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Full text of "Revue d'Alsace"

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REVUE 


D'ALSACE 


i 


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THE  UNIVERSITY 
OF  ILUNOIS 
LIBRARY 

HELB 

v.sa 


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I 


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REVUE  D'ALSACE 


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REVUE  D'ALSACE 


NOUVELLE  SERIE 


SEPTIÈIE  ANNEE 


TOME  SEPTIÈME 


COLMAR 

BOBSAU,  PUCË  DU  MAKCHÉ-Al'-P£IiT-fiÉÏAlL,  N*  23 
1878 


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DOCUMENTS 

POOR  SERVIR  A 

LA  NUMISMATIQUE  DE  L'ALSACE 


N«  4 


Recueil  de  bractéates  alsadeimes  inédites  ou  peu 
connues,  tirées  des  principaux  cabinets  publics 
et  particuliers. 


Tous  les  amatears  de  numismatique  alsacienne  connaissent 
bien  cette  corieuse  suite,  qui  sollicite  leur  alteotion  par  la 
sîngnhrité  de  ses  types  et  les  difficultés  de  classement  qu'elle 
présente.  Bans  ce  nouTean  fasdcnle,  nous  nous  sommes 
donnés  pour  objet  non  pas  de  présenter  aux  numismates  un 
nouveau  système  de  clas.sificatiou,  mais  simplement  un  exposé 
des  principaux  types,  inconnus  à  BersteU  ou  môme  complè- 
tement inédits,  que  nous  avons  rencontrés  dans  le  cours  de 
nos  recherches  dans  les  Musées,  ou  dans  les  cabinets  particu- 
liers de  réfranger,  et  surtout  de  l  Autriche  et  de  l'Allemagne. 

Toujours  un  peu  négligée  dans  les  ooUections  françaises, 
«>n«ne  du  reste  la  suite  alsacienne  en  général,  la  série  des 


691740 


6 


BBVDE  D'ALB4C» 


bractéates  alsadennes  ne  peut,  en  effe^  être  étudiée  à  fond 
que  dans  les  médailliero  allemands,  et  ce  sont  ces  derniers 

qui,  jusqu'à  présent^  nous  ont  fourni  le  plus  de  nouveautés. 
—  L'incertitude  qui  règne  dans  les  attributions  de  la  plupart 
de  ces  deniers  (car  c*est  là  plutôt  la  véritable  déncmiination 
qui  conyient  aux  pièces  dont  il  est  ici  question,  et  qui  n'ont 
rien  de  commun  avec  les  bractéates  proprement  dites),  n'em- 
pêche pas  les  numismates  d'être  tous  d'accord  sur  un  point, 
c*est  quils  sont  indubitablement  â*origine  alsacienne,  et 
sortent  en  grande  partie  des  ateliers  du  Bas-Rbin,  tels  que 
Strasbourg,  Wissembourg,  etc.;  l'abbaye  de  Wissembourg 
pourrait  surtout,  à  notre  avis,  en  reTondiquer  bon  nombre 
pour  elle.  Mais,  nous  le  répétons,  nous  ne  voulons  tenter  ici 
aucune  attribution  nouvelle;  nous  serions  d'ailleurs  obligés 
de  nous  en  tenir  à  des  conjectures  plus  ou  moins  hasardées; 
rappelons  seulement  que  Tattribution  de  ces  deniers  à  TAlsace 
est  surtout  confirmée,  d'abord,  par  une  physionomie  et  des 
types  qui  leur  sont  particuliers,  puis,  par  leur  provenance 
qui  est  presque  toujours  alsacienne.  Nous  citerons  les  grands 
dépôts  de  bractées  découverts  à  Guémar  et  à  Sausheira,  dépo- 
sées aujourd'hui  dans  les  cartons  du  Musée  de  Colmar,  et  tant 
d'autres  qui  ont  disparu  pour  jamais  dans  le  ereuset  des  fon- 
deurs, et  dont  des  témoignages  éloignés  viennent  seuls  nous 
révéler  l'existence.  Il  y  a  cependant  une  exception  ;  c'est  la 
trouvaille  d'Ulingen,  près  de  Rastadt,  qui  est  de  beaucoup  la 
plus  intéressante  des  trouvailles  de  ce  genre,  par  la  variété 
et  la  nouveauté  des  types  qu'elle  a  fournis.  Elle  a  été,  par 
bonheur,  acquise  en  entier  par  le  prince  de  FUrstenberg;  et 
feu  M.  de  PMeuho£en,  le  conservateur  de  son  superbe  médail- 


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mnOBMATIQDB  DB  L'ALSAOB 


7 


lier,  eu  a  donné  nne  description  complète,  aooompagnée  de 
planefaes»  dans  la  Bum  mmiimaUqw  firançaisê  de  1868 

Cest  pourquoi  nous  n'y  reviendrons  pas.  Nous  avons  pu  der- 
nièrement, grâce  à  Tobligeance  de  M.  Sigiarnood  RieUler, 
l'étudier  noas-méme,  snr  les  lieux,  avec  tontes  les  fedlitée 
déBlraUes,  et  nons  pouTons  affirmer  que  parmi  tous  les 
deniers  alsaciens,  il  n'en  est  peut-être  pas  qui  excite  davan- 
tage la  curiosité  et  qui  mérite  plus  Tattention  da  spécialiste, 
qoe  ceux  qui  ont  pris  place  dans  le  cabinet  de  Donaueschin- 
fUL  Nons  n'avons  pas  en  la  bonne  fortuue,  comme  M.  de 
Pfcffenhofen,  de  mettre  la  main  sur  une  série  complète  de 
moooaies  nouvelles  et  inconnues,  et  celles  que  nons  publions 
ai^oord'hui  ne  sont  que  des  glanes  éebappées  à  nos  préde- 
«esBeurs,  mais  noua  serions  heureux  si,  en  mettant  en  lumière 
ces  monuments  encore  si  peu  étudiés^  nous  ponvions  attirer 
snr  enx  Tattention  des  ssvanls  et  susciter  enfin  une  nouvelle 
tentative  de  classification. 
Puis,  en  décembre  1876. 

Arthur  ëngel. 


ABRÉVIATIONS 

Do.      Médaillier  da  prinee  de  FOntenberg,  à  OonaiMschingen. 

Médaillier  du  Musée  de  llmiieh. 
f^olm.    Médaillier  de  la  Bibliothèque  de  Colmar. 
■^f'".      Médaillier  de  l'Université  de  Straibonrg. 

Médaillier  du  Musée  de  Dresde. 
C'*-       Médaillier  du  Musée  de  Grenoble. 
^P-     Médaillier  du  Musée  de  Leipzig. 

Module  en  inillimôti-es.  —  Pds.  Poids  en  grammes. 


Mod 


N.-B.  —  Timt»  k$  pièen  ééerites  sont  d'argent. 


8 


BBVCB  D'aLSACE 


A»  BusU  à  drniii  revers  divers, 

1 .  —  Buste  couronné  à  droite,  tenant  une  épée  de  la 
main  droite  et  un  bouclier  de  la  gauche;  dans  le  champ, 
étoile  à  six  rayons. 

Rf.  Edifice  à  deux  portails  et  deux  grandes  croLx,  entre 
lesquelles  une  étoile  à  huit  rayons. 
Mod.  17.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  1. 

8.  —  Même  buste  à  droite,  sans  Fétoile. 

Rf,  Edifice  très  simple  à  un  portail,  surmonté  de  trois 
grandes  croix. 
Mod.  14.  —  Do. 

3.  —  Buste  nu  à  droite,  une  croix  sur  la  poitrine,  tenant 
de  la  main  droite  un  sceptre  terminé  en  fleur  de  lys,  et  de 
la  gauche  un  calice. 

Rf,  Edifice  à  un  portail  contenant  une  croix  et  deux 
ingnons  surmontés  de  croix,  entre  lesquelles  plane  une 
couronne. 

Mod.  19.  —  Mu.  —  Gravée,  pl.  I. 

4.  —  Buste  nu  à  droite,  une  croix  sur  la  poitrine,  tenant 
de  la  main  droite  un  calice,  et  de  la  gauche  une  clé. 

Edifice  à  un  portail  contenant  une  croix,  et  deux 
longues  croix  entre  lesquelles  plane  une  couronne. 
Mod.  1&  —  Cabinet  de  M.  Vallier,  à  Grenoble. 

5.  —  Buste  nu  à  droite,  une  croix  sur  la  poitrine,  tenant 
de  la  main  droite  un  calice  et  de  la  gauche  une  crosse. 

Rf.  Edifice  à  un  portail  contenant  une  croix,  et  deux 
pignons  surmontés  de  croix,  entre  lesquelles  plane  une 
couronne. 

Mod.  16.  ^  Do. 

C—  Même  buste,  coiûc  d  une  mitre  arrondie,  tenant  de 
la  main  droite  un  livre  et  de  la  gauche  une  crosse  ;  der- 
rière, étoile  à  six  rayons. 


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NUMISMATIQUE  DE  L'ALSAOB 


9 


Rf.  Sommet  d'un  édifice,  de  forme  arrondie,  surmonté 
d'une  croix  que  soutieancnt  deux  anges. 
Mod.  15.  —  Do. 

7.  —  Même  buste,  mitré,  tenant  de  la  main  droite  un 
livre  Q)  et  de  la  gauche  une  croix. 

Rf,  Le  même,  mais  le  toit  de  Fédifice  est  pointu,  et  Ton 
aperçoit  une  fenêtre  au-dessous. 
Mod.  la  — Do. 

8.  —  Buste  couronne  à  droite,  tenant  de  la  main  droite 
un  sceptre  fleurdelisé  sur  l'épaule,  et  de  la  gauche  une 
croix  ;  derrière,  étoile  à  sept  rayons, 

Rf,  Edifice  à  trois  portails,  celui  du  centre  contenant 
une  croix,  et  surmonté  de  deux  tours  entre  lesquelles  deux 
antres  croix. 

Mod- 19.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  I. 

9.  —  Buste  couronné  à  droite  ;  dans  le  champ,  à  droite, 
un  oiseau  (?)  ;  â  gauche,  étoile  à  cinq  rayons. 

Rf.  Edifice  très  simple,  à  un  portail,  et  surmonté  de 
trois  croix. 
Mod.  16.  —  Do. 

10.  —  Buste  couronné  à  droite,  tenant  un  sceptre  fleur- 
delisé. 

Rf.  Edifice  à  sommet  horizontal  et  trois  portails  de 
même  niveau,  surmonté  de  deux  croix. 
Mod.  13.  —  Do.  • 

B.  BusU  dt  Jaci;  revtrs  divers 

41  —  Buste  nu  de  face,  une  croix  sur  la  poitrine,  bénis- 
sant de  la  main  droite  et  tenant  de  la  gauche  un  livre. 

Rf.  Agneau  pascal  à  gauche. 

Mod.  15.  —  Fabrique  médiocre.  —  Do. 

i%  —  Même  buste. 

Edifice  à  un  portail  et  à  toit  pointu,  accosté  de  deux 


10 


BEVQB  D*AL64C1S 


colonnes  surmontées  de  croix,  entre  lesquelles  une  étoile 

à  six  rayons. 

Mod.  15.  —  Fabrique  plus  soigaée.  —  Do.  —  Gravée,  pL  I. 

13.  —  Même  buste,  tenant  de  la  main  droite  un  calice 
surmonté  d'une  croix  et  de  la  gauche  une  crosse. 

Rf.  Edifice  à  trois  portails,  surmonté  d'une  large  tour 
crénelée  et  accosté  de  deux  tourelles. 
Mod.  17.  —  Do. 

14.  —  Même  buste,  très  allongé,  bénissant  de  la  main 
droite  et  tenant  une  crosse  de  la  gauche. 

Rf.  Double  croix  supportée  par  deux  anges. 

Mod.  15.  —  Do.,  et  Colm.  du  même  coin.— Gravée,  pl  I. 

15.  —  Buste  nu  de  fece,  bénissant  de  la  main  droite,  et 
tenant  une  crosse  de  la  gauche. 

Rf.  Ange  debout  à  droite,  supportant  une  croix,  devant 
laquelle  une  étoile  à  six  rayons. 
Mod.  17.  —  Mu. 

16b  —  Même  buste,  une  croix  dans  la  main  gauche. 
Rf.  Le  même. 

Mod.  17.  —  Str.  —  Gravée,  pl.  I. 

17.  —  Même  buste,  une  croix  sur  la  poitrine,  tenant  de 
la  main  droite  une  croix  et  de  la  gauche  une  crosse. 

Rf.  Le  même,  mais  la  croix  n'est  figurée  qu'au  trait. 
Mod.  15.  —  Str. 

18.  —  Même  buste,  tenant  de  la  main  droite  une  croix 
et  de  la  gauche  un  objet  indéterminé. 

Edifice  à  toit  horizontal,  surmonté  de  deux  croix, 
entre  lesquelles  une  étoile  à  huit  rayons. 
Mod.  16.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  lU,  sans  numéro 

19.  —  Buste  nu  de  fece,  deux  croix  sur  la  poitrine,  tenant 
de  la  main  droite  une  crosse  et  de  la  gauche  un  livre. 


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NUMKniA.'nQUB  xn  l'alsaob 


u 


Rf.  Ange  debout  à  gauche,  supportant  une  croix;  au 

milieu,  une  étoile. 

Mod.  15.  —  Str.  —  Gravée,  pl.  IL 

20.  —  Buste  nu  de  face,  une  très  petite  croix  sur  la  poi- 
trine, bénissant  de  la  main  droite  et  tenant  de  la  gauche 
une  croix. 

RI,  Edifice  à  an  portail  et  trois  tourelles  surmontées  de 
croix. 

Mod.  la  —  Mu. 

21.  —  Mâme  buste,  la  figure  plus  pleine,  une  croix  figurée 
par  quatre  points  sur  la  poitrine  ;  il  tient  de  la  main  droite 
une  croix  et  de  la  gauche  une  crosse. 

Rf,  Edifice  à  un  portaU  et  trois  croix. 

Mod.  15.  —  Style  primitif.  -  Do. 

21  —  liiôme  buste,  la  chevelure  figurée  par  une  série  de 
points  ;  il  tient  de  la  main  droite  une  croix,  et  bénit  de  la 
gauche,  la  paume  de  la  main  ouverte. 

Rf.  Edifice  primitif  à  grand  toit  pointu,  surmonté  d'une 
croix  et  accosté  de  deux  tourelles  portant  également  des 
croix. 

Mod.  16.  —  Dr. 

23.  —  Buste  nu  de  face,  bénissant  de  la  main  droite  et 
tenant  de  la  gauche  une  croix. 

Rf.  Edifice  à  un  portail  contenant  une  croix,  surmonte 
d  un  a^rneau  pascal  allant  à  gauche,  et  accosté  de  deux  tou- 
relles pointues. 

Mod.  la  —  Colm.,  trouvaille  de  Guémar.  —  Pds.,  0,602. 

24.  Même  buste,  bénissant  de  la  main  droite  et  tenant 
de  la  gauche  une  crosse  accostée  d*une  étoile  à  six  rayons, 

Rf*  Le  même. 

Mod.  16.  —  Do. 


asvuE  d'alsàcs 


25.  —  Même  buste,  portant  un  collier  formée  d'annelets; 
il  tient  de  ia  main  droite  une  palme  et  de  la  gauche  une 
crosse. 

Jî/i  Edifice  à  un  grand  portail  contenant  un  calice  et 
deux  petites  portes  latérales.  Il  est  surmonté  d'une  tour 
crénelée,  accostée  de  deux  tourelles  tenniaées  en  boule. 

Mod.  20.  —  Do,  —  Gravée,  pl.  I. 

Tous  ces  deniers  de  gnuid  module  sont  rares. 

26.  —  Buste  nu  de  face,  avec  un  rabat  et  deux  croix 
superposées  sur  la  poitrine,  tenant  de  la  main  droite  un 
objet  indéterminé  et  de  la  gauche  une  crosse. 

Rf.  Edifice  à  un  portail  contenant  une  croix,  et  une  tour 
crénelée  accostée  de  deux  appendices  inclinés  et  terminés 
en  boule  ;  la  tour  est  séparée  du  portail  par  une  ligne  hori- 
zontale d'annelets,  et  présente  elle-même  une  porte. 

Mod.  20.  —  Dr.  —  Gravée,  pl.  I. 

'il.  —  Même  buste,  tenant  une  crosse  de  ia  main  droite 
et  un  livre  ouvert  de  la  gauche.  Sur  la  poitrine,  collier 
forme  d'annelets  et  se  prolongeant  verticalement  vers  le 
bas.  —  A  gauche,  dans  le  champ,  étoile  à  sept  rayons  ;  à 
droite,  au-dessus  du  livre,  annelet  entouré  de  neuf  autres 
annelets  plus  petits. 

Rf.  Grand  édifice  à  un  portail  et  deux  fenêtres;  le  toit, 
incliné,  est  surmonté  d'une  tour  crénelée  et  accostée  de 
deux  tourelles  se  terminant  en  boule. 

Mod.  19.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  1. 

28.  —  Même  buste,  avec  le  rabat  et  un  annelet  sur  la 
poitrine,  tenant  de  ia  main  droite  une  crosse  sous  laquelle 
une  étoile  à  six  rayons,  et  de  la  gauche  une  croix. 

Rf,  Edifice  à  un  portail  contenant  une  croix,  et  une 
tourelle  pointue  surmontée  d'une  croix,  accostée  de  deux 
clochetons  terminés  en  boule,  et  surmontés  également  de 
croix. 

Mod.  20.  —  Do. 


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MUMISMATIQUE  DB  L'ALSACK 


13 


29.  —  Buste  mitre  de  tacc.  tenant  un  livre  de  la  main 
droite  et  une  crosse  de  la  gauche;  à  côté,  une  étoile  à  six 
rayons. 

Rf.  Edifice  à  un  portail  renfermant  un  calice,  et  deux 
tourelles  pointues  surmontées  de  croix,  entre  lesquelles  un 
aigle  regardant  à  gauche. 

Mod.  16.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  I. 

90i  —  Même  buste,  tenant  de  la  droite  une  crosse  et  de 
la  gauche  un  IWre  Q). 

Rf,  Edifice  à  un  portail  surmonté  d*une  tourelle  pointue 
portant  une  croix,  et  accostée  de  deux  tourelles  terminées 
en  boule. 

Mod.  15.  —  Mu.  —  Gravée,  pl.  1. 

31.  —  Buste  nu  Q)  de&ce,  bénissant  de  la  main  droite 
et  tenant  de  la  gauche  un  objet  indéterminé. 

Rf.  Edifice  à  un  portail  contenant  un  calice,  et  deux  tou- 
relles pointues  surmontées  de  croix,  entre  lesquelles  un 
aigle  regardant  à  gauche. 

Mod.  la  —  Do.  —  Gradée,  pl.  î. 

32.  —  Buste  de  &ce,  largement  drapé,  et  tenant  de  la 
main  droite  une  crosse. 

Rf*  Edifice  primitif  à  un  portail  contenant  une  croix  et 
surmonté  d'une  sorte  de  ^oùte,  portant  une  croix  et  ren< 
fermant  un  point.  A  droite  et  à  gauche,  deux  tourelles 
pointues  portant  également  des  croix. 

Mod.  19.  —  Fabrique  barbare.  —  Do. 

33.  —  Même  buste,  couronné,  un  drapeau  dans  la  main 
droite  et  une  épée  dans  la  gauche. 

Rf.  Edifice  à  un  portail  et  une  tourelle  pointue;  dans  le 
champ,  d  gauche,  grande  étoile  à  six  rayons. 
Mod.  19.  —  Do. 

34*  —  Môme  buste,  couronné,  tenant  de  la  main  droite 
un  globe  surmonté  d'une  fleur  de  lis  et  de  la  gauche  une 
croix. 


14 


REVUE  D'âL&AGE 


Rf.  Deux  anges  soutenant  une  croix  sur  un  toit  pointu 
percé  d'une  fenêtre. 

Mod.  16.  —  Do. 

G.  Busu  à  gûwbti  rtwrs  divtrs 

35.  —  Buste  mitrè  à  gauche,  bénissant  de  la  main  droite 
et  tenant  de  la  gauche  un  objet  allongé;  sur  la  poitrine 
une  croix. 

Rf.  Agneau  pascal  à  gauche, 

Mod.  16.  —  Do.  et  collection  Prissay  à  Dijon. 

36.  —  Buste  couronné  à  gauche,  tenant  de  la  main  droite 

une  croix. 

Rf,  Edifice  à  un  portail  sunnonté  d'une  tour  crénelée. 
Mod.  15.  —  Collection  Prissay  à  Dijon. 

37  —  Buste  nu  à  gauche;  devant,  objet  allongé;  der- 
rière, une  crosse. 

Rf.  Edifice  primitif  à  un  portail  et  trois  croix. 
Mod.  17.  —  Do. 

38.  —  Même  buste;  devant,  une  croix. 
Rf.  Même  édifice,  sans  portail. 

Mod,  15.  —  Gr.  —  Gravée,  pl.  I. 

39.  —  Buste  couronne  a  gauche,  tenant  de  la  main  droite 
un  globe  surmonté  d  une  croix,  et  de  la  gauche  un  globe 

surmonté  d'une  fleur  de  lis. 

R/*  Aigle,  les  ailes  étendues,  regardant  à  gauche. 
Mod.  15.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  I. 

40.  —  Buste  couronne  à  gauche,  tenant  de  la  main 
droite  une  croix  et  de  la  gauche  un  sceptre  fleurdelisé. 

RJ.  Sommet  d'un  édifice  surmonté  d*un  toit  pointu 
accosté  de  deux  étoiles. 

Mod.  15,  —  Do.  et  Dn  —  Gravée,  pl.  t 


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NUMISMATIQUE  DE  L'ALSACE 


15 


W.  —  Buste  couronné  à  gauche,  tenant  un  sceptre  fleur- 
delisé. 

Rf.  Edifice  à  une  voûte,  surmontée  d'une  tour  pointue 
accostée  de  deux  tourelles. 

Mod.  15.  —  Pièce  très  mince  et  de  âa>rique  toute  parti- 
ticuUère.— Golm.,  trouvaille  de  Saushdm.  —  Grayée,  pl.  1. 

42.  —  Buste  mitre  (bicorne)  à  gauche,  bénissant  de  la 
main  droite  et  tenant  de  la  gauche  une  crosse.  Sur  la  poi- 
trine, une  croix  et  deux  annelets. 

Rj,  Portail  crénelé. 

Mod.  15.  —  Colm.,  trouvaille  de  Sausheîm. — Pds.  0,551. 
-Gravée,  pl.  II. 

43.  ~  Buste  nu  à  gauche,  bénissant  de  la  main  droite 
et  tenant  de  la  gauche  une  crosse.  Dans  le  champ,  étoile  à 

rayons. 

jy.  Edifice  à  trois  portails,  celui  du  centre  allongé  et 

contenant  une  croix,  et  trois  tourelles  d  égale  hauteur, 

swmontécsde  croix;  les  tourelles  latérales  se  terminant 
en  boule. 

Mod.  17.  —  Do. 

44.  —  Buste  mitré  (bicorne)  à  gauche,  tenant  d'une 
fflain  une  crosse  et  de  Tautre  un  livre. 

Rf'  Edifice  à  un  portail  contenant  une  croix,  et  deux 
tourelles  entre  lesquelles  un  agneau  pascal  à  gauche. 

Mod.  16.  -  Golm.,  trouvaille  de  Guémar.  —  Pds.  0,574 

à  0,589. 

U  existe  de  norabituscs  vuiétis  de  ce  type,  dti  reste  trii  commim. 

48.  —  Buste  nu  à  gauche,  bénissant  de  la  main  droite 
et  tenant  de  la  gauche  un  attribut  indistinct. 

f<f-  Edifice  à  un  portail  contenant  une  croix,  et  deux 
croix  entre  lesquelles  plane  une  couronne. 

Mod.  15.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  IL 


16 


BEVUB  D'ALSACB 


40,  —  Môme  buste,  tenant  un  objet  terminé  en  fleur  de 
lis. 

Rf.  Temple  à  un  portail  contenant  une  étoile  à  cinq 
rayons,  et  une  tourelle  pointue  surmontée  d'une  croix  et 
accostée  de  deux  autres  tourelles. 
.  Mod.  17.  —  Golm.,  trouv.  de  Guémar.  —  Pds.  0,620. 

47.  —  Buste  nu  à  gauche,  tenant  une  croix  devant  lui; 
derrière,  étoile  à  huit  rayons. 

Rf.  Edifice  à  deux  portails  et  deux  tourelles,  entre  les- 
quelles une  étoile  à  huit  rayons. 
Mod.  17.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  II. 

48.  —  Buste  mitré  (bicorne)  à  gauche,  bénissant  de  la 
main  droite  et  tenant  de  la  gauche  une  crosse. 

RJ.  Même  édifice. 

Mod.  17.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  II. 

49.  Buste  mitré  (bicorne)  à  gauche,  bénissant  de  la  main 
droite  et  tenant  de  la  gauche  une  crosse. 

RJ.  Edifice  à  trois  tourelles  et  un  portail  contenant  une 
roue  fermée  à  cinq  rayons. 

Mod.  15.  —  Colm.,  trouvailles  de  Guémar  et  de  Sausheim. 
—  Nombreux  exemplaires;  Tarrangement  des  annelets  et 
de  la  croix  sur  la  poitrine  très  variable.  —Pds.  0,535; 
0,556;  0,572;  0,588;  1  gr.  571  et  1  gr.  572. 

Voici  les  analyses,  faites  à  Berne,  des  pièces  appartenant  aux  principaux 
types  de  la  trouvaille  de  Sausheim  : 

Afgaot       Cuivre  Or 

Strasbourg  :  Ange  à  la  croix   975  25  _ 

Evcqucs  de  Bâle  :  Annelets   975        35  _ 

•  •    070         1.5  10 

»             Petit  évêque  à  la  croix   975         15  10 
Zofingen  :  Profil  mitré  ; .  ^    qoq  qo 

»        Tête  de  face  couronnée   m)         90  10 

»        Tête  de  face  voilée   900         45  155 

  950        40  10 

Lion  passant  â  gauche,     9   950         5  45 


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HDIIIBMATIQUE  DE  L'aLSACE  17 

«0.  -  Buste  nu  à  gauche  tenant  une  crosse;  au-dessus 
étoile  à  six  rayons.  * 

Rf.  Temple  à  trois  portails  et  trois  tourelles  surmontées 
de  croix. 

Mod.  15.  -  Do. 

51.  -  Même  buste,  bénissant  de  la  main  droite  et  tenant 

une  crosse  de  la  gauche. 
Ri.  Le  même. 
Mod.  16.  —  Mu. 

D.  Cavalier  ;  revers  dhers 

82.  —  Cavalier  à  droite,  la  lance  en  arrêt. 

Rf.  Temple  a  un  portail  et  trois  tourelles  surmontées 
de  croix. 

Mod.  15.  —  Do. 

La  même;  dans  le  portail,  une  roue  Q). 
Mod.  15.  —  CoUn.,  trouv.  de  Sausheim.  —  Pds.  0,580. 

^i.  -  Môme  cavalier,  sans  la  lance  ;  derrière,  un  annelet. 
Temple  a  deux  portaUs  continus,  renfermant  chacun 
deux  annelets;  et  une  tourelle  pointue  surmontée  d'une 
croix  et  accostée  de  deux  étoiles  à  six  rayons. 

Mod.  la  -  Do.  -  Cf.  Berst.  295.  -  Gravée,  pl.  II. 

84      Môme  cavalier,  sans  l  annelet. 
^  Le  même,  le  toit  de  forme  arrondie, 
Mod.  16.  — Do. 

53.  -  Cavalier  à  droite,  tenant  une  bannière. 
Rl-  Edificeàunportailet  deux  tourelles,  entre  lesquelles 
le  croissant  de  la  lune  tourne  à  gauche. 
Mod.  15.  -  Do.  -  Gravée,  pl.  IL 

%,  —  Même  cavalier. 

Rf'  Edifice  à  trois  portails  et  une  tour  crénelée  conte- 
nant une  croix,  accostée  de  deux  tourelles. 
Mod.  15.  -  Mu.  —  Gravée,  pL  IL 
KotwBe  Série  -  7»  Année  % 


18 


RfiVUS  D'ALSACE 


57.  —  Cavalier  du  53. 

R[.  Celui  du  même  numéro;  la  tourelle  accostée  de 
deux  drapeaux. 
Mod.  16.  —  Do.  et  Mu.  —  Gravée,  pl.  II. 

£.  Perwmagt  assis  à  gauche  ^  revers  du  tempk 

58.  —  Persoanage  couroané,  assis  à  gauche,  bénissant 
de  la  main  droite  et  tenant  de  la  gauche  un  sceptre  sur* 
monté  d*une  fleur  de  lis. 

JR/I  Temple  à  trois  tourelles  surmontées  de  croix  ;  dans 
le  portail,  une  roue  à  cinq  rayons. 

Par  suite  d'une  erreur  du  graveur,  cette  roue  se  trouve  incomplètement 
reprisentie  sur  la  planche. 

Mod.  16. —  Fabrique  barbare;  sur  d'autres  exemplaires 
il  est  difficile  de  distinguer  le  sceptre  d'avec  une  crosse 
(cf.  Collection  Prissay  à  Dijon).  —  Colm.,  trouvaille  deGué- 
mar.  ~  Pds.  0,551,  0,559  et  0,593.  —  Gravée,  pl.  II. 

F.  Buste  a  gauche^  au  revers  du  lion 

59.  —  Buste  mitre  (bicorne)  à  gauche,  tenant  une  croix 
de  la  main  droite  et  un  objet  indéterminé  de  la  gauche. 
Sur  la  poitrine  une  croix. 

Bf,  Lion  à  gauche. 

Mod.  17.  —  Do.  —  C£  Berst-,  285.  —  Gravée,  pl.  II. 

G.  Bttst*  cwromtiy  au  revers  de  Faigk 

60.  —  Buste  couronné  à  gauche,  tenant  de  la  main  droite 
le  globe  crucigère  et  de  la  gauche  un  sceptre  fleurdelisé. 

Rj.  Aigle,  les  ailes  étendues,  regardant  à  gauche. 
Mod.  17.  —  Do. 

H.  Tete  à  gauche^  au  revers  de  la  crosse 

fâ.  —  Téte  nue  (?)  à  gauche. 

Rf.  Crosse  entre  deux  étoiles  à  cinq  rayons. 

Mod.  17.  —  Dr.  —  Gravée,  pl.  II. 


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NUtfIBBIATIQUB  DE  L'àLSACB 


19 


1.  Abbi  recevant  une  crosse  des  Tuains  (Twi  ange;  au  revers 

trois  personnages 

63.  —  Abbé  mitrè  à  gauche,  recevant  une  crosse  des 
mains  d*ua  ange. 

R[.  Personnage  assis  à  gauche,  tenant  une  croix,  devant 
laquelle  se  tiennent  deux  figures  debout,  dont  l'une,  les 
deux  bras  étendus,  présente  à  la  croix  un  objet  indistinct, 
consislaiu  en  deux  boules  superposées. 

Mod.  18.  —  Leip.  —  Gravée,  pl.  II. 

6i  Même  pièce;  dans  le  champ,  au-<lessus  de  l'ange, 
étoile  à  huit  rayons  et  S. 

Rf.  L'objet  présente  à  la  croix  parait  être  un  enfant. 

Mod.  16.  —  Dr. 

J.  Même  type,  au  revers  du  temple 

(fô.— Type  du  n**  63;  sur  la  poitrine,  étoile  à  sept  rayons 
et  annelets. 

Rj,  Temple  de  forme  particulière,  traversé  par  une 
longue  croix.  Dans  le  champ,  quatre  petites  étoiles  à  sept 
rayons. 

Mod.  15.  —  Str.  —  Gravée,  pl.  II. 

CO.  —  Même  type,  mais  le  temple  ofifre  trois  portails  et 
trois  tourelles  portant  des  croix. 
Mod.  15.  —  Dr. 

K.  ^mU  i  droiUy  séparé  par  me  lance  ^um  peiUe  figure  regar- 
dant à  gauche^  au  revers  de  Pagneau  pascal 

67.  —  Buste  nu  a  droite,  séparé  par  une  crosse  ou  une 
lance  d'une  petite  figure  regardant  à  gauche. 

Rf  Sur  un  portail  contenant  une  croix,  agneau  pascal 
regardant  à  droite  ;  dans  le  champ,  deux  étoiles  à  huit 
rayons. 

Mod.  15,  —  Str.— et  Berst,  SufpL  217.  —Gravée,  pl.  IL 


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20 


BKVm  D'AUSàGB 


L.  Pgrstmu^t  ttnmtt  m  Bvre  ouvert  devant  m  busU  ^abbiy  au 

revers  de  l'agneau  pascal 

Qg.  _  Buste  nu  à  droite,  tenant  une  crosse;  devant  lui, 
une  petite  figure  tenant  un  livre  ouvert, 
je/.  Celui  du  n*  67. 

Mod.  15.  —  Dr.,  Do.,  Leip.  et  Collections  de  MM.  Erb- 
stein  frèreSf  à  Dresde.  —  Gravée,  pl.  II. 

M.  Buste  à  droite-,  au  revers  du  Saint-Michel  terrassant  le 

dragon 

60.  Buste  mitrè  à  droite,  tenant  de  la  main  droite  une 
crosse  et  de  la  gauche  une  croix. 
Rf,  Saint-Michel  terrassant  le  dragon. 
Mod.  16.  —  Str.  —  Gravée,  pl.  III. 

N.  Buste  de  face;  au  revers^  groupe  de  deux  personnages 

70.  —  Buste  couronné  (?  —  la  coiffure  ressemble  plutôt 
à  un  assemblage  de  trois  croix)  de  face,  orné  d'un  collier 
auquel  pend  une  croix.  Il  tient  de  la  main  droite  une  fleur 
de  lis  et  de  la  gauche  un  globe  crucigëre. 

Rf,  Personnage  assis  à  gauche,  tenant  une  crosse;  devant 
lui,  une  petite  figure  lui  présente  un  objet  circulaire. 
Mod.  la  —  Dr.  —  Gravée,  pl.  III. 

O.  Buste  de  face^  au  revers  du  buste  h  droite 

71.  —  Buste  couronné  0)  de  face,  tenant  de  la  main 
droite  une  iûleur  de  lis  et  de  la  gauche  uq  objet  indéter- 
miné. 

Rf.  Buste  mitré  à  droite,  tenant  une  croix. 
Mod.  17.  —  Str.  -  Gravée,  pi.  111. 

P.  Guerrier  sur  une  tour^  au  revers  du  portail 

72  Guerrier  à  droite,  sur  une  tour,  tenant  une  bannière 
et  un  bouclier. 

Rf  Portail  contenant  une  croix  entre  deux  tourelles 
surmontées  de  croix,  entre  lesquelles  plane  une  couronne 
fermée. 

Mod.  16.  Mu.,  Do.,  etc.  —  Gravée,  pl.  IIL 


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NUHISAI4IIQUB  BB  L'ALSAGD 


ai 


DEUXIÈME  SÉRIE 
nèNB  miilkoes 

Q.  Etoiit  à  six  rayons 

73.  -  Etoile  à  six  rayons,  cantonnée  de  points. 
Mod.  16.  —  Dr.  —  Gravée,  pl.  IIL 

R.  Etoile  figmrmt  mu  rout  au  rrotrs 

74.  Etoile  formée  de  six  losanges  autour  d'un  annelet 
U  Roue  formée  de  six  T  concentriques. 

Mod.  13.  -  CoUection  Trinks  à  Prague.  -  Gravée, 
rattribntioii  de  cette  pièce  à  l'Alsace  est  douteuse. 

S.  AigU 

LrV?''''n  '^'"'^^  "^^^^  déployées. 

Mod.  la  ~  Do.  —  Gravée,  pl.  III. 

T.  EuiU  dam  un  cercle  en  relief 
7«.  -  Au  milieu  d'un  cercle  en  reUe£  étoile     à  six 

rayons,  dont  le  centre  est  un  annelet.  ^  ^  ^ 

dcTn!^"  ~  '^''^'^^'^        les  mains 

M.  Deraangeont,  à  Montbéliard.  -  Gravée,  pi  III. 

U.  Deux  oiseaux  st  faisant  face 

2' ^o^.T^''^'^'^  ^"^"^  quelquefois,  entre 

^  étoile  a  cmq  rayons.  Grénetis. 

J^ûd.  ta  -  M.  Demangeont.  -  Gravée,  pl.  III. 

Seiiii.ce «ne  modification  de  la  pièce  dccrlte  par  M.  de  PfafFenhofen 
«»    lC*tW  mtmisMatique?  (i868,  TrowvailU  iflllingen,  9.) 

V.  ilnmj  dt  laviUe  de  Tbann  (?) 
Ecusson  ouvert,  au  milieu  duquel  un  sapin  {}). 
Mod.  13.  Bas  billon.  -  Do.,  où  elle  est  classée  à  Thann. 
Le  style  et  le  métal  de  cette  pièce  me  fout  croire  quelle  n  est  pas  de 


22 


BBTQE  D'ALSACE 


W.  Crtix 

70.  —  CiT)ix  cantonnée  de  quatre  étoiles  à  six  rayons. 
Mod.  15.  —  Golm.,  trouvaille  de  Sausheim.  —  Gravée, 
pl.  III. 

80.  —  La  même,  de  frappe  médiocre. 

Mod.  13,  —  Colm.,  trouvaille  de  Guémar.  —  Pds.  0,255. 

81.  —  Croix  cantonnée  de  quatre  annelets. 

Mod.  15.  —  Colm.,  trouvaille  de  Sausheim.  —  Gravée, 
pl.  III. 

82.  —  La  même,  variée,  de  fabrique  plus  yi  ossière. 
Mod.  14.  -  Colm.,  trouvaille  de  Guémar.  —  Pds,  0,284. 

—  Gravée,  pl.  111. 

83.  —  Même  type,  sans  les  annelets. 

Mod.  12.  —  Colm.,  trouvaille  de  Guémar.  —  Pds.  0,244. 

—  Gravée,  pl.  III. 

84.  —  Même  type,  les  annelets  variés. 

Mod.  17.  —  Colm.,  trouvaille  de  Guémar.  —  Pds.  0,890 

—  Gravée,  pl.  III. 

85.  —  Même  type;  grosse  croix  cantonnée  de  quatre 
autres  plus  petites. 

Mod.  11  et  12.  —  Colm.,  trouvaille  de  Guémar.  —  Pds 
0,750  et  0,979.  -  Gravée,  pl.  IIL 

—  Croix  de  forme  variée;  grénetis. 
Mod.  12.  —  Colm.,  trouvaille  de  Guémar.  Pds.  0,773  et 
0,502.  —  Gravée,  pl.  III. 

87.  —  Croix  dans  un  cercle  en  relief. 

Mod.  13 — Colm.,  trouvaille  de  Guémar.— Gravée,  pl.  IIL 

X.  Etoile  dam  un  cercle  en  reUef 

88.  —  Etoile  à  six  rayons  dans  un  cercle  en  relief. 
Mod.  15.  —Colm.,  trouvaille  de  Guémar. —Gravée,  pl.  111. 


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REVUE  D'ALSACE 


PI  11. 


DKMKRS  MUKTS  ATTRI BU  KS  A  l.  AI.SACK 


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NUMIBMATIQ€B  DE  L'ALSAOE  33 

Y.  CaSet  mire  diux  taurelUs 

80.  —  Calice  surmonté  dune  croix,  entre  deux  tourelles 
portant  également  des  croix. 

Mod.  16.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  111. 

Z.  Typa  d'édifices  divers 

90.  —  Tour  (ou  couronne),  au-dessous  de  laquelle  une 
roue  à  cinq  rayons. 
Mod.  15.  —  Do.  —  Gravée,  pl.  III. 

01.  —  Temple  à  une  tourelle  surmontée  d*une  croix  et 
accostée  de  deux  croix. 

Mod.  15—  Do.  —  Gravée,  pl.  III. 

01  —  Tour  crénelée  à  un  portail,  accostée  d'une  croix 
et  d'un  annelet. 

Mod.  15.  —  Do. 


LA 


MUSIQUE  ET  L'ACOUSTIQUE 

APERÇU  généj;al 

sur  leurs  rapports  et  sar  leurs  dissemblances 


La  mBBiqae  et  racoatisqael  L'art  le  plus  dégagé  des  réali- 
tés de  ce  monde,  l'art  dont  l'instinct  divinatoire  des  poètes  a 
fait  la  langue  des  anges,  et  une  branche  spéciale  de  la  phy- 
sique! La  traduction  de  nos  st-ntiments  les  plus  intimes  et 
les  plus  élevés  à  l  aide  de  mélodies  et  d'harmonies,  et  Tétude 
physique  et  mathématique  des  sons  qui  forment  ces  mélodies, 
oes  harmonies  f  Quels  rapporte  peut-il  exister  entre  deux 
ordres  de  manifestations  aussi  distinctes,  aussi  opposées,  de 
rftme  humaine?  N'est-ce  point  confondre  par  trop  ostensible- 
ment les  produits  de  la  raison  a?ec  ceux  de  i  imagination,  que 
de  parler  de  tels  rapports? 

Ces  relations  pourtant  ne  sont  point  des  fictions;  elles 
existent  :  entrevues,  pour  ainsi  dire,  dès  la  phis  haute  anti- 
quité, elles  ont  été  l'objet  des  méditations  des  phUosophes  et 
des  savants  de  toutes  les  époques,  et  ont  été  étudiées  à  l'aide 
de  procédés  de  plus  en  plus  rigoureux,  à  mesure  que  la 
science  théorique  et  expérimentale  et  que  l'art  musical  lui- 
môme  se  sont  déTeloppés  et  perfeclîonnés. 

La  science  est  parvenue,  non  seulement  à  connaître  le 
méaanisme  intime  du  son,  à  constater  qu'il  résulte  d'unmou- 


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LA  MUSIQUË  £T  L'ACOUBTIQIIB  25 

▼ement  oscillatoire  des  parties  des  corps  sonores  et  du  milieu 
aérien  où  nous  sommes  plongés,  et  qu^un  son  est  d'autant 
plus  aigu  que  ces  oscillations  sont  plus  rapides,  mais  encore 
à  compter  rigoureusement  le  nombre  de  ces  oscillatione  par 
unité  de  temps,  depuis  le  son  le  pins  graFe  jusqu'au  plus  aigu 
que  notre  oreUle  puisse  percevoir,  à  mesurer  la  longueur  des 
ondes,  à  déterminer  le  nombre  relatif  de  Wbratfons  ncces- 
nires  poar  que  deux  ou  plusieurs  sons  simultanés  forment 
pour  nous  un  accord  consonnant  ou  dissonant.  Et,  dans  ces 
dernières  années,  la  science,  on  peut  îodire  sans  exagération, 
a  atteint,  dans  l  étu  le  des  sons,  les  limites  du  merveilleux! 
Dès  l'origine,  on  avait  tout  au  moins  soupçonné  la  raison  du 
degré  de  gravité  ou  d  acuité  des  sons;  plusieurs  phUosophes 
grecs  ont  cherché  déjà  dans  Tharmonle  ou  dans  le  désaccord 
des  nombres,  considérés  abstractivement,  les  raisons  physl- 
qucs  et  métaphysiques  de  Tharmonie  et  de  la  dissonance  des 
8M8  sûnullanés.  Il  restait  cependant  une  énigme  profonde  à 
deviner;  elle  semblait  déOer  la  puissance  de  la  théorie  et  de 
refpérimentation.  Deux  sofis.  quoique  équivalents  comme  tons, 
quoique  répondant  ex-ictemeut  à  Ja  même  note,  peuvent  dif- 
férer par  cette  qualité  intime  que  nous  appelons  le  Umbrê. 
Le  la  normal  qu  il  soit  donné  par  le  diapason,  parla  voix 
humame,  par  ie  violon,  par  la  flûte,  par  te  cor. . répond 
toujours  an  même  nombre  (870) de  vibrations  par  seconde,  et 
cependant  te  nom  senl  des  instruments  que  je  viens  de  citer 
éfeiUe^en  nous  des  impressions  différentes,  tant  est  différente 
«qualité,  te  timbre  des  sons  que  chacun  d  eux  produit. 

Doù  peuvent  dériver  des  variations  aussi  considérables 
dans  la  nature  intime  de  sons  dus  à  des  ondulations  rigoureu- 
sement égales  en  longueur?  Mais  aUons  bien  plus  loin.  U 
parole,  la  voix  humaine  articulée,  te  grondement  du  tonnerre, 
•e  rugissement  de  l'Océan,  les  milte  et  mille  bruite  sourds  m 
^^nts  qui  frappent  sans  cesse  notre  ouïe,  sans  que  nous  y 
'waions  môme  attention,  tous  ces  sous,  d'espèces  sans  nombre. 


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26  RBVDB  D'ALSAOB 

relèvent  de  mouvements  ondulatoires  txcités  dans  l'air  par 
des  causes  diverses.  Notre  iateJligence,  aidée  de  roreille  la 
plus  délicate,  ne  soapçonoe  pas  même  ici  Texistence  d'un 
ton  musical.  Gomment  un  môme  mode  de  mouvement  du  fluide 
aérien  peut-il  éveiller  en  nous  des  impressions  aussi  profon- 
dément différentes?  La  question  n'avait  reçu  que  des  répouses 
très  vagues  et  presque  hypothétiques;  on  supposait,  et  avec 
raison,  que  le  timbre  du  son  devait  dépendre  de  la  forme 
inierne  des  ondes  sonores,  de  la  manière  dont  y  sont  distri- 
buées les  condensations  et  les  raréfactions  du  miUeu  sonore; 
mais  cette  explication  demandait  à  être  singulièrement  éclair- 
€îe  elle-même,  pour  prendre  définitivement  rang  dans  la 
science.  Les  superbes  travaux  de  M.  Helmholtz  ont  jeté  la 
plus  vive  lumière  sur  la  c[ne8tion  et  ne  laissent,  pour  ainsi 
dire,  plus  de  lacunes  à  combler. 

Les  tons  les  plus  purs  de  nos  instruments  de  musique,  ceux 
delà  voix  humaine  elle-même,  ne  sont  jamais  simples.  Lors- 
que, par  exemple,  nous  frappons  l'une  des  notes  graves  d'un 
de  nos  pianos  les  mieux  construits,  nous  entendons,  non  seu- 
lement le  ton  fondamental,  le  ton  principal  de  la  corde,  mais 
une  suite  do  tons  de  plus  en  plus  aigus,d*autant  plus  étendue 
que  notre  oreille  est  plus  délicate  et  plus  aUmUve.  Ce  sont  ce 
qu'on  appelle  les  sons  harmoniques  de  la  corde.  Les  nombres 
de  vibrations  qui  répondent  à  ces  sous  croissent  comme  la 
suite  des  nombres  naturels  :  1 ,  2,  S,  4,  5,  6,  7,  8 ...  ;  en  d'au- 
tres termes,  outre  la  note  principale,  on  entend  la  première 
0(;tave,  la  quinte,  la  seconde  octave,  etc.  Selon  l'instrument 
qui  rend  le  son,  les  uns  ou  les  autres  de  cessons  secondaires 
sont  plus  ou  moins  prédominants  par  rapport  aux  autres,  et 
c'est  précisément  de  cette  prédominance  spécifique,  c'est  de 
l  intensité  relative  des  sons  harmoniques  accompagnant  tou- 
jours le  son  fondamental,  que  dérive  le  timbre  de  chaque 
instrument,  celui  de  la  voix  humaine  avec  toutes  ses  variétés. 
Parmi  ces  sons  Iiarmoni(iues,  il  en  est  dont  la  coexistence 


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LA  MUiU<ïU£  AT  L'ACOUSTIQDB  jgj 

produit  pour  nou8  des  accords  agréables,  ou  désagréables,  ou 
absolument  faux;  il  en  esl  qui  ikî  trouvent  pas  m  ê  me  de  place 
dans  notre  gamme.  De  là  iiaitla  diversité  iiiânie  des  timbres 
de  nos  instruments  de  musique. 

Si,  à  une  association  de  tons  liarmoniqaes,  nous  snbstitaons 
un  mélange  de  tons  pris  aa  hasard,  nous  aurons  le  bniit,  qui 
semble  le  contraire  de  toute  note  musicale. 
^  Je  ne  puis  songer  à  présenter  ici,  même  en  court  résumé, 
l^eosemble  des  expériences  inattaquables  sur  Ie.>quelles  repose 
lïnterprélation  de  M.  Hclmlial!z.  Il  s  en  trouv  e  pourtant  deux 
qui  sont  trop  belles  el  trop  frappantes  pour  que  je  les  passe 
sous  silence.  Si  le  timbre  d'un  sou  dérive  effectirement  de 
la  seule  coexistence  de  plusieurs  sons  simultanés,  il  est  yisible 
que  nous  devrons  pouvoir  faire  rendre  à  un  même  instrument 
de  musique  le  timbre  de  tous  les  autres,  à  la  seule  condition 
qae  nous  sachions  le/orcsr  à  reproduire,  dans  le  même  ordre 
et  arec  la  même  intensité,  les  sons  secondaires  d'où  naît  le 
timbre  de  ctaaeun  d'eux.  C'est  à  quoi  l'on  parvient  d'une  façon 
qm  tient  presque  du  prodige.  Si  l'on  soulève  les  étouffoirs 
dun  piano  et  si,  à  la  partie  où  le  couvercle  laisse  yoir  les 
cordes  et  les  marteaux,  on  prononce  distinctement  les  Toyelles 
A  E.  r,  0,  U,  en  les  cliantant,  et  en  mettant  la  voix  d*accord 
airec  l'une  des  cordes,  avec  le  h,  par  exemple,  on  mtend 
^^'^^^mmrépéf^rcùmmmé^ks  cette 
expérience  excite  l'étonnement  de  tontes  les  personnes  qui 
yassislent  pour  la  première  fois.  J  en  cite  une  autre  plus 
flippante  encore.  Elle  est  due  au  grand  physicien  anglais 
Wbealstone,  que  la  science  a  perdu,  il  y  a  peu  d'années.  Dans 
nne  salle  de  concert,  et  à  la  place  habituellement  occupée  par 
1  orchestre,  se  trouvent  rangées  quelques  harpes;  nul  autre 
>»^trunient  de  musique  n'est  visible;  nul  artiste,  pour  tirer 
'-^^  desharpesl  Ët  cependant,  ô  prodige!  celles-ci  font 
entendre  une  symphonie  complète;  instruments  à  cordes, 
"ûte,  clarinette,  basson,  cor. . .,  rien  n'j  manque,  nul  timbre 


96 


BEVUE  D'ALBAGE 


n'y  Mt  défaut.  Qu'est-ce  donc  qui  fait  rendre  aux  harpes  ces 
8008  variés?  Âu-dessous  d'elles,  dans  une  cave  voûtée,  ae 
trouve  un  vrai  orchestre,  dont  nul  son  toutefois  ne  peut  par- 
venir aux  auditeurs;  mais  les  organes  sonores  des  divers 
instruments  de  cet  orchestre  sont  mis  en  rapport  avec  les 
harpes  par  de  simples  barreaux  de  bois  sec,  qui  jouent  Id  le 
mône  rôle  (lue  Vaine  des  instrmnc'nls  h  co.nles,  (jui  trans- 
mettent fidèlement  aux  harpes  toutes  les  vibrations  souter- 
raines, et  qui  forcent  ainsi  leurs  cordes  à  parler  comme  l'or- 
cheslre.  L'expérience  surprenante  de  Wheatstone  a  précédé 
de  plusieurs  années  l'interprétation  de  M.  Helmholts  et  Ta 
ainsi  en  quelque  sorte  vérifiée  à  Tavance. 

Les  faits  que  je  viens  de  signaler,  et  que  j*aurais  pu  déve- 
lopper considérablement,  nous  font  voir  des  relafioDS  évidentes 
entre  l'acoustique  et  la  musique  ;  mais  ils  ne  laissent  pas 
non  plus  de  doutes  sur  la  nature,  sur  1  espèce  de  ces  rela- 
tions. 

La  physique  ici  analyse  et  dissèque  en  quelque  sorte  les 
matériaux  a?ec  lesquels  Tart  produit  ses  créations ,  les  sons, 
à  l'aide  desquels  le  compositeur  exprime  ses  plus  sublimes 
inspirations.  La  science,  en  tout  cela,  se  contente  de  nous 
faire  connaître  les  éléments  avec  lesquels  Part  opère;  elle 
n'essaie  ni  de  se  fondre  avee  Fart,  ni,  bien  moins  encore,  de 
s*y  substituer . 

La  science  peut-elle  aller  beaucoup  plus  loin?  Peut-elle 
expliquer  raclion  des  sons  cl  de  leurs  combinaisons  sur  la 
partie  sensitive  de  notre  être?  Peut-elle  aller  beaucoup  plus 
loin  enrorc,  peul-elle  rendre  compte  de  l'impression  que  pro- 
duit la  musique  sur  notre  être  pensant? 

Beaucoup  de  philosophes  Tout  cru  à  diverses  époques  et  le 
croient  encore.  Sans  parler  de  ceux  qui,  systématiquement, 
réduisent  toutes  nos  manifestations  intellectuelles  à  de  simples 
phénomènes  physiologiques,  beaucoup  croient  que  TefFet  de 
la  musique  n'est  que  le  résultat  pur  et  simple  de  sensations 


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LA  MUSIQUE  ET  L* ACOUSTIQUE 


29 


agréables  ou  désagréables,  comme  le  sont,  par  exemple,  les 
impressions  du  poiM,  de  rodoi"at.  L'art  le  plus  immatériel 
qu'ait  créé,  et  dont  dispitse  lo  génie  de  i'iiomnie,  Fart  dont  la 
seule  existence  est  une  réfutatiou  des  idées  matérialistes,  ne 
serait  ainsi  que  le  produit  d'impressions  physiques!  Sans 
descendre  aussi  bas,  oa  plutôt,  essayant  de  s'élever  bien  plus 
haut,  d*aatres  font  dériver  l'action  de  la  musique  des  combi- 
naisons mathématiques  que  forment  entre  elles  les  vibrations 
sonores. 

Le  lecteur,  je  n'en  doute  pas,  s'attend  à  ce  qu'un  physicien 
doublé  d'un  nialliémalicien,  si  même  il  ne  tombe  pas  dans  les 
exagérations  précédentes,  cherche  du  moins  à  démontrer  que 
la  science  domine  l'art,  qu'elle  lui  impose  ses  lois,  qu'elle  ex- 
plique, sinon  ses  effets  sur  l'âme,  du  moins  les  procédés  qu'il 
emploie  pour  arriver  à  ces  effets.  Le  but  du  travail  que  j'offre 
aujourd'hui  aux  lecteurs  de  la  Revue  ttAkace,  est  cependant 
tout  opposé,  en  bien  des  points.  Je  vais,  an  contraire,  montrer 
que  si  la  science  fournit  à  Tart  des  données  que  tout  musicien 
un  peu  instruit  devrait  désormais  posséder,  il  est,  d'un  autre 
Côté,  des  limites  très  nettes  et  très  faciles  à  poser,  qu'elle 
ne  saurait  franchir;  que,  même  bien  en  deçà  de  ces  limites, 
il  est  bon  nombre  de  problèmes  où  la  science,  tout  en  inler- 
Teuaat  sous  une  forme  utile,  est  pourtant  obligée  de  se  plier 
aux  exigences  de  l'art;  qu'il  est,  en  un  mot,  des  questions 
que  le  savant  ne  peut  même  pas  aborder,  s'il  n'a  étudié  la 
musique. 

C'est  précisément  sur  l'une  de  ces  dernières  questionr,  c*est 

sur  la  structure  de  la  gamme  diatonique  que  j'appellerai  tout 
(l'abord  raltention  du  lecleur.  Le  sujet  est  bien  loin  d'élre 
aussi  simple  qu'on  pourrait  le  penser. 

Notre  gamme  est  formée,  comme  chaci;n  le  sait,  de  sept 
intervalles,  procédant  par  degrés  ascendants  de  tons  entiers 
et  de  demi-tons,  dans  l'ordre  suivant  : 

1  RÊ  1  m  <4  FA  1  SOL  1  U  t  SI  >i  OT 


90 


BEYUB  D'ALSAOB 


Toutefois,  les  tons  entiers  ne  sont  eux-mêmes  pas  formés 
d'iniemlles  égaux,  et,  pour  que  la  gamme  diatonique  soit 
rigoureusement  juste,  il  faut  que  le  nombre  de  vibrations 
répondant  à  chaque  note  soit  arec  celui  de  la  note  suivante 
dans  le  rapport  des  chiffres  : 

0X8:9  RÉ9M0  MH5H6  FA8:9  SOLOrlO  L\8:î)  SHrS:i6  (T 
En  partant  du  iiotnl)re  de  vibraliotis  S7U,  admis  mainte- 
nant généralement  pour  le  /a,  on  trouve  aisément  que  les 
nombres  de  vibrations  qui  répondent  à  chaque  note  de  la 
gamme  sont  : 

m       RÊ       MI       FA       SOL       LA       SI  LT 
522     587,25  652.5    696       783       870    978,75  1044 

Au  premier  abord,  le  lecteur  pourrait  croire  qu'il  s'agit 
ici  d  une  abstraction  théorique,  ou  môme  d'une  sorte  de  con- 
venUon  arbitraire.  11  n'en  est  nullement  ainsi,  comme  on  va 
le  voir. 

Parmi  les  accords  que  chacune  des  iiotes  a  cnndantes  forme 
avec  la  note  fondamentale  ni  deux  sont  fram  licrnent  disso- 
naids  :  l'accord  de  seconde  majeure  ut  ré  fct  l'accord  de  sep- 
tième ut-sL  l/intervûUe  tO-ut,  celui  de  Toclave  est  an  con- 
traire tellement  consonnant  qu'il  ne  forme  pas  un  accord 
proprement  dit  Les  quatre  autres,  la  tierce  majeure  ui  mi, 
la  quarte  ta  fa,  la  quinte  ut-sol,  et  la  sixième  ut  la,  à  partir 
de  la  quinte,  ont  été  successîyement  admis  comme  des  accords 
consonnants.  Bien  que  le  terme  d'accord  diss^narit  n'ait  rien 
de  commun  avec  celui  iraccord  faux,  il  n'en  est  pas  moins 
vrai  que  notre  oreille  est  moins  blessée  par  une  légère  alté- 
ration subie  par  un  accord  dissonant  que  par  celle  que  subit 
un  accord  consonnant.  Or,  la  science  a  déterminé,  avec  une 
rigueur  sans  égale,  et  à  l'aide  de  procédés  qni  sont  de  nature 
à  étonner,  les  nombres  de  vibrations  relatifs  des  accords  con- 
sonnants. Pour  qu'une  tierce,  une  quarte,  une  quinte..., 
aoît  parfaitement  juste,  il  laut  que  les  nombres  de  vibrations 


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LA  MUSIQUE  ET  l' ACOUSTIQUE 


ai 


répondant  aux  deux  notes  soient  entre  eux  dans  les  rapports 

suivants  : 

TltllCt:  Ml.NELRL   TIERCE  iLVJEUUE       AllTE   QL'LNTE  SIXTE 
5:6  4:5  3:i         2:3  3:5 

Quant  à  l'octave,  le  rapport  est  de  1  à  2.  Le  lecteur  peut 
s'assurer  que,  dans  la  gamme  ci-dessus,  ces  rapports  se  trou- 
Tenl  exactemeut  observés;  ainsi,  par  éxemple,  on  a  : 

Ué  est  à  80l  comme  S32  est  à  783,  comme  2  est  à  3. 

n  est  dès  ee  moment  facile  de  déterminer  les  notes  disso- 
nantes ré  et  si.  Pour  qae  la  quarte  ré-sol  mi  juste,  il  fant  en 
effet  qu'on  ait  : 

Ré  est  à  sol  conimo  3  est  à  4,  comme  X  est  à  783. 

D'où  l'on  tire  :  X  ^  587.2o. 

On  trouve  de  même  la  valeur  de  si,  en  remarquant  que, 
pour  que  la  tierce  sol-si  soit  juste^  il  fiiut  qu'on  ait  : 

Soiesiksi  comme  4  est  à  5,  comme  788  est  à  978,75. 

Telle  est  la  construction  de  la  gamme  diatoniqae,  tiiéorigm, 
en  tU  majeur.  Au  premier  at)ord,  le  lecteur  ne  doit  pas  com- 
prendre pourquoi  je  me  sers  prudemment  du  mot  théorique, 
et  pourquoi,  au  contraire,  celte  j^amme  ne  serait  pas  essen- 
liellenieiit  pratiiine.  La  rciuiioii  d'une  note  quelconque  avec 
l'//  forme  en  effet  u:i  accord  parfaitement  juste,  qu'il  soit 
consonnant  ou  dissonant.  Il  semble  donc  que  le  musicien  le 
plus  scrupuleux  pourrait  seserWr  a?ec  confiance  d*un  instru- 
ment qu'on  physicien  aurait  accordé  en  partant  de  ces  prin- 
cipes. Voyons  cependant  tout  de  suite  ce  qui  en  est,  même 
avant  de  nous  occuper  des  gammes  en  d'autres  tons.  Au  lieu  de 
comparer  les  six  notes  ascendantes  de  l'octave  à  Vnt  fonda- 
mental seulement,  réunissons  les  deux  à  deux  entre  ellc:^  : 
le  résultat  de  cette  comparaison  e^l  frappant.  Tous  les  accords 
sont  justes,  à  lexception  do  deux  :  la  tierce  mineure  ré-fa 
et  la  quinte  ré-la  ;  le  ré  étant  admis  comme  point  de  départ 
avec  ses  5S7,âo  vibrations,  il  faudrait,  pour  que  la  tierce  et 
Ift  quinte  deriassent  jostes,  que  le  fa  répondit  à  704,7  et  le 


22 


BBVUE  D' ALSACE 


/o  à  880.875  vibrations;  or,  ces  notes  en  représentent  dans 
notre  gamme  G9G  et  870.  Acceptée  telle  (iiicllo,  cette  gamme 
donne  donc  lieu  à  deux  accords  fniix.  P.)ur  accorder  un 
instrument  à  sons  fixes,  le  piano,  par  exemple,  de  façon  à 
corriger  dans  la  limite  du  possible  ces  accords  faux,  il  faut 
donc  fauner  un  tant  soit  pea  les  accords  justes  au  bénéfice 
de  ceux  qni  ne  le  seraient  pas  assez;  et  cela  déjà  pour  les 
cordes  qui  répondent  à  la  seule  gamme  é'tU  majeur  (celles 
des  touches  blanches)  ;  il  faut,  en  un  mot,  diminuer,  tempé* 
rer  la  justesse  trop  absolue  de  certains  accords  pour  obtenir 
une  justesse  moyenne  lolérable.  Si,  du  piano  aux  sous  inva- 
riables, nous  passons  aux  instruments  à  corde»,  où  l'exécu- 
tant est  maître  de  donner  aux  sons  le  degré  d'acuité  qu  il 
▼eut,  nous  arrivons  à  une  conelusion  qui,  peut*  être,  fera  rire 
par  son  caractère  paradoxal.  C'est  que,  sur  ces  instrumeats, 
on  est  obligé  de  jouer  sans  cesse  légèrement  faux  pour  ne  pas 
aboutir  &  des  tons  d*une  fausseté  intolérable,  — alors  même 
qu'on  reste  dans  le  seul  ton  à\U  majeur  !  Je  vais  mettre  cette 
assertion  baroque  hors  de  doute  et  de  plus  permettre  ù  cha- 
cun de  la  Vc^rifier. 

Que  ceux  de  mes  lecteurs,  qui  ontde  l'oreille  et  qui  savent 
tirer  du  violon  un  son  pur  et  soutenu,  accordent  parfaite- 
ment juste  les  trois  quintes  formées  par  les  cordes  à  vide; 
qu'ils  appuient  le  second  doigt  sur  le  la  et  le  troisième  sur 
le  ré,  et  qu'ils  accordent  aussi  juste  que  possible  la  tierce 
majeure  uf-nU  et  ensuite  la  quarte  soM.  Ën  comparant  alors 
le  9ol  avec  celui  de  la  corde  à  vide»,  ils  reconnaîtront,  à  leur 
grand  ctouacmeiit  peul-ôlre,  que  roclavc  ;nnsi  oblcnue  est 
intolérablement  fausse.  La  raison  de  celte  singularité  est  très 
simple.  Le  la  à  vide  faisant  870  vibrations  et  le  violon  étant 
accordé  par  quintes  justes,  le  wrj  fait  870X-f  vibrations,  soit 
l^îo:;:  iercen  fait870x4.  soit 580;  le «tf  en  fait  580xf,8oil 
S86,67.  D'un  autre  côté,  l'fi<,  accordé  en  tierce  juste  avec  la 
Chanterelle,  m  1805Xp  soit  1044  vibrations,  et  le 4o( accordé 


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LÀ  MUSIQUE  £T  L'AGOUSTIQUE  88 

en  qurfe  jasteavec  cet  tit,  fait  iOUXj-,  soit  783  vibrations  ; 
or,  Toctave  jiisie  de  ce  sol  h  vide  ferait  38G.67X2,  soit  778.84 
vil)ration.s;  le  sol  juste,  par  rapport  à  ut  et  m,  fait  donc  dix 
vibrations  de  trop.  Comme  les  accorda  d'octave  ne  tolèrent 
aucune  altération,  il  faut,  par  suite,  que  le  violoniste  tempère, 
ou,  pour  dire  le  mot  propre,  faum  légèrement  le  iol  de  la 
qoarte  et  Vut  de  la  tierce. 

La  science,  on  le  voit  par  ce  premier  exemple,  ne  peut 
donc  pas  nous  imposer  ses  procédés  inflexibles,  pour  accorder 
M  seule  gamme  d*tt/ majeur;  il  faut  quelle  laisse  l'oreille  de 
Tartiste  libre  de  corriger  le  trop  de  justesse  en  un  seris,  pour 
obtenir  une  justesse  suffisante  en  un  autre  sens;  mais,  en 
même  temps,  elle  nous  montre  clairement  le  pourquoi  de  la 
nécessité  de  cette  sorte  de  concession.  Ce  qui  est  déjà  frap- 
pant, quand  nous  ne  nous  occupons  que  de  la  gamme  en  ut 
majeur,  va  le  devenir  au  plus  haut  point  par  Texamen  des 
tntres  gammes. 

Le  compositeur  recourt  à  des  gammes  de  divers  tons,  non 
pss  seulement  comme  le  pensent  beaucoup  de  personnes,  p(jur 
donner  à  une  mélodie  le  degré  d  acuité  ou  de  gravité  qui  lui 
convient,  mais  aussi  parce  que  le  timbre  de  beaucoup  d'instru- 
ments varie  et  prend  un  caractère  particulier  arec  les  divers 
tous  dans  lesquels  on  écrit,  et  surtout  enfin,  parce  qne  les 
modulations  qui  servent  à  passer  d*un  ton  en  un  autre  sont 
pour  Tartisle  une  source  puissante  d'effets  tout  spéciaux. 

Le  ton  d'une  gamme  dépend,  non  de  la  note  qui  la  com- 
■Mnce,  mais  de  respîce,  du  nombre  relatif  et  de  l'ordre  res- 
pectif des  tons  entiers  et  des  demi-Ions  qui  la  forment.  Kn 
écrivant  :  SoUa  si  ut  ré  mi  fa  sol,  nous  ne  sortons  pas  pour 
cela  du  ton  d'î^/ majeur  ;  mais  si  nous  altérons  certains  tons, 
81  nous  écrivons,  par  exemple,  A/  dièse,  ou  si-bémol,  ou  fa- 
<3ie8e,  sî-bémol  et  mi-bémol,  le  ton  de  la  gamme^  ainsi  que 
celui  de  toutes  les  mélodies  qne  nous  composerons  avec  elle, 
passe  en  «a  migeur,  en  fa  majear,  ou  en  w/  mineur.  Pour 


81 


BEVUE  D'ALSAOB 


que  la  note  qui  commence  une  gamme  soit  réellement  la  note 
fondanmialet  la  iomque,  il  fiiut»  si  eUe  doit  êire  miyeare, 
que  les  tons  entiers  et  les  demi-tons  s*y  succèdent  dans  le 
même  ordre  qne  dans  la  gamme  dW  majear,  et  il  en  est  de 
même  pour  les  gammes  en  mode  mineur. 

Prenons  comme  exemples  les  gammes  en  si  et  en  r^-bémol 
majeurs,  pour  que  les  tons  et  demi-tons  s'y  succèdent  suivant 
Tordre  : 

^    i    y»    i    i    \  'A 
lï  fout  visiblement  que  nous  altérions,  comme  il  suit,  les 
diverses  notes  qui  les  composent  : 

SI       UTjl     Rɧ     la       FAl     S0I|     LAt  SI 
RÉIp    Mlt^      FA      SOI>    LAl^      SIb      Ut  RÊ|^ 

Hais  quelle  est  maintenant,  sons  forme  numérique,  c'est- 
à-dire  en  nombre  relatif  de  vibrations,  la  valeur  de  toutes  ces 
altérations  de  tons  entiers  et  de  demi-tons?  Les  tons  entiers 
si-ut  ,  ut  -ré  ,  ré  -mi  ,  mi  -fa,  los  demi-tons  la  -si,  ut-ré  , 
sont-ils  les  mômes  que  leui-s  correspondants  ni-ré,  ré-^m, 
si-ut  ?  En  quoi  consiste  au  juste  Taltération  de  dièse  et  de 
bémol,  à  l'aide  de  laquelle  nous  changeons  ainsi  le  ton  d*nne 
gamme?  Le  ton,  le  degré  d'acuité  d'une  note  est-îl  le 
même  que  celui  de  la  note  bémoHsée  immédiatement  supé^ 
rieure? 

Ces  questions  sembleront  peut-être  naïves  à  bien  des  per- 
sonnes qui  jouent  d'an  instrument  quelconque,  ou  surtout 
qui  ont  la  prétention  de  connaître  la  musique  par  principes: 
elles  ne  le  sont  pourtant  nullement  en  réalité;  elles  sont  en 
litige  déjà  depuis  l'époque  do  Rameau.  Les  physiciens  ont  à 
diverses  reprises,  et  de  nos  jours  môme,  proposé  des  solutions, 
disons  plutôt  des  systèmes  très  divers,  quoique  topjours  très 
tranchés  ;  d'un  autre  côté,  les  musiciens,  se  souciant  peu  des 
verdicts  de  la  sdenre,  se  sont  obstinés  à  n'écouter  que  leur 
oreille  et  leur  sentiment.  Cherchons  à  voir  qui  a  tort  ou 
raison. 


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LA.  mXHQXm  ET  L'AjOOXTSTIQUS 

L'idée  la  plus  naturelle,  celle  qui  se  présente  la  (iremière 
à  l  êsprit,  c  est  de  faire  ies  demi-tons  obtenus  à  l'aide  des 
dièaes  et  des  bémols  semblables  aux  demi-tons  natnrels  fiOfa 
et  M,  afin  d'obtenir  l'identité  complète  des  nourelles  gammes 
i«c  la  gamme  diatoDîque  juste  en  ut  majeur.  Cette  méthode 
cependant,  nous  allons  le  voir  tout  de  suite,  conduit  à  des 
résultats  inacceptables  pour  l'oreille. 

Les  demi-tons  si-ut  et  mi-fa  répondant  au  rapport  16:16, 
quant  au  nombre  de  vibrations  que  doi?ent  Ikice  tes  denx 
flotea,  il  Ikudra,  pour  diéser  on  pour  bémoliser  une  note  quel- 
«mqne,  multiplier  par  j|  ou  par  ||  te  nombre  de  yJbrations 
qoî  répond  à  cette  note.  Ainsi,  par  exemple,  pour  diéser  Vui, 
nous  multipUerons  522  par  16  et  nous  diviserons  le  produit 
P«r  15;  pour  bémoliser  le  ré,  nous  multiplierons  587,25-  par 
15  et  nous  diviserons  le  produit  par  16.  En  procédant  ainsi, 
quant  à  nos  deux  gammes,  en  ii  et  en  ré  bémol,  nous  arrivons 
aux  nombres  suivants  : 


^   489,375 

^ïf   556.8 

*É   626,4 

^   652,4 

^4   74M 

  835,2 

^4   928 

  978,75 


8/9,102 
8/9 
24/25 
8/9.102 

8/9 
9/10 
15/15,82 


RKb   530,55 

Mit'   611.72 

FA   696 

SOL^   734,i 

Làj^   815,63 

Sd'   717,58 

UT   522 

i#   1101,1 


9/10 
8/9,102 
15/18^82 
9/10 
8/9 

9/9,102 

15/15,82 


Ou  voit  que,  dans  celte  manière  d*acGOider  un  instrument, 
les  iotervaUes  des  tons  et  des  demi-tons  diflèrent  eonsidéra- 
blemeni  de  ceux  de  leurs  ourrespondanto  dans  la  gamme  dW 
™«ieur;  on  vdt  aussi  que  les  tons  diésés  sentent  plus  aigus 
W  les  tons  bémolisés  qui  les  suivent.  Ainsi,  tendis  que  te 
^  dièse  ferait  626,4  vibrations,  le  mi  bémol  n'en  ferait  que 


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96 


JkEVDB  D*AL8ACB 


61i,4.  Ces  défauts  ont  condail  les  théoriciens  à  adopter  pour 
les  demi-tOQS  art^mlslQ  rapport  uniforme  24:25.  Ainsi, 
poar  diéser  le  la,  il  fiiut  multiplier  le  nombre  870  de  vibra> 
tions  du  h  normal  par  25  et  diviser  le  produit  par  24;  pour 
bémoliser  le  il  fout  multiplier  489,875  par  24  et  diviser 
le  produit  par  25.  Le  tableau  suivant  donne  la  gamme  chro- 
matique complète  à  laquelle  conduit  celte  méthode;  et  la 
gamme  ainsi  obtenue  répond,  en  quelque  sorte,  au  dernier 
mot  de  la  scieace,  quant  à  la  subdivision  des  ions. 

Gamme  chromatique  complète 


Nombic 
d0  Tibnttom 

OT   1004 

UT  ^   1002,4 

SiJ   1019,5 

SI   978,75 

SI>   930,6 

LA  1   îM)6,25 

LA  (normal)   870 

LA  l?   833,2 

SOL  j(   815,63 

SOL   783 

SOLI^   751,68 


FA» 
FA,. 
FA> 
MI#. 

Mï  .. 

Ml  K 

RÉ* 

RÉ  i? 
UTK 
UT.. 


4t  lAnlioM 
357 
696 
668,16 
679,69 
653,5 
626,4 
011,72 
387,23 
563,76 
343,73 
522 


A  l'aide  de  ce  tableau,  il  est  facile  de  construire  unegamme 
diatonique  dans  n'importe  quel  ton,  il  sullil d'y  choisir  les  noies 
de  telle  sorte  que  les  tons  et  les  denii-tons  se  succèdent  dans 
Tordre  voulu.  A  ce  tableau  j'enjoins  un  autre  petit,  quiîntéres- 
serale  lecteur.  Il  indique  la  position  exacte  qu*il  faut  donner  à 
l'index,  sur  les  cordes  de  Talto  et  du  violon,  pour  obtenir  les 
trois  ou  quatre  premiers  demi-tons  consécutifs  sur  chacune 
de  ces  cordes.  Ces  indications  feront  le  mieux  voir  au  lecteur 
combien,  dans  ce  système  de  gamme,  les  demi-tons  diésés 
diffèrent  des  demi-tons  bémolisés  de  la  note  suivante. 


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LA.  MUSIQUE  BT  L 'ACOUSTIQUE 


S7 


Position  do  l'indez  sur  les  cordes  de  l'alto  et  du  violon 

Nombre  Longueur  libre 

de  vibrations  de  la  cunic 

FAj   1450  («97 

FA   1392  0,3094 

FAI^   1336,32  0,3223 

M»}   i3S»,38  0,3157 

  *305  0,33  Ifi  do  Tiolon. 

SI|   loin, 51  0,28IfJ 

SI  —  ...   978,75  0,2n:{:{ 

  939,6  0,3()o(i 

  006,25  0,31G8 

^   WO  0,33  La  du  violun. 

  652,5  0,297 

  02G,.i  0,3004 

  011,72  0,3108 

^"   587,25  0,33  JMduviolofl. 

  435  0,292 

^'^^   il7,6  0,3094 

^'ï   'i07,8!  0,3108 

  301,5  0,33  âMduvioloD. 


RÉ  

'^'^  ^   281,88  0,3333 


893,625  0,32 


*    275,875  0,3456 

^'^   261  '  0,36  Oitderidto. 

Arant  de  diseater  tes  amtages  elles  dterantages  de  celte 
gamme,  il  est  nécessaire  de  rappeler  celle  qui  est  en  usage 
exclusirement  jusqu'ici.  Chacun  sait  que,  sur  le  piano  et  sur 

l*orgae,nne  seule  et  môme  touclic  înoirc)  répond  au  dièse  et 
au  bémol  de  deux  notes  consécutives  :  ainsi,  uns  même  touche 
donne  w/-dièse  et  /a-bcmoL  Mais  ici  encore,  nous  rencontrons 
(lenx  systèmes  différents  de  gammes  dites  tempérées.  L'un, 
quoique  tout  à  fait  scientifique,  a,  chose  assez  étrange,  été 
proposé  par  Rameau,  n  consiste  à  diviser  rocta?e  en  douze 
mterralles  absolument  semblables,  de  telle  sorte  que  le  rap- 


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^  BEVOE  D'ALSACE 


port  des  nombres  de  vibrations  soit  le  même  pour  tous  les 
demi-tons  de  l'échelle  chromatique.  Ce  système,  cité  dans  tous 
les  traités  de  physique,  n'a  jamais  pu  prévaloir,  et  cela  par 
une  raison  très  simple.  Notre  oreille  est  absolament  incapable 
da  juger  d'une  égalité  de  dirision  comme  celle  dont  il  est  ici 
question;  pour  Tobtenir,  il  fiiudrait  que  les  facteurs  ou  les 
accordeurs  d'orgue  et  de  piano  fussent  tous  pourvus  d'une 
échelle  de  douze  diapasons  parfaitement  accordés  en  demi- 
tons  égaux,  avec  lesquels  ils  pussent  mettre  d'accord  un  à  un 
lestons  de  leurs  instruments.  La  construction  d'une  semblable 
échelle  serait  très  facile,  sans  doute;  mais  son  emploi  serait 
une  sujétion  des  plus  pénibles  dans  la  pratique.  L'autre  mé- 
thode, qu'on  peut  appeler  la  méthode  naturelle,  et  qui  est,  je 
crois,  généralement  suivie  par  les  accordeurs  de  piano,  con- 
siste à  faire  porter  les  lég^  altérations  indisptnsables  sur 
ceux  des  accords  qui  les  tolèrent  le  mieux,  et  à  respecter  les 
autres.  Les  octaves  ne  tolèrent  pas  la  plus  légère  modiOcation, 
et  il  est  d'ailleurs  inutile  de  leur  en  faire  subir  une.  [Après 
elles,  viennent  les  quintes,  pour  lesquelles  l'oreille  est  très 
exigeante  aussi  ;  un  calcul  aisé  montre,  à  la  vérité,  qu'il 
serait  impossible  d'accorder  un  piano  par  quintes  justes; 
mais  on  cherche  du  moins  à  les  altérer  le  moins  possible. 
Les  accords  de  tierce,  de  quarte,  de  sixte,  à  l'égard  desquels 
Toreille  est  moins  exigeante,  subissent  donc  principalement 
le  tempérament  nécessaire  pour  que  la  justesse  moyenne  de 
la  gamme  devienne  supportable. 

J'ai  dit  que  cette  gamme  tempérée  naturelle  est  la  seule 
en  usage  dans  notre  musique  moderne.  Est-elle  destinée  à 
être  un  jour  complètement  mise  de  côté  etàMre  place  à  la 
gamme  toute  scientifique  que  nous  avons  trouvée  ci-dessus? 
C'est  ce  que  pensent,  non  seulement  plusieurs  savants,  mais 
même  quelques  artistes. 

M.  Blaserna,  profimur  à  l'Université  de  Rome,  a  publié 
Kicemm«it  un  ouvrage  des  plus  remarquables,  et  dont  on  ne 


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LA  MU8IQUK  £T  L'aCOUSTIQUE 


89 


saurait  dire  trop  de  bien  V  Ce  livre  sera  lu  avec  fruit  et  avec 
plaisir  par  chacun  :  par  tous  ceux  du  moins  qui  aiment  mieux 
aller  eu  a?aat  que  reculer,  et  qui  préfèrent  i&  Jour  à  la  nuU. 

,L*anteur  8*y  montre  non  sealement  phy^den  instruit  et 
correct,  mais  encore  critique  impartiai  et  éteTé  en  matière 
d*art.  n  pose  afee  soin  les  limites  qui  séparent  la  sdence  de 
Tart;  comme  critique,  il  sait  rendre  justice  à  tontes  les  écoles 

et  ne  craint  point  de  dire  à  sa  patrie  ce  qu'il  faut  qu'elle 
fasse  po'ir  se  tenir  au  rang  qu'elle  a  occupé  si  longtemps  en 
musique;  tout  en  faisant  de  quelques-uns  des  compositeurs 
de  son  pays  Téloge  qu'ils  méritent,  il  sait  apprécier  ceux  des 
autres  nations  et  ceux  qui,  par  la  grandeur  de  leur  génie, 
appartiennent  à  Thumanité  entière  et  non  à  tel  ou  tel  pays; 
il  a  compris  à  quelle  hauteur  incomparable  s'est  élevé  Beet-' 
hoven,  dont  la  musique  passe  pour  Tantipode  de  la  musique 
italienne;  il  a  le  courage  de  dire  que,  quand  les  passions  mau- 
vaises (disons  :  ridicules)  se  seront  apaisées  et  qu'au  lieu  de 
siffler,  on  se  donnera  la  peine  d'écouter,  on  reconnaîtra  de 
côté  et  d'autre  que  R.  Wagner  pourrait  bien  être  un  homme 
de  génie',  et,  en  certains  points,  qui  n'ont  plus  rien  de  commun 
arec  la  science  ou  Tart,  il  se  laisse  aisément  reconnaître 
comme  Fami  du  progrès,  confiant  dans  rarenir  de  Inhumanité. 
Qn*en  ces  temps  de  trouble  et  d'épreuve,  où  tous  les  hommes 
qui  pensent  et  sentent  de  la  même  manière  font  bien  de  se 
serrer  la  main,  M.  Blaserna  me  permette  de  lui  donner  id  un 
témoignage  de  ma  sympathie! 

Dans  l'un  des  derniers  chapitres  de  son  ouvrage,  M.  Bla- 
serna discute  et  présente,  ayec  toute  la  clarté  possible,  ce  qui 
semble  donner  à  ht  gamme  sdentifique  la  supériorité  sur  notre 
gamme  tempérée.  A  Tappui  de  cette  supériorité,  il  dte  une 
preuTS  pour  ainsi  dire  parlante:  «M.  Helniholtz  s'est  liait 

*U  ton  et  la  matiqM,  Librairie  Gema^&aillière  et  G*  (BiblioUièqae 
iatnnafioiiale). 


40  BBVUB  D'ALSACE 

construire  un  harmonium,  qui  lui  permet  de  jouer  ù  yolonté 
avec  la  gamme  exacte  et  avec  la  gamme  tempérée,  pour  voir 
sii  existe  réellement  entre  elles  ane  différence  appréciable. 
Pour  peu  que  roreille  s'y  habitae,  la  différence  devient  très 
sensible.  Avec  la  gamme  exacte,  les  accords  consonnants  de- 
viennent beaucoup  plus  doux,  plus  clairs  et  plus  transparents; 
les  accords  dissonants,  plus  forts  et  plus  mordants;  la  gamme 
tempérée,  an  contraire,  mêle  le  tout  dans  une  teinte  uniforme; 
sans  caractère  tranché.  Dans  la  première,  les  sons  résultants 
ont  une  importance  plus  jurande,  et,  en  générul,  la  musique 
prend  un  caractère  plus  décidé,  plus  franc,  plus  robuste  et 
plus  doux.  Ce  fait  prouve  que  les  résultats  de  la  théorie  ne 
sont  pas  de  pures  spéculations  ou  des  exagérations  pédan- 
tesques,  mais  qu'ils  ont,  au  contraire,  une  véritable  valeur, 
qui  ddt  les  faire  accepter  également  dans  la  pratique. .  De 
tout  rensemble  de  sa  discussion,  d'ailleurs  très  ir](éressante, 
M.  Blaserna  conclut  que  la  gamino  tempérée  doit  être  aban- 
donnée définitivement  dans  un  avenir  prochain.  <  Si,  dit-il, 
nous  supportons  celle-ci,  cVsl  uniquement  parce  que  nous 
avons  1  oreille  systématiquement  faussée  depuis  notre  enfance.» 

Quelque  spécieuses  que  soient  les  raisons  données  par 
M.  Blaserna,  quel  que  poids  qu'aient  ici  les  belles  expériences 
de  M.  Helmholtz,  il  m'est  impossible  de  me  rallier  an  juge- 
ment précédent,  soit  au  point  de  vue  delà  musique,  soit  même 
à  celui  de  la  physique  seul . 

La  condamnation  et  l'abolition  de  la  gamme  temi)érée  con- 
duisent à  des  conséquences  beaucoup  plus  graves  qu'Une  peut 
sembler  au  premier  abord,  dans  la  praUque  de  notre  musique 
moderFie.  Elles  entraînent,  en  effet,  d'une  part,  l'aboUtion  du 
piano  et  de  l'orgue,  car,  pour  accorder  ces  instruments  sui- 
vant la  nouvelle-gamme,  il  faudrait  ajouter  à  chaque  octave 
sept  touches  (sept  conks  ou  tuyaux)  pour  distinguer  les  dièses 
des  bémols,  ce  qui,  pour  le  piano,  serait  une  impossibilité 
et,  pour  l'orgue,  tout  au  moins  une  immense  difficulté.  D'autre 


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LA  MusiyuB  srr  l'agoustique  il 

pari,  si  elles  n'enlraîiient  pas,  comme  il  me  paraît  probable, 
rabolition  de  bon  nombre  d'antres  instruments  essentiels  à 
lin  orchestre,  elles  rendent  du  moins  beaucoup  plus  ditacile 
1  étude  et  l'usage  de  ces  instruments.  La  flûte,  le  basson,  la 
clarinette,  etc.,  ete.,  sont  des  instruments  à  sons  fixes,  qu'il 
serait  absolument  impossible  de  construire  pour  deux  espèces 
de  demi-tons;  les  exécutants  peuTent,  sans  doute,  modifier 
l^rement,  à  Taîde  de  Temboucbure,  le  ton  d'une  même  note, 
mais  le  peufent-ils  assez  pour  les  exigences  de  la  nouvelle 
gamme?  C'est  ce  dont  ils  jugeront  par  eux-mêmes,  d'après 
ce  qui  va  suivre.  Ef.fin,  dans  l'usago  des  instruments  à  cordes 
même,  sur  lesquels  l'exécutant  donne  la  hautmr  TOulue  à 
certains  tons  {non  à  tous,  il  s'en  faut),  la  gamme,  dite  exacte, 
conduit  encore  à  des  difficultés  qu'il  n'est  pas  permis  de  pas- 
ser sous  silence.  Le  violon,  l'alto,  le  rioloncelle,  ne  peuvent 
s'accorder  que  par  quintes  très  justes.  Le  ia  du  violon  et  de 
Pallo  faisant 870  vibrations,  le  r^en  fait  870  X  4,  soit  580  ; 
or  ler^  de  la  gamme  juste  répond  à  586.25  vibrations:  il 
suit  de  là,  que  pour  jouer  parfaitement  juste  sur  ces  instru- 
ments, on  ne  pourrait  plus  se  servir  de  la  corde  du  ré  k  vide, 
m  d'aucun  des  sons  harmoniques  de  cette  corde,  car  tous 
seraient  relativement  faux. 

Mais  passons  sur  des  difficultés  pratiques  qui,  si  grandes 
qu'elles  soient,  seraient  à  surmonter,  si  effectivement  l'em- 
ploi de  la  gamme  scientifique  échappait  à  la  critique  et  devait 
conduire  réellement  à  de  plus  beaux  effets  en  musique,  et 
examinons  de  près  cette  gamme. 

Déjà,  dans  la  seule  gamme  en  ?/^majeur,  nous  avons  ren- 
contré une  quinte  absolument  inacceptable  pour  une  oreille 
qui  ne  serait  pas  aussi  faussée  systématiquement  :  la  quinte 
fe-la.  Mais  passons  à  la  gamme  complète  ou  chromatique;  j'y 
choisis  presque  au  hasard.  Le  si  naturel  fait  978,75  vibra- 
tions; la  quiote  supérieure,  pour  être  juste,  devrait  en  faire 
978,76  x-j-,  soit  1468,125.  Or,  le/o-dièse  de  la  gamme  chro- 


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42 


BEVOE  D'ALSAOB 


malique  en  lait  725X'2,  soit  1450.  Cette  différence  donne  lieu 
à  une  quinte  que  je  ne  puis  qualifier  que  d'horrible,  et  je  vais 
mettre  chacaa  à  même  de  s'en  assurer.  La  quinte  si-fa-^lèsê 
s'obtient,  eomme  on  lésait,  sur  le  ?iolon, en  appuyant  Tindex 
à  la  fois  et  bien  également  sur  les  cordes  h  et  mt.  Celles-ci 
ayant  la  longoenr  habituelle  0",88,  il  faut,  pour  que  le  st  et 
sa  quinte  soient  justes,  que  le  doigt  soit  placé  à  0*,298S  de 
distance  du  chevalet.  Pour  substituer  à  notre  /Vi-dièse  Umpé' 
rée  le  /a-dièse  de  la  gamme  scientifique,  il  faut  que  nous 
reculions  l'index  de  façon  que  sa  distance  au  chevalet 
derienne  Û",â97  ;  mais,  dans  ces  conditions,  nous  ne  pour- 
rons plus,  avec  la  même  doigt,  conserver  la  distance 
0",:2933,  nésessaire  pour  que  la  note  s»  reste  j  liste.  Le  lecteur 
y  parTiendm  on  plaçant  sous  Tindes  une  courte  et  mince 
règle  en  bois,  qu'il  obliquera  sur  les  cordes  de  façon  que 
la  partie  libre  des  cordes  soit  0*,2988  sur  le  Ai  et  0',397  sur 
la  chanterelle.  Un  violoniste  qui  verra  faire  ces  apprêts 
aura  la  chair  de  poule  avant  même  que  l'archet  passe  sur 
les  deux  cordes,  et  il  est  permis  de  douter  qu'aucune  habitude 
nous  fasse  jamais  accepter  la  quinte  ainsi  produite!  Je  prends 
un  autre  exemple.  Dans  l'accord  complet  de  septième  du  ton 
de  r^-mineur  (ou  mt  jwi  st-bémol  u^-dièse),  les  deux  notes 
altérées,  st  et  tU,  forment  ensemble  une  tierce  mineure;  nous 
savons  que,  pour  qu'une  telle  tierce  soit  juste,  il  faut  que  les 
nombres  de  vibrations  répondant  aux  deux  tons  soient  entre 
eux  comme  5  est  à  6.  Le  si-bémol  faisant  939,6  vibrations, 
il  faudrait  donc,  pour  que  la  tierce  devînt  juste,  que  1  w/-dièse 
en  nt  939.6  X  ^,  soit  1 127,5X2;  or,  l'w/-dièse  de  la  gamme 
scientifique  n'en  fait  que  551,72,  soit  1103,5,  ce  qui  nous 
donne  le  rapport  939,6  : 1103,5,  soit  ô  :  5,87,  au  lieu  de  5 : 6. 
La  tierce  mineure  ainsi  obtenue  serait  donc  extrêmement 
fiinsse;  elle  ne  serait  plus  même  un  accord  possible. 

n  ne  sera  pas  difficile  au  lecteur  de  trouver,  dans  Jaganmie 
dite  exacte,  d'antres  tons  formant  entre  eux,  non  des  accords 


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LA  MUSIQUE  ET  L'ACOUSTIQUE  43 

nuis  des  accords  dont  il  pourra  lui-même  véri- 
fier rintolérable  fausseté,  s'il  sait  se  servir  convenablement 
d'un  instrument  à  sons  variables  à  volonté  (violon,  alto,  vio- 
loncelle). 

De  tout  ce  qui  précède,  nous  condnrons  qae,  d^one  part 
sans  doute,  la  gamine  scientifique,  par  la  jaateese  absolue 
qu'elle  donnerait  à  certains  accords,  conduirait  effectivement 
à  des  résultats  remarquables  de  sonorité,  mais  que,  d'autre 
part^  eUe  nous  condamnerait  à  bannir  de  l'harmonie  toute 
nne  série  d'accords  indispensables,  qu'elle  fausserait  à  un 
trop  haut  degré.  L'art  de  la  musique  perdrait  ainsi  certaine- 
ment plus  qu'il  ne  gagnerait.  Si  l'harmonium  de  M.  Helm- 
holtz  semble  conduire  à  des  conclusions  tout  opposées  aux 
précédentes,  la  raison  en  est,  je  pense,  très  simple.  H  est 
toujours  facile  à  un  exécutant  babile  de  déguiser  dans  une 
certaine  mesure  les  défectuosités  de  son  instrument;  en  évi- 
tent sur  un  harmonium  accordé  zàmtiMiemmt  les  accords 
douteux  ou  Ihux,  rinstrument  certes  devient  supérieur  à  tout 
autre. 

Que  le  lecteur  me  permette  une  digression  qui,  bien  qu'un 
peu  étendue,  sera  ici  à  sa  place,  et  qui,  loin  de  détourner  son 
attention,  lui  fera  encore  mieux  saisir  l'ensemble  des  vues 
que  je  développe. 

M  Blaserna,  que  je  dte  encore  une  Ibîs,  et  avec  plaisir, 
présente  dans  son  ouvrage  quelques  réflexions  critiques,  très 
justes  à  bien  des  égards,  mais  trop  sévères  en  d'autres  sens, 
quant  à  l'mflnence  qu'exerce  l'usage  général,  disons  Vabus 

du  piano  sur  le  goût  musical,  sur  l'oreille  du  public.  C'est  à 
lesiaoslon  de  cet  instrument  qu'il  attribue,  en  grande  partie 
du  mMns,  l'emploi  exclusif  et  invétéré  de  la  gamme  tempérée  ; 
je  reviendrai  tout  de  suite  sur  ce  côté  de  la  question.  Mais  je 
signale  d'abord  plusieurs  justes  griefii  que  Ton  peut  articuler 
^^ontre  le  piano.  Cet  instrument  est  à  sons  fixes  multiples; 
"  ûe  peut  tenir  indéfiolment  Faoeord;  et,  lorsqu'à  n'est  pas 


44 


BBVUB  D*AL8AGB 


parfailcmoiil  construit,  il  le  perd  fort  vite,  et  exige  les  soius 
d'un  homme  spécial  intelligent. 

Il  suit  de  là  que  les  neuf  dixièmes  des  pianos  sont  habituel* 
lement  disoords,  et  qulls  acclimatent  ainsi  les  oreilles  des 
exécutants  et  des  auditeurs  à  des  accords  qui,  de  fait,  n'ap- 
partiennent plus  à  aucune  gamme.  Il  est  une  autre  défectuo- 
sité dont  les  conséquences  ne  sont  pas  moins  graves.  Bn  dépit 
des  progrès  considérables  qui  ont  été  réalisés  dans  sa  con- 
struction, le  piano  n'en  reste  pas  moins  un  instrument  hsom 
courts;  il  ne  se  prèle  point  à  rexéculion  de  compositions  à 
mouvement  très  lent  et  à  notes  soutenues  et  prolongées;  la 
mémoire  et  la  pensée  de  l'auditeur  sont  obligées  ici  de  sap* 
pléer  sans  cesse  à  ce  qui  manque  à  la  dorée  réelle  des  sons. 
Il  résulte  de  là  que  les  pianistes,  lorsqu'ils  ne  sont  pas  sou- 
mis à  une  discipline  très  sévère,  prennent  Thabitude  d'altérer 
les  mouTements,  de  presser  ou  de  ralentir  à  leur  guise  sous 
prétexte  de  donner  de  l'expression,  mais,  en  réalité,  parce 
qu'ils  ne  savent  plus  obvier  dans  une  certaine  mesure  à  la 
défectuosité  inhérente  à  leur  instrument.  Ce  travers  devient 
surtout  frappant  chez  certains  exécutants,  lorsqu'ils  essaient 
de  rendre  sur  le  piano  des  moroeaoz  écrits  pour  instruments 
à  cordes  on  pour  orchestre;  c'est  ainsi  qn'il  m'est  arrivé 
d'entendre  des  mains  peu  scrupulenses  convertir  le  sublime 
allegretto  de  la  symphonie  en  la  de  Beethoven  en  une  espèce 
de  marche  au  pas  accéléré!  Les  pianistes  les  plus  accomplis 
se  laissent,  en  certains  moments  d'inadvertance,  tomber  dans 
ce  défaut.  Il  me  souvient  d'avoir  assisté  (eu  1842)  à  un  con- 
cert donné  au  Conservatoire  de  Paris  en  mémoire  de  Beetho- 
ven; entre  autres  compositions  du  grand  maître,  le  programme 
annonçait  la  sonate  en  r^-minenr  pour  piano  et  violon,  et  le 
concerto  en  mi-bémol  pour  piano  avec  orchestre.  Dans  le 
premier  aXkgro  de  la  sonate,  Listz,  alors  dans  la  plénitude 
de  son  talent,  se  laissa  aller  à  une  fougue  par  trop  désordon- 
née; Allard,  qui  l'accompagnait,  en  fut  réduit  à  estropier,  j'allais 


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Lk  MU8IQXJB  BT  L'ACOUSTIQUE 


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dire,  à  racler  s»  partie!  Si  je  me  sers  de  qiialiûcations  pa- 
reilles, ce  Il  est  assurément  pas  dans  une  intention  moqueuse; 
ce  violoniste  sympathique,  d'un  talent  si  pur  et  ai  distingué, 
était  la  ?iGtime  innocente  de  l'intempérance  de  son  partner. 
Dans  le  eoncertOt  les  rôles  changèrent  singulièrement  A 
plusieurs  reprises,  je  vis  Listz  se  lever  d*un  air  inspiré,  «gî- 
ter sa  vaste  chevelure,  comme  un  lion  secoue  au  vent  sa  cri- 
nière, essayer  d'entraîner  ou  de  retenir  les  mouvements,  à 
80D  gré  trop  réguliers:  mais  lo  gvdnd  artiste,  qui  alors  diri- 
geait rorchestre,  n'entendait  pas  plaisanterie  en  matière  de 
rhylhme;  la  baguette  de  llabeneck  savait  contenir  les  plus 
impatients,  stimuler  les  plus  indolents;  bientôt  la  sybilie, 
écnmant  sur  son  trépied,  dut  so  calmer,  le  coursier  indomp- 
table sentit  le  firein;  et,  pour  parler  sans  métaphore,  Listz  fit 
ce  qu'il  avait  de  mieux  à  faire:  le  virtuose  sans  égal  se  fit, 
avec  l'orchestre  entier,  l'humble,  mais  inimitable  interprète 
de  l'œuvre  du  génie;  jamais  grande  œuvre  ne  fut  plus  admi- 
rablement rendue  ! 

Soyons  justes  et  vrais.  En  dépit  des  défauts  qu'il  est  per- 
mis (Je  lui  reprocher,  et  dont  quelques-uns  peuvent  être  beau- 
coup atténués  par  le  talent  de  l'exécutant,  le  piano,  bien 
construit,  bien  accordé  et  employé  avec  bon  sens,  conservera 
toqjours  un  beau  rôle,  non  seulement  dans  nos  salons,  mais 
encore  dans  nos  concerts  et  au  milieu  de  l'orchestre;  le  œn- 
certo  de  Beethoven  dont  je  viens  de  parler,  est  une  des  plus 
magnifiques  preuves  qu'on  puisse  fournir  en  faveur  de  cette 
assertion.  Le  piano  possède  d'ailleurs  une  haute  qualité,  j'al- 
lais dire  une  vertu,  qu'on  ne  peut  trop  apprécier  :  il  est  ror- 
chestre du  solitaire,  do  rcxilê!  Et  puis  (une  réflexion  philo- 
sophique n'est  jamais  de  tropj,  qui  est  sans  reproche  en  ce 
monde?  Hommes  ou  chosesl  Les  instruments  à  archet  tiennent 
à  juste  titre  le  premier  rang  dans  notre  musique.  Le  violon 
cependant  a  sur  ht  conscience  un  méfiait  bien  autrement  grave 
qu'aacim  de  eeox  ga*on  peut  reprocher  au  piano;  à  lui  me 


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BBVOB  D'ALSAiOB 


semble  reTenir  la  paternité  incontestable  du  chevrotement, 
des  Bons  tremblés  oa  irénolés;  c^est,  en  tout  cas,  par  les  fio- 
lonîstes  qae  fai  pour  la  première  fois  entendu  pratiquer  cet 
abominable  ornement  Aujourd'hui,  il  n'est  plus  possible  d*en- 
tendre  produire  une  note  pure  et  également  soutenue.  Flûtes, 
bassons,  cors...,  gosiers  liumains  mâles  et  femelles,  tous 
impitoyablement  tremblotent;  l'orgue  môme  a  été  doté  d'un 
registre  de  cheyroteraent  !  Un  programme  perfide  m'annonce- 
t-ii  le  pasHage  d'une  voix  renommée  et  me  promet-il,  par 
exemple,  la  sublime  prière  d'Agathe  : 

Leise,  leise,  fromme  Weisc...  * 
ou  la  plainte  touchante  de  Floreslan  : 

In  des  Lebens  Frùhiiagstagen  ist  das  Gluck  von  mir 

geflohn - 

aussitôt  l'inquiétude  me  saisit  :  Ta-t-elle  on  ya-t-il  chevro- 
ter? Rarement  ma  peur  est  vaine  !  Sur  le  violon,  le  tremblo- 
tement s'obtient  en  (Usant  roukr  vivement  en  avant  et  en 
arrière,  sans  glisser,  le  doigt  qui  appuie  sur  la  corde  ;  il  se 

produit  ainsi  un  trille,  formé,  non  de  tons  ou  de  demi-tons, 
mais  de  quarts,  de  huitièmes  de  tons.  N'étant  pas  chanteur, 
je  ne  saurais  dire  comment  il  s'obtient  avec  la  voix  :  mais  la 
chose  n'eâtpas  diQicile,  à  ce  qu'il  parait.  Violonistes  et  chan- 
teurs (et  orgues  de  Barbarie)  pensent  donner  ainsi  VesDpreS' 
sion.  On  oublie  qu'un  tremblement,  quel  qu'il  soit,  est  en 
définitive  un  symptôme  de  fiiiblesse  :  nerveuse,  musculaire  ou 
morale,  peu  importe.  Dans  la  déclamation  et  dans  la  musique, 
remploi  des  sons  tremblés  ne  peut  être  considéré  que  comme 
un  procédé  artificiel,  que  comme  une  harmonie  iraitative, 
grossière  et  sans  goût,  de  Témotion,  de  la  passion;  il  sert  à 
l'artiste  à  simuler  ce  qui  lui  fait  défaut  et  ce  qu'il  ue  peut 
dès  lors  que  fausser  chez  ses  auditeurs. 
Pour  revenir  à  nos  diverses  espèces  de  gammesje  pense  que 

*  Freischaiz.   »  Fidelio. 


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Lik  MUSIQUB  ET  L'ACOITSTIQUE 


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l'emploi  exclusif  de  la  gamme  tempérée  ne  doit  être  attribué,  ni 
au  piano,  ni  aux  autres  instruments  à  sons  Gxes.  Avec  les 
instruments  à  archet,  l'exécutant  est  absolument  libre  de 
donner  à  chaque  note  le  degré  d*Bcaité  qui  lui  plait;  et  cepen- 
dant il  est  obligé  de  kmpérer  autant  que  cela  a  lien  sur  le 
piano.  Sur  le  tableau  qui  indique  les  nombres  de  Tibratlons 
répondant  à  chaque  note  de  la  gamme  scientifique,  on  voit 
que,  si  le  fa  naturel  est  de  696  vibrations,  le  m/-dièse  n'en 
a  que  679.7  ;  on  voit  aussi  que,  si  la  chanterelle  du  violon  a 
O^.âS  de  longueur,  il  faut,  pour  obtenir  le /a,  placer  le  doigt 
à  O'",3094  de  distance  du  chevalet,  tandis  que,  pour  obtenir 
le  mi-dièse,  il  fout  le  placer  à0",8i68,  c'est-à-dire  le  reculer 
de  0»,0074;  il  est  permis  de  douter  qu*aucun  violoniste  se 
hdsse  jamais  amener  à  foire  une  pareille  différence  entre  fa 
et  mi-dièse.  Toutefois,  sur  ces  instruments,  accordés  tous 
aajonrd*hai  par  quintes  parfaitement  justes  et  impossibles 
dans  n'importe  quelle  espèce  de  ganjme,  le  tempérament 
diffère  nécessairement  un  peu  de  celui  qu'on  est  forcé  d'em- 
ployer sur  les  instrunients  à  sons  fixes;  il  se  fait  en  quelque 
sorte  de  sentimeni;  et,  quelque  singulière  que  puisse  sembler 
eeUe  assertion,  j'igoute  qu'il  varie  continuellement,  et  que, 
rigoureusement  parlant,  le  degré  qa*nn  artiste  habile  donne 
à  une  même  note  dépend  sans  cesse  du  rapport  de  cette  note 
avec  celles  qui  la  précèdent,  raccompagnent  ou  la  suivent 

Notre  gamme  tempérée,  en  un  mot,  ne  constitue  ni  une 
invention,  ni  un  système;  elle  repose,  à  l'insu  même  de  la 
plupart  des  musiciens,  sur  un  fait  physique  et  mathématique, 
auquel  nous  ne  saurions  riea  changer.  Et  telles  sont  les 
vraies  raisons  de  son  emploi  général.  Dès  l'origine  de  l'usage 
des  sept  notes  de  la  gamme  diatonique,  on  a  dd  s'apercevoir, 
non  seulement  dans  les  combinaisons  harmoniques,  mais  même 
dans  les  successions  mélodiques,  qu*en  exagérant  la  justesse 
de  certaines  notes,  on  portait  forcément  préjudice  à  celle 
d'autres  noies.  Voilà  l'énoncé  du  fait  physique.  Sa  raison 


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RBVUB  D'aLSAOB 


mathématique  est  que  les  fractions  qui  représentent  les  rap- 
ports des  vibrations  des  diverses  notes  de  la  gamme  ne  peu- 
vent se  combiner  iadiUéremment  dans  tous  les  ordres,  sans 
donner  lieu  à  de  nouveaux  rapports,  qui  ne  répondent  plus 
à  aucun  accord  juste.  La  science,  qui  nous  a  appris  à  déter- 
miner si  admirablement  les  rapports  nécessaires  des  vibrations 
dans  les  accords,  consonnants  ou  dissonants,  est  obligée,  dans 
la  construction  de  la  gamme,  de  courber  son  exactitude  aux  exi- 
gences de  l'oreille  et  de  l'art;  mais,  et  je  ne  ic  dis  pas  sans  une 
légiliuie  (lerté  comme  physiiien,  c'est  elle  même  qui  nous 
apjirend  clairement  le  pourquoi  de  cette  concession  indispen- 
sable, qui  nous  dit  la  raison  pour  laquelle  nous  ne  pouvons 
accepter  la  gamme  exacte. 

Une  objection  spécieuse  cependant  peut,  semble-t-il,  être 
opposée  i  ce  verdict  de  la  science  contre  elle-même.  Elle  est 
des  plus  intéressantes  à  examiner. 

Les  divers  accords  que  nous  employons  aujourd'hui  n'ont, 
il  s'en  faut,  pas  été  admis  tous  dès  l'origine  dans  l'harmonie; 
les  grands  maîtres  ont  introduit  peu  à  peu  dans  leurs  com- 
positions des  combinaisons  de  sons  réputées  d'abord  par  trop 
dissonantes,  et  la  critique  des  conservateurs  outrés  des 
règles,  disons  la  critique  des  sots,  n*a  jamais  manqué  de  leur 
faire  expier  ces  infractions,  qui  bientôt  pourtant  passaient 
elles-mêmes  à  Tétat  de  régies.  On  pourrait  donc  se  demander 
si  Thabitude  et  Téducation  n'aeelîmateraîent  pas  finalement 
aussi  notre  oreille  à  ces  accords,  prétendus  faux  de  la  gamme 
exacte,  et  si  alors,  outre  le  bénéfice  d'un  ensemble  de  con- 
sonnances  parfaitement  justes,  nous  n'auriofis  pas  celui  d'ac- 
cords d  un  effet  tout  nouveau.  Je  montrerai  bientôt  la  diffé- 
rence mathématique  qui  existe  entre  un  accord  réellement 
&UX  et  un  accord  si  dissonant  qu*on  voudra  d'ailleurs;  mais 
voyons  d*abord  dans  quels  cas,  et  sons  quelles  conditions, 
l'oreille  peut  efiéclivement  M&er  des  suites  de  sons  absolu* 
mentanti-mnsîcales,  et  l^art  en  tirer  même  parti. 


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LA  HDSIQUE  ET  L'aOOUSIIQUE 


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Ceux  de  meslecleors,  pea  nombrenzsansdoutejquiontla 
la  charmante  autobiographie  da  Matou  Hoorr  \  se  rappellent 
un  oonseîi  donné  ans  eompositears  par  ce  génie  précoce,  à  la 
fois  artiste,  sarant  et  philosophe.  «  Nous  entonnâmes  un  duo, 
tiré  d'un  opéra  tout  récent,  qui  nous  réussit  à  merveille,  car 
il  semblait  écrit  exprès  pour  nous.  Les  célestes  roulades  s'é- 
lançaient perlées  de  nos  cœurs,  parce  qu'elles  consistaient 
la  plupart  ni  passages  chromatiques  (j'ai  le  regret  d'avoir 
oublié  le  nom  du  compositeur;  c^était  un  fier  artiste,  à  mon 
sens).  Je  saisis  cette  occasion  pour  faire  observer  que  notre 
espèce  est  essentiellement  chromaUqae,  et  que,  par  suite,  tout 
compositeur  qui  voudra  écrire  pour  nous,  fera  très  bien  d'ar- 
wnger  chromaliquement  ses  mélodies,  et  tout  le  reste,* 
Cbacon  ne  partageait  pas  cette  opinion,  paraît-îi;  car,  tandis 
que  notre  jeune  artiste,  avec  la  tendre  Miesmie,  l'objet  de  sa 
première  flamme,  et  avec  son  ndcle  ami  Mucius,  exécute  un 
xno  en  genre  clh-o:iiatique,  une  tuile  brutale  tombe  aumilien 
d'eux,  accompagnée  d'une  imprécation  terrible  :  Ces  maudits 
chats  se  tairont-iis  ane  fois!  «  0  les  barbares,  dénués  de  tout 
sentiment  de  l'art,  qui  restent  insensibles  aux  plaintes  les 
plus  poignantes  des  ine£hbles  peines  d'amour,  et  qui  ne  rêvent 
que  vengeance,  mort  et  destruction  f .  Telle  est  la  réfle.vion 
méprisante  de  Mourr  à  l'égard  de  noire  espèce  et  de  notre 
sentiment  do  beau. 

Bh  bien!  que  le  lecteur  ne  rie  pas,  Mourr  nous  fait  un  très 
grand  tort,  quand  il  nous  reproche  de  ne  pas  savoir  apprécier 
legenre  chromatique.  Ces  gammes  impossibles  que  pratiquent 
certains  individus  de  l'espèce  féUne,  ces  longues  et  lentes 
traînées  de  sons  qui  passent  par  tous  les  degrés  imaginables 
M  l'échelle  et  qui  nous  paraissent  à  juste  titre  si  horribles 
«ww  les  concerts  de  chats,  nous  les  employons  nous-mêmes, 

j  Lebefis-Aimchien  des  Kalers  Jfwr,  benmsgegeben  von  T.  A.  Hofp- 
NoayeJJe  Séiie  -  ?•  Année  4 


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BBVUB  D'ALBAGE 


et  forcément,  dans  bien  des  cas  ;  noire  oreille  y  semble  accli- 
matée, et  non  seulement  elles  ne  nons  heurtent  pas,  mais 
nons  en  tirons  de  très  twns  effets.  Hais,  est  modus  m  rébus  I 
Je  dis  :  nous  les  employons  foreémmi.  Il  nons  est,  en  effet, 
impossible,  en  chantant,  de  lier  deux  notes,  sans  que  la  voix 
passe  par  tous  les  degrés  intermédiaires;  il  nous  est  Impos- 
sible, sur  les  instruments  à  cordes  et  dans  les  changements 
de  position  de  la  main  gauche,  de  lier  deux  notes,  sans 
passer  aussi  par  tous  les  tons  intermédiaires.  Ët  cependant 
ces  liaisons,  ces  traênées  chromcUiques,  lorsqu'elles  sont  faites 
habilement,  ne  se  perçoiyenf  pas  même  ;  et,  lorsqu'elles  sont 
fiâtes  avec  go&t,  elles  deviennent  un  moyen  puissant  d'ex- 
pression, dont  Fauditeur  ne  devine  pas  Forigine 

Quel  est  donc  le  seeret  de  cette  tolérance  apparente  de  To* 
reille,  de  cette  satisfaction  de  notre  sens  musical  à  l'égard 
d'un  effet  hideux  en  lui-même?  Ce  n'est  assurément  pas  l'ha- 
bitude. Pour  que  le  genre  de  liaison  dont  nous  parlons  soit 
acceptable,  il  faut  que  la  jonction  des  deux  notes  se  fasse 
avec  une  rapidité  sufiSsante  et  sans  trop  d'insistance  ;  il  faut 
surtout  que  la  traînée  commence  et  finisse  par  une  note  juste, 
qui  fuke  oublier  les  sons  Intermédiaires.  Hors  de  là,  la  liai- 
son, si  elle  n*e8t  tout  à  fitlt  intolérable,  est  du  moins  de  mau- 
vais goût.  Soit  dit  en  passant,  les  virtuoses  des  gouttières  ne 
sont  pas  les  seuls  qui  oublient  cette  règle,  que  dicte  la  phy- 
sique, aussi  bien  que  Part.  Lorsque  ces  conditions  sont  rem- 
plies, nous  supportons  au  contraire  la  traînée,  quelque  longue 
qu'elle  soit.  Tous  les  violonistes  connaissent  le  trille  de  May- 
seder  :  il  s'obtient  en  faisant  glisser  nn  doigt  du  haut  en  bas 
d*une  corde,  et  en  frappant  le  trille  avec  le  doigt  suivant 
Pour  que  Toreille  ne  srât  pas  blessée,  il  finit  que  les  batte- 
ments soient  très  rapides  et  que  les  sncoessions  de  secondes 
qu'ils  produisent  soient  justes.  Si  le  violoniste  supprimait  les 
battements,  en  faisant  ainsi  glisser  le  doigt,  il  ne  produirait 
qu'un  alïreux  miaulement. 


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LA  MU8IQUB  BT  L'ACOUSTIQOE 


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Au  fond,  et  en  y  regardant  de  près,  nous  voyons  que  noire 
oreille  n'accepte  nullement  en  elles-mêmes  ces  traînéen  de 
sons  que  Hoffmann  appelait,  par  ironie,  passages  chromatiques. 
Miis  l'artiste,  qoand  il  est  forcé  de  les  employer,  sait  les  mas- 
quer et  les  placer  léllemeiit  à  rtrrière-plaa  que  lear  laideur 
diqiaralt  et  qu'éUes  rehaussent  Teipressloa  des  tons  jastes^ 

Ed  nn  moty  et  quoi  qu'on  en  ait  dit  souTent,  noire  oreille 
peut,  à  la  Térité,  se  blaser  sur  les  consonnances  fausses,  elle 
peal s'y  habituer  à  force  d'en  entendre,  mais  elle  ne  les  accepte 
pas  pour  cela,  et,  par  atamme,  elle  revient  toujours  aux  into- 
nations correctes,  quand  elle  en  a  le  choix.  Si  jamais,  contre 
loate  probabilité,  les  accords  faux  de  la  gamme  scieotifiqae 
deraient  &ire  infasion  en  mosiqae,  oene  serait  que  sons  une 
fimne  artistement  dégnisée,  et  ils  ne  ibraienl,  à  aaean  titre, 
partie  de  l'harmonie  proprement  dite. 

L'élttde  des  diverses  gammes  et  des  aeeords  nous  place, 
comme  le  lecteur  a  pu  le  voir,  en  face  d'une  sorte  dedilemme 
paradoxal.  D'une  part,  notre  oreille  réclame  des  consonnances 
ausâi  justes  que  possible,  et,  d'autre  part,  il  nous  est  physique- 
ment impossible  de  construire  une  gamme  absolument  juste. 
C'est  précisément  ce  dilemme  qu'élude  la  gamme,  non  pas 
tempérée  systématiquement,  comme  celle  que  proposait 
Rameau, mais  tempérée  tnt^ificltveinen^oa  deaentimmi,€imm 
cdle  qu'emploient  les  artistes,  sur  les  instruments  à  cordes, 
on  les  accordeurs  de  bon  sens,  pour  le  piano.  Quelques  per- 
■onncs  ont  touIu  expliquer  on  même  résoudre  le  dilemme 
précédent,  en  disant  que  la  mélodie  et  l'harmonie  sont  deux 
choses  distinctes  dénature,  que,  par  suite,  la  gamme  de  l'une 
ne  peut  convenir  à  l'autre.  Mais  cette  assertion,  outre  qu'elle 
ne  réduit  pas  la  difficulté  pratique  du  problème,  constitue 
bien  certainement  une  erreur  de  physique  et  de  musique.  Il 
est  sans  doute  plus  diiMIe  à  notre  oreille  d  apprécier  la  jus- 
tesse d'une  consonnance,  lorsque  nous  entendons  séparément 
les  tons  qui  la  forment,  que  quand  nous  les  entendons  simnl* 


m 


REVUB  D*AL8AGB 


tanément;  mais  cette  difi^ultô  dérive  d'un  défout  d^exercice 
et  peut  être  vaincue  complètement  ;  elle  n'impliqae,en  aucaiie 
façon,  une  différence  de  nature  entre  la  perception  successive 
et  la  perception  simultanée  des  tons.  Les  sons  qui  se  suivent 

dans  une  mélodie  forment  tout  aussi  bien  entre  eux  des 
accords,  consontiants  ou  dissonants,  que  ceux  que  nous 
entendons  à  la  fois  dans  un  accord  proprement  dit.  C'est  la 
mémoire  correcte  de  c-es  accords,  qui  permet  uniquement  à 
un  chanteur,  par  exemple,  de  chanter  juste  une  mélodie  pri- 
vée temporairement  d'accompagnement  Ck>mme  exemple  entre 
mille  de  ce  genre,  je  cite  le  suave  et  céleste  adieu  de  Lolien- 
grin  au  cygne  '  ;  malheur  au  chanteur  sHl  allait,  tandis  qu*il 
est  abandonné  à  lui-même,  imaginer  une  gamme,  une  tona- 
lité autre  que  celle  que  de  cinq  en  cinq  mesures  vient  lui 
offrir  rorchestre  dans  l'accord  /a-?</-dièse!  Tel  est,  dans  l'er- 
reur dont  je  parle,  le  côté  que  condamne  la  physique  môme. 
Au  point  de  vue  purement  musical,  l'erreur  est  peut-être 
plus  grande  encore,  du  moins  aujourd'hui.  Je  m'explique, 
quant  à  cette  espèce  de  réticence,  à  Taide  d'une  citation,  qui 
sera  saisie  de  tous  mes  lecteurs  s'occupent  un  tant  soit  peu 
sérieusement  de  musique.  Les  quatuors,  pour  instruments  à 
cordes,  de  Haydn,  de  Mozart,  et  d'ailleurs  de  beaucoup  d'au- 
tres compositeurs  plus  modernes,  si  différents  entre  eux,  si 
originaux  qu'ils  puissent  être,  revêtent  cependant  u^énérale- 
ment  une  forme  commune.  Ils  présenteut  une  partie  princi- 
pale (mélodie,  traits,  etc.)  exécutée  par  l'un  des  instruments, 
avec  accompagnement  des  trois  autres.  La  mélodie,  le  chant, 
touten  alternant  souvent  d'un  instrument  à  l'autre,  se  détache 
nettement  de  l'accompagnement  et  de  l'harmonie,  qui  servent 
à  le  faire  ressortir  en  formant,  en  quelque  sorte,  l'arrière- 
plan.  Je  dis  généralement;  il  me  serait  facile  de  citer  ccpea- 

Lohengrin,  opéra  romantique  en  trois  actes,  mosiqae  et  paroles  de 
lUchard  Wagner. 


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LA  MUSIQUfi  ET  L'AGOVSTIQUB  53 

danl  quelques  exceplîofis  remarquables  à  cette  forme  com- 
mune: el  je  me  hAte  de  dircqucii  m'enonçant,  comme  je  viens 
de  le  faire,  ce  n  est  point  une  sorte  de  critiifue  malséante  qae 
je  fais.  Parmi  Jes  œuvres  dont  il  est  question,  il  se  trouve 
des  chefs-d'œuvres  du  genre,  qiiî  resteront  éternellement 
beaux  et  neafs.  Les  premiers  quataors  de  Beethoven,  ceux 
que  l'on  entend  le  plus  fréquemment,  revêtent  aussi  en  partie 
cette  forme,  quoique  avec  de  profondes  modifieitions  déjà;  une 
tendance  nouvelle  s'y  niontn%  on  (iïef.  de  pinson  i-'us  iiiar- 
qaée.  A  partir  du  œizième  qualuor  (/«-mineur),  la  transfor- 
malion  est  coiiii^lèle.  Les  onzième,  douzième,  treizième,  quin- 
zième et  seizième  eoiislituent  de<  créations  à  part  et  une 
musique  nouvelle.  Je  ne  serai  démenti  par  aucun  arUste 
sérieux,  lorsque  je  dirai  que  ces  œuvres  sont  jusqu'ici  sans 
égales;  sur  le  domaine  modeste  de  ce  qu'on  est  convenu  d'ap- 
peler musique  de  chambre,  le  pas  accompli  par  tk^ellioven 
est  aussi  immense,  ce  génie  immortel  s'y  révèle  d'une  manière 
aussi  puissante,  que  sur  le  domaine  de  la  syni|.|inuie.  Dans 
cette  musique  prrandiose.  les  quatre  parties  r,rmen(  un  (oui 
l'idissoiuble  ;  l  'accompaguement,  avec  tout,  l'ensemble  des  effets 
liarraoni(pies.  y  devient  lui-même  un  chant  d'un  caractère  à 
part,  qui  se  fond  dans  la  pensée  principale  et  la  complète. 
Soit  dit  en  passant,  c'est  peut-être  cela,  plus  encore  que  la 
grandeur  même  de  la  pensée,  qui  fait  que  ces  dernières 
œuvres  ne  sont  pas  saisies  de  prime  abord  par  d^^s  intelli- 
gences non  préparées,  et  ce  qui  les  fiit  i.)m;)rei,(l;e  généra- 
lemait  sous  le  titre  de  musique  mmule.  alors  qu'elles  sont 
précisément  tout  le  contraire,  alors  qu'elles  découlent  de 
l'inspiration  la  plus  purel  Quoi  qu'il  en  soit,  il  y  aurait  un 
n  "1  sens  criant  à  voir  encore  ici  dans  la  mélodie  et  l'harmonie 
deux  choses  distinctes  en  nature,  même  au  seul  point  de  vue 
^  la  physique  des  sons. 

6 -A.  HniN. 

(l^  fi»  h  la  pro€haùi9  UvntùonJ. 


DÉPÊCHES  MILITAIRES  INEDITES 

t 

SDR 

LTOYABION  DE  IBH 


VOSGES  ET  ALSACE 


Nani^,  le  9  mars  1815. 

À  Momieur  k  Maréchal  Oudimtf  gmmnmar  générai 
àMei9. 

Honaieiir  le  Maréchal, 


Je  reçois  en  ce  moment,  6  heures  du  matin,  le  rapport  du 
commandant  d'armen  de  Plmlsbourg,  qui  m'annonce  que  les 
deux  bataillons  du  6'  régiment  d'infanterie  légère  sont  partis 
de  cette  place  le  8,  à  deux  heures  de  l'après-midi,  pour  Lons- 
le-Saulnier:  ils  ont  été,  comme  ceux  du  4'  régiment,  com- 
plétés à  500  hommes.  Lear  armement  et  leur  équipement 
sont  bons,  ainsi  que  la  chaussure,  mais  il  leur  manque  160 
habits,  100  vestes,  SOO  pantalons,  100  capotes  et  100  schakos. 
I«  colonel  passe  à  Strasbourg  pour  fiire  Tachât  des  eflétsde 
grand  équipement  et  qu'il  emmènera  à  Beifort  où  il  rejoindra 
son  régiment.  Il  espère  que  dans  huit  jours  les  effets  d'ha- 
billement nécessaires  seront  prêts  et  qu'ils  seront  expédiés 
en  même  temps  que  les  batailloos  à  liOns-le-Saulnier. 


• 


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l'Invasion  bb  1815 


n  est  à  remarquer  que  ce  régiment  et  le  4*  ont  été  obligés 
de  prendre  des  hommes  dans  le  8"  bataillon  pour  compléter 
les  deux  premiers,  de  manière  qa'il  ne  reste  aux  S*'  batail- 
lons et  aox  dépôts  que  des  hommes  rappelés  non  habillés 
(d'autres  attendent  leur  réforme)  et  les  ouvriers. 

. . .  Je  vous  prie  bien,  Monsieur  le  Maréchal,  de  vouloir 
bien  agréer  Fassurance  de  mon  respeet  et  de  mon  parfait 
dévouement 

Le  Lkutenant-ginérai, 
GOMTB  PaGTHQD.' 


Paris,  le  19  mars  isis. 


Général,  je  vois,  par  votre  rapport  du  14,  que  vous  vous 
proposez  de  faire  partir  de  Phalsbourg,  le  17,  et  de  diriger 
sur  Grenoble  le  â*  bataillon  du  6'  régiment  d'infanterie  légère, 
fort  de  600  hommes.  Mais,  d'après  de  nouvelles  dispositions 
prescrites  par  Sa  Majesté,  oe  bataillon,  ainsi  qne  le  4*  batail- 
lon du  même  régiment,  ne  doivent  pas  «joindre  les  denx 
premiers  bataillons  à  Tannée  des  Alpes,  Ils  sont  destinés  à 
se  rendre  à  l'armée  de  la  Moselle. 

Ainsi,  rappelez  ce  bataillon,  si  vous  l'avez  fait  mettre  en 
marche,  et  dirigez-le  sur  Metz,  où  il  recevra  les  ordres  de 
M.  le  Lieutenant-général  Gérard. 
Beoe?e2,  Général,  etc. 

Le  Maréchal  ministre  de  la  Guerre, 

Pringb  d'ëgkhûhl. 


*  Tontes  ces  dépêches  ont  élé  copiées  sur  les  originaax,qui  font  partie 
du  riche  cabinet  de  H.  Dufresne,  de  Metz. 


Ô6  UEVUK  D'âLSÂC£ 


PuLICB 

générale  Nancy,  le  15  mars  18i5. 

Monsieur  le  Gonile, 
J*ai  rhonnenr  de  vous  informer  que  le  sous-préfet  de 
Sarrebourg  vient  de  foire  arrêter  le  nommé  Jean  Perrier, 
eanonnier  au  i*'  régiment  d'artillerie  de  la  mnn'ne,  venant 

de Phaisboiirg  et  se  rendant  à  Moulins,  pour  y  jouir  de  la 
solde  de  retraite.  Celhomme»*est  [)erm'S  do  rrierdauslos  bu- 
reaux même  du  soua-i)réret  :  Vive  i\Lm>)(re/ir  !  Je  suis  soidat  de 
lEmperenr,  et  autres  propos  semblabh.'s.  Jl  a  (Mé  remis  entre 
les  mains  de  la  Gendarmerie,  pour  cMre  conduit  de  Brigade 
en  Brigade  à  Nancy,  où  il  sera  remis  à  vt  Irc  disposition.  J'ai 
cru  devoir  rendre  compte  de  ce  fait  à  Son  Exc.  le  Directeur 
général  de  la  police  du  royaume.  J'aurai  riionticnr  de  vous 
faire  connaître  sa  réponse  aussitôt  qu'elle  me  parviendra. 
Receveis. . . 

le  ^éfet  du  département  de  ta  Ifwrtfte, 
De  Miqub. 

Au  général  Paethod,  e^,  la  ^  1>»  m%  à  Nancy. 

—  L'arrivée  de  Napoléon  à  Paris  exempta  le  Directeur 
général  d'une  réponse  qui  aurait  pu  ne  pas  êu  e  très  agréable 
an  eanonnier  Perrier. 


MlNltTÉRB 

^  ^^'^^  Paris,  le  »  ma»  I8is.t 

Général,  l'inlcnlif)»  de  TEmpcreur  est  que  les  Comman- 
dants militaires  fassent  insUller  les  nouveaux  préfets  nommés 
par  Sa  Majesté  partout  où  elle  a  jugé  à  propos  de  faire  rem- 
placer ceux  qui  avaient  été  mis  à  la  tête  de  l'administration 
par  l'ancien  Gouvernement. 

Donnez  sur  le  champ  les  ordres  nécessaires  aux  {généraux 
commandant  les  départements  qui  coniposcnl  voire  division, 
pour  qu'ils  remplissent,  à  cet  égard,  les  intentions  de  l'Em- 

*  Tontes  les  lettres  datées  de  Paris  émanent  du  Ministère  de  la  guerre. 


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l'invasion  de  itilo 


87  - 


pereur  et  fiissent  même  arrêter  les  anciens  préfets,  s'ils 
trouvaient  quelque  opposition  à  rétablissement  de  ceux  qui 
doivent  les  remplacer. 
Agrées,  Générai,  etc. 

Le  minisire  de  la  Guerre, 
Maréchal  prince  d'ëgkmuul. 


I>iuris,  te     avril  18IS. 

tiéoéral,  Je  tous  prérienKque  TEmpereur  vient  d'ordonner 
la  formation  de  la  4*  Division  de  réserve  de  Cuirassiers. . . 
Le  S*  régiment  de  Cuirassiers,  qui  est  à  Pont* à-Mousson, 

devant  faire  purlie  de  la  3'  Division  de  Réserve,  (jiii  doit  i^e 
réunir  eu  Alsace,  vous  donnerez  l'ordre  à  ce  Régiment  de 
compléter  ses  deux  premiers  escadrons  avec  tous  lesciievaux 
disponibles,  et  vous  les  ferez  mettre  en  marche  à  Tépoque 
fixée  par  l'ordre  de  roule  ci-joint,  pour  se  rendre  à  Strasbourg. 

Je  fOQS  prie,  Général,  de  m'instruire  du  départ  de  ces 
Escadrons  et  de  me  faire  connatti'e  leur  composition  exacte. 

Recevez,  etc. 


Paris,  le  S  avril  181S. 

Monsieur  le  Comte,  J'ai  l'honneur  de  vous  informer  que, 
conformément  aux  intentions  de  r£mpereur,  M.  Mourcet', 
oujor  à  la  suite  du  S6*  de  ligne,  est  nommé  Commandant 
d'armes  à  Pbaisboorg,  en  remplacement  de  M.  le  Colonel 
lUguet  de  Brandon.  Ce  dernier  devra  quitter  cette  place  dans 
lesdooze  heures  de  Tarrivée  de  son  successeur. 

Je  vous  invite  à  veiller  à  Texécution  de  cet  ordre  et  à  m'in- 
formcr  de  l'arrivée  de  M.  Mourcet  à  Phaisbourg.  Cet  officier 
reçoit  l'ordre  de  se  rendre  sur  le  champ  en  po.^te  à  sa  deati- 
nalion.  Je  vous  adresse  ci-juiut  ses  lettres  de  service. 

Recevez. . . 

'  Anriré  le  13  à  Nancy.  Le  23  janvier,  M.  Lomprenr  avait  été  nommé 
adjudant  de  plaoe. 


'  fis 


BEVUE  D'ALSAOB 


Paris,  le  12  avril  1815. 

Général,  J'ai  été  informé  qu'il  se  présentait  sur  les  fron- 
tières beanooup  de  militaires  nés  dans  la  Belgique  on  dans 
les  départements  situés  sur  la  rire  gauehe  du  Rhin,  et  qui 
demandent  à  rentrer  dans  les  Régiments  où  ils  ont  précédem- 
ment servi. 

Il  est  dans  l'intention  de  Sa  Majesté  d'accueillir  les  offres 
de  serrice  de  ces  militaires,  dont  vous  me  ferez  passer  des 
Ëtats  nominatifis,  à  mesure  qu'ils  se  présenteront.  Vous  ferez 
incorporer  de  suite  ceux  qui  y  consentiront,  suivant  Tarme 
dont  ils  font  partie,  dans  les  régiments  employés  sons  vos 
ordres.  Ceux  qui  persisteront  à  vouloir  rejoindre  leurs  anciens 
drapeaux  seront  provisoirement  rois  en  subsistance  dans  ces 
mêmes  corps,  et,  d'après  les  renseignements  que  tous  me 
transmettrez  sur  leur  compte,  j'aviserai  aux  moyens  de  satis- 
faire par  suite  à  leurs  désirs. 

Recevez. . . 

Le  Jliaréchal-dc-camp,  Sccrclairc  génér<Uf 
CÉSAR  m  IjAVILLB. 


l'aris.  le  15  avril  181S. 

Général,  J'ai  l'bonneur  de  vous  prévenir  que  rjSmpereur, 
jugeant  à  propos  d'employer  dans  son  grade  M.  le  lieutenant- 
général  d*Hastrei,  qui  commande  le  département  des  Vosges, 
m'a  fait  connaître  ses  intentions,  pour  que  ce  général  se  ren- 
dît de  suite  à  Paris.  Il  y  recevra  de  nouveaux  ordres. 

Sa  Majesté  a  désigné,  pour  remplacer  le  général  d'Hastrel, 
M.  le  Maréclial-de-camp  Raoul  qu  Elle  a  admis  à  reprendre 
du  service.  Le  général  Raoul  reçoit  Tordre  de  se  rendre  sur 
le  champ  en  poste  à  Epinal. 

Vous  trouverez  ci-joint  ses  lettres  de  service. 

Recevez. . . 


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L'nvAnoN  08  1815 


80 


Paris,  avril  1813  (Expédié  le  39). 

Général,  J'ai  donné  des  ordres  à  M.  le  Directeur  d  artillerie 
de  Strasbourg  pour  faire  expédier  sur  Yincennes  la  quantité 
de  119  Toitures  d'artillerie,  par  oooTd  de  25  Toitura,  qai 
devront  partir  chaqae  jour  et  qui  seront  attelées  par  des  che- 
nuz  de  réquisition  de  gtte  en  gîte  d*étape.  Les  conTois  devront 
être  pourvus  de  relais. . .  à  Sarreboarg,  du  8  an  9  mai,  etc. 
J'ai  donné  des  ordres  à  MM.  les  Préfets  et  soas-Préfels  pour 
faire  fournir  exactement  des  chevaux  de  réquisition. 

Je  vous  recommande,  général,  de  vous  assurer  de  Texécu- 
tion  de  ces  dispositions,  de  lever  toutes  les  difficultés  qui 
pourraient  se  rencontrer  dans  l'exécution  de  ces  transports  et 
d'activer  par  tous  les  moyens  le  départ  et  la  marche  de  ces 
convois  dans  Tétendae  de  votre  commandement. 

Ges  voitures  de  campagne  sont  destinées  à  former  an  équi- 
page d'artillerie  de  réserve  à  Yincennes,  et  il  est  très  impor- 
tant qu'elles  y  soient  aux  époques  que  j*ai  fixées. 

Recevez. . . 


Paris»  te  7  mal  1815. 

Général,  vous  trouverez  ci-joint  S  exemplaires  d'une  cir- 
culaire que  j'adresse  aux  Généraux  et  officiers  chargés  du 
commandement  des  Bataillons  d'élite,  sur  les  soins  et  les 
égards  dont  les  gardes  nationaux  doivent  être  l'objet 

Je  vous  invite  à  secofider  les  intentions  exprimées  dans 
cette  circulaire;  ce  sont  celles  de  Sa  Majesté. 

Veuillez  bien  m'accuser  réception  de  cette  lettre. 

Agréez 


.60 


WPnm  D*ALSikOB 


des  Corps  francs  Paris,  le  3  jain  1815. 

Le  Général  Thiry,  mon  clier  Général,  conlinue  à  se  plaindre 
de  ce  que  le  colonel  Viriot,  recrulant  pour  son  propre  loniple, 
lui  Ole  les  moyens  de  recruter  pour  le  sien,  que  cela  con- 
trarie le  but  de  ses  opérations,  qu'il  en  résulte  des  scliii$mes 
individuels»  etc. 

Je  ne  conçois  pas  que  le  générât  Thiry  \  ayant  lecoromau- 
dément  supérieur  de  tous  les  corps  francs,  puisse  avoir  intérêt 
à  ce  que  l'un  recrute  de  préférence  à  Tautre.  Ces  altercations 
doivent  nuire  au  service  de  l'Empereur  et  jo  vous  invite  à 
prendre  des  mesures  pour  les  faire  cesser. 

Je  vous  répète  que  le  général  ïliiry  a  le  roinniandenient 
supérieur  sur  tous  les  corps  francs,  mais  ([uc  les  détails  de 
recrutement  et  d'armement  regardent  les  chefs. 

D  après  la  demande  du  général  Tliiry,  vous  pouvez  mettre 
à  sa  disposition  deux  ou  trois  milliers  de  pondre,  pour  être 
mis  dans  des  dépôts  secrets,  nuis  il  faut  Téconomiser.' 

Quant  à  la  demande  que  foit  le  général  Thiry  de  faire 
payer  son  aide-de-camp  comme  Chef  d'escadron  ,  je  la  lui 
accorderai  aussitôt  que  j'aurai  un  étal  de  situation,  qui  me 
prouve  qu'il  a  réussi  à  lever  un  corps  franc. 

Recevez. . . 


Parts,  le  5  Join  IStS. 

Général,  Dans  les  deux  lettres  que  vous  m'avez  écrites  le 
28  et  le  26  mai.  vous  demandez  qu'il  soit  envoyé  à  Phals- 
bourg  des  fusils  pour  l'armemcnl  des  gardes  nationales. 

•l'ai  riioiineurde  vous  prévenir  que  le  Dit eclcur  d'artillerie 
de  Strasbourg  a  reçu  l'ordre  d'en  envoyer  1600  dans  celte 
place.  Ckit  ordre  lui  a  été  réitéré  le  26  mai. 

ReceTes. . . 

'  Nommé  io  1  niai. 

'  Ecrit  de  suite  au  Directeur  do  1  artillerie  à  Metz. 


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l'invasion  db  1H15 


Paris,  Ii<  7  juin  4815. 

Général,  je  vous  préviens  que  je  fais  diriger  de  Sarrelouis 
sur  Toul  par  relais  le  14-  B  »  de  la  Moselle. 

Ce  Bataillon  compte  déjà  un  assez  grand  nombre  de  déser- 
teurs. Vous  Toudrez  bien  donner  des  ordres  pour  que,  da 
moment  de  son  eiilrée  dans  votre  division,  il  soit  surveillé 
jasqu*ison  arrivée  à  Toul,  où  il  tiendra  garnison. 

Recevez. . . 


PoBcfmifiiaire  ï**^»  ^  '  i»*»  ««•. 

Général,  j'ai  l'honneur  de  voas  adresser  les  signaiemens 
de  plusieurs  émissaires  du  Comte  de  Lille,  qui  doivent  se 
rendre  en  France,  soit  pour  y  fomenter  des  troubles,  soit  pour 
fiiire  santer  la  poudrière  de  Besançon. 

On  n*apa  savoir  s*il  était  question  des  magasins  à  pondre 
de  la  place  ou  de  la  manufacture  qui  est  près  de  cette  ville; 
mais  il  paraît  qu'un  système  généralement  adopté  par  les 
Iransl'iiges  françois  est  de  l'aire  sauter,  dans  toutes  les  places 
de  la  Franco,  les  magasins  à  poudre,  ainsi  qae  les  manafac- 
tures  où  on  la  fabrique. 

Je  vous  prie  d'envoyer  ces  signaiemens  aux  Commandants 
des  places  de  votre  Division,  en  leur  ordonnant  de  foire  sur- 
veiller, avec  le  plus  grand  soin,  les  personnes  qui  se  rendront 
dans  ces  places,  et  de  faire  arrêter  ceux  des  émissaires  du 
Comte  de  Lille  qui  pourraient  s'y  présenter. 

Je  vous  prie  aussi  de  ni'accuser  réception  de  cette  lettre 
et  de  m'informer  du  ré.sultat  de  votre  vigilance. 

Recevez. . . 

Le  Conseiller  (i  l An f,  Secn'laire,  générait 

B""  Marchant. 


62 


BRVDB  D'AUMOB 


Ministère 

DE 

LA  ougaas 

Signahmem  âê  phulmn  Bminakreê  du  Qomk  ék  UBê 

N"*  5.  Signalement  du  Hochard,  qui  était  mai  des  logis 
dans  les  dragons  de  la  garde  impériale,  et  est  parti  avec  la 
maison  du  roi  et  est  passé  adjudant  dans  le  dépôt  d»  cavalerie 
démoiité,  qui  est  à  Hoestach.  IL  est  ateacieo,  âgé  de  S8  à  84 
ans,  taille  de  8  pieds  6  poaces,  cheveux  blondB-rooz,  barlie 
idm^  IhtToris  ufem,  soardle  blonds,  yeaz  bleue,  nez  moyen, 
boacbe  grande,  ayant  des  moustaches  rousses,  figure  pleine, 
accent  un  peu  allemand. 

N^.  Cet  individu  est  un  émiesaire  envoyé  en  France  par 
le  duc  de  Berry  et  autres.  On  a  leeonnu  quil  était  émissaire 
par  la  liste  trouvée  ches  le  Comte  de  Tragof,  chef  d'Etat*nugor 
du  due  de  Berry  et  du  duc  de  Rochecbouart,  où  il  était  dit 
qu'il  était  envoyé  en  mission. 


Paris,  le  11  Jain  1815. 

Général,  je  vous  adresse  d-'ynni  une  Lettre  pour  M.  le  M»' 
de  Camp  Gassagne  \  auquel  je  donne  Tordre  de  se  rendre  en 
poste  à  Philippeville 

Veuilles  bien  la  ftire  porter  par  ordonnance  extraordi- 
naire, afin  que  Tarrivée  du  général  Gassagne  n'éprouve  aucun 
retard. 

Receves. . . 


*  Le  général  baron  Pierre  Cassagne,  qui  défendit  le  mieux  qu'il  pût, 
«m  1814,  le  département  des  Vosges,  était  né  à  Toulouse,  en  1763.  Il 
monrot  le  se  novembre  1833.  C*éteit  on  brave  génénl  et  va  bon  tdmi- 
nistratenr.  Ses  actes  le  prouvent  II  s'était  flié  à  Naney. 

J'ai  public  l'année  dernière,  à  Epinal,  ses  dépdehes  snr  Tlnvasion 
dans  les  Vosges  (Mim.  de  ia  Socm  d'émulatMm,J 


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l'invasion  de  181Ô 


6^ 


Paris,  le  13  jotn  ttts. 

Général,  j'ai  l'honneur  de  vous  informer  que,  conformé- 
ment aux  ordres  de  l'Empereur,  M.  le  MarécliaUde-camp  Raoul, 
qui  commande  en  ce  moment  le  département  des  Vosges, 
reçoit  l'ordre  de  se  rendre  sur  le  champ  à  Metz,  pour  être  à 
la  disposition  de  M.  le  Lieutenant-général  Comte  fielliard,  qoi 
poarToira  à  son  remplacement 

Receves... 


AimtLBRIB  ^^^^     j^j^jjj  jgjç 

Général,  J'ai  ràooneur  de  todb  préTenir,en  réponse  à  votre 
lettre  du  10  de  ce  mois,  qu'il  n'existe  plus  dans  les  arsenaux 
de  France  aucune  pièce  à  la  Rostaing,  et  qu'ainsi,  celles  que 
que  TOUS  demandiez  pour  Ja  défense  des  Vosges  ne  peuvent 
TOUS  être  envoyées. 

Les  canons  de  4  de  campagne  peuTent  très  bien  y  suppléer 
dans  presque  toutes  les  circonstances  et  les  remplacent  aTun- 
tagensement;  rapproTisionnement  de  ces  derniers  n*est  que 
tfnn  seul  caisson  par  pièce,  qui  doit  suffire  en  ce  moment 
pour  le  serTice  auquel  est  destinée  l'artillerie  qui  vous  a  été 
envoyée;  les  places  qui  sont  à  proximité  des  opérations  que 
^  vous  trouverez  dans  le  cas  d'exécuter  pourvoiront  au 
remplacement  des  munitions  que  vous  coosommeriez,  mais 
saus  augmenter  le  nombre  de  vos  caissons. 


Par  orèn  du  Jftntfdie, 
B*"Btain. 


Paris,  le  47  juin  1815. 

Monsieur  le  Lieutenant-Général,  fai  reçu  vos  deux  lettres 
du  9  juin  courant  relatives,  tant  au  dénuement  des  moyens 
pécuniaires  où  le  Munitionnaire  général  de  vivres  laisse  le 
garde-magasin  des  vivres  d'Ëpinal  qu'à  la  nécessité  d'établir, 


BBVmE  d'alsaob 


indépendaimnent  du  magadn  d*ËpiDal,  qui  est  le  seul  qull 
y  ait  dana  les  Vosges»  trois  aatres  magasins  de  vivres  et  four- 
rages à  Saint-Dié,  La  Bresse  et  Saint-Hanrice. 

Je  vous  préviens  que  je  donne  l'ordre  au  Munitionnaire 
générai  des  vivres,  non  sealcmeot  d'organiser  de  suite*  pour 
les  7i?reti  et  pour  les  fourrages^dans  les  trois  places  que  vous 
m'avez  indiquées,  les  services  temporaires  pour  assurer  la 
Bubsistanee  des  troupes  qui  seront  employées  à  la  défense 
des  points  fortifiés  du  département  des  Vosges,  mais  encore 
de  procurer,  tant  aux  préposés  qu'il  chargera  de  ces  servicM 
temporaires  qu'an  garde- magasin  des  vivres  d'Epi nal.  les 
moyens  en  numéraire  effeclif  proportiouné  à  l'importance  de 
leurs  services  effectifs. 

Je  vous  prie  de  me  fiiire  connaître  les  mesures  qui  auront 
été  prises  à  cet  égard. 
Receves. . . 


Colmar,  le  f  »  Juin  1815. 

Monsieur  le  Général, 

La  division  de  réserve  de  Garde  nationale  de  Nancy,  que 
le  Ministre  m*avait  annoncé  devoir  se  porter  sur  Epi  nal  et 
Saint-Dié  pour  la  défense  des  Vosges,  n'arrivant  pas,  il 
pourrait  arriver  qu'une  partie  des  gardes  nationales  sous 
mes  ordres  fût  obli<;ée  de  garnir  et  de  défendre  les  ouvrages 
conslruits  près  de  la  crête  des  montagnes,  où  il  n'y  a  abso- 
lument aucune  ressource  pour  les  subsistances.  Dans  ce  cas, 
il  serait  nécessaire  que  les  vivres  soient  assurés  sur  l'autre 
revers  à  S^-Dié,  Bpinal  et  Remiremont  Je  viens  donc  vous 
prier  de  donner  vos  ordres  pour  que  radministration  se  mette 
en  mesure  k  cet  égard. 

Les  moyens  de  défense  se  multiplient  chaque  jour  ici  et 
TAlsace  est  en  bonne  position,  il  n'est  pas  probable  que  l'en- 
nemi puisse  forcer  les  Vosges,  mais  je  ne  sais  comment  est 


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L  INVASION  DE  1615 


66 


gardée  k  frontière  de  la  Lorraine  allemande.  S11  survenait 

quelqu'événement  dans  celte  partie,  je  vous  serais  très  recon- 
naissant de  m  ea  informer. 
Agréez. . . 

Le  Lieulenunt-Général  commandant  les  gardes  nationales 
de  la  5"  m% 

HOUTOB.' 


Ueenoiament  opéré  à  Fhalsbour^  des  hommes  de  la  garde  nationale 
levés  spontanément,  en  avril  1815,  dans  les  départements  de  la 
Heurthe  et  des  Vosges,  opéré  en  vertu  des  ordres  de  S.  £z>  le 
ICinistre  de  la  guerre,  en  date  du  25  juillet. 


S 

□ 
6) 
O 


a 


CORPS 


(BtlalDons) 


9' 

[(d»  la  Marthe) 


5" 


Août  \  (des  Voigti) 


(de  b  Mearlbe) 


Totaux.. 


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•2 
3 


3  '19 


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10 


10 


12 


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23  4 


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228 


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333 


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)>  1237 


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529 


403 


545 


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•7.  6 
s 


197 


320 


13  1477  517 


348  41 


590 


362 


1300  91 


50 


H 

a. 

S 

Cf 


■A  e 
si 


402 


304 


394 


1190 


Certifié  à  Nancy,  le     août  1 8 1 5. 

U  I^rff^  et.  la  4*  Dit?,  m*. 

*  n  avait  été  désigné  par  le  roi  pour  inspeeter,  m  1815,  le  régiment 

de  Monsieur.  4«  de  li^^nc,  à  Nancy,  et  de  Berri,  e* léger,  à  Phaisbourg.  Son 
adjoint  était  le  Marécluil-de-camp  haron  Porson.  Le  comte  Hourcier  (de 
la  Petite-Pierre)  divait  in^[»ecter  le  5"  cuirassier<i  à  Poiit-'i-Miusson,  le 
10»  dragons  à  Toul,  los  dragons  de  ilerri  (G")  à  Nancy  el  ceux,  de  âlon- 
•i«ir(4*)àE|nnal. 

.  Rm«Il«  Steto.  >  r*  Année.  5 


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68 


BBVUB  D'AIS&CB 


Epinal,  le  14  oclobro  1815- 

Monsieur  le  Comte, 

Malgré  que  je  ii*ai  pas  à  me  plaindre  de  Messieurs  les 
Bavarois,  je  ne  trouve  pas  qu'ils  aient  mis  de  Teau  dans  leur 

vin,  puisqu  ils  ne  veulent  pas  encore  souffrir  que  je  com- 
mence rorganisation  des  compaiiriies  provisoires.  Ils  parlent 
de  leur  départ,  mais  n'en  disent  pas  Tépoque,  qui  ne  me  paraît 
pas  cependant  éloigné.  Je  fais  des  vœux  bien  ardents  pour 
être  bientôt  débarassé  d'eux  et  pouvoir  agir  sans  contrainte. 

Le  gM  d'Hastrel  ne  m*a  pas  encore  répondu,  f  ai  eu  l'hon- 
neur, mon  Général,  de  lui  parler  de  votre  désir,  j'en  ai  éga- 
lement fait  pari  à  M.  le  duc  de  Feltre.  Comme  il  paraît  qu'il 
nous  faut  de  nouvelles  lellres  de  service,  je  vais  écrire  à  ce 
sujet  au  Ministre. . . 

J'ai  riionneur  d'être. . . 

Le  MaréehaMe'eampf 
MANDimLLB.* 

kM,k  Um^.'ff^  ViUaie,  à  Nancy. 

'  Ami  du  Maréchal  Clarcke,  le  général  do  Mandevillc  naquit  ;'i  Avesne 
en  1780,  et  mourut  à  Saverne  en  1850.  11  est  enterré  prés  de  son  ami  à 
Neuwillor. 

—Le  baron  de  ZoUer,  K-g^  bavarois,  commandait  dans  les 
Vosges. 


lIlNlSTiHB 
DB 

u'GORRRB  Paris,  le  19  décembre  1813. 

Monsieur,  J'ai  rhonneur  de  vous  prévenir  qu'environ  6000 
hommes  de  troupes,  formant  le  contingent  de  la  Saxe  qui 
doit  faire  partie  de  Fermée  d'occupation,  marchant  en  deux 
divisions,  partiront  de  S"=-Marie-aux-Mines,  les  19  et  21  dé- 
cembre, et  iront  loger  à  ; 


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L'WyASIDN  DE  1815 


«7 


!•  (li^^s^on  r  division 

S.  Dié    19  2^ 

Séjour   20  2â 

Baccarat   21  33 

LunéFiile   22  24 

Nancy   2s  28 

Séjour   24  26 

Tonl...   25  27décembre 


D'où  ils  se  rendront  à  Void. 

Je  vous  prie,  MonFîeur.  de  veiller  à  ce  que  toutes  les 

mesures  nécessaires  soient  faites  pour  assurer  leg  différens 

services  pendant  la  marche  des  troupes  et  de  m'informer  de 
fiOQ  passage. 

J'ai  l'honneur. . . 

Le  duo  db  Feltrb. 


Colmar,  le  «  nwn  MU. 

A  Monsieur  le  CmU  de  Casteja,  préfet  du  dépati^.  du 

Monsieur  le  Comte, 
Je  Tiens  de  receroir  votre  lettre  du  28  février,  par  laquéUe 
vous  me  oommuniquez  que  les  nommés  Plisson  et  Harmand, 
prévenus  d'însulles  fiiites  à  des  soldats  autrichiens  sur  les 
Jww  de  Belfort,  furent  arrêtés  et  mis  à  la  disposition  du 
Procnreur  du  Roy. 

Envi3ag3ant  l'incondiiite  de  ces  inculpés  comme  uneétour- 
dci  ie  de  jeunes  gens  qui,  d'après  la  déposition  des  militaires, 
a  été  redressée  sur  le  champ  par  les  autorités  de  Bellbrt, 
j  ose  vous  prier.  Monsieur  le  Comte,  de  ne  plus  fàire  procéder 
contre  eux,  qui  auront  reconnu  leurs  torts  par  Tarrestation 


es  BETOB  D'ALSAOB 

quïls  ont  subie  et  dont  rextraragaDce  paroit  suffisamment 
corrigée  par  la  loi. 
.Agréez  Tassurance  de  ma  considération  la  plus  distinguée. 

JU  Général  m  eheft 
Frihont. 

En  marge:  Remercie?^  le  g''\  r/iais  exiger  que  justice  soit 
faite.  Envoyé  le  5  mars  1816.  N"  1725. 


—  Le  lieutenant  au  8*  bataillon  de  cbasseius  Jos.  Sehôn- 
schutB  a  profité  des  presses  lithographiques  de  6.  Engelmann, 
à  Mulhouse,  pour  reproduire  les  traits  du  général  Frimont 
et  ceux  du  lieutenant-général  baron  Lederer  et  du  colonel 

de  Wiland  (Grand  iu-fo!io).  Le  baron  de  Frimont  est  repré- 
senté couvert  de  dccoralions  et  en  tenue  de  colonel  du  9*  régi- 
ment des  Hussards  autrichiens.  Derrière  lui,  on  voit  ses  esca- 
drons en  bataille  dans  la  plaine  de  Cîolmar  que  dominent  les 
hauteurs  voisines  des  Trois-Ëpis. 

Ces  lithographies  assez  rares  sont  comprises  dans  les  pre- 
miers essais  d*Engelmann. 

A.  BatroiT. 


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L'INSTRUCTION  OBLIGATOIRE 

DAMS  LE 

COMTÉ  DE  RIBAUPIERRE 

AYANT  LA  RÉVOLUTION 


Usdeuxpièces  qtd  suivent,  extrait  des  archives  de  Scdnte- 
Marie^iuaf-Mines»  eôté  d'Alsace,  nous  paraissent  mériter 
^étre  connue  dm  pub&c. 


1789.  Chnad  Oonsistoire 

Monsieur  Vernet,  pasteur  de  celte  Eglise,  s'élant  plaint 
plusieurs  fois  de  la  négligence  des  pères  et  mères  de  celle 
Eglise  à  envoïer  leurs  enfana  aux  écoles  et  instructions 
publiques,  mais  sans  fruit;  pour  remédier  à  ce  désordre,  le 
grand  Gousistoire  a  été  assemblé  le  16*  aoiist  (789,  daus  lequel 
il  a  été  résolu  par  l^unaniHiité  des  suffrages  des  Pèrts  et  Ghefe 
de  ftmille,  qui  se  sont  même  engagés  par  leur  signature  à 
ce  qui  suit,  saToir  : 

1*  d*en?oïer  leurs  enfans  aux  écoles  puMiques,  à  peine, 
en  y  manquant,  de  païer  le  maître  d  école  ni  plus  ni  moins, 
et  dêlre  contraints  au  païenieiil  de  l'écolage  en  cas  de  refus; 

'2'  de  donner  à  notre  dit  Pasteur  un  témoignage; 

3*  de  consentir  que  les  danses  et  les  jeux  seront  oéiTendns 
les  jours  de  Dimanche,  sous  peine  au  délinquant  de  suspen- 
sion de  la  S**  Gène  au  troisième  aTertlssement;  que  ceux  qui 
Tentent  être  dispensés  d'aller  à  fiehery  soient  tenus  d'arertir 


70 


REVUE  D'ALS/kOB 


FAncien  du  quartier  une  fois  pour  toutes  des  raisons  qui  les 
Cû  empêchent;  que  ceux  des  rillages  d  Echery,  de  la  Petite 
Liep?re,  Biaise  et  Fertruy  seront  tenus  de  ûdre  la  môme 
chose  par  rapport  aaz  senrices  de  S*"  Marie  ;  que  persoime  ne 
sera  dispensé  de  s'approcher  de  la  S**  Gène  sans  marque, 
excepté  ceux  qui  sont  en  service  ;  que  tous  ceux  qui  crient 
contre  le  ministre,  au  lien  de  venir  lui  représenter  respec- 
tueusement leurs  raisons,  seront  obligés  de  venir  lui  deman- 
der pardon  de  leur  insolence;  que  tout  mcubrede  la  commu- 
nauté françoise  sera  authorisé  à  reprendre  tout  enfant  qu'il 
trouvera  en  rtle  parlant  allemand  avec  un  autre  de  la  même 
cmnmuniun. 

1789.  Bftgleinsnt  cenoenaiit  l€s  éecdss 

Le  11*  octobre  1739  a  été  lu  et  approuvé  en  grand  Con- 
siste^ assemblé  à  Marie  le  Règlement  suivant^  concernant 
les  Ecoles,  qui  regarde  les  Pères  et  Mères,  les  Maîtres  d'Ecoles, 
les  Enfans  et  le  vénérable  Consistoire. 

BmxAr  de»  Pères  et  Mères  à  ed  égard: 

1*  Les  Pères  et  Mères  envoleront  leurs  Enfims  aux  Ecoles 
publiques  pour  y  être  instruits  et  élevés  en  la  discipline  du 
Seigneur  et  cela  depuis  rage  de  six  ans  pour  les  lieux  où 
résident  les  miiîtres  d'Ecole  et  de  diîc  ans  pour  les  villages, 
et  s'ils  ne  les  envoient  pas,  ils  seront  obligés  de  payer  les 
Maîtres  d'Ecole  ni  plus  ni  moins  que  s'ils  envoïaient  leurs 
enfans  à  l'école,  et  celte  obligation  commencera  dès  que  leurs 
enfens  auront  atteint  Tftge  marqué  ci-dessus  Jusqu'à  ce  que 
alantété  examinés  par  le  Pasteur,  ils  auront  été  sufiBsamment 
instruits.  Les  cas  de  maladie,  ou  autres  semblables,  sont  id 
exceptés. 

2°  Quand  un  Père  ou  une  Mère  voudra  en  voie  r  son  enfant 
à  l'école,  lui  ou  elle  l'amènera  premièrement  au  Pasteur 


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INSTRUCTION  OBLIGATOIRE  ÙK  RIBAUPIERRE 


71 


qui  l'iosérera  dans  un  livre  et  le  recommandera  au  maître 

d'école. 

S"  L'enfant,  une  fois  introduit  dans  les  écoles,  ne  pourra 
plus  en  être  retiré  ni  même  s'en  absenter  une  semaine 
entière  sans  permission  du  Pasteur,  mais  continuera  d'y  ailer 
jusqu'à  ce  qull  sache  lire  coulamment,  écrire  passablement, 
et  répondre  d*ane  manière  satlsfiiisante  aux  questions  qui 
lai  seront  faites  sur  la  Religion. 

4*  Quoiqu'il  serait  bon  qne  les  filles  sussent  aussi  écrire, 
cependant  ou  ne  l'exige  pas  absolument. 

o'  Quand  on  aura  quelque  plainte  à  faire  contre  les  maîtres 
d'école,  on  s'adressera  à  l'Ancien  da  quartier,  qui  en  fera 
son  rapport  au  Consistoire. 

Devoir  des  maîtres  d  Ecole  : 

Les  Maîtres  d*EcoIe  vaqueront  eux-mêmes  à  llnstmc- 
tloo  de  la  jeunesse  confiée  à  leurs  soins,  sans  pouvoir  se 
décharger  de  ce  soin  sur  qui  que  ce  soit,  sans  permission 
expresse  de  TAncien  du  quartier,  (}ui  ne  la  leur  accordera 
que  dans  la  cas  d'une  absolue  nécessité. 

2"  I/Ecole  se  fera  en  langue  française  sans  qu'il  suit  eu 
ancune  façon  permis  d  y  parler  allemand,  pas  même  sous 
prêt,  xte  d  interprêter  aux  enfans  ce  qu'iLn  n'auront  pas  com- 
pris; oii  ne  s'y  servira  point  non  plus  de  livres  allemans  ni 
moitié  allemand  pendant  les  heures  destinées  k  l*Ecole. 

S*  Les  étrangers  et  ceux  qui  ne  sont  point  de  la  Commu- 
nion françoise  pourront  fréquenter  nos  assemblées  en  s  as- 
sujettissant aux  Loix  qui  y  seront  observées  ot  en  priant 
l'Ecolage  :  permis  néanmoins  aux  Régents  quand  TEcolesera 
finie  de  disposer  de  leur  tems,  comme  il  leur  plaira. 

^'  Afin  que  [qs  maîtres  d'Ecole  puissent  d  autant  mieux 
vaquer  à  Tinstruction  de  la  jeunesse,  et  que  tes  enfans  soient 
plus  atteatiiîi  et  puissent  mieux  profiter  des  leçons  qu*on  leur 
fera,  on  n'exercera  pendant  l'Ecole  dans  le  lieu  où.  les  enfans 


72 


BBVOB  D'ALSACB 


seront  aBsemblés  aacnn  métier  qui  fasse  da  brait,  et  on  fera 
en  aorte  qa*il  y  ait  auffisamment  place  pour  les  Ecoliers  en 
ôtant  tout  métier  ou  meuble  qui  pourra  embarasser  la 
chambre  où  se  tiendra  TEcole. 

5*  Les  mattres  d'Eeole  tiendront  régulièrement  Kcole  deux 
fois  par  jour,  exceptés  le  jeudi  et  le  samedi  jours  auxquels 
ils  ne  la  tiendront  qu'une  fois;  sans  pouvoir  y  manquer  sau3 
permission  du  Pasteur. 

Q"  Lorsqu'il  y  aura  quelque  faite  dans  la  semaine,  on  tien- 
dra deux  Ecoles  le  jeudy. 

7*  Chaque  Ecole  sera  de  deux  heures  Thyrer,  safoir,  depuis 
la  Toussaint  jusqu'à  Pasque;  elle  commencera  à  huit  heures 
pour  le  matin  et  finira  à  dix;  le  soir  on  y  entrera  à  midi  et 
on  en  sortira  à  trois  heures  :  l'été,  savoir  depuis  Pasque 
jusqu'à  la  Toussaint  on  y  entrera  à  sept  heures  pour  le 
matin  et  on  en  sortira  à  neuf;  le  soir  l'Ecole  commencera 
aussi  à  midi  et  finira  à  trois  heures. 

8°  Les  maîtres  d'Ecole  auront  soin  d'entretenir  parmi  leurs 
écoliers,  le  bon  ordre,  la  paix  et  la  tranquillité;  pour  cet  efEét 
il  pourra  chfttier  avec  k  Terge  seulement,  sans  que  père  ni 
mère  puissent  s*en  formaliser,  tout  enfant  qu'il  appercem 
manquer  à  son  devoir  soit  en  badinant  avec  ses  voisins,  soit 
en  les  interrompant  soit  encore  en  ne  faisant  pas  ce  qui  lui 
aura  été  prescrit. 

9"  Les  enfans^quî  dans  l'Ecole'ou  hors  de  TEcole  auront 
été  surpris  à  jurer,  se  battre,  manquer  de  respect  à  qui  que 
ce  soit,  ou  parler  allemand  avec  d'autres  de  la  même  commu- 
nion en  seront  châtiés  à  proportion  de  leur  fiiute. 

lO"  Afin  que  le  maître  d'Ecole  soit  d'autant  mieux  informé 
de  la  conduite  des  enfiins  qui  lui  auront  été  confiés,  il  ehoi- 
rira  parmi  eux  un  Ecolier  sage  et  diligent  qui  observera  les 
fautes  de  ses  camarades  et  lui  en  fera  le  rapport. 

li*  L'Ecole  commencera  aux  heures  susdittes  par  l'invoca- 
tion du  Nom  de  Dieu  ;  pour  cet  effet  un  des  enfans  récitera 


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mSTBnOnON  OBLIfiATOIBB  DB  lUBAOPIERBE  73 


i  genoux  tes  autres  étant  debout  une  courte  prière  compo- 
sée à  ce  siqet;  oe  qui  étant  &it,  chaque  enfant  reprendra  sa 
pitoe  :  et  le  maître  d'Ecole  leur  prescrira  à  chacun  une  tftche 
silon  leur  portée,  et  H  prendra  garde  tantôt  à  Tan  tantôt  à 
l'autre  pour  voir  de  quelle  manière  chacun  8*acqnitte  de 
son  devoir. 

15°  La  première  heure  de  l'Ecole  sera  employée  à  faire 
lire  tous  les  écoliers  et  à  faire  épeier  ceux  d  entre  eux  qui 
ne  le  sauront  encore  point;  la  demie  heure  suivante  à  visiter 
les  eiemples  de  ceux  qui  apprennent  à  écrire;  et  le  reste  à 
fiaire  i^éter  la  section  du  catéchisme  que  le  Pasteur  devra 
expliquer  le  Dimanche  sui?ant  Gela  fait,  on  les  fera  prier 
Dieu,  et  on  leur  ordonnera  de  se  retirer  en  bon  ordre  et  à 
se  montrer  honnêtes  et  civils  envers  un  chacun. 

13°  Le  soir  on  fera  la  même  chose  que  le  malin  excepté 
qu'au  heu  de  répéter  la  section  du  Caléchisme,  on  donnera  à 
ceux  qui  savent  lire  un  verset  de  Pseaurae  ou  de  TEcriture 
sainte  à  apprendre  par  cœur,  qtt*on  leur  fera  réciter  le  lende- 
main à  la  môme  heure;  et,  s'ils  sarent  écrire  on  y  ajoutera 
an  exemple  tiré  de  l'Ecriture  sainte  ou  quelqu*autre  qui  con- 
tiendra des  maximes  de  sagesse. 

14*  Dpux  fois  la  semaine  on  dictera  à  ceux  qui  sauront 
écrire  quelque  chose  d'édifiant  pris  du  Nouveau  Testament, 
du  Catéchisme,  ou  de  quelque  livre  de  pîéfé:  on  leur  corrigera 
ensuite  ce  qu'ils  auront  (sic)  pour  leur  apprendre  l'ortho- 
graphe. 

16''  La  dernière  Ëcole  de  la  semaine  sera  emploïée  à  repas- 
ser ce  qu*on  aura  fait  et  appris  les  jours  précédons;  on  y 
fera  un  rolle  dé  ceux  des  enfons  qui  auront  été  assidus  à 
i*ficole  pendant  la  semaine  et  qui  s'y  seront  bien  conduits, 
lequel  rolle  sera  présenté  au  Pasteur  le  Dimanche  matin. 

10'  Il  y  aura  deux  fols  par  semaine  une  Me  de  musique, 
où  les  enfans  seront  exercés  pendant  une  heure  à  connoître 
tes  notes  des  Pseaumes,  et  à  leur  donner  le  ton;  et  pour  la 


• 


74  BBVUB  D*ALSACB 

ditte  Ecole  le  maître  sera  paie  à  part  tant  de  l'Eglise,  que  des 
Pères  de  famille . 

Dwoir  des  Es^fcm  : 

Les  Enfansse  rendront  assidoement  à  TEcole  an x  heures 

prc'scrittcs  ;  ceux  qui  enlreruul  après  la  prière,  ils  seront  mis 
au  dernier  rang;  s'il  en  vient  après  la  première  dcmiiî  heure, 
ils  resteront  debout  pemîaiU  une  demie  heure,  et  quand  à 
ceux  qui  viendront  après  la  seconde  demie  heure  on  les  fera 
mettre  à  genoux,  et  ils  y  demeureront  jusqu'à  la  fln  de  TE- 
eole;  et  slls  manquent  tout  à  foil,  ils  en  seront  châtiés,  à 
moins  qu*il8  n'apportent  une  excuse  valable  de  leur  defhut. 

2*  Les  Enfans  auront  tout  le  respect  et  toute  la  soumission 
possible  pour  le  Maître  qui  les  instruit. 

8°  Ils  s'appliqueront  de  tout  icur  possible  à  faire  tout  ce 
que  le  Maître  dlilcolc  leur  aura  prescrit. 

4"  lis  entreront  dans  TEglise  avec  le  Maître  d'Et'ule  cl  se 
placeront  vis  à  vis  de  la  Chaire;  pour  cet  effet  ils  se  ren- 
dront de  bonne  heure  à  r£lcoie  a?ant  que  le  serTice  Divin 
soit  commencé,  afin  de  suivre  leur  Ma!tre  quand  il  ira  faire 
la  lecture,  et  ils  Tassisteront  dans  le  chant  des  Pseaumes. 

Devoirs  du  vénérable  Consistoire  : 

1°  Le  vénérable  Consistoire,  tant  le  Pasteur  que  les  Diacres 
et  Anciens  qui  le  composent  veilleront  d'une  manière  parti- 
culière, à  ce  que  les  articles  ci-dessus  exprimés,  soient  exacte- 
ment et  inviolablement  observés;  à  celte  fin  ils  s'engagent 
à  visiter  les  Ecoles  pour  le  moins  deux  fois  tous  les  mois, 
laquelle  visite  ne  durera  jamais  moins  il  une  licure. 

2'  Cehii  qui  fera  la  visite  aura  le  pouvoir  de  faire  châtier 
celui  des  enfans  qu'il  jugera  l'avoir  mérilé. 

3"  Les  Anciens  recevront  les  plaintes  des  Maîtres  d'Ecole 
contre  les  Ënfans,  et  celles  des  Pères  ou  mères  de  famille 
contre  les  maîtres  d'Ecole,  pour  en  faire  leur  rapport  au  véné- 
rable Consistoire  qui  tâchera  d'y  mettre  ordre. 


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mSTBUGTION  OBUGATOIEB  D£  BIBAUPIERBE 


75 


4"  Afin  d'encourager  les  enfans  à  faire  leur  devoir,  il  y 
aura  quatre  prix  établis  pour  être  distribués  à  ceux  d'entre 
les  Ëcoliers  dont  on  aura  le  plus  sujet  d'être  content  :  le 
premier  et  le  plus  honorable  sera  ponr  celui  qui  pendant 
toute  Tannée  aura  le  mieux  fréquenté  Fficole,  le  second  ponr 
celui  qui  saura  le  mieux  son  Catéchisme;  le  troisième  pour 
celui  dont  l'écriture  sera  la  plus  belle  et  la  plus  correcte;  le 
quatrième  enfin  pour  celui  qui  lira  d'une  manière  à  se  faire 
le  mieux  entendre. 

o'  Le  Lundi  après  Pasqucs  à  une  heure  après  midy  le 
Ténérabie  Consistoire  s'assemblera  pour  examiner  les  enfans, 
tant  d'£chery  que  de  S^^'  Marie,  et  pour  juger  sans  partialité 
à  qui  Ton  doit  assigner  les  prix  ci-dessus  mentionnés  et  la 
distribution  s*en  fera  le  lendemain  dans  l'Eglise  après  leSer- 
viee  Divin. 

6*  Toutes  les  fois  que  les  Anciens  distribueront  les  mar- 
ques ils  ne  manqucroiit  pas  d'exhorter  les  particuliers  qui 
auront  des  enfans  à  prendre  soin  de  leur  éducation,  et  à  leur 
faire  rendre  compte  de  ce  qu'ils  auront  appris  à  l'Ecole, 
comme  aussi  de  censurer  ou  d'encourager  les  enfans  selon 
la  manière  dont  ils  s'acquitteront  de  leur  devoir  à  cet  égard. 

V  Les  articles  mentionnés  dans  le  présent  Règlement  qui 
regardent  les  Pères  et  Hères  de  famille  seront  lûs  publique- 
ment chaque  premier  jour  de  Tannée;  ceux  qui  regardent 
les  maîtres  d'Ecole  et  les  Ecoliers  seront  écrits  en  caractères 
lisibles  sur  des  papiers  collés  sur  une  planche  et  suspendus 
dans  les  Chambres  où  se  tiendront  les  Ecoles  pour  l'instruc- 
tion d'un  chacun;  enfin  ceux  qui  regardent  le  vénérable 
Consistoire  seront  lyoutés  à  notre  Discipline  ecclésiastique 
et  auront  la  même  anthenticité  que  les  autres  qui  y  sont 
contenus. 

Cette  pièce  est  tirée  des  archives  du  Consistoire  de  l'Eglise 
réformée  française  de  Sainte-AIarie-aux-Mines.  Bile  ne  con- 


78 


BBvnB  d'alsaob 


ceroait  donc  qa'une  partie  de  la  population  alsacienne  de  la 
commune.  Non-sealement  le  côté  Lorraine  restait  en  dehors 
de  ces  mesures»  mais  les  réformés  allemands,  les  luthériens 
et  les  catholiques  du  cdté  d'Alsace  n'étaient  pas  atteints  par 
dles.  Us  le  furent  plus  tard  par  un  arrêté  dont  voici  la  tra- 
duction : 

EzlraU  des  Pratoeoies  de  poUM  de  la  eommuM  de  SainU' 
Marie-^im-Mines  (côté  d'Abaoe') 

Par  devant  nous.  Georges-Joseph  Liechlenberger,  graud- 
bailU  du  comté  de  Ribaupierre  et  du  bailliage  de  Sainte- 
Marie*aux-Min6s,  est  personnellement  comparu  M,  Théobald 
Schmidt,  procureur  fiscal  desdits  comté  et  bailliage,  lequel 
nous  a  représenté  que  la  jeunesse,  dans  tontes  les  communes 
du  comté,  est  élevée  dans  rignoranoe  la  plus  grande  et  la  plus 
condamnable,  par  suite  de  la  négligence  des  parents,  tuteurs, 
maîtres  et  maîtrises.  La  plupart  des  parents,  poussés  par  le 
désir  du  gain,  n'envoient  pas  leurs  enfants  aux  Ecoles  publi- 
ques et  lea  occupent  de  bonne  heure  à  divers  travaux  ;  d'au- 
tres, par  insouciance,  ne  surveillent  pas  leurs  enfants  comme 
ils  le  devraient  et  les  laissent  s'abandonner  à  Toisiveté,  plutôt 
que  de  leur  faire  fréquenter  l'Ecole.  Une  telle  incurie,  très 
funeste  à  l'Etat  et  à  chaque  commune  en  particulier,  ne  Fest 
pas  moins  à  la  chrétienté.  En  conséquence,  le  comparant  pose 
les  conclusions  ci-après  : 

Plaise  à  nous,  ordonner  et  enjoindre,  à  tous  et  principale- 
lement  aux  parents  et  tuteurs,  d'envoyer  leurs  enfantS;  dont 
ils  out  charge,  aux  Ëcoies  publiques,  et  cela  depuis  leur 
septième  année  jusqu'à  es  que,  pour  leur  état,  ils  soient  assez 
instruits  dans  la  lecture  et  dans  l'écriture  ; 

Que  si  Tun  d'eux  manque,  sans  excuse,  à  l'Ecole,  durant 
une  semaine,  les  parents  ou  tuteurs  soient  condamnés  à  une 
amende  de  quatre  sous,  laquelle  sera  portée  an  double  en  cas 
de  récidive.  Et,  pour  que  certains  parents  ne  puissent  arguer 


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IMSTBCGTIOM  OBUOATOUUS  DE  BIBAUPIERRE 


77 


raisonnablement  de  leur  pauvreté,  l'écolage  des  enfants  sera 
soldé,  suivant  Tutiage,  par  la  fabrique  de  i'Ëgliâe  ou  par  la 
Commune  ; 

Nous  piaiae  également  ordonner  aux  parents,  tuteurs, 
maîtres  et  maîtrises  dWoyer  leurs  en&nts  propres  ou  ceux 
dont  la  eharge  leur  est  commise  à  rinstmction  publique  reli- 
gieuse, sous  peine  de  deux  sous  d'amende  pour  chaque  absence 

non  justifiée  ou  pour  laquelle  on  n'aura  point,  au  préalable, 
reçu  de  permission;  ladite  peine  sera  doublée  à  chaque 

réi-idive  ; 

£q  outre^  que  tous  les  troi^i  mois  il  soit  dressé  par  les  curés 
ou  pasteurs  un  état  des  contrafentions  signalées;  cetétat  sera 
transmis  au  Becereur  de  l'Eglise  on  à  ceux  qui  auront  reçu 
autorité  à  oetcffiAt,  lesquels  feront  les  rentrées  et  en  remet- 
tront le  produit  au  curé  ou  pasteur.  Genx-ei  partageront  les 
fonds  reçus  de  la  sorte  entre  ceux  des  enfants  qui  se  seront 
distingués  par  leur  assiduité,  et  ce  à  titre  d'encouragement; 

Et,  comme  le  mauvais  gouvernement  des  enfants  provient 
de  la  négligence  des  parents  et  autres  chargés  de  leur  sur- 
TeiUance,  à  cette  fin  que  les  parents,  tuteurs,  maîtres  et  maî- 
trises ne  puissent  prétexter  d'ignorance,  nous  plaise  ordonner 
que  l'arrêté  à  interrenir  touchant  ces  objets  soit  transcrit  au 
Kgistre  de  la  ville  et  du  bailliage,  inscrit  au  grelfe  de  police 
et  publié  dans  toutes  les  communes. 

De  tout  quoi  il  demande  acte,  et  a  signé  à  Toriglual  :  SchmxU 
(avec  paraphe). 

(Suit  un  arrêté  conforme  qui  n'est  guère  que  la  copie  de 
conclusions  du  procureur  fiscal.) 
Donné  à  RibeanviUé,  le  SO  STril  1778. 

Signé  :  6.-J.  Liei^tenberger. 

{Cmmmiqué  par  M.  G.  Muhlenbeck.) 


L'ECOLE  LATINE  DE  RIQUEWIHR 


CHAPITRE  DE  L'HISTOIRE  SCOLAIRE  D'ALSACE 


Quand  oo  parle  de  nos  jours  d*ane  école  latine,  ou  se  repré- 
sente un  grand  établissement  à  programme  compliqué,  au 
personnel  enseignant  plus  ou  moins  nombreux,  un  lycée, 

un  gymuase.  Les  centres  populeux  en  ont  seuls  le  privilège. 
Il  n'en  a  pas  toujours  été  ainsi.  Riquewihr  a  possédé  une 
école  latine  jusqu'au  jour  où  la  révolution  de  quatre-vingt- 
neuf,  en  englobant  le  chef-lieu  de  l'ancienne  seigneurie  wur- 
tembergeoise  dans  la  grande  unité  de  la  République,  lui 
enlera  ses  institutions  particulières.  Nous  essayerons  de  retra- 
cer l'histoire  de  ce  modeste  établissement,  qui  préparait  ses 
élères  jusqu'à  l'entrée  de  l'Université;  on  verra  qu'avec  des 
ressources  restreintes  et  dans  une  sphère  étroite,  nos  pères 
ont  su  fonder  et  entretenir  pendant  plus  de  deux  siècles  une 
école  très  utile,  par  moments  prospère,  et  rendantaux  familles 
des  services  incontestables.  Les  renseignements  dont  nous 
disposons  concernent  trois  époques  de  cette  histoire,  le  temps 
qui  suivit  l'introduction  de  la  Réforme  à  Riquewihr,  la  fin 
de  la  guerre  de  trente  ans  et  le  milieu  du  siècle  dernier. 

Le  duc  Christophe  de  Wurtemberg  publia,  en  1659,  un 
règlement  scolaire  {SOwUorânmig)  ordonnant  de  fonder  dans 
les  petites  localités  (m  den  kk  'mm  Dôrffern  mid  Flecken)  des 
écoles  primaires;  dans  les  localités  plus  importantes  (m  alkn 


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ÉOOLB  LATOn  DB  BIQUEWIHR 


79 


undjeden  Siadten,  sie  seien  grm  odêr  klein,  desgkichm  eU^ 
dm  der  furnehimten  Dôrffem  od^  Fiedsm),  on  devait  y 
joindre  des  écoles  latines  \  On.  n'avait  pas  attendu  à  Riqne- 
wihr  la  publication  de  cet  édit  pour  organiser  rinstrnclion 
publique.  Immédiatement  après  Tintroduetion  de  la  Réforma- 
tion,  qui  eut  lien  en  1536,  le  duc  George  de  MoiUbéliard  avait 
en  soin  d'établir  une  classe  d'enseignement  latin  à  coté  de  la 
classe  allemande.  Le  docteur  Louis  Baler  avait  été  chargé  de 
la  diriger.  Elle  acquit  un  certain  renom,  à  partir  de  1547, 
s  His  rintelligente  direction  du  savant  Jean  Ulstetter.  Il  était 
natif  de  Nuremberg  et  avait  été  pastear  à  Hunainhr;  il  était 
le  gendre  de  Paul  Pagina,  recteur  de  Técole  d'Isny  (1527)  et 
pins  tard  professeur  à  Cambridge.  Cette  parenté  lui  valut  sans 
doute  d'utiles  conseils  et  des  encouragemenis  précieux  dans 
l'œuvre  à  laquelle  il  avait  été  appelé.  Sa  réputation  s'étendit 
bien  au  delà  du  temps  où  il  vécut,  grâce  à  une  importante 
collection  de  lettres  de  ses  contemporains,  quiao  trouvait  dans 
la  bibliothèque  schôpflinienneet  qui  a  péri  avec  elle  dans  la 
catastrophe  de  1870'.  Nous  n'avons  pas,  pour  ces  premiers 
temps,  d  autres  détails  sur  notre  établissement;  il  continua, 
après  la  mort  dUlstetter,  à  initier  la  jeunesse  de  Riquewibr 
el  des  environs  dans  la  langue  savante  du  temps,  suivant, 
pendant  quelques  années  encore,  l'impulsion  que  lui  avait 
donnée  cet  homme  de  mérite.  A  mesure  que  le  souvenir  s'en 
effiiçait,  l'éclat  passager  que  notre  école  avait  jeté  s'affaiblis- 
sait. Vers  le  milieu  de  la  guerre  de  trente  ans,  son  état  était 
désespéré  et  il  fallut  an  acte  de  vigueur  pour  lui  rendre  la 
ne  et  la  santé. 

Nous  possédons  dans  nos  archives  communales  une  pièce 

'  RàUMER,  Geschichle  der  Pœdagogik,  I,  p.  2ôi  s({. 

'  Rœhrich  Gescliichle  der  Jlefomntion  im  EUa^^i,  II,  p.  228.  —  Son 
fib,  Israël  Ulstetter,  fut  pendant  quelque  temps  diacre  à  Téglise  de 
Riquewibr  et  devint,  après  qae  le  culte  protestant  eut  été  organisé  à  Gol- 
marflô  mai  1575),  diacre  dans  cette  ville  ;  il  mourat  Tannée  suivante,  1576 
(AocHOLL,  Einfuknmg  der  Re formation  in  Colmar,  p.  S02). 


80 


BEVUB  D'ALSAGB 


non  datée,  mais  qui  est  probablement  de  1636  ou  37;  elle 
portL'  le  titre  :  Gravamina  uber  die  lieicfiemveylensche  Schuly 
et  nous  donne  le  résultat  d'une  enquête  sur  le  triste  état  des 
écoles  de  Riquewihr.  L'analyse  que  nous  allons  en  donnar 
nous  permettra  de  nons  faire  une  idée  de  cet  établissement 
et  des  mœurs  scolaires  du  temps. 

Les  enfimts  des  deux  classes  latine  et  allemande  étaient 
réunis  dans  la  même  salle,  mais  occupaient  des  tables  parti- 
culii  res.  Deux  maîtres  en  avaient  la  directiou  et  la  caisse  de 
l'église  leur  émargeait  un  traitement  considérable  pour  le 
temps  {dahero  sie  aus  den  Kircheiigpfàîkn  wohl  hesoldel  imd 
tmiêrhaUmmrdeu).  Le  document  cite  les  noms  des  recteurs 
pour  les  quarante  dernières  années  et  (ait  Téloge  des  serTioes 
qu'ils  ont  rendus.  On  remarquera  que  ces  quarante  ans  nons 
ramènent  bien  près  de  l*époqu6  d'Ulstetter;  il  n'y  a  qu'une 
lacune  d'enyiron  vingt  ans.  Le  nom  de  ces  humbles  pionniers 
delà  science  mérite  bien  d'être  tiré  de  Tonbli.  Ils  s'appelaient 
Scliold,  Jean  Tonsorius  (Scliererj  père,  Nicodème  Sitzlin, 
Jean  Molilor  (Millier),  Jean  Gossmann,  Mallhieu  Piscalor 
(Fischer).  Nous  avons  sur  ces  précepteurs  à  peine  d'autres 
renseignements  que  leurs  noms;  quelques-uns  d'entr'eux 
étaient  maîtres  ès  arts  ;  entre  autres  Jean  Tonsorius,  Nie  Sitslin 
(promu  à  Tubingue  ie  12  août  1594),  J.  Molitor  ùpromu  à  la 
même  Uniyersité  le  6  février  1588)  et  Piscator,  né  à  Grails- 
beim  dans  le  Wurtemberg  (promu  le  5  août  1584);  il  devint 
diacre  à  Riquewihr,  où  il  décéda  le  7  décembre  1635.  La 
classe  latine  comptait  en  moyenne  dix  élèves;  on  les  poussait 
jusqu'à  la  lecture  des  auteurs  et  à  la  rédaction  de  travaux 
personnels   La  déchéance  de  Técole  est  attribuée  à  l'incspa- 

'  Die  Prœcepta  wnd  qnœttiones  grammaUeet,  damU  $ie  ûnfangs  dU 
formulas  decîinandi  et  conjugandi  ncht  ergriffe»,  hêmach  aueh  diê  «n- 

dern  accidentia  nominis  et  vcrbi  mit  den  uchrigvn  pnrtihiis  orationis  et 
generalibus  regulis  ctymohigiœ^  aucli  noch  andfrc  hivhcre  antores  nnd 
kctiones  pro  captu  pvcrorutn  vorgvlcscn.  dannis  daiin  die  (Jcissigsten 
Knaben  bereils  feine  Argumenta  compomrt  haben  und  in  dem  ExereUio 
mutko  vnteniehut  worden. 


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ÉCOLE  LATINE  DE  RIQUEWIHB  '  81 


cité  du  précepteur  David  Schackh,  alors  en  fonctions,  et  de 
son  aide,  le  proviseur  Jean-Conrad  Tonsorius  fils.  On  reproche 
à  ce  dernier  de  négliger  ses  devoirs  scolaires^  en  vue  du 
ministère  pastoral  auquel  il  aspirait;  il  était  né  à 
Riqaewihr  et  avait  été  promu  miitire  ès  arts  à  Tnbingue  le 
16  août  1619.  Des  inconvénients  de  toute  nature  résultaient 
do  mauvais  état  de  la  discipline  et  de  rinstrnction.  Des 
familles  évangéliques,  chassées  de  Colmar  en  1 638  \  s'étaient 
réfugiées  sur  le  territoire  Avurlembergcois;  on  ne  pouvait  leur 
olïrir  le  moindre  équivalojil  de  ce  qu'elles  avaient  perdu  à  Col- 
mar; les  familles  de  Kiqucwilir  envoyaient  leurs  enfants  au 
dehors  et  le  receveur  seigneurial,  David  Rôtlilin,  avait  appelé 
pour  l'instruction  de  ses  fils  un  précepteur  particulier. 

Les  reproches  qu'on  adresse  aux  deux  instituteurs  sont 
très  graves;  tantôt  ils  s'absentaient  sans  permission  et  l'éetde 
était  en  vacance;  tantôt  ils  se  rendaient,  pendant  les  heures 
de  classe,  dans  la  chambre  de  l'un  d'eux  et  s'y  amusaient  à 
boire  et  à  jouer.  Les  voisins  entendaient  alors  dans  la  salle 
d'école  un  vacarme  affreux;  c'étaient  les  élèves  qui  prolitaieut 
des  loisirs  que  leurs  maîtres  leur  accordaient.  Il  se  passait 
des  semaines  sans  que  les  cahiers  fussent  inspectés;  on  conçoit 
rétatoùils  srtrou  valent.  Les  enfants  faisaient  l'école  buisson - 
uière.  Quelquefois  le  maître  se  réveillait  de  son  indolence; 
la  fièvre  de  discipline  le  prenait  et  les  coups  pleuvaient  drus 
wa  le  dos  des  malheureux  ^  On  comprend  que,dan8  ces  con- 

'  Lerse.  (ieschichte  der  Ucformalion  in  Colmar,  p.  30. 

'  Dnsii  dtr  Schnlmci.^ter  zu  hart  nnd  nicht  alleiregen  der  rjcbur  nnch 
disciplivtrH  und  ziirhtifjrt,  sonderu  rs  biswpilen  mit  ungeu:œhnlicli€n 
Sddœgen  und  Tretcn  zu  yrob  luaclil,  auch  die  Kinder  mûfUifvMUn^  Wl 
qttrmger  Vnaeken  willm  und  0w  vnmœmgm  Zorn,  glM  TewfeUkk^' 
à«r  hHiH,  dot  iDahr  tmd  htweiiUeh,  —  Il  font  qae  les  correcllont 
idminislrce»  par  le  précepteur  aient  dépassé  tonte  mesure,  poisqu'on 
lui  en  fait  un  reproche.  \  cette  époqne,  les  moyens  do  discipline  n'é- 
t^ionl  pas  bion  d/>Iica(s.  [Ino  «Hran^ie  fêle  scolaire  en  fait  foi.  A  quelques 
minutes  de  lUqu.iwihr,  st-lève  une  colline  boisée  qui.  malgré  son  nom 
de  funeste  augure  (elle  s'appelle  iluthenbUckek),  est  1  endroit  de  prédi- 

Nouvelle  Série  -  7'  Aunce.  6 


83 


BEVUE  D'ALSACE 


dilions,  rinstruclion  el  li\  conduite  des  élèves  laissaient  fort  à 
désirer.  Leurs  polissouneries  ne  cessaient  pas  même  à  leglise 
pendant  le  service  divin.  En  un  mol,  l'état  de  Técole  exigeait, 
dans  l'intérêt  commun  des  parents  et  des  en&nts,  un  prompt 
remède.  Ce  remède  se  fit  attendre  pendant  plusieurs  années. 
La  gaerre  continuait  et  la  haute  Alsace  en  éprouvait  de  plus 
en  plus  les  funestes  effets.  Quand  on  est  préoccupé  des  dan- 
gers qui  liiCDaccnt  la  propriété  et  la  vie.  on  ne  prend  pas  le 
temps  de  rélorniLT  une  ccole.  Enlin,  en  (OU),  un  an  après 
la  conclusion  do  la  paix,  les  anciens  règlcnicnls  furent  refon- 
dus et  amendés.  Nous  allons  y  jeter  un  coup  d'œil. 

Le  premier  chapitre  traite  de  renseignement  à  donner. 
Les  heures  de  classe  s'étendaient  en  été  de  six  à  neuf  Ifi 
matin,  en  hiver  de  sept  à  dix,  et  Taprès^dîner  de  midi  à  trois 

heures.  Défense  aux  enfents  de  s'absenter  sans  motif  sérieux 
dûment  constaté.  La  classe  commeiirail  par  l'appel  des  élèves. 
La  section  latine  occupait  une  place  séparée  de  la  section 
allemande;  il  était  défendu  aux  élèves  des  deux  sections  de 
jouer  ensemble  aux  heures  de  récréation.  Chacune  avait  son 
surveillant  (Coryphœwt),  qui  notait  les  infractions  et  foisait 
réciter  les  leçons. 

Chaque  section  était  partagée  en  trois  groupes.  Le  premier 
{die  hiitianfev  ]  apprenait  l  alphabet,  le  second  s'exerçait  à 
la  lecture  dans  le  c;itécbisnie.  le  troisième  lisait  les  psaumes 
et  les  proverbes  de  Salomon.  Les  exercices  de  mémoire  com- 

loclioti  ilt;s  enfants.  Au  temps  jadis,  qiinnd  los  bouleaux  avaient  poussé 
déjeunes  branches,  1  iiistiliUeiir  y  »-onduis:iil  son  écolft  ol  Ion  faisait  la 
provision  de  verge.s  pour  l'année.  Le  soir,  1  on  rejilr.iit  en  curlége  et  en 
chantant.  Uagonbach  {KirekengesehichU,  t.  IV,  p.  ô(ii)  nous  a  conservé 
l'une  des  chansons  qu'on  entonnait  dans  le  PalalUiat  vers  ld65  :  Ihr 
Vœter  und  ihr  .Viidvrldn,  —  Nun  selund  wie  fcir  gehn  hcrein  —  Mit 
Birkcnholz  bclndrn.  —  Wclchcs  una  xcnhl  dicm-n  kann  —  Zu  Nutz  und 
Schnden  —  Eu'r  W'ill  innl  Goltcs  gcbot  —  l'un  dazu  gdripben  hnf. — 
Dass  wirjetzl  unsere  Uuiiie  —  Uebenn  eigiien  Leib —  Traycn  mil  leich- 
tem  Uuthe. 


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ÊOOLB  LATINE  DE  RIQUKWIUB 


88 


portaient  le  catéchisme  de  Brentz  *  et  des  passages  choisis 
ùm  la  Bible.  U  était  enjoint  de  ne  pas  s'écarter  dans  les 
explications  de  la  doctrine  lathérienne.  Les  exercices  d*é- 
critore  accompagnaient  ceux  de  lecture.  U  était  recommandé 
aux  élè?es  de  tenir  leurs  cahiers  proprement,  et  aux  maîtres 
d'en  faire  tous  les  soirs  la  révision  ;  tous  les  quinze  jours,  ils 
écrivaient  un  nouveau  modèle,  quelque  [lassoge  biblique,  que 
les  Piéves  copiaient  à  la  maison.  Les  leçons  de  l'après-midi 
commençaient  par  le  chant;  le  mardi  elle  vendredi,  il  y  avait 
une  leçon  d'arithmétique. 

Quant  aux  élèves  de  langae  latine,ils  apprenaient  les  iâcsr- 
cUia  Etymologiœ  et  Syntaxm,  introduits  dans  le  Gymnase 
de  Hontbéliard,  et  renseignement  était  arrangé  de  teile  sorte 
que  Ton  pouvait  passer  de  Riqnewihr  à  Hontbéliard  et  niée 
tersà  sans  se  sentir  depay  é  l 

Le  chapitre  deuxième  est  intitulé  :  De  la  crainte  de  Dieu. 
Les  leçons  commencent  et  Unissent  par  la  prière.  La  sortie 
de  l'école  se  fait  deux  à  deux,  sous  la  conduite  des  deux 
maîtres,  la  section  allemande  prenant  la  tête.  Les  jours  de 
service  divin,  les  élèves  se  rassemblent  dans  la  salle  d'école 
et  sont  conduits  dans  le  même  ordre  à  l'église.  Au  sortir  de 
roifice,  les  enfants  sont  ramenés  à  l^école,  où  on  les  examine 
sur  le  sermon  entendu.  Ils  apprennent  le  catéchisme  par 
cœur  et  les  maîtres  ont  à  veiller  à  ce  que.  dans  les  récitations, 
chaque  verset  soit  distincleinenl  prononcé. 

Le  chapitre  troisième  traite  de  la  discipline.  Les  élèves  ont 

•  Jean  Brentz,  lo  réformateur  du  Wurleniborj:,  publia  son  eatécbisme 

en  1527;  il  en  publia  un'^  ôilition  aupinoiilécî  en  1559. 

^  Mil  dm  luleittis-chpii  Knaln-n  aoll  .«natl  Vor-  als  Nachmitlags  die 
Forma  informandi  so  in  prircepli!:  ids  in  exerciliis  Etymologiœ  et  Syn- 
taxm  wiê  inben  xu  Mumpelgart  bey  dem  keMiehe»  CyifMMMW  «W«r- 
iin^g  gOioUe»  werâw  uni  iokhe$  darumb  toetl  heede  Schuelen  unter 
'  n  i  DireeUmo  hegriffen,  <o  gehukrt  sich  nuch  eine  gleiche  pariM  t  zu 
hnilen  und  dan  nuch  bcderseils  Scholares  die  der  Sprnch  halben  eiUweder 
hinauff  odcr  Iwrab  gp^'-hickl,  »  7  htn>j  anfgehaUcn,  sondern  alsobaid 
mU  den  andeni  angekailen  und  fortyelrieben  icerden. 


8é 


REVUS  D'ALSACE 


à  se  présenter  à  l'école  bien  lavés  et  bien  peignés  ;  il  leur 
est  défendu  de  manger  pendant  les  heures  de  classe;  on  peut 
faire  toutefois  une  exception  en  faveur  des  tout  petits  enfants. 
Ceux  qui  apprennent  !•  latin  sont  astreints  à  faire  la  conyer- 
sation  dans  cette  langue.  Il  est  défendu  à  tous  de  raconter  à 
la  maison  ce  qui  s'est  passé  à  Técele  et  surtout  de  dire  du 
mal  de  leurs  précepteurs  d*aToir  la  tôte  couverte  dans  la 
salle,  de  se  quereller.  Il  leur  est  interdit  de  vagabonder  dans 
les  rues,  et  surtout  sous  les  arcades  devant  la  maison  com- 
mune. Les  jeudis  et  les  samedis,  après  diner.  les  précepteurs 
les  conduiront  à  la  Hart,  communal  inculte  à  cette  époque  ; 
là,  ils  pourront  prendre  leurs  ébats.  Défense  de  se  baigner, 
surtout  dans  le  lavoir  public  \  La  présence  d'enfiints  atteints 
d*un6  maladie  contagieuse.n'estpas  tolérée*. 

dé  règlement  fut  copié  sur  nn  tableau  qu'on  suspendit  à 
l'école,  et,  tous  les  trois  mois,  les  précepteurs  en  disaient 
la  lecture  en  y  ajoutant  les  explications  convenables.  Il  est 
uaturelydu  resle,qu'ii  ait  beaucoup  de  ressemblance  avec  d'au- 

'  5te  soUen  auch  weder  doftcim  noâi  andermoo  efmê  auMcfttOifrer», 
«tel  vmiger  ihre  Prœeeptons  gegm  ikre  icJler»  noch  gegm  Jmandm 

andern  verunglimpffen. 

^  Ce  lavoir  se  trouve  à  l'enlrce  de  la  ville,  joignant  la  porte;  ce  n'est 
pas  cependant  la  simple  convenance  locale  qui  motiva  cette  singulière 
interdietion  des  bsins,  puisqu'elle  se  trouve  duis  ploaieiurs  anciens  règle- 
ments Bcolaires,  en  môme  temps  qne  la  défense  d'aller  en  tralnean  on 
de  faire  des  boules  de  neige.  Aesiate  flumina,  hyeme  gliutiempum  non 
ingrediantiir  (Ecoles  do  Stralsund).  —  Eiherno  tempore  globit  «lioMS 
alios  impetere,  rhedis  per  dediria  in  prœcipiU'i  Inm  invehi. . .  nemini 
permUtilur  (Ecoles  de  Hîile),  cf.  Hagenbach,  hnchengeschicJite,  t.  IV, 
p.  ôGl,  Note.  —  Le  célèbre  pédagogue  du  XVI"  siècle,  Trotzendorf,  a 
introdoit  la  mfime  défense  dans  son  règlement  :  Née  œstate  frigidia 
€upùg  Uiwmtùr,nee  hyme  glaeiei  u  endentoryiMt  nms  globoa  jaeulantor. 
—  Ailleurs,  la  défense  est  moins  formule,  comme  dans  la  règle  citée  par 
PfafT  {Geschichte  des  UnterrichtweseM  4n  Wurtemberg,  p.  SI)  :  In  agvù 
sine  /u  9.st&u.<;  noli  baineare.  Comparez  VBistoirt  de  la  pédagogique  à» 
Raumer,  passim. 

'  Keiner  der  mil  dcm  Lrbgnnd,  ansleckender  Sucht  oder  mil  Lœussen 
(mefMfer)  hehafft  wd  helade»  itt^  90U  in  der  Sehuel  geduldet  werden. 


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ÉCOLE  LATINE  DB  BIQUBWIHR 


85 


très  règlements  de  la  même  époque  et  qu'il  procède  en  der. 
nier  lieu  de  la  Evangelisehe  Kirehm-  md  Sehukrdmngy 
publiée  par  Melanchton  en  1S28. 

On  s^éfanme  de  prime  abord  que  notre  règlement  ne  parle 
que  des  garQons.  L'instruction  des  filles  aurait-elle  été  totale- 
ment négligée?  Cela  n'est  pas  probable,  quand  on  voit  ailleurs 
ouvrir  des  écoles  de  lilles  (Brauusc/iweiger  Kirchenordnnng 
de  1528),  et  quand  ou  lit  dans  Bugenhaj^cn  (cité  par  Scliaef- 
fer,  De  f  influence  de  Luther  sur  l'éducation,  p.  197)  la  recom- 
mandation Buivaute  :  c  On  créera  des  écoles  pour  les  filles. . . 
Les  filles  apprendront  à  lire;  on  leur  fera  apprendre  de 
courtes  explications  du  Ilécalogue,  du  Symbole  des  apôtres  et 
de  rOraison  dominicale,  des  Sacrements  du  baptême  et  du 
corps  de  Christ,  etc.  >  Nous  ayons,  an  surplus,  en  ce  qui 
concerne  Riquewihr,  une  preuve  directe  de  l'exislencc  d'une 
école  de  filles.  C'est  une  quittance  qui  constate  le  paiement 
de  récolage.* 

Le  successeur  de  Conrad  Tonsorius  fut  Malakauder  (VVeicii- 
mann).  dont  nous  ne  connaissons  que  le  nom. 

Les  destinées  de  notre  école  nous  sont  inconnues  pendant 
près  d*un  siècle  ;  il  est  à  supposer  qu'elle  continua  de  rendre 
humblement  les  services  qo*on  lui  demandait.  Le  Consistoire 
deRiqnewihr'  eut  de  noureau  à  s'en  occuper  en  17  5S;  dans 

'  An  nerrm  Daniel  auffier  Brueken,  Spitalpfi^er,  von  wegen  des 

Wilhflm  Maurer  DtBcftterh'n,  rfrt.^.^  es  in  die  Schul  gangm  ist  seil  anno 
und  îH  dnrein  gangen  bis  auff  ifiiJ  ;  in  den  vir  jnreii  ist  r.-i  ein 
hatb  jar  darauits  gehlieben,  und  ist  das  Schulgehl  yir.<  jnr  I  //.,  tricjjl 
fich  die  vierthalb  jtir  3  (î.  %  undistdas  Jloilz  aile  jar  cm  rkrling,j€der 
vùrUng  «n  Aa/6e/i  /i.,  Iriefft  sich  5  vierling  'A  andertlialb  gulden. 
Datwm  dmSTiig  de»  ÂugustmùnaU  46tr.  Sunma  S  ft. 

SuiannaFietorerin,  Stàv^usu  Rekhenueiller. 
Cette  Siisanne  Pistorélait  la  fille  d'an  ancien  surintendant  de  Riqne- 
wihr,  Michel  Pistor,  mort  en  1605. 

'  L'ancien  Consistoire  de  Hiiniewihr  avait  l'adMiinistralion  de  toutes 
les  pnntiss/'s  de  I.i  seigneurie  d  Horl)ourf,'-Riqiiewil)r;  elles  étaient  au 
noiuljre  de  (quatorze.  Sa  coiopéteiiM  s'étendait,  non  seulement  sur  les 


86 


BEVUE  D'ALSACE 


sa  séance  du  ^'i  octobre  de  celte  année,  ie  règlement  fut  révisé 
et  divers  abus,  qui  s'étaient  introduits  avec  le  temps,  furent 
corrigés.  Le  titulaire  s'appelait  alors  Jean  Nardin  \  qui  mou- 
mt  le  7  avril  1757,  après  avoir  dirigé  l'école  pendant  plus  de 
vingt  ans.  Le  nouveau  règlement  ne  contient  rien  de  saillant; 
c'est  un  exposé  très  verbeux  des  principes  moraux  et  religieux 
qui  doivent  inspirer  l'instruction  de  la  jeunesse.  Après  la 
mort  de  Nardin,  le  Consistoire  résolut  de  nommer  à  sa  place 
un  maître  lettré,  uyant  fait  des  études  académiques,  ailn  de 
ramener  l'école  à  son  ancienne  prospérité  ^  Par  suite  de  cet 
arrêté,  un  jeune  étudiant  en  théologie  de  l'Université  de  Stras- 
bourg, George  Daniel  Griiner,  de  Ribeauvillé,  fut  installé  dans 
ces  fonctions  ie  20  mai  1167.  Les  émoluments  de  sa  charge 
consistaient  en  SO  livres  tournois  pour  ses  fonctions  d'orga- 
niste, 110  livres  pour  ses  services  scolaires,  18  quarts  de 
seigle  et  9  mesures  de  vin;  en  outre,  il  avait  le  logement 
libre  à  la  maison  d'école. 

Le  successeur  de  Criiiier  fut  Daiiiel-Aiidfé  Eberhardl,  qui 
mourut  en  juin  1777  et  céda  la  place  à  Jean-George  Resch, 
candidat  en  théulo^fie,  de  llunawihr.  Le  12  mars  17 8â,  il  fut 

affaires  ecciôsiaslique*  et  scolaires,  mais  encore  sur  les  questions  nialri- 
iiioniales  ((iispiMi>;es  et  divorces*  <H  sur  hi  pulicc  des  iinrurs.  Il  se  com- 
posait (lu  stirint'Midaiit.  do  ileiix  as-M'ssours  l'i'clcsiasiifiui's  et  d'un  con- 
seiller laïque,  délégué  par  le  gouvernoini'iit  [Hochfursll.  icurlemb.  italh). 

*■  La,  bmii\9  Nardin  est  origÎDairedu  pays  de  Uootbéliard;  vers  1700, 
Jean-Frédéric  Nardin  était  pastenr  ft  Hérieonrt,  puis  à  Blamont;  vers  la 
mt^nie  épnqne,  Léonard  Nardin  était  chambellan  du  dnc  Léopold  Eber- 
hard.  Tnmsporloe  ;i  l{ii|ni'\vilir,  elle  fit  souche  d'instituteurs,  et  les 
vieilles  gens  ont  encore  prolitc  des  leçons  d'un  inslilateor}  UOlUiué  Nar- 
din, qui  vécut  au  commencemtMit  d«;  e  •  siérle. 

*  t  ...Die  Slelle  durch  ein  tiichligcs  Subjcctum  zu  bedlzen  und  zwar 
dfireb  etfM»  LUeratum,  die  Sekuie  nadi  «nd  «oek  mit  âer  HÛlfe  SoUet 
wkder  ta  dew  mHgen  SUind  zu  hringm^  tn  loeleAem  «te  ehidessen  gewt- 
sen,  da  die  Ktnder  so  weil  diirin  gebradU  wonfe»,  da$s  sic  von  hier 
nnrh  ân-  Vvivrrs-it'rtnnil  in  da.t  Slipendinm  zn  Tiibingen  gehen  kœnnen.  » 
Le  comt>:  (ieorge  de  .MoitUjrliard  avait  fondé  six  bourses  à  l'Université 
de  Tubingue  en  faveur  d  cludiauts  en  théologie  originaires  de  sa 
seigneurie  alsacienne. 


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ÉCOLE  LATDŒ  DK  BIQUËWIHR 


87 


nommé  sous-diacre  et,  le  mai  suivant,  il  fut  rmplacc  par 
Jean-Daniel  Meyer,  d'OslIieiui.  Lui  aussi  obtint  les  fonctions 
de  pous-diacyre  et  contribua,  sous  la  ïei  reiir,  à  Tarrestation 
du  dernier  surintendant,  Jacques  Frédéric  Titot.  Le  dernier 
rectear  de  notre  école  fut  Léopold-Louis  Yallet  des  Barres^ 
qui,  après  avoir  été  examiné  en  théologie  par  le  Consistoire, 
fut  chargé  par  le  gouvernement  de  Hontbéliard,  par  arrêté  du 
5  novembre  1789,  ft  faire  pour  la  garde  nationale  un  service 
religieux  en  dehors  des  heures  ordinaires,  parce  que  les  exer- 
cices militaires  empêchaient  ces  soldats  citoyens  de  participer 
aux  services  de  la  communauté.' 

L'antique  institution  disparut,  pour  ne  plus  se  relever,  dans 
la  tourmente  révolutionnaire.  Quelque  modeste  qu'elle  ait  été, 
nous  avons  cru  Intéressant  d*en  raviver  la  mémoire,  ne  fût- 
ce  que  pour  relever  un  des  traits  caractéristiques  de  Tancien 
Riquewihr. 

£d.  Enspelder, 

pa$t«ur  d  Riquewihr 


*  Léopold-Lrtuis  tlescentlail  il  •  (■.■N.r;o-!:ii.>ii!ie  Vail  ^t  d-^s  IJarrc^,  sur- 
intendant de  17.J7-17GS.  CeUe  latiiillc  rniv^vn  en  AUeiiagne  pendant  la 
Terreur,  et  l'un  de  sos  membres  est  actuellement  eolonel  à  Erfurt. 


SCÈNES  ET  PAYSAGES  DES  VOSGES 


I.  Le  lac  Noir 

Sauvage  et  sévère,  avec  son  cadre  de  hautes  montagnes, 
se»  escarpements  abrupts,  ses  forôts  de  sapins,  le  lac  Noir 
remplit  le  fond  d'un  cirque  élevé.  En  face  de  la  gorge  qui 
donne  accès  au  lac  et  par  où  s'écoulent  ses  eaux,  mugit  une 
blanche  cascade.  Une  ceinture  de  grands  blocs  éboulés  enlace 
le  lac.  Quand  la  nappe  d'eau  s'abaisse  au  Diveau  da  canal 
d'éooalement  de  son  barrage,  les  blocs  prennent  une  nuance 
blanche  nettement  dessinée  et  une  plage  de  sable  B*étale  à 
leur  base.  Sur  la  rive  droite,  vous  Yoyez  une  belle  forêt  de 
sapins.  L*autrerive,  plus  nue,  plus  rapide,  ne  présente  guère 
gue  da  gazon  entre  ses  éboulements  et  ses  rochers  dressés 
tout  droit.  Au-dessus  de  la  cascade  du  fond,  qui  tombe  d  une 
hauteur  de  vinç;t  mètres,  une  série  de  vallons  s'étagent  eu 
gradins  avec  leurs  tapis  de  verdure  séparés  par  des  escar- 
pements gris.  Escarpements  et  gazons  sont  franchis  par  le 
ruisseau  de  la  cascade,  qui  tour  à  tour  s'élance»  sautille  ou 
se  recurîlle,  suivant  les  aspérités  ou  raplanîssement  de  son 
parcours,  d'autant  plus  fort  que  la  pluie  ou  la  neige  est  plus 
abondante.  De  la  neige,  nous  en  voyons  encore,  tout  en  haut 
de  hi  gorge,  à  200  on  800  mètres  au-dessus  du  lac.  Elle  est 
Tidble  depuis  la  plaine,  cette  tache  de  neige  éblouissante.  Je 
crois  la  toucher  du  doigt,du  sentier  où  je  suis,  et  je  mets  une 
heure  pour  ratteiiidre.à  partir  de  la  digue,  après  avoir  grimpé 
eu  m'aidaut  des  pieds  et  des  mains  le  long  des  arêtes  de 


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SCÈNES  ET  PAYSAGES  DES  VOSGES 


89 


granit  et  contourné  des  couloirs  en  cheminée  trop  raides, 
resserrés  et  glissants.  En  plein  mois  d'août,  la  neige  a  pris 
une  texture  grenue,  transformée  eu  glace  au  contact  du  sol. 
C'est  un  petit  glacier  temporaire,  comme  celui  des  lianes  du 
Hohncck,  au  Wormspel.  A  sa  place,  autrefois,  un  gladerplos 
grand,  puissant  et  fort,  a  raboté  les  gradins  de  granit  qni 
dominent  ce  lac  et  déposé  les  matériaux  de  )a  moraine  sur 
laqoelle  s'appnie  le  barrage. 

Le  barrage  transforme  le  lac  en  résenrofr  d*eau  pour  les 
temps  de  sécheresse.  Travail  fécond,  excellent  à  tous  les  points 
de  vue  et  bien  digne  d'imitation  dans  nos  vallées  des  Vosges. 
Avant  sa  construction,  le  lac  Noir  déversait  inutilement  ses 
eaux  pendant  la  fonte  des  neiges  et  lors  des  pluies,  et  son 
appoint,  avec  celui  du  lac  Blanc.grossissait  à  certains  moments 
d'une  manière  démesurée  le  torrent  de  la  Weiss,  qui  se  gon- 
flait au  point  de  sortir  de  son  lit  et  d'éprouver  des  déborde- 
ments violents.  Venaient  ensuite  des  temps  de  sécheresse,  le 
torrent  tarissait,  ne  donnant  pins  d'irrigation  aux  prairies, 
m  de  force  motrice  aux  usines.  On  songea  à  endiguer  les 
hcs,  afin  de  retenir  leurs  eaux  aux  moments  de  surabon- 
dance, pour  les  employer  pendant  l'été.  On  fit  bien.  La  con- 
struction du  barrage  commença  en  1856  et  fut  achevée  aux 
frais  et  à  l'initiative  des  industriels  de  la  vallée.  Comme  les 
constructeurs  ne  connaissaient  ni  la  hauteur  d'eau  fournie 
chaque  année  par  les  pluies  et  les  neiges,  ni  le  volume  possible 
à  retenir  ou  à  réserfer,  les  tâtonnements  étaient  inéviUbles 
dans  un  premier  travail  de  cette  nature.  Plusieurs  années  de 
soite,  on  remit  la  main  à  la  tftche  pour  élever  les  digues, 
augmenter  la  capacité  des  réservoirs.  Une  réparation  impor- 
tante, que  j*ai  eue  à  surveiller  au  barrage  l'été  dernier,  m'a 
**nné  occasion  de  fouiller  à  loisir  tous  les  alentours.  Ne  vous 
u&patîentez  pas  trop,  si  je  vous  retiens  un  peu  plus  long- 
temps. 

Voici  d'abord  le  seuil  d'écoulement  que  je  veux  vous  faire 


90 


BEVUE  D'ALSACE 


voir  de  près.  Altentioii  donc  et  regardez  bien.  Le  barrage 
recouvre  lancienne  rii^oli?  naturelle  où  les  eaux  ont  passé. 
A  Taspect  des  escarpemeuls,  des  parois  rocbeuscs  qui  se  dres- 
scnldevant  vous,  vous  pensez  que  le  roc  ni»sf-if  forme  aussi  le 
seuil  d'écoulement  du  lac  et  sert  de  base  immédiate  au  bar- 
rage. Point  du  tout,  car,  si  tous  aviez  pu  voir  arec  moi  la 
tranchée  ouverte  à  douze  mètres  de  profondeur  pour  le  bétou 
de  la  digue,  vous  auriez  trouvé,  au  lieu  d'une  masse  de  gra- 
nit continue,  un  amas  de  menus  matériaux,  du  sable,  des  pierres, 
de  gros  blocs  mêlés  ^ans  ordre,  sans  trace  de  slraliûcation 
non  plus.  Mais  cet  amas  est  si  fortement  tassé  qu'on  le  croi- 
rait presque  une  roche  compacte,  que  le  pic  entame  avec 
peine,  comme  si  ses  divers  éléments  étaient  cimentés.  Tout 
l'ensemble  rappelle  les  moraines  formées  par  les  glaciers, 
malgré  l'absence  de  galets  striés  et  de  rocbes  polies.  Un  cou- 
rant d*ean  n'aurait  pas  déposé  une  pareille  digue  de  débris 
juste  an  débouché  du  lac  et  à  rentrée  d'une  gorg»  très  déclive. 
A  défeut  de  stries  et  de  polis,  le  dépôt  présente  des  veines 
d'argile  très  fine  mêlées  au  ssble  et  tontes  pareilles  à  la  boue 
glaciaire.  D'ailleurs,  les  gradins  graniiitiues  au-dessus  de  la 
cascade  sont  unis  à  leur  surface,  comme  s'ils  avaient  subi  de 
puissants  coups  de  rabot  sous  la  pression  du  iilacier.  qui  a 
également  comprimé  sous  son  poids  les  éléments  de  la  moraine, 
en  passant  là  comme  passe  sur  nos  routes  un  gigantesque 
rouleau  compresseur.  Au  pied  de  la  cascade,  nous  pouvons 
encore  observer  le  travail  de  sédimentation  et  d'érosion  des 
eaux  dans  un  bassin  fermé,  et  dont  le  niveau  varie.  Les  escar- 
pements rocheux  semblent  descendre  dans  le  lac  de  ce  côté 
avec  leurs  parois  toutes  drdtes.  Sons  la  ebute  même,  il  y  a 
un  amas  de  blocs  de  toute  grosseur,  anguleux  ou  arrondis, 
précipités  au  bas  de  la  cascade  lors  des  ^xrandcs  crues.  Une 
plage  de  saille  stratiliée  à  [lente  plus  douce  s'étale  tout  alentour, 
déposée  Icntcuîenl  dans  le  lac  sous  le  niveau  de  ses  eaux, 
puis  par  le  ruisseau  de  la  cascade,  quand  ce  niveau  s'abaisse 


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SCÈNES  £T  PAYSAGES  D£S  VOSGES 


91 


souslelTet  des  prises  d'eau  pratiquées  parles  vannes  du  bar- 
rage pendant  la  saison  d'été.  Sur  les  points  où  l'eau  des 
sources  supérieures  s'infillre  tout  doucement,  vous  sentez  le 
sable  céder  et  rebondir  sous  vos  pas  comme  un  ressort  élas- 
tique. Cela  provient  de  couches  de  tourbe  intercalées  dans 
le  sable  et  formées  à  l'intérieur  du  bassin.  Tourbe  et  sable 
reofarment  des  branches  d*arbres,  voire  des  troncs  entiers 
de  sapin  qui  deviendront  du  lignite.  Que  de  fidts  intéres- 
sants, que  de  choses  nous  pourrions  constater  encore,  tout  en 
admirant  le  paysage.  La  géologie  s'apprend  ici  comme  au 
milieu  d'un  rôvc  charmant. 

Pourquoi  le  nom  de  lac  Noir?  Je  perds,  à  en  chercher 
lexplicaliou,  tout  mon  latin.  A  dire  vrai,  les  eaux  du  lac  Noir 
lie  sont  pas  plus  uoires  que  ne  sont  blanches  les  eaux  du 
lac  Blanc.  Puisez-en  un  verre  dans  l'un  ou  l'autre  bassin, 
c'est  id  et  là  comme  le  cristal  le  plus  pur,  une  onde  limpide, 
transparente.  Transparenie^ia  nappe  du  lac  Noir  le  parait 
surtout  à  certaine  heurT'du  matin  par  les  belles  journées 
d'été,  avant  le  lever  du  soleil,  alors  qu'aucune  brise  ne  souffîe 
encore.  La  brise  se  \ëve  avec  le  soleil,  aspirée  par  les  mon* 
tagnes.  Si  vous  arrivez  à  l'heure  due,  sans  crainte  de  fatigue, 
le  lac  vous  offre  une  scène  ravissante  de  beauté.  Pas  la 
intiiidre  ride  à  la  surface  de  Teau,  pas  un  bruit  dans  l'air. 
Rien  ne  détourne  l'attention,  si  ce  n'est  le  mugissement  dis- 
cret de  la  cascade  ou  le  chant  de  réveil  des  oiseaux  ;  encore 
les  oiseaux  sont-ils  rares  et  la  cascade  se  tait  souvent.  Tout 
demeure  tranquille  sur  la  rive  du  lac.  Le  regard  plonge  dans 
ses  profondeurs  sans  pouvoir  les  mesurer.  L'image  des  objets 
environnants  se  reflète  dans  son  miroir  avec  une  pureté  de 
ions,  une  netteté  admirables.  Montagnes,  rochers,  forêts,  ciel, 
verdure  se  montrent  à  la  fois  dans  l'onde  et  au-dessus  de 
l'onde,  comme  s'ils  étaient  dédoublés.  Quel  magnifique  labieau! 
niais,  surtout,  quelle  sérénité  et  quel  calme!  Que  ne  suis-je 
assez  artiste  pour  saisir  et  lixer  celte  scèue  sous  sou  aspect 


92 


AEVUS  D'ALSACB 


du  moment!  Elle  est  si  mobile,  si  fugitive.  De  longtemps  nous 
ne  la  verrons  plus  dans  sa  beauté  présente,  le  moindre  souille 
d'air,  un  rien  suilisant  pour  i  altérer.  Ainsi,  dans  la  vie, 
nos  impressions  et  dos  sentiments  les  meilleurs  trouvent  à 
peine  nu  instant  ponr  se  manifester  sans  que  le  vent  des  con- 
tradictions ne  trouble  ou  ne  dissipe  leur  calme  serein. 

Le  bassin  du  lac  forme  une  curette  de  {^anit,  entaillée 
comme  à  remporte-pièce  dans  le  flanc  delà  montagne.  Impos- 
sible de  fkire  le  tour  de  la  nappe  d'eau  à  pied  an  nireau  de 
sa  surface.  Sur  la  gauche  de  la  cascade  le  rocher  descend  à 
pîc  pour  plonger  à  une  grande  profondeur.  Plus  haut,  les 
escarpements  s'étagent  par  gradins,  mais  sans  former  de 
parois  continues,  alternant  avec  des  haldes  de  blocs  éboulés, 
arrachés  de  leur  tête  par  la  gelée  et  les  intempéries,  puis 
accumulés  en  longues  traînées  mobiles  sur  les  pointes  moins 
dédires.  Le  ton  grisfttre  de  oes  pierres  trancbe  arec  la  rer- 
dure  des  mousses  et  des  bruyères.  Bruyères  et  mousses  se 
(  cramponnent  partout  où  reste  un  peu  de  terre  régétale.  Cette 

terre  derient^lle  assez  épaisse,  les  buissons  et  les  arbres  y 
prennent  racine,  notamment  de  petits  pins  que  le  vent  tour- 

« 

mente  et  que  la  neige  écrase  souvent.  Si  vous  montez  dans 
les  couloirs  entre  les  grands  rochers,  vous  y  trouvez  des 
^  lacets  tendus  pour  les  chevreuils  aux  branches  d'arlires 

repliées.  Vous  y  entendez  aussi,  pendant  les  premiers  jours 
de  septembre,  les  gais  appels  des  myrtillenses,  quiront  cueil- 
lir avec  des  peignes  en  bois  les  baies  noires  et  sucrées  de  la 
brimbelle,  au  milieu  des  escarpements  et  des  bruyères. 
Paurres  filles  de  la  montagne,  la  cueillette  des  brimbelles 
est  pour  elles  une  féte.  En  traraillant  bien,  chacune  peut, 
dans  la  journée,  ramasser  un  panier  de  fruits.  Rfais,  an  prix 
de  quelles  fatigues!  La  hrimbellc  ou  la  myrtille  noire  se  vend 
à  quatre  .sous  la  livre.  Un  pnnier  pèse  de  30  à  40  livres.  On 
en  fait  des  confitures;  on  la  sèche  pour  la  conserver  pendant 
l'année,  ou  bien  encore  on  la  distille  pour  en  tirer  une  bonne 
eau-dc-Tie.  Il  vient  d'ailleurs  de  nos  montagnes  quatre  espèces 


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SCÈNES  BT  PAYSAGES  DES  VOSGES 


83 


de  myrlîlles  :  la  myrtille  noire  ou  brimbelle,  Vaccînum  myr- 
iillus  des  l)otaiiistes,  on  aWemmà  Uekielbeere  on  Sehwarzheere^ 
commune  dans  tout  le  pays,  depuis  la  forôt  de  lîagucnau, 
dans  la  plaine,  jusqu'au  sommet  des  montagnes;  la  myrtille 
des  marais.  V.  idigmosum,  Jœgdrheer  ou  Rossbeer,  à  fruit 
plus  grand,  d'un  bleu  foncé  et  à  saTear  très  douce,  fréquente 
dans  les  pâtorages  tourbeux  en  plaine  et  au  felfe  des  Vosges; 
la  myrtille  rouge,  F.  vi^  Uka  ou  Preisseèeere,  à  fruit  d'un 
rouge  écarlate,  d*nne  saveur  plus  âpre,  qui  vient  dans  les 
bruyères  et  les  pâturages  élevés;  enfin  la  myrtille  des  mousses, 
V.  oxycoccos,  Moosbeere  ou  Torfimre,  (|ui  croît  surtout  dans 
es  tourbières  mousseuses,  sert  à  préparer  une  confiture  et  à 
la  nourriture  du  coq  de  bruyère. 

Pour  aller  du  lac  Noir  au  lac  Blauc,  il  faut  une  demi- 
heure,  près  d'une  heure  pour  atteindre  l'hôtel  Petitdemange 
au-dessus  du  lac  Blanc  L'hôtel  se  trouve  à  1120  mètres  d'al- 
titude, le  point  le  plus  élevé  des  Hautes-Charmes  à  ISOO,  le 
lae  Blanc  à  1050,  le  lac  Noir  à  980,  Orbey  à  450.  Un  bon 
sentier  conduit  d*nn  lac  à  Tautre.  U  monte  jusqu'à  l'hôtel, 
suivant  une  pente  régulière,  traversant  entre  les  deux  lacs 
une  nouvelle  forêt  de  pins  et  de  sapins  delà  plus  belle  venue, 
bien  fraîche  peiuiantles  journées  chaudes  d  été.  Dans  la  forêt, 
la  pensée  des  V'osges  vous  olTrc,  en  juillet,  de  vrais  tapis  de 
fleurs,  comme  ailleurs  la  myrtille  ou  la  bruyère  rose.  Il  y  en 
la  de  toutes  les  couleurs,  bleues,  jaunes  et  blanches,  avec  les 
nuances  intermédiaires,  tantôt  indigo-pourpre,  tantôt  présen- 
tant à  la  fois  le  pourpre,  le  jaune  et  le  blanc.  J'en  ai  cueille 
des  bouquets  de  six  variétés  différentes.  Âdmires-les  donc  un 
peu,  ces  pensées  sauvages.  A  côté,  les  fraises  pourpres  si 
décèlent  par  leur  parfum,  puis,  un  peu  plus  tard,  les  fram- 
boises avec  la  potentille  jaune,  la  carapanîlle  bleue  et  la 
Btellaire.  A  mi-chemin  des  deux  lacs,  se  trouve  une  grande 
tourbière,  cachée  par  un  rideau  de  bois,  mais  que  vous  aper- 
cevrez bientôt  en  vous  approchant  de  la  digue  du  lac  Blanc, 


94 


BETUB  D'ALSAOB 


sur  la  gaiicliG.  Sur  la  droite  le  regard,  si  vous  le  déiounioz, 
embrasse  d  abord  le  vallon  de  Pairis,  noyé  dans  de  légères 
brames,  puis  celui  de  Blancrupt.  Le  Blancrupt  est  le  ruis- 
seau qui  8*échappe  du  lac  Blanc  il  saute  de  cascades  en  cas- 
cades, tontes  blanches  d^écume,  quand  les  vannes  du  barrage 
sont  ouvertes  et  toutes  bien  dignes  de  fixer  un  moment  l'at- 
tention, même  pour  quiconque  a  tu  les  chutes  plus  grandes 
des  Alpes  suisses.  Réunies  avec  celles  du  lac  Ndr,  les  eaux 
du  Blancrupt  forment,  au-dessus  d'Orbey,  la  Weiss,  affluent 
de  la  Fecht. 

Nous  voici  sur  le  barrage  du  hic  Blanc.  D'un  côté,  s  ouvre 
la  gorge  qui  livre  passage  au  ruisseau,  de  l'autre  p3  dressent 
les  rochers  escarpés  qui  dominent  le  lac  avec  un  aspect  de 
vieilles  tours  en  ruines.  Un  de  ces  rochers  porte  le  nom  de 
châimi  Sans.  C'est  le  plus  élevé  et  sa  silhonetto  se  découpe 
sur  le  del  bleu.  Le  versant  du  lac  que  longe  le  sentier  est 
seul  boisé.  Les  autres  consistent  en  escarpements  trop  raîdes, 
où  viennent  à  peine  quelques  buissons.  Citons,  parmi  les 
buissons,  le  rhododendron,  rose  des  Alpes  perdue  dans  ce  coin 
des  Vosges,  le  seul  point  de  nos  montagnes  où  nous  connais- 
sions celle  plante,  non  inscrite  encore  clans  les  catalogues  de 
la  flore  indigène.  Avec  le  rhododendron  se  trouve  aussi  le 
sorbier,  aux  fruits  rouges,  aliment  favori  des  grives.  Ces  sor- 
biers sont  tellement  chargés  de  baies  que  les  branches  plient 
sous  leur  poids.  Quand  le  soleil  de  midi  frappe  le  lac  de  ses 
rayons,  Tceil  ne  peut  supporter  le  miroitement  de  ses  eaux, 
ni  réblonissante  blancheur  de  son  bassin  rocheux  et  de  ses 
plages  de  sable  à  la  fin  de  Tété.  Quand  Torage  gronde  sur  les 
sommets,  les  nuages  sombres  envahis.scnt  les  cirques  des 
deux  lacs,  cl  tourbillonnent  en  se  uéchiraul  sur  leurs  parois 
déchiquetées  avec  une  furie  sauvage.  Ils  passent  très  vite 
au-dessus  des  dignes  du  seuil  d'écoulement,  se  forment  en  un 
clin  d'uni  et  se  dissipent  avec  une  rapidité  égale,  sousl'elïet 
d'un  fort  courant  d'air  qui  règne  en  ce  point.  Les  masses 


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SCÈNES  ET  PAYSAGES  DES  VOSGES 


(l'air  comprimées  à  l'issue  des  cirques,  qù  l'espace  se  resserre 
brusquement,  déterminent  un  vent  violent,  au  point  qu'un 
homme  a  souvent  de  la  peine  à  se  tenir  debout  sur  la  crête  du 
barrage,  alors  qu'au  fond  do  la  vallée,  l'air  est  parfaiiemeat 
tranquille. 

Avant  la  constroetioo  des  barrages,  qui  ont  transformé  le 
lac  Blanc  et  le  lac  Noir  en  réservoirs,  les  afflux  â*eau  causés 
par  les  pluies  excessives  ou  par  la  fonte  des  neiges  se  dissi- 
paient en  quelques  heures  sans  ctianger  sensiblement  le 
Kîveau  des  lacs.  Dans  la  vallée  inférieure,  le  torrent  donnait 
lieu,  au  printemps  et  en  automne,  à  des  débordements  dange- 
reux, suivis  pendant  l'été  de  sécheresses  plus  ou  moins 
intenses,  La  disposition  des  lieux  devait  tout  naturellement 
appeler  la  création  de  réservoirs  aux  lacs  d'Orbey.  Elevés 
à  rentrée  des  couloirs  qui  livrent  passage  aux  eaux,  les  bar- 
rages construits  mesurent,  Tun  25,  Tautre  50  mètres  de 
développement,  sur  une  épaisseur  de  16  mètres,  avec  une 
hauteur  au-dessus  du  niveau  naturel  de  6  mètres  au  lac  Blanc 
et  de  li  mètres  au  lac  Ndr.  Ils  se  composent  de  deux  murs 
secs  en  blocs  de  granit  L'intervalle  entre  ces  deux  murs  a 
été  rempli  avec  des  rochers,  du  sable,  de  la  terre  provenant 
delà  déconipusilion  du  granit.  L'ii  massif  de  béton  hydrau- 
lique traverse  la  diguo  à  3  mètres  du  parement  ([iii  fait  face 
au  lac,  afin  d  empéclier  les  iiitrations.  Pour  éviter  la  dislo- 
cation du  mur  vertical  du  côté  de  l'eau  sous  l'action  de  la 
gelée,  on  l  a  garanti  par  un  talus  de  gros  blocs  simplement 
juxtaposés.  L'écoulement  des  eaux  s  effectue  au  moyen  de 
tuyaux  en  fonte  solidement  fixés  à  la  base  du  barrage,  dette 
conduite  débouche  du  côté  du  lac  dans  une  cage  ménagée  dans 
le  mur  de  soutènement.  Du  côté  opposé,  elle  est  munie  â*un 
ajutage  avec  une  vanne,  qui  8*ouvre  et  se  forme  au  fond 
d'une  chambre  destinée  aussi  à  mettre  ce  mécanisme  à  l'abri 
de  la  gelée.  Le  canal  d  éiouicmcnt  à  murs  parallèles  se  pro- 
longe en  dehors  de  la  chambre.  Le  canal  d'amenée  s'évase 


96 


REVUE  D'ALSACE 


vers  le  lac  sur  toute  sa  longueur.  Tout  le  réservoir  se  remplit- 
il,  les  eaux  surabondantes  s'écoulent  par  un  déversoir  de 
superficie, arrasé  à  un  mèlre  au-dessus  du  niveau  du  barrage 
et  revêtu  d'an  dallage  solide  pour  éviter  les  alfouillcmenls. 
De  plus,  un  parapet  d'un  mètre  également,  élevé  du  côté  du 
lac»  protège  Toumge  contre  le  choc  des  vagues  que  les  vents 
du  sud  et  de  Touest  soulèvent  parfois  avec  violence  à  la  sur- 
filée des  eaux.  Tai  vu  telles  de  ces  vagues  atteindre,  lors  de 
fortes  bourrasques,  deux  mètres  et  plus  d'élévation  contre  les 
parois  de  la  digue  du  lac  Blanc. 

Les  deux  barrages  sont  construits  de  même,  avec  cette 
dillérence  que  l'ouvrage  atteint  une  plus  grande  élévation 
au  lac  Noir  qu'au  lac  Blanc,  afin  de  contenir  un  afriux  d'eau 
plus  considérable.  Ensemble,  ils  assurent  une  réserve  d'en- 
viron trois  millions  de  mètres  cubes,  soit  1 ,800,000  pour  le 
lac  Noir  et  1,200,000  pour  le  lac  Blanc,  le  bassin  d'alimen- 
tation du  lac  Noir  étant  de  288  hectares  environ  et  celui  du 
lac  Blanc  de  i6S  hectares.  Année  moyenne,  la  hauteur  d'eau 
fournie  par  les  neiges  et  les  pluies  équivaut,  dans  cette  partie 
des  Vosges,  à  1500  millimètres,  avec  des  rarlations  de  1000 
à  2000  millimètres.  Entre  les  eaux  tombées  à  la  surface  du 
bassin  de  réception  des  deux  lacs  et  celles  retenues  par  les 
barrages  des  réservoirs,  la  proportion  est  de  deux  à  un.  Cela 
veut  dire  que  les  barrages  retiendraient  seulement  la  moitié 
des  eaux  tombées,  si  elles  arrivaient  d'un  coup.  Mais,  dans 
rintervalle  des  pluies,  une  partie  des  eaux  recueillies  peut 
être  lâchée  à  volonté.  L'an  passé,  en  18T6,  le  lac  Blanc  a 
déversé,  par  le  canal  établi  à  la  crête  du  barrage,  depuis  le 
mois  de  lévrier  jusqu'à  la  fin  de  jub.  D  serait  facile  d'aug- 
menter la  retenue  de  500,000  mètres  cubes  pendant  les  années 
humides,  en  élevant  de  deux  mètres  le  niveau  du  déver- 
soir. Cette  réserve  assure  aux  usines  la  force  motrice  néces- 
saire en  temps  de  sécheresse,  tout  en  servant  encore  pour 
rirrigatiou  des  prairies  de  la  vallée  pendaut  Tété,  alors  que, 


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SCÊNU  IT  PAYSAGES  DES  VOSGES 


97 


nos  les  l)aiTage8,les  lacs  ue  fourniraient  plus  rien.  Tout  cela 
avec  une  dépense  de  70,000  francs  pour  les  frais  de  construc- 
tion primitifs,  et  8000  à  4000  francs  de  frais  aunuels  de  garde 
et  d'entretien. 

Après  ces  beaux  résultats, pourquoi  ne  TOyons-nOQSpas  se 
multiplier  les  entreprises  analogues?  Depuis  la  création  des 
réservoirs  d'Orboy,  les  industriels  de  Guebwiller  et  ceux  de 
la  vaUée  de  Masevaux  ont  également  fait  des  retenues  aux 
Neuweyer,  au  Stemsée  et  an  lac  du  Ballon.  On  a  construit 
au-dessus  de  Soultzeren,  dans  le  val  de  la  Fecht,  les  réser- 
voirs du  lac  Vert  et  du  Fohrenweyer.  Mais  il  serait  aisé  d'em- 
magasiner l'eau  en  plus  grande  quantité  dans  les  vallées 
des  Vosges.  D'une  part,  l'opposition  des  cultivateurs  et,  du 
côté  des  fabricants,  la  responsabilité  en  cas  de  rupture  des 
digues  enlraveut  Icxécution  de  ces  ouvrages  éminemment 
utiles.  Les  paysans  dOrbey  ont  vu  d'un  œil  défiant  et  se  sont 
longtemps  opposés  à  rendiguement  des  lacs,  sous  prétexte  d'un 
préjudice  pour  leurs  prairies  ;  mais,  depuis  qnlls  éprouvent 
les  effets  utiles  des  retenues  d'eau  pour  leurs  irrigations,  ils 
reviennent  de  leur  opposition  pour  réclamer  la  multiplication 
des  réservoirs.  Quant  au  danger  des  ruptures,  on  1  exagère 
beauROup  et  une  bonne  exécution  des  travaux  l'écarté  com- 
plètement. Au  lieu  de  {grands  bassins  comme  ceux  de  l'Algérie, 
on  peut  se  contenter  de  petites  retenues  étagées  dans  les  val- 
lées, de  distance  en  distance,  selon  l'abondance  des  eaux  et 
les  dis{)ositions  du  terrain.  C'est  le  système  que  nous  appli- 
l'iotis  dans  les  Vosges,  système  qui  présente  des  avantages 
évidents  pour  rirrigation  des  prairies,  comme  pour  les  moteurs 
des  usines,  sans  exposer  à  des  risques  graves  comme  les  bar- 
'«ges  de  grandes  dimensions.  Ne  voyons-nous  pas  certains 
barrages  du  midi  de  l'Espagne,  construits  par  les  Maures, 
«noorebîen  conservés  aujourd'hui,  malgré  un  entrelien  assez 
négligé?  En  Algérie,  le  réservoir  de  l'H-^bra  résiste  bien 
aussi,  malgré  une  capacité  de  35,000,000  de  mètres  cubes  et 


BEVUE  D'ALSACE 


une  élévation  de  34  \miiv6.  Le  barrage  du  Furent,  au-dessns 
de  Saint-Etienne,  atteint  même  50  mètres  de  liaiiteur;  mais 
il  est  en  maçonnerie  pleine,  ainsi  que  ceux  de  l  AIgérie  et  de 
l'Espagne  Pendant  sa  session  de  1876,  le  Conseil  général  de 
la  Haute-Alsace  émit  un  vœu  pour  l'élaboration  d'un  projet 
de  loi  finseepUble  de  ravoriser  l'établissement  des  réserroirs, 
en  dégageant  la  responsabilité  directe  des  constructeurs.  Ce 
qui  vaudrait  mieux,  c'est  que  le  gouvernement  exécutât  ces 
travaux  avec  le  concours  pécuniaire  des  plus  intéressés,  en 
vue  de  régulariser  le  régime  de  l'Ul,  œuvre  dont  profiterait 
toute  la  plaine  d'Alsace. 

De  fait,  l'idée  des  réservoirs  d'eau  jiest  pas  nouvelle,  même 
en  Alsace.  Nous  avons  sous  Un  yeux  d'anciennes  cartes  du 
XVI'  âècle,  qui  indiquent  i'existence  de  nombreuses  digues 
formant  autant  de  réservoirs  étagés  le  uns  au-dessus  des 
autres  dans  toutes  nos  vallées.  Par  malbeur,  la  guerre  des 
paysans  a  détruit  la  plupart  de  ces  ouvrages.  Ceux  de  ces 
réservoirs  qui  rendaient  TIll  navigable  jusqu'à  Altkircb,  ceux 
qui  régularisaient  le  cours  delà  Thurr,  n'existent  plus  depuis 
ces  tristes  temps.  Mais,  suivant  l'exemple  donné  dans  la 
vallée  de  la  Weiss,  les  proi  rictaires  d'usines  et  de  febriques 
de  la  vallée  de  la  Tnurr  ont  fut  étudier  cinq  projets  de 
barrages,  dont  un  seul,  consiruil  eu  aval  du  château  de  Wil- 
denstein,  donnerait  une  retenue  de  3,000,000  mètres  cubes. 
Dans  la  vallée  de  Munster,  nous  avons  aussi  étudié  la  con- 
struction de  sept  réservoirs  nouveaux,  susceptibles  de  retenir 
8,500,000  mètres  cubes  en  sus  du  volume  d'eau  fourni  par 
la  retenue  du  lac  Vert  et  du  Fohrenweyer. 

On  a  commencé  par  construire  les  barrages  qui  présen- 
taient le  plus  de  facilité  d'exécution,  en  toucbantaux  retenues 
naturelles  des  lacs  a^scz  nombreux  dans  les  Vof^ges.  C'est  le 
cas  des  réservoirs  d  Orbey.  du  lac  Vert,  du  Slei  n^ce,  des 
Neuweyer,  du  Ballon,  sur  le  versant  alsacien,  puis  du  lac  du 
Corbeau  et  du  lac  de  Biauciicmer,  près  de  La  Brosse  en  Lor- 


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SCÈNES  ST  PAYSAGES  DBS  TOSOBS 


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raine.  Au  lac  du  Ballon,  dont  lancienne  digue,  élevée  par 
Vauban,  lors  de  la  construction  des  forts  de  Neuf-Brisach, 
avec  de  sinipie^  n-mblais  en  terre,  s'est  rompue  en  1740,  Ja 
prise  d'eau  s'eilectue  au  moyen  d"un  canal  creusé  dans  le  roc 
et  réglé  par  une  vanne  à  18  mètres  de  la  surface  da  lac.  Vous 
ne  m'en  Toudrez  pas  de  tous  entretenir  un  peu  de  ces  réser- 
voirs d*eau  des  Vosges.  La  question  mérite  une  attention 
sérieuse.  Elle  se  trouve  à  Tordre  du  jour  dans  les  pays  de 
montagnes,  en  France  comme  en  Espagne  et  en  Italie,  en 
Algérie,  en  Chine  et  dans  1  'Inde.  En  Alsace  les  réservoirs 
construits  dRHS  un  ijtit  [)urement  industriel,  ont  couvert  en 
peu  de  temps  les  frais.  Personne  na  oublié  les  désastres 
causés  à  Toulouse,  au  mois  de  juin  1875,  par  le  débordement 
de  la  Garonne,  avec  une  perte  de  75,000,000  francs,  sans 
compter  la  mort  d'un  millier  de  personnes.  Or,  la  lamed'ean 
nuisible  de  la  Garonne,  cause  de  tout  ce  mal,  ne  dépassa 
guère  cent  millions  de  mètres  cubes.  Trois  on  quatre  barrages, 
comme  celui  de  l'Habra,  qui  a  coùlé  quatre  à  dnq  millions 
de  francs,  auraient  suffi  pour  arrêter  cet  excédant  d'esn  Aineste. 
Preuve  péremptoire  en  faveur  de  l'utilité  et  de  la  valeur 
rémunératrice  des  barrages-réservoirs,  grands  et  petits. 

La  plupart  de  nos  lacs  des  Vosges,  pour  ne  pas  dire  tous, 
doivent  leur  formation  à  des  digues  morainiques  déposées 
par  d'anciens  glacii.rs.  maintenant  disparus.  Elie  de  Beaumont 
attribuait  l'onV^ine  du  lac  Noir  et  du  lac  Blanc  à  des  t  écrou- 
lamcnls  qui  ont  eu  lieu  dans  des  cavités  situées  dans  l'inté- 
rieur des  montagnes  à  l'occasion  des  dernières  secousses  qui 
s'y  sont  Dût  sentir,  et  peut-être  à  Tépoque  des  éruptions  vol- 
caniques, qui  ont  produit  à  leur  pied,  dans  la  plaine  du  Rhin, 
le  massif  du  Kayserstuhl  et  les  petits  îlots  basaltiques  de 
Richewihr  et  de  Gundershofen  Par  leur  aspect  cratéri- 
forme,  certains  de  nos  lacs,  surtout  le  Sternsée  de  la  vallée 
deMasevaux,  res>cmb!o[it  cHi\  lacs  avec  amphitliéàtre  de  Meer- 
feld,  de  Gilicnfeid  et  de  JJauu,  dans  i'Ëiel,  ou  bien  encore 


100 


BBVUE  d' ALSACE 


au  lac  Pavin.  en  Auvergne.  xN'onobstant,  je  n'oserais  afiirmer 
que  l'apparition  des  lacs  vosgiens  résulte  d'elTondrements. 
Leur  origine  tnorainique  est  trop  manifeste  sur  la  plupart 
ûm  points.  Même  aux  lacs  d'Orbey,  l'action  des  glaciers  se 
reconnaît  aisément,  nous  l'avons  vu  tout  à  l'heure.  La  profon- 
deur des  deux  bassins  peut  bien  soule?er  des  objections,  car, 
dans  le  iac  Blanc,  j*ai  constaté  arec  la  sonde  68  mètres  de 
hauteur  d*eau,  tandis  que  les  blocs  détachés  reooumnt  le 
bord  oriental  jusqu^à  80  mètres  d^élération  au-dessus  de  son 
niveau.  Mais  tout  Taspect  du  sol  environnant  rappelle  Taction 
glaciaire,  les  moraines  qui  constituent  les  dignes  qui  ont 
donné  naissance  aux  autres  lacs  des  Vosges,  aux  lacs  de 
Gérardmer  et  de  Longemer,  aux  lacs  de  Blanchemer,  du  Cor- 
beau et  de  Fondromaix,  de  Soultzeren  et  de  Seewen.  Ces 
autres  nappes  d'eau  remplissent  des  vallons  à  fond  plat,  barrés 
par  des  digues  de  débris  erratiques,  d'anciennes  moraines 
frontales.  Plusieurs  de  ces  lacs  aussi  sont  enTshis  par  la 
tourbe;  nombre  de  bassins,  aujourd'hui  à  sec  et  susoeptiblea 
de  se  prêter  à  la  création  de  réservoirs,  doivent  leur  origine 
à  des  moraines. 

Âu  lac  Noir,  25  août  1Ô77. 

Ch.  Grao, 
Membue  du  Clnb  alpin  français. 


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HISTOIRE 


DE 

L'ANCIEN  COMTÉ  DE  SAAllWEllDEN 

ET  DE 

LA  PRÊYOTË  DE  HERBITZHEIH 

rSuiteJ 


CHAPITRE  IV 

Le  comté  de  Saarwerden  sous  la  domination  de 
la  maison  de  Nassau-Saarbrnok 

Le  comte  Jean-Louis  de  Nassau-Saarbruck,  affaibli  par 
l'ûge  et  fatigué  d'un  règae  qui  avait  duré  plus  de  soixante- 
dix  ans,  Qk  le  partage  de  ses  Ëtats  entre  ses  trois  fils,  sairant 
acte  du  mardi  après  Jubilate  (mai)  1544.  Philippe,  rataô, 
est  le  eomté  de  Saarbrack  arec  ra>ooer!e  de  Herbitsheira  ; 
Jean,  le  second,  reçut  la  seigneurie  d'Ottwiller  et  celle  do 
Hombourg;  et  son  troisième  fils,  Adolphe,  reçut  la  part  qui 
appartenait  à  son  père  de  la  seigueurie  de  Kirchheira,  savoir: 
le  château  de  Tannenfels  et  ses  dépendances,  la  ville  et 
le  château  de  Kirchheim  avec  leurs  dépendances  el  la  part 

il  avait  à  prétendre  dans  les  seigneuries  de  Frankenatein, 
WôUsteia  et  Aiten-Bamberg.  Le  comté  de  Sairverden  et  les 


102 


REVUE  D'ALSACE 


seigneuries  de  Lahr  et  de  Malill)erg,  qui  étaient  grevés  du 
douaire  de  leur  mère,  Catherine  de  Sîiarwerden,  et  de  celui 
de  Béatrice  de  Salm,  veuve  du  com!e  Jacques  de  Saarwerden, 
demeurèreut  indivis  entre  les  trois  frères'. 

Le  comté  de  Saanrerden  avait  reçu  un  accroissement 
notable  par  l'engagement  que  Henri,  sire  de  Fénélrange^  avait 
ftit  en  1421  à  Philippe  I*',  comte  de  Nassau-Saarbrack,  de  la 
moitié  de  la  sdgnearie  de  Diemeringen,  qui  comprenait  le 
château  et  la  ville  de  ce  nom,  Weyer  (  Wigere^  village  détruit), 
Dehii n gen ,  BUtten et  Wellerdingen  (  VôUerdingen),  moyennant 
la  somme  de  quatre  mille  florins',  et  la  maison  de  Nassau - 
Saarbruck  sut  se  maintenir  par  la  >:vÀW.  dans  la  possession 
des  villages  de  Bulteu  et  de  Vullerdingeu,  qui  élaieul  si  fort 
à  sa  convenance. 

La  seigneurie  d'ilingen  {l/dingen)  qui  avait  appartenu  à  la 
maison  de  Saarwerden,  fut  conférée  dans  la  suite  en  âef  mas- 
culin aux  barons  de  Kerpen,  qui  la  possédaient  encore  vers 
la  fin  du  XVIII*  siècle'.  Le  Wmthum  de  ce  village,  publié 
par  6rimm\  est  de  Tan  1700.  Le  baron  Jean  Ferdinand  de 
Kerpen  avait  alors  obtenu  Tinvesliture  de  celte  sdgneurie 
lilliputienne  et  le  Geriehi  du  village  siégeait  comme  d'an- 
cienneté sous  le  tilleul  qui  s'élevait  sur  la  place  communale, 
et  il  était  présidé  par  le  receveur  seigneurial. 

Le  comte  Jean-Louis  de  Nassau-Saarbruck  termina,  le 
18  juin  1545,  le  cours  de  sa  carrière  terres're.  Le  mardi  de 
la  Saint-Barthélemi  de  la  môme  armée,  les  trois  frères,  Phi- 
lippe, Jean  et  Adolphe,  jurèrent  l'observance  du  pacte  béré« 
ditaire  làit  par  leur  père  an  sujet  du  comté  de  Saarwerden, 
et  reçurent,  conjointement  avec  leur  mère,  Thonamage  de 
leurs  sujets  de  Saarwerden  et  des  deux  seigneuries  trans- 
rhénanes. 

*  KCELLNKU,  Inc.  citât. ,  1. 1.  p.  252.    -  Ibidem,  l  I,  p.  190. 

*  Kremer,  Geschichtc  des  arien,  GegeUeekUs^  1 1,  p.  228. 

*  Weislhumer,  1. 11,  p.  M. 


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103 


La  veuve  du  conile  Jean-Louis  se  retira  dans  le  château 
paternel  de  Saarwerden,  où  elle  termina  ses  jours  le  vendredi 
après  1  Exaltation  de  la  croix  1547  ;  sa  tit  jiouille  mortelle  fut 
inhumée  dans  l'anliqne  é\;\\SL'  de  Houquenoin*. 

Ëo  1551,  Jean  de  Nassau -Saarbruck,  coinle  d'Otlwiiler,  ût 
ses  reprises  du  cardinal  de  Lenoncourl,  évèque  de  Metz,  pour 
les  fiefd  messios  enclavés  dans  le  comté  de  Saarwerden  ;  il  en 
feçat  Tinvestilure  que  François  de  Beaucaire,  successeur  du 
cardinal  de  Lenoncourl  sur  le  siège  messin,  lui  renouTela 
en  1557'. 

Un  différend  9*étant  élevé  entre  Philippe,  comte  de  Nassau- 

Saarbniek.  et  Jacques,  comte  de  Deux-Ponts-Bitclie,  au  sujet 
des  droits  que  celui-ci  prétenlait  avoir  diiis  le  comte  de 
SaiU'wenlen,  les  parties  cotilendatites  convinrent  de  s'en 
rapporter  à  l'arbitra;,'';  de  Jean  de  Scliwarzenl)  )uru^.  Inilli  de 
Sarregueminen:.  et  de  \\'o!f  di^  Wickersiieim;  ces  deux  arbitres 
se  réunirent  le  17  juillet  13ôâ,  a  Oermiugen,  et  moyennèrent 
entre  les  parties  un  arrangement,  par  suite  duquel  le  comte 
Philippe  de  Nassau-Saarbruck  céda  au  comte  Jacques  de 
Deuz-Ponls-Bitche  le  village  d'Âcken,  qui  dépendait  du  comté 
de  Saarwerden,  avec  les  habitants,  hommes,  femmes  et 
enfants,  et  toute  juridiction  contre  la  forêt  dite  Wersinger- 
hardt.  la  chapelle  de  Wersing  (  W'àrschinyy  et  la  forêt  dite 
Lelzel*. 

Le  comte  Philippe,  qui  s  était  retiré  à  Strasbourg  pour  y 
rétablir  sa  santé  délabrée,  y  finit  ses  jours  le  19  juin  1554', 
sans  laisser  de  postérité;  Jean  et  Adolphe  se  partagèrent 
Topulent  héritage  qui  venait  de  leur  échoir;  l*un  reçut  le 
comté  de  Saarbruck  et  Tautre  le  comté  de  Saarwerden  avec 

*  Kœllner.  Lqc.  citai.,  t.  I,  p.  255  et  erratam  sur  la  deniîëra  page. 
'  Sgh\^br,  Loe.  àtaLt  t.  II,  p.  243. 

'  Wùraching  était  une  censé  située  à  environ  ISOO  mètres  de  Rim- 

liii-r.  elle  a  été  dÂtruite  vers  1800. 

*  Archives  du  Uas-Rhin.  G.  E.  'A:V\. 

»  KftEMER,  Orig.  nassoic.»  t.  U,  p.  467. 


104  REVUE  D'ALSAGE 

les  seigneuries  de  Lahr  et  de  Mahlberg.  Ce  partage  n'eut 
qu'une  durée  éphémère.  A  peine  cinq  années  s'étaient-elles 
écoulées  que  le  comte  Adolphe  suivit  son  frère  dans  Téternité; 
il  mourut  à  la  fleur  de  l'âge,  le  26  novembre  1559,  vivement 
regretté  et  sans  enfants.  Son  frère  Jeao,  comte  d'Oltwiller, 
qui,  depuis  la  mort  de  Philippe,  a7ait  pris  le  titre  de  comte 
de  Nassau-Soarbmck,  devint  puissant  par  la  réunion  sur  sa 
tête  des  vastes  possessions  de  la  maison  de  Nassan-âaarbrock 
et  de  celle  de  Saarwerden,  et  obtint,  en  1568,  l'investiture 
des  fief^  messins  de  François  de  Beaueafre,  évêque  de  Metz. 

C'est  pendant  le  règne  d  Adulphe  que  la  réforme  s'intro- 
duisit dans  le  comté  de  Saarwerdcn.  Quoiqu'il  eftt  donné  son 
plein  assentiment  à  la  nouvelle  doctrine,  il  ne  l'a  jamais 
embrassée  publiquement,  et  n'employa  ni  la  violence,  ni  la 
contrainte,  pour  la  faire  adopter  à  ses  sujets;  une  tolérance 
éclairée  et  toujours  égale  caractérisa  son  trop  court  règne, 
et  il  ne  fovorisa  jamais  un  culte  aux  dépens  de  Tantre. 
Sons  le  règne  de  Jpan  IV,  comte  de  Nassau-Saarbruck,  une 
partie  de  la  population  suivit  l'exemple  de  son  souverain  et 
embrassa  la  religion  prolestante;  mais  malgré  le  jus  refor- 
mandi  qui  lui  compétait,  comme  seigneur  jouissant  de  la 
supériorité  territoriale,  il  n'cmplnya  jamais  l'exemple  de  la 
force  pour  opérer  des  conversions.  C'est  sons  le  règne  du 
comte  Adolphe,  vers  1558,  que  des  réformés  français  que  les 
persécutions  religieuses  avaient  fait  fuir  de  leur  patrie,  s'éta- 
blirent dans  le  comté  de  Saarwerden;  mais  c'est  surtout  sous 
le  règne  du  comte  Jean  IV  que  des  calvinistes  de  France  et  des 
Pays-Bas,  les  uns  chassés  par  les  édits  contre  les  réformés,  les 
autres  persécutés  par  llnquisition,  y  trouvèrent  asile  et  pro- 
tection, grftce  aux  démarches  actives  que  le  célèbre  disciple 
de  Calvin,  Guillaume  Farel,  qui  se  trouvait  alors  à  Metz,  fit 
faire,  tant  auprès  de  ce  prince  qu'auprès  d  isracl  Ashatius, 
son  surintendant  à  Saarwerden*.  Les  calvinistes  rétablirent 

'  Kœhrich,  MiUheilungm  aus  derCeaehi^ierevangdisehmKinihe 
des  Ekauest  L  U,  p.  133. 


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SAARW£RD£N  ET  HERBITZUEIM 


105 


les  villages  d'AItwiller,  do  Gorlingen.  de  Burbach,  de  Rau- 
weiler  et  de  Kirberij;.  qui  étaient  pre.sqiie  enticrenieiit  ruinés 
et  détruits.  Le  comte  Jean  encouragea  leurs  eiïurts,  leur  donna 
des  terres  à  cultiver  et  leur  accorda  la  liberté  du  culte;  il 
attira  même  dans  cette  contrée  des  ministres  calvinistes,  pour 
que  ses  nouveaux  sujets  pussent  entendre  la  parole  de  Dieu 
dans  leur  langue,  et  Toua  une  partie  des  revenus  des  églises 
protestantes  à  la  construction  de  temples  calvinistes,  de  pres- 
Iqrlères  et  de  maisons  d'école  pour  le  nouveaa  culte,  mais 
seolement  à  titre  de  gracieuseté.  Là  où  il  n*y  avait  pas  de 
temple,  les  réformés  s'assemblaient  en  plein  champ,  le 
ministre  montait  sur  une  charrette  ou  sur  des  arbres  amon- 
celés, pour  prt>cher,  et  ensuite  tous  ensemble,  hommes,  fem- 
mes et  enfants,  entonnaient  des  psaumes.  Dès  l'année  1575, 
ou  trouve  comme  ministres  du  culte  réformé,  Pierre  Armo- 
sianus,  à  Gorlingen,  et  M.  Dubaucq,  à  Burbach.  A  une  époque 
OÙ  les  esprits  étaient  partout  parvenus  an  dernier  degré  d'exal- 
tation religieuse,  le  comte  Jean  IV  sut  éviter  tout  conflit,  toute 
contestation  entre  ses  anciens  et  ses  nouveaux  sujets,  entre 
les  protestants  et  les  calvinistes,  en  assignant  à  ceux-ci  des 
villages  entièrement  séparés  de  ceux  habités  par  les  protes- 
tants, et  où  ils  pouvaient  vivre  selon  leur  culte  et  assister 
librement  à  leurs  prêches.  Les  villages  où  .s  etalilireiil  les 
réformés  fran(;ais  .sont  encore  appelés  de  nos  jours  les  villages 
français  (fiie  wckchm  JJiirfer)  el  le  nom  français  d'une  foule 
de  leurs  habitants  traduit  leur  descendance. 

Le  comte  Jean  IV  fut  occupé,  pendant  tout  son  règne,  à 
guérir,  par  une  administnition  sage,  les  maux  qu'avait  souf- 
ferts le  comté  de  Saarwerden,  qui  prit  an  accroissement 
rapide  de  population  et  de  richesse;  il  encouragea  Tagricnl- 
tore  et  remit  en  valeur  les  terres  abandonnées  ;  il  rétablit  les 
villages  d'Eywiller  el  de  Diedendorf  qui  étaient  entièrement 
détruits ^  L'exploitation  régulière  des  vastes  et  belles  ferôts 

*  Summarischer  Berichl,  p.  16. 


106 


BEVUE  D'ALSACE 


qui  couvraient  le  sol  des  comtés  de  Suarbruck  et  de  Saar- 
A^'erden  fut  longtemps  une  sourrc  de  bons  nroduils  pour  la 
maison  de  Nassau-Saarbruck  et  augmenta  considérablement 
SCS  revenus'. 

lits  différends  qui  s'étaient  élevés  entre  le  comte  Jean  lY 
de  Nasaau-Saarbruck  et  le  comte  palatin  George*Jean  de 
Veldenz,  au  sujet  de  leurs  droits  respectifs  à  Lohr,  Sinnwiller 
(SkioiUar)  et  dans  quelques  autres  localités,  furent  soumis  à 
rexamen  des  conseillers  respectifis  des  deux  seigneurs  et 
définîtivement  réglés  par  une  transaction  du  25  avril  1570*. 
Les  deux  seigneurs  proniirenl  de  se  restituer  réciproquement 
les  serfs  qui  pourraient  avoir  quitté  les  terres  de  l'un  d'eux 
pour  aller  demeurer  sur  les  terres  de  Tautre,  Le  comte  de 
Nassau-Saarbruck  céda  au  comte  palatin  de  Veldenz  tous  les 
gens,  biens  et  droits  généralement  quelconques  quMl  possédait 
à  Lohr,  contre  une  rente  annuelle  de  vingt  simmers  d'avoine 
dite  amt-simmer;  il  lui  céda  aussi  la  dime  à  Durstel  et  tims 
ses  droits  sur  le  Steiobaclierhof  ;  par  contre,  le  comte  George- 
Jean  céda  an  comte  de  Nassau  tous  les  biens  et  droits  quel- 
Cimqnes  qnfl  possédait  h  Rexint^en,  la  grosse  et  petite  dîme 
à  Sinnwiller  (Slewilkr)  et  à  EHenbacliS  le  droit  de  patronage 
de  l'église  de  Siiunviller  ffiui  étiiit  filiale  de  liolirl.  et  promit 
de  lui  livrer  annuellement  le>  six  rezeaux  de  seigle  que  les 
sires  de  Fénétrange  avaient  à  prétendre  à  Lolir.  pour  droit 
d'hébergement;  il  lui  céda  enfin  sa  métairie  à  Mackwiller,  la 
partie  de  la  dtme  que  l'église  de  Lutzelstein  avait  le  droit  de 
percevoir  dans  cette  localité  et  la  forêt  de  Gammerwald,  près 
de  Sinnwiller. 

Le  comte  Jean  IV,  qui  avait  réani  tout  lliérifage  de  son 

>  Obrecett,  PoUtischeê  Bedeneken  vtm  Land  und  LetU,  p.  96. 

*  Archives  du  Bas-Rhin,  S.  EL  352. 

*  Le  village  d'EUenbach  a  disparu  depuis  longtemps,  il  était  très 

ancien  ;  il  cii  osl  fait  mention  dans  u  ic  charte  de  l'abbaye  de  Wissem- 
boorg  da  30  jaîn  847;  sa  banlieue  a  été  réanie  à  celle  de  Drulingen. 


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8AÀIIW£IU>KN  ET  UEROlTZilEIM 


107 


père,  se  voyait  [)rîvé  d'enfiiiits  légitimes;  il  fit  donation,  en 

1571,  aux  frères  Albert  et  Phili['pe,  comtes  de  Nassau-Woil- 
biurg,  ses  coiniii.s,  du  comlc  de  Sacirwerden.  avec  tous  les 
biens,  propriélt's.  droits  de  souveraineté  et  de  juridiction  y 
attachés,  au  détriuicul  de  sa  sœur  Germaine-Catlieriue  de 
Nassau-Saarbruck.  qui  avait  donne  s;i  maiu,  en  1537,  à 
Emicli  IX,  comte  de  Linan^'e-Dabo.  Quoique  celle  donation, 
longtemps  méditée,  fût  autorisée  non  seulement  par  le  pacte 
héréditaire  de  la  maison  de  Nassau-Saarbruck,  mais  encore  par 
la  renonciation  éventuelle  que  Catherine,  du  consentement  du 
eomte  Emich  IX,  son  mari,  avait  faite  à  tout  héritage  contre  une 
eoistitution  de  dot  de  dix  mille  florins,  renonciation  qu'elle  avait 
prorais  de  respecter  par  un  seraient  solennellement  prêté,  en 
platrinlsa  main  droite  sur  son  sein  gauche,  selon  l'ancien 
mode  usité  en  Ai'.emagneS  elle  causa  des  contestations  aussi 
vives  {|i;c  longues  cnlre  la  branche  des  Nassau-Weiibuurg  et 
la  niaisoa  de  Lioauge-Dab.).  Le  comte  Jean  IV  avait  cru  faire 
respecter  sa  volonté  en  léguant  à  Jean«Pbilippe  I*'  et  Emich  X, 
comtes  de  Linange-Dabo,  ses  neveux,  la  somme  de  dix  mille 
florins,  ils  se  réservèrent  tous  leurs  droits  de  succession 
éventuelle  en  cas  de  défaillance  masculine  et  prolestèrent 
contre  toute  cession  à  ce  contraire. 

Gomme  le  procès  pendant  devant  la  Chambre  impériale  de 
Spire,  au  sujet  du  comté  de  Saaru'erden,  semblait  prendre 
une  tournure  favorable  aux  intérêts  de  la  maison  de  Nassau- 
Sa-dibruck,  le  comte  Jean  IV  aj  outa  à  son  nom  le  titre  de 
comte  de  Saarwerdeu  et  engagea  ses  agnats,  Albert  et  Phi- 
lippe, à  prendre  possession  du  comté.  Ces  seigneurs  prirent 
les  mesures  nécessaires  pour  garder  les  fruits  de  la  libéralité 
de  leur  cousin  ;  ils  se  firent  solennellement  reconnaître  par 
leurs  nouveaux  sujets  et  reçurent  leur  hommage  et  leur  serment 
de  fidélité.  Cette  cérémonie  se  fit  avec  la  plus  grande  pompe, 

'  Summamcher  Dendil,  p.  14. 


108 


BEVUE  D  ALSAOB 


le  2  mai  1571,  sur  la  prairie  qui  s'étend  devant  la  ville  de 
Sttarwerden  et  qu'on  appelle  communément  die  MiihlmattK 
Les  comtes  Albert  cl  Philippe  prirent  en  main,  du  consentement 
de  leur  cousin  Jean  IV,  le  gouvernail  des  all'aires  et  firent 
publier,  dès  l'année  1573,  dans  le  comté  de  Saarwerden,  par 
leur  bailli  Jean  Streif  de  Lauenstein,  un  remarquable  règle- 
ment iur  la  rente,  l'écbange  et  le  retrait  ligoager. 

Le  comte  Jean  IV,  mùr  pour  Tétemité,  termina  sa  carrière 
terrestre  à  Saarbruck,  le  2S  noyembre  1574,  et  arec  lui 
s'éteignit  la  lignée  de  Nassan-Saarbrnck  fondée  par  le  comte 
Jean  III.  Les  comtes  Albert  et  Philippe  se  mirent  eu  posses- 
sion, non  seulement  du  comté  de  Saurwcrden,  mais  encore  de 
tous  ses  Etats,  qu'il  leur  avait  léi^ués  par  ses  dispositions 
testamentaires  du  12  octobre  1563,  et  obtinrent  de  l'empereur 
Maximilien  II  un  mandatiim  de  non  ttirbando.  Ils  prirent  le 
titre  de  comtes  de  Nassau-Saarbruck  et  de  Saarwerden  et  en 
placèrent  les  armoiries  dans  leur  écnsson.  Selon  Spener*,  ils 
portaient  parU  et  coupé  de  dem  :  m  premier,  étasur  emé  de 
croix  recroieeettéee  m  pied  fiché  dar,  au  Hen  d^argerU  couromé 
«for,  ^eeide  Sàarbruck;  m  demièmy  de  eoMe,  à  taiglc  à 
deux  têtes  d'argent,  au  vol  déployé,  becquetée  et  memhrée  d'or 
et  lanpnée  de  gueules,  qui  est  de  Saarwerden;  au  troisième,  d'or 
à  la  f accède  sahlc^  qui  est  de  Mœrs;  au  quatrième,  d'or  à  deux 
léopards  de  gueules,  passant  l'un  sur  l'autre,  qui  est  de  Weil- 
bourg;  au  dnquièm,  dazur  semé  de  biUettee  dor,  au  lion  de 
même,  arméet  lampaeeédegueidee^quieetdeNaeeau;  aueixiime, 
de  einople  à  la  croix  en  sautoir  dor,  eemé  de  daussè  croisettee, 
trois  dans  diague  canton,  gui  était  de  Mehrenberg*;  au  sep- 
Même,  dor  auHon  de  sable,  qui  est  de  MaMberg;  et  au  hui- 

'  Erkrhard,  Loe.  eiuu.y  p.  69. 
*  Opu$  htraïdiettm,  tairai.  XXIX. 

'  Mebreiiberg,  ebâteaa  situé  «lans  le  eomté  de  Nassan-Weilboiirg,  était 

le  chef-lieu  d'une  seigneurie  qui  comprenait  div-scpt  villages;  en  1328, 
lors  de  le  défaillance  en  rac'^  rnâlc  des  dynastes  dt-  Mehreaberg,  celte 
seigneurie  tomba  par  mariage  à  la  maison  de  Nassau. 


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SAARWERDEN  ET  HBRBirZHEIM 


109 


Uème^  étor  à  h  faace  de  guettiez,  qt$i  est  de  Lahr.  Su!7ant 
l'armoriai  de  Luck',  ils  portaient  écartelé  au  premier  de  Saar- 
bruck,  au  deuxième  de  Mœrs,  au  troisième  de  Saarwerden,  au 
quatrième  de  Nassau,  sur  le  tout  Lahr  parti  de  Mahiberg. 

Quoique  le  testament  de  Jean  IV  portai,  pour  les  comtes 
Philippe  I"  et  Emich  X  de  Linange-Dabo,  la  clause  de  la 
nullité  de  lear  legs  de  dix  mille  florins,  slls  formaient  des 
oppositions  à  la  dernière  Tolonté  da  testateur,  ces  seigneurs 
qui  se  voyaient  exclus  de  la  succession  de  Catherine  de  Saar- 
werden, leur  aïeule  maternelle,  opposèrent  à  cette  exhéréda- 
lion  toutes  sortes  de  cbicanes  et  cherdièrent  à  revendiquer 
le  comté  de  Saarwerden  comme  fief  féminin,  qui  devait 
retomber  à  la  ligne  féminine,  au  défaut  d'héritiers  mâles. 
Ils  se  portèrent,  en  1588,  partie  intervenante  dans  le  procès 
pendant  à  la  Chambre  impériale  de  Spire  entre  la  maison  do 
Lorraine  et  celle  de  Nassau-Saarbruck,  au  sujet  de  la  posses- 
sion du  comté  de  Saarwerden,  et  plaidèrent  la  nullité  de  la 
cession  ou  donation  faite  de  ce  comté  aux  comtes  Albert  et 
Philippe  de  Nassau- Weilbourg  par  Jean  lY,  comte  de  Nassau- 
Saarbruck,  au  préjudice  de  Théritière  légitime'.  La  maison  de 
Linange-Dabo  ne  fut  jamais  établie  dans  cette  succession  tant 
convoitée  ;  elle  poursuivit  vainement  ses  droits  an  congrès 
d'Osnabruck,  qui  les  lui  réserva  pourtant  ;  cette  réserve  fut 
cause  qu'elle  renouvela,  en  1G98,  ses  prétentions,  à  la  Diète 
de  Ratisbonne,  et  lorsque  la  I\évolution  française  éclata,  le 
procès  pendant  à  la  Chambre  impériale  entre  la  maison  de 
Linange  et  celle  de  Nassau-Saarbruck  n*avait  pas  encore 
reçu  de  solution. 

Les  frères  Albert  et  Philippe,  de  la  branche  de  Nassau- 
Weilbourg,  que  la  défaillance  de  la  lignée  de  Nassau-Saar- 
bmck  avait  rendus  riches,  puissants  et  forts,  ne  craignirent 

'  Manuscrit  déposé  à  la  bibliothèque  de  Strasbourg,  brûlé  pendant  le 

siège  (le  1870. 
^  Lëhmann,  Die  Burgen  der  Pfals,  t.  lU,  p.  234. 


110 


REVOB  D'AIiSAOE 


pas  de  s'affaiblir  réciproquement  par  le  partage  de  leurs 
états  (le  partage  t^gal  des  Etals  souverains,  à  l'instar  des  for- 
tunes particulières,  était  alors  très  commun  en  Allemagne). 
Le  comte  Albert  reçut  Oltwillcr,  Hombourg,  Kirchheim,  Lahr 
et  Mahiberg,  et  Philippe  les  comtés  de  Saarwerden  et  de 
Saarbruck  et  la  seîgnearle  de  Stauff  ^ 

  la  nouvelle  de  la  mort  du  comte  Jean  lY  de  Nasaaa- 
Saarbruck,  Charles  HI,  duc  de  Lorraine,  résolut  de  faire 
valoir  les  prétentions  do  sa  maison  sur  le  comté  de  Saar- 
werden, il  enrôla  lies  troupes  et  fil  tous  les  préparatifs  néces- 
saires pour  s'en  emparer  de  vive  force,  mais,  menacé  du  ban 
de  l'Empire,  il  dut  renoncer  à  ses  projets  de  conquête  et 
attendre  la  décision  ûnale  de  la  GUumbro  impériale  de 
Spire'. 

C'est  ainsi  que  lorage  qui  menaçait  depuis  si  longtemps 
le  comté  de  Saarwerden  fut  encore  dissipé;  les  relations  avec 
la  Lorraine  devinrent  plus  pacifiques.  On  se  rapprocha  et, 
après  des  négociations,  on  conclut,  le  2S  août  1581,  Téchange 
suivant': 

Le  comte  Philippe  III  de  Na?sau-Saarl)ru  k  céda  et  aban- 
donna à  Charles  III,  duc  de  Lorraine,  sa  pari  d,i  village  de 
Salzbroun  cL  de  la  saline  de  ce  lieu,  avec  la  facullé  de  couper 
tout  le  bois  nécessaire  à  la  saline  dans  la  lorêl  dite  Almut, 
située  entre  Herbitzheim  et  Koskastel.  sous  la  ré  crve  et  sans 
préjudice  des  droits  d'usage  et  de  pÂlurage  dont  cette  forêt 
pourrait  être  grévée,  et  il  a  été  convenu  que  dorénavant  le 
vilUge  de  Salzbronn  ne  serait  plus  considéré  comme  une 
dépendance  de  Herbitzheim,  mais  qu'il  serait  compris  dans 
la  banlieue  d'Atbe  (Saar-Âlbe). 

Le  duc  de  Lorraine,  de  son  coté,  se  déporta,  au  proQl  du 
comte  Philippe,  des  droits  d  advocatie  et  de  liaute  juridiction 

'  Kœllner,  Loc.  cilat ,  i  I,  p.  987. 
«  Ibidem,  t.  I,  p.  288. 
'  Apptndix  cit,,  p.  7> 


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a/UkRVS'£RD£N  ET  U£RBITZH£IM 


111 


qu'il  prétendait  snr  Tancienne  abbaye  de  Herbitziieîm  et  dans 

les  villages  qui  en  dépeiidait'iit;  il  lui  céda  en  outre  sctze 
muids'  de  sel  de  renie  sur  la  saline  de  Salzbronn,  ef,  en  cas 
qiit'  cette  saiiuc  dut  cesser  delre  exploitée,  sur  celle  de 
Dieuze. 

Philippe  m  s^opposa,  non  sans  succès,  à  l'introduction  dans 
SCS  états  do  nouveau  calendrier,  que  le  pape  Grégoire  Xill 
essaya  de  faire  adopter  aux  protestants^  Il  confirma,  en 
les  us  et  coutumes  qui  régissaient  ses  Etats,  et,  en  1598,  il 
fixa  la  compétence  des  juridictions  inférieures  et  ordonna 
que  Ton  ne  pourrait  porter  devant  la  juridiction  d*appel  qoe 
les  causes  dont  le  taux  dait  supérieur  à  quinze  florins. 

Vers  la  lin  du  XVr  siècK',  Tccuvre  de  la  riruriuation  était 
accomplie  dans  tout  le  comté  de  Saarm  rdcn  ;  Bouquenom 
a?ait  embrassé  la  nouvelle  doctrine;  toutes  les  paroisses 
étaient  administrées  par  des  ministres  protestants  ou  calvi- 
nistes, qui  se  montraient  plus  intolérants  que  les  prêtres 
e&tholiques  de  celte  époque.  Le  culte  catholique  était  interdit, 
il  ne  fut  pas  permis  à  ceux  qui  étaient  restés  fidèles  à  la 
foi  de  leurs  pères  d*adorer  Dieu  à  leur  manière,  et  ils  furent 
en  butte  aux  insultes  et  aux  outrages  de  ceux  qui  s'étaient 
ralliés  à  ta  réforme.  lOn  i.'iOo,  tous  les  ministres  du  comté  se 
réiiiiirout  en  couvont,  sous  la  présidence  de  Jean  Kuliner,  qui 
fut  le  premier  pasteur  prote:i!ant  à  Bouquenom,  et  prirent 
une  mesure  digne  d'éloges.  Ils  arrêtèrent  que  ciiaiiue  paroisse 
aurait  son  registre  où  le  pasteur  inscrirait  les  actes  de  bap- 
tême et  de  mariage'. 

'  î.e  muid  de  sel  était  composé  de  16  vaxels,  le  vaxel  <lo  16  pots  ;  le 
polètiiit  snppcKi'  peser  deux  livivs  h  poitls  du  muid  do  sel  serait  de 
512  livres;  ce  poids  vnriail  d;  pdii  au-dessus  ou  au-dessous  (Calmet, 
Notice  de  Lorraiiir,  v.  Kosi<'r''>V 

'  Le  nouveau  calendrier  fut  adopté  dans  l'évèché  de  Metz  le  24  DO- 
Yembre  13^  et  autorisé  le  10  décembre  suivant,  qai  fut  compté  pour  le 
20  da  même  mois. 

'  Manuscrit  appartenant  &  la  famille  de  feu  M.  J.-N.  Kablé,  pbaima- 
cien  à  Saar-Union. 


118 


BEVUE  D'âLSACE 


Philippe  m  avait  épousé,  en  premières^  noces,  Henriette, 

comtesse  de  Mandersclieid,  et,  en  secondes  noces,  Isabelle,  lille 
de  Jean,  comte  de  Nassau- Dilicmbourg.  L'une  et  l'autre 
union  furent  stériles.  Ce  prince  cessa  de  vivre  le  12  mars 
1602;  il  eut  pour  successeur  son  neveu  Louis,  comte  d'Ott- 
willer,  qui  avait  reçu  dans  le  partage  de  la  succession  pater- 
nelle, Otlwiller,  Hombourg,  Kirchbeim  et  Lahr,  et  qui,  comme 
dernier  survivant  des  nombreux  fils  du  comte  Albert,  avait 
recueilli  toutes  les  terres  des  aînés. 

Louis,  qui  avait  eu  le  bonheur  de  réunir  toutes  les  posses- 
sions de  sa  maison,  commença  son  règne  sons  d*benreux 
auspices  et  se  ménagea  l'invesliture  du  comté  de  Saarwerdcn, 
que  le  cardinal  Charles  de  Lorraine,  évêqne  de  Metz,  lui 
accorda  sans  trop  de  difficnllés.  Jean-Kberard  Streif  de 
Lœwenslein  {Lmimstein),  son  bailli  à  Bouqucnom,  se  rendit 
en  son  nom  à  Vie,  où  il  reçut,  le  15  mai  1603.  de  ce  prélat,  de 
main  et  de  bouche,  les  fiefs  mouvant  de  i'évôché  de  Metz, 
savoir  :  le  chftteau  et  la  ville  de  Saarwerden,  la  ville  de  Bou- 
quenom  et  la  cour  de  Wiberswiller  ;  il  loi  rendit  ensuite 
hommage  et  promit,  au  nom  de  son  maître,  de  remplir  tontes 
les  obligations  auxquelles  un  fëal  vassal  était  tenu  et  obligé 
par  droit  et  par  coutame. 

Depuis  longtemps,  ladvccalie  de  l'ancienne  abbaye  de 
Wernerswiller  était  devenue  un  objet  do  litige  entre  la 
maison  de  Nassau -Saarbruck  et  celle  de  i3eux-Pouts;  le 
comte  Louis,  dominé  par  des  idées  de  paix  et  de  concorde, 
s'arrangea  en  1603  avec  le  comte  palatin  Jean  I-  de  Deux- 
PûDts  sur  ce  diiîérend,  et  lui  céda  tous  ses  droits  d'advocatie 
et  de  supériorité  territoriale  sur  cet  antique  mona8tère\ 

Presque  tous  les  actes  du  comte  Louis  portent  Tempreinte 
d'une  utilité  bien&isante;  en  1607,  il  fit  donation  à  rhôpital 
de  Saarbruck  d'une  rente  annuelle  de  cent  florins  à  prélever 
sur  les  revenus  de  Tancienne  abbaye  de  iierbilzheim'. 

»  KcELLNER,  Loc,  citat.,  1. 1,  p.  310,  »  ibidem,  1. 1,  p.  312. 


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SAAB'WBBDBN  BT  HEBBITZHBIU 


113 


Après  la  mort  du  cardinal  Charles  de  Lorraine,  Anne 
d'Escar.s,  cardinal  de  Givry,  (jui  lui  succéda  sur  le  siège  épis- 
copal  de  Metz,  accorda  au  comte  Louis  de  Nassau-Saarbruck 
rinvestilure  des  fiefô  enclavés  dans  le  comté  de  Saarwerden 
et  relevant  de  son  église,  et  le  bailli  de  Bouqaenom,  Jean- 
Eberard  Streif  de  Lauenstein  fit,  le  1*  septembre  1609,  au 
Dom  de  son  maître  et  comme  fondé  de  sa  procuration,  ses 
reprises  de  ces  fiefe  et  prôla  serment  de  fidélité  à  révêqae  de 
Metz,  devant  sa  cour  féodale  Kéant  à  VicS 

Depuis  quelques  années,  il  s'était  élevé  entre  le  duc 
Ileiiri  II  de  Lorraine  et  le  comte  Louis  de  Nassau-Saarbruck 
des  contestations  au  sujet  des  Tillages  de  Wieswiller  et  de 
Wulflingcn;  les  oUiciers  lorrains  prétendaient  que  ces  villages 
appartenaient  au  comté  de  Bilche,  tandis  que  les  employés  du 
comte  Louis  affirmaient  qu'ils  dépeodaient  du  comté  de 
Nassau-Saarbruek.  U  existait  encore  différents  démêlés  entre 
les  deux  malsons,  au  sqjet  de  diverses  prétentions  qu'elles 
formaient  Tune  contre  Tautre.  Le  duc  Henri  II  et  le  comte 
Louis,  animés  d'un  esprit  sincère  de  concorde,  nommèrent  des 
commissaires  pour  terminer  les  différends  qui  les  divisaient. 
Dans  des  conférences  tenues  à  Saaralbe  on  arrêta  une  trans- 
action qui  lui  sanctionnée  par  les  deux  princes,  savoir  :  à 
Nancy,  par  le  duc  Henri  H,  le  6  septembre,  et  à  Saarbruck, 
par  le  comte  Louis,  le  S  octobre  1621';  cette  transaction 
porte  en  substance: 

Le  comte  Louis  de  Nassau-Saarbruck  cède  à  Henri  U,  duc 
de  Lorraine,  toutes  ses  prétentions  sur  la  souveraineté  des 
villages  de  Wieswiller,  de  Wdlflingen,  de  Remeringen  et  de 
Grundwiller'  et  les  dîmes  à  Reuchlingen,  contre  les  droits  de 
souveraineté  et  de  haute  justice  sur  les  villages  de  Fechinjren, 
de  Saarweliingen,  d'Oermingeo,  de  Zettiugen  et  de  Siltziieim, 

*  Arrêt  de  r^to»,  p.  7. 

*  Àppenitx  ett.,  p.  13. 

'  Villages  de  l'anondisgement  de  Sarregaemiiies. 


Nouvelle  Série.  —  7"  Année. 


8 


114 


BEVUB  D'ALSACE 


et  tous  les  droits,  rentes,  revenus  et  propriétés  qui  apparte- 
naient à  la  maison  de  Lorraine,  dans  toute  l'étendue  de 
FaTOuerie  de  Herbitzheim. 

Les  deux  princes,  dans  le  but  d'augmenter  le  commerce  et 
de  favoriser  l'industrie,  firent,  le  S4  mars  1612,  un  traité 
pour  rendre  la  Saar  navigable,  depuis  le  village  de  Herbitzheim 
jusqu'à  Saarbmck;  il  y  fut  stipulé  que  Ton  creuserait  la 
rivière  dans  les  endroits  où  elle  était  trop  large,  qu'on  la 
nettoierait  là  où  elle  était  embarrassée,  qu  on  couperait  les 
bois  qui  croissaient  sur  ses  bords,  que  la  navigation  demeu- 
rerait libre  et  tranche  de  tous  droits  et  péage  pour  les  maisons 
des  deux  princes,  et  qu'au  surplus  il  serait  perçu  les  mêmes 
droits  et  péage  qu'auparavant^ 

Dans  le  cours  de  la  même  année,  le  célèbre  condottière 
Mansfeld,  qui  avait  vu  sa  fortune  écbouer  devant  les  murs 
de  Saverne^  traversa  avec  ses  bandes  mdisdplinées  le  comté 
de  Saarwerden  et  la  Lorraine  allemande,  où  elles  commirent 
de  tels  dégâts,  qu'un  siècle  plus  tard  sa  mémoire  y  était 
encore  ou  horreur;  le  village  d'Ottu-iller  fut  surtout  cruelle- 
ment éprouvé,  la  plupart  de  ses  habitants  furent  massacrés, 
sou  L'i^lise  fut  livrée  aux  flammes  et  les  cloches  enlevées'. 

Le  différend  qui  divisait  depuis  si  longtemps  la  maison  de 
Nassau-Saarbruck  et  celle  de  Geroldseck,  au  sujet  de  la  moitié 
indivise  des  seigneuries  de  Labr  et  de  Mahlberg,  fut  terminé, 
en  1625,  par  une  transaction  intervenue  entre  Jacques  dt 
Geroldseck  et  le  comte  Louis  de  Nassau-Saarbruck.  Cette 
transaction  laissa  à  la  maison  de  Nassau-Saarbruck  la  pos- 
session de  la  moitié  de  ces  seigneuries  contre  la  somme  de 
cent  mille  llorins,  que  le  comte  Louis  promit  de  payer  avec 
les  intérêts  légaux  sur  les  revenus  du  bailliage  de  Labr*. 

'  Kœlinkr,  Luc.  citât.,  t  I,  p.  311. 

*  Rœbbioh,  Sekîektate  ier  evangeUtehm  Londgmmden  âetSItatset 
xvœhrcnd  4e»  dreissigjœhrigm  Krieget,  t  H,  p.  168. 
»  ScHWEDER,  Loe,  cOot.,  t.  H,  p.  326. 


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8AABWEBDEN  ET  HEIIBITZHEIM 


115 


En  1626»  ime  maladie  peatiltatielle  sévit  a?ec  inteiuité 
dans  le  comté  de  Saanrerden.  Les  soins  généreux  que  le 
comte  Louis  prodiguait  à  ses  sujets  furent  les  derniers  bien- 
faits d'un  pere;  la  mort  le  surprit  le  22  novembre  i627,  jour 
anniversaire  du  décès  d'Anne-Marie  de  liesse,  sa  femme.  Sou 
fils  Guillaume-Louis  lui  succéda  dans  le  comté  de  Saarbruck, 
qu'il  reçut  pour  sa  portion  héréditaire,  avec  la  pré  voté  de 
iïerbilzheim,  Ottwiiler,  mie  partie  de  Hombourg,  le  bailliage 
dlogenbeim  et  Usingen.  Idatein,  Wiesbaden  et  Labr  forent 
attribués  à  Jean,  son  deuxième  fils  (les  seigneuries  de  Labr 
et  de  Mablberg  Tenaient  d'être  Tobjet  d'nn  partage,  en  Yertu 
doqael  Tune  avait  été  attribuée  à  la  maison  de  Nassau-Saar- 
bruck,  tandis  que  l'autre  était  échue  à  la  maison  de  Bade). 
I«  troisième  iils,  Ernest-Casimir,  reçut  Weilbourg,  Gleiberg, 
Mehrenberg,  Kirchheim  et  l'autre  partie  de  Hombourg. 

Le  quatrième  et  plus  jeune  fils,  Otton,  reçut  le  quatrième 
lot  des  possessions  paternelles,  et  on  lui  ajBfecta  KirciUieim 
pour  sa  résidence'. 

Le  comté  de  Saarwerden,  qui  était  toujours  une  pomme  de 
discorde  entre  la  maison  de  Lorraine  et  celle  de  Nassau- 
Saarbruck,  devait  demeurer  dans  indivision  jusqu'à  la  déci- 
sion du  tribunal  suprême  de  TEmpire,  où  le  procès  était  pen- 
dant depuis  un  siècle. 

Le  comte  Guillaume-Louis  parvint  à  la  régence  dans  les 
Circonstances  les  plus  épineuses;  les  troupes  de  l'empereur 
Ferdinand  II,  sous  les  ordres  du  colonel  Cralz  de  S.'haffers- 
heim,  après  avoir  ravagé  et  pillé  les  bords  de  la  Saar,  avaient 
pénétré  au  cœur  de  la  Lorraine  et  occupaient  Vie  et  Moyenvic, 
^les  appartenant  à  l'évéque  de  Metz;  l'édit  de  restitution 
des  biens  ecclésiastiques,  que  le  chef  de  l'Empire  avait  rendu 
le  6  mais  46S9  et  qull  était  résolu  à  &ire  exécuter  avec 
rigueur  et  violence,  ne  put  manquer  d*alarmer  un  prince 
protestant  La  sentence  inattendue  que  rendit,  le  7  juillet  de 

È>  Kœlmeb,  Loc.  citai.,  1. 1,  p.  318. 


ne 


BETUB  D*ALBiLOB 


la  même  année,  la  Chambre  impériale,  au  sujet  du  comté  de 
Saarwerden,  Tint  augmenter  ces  alarmes.  Cet  arrêt  ne  satisfit 
ni  Tune  ni  Vautre  des  parties  lîtigantes.  La  ville  de  Bou- 
quenom,  le  cbfltean  et  la  ville  de  Saarwerden  et  la  cour  de 

Wiberswiller,  avec  leurs  dépendances,  furent  reconnus  pour 
fiefs  masculins  de  révôclié  de  Metz,  et  l'investiture  qui  en 
avait  été  accordée  en  1527,  par  le  cardinal  Jean  de  Lorraine, 
évC^que  de  Metz,  à  Antoine,  duc  de  Lorraine,  son  frère,  fut 
validée.  La  possession  de  ces  fiefs  fut  adjugée  à  François  II, 
duc  de  Lorraine.  Le  comte  de  Nassau-Saarbruck  fut  condamné 
à  la  restitution  des  fruits  perçus,  dont  le  montant  s'élevait  à 
plus  de  deux  millions  d*écus  d*Empire.  Les  autres  parties  du 
comté  de  Saarwerden,  c*est-à-dire  les  villages  qui  en  dépen- 
daienti  furent  reconnus  comme  de  francs-alleux  libres  et  indé- 
•  pendants  et  adjugés  à  la  maison  de  Nassau-Saarbruck*. 

Les  mésintelligences  qui  régnaient  entre  les  deux  maisons 
ne  furent  pas  calnices  par  cet  arrêt,  dont  l'exécution  franche 
fut  constamment  éludée.  Le  prince  Guillaume-Louis  et  les 
princes  de  sa  maison  déplorèrent  amèrement  la  perte  des 
villes  de  Bouquenom  et  de  Saarwerden,  joyaux  précieux  que 
Tarrét  de  la  Chambre  impériale  venait  d'arracher  de  leur 
couronne  féodale,  et  la  maison  de  Lorraine  ne  regretta  pas 
moins  les  beaux  villages  que  le  tribunal  suprême  de  l'Empire 
avait  déclarés  allodiaux. 

Le  duc  de  Lorraine,  François  IV,  fit  aussitôt  marchar  des 
troupes  sur  Saarwerden,  qui  n'était  pas  en  état  de  leur 
opposer  la  moindre  résistance.  La  ville  de  Bouquenom  fut 
occupée  violemment  et  celle  de  Saarwerden  enlevée  par  esca- 
lade. A  peine  le  comte  Guillaume-Louis  avait-il  eu  le  temps 
de  faire  enlever  nuitamment  les  archives  du  comté  de  leur  lieu 

*  Auftxe  VMrhaffle  Erzehhmg  decM»,  so  sih  begtbm  hat  t»  antrtUimg 

der  Ponsession  der  Craffschafl  Sarwerden.  1630,  iii-l",  p.  45. 

'  François  II  conserva  la  qualificalion  de  duc  do  Lorraine  et  do  IJar, 
quoiqu'il  eût  cnl.^  soa  trône  à  son  fils  Charles  IV;  il  mourut  à  Kancy, 
le  14  octobre  IWi. 


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SAASWBSDSH  ET  HBBBUZBBDI  117 

* 

de  dépôt,  de  Boaqnenonii  et  de  les  fidre  transporter  à  la  hftte, 
par  des  Toitariers  de  Haekwiller,  dans  sa  résidence  de  âaar- 
brack^  Les  soldats  lorrains  se  répandirent  dans  Unit  le  comté; 

la  prévôté  de  Herbilzlieim,  qui  était  demeurée  conslarament 
en  dehors  du  litige,  fut  envahie;  cette  malheureuse  contrée 
fut  traitée  avec  la  plus  grande  rigueur;  les  campagnes  furent 
livrées  à  une  soldatesque  indisciplinée;  tous  les  officiers  et 
employés  du  comte  de  Nassau-Saarbruck  furent  emprisonnés 
ou  expulsés  du  pays.  Les  habitants  ne  restèrent  pas  & 
l'abri  des  persécutions;  ils  furent  forcés  par  la  violence, 
les  menaces  les  plus  terribles  et  la  crainte  des  cfafttiments 
tes  plus  rigoureux  à  foire  hommage  au  duc  de  Lorraine 
et  à  lui  prêter  un  serment  de  fidélité  qui  n'était  pas  de 
bon  aloi. 

L'honorable  Nicolas  Cans,  bailli  du  comté,  résista  aux 
injonclions  des  envoyés  lorrains  et  resta  inéhranlablc  dans 
son  attachement  envers  la  maison  de  Nassau-Saarbruck.  La 
bourgeoisie  de  JBoaqueoom,  encouragée  par  la  noble  résis- 
tance de  son  premier  magistrat,  refusa  de  slndiner  devant 
les  commissaires  lorrains;  mais,  lorsqu'elle  se  vit  en  butte 
aux  exigences  d'une  soldatesque  effrénée  et  menacée  de  voir 
ses  demeures  réduites  en  cendres,  elle  céda  à  la  nécessité  et 
passa  sons  les  iburehes  caudines  des  envoyés  de  Charles  IV. 
L'oifider  qui  commandait  dans  la  Tille  de  Saarwerden  Ait 
désarmé  et  conduit  prisonnier  à  Bouquenom;  on  s'empara  de 
son  cheval  et  de  ses  effets.  Saarwerdcn  fut  traite  en  ville 
conquise  et  subit  les  traitements  les  plus  rigoureux.  Les  Lor- 
rains s'emparèrent  môme  du  village  de  Lohr,  qui  appartenait 
au  priuce  palatia  de  Lûtzelstein,  des  villages  de  Postorf  et  de 
Mettingen,  qui  dépendaient  de  la  seigneurie  de  Steinzel,  et  de 
la  seigneurie  de  Diemeringen,  qui  appartenait  aux  rhingraTes 
Otton-Louis  et  Jeam-Phîlippe. 

Le  comte  Guillaume-Louis,  dans  llmpuissance  d'opposer  au 


118  BEVDB  D'ALS&CB 

duc  de  Lorndne  des  forces  sufifisantes,  ne  put  que  dénoncer  à 
rEmperenr  et  aux  Ëtats  de  l*Ëmpire  rinjuste  agression  de  ce 
prince;  on  loi  fit  des  représentations  infiractnensM,  la  Chambre 
impériale  de  Spire  le  somma  yainement  de  restituer,  sons 
peine  d'une  amende  de  dnquante  marcs  de  bon  or,  les  villes, 
bourgadei  et  villages  qu'il  avait  violemment  occupés,  et  de  ne 
plus  prendre  le  litre  de  comte  de  Saarwerden,  qu'il  avait 
usurpé;  il  n'en  continua  pas  moins  ses  actes  despotiques.  Son 
conseiller  et  premier  maître  d'holcl,  Nicolas  de  Serinchamps, 
à  qui  il  avait  remis  la  plénitude  de  son  autorité,  crut  affermir 
la  puissance  de  son  maître  par  remploi  des  moyens  les  plus 
rigonreux.  Les  armes  de  la  maison  de  Nassau-Saarbruck  furent 
arrachées  partf)at  et  remplacées  par  les  armoiries  lorraines;  les 
pasteurs  évangéliques  et  les  instituteurs,  leurs  femmes  et  leurs 
enfiints,  fiirent  bannis.  Treize  ministres,  parmi  lesquels  se  trou- 
valent  Âmbroise  Bingel  de  Bouquenom,  Jean  Conrad  de  Btttten, 
Conrad  Dormeyer  d'Oermingen,  Samuel  Scliierbart  d'Eywiller, 
Jean  Pfeifer  de  Ilerltitzheim,  Jean-Henri  Buttner  de  Hars- 
kirchen,  Heinricii  de  Wolf:*kirclien,  Dayid  Iliemeyer  de  Dom- 
fessel  (cGlui-ci  était  un  vieillard  de  soixante-huit  ans),  furent 
arrêtés  à  rentrée  de  la  nuit  et  conduits  par  cinquante  fusi- 
liers à  Saarwerden,  où  on  leur  eiqoignit  de  quitter,  dans  les 
vingt^quatre  heures,  le  territoire  du  comté,  sous  peine  de  la 
vie  et  de  la  perte  de  tons  leurs  biens,  avec  menace  que  si  run 
d*eux  poussait  Taudace  jusqu'à  revenir  dans  ses  foyers,  sa 
téte  tomberait  sous  la  hache  du  bourreau*. 

Le  registre  des  actes  de  l'ancienne  paroisse  protestante  de 
Bouquenom  porte,  dans  la  mention  suirante,  un  témoignage 
irrécusable,  quoique  laconique,  des  violences  des  Lorrains 
pendant  la  néfaste  année  1629  :  I&c  ineipit  exUium  Domini 
Ambrom  Bingtlii  gui  fmt  pukm  ptr  deœs  IMharmgiœ, 
Hier  darf  vxM  getagt  werdm  wiê  ekukna  Frais  Polonlb  : 
Finis  lYotêstantorum  Miffionis  tt  IMterta^, 

>  BcsHBiOB,  Io6.  ciftrt.,  l.  II,  p.  138. 


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SAARV^-ERDEN  ET  HERBITZHEIM 


119 


Les  ministres  ibgitife  se  retirèrent  è  Saarbruck,  où  le 

comte  Guillaurae-Loiiis  les  accueillit  avec  le  plus  vif  intérêt. 
Ce  prince  fit  de  vaines  remontrances  à  Albert  de  Roche, 
commissaire  lorrain,  sur  l'expulsion  des  pasteurs  et  le  bar- 
bare traitement  dont  ils  avaient  été  l'objet.  Le  commissaire 
du  duc  de  Lorraine  fit  une  réponse  pleine  de  menaces  et  de 
fierté  et  donna  ordrt  à  ane  compagnie  de  soldats  de  parcourir 
tout  le  pays,  accompagnée  du  bourreau,  et  d'arrêter  tous  les 
ministres  qui  pourraient  encore  s*y  trouver.  LWcier  qui 
commandait  cette  troupe  reçut  l'ordre  le  plus  impératif  de 
Ikire  pendre  ft  Paritte  le  plus  proche  celui  qui  opposerait  la 
moindre  résistance,  de  faire  surveiller  toutes  les  routes,  tous 
les  chemins  qui  conduisaient  hors  du  comté  et  de  commander 
à  ses  soldats  de  tirer  sur  les  ministres  qui  auraient  déjà 
atteint  la  terre  étrangère.  Tous  les  presbytères  furent  ensuite 
occupés  par  des  soldats  et  livrés  au  pillage.  Toutes  les  églises, 
tous  l«s  biens  des  églises  furent  abandonnés  aux  catholiques, 
et  des  curés  catholiques  furent  institués  partout.  Tous  les 
habitants  furent  en  butte  aux  plus  odieuses  Tentions;  les 
soldats  se  faisaient  nourrir  à  discrétion,  contraignant  leurs 
hôtes  par  la  force  et  l'outrage  et  répondant  à  leurs  prières  et 
à  leurs  sollidtations  par  la  raillerie  et  le  mépris.  La  prévôté 
de  Herbitzheim  fut  traitée  avec  non  moins  de  barbarie  ;  les 
insultes,  les  vexations  de  tout  genre,  hs  confiscations,  le  ban- 
nissement, tout  fut  employé.  François  II  crut  bien  servir  le 
ciel  en  poursuivant  de  sa  haine  les  protestanî=;  du  pays  qu'il 
venait  d'incorporer  à  la  Lorraine,  il  prit  des  mesures  contre 
Thérésieet  chercha  à  rétablir  partout  la  religion  catholique. 
Le  pape  Urbain  ViU  favorisa  son  dessein  et  lui  accorda  le 
droit  de  patronage  sur  toutes  les  paroisses  du  comté  de  Saar- 
werden  qu'il  avait  rétablies  et  sur  celles  qu'il  pourrait  réta- 
blir à  ra?enir.  L'Eglise  triomphait,  elle  n'avait  plus  d'adver- 
saires. Le  duc  François  II  jugea  que  pour  affermir  la  conver- 
sion de  ses  nouveaux  sujets  et  maiutcuir  la  religion  catho- 


120 


REVUE  D'aLSACB 


lique  henreusciLient  rétablie  dans  les  villes  et  villages  du 
comté  de  Saarwerden,  il  ne  pouvait  rion  faire  de  plus  avHii- 
t'igeux  à  son  dessein,  pour  la  gloire  de  Dieu,  le  bien  et  l'uli- 
lilé  de  ses  sujets,  que  de  fonder  un  collège  dans  la  ville  de 
Bouquenom  pour  les  Révérends  Pères  de  la  Compagnie  de 
Jésua,  selon  le  projet  qu'il  en  avait  formé  depuis  longtemps; 
en  conséquence,  il  fonda  et  établit,  par  une  ordonnance  rendue  ' 
à  Nancy  le  i"  décembre  1680,  un  collège  de  jésuites  dans 
cette  Tille  et  le  dota  des  biens  de  l'abbaye  de  Herbitzheim\ 
Cette  fondation  se  fit  du  consentement  et  arec  Tapprobation 
du  pape  Urbain  Vlïl.  François  II  imposa  aux  Révérends 
Pères,  eutr  autres  conditions,  celle  d'enseigner  les  humanités 
jusqu'à  la  rliétorique  inclusivement,  de  rendre  en  même  temps 
populaire  l'enseignement  de  la  langue  allemande,  qui  était  la 
langue  de  ses  sujets  allemands  formant  le  tiers  de  la  popula- 
tion de  ses  états,  de  prêcher  en  allemand  à  Bouquenom  et 
d'entretenir  constamment  dans  cette  ?ille  six  élères  sacbant 
la  langue  allemande  et  destinés  à  desaerrlr  les  cures  du 
comté  de  Saarwerden  et  celles  de  la  prévôté  de  Herbitzheim. 
Il  arrêta  que  si,  parmi  ces  six  étudiants,  il  se  rencontrait  de 
<  beaux  esprits  »,  capables  d'une  instruction  solide,  il  seraient 
envoyés,  aux  frais  du  collège  de  Bouquenom,  à  l'université 
de  Pont-à-Mousson,  pour  y  étudier  la  pbilosopliie  et  la  théo- 
logie, et  qu'ils  y  seraient  entretenus  jusqu'à  la  fin  de  leurs 
études.  Il  ordonna  que,  pour  perpétuer  le  souvenir  de  celte 
fondation,  une  inscription  en  caractères  de  bronze  serait 
placée  sur  le  portail  de  l'église  de  Bouquenom  et  sur  celui 
du  collége^ 

Les  jésuites  qui  furent  appelés  à  diriger  cet  établissement 
étùent  de  la  proTînce  de  Mayence;  ils  8*eflbrçaient  de  remé- 
dier au  défaut  d'instruction  et  de  rendre  en  même  temps 
populaire  renseignement  des  humanités.  Ils  tâchèrent  de 

'  DomCalmet,  Preuves  de  l'hi$toire  de  Lormine,  t  VH,  p.  GCXCVn. 
»  Ibidem,  t.  VU,  p.  CCXCVII. 


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SAARWERDEN  ET  HERBITZHEIM 


i2i 


gigner  lei  luthdrienB  par  la  persuasion  t  en  leur  distribuant 
le  pain  salutaire  de  l'Evangile  >,  et,  quoique  doués  d'une  foi 

religieuse  ardente,  ils  s'abstinrent  de  faire  tomber  de  la 
chaire  des  semences  de  haine  et  de  di-scordo  et  de  prononcer 
contre  les  sectaires  des  anatlièraes  foudroyuutsV 

Le  duc  François  II,  persuadé  que  l'instruction  scnle  pou- 
vait former  des  mœurs  vraiment  chrétiennes,  fonda  et  établit 
à  fiouquenom,  le  1"  mars  1631,  un  couvent  de  religieuses  de 
la  congrégation  de  Notre-Dame,  dont  l'ordre  venait  d*étre 
institué  par  le  célèbre  Pierre  Fourrier,  dans-  le  dessein  de 
créer  des  écoles  pour  les  jeunes  filles,  et  avait  conquis  rapi^ 
dément  une  réputation  justement  méritée. 

Le  duc  de  Lorraine  députa  à  l'empereur  Nicolas  Foamier, 
conseiller  d'Etat,  pour  lui  rendre  compte  de  la  manière  dont  il 
setait  saisi  du  comté  de  Saarwerden,  en  exécution  de  l'arrêt 
de  la  Chambre  impériale  de  Spire.  Le  chef  de  l'Empire 
répondit  à  l'ambassadeur  qu'il  éprouvait  une  grande  satisfac- 
tion qu'après  un  si  long  et  si  coûteux  procès  le  duc,  son 
mattre,  se  fût  mis  en  possession  du  comté,  et  que,  bien  que 
cette  prise  de  possession  pécbftt  contre  les  formes  ordinaires, 
il  n'en  saurait  résulter  aucun  préjudice  pour  lui*.  Dans  le 
même  temps,  le  duc  François  n  euToya  Mauljean,  son  conseiller 
et  secrétaire,  à  Ratisbonne,  avec  ordre  de  s'adresser  au  duc 
de  Bavière,  pour  tâcher  de  l'intéresser  à  ses  affaires  et  de 
poursuivre  auprès  de  la  Diète  impériale  la  confirmation  de  la 
prise  de  possession  du  conilc  de  Saarwerden.  Ses  instructions 
portaient  de  réfuter  les  accusations  calomnieuses  formulées 
par  les  comtes  de  Nassau-Saarbruck  devant  la  Chambre  impé- 
riale, en  objectant  que  les  villages  dont  on  avait  pris  posses- 
sion n'avaient  jamais  formé  un  comté  particulier,  que  ces 

'  Ménioiro  dos  habitant^  proit^staiits  de  Boaquenom adressé,  verslTôl, 
au  procureur  ^'t^néntl  de  la  Lorraine. 

'  BibliolhèiiULï  de  Metz,  Inventaire  des  litres  de  Lorraine,  tome  X, 
layette  2*  de  Saarwerden. 


BEVUE  D'ALBACB 


TîllagM  ataient  toiyonni  4té  des  dépendances  des  Tilles  et 
diftteanx  de  Boaquenom  et  de  Saanrerden,  que  la  nomination 
de  leurs  maires  et  gens  de  jastice  ayait  tonjonrs  été  fldte 
par  les  comtes  de  Saanrerden,  que  le  bailli  do  Bouquenom 

avait  de  tout  temps  exercé  la  jaridiclion  sur  les  habitants  de 
tous  les  villages,  en  tous  cas  civils  et  criminels,  qu'il  n'y 
avait  qu'un  sceau  de  tabellionage  et  que  tous  les  habitants 
étaient  tenus  à  des  corvées  envers  le  château  de  Saarwerden. 
Quant  à  Herbilzheîm,  le  sieor  Mauljean  devait  soutenir  que 
le  duc  de  Lorraine  avait  eu  raison  de  s*en  saisir  «  comme 
étant  un  ban  joignant  de  Bouquenom  »,  lequel  avait  été 
enlevé  par  les  comtes  de  Nassan-Ssarbruck,  après  en  avoir 
chassé  les  religieuses  de  Saint-Benoit,  d'autant  plus  que  le 
duc  François  II  n'en  prétendait  retenir  que  Favouerie,  aban* 
donnant  les  revenus  des  cinq  villages  qui  formaient  la  Kellerti 
de  cet  ancien  couvent,  pour  la  fondation  d'un  collège  de 
jésuites  à  Bouquenom,  auquel  le  pape  Urbain  Vlil  les  avait 
incorporés*.  Le  duc  François  envoya  à  Vienne,  en  1682,  le 
R.  P.  Merigot,  jésuite,  pour  obtenir  de  Tempereur  Ferdi- 
nand II  la  confirmation  du  collège  de  Bouquenom  et  repré^ 
senter  au  chef  de  Ffimpire  que  les  biens  de  rancienne  abbaye 
de  Herbitaheim  ayant  été  usurpés  par  les  comtes  de  Nassau* 
Saarbruck,  en  1568,  depuis  le  traité  de  Passau,  et  ayant  ëté 
unis  par  bulle  audit  collège,  la  confirmation  de  cette  union, 
qui  était  de  pure  grâce,  n'était  point  du  ressort  du  Conseil 
aulique'. 

Le  prince  lorrain  chercha  à  s'attirer  l  atlacliement  des  habi- 
tants de  Bouquenom  par  les  promesses  les  plus  magnifiques  : 
Tagrandissement  de  leur  ville,  la  reconstruction  de  leur  église, 
la  fondation  de  plusieurs  établissements  utiles,  tels  étaient  les 
projets  qui  devaient  changer  l'aspect  de  l'antique  cité.  Le  doc 
de  Lorraine,  malgré  la  défense  de  Tempereur  Ferdinand  II, 

*  Ibidem^  laycltô  3«  de  Saarwerden. 
■  Ibidem. 


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BAABWEBDEN  BT  HERBTTZHXIM 


18S 


eontinna  à  ijoater  à  ties  titres  et  qualités,  sur  les  soeanz  et 
dans  les  actes  publics»  le  titre  de  comte  de  Saarwerden. 

Enfin,  à  force  de  prières  et  de  suppUcations,  les  protestants 
da  comté  de  Saarwerden  finirent  par  arracher  an  dne  de 
Lorraine  la  permission  de  professer  leur  culte;  mais  ce  prince 
n'accfirdait  d'une  main  que  ce  qu'il  avait  l'intention  de  retenir 
de  l'autre;  les  trente-huit  communautés  qui  constituaient  le 
comté  de  Saarwerden  et  la  prévôté  de  Herbilzheim  obtinrent, 
il  est  vrai,  la  révocation  de  l'édit  qui  interdisait  leur  culte, 
mais  CD  ne  leur  accorda  qu\m  seul  ministre  et  on  ne  leur 
permit  de  s'assembler  qu'à  Boaquenom,  où  devait  résider  le 
ministre.  Leur  choix  se  fixa  snr  Jost  Holler,  Tan  des  pasteurs 
expulsés  et  qui  emplissait  alors  les  fonctions  de  vicaire  à 
Eunbeim,  en  Alsace,  et  celui-ci  se  vit  dans  la  nécessité,  avant 
d'entrer  en  fonctions,  de  promettre  par  serment  qui!  ne  prê- 
cherait pas  contre  l'honneur  de  Dieu,  de  la  Sainte- Vierge 
Marie  et  des  Saints,  et  qu'il  ne  commettrait  aucun  acte  atten- 
tatoire à  la  couronne  lorraiuc'. 

Cependant,  le  comté  de  SaarAverden  continuait  à  soulTrir 
des  exigences  des  soldats  ;  Tautorité  sans  contrôle  dont  jouis- 
sait M.  d'Atlel,  conseiller  d'Etat  du  duc  de  Lorraine  et  gou- 
verneur du  pays  que  ce  prince  venait  d'annexer  à  ses  états, 
son  administration  arbitraire  et  Tinsolence  des  fonctionnaires 
subalternes,  firent  tomber  cette  contrée  dans  un  tel  état  de 

• 

démoralisation  et  de  faiblesse,  qu'elle  ne  devait  plus  oUHr 
aucun  sujet  de  crainte  au  duc  François  II  et  à  son  fils,  le  duc 
Charles  IV.  Pendant  trois  années  entières,  les  habitants  de  ce 
petit  Etat  eurent  à  supporter  les  iniquités  et  les  vexations  des 
afficiers  lorrains,  lorsque  le  rliingrave  Othon-Louis  vint,  au 
mois  d'août  1633,  les  délivrer  de  leurs  odieux  oppresseurs. 
Heureux  d'échapper  à  la  tyranuique  domination  du  prince 
lorrain,  ils  saluèrent  de  leurs  cris  de  joie  le  drapeau  de  la 
Suède,  aceneilUrent  le  rhingrave  Otton-Louîs  comme  un  libé- 
*  Rœhmoh,  Loe.  eiUU.,  t.  U»  p.  143. 


m 


REVUE  D'ALSACE 


rateur  et  rendirent  avec  empressement  hommage  à  cette 

couronne  et  aux  princes  confédérés.  Le  rhingrave  fît  saisir 
la  bibliothèque  dont  le  duc  de  Lorraine  avait  fait  don  au 
collège  des  jésuites  de  Bouquenom;  il  renvoya  à  Strasbourg, 
où  elle  alla  curicliir  la  bibliothèque  de  l'Université  do  cette 
Tille  (dans  la  suite  la  bibliothèque  du  séminaire  protestaut)'. 

Peu  après,  le  général  suédois  quitta  cette  contrée  après 
avoir  laissé  à  Bonquenom  une  garnison  de  trois  compagnies. 
Après  le  départ  da  rhingrare,  les  troupes  lorraines  inon- 
dèrent le  comté  de  Saarwerden  et  investirent  Bouqaenom, 
mais  au  bruit  de  la  marche  du  général  suédois,  qui  accourait 
au  secours  des  assiégés,  elles  décampèrent  avec  la  précipi- 
tation de  la  crainte. 

Au  mois  de  mars  1635,  le  chancelier  de  la  couronne  de 
Suède,  Axel  Oxentjerna,  directeur  de  l'Union  évan?élii|ue.  fit 
restituer  au  comte  Guiliaume-Louis  de  Nassau-Sarrebruck  le 
comté  de  Saarwerden,  avec  les  fiefs  de  l'ancienne  mouvance 
de  révécbé  de  Metz,  d<Hit  le  duc  de  Lorraine  fut  déclaré  déchu, 
à  raison  de  roccupation  violente  quUl  en  avait  &ite.  Le  comte 
Guillaume-Louis  se  rendît  à  Bouquenom,  où  Frédéric-Richard 
Mockel,  résident  suédois  à  Strasbourg,  lui  fit,  le  2S  avril  1685, 
la  remise  solennelle  de  son  ancien  patrimoine,  au  milieu  des 
transports  d  allcgresse  de  la  population  tout  entière,  qui 
s'empressa  de  rendre  hommage  à  son  ancien  seigneur  et  de 
lui  prêter  serment  de  fiflélitc'. 

Cependant,  les  Français  avaient  fait  leur  jonction  avec  les 
Suédois  dans  le  Palalinat,  mais  les  armées  alliées  furent 
forcées  de  fuir  devant  Tépée  victorieuse  de  Galles;  afin  de 
marcher  avec  plus  de  rapidité  et  d*échapper  aux  enne- 
mis, les  Franco-Suédois  furent  réduits  à  brûler  leurs  voitures 
et  leurs  équipages  et  à  enterrer  leurs  canons.  Après  onze 
jours  de  marches  forcées,  Tarmée  confédérée  arriva  dans  le 

*  Charles  Meiil,  BibUotlùque  de  la  ville  de  Utrasbourg,  p.  6. 
'  KŒtLNER,  Loc.  cilat.,  t.  I,  p.  3. 


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SAASWBBIKBN  ET  HEBBITZBEDf 


125 


dénûment  le  plus  absolu  sur  les  bords  de  la  Saar,  où  elle  res- 
pira. Gallas  poursuivit  les  alliés  Tépée  dans  les  reins,  s'em- 
para de  VandreTanges,  viak  camper  à  deux  lieux  de  Sarre- 
guemtnes  et  fit  séquestrer,  au  nom  de  Tempereor,  les  comtés 
de  Saarbruck  et  de  Saarwerden,  par  le  commissaire  impérial 
Starm,  qui  força  toutes  les  autorités  à  rendre  hommage  au 
chef  de  TËmpire.  Les  troupes  impériales  inondèrent  tout  le 
pays.  Aux  calamités  de  la  guerre  se  joignirent  d'antres  maux 
plus  cruels  encore  qu'elle  a  coutume  d'enfanter.  Pendant  que 
les  Croates  se  livraient  impitoyablement  au  pillage,  la  famine 
et  la  peste  ravageaient  cruellement  les  rives  de  la  Saar  et 
enlevaient  les  trois  quarts  de  la  population. 

Cependant  Gallas,  jugeant  que  sa  position  n'était  pas  tenable 
en  Lorraine  et  ne  voulant  pas  courir  les  chances  d'une 
bataille  avec  une  armée  décimée  par  les  maladies,  qui  exer- 
çaient sur  elle  une  action  désastreuse,  avait  levé  le  camp, 
abandonnant  à  la  générosité  des  ennemis  une  foule  de  malades, 
dont  la  plupart  furent  massacrés  sans  pitié  par  les  Suédois. 
H  se  hâla  de  pgner  l'Alsace,  s'empara,  le  45  novembre  1686, 
de  Saverne  et  investit  les  places  fortes  qui  étaient  en  posses- 
sion des  Franco-Suédois. 

L'année  IGSO  s'ouvrit  sous  de  tristes  auspices  pour  les  Impé- 
riaux. Le  cardinal  de  la  Valette,  gouverneur  de  Metz,  ravi- 
tailla les  places  fortes  de  l'Alsace  et  défît  les  ennemis  dans 
plusieurs  rencontres.  Le  prince  Bernard  de  Saxe-Weimar 
reprit  Saverne,  enleva  le  fort  de  la  Petite-Pierre,  mena  ses 
troupes  dans  la  Lorraine  allemande  et  établit  ses  quartiers  à 
Fénétrange\ 

Le  général  Rosen  surprit  Bouquenora  et  Saaralbe  et  s'em- 
para de  Deux-Ponts:  il  soumit  Saarwerden  et  contribua  puis- 
samment à  chasser  les  Autrichiens  de  la  Lorraine  allemande. 

Cependant  l  empereur,  qui  avait  de  grands  sujets  d'être 
mécontent  des  trois  £rères  Guillaume-Louis,  comte  de  Nassau- 

'  theat,  ewrop,,  t  III,  p.  610. 


126 


BEVUE  P*ATiBAOB 


Saarbraeky  Jean,  comte  de  Nassau-Idstein,  et  Ërnest-Gasîmir, 
comte  de  Nassan-Wdlbonrg,  les  fit  dter  devant  la  Chambre 
impériale  où  ils  forent  déclaré,  en  1687,  coupables  du  crime 
de  lèse-majesté.  En  conséquence  de  cet  arrêt,  Ferdinand  n 
donna  les  pays  cisrhénans  de  la  maison  de  Nassan-Saarbmck 
à  Charles  IV,  »1uc  de  Lorraine,  en  récompense  des  services 
que  ce  prince  avait  rendus  à  la  maison  d'Autriche*.  Les  succès 
des  l'Iran co-Weimarieus  empêchèrent  rexécution  de  cette 
donation. 

Le  comte  Guillaume-Louis  s*était  retiré  à  Metz,  où  il 
menait  une  existence  paisible,  attendant  en  silence  des 
conjonctures  plus  foyorables  de  ralliance  de  la  France  arec 
la  couronne  de  Suède,  n  mourut  dans  cette  Tille,  le  S8  août 
1640.  Son  épouse,  Amélie  de  bade,  Tavait  rendu  père  de  trois 
fils,  qui  ftirent  confiés  à  la  tutelle  de  leur  mère  et  qui  derin- 
rent,  dans  la  suite,  les  tliefs  de  trois  nouvelles  branches.  Jean- 
Louis  lut  fauteur  de  la  branche  dOltwiller,  Gustave-Adolphe 
le  chef  de  la  lignée  de  Saarbruck,  et  Walrade  Fauteur  de 
celle  d  Usingen. 

La  misère  était  alors  générale  dans  le  comté  de  Saarwerden, 
les  villes  et  les  villages  n'étaient  plus  que  des  monceaux  de 
ruines  et  présentaient  Taspect  le  plus  désolant;  plusieurs 
villages  avaient  même  complètement  disparu  et  leurs  terri- 
toires étaient  incultes. 

Dag.  Fisguer. 

(La,  mite  À    prochaine  Horaism^ 


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NOTES  BIOGRAPHIQUES 

SUR  LES 

HOMMES  DE  LA  RÉVOLUTION 


STRASBOURG  ET  LES  ENVIRONS 

Suite 


TURGKIIEIM  (Jean  de),  pôl'e. 
1758.  Membre  de  la  tribu  du  Miroir. 
1774.  Sénateur  à  la  même  tribu. 
178i.  Amraeister. 

178G.  Directeur  du  l^ailliage  de  Wasselonne. 
1787.  Directeur  de  celui  de  la  Ruprechtsau.  Membre  de  la 
Chambre  des  XIU.  Membre  du  bureau  de  bien&i- 

sance. 

Juin^.  Nommé,  par  le  roi  Louis  XVI,  député  du  Tiers- 
Etat  à  l'Assemblée  générale  provinciale  d'Alsace,  qui 
s'est  constituée  le  18  août  et  dôtuia  ses  travaux  le 
9  décembre  suivant  H  y  occupait  la  présidence  du 
bureau  des  travaux  pub]ic& 

1/88.  Juge  ù  la  Chambre  des  contrata  Le  roi  n'ayant  pas 
jugé  à  propos  de  convoquer  les  Assemblées  provin- 
ciales du  royaume,  Fadministratlon  resta  confiée  aux 
Commissions  intermédiaires,  dont  ilfitpartieiusqu'au 
15  février  1789.  • 


iSB  BEVUE  D'ALSACE 

23  mars  1789.  Membre  de  rAsscmblée  dos  Etats  généraux 
à  Versailles.  La  mission  était  difficile  ;  la  noblesse 
réclamait  le  maintien  do  ses  droits  seigneuriaux,  les 
tribus  élevaient  des  prétentions  sans  fin,  les  bouchers 
même,  comme  plus  tard,  en  1830,  exigeaient  la 
réduction  des  droits  d'entrée  sur  les  bestiaux,  et  la 
bourgeoisie  voulait  être  exemptée  de  tout  tirage  de 
la  milice  par  tout  le  roj'aume.  j\Ialgré  cola,  il  accepta 
le  cahier  des  doléances  (|ui  traçait  sa  ligue  de  con- 
duite, et  pai'tit  pour  Versailles. 

Mai  — .  II  écrivait  à  Dietrich  : 

Nous  avons  rondu  le  iniiiislr<^,  spcrétairc  d'Htal  de  In  g:uorrp, 
allenlif  sur  la  sitiialion  i»olilii|iie  d(^  Slraslxini  j,'  elsur  la  nécessité 
d'y  envoyer  un  cuuiniissaire  ruyal  en  (|ualili'  do  ini'dial.  ur. 

Le  6  juillet  suivant,  Dietrich  était  nommé  à  ces 
fonctions,  en  remplacement  de  Gérard,  malade  par 
suite  des  violentes  discussions  avec  les  bouchers. 

14  juillet  — .  Il  annonce  la  prise  de  la  Bastille. 

20 — .  Sa  lettre  est  lue  au  Grand-Conseil,  à  l'hôtel  actuel  du 
commerce,  appelé  alors  die  Nene  Pfalz,  et  qui  fut 
saccagé  le  lendemain,  21,  par  la  populace. 

4  août  — .  Lors  de  la  séance  historique  tenue  cette  nuit  à 
Versailles,  il  déposa,  sur  le  bureau  de  TAssemblée 
nationale,  la  déclaration  suivante  : 

Li  ville  de  Strasbourg,  d-devani  Ri^iublique  souveraine,  s*cst 
soumise  librement  à  la  Kranee,  il  y  a  cent  ans.  File  a  obtenu, 
pour  jîai^Hî  de  celte  soumission  vuluntaire,  une  capilnlaliun  de 
Louis  XIV,  liue  unique,  qui  lui  conûrme  ses  privilèges  el  sa 
Constitution  particnliftre.  Nos  coramettanu  nous  ont  donné  un 
mandat  impératir  pour  en  demander  la  maintenue.  Ces  privilèges, 
la  ville  ne  les  réclame  pas  pour  so  soustraire  à  la  moindre  des 
charges  communes  de  l'EUit  :  elle  y  contribue  dans  des  propor- 
tions supérieures  à  ses  forces  et  aux  contriluitinns  des  autres 
provinces  ;  mais  elle  désire  de  conserver  sa  Constitution  distincte 
du  régime  de  la  province. 

Nous  écrirons  cependant  des  demain  ù  nos  coraniettants,  pour 
leur  peindre  Tentliousiasffle  patrioiuiuc  (lui  anime  toutes  les  pro- 
vinces, et  leur  déterminaUon  uniforme  de  se  soumettre  à  la  loi 
commune,  qui  va  régénérer  la  France,  et  nous  ne  doutons  pas 


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LES  HOMMES  DB  LA  EftVOLimON 


139 


que  la  ville  ne  s'empressi'  de  faire  tous  les  sn(  rilicos  qui  sont  en 
son  pouvoir,  à  la  Patrie  commune,  dont  ellf  tient  son  'bonheur 
depuis  vmi  ans,  el  (qu'elle  ne  lui  abandonne  avec  confiance  ses 
pluB  chers  intérêts. 

La  rédaction  des  décisions  prises  dans  cette  nuit 
du  4  fut  discutée  dans  la  séance  du  lendemain  5. 
Chacun  cherchait  à  sauver  quelques  débris  du  nau- 
frage des  privilèges  et  des  revenus.  11  demanda,  à 
Toccasion  de  la  suppression  des  juridictions  seigneu- 
riales, do  faire  une  exception  pour  TAlsace,  où  beau- 
coup de  princes  étrangers  y  possèdent  des  droits 
féodaux,  garantis  par  des  traités  avec  la  France,  mais 
en  tout  cas  de  ne  les  abolir  que  moyennant  une 
indemnité  à  tlxer,  ce  qui  fut  admis  dans  la  séance  du 
11  et  sanctionné  par  le  roi  le  13  suivant. 

Le  Moniteur  universel  du  5  août,  en  résumant  ces 
séances,  dit  : 

l-es  députés  de  Strasbourg  se  souraetltMil,  pour  leurs  commet- 
tanls,  à  1  égaillé  entière  de  réparlilion  des  impôts,  sous  la  seule 
réserve  de  Tadministration  et  des  privilégesde  leur  ville,  ù  laquelle 
Ils  ae  réfèrent  sur  ees  objets  consignés  dans  ses  capitulations,  et 
relatills,  en  grande  partie,  à  sa  situation  si  importante  et  si  pré- 
dense  au  Royaume. 

Par  suite  de  toutes  ces  nouvelles,  Tancien  Magis- 
trat donna  successivement  sa  dômission,  et  à  la  date 
du  12  août,  il  ne  restait  déjà  plus  que  les  souvenirs 
des  xm,  des  XV,  des  XXI,  des  Cïonsuls  et  des  dOO 
échevins.Dietricli,  commissaire  du  roi  depuis  à  peine 
un  mois,  avait  aussi  offert  de  se  retirer,  mais,  cédant 
à  des  instances  unanimes,  il  consentit  à  remplir  au- 
près de  la  magistrature  strasbourgeoise,  rôorgaiiJsée 
dès  le  13,  les  fonctions  de  représentant  du  gouver- 
nem^t. 

Septembre--.  De  Paris,  TQrokhâm lui  annonçait  : 

Vous  seres  maire  de  Strasbourg,  mais  nous  sommes  à  la  Teille 
d*nne  grande  révolution. 

10  octobre  — .  H  présente  à  TAssemblée  nationale  les  obser- 
vations arrêtées  le  1**  de  ce  mois  en  assemblée  des 

Monnlle  Série.  —  7«*  Année.  ^ 


REVUE  D'ALSACE 


échevîns^représeiitants  librement  élus  de  la  commune 
de  Strasbourg. 

On  pensait  que  la  lecture  de  ces  observations  amè- 
nerait PAssemblée  à  quelques  concessions;  mais  il 
n'en  fût  rien,  les  IntÔrôts  de  Strasbourg  ftirent  sacri- 
fiés, ses  institutions  foulées  aux  pieds,  et  de  sa  Con- 
stitution il  ne  fut  pas  plus  question  que  si  jamais 
elle  n'avait  existée. 

Déoourai^c  par  cette  marche  des  choses,  et  fatigué 
des  contradictions  journalières  de  TAssemblèe,  il 
demanda  et  obtint  un  congé  pour  raison  de  santé. 

Octobre — .  Arrivé  à  Slrasbuur<f  voi^  la  fin  do  ce  mois,  il 
envoya  sa  démission  de  député  à  TAssemblée  natio- 
nale, où  son  collègue  de  Schwendt  resta  seul  sur  la 
brèche  à  défendre  les  libertés  grandement  compro- 
mises du  vieux  Strasbourg. 

2  décembre  — .  n  se  démit  également  de  ses  autres  fonc- 
tions ;  mais,  ayant  à  cœur  de  se  justifier  aux  yeux  des 
échevins  qui,  plus  d'une  fois,  critiquèrent  ses  vues 
politiques,  il  se  décida  à  les  publier  sous  le  titre  de  : 
Rapport  à  la  commune  de  Strasboui^g  sur  la  situation 
de  P Assemblée  nationak  au  mois  d'octobre  de  Vannée 
courante,  lorsque  je  la  quittai,  1789. 

n  indique,  dans  ce  rapport,  les  causes  qui  Pont  forcé 
à  donner  sa  démission,  n  y  rend  compte  de  tout  ce 
qui  s'est  passé  à  Paris,  depuis  l'ouverture  de  l'Assem- 
blée nationale  jusqu'à  fin  octobre  1789. 

Cet  écrit,  qui  renferme  beaucoup  de  vérités,  reflète 
l'esprit  praticien  et  patriotique  du  vieux  Ammeister, 
et  avec  franchise  il  vous  fait  sentir  le  soufQe  domi- 
nateur du  moment,  le(iucl,  plus  tard,  engendra  la 
Terreur  et  toutes  ses  cruautés. 

Retiré  à  la  campagne,  il  ne  s'occupa  plus  que  de 
ses  afEaires  particulières. 

Nous  avuns  de  lui  : 
1^  De  Jure  legislatorio  Merovacomm  et  Carolingonm 


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UB  HOMMES  DB  LA  RÉVOLUTION 


idi 


Galliœ  Rcgum  circa  Sacra*  Argentorati  in-4% 
1772.  Sa  thèse  de  docteur. 
2»  Mémoire  de  droit  public  sur  la  ville  de  Strasbourg 
et  TALsace  en  général  Strasbourg,  1789. 

TURGKHEIM  (Behnhaed-Feédérig  de),  fils. 

1789.  Vicaire  du  corps  des  marchands.  Attaché  àla  maison 
de  banque  de  son  père,  Jean  de  TOrckheim,  rue 
Brûlée.  Il  en  devint  plus  tard  le  chef. 

8  février  1790.  Elu  officier  municipal 

11  novembre — .  Maintenu. 

8  janvier  1791.  Signataire  de  la  proclamation  de  la  muni<^ 
palité  aux  Strasbourgeois  lors  des  rassemblemmts 
et  troubles  qui  eurent  lieu  près  de  Saint^Pierre-le- 
Vieuz. 

14  novembre  —,  De  nouveau éluofiacier  municipal;  il  avait 
le  bureau  des  établissements  publics  et  du  commerce. 

1*  juillet  1793.  n  parut  un  méchant  pamphlet  dans  les 
termes  suivants  : 

Vous  êtes  avertis  qu'on  procédera  le  9  de  ce  mois  à  l'enrôle- 
ment  des  aeiie  ceats  liommes  que  le  Dassin  doit  oflirir.  On  croit 
devoir  vous  piévenir  que  le  maira  ne  s^enrélen  pas,  parce  qnll 
veut  se  fiiire  nommer  député  pour  la  seconde  léglslatore,  étant 

inslruii  p:ir  les  rapiwrts  de  ses  chiens  courants  do  rcmpressomont 
qu'unt  tons  les  j,tiis  honnêtes  de  si'  tlcharnisscr  du  ce  m;uivais 
sujet  et  de  le  rcmplâcer  par  riiuiiiu'lo  t  t  vi  rtiieux  de  Tiirckheiin. 

20  août  1792.  Destitué  oûicier  municipal  par  Garnot»  Prieur 

et  Ritter. 

6 décembre— .  Elu  maire  en  romplaceuient  de  Lachaussc 
et  de  Braun,  qui  ne  restèrent  en  fonctions  qu'environ 
quatre  mois. 

18  janvier  1793.  Destitué  par  Couturier,  Rûhl  etDentzel,  et 
remplacé,  pendant  quelques  jours,  par  Saum  père, 
qui,  peu  après,  fait  place  au  Savoyard  Monet. 

U  septembre  — .  Monet  ordonne  à  l'officier  municipal  Jung 
de  £Edre  venir  à  la  maison  commune  Tûrckheim, 
ancien  maire,  ci-devant  noble,  pour  luiintlmer  Tordre 


13S 


BBVUB  D*AL8A0B 


de  se  rendre  au  Séminaire,  faute  de  n'aToir  pas  obéi 
à  la  proclamation  du  gônéral  divisionnaire  Dièche. 

Informé  à  temps,  il  passe  le  Rhin  et  se  réfugie  chez 
son  frère  aîné  jusqu'après  la  chute  de  Robespierre^ 
27  juillet  17d4. 

10  octolve  — .  Pendant  son  absence,  un  vil  individu  vint 
déclarer  au  Comité  de  survdllance  des  jacobins  avoir 
vu  sortir  de  la  maison  TOrckheim,  ex-maire  et  homme 
suspect»  une  femme  avec  un  panier  couvert  d^un  linge 
blanc  et  allant  au  Marohé-Neu^  n*  5,  maison  Hertz. 
La  déclaration  fiit  aussitôt  renvoyée  au  maire,  qui 
ordonna  à  Waghette  une  visite  des  lieux.  La  maison 
fut  fouillée  de  la  cave  aux  greniers,  sans  qu'on  trou- 
vât rien,  et  ce  fht  Wa^iette  qui  en  recueillit  tous  les 
désagréments. 

81  — .  Imposé  par  SaintJust  et  Lebas  à  160,000  livres,  qui 
furent  régléesles  7,17  et 22  novembre  en  30,000  livres, 
-  le  Ck)mité  de  sûreté  générale  du  Bas -Rhin  ayant 
déclaré,  le  7  décembre,  qu'il  lui  sera  délivré  une  quit- 
tance iiuale,et  que  Ton  se  contentera  des  30,000  livres 
payées. 

Voici  le  jugement  sur  son  compte  que  nous  en  a 

laissé  la  Société  des  jacobins  : 

Tiirckheim,  arisloiTati'  (Icclaié,  qui  ne  s'est  point  fait  de  scru- 
pules de  dire  baulement,  el  toutes  les  fois  que  Toccasiou  s'en  pré- 
sentait, qu'il  n'aimait  pas  la  révolution. 

U  était  officier  mtmicipal  avant  le  18  août,  il  a  signé  lâ  fameuse 
adresse  contre  la  déchéance  dn  roi,  et  a  voté  dans  le  sens  des 
trois  corps  administratifs,  pour  la  non  exécution  de  la  loi  qni 
prononce  la  dérliéancc  do  Louis  XVI. 

Il  est  un  des  suspendus  par  dé(Tel  de  l'Assemblée  législative. 

il  u  protégé  en  mille  occusious  les  aristocrates,  les  fanatiques, 
et  a  vexé  plusieurs  prêtres  patriotes  et  d^autres  citoyens  employés 
dans  les  malsons  de  cbarllé,  dont  il  avait  Padmlnistration. 

Finatoneot,  c'est  un  de  ces  riches  banquiers  qui  ont  acheté  de 
TEmpereur  des  titres  qui  les  dispensaient  d'éire  des  hommes. 

Pareilles  calomnies  ne  sont  point  étonnantes, 
quand  Monet»  dans  son  discours  sur  la  coi^uration 


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LES  HOMMES  DE  LA  RÉVOLUTION 


133 


de  l'Etranger,  prononcé  au  dub  des  jacobins  le  10  mai 
1794,  disait  avec  assurance  : 

Avant  que  Schneider  eut  terminé  sur  i'échafaud  sou  infâme 
carrière,  rèmigré  TQrckbeiiii  soutenait  nos  prisonniers  du 
Fort-Vanban,  quHl  n*y  avait,  à  Strasbourg,  qu*an  seul  iionnéte 
homme  C'était  Schneider. 

Gomme  son  père,  il  ne  fit  point  partie  de  la  Sodété 
des  amis  de  la  Constitution,  tout  en  étant  partisan. 

ULRICH  (ÂNDRÉ). 

1789.  Homme  de  lettres,  GrandYae  de  la  Grange,  6,  à  Stras- 
bourg. * 

SJauTier  1790.  n  fonde  et  rédige  les  Wac^ieniUdie  Na/ch- 
Hchten,  qui  prirent  fin  le  80  décembre  1791. 

8  téTiier  .  DIetrich  le  nomme  secrétaire-Interprète  de  la 
nouvelle  municipalité,  pour  laquelle  il  est  proposé. 

6juillet— .  Membre  delà  Société  des  amis  de  la  ConsU* 
tution;  il  prononce  un  discours  à  sa  réception,  et 
dépose  quelques  propositions  en  &Teur  de  la  langue 
allemande.  ' 

7  février  1792.  D  est  à  l'Auditoire  avec  la  Société. 

6  décembre—.  Elu  officier  municipal  sous  Fréd.  de  Tûrck- 

heim. 

18  janvier  1793.  Suspendu  provisoirement  par  Couturier, 

Rûhl  et  Dentzel. 
11  février—.  Les  mômes  représentants  enjoignent  à  la 

municipalité  de  lo  faire  expulser  do  la  ville,  dans  le 
plus  bref  délai,  sans  qu'il  puisse  se  retirer  en  Alsace 
et  dans  lo  pays  de  Bitsclie. 
Mars  — .  n  va  à  Besançon  déposer  en  faveur  de  Dietrich. 

7  juin  — .  A  peine  est-il  de  retour,  que  son  arrestation  est 

ordonnée  par  les  trois  corps  constitués  du  Bas-Rhin. 
U  échapi»e  aux  poursuites. 

18—.  Dans  la  cinriuièmo  section  de  la  ville,  Schneider  l'at- 
taque dans  un  écrit  intitulé  :  Les  cris  au  désert. 

27  juillet  —  ,  Dans  une  lettre  de  Paiis  aux  jacobms  de  Stras- 


REVUE  D'ALSACE 


bourg,  Laveaux  le  qualifie  de  finiit  see,  de  brouil- 
lon, qui  Ta  toujours  été  et  le  sera  toujours.  Un  de  ces 
êtres  qui  ne  se  corrigent  jamais.  Le  serpent  meurt 
dans  sa  peau,  si  vous  le  réchauffez  dans  votre  sein,  il 
vous  perce  le  cœur,  je  vous  prédis  que  vous  vous 
repentirez  de  votre  indulgence  envers  ce  coquin. 

29  novembre  — .  Il  est  arrêté  et  incarcéré  dans  une  maison 
d'arrêt  de  Strasbourg,  par  ordre  de  Schneider,  dit  le 
registre  des  écroux  ;  mais  le  geôlier  Léonard  fils,  dans 
la  colonne  d  obsorvations,  ajoute  qu'il  ignore  les 
motifs  de  rarreslation. 

Il  est  aussitôt  transféré  à  Besançon,  d'où  on  le 
ramène  à  ses  frais  pour  être  guillotiné. 

15  décembre  — .  Il  arrive  à  Strasbourg,  le  jour  où  Schneider 
a  été  exposé  au  poteau.  Cette  heureuse  circonstance 
lui  sauve  la  vie,  et  peu  de  temps  après  il  est  rendu  à 
la  liberté. 

2  septembre  1791.  Tisserant.  aux  jacobins,  le  désigne  comme 
l'un  des  chefs  de  la  faction  Dietrich  ;  mais  la  chose 
n'eut  point  de  suite,  leur  rcMe  était  terminé  par  suite 
de  la  chute  de  Robespierre. 

17  janvier  1795.  Le  représentant  Bailly  le  nomme  notable 
de  la  commune. 

1800.  Nommé  par  le  préfet  secrétaire  de  la  Commission 
administrative  des  hospices  civils.  Il  est  l'auteur  et 
l'imprimeur  du  Recueil  des  pièces  authentiquas  servant 
à  rhïstoire  de  la  Révolution  à  Strasbourg  (appelé  : 
Livre  bleu  par  rapport  à  sa  couverture). 

UNGERERfils. 

1789.  Boucher  à  Strasloourg. 

12  mai  1793.  A  la  réunion  de  la  sixième  section  de  la  ville, 
il  atteste  avec  Stuber  avoir  entendu  Schneider,  ex- 
pretre  alloinand,  dire,  dans  le  club  des  jacobins,  que 
le  Comité  des  douze  sections  est  une  assemblée  illé- 
gale; que  la  majorité  de  ce  Comité  est  composé  d'aris- 
tocrates et  de  feuillants  avérés  j  que  ce  comité  tend. 


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LES  HOMMES  DB  L4  BËVOLUTIOK 


196 


par  ses  principes,  à  corrompre  l'esprit  public  ;  que  ce 
Comité  s'oppose  formoUemont  aux  pouvoirs  consti- 
tués; qu'il  formo  un  Etat  dans  l'Etat;  qu'il  est  le 
centre  de  la  contre-révolution  dans  le  département; 
qu'il  agit  do  connivence  avec  les  Prussiens  et  les 
Autrichiens;  qu'il  est  urgent  de  supprimer  totalement 
ce  Comité. 
Schneider  y  répond  le  4  juin  suivant. 
25  octobre  — .  Le  Comité  de  sûreté  générale,  dont  Schnei- 
der est  membre,  ordonne  que  Ungerer  sera  déporté 
hors  des  frontières  de  l'Alsace.  On  change  d'avis  et 
il  est  mis  au  Séminaire  jusqu'à  la  chute  de  Robes- 
pierre. 

VOGT  (FO,  père. 

Avant  1789.  Fourbisseur,  au  pont  de  la  Grande-Boucherie, 

à  Strasbourg.  ' 

Juillet  1790.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Consti- 
tution. 

14  novembre  1791.  Elu  notable. 

7  février  1792.  Il  suit  les  amis  de  la  Constitution  à  l'Auditoire 
du  Temple-Neuf,  avec  lesquels  il  reste  juaqu^au  jour 
de  la  fermeture  de  la  salle,  le  27  juin,  pour  passer  aux 
jacobins. 

6  décembre  — .  De  nouveau  élu  notable.  Il  était  alors 
commandant  d'un  bataillon  de  la  garde  nationale  et 
employé  dans  les  bureaux  de  la  municipalité  de 
Strasbourg. 

18  janvier  17d3.  Destitué  comme  notable. 

17  octobre  — .  H  figure  sur  une  liste  de  proscription. 

14  novembre—.  Destitué  commandant  de  la  garde  natio- 
nale, mis  en  état  d'arrestation  pour  être  conduit  en 
prison  à  D^on,  comme  otage,  jusqu'à  la  paix. 

25 n  est  rayé  du  club  des  jacobins. 

10  janvier  1794.  Baudot  et  Lacoste  parviennent  à  le  faire 
arrêter  dans  la  nuit»  et  conduire  aussitôt  à  D\jon; 


BBVOB  U'àlSkCE 

seulement  dans  rarrôté  U  est  qualifié  par  erreur  d*  em- 
ployé dans  les  greniers  de  la  ville. 
19—.  Âux  jacobins,  on  donne  lecture  d^une  lettre  des  pri- 
sonniers de  Dijon,  dans  laquelle  il  relève  la  qualité 
d^employé  des  greniers  de  la  ville,  tandis  qu^  était 
alors  scribe  dans  les  bureaux  de  la  commune.  H  se 
dit  père  de  dnq  enfants,  dont  un,  âgé  de  18  ans,  lisdt 
la  guerre  en  Vendée. 

Les  sans-culottes  le  qualifient  de  Jacobin  de  1788, 
homme  du  peuple  avec  tout  son  nerf  et  ses  vertus, 
il  jouit  de  Testime  de  tous  les  vrais  sana-culottes  de 
Strasbourg. 

26-  ..  La  âtoyenne  Massé  lui  MX  savoir  que  sa  femme  et 

ses  en&nts  se  portent  bien,  qu'^  est  restée  très 
courageuse,  et  qu^à  la  levée  des  scellés,  on  n^a  rien 
trouvé  de  suspect. 

12  février  — .  De  Dijon,  il  adresse,  avec  ses  ooUègnes,  au 

dub  des  jacobins,  V Histoire  de  la  propagande  et  des 
miracles  qu'elle  a  faits  à  Strasbourg  pendant  son 
séjour  ikins  cette  commune  en  frimaire  de  Van  II 
(1793). 

13  mars  — .  La  Société  des  jacobins,  examinant  la  liste  des 

incarcérés,  passe  à  Tordre  du  jour  sur  rex-commau- 
dant  Vof^t,  ce  qui  ne  IVi  pas  empêché  de  rentrer  le 
lendemain  à  Strasbourg. 

27 —  .Monet,  Teterel  et  Mainoni  dénoncent  à  la  Société 

épurée,  at'liliée  aux  jacobins  de  toute  la  République, 
la  l>rochure  du  12  février,  contenant  des  calomnies 
contre  eux  et  de  fausses  inculpations. 
10  mai  — .  Monet,  dans  son  discours  sur  la  conjuration  de 
l'Etranger  dans  le  Bas-Bliin,  ne  peut  s'empêcher  de 
dire  que  Vogt  était  du  complot  marchant  de  pair  avec 
celui  de  Paris  pour  renverser  le  gouvernement  révo- 
lutionnaire et  républicain,  que  les  jacobins  ont  sage- 
ment agi  de  le  proscrire  de  leur  sein,  que  Schneider 
lui  écrivait  de  TAbbaye,  le  20  février  1794,  que  sa 
position,  triste  eu  elle-même,  était  plus  afOigeaute 


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LES  HOlIMBB  DE  LA  B£vOLUTION  ii)7 

encore  par  la  certitude  où  il  était,  d'avoir  causé  son 
infortune  et  son  arrestation,  et  que  m*'mo  Simond, 
de  son  côté,  donnait  à  Vogt  Tassurance  ([ue  sa  réclu- 
sion no  sera  pas  do  longue  durée.  Par  contre,  le  cor- 
donnier Jung  avouait  que  Tàme  de  Vogt  était  Tégout 
de  tous  les  vices. 
SÎ4  juillet  — .  De  Paris,  le  représentant  Riihl  donne  les  ren- 
seignements suivants  sur  Vogt  : 

L'ayeiil  niali'i  nel  de  sa  femme  est  le  même  que  le  mien,  const^- 
quemmeut  ma  cousine.  C'esl  un  bon  ai  iiste  et  un  des  fuurbis- 
aenn  les  plus  renommés  de  la  république  ;  je  ne  lui  ai  parlé  (lu  uoe 
fois  dans  ma  vie^  et  Jignore  quels  sont  ses  principes,  il  a  été  très 
attaché  à  Dietrich,  le  traître,  dont  la  mémoire  sera  toujours  en 
exécration  à  tout  vrai  n^publicaln.  Ce  bruit  cependant  peut  être 
faux  et  je  suis  bien  elitigiié  d'en  {garantir  la  vérité. 

17  janvier  1795.  Bailly  le  nomme  notaljle  au  Conseil  de  la 
de  la  commune,  ajoutant  (jue  le  grade  qu'il  occupait 
dans  la  garde  nationale,  n'existant  plus  dans  la  nou- 
velle organisation,  il  a  cru  exprimer  le  vœu  de  ses 
concitoyens,  en  le  nommant  à  la  municipalité, parce 
qu'il  n'a  jamais  cessé  de  mériter  leur  confiance. 

5  février  —.  Maintenu  notable  sous  le  maire  Keppler. 

31  mars  1800.  U  est  remplacé  par  Vogt»  charpentier. 

WAMGEN  DE  GEROLDSBCK  (Louis  de), 
rae  de  la  Toussaint,  n"  18,  à  Strasbourg. 

1789.  Membre  de  TAssemblée  provinciale  d'Alsace. 

Septemljre  1791.  Membre  du  Conseil  d'administration  du 
district  de  Strasbourg,  de  corps  se  constitua  peu  de 
temps  après  et  nomma  son  Directoire,  dont  il  fut  l'un 
des  quatre  membres  sous  la  présidence  de  M.de  Sancy. 

8  joillet  1792.  Signataire  de  1'  adresse  envoyée  à  l'Assemblée 
nationale  lors  de  renvabissement  des  Tuileries,  le  20 
juin,  et  demandant  la  poursuite  et  la  condamnation 
des  auteurs. 

13-U  novembre — .  A  l'élection  tenue  à  Wissembourg,  il 
est  de  nouveau  élu  membre  du  Directoire  départe- 
mental, dont  Monet  était  le  procureur  général 


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138  BBVUB  D'ALSACE 

7  février  1793.  Encore  en  fonction,  il  vise  un  état  des  émis- 

grés  du  Bas-Rhin. 

22  juin  — .  Vice-président  de  cette  administration,  il  déboute 
Tabbé  Rumpler,  enfermé  au  Séminaire,  de  sa  plainte 
contre  le  maire  Monet. 

3  octobre  — .  Destitué  comme  ci-devant  noble,  dont  la 
famille  a  émigré,  fouillant,  qui  a  refusé  de  signer 
l'adliésion  à  la  révolution  du  31  mai,  et  qui  a  appuyé 
ladressa  fédéraliste  de  l'administration  du  départe- 
ment de  la  Meurthe,  où  il  avait  des  propriétés. 

5  — .  Il  signe  encore  comme  administrateur  du  Directoire. 

14 — .Le  Comité  de  sûreté  générale  du  Bas-Bhin  ordonne 
sa  réclusion. 

11  décembre — .  Sur  sa  réclamation,  le  même  Comité  passe 
outre  et  lui  refuse  le  certificat  de  civisme,  ce  qui 
l'oblige  à  quitter  Strasbourg. 

14  - .  Il  sera  écrit  à  la  municipalité  et  an  Comité  de  surveil- 
lance de  la  commune  de  Grépy,  prés  Brienne,  dépaiv 
tement  de  PAube,  de  rarrôter  et  Mre  conduire  à 
Strasbourg. 

8  septembre  1794.  Aux  jacobins,  Tisserant  le  classe  chef  du 

parti  Dietdch.  * 

17  janvier  1795.  n  revient  dans  ses  foyers,  le  représentant 

Bailly  le  nomme  administrateur  du  district  de  Stras- 
bourg. 

30  — «  Membre  du  Comité  de  la  Société  populaire  régénérée, 
il  signe  le  règlement  de  la  nouvelle  Société  d'après 
rarrèté  de  Bailly  du  17  dudit. 

81  —,  nMtappelàses  concitoyens  pour  obtenir  des  secours. 

Octobre—.  Lors  des  troubles  d'Obemai,  il  y  fut  envoyé 
comme  commissaire  par  l'administration  du  Bas- 
Rhin,  pour  procéder  à  l'enquête  demandée.  Celle-ci 
ayant  été  faite  dans  un  sens  favorable  à  la  commune, 
le  représentant  FHcot  n'y  donna  pas  suite. 

18  avril  1797.  Démissionnaire  de  radmiiiistration  du  Bas- 

Bhin. 

1800.  De  reeh^  membre  du  Conseil  général  du  Bas-lihin, 


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LES  HO&OfBS  DE  LA  RÉVOLUTION 


139 


il  fiit  61a  commissaire  administratif  des  hospices 
deStradM)urg. 

1806-1810.  Maire  de  Slrasbourg;  il  reçut  Tempereur  et  . 
rimpémtrioe  Joséphine,  en  1809,  et  Blarie-Looise,  en 
mars  1810. 

WEBER  (Samuel-Reinhardt). 

23noY6mbre  1747.  Né  à  Strasbourg,  où  il  était  licencié  en 

droit  avant  1783. 
1783.  Secrétaire  de  la  Cliambre  des  économies  et  de  celle 

des  forôts. 
1786.  Chef  de  la  tribu  de  FAncre. 

1788.  Secrétaire  de  la  CSiambre  des  impôts  et  interprète  à 

celle  des  contrats. 
8  tMBt  1790.  Gomme  membre  de  Fancien  Magistrat,  il  est 

élu  officier  munidpal. 
80  avril  — .  Substitut  du  procureur  municipal.  M**  Mathieu. 

Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Constitution. 
11  novembre  — .  Maintenu  substitut  de  X.  Levrault 

6  septembre  1791.  Gomme  tel,  il  proteste  contre  rinfôme 

pan^hlet,  accusant  Dietridi,  Levrault  et  Noisette 
d*aroir  été  les  instigateurs  d'une  tentative  d'assassinat 
contre  le  cardinal  de  Rohan,  alors  à  Ettenheim. 
14  novembre  — .  Confirmé  substitut  de  Michel  Mathieu. 

7  février  1793.  A  l'Auditoire  avec  la  Société  des  amis  de  la 

Constitution,  et  ce  jusqu  au  27  juin  suivant,  jour  de  la 

fermeture  de  la  salle. 
22  août  ~.  Camot,  Prieur  et  Bitter  le  nomment  procureur 

de  la  commune  à  la  place  de  Michel  Mathieu. 
Janvier  1798.  H  autorise  Hervé  à  compter  800  livres 

à  Biviére,  chargé  de  remettre  au  représentant  RCIhl,à 

FGuria^unelettre  que  ce  dernier  dit  n'avoir  jamais  reçue. 

8  octobre  — .  Destitué  procureur  par  Milhaud  et  Guyardin, 

comme  aristocrate,  agent  de  Dietrichet  colporteur  de 
ses  adresses. 

14—.  Ordre  de  TOloigner  à  vingt  lîeues  des  frontières  de 
l'Alsace.  Il  indiquera  sa  résidence. 


140 


BBVQB  D'ALSAOB 


11  décembre —.  Rentré  clandestinement  à  Strasbourg,  il 
est  conduit  au  Séminaire  jusqu'à  nouvel  ordre. 

Après  la  chute  de  Robespierre,  27  juillet  1794,  il  est 
mis  en  liberté. 

17  janvier  1 795.  Bailly  le  fait  juge  au  tribunal  civil  du  district 

de  Strasbourg. 

1797.  Receveur  général  des  hospices  civils  de  Strasbourg. 

WEBËB  (Daniei^Faêdéeug). 

31  janvier  1752.  Né  à  Strasbourg,  où  il  était  charpentier. 

1786.  Chef  de  cette  tribu  dans  la  rue  de  ce  nom. 

2  mars  1790.  Capitaine  de  la  garde  nationale,  et,  comme  il  a 
reçu  le  juif  Marx  Berr  dans  sa  compagnie,  la  Société 
des  amis  de  la  Constitution  lui  adresse  une  lettre  de 

remercîments. 
81  — .  11  est  reçu  membre  de  cette  Société. 

13  avril — .  A  son  entrée,  il  prononce  un  petit  discours 

approprié  à  la  circonstance  et  empreint  du  plus  pur 
pati'iotisme. 

7  février  1792.  U  est  à  TAuditoire  avec  les  ûdôles  à  la  Consti- 

tution. 

6  décembre  — .  Notable  de  la  commune. 

18  janvier  1793.  Maintenu,  mais  pour  peu  de  temps. 

31  octobre  — .  Saint- Just  et  Lcbas  l'imposent  à  2000  livres, 
qu'il  paie  les  11  et  21  décembre  suivant 

11  décembre  — Cionduit  au  Séminaire  avec  son  frère  Tex- 
procureur. 

22  avril  1794  Décédé,  après  sa  sortie  du  Séminaire. 

WEILER  (F.). 

Avant  1780,  Docteur  en  médecine  à  Strasbourg. 

8  févi'ier  1790.  Proposé  pour  la  nouvelle  municipalité. 
Juillet  — .  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Constitution. 

7  février  1793.  Il  est  avec  elle  à  TAuditoire  du  Temple-Neuf. 

14  octobre  179a  Le  Comité  de  sûreté  générale  du  Bas-Rhi^ 

arrête  qu'il  sera  reclua 


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LES  HOMMES  DE  LA  BÉVOLUTION  141 

31  —  .  Imposé  par  Saint-Just  et  Lebas  à  30,000  livres,  sur 
lesquels  il  paie  les  6  et  11  novembre  10,500  livres.  Il 
paraîtrait  que  le  surplus  lui  a  été  remis. 

21  novembre  — .  Il  est  rais  au  Séminaire. 

22  .  Il  réclame  son  ôlai'gissement  ;  mais,  comme  il  est 

reconnu  feuillant  convaincu,  on  passe  outre  ;  seule- 
ment pour  ne  pas  laisser  soulfrir  ses  malades,  il  lui 
sera  donné  deux  plantons  patriotes  et  intelligents, 
à  3  livres  chacun  par  jour. 
1"  décembre  — .  Il  ose  sortir  du  Séminaire  avec  un  planton. 
2-i— .  Ce  planton  lui  est  retiré. 

Après  la  chute  de  Schneider,  il  est  m»»  en  liberté, 
WËYHËE  (£x»ins). 
ATOnt  1789.  Négociant  à  Strasbourg 

80  novembre  1790.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la 
Constitution. 

7  février  1793.  Il  est  avec  elle  à  TAuditoire. 

6  décembre  — .  Elu  notable  et,  peu  de  jours  après,  nommé 

officier  municipal. 
18  janvier  1793.  Mamtenu. 

6  avril  — .  Il  signe  la  réquisition  d'uniformes  complets 

pour  les  gardes  nationaux  de  Strasbourg. 
3  octobre  — .  Destitué  par  Milhaud  et  Guyardin,  comme 

chef  des  municipaux-feuillants. 
31  - .  Imposé  par  Saint-Just  et  Lebas  à  20,000  livres,  qu'il 

paie  les  U  et  9  novembre. 
31  mars  1800.  Notable  sous  Livio. 
21  mai  1802.  Membre  du  Conseil  général  du  Bas-Rhin. 

WILD  [j£UkN-GEOFFBOl). 

1786.  Secrétaii»4reoevâur  du  vingtième  au  bureau  du 
tratâe]avm& 

8  février  1790.  Fïroposê  pour  la  municipalité. 

30  septembre  — .  En  eette  qualité,  reçu  membre  de  la 
Société  des  amis  de  la  Constitution. 

7  février  1792.  Avec  elle  à  l'Auditoire  du  Temple-Neuf  jus- 

qu'à la  fermeture  de  cette  saUe,  le  27  juin  suivant. 


142  BsyuB  d'albaob 

10  septembre  1793.  Le  Comité  des  jacobins  arrête  d^envoyer 
une  députation  à  la  municipalitô  pom*  le  faire  incar- 
cérer sans  hésiter,  comme  ayant  mérité  depuis  long- 
temps co  traitement.  Cette  députation  ira  chez  le 
généralDiôche,  pour  qu^  prenne  les  mesures  conve- 
nables, afin  que  cet  oiseau  ne  s'évade  pas,  et  malheur 
à  celui  qui  oserait  lui  donner  asyle. 

Ënferm*  '  nu  Séminaire,  il  n'en  sortit  que  fin  décem- 
bre, après  la  chute  de  Schneider. 

26  mai  1794.  De  nouveau  mis  en  état  d^arrestation  conmie 
ex-employé  de  la  municipalité»  destitué  pour  cause 
d'aristocratie  et  meneur  de  section. 

La  chute  de  Robespierre  lui  rendit  la  liberté  en  août 
suivant 

Octobre  Le  maire  André  lui  donne  un  emploi  à  la 
municipalité. 

17  janvier  1795.  Cîomme  tel,  le  représentant  BaîUy  le  nomme 
juge  de  paix  du  troisième  arrondissement  de  la  ville. 

Iv  octobre  — .  U  est  chargé  de  recevoir  les  cotisations  pour 
suivre  et  arriver  au  remboursement,  par.FEtat,  de 
Femprunt  forcé  de  SaintpJust  etLébasdu  31  octl793. 

WILHELM. 

Mars  1791.  Vicaire  apostolique  de  la  cathédrale  de  Stras- 
bourg et  secrétaire  presbytéral,  nommé  par  Tevèque 
constitutionnel  Brendel,  en  vertu  du  décret  de  TAs- 
semblée  nationale,  du  l'2  juillet  1790. 

8  novembre  1792.  11  répond  à  Tarrété  épiscopal  en  ces 
termes: 

Lps  sex;igi  riairt's  catholiques  romains,  citoyens  du  Séminaire, 
non  siMilemi'Mi  y  iviiiiis  aux  termes  de  la  loi  du  2(5  août,  mais 
même  y  reurerniés,  au  désir  de  rarrêté  du  5  novembre,  déclarent 
par  les  présentes  au  citoyen  évèque  iircndel  que,  pour  oser  en 
bonne  conscience  fidre  leur  culte  dans  réalise  cathédrale,  il  fim- 
drait  qu'ils  se  trouvassent  d'accord  en  opinions  religieuses  avec 
ledit  citoyen  évêque. 

Or,  s'ils  s<^  fussent  trouvés  dans  ce  cas,  ils  n'auraient  pas  été 
dénoncés  comme  des  prêtres  insermentés,  par  six  imbéciles  de 
leurs  cantons,  et  ils  ne  jouiraient  pas  aujourd'hui  de  la  gloire  de 
se  voir  incarcérés  pour  la  cause  de  Dieu. 


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LB8  HOMMES  DE  LA  RÉVOLUTION  143 

Its  ^tent  que,  seloD  lenr  manière  Cinatiqiie  de  croire.  Us  ne 
penvenl.  ni  ne  doivent  pas  plus  eélébnr  ies  saints  mystères  dans 

les  é<îlises  (le  conformistes,  qu'ils  n.>,  doivent  ou  ne  peuvent  les 
célébrer  dans  les  temples  des  protesUmts. 

ZIMMER  (Jean-Frédéric),  père, 
qiud  Saint-Thomas. 

1760.  Nomménotairele24mai  et  ^^reffier  aux  inventaires 
le  14  juin.  Plus  tard,  notaù-e  de  l'Université  de  Stras- 
bourg, NotaiHm  Academicus.  Administrateur  de  la 
paroisse  protestante  de  Saint-Pierre-le-Jeune.  Rece- 
veur  de  la  fondation  de  Saint-Thomas. 

26  mal  179a  Gomme  ancien  stettmeister,  élu  membre  du 
district  de  Strasboui-g. 

Sjuillet  — .  Le  district,  s'étant  constitué,  le  nomma  du 
Directoire  déi^artemental. 

Janvier  1791.  Jtmi  Mieux  intentionné,  dans  une  lettre  à  ses 
confrères  qui  cultivent  la  terre,  tâche  de  leui^  prouver 
que  la  vente  des  biens  ecclésiastiques  est  la  ruine  des 
paysans,  que  les  canonspayés  jusqua  présent  étaient 
moindres  que  les  nouvelles  contributions. 

^^"^'^  S'-i'ie,  dit  l'auteur  anonyme, 

jODimals  chaque  fois  une  diminution  d-î  mes  canons  :  me  mau- 
qnaiNl  du  blé  pour  ensemencer  mes  terres,  surtout  de  l  orge,  je 
le  recevais  sans  difficulté  de  Zimmer,  raeeveur  de  b  ftndatimi  de 

!>aint-Ihoinas;  ce  l,rave  homme  était  aussi  aimable  envers  moi 

que  ses  devanciers  envers  mon  ix-re  et  mes  aïeux. 

26  février      Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Consti- 

tution. 

15  septembre      Maintenu  au  Directoire  du  district. 

7  février  1792.  U  suit  les  amis  de  la  Constitution  à  TAuditoire. 

14  mars  1793.  Président  d'âge  du  Directoire  du  disMct 

3  octobre  Destitué  du  Directdre  comme  aristocrate,  qui 
a  refusé  d'adhérer  à  la  révolution  du  SI  mai. 

14—.  Le  Ck>mité  de  sûreté  générale  du  Bas-Rhin  anéte  qu'il 
sera  éloigné  à  vingt  lieues  des  frontières  dol'Alsace, 
™^  tenu  d'indiquer  son  nouveau  domicfle. 

31     Imposé  par  SaintJust  et  Lebas  à  50,000  livres. 

enovemhre-.  Il  paie  à  compte  8000  livres. 


144 


REVUE  D'ALSACB 


15  —  .  Le  Comité  de  sûreté  générale  du  Bas-Rhin,  vu  le  peu 
de  zèle  que  montre  Ziramer  père  à  payer  sa  contri- 
bution, décide  de  le  f;iire  mettre  sur  le  champ  en  état 
d'aiTestation.  Incarcéré  au  Séminaire,  il  n'obtint  sa 
liberté  qu'après  la  chute  de  Robespierre,  en  août  1794. 

17  janvier  17U5.  Bailly  le  nomme  notable  de  la  commune. 

1797.  Commissaire  du  Directoire  exécutif  près  l'adminis- 
tration municipale  de  Strasbourg,  dont  Dômichel  était 
président 

ZIMMER  (George-Frédéric),  fils. 

Avant  1787.  Licencié. 

26  mai  1787  au  24  février  1827.  B  succéda  à  son  père,  Jean- 
Frédéric,  comme  notaire  à  Strasbourg. 

26  février  1791 .  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Consti- 
tution. 

7  février  1792.  Avec  elle  à  PAuditoire  jusqu'à  la  formetore 
de  cette  salle,  le  27  juin. 

81  octobre  1793.  Imposé  par  SaintJust  et  Lébas  à  la  même 
somme  que  son  père,  50,000  livres. 

15  novembre—.  Vu  son  peu  de  zèle  à  payer  cette  contri- 
bution, le  Cîomité  de  sûreté  générale  arrête  quil  sera 
admonesté;  que  cependant  sa  contribotion  serait 
réduite  à  20,000  livres,  à  condition  de  la  payer  sur  le 
champ. 

19  — .  Il  verse  2000  livres. 

21  — .  Ledit  Comité  lui  délivre  son  certificat  de  civisme,  et 
réduit  de  nouveau  sa  contrD3ution  à  12,000  livres. 

24—.  Si,  dïci  au  26,  à  midi,  sa  taxe  n"est  point  payée,  il  ira 
au  Séminaire.  Ce  qui  eut  lieu. 

Il  n'en  sortit  qu'après  la  chute  de  Robespierre,  en 
août  1794 

Etienne  Barth. 

(Les  Hommes  de  1793  ù  la  prochaine  livraison.) 


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ÉTUDE 


SUB 


QUELQUES  POINTS  OBSCURS  OU  CONTROVERSÉS 


LHISIOIRE  DE  SAINTE-MARIE-AUX-MINES 


Avant  1790,1a  comnuine actueliti de Sainte-Marie-aux-minc9 
était  divisée  en  deux  portions,  formant  cliucuue  une  commune 
distincte,  ayant  son  administration  propre,  ses  lois  et  même 
sa  religion.  Billing  et  Grandidier  attestent  que,  de  leur  temps, 
la  langue  allemande  était  presque  seule  parlée  dans  Tune  et 
la  langue  française  dans  Tautre.  La  portion  méridionale  de 
Sainte-tfarie  appartenait  au  comté  de  Ribaupierrè  ;  la  sep- 
tentrionale était  lorraine.  Entre  les  deux  eoulait  le  Landwas- 
ser  on  Landbaeh,  formé  par  la  réunion  au  lieu  dit  Bréliagotte 
(hameau  auj  m rd*hni  englobé  dans  la  Tllle)  du  ruisseau  d*Her- 
gochamps  ou  de  Liverselle  et  de  la  Liepvrette.  En  amont  du 
Bréhagolte.  le  ruisseau  d'Hergochamps  séparait  seul  la  Lor- 
raine de  l'Alsace,  et  il  en  était  ainsi  jusqu'à  sa  source  appelée 
•  la  Gineselle  ». 

L'assertion  de  Billing,  de  Grandidier  et  de  tous  les  con- 
temporains de  la  Révolution  française,  relative  au  langage  des 
habitants  de  Sainte-Marie  (Alsace),  est  conforme  à  la  réalité 

Roimlle  SMe  -  7*  Année.  10 


DE 


oftté  d'Alsace 


146 


BXVUB  O'AtSACB 


des  faite.  Vers  la  fin  du  XVIIP  siècle,  les  communautés  de 
la  rive  droite  do  la  Liepvretle  étaient  absolument  germani- 
sées. Peut-être  paraitra-t-il  de  quelque  intérêt  de  rechercher 
oommeoi  celte  germanisation  s'est  opérée.  C'est  ce  que  je 
?aîB  essayer  de  faire. 

Au  mlliea  du  XVI*  siècle,  Sainte-Marie  d'Alsace  n'existait 
pas  encore.  A  cette  époque,  on  ne  connaissait  que  Mergenkilch, 

Marîenkirch,  Mariakirch,  petit  hameau  élevé  depuis  peu  anx 
cantons  dits  <  le  Rain  et  le  Pré  de  Sainte-Marie-Madelaiue  », 
sur  un  terrain  payant  la  dîme  à  l'église  «  Marie-Madeleine  », 
située  sur  la  rive  lorraine,  et  qui.  jusques  en  15 lo,  avait 
servi  de  pâturage  commun  aux  riverains  des  deux  bords. 
Tant  que  le  sol  sur  lequel  se  bâtit  le  bourg  de  Sainte-Marie 
d'Alsace  put  sembler  improductif,  nul  ne  songea  à  en  reven- 
diquer la  possession.  Les  seigneurs  de  Lorraine  roccupèrent, 
sinon  de  droit,  au  moins  certainement  de  fiiit.  Une  douzaine 
de  maisons,  les  seules  construites  à  Mergenkilch  avant  i51S, 
leur  payaient  un  droit  de  ménantie  et  continuèrent  à  le  payer. 
Un  accord,  intervenu  entre  Sclimassmau  de  Ribaupierre 
et  Antoine  de  Lorraine  (loi2-15l5},  ne  décida  pas  absolu- 
ment de  lu  (juestion  de  propriété  :  il  permit,  en  effet,  aux 
sujets  lorrains  de  faire  pâturer  leur  bétail  sur  le  territoire 
en  litige,  et  Schmassman  s'obligea  à  indemniser  les  habitants 
de  Fertrupt  qu'il  avait  maltraités  et  empêchés  do  travailler 
aux  mines  ouvertes  par  la  Lorraine  sur  un  point  de  ce 
môme  territoire,  &  Suscité.  Après  la  réunion  deTAlsace  à  la 
France,  Louis  XIV,  en  1669,  crut,  paralt-il,  devoir,  par  nn 
édit  spécial,  afBrmer  à  nouveau  ses  droits  sur  Sainte-Marie, 
bourg  alsacien.  «  Tout  ce  qui  se  trouve  à  droite  de  la  hau- 
teur et  de  l'eau  vers  le  midi  sera  et  demeurera  entièrement 
séparé  de  la  Lorraine. . .  distrait  du  ban  de  Marie-Madeleine 
(Lorraine)  et  ',^•^rde  le  nom  de  Sainte-Marie,  côté  d'Alsace, 
etc.  •  Ou  trouve  des  traces  de  ces  contestations  jusque  dans 


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HISTOIRB  XXB  SAINTB-IIABIB-AUX-MINBS 


147 


les  préliminaires  et  dans  rioBtrument  lai-méme  de  VEutih 
p&iteheBuhe  à»  il i9. 

jQsqae  Yen  le  XVI*  siècle,le  nom  donné  à  la  contrée  sou- 
mise aux  Ribaupierre  sur  la  rive  droite  delà  LiepTrette était 
celai  de  val  de  U^Yre  et  d'Eschery.  On  n'y  royait  point, 
ayant  i500,  d'agglomérations  compactes  de  maisons  capables 
de  former,  ni  une  ville,  ni  même  un  bourg, mais  des  habita- 
tions éparses,  ça  et  là  quelque  peu  groupées,  noyaux  primi- 
tifs qui,  en  se  soudHut  entre  eux.  ont  formé,  par  la  suite  des 
âges,  une  partie  de  la  ville  actuelle.  C'étaient  le  Pré,  Sainte- 
Marie- Madeleine  (Alsace),  Saint-Philippe,  Liverselle,  Bréha- 
gotle,  etc.  Vers  le  même  temps  que  Mergenkilch»  ou,  pour 
mieux  dire,  un  peu  auparavant,  un  hameau  d*une  certaine 
importance  s'était  élevé  en  aval,  le  longdurniaseletduFeur- 
truptou  de  Fortelbacb.  Il  en  existait,  d'ancienneté,  deux 
autres,  l'un  à  l'extrémité  orientale,  l'autre  à  l'extrémité  occi- 
dentale de  la  vallée  :  c'étaient  les  deux  Saint-Gotllaume,  qui, 
pour  avoir  été  antrefois  occupés  par  les  moines  d'un  couvent 
syanteu  un  Saiut-Guillame  à  sa  léte,  en  avaient  pris  le  nom, 
comme  ils  prireiit  tous  deux  celui  d'Eschery,  ou  Eckkericli, 
du  vénérable  A(  hericli,  homme  noble  et  protecteur  du  môme 
couvent,  à  ce  que  rapporte  Richer  de  Senones,  contredit  sur 
ce  point  par  une  charte  de  CUariemagne,  du  14  septembre 
774,  oii  le  D'  FOrstmann,  de  Dresde,  trouve  déjà  le  nom 
d'Ëckerlch  sons  la  forme  <  Achinis  ragni  >.  Quoi  qu'il  en  soit, 
à  côté  du  Saint  Guillaume  devenu  l'Eschery  actuel,  se  trou- 
vaient dispersés  des  groupes  plus  ou  moins  nombreux  de 
maisons,  à  Fàunoux  (aujourd  hui  Rauenthal),  à  Sorlhftte,  à 
la  Barre  (La  Côte  ),  à  la  Petite  Lièpvre.  etc.  L'autre  Saint- 
Guillaume,  le  Saint-Guillaume  oriental,  perdit,  on  ne  sait  com- 
ment, ce  nom,  pour  redevenir  exclusivement  Saint-Biaise, 
comme  au     et  au  XI"  siècle. 

Le  courent  dont  j'ai  parlé  fut  le  premier  siège  connu  de 


148 


RBVUB  D'ALaAOB 


radinioistratioii  régionale;  plus  tard,  Fabbayede  Moyemnou- 
tiers  dirigea  le  couveot  lai-même.  Plas  tard  encore^*  siècle), 
des  nobles  bâtirent  le  château  d^Ëschery  (Hbh  Eckkerich)  du 
produit  des  mines  qolls  aFaient  décooTcrtes  et  exploitées 

dans  le  val,  «t  prirent  ou  reprirent  possession  des  domaines 
peu  à  peu  abandonnés  par  la  négligence  des  moines  de 
Moyenrnouliers.  Après  rextinction  des  Eckkerich,  leur  châ- 
teau passa  par  moitié  aux  seigneurs  de  Lorraine  et  à  ceux  de 
Ribaupierre.  Ceux-ci  y  entretinrent  un  gouverneur,  qui, 
devenu  plus  civil  que  militaire,  et  trouvant  le  château,  con- 
stniitau  petit  Rombach  (commune  de  Sainte^Groix-aux-Mines), 
de  (kible  ressource,  Tint  loger  an  Landhaus  de  Saint-Biaise, 
à  rentrée  du  wallon  de  Fertrupt,  à  Textréme  limite  du  Pré 
de  Sainte*Marie-Madeleine. 

Le  gouverneur  ou  Landrichter  administrait  le  val.  A  côté 
de  lui,  l'on  trouvait  au  XVP  siècle  une  autre  autorité  absolu- 
ment indépendante  de  son  pouvoir  :  c'était  le  Bergrichter, 
juge  0(1  {2:ouverneur  des  mines,  qui  réglait  les  affaires  de  la 
confrérie  des  mineurs  (Jùiappscàafi)  et  celles  des  mineurs 
eux-mêmes. 

Cette  double  administration  était  indispensable.  Le  val  de 
LièpTre  et  d'Eschery,  avec  ses  forêts,  ses  pâturages,  ses  cours 
d*eatt,  ses  babitants  bourgeois,  appartenait  au  LandethtrTf 
seigneur  foncier  de  Ribaupierre  seul  :  celui-ci,  depuis  Scbmass- 
man  I,  les  tenait  en  flef  deTabbayede  Murbach,  dont  il  avait 
recherché  la  protection.  Les  mines,  au  cunh  aire,  formaient 
un  ûef  d'Empire,  concédé  par  Charles-Quint  aux  Ribaupierre 
et  aux  archiducs  d'Autriche  indivisément. 

Ces  mines  avaient  été  plus  ou  moins  explorées  dès  le  XI" 
et  le  XII"  siècle,  au  rapport  de  Richer.  Il  parait  qu'elles  ne 
tardèrent  pas  à  tomber  dans  un  abandon  presque  complet, 
jusqu'au  moment  où  les  Lorrains,  dont  Texemple  fut  suivi  par 
Brunon  de  Ribaupierre  (fin  du  XV*  siècle),  s'en  occupèrent 
de  nouTeau.  Leur  richesse  éveilla  l'attention  et»  soit  que  les 


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HBITOIBB  DE  BAIMTS-MABlB-AtfX-KQIES 


149 


sdgnturs  de  Ribeau?iUé  fassent  hors  d*état  de  les  exploiter 
seuls,  soit  qu'ils  cberebassent  à  obtenir  contre  les  réelama- 
tkms  des  Lorrtias  an  appai  dans  la  fomtiie  impériale,  ils 
rÔDSsireat  à  se  les  fidre  concéder  i  titre  de  fief  d*Bmpire 
indivis  entre  eux  et  Ferdinand  d'Autriche.  Les  mineurs  y 
accoururent  en  foule. 

Tl8  se  logèrent,  naturellement,  dnns  le  voisinage  immédiat 
des  galeries  en  cxploitntion,  c'est-à-dire  dans  les  vallons,  jus- 
que-là presque  déserts,  de  la  Burgonde.  du  Fissthal  et  du 
Fertrupt,  à  Suscité  ou  Siltcn,  sur  le  Pré  el  aux  abords  du 
Rain  de  Sainte-Marie- Madeleine,  où,  dans  Tespace  de  moins 
d'an  demi-siècle,  ils  élevèrent,  si  nous  en  croyons  Sébastien 
Honster,  près  de  douze  cents  maisons. 

Or,  ces  mineurs  étaient  pour  la  plupart  des  étrangers. 
Tenus  de  Saxe  et  d*antres  pays  de  l'Allemagne  :  leur  langue 
était  donc  l'allemand.  Tandis  que  les  vassaux  naturels  de 
Ribaupierre,  bourgeois  et  manants  indigènes  des  communau- 
tés du  Val.  parlaient  le  français  ou  le  patois  vosgien,  appa- 
renté au  français,  les  membres  de  la  Jûiappsrhnfft,  sujets 
d'Autriche-llibaupierre,  n'entendaient  que  le  pur  allemand. 
En  d'autres  termes,  les  anciens  hameaux  de  Saint-Biaise  et 
d'Eacbery  étaient  au  XYI*  siècle  exclusivement  françaia;  les 
nouveaux  bameaux,  au  contraire,  savoir  Fortelbacb  et  Marien- 
kirch,  colonies  saxonnes,  étaient  germains. 

Si  Ton  considère  que  toutes  les  commnnes  limitrophes  de 

Saînte-Marie-d'Alsace  avaient  et  ont  encore  une  môme  langue, 
parlée  à  Aubure,  à  Fréland,  à  la  Poutroye.  au  Bonhomme, 
aussi  bien  qu'à  Sainte-Croix-aux-Mines  et  à  Sainte-Marie  de 
Lorraine,  Ton  sera  porté  à  admettre,  a  priori,  que  l'étroit 
îlot  formé  dans  cet  océan  de  français  par  Sainte-Marie  d'Al- 
sace n'avait  pas  un  langage  particulier,  pas  plus  qu'il  n'avait 
de  monnaie  particulière,  hors  de  cours  chez  les  voisins. 
Il  est  impossible  de  croire  que  Ribeauvillé,  pays  riche  et 


ISO  BEVUB  D*ALSAGB 

fertile,  ait  envoyé  des  colonies  dans  les  landes  stériles  d'Esclie- 
Tf,  Il  est  non  moins  impossible  de  supposer  qae  les  habitants 
primitife  dn  vn\  de  Uèprre  alsacien,  dans  l'hypothèse  qu'ils 
aient  été  de  langue  allemande,  soient  restés  confinés  dans 
une  plaine  relative,  alors  que  leurs  adversaires  venus  de 
l'Ouest,  maîtres  de  celte  même  plaine  du  côté  de  Lorraine, 
se  seraient  bornés,  au  miiii,  à  occuper  la  cime  des  montagnes. 
Aujourd'hui  encore,  pour  peu  que  Tou étudie  la  physiononiie 
des  rirerains  de  la  Liepvrette,  on  reconnaîtra  qu'ils  sont  de 
deux  races  nettement  caractérisées.  Les  anciennes  familles  dn 
côté  droit  de  la  rivière  ont  la  même  taille^  la  même  expres- 
sion, le  même  accent,  le  même  esprit,  j'sjouterai  encore 
les  mêmes  noms  qae  celles  du  côté  gauche.  Elles  contras- 
tent singulièrement  avec  cenx  de  nos  concitoyens  de  race 
germanique,  qui,  plus  grands,  plus  vigoureux,  d'une  intelli- 
gence plus  étendue,  mais  moins  fine,  ont  éh'  moins  éprouvés 
par  un  long  séjour  dans  une  vallée  froide  et  humide. 

Mais,  sans  insister  sur  ces  considérations  trop  théoriques, 
et  quittant  le  domaine  de  la  spéculation  pour  aborder  les 
preuves  matérielles,  voyons  ce  que  nous  indiquentles  docu- 
ments du  passé  1. . .  Ils  tendent  uniformément  à  établir  que: 

1*  La  langue  principalement  en  usage  au  XVI'  siècle,  dans 
le  val  de  Lièpvre  alsacien,  était  la  française  ; 

9r  Des  Allemands,  venus  da  dehors,  s'établirent  dans  le 
val,  à  partir  de  la  fin  du  XV' siècle.  D  autres  les  rejoignirent 
vers  1560;  de  nouvelles  immigrations  euient  lieu  de  1637 
à  1690,  vers  1730,  de  1730  à  1789.  Ainsi  se  perdit  peu  à 
peu  l'usage  du  français,  qui  fut  remplacé  par  lailemand. 

Quant  au  premier  point,  il  me  suMra  de  rappeler  que  les 
indigènes  du  val  de  Lièpvre,  quoique  séparés  administrati- 
vement,  étaient  absolument  d'accord  pour  tout  le  reste.  Les 
jours  de  fêle  solennelle,  les  bahitants  de  Sainte-Marie  de  Lor- 
raine se  rendaient  avec  croix  et  bannières,  en  véritable  pro- 
cession, à  Saint-Pierre  sur  l'Hâte,  qui  était  réglised'Eschery; 


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mSTOlHE  DE  SAINTE-MAltlE-AUX-MlNES 


lôl 


d*antre8  fois,  au  contraire,  c'étaient  tes  gens  â*Âlaace  qni 

allaient  processionnellement  à  Sainte-Marie-Magdeleine,  Té- 
glise  du  cùlé  lorrain.  Les  actes  publics,  délibérations  de  jus- 
tice, livres  terriens,  registres  de  l'Etat  civil  (1562), etc.,  sont 
tous  français.  11  en  est  de  même  du  nom  des  localités  et  des 
personnes:  quand,  par  exception,  un  nom  propre  est  allemand, 
on  le  trouve  toujours  orthographié  selon  la  prononciation 
française. . .  Je  n'insisterai  pas,  du  reste  :  tous  cens  qui  se 
aont  occupés  de  l'histoire  de  Sainte-Marie  sont  d*accorâ  à  ce 
SDjet,  et,  sll  restait  an  lecteur  quelque  doute  à  propos  d'une 
question  de  détail,  je  pense  qu'il  se  trouvera  levé  par  ce 
qui  Ta  suirre. 

J  îii  déjà  dit  que  des  mineurs  saxons  avaient  fondé  Fer- 
trupt  et  Marienkirch,  où  ils  s'étaient  d'abord  établis,  entre 
Saiiit-Blaii-e  à  Test  et  Kschery  à  ruiie.st.  Ils  ne  poussèrent 
pas  fort  loin  les  premiers  progrès  de  leur  colonisation.  Ainsi, 
à  Sainte-Marie  même,  ils  ne  dépassèrent  guère  les  environs 
de  la  place  de  la  Fleur.  Quelques-uns  d'entre  eux  seulement 
s'aventurèrent  jusque  dans  les  régions  de  Saint-Philippe,  où 
l'on  venait  d'ouvrir  des  galeries.  Lorsque,  probablement  vers 
le  milieu  du  XVI*  siècle  et  à  une  date  assez  peu  antérieure  à 
1568,  les  seigneurs  de  Ribaupierre  se  virent  obligés  de  con- 
stater officiellement  l'existence  des  nouveaux  hameaux,  en 
leur  créant  un  ban,  l  administration  locale  cul  a  régir,  d'une 
part,  les  anciens  hameaux  qui  étaient  alors  exclusivement 
habités  par  des  bourgeois  indigènes.  Suint-Blaise,  I^iverselle, 
Saint-Philippe  (occidental),  Brchagotte,  Eschery,  Surriiàtc, 
Faunoux,  la  Barre  et  la  Petite  Lièpvre,  et,  d'autre  part,  les 
régions  allemandes  récemment  peuplées,  savoir  :  Fertrupt, 
Sainte-Marie,  Sainte  Philippe  (oriental),  la  Fourcelle. 

Vers  le  milieu  du  XVI*  siècle,  la  tourmente  religieuse  qui 
agitait  TAllemagne  porta  à  Sainte-Marie  de  nouveaux  colons. 

Egueuolphe  IQ  de  Ribaupierre  venait,  à  l  âgedc  vingt  ans 


BEVUB  D'ALBAOB 


de  succéder  à  son  grand-père  Guillaume.  Elevé  par  une  mère 
plus  qu*à  demi  protestante,  qui  était  en  correspondance 
réglée  arec  qaelques-ans  des  apôtres  de  l'époqae,  arec  Bol- 
linger  par  exemple,  et  surtout  avec  Hathis  Erb,  prédicant 
suisse  sans  confession  doctrinale  bien  arrêtée,  que  Georges 
de  Wurtemberg  avait  installé  comme  surintendant  ecclésias- 
tique dans  sa  principauté  de  Riquewihr,  réformée  depuis  1B88, 
Eguenolphe  inclinait  aux  idées  nouvelles.  Mais,  tandis  que  la 
pliijMirt  des  souverains  de  ce  temps  ne  souffraient  sur  leurs 
domaines  qu'une  seule  confession,  la  leur,  Eguenolphe  se 
montrait  plus  tolérant,  peut-être  parce  que  sa  propre  foi  n'é- 
tait point  encore  fixée  parmi  tant  de  Uoctrines  qui  se  dispu- 
taient l'empire  des  esprits,  peut-être  parée  que  les  circon- 
stances, et  aussi  l*autorité  que  Mathis  Erb  exerçait  sur  lui, 
lui  en  liiisaient  une  loi. 

Le  Tal  d*Eschery,  par  sa  situation  même  aux  confins  de 
l'Allemagne  et  de  la  France,  par  la  focilité  que  toot  étranger 
avait  de  s'y  établir  sous  prétexte  do  chercher  de  l'ouvrage 
aux  mines,  et  plus  encore  par  son  peu  d  importance  au 
point  de  vue  politique,  était  un  lieu  de  refuge  admirable. 
La  promulgation  de  Tlnlérim  (1548)  et  la  paix  religieuse 
d'Augsbourg  (1555)  avaient,  du  consentement  mutuel  des 
catholiques  et  des  prolestants,  décidé  en  Allemagne  de  la 
proscription  des  non  luthériens.  Georges  de  Wurtemberg  ne 
les  Toyait  qu*a?ec  impatience  sur  ses  terres  foisines  de 
Sainte-lfarie,  à  Riquewihr,  à  Hunawihr,  k  Ostheim,  à  Au- 
bure;  plusieurs  fois  déjà,  il  les  arait  menacés  et  les  tuteurs 
de  son  fils  Ifrédéric  devaient,  en  1560,  les  chasser  définiti- 
Tcment. 

Tracassés  ailleurs,  beaucoup  d'Allemands  de  sectes  diver- 
ses s'établirent  à  Fertrupt  et  à  Sainte  Marie,  à  côté  des  pre- 
miers arrivés  de  la  Knnppschafft.  Mais,  comme  le  nombre 
des  rélugiés  augmentait  chaque  jour,  ils  furent  obligés  de 
dépasser  les  limites  entre  lesquelles  les  mineurs  s'étaient 


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HISTOIRE  8AINT£-MABIE-AUX-MIMES 


183 


cantonnés  jusque-là;  en  peu  de  temps,  ils  encombrèrent  le 
quartier  déjà  germanisé.  en\-ahirent  ensuite  la  place  de  la 
Fleur  et  s"étal)lirent  jusque  dans  le  Bréimgolte.  C'est  ce  que 
nous  apprend  une  requête  présentée,  en  1561,àËgueuolphe, 
[Hir  des  délégués  de  la  Knappschafft. 

Cette  confrérie  avait  fait  l>fttir  une  égliie,  une  quinzaine 
d'années  auparavant»  sur  le  Pré  même,  à  peu  près  à  l'entrée 
de  Fertmpt;  oUe  en  salariait  le  desserrant  Gelui-d,  quoi- 
qull  se  qualifiât  de  catholique»  ne  semble  pas  SToir  été  d'une 
orthodoxie  scrupuleuse,  non  plus  que  ses  ouailles.  H  mourut 
en  1568  et  la  Régence  d'Ensisheim  appela  Tattention  d'Egue- 
uolphe  sur  le  choix  de  son  successeur.  Elle  avait  clé  avertie 
que  le  défunt  pr(^cliait  des  doctrines  lulhéricnnes.Les  mineurs 
s'émurent  de  celte  accusation,  non  justifiée  à  leur  avis,  et 
défendirent  la  mémoire  de  leur  pasteur.  A  iea  entendre, 
celui-ci  était  catholique,  apostolique  et  romain;  rien  dans  ses 
sermons  ne  sentait  l'hérésie.  Il  est  mi  que,  de  facto^  il  était 
marié,  mais  llntérim  permettait  le  mariage  des  prêtres  et, 
dans  Tespèce,  on  n'en  pou?ait  rien  conclure  de  déflirorable 
an  desservant  du  Pré;  le  foit  de  son  mariage  ne  prouvait 
rien  contre  ses  doctrines,  maïs  seulement  que  Dieu  ne  lui 
avait  pas  accordé  la  grâce  de  la  chasteté.  Les  mineurs,  aussi 
orthodoxes  que  leur  curé  —  on  le  voit,  —  ajoutaient  que 
vivre  avec  une  femme  attitrée  valait  mieux  pour  un  prôtre 
que  l'impure  chasteté  (unkeusche  Keuschheit)  où  vivaient  la 
plupart  de  ses  confrères. 

Au  commencement  de  1561,  la  iifnappscAa^f^,  catholique,  en 
1558,  de  la  fiiçon  qu'on  vient  de  voir,  était  devenue  absolu- 
ment luthérienne.  Sous  prétexte  de  défendre  les  intérêts 
de  la  vraie  religion,  c'est-à-dire  des  doctrines  admises  par 
la  confession  d'Augsbourg,  les  mineurs  eicigërent  d'Egne- 
nolphe  le  renvoi  des  nouveau  venus,  <  Anibaptistes,Galvinistes, 
Schwengsfelder ,  Winckler,  Satller,  Gabrielistes.  Bilgerer, 
que  les  honnêtes  travailleurs  ne  souffrent  point  dans  leurs 


154 


REVUE  D' ALSACE 


galeries,  de  peur  d'avoir  la  conscience  troublée  par  leurs 
mauvaises  doctrines. . .  ».  En  réalité,  cr  qui  remuait  bien 
autrement  la  bile  des  honnêtes  membres  de  la  Jùiappschnfft, 
c'est  la  difficulté  qu'ils  éprouvaient  à  «  trouver  désormais  logis 
à  leur  convenance  et  à  pourvoir  à  leurs  besoins,  les  sectaires 
s'étant  emparés  des  meilleures  maisons,  de  môme  qn*au 
marché,  ils  achètent  sans  compter  et  tout  le  plus  beau,  pour 
s'en  régaler  eux-mêmes  en  (brêt  ou  pour  lefàire  tenir  à  leurs 
frères  d'Allemagne  '  ». 

Le  seigneur  de  Ribaupierre  se  trouva  fort  embarrassé  par 
cette  mise  en  demeure.  S'il  repoussait  la  demande  des  mineurs, 
il  pouvait  craindre  qu'ils  ne  s'adressassent  plus  haut,  à  Ensis- 
heim  par  exemple,  comme  ils  le  firent  réellement  parla  suite. 
Il  lui  était  non  seulement  pénible,  mais  difficile,  de  chasser  de 
ses  domaines  les  individus  qui  s'y  rencontraient  d'autre  confes- 
sion que  de  celle  d'Âugsbourg.  La  Kmpptsehqfft  alléguait  que 
les  sectaires  n'étaient  pas  soufferts  du  côté  de  Lorraine,  «  qui, 
cependant,  est  encore  du  Papisme  >  ;  elle  menaçait  de  porter 
ses  plaintes  à  Teropereur;  elle  promettait,  au  contraire,  si  elles 
étaient  écoutées  d'Eguenolphe,  un  dévouement  absolu  à  la 
maison  de  Ribaupierre;  mais  elle  oubliait  ou  feignait  d'ou- 
blier que  —  le  voulût-il  —  le  seigneur  ne  pouvait  proscrire 
les  non  luthériens;  il  avait  dans  le  val  de  trop  nombreux 
sujets,  attachés,  non  pas  aux  doctrines  d'un  calvinisme  fort 
pur,  mais  k  la  façon  calviniate  de  comprendre  la  Réforme. 

'  n  ne  semble  pas  que  les  affiûras  de  la  Knappsehafft  allassent  des 

mieux  en      temps-là.  Diverses  pièces  (1570  iilôSO)  relativesà  des  bogue- 

nots  venus  de  Franco  indiiiin-nl  que  plusieurs  d'entre  eux  sont  arrivés 
possesseurs  d'uue  certaine  fortuue  qu'ils  ont  mise  dans  les  mines  et 
perdae. 

Un  meendie  détniisit,  en  1575,  nne  notable  partie  de  Sainte-Marie 
d'Âlsace. 

In  Knappsekaffl  accusai l  les  nouveanx  venus  d'être  canse  de  sa  raine, 

par  lé  développemenl  qu'ils  avai  ent  donné  à  Tindoslrie  „unb  fie  tiâ^cr 
uni  baè  Srig  uiit  item  gUrf^auff  mt>  anWrem  gébtac^t  unb  mberbt." 


HISTOmB  DE  SAl^iTE- MARIE- AUX-MI14£S 


155 


Ces  sqets  lai  avaient  présenté  leorconfesBion  de  foi  dès  1558, 
10  moment  de  son  mariage  avec  la  comtesse  d^Erbach  ;  il 

•  l'avait  approuvée  ;  il  ne  pouvait  donc  la  condamner  tout  à 
coup;  il  le  pouvait  d'autant  moins  (juo  ces  calvinistes  n'étaient 
pas  des  immigrants,  mais  des  hourgcois  du  val 

Ces  bonnes  gens  se  souciaient  médiocrement  des  discussions 
Ihéologiques  et  n'étaient  guère  portés,  de  nature,  aux  aren- 
tores  de  la  pensée.  Le  mou?ement  dit  des  anabaptistes  avait, 
en  1535,  agité  momentanément  les  esprits  de  queiqaes-ans 
d'entre  eox,  mais  par  contre-coup  seulement,  à  propos  du  sac 
du  prieuré  de  Uèpvre.  Depuis  ce  temps,  ils  s'étaient  tenus  à 
récart  et  s'y  fussent,  sans  doute,  tenus  toujours,  si  les  insti- 
gations secrètes  de  leur  seigneur  ne  les  avaientdisposésfiTo- 
rablement  «  pour  le  pur  Evangile  ».  Ils  se  firent  calvinistes, 
uniquement  parce  que  le  calvinisme  était  la  religion  des  mis- 
sionnaires de  leur  langue;  s'ils  avaient  su  plus  d'allemand, 
ils  eussent  été  luthériens. 

*  L'insistance  que  la  Régence  d'Ensisheim  mettait  à  provoquer  le 
départ  des  calvinisti-s  d'Escliery  s'i'xpliquo  par  des  motifs  purement 
politiques.  On  ne  voulait  pas  soutlrir,  dans  une  ville  frontière,  des  réfu- 
giés d'an  pays  voisin,  réfugiés  dont  les  intrigues  pouvaient  devenir 
eompronieUantes  et  dont  la  senle  présmce  était  pour  le  pays  un  danfer 
sérieux.  Entre  autres  documents,  qui  prouvent  à  quelles  représailles 
s'exposait  le  val  de  Li<vvre,  jo  citerai  une  lettre  d  Eguenolplio  à  la 
Répenro,  datée  du  21  si'pl.Mnhre  1575.  Le  sei^'neur  de  Itiliaupiern'  y 
demande  du  secours  contre  le  duc  de  Guise,  qui  a  l'intention  d  occuper 
les  passages  de  la  Haute-Alsace.  Le  36  du  même  mois,  les  deux  Berg- 
rMOer  de  Sainte-Marie  donnent  avis  à  Egaenolphe  qne  des  eoureors 
allemands,  de  la  compagnie  d'un  certain  capitaine  Ilans  Friderich, 
vionnont,  sur  l'ordre  de  leur  chef,  de  les  prévenir  confidentiellement 
qui^  h;  duc  de  Guise  et  son  frère,  en  marche  de  Ilambervillers  à  Saverne, 
ont  l  iulenliou  de  détruire  les  nids  de  linguenots  du  val  de  Lièpvre,  de 
Baiscbweiler  et  de  Phaisbourg.  „bo  man  jeberieit  bie  ^ugcnottcn  uf^atte 
Icimattftid^en  unb  bot  m^len  Sttm  alba  aiUtu^en..."  D  après  la  déclar 
ration,  sans  doute  exagérée,  des  coureurs,  Gaise  menait  arec  lui  six  mille 
hutiimes  de  pied  (Si^fl^en),  quatre  mille  cavaliers  français,  dont  un 
certain  nomlire  armé  de  Ion  eues  arquebuses  (mittangcn  -Rorcn),  mille 
reitres  allemands,  deux  pièces  de  sié?e  ^2)Jaucrtired)crinticu)  et  douze 
pièces  de  campagne.  L'attaque,  fixée  au  vendredi,  u  eut  point  lieu. 


166 


REVUE  D  ALSACE 


Vers  1550,  un  nommé  Elie  s'en  vint  habiter  le  val.  Il  tra- 
vaillait aux  mines,  en  apparence,  du  moin?;  dans  le  Trai.  son 
métier  était  d'évaDgéliser.  Autrefois  abbé  dans  le  Hainaut  il 
s'y  était  converti  à  la  Réforme,  et,  après  1543,  c'est-à-dire 
tprès  le  supplice  de  Pierre  Brusly,  livré  au  bûcher  dans  la 
Tille  de  Tonmay,  il  était  allé  à  Strasbourg,  où  il  avait  épousé 
la  venvedn martyr  calviniste.  Pierre  Brusiy,  comme  on  lésait, 
avait  été  le  successeur  immédiat  de  Calvin  à  l'Eglise  française 
de  Strasbourg.  Il  y  a  donc  apparence  qne  sa  femme  n'était  pas 
sans  relations  avec  le  ministre  qui  l'avait  lui-même  remplacé, 
c'est-à-dire  avec  Pierre  Garnier.  et  que  maître  Elie  put  ainsi 
le  connaître  avant  que  de  se  rendre  à  Sainte-Marie,  où  nous 
le  trouvons  travaillant  le  jour  de  ses  mains  et  le  so'r  parlant, 
commentant  la  Bible,  iaisant  de  sa  demeure  un  lieu  de  réu- 
nion. Il  baptisa  même  on  enfant  et  administra  la  cène  sous 
les  deux  espèces,  à  c  laquelle  participèreot  environ  treize 
personnes  ».  De  tels  agissements,  enregistrés  avec  soin  et 
sans  aucun  blâme,  par  les  premiers  réformés  du  val,  n'étaient 
point  licites,  si  Elie  n'avait,  au  préalable,  reçu  l'imposition 
des  mains.  D'un  autre  côté,  le  silence  des  pasteurs  subsé- 
quents, qui  ne  le  comptent  point  comme  ayant  été  effective- 
ment parmi  les  leurs,  permettrait  de  supposer,  ou  qu'EIie 
agit  sans  mandat  réo:ulier,  ou  que  des  motifs  personnels  et 
peut-être  le  souvenir  du  supplice  de  Brusiy  l'empêchèrent 
de  le  produire.   Il  disparut  de  la  vallée  sans  qu*on  sCtt 
autre  chose  de  lui.  Vers  1553  (?),  le  nombre  des  réformés 
parait  avoir  été  déjà  de  qoelqu'importance,  car  ils  deman- 
dèrent à  Eguenolphe  et  obtinrent  de  lui  la  permission  d'en- 
tsndre  l'Evangile  de  la  bouche  d'un  ministre  approuvé.  L'E- 
glise de  Strasbourg  leur  prêta  Jean  Locquet,  ancien  moine 
augU8tin,qui  avait  été  des  premiers  qui  prêchèrent  la  Réforme 
à  Bourges,  vers  1540.  Théodore  de  Bozc  j)arle  avec  éloges 
dans  son  Histoire  de  ce  Locquet,  •  (jui  depuis  a  été  excellent 
ministre  des  Eglises,  vivant  encore  aujourd'hui  «n  telle  répu- 


UiaTOIR£  DE  î>A.INTE-MARI£-AUX-lfIME8 


157 


tatioii  que  méritent  sa  piété  et  savoir. . .  ».  Il  faut  nécessai- 
rement, pour  qu'il  ait  obtenu  un  tel  éloge  de  la  part  de  de 
Bèze,  que  Locquet  ait  clé  un  calviniste  des  plus  décidés;  les 
bourgeois  du  val  de  Lièpvre,  prêchés  par  lui,  ne  purent  donc 
a?oir  que  des  idées  d'une  orthodoxie  gencTOise  indiscutable. 

Après  Locquet,  vint  Morel  de  Gollonges,  qui  fut  envoyé 
diraetement  par  le  Consistoire  de  Genève,  non  plus  à  titre  de 
prédicant  missionnaire,  mais  pour  être  Traiment  ministre  à 
demeure  (1555  à  1557).  D'après  les  eonventions  de  la  paix 
d'Aagsbourg  de  1555,  Eguenolphe  ne  pouvait  tolérer  de  sec- 
taires calrloistes  ;  il  D*a?a{t  môme  pas  strictement  le  droit  de 
souffrir  qne  les  vassaux  qu'il  tenait  de  Murbach  abandon- 
nassent les  principes  catholiques.  Morel,  après  un  court  séjour 
à  Eschery,  fut  donc  contraint  d'aller  résider  à  Aubure,  dont 
le  temple  lui  était  ouvert  et  où  se  rendait  tous  les  dimanches 
une  nombreuse  assemblée  de  frères  du  val.  Il  prépara  Tor- 
ganisation  da  TEiglise  calviniste  de  Sainte-Marie,  mais  il  ne 
put  Tachever.  Les  pasteurs  de  Genève  le  rappelèrent  dans  Isa 
premiers  jours  de  1557,  pour  lui  confier  l^Eiglise  de  Paris. 
Il  présida,  comme  on  sait,  it  premier  synode  national  de 
France,  celui  qui  dressa  la  Confession  de  fiai  de  1559  ;  il  fut 
ensuite  aumônier  de  Renée  de  Ferrare.  Une  requête  des  haM- 
tants  du  val,  datée  du  20  avril  1557,  demanda  a  Eguenolphe 
un  nouveau  pasteur,  qui  les  enseignât  comme  l'avait  fait 
jusque-là  François  Morel  (roas  bann  bi^^er  Franciscus  Morel 
get§an).  Ce  nouveau  pasteur  fut  Pierre  Marbœuf,  envoyé, 
comme  son  prédécesseur,  par  TËglise  de  Genève.  Il  acheva 
l'œuvre  d'organisation  entreprise  par  Morel,  et,  plus  heureux 
que  lui,  obtint  de  résider  à  Eschery.  En  mai  1558,  il  présenta 
à  Eguenolphe  une  confession  de  fol  préparée,  comme  il  ledit 
lui-même,  par  Morel  de  CoUonges,  et  la  vit  approuvée  du 
seigneur  de  Rîbaopierre  et  des  comtes  d'Erbacb.  Elle  fut 
imprimée,  et  probablement  à  Sainte-Marie  même,  où  se  trou- 
vait  alors  uu  imprimeur  réfugié  ;  elle  était  suivie  d'une  disci- 


iSB 


MEVaS  D'AL8A,€a 


pline  de  l'Eglise  et  d'une  sorte  de  catéchisme.  La  discipline  a 
été  conservée  dans  son  texte  français  original;  elle  renferme 
beauGOop  moins  d'articles  et  entre  dans  infiniment  moins  de 
détails  que  celte  qui  M  pins  tard  la  règle  des  Eglises  réfor- 
mées de  France.  Quant  à  la  confession  de  foi  de  Narbœaf, 
ane  traduction  allemande  manuscrite  tend  à  faire  admettre 
qu'elle  n'était  pas  une  confession  proprement  dite,  mais  un 
exposé  par  lequel  le  ministre  entendait  combattre  certaines 
accusations.  Il  est  vrai  qu  a  côté  de  celte  pièce,  où  le  nom  de 
Marbœuf  ligure  inscrit  au  titre  même,  il  en  est  une  autre, 
Bekantnufis  des  Glaubens  der  franziisinchen  Gcmein  zu  Maria- 
kirch  im  LcherthaH ,  dont  le  texte  signalé  par  Rohrich 
(^BirformationmEappoii^n,  p.  IH),  aété  publié  par  M.Drion. 
C'est  une  traduction  d*une  confession  ayant  beaucoup  d'ana- 
logies avec  cellede  1569  des  Eglises  de  France.  Sous  la  phrase 
allemande,  on  devine  souvent  Texpression  française,  absolu- 
ment calviniste,  souvent  prise  de  Calvin  même,  mais  les 
articles  sont  autrement  disposés,  autrement  coupés  que  ceux 
adoptés  par  les  synodes  de  France.  Ce  document  est  une  tra- 
duction; ce  qui  le  démontrerait,  s'il  pouvait  y  avoir  la  moindre 
hésitation  à  ladmettre.  c  est  l'existence  d  une  variante  d'une 
autre  plume,  où  la  pensée  primitive  se  rencontre  parfois  sin- 
gulièrement défigurée  et  incompréhensible. 

Pierre  Marbœuf  mourut  à  Ëschery  en  1561.  Au  moment 
o&  la  Knappsehaffi  dressa  la  requête  ci-dessus  signalée  tou- 
chant Vexpulsion  des  sectaires  non  luthériens,  il  venait  d*être 
remplacé  par  Ârnauld  Banc,  Nîmois,  firançais  de  langue,  par 
conséquent,  et  calviniste  comme  ses  devanciers. 

Les  circonstances  au  milieu  desquelles  Arnauld  parut  à 
Eschery  étaient  singulièrement  graves.  Nous  avons  vu  com- 
ment la  hnappsckaft,  convertie  au  luthéranisme,  cherchait  à 
se  débarrasser  de  ceux  qui  n'adoptaient  pas  expressément  les 
articles  de  la  confession  d'Augsbourg,  et  le  cherchait  avec 
une  ardeur  d'autant  plus  grande  que  les  intérêts  temporels 


HJfiTOIUE  DE  8AIMTS  MABI&-AUX-MIN£S 


160 


des  mineurs  leur  semblaient  plus  compromis.  Il  n'existait 
point,  pour  Eguenolphe  menacé,  d'autre  moyen  de  salut  que 
de  réussir  à  négocier  un  compromis  entre  les  sectaires  alle- 
mands et  les  français,  et  cela  même  était  malaisé.  Il  le  tenta 
néanmoins,  tant  la  nécessité  était  grande.  Arnauld  dut  lui 
enroyer  un  long  commentaire  sur  le  sacrement  du  baptême 
et  divers  antres  points  de  doctrine,  afin  de  prouTer  que  les 
calTinistes  n'avaient  rien  des  idées  des  anabaptistes,  après 
quoi  on  avisa  à  une  entente  plus  complète. 

La  Knopptehafi  possédait  en  propre  réglisebfttie  par  elle 
sur  le  Pré.  Un  pasteur  luthérien,  Pierre  Hogger,  y  prêchait 
librement  depuis  le  jour  où  le  desservant  papiste,  cessant 
d'être  soldé  par  la  caisse  des  mineurs,  avait  at)andonné  le 
poste.  Pierre  Hogger  était  entretenu  par  cette  cuisse.  Les 
bourgeois,  bien  loin  d'être  aussi  bien  partagés  que  les  mineurs, 
n'avaieot  à  leur  disposition  aucun  lieu  public  d'assemblée  ; 
ils  se  réunissaient,  tantôt  chez  Tun,  tantôt  cbes  l'autre  d'entre 
eux,  et,  comme  ils  devenaient  de  plus  en  plus  nombreux,  ils 
ne  trouvaient  plus  de  local  privé  assez  vaste  pour  les  conte- 
nir tous.  Aussi,  dans  le  temps  môme  que  les  luthériens  pré- 
sentaient requête  à  l'elTet  de  contraindre  toute  la  population 
à  embrasser  les  doctrines  wittcmbergcoises,  eux  en  présen- 
taient une  (8  février  1361)  pour  obtenir  la  permis.siou  de 
construire,  à  leurs  frais,  un  édifice  servant  de  temple,  soit  à 
Eschery,  soit  à  Sainte-Marie,  si  toutefois  on  n'aimait  mieux 
leur  accorder,  pour  les  besoins  de  leur  culte,  Téglise  exi- 
stante de  Surlhftte,  que  le  prêtre  catholique  venait  d'abandon- 
ner. En  1560  encore,  ce  prêtre  avait  tenté  de  B*opposer  à  Har- 
bœuf,  qui,  dans  une  lettre  latine  (nouvelle  preuve  que  Iffarbœuf 
n*entendait  pas  Tallemand),  adressée  ComiU  deBapeBteiny  se 
plaint  amèrement  des  ennuis  que  lui  cause  le  saer^ieuhês 
d'Eschcry,  qui  ne  faisait  pas  mine  de  vouloir  abandonner  un 
poste,  dans  lequel  un  certain  nombre  d'habitants  le  soute- 
uaienl  de  leur  iuûuence.  Il  u'y  avait  pas  plus  d'apparence 


RBVOE  D'aLSACB 


que  les  luthériens  concédassent  aux  réformés  Tusage  complet 
de  leur  église  du  Pré,  trop  éloignée,  au  demturant,  pour 
qu  elle  pùt  utilement  et  régulièrement  servir  aujt  gens 

d'Eschery. 

En  janvier  1561,  l'église  de  Surlbâte  perdit  son  dernier 
prêtre  catholique.  Dès  le  26  de  ce  mois,  Matbis  Ërb  écrit  à 
Sgaenolpbe  pour  lui  reeommander  de  le  remplacer  par  deux 
diacres,  qui  prêcheraient,  Tan  en  firançais,  Tantre  en  allemand. 
Le  8  février,  les  habitants  demandent  an  homme  instruit»  qoi 
les  enseigne  en  leur  langue,  nomination  parfaitement  justifiée 
par  66  fait  que  les  Allemands  ont  depuis  quelque  temps  un 
pasteur  de  leur  nation.  Eguenolphe  accueillit  favorablement 
cette  requête,  comme  il  avait  accueilli  les  précédentes.  Il  y 
était  engagé  d'avance.  Lui-niètne,  en  effet,  s'était  chargé  de 
bftter  le  départ  du  desservant  catholique  d'Eschery.  il  s'était 
rendu  chez  le  greffier  des  mines,  Wilbeim  Scbira  (Guillaume 
Girard),  avait  attendu  que  ce  desservant,  nommé  Noa,  fût  à 
son  poste,  puis  il  était  entré  dans  Péglise^  avait  pris  par  la 
main  le  prêtre  qui  officiait  et  l'avait  conduit  jusqu'au  dehors 
du  saint  lieu,  dont  il  ferma  aussitôt  les  portes. 

Pour  assurer  sa  victoire,  Egucnolpbe  chercha  à  obtenir 
un  accord  entre  les  luthériens  et  les  réformés.  Il  y  réussit 
en  apparence,  dès  le  mois  de  juin.  Arnauid  Bauc,  à  quelques 
réserves  près,  déclara  être  prêt  à  accepter  la  confession 
d  Augsbourg.  Cet  acquiescement,  préparé  par  les  soins  de 
Mathis  Erb  et  de  Sulzer,  autiste  de  Bêle,  fut  suivi  d'un 
décret  du  seigneur,  par  lequel  les  luthériens  entrèrent  en 
exclusive  jouissance  de  réglîm  du  Pré  et  les  réformés  de 
réglise  de  Surlbâte.  Ni  les  catholiques,  ni  leurs  adversaires, 
ne  se  montrèrent  pleinement  satisfeits. 

Les  premiers  essayèrent  d'installer  un  autre  prêtre  à  la 
place  de  Noa.  Ainsi.  Haubinsack  écrit,  au  mois  d  août  1561, 
pour  prévenir  le  seigneur  que  l'évêque  de  Strasbourg  a  envoyé 
à  la  <  McsskircUe  »  un  maudit  prêtre  rogneujc  (fitUlosmi  Gritui' 


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HISTOIBB  DE  8AIMT&-UAKI£-AUX-IkaNES      ^  161 

MMr),  qui  ne  sait  ni  allemand,  ni  français,  el  enem  mdns 
de  latin,  mais  que  lui,  Haubfnsaek,  a  reçu  ccemiaérablede  la 
bonne  manière  et  de  façon  à  lui  ôter  toute  envie  d'aller  jus- 
qu'à Escliery  ». 

Il  nous  reste  de  ces  intri^'ues  quelques  documents  curieux. 
C'est  d'abord  une  façon  de  procès-verbal  dressé  par  Glady 
ThirioD,maired'Eschery,atinde  disculperArnauld  de  plaintes 
portées  contre  lui,  puis  un  recensement  établi  par  le  même 
fonetioouaire,  en  langue  oifidelle,c*est-àHlireen  allemand,  et 
où  se  trouvent  portés  les  noms  des  boniigeois  de  Sainte-Marie, 
de  Fertrnpt,  d^Eschery,  etc.,  possédant  ou  non  maison  à  eux, 
ainsi  que  ceux  des  yeuvea  de  bourgeois,  qui  se  sont  déclarés 
membres  de  TEglise  française  (fo  ber  n)el[d;en  Stix^  ami^ângig 
feçnnt. .).  La  pièce  est  complétée  par  une  autre,  qui  indique 
ks  membres  de  la  Jùiappschcyjfl,  partisans  des  opinions  cal- 
vinistes . 

Je  relève  quelques-uns  des  noms  portés  comme  étant  de 
bourgeois  d'Eschery  : 

Wilhelm  Schira     Anthoi^  MOller     Hanns  Ropert 
Gladt  Nicklaus      Jacob  Schumacher  Hanns  MtUler 
Hanns  Mary         Ruob  Youpriell  FrantsZymmermaon 
Gladt  Kfinig         Hanns  Spynnailer  Fninntz  Kollynn 
WUbelm  Peronn    Hans  Kaufmann    Gladt  Durnm 
Steffan  Kremer      Hans  FUrmanii      Jerig  Kirschner 
Anthonj  Tboraa      Gladt  Grus  Hanns  Blesis  Muschj 
Rem  Muschj  Hanns  Dietrich      Muschj  Schmidt,  etc. 

Certes,  à  la  première  vue,  l'immense  majorité  de  ces  noms 
parait  allemande.  On  en  reconnaît,  cependant,  qui  sont  essen- 
tiellement français,  écrits  comme  on  les  prononçait.  Les  autres, 
inalgré  le  travestissement  qn*ils  ont  subi,  ne  laissent  pas  aussi 
que  d'être  français.  Si  je  consulte,  en  effet,  le  registre  de 
l'état  dvil  de  l'époque,  c'est-à-dire  les  actes  de  baptême  de 
1S6S  et  années  suivantes,  je  ne  tarde  pas  à  me  convaincre 
que  : 

Nouvelle  Série  —  7»  Année.  11 


102  ^  BEVUE  D'ALSACE 

Wilhelm  Schira  est  l'ancien  du  Consistoire  et  greffier  des 
mines,  Guillaume  Girard. 

Steffan  Kremer  est  Etienne  Lemercier. 

Rem  Mttscfaii  est  Remy  Mougin. 

Klaus  SpynnaUer  est  Claude  d'Epinal. 

Haims  UûUer  est  Jean  on  Hanns  Damonlin. 

Ânthonj  Hailer  est  Antoine  Boulanger. 

Muschj  Schmidt  est  Mougeon  Haréehal,  ancien  da  Consistoire. 

Frannlz  Kollynn  est  Fraocds  Collignon,  ancien  do  Consistoire. 

Jerig  Kirschner  est  Georges  Lepelletier. 

Gladt  Crus  Ilanns  est  Claude  Grandjean. 

Hans  Kaufmaun  est  Jean  Marcliand,  et  ainsi  de  suite. 
Les  Fiirmann  deviennent  les  Charreton  ;  les  Zymmermann 

les  Charpentier.  La  famille  Toussaint  prend  dans  les  textes 

allemands  le  nom  d'Allheilig,  etrapothicaire,  appelé  à  Ribeau- 

TUlé  Sapam,  est  connu  dans  le  yal  de  Uèpm  sous  le  nom 

de  GtofNm,  comme  le  Papetier  de  Sainte^Marie  devient  ailleurs 

Herr  Papiirmaeher. 
J'ajouterai  que  plusieurs  fiimilles  dont  il  est  ici  question 

existent  encore;  ainsi  les  Boulanger,  les  Maréchal  OU  Marchai, 

les  Dumoulin,  les  Gollij^non,  etc. 

Il  n'y  avait  point  encore,  en  15G1,  de  véritables  noms  de 
&miUe  pour  désigner  celles  de  la  bourgeoisie,  ou,  du  moins, 
ces  noms  étaient  encore  assez  rares.  La  plupart  des  individus 
étaient  connus  dans  nos  vallées,  comme  ils  le  sont  encore 
dans  bien  des  campagnes,  sous  leur  seul  nom  de  baptême, 
auquel  on  adjoignait  une  désignation  nettement  caractéristique, 
soit  rindicationde  la  demeure  (ainsi  :  Clanss,  Colas,  Nicolas... 
du  Mr«),  soit  celle  du  lieu  d'origine  de  llndiTido  (comme 
del^afîc«,d'J5^fïaO'Soit  celle  du  métier  exercé  par  lui  (Gladt, 
Gladj,  Glande. . .  Charpen(if  r),  soit  un  qualificatif  quelconque, 
Grandjesiu,  Pp/î7demenge,  (;/'a?/^/emenge,  etc.  Ces  appellations 
diverses, n'étant  d'anruue  langue  particulière,  étaient  de  toutes 
et  pouvaient  se  traduire  dans  celle  de  n'importe  quel  écri- 


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mSTOIRE  DE  SAINT£-MARIE-AUX-MIN£S 


nin,  tu  illemand  loat  aussi  bien  qu'en  latin,  en  grec  et 
même  en  hébreu.  Je  dois  signaler  cependant,  pour  le  val  de 

Lièpvre,  un  fait  assez  singulier;  les  noms  desfouctions  publi- 
ques ou  des  fonctions  exercées  dans  les  mines  sont  toujours 
allemands  ;  on  trouvera  toujours  le  Bergrichter,  le  Landrichier 
et,  mémo  encore  au  XVU"  siècle,  le  Todengràber  et  non  le 
fossoyeur. 

Quelques  individus  portent  plusieurs  désignations,  qui 
les  rendent  assez  difficiles  à  découTrir.  C'est  ainsi,  pour 
n*en  dter  qu'un,  que  nous  rencontrons  assez  souvent  porté 
eomme  témoin  d'un  baptême  un  certain  Fladanbeek,  dont  les 
registres  français  d'état  civil  n'écrivent  pas  autrement  le  nom. 
La  famille  a  Tair  de  disparaître  assez  tôt  du  ral  de  Lièpvre; 
au  moins  ne  l'y  retrouve-t-on  plus  au  XVII"  siècle.  Une  sorte 
de  liste  de  proscription  nous  indique  ce  qui  est  arrivé  de 
Fladenbeck;  cette  liste  de  tous  les  Lorrains, habitants  d'Epinal 
et  Français,  qui  demeurent  sur  Sainte-Marie,  côté  allemand, 
depais  moins  de  trois  ans,  à  en  croire  les  rapports,  porte 
Bastian  Helbart,  lequel  est  fladenbeck,  c'est-à-dire  une  sorte 
de  confiseur,  et  est  venu  d'Ëpinal  avec  des  papiers  en  bonne 
forme.  Le  nom  de  Hallebarde  se  maintient  dans  le  Bréiiagotte, 
etc.,  après  que  l'autre  a  cessé  de  se  rencontrer. 

Je  suis  porté  à  ne  considérer  comme  ayant  été  des  noms 
de  flunille  déjà  faits  que  cenx  pareils  à  Kilnig,  qui  ne  donnent 
aucune  indication  spécialement  persunnelle.  (Jiiaat  à  recon- 
naître sûrement  (juelle  était  l'originale,  de  la  forme  française 
ou  de  la  forme  allemande  du  nom,  cela  est  au  moins  diflicile, 
quand  d'autres  pièces  ne  viennent  éclairer  de  quelque  jour 
l'origine  de  l'individu,  ou  quelque  autre  circonstance  sem- 
blable. Je  crois  cependant  qu'en  thèse  générale,  il  convient 
d'admettre  que  la  langue  qui  donne  la  caractéristique  la  plus 
précise  est  l'originale;  cette  remarque  ne  peut  guère  s'appli- 
quer aux  noms  tirés  de  professions  on  de  métiers,  mais  elle 
trouve  parfois  un  emploi  utile  pour  de  certains  autres.  Après 


7 


RE7UB  D'AL840B 

la  révocation  de  l'édit  de  Nantes,  beaucoup  de  Français 
gagnèrent  les  pays  étrangers  et  surtout  la  Prusse,  où  les  noms 
de  plusieurs  d*entre  enr  se  germanisèrent  au  moyen  d'une 
tradactioii  par  à  peo  près  :  ainsi,  Rossignol  fit  Nachtrogel, 
dont  la  signification  est  beaucoup  plus  vague.  Parmi  lesnoms 
les  plus  rarement  traduits,  soit  de  l'allemand  en  français, 
soit  réciproquement,  et  cela  précisément  parce  que,  nlndi- 
quant  aucune  qualité  propre  au  sujet,  ils  sont  déjà  de  véri- 
tables noms  de  famille,  je  trouve  celui  de  Ktinig,  orthographié 
Cunic,  Cunicq  ou  Gunit  dans  les  pièces  françaises,  selon  la 
prononciation  habituelle  et  essentiellement  française  dij;pays. 
Un  Claude  Kiinig  se  trouve  ancien  du  Consistoire  et  ofûcier 
de  justice  en  i668.  Or,  le  14 janvier  1575,  je  rencontre  men- 
tion du  baptême  de  Jeanne,  fille  de  Claude  Leroy.  On^ponr- 
rait  croire  que  ce  Claude  Leroy  et  notre  Glande  Eûnig  sont 
identiques,  si  une  note  de  police  ne  portait  parmi  ceux  qui 
ff  demandent  à  devenir  bourgeois  de  notre  gracieux  sri- 
gneor  »  vers  1365,  un  M.  Claude  Leroy  et  ses  frères  Pierre 
et  Demenge,  venus  de  Biencourt  en  Barrois,  le  premier 
comme  prédicant  persécuté,  les  autres  comme  cultivateur  et 
commerçant.  La  difficulté  de  démêler  certaines  familles,  et 
entre  autre  celle-ci,  s'augmente  par  le  fait  du  départ  des  Le- 
roy pour  Badonvillers,  en  1576  et  l£»8â;  de  Badonvillers,  ils 
revinrent  à  Sainte-Marie,  en  16S4,  avec  la  communauté  cal- 
viniste de  cette  localité,  puis  gagnèrent  la  Suisse. 

Je  dte  ces  détails  pour  montrer  à  quels  embarras  conduit 
l'étude  des  noms  du  XVI*  siècle  et  combien  on  risquerait  de 
se  méprendre,  si  Ton  jugeait  de  la  nationalité  des  individus 
qui  les  portent  par  la  forme  eu  laquelle  on  les  rencontre 
écrits. 

Le  lecteur  a  pu  voir,  par  les  extraits  que  j  ai  donnés  du 
recensement  de  1561,  que,  parmi  les  noms  de  baptême  com- 
muns à  l'époque,  se  trouvaient,  entre  autres,  ceux  de  Claude, 
de  Nicolas  et  de  Guillaume.  Quand  le  pays  fût  devenu  réfiinné, 


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HISTOIRE  DE  SAIMTE-MABIË-AUX-HIMBS 


166 


ces  trois  noms  Atrtnt  k  peu  près  proscrits.  Nos  actes  de  bap- 
tême ne  Ibnt  mention  d'aucun  nouveau  Guillaume  depuis  1562 
joagu^à  1622,  où  il  en  reparaît  un.  De  1562  à  1596,  point  de 
Claude;  il  en  est  de  même  pour  les  Nicolas.  Le  prénom  de 
Demenge  (Mougin,  Muschi,  Mougeon,  Sontag)  devient  aofld 
extrê?nement  rare.  En  revanche,  les  noms  bibliques  les  plas 
désagréables  abondeDt.  Il  y  a  foison  d  Âbraham,  de  Gédëon, 
d'Israël,  de  Jonas;  je  trouTe  même  un  Absolom.  Les  noms 
les  plus  fréquents  ponr  les  gar^s  sont  ceux  de  Darid,  de 
Jean,  de  Jaoob,  de  Paul,  de  Pierre,  de  Samuel,  et  la  très 
grande  m^lé desfilles  obtient  ceux  plus  euphoniques  d  Eli- 
sabeth, de  Uarie,  de  Judith,  de  Sara  et  de  Suzanne.  En  feuil- 
letant ees  registres  de  baptême,  du  reste  fort  mal  tenus,  on 
se  rappelle  involontairement  l'aventure  de  ce  bonhomme  de 
Genève,  que  le  Consistoire  Ut  mettre  en  prison,  parce  qu'il 
voulait  obstinément  nommer  Claude  son  iWs,  à  qui  le  ministre 
destinait  le  nom  d'Abraham.  Il  a  fallu,  sans  doute,  que  les 
pasteurs  du  val  de  Lièpvre  usassent  plus  d'une  fois  d*antorité 
pour  obtenir  l'abandon  de  prénoms  naguère  ftvoris,  portés 
dans  chsque  fomille,  en  quelque  ssrte,  et  si  ce  n'est  par  le 
père,  au  moins  par  un  aïeul. 

Il  ne  Ihnt  pas  croire  que  les  bourgeois  subirent  sans  résis- 
tance le  joug  des  ministres  qu'on  leur  envoyait  de  Genève. 
Ce  que  Calvin  et  ses  sectaires  appelaient  le  Consistoire,  véri- 
table tribunal  d'inquisition  et  des  plus  odieux,  ne  fut  pas 
reçu  sans  luttes  dans  le  val  de  Lièpvre.  Les  réformés  usèrent, 
pour  se  maintenir,  de  la  tactique  qui  leur  avait  réussi  à 
Cenève  ;  ils  appelèrent  à  leur  aide  les  frères  du  dehors'. 
Ëschery  defint  un  foyer  de  prédication,  envoyant  ses  mis- 
sionnairas  un  peu  partout,  à  Honturenz,  dans  le  département 

^  '  Haubinsack  fait  de  ces  réfugies  un  portrait  peu  ibttéî  «  Ua  ne  font 

nen  de  toute  Tannée,  écrit-il,  mais  ces  singuliers  personnages  ont  soin 
daller  ostensiblenienl  à  l'ouvrage  aux  jours  chùmés  partout,  a  Noël,  par 
eKempIe. . .  Ils  passent  le  temps  à  débiter  des  nouvelles  «  ncuc  ^citungcn..» 


m 


BBVm  D'ALBAiGB 


actuel  de  Haule-Saône,  à  Badonvilliera,  à  Metz,  etc.  Tour  à 
tour  y  passaient,  soit  pour  prendre  un  mot  d'ordre,  soit  pour 
s'y  reposer  temporairement,  soit  pour  préparer  quelque  mys- 
térieuse incursion  dans  tes  contrées  roisines,  les  ministres 
Pierre  de  Cologne,  Tbevenin  Dommari,  Peintre  dit  Lâcha- 
pelle,  Jean  Gamier,  Louis  Desmazures,  Zancliius,  Robert  de 
Banti,  Jean  Cousin,  Pierre  Viriot,  La  Carrière,  sans  eompter 
Claude  Leroy  que  j  ai  déjà  nommé  et  les  ministres  attitrés  du 
lieu  même.  Claude  Antoine  de  Vienne,  sieur  de  Clervant,  de 
Courcclles  et  de  Muntoy,  était  l'intermédiaire  politique  des 
intrif2:iies  religieuses  de  tout  ce  monde  et  jette  quelque  reflet 
d'honneur  militaire  sur  ces  conciliabules.  Ce  Clervant  est  le 
même  qui,  fait  prisonnier  en  1575,  à  Tâge  de  soixante-cinq 
ans,  refusa,  malgré  toutes  les  menaceside  se  laisser  échanger 
contre  Besme,  Tassassin  de  Coligny,  prisonnier  des  huguenots. 
Ptorlbis,  les  complots  ourdis  dans  le  val  dépassent  la  portée 
ordinaire  des  conférences:  ainsi,  le  gentilhomme  La  Coche 
parait  y  avoir  recruté  des  hommes  d'armes,  pour  attaquer  le 
duc  d'Aumale  posté  en  Lorraine  avec  des  troupes  catholiques  ; 
au  moins  plusieurs  lettres  de  la  Régence  d'iiusisiieim  don- 
nent-elles à  l'entendre. 

Arnauld  Bauc  (Arnould  Bauce,  Arnolf  )  vit  le  commence- 
ment de  cet  état  de  choses.  D'un  caractère  peu  accommodant 
avec  ses  paroissiens,  malgré  la  souplesse  qu'il  montrait  dans 
ses  rapports  avec  ses  supérieurs,  il  ne  put  rester  longtemps 
à  Ëschery.  MU.  Caspari  et  Drion  se  sont  montrés  asses  durs 
à  son  égard,  Taccusant  de  mensonge,  ainsi  que  les  anciens 
de  son  Consistoire,  parce  quils  avaient  accepté  la  déclaratioxL 
d'Âugshourg.  Us  ont  oublié,  assurément,  que  Calvin  lui- 
même  avait  toujours  conseille  d'en  a^^ir  comme  on  fit.  Jamais 
le  réformateur  ne  varia  sur  ce  point.  En  1538,  il  écrivait  de 
Strasbourg  pour  blâmer  Antoine  ('ordier,  qui  avait  refusé, 
malgré  ses  conseils,  de  communier  avec  du  pain  azyme.  Une 
autre  letUe  de  lui,  de  1555,  porte:  *In  refrus  medii8,utiuni 


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HISTOIRE  DE  SAINTE- MAUIE  AUX-MIMES 


167 


wternirUus,  facUm  me  aeflexibUm  praébeo  >.  Il  admettait  la 

communion  par  l'hostie  ou  par  le  pain  (  lettre  du  7  octobre 
io43),  mais  il  voulait  que  l'on  résistât  «  jusqu'au  sang  »  à  la 
croyance  à  la  transsubstantiation,  «  superstition  intolérable  ». 
De  Bèze  ne  parla  pas  autrement  au  colloque  de  1586,  et  les 
comtes  Georges  de  Montbéliard  (lettre  à  Mathis  Erb,  1556)  et 
Frédéric  (12-16  janvier  1573),  tantôt  recbercbèrent  inutile- 
meot,  taotôt  obtinrent  des  transactions  analogues  à  celle  con- 
Tonue  par  Amauld  Banc,  à  la  suite  d*un  plébiscite  de  son 
tronpeao. 

Où  Ârnanld  commit  nne  fonte,  ce  ne  fut  pas  en  acceptant 
anaecommodementsTec  des  adversaires  religieux  qui  eussent, 

à  coup  sùr,  ruiné  la  communauté  réformée  par  le  maintien 
de  leurs  plaintes  contre  les  non  luthériens,  ce  fut  bien  plutôt 
parce  qu  il  voulut  abuser  des  bénéfircs  qu'il  était  en  droit 
d'attendre  de  sa  soumission.  Le  8  juin  1561,  Kguenolphe 
avait  accordé  aus  Franç^iis  l'usage  exclusif  de  l'église  de  Sur- 
IhAle  et  aux  luthériens  l'entière  possession  de  l'église  du  Pré. 
On  pouvait  espérer  que  les  deux  partis,  égalements  satisfaits, 
jouiraient  en  paix  de  ces  feveurs.  Malheureusement,  il  fut 
bien  loin  d*en  être  ainsi  Le  pasteur  luthérien  Pierre  Hogger 
crot  de  son  devoir  de  se  rendre  une  dernière  fois  au  temple 
de  Sarlfaftte,  afin  de  prévenir  ses  ouailles  spirituelles  qu% 
Taveuir  il  ne  prêcherait  plus  que  sur  Ip  Pré.  A  peine  avait-il 
fait  sonner  les  cloches  pour  asseinhler  les  fidèles  qu'Arnauld 
Bauc accourut,  suivi  do  ses  partisans. Pierre  lloggcr  fut  chassé. 
Les  mineurs  témoignèrent  un  vif  courroux,  en  apprenant  la 
mésaventure  de  leur  pasteur,  et  même  quelques-uns  d'entre 
eux,  enrôlés  dans  la  compagnie  des  arquebusiers,  prirent  les 
armes.  On  eut  quelque  peine  à  cakner  le  tumulte.  Quant  à 
Ârnanld,  non  content  d*avoir  triomphé  de  son  collègue,  il 
profita  de  ce  qu*un  grand  nombre  de  viwx  bourgeois  se  trou- 
vaient réunis  dans  son  église;  il  leur  déclara  qu*il  ne  souf- 
.liirait  point  qu'ils  allassent  en  d'autre  prêche  qu'au  sien,  les 


168 


RBVUE  O*AL8A0B 


menaça  de  ne  point  baptiser  leurs  enfants  et  de  ne  point  bénir 
leurs  mariages  B*ils  se  montraient  rebelles  à  ses  admonesta- 
lions;  enfin,  il  lenr  demanda  de  s'engager  par  serment  à  ne 
pas  écouter  d*aatre  prédicateur.  Les  bonrgeds  (tNirgev  {u 
@gtrt(^  unb  im  ^re^egoit),  irrités,  s'adressèrent  à  Gguenolphe 
et  lui  signalèrent  les  tyranniques  agissements  du  pasteur. 
Leur  requête  témoigne  d'une  singulière  émotion;  il  semble, 
en  la  lisant,  qu'ils  protestent,  non  seulement  contre  les  abus 
du  ministre,  mais  encore  contre  le  trouble  jeté  dans  leurs 
consciences  par  toutes  ces  subtilités  théologiques,  auxquelles 
ils  n'entendent  rien.  A  leur  indignation  se  mêle  je  ne  sais 
quelle  tristesse  contenue  :  t  Le  nouveau  prédicant  installé 
dans  notre  Yieille  église  communale  d'Ëschery. . .  Nous,  vieux 
bourgeois  de  Votre  Grâce,  qui  rayons  été  toute  notre  vie  et 
qui  ne  souhaitions  autre  chose,  nous  voir  ainsi  forcés  par  un 
prédicant  d*aller. . .  Que  nous  n*ayons  pas  été  endoctrinés  de 
la  parole  de  Dieu  autant  que  ceux  d'aujourd'hui,  est-ce  de 
notre  fauteîelc.  •  Eguenolplie  prit  pilié  de  ces  bonnes  gens  et 
enjoignit  à  Arnauld  de  les  laisser  en  paix.  (î)an  ruo  bap 
nit  t^ctcn,  roûrben  roir  gebûrii(^e  SKittcl  fud^en  muffen  ba^  onfer 
SSnbctt^anen     9lu^  gc^olfen  moc^t  racrben.)  Arnauld  feignit  d'a- 
Toirété  calomnié.  Accompagné  des  officiers  de  justice  et  heim- 
bourgs,  il  se  rendit  chez  le  maire  d'Eschery,  Claude  Tbirion, 
et  fit  dresser  procès-verbal  de  ses  déclarations  et  de  celles 
de  ses  acolytes.  Geux-el  affirmèrent  qu'ils  avaient  suivi  tous 
les  sermons  de  leur  prédicateur  et  qu'ils  ne  l'avaient  jamais 
entendu  refuser  le  baptême,  ni  les  épousailles  à  qui  que  ce 
fût,  qu'il  n'avait  jamais  chassé  aucun  chrétien  du  temple,  etc. 
Ce  jésuitisme  ne  sauva  point  Arnauld.  Les  rancunes  des 
anciens  bourgeois  demeurèrent  éveillées  ;  la  guerre  commença 
entre  les  habitants  primitifs  du  val  et  les  nouveaux,  réfugiés  . 
Tenus  de  la  Savoie,  alors  en  proie  aux  troubles  religieux,  et 
dont  le  nombre  devait  s'accroître  bientôt  (1562)  de  calvinistes 
ehassés  par  la  guerre  de  religion  de  l'Anjou,  de  la  Picardie^ 


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HISTOIRE  DE  SAINTE- MARI£-AUX  MIME8 


169 


de  la  Champagne,  de  Lyon,  de  Dijon,  du  Dauphiné  et  surtoat 
d'Epinal  et  de  la  Lorraine.  On  Fit  se  re[)rodinre,  sur  une 
pelito  échelle,  la  lutte  qui  avait  ensanglanté  Genève  quand 
les  gens  du  pays,  les  libertins,  avaient  cheroliô  à  se  débarras- 
ser du  joug  des  sectateurs  étrangers  de  Calvin;  seulement,  Isa 
rôles  étaient  intervertis.  Les  liberlios  de  Sainte-Marie  avaient, 
non  Bealemeat  l'appoi  de  la  Régence,  maïs  enoors  celui  des 
mineuiB.  Ils  recréât  en  outre  celui  de  Mathis  Erb,  homme 
pieux,  partisan  de  Tesprit  éraagélique,  sans  être  sectateur  de 
Tun  des  interprètes  de  la  lettre  pure,  et  conseiller  intime 
d*Egneno]phe.  Erb  chercha  ft  calmer  les  haines  si  maladroile- 
ment  émues.  Il  invita  Arnauld  et  sou  Consistoire  à  une  con- 
férence, sous  prétexte  de  délibérer  avec  eux  au  sujet  d'une 
requête  qu'ils  venaient  d'adresser  au  seigneur  de  Ribau- 
pierre.  Celte  requête  était  probablement  relative  aux  images, 
car  il  en  existe  plusieurs  de  ce  temps~là  et  une,  entre 
autres,  qui,  dressée  par  ministère  du  tabellion  de  Sainte-lfarie 
deLorraine,était  singulièrement  offensante^non  seulement  par 
sa  forme  insolite,  mais  aussi  par  les  termes  comminatoires 
dont  elle  était  remplie.  Arnauld  ne  parut  pas.  Wilhelm  Schira, 
lliomme  d*action  du  parti,  se  présenta  seul.  11  protesta  de 
son  dévouement  à  la  famille  de  Ribau pierre,  prétendit  que 
lui  et  les  siens  n'avaient  pas  voulu  susciter  de  diflicultés, 
qu'ils  avaient  pensé  défendue  les  Français  contre  les  calom- 
nies co!()nrlées  par  certains  membres  de  l'église  allernaiide, 
que  leur  but  était  de  combattre  les  supersUlions  pratiquées 
sur  le  Pré  et  ailleurs,  et  qui  étaient  causes  de  perpétuels 
froissements.  i£rl)  engagea  les  plaignants  à  Tunion  et  écrivit 
à  Ëguenolphe  pour  qu*il  essayât  de  rétablir  la  paix  sur  les 
bases  d'une  égalité  complète  entre  les  deux  Eglises  et  les 
deux  pasteurs,  dont  aucun  ne  devait  s'attribuer  de  supério- 
rité sur  l'autre.  Le  14  juillet,  Eguenolphe  donna  rendez-vous 
au  ministre  et  à  ceux  de  ses  adhérents  qui  comprenaient 
Tallemand  ;  il  les  convoqua  pour  le  jeudi  suivant  en  l'église 


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BEVUE  D^ALSACE 


du  Pré.  «  De  toutes  ses  démarches,  disait-il,  il  n'avait  recueillî 
qu'un  redoublement  de  mésintelligence  entre  les  deux  com- 
munions, au  lieu  de  la  paix  et  de  l'union  qu'il  cherchait.  Une 
dernière  fois,  il  voulait  tenter  d'arriver  à  une  conciliation 
néceeeaire  >.  Je  ne  sais  ce  qui  résulta  de  la  conférence  prési- 
dée par  Eguenolphe;  mais,  le  21  août  suivant,  la  Régence 
d'Ënsisheim  intima  l'ordre  d'expulser  les  sectaires  du  val  de 
Lièpvre,  et  les  mineurs,  voyant  que  cette  mise  en  demeure 
n'était  point  suivie  d'effét,  recoururent  aux  dénonciations. 
Ils  furent  dé^nvoués  par  quelques-uns  de  leurs  commandi- 
taires qui  hahiluieiit  Strasbourg  (19  octobre  1501),  mais  trop 
tard.  Les  plaintes  de.^  mineurs  minants  avaient  eu  tout  l'effet 
qu'ils  en  attendaient.  Eguenolplie,  se  sentant  suspect  à  la 
Régence,  se  décida  à  faire  acte  de  vigueur.  Les  deux  partis, 
luthériens  et  réformés,  avaient  commis  d'égales  fautes  :  il 
importait  de  les  réduire  à  Tobéissance.  Ce  ne  fut  pas  sans  de 
cruelles  hésitations  qu'Ëguenotphe  parvintà  prendre  une  déter- 
mination.  Il  demanda  conseil  partout  et  d  abord  à  son  beau- 
père,  le  comte  Eberhard  d'Erbacb.  La  réponse  de  celui-ci 
(22  septembre)  est  d'un  homme  effrayé.  «  Sur  toutes  choses, 
gardez  qu'il  ne  s'élève  des  troubles,  car  vous  seriez  perdu  ^ 
Le  meilleur  avis  que  je  puisse  vous  donner,  est  de  prier  et 
de  prier  sans  relâche!  »  Puis  venaient  que](|ues  idées  qui, 
malgré  leur  vague  et  leur  désordre,  étaient  plus  reilécbieâ  : 
«  Faites  que  vos  prédicantâ  s'arrangent;  donnez-leur  une 
Constitution  religieuse,  mais  que  ce  ne  soit  pas  la  nôtre, 
d'Erbach;  nous  sommes  déjà  très  mal  notés  !  Prenez  celle  de 
Strasbourg,  celle  au  moins  qu'y  introduisit  Bucer  !  UaîtreMa- 
this  EO  chargera  de  l'arranger. . .  J'entends  que  vous  avez  un 
maître  d*éeo1e  français  qne  vos  mineurs  voient  de  bon  œil  et 
qui  a  déjà  été  in  docir'mn  :  à  voire  [liace.  je  tii  enquerrais 
auprès  des  mineurs,  aTui  de  savoir  si  sa  nomination  leur 
agréerait...   Il  serait  bon  que  vous  pussiez  accorder  vos 
prédicants  au  sujet  des  cérémonies,  et  Ton  me  dit  que  le 


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mSTOIBE  DS  SAlNTË-MAftlE-AUX-llIMBB 


171 


Prtnçaîs  ne  demande  pas  mieux;  en  homme  de  sens,  il  s'ac- 
commodera bien  de  la  confe.vsion  d'Augsbourg. . .  Si  M.  Ar- 
nolplie  était  obli^^ô  de  {)artir,  je  donnerai.^  coni^é  aussi  au 
pasteur  aileniKiid ..  .  »  Nicolas,  t<erviteur  d'Erbacli,  est  plus 
calme  :  «  Mettez  en  place  d'Arnolphus  le  maître  d'école  de 
Sainte-Marie  ou  un  autre,  mais,  au  préalable,  faites  le  aller 
à  Montbéliardi  afin  d'y  être  examîDé  ;  faites-loi  signer  une 
confession  de  foi  touchant  la  Sainte-Gène  et  le  reste,  puis 
dèbarrassez-TOus  de  Berr  fiUer,  en  le  nommant  Totre  Bqf- 
pretHeani,  et  nommez  un  autre  Allemand  à  son  poste;  que  le 
ministre  français  et  Tallemand  souscrÎTent  la  confession 
d'Aui^sbourg;  mettez  tout  en  œuvre  pour  empêcher  de  nou- 
velles plaintes  de  la  j^art  de  vos  mineurs  et  contentez  l'empe- 
reur au  sujet  des  calvinistes!  >  Le  3  novembre, Eguenolpbe, 
enlin  déicrminé.  annonça  à  Sulzer.  que  la  paix  n'ayant  point 
été  obtenue  entre  les  divers  religionnaires  du  val  d  Eschery, 
iJ  allait  permettre  à  Peter  Hoger  de  prendre  un  congé,  vu 
son  état  de  maladie  et  de  faiblesse,  et  le  remplacer  par  un 
certain  Herr  Jacob,  au  sujet  duquel  nous  n'avons  point  de 
renseignements.  Arnauld  Bauc,  atteint  de  la  même  maladie 
et  ftiblesse  que  son  rival,  prit  de  lui-même  un  congé  et  fut 
remplacé  temporairement  par  le  ministre  Jean  Figon,  envoyé 
par  l'Eglise  de  Metz. 

«  Le  10  janvier  1562,  rapportent  les  Amiafca  de  Liicke, 
il  y  eut  à  Ehchery  réunion  de  pieux  et  .^avants  [lersoniiages 
françait-,  savoir  Petrus  Golonius,  Zancbius  et  \Yernerius.  » 
LUcke  ne  dit  point  pourquoi  ces  doctes  ministres  vinrent 
d'aussi  loin,  par  une  telle  saison,  mais  il  est  probable  que 
des  motifis  d'assez  grande  importance  déterminèrent  cette 
démarche  etassemblèrênt Pierre  van  Geuleii,  ministre  de  Metz, 
Jérôme  Zancbius  et  Jean  Garnier,  ministres  de  Strasbourg. 
Quoi  qu'il  en  soit,  ce  conciliabule  fut  suivi  de  scènes  étran- 
ges, dont  voici  l'histoire  : 

Hoger  usait  du  congé  qu'il  avait  reçu  pour  cause  de  santé  ; 


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172 


BEVUB  D'ALSACE 


la  chaire  du  Pré  restait  vide.  Uq  dimanche,  l-^guenolphe  parut; 
il  présenta  aux  miueurs  Uerr  (Àjurac/,  c  e.^t-à-dire  le  théolo- 
gien Conrad  Finck,  de  Mulliouse,  leur  annonça  qu'ils  devaient 
le  considérer  comme  leur  pasteur,  puis,  comme  scandalisé  de 
trouver  encore  dans  l'église  tant  d'idoles  et  d'objets  d'idolâ- 
trie, il  oommanda  à  Fiock  de  les  faire  disparaître  dès  le  lea» 
demaio.  Le  landi  donc,  Tautel  en  pierre  fiit  jeté  à  la  porte  de 
l'église;  on  le  remplaça  par  une  simple  table  delxns;  on  lança 
également  sar  le  Pré  an  crucifix,  un  baptistère,  an  tabernacle. 
Les  mineurs,  pour  partisans  qu'ils  parussent  des  noavelles 
idées,  murmurèrent.  Courroucés  de  ce  qu'on  en  agissait  de 
la  sorte  dans  une  église  bâtie  par  eux  et  (30ur  eux,  ils  écla- 
tèrent en  menacCvS  contre  les  calvinistes  soupçonnés  d'être  les 
instigateurs  secrets  de  l'entreprise.  Une  lettre  anonyme,  sans 
date,  dénonça  Tafiaire  aux  officiers  autrichiens.  Cette  lettre, 
attribuée  par  eux  aa  BergrielUer  (Veltin  Ck>lin),  ils  la  trans- 
mirent à  leurs  supérieurs.  Les  plaintes  parvinrent  jusqu'au 
trône  impérial.  Le  5  mai  i562,  Ferdinand  adressa  une  lettre 
menaçante  à  son  yassal  Eguenolphe.  De  son  côté,  la  Régence 
d'Ensisheim,  à  la  première  nouvelle  qu'elle  avait  reçue  du 
délit,  en  avait  exigé  réparation  (  27  mars  1562)  :  elle  deman- 
dait le  rétablissement  des  choses  dans  leur  état  antérieur 
(voir  Contmuaiîo  Sleidum,  t.  Vil,  pp.  2804)00).  Conrad  Finck 
rentra  à  Mulhouse,  où  il  reprit  ses  fonctions  pastorales  (1554 
à  1567J.  Il  fut  remplacé  sur  le  Pré  par  l'ancien  curé  de 
Sainte-Marie-Madeleine  (côté  lorrain).  Gelui-ci,  nommé  Nicolas 
François,  converti  depuis  peu  au  protestantisme,  prêcha  les 
luthériens,  comme  plus  tard  il  prêcha  les  réformés,  quand 
il  tai  devenu  ministre  d'Eschery,  c'est-à-dire  avec  une  cer- 
taine indépendance  d'opinions  et  sans  parti  pris  doctrinaire. 

Ë  MUHLENBBGK. 

tLa  fin  h  la  prochaine  livraison.  J 


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LA 

MUSIQUE  ET  L'ACOUSTIQUE 

APERÇU  GÉXÉIUL 
sur  leurs  rapports  et  sur  leurs  dissemblances 


Fin, 


Nous  voyons  très  nettement  Jasquld  comment  la  scienee 
accompagne  Tart,  comment  l*a60iutique  eôtoU  la  mosique, 
sang  jamais  se  confondre  a?ec  elle.  L*art  puise  dans  la  science 
la  connaissance  intime  des  éléments  avec  lesquels  il  crée  ;  la 
sdence  précise  les  lois  fondamentales  des  combinaisons  de 
ces  éléments  entre  eux,  en  faisant  plier  toutefois  son  exacti- 
tude malhémati(jue  devant  les  exigences  de  l'art;  mais,  ici 
même  encore,  elle  explique  le  pourquoi  de  cette  concession 
nécessaire.  La  marche  naturelle  de  cet  exposé  va  noos  con- 
duire à  des  questions  de  plus  en  plus  élevées,  dans  l'examen 
desquelles  le  même  fait  nons  frappera. 

L*une  des  premières,  qui  s'est  présentée  à  nons  an  dâ)ut 
même,  est  celle-ci  :  la  science  peut-elle  expliquer  Faction  des 
sons  et  de  leurs  combinaisons  sur  la  partie  sensiti?e  de  notre 
élret  Ainsi  posée,  la  question  est  presque  purement  physio- 
logique et  peut  se  faire  identiquement  quant  à  tous  nos  autres 
sens,  quant  à  toutes  nos  autres  sensations.  Pour  y  répondre, 
il  faudrait  que  nous  connussions  le  mécanisme  précis  de  nos 


174 


REVUE  D'ALSACE 


sens  (système  nerveux),  la  nature  intime  de  l'agent  (électri- 
cité) qui  y  est  enjeu,  et  enfin  la  nature  intime  de  notre  être 
pensant  et  sentant  (^ûme).  La  science  nous  conduira  tôt  ou  tard 
à  la  première  de  ces  connaissances  ;  des  progrès  considérables 
ont  été  faits  déjà  daos  cette  directioQ.  Ainsi  qae  je  Tti  montré 
dHDS  on  ouYrage  spécial  S  nous  ne  pourons  arriver  à  la 
seconde  connaissanee  qu'en  éliminant  successivement  toutes 
les  hypothèses  Ikusses  on  absurdes,  qnant  à  la  nature  de  ra- 
gent intermédiaire;  toutefois,  comme  celui-ci  n^est  pas,  ainsi 
qu*on  YtL  admis  si  longtemps,  spécial  aux  êtres  vivants,  mais 
se  manifeste  partout  dans  la  nature,  la  puiss;ince  de  la  science 
reste  encore  très  étendue  dans  ce  travail  d  élimination  des 
erreurs  possibles  d'interprétation.  Il  n'en  est  plus  de  même 
quant  à  la  troisième  espèce  de  connaissance,  celle  qui  con- 
cerne la  nature  de  notre  propre  être  et  de  ses  rapports  avec 
le  monde  externe;  nous  pouvons  encore,  dans  une  certaine 
mesure,  arriver  à  savoir  ce  qu'il  n'est  pas;  mais,  en  ce  monde, 
nous  n'aurons  jamais  la  plus  légère  notion  de  ce  qu'il  est 
réellement,  car  notre  être  ne  saurait  s'inspecter  et  s'étudier 
lui-même.  Bt,  quant  à  nos  rapports  avec  Textérieur,  nous 
nous  trouvons  dans  une  double  impossibilité  contradictoire; 
nous  ne  pouvons  pas  plus  nous  concevoir  un  seul  instant 
privés  de  ces  rapports  que  nous  ne  pouvons  concevoir  le  com- 
ment de  leur  existence. 

Toutefois,  si,  au  lieu  de  chercher  à  sonder  la  nature  des 
choses,  nous  acceptons  comme  un  fait  expérimental  pur  et 
simple  nos  relations  avec  le  monde  externe  par  l'intermédiaire 
de  nos  sens,  et  si  nous  nous  bornons  à  en  étudier  les  lois,  la 
question  change.  A  côté  de  la  réponse  éternellement  négative 
en  ce  monde,  s'en  présente  une  qui  devient  affirmative;  à 
côté  d'une  porte  à  jamais  fermée  au  savoir  humain,  s'en  trouve 
une  que  la  science  a  déjà  entr'ouverle  et  qui,  sans  aucun 
doute, s'ouvrira  de  plus  en  plua.  iMais,  eu  ce  seus  limité  mémt, 

^  Analyse  élémeiUaire  âe  VUniinn. 


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LK  MUSIQUE  ET  L'aCOUSTIQUE 


175 


les  progrès  de  la  science  ont  été  très  inégaux,  selon  les  direraes 

espèces  de  sensations  à  étudier.  C'est  dans  l'étude  des  phéno- 
mènes de  la  Fisioa  et  de  l'ouïe  qu'ils  ont  été  le  plus  consi- 
dérables. 

J'aurai  ici  à  continuer  identiquement  ce  que  j'ai  fait  depuis 
le  début  ;  j*aarai  à  signaler  des  résultats  très  beaux  et  incon- 
testables ;  mais  j*aurai  aussi  à  rabattre  certaines  assertions 
de  la  science,  qui  sont  tout  au  moins  temporairement  trop 
ambitieuses. 

Nous  ayons  vu  que,  pour  chaque  accord,  la  physique  a 
déterminé  rigoureusement  le  nombre  relatif  de  Tibrationi  des 
sons  qui  le  produisent.  C'est  ce  que  j*Ri  déjà  montré  flous 

diverses  formes,  et  j'y  reviens  sous  une  nouvelle  face. 

Nous  avons  vu  que  la  gamme  en  -uiHjeur  est,  aritliméti- 
quement  parlant,  formée  par  la  suite  de  rapports  : 

UT  »/•  RÉ  •>  Ml  »•/!•  FA  •/•  SOL  ««/b  LA  >  SI  "/»  UT 

on  si  nous  prenons  pour  point  de  comparaison  la  note  fonda- 
mentale 

SECONDE  TIERCE    yUAUTE    QUINTE   SIXIEME  SEPTIÈME 
1      •/•  V*  V*  7»  V« 

La  seule  inspection  de  ces  diverses  fhictions  nous  fait  aper- 
cevoir ce  qui  caractérise  mathématiquement  un  accord  juste. 
Tontes,  en  effet,  constituent  des  rapports  simples  et  faciles 

à  saisir.  Si  au  rapport  2:3,  ou  322:783,  qui  repréienle  la 
quinte  ut-sol,  nous  substituons,  par  exemple,  les  nombres 
pris  au  hasard  527  :  789,  nous  avons,  aritliméliquement,  une 
fraction  difficile  à  saisir,  irréductible^  et,  musicalement,  nous 
STons  une  quinte  fausse.  Mais  comment  la  simplicité  arith- 
métique ou  la  complexité  répond-elle  à  une  sensation,  soit 
agréable,  soit  pénible?  La  forme  mathématique  du  phénomène 
est  connue.  Mais  quelle  en  est  k  raison  première?  M.  Helm- 
holts  a  cherché  à  donner  une  solution,  en  partant  de  consi- 
dérations basées  sur  la  structure  anatomiqne  de  Toreille,  et 


REVUE  D'ALSAOB 


en  se  fondant  sur  d'autres  données  encore.  Il  semble  résulter 
d*études  très  exactes  que  roreille  renferme  une  sorte  d'ap^- 
reil  musical  dont  les  cordts,  en  nombre  prodigieux,  sont 
accordées  cbtcane  poar  un  ton  particulier  et  ee  mettent  à 
fibrer,  dès  que  les  ondes  de  ce  ton  les  frappent»  mais  seule- 
ment dans  ce  cas.  Quelque  correctes  que  Ton  suppose  des 
recherches  anatomiques  aussi  délicates  et  difficiles,  quelque 
valeur  que  puissent  avoir  les  conclusions  qui  en  ont  été 
tirées,  je  ne  puis  m'erapêcher  de  dire  que  ki  difficulté  princi- 
pale n'est  pas  résolue  par  elles.  Quand  bien  même  l'appareil 
auditif  serait,  comme  cela  est  d'ailleurs  très  admissible,  disposé 
de  manière  à  analyser  et  à  trier  les  sons,  c'est,  en  dernière 
analyse,  toujours  notts  qui,  à  notre  propre  insu,  établissons 
le  rapport  mathématique  des  sons  entre  eux,  et  qui  «mam 
impressionnés  par  la  justesse  ou  la  &us8eté  du  résultat;  peu 
importe  d'ailleurs  ce  que  telle  ou  telle  école  de  philosophie 
Toudra  foire  de  ee  nous.  En  un  mot,  la  question  qui  nous 
occupe  est  d*abord  toute  de  physique,  passe  ensuite  sur  le 
domaine  de  la  physiologie,  et  puis,  en  dernier  lieu,  s'arrête 
sur  celui  de  la  psycholoi^ie.  Je  suis  loin  de  dire  que,  sur  ce 
terrain,  elle  devienne  alisulument  insoluble:  je  pense  seulement 
que  les  explications  tirées  de  la  physique  pure  échouent 
nécessairement  ici. 

Si  la  loi  mathématique  qui  détermine  la  justesse  ou  la 
fausseté  d*une  oonsonnanoe  se  saisit  à  première  vue,  il  ne 
me  semble  plus  en  être  ainsi  de  celle  qui  ftût  que  tel  accord 
nous  apparaît  comme  consonnant  et  tel  autre  comme  dissonant 

Que  le  lecteur  me  pardonne  si  jinterrîens  personnellement 
dans  la  discussion  et  si  je  cesse  de  parler  collectivement,  au 
nom  de  la  science.  Je  le  fais  par  un  sentiment  naturel  de 
réserve  et  de  modestie,  parce  que  mon  opinion  diffère  de  celle 
de  plusieurs  physiciens  éminents  de  notre  époque,  aux  yeux 
desquels  la  question  semble  facile,  et  aussi  parce  que,  selon 
moi,  en  matière  de  consonnances  et  de  dissonaneeS)  chacun 
en  est  réduit  à  juger  d'après  ses  propres  Impressions. 


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LA  MUSIQUE  ET  L'AGOUBTIQUB 


177 


On  dtt  qa*an  accord  de  deux  notes,  de  deux  ions,  est  d'eu- 
tant  plus  consonnanl,  plus  agréable,  que  le  rapport  des  nom- 
bres de  vibrations  est  plus  facile  à  saisir,  et  aussi  que  les 

sons  harmoniques,  qui  accompagnent  toujours  les  sons  fonda- 
nieulaux,  sont  cux-nièrnes  ensemble  dans  un  rapport  plus 
simple.  Tout  d'abord,  et  en  ce  qui  concerno  cette  der- 
nière raison,  je  ferai  remarquer  (jue,  puisque  le  timbre  des 
divers  instruments  dépend  de  la  prédominance  particulière 
de  tels  ou  tels  sons  liarmoniqucs  sur  tels  ou  tels  autres,  ou 
plus  généralement  encore  de  la  forme  interne  des  ondes  sono- 
res, il  devrait  arriver  qa*ttn  accord,  très  consonnant  snr  un 
instrument,  le  fût  beaucoup  moins  sur  un  autre,  et  surtout 
que,  si  i*un  des  sons  était  donné  par  tel  instrument  et  Tautre 
son  par  tei  autre,  la  consonnance  lût  altérée;  ceftit,  à  ma 
connaissance,  n'a  jamais  été  si^alé.  En  ce  qui  concerne  Teffet 
de  la  simjijicitc  plus  ou  moins  grande  des  rapports  numé- 
riques des  vibraliuns  sur  le  degré  de  consonnance,  je  ferai 
remarquer  que,  si  cette  face  de  1  "intei  prelation  était  correcte, 
ce  degré  de  consonnance  devrait  aller  en  diminuant  rapide- 
ment depuis  la  quinte  (2 :  3)  jusqu'à  la  tierce  mineure  {6 : 5), 
qui,  numériquement,  tient  le  milieu  entre  la  quinte  et  la  dis* 
sonance  bien  Dranche  de  seconde  (9 : 8).  Or,  si  Je  pars  de 
mon  impression  personnelle,  je  dirai  que  la  tierce  mineure 
m*est  tout  aussi  agréable  que  la  quinte,  et  qu'il  en  est  de  m6me 
de  la  sixte  (tierce  mineure  renversée),  exprimée  numérique- 
ment pourtant  par  une  fraction  qui  est  fort  loin  d'être  simple 
(S: 8).  Comme  mathématicien,  je  l'avoue  d'ailleurs,  il  m'est 
impossible  d'apercevoir  en  quoi  la  fraction  9:8  (accord  de 
seconde  majeure)  est  plus  diûiciie  à  saisir  que  la  frac- 
tion 5 :  3. 

II  est  peut-être  plus  lacilc  d'apercevoir  la  raison  mathéma- 
tique de  la  dissonance  ou  de  la  consonnance  d'un  accord 
formé  de  plusieurs  tons.  Si  nous  réduisons  au  même  dénomi- 
nateur la  suite  de  fractions  qui  forment  la  gamme  en  «(- 

Il «Bfilto  SMt  -  7*  Année  1^ 


176  RBVCB  D'ALSACE 

majeur,  par  exemple,  nous  arrivons  à  la  série  des  nombres 
sairantes  : 

UT  RÉ  Ml  FA  SOL  LA  SI  I3T  RÉ  Ml  FA 
U     VI     30    32      36      40     45    48     Si     60  64 

SOL  LA  SI  irr 

72     80     90  96. 

L*accord  le  plus  consonnani  de  loas,  raccord  parfiiil  u^mt- 

so/,  est  donc  donné  par  les  nombres  relalil's  de  vibrations  24- 
30-3G.  Ces  nombres  [irucèdcnl.  connneon  le  voit,  par  différences 
arithmétiques  é^'ah-s  (<>).  et,  de  pins,  cette  différence  estelle- 
mème  avec  le  nombre  fondamental  24  dans  le  rapport  très 
simple  de  1  à  4.  U  n'en  est  nullement  ainsi  de  l'accord  com- 
plet, disionaai  et  caractéristique,  de  septième,  sol-si-ré-fa; 
les  différences  (9,  9, 10)  qu'on  obtient  en  ce  cas  sont  inégales 
et  dans  un  rapport  complexe  avec  le  nombre  de  la  note  fon- 
damentale : 9  :S6  et  10: 86.  Je  me  hâte  dédire  que  je  n*in- 
diqne  qa'ane  sorte  d*expression  numérique  des  faits  et  que 
je  n'explique  rien.  Un  autre  fait  frappant  se  présente  à  nous; 
il  est  généralement  admis,  si  je  ne  me  trompe,  de  sorte  que 
je  n'ai  plus  à  le  disniter  ii"î][)rès  nia  ^e\ih'  impression  per- 
sonnelle. Notre  (ireiile  ne  t^-lère  pas  de  la  même  manière  les 
altérations  même  légères  que  nous  faisons  subir  à  la  justesse 
des  dirers  accords,  et  c'est  sur  ce  fait  que  repose  la  manière 
la  plus  correcte  d'accorder  le  piano.  La  plus  minime  altéra- 
tion apportée  à  un  ton  qui  doit  être  à  Tunîsson  ou  à  Toctare 
avec  un  autre  produit  un  effet  intolérable.  Immédiatement 
après  vient  la  quinte;  il  me  paraît  très  douteux  qu*nne 
oreille  délicate  acce{)îe  jamais  pour  la  quinte  ré-la  le  rapport 
587,25:870,  donné  par  la  gamme  dite  exacte,  alors  que  la 
quinte  rigoureusemint  jtisie  exigerait  les  nombres  de  vibra- 
tions 580:S70.  A  raiilr»»  l'xiréuiilé,  là  où  rorcille  supporte 
le  mieux  mie  alir-raliou,  cc.sl  TuD'ord  de  seconde,  majeure  et 
surtout  mineure,  qui  se  présente.  La  confiance  des  physiciens 
en  cette  tolérance  va  toutefois,  je  pense,  beaucoup  trop  Ioîd» 


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LA  MUSIQUE  ET  L'AOOUBTIQUB 


179 


lorsqu'ils  proposent  de  siibslitiier  le  demi-ton  artificiel  donné 
par  le  rapport  24 :  25  au  demi-ton  naturel  donné  par  le  rap- 
port 15: 16.  Celte  plus  grande  tolérance  de  notre  oreille  dans 
un  cas  que  dans  Tautre  s'expliquerait  arithméiiqQemeat,  ai 
aile  allait  en  croissant  régulièrement  depuis  la  quinte  jusqu'à 
la  seconde  mineure,  c'est-à-dire  si  elle  augmentait  arec  les 
nombres  des  vibrations  qui  forment  les  numérateurs  et  les 
dénominateurs  de  nos  fractions  ;  mais  c'est  là  ce  qui  n*a  pas 
lieu  du  tout.  Les  tierces,  majeures  ou  mineures,  supportent 
de  légères  allcralions  tout  aussi  bien  que  la  quarte, et  mieux, 
à  mon  avis  du  moins,  que  la  sixte. 

En  résumé,  tout  en  admettant  qu'il  existe  à  la  fois  une 
raison  piiysiciue  et  une  raison  physiologique  sur  lesquelles 
repose  la  différence  que  nous  faisons  etitrc  les  accords  ron- 
sonnsnts  et  les  accords  dissonants,  tout  en  admettant  que 
ces  raisons  sont  déjà  entrevues,  je  pense  pouvoir  dire,  sans 
(iure  tort  à  aucun  savant,  qu'elles  sont  loin  d'avoir  encore 
le  caractère  de  netteté  et  de  certitude  qu'on  est  en  droit  de 
désirer;  j'ajoute  qu'à  côté  de  ces  raisons,  physique  et  physio- 
logique, il  s'en  trouve  nécessairement  une  troisième  toute 
psychologique,  que  l'homme  ne  connatlra  jamais  ici-bas. 

La  marche  naturelle  de  cet  exposé  nous  conduit  enfin  en 
face  d'une  des  questions  les  plus  élevées  qui  se  puissent  pré- 
senter à  nous,  de  Tune  de  celles  qui  ont  été  le  plus  débattues, 
tacitement  ou  ouveriemeut:  car  elle  s  impose  à  toute  doctrine 
de  philosophie  qui  a  la  prétention  d'interpréter  logiquement 
la  nature  do  Tbomme. 

La  science,  nous  sommes-nous  demandé,  peut-elle  aller 
beaucoup  plus  loin  encore,  peut-elle  expliquer  l'impression  de 
la  musique  sur  notre  être  pensant? 

D'après  l'ensemble  des  rues  que  j'ai  développées  dans  ce 
travail,  le  lecteur,  sans  d  ule.  devine  déjà  la  réponse  qu'an 
nom  delà  science  elle  même,  je  ferai  à  celte  question.  Dès 
la  première  phrase,  j  ai  appelé  la  musique  :  l'art  le  plus 


180 


RETUB  D'ALSACB 


dégagé  des  réalités  de  C(3  monde,  l'art  dont  l'instinct  divina- 
toire des  poètes  a  fait  la  langue  des  anges.  En  langage  scienti- 
fique, cela  signifie  que,  plus  que  les  autres  arts,  plus  que  la 
poésie  même,  la  musique,  tout  en  arrivant  à  nous  par  noter- 
médiaire  obligé  des  sens,  8*adresse  pourtant  en  dernière  ana- 
lyse i  ce  qnHl  y  a  de  plus  pur  en  nous,  à  cette  partie  de  notre 
être  dont,  en  dépit  de  toutes  les  négations  systématiques,  le 
simple  bon  sens,  aussi  bien  que  la  raison  du  savant,  ftit  un 
priiu  ipe  distinct  des  éléments  de  notre  corps.  Cela  signifie,  en 
un  mot.  que  la  pensée  musicale,  comme  la  notion  du  beau 
en  général,  n'apparlient  qu'à  l'àme,  et.  je  l'ajoute  formelle- 
ment, ne  peut  s'e.xpliquer  que  par  l'àme. 

Qu'il  me  soit  permis  de  citer  l'opinion  du  savant  éminent 
auquel  la  physique  des  sons,  l*acoustique,  doit  certainement 
ses  progrès  récents  les  plus  considérables,  et  qui  aurait  eu 
le  plus  le  droit  de  hasarder  une  explication  de  physique  pore 
pour  rendre  compte  de  Inaction  de  la  musique  sur  nous. 

t  La  sensation  de  l'accord  musical  pur  n^est  certainement 
que  le  premier  degré  de  la  beauté  musicale.  La  consonnance 
et  la  dissonance  ne  sont,  par  rapport  à  la  beauté  intellec- 
tuelle de  la  nmsique,  que  des  moyens:,  mais  des  moyens  réels 
et  puissants.  Dans  la  dissonance,  le  nerf  acoustique  e.st 
tourmenté  par  le  choc  de  sons  incompatibles;  il  désire  entendre 
la  consonnance  paisible  et  pure  de  sons  harmonieux;  il  se 
sent  attiré  vers  la  consonnance,  et,  lorsqu'il  la  trouve,  il  s'y 
complaît  La  consonnance  et  la  dissonance  ralentissent  ou 
activent  alternativement  i*écoulement  des  sons,  et  notre  intel- 
ligence admire,  dans  leurs  mouvements  invisibles,  Fimagede 
ses  propres  idées  et  de  ses  propres  sentiments.  Elle  saisit  le 
mouvement  rhythmique  toujours  varié  des  ondes  sonores, 
comme  sur  le  bord  de  lu  mer  elle  admire  le  mouvement  des 
vagues.  Dans  ce  dernier  spoclacle.  l'observateur,  en  pré- 
sence de  forces  naturelles  mécaniques,  agissant  aveuglément, 
n'emporte  iinalement  qu'une  impression  de  désert;  dans 


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LA  MUSIQUE  ET  L'ACOUSTIQUE 


181 


rexéeotion  d*aiie  œurre  artistique,  les  monTements  snirent, 

aa  contraire,  les  flots  de  pensée  de  l'âme  de  Tarliste.  Tantôt 
les  ondes  sonores  s  écoulent  douceniont,  larilOt  elles  sautillent 
agréablement,  tantôt  elles  ont  tous  les  accents  de  la  passion, 
elles  font  passer,  avec  leur  vigueur  primitive,  les  sentiments 
inconnus  que  Tarliste  a  dérobés  à  son  âme,  dans  celle  de  l'au- 
diteur, qu'elles  transportent  dans  les  régions  de  l'étemelle 
beauté,  qa*un  petit  nombre  de  favoris  de  la  divinité  a  reça 
mission  de  noos  fiiîre  connaître. — Mais  ici  s'arrête  la  sdence.  > 

C'est  par  ces  belles  paroles  que  H.  Helmholtz  a  terminé 
aoe  conférence  sor  les  causes  physiologiques  de  Tharmonie 
musicale,  tenue  à  Bonn. 

C'est  en  elTet  là  que  s'arrête  la  science,  appliquée  à  Tintcr- 
prétation  {)hysique  et  physiologique  de  la  puissance  de  l'art 
musical.  Sans  franchir  les  termes  admissibles,  M.  Helmholtz 
a  cependant  été  en  ce  sens  aussi  loin  que  possible.  Mais  ce 
n'est  point  ici,  il  s'en  faut,  qu'est  borné  ce  qui,  dans  nos 
sciences,  est  plus  beau  peut-être  que  la  connaissance  même 
des  phénomènes,  si  complète  qu'elle  soit,  qu'est  bornée  la 
force  de  la  méthode  tdmtifiqw,  employée  à  tirer  des  conclu- 
sions de  cette  impuissance  apparente  de  la  science,  employée 
à  découvrir  ce  qui  découle  naturellement  de  la  distinction  de 
l'art  et  de  la  sdence.  Sans  faire  aucun  programme,  il  me 
sera,  je  pense,  permis  de  marcher,  aussi  loin  que  possible, 
dans  cette  direction  avec  mes  lecleurs. 

J"ai  entendu  bien  des  persuiines,  d'ailleurs  intelligentes  et 
ne  manquant  pas  mèmn  t  ilalement  du  sens  musical,  dire  que 
la  musique  ne  saurait  exprimer  des  idées,  qu'elle  est  un  art 
tout  de  sensations,  et  quecequile  prouve  le  mieux,  c'est  que, 
sans  l'exécution  instrumentale  ou  vocale,  sans  l'audition,  il 
n'existe  plus  même  de  musique.  U  y  a  dans  une  telle  asser- 
tion une  double  erreur  trop  criante  pour  que  je  ne  la  mette 
pas  en  pleine  lumière.  Je  n'ai,  il  me  semble,  pas  besoin 
de  consacrer  beaucoup  de  tempe  à  établir  qu'une  phrase 


182 


REVUE  D'ALSACE 


musicale  quelconque,  belle  ou  laide,  noble  ou  triviale,  est  par 
elle-même  une  idée.  La  posr^ibilité  des  cpithèles  que  j'emploie, 
et  que  personne  ne  récusera,  justiûe  mes  assertions  mieux 
que  tout  raisonnement  Personne  au  monde  ne  les  appliquera 
jamais  à  une  odeur,  à  une  saveur,  à  une  sensation  quelconque  1 
la  question  est  seulement  de  savoir  si  la  pensée,  si  ridée  musi- 
cale ne  peut  naître  en  nous  ou  nous  arriver  du  dehors  et 
nous  émouvoir  que  sous  la  forme  d*une  suite  de  sensations. 
Certes,  une  belle  œuvre  musicale  nous  émeut  bien  plus,  lorsque 
nous  l'entendons  exécuter  convenablement,  que  lorsque  nous 
nous  la  reproduisons  par  souvenir,  si  vif  que  puisj^e  être  ce 
souvenir;  certes,  une  symplionie  nous  remue  plus  profondé- 
ment, quand  elle  est  rendue  par  un  bon  orchesire,  que  quand 
elle  ne  Test  que  par  le  piano  seul,  par  exemple,  ou  que  quand 
nous  en  lisons  simplement  la  partition.  Tout  cela  est  incon- 
testabie  et  11  fiiudrait  être  insensé  pour  le  nier  ;  mais  qu'en 
réâulte-t^il?  Un  beau  tableau,  un  monument  grandiose  d'ar- 
chitecture nous  impressionnent-ils  donc  par  hasard  autant, 
quand  la  mémoire  la  plus  fidèle  nous  les  retrace,  que  quand 
nous  sommes  en  leur  présence?  Il  n  a  jamais  passé  par  la 
tôle  d'aucun  homme  raisonnable  de  dire  que  l'art  dramatique 
ne  repose  que  sur  des  sen^^ations;  et  cependant,  qui  ))ourrait 
nier  qu'une  grande  œuvre  ne  nous  émeuve  pas  iiiliiiimeiit 
plus,  quand,  au  Du  àlre,  elle  est  rendue  i7'i*an/6  par  de  grands 
arlistt's,  (jue  quand  nous  nous  bornons  à  la  lire  V  Je  suis 
loin  de  dire  qu'il  n'y  ait  pas,  quant  à  Timpression  produite 
sur  nous,  une  différence  en  ce  sens  entre  une  œuvre  musi- 
cale et  une  poésie,  selon  que  nous  les  entendons,  l'une  bien 
exécutée,  Tautre  bien  déclamée,  ou  que  nous  nous  bornons  à 
les  lire.  Toutefois,  la  différence  repose  au  moins  autant  sur  un 
défaut  d'éducation  musirale  que  sur  l'essence  des  deux  genres 
de  beauté.  Nous  apprenons  à  parler  avant  d'apprendre  à 
clrinter  ou  même  seulement  avant  d'entendre  de  la  musique: 
nous  apprenons  à  lire  et  à  écrire  longtemps  avant  qu'on 


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LA  MUSIQUE  ET  L'ACOUSTIQUE 


183 


DOUB  enseigoe  tant  bien  que  mal  récriture  et  la  leeture  de  la 

musiqae.  Une  éducation  convenable  diminneraît  singulière- 
ment la  différence  des  effets  de  ces  deux  genres  de  lecture 
sur  nous.  ,]'njnule  qu'en  nous  prenant  ni(^me  tels  que  nous 
fait  notre  éducation  actuelle,  toute  personne  ayant  le  senti- 
ment de  l'art  préférera  de  beaucoup  s'en  tenir  au  souvenir 
TÎf  et  correct  d'une  belle  œuvre  musicale,  plutôt  que  de  se 
risquer  à  l'entendre  interpréter  par  des  artistes  peu  scrupu- 
leux quant  au  rbythme,  ou  habitués  à  eheorùler,  ou  capables 
de  prendre  trop  au  pied  de  la  lettre  les  préceptes  chromatiques 
du  matou  Mourrl 

Je  complète  la  discussion  précédente  par  une  preure  en 
quelque  sorte  parlante,  dont  TéTidence  frappera  chacun.  Com- 
ment un  artiste  pourcait-il  composer,  d'un  jet  et  sans  tâton- 
nements, une  symphonie,  une  reuvre  pour  orcliestre  avec 
chœur,  s'il  n'entendait  nettement  et  vivement  toutes  les  mélo- 
dies, toutes  les  harmonies,  avec  tous  leurs  timbres  variés,  à 
mesure  qu'elles  prennent  Tétre  dans  son  âme?  Je  connais,  il 
est  vraii  des  personnes  qui  s'imaginent  que,  pour  écrire,  un 
compositeur  s^assied  à  son  piano  et  laisse  ses  doigts  errer 
à  rarentnre  sur  les  touches;  d*où  il  résulterait  que  ce 
seraient  les  doigts  qui  créeraient,  et  que  rintelligenoe  se  borne- 
rait à  inscrire!  Je  ne  cite  que  pour  mémoire  cette  explication 
passablement  plaisante.  Chacun  sait,  par  des  récils  d'anec- 
dotes, comment  écrivaient  Haydn.  Mozart.  Ce  n'était  point  au 
piano,  assurément!. . .  Le  {)ln?5  jjrraiitl  {)armi  les  grands  cré- 
ait, tandis  qu'il  errait  à  pas  l  apiili  s  dans  la  campagne,  dans 
une  forêt,  ou  assis  sur  le  tronc  fourchu  d'un  vieil  arbre. 
Beethoven,  on  le  sait,  a  eu  l'infortune  de  perdre  l'ouïe  dès  le 
milieu  de  sa  vie;  il  ne  lui  a  pas  été  donné  d'entendre  les 
chefe-d'œurre  de  la  dernière  partie  de  sa  carrière:  la  création 
la  plus  immensément  belle  qui  soit  sortie  d'un  cerveau 
humain,  la  symphonie  avec  chœur  est,  dans  scs^efe  <fe  ssnm- 
dons  physiques,  restée  une  inconnue  pour  lui  1  Je  n'ajouterai 


184 


REVUE  D'ALSAΠ


rien  de  plus.  Je  dirai  seulement,  en  passant,  que,  pour  qui- 
conque sait  réfléchir,  la  musique,  bien  loin  de  ne  reposer  qae 
sur  des  impre.^^sions  physiques,  est.  dans  son  existence  même, 
poe  des  preares  les  plus  frappantes  de  rezistence  d'un  prin- 
cipe îmnmtériel  pensant  dans  Thomme. 

Je  pense  que  personne  ne  prendra  en  mal  à  nn  physicien 
d'appliquer  sa  méthode  scientifique  pour  aboutir  à  une  telle 
assertion. 

Je  viens  de  parler  d'un  défaut  d'éducation  musicale.  J'ai 
à  revenir  sur  ce  sujet  à  deux  points  de  vue  distincts.  Je  l'exa- 
mine une  première  fois  sous  une  forme  digressive,  que 
chacun  cependant  me  pardonnera,  je  l'espère. 

Ën  parcourant  la  biographie  des  compositeurs  modernes, 
on  est  saisi  d'une  émotion  profonde  et  douloureuse  devant  le 
sort  de  plusieurs  d'entre  eux  ;  disons,  de  tous  ceux  qui,  se 
sentant  la  puissance  d'ouvrir  à  Tart  des  vois  nouvelles,  ont 
eu  Tabnégation,  la  conscience  et  le  courage  de  ne  pas  sacrifier 
au  goût  du  Jour  et  de  persévérer  dans  le  beau,  tel  qu'ils  le 
concevaient.  Geux-lft,  presque  ^ans  exception,  ont  plus  d'une 
fois  en  leur  vie  dù  «  manger  leur  pain  trempé  de  larmes  ». 
Je  n'ai  point  à  rappeler  les  .sottes  critiques,  les  niaises  tracas- 
series dont  Beethoven  a  été  l'objet,  parfois  môme  de  la  part 
d'amis,  compétents  en  apparence;  on  sait  que  ses  dernières 
œuvres,  les  plus  grandioses,  ont  passé  pour  celles  d'un  fou; 
je  ne  suis  pas  convaincu  que,  mpeitOf  ce  ne  soit  pas  là  encore 
ropinion  de  certains  critiques.  Si  je  n*avals  pour  principe  de 
laisser  am  moria  la  poix,  je  pourrais  citer  d'étranges  correc- 
tions qu'on  historien  célèbre  de  la  musique,  compositeur  lui- 
même,  a  tenté  de  faire,  entre  antres,  à  la  symphonie  pasto- 
rale, alors  en  gravure  à  Paris;  heureusement  l'épreure  passa 
avant  le  tirage  entre  des  mains  plus  scrupuleuses  et  plus 
sensées  (  j'ai  dans  ma  bibliothèque  une  partilirm  de  la  sym- 
phonie avec  chœur,  que  je  soupçonne  très  fort  d'avoir  éprouvé 
une  avarie  de  môme  origine).  On  sait  combien  amers  ont  été 


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LA  MUSIQUE  ET  L'AGOUSTIQUE  186 

1m  derniers  jours  de  Weber;  il  a  ea  Tétrange^ satisfaction 
d'assister  de  loin  au  {deiii  succè-?  de  son  Freischutz,  lacéré 
et  approprié  aux  fxif/piices  de  la  scène  parisienne  par  un 
habile,  dont  il  a  aiilé  à  raice  hi  fortune.  Et  notre  pauvre  Ber- 
lioz!.. .  Si  je  n'en  étais  empêché  par  un  devoir  de  discrétion, 
je  donoerais  de  carieux  et  navrants  détails  sur  les  luttes  et 
les  épreuves  qa*a  en  à  subir  cette  nature  énergique.  Aiyoïir- 
d*bai  la  justice  se  fait  lentement  pedSseAitfdiv;  on  commence 
à  reconnaître  que  la  France  a  perdu  en  Berlioz  nn  de  ses 
grands  hommes.  —  Il  y  a  en  sans  doute  dans  toutes  les  car- 
rières intellectuelles  des  hommes  émlnents,  méconnus  et  mal- 
heureux; le  nombre  n'en  est  que  trop  grand,  hélas!  Mais  on 
est  pourtant  frappé  de  ce  fait,  c'est  que  les  peintre?,  les  sculp- 
teurs, les  poètes  célèbres  ont  tous,  à  de  bien  rares  exceptions 
près,  conquis  de  leur  vivant  déjà  la  plus  belle  partie  de  leur 
renomméei  tandis  que  c'est  précisément  le  contraire  qui  a 
lieu  pour  les  grands  compositeurs,  à  certaines  exceptions  près 
aussi,  dont  il  est  focîle  d'apprécier  Torigine. 

Le  &it  que  je  signale,  et  dont  la  réalité  ne  peut  échapper  à 
personne,  repose  directement  sur  les  conditions  essentielles  de 
la  perception  du  beau.  Pour  que  nous  puissions  saisir  et  com- 
prendre dans  ron  ensemble  une  œuvre  d*art  â*on  caractère 
élevé  et  d'une  valeur  réelle,  il  faut  de  toute  nécessité  que  nous 
soyons  assez  longtemps  en  présence  d'elle  pour  que  notre 
mémoire  puisse  en  retenir  les  plus  minimes  détails  et  que 
notre  intelligence  soit  ainsi  mise  à  même  de  saisir  les  rap- 
ports des  parties.  Ces  conditions  peuvent  toujours  être  rem- 
plies quant  à  une  œuvre  de  ptinture,  de  sculpture,  de 
poésie.  Par  suite  de  notre  éducation  et  de  nos  habitudes,  elles 
le  sont  encore  quant  à  une  œuvre  dramatique,  du  moins  dans 
une  certaine  mesure.  Il  D*en  est  nullement  ainsi  quant  à  des 
œuvres  musicales  quelque  peu  développées  et  compliquées. 
Dans  rexéeotlon  d'une  symphonie,  d'un  opéra,  d'une  CBUvre 
étendue  quelconque,  les  mélodies  avec  leurs  développements, 


136 


BEVUE  D'ALSACE 


les  harmonA,  les  diverses  formes  des  accompagnemeutStpas- 

aent  au  vol  devant  notre  esprit  et  se  répètent  rarement  assez 
souvent  pour  se  graver  dcfmitivcmejit  dans  la  mémoire  la 
plus  exercée  ;  elles  ne  nous  saisis.-^cnt  et  ne  nous  impression- 
nent ainsi  que  d'une  nianièro  transitoire:  nous  ne  saurions 
apercevoir  leur  dépendance  et  le  l'^^le  de  cliacuiie  dans  l'en- 
semble  de  l'œuvre.  Que  dis  je?  c't^t  à  peine  si  nous  saisis- 
sons toujours  le  vrai  caractère  de  l'une  ou  l'autre,  prise  isolé- 
ment. En  un  mot,  et  pour  nous  résumer,  il  est  impossible  à 
l'intelligence  musicale  la  mieux  dotée  de  comprendre,  de  s'as- 
similer et  de  juger  correctement,  d  après  une  seule  et  pre- 
mière audition,  une  œuvre  musicale  étendue,  d*un  caractère 
sérieux  et  élevé.  La  lecture  patiente  de  la  partition,  ou  Tau- 
dition  répétée  un  nombre  de  fois  suffisant,  ne  fCit-ce  d^abord 
qu'au  piano,  est  une  condition  imposée  à  quiconque  veut 
juger  équilablement  une  grande  œuvre. 

M.  HelmhoUz  dit  avec  vérité  qu'un  petit  nombre  d'élus  ont 
reçu  du  ciel  la  mission  de  nous  transporter  dans  les  régions 
de  réternelle  beauté;  mais,  pour  que  ce  iioas  devienne  collec- 
tif, pour  qu'il  ne  se  réduise  pas  lui-même  à  un  nombre  res- 
treint de  favorisés,  il  faut  du  moins  encore  que  chacun,  de 
son  côté,  fasse  quelques  efforts  pour  s'élever,  et  qu'il  se  montre 
digne  de  ce  qui  lui  est  envoyé  d'en  liant.  Ce  n'est  point  de 
cette  oreille,  c'est  bien  ici  le  cas  de  le  dire, qu'entend  le  gros 
du  public.  £n  allant  écouter  pour  la  première  fois  un  opéra, 
un  oratorio,  une  symphonie,  chacun,  sans  préparation  aucune, 
s'institue  juge  et  se  dispose  à  user  à  l'occasion  du  droit  brutal 
qu'à  la  porte  il  acquiert  en  payant  ;  si,  dans  Tœuvre,  qu'U 
mknd  parfois  sans  Cécouter^  il  ne  trouve  pas  immédiatement 
quelques  points  saillants  et  soisissables  qui  l'impressionnent, 
la  fiitigue  arrive,  et  avec  elle  rimpalience,  la  critique  imper- 
tinente. Pour  bien  des  personnes,  d'ailleurs,  il  faut  en  con- 
venir, la  musique  est  un  art  dagrénunt:  elle  implique 
esseiilieilemeiit  la  galle;  loule  pensée  de  sérieux  semble 


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LA  MUSIQUB  BT  L'AGOUBTIQUE 


187 


iDeompatible  afec  elle.  PendaDt  Tan  des  passages  les  plus 
sombres  de  la  tragédie  ^  d*Antîgone,  alors  que  le  chœur  vient 
dire  la  sinistre  fatalité  du  destin,  une  voix  me  souffla  à  Foreille 
d  no  ton  de  mépris  :  «  Quand  tout  va  de  travers,  ceux-là  8*a- 
mnsent  et  chantent.  «  Cette  réflexion  judicieuse  de  mon  voisin 
à  rOdéon  résume  l'opinion  de  bon  nombre  de  gens.  Ce  ne 
sont  pas  là  toutefois  les  auditeurs  les  plus  iriJignes;  bien  gui- 
dés, l)C!iur  d'entre  eux  finissent  par  sentir  et  comprendre. 
Les  pires  sont  ceux  fjui,  sans  être  (dus  capables  de  compren- 
dre en  une  première  fois,  arrivent  avec  un  jugement  tout 
fait  que  leur  a  incuhiué  quelque  érudit.  «  C'est  de  la  pyro- 
technie et  non  de  la  musique!  >  me  dit  à  haute  voix  un 
Inconnu  qui  assistait,  à  côté  de  moi,  à  la  première  représen- 
tation '  de  Freisrkaiz  au  Grand-Opéra;  voilà  tout  ce  que  cet 
auditeur  prévenu  avait  compris  à  la  scène  sans  pareille  de  la 

'  La  Irngt^die  de  Soplioele,  Iratluile  tros  fidèlement,  a  l'-lé  inonlp*"  avec 
be;uii'nu[)  do  suin  à  I Odôoi),  à  Paris.  I,a  iiiiisi(jiic  des  rliuMiis,  (jii,  plus 
Coneoletueiit,  la  musique  dos  diverses  enU'ées  du  cha'ur  antique,  aviùt 
été  écrite  par  Hendel:»ohn.  Elle  a  été  analysée  très  fiivonibleroefit  par 
diffêrents  critiques  et,  en  tète,  par  Berlioz.  N'ayant  entendu  qn^une  seule 
fois  cette  œavre  dn  grand  composileur,  je  ne  hasarderai  ancon  juu'ement; 
je  dirai  st?ulement  (ju  -,  roiirn  '  d'  nisou,  le  caractère  général  de  ces 
chœurs  n'a  ahsolnni  iit  rien  de  conmiun  avec  la  joie. 

'  On  se  rap|)elle  (jue  Frei>cliQfz  a  <''l<'"  rr-présenl'',  avec  un  fjrand  luve 
de  mise  en  scène,  à  l'Opéra  de  Paris.  Les  récitatifs,  très  remarquables, 
avaient  été  composés  par  Berlioz;  la  musique  des  ballets  était  Urée  des 
compositions  de  Weber  même,  très  bien  choisies  aussi  par  Berlioz,  qui 
avait,  onire  autres,  magnifiquement  <  r<  liestré  l'Invitation  h  la  valu,  l'un 
des  plus  beaux  morceaux  de  piano  de  Weher. 

J'aflirme  i  "i  qu'^quoi  que  Von  en  ait  dit,  la  superbe  parlitioti  (ieWeb-T 
û  a  en  cette  occasion  éti-,  dai  s  son  ensemble,  ni  bien  rendue  par  les 
acteurs,  ni  bien  comprise  ])ar  le  public  Je  ne  sais  s'il  en  a  été  autrement 
depuis  au  Théâtre-Lyrique  ;  je  me  permets  d'en  douter.  Le  libretto  de 
Freischûlz,  contre  l'ordinaire,  admir.ilileinent  conçu  et  écrit  d'un  bout 
à  l'autre,  no  peut,  selon  moi,  être  traduit  <'l  Iran^jiorlé  sur  la  sr.  ne  fran- 
çaise, sans  perdre  ron<idéral)'ein-Mil  de  son  caracti-re  el  ^riiis  d 'venir  par 
places  presque  puéril.  Et,  quoi  qu  on  fasse,  I  cirel  de  la  muïique  en  est 
atteint  par  coatre-coop. 


188 


REVUE  D'AIi8&0B 


Ibnte  de9  balles.  <  Qaelle  jolie  chose  que  cette  symphonie 
pastorale*!  ce  chant d*oiseau  après  Forage I> dirait  une  dame 
sortant  d*un  concert  dn  Conservatoire  de  Paris.  <  Bah!  ce 
n*est  plus  de  la  mosique,  cela  !  »  lui  fut-il  répondu,  d*uae 
▼oixqui  n'admettait  point  la  réplique.  La  dame,  après  tout, 
ne  disait  qu'une  sottise,  en  oubliant  la  place  du  chant  d'oi- 
scaii.  qu'elle  admirait;  monsieur  son  mari,  au  contraire,  qui 
évidemment  avait  été  renseigné  à  l  avance  par  un  savant 
connaisseur,  appliquait,  à  tort  et  à  travers,  à  cette  admirable 
œuvre  tout  entière,  une  critique  qui  ne  porte  juste  que  sur 
huit  mesures  de  Vandante  (c'est,  soit  dit  eu  passant,  la  seule 
fois  que  Beethoven  se  soit  permis  de  l'harmonie  iraitalive 
réelle,  et  il  Ta  Tait  d'une  façon  charmante.  On  peut  pardonner 
à  Hercule  de  badiner  une  fois  en  sa  vie).  Je  dis  que  les  pires 
sourds  en  musique  sont  ceux  qui  ne  veulent  pas  entendre. 
Des  intelligences,  en  quelque  sorte  incultes  et  étrangères  à 
rétude  de  Tart,  pourvu  qu'on  ne  les  ait  pas  prévenues  et 
qu'elles  soient  douées  de  bonne  volonté,  finissent  toujours,  à 
ibroe  d'entendre  répéter  une  grande  œuvre,  par  en  saisir  au 
moins  certaines  parties  et  par  en  être  émues.  C'est  ce  qui 
explique  parfaitement  comment  tant  do  belles  créations  musi- 
cales, après  avoir  été  accueillies  avec  défaveur,  parfois  avec 
de  viles  huées,  ont  fini  par  exciter  Tenlhousiasme  d'un  même 
public.  Je  pourrais  citer  des  milliers  d'exemples  à  l'appui  de 
cette  assertion  ;  je  m'arrête  à  un  seul,  qui  est  tristement 
caractéristique,  et  qui  est  tout  récent  encore.  Ainsi  que 
presque  toutes  les  grandes  œuvres  de  Berlioz,  la  DammUon 
de  Fautt  a  été,  à  Torigine,  accueillie  avec  plus  que  de  la 

'  La  symplionîe  pastm  de  est  fortncj  dn  cinq  parties:  1"  Le  premier 
allegroy  sensations  ilniics  pn  arrivant  à  la  canipajrne;  2"  l'andanle, 
aoèiio  près  du  ruisseau;  a"  le  menuet,  réunion  joyeuse  de  villageois; 
4*  Vorag$:  5*  le  final,  chant  des  bergers.  Ces  trois  dernières  parties 
ne  peuvent  être  disjointes.  C'est  à  la  fin  de  la  seconde  que  Beethoven  a 
reproduit,  d'ailleurs  sous  la  forme  la  pins  mosieale,  le  chant  dn  rossi- 
gnol, de  la  caille  et  da  eoncon. 


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LA  MUSIQUE  ET  l'ac'OUSTIQUE 


«89 


déliTeur;  aujourd'hui,  celte  musique  transporte  la  foule,  qui 
uagnëre  était  disposée  à  la  siffler.  Telle  sera  indubitablement 
la  fin  glorieuse  de  Benvemsio  CelUiU,  des  Tro^MS. . tom- 
bés dès  les  premières  représentations,  sans  que  le  public  se 
soit  même  donné  lu  peine  d  écouter.  Telle  sera,  à  Paris  aussi, 
celle  de  Loheugrin,  des  Matins  chanteurs,  de  Tristan  et 
JseitU. .  .jdont  les  noms  seuls  excitent  aujourd'hui,  dans  cer- 
tains milieux,  des  grincements  de  dents  et  un  décliaîuemeot 
de  passions,  absolument  étrangers  à  la  question  d'art. 

La  remarque  précédente  est  rassurante  sans  doute,  au 
point  de  vue  de  l'art  en  général.  Elle  peut  suffire  à  certains 
philosophes,  qui  planent  au-dessus  de  ce  monde  (lorsque  leur 
existence  est  assurée  sur  terre):  <  Le  beau,  disent-ils,  peut 
être  Toilé  quelque  temps,  mais  il  est  impérissable  dans  son 
essence.  »  On  ne  saurait  exiger,  en  vérité,  qu'elle  inspire  la 
même  quiétude  à  Tartiste,  qui,  après  tout,  est  homme  aussi, 
et  qui  a  besoin  du  pain  quotidien  du  corps  et  de  l'esprit. 
L'assurance  d'être  admiré  d'îd  à  vingt  ans,  et  d'avoir  enfin 
droit  au  soleil,  quand  peut-être  il  aura  quitté  cette  terre,  ne 
saurait  lui  être  adjugée  comme  une  consolation  suffisante. 
Il  me  semble  que  celle  remarque  devrait  être  pour  tous  un 
grand  enseignement.  Si  elle  concerne  plus  particulièrement 
le  sort  des  grandes  œuvres  nmsicales,  et  par  contre-coup  celui 
des  compositeurs,  elle  n'en  est  pas  moins  générale;  elle  ne 
s'applique  que  trop  souvent  à  toutes  les  œuvres  de  l'intelli- 
gence  et  à  la  destinée  de  tous  les  hommes  qui  apportent  leur 
quote-part  au  développement  de  l'esprit  humain.  —  Foules 
toujours  prêtes  à  acclamer  les  génies  malfaisants  qui,  sous  le 
prétexte  d'une  vaine  gloire,  ne  vous  conduisent  qu'à  la 
destruction  et  à  la  ruine,  et  qui  perpétuent  parmi  vous  le  culte 
du  crime  heureux,  ô  vous  tous,  grands  et  petits,  respectez  et 
écoutez  ces  ftmes  d'élite  qui  descendent  parmi  vous  pour 
vous  relever  et  vous  consoler:  ce  que  vous  ne  savez  appré- 
cier aujourd'hui,  vous  l'admirerez  peut-être  demito.  Et,  si 


190 


BBVOB  D'ALSACE 


décidément  vous  ne  comprenez  point,  n'insnllez  point,  et  ayez 
un  peu  de  cœur.  Ne  refusez  pas  à  Tarlisle,  au  poète,  au 
savant,  qui  vous  apportent  le  I)eau,  le  grand  et  le  vrai,  sous 
toutes  leurs  formes,  ce  que  vous  prodiguez  à  ceux  qui  ne  vous 
apportent  que  le  mal  ! 

Nous  avons  dit  qu'il  est  impossible  d'expliquer  d'une 
manière  purement  physique  et  physiologique  la  seule  iropres- 
Bîon  que  produit  en  nous  un  accord  consonnaiit  ou  disso- 
nant; et  qu'à  eôlé  des  raisons  de  Tordre  physîque,nou8  sommes 
obligés  d*en  chercher  une  psychologique,  dépendant  de  la 
nalure  de  notre  être  animique.  Nous  arons  fait  un  grand 
pas  de  plus,  et  nous  avons  reconnu  que,  quelque  grande 
qu'on  fasse,  dans  Teffet  de  la  musique,  la  part  de  Taction 
physique  des  sons  sur  la  partie  sen.^ilive  de  noire  être,  il  n'en 
demeure  pas  moins  certain  (juc  ia  pensée  isiusicale.  dans 
rin]{)rcs!çinn  produite  sur  notre  être  inlellectuel,  dans  le  juge- 
ment f[ui>  nous  portons  sur  elle,  et  entia  dans  sa  création 
même,  n'a  plus  rien  de  commun  avec  nos  sens.  A  bien  plus 
forte  raison  arrivons-nous  à  une couclusioo  semblable,  lorsque 
nous  nous  demandons  d'où  dérive  le  caractère,  non  pas  seu- 
lement d'une  œuvre  dans  son  ensemble,  mais  même  celui 
d'une  simple  pbrase  isolée  ;  lorsque  nous  nous  demandons 
pourquoi  une  mélodie  nous  apparaît  comme  belle  ou  laide, 
noble  ou  triviale,  gaie  ou  triste,  lugubre  ou  sereine...  Ce 
serait  le  comble  de  Tabsurdité  que  d'en  chercher  la  raison 
dans  reffet  que  produit  sur  le  nerf  auditif  et  sur  le  cerveau 
la  succession  des  sons  dans  tel  ou  tel  ordre.  La  raison  psy- 
chologique reste  ici  seule  en  action;  elle  écbappe  à  une  expli- 
cation proprement  dite  et  repose  sur  la  loi  do  création  même 
de  notre  être  animique:  ou.  pour  parler  d'un^-»  façon  plus 
réservée,  c'est  du  moins  là  toni  ce  que  nous  pouvons  en  dire 
ici-bas.  En  ce  sens,  la  musique  rentre  dans  les  cotulilions  des 
autres  arts  et  de  la  poésie.  On  a  fuit  de  tout  temps  des  efforts 
incroyables  pour  expliquer  ce  qui  constitue  le  beau  et  le  laid, 


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LA.  MUîiigUK  ET  L  ACOLSTIQUE 


191 


pour  les  définir.  De  toat  temps  aussi,  on  aamit  reconnu  la 
tanité  de  ces  explications,  de  ces  définitions,  si  Ton  s'était 

donné  la  peine  de  comparer  les  résultats  auxquels  elles 
conduisent  avec  ceux  qu'on  tire  des  définitions  correctes  dea 
sciences,  par  exemple.  D'une  définition  exacte  de  l'ellipse,  le 
géomètre  tire  les  propriétés  et  la  construdion  de  cette  courbe. 
De  la  défini  tien  correcte  d'un  gaz.  le  physicien  tire,  dans  une 
certaine  mesure  au.ssi.  la  connaissance  des  propriétés  de  cette 
classe  (le  corps.  Des  définitions,  quelles  qu'elles  soient,  du 
beau,  jamais  artiste  ou  poète  n'a  tiré,  je  ne  dirai  pas  un  moyen 
de  créer  le  beau,  maïs  seulement  un  moyen  de  le  faire  recon- 
naître à  coup  sûr  par  quelqu'un  qui  ne  serait  pas  par  lui- 
même  doué  de  la  faculté  de  le  sentir.  Uart,  dans  sa  base 
même,  échappe  à  la  démonstration  scientifique;  et  cependant 
c'est  là  où  leur  scission  semble  le  plus  complète  que  la  parenté 
entre  Tart  et  la  science  est  la  plus  sublime;  tandis  que  Tar- 
liste  s'efforce  vers  Téternellement  beau,  le  savant  tend  vers 
rétemellemcnt  vrai.  Et  le  vrai  n'est  pas  plus  susceptible 
d'une  délinilion  alisolue  que  Iiî  beau;  on  lus  sent,  on  ne  les 
démontre  pas,  dans  leur  essence. 

Il  n'est  j)as  d'art  qui  ait  donné  lieu  à  plus  d'exagérations 
que  la  musique,  dans  les  opinions  qui  ont  été  émises  sur 
l'étendue  de  son  p  luvoir.  Tandis  que,  pour  les  uns,  elle  n'est 
pas  même  appelée  à  exprimer  des  idées,  d'autres  ont  été  jus- 
qu'à dire  qu'elle  est  un  art  essentiellement  descriptif.  11  suffit 
pourtant  de  se  laisser  guider  par  les  simples  règles  du  bon 
sens  pour  éviter  de  tels  égarements. 

La  musique  constitue  une  langue  à  part,  appelée  à  expri- 
mer des  idées  i  part  aussi.  Une  mélodie  quelconque,  une  suite 
d'accords  se  résolvant  liarmoniquement  les  uns  parles  autres 
sont  des  idées,  aussi  bien  que  nlmporte  quelle  manifestation 
de  ractivilé  de  notre  ftme.  Ces  idées  sont  seulement  d'une 
autre  espèce  que  celles  que  rendent,  en  général  du  moins,  nos 
langues  articulées.  La  musique,  certes,  ne  saurait  peindre  un 


192 


BEVUE  d'ALSAOB 


paysage,  une  scène  de  la  nature  morte  ou  TiTante,  ni  (Dieu 

en  soit  loué  !)  une  bataille.  Mais  elle  peut  éveUler  en  nous  les 
mômes  senlimiMiis,  les  mêmes  émotions  que  ces  scènes,  et  elle 
le  fait  d'une  manière  souvent  plus  intense,  toujours  plus 
pure  et  plus  élevée,  que  ne  le  fait  la  réalité,  bien  que,  par  la 
nature  mémo  de  ses  accents,  elle  laisse  dans  le  vague  et  l'in- 
défini les  formes  des  contours.  Le  vrai  caractère  de  la  musique, 
alors  cependant  dans  Tenfance  encore,  est  admirablement 
exprimé  dans  le  beau  mythe  que  nous  a  légué  le  plus  artiste 
des  peuples,  et  que  la  musique  de  Gliick  eût  dCt  noas  rendre 
sacré  (je  dis  :  sâ<  un  artiste  sans  conscience  et  sans 
scrupnle  n*a  point  craint  de  le  traîner  sur  la  scène  en  une 
triTîale  parodie).  Orptaée  ne  peiffnaU  pas  les  rochers,  les 
Ibièts,  les  fleures,  les  monstres  sauyages;  il  les  animait,  il 
les  ftisait  mouvoir,  il  les  détournait  de  leur  cours,  il  les 
adoucissait.  Il  n'a  point  décHi  Fenfer  et  ses  tourments;  il  en 
a  attendri  le  sombre  roi  et  a  suspendu  lescoups  des  Furies 
vengeresses.  Et,  lorsque  de  vraies  furies  eurent  mis  en  pièces 
le  corps  du  chantre  immortel, 

...Dans  les  antres  qui  gémirent, 

Le  lion  répaadit  des  pleurs. 

La  musique  peut  éyeiller  en  nous  des  émotions  du  même 
ordre  que  celles  qui  naissent  à  la  Tue  des  scènes  du  monde 
réel;  mais  elle  peut  bien  plus  encore,  elle  peut  traduire  des 
sentiments  qu'aucune  lanipie  articulée  ne  rendra  jamais,  et 

*  Mes  lecteurs,  j'en  suis  cerlain.  me  trouveront  bien  sévère;  plas  d'an 
sans  donta  a  ri  de  la  charge  musicale  de  II.  Offenbaeh.  Sous  forme  géné- 
rale, et  en  ce  qui  concerne  les  applaudissements  que  Ton  prodigue  à  de 

semblables  trivialités,  je  ne  puis  m'cmpêcher  de  dire  que,  quelque  sûrs 
que  nous  soyons  de  possodiT  ex(*l^siv^•ment  la  vérité,  il  ne  serait  que 
juste  de  respecter  du  moins  ce  qui  se  trouvait  parfois  de  beau  et  d  élevé 
dans  ces  mythes  païens,  que  nous  méprisons  tant  et  auxquels  pourtant 
nous  ayons  tant  emprunté.  Et,  quant  à  la  question  d'art,  il  me  semble 
que  ce  n'est  point  un  compositeur  (pii  devrait  do^ceadre  à  un  manque 
de  respect  aussi  indigor?  envers  l'une  des  plus  hautes  glorifications  de 
la  puissance  de  l'art  musical  ! 


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LA.  MUSIQUE  £T  L'AOOU»TIQUS 


193 


qui  répondent  aux  aspirations  les  plus  élevées  de  l'âme.  Les 
accents  dont  elle  dispose,  les  éniDliuiis  qu'elle  excite,  sont  au 
gré  de  l  artis'e  assez  (luissaiil  pour  créer  et  doué  d'assez  de 
bons  sens  pour  se  gouverner  lui-même. 

Dans  l'opéra  et  dans  l'oratorio,  dans  le  drame  théâtral, 
comme  dans  le  drame  sacré,  il  esi  évident  que  tout  l'ensemble 
de  la  parUUoD,  dans  ses  plus  minimes  détails,  doit  toujours 
répondre  aux  sentimeats  q\k'indiqiêeiU  les  paroles,  qu'il  s'a- 
gisse d'ailleurs  de»  parties  du  cliant  ou  de  eelles  que  rend 
l'orchestre  seul.  C'est,  quant  à  la  musique  de  théâtre,  ce  qui 
a  été  admirablement  compris  par  GIQck  d'abord,  et  puis  par 
d'autres  grands  artistes.  C'est  ce  qui  a  été,  par  Wagner,  porté 
aux  dernières  limites  du  p  ssible,  mais  nullement  i  l'exagé- 
ration, quoiqu'on  en  ail  dit.  Dans  ce  genrede  musique,  il  y  a 
une  connexion  intime  entre  les  sentiments  annoncés  par  la 
langue  arliculée  et  ceux  que  ia  langue  musicale  exprime  en 
les  anipliliant,  en  les  nortant  à  leur  plus  haut  degré  d'inten- 
sité. Ouand  une  œuvre  de  ce  genre  est  bien  conçue,  il  devient 
impossible  de  di.^joindre  la  musique  de  la  scène  dramatique 
quïndique  le  librelto,  fût-il  même  mal  fait,  et  nous  sommes 
souvent  éto?inés,  en  rentrant  en  nous»  do  Tintérôt  que  la 
beauté  musicale  nous  iîtit  porter  à  un  sujet  pauvrement  rendu 
par  le  librettiste.  A  plus  forte  raison  en  est-il  ainsi,  quand, 
par  hasard,  les  paroles  du  drame  sont  quelque  peu  dignes  de  la 
musique.  Pour  arriver  alors,  en  y  substituant  d'autres  paroles 
d'un  sens  différent,  à  quelque  chose  de  parfaitement  bouffon, 
il  n'est  pas  nécessaire  d'aller,  à  beaucoup  près,  aussi  loin  que 
ce  professeur  d'un  séminaire,  qui  avait  ajusté  les  paroles  d'un 
hymne  chrétien  sur  la  musique  du  chœur  des  chasseurs  de 
Freischiitz.  —  Maintes  fois  les  librelti.stes  cherchent,  dans  des 
drames  connus  depuis  Irmgtemps,  les  sujets  du  drame  musical 
que  le  compositeur  se  charge  de  développer.  L'épreuve  est 
ici  décisive  pour  larlisle  et  pour  la  musique,  parce  que  l'au- 
diteur est  forcé  de  comparer  ce  qui  avait  pour  lui  revêtu  jusque- 

Roavflto  Béri*  -  7*  Amièe. 


194 


BKVUB  d'ALSAGB 


là  la  forme  littéraire  avec  ce  qui  rerêt  maintenant  la  forme 
musicale.  Cette  espèce  de  parallèle  obligé  est  redoutable,  dans 
certains  cas,  et  cependant  la  musique  l*a  plus  d'une  fois  sup- 
porté victorieusement.  Dans  le  troisième  acte  d*OffM>f  le 
génie  de  Bossini  a  certainement  su  s'élever  à  la  hauteur  de 
celui  de  Shakespeare.  Et,  s*il  m*est  permis  de  citer  une  œuvre 
d'un  contemporain,  }e  dirai  que,  dans  Fimt,  en  dépit  de  la 
fiilblesBc  peu  justifiable  du  lihretto  S  M.  Gonnoda  su  maintes 

*  Je  ne  connais  que  l  œuvie  représentée  à  l'ancien  TliéàtrtvLyrique  de 
Paris,  et  je  ne  sais  sMI  a  ét&  foit  des  modifications  au  libretlo,  pour  la 
sc6ne  da  Gnnd-Opéra —  Lorsqu'on  librettiste  se  charge  d'arranger 

pour  un  compositeur  le  sujet  d'un  ilratne  devena  en  qaelqae  sorte  monu- 
mcnliil,  (t^l  que  Marluîtli,  Ilaiiilot,  (Uliello. . son  premier  souci  devrait 
être  de  respecler  la  coideur  générale  du  inodtMe,  de  ne  faire  que  le>i  cou- 
pnres  et  les  modifications  exigées  naturellement  pour  le  passage  du 
drame  parlé  au  drame  ehanté,  afin  de  permettre  an  eompositaor  d'éyaU- 
1er  dans  l'esprit  de  {  auditeur  des  sentiments  d'un  même  ordro  qoe  eeoz 
que  le  poMe  avait  d  «puis  longtemps  développés  dans  le  drame.  —  C'est 
pourtant  presque  toujours  le  contraire  que  font  la  plupart  des  arrangeurs, 
afin,  semblerait-il,  de  rendre  à  l'artiste  la  tichc  pins  difficile  et  plus 
ingrate.  —  Quelque  opinion  qu'on  puisse  avoir  du  I-alst  do  Goethe, 
tonjours  est-il  que  ce  drame,  d'une  structure  si  étrange,  restera  un  type 
auquel  personne  ne  touchera  plus.  C'était  le  cas  ou  jamais  d'observer 
la  règle  élémentaire  précédente.  —  Or,  il  semble  que  le  librettiste  ait 
pris  à  tâche  de  dépouiller  l  iniitutioa  française  de  toute  la  couleur  locale 
indostractible  que  Goethe  a  donnée  à  son  drame.  —  Je  ne  ferai  qu'une 
citation.  Au  début  du  drame,  au  moment  où  Faust  porte  à  ses  lèvres  la 
coupe  empoisonnée,  on  entend  dans  le  lointain  l'hymne  joyeux  da  jour 
de  Pâques  {Christ  est  ressuscité),  U  savant  blasé  et  dégoûté  de  toutes 
les  choses  de  cette  terre  est  ram  ^ié  m  ilgrc  lui  aux  fraîches  et  pieuses 
impressions  de  sa  jeunesse;  la  coupe  t'imli,;  do  ses  mains  :  «  Erde,  du 
hast  mich  vieder!  »  s'écrie-t-il,  en  sentant  une  larme  couler  le  long  de 
ses  joues.  Dans  cette  scène  profondément  émouvanle,  qui  sert  en  quel- 
que sorte  de  clef  de  voûte  au  drame,  et  dont  le  génie  de  II.  Gonnod 
eût  tiré  un  admirable  oITet,  le  librettiste  a  substitué  à  l'hymne  religieux 
un  chaut  de  campagnards  joyeux  partant  pour  la  moisson.  Quelque  gra- 
cieuse que  soit  la  musique  de  câ  chant,  il  est  certain  que  tout  le  sens 
profond  du  drame  est  ici  rompu.  —  Etait-il  vraiment  nécessaire  de  pous- 
ser le  contrains  jusqu'à  donner  à  un  jeune  premier,  atteint  d'un 
amour  malfieureux  pow  Marguerite^  le  nom  (Siebel)  de  l'un  des  quatre 
PHiuL-oauv  que  Faust,  h  sa  première  sortie  avec  Hépbistophelès»  troan 
^lUbieti  dans  la  cave  d'Aaerbach? 


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LA  HUraQDB  ET  L'aCODSTIQUE  |95 

fois  se  placer  à  côté  de  son  paissant  ri?al,  que  1* Allemagne 
appelle  TOLncpisir  de  la  poésie. 

Eo  dehon  de  Tonitorio  et  du  drame,  où  la  musique  est  con- 
damnée, sons  peine  d'être  mauvaise,  à  rendre  un  ordre  déter- 
miné de  sentiments,  de  passions,  il  est  des  cas  où,  quoique 
séparée  de  la  parole,  quoique  tout  instrumentale,  elle  traduit 
eneore  certains  sentiments  indiqués  à  l'avance  par  le  com- 
positeur. Il  me  sufllt,  comme  exemple,  de  rappeler  la  sym- 
phonie pastorale  tout  enlière.  Dan.s  un  genre  bien  ditïérent, 
je  citerai  le  majestueux  adagio  du  douzième  quatuor  de  Beet- 
hoven (chant  de  grâce  rendu  à  Dieu,  après  une  guérlson); 
il  répond  dans  toute  la  plénitude  de  la  Leauté  au  titre  donné 
parle  compositeur.  Jamais  hymne  exprimant  an  plus  pro- 
fond sentiment  de  reconnaissance  n'est  sorti,  en  langue  arli- 
colée,  de  la  bouche  â*un  croyant  I 

Bans  aucune  des  manifestations  dont  nous  venons  de  parler, 
la  musique  ne  décrit  ou  n'tmtïe;  mais  elle  fait  naître  en  nous 
et  nprime  pour  nous,  avec  des  accents  particuliers,  des 
sentiments,  des  émotions,  des  passions  d'une  espèce  donnée. 
Remarquons-le  tout  de  suite  formellement,  dans  t  us  ces  cas  où 
le  sens  est  spécifié  à  l'avance,  ce  n'est  point  Ja  musique  qui 
gagne  par  le  tableau,  par  la  scène,  par  les  sentiments  parti- 
cnllers  qu'elle  est  chargée  de  traduire:  c'est  tout  l'inverse 
qui  e^t  vrai;  c'est  la  musique  qui  embellit  ce  qu'elle  rend  et 
qui  le  transporte  parfois  entièrement  en  dehors  de  ce  monde. 
L'art  n'a  nul  besoin  de  ces  sortes  de  spécifications  pour 
rester  ce  qu'il  est.  Haydn,  Mozart,  Beethoven  et,  après  eux, 
d'autres  grands  artistes,  ont  écrit  on  grand  nombre  d'œurres, 
sans  aucune  indication  quelconque  d'un  snyet  particulier. 
Ces  œuvres,  ainsi  dénudées  en  apparence,  n'en  sont  pas  moins 
des  che&-d*œuTre.  Cette  remarque  m'amène  tout  naturelle- 
ment à  parler  d'une  tendance  étrange,  qui  prédomine  chez 
beaucoup  d'intelligences,  d'ailleurs  très  bien  douées.  Bien  des 
Pononnes ont  essayé  d'Auman^eo  quelque  sorte  les  grandes 


196 


BBVCB  D'ALSACS 


symphonies  de  Beethoven*  (entr'autres),  de  broder  sur  elles 
des  scènes  de  la  vie  privée  ou  publique.  Je  ne  veux,  à  aucun 
titre,  peiner  les  inventeurs  de  ces  sortes  de  romans  musi- 
eaux  ;  je  les  engage  seulement  à  les  garder  discrètement  pour 

eux;  car,  ce  qui  en  ce  genre  plaît  à  l'un  semble  fort  souvent 
puéril  ou  faux  à  un  autre.  Les  symphonies  en  «i-bémol,  en 
/«/-bémol,  eu /a. . .,  n'ont  assurément  rien  à  gagner  à  de 
pareilles  fanlai^ies.  Ber  lliuven  a  dit,  en  parlant  des  premières 
mesures  de  sa  symphofiie  eu  ///-mineur  :  «  C'est  ainsi  que  le 
destin  frappe  à  nos  portes.  »  U  caractérisait  ainsi  la  couleur 
du  premier  aiUgro.  Gardona-nous  d'njouler  quoi  que  ce  soit. 
Ce  formidable  morceau  terrasse  et  jette  Tauditeur  dans  une 
telle  angoisse  qu'on  se  hftte  d'oublier  les  plus  bdks  scènes 
qu'on  aurait  la  velléité  de  greffer  sur  lui. 

Le  beau,  avons-nous  dit,  ne  peut  pas  plus  être  démontré 
en  musique  que  dans  les  autres  arts  et  qu*en  poésie.  Hais 
alors,  objectera-t-on,  à  quels  caractères  le  reconnaît-on  t  La 
beauté  en  littérature,  en  pointure,  en  sculpture,  a  des  siècles 
d'épreuve;  à  défaut  de  démonstration,  elle  a  pour  mesure  la 
comparaison  des  eeuvres  de  même  espèce  entre  elles.  La 
musique,  au  contraire,  est  lui  art  relativement  moderne,  au- 
quel lait,  par  suite,  défaut  la  sanction  des  ftges.  11  est  d  ailleurs, 

*  Le  Idctenr  qui,  plus  loin,  m'entendra  bl&mer  rexclosÎTione,  m'ao- 

cii<f^r,T  peut-être  d'y  l'tiv  tombé  tout  le  preniîer,  parce  que  le  nom  de 
tJ" 'llinven  revient  si  snnvont  s«iii>  ma  plume.  Il  m  eùt  été  bien  facile  de 
inultiplior  les  citations  do  uums  Uarlislis,  et  défaire  preuve  derudition 
(à  peu  de  frais  en  vérité).  Dans  nn  travail  aussi  condensé  et  pourtant 
aussi  étendu  que  celui-ci,  j'ai  cru,  au  contraire,  devoir  rester  très  sobre 
en  ce  sens  et  iio  faire  que  des  citations  où  mon  opinion  personnelle  flit 
celle  tic  tout  le  ni«)iido.  Si  javais  .-n  à  parler  de  drame,  c'est  Shakespeare 
que  j'aurais  surtout  nommé;  ayant  à  donner  des  exemples  inattaquaMi's 
en  matière  de  musique,  j  ui  cité  de  préférence  les  dernières  œuvres  d  un 
des  génies  les  plus  incontestablement  complets  dont  l'art  paisse  se  glo- 
rifier. Si  cette  dernière  assertion  devait  faroavw  on  contradictrar,  je 
déclare  très  carrément  que  je  passerais  outre»  dussé-je,  à  mon  tour,  être 
accusé  de  cet  orgueil*  dont  on  jette  si  sonvent  le  reproche  &  la  tête  des 
Mvants. 


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LA  MUSIQUE  ET  L'AGODSTIQUB 


197 


on  le  sait,  bon  nombre  de  personnes  qui  pensent  que  le  lieaii 
elle  laid,  le  bien  et  le  mal,  sont  des  diises  tout  de  conven- 
tion et  d'éducation;  qui  pensent  que  ce  qui  est  hideux  ou 
criminel  à  nos  yeux  peut  être  magniûquc  ou  juste  à  ceux 
d'un  Chinois,  d*un  Japonais  ;  qui  admettent  qu'il  n'y  a  de  mfti 
que  ce  qui  est  préva  par  le  Gode.  Le  lecteur,  sans  doute,  ne 
8*attend  pas  à  ce  que  je  porte  la  discussioa  sur  ce  terrain-là. 
Si  nous  Dous  laissons  ici  encore  guider  par  la  vraie  méthode 
scientifique,  c^est-à-dire  par  les  simples  lois  du  lion  sens  et 
par  l*ob8erTation  impartiale  des  faits,  comme  je  me  suis  efforcé 
de  le  fiJre  arec  mes  lecteurs  dans  tout  le  cours  de  cet  exposé, 
nous  arriTons  à  des  conclusions  beaucoup  plus  rassurantes, 
quant  à  la  possibUité  d*un  jugement  correct  en  matière  de 
mniiqoe. 

Nous  ne  naissons  certainement  pas  juges  de  toute  pii'cc, 
en  esthétique,  qu'il  s'agisse  de  musique,  de  peinture,  de  poé- 
sie, peu  importe.  Je  connais,  je  l'avoue,  des  personnes  à 
jamais  incapables  de  saisir  un  rliylhme  un  peu  plus  compli- 
qué que  celui  de  la  valse  ou  de  la  polka,  ou  de  distinguer  un 
accord  fiiux  d'un  accord  juste;  mais  c'est  heureusement  là 
Texception,  et  hi  plupart  d'entre  nous  naissent  avec  la  faculté, 
du  mdns  en  germe,  de  saisir  la  phrase  musicale  comme  la 
phrase  articulée.  Chez  la  plupart  aussi,  ce  germe,  ainsi  que 
celui  de  toutes  nos  autres  focultés»  peut  ôhre  développé,  à  un 
plus  ou  mmns  haut  degré,  par  une  éducation  convenable.  Ici, 
toutefois  encore,  une  distinction  profonde  est  à  faire.  Dans  la 
poésie,  dans  Part,  dans  la  science,  autre  chose  est  de  savoir 
créer,  on  d'être  seulement  apte  à  comprendre  ce  que  d'autres 
ont  créé,  loutre  ces  deux  genres  d'aptitudes  s'élève  un  mur 
d'airain,  qu'aucune  éducation,  auiumc  volonté  ne  saurait 
renverser.  Si  je  m'arrête  un  instant  sur  celle  distinction, 
évidente  à  mon  avis  par  elle-même,  c'est  parce  que  j'ai 
entendu  des  hommes  intelligents  la  nier  forraelleincnt,  et  aller 
jusqu'à  dire  qu'il  suffît  d'une  volonté  énergique  pour  deve- 


196 


BBVtPB  D*AL8AQB 


nir,  ad  libitum,  un  Miiiiel-Auge,  un  Shakespeare,  un  New- 
ton, un  Mozart.  Si  le  nombre  de  ocs  fnrorisés  dfi  la  divinité 
n'est  pas  plus  grand,  c'est,  dit-on,  parce  que  chacun  ne  recon- 
naît pas  clairement  leur  utilité  et,  par  suite,  n'applique  pas 
ses  forces  à  devenir  digoe  de  se  faire  inscrire  parmi  eux. 
Une  pareille  assertion  se  réfute  à  la  rigueur  d'elle-même 
pour  chacun,  à  la  seule  condiUoa  qu*en  rentrant  en  lui-même, 
il  sache  se  Jauger  avec  un  peu  de  bon  sens  et  de  modestie, 
La  soutenir  avec  trop  dinsislance,  c'est  simplement  prouver 
qu'on  n'appartient  pas  même  à  la  catégorie  de  ceux  qui  sont 
aptes  à  comprendre.  Un  argument,  cependant.  H  n'a  jamais 
manqué  d'hommes  qui  se  croient  appelés  à  gouverner  leurs 
semblables,  qui  ont  appliqué  toutes  les  forces  de  leur  volonté 
à  atteindre  ce  but;  il  n'en  est  que  trop  qui  ont  réussi,  à  l  aide 
d'heureux  coups  de  force,  à  se  faire  acclamer  p  )ur  un  moment 
comme  les  sauveurs  des  litals.  Ambition,  égoïsme,  intérêt 
personnel  bien  compris,  tout  conspirait  à  les  rendre,  sinon 
par  amour  pour  le  prochain,  du  moins  par  amour  pour  eux- 
mêmes,  inventifs  en  a'éationa  utiles  et  durables.  Combien  y 
en  a-t-il  cependant  qui  aient  su  créer  et  laisser  derrière  eux 
autre  cbose  que  des  ruines  et  la  tradition  du  mal  qa'ils  ont 
engendré  ?  —  Mais  quittons  le  domaine  de  ces  tristes  réalités  ; 
reveuons  à  ceux  qui,  modestement,  cherchent  à  comprendre 
le  beau,  et  qui,  humblement,  remercient  le  ciel  de  les  en  avoir 
rendus  capables.  Le  germe  de  celte  faculté  est,  disons-nous, 
plus  commun  qu'on  ne  le  dit  en  général,  et,  pour  l'éveiller^ 
même  chez  l'enfant,  il  ne  faut  souvent  qu'une  étincelle.  Il  me 
souvient  d'avoir,  à  l'âge  de  di.\  ou  onze  ans,  assisté  à  la  pre- 
mière représentation  {icut-êlre  de  Freischulz  eu  France'; 

'  (18-3Ô  on  IH2'\.  !  C'est,  si  je  ne  nie  (rompe,  an  on  doux  :\m  apn"'? 
seulement  que  l  œuvre  du  Wehcr,  estropiée  par  Caslil-Blaze,  est  apparue 
sar  la  scène  à  Paris.  Un  témoin  in  li;;ii«;,  dont  je  ne,  puis  mellre  la  véra- 
cilé.en  doate,  m'a  raconté,  à  cette  opotjuo  déjà,  qu'entr'antres  innova- 
tions et  corrections,  le  cliarmunt  chœur  déjeunes  filles  du  dernier  aete 
élut  chanté  par  une  enfant  d'une  quinzaine  d'années!  C'est  ici  qu'il  est 
permis  de  dire,  sans  réticence  :  Ab  utio  disee  omnes/ 


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LA  MUnQUB  ET  L'ACOUBTIQUB 


199 


c'était  sur  un  bien  modeste  petit  théâtre  d'une  petite  ville  de 
province.  Acteurs  et  orchestre,  sans  doute,  laissaient  à  dési- 
rer; mais  chacun  était  de  bonne  volonté  et  consciencieux, 
ee  qui  rachète  maintes  défectuosités.  L'enfant.  certe8,eùt  été 
excusable  de  prêter  le  plus  d'attention  à  la  scène,  an  drame, 
si  émonvants  pour  loi.  C'est  pourtant  la  musique  qui  prit  le 
dessus  sur  toutes  les  distractions  accessoires,  et  qui,  dès 
rouvertors,  eieita  en  lui  un  enthousiasme  inexprimable.  J*ai 
coiiserTé,  je  l'avoue,  m  profond  sentiment  de  gratitude  pour 
la  mémoire  du  grand  artiste,  qui  avait  su  ravir  ainsi  Tftme 
d*un  enfant,  et  dans  ce  monde,  encore  si  nenf  pour  lui,  lui 
révéler  déjà  l'existence  d'un  autre  monde  bien  supérieur. 
Après  un  demi-siècle  d'intervalle,  ce  souvenir  est  demeuré 
l'un  des  plus  vifs  et  des  plus  bienfaisants  de  mon  entrée 
dans  le  monde  de  la  pensée.  —  .le  suis  loin,  sans  doute,  de 
soutenir  que  l'on  puisse  dire  :  Ab  um  disce  onuir^s:  mais  ce 
qui  est  vrai  de  l'un  l'est  du  moins  d'un  plus  grand  nombre 
qu'on  ne  l'admet  en  général.  Paris  a  été,  daos  ces  dernières 
années,  témoin  d'une  expérience  décisive  en  ce  sens.  De 
modestes  hommes  du  peuple  apportent  en  foule  leur  pécule 
pour  assister  aux  concerts  de  H,  Pasdeloup,  éconter  dans  un 
silence  religieux  et  applaudir  des  oeuvres  réputées  difficiles 
entre  toutes.  Ge  même  publie,  je  le  sais,  donnera  son  appro- 
bation è  des  œuvres  bien  inférieures;  on  lui  fora  accepter 
votontierede  la  corUrebande  musicale;  mais  ceci  ne  change 
rien  à  la  question.  Ici  doit  intervenir  seulement  le  travail  de 
l'éducation,  aussi  indispensable  en  musique  qu'eu  toute  autre 
chose. 

On  commence  à  admettre  assez  généralement  aujourd'hui 
que  I  clude  de  la  musique,  comme  celle  du  dessin,  etc.,  doit 
faire  partie  de  toute  éducation  un  peu  complète.  L'étude  et 
la  culture  de  la  musique  d'ensemble  surtout  sont  utiles,  dit- 
on,  parce  qu'elles  détournent  la  jeunesse  de  distractions  plus 
frivoles  ou  pernicieuses.  J'applaudis  de  grand  cœur  à  ce  point 


200 


BBVUB  D'ALSAΠ


de  7ue  utilitaire.  L*art  se  trouve  mis  aiosi  immédiatement 
soos  la  protection  des  défenseurs  de  Tordre  moral,  de  la  reli- 
gion, de  la  famille,  de  la  propriété,  de  tout  ce  qu*on  défend  à 
outrance. . .  quand  on  le  possède.  Gela  est  fort  heureux!  Mais 
j'estime  que  d^autres  raisons  encore  militent  en  faveur  de 
Tart.  —  .Te  commonce  tout  d*abord  par  renverser  Tassertion, 
en  t-e  qui  i  iicernc  rédiK-ation  en  général,  on  du  moins  par 
Vc'gnfisrr  en  quelque  sorti\  Si  l'étude  de  la  musique  doit  faire 
partie  de  toute  éilucaliùii  un  peu  élevée,  l'inverse  est  tout 
aussi  vrai,  e'est-à-dire  qu'il  est  impossii)ie  d'être  artiste  ou 
seulement  appréciateur  compétent  des  arts  en  général,  si  l'on 
ne  possède  pas  en  outre  uu  ensemble  de  connaissances  qui, 
au  premier  abord,  peuvent  y  sembler  tout  à  Hiit  ét^ang^res. 
—  L'un  de  nos  critiques  littéraires  les  plus  éminents  disait 
qoll  n*est  plus  permis  aujourd'hui  à  un  poète  d*ignorer  les 
éléments  tout  au  moins  de  nos  sciences  naturelles  et  exactes; 
d'ignorer  les  grandes  lois  que  ces  sciences  ont  proclamées, 
et  les  interprétations  qu'elles  ont  données  des  migestoeux 
'  phénomènes  de  la  nature;  en  analysant  une  des  poésies  '  de 
Lamartine,  dont  il  fait  ressortir  les  beautés,  Gustave  Planche 
critique  l'une  des  stroplios.  et  dit  avec  juslessc  qu'il  est  des 
hécues  astronomiques  qui  sont  devenues  impardonnables 
chez  un  grand  poète.  —  (le  tjue  F'ianclie  dit  des  poètes  î<"a- 
dresse  identi(|uemenl.  non  seulement  et  surtout  aux  artistes, 
miis  même  aux  personnes  qui  veulent  sérieusement  sentir, 
comprendre  et  juger  les  œuvres  d  art  de  n'importe  quelle 
espèce . 

£n  ce  qui  concerne  la  partie  technique  de  chaque  arl,  Tas- 
serlion  précédente  est  évidente  de  vérité.  Le  sculpteur,  le 
peintre,  le  compositeur,  qui  ne  possède  pas  les  notions  fonda- 
mentales de  la  géométrie  dans  Tespace,  de  Toptique,  de  Ta- 
coustique,  est  privé  d'un  puissant  appui,  dans  la  partie  toute 
matérielle  de  son  art.  C'est,  quant  à  la  musique,  ce  que  la  pre- 

*  Les  FaoUch. 


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LA  MUSIQUE  BT  L'ACOUSTIQUE 


miôre  moitié  de  ce  travail  aura  mis  hors  de  doute,  je  l'espère. 
La  routine  sans  d  nite  peut  suppléer  à  l'étude  scientilique; 
mais  n'est-il  point  triste  de  voir  un  homme  intelligent  se  con- 
damner h  ne  savoir  qu'au  bout  de  dix  ans  de  travail  ce  que 
la  science  loi  appreodrait  en  six  mois?  Soit,  dira-l-on;  yoilà 
pourJa  partie  technique  et  matérielle;  mais  qoimporte  la 
acience  à  Tait  proprement  dit?  Un  compositeur  risqaerait-il 
par  hasard  de  commettre  des  èémus  asironmiqtiet,  comme 
celles  que  Planche  reprochait  à  Lamartine? Ne  riez  pas  trop, 
lecteurs.  Un  compositeur  justement  estimé,  Romberg,  ayant, 
dans  un  oratorio,  à  peindre  rbarroonie  des  eieux,  a  cherché 
à  rendre  le  roulement  des  sphères  célestes  par  celui  de  six 
paires  de  timbales.  Je  ne  sais  quelle  est  la  valeur  de  cette 
œuvre  en  elle-même:  mais  ce  qui  est  certain,  c'est  qu'il  y  a 
ici  un  lapsus  monstrueux,  comme  art  et  comme  science.  Ce 
qu'il  y  a  précisément  de  sublime  dans  le  spectacle  des  cieux. 
c'est  le  calme  et  le  silence  absolu,  dans  lesquels  s'accomplis- 
sent les  phénomènes  célestes.  Si  le  compositeur  veut  faire  sentir 
cesublime,  il  faut  qu'à  l'aide  des  sons  m^me,  il  sache  éveiller 
en  uous  le  sentiment  du  silence  profond  et  majestueux.  Pour 
le  phyMicien,  l'idée  seule  du  roukmmt  de»  sphères  implique 
une  résistance,  un  travail,  une  usure,  une  fn.  Le  bruit,  s'il 
était  possible  dans  les  deux,  annoncerait  une  ruine  prochaine . 
C'est  ridée  précisément  contraire  qui  s'empare  de  nous,  quand 
l'cBil  éperdu  plonge  dans  l'espace  céleste. 

Artistes,  croyez-en  le  physicien  ;  ne  craiguez  point  d'étu- 
dier les  éléments  dos  sciences  voisines  de  votre  art.  Vous 
vous  convaincrez  bientôt  que,  dans  la  nature,  il  n'y  a  d'aride 
que  notre  manière  de  la  considérer.  Lisez  V Exposition  du 
sf/sfème  du  monde  de  Laplace,  k  Ciel  de  ('tnillemin,  rUnicers 
del*oucliet,et  tant  d'autres  ouvrages,  où  des  liomme^  dévoués 
ont  mis  les  mystères  de  l'infinimcnt  petit  et  de  l'infiniment 
grand  à  la  portée  de  quiconque  est  de  bonne  volonté,  ont  mis 
la  mofesié  de  la  nature  à  la  portée  de  tous;  élevez  parfois  vos 


RBTDE  O'ALSAXJE 


regards  vers  ces  fleurs  immortelles  des  cieux,  vers  ces  étoiles 
dont  la  science  nous  révèle  les  lois  :  voire  art  n'y  perdra 
point  £t  8i  une  foule  injuste  siffU  une  œuvre  où  vous  aurez 
mis  une  parcelle  de  votre  âme,  regardez  encore  une  fois  le 
ciel;  voaB  y  trouverez  la  force  de  persévérer  dans  le  beau. 

A  cette  foule  qui  n*e8t  point  appelée  à  créer  dans  Fart,  au 
public,  simple  auditeur  bénévole  on  malévole  en  musique, 
par  exemple,  une  condition  sHmpose  absolument,  dès  qu*il  Teut 
exercer  son  droit  de  critique  :  c*est  Téquité.  Elle  slmpose  à 
quiconque  Teut  mériter  le  nom  d*bonnête  bomme,  et  pour- 
tant, hélas!  c'est  celle  dont  on  s'inquiète  le  moins.  lie  beau 
n'a  pas  seulement  une  forme,  il  en  revêt  mille.  Si  nous  ne 
nous  habituons  de  bonne  heure  à  l'accepter  sous  des  faces 
diverses,  nous  en  devenons  bientôt  incapables;  nous  tombons 
dans  l'exclusivisme,  dans  [  engouement  et,  par  un  contre-coup 
presque  forcé,  dans  l'inconstance.  Noua  commençons  par  nous 
éprendre  du  maître  dont  la  manière  répond  le  mieux  à  notre 
caractère,  ce  qui  est  d'ailleurs  naturel  et  presque  légitime; 
mais,  au  lieu  de  suivre  ce  maître  dans  les  transformations, 
dans  les  progrès,  qui  caractérisent  le  géide,  nous  voulons  lui 
imposer  fort  immodestement  notre  propre  petite  manière. 
Nous  en  venons  à  condamner  Beethoven  avec  Beethoven, 
Rossini  avec  Rossinî,  Verdi  avec  Verdi.  Et  comme,  en  défi- 
nitive, Fesprit  le  plus  retardataire,  le  plus  immobile,  ne  peut 
pas  tourner  toujours  dans  le  même  cercle,  nous  finissons  par 
nous  lasser  et  nous  rejetons  un  beau  jour  ce  que,  la  veille 
encore,  nous  déclarions  seul  admirable.  A  force  d'errer  ainsi, 
nous  en  arrivons  à  ne  plus  savoir  sentir  par  nous-mêmes,  à 
ne  plus  savoir  juger  que  sur  le  dire  d'autrui;  nous  condam- 
nons ou  nous  acclamons  une  œuvre  d'après  le  nom  qui  se 
trouve  au  bas.  Dans  la  collection  des  Ueder  de  Schubert  s'en 
trouve  un,  qui  est  beau  entre  tons  {ÂàMul),  Un  jour,  on 
apprend  que  ce  morceau  a  été  composé  par  un  jeune  étudiant 
inconnu.  A  partir  de  ce  moment,  il  avait  perdu  toute  valeur 


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LA  MUSIQUE  ET  L'ACOUSTIQUE 


aux  yenz  de  certains  juges.  H  est  évident  qu'une  fois  parrenu 

à  cet  extrême,  on  est  devenu  incurable. 

Les  légendes  d'Orphée,  d'Amphion,  nous  montrent  ce  que 
les  nations  civilisées  de  l'antiquité  pensaient  de  la  puissance 
de  la  musique.  iNouh  n'avons  aucune  notion  exacte  de  ce 
qu'était  cet  art  chez  les  Grc(s.  par  exemple.  Les  accords, 
l'harmonie  en  étaient  exchis  ;  les  chœurs  étaient  chantés  à 
l'unisson  ou  à  l'octave;  d'après  les  descriptions  qui  nous 
restent  des  instruments,  la  musique  d'orchestre  ne  pouvait 
pis  même  exister.  Et  cependant  Tart  était  tena  hautement  en 
honneur  et  respecté.  Il  est  permis  de  croire  qne  la  musique 
grecque  était  surtout  le  récit  chanté,  tel  qne,  sous  Tune  de 
sesfiMes  au  moins,  Richard  Wagner  Ta  introduit  dans  le  drame 
musical.  Une  partie  de  sa  puissance  pouvait,  ee  semble,  repo» 
ser  dès  lors  sur  la  mélodie  inhérente  à  la  langue  grecque 
(de  même  qu'à  la  langue  latine),  mélodie  dont  nos  langues 
modernes  n'ont  conservé  aucune  trace  et  dont  nous  ne  pou- 
vons pas  nous  faire  \i\  plus  légère  idée.  Que  dirions-nous  si, 
à  l'instar  d'un  des  Gracques,  il  prenait  fantaisie  à  un  député 
de  nos  parlements  de  se  faire  accompagner  à  la  tribune  par 
une  petite  flûte,  pour  soutenir  sa  voix  ?  Il  est  plus  que  douteux 
que  ce  soit  à  ce  genre  d'instruments  ^ que  recourraient  nos 
élus,  s'ils  avaient  a  chercher  un  point  d'appui  dans  les  élé- 
ments de  nos  orchestres.  —  Platon  craignait  pour  les  mœurs 
publiques  et  pour  la  stabilité  de  la  république,  parce  qu*un 
innovateur  audacieux  proposait  d*ijouter  une  corde  de  plus  à 
la  lyre.  Nous  sommes  loin  aujoucd*hui  d*étre  dotés  de  cette 
sensibilité  artistique  presque  maladive,  et  ce  n'est  assurément 
point  lintroduction  d*un  accord,  si  dissonant  qu'il  lût»  qui 
pourrait  compromettre  le  sort  des  Etats.  Si  nos  jeunes  répu- 
bliques modernes  n*avaienl  pus,  dans  les  privilégiés  du  passé, 
des  ennemis  plus  dangereux  que  dans  les  savants  qui  tentent 
de  réformer  la  ij;amme,  h:ur  sort  serait  parfaitement  assuré 
dans  l'avenir.  —  L'art  n'a  poiut  décliné,  soyous-eu  sûrs.  La 


BBVUS  D'ALSAΠ


muse  céleste  donne  à  pleines  mains  à  qui  en  est  digne;  mais 
ne  lai  demandons  pas  l'impossible  On  a  souvent  parlé  de  la 
poiseanoe  de  moralisalion  que  la  bonne  musîqae  pourrait 
aTdr  sar  les  masses,  et  de  l  utilité  qu'il  y  a.  par  suite,  d*ea 
répandre  renseignement.  Nal  doute  que  le  eommeree  journa- 
lier avec  le  beau,  sous  quelque  fbrme  qu'il  se  manireste,  ne 
finisse  par  élever  et  développer  Tâme;  le  eulte  du  beau  est 
rune  des  mille  formes  de  la  prière  à  laquelle  les  dévots  n*en 
veulent  reconnaître  qu^une  seule*  Nul  doute  même  que  Tes- 
pèee  des  œuvres  littéraires  et  artistiques  qui,  à  une  époque 
donnée,  sont  en  faveur  chez  le  public,  ne  serve  de  mesure, 
de  thermomètre  à  l'état  moral  de  la  nation  à  cette  époque. 
Mais,  encore  une  fais,  ne  demandons  pas  trop  à  la  muse,  et, 
en  fait  de  moralisation  du  peuple,  comptons  surtout  sur  l'effet 
de  l'exemple  donné  par  les  castes  qui  OLt  la  prétention  da 
diriger  les  masses;  soyons  quelque  peu  exigeants  de  ce 
côté. 

Dans  le  même  but  de  moralisation,  compris  comme  11  peut 
rétro  par  certaines  gens,  on  a  classé  la  musique  en  profane  et 
en  sacrée;  et  il  va  sans  dire  que  c'est  celte  dernière  qui,  seule, 
doit  être  ensdgnée,  Tautre  n'étant  propre  qu'à  corrompre  le 
sens  moral 

Il  y  a  id  une  large  restriction  à  faire  dans  remploi  de 
l'épilhète  de  profane,  en  tant  qu'on  veut  lui  faire  signifier, 
non  seulement  ce  qui  n'est  pas  diri<;é  immédiatement  vers  la 
pensée  religieuse,  mais  ce  qui  éloigne  même  de  cette  pensée. 
Il  n'est,  iiélas!  pas  conlestahle  un  seul  instant  qu'il  se 
trouve  des  artistes  qui,  oublieux  du  respect  qu'ils  doivent  à 
l'art  et  à  eux-mêmes,  et  ne  cherchant  qu'une  prompte  vogue, 
nlmporte  à  quel  prix,  mettent  la  muse  an  service  de  n'im- 
porte quel  sujet,  et  emploient  un  talent  souvent  incontestable 
à  exprimer  des  sentiments  vils  et  bas,  à  éveiller  chez  l'andi- 
teur  des  pensées  honteuses,  à  rabaisser  encore  davantage  ce 
que  la  musique  aurait  en  la  puissance  d'ennoblir.  ~  Si  ce 


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LA.  mniQXJK  ST  l'aooustiqub 


906 


n'était  souiller  aa  plume  que  de  faire  des  citations,  il  serait 
facile  de  trourer,  dans  le  coars  des  Tiogl-diiq  années  qui 
Tiennent  de  8*écouler,  de  nombreuses  prodactions  de  cet  ordre. 
De  telles  œuvres,  littéraires  on  musicales,  sont  plus  que 
profanes;  elles  sont  malsaines,  non  seulement  pour  lepaoTie 
peuple,  mais  plus  encore  pour  les  classes  dites  lettrées.  De 
telles  œnvres,  disons-le  bien  baut,  peuvent  être  spirituelles, 
entraînantes  de  verve,  originales  même  :  elles  ne  sauraient 
être  bclICvS,  dans  la  vraie  acception  de  ce  terme.  Ce  qui  est 
réellement  beau  ne  peut  être  profane;  les  sujets  d'Orpliée, 
d'Alc-este,  d'Iphigénie,  et  en  partie  d'Armide,  sont  païens, 
comme  il  est  reçu  de  dire,  et  cependant  l'admirable  musique 
de  Glttck  ne  fera  naître  dans  aucune  &me  autre  chose  que 
des  sentiments  nobles  et  élevés;  ce  serait  un  contre-sens  inju- 
rieux que  de  lut  appliquer  Tépithète  de  profane  1  Sans  doute 
la  musique,  lorsqu'elle  ajoute  ses  accents  à  la  prière,  est  plus 
puissante  qu'aucune  langue  articulée  à  transporter  Tftme  du 
fidèle  vers  son  Créateur;  c'est  ce  que  l'intuition  d'un  poète  a 
admirablement  exprimé  : 

La  piété  emprunte  à  la  musique  ses  sons 
Et  la  musique  prend  les  ailes  de  la  piclc; 
Et,  ainsi  que  Toiscau  qui  salue  le  soleil, 
Elles  selancent  vers  le  ciel,  et  en  selevant  elles 

chantent.* 

*  When  autumn  nights  were  long  and  drear, 

And  forest  waUcs  were  dark  and  dim^ 
How  sweetiy  on  thc  pilgrim's  car 
Was  wont  to  steal  thc  hermît's  hymnl 

Dévotion  "borrows  music's  tone 
And  Music  took  dcvotion's  wîng; 
And,  like  thc  bird  that  hails  thc  sun, 
Thcy  bour  to  heaven,  and  soaring  sing! 

W.  Scott  .T  mis  ces  deux  clKirrn.inti^s  strophes  coinni''  épigraplie  au 
chapitre  XX  d  ivanlioc.  Malgré  1  origine  «j[u  il  leur  donne,  il  est  permis 
de  croire  qu'elles  sont  de  lui-uiêine. 


BEVUE  D' ALSACE 


lidB,  quelque  Bentiment  qae  traduise  le  yrai  beau,  il  ne 
peut  qu'élever  notre  âme. 

Nous  ayons  dit  que  l'existence  môme  de  la  musique  implique 
en  nous  celle  d'un  principe  inimulériel  auquel  est  dévolue  la 
fonction  de  la  pensée.  Je  reviens  sur  ce  sujet  à  un  autre  point 
de  vue,  plus  élevé  encore,  s'il  est  possible,  qui  ne  semblera 
digressif  à  aucun  de  mes  lecteurs;  je  le  fais  en  toute  sincérité, 
dussé-je  par  hasard,  une  fois  en  ma  vie,  sembler  d'accord  avec  les 
défenseurs  de  l'ordre  morsl,  et  risquer  d*aTQir  leur  approbation. 

Plus  que  les  autres  arts,  plus  que  la  poésie  elle-môme,  la 
musique  a  le  pouvoir  de  nous  détacher  des  choses  dlci-bas, 
de  nous  transporter  dans  un  autre  monde,  dans  des  régions 
éthéréesoù  la  vertu  se  divinise,  où  le  crime  même,  sans  cesser 
d'être  crime,  perd  du  moins  son  aspect  trivial.  Mais,  est- ce 
au  pays  des  rêves  seulement,  n'est-ce  qu'à  des  songes,  si 
beaux  qu'ils  puissent  être  d'ailleurs,  qu'aboutit  l'art  divin? 

Le  songe,  croyons-le  bien,  répond  id  à  rintultion  d*une 
Térité  pins  baute.  On  a  dit  souvent,  et  toujours  avec  raison, 
que  Tune  des  preuves  les  plus  convaincantes  de  rimmortalité 
de  l'ftme  et  d'une  vie  future^  c'est  le  besoin  insurmontable 

de  justice  qu'éprouve  Vhométe  homme,  à  la  vue  de  toutes  les 
iniquités  monstrueuses,  de  tous  les  crimes  qui  se  commettent 
autour  de  lui,  de  toutes  les  douleurs  imméritées  qui  l'en- 
tourent, et  qui  pourtant  peuvent  ue  pas  rallcindre  directe- 
ment. Aticune  vibration  de  la  masse  cérébrale  n'expliquera 
jamais  cette  soif  du  bien,  si  rarement  et  si  incomplètement 
satisfaite  ici-bas;  aucune  philosophie  positive  n'en  éludera 
les  conséquences.  La  seule  notion  du  bien  moral  implique 
l'existence  de  l'ftme,  et  la  soif  inextinguible  de  cette  âme  vers 
la  justice  implique  la  nécessité  d'un  autre  mode  d'existence 
pour  elle.  Ce  n'est  pas  le  seul  besoin  de  faire  une  belle  strophe 
qui  a  poussé  Scbiller  à  dire  : 


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LA  M08IQVB  BT  L'AOODSTIQUB 


907 


Souffrez  courageusement,  foule  sans  nombre, 
SoufVrez  pour  le  monde  meilleur! 
Là-haut,  au-dessus  de  la  tente  étoilôe, 
Ua  Dieu  grand  et  bon  récompenserai 

 ••  ••• 

Frères,  au-dessus  de  la  tente  ctoilcc 
Dieu  jugera  comme  nous  aurons  jugé.' 

(Soit  dit  en  pansant,  les  hommes  â*ordre  feraient  bien  de  se 
rappeler  cette  dernière  strophe.) 

La  science  et  Tart,  le  besoin  du  m!  et  dn  beau  impliquent 
aoisi  Texistence  d*nn  principe  supérieur  pensant  ;  n*impli- 

quent-ils  point  une  autre  conséquence? 

«  La  plus  belle  découverte  scientifique,  la  plus  belle  sym- 
phonie ne  nous  console  point  de  la  perte  d'un  être  chéri,  et 
reste  impuissante  devant  une  tombe.  »  Telle  est  l'apostrophe 
iujarieuse  que  certaines  personnes  jettent  à  la  tête  du  savant, 
de  l'artiste.  Il  ne  faut  vraiment  pas  un  esprit  bien  inrentif 
pour  découvrir  de  telles  vérités  ;  les  émettre  sous  cette  forme, 
c'est  tout  simplement  comprendre  la  sdenoe  et  Tart  à  rebours. 

L'homme,  disons  plutôt  certains  hommes  sont  poussés  par 
nn  besoin  irrésistible,  non  pas  seulement  à  Tétude  des  phé- 
nomènes de  la  nature  et  à  la  détermination  des  lois  qui  les 
représentent,  mais  encore,  et  surtout  peut-être,  à  la  recherche 
des  causes  qui  donnent  lieu  &  ces  phénomènes,  à  la  recherche 
de  la  nature  de  la  matière,  de  la  force,  dn  mouvement,  de  la 
▼ie,  de  l'âme. . .  Dès  que  leurs  efforts  se  portent  de  ee  côté, 
ils  ne  tardent  point  à  s'apercevoir  qu'ils  devinent  asssz  la 
nature  des  choses  pour  que  leur  aspiration  soit  pleinement 
légitimée;  mais  à  .s'apercevoir  aussi  qu'avec  les  moyens  dont 
ils  disposent,  jamais,  en  ce  monde,  leur  aspiration  ne  pourra 
être  complètement  satisfaite,  jamais  ils  ne  pourront  arriver 
à  une  pleine  connaissance.  Sentant  ainsi  tout  à  la  fois  leur 

^  Ode  h  la  Joie.  —  Ou  siiit  ({lu;  liticllioven  a  mis  celte  belle  poésie 
dant  le  final  do  sa  nenviéine  symphooia. 


808 


BBVDB  D*ALBAOB 


force  et  leur  faiblesse,  la  sainteté  de  leur  désir  et  l  impossibi- 
lité  de  le  combler  en  ce  monde,  ces  hommes  peuvenl  conce- 
Toir  i*espérance  légitime  que  ce  qui  leur  est  refusé  ici  bas 
leur  sera  léTélé  aillears.  —  £t  \k  précisément,  où  la  science 
semble  biblir  et  les  abandonner,  elle  les  conduit  au  but  le 
plus  sublime. 

A  ces  sommités,  Tart  B*amt  a^ec  la  sdenoe  en  on  faisceau 
indissoluble  et  nous  conduit  au  même  but 
L'homme,  disons  aussi  bien  plutôt  certains  hommes  sont 

portés,  par  un  besoin  irrésistible,  à  créer  le  beau  sous  toutes 
ses  formes.  Plus  lieureux  que  le  savant  dans  la  recherche 
des  causes,  les  élus  parmi  ces  hommes  alleigutjil  parfois,  dans 
les  limites  du  possible  en  ce  monde,  le  but  de  leurs  désirs, 
comme  conception  pure  de  finieliigence.  La  question  change, 
lorsqu'il  s'agit  de  réaliser  celte  conception  et  do  la  transmettre 
aux  autres  hommes.  Ici,  toutefois,  une  différence  profonde  se 
montre  eolre  les  divers  modes  de  manifestations  du  beau.  Le 
poète,  le  peintre,  le  sculpteur,  l'architecte,  peuvent  réaliser 
leur  pensée,  la  rendre  accessible  à  tout  le  monde,  sans  le  con- 
cours nécessaire  de  leurs  semblables,  on  du  moins  sans  que 
ce  concours  soit  de  nature  à  altérer  Tcenvre  une  fois  conçue, 
n  n*en  est  plus  ainsi  quant  au  compositeur.  Une  fois  sa  con- 
ception rendue  sensible  par  des  signes,  une  fois  la  partition 
écrite,  il  lui  faut,  pour  la  rendre  sensible  à  tous,  le  concours 
d'un  nombre  plus  ou  moins  grand  de  personnes  ayant  reçu 
une  éducation  musicale  complète,  capables,  non  seulement  de 
sentir  et  de  comprendre,  mais  encore  de  repmduire  à  l'aide 
d'un  instrument  chacune  des  parties  élémentaires  de  la  pen- 
•  sée.  Ce  seul  énoncé  nous  dit  qu'il  est  impossible  de  réaliser, 
autrement  que  sous  la  forme  d'un  à  peu  près  plus  ou  moins 
satisfaisant,  rexécutlon  d'une  grande  couvre  musicale,  telle 
qu'un  opéra,  un  oratorio,  une  symphonie  avec  chœur. . . . 
L'exécution,  par  la  force  même  des  choses,  reste  toujours  plus 
ou  moins  inférieure  à  ce  qu'elle  est,  non  seulement  dans  la 


LA  MUSIQUE  ET  L'AOOUBTIQUE 


pensée  de  l'artiste,  mais  même  dans  celle  d'un  auditeur  bien 
doué,  qui  s'esl  assimilé  l'œuvre,  soit  par  la  lecture,  soit  par 
plusieurs  auditions  tolérables.  Et,  qu'on  le  remarque  bien,  en 
m'expiimant  comme  je  le  fais,  je  place  les  choses  dans  les 
conditions  les  plus  tavorabies  ;  j  admets  en  quelque  sorte  a 
priori  que  les  exécutants  sont  tous  de  bonne  volonté  et  bien 
disciplinés.  Si  nous  rentrions  dans  la  réalité  pratique»  doiu 
risquerions  de  tomber  dans  le  trivial,  à  force  de  rester  vraie. 
Qui  n'a  entendu  parler  des  tribnlatione,  des  douleurs  éproo- 
Téea  par  de  grands  compositeurs,  lorsque,  pour  la  première 
fols  et  pldns  encore  dllinslons,  ils  ont  essayé  de  Urrer  nne 
grande  œuvre  à  la  scène?  Qui  ne  8*est  senti  révolté  an  rédt 
des  Indignes  concessions  que  rartiste  est  parfois  obligé  de  fidre 
i  de  prétendus  virtuoses,  chanteurs  ou  chanteusest  —  Ser- 
iez, en  parlant  de  Freischûtz,  dit  que  Welier  a  dû  éprouver 
un  de  ces  moments  de  bonheur  ineffable,  s'il  lui  a  été  donné 
d'entendre  une  artiste  clianler  la  Prière  (T Agathe,  comme  il 
l'avait  conçue,  et  d'être  aimé  d'une  telle  femme!  —  Weber 
n'a  point  eu  ce  bonheur,  soyons-en  assurés.  El,  le  sort  lui 
eût-il  été  favorable,  il  lui  fallait  encore,  pour  entendre  son 
FreischUtz,  quatre  autres  solistes  de  même  valeur,  et,  outre 
l'orchestre,  une  quarantaine  de  choristes  tolérables.  —  Qui 
de  nous  ne  s'est  réjoui  d'aller  enQn  entendre  telle  grande  œuvre, 
depuis  longtemps  rêvée,  et  n'est  rentré  déçu  ou  indigné?  — 
Voilà,  je  le  répète,  pour  le  côté  trivial  et  terre  à  terre  de  la  ques- 
tion; mais  en  restant,  comme  il  convient,  an  point  de  vue  le 
plus  élevé,  nous  sommes  bien  obligés  de  reconnaître  que  le  beau 
musical,  dans  sa  pureté,  est  irréalisable  en  ce  monde.  Il  nous 
est  donné  de  le  concevoir  d'une  manière  assez  nette  pour  ne  plus 
pouvoir  douter  de  la  réalité  de  son  existence,  mais  pour  recon- 
naître en  même  temps  qu'il  est  hors  do  notre  portée  ici-bas. 

Loin  de  conduire  l'homme  de  cœur  et  de  bon  sens  au  décou- 
ragement, celle  dernière  pensée  le  relève  vers  un  espoir 
suprême.  Le  juste,  le  poète,  l'artiste,  le  savant,  se  donnant 

Nottftlto  Sérit.  -  Amiéff. 


010 


IkEVUB  D'aLSACI 


id  la  roain,  peurent,  pleins  d'une  sublime  confiance,  redire 
iTec  Schiller  et  Beethoren  : 

Ainsi  que,  joyeux,  ses  soleils  volent 

Par  les  orbes  majestueux  des  cieux. 

Frères,  parcourez  Yotre  carrière, 

Joyeux,  comme  un  héros  court  à  la  yictoirel 

Frères,  au-dessus  de  la  tente  ètoiièe 
Doit  demeurer  un  Père  chéri  I 

G.-A.  HiRN. 

Logelbacb,  4  septembre  i877. 


4 


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Dins  le  cftnton  de  Dannemarie,  arrondissemeiit  de  BelforI, 

setronTe  le  village  de  Hagenbacb,  berceau  d'une  famille 
noble  qui  eut  le  malheur  de  voir  sortir  de  sou  sein  Pierre 
de  Hng(}}hach,  lieutenant  de  Cliarles-le-Téraéraire,  duc  de 
Bourgogne,  et  l'un  des  types  les  mieux  réussis  des  brigands 
féodaux.  Les  valets  sont  pires  que  leurs  maîtres;  c'est  un 
proverbe  que  le  sire  de  Ilagenbach  réussit  à  merveille  à 
mettre  en  pratique  pendant  son  existence;  le  duc  de  Bour- 
gogne, qui  fut  le  prince  le  plus  violent  de  son  siècle  et  qui 
ne  reculait  devant  aucun  moyen  pour  agrandir  ses  Etats  et 
créer  un  nouveau  royaume  de  Bourgogne,  avait  cependant 
certains  moments  de  générosité,  lorsque  la  passion  dormait 
en  lui;  sa  nature  irascible  et  impétueuse  cachait  des  senti- 
ments chevaleresques  ;  tandis  que  son  lieutenant  Hagenbach 
n*eut  jamais  du  noble  que  le  nom;  c'était  un  profond  scélé- 
rat, dont  la  vie  ne  fut  qu*un  tissu  de  crimes  et  d'infiimies. 

L'archiduc  Sigismond  d'Autriche,  souverain  du  Brisgau  et 
d'une  grande  partie  de  la  Haute-Alsace,  fatigué  de  ses  démê- 
lés continuels  avec  les  Suisses  et  de  leurs  incursions  sur  sas 
domaines,  et  atin  de  leur  donner  un  puissant  ennemi  pour 
voisin,  avait  vendu,  au  moi'»  de  juin  1469,  pour  quatre-vingt 
mille  florins  d'or,  à  Charles  le-Téméraire  le  comté  de  Fer- 
rette,  le  Sundgau,  le  Brisgau  et  d'autres  terres  appartenant 
à  la  maison  d'Autriche,  sous  la  condition  que  ce  prince  ne 


î 


813  RSVtlE  D'ALSACE 

porterait  aucune  atteinte  aux  droits  et  franchises  des  habitants, 
et  que  ces  domaines  seraient  restitués  à  la  maison  d'Autriche 
moyeoaant  le  remboursement  de  la  somme  STancée.  Le  doc  de 
Bourgogne  pritalors  possession  de  ces  contrées  et,  de  la  sorte, 
établit  sa  domination  sur  les  deux  rives  du  Rhin.  Il  plaça  à 
leur  tête»  comme  Lanâoogtt  Pierre  de  Hagenbach,  qui  était 
depuis  longtemps  au  service  de  la  maison  de  Bourgogne;  c'é- 
tait lui  qui  avait  commandé  Partillerie  bourguignonne  au 
siège  de  Dinant,  que  le  Téméraire  rédui.iit  cii  cendres  après 
l'avoir  mise  à  sac  et  au  pillage  et  avoir  fait  noyer  dans  la 
Meuse  800  de  fes  défenseurs  liés  deux  à  deux  (août  146H). 

Oa  racontait  que  Hagenbach  arait  commencé  sa  fortune 
d'une  manière  singuUère.  Quand  le  ?ieux  duc  Philippe-le-Bou 
devint  chauve,  et  que  beaucoup  de  gens  se  faisaient  tondre 
pour  lui  faire  plaisir,  il  y  eut  pourtant  des  récalcitrants  qui 
tenaient  à  leur  chevelure;  Hagenbach  s'établit,  ciseaux  en 
main,  aux  portes  de  rhdiel,  et,  lorsqu'ils  arrivaient,  il  ks 
fiiisait  tondre  sans  pitié  (Hf ichilxt,  BkMtt  de  FhmcB), 

Voilà  l'homme  que  le  duc  de  Bourgogne  nomma  gouver* 
neur  du  Sundgau  et  du  Brisgau.  Hagenbach  s'y  prit  d'une 
façon  k  rendre  odieuse  dans  ces  contrées  la  domination  bonr^ 
guignonne.  II  voulait  établir  une  violente  uniformité  dans 
ces  pays  qui  avaient  des  coutumes  très  variées,  et  où  les 
villes,  les  communes  et  les  seigneurs  jouissaient  de  libertés 
afTectantles  formes  les  plus  diverses.  Sous  prétexte  d'y  établir 
l'ordre,  il  foula  aux  pieds  tous  les  droits  et  toutes  les  tradi- 
tions. Il  frappa  les  populations  d'un  impôt  vexatoire  et  arbi- 
traire, appelé  la  Mauvais  denier,  et  envoya  à  i'échafaud  tous 
ceux  qui  résistaient.  Joignant  le  cynisme  à  la  cruauté,  il  outra- 
geait chaque  jour  les  mœurs  publiques,  en  commettant  des 
rapts  et  des  viols. 

«  La  première  chose  qu*il  fit,  ditHichelet,  ce  fut  de  rétablir 
la  sûreté  des  routes  à  force  de  pendre;  le  voyageur  ne  risquait 
plus  d'être  volé,  mais  d'être  p  adu.  11  se  chargea  ensuite  de 


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les  comptes  entre  la  Tille  libre  de  Mnlhooss  et  les 
sqjetB  du  dae,  comptes  obacars,  les  uns  et  les  autres  étant  à 
la  fois  eréanciers  et  débiteurs;  pour  foire  payer  Mulhouse,  il 
lui  coupait  les  Tirres.  Il  disait  aux  gens  de  Uulhonse  que 
leur  ville  ne  serait  jamais  qu'une  étable  à  vaches  tsnt  qu*elle 
serait  ralliée  des  Suisses,  et  que,  si  elle  se  soumettait  an  due, 
elle  deviendrait  le  Jardin  des  roses  et  la  couronne  du  pays. 

t  Hagenbach  établit  un  autre  compte  avec  les  seigneurs; 
il  les  somma  de  recevoir  les  sommes  pour  lesquelles  le  sou- 
verain du  pays  leur  avait  jadis  engagé  des  châteaux  ;  sommes 
minimes,  et  tel  de  ces  châteaux  était  engagé  depuis  150  ans. 
Les  détenteurs  se  souciaient  peu  d'être  payés  ;  mais  Hagen- 
bach les  payait  de  force  et  Tépée  à  la  main.  L'un  de  ees  sei- 
gneurs engagistes  était  la  riche  ville  de  Bâle,  qui,  pour 
vingt  mille  florins  prêtés»  tenait  deux  villes,  Stein  et  Rhein- 
felden;  un  matin,  Hsgenbach  spporte  la  somme;  les  Bâlois 
auraient  bien  voulu  ne  pas  la  receyoir. 

c  II  dispntsit  aux  nobles  leur  plus  cher  privilège,  le  droit 
deefassse.  Il  disputa  aux  petites  gens  leur  vie,  leurs  aliments, 
frappant  le  blé,  le  vin,  la  viande  du  mmwaiê  dmkr;  c'était 
le  nom  de  celte  taxe  détestée.  Thann  refusa  de  payer,  et  elle 
paya  de  son  sang;  quatre  hommes  y  furent  décapités.  • 

Des  sujets  de  son  maître  Hagenbach  passa  aux  voisins;  il 
vexa,  menaça  Mulhouse,  Colmar,  Strasbourg,  Bàle:  il  voulait 
faire  accepter  la  protection  de  la  Bourgogne.  Les  Suisses,  qui 
tvaient  accordé  à  Mulhouse  des  droits  de  corabourgeoisie,  inter- 
cédèrent souvent  auprès  du  landvogt  bourguignon  ;  mais  ils 
n'en  reçurent  que  des  moqueries.  Il  leur  répondit  un  jour  : 
«  J'écorcherai  Tours  de  Berne,  pour  m'en  fiiire  une  Iburrore.  » 
Il  devait  plus  tard  apprendre  à  ses  dépens  que  Tours  savait 
défendre  sa  pesu.  Dès  son  arrivée  en  Alsace,  il  avait  planté 
la  bannière  ducale  sur  une  terre  qui  appartenait  à  Berne; 
celle-d  ayant  porté  plainte^  le  duc  avait  répondo  :  <  H  ne 
mimporte  guère  que  mon  gonvemenr  soit  agréable  à  mes 


914  REVUE  d'âlsace 

gens  et  à  mes  Toisins;  e*est  assez  qull  me  plaise,  à  moi!  * 
Dès  lors,  les  Suisses  renoncèrent  à  ^alliance  du  duc  et  firent 

un  traité  avec  Louis  XI  (13  aoùl  1470).  Gharles-le-Téméraire 
rendit  alors  la  terre  usurpée. 

Hageubacb,  qui  se  sentait  npi)uy('-  par  son  puissant  maître, 
laissait  de  temps  en  temps  échapper  des  plaisanteries  mena- 
çantes à  rencontre  des  villes  libres  d'Alsace.  Il  disiiil  de 
Straiiboarg:  «  Qu'ont'ils  besoin  de  bourgmestre  ?  ils  en  auront 
un  de  ma  main,  non  pins  un  tailleur,  un  cordonnier,  mais  un 
dno  de  Bourgogne  >  ;  et  de  Bâle  :  <  Je  voudrais  Taroir  en 
trois  jours  1  > 

Gliarles-le-Téméraire,  Tenant  de  Nancy,  entra  en  Alsace  an 
mois  da  décambre  U78;  mais  ce  n*étaît  pas  pour  &ire  droit 
aax  justes  plaintes  des  populations.  Il  amenait  arec  lui  6000 
caTaUers,  tons  étrangers  et  Wallons,  ne  connaissant  point  la 

langue  du  pays  et  animés  des  plus  mauvaises  dispositions. 
Gesl  son  gouverneur  Ilagcnbach  qui  se  chargea  de  lui  faire 
connaître  ses  nouvelles  possessions.  Colmar  n'eut  (jue  le  temps 
de  fermer  ses  portes.  Hàle  s'arma  et  prit  toutes  les  mesures 
nécessaires  pour  se  prémunir  coutre  les  entreprises  d'un  si 
redoutable  voisin.  Toute  la  contrée  était  en  prières.  Mulhouse, 
contre  qui  il  avait  proféré  des  menaces  terribles,  désespéra 
de  son  salut:  le  Téméraire  était  venu  l'assiéger  ;  les  rues  y 
étaient  pleines  de  gens  qui  récitaient  les  prières  des  agoni* 
sants  ;  ils  chantaient  des  litanies  ;  ils  pleuraient  ;  lenrs  gémis- 
sements gagnèrent  les  petits  enfiinis  enz-mèmes.  Heorense- 
ment  pour  Mulhouse,  une  crue  subite  de  1111  changea  la 
campagne  environnante  en  un  lac  immense.  Lednc  se  retira, 
furieux  de  n'avoir  pu  s*en  emparer,  et  remit  la  vengeance 
à  une  époque  qui  ne  devait  pas  arriver. 

Charles -le- Téméraire  avait  fait  son  entrée  à  Brisach  le 
24  décembre  1473.  accompagné  de  son  féroce  lieutenant.  Ils 
étaient  tellement  craints  que  tous  les  habitants  allèrent  en 
procession  au-devant  d'eux.  Le  duc  lit  ranger  sa  troupe  en 


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PIEBRB  DE  HAGBNBAOH 


916 


btlaiUe  sur  la  place  et  lear  fit  prôtflr  na  sermeat  pur  et 
simple,  où  leurs  prifiléges  n^étaient  nuIlemeDi  mentionnés. 
Il  sortit,  escorté  de  Hagenliaeh,  qui  rentra  bienidt  arec  vn 
millier  de  WaHons  ;  eenz-ci  se  mirent  à  piller  et  à  vider  ;  les 
habitants  obtinrent  à  grand*peine  que  le  duc  éloignât  ces 
brigands  de  la  ville  ;  il  approuva  même  Hagenbach,  en  disant  : 
«  TuAt  mîenz,  il  a  bien  Ait;  ils  le  méritent;  il  liint  les  tenir 
ferme.  » 

Gharles-le-Téméraire  partit  ensuite  pour  se  rendre  en 
Bourgogne ,  laissant  en  Haute-Alsace  son  lieutenant  Hagen- 
bach, qui  semblait  fou  de  joie  et  d'insolence  :  «  Je  luispape, 
criait-il,  je  suis  évêque,  je  suis  empereur  et  roi!  » 

Hagenbach  se  maria  le  24  janvier  1474  et  prit,  pour  célé- 
brer ses  noces,  cette  même  ville  de  Thaou  qu'il  avait  récem- 
ment enssnglantée  et  ruinée.  Ce  mariage  fut  une  occasion 
d'extorsions,  pois  de  réjouissances  folles,  d'étranges  baccfaa- 
naiss,  de  brces  Inbrlqnes.  M.  de  Barante  raconte  que  Hagen- 
bach s'amnsa  à  Adre  mrttre  les  femmes  nues  et  bi  téte 
couverte  d*nn  vdls^  pour  voir  si  leurs  maris  pourraient  tes 
nconnaitre. 

Jouissant  de  Timpunilé  la  plus  absolue  et  croyant  que  rien 
ne  lui  était  impossible,  Hagenbach  tenta  une  chose  bien  grave, 

la  suppression  des  corj)S  de  métiers  et  des  bannières  des  villes, 
c'est-à-dire  la  désorganisation  et  le  liésarmement  de  celles-ci  ; 
tout  cela,  disait-il,  il  le  faisait  en  haina  des  monopoles  : 
'  Quelle  belle  chose  que  chacun  puisse,  sans  entrave,  tra- 
vailler, commercer  comme  il  le  veut  !  » 

Les  Suisses  tâchèrent  d'obtenir  justice;  ils  envoyèrent  des 
députés  au  duc  Gharlss,  qui  les  traîna  jusqu'à  Dijon,  sans 
daigner  leur  répondre,  il  n'avait  pas  encore  visité  la  Bour- 
gogne depuis  la  mort  da  son  père  ;  il  ût  à  Dijon  une  entrée 
d*un  ihste  inoui  (IS  janvier  1474).  Dans  la  harangue  qu'il 
sdressa  aux  Etats  du  dnché  et  du  comté,  il  lenr  rappela  l'exi- 
stence indépendante  du  royaume  deBourgogne,  «  qf»  cm» 


216  RBVUE  D'ALSACaS 

fhmw  mU  i(m0imip»u9urpéêtd^kéhitffaliâutMf€B  que  tout 
ks  doUmi  Mm  avoir  à  regreit  «/  gu^U  awH  m  9oi 
âeê  ehofes  qu'il  n'appartenaiê  de  eavoir  à  fwU  qîfà  ft4i  ».  Son 

dessein  était  de  réunir  Tancien  royanme  de  Lorraine  on 
d'Austrasie  à  celui  de  Bourgogne,  qui  avait  jadis  compris  la 
Savoie,  une  partie  de  la  Suisse  et  le  Daiiphiné.  Il  espérait 
même  que  le  roi  René  lui  léguerait  la  Provence. 

Le  discours  de  Gliarles-ie-Téméraire  aux  Etats  de  Dijon 
confirma  les  craintes  et  excita  la  colère  des  Suisses  ;  il  repar- 
tit pour  les  Pays-Bas  sans  aroir  accordé  satiafiiction  à  leurs 
ambassadeurs,  et  le  retour  de  ceux-ci  fut  suivi  d'un  résultat 
incroyable  :  les  Suisses  oublièrent  leur  haine  aécalaira  contre 
la  noblene  de  r Alsace  et  de  la  Haute-Allemagne;  le  reeien- 
timtnt  d*Qn  commun  outrage réeondlia  ces  mortels  ennemis; 
les  archiducs  d'Autriche  eux-mêmes  se  rapprochèrent  des 
républicains  de  THelfétie ,  grâce  à  rintermédiaire  du  roi  de 
France,  qui  entretenait  avec  ces  derniers  des  relations  ami- 
cales  depuis  plusieurs  années,  et  qui  négociait  avec  eux,  en 
ce  moment  même,  une  alliance  contre  le  duc  de  Bourgogne. 
Le  25  mars  1174,  un  traité  d'alliance  offensive  et  défensive 
fut  signé  à  Constance  entre  le  duc  Sigismond  d'Autriche,  le 
margrave  de  Bade,  les  villes  de.  Bàle,  Strasbourg,  Colmar, 
Hagenau,  Schlestadf  et  Mulhouse,  d'une  part,  et  de  l'autre  les 
honorables  communes  confédérées  des  villes  et  cantons  de 
Zurich,  Lucerne,  Berne,  Uri,  Schwitz,  Unterwalden,  Zug  et 
Claris.  Fribourg,  Saint-Gall.  Appenzell  ratifièrent  plus  tard 
ce  traité,  que  te  roi  Louis  XI  garantit  par  deux  de  ses  sgents. 
Le  duc  Sigismond  scella  la  réconciliation  de  la  maison  d'Au- 
triche avec  les  Suisses  par  un  pèlerinage  à  Notre-Dame 
d'ffînsledlen,  au  milieu  de  ces  montagnes  tant  de  Ibis  témoins 
des  désastres  de  ses  pères.  Les  conséquenees  du  traité  de 
Constance  ne  se  firent  point  attendre  :  les  riches  cités  de  Stras* 
bourg  et  de  Bêle  s'étaient  engagées  àpréter  à  Sigismond,  sons 
la  caution  de  Louis  XI,  les  quatre-vingt  mille  florins  que  le 


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FnSBBB  DB  BASBNBàOB 


dae  d'Autriche  derait  à  Gharles-le-Téménire.  Daoi  les  pre- 
mien  jours  d*arril,  Sigîsmond  signifia  au  due  de  Bourgogne 
qu*U  était  prêt  &  solder  sa  dette  et  réclama  en  conséquence 
ses  domaines  de  Souabe  et  d*Alsace  (Vby.  H.  Martin,  BsMre. 
de  Frmwêj  tome  YII,  pp.  86  et  suiv.). 

Hagenbach,  Tauteur  principal  de  la  haine  qne  les  Alsa- 
ciens portaient  au  duc  de  Bourgogne,  allait  être  frappé  par 
l'orage  qu'il  a\ai[  attiré  sur  sa  tête.  Il  avait  établi  sa  rési- 
dence à  liriaacli,  et,  chaque  jour,  il  cherchait  à  augmenter  la 
fureur  du  peuple  contre  lui.  On  racontait  de  lui  des  choses 
effroyables:  il  aurait  dit  :  »  Vivant,  je  ferai  mon  plaisir; 
mort,  que  le  diable  prenne  tout,  àme  et  corps;  à  la  bonne 
heurel  >  11  poursuivait  d'amour  une  Jeune  nonne;  les  parents 
rayant  fàit  cacher,  il  eut  Timpudence  incroyable  de  faire 
publier  par  le  crieur  public  qu'on  eût  à  la  ramener,  sous 
peine  de  mort  —  Un  jour,  il  était  à  l'église  en  propos  d'a- 
mour avec  une  petite  femme,  le  coude  sur  Tautel  qui  était 
tout  paré  pour  la  messe;  le  prêtre arrifa.  <  Gomment,  prêtre, 
ne  Tols-tu  pas  que  je  suis  là?  Va-t  en,  ra-t-en!  *  Le  prêtre 
oflicia  à  un  autre  autel;  Hagenbach  ne  se  dérangea  pas,  et 
l'on  vit  avec  horreur  qu*il  tournait  le  dos  pour  baiser  la  belle, 
i  rélé?alion  de  l'hoslie!  (Michelet,  tome  VI,  p.  142.) 

Charles-le-Téméraire  ne  voulait  pas  restituer  au  duc 
SigisMiond  ses  domaines;  ce  n'était  point  l'affaire  du  duc  de 
Bourgogne  qui,  de  métne  que  tout  acheteur  à  réméré,  comp- 
tait sur  l'insolvabilité  de  son  débiteur  et  se  considérait  comme 
propriétaire  de  son  gage;  c'était  encore  moins  l'affaire  de 
Hagenbach,  qui  menait  joyeuse  vie  sur  les  bords  du  Rhin  et 
qui  pillait  et  rançonnait  le  pays.  Le  duc  de  Bourgogne  sou- 
leva des  difQcultés  sur  le  mode  et  le  lieu  du  paiement;  et 
son  lieutenant,  apercevant  des  symptômes  de  rébellion  parmi 
ceux  qu'il  considérait  comme  ses  sqjets,  résolut  de  prévenir 
pur  la  terreur  un  soulèvement  imminent.  A  Brisach  se  trou- 
vait une  garnison  composée  de  900  fimtassins  alleniands,dont 


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BBVUB  D'ALSACE 


il  n*était  pas  sûr,  car  il  ne  lear  avait  poiot  payé  de  solde 
depuis  longtemps;  il  fit  venir  800  Mbanê  étrangers,  Wékîkn 
ou  Picards.  Mais,  par  ane  impradenee  inconcevable,  il  ne  dés- 
arma point  les  bourgeois. 

Ceux-ci,  après  avoir  juré  de  secouer  la  tyranide  du  sire 
de  Hagenbach  ou  de  mourir,  mirent  à  leur  tête  Frédéric 
Wœgeliii,  le  chef  de  la  garnison  allemande.  Le  landvogt,  se 
doutant  de  la  conspiration  ourdie  contre  lui  et  craignant  la 
défection  des  soldats  allemands,  fit  annoncer  en  chaire,  le 
dimanclie  de  Pâques,  (jiie  soldats  et  bourgeois  devaient  aller 
le  lendemain  travailler  sans  armes  hors  de  la  ville  à  un  fossé 
nécessaire  à  la  défense  de  la  place.  Comprenant  qu'une  fois 
sorlis,  on  fermerait  les  portes  sur  eux  et  que  la  ville  tombe- 
rait ainsi  à  la  merci  de  Hagenbach  et  de  ses  trabans,  Wœ- 
gelin  convint  avec  les  habitansquUl  irait  lui  réclamer  la  solde 
arriérée  de  ses  hommes,  que  ceux-ci  prendraient  les  armes, 
et  que,  sur  le  refus  probable  du  landvogt»  tous  entoureraient 
son  logis  et  s'empareraient  de  sa  personne,  avant  qu'il  fût 
secouru  par  ses  aides.  Gela  fut  exécuté:  on  saisit  Hagenbach, 
et  les  trabans  quittèrent  précipitamment  Brisach,  abandon- 
nant leurs  armes  et  tous  leurs  elTets,  (jui  leur  furent  rendus 
ensuite  par  les  bourgeois  :  car  leur  séjour  avait  été  trop  court 
pour  qu'ils  eussent  pu  se  faire  haïr. 

Ceci  eut  lieu  le  10  avril.  Les  autorités  de  Brisach  procé- 
dèrent immédiatement  à  une  instruction  criminelle  contre 
Hagenbach.  Le  SO  du  même  mois,  le  duc  Sigismond  arriva 
dans  cette  ville  et  convoqua  pour  le  9  mai  le  tribunal  qui 
devait  juger  le  lieutenant  de  Gharles-le-Téméraire.  Le  4  mai, 
Hagenbach  fut  conduit  en  charrette  dans  une  tour,  appelée 
parles  documents  de  Tépoque  Tour  de  la  question  ouTViur  de 
Veau  {Fohtrihunn  ou  YFastsrfAtinn)  \  On  raconte  que  e'eet 

'  Cfi  qui  fait  horiiKMir  à  In  population  do  Brisach,  c'est  que  celte  tour 
ne  contenait  aacon  inslrument  (1>>  torture;  on  en  demanda  quelques-nus 
aux  Bàlois,  qui  se  firmt  un  pkn$ir  de  les  fournir. 


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l'IERRE  DK  li^^GENliACH 


919 


là,  après  ayoir  subi  la  question,  queHagenbadi,  tes  membres 
rompus,  gisant  sur  un  Ht,  poussant  de  profonds  gémissements 
que  ses  gardiens  ne  pouvaient  arrêter^  entendit  les  pas  de 
cavaliers  qui  passaient  sous  la  porte  de  la  tour,  et  qu'ayant 

demandé  ce  que  c  elait,  il  lui  fut  répondu  que  c'étaient  des 
gens  inonté.s  sur  des  chevaux  hongres,  espèce  employée  à 
Bàle,  et  qu'il  s'écria  :  «  Hélas!  ce  sont  des  Suiascs;  cest 
maintenant  fait  de  moi  !  * 

C'étaient,  en  effet,  des  Suisses,  qui  venaienlpour  le  juger; 
il  y  en  avait  deux  pour  chacune  des  villes  de  Bàle,  Soleure 
et  Berne;  huit  furent  fournis  par  Brisach  et  deux  par  cha- 
cune des  villes  de  Strasbourg,  Schlestadt,  Golmar,  Kenzingen, 
Fribourg  en  Brisgau  et  Neubourg;  en  tout  26  jurés  ou  asses- 
seurs {Onchwornên  ou  ^etatYsmi),  présidés  par  Thomas 
Sehntts,  prévôt  d'Ensisheim.  Ce  fut  le  10  mai  queHagenbaeh 
comparut  devant  ce  tribunal  ;  ses  fers  Tempéchant  de  mar- 
cher, on  Ty  conduisit  en  brouette,  au  milieu  de  la  multitude 
qui  criait  :  >  Judas  I  Judas!  > 

Le  D'  Schreiber  a  donné,  en  1840,  dans  les  TascheribUcher 
de  Fribourg,  du  procès  de  llagcnbach  une  relation  palpitante 
d'intérêt,  donc  voici  la  traduction'  : 

«  A  8  heures  du  matin  (  le  10  mai  1474).  les  juges  se  réu- 
nirent devant  la  maison  du  hourgineslre  Stielin.  qui,  d'après 
la  tradition,  était  située  sur  la  plate-forme  actuelle,  non  loin 
ÙGhTour  du  puits.  C'est  une  de  celles  qua  détruites  le  bom- 
bardement de  1793.  L'audience  se  tint  en  plein  air,  confor- 
mément à  un  vieil  usage  germanique,  peut-être  aussi  à  cause 
de  la  foule  des  assistants.  Un  des  assesseurs,  Henri  Iselin,  de 
Bftie,  se  présenta  comme  accusateur  public  au  nom  du  nou- 
veau landvogt'.  Hagenbach  avait  choisi  pour  son  avocat  un 
des  jurés  de  Brisach.  Iselin  établit  son  accusation  sur  les 

•  Cotto  Iraducliuii  est  cmprnnli-n  à  M.  Hnol  {Dr^  Vosges  an  liinn). 
'  Hei  inann  d'Ëptingcn,  nomme  par  le  duc  Sigismond  à  la  place  de 
Hagenbacl). 


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quatre  poinlB  iuivants:  l' Pierre  de  Hagenbedi  aurait,  dam 
le  cours  de  Tannée  dernière  (1478),  à  Thann,  Ikit  décapiter, 

sans  sentence  judiciaire,  quatre  honnêtes  et  honorables  bour- 
geois, et  en  cela  contrevenu  aux  lois  de  l'Empire;  — 
2°  et  8°  Le  mêma  aurait,  lorsqu'il  Gt  son  entrée  à  Brisach 
et  prit  possession  de  cette  ville,  juré  devant  Dieu  et  tous  les 
saints  (en  scellant  de  son  sceau  l'acte  qui  en  fut  dressé),  qu'il 
n'y  introduirait  aucune  nouveauté  et  n'y  établirait  aucun 
nouvel  impôt,  mais  qu'il  laisserait  toutes  clioses  dans  leur 
ancien  état,  et  qu'il  n'appellerait  non  plus  dans  Brisach  aucune 
troupe  firancaiae;  et»  néanmoins,  il  y  aurait,  au  mépris  de  son 
serment  et  de  Pacte  revêtu  de  aon  sceau,  introduit  de  pénibles 
innovations,  notamment  en  supprimant  les  tribus,  le  Conseil 
de  viUe  et  le  Sebultbeiss;  il  y  aurait  établi  de  lourds  impôts 
et  redevances  contraires  à  la  coutume,  et,  de  ce  non  content, 
il  aurait  appelé  dans  la  ville  des  Français  et  des  Picards  qu'il 
aurait  placés  chez  les  bourgeois,  où  ils  ont  tout  consommé, 
et  qui,  à  un  sigal  donné,  devaient,  d'après  ses  ordres,  égorger 
ceux  chez  qui  ils  logeaient.  En  outre,  aurait  ledit  Hagenbach 
fait  fabriquer  des  bateaux  à  soupape  pour,  après  le  massacre 
des  hommes,  transporter  sur  le  Rhin  et  noyer  dans  ce  fleuve 
les  femmes  et  les  enfants;  —  4°  Enfin,  aurait  ledit  Hagenbach, 
à  Brisach,  abusé  (missbrancM),  contre  leur  volonté,  de  diver- 
ses femmes  mariées,  jeunes  filles  et  même  religieuses  ;  lamelle 
chose  il  se  serait  permise,  non  seulement  en  ce  lieu,  mais 
encore  dans  plusieurs  autres  villes,contrairement  aux  lois  de 
la  justice  et  de  la  pudeur.  En  conséquence,  requérait  ledit 
accusateur  que  ledit  Hagenbaeh  lût  déclaré  coupable  de 
meurtre,  de  parjure,  de  desseins  criminels  et  de  viol,  et,  pour 
ce,  condamné  daus  son  corps  et  sa  vie  (an  Leib  tmê  lêbm). 

«  Après  eet  exposé  de  l'accusateur  public,  il  y  eut  une 
suspension  d'une  certaine  durée,  parce  que  l'assesseur  de 
Brisach  que  Hagenbach  avait  d'abord  choisi  pour  avocat 
n'osa  se  risquer  ou  ne  fut  pas  autorisé  par  le  tribunal  à 


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PIBBBB  DB  HA6BMBACH  2Si 

• 

prondre  la  ptrole  poar  son  dieiit.  Alors,  le  second  aseesieur 
de  Bâle,  Jean  Irmin,  s*offdt  et  fat  agréé  eomme  défenseur  de 
raecosé.  Après  s*étre  concerté  avec  d*autres  assesseorsi  il 
répondit  à  Tensemble  de  raeeusalion  :  Que  le  sire  Pierre 

de  Hagenbach,  en  sa  qualité  d'ancien  landvogt  du  duc  de 
Bourgogne,  était  fondé  à  prétendre  qu'il  ne  devait  compte  de 
son  Administration  à  nul  autre  juge  qu'au  duc  son  maître. 
En  ce  qui  concernait  le3  chefs  spéciaux  d'accusation,  il  répon- 
dit à  chacun  d'eux  de  la  manière  suivante  :  Quant  au  pre- 
mier, sans  doute,à  ThannJIagenbach  avait  fait  décapiter  quatre 
bourgeois,  mais  uniquement  parce  qu'ils  étaient  à  la  téte 
d'une  insurrection;  cette  insurrection,  il  en  avait  informé  tout 
à  la  fois  l^empereur  et  le  duc,  son  maîre,  qui,  tous  deux,  lui 
STaient  feit  dire  de  punir  les  conpables;  il  n'a?ait  donc  en 
cela  rien  Adt  antre  chose  que  ce  qui  lui  était  ordonné.  Quant 
an  second,  il  était  sans  doute  vrai  que  Hagenfaacb,  lors  de 
son  entrée  à  Brisaeh,  s'était  engagé  par  serment  solennel  et. 
per  lettre  réversale  à  n*7  introduire  aucune  nou?eauté;  mais, 
Is  bourgeoisie  de  Brisaeh  ayant  plus  tard  renonrelé,  sans 
SDCone  réserve,  son  serment  de  fidélité  au  duc  de  Bourgogne 
lui-même,  dès  lors  l'engagement  pris  par  l'accusé  avait  cessé; 
et  celui-ci  u'avait,  antérieurement  à  cette  époque,  établi  aucun 
nouvel  impôt  ou  contribution  de  son  chef,  mais  agi  en  toutes 
choses  conformément  aux  ordres  de  son  maîire.  Quant  au 
troisième,  enfin,  comment  Hagenbach  en  avait  agi  avec  cer- 
taines femmes  ou  filles,  Upen  avaieni  plus  d'un  qui  siégeaient 
m  CêtU  anjuHienM  màne^  qui  m  avait  fait  autant,  sans  être 
pour  cela  condamnét  à  mort;  en  outre,  ces  femmes,  Taccusé 
Iss  avait  payées  et  n*aTait  agi  que  de  leur  plein  consente- 
ments En  conséquence  de  ce,  il  concluait  à  ce  que  Hagen- 
bach fikt  acquitté  de  Paccusation. 

•  Suivant  M.  Rosmanii,  (jui  a  lionné  un»*  analyse  du  procès  do  Hagen- 
bach, c'est  ce  dernier  lui-oièue  (jui  aarait  répuudu  :  «  Je  u'ai  jamais 
tût  ridenoe  à  personne,  moû  toujours  payé  mMetkon  wrgwL  » 


BEVUE  D'ALSACB 

Lorsqn'en  suite  la  parole  revint  à  Henri  Iselin,  celui-ci 
déclara,  après  en  avoir  conféré  avec  ses  conseils  (?uit  den 
seinenRaih)\  qu'il  n'était  pas  en  état  de  rt^pliquer  à  cette 
plaidoierie.  Après  avoir  l  éitéré  celte  déclaration  par  serment, 
il  fut  dispensé  de  la  suite  de  l'accusation  qui  fut  soutenue, 
au  nom  du  landvogt  autrichien,  par  le  maréchal  de  Tarchi- 
duc  Sigismond,  qui  était  présent  Geliii-ci  passa  de  nooma 
tn  rerae,  dans  un  habUe  discours,  les  di?er8  articles  en  les 
appuyant  sur  des  textes  de  loi,  igoutant  :  que  les  crimes  et 
actes  honteux  reierés  contre  Hagenbacb,  ainsi  qua  d'autres 
dont  il  ne  parlait  pas,  étaient  assez  notoires  dans  le  pays  pour 
n*aTairnnllenient  besoin  de  prennes;  que,  cependant,  il  offrait 
si  on  le  désirait,  de  fournir  immédiatement  ces  preuves. 
Irmin  répliqua  que  son  client  ne  pouvait  être  convaincu  sans 
preufes;  mais  que,  si  l'on  voulait  dire  que  Ilagenbach  se  serait 
accusé  lui-même  au  milieu  des  tortures,  ces  aveux  n'auraient 
pas  étu  spontanés,  mais  arrachés  par  la  douleur.  Alors,  sur 
la  deujaude  du  maréchal,  ou  appela  les  six  témoins  jurés 
(geschworene  sechs  Z^jigen),  qui  avaient  assisté  à  la  torture 
de  llagenbach.  ils  déclarèrent  tous  unanimement,  soua  la  M 
de  leur  serment,  qu'ayant  d'être  mis  à  la  question,  Hagen- 
bacb  n'avait  rien  voulu  répondre  à  aucun  point  particulier; 
mais  qu'après  avoir  été  convenablement  igehdrig)  susptndn 
avec  des  poids  aux  pieds  et  aux  mains,  il  s'était  écrié  :  t  Lâ- 
ch^md,  je  rais  tout  avouer  I  >  et  qu'alors,  descendu  et  les 
mains  libres,  il  avait,  sur  chacune  des  questions  qui  lui  étaient 
faites,  avoué  tout  ce  que  l'accusateur  lui  reprochait,  et  beau- 
coup d'autres  choses  encore  qui  étaient  consigriées  dans  le 
procès-verbal  du  grever  provincial.  Après  l'audition  de  ces 


4  av,i.u3rtn>ui  jiiuitiulu  eiaii  assisit;  de  const^ 
même  pour  la  défense,  d  après  l'analyse  du  procès  faite 
Hagenbach  aurait  eu  quatre  défenseurs,  parmi  lesquels  1 
consulte  de  Brisach;  maia  on  voit  que  c'est  Irmin  qui  i 
et  qu'il  ne  s'en  tire  pas  mal. 


il  on  était  de 


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PiBBaS  DE  HAOENBACH 


témoins,  le  maréchal  continua  son  réquisitoire  et  conclut  à 
ce  que,  maintenant  que  I  on  était  sùr  de  l'aveu  libre  et  spon- 
tané de  Hagenbacli,  le  Schultheiss  consullàt  les  assesseurs 
sur  ce  qui  était  de  droit.  A  quoi  Irmin  répliqua  qu'il  avait 
bien  entendu  que  laveu  de  l'accusé  n'était  nullement  spon- 
tané, mais  au  contraire  arraché  par  la  torture,  et  qu'il  avait 
craint  d'être  de  nouveau  et  plus  cruellement  mis  à  la  ques- 
tion, 8*il  n'avouait  pas  tout  ce  qa'on  roulait;  ajoutant  que, 
dans  tout  ce  qui  lui  était  reproché,  il  n*avait  réellement  agi 
queaurles  ordres  du  très  sérénissime  empereur  et  du  duc, 
son  mettre.  Sur  quoi,  le  maréchal  prit  de  nouveau  la  parole 
en  ces  termes  :  «  Supposé,  mais  non  admis,  que  Hagenbach 
eût  reçu  plein  pouvoir  de  notre  empereur  ou  du  duc  de  Bour- 
gogne, ceux-ci  n^avaient  pu  penser,  ni  Tan  ni  Pantre,  quil 
l'exercerait  sans  souci  de  l'équité.  Supposer  une  telle  pensée 
à  l'empereur,  ce  serait  l'accuser  lui-même  de  lèse-majesté, 
car  ce  serait  admettre  que  l'empereur  aurait  délégué  son 
autorité  pour  un  usage  contraire  aux  Con3tilulions  mêmes  du 
Saint-Empire  romain.  »  Or,  comme  cela  était  complètement 
inadmissible,  il  concluait  de  nouveau  (.le  maréchal)  à  ce  que 
l'accusé  fût  déclaré  coupable.  Irmin  répliqua  que,  lorsque 
éclata  la  révolte  de  Thann,  l'accusé  avait  reçu,  en  ce  qui 
concernait  les  rebelles,  qui  commettaient  si  ouvertement  le 
crime  de  lèse-mqesté  envers  le  duc  de  Bourgogne  et  son 
landvogt,  plehi  pouvoir  de  les  punir,  sans  qu'il  fdt  besoin  de 
procéder  à  leur  égard  selon  les  formes  judiciaires.  En  consé- 
quence,  il  réclamait  en  ikveur  de  l'accusé  un  délai  pour  Ibur* 
nir  la  preuve  de  rantorisation  reçue,  et  que  jusque-là  il  fftt 
sursis  aux  débat*.  On  n'eut  aucun  égard  à  cette  dernière 
demande  d' Irmin  en  faveur  de  son  client,  laquelle  fut  consi- 
dérée comme  insignifiante,  et  aussitôt  les  débats  furent  clos. 

Les  jurés  se  retirèrent  pour  délibérer,  et,  à  leur  retour,  le 
déclarèrent  coupable.  Le  Schultheiss  ayant  de  nouveau 
recueilli  les  opinions  sur  la  peine  à  appliquer  au  délinquant 


RBVU£  D'aLSAGE 


(Daînquinkn)t  la  déeiaioii  Ait  que  Hagenbach  derait  être 
exécuté  par  le  glaive.  Lui-même,  debout  au  milieu  des  juges, 
inclina  sa  tête  vers  eux  et  implora  (redoutant  qiielqu'aggra- 
valion)  leur  miséricorde.  Irmiii  seul  fut  assez  courageux  pour 
émettre  de  nouveau  sa  préci'dente  proposition  :  qu'il  ne  pou- 
vait être  régulièrement  rien  entrepris  contre  Hageubach, 
tant  que  l  empereur  et  le  duc  de  Bourgogne  ne  se  seraieat 
pas  expliqués  sur  les  pouvoirs  qu'ils  lui  avaient  donnés.  Alors 
Tint  le  tour  pour  le  Hérault  impérial  (kaiseriichen  Beroid), 
Gaspard  Hurter,  de  dépouiller  le  condamné  de  sa  dignité  de 
chevalier,  en  lui  enletant  son  épée,  ainsi  que  ses  gants  et 
éperons.  Gomme  Hagenbacli  ne  portait  plus  aacan  de  ces 
insignes,  le  hérault,  se  toomant  vers  iai,  lui  adressa  ces 
mots  :  •  Je  regrette  pour  toi,  Pierre  de  Hagenbach,  que  tu 
aies  encouru  pour  tes  mé&ils  le  jugement  qui  t'a  condamné 
à  mort.  Je  devrais  t'enlerer  les  glorieux  insignes  de  la  dignité 
de  cheTalier.  Je  ne  les  trouve  plus  sur  toi.  Maintenant  donc, 
au  nom  du  céleste  protecteur  Saint-George,  en  Thonneur 
duquel  tu  fus  jadis  armé  chevalier,  je  le  décrie  ici  publique- 
ment comme  un  homme  indigne  et  dépouillé  des  honneurs, 
rang  et  grandeur  de  chevalerie.  Braves  chevaliers,  et  vous, 
nobles  écuycrs  qui  aspirez  à  la  chevalerie,  restez  dignes  de 
votre  nom,  méditez  cet  exemple  I  '  » 

Huit  exécuteurs  (Scharfric/Uer)  '  se  disputèrent  Thonneur 
d'enlever  la  vie  au  laiidvogt  déchu.  On  choisit  celui  de  Ciolmar, 
tm  petit  homme  aveeme  courie  épée,  emblème  bien  8tffnyiee0 
gm,  lonç[ue  r heure  est  venue,  le  jplus  petit  nfffU  pour  réduire 
enpoueeière  te  ptdesant  or^tieiiSlimfl;.  Cependant,  Tobscurité  se 
iiiisait.  Les  débats  avaient  duré  tout  le  jour  jusqu'à  7  heures 

*  Cette  fonnnle  si  digne  et  si  sobre  ne  ressemble  point  sa  diseonrs 
emphaiique  prêté  au  hérauU  d'armes  par  M.  de  Baiante  dans  son  iftf- 

toire  deg  ducs  de  Bourgogne. 

*  le  Schnrfrichier  cUiit  le  coupe-tête  des  nobles;  les  vilau»  avaient 
un  bourreau  appelé  Hmcker,  qui  i«s  pendait. 


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PIERRE  DE  UAQSNBACU 


dn  80îr.  On  apporta  des  torches;  les  vingt-sept  juges  mou- 
lèrent à  cheval  ;  au  milieu  d'eux  s'avançait  le  condamné, 
assisté  de  son  confesseur;  le  peuple  en  foule  courait  derrière. 
Le  funèbre  cortège  sortit  par  la  Porte  d'en  haut  et  se  rendit 
sur  le  lieu  du  supplice;  là,  Hagenbach  se  dressa  encore  une 
fois  au  milieu  du  cercle  et  dit  :  <  Je  ne  regrette  pas  la  vie  ; 
j*ai  souvent  exposé  la  mienne;  mais  ma  mort  entraînera  celle 
de  plus  d'un  honnête  homme,  car  le  duc  Charles  en  tirera 
vengeance.  Néanmoina,  pardonnez-moi  tons  pour  Tamour  de 
Diea  et  de  sa  mère,  la  yierge  Marie.  Pries  tous  pour  moi  (  > 

I  11  demanda  encore  (ainsi  qa*il  Vmii  réglé  par  son  tes- 
tament) qae  Tarchidnc  fit  délivrer  à  l*égiise  de  Brisach  sa 
chaîne  €l*or  et  ses  seise  chevaux.  Ensuite,  Il  se  mit  à  genoux, 
les  mains  liées,  et  fut  décapité  K  Son  corps  Ait  porté  à  Hagen- 
bach, dans  le  tombeau  de  ses  pères.  > 

On  voit  au  musée  des  Unterlindende  Colmar,  soug  un  globe 
de  verre,  une  tête  rousse,  hideuse,  les  dents  serrées,  repo- 
sant sur  deux  mains  et  qu'on  prétend  être  celle  de  Ilajîen- 
bach.  C'est  une  erreur;  ces  restes  sont  ceux  d'un  chevalier 
de  Saint-Jean,  de  la  commanderie  de  Fribourg  en  Brisgau, 
martyrisé  en  Terre-Sainte  par  les  Sarrazins;  ils  furent  rap- 
portés en  Europe  par  les  frères  d'armes  de  la  victime,  et 
longtemps  vénérés  comme  reliques  à  Fribourg;  les  Français 
les  enlevèrent,  en  1796,  de  la  cathédrale  de  cette  ville  et  les 
envoyèrent  à  Ck>lmar. 

P.-E.  TUEFFERD. 


^  Sdon  la  relation  rapportée  par  M.  Rnsmann,  bourreau  s'acquitta 
avec  dextérité  de  son  oftlce  :  il  sépara  maitremetU  la  Ule  d»  tronc. 

Kcnmlte  8M»  —  7*  Année.  16 


MATERIAUX 

POUR  S£RVIR  A 

L'HISTOlBfi  DE  U  GUERRE  DE  TRENTE  ANS 

tirés  des  archives  de  Colmar  ' 


Négociations  du  résident  de  Suède  Mockbel  avec 
le  résident  de  France  Melchior  de  l'Isle,  pour 
procurer  à  Colmar,  de  l'aveu  de  la  ville,  dll 
chancelier  AxelOxenstirn  et  durhingrraveOtton- 
Louis,  la  protection  de  la  France;  recours  au 
maréchal  Gaumont  de  La  Force;  traité  couolu 
sous  la  réserve  de  la  ratification  des  deux  cou- 
ronnes; travaux  de  fortification. 

Après  le  désastre  de  Nordlingeii,  les  chefs  da  parti  protes- 
tant, Oxenstirn  à  leur  tôle,  sentirent  que  c'en  était  fait  de  la 
prépondérance  de  la  Suède  dans  les  affaires  communes  de 
l'Union.  En  même  temps  que  Colmar  tournait  les  yeux  vers 
la  France,  le  chancelier  mandait,  le  9  septembre  1634,  au 
résident  Mockhel,  à  Strasbourg,  que,  malgré  les  pertes  subies 
à  Nordliogea,  la  partie  n*était  pas  perdue;  il  fallait  implorer 
le  secours  de  Dieu,  rassembler  les  débris  de  l'armée  et  la 
mettre  sur  un  pied  respectable.  Ozeiistim  espérait  que,  dans 
cette  épreuve,  Strasbourg  ne  se  laisserait  pas  ébranler,  et 

*  Voir  la  livnisoii  de  Octobre-Novembre-Décembn  1877. 


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mSTOniË  DE  LA  GUERRE  DE  TRENTE  ANS 


227 


qull  serait  à  la  haatenr  de  tous  tes  sacrifices  imposés  par 
les  drconstances.  QaantàGolmar  et  à  quelques  autres  villes 
d*Âlsace,  il  partageait  l'avis  de  Mockhel  que,  dans  un  moment 
donné,  il  leur  serait  avantageux  d'accepter  la  protection  fran- 
çaise, moyennant  la  garantie  de  capitulations,  plutôt  que  de 
risquer  leur  salut,  corps  et  âmes,  en  se  remettant  soua  le 
joug  des  armées  espagnoles  et  impériales. 

Dans  une  seconde  lettre  du  12  septembre,  Oxenstirn,  qui 
venait  d'apprendre  que  les  châteaux  de  Thanu  et  de  Beifort 
avaient  été  remis  entre  les  mains  de  ia  France^  engage  le 
résident  à  faire  mettre  les  autres  places  fortes  en  état  de 
soutoiir  un  siège,  en  ijoutant  que,  si  la  nécessité  Tezige,  il 
ne  Terrait  pas  d'inconrénient  à  coafier  également  aux  troupes 
françaises  la  protection  de  Gdniar  et  de  Sélestadi 

Golmar,  de  son  cdté^  prend  tontes  les  mesures  pour  parer 
aux  éventualités.  On  fait  venir  de  Benfeld  deux  canons  nou- 
vellement coulés  par  le  fondeur  Quinckelberger;  on  invite  le 
capitaine  Adrian  à  se  rendre  à  Colmar;  on  se  procure  les 
munitions  qui  faisaient  défaut.  Eu  ce  qui  les  concerue,  les 
généraux  suédois  secondent  de  leur  mieux  ces  efforts  et  en- 
voient à  Colmar  les  régiments  de  Scha^vlitzki  et  deLoewiza  : 
c'était  un  renfort  de  850  hommes  pour  la  garnison.  Les 
troupes  suédoises  qui  tenaient  la  campagne,  et  notamment  la 
cavalerie  qui  veillait  à  la  sûreté  de  la  rive  gauche  du  Rhin, 
reçoivent  l'ordre  de  combiner  leurs  mouvements  de  manière 
à  couvrir  la  place.  On  maintient  provisoirement  à  Ensisbeim, 
qtt*il  avait  été  question  d'évacuer,  une  petite  garnison  de 
75  hommes,  suflisanto  pour  arrêter  un  instant  les  progrès  de 
Tennemi  dans  la  hante  Alsace. 

Ces  précautions  n'empêchaient  ni  la  ville,  vi  le  fésident 
Mbd[hel  de  sentir  que  le  secours  de  la  France  pouvait  senl 
prévenir  une  catastrophe.  Le  danger  devenait  de  plus  en  plus 
pressant.  Le  rhingrave  Oltuu-Louis,  qui  n'avait  pu  prendre 
part  à  la  bataille  de  Nordlingen,  se  rapprochait  de  l'Alsace, 


228 


BEVUE  D'ALSACE 


suivi  de  près  par  le  duc  de  Lorraine  et  le  fameux  Jean  de 
Wertii,  à  la  tôle  de  six  régiments  de  cavalerie,  de  deux  régi- 
ments de  Croates  et  de  3000  mousquetaires.  Avant  de  passer 
le  pont  de  Kehl,  le  rhingrave  dut  soutenir  plusieurs  engagc- 
menls,  dont  des  lettres  de  Strasbourg,  du  18  et  du  19  sep- 
tembre, entcetienneat  la  ville.  Par  suite  de  l*e[)Coinbreineat 
des  voitures  sar  le  pont,  où  Strasboarg  prétendait  percevoir 
le  péage,  les  troupes  suédoises,  refoulées  dans  leur  mardie, 
psrdîreut  aoe  partie  de  leur  arrière-garde.  Olton-Lonis  même 
faillU  tomber  entre  le  mains  de  Tennemi,  le  17  septembre,  à 
WildstiBtt.  Cependant  il  étaitresté  mettre  du  passage  du  Rhin: 
mais,  dès  ce  moment,  Mockhel  préToyait  quMl serait  obligé  de 
se  retirer  et,  dans  ce  cas,  il  ne  restait  à  Golmar,  après  le 
secours  du  Tout-Puissant,  que  l  appui  éventuel  de  la  France, 
dont  la  proteclion  s'élctidait  déjà  sur  les  seigneuries  de  Bel- 
fort  et  de  Délie.  De  concert  avec  la  ville,  il  était  entré  en 
négociations  avec  le  résident  de  France  et,  en  cas  de  besoin, 
il  avait  l'espérance  que  la  garnison  française  de  Belfort  se 
rendrait  à  Golmar  et  que,  do  son  côté,  le  maréchal  de  La 
Force  enverrait  du  secours.  Mockhel  n'oubliait  pas  de  rappe- 
ler à  la  Tille  le  danger  que  courait  le  régime  restauré  en 
i6SS,  dans  la  persuasion  que  les  hommes  qu'il  sTait  ramenés 
au  pouToir  sauraient  défendre  leur  position.  En  ce  moment, 
on  eontinuait  de  s'occuper  des  fortifications  :  Mockhel  presse 
la  Tille  d*acheTer  la  contrescarpe  et  d'englober  le  moulin  de 
MHieden  dans  les  ouvrages.  Ce  Ait  pour  ces  traTauzdedéfiBiise 
que  Golmar  se  procura  alors  8600  palissades  par  Toie  de 
réquisition. 

Indépendamment  de  l'état-major,  la  Suède  était  représen- 
tée à  Golmar  par  un  commissaire,  chargé  d'assister  le  magis- 
trat de  ses  conseils,  au  besoin  de  ses  actes,  et  correspondant 
avec  le  résident  qui  le  nommait.  Brombacb,  qui  aTait  jusque- 
là  rempli  ces  fonctions,  rei^ot  à  cette  époque  une  autre  des- 


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UISTOIRË  DS  LA  GU£BRE  D£  TRENTE  ANS  2S9 

tinttioii,  et  Hockhel  le  remplaça  par  Jean-GnUlaume  Tafinger, 
aecrétaire  de  la  diambre  da  comte  de  Hohenlobe. 

Le  lieatenantHM)lonel  de  ROicken,  qui  commandait  la  place, 
aTaît  reçu,  le  18  septembre,  du  rhingrave  Olton- Louis  les 
ordres  nécessaires  pour  la  défense  de  la  ville.  Il  prêla  à  la 
ville  le  serment  de  faire  son  devoir  et,  sur  sa  demande,  le 
magistrat  convoqua,  le  21  septembre,  à  4  heures  du  matin, 
le  conseil  des  écbeyios,  pour  s'aasurer  des  dispositions  de  la 
bourgeoisie. 

Le  greffier-syndic  donna  lecture  d'un  rapport  sur  la  situa- 
tion critique  où  Ton  se  trouyait.il  expliqua  que,  <  nonobatant 
les  échecs  que  la  Suède  aTait  subis,  Golmar  ne  serait  pas 
abaadoDné  :  la  garnisoD  était  tout  déronée^  et  aa  dehon  la 
France  Tdllait.  Pour  aaarer  les  vieilles  immunités,  il  ne  s'a- 
gissait que  de  rester  uni,  de  se  souvenir  da  serment  prêté, 
de  ne  reculer,  ni  devant  le  danger,  ni  devant  les  sacrifices, 
pour  assurer  le  salut  commun.  Il  plaira  sans  doute  aux  éehe- 
vins  de  manifester  la  résolution  dont  ils  sont  animés;  cepen- 
dant, si  Tun  ou  Tautre  avait  un  meilleur  avis  à  proposer,  le 
magistrat  était  prêt  à  l'entendre  •. 

Le  conseil  des  échevins  s'associa  unanimement  à  ces  sen- 
timents. Il  fut  résolu  qu'on  se  défendrait  jusqu'au  dernier 
homme,  qu'on  ne  marchanderait  ni  sa  vie,  ni  son  sang,  ni 
son  bien  et,  pour  commencer  les  sacrifices,  le  magistrat  et  le 
conseil  votèrent  une  contribution  générale  d'une  mesure  par 
foudre  de  vin  (Cf.  Ptot  mias.,  lettre  du  25  septembre  à 
Moekhel). 

Hockhel  tenait  la  ville  au  courant  de  toutes  les  nouvelles 
capables  de  lui  hausser  le  cœur.  Le  duc  de  Lorraine  ne  foi- 
aaitguèra  de  progris  dans  le  Margraviat  II  avait  inutilement 
sommé  Offenbourg  de  se  rendre.  Le  rbingrave  jugeait  que 
ce  prince  descendrait  la  vallée  du  Rhin,  pour  n  joindre  le  gros 
des  Impériaux,  ce  qui  assurerait  au  moins  pendant  l'hiver 
la  tranquillité  de  Golmar.  L'armée  suédoise  se  fortiûail  au* 


280 


BETUB  D'ALBACB 


tour  de  Francfort,  par  la  jonction  des  troupes  de  liesse  et  de 
Liinebourg.  Le  feld-roaréchal  Bannîer  avait  sous  ses  ordres 
20,000  Saxons.  Enfin,  le  maréchal  de  La  Force  occupait  Boux- 
willer  et  les  environs.  Il  est  vrai  que  son  attitude  était  pas- 
sive, et  Mockhel  se  demandei  dans  sa  leitre  du  21  septembre, 
sli  agira  ou  non. 

Cette  lenteur  était  affectée  :  elle  avait  pour  bat  de  &ire 
mienx  sentir  à  Ozenstirn  le  besoin  qa*îl  avait  de  la  France. 
Mais  lea  négociations  n*en  tratnaient  pas  moins  plus  qu'il  ne 
convenait  à  Mockhel  et  à  Golmar.  Â  ce  moment  le  résident 
de  Suède  reprenait  une  combinaison  déjà  traitée  à  Francfort 
et  à  laquelle  la  ville  s'était  laissé  ramener  (Cf.  Rapport  an 
conseil  des  échevins)  ;  il  s'agit  de  Sélestadt,  quïl  proposait 
de  sncrifier  seul  à  la  France,  qui  y  aurait  mis  garnison,  en 
s'engageant  en  revanche  à  secourir  Colmar  en  cas  de  siège 
ou  de  blocus. 

Les  événements  se  chargèrent  d'éclairer  Mockhel  sur  l'é- 
tendue des  sacrifices  que  la  situation  commandait.  Le  rhin- 
grave  Okhon-Louis  avait  quitté  Strasbourg  ;  le  26  septembre, 
il  était  à  Seiz.  De  l*aatre  côté  da  Rhin,  l'armée  bavaroise  de 
Jean  de  Werth  passait  la  nuit  à  Rastadt.  lie  fleuve  seul  sépa- 
rait les  deux  armées  et,  dans  cetle  situation  critique  où,  de 
Taven  du  rhingrave  même,  il  ne  savait  à  quoi  se  résoudre,  il 
envoya  une  dépêche  à  Mockhel  pour  lui  recommander  à  la 
fois  l'achèvement  des  fortifications  de  Strasbourg  et  la  con- 
clusion du  traité  qui  devait  livrer  à  la  France  les  places  de 
la  haute  Alsace,  où  la  Suède  avait  encore  des  garnisons.  On 
sait  que  ce  vaillant  soldat  mourut  à  quelques  jours  de  là 
d'une  maladie  aiguë. 

Malgré  le  mystère  qui  entourait  les  négociations,  Stras- 
bourg en  eut  connaissance  et  s'en  alarma.  En  vertu  de  son 
droit  de  convoquer  et  de  présider  la  diète  des  villes  impériales, 
il  crut  pouvoir  intervenir  et  fit  remettre  aux  résidents  de 
France  et  de  Suède  une  note,  datée  du  27  septembre.  Dans 


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HISTOmB  DB  LL  CtUBBBB  SB  TBBMTB  ANS  981 

ee  doeamenk,  Strasbourg  ne  disBimnle  pas  qa*aa  point  où  en 
Bont  les  choses,  il  ne  pense  pas  qne  ses  obsemtions  soient 
accueillies  :  cependant,  comme  le  traité  à  interrenîr  doTaît 
réserver  la  ratification  des  deux  couronnes,  il  espérait  qn'on 
pourrait  encore  tenir  compte  de  son  avis. 

Gela  posé,  Strasbourg  demande  qa*on  étende  aux  autres 
Tilles  protestantes,  telles  que  MQnster,  le  bénéiice  des  garan- 
ties stipulées  en  faveur  de  Golmar. 

En  ce  qui  concerne  cette  dernière  ville,  il  veut  aussi  que 
le  traité  de  protection  réserve  formellement  les  droits  de 
l'Empire  et  les  franchises  municipales;  qu'il  soit  interdit  aux 
commandants  de  place  français  d'établir  de  nouveaux  péages 
endroits  de  douane;  que  les  vllies  qui  acceptent  la  protection 
puissent  continuer  à  correspondre  stcc  leurs  alliés  et  notam- 
ment avec  Strasbourg;  enfin,  que  le  traité  ne  les  relève  pas 
des  obligations  qui  leur  incombent  comme  membres  de  VV- 
nion  de  Heilbronn,  soumis  aux  contributions  dues  à  la  caisse 
commune. 

Gomme  Strasbonig  Tavait  prévu,  le  traité  était  à  la  vdlie 
d'être  signé  :  il  porte  la  date  du  9  octobre.  Etant  conclu  avec 

la  France,  il  est  probable  qu'on  (It  usage  du  calendrier  gré- 
gorien. Soit  qu'on  se  fût  in^ipiré  des  vues  de  la  ville  de  Stras- 
bourg, soit  plutôt  que  les  conditions  fussent  imposées  par  la 
situation  générale,  elles  répondent  entièrement  aux  vœux 
exprimés  dans  la  note  du  27  septembre. 

L'importance  de  cet  instrument,  qui  n'a  jamais  été  publié, 
non  plus  que  son  annexe,  ne  permet  pas  de  n'en  donner  que 
des  extraits  ;  en  voici  le  texte  fidèlement  reproduit  de  Tori- 
ginal  : 

Le  bien  public  des  affaires  comnaunes  requérant  de  reti- 
rer les  armes  de  la  couronne  de  Suéde  des  principales 
places  de  l'Alsace,  pour  les  mettre  sous  la  protection  de 
saMai'^treschrestienac,  les  Ministres  des  deux  couronnes 
soubsignea  sont  tombez  d'accord,  pour  les  villes  et  chat- 


BEVUE  D'ALSACE 


teaux  de  Cotmar,  Scblettstat,  Marckelsheîm,  Turckheim, 
Easisheim,  Mûaster,  Kaisersperg,  Ru&c,  Mtirbac,  Geb- 
willer,  Daoo,  Polyeiler,  Oberberkheim,  Hohenlandsperg, 
Rotenburg  ynd  (sic)  Maszmûnster  et  Hohenkœnkesbeig, 
quelles  seront  mises  sous  la  protection  de  [la]  France, 
aux  conditions  suiuantes  et  à  la  ratification  de  leurs  sou- 
Terains  et  supérieurs  : 

Premièrement  et  en  gênerai  que,  par  ladicte  protection, 
le  R07  très  Cbrestien  nentend  point  déroger  aux  droicts  de 
Tempire  et  de  la  liberté  des  Estats  alliez,  ni  de  contrevenir 
•  ou  prœiudic[i]er  aux  traittez  d'alliance  &ict8  à  Hailbron 
et  depuis  a  Francfort,  soit  pour  la  bonne  intelligence  re- 
quise et  nécessaire  entre  iceux  et  spedelement  touchant 
les  communications  ordinaires  des  villes  impériales,  ains 
ploustost  destablir  et  confirmer  tout  cela  de  plus  en  plus, 
tellement  que,  non  obstant  la  dicte  protection,  le  tout 
demeurera  en  Testât  accoustume  et  convenu  es  articles  du 
traitté  de  la  dicte  alliance,  et  mesmes  que  les  gouuemeurs 
des  places  et  guarnisons  que  le  Roy  très  Chrestîen  voudra 
ordonner  en  dictes  places,  apporteront  toute  assistance  à 
l'accomplissement  d'iceux,  autant  que  faire  ce  (sic)  pourra. 

Secondement  que  les  alliez  auront  libre  passage  f>ar 
toutes  les  dictes  places  et  retraitte  en  icelle  en  cas  de  néces- 
sité, comme  aussi  leur  seront  au  besoin  fournis  viures, 
munitions  de  guerre  et  aultres  necessitésà  prix  raisonnable, 
et  tout  cela  au  contraire  dénié  et  refusé  aux  ennemis,  contre 
Icsq  kIs  et  leurs  excursions  sa  Mai'*  protégera  et  défendra 
les  dites  places  auec  leurs  dépendances,  autant  que  faire 
ce  pourra,  et  resteblera  (sic)  en  icelles  la  seureté  et  liberté 
du  commerce  public,  sans  permettre  qu'aucuns  nouueaux 
pcagrcs  et  imposts  soyent  introduits  au  prseiudice  du  com- 
merce public  et  de  la  liberté  des  Princes  et  Estats  alliez, 
sous  quelque  praetexte  que  ce  soit. 

En  troisicsme  lieu  que  toutes  lesdictes  places  et  leurs 
dépendances  demeureront  en  la  possession  et  au  mcsme 
estât,  tant  pour  le  faict  de  la  Religion  que  de  la  Police, 
auquel  elles  se  trouvent  présentement,  iusques  à  la  pacifi- 


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BUTOIBB  1»  LA  OUSBBB  SB  TBBMTl  AMS 


888 


cation  des  guerres  d'Alemagnc  {sic),  laquelle  arrivant,  elles 
seront  remises  à  un  chacun,  selon  le  contenu  du  traittc  de 
paix  qui  sera  faict.  Et  d'autant  qu'es  villes  de  Colmar  et 
Schetstat  {sic)  y  a  cinq  gros  canons  appartenans  à  Mons,  le 
Marquis  de  Baden  et  à  la  ville  de  Strasbourg,  comme  aussi 
quelques  petites  pièces  de  campaigne  de  la  couronne  de 
Suéde,  est  accordé  qu'ils  seront  preallablement  rendus  à 
ceux  à  qu'ils  appartiennent,  comme  aussi  les  munitions 
et  grains  qui  appartiennent  aux  munitionnaires  Suédois 
et  non  auxdictcs  villes. 

Finalement  que  les  articles  particuliers  concernant  la 
ville  de  Colmar,  desquels  les  ministres  des  deux  dictes 
Couronnes  sont  tombez  d'accord  avec  les  députez  de  la 
dicte  ville,  seront  poinctucUement  observez  de  bonne  foy 
et  sans  aucunne  contravention. 

Faict  et  accorde  soubs  la  ratification  des  souverains  et 
supérieurs,  le  9  octobre  1634. 

FRroERiG  Richard  Mogkiiel, 
Coaseill'*.  et  Résident  de  la  Couronne  de  Suéde  eu  Alsace. 

Les  articles  particuliers,  aa  nombre  de  treize,  forment  un 
traité  Béparé,  dont  voici  également  le  texte  : 

ArtUiies  ccmwnus  et  accordés  entre  les  deux  BesiderUs  de  la 
Couronne  de  Suedenetde  la  Fftmce,  touchant  la  protec- 
tion de  la  tnUe  Itnperiaie  de  Colmar. 

1.  —  La  ville  Imperialle  de  Colmar,  auec  tous  ses  bour- 
geois et  habitans,  comme  aussi  son  territoire,  dépendances 
et  appartenances,  seront  receu  en  la  protection  du  Roy 
Tres-Chrestien,  pour  y  estre  et  demeurer  iusques  à  la 
Pacification  de  ceste  guerre  présente,  en  Allemagne,  la- 
quelle arrivant,  la  dicte  ville  sera  remise  en  Testât  tout 
entier  auquel  elle  a  esté  avant  le  commencement  de  ces 
troubles  en  Allemagne  et  Bohême,  de  l'année  162a 

3.  —  La  dicte  ville  sera  conservée  en  tous  ses  privilèges, 
franchises,  immunités,  droicts  et  coutumes  desquels  elle  a 
iouy  iusques  à  maintenant,  sans  diminution  quelconque. 


234 


REVUE  D'ALSACE 


d.  —  Les  afibires  d*estat  et  de  iustice  de  la  dicte  Tille 
seront  gouvernées  comme  par  cy-devant,  par  la  mesme 
forme  de  gouuernement,  sans  que  sa  Maiestè  prétende  de 
changer  chose  quelconque  en  Telection  et  iurisdiction  des 
Magistrats,  ny  au  nombre  et  qualité  des  personnes. 

4  —  Et  pour  le  faict  de  la  Religion,  il  est  convenu  et 
accordé  que  les  deux  Religion,  Protestante  et  Catholique, 
y  seront  entretenus  en  leurs  exercices,  libertés  et  fran- 
chises, ainsi  que  de  présent  la  susdicte  ville  et  habitans  en 
iovissent,  sans  y  rien  changer  ou  innover  soubs  quelque 
prœtexte  que  ce  soit. 

5.  —  Les  Monastères,  Abbayes,  Egcliscs  Collégiales,  Pra:- 
positurcs,  qui  appartiennent  à  la  dicte  ville,  oucetrouucnt 
en  la  protection  d'icelle,  y  seront  maintenus  en  l  estât 
auquel  elles  sont  présentement,  sans  diminution  du  droict 
de  Patronat  et  aultres  droicts  appertenans  a  la  dicte  ville, 
dans  laquelle  on  ne  permettra  point  que  [de]  nouveaux 
ordres  y  entrent,  que  ceux  qui  y  sont  de  présent. 

6.  —  La  guarnison  que  le  Roy  mettra  dans  la  ville,  comme 
aussi  les  fortifications  nécessaires,  seront  entretenus  et 
faictes  aux  tlespcns  de  sa  Maiestè,  sans  que  pourtant  elle 
prétende  en  tirer  aucune  rétribution,  recompense  ny  ad- 
vantage. 

7.  —  Et  dautant  que  les  bourgeois  et  habitans  de  la  dicte 
ville  ont  depuis  quelques  années  beaucoup  pati,  sa  Maiestè 
trouvera  bon  de  ne  les  poinct  charger  de  plus  grande  guar- 
nison  qu'ils  ne  peuuent  soupportcr,  et  pour  le  présent  pas 
plus  de  six  cent  hommes  de  pied  (  y  compris  deux  cent 
cinquante  que  la  dicte  ville  a  desia  levez)  et  de  cinquante 
carabins. 

8.  —  Le  gouverneur  que  le  Roy  mettra  dans  la  ville, 
sera  obligé  de  tenir  bon  ordre  et  discipline  entre  les  soldats 
de  la  guamison,  a  ce  qu'ils  ne  fieicent  aucun  tort  aux  habi- 
tans de  la  ville  et  plat  pays,  et  cas  advenant  qu'il  [y]  ait 
plaincte  d^un  bourgeois  contre  le  soldat,  fera  bonne  et 
briefve  iustice.  Comme  au  réciproque  si  le  soldat  a  subiect 


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HOTOIBB  DB  LA  OUBRBB  DE  TRENTE  ANS 


235 


de  se  plaindre  du  bourgeois,  le  Magistrat  ordinaire  de  la 
yille  sera  tenu  de  &ire  aussi  bonne  raison  au  soldat. 

9.  —  Le  logement  des  soldats  et  disUibution  des  quar- 
tiers de  la  ville  sera  donné  par  ceux  que  le  Magistrat  d*i* 
celle  députera,  sans  que  aultre  s'en  doive  mesler. 

10.  —  La  dicte  ville  ayant  [tant]  du  temps  de  la  Guarnison 
Impériale  que  Suédoise  tousiours  entretenu  à  chasque 
porte  quelque  boar^-eois  pour  servir  et  ayder  tant  à  la 
garde  d'icclles  que  pour  veiller  sur  l'entrée  et  sortie  des 
denrées  et  du  péage  et  tribut  qui  leur  appartient,  sera 
maintenue  en  telle  coustumc. 

11.  —  Le  gouuerneur  entrant  dans  la  ville,  il  sera  faict 
inventaire  des  canons,  armes  et  munitions  qui  se  trouue- 
ront  dans  icelle,  lesquels  seront  après  la  dicte  pacification 
remis  et  restituées  à  la  dicte  ville,  en  pareille  quantité  et 
qualités. 

12i  —  £t  combien  que  par  cy  devant,  tant  du  temps  de 
la  Guarnison  Impériale  que  Suédoise,  les  clefe  des  portes 
et  entrées  de  la  ville  soient  esté  tousiours  portées  au  logis 
du  premier  Magistrat  d'icelle,  si  est  ce  qu'il  a  esté  accordé 
que  de  chasque  porte  la  moitié  de[s]  clefs  soit  rendue  au 
logis  du  Gouverneur  et  i'aultre  en  celuy  du  dict  premier 
Magistrat,  à  fin  que  du  commun  consentement  de  tous 
deux,  les  portes  s'ouurent  et  se  ferment. 

13.  —  Finalement  comme  le  R07  par  sa  protection  ne 
prétend  point  de  dimminuer  (sk)^  ains  plustost  de  conser- 
ver les  droicts  et  privilèges  de  la  dicte  ville,  aussi  est  sa 
Maiesté  contente  qu'elle  demeure  et  persiste  dans  TAllianoe 
faicte  à  Hailbron  et  dans  la  bonne  correspondance  des 
aultres  alliez. 


yiSUSSJXSSt  DB  ïàIBLB, 

geotilhomme  ord*  de  la  chambra 
du  Roy  tris  Chrestien,  cons*' 

deslat  et  Ambassad'  résident 
s;i  Mnicsté  presenlemeat  à  Stras- 
bourg. 


Fbidebiq  Richard  Mockhel, 
conseil' et  Résident  de  la  Gou- 
rofuie  de  Snede  en  Alsace. 


BEVUE  D'ALSAGE 


Sous  la  même  date,  MUnster  obtint  également  des  gatanties 

particulières,  tant  pour  lui  que  pour  les  villages  qui  ccnstl- 
tuaieiil  ensemble  la  cité  et  vallée  de  Saint-Grégoire. 

Le  traité  une  fais  signé,  il  s'agissait  d'en  assurer  l'exécutioa. 
Dans  ce  but,  de  L  lsle,  accompagné  des  députés  deCoIraur,  se 
rendit  au  quartier  général  français  pour  porter  l'instrument 
à  la  coonaissanœ  du  maréchal  Jacques  Bompar  Cauraont  de 
la  Force.  Mockbel,  que  le  soin  des  affaires  retenait  à  Stras- 
boorg,  écrivit  le  80  septembre  (10  octobre)  an  maréchal 
poar  s*ezcaser  et  pour  recommander  les  députés  à  sa  bien- 
▼eillanoe. 

Ce  fut  arec  une  joie  profonde  que  la  yille  remercia,  le  S 
octobre,  le  négociateur  suédois  de  Theureux  résultat  de  ses 
efforts.  Elle  croyait  voir  une  nouvelle  ère  de  paix  et  de  pro« 
Hpérité  s'ouvrir  à  son  profit;  elle  comptait  que  le  traité  était 

la  meilleure  sauvegarde  «  de  la  gloire  de  Dieu,  des  vieilles 
franchises  germaniques  et  de  la  liberté  religieuse  ».  Cepen- 
dant Mockhel  jugeait  mieux  de  la  situation  :  dans  la  lettre 
par  laquelle  il  avait  annoncé,  le  30  septembre,  la  conclusion 
du  traité,  le  passage  suivant  montre  qu'il  ne  se  faisait  pas 
illusion  :  t  Quant  à  l'unique  but  que  je  me  suis  proposé  dans 
cette  affaire,  à  savoir  la  gloire  de  Dieu,  le  maintien  de  sa 
parole  et  de  la  liberté  politique  de  la  ?iile,  le  salut  général 
de  tons  les  habitants,  il  &ut  instamment  prier  le  Tout-Puis- 
sant pour  qu*on  Tatteigne.  » 

Les  Impériaux  ne  s'attendaient  pas  à  yoîr  la  France  inter- 
▼enlr  pour  leur  enle?er  le  fruit  de  leurs  succès.  A  la  première 
nouTelle  que  les  Suédois  doTaient  abandonner  aux  troupes 
françaises  le  chftteau  de  Belfort,  le  margrave  Guillaume  de 
Bade,  qui  exerçait,  au  nom  de  TEmpire,  le  commandement 
suprême  sur  le  haut  Rhin  et  qui  était  revêtu  de  plus  de 
l'onice  de  grand-bailli  des  pays  antérieurs,  avait  donné,  le 
5  octobre  (ii.  st.),  au  partisan  Oriel  ordre  de  se  saisir  du  fort; 
mais,  vul'iasuflisaQce  de  ses  forces,  prévoyant  qu'il  ne  pour- 


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HISTOIRE  DE  LA  GUERRE  DE  TRENTE  ANS 


237 


nit  pas  en  disputer  la  possession,  ii  protestait  eontre  rentrée 
des  Français,  qu'il  considMlt  comme  un  acte  d'hostilité  non 
justifié  et  comme  une  atteinte  aax  droits  de  la  maison  â*Aa- 

triche  sur  la  roche  et  la  seigneurie  de  Belfort.  Ce  fut  pour 
répondre  à  cette  protestation  que  Melchior  de  L'Isle  adressa 
le  10  (20)  octobre,  de  Colmar,  où  il  était  arrivé  la  veille  avec 
Mockhel,  au  margrave  Guillaume  la  lettre  suivante  : 

Monseigneur, 

Les  peuples  de  cette  province  ayant  recogneuladooceur 
et  seureté  dont  iouissent  ceux  que  le  Roy  très  chrestien, 
mon  maistre,  honore  de  sa  protection,  ont  creu  ne  pou- 
uoir  en  aucune  feçon  mieux  pouruoir  à  leur  salut  et  à  la 
oonseruation  de  tout  le  pays,  qu'en  ayant  recours  à  icelle. 
C'est  pourquoy  sur  les  considérations  que  ladite  maiestë 
a  eu  de  la  désolation  générale  de  ce  pays,  et  sur  l'instance 
qu'ils  lui  en  ont  ûicte,  elle  les  a  receu  en  sa  royale  protec- 
tion iusques  à  une  pacification  générale  en  AUemaigne, 
sans  sur  ce  moyen  preiudicier  en  aucune  &çon  aux  droits 
de  l'Empire,  ny  aux  franchises  et  priviieges  de  ces  peuples. 
De  quoy  j'ay  creu  deuoir  donner  aduis  à  vostre  Altesse, 
afin  que  tant  ceste  ville  que  les  autres  places  qui  se  trou- 
uent  honorez  de  la  protection  du  Roy,  ne  soyent  point 
inquiétez  ny  troublez  par  les  soldats  de  vostrc  garnison, 
et  que  toute  bonne  correspondance  soit  entretenue  de  part 
et  d'autre.  Ce  qu'attendant  de  vostre  Altesse,  ie  me  dis  etc. 

Le  margrave  se  borna  à  accuser  réception  de  cette  com- 
munication :  ii  refusa  d'y  répondre  immédiatement,  en  allé- 
guant qa*eUe  était  de  trop  grande  considération  ;ee  récépissé 
est  daté  de  Biisach,  SI  octobre.  Le  même  jour,  le  résident  de 
France  signa  un  acte  qoi,  sous  la  réserve  des  franchises  de 
la  commune,  étendait  la  protection  française  à  la  ville  de 
TOrkheim. 

Cest  ainsi  que  la  France  prenait  pied  sur  la  rive  gauche 
du  Rhin.  Dès  le  commencement  de  Tannée,  le  comte  de  Salm 


888 


BEVUE  D'ALSACE 


lui  avait  remis  Savenie  et  Haguenau.  Précédemment  déjà, 
les  princes  de  Monlbéliard  avaient  conclu  un  traité  semblable, 
en  vertu  duquel  Horbourg  et  Riquewihr  avaient  rerii  de 
petites  garnisons  françaises,  sous  le  commandement  d'un  oili- 
cier  du  nom  de  Lachaulne. 


X.  MOSSMANN. 


(la  «tttte  h  la  prochoMe  Uvraiion.) 


DOCUMENTS  INÉDITS 


pour  servir  à  Tbisloire  de  l'Uicieiiiie 


SËIGNËUlUE  DU  BAN-DË-U-RÛCHË 


Le  Ban-de-la- Boche,  en  allemand  Steinthal,  a  acquis  une 
notoriété  presque  universelle,  grâce  au  long  ministère  du 
pasteur  Oberlin,  qui,  à  la  fia  du  siècle  dernier  et  au  commen- 
cement de  celui-ci,  y  accomplit  une  œuvre  de  civilisation 
chrétienne,  au  triple  point  de  vue  social,  charitable  et  reli- 
gieux. Toutefois,  ce  n'est  point  à  ce  point  de  Tue  que  nous 
voulons  publier  des  documents  inédits  ou  peu  oonnus,  quel- 
qulntérwsants  qu'ils  soient;  nous  pourrons  peut-être  plus 
tard  en  mettre  aussi  au  jour. 

Les  pièoes  que  nous  ayons  IMntention  de  ftiire  connaître 
remontent  pour  la  plupart  à  une  époque  antérieure  et  se  rap- 
portent aux  ancfens  possesseurs  de  la  contrée.  Ce  sont  des 
documents  qui  peuvent  servir  à  l'histoire  de  Tandenne  sei- 
gneurie ou  comté  du  Ban-de-la-Roche.  Nous  en  indiquerons 
au  fur  et  à  mesure  la  provenance  et  nous  en  donnerons  le 
contenu  intégral  ou  partiel  suivant  leur  importance,  en  y 
ajoutant  quelquefois  des  annotations.  Mais  nous  serons  heu- 
reux si  leur  publication  provoque  des  recherches  fructueuses 


(en  allemand  Zum  Stein) 


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240  REVUS  D'ALSAOB 

de  la  part  des  amis  de  Thisloire  d'Alsace  qui  auraient  con- 
naissance de  pièces  analogues  ou  qui  pourraient  noua  fournir 
des  renseignements  utiles. 

Mais,  tupanYant,  nous  croyons  devoir  donner  une  eonrte 
notice  historique  sur  la  contrée  dont  il  s^agit,  afin  de  rander 
plos  claires  et  plus  compréhensibleB  les  documents  qui  8*7 
rapportent 


Le  Ban-de-Ia-Rocbe  est  une  contrée  pittoresque  et  monta- 
gneusCi  située  dans  la  partie  supérieure  de  la  vallée  de  la 
Bruche,  sur  le  Tersaot  occidental  du  Ghamp-dn-Feu,  système 
de  montagnes  détaché  de  la  partie  orientale  des  Vosges,  et  sur 

les  limites  de  la  Lorraine  et  de  la  Basse-Alsace.  Son  terri- 
toire occupe  une  surface  de  8  à  9000  arpents,  comprise  entre 
la  Bruche  et  deux  étroites  yaliées  latérales  ;  il  se  compose  de 
huit  villages  :  Rothau,  Neuvillers  et  Wildersbacli  dans  la 
première  vallée,  et  Fouday,  Solbach,  Waldersbach,  Beliefbsse 
et  Belmont  dans  la  seconde. 

Le  nom  donné  à  ce  territoire  ou  ban  lui  vient  d'un  an- 
cien ch&teau  dit  «  de  la  Roche  >  Qnm  Slein),  autrefois  habité 
par  des  seigneurs  qui  vivaient  de  rapines,  détroussant  les 
passants  qui  ne  pouvaient  payer  le  tribut  qu'ils  en  exigeaient. 
Le  chClteau,  situé  an  aonunet  de  la  montagne  au  bas  de  lar 
quelle  est  bâti  le  village  de  Bellefoese,  Ait  détruit  à  diflérentes 
repriaee  :  la  première  fois  en  1099  et  enr  dernier  lien  en 
1471. 

L'an  1467,  Ulric  de  Rathsamhausen  remit  cette  seigneurie 
à  son  fils  Gérothé,  qui,  par  son  brigandage,  rendit  la  route 
du  val  de  la  Bruche  très  périlleuse.  Les  Slrasbourgeois,  qui 
en  souffraient  beaucoup,  firent  plusieurs  expéditions  contre 
lui,  et  eoûa,  de  concert  avec  les  troupes  del'éTÔquede  Slras- 


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ANOIBMMB  SnaMEUBIB  DU  BA1H>»-LA-B00HB 


bourg  cl  celles  du  duc  de  Lorraine,  en  devinrent  vidorieur. 
Le  seigneur  de  liathsambauseai  depuis  lors,  n'eut  plus  le 
Ban-de-la -Roche  en  propriété,  mais  en  fief.  Ce  Géroihé 
(George-Guérotbé)  fut  enterré,  eo  i491«dan8  i*églifleâe  Fou- 
day,  où  sa  trouve  eueore  sa  pierre  tomnlaire. 

La  seigneurie  du  Ban-de-ïa-Roche  était  originairement  an 
fief  impérial,  composé  de  dix  villages,  en  y  comprenant  Saint- 
Biaise  et  Blancherupt,  qni  eo  furent  détachés  plos  tard.  Ce 
fief  fut  possédé,  dès  le  commencement  du  XIY*  siède,  par 
les  sieurs  de  Rathsamhausen  de  la  Roche  (ou  «  à  la  Pierre  >, 
|ttm  @tetn). 

Au  commencement  du  XVI'  siècle,  l'évêquede  Strasbourg, 
Albert  de  Bavière,  duquel  les  Rathsamhausen  tenaient  en 
fief  les  châteaux  de  Breitemherg  (Haut-Rhin),  accorda  aux 
trois  frères,  George,  Albert  et  Samson  de  Rathsamhausen,  la 
permission  de  vendre  ce  dernier  château,  à  charge  par  eux 
de  donner  à  l'érèché  un  équivalent  dudit  fief.  La  ville  de 
Soultzmalt  se  rendit  acquéreur. 

L'évéque  de  Strasbourg  étant  mort  snr  ces  entrefaites,  ce 
ftit  à  son  successeur,  Guillaume  IR  de  Hohensteiii,  qu'en  l*an- 
née  1507,  les  sieurs  de  Rathsamhausen  domièrent  les  deux 
villages  de  Sainl-Blaise  (Helmansgereuth)  et  de  Blancherupt 
(Bliensbach)  avec  tous  les  droits  de  seigneurie  qui  y  étaient 
attachés.  L*évéqne  Guillaume  leur  rendit  ces  deux  villages, 
mais  à  titre  de  fief  masculin.  En  1690,  par  suite  de  l'extinc- 
tion de  la  race  masculine  de  Rathsamhausen  de  la  Roche, 
levêque  de  Strasbourg  retira  le  fief  à  lui,  et  en  investit  un 
sieur  de  Ghamley.  En  1719,  ce  fief  passa  h  la  maison  de 
Rohan,  qui  le  posséda  jusqu'à  la  Révolution  française. 

Les  autres  parties  de  la  seigneurie  du  Ran-de-la-Roche  res- 
tèrent entre  les  mains  de  la  famille  de  Rathsamhausen  jus- 
qu'en 1584.  A  cette  époque,  du  consentement  de  Tempereur, 
la  seigneurie  fut  vendue  aux  comtes  de  Yeldents.  L'eztinc- 
*  tion  de  la  ligne  masculine  de  celte  femilto  fit  passer  le  fief, 

Roayeile  Série  -  7*  Année.  16 


m 


BBvmB  d'aubâgb 


aux  fîiles,  et,  en  J694,  à  la  princesse  palatiae  Dorothée,  da- 
chesse  de  Deux-Ponts. 

En  1720,  ce  fief  fut  conféré  au  sieur  d'Angervilliers,  inten- 
dant d'Alsace,  et  après  lui  à  sa  fille  atnée,  la  duchesse  de 
Ruffee,  qui  moanit  sans  enbnts,  de  sorte  que  la  seigneurie 
du  Bau-de>Ia-Roche  fut  ensuite  donnée  à  M.  le  marquis  de 
Paulmy  d*Ârgençon,  ministre  d*Âlsaee,  et  fut  érigée  en  comté 
en  son  honneur,  en  1762.  Dès  le  mois  de  mars  1771,  M.  de 
Paulmy  d*Argençon  Tendit  son  comté  pour  la  somme  de 
820,000  francs  à  M.  le  baron  Dietrich,  slettmeister  de  Stras- 
bourg, qui  fit  transporter  immédiatement  tous  les  titres  et 
colligendcs  des  communes  dans  celte  ville,  où  ils  sont  restés, 
paraît-il,  pour  la  plupart. 

Ces  documents  ont-ils  été  délruils  lors  de  l'incendie  de  la 
bibliothèque  en  1870?  Ont-ils  disparu  auparavant  ?  Quelqaes- 
uns  existent-ils  encore, dispersés  en  ditTérents  endroits?  C*est 
une  question  qui  pourra  peut-être  s*éclaircir  un  jour. 

La  fomille  de  Dietrich,  en  rendant  les  forges  de  Framont 
et  ses  propriétés  du  Ban-de-la-Roche  à  M.  Ghnmpy,  en  1799, 
t  remis  à  ce  dernier  les  anciens  titres  de  la  seigneurie.  La 
ftmille  Ghampy,  à  son  tour,  a  aliéné  à  différents  acquéreurs 
ses  propriétés  de  Rothau  en  1878,  et  a  quitté  l'Alsace  pour 
se  fixer  en  France.  Elle  a  cru  devoir  garder  tous  les  anciens 
papiers  et  parchemins  qui  se  rapportent  à  la  seigneurie  du 
Ban-de-la-Roche. 

C'est  dans  ces  archives,  qu'elle  a  bien  voulu  mettre  à  notre 
disposition,  que  nous  avons  puisé  les  documents  que  nous 
croyons  utiles  de  conserver  pour  riiiâtoire  du  pays  et  que 
nous  offrons  à  la  Revite  d'Alsace. 

Les  documents  dont  il  s'agit  forment  deux  catégories.  Les 
nus  sont  des  pièces  détachées,  la  plupart  originales,  en  fran- 
çais on  en  allemand,  contenues  dans  un  grand  carton.  Les 
antres  sont  des  copies  de  pièces  on  des  traductions  en  la- 
çais, trancrites  dans  un  grand  registre  in-folio. 


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AKaimiNB  BBiaNSDBIB  DU  BAN-DB-LA-BOOBB 


243 


Dans  Id  carton  se  trouTent  : 

1*  Des  lettres  de  fief  accordées  ptr  les  emperoars  d'Au- 
Irîche,  de  Tan  1578  à  Tan  1689,  aax  seigneurs  du  Baa-de-la- 

Roche.  Ces  parchemins,  au  nombre  de  huit,  sont  écrits  en 
allemand  et  munis  de  grands  sceaux  en  cire  rouge. 

2°  Une  liasse  de  quinze  pièces,  allemandes  pour  la  plupart, 
relatives  à  l'achat  et  à  la  vente  du  Ban-de-la-Roche  par  les 
Batbsamhaaseii  et  la  maison  de  Veldentz,  de  1580  à  16Si. 

8*  Une  vingtaine  de  pièces  relatives  à  la  possession  du  fief 
par  le  sieur  d^Angervilliers,  del7S0àl786.  Lettres  patentes, 
revenus  fi  charges  de  ta  seigneurie. 

4°  Une  dizaine  de  pièces  relatives  à  l'érection  du  Ban-de- 
la-Koche  en  comté,  en  faveur  du  marquis  de  Paulmy.  Lettres 
patentes,  état  des  bâtiments  seigneuriaux»  des  forges  et  des 
ibrèts;  de  1762  à  1771. 

5*  Quelques  pièces  se  rapportant  à  racquisition  du  comté 
par  M.  le  baron  de  Dietrich.  Lettres  dinvestiture,  aveux  et 
dénombrement  des  biens,  drdts  et  ebarges  en  1771 . 

Il  existe  en  outre  un  certain  nombre  d'autres  documents 
qui  ne  peuvent  être  rangés  dans  ces  différentes  catégories. 
Telles  sont  les  quatre  pièces  suivantes,  les  seules  que,  pour 
le  moment,  nous  extrayons  du  carton,  et  qui  permettent  de 
jeter  un  coup  d*œil  d'ensemble  sur  Thistoire  du  Ban-de-la- 
Roehe  et  sur  ses  andennes  archives. 

La  première  est  un  résumé  chronologique  des  changements 
qui  sont  survenus  parmi  les  possesseurs  de  la  seigneurie,  de 

1871  à  1794.  Ce  travail  est  sans  date  et  sans  signature,  mais 
il  doit  remonter  au  commencement  de  ce  siècle. 

Les  trois  autres  pièces  sont  en  quelque  sorte  des  catalogues 
énuméraut  les  documents  qui  existaient  dans  les  archives 
vers  ie  milieu  du  siède  dernier,  et  qui  devaient  encore  s'y 
trouver  en  1771,  lorsque  M.  de  Dietrich  devint  possesseur  du 


samm  b'alb&ch 


comté.  Les  dates  sont  placées  en  marge,  mais  elles  nesoÎTOnt 
pas  toqoiirs  l'ordre  chronologîqne. 

Nous  reprodoirons  ausd  exactement  que  possible  les 
originaux,  en  oonserrant  même  rorthographe  inctirreete  de 
certains  noms  propres,  à  moins  qn*îl  ne  s'agisse  de  ikntes 
d'inadvertance  des  coidstes. 

Ë.  DiETZ, 

INifliMrd  Jlolftm. 

{Lu  âoemml»   la  yroehamê  Uvnùon.) 


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HISTOIRE 


DB 

L'ÂNCIËN  COMTÉ  M  SAARWËfiDËN 

ET  DB 

LA  PRÉVÔTÉ  DE  HERBITZHEIH 

rSuiteJ 

En  J  641,  te  duc  GbarleB  IV  de  Lorraioe  se  Baidt  derechef 
du  oomté  de  Searwerden  et  de  quelques  autres  possessiona 
de  la  maison  de  Nassan-Saarbruck  et  se  prépara  à  défendre 
aTec  opiniâtreté  la  firontière  de  la  Lorraine  contre  les  troupes 
fhinçaises.  Il  ne  fallut  pas  longtemps  aux  Français  pour 
réduire  ce  pays,  que  Charles  fut  oblige  d'abandonner.  La 
France  se  mit  en  possession  des  pays  situés  le  long  de  la 
Saar. 

Cependant,  les  conférences  ouvertes  à  Munster  et  à  Osna- 
bruck  depuis  cinq  années,  pour  rétablissement  de  la  paix, 
touclièrent  à  leur  fin  ;  toutes  les  difficultés  pour  régler  les 
prétentions  des  parties,  dont  les  intérêts  étaient  si  différents 
et  si  opposés  les  uns  aux  autres,  étant  levées,  le  traité  de  paix 
fut  signé  le  24  octobre  1648.  L'article  4  du  traité  d'ûsnabruck 
ordonna  t  la  restitution  aux  comtes  de  Nassan-Saarbruck  de 
tous  leurs  comléB,  bailliages,  territoires,  honneon  et  biens 


BBVDB  D'ALSAOB 


ecclésiastiques  et  séculiers,  féodaux  etallodiaux,  nommément 
1«8  comtés  de  Saarbruck  et  de  Saarwerden,  tant  de  part  et 
â*aiitre  respeetiTemeat,  les  droits,  actions,  exceptions  et  béné- 
fices de  droit  qui  sont  à  déterminer  par  les  lois  de  TEmpire, 
tant  à  canse  des  choses  a^ugées  au  réTisoire,  par  sentence 
du  septième  juillet  16Î9,  que  pour  les  dommages  soufferts,  si 
mieux  les  parties  n'aiment  accommoder  Taffiiire  è  Tamiable, 
sauf  le  droit  qui  peut  appartenir  aux  comtes  de  Linange-DalM) 
dans  le  comté  de  Saarwerden  > . 

Après  la  paix  de  Westphalie,  l'armée  française  avait  repassé 
le  Rhin  ;  le  général  Rosen  quitta,  au  mois  de  septembre  1649, 
ses  cantonnements  de  l'Alsace,  franchit  la  montagne  de 
Saverne  pour  se  diriger  sur  Trêves;  il  espérait  surprendre, 
chemin  faisant,  le  château  de  Lorenlzen,  dont  le  colonel  lorrain 
s'était  emparé  peu  de  temps  auparavant,  mais  il  ne  put  Ten- 
lerer  d'emblée;  il  somma  le  gouverneur  de  se  rendre,  ne  lui 
laissant  qu'un  délai  de  sept  minutes.  Gelui-ci,  effrayé,  obéit 
et  capitula.  La  garnison  obtint  ia  feculté  de  sortir  stcc  les 
honneurs  de  la  guerre;  elle  M  escortée  jusqu'à  Bitche*. 
Rosen  se  dirigea  ensuite  sur  Metz,  laissant  le  général  Maro- 
lettB  à  Bouquenom.  Le  comté  de  Saarwerden,  accablé  de 
contributions  et  tourmenté  de  passages  continuels,  fut  réduit 
aux  abois.  Peu  après,  les  Lorrains  revinrent,  se  saisirent  de 
Bouquenom,  reprirent  Lorenlzen  et  occupèrent  tout  le  pays. 
Six  régiments  lorrains  restèrent  cantonnes  dans  un  pays 
épuisé  par  la  guerre  et  la  disette  et  dont  la  population  avait 
presque  péri  en  entier,  par  le  fer,  la  famine  ou  des  maladies 
pestilentielles.  La  ville  de  Saarwerden  n'était  plus  qu'un 
monceau  de  décombres  et  ne  put  jamais  se  relever  complète- 
ment de  sa  ruine;  le  beau  et  florissant  village  de  Harskircben, 
qui  compte  aii^ourd'hui  près  de  1200  Ames,  n*avait  plus  alors 
que  huit  ftmilleB. 

»  Heiss,  Histoire  de  l'F.mpirc  (Traités  de  paix),  t.  II,  p.  67. 
»  ThdoL  «iirop.,  t  VI,  p.  795. 


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Une  convention  conclue  à  Nuremberg,  le  2  mai  1650,  pour 
TexécutioD  de  la  paix  de  VV^estphalie,  avait  fixé  un  délai  de 
trois  mois,  dans  lequel  le  duc  de  Lorraine  serait  tenu  de  faire 
à  la  maison  de  Nassau-Saarbruck  la  restitution  da  comté  de 
Saarwerden,  do  bailliage  et  da  ehftteau  de  Homboorg  et  de  la 
prérdté  de  Herbitzheim. 

Une  autre  oonrentioii,  da  27  jain  soÎTant,  également  conclae 
à  Naremberg^  imposa  le  eomté  de  Searwerden  à  la  somme 
de  dix  mille  six  cent  quntre-Tingts  florins,  ponr  sa  part  des 
cinq  millions  d*écas  qne  lUmpire  devait  à  la  Suède,  d'après 
le  traité  de  Westphalie^ 

Leduc  de  Lorraine,  malgré  la  convenlion  de  Nuremberg, 
refusa  de  se  dessaisir  du  comté  de  Saarwerden,  sous  le  pré- 
texte que  l'Empire  lui  devait  quelques  arrérages  de  subsides 
que  l'empereur  lui  avait  promis  qunnd  il  s'engagea  dans  la 
guerre  contre  la  Suède  et  la  France. 

A  cette  époque,  quoique  la  ville  de  Bouquenom  eût  conservé 
son  ministre  protestant  Jost  Holler,  l'exercice  de  tout  autre 
culte  que  le  culte  catholique  y  était  défendu  ;  des  roesnres 
aussi  sévères  étaient  adoptées  ponr  tout  le  comté  ;  il  n'y  avait 
que  les  châteaux  de  Lorentcen  et  de  Diedendorf  où  les  protes- 
tants pussent  se  livrer  à  Texercice  public  de  leur  culte'. 

La  paix  avait  fiiit  revenir  la  veuve  du  comte  Guillanme- 
Lonis  à  Saarbruck;  elle  y  termina,  le  18  novembre  1661,  une 
carrière  pleine  de  sonda  et  de  revers,  laissant  la  tutelle*  da 
ses  enfants  mineurs  à  son  fils  aîné,  Jean-Louis.  Celui-ci  gou- 
verna les  états  paternels  jusqu'à  la  majorité  de  ses  frères 
puînés  et  les  partagea  avec  eux  en  lGo9.  Il  choisit  Ottwiller 
et  Hombourg.  Gustave-Adolphe  reçut  Saarbruck  et  Saarwer- 
den, sauf  la  part  de  ce  comté  qui  était  tombée  à  la  branche 
de  Nassau- Weiibourg,  et  WaJrade,  le  plus  jeuue,  eut 
Usingen^ 

*  LoxDORP,  Acla  publica,  l  VI,  p.  592. 

*  Manuscrit  de  M.  Kablé,  cité  ci-dessas. 

*  KcELLNER,  Luc.  cUat.,  t.  I,  p.  334. 


BSVUB  D'ALS&GB 


Quoique  le  trailé  d'Osnabruck  eût  assuré  à  la  maison 
de  Nassau-SaarbrucK  la  possession  pleine  et  entière  du 
comté  de  Saarwerden,  ayec  toutes  ses  dépendances,  sauf 
les  parties  où  les  droits  primitifo  de  l'éTêque  de  Metz 
n'étaient  pas  éteints,  le  duc  Charles  IV  de  Lorraine  en 
éluda  constamment  l'exécution  et  ne  se  soudait  nullement 
de  fkdre  la  restitution  ordonnée.  Le  comte  Jean-Louis 
de  NassBtt-Saarbrnck  s'adressa,  en  1658,  à  la  Diète  de 
Rstisbonne,  pour  réclamer  Inexécution  franche  du  traité  de 
paix*,  mais  toutes  ses  démarches  échouèrent  devant  Tobstina- 
tion  du  duc  de  Lorraine.  La  Diète  de  Ralisbonne  fut  encore 
mise  en  demeure,  en  1654,  par  les  comtes  de  Nassati-Saar- 
bruck,  d'enjoindre  au  duc  de  Lorraine  de  faire  celte  restitu- 
tion et  de  ne  plus  porter  le  titre  de  comte  de  Saanverden'. 
liOuis  XIV,  qui  se  disait  garant  des  fameux  traités  qui 
Tenaient  de  régler  le  sort  de  TAllemagne,  chercha  vainement 
à  rétablir  la  bonne  intelligence  entre  le  duc  de  Lorraine  et  la 
maison  de  Nassau-Saarbruck  et  se  crut  obligé  de  ftiire  quel- 
ques tentatiTes  pour  amener  le  duc  Charles  lY  à  rendre  aux 
comtes  de  Nassau-Saarbruck  le  comté  de  Saarwerden  et  la 
prévôté  de  Herbitzheim,  dont  il  les  avait  injustement  dépouillés. 
Charles  IV,  fidèle  à  son  système  de  tergiversation,  soutenait 
que  les  griefs  de  la  maison  de  Nassau-Saarbruck  n'étaient 
pas  fondés,  que  la  contestation  au  sujet  du  comté  de  Saar- 
werden était  pendante  au  tribunal  suprême  de  l'Empire  et 
qu'il  était  prêt  à  se  soumettre  à  sa  décision'. 

Le  comté  de  Saarwerden  et  la  prcv(Mé  de  Herbitzheim,  qui 
avaient  été  entièrement  ravagés  et  pour  ainsi  dire  changés  en 
désert  pendant  la  terrible  lutte  trcntenaire,  commençaient  à 
se  relever  de  leurs  nûnes.  Le  lieutenant-colonel  lorrain 

•  LoNDORP,  lue.  cit.,  t.  VI,  p.  589. 

•  U  môme,  t.  VII,  p.  474. 

•  Voir  le  traité  du  36  lévrier  1661  entre  la  France  et  le  dne  de  Lor- 
raine. 


SAAR\\'£RD£N  ET  liERBITZHEIM 


Charles  de  Broussey,  gonrerneor  de  cette  contrée,  fit  quelques 
lonables  effort»  poar  rendre  à  la  culture  les  terres  abandon- 
nées par  leurs  anciens  possesseurs,  il  encouragea  la  recon- 

slructîon  des  maisons  détruites  pendant  la  guerre,  admit  de 
nouveaux  colons  et  n'établit  qu'une  légère  redevance  sur  les 
maisons  ou  terrains  abandonnés  aux  nouveaux  venus.  Les 
communes  s'efTorçaient  aussi  de  mettre  de  l'ordre  dans  leurs 
finances  et  d'obtenir  des  atermoiements  de  leurs  créanciers. 

Cependant,  le  duc  Charles  IV  recommençait  avec  une  nou- 
velle ardeur  ses  persécutions  contre  les  protestants  et  cher- 
chait à  déraciner,  par  des  règlements  sévères,  la  religion 
réformée.  U  ordonna,  en  1664,  que  les  enûmts  des  protestants 
seraient  élevés  dans  des  écoles  catholiques,  qu'ils  seraient 
instruits  dans  la  religion  catholique  et  qu'ils  ne  pourraient 
apprendre  d'autre  cathéchisme  que  le  cathéchisme  catholique, 
que  les  mariages  des  protestants  et  les  baptêmes  de  leurs 
enfonts  se  feraient  dorénayant  par  le  curé  catholique,  confor- 
mément aux  usages  de  l'Eglise  romaine'.  «  Mais,  comme  toutes 
les  religions  du  monde  ne  trouvent  jamais  que  d'i  mauvais 
prosélytes  quand  le  cœur  n'a  point  de  part  aux  conversions, 
on  vit  l)iont(3l  les  inccnvénients  qui  empêchaient  l'exécution 
de  ces  règlements,  aussi  les  luthériens  restèrent-ils  en  pos- 
.  session  de  professer  librement  leur  cultel  » 

Le  pasteur  protestant  du  comté  de  Saarwerden.  Jost  Holler, 
fut  enlevé  par  la  mort  k  son  troupeau,  en  1667,  et  ce 
ne  fut  qu*aa  bout  d'une  année,  et  à  force  de  démarches, 
que  les  habitants  luthériens  obtinrent  qu*i!  lût  pourvu  à 
son  remplacement.  Ils  désignèrent  pour  ces  fonctions  Jean- 
Henri  Winzheimer,  de  Darmstadt,  et  M.  de  Romecourt,  gou- 
verneur de  Bitcke,  Saarwerden,  Faikenstein  et  Reichshofen, 
le  nomma  nHnkire  au  comté  de  Saarwerden,  par  décret  dn 
26  juillet  1688*. 

^  Manuscrit  de  feu  M.  Râblé.    "  La  môme. 
•  RodiiiucH,  Loc.  cUat.f  t.  II,  p.  140. 


250 


RETUB  D  ALBAOB 


En  4669,  le  dac  Charles  IV  maria  son  fllB,  Charles-Henri, 

prince  de  Vaudémont,  qu*il  aTaît  eu  de  la  prineesse  de  Gante- 
croix,  avec  Anne-Elisabeth  de  Lorraine-Elbeuf,  et  sollicita 
auprès  de  l'empereur  Térection  en  duché  de  Saar-Land,  et 
principauté  immédiate  de  l'Empire,  de  la  terre  de  Lixheim, 
des  comtés  de  Bitche  et  de  Saarwerden,  de  la  barounie  de 
Falkenstein,  de  celle  de  Pénétrante  et  des  terres  de  Marmou- 
lier,  Saargueraines,  Saareck  et  Saaralbe,  dont  il  lui  arait 
fiait  donation.  Le  duc  de  Lorraine,  bien  qu*il  eût  assuré  la 
réversion  de  cette  principauté  dacale  à  la  couronne  ducale, 
an  défont  d^hoirs  mâles  da  prince  de  Vaudémont,  porta,  par 
ce  démembrement  de  la  plus  grande  partie  de  la  Lorraine 
allemande,  le  mécontentement  de  ses  sujets  à  son  combleS 

Sur  ces  entremîtes,  le  comte  Gustave-Adolphe  de  Nassau- 
Saarbmck,  fort  de  son  droit,  reconrut  à  la  Diète  générale  de 
TEmpire,  ouverte  en  1669,  à  Ratîsbonne;  il  y  exposa  ses 
griefs  au  sujet  de  rinfraclion  du  Irailé  de  paix  qui  devait 
meltre  fin  aux  longues  querelles  de  sa  famille  avec  la  maison 
de  Lorraine.  Appuyant  ses  instances  du  crédit  de  Louis  XIV, 
il  poursuivit  avec  chaleur  la  restitution  de  son  ancien  patri- 
moine. Le  refus  du  duc  de  Lorraine  de  remplir  le  traité  de 
Westphalie  avait  indisposé  la  Diète  de  Hatisbonne,  et  le 
recours  du  comte  Gustave- Adolphe  y  éprouva  la  faveur  qu'il 
avait  dû  espérer;  elle  ordonna,  le  14  juillet  1670,  que  le  duc 
Charles  IV  serait  tenu  de  remettre,  mais  par  provision  seu- 
lement, au  comte  de  Nassau-Saarbruck,  les  villages  du  comté 
de  Saarwerden  et  la  prévôté  de  Herbitzheim,  qu*il  détenait 
depuis  si  longtemps,  et  de  8*en  tenir  seulement  aux  villes  de 
Bouquenom  et  de  Saarwerden  et  à  la  cour  de  Wiberswiller, 
qui  lui  avaient  été  adjugés  par  la  Clvimbre  impériale  de 
Spire,  en  1629,  jusqu'à  ce  que  les  arbitres  nommés  pour 
juger  l'affaire  au  fond  eussent  rendu  leur  seuteuce\  On  profita 

*  DiGOT,  Histoire  de  Lorraine,  t  V,  p.  389. 

•  Theal.  europ,,  t.  X,  p.  249. 


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B&ASWEBDIEN  BT  BSBBUZHEDI 


851 


des  troubles  de  la  Lorraine  et  de  rabsence  da  doc  Cbaries  17 
pour  mettre  à  exécotion  le  réeès  de  la  Diète.  Deox  commis- 
saires  impérianz  se  rendirent  dans  le  oomté  de  Saarwerden, 
j  firent  publier  à  son  de  trompe  la  résolntion  de  la  Diète  et 
délièrent  les  habitants  du  serinent  de  fidélité  qu'ils  STaient 
prêlé  au  duc  de  Lorraine.  Le  13  octobre  1670,  le  comte 
GustaTC-Adolplie  de  Nassau -Saarbruck  se  rendit,  arec  ses 
frère?  Jean-Louis,  comte  d  OllwiHcr,  et  Walrade,  comte 
d'Usingen,  et  ses  cousins  Jean,  comte  de  Nassau-Tdslein,  et 
Frédéric,  eonile  de  Nassau-Wcilhourg,  dans  la  bourgade  de 
Lorenlzen,  où  il  reçut  des  commissaires  impériaux,  avec  la 
plus  grande  solennité,  au  bruit  d'une  musique  guerrière  et 
des  saires  d'artillerie  et  aux  arclamations  de  la  multitude,  la 
remise  de  son  patrimoine;  les  habitants  lui  rendirent  hom- 
mage et  lui  prêtèrent  le  serment  de  fidélité.  Un  splendide 
banquet  auquel  assista  le  peuple,  ivre  de  joie  et  d'espérance, 
couronna  la  journée.  Le  lendemain,  les  mêmes  formalités  et 
les  mêmes  cérémonies  eurent  lieu  à  Herbitzheim,  où  le  libre 
exercice  de  la  religion  catholique  fat  assuré  aux  habitants'. 
C'est  ainsi  que  la  maison  de  Nassau-Saarbruck  fut  rétablie 
dans  la  partie  allodiale  du  comté  de  Saarwerden  et  la  prévôté 
de  Herbitzheim,  dont  elle  était  dépouillée  depuis  si  long- 
temps. 

Un  des  premiers  soins  du  comte  Gustave-Adolphe  fut  d'in- 
terdire à  Georgos  d'Aubusson  de  la  Feuillade,  évôque  de 
Metz,  l'entrée  de  ses  Etats  que  ce  prélat  avait  le  projet  de 
visiter.  11  détruisit  la  maison  des  jésuites,  à  Bouquenom,  où 
ils  étaient  revenus,  et  fit  chasser  170  écoliers  qui  j  faisaient 
leurs  études^  Il  s'occupa  aussi  de  pourvoir  les  paroisses  de 
nouveaux  pasteurs,  et  bientôt  l'action  bienfàîsante  de  son 
gouvernement  se  fit  partout  sentir*. 

*  GOTFRIED,  ChrunUine,  p.  127. 

'  DiGOl',  Histoire  de  Lorraine,  t  V,  p.  395. 

*  RoEHBlOB,  Xoc.  cUat.,  1. 1,  p.  344. 


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I 

BBVra  D'AIiSAOB 


Le  dne  Gharles  IV,  de  son  côté,  jogeaat  qae  le  décret  préa- 
lable de  la  Diète  de  Ralisboniie  était  siuo^tilde  de  rédama- 
tiens,  protesta  contre  la  prise  de  possession  du  comté  de 
Saarwerden . 

En  1671,  le  comté  de  Saarwerden  fut  traversé  par  un  eorps 
darmée  française,  qui  y  commit  les  plus  épouvanlablei» 
ravages.  Les  fortiûcalions  de  Bouquenom  et  de  Fénétrange 
furent  rasées,  par  ordre  du  maréchal  de  Gréqui  ;  toutes  les 
réclamations,  toutes  les  plaintes  des  comtes  de  Nassau  et  du 
rtiingrave  de  Daun  furent  inutiles  et  ne  parvinrent  pas  à 
arrêter  cette  œuvre  de  destruction'. 

L*espoir  qu'avait  conçn  le  comte  Gustave-Adolphe  de 
régner  paisiblement  sur  ses  états  liéréditaires  ne  fut  pas  de 
longue  durée.  L*Empire  s'uolt,  en  167S,  étroitement  avec  la 
Hollande,  TEspagne  et  le  duc  de  Lorraine  contre  la  France, 
et  bientôt  la  guerre  s'alluma  sur  les  deux  rives  du  Rhin. 
Accablé  de  contributions  extraordinaires,  tourmenté  de  pas- 
sages continuels,  foulé  et  excédé  de  charges  de  toute  espèce, 
le  comté  de  Saarwerden  fut  alors  plus  malheureux  que  jamais. 
Les  troupes  françaises  donnèreut  un  libre  cours  à  leurs  sen- 
timents désordufinés,  tous  les  lieux  de  leur  passage  furent 
témoins  et  victimes  de  leurs  excès  et  de  leurs  violences. 

Dès  le  commencement  des  hostilités,  le  comte  Gustave- 
Adolphe,  qui  avait  refusé  de  signer  une  promesse  de  ne  pas 
servir  contre  l'armée  française,  fût  arrêté  à  Saarbruck,  par 
ordre  du  marquis  de  Rochefort,  et  conduit  prisonnier  à  Metis; 
il  ne  recouvra  la  liberté  qu'après  une  détention  de  cinq  mois  ; 
toutes  les  démarches  qu'on  fit  pour  le  détacher  de  la  patrie 
fiirent  infructueuses^  et  à  peine  fut-il  libre  qu  11  se  rangea 
sous  la  bannière  de  l'Empire*. 

En  1677,  le  théAtre  de  la  guerre  fut  porté  sur  la  Saar;  le 
prince  Gharles  Y  de  Lorraine  passa  le  Rhin  sur  te  pont  de 

'  Thcat.  exirop.,  t.  X,  2"  partie,  p.  476. 
*  Kœllneb,  Loc.  cUal.,  t.  I,  p. 


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SAARWERDEN  ET  HEBfiITZHEIH 


968 


Strasbourg  et  marcha  yers  la  Moselle,  pour  faire  sa  jonction 
arec  Tannée  impériale  qui  s'était  avancée  sur  la  Saar  ;  il 

8*eropara  de  Saarbruck,  ville  à  laquelle  le  commandant  fit 
mettre  le  feu,  après  s  y  être  yailiamment  défendu.  Se  trou- 
vant maître  de  toute  la  contrée,  Charles  s'avança  vers  le  pays 
messin  dont  s'approchait  le  maréchal  de  Créqui.  Charles 
résolut  de  lui  livrer  bataille,  il  essaya  vainement  de  l'attirer 
dans  la  plaine  ;  pendant  six  semaines,  on  s  observa  de  part  et 
d'autre.  Charles,  qui  eut  beaucoup  de  peine  à  subsister,  gagna 
Bouzonvillc,  passa  la  Moselle  au-dessous  de  Sierk,  traversa  le 
pays  de  Luxembourg,  atteignit  la  Meuse,  saccagea  Mouzon, 
leva  des  contributions  énormes  dans  toute  la  province  et  se 
mit  en  marche  par  les  Ardennes,  pour  fidre  sa  jonction  avec 
le  prince  d'Orange,  qui  investissait  Gharleroi.  Mais,  la  veille, 
le  blocus  avait  été  levé,  de  sorte  qu*il  ne  resta  d'autre  parti  à 
prendre  à  Charles  que  de  se  frayer  une  route  à  travers  le 
pays  ennemi  et  de  regagner  TAIssee.  Ayant  passé  la  Moselle 
à  Wasserbillich,  il  remonta  la  Saar  jusqu'à  Saarbruck,  tenant 
continuellement  tête  au  maréchal  de  Créqui,  qui,  toujours  à 
ses  côtés,  décrivait  une  ligne  parallèle  à  celle  qu'il  parcourait. 
Il  prit  le  cliemin  du  Palalinat,  gagna  Kaiserslautern  et  Lan- 
dau, traversa  le  Rhin  à  Phillipsbourg  et  marcha  sur  Stras- 
bourg. Créqui  traversa  le  comté  de  Saarwerden,  déboucha  en 
Alsace  par  les  défilés  de  Saverne,  franchît  le  Rhin  et  livra, 
non  loin  de  Wllstett,  aux  Impériaux,  un  combat  insignifiant 
qui  ne  ralentit  point  la  marche  du  prince  Charles  sur  TAIsace. 
Créqui  repassa  ce  fleuve  et  se  porta  rapidement  sur  Saverne, 
se  doutant  bien  que  raraiée  impériale  ne  tarderait  pas  à  lui 
tomber  sur  les  bras.  Le  duc  de  Lorraine  s'avança  vers  Stras- 
bourg, passa  le  Rhin  sur  le  pont  de  cette  ville  pour  suivre 
Tannée  f^ançaise^  Il  la  trouva  campée  sur  la  montagne  du 
Kochersperg,  près  du  château  en  ruines  de  ce  nom  ;  et,  ayant 
envoyé  le  général-major  Schullz,  avec  un  gros  détachement 

^  Mémoires  de  ViUars  (collection  iilicbaud,  série  III,  U  IX,  p.  16). 


25é 


VBVUE  D'ALBA,0B 


de  cavalerie  pour  la  reconnaître,  le  eomfe  de  Haran  poussa 
jusqu'à  la  grande-garde  des  Français.  Peu  s'en  fallut  qu'il  ne 
la  renversât  et  qu'il  n'engageât  une  affaire  générale.  Le  raaré- 
clial  de  Créqui  envoya  trente-six  escadrons  conire  les  Impé- 
'riaux  qui  furent  battus  et  mis  en  déroute.  Ce  combat  eut  lieu 
le  7  octobre*.  Le  comte  Gustave-Adolphe  de  Nassau-Saarbruck, 
général-major  de  l'armée  impériale,  ayant  été  blessé,  tomba 
entre  les  mains  des  Français.  11  obtint  la  permission  de  se 
Ikire  transporter  à  Strasbourg  où,  malgré  tons  les  secours  de 
Tart  qni  Ini  furent  prodigués,  il  mourut  deux  jours  après. 
Son  corps  Ait  embaumé  et  déposé  dans  réglise  de  Saint- 
Thomas. 

Les  avantages  et  les  revers  de  la  campagne  se  balançaient, 
mais  à  peine  les  Impériaux  avaient-ils  pris  leurs  quartiers 
d'hiver,  que  Créqui  assiégea  Fribourg  en  Brisgau,  ville 
importante  dont  la  prise  jeta  les  cours  d'Allemagne  dans  la 
GonsteruatioD. 

Les  pays  situés  sur  la  Saar,  épuisés,  accablés  de  contribu- 
tions et  tourmentés  de  passages  continuels,  souffraient  des 
manz  affreux.  Les  soldats  français  dévastaient  et  ravageaient 
cette  contrée  avec  une  incroyable  sauvagerie;  ils  étaient  un 
objet  de  terreur  et  d*effiN>i  pour  les  malheureux  habitants  et 
étaient  toujours  prêts  à  se  livrer  au  pillage  et  à  tous  les 
excès  qui  en  sont  la  suite. 

Le  comte  Gustave-Adolphe  de  Nassau-Saarbruck,  qui  avait 
eu  plusieurs  enfants  de  son  épouse  Eléonore-Glaire,  fille  du 
comte  Gralon  de  Hohenlohe,  avait  institué  pour  son  succes- 
seur et  héritier  de  ses  états,  son  fils  ainé,  Louis  Craton,  & 
peine  âgé  de  quatorze  ans.  Sa  veuve,  nommée  tutrice  de  ses 
enfanta  par  Fempereur  Léopold  I",  prit  en  main  le  gouver- 
nail de  Tadministration  et  8*eiforça  de  cicatriser  les  plaies 
encore  vivaces  du  pays. 

*  TiuaU  ewrop.,  t.  XI,  p.  IISO. 


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SAABWERDEN  ET  UERBITZHEIM 


255 


Charles  Y,  duc  de  Lorraine^  ne  Ait  pas  compris  dans  la 
paix  Gondoe  à  Nimègue,  en  1678,  parce  que  les  eondittons 
de  Louis  XIY  étaient  trop  dores  pour  qu'il  y  sonscrirlt.  La 
Lorraine  resta  tous  la  domination  de  la  Praoce.  Gomme  ta 

souTcraineté  sur  les  évccliés  de  Metz,  Verdun  et  Toul  arait 
été  cédée  en  plein  à  la  France  par  le  traité  de  Miinsler, 
Louis  XIV  établit,  en  1579,  à  Metz,  un  trii)unal  politique 
ayant  pour  attribution  de  réunir  à  la  France  les  terres  ou 
ûefs  qui  avaient  pu  dépendre  des  trois  évècliés  et  qui  en 
avaient  été  distraits,  à  quelque  titre  que  ce  fût.  Cette  Chambre 
porta  des  arrêts  qui  déclarèrent  les  fiefs  des  maisons  de 
Nassau,  de  Bitchc,  de  Deax-Poats  et  de  Hanau,  relevant  jadis 
de  l'évécbé  de  Meta,  arrière-Tassanx  de  la  France;  regardant 
les  aliénations  des  fiefo  releTsnt  andennement  de  cette  église, 
non  comme  des  matières  de  droit  public  à  régler  par  la  diplo- 
matie, mais  comme  des  afEûres  particulières  sijjettes  aux 
procédures,  elle  se  mit  à  la  place  des  arbitres  consentis  par 
la  France  et  TAllemagne,  pour  interpréter  ces  mots  Tagues 
et  élastiques  <r  ctm  eorum  districtu  >,  lesquels  araient  été 
insérés  dans  le  traité  de  Westpbalie. 

L'éyôque  de  Metz,  Georges  d'Aubusson  de  la  Feuillade, 
ayant  obtenu,  le  2  mars  168U,  de  la  Chambre  royale  établie  à 
Melz,  commission  tendant  à  ce  que  les  vassaux  de  son  évê- 
ché  fussent  condamnés  à  faire  la  reprise  de  tous  les  fiefs 
mouvants  de  1  egliâe  de  Melz,  à  fournir  en  bonne  et  due  forme 
les  aveux  et  dénombrements  de  leurs  fîefs,  terres  et  seigneu- 
ries, et  de  leurs  dépendances,  à  représenter  les  titres  et  docu- 
ments y  relatifs  et  à  fournir  les  renseignements  en  yertn 
desquels  ils  avaient  joui  et  jouissaient  encore  de  ces  terres  et 
seigneuries,  fit  assigner  <  le  prétendu  seigneur  »  du  comté 
de  Saarwerden,  de  Bouquenom  et  de  la  cour  de  WiberswiUer, 
an  domicile  du  sieur  Mathias  Happe,  prévôt  de  Bouquenom, 
pour  qnll  fftt  condamné  à  lui  rendre  les  devoirs  qu*il  lui 
devait  comme  vassal  de  son  église.  Charles-Henri  de  Lorraine, 


256 


BEVOB  D'AL8A(» 


prince  de  Vaodémcmt,  se  crut  fondé  à  intenrenîr  dans  cette 
instance  et  avoua  que  le  fief  de  Saarwerden  était  mou?aiit  de 

révêché  de  Melz,  qu'il  le  possédait  comme  donataire  de  feu  le 
duc  Cliarles  IV  de  Lorraine,  son  père,  et  qu'il  offiraîl  de 
rcTidre  à  qui  de  droit  les  de?oirs  prescrits  par  la  loi  et  la 
coutume  féodale. 

La  comtesse  de  Nassau-Saarbruck,  au  nom  et  comme  mère 
et  tutrice  de  ses  enfants,  ayant  été  sommée  de  faire  hommage 
à  révÔque  de  Metz  pour  les  comtés  de  Saarwerden  et  de 
Saarbruck,  qui  étaient  des  ûefs  dépendant  de  son  église,  se 
oourba  dcYant  les  prétentions  de  ce  prélat  et  offrit  de  le 
reconnaître  pour  son  sdgneor  suzerain. 

La  Chambre  royale  rendit,  le  41  juillet  4680,  un  arrêt  par 
lequel  il  fiit  ordonné  «  au  pritindu  t^gneur  »  du  comté  de 
Saarwerden,  de  Bonquenom  et  de  la  cour  de  Wiberswiller,  de 
faire  ses  reprises  de  l'église  de  Melz,  de  rendre  foi  et  hommage 
en  personne,  pour  raison  de  ces  terres  et  seigneuries,  sous 
peine  de  commise,  et  de  fournir  ses  aveux  et  dénombrements 
en  bonne  et  due  forme  et  par  le  menu  ;  il  fut  fait  défense  et 
inhibition  audit  prétendu  seigneur  du  comté  de  Saarwerden 
et  à  ses  officiers,  vassaux  et  sujets,  de  reconnaître  un  autre 
souverain  que  le  roi  de  France  et  une  autre  justice  supérieure 
que  celle  du  Parlement  de  Metz;  il  fut  encore  ordonné  que 
i'évéque  de  Metz  comprendrait  le  comté  de  Saarwerden  et  ses 
appartenances  dans  les  reprises  qu'il  était  tenu  de  faire  du 
roi  pour  les  biens  et  les  droite  dépendant  de  son  église'. 

La  prérdté  de  Herbltzheim  (HérhOum)  fut  également 
réunie  à  la  couronne  de  France,  par  arrêt  de  la  Chambre 
royale  de  Metz,  du  20  mai  4680,  sous  le  prétexte  qu'elle  était 
une  dépendance  de  Saaralbe. 

Lorsque  les  descendants  de  la  maison  de  Nassau-Saarbruck 
se  virent  menacés  d'une  prétention  alarmante  sur  leurs  pos- 
sessions, ils  étaient  d'abord  résolus  à  repousser  avec  fierté 

>  Voir  le  Reeueii  des  arréu  de  la  Chambre  royale  de  MeU^ 


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MAABWBBDdBM  BT  HBBBXXZBBDf 


267 


la  sommatioii  de  rdréque  de  Metz,  maiB,  comme  Us  craignaient 
les  saites  Aeheasaa  d*une  opposition  intempestîTe,  ils  offrirent 
de  ftire  seulement  leurs  reprises  de  ce  prélat  pour  les  Tilles 
deSaarbruck,  d*OttwiUer,  de  Saarwerden  et  de  Bouquenom, 
qui  pooTaient  être  des  iiefii  dépendant  de  son  église,  et 
demandèrent  la  séparation  de  leurs  possessions  et  propriétés 
allodiales,  dont  les  comtés  de  Saarbruck  et  de  Saarwerden 
étaient  parsemés.  L'évôque  de  Metz,  qui  ne  souffrait  pas  de 
contradicteurs,  exigea  d'eux  l'acte  de  foi  et  hommage  pour 
les  deux  comtés,  sans  aucune  excepUdn  ni  réserve. 

Jean-Louis,  comte  d'Ollwiller,  sut  se  soustraire  à  l'acte  de 
foi  et  hommage  qu'on  exigeait  de  lui;  il  ût,  par  acte  du 
16  juin  1680,  cession  à  son  fils,  Frédéric-Louis,  de  tous  ses 
Etats,  et  ses  parents  des  branches  d'Usingen,  d'Iditein  et  de 
Weitbourg  lui  cédèrent  également  tons  leurs  droits  sur  le 
comté  de  Saarwerden\  pour  qu'il  pût  en  recevoir  l'investi- 
ture en  son  nom  du  roi  de  France,  à  qui  la  directe  de  ses 
domaines  et  seigneuries  était  dévolue,  aux  lieu  et  place  do 
l'évêque  de  Metz,  qui,  retranché  du  corps  germanique,  était 
rangé  dans  la  classe  des  eximés  inhabiles  à  exercer  la 
snseraineté  sur  un  ancien  état  immédiat  de  TEmpire. 

Les  descendants  de  la  maison  de  Nassau-Saarbrnck  et  la 
comtesse  douairière  Eléonore-Glaire,  au  num  de  ses  enfants, 
invoquèrent  ralloiiialiléd'un  grand  nombre  de  leurs  domaines, 
sur  lesquels  l'évéché  de  Metz  n'avait  jamais  exercé  la  suze- 
raineté; sensibles  à  la  perte  de  leur  indépendance,  ils  expo- 
sèrent que  «  cette  manière  de  procéder  était  toute  nouvelle, 
inouïe  et  réprouvée  par  tous  les  droits,  écrits,  de  nature  et 
de  gens  i.  La  comtesse  adressa  de  très  justes  plaintes  au  roi 
Louis  XIV,  en  fidsant  appel  à  sa  bonté  et  à  sa  générosité, 
et  en  le  suppliant  d*aToir  égard  à  son  veuvage,  au  bas  Age  de 
ses  pauyres  enlknts  et  au  misérable  état  où  le  mal  de  guerre 
avait  réduit  eux  tous  et  le  peu  de  terres  qu'ils  possédaient 

*  K<BLuant,  Lœ,  eiUU.,  t.  I,  p.  371. 
iNoavelio  Série  —  T  Année. 


BEVUE  D*AKiSAOB 


paiflibteineDt»  et  de  ne  pas  permetUe  qnDs  fiuBeiit  plus  long- 
temps inquiétés  et  foulés  eatièrement  sous  les  pieds  per  de 
semblables  poarsuites. 

Toutes  leurs  supplications,  toutes  leurs  plaintes,  toutes 
leurs  représentations  furent  inutiles.  La  voix  de  la  justice  ne 
put  se  faire  entendre  contre  un  agresssur  puissant.  La 
comtesse  douairière  de  Nassau-Saarbruck,  au  nom  et  comme 
tutrice  de  ses  enfants,  et  Frédéric-Louis,  comte  de  Nassau- 
OltwiUer,  comme  portaur  des  ûefs  de  Saarwerden  et  de  Saar- 
bruck,  furent  forcés  de  subir  renvaliiasement  juridique  de 
leurs  états  et  de  se  rendre  à  Metz,  pour  prêter  foi  et  hommage 
défaut  la  Chambre  royale,  au  roi  de  France,  au  iîea  et  place 
de  réf  éque  de  Metz,  qui  était  inhabile  à  réclamer  ilnvesti- 
turs  du  temporel  de  son  éf  êché.  Cette  cérémonie  eut  lien 
dans  les  ibrmes  Toulues  par  la  eoutun»  iéodale^  le  9  jan- 
fier  1681 . 

La  couronne  de  France  acquit  ainsi  une  foule  de  petit  Etats 
dont  les  légitimes  souverains  furent  obligés  de  courber  la 
tête  et  de  placer  leurs  possessions  sous  le  lien  vassalitique  de 
Louis  XIV.  Les  décisions  de  la  Chambre  royale  de  Metz,  qui 
empiétèrent  en  pleine  paix  sur  l'Empire  germanique  de  la 
manière  la  plus  poignante,  révoltèrent  toute  l'Allemagne  et  la 
France  elle-même;  soutenues  par  la  force,  elles  étaient  exé- 
cutées impitoyablement;  tous  les  liens  qui  rattachaient  à 
l'Allemagne  les  domaines  rsTendiqués  par  la  France  furent 
brisés  et  leurs  possesseurs  obligés  de  se  soumettre  à  Is  Juri- 
diction du  Parlement  de  Metz,  mais,  en  considération  de  cette 
soumission,  leurs  droits  territoriaux  et  régaliens  leur  furent 
confirmés,  en  tant  que  la  jouissance  de  ces  droits  était  compa- 
tible a?ee  la  souTeraineté  de  la  couronne. 

Jua^ment  indignée  d'un  tel  excès  de  despotisme,  tonte 
l'Allemagne  se  préparait  à  une  nouvelle  levéa  de  boucliers, 
mais  la  révolte  des  Hongrois  et  l'attitude  hostile  de  la  Tur- 
quie suspendirent  la  guerre  que  l'empereur  avait  l'intention 


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SAABWEBDSM  ET  HERBITZEEIM 


aoo 


de  déclarer  à  la  France.  La  paix  se  rétablit  et  le  traité  de 

Ratisbonne,  qui  fut  signé  le  15  août  1684,  maintint  la  France 
dans  Ift  possession  provisionnelle  de  toutes  les  terres  dont 
la  réunion  avait  été  pronoucée  par  la  Chambre  rojale  de 
Metz'. 

Une  nouvelle  province,  sous  le  nom  de  province  de  Saar  ou 
Sarre,  fut  formée  des  partie  de  la  Lorraine  et  du  Weslrich 
que  cette  rivière  arrose  et  des  terres  d'Empire  qui  ea  étaient 
yoîsines  on  qui  y  étaient  enclavées.  L'administration  en  Ait 
conQée  à  Anfaâne  Bergeron  de  la  GoupiUière^  avee  le  titre 
d'intendant  de  justice,  police  et  finances;  sa  résidence  fot 
fixée  à  Hbmboiirg-ear-la-Blies.  Son  premier  soin  fut  d'oiga- 
nîKr  la  justice  dans  les  pays  noayellenient  réanis.  Tons  les 
bailliages,  les  régences,  les  chancelleries,  les  dicastères  des 
diverses  seigneuries  forent  soumis  an  Parlement  de  Metz 
et  défense  fut  faite  aux  possesseurs  de  ces  terres  et  à  leurs 
habitants  d'appeler  à  une  autre  juridiction. 

Cependant  le  prince  Charles-Henri  de  Vaudémont,  en  faveur 
duquel  le  duc  Charles  IV  de  Lorraine  avait  érigé  le  duché  de 
Sarreland,  après  qu'il  eut  rendu  hommage  à  la  couronne  de 
France,  chercha  à  dépouiller  la  maison  de  Nassau-Saarbruck 
du  cb&teau  de  Saarwerden,  qui  venait  d'être  restitué  à  ses 
anciens  possesseurs,  comme  fief  mouvant  de  révêché  de  Metz. 
Il  fit  sommer,  par  acte  judiciaire,  tous  les  oiïïciers  et  employés 
du  comté  de  Saarwerden  et  de  la  prévôté  de  Herbitzheim  de 
casser  leurs  fonetîons  et  de  sortir  du  territoire.  La  prétention 
du  prince  de  Vaudémont  sur  ce  pays  occadonna  une  instance 
devant  le  Parlement  de  Mets.  Le  procureur  général  Raveaux, 
en  exécution  des  ordres  du  roi,  fit  écarter  la  prétention  de 
ce  prince  et  le  fit  déclarer  décbu  de  tous  les  fiefe  lorrains 
qui  constituaient  son  apanage^ 
L'état  de  cette  contrée  était  déplorable,  elle  était  presque 

'  Tfmtt.  europ.,  t.  XII,  p.  630. 

a  KcELLMsa,  Loc.  ciUU.,  1 1>  p.  373. 


260 


BEVUB  D'ALSACE 


transformée  en  une  vaste  solitude,  les  terres  demeuraient 
partout  sans  culture,  les  l)ras  manquaient  à  l  industrie.  L'in- 
tendant de  la  Goupilliere  s  occupa  de  repeupler  le  pays  et  d'y 
opérer  les  améliorations  que  son  état  réclamait.  En  confor- 
mité des  ordres  du  roi,  les  habitants  eurent  la  faculté  de 
défricher  les  terres  incultes  et  de  nettoyer  les  prairies  situées 
ie  long  de  la  Saar  et  d*en  jouir  sans  en  rien  payer,  savoir  : 
des  terres  pendant  dix  années  et  des  prairies  pendant  trente 
années.  Le  roi  ordonna,  par  plusieurs  arrêts  pris  en  Conseil 
d*Etaty  que  ■  ceux  qni  aoront  desserté  et  mis  en  valeur  les- 
dites  terres  en  demeureront  paisibles  possesseurs  hérédi- 
taires, après  ledit  temps  de  dix  années,  en  payant  seulement 
la  dlme  des  fruits  en  provenant  aux  propriétaires  et  seigneurs 
et  les  droits  seigneuriaux,  et  que  ceux  qui  auront  mit  en 
valeur  des  prés  abandonnés  en  jouissent  en  toute  propriété 
après  trente  années  » . 

Pendant  que  cette  contrée  faisait  des  efforts  inouïs  pour  se 
relever  de  ses  ruines,  Louis  XIV,  qui  aimait  à  promener  sa 
cour,  vint  visiter,  au  mois  de  juillet  1683,  le  pays  que  son 
Parlement  de  Metz  lui  avait  conquis.  Il  établit  son  quartier 
général  à  Bouquenom.  Le  dauphin,  le  duc  d'Orléans,  le  maré- 
chal de  Luxembourg,  Gréqui,  Guillaume  Egon  deFurstenbergt 
éfèqvLB  de  Strasbourg,  et  une  fonle  de  seigneurs  formaient 
son  cortège.  La  misère  et  la  douleur  qui  frappaient  les  regards 
du  roi  formaient  un  triste  contraste  STec  le  luxe  qu'étalaient 
les  courtisans.  Louis  XIV  alla  Tîsiter  les  travaux  de  la  cita- 
delle qnll  fiiisait  construire  entre  Strasbourg  et  le  fort  de 
Kehl,  sans  entrer  dans  la  capitale  de  l'Alsace',  revint  à  Bou- 
quenom et  se  rendit  ù  Saarbruck  et  à  Saarlouis. 

Le  roi  séjourna  neuf  jours  à  Bouquenom.  et,  ayant  été 
informé  que,  pendant  tout  le  tempf^  nue  le  duc  Charles  IV  de 
Lorraine  avait  é\é.  privé  de  ses  Etats,  les  jésuites  de  Bou- 
quenom n'avaient  cessé  de  rendre  des  ser?ices  essentiels,  tant 

^  TheaL  europ.,  t.  II,  p.  510. 


8AABWSRDSN  ET  HBRBITZHEIM 


261 


par  rapport  à  Teiiaeigneiiitnt  de  la  langue  allemande  que  pour 
la  religion,  il  leur  assigna  sur  le  trésor  royal  une  pension  de 
six  cents  lirres,  pour  les  mettre  en  état  de  subvenir  à  leurs 
plus  pressants  besoins  et  de  continuer  leurs  travaui:  jusqu'à 
ce  qu*il  eût  mis  à  exécution  sa  résolution  de  remplacer  de 
nouireau  leur  ancienne  fondation,  dont  ils  avaient  été  dépouillés 
en  1670. 

Le  camp  qui  était  alore  établi  sur  les  bords  de  la  Saar, 
près  de  Houqiieriom,  fut  une  lourde  charge  pour  toute  la 
contrée,  qui,  tour  à  tour  dévastée  par  les  gens  de  guerre  et 
pressurée  par  les  employés  du  roi,  était  obligée  de  faire  de 
sublimes  ilïorts  pour  exister.  Les  habitants  subissaient  des 
vexations  et  des  humiliations  de  toute  sorte,  les  soldats  étaient 
tellement  habitués  an  désordre  qu'il  n'était  pas  au  pouvoir 
des  eheb  les  ndeux  intentionnés  de  tûn  régner  parmi  eux 
la  discipline. 

Cependant  Louis  XIV  recommençait  contre  les  protestants 
les  persécutions  des  règnes  précédents  et»  en  1685,  il  y  mit 
le  comble  par  limpolitique  révocation  de  Tédit  de  Nantes. 
L'inquiétude  et  Tanxlété  planaient  sur  les  protestants  du 

comté  de  Saarwerden,  leurs  temples  furent  fermés  par  ordre 
du  comte  de  Bisscy,  commandant  pour  le  roi  en  Lorraine;  ils 
furent  profanés  et  quelques-uns  ruinés  et  même  détruits  de 
fond  en  comble.  Des  bandes  de  soldats  parcouraient  toute  la 
contrée,  allaient  de  village  en  village,  de  maison  en  maison, 
présentaient  aux  protestants  une  formule  écrite  d'abjuration 
et  les  forçaient,  par  des  menaces  de  toute  sorte,  à  la  siî]jner. 
Les  bibles  et  tous  les  livres  de  prières  des  protestants  lurent 
saisis  et  publiquement  brûlés.  Le  sieur  Simon,  grand-prévOt 
de  Lorraine,  fut  envoyé  dans  le  comté  de  Saarwerden  pour 
en  expulser  tous  les  calvinistes  fintnçais  qui  s'y  étaient  réfu- 
giés^  On  recourut  à  l'emploi  de  la  violence  pour  forcer  les 
baUtants  à  aller  à  la  messe  et  à  se  convertir;  on  employa 

1  Lbpaqb.  Le»  commîmes  de  la  ISmflh»,  1 1,  p.  348. 


REVUE  D'ALSACE 


rargent,  et  môme  dm  moyens  plus  immoraux  enoon,  ponr 
les  décider  à  retourner  à  la  foi  catholique,  et  là,  où  ces  moyens 

échouaient,  la  violence  et  la  prison  y  suppléaient;  toutDOu- 
veau  converti  était  obligé  de  signer  une  attestation  que  sa 
conversion  n'était  pas  le  résultat  de  la  contrainte,  mais  l'effet 
d'une  volonté  libre  et  spontanée.  Tous  les  prévôts  des  villages, 
tous  les  greffiers,  tous  les  employés  furent  obligés  d'abjurer 
OU  de  quitter  leurs  fonctions  ;  on  reprocha  à  ceux  qui  avaient 
préféré  leur  foi  à  leurs  places  de  mépriser  le  serrioe  du  roi, 
et  on  les  coutraignit  à  retendre  leurs  fonctions,  sous  peine 
d*une  amende  de  cent  ou  deux  cents  écns,  et  d*abjurer.  Tous 
les  auliergistes,  calwretîers,  bouchers,  boulangers,  barbiers» 
furent  classés  parmi  les  gens  du  rd,  et  tous  les  protestants 
qui  exerçaient  de  telles  industries  ftirent  cités  derani  la  jus- 
tice, qui  les  condamna  à  quitter  leur  religion  ou  leur  étaL 
Les  nouyeaux  convertis  étaient  exempts  de  toutes  charges  et 
redevances,  surtout  de  logements  militaires,  que  les  proies* 
tants  supportaient  seuls .  Un  assez  grand  nombre  d'habitants 
parvinrent  à  gagner  la  frontière  et  à  se  réfugier  dans  le 
comté  de  la  Petite-Pierre  qui,  comme  terre  d'Alsace,  était  à 
l'abri  des  persécutions  enfantées  par  la  révocation  de  l'édit  de 
Nantes.   Les  vexations  de  tout  genre,  les  confiscations, 
l'exemple  de  la  force,  de  la  violence,  tout  fut  essayé  pour 
Taincre  la  résistance  des  protestante.  A  Bouquenom  et  à 
Lorentien,  les  églises  furent  restituées  au  culte  catholique  et 
l'éTêque  de  Meta,  Georges  d'Aubusson  de  la  Feuillade,  vint 
lui-même,  pendant  Tété  de  1686,  les  réconcilier  et  les  purifier 
de  leurs  souillures.  Le  ministre  protestant  du  comté,  Jean- 
Beari  Winsheimer,  donna  Texemple  de  la  soumission,  fit 
abjuration  à  Metz  et  prêcha  en  grande  solennité  le  retour  à  la 
foi  catholique*.  Il  chercha  à  juslilier  sa  conduite  et  adressa  à 
ses  anciennes  ouailles  une  brochure  apologétique,  où  il  disait 
que  sa  conversion  était  le  résultat  de  sa  conviction,  tandis 
^  KOSLLMEB»  LoG.  ôtoi,  1 1.  p.  379. 


SAARWERDEN  ET  HKRBITZHSIM 


963 


qu'elle  n*étalt  gae  le  réealtet  de  la  peur  et  de  la  fidbjesse. 
Objet  do  mépris  uairerael,  il  traîna  une  exiatenee  misérable 
jusqH*à  sa  mort,  qui  arrira  pea  après. 
L'obserTance  de  toates  les  6Hes  cattioliqnes  M  séTèrement 

prescrite.  Les  nouveaux  convertis  n'étaient  pas  à  l'abri  des 
vexations,  ils  (Paient  tenus  d'assister  régulièrement  au  caté- 
chisme sous  peine  de  dix  livres  d'amende,  ceux  dont  la 
conversion  n'était  que  simulée  eurent  surtout  à  supporter  les 
vexations  des  olTiciers  du  roi.  Le  collège  des  jésuites,  fondé  à 
Bouquenom  par  le  duc  Charles  W  de  Lorraine  et  détruit  par 
le  comte  Jean-Louis  de  Nassau-Saarbruck  en  1670,  fut  rétabli 
et  ces  religieux,  doués  d'une  foi  religieuse  ardente,  8*effi>r- 
eèrent  de  Umq  triompher  la  religion  catholique  dans  les  cam- 
pagnes; on  se  pressait  à  leurs  sermons  et  leur  tendance  an 
prosélytisme  souleva  les  plaintes  des  protestants. 

Le  Conseil  de  la  régence  de  Saarbmck  remit  à  Tambassa- 
denr  français,  à  la  IMète  de  Ratfsbonne,  en  1686,  un  mémoire 
où  il  signalait  toutes  les  mesures  arbitraires  et  toutes  les 
Tiolenceii  exercées  contre  les  protestants  des  comtés  de  Saar- 
werden  et  de  Saarbmclc^ 

Looîs  XIV  avait  fait  bâtir,  non  loin  de  Vaudrevanfçe,  sur  le 
territoire  de  Listroff,  dans  l'isthme  d'une  presqu'île  que  forme 
la  Saar,  une  ville  à  laquelle  il  donna  le  nom  de  Saar-Louis  et 
qu'il  lit  fortifier  avec  le  plus  grand  soin.  Il  y  étahlit,  par  un 
édit  du  mois  de  février  1685,  un  présidial  ({ui  étendait  sa 
juridiction  sur  le  bailliage  d'Allemagne,  Phaisbourg,  Saar- 
boorg,  Saarguemines  el  les  comtés  de  Bitche,  Saarwerden, 
Saarbruck,  Deux-Ponts,  Bliescastel,  Saint- Wendel,  Hombourg 
et  Ottwiller,  et  qui  ressortissait,  quant J.à  Tappel,  au  Parle- 
ment de  Metz,  et  le  pays  n'eut  qu*à  se  féliciter  de  son 
institution. 

Le  voisinage  de  rÂUemagne  fit  bientôt  renoncer  &  remploi 
de  la  violence  en  matière  de  fiâ;  on  craignit  Tappui  des  pro- 

*  Theat.  ewrop.,  t  XII,  p.  976. 


1 


264  BEVUE  d'al&ace 

testants  du  Rhin  et  Ton  renonça  même  aux  persécations  juri- 
diques. Un  édit  du  10  février  1687  accorda,  non  seulement  la 
franchise  de  dix  ans  aux  étrangers  qui  viendraient  s'établir 
en  la  province  de  la  Saar.  mais  encore  la  liberté  entière  de 
religion,  à  c^nditiou  de  bâtir  des  maidoos  et  de  défricher  des 
terres'. 

Cependant  il  se  forma,  en  1687,  à  Augsbourg,  une  ligue 
pour  arrêter  les  progrès  de  Lonis  XIV ;  la  plupart  des  prinees 
de  TËurope  y  entrèrent  Louis,  de  son  cdté,  réctamait  la  suc- 
cession de  rélecteur  palatin,  au  nom  de  la  dachesse  d'Orléans, 
et  Toolut  imposer  à  Cologne  un  éTéque  de  son  choix.  L'am- 
bition du  roi  de  France  alluma  une  nouvelle  guerre  qui  ne 
finit  qu'en  1697,  par  le  traité  de  Byswick,  dont  le  quatrième 
article  condamna  toutes  les  infiraetim  fiites  au  traité  de 
Weiitptaalie  par  la  Chambre  de  réunion  de  Metz,  abolit  les 
arrêts  rendus  par  cette  Giiambre,  «  monuments  cPune  puis- 
sance et  dune  fierté  dangereuses  »,  et  restitua  à  l'Empire  ger- 
manique toutes  les  terrcvS  et  seit^ueuries  qui,  situées  hors  de 
1  Alsace,  eu  avaient  été  détachées  par  cette  Chambre'. 

Dag.  Fischbr. 

fLa  suite  a  la  prochaine  livraison  J 


*  Lepagk,  Les  rowmnnrs  de  la  Mrurthe,  t.  I,  p.  ^18. 

•  Waizbnegger,  Corpus  juris  publ.  s.  r.  Jmperii,  p.  660. 


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DES  COMTeA^®^'-^^^ 

?urg. 


m. 


Adolvbi. 
comte  de  Nauaa, 
de  Wieabadeo  «t  d'I 

t  UTO. 


ifti. 


FHEDEHIC. 
comto  dt;  WciJbouis, 
t  WW. 


JEAN-ERNEST. 

prince  de  Weilhour;:. 


.de 

I 

I/- 


GHARLBS-AUGUSTE. 
prioce  de  Weilboais, 
I7SS. 


GHARLESCHRISTIAN. 
t  1788. 


FREDEItlC-GUlLLAiniB, 
dflc  de  Nasiav, 
t  1818. 


ALBBR1 
t  1388J 


OULLAUNE-GEORGE-AUGUSn, 
né  le  14  juU)  179S, 
a  bMti  Ueingen,  f  18S9. 


ADOLPHE, 
doe  de  Nassau, 
né  Je»JaUl«il8l7. 


/ 


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NOTES  BIOGRAPHIQUES 

SDR  US 

HOMES  DE  lA  DEVOLUTION 


STRASBOURG  ET  LES  ENVIRONS 


SuiU 


Les  685  de  1793 


1.  AeInnI,  Josepli. 

2.  Âdam  atné. 

3.  Adorne. 

4.  Albert  aîné,  Jean-EtieiUM. 

5.  Alcan,  Abraham. 

6.  Alexandre,  G.-François. 

7.  AUiery. 

8.  Altmayw. 

9.  Ammann. 

10.  André,  Jean-François. 

11.  Andrès,  Philippe. 
19.  Anstect,  Jean. 
13.  Aitogast,!. 

ii.  Armand-Maizière. 

15.  Arnest,  Josepb-Philippe. 

16.  Arriez. 

47.  Attbry,  Denis^ean. 

18.  Aubugeoia^AnL-Jeui-Baptiste. 

19.  Aubuason,  Fnnçois-Midwl. 


30.  Aneroff. 

91.  AD6chtoger,leaiii-Fràiéric. 

22.  Aymal,  Jean-Baptiste. 

23.  Iî;er. 
U.  Fî.Tr. 

25.  Ba3rr,  Marx. 

96.  fiaillond,  CharMosepb. 

97.  Bailly  de  Joilly,  Edinfr-L.-!!. 

28.  Bajot,  J.-F. 

29.  Baldner,  JeaD-Daniel. 

30.  liallet. 

31.  Bar,  Jean-EUenne. 
39.  Barbat,  Frédéric. 

33.  Barbier,  Louis-Laur.-CamiUe. 

U.  Bardel. 

35.  Bardot,  Jean. 

36.  Barlholmé.  Jean-Jacques. 

37.  Basl. 

38.  Balant,  ClaiuMierre-Philib. 


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266 


BEVUE  D'ALSACE 


39.  Baudot,  Ifaro-Antotne. 

40.  Baudrier,  Josepli. 

41.  BaudrilloD. 

42.  Raiim;inii,  Roch. 

43.  naumgartnor. 

44.  Beauseigneur,  Jean-Pierre. 
48.  Beauseigneur,  Pierre. 

46.  Beck,  J. 

47.  Becker  Jean. 

48.  Renoit,  Briilii>. 

49.  H'MiUil>()le,  Piorrc-Louis. 

50.  Berger,  Jacques. 

51.  Berghauer. 

52.  Bernadon,  Pierre. 

53.  Bernard,  i.nuis. 

54.  Beri  iiyer,  Jean-Frauçois. 

55.  Berlrand,  Jean. 

56.  Basson. 

57.  Bevalet. 

58.  Beyer,  Jean-Daniel. 

59.  Bierlyn,  Jean-Uenri. 

60.  Birckic.ht. 

Cl.  Blanier,  Hainiond. 

6S.  Bleinck. 

63.  BœU,  JeaiM^aspard. 

64.  Bœtiger,  Michel. 

65.  Bohn. 

66.  Bonlcmps,  Jean-Baptiste. 

67.  fiorie-Cambort,  Jean. 

68.  Bomert. 

69.  Bossénius,  Chrétien-Geoffrol. 

70.  Bourrier. 

71 .  Rourgif;non,  .lacques. 
li.  ilouriol,  traiiçois. 

73.  Bouteille. 

74.  Boy,  Adrien. 

7.-.  Rra  ndlé,  Sébastien. 

76.  Bramarbas. 

77.  Rns  d'Or. 

78.  lirauii  aine,  Jean-Daniel. 

79.  BrauQ¥rald,  Louis. 

80.  Breck. 

81 .  Rremsinger,  Andr(^. 

82.  Brendel,  Fran«oi»'Antoine. 


83.  Brevet,  François. 

84.  Brey,  Frédéric. 

85.  Bronner,  Francois. 

86.  Brual. 

87.  Rrnder,  Jean. 

88.  Brunck,  Charles. 

89.  Bfthrer,  Jean-Frédéric. 

90.  Bnry,  l.-Loois. 

91 .  Buicnscbœn,  Frédéric. 
1)2.  Caillel. 

93.  Caire,  Ca.simir-M. 

94.  Cantrcz,  Charles. 

95.  Capitaine. 

96.  Garondelet,  Louis. 

97.  Carrey,  Louis. 

08.  Cari,  Jean-Frédéric. 

09.  Cari,  Philippe-Jacques. 

100.  Cariiot,  Lazare-Nic.-Marg. 

101.  Casimir. 

102.  Catolre,  Fnnç.-Henri-Gésar. 

103.  Cauvin. 

104.  Cavaignac,  Jean-Bapliste. 

105.  Cayon,  C. 

106.  Chabé. 

107.  Chagnet,  Aubin. 

108.  Chandon,  François. 

ion.  Chapuis,  François-Laurent. 

110.  Chasscloup-Laubal  (de). 

111.  Chebrelle,  Henri. 
113.  Chenest,  Pierre. 

113.  Cfaenevet  père,  Charles. 

114.  Cherbouosl,  Denis. 

115.  Cliristiaiii.  Henri. 

HG.  Christmano,  Marie-Louis. 

117.  Clavel. 

118.  Clément 

119.  Clerc. 

120.  Cohendet,  Joseph. 

121.  Collumbel,  Uypolite. 

122.  Cnmba. 

Iâ3.  Combès,  Pierre-Mathieu. 

134.  Gondere,  Raimond4ean. 

125.  Conrad,  PauL 

126.  Cordouan,  Loois^imalile. 


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LES  HOUMES  DE 


LA  RÉVOLUTION 


267 


H7.  Cotta,  Christophe-Frédéric. 
428.  Couchcry. 

lâîL  Coulmann,  Georges-Fri'idéric 

430.  Courlîn. 

1^  Courtot,  Antoine. 

131.  Cousin. 

433.  Couslard. 

43-i.  Couslard,  Anne-Pierre. 

435.  Coustillas. 

13a.  Coulailloux. 

13L  Couturier,  Jean-Pierre. 

IM.  Crécial,  François. 

439.  Crétin. 

440.  Cunier,  David-Ch  -Henri. 

441.  Dangler. 

Hi.  Dannbach,  Philippe-Jacques. 

443.  Danner,  François-Joseph. 

Ui.  Darbas. 

lil.  Daum. 

IM^  Debergeas. 

447.  Delâtre,  A.-F. 

iÂSL  Delleville. 

ÏÂâ.  Delteil,  Antoine. 

l.'îO.  D'Elwert,  Guillaume-Antoine. 

451.  D'Elwert,  Joseph-Antoine. 

lal.  Demeurey,  Charles. 

453.  Démougé,  François-Maxime. 

loi.  Dendinger,  Nicolas. 

15i*  Dentzel,  Georges-Frédéric. 

456.  D'Epinay,  François-Xavier. 

15!L  Desmarets,  Kené-Marcus. 

ISEx  Dessolliers,  P. 

lâiL  Didier.  Jean. 

IM.  Didier,  Jean-Nicolas. 

iùi^  Diéchc,  Antoine-Claude. 

Ifii.  Dielsch,  Jean-George. 

Ifil.  Dieudonné. 

IfLL  Donnât,  Dominique-Théodore. 

465.  Doppet. 

466.  Dorn. 

Ifil.  Doron,  Nicolas. 
ÏMa  Dorsch,  Antoine-Joseph. 
IfîlL  Druot,  Nicolas-Benoit. 
IIIL  Dubois,  L.-H. 


171.  Dudin. 

17i.  Duéz,  Jean-Jacques. 

173.  Duplaquet,  Louis. 

17  i.  Dupont. 

17.;.  Duport,  Jcan-Marie-Paturay. 

176.  Durand. 

177.  Durant,  Joseph-Alex.-Jacques. 

178.  Duriége. 
171).  Duroy,  J.-M. 

1  Si> .  Duverger,  Pierre. 

ISl .  Duzel. 

lS-2  Eberhardt,  Jacques. 

183.  Eberié,  Martin. 

184.  Edcl. 

1R;>.  Edelmann  aîné,  Frédéric. 

l.sii.  Edelmann  cadet,  Gcof.-Louis. 

187.  Ehrlenhollz,  Jeati. 

188.  Ehrmann,  E.-Frédéric. 
l.so.  Ehrmann,  Jean-François. 
lîiii.  Emmerich,  J.-M. 

101 .  Engel,  Mathias. 

19^.  Engel,  Philippe-Jacques. 

193.  Engelbach,  Aug.-Frédéric. 

104.  Ensfclder. 

19:ï.  Ensfelder  jeune,  Jean-Daniel. 

196.  Escher,  Jean-Baptiste. 

197.  Eylelwein. 

498.  Fabian,  Jean. 

499.  FahrKTndcr. 
iOO.  Ferrai. 
2ÛL.  Ferrières. 
202.  Ferry. 

2Û1.  Fibich,  Jean-Philippe. 

204.  Fibich,  HIs. 

205.  Fiesse. 

206.  Fischer. 

207.  Fischer,  George. 
2Q&.  Fischer,  Jean-George. 

209.  Flach,  llls. 

210.  Flambart,  Jean-Prosper. 

211.  Fleischmann,  Jacob. 

212.  Fonrouge,  A. 
211.  Fougières,  Jean. 
214.  Fournler. 


268 


REVUE  D'ALSACE 


21^  Foussedoire. 

Français. 

211.  Franck,  Jean-Daniel. 

ilK.  Freiss,  Jacques. 

2ilL  Fresne. 

22Û.  Fressine,  A.-L. 

221.  Frey. 

222.  Fricaud,  François. 

22a.  Fridolsheim,  Jean,  fils  dWbr. 

224.  Frics,  Jean-Michel . 
22a.  Frics,  Jean-Philippe. 
22fî.  Friez. 

221.  Frouarl,  G. 

225.  Friihinsholtz,  G. 
229.  Fuchs,  Jean. 
2aiL  Funck. 

Fûssinger. 

232.  Galbaud,  César. 

23a.  Gallay,  Guillaume. 

234.  Garabs,  F.-C. 
23a.  Gardier,  Jean. 

23fî.  Garigue,  Jean-Claude. 

231.  Garnerin,  J.-Bapt.-OIivier. 

235.  Garnier. 

2211.  Garnier,  Jean-François. 

2ifl.  Galteau. 

241.  Gaucher,  père,  Pierre. 

242.  Gauthey,  François. 
24a.  Gay,  Jean-Baptiste. 
244.  Geissenmaycr. 
24i.  Genêt. 

m  Genshirt,  fils. 

241.  Genlhon,  Antoine-Charles. 

248.  Gérard,  Marie-Jos.-Fr.-Adam. 

24a.  Gerhardl,  Philippe. 

2aû.  Germain,  Nicolas. 

2âL  Gérold,  J. 

222.  Gerst. 

2^  Gigaiid,  Jean-Raptisle. 

254.  Gilberti,  Antoine. 

2aa.  Gilliet,  Philippe. 

2a&x  Gillot,  Jcan-Chrélicn 

2al.  Gimbel,  Tobie. 

258.  Gimpel,  IL 


2aïl.  Girault,  François-Pierre. 

2fîÛ.  Giroux,  fils. 

2lil.  Glèze,  Charles. 

202.  Gnilius,  Jean-Henri 

Goberl,  Dominique-François. 

2fi4.  Gœrgen,  Philippe-Jacques. 

2fia.  Gœury,  Nicolas-Charles. 

26fî.  Gotlis,  Pierre-Claude. 

2fîl.  Gouguet,  Jean-Jacques. 

2M.  Goujon,  Jean-Marie-CI.-.\lex. 

âfîa.  Goupy,  Philippe. 

231L  Goutard,  Bernard. 

211.  GrafTenauer,  Jean-Philippe. 

212.  Grammaire. 

223.  Grandmougin,  père.  J.-B.-Nic. 

214^  Greuhm  ainé,  Charles-Fréd. 

27ri.  Grillet  tils,  Jean-Biiptiste. 

2IÊ.  Grillet  i>ère.  Jean-François. 

222.  Grimmeisen. 
2Iâ.  Grimmer,  G. 

223.  Grimmer,  Jean-Frédéric. 
280.  Grisard,  Claude-&iarie. 
2&1.  Gross. 

2S2.  Grosse,  Jean-Frédéric. 

283.  Grosse,  Jean-George. 

284.  Gruber,  Jean-George. 

285.  Grùn. 

28fi.  Gueffemme,  François-Joseph. 

2S2.  Guenot.  François. 

28S.  Guersching,  George. 

259.  Guillerin,  Charles. 

2aû.  Gûntzrolh  fils,  Chrétien. 

201 .  Gûntzrolh  iH>re. 

292.  Gûttel,  Jean-Etienne. 

2!}3.  Gûttelraann. 

294.  Guyardin,  Louis. 

2Qa.  llartwein,  Henri. 

2ÎÎ0.  llasenfratz. 

2Û1.  Hassclmann. 

2M.  Hauck. 

299.  Haupl,  Frédéric. 

300.  Ilaussmann,  Nicolas. 
3Û1.  Hausswald,  Ignace. 
302.  Ileim,  Joseph. 


LES  HOMMES  DE 


LA  BÉTOLUnON 


260 


30S.  HeiDrich. 

304.  Helck,  P.-Joseph. 

30").  Ilolnistottcr,  Pli.-GeOl^gfrJean. 

30G.  llemmel,  Frédéric. 

307.  Henninger. 

308.  Henry,  Jean-Nicolas. 
300.  Hente,  Cliarles. 

310.  riôiault(leStehelles,N.-Jean. 

31  i.  Ilering.  (ils. 

312.  Hervé,  Ilyacinlhe. 

313.  Uess.  Frédéric. 

3U.  Hess,  PliHIppenlacqiies. 

315.  Hess  (de),  Maurice. 

311).  Iless-Rhelnfels  (de),  Charles. 

317.  Hetzol,  Thiébaut. 

318.  Heubach,  Charies-Cbrétien. 

310.  Hlnchinger. 

320.  HoGlidœrflèr,  Jean-Pierre. 

321.  Ilo.lel. 

322.  Hoffmann.  Jean. 

323.  Honel,  Nicolas. 

324.  ilorack. 

325.  Horbel,  Joseph. 

326.  Hugard.  Jean-Charles. 

327.  Hugot. 

328.  Jlulli. 

329.  Hummel,  Jean. 

330.  Isnardi.  Pierre-François. 

331.  Jacob,  C. 

332.  Jacquot,  Félix. 

333.  Ja'ckié,  Fréderir. 

334.  .I;r^-i,  Jeau-lkpUsLe. 
33a.  Jauies. 

336.  Jardet,  Jacques. 

337.  Jeanne]. 

338.  Johnnnol. 
330.  Joinard,  J(>an. 
3-40.  im'n,  Jean-Marie. 
341.  Josl,  Jacques. 
349.  Jndée,  L. 

343.  Jung,  Jean. 

311.  Jimp,  Jean-George. 

34").  Junkcr.  Philippe-Jaoqiies. 

346.  Jurandon,  Pierre. 


347.  Jast(deSaini-),Ant.-L.-Léon. 

348.  Jnslet  cadet,  Pierra-Anloine. 
340.  Kicmmerer.  Jean-Jacques. 

350.  h>rling,  Michel. 

3'il.  Kamm.  Jean-.Vndré. 

352.  Karcher,  André. 

353.  Kéfein. 

354.  Keil,  Léopold. 

355.  Kiechel,  Jean<Frédèric. 

356.  Kioffer. 

357.  Kieuliu,  ainé  J.-Cbristophe. 

358.  Kim. 

350.  Klauer,  Charles. 

360.  Klée,  Jean-Jaoques 

301 .  Klein,  Jean. 

302.  Klein,  P.-IIenri. 

303.  Knecbl,  Jean-Daniel. 

364.  Knoll.  Balthaiard. 

365.  Koch,  Jean-Daniel. 

366.  Kohler. 

367.  Koll),  .fean-Jacques. 

368.  Koru,  Frédéric. 

369.  Kotelût. 

370.  Kranss,  FTançoi^Joseph. 

371 .  Krcss,  Philippe. 

372.  Kiiyler,  xVndrt. 

373.  Kngler.  F. 

374.  Kugler  (Senior),  F. 

375.  Kugler,  Jean-Frédéric. 

376.  Labartasse,  J.-Booillon. 

377.  Labeaame,  Philibert. 

378.  Laelaie. 

379.  Liicosle,  Jean-Haptisle. 

380.  Lxmmcraianu. 

381.  Laforgue. 
383.  Laforgue,  fils. 

383.  Lagrange,  Bernard. 

384.  Lagrols,  Guillus. 

385.  Landholt. 

386.  Lanfrey,  François. 

387.  Langert. 

388.  Langler. 

380.  Lantières  Ligelles. 

390.  Laqaiante,përe,J.-T.-d'Aquin. 


930 


BEVUB  D'ALSACE 


391.  Laaer. 

392.  Uogier. 

393.  Lanrent. 

39i.  I.aurpnl  aîné,  Joseph. 

30ri.  Lauieiil  cadet,  Nicolas. 

396.  Laurent,  Claude-Hilaire. 

991.  lATeaux,  Jean-Ottries. 

396.  Uvilte. 

399.  LavraïKl,  C.-L. 

400.  Lebas,  Philippe. 

401.  Leclère,  Charlcs-Frauçois. 

402.  Lédir,  Pierre. 

493.  Lefebvre,  François. 

494.  LeTebvre,  Us»  Fraiiç.-Xavier. 

405.  Legracicux,  Stanislas. 

406.  Leicht,  Henri. 

407.  Lémanc,  A. 

408.  Le  Mouuier,  lléné. 
499.  Léonard. 

419.  Léonard  fiis. 

411.  Léonhardt,  Chrétien-Louis. 

412.  Leoricr  fils,  Joseph. 

413.  Lepicq,  Antoine 

414.  L'Espagnol. 

415.  Lespomarède,  Fortuné. 

416.  Leslerpt,  François. 

417.  Les  Vignes,  MarUal. 

418.  LoYy-\Yolff. 

419.  Lichtcnberger,  Jean-Frédéric. 
499.  Lienhardt,  François. 

481.  Litaiie.  François-Martin. 

422.  Lix,  Thiébaut. 

423.  Loin-,  Aiulié. 
i-U.  Lorenlz.  J. 

425.  Louis,  Jean-Antoine. 

426.  Lusigny,  Etienne. 

427.  Haderlioffer,  George-Ignace. 

428.  Ifagnen,  Josepli. 

429.  Magnier. 

430.  Mainoni,  Joseph- Antuine. 

431.  Mallarmé,  Frauç.-Héaé-Aug. 

432.  Marcbais. 

433.  Marchand,  Léoninrd. 

434.  liarelle.  Unis. 


435.  Marin,  Prosper. 

436.  Martin,  Jfaeques-AlifalttiD. 

437.  Marx,  Michel. 

438.  Mass(^,  Mathieu. 

439.  Matthaeus,  Jean-Christophe. 

440.  Maurer,  J. 

441.  Mayer,  atné. 

442.  Mayer,  cadet»  Joseph. 

443.  Mayer,  Simon. 
4-44.  Mayran. 

445.  Mazot,  Josei)h-HYpolile. 

446.  Mechling,  Jean-Duniel. 

447.  Mengue.  R. 

448.  HénioUe,  fils,  V. 

449.  Menler. 

450.  Merckel. 

451.  Merlin,  Antoine-Christophe. 

452.  UerU,  Michel. 

453.  Metz,  Jean-Loals. 

454.  Melzger,  fiis. 

455.  Meyer,  André. 

456.  Meyer  fils,  André. 

457.  Meyer,  G. 

458.  Michelot,  Jacques-Charles. 

459.  Michelot,  fils,  Jean-PaoL 

460.  Milhaud,  Jean-Baptiste. 

461 .  Monet,  père,  Augustin. 

462.  Monet,  Pierre-François. 

463.  Monnet. 

464.  Moreau. 

465.  Mougeat,  Oomin.-Ferdinand. 

466.  Moutier,  Guillaume. 

407.  Moyaiix,  fils.  Joseph-Barlh(^l. 

468.  Moyaux,ptîrc,  Nicolas-Joseph. 

469.  Muhlberger,  Gaspard. 
479.  Millier. 

471.  MûUer,  Jean<Baptiste. 

472.  MûUer,  Je.in-Philippe. 

473.  Mûller,  Philippc-Jucques, 
47i.  Mulotte,  Philippe, 

475.  iNachbauer,  Joseph. 

476.  Nachtsheim. 

477.  Nanta. 

478.  Nestlin,  Jeaonlaoqnes. 


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UB  BOMKIB  OB  LA,  Bt?OUniOII 


271 


479.  Ncumann,  François. 

480.  Neunreuter,  J. 

481.  Mirxile,  Fraovoiâ-Godcfiûi . 
481.  Nlou. 

483.  NoUo,  Cbiide. 

484.  Obcrliii,  Nicolas. 

485.  Ocrtel,  Jean-Chrélien. 

486.  Ohlmann,  François-Joseph. 

487.  Olivier,  Paul. 

488.  Ortiieb. 

489.  Ostertag,  André. 

490.  OU,  Daniel. 

491.  OU,  Michel. 
49â.  Pabsl. 

483.  Pageot. 

484.  PaiUot 

495.  Panel,  André-Nicolas. 

496.  Pardon,  Jcan-Bapt.-Florenl. 

497.  Parent,  Loui&Joseph. 

498.  Paul. 
489.  Peoate. 

S8D.  Mrigny»  Charles. 

501 .  PelerscD,  Pierre. 

502.  Petifîny.  ,\nne-Ron(^-Josop!i  • 

503.  Petigny,  .loan-.Autoine-Tous- 

sainl-liibet. 

504.  PetiD. 

505.  Pétuaud,  André. 

500.  Peureux,  Jean-Baptiste. 

507.  Pfeffinger. 

508.  Pfeififer,  Cliarles-Frédéric. 
SOO.  Pflûger  ainé,  J.-A. 

510.  PUurr,  alnë,  Jean-TiiéopiiUe. 

511.  Piarr,  cadel,  François. 

512.  Pouquet. 

513.  Prieur,  C.-A. 

514.  Prieur,  Tibule. 

515.  Probst. 

516.  Prosandé,  Jean-FMdéric. 

517.  Prosl,  Antoine. 

518.  Prudhomme,  Pierre. 

519.  Puel,  Guillaume. 
590.  Purnot. 

Bit.  (tnirin. 


522.  Radès. 

523  Uaeser,  Frédéric-David. 

5i4.  Rasche,  Chrétien-Samuel. 

585.  Rauch,  Antoine. 

586.  Raotenstraueb,  Jean. 
527  Raymond,  Jean-Blicbel. 

528.  Ueibcl,  .leun-George. 

529.  Reul)eil,  Jean. 

530.  Heuillot. 

531.  Revel,  Jacques. 

532.  Richard,  Charles. 

533.  Richaud,  II.-J. 

534.  Ricot,  Joan-Tbomas. 

535.  Ries,  Jean. 
538.  Rigolot,  Alexis. 
531.  RisC,  Louis. 

538.  Ritter,  B.-J. 

539.  Riva,  André. 

540.  Rivage,  Michel. 

541.  Rivaud,  i\. 

548.  Rivet,  GuiUaume-Francois. 

543.  Robert. 

544.  Robinol. 

51.").  llobinot,  Antoine-Vincent. 

540.  Hobiuui,  Bernardin. 

547.  Rocba. 

548.  Rffiderer,  Frédérlo^aoqnes. 

549.  Rœderer,  Geoffroi. 

550.  Raderer,  J.-Phiiippe.  . 

551.  Rœssler. 

552.  Romand,  Jean. 

553.  Rooss,  Louis. 

554.  Rosat,  Jean. 

555.  Rosières,  François. 

556.  Rouge,  père,  François. 

557.  Rougemont. 

558.  Royer,  Jean-Baptiste. 

559.  Ruamps,  Pierre-Charles. 

560.  Ruault,  Chartes-Henri. 

561.  Rubin,  Joan-Baptlste. 

562.  Ruchet,  David. 

563.  Rudloir,  Charles. 

564.  Rûhl,  H.-Philippe. 

565.  Rnmplflr»  abbé^Franç.-Loai8. 


272 


RBVUE  D'ALSACE 


566.  Rnmpler»  Heori-lgiuice. 

567.  Ruppert. 

568.  Saget,  Etienne. 

569.  Sancy  (de),  Bruxel. 

570.  Sarez,  Simon. 

571.  Sauriat,  Jean-Charles. 
578.  Scaer.  Lauréat. 

573.  SchselTter.  George. 

574.  Si'haU,  Jacques. 

575.  Scherer,  Jean. 

576.  Schilling. 

577.  Scbkessiiig. 

878.  Schmitllieoiier,  Jean. 

570.  Schmlttheoner,  Jean-Théoph. 

580.  Sthmitz. 

581.  Sclnieegans,  Jean-Valentin. 
583.  Schneiber. 

583.  Schneider. 

584.  Schndder,  George. 

585.  Schneider,  J.-George(EaIoge). 

586.  Schnellcr,  .loseph-Michel. 

587.  Schœil  jeune, L.-GuiU.-Fréd. 

588.  Schoaler,  Jean-Henri. 

589.  Schropp. 

590.  Schûgler. 

591.  Schulimiichpr,  Toblas. 

592.  Sduillfr,  F.-J. 

593.  Schwahu,  Jeaa-Conrad. 
591.  SdrmirtE,  lem. 

595.  Sch?rartz»  Jean-Chiude. 
896.  Schwarlz,  Jean-George. 
697 .  SchweighaBusser,  Jean-Michel 

598.  Schwengsfold ,  Charles. 

599.  Schwind,  Charles-François. 
690.  Schwiagdenbamiiier,  Phil-P. 
601.  Sengel. 

cm.  ^Hh{'. 

G03.  .Silberrad,  Jean-Samuel. 

604.  Simon,  Jean-Frédéric. 

605.  Simon.  Nicolas. 

606.  SinxNid.  Daniel. 

607.  Simond,  PhiUbert 

608.  Sommervogel,  Xavier. 

609.  Spangelbcrg,  Harlin. 


610.  Specli. 

611.  Spielmann,  Louis. 

612.  Slahl,  George-Frédéric 

613.  Slamm,  Daniel. 

614.  Stampf,  Jean-George. 

615.  StardL,  Jeaihfacques. 

616.  Slempièl. 

617.  Stero,  Jean-Georges . 
(318.  Stierling,  Michel-.Vtulré. 

619.  StœbiT,  père,  Elie-Louis. 

620.  Slolz. 

681.  Stonhlen,  Francols-loaeph. 
689.  Striffler  François-Ignace. 
633.  Strohl,  Jean-Daniel. 

624.  Sluber,  Jean-Daniel. 

625.  Sultzer,  Jean-Michel. 
686  Tachet,  Nicolas. 
687.  Taffln,  Charles. 

628.  Téterel,  Antoine. 

629.  Télerel.  LiOUis. 

630.  Thomas. 

631.  Tisserant,  Nicolas-Joseph. 
638.  Tissert. 

633.  Tœrdel. 

634.  Toustaint,  Pierre. 

635.  Touzay,  Louis. 

636.  Touzay,  .Michel. 

637.  Uhlenbut. 

638.  Ulrieil,  André. 

639.  Ulrich»  Jean-Daniéi. 

640.  Valenlin,  Ignace. 

641.  Vérins,  Jean-Frédéric 

642.  Voniirr,  François. 

643.  Vialars,  Scipion. 

644.  Vienne. 

645.  Vincent. 

646.  Vissant,  Jean-Daniel 

647 .  Vitasse,  Jean-BapUste. 

648.  Vix,  Jacques. 

649.  Vix.  Jean-George. 

650.  Vogt. 

651.  Volck. 

652.  Vullier,  J. 

653.  Wagheue.père,  Jean-Jacques. 


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# 


LES  HOMlfBS  DB 


LA  RâvoLirnoM  ?73 


654.  Wagner,  Jean-George. 
635.  François-Joseph. 

656.  Wassner,  Jean-Thomas. 

657.  Weiler,  Jeau-IIeuri. 

658.  Wdller,  i. 
fi59.  Wetarani. 

660.  Weishnar,  Jean^éllx. 

661.  Weiss,  G.-F. 

662.  Weiss,  Michel. 

663.  Welcker,  Frédéric-Antoine. 

664.  Wencker. 

665.  Westermaiia,  Fniiiç.4o6eph. 

666.  Welzel. 

667.  Widokind,  J. 

668.  Widenlœcber,  Joseph. 
660.  Wieger.  Jâun-Flrdéric. 


670.  Wild. 

671.  Wilhclm,  ConradnJos.-Allt. 

672.  Willich,  George. 
G73.  Willisbach. 

674.  Wilmar  (de),  Loais. 

615.  WUvQt(dft). 

676.  Willelsbach,  Michel. 

677 .  Wiltmann,  Jean-Geoffroi. 

678.  Wohringer,  Gustave. 

679.  Wolir.  ûls,  Marx. 
680  Wolff,  Jean-Ouilel. 
68 i.  Zabem,  Andrt. 
G8-2.  Zny,  La/;in1. 

(3S:j.  ZeiliKickcr,  Jacques. 

G84.  Zimroermann. 

685.  ZiUenlier.  Jean-Dtnial. 


AGH.\RD  (Joseph). 

Né  en  1753  à  Toubepain,  département  du  Jura,  où  il  était 

menuisier  avant  1789. 
1791.  Ouvrier  à  rar.senal  de  Strasbourg. 
7  février  1792.  Membre  do  la  Société  des  jacobins,  où  il  est 

est  encore  inscrit  le  25  octobre  1794. 

ADAM,  alnè. 

1798.  Juge  au  conseil  de  guerre  de  Tarmée  de  la  Moselle. 

25  janvier  1794.  Juge  près  la  CSommission  révolationnaire 
ambulante,  instituée  par  les  représentants  du  peuple 
Lacoste  et  Baudot  pour  les  deux  départements  du 
Rhin. 

ADORNE, 
rue  Brûlée. 

1789.  L  avait  la  spécialité  pour  les  instruments  de  physique. 

10  septembre  1793.  Membre  du  Comité  de  surveillance  de 
la  Société  des  jacobins,  il  est  député  à  la  municipalité 
et  au  général  Dièche  pour  demander  Tarrestation  du 

NouTelte  Séii0.  —  7-*  Anato.  13 


2M 


BBTUI  D'ALBàOI 


professeur  Di^ttorich,  qui  a  însolté  Téobaipe  tricolore, 
ainsi  que  de  Noisette  et  de  Wild,  lesquels,  depuis 
longtemps,  devraient  ôtre  reclus. 

Il  approuve  la  demande  de  Stierling,  réclamant  le 
remplacement  de  Bella,  receveur-régisseur  principal 
du  séquestre  des  biens  des  princes  étrangers  posse»* 
sionnés  dans  la  République. 
21  décembre  1793.  Le  Ck)mité  de  surveillance  et  de  sûreté 
générale  lui  accorde  une  carte  de  sûreté  à  échanger 
contre  un  bon  civique  dès  qu^il  présentera  un  certi- 
ficat de  dvisme  dans  les  formes  prescrltea 

AJuBEBU  (  JBàN-EnBNMB),  alnè, 

dit  le  grand  ou  le  noir,  pour  le  distinguer  de  son  frère  cadet, 

dit  le  petit  ou  le  rouge. 

1765.  Avocat  plaidant  et  consultant  au  Conseil  souverain 

d'Alsace  à  Colmar. 
1784.  Membre  de  la  Chambre  royale  des  consultations  à 

Colmar. 

5  octobre  1789.  Secrétaire  de  la  Chambre  de  police  à  Stras- 
bourg. 

31  mars  1790.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Consti- 

tution  de  Strasbourg. 

29  mai  1791.  Etant  procureur  do  la  Commune  à  Colmar,  il 
dénonce  à  la  municipalité  deux  petites  pièces  de  vers 
aristocratiques  à  son  adresse  et  conclut  à  la  proscrip- 
tion la  plus  sévôre  de  ce  libelle  incendiaire,  à  la  brû- 
lure par  la  main  du  bourreau. 

2  septeml)i  o  1792.  Il  est  élu  député  du  Haut-Rhin  à  la  Con- 
vention nationale. 

15  et  19  janvier  1703.  Dans  le  procès  du  roi  Louis  XVX,  il 
vote  la  détention  et  le  banissement  à  la  paix. 

19  février  — .  Elu  juge  à  Coiiiuu',  et  peu  après  appelé  par  les 
représentants  du  peuple  comme  juge  au  tribunal  cri- 
minel du  Bas-Rhin. 

1"  août  — .  £u  cette  qualité,  il  lance  une  adresse  à  ses  con- 


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LES  UÛMMSâ  DK  LA  BÉVOLUTIOM 


275 


dïùyeoB,  dans  UicpieUe  il  développe,  en  oonnaissance 
de  cause,  le  bon  et  le  mauvais  c6té  des  assignats. 

21  octobre  1795.  De  nouveau  élu  député  du  Haut-Bhin  à 
PAssemblée  législative. 

21  novembre  — .  Ajccusateur  public  prés  le  tribunal  criminel 
du  Bas-Rhin  ;  il  assure  ses  condtoyens  quil  ne  cessera 
de  surv^er  Texécution  des  lois  protectrices  de  la 
sûreté  des  personnes  et  des  propriétéa 

1797-1800.  Membre  du  Gonsdl  des  Cinq-Cents  pour  Farron- 
dissement  de  Selestadt 

1800.  Elu  député  du  fias-Rhin  au  Corps  législatif. 

ALGAN  (Abraham). 

1756.  Né  à  Nancy,  où  il  était  négociant  avant  1789  ;  puis  à 
Paris  et  en  dernier  lieu  à  Stn^K>urg,  rue  des  Juifs. 

81  octobre  1798.  Imposé  par  SainfeJust  et  Lebas  à  15,000 
livres,  payées  les  6  et  10  suivants.  U  se  &it  ensuite  rece- 
voir aux  jacobins,  où  il  figure  encore  le  25  oct  1794. 

ALEXANDRE  (G.-Franoo]s). 

1761.  Né  à  Paris. 

1789.  Employé  à  la  loterie  de  Strasbourg  et  peu  après  direc- 
teur du  magasin  des  vivres  de  la  5'  division  militaire 
dans  la  môme  ville. 

Mai  1790.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Constitution. 

18  février  1791.  De  retour  d'une  mission  à  Colmar,  dont  les 
commissaires  royaux,  Dumas,  Hérault  et  Foissey, 
l'avaient  chargé,  il  lit  une  lettre  de  la  Société  de 
Colmar  à  celle  de  Strasl  Mjmy,  exprimant  le  plus  sin- 
cère et  le  plus  ardent  pâtriolisme.  Il  a  eu  la  satisfac- 
tion d'y  embrasser  le  brave  Stockmeyer  au  nom  des 
Strasbourgeois. 

30  avril  — .  Membre  du  Comité  de  correspondance  de  la 
Société  des  amis  de  la  Constitution. 

11  novembre  — .  Notable  de  la  Commune  de  Strasbourg. 

7  février  1792.  li  passe  aux  jacobins. 


376 


BEYUB  D'ALSAGS 


5  avril  Genx-ci  renvoient  à  Paris  pour  déposer  à  la 
CionYention  nationale  Taote  d^aocusation  dee  sans- 
culottes  contre  Pez-niaire  de  Dietrich  et  les  adminis- 
trateurs du  département  du  Bas-Rhin. 

23  mai  — .  De  retour,  il  signe  la  lettre  des  jacobins  de 

Strasbourg  à  toutes  les  Sociétés  afiUiées»  pour  leur 
peindre  la  dtuation  politique  de  nos  frontières. 

24  juin     Cité  devant  le  juge  pour  cette  adresse  inoeur 

diaire;  la  salle  de  lectures  du  club  est  fermée  par 
ordre  du  maire  Dietrich. 
20  lévrier  1798.  Le  représentant  BentaboUe,  à  Paris»  informe 
le  maire  M onet  <  qu^Àlexandre  allait  retourner  à 
Nancy;  quand  sa  place  au  Cîomité  des  achats  de 
vivres  lut  supprimée,  mais  il  reste  kà,  parce  qull  aura 
une  bonne  place  à  la  marine  >. 

25  novembre 1798.  Membre  d*une  Commission  pour  la  réo^ 

ganisation  complète  de  la  Société  des  jaoolnns  et  de 
son  Comité  de  surveillance  à  Strasbourg. 

18  décembre—.  Occupant  le  ikuteuil  de  la  présidence  au 
dub  des  jacobins,  et  remontant  aux  massacres  d^é- 
rode,  jusqu^aux  dragonnades  deLouis  XIV,  il  cherche 
à  prouver  qu'il  serait  nécessaire  d*en  iSsiire  autant  des 
suspects;  Taccusé  serait  tout  simplement  interrogé, 
jugé  et  puni  par  le  peuple.  Ainsi  agissaient  les  Ro* 
mains  dans  les  beaux  jours  de  la  République. 

28  avril  1794.  Au  Comité  de  surveillance  des  jacobins  et  à 
celui  de  salubrité  pubUque  à  Strasbourg,  il  est  élu 
notable  de  la  Commune. 

2  août  1794.  D  adhère  à  Padresse  de  la  municipalité  de  Stras- 
bourg à  la  Convention  nationale,  lors  de  la  conspira- 
tion de  Robespierre,  Couthon,  SaintJust  et  Lebas. 

18—.  Uest  chargé  par  les  jacobins  de  rédiger  l^&dresse  à  la 
Convention  nationale  pour  maintenir  les  mesures 
efficaces  et  révolutionnaires  prises  par  les  représen* 
tants  Lacoste  et  Baudot 

9  septembre  1794.  Refuse  de  succéder  à  Monet  comme  maire 
de  Strasbourg,  n  ne  pourrait  accepter  ces  fonctions 


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LES  HOMMES  DE  LA  BËVOLUTION 


277 


ayant  trois  mois,  ayant  à  administrer  mie  oonq»tabi* 
lité  d*au  moins  50  n^ons;  d^aiHeurs,  il  ne  possède 
pas  assez  les  connaissances  locales  requises. 
25  — .  Au  dub,  il  pose  la  question  : 

Si,  dans  une  République  naissante,  divisée  par  des  partis,  eu 
batte  au  traits  de  la  malTelUaoce  et  4  la  féroeltè  des  despotes  et 
de  leuB  satellites,  il  ne  ikndrait  pas  poeer  des  bornes  aux  droits 
de  tous  les  citoyens,  pour  enlerer  aox  malvciUants  le  pouvoir  de 

nuire? 

En  terminant  son  discours,  il  propose  un  anétéen 
trois  articles,  adopté  à  Tunanimité  par  la  Société. 

ALLIEHY  ou  ALHËRY. 

1791 .  Ganonnier  de  la  garde  nationale  de  Strasboui^^. 

8  octobre  1793.  Membre  du  dub  des  jacobins»  du  (2omité 

de  surveillance  et  de  sûreté  générale  de  la  Commune 

de  Strasbourg. 

25  décembro  — .  Ce  Comité  le  propose  pour  notable  de  la 
Commune. 

5  janvier  1 794.  Maintenu  membro  du  Comité  de  surveiUanoe 
de  la  Commune  par  le  représentant  du  peuple  Bar. 

ALTMAYER 

1793.  Membre  du  tribunal  criminel  delà  Moselle,  et  plus 
tard  accusateur  public  près  ce  môme  tribunal. 

25  janvier  1791.  Accusateur  public  près  la  Commission 
révolutionnaire  ambulante  instituée  par  Lacoste  et 
Baudot  pour  les  deux  départements  du  Rhin. 

ÂMMAMN  ou  HâMBIâMN, 
d*Oberhausbergen. 

1790-1791.  Membre  du  Directoii'e  du  district  de  l'administra- 
tion de  Haguenau. 

8  octobre  1793.  Conseiller  général  du  département  du  Bas- 
Rhin,  en  remplacement  de  Taristocrate  Braun. 

8  novembre  — .  Le  représentant  Saint-Just  le  conserve  à  la 
Commission  départementale,  en  sgoutantqd'fl  n<s  sera 


878 


RBVUE  D'ALSAOE 


pas  compris  dans  rarrestation  qui  frappe  ses  ankes 
collègues  da  département 
18  février  1794.  n  remet  400  livres  environ  à  Weiss,  secrè- 
taire-greffîer  du  tribunal  révolutionnaire  de  Sdmei- 
der,  qui  en  &it  la  déclaration  au  juge  de  paix  Mar- 
chand, à  Strasbourg. 

ANDRÉ  (JsàN-FbANCOis). 

1764.  NéàToul. 

1791 .  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Gonstitulioii  de 

StrasiDourg. 

7  février  179"^.  Il  quitte  cette  Société  pour  rester  avec  les 
jacobins  au  Miroir. 

1792.  Avocat-avoué  au  tribunal  du  district  de  Strasbourg. 
21  août  — .  Membre  du  Conseil  général  du  département  du 

Bas-Rhin . 

21  janvier  1793.  Procureur-général-s^Tidic  du  Bas-Rliin  à  la 
place  de  Monet,  nom  nie  maire  de  Strasbourg.  Dans 
cette  position,  disent  Liebich  et  Lauth,  députés  à  Pa- 
ris par  les  douze  sections  de  la  commune  de  Stras- 
bourg, dans  un  précis  sur  la  situation  de  cette  ville, 
présenté  à  la  Convention  nationale  en  mars  1793, 

André  t)arvint  à  écarter  des  concurrents  fâcheux,  pour  placer 
tlob  de  ses  parents  an  détnrteiiieiit  el  un  de  ses  bean-flrèns  à 
la  mnniclpalitô.  Ce  n'est  pas  les  injarler,  a^iontent  ces  coaunis- 
saires,  que  de  dire  qu'ils  n'avaleot  été  jnsqu^alon  oonnos  que 

par  leur  grande  nullité. 

6mai— .  Dans  une  lettre  aux  législateurs  à  Paris,  il  se 
défend  des  attaques  dirigées  contre  lui . 

7  mai  —.11  adresse  au  représentant  Bentabole,  à  Paris, 
copie  do  sa  démission  de  procureur-général-syndic  du 
Bas-Rhin,  envoyée  à  la  Convention  nationale  ;  mais, 
à  la  date  du  21  octobre  suivant,  il  est  encore  en 
fonctions. 

17  mai  — .  La  garde  nationale  est  sous  les  armes  ;  il  s'agit 
d^envoyer  des  bataillons  de  volontaires  en  Vendée  et, 
pour  électriser  la  jeunesse,  il  se  présente  pour  voler 


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L£B  HOMMES  DE  LA  RÉVOLUTION 


279 


à  la  défense  de  la  Rèpablique  et  de  la  liberté.  Je  n'ài 
ttmvé  nulle  part  qa^  lût  parti. 

8  oetobre  — .  Membre  du  Comité  de  surveillance  et  de  sûreté 
générale  du  Bas-Rhin. 

23  octobre  — .  Au  club  dos  jacobins,  il  réunit  les  sufYragea 
unanimes  pour  composer  le  Conseil  deniaudc  parles 
représentants  du  peuple  alors  à  Strasbourg. 

2  novembre  — .  Arrêté  par  ordre  de  Saint-Just  et  Lebas.  En 
prison  à  Strasbourg,  il  voulut  se  justifier  de  Taccusa- 
tion  d'entente  qui  aurait  eu  lieu  entre  l'administration 
etTennemi;  mais  les  représentants  refusèrent  toute 
explication,  on  hâta  niômo  son  départ,  et,  vers  la  fin 
de  novembre,  il  était  incarcéré  à  Metz.  On  fit  ties  dé- 
marches pour  son  élargissement,  et  ce  ne  fut  que  le 
24  février  1794  qu'il  fut  mis  en  liberté  par  ordre  du 
représentant  Foussedoire. 

11  mars  1794.  Il  se  présente  au  club  des  jacobins,  où  les 
membres  et  les  tribunes  lui  témoignent,  par  leurs 
applaudissements,  toute  la  joie  qu'ils  ressentent  de 
le  revoir  dans  leur  sein.  Il  monte  à  la  tribune  et  leur 

dit  : 

Je  ne  puis  vous  exprimer,  citoyens,  toul  le  plaisir  que  Je  res- 
sens de  me  trouver  au  milieu  de  vous;  J'ai  beaucoup  souffert, 
mais  foutes  mes  peines  et  mes  ebagrins  soot  oubliés;  il  est  donc 
arrivé,  cet  beureux  moment  où  jo  pourrai,  de  concert  avec  vous, 
épancher  mon  cœur  et  Iravaillcr  à  rafTermisscmenl  de  notre  liberté 
et  au  bonheur  de  rhuraanitt-.  .Mais  il  manquo  encore  quelque  chose 
à  mon  bonheur  et  à  celui  de  mes  compagnons  d'infortune  ;  quoi- 
qn'élargls  des  prisons  de  Uetz»  notre  Justiftcation  n'est  pas  com- 
plète, puisque  nous  avons  encore  Strasbourg  pour  lieu  d'arrêt  Le 
patriote  ne  peut  souffrir  que  le  soupçon  plane  longtemps  sur  sa 
téle;  je  demande  que  la  Société  <^meltc  son  opinion  sur  notre 
compte,  el,  si  elle  nous  juge  innocents,  (ju'elU;  lâche  d'oblenir 
notre  entier  élargissement  et  prenne  de  graudcs  mesures  pour 
arracber  des  prisons  tons  les  patriotes  qui  y  gémissent. 

La  demande  fut  unanimement  accueillie. 


28  août  — .  Membre  d'une  commission  de  six  membres, 
réclamée  à  grands  cris  par  Noisette  et  Burger,  enfer- 


280 


REVUE  D  ALSACE 


méB  ddpais  longtemps  au  Séminaire  et  qui  ne  cessent 
de  demander  leur  liberté. 

Âprôs  la  chute  de  Robespierre  et  celle  de  Monet,  le 
représentant  du  peupleFoussedoire  déclare  que,  pour 
le  bien  de  la  ville,  il  ne  peut  nommer  un  Strasbour- 
geois  pour  maire; Alexandre  ayant  refusé,  U  ne  peut 
prendre  qu'André.  CTest  le  9  septembre  1794  qu^  fut 
nommé  à  ces  fonctions,  pour,  en  janvier  1795^  par 
ordre  du  représentant  Bailly  de  Juilly,  feire  place  à 
Ifichel  Mathieu,  ancien  procureur  de  la  (Commune  de 
Strasbourg. 

9S  mars  1796.  Procureur  près  Tadministration  départemen- 
tale du  Bas-Rhin,  ou  Directoire  exécutif. 

1797-1796.  Membre  du  Conseil  des  Cinq-Cents. 

8  avril  1798.  Commissaire  du  Directoire  exécutif  près  Tad- 
ministration  centrale  du  Bas-Rhin;  il  sévit  contre  un 
libelle  intitulé  :  BetUcatéc/Usm  pour  ks  (err^  pré- 
sents. 

Sous  Napoléon  I**,  député  au  Corps  législatil 
10  juin  1811.  Conseiller  à  la  Cour  impériale  de  Colmar. 
7  novembre  1833.  Président  de  Chambre  à  la  Cour  royale 

de  Colmar. 

Décédé  en  fonctions  en  1848.  U  avait  été  un  jacobin 

modéré. 

Véron-Réville,  dans  son  histoire  de  la  Révolution 

dans  le  Haut-Rhin,  Tapprécie  de  la  manière  suivante  : 

André,  d('  Stnsbonrg,  plein  de  connaissances  et  de  luraitTCs; 
be:iucoup  de  talent  et  de  i»atriotisme;  est  fait  i)our  rendre  les  plus 
grands  services  à  radrainistralion  :  il  unit  la  prudence  ù  la  fer- 
meté, n  jouit  de  1  eslime  que  mérite  une  probité  reconnue. 

ANDRÈS  (PmuFFE). 

1793.  Membre  de  la  municipalité  de  Bœrsch. 

21  novembre—.  De  Molsheim,  Nestlin  et  Fussinger,  du 
tribunal  révolutionnaire  de  Strasbourg,  lui  donnent 
ordre  de  se  transporter  dans  les  communes  du  dis- 
trict pour  eu  retirer  tous  les  vases  d'or,  d'argent  et  de 


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LIS  HOMMES  DE  LA  BtVOLimON 


coiTre,  et  en  général  tout  ce  qui  a  flerri  au  fimatiame» 
efc  renvoyer  sur  le  ehamp  à  Wasselonne. 

Dans  les  communes  qui  se  sont  signalées  comme 
les  archi-ennemis  de  leor  patrie,  en  ûtvorlsant  les 
desseins  des  tyrans,  il  devra  briser  et  exterminer,  tant 
au  dedans  qn^au  dehors  des  églises,  chapelles,  cime- 
tières, tous  les  signes  et  monuments  qui  tirent  leur 
origine  de  la  superstition  et  de  la  bêtise.  Il  devra  leur 
imposer  en  outre  une  contribution  en  chemises,  sou- 
liers, manteaux,  redingotes,  et  surtout  une  taxe  en 
argent  payable  par  les  fanatiques  et  les  plus  riches, 
dans  Tespace  de  douze  heures,  sous  peine  de  prison 
et  de  conhacation  de  leurs  biens  au  profit  de  la  Ré- 
publique. 

n  rendra  compte  de  sa  conduite  dans  les  quarante- 
huit  heures. 

1798.  Comme  ex-agent  municipal  de  Bœrsch,  il  est  élu 
représentant  du  canton  d'Obernai  extra  muros  aux 
assemblées  primaires  du  Bas-Rhin. 

ANSTETT  (Jean). 

1789.  Curé  à  Oberbergheim,  puis  à  Schnersheim  lors  de 
son  abjuration. 

3  octobre  1793.  Membre  du  club  des  jacobins,  il  est  nommé 
membre  du  Directoire  du  département  du  lîas-Uhin. 

31  — .  En  cette  qualité,  il  dénonce  au  Conseil  do  surveil- 
lance et  de  sûreté  générale  lliehl,  ex-prévôt  de  Kiit- 
tolsheim,  et  trois  prêtres  insermentés,  qui  se  trou- 
vent à  Osthoffen.  C'est  Glavel  qui  est  chargé  de  Tar- 
restation. 

13  novembre  — .  n  quitte  radministration  départementale 
du  Bas-Rhin,  pour  courir  la  campagne  oomme  com- 
missaire révolutionnaire  taxateur  permanent  dans  le 
Eocfaersberg.  Il  avoue  n*avoir  perçu  que  171588  livres 
dans  ce  canton,  où  il  avait,  oomme  euré,  éssuyé  quel- 
ques mortifications.  De  là  beaucoup  de  vengeance, 
de  haine,  de  passions  Asatis&ire  vis-é-vis  des  cultiva- 


BBVUS  D'ALBAGB 


teursqui  lui  déplaisaient.  C'était  un  dénonciateur 
dangereux,  frappant  de  tous  côtés  au  nom  de  Schnei- 
der, dont  il  était  un  des  agents  dévoués. 

Dans  le  Kochersberg,  il  était  contre-carré  par  le  chef 
de  bureau  Bremsinger,  qui  rédigeait  aux  paysan^ 
contre  bon  argent,  des  plaintes  contre  lui. 

15  décembre  —,  Arrêté  par  ordre  de  Mainoni  et  conduit 

au  Séminaire  pour  ses  liaisons  suivies  avec  Euloge 
Schneider. 

16  — .  Neumann  est  chargé  de  rinterroger,  mais  aa  mise  en 

liberté  est  prononcée. 

Après  la  Terreur,  il  se  retire  à  Bramath,  où  il  de- 
vient agent  municipal,  et  c'est  en  cette  qualité  qull 
est  élu,  en  1798,  pour  représenter  le  canton  aux  as- 
semblées primaires  du  Baa-Bbin. 

ARBOGAST  (L.).  de  Mutzig. 

1789.  Avocat  non  plaidant  au  Conseil  souYeiain  d'Alsace. 
Professeur  de  mathématiques  au  corps  royal  d'artilie- 
rie  et  de  physique  au  collège  national  de  Strasbourg, 
dont  il  fut  principal. 

Octobre  1790.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Con- 
stitution à  Strasbourg. 

1 1  novembre  -.  Notable  de  la  Commune  et,  comme  tel,  il 
signe,  le  27  mars  1791,  la  mise  en  état  d^airestation 
de  Jœglé,  curé  de  la  paroisse  de  Saint-Laurent,  pour 
insultes  faites  à  Févéque  constitutionnel  BrendeL 

26  août  1791 .  Député  à  FAssemblée  nationale. 

2  septembre  1792.  A  l'élection  tenue  à:Haguenau,  élu  dé- 
puté à  la  Convention. 

Malgré  la  chaude  recommandation  de  YArgos,  son 
élection  paraissait  douteuse;  on  lui  reprochait  son 
absence  de  la  séance  où  le  sort  dë  Lafayette  était  en 
jeu,  son  peu  d'empressement  à  la  journée  du  10  août 
etàce quien  fhtla  suite.  Malgré  cela, U  fut  élu  à 
une  forte  majorité. 


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LES  HOMMES  DE  LA  RÉV<niimON 


15-19  janvier  1793.  Lors  du  procès  de  Louis  XVI,  il  se  pro- 
nonce pour  la  détention  et  le  bannissement  &  la  paix, 
refusant  son  vote  sur  la  question  du  sursis. 

Juillet  1795.  Le  reprêemUnt  du  peuple  Jard-Panvillers, 
chargé  de  Torganisation  de  TEcole  centrale  à  Stras- 
bourg, le  nomme  professeur  de  mathématiques  et  de 
géométrie,  il  y  est  encore  en  1803  ;  cette  Ecole  fut 
supprimée  en  1804,  lors  de  la  création  du  Lycée. 
Décédé  en  1805. 

ARMAND-MAIZIÈJIE. 
11  mars  1793.  Membre  du  Comité  de  surveillance  et  de  cor- 
respondance de  la  Société  populaire.  H  signe  la  déci- 
sion portant  que  le  citoyen  Waghette  sera  rayé  de 
la  liste  des  membres  du  Comité  de  surveillance  des 
jacobins. 

ÂRNEST  (JOBEPH-PaiLiPPE). 

1754.  Né  à  Lunéville. 

Avant  et  après  1789,  adjudant  de  place  à  Strasbourg. 

Juin  1790.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Constitu- 
tion jusqu'à  sa  dissolution,  27  juin  1792. 

22  août  1798.  Membre  du  dub  des  jacobins. 

28  septembre  — .  il  dénonce  au  Comité  de  surveillance  de 
cette  Société  :  1"*  Charles  Lecler,  chapelier,  place 
d^Ârmes  ;  2"  Knûrr  fils  ;  3'  Charrois  ;  les  deux  derniers 
canonniers  de  la  garde  nationale. 

80  novembre  — .  Il  dénonce  encore  Kleinmann,  ex-XV. 

27  décembre  — .  A  Thôtel  de  Darmstadt,  à  Strasbourg,  au 
bas  d'une  lettre  collective,  il  ajoute  : 

SI  Schneider  est  dans  le  besoin,  je  m'angage  à  lui  donner  tous 
les  mois  35  livres;  je  dois  cette  reconnaissance  aux  principes 
purs  et.an  bien  quil  a  produits  dans  cette  ville,  à  moins  qu*on  ne 
me  donne  des  preuves  du  contraire. 

11  avril  1794  Secrétaire  du  Comité  de  surveillance  de  la 

Commune  de  Strasbourg. 
8  mai  — .  ÂcQuâant  de  place>il  arrache  à  une  femme ungros 

flot,  en  forme  de  co(»rde  blanche,  et  demande  son 

arrestation. 


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BBVUE  D'ALSAGS 


16  mai  — .  Âu  Ck>iiiité  de  surveillance  des  jacobins,  il  dé- 
nonce céltli  de  surveillance  de  la  Commune,  lequel, 
ditpil,  contient  encore  quelques  membres  qui  pleu- 
rent la  mort  du  traître  Dietrich.  Sommé  par  Teterel 
de  les  indiquer,  il  ne  peut  répondre. 

25  octobre  — .  Il  était  encore  aux  jacobins. 

ARRIEZ, 
capitaine  au  6^  bataillon  du  Doubs. 

!•  novembre  1793.  H  est  envoyé  en  toute  hâte  aux  repré- 
sentants du  peuple  Saint-Just  et  Lebas,  à  Strasbourg, 
par  le  général  de  division  Michaud,  avec  une  lettre 
signée  le  marquis  de  Saint-Hilaire  et  adi'cssée  au 
citoyen  en  C.  D.  17, 18,  place  d'Armes,  à  Strasbourg. 
Cette  lettre,  interceptée  aux  avant-postes  de  la  divi- 
vision  Michaud,  semblait  prouver  quïl  existait  entre 
l'ennemi  et  des  citoyens,  même  des  fonctionnaires, 
des  intelligences  pour  livrer  la  place.  Cet  absurde 
écrit  n'était  que  l'œuvre  (Vun  faussaire;  mais  Saint- 
Just  ne  voulut  pas  entendre  raison,  et,  dans  la  nuit 
du  2  au  3  novem})re,  presque  tous  les  membres  du 
district,  du  département  et  de  la  municipalité  furent 
arrêtés  et  transférés  à  Metz,  Besançon  et  Ghâlons,où 
ils  restèrent  emprisonnés  pendant  plusieurs  mds. 
De  ce  nombre  étaient  les  citoyens  les  plus  honnêtes 
et  les  plus  dévoués  à  la  République,  tels  que:  Andié, 
OberUn,  les  frères  Edelmann  et  autrea 

Ce  tour  ayant  réussi,  on  jugea  bientôt  à  propos  de 
l'employer  de  nouveau.  Zimmermann,  d*^«g  sa  pétir 
tion  du  15  février  1794  au  Ciomité  de  sûreté  générale 
de  la  Convention,  y  &it  allui^on. 

AUBHT  (DENis-JBiN). 
1737.  NéàAlençon. 

Avant  1789,  miUtaire,  plus  tard  (1789),  a(^udant  de  place  à 
Strasbourg. 

i&  décembre  179a  Le  Cbmité  de  surveillance  et  de  sûreté 


• 


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LBB  H0MMS8  DB  LA  B&VOLUTIOM 


9B6 


générale  du  Bas-Rhin  arrôte  qu'outre  ses  appointe- 
ments, il  recevra  une  gratification  do  100  livres. 

Dans  le  même  mois,  il  est  reçu  membre  du  club 
des  jacobins. 

Il  passe  capitaine  au  37*  régiment  d'infanterie  de 
ligne. 

9i  mai  1794.  Sa  femme  dénonce  au  san&HRilotte  Massé, 
lequel  en  informe  le  Comité  de  surveillance,  qu'un 
prêtre  réfractaire  loge  chez  Dietseh,  drapier,  quai  des 
Bateliers,  au  second. 

5  juillet  ^ .  GommissaiiB  des  gaerres  à  Landau,  il  réclame 
à  Monet  renvoi  du  vin  rouge,  de  Teau-de-vie  et  du 
sacre  mis  en  réquisition  chez  les  riches  de  Strasbourg, 
et  nécessaires  pour  la  table  des  représentants  Hentz 
Qoi^on  et  Rougemont 

ÂUBUGrEOIS  (AimnNBJBAN-BApnsTB). 

90  mars  1793.  Président  d'âge  du  Comité  révolutionnaire 
de  Strasbourg. 

On  arrête  que  la  présidence  sera  de  la  durée  d'un 
mois  et  à  tour  de  rôle,  en  prenant  chaque  fois  le  jaco- 
bin le  plus  âgé. 

AU6USS0N  (Fbançois-Mighbl). 

1755.  Né  à  Tours. 

Avant  1789,  aux  subsistances  militaires. 

1793.  Inspecteur  principal  des  vivres  à  l'armée  du  Ilhin. 

Cette  même  amiée,  il  fut  reçu  aux  jacobins,  où  il 
figure  encore  le  25  octobre  1794. 


AUEROFF. 

1792.  Membre  du  club  des  jacobins. 

11  mars  1796.  Membre  du  Ciomitéde  surveillance  et  de  cor- 
respondance de  cette  Société,  il  approuve  et  dgne  la 
radiatioQ  de  Waghette. 


286  BEVUE  d'alsaob 

AUFSCHLAGEH  (Jean-Frédéric). 

Février  1792.  Membre  da  dub  des  jacobins  aa  Miroir. 
1798.  InsUtutetiT  à  Strasbourg,  il  a  trouvé  bon  d^abjuier 

rimposture  et  de  n^enseigner  dans  la  suite  que  la 

ample  morale  de  la  nature. 
9  avril  1797.  Employé  au  bureau  des  finances  de  la  muni- 

dpalité,  il  prononce  un  discours,  dans  le  temple  de  la 

Liberté,  sur  les  devoirs  des  électeurs. 
1798.  Elu  pour  représenter  Strasbourg  aux  assemblées  pri- 
maires du  Bas-Bhin.  Us  étaient  au  nombre  de  qua- 

lante-et-un  pour  ce  canton. 
1805.  Sous-chef  au  bureau  des  recettes  de  la  ville. 

Auteur  d'une  histoire  d'Alsace  en  trois  volumes» 

imprimée  à  Strasbourg,  eu  1825. 

AVMÀL  (jEMf-BAPnSTB). 

1748.  Né  à  Paris. 

Chirurgien-major  de  1"  classe. 
Mars  1792.  Membre  du  club  des  jacobins. 
179B.  Un  des  quatre-vingt-dix  de  la  sainte  propagande  à 

Strasbourg. 

18  octobre  —.  Président  des  jacobins,  il  assiste  à  rassem- 
blée générale  des  autorités  constituées,  des  Sociétés 
populaires  et  du  peuple  de  Strasbourg  dans  le  temple 
de  la  Raison,  à  Peffet  de  développer  les  principes 
rèpublicains.et  d^élever  le  département  duBas-Bbin  à 
la  hauteur  des  circonstances. 

23  octobre  — .  Proposé  par  les  jacobins  pour  ûdre  partie 

d'un  certain  Conseil  réclamé  par  les  représentants  du 
peuple  alors  à  Strasbourg,  mais  dont  les  attributions 
sont  restées  inconnues. 

24  octobre  — .  D'une  Commission  de  huit  membres,  qui  pro- 

cédera à  la  nomination  de  vingt  et  un  citoyens  pour 
composer  les  trois  corps  administratife  révolution- 
naires du  Bas-Bhin. 
18  novembre  — .  U  signe  rappel  des  sans-culottes  strasboui^ 


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LBS  HOMMES  DE  LA  RÉVOLUTION 


987 


geoia  aux  Sociétés  a£Bliée6,  pour  réclamer  l'envoi 
d'une  colonie  de  vrais  patriotes,  pour  les  aider  dans 
Texécution  des  grandes  mesures  nécessiiées  par  les 
circonstances  : 

VenŒ,  frftras,  sauvons  ensemble  la  chose  publique,  ou  sachons 
nous  ensevelir  sons  ses  décombres. 

1789.  Serrurier  &  Strasbourg. 
1793.  Membre  du  club  des  jacobins. 

21  Janvier  1793.  Les  commissaii-es  do  la  Convention  natio- 
nale, Couturier,  Rûhl  et  Denzel,  le  nomment  notable 
de  la  Cîommune. 

13  mai  — .  Membre  du  Comité  permanent  de  la  VIII'  section 

de  la  ville  do  Strasbourg,  il  signe,  avec  douze  de  sos 
collègues,  une  dénonciation  à  la  Convention  natio- 
nale, demandant  le  baimissement  de  la  ville,  même 
de  la  République.  d'Euloge  Schneider,  accusateur 
public. 

8  octobre  et  5  novembre  1793,  30  janvier  et  23  avril  1794. 
Elu  par  la  Société  populaire  notable  de  la  Com- 
mune. 

1793.  Greffier  au  tribunal  révolutionnaire  de  Strasbourg. 
Membre  du  club  dos  jacobins. 

18  novembre  -.  Il  signe  la  mise  en  liberté  de  Joseph  Moser, 
d'Avolsheim,  contre  5000  livres  à  verSOT  dans  quinze 
joui's  à  la  caisse  dudit  tribunal. 

23  novembre  — .  La  trésorerie  révolutionnaire  lui  paie  mille 
lives  pour  dépenses  du  tribunal 

23  décembre  — .  Il  certifie  conforme  une  dépèche  des  repré- 
sentants Lacoste  et  Baudot  au  général  Diéche,  com- 
mandant la  place  de  Strasbourg,  demandant  des  sou- 
liers pour  les  soldats  de  Tarmée  de  Bhin-et-Moselle. 

Il  vaut  mieux,  disenUIs,  que  les  liabitants  des  villes  soient 
sans  souUers  que  les  défiensenn  de  la  patrie. 


888 


BBVmS  D'ALSACE 


22  août  1791.  Greffier  du  juge  de  paix  Scliœll;  il  nous  donne 
les  résultats  d'une  cause  contre  François  Poirson, 
d'IUkirch,  comJamné  à  la  déportation  perpétuelle,  et 
sa  femme,  née  Ulmer,  mise  à  mort. 

I-e  maire  de  celte  commune,  dil-il.  le  citoyen  Sengel,  aiiraît 
bieu  voulu,  dit-on,  s'emparer  de  leur  belle  propriété;  leurs  meu- 
bles et  effets  ayant  deja  eie  employés  A  l*uâge  des  fiemiiies  pa- 
bliques  de  Schneider,  Taffin  et  Glavel. 

BMRR  (Maex). 
Un  Israélite  de  Strasl)ourg.  La  seule  famille  autorisée,  depuis 
1771,  à  résider  au  Judenho^  au  Finckwiller,  à  Stras- 
bourg. 

20  février  1790.  Reçu  membre  de  la  Société  des  amis  de  la 

Constitution  à  Strasbourg,  qui  fit  insérer  dans  les 

feuilles  le  discours  prononcé  à  cette  occasion  par  le 

récipiendaire,  en  y  ajoutant  : 

La  Société  croit  s'honorer  par  le  premier  témoignage  donné 
publiquement  en  Alsace  du  mépris  d'un  injuste  préjngiV  que  |>cul 
affaiblir  la  demande  qui  lui  a  faite  au  nom  du  nouvel  admis. 
Elle  s'est  déterminée,  par  ce  motif,  à  la  faire  imprimer. 

31  octobre  1793.  Imposé  par  Saint-Just  et  Lebas  à  25,000 

livres  ;  il  réclame. 
15  novembre  — .  Le  Comité  de  surveillance  et  de  sûreté 
générale  arrête  que  Marx  Bterr,  connu  par  son  civisme 
et  par  la  constance  avec  laquelle  il  s"est  montré  dans 
les  moments  les  plus  critiques  pour  les  \Tais  républi- 
cains, sera  réduit  à  10^000  livres,  qu'il  solde  le  19  sui- 
vant. 

S'il  a  fait  partie  du  club  des  jacobins,  il  n'y  était 
plus  le  25  octobre  1794. 

ËTlENIiJS  BaETB. 
{La  iuUe  à  la  prochaine  livraisonJ  * 


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L'ASSASSINAT 

va 

COMTE  ANDRÉ  DE  SONNENBERG 

(1611) 


. .  •  Das  Roich  iât  trotz  einem  yienig- 
Jtthfigen  LandlHedens  noeh  {mmer  eina 
Mdrdovrabe. . . 

G<BTZ  DB  BSBUCHIÎICBir. 

Au  milieu  de  Tannée  1511,  Guillaume  de  Ribnupierre, 
landvogt  en  Alsace  et  Brisgaii,  recevait  Idrdre  do  se  f^aisir 
du  noble  Herninrin  de  Brandschilt  \  réfugié  à  Brisacli  et  qui 
était  véhémentement  soupçonné  d'avoir  pris  la  part  la  plus 
active  à  l'assassinai  d  un  des  ])Ius  illustres  seigneurs  de  l'Em- 
pire, le  comte  André  de  Sonnenberg. 

Cet  ordre,  en  texte  imprimé.  quej*BÎ  trouvé  dans  les  papiers 
de  la  famille  de  Ribaupierre,  n*est  accompagné  d'aucun  docu- 
ment indiquant  les  mesures  prises  par  le  représentant  de 
rempereur,  qui,  très  prudent  et  circonspect,  resta  (irobable- 
mentfnactir,  et  c'est  ailleurs  que  j'ai  dû  rechercher  les  détails 
de  ce  lamentable  éfâsode  de  vengeance. 

Lft  père  d'André  de  Sonnenberg  avait  acquis  autrefois  du 

*  La  famille  Brandsehilt  était  d'origine  alsacienne.  Ses  armoiries  par- 
lantes se  composaient  d'un  Âca  portant  six  fiuces  alternativement  de 
gneoles  et  d'argent  an  tison  enflammé  brochant  snr  le  toot  (HsBTzoa). 

NooTtlle  Série.  -  7-  Année.  19 


290 


RE\T;E  d' ALSACE 


eomte  de  Werdenberg  la  seigneurie  de  Walbourg  et  m\i 

obtenu,  des  grâces  de  l'empereur  Frédéric  III,  le  titre  de 
comte  attaché  à  cet  apanage. 

Sous  le  trop  long  n-gne  de  l'apathique  Frédéric  IIl,  l'éclat 
du  trône  d'Allemagne  s'était  à  peu  près  éteint  et  Maximilien  I*", 
qui  lui  aaecéda  en  1492,  ne  put  parrenir  à  le  raviver.  Les 
Etats,  gouvernés  par  des  princes  revêtus  de  la  dignité  d'élec- 
teur, demeuraient  indivisibles  par  droit  absolu,  mais  les  autres 
fiefs  étaient  le  plus  souvent  partagés,  à  la  mort  du  père,  entre 
les  enfiints  mftles,  et  ainsi  les  dynasties  s^affiiiblissaient  an 
grand  détriment  du  corps,  autrefois  si  redoutable,  qui  s'appe- 
lait l'Empire  germanique. 

Ce  démembrement  répf^té,non  seulement  à  la  suite  d'héri- 
tages, mais  encore  par  des  aliénations  partielles,  suscitait 
trop  souvent  des  querelles  de  Humilie  toujours  sanglantes  et 
entraînait  enfin  des  désordres  sans  fin  et  sans  remède. 

Les  cadets  de  fiimille,  les  seigneurs  i  bout  de  ressources, 
se  sentaient  poussés  à  d'odieux  brigandages,  qu'on  érigeait 
pour  pouvoir  les  excuser  en  prouesses  guerrières  et  qui,  de 
nos  jours,  seraient  considérés  avec  raison  comme  des  crimes 
de  droit  commun  et  dignes  du  dernier  supplice. 

On  se  réunissait,  à  la  vérité,  en  diète  pour  régler  les  affaires 
les  plus  importantes;  toutefois,  l'indolent  Frédéric  s'abstenait 
de  paraître  à  ces  assemblées,  et  plus  tard  son  fils  Maximilien, 
toujours  befloigneux,n*y  arrivait  que  dans  le  but  d*extorqaer 
rargent  nécessaire  à  ses  nombreux  projets. 

Le  fidble  lien  qui  unissait  les  Etats  de  Germanie  se  serait 
Infoîlliblement  rompu  sans  la  splendeur  de  la  puissance  otto- 
mane, alors  à  son  apogée,  et  qui,  menaçant  d'inonder  toute 
l'Europe,  obligeait  encore,  malgré  leurs  haines  et  leurs  dis- 
cordes privées,  les  seigneurs  dAliemague  à  se  serrer  quelque- 
fois autour  du  trône  impérial. 

C'est  au  milieu  de  cette  époque  tourmentée  que  le  eomte 
André  de  Sonnenberg  fit  ses  premières  armes.  Doué  d*un 


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l'assassinat  du  comte  andbé  de  bonnembbbg 


991 


caractère  franr  et  chevaleresque,  il  avait  embrassé  avec  Tar- 
deur  du  dévouement  la  cause  de  Maximilien. 

Capitaine  jrénéral  pendant  la  guerip  de  Bourgogne,  il 
conquit,  en  J4â6,  une  bannière  françaifie.  Plus  tard,  on  le 
retrouve  marchant  à  la  tète  d'un  corps  important  lar  Bruges, 
pour  délivrer  son  maître,  alors  encore  roi  des  Romains.  Dans 
un  combat  livré  par  lui  aux  bourgeois,  sept  mille  de  ces 
derniers  restèrent  sur  le  champ  de  bataille.  Il  se  distiogua 
enfin,  à  plusieurs  reprises,  dans  les  guerres  des  Paya-bas  qui 
suivirent. 

Dans  la  campagneque  Maximilien  entreprit,  en  1490, pour 
reprendre  le  duché  d'Aulriche.  envahi  par  Mathias  Gorvin. 
le  comte  André  montait  vaillamment  à  l'assaut  deStuhlweis- 
senbourg,  puis  se  battait  en  héros  contre  les  Turcs,  maîtres 
de  la  Croatie. 

Quoique  âgé  déjà,  il  reparaît»  en  1504,  dans  la  guerre  de 
suceession  de  Landshut  contre  le  palatin  Rupert  et,  moins 
heureux  cette  fois  dans  le  rude  métier  qui  ravaît  illustré,  il 

est  fait  prisonnier  au  moment  où  il  tente  de  rejoindre,  à  Kuf- 
stein,  avec  sa  cavalerie  celle  de  l'empereur,  son  maître  et 
souverain. 

C'est  seulement  vers  1510  que,  fatigué  de  la  guerre,  le  vail- 
lant champion  de  Maximilien  prit  la  détermination  d'aller 
Tine  tranquille  dans  ses  vastes  domaines  de  la  Souabe.  Mais 
il  ne  devait  trouver  le  repos  que  dans  la  tombe,  et  Dieu  per- 
mit qu*un  vieux  soldat,io  vulnérable  sur  les  champs  de  bataille, 
tombftt  victime  du  plus  lâche  des  gnets-apens. 

Le  eomfe  André  était  depuis  longtemps  en  discussion  avec 
Félix  de  Werdenbcrg,  qui  ne  pouvait  se  consoler  de  la  vente 
de  la  seigneurie  de  Walbourg  '  clTer.luce  par  sua  père.  Chris- 
tophe Scheiick.  de  Liinbouriî.  avait  été  désigné,  d'un  com?nun 
accord  et  par  les  deux  parties,  pour  régler  arbitraiement  le 

*  Sébastien  Munster  prétend  que  le  litige  fat  soulevé  an  siyet  de  la 
seigneurie  de  Ueiligenberg. 


383 


BBVQB  D'ALSAOB 


litige  dont  la  soIuUod  paraissait,  en  tout  cas,  devoir  être  toate 
pacifique. 

Le  5  mai  1511,|||kodré  de  Sonnenberg  revenait  de  son 
domaine  de  Bfissen,  accompagné  de  son  chapelain  et  de  trois 
pages;  il  dteranchait  lentement,  en  se  livrant  au  plaisir  de 

la  chasse,  vers  son  château  de  la  Sclieer.  Le  soleil,  s'inclinant 
déjà  vers  roccidenl,  marquait  à  peu  près  3  heures,  lorsque 
arrivé  à  la  hauteur  de  la  commune  de  Hunderfingen,  le  vieux 
comte  aperçut,  à  l'entrée  d'une  clairière  de  la  forêt  qu'il  tra- 
versait, une  troupe  d'environ  dix  cavaliers,  qui  paraissaient 
être  en  emboscade.  Ne  pouvant  se  rendre  compte  de  leurs 
intentions,  il  envoya  Tnn  de  ses  suivants  poar  les  reconnaître. 
Les  cavaliers  répondirent  qn1ls  étaient  TtoUiehÇ^^eiSonnea' 
berg  rassuré  crut  pouvoir  poursuivre  tranquillement  sa  route. 
Mais  bientôt  le  chef  de  la  bande,  qui  n'était  autre  que  Her- 
raann  de  Brandschilt,  s'écria  :  Tirez!  Quelques-uns  des 
hommes  d'armes  déchargent  à  l'instant  leurs  arbalètes  sur 
le  comte,  qui,  n'ayant  pas  été  atteint»  est  assailli  à  coups 
d'épée.  Son  cheval  est.  tué  et  lui-môme  tombe  bientdt,  frappé 
à  mort.  En  yain  le  chapelain  se  jette  au  milieu  des  meurtriers 
et  demande  en  grftce  d'assister  son  maître  dans  cet  instant 
suprême;  il  est  repoussé  sans  pitié  et  le  comte,  qui  a  déjà 
rendu  Tftme,  est  insulté  encore  par  ses  misérables  assassins. 

La  voix  publique  désigna  immédiatement  le  sire  de  Wer- 
denberg  comme  étant,  sinon  l'auteur  direct,  au  moins  l'insti- 
gateur de  cet  horrible  for&it,  qui  répandit  la  consternation 
dans  tont  le  pays  d*a]entour.  « 

Du  reste,  le  soir  même,  Christophe  de  Werdenberg  dénon- 
çait son  frère  aux  comtes  de  Truchsess  \  gendres  d'André  de 
Sonnenberg.  L'accusation  portée  contre  Félix  de  Werdenberg 

*  La  famille  Truchsess  (de  Walhonrp^  possédait  la  charge  de  grand- 
écuyer  tranchant  de  rEinpire.  Un  membre  de  cette  famille  considérable 
(Henri  Thiduess)  rapporta  à  1  empereur  d  Allemagne  le  gant  que  le 


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l'assamimat  du  ooitn  amdié  i»  bomnkkbbbo  283 

était  appuyée  de  preuves  irrécusables,  entre  autres  d'une 
lettre  livrée  par  le  baron  de  Zimmern,  dans  le  manoir  duquel 
les  meurtriers  avaient  trouvé  l'hospitalité. 

Voici  la  traduction  de  cette  lettrt  carieuse  à  plus  d'un 
titre  : 

A  mon  cher  et  bien  aimé  parent,  Jean  Werner,  baron 
de  Zimmern,  en  mains  propres 

Noble,  cher  et  bien  aimé  coudn,  je  dois  me  rendre  à 
Ulm  vers  la  mi-carôme  et  ne  sais  si  je  reviendrai  avant 
votre  départ  pour  Heilbronn. 

Pour  ce,  je  viens  vous  prier,  au  nom  de  notre  vieille 
amitié,  de  me  rendre  un  service.  Un  Wtbcbe^  du  pays  de 
Lorraine,  m'a  infligé  une  humiliation.  Permettes-moi 
d'envoyer  huit  à  dix  cavaliers  à  Wîldenstein,  mais  gardez 
l'affaire  secrète  et  surtout  n'en  divulguez  rien  à  mon  frère 
Christophe.  J'ai  grande  envie  de  m'arranger  de  manière 
que  ces  Wihches  me  laissent  en  repos  et  apprennent  à 
respecter  les  Allemands. 

Si  je  puis  quelque  jour  me  revancher  du  service  que  vous 
allez  me  rendre,  je  le  ferai,  croyez-le  bien,  aux  dépens  de 
mon  bien  et  de  mon  existence.  Dès  que  vous  aurez  besoin 
de  mon  secours,  venez  à  Mùselbourg  et  je  vous  assisterai, 
serait-ce  contre  le  diable  et  sa  grand'mère. 

Rcpondez-moi  par  ce  courrier  et  n'oubliez  que  je  suis 
toujours  prèt,ct  en  toute  occasion,  à  sacrifier  pour  vous  et 
ma  fortune  et  ma  peau. 

Sur  ce,  Dieu  vous  garde.  Datum,  Mercredi  avant  L<r/ar/, 
de  l'année  mil  cinq  cent  et  onze. 

Les  démarches  auprès  des  corps  de  la  noblesse,  les  appels 
aux  tribnnaaXf  les  suppliques  à  l'empereur,  tout  fut  employé 

tnalhenreux  Conradin,  dernier  des  Ilohenstiuffen,  j«fa  du  haut  de  Técha- 
faud,  à  Naples  (1268).  En  souvenir  di3  cet  acte  de  fidélité,  les  Truchsess 
avaient  obtenu  le  privilège  de  porter  dans  leur  éca  les  armes  pleines  de 
Sonabe  :  desslrle  à  trois  léopards  d*or. 

*  Le  dimanche  de  ImUire  tooibaif,  en  1511,  au  ï*'  avril.  Le  faXi 
accompli  le  11  mai  avait  donc  été  longaement  prémédité. 


KBVOB  O'ALSAOB 


par  les  parents  d'André  pourol)lenir  la  mise  en  accusation 
de  Félix  de  Werdenberg,  mais  celui-ci  devait  échapper  à  la 
justice  des  hommes,  dans  ces  temps  troublés  où  la  féodalité, 
qui  a  Dût  tant  de  mal  au  pouvoir  souverain  comme  aux 
peuples,  annihilait  rautorité  suprême  et  noyait  rÂUemagne 
dans  le  sang  des  querelles  intestines. 

L^empereur,  qui  se  proclamait  tout  puissant  et  invincible 
dans  les  actes  publics;  celte  majesté  sainte, qui  prétendait  au 
gouvernement  de  tout  [  univers  *,  n'avait  pas  même  le  pou- 
voir de  venger,  selon  les  droits  de  la  justice,  l'assassinat  du 
plus  noble  et  du  plus  ûdèle  de  ses  si^ets. 

P.-6.  Frantz. 


*  Ihro  Knij.  3fajMe!  fhi^  ahrisl  vttUlieh  Haupt  vndein  ïïerr  aikr 

Provinzen,  ncrrsrhaiftfn,  ja  auch  dcr  ganzm  WeU  nnrf  aller  dero  7hp- 
tern,  des  auch  was  undrrc  Fursten,  Herrn  itnd  privât  Prrsonen  haben, 
von  dero  zu  habcn  geachlel  werden  (Consultation  judiciaire  1591). 


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LE  SCHNEEBERG 

ET 

LE  COMTÉ  DE  DABO 

en  1778 


ÉTUDE  SUR  LES  MONTAGNARDS  VOSGIENS 

par  u»  professeur  alkmand^ 


L'auteur  de  cette  étude  sur  la  partie  montagneuse  des 
Vosges  dont  leSchneebergest  le  point  culminant  avait  résidé 
dix-huit  mois  à  Strasbourg  avant  d'entreprendre  ses  excur- 
sions dans  la  Montagne.  Bien  qu'il  eût  été  admis  dans  la 
société  de  l'Âmmeistre  de  Tarckheim  et  des  pastears  Stuber 
et  Blessig,  son  nom  est  resté  ineonou.  En  sa  qualité  de 
t  phîlantbropiste  *  >,  il  n*a  pas  d'instincts  haineux  et  on  doit 

*  Bibliothek  der  besten  Zeitschrifftcn,  in-8'*,  s.  1.  ii.  d.,  ronfermant  les 
obsttrattoiis  sar  divers  voyages  en  Alsace,  dans  les  Vosges  et  de  l'antre 
eAté  du  Rhin,  105  p.  (catalogue  Heilz,  n*  9l>B9,BibUothiqn9  provinciak 

de  Strasbourg). 

*  Les  fondateurs  du  philan^ropinismus  (V.  le  Conversatîom-Lexikon, 
nt'utlingtni,  18311  avaient  pris  noiir  ba<(^  de  rédiicalion  des  enfants  le 
système  do  Jeuii-Jacqnos  Pi(inss\iu.  système  avait  pour  principe 
essentiel  de  ne  jamais  ciiiplo\  t'r  aiinm  inoyoïi  coiîrcitif  cuulrc  la  jeunesse. 
On  ne  devait,  dans  leurs  étades,  jamais  empêcher  les  enlànts  de  faire  ce 
qui  leûr  plaisait.  Ce  nouveau  mode  d'éducation,  qui  en  valait  bien 


296 


REVUE  D'ALSAGB 


lui  en  savoir  gré.  Il  est  ainsi  bien  supérieur  au  célèbre  éco- 
nomiste anglais  Young,  dont  l'amère  jalousie  éclate  à  chaque 
page  de  son  voyage,  si  vanté  de  nos  jours. 

Par  la  brutale  peinture  de  ses  descriptions,  notre  voyageur 
est  de  réoole  des  écrifains  réalistes  de  la  fin  du  XYUI*  sièeie. 
Une  vive  agitation  régnait  alors  daos  les  esprits  et  les  remoaik 
dans  toux  les  sens.  Tout  homme  de  lettres  se  eroyiit  nn  pro- 
fond économiste.  Aossi  ragricnlture,  Tindustrie,  le  commerce, 
réconoiiiic  politique  forment  la  base  des  recherches  de  notre 
professeur.  Comme  tout  le  monde,  il  ne  veut  parler  que  du 
peuple  et  n'étudier  que  le  peuple.  Pour  lui,  la  description 
de  la  chaumière  dii  malheureux  réformé  Schenck  est  bien 
plus  intéressante  que  celle  du  palais  du  prince-évéqoe. 
S*il  parle  d*nn  gentilhomme,  c'est  qne  M.  de  Birkenwald  est 
son  confrère,  est  homme  de  lettres.  Toutes  ses  sympathies 
sont  pour  les  pauvres  montagnards  —  bien  à  plaindre  vrai- 
ment —  car  il  les  trouve  au  cabaret,  ayant  la  double  satisfac- 
tion de  bien  boire  et  de  narguer  les  employés  de  l'autorité. 

On  118  doit  pas,  du  reste,  prendre  trop  au  sérieux  ses 
utopies  philanthropiques,  car  parfois  il  avance  des  réflexions 
assez  saugrenues,  fruit  peut-être  de  préjugés  enracinés. 

Vers  la  même  époque,  un  avocat  de  Nancy,  M.  de  Sivry, 
parcourait  en  minéralogiste  les  Vosges.  Dabo,  Saint-Quirin 
ont  été  visités  par  lui,  mais  il  n*a  pas  gravi  le  Schneeberg 
Ses  dtscriptions  concordent  toujours  avec  celles  du  professeur 
d'outre-Rhîn.* 

d'autres,  fut  très  goûté  en  AlI'^maf,'MC  el  il  fat  pratiqué  môme  pendant 
ce  siècle.  Basedow,  originaire  de  Deisau.  fonda  le  premier  èlablissernent 
de  phUanthropinùmus  en  1774  Les  élèves  les  plus  célf'hres  furent 
Campe,  qui  créft  une  nuùson  d'édaeation  près  de  flambourg  ;  Ch.-F. 
Weise  et  Saixmann,  qai  s'étoblit  à  Schepfenthal,  en  Tbarinire.  Ce  dei^ 
nier  a  donné  en  deux  volumes  (178 la  relation  des  excursions  qu'il  fit 
en  AIIema,'ne  avec  ses  élèves  (rens>ii{;nementsdas  àTextrème  obl^eance 
de  M.  le  pasteur  VVinter,  de  Fénétrange). 

*  Observations  minéralogiqueis  faites  dans  une  partie  des  Vosges  et  de 
l'Alsace.  Nancy,  1782,  ia-Q". 


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L£  SCUM££BEaa  ET  LE  COMTÉ  0£  DABO 


297 


J'ai  pn  ajouter  aux  notes  de  celai-ci  deux  appendices  qui 
complètent  son  travail.  Le  premier,  extrait  d'un  ouvrage  du 
docte  dom  Calmet,  est  l'amusante  histoire  du  spirite  qui 
bouleversait  la  maison  du  curé  de  Walscheid,  «  malgré  que 
toutes  les  prières  du  Rituel  eussent  été  employées  >.  Le 
aecond  appendice  est  le  rapport  in  extenso  de  Tépizootie  qui 
ravageaity  en  1778,  les  étables  du  comté  de  Dabo.  Ces  deux 
pièces  étant  assez  difiSciles  à  trourer,  j*d  cm  bien  faire  en 
les  ajoutant  à  Ja  narration  de  notre  touriste  humanitaire. 

Il  est  inutile  de  parler  du  pays  yisîté:  Obersteigen,  Dabo, 
Abreschwiller,  Saint-Quirin,  Saverne  el  ses  ciiàteaux,  Birken- 
wald  sont  assez  connus.  De  bien  intéressants  ouvrages  ont 
paru  sur  presque  tous  ces  lieux  qu'eutoureul  de  vastes  forêts 
et  qui,  depuis  plus  d'un  siècle,  ont  toujours  su  passiouuer, 
par  leur  étrange  té,  F  historien  et  le  poète. 

Cependant  quelques  lignes  peurent  encore  être  oonsacréee 
au  comté  de  Dabo,  malgré  les  nombreux  éerits  dont  il  a  été 
l'objet': 

Propriété  plus  que  séculaire  des  Linange-Dabo,  cette  petite 
contrée  était,  avant  1879,  de  deux  diocèses.  Les  paroisses  de 
Dabo  et  d'Oberslcigcn  relevaient  de  celui  de  Strasbourg, 
archiprétré  de  Bettbur.  Walscheid,  église  mère  d'Abresch- 
willer  et  de  Voyer,  et  Hommert  dépendaient  de  celui  de  Metz 

^  V.  ce  qu  ont  publié  MM.  Alexandre,  Beauliea,  L.  Benoit,  Bretagne, 
D.  Carrière,  G.  Chevandier,  Colle,  D.  Fischer,  Klein,  H.  Kohn,  D' Kfiss, 
Lopage.  RoUiaïQller,  RflhU  Salmon,  Schœpflin,  Sebweighasiiser,  ete., 
Speeklé  et  Uérîan  ont  donné  la  ma  du  chàtean  de  Dabo,  dont  il  y  a  une 
gravure  des  plus  rares  dans  la  richissime  collection  de  M.  I?.  Cfiauf- 
four  à  Cûlinar  Le  plan  dus  fiir'ifi-'ritioiis  telli'S  qu'elles  dtn'aieut  être 
faites,  après  la  prise  du  château,  est  conservé  au  luiniâtère  de  la  guerre 
à  Paris. 

Sur  SaTerne,  il  existe  l'excellente  notice  de  feu  Klein  et  sortoat  l'ioi' 
portante  monographie  de  notre  collaborateur  à  la  i7«i;tie  d^Altaeet  Bl  D. 
Fischer,  qai  a  décrit  presque  tontes  les  localité|  parconraes  par  le 
«  philanUuropiste  ». 


886 


fiEYUB  D'àlSàOE 


arcbidiacoaé  de  Sarrebourg*.  (I^iUë  de  la  Biblioihèque  de 

Metz). 

Le  comte  et  i'érêque  se  disputaient  la  nomination  de» 
curés,  le  motif  mis  en  avant  par  la  prélat  était  «  Thérésio 
da  patron  »• 

Si  Ton  soit  les  données  histariqnes  modernes,  deux  peu- 
plades de  deux  pronnces  différentes  haletaient  ce  petit  pays  : 
l*les  THboques,  qui  s'étendaient  jusqu'aux  sources  de  la 
Zoro,  un  des  cours  d'eau  du  bassin  alsatique;  2°  les  Médio- 
malriks,  séparés  de  l'Alsace  par  la  Bièyre,  la  rivière  des 
Castors,  et  !«  Sarre,  larivièredes  Cerfs.  Ce  qu'il  a  été  trouvé 
de  monuments  antiques  dans  les  vallées  qu'arrosent  ces  conrs 
d'eau,  est  prodigieux.  On  en  voit  dans  les  Musées  de  Ciolmar, 
dt  Saveme,  de  Nancy,  de  Metz,  et  même  dans  celui  de  Saint- 
Germain.  Tous  ceux  qui  avaient  été  transportés  à  Strasbourg 
ont  disparu  lors  de  l'incendie  de  la  Bibliothèque  en  1870. 
Il  en  reste  encore  dans  la  contrée;  mais,  depuis  ces  dernières 
années,  l'ignorance  en  a  beaucoup  détruit  sur  les  bords  de  la 
Bièvre.  On  a  fait,  entre  autres,  une  digue  avec  des  pierres 
antiques. 

Au  point  de  vue  linguistique,  le  comté  de  Dabo  est  encore 
plus  curieux  à  étudier.  Le  dialecte  alsacien  est  parlé  à  Dabo, 
dont  les  habitants  ont  conservé  les  coutumes,  les  mcsurs,  le 
type  de  Tancienne  province  qui  les  protégeait  ;  à  Walscheid, 
à  Hommert,  c'est  le  patois  du  Westrich  ou  du  pays  de  la 
Sarre;  enfin  à  Abreschwiller,  à  Voyer,  on  entend  le  pur 
roman 

*  Vere  ITR),  il  y  avait  70  communiants  à  Iloinraert  et  Ilarreberg,  530 
à  Dabo,  700  à  Walscheid  et  ses  annexes.  La  cure  rapportait  800  livres 
à  Dabo  ol  903  à  Walscheid.  L'impression  annotée  dn  Ponillé  manuscrit 

du  diocèse  de  Metz,  faite  par  M.  H  Lepage,  le  zélé  archiviste  du  dépai^ 

tfiincnt  do  In  M^nii  th.-,  ôt;iit  prestjue  terniiiv-o,  loiNquc  l'incendie  de 

rini[)riiiiericKousseau-Pallûzàil8U  délroisil  le  fruit  de  plusieurs  années 
de  travail.  • 

D'après  H.  de  Beaulieu,  les  couiles  de  Linange,  poui-  repeupler  leur 


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LE  SCaN££tiSBG  EX  LK  COMTÉ  DE  DABO 


889 


En  1790,  les  dépatés  alsaciens  de  l'Assemblée  nationale 

détachèrent,  bien  légèrement,  d'après  les  intéressés,  le  comté 
de  Dabo  de  la  province  d'Alsace  \  sauf  Engenthal,  qui  resta 
du  canton  de  Wasselonne,  et  le  réunirent  au  département  de 
la  Mearthe,  district  de  Sarrebourg.  Jamais  les  montagnards 
ne  purent  s'habituer  à  ce  changement.  Ils  furent  obligés  de 
se  soumettre  à  des  administrateurs,  qui,  malheureusement, 
ne  comprirent  rien  à  leurs  coutumes,  à  leurs  droits  et  aux 
glorieux  traités  qui  les  protégeaient  De  li,  une  haine  sourde, 
qui  éclata  sourent  d'une  manière  terrible. 

Notre  voyageur  parcourait  donc  au  mois  d'août  1778,  dans 
un  cercle  bien  restreint,  des  régions  distinctes  par  la  race  et 
le  langage  de  leurs  habitants.  Bien  qu'il  n'y  fit  pas  grande 
attention,  son  excursion  humoristique  peut  mériter  d'être 
reproduite  et  j'ose  ia  présenter  ici  en  toute  confiance. 

A.  Benoît. 


«  Pendant  mon  séjour  à  Wangen  ^  j'entendis  sur  le  compte 
des  montagnards  des  Vosges  tant  de  récils  à  faire  frémir,  tels 
que  meurtres,  brigandages,  assassinats,  que  mon  désir  de 
chercher  à  les  connaître  devint  de  plus  en  plus  violent.  On 
me  disait  aussi  merveille  d'un  grand  rocher  qui  se  trouvait 
sur  le  sommet  du  Schneeberg,  montagne  située  à  quatre  lieues 
sud-ouest  de  l'habitation  où  j'étais.  On  pouvait,  disait-on,  le 

pays  désert,  appelèrent  des  colons,  picards,  lorrains,  aaver^^nats,  et 
même  de  la  Saisie  italienne  dans  ces  deax  derniers  vilh^s  ;  des  Alle- 
mands s'établirent  à  Dabo,  à  Walscheid,  à  Obersteigen,  à  Hommert.  Il 
est  à  remarquer  que,  inv'  jr*'  que  Ks  soigneurs  aient  adopté  le  culte 

évangélique,  les  h  ibilanls  ii'sti'nînt  r  lEhoIiqiics  romains. 

*  On  connaît  do^  ni  cinai  's  ;ui\  ,iriii"s  iJos  ooniles  l.iiiaii:.'û-Dabo. 
Feu  Dorlan  ei  possédait  dans  son  richo  médailli  r.  Le  traité  de  Lunô- 
Tilleannihila  eomplétemenl  1  »  privil^s  de  ces  petits  princes  souverains. 

'  Village  &  23  kilomètres  oaest  de  Strasbourg,  seigneurie  ecdésias- 
tique. 


3Û0 


RSVUE  D' ALSACE 


faire  osciller  avec  le  doigt.  Comme  les  habitants  des  forêts 
(car  en  Alsace  le  paysan  de  la  plaine  ne  désigne  les  montagnes 
que  sous  le  nom  de  «  forêts  »,  et  il  appelle  les  pâtres  et  les 
bûcherons  des  <  sauvages  >)  mouraient  été  dépeints  sous  les 
couleurs  les  plus  noires,  je  pris  la  précaution,  lors  de  mon 
premier  Tojage,  de  me  faire  accompagner  par  le  domestique 
de  mon  bôte  chez  son  bûcheron,  qui  devait  me  servir  de 
guide  au  Schneeberg.  C'était  la  première  fois  que  je  faisais 
une  Yéritable  excursion  dans  les  montagnes  pour  en  connaître 
les  sites  et  les  habitants.  J'avais  vu,  il  est  vrai,  les  montagnes 
de  la  Hcsse,  mais  en  chaise  de  poste,  et  celles  de  la  Misnie 
que  je  vis  dans  ma  jeunesse  ne  sont  rioQ  en  comparaison  des 
Vosges.  La  satisfaction  que  j'éprouyai  à  les  parcourir  fut  si 
grande,  si  noble  et  si  pure  que  j'en  coiiserverai  toute  ma 
▼le  le  plus  agréable  sou?enir. 

<  Leurs  contreforts  ondulent  dans  la  plaine  et  sont  partout 
courertsde  vignes,  d^arbres  fruitiers  et  de  châtaigniers.  Leurs 
sommets  sont  couronnés  d'arbres,  quelquefois  ils  sont  dominés 
par  des  rochers  hauts  et  escarpés,  sur  lesquels  l'industrie 
humaine  a  réussi,  au  prix  de  raille  efforts,  à  y  apporter  de 
la  terre  végétale  et  à  y  planter  des  vigues.  Des  chênes  y  ont 
poussé  à  travers  la  mousse  leurs  racines  dans  les  interstices 
du  roc.  Beaucoup  de  collines  servent  de  carrières  et  la  poudre 
y  bit  sauter  la  pierre.  Les  plus  renommées  sont  celles  du 
Kronthal  près  de  SouItz-les-Bains.  Rien  de  plus  sauvage  et 
de  plus  majestueux  par  Taspect,  rien  de  plus  intéressant  par 
la  formation,  les  cavernes  et  les  diverses  couches  que  celles 
quisonl abandonnées.  J'y  rencontrai  le  plus  souvent  du  quarz, 
du  granit,  du  grè5  et  du  calcaire.  Le  massif  des  Vosges  est 
couvert  de  forets  naturelles,  qui  ne  sont  pas  dues  à  la  silvi- 
cullure.  L-s  cbèues,  les  sapins,  les  pins,  les  ormes,  les  sor- 
biers, les  peupliers,  les  aulnes  y  sont  les  espèces  dominantes. 

•  Quelques  chaumières,  demeure  des  pâtres,  se  trouvent 
disséminées  dans  les  vallées;  des  villages  aux  malsons  très 


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LK  SCHMEEBBBa  XT  LK  COMTÉ  DE  DABO 


901 


écartées  l'une  de  l'autre*  sont  bâtis  dans  les  plus  grandes. 
Je  parcours  le  Wolflingerthal  l'Engenthal  et  le  Schneetlial. 
Quoique  les  Vosges  soient  parsemées  de  routes^  dont  la  prin- 
cipale, celle  de  Sarerne,  est  une  magnifique  chaussée  créée 
comme  les  autres  à  grands  frais  et  ayec  beaucoup  de  peine, 
le  transport  dans  certaine  partie  est  très  difficile  et  ponr 
ainsi  dire  impossible.  Le  chêne  et  le  sapin  f  pourrissent 
depuis  des  siècles,  et  même  à  la  place  où  je  suis,  malgré  la 
feible  distance  (deux  lieues)  qu'il  y  a  pour  aller  dans  la  plaine, 
on  trouve  beaucoup  d'irbres  cntièreoKMit  ou  à  moitié  pourris 
que  le  veut  déracine.  On  pourrait  utilement  s'en  servir,  je 
pense,  en  les  brûlant  pour  em{)loycr  les  cendres  dans  les 
verreries,  si  on  ne  peut  pas  absolument  les  utiliser  comme 
bois  de  construction. 

<  Le  bftcheron  auquel  j'étais  adressé,  me  conduisit  dans  sa 
chaumière,  située  avec  plusieurs  autres  au-dessus  de  TEngen- 
Ihal  sur  le  penchant  de  la  colline  à  égale  distance  de  son 
sommet  et  du  fond  de  la  valléa  La  montagne,  en  s'Indinant 
d'abord  petit  à  petit,  forme  d'abord  des  champs  bien  cultivés 
et  finit  à  sa  base  par  se  transformer  en  prairies.  Les  chau- 
mières touchent  presque  la  forent;  elles  sont  construites  en 
pierres  informes  avec  des  murs  très  épais,  soutenant  un  petit 
toit  en  bardeaux  :  chacune  d'elles  était  entourée  de  quelques 
arpents  de  terres,  séparés  du  voisin  par  des  murs  en  pierres 
sèches  entremêlées  souvent  de  morceaux  de  bois.  Des  champs 
étaient  semés  d*avoine,  qui  mûrit  encore  à  cette  hauteur'; 
mais  on  ne  voyait  ni  orge,  ni  seigle,  ni  blé.  La  pomme  de 
terre  est  la  grande  cniture  de  la  montagne.  Les  arbres  frui- 
tiers qu'on  y  trouve  sont  les  pommiers,  les  poiriers  et  les  pru- 

*  Dans  le  v.il  d'Orbey,  la  mt'me  construction  est  idoptée. 

'  La  première  de  ces  vallées  est  df  la  commune  de  Wanpenbonrj;.  Les 
deux  aatres  dépendent  d'Engenthal.  Ou  s'y  livre  avec  succès  et  proQt  à 
rédoeation  des  abeilles. 

*  D'après  le  IF  Kinehleger,  l'avoine  erott  encore  à  800  et  même  & 
950  mètres  d'alUtade. 


m 


BSVUB  D'ALSAOS 


niers,  mais  ceux-ri  portent  rarement  des  fruits.  Les  cerisiers 
n'y  mûrissaient  pas  à  cause  de  l'altitude  du  sol.  Presque  tous 
les  clos  des  enrirons  étaient  de  magoiûques  prairie!}.  Les 
maisons  à  un  étage  étaient  tournées  avec  la  partie  postérieure 
ms  le  Nord  et  la  porte  était  placée  an  Sud  ou  Ters  ta  mon- 
tagne, de  sorte  qu'en  revenant  des  prés  ou  de  chez  le  voisin, 
on  doit  faire  le  tour  de  Thabitation  pour  en  trouver  rentrée. 
L'écurie  est  partie  intégrante  de  la  demeure  et  en  occupe  à 
peu  près  la  moitié.  Le  grenier  sert  de  grange  et  de  magasin 
à  foin. 

•  En  entrant  cliez  mon  guide,  je  fus  suffoqué  par  l'odeur 
de  la  fumée;  car.  malizré  que  Ion  fût  en  été,  le  poêle  était 
fortement  chauffé.  Gela  tient  à  ce  que  les  hivers  rigoureux 
habituent  les  montagnards  à  supporter  une  forte  chaleur  même 
pendant  i*été,  qui,  bleu  souvent,  est  assez  froid.  Puis,  on  a 
le  bois  à  volonté  et  sous  la  main,  sans  avoir  besoin  de  rache- 
ter. Aussi  le  fonmean  est-il  toujours  rempli.  Il  était  grand 
et  informe,  fait  d  argilo  et  occupant  pre'-'que  la  moitié  de  la 
chambre*:  il  fumait  beaucoup.  Je  ne  pus  me  résigner  à  sup- 
porter cette  atmosphère,  et  quoiqu'on  eût  ouvert  la  seule 
fenêtre  de  la  chambre,  il  fallait  plus  d'air  à  mes  poumons. 
JMnsistei  donc  avec  beaucoup  de  force  pour  que  mon  guide 
me  conduisît  snr-le-champ  au  Schneeberg.  Avant  de  partir, 
nous  nous  restaurâmes,  moi  avec  du  vin  et  du  rOli  que 
j'avais  fait  emporter,  et  lui  avec  du  lait  et  du  fromage,  deux 
objets  qui  ne  sont  pas  à  dédaigner  pour  un  véritable  habitant 
du  pays. 

«  Les  enfants,  tant  qu'ils  ne  peuvent  pas  aider  leurs  parents 
à  récolter  les  pommes  de  terre  ou  à  garder  les  bestiaux, 
courent  presque  tous  en  chemise.  Plus  terd,  on  leur  donne 
quelques  vêtements  passables.  Us  mènent  une  vie  dure  qui 
les  fortifie  de  bonne  heure  et  favorise  leur  croissance. 

*  J'ai  vu  les  c]i  hris  d  on  semblable  calorifère  dans  une  cbaumière  au 
Cra,  près  de  la  Poutroie. 


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LB  SCHNEEBERG  ET  LE  COMTÉ  DE  D4B0 


303 


«  Dans  la  chaumière,  Jevis  des  lits,  une  annoire,  uneofTre, 

une  table,  un  escabeau,  un  banc,  quelques  couteaux,  fies 
cuillers  en  bois  et  un  crucifix.  C'était  Tunique  mobilier  qui 
garnissait  riuimble  chambre.  Il  faut  y  ajouter  une  Bible  et 
un  livre  de  prières.  Autour  de  la  maison,  il  y  avait  des 
pioches,  des  pelles,  une  cirière  une  hache,  des  pots;  les 
bestiaux  étaient  À  la  montagne,  quelque  poules  sautillaient 
çàetlà. 

c  Nous  commençâmes  de  monter  du  côté  de  l'Est  par  une 
espèce  d^escalier  tournant  et  après  aroir  gravi  la  moitié  de 
la  hauteur,  nous  nous  trouvâmes  ao  Nord  et  nous  arrivâmes 

au  sommet  du  côté  de  l'Ouest.  Le  chemin  serpente  ainsi, 
afin  qu'on  puisse  monter  avec  des  traîneaux  pour  chercher 
le  bois*.  11  f;iut  une  bonne  heure  pour  arriver  au  sommet, 
en  partant  de  la  chaumière  située  au  I^'ord,  au  pied  ou  peut- 
être  déjà  à  mi-côte.  Si  nous  avions  pris  un  sentier  plus 
direct,  nous  serions  arrivés  bien  plus  vite,  mais  avec  beau- 
coup plus  de  fatigue. 

<  Le  chemin  était  partout  endigué  avec  du  bois;  nous 
traversâmes  une  fois  un  pont  formé  de  troncs  d'arbres  et 
sîtué  dans  une  échancrure.  où  les  torrents  ont  enlevé  la  terre 
végétale  et  mis  la  roche  à  nu.  Nous  franchîmes  une  espèce 
de  préi  ipice  et  nous  vîmes  dans  le  fond  un  ruisseau.  La 
montagne  s'est  ici  fendue  pendant  un  grand  orage,  et  à  tra- 
vers la  fente  on  ne  voit  au  fond  que  des  rochers.  Les  sapins, 
les  chênes,  les  ormes  et  les  bouleaux  ne  nous  enlevaient  pas 
tout  à  fiiit  la  vue.  Les  arbres  mugissaient  au-dessus  de  nous 
comme  les  vagues  soulevées  parle  vent.  Mon  plaisir  augmen- 
tait à  mesure  que  nous  montions.  Sur  les  rochers  au-dessus 
de  nos  tètes,  croissaient  beaucoup  de  mùders  sauvages,  de 

'  «  On  monte  au  Schneeberg  par  do  hanttis  fntMies  de  sapin  et  de 
hêtre,  sur  le  sol  vospien  parsemé  d  iinrnenses  blocs  de  ce  grés.:^  I.e  chomin 
dont  parle  notre  voyageur,  est  une  Schlitte,  chemin  forestier,  illustré  par 
Théophile  Schaler,  dont  on  déplore  la  perle  réeemte. 


BEVUE  D'ALBàGB 


d04 


myrtilles  et  de  fraisierî.  Le  sommet  est  dégarni  d'arbres;  il 
est  couvert  de  genêts,  de  genévriers  et  de  bruyères.  Au  milieu 
se  trouve  un  grand  rocher  fort  élevé,  qui  s'étend  du  côté 
de  TEst  comnae  un  mar  à  une  hauteur  de  cinquante  pieds. 
Tout  prèa  de  ce  rocher,  pousse  un  houx  el  plus  loin  un 
misérable  petit  sorbier,  qui,  probablement,  n*y  Tîm  pss 
longtemps  et  qui  a  être  apporté  là  par  quelque  oiseao. 
Notre  première  idée  fut  de  jeter  nos  regards  sur  le  pays. 
Quel  spectacle  grandiose  et  émouvant!  Vers  l'Ouest,  l'oril 
plonge  bien  avant  dans  le  Pays  messin  et  la  Lorraine  par 
dessus  une  masse  de  hautes  montagnes  noirâtres,  couvertes 
de  sombres  forêts,  de  vallées  parsemées  de  cabanes  et  de 
troupeaux,' de  grands  étangs  et  d'énormes  masses  de  rochers; 
▼en  le  Nord,  on  aperçoit  la  Basse-Alsace  et  le  Palatinat; 
Ters  l'Est,  les  pays  de  Bade  et  de  Wurtemberg,  le  tout  par- 
semé  de  ▼illes  et  de  Tillages;  vers  le  Sud,  une  chatne  da 
monts  à  perte  de  Tue.  On  embrnsse  tout  cela  de  quelques 
regards.  Il  est  impossible  de  dépeindre  la  douce  satisfaction 
que  je  ressentais.  J'éprouvais  autant  de  plaisir  à  ce  spectacle 
qu'à  celui  que  je  vis  par  un  temps  de  pluie,  à  une  autre 
asceasioQ,  lorsqu'un  nuage  m'efitoura  de  brouillards  humides 
et  sombres,  qui,  me  quittant  tout-à-coup,  allèrent  se  perdre 
bien  au-deseos  de  la  montagne.  Le  Schneeberg  n*est  pas  aussi 
haut  que  le  Ballon,  ni  qne  le  mont  Sainte-Odile,  ni  que  le 
Donon  \  Celui-ci  forme  dans  la  petite  principauté  de  Salm, 
derrière  le  Ban-de-Ia-Roche,  les  limites  de  TAIsace  et  de  la 
Lorraine.  Mais  il  est  bien  le  mont  le  plus  haut  à  partir  de 
sa  base,  du  côté  du  pays  de  Nassau  V 

«  Quant  à  la  roche  {LoUefelsen\  qu'on  nous  assurait  pou- 
?oir  être  remuée  avec  le  doigt,  c'est  une  assez  grosse  pierre, 

*  Le  Ballon  a  1436  mètres;  le  Donon  iOiO;  le  ScbDeeberg  967; 
Sainte-Odile  700. 

•  Le  pays  de  Nassau,  prés  Saar-Union,  est  à  peu  près  à  10  kilomètres 
aa  nord. 


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LB  lOBMBBBBBO  IT  LB  OOIRÉ  DB  OJLBO 


806 


longue  de  six  pieds  snr  qaalre  de  large,  liais  pour  la  remuer, 
il  me  ikllat  employer  les  deax  mains.  Soa  point  d'appui  n*est 
pas  aa  miliea,  comme  on  me  ravait  dit»  mais  elle  repose  sar 
tfûis  pieds  pointas  qoi  se  troarenl  aux  angles  et  celui  du 
milieu  est  plus  long  que  les  autres.  Sur  un  des  rochers,  et 
ils  sont  entassés  les  uqs  sur  les  autres,  je  vis  une  croix.  Mon 
guide  me  dit  que  ies  illustres  chanoines  de  l'église  cathédrale 
de  Strasbourg  Taraleat  fait  sculpter  dans  la  pierre  {your  éloi- 
gner les  sorcières,  qui  se  rassemblaient  dans  ce  lieu  écarté, 
pour  de  là  foire  éclater  les  épidémies  dans  le  bétail,  et  depuis 
que  les  prêtres  avaient  i)éni  la  roche  et  la  croix,  ies  sorcières 
ne  s*étaientplas  ayenturées  sur  le  Schneeberg.  Je  lui  deman- 
dai alors  si  le  bétail  n*était  plus  malade  depuis.  — Hélas,  reprit 
mon  homme,  c'est  maintenant  que  le  pays  de  Dabo  est  dans 
la  terreur.  —  Les  gens  d'ici  ne  savent  rien  du  Blocksberg,  mais, 
d'après  la  tradition  populaire,  les  rochers  des  hautes  mon- 
tagnes sont  partout  hantés  par  de  bons  ou  de  mauvais  génies 
Tous  les  peuples  croient  aux  sorciers,  et  comme  ici  le  Schnee* 
berg  est  la  montagne  la  plus  élevée,  il  fimt  que  cette  hauteur 
soit  le  Blocksberg  du  pays  *. 

*  V.  l'Appendice,  n*  I. 

*  La  célèbre  montagne  des  Soreièrae  près  de  Halle. 

Le  Blocksberg  alsacien  ne  fat  pas  favorable  à  l'excarsion  qu'y  fit,  en 
1859,  le  docteur  Kirschleger.  Parvenus  au  sommet,  couronné  par  d'im- 
menses rochers  dénudés  de  grès  et  au  moment  d  herboriser,  le  tonnerre 
gronde,  les  nuages  fuient,  le  vent  gémit  et  hurle,  une  pluie  froide  tombe 
me  force,  et  les  amis  de  la  botanique  extra  murot  sont  heorenx  de 
troiiTer  on  abri  dans  des  etTeraes  oa  des  aafraetooeités  du  loe  et  de 
povToir  y  aOamttr  da  fea.  La  pluie  cesse  enGn  et  l'on  espère  jouir  de  la 
vue  magnifique  et  imposante  qu'on  attendait  avec  tant  d'impatience. 
Mais,  liélas  !  cette  jouissance  ne  fut  rien  moins  que  complète;  partout 
des  orages  locaux,  des  brouillards,  des  pluies,  une  fausse  lumière  projetée 
sur  l'ensemble.  On  reprit  tristement  à  5  heures  du  soir  le  sentier  de 
Wangenbourg  (Flore  d^Akace,  p.  247). 

Le  S4  joillet  1865,  le  doetenr  ent  plus  de  bonheur,  il  monta  an  som- 
met du  Schneebergpar  d'excellents  sentiers.  Il  y  vit  un  autel  druidique, 
formé  d'énormes  roches ,  avec  des  cuvettes  semblables  à  celles  du 
Hohnack.  On  s'amusa  à  remuer  le  LolUlfeUen.  L'idée  d'une  mer  rhé- 

Noiulle  SMe  -  T*  Amiés.  ^ 


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806 


BBVUB  D*ALS&GB 


c  Un  Teai  froid  se  faisait  sentir,  une  petite  grottean  levant 
me  serrit  d*abri  ponr  dîner,  car  farais  enoere  apporté  mon 
Tin  et  ma  mnde.  Un  nid  de  chat-hoant  était  an-desnis  de 
moi  dai»  nn  roeber.  Sauf  la  masse  imposante  dn  grès  Tosgien, 

le  sommet  de  la  montagne  présente  une  sarfaee  assez  nnîe. 
Un  grand  espace  est  couvert  de  joncs  et  de  roseaux.  Ce  serait 
un  ancien  étang  comblé  petit  à  petit,  d'après  la  tradition  *. 
Vers  le  Nord-Est  rSugenthal,  vers  le  Sud  le  Scbneethal, 
comprenant  pluseors  masures  isolées.  De  la  place  où  j'étais, 
j*en  remarquai  nne,  e*était  la  demeure  d'un  réformé  nommé 
Schenek,  accusé  tout  récemment  d*a¥oir  tué  un  pfttre  dont  le 
corps  avait  été  trouvé  dans  la  forêt,  percé  d'une  balle.  Mon 
guide  ne  m'a?ait  dit  que  du  bien  du  pauvre  fneiilpé  et  tout 
le  monde  le  regardait  comme  un  type  d'honnêteté,  car  il  n'a- 
vait jamais  fait  de  mal  à  personne.  On  ne  pouvait  se  figurer 
qu'il  fût  le  criminel.  L'assassiné  avait  beaucoup  d'ennemis, 
étant  un  grand  séducteur  de  femmes  et  de  fiUes.  Avant  d'ex- 
pirer, il  avait  eu  le  temps  d'indiquer  comme  son  meurtrier 
un  montagnard  dont  il  avait  séduit  la  fille.  Mon  guide,  malgré 
qttll  crfiit  à  l'innocence  de  Schenek,  ne  voulut  pas  se  rendre 
avec  moi  dans  la  dmumîère  de  ce  dernier,  et  aucun  pourboire 
ne  put  le  faire  changer  d  idée.  Est-ce  son  catholicisme  qui  le 
faisait  ainsi  regimber  ou  toute  autre  cause  ?  Je  ne  sais. 

nane,  dont  les  flots  avaient  rongé  les  flancs  do  ees  masses  creusées  en 
tout  sens,  revint  à  la  mémoire.  Admirable  vue  vers  les  quatre  points 
cirdinaux  ;  les  Alpes  firent  défaut.  (Sans  être  sorcier,  c'était  signe  de 
beau  temps.)  Les  flancs  de  la  montagne,  ajoute  Frédéric  Kirschleger, 
sont  converte  de  limyères  fleuries  qui ,  fort  souvent ,  sont  à  fleurs 
bUmehes  (AnnaU$,  p.  S13). 

Les  montagnards  désignent  aons  le  nom  de  kriai  ê»  sorcier  une  mal»* 
die  (lu  sapin,  provenant  d'un  arrêt  de  sève,  qui  se  manifeste  à  l'origine 
par  un  rameau  déformé  et  qui  csl  une  cause  de  forte  dépréciation  pour 
l  arbre  (H.  Jj'xjche,  Manuel  de  botanique  forestière.  Nancy,  1873,  in-Ô", 
p.  281). 

'  Ce  plateau  frappa  également  les  regards  du  docteur  Kirsclileger  : 
«  La  végétation  prénd  le  canelàre  maiéeagenx  lUigineux,  c'est  one  tene 
humide  et  profonde  où  dominent  le  Calhtma,  le  JfyrttUMS,  etc.  » 


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LE  SOHNBBBEBa  ST  IB  OOHTt  OS  OABO 


807 


<  On  TOfait  sur  la  montagne  en  face  8*él6?er  de  la  ftimée; 
mon  goide  me  dit  gue  c'était  li  et  qu'il  n'y  aniait  aansdoote 
personne.  Je  Ini  0Td<mna!  de  m'attendreet  je  me  dirigeai  vers 

la  demeure  de  Schenck.  Elle  était  enclavée  dans  six  ou  huit 
jours  de  terre  entourés  d'un  mur  sans  ciment.  La  plus  grande 
partie  de  l'enclos  consistait  en  un  pré  arrosé  par  une  source. 
Le  jardin  aux  légumes,  dans  lequel  poussaient  quelques  arbres 
fruitiers  et  des  pommes  de  terre,  touchait  la  maison.  La  femme 
y  traTaiUait  justement,  lorsque  je  m'approchai  de  la  porte; 
elle  vint  à  ma  rencontre  avec  sa  hone.  Elle  avait  dû  être  belle 
dansia  jeunesse,  car  elle  avait  des  traits  distingués;  elle 
était  forte  et  bien  portante;  mais  on  voyait  qu*ane  doulenr 
sourde  la  minait.  Elle  me  montra  d'abord  quelque  défiance, 
puis,  pendant  les  trois  visites  que  je  lui  ûs,  elle  me  raconta 
ses  peines. 

«  Ils  étaient  Suisses  et  avaient  été  quelque  temps  en  con- 
dition en  Alsace,  et  principalement  dans  les  Vosges.  Elle  y 
était  venne  avec  sa  mère,  étant  encore  en  bas  ftge.  Schenck 
avait  réussi,  à  Ibrce  d'économie  et  de  travail,  à  acquérir 
une  petite  fortune  et  elle  aussi.  Lnsqu'ils  se  marièrent,  ils 
louèrent  cette  petite  ferme,  ne  consistant  qu'en  prés  et  bois; 
sans  terres  qui  puissent  produire  du  vin  ou  du  pain.  Mais 
l'élevage  des  bestiaux  les  mit  en  mesure  de  payer  de  plus 
en  plus  cher,  de  sorte  que  leur  canon  se  montait  actuellement 
à  quarante  florins  par  an.  Ils  l'avaient  toujours  très  réguliè- 
rement acquitté,  ainsi  que  leurs  contributions.  Jamais,  Ils 
n'avaient  eu  affaire  à  la  justioe  pour  fraude  envers  r£tat  ou 
pour  procès  avec  les  rmsins.  Le  mari  coupait  du  bois  pendant 
l'hiver  et  il  était  aidé  par  son  fils  déjà  assez  grand. 

<  Deux  jeunes  filles,  de  16  à  17  ans,  étaient  déjà  en  mesure 
de  gagner  leur  pain,  soit  qu'elles  allassent  en  condition,  soit 
qu'elles  aidassent  dans  le  ménage.  La  famille  avait  acheté  le 
droit  de  brûler  des  cendres  pour  les  verreries  avec  la  fougère, 
le  bois  mort  et  las  pommes  de  pin.  C'était  un  bon  revenu 


308 


BKVUE  D'ALB40I 


pour  elle,  car  les  enfluits  p<m?aieiit  y  être  employés.  Le  plus 
grand  pooTait  déjà  semr  de  domestique  et  le  plus  petit  des 
garçons  et  la  plus  jeune  des  filles,  quoique  âgés  de  6  à  S  ans, 
étaient  si  grands  et  si  forts  qu'ils  paraissaient  avoir  douze  ans. 
Le  ménage  était  riche  comparativement  à  celui  des  autres 
montagnards.  Aussi  croyait-on  partout  que  les  Scbenck  avaient 
le  bon  sort  et  arait-on  cherché  à  avoir  leur  ferme,  mais  tou- 
jours inutilement.  Ds  avaient  nn  troupeau  de  vingt  i  trente 
vaches,  et  actuellement  ila  jcraignaient  qu*on  leur  prit  tout 
leur  avoir.  La  fille  ainée  n'avait  jamais  eu  de  relations  avec 
le  berger  tué  et  on  ne  lui  avait  jamais  connu  le  dessein  de 
l'épouser.  Lorsque  le  crime  fut  commis,  le  père  était  sur  une 
montagne  éloignée  de  plus  d'une  lieue.  Il  pouvait  le  prouver 
par  témoins.  Son  fusil  avait  été  plus  de  six  mois  au  grenier, 
sans  qu'il  s'en  servît.  La  fille  ainée  me  le  chercha,  il  était 
chargé  avec  des  pois;  le  père  ayant  voulu  tuer  un  chien 
errant,  qui  venait  toogours  à  la  iërme.  Sll  était  parti  avec 
Itt  vaches,  c'est  qu'on  l'avait  menacé  de  1$  meOn  à  h  torture  K 
n  viendrait  se  présenter  et  prouver  son  innocence,  sll  pou- 
vait avoir  un  sauf-conduit  et  s'il  ne  connaissait  pas  l'îniqullé 
des  juges.  La  victime  avait  aussi  désigné  deux  autres  monta- 
gnards ;  mais  comme  ils  étaient  pauvres  et  catholiques,  on 
les  laissait  tranquilles.  Enfin,  le  décédé  avait  en  outre  for- 
mellement déclaré  que  ce  n'était  pas  Sdienck  qui  l'avait  tué 
et  qu'on  ne  devait  rien  lui  ftire.  Cependant  les  biens  de  celoi- 
ci  étaient  séquestrés  à  cause  de  sa  fhite  et  on  vouhdt  même 
le  brûler  en  elflgie  et  chasser  sa  femille  après  l'avoir  minée. 
Je  causai  pour  la  première  fbis  avec  les  enfonts  sur  la  mon- 
tagne où  ils  faigaieut  des  cendres  avec  de  la  fougère  et  da 
bois.  Ils  étaient  tous  très  bien  faits,  surtout  la  fille  aînée  qui 
avait  des  yeux  et  des  cheveux  noirs,  des  joues  rondes  et  rouges, 
et  UQ  nez  long  et  pointu  qui  lui  allait  à  merveille.  C'était 

>  L'infortuné  Louis  XVI  fit  sapprimer  la  question  préparatoire  m 
1780. 


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LB  SUUMJUIBUia  n  LB  OOlfTÉ  SI  DABO 


809 


une  geatiUe  bergère  qui  méritait  bien  une  idylle.  Son  inno- 
cence et  sa  naïveté  étaient  dignes  de  TArcadie.  Je  savais 
qa*ii  n'y  avait  pas  é»  temple  dans  le  paya  et  qa*ila  étaient 
thUgfis  d^aUer  à  Wolfisheim  \  près  Strasbourg,  locsqulla  vou- 
laient communier.  Les  parents  étaient  obligés  d'instruire 
leurs  enfiints,  parce  qu'ils  ne  voulaient  pas  les  envoyer  à 
TEcole  catholique.  Ils  célébraient  le  culte  divin  cbez  eux  et 
le  père  était  le  prêtre  de  la  famille.  Je  comparai  un  jour  leur 
vie  à  celle  des  patriarches,  mais  j'ajoutai  prudemment  que  je 
doutais  s'il  y  avait  chez  eux  autant  d'innocence  : 

<  —  £t  pourquoi  pas  ?  me  répondit  la  âlle  aînée,  en  fixant 
sur  moi  ses  yeux  noirs  et  brillants.  Son  regard,  sa  mine,  son 
ton  étsient  asseï  oonvaincants  pour  détruire  tout  soupçon. 
—Ces!  dommage  qu'elle  ne  puisse  pas  être  devant  ses  juges 
l'avocat  de  son  père,  pensai-je. 

«  Plus  tard,  à  Engenthal,  on  me  raconta  que  le  pâtre,  un 
peu  avant  d'être  tué,  avait  passé  près  d'un  chasseur  l  II  me 
paraît  assez  probable  que  celui-ci  l'aura  pris  pour  une  bête 
sauvage.  D'autant  plus  que  Taccident  arriva  à  la  tombée  de 
la  nuit  On  crut  aussi  que  les  brigands  qui  étaient  nombreux 
dans  le  pays,  auraient  bien  pu  ftire  le  coup. 

*  Un  temple  réfbrmé  avait  été  \AA  dans  ce  village  appartenaot  ta 
prisée  de  Hesae-Darmetadt. 

*  Oa  plutôt  on  braconnier.  La  passion  de  la  chasse  est  ane  des  plaies 

da  comté  de  Dabo.  Rien  n*arrtMc  le  chasseur  de  la  montagne  ;  avec  son 
mauvais  fusil,  il  tne  pins  de  gibier  que  les  opulents  adjiuiicataires  des 
chasses.  Les  cerfs  et  K^s  coqs  de  bruyère  finiront  par  ilisparaître  complè- 
tement. Cinq  ou  six.  montagnards  se  réunissent  ordinairement  pour 
ehaiser  et  le  produit  est  venda  et  partagé.  Le  braconnage  est  le  senl 
déCuitda  montagnard;  l'étranger  est  toiyoors  respecté.  Onpent  par- 
eoorir  seul  la  montagne,  le  jour  ou  la  noit.  on  n'a  rien  &  craindre.  (Cette 
note  était  écrite  depuis  longtemps,  lorsque  nous  lûmes  dans  le  compte- 
rendu  de  la  séance  de  la  Délégation  d'Alsace-Lorraine,  du  8  décembre 
1877,  que  plusieurs  habitants  de  Soldalenthal  (écart  d'Abreschwiller) 
avaient  envoyé  une  pétition  an  sujet  des  dégâts  commis  par  les  cerfe. 
Ces  Intéressants  animaux  n'ont  donc  pas  tons  disparu.  —  Tant  mi9uxl } 


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810 


<  Je  m*étal8  renda  une  aatre  îoàB  dans  ]a  moniagiie  ayee 
deux  tonrietea.  Noua  saiviona  le  chemiii  de  Wangenbooig,  et 

malgré  que  mes  camarades  se  troovassent  un  peu  fatigués  et 
qu'ils  souffrissent,  par  suite  d'une  forte  pluie,  d'un  rhume 
de  cerveau  et  de  quelques  autres  indispositions,  je  me  Irou- 
yais  en  bonne  santé,  quoique  le  plus  £rêie  et  celui  qui  était 
habillé  le  plus  légèrement. 

«  Vers  le  soir,  je  m'arançai  encore  on  peu  plus  avant  dans 
la  Yallée,  habitée  non  seulement  par  des  «diarbonniers,  des 
scieurs  de  planches,  des  pfttres,  mais  encore  par  des  monta- 
gnards  d*antres  proCassions  K 

c  Les  maisons  ne  sont  pas  toutes  écartées  les  unes  des 
autres  on  entourées  de  prairies.  Dans  les  villages,  quelques- 
unes  ont  un  jardin  et  en  dehors  un  peu  de  terrain.  La  vallée 
d'Engenthal  serpente  dans  la  montagne  pour  aller  se  perdre 
dans  la  plaine  près  Wasselonne.  C'est  avec  Schneethal  et 
Wolfthai  une  dépendance  de  la  paroisse  d'Obersleigen,  où,  si 
je  ne  me  trompe»  il  y  a  aussi  la  Gour  ou  tribunal  de  justice. 

c  Le  fiscal  du  comté  de  0abo  demeure  à  Abreschwiller  et  le 
bailli  à  Saveme.  Dans  les  vallées,  les  gardes  forestiers  sont 
en  même  temps  cabaretiers  et  maires.  On  les  accuse  de 
soustraire  à  leur  profit  beaucoup  de  bois  et  d'amoindrir  ainsi 
le  revenu  des  seigneurs  les  comtes  de  Linange.  En  montant 
la  forêt,  j'entendis  de  la  musique,  et  après  m'étre  dirigé  da 
côté  d'où  elle  venait,  je  me  trouvai  dans  une  auberge  où  Ton 
célébrait  la  fête  du  village  Je  m'amusai  pendant  un  cortain 
temps  à  voir  danser  les  jeunes  gens;  puis  j*al]ai  joindre  dans 
une  autre  chambre  les  hommes  plus  âgés  qui  causaient  de 
chose  et  dWre,  à  côté  d'un  verre  de  vin.  Je  m*empreBBal, 

*  Le  Daboyen,  dans  la  bellu  saison,  passo  toute  la  semaine  à  travailler 
dans  la  forêt;  une  huile  faite  grossièrement  1  abrite.  Le  dimanche,  il  va 
à  la  maison  chereher  des  provisions  el  assister  aux  offices.  La  nuit  alors 
se  passa  souvent  an  cabaret 

'  Le  15  août,  ffile  de  la  Vierge,  est  la  m  d'Obersteigen. 


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LB  SUUMJCKBUa  Wt  U  OOMXft  I»  l>àBO 


811 


pour  gagner  la  confiance  de  ces  bonnes  gens,  de  leur  vwier 
totyonra  de  ma  itouteilie. 

<  Quand,  après  aroir  soldé  ma  dépense,  je  tooIus  me  diri- 
ger an  commeneement  de  la  nnît  vers  ane  autre  auberge, 

située  à  une  demi-lieue  plus  bas  et  où  j'avais  laissé  mes  deux 
compagnons  de  voyage,  je  vis  venir  vers  moi  sur  le  seuil  de  la 
porte  un  de  mes  voisins  de  table,  homme  d'une  physionomie 
sérieuse  et  honnête,  qui  me  dit  en  frappant  de  la  main  sur 
mon  Goutean  de  chasse  : 

«  —  Voilà  ee  qne  tous  avez  maintenant  de  mieux  I 

«  —  Gomment  oela?répondis-je,  y  aurait-Il  à  craindre  des 
assassins  on  des  brigands  dans  un  tnjet  ausri  courtt  SaTOE- 
TOus  quelque  chose? 

«  —  Enfin,  reprit  mon  homme,  votre  couteau  de  chasse 
est  YOtre  sauve-garde;  prenez  garde  à  tousI 

€  Et  en  disant  cela,  il  jeta  un  regard  sur  un  individu  de 
mauTaise  mine  qui  se  trouYaît  là,  qui  ne  m*avait  presque 
jamais  adressé  la  parole,  se  dissimulait  le  plus  possible  et 
avait  assez  Tair  d*un  voleur.  La  mémoire  me  vint  que  cet 
homme  8*était  une  fois  absenté  pendant  une  heure.  A  son 
retour,  il  laissait  toujours  paraître  sur  ses  traits  une  certains 
crainte  et  une  grande  inquiétude.  —  Si  quelqu'un  a  formé 
quelque  projet  sur  ma  bourse,  ce  ne  peut  être  que  celui-là, 
pensai-je.  Cependant,  seul,  il  ne  m'osera  attaquer.  Il  faut  donc 
Adre  en  sorte  qu*il  ne  puisse  pas  me  rencontrer  arec  ses 
camarades.  Je  pris  donc  la  résolution  de  le  prendre  pour 
gdde. 

«  —  Mon  ami,  lui  dis-je,  je  suis  étranger  et  il  fait  nuit; 
ne  pourriez-vous  pas  me  conduire  vers  mes  camarades  qui 
se  trouvent  là-bas,  à  Eogenthal,  dans  la  maison  forestière? 

*  11  commença  à  bégayer  une  masse  d'excuses,  sa  femme 
rattendait,  il  devait  se  rendre  de  suite  à  la  maison,  etc. 

<  —  Votre  femme,  lui  répondis-je,  est  une  brave  femme, 


Wam  B'AXAAfll 


et  elle  ae  réjouira  loraqa'aUe  staia  qne  tous  am  fldt  m 
bonne  aetion,ra  montrant  le  cheniin  à  nn  étranger! 

<  Et»  aana  attendre  aa  réponse,  je  eaiaiade  ma  main  guielie 
son  braa  droit  pour  avoir  ma  main  droite  libre  et  ponvoir,  en 

cas  de  besoin,  saisir  de  suite  mon  couteau  de  chasse.  Je  le 
conduisis  ainsi  avec  moi  et,  tout  en  cheminant,  je  lui  parlais 
comme  un  ange.  Il  répondait  d'une  manière  entrecoupée  et 
en  tremblant  : 

c  —  Si  j*ayai8  appris  senlement»  bégayait-il  de  temps  tn 
temps,  à  connaître  pins  tôt  un  bomme  aussi  bon;  car,  ici 
dans  la  forêt,  les  gens  sont  si  méebantsl 

c  Le  éheminse  fit  bien.  La  erabite  de  cet  bomme  provenait 
pent^tre  anssi  bien  de  moi  et  de  mon  couteau  de  chasse  cpie 
des  reproches  d'une  mauvaise  conscience.  En  attendant,  il 
pouvait  se  tranquilliser.  Comme  il  ne  voulait  pas  accepter  di 
souper  avec  moi,  je  lui  fis  préparer  quelque  chose  avec  une 
bouteille  de  yin,  je  lui  donnai  aussi  un  petit  pourboire.  Dans 
la  aoite,  j'appris  cependant  qu'il  ne  jooissait  pas  d'une  fort 
bonne  réputation. 

c  Ghes  le  gaide-forestier,  aubergiste  de  Dabo,  nous  avons 
trouvé  des  vétérinaires  et  noos  avons  de  suite  èbercbé  à  noos 
entretenir  avee  eux.  Cétafent  des  gens  assez  instruits,  qui 
avaient  étudié  à  une  bonne  école  spéciale.  L'épidémie  sur 
les  bestiaux  exerçait  particulièrement  ses  ravages  dans  les 
montagnes  forestières  de  l'Alsace  et  de  la  Lorraine.  Elle  était 
mortelle  ^  Une  femme  mourut  dans  son  étable  par  suite  des 
exhalaisons  de  son  bétail.  Un  des  artistes  racontait  qu'un  de 
ses  doigts  ayant  touché  une  vache  malade,  il  dnt  prendre 
soin  de  sa  main,  nne  tache  ndre  et  snppnrente  s*étant  fiût 
voir.  Avant  l'arrivée  des  vétérinaires,  quarante  bétes  étaient 
mortes  dans  le  aenl  village  de  Dabo.  Depuis  leur  arrivée,  cinq 
aenlement  avaient  péri.  Ils  avaient  été  obligés  de  promettre 
de  payer  grassement  pour  avoir  quelques  aides,  tant  les  habi- 

»  Voir  l'Appendice  a"  IL, 


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U  flflHIlMHMmO  IT  LB  OOHIÉ  SB  DABO 


813 


tants  avaient  de  répugnance  à  soigner  les  bétes  atteintes.  Us 
avaient  employé  utilement  des  remèdes  externes  et  internes. 
D'après  eux,  répidémie  pro7«DaU  d'une  sorte  de  cbeniUes, 
qui  8*étiient  beaaoonp  nraltipliées  pendant  Tété  et  qui  araient 
détrait  totatoment  les  légumes  dans  lea  jafdins.  A  mon 
humble  avis,  l'épidémie  pourait  provenir  de  la  grande  cba* 
leur  et  de  la  sécheresse  de  l'été  de  l'année  4778.  Le  bétail 
s'était  trop  échaufTé  sur  les  montagnes  et  par  suite  du  manque 
d'eau,  il  était  obligé  à  se  désaltérer  à  des  sources  glaciales 
sortant  des  rochers  et  s'écoulant  dans  les  vallées.  En  outre, 
les  bôtas  avaient  été  rarement  abreuvées.  D'un  autrs  cété, 
comme  les  rniaseaux  reçoivent  des  naines  de  la  montagne 
beaucoup  de  vitriol  et  d'araeoic,  lea  premièree  bétes  atteintes 
ont  pu  gagner  la  maladie  en  buvant  de  ces  eaux  iitides. 
Quand  une  épidémie  est  sur  le  point  d'éclater,  il  y  a  bien 
des  causes  qui  peuvent  y  contribuer  et  gftter  encore  plus  le 
sang.  Une  température  plus  fraîche  et  un  peu  pluvieuse  me 
paraît  alors  le  remède  le  plus  efficace  contre  le  fléau 

«  Nulle  part,  on  ne  fait  autant  de  contrebande  et  de  fraude 
qu'à  Dabo.  Du  temps  qu'on  cherchait  le  vin  dans  lo  Haut- 
Rhin,  je  voyais  tous  les  jours  des  voituriers  fidre  le  tour  de 
Strasbourg  pour  échapper  à  la  douane.  Dans  les  auberges,  il 
y  avait  du  sel  apporté  de  la  Lorraine,  et  j*ai  entendu  de  mes 
propres  oreilles  à  Engenthal,  dans  ht  maison  forestière,  un 
homme  répondre  an  sujet  de  sa  profession  devant  le  garde 
forestier,  comme  toujours  maire  et  cabaretîer  '  :  «  Je  fais  la 
contrebande,  et  je  voudrais  bien  voir  celui  qui  essaierait  de 

*  L'épisootie  avait  éclaté  au  moto  de  déeambre  1776  dus  le  paya  da 
Forbaeh.  L'intendant  de  Calonne  (devemi  depuis  si  célèbre)  s'empressa 
de  prendre  les  mesures  les  plas  efficaces.  Trois  vétérinaires  furent  en- 
voyés \  Forhach  .  entre  autres  les  maréchaiiX'experts  des  régiments  de 

la  Reine  et  du  Royal-Nassau. 

*  On  peut  encore  se  rafraîchir  chez  les  gardes  forestiers  de  la  mon- 
tagne. Lear  cordiale  hospitalité  était  un  des  bons  souvenirs  d'une 
ascanion  dans  les  Vosges. 


814 


BEVUE  D'AL8A€B 


me  la  défendre.  »  En  disant  cela,  je  le  ris  prendre  sa  charge 
et  payer  son  écot  à  monsieiir  !•  maire. 

c  Les  habitants  de  Daho  s'adonnent  cependant  quelque  peu 
à  ragriculture.  Us  ont  plus  de  terres  labourvbles  que  les 
autns  haletants  de  la  montagoe.  La  plupart  sont  bûcherons, 
seieurs  de  planches,  charbonniers  et  même  quelques-uas  éle- 
veurs de  bétail. 

*  Les  ruines  de  l'ancien  cliâteau  de  Daho  se  trourent  sur 
les  rochers  d'une  haute  montagne. 

'  Il  7  a  aussi  à  Ëngenthal  un  château  appelé  WangBih 
bourg,  qui  tire  ck>n  nom  des  barons  de  Wangen.  Ge  château 
est  en  mbies  et  il  est  peu  intéressant,  d'autant  plus  quil  se 
trouve  dans  un  ibnd.  Cependant  le  garde  forestier  de  l'en- 
droit était  mécontent  en  nous  voyant  visiter  ces  ruines  sans 
lui  avoir  demandé  permission  :  «  Ce  n'est  pas  peu  que  de 
visiter  un  castel  de  si  haut  renom  dit-il.  Pour  lui,  il  s'a- 
gissait peut-être  d'avoir  un  petit  pourboire,  chose  importante 
aux  yeux  d'un  honnête  cabaretier 

<  Chez  les  anciens  Francs,  U  existait  une  coutume  d'après 
laqueUe  tout  voyageur  pouvait  être  tué,  s'O  abandonnait  le 
grand  chemin,  sans  foire  entendre  on  cri  de  sauve-garde. 
Aussi,  à  cette  époque,  on  ne  voyageait  pas  en  philosophe,  en 
géographe  ou  en  touriste,  pour  prendre  connaissance  des 
divers  peuples.  li  n'en  est  plus  ainsi  dans  notre  Europe  mo- 
derne. Cependant  un  étranger  qui  délaisse  les  grandes  voies, 
est  regardé  presque  partout  comme  un  vagabond,  un  brigand 

*  Gilce  à  H.  Weyw>  il  j  a  maintenant  à  Wangenbourg  un  très  bon 
hôtel,  où  on  peut,  comme  anx  Trois-Epis,  an  Hohwald,  passer  me  saison 
estivale.  La  cascade  du  Nideck,  l'église  de  Haslach,  le  château  d'Oeh- 

senstein,  offrent  de  magnifiques  buts  de  promenade.  Le  village  était  nne 
haute  justice  appartenant  à  M.  h  haron  do  Wangon.  L'é-Iise  roiiferme 
encore  des  tombes  anciennes.  D'après  Cantener,  la  commune  aurait  près 
de  neuf  lienes  de  tour;  il  est  vrai  de  dire  qu  entre  chaque  voisin,  il  y  a 
quelquefois  plus  d'une  demi-heure  de  marche.  On  rencontre  assez 
souvent  de  ces  paroisses  dans  les  Vmges.  Wangenbourg  dépendait  du 
Directoire  de  la  noblesse  hnmédiale  de  la  Basse-Alsace. 


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Ll  BfflïNlRHRIW  HT  IM  OOHXt  DB  DABO 


815 


OU  un  espion,  même  là,  où,  d'après  ropinion  de  tout  îionnête 
homme,  il  n'y  a  rien  à  espionner.  Bien  souTent  môme,  les 
paase-ports  ne  peuvent  protéger  contre  les  maoTsis  soupçons 
et  répUiète  d'espion.  Les  Yoyagea»  qui  s'arrêtent  quelque 
temps  dans  une  contrée  pour  se  rendre  compte  des  habitants, 
de  leur  industrie,  on  qui  y  sont  pour  y  fhire  quelque  étude 
philosophique  sur  les  mcenrset  le  caractère  d'une  population, 
sont,  principalement  en  Allemagne,  exposés  à  cette  insanité 
patriotique  de  la  populace  et  à  l'ennui  de  se  voir  traités 
d'espions.  C'est  dans  ce  pays,  que  la  basse  classe  est  plus 
acharnée  à  se  nuire  qu'ailleurs  les  souverains.  La  distance 
d'un  mille  y  suffit  pour  rendre  les  hommes  méfiants  les  uns 
enTers  les  autres. 

«  Nous  avions,  pour  aller  à  Lettenbach  \  un  chemin  bien 
agréable  trayersant  des  collines  et  une  reliée  bien  cnltiTée, 

et  à  mesure  que  nous  approchions  de  la  verrerie,  noua  ren- 
contrions une  civilisation  plus  avancée.  Lettenbach  est  situé 
d'une  manière  ravissante  dans  une  vallée  qui  s'étend  du 
couchant  au  midi,  son  loin  de  la  source  de  la  Sarre  ^  On  y 
voit  des  prés,  des  champs  et  des  jardins  fertiles.  En  descen- 
dant du  cdté  de  ronest,  le  hameau  touche  immédiatement  à 
hi  plaine  de  Lorraine  vers  Sarrebourg  et  non  Ssarbrflck,  et, 
id  je  ne  me  trompe,  l'endrdt  est  de  ce  ressort  Les  pro- 
priétaires de  la  verrerie  résident  à  Mets.  Busching,  dans  sa 
7'  édition  de  la  Géographie  de  la  France  de  Tannée  1777,  ne 
fait  mention  d'aucune  verrerie  en  Lorraine,  en  Alsace  ou 
dans  le  pays  messin;  il  paraît  en  général  que  cet  auteur  a 
puisé  presque  toutes  ces  citations  dans  ÏAkatia  ilkairakk  de 

*  Hamein  célèbre  par  aa  verrerie  fondée  par  les  moioes  de  Marmoa- 
tier,  Mignetirs  de  Sai&Khiirin,  bon^  da  pays  messin,  diocèse  de  Heti, 

twm  mmtno  pecuniœ  danmo. 

*  La  Sarre  (i  Strasbourg,  avant  1870,  Saar  ;  ù  Nancy  et  à  Metz,  Sarre) 
prend  sa  source  sur  le  revers  septonlriunal  des  Vosges,  et  non  aa  châ- 
teau de  Salm,  situé  dans  la  vallée  de  la  Bruche. 


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816 


nmiB  D'ALBAfll 


Scbœpflin,  qui,  comme  on  le  sait,  s'attachait  plus  à  1*h!8toîre 
te  antiquités  qu'au  reite.  Depuis  ce  temps,  il  y  a  eu  beau- 
oonp  de  changements.  Dans  le  petit  district  seul  où  je  suis 
en  ce  moment,  il  y  a  trois  verreries  K  A  Lettenbach,  il  y  a 
quatre-vingts  oavri6r8,on  ytSibriqae  des  Titres,  des  bouteilles, 
des  verres  à  bière,  à  vin,  à  patte,  ete.  Par  suite  de  rétablis- 
sement de  la  fabrique,  l'endroit  a  beaueoup  gagné  en  popu- 
lation. On  y  trouve  des  artisans,  des  merciers,  des  marchands 
de  toute  sorte  et  de  bons  moulins,  plusieurs  hôtels  et  auber- 
ges. De  vastes  bâtiments  servent  d'entrepôt  pour  le  verre,  et 
sont  pleins  des  produits  de  la  manufacture,  ce  qui  donne  une 
tiaute  idée  de  Tactivité  de  oette  usine.  On  m'a  dit  que  plusieurs 
tonnes  d*er  sont  engagées  dans  ses  affaires  commerciales. 
Pour  la  visiter,  il  m*a  follu  demander  la  permission  à  un  te 
associés  qui  était  là.  J'ignore  s'il  ne  s*était  pas  figuré  que 
j'étais  moi-même  verrier  ou  que  j'étais  eu  relation  avec  des 
concurrents,  ou  a-t-il  voulu  Himplement  plaisanter,  lorsqu'il 
m'a  demandé  si  je  ne  voulais  pas  profiter  de  l'organisation  et 
du  système  de  fabrication  pour  créer  une  verrerie  semblable. 
Je  lui  répondis  en  riant  que  je  me  ferais  plutôt  couper  la  tête 
que  de  vouloir  laire  du  verre;  et  dès  lors,  il  ne  fit  plus  de 
difficulté.  Je  ii*ai  pas  trouvé  id  une  bien  grande  différence 
entre  les  ikbriques  de  glaces  que  j'ai  déjà  vues  ou  celles  tet 
j'ai  lu  la  description. 

«  Ce  propriétaire  de  la  fabrique  est,  du  reste,  un  exemple 
de  ce  que  peut  faire  le  zèle,  la  prudence,  Tordre  et  l'esprit 
d'entreprise.  On  m'a  raconté  qu'il  avait  été  aide  berger  et 
qu'il  avait  commencé  avec  quelques  sous  un  petit  commerce 
de  rubans,  et  un  trafic  plus  grand  succédant  à  un  plus  petit, 
il  avait  pu  arriver  à  être  ce  qu*il  est  aujourd'hui  :  un  des 
plus  riches  négociants  du  pays.  G*étaient  les  fruits  de  Téco- 
nomie,  de  l'ordre  et  de  Factirité  qui  régnaient  dans  son 
intérieur. 

*  La  CarUhiitte  d'iiarreberg,  comte  de  Dabo  (Alsace),  de  Plaine  de 
Walwb,  ta  comte  de  LOtielbourg  (Lorraine)  et  de  Lettenbac^(Evêehi8). 


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UE  t>CUN£EB£Ra  ET  LE  COMTÉ  DE  DABO 


317 


«  On  parle  le  patois  roman  à  LetteDbach. 

€  Après  avoir  quitté  cet  endroit,  j'ai  traversé  Abresclnvil- 
1er  grand  village  du  comté  de  Daho,  qui  ressemble  à  une 
petite  ville.  Il  y  a  beaucoup  de  marchands  et  d'ouvriers.  J'ai 
fait  une  visite  au  procureur  fiscal  seigneurial  Baumgart ,  qui 
m*a  dit  qu'on  trouve  eocore  dans  les  montagnes  de  vieux 
troncs  de  7igne^  môma  an  milieu  des  grandes  forêts.  Jadis,  • 
selon  loi,  il  régnait  dans  ces  contrées  montagneuses  nna  bien 
pins  grande  actiTité  indostrielle  qa*aiqonrdlini;  ce  qui  proa« 
Terait  qne  bien  des  endroits  étaient  habités  et  coltiTés,  qui 
ne  le  sont  plus  de  nos  jours.  Ainsi,  on  voit  des  raines  d'babi- 
tations  et  de  vieux  châteaux,  là  où  il  n'y  a  plus  du  tout  de 
village.  Moi-même,  j'ai  vu  plusieurs  de  ces  ruines. 

«  Mais,  selon  moi,  jamais  les  montagnes  n'ont  été  plus 
peuplées  que  de  nos  jours,  ni  mieux  cultivées.  Les  ruines 
montrent  seulement  que  les  chevaliers  cherchaient  dans  les 
profondeurs  desmontsgnes  un  abri  sûr  pour  eux;  tandis  que 
leurs  siqets  habitaient  ordinairement  la  plaine.  Il  n'y  avait 
donc  pas  dans  les  Vosges  une  population  plus  forte  que  dans 
le  cours  du  tiède  actuel*. 

*  Le  plus  riche  village  dn  comté,  dit  Sehœpflin,  par  les  avantages 
qoa  loi  donne  la  Sarre  pour  le  eommeree  des  bois*  Je  ne  sais  poni^ 
qnoi  le  savant  historien  donne  la  jnstice  et  le  patronat  de  eette  localité  à 
l'évôque  de  Metz.  En  1784.  le  bailli  du  comté,  M.  d'Elvert,  et  le  greffier 
Muret  demenraient  à  vSavernc,  le  procureur  fiscal  Verniory  résidait  à 
Abreschwiller.  L'évêque  prétendait  peut-être  nommer  le  curé  en  verta 
de  soQ  droit  de  création.  —  Abreschwiller  est  la  patrie  da  vertueux 
Gange,  le  pbllanQiro|ie  portefaix  pendant  la  Terreur,  du  générallordy  et 
de  M.  Chatrian,  nn  des  anteors  des  «  Romans  nationaux  », 

*  M.  de  Siny  parle  aussi  de  la  vigne  'd' Abreschwiller.  Selon  M.  Jou- 
ve, les  vignes  ne  manquaient  pas  près  de  Senones,  d'£tival,  etc.  A 
quoi  attribuer  leur  disparition? 

*  V.  dans  les  Mt^moires  de  la  Société  philomatique  de  Sainl-Dié,  1877, 
p.  11,  une  très  savante  dissertation  sur  l'ancienne  population  des  Vosges, 
par  H.  Jouve  :  «  Les  moines  ont  sa  grouper  des  populations  moins 
denses  qn'anjoardlrai,  mais  eUet  «xittaieiii,  ils  ne  les  ont  point  créées  », 
dit  le  savant  professeur. 


318 


BBVDB  D'ALSACK 


<  Je  pris  mon  chemio  depuis  AbrasGhwiller  par  quelqaei 
Tillages  de  la  Lorraine,  dans  lesquels  on  parlait  le  dialecte 

alsacien.  J'ai  également  traversé  d'autres  localités  où  on  s'ex- 
primait en  français.  Le  paysan  lorrain  me  parut  nsiblement 
plus  pauvre  que  celui  d'Alsace.  De  misérables  cabanes,  des 
champs  mal  cultiTés,  des  figures  minables  se  ?ojaienten  plus 
grand  nombre. 

c  On  lit  dans  Bosching  que  le  pays  produit  beaucoup  de 
Yin  ;  je  trouve  qu'il  fournit  plutôt  du  blé,  qui  est  expédié  en 
Alsace,  province  qui,  en  retour,  lui  donne  du  Tin. 

«  Les  animaux  domestiques  ne  sont  pas,  en  Alsace,  d'une 
bien  grande  taille,  particulièrement  les  chevaux;  mais  ils 
soHt  encore  plus  chétifs  en  Lorraine.  Depuis  longtemps  on  a 
l'habitude  d'atteler  les  chevaux  de  trop  bonne  heure;  de 
plus,  ils  sont  mal  nourris  et  fatigués  outre  mesure;  de  sorte 
que  la  race  devient  de  plus  en  plus  malingre  et  chétive,  et 
de  nos  jours  on  voit  de  ces  malbeureuses  bêtes  attelées,  qd 
ressemblent  à  des  pouldns  d*nn  an\  Cependant,  on  ren- 
contre cerbdns  fermiers  et  même  des  régions  élevées  pour- 
vus d'excellents  attelages. 

«  Le  sel  et  les  carrières  sont  les  richesses  de  la  Lor- 
raine, qui  me  paraît  pouvoir  êtra  classée  dans  la  troisième 
classe  de  la  science  économique,  en  partant  d  en  haut,  tandis 
que  toute  l'Alsace  peut  entrer  dans  la  deuxième  classe; 
cependant,  quelques  parties  de  cette  dernière  province  appro- 
chent de  la  première  (f  !  j 

«  L'élevage  des  bestiaux  pourrait  être  bien  plus  important 
en  Lorraine  qu'en  Alsace.  Cependant  on  voit  encore  de  grands 
troupeaux  de  moutons,  de  porcs,  etc.,  traverser  ces  contrées. 
Ils  sont  expédiés  du  Wurtemberg  et  du  reste  de  rAUemagne 
sur  Paris. 

'  Aa  bout  d'nn  siècle,  on  pournit  adresser  les  mêmes  reproches  aax 
cnltiTatean. 


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UB  SaSDfBIBBBa  ST  LB  OOUTft  DB  OiàBO 


819 


c  Ptaaisbonrg  est  la  clé  de  la  Lorraine;  c^est  ane  ville 
bien  Itfttie^  avec  de  nonrelles  fortifications  près  des  Vosges, 
non  loin  de  la  Yîlle  de  SaTeme,  dont  elle  garde  le  défilé 
comme  la  plaoe  d*Hnningiie  snnreille  le  pays  vers  Bâle.  La 

grande  route  de  Strasbourg  à  Paris  traverse  cette  localité. 

«  Malgré  qu'on  n'apprend  pas  à  connaître  ce  qu'un  pays 
a  de  plus  curieux  en  suivant  les  grandes  voies,  je  pris  ma 
route  par  cette  belle  chaussée  qui,  en  elle-même,  est  ce  qu'il 
y  a  de  plus  remarquable  ici.  Je  ne  troave  pas  exagérées  les 
descriptions  qui  en  ont  été  faites.  Je  ne  puis  dire  qu'elle  a 
été  eonatmite  par-dessns  les  montagnes,  mais  bien  qu'elle  a 
été  percée  à  travers.  Ce  qae  les  missionnaires  de  la  Cihine 
racontent  de  tels  grands  diemins  de  oe  pays,  de  la  grande 
muraille  bâtie  sur  de  bautes  montsgnes,  ne  doit  pas  être 
plus  merveilleux,  si  on  fait  la  part  des  exagérations.  On  a, 
à  force  de  travail,  fait  disparaître  et  écarter  de  très  grandes 
roches.  Le  pavé  est  taillé  dans  le  roc.  Je  fus  agréablement 
surpris  de  trouver  daus  un  coin  sauvage  et  inhabité  une 
inscription  sculptée  sur  une  paroi  de  rocher,  qui  perpétue 
la  merreille  et  le  souvenir  de  l'entreprise.  De  distance  en 
distance,  des  sources  sortent  du  roc,  principalement  près 
d*une  beUe  grotte,  où  se  trouvent  des  bancs  pour  le  voyageur 
btigué 

■  Lorsqu'on  descend  de  la  montagne  et  qu'on  distingue 
tout-à-coup  Saverne  dans  la  plaine  avec  sa  rivière,  son  châ- 
teau, ses  jardins,  ses  nombreuses  ruines  féodales  perchées 
sur  les  hauteurs  des  environs,  la  plaine  s'étendant  bien  au 
loin  et  émaillée  d'une  foule  de  villes  et  de  villages,  on  éprouve 
plus  de  peine  à  descendre  la  montée  qu'à  la  gravir.  J'em- 
ployai bien  une  demi-heure  à  contempler  ce  beau  paysage 

'  Le  voyageur  Fr.-J.  Gondercede  (Amm,  Breslan,  1783,  1. 1,  p.  33) 
tnmvft  an  mois  de  mars  1774  que  la  place  forte  de  Phalsboarg  était  une 
petite  viUe  comme  Sarrebonrg. 

*  le  unU  du  Charlti.  Le  voyageur  parcovnit  la  noavelle  et 
randeene  rente. 


880 


BHvra  d'alsaoi 


el  je  ne  pus  pas  m'empêchtr  de  m*iriéter  chaque  fois  que 
mes  regards  se  perdaient  dam  IMinmeine  horizon,  et  jen^eiiB 

pas  tort  de  tant  tarder,  car  la  ?ille  eai  mal  bâtie  et  les  habi- 
tants ne  me  plurent  pas. 

•  J'escaladai  tous  les  châteaux  ruinés,  aussi  bien  le  Greif- 
fenstein  que  le  Hoh-Barr  et  les  Haut-  et  PeUt-Gerols-Ëck. 
Ces  trois  derniers  burgs  sont  alignés  sur  des  sommets  d'égale 
hantear  et  ne  sont  séparés  l'on  de  Tautre  que  par  une  petite 
dépression  de  terrain  et  non  par  des  vallées. 

c  Greiflfenstein  est  I  Topposé  ?ers  l'oceident;  il  est  perché 
seul  sur  une  haute  montagne  boisée.  Du  fond  de  la  vallée,  on 
n'en  voit  qu'une  tour.  La  Zorn  et  sa  profonde  vallée  séparint 
tous  les  châteaux.  Je  gravis  le  Greiffenstein  un  dimanche. 
On  y  voit  encore  les  restes  bien  conservés  de  salles  et  prin- 
cipalement 1<8  mines  d'une  vaste  chapelle  tournée  vers  le 
fond  de  la  montagne.  C'est  id  que  semble  avoir  été  rentrée 
dn  château  et  non  sur  le  devant,  où  la  colline  Adt  Ihce  à  la 
plaine  de  Saveme.  Presque  tout  le  burg  repose  sur  d'énormes 
rochers.  Les  pans  en  avaient  été  taillés  et  Tintérieur  formait 
différenteiî  pièces,  dont  quelques-unes  devaient  être  construites 
triangulairement.  Sous  le  rocher  étaient  des  souterrains,  dont 
les  entrées  étaient  presque  toutes  recouvertes  de  grilles.  On 
me  dit  plus  tard  que  ces  ruines  servaient  de  repaire  à  des 
brigands,  à  de  faux  monnayeurs  et  à  d'autres  gens  tarés.  Ces 
nobles  débris,  environnés  de  forêts,  Isolés,  au  milieu  de  mrats 
sauvages  et  peu  fréquentés,  sont  trte  propres  à  recevoir  de 
pareils  gens.  L'obscurité  de  l'entrée  ne  me  frappa  [)asd*abord. 
Mais  après  nous  être  arrêtés  silencieux  dans  la  salle  intérieure, 
nous  entendîmes  un  bruit  sourd.  Il  nous  parut  in?rai8ein- 
blable  que,  près  de  la  cathohque  ville  de  Saveme,  quelqu'un 
se  permît  le  dimanche  d'abattre  des  arbres.  Nous  écoutâmes 
tout  d'abord  et  nous  découvrîmes  bientôt  que  ce  bruit  était 
celui  d'un  marteau  et  que  le  plancher  sur  lequel  nous  nous 
trouvions  était  doucement  ébranlé.  Gomme  rien  ne  nous 


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LE  SGHNEEBJbUG  ET  LS  COMTÉ  DE  DABO  321 

forçait  de  risqoer  notre.TÎe  poar  faire  punir  les  malfaitenrs 
de  la  terre  entière,  et  que  nous  supposâmes  avec  raison  que 
si  une  personne  se  trouvait  sous  nous,  plusieurs  pouvaient 
également  y  être,  avec  lesquelles  peut-être  nous  nous  accom- 
moderioQS  fort  mol,  n'ayant  que  de  aimpies  couteaux  de 
chasse  pour  toute  arme  défenaîTe,  nous  sortîmes  de  suite  à 
petit  pas  en  longeant  rentrée  couverte. 

c  Le  château  du  Haut-Barr  est  à  peu  de  distance  sur  la 
montagne  en  fice  vers  Torlent.  Ce  qu*il  y  a  de  plus  remar- 
quable, est  un  puHs  taillé  dans  le  roc  et  dont  on  tire  Tenu 
d'une  profondeur  extraordinaire,  il  y  a  aussi  une  petite  cha- 
pelle. A  rentrée  du  château  est  une  inscription  portant  que 
révôque  de  Blanckenhcim  l'a  restauré  pour  la  sécurité  du 
paya.  Je  n'ai  pu  déchiffrer  la  date;  1H33,  selon  mon  ami;  je 
crois  plutôt  que  c'est  1583  et  l'historien  Schœpûia  est  de  mon 
avis.  Les  paysans  disent  Boppar  en  parlant  du  château. 

<  Tous  les  turgs  du  Yasgau  ont  été  construits  dans  des 
conditions  extraordinaires  de  solidité.  Les  murs  ont  souvent 
de  chiq  à  six  pieds  d'épaisseur  et  sont  revêtus  de  pierres  de 
taille  jusqu'au  faîte.  C'est  une  barbarie  sans  nom  de  les  avoir 
tous  détruits!  Le  plus  grand  nombre  résistèrent  aux  mortiers 
et  aux  canons  et  durent  ôlre  pris  parla  famine  ou  en  faisant 
sauter  les  murs  avec  la  poudre.  L'intérieur  de  l'un  d'eux 
avait  en  superficie  un  jour  de  terre  et  on  y  récoltait  effecti- 
vement des  grains.  Ces  masses  imposantes  donnent  une  grande 
idée  de  nos  ancêtres.  Ce  qui  leur  manque  en  magnificence 
et  en  ornementation,  se  trouve  remplacé  par  la  force  et  la 
solidité.  Quelle  idée  splendide  d'établir  sa  demeure  sur  une 
hauteur  d'où  la  vue  domine  tout  le  pays  et  de  pouvoir  être 
avec  ses  propres  yeux  le  gardien  de  ses  vassaux  !  Nous  n'a- 
vons plus,  il  est  vrai,  du  tout  besoin  de  ces  châteaux.  Les 
grands  seigueuisont  absorbé  les  petiis  gentilshommes:  un 
seul  homme  commande  à  des  millions  d  êtres  et  peut  se  servir 
de  mille  mains  étrangères  pour  s'aider  à  gouverner.  SI  nous 

XoiiTdte  Siite.  —  7-  Annéo. 


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m 


R£VU£  D  ALfiACE 


ne  sommes  pis  pins  malheureus  qa*à  cette  époqut,  nom 

8011111166  certainement  rarement  plus  heureux.  Les  époqaas 
moins  civilisées  araieut  moins  do  b«^soins  et  plui  de  moyens 
de  les  satisfaire.  Nous  avons  actuellement  beaucoup  plus  de 
Ji)esoins  et  bien  moins  de  ressources  pour  les  contenter.  Le 
peuple  s'épuise  petit  à  petit  de  plus  en  plus.  •Ëo  détruisant 
les  châteanx,  on  brisa  rorgsnisatîon  mosealilre  des  sujets. 
Ausd  de  nos  jours,  le  peuple  est-il  Juste  asses  heureux  pour 
pouToir  dire  qu*il  n*est  pas  malheureux. 

<r  Le  jardin  do  chftteau  de  Saverne  est  très  beau.  Sur  le 
côté  éclairé  par  le  soleil  du  matin  et  de  raidi,  il  y  a  des 
vignes;  de  l'autre  côté,  on  voit  des  petits  bois;  sur  la  partie 
du  midi,  juste  derrière  le  château,  on  trouve  des  parterres 
de  ù&aia  et  uoe  foule  de  choses  agréables.  Entre  les  forêts 
el  les  vignes,  on  a  creusé  une  pièce  d*eau  solitaire,  formée 
par  les  eaux  de  la  Zom,  que  Ton  voit  couler  dans  un  Imntain 
bordé  de  longues  allées.  Le  château  a  été  incendié,  il  y  a 
quelque  temps. 

«  L*abbaye  de  Marmoutier  a  aussi  de  splendides  jardins» 
Le  pays  est  plein  de  châtaigniers. 

»  Birkenwald  *,  village  considérable  dans  la  montagne, 
vers  l'Engcnthal,  est  célèbre  comme  étant  la  demeura  d'un 
des  plus  savants  et  des  plus  éclairés  gentilshommes  de  l'Al- 
sace. M.  de  Birkenwald  échangea  une  longue  correspondance 
avec  Voltaire.  U  reçoit  souvent  la  visite  de  savants  français 
et  il  ne  méprise  pas  les  écrivains  allemands.  Mais  il  lui  fout 
un  bon  lecteur,  car  il  est  complètement  aveugle,  n  perdit  un 
CBil  i  la  guerre  et  Tautre  suidt  bientôt  le  sort  du  premier. 
Je  m'entretins  fort  agréablement  pendant  une  grande  heure 
avec  ce  charmant  vieillard  que  l'on  m'avait  dit  doué  d'un 

^  Birkenwald  ressortait  au  Directoire  de  la  noblesse  immédiate  de  la 
Basse-Alsace.  Le  château  a  ê[o  reproduit  dans  l'Alsace  noble.  Il  appar- 
tient aojourd'hni  à  M.  le  baron  Gustave  de  Latouche,  ancien  membre 
da  Conseil  général  du  Bas-Rhin  et  alUé  aux  Birkenwald  (V.  b  NotsIlQ< 


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LE  SCU.NKbUSRG   £1'  LE  COMTÉ  DE  DKBO 


333 


sens  physionomique  très  fin;  car,  à  ce  qu'on  prétend,  il  peut 
juger  un  homme  d  après  sa  voix  et  son  langage. 

*  Les  gentilshommes  alsacitins  ont  l'habitude,  en  parlant 
à  des  professeurs  ou  à  des  sa?ants,  d'employer  le  pronom  f7, 
Er,  Gela  peut  s'expliquer  ainsi  :  lorsque  la  langue  allemaDde 
commença  à  se  polir  et  à  se  perfectionner,  TAIsaoe  Tenait 
de  passer  sons  la  domination  française.  La  littératore  fran- 
çaise prima  tout  et  la  langue  française  gagna  de  joor  en  jour 
du  terrain.  La  langue  allemande,  par  contre,  an  lieu  de 
perdre  de  sa  rudesse  et  de  s*épurer,  resta  dans  la  provlDce 
aussi  barbare  que  dans  les  siècles  anciens.  On  l'abaissa  et 
on  la  laissa  tomber  d'une  manière  incroyable;  car  on  la  mêla 
à  un  v(5ritable  mic-mac  de  français.  Gela  devint  à  la  fin  un 
baragouin  germano-français.  Par  suite,  un  gentilhomme 
alsacien  parlant  à  Klopstock,  à  Lessing  ou  à  tout  autre  grand 
teriyain  allemand,  dira  er.  M.  de  Birkenwald  me  qualifia 
de  cette  dissonance  grossière»  mol,  jadis  humble  professeur  de 
philanthropie;  mais  an  bout  de  quelques  minutes,  il  se  servit  . 
dn  pronom  plus  élégant  et  plus  poli  «oiia, 

«  Il  est  vrai  que  ce  fut  la  seule  fois  que  j'entendis  cette 
expression  saugrenue  en  Alsace,  car  la  noblesse,  comme  celle 
de  Berne,  [larle  habituellement  le  français.  Quoiqu'il  en  soit, 
si  les  savants  et  les  professeurs  se  laissent  traiter  d^une 
manière  aussi  méprisante,  non  seulement  ils  le  méritent, 
mais  ils  méritent  encore  d*étre  expulsés  de  la  République 
des  lettrée  et  d'être  relégués  an  milieu  des  veilleurs  de  nuit 
dans  les  ranp  de  la  vile  populace  I  > 

Après  cette  vigoureuse  sortie  sur  le  respect  dû  i  sa  «  per* 
sonne  >,  notre  professeur  continue  ses  courses,  fixant  toujours 

son  attention  sur  l'état  de  l'agriculture  et  la  situation  de 
la  production  ouvrière  et  du  commerce.  Avant  de  visiter  la 
Suisse,  il  ûi  un  voyage  à  pied  par  la  Basse- Alsace  \  dans  le 
*  Près  de  Bnunatb»  il  Toit  de  grandes  plantatioiis  de  légumes. 


834 


BEVUS  D'ALSAOK 


Palatinat,  il  revint  parMannheim  etCarlsruhe  à  Strasbourg. 
Il  jïi  travailler  le  gravier  aurifère  du  Rhin. 

€  Dû  prétend,  dit-il,  que  les  orpailleurs  meurent  tous  à 
rhOpital,  Je  le  gtoub  Tolootiera  et  je  iroure  qu'on  fait  très 
bien  de  ne  pas  lecherdier  dans  TIll  ou  dans  la  Bruehe  iei 
parcelles  d*or  que  ces  rivières  renferment  > 

Son  voyage  sur  le  Rbia  lui  inspire  encore  une  autre 
réflexion  : 

«  Je  YOttdrais  pouvoir  calculer,  dit-il,  la  valeur  du  bois 
▼olé  sur  les  riTSS  par  les  gens  qui  descendent  le  Rhin  sur 
des  bateaux  ou  radeaux.  Us  prennent  tout  le  bois  quil  leur 
&ut  pour  cuire,  et  le  fleuve  est  constamment  couvert  de 
barques  !  Je  m*étonne  qu'après  cela,  on  laisse  encore  le  bois 
façonné  sur  les  bords  du  fleuve.  Je  veux  bien  que  les  pauvres 
mariniers  y  gagnent  quelque  chose  ;  mais  cuique  suum,  » 


Notes 
I 

JjQ  lutin  de  la  maison  de  cure  de  Walscheid 

t  J*ai  reçu,  le  85  août  1746,  une  lettre  d*un  fort  bonoèle 
homme,  curé  de  la  paroisse  de  Walscbe,  village  situé  dans 

les  montagnes  des  Vosges,  au  comté  de  Dabo  ou  Dagsbourg, 
dans  la  Basse-Alsace,  diocèse  de  Melz,  qui  a  Strasbourg  10 
lieues  vers  le  midi.  Par  celte  lettre,  il  me  dit  que  le  10  juin 
1740,  à  8  heures  du  matin,  lui  étant  dans  sa  cuisine  avec  sa 
nièce  et  sa  servante,  il  vit  tout-à-coup  un  pot  de  fer  qui  fut 
mis  à  terre,  et  y  flt  trois  ou  quatre  tours,  sans  qu'il  y  «ût 
personne  qui  le  mit  en  mouvement  Un  moment  après,  une 
pierre  d'euTiron  une  livre  pesant,  fiit  jetée  de  la  ehsmbre 
voisine  dans  la  même  cuisine,  en  présence  des  mêmes  per- 
sonnes, sans  qu'on  vît  la  main  qui  la  jetait  Le  lendemain. 


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LE  8CHNBKBSBG  BT  LE  COMTÉ  DE  DABO 


833 


à  9  heures  du  matin,  quelques  carreaux  de  vitres  forent 
cassés,  et  quelques  pierres  furent  jetées  à  travers  ces  car- 
reaux avec  une  dextérité  qui  parut  surnaturelle.  L'esprit  ne 
fit  jamais  de  mal  à  persoane,  et  ne  fit  rien  que  pendant  le 
ionr  ait  Jamais  pendant  la  nuit.  Le  curé  empîoya  les  prières 
noarquées  par  le  rituel,  pour  bénir  sa  maison,  et  depuis  ce 
temps-là,  le  génie  ne  brisa  plus  de  fifres,  mais  11  continua  de 
jeter  des  pierres  sur  les  gens  du  curé,  sans  toutefois  lei  bles- 
ser. Si  l'on  apportait  de  l'eau  de  la  fontaine,  il  jettait  des 
pierres  dans  le  seau;  il  se  mit  ensuiti  à  serrir  dans  la 
cuisine.  Un  jour,  comme  la  servante  plantait  des  choux  au 
Jardin,  le  génie  les  arrachait  à  mesure  et  les  mettait  en  mor- 
caaaz;  la  serrante  eut  l»eau  à  tempêter,  oienaesr,  Jurer  à 
rallemanda,  le  génie  continua  ses  liadineries. 

<  Un  Jour  qu'on  arait  bêché  et  préparé  on  carreau  au 
jardin,  on  trouva  la  bêche  enfoncée  de  deux  pieds  en  terre, 
sarYB  qu*on  vit  aucun  vestige  de  celui  qui  l'avait  ainsi  fichée 
en  terre;  on  remarqua  sur  la  bêche  un  ruban,  et  au  côté  de 
la  bêche,  deux  pièces  de  deux  sols,  que  la  servante  avait 
serrées  la  veille  dans  une  petite  boite.  Quelquefois  il  prenait 
plaisir  à  déplacer  la  vaisselle  de  fayence  et  d'étain,  et  de  la 
ranger  en  rond  dans  la  cuisine  ou  dans  le  porche,  ou  même 
dans  le  cûnetière,  et  toujours  en  plein  jour.  Un  jour,  il  rem* 
plit  un  pot  de  terre  d*herbes  sauvages,  de  sons,  de  feuilles 
d*arbre,  et  ayant  mis  de  Teau,  le  porta  au  jardin  dans  l'allée. 
Une  autre  fois,  il  le  suspendit  au  cramail  sur  le  feu.  La  ser- 
vante ayant  cassé  deux  œufs  dans  un  petit  plat  pour  le  souper 
du  curé,  le  génie  y  en  cassa  deux  autres  en  sa  présence,  la 
servante  ayant  seulement  tourné  le  dos  pour  y  mettre  du  sel. 
Le  curé  étant  allé  dire  la  messe,  il  trouva  au  retour  toute  sa 
vaisselle,  ses  meubles,  son  linge,  pain,  lait  et  autres  choses 
répandues  dans  la  maison. 

<  Quelquefois  il  fi>rmait  sur  le  paré  des  cercles,  tantôt 
avec  des  pierres,  tantôt  arec  du  blé  ou  des  feuilles,  et  dans 


326  BBVOB  D'ALSAOB 

nn  moment,  aux  yeox  des  assîsttnts,  tout  cela  éUit  renrersé 
el  dérangé.  FaUgué  de  tout  ce  manège,  le  curé  fit  Tenir  le 
maire  du  lieu,  et  lui  dit  qu'il  était  résolu  de  quitter  la  maiion 

curiale.  Bans  ces  entrefaites,  arriva  la  nièce  du  curé,  qui 
leur  dit  que  le  génie  avait  arraché  les  choux  du  jardin,  et 
avait  mis  de  l'argent  dans  un  trou  en  terre  On  y  alla  et  on 
j  trouva  la  chose  comme  elle  l'avait  dit«.  On  ramassa  l'ar- 
gent, qui  était  celui  que  le  curé  avait  mis  dans  son  poêle,  en 
un  lieu  non  fermé,  et,  un  moment  après,  on  le  trouva  de 
nouveau  avec  des  liards  deux  à  deux  répandus  dans  sa  eoi- 
Bine. 

«  Les  agens  du  comte  de  Linange  étant  arrivés  à  Walflche, 
allèrent  chez  le  curé  et  lui  persuadèrent  que  tout  cela  était 
l'effet  d'une  sorcellerie;  ils  lui  dirent  de  prendre  deux  pisto- 
lets et  de  les  tirer  à  l'endroit  où  il  remarquerait  quelques 
mouvements.  Le  génie  jeta  en  même  temps  dans  la  poche 
d'an  de  ces  offlders  deux  pièces  d'argent,  et,  depuis  ce  temps, 
il  ne  se  fit  plus  sentir  dans  la  maison. 

<  Cette  circonstance  de  deux  pistolets  qui  terminèrent  la 
scène  de  l'esprit  follet  qui  inquiétait  le  bon  curé,  lui  fit  croire 
que  ce  lutin  n'était  qu'un  certain  mauvais  paroissien,  que  le 
curé^  avait  été  obligé  de  faire  sortir  de  sa  paroisse  et  qui, 
pour  se  venger,  avait  fait  dans  la  maison  curiale  tout  ce  que 
nous  venons  de  voir.  Si  cela  était,  il  s'était  donc  rendu  invi- 
sible, ou  il  avait  eu  le  crédit  d'employer  en  sa  place  un  génie 
fkmilier  qui  intrigua  le  curé  pendant  quelques  semaines  ; 
mais  sll  n*était  point  en  corps  dans  cette  maison,  qu'avait^ll 

*  Le  cnré  se  nommait  André  Albert,  né  à  Freybouse  (canton  de  Gros- 
Tenqvin),  il  occupa  sa  place  de  1738  h  1774.  Il  avait  la  dîme  dn  village 
et  de  ses  dépendances.  Michel  Albert  le  remplaça;  la  Révolution  le 
surprit,  sans  l'abattre,  car  il  partit  pour  l'exil. 

Schœpllin  traite  rudement  le  village  de  Walscheid,  cu/tw  titeote» 
nliquû  inH  it  ferocu,  dil-il  (ibofta,  L  I,  p.  193).  AbresehwiOer  M 
détaobé  de  la  paroisse  de  Walsebeid  avec  Toyer.  Un  pen  avant 
Tannée  1780,  ce  dernier  village  fiit  aussi  érigé  en  eore. 


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LB  aoHRmnrao  bt  lb  oonté  db  dabo 


397 


à  craindre  dt  coaps  de  pistolets  qu'on  aurait  po  tirer  sur 
luit  Et  8*il  était  en  corps,  comment  pounit-il  se  rendre 
iofisiblet'  > 

n 

Préoin  de  la  maladie  épizootique  qui  a  régxié  dans 
le  comté  de  Llnange-Dabo  et  dépendanoes,  en- 
Toyé  à  M.  Bertin,  ministre  et  secrétaire  d*Btat» 
par  M.  de  Galaiziàre,  intendant  de  Strasbourg*. 

c  Depuis  le  15  août,  uns  maladie  particulière  paraissait 
attaiiuer  les  I>e8tiaax  dans  quelques  tillages  de  ce  comté. 
Gomme  le  pajaan,  toujours  craintif  sur  Tidée  seule  de  ce  qu'il 
pourrait  loi  en  coûter  en  réclamant  les  secours  des  gens 

instruits,  est  dans  Tusage  d'attendre  la  dernière  nécessité, 
ou  que  le  danger  soit  réel  et  présent  pour  se  déterminer  à 
employer  les  moyens  ou  curatife,  ou  préservatifs,  et  que,  dans 
ces  états  d'indolence,  il  ne  se  donne  pas  même  la  peine 
d'examiner  ou  de  checcber  les  causes  de  ces  épidémies  qui 
souTsnt  l'environnent;  par  une  conséquence  naturelle,  il  en 
résulte  communément  qne  ces  causes  se  multiplient,  s*sggra- 
▼ent,  deriennent  pires,  que  la  maladie  se  propage,  que  les 
accidents  augmentent,  et  que  le  caractère  et  la  nature  de  la 
maladie  s^envenime.  Voilà  précisément  ce  qui  rient  d'arrirer 
aux  viiiag<}8  d'Abresclnviller,  Walscheid,  Dabo,  chef- lieu  et 
dépendances,  par  rapport  à  l'épizootie  en  question.  Les  habi- 
tants qui,  dans  les  premiers  moments,  n'avaient  pas  fait 
grande  attention  à  cette  maladie,  commencèrent  enfin  à  s'ef- 
firayer  des  progrès  que  leur  négligence  leur  a?ait  laissé  dire, 
et  ils  prirent  le  parti  de  réclamer  par  requête  les  secours  de 
M.  de  Is  Galaizière,  qui,  sur  le  chsmp,  Ht  partir  les  sieurs 
Adolphe  et  Guise,  tous  deux  élères  de  TEcole  Tétérinaire  de 

*  DoM  Galmet,  Traité  des  HfpanHoiu  ie»  Etprits.  Senones,  I7ô9, 

t.  I,  p.  225. 

•  GaseUe  d'agricuUure.  Paris,  1778,  in-4s  p.  675. 


REVUE  D'ALSAOB 


Paria.  RendiM  à  Dabo,  ils  se  parkagèreiit  les  oommiuiiatéi 
dans  lesquelles  la  maladie  régnait  arec  le  plus  de  force.  Le 
sieur  Adolphe  8*étaot  transporté  à  Dabo  et  dépendances,  où 

85  bœufe,  9  vaches,  4  chtvaux,  4  ânes,  avaient  déjà  péri  de 
celte  maladie,  y  trouva  80  pièces  de  bétail  attaquées  et  infec- 
tées de  cette  épidémie.  Il  employa  sur  le  champ  les  remèdes 
et  les  moyens  que  nous  indiquerons  plus  bas,  avec  tant  de 
tawès  qu'il  n'en  a  perdu  aucune;  ses  soins  et  ses  précautions 
poar  garantir  les  antres  animaux,  lui  ont  si  bien  réassi 
qn'anenn  autre  n*en  a  été  afEaclé  par  la  suite. 

c  Le  sienr  Gnise  ent  en  partage  les  villages  de  Walsche 
et  d^AbreschwilIer;  dans  le  premier,  40  pièces  de  bêtes  à 
cornes  étsient  déjà  mortes.  Il  y  tronva  260  t^lèees  attaquées 
de  la  maladie,  à  laquelle  cinq  seulement  ont  succombé,  parce 
qu'elles  avaient  été  mal  traitées,  dans  le  principe,  par  un 
charlatan  qui  se  trouvait  là.  Cet  élève  a  de  plus  garanti  de 
toute  invasion  110  pièces  dans  ce  même  endroit.  A  Abresch- 
willer,  le  même  Guise  a  traité  quinze  pièces  attaquéea  de  la 
même  maladie  et  aucnne  n*a  péri  ;  SOS  antres  ont  été  préser- 
vées de  tonte  oontsgion  par  ses  soins  et  par  le  moyen  des 
préservatifs  qu'il  leur  a  administrés.  Avant  son  arrivée  dans 
ce  lieu,  17  bêtes  à  cornes  étaient  mortes  de  la  maladie. 

«  La  vérité  de  cet  exposé  est  constatée  parles  certificats  des 
maires  et  préposés  desdits  lieux,  envoyés  et  exisians  dans 
les  bureaux  de  riutendance  à  Strasbourg. 

Ei^é  dê  la  makuH»i  symptânm  et  itaitmmt 

c  de  cmel  fléan  s'est  manifesté  dans  le  courant  d*août, 
avec  tant  de  rapidité  que,  depuis  le  15  au  29  août,  il  élalt 

péri  à  Dabo  52  pièces,  à  Abreschwiller  17,  et  à  Walscheid 
40,  en  tout  109  su  quatorze  jours,  comme  il  eat  constaté  par 
les  cerliûcats. 


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LB  SOHNRKBKRO  BT  LB  OOUTÉ  OB  IMkBO 


Caum  des  tymptômu 

<  1  °  Les  grandes  et  conliauelles  chaleurs  de  Tété,  qui  ont 
séché  en  partie  lea  lacs  et  les  marais  ;  3**  la  disette  de  bonne 
eta  jponr  abreuver  les  bestiaux:  8*  les  miasmes  putrides 
exaltés  par  la  chaleur;  4*  l*lierbe  que  pAturaient  ces  animaux. 
Gstte  herbe  étant  sèche^  noire  et  chargée  d*une  partie  de  ces 
miasmes,  ou  au  moins  d*une  espèce  de  ronille,  ne  pouvait  que 
leur  fournir  une  nourriture  malfaisante.  Ajoutez  à  cela  les 
chenilles  qui  ont  été  celte  année  très  nombreuses,  et  qui,  en 
tombant  des  arbres,  s'attachaient  aux  plantes  et  étaient  con- 
séquemment  avalées  par  les  bestiaux;  5"  des  écuries  très 
basses,  mal  ou  point  aérées,  plus  mal  situées,  ayant  au  jour 
des  fumiers  en  grand  tas,  qui,  par  les  chaleurs,  ne  pouTaient 
manquer  de  produire  des  exhalaisons  très  putrides.  Les 
symptômes  les  plus  apparens  et  les  mieux  rérifiés  étaient  : 

1'  Une  respiration  gênée,  une  écume  ou  bave  sortant  de 
la  bouche;  des  tumeurs  critiques  qui  se  manifestaient  indif- 
féremment sur  toutes  les  parties  du  corps  :  ces  symptômes, 
quoique  très  graves,  n'influaient  en  rien  ou  pour  peu  sur 
les  autres  fonctions  animales,  qui  ne  se  ralentissaient  qu'au 
moment  de  la  mort  :  phénomène  extraordinaire  et  très  rare; 
8*  nn  bœuf  attaqué  de  la  maladie  ayant  flenté,  on  imprégna 
de  la  fiente  du  blé,  qui  fut  donné  un  moment  après  à  an 
poulet;  oeTulatîle  en  creva  an  bout  de  deux  beures  qu*il  Teut 
mangé;  on  ouvrit  un  des  dépôts  critiques  et  on  laissa  couler 
une  goutte  de  la  matière  qui  en  coula,  sur  une  pièce  d'ar- 
gent. Cette  pièce  devint  noire  en  très  peu  de  temps  et  rendit 
du  vert  de  gds;  5*  le  bourguemestre  de  Walscheid,  pour 
avoir  écorcbé  un  de  ses  bœufs  crevé  avec  une  tumeur  critique, 
est  mort  des  suites  d'an  semblable  dépôt  qu'on  négligea  de 
soigner.  Une  fille,  pour  avoir  mangé  de  la  viande  d'un  bœuf, 
qui  fiit  tué  aa  premier  symptôme  de  maladie,  en  est  morte, 
et  sept  antres  personnes  ont  été  en  très  grand  danger  pour 


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BEVUB  D'ALSACB 


la  même  cause,  mais  H.  Grosse,  chirargîen  hatnle  de  Sarre- 
boarg,  leur  a  administré  des  remèdes  oonrenables,  asses  à 
temps  pour  les  saoTer  tontes.  D  a  été  ocenpé  trois  semaines 

à  leur  guérison;  6°  un  jeune  paysan  voulant  eonnattre  par 

lui-même  l'état  de  la  bouche  d'un  de  ses  bœufs  malades,  et 
s'étanl  sans  doute  approché  de  très  près,  a  été  infecté  par  la 
respiration  de  l'animal,  au  point  qu'il  a  eu  les  lèvres  rem- 
plies de  pustoles. 

CuraUon,  traitement  et  préeervat^ê 

<  On  a  commencé  par  éloigner  autant  qnll  a  été  possible, 
ls8  causes  physiques,  en  aérant  les  écuries,  en  écartant  le 

voisinage  des  fumiers,  surtout  ceux  dans  lesquels  avaient 
pourri  des  végétaux;  en  ne  donnant  à  boire  aux  animaux 
qu'une  eau  pure  et  claire  ;  en  parfumant  les  étables  plusieurs 
fois  le  jour  avec  de  la  graine  de  genièvre  alternativement  et 
du  vinaigre.  Les  animaux  attaqués,  chez  lesquels  nul  dépôt 
critique  ne  s*était  encore  manifesté,  avalaient  tous  les  jours 
une  ou  deux  potions  antiseptiques  fiiltes  avec  les  infusions  de 
kina,  de  baies  de  genièvre,  auxquelles  on  ajoutait  du  nitre, 
du  eampbre  et  de  la  tbériaque,  quand  la  nature  paraissait 
trop  engourdie,  [lest  arrivé  que,  malgré  ces  remèdes  sus-indî- 
qués,  elle  ne  faisait  encore  aucun  effort,  alors  on  la  sollicitait 
avec  une  espèce  de  cautère,  qu'on  établissait  au  moyen  de  la 
racine  d'ellébore  introduite  entre  cuir  et  chair,  et  qu'on  avait 
grand  soin  d'entretenir  jusqu'à  guérison;  on  en  agit  de  même 
dans  les  tumeurs  vraiment  critiques  opérées  par  la  nature, 
en  ayant  soin  de  les  ouvrir  dans  toute  leur  longueur  et  d'y 
fàire  nattre  une  suppuration  au  moyen  de  digesti&  fidts  arec 
l*onguent  badUoon  et  les  cantharldes. 

«  Je  ne  ferai  aucun  délai!  des  boissons  adoucissantes, 
délayantes  et  nitrées;  ces  remèdes  étaient  rendus  plus  ou 
moins  actifs  suivant  l'exigence  des  cas;  les  saignées,  les 
lavements,  les  purgatUs,  à  la  fin,  ont  trouvé  leur  place.  Je 


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ut  soHNBBBna  n  le  oouri  dk  tuœo 


831 


ne  dois  point  oublier  de  dire  que  le  soufre  a  été  employé 
intérieurement  aTee  soccès 

Orner  kure  des  cadÊorei 

«  Les  é\ëve3  n'ont  pu  ouvrir  que  les  cinq  cadavres  dont 
j*ai  parlé  plus  hHut;  il»  oui  trouvé  la  rate  enflammée  et  même 
gangrenée;  2*  le  sang  des  yeines  absolument  aqueux,  pheuye 
de  oolllquation  ;  8*  ila  ont  trouvé  deux  diaphragmes  sphaeelés 
avec  des  ooTertnres  et  des  écartements  dans  k  partie  char- 
nue, symptôme  qui  les  a  étonnés,  mais  que  Je  regarde  comme 
l'effet  et  la  suite  du  sphaeel . 

<  A  Strasbourg,  le  *S  octobre  1778. 

•  Signé  :  Laghaubss, 
aneim  méd$ein  dSst  Jrméu  du  Bsy^  de  fttûpiki  mMÊirê, 
dMurgé  dê  fkupMon  m  Vabnim  d$  M,  Bênodin.  > 

m 

M.  de  Birkenwald 

Le  «  savant  »  Charles-Ferdinand  Dupré  de  Dordhal  sei- 
gneur de  Birkenwald,  d'extraction  lorraine,  était  membre  de 
la  noblesse  de  la  Basse-Alsace. 

n  naqnit  le  i  5  février  178S  et  il  mourut  le  19  janvier  1788. 

'  D'après  if.  Salle,  vétériiiaire  en  premier  an  9*  régimeiit  de  dragonSt 
les  eanses  invoqoées  eoat  des  lieux  eomnims  stos  valeur.  Les  symp- 
tômes assez  vagues,  pea  précis,  ne  penvent  en  rien  faire  supposer  que 
cette  maladie  soit  la  peste  bovine.  Les  lésions  n'ont  rien  d'assez  carac- 
téristique pour  affirmer  que  cela  soit  cette  terrible  maladie.  Une  seule 
chose  surprend,  c'est  que  les  vétérinaires  n'aient  pas  en  reeovrs  à  la 
séqaestaiHon»  k  risolement 

Un  tut  frappe  dans  cette  relation,  c'est  la  faciUté  de  contagion  ;  et  la 
mort  des  sujets  contaminés,  hommes  ou  bêtes,  permettrait  de  sup- 
poser que  l'a&ction  observée  en  1778  serait  plutôt  le  charbon  qae  la 
peste  bovine. 

*  Château  et  ferme,  canton  de  Uienze. 


BBVUB  D'ALBAiOB 


U  fut  inhumé  dans  le  chœar  de  1  église  de  Birkenwald.  De 
son  mariage  avec  Marie-Elisabeth  de  Musiel,  il  n*eut  qu'une 
fille,  Fanny,  qui  eut  le  fief  de  Birkenwald,  sous  la  gaide  noble 
de  sa  mèro. 

A  la  RéTOlotion,  la  mère  et  la  fille  émigrèrent  et  elles  pas- 
sèrent ffaelqnes  années  à  la  Cour  de  Vienne  \  Le  premier 

Consul  les  fit  rayer  de  la  liste  des  émigrés  et  leur  fit  rendre 
leurs  biens.  II  maria  la  jeune  fille  à  M.  le  marquis  de  Gri- 
maldi-Monaco,  son  oiïlcier  d'ordonnance . 

Leur  union  ne  fut  pas  de  longue  durée,  car  le  marquis 
mourut  à  Paris,  en  1803. 

Le  veuTage  ne  fit  qu*embellir  les  charmes  de  IP  de  Bir- 
kenwald et  peut-être  aurait-elle  volé  à  de  nonveanz  liens, 
lorsque  Tinexorable  mort  vint  la  frapper  presqu'une  année, 
jour  pour  jour,  après  la  mort  de  son  mari.  Elle  habitait  Flo- 
rence et  était  une  des  rares  étoiles  de  la  petite  Cour  de  la 
célèbre  comtesse  Albani  la  reuve  du  prétendant  Charles- 
Edouard,  remariée  alors  en  secondes  noces  au  poète  Allieri, 
t  Tennemi  des  Rois  ».  Celui  ci  expirait  la  même  année  que  le 
marquis  de  GrioMldi  et  il  laissait  le  champ  libre  à  un  jeune 
pdntre,  Francols-Xavier  Fabre,  qui  devait  lui  snecéder  dans  . 
les  bonnes  grftoes  de  la  veuve  du  dernier  Stuart. 

Fabre  fit,  en  180S,  le  portrait  en  pied  de  la  marquise  de 
Grimaldi.  Il  la  représenta  dans  un  site  sauvage  au  moment 
où,  se  dirigeant  à  travers  une  forêt  de  cyprès  et  de  saules 
pleureurs  vers  la  tombe  ouverte  de  son  mari    elle  soulère 

*  M.  Schœll,  avocat  à  SaTeme,  a  bien  vonla  me  donner  ces  renseigne- 
ments, qu'il  veuille  bien  recevoir  mes  vifs  sentiments  de  reconnaissance. 
Il  possède  aussi,  dans  son  intéressante  coUoclion  sur  S;ivorne  et  sas 
environs,  le  portrait  de  M^^"  de  Birkenwald.  M.  Dagobert  Fischer,  de 
StTerne,  a  été  aussi  pour  moi  d'un  grand  secours  ;  nul  plus  qae  loi  o'eit 
eipable  d'aider  un  oonfrftre. 

'  Voyez,  pour  le  sqonr  de  la  comtesse  près  de  Cobiiar,  la  Pettle  GuuUi 
d'Alsace  de  M.  de  Neyremand,  1863. 

'  On  lit  sur  la  pierre  sépulcrale  :  GIÛ.  BAT.  GRIMALDI  DËLU 
PI£TRA.  NDCCCIU. 


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LB  flfIHNBRBKRO  BT  LE  COMTÉ  DE  DABO 


333 


son  voile  de  deuil,  qui  cachait  ses  traits  (et  sa  chevelure  à 
la  chien),  pour  regarder  d'un  air  dolent  l'Amour  qui  cherche 
à  la  retenir  en  enlaçant  de  ses  petites  mains  son  Jtoau  bras. 
Cette  peintare  était^le  une  alioaion  à  l'amonr  secret  da 
peintre?  FU>re,  qui  avait  alors  trente  ans,  devait  sans  doute 
préférer  la  jeune  yettve  à  l'amitié  sénile  de  la  comtesse. 

Quoiqu'il  en  soit,  celle>ei,  victime  de  sa  beauté,  expira  à 
Gênes,  empoisonnée  par  son  médecin,  dont  elle  avait  dédaigné 
la  main.  Elle  laissa  Birkcinvald  à  sa  mère  désolée. 

Le  portrait  du  peintre  de  Montpellier  a  été  gravé*;  en 
voici  la  description  : 

S9MS  k  trâit  : 

F.  Xaverio  Fabre  dipinse.  Pietro  Erimini  disegno.  Pietro 
Bettelini  incise.  Roma  1806. 

(Au-dessous.)  La  Marchesa  Fanny  Grimaldi  Monaco  di 
Genova,  nata  Baronessa  di  Bûrckenwald,  Dama  dclla  Croce 
Stella. 

CUPIDO  PANNIAM 
OOMJUaiS,  ANTE  DIKM  RAFFI,  DESIDERIO  TABEtiCENTEM 

NOVA    CUKA  SOLLICITANS 

(illl  mi£tUf  les  amuiries  de  Grimaldi-Birckemuald  surmontées  de 
la  courmau  4t  matfuis^  et  au  bas  la  dicûratim  dt  la  Croix  itû&t.) 
Puis: 

A  Sua  Bccellenza  Don  Luigi  Grimaldi,  Marchese  délia 
Pietra  Vairana,  Conte  di  S.  Felice,  utile  Signore  di  S.  An- 
gelo  e  Raciscanino,Nobili  Genoveee,  e  Barone  Napoletano, 
etc.,  etc.,  Fratello  di  S.  £.  Gioy.  Batt^.  Grimaldi 

Morte  a  Parigi  il  di  4  Febb*.  1805  e  sposo  délia  M*\  Fan- 
ny che  losegui  nella  Tomba  il  di  6  Febb».  1804.  in  Firenze. 

Nicolo  Pagni  D.  D.  D. 

Nicola  d'Antony  impresse. 


*  Hauteor  0,5;.^ ,  largeur  0,38. 


DOCUMENTS  INÉDITS 

pour  servir  à  ndstoire  de  randenae 

SEIGNEURIE  Dli  BAN-DE-U-ROCHE 

(en  allemand  Zum  Stein) 


Fin 


I 

Quelqiies  notes  sur  le  domaine  duBan-de-larRoohe, 
Znmstesn  ou  ohftteau  de  la  Roche 

SA  MOUVANCE 

Les  premiers  possessenrs  eonnns  de  ce  fief  sont  Heberhard 
d*And]aii  et  ses  fils. 

1871.  'Ils  le  Tendirent  à  Dietrich  deBotemhaiiaen  (Ralh- 
aamhansen).  —  Le  dernier  poaseasenr  de  cette  lunille  Ait 

Jfean-Frédéric  de  Rotemiiauzen. 

21  mars  1580.  —  Rodolphe  II,  empereur  d'Autriche,  Tau- 
lorisa  à  vendre  ce  fief. 

8  juin  1584.  —  Il  est  vendu  au  comte  palatin  de  Veldentz. 

il  juillet  1613.  —  Lettre  d'investiture  de  George-Gustave, 
fils  de  Geoarge-Jean  Yeldenta,  par  Matthias. 

6  avril  16S1.  —  Lettre  dlnvestitaie  en  bTenr  dn  même, 
par  Ferdinand  second. 


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AKCIBNNB  SBIGMEUBIB  DU  BAK>DB>LVBdCBB  886 

4669  (aU*).  —  C'est  probablement*  une  inmtitare  en 
fiiTeor  de  Léopold-Loais  de  Yeldentz,  petit- fils  de  i*acquéretir 

George- Jean  et  fils  de  Jean -Frédéric. 

Il  est  mort  à  Strasbourg,  en  1694,  sans  enfants  mâles. 

Il  a  laissé  une  princesse  palatine,  nommée  Dorothée  Vel- 
deutz,  qui  se  mit  en  possession  du  fief  et  le  conserva  jusqu'en 
1720  ;  ell«  avait  épousé  un  duc  des  Deux-Ponts,  Gustave- 
Samuël-Léopold.  Maia  le  M  était  vacant  à  défaut  d'eniknts 
mâles. 

AoDst  i7S0.  —  Louis  XY  le  ftit  eomme  éehu  à  sa  maison 
et,  en  aonst  I7S0,  en  a  iuTesti  M.  Nicolas-Prosper  Bauya 
d'Angervillers,  son  oonseitler  d'état,  intendant  de  la  Haute* 
et  Basse-Alsace,  à  condition  qu'il  serait  réservé  à  descen- 
dance masculine,  et  à  défaut  de  mâles,  à  sa  ilile  aînée  et  à 
ses  descendants  mâles. 

Mais  les  lettres  réserven  t  la  sur  fie  en  faveur  de  la  princesse 
des  Deux-Ponis,  Dorothée  Veldents. 

LsB  mêmes  lettros  accordent  la  surriranoe  à  M**  de  Man- 
poo,  épouse  de  M.  d'Angerrillirs. 

80  Juillet  1788.  —  H.  d^AngerviUers  se  démet  entre  les 
mains  du  roi,  mais  en  btrenr  de  Marie-Jeanne-Louise,  sa  fille 
unique. 

4  aoust  1728.  —  Lettres  d'investiture  en  faveur  de  ladite 
Marie-Jeanne-Louise  et  des  descendants  mâles,  <  sans  aucune 
chose  nous  en  réserver  ni  roteoir  que  le  ressort  et  la  souve- 
raineté, les  foi  et  hommage,  les  roprisas  féodalea  aux  muta- 
tions, les  aveux  on  dénombrements  dans  les  cas  où  ils  sont 
d'usage  en  notre  province  d'Alsace. 

«  En  cas  de  décès  sans  postérité  mâle,  lesdits  fiefe  et 
dépendances  retourneront  à  notre  disposition  et  à  la  dispo- 
siliun  des  Rois,  nos  successsurs.  > 

*  Cette  expranon  dubitative  s'explique  par  la  note  mise  on  marge,  4 
côté  de  la  date.  Le  document  original  était  en  alleniand  et  l'anlenr  du 
présent  travail  ignorait  sans  doute  cette  langue. 


995  BEVUE  D'ALSACE 

Cette  demoiselle  d^Angervillers  épousa  M.  Jean-Réiié  de 
LonguerU,  marquU  de  Maison.  .      ^  „ 

Ella  épousa  en  secondes  noces  le  marquis  de  Ruffec 

Acte  de  davest  dans  les  mains  du  roi. 

10  janvier  17S8.  -  Lettres  d'investiture  en  faveur  de  la 
dite  et  de  sa  descendance  màle.  soit  de  son  mariage  avecle 
r^arquis  de  Ruffec,  soit  des  a^iires  moriOgaj^tlkpi^ 
léaUimment  contracter  dans  la  mUe,  à  condition  que  lelW 
aéra  possédé  de  mâle  en  màle  pour  un  sêuh  sans  pmwsir 

^JrlSle  spéciale,  à  défaut  d'enfanls  mâles  de  la  dite 
Marie-Jeanne-Louîse  de  Bauyn,  il  passera  à  sa  fille  aînée  et 
à  ses  descendants  mMes.  EUe  épouse  en  secondes  noces 
M.  Antoine-René  de  Voyer  d'Argemïon,  marquis  de  Pau  my. 

Mars  1 7  58.  -  Investiture  en  faveur  du  marquis  de  Paulmy, 
Antoine-René  de  Voyer  d'Argenson.  .  n    a  u 

Mars  1162.  —  Erigé  en  comté  sous  le  nom  de  Ban  oe  » 
Roche, «sans  que  ces  présentes  puissent  faireaucun chMge- 

ment  aux  mouvances. 

«Entendons  néanmoins  qu'en  cas  dexlinction  des  descen- 
dants  mftles  du  marquis  de  Paulmy  et  à  leur  défaut  de  sa 
fille  atnée  et  de  ses  descendants  mttes,  les  fiefs  terres  ei 
seigneuries,  appartenances  et  dépendances,  érigés  pariw 
présentes  en  comté,  reUmmsrwt  à  leur  premSirs  «awr», 

tUres  et  qualités.  . 

25  avril  1771.  —  M.  de  Voyer  de  Paulmy  se  déme»  eni» 
le  mains  du  roi,  avec  prière  d'en  investir  M.  Dietrich. 

Avril  mi.  —  Lettres  d'investiture  en  faveur  de  M.Jean 
Dietrich  pouvant  jouir  comme  M.  de  Paulmy,  à  condition  que 
la  lignée  mascuUne  dudit  sieur  Dietrich  venant  à  manquer, 
lesdils  flcfe  et  dépendances  érigés  en  titre  de  comté,  retour- 
neront  à  notre  disposition  et  ceUe  des  rois  nos  successeurs. 

16  décembre  1772.  -  xVveux  et  dénombrement  au  Conseil 
souverdin  d  Alsace. 


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AXCIENNB  S&iaXIi^UKlË  DU  BAH-Di-LArBOCHE  887 

S8  août  1775.  —  Autres  aveux  et  dénombrement;  il  est 

probable  que  ce  sout  les  derniers  fournis  (à  cause  de  la  révo- 
lutioo).  M.  Jean  Dietrich  est  mort  à  Strasbourg  en  1794. 

n 

Etat  des  titres  et  pièces  conoernant  le  Ban-de-la- 
Roohe;  pièces  contenues  en  la  liasse  étiqpietée  ; 

PIÈCES  TfMhvja  nga  ARCHIVES  DE  YELDENGB^ 

1585.  —  Copie  collationnée  de  la  quittance  délivrée  par 
les  tuteurs  du  tils  de  feu  Jean-Frédéric  de  Rathsamhausen 
à  la  pierre,  à  George-Jean,  comte  palatin  du  Rhin,  duc  de 
Bavière  et  eomte  de  Veldents,  pour  la  somme  de  47,000  flo- 
rins, prise  de  la  fente  des  fie6  împérianz  possédés  par  leur 
mineur  et  Tendus  audit  comte  palatin. 

1698.  —  Fireille  copie  de  la  cession  des  8/4  du  Ban-de-la- 
^  Roche  avec  ses  appartenances,  ftilte  par  Jean-Auguste  et 
Philippe-Louis,  comtes  palatins  du  Rhin,  tant  en  leurs  noms 
qu'en  celui  de  leur  frère  George-Jean,  à  George- Gustave  leur 
frère,  pour  la  somme  de  i  8.000  florins. 

1604.  —  Investiture  accordée  pour  le  susdit  fief  par 
Tempereur  Rodolphe  II  à  George-Gustave,  comte  palatin  du 
Rhin. 

ni. 

Pièces  produites  à  la  commission  féodale  par  feue 
la  dame  duchesse  de  Kuffeo 

1404.  —  Translat  flrancois  de  linvestitnre  accordée  par 
Robert,  roi  des  Romains,  à  Chirothée  (GérothéJ  et  Thierry 

de  Rathsamhausen  à  la  pierre. 

*  Cette  pièce  et  la  suivante  se  trouvent  sur  la  même  feuille  in-folio  ; 
on  y  lit  en  haut  de  la  iiiart.";  la  note  suivante,  écrite  d'une  autre  maia, 
probablement  de  rhoiniiic  d  affaires  de  M.  de  Dietrich,  qui  était  en  pos- 
session da  fief  depuis  le  mois  d'avril  1771  : 

«  U  Septembre  1771  j'ai  demandé  à  l'intendanee  eopie  de  tontes 
ces  pièces  devant  lesqoelles  il  n'y  a  pas  de  liasse.*  > 

HoqtcUo  Siilfc  —  1*  Année  ^ 


8il8 


EEVUB  D*AL8A€B 


15!21.  —  Idem,  de  Charles  V  à  Uiric  de  Raihsamhauseû  et 

à  ses  cousins. 

i563.  —  Idem,  de  remperenr  Ferdinand  à  Jacques  de 
Battaflambaosen  et  Wolff  Tliierry,  son  cousin. 

1577.  —  Idem,  de  remperenr  Rodol^  à  Jean-Frédéiie 
de  Bathflamhanain.  * 

1680.  — -  Lettres  patentes  dndit  Bmperenr  oetroiées  an 

même  vassal  aux  fins  de  pouvoir  vendre  le  fief. 

1584.  —  Contrat  de  vente  de  ce  fief  passé  par  les  tuteurs 
de  Samson  de  Rathsamhausen,  fils  du  susdit  Frédéric,  en 
faveur  de  Georges-Jean,  comte  palatin  du  Bbiu,  et  de  ses  héri- 
tiers féodaux. 

1604.  —  Inrestiture  aecordée  par  Temperenr  Rodolphe  H 
à  George-GustaTe,  comte  palatin  dn  Rhin. 
16S1.  —  Mem,  de  Temperenr  Ferdinand  II  an  mdme. 
1661.  —  Idem,  de  l'empereor  Ferdinand  RI  à  Léopold- 

Louis,  comte  palatin  du  Rhin. 

4659.  —  Idem,  de  l'empereur  Léopold  au  môme. 

1720.  —  Lettre  patentes  du  Uoi  portant  don  de  ce  fief  à 
Nicolas-Prosper  Bauyn  d'Angerviilers,  conseiller  au  Conseil 
d'Etat,  intendant  de  Justice,  Police  et  Finances,  en  Alsace. 

1728.  —  Reprise  de  ee  fief  bite  par  ledit  fBsrala?ec  l'acte 
de  ]a  prestation  des  foy  et  hommage. 

Idem.  —  Arrêt  dn  Conseil  d'Etat  qui  permet  audit  raasal 
de  rétablir  la  forge  et  usines  appartenantes  dans  le  Ban-de- 
la-Roche,  en  tel  endroit  qu'il  jugera  à  propos. 

Idem.  —  Lettres  patentes  conformes  audit  arrêt  avec  l'ar- 
rêt de  l'enregistrement  qui  en  a  été  fait  au  Conseil  d'Alsace. 

1728.  —  Acte  de  devesl  de  ce  fief  de  la  part  du  susdit 
vassal  en  fiiTeur  de  sa  fille  unique  et  de  ses  héritiers  mfllei 
à  naître  d'elle. 

Idem.  —  Lettres  patentes  conibrmes  audll  devest,  à  la 
snite  desquelles  se  trouve  transcrit  Tarrét  d'enregistrement 
du  Conseil  souverain  d'Alsace. 


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AMOtBMKB  SSiaïUiUAUi  DU  BAN-AB^LA  BOCUfi 


939 


Idem.  —  Lesdiles  lettres  patentes  avec  l'enregistrement 
fait  au  Contrôle  générai  des  finances  et  au  Parlement  de 
Paris. 

Idem.  —  ArrdI  du  Parlement  de  Paris  qui  ordonne  ledit 
eoregifitfement. 

Idem.  —  Idem,  da  Conseil  eouTeraîa  d^Ateaoe  aux  mèmee 
fins. 

Idem.  —  Reprise  hito  par  cette  Yiesalle,  arec  l'acte  de  la 

prestation  de  fby  et  hommage. 

17SS.  —  Acte  de  devest  de  ladite  vassalle  après  le  décès 
de  son  premier  époux. 

Idem.  —  Antres  lettres  patentes  octroiées  par  le  roi  à  la 
dite  Tassalle,  eur  le  derest  de  ce  fief  par  elle  iSiit  après  le 
décès  de  son  premier  éponz,  le  siear  Marquis  de  Maison,  por- 
tant lesdites  lettres  que  les  enfiints  mâles  à  naître  d'elle  et 
de  son  ftitor  éponz,  le  S"  Marquis  de  Rufbc,  succéderont  à 
rinfini  dans  ce  lief,  Taîné  toujours  préféré.  Les  enregistre- 
ments qui  eu  ont  été  faits  tant  au  Parlement  de  Paris,  en 
1785,  qu'au  Contrôle  générai  des  finances  à  Paris,  en  1788, 
qu'au  Conseil  souverain  d'Alsace,  en  1786,  sont  transcris  sur 
le  même  cahier. 

1785.  —  Arrêt  dn  Parlement  de  Paris  qui  ordonne  le  sus- 
dit enregistrement. 

4786.  —  Idem,  du  Conseil  souverain  d'Alsace. 
Idem.  —  Reprise  faite  audit  Conseil  par  ladite  vassalle. 
Acte  de  la  prestation  des  foy  et  hommage. 

N,'JB,^  Aux  archives,  il  se  trouve  rinventaire  des  pièces 
concernant  le  Ban-de-la-Roche,  qui  en  ont  été  retirées  par 
M.  d'Angervillers  pour  M.  le  Marquis  de  Rulfec  le  15  novem- 
bre 1788. 


BSVUB  D'AUSACB 


IV. 

Beooimaissaiice  de  MadMa  Duchesse  de  HafTec  des 
pièces  qm  lui  ont  été  remises  le  6  aoust  1748* 

POUR  COPIE 

Etat  des  pièces  qui  m'ont  été  remises  par  M.  de  MontrtQÎl. 
StToir  : 

(A  M.  d'Angervilliers.) 

1720.  —  Lettres  d'investiture  accordées  à  M.  d'Anger?il- 
tiers  da  fief  Zam  Stein,  de  17  SO. 

1794  (1**  ibrge).  —  Lettres  patentes  données  en  1724^  pour 
raison  du  même  fief  sTec  Tanest  d'eniegistrement  an  Gon- 
hS\  d'A]flaoe  pour  établissement  d*nne  forge. 

1728.  —  Lettres  d'investiture  de  1728  pour  Mad»  et  Maff^ 
d'Angervilliers  avec  l'arrest  d'enregistrement  du  Conseil 
d'Alsace. 

Lettres  d'investiture  pour  Mad"'  d'Angervilliers,  de  1728, 
STec  les  actes  de  devest  de  M.  et  M"'  d'Angervilliers. 

1728.  —  Arrest  du  Conseil  d'Alsace  de  1728,  pour  pres- 
tation de  kf  et  hommage  de  M.  d'Angervilliers,  de  1738. 
(A  Mad*  la  Duchesse  de  Ruffec) 

Janvier  i788.  ^  InrestHure  pour  H"*  la  Duchesse  deRuf- 
fec  dudit  fief,  de  janvier  1738. 

1745.  —  Enregistrement  desdites  lettres  au  Parlement  de 
Paris,  le  23  décembre  1745. 

Arrest  d'enregistrement  du  Conseil  d'Alsace  du  16  sep- 
tembre des  lettres  d'investiture  de  1728. 

Arrest  d'enregistrement  du  Conseil  d'Alsace  du  2  décembre 
des  lettre  dlnvestiture  de  1728,  accordées  ftlf  ad"*  d'Ange^ 
Tilliers  avec  la  prestation  de  fcaj  et  hommage,  au  nom  de 
H.  le  président  de  Maison. 

Arrest  d'enregistrement  du  Conseil  d'Alsace  des  lettres 
patentes  de  1738. 

*  Ce  titre  se  trouve  à  la  nurse  sapérieure  de  U  pièee,écrit  d'une  autre 
maiii. 


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ANCIBMMI  SBlOMBDBm  BU  BâM-DKArROCHB 


3él 


S8  mai  1786.  —  Reprise  du  ûef  &it  au  Conseil  d'Alsace 
par  M.  de  Huifec,  du  â8  mai  1786. 

Je  reconnais  que  les  pièces  cy-dessas  mentionnées  m'ont 
été  remises  par  M.  de  Montrenil  à  Strasbourg,  an  8*  aoost 
1748. 

Signé  sur  Tortginal  :  D^ANeramms  ns  Roftic. 


Les  documents  les  plus  anciens  se  trouvent  dans  le  grand 
registrt  dont  nous  avons  parlé  et  qui  forme  la  seconde  source 
à  laquelle  nous  allons  maintenant  puiser. 

(Test  un  gros  volume  in-folio,  relié  en  parchemin,  conte- 
nant 829  feuillets  manuscrits  et  numérotés,  et  un  certain 
nombre  d'autres  feuillets  restés  en  blanc  L'écriture  parait 
être  de  deux  on  trois  mains  différentes. 

Ce  recueil  a  été  commencé  lorsque  M.  le  baron  de  Dietrich 
entra  en  possession  du  comté.  Son  homme  d'affiiires  a  reçu 
les  titres  originaux  des  mains  d'un  M.  de  Klinglin  \  dès  le 
mois  de  mai  1771,  et,  après  les  avoir  classés,  les  a  fait  tra- 
duire et  copier.  Mais  ce  livre  ne  porte  point  de  signature  de 
son  auteur. 

Au  commencement  se  trouve  un  répertoire  général  et 
détaillé  de  toutes  les  pièces  contenues  dans  le  volume.  Nous 
n^  donnerons  que  ce  qui  concerne  le  classement  des  originaux 
en  quatre  parties. 

*  C'est  sans  douta  un  membre  de  la  ikmille  da  fiunemc  préteur  royal 
de  Strasbourg,  FrançoifrJoseph  de  Klhigliii,  diegraeié  et  mort  snbitemeot 
en  1752,  et  qui  lui-même  avait  été  fundô  de  pouvoirs  du  sieur  d'Anger- 
villiers,  à  l'eifot  de  prêter  pour  lui  foi  et  hommage  au  Roi,  à  Colmar,  en 

1728. 

Voir  quelques  délails  sur  la  famille  de  Klirirrliii  dans  un  article  publié 
par  M.  Etienne  Barth,  dans  le  IV«  tome  de  la  Revue  d'Alsace,  1873, 
page  548. 


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343 


RBVUE  d'ALSAOB 


AYertissement  ou  abrégé  du  présent  Recueil 

LeB  titres  contenus  an  présent  recueil,  traduits  tant'  snr 
des  originanz  qoe  sur  quelques  projets  informes,  ont  été 
distribués  en  quatre  parties. 

(Nonu  —  Ces  originaux  aux  projets  m'ont  été  remis  le  18  Mai  1771 
par  M.  de  KUnglin.) 

Ckmknu  ék  la  1r  partie 

Nota.  —  J'ai  joint  les  originaux  de  cette  V  partie  aox  autres  vieux 

documents*. 

La  première  partie  contient  des  transactions,  contracts  de 
vente,  règlements  entre  le  Seigneur  et  les  Communautés, 
lettres  d'investitures,  GolligQndes  et  renouveUements  des  reve- 
nus, reutes  et  droits  seigneuriaux.  —  Par  ces  documents  il 
appert  que  le  Bau  de  la  Roche,  autrement  la  Seigneurie  dite 
à  la  Pierre  (en  allemand  snm  6tetn),  était  on  fief  relevant  de 
l*£mplre,  et  que  la  dtme  tant  en  foin  qu'en  grains  à  Ober- 
elientaeim  relevait  en  flef  du  Laadgraviat  de  Néllenbourg, 
dépendant  de  la  maison  d'Autriche. 

Les  autres  titres  pourront  être  d'une  grande  utilité  pour 
faire  revivre  et  valloir  des  droits  Seigneuriaux,  qui  peut-être 
ont  été  négligée  par  le  long  laps  de  temps  et  par  les  guerres 
survenues  ou  qui  sont  ignorée  depuis  le  changement  de  domi- 
nation. 

Coniêm  de  h  partie 

Nota.  —  Les  originaux  de  celle  2«  partie  restent  rassemblés  en  liasse. 

La  seconde  partie  renferme  différents  écrits  touchant  la 
découverte  et  exploitation  des  anciennes  mines  et  ihiges  du 
Ban  de  la  Roche.  Le  foit  qui  en  résulte  est  qu'en  1668  l'fim* 
pereur  Ferdinand  sur  le  prétexte  que  le  Ban  de  la  Roche 
rdevait  en  flef  de  rAulriche  antérieure  et  que  le  droit  des 
mines  était  un  Régalien,  qui  ne  pouvait  compéter  qu  au  Sei- 

*  Cette  note  se  trouve  en  marge,  ainsi  que  les  antres  semblables. 


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ANOIBNMB  SBIQHEUBIB  DU  BAN-DE-L\-ROOHB  813 

gneur  direct,  envoya  à  cet  effet  des  commissaires  gur  les 
lieux;  le  S'  de  Rathsamhause  s'opposa  à  cette  prétention, 
exposant  qae  ladite  Seigneurie  avait  de  toat  temps  été  et 
éldt  encore  fief  immédiat  de  TEmpire,  que  eonséqnemment 
la  maiflon  d'Aatriche  n'avait  rien  à  y  prétendre;  ce  nonob- 
stant, ledit  Emperear  et  ensuite  Tarehidoe  son  fils  admodiè- 
rent  les  mines  en  question  au  prince  George-Jean,  comte 
Palatin  de  Yeldence,  à  qui  apparemment  elles  étaient  de 
quelque  convenance  utile. 

Ce  procédé  réveilla  les  S"  de  Rathsamhause  qui,  après 
avoir  fait  la  recherche  et  production  de  tous  leurs  titres,  dis- 
posèrent enfin  Tarchidnc  à  céder  et  à  désister,  de  manière 
qa*en  1580  ledit  eomte  Palatin  rononvella  son  bail  avec  eux 
et  révoqua  le  premier.  Cette  ferme  a  donné  Heu  à  plusieurs 
contestations  et  probablement  à  la  vente  dont  mention  s'en 
suit. 

ùmiUm  d»  ta  parUe 
îkntk.  ^rai  joint  les  originaux  aux  astres  titres  d^achat  delà  Seigneurie. 

En  1584  les  S"  de  Rathsamhause  vendirent  au  Comte 
Palatin  de  Yeldence  la  Seigneurie  du  Ban  delà  Roche  à  chargt 
par  lui  d'obtenir  sur  ce  l'agrément  de  l'Empereur  et  de  l'Em- 
pire, dont  ladite  Seigneurie  relevait  à  titre  de  fief  masculin. 
Gstte  vente  toi  faite  et  passée  pour  47,000  florins  dont  l'achep- 
teur  et  respectivement  débiteur  assigna  le  payement  sur  le 
Prince  de  Lorraine,  qui  lui  était  redevable  d'une  pareille 
somme  affectée  sur  la  Seigneurie  de  Pfaltzbourg,  ce  qui  fut 
accepté  par  toutes  les  parties  intéressées. 

En  le  Prince  de  Lorraine  consigna  ladite  somme  à 
la  monnaie  de  Strasbourg;  les  Ratbsambaose  la  reçurent  des 
mains  des  officiers  de  ladite  monnaie;  mais  ayant  trouvé 
qu'il  leur  était  encore  deubs  (dû)  quelques  arrérages  d'inté- 
rêts et  que  d'ailleurs  ce  remboursement  avait  été  M\  en 
espèces  si  hautes  qu'ils  y  perdaient  au  delà  de  la  mdtié,  ils 


844 


BEVUB  D*AL8ACB 


demandèrent  une  indemnité  à  Teffet  de  quoi  ne  pou?ant 
obtenir  du  prince  la  jastîce  qu'ils  dériraient,  ils  s'adreBsèrtnt 
tant  ao  Roj  de  Francs  et  an  cardinal  Richelieu,  qa*à  l'arclii- 
due  d'Autridie  et  au  comte  de  Véldence,  pour  qu'il  leur  plût 
octroyer  dee  lettres  dlntercearion  ;  mais  toutes  oes  démarches 
et  solLicitationa  sont  deyenues  infruetuenses. 

Contenu  de  la  4°'  partie 

jfyftj^  —  J'ai  Joint  les  originaux  de  cette  4"  partie  à  la  procédure  conUe 

les  Ralhsrtmhausen. 

Outre  ce  désagrément,  lesRathsamhause  ont  encore  essuyé 
celui  de  se  Toir  assignés  au  Gons^  aulique  à  la  requête  du 
Comte  de  Veldence,qui  prétendit  qnils  avaient  malapropoa 
fendu  et  qulls  retenident  arec  une  pareille  injustice  plusienra 

fonds,  terres  et  revenus,  faisant  partie  de  la  Tente  de  1584. 
L'Empereur  nomma  pour  commissaires  ou  examinateurs  de 
cette  discussion  le  prince  de  Wtlrtemberg  et  le  comte  de  Ri- 
beaupierre  :  par  devant  qui  les  parties  produisirent  leurs 
pièces  d'écritures  et  contestèrent  spéciatement  sur  la  division 
et  distraction  de  l'allodial  d'aTOC  le  féodal  ;  il  ne  parait  cepen- 
dant point  qu*il  soit  h  cet  égard  interrenu  aucun  jugement 
définitif: 


Ici  se  trouTO  la  t  Table  des  pièces  et  titres  contenus  au 
présent  recueil  >,  au  nombre  de  90  :  28  pour  la  1**  partie, 
S6  pour  la  seconde,  15  pour  la  troisième  et  87  pour  la  qua- 
trième. Cette  table  n*est  qa*nne  énumécation  des  en-tête  de 
chaque  pièce  avec  les  dates,  tels  que  nous  les  donnons  avec 
les  pièces  elles-mêmes. 

E.  DiETZ, 


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DOCUMENTS 

POUR  SERVIR  A 

LA  NUMISMATIQUE  DE  L'ALSACE 


N«  5 


V 

Deui-ioamois  de  la  ville  de  Thauu 

PAR 

le  D'  Arnold  XiOBchin 


{Traduction  littérale) 


A  la  même  ccillection  de  laquelle  émane  la  magnifique  mé- 
daille du  oomte  Gharles-Loais  de  Salz,  que  nous  avons  décrite 
dans  le  précédent  cahier  de  la  Smnu  mmimaHquet  appar- 
tient aossi  llntéressante  monnaie  qui  ibrme  la  matière  de 
cet  article.  Elle  n'est  pas,  à  la  Térité,  MdUe,  pour  parler  le 
jargon  ordinaire  des  numismates,  mais  néanmoins  inconnu^ 


346 


RISVUE  D'ALSAOR 


et,  en  tous  cas,  jusqu'à  une  prochaine  trou?aille,  une  rareté 
de  premier  ordre. 

Le  savant  bénédictin  de  Saint-Biaise,  dans  la  Forêt-Noire, 
le  P.  Marqnart  Herrgott,  qal  a  publié  le  premier  cette  pièce 
au  siècle  dernier  \  la  place  parmi  les  produits  de  Tatelier 
monétaire  de  Léopold  m  d*Ântriebe;  Toici  ce  qo*ll  en  dit  : 

Epigraphe  huius  monetœ  sichabct  :  f  LEOPOLDI  DVX: 
AVSTRIvE.  Parmulam  Austri a  cing'it  insigne  Draconis,  quod 
prius  pro  laurea  habcbatur,  et  memoriam  ordinis  T)raconict 
seu  Draconitarum  a  SIGISMVNDO  Hun^.  et  Roh.  Rege  insti- 
tué perennat  ut  nuper  a  Revercndiss.  SMITERO,  comen- 
datore  Ord.  Melitens  et  metropolitanœ  Ecclcsice  Viemms  : 
Canonico,  edocti  suimus,  qui  in  litteris  ad  nos  datis  multa 
de  primis  Ordinis  huius  Equitibus,  et  insigniis  praeclare 
dissent.  —  In  postica  effigies  S.  THEOBALDI  initrati,ca- 
pite  nimbo  cincto,  dextra,  quasi  benedicensis,  elata,simstra 
pedum  tenentis,  cum  inscriptione  S.  TH£OBALDVS  :  in 
imo  scutum  Austrtacum, 

Muséum  San-Blasianum.  —  Arg.  Pond.  J.  Den. 

Pendant  les  cent  vingt-deux  ans  qui  se  sont  écoulés  depuis, 
celte  monnaie  tomba  de  nouveau  dans  l'oubli,  c'est  pourquoi 
elle  manque  dans  l'estimable  recueil  de  Berstett  sur  la  numis- 
matique de  l'Alsace.  Cette  circonstance,  aussi  bien  que 
certaines  inexactitudes  qu'on  peut  relever  dans  Tancienne 
description,  m'autorisent  à  revenir  sor  ce  sujet 

Je  me  servirai  dn  môme  exemplaire  qae  Herrgott  avait 
acquis  de  M.  de  Schwandtner  pour  la  collection  dn  chapitre 
de  Saint-Blaîse,  et  qui  pins  tard  a  passé  avec  celle-ci  à  Saint- 
Paul,  dans  le  Lavantlhale  (Basse  Carinthie). 

Avant  tout,  quant  à  ce  qui  regarde  laltribution  de  cette 
monnaie  à  Thanu.  en  Alsace,  elle  est  certainement  fondée. 

Dans  U  splendide  ouvrage  :  ilonumenta  Auguslœ  domns  AnMica: 
(1750-72,  4  tomes  en  sept  parties  iii-folio],  Tomus  II,  pars  /«,  Pl.  VU, 


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ÉTDDB  SUR  LES  MONNAIES  ALSACIIMMBB 


347 


Saint-Thiébaud  comme  iwtron  de  la  ville  et  l'écu  à  la  fasce 
d'Autiicbe  ne  laissent  aueon  doute  à  cet  égard.  Si  on  attri- 
buait celte  pièce  à  Vicence,  en  dépit  de  son  aspect  général,  il 
ikudrait  aoppoeer  d*abord  la  présence  de  Timage  et  da  nom 
da  Saint  sur  des  monnaies  de  cette  Yllle  au  moyen-âge,  ce 
qui,  jusqu'à  présent,  à  ma  connaissance,  ne  s'est  pas  encore 
rencontré  Par  contre,  il  s'agit  de  savoir  quel  est  le  duc 
Léopold  d'Autriche  dont  il  est  question  dans  la  légende,  car 
il  y  a  deux  princes  de  ce  nom  qui  se  suivirent  immédiate- 
ment sur  le  trône  :  Léopold  III  ou  le  Preux,  qui  tomba  à 
Sempacb,  en  1886,  et  son  fils  Léopold  IV  (aussi  appelé  le 
Superbe,  1 1411). 

Un  premier  indice  nous  est  fourni  par  les  lettres  X  et  a, 
qui  paraissent  dans  la  légende,  si  on  les  compare  avec  les 
lettres  similaires,  usitées  tout  près  de  là  pour  les  tournois  des 
ducs  de  Lorraine  et  leurs  subdivisions.  On  obtient  le  tableau 
suivant  : 

X         E  a 

Raoul,  1 1846   rare     fréquent  — 

Jean  I«  (1846-1890)   >  >  rare 

Charles  I"  (1890-1491)  . . .  fréquent     rare  fréquent 

Ce  qui  permet  de  conclure  que  la  pièce  en  question  de  l'ate- 
lier de  Thaun  doit  être  attribuée  avec  beaucoup plus  de  vrai- 
semblance à  Léopold  IV  qu'à  son  père. 

'  Dans  le  Verzeichnisis  der  fleiligm  der  Munzen,  un  des  rares  appen- 
dicos  ati  nroschenkabàiel  do  Joachim,  paru  en  17-16,  on  lit  à  la  page  21  : 
«  Theobaldus,  ormite  do  Vicence,  en  Italie,  t  106().  Sur  les  monnaies  de 
Thann  »,  ce  qui  a  fait  croire  à  ilcrrgott  que  ta  Saint  ligarait  sur  les 
momuies  des  deux  villes  en  question.  Au  reste,  le  patron  do  Tbana 
n'est  pas.  comme  le  témoigne  son  signalement,  ee  dernier  ermite  (dont 
lafêtecoîDcideavec  leThéoliaIdiis,confe8sear,le3octobre),  mais  nnéréqne 
dont  la  fête  est  célébrée  le  1*''  juillet  dans  les  diocèses  de  Constance, 
Bàle  et  Trêves.  —  Sur  le  culte  de  Saint-Thiohand  ;i  Thann.  cf.  Revue 
d'AUace,  2«  année,  nouvelle  série,  J873.  Les  Origines  de  Thann,  par  X. 
Mussniann  (Note  du  traducteur). 


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848 


BBVUB  O'ALSàGE 


Ce  qui  aide  encore  à  Oxer  la  date  de  la  pièce,  c'est  la  figure 
énigmatiqne  de  l'avers,  qui  entoure  les  armes  de  l'Autriche. 
Herrgott  y  voit  une  couronne  de  lauriers,  pour  moi,  ce  sont 
les  iosignes  à'vM  ordre  de  chevalerie,  ceux  du  Dragon  de 
HoDgrie.  Si  ma  snpposltioD  est  juste,  la  probabilité  derient 
une  certitude  que  te  demi-tournois  appartient  bien  au  duc 
Léopold  ly  et  non  à  son  père,  puisque  la  fondation  de  cet 
ordre  est  contemporaine  du  règne  du  fils. 

Il  est  vrai  que,  sur  ce  point,  les  opinions  sont  partagées, 
puisque  plusieurs  sont  d'avis  que  Sigismond  avait  fondé  l'or- 
dre du  Dragon  à  la  fin  de  novembre  1385,  à  l'occasion  de  son 
mariage  avec  Marie  de  Hongrie.  Mais,  dans  ce  cas,  jusqu'à  la 
bataille  de  Sempach  (9  juilletl886),  il  n'y  aurait  qu'on ioter- 
Talle  de  quelques  mois,  et  il  fondrait  admettre  qu'après  avoir  . 
été  honoré  de  Tordre,  Léopold  n*a  rien  eu  de  plus  pressé  que 
de  le  reproduire  immédiatement  sur  les  monnaies  des  pays 
antérieurs  de  T Autriche.  Aussi,  si  l'on  tenait  absolument  à 
cette  attribution,  serait-il  beaucoup  pins  naturel  de  voir  dans 
cette  figure  une  tresse,  du  moment  qu'on  sait  que  Léopold  U 
appartenait  à  la  société  de  la  Tresse  fondée  par  son  frère 
Albert  in,  et  qu'il  est  représenté  avec  cet  ornement  sur  de 
vieux  Tîtrauz.  Seulement,  on  peut  objecter  que  cette  tresse, 
même  si  eUe  était  en  cheveux,  était  enfermée  dans  un  four- 
reau droit  et  raide,  en  cuir  ou  en  métal,  et  qu'il  n'aurait  pas 
été  possible  de  lui  foire  contourner  Téeusson. 

Mais  je  doute  beaucoup  que  l'ordre  en  question  du  <  Dragon 
renversé  ou  vaincu  »  remonte  à  1885;  je  m'en  liens  bien 
plutôt  à  l'autre  donnée,  d'après  laquelle  Sigismond  l'a  fondé 
en  1387,  à  l'occasion  de  son  couronnement  (31  mai)  comme 
roi  de  Hongrie.  A  cette  époque,  il  fut  lui-même,  à  peine  ftgé 
de  22  ans,  promu  chevalier  par  le  député  vénitien  Pantaléon 
Barbo,  et,  à  cette  époque,  les  circonstances  étaient  de  nature 
à  expliquer  l'allusion  assez  siguiflcative  que  renferment  les 
insignes  de  l'ordre,  qui  sont  un  dragon  vaincu  avec  les  ailes 


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£TUDX  sur  lis  HONMAISb  ALSACIEMMBS  349 

paralysées.  Le  prétendant  Charles-Robert  était  mort,  la  r(Mne 
Mark-  délivrée  (4  juin)  ;  les  résislances  généralement  dump- 
iées  ;  par  sou  couronnement,  Sigismond  était  devenu  roi  légi- 
time  de  Hongrie.  —  Donc  la  monnaie  lie  peut  appartenir 
qu'à  Léopold  IV,  poiaqae  l'ordre  du  Dragon  y  apparaît  Outre 
eela,  je  ne  pois  interpréter  les  sigles  incertains  L-A,  supposés 
par  Herrgottdans  le  champ,  et  qu*il  explique  p&rLaunaeum, 
Ils  font  partie  intégrante  dn  dragon  et  correspondent  peut- 
être  à  l'extrémité  des  ailes  et  des  pattes,  tandis  que  la  soi- 
disant  feuille  de  trèfle  serait  la  tète  du  monstre*. 

L'histoire  de  Léopold  IV  se  trouve  complètement  en  har- 
monie avec  la  conclusion  à  laquelle  nous  sommes  arrivé  par 
les  explications  précédentes.  Après  la  mort  de  Léopold  III,  le 
due  Albert  m  réclama  aussitôt,  comme  Talné  de  la  iSimillei 
la  tutelle  de  ses  neveux  Guillaume,  Léopold,  Ernest  et  Fré- 
déric, et  elle  loi  fbt  reconnae  sans  difficulté  par  le  doc  Guil- 
laume au  nom  de  ses  Irères.  Par  la  remarquable  charte  du 
10  octobre  1386.  le  duc  Guillaume  laLilia  premièrement  la 
prise  de  possession  de  la  succession  de  son  père  ordonnée 
pour  le  compte  du  duc  Albert,  en  déclarant  que  <  son  sei- 
gneur et  parent,  le  duc  Albert,  avait  accepté  sa  tutelle  et  celle 
de  ses  frères,  et  qu*il  prenait  à  sa  charge  leurs  domaines  et 
leurs  vassaux,  les  profils,  les  guerres  et  toutes  les  dettes 
passives  ».  Indépendamment  de  cela,  il  était  encore  stipulé 
que  le  duc  Albert  t  devait  entrer  en  possession  de  toutes  les 
principautés,  de  tous  les  domaines  des  mineurs,  de  leurs  pays 
et  de  leurs  vassaux,  les  administrer  et  gérer,  eu  user  et  jouir, 
en  agir  et  disposer  complètement  sa  vie  durant,  sans  que  ni 
le  duc  Guillaume,  ni  ses  frères,  ni  leurs  héritiers,  ni  leurs 

'  Sur  bfoadation  del'ordre  du  Dragon,  cf.  Gebhabdi,  6«n.  Gesch  ichte 
der  erblichen  !leichsstœnde  in  DeiUschland,  t.  II.  p.  48  et  sq.—  P.  IIyp. 

Heliot.s,  Histoire  des  ordres  tvmnsticjues  religieux  et  militaires  et  des 
congrâjations  )>t'culièrcs,  t.  VIII,  cliap.  LI,  p.  395  et  seq.  Paris,  1721.— 
Ailleurs,  il  est  aussi  question  dans  le  Testament  de  F.  de  Pozzo,  de 
Vérone^  de  Uatiilmee,  en  1387,  des  mOttet  étoeoniTi, 


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350  REVUS  d'alsacu 

états,  ni  leurs  vassaux,  ni  qui  que  ce  soit  puissent  jamais  y 
faire  opposition  ou  attaquer  la  concession  en  aucune  manière. 
Et,  de  même,  quand  uous  aurons  atteint  Page  de  seize  ans, 
nous  serons  en  droit  de  réclamer  notre  part  conformément 
anx  actes  de  partage,  qui  doireat  être  maintenus  dans  toutes 
leurs  dispositions  »,  etc. 

En  vertn  de  son  droit  de  tutelle,  le  duc  Àlliert  III  pouvait 
donc  accorder,  en  l'an  1887,  en  tout  droit  et  justice,  aux 
bourgeois  de  sa  ville  de  Than  nie  privilège  de  frapper  et  fondre 
à  perpétuité  notre  monnaie,  <  avec  la  taille  et  avec  tous  les 
droits  dont  jouissent  nos  autres  villes  d'Alsace  et  deSundgau, 
et  de  posséder  et  gérer  le  change  avec  tous  les  droits  que  la 
justice  et  la  coutume  comporte,  sans  iraude  ^  >. 

Peu  après,  le  duc  Léopold  IV,  ayant  atteint  sa  majorité 
(il  était  né  en  lS7i),  réclama  sa  part  de  Théritage  paternel, 
et  obtint  les  pays  antérieurs,  où  il  établit  sa  principale  rési- 
dence pendant  la  première  moitié  de  son  règne.  Ainsi  c'est 
à  Thann,  entr  autres,  que  se  conclurent  les  importantes 
négociations  relatives  à  l'engagement  de  la  seigneurie  de 
Badenweiler. 

Nous  trouverons  également  sur  la  date  d'émission  de  cette 
monnaie  quelques  points  de  repère  plus  précis.  Peu  de 

semaines  avant  que  le  roi  Sigîsmond  de  Hongrie  eût  prononcé 
sa  sentence  sur  la  guerre  fratricide  qui  avait  éclaté  après  la 
mort  du  duc  Guillaume,  au  sujet  de  la  tutelle  du  duc  Albert  V, 
le  duc  Ernest  se  fit  recevoir,  le  16  février  1 409,  avec  plusieurs 
nobles  autrichiens  et  styriens,  dans  Tordre  du  Dragon. 

n  s'agissait  pour  le  duc  de  se  ménager  un  rapprochement 
avec  le  roi,  et  il  s'engagea  avec  ses  hommes  liges  à  fiiire 
partie  de  <  la  Compagnie  du  Dragon  »,  parce  que  Sigîsmond 
avait  une  grande  prédilection  pour  l'ordre  quil  avait  créé, 

*  Daté  de  1387,  septembre,  à  Thann.  Voir  Schœpflin,  AUatia 
d^hmatka,  t.  U,  p.  S85,  N«  mo  {Ex  artkMo  TawnMtis  oppidi). 


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£TUDK  8U&  LES  MOMMAISS  ▲LSACIBNMSS  351 

car  les  autres  avantages  y  attachés,  comme  le  droit  de  juri- 
diction attribué  au  roi,  et  par  suite  au  duc,  dans  toutes  les 
querelles  où  un  chevalier  da  Dragon,  hoogrois  ou  austro  sty- 
rien,  pouyait  être  mêlé,  comme  ttmi  robligalioo  de  lui 
prêter  appui,  étaient  plas  importants  pour  les  snaerains  da 
pays  que  pour  les  prinoes  qui  reloTaienl  de  leur  directe. 
A  oette  époque,  en  effet,  le  duc  Léopold  Vf  ii*était  rien 
mohis  que  sur  un  bon  pied  avec  Sigismond,  et  le  duc 
Ernest  cherchait,  comme  je  Tai  dit  plus  haut,  à  opérer  sa 
réconciliation. 

Tout  au  coutraire,  si  nous  retournons  à  Tan  1405,  nous 
trouvons  justement  une  situation  politique  opposée.  Alors,  en 
effet»  c'est  le  duc  Léopold  IV  qui  conclut  a? ec  le  roi  Sigis- 
mond  une  alliance  offensive  et  défensive,  et  n'en  excepte  que 
le  roi  des  Romains,  Robert,  son  frère  le  duc  Frédéric,  enfin 
rarchevéque  de  Salzbonrg,  mais  non  ses  frères,  les  dncs 
Guillaume  et  Ernest.  C'est  alors,  ou  peu  après,  que  Léopold 
serait  entré  dans  l'ordre  du  Dragon,  dont  il  fit  représenter 
l'insigne  sur  la  monnaie,  probablement  pour  montrer  au  roi 
quel  prix  il  attachait  à  son  alliance;  circonstance  qui,  dans 
Tbistoire  monétaire  autrichienne  de  cette  époque,  autant  que 
je  sache,  ne  se  reproduit  pas.  Notre  pièce  doit  donc  par  cela 
avoir  été  émise  après  l*an  1405  et  avant  la  mort  subite  du 
duc  Léopold,  le  8  juin  1411  ;  et  nous  pouvons  maintenant, 
après  ces  préliminaires,  en  venir  à  une  description  et  à  un 
examen  plus  minutieux  de  la  pièce  : 

i  LaVPOLD».  D  —  VX:  AVSTRTE.  Dans  un  cercle 
quadrilobè  Técu  à  la  £aâce  d'Autriche  entouré  des  insignes 
de  Tordre  du  <  Dragon  vaincu  >. 

Rf  S.  THQO— BALDVS.  Le  saint  assis  en  costume  épis- 
ooiMd,  bénissant  de  la  noain  droite  et  tenant  de  la  gauche 
la  crosse  ;  à  ses  pieds  le  même  écusson  autrichien. 

Mod.  23.  Pds.  1,91  gr.,  tient  d'après  la  pierre  de  touche 
Mlothsdefin. 


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808 


BBVDB  D'AL8AGB 


D'après  la  râleur  nominale  primitive,  j'ai  lieu  de  croire 
que  la  pièce  est  un  demi-tournois  émis  à  trèwS  bas  titre.  Cette 
éTaluation  s'accorde  avec  le  poids  brut;  il  esfc  vnique  depuis 
longtemps  le  poids  de  fin  n*y  correspond  pas,  à  moins  que  la 
pierre  de  (onche,  qai  est  une  épreare  fort  incertaine,  B*ait 
donné  un  résultat  par  trop  fiioti£  Malhenreusement»  je  n'ai 
plus,  dans  ee  moment,  Toccasion  de  le  vérifier.  Si  la  pièce 
n'est  réellement  qu'à  9  loths  de  fin,  son  titre  (1,1  gr.)  atteint 
à  peine  1/8  de  celui  des  gros  ou  tournois  de  Strasbourg,  qui 
étaient  encore  en  1427  à  14  3/4  iolhs,  et  devaient  contenir 
8,1  gr.  de  ûn  \ 

Les  gnerree  dans  lesquelles  le  duc  Léopold  17  était  con- 
stamment engagé,  particulièrement  depnis  Tan  1461,  sa 
malheureuse  expédition  en  Ttalie,  et  surtout  ses  qumlles  STse 

ses  frères,  à  roccasion  de  la  tutelle  d'Albert  V,  expliqueraient 
suffisamment  le  titre  inférieur  de  la  monnaie;  ce  qui  con- 
stituait au  moyen-âge,  comme  on  le  sait,  une  mesure  finan- 
cière fréquemment  employée.  Cependant  ce  n'était  là,  pour 
les  l)ourgeois  de  Ttiann,  qu'un  léger  préInde  de  ce  qui  les 
attendait  sous  le  gouTemement  du  grand  iNiilli  bourguignon, 
Pierre  de  Eiagenbach,  en  1478  \ 

Il  me  reste  encore  à  signaler  une  contradiction  qui  semble 
ressortir  du  privilège  de  battre  monnaie,  baillé  è  Thann  par 
le  duc  Albert  TIT,  le  1"  septembre  1387,  quand  on  le  rap- 
proche de  la  grande  convention  monétaire  conclue  seulement 
treize  jours  plus  tard,  par  le  même  duc  arec  Téréque  de 

*  Die  Chroniken  der  Stœdle,  t.  IX,  Strasbourg,  p.  1005. 

'  Cf.  Dans  la  Chronique  bernoise  du  greflier  de  justice  Diepold  Schil- 
ling» le  ehapitre  intitnlé  :  <  Comment  Hagenbacb  a  fait  décapiter  certains 
nofâbles  de  Thann,  de  ion  ehef  et  sans  antre  forme  de  procès,  et  comme 
il  a  laissé  leurs  cadavres  gisant  dans  les  mes  pendant  plnsienrs  jours.  * 
Il  avait  ordonné  leur  supplice,  parce  qu'ils  lui  avaient  fait  des  représen- 
tations sur  l'imposition  du  mauvais  denier  et  sur  les  autres  charges  dont 
il  les  avait  frappés,  contrairement  à  leurs  franchises  et  à  leurs  bonnes 
coutumes. 


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ÉTUDE  SUE  LES-  M0NNAIB8  ALSAdENNSS  858 

Strasbourg,  les  comtes  de  Habsbourg-Laufenbourg,  Kybourg, 
NeueIlboll^«,^  etc.,  étendue  plus  lard  aux  Tilles  saieses. 

Dans  cette  convention,  Thann  est  nommé  non  comme  ate- 
lier monétaire,  mais  seglement  eomme  un  des  lieux  où  les 
pfennings  à  10  loths  des  seignenrs  et  Tilles  contractants 
doTaient  aTOir  libre  cours'. 

En  admettant  qoe  la  date  des  deux  docaments  soit  exacte, 
on  ne  TOit  réellement  pas  comment  expliquer  pourquoi  le 
duc,  peu  de  jours  seulement  après  avoir  accordé  le  droit  de 
monnayage,  aurait  omis  de  mentionner  l'atelier  monétaire 
qu'il  venait  de  fonder  à  Thann.  On  serait  presque  tenté  de 
supposer  une  erreur  de  copie,  ou  une  &Qte  d'impression 
dans  la  date  de  l'un  on  de  l'autre  document,  et  d'admettre 
que  le  prîTilége  n*ait  été  accordé  qu'en  i888  ou  1889,  ou 
Wee,  ce  qui  est  plus  probable,  que  la  conTention  monétaire 
datée  du  18  du  mois  de  septembre  1887,  peu  de  mois  après 
la  bataillede  Serapach,  ait  été  conclue  avant  le  jour  de  Saint- 
Gilles  de  Tau  1387,  parce  qu'il  y  a  lieu  de  croire  que  c'est 
précisément  cette  convention  qui  a  donné  lieu  aux  bourgeois 
de  Tiiann  de  réclamer  de  leur  duc  le  droit  de  battre  mon- 
naie. 

Cet  atelier  de  Thann  a-t-il  pris  naissance  dès  le  XIV*  siècle 
et  est-il  resté  entre  les  mains  des  bourgeois?  C'est  ce  qu'on 
ne  saurait  dire.  D'après  la  frappe  de  la  pièce  eo  question, 
il  est  plus  probable  que,  sous  le  règne  du  duc  Léopold  IV, 

Tatelier  fut  géré  par  ses  officiers.  Cela  s'accorderait  avec  l'as- 
sertion de  Berstett,  qui  dit  que  la  ville  n'a  commencé  qu'en 
1418  à  frapper  des  monnaies  spéciales,  en  y  employant  l'ar- 
gent qu'elle  tirait  des  ricbes  mines  de  la  Tallée  de  Saint- 
Amarin. 

M.  le  protoeur  Luschin  a  eu  TobUgeance  de  m'adresser, 
en  date  du  26  novembre  1876,  quelques  renseignements 

'  Cf.  II.  Meyeb,  Du  BracUaten  dir  Schweù,  p.  10. 
Nouvelle  Série.  -  7-*  Année.  S3 


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354 


BSVUB  ]>*ALBACB 


complémentaires  pour  lliiléressaiit  article  doul  on  vient  de 
lire  la  traduction  : 

c  L'ordre  du  Dragon,  tel  qu'il  est  représenté  sur  notre 
monneie,  se  retrouTe  encore  absolument  semblable  sur  les 
sceaux  d*Emest»  due  d'Autriche,  des  années  140S,  1404^1408, 
et  d*Albert  lY,  de  1S96.  On  en  trourera  tes  copies  fidèles  dans 
les  MUeiâUuinffm  der  k,  k.  OsnM'Commisskmgur  BrkaUung 
der  Baudenhinale,  t  XII,  p.  184,  et  t.  XllI,  p.  18S«  Yienne, 
1867-1868. 

t  La  preuve  que  le  duc  Léupold  IV  était  chevalier  de 
Tordre  du  Dragon  dès  1394  résulte  du  Codex  existant  aux 
archives  de  Vienne,  sous  le  n"  473  :  Si.  Chrisiophori  cm 
Ariperg  Bruederschc^i-Buech,  qui  donne,  fol.  8  et  9,  les  armes 
du  due  Léopold  IV  arec  les  insignes  de  l*ordre  du  Dragon  et 
la  dale  de  1394.  > 

Arthur  Enoel. 


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ÉTUDE 


SUR 

QUELQUES  POINTS  OBSCURS  OU  CONTROVERSÉS 

DB 

L'HISTOIRE  DE  SAINTE-MARIE-AUX-MINES 

odtô  d'A]8aoe 


Fm. 


Dans  le  milieu  d  avril,  I^Eglise  française  de  Strasbourf 
qui  s'arrogeait  une  façon  de  droit  épiscoï»!  sur  les  églises 
réformées  d'alentour,  fut  avertie  par  PigoB  et  par  deux  anctens 
que  les  frères  d^Eschery  étaient  grandement  trooblés.  Aussitôt 
elle  dépêcha  sur  tes  lieux  deux  commissairas  pour  infor- 
mer. 

C'était  Jérôme  Zanehins,  savant  théologien  italien,  devenu 
chanoine  de  Saint-Tbomas,  un  modéré  du  temps,  inventeur, 
pour  le  compte  des  prolestants,  de  l'usage  des  restrictions 
mentales,  et  qui,  peu  après,  fut  obligé  de  quitter  la  place  pour 
aller  vivre  à  Chiaveniia,  alors  dans  les  Grisons;  il  était  accom- 
pagné de  Jean  6arnier,a?ignonnais,  dont  Théodore  de  Bèse  lui- 
même  biftmeleaôle  trop  ardent.  Gesétranges  assoeiés  firent  une 
Arte  d'enquête  à  Sainte-Marie,  puis  se  rendirent  au  (ihfttean 
de  Ribeauvillé»  où  ils  dressèrent  rapport  de  ce  çu'ils  avaient 
•pprîs,  îe  tout  pour  servir  de  guide  au  •  Baro  •  de  Ribaupierre, 


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3^6 


BBVUE  D*At8ACB 


Us  reconnaissaient  que  Baue  s'était  rendu  impossible,  mais 
rejetaient  la  responsabiUté  da  déclin  de  i'Ëi^ise  d'fiâchery 
snr  le  prédicateur  da  Pré,  Nicolas  François,  dont  les  sarcasmes 
ne  tarissaient  pas  sar  le  compte  de  Torganisation  calviniste. 

Il  fallait,  selon  eux,  pour  porter  remède  à  ces  maoz  :  !•  Don- 
ner à  Arnauld  Bauc  son  congé  définitif:  2"  Obtenir  de  l'Eglise 
de  Metz  qu'elle  consentît  à  envoyer  à  Sainte-Marie  Pierre  de 
Cologne,  homme  docte,  de  caractère  concilituit  et,  de  plus, 
maître  des  deux  langues  parlées  dans  le  val  Si  les  Messins 
se  décidaient  à  se  priver  des  services  de  leur  ministre,  Figon 
irait  le  remplacer;  sinon,  Figon  demeurerait  dans  sa  place 
actuelle;  8*  Le  prédicateur  du  Pré,  n'ayant  pas  nomination 
définitive,  serait  averti  qu'il  eUt  à  changer  de  ton  ou  à  sa 
retirer  (10-14  avril  1562).  On  le  voit,  les  deux  partis  allaient 
s^unir;  tout  présageait  un  accomodement,  aux  dépens  des 
calvinistes  purs  satisfaits,  d'autre  part,  par  la  destruction  des 
images  du  Pré.  Cependant,  l'empereur  devenant  pressant,  il 

*  VEncyclopédie  de  M.  Lichtenberger  ne  fait  nulle  mention  de  PUm 
de  Cologne.  Il  était  né  à  Gand  et  s'appelait  m  réalité  Van  Gealeo.  Son 
précepteur  le  nomma  Colonins,  qai  fut  mal  entendn.  Il  fal,  snr  la  recom- 
mandation de  Robert  Estienne,  avec  qui  il  était  fort  lié,  admis  an  Cénacle 
de  Genève,  où  Calvin  et  de  Bèze  mirent  la  dernière  main  à  son  instnic- 
tion.  Clcrvaut  remmena  dt?  C.enève  et  le  plaça  à  Metz  en  qualité  de 
nnnistre,  en  lô.'iH.  Tour  n  tour  pors/'cuté  ot  autorisé,  honoré  et  empri- 
sonné, Pierre  de  Cologne,  après  la  destruction  del  Eglisede  Metz  (1569), 
se  léftigia  à  Hoidelberg ,  où  il  prèeha  en  allemand.  Il  moorat  dans  cette 
Tille»  «  à  la  fleor  de  l'ftge  »,  dit  Bayle.  Il  laissait  on  fils»  qui  devint  pro- 
fesseur à  Leyde,  et  une  fille  qui  fat  mère  du  célèbre  orientaliste  Louis 
de  Dieu. 

On  a  de  Piorro  de  Colopne  diverses  traductions  de  l'allemand  et  du 
latin,  presque  toutes  relatives  à  la  (|uesliorj  do  la  cène.  Son  principal 
ouvrage  est  une  apologie  de  la  confession  d'Augsbourg,  bien  entendue, 
touchant  le  mdme  point  Ce  livre,  ainsi  qu'une  réplique  à  un  pampblst 
de  l'évèque  de  Mets,  Beaueairede  Pegnillon,  est  de  1566.  Il  fiit  Imprimé 
à  Genève,  chez  François  Perrin,  que  Colonins  avwt  appris  à  connaîÉB 
;\  Sainte-Marie,  où  il  résida  et  impriina.Deux  exemplaires  seulement  sortis 
des  presses  de  notre  valU-o  subsistent,  dit-on,  et  sont  conservés  à 
Uruxellcs. 


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mSTOUtB  DE  SADmS-HABIBpAUZrlIINBS 


867 


importait  d'aviser.  Les  délégués  de  la  bourgeoisie  et  ceux  de 
h  KnappschaJJt  rureni  réunis  (juin  156âJ  à  la  maison  de 
justice  de  Sainle-Marie,  afin  de  délibérer,  en  présence  d'Ijgae- 
nolphe,  sur  la  réponse  à  donner  à  Ferdinand. 

Le  seigneur  de  Ribaupierre  commença  par  déclarer  que, 
personnellement,  il  était  prêt  à  tous  les  sacrîGces  pîutôl  que 
de  renier  sa  foi  et  de  donner  nux  fidèles  le  scandale  d'une 
restauration  de  Tidolâtrie.  Les  assistants  se  partagèrent:  les 
uns  opinèrent  pour  qu'on  se  montrât  fort  tolérant  dans  les 
affaires  purement  extérieures  (adiaphora  bnb  aJUttelbing).  Ils 
jugèrent  qu^il  fallait  remettre  en  pJaoe  les  objets  sortis  de 
l'Eglise,  en  que  l'on  pou?aît,  au  demeurant,  sans  scandale,  ni 
péché  aucun.  Les  autres  alléguèrent  qu'en  agissant  de  la 
sorte,  on  avait  à  craindre,  non  seulement  de  commettre  un 
acte  d'idolâtrie^  mais  encore  de  troubler  les  foibles  dans  la 
foi  et  de  fortifier  ainsi  le  parti  des  papistes.  Après  une  lonj,ue 
discussion,  on  se  décida  à  remettre  Taulelen  sa  place  primi- 
tive, seulement  on  supprima  le  cruciûx  pour  le  remplacer  par 
un  tableau  représentant  la  cène  et  la  mise  en  croix;  on  mit 
le  baptistère  eu  lieu  réputé  convenable,  et  le  tabernacle  reçut 
une  destiDalion  DOUTelie;  on  en  fit  un  tronc  pour  recevoir  les 
collectes  et  les  aumônes.  Apt-ès  quoi  Ton  écrivit  à  l'empereur 
que  fout  était  remis  comme  devant  La  Régence,  apaisée  par 
ce  semblant  de  soumission,  se  montra  satisfaite  et  exigea 
seulement  le  n»nvoi  définitif  des  anabaplisles,  calvinistes  et 
antres  sectaires  réfugiés.  Des  mandats  imprimés  furent  publiés 
en  conséquence,  mais  Ejruenolphe  réussit  encore  à  tourner  la 
difTiculté.  Il  lança  lui-même  un  édil,  par  lequel  il  interdit  à 
tout  hôtelier  ou  bourgeois  de  loger  quelqu'étranger  non  muni 
d  une  permission  spéciale  et  dépourvu  de  papiers  en  règle, 
déiirréspar  les  autorités  de  sa  dernière  résidence.  Figon,  peu 
après,  partit  ponr  Badonvillers  ;  il  fut  remplacé  par  Nicolas 
François,  qui  signa  une  vague  confession  de  foi,  n  engageant 
à  rien  de  bien  précis.  Il  semble  quels  danger conaraun  rendit 


358 


REVUB  D*ALSAGB 


Allemands  et  Français  plus  traitables;  on  peat  mdme  roir 
par  les  registres  de  baptême  que  —  chose  inouïe  I  —  on  flarr 

Joseph,  successeur  inconnu  de  Hoger,  servit  un  jour,  par 
procuration,  il  est  vrai,  de  parrain  k  un  enfant  calviniste! 

Durant  de  longues  années,  les  seigneurs  de  Ribaupierre 
parvinrent  à  empêcher  sur  leurs  terres  l'exécution  du  man- 
dat de  religion  applicable  à  tous  les  pays  antérieurs  d'Au- 
triche. Malgré  les  réclamations  presque  incessantes  des  cou- 
eelUers  de  la  Régence,  ils  continuèrent  à  donner  asile  aux 
(tagitifr  Tenus  de  France  et  de  Lorraine.  Il  est  mi  que  cette 
lutte  d^adresse  engagée  par  Ëguenolphe  contre  les  ordres  de 
son  souverain  faillit,  à  plusieurs  reprises,  détenir  pour  lui 
fort  dangereuse.  Ainsi,  un  ministre,  Tfiomas  Buyrette,  jadis 
pasteur  à  Lyon,  réfugié  ensuite  en  Savoie,  où  il  parvint  à 
intéresser  à  son  sort  le  comte  palatin  du  Rhin,  Christophe, 
duc  de  Bavière,  fut  recommandé  par  celui-ci  à  Ëguenolphe; 
mais  il  dut  être  renvoyé»  ses  prédications  —  probablement 
trop  calrinistes  —  risquant  d'entraîner  des  troubles.  Vaine- 
ment  son  protecteur  intercéda  pour  lui  :  •  Quoique  rous  ayei 
encore  permis  et  en  partie  enjoint  k  quelques-uns  de  fos 
yassaux,  bourgeois  et  chrétiens  de  l'église  d*Eckerlch  d'établir 
et  recevoir  un  ministre  particulier...,  nonobstant  toutes 
prières  et  supplications,  l'église  du  lieu  a  été  et  est  restée 
fermée  jusqu'à  ce  qu'il  ail  été  envoyé  en  dernier  lieu  auxdils 
chrétiens,  contre  leur  gré,  un  ministre  du  comté  de  Monlbé- 
liard,  qui  a  déjà  une  cure  à  desservir  et  qui,  à  raison  de  sa 
doctrine....  n'est  point  propre  an  ministère   (lettre  de 
Christophe  à  Ëguenolphe,  datée  de  Hddelberg,  S5  janvier 
1569)  ».Les  églises  d'Bscbery  et  de  Saint-Biaise^  celle-ci  récem- 
ment affectée  au  culte  réformé,  furent  fermées  pour  quelques 
mois.  La  lettre  du  duc  Christophe  tendrait  à  faire  croire  que 
le  successeur  de  Buyrette,  désigné  comme  ministre  de  Mont- 
béliard,  professait  des  doctrines  luthériennes  :  cela  est  au 
moins  peu  probable  ;  je  crois  plutôt  qu^Ëgueooipbe  mit  tu 


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HVtTOIBB  OB  aAIMTB-lCARlB-AUX-lIlNBS  859 

pratique  les  conseils  que  lui  avait  donnés  son  beau-père  en 
1561.  Un  autre  pasteur  du  yal,  nomme  Jean  Haran,  «  lequel 
n'était,  ni  de  PaoJ,  ni  d'Apollon,  ni  de  Calvin,  ni  de  Zwingle, 
mais  de  Christ  »,  fut  eité  devant  la  Chambre  d'Ensisheim 
(1578)  pçur  avoir  prêché  et  baptisé  au  Bonhomme.  Il  se  tira 
dn  danger  en  rejetant  tout  sur  les  suggestions  d'Eguenolprie 
et  se  faftta  de  quitter  le  pays  en  déclinant  par  lettre  les  hon- 
neurs du  martyre. 

Ce  ne  fut  qu'après  la  mort  d'Eguenolphe,  sous  la  minorité 
de  son  nis  Eberhard,  que  la  Kégence  obtint  le  renvoi,  non  des 
calvinistes  précisément,  mais  deeeux-Ià  seulement  qui  étaient 
venus  du  dehora,  réfugiés  français,  lorrains  ou  savoyards. 
Les  autres  continuèrent  en  paii  Texereiee  de  leur  culte.  Si 
MM.  Rœrich  et  Caspari  ont  soapçonrié  le  contraire,  c'est  faute 
d'avoir  en  à  leur  disposition  les  documents  péremptoires  sur 
lesquels  je  puis  m  appuyer.  Citons  seulement  les  registres  de 
baptême  dont  les  indications  concordent  avec  celles  fournies 
d'autre  pari. 

En  1585  la  paraisse  réformée  compte  . .  iSS  baptêmes. 

  208. 

1587    56 1 

En  i  888  la  paroisse  réformée  compte  . .  i22  * 

1589   74. 

«590    69. 

1591  ...    71. 

A  dater  de  ce  momenl,  les  chiffres  n'osdlient  plus  guère 
qu'entre  53  et  98.  Ën  1610,  cependant, on  trouve  le  minimum 
de  32  baptêmes.  Le  nombre  en  remonta,  quelque  peu  après 
1624,  quand  une  colonie  française,  celle  des  calvinistes  de 
Hadonvillers,  vint  se  fixer  à  Sainte-Marie. 

VEgHse  réformée  du  val  de  Lièpvre  a?ait  eu  des  relations 
spirituelles  arec  celles  de  Sira.sbourg,  de  Genève  et  de  Neu- 

*  Retour  de  quelques  bannis  qui  avaient  apparemment  cru  qa'on  les 
laisserait  en  repos  après  une  démonstration  de  départ  (?) 


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860 


cbâtel  ;  tlle  en  avait  eu  de  religieuses,  mais  surtout  de  poli- 
tiques, arec  Metz.  Ainsi,  de  Bèze  cils  François  Peintre, 
dit  La  Chapelle,  Tun  des  nombreux  ministres  suppléants 
d'Esctaery,  comme  ayant  été  appelé  à  Metz  par  ceox  de  la 
religion  en  1588.  Oe  La  Chapelle,  ayant  prêché  et  chanté  on 
psaume  dans  une  maison  particulière,  ftat  entendu  d*an  cha- 
noine logé  proche  de  là  et  emprisonné.  Il  tut  délivré  sur  les 
instances  du  duc  des  Deux-Ponts,  qui  «  avouait  ledit  pour 
être  de  sa  maison  et  à  son  service  >.  Lors  de  la  peste  de  Metz 
(1568),  c  ceux  de  la  Religion  furent  premièrement  visités  et 
trèssoigneusement  consolés  par  les  pasteurs;  finalementi  parce 
que  le  peuple  les  roulait  épargner,  forent  assistés  par  un 
nommé  Guillaume  Brayer,  député  à  cela,  comme  aussi  il  y 
était  fort  propre,  étant  plein  de  zèle  et  de  constance  (de 
Bèze,  Bsl)^.  Ce  Guillaume  Brayer,  qui  courut  les  dangers 
évités  à  Thypocrile  lâcheté  des  pasteurs  en  titre,  se  retroure 
en  1576  à  Sainte-Marie,  où  il  fut  ancien  du  Consistoire. 

J'ajouterai  qu'au  XVII'  siècle,  Metz  fournit  au  val  un  grand 
nombre  de  ministres,  ainsi  Pierre  Joly,  de  la  famille  de  Paul 
Ferry,  le  Bachelez,  Técuyer  Couët  du  Virier,  également  de  la 
fomille  de  Ferry.  Pour  ne  pas  sortir  des  limites  du  XVI*  siècle, 
je  rappellerai  seulement  les  noms  de  Pierre  de  Cologne^  né 
à  Gand,  et  qui,  au  rapport  de  Bayle,  devint  plus  tard  ministra 
à  Heldelberg,  où  il  prêchait  dans  les  deux  langues,  Figon  et 
Louis  Desm azurés,  que  de  Bèze  nomme  simplement  Louis, 
«  dès  autrefois  secrétaire  de  l'ancien  cardinal  de  Lorraine, 
mais  homme  de  bien  et  de  bon  savoir,  lequel,  contraint  pour 
la  religion  de  partir  de  la  rille  de  Saint -Nicolas,  se  retira 
dedans  Metz  >.  Louis  Desmazures  mourut  à  fischery.  Une  note 
du  registre  des  baptêmes  porte  :  c  Le  17  de  juin  de  cette 
présente  année  1574^  mourut  M.  Louys  des  Masures,  fidèle 
serriteur  de  Dieu  :  fut  le  même  jour  ensépulturé  au  noureau 
cimetière,  étant  le  premier  qui  y  a  été  enseveli.  La  poursuite 
(ht  d^une  bien  grande  compagnie  de  frères  et  de  sœurs  de 


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UISTOIAE  DS  8AIMTE-MABIB-AUX-MINBS 


361 


notre  Eglise,  regrettant  la  perte  d'un  si  bon  et  vertueux  per- 
sonnage*. .  Sa  veuve,  Anne  Berman,  fit  «  aux  pauTres  »  des 
legs  imporlants  et  leur  donna,  entr'autres,  une  somme  asses 
forte  destinée  aa  chauffage  des  écoles  età  l'entretien  des  écoliers. 

BadooviUers  avait  eu  ayec  le  val  de  Lièprre  des  relations 
d'un  intimité  plus  cordiale.  Quelques  pasteurs,  Flgon,  et  plus 
tard  Mathieu  Barlbol,  avalent  quitté  Sainte-Marie,  pour  évan- 
géliser  la  ville  lorraine  et  y  prêter  assistance  au  minisire 
Du  Cloox  et  à  ses  collègues;  mais  ce  n'était  pas  tant  cet 
échange  de  prédicateurs  qui  unissait  les  deux  églises  que  les 

*  Louis  des  31asures  naquit  vers        à  Tournav.  l.e  premier  mission- 
naire de  la  Réforme  en  noire  région  fut  un  ancien  abbo  du  pays  de 
Tournay,  nommé  Elle.  Quelles  relations  l'unissaient  à  son  compaU-iote 
des  Masures?  On  n'en  sût  rien,  mais  il  est  permis  de  svpposer  que  les 
événements  de  1550  à  1562  farentmieox  liésqn'onnele  pensait  josqu'id. 
Le  nom  d'Elie  était  probablement  un  nom  de  guorn^  comme  ceux  de 
Jonas.  de  La  Chapelle,  de  Lrt  Rivière,  pris  par  de  FJèze,  I»eintre  et  Le  Mas- 
son,  enfants  perdus  du  parti.  Cependant,  je  trouve  mention,  à  la  date 
du  29  décembre  1566,  d'un  baptême  auquél  sert  de  témoin  «  Marguerite, 
▼enre  de  maistre  £Iy  ».  Rien  ne  prouve  assurément  que  cotte  Marguerite 
ait  été  la  renre  de  Pierre  Brosly»  veuve  d'nn  seeond  mari  c^lement, 
reveone  pour  un  temps  dans  un  pays  depuis  longtonps  quitté  par  elle  ; 
maïs  quelques  indices  nous  autorisent  à  ne  pas  repousser  au  moins  une 
telle  supposition.  Pour  l'ordinaire,  nos  registres  inscrivent  purement  et 
simplement  les  noms  des  pens  du  commun  ;  aux  riches,  ils  accordent 
un  m*"»,  à  quelques  rares  laïques  inlluents  dans  les  mines  le  Uerr,  près- 
qu'aux  seuls  gens  d'Eglise  hmaittn  complet;  encore  est-il  à  remarquer, 
qu^dés  que  cesse  la  fonction,  cesse  l'emploi  de  cette  làçon  de  particule. 
Des  Masures  seul  est  parfois  mieux  traité.  Il  mourut,  non  pas  à  Stras- 
houri'  et  en  1580,  comme  semblent  l'admettre  les  biographiw,  mais  à 
Kschery  en  1571.  l.i'  ret.'istre  brouillon  des  bapt»'^mes  porte  une  note  qui 
est  létjéremerit  liiodifiée  par  lerej^'i^tre  copie:  «  L'an  1571,  le  17"  jour  de 
Juing  fut  muet  maistre  Louys  des  Masures,  serviteur  de  Dieu.  La  sépul- 
ture a  esté  ftiete  le  mesme  jour  au  lien  d'Esehery. . .  »  On  ne  tenait  pas 
compte  des  décAs»  mais  seulement  des  baptêmes»  de  ceux  qui  ont  rendu 
raison  de  leur  foi  et  des  mariages.  L'insertion  de  la  note  relative  à  la 
mort  de  des  Masures  est  un  hommage  rendu  au  père  spirituel  de  la  vallée, 
à  l'ancien  secrétaire  du  rardinal  Jean  de  Lorraine  et  du  jeune  duc  de 
Lorraine,  au  collahonilcur  de  Pierre  de  Cologne,  au  traducteur  dé  !  K- 
neide,  à  l'auteur  de  quelques  tragédies  et  de  quelques  poésies  diverses. 


389 


ttRVUB  D'ALSAOB 


rapports  de  famille  et  de  commerce  existants  entre  leon 
membres.  La  femme  de  Dombalte,  tabellion  du  val  d'Ëachery, 
était  souvent  témoin  de  quelque  baptême  à  BadonTillîers,  où 
Glande  Desmaznres  jouait  le  rôle  qu*avait  pris  Louis  en 
Alsace.  Ce  Claude  Desmazures  avait  épousé  une  Gollignon. 
Des  alliances  assez  nombreuses  unissaient  les  personnes;  de 
plus,  l'industrie  était  h  môme  dans  les  deux  localités,  oîi 
l'orfèvrerie  était  principalement  cultivée,  c'est-à-dire  la  passe- 
menterie, la  fabrication  de  galons  d'or  et  d'argent,  et  où  l'on 
voyait  également  un  grand  nombre  de  boutonnière  et  d'épin- 
gllers.  Le  seul  commerce  qui  paraisse  propre  &  Badonvillers 
est  celui  de  Tarquebuserie.  Quand,donc,  en  1694,  les  réformés 
chassés  de  la  ville  sœur  furent  obligés  de  se  choisir  un  aeile, 
il  se  dirigèrent  tout  naturellement  vers  te  val  de  Lièpvre  et 
y  portèrent  leur  expérience  technique  et  leurs  ateliers. 

Ces  ateliers  prospéraient  quand  la  guerre  de  trente  ans 
vint  les  ruiner  de  fond  en  comble.  Les  Suédoi-^  s'établirent 
à  Sainte  Marie  d'Alsace  en  1636,  et  y  maltraitèrent  fort  leurs 
alliés  naturels,  les  protestants,  qui  paraissent  avoir  été  plus 
mdemeut  traités  que  ne  furent  les  catholiques  de  Lorraine. 
Les  principaux  bourgeois  furent  contraints  de  quitter  le  lieu. 
Les  ministres,  qui  venaient  d'inaugurer  un  nouveau  temple, 
construit  à  Sainte-Marie  même,  aux  frais  de  la  communauté 
(1684),  s'enfuirent  des  premiers.  L'un  d'eux,  Jacques  Faltet, 
était  jeune  encore;  quoique  né  dans  le  val,  il  ne  voulut  jamais 
yretourner  et  resta  en  Suisse;  il  était paurre.  L'autre, Claude 
Perrochel,  possédait  de  grat.des  propriélés,principilementaux 
cantons  de  Faunoux  (aujourd'hui  le  Rauenthal)  et  delà  Haute 
Broque;  il  avait  marié  son  jeune  fils  Félix  à  Tune  des  plus 
riches  héritières  d'Bschery,  une  demoiselle  Finance  ;  psr 
vanité  singulière,  il  avait  fait  placer  ses  armoiries  sur  les 
vitres  deTéglise  nouvelle.  Claude  Perrochel  revint  à  son  trou- 
peau. Quant  au  pasteur  allemand,  il  ne  partit  (lue  lorsqu'il 
Y  ftit  absolument  contraint,  sa  femme  venait  il  accduclier  au 


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HISTOIRE  DB  SAOnV-MARlB  AUZ-MIKB8 


963 


sein  de  la  plus  lamentable  misère, dénuée  d a  strict  nécessaire; 
tout  sabeide  de  la  part  des  minears,  dont  la  caisse  soldait  les 
employés  de  Téglise,  Aiisait  défout.  Les  galeries  de  mines 
araient  été  abandonnées;  quelqaes-unes  ne  furent  jamais 
exploitées  par  la  suite,  étant  on  effondrées  on  enrataies  par 
les  eaux.  L'incendie,  le  meurtre,  la  famine,  la  peste,  en  nn 
mot,  les  Suédois  avaient  passé  par  le  val.  Les  communautés 
ne  comptaient  plus  que  de  rarei  bourgeois;  si  l'on  compare 
les  registres  de  l'état  ciTii  de  1637  à  ceux  des  années  immé- 
diatement antérieures,  on  ?oU  que  les  baptêmes  sont  autant 
de  merreilles  :  les  mariages  contractés  le  sont  presque  tous 
entre  reufe  et  reuves. 

Ls  Knappschaffl  ne  se  rétablit  jamais.  L^ezploitation  en 
règle  des  mines  cessa.  On  attaqua  bien  encore  ça  et  li  quel- 
ques filons,  mais  presijue  à  l'aventure,  encore  ne  fut-ce  qu'au 
XVIII*  siècle.  La  Knoppschn(f t  h'mait  des  biens;  l'Eglise 
luthérienne  s'en  chargea  et  prit  l'engagement,  en  échange, 
de  solder  pasteur  et  maiire  d'école  et  d'assister  les  iniirmes, 
les  Teures  et  les  orphelins. 

Quand  la  paix  fut  faite,  le  val  de  Lièpyre  était  un  désert 
à  repeupler.  Des  édits  royaux  rappelèrent  les  anciens  bour- 
geois. Peu  d*entr*eux  refiurent,  mais  quantité  d'étrangers  et 
surtout  des  Suisses  allemands  aeconrnrent.  Nous  assistons, 
en  conséquence,  à  une  nouvelle  colonisation  par  des  immi- 
grants de  langue  allemande,  seulement,  celte  fois,  les  hameaux 
jusque-là  restes  fnmçais  d'Eschery,  Surlhûte,  Faunoux,  etc., 
les  reçurent  de  préférence.  Là,  en  effet,  se  trouvaient  des 
mines,  qui,  plus  récentes  et  plus  superficielles  que  celles  de 
Fertrupt,  promettaient  un  bénéfice  plus  &cile.  On  peut  se 
rendre  compte  des  effets  de  cette  nouvelle  inrasion  par  Texa- 
men  des  lims  terriens.  Je  prends  ceux  dressés  en  1686  par 
le  tabellion  Louis  Marehand,  et  j'en  extrais  au  hasard  le  n*  iO 
de  chaque  section.  Le  lecteur  ne  convaincra  ainsi  que  l'office 
de  Sainte-Marie,  relativement  nouveau,  est  déjà  en  parlie 


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30é 


BBTUB  D'ALSAOB 


allemand  dès  les  premières  années  duXVlI*  siècle,  ces  livres 
donnant  les  noms  des  propriétaires  successif  du  sol  depuis 
I  tonée  1625  environ.  L'office  d'Ëscherj,  comme  on  le  mn, 
ne  devient  allemand  que  pins  tard.  Pour  établir  cette  preuTe, 
je  prends  eomparatirement  les  deux  ou  trois  premiers  noms 
portés  pour  chaque  section  et  qui  sont  ceux  des  individus 
inscrits  avant  4686,  puis  les  deux  ou  trois  derniers  noms 
inscrits  pour  la  même  section  et  qui  sont  ceux  des  posses- 
seurs de  la  fin  du  XVIII-  siècle  et  du  commencement  du  XIX% 
DOS  livres  ayant  été  tenus  à  jour  jusque  vers  1820 

En  appliquant  ce  procédé,  comme  je  Tai  dit,  au  n'  10  de 
chaque  section  pour  l'office  de  Sainte-Marie,  cest-à-dire  pour 
Feurtru,  Sainte-Marie,  la  Fonrcel,  Saint-Philippe  (partie),  je 
trouve,  avant  1686,  dans  ces  quartiers,  sur  12  inscrits  : 

Français,  5; 

Allemands,  7. 

Les  mêmes  loi  alltés  fournissent  pour  la  ûo  du  dernier  siècle 
et  le  début  de  celui-ci  : 

Français,  1: 
Allemands,  10  (sur  11). 

Quant  à  loffice  d'Eschery.  je  relève,  avnnt  1686.  pour  Sainl- 
Blaise,  Bréhagotte,  Saiiil-Philippe  (partie),  Liverselle,  Sur- 
Ihâte,  Faunoux,  Eschery,  La  Barre,  Petite  Lièpvre,  sur  un 
total  de  23  inscrits  : 

Français,  17; 

Allemands,  6. 

A  la  fin  du  siècle  dernier,  j'y  rencontre,  sur  21  proprié- 
taires: 

Français,  1 1  ; 
Allemands,  10. 

'  Il  m'a  été  impossible  do  prondni  loiijours  un  mr-iiie  iioiribnide  noms, 
quelciues  parcelles  ayant  passé  dans  le  mèim  laps  do  temps  par  un  noin- 
iure  de  possessenn  moindre  que  trois. 


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HISTOIRB  DB  8AIIITB-M ABIB-AUZ*1I1NBB 


365 


On  peut  suivre  ainsi  les  progrès  que  font  les  Allemands, 
et  la  preuve  que  j'eu  donne  est  aisée  à  multiplier.  Ce  ne 
Alt  pis  sans  quelque  résistaoce  de  la  part  des  anciens  hoat- 
geois  que  les  arrirants  prirent  pied  dans  la  partie  du  Taf  jus- 
qu'alors épargnée.  Cette  résistance  se  porta  surtout  sur  le 
terrain  religieux. 

n  llint  convenir  qu*au  point  de  vue  historique,  le  mouve- 
ment calviniste  était  absoluniciil  artificiel  et  illogique.  Un 
peuple  qui  s'est  lait  un©  relitjion  à  sa  mode  par  l'activité  tur- 
bulente ou  latente  de  quinze  siècles  ne  peut  être  ramené 
tout  d'un  coup  à  l'état  moral,  intellectuel,  politique  et  social 
où  il  se  trouvait  quinze  siècles  auparavant.. 

Les  séides  de  Calvin  et  surtout  lui-même  méconnurent  la 
valeur  de  tout  antre  ihctenr  que  la  Bible  :  loin  de  considérer 
leur  entreprise  comme  une  tendance  au  progrès,  j*ai  le  regret 
de  ne  pouvoir  la  considérer  que  comme  In  réaction  la  plus 
insensée  qui  se  soit  jamais  produite  contre  les  conquêtes 
propres  de  1  intelligence  humaine.  Il  n'est  d'analogue  —  et 
encore  la  comparaison  n'cst-ell«  pas  absolument  exacte  — 
que  la  tentative  faite  par  les  Wahabites  de  T Arabie.  Dès  que 
l'eflervescence  première  fut  un  peu  calmée,  on  put  voir 
combien,  au  fond,  les  doctrines  réformées  répugnaient  aux 
populations.  Les  registres  consistoriaux  de  1640  à  1650 
sont  remplis  d*admonestations  à  des  individus  qui  <  ftl- 
faisaient  des  signes  de  croix  sur  des  enfants  malades  >,  qui 
«  épousaient  à  la  papauté  »,  qui  «  prenaient  mari  ou  femme 
de  religion  contraire  »,  qui  *  payaient  des  violons  »,  qui 
t  blasphémaient  »,ce  qui  veut  souvent  dire  qui  médisaient  du 
Consistoire.  Au  milieu  du  XVII*  siècle,  les  haines  religieuses 
étaient  partout  singulièrement  refroidies;  il  s'était  fait  comme 
une  sorte  d'apaisement  La  noblesse  française^  effrayée  du 
rigorisme  et  de  Pétroitesse  d'esprit  des  ministres,  retournait 
en  masse  au  catholicisme;  ailleurs,  on  parlait  de  transactions. 
Certains  pasteur.s  calvinistes  en  chercbaieut  eux-mêmes.  Paul 


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ggg  REVUE  D  ALSACE 

Ferry  à  Metz,  Durceus  en  Ecosse,  s  occupaient  de  rénnîr  les 
léformésaux  luthériens.  La  même  pensée  se  fit  jour  avec  un 
certaia  éelai,  jusque  dans  le  val  de  Lièpvre.  Un  ministre  de 
Sainle-llarie,  Jean  Meiiel,  publia,  vers  1664,  un  traité  aujour- 
d'hui introQTabie,  qui  fil  du  bruit  parmi  les  8a?anls  de  l'é- 
poque et  où  il  conaeiUait  de  rédproquesconcessioiw.  GeMeUet 
avait  été  l'aumônier  d'Anne  de  Coligny,  femme  du  comte  de 
Wurleniberg-Montbéliard,  princesse  d'un  esprit  filiWe,  d'une 
famille  céh^bre.  même  à  la  cour  de  Louis  XIV,  par  la  légèreté 
de  ses  mœurs.  Anne  éUit  zélée  calviniste,  c^mme  son  aïeul 
ramiral,  mais  elle  avait  dù  céder  aux  sullicitations  de  son 
mari,  au^  fou  qu'elle,  épris  de  théologie  jusiiu'à  lire  quinze 
eenta  fois  la  Bible  d'un  bout  à  l'autre,  luthérien,  du  reste,  et 
d'une  orthodoxie  ferouche.  Elle  s'était  rangée  à  la  confésaion 
d'Augsbourg,  mais,  faute  de  pouvoir  consulter  un  colloque  à 
sa  guise,  elle  amîl  an  moins  prié  Mellet  de  lui  préparer  nne 
élude  comparée  des  diverses  doctrines  protestantes.  Comme 
on  devait  s'y  attendre,  les  conclusions  de  faumônier  avaient 
été  conformes  aux  désirs  de  la  cour;  il  npinaen  faveur  d'une 
conciliation.  Un  ministre  imbu  de  telles  idées  eût  pu,  sans 
doute,  vivre  en  bonne  intelligance  avec  des  cullègues  d'autre 
doctrine;  mais  Jean  Mellet  ne  s'entendit  point  avec  les  réfor- 
més allemands  venus  de  Suisse.  Gouët  du  Vivier,  qui  lui 
snoeéda,  était  de  la  femille  de  Paul  Ferry,  l'nn  des  chefs  de 
ce  parti  de  conciliateurs  que  Ton  nommait  alors  les  Sywri- 
listes.  Son  orthodoxie  ne  devait  pas  être  fort  intolérante. 
Malgré  la  facilité  qu'ils  trouvèrent,  selon  toutes  apparen<;€S, 
dans  l'humeur  des  pasteurs  «  français  »  de  l'époque,  les 
réformés  <  allemands  »  demandèrent  et  obtinrent  un  ministre 
de  leur  langue  (1666);  il  est  à  croire  que  d'autres  motifs  que 
des  motifii  purement  religieux  inspirèrent  leurs  démarches. 

Ces  motilb  ne  sont  pas  malaisés  à  découvrir.  La  population, 
en  général,  était  fort  émue  contre  la  police  exercée  par  le  Con- 
sistoire, et  qui  dépassait  en  tyrannie  tont  ce  qoe  nous  pourrions 


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UISÏOIKE  DB  SAINTJ£-MAiU£  AUX-MlMfiS 


aujourd'luii  imaginer;  les  Allemands  étaient  mai  représentés 
dans  relte  assemblée,  et,  par  surcroît,  celle-ci  avait  réellement 
dilapidé  les  fonds  en  caisse.  Quelques  extraits  du  refpslre 
consistorial  veot  en  fooruirla  démonstration.  Peut-être  sera- 
t*il  bon,  avant  d*en  Tenir  adz  preuTee  écrites,  de  dire  ce  que 
c*était  au  juste  que  ce  fomeux  Consistoire  et  de  qui  il  était 
composé. 

On  distinguait  dans  la  pratique  un  petit  et  un  grand  Con- 
sistoire. Celui-ci  se  composait  de  tous  les  pères  de  famille  de 
la  religion  ;  ou  ne  rassemblait  que  dans  les  occasions  impor- 
tantes. Lb  petit  Consistoire  STait  des  séances  régulières  ;  ses 
membres  discutaient,  un  dimanche  à  Sainte-Marie,  le  diman- 
che diaprés  à  Escbery,  se  contaient,  on  peut  le  dire,  les  can- 
cane de  la  semaine,  en  informaient  et  fiiisaient,  s'ils  le  jugaient 
convenable,  comparaître  les  intéressés.  Le  petit  Consistoire 
se  composait  de  douze  anciens,  élus  par  le  suffrage  des  fidèles 
Le  membre  sortant  était  rééligible  ;  mais,  comme  la  modestie 
chrétienne  empêchait  qu'il  se  représentât,  il  désignait  deux 
membres  pour  le  remplacer.  Les  noms  des  trois  candidats 
étaient  lub  en  chaire  pendant  trois  dimanches  consécutils. 
Après  la  troisième  proclamation,  le  ministre  se  plaçait  devant 
Tautel  et  remeillalt  les  suffrages.  Chaque  père  de  famille  lui 
soufflait  à  Torellle  le  nom  de  son  préféré;  monsieur  le  minis- 
tre prenait  note  de  cette  confession,  supputait  in  petto  le 
nombre  des  voix  recueillies  et  proclamait  ensuite  les  résul- 
tats de  ce  naïf  8crulin.  Les  chefs  du  Consistoire  étaient  les 
diacres;  il  y  en  avait  un  pour  Ëschery,  un  pour  Sainte-Marie. 
Plus  tard,  il  j  en  eut  un  allemand.  Ceci  posé,  voyous  par  ses 
registres  quels  étaient  les  attributions  et  surtout  les  agisse- 
ments de  ce  collège  d*<  élus  >: 

1.  —  2$  octobre  1635.  Comme  ainsi  soit  que  le  mardi  27 
décembre  de  Tannée  1633  passée,  nous  aurions  procédé  à 
la  bénédiction  du  mariage  de  Zacharie  Vouriat  et  Marie, 


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BBVOB  D*AL8A0B 


fille  de  feu  Grandcuny,tous  deux  d'Eschcry,  ce  néanmoins 
le  lendemain  de  la  conlirmation  et  célébration  dudit 
mariage,  ladite  Marie  s'étant  trouvée  enceinte  d'un  autre, 
violant  la  promesse  faite  à  Dieu  et  à  son  parti,  et  ainsi  délin- 
quante. Raison  pourquoi,  cedit  mariage  ne  s'étant  pas 
trouvé  seulement  fallacieux,  frauduleux  et  abusif,  mais  qui 
plus  est  directement  contraire  à  la  parole  de  Dieu,  laquelle 
au  Deutéronome,  chapitre  22,  prononce  sentence  de  mort, 
mais  aussi  contraire  aux  ordonnances  de  l'Eglise  ortho- 
doxe et  consistoires  notables  de  l'Eglise  réformée  selon  la 
parole  de  Dieu,  et  ainsi  laditeMarie  délinquante  convaincue 
d'adultéré  énorme.  A  cette  cause  ledit  Zacharie  insistant 
d'être  séparé,  ce  néanmoins  Tayant  admonesté  et  exhorté 
suivant  l'ordonnance  de  Son  Excellence  Monseigneur 
de  Ribaupierre,  de  prendre  ladite  Marie  délinquante  en 
merci  et  se  rallier  avec  elle  selon  que  les  lois  divines  et 
humaines  le  permettent  en  tel  cas,  mais  lui,  considérant 
rénormité  du  &it  et  grandeur  du  forfait  non  jamais  vu  ni 
ouï  ni  peut-être  perpétré  en  ce  lieu,  après  lui  avoir  donné 
terme  compétent  pour  prendre  avis,  lequel  étant  expiré, 
de  sa  pure,  franche  et  libre  volonté,  a  déclaré  que  pour  le 
contentement  de  tous  ceux  qui  lui  appartiennent  et  attou* 
chent,  mais  principalement  pour  le  repos  de  sa  conscience, 
ne  peut  et  ne  veut  entendre  à  aucune  réconciliation,  de 
lors  comme  maintenant,  et  maintenant  comme  pour  lors, 
à  cet  effet  nous  ayant  instamment  priés  et  requis  d'avoir 
liberté  de  se  pouvoir  remarier  où  il  trouvera  son  mieux. 
Nous,  pasteur,  et  anciens  et  diacre  de  cette  Eglise,  insis- 
tant sur  le  devoir  de  nos  charges,  et  selon  la  liberté  que 
lui  donne  la  parole  de  Dieu,  ciant  autorisés  par  le  décret  de 
Son  Excellence  Monseigneur  de  Ribaupierre,  lui  déclarons 
qu'il  est  en  sa  liberté  de  se  pourvoir  où  il  plaira  à  Dieu  dc 
l'adresser. 

2. —  25  juillet  1638.  Ce  jour  on  n'a  point  tenu  dc  Con- 
sistoire à  cause  de  l'armée  du  comte  de  Turraine  laquelle 
furent  trois  jours  logés  dans  ce  lieu  de  Sainte-Marie,  les 
anciens  et  diacre  étant  réfugiés  dans  les  bois  et  lieux  cir- 


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mSÏOIRE  OB  SAIKTE-MARIE-AUX-MINES  369 

I 

convoisins  pour  la  crainte  de  plus  que  barbare  cruauté  des 
soldats  contre  les  pauvres  gens. 

3.  —  13  novembre  1639,  Sara  Domballe  habitante  à  Col- 
mar  a  fait  réparation  au  Consistoire  pour  avoir  épousé  sou 
mary  soldat  à  la  papauté— 

4.  —  18  mars  1640.  Sera  remontré  à  Sara  Domballe  rési- 
dante à  Colmar  à  sa  première  arrivée  ici  de  sa  fiiute  com- 
mise ayant  par  idolâtrie  et  superstition  envoyé  par  com- 
mission envers  un  certain  saint  pour  pensant  recevoir  par 
iceUe  de  lui  guérison  de  quelque  maladie* 

ft.  —  36  avril  1640.  Judith,  fille  à  M.  Dieudonné  maire  à 
Eschery,  comme  aussi  Jeanne  fille  de  feu  Toussaint  Re- 
nault ont  feit  réparation  au  Consistoire  pour  avoir  dansé». 

6.  — 16  décembre  1640.  Ceux  qui  ont  demandé  de  com- 
muniquer à  la  Sainte-Céne  du  Seigneur  à  Noël  1640, 

Joseph  Peltierle  jeune,  ayant  attestation  de  Basle. 
Jean  Pairat,  drapier,  aussi  attestation  de  Kenne, 
Daniel  Papelier,  aussi  attestation  de  ladite  église  de 
Bienne. 

7.  —  22  septembre  1641,  Sera  donnéà  Suzanne,  veuve  dé 
Jean  Maire,  de  Ribeauviller  pour  lui  subvenir  à  payer 
i'écolage  de  ses  enfants  4  fr.  à  condition  qu'ils  iront  auprès 
d'un  maître  de  notre  profession. 

8.  —  Le  6  mars  1642,  par  ordre  du  Consistoire  fut  donné 
à  la  femme  à  Nicolas  Le  Clerc,  lui  étant  luthérien  et  sa  dite 
femme  de  notre  profession,  laquelle  étant  en  couches  et 
ledit  son  mari  malade,  étant  en  grande  nécessité,  lui  avoir 
donné  pour  cause  de  sa  femme  4  fr. 

9.  -~  21  novembre  1642.  Daniel  Gbodey  a  mal  à  propos 
et  faïussement  parlé  contre  lesanciensen  taverne  publique, 
a  été  censuré  du  Consistoire^ 

la— 15  avril  1643.  EUsabeth, veuve deFélix  Perrochet, 
Esther  Grandhomme,  Marguerite  Didier,  Judith  Didier^ 
Sara  Mathieu  femme  à  Jean  le  Maire,  Isaac  Mougin,  Pierre 
Marchant,  etc.»  etc.,  ont  été  censurés  pour  avoir  dansé. 

11.  — 13  mai  1643.  A  été  ordonné  que  Monsieur  Bachelles 

NouveUo  Série  —  ?•  Année.  ^ 


370 


RKVUt  D'ALSACE 


et  Daniel  Lasus  s'enquêteraient  ^ers  Mons'  le  Lieutenant 
à  quel  sujet  Beajamin  Corvisier  n*ètaît  capable  de  la  chaiige 
d'ancien. 

42.  —  4  février  1646.  Zacharie  Vouriat  a  été  au  Consis- 
toire pour  avoir  été  pris  de  vin  et  avoir  fait  du  débat  coq- 
tre  sa  femme . 

13.  —  22  mars  1646.  Claude  Gardon  a  été  censuré  au 
Ck>nsi8toire  pour  avoir  été  longtemps  dehors  et  n'avoir 
point  apporté  de  témoignage  des  églises  qu'il  devait  avoir 
firéquentées  et  croyant  qu'il  ait  été  de  la  messe. 

14.  — 10  mai  1646.  Elisabeth  Pihle  a  été  censurée  au 
Consistoire  pour  avoir  été  épouser  son  mari  à  Hunawihr. 

15.  —  30  juin  1647.  Monsieur  Le  Bachellez  ministre  étant 

en  chaire  le  dimanche  matin  dudit  30  juin  1647  dit  que  le 
diacre  cl  Ei^ùhery  et  les  anciens  avaient  faussé  le  serment 
qu'ils  avaient  fait  devant  Dieu  et  les  hommes;  il  a  été 
recherché  de  leur  crier  merci,  ne  l'a  voulu  faire.  Ils  ne  se 
sont  assemblés  au  Consistoire  durant  le  temps  qu'il  a  été 
audit  lieu. 

16.  —  17  mai  1648.  David  Georges  a  été  au  Consistoire 
pour  avoir  dansé  et  s'avoir  abstenu  de  communiquer  plu- 
sieurs fois. 

17.  —  ai  novembre  1649.  Paul  Didier  doit  ôtre  censuré 
pour  avoir  proféré  parole  blasphématoire  contre  ceux  qni 
avoient  assisté  en  Êdsant  Féglise  de  Sainte-Marie,  disant 
que  depuis  le  temps  que  ledit  temple  était  iàit  que  toutes 
sortes  de  malheurs  8*en  étaient  ensuivis  et  plusieurs  autres 
discours  qu'ils  ne  devaient  être  dits  par  un  homme  ayant 
charge  d'ancien  comme  lui. 

18.  —  23  avril  1651,  A  été  ordonné  de  donner  à  Jean 
Brique  le  bon  gardien  six  francs  pour  chasser  les  chiens 
du  temple. 

19.  —  25  juin  1651.  La  vieille  Elisabeth  Thouvenin,  mère 
à  Pierre  Thouvenin,  âgée  d'environ  quatre-vingt-dix  ans  a 
fait  abjuration  de  la  foi  papistique,  Dieu  lui  ayant  ouvert 


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HISTOIRE  D£  BAIMTJB-HARIE-AUX  MINB8 


871 


les  yeux  de  la  foi  et  lui  ayant  donné  la  yraie  connaissance 
du  saint  Evangile  nonobstant  qu'elle  était  aveugle  des 
deux  yeux... 

20.  —  29  octobre  1651.  Tante  Elisabeth  demande  des 
souliers  à  bas  pour  elle  et  celle  qui  la  mène. 

24.  —  Mars  1652.  Elisabeth  Vourion  femme  à  Simon 
Lhuilier  a  été  censurée  au  Consistoire  pour  avoir  été  en 
un  baptême  à  l'église  papistique. 

22.  —  22  juillet  1652.  Jacob  Irmel  et  sa  femme  ont  été 
censurés  en  Consistoire  pour  avoir  dansé  au  festin  de  Joseph 
Vîneau,  frère  et  beau-frère  d'iceuz. 

23.  —  I  fuin  1653.  Se  présentent  pour  communiquer  i  de 
Sainte-Marie,  14  des  terres  de  Berne^  15  des  terres  de  Zu- 
rich, 1  de  Zoffingen,  i  de  Metz,  1  d*Aarau« 

21.  —  Novembre  1654.  La  fille  Jean  Le  Maire  avec  une 
autre  qui  s*appelle  Anne  qui  demeurent  à  Richivir  pour 
avoir  assisté  au  festin  de  la  fille  Bouchard.  —  Les  deux 
filles  Bouchard  ont  été  fort  censurées  pour  avoir  assisté  au 
mariage  de  leur  sœur. 

25.  —  23  mars  1656.  Tante  Elisabeth  l'aveugle  a  comparu 
au  Consistoire  et  a  reçu  censure  pour  avoir  fait  des  signes 
de  croix  auprès  d'un  enfent  malade. 

—  13  avril  1656.  David  François  a  comparu  au  Con- 
sistoire avec  d'autres  pour  avoir  joué  aux  cartes  nuit  et 
jour  et  ont  été  censurés. 

27.  —  21  mai  1656.  Pierre  Grandpierron  a  comparu  au 
Consistoire  pour  avoir  dit  en  disputant  avec  Thomas  Pa- 
quet étant  ancien  que  Ton  prenait  des  sots  pour  être  anciens 
et  a  été  censuré. 

28.  —  17  décembre  i6$6.  Plus  pour  chose  notoire  à  ceux 
qui  viendront  en  charge  en  lisant  cet  article  prendront 
connaissance  de  ce  qui  s'est  passé  en  ce  cas,  c'est  que  Jean- 
non  fenune  à  Jean  Brique!  maréchal  à  Bréhagoutte  étant 
accusée  pour  le  &it  de  sorcellerie  par  beaucoup  de  sor* 
cîéres  et  sorciers  qui  ont  été  brûlés  à  Sainte-Marie  du  côté 
de  Lorraine  et  beaucoup  d'autres  indices,  ce  que  ayant  et 


REVUE  D'ALSACE 


voyant  le  pasteur  et  les  anciens  cette  femme  être  ainsi 

accusée  criminellement,  ils  n'ont  pu  qu'ils  ne  la  retran-  • 

chent  de  la  Sainte-Ccne  jusqu'à  ce  qu'elle  se  justifie  de  ce 
crime  —  ce  qu'elle  n'a  su  taire  —  ce  que  sachant  elle  et 
son  mari  ont  pris  recours  à  Monseigneur  le  comte  deRibau» 
pierre  avec  grandes  instances  de  faire  que  ledit  pasteur  et 
les  anciens  la  reçoivent  a  la  communion  de  la  Sainte-Cène. 
Ce  que  ledit  seigneur,  après  beaucoup  de  sollicitations,  a 
ordonné  de  la  recevoir  en  ladite  communion  et  pour  des 
considérations  qui  ne  se  nomment  point  ici  qu'il  ne  vou- 
lait prendre  en  ce  temps  connaissance  de  ces  accusations 
pour  des  raisons  particulières  dont  le  Consistoire  après 
avoir  fait  redoubler  la  compag'nic  ont  fait  venir  ladite 
Jcannon  pour  comparaître  et  ouïr  ses  défenses,  n'ont 
reconnu  autre  chose  en  elle  qu'une  arrogance  bien  grande, 
mais  de  peur  d'offenser  Monseigneur  à  cause  ducomman- 
'dement  fait,  ils  l'ont  admise  à  participer  à  la  Sainte-Gène 
avec  regret  ne  voyant  aucune  piété  en  elle. 

29.  —  17  février  1658,  Paul  Pouschberg  fils...  sera  appelé 
au  Consistoire  pour  avoir  été  si  hardi  que  d'avoir  monté 
dedans  la  chaire  du  ministre  à  l'heure  du  prêche  et  y  faire 
des  discours  frivoles,  étant  là  beaucoup  de  gens  assemblés. 

30.  —  16  août  1659.  Jean  Goetz  sera  averti  de  se  trouver 
ès  prôcbes  plus  diligemment  qu'il  n'a  Mi  par  le  passé. 

31.  —  14  mars  1660.  Jean  Broulat  demeurant  à  Richivir 
sera  appelé  en  Consistoire  pour  avoir  dansé. 

32.  —  9  mai  1660.  La  sage  femme  nommée  Barbel  a  été 
en  Consistoire  à  cause  qu*eUe  a  recueilli  l'enfent  de  Nicolas 
Herment  lequel  est  venu  trop  tôt  et  n'en  ayant  averti  le 
Consistoire,  pourquoi  elle  a  été  eensurée..* 

33.  —  s8  novembre  1660.  La  femme  Gabriel  Prélat  de 
Sainte-Marie  ayant  dansé  à  Ribeauvillé  sera  appelée  en 
Consistoire. 

34.  — 19  février  i66«.  Paul  Pouschperg  le  jeune  ayant 
proféré  et  dit  en  plein  marché  parlant  de  la  femme  ChriS' 
tophe  Vaisseau  rappelant  bécasse  en  se  moquant ,  sera 
appelé  en  Consistoire  pour  en  être  censuré. 


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mSTOJBB  DB  aAIMTB-MABIB  AUZ  IOIIBS 


373 


35.  —  26  novembre  1662.  Marguerite  Guelot  a  été  avertie 
de  ne  point  recorder  d'enfants  au  logis  qui  peuvent  aller 
à  l'école  ou  bien  on  lui  retranchera  les  2  francs  que  l'Eglise 
lui  donne  par  semaine  à  cause  que  l'école  se  déserterait 
(Marguerite  Guelot  était  la  maîtresse  même  d'école). 

36.  —  15  décembre  1675.  Combien  qu'il  y  ait  grande 
quantité  de  pauvres,  ce  néanmoins  il  n'est  pas  possible 
qu'on  puisse  aider  à  tous  à  cause  de  la  grande  pauvreté 
survenue  à  beaucoup  de  bonnes  gens  qui  sont  devenus 
pauvres  à  cause  des  guerres  et  qui  par  ci  devant  Êdsaient 
bien  de  la  charité,  mais,  hélas  I  leurs  ruines  font  compas- 
sion quoiqu'on  ne  les  puisse  assister  et  le  peu  qu'on  reçoit 
aux  recettes  ordinaires  n*est  presque  rien  à  cause  du  peu 
de  gens  qui  se  trouvent  aux  saintes  assemblées  et  quant 
aux  recettes  qui  se  devraient  fidre  de  ceux  qui  doivent  des 
intérêts  aux  pauvres,  il  est  impossible  d'en  tirer  quoi  que 
ce  soit  pour  le  présent,  à  cause  des  guerres  et  de  la  ruine 
survenues  à  beaucoup  de  gens  qui  devaient.  Et  je  prie 
aussi  ceux  qui  viendront  après  moi  de  ne  me  blâmer  s'ils 
ne  trouvent  qu'on  att  écrit  de  dimanche  à  autre,  comme 
cela  devrait  être,  mais  le  plus  souvent  quand  on  pensait 
tenir  Ckinsistoire,  il  fellait  foire  logements  des  gens  de 
guerre.  C'est  pourquoi  j  espère  que  ceux  qui  me  succéde- 
ront jugeront  charitablement  de  ce  que  j'écris  ci-dessus. 

Quant  aux  scandales,  ils  ne  sont  pas  firéquents  durant 
ces  pauvres  temps,  à  cause  que  les  scandaleux  de  ci-devant 
ont  bien  souvent  disette  et  les  ivrognes  scandaleux  n'ont 
pas  toujours  eu  de  quoi  pour  acheter  du  vin,  car  on  a 
vendu  le  pot  jusqu'à  5  francs  et  un  demi  écu  blanc. 

On  me  permettra  de  m  arrêter  dans  mes  extraits,  tran- 
scrits presque  au  hasard.  Tout  lecteur  impartial  conviendra 
que  Ton  ne  devait  pas  se  sentir  à  Taise  sans  an  pareil  régime. 
Or,  les  Allemands  étaient  peu  nombreux  dans  le  Consistoire, 
et,  par  conséquent,  plus  gênés  encore  qae  les  Français  par 
80D  ombrasBuse  tyrannie.  De  plos,  ils  devaient  tenir  à  ne 


974 


tarruB  d'alsacb 


point  porter  la  responsabilité  de  la  situation  financière  de  la 
communauté.  Cette  situation  était  des  plus  précaires,  et,  comme 
elle  léBultait  d'une  déplorable  administration  antérieare,  d'im 
gaspillage  effiranté  de  la  fiyrtane  dite  c  des  pauTrei  >,  dila- 
pidée à  Tenyi  par  les  ministres  et  par  les  andens  qui  la  détour- 
naient à  leur  proflt,  les  nouveaux  frères  avaient,  jusqu'à  un 
certain  point,  le  droit  de  demander  à  faire  table  rase  du  passé. 
Trop  de  détails  seraient  fastidieux;  on  me  permettra  cepen- 
dant de  donner  quelques  indications  sonuuaires  au  sujet  de 
ce  que  je  viens  d'avancer  : 

En  1684,  la  paroisse  calviniste  s'était  trouvée  en  état  de 
bfttir  de  ses  propres  deniers  l'église  de  Sainte-Marie,  bourg. 
Elle  jouiasait  d'un  revenu  considérable  pour  Tépoque  et  pour 
la  contrée,  dû  aux  libéralités  de  plusieurs  familles  et  surtout 
des  Raillard  et  de  M""  Anne  Rerman,  veuve  Desmazures, 
qui  avait  légué  un  certain  capital  destiné  aux  besoins  des 
écoles.  Les  malheurs  de  1687  avaient  obligé  d'ébrécher  cette 
fortune;  les  anciens  avaient  emprunté  de  l'argent  dit  <  des 
pauvres  >  et  leurs  Aimilles  restaient  le  devoir  encore  vers 
1666;  des  ministres,  Le  Bachelez  entr'autces,  et  surtout  Octa- 
vien  Amyrault,  avaieni  usé  du  reste  pour  leurs  besoins  per- 
sonnels; la  communauté  restait  devoir  à  plusieurs  villes,  à 
Saint-6all  surtout,  une  somme  assez  forte  dont  le  paiement 
devait  être  effectué  par  Klein,  gendre  d'Amyrault,  Allemand 
habitant  Mulhouse,  qui  s'était  chargé  de  rembourser  la  caisse 
des  pauvres  d'une  partie  de  ce  que  son  beau-père  en  avait 
détourné.  Outre  l'aiigent,  les  réformés  avaient  laissé  se  perdre 
un  nombre  assez  grand  de  propriétés  foncières  psssées  par 
prescription  aux  mains  de  locataires  et  de  divers  occupants; 
on  s'occupait,  il  est  vrai,  de  la  recherche  de  ces  biens,  mais 
sans  grand  espoir  de  les  récupérer.  Les  traités  de  Munster  et 
d'Osnabrack  garantissaient  la  liberté  de  conscience  en  Alsace; 
mais  ils  prenaient  pour  base  l'état  religieux  accepté  par  la 
paix  de  1655  ;  c'est  dire  que  les  calvinistes  étaient  plutôt 


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HIBTOIltB  DB  8AINTB-BIARIB  AUX^MIMBS 


875 


tolérés  que  reconnus.  On  les  ignorait  officiellement.  Ils  ne 
pouyaieok,  en  conséquence,  se  recrater  qu'au  dehors;  le  pro- 
aélytieme  sar  plaee  leur  était  à  peu  près  interdit  Le  nombre 
des  memlires  de  leur  Bglise  tendait  done  à  décroître  d*autaat 
plus  rapidement  qu'aux  expatriation»,  aux  décès,  se  joignaient 
les  mariages  mixtes  a?ec  luthériens  ou  luthériennes;  ces 
unions  étaient  devenues  d'autant  plus  fréquentes  que  le  Con- 
sistoire, par  qui  elles  étaient  autrefois  interdites,  était  devenu 
lui-même  un  ?ain  épouvantait.  Sa  puissance  n'était  plus  ni 
écoutée,  ni  obéie.  Bon  nombre  de  familles  importantes  étaient 
retournées  au  culte  romain  :  les  Marchai,  les  Dieudonné,  les 
Domballe,  derniers  saecesseurs  de  Claude  Dehavit  de  Dom- 
halle,  la  tebellion  calviniste  du  XYÎ^  siècle,  les  GoUignon,  ele. 
Les  ressources  financières  de  la  communauté  baissaient  de 
plus  en  plus,  par  suite  de  ces  désertions.  Obligés  de  pourvoir 
aux  firais  du  culte,  de  payer  pasteurs  et  maîtres  d'école,  de 
subvenir  aux  besoins  des  pauvres,  les  réformés  commençaient 
à  trouver  la  charge  lourde.  Le  roi  Louis  XIV,  de  passage  à 
Sainte-Marie,  avait  ordonné  les  plans  d'une  église  catholique 
et  avait  établi  un  maître  d'école  pour  les  enfiuts  non  protes- 
tants. De  là  un  surcroît  de  dépenses,  qui  empêchait  les  août- 
ê^mOi  et  heknôourgs  d'aider  des  fonds  de  la  commune  leurs 
frères  calWnistes  dans  la  détresse.  L'eus^ent-ils  voulu,  du 
reste,  que  la  chose  devenait  impossible,  à  cause  de  la  sur- 
veillance que  las  officiers  catholiques  exerçaient  sur  eux  et 
qui  est  attestée  par  des  lettres  de  quelques-uns.  L'intendant 
rendait  au  culte  romain  la  moitié  de  l  église  de  Surlhâte  et 
lui  restituait  la  petite  dim«  d'Eschery,  achetée  au  XYI*  siècle 
par  quelques  bourgeoisd'E.^her7,  dont  les  héritiers  en  avaient 
fait  don  à  la  paroisse  réformée.  L'abbaye  de  Moyenmontiers 
elle-même,  à  laquelle  personne  ne  songeait  plus  depuis  des 
sièelee,  fiiisait  mine  de  contester  à  la  &mil?e  de  Rîbaupierre 
ses  anciennes  possessions  et  envoyait  (28  mai  1681)  au  Land- 
richter  Fattet  assignation  à  comparaître  à  Metz  «  pour  y 


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876 


ftBVOB  D'ALSACE 


apporter  les  titres  et  papiers  et  documents  en  vertu  desqueli 
luy  ouïes  détenteurs dadit prioré  (d'Eschery)  eojoayssant...». 
La  misère,  qui  était  grande  d^à  en  1666,  fût  an  comble  à  la 
fin  du  siècle.  Un  procèa  qui  s'engagea  entre  TigMae  et  Pan 
de  ses  andens  paatenrs,  au  aiyet  d'une  somme  d'argent  que 
celui-ei  réclamait,  Ait  le  signal  d'une  révélation  intestioe. 
1^8  Allemands,  devenus  peu  à  pen,  sinon  plus  nombreux,du 
moins  aussi  nombreux  que  les  Français,  las  d'une  situation 
qu'ils  n'avaient  pas  faite,  obtinrent  une  séparation  complète. 

De  1720  à  1740,  des  recrues  leur  vinrent  d'Allemagne. 
Une  nouvelle  compagnie  s'était  formée  en  vue  de  l'exploita- 
tion des  mines.  A  la  suite  de  ses  chelSi,  les  Erœber,  Isa 
Schreiber,  les  Gttnther,  les  Finck,  d'autres  Saxons  et  Hano- 
Triens  accoururent.  Us  s'établirent  principalement  à  Escbery, 
à  Snribftte,  au  Ranenthal.  Presque  tons  étaient  luthériens. 
Les  derniers  descendants  des  familles  primitives,  les  Maire, 
les  Petildemenge,  les  Coltel,  les  Bouvier,  les  Benoît,  les  Ante- 
nat,  furent  refoulés  vers  la  Petite  Lièpvre  ou  s'en  vinrent 
s'enrôler  en  ville  parmi  les  ouvriers  des  fabriques  de  tissus 
que  Ph.  Steffan  y  fondait.  Ces  ateliers,  ayant  prospéré  et  s'é- 
tant  multipliés,  attirèrent  un  grand  nombre  de  Suisses»  d'in- 
dividus du  Palatinat,  de  tisserands  de  Mulhouse^  etc.  Ge  con- 
cours d'étrangers  achoTa  de  changer  la  physionomie  do  val 
A  la  fin  du  XVm*  siècle,  il  était  derenu  allemand  de  langue, 
an  point  que  des  membres  de  l'Eglise  française  de  1562,  un 
Antenat,  par  exemple,  demandaient  par  grâce  au  Directoire 
du  département  de  u'êtro  plus  contraints  d'envoyer  leurs 
•nfants  h  un  catéchisme  français  auquel  ils  n'entendaient  rien. 
Le  français,  cependant,  resta  pour  plusieurs  une  ftçon  de 
langue  sacrée.  On  priait  et  l'on  chantait  en  français,  comme 
les  cathoUques  prient  et  chantent  enlatin.  On  voulut  prendre 
quelques  mesures  pour  maintenir  l'emploi  de  la  langue 
pateniélle.  Il  était  trop  tard.  Vainement  défendit-on  l'usage 
de  Tallemand  dans  les  écoles  ou  hors  des  écoles.  La  sœur 


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HUTOIBB  ra  8AXMTB*lIàBIB-A0Z-iailBB 


S77 


aînée  reçut  yaineraent  poar  mission  singulière  cellt  de  gour- 
mander  et  môme  de  châtier  de  la  main  les  petits  frères  qai 
8*<Niblieraient  josqu'à  se  aenrir  eDtr*eux  de  la  langue  pro- 
aerite;  fainement  alla-t-oo  juaqa'à  des  signes  extérieurs  de 
reoonnaissanoe  et  par  conséquent  d'hostilité,  les  Français  se 
fouant  au  ?ert  et  les  Allemands  an  rouge;  on  temps  Tint  où 
Eschery  fut  tout  allemand  ou  à  peu  près.  Quand,  après  1840, 
cette  annexe  dut  recevoir  un  pasteur,  elle  le  voulut  luthérien. 
Aujourd'hui,  la  population  réformée  de  la  commune  entière 
de  Sainte-Marie  est  le  sixième  de  la  population  totale  ;  k 
Eschery,  elle  est  d*un  peu  plus  du  quart  du  nombre  total  des 
habitants,  mais  il  n'y  a  plus  que  des  réformés  allemands, 
les  familles  qui  se  classeraient  généalogiquement  parmi  les 
Firançais  se  sont  elles-mêmes  germanisées.  Pour  en  venir  là, 
il  a  Ikllu  Teffort  de  deux  siècles.  L*Eglise  luthérienne,  alle- 
mande, dès  son  origine,  Tétait  restée  presque  jusqu'au  bout; 
le  premier  sermon  prononcé  en  français  par  un  pasteur  de 
la  confession  d'Augsbourg  le  fut  en  1853,  troia  siècles  après 
les  temps  de  Locquet  et  de  François. 


ËUG.  MUHLENBECK. 


HISTOIRE 


DB 

L'ANCIEiX  COMTÉ  DE  SAARWERDEN 

ET  DB 

LA  PRÊYOTË  DE  HËRBITZHEIM 

fSuUeJ 

GQAPITRB  V 

Démembrement  du  oomté  de  Saarwerdeix 

La  paix  de  Ryswick  fit  recouvrer  ses  Etais  à  Léopold  I", 
fils  de  Charles  V,  duc  de  Lorraine,  mais  en  ne  lui  laissant  ni 
places  fortes  ni  troupes;  elle  le  mil  dans  l'heureuse  impuis- 
sance de  faire  la  guerre.  La  ville  de  Bouquenom,  encore  sai- 
gnante de  ses  blessures,  la  cour  de  Wîberswîller  et  Saar* 
werdeu,  descendu  alors  au  rang  d*an  humble  TîUage,  forent 
attribués  à  la  Lorraine,  conformément  à  Tarrêt  rendu  en  4629 
par  la  Chambre  Impériale  de  Spire.  Bouquenom,  qui  mérilait 
à  peine  le  nom  de  ville,  ne  comptait  alors  que  soixante-et- 
nn  chefs  de  familles  et  cinq  veuves  ou  filles'. 

Aussitôt  que  Léopold  1"  fut  paisiblement  tem  sur  le  trône 

'  Mémoire  sur  l'Etat  de  la  Lorrome  à  (a  «a  dt»  IVIP  siMe,  imprimé 
à  Nancy,  eu  1858,  p.  28. 


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8AARWBRIUEN  ET  HBBBITZHIUM 


879 


dacal,  il  établit  à  Bonqaenom,  par  an  ëdit  renda  en  1695, 
une  prévôté  bailliagèn  qui  comprenait  la  TiUe  de  ce  nom  et 
le  Tillage  de  Saarwerden.  Le  i:illage  de  WiberswiUer  ftiisait 
partie  de  la  seigneorie  du  Gol-de-Gygne  (âisAc0on«nftaÀ), 
dépendant  du  bailliage  de  Fénétrange.  La  prévôté  de  Boa- 
quenora  ressortissait  au  bailliage  de  Saargueraines,  elle  se 
composait  d'un  prévôt,  chef  de  police  et  gniyer,  d'un  lieu- 
tenant-prévôt contrôleur  enlagruerie,  d'un  assesseur,  garde- 
marteau  en  la  gruerie,  d'un  substitut  du  procureur  général  de 
Nancy,  de  deux  tabellions,  d'un  haissier  exploitant  et  de 
deux  sergents.  La  résidence  de  Tun  des  tabellions  était  fixée 
'à  Booqnenom,  l'antre  réridait  à  Saarwerden. 

Le  duc  Léopold  I**  se  montra  d*abord  pen  ISiTorable  aux 
protestants  de  Boaqnenom  et  de  Saarwerden  et  adopta  des 
mesures  sévères  contre  eux;  mais  les  précautions  qu'il  crut 
devoir  prendre  regardaient  principîilement  les  étrangers  pro- 
fessant la  religion  luthérienne.  Il  ne  toléra  à  Bouquenom  que 
ceux  qui  y  étaient  établis  avant  la  paix  de  Ryswick;  il  fit 
défense  à  tout  ministre  protestant  de  Tenir  dans  cette  ville 
poar  y  catéchiser  et  obligea  les  enfiints  nés  de  mariages  mixtes 
à  assister  aux  offices  da  calte  catholique.  Las  assemblées  des 
prolestants  étaient  interdites  et  aucun  protestant  ne  ponvait 
Talablement  acquérir  d'an  catholique  une  maison  on  des  biens 
quelconques  sis  à  Bouquenom. 

Ce  prince,  mieux  éclairé  sur  les  véritables  intérêts  de  sa 
couronne,  vint  à  résipiscence  et  rendit,  le  22  mars  1707, 
l'ordonnance  suirante,  qu'il  adressa  à  ses  officiers  de  la  pré- 
TÔté  de  Bouquenom  : 

«  Quoique  nous  tous  ayons  ordonné  d*empècher  que  nos 
aiyets  de  Bouquenom  et  de  Saanrerden,  de  la  religion  d'Augs- 
bourg,  n'augmentassent  le  nombre  des  fiimilles  luthériennes 
par  le  mariage  de  leurs  enfants,  au  préjudice  de  la  tolérance 
qui  leur  avait  été  accordée  par  feu  le  duc  Charles  IV,  notre 
très  honoré  grand- oncle,  qui  soit  en  gloire,  nous  vous  faisons 


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BKVDB  D'ALBACB 


la  présente  pour  rous  faire  dire  qae,  par  bonnes  conBidéra- 
tions  et  sans  tirer  à  eonséqaence,  dods  avons  permis  à  nos- 
ilits  sigets  de  Ronquenom  et  de  Saarwerden,  de  la  religion 
lathérienne,  de  marier  leurs  enùuils,  à  charge  de  bfttir  des 
maisons  dans  lesdits  lieux,  sans  néanmoins  qu*il  leur  serait 
loisible  d*aTdr  anenn  exercice  libre  dans  leur  religion,  par 
le  ministre  ou  le  maître  d  école,  ce  à  quoi  nous  vous  ordon- 
nons  de  tenir  la  main.  » 

Cette  ordonnance  fait  sensiblement  connaître  que  la  volonté 
du  duc  Léopold,  disaient  liss  protestants  de  BouqaenomS  était 
de  traiter  les  luthériens  comme  ses  autres  sujets;  dès  qu'il 
leur  était  permis  de  marier  leurs  enûints,  c'était  autoriser  de 
nou?eanx  établissements;  en  leur  enjoignant  de  bfttir  des 
maisons,  c'était  leur  IHlre  connaître  qu'il  ne  leur  était  pas 
défendu  d'acheter  celles  qui  pourraient  lenr  oonTOnir;  en 
leur  interdisant  Texercice  public  de  leur  religion,  c'était 
une  dispense  pour  pouvoir  la  professer  en  particulier. 

Depuis  cette  époque,  les  luthériens  ont  librement  marié 
leurs  enfants;  il  leur  sufQsait  de  prendre  une  permission  du 
juge,  pour  laquelle  ils  étaient  tenus  de  payer  cinq  livres  ; 
après  la  célébration  du  mariage,  ils  étsient  obligés  de  la  £iire 
enregistrer  ches  le  curé  et  cet  enregistrement  coûtait  encore 
trente  sous.  Us  en  agissaient  de  même  lors  de  la  naissance 
d'un  enfant  et  donnaient  au  curé  cinq  sous  argent  de  France 
pour  l'enregistrement  de  la  permission  qu'il  accordait  de  le 
baptiser  selon  le  rite  protestant. 

L'autorité  ducale  a  si  bien  reconnu  l'importance  qu'il  y 
ayait  d'augmenter  le  nombre  de  ses  sujets  que,  quand  un 
étranger  venait  épouser  une  ûlle  protestante,  elle  robligeait 
à  résidence.  Quand  un  garçon  protestant  quittait  Bouquenom 
pour  aller  se  marier  aiUeurs,  les  père  et  mère  étaient  passi- 
bles d'une  amende  plus  ou  moins  forte,  mais  elle  n'était 
jamais  moindre  de  trois  à  quatre  cents  livres. 

*  Manuscrit  de  feu  U.  Kablé. 


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SAABWEBDEN  ET  HSRBITZHEDf 


881 


Un  bourgeois  luthérien  ayant  voulu  s'établir  ailleurs,  pour 
le  bien  de  son  commerce,  ne  put  quitter  sa  demeure  qu'en  se 
Boumeltant  à  payer  toute  sa  vit  la  subvention,  comme  s'il 
demeurait  à  fioaquenom .  U  a  payé  cet  impôt  peadant  plas  de 
TÎngi-quAtre  ans  et,  qaoiqa*il  eût  établi  an  eoHuit  en  son  lien 
•t  place  dans  cette  Tille,  il  a  oontiniié  à  y  être  imposé  sar  un 
pied  anasi  élevé  qu'an  catholique  de  la  première  classe. 

Le  prince  Henri  de  Yandemont,  qui  avait  reçu  de  Ghariss  17, 
duc  de  Lorraine,  son  père,  le  daché  de  Sarreland  en  apanage, 
était  résolu  à  contester  au  duc  de  Lorraine,  Léopold  I",  les 
villes  de  Bouquenom  et  de  Saarwerden,  qui  étaient  comprises 
dans  sa  donation  ;  mais  la  mort  du  prince  Gharles-Thomas, 
son  fils,  décédé  sans  alliance  en  1704,  le  fit  renoncer  à  son 
dessein  et,  en  i708,  il  fit  avec  le  duc  Ijéopeld  I*  on  traité  de 
braille,  par  lequel  il  lui  céda  la  proprié^  de  tous  ses  biens 
contre  la  jouissance  riagère  de  la  principauté  de  Gommercy. 

En  1704,  le  duc  Léopold  I*'  et  les  princes  de  la  maison  de 
Nassau-Saarbruck  Orent  procéder  à  la  délimitation  de  leurs 
états  respectifs  ;  celte  opération,  qui  fut  conduite  avec  autant  de 
zèle  que  d'inteiligeace  par  François  Didier,  procureur  et  rece- 
veur des  finances  à  Saarguemines.  et  Jean-Jacques  Becbt, 
bailli  du  comté  de  Saarwerden,  fut  ensuite  sanctionnée  par 
le  duc  Léopold  I**  et  les  princes  de  Nas8au-Saarbruck\ 

En  1781,  le  jour  de  la  Nativité  de  Notre-Dame  (8  sep- 
tembre) et  les  deux  jours  suivants,  les  religieuses  de  Bou- 
quenom célébrèrent,  dans  Téglise  paroissiale,  la  béatification 
du  bienheureux  Père  Fourrier,  foudaleur  de  leur  ordre'. 
Ce  fut  une  grande  fête,  non  seulement  pour  la  petite  popula- 
tion catholique  de  la  ville,  mais  encore  pour  une  foule  de 
fidèles  accourus  de  près  et  de  loin  ;  c'était  le  spectacle  d'une 
population  tout  entière  se  pressant  à  grands  flots  dans  l'en* 
ceinte  sacrée,  pour  recevoir  les  saints  sacrements;  on  en 

*  ÀrehiveB  do  Bas-Rhin,  E.  5188. 

*  Le  B.  P.  Fourrier  Ait  béatifié  le  S9  janvier  1730. 


382 


comptait  plus  de  cinq  mille.  Le  dernier  jour,  à  vêpres,  le 
R.  P.  F.  Kiecler,  curé  de  Bouquenom,  donna  l'habit  de  norice 
à  Salomé  MtUler.  Les  jeunes  prince*  et  princesHes  de  Bircken- 
feld  8*étaiMil  empressés  d'honorer  cette  imposante  solennité 
de  lenr  présence  et  s'en  montrèrent  édifiés . 

Les  religiensis  de  Bouqnenom  Itarent  Tobjet  oonstinl  de 
la  sollieitude  des  éTéques  de  Mets,  et,  lorsqu'ellas  enrent 
commencé,  en  178Î,  la  construction  de  leur  cbapeUe  et  de 
leur  cour,  l'évêque  Henri-Charles,  duc  de  Goislin,  y  contribua 
pour  une  somme  de  mille  écus  au  courg  de  France*. 

Le  collège  des  jésuites  que  Louis  XIV  avait  rétabli  a  Bou- 
quenom avait  de  la  peine  à  subsister;  le  duc  Léopold  rem- 
plaça, en  1710,  leur  fondation  en  leur  cédant  comme  dédom- 
magement le  fief  de  Brandelfing,  situé  en  partie  dans  le  comté 
de  Bitcbe  et  en  partie  dans  le  district  de  Saargnemines.  Ce 
oollége  tomba  |ieu  à  peu  et  il  n*était  plos  fréquenté,  lorsque 
les  classes  reçurent,  en  1749,  une  nouvelle  activité  al  uns 
plus  graude  extension. 

Le  duc  Léopold  I"  confirma,  par  décret  du  29  janvier  1721, 
l'établissement  des  religieusss  de  la  congrégation  de  Notre- 
Dame  dans  la  ville  de  Bouquenom^ 

La  protection  que  le  duc  de  Lorraine  accordait  au  culte 
catholique  lui  fit  tain  de*  rapides  progrès,  dans  la  prévôté  de 
Bouquenom,  sur  la  réformatioa  qui  fut  abandonnée  par  la 
grande  majorité  des  habitants;  et,  en  1751,  on  n>  comptait 
plus  que  soixante  familles  luthériennes,  tandis  que  le  nombre 
des  familles  catholiques  s'élevait  à  plus  de  trois  cent  cin- 
quante'. 

La  maison  de  Lorraine  renouvela  plusieurs  fois  ses  préten- 
tions sur  cette  partie  du  comté  de  Saarwerden  qui  avait  été 
reconnue  allodiale  par  Tarrêt  rendu  par  le  tribunal  supréms 

^  Journal  du  curé  Kieder,  aux  archives  de  Saar-UnioA. 

*  Dou  Galmbt,  Notkt  de  Lomme,  t.  VL,  sappl.,  p.  81. 

*  Utnascrit  dté. 


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SAARWERDEM  ET  HERBITZUEIM 


38a 


de  l'Empire,  en  i6t9.  De  leur  côté,  les  prinees  de  la  maison 

de  Nassau-Saarbruck  aspiraient  aussi  à  recouvrer  les  ûefs 
messins  de  Saarwerden  et  essayèrest  d«  faire  valoir  leurs 
prétentions  à  la  Diète  générule  de  l'Empire,  pour  obtenir  la 
révision  de  rarrét  qui  les  avait  dépouillés  du  plus  beau  ileu- 
nm  de  leur  couronne  féodale.  Mais  toutes  leurs  démarches 
demeurèrent  infractoeoses  et  la  maison  de  Lorraine  resta  en 
possession  de  ces  fiefs,  qni  facent  compris  dans  la  cession  de 
la  Lorraine  fiiite  i  la  France  par  le  traité  de  Vienne,  le 
$0  octobre  1785. 

Par  ce  traité,  on  le  sait,  les  duchés  de  Lorraine  et  de  Bar 
furent  cédés,  à  titre  de  souveraineté,  à  Stanislas  Leckzinski, 
roi  de  Pologne,  dont  la  fille  avait  épousé  Louis  XV,  avec 
réversion  à  la  couronne  de  Fr&nce;  mais  Stanislas,  docile  aux 
volontés  de  Louis  XV,  céda  à  la  France  le  gouvernement 
militaire  et  Tadministration  des  deux  duchés,  dont  la  prise  de 
possession  n*ettt  lien  qne  le  81  mars  1787. 

Sous  le  règne  de  Stanislas,  les  protestants  de  Bouquenom 
eurent  encore  de  lourdes  charges  à  supporter;  quoiqu'il  n*y  eût 
point  de  proportion  entre  leurs  biens  et  ceux  des  catholiques,  et 
que  caux-ci  fussent  plus  norabreui  et  de  beaucoup  plus  riches, 
les  protestants  payèrent  plus  de  la  moitié  de  toutes  les  impo- 
sitions; des  corvées,  des  logements  et  des  convois  militaires, 
des  impositions  en  denrées  et  en  fourrages,  proportionnément 
beaucoup  plus  forts  que  ceux  auxquels  élaîent  assujettis  les 
halntants  catholiques,  vinrent  se  joindre  aux  nombreux  sacri- 
fices eiigés  d*eux,  et,  lorsqu'on  reconstruisit,  en  1751,  le 
presbytère  catholique  de  Bouquenom,  ils  furent  chargés  des 
trois  quarts  des  corvées'.  Deux  jeunes  protestants  étant  allés 
s'établir  ailleurs,  on  refusa  de  les  admettre  à  la  succession 
de  leur  père;  il  leur  avait  délaissé  une  maison,  elle  fut 
confisquée  et  donnée  an  conrent  des  religieuses  de  la  congré- 
gation de  Notre-Dame. 

*  Namuerit  dté. 


384  BEYUB  d'alsacb 

Les  bourgeois  Henri  Karcher  et  Nicolas  Kablé,  de  Booqoft- 
nom,  au  nom  et  se  disant  fondés  de  procuration  des  luthé- 
riens de  cette  Tille,  adressèrent,  vers  le  milieu  du  siècle  der- 
nier, aa  procarear-général  du  duché  de  Lorraine,  un  mémoire 
où  ilB  exposèrent  leors  plaintes  et  leafs  doléances;  en  même 
temps  qu'ils  j  dépeignirent,  avee  les  couleurs  de  la  rérité,  la 
vie  paisible  et  laboriease  des  relîgionnaires.  Us  disaient  : 

€  La  religion  (catholique)  ne  sonifre  en  rien,  les  luthé- 
riens ne  font  aucun  exercice  (de  leur  culte),  ils  ne  caoBent 
aucun  scandale  à  personne,  ils  n'entraînent  aucun  catholique 
dans  la  réforme  ou  le  libertinage,  ils  vivent  tranquilles  sans 
ùâce  de  tort  k  qui  que  ce  soit,  ils  ne  forment  aucune  assemblée 
secrète,  on  ne  Toit  aucune  cabale  parmi  eux;  le  curé  du  lieu 
ne  trouve  rien  de  répréhensible  dans  leur  conduite  ;  ils  ne 
s'appliquent  qu'au  travail  et  au  commerce,  et  si  quelques-uns 
d'entr'enz  ont  amassé  des  biens,  ils  ne  le  doivent  qu'à  lear 
industrie,  aux  peines  qu'ils  se  donnent,  à  réconomie  avec 
laquelle  ils  vivent  ;  la  religion  ne  domine  pas  avec  tyrannie 
sur  les  cœurs,  elle  veut  les  gagner  et  non  pas  les  compter*.  » 

Le  roi  Stanislas,  par  son  édit  du  mois  de  juin  1751,  donna 
à  ses  Ëtats  une  nouvelle  organisation  judiciaire  ;  il  établit  à 
Bouquenom  un  siège  de  prévôté,  composé  d'un  prévôt  com- 
missaire-enquêteur et  examinateur,  d'un  lieutenant-prévôt, 
d'un  avocat-procureur  feisant  fimctîon  de  ministère  public, 
d'un  greffier,  d'un  huisrier-audiender,  de  deux  huissiers  ordi- 
naires,  de  quatre  procureurs  et  de  deux  notaires.  Jm  appels 
de  ce  siège  ressortisaaient  au  bailliage  de  Saarguemines . 

Les  jésuites  de  Bouquenom  reconstruisirent,  en  17W  et 
1757,  leur  collège  et  l'église  qui  en  faisait  partie.  Les  bâtî- 
menU  du  collège  sont  vastes  et  soUdes;  le  premier  corps  a 
deux  étages,  outre  le  res-de-cbaussée  ;  le  sscond  n'a  qa'an 

*  La  minute  sans  date  de  ce  mémoire  se  conserve  parmi  le»  doonBMati 
de  la  famille  Kablé. 
'  G&LMBT,  Notkê  de  la  Lorraine,  t.  Il,  suppl.,  p-  1<X* 


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SAARWERDSM  ET  HERBITZHSIM 


385 


éiagQ,  mais  on  a  donné  aux  fondements  et  aux  murs  la  soli- 
dité nécessaire  pour  pouvoir  le  surmonter  d'un  étage.  Au- 
dessus  de  la  porte  d  entrée  se  voit  encore  le  monogramme  deâ 
jésuites:  A.  M.  D.  G.  (ad  mqjorem  Dd  gloriam). 

A  la  mort  de  Stanislas,  arrivée  en  1766,  Boaqàenom  et 
Saarwerden  suivirent  le  sort  de  la  Lorraine  et  forent  réanis 
à  la  France.  Les  jésuites  durent  quitter  Bouquenom;  le  ool- 
lége  subit  une  réorganisation  et  d^autres  maîtres  y  ftirent 
installés;  c'étaient  des  prêtres  séculiers  ;  mais,  eu  1780,  il  fut 
desservi  par  des  chanoines  réguliers  de  la  congrégation  de 
Notre-Seij,'iieur,  qui  s'intitulaient:  Canonici  regularii  collegis 
in  Botuiumm  gymnasiarchi .  Le  roi  Louis  XY  confirma  cet 
établissement  par  lettres  patates  du  1"  août  4768.  On  y 
enseignait  les  humanités  jusqu*à  la  rhétorique  inclosiTement, 
on  y  enseignait  aussi  les  langues  française  et  allemanâe^  Ces 
lettres  patentes  assignaient  aux  prêtres  séculiers  chargés  de 
l'enseignement  des  appointements  et  ordonnaient  aux  admi- 
nistrateurs de  pourvoir  à  leur  subsistance  et  nourriture,  qu'ils 
taxaient  à  la  somme  de  trois  cents  francs  par  an,  que  chaque 
professeur  ajouta  à  ses  appointements.  Le  traitement  du  prin- 
cipal était  fixé  à  onze  cents  livres,  celui  du  professeur  de 
rhétorique  à  neuf  cent  cinquante  li?res,  et  chacun  des  cinq 
régents  avait  un  traitement  de  huit  cents  livres. 

La  paix  de  Ryswick  avait  restitué  à  llimphre  germanique 
le  comté  de  Saarwerden,  fatigué  du  despotisme  de  Louis  XIV, 
sauf  Bouquenom,  le  village  de  Saarwerden  et  la  cour  de 
Wiberswiller,  qui,  comme  nous  l'avons  dit  précédemment, 
en  avaient  été  détachés  comm*  fiefs  messins  dont  la  maison 
de  Lorraine  avait  été  dûment  investie;  elle  avait  rétabli  la 
maison  de  Nassau-Saarbruck  dans  ses  anciens  droits  de  sou- 
veraineté sur  la  partie  allodiale  du  comté  de  Saarwerden  et 
brisé  le  joug  de  sa  dépendance  envers  la  France.  Les  princes 
de  Nassau-Saarbruck,  qui  regrettaient  vivement  k  perte  de 

'  DuRiVAL,  Description  de  la  LorraitiCt  t.  II,  p.  248. 
NooTelle  Séria  —  ?•  Année  ^ 


386 


BEVUE  D  ALSACE 


BoaqnenoiD,  ehef-lien  du  comté  et  siège  de  radministration, 

s'unirent  pour  construire  une  nouvelle  ville  qu'ils  destinèrent 
à  devenir  le  chef-lieu  de  leurs  possessions  et  le  siège  de  leurs 
dicaslères.  lia  bâtirent,  en  1706,  sur  le  territoire  de  Zollingea 
et  la  rife  gauche  de  la  Saar,  vis-à-vis  de  Bouquenom,  la  riile 
de  New-Saarwerden,  qui  fut  appelée  Tulgairement  Neustadt; 
ils  7  firent  des  eonstnictions  dispendieuses  commandées  par 
Totilité  publique.  Os  y  établirent  le  siège  de  leurs  dieastèrei 
et  contribuèrent,  à  finis  communs,  à  la  construction  des  bâti- 
ments néceseaires  aux  services  publics.  Ils  firent  à  la  ville- 
naissante  de  magniûques  dotations  pour  tous  les  besoins  reli- 
gieux et  accordèrent  aux  habitants  qui  s'y  établirent  quelques 
privilèges.  Les  protestants,  que  Tintolérance  religieuse  aviit 
chassés  de  Bouquenom,  de  Saarwerden  et  de  la  Lorraine, 
vinrent  s'établir  dans  la  nouvelle  ville,  refuge  sacré  où  ils 
se  trouvaient  à  Tabri  des  vexations  et  des  persécutions  des 
officiers  lorrains. 

La  construction  de  la  nourelle  ville  Ait  poussée  avec  une 
grande  actiyité;  quatre  années  suùirent  à  l'exécution  de  cette 
magnifique  entreprise,  et,  dès  l'année  1710,  les  autorités  y 
étaient  établies.  L'établissement  de  cette  ville  donna  une 
nouvelle  valeur  au  comté  de  Saarwerden  et  fut  l'événement 
le  plus  brillant  du  XVIII*  siècle  pour  cette  contrée. 

Aussitôt  que  les  princes  de  la  noaison  de  Nassau-Saarbrock 
se  virent  dans  la  paisible  possession  du  comté  de  Saarwerden, 
ils  s*occupèrent  à  briser  les  entraves  qui  gênaient  les  protes- 
tants dans  Tezercice  de  leur  culte  et  à  y  établir  des  paroieseï 
protestantes,  selon  les  besoins  de  la  population,  tout  en  ména- 
geant le  culte  catholique,  là  où  il  était  professé.  Dès  Tannée 
1698,  quatre  paroisses  furent  érigées  aux  quatre  points  les 
plus  éloignés  du  comté,  savoir  :  à  Pistor^  Lorentzen,  Kes- 
kastel  et  Hirschland.  Chacun  des  paateufs  avait  neuf  com- 
munes à  desservir. 

Les  rélbrmés  firançais  qui  s'étaient  réfàgiés  dans  le  comté 


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SAARWERDEM  ET  HBRBTTZHEIM  3g7 

deSaamarden  commençaient  à  respirer  et  purent  ee  Wvret 
librement  à  l'exercice  de  leur  culte.  Ils  construisirent  une 
église  et  un  presbytère  à  Diedendorf  et,  dèi  le  S4  mai  1698, 
M  Samuel  de  Perroudet*  fut  appelé  à  y  ezereer  lea  fbDCtiona 
pastorales.  Pendant  la  oonatroction  de  l'église  et  da  presby- 
tère, le  pastear  logeait  au  château  de  cette  localité  et  y  célé- 
brait le  serrlce  divin. 

Le  temple  de  New-Saarwerden,  dont  la  construction  venait 
d'être  achevée,  fut  inaugurée  le  dimanche  des  Rogations  de 
l'année  17 10,  en  présence  d'un  grand  concours  de  personnes, 
et  le  pasteur  Gustave  He^ren8cl]midl^  de  Pister/,  fat  appelé 
à  la  desserte  de  la  paroisse  qui  avait  été  érigée  dans  la  ville 
naissante. 

Les  princes  de  la  maison  de  Nassan-Saarbruck  établirent  à 
New-Saarwepden  une  Régence  commune  (GeoieifMeiki^iteam/), 
qui  était  à  la  fois  un  conseil  administratif  et  judiciaire,  un 
BaumeiHerthim  ou  Direetornm  pro  raiis  cfmdominialibus  et 
un  tribunal  intermédiaire  entre  les  premiers  juges  et  le  tri- 
bunal suprême  de  l'Empire.  Exercer  la  justice  comme  chan- 
cellerie de  ressort,  veiller  aux  intérêts  de  la  rsligion  et  à  la 
conservation  du  domaine,  surreiller  Tadministration  des  com- 
munes, des  fabriques  et  des  établissements  de  cfaarifé,  prendre 
les  mesures  propres  à  assurer  une  bonne  police,  telle  était  la 
iâcbe  que  les  princes  de  Nassau  imposèrent  au  nouveau 
Directoire. 

L'établissement  de  ce  tribunal  de  ressort,  siège  intermé- 
diaire entre  la  justice  locale  et  la  Chambre  impériale,  fut  un 
grand  bienfait  pour  les  habitants  du  comté  qui  étaient  obligés 
de  recourir  à  la  justice  de  deuxième  instance.  Antérieure- 
ment, ils  souffraient  des  pertes  de  temps  considérables  pour 
chercher  une  juridiction  d'appel  sur  une  terre  lointaine. 

Ce  Conseil  connaissait  aussi  de  toutes  les  aifidres  eontisfo- 

*  Né  en  1667  à  Gex. 

*  n  était  originaire  dUlm. 


888 


BEVIJB  D'ALBAGB 


riales  et  les  maîtrises  y  ressortissaient.  Il  était  composé  d  uo 
grand-bailli  qui  était  à  la  nomination  de  la  branche  de 
Naflsaa-Saarbrack,  d*uo  bailli  dont  la  nomination  appartanait 
à  la  brancho  de  Nasaaa-Weilboarg,  et  d*nn  trésorier  (lom^ 
Khmbet)  qui  était  nommé  par  les  denx  branchée,  et  la  prési- 
dence en  appartenait  altemativement,  pendant  denx  annéis 
consécutives  au  graiid-bailli  nommé  par  le  comte  de  Nassau- 
Saarbnick,  et  ensuite,  pendant  une  annt^e  seulement,  au 
bailli  nommé  par  le  comte  de  Nassau- Weilbourg.  A  ce  Conseil 
étaient  attachés  un  greffier,  deux  arocats,  un  procureur-ÛMîal, 
un  huissier-eergent,  «n  apparitenr  et  trois  sergents-exploi- 
tants. D  y  avait  encore,  à  NewSaarwerden,  nn  médecin,  un 
chirurgien,  un  pharmacien  et  nn  capitaine-commandant  de  la 
force  publique,  lesquels  tenaient  tous  leur  nomination  des 
seigneurs  du  pays.  Il  y  avait  de  plus  un  receveur  des  fiibii- 
qnes  et  des  fondations  religieuses  et  un  greffier  gruyer\ 

Les  habitants  du  comté  de  Saarwerden  et  de  la  prévôté 
de  Herbilzheim  se  plaignaient  des  nombr«uses  impositions 
seigneuriales  auxquelles  ils  étaient  assujettis  et  ne  craigaireat 
pas  de  <  pousser  leur  aveugle  désobéissance  •  jusqu'à  porter 
leurs  griels  à  la  Chambre  impériale  de  Welsiar.  Qiioiqulls  y 
eussent  été  condamnés  par  une  sentence  du  14  août  \  7f  1,  ils  ne 
persistèrent  pas  moins  dans  leur  coupable  résistance  et  réso- 
lurent de  s'opposer  par  la  force  à  rexécution  de  Tarrêt  raidn 
par  le  tribunal  suprême  de  TEmpire.  Lorsque  les  troupes  du 
cercle  du  Haut-Rhin  chargées  d'exécuter  cette  sentence  se 
présentèrent  dans  le  comté  de  Saarwerden  et  la  prévôté  de 
Herbitzlieim,  elles  furent  repoussées.  Cette  audace  inouïe  et 
cette  opposition,  <  réprouvée  également  par  les  lois  divines  et 
par  les  lois  humaines  excitèrent  l'indignation  des  commis- 
sairee  impériaux  qui  rendirent,  le  18  septembre  suivant,  à 
Worms,  une  ordonnance  par  laquelle  ils  arrêtèrent  que  les 

*  Archives  du  Bas-Rhin,  fonds  du  comté  de  Nassaa-Saarwerdeii,  £• 
6130. 


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SAABWËRDEN  BT  HEBBITZaEIM  S89 

htbitaats  da  comté  de  Saarwerden  et  de  la  prérôté  de  Her- 
bîtehcim  seraient  tenus  de  se  présenter,  par  leurs  délégués, 
devant  eux,  dans  l'espace  de  douze  jours,  à  Francfort,  et  de 
l«ur  justifier,  par  des  quittances  en  due  forme,  de  Taequitte- 
ment.  non  seulement  de  toutes  les  impositions  seigneurialss, 
mais  encore  de  tous  les  frais  anzqaels  a?att  donné  liaa  l'exé- 
cution miUtairo  de  la  senlence  de  la  Chambre  impériale; 
Binon,  ils  y  seraient  contraints  par  roie  d'exécution  militaire 
et  par  des  ibroes  suffisantes  à  pîed  e|  à  cheval 

Vers  le  milien  da  XVIII*  siècle,  commença  pour  cette  contrée 
une  ère  nouvelle.  Le  prince  Guillaume-Henri  donna  des  soins 
particuliers  au  culte.  Les  paroisses  calholiques,  comme  les 
paroisses  protestantes  et  réformées,  furent  desservies  d'une 
manière  régulière,  les  misérables  chaumières  se  changèrent 
en  maisons  d'habitation  confortables,  les  impôts  liirent  dimi- 
nué&  Mais  les  habitants  du  comté  de  Saarwerden,  k  l'excep- 
tion de  ceux  de  la  ville  de  New-Saarwerden,  et  ceux  de  la 
prévôté  de  Herbitiheim  étaient  encore  considérés  comme  des 
serfe,  comme  une  adhérence  à  la  glèbe,  et  nul  d'entre  eux  ne 
pouvait  changer  de  demeure  sans  la  permission  de  l'autorité. 
Le  comté  de  Saarwerden  et  la  prévôté  de  Herbitzheim,  quoique 
soumis  à  la  même  administration,  étaient  considérés  comme 
étrangers  l'un  à  l'autre  pour  tout  ce  qui  concernait  le  servage 
de  leurs  habitants.  Aucun  serf  ne  pouvait  aller  d*un  terri- 
toire à  l'autre  sans  payer  un  droit  de  péage,  et  lavouerle  de 
Htrbitsheim  avait  ses  tribus  ou  corporations  entièrement 
séparées  de  celles  du  comté  de  Saarwc^den^ 

Le  prince  Guillaume-Henri,  tout  en  ménageant  les  deniers 
du  peuple,  répara  les  routes  publiques,  veilla  à  la  sûreté  des 
chemins,  encouragea  l  agricuiture  et  remit  en  valeur  les  terres 
abandonnées  et  incultes.  Les  étrangers  accoururent  et  la  popu- 
lation augmenta  d*une  manière  sensible.  Le  nombre  des  pas- 

*  Archives  de  Weyer,  village  du  canton  de  Drnllngen. 
'  Archives  da  Bas-Rhin,  E.  5136. 


«BVUB  D'ALSACE 


leurs  prol«8tant8  fut  porté  à  huit,  celui  dfs  ministres  réformés 
à  quatre  et  cdui  des  curés  catholiques  à  sept.  Le  nombre  des 
instituteurs  prottstants  était  de  vingt-ciuq,  celui  des  réformés 
de  six  et  celui  des  catholiques  égalemeat  de  six.  La  nomlDa- 
tioa  des  ministres  protestaals  et  réformés  tppsrtemât  à  la 
seigneurie  et  ils  touchsient  lear  traitement  sur  les  rerensi 
des  Jkbriiiaes  des  églises.  La  coUatioii  des  curés  catlioUqoeB 
était  réssnrée  à  réTêque  de  Mets.  Les  curés  caihoIiqosB  ne 
touchaient  qu'un  raodiqu§  traitement  de  douze  florins  cinq 
schillings,  recevaient  douze  cordes  de  bois  de  chauffage  et 
avaient  de  modedles  presbytères.  Les  luthériens  possédaient 
toutes  les  églises,  à  l'excepliou  de  celle  da  Kirberg  qui  appar- 
tenait aux  catlioliques;  la  plupart  des  églises  étaient  somnisis 
au  simuUaneum,  soit  au  pn^t  du  culte  catholique,  soit  au 
profit  du  culte  réformé.  L*église  catholique  de  Kirberg  était 
une  filiale  de  Téglise  d'Ohersteinzel  et  desserrie  par  le  cnié 
de  ce  lieu.  Le  curé  de  Boaquenom  desservait  les  églises  de 
Schopperlen  et  de  Rimsdorf .  Les  catholiques  étaient  toujours 
soumis  à  la  juridiction  ecclésiastique  de  levêque  de  Metz. 

Le  comté  de  Saarwerden  et  la  prévôté  de  Herbitzbeim 
avaient  été  possédés  et  administrés  en  commun  avec  la 
branche  de  Nassau- Weilbourg;  mais,  pour  éviter  désormais 
les  tiraillements  et  les  débats  fréquents  auxquels  cette  posses- 
sfon  commune  donnait  lieu  entre  les  deux  branches,  ils  forent 
morcelés  et  partagés,  par  acte  du  27  mai  1745.  Guillaume- 
Henri  en  reçut  deux  tiers  pour  sa  part  et  l  autre  tiers  fut 
attribué  au  prince  Charles-Auguste  de  Nassau-Weilbourg. 

Le  lot  de  Guillaume-Henri  comprenait,  outre  la  ferme  de 
Wiberswiller  et  divers  biens  disséminés  dans  diverses  ban- 
lieues, les  localités  suivantes  :  1°  Altwiller;  2°  Berg;  3"  Bii- 
sert,  4"  Buscherhof;  5»  Btttten;6»  Diedendorf;  V  Domfessel; 
S*  Drulingen  ;  9-  finswiller';  lO*  Eschwiller;  11*  Gœrlingen; 
12*  Harskirchen;  18*  Hinsingen;  14*  Hirschland;  15-  Er- 

*  bi8willer>  village  da  canton  d'Albestrof. 


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SAARWBBDBM  BT  HBaBITZBUK 


m 


berg;  16°  Lorentzen;  17'  Mackwiller:  18»  Metttngen  en  partit; 
19»  Oermingen;  20°  Ottwiller;  Sl^Possdorf  enpirUc; 
willer;  28»  Rexingen  ;  24'  la  censé  Roderhof  et  la  moitié  da 
territoire  dit  Roderbao*;  25-  Siewillar;  86*  SteinEel  en  partie- 
87-  Tbal;  28*  Wiiler;  89-  Weyer;  et  WolfekîrclieD. 

Le  prince  Charles-Âagnste  de  Naaaaa-Weilbourg  reçut 
dtDaeoolotlesoommaDesstilTaiites:  1«  Burbach;  2»  Eywiller; 
8*  Herbitzfadm  ;  4«  Keskistel;  5°  New-Saarwerden  ;  6"  Pis- 
torf;  7«»  Rimddorf;  8"  Schopperleri;  9'  Silzheirn;  10»  Vœller- 
dingen;  et  11°  Zollingen.  Il  forma,  des  localités  qui  lai  étaient 
échues,  le  bailliage  de  New-Saarwerden,  qui  resiortisiait  à 
la  Kégeaca  d'Usingea.  Le  sigillé  de  ce  bailliage  représentait 
le  lion  de  Saarbrack  ayec  cette  légende:  Funt.  Nmm.  WeUb. 
Saarwerd.  Jmbt$,  Le  prince  de  Nassaa  Weîlbonrg  se 
Gomplnt  à  embellir  la  riile  de  New-Saarwerden  et  à  y 
eoostmire  quelques  édifices  commaadés  par  rutillté  publique. 
Ces  embellissements  et  ces  constructions  eurent  l'avantage 
d'attirer  dans  cette  localité  un  grand  nombre  d'étrangers.  Le 
château,  dont  il  voulait  faire  sa  résidence,  ne  fut  pas  acheré; 
la  Révolution  le  trouva  seulemeat  éleré  au-dessus  du  pre- 
mier étage\ 

Le  comte  Guillaume- Henri  de  Nassaa-Saarbmck  fit  da 
village  de  HarskirGhen  le  cheMieu  des  localités  gui  renaient 
de  Ini  être  attribuées  par  le  partage  de  (745.  Il  y  établit  le 
n'égedeees  dicastèrts  et  y  fit  des  constructions  et  des  embel- 
lissements qui  donnèrent  à  cette  localité  l'aspect  d'une  petite 

*  Le  territoire  appelé  Roderbm  dépendait  de  la  baronnie  de  Fénétrange 
et  du  comté  de  Saarwerden,  tant  pour  la  justice  et  les  antres  droits,  fl 
avait  été  divisé  en  deux  parties  lors  de  Tarpentage  général  de  la  baron- 
nie de  Fénétrange  fait  en  17i>5.  L'une  avait  été  attribuée  à  Wiberswiller 

et  l'autre  fut  annexer  ;\  EnswiUer. 

'  Il  a  été  achfîté,  il  y  a  quelques  années,  par  M.  l'abbé  Kœni/î,  curé 
de  Munster,  qui  en  employa  les  matériaux  pour  la  restauration  de  l  égliso 
de  cette  localité  (voir  l'Ancienne  collégiale  de  Munster,  par  AJ.  Arthur 
Benott,  p.  15,  note  11*). 


300 


BEVUE  D'ALBAGB 


ville;  on  y  remarquait  lurtout  l'hôtel  du  bailliage  et  la  pri- 
son. Le  bailliage  de  Harskirchen  ressortissait  à  la  Régence 
de  Saarbruck  et  son  slgUU  représentait  les  armoiries  pleines 
de  Nassau-Satrbruck,  avec  cette  légende:  Nassoo:  Sarb:  Y: 

Depuis  longtemps  le  pont  de  BooqQenom,  qui  reUait  les 
deux  lÎTeB  de  la  Saar,  menaçait  raine  et,  en  1751,  il  fat 
emporté  par  les  eaax.  Le  roi  Stanislas  le  fit  rétablir,  Tannée 

d'après,  par  M.  de  Baligand,  ingénieur^  à  la  grande  satisfac- 
tion des  habitants  de  la  contrée,  et  surtout  de  ceux  de  Bou- 
quenom.  Ceux-ci  avaient  pris  l'habitude  de  traverser  la  Saar 
pour  se  rendre  à  New-Saarwcrden.  où  ils  achetaisnt  la  livre 
de  sel  un  sou  meilleur  marché  qu'au  magasin  de  Bouqnenom. 

Le  comte  Gnillaame-Henrî  fit  pladeurs  voyages  à  la  cour 
de  France  pour  négocier  un  arrangement  définitif  avec  cette 
puissance,  au  sojet  des  prétentions  qu'elle  formait  sur  quel- 
ques-unes de  ses  possessions,  et  échangea  avec  elle  plusieurs 
villages  qui  étaient  à  sa  convenance  contre  d'aulrns  qui,  ptr 
leur  situation  géographique,  formaient  enclaves  dans  les 
comtés  de  Saarwerden  et  de  Saarbruck.  Après  diverses  négo- 
ciations préliminaires.  M.  Mathis,  commissaire  du  gouverne- 
ment français,  et  M.  Stutz,  conseiller  du  prince  de  Nassau- 
Saarbruck,  reçurent  mission  de  leurs  gouvernements  respec- 
tif de  régler  à  Tamiable  tous  les  différends  qui  les  divisaient 
Ils  se  rendirent  à  Bouquenom  et»  grAce  à  leurs  dispositions 
conciliantes,  ils  conclurent,  le  15  février  1766,  relativement 
an  comté  de  Saarwerden,  une  transaction  qui  porte  en 
substance  : 

Le  prince  de  Nassau-Saarbruck  renonçe  à  perpétuité  à  sea 
prétentions  sur  Bouquenom,  Vieux-Saarwerden  et  Wibers- 
wilier;  de  son  côté,  le  roi  de  France  cède  au  comte  de  Nassau- 
Siarbruck  tous  les  droits  qui  compétaient  à  la  Lorraine  sur 

'  Arehives  à»  Star-UnioD,  Registres  dus  délibérations  et  réslemeats 
de  la  ehambro  de  polioe. 


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SAAB^VBRDBN  ST  BBBBUZHBDI 


les  autres  parties  du  comté  de  SaarweKieo,  appartenant  à  la 
maison  de  Naseau-Saarbruck,  comme  proTÎooe  immédiate  de 
Tfimpire. 

Le  comte  Gaillaume-HeDri  cède  et  abandonne  à  la  France 
les  villages  d'Enawiller  et  de  Roderhof,  tons  ses  droita  et  see 
propriétëB  allodialea  à  Hanster,  Wiberewilicr,  Hottingen  et 
Kalbhaosen,  sa  part  de  la  seigneurie  de  Geroldseck'  et  des 
villages  de  Mettingen,  de  Steinsel  et  do  Possdorf,  dépendant 
de  la  baronnie  de  Fénétrange,  et  enûa  tous  ses  droits  sur 
Dreihamhach  et  Rodt. 

Par  coutr«,  le  roi  de  France  cède  au  prince  de  Nassan- 
Saarbruck  les  rillagea  de  BOst  et  de  Bœrendorf,  dépendant 
de  la  baronnie  de  Fénétrange,  tooa  ses  droits  sur  Wolbkirchen 
et  tons  ses  biens  et  domaines  à  Eirberg,  Weyer,  Bfltten  et 
Diedendort  II  est  arrêté  en  ontre  qne  tout  ce  qal  a?ait  appar- 
tenu, dans  le  comté  de  Saarwerden,  à  la  maison  de  Lorraine, 
denendrait  la  propriété  irrévocable  de  la  maison  do  Nassau- 
Saarb^uck^ 

Tous  les  péages  sont  abolis  entre  les  parties  française  et 
allemande  du  comté  de  Saarwerden  et  tous  les  habitants 
auront  la  foculté  d'y  exercer  indistinctement  leur  industrie  et 
d*y  posséder  des  biens.  Le  commerce  est  déclaré  libre  entre 
les  sojels  des  deux  pays  ;  le  libre  exercice  des  deux  religions, 
catholique  et  prolestante,  est  maintenu;  toulafois,  dans  les 
localités  cédées  par  la  France,  les  catholiques  conierreront 
le  droit  de  se  livrer  aux  cérémonies  extérieures  de  leur 
culte. 

Cette  transaction  fut  sanctionnée  par  le  roi  de  France,  le 
11  mars  suivant,  et  par  le  prince  de  Nassan-Saarbruck,  le 
SO  du  même  mois  ;  elle  fut  ensuite  soumise  à  bi  rati0cation 
du  chef  de  TEmpire  et  sanctionnée  par  ce  prince,  le  15  février 

'  Geroldseek  était  l'une  dos  quatre  seigneuries  qui  composaient  la 
baronnie  de  Fénétnmge. 
'  Archives  eommunalM  de  Bibt. 


BBVUB  D'ALBAOB 


1768;  elle  renferme  des  conventions  analogues  au  sujet  da 
comté  de  Saarbruck,  elle  règle  les  limites  précisée  entre  U 
France  et  les  Etats  de  la  maisoa  de  Nassaa-Saarbruck.  Tous 
les  titres  et  docnmeats  relatib  aux  terres  qui  Teoaieat  d*être 
cédées  au  comte  Gaillanme-Henri  fareot  retirés  des  dépôts  et 
remis  à  Georges-Philippe  Lex,  son  fondé  de  pouvoirs,  par 
Léopold-Gharles  Lefebvre,  président,  et  Mathias-Félicien  de 
Hurdt,  conseiller  à  la  Chambre  des  comptes  de  Lorraine, 
les  deux  commissaires  en  cette  partie. 

Avant  celte  convention,  les  habitants  de  Bouquenom  etda 
Vieux  Saarwerden  étaient  assujettis  à  un  droit  onéreux  lors- 
qu'ils faisaient  des  acquisitions  dans  les  possessions  nassauvien- 
uiB,  et  réciproquement  les  Nassannens  pour  leurs  acquisitions 
en  Lorraine.  Le  traité  les  affraneUt  de  ce  droit  et  leur  accorda 
la  liberté  d'acheter  et  de  vendre  dans  les  Etats  respectits  du 
roî  de  France  et  du  comte  de  Nassau-Saarbruck,  sauf  les 
droits  de  mutation  accoutumés,  pour  lesquels  les  sujets  des 
deux  pays  étaient  traités  également  et  sans  aucune  distinc- 
tion. Le  prince  de  Nassau,  jaloux  de  conserver  la  bieuTeillance 
de  son  puissant  voisin,  remplit  avec  le  plus  grand  scrupule 
tous  les  engagements  qui  avaient  été  contractés. 

Âu  début  de  Tannée  1771,  H.  Mathis,  commissaire  général 
de  limites  pour  le  roi  de  France,  fit  remise  an  prince  de 
Nassau-Ssarbruck,  représenté  par  M.  Jérôme-Maximilien  de 
GUnderode,  président  de  sa  Régence  et  son  conseiller  intime, 
des  villages  de  Baerendorf  et  de  BUst.  Cette  ramise  se  fît 
a?ec  beaucoup  de  solennité;  les  habitants  de  chaque  village 
furent  convoqués  et  obligés  de  rendre  hommage  à  leur  nou- 
veau maître  et  seigneur,  et  il  leur  fut  enjoint  de  ne  recon- 
naître d  autre  justice  de  première  instance  que  celle  du 
grand-baUliage  de  Harskirchen,  et  d*autie  Régence  que  celle 
de  Saarbruck*. 

»  Arebives  commuuales  de  Haeieiulorf.  Le  procès-verbal  de  la  remise 
oe  cette  commune  porte  la  date  du  26  jauvier  1771. 


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HAABWBBDBN  ST  BEBBITZHBIM 


385 


Ptr  la  convention  de  1766,  il  avait  été  stipulé  que,  comme 
le  droit  d'aubaine  n'avait  jamais  eu  lieu  entre  les  ËtaU  rM* 
pectifis  du  roi  de  France  et  du  prince  de  Nassau-Saarbrack, 
il  ne  pourrait  y  èire  introduit  à  l'avenir,  et  que  leurs  siiyeta 
respeetift  j  étaient  appelés  à  raeneiUir,  comme  par  le  paaaé, 
librement  et  sans  empéetaement,  toutes  les  snooessions  qui 
pourraient  leur  y  échoir.  Gette  stipulation  fut  de  noufeau 
confirmée  par  une  convention  conclue  entre  les  deux  Etats 
le  19  août  1774». 

Quoique  le  prince  de  Nassau  fit  profession  de  fdi  de  la  reli- 
gion protestante,  il  savait  préférer  son  intérêt  tarritorial,  des 
sujets  nombreux,  In  paix  intérieure,  à  la  raine  satisfaction 
d*un  fanatisme  religieux  qui  eftt  appauvri  ses  terres  ;  il  souf- 
frait dans  ses  Etats  la  religion  catholique  et  montrait  des  dis- 
positions bienveillantes  pour  ses  sujets  qui  professaient  ce 
euUe.  liO  roi  de  France  prit  aussi  à  cœur  les  intérêts  des 
catholiques  de  ce  petit  coin  de  terre  et  conclot,  le  16  décem- 
bre 1766,  avec  le  conile  Guiliaumi-Henri,  une  convention  au 
sujdt  de  la  constructism  de  plusieurs  églises  pour  la  célébra- 
tion du  culte  catholique  dans  ia  partie  du  comté  de  Saar- 
werden  qui  appartenait  au  prince.  De  nouvelles  églises  furent 
bâties  à  Berg,  Ëschwiller,  Hurskirchen,  Lorentzen,  Oermingen 
et  Weyer,  et,  comme  Louis  XV  avait  contribué  par  sa  muni- 
ficence à  cette  construction,  le  choix  de  conserver  Tancienne 
église  ou  de  prendre  la  nouvelle  fut  laissé  aax  catholiques;  ils 
optèrent  pour  l'ancienne  k  Berg,  Harskirchen,  Oermingen  et 
Weyer,  et  pour  la  nouvelle  à  Lorentzen  et  Ëschwiller". 

Les  limites  des  possessions  respectives  de  la  France  et  du 
prince  Charles-Chrétien  de  Nassau-Weilbourg.  pour  le  tiers 
que  ce  prince  possédait  dans  le  comté  de  Saarwerden  et 
ravouerie  de  Herbitsheim,  furent  réglées  par  une  convention, 
conclue  le  S6  avril  1776,  entre  le  sieur  Esprit-Glaude-Pierre 

*  Ordonnances  ^Ahace,  1 1,  p.  838. 

*  KCELLNSB,  Loc.  citât.,  t  I. 


896 


BETUE  D' ALSACE 


de  Sivry,  président  à  mortier  aa  Parlement  de  Lorraine,  fondé 

de  pouvoirs  du  roi  de  France,  et  le  sieur  Jean-Antoine  Rusch, 
conseiller  du  prince  de  Nassau-Weiibourg  et  son  fondé  de 
pouvoirs'. 

Le  roi  de  France  fut  laissé  dans  la  possession  et  la  soufe- 
raîneté  des  yillea  de  Bouqaenom  et  de  Vieux^Saarwerden, 
ainsi  qu'elles  avaient  été  adjugées  à  la  maison  de  Lorraint 
par  la  sentanoe  de  la  Chambre  impériale,  du  16  jaîllat  1689. 

Le  prince  de  Nassan-Weilbourg  céda  au  roi  Tétang  appelé 
Strassenweyer,  situé  aux  bans  deSchopperten  et  de  Bouque- 
nom,  sous  la  condition  que  la  partie  qui  était  située  au  ban 
de  Schopperten  passerait  sous  la  domination  de  la  France. 
Par  contre,  le  roi  de  France  céda  à  perpétuité  au  prince  de 
Nasaau-Weilbourg  l'étang  nommé  le  Glassbuchelweyer,  situé 
au  ban  de  Gastei  (Eeskasiel),  avec  les  terres  et  prés  en  dépen- 
dant. Il  fût  oonvenu  que  le  pont  construit  sur  la  Saar  entre 
Bonqaenom  et  New-Saarwerden  serait  commun  et  mi-partie 
pour  la  propriété,  la  sonveraineté  et  l'entretien,  et  que  Ton 
y  planterait  une  borne  séparative  des  deux  Etats,  à  distança 
égale  des  deux  rives  de  1h  rivière,  dont  le  milieu  formerait 
la  limite  des  deux  souverainetés.  Il  fut  arrêté  que  ledit  pont 
serait  affranchi  de  tout  droit  de  passage,  de  pontenagc,  et  de 
toutes  impositions  quelconques,  que  les  habitanta  de  Bou- 
qnanom  et  de  Vieuz-Saarwerden  jouiraient  de  toute  exemption 
de  péage  et  de  haute  conduite  par  terre  et  par  eau  dans  lis 
lieux  appartenant  au  prince  de  Naasau-Weilbourg,  pour  les 
blés,  grains,  foins,  avoines,  regains,  bestiaux,  vins  et  toutes 
autrea  choses  quMls  achèteraient  ou  chercheraient  dans  toute 
l'étendue  du  comté  de  Saarvverden.  Le  roi  de  France  accorda 
aux  sujets  du  prince  de  Nassau-Weilbourg  l'exempliun  des 
droits  imposés  sur  les  cuirs  qu'ils  transporteraient  d'une 
partie  du  comté  de  Saarwerden  et  da  Tavouerie  de  Herbitz- 

*  ConveiUMm  entre  le  roi  et  le  prince  de  NaeBaMrWeObowrgt  eoneernmt 
(m  Hmiut  de  kure  State  rtepeelifs  Paris,  1776.  in-4'. 


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8AABWBBDBH  ST  HEBBITZHEDI 


397 


heim,  en  panmiit  par  Bouquenom  et  Vieui-Saarwerdcii.  H 
fiit  stipulé  qae  ehacan  Jouirait  de  la  iSumlté  d'acheter  et  de 
Tendre  tels  biens  qu'il  jugerait  à  propos,  et  quMI  pourrait 
rentrer  sa  récolte  librement  et  sans  être  soumis  à  aucune 
formalité. 

Il  fut  arrêté  que  le  droit  d'aubaine  ne  pourrait  être  établi 
dans  les  Etats  respectifs  du  roi  de  France  et  du  prince  de 
Nassau-Weilbourg.  et  que  leurs  sujets  respectif  recueille- 
raient librement  et  sans  empêchement  les  successions  qui 
pourraient  leur  échoir. 

Enfin,  il  fut  stipulé  que  le  droit  dit  Weggeld^  qui  se  percerait 
au  profit  des  communes  pour  Tentretien  du  pavé»  continuerait 
à  être  perçu  et  qu'il  serait  rétabli  à  Bouqnenom  et  i  Vieux- 
Siarwerden,  où  il  avait  été  aboli  en  1739. 

L9  prince  Guillaume-Henri  de  Nassau-Saarbruck,  qu'une 
attaque  d'apoplexie  avait  emporté,  le  24  juillet  1768,  avait 
laissé  ses  Etats  à  son  fils  Louis,  qui  n'avait  pas  encore  l'âge 
de  majorité.  Sa  mère  et  sa  tutrice  naturelle,  Sopbie-Cbriatine- 
Gharlotte-Frédérique-Erdmuthe,  née  comtesse  d*Erbach,  prit 
en  main  le  gouTemail  de  Tadministration  qu'elle  s'empressa 
de  remettre  à  son  fils,  dès  qu'il  eut  obtenu  du  chef  de  l'Em- 
pire une  dispense  d'âge  pour  gouverner  ses  Etats.  Bile  se 
retira  dans  le  château  (Witlumgschhss)  de  Loreatzeii;  elle  y 
contracta  une  intime  liaison  avec  un  jésuite  de  Bouquenom 
qui  la  fit  rentrer  dans  le  sein  de  l'église  catholique.  Elle 
vécut  dans  la  retraite  et  fut  peu  à  peu  oubliée,  n'ayant  auprès 
d'elle  que  qudques  sernteurs  déroués.  Les  érénements  de 
la  Révolution  la  forcèrent  à  quitter  cet  asile  et  à  passer  le 
Rhin;  elle  se  réfugia  ensuite  à  Aschaffenbourg»  où  elle  finit 
ses  jourS)  le  1"  juin  1795. 

Le  prince  Louis  signala  son  règne  par  de  sages  réformes, 
il  s'occupa  du  perfectionnement  des  écoles,  il  encouragea  les 
sciences  et  les  beaux-arts,  réglementa  les  foires  et  marchés  et 
entreprit  la  constroction  de  nouvelles  routes  dans  le  comté 


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106 


BBVUB  D*ALSAOB 


de  Saarwerden.  Enhardis  par  les  premières  concessions  qu'ils 
avmieut  arrachées  au  prince  Louis,  les  sujets  du  comté  de 
Saarwerden  réclamaient  rabolition  des  innombrables  abus 
que  les  siècles  passés  sous  Tempire  da  poaroir  absolu  y  avaient 
implaotés.  Ils  se  plaignaient  d*être  écrasés  sous  le  poids  des 
impôts,  de  la  dime  et  des  droits  féodaux.  Limpôt  du  sang  lear 
était  surfont  odieux  ;  ils  ne  récriaient  contre  Tabus  du  mode 
de  recrutement  qui  «nievait  aux  travaux  des  champs  les  bras 
les  plus  valides,  les  ûls  de  famille,  les  domestiques  et  tous 
ceux  qui  étaient  en  état  de  porter  les  armes;  un  cri  una- 
nime de  réprobation  s'était  élevé  contre  la  mesure  arbitraire 
qui  forçait  les  parents  à  libérer  à  prix  d'argent  leurs  eniants 
du  service  militairs,  quand  'même  ceux-ci,  pour  ne  pas  les 
mettre  dans  la  géne,  manifestaient  Tintention  de  servir  et  de 
vouloir  finir  lenr  temps  sous  les  drapeaux^  Mais  toutes  leurs 
prières,  tontes  leurs  sapplications  furent  inutiles. 

Le  prince  Louis  avait  épousé,  en  1766,  la  princesse  Wllhel- 
mine-Sophie-Eléonore  de  Schwartzbourg-Rudolstadt,  dont  il 
eut,  le  9  mars  17G8,  un  (ils  qui  reçut  les  prénoms  de  Henri- 
Louis-Gtiarles- Albert.  Ce  prince  avait  à  peine  onze  ans  lors- 
que son  père  le  fiança  à  Mademoiselle  Marie-Françoise-Maxî- 
miliennt  de  Saint^Hauris,  princesse  de  Uontbarrej,  fille  du 
prince  de  Mootbarrey ,  ministre  de  la  guerre  du  roi  de  France 
Louis  XVI,  laquelle  avait  déjà  atttônt  Tâge  de  sdze  ans. 
c  Ge  mariage,  dit  le  prince  de  Ifontbarrey*,  présentait  de 
grands  înconvénieuts.  L'extrême  disproportion  d'âge  entrâtes 
deux  futurs  époux  at  la  dilïérence  d^  religion  offrirent  d'abord 
des  obstacles  embarrassants,  mais  le  désir  ardent  que  le  prince 
régnant  paraissait  avoir  de  celte  alliance  les  eut  bientôt 
levés.  ■ 

Les  arrangements  préparatoires  et  les  conventions  entre 
les  parties  furent  bîentdt  terminées.  Gomme  la  princesse  de 

*  Archives  communales  de  Bûst,  n'  9. 
■  Mémoires^  t.  II,  p.  367. 


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BAARW'ERDEN  ET  HERBITZHEIM 


380 


Montbarrey  était  catholique  et  que  le  prince  de  Saarbruck 
désirait  maintenir  dans  ses  Etats  la  religion  protestante  dans 
la  pureté  de  la  confession  d'Augsbourg,  il  publia,  le  25  mars 
1779,  la  loi  de  famille,  qui  stipulait  que  la  religion  é^angé- 
liqiie  était  la  religion  dominante  et  qu'en  cas  de  changement 
de  religioa  de  la  part  du  prince  régnant,  tons  ses  si^jets  qui 
proféssaient  le  protestantisme  seraient  maintenns  dans  leors 
droits,  libertés  et  privilèges,  et  dans  la  joaissanoe  des  biens 
d'église,  des  dotations  et  fondations  pienses,  sans  pouvoir  y 
être  gênés  ni  molestés.  Ce  règlement  pour  la  conî^ervafion  de 
la  religion  évangélique  fut  confirmé  quelques  mois  après  par 
le  prince  Charles-Guillaume  de  Nassau-Usingen  et  le  prince 
Charles  de  Nassau- VVeilbourg  et  accepté  comme  loi  de 
famille  par  toute  la  maison  de  Nassau,  sous  1^  garantie  des 
Etats  protestants  de  rfimpire  et  de  Frédéric-le^  Grand,  roi  de 
Prusse*.  Le  contrat  de  mariage  portait  que  les  futurs  époux 
seraient  mariés  à  Saarbruck,  sous  les  deux  communions  pro- 
testante et  catholique,  que  la  princesse  héréditaire  aurait  le 
plein  exercice  de  sa  religion,  que  les  enfants  mâles  qui  pro- 
viendraient de  ce  mariage  seraient  élevés  dans  la  religion 
protestante  et  les  filles  dans  la  religion  catholique  jusqu'à 
l'âge  de  dix-sept  ans,  et  qu'à  l'expiration  de  ce  délai,  elles 
pourraient  opter  entre  les  deux  religions.  Le  contrat  de 
mariage,  après  qu'il  eut  été  signé,  non  seulement  par  les 
pères  et  mères  des  futurs  époux,  mais  encore  par  les  princes 
chefe  des  branches  collatérales  de  la  maison  de  Nassau,  fai 
présenté  à  la  signature  du  roi  et  de  la  reine  de  France.  Le 
mariage  fut  béni,  sous  la  forme  des  deux  religions,  à  Saar- 
bruck, le  6  octobre  1779,  mais  la  réunion  et  la  consommation 
finale  en  furent  fixées  au  mois  d  avril  1789. 

L'épouse  du  priuce  régent,  Wilhelmine-Sophie-Eléonore  de 
Schwarzbourg-Rudolstadt,  mourut  en  1780,  après  une  longue 
et  douloureuse  maladie,  à  Tége  de  29  ans,  laissant  des  regrets 

>  E<BUJaB,  loe.  eitaL,  1. 1,  p.  473. 


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400 


BEVUE  ^!aL8ACB 


uniyersel8\  Le  prince  Louis  conf racla,  en  1787,  un  mariage 
morganatique  avec  son  ancienne  maîtresse,  Catherioe  Kess, 
de  Fecbingen,  fille  d'un  gardeur  d'oies,  dont  il  existe  encore, 
dit-on,  des  parents  à  Harskirchen.  11  Téleva  tu  rang  de 
baronne  d'Ottwiller.  li  avait  conçn  pour  allé  une  pasaioa 
désordonnée  et  en  avait  eu  plnaienrs  enbnts.  La  mort  de 
la  princesse  avait  laissé  le  champ  libre  à  leurs  amours,  et  la 
belle  maîtresse,  qui  eonservait  la  m4me  ftveur  et  un  grand 
crédit,  Toulut  se  faire  épouser  et  se  faire  reconnaître  pour 
leur  souveraine  par  les  peuples  auxquels  le  princt  comman- 
dait. L'empereur  d'Allemagne,  Joseph  II,  lui  décerna  le  titre 
de  comtesse  d'Ottwiller;  ella  mourut  à  Idannlieun  le  11  décem- 
bre 1829,  à  rfige  de  72  ans. 


Dao.  Fœcmni. 


(La  fin  à  la  prochaine  livraisanj 


*  KcELLKER,  Loc.  cUot.,  1 1,  p.  473. 


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LE  f  OTER  ALSACIEN 

LÉGENDES  ET  TRADITIONS  POPULAIRES 


zn 

UNE  SOIRÉE  AU  HAGENECK 


Ceci  se  rapporte  à  nn  souyenir  du  passé.  Heureux  sourenir, 
toujours  présent  à  notre  nsémoire,  et  dont  l'impression  nous 
reste,  vive,  profonde,  ineffaçable,  comme  un  beau  rêve! 
Rappelons-nous  la  famille  de  Hageneck  réunie  pour  la  cau- 
serie sur  la  terrasse  du  manoir.  Autour  du  chftteau,  les  vieux 
châtaigniers  qui  élèFcnt  dans  l'obsearité  leur  brtDcbige 
dépouillé  à  demi,  annoncent  rapproche  de  l'hiw.  Voyei  à 
Iravara  la  croisée  entr'ouTerte  une  bûche  de  chêne  flamber 
an  foyer  de  ta  grande  salle. Ce  8ofr,cependant,rair  est  si  donx, 
le  ciel  si  pur,  si  calme,  que  chacun  se  sent  attiré  au  dehors 
pour  admirer  le  charme  d'une  nuit  splendide.  Quelle  poésie 
dans  la  scène  I  Devant  nous  le  vallon  s'ouvre  obscur  eu  partie, 
en  partie  éclairé.  Un  de  ses  versants  disparait  dans  Tombre, 
tandis  que  lautre  versant  se  montre  en  pleine  lumière.  Gomme 
cette  lumière  se  reflète  ara  un  éclat  adouci  sur  une  des  liices 
de  la  tour  du  manoir,  en  contraste  ara  Taspect  tout  noir  de 
la  foca  voisine!  Cachée  discrètement  derrière  nndes  sommets 
de  la  montagne,  la  lune  éclaire  la  plaine  jusqu'au  Rhin  bru- 

Noavelld  Série  —  7*  Année.  ^ 


402 


meux.  Nul  bruit  ne  s'élève  des  forêts.  Même  le  ruisseau  se 
tait,  lui  d'habitude  si  babillard.  Tout  le  site  semble  se  recueil- 
lir, pénétré  de  mystère.  L'heure  se  prête  aux  épanchemeots 
intimée. 

Qui  oublie  jamais,  qui  ne  se  rappelle  afee  bonheur  ces 
causeries  ftimilières  o&  la  pensée  s'exprime  simplement  comme 
elle  découle  du  cœur,  sûre  de  trouver  toujours  un  écho  sym- 
pathique 1  Donc,  au  moment  dont  je  veux  parler,  l'entretien 
engagé  aur  la  terrasse  du  Hageneck  excitait  plus  d'attention 
encore  que  de  coutume.  Toute  la  famille  y  prenait  part  avec 
un  intérêt  visible  :  le  baron  Magnus,  son  intime  le  peintre 
Michœl  et  le  Père  prieur,  les  dames  de  la  maison,  même  les 
enflints.  Dans  ce  cercle  affectueux,  la  pensée  était  en  commun 
comme  tout  le  reste.  Tout  le  monde  s'aimait.  Ptinea  et  plai- 
sirs de  chacun  devenaient  le  partage  des  autres.  ITy  a-t-il 
pas  un  ineffable  bonheur  à  sentir  ainsi  les  coears  vibrer  à 
l'unisson?  Si  la  conversation  entamée  provoquait  un  intérêt 
si  vif,  cet  intérêt  s'explique  par  la  grandeur  du  sujet.  On 
s'entretenait  de  l'immortalité,  de  la  vie  future  et  de  la  per- 
sistance des  affections  terrestres  dans  le  ciel.  La  transfigura- 
tion des  attaches  d'iei-bas,  la  f^eité  de  la  vie  à  venir,  i'iffl- 
mortalité,  thème  magnifique  et  grandiose  à  méditer  en  ftM 
de  ce  firmament  splendide,  sous  le  charme  de  cette  nuit  serefaie, 
dont  les  perspectives  inspiraient  comme  un  avant-goût  de 
rinfini.  Ce  fut  Lina,  l'héritière  du  château,  qui  détermina 
l'entretien. 

Lina  venait  de  confier  à  sa  mère  son  intention  de  se  retirer 
au  cloître.  Quitterait-elle  le  foyer  chéri  où  tout  souriait  à  sa 
jeunesse  ?  Âh  I  le  sentiment  de  la  peine  que  causerait  son 
départ  à  toute  la  maison,  la  pensée  de  se  séparer  de  ceux 
qu'elle  aimait  si  tendrement,  dont  elle  était  tant  aimée,  TafOi- 
geait  au  fond  de  fftme.  Mais  plus  fort  devenait  alors  le  mou- 
vement intérieur  qui  la  poussaitEt,  tout  bas,  die  disait  àsa 
mère  et  elle  répétait  en  la  suppliant  avec  une  émotion 


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um  eomÉB  au  BAiaBHBOK 


40B 


contenue  :  «  Mère,  je  n'en  puis  plus.  Il  foat  partir  et  dès 
demain.  »  Sa  mère,  rembrassant,  Ja  dissuadait»  lui  eooseiUait 
de  réfléchir,  d'attendre.  Elle  de  répondre  :  <  Non,  bonne 
mére,  de  grflcel  L*an  passé,  à  pareil  jour,  je  me  promenais 
dans  l'allée  des  châtaigniers  en  méditant.  Jlnterrogetfo  fave- 
nir  et  je  priais.  Je  songeais  au  bonheur  de  ma  vie.  Je  sentais 
la  fragilité  de  ce  bonheur.  Une  tristesse  indicible  troublait 
ma  joie.  La  pensée  de  ne  pouvoir  conserver  à  mon  affection, 
toujours  et  toujours,  ceux  que  j'aime  me  nayrtit  le  cœur. 
Le  sentiment  de  mon  impuissance  en  face  de  Timmensité  de 
mes  aspirations  me  (Usait  le  Wde  dans  rime,  brusquement, 
au  miliett  de  la  plénitude  de  l'exislenoe.  Plus  je  cherchais  à 
assurer  notre  félicité,  plus  je  me  sentais  défidllir.  A  la  vue 
des  feuilles  mortes  tombant  de  leurs  brandies,  sons  nn  soleil 
d'automne,  beau  comme  celui  d'aujourd'hui,  j'apercevais  tous 
les  êtres  chéris  qui  nous  sont  enlevés  de  même,  sans  pouvoir 
les  retenir  contre  ce  cœur  auquel  ils  semblent  cependant  si 
fortement  attachés.  Or,  pendant  que  je  cheminais  absorbée 
dans  ma  douleur,  tout  à  coup  je  m'entendis  appelée  par  une 
Toix  d'nne  douceur  suave  :  «  Je  t'attends,  ma  fille;  j'entends 
tes  prières  j».  Et  d'autres  voix  répétaient  en  ehcrar  :  c  Sœur, 
venez,  le  Seigneur  vous  a  choisie  et  vous  appèUe.  Venes, 
venez  t  »  Ge  concert  de  voix  mystérieuses  m'arrivait  distincte- 
ment, bien  que  je  ne  pusse  apercevoir  personne.  Je  ^entendait 
dans  le  silence  de  la  forêt,  mêlé  au  bruissement  du  vent  dans 
la  cime  des  grands  arbres  et  au  murmure  de  la  source 
auprès  de  laquelle  je  m'étais  assise.  Partout  où  je  vais,  les 
mêmes  voix  me  suivent.  Dans  l'oratoire,  quand  je  prie,  elles 
m*entoureni  Elles  m'appellent  la  nui^  an  milieu  du  som- 
meil. Toi^jonrs  :  «  Je  t'attends,  ma  fille.  —  ScBor,  venei, 
le  Seigneur  vous  a  choisie  I  »  Depuis  trois  jours,  l'appel  est 
plus  pressant,  continu,  irrésistible.  Une  puissance  invisible 
m'entraîne.  Laissez-moi  obéir  et  la  suivre,  poor  la  paix  de 
mon  ftmel  > 


404 


BBVQB  D'AtiSAGB 


Et  la  Jeune  flUe  lemint  m  confidence  a?ec  des  sanglots 
dans  la  wîx  et  eUe  eerra  sa  mère  étonlement  contre  sa  poi- 
trine.  La  mère  comprenail  la  focation  et  s'y  résignait  sans 
plus  dire  un  mot  de  résistance.  Tontes  denx  se  tenaient  la 
miin  dans  la  main,  le  regard  perdn  dans  les  profondeurs  dn 
cial,  image  et  symbole  de  la  cité  bienheureuse  et  aamte,  oft 
it  nV  aura  plus  ni  mal,  ni  deuil,  ni  douleur.  Afin  de  se  con- 
soler d'une  séparation  désormais  résolue  et  définitive  pour 
ce  monde,  elles  éleTaient  leur  âme  fers  ce  séjour  h  remr,  où 
la  pureté  dn  cœur,  la  paix,  l'amonr  mutuel,  régneront  sans 
limite  et  sans  Ûn,  où  ceux  qui  se  sont  rencontrés  ou  aimés 
sur  la  terre  se  ferront  réunis  pour  ne  plusse  séparer.  Seules 
et  sans  témoin,  à  cette  heure  de  la  nnil,  après  le  sacrifia 
accompli  au  fond  du  cœur,  la  mère  et  TenHint  goûtaient  uns 
ineffable  douceur  à  s'abandonner  à  la  volonté  dWine.  OuWlast 
le  passé  et  n'enrisageant  que  l'avenir,  elles  cherchaient  à 
s'expliquer  mutuellement  quelle  devait  être  cette  rie  étemelle 
des  élus,  que  l  obU  de  l'homme  n'a  pas  Tue,  dont  son  oreille 
n'a  pas  entendu  parler,  que  son  cœur  a  tant  de  peine  à  com- 
prendre. Gomme  éllee  étaient  arrivées  à  cette  conclusion  que 
toutes  les  jouissances,  tous  les  plaisirs  des  sens,  toutes  les 
splendeurs  de  la  vie  mondaine,  ne  sont  rien  auprès  des 
délices  de  cette  autre  vie  remplie  d'un  enthousiasme  crois- 
sant, Lina  du  Hageneck  affirma  comme  unique  et  constants 
préoccupation  de  son  existence  Tardent  désir  de  voir  tous  ISB 
siens  réunis  au  sein  de  l'immortalité.  Les  voix  mystérieuses 
qui  rappelaient  lui  promettaient  Timmortolité  et  la  vie  éter- 
nelle pour  les  êtres  chéris  en  récompense  de  sa  retraite.  Ët, 
en  témoignage,  depuis  le  Jour  où  les  voix  célestes  ont  com- 
mencé à  lui  parler,  une  guirlande  d'Immortelles  WanchM, 
fleurs  toujours  fraîches  et  vives,  s'était  épanouie  autour  de 
la  source  sous  les  châtaigniers  du  vallon. 

C'est  sur  ces  entrefaites  que  parut  sur  la  terrasse  le  baron 
Magnus  avec  le  peintre  Michael  et  le  Père  prieur.  A  quelques 


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UNI  80IBÉB  AU  HAOIHIBOK 


406 


pas  aaiTaîent  les  autres  habitués  du  château,  et  un  jeune 
hommeiaeeondé  dans  Tombre  et  venu  depuis  nn  moment  déjà, 
regardait  ie  deL  Magnus  avait  saisi  les  dernières  ptroles  de 
sa  pupiile  Uns  sur  la  merveilieuse  apfiuitlon  deslmmorteiles 
de  la  source.  H  avait  tu  ces  jolies  petites  fleurs  dans  leur 
coin  retiré  pour  la  première  fois  le  matin  même.  Il  avait  été 
surpris  de  les  trouTer,  mais  sans  y  attacher  d'autre  attention, 
et  demanda  à  la  jeune  fille  pourquoi  leur  découverte  la  faisait 
rêver.  Line  répondit  que  les  immortelles  devaient  être  venues 
par  la  main  du  bon  Dieu  ou  des  anges.  Véritable  miracle^ 
signe  de  bonheur  pour  la  maison.  Autrement,  comment  expli- 
quer dans  cette  saison  avancée  répanomssement  subît  de  la 
guirlande  si  brillante  et  si  bellet  Jamais  personne  n'avait 
aperçu  auparavant  de  fleur  en  ce  point  La  mère  de  Una 
croyait  à  un  prodige.  Mais  le  baron  Magnus  secoua  la  tête 
d*un  air  de  doute.  Michael  fit  comme  le  baron.  De  son  côté, 
le  bon  Père  prieur  se  prononça  pour  un  fait  surnaturel.  Lîna 
appuya  les  affirmations  du  Père  prieur  et  de  sa  mère.  Repre> 
nant  la  conversation  de  tout  à  Tbeore,  elle  présenta  les 
Immorteiles  de  la  souroe  comme  un  symbole,  une  image,  un 
gage  de  rimmortalité  et  de  réternelie  vie.  La  splendeur  du 
ciel  présente  à  son  regard  Tinspirait,  et  de  limpression  sccu- 
sée  par  les  magnifiques  perspectives  de  ce  del  physique  elle 
concluait  au  ravissement  des  élus  dans  la  Cité  de  Dieu  pen- 
dant l'éternité.  Une  émotion  religieuse  gagnait  l'assiatance  et, 
au  mol  de  Cité  de  Dieu,  le  jeune  homme  pensif  accoudé 
dans  l'ombre  demanda  à  réciter  une  page  de  Saint-Augustin 
venue  à  sa  mémoire  : 

«Nous  nousélevftmes  plus  haut  et  nous  parcourûmes  tous 
les  objets  matériels,  jusqu'au  del  lui-même,  avec  le  soleil,  les 
étoiles  et  tous  les  astres.  Puis  nous  nous  enibnçftmes  plus 
avant  dans  ces  profondeurs,  continuant  de  penser  i  vous, 
Seigneur,  de  parler  de  vous,  d'admirer  vos  ouvragep.  Enfin 
nous  arrivâmes  à  nos  ftmes,  mais  nous  passâmes  encore  par- 


I 


BBVOB  D'ALB&CB 


deasoB,  pour  atteindre  celte  région  de  la  plénitude  inSnie, 
où  TOUS  nourrissez  étemelleiiient  m  élus  de  Taliment  de  la 
Térité,  où  la  vie  est  la  sagesse  même»  où  tout  oe  qui  existe 
puise  Teiistence,  et  non  seulement  tout  ce  qui  existe,  mais 
ce  qui  a  existé  et  oe  qui  existera,  tandis  qu'elle-même  u*a 
point  de  fieiite,  mais  existe  aujourd'hui  telle  qu'elle  a  été  et 
sera  toujours,  ou,  pour  mieux  dire,  elle  ua  pas  été  et  ne  aen 
point,  mais  elle  est  seulement  parce  qu'elle  est  éternelle. . . 
Et,  pendant  que  nous  pariions  et  nous  élancions  avec  ardeur 
Tors  cette  céleste  contrée,  nous  en  touchâmes  le  bord  d'un 
coup  d'aile  de  notre  ccsur;  et,  après  ces  prémices  de  ?ie  spi- 
rituelles, nous  redescendîmes,  en  soupirant,  à  ces  accents  de 
notre  bouche,  à  cette  parole  humaine  qui  ne  naît  que  pour 
mourir,  souffle  fugitif,  pur  néant,  Seigneur,  auprès  de  votre 
Terbe  éternel,  qui  rit  en  lui-même  sans  vieillir  jamais  et 
qui  renouvelle  toute  chose.  —  Nous  disions  donc  :  Si  une  âme 
pouvait  s'élever  complètement  au-dessus  du  tumulte  de  la 
chair,  se  délivrer  des  vains  fantômes  de  la  terre,  des  eaux, 
de  l'air  et  des  deux,  s'échapper  à  elle-même  en  s'oubliant, 
en  oubliant  ses  pensées,  ses  imaginations  et  ses  rêves,  et  toute 
langue  humaine,  et  toutes  choses  qui  commencent  et  qui 
finissent  (car,  si  elle  les  écoute,  elles  lui  disent  :  Nous  ne  nous 
sommes  pas  fidtes  nous-mêmes,  e*est  TEtemel  qui  nous  a 
créées)  ;  si  donc  toutes  se  taisaient ...  et  qu'alors  cet  Etre 
étemel  lui  parlât  lui-même,  non  pas  par  la  voix  d'aucune 
créature,  ni  même  par  celle  d'un  ange  ou  d'une  nuée  du  ciel, 
mais  directement  lui-même  et  lui  seul,  comme  en  ce  moment 
où  le  vol  de  notre  pensée  nous  a  élevés  jusqu'à  la  sagesse 
étemelle  et  suprême. . .  et,  si  cet  étatse  continuait,  si  cette 
âme  se  sentait  absorbée,  abtmée  dans  le  bonheur  de  sa  sublime 
▼irion,  de  telle  sorte  que  ce  court  mommit,  cet  éclair  d'nifui- 
tion,  après  lequel  nous  avons  tant  soupiré,  fat  pour  elle  une 
▼îe  immortelle,  ne  serait-ce  pas  là  Ta ccom plissement  de  cette 
parole  :  Entre  dans  la  joie  du  Seigneur  ?  * 


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Dm  aOlBÉI  AU  HAflBMBGK 


407 


Lorsque  le  jeune  homme  s'arrêta,  il  m  trouya  avoir  inter- 
prété précisément  l'entretien  de  Une  et  de  sa  mère  lYant 
l'arrivée  de  la  société.  Toutes  deax  lui  envoyèrent  un  sourire 
d'assentiment  pour  le  remercier  d'avoir  si  bien  rendu  leur 
pensée.  Karl  s'inelina  devant  ce  témoignage  auquel  steociait 
aussi  le  Père  prieur.  Le  peintre  Michael  le  félicita  de  s'en- 
tendre si  heureusement  avec  les  dames.  Cette  observation 
laissait  percer  une  légère  pointe  de  malice  plus  sensible 
dans  la  forme  que  fondée  dans  Tintention.  Quant  au  baron 
MagQus,  il  s'étonnait  un  peu  du  mysticisme  de  son  jeune 
ami,  le  savant  de  la  maison.  Que  Line  s'extasiAt  ou  tomb&t 
dans  le  ravissement  devant  Tapparition  mervdllense  de  sa 
guirlande  d'immortelles,  cela  ne  devait  surprendre  personne 
et  tenait  à  sa  nature  de  jeune  fille,  où  prédomine  le  sentiment. 
Mais  un  savant  adonné  à  l'étude  des  sciences  exactes,  occupé 
de  l'observation  de  faits  positifs  et  précis,  qui  vous  récite  et 
vous  interprète  des  textes  des  Pères  de  l'Eglise,  des  médita- 
tions mystiques,  cela  lui  semblait  incompréhensible  et  il  expri- 
mait tout  haut  son  étonnement.  L'entretien  n'en  continua  pas 
moins  sur  le  mémo  thème.  Karl  développa  son  commentaire. 

—  Tous  ceux  qui  ont  aimé,  qui  ont  désiré  la  vérité,  qui  ont 
rêvé  une  (élidté  suprême,  qui  ont  brûlé  du  désir  de  pénétrer 
dans  les  mystères  de  ce  moode,  qui  se  sont  laissé  ravir  à 
toutes  les  étincelles  de  beauté  qu'ils  trouvaient  dans  les  ombres 
d'ici-bas,  tous  ceux-là  ont-ils  songé  sérieusement  à  ce  que 
c'est  que  d'être  admis  à  posséder  réellement,  sans  partage,  la 
vérité  et  le  beau?  S'ils  se  sont  attachés  arec  une  foi  sincère, 
vivante,  à  la  certitude  de  l'avenir  qui  nous  est  promis  et  nous 
attend,  ils  ont  vu  cet  avenir  comme  une  réalité  toute  proche 
de  nous.  Us  savent  ce  que  peut  être  Téclaircissement  de  toutes 
lee  ignorances,  la  perception  claire  de  tant  de  choses  qu'ils 
avaient  soif  de  comprendre,  la  possession  d'une  beauté  infini- 
ment au-dessus  des  images  qui  les  faisaient  languir  de  désir,  la 
pleine  jouissance  d'un  amour  auprès  duquel  les  rêves  les  plus 


4M 


doux  flonl  sBilItiiieDiile  pâles  et  froides  impressions.  Pensona- 
iioas  è  b  léUdté  de  posséder  étemeUemeot  on  objet  sus 
tMhe,  8«D8  fidbteflse»  stns  défidlhmee,  un  objet  wtiBfiûstntl 
la  ibis  tous  les  besoins  da  eœor  et  de  Fespiit»  dePtanoor 

duquel  nous  puissions  jouir  sans  trooMe,  sans  ebangraiea^ 
stns  fin?  Une  pareille  certitude  doit  nous  détacher  de  la  fie 
qui  nous  en  sépare,  et  nous  donner  aussi  par  la  solidité 
d'une  telle  espérance  le  courage  de  tout  supporter.  Que  dis- 
je?  le  ixmbeur  de  cette  vie  et  les  affections  terrestres,  la 
beantâ  passagère  de  oe  monde,  les  faibles  lueurs  de  la  science 
d*id-ba8  nons  èlèrent  on  nons  font  aspirer  de  toute  la  puis- 
sance de  noire  être  à  la  joie,  àla  beauté  et  à  la  sdenoe  infi- 
nies données  par  Tamcor  étemel  dans  le  sein  de  Dieu.  Oui, 
quel  que  soit  l'idéal  que  notre  espérance  ait  placé  an  eîelï 
quand  nous  avons  conscience  que  cet  idéal  est  sorti  de  ce  que 
nous  avons  de  plus  élevé  et  de  meilleur  en  nous,  nous  pou- 
vons avec  assurance  lever  les  yeux  rers  lui,  nous  pouvons  le 
chérir  comme  notre  plus  cher  trésor,  sans  nous  laisser  trou- 
bler par  le  doute.  Le  monde  à  venir,  runirers  invisible  ne 
peut  être  trop  étroit  pour  contenir  oe  que  notre  âme  est 
capable  d'embrasser. 

—  Illusion  poétique,  reprit  Magnus.  Généreux  et  beau  rèfe, 
tout  cela,  inspiration  de  la  jeunesse.  Jeunes  gens,  conssrrss 
ces  illusions.  Soyez  heureux  de  les  posséder.  Puissiez-vous 
les  avoir  toujours  et  rester  aous  leur  charme  dont  je  connais 
la  douceur.  Cette  douceur,  que  ne  puis-je  encore  la  sentir? 
Le  dell  revenir  I  rimmortalité  1  Séduisantes  perspectives 
ouvertes  à  nos  as^rations  à  l'aurore  de  la  vie.  Il  fidt  bon  les 
rappeler  à  quiconque  les  a  éprouvées  un  jour  ou  un  instant 
Cette  belle  nuit  se  prête  au  souvenir.  Hais  est  ssge  réelle- 
ment qui  sait  goûter  la  féh*cité  présente.  Sachons  jouir  de 
notre  bonheur  présent  sans  le  chercher  au  delà.  Pour  qui 
sait  le  trouver,  le  ciel  est  sur  la  terre.  J'en  prends  i  témoin 
le  regard  de  Lina,  plus  persuasif  malgré  ses  rêves  que  les 
iounortelles  de  la  source. 


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mm  B01BÈM  AU  EAGIIOMK  409 

—  Moi,  fit  Lina,  la  terre  ne  me  suffit  pas  et  J'ai  besoin  du 
ciel  où  tendent  tous  les  élans  de  mon  cœur,  et  tel  que  ma  foi 
le  montre,  plus  lieaaque  mes  plus  charmants  rôres.  Si  le  monde 
tenestre  nous  offre  parfois  de  gracieuses  Tisions,  plus  magni- 
fique est  l'attrait  dn  monde  céleste  et  les  joiei  à  venir  me 
sont  garanties  par  la  joie  présente.  Tout  le  bonheur  de  la  vie 
maintenant  tient  au  sentiment  d'affection  qui  nous  unit.  Au 
sein  de  la  rie  éternelle,  ce  sentiment  doit  pénétrer  notre  être 
avec  une  énergie  toujours  croissante  sans  aucun  trouble.  Le 
trouble  dans  cette  vie  vient  d'une  pensée  triste.  L'attache- 
ment que  nous  nous  portons  ne  nous  permet  pas  de  retenir 
les  êtres  ehéris  que  la  mort  nous  enlève.  Yoilà  la  douleur 
Inévitable,  implacable,  dont  Tédat  subit  au  fond  intime  de 
l'âme  refiroidit  ses  ardeurs  et  arrête  ses  élans.  Voilà  pourquoi 
la  vie  terrestre  se  ternit  au  meilleur  moment  et  pourquoi 
nous  aspirons  à  l'immortalité  bienheureuse,  où  il  n'y  aura 
plus  de  séparation  pour  ceux  qui  s'aiment  unis  dans  la  vie 
éternelle  et  s'aimeront  sans  trouble  et  sans  limites.  Ët  ainsi 
la  réalité  du  ciel  surpasse  les  plus  beaux  rêves. 

Karl  sjouta  :  A  ceux  qui  nous  demandent  des  preufes 
et  la  raison  de  notre  confiance  en  l'immortalité,  nous  répon- 
drons qu'il  ne  s'agit  pas  ici  de  démonstration  mathématique 
et  que  les  sentiments  de  notre  cœur  sont  des  arguments  aussi 
légitimes,  tout  aussi  solides  que  les  raisonnements  de  notre 
intelligence.  A  ceux  qui  nous  défendent  d'njouter  foi  au  sen- 
timent sur  le  reproche  de  rayaticisrae,  je  ne  veux  pas  per- 
mettre de  dépouiller  l'âme  humaine,  de  n'y  laisser  vivante 
que  la  seule  raison.  Arrachez-vous  à  l'oiseau  ses  ailes  sons 
prétexte  qu'elles  peuvent  Tégarer  et  que  ses  pieds  sont  plus 
sûrs?  Non  seulement  l'homme  conçoit  l'immortalité,  mais 
encore  il  y  aspire,  it  l'aime,  il  en  a  besoin,  il  la  lui  fout  pos- 
séder. Nous  sommes  donc  en  droit  de  l'affirmer  arec  assu- 
rance, l'immortalité  est  une  réalité  aussi  certaine  que  si 
nous  la  touchions  du  doigt.  Sans  elle,  tout  se  rapetisse,  tout 


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410 


BEVUE  D'AI;.S4CB 


8*obscarcit,  tout  étouffe  dans  les  étroites  limites  de  notre  vie 
présente,  si  incertaine,  si  courte,  dont  la  vanité  éclate  dans 
un  accent  de  désespoir.  Avec  elle,  notre  être  s'élère  el  fl'a- 
grandit,  la  moindre  de  nos  actions,  la  moindre  de  nos  paroles 
a  an  retentissement  indéfini  dont  nons  percevons  rétemel 
écho  et  les  ombres  les  plus  noires  s'éclairent  Ârec  la  croyance 
au  ciel,  la  souffrance  prend  une  signification  et  derient 
répreuYe;  l'homme  a  un  recours  contre  nnjnstice,  contre  la 
tristesse  une  consolation  et  une  épreuve.  Avec  la  vie  à 
venir,  nous  échappons  aux  lois  aveugles,  qui  régissent 
l'aveugle  de8tinée,nous  devenons  ce  que  nous  avons  conscience 
d'être,  les  enfanta  de  Dieu  dont  l'esprit  réside  en  nous,  el  il 
nous  est  donné  par  la  vertu  de  notre  désir,  de  nos  efforts,  de 
fortifier,  d'accroître  en  nons  cet  élément  spirituel  enté  à 
jamais  sur  la  substance  divine,  en  laquelle  nous  vivons  dans 
une  communauté  toujoors  plus  intime  et  plus  glorieuse. 

—  Vous  parlez  du  ciel  comme  des  personnes  qai  en  vien^ 
sent  ou  y  demeurent,  mes  chers  poètes.  Lina,  Karl,  à  vous 
entendre,  on  croirait  boire  à  la  coupe  enchanteresse  de  l'ira- 
mortalité.  La  jeunesse  prend  aisément  ses  rêves  pour  la  réa- 
lité, et,  dans  ses  poétiques  éiaus,  elle  voit  en  beau  tout  ce 
qu'elle  conçoit.  Pour  avoir  connu  cet  enthousiasme,  j*en  ai 
senti  plus  profondément  les  déceptions.  Que  d'espérances  j'ai 
portées  dans  mon  cœur  qui  n*ont  jamais  abouti!  Mais  une  chose 
n'est  pas  par  la  raison  qu'on  la  désire  ou  qu'elle  répond  à 
un  besoin.  Le  besoin  nons  presse  de  tous  côtés,  sous  tant  de 
formes,  le  plus  souvent  sans  moyen  de  le  satisfaire,  en  nous 
laissant  seulement  le  sentiment  de  notre  impuissance  ou  de 
notre  misère.  Misère  de  lame,  impuissance  du  cœur.  Impuis- 
sance du  cœur  que  le  mouvement  de  toutes  les  aspirations 
généreuses  entraine  et  que  resserre  le  conflit  des  confoîlises 
hostiles.  xMisère  de  l'Ame  qui  aspire  à  la  perfection  infinie  et 
qui  s'affaisse  sous  le  poids  de  ses  ûiiblesses.  Au  lieu  du  bon- 
heur poursuivi  sans  relftche,  la  douleur  s'assied  en  maîtresse 


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ONE  ttOIAÊB  AU  HAGSNSGK 


à  notre  foyer  désolé.  Quand  l'idéal  nous  attire,  le  mal  nous 
accable.  La  vérité  que  nous  cherchons  devient  mensonge,  la 
confiance  un  désespoir,  la  vie  un  tourment  Point  d'écho  pour 
la  prière  demandant  secours  ou  délivrance.  Point  de  trêve  à 
noatounDent8.Ëpui8éscl*efibrtBet  au  terme  de  nos  recherches, 
une  expérienee  amère  nous  montre  l«i  hommes  méchants»  le 
ciel  mnetp  IHen  absent.  Si  Diea  existe  et  sll  est  bon,  pourquoi 
Bommes-nons  misérables?  Si  Dieu  manque,  que  derient  rim- 
mortalité? 

Après  ces  paroles  du  baron,  il  y  eut  un  silence.  Un  flot 
d'amertume  lui  gonflait  la  poitrine.  Maintes  fois  ses  amis 
l'entendaient  exhaler  sa  plainte  avec  un  accent  anxieux 
comme  celui  d'un  esprit  qui  s'efforce  de  ramer  sa  foi  éteinte, 
mais  impuissant  à  ressaisir  ses  espérances  perdues.  Garac- 
tère  élevé  et  généreux,  eroyant  par  le  ccsor,  mais  désabusé 
par  rexpérience,  froissé  jasqoe  dans  ses  dernières  fibres  par 
le  speeteele  dn  mal  partout  dominant,  il  ne  pouvait  se  plier 
à  l'idée  d'un  Dieu  bon  et  à  l'action  de  sa  providence,  en 
présence  de  la  malice  des  hommes  ou  des  misères  de  la  nature 
humaine.  Dans  ses  accès  de  mélancolie  sombre,  il  laissait 
éctiapper  et  répétait  Ja  lamentation  désespérée  du  prophète  : 
«  Eh  quoi?  Dieu  nous  conduit I  Et  il  nous  conduit  aux  ténè* 
bras  et  non  à  la  lumière  I  II  tourne  et  retourne  sa  main  sur 
nous,  n  brise  nos  os  et  nous  enveloppe  de  fiel.  U  nous  plonge 
dans  la  nuit  comme  les  morte  pour  rétemité.  Si  je  crie,  si 
je  prie,  il  repousse  ma  prière  ;  il  se  jette  sur  moi  comme 
l'ours  ou  le  lion  sur  leur  proie.  Vous  me  faites  violence,  ô 
mon  Dieu!  0  Seigneur,  est-ce  donc  là  la  vie?  J'ai  perdu  toute 
joie  et  toute  paix.  J'ai  perdu  le  sens  de  tout  bien.  J'ai  dit  :  La 
vie  n'a  plus  de  bat  Je  n'espère  plus  en  Dieu.  >  Lors  de  ces 
mouveroente  d'humeur  sombre,  Magnus  ne  souffrait  point  de 
contradiction.  Mais  il  se  ravisait  de  lui-même  après  un  instent, 
quand  il  craignait  d*avoirfiroissé  Tun  ou  Tautre  autour  de  lui. 
La  bonté  remportait  et  le  ramenait.  Tout  &  Theure  ai  irritable, 


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^  KBVUB  D'ALSACE 

il  reprenait  doucement  :  Est-ce  l'âge  qui  me  refroidit  et 
m'attriste?  Je  ne  sais,  mais  je  Toadraia  que  7008  n'en  éproa- 
vassiez  rien.  L'affection  sur  la  terre,  je  la  oomprenda,  car  Je 
la  vois.  G'eat  an  fait  d'expérience.  Pour  m'ea  assurer,  U  me 
«nffil  de  regarder  autour  de  moi  et  de  sentir  l'attochement 
te  ndens.  liais  quel  gage  ce  bonheur  actuel  donne-t-il  pour 
raT«nir>  La  pensée  de  l'arenir  ne  vient-elle  pas  plutôt 
ternir  la  satisfaction  du  présent?  Quand  arrive  l'heure 
de  la  séparation,  au  terme  de  la  vie,  quand  au  delà  du  tom- 
beau le  vent  aura  balayé  ma  cendre,  comment  nous  retrou- 
ver? L'immortalité,  l'union  éterneUe  arec  tous  ceux  que  nous 
aimons,  je  la  désire  de  toute  la  force  de  meu  ftme.  Seulement, 
qui  me  montre  le  lien  entre  l'être  présent  et  la  destinée 
future?  Où  est  la  certitude  du  revoir T 
^  Autant  Magnas  se  sentait  affecté  péniblement,  autant  Karl 
8'était  animé.  Cet  entretien  agissait  d'une  manière  bien  diffé- 
rente sur  le  seigneur  de  Hageneck  et  sur  son  jeune  protégé. 
Celui-ci  parlait  avec  chaleur  en  s'élevant  jusqu'à  l'en- 
thousiasme. Quoique  d'humeur  taciturne  et  encUn  à  la  mé- 
lancolie, il  s'animait  vite  sons  l'effet  des  objections,  non  pss 
par  amour  propre  ou  pour  Imposer  une  opim'on  personnelle, 
mais  afin  de  fitire  prévaloir  le  juste  et  te  yrai.  Son  caractère 
sexprimait  dans  sa  devise  :  t  S*appuyer  sur  l'obstacle  pour 
s'élancer  au  delà. .  Aussi  semblait-il  rechercher  les  difficultés 
comme  à  plaisir  pour  s'habituer  à  les  vaincre.  Ne  pensez  pas 
d'ailleurs  que  la  vie  lui  ait  ménagé  les  peines.  Le  baron  Mag- 
nus  le  rencontra  un  jour  aux  prise»  avec  une  situation  diffi- 
cîte.  Il  s'intéressa  à  lui  et  de  ce  moment  Karl  devint  l'ami 
du  château.  Mais  écoutons  la  suite  de  Tentietien  interrompu. 

Ce  fut  le  Père  prieur  qui  reprit  d*abord  la  parole.  Le  bon 
Père  regretteil  la  tournure  prise  par  la  discnssiou  :  «  Gom- 
ment pouTons-nous  seulement  mettre  en  doute  la  certitude 
du  revoir,  disait-il,  à  quoi  bon  troubler  notre  quiétude  par 
ua  trop  grand  souci  de  l'avenir? Dieu,  dont  nous  ne  doutons 


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UNE  SOIBÉS  AU  HAGBNECK 


pas,  nous  a  promis  une  vie  future  sans  fin.  En  quittant  ce 
monde,  le  divin  Rédempteur  a  dit  qu'il  allait  nous  préparer  le 
lieu  de  Timmortalité.  Gomment  et  où  sera  ce  lieu,  peu  importe 
maintenant.  La  croyance  ea  son  existence  doit  nous  suffire 
à  toas,  tant  qne  nous  sommes,  et  nos  objections  n'apportent 
pas  la  moindre  lumière  sur  le  mystère  du  elel.  Dès  lors,  il 
Taut  mieux  nous  abandonner  avec  confiance  à  notre  fin.  Pre- 
nons la  yie  ayec  simplicité,  comme  chaque  jour  noos  la  foii 
Que  nous  sert  Tanxieuse  recherche  d'une  vérité  inaccessible 
à  la  faiblesse  de  notre  raison?  Je  n'admets  point  de  contro- 
verse ou  stérile  ou  impuissante.  La  controverse,  non  seule- 
ment n'éclaire  pas,  mais  elle  suscite  le  doute  et  ainsi  devient 
coupable.  L'autorité  de  la  sainte  Eglise  nous  garantit  Tezis- 
ienee  bienbaureuse.  Ne  scrutons  pas  ses  enstignements. 
Vivons  doucement.  Gomme  la  paix  est  une  condition  ou  un 
efifot  de  la  Tie  bienheureuse,  il  dépend  de  nous  de  réaliser  le 
ciel  sur  la  terre  en  possédant  la  paix  dès  à  présent  > 

—  Non  pas  la  paix,  mais  la  lutte,  reprit  Karl.  La  lutte  est 
ici-bas  notre  partage  avant  de  nous  mener  à  la  paix.  Cette 
lutte  pourtant  élève  l'homme  au-dessus  de  sa  nature  et  le 
grandit  par  l'épreuve,  en  le  rapprochant  de  la  nature  divine 
souTerainement  belle  et  juste.  Sans  l'épreuve  qui  nous  oblige 
à  surmonter,  à  réprimer  des  penchants  pervers,  quel  mérite 
aurions-nous  à  nous  laisser  aller  au  cours  d*une  existence 
amollie,  où  rien  ne  pousserait  seulement  notre  liberté  à  se 
manifester  en  choisissant  entre  le  Uen  et  le  malt  Sans  le  mal 
qui  nous  opprime,  quel  motif  nous  amènerait  à  élever  le 
regard  plus  haut  que  terre,  à  aspirer  à  un  état  meilleur  et 
plus  parfait?  Dieu  nous  brise  et  nous  broie,  niais  il  est  bon. 
La  douleur  devient  l'aiguillon  qui  nous  stimule  à  remonter 
vers  le  Père*  notre  principe  et  notre  ûn,  bonté  inGoie  et 
grandeur  suprême,  dont  la  jouissance  ou  la  possession  nous 
donne  le  ciel  et  réalise  le  bonheur  au  sein  de  Téternité.  Rien 
de  créé  ne  nous  rassasie  dans  notre  désir  de  vivre,  pas  plus 


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414 


BEVDB  D*AIi8A0B 


que  dans  notre  passion  d'aimer.  Demandons-le  nous,  pour- 
quoi, dans  notre  cœur  et  dans  les  rêves  de  notre  jeunesse,  ce 
Tide  insondable  où  notre  &me  semble  si  souvent  se  peràre  et 
aTQÎr  froid?  Pourquoi  cette  inconsolable  tristesse  qui  fait  le 
fond  de  tonte  âme  humaine,  dont  le  baron  Hagnus  vient  de 
laisser  échapper  nn  écho,  et  qui  jette  une  plainte  d'autant 
plus  pénible  qu'elle  s'élève  d'une  mer  plus  vaste  et  plus  ora- 
geuse? C'est  que  l'iuûiii  nous  appelle  au  dedans  et  au  dehors; 
c'est  que  nous  entendons  sa  voix;  c'est  que  dans  la  vie  pré- 
sente il  nous  manque.  Tant  que  dure  cet  exil  loin  de  Dieu, 
nous  nous  agitons  sans  trêve,  en  le  demandant  à  tout  avec 
angoisse  et  d'un  cri  désespéré.  Mais  Dieu  est  notre  père  et  il 
nous  attire,  et  sa  possession  devient  pour  nous  l'existence 
céleste  et,  tant  que  nous  sommes,  nous  serons  recueillis  dans 
son  sein.  UEden  n'est  qu'un  symbole,  le  vrai  paradis,  c'est 
le  monde  renouvelé  pour  être  notre  commune  demeure*  Les 
destinées  des  êtres  unis  sur  terre  se  préparent  sous  l'influence 
des  mômes  causes  ;  elles  se  nouent  et  se  consomment  ensem- 
ble ;  la  Providence  se  complaît  à  rassembler  en  ce  monde  sous 
son  regard  ceux  qu'elle  veut  tenir  en  son  sein  dans  l'éternité. 
Ne  craignons  rien,  que  notre  affection  s'affermisse  et  ne  se 
trouble  pas  au  seuil  de  la  mort,  tremblante  devant  les  per- 
spectives d'un  del  plein  de  mystère.  Celui  qni  nous  a  rap- 
prochés comme  les  grains  d'un  seul  é^  saura  nous  garder 
sur  la  même  tige,  et  la  main  qui  devra  nous  cueillir  n'aura 
point  de  peine  à  nous  transporter  ensemble  dans  la  môme 
aire  immortelle. 

Ce  discours  continuait,  lorsqu'une  voix  plus  jeune  et  très 
vive  l'interrompit,  venant  d'une  allée  du  parc:  «  Quelle  idée! 
Gens  sérieux  de  là-haut!  Raisonner  et  disputer  une  nuit 
durant  sur  un  ddt  indiscutable!  Bst-ce  bien  la peinede  perdre 
le  meilleur  de  son  temps  à  se  tourmenter?  Pourquoi  ne  pss 
discourir  plutôt  sur  le  dur  de  lune,  afin  de  constater  si  nous 
ponnions  voir  la  tète  des  diâtaigniers  à  sa  lumière  î  Hub 


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VVM  80IBÉB  AU  HAOEMBCK 


415 


rimmorUlité  et  le  ciel,  mon  simple  sentiment  en  prouve 
l'existence.  Je  désire  le  ciel  et  l'éternelle  vie.  Cela  suffit,  moa 
désir  sera  comblé.  >  Aa  même  instant  parut  sur  la  terrasse 
Anaïs,  sœur  de  Lina,  terminant  son  interruption  par  nn  joyeux 
éclat  de  rire.  Elle  portait  dans  un  pli  de  sa  robe  un  bouquet 
de  fleors  et  tenait  de  Tautre  main  un  gros  chien.  «  Voilà  pour 
les  incrédules  qui  ne  veulent  pas  croire  à  Tapparition  des 
immortelles.  Moi,  je  viens  de  les  cueillir  toutes  fraîches  à  la 
source  de  Lina.  Tenez,  prmiez  tous.  >  Et  se  tournant  vers 
Lina  :  «  Toi,  grande  sœur,  tu  t'en  feras  une  couronne  de 
sainte,  de  mes  jolies  immortelles.  Quant  à  Karl,  il  n'en  aura 
pas  une.  >  Puis  la  fantasque  en&nt  sauta  au  cou  de  sa  mère, 
rembrassa,  Tétreignit,  siffla  son  chien  et  repartit  en  fredon- 
nant 

Pnsque  aussitôt  retentirent  à  travers  les  croisées  ouvertse 
de  la  grande  salle  les  sons  d'une  musique  aux  accents  pres- 
sés, tumultueux,  déchirants,  quelque  chose  comme  un  cri 
d'angoisse  profonde  suivi  d'un  violent  cri  de  révolte.  Puis 
venaient  des  accords  plus  doux,  mais  pleins  d'émotion,  un 
appel  mystérieux,  une  mélancolique  plainte,  des  soupirs  si 
bas  que  la  son  restait  perceptible  à  peine.  Ces  modulations 
s'élevaient  et  s'abaissaient  tour  à  tour,  suivant  le  mouvement 
de  la  sym^onie  et  le  sentiment  qu'elles  exprimaient  Karl 
tressaillit  et  devint  plus  rdvenr.  La  conversation  avait  cessé 
sur  la  terrasse.  Tout  le  monde  se  taisait.  Au  moment  où  la 
musique  s'arrêta,  un  rayon  de  la  lune  effleura  le  groupe  réuni 
sur  la  terrasse  et  jusqu'alors  dans  l'ombre.  Magnus était  assis 
le  front  dans  la  main,  tout  entier  à  ses  pensées.  Lina  avait  l'œil 
fixé  sur  sa  mère,  avec  son  regard  limpide  et  pur.  Michael* 
dans  sa  gaîté  insouciante,  répétait  de  légers  piopos.  L'heure 
avancée  détermina  la  société  à  rentrer,  qudque  la  nuitrestftt 
magnifique.  Quand  Lina  et  sa  mère  passèrent,  Karl  se  détourna 
pour  dérober  une  larme.  «  Lina  priera  pour  vous»,  dit  la 
mère.  Et  te  baron  murmura  :  t  Piuvre  ami  I  > 

Charles  Gbjuk 


NOTES  BIOGRAPHIQUES 

SUR  LBS 

HOfflES  DE  U  RÉVOLUTION 

A 

STRASBOURG  £T  LES  ENVIRONS 


Suite 


BAILLOND  (GHÂBLBS-JoeEra). 

1768.  NéàPussîgny. 

1789.  Etudiant  en  droit  à  Paris. 

1791.  Envoyé  garde-magasin  militaire  à  Strasbourg,  il  6Bt 
reçu  à  la  Société  des  amis  de  la  Constitution . 

7  lévrier  1792.  H  passe  à  celle  des  jacobins,  où  il  est  encore 
inscrit  le  )ib  octobre  1794. 

BAILLY  DE  JUILLY  (Braa^Loins-fiABiiHÉLBiiT), 
officier  de  la  Légion  d*honneiir. 

1760.  Né  à  Troyes. 

1788.  Oratorien  et  professeur  au  collège  de  Juilly;  de  là  sa 
dénomination. 

1790.  Avocat  au  parlement  de  Paris,  et,  peu  de  temps  après, 
administrateur  du  département  de  Seine-et-Marne, 
qui  le  nomma,  eu  1793k  député  à  la  Cionvention  na- 
tionale. 


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LBB  HOIOIBS  D8  LA  tftTOLOTSm 


417 


1793.  Lors  du  procès  Louis  XVI,  ilse  prononça  pour  l'aDDel 
au  peuple,  la  détention,  le  bannissemant  deux  ans 
après  la  paix,  et  ensuite  pour  le  sursia. 

Citoyens,  dit-il  à  ses  collègues  de  la  Convention,  Je  n'examine, 
rai  point  dans  ce  moment  si  vos  comnipttans  vous  ont  déféré  des 
pouTOire  judiciaires^,  niais  je  vous  cil«rai  un  fait.  Dans  Passem- 
în««ïf*'!?  î  «Parteinent  de  Seine^t-Marne,  lorsqu'on  eut 
noBUBé  les  dépotés  k  b  GonvenUon  naiionale,  on  était  si  persuadé 
qu  Us  ne  sfiraieni  point  les  juges  de  Louis  XVI  qu'en  procédinl 
â  la  nomination  du  liaut-juré,  on  eal  soin  dlnviler  les  éiedeun 
à  ne  choisir  que  des  patriotes  fermes  et  intrépides,  parce  que 
on  dit  qu'Us  avaient  A  juger  Louis  Capet.  D'après  ce  fait,  dont 
je  pnmds  à  témoin  mes  collègues,  convaincu  que  la  seule  mesure 
de  Ugallser  la  marcbe  que  nous  avons  suivie  jusqu  ici  est  la 
SMictIon  dn  peuple,  je  dis  :  Oui. 

Mai  1704.  Secrétaire  de  la  Conveution,  envoyé  en  mission 
à  Strasbourg  dans  les  derniers  mois  de  1794.  Il  rendit 
compte  à  cette  assemblée  des  maux  que  la  ville  et 
868  liabitants  avaient  soufferts  pendant  le  règne  de 
la  Terreur,  lui  annonçant  qu'il  avait  éliminé  tous  les 
employés  attachés  à  la  faction  de  Robespeire^  et 
épuré  les  Sociétés  politiques. 
22  janvier  1795.  n  libéra  cent  soixante-deux  honnêtes  dto* 
yens,  retenus  encore  dans  les  prisons  da  Séminaire 
et  de  Phôtel  de  Darmatadt 
6  février  — .  Brasndlé,  anrîen  secrétaire^iiyoint  du  district 
de  Strasbourg»  lui  dénonce  le  projet  de  noyade  dedx 
miUe  Strasbourgeois,  conçu  en  novembre  1793  par 
SainWust,  Lebas  et  autres. 

Bu  Alsao^  il  continua  roBuvre  de  légénération 
commencée  par  son  prédécesseur,  Foussedoire,  en 
ramenant  le  calme  et  la  confiance  dans  uns  ville, 
d'où  Ils  avaient  si  longtemps  été  VMinwia 

De  retour  à  la  Convention,  dans  la  Journée  orageuse 
du  SO  mai  1795,  il  occupa  le  fiiuteuil  en  remplacement 
de  Vemier,  dont  le  grand  âge  ne  supportait  plus  les 
&tigues  de  la  présidence.  En  août  suivant,  il  s'éleva 
contre  Dubois^ncé,  qui  signalait  à  la  GonvenUon 
SMMIa  Séiie  —  r  Année.  tgj 


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418 


BEVUE  D'AL8A.CE 


les  progrès  des  royalistes;  mais,  voyant  les  jacobins 
applaudir  au  discours  de  ce  dernier,  Bailly  se  retourne 
vers  eux,  et  leur  dit  : 

Messieurs  de  la  ci^vant  Montagne,  tous  n'êtes  pas  encore  les 
maîtres. 

n  devint  ensoite  membre  du  Comité  de  sûreté  géné- 
rale» où  il  rendit  de  grands  services  par  sa  modération 
et  par  la  force  de  caractère  qa*il  opposa  constamment 
aux  jacobins. 

21  octobre  1795.  Le  département  du  Bas  Rhin  le  nomma 
député  à  la  Législative.  Il  passa  plus  tard  avec  les 
deux  tiers  des  membres  de  ce  corps  dans  le  Conseil 
des  Cinq-Cents,  où  il  se  rangea  du  parti  clichien. 

4  septembre  1797.  Compris  sur  la  liste  de  déportation,  pour 
ses  liaisons  avec  les  principaux  chefs  de  ce  parti;  le 
député  Malés,  ayant  fstit  observer  que  Bailly  était 
prêtre  assermemU  et  marié,  parvint  à  obtenir  sa 
radiation. 

1798.  Encore  du  Corps  législatif,  il  y  fut  attaqué  par  Gauran, 
comme  un  royaliste  échappé  à  la  déportation  de  sep- 
tembre et  comme  un  lâche. 

9  novembre  1799.  Préfet  dn  Lot;  une  grande  modération, 
la  plus  intégre  probité,  caractérisent  son  administra- 
tion; cependant»  elle  n*a  pas  été  exempte  de  repro- 
ches: des  agents  indignes  de  sa  confiance  le  compro- 
mirent n  se  justifia,  son  honnêteté  était  inattaquable^ 
mais  non  son  administration,  n  Ait  remplacé,  en  1819» 
par  Petit  de  Beauverger.  Retiré  à  la  campagne,  il  ne 
s'occupa  plus  que  de  ses  aflbires  et  de  réduoation  de 
sesenfents. 

1819.  En  revenant  de  Rouen,  sa  voiture  versa.  Il  eut  les 
deux  bras  brisés.  On  crut  le  sauver  par  une  double 
amputation,  mains  en  vain.  H  mourut  à  Tâge  de 
59  ans. 


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LES  HOMMES  DE  LA.  BÉVOLUTIOM 


419 


BAJOT  (J.-F.). 

On  des  quatre-vingt  dix  propagandistes  venus  de  Métz  pour 

répandre»  à  Strasbourg,  les  idâes  révolutionnaires. 
18  octobre  1793.  Signataire  du  procès-verbal  des  maiimes 

étemelles»  qui  ont  électrisé  les  Strasbouigeois  dans 

le  temple  de  la  Raison. 
90  novembre  — .  Membre  de  la  Société  des  sans-culottes^  il 

signe  une  adresse  aux  représentants  Baudot  el  Le- 

mane  ainsi  conçue  : 

Le  |}euple  de  celle  grande  dié  savoure  eofln  les  délicieux  fruits 
de  11  vérité;  il  se  porte  ea  foule  dans  le  temple  qui  lui  est  con- 
sacré, pour  entendre  ses  donx  aoceos.  Le  temple  n*est  plus  assea 
vaste  poiir  le  contenir  commodément,  celui  de  Saint-Thomas  est 

tr;>s  propre  pniir  un  (Hablisseraenl  aussi  utile;  ainsi,  les  repré- 
senUaits  sont  invités  de  lui  accorder  ce  Io<.al,  el  de  lui  délivrer 
un  mandai  sur  le  coffre  des  riches  aristocrates  pour  faire  les  frais 
qui  y  seront  nécessaires. 

Lesdits  représentants  aiTôtent  que  le  temple  de 
Saint-Thomas  servira  dorénavant  aux  séances  de  la 
Société  populaire. 

Quelque  temps  après,  Bajot  s'adresse  de  nouveau 
aux  mêmes  représentants  pour  obtenir,  pour  ladite 
Société,  le  temple  des  réfonnos,  GrandYue  du  Bou- 
clier, Saint-Thomas  étant  trop  petit  et  peu  commode. 
Les  représentants  adhérent  à  la  demande. 
2  décembre  — .  Il  sif^ne  la  proclamation  de  la  propagande 
révolutionnaire  aux  citoyens  de  Strasbourg  et  des 
deux  dépai'tements  du  lihin,  leur  apprenant  que  lui 
et  ses  frères  sont  venus  pour  les  sauver  et  leur  pré- 
senter la  vérité  sur  les  dangers  qui  les  entouraient. 

BALDN£R  (Jean-Daniel). 

1775.  Né  à  Strasbourg,  où  il  était  étudiant 
1798.  A  ràge  de  18  ans,  employé  dans  les  bureaux  de  la 
commune. 

20  septembre  1794.  Membre  du  dub  des  Jacobins  aulfiroir, 
dissous  trois  mois  après. 


4S0 


BEVro  D'ALSACE 


BALLET. 


8  novembre  1793.  Gendarme  de  la  compagnie  sédentaire  à 
Strasbourg,  le  Comité  de  sûreté  f^énérale  du  Bas-Rhin 
ordonne  à  la  Caisse  de  la  trésorerie  révolutionnaire 
de  lui  payer  250  livres  pour  récompense  de  sa  dénon- 
ciation. 


Septembre  1792.  Député  à  la  Convention  nationale  pour  le 
département  de  la  Moselle.  Il  si^ea  constamment  au 
sommet  de  la  montagne. 

1798.  LorB  du  procès  du  roi,  'sur  la  question  :  Y  aurOrtrU 
appà  au  peuple?  il  déclare  que,  ne  voulant  pas  voir 
son  pays  désolé  par  la  guerre  civile,  il  dit  non.  Sur  la 
peine  à  infliger  à  Louis  XYI,  il  répond  froidement  la 

mort»  tout  en  repoussant  le  sursis 

A  la  fin  de  cette  fatale  années  il  fût  envoyé  en  mis- 
sion à  rarmée  du  Nord  et  dans  les  départements  de 
la  Hosélle  et  du  Bas-Bhîn. 
5  janirler  1794.  Arrivé  à  Strasbourg,  il  organise  un  Comité 
de  surveillance  de  douze  membres,  pris  parmi  les 
sans-culottes  les  plus  exaltés,  qui  fxA  spédalement 
chargé  de  prendre  et  d^exécuter  toutes  les  mesures 
de  sûreté  générale  qu'exige  la  répression  des  entre- 
prises des  ennemis  du  peuple  et  de  la  libertA 

11  fait  arrêter  Grimmer,  pour  avoir  dilapidé  les  reve- 
nus et  les  propriétés  nationales  pendant  qu'il  était 
agent  du  district  de  Wissembourg. 

Dans  cette  petite  ville,  il  fit  de  notables  change- 
gements.  tant  au  district  que  dans  la  municipalité. 
Comme  à  Strasbourg,  il  y  installa  une  commission  de 
douze  membres,  pris  dans  le  sein  des  jacobins,  pour 
Taider  dans  ses  projets. 

Plusieurs  membres  de  l'ancien  district  furent  con- 
duits et  emprisonnés  à  Strasbourg;  les  municipaux 
Bartholdi,  Ulrich,  Musculus  et  Heidenreich,  transférés 


BÂR  (jBAN-EnBNNB). 


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LES  HOMMia  DB  LA  RàVOLOTIOH  4gl 

ai  toute hflte  à  Paris,  portèrent  leurs  têtes  sur  Técha- 
aud,  peu  avant  la  chute  de  Robespierre. 

A  Landau,  il  sévit  de  môme,  et  après  avoir  exécuté 
toutes  ses  cruautés,  il  retourna  à  Paris,  occuper  le 
POT*e  de  secrétaire  à  la  GonvenUon  après  ie  27  juillet 

Hus  tard,  il  proposa  à  la  Convention  nationale  la 
Ration  du  jugement  de  la  Commission  militaire  de 
Rochefort  contre  le  représentant  Déchézeau  et  por- 
tant la  peiJie  de  mort.  Il  demanda  aussi  què  toute 
radiation  de  la  Uste  des  émigrés  fût  suspendue. 
8  octobre  1795.  Il  entra  au  Conseil  des  Anciens  avec  les 
deux  tiers  des  membres  de  la  GonvenUon,  'poop  dis- 
paraître ensuite  de  Thorizon  politique. 

BARBAT  (Frédéric). 

1766.  Né  à  Chadelay,  département  de  risôre. 
1789.  Professeur  à  Chadelay. 
1791 .  Chef  de  brigade  à  Strasbourg. 
7  février  1792.  Membre  du  club  des  jacobins. 
25  octobre  1794.  Trois  mois  avant  son  épuration,  encûce 
inscrit  comme  tel. 

BARBIER  (Louis-LAuaENT-GAMiLLB). 
1758.  Né  à  Strasbourg. 
Avant  1789.  Homme  de  lettres. 

Avril  1790.  Reçu  membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Cton- 
stitution.  n  était  alors  premier  commis,  suppléant  le 
secrétaire  général  de  radministration  départementale 
du  Bas-Rbin. 

Novembre  1702.  D  remplace  Hoffinann  comme  secrétaire 
général  de  cette  administration;  poste  quil  conserva, 
à  peu  d'années  pràs^sous  tous  les  régîmes  qui  se  sont 
succédés  Jusqu'en  1890.  U  n>  a  pas  une  seule  pièce 
importante  qui  ne  porte  sa  signature  pendant  les 
années  de  la  Révolution. 

33  novembre  170a.  Le  Comité  de  surveillance  et  de  sûreté 


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4SU  R1CVDE  d'als&gb 

générale  duBas-Rhin,  présidé  par  Monet,  lui  acconia 
le  certificat  de  déisme. 
36fêviier  1794.  Ennemi  Juré  d*Euloge  Schneider,  ayec  FSeasé, 
secrétaire-adjoint  de  radministration  du  Ba&>Bhin,  il 
rédige  un  pamphlet  contre  l'ex-accusateur  public,  et 
dans  lequel,  nous  dit  le  révolutionnaire  J.-D.  Wolff, 
ff  on  passe  d'une  accusation  à  une  autre  sans  rien 
prouver  » . 

Ce  pamphlet  fiit  adressé  en  forme  de  lettre  an 

Comité  de  salut  public  de  la  Convention  nationale, 

par  les  administrateurs  du  Directoire  du  Bas-Rhîn. 
C'était  une  réponse  aux  mensonges  et  aux  impoe* 
tures  répandus  diuis  un  écrit  de  Schneider,  adressé 
de  TAbbaye  à  Robespierre  aine,  le  6  février  1794. 
25  mai  — .  Le  club  des  jacobins  le  fait  figurer  sur  une  Me 
de  soixante-dix-sept  suspects, 
mars  1796.  Président  de  l'administration  centrale  du 
Bas-Bhin. 

1798-  1799.  Juge^ppléant  au  tribunal  civil  de  Strasbourg. 

1799- 1800.  11  est  juge. 

1800-  1801.  Secrétaire  général  à  la  mairie  de  Straabouïg,  poste 

quil  conserva  jusqu'en  1B30. 

BABDEL  (La  dtoyenne), 
connue  sous  le  nom  de  Bariblbb,  Grandiras  de  la  Grange, 

n'il. 

10  décembre  1793.  Avec  la  citoyenne  Rœgner  du  n'  28,  elle 
se  présente  au  Comité  de  surveillance  de  la  Société 
des  jacobins  pour  l'informer,  qu'Anne  Stassellieydorfifi 
fripière,  qui  a  obtenu  un  certificat  sûreté,  n'est  que 
l'espionne  des  aristocrates  et  des  prêtres  réfractaires. 
La  femme  Metz  et  sa  fille,  du  n"  11,  la  Ruprecht  et 
Saget,  du  n"  10,  attesteront  les  faits. 

La  dénonciation  est  envoyée  au  Comité  de  surveil- 
lance et  de  sûreté  générale  du  Bas-Bhin,  qui  lit  enfer- 
mer rinculpée  au  Lycée. 


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UBS  HOMMES  DB  LA  BftVOLUnOK 


42S 


BâRDOT  (Jean). 

1758.  Né  à  Sézanne,  département  de  TÂube. 
Ayant  1789.  Aubergiste  à  Sézanne. 

1793.  Arrivé  comme  militaire  à  Strasbourg»  il  est  reçu  aux 
jacobins. 

d5  octobre  1784.  H  y  est  encore  inscrit 

BARTHOLMË  (Jean-Jacques). 

1768.  Né  à  HeUigenstein. 

Avant  1789.  Tonnelier  à  Strasbourg. 

21  janvier  1793.  Nommé  notable  de  la  commune. 
8  octobre  et  5  novembre  — .  Maintenu. 

24  mars  1794.  Avec  Lâemmermann,  il  dénonce  au  Comité  de 

sûreté  générale  du  Bas-Rhin  le  cafetier  Biedling,  au 
Foele  des  Tonneliers,  comme  un  aristocrate  fiefifô, 
chez  lequel  il  se  tient  des  conciliabules  nocturnes. 

80  janvier  et  23  avril  — .  Proclamé  notable  du  Conseil  géné- 
ral de  la  commune  par  la  Société  des  jacobins,  dont 
il  était  membre  depuis  avril  1793^ 

26  octobre  — .  D  y  est  encore  inscrit  comme  tel. 

BAST. 

Décembre  1793.  Employé  dans  les  bureaux  du  Comité  de 

surveillanoe  et  de  sûreté  générale  du  Bas-Bhin. 
14  décembre  — .  U  touche  150  livres. 

25  décembre     Avant  de  se  séparer,  ledit  Cïomité  lui  &it 

encore  payer  75  livres  sans  autre  indication. 

n  était  membre  du  dab  des  jacobins;  mais  le  25 
octobre  1794,  il  n*y  était  déjà  plus. 

BATAUT  (Glaude-Pierre-Puilibert). 

1784.  Né  à  Ghâlons-sur^ône. 
Avant  1789.  Il  y  était  écrivain. 

Après  1789.  Employé  à  l'hôpiUil  militiiire  de  Strasbourg,  il 
se  fait  recevoir  aux  jacobins  le  11  novembre  1793. 


4M  BBVUB  d'albaoe 

BAUDOT  (Marg-Antoinb). 

1789.  Médecin  à  Gharolles.  Il  abjura  son  éftat»  comme  étant 
entàché  de  charlatanisme. 

1791.  D6pat6  suppléant  à  rAssemblée  législative  pour  le 

département  de  Saône-et-Loire. 
Septembre  1793.  Député  à  la  Gonyantion  nationale. 
Octobre  — .  D  demande  un  décret  d^ceusatlon  contre  Mau- 

ry,Dillon,  Courvoisieret  de  Cîhoiseul-Gtouffier,  comme 
ayant  correspondu  avec  les  frères  de  Louis  XVL 
15-19  janvier  1793.  Il  vota  la  mort  de  Louis  XVI  et  Texécu- 
tion  dans  les  vingt-qnatre  heures.  Il  refusa  l'appel  au 
peuple,  ainsi  que  le  sursis. 

Lors  de  la  révolution  du  31  mai,  il  était  en  mission 
à  Monta uban,  avec  ordre  de  suspendre  les  autorités 
constituées  de  cette  ville. 

Envoyé  comme  commissaire  de  la  Convention  à 
Tannée  de  Rhin-et-Moselle,  il  déploya  toute  sa  sévé- 
rité contre  les  émigrés  et  les  prêtres»  et  fit  incarcérer, 
à  Metz  et  à  Strasbourg,  un  grand  nombre  de  ces 
citoyens. 

9  novembre  — .  H  lança  son  premier  sôrôté  aux  Stra8bou^ 
geois  : 

Les  actions,  les  manières,  le  style,  tout,  dans  une  république, 
doit  porter  Tempreinfe  la  liberté.  Les  plirasos  longues  appar- 
tiennent au  régime  des  monarchies,  le  laconisme  est  le  propre 
d'une  république. 

Dix  lignes  suffisent  et  au-delà,  pour  chaque  objet  d'une  pétfliol. 
Cens  qui  eo  écriront  davantage,  seront  suspectés  de  vouloir  netln 
des  longueurs  à  la  révolution,  etc. 
18 novembre— .  H  ordonne  que  les  vins  desridies  deStias» 
bourg  sont  mis  en  réquisition  pour  les  hôpitaux  mili- 
taires; la  municipalité  et  douze  braves  sans-culottes, 

nommés  par  la  Société  populaire,  feront  cette  nuit  les 
visites  domiciliaires. 
19  novembre     n  Informe  son  ami  et  collègue  Charles 
Duval,  que  c'en  était  fait  de  l'esprit  public  sur  la  rive 
du  lOiin,  sans  les  opérations  révolutionnaires  de  Saint- 


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LS8  HOMMES  DB  LA  BÉVOLUTION 


4^ 


Just  et  Lebas,  lesquels  ont  donné  Télan  patriotique, 
qui  doit  amener  les  idées  et  les  actions  des  habitants 
au  niveau  de  la  liberté  et  de  Tégalité,  que  Tannée  du 
Rhin  et  celle  de  la  Moselle  font  merveilles,  que  la 
fusillade  continue  près  de  Strasbourg  et  que  tout 
annonce  joie  et  succès.  Passant  aux  Sociétés  popu- 
laires dos  départements  voisins,  elles  ont  envoyé  des 
propagandistes  trempés  au  fer  chaud  du  père  Du- 
chesne,  pour  régénérer  la  ville  de  Strasbourg.  L'es- 
prit public  gagne  chaque  jour  par  leur  zèle  et  leurs 
lumières  ;  les  harangues  d'un  côté,  la  guillotine  de 
Tautre,  font  espérer  un  succès  complet. 

Il  termine  en  se  plaignant  des  juifs,  qui  auraient 
dû  se  dévouer  entièrement  à  la  cause  de  la  liberté. 
Ils  ont  trahi  dans  plusieurs  endroits,  et  Ton  serait  en 
peine  d'en  compter  dix  reconnus  patriotes  dans  les 
deux  départements  du  Rhin.  Il  demande  s'il  ne  con- 
viendrait pas  de  s'occuper  â*une  légénération  guillo- 
tinière  à  leur  égard. 

90  novembre  1793.  Il  assiste ,  en  grand  costume,  à  la 
fôte  de  l'Être  suprême,  dans  le  temple  de  la  Raison. 
Son  discours  félicite  le  peufile  d'ôtre  délivicé  de  la  ter- 
reur et  de  la  tyrannie;  il  montre  le  prôtre  tovgours 
d^acoord  avec  le  tyran  pour  enchaîner  le  genre  hu- 
main, et  abusant  du  nom  du  del,  pour  empêcher 
l^omme  d'uHer  des  droits  de  la  nature.  Le  peuple 
ddt  employer  tous  ses  moyens  pour  compléter  Tobu- 
vre  de  la  Révolution.  Pendant  son  discours,  une 
masse  de  reliques  et  dUndulgenoes  fàrent  brûlées 
devant  un  autel  dressé  à  cet  effet  De  là,  on  se  rendit 
sur  la  place  de  la  Responsabilité  (du  chftteau),  quinze 
chariots  de  vieux  titres  furent  livrés  aux  flammes,  les 
e£Qgies  des  despotes  ecdésiastiques,  qui  ont  régné 
dans  Strasbourg,  purifieront  par  cet  auto-da-fô  une 
atmosphère  qu'ils  avaient  souillée  pendant  leur  vie. 

93  novembre  — .  Au  dub  des  jacobins,  il  parle  contre  la 
tyrannie  des  rois,  il  tonne  contre  les  scélérats  qui 


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*  496  BBVUB  D*ALaAGB 

regrettent  Tancien  régime;  il  invite  ceux  qui  enten- 
draient le  moindre  discours,  qui  verraient  le  moindre 
signe  en  iàyear  de  la  royauté,  «  à  poignarder  sur  le 
dtomp  ceiix  qui  seraient  coupables  de  ce  forfaU  » . 

28  novembre  1793.  Informé  par  le  général  Dièdie  qoe  les 
communes  de  Molsheim,  Mutzlg  et  autres,  étant  inCpo- 
tées  d'aristocrates,  méritent  la  plus  grande  sorveilr 
lance,  il  nomme  8iû>le-champ  deux  commissaires,  à 
Teffet  de  remplir  la  demande  du  général 

C'est  à  peu  près  à  cette  date  qu'il  accorda  les  tem- 
ples de  Saint-Thomas  et  des  léùxméB  aux  séances  de 
la  Société  populaire. 

S4  novembre  — .  Sur  la  demande  des  jacobins,  il  ordonne 
que  les  douae  sections  de  la  ville  ne  seront  plus  assem- 
blées en  permanence,  mais  seulement  dans  les  cas 
prévus  par  la  loi. 

6  décembre  — .  Aux  jacobins,  il  développe  les  grandes 
mesures  que  Ton  doit  prendre  dans  un  instant,  où  la 
terreur  est  à  Vcrdre  du  jour,  et  il  menace  ceux  qui 
s'y  refuseraient  de  la  hache  qui  est  suspendue  eut  la 
Ute  des  pervers . 

9  décembre  — .  Il  continue  sa  thèse  menaçante  sur  le 

même  ton. 

13  décembre  — .  A  7  heures  du  soir,  quelques  patriotes  s'é- 
taient rendus  chez  lui,  pour  Tinformer  des  atrocités 
commises  par  Ealoge  Sclnieider  et  des  projets  qu'il 
nourrissait.  Frappé  du  poids  et  de  la  vérité  de  ces 
dénonciations,  il  promit  de  le  suspendre  dès  le  lende- 
main et  de  le  mettre  en  état  d'arrestation  à  20  lieues 
des  fontières.  Cette  promesse  allait  s'accomplir,  quand 
Saint-Just  et  Lebas  arrivèrent  inopinément  à  Stras- 
bourg et  firent  arrêter  Tex-accusateur  ilans  la  nuit. 

22  décembre  — .  Ce  sont  des  chaussures  pour  la  troupe  qu'il 
met  en  réquisition  chez  les  riches. 

10  janvier  1791.  Il  fait  arrêter  Gotta,  Martin,  Boch,  Buten- 

schœn,  Wolff,  Jung,  Massé,  Vogt,  Glaner,  Dauin  et 
Bergbauer. 


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LES  HOMMES  DE  LA  BÉTOLVTION 


427 


22  janvier  1794.  Il  fait  remettre  par  le  receveur  de  l'emprunt 
sur  les  riches  égoïstes  de  Strasbouri?,  245  livres  à 
Rousseau,  chef  de  bureau  au  département  des  Vosges, 
envoyé  à  Metz  pour  mesurf's  de  sûreté  publique  et 
de  propagation  de  principes  révolutionnaires, 
janvier  — .  Il  requiert  les  autorités  civiles  et  militaires  de 
Strasbourg  de  M  foomir,  dans  les  vingt^iuatre  heu- 
res,  une  liste  de  tous  les  détenus  dans  les  maisons 
d'arrêts,  de  fidre  placer  des  sentinelles  à  toutes  les 
portes  desdits  lieux,  et  d'arrêter  tontes  lettres  ou  bil* 
lets  envoyés  aux  détenus  ou  par  eux  adressés. 

35  janvier  — .  n  ordonne  im  échange  de  dixmillions  enassi- 
gnats  contre  pareille  somme  en  espèces  :  savoir,  trois 
millions  argent  à  fournir  par  Strasbourg,  le  surplus 
per  le  département.  L*écliange  doit  être  terminé  dans 
la  décade. 

Le  même  jour,  il  crée  une  Commission  de  sfac  mem- 
bres, ayant  pouvoir  de  rendre  des  jugements  exécu- 
tables dans  les  vingt-quatre  heures,  et  dtms  les  lieux 
qu^elle  désignera  comme  les  plus  susceptibles  d'avoir 
sous  les  yeux  des  exemples.  Elle  était  ambulante  en 
Alsace. 

2  mars  — .  De  retour  à  la  Convention,  il  est  élu  secrétaire. 

27  juillet  — .  On  renvoya  à  l'armée  des  Pyrénées  orientales, 
où  il  resta  jus(îu'au  niuis  de  mai  1795.  A  son  retour, 
il  eut  connaissance  du  décret  qui  le  mettait  en  état 
d'arrestation.  Il  se  retira  en  Suisse  et  de  là  à  Venise, 
où  il  séjourna  jusqu'après  le  25  septembre  1795,  pour 
ensuite  remplir  les  fonctions  de  chef  de  division  au 
ministère  de  la  guerre  sous  le  général  Bernadette, 
devenu  roi  de  Suède.  Retiré  dans  ses  foyers,  il  reprit 
sa  profession  de  médecin.  Pendant  les  Cent  jours,  il 
remplit  une  courte  mission  en  Bretagne,  et  se  trouva 
ainsi  placé  dans  la  catégorie  des  Conventionnels  votans, 
qui  furent  bannis  de  France  après  1815. 

4  février  1816.  U  partit  de  nouveau  pour  la  Suisse  et  ce  ne 
fiit  que  par  la  protection  d'un  médecin  de  Lausanne 


488 


BBVIIB  D'ALB&OB 


qu'il  put  trouver  une  retraite  à  Avenche,  sur  les  con- 
fins du  pays  de  Vaud  et  du  canton  de  Fribourg,  dans 
une  maison  destinée  aux  aliénés,  n  y  passa  cinq 
mois  et  se  rendit  ensuite  à  Liège,  où  il  trouva  enfin, 
dans  un  asile  assuré^  un  terme  aux  vicis&itudeB  de 
sa  vie  politique. 


Avant  1780.  Receveur  de  la  loterie  à  StraBt>oarg. 

Avril  1798.  Employé  àla  caiBse  desvivres,  il  eetreça mem- 
bre de  la  Sodété  des  jacobins. 

8  décembre  — .  Le  comité  de  surveillance  et  de  sûreté  géné- 
rale ajourne  sa  demande  d^un  certificat  de  civisme. 

7  décembre  — .  D  lui  est  accordé. 

95  octobre  1794.  Encore  membre  des  jacobins. 

1797  à  1805.  Receveur  du  bureau  de  loterie,  rue  des  Halle- 
bardes, n**  78,  à  blrasbouig. 


98  novembre  1798.  Membre  de  la  Société  des  jacobinef,  ilea 
demande  répurement  immédiat  aux  représentants 
Saintnlust  et  Lebas,  vu  que  raristoeratie  et  le  modé- 
rantisme»  d*après  les  principes  des  sanMlottes^ 
doivent  être  entièrement  anéantis. 

Dans  une  seconde  lettre  du  même  jour,  il  réclame 
des  mêmes  la  suppression  de  la  permanence  des 
douze  sections  de  Strasbourg. 


Novembre  1798.  H  était  curé  de  Matzenbaim,  quand  U  abjura 
nmposture  dans  le  temple  de  la  Raison  à  Strasbourg* 
Le  maire  Monet  ne  nous  donne  pas  les  expressioDS 
de  sa  profession  de  foi. 


99  novembre  1793.  Membre  de  la  Société  des  jacobins,  H 
pose  à  SaintJust  et  Lelws  identiquement  les  mêmes 
demandes  que  son  ami  Baudrillon. 


BAUDRIER  (JosBFH). 


BAUDRILLON. 


BAUMâNN  (RoGH). 


BAUMOARTNER. 


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LBB  HOmOS  DE  LA  BÉVOLUTION 


4» 


BEÂ.UâElGNEUR  (Jban-Piebbb),  pàr^ 
me  de  la  Pould. 

1741.  Né  à  Ghàtenois. 

Avant  1789.  Ingénieur  à  Strasbourg. 

Juin  1791.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Gonstitu- 
tîon. 

1792.  Membre  laïc  de  la  paroisse  de  Saint-Jean-aux-Ondes. 

7  fÔTrier  1792.  Il  passe  aux  jacobins. 

9  ièvrififf  1793.  Le  maire  Monet,  dans  une  lettre  à  André, 
procureur-général,  lui  dit  franchement  : 

To  connais  raristocfatie  et  le  ftnatlene  de  Rondoiiin,  entrepre- 

nenr  des  fortiflcations,  il  faut  lui  faire  faire  la  culbute  pour  y  plaoa* 
Beauseigneur  ;  il  faut  absolument  qiip  ta  réponse  soit  envoyée  ce 
matin  aux  commissaires  Couturier  et  Dcnizei,  eu  même  temps 
que  rarrélé  que  je  le  demande.  Dans  la  même  réponse,  il  y  a  des 
renseignements  à  damer  sur  Jacquinoi',  qui,  au  reste,  sont  moins 
pressants,  parce  que  Beauseignenr  fils  que  je  songeais  à  fidra 
mettre  à  sa  place,  restera  avec  son  pèce,  8*U  obtient  celle  qn*il 
demande;  au  reste,  monsieur  le  procureur  général  ne  va  pas 
croiro  qup  ce  n'est  là  que  de  Tinlrigue,  ce  sont  des  foulas 
aristocrates,  des  ^^  edins  que  Ton  met  à  la  porte,  pour  en  confier 
la  clef  à  de  bons  saiis-(  uloites. 

8  octobre,  5  novembre  1793,  30  janvier  et  28  avril  1794.  Elu 

notable  du  Conseil  général  de  la  commune  de  Stras- 
bourg. 

2  août  — .  Signataire  de  l'adresse  de  la  municipalité  à  la 
Convention  nationale,  lors  de  la  conspiration  ourdie 
par  Robespierre,  Gouthon,  Saint-Just  et  Lebas. 

Le  même  jour,  il  est  désigné  pour  remettre  cette 
adresse  au  représentant  Duroy  alors  à  Strasbourg,  et 
rinvita  à  la  transmettre  à  la  Convention. 

25  octobre  — %  U  est  encore  aux  jacobins. 

1797.  fintreproaeur  des  fortifications  à  Strasbouig. 

Sous  rempire.  simple  employé  àbez  Tentrepreneur 
du  génie  militaire. 

'  n  éuit  garde  d'artillerie  à  Técole,  en  1792 


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430 


BKVUS  D'ALSACS 


BEAUSEIGNEUR  (Pierre),  fils. 
1768.  Né  à  Strasbourg. 

1792.  Gasernier,  attaché  au  corps  royal  du  génie. 

9  février  1793.  Le  maire  Monet  songeait  à  le  mettre  à  la 
place  de  Jacquinot,  alors  garde  d'artillerie  à  Técole  de 
Strasbourg. 

CiOnime  élôve  ingénieur,  il  passa  dans  TartlUerie. 
Octobre  — .  Gapilaîne  de  cette  arme,  il  est  reçu  membre  de 

la  Société  des  jacobins . . 
26  octobre  1794.  B  y  est  encore  inscrit 

BËCK  (J.). 

Janvier  1791.  Membre  delà  Société  des  amis  de  la  Con- 
stitution. 

1793.  IGnistre  au  Séminaire  protestant  de  Strasbourg. 
7  février—,  n  passe  aux  jacobins. 

22  novembre  179S.  Au  club  de  cette  Société,  il  adhère  à  deux 
lettres  aux  représentants  Saint-Just  et  Lebas,  la  pre- 
mière demandant  la  suppression  de  la  permanence 
des  douze  sections  de  la  ville,  et  la  seconde,  Tépure- 
ment  des  Comités  de  surveillance. 

Ordonnez,  el  d'après  la  censure  des  sans-culottes,  nous  purge- 
rons oes Gonitès  des  penomies  suspectes  et  dsngeremes;  alon 
elles  seront  saptes  toutes,  et  les  mesures  de  santé  seront  pleine- 
ment  exécutées. 

BECUŒR  (jBàN). 

1744.  Né  à  Metz. 
Avant  1789.  Militaire. 

1791.  Brigadier  de  gendarmerie  à  Strasbourg. 

22  novembre  1792.  Membre  de  la  Société  des  jacobins. 
25  octobre  1794.  Il  y  est  encore. 

BENOIT  (Bruttts), 
offîcier  au  1"  régiment  d'in£guaterie. 

1792.  Membre  de  la  Sodété  des  jacobins. 

SO  mars  1793.  Membre  du  Ck>mitè  révolutionnaire  de  cette 


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LES  HOMMES  DE  LA  RÉVOLUTION 


431 


Société,  il  se  charge  de  donner  sous  peu  des  détails 
sur  Dumoncliau,  ex-SGrfj^ent-inajor  du '2'  bataillon  des 
Vosges,  dénoncé  à  la  surveillance  du  Comité. 
20  mai  1793.  Au  club,  il  prononce  un  discours  sur  la  guerre 
de  la  Vendée.  A  la  nouvelle  des  [irogrès  des  Chouans, 
les  jacobins  jurent  unanimement  de  voler  au  secours 
de  lem^s  frères  en  danger,  malgré  réloignement  de 
deux  cents  lieues  ;  soixante-dix  se  font  inscrire,  mais 
très  peu  sont  partia 

BENTABOLE  (Pberrb-Louis). 

1753.  Né  à  Landau. 

1783.  Reçu  avocat  à  Colmar. 

1791 .  Commissaire  du  roi  prés  le  tribunal  civil  du  district 
de  Haguenau,  séant  à  Saverne. 

27  novembre  — .  Sur  la  présentation  de  Tabbé  Bevallet,  vi- 
caire épiscopal  du  Bas-Rhin,  il  est  reçu  membre  de 
la  Société  des  amis  de  la  Constitution  à  Saverne, 
avec  les  plus  \ifs  [applaudissements»  comme  patriote 
fameux  dans  la  Révolution,  membre  du  club  des 
jacobins,  porte  le  procès- verbal  de  la  séance.  Quelques 
mois  après,  il  était  élu  président  de  cette  Société. 

Sn  août  1792.  Membre  de  Tadministration  du  département 
du  Bas-Rhin. 

Plus  tard,  procureur  général  du  Directoire  du  même 
département 

2  septembre  — .  A  Baguenau,  il  est  élu  le  troisième,  député 
du  Bas-Rhin  à  la  Convention  nationale. 

13  janvier  1798.  De  Paris,  il  mande  à  Monet,  maire  de 
Strasibouig: 

Le  dteret  qui  vous  envoie  de  nonveanx  commiasaiKséttit  û^vh 
tant  plus  néoessaîre,  qu*il  paraît  bien  évidemment,  par  ce  que 

vous  rae  marquez  et  ce  que  j'apprends  d'ailleurs,  que  les  premiers 
commissaires'  n'ont  rien  tait  et  n'auraient  rien  fait  qui  vaille. 
Tâchez  donc  d'en  tirer  bon  parti;  je  pense  qu'ils  sont  maintenant 
chez  vous  el  que  vous  faites  de  la  bonne  besogue.' Je  vous  i^com- 
mande  la  suspension  de  la  municipalité  de  Saverne. 

*  Aeubel,  Merlin  et  Ilaussmann.  —  *  aûhi.  Couturier  et  Deotzel. 


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4312  BBVDB  D'ALBàGB 

16-19 jan^iar  1793.  IlvotelamortdeLouisXVI,refuaerappel 
au  peuple  et  le  sursis. 

20  février  — .  Nouvelles  communications  à  Monet  : 

Je  sais  que  le  Bns-Hhin  a  besoin  plus  que  jamais  d'une  grande 
énerijie.  jp  vous  prie  d'engager  les  conomissaîres  à  ne  point  quit- 
ter le  déparlement  sans  avoir  déposé  tous  les  genres  d'autorités 
entre  les  mains  des  patriotes,  car  il  est  menacé  aux  approclMBde 
la  guerre,  dès  que  tes  commissaires  l^aaront  quitté.  H  &ut  qnlls 
régénèrent  les  principales  municipalités»  notamment  celle  de  Sa- 
verne.  qu'ils  destituent  les  mauvais  juges  de  paix,  juges  de  dis- 
trict, les  officiers  de  la  garde  nationale  gangrenés.  Il  y  a  de  fort 
mauvais  juges  de  paix  dans  la  ville  et  dans  le  canton  de  Saverae, 
il  faut  un  ou  deux  bons  commis.sairos  î"!  Saverne. 

2d  avril  — .  Cest  aux  sans-culottes  composant  le  Comité  de 
correspondance  de  la  Société  de  Paris  qu'il  s'adresse  : 
On  a  décrété  la  déclaration  des  droits  de  rhoramc  dans  la  Con- 
stitution, elle  n'a  ni  le  earaetère  de  grandeur  et  de  morale,  qui 
convient  à  la  nation  ei  aux  circonstances  d'une  régénération  Incon- 
nue jusqu'à  présent  et  qui  doit  s'étendre,  pour  ainsi  dire,  dans 
tout  ninlvers.  Je  crains  bien  de  cette  prédpiutioo,  qne  la  Con- 
stitution à  fidre  ne  soit  pas  ce  qu'elle  devrait  être,  mais  aura  la 
ressource  de  Taoceptatlon  du  peuple  et  de  fiiire  proposer  les  chan- 
gements utiles. 

8  décembre  — .  Maynoni,  président  du  Comité  de  surveil- 
lance et  de  sûreté  générale  du  Bas-Rhin,  dépose  une 
lettre  du  Comité  de  sûreté  générale  de  Nancy,  dans 
laquelle  Bentabole  est  quaÙfié  de  directeur  des  sub- 
sîBtanoes.  Elle  sera  communiquée  à  Alexandre,  de 
radministration  des  vivres. 

Mars  1794.  A  la  Convention,  avec  Gouthon,  Il  défend  son 
collègue  Hérault  de  Séchelles,  mais  en  vain. 

eoctobre  -,  Membre  du  CSomlté  de  sûreté  générale  du 
paya. 

Dans  la  même  année,  Il  est  adljo^i^  ^  * 
Hôntaut  pour  demander  des  explications  au  général 
Dumouriez,  alors  à  Paris,  au  sqjet  de  sa  conduite 
contre  deux  bataillons  de  volontaires,  qui  avaient 
égorgé  des  déserteurs  émigrés. 

(La  nùU  h  la  proMnê  UvnùonJ 


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NOTICE 

SUR  hk 


SITUATION  D£  LA  YILLË  DË  BËLFORT 

à  l'iDstant  de  son  mvestisseiieDt  |>ar  les  Alliés 

LE  21  DÉGISMBRE  1818 


La  Notice  que  nous  publions  anjourdliaî  sur  le  blocns  de  Belfort 

en  1813  contient  des  indications  qni  ne  se  trouvent  pas  dans  le 
Journal  de  M.  Triponp,  paru  en  1874  dans  la  Beruf.  C'est  donc  un 
document  .'i  rnnstîrver  aussi  pour  l'fiisloire  militaire  de  Belfort.  I!  est 
dû  à  un  contemporain  du  blocus,  M.  I*aul  George.  Le  (ils  aîné  de 
celui-ci  en  a  donné  le  manuscrit  à  M.  Henri  Bardy,  qui  en  communique 
le  texte  anx  lecteur*  de  la  Reme  d^Altuee, 


Le  âi  décembre  181S,  à  onze  heures  do  soir,  on  apprit  la 
nonreile  que  Tarmée  alliée  a?ait  passé  le  Rhin  à  Bftie; 
le  88  du  même  mds,  la  place  fut  déclarée  en  état  de  siège, 
le  24,  elle  fut  inrestie,  à  deux  heures  de  Taprès-midi,  pur  un 

corps  bavarois. 
L'étal-major  de  la  place  se  composait  alors  de  : 

M.  Lbgrakd,  chef  de  bataillon,  commandant  d'ances; 

M.  Jear,  capitaine,  adjudant  de  place; 

Nowellè  Série  - Année.  ^ 


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BBVUB  D'ALSAOB 


H.  Floramce,  capitaine  de  hnssarda  en  retraite  (cet  offi- 
cier fîit  nommé  par  M.  le  commandant  d'armes  poor  fàire. 
de  concert  avec  H.  Jear,  le  serrice  de  la  place  pendant  le 

siège); 

M.  Marcon  filR,  lieutenant  en  retraite  (cet  officier  fot  éga- 
lement désigné  par  le  commandant  d'armes  pour  faire  le 
service  d'adjudant  au  château); 

M.  Laloiibardièue,  chef  de  bataillon,  fut  aussi  chargé  du 
commandement  de  l'artillerie  da  fort. 

Les  corps  qui  composaient  la  garnison,  forte  de  deux  mille 
huit  cents  hommes,  étaient  ceux  dont  la  descriptiou  suit 

68*  régiment  dlnfanterie  de  ligne  (dépôt). 
14*      >      de  chasseurs  à  cheval  (id.) 
2*      *      dlnUinterie  de  ligue  \ 


On  procédé,  le  20  décembre,  à  la  nomination  da  Conseil  de 
défense,  qui  fat  composé  de  : 

MM.  LisoRAio),  commandant  d'armes; 
Eail,  colonel  do  68*  régiment; 
Deloub,  major  du  f4*  chasseurs  à  dieval; 
Lalohbardièris,  commandant  d*artillerie; 
Emon,  capitaine  du  génie. 

Le  joor  de  linvestîssement,  les  approvinonnements]  de 
bouche  de  la  place  étaient  nuls,  soit  par  l'effet  de  riropéritie 
des  agents  da  gouvernement  ou  de  la  trahison.  La  garnison 


il- 
87* 
79" 
8f 
98* 
54* 
18* 


détachements. 


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WVESTISSEMBNT  DB  LA  VILLE  M  BBLFOitT  485 

avait  à  peine  ponr  quelques  jours  de  quoi  se  nourrir  en  pain- 
line  tentitiye  faite,  trop  tard,  pour  s'en  procurer  dans  le^ 
▼illages  voisins  échoua  complètement,  puisque,  pendant  que 
nos  troupes  étaient  à  Danjoutin  occupées  à  fouiller  les  gre- 
niers et  les  écuries,  l'ennemi  se  montra  et  força  les  fonrra. 
geurs  à  la  retraite. 

Cette  posiUon  pénible  n'abattit  pas  le  courage  des  bniyes 
de  la  garnison  :  elle  était  composée  de  Français.  Le  Conseil 
de  défense  pensa  qae  Ton  trouverait  des  ressources  en  vivres, 
tant  chez  MM.  les  commissionnaires  et  négociants  que  chez 
les  cultivateurs  aisés  et  propriétaires  de  la  ville  et  des  fau- 
bourgs; on  forma,  en  conséquence,  une  commission  qui  était 
chargée  de  faire  des  visites  à  l'efifet  d'en  enlever  le  superflu. 
MM.  Grasset,  quartier-maître  du  6B-  régiment  dlnftnteriê 
de  ligue,  et  Bonnier,  quartier^maîlre  du  14*  régiment  de 
chasseurs  à  cheval,  furent  désignés.  Le  maire  de  la  ville,  qui 
aurait  dû  présider  cette  commission,  8*était  caché  dans  sa 
cave;  il  n'osait  paraître  en  rien;  il  abandonna  la  bourgeoisie 
à  l'arbitraire  militaire  :  de  là  les  vexations  et  les  injustices 
qui  se  répétèrent  pendant  le  blocus. 

La  première  opération  de  celte  comramission  fut  de  s'em- 
parer des  grains  et  farines  déposés  à  la  halle  de  la  ville  et 
qui  appartenaient  à  différents  parUculiers.  Des  perquisitions 
eurent  ensuite  lieu  à  main  armée  chez  les  dfojens  présumés 
avoir  des  vivres  au  delà  de  ce  qui  leur  était  nécessaire  pour 
leur  subsistance  de  deux  mois  et  on  leur  enleva  l'excédant. 
Des  réquisitions  en  vins  furent  frappées  chez  des  marchands, 
ainsi  que  des  huiles,  vinaigres,  sel,  morue,  bougie,  riz,  chan- 
delles, avoines,  etc. 

Au  bout  d'environ  deux  mois,  les  denrées  que  l'on  s'était 
procurées  étaient  presque  consommées,  et  néanmoins  la  gar- 
nison n'avait  pas  envie  de  se  rendre.  Le  Conseil  de  défense 
s'imagina  qu'en  payant  les  denrées  que  l'on  supposait  se 
trouver  encore  chez  quelques  particuliers,  on  pourrait  pro- 


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436 


BEVUE  D'ALSACE 


longer  la  défense  de  la  place;  le  motif  était  louable,  sans 
doute;  mais  le  fait  est  que  le  nommé  Bonnier,  quartier- 
maître  du  14"  rcgimeat  de  chasseurs,  ayant  eu  l'administra- 
tion des  grains  enlevés  par  voie  de  réquisitions,  avait  fait  de 
grandes  économies  et  roulait  en  retirer  de  l'argent  dans  des 
ventes  simulées,  si  vrai  que  des  marchés  forent  Ma  et 
défaits. 

Mais  la  garnison  manquidt  d'argent  On  fit  payer  les 

contributions  de  1818  et  celles  courantes;  on  frappa  une 
contribution  de  6000  francs  sur  les  plus  riches  citoyens.  Les 
tabacs  du  gouvernement  furent  vendus;  des  madriers  et  bois 
de  construction,  destinés  aux  travaux  de  défense  de  la  place, 
furent  également  vendus;  on  se  procura,  au  moyen  de  toutes 
ces  ventes,  une  somme  de  28000  firancs,  dont  une  faible 
partie  fut  employée  à  payer  un  léger  à-compte  au  soldati 
sur  la  solde  qui  lui  était  due,  et  le  restant  à  rachat  de  grains 
à  un  prix  exhorbitant. 

C'est  ainsi  que  la  garnison,  qui  n'avait  pas  pour  huit  joUTS 
de  vivres  lors  de  l'investissement  de  la  place,  parvint  à  se 
maintenir  pendant  cent  et  treize  jours;  mais,  il  faut  malheu- 
reusement le  dire,  les  mesures  ne  furent  pas  toujours  dictées 
par  la  sagesse  et  la  modération.  L'astuce,  la  violence  et  la 
méchanceté  la  plus  criante  furent  souvent  employées  pour 
arracher  aux  malheureux  habitants  le  peu  de  denrées  qu^ils 
auraient  désiré  conserver. 

Comment  auraient-ils  pu  s'en  dessaisir T  Le  terme  du 
blocus,  qui,  dans  le  principe,  avait  été  fixé  à  deux  mois, 
paraissait  indéfini.  Dans  les  premiers  jours  de  Tinvestisse- 
mcnt,  on  avait  enlevé  à  main  armée  tout  ce  que  les  particu- 
liers avaient  en  denrées,  c'est-à-dire  de  surplus  pour  deux 
mois.  Ces  deux  mois  écoulés,  la  garnison  tenait  et  ne  pen- 
sait pas  à  se  rendre.  Le  particulier,  déponiUé,  se  trouvait  en 
proie  au  dénùment  le  plus  absolu  et  ne  prévoit  pas  la  fin 
de  sa  misère,  puisque  tant  et  aussi  longtemps  que  Ton  ponr- 


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INTESTiaamiBlIT  DB  Lk  TIUiB  DE  BILFOKr  4S7 

rait  proearer  un  pea  de  pain  aa  soldat,  la  ville  ne  serait  pas 
rendue. 

Certes,  le  soldat  est  précieux  à  Pfitat,  mais  le  citoyen  doit 
lai  êire  cher  aussi;  il  est  enfant  de  la  même  famille,  et  sMl 
ne  porte  pas  les  armes,  il  les  a  précédemment  portées;  il 
élève  des  enfants  qui  les  porteront  un  jour,  et  son  industrie 
fournit  à  l'Etat  les  moyens  de  solder  les  braves  militaires 
qui  le  défendent. 

Je  dois  cependant  à  la  vérité  de  dire  qu'il  fut  question, 
dans  le  projet  de  résistance  indéfinie,  de  distribuer  des 
rations  en  vivres  aux  malheureux;  mais  cette  mesure,  que 
rhumanité  et  la  justice  commandaient,  n*eut  aucun  effet.  Les 
pauvres  ne  restèrent  cependant  pas  sans  ressources  :  des 
soupes  économiques  leur  furent  distribuées:  les  particuliers 
aisés  se  plurent  à  les  soulager.  C'est  ninsi  que  des  êtres 
bienfaisants  soulageaient  les  malheureux,  pendant  que  d'au- 
tres aussi  riches,  mais  animés  par  l'égoïsme  le  plus  dégoû- 
tant et  par  le  génie  du  mal,  repoussaient  les  paurres  qui 
leur  demandaient  des  secours,  renouvelaient  dans  Bellbrt  les 
atrocités  révolutionnaires  et  se  livraient  à  des  dénonciations 
eatomnieuses. 

Enfin,  Tépoque  du  12  avril  arriva.  Toutes  les  ressources 
étaient  épuisées;  la  garnison  était  réduite  à  moitié,  et  le 
soldat  qui  restait  était  exténué  par  la  fatigue  et  par  les  nom- 
breuses privations  qu'il  avait  éprouvées  pendant  trois  mois 
et  demi.  Il  fiadlut  se  rendre;  ou  négocia,  et  cette  brave  gar- 
nison, dont  an  sort  plus  juste  aurait  dù  couronner  les  longs 
et  pénibles  efforts,  fut  obligée,  le  16  avril  1814,  après  être 
sortie  de  la  place  avec  les  honneurs  de  la  guerre,  de  déposer 
les  armes  dont  elle  s'était  si  glorieusement  servie  et  qu'elle 
arrosait  des  larmes  du  désespoir  en  les  abandonnant. 


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438  BEVDB  d'alsacs 

Btefc  dflt  diitribntions  fidies  à  la  garaison  peadiat  le  tiigt 


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Voilà  les  ratious  avec  lesquelles  le  soldat  a  élé  substanté 
pendant  le  siège;  cbacun  sait  que  des  hommes  désœuvrés^ 


410 


BXTUB  D'ALSAOB 


qui  ne  reçoivent  que  pour  un  et  deux,  n*ont  presque  rien. 
Les  ibnmisseurs,  les  distributeurs  des  oompagniesy  ebacan 
retient  quelque  diose;  aussi  ne  faut-il  pas  B*étonner  s'il  en 
est  mort  800  pendant  le  blocus! 

La  contagion  et  la  misère  n'ont  pas  épargné  les  habitants. 
Sur  une  population  de  4759  habitants,  il  en  meurt,  année 
courante,  de  89  à  92.  Il  en  est  mort,  depuis  Je  1"  janvier 
1814  jusqu'au  U  juin,  252. 

Communiqué  par  H.  Henri  Babdy. 


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FR.-CH.  KELLERMANN 


Kellermann  naquit  à  Strasbourg  le  28  mai  1735.  Ses 
ancêtres  avaient  quitté  la  Saxe  pour  venir  s'établir  en  Alsace, 
peu  d*années  après  ia  réunion  de  Strasbourg  à  la  France. 
Louis  XIV  avait  nommé  Christophe,  le  grand-père  de  Keller- 
mann, prévôt  des  marchands  (1687). 

François-Christophe  Kellermann,  le  futur  maréchal  de 
France  et  duc  de  Valray,  entra  très  jeune  dans  la  carrière 
des  ai  mes.  Kii  1750,  il  faisait  partie,  comme  cadet,  du  régi- 
ment de  Lœvendal,  et  il  parcourut  rapidement  les  grades 
inférieurs  de  l  armée.  Pendant  la  guerre  de  Sept- Ans  (1756- 
1763),  il  était  lieutenant  dans  les  volontaires  d'Âlsace  et  se 
distingua  à  la  bataille  de  Berghen,  gagnée  par  le  maréchal 
de  Broglie  sons  les  murs  de  Francfort 

En  1765  et  1771,  il  fut  chargé  de  missions  de  confiance  en 
Pologne;  la  seconde,  en  compagnie  de  MM.  de  Yioménil  et  de 
Choisy.  Il  organisa  la  «  avalcrie  de  la  Confédération  et  se 
trouva  en  rapport  avec  les  chefs  politiques  et  militaires  de 
ce  malheureux  pays,  qui  était  déchiré  par  les  dissensions 
civiles. 

Kellermann,  en  récompense  de  ses  services  diplomatiques, 
obtint  en  1780  le  grade  de  colonel  du  régiment  de  colonel- 
ffénéral'hu89ard&;  en  1788,  il  fut  nommé  maréchal  de 
camp. 

L*année  suivante,  il  adopta  franchement  les  principes  de 

la  Révolution;  après  la  journée  du  10  août,  il  reconnut 


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442  BEVUE  d'albâcb 

raatorité  de  1* Assemblée  législatîTe.  Dans  le  connut  de  1798, 

on  lui  conOa  le  commandement  de  Tarmée  de  la  Moselle, 
réunie  sur  la  frontière  du  norJ-esl,  pour  s'opposer  à  Vinva- 
sion  des  Autrichiens  qui  avaient  passé  le  Rhin  à  Spire.  Dans 
les  premières  semaines  du  mois  de  septembre  de  celte  année- 
là,  il  se  replia  de  Metz  sur  Saint-Dizier  et,  à  la  suite  d'habiles 
manœurres,  il  opéra,  près  de  Saiate-Menehould,  avec  vingt 
mille  hommes,  sa  jonction  a?ec  Dumouriez. 

Celui-ci,  après  avoir  défendu  les  défilés  de  TArgonn^  ces 
Themopyles  de  la  l^hmee,  contre  Brunswick  qui  Tenait  de 
s'emparer  de  Verdun,  avait  été  obligé  de  so  replier  de 
Grandpré  sur  Sainte-Menehould  pour  ne  paH  être  coupé;  car 
Clairfayt  avec  ses  Autrichiens  et  le  prince  de  Ligue  avec  ses 
émigrés  s'étaient  emparés  des  pas^^ages  de  la  Croix-au-Bois 
et  du  Chêne-Populeux  (18  septembre).  Dumouriez  n'avait 
plus  que  quinze  mille  hommes;  aussi,  comme  Fabius  Gunc- 
tator,  refusa-t^il  dans  son  camp  de  la  Lune  la  bataille  à 
Brunswick  qui  en  avait  quatre-vingt  mille.  G*est  dans  la  nuit 
du  19  au  20  que  Dumouriez  fut  rejoint  par  Kellermann.  Le 
«0,  &  8  heures  du  matin,  les  Prussiens  se  déployè^ot  en 
bataille  pour  attaquer  Dumouriez  dans  son  camp.  Kellermann 
occupait  la  hauteur  où  se  trouve  le  moulin  à  vent  de  Valmy  ; 
caché  par  les  brouillards,  il  ne  fut  aperçu  par  Brunswick  qu'à 
7  heures  du  matin. 

C'est  dans  ces  plaines,  où  les  armées  des  rds  allaient  être 
repoussées  par  celles  de  la  France  républicaine,  que,  bien  des 
siècles  auparavant,  Attila,  vaincu  par  Aetius,  avait  perdu  le 
quart  des  cinq  cent  mille  barbares  qu'il  traînait  au  sac  des 
Gaules  (441). 

Brunswick  fit  avancer  58  bouches  à  feu  ;  Kellermann,  de 
son  côlé,  mit  en  ligne  ses  batteries.  Parmi  les  jeunes  officiers 
qui  l'entouraient  se  trouvaient  le  duc  de  Chartres  (plus  tard 
Louis-Philippe)  et  le  duc  de  Montpensier,  son  frère. 

Bientôt  l'air  s'ébranla,  dit  Louis  Blanc  dans  son  Bitoire 


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de.  la  RévokUUm,  Jes  écbos  de  la  vallée  mugirent  et  le  front 
des  deux  armées  parut  tout  en  feu.  Gœth^  était  là;  étudiant 
les  effets  de  la  canonnadc  c  C'est  un  broît  singulier,  écrivait- 
il  au  retour,  un  bruit  qu'on  dirait  composé  du  bourdonne- 
ment de  la  toupie,  du  murmure  des  ondes  et  du  sifflement 
des  oiseaux.  Par  degrés,  vous  arrivez  à  éprouver  une  sensa- 
tion extraordinaire,  qui  ne  saurait  être  exprimée  que  par 
comparaison.  C'est  comme  si  vous  étiez  dans  un  endroit 
excessivement  chaud  et  dont  la  chaleur  vous  pénétrerait  de 
toutes  parts,  de  manière  à  tous  faire  sentir  que  tous  tous 
trouTez  parftitement  en  harmonie  aTec  l'élément  qui  tous 
entoure.  La  Tue  ne  perd  rien  de  sa  force  et  de  sa  netteté; 
mais  il  semble  que  chaque  objet  devient  d'un  rouge  foncé,  ce 
qui  en  rend  l'impression  plus  vive.  » 

Or,  tandis  que,  la  bride  sur  le  cou  de  son  cheval,  Gœthe 
se  laissait  ainsi  distraire,  pur  le  bruit  du  canon,  de  son  Faust 
que  précisément  alors  il  méditait,  les  jeunes  volontaires  de 
I  armée  de  Kellermann  déployaient,  sous  le  feu,  la  fermeté  de 
vieux  soldats.  Leur  attitude  hénffque  Ait  telle  que  Brunswick 
en  resta  comme  saisi  de  stupeur.  Au  plus  fort  de  la  canon- 
nade, ayant  aperçu  la  cavalerie  française  à  pied,  et  dont  les 
chevaux  non  bridés  mangeaient  encore  le  foin,  il  se  relourjia 
Ters  ses  officiers  et  leur  dit  :  «  Voyez,  messieurs,  à  quelles 
troupes  nous  avons  affaire,  qui  attendent  avec  sang-froid  que 
nous  soyons  sur  elles  pour  monter  à  cheval  et  nous 
charger.  » 

Vers  dix  heures,  cependant,  deux  obus  partis  des  batteries 
prussiennes  causèrent  un  peu  de  confusion  dans  l'armée 
française,  en  ftisant  sauter  deux  caissons  près  du  moulin,  et 
Kellermann  eut  son  cbeTal  tué  sous  lui.  Le  roi  de  Prusse  croit 
le  nôoment  fiiToreble  pour  Tattaque;  lui-même  il  ordonne  à 
son  înfiiinlerle  de  se  former  en  trois  colonnes  et  de  marcher 
en  avant.  De  son  côté,  après  avoir  tout  préparé  en  vue  d'un 
choc  décisif,  Kellermann,  le  visage  rayonnant  d'enthousiasme, 


414 


BBVDB  D*ALBàOB 


8*écrie  :  c  Vu»  ia  pairiel  aUons  wdncre  pour  elle!  >  Ge  cri, 
qai  remporta  depuis  tant  de  victoires,  retentit  aanitôt  sur 
toate  la  ligne  d*une  manière  fbrmidable.  Les  coloones  enne- 
mies, qui  s'ayançaient  en  bon  ordre,  8*étonnent  et  commen- 
cent à  flotter.  Brunswick,  son  télescope  à  la  main,  examinait 
attentivement,  du  haut  de  sa  position,  la  contenance  des 
Français;  découragé,  il  laisse  tomber  ces  mots  :  <  Nous  ne 
nous  bâtirons  point  ici!  »  Deux  fois,  le  roi  de  Prusse,  qui 
frémissait  de  colère,  youlat  pousser  ses  soldats  à  Tattaquc, 
deux  fois  ils  dorent  se  replier.  Vers  sept  heures  du  soir,  la 
canonnade  cessa.  La  perte,  de  chaque  côté,  8*élait  élOTée  à 
environ  900  hommes,  tués  ou  blessés. 

L*affiûre  de  Yalmy,  sans  être  précisément  une  victoire,  eat 
toute  rimportance  â*une  grande  bataille.  Là  venaient  d'appa- 
raître, la  face  éclairée  par  la  lueur  des  canons,  ces  hommes 
au  cœur  indomptable,  aux  muscles  d'airain,  qu'on  allait  voir 
parcourir  l'Europe  au  pas  de  charge  et  chasser  devant  eux, 
comme  autant  de  faibles  troupeaux,  les  plus  puissantes 
armées.  Là,  enfin,  Gœthe  pot  dire  le  soir  à  ceux  qui  l'inter- 
rogeaient sur  les  résultats  de  la  journée:  ^BneàUwtld» 
ce  jour  date  une  nmmBê  ère  dam  fhùtoùre  du  monde,  et  vm 
pourrez  dire:  Xy  ék»,  > 

Le  lendemain,  Kellermann  écrivit  simplement  au  ministre 
de  la  guerre  :  «  Les  ennemis  avaient  prolongé  leurs  troupes 
sur  ma  droite,  sous  la  protection  d'une  immense  artillerie.  Je 
m'étais  rangé  en  bataille  et  j'avais  présenté  le  combat  de  sept 
heures  du  matin  à  sept  heures  du  soir.  La  journée  s'est  passée 
en  une  canonnade  de  quatorze  heures.  J'ai  gardé  ma  position 
Jusqu'à  dix  heures  du  soir;  ensuite,  j'ai  pris  un  autre  camp 
sur  la  droite  de  l'ennemi.  >  A  la  fin  de  sa  dépêche,  il  signa- 
lait les  officiers  qui  s'étaient  distingués  :  Chartres,  M ontpen- 
sier,  etc.,  et  se  louait  des  excellents  procédés  de  DomourieSi 
qui  avait  fait  abnégation  de  tout  désir  de  briller  et  atiit 
secondé  de  sou  mieux  le  corps  d'armée  posté  à  Yalmy. 


1B.-0B.  XUJJERMANN 


445 


Le  découragement,  la  disette,  les  maladies  s'emparèrent  de 
l'armée  de  Brunswick.  Une  retraite  désastreuse  commença 
pour  elle;  elle  éracua  Verdun;  quelques  semaines  après  le 
20  septembre,  il  ne  restait  plus  sur  le  sol  iraocais  d*autres 
élrangers  que  des  blessés  et  des  moribonds. 

Kellermann  se  mit  à  la  poursuite  de  Tennemi,  mais  sa 
poursuite  ne  parut  pas  assez  vigoureuse  à  Gustine,  sous  les 
ordres  duquel  il  avait  été  placé.  Une  lettre  de  ce  général, 
datée  de  Mayence  le  30  octobre  1792  et  lue  dans  une  séance 
de  la  Convention  nationale,  accusait  formellement  le  vain- 
queur de  Valmy  d*a?oir  négligé  de  s'emparer  de  Trêves  et 
de  Goblentz  et  de  ne  pas  s'être  porté  assez  rapidement  de  la 
Moselle  sur  la  Sarre.  Gustine  affirmait  qu'avec  un  peu  de 
hardiesse,  ces  succès  auraient  pu  être  obtenus  sans  coup- 
férir  ;  que  tous  les  magasins  de  réserve  de  l'ennemi  seraient 
tombés  entre  ses  mains.  Enfin,  il  accusait  Kellermann  d'être 
incapable  et  d'être  jaloux  de  commander. 

Ces  reproches  n'étaient  pas  fondés.  Le  conventionnel  Carra, 
dans  la  séance  du  4  novembre,  s'écria:  <  Gomment  voulez- 
vous  qu'avec  quinze  mille  hommes  qui  restaient  à  Keller- 
mann, après  la  séparation  du  corps  d'armée  de  Dumouriez, 
et  avec  les  quinze  mille  hommes  de  Valence,  c'est-à-dire  avec 
trente  mille  soldats  harrassés,  couchés  dans  laboue^  il  se  jetât 
sur  l'armée  prussienne  qui  en  comptait  cinquante-cinq  mille, 
qui  avait  quatre  journées  d'avance  sur  nos  troupes  et  était 
rentrée  sur  les  terres  allemandes?  » 

Kellermann  vint  en  personne  plaider  sa  cause  devant  la 
Convention  (U  novembre).  «  Je  viens,  dit-il,  de  montrer  sur 
la  carte,  au  Conseil  exécutif,  soixante  camps  que  j'ai  tracés 
et  parcourus  en  moins  de  trois  mois,  pour  opérer  ma  jonc- 
tion avec  Dumouriez,  le  19,  et  soutenir,  le  SO,  par  Tintrépî- 
dité  de  vingt  mille  soldats  de  la  liberté,  le  choc  de  quatre- 
vingt-dix  mille  esclaves!  Vos  commissaires  m'ont  suivi  pas  à 
pas;  ils  ont  vu  si  Kellermann,  qui  depuis  trente  ans  com- 


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44G 


REVUE  D'ALSACE 


mande  des  armées,  a  manqué  aux  principes  et  à  la  dignité 
d'un  soldai  républicain  dans  Tâmc.  •  Il  entra  ensuite  dans 
des  détails  stratégiques  et  démontra  qu'il  eût  été  impossible 
de  devancer  les  troupes  hessoises  et  prussiennes  et  que  son 
armée  était  exténuée  de  fatigue  et  privée  de  tout. 

Un  mouTement  approbateur  accueillit  les  paroles  du 
général  calomnié;  et,  pour  mettre  an  terme  à  un  dissentiment 
ficheux,  le  Conseil  exécutif  le  plaça  à  la  téte  de  Tarmée  des 
Alpes.  <  Je  pars,  dit-il  dans  le  même  discours,  je  pars;  il 
B*aglt  maintenant  de  planter  le  drapeau  de  la  liberté  et  la 
SBÎnte  table  des  droits  de  riiomme  à  Télranger;  c'est  pour 
délivrer  Rome  que  vous  allez  franchir  les  Alpes.  Oui.  nous 
les  franchirons,  si  j'en  crois  mes  pressentiments  et  le  courage 
des  troupes  de  la  République.  Citoyens,  comptez  sur  un  vieux 
soldat  qui  sait  mieux  agir  que  parler!  > 

Kellermann  alla  prendre  son  nouveau  commandement  et 
établit  son  quartier  général  à  Chambéry.  C'est  pendant  qu'il 
était  en  SaToie  que  Gnstine  renouvela  contre  lui  ses  accu- 
sations; cette  insistance  ébranla  un  moment  le  Directoire 
exécutif  qui,  au  commencement  de  mai  1793,  le  rappela  de 
son  poste;  mais,  à  la  date  du  i8  du  même  mois,  un  décret  de 
TAssemblée  portait  que  :  «  Kellermann,  mandé  à  Paris  pour 
rendre  compte  de  sa  conduite,  n'a  point  démérité  de  la 
patrie.  •  On  le  chargea  en  même  temps  du  commandement 
par  intérim  de  l'armée  de  Vendée,  dont  le  général  Biron 
était  tombé  malade.  11  fut  mis,  peu  de  temps  après,  à  la  tète 
des  armées  des  Alpes  et  d'Italie;  mais  on  le  chargea  préala- 
blement d'organiser  à  La  Rochelle  l'armée  qu'on  formait  sur 
les  côtes  de  l'Océan. 

Pendant  que  Kellermann  organisait  celle  nouvelle  armée, 
le  général  Brunei,  placé  sous  ses  ordres,  fut  maiidenu  dans 
le  commandement  de  l'armée  des  Alpes.  Kellermann  vint  se 
mettre  à  sa  tête  an  mois  de  juin  1798  La  ville  de  Lyon 
s'étant  révoltée  contre  la  Convention,  il  fut  chargé  de  la  difU- 


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FB..OH.  KELLEBMAMN 


447 


cile  mission  dV  rétablir  l*ordre;  on  lui  adjoignit  les  repré- 
sentants Gautliier  et  Dul)ois-Grancé.  Le  8  août,  il  somma  la 
grande  cité  de  se  rendre  dans  une  henre  de  délai.  H  réitéra 

sa  sommation  deux  jours  après;  mais  les  insurgés  lui  répon- 
dirent à  coups  de  canon.  Kellermann  l)i>ml)arda  alois  Lyon; 
mais,  trouvant  iju'il  ne  la  réduisait  pas  assez  proniptemeut  à 
robéissance,  certains  convention  ne  is,  tels  que  Robespierre  et 
Amar,  attaquèrent  violemment  Kellermann  et  Unirent  par 
obtenir  du  ministre  de  la  guerre  sa  destitution  et  son  rem- 
placement par  le  général  Doppet  (14  septembre).  La  Société 
des  Jacobins  Texclut  de  son  sein,  et  il  tai  jeté  en  prison  où 
il  passa  treize  mois.  Le  9  Thermidor  ne  lui  rendit  pas  la 
liberté;  ce  ne  fut  que  trois  mois  après  qu'il  fut  délivré,  après 
avoii-  été  jugé,  sur  sa  demande,  le  8  novembre  1794,  par  le 
tribunal  révolutionnaire  qui  rac(juitla  et  dont  il  reçut  des 
éloges.  <  LMiistoire,  dit  le  président  de  ce  tribunal,  uFiira  sur 
la  tète  de  Kellermann  les  lauriers  cueillis  sur  le  Mont-Blanc 
à  ceux  moissonnés  à  Vaimy.  > 

Kellermann  demanda  alors  à  la  Gonirention  à  être  réin- 
tégré dans  son  grade;  ce  qui  eut  lieu  le  7  mars  1795.  Il  alla 
ensuite  reprendre  le  commandement  de  Tannée  des  Alpes  et 
dllalie,  qui  n^étaît  que  de  quarante-sept  mille  hommes  et 
avec  laquelle  il  tint  tête  à  Tarmée  austro-sarde  qui  eu  avait 
cent  cinquante  nulle  (1795). 

Pendant  qu'il  était  à  la  téte  de  l'armée  des  Alpes,  il  fut 
Tobjet  de  nouvelles  iocriminations.  En  1796,  il  fut  remplacé 
par  Bonaparte;  il  s'effaça  complètement  devant  ce  jeune 
général  qui  allait  étonner  le  monde  par  aon  audace  et  son 
génie  militaire.  Kellermann  sentit  qu*il  devait  se  résigner  à 
jouer  un  rôle  tout  à  ^fait  secondaire  et  tftcber  de  contribuer 
sans  arrière-pensée  aux  succès  de  son  successeur. 

En  1798,  Kellermann  fui  chargé  par  le  Directoire  de  réor- 
ganiser la  cavalerie.  Après  le  18  Brumaire,  Napoléon  le 
nomma  successivemeot  membre  du  Sénat»  puis  président  de 


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418 


ce  oorps,  membre  do  Gonfleil  de  la  Légion  d'honneur,  maré- 
chal de  Franee  et  grand-«ordon  de  la  Légion  d*honnear.  Lors 
de  la  campagne  de  1805,  il  commandait  le  corps  de  résenre 

an  quartier  général  de  Strasbourg.  Pendant  la  campagne  de 
1806-1807,  il  commandait  Mayence  où  il  r«sta  ju>qa'en  1818. 
En  1809,  il  avait  été  créé  duc  de  Valmy  et  avait  reçu,  à  tilre 
de  dotation,  le  donnaine  de  Johannisberg,  qui  lui  fut  enlevé 
après  les  événements  de  1815.  Après  la  désastreuse  campagne 
de  18IS,  il  prit  à  Mets  la  direction  des  résenres  et  de  la 
8'  diriaion  militaire;  il  remplit  fidèlement  cette  mission  im- 
portante pendant  rinvasion  de  1814.  Toutefois,  à  la  chute  de 
r£mpire,  il  accepta  la  restauration  des  Bourbons  et  fiit 
confirmé  par  LooIh  XVIII  dans  les  honneurs  que  lui  aTSit 
conférés  Napoléon.  H  fui  succe^ssivement  nommé  commi^'saîre 
du  roi  dans  la  3"  divisiori  militaire,  pair  de  France  et  grand- 
croix  de  Tordre  de  Saint- Louis. 

Kellermann  mourut  le  12  septembre  1820,  dans  sa  pro- 
priété située  dans  la  vallée  de  Montmorency,  où  il  avait  passé 
les  dernières  années  de  sa  longue  carrière.  Son  éponse  l'avait 
précédé  dans  la  tombe  huit  années  auparavant  Dana  son 
testament,  il  demanda  que  son  cœur  (ùt  transporté  ft  VtAmy 
et  déposé  sons  le  monument  qu'on  érigerait  sur  le  champ  da 
bataille,  avec  i"in.scriplion  suivante  : 

«  Ici  sont  morts  glorieusement  les  braves  qui  ont  sauvé  la 
France,  au  20  du  mois  de  septembre  1792.  Un  soldat  qui 
avait  rhonneur  de  les  commander  dans  cette  mémorable 
journée,  le  maréchal  Kellermann,  duc  de  Valmy,  dictant  après 
Tingt-huit  ans  ses  dernières  volontés,  peo  de  temps  arant  sa 
mort,  a  voulu  que  son  cœur  fût  placé  au  milieu  d^eux.  > 

Son  désir  fut  scrupuleusement  rempli.  Son  fils,  le  général 
François-Etienne  Kellermann  (mort  en  juin  1885),  déposa 
son  cœur  sous  la  pyramide  en  pierre  qui  fut  érigée  au  mois 
d'octobre  1820  sur  le  terrain  illustré  par  la  canonnade  dn 
20  septembre  1792.  P.-E.  Tueffbbd. 


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QUELQUES  DÉPÊCHES  INÉDITES 

DB 

L'ARMÉE  DE  RHIN  ET  MOSELLE 

1793-1795  ' 


MouvêmmUs  mUUairea  —  Services  des  vivres  et  de  tlmbille- 
mnt  —  Le  conventionnel  J^lieger 


I 

AAnte  £TAT-MAJOR  GÉ^iÉRAL 

de  là  Moselle  — 

Au  quartier  général,  à,  Uliescasici.  lo  15  frimaitiel798, 
l'Ut  a*  de  Ja  Bépoliliqae  ftancatse*  nue  et  indtvtalble. 

LIBERTÉ  ÉGALITÉ 

Il  est  ordonné  à  chaque  commandant  de  place  de  faire 
passer  au  quartier  général  de  Bliescastel,  en  poste,  les  cinq 
sixièmes  des  chemises,  culottes,  souliers  et  capotes  qulls 
pourront  avoir  en  magasin. 

n  est  ordonné  à  tous  commandans  de  place  de  faire  con- 
duire &  l'armée  tous  fuyards  et  autres  soldats,  qui,  munis 
d'un  billet  d'hôpital,  ne  seroient  plus  malades.  Il  est  défendu 
d'accorder  aucune  subsistance  aux  liomraes  ci-dessus  dési- 
gnés que  celles  nécessaires  à  leur  retour  à  leur  corps.  Il  sera 
établi  à  Sarreguemines  un  bureau  où  Ton  indiquera  à  chaque 
soldat  l'endroit  où  est  son  corps. 

'Tontes  les  dépêches  ont  été  oopiées  sur  les  orifinMix. 

IfOQTeUe  Série.  —  7<"*  Aimée.  29 


460 


KEVUB  d'ALSAGB 


L'intention  du  général  d'armée,  citoyen  commandant,  est 
que  tu  me  mettes  à  portée  de  lui  faire  connaître  au  plutôt  les 
troupes  qui  composeiii  ta  garnison  et  quello  est  leur  force 
effective  sous  les  armes. 

Salut  et  frateroité. 

Qvsm, 


n 

?^ï!lï:jli!^^       Employés  de  la  paOeamhtirês 

Effectif       fwmmes  1889  livres  de  vicmdê 

J'ai  reçu  des  administrateurs  généraux  des  sobsistaiifies 

mlfitaires,  section  de  la  Tîande,  la  quantité  de  dMM 

qualre-vwgl-neuf  livres  de  viande  pour  la  subsistance  des 
Employés  de  la  poste  aux  lettres,  pendant  le  courant  des  mois 
de  juillet,  août  et  septembre  1793. 

Fait  à  Scbiltigheim,  le  S  Brumaire  i79â,  Tan  2*  de  la 
République  française. 


m 

Nous,  mairt,  officiers  municipaux  et  Gonsdi  général  de  la 

commune  de  Bourdonnay,  déparlement  de  la  HeurthC)  district 
de  Château-Salins,  sur  la  demande  à  nous  faite  par  le 
citoyen  Jacques  Jacquot,  garçon,  natif  dudit  Bourdonnay,  pré- 
sentement fourrier  d'armée  à  l'armée  du  Rhin,  d'an  certificat 
de  civisme,  disons  que  ledit  Jacquot  s'est  toujours  montré 
bon  républicain  depuis  le  commencement  de  la  Révolution 
française,  ami  des  lois  et  de  la  paix,  et  durant  tout  le  temps 
qu*il  a  résidé  dans  notre  commune,  et  que  Jamais  il  n'est  par- 
venu à  notre  connaissance  aucun  trait  d'incivisme  de  la  part 
dudit  Jacques  Jacquot,  jusqu'au  1"  octobre  1792,  époque  de 


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L'ABHÉB  de  SBSH  BT  MOaSLLB 


451 


son  entrée  au  serrice  des  armées,  doot  il  n'y  a  que  les  supé- 
rieurs qui  en  puissent  connaître. 

En  conséquence  de  ce,  et  sur  Tavis  du  Comité  de  surveil- 
Imee,  noas  accordons  audit  Jacquot  ledit  certificat  de  cifisme, 
depuis  le  eommencenient  de  la  Révolution  française  jusqu'au 
moment  où  il  est  entré  an  service  desdites  années  de  la  • 
République  française. 

Donné  en  la  salle  commune  de  Bourdonnay,  le  22*  jour  du 
mois  de  Brumaire  1793,  Tan  2'  de  la  République  française, 
une  et  indivisible. 

R.  Merel,  Galland,  off.;  J.  Chevet;  J.-Louis  Garnich; 
J.  Godard,  procureur  ;  F.  Humbert,  officier  ;  Bar- 
bier, off.;  J.-N.  Blondlot,  off. 

Vu  par  nous,  membres  du  Comité  de  siirreîHance  du 
canton  de  Bourdonnay,  le  certificat  de  civisme  ci-contre  et, 
d'autre  part,  approuvons  ledit  certificat  dans  tout  son  contenu. 
A  Bourdonnay,  le  22'  jour  Brumaire,  1793,  l'an  2*  de  la 
République  française,  une  et  indivisible. 

RbKT  HbRBL,  F.  HUHBERT,  F.  UOMB,  MOBIiOT,  S0C. 


IV 

d«teJ&U«  RÉPUBUQUE  FRANÇOISE,  UNE  ET  INDIVISIBLE 

D«  de  Hoieanx  C^"'^^  cartoiicht) 

—  Aa  quartier  jéDéral  de  Meookirclien,  le  IS  Germiiial.  . 

ran  r  de  la  Répabllqiie  Araoçoise  une  et  indlvlaible. 

LIBERTÉ  ÉGALITÉ 

le  général     dkiskm  Mortaiix  au  citoyen  Bidok,  général 

de  brigade 

Je  te  préviens,  mon  camarsde,  qu'ayant  évacué  du  pays 
que  j'occupe  tout  ce  qui  pourrait  être  utile  à  la  République, 
en  fourrages,  bestiaux  et  effets,  ma  division  reprend  demain, 
13  germinal,  ses  derniers  cantonnemenfa  à  Rliescastel,  où 


45d 


BETUB  D'ALSAOB 


j'établirai  mon  quartier  général.  Ma  gauche  sera  appuyée  à 
Sarrebruck. 
Salut  et  fraternité. 

MOREAUX^ 

V 

Le  24  floréal,  Tan  deux  de  VÈre  républicaine,  les  cit.  Meycr 
et  Gherandier,  Gommissaires  pour  Téquipement  des  troupes 
de  la  République,  doiv^  à  Michel  Gaillard  : 

50  d*^  et  8  paires  bas  de  coton  n*  6,  à  88  fr...  19S5.6.8 

8  îd.  n*7  à44  »  W 

Total  •.  2(357.6.8 

Nous,  soussignés,  membres  de  la  Commune,  nous  sommes 
transportés  dans  les  magasins  de  la  République,  et,  en  pré- 
sence da  O  Ghevandier,  commistaire,  chargé  par  radminis- 
tration  de  l*habillement,  équipement,  etc.  d^.  troupes,  et  le 
cit.  M*^  Gaillard,  avons  examiné  les  bas  ci-dessns  et  lesaTons 
estimés  au  prix  du  maximum.  En  foi  de  quoi,  nous  STOIIS 
signé  le  présent,  i\  Commune  alTranc/iie\  le  24  floréal,  Tan 
deux  de  la  Képublique,  une,  indivisible  et  démocratique. 

Paul  Ghabier,       Jacob,  Ghevandier, 
oIT.  municipal,  of.  m»>,  commissaire. 

VI 

Arvér  Gros  Hcmerslror,  le  2  prairial.  Pan  1»  de  la  B^P«WlflW 

de  la  Moselle  françolse,  ane  et  indivisible. 

MIJERTÉ  ÉGALITÉ 

Vincent,  général  de  divismi,  au  citoyen  général  Bidois^ 

commandant  en  chef  à  SarreUbre 
Hier,  citoyen  général,  les  gendarmes  ont  fait  une  belle 
erreur;  j*ai  fiiit  mettre  en  liberté  un  caporal  de  grenadiers 
et  envoyé  nn  sergent  à  Sarrelibre  ;  ils  se  sont  trompés,  il  f^i 
réparer  cette  erreur  ;  je  le  préviens  que  je  vais  toire  con- 

*  Mort  jeaue  ;  il  aurait  été  mi  grand  général. 
'  Lyon. 


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L'ABUÉE  de  BHIN  BT  MOflSLLB 


4S8 


duire  à  Sarrelibre  le  sergent  désigné  dans  le  procès-verbal, 

tu  renverras  le  caporal. 

Tu  recevras  en  même  temps  deux  déserteurs  qui  me  sont 

arrivés  hier. 

Le  Gooroi  d'iiommes  ne  partira  que  dans  aoe  heure  ou 
deux  après  le  départ  de  la  présente. 
Salut  et  fraternité. 

VnfCBRT*. 

VII 

An  reçu  de  l'ordre  du  général  Ylnoenf,  le  citoyen  Long- 
ehamp,  caporal  au  1*  B"  des  corps  francs,  détenu  en  la 
maison  d'arrêt  de  Sarrelibre,  a  été  mis  en  liberté. 

Sarrelibre,  le  2«  prairial,  2'  année  républicaine. 

Le  Roy,  concierge. 

VUI 

Le  citoyen  Biaise,  garde-magasin  de  rhabîllement  des 
troupes,  est  invité  et  autorisé  à  délivrer  au  O  Joseph  une 
paire  de  bottes  à  la  hussarde,  pour  servir  de  modèle  et  rester 
chez  le  représentant  du  peuple. 

Nancy,  le  7  messidor,  an  2-  de  la  Hep.,  une  et  ind. 

L'aUfoint  au  représentant  du  peujUe, 

Lenain. 

IX 

lia  u"??^  Il  'ILi'irlicr  gèn.Tal,  à  Bitche,  le  30  messidor,  l'an  2*  de  la 

«8  la  ^oseiie  République  frani;oise,  une.  indivisible  et  démocnUique. 

UBBRTlt       .  âOAUTi 

Ordre  générai  du  âO  memdor  otc  i**  tàemUdor 

Le  tribunal  militaire  du  1"  arrondissement  de  l'armée  de 
la  Moselle  a  condamné  à  la  peine  de  mort  Nicolas-Hilaire 

*  Ké  à  Montierender  (Haute-Marne),  mort  maire  de  cette  ville 


454  BEVUE  d'alsaoe 

Picquet,  cavalier  au  il*  régiment,  convaincu  d'avoir  assassiné, 
le  17  de  ce  mois,  uu  habitant  de  la  comuiune  de  Bepenkorn. 

Certifié  Gonforme  au  registre  : 

L*adiud>  g''  chef  de  brigade, 
AUG.  MfiBMBI. 

X 

Mot  du  2S  Ihermidot 

Mot  d'ordre:  Otoyem^  BépMqu»; 
Ralliement  :  iZeconfiotMon/e. 

L*a4fudani  çMr^  eketdt  Mjfod», 

AUO**  IfBBHBr. 

XI 

AlMÉB  1»B  LA  MOSKLB 

Mots  d ordre  et  de  raUkmmU  àuSSauSO  ^htetidor,  fanÈdi 
la  MépubSgw,  une,  indUdsibh  et  démoeratiipie 

Mots  (  Peuple  sonrerun; 

(  de  raUieHmt  :  Vengé. 

L*ad(^udant  général,  chef  de  brigade* 

MOUXOR*. 

XII 

de  li"i!iSelto  ÉTAT-MAJOU  GÉNÉRAL 

Aa  quartier  général,  à  Trêves,  le  M  Vendémiaire,  l'an  S*ilaiâ 
République  françoise,  une,  indivisible  cl  démocratique. 

LIBERTÉ  ÉGALITÉ 

Ordre  général  dft  ié  au  iS 
Le  général,  informé  que  plasieura  Tivandiers  de  Tarmée 
'Maréchal  de  Fhuiee. 


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L'ABMÉB  de  BHIN  et  IIOBBLLB 


496 


trouvent  le  moyen  de  se  servir  des  fourgons  attachés  aux 
bataillons  et  autres  voitures  appartenant  à  la  République 
pour  le  transport  du  vin  qu'ils  sont  autorisés  d*acheter,  pour 
réprimer  un  pareil  abus,  ordonne  que  toute  boisson  qui  sera 
trouTée  sur  des  voitures  appartenant  à  la  République,  sera 
confisquée  au  prolU  de  la  nation  sans  préjudice  de  plus  fortes 
peines  eoatre  le  viTindier  préTsna  d'avoir  violé  le  présent 
ordre. 

Les  divisions  recevront  avec  Tordre  du  jour  des  modèles  de 
bons  de  sobsistances;  il  est  enjoint  à  tous  les  corps  d*en 
observer  strictement  la  forme  à  compter  du  16  Tendémiaire. 

Pour  la  joamée  de  demain,  les  râlions  de  fourrage,  pour 
les  chevaux  de  toutes  les  armes,  seront  délivrées  avec  avoine. 

Gertiiié  conforme  au  registre  : 

Lodjudant  général, 
MOUTOR. 

xni 

da  Iaf£te11d  ÉTAT-MAJOR  GÉNiBAL 

Aa  quartier  général,  à  Trêves,  le  l''  Nivôse,  i'aji  3*,  etc. 
LUIBRTé  É6ALITÂ 

Ordré  ffMrai  du     au  2  IHvâtB 

L'armée  est  prévenue  que  le  quartier  général  partira 
demain,  S*,  pour  être  rendue  le  S  à  Viilers-la-Tour. 

Certifié  conforme  au  registre  : 
raéffudant  général ,  dtefde  brigade, 

Ceassbloup. 


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456 


BIVDB  D*AZiSA€B 


XIV 

de  U^pMB  ÉTAT-lIàJOT^GliNÉRAL 

LIBERTÉ  (njs"  i*  •«  «'pubiiqni)  ÉGALITÉ 

An  quartier  ^(jncral,  à  Villors-I.i-Tour,  le  neuf  Pluviôse,  l'an  3»  de 
la  Hépablique  frani;oise,  une,  indivisible  el  démocratique. 

Le  général  Moremix,  commandant  F  armée  de  la  Moselk^  au 
cUoyen  Bidois,  g&aéral  de  brigade 

Je  Tiens  donner  avis,  mon  eamarade,  au  comniissairei  des 
efleta  qui  existent  dans  le  magasin  d'habillement  de  Sarre- 
libre,  en  rengageant  à  prendre  les  mesures  conTenables  pour 
ne  pas  les  laisser  dépérir  et  les  employer  utilement. 

Je  ne  pois  en  ce  moment  Venvoyer  le  dépôt  dn  1*  bataillon 
de  Parthônay,  jusqu'à  ce  que  Ton  ait  pria  des  mesures  géné- 
rales pour  tous  les  dilïérenls  dépôts. 

Salut  et  fraternité. 

MoRiAin. 

XV 

Armée  devant            s*  BATAILLON  DE  LA  MAMCHB 
Loxembonig   

Etat  des  effets  d^ habillement  dont  les  citoyens  dénommés  ci- 
après  ont  un  extrême  besoin,  savoir  : 

Le  Boqlanoer  ('  [!"  H  Mougbet  l k  k  . 

L*  de  la  8*    l  une  v  bas.  de  la  <  une  paire  de  bas, 

Compagnie  funchapoau  6.Coinp^r~P^^"^ 

*^  "  \  Ln  bonuul  de  police.  ||  y 

CertiQé  par  nous,  membres  composant  le  Conseil  d'admi- 
nistration dudil  bataillon,  le  2"  lloréal,  an  S%  etc. 

Jaunety  chef  de  B*»;  Lemoucheux,  C*;  Manger, 
serg^-miy'';  Dam,  caporal;  Noiselle,  sergent;  Dali- 
dan,  tf-l*;  Blandamour,  ep**  four.  Vu  par  nous, 
commissaire  des  Guerres,  Dof  our. 
Tu  et  approuTé  par  le  général  de  division,  attendu  Tur- 


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L'aBM££  D£  BHIN  ST  MOSELLE 


457 


gence  où  se  trouvent  les  soldats  qui  n'ont  pu  se  procurer  les 
effets  demandés  par  le  commissaire  général  de  l'armée,  • 

Dkbrun. 

Va  rétat  ci-dessas  des  effets  dont  les  offiders  an  9*  B**  de 
la  Manche  ont  un  présent  besoin,  lequel  est  approuvé  par  te 
général  de  division  Debrnn  et  visé  par  le  commissaire  des 

guerres  chargé  de  la  police. 

Considérant  qu'en  vertu  de  l'arrêté  du  Comité  de  salut 
public  en  date  du  19  pluviôse  dernier  et  la  lettre  de  la  Com- 
mission des  approyisionnemeats  du  15  ventôse  suivant,  les 
officiers  des  corps  sont  autorisés  à  prendre  dans  les  magasins 
de  la  Répablique  les  effets  d'habillement  dont  ils  ont  besoin, 
en  les  payant  an  prix  de -l'estimation. 

Nous,  commissaire  ordonnateur  de  la  4*  division  militaire, 
aatorisons  le  garde-magasin  de  Tagence  de  Thabillement  à 
délivrer  aux  deux  ofOciers  dénommés  and.  état  les  effets  qui 
y  sont  portés,  qu'ils  payeront  conformément  aux  dispositions 
de  l'instruction  de  la  Commission. 

Fait  à  ^ancy,  le  â  floréal,  Tan  â*  de  la  Rép.  une  et  ind. 

Bersohnet. 

XVI 

^RhrTe^"        Extrait  de  la  revue  faite  par  moi,  commis- 
Mcseiie  guerres  employé  à  la  sixième  divi- 

Divisioaj  Ambert  ^^^^  conformément  à  l'article  quatre  de  la  loi 
du  4  messidor  dernier,  pour  servir  à  la  déli- 
vrance des  fournitures  ordonnées  par  ladite 
loi: 

Ambert,  général  de  division. 

Fait  et  arrêté  au  quartier  général,  à  Belheiro, 
le  24  frucUdor,  l'an  S*. 

Cootobseb}, 


*  Fils  (la  conventionnel.  Sa  oominatioD,  va  son  jeune  âge,  excita 
rétornement  de  l'armée. 


458  BKVUS  D'ALa^GE 

XVII 

Armée  do     ^TAT  (Jc  la  somme  de  888M  G'.S*  remise  au  payeur 
siomiie  de  Tarmée  pour  le  roontanl  des  fournitures  accor- 
dées au  général  de  diviaioa  Anibert  par  la  loi  do 
4  Messidor  d',  doot  le  détail  suit: 

Savoir  : 

Drap  bleu  national  5/4,  3  aunes  i/6  à  i6î,10  814.11.8 
id.   blanc,  id.  1    id.    3/4  à  m  218.15.0 

id.   écarlate,        id.  0   id.    i/12à225  18.15.0 

Gadisbieu.  5/12  3   id.    —  à    18,10  55.10.0 

id.  blanc,  id.  2   id.   8/4  à    15  41.05.0 

ToUe  de  coton       7/8  â  id.    —  à  20  40.00.0 

*888.16.8 

Je  soussigné,  payeur  divisionnaire,  reconnais  avoir  reçu 
du  cit.  Ambert,  général  de  division,  la  somme  de  888  francs. 
16  sols,  8  deniers,  pour  le  montant  des  objets  ci-dessus 
dénommés. 

A  Franckenthal,  le  4*  jour  complémentaire,  8*  année  répu- 
blicaine. 

Blachbtte. 

XVUI 

ABMéB  /      (La  Liberté)  x 

1        Etal-m^or        1  liIBBRTB 

M  I    général.  Le  peuple    I  ,  _   , 

n»».  -  \  seul  esl  souverain.  IEgALUÉ,  FbATBEWTB 

asm  m  RIOSBLLE    VRépubUque  française/ 

Au  quartier  général,  à  Herxiieim,  le  se?  Bmmaire,  an  4»do  1» 
RéinbUqae  fittncoiM,  une  el  fndMaible. 

Lê  général  ék  divinm  ehrf  de  FEtai-maJor  général  de  Cannée 
au  commandant  de  la  place  de  SarrMre 
Je  suis  instruit,  ciloyen,  que  par  insouciance,  négligence 
ou  mauvaise  volonté,  les  différents  commandants  des  places 
frontières  ne  font  point  arrêter  les  militaires  de  toutes  ames 
qui,  par  lâcheté  ou  par  amour  du  brigandage,  abandonient 

*  En  assignats. 


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L'ABMÉB  de  SmN  BT  MOflKr.T.B 


450 


leurs  drapeaux  pour  rentrer  dans  l'intérieur  ;  le  nombre  en 
est  considérable,  et  les  excès  auxquels  ils  se  livrent  font 
horreur  ;  Je  mal  ne  serait  pas  si  grand,  ou  tout  au  moins 
n^aurait  pas  duré  si  Jougtemps,  à  les  autorités  ci?ile8  et  mili- 
taires eussent  vonla  faire  leur  devoir.  On  m'objeetera,  peut- 
être  que,  dans  beaucoup  d*endrQit8,  on  manquait  de  force 
armée.  Et  la  garde  nationale,  tonte  composée  de  citoyens 
intéressés  au  maintien  de  Tordre  et  de  la  tranquillité 
publique,  retuscrait-clie  de  marcher  contre  des  brigands  aussi 
lâches  qu'ils  sont  cruels? 

Je  yous  ordonne  donc,  citoyen,  sous  votre  responsabilité 
personnelle,  de  faire  arrêter  tout  militaire  qui  se  présenterait 
dans  la  place  que  tous  commandez,  prenant  la  route  de  Tinté- 
rienr,  sans  être  muni  d'un  congé  en  bonne  forme  ou  â*nn 
billet  d'hôpital  déterminant  le  lieu  où  doit  se  rendre  le  mili- 
taire qui  en  est  portenr;  lorsguMIs  seront  arrêtés,  tous  me 
préviendrez,  en  me  donnant  les  motifs  de  l'arrestation;  je 
TOUS  enverrai  des  ordres  eu  conséquence 

Salut  et  fraternité. 

LiEBERT. 

P.  S.  —  Vous  voudrez  bien  m'accuser  réception  de  la 
présente. 

XIX 

Oderarm.  du  Bhin,  ek. 
Au  citoyen  commandant  la  place,  à  Sarrelibre. 

(Cachet  Umbre  sec  à  la  fumée  :  la  République.) 

Je,  soussigné,  reconnais  avoir  reçu  des  magasins  de  la 
République,  en  effets,  la  quantité  d'étoffes  propres  à  mon 
usage,  conformément  à  la  loi  du  5  thermidor. 

Savoir  : 

Treis  aunes  et  demie  drap  bleu  n**, 
Un  cinquième  drap  éearlate, 
Trois  aunes  un  quarts  cadis  écarlate, 


BBVOB  O'ALBAGE 


Une  aane  trois  huitièmes,  cadis  blanc, 
Une  anne  et  demie  de  toile  de  sept  imitièmes,  dont 
quittance. 

Mets,  le  18  frimaire.  Le  condnetenr  général  de  Tartillerie, 
P.*G.  Lecomte. 

XX 

Le  garde  magasin  des  effets  mililaires,  à  Nancy,  délivrera 
deux  paires  de  souliers  pour  deux  cavaliers  du  2*  régiment, 
passant  à  Tinfanterie  et  allant  4  Metz  ponr  y  être  embrigadés, 
ainsi  que  deux  paires  de  bas. 

Nancy,  le  IS  frimaire,  4*  année. 

Le  représentant  du  peuple  chargé  de  Torganisation  de  la 
cavalerie,  PFLIEGER. 

(Cachet  ovale  :  te  népublique)  Représentant  dn  iwiiple,  Bip.  Pr.  («n  nng») 
Les  objets  ci-dessus  ont  été  délivrés  par  le  citoyen  Biaise, 
Nancy,  le  12  tr.  au  4.  L'adjud'  g'',  Insp'  g*',  Gourselles.' 

XXI 

11  est  ordonné  au  garde  magasin  des  effets  mililaires  de 
Nancy  de  délivrer  au  Conseil  d'administration  du  21'  régi- 
ment de  cavalerie,  vingt-cinq  étrilles,  autant  de  peigaes, 
éponges  et  brosses,  yingt-dnq  licols  avec  longes,  vingt-cinq 
bridons  d'abreuvoir.  Nancy,  le  18  frimaire,  an  4  de  la  Répa- 
bliqne.  Le  représentant  du  peuple,  PFLIEGER. 

(Cachet) 

(Cmmimietaim  de  M.  A.  Benoit.) 

'  Il  avait  qaitté  Paris  ponr  éviter  Chariot,  Aatovr  d*iine  brochure  très 
remarquable,  malheureusement  trop  pen  eonnae  :  L'Observateur  impar- 
tial anr  armées  de  la  Moselle,  de  Sambn^t-Mwte  «t  RhixtrMouU^i 
Paris  et  Strasbourg,  1797, 


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TROIS  LETTRES  INÉDITES 

DE 

J--J.  Oberlin,  de  Dietrich  et  du  chevalier  de  Kéralio 


Letirê  adressée  par  JérémMacguM  merUn\  de  Strasbourg, 
à  M.  OsUlef  de  Qmrmitie,  ancien  Meulsnant  criminel  au 
présidiai  de  Bouen,  seeritabre  perpétuel  de  l Académie  de 
eeUeviUe, 


Strasbourg,  28  plnviôso, 
l'an  3  de  la  AépaJtiliqae  ane  et  iQdiTisii)le. 

Ami  citoyen, 

C'est  arec  la  joye  la  plus  Tire  qae  je  riens  d'apprendre  par 
notre  ami  Ângot  qae  tu  as  été  remis  en  liberté.  Eh  liieni 
îe  sois  dans  le  même  cas.  J'ai  été  arrêté  par  le  petit  Savoyard 
de  S4  ans,  Honet,  Cfni  avait  su  se  saisir  de  la  place  de  maire 
chez  nous  et  qui  a  vexé  tous  les  gens  de  lettres,  de  même 
que  les  négociants  de  la  commune.  Nous  sommes  enfin  déli- 
vrés de  ce  scélérat  et  de  ses  complices.  Espérons  que  le  règne 

*  J.  J.  Oberlin  était  membre  de  l'Académie  de  Rouen.  C'est  lui  qui  a 
Wt  recaydr  dans  c«tte  docte  assemblée  l  abbé  André  Grandidier. 


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BBTDE  D'ALSAGE 


de  la  liberté  sera  aussi  Téqoque  de  la  renaissance  des  lettres. 
Adieu,  mon  cher,  doiine-moi  de  tes  npuvelles. 

Obubun. 

Je  suis  encore  inquiet  sur  le  sort  du  ci-devant  baron  de 
Ste-Groix'.  Il  a  été  englobé  dans  les  troubles  du  Comtat  et 
je  n'ai  plus  de  ses  noarelies  depuis.  Queile  perte  encore  pour 
lee  lettres  I 


n 

Lettre  adressée  le  2  novembre  1792,  par  Dieirick,  anden 
maire  de  Strasbourg,  au  commissaire  civil  du  département 
du  Haut-Rhin  à  l'armée  du  Haul-Min  MyppoUte  Colombel, 

Bade,  lè  t  novembre  47M> 
Vaa  l"  de  la  RéimbliqDe  fraiifiaiie. 

Citoyen  commissaire, 
L'Assemblée  législatire,  à  laquelle  on  avait  bussement 
exposé  que  j  étais  à  Paris  et  que  je  me  tenais  caché,  a  déddé, 

dans  la  nuit  du  27  au  28  août  dernier,  que  je  serais  traduit 
par  la  force  armée  à  la  barre  où  j'avais  été  mandé  le  2  sep- 
tembre i  elle  a  décrété  qu'il  y  avait  lieu  à  accusation  contre 
moi. 

Dès  le  dix  septembre,  j'exposais  à  l'Assemblée,  dans  une 

lettre  dont  j'ai  Thonnenr  de  tous  envoyer  un  exemplaire,  les 

motife  qui  m*araient  forcé  de  quitter  la  ronte  de  Paris,  où 

j'allais  me  justifier,  et  je  m'engageais  à  obéir  aux  décrets 

qu'elle  avait  rendus  contre  moi,  dès  que  les  vrais  principes 

de  la  liberté  et  de  Tégalité  seraiont  proclamés.  La  Convention 

nationale  a  répondu  à  mes  espérances.  Plein  de  conflance 

*  De  Clermonl-Lodèvfi,  baron  de  Sainte-Croix,  i»é  en  174(3,  à  Mor- 
noiron  (Comtat  venaissin),  mort  en  1809  ;  orientaliste,  membre  de 
l'Académie  des  sciences. 


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TfiOU  LSTTBBS  INÉDITES  488 

dans  la  justice  et  dans  l'entière  conviction  que  le  penpie, 
dirigé  par  ces  utiles  impulsions,  protégera  la  vie  des  ciloyens, 
môme  de  ceux  contre  lesquels  on  s'est  efforeé  de  rercîter,  je 
ne  veux  plus  tarder  à  remplir  ma  promesse. 

Je  TOUS  demande,  au  nom  de  fa  loi,  de  l'exécuter  en  ma 
personne,  au  jour  et  à  l'heure  que  je  voua  somme  de  m'indi- 
qucr.  Je  Tiendrai  à  Saint-Lonfs  me  constituer  en  état  d'arres- 
Moo  entre  tob  mains,  aûu  que  vous  requerriés  la  force 
armée  de  me  traduire  à  la  barre  pour  ne  me  quitter  que 
lorsque  la  Convention  aura  prononcé  sur  ma  liberté.  C'est  à 
moi,  et  non  à  l'Etat,  de  faire  les  frais  de  ma  translation  à 
Paris  ;  ainsi  ne  soyez  pas  arrêté  par  la  crainte  de  la 
dépense. 

Le  porteur  a  Tordre  d'attendre  Totre  réponse.  Vous  êtes 
trop  fidèle  obsenraleur  des  kia  pour  fqu'il  me  soit  permis  de 
douter  deTOtre  empressement  à  satiiifaire  à  celle  que  je  vous 
demande  d'accomplir. 

(Atakkm  du  Haut-Mm,)  1>œxbich. 


m 

SOraU  d'une  kttre  par  laquelle  k  chevalier  de  Kéralio* 
annonce  la  mort  cfe  Vollaire  à  M.  le  baron  de  FapeSir, 
chancelier  du  duc  de  Deux-fonte  (i9  jum  1776). 

Vousauvés  appris  la  mort  de  Voltaire;  sa  dépouille  ter- 
restre doit  être  actuellement  à  Femey  où  on  l'a  transporté. 
Voilà  la  cabale  encyclopédique  sans  général,  elle  va  tomber 

^  M.  de  Kéralio  était  à  cette  époque  précepteur  dee  flofiuts  de  la  com- 
tesse (le  Forbach.  Il  devint  plus  tard  inspecteur  de  douze  écoles  mili- 
taires. Ce  fut  lui  qui,  le  premier,  distin;^ua  Napoléon  Bonaparte  à 
I  école  de  Brienne,  et,  grAce  à  sa  recoinmandatioti  spéciale,  le  futur 
Céttr  fiit  admis  à  l'Ecole  militaire  de  i^aris  (Norvins). 


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et  il  n'y  aura  pas  grand  mal  à  cela;  il  en  sera  de  même  du 
jansénisme  et  du  moUnisme  à  la  mort  de  raicbevêque  de 
Ptris^;  il  n'y  aara  pas  de  mal  encore. 

Âdîen,  monsfear,  oontiiitiés-moi  Totre  amitié  et  emnirtés 
biea  poaitiTemeat  sar  celle  que  je  roue  ai  yôoée  ponr  la  rie. 


Le  Ghr  de  Kérauo. 


i(knmm$meaUonde  M,  G.  Frantz.) 


*  Chrittophe  de  Betomont. 


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MATERIAUX 

roua  SERVIR  A 

L'HISTOIRE  DE  LA  GLERRE  DE  TRENTE  m 

Urês  des  archives  de  Calmar' 


Arrivée  de  troupes  françaises  &  CSolmar;  mesures 
transitoires;  déclarations  explicatives  du  traité 
de  protection,  que  la  cour  de  France  refuse  de 
reconnaître  ;  concert  avec  le  duc  Henri  de  Ro- 
han  pour  la  défense  du  pays  contre  le  duc  de 
Lorraine  et  Jean  de  Werth  ;  préliminaires  de 
Pima;  mouvements  du  duc  de  Lorraine  sur  la 
rive  gauche  du  Rhin  ;  approche  du  duc  de  Ro- 
han;  refus  de  l'Union  x^rotostante  d'adhérer  à  la 
paix  de  Prague  entre  la  Saxe  et  l'Empire. 

Informé  par  les  intéressés  mêmes  da  traité  conclu  entre 
les  deux  résidents  de  France  et  de  Suède,  le  maréchal  Cau- 
moDt  1a  Force  enyoya,  le  13  octobre,  du  camp  devant  Lan- 
daa,  à  son  fils,  le  marqais  de  Gaalelmorou,  l'ordre  de  se 
rendre  aree  son  régiment  à  Sélesladt  et  à  Golmar,  pour  y 
tenir  garnison.  Le  19,  M.  de  BoarseriUe,  à  la  tête  des  com- 
pagnies destinées  à  cette  dernière  place,  se  tronrait  à  Kerg- 
heîm,  d'où  il  annonça  son  arrivée  an  magistrat.  Le 
octobre,  Bourseville  et  son  major  Rospide  s'entendirent  avec 

Voir  la  Itvimsoa  do  Avril-llaiiliiiii  1878. 
M  ouTtlto  Sédt.  —  7**  Annfe.  ^ 


466 


BBVDB  d'ALSACB 


le  greffier-syndic  Mogg  pour  les  rations  auxquelles  les  offi- 
ciers auraient  droit  Précédemment  déjà,  le  munitionoaire 
général  Rose  avait  invité  la  ville  à  fournir  aux  soldats,  pour 
son  compte,  le  pain  dont  ils  auraient  besoin.  Golmar  ne  cessa 

point  d  être  chargé  de  ce  service,  et  la  suite  des  dossiers 
témoigne  des  avances  qu'on  dut  faire  pour  ce  objet,  et  des 
difficullés  quon  eut  souvent  pour  rentrer  dans  les  déboursés. 
A  dater  de  ce  moment,  les  affaires  militaires  de  la  ville  pas- 
sèrent aux  mains  de  la  France.  Eu  novembre,  la  garnison  fut 
renforcée  d'une  compagnie  du  régiment  d'Hoquincourt.  La 
prise  de  possession  des  troupes  firançaises  donna  lieu  à  diver- 
ses mesures  d*ordre,  telles  que  la  rédaction  de  linventaire 
du  matériel  de  guerre,  le  transport  à  fienfeld  de  canons 
appartenant  à  l'armée  snéddse,  le  règlement  d'une  avance 
de  blé  tirée  par  la  ville  des  magasins  suédois.  L'inventaire  du 
matériel  est  joint  au  dossier.  Il  constate  l'existence  de  86 
canons  de  tout  calibre,  depuis  30  livres  de  balles  jusqu'à  un 
quart  de  livre;  de  20,979  livres  de  poudre;  de  80,408  boulets  ; 
de  169  doubles  arquebuses;  de  661  mousquets,  arquebuses 
simples  et  mousquetons;  de  diverses  armes  blanches,  d ar- 
mures, de  cuirasses  et  d'objete  d'équipement.  Ce  document 
présente  un  grand  intérêt  :  comme  il  énumère  les  pièces  en 
désignant  les  lieux  où  elles  étaient  en  batterie,  il  permet  de 
suivre  tout  le  périmètie  de  l'enceinte  et  de  reconnaître  les 
divers  ouvrages  dont  elle  se  composait. 

Dès  le  premier  moment,  Golmar  s'était  mis  en  devoir  d'ob- 
tenir la  ratiQcation  du  traité  de  protection,  tant  par  la  France 
que  par  la  Suède.  Il  avait  écrit  à  cet  effet,  le-^ 
au  vice-chancelier,  que  les  affaires  de  l'Union  avaient  appelé 
à  Pâris,  et,  le  IS  octobre,  au  grand-chancelier  Oxenstirn. 
Ce  dernier  manda,  le  octobre,  de  Mayenoe,  su  résident 
Mockhel,  qu'il  validait  ses  acles.  A  Paris,  la  nouvelle  du  traité 
fut  moius  bien  accueillie.  Dans  un  moment  où  la  situatioa 
des  protestants  semblait  désespérée  et  où,  sans  le  bras  de  la 


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HIEtTOIBB  DI  LA.  GtnSBBB  DB  TRENTE  ANS 


467 


France,  il  paraissait  impossible  que  leur  résistance  continuât, 
Richelien  comptait  8*en  tirer  à  de  meillearcfl  conditions.  Les 
néipciations  engagées  avec  Lœfller  se  ressentirent  immédia- 
tement de  cette  impression.  On  lui  objecta  que  Taccord  inler- 
vena  entre  de  llsle  et  Mockbel  B*était  fait  plutôt  par  crainte 
et  par  nécessité  que  par  une  affection  sincère  pour  le  roi,  et 
que  Sa  Majesté  ne  pouvait  se  charger  de  la  protection  d'une 
ville  si  mal  pourvue  d'artillerie  et  de  munitions,  ni  y  entre- 
tenir une  garnison  à  grands  frais,  quand  elle  a'en  tirait 
aucun  revenu.  Le  cardinal  Richelieu  tit  encore  remarquer 
qu'il  serait  étrange  de  s'obliger  à  maintenir  la  religion  pro- 
testante à  Golmar,  quand  on  ne  savait  même  pas  de  quelle 
manière  die  y  était  établie  avant  ces  événements.  Les  repré- 
sentations de  Lceiller  ne  servirent  de  rien;  les  traités  du  9 
octobre  furent  déclarés  non  avenus,  et  la  diplomatie  pour- 
suivit son  entreprise  sur  nouveaux  frais,  sans  tenir  compte 
des  faits  accomplis  en  Alsace,  dont  la  France  recueillait  déjà 
le  fruit  (Lettres  de  J.-IL  Mogg,  du  12  et  du  20  novembre). 

Le  i**  novembre,  Lœfiler  signa,  an  nom  de  la  Suède  et  de 
rUoion  protestante,  un  traité  qui,  en  cas  de  rupture  ouverte 
de  la  France  avec  TEmpire,  mettait  TAIsace  *  en  dépôt  et  en 
la  protection  »  du  roi,  «  avec  les  places  et  villes  qui  en 
dépendent  ».  Une  copie  de  l'instrument  est  jointe  au  dossier. 
Provisoirement,  Richelieu  fit  mine  de  vouloir  tout  remettre 
en  Alsace  sur  Tancien  pied;  le  maréchal  Caumont  la  Force 
reçut  ordre  de  retirer  la  garnison  de  Colmar.  Le  vice-chan- 
celier IxeOIer  ne  s'alarma  point  de  cette  mesure,  et,  dans  un 
entretien  qu'il  eut  avec  Jean-Henri  Mogg  à  son  retour  à 
Strasbourg,  le  il  novembre,  il  lui'  expliqua  qu'aux  termes 
du  traité  qu'il  venait  de  signer,  Tarmée  ne  serait  pas  moins 
tenue  de  défendre  Golmar  contre  les  Impériaux,  et  que,  si  le 
corps  recruté  par  la  ville,  et  qui  ne  complaît  encore  que  400 
hommes,  était  insulllsant,  elle  en  serait  quitte  pour  ouvrir 
de  nouveau  ses  portes  à  une  garnison  suédoise.  Cependant 


438  WSBWB  H'àlBhXM 

il  engagea  Hogg  à  le  8iii?re  à  Worms,  où  le  chancelier  Oien- 
stirn  allait  réunir  «ne  assemblée  restreinte  de  l'Union,  pour 
loi  sonmcHre,  entr'aolres,  le  traité  récemment  condnà  Parie. 

En  conséquence,  le  syndic  partit  le  i8  norembre  poar 
Worms,  en  Compagnie  de  Lœfller  et  des  députés  de  Stfas- 
bourg..  d'Ulm,  d'Augsbourg  et  de  Nuremberg. 

Quand,  en  Alsace,  on  eut  connaissance  du  refus  de  Riche- 
lieu de  ratifier  les  traités  du  9  octobre,  réraolion  fut  profonde. 
Melchior  de  l'Me,  le  résident  de  France,  ne  fut  pas  le  moins 
irrité,  et,  dans  une  lettre  du  U  norembre  au  maréchal 
Gaumont  de  la  Force,  dont  l'original  est  au  dossier,  il  s'en 
explique  avec  une  humeur  peu  diplomatique  :  «  Mesaieun 
les  Suédois,  dit-il,  s'estonnent  fort  de  ce  qu'on  desadaoue 
en  court  les  conditions  du  traitté  fiiîct  entre  MonaT.  Hockhel 
et  moy,  et  disent  tout  haut  qu'on  se  veut  prévaloir  de  leur 
malheur,  croyants  que  pour  le  besoin  qu'ils  ont  de  leurs  gens 
en  la  carapaigae,  on  veut  emporter  les  places  d'Alsace  sans 
aucune  condition,  mais  que  ce  n'est  pas  le  moyen  de  gaigner 
les  cœurs  de  ces  peuples;  outre  que  Golmar  n'est  point  réso- 
lue de  se  rendre  à  autres  conditions  et  en  accepter  de  plus 
dures  qu'elle  ne  ferait  soubs  l'Empire,  qui  les  appelle  tous 
à  8oy  et  leur  donne  la  carte  blanche  ».  Ce  dernier  trait  por- 
tait juste  :  au  moment  de  partir  pour  Worms,  Mogg  mandait 
à  ses  commellauls  qu'à  ses  yeux,  rien  ne  serait  plus  dési- 
rable pour  la  ville  de  Colmar  que  d'être  comprise  dans  la 
paix  que  Télccteur  de  Saxe  négociait  avec  l'Empire,  et,  sui- 
vant toutes  les  apparences,  on  ne  se  faisait  pas  faute  à 
Worms  d'invoquer  l'exemple  que  ce  prince  donnait  au  parti 
protestant  On  s'est  complu  à  présenter  la  conduite  de 
rélecteur  Jean-George  !•  comme  uniquement  dictée  par  sa 
jalousie  contre  Oxenstirn,  qui  lui  avait  été  préféré  comme 
directeur  de  l'Union.  On  aurait  pu  peut-être  lui  prêter  des 
vues  et  des  sentiments  plus  élevés.  Quand  une  guerre  dure 
depuis  seize  ans,  quand  l'expérience  a  prouvé  qu'à  mouis 


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mSTOIBE  DX  Là,  QUEBKB  DE  TRENTE  AMB 


469 


du  secours  de  rétranger,  les  belligéranls  ne  sont  plus  en 
ctat  de  conliauer  leurs  premiers  efforts  et  leurs  longs 
sacrifices,  ne  valait-il  pas  mieux  pour  les  protestants 
s'entendre  avec  les  catholiques,  alors  que  Teoipereur  se 
montrait  disposé  à  transiger?  £n  traitant  avec  Ferdinand  H, 
non  pas  seulement  pour  son  compte,  mais  encore  pour  les 
autres  états  protestants  qui  seraient  de  son  avis,  l'électeur 
de  Saxe  ne  faisait-il  pas  preuve  de  plus  de  patriotisme,  de 
dévouement  à  la  cause  commune,  voire  de  dôsitiléressemenl, 
que  tous  ces  princes  qui  désolaient  la  pairie  allemande  philùl 
en  vue  de  leur  agrandissement  (jue  dans  l'intérêt  et  en  faveur 
des  droits  particuliers  des  états,  et  dont  la  pression  seule 
retenait  encore  un  certain  nombre  d'alliés  sous  le  drapeau 
de  rUniont  C'est  dans  ces  termes  que  s'exprimait  une  lettre 
d*un  caractère  privé,  datée  du  21  novembre,  véritable  mani- 
feste de  rélecteur  de  Saxe,  que  Mogg  recueillit  à  Worms  et 
dont  il  fit  part  à  ses  commettante.  Représentant  convaincu 
du  parti  qui,  à  Colmar,  assumait  depuis  deux  ans  la  respon- 
sabilité des  événementsjl  sentait  qu'il  fallait,  non  seulement 
conjurer  les  maux  de  la  guerre,  mais  encore  sauvegarder  les 
intérêts  protestants  menacés  de  tant  de  côtés.  On  ne  pouvait 
absolument  se  fier,  ni  aux  avances  plus  on  moins  équivoques 
de  Ferdinand  II,  ni  aux  sympathies  intéressées  de  la  France 
catholique.  Le  député  de  Golmar  comprenait  que  le  traité  du 
1"  novembre  était  nne  médiocre  barrière  contre  ses  envahis- 
sements sur  le  terrain  confessionnal.  L'article  VH  allait  jus- 
qu'à obliger  les  états  protestants  à  «  rétablir  sans  délai  le 
libre  exercice  de  la  religion  catiioIi(iuc  dans  toutes  le-^  églises 
des  lieux  occupés  par  eux  sur  les  catholiques,  depuis  les 
derniers  mouvements  de  l'an  1618  ».  Celte  stipulation  ne 
pouvalfr^Ue  pas  devenir,  entre  les  mains  de  la  France,  une 
arme  contre  le  régime  restauré  à  €k»lmar  en  163i?  Mogg 
sentait  qull  fiillatt  à  tout  prix  détourner  ce  danger.  Malheu- 
reosement,  il  ne  lui  était  pas  fodle  de  suivre  son  inspiration, 


470 


BEVUE  D'ALSACE 


d'agir  comme  il  l'entendait.  Oxenstirn  n'était  pas  encore  arrivé 
à  Worras.  Le  vice-chancelier  Lœfiler  était  dans  les  meilleures 
dispositions  pour  Golmar;  mais  le  syndic  n'osait  faire  à  son 
insu  les  démarches  auxquelles  il  se  sentait  porté,  de  crainte 
de  le  froisser  et  de  se  l'aliéner  (lettre  du  20  noTombre).  Le 
21  novembre,  il  fut  rejoint  par  son  ancien  collègue  de  Franc- 
fort, Jonas  Walch,  récemment  promu  stettmestre,  qui  loi 
apportait  sans  doute  les  dernières  instructions  de  la  ville.  Le 
chancelier  Oxenstirn  arriva  le  même  jour,  en  compagnie  de 
M.  de  Feu(juière,  «  conseiller  du  roi  en  son  Conseil  delat  et 
maréchal  de  ses  camps  et  armées,  ambassadeur  extraordinaire 
pour  Sa  Majesté  en  Allemagne  >  :  sa  présence  permit  aux 
deux  envoyés  de  faire  la  démarche  qu'ils  avaient  concertée. 

Four  faire  comprendre  à  rassemblée  de  Worms  la  situation 
critique  de  Golmar,  ils  lui  présentèrent  un  mémoire  sans  date, 
où  ils  rappelaient  que  c'était  en  vertu  d'un  traité  non  ratifié 
par  la  couronne  de  France,  qu'une  garnison  française  avait 
pris  possession  de  la  ville,  et  qu'à  moins  de  Pintervenlion  de 
l'Union,  leurs  commettants  n'étaient  assurés  de  conserver  ni 
leurs  privilèges,  ni  leurs  droits,  ni  leur  juridiction,  et  même 
que,  dans  les  éventualités  qui  pouraient  se  produire,  une 
protection  efficace  contre  les  dans^  de  la  guerre  ne  serait 
rien  moins  que  certaine. 

Cette  démarche  dénotait  une  nécessité  pressante,  à  laquelle 
il  fallait  porter  remède  au  plus  tôt.  Malheureusement,  la 
marche  des  négociations  avec  Feuquière  no  faisait  pas  pré- 
voir une  entente  prochaine.  Pour  donner  cependant  une  appa- 
rence de  satisfaction  aux  députés  de  Golmar,  rassemblée  et 
l  ambassadeur  tombèrent  d'accord  avec  eux  pour  leur  délivrer 
une  double  déclaration.  La  première,  au  nom  des  étals  pro- 
testants réunis  à  Worms,  était  une  simple  prise  en  considé- 
ration de  leur  demande,  portant  qu^on  aura  égard  aux  inté^ 
rêts  de  Golmar,  et  qu'on  y  pourvoira  suivant  les  convenaooas 
des  députés,  soit  lors  de  la  conclusion  du  traité  définitif  avec 


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HISTOIRE  DË  LA  GUERRB  DE  TRENTE  AH8 


471 


la  Pnnce,  soit  an  moyen  d'une  convention  particulière  (Décla- 
ration du  Directoire  électoral  palatin,  du  7  décembre).  Par 
la  seconde,  datée  du  17  décembre,  Feuquière  prit  envers  Gol- 
mar  rengagement  suivant  : 

«  Sur  ce  que  les  députés  de  la  yilfe  imperialle  de  Golmar 
nous  ont  tesmoîgné  qu'on  leur  avait  voulu  persuader  que  le 
Roy  prenant  leur  protection  et  tenant  ses  garnisons  en  leur 
dite  ville,  les  troubleroit  en  leurs  priuilcges,  franchises  et 
libertez,  tant  pour  le  faicl  de  leur  relligion  qu'autrement, 
nous  leur  certifiions  que  sa  Ma'*  n'en  a  aulcune  pensée,  et 
qu*att  contraire  elle  les  protégera  dans  leurs  dictes  libériez 
et  prinileges,  tant  en  tadlcte  ville  qa*ez  dépendances  d*ioelle, 
es  mesmes  possessions  ez  quelles  ils  estoient  en  Tan  rnil  six 
eens  dix-huict,  ainsy  que  leurs  dépotes  ont  tesmoigné  le 
désirer.  » 

Cependant  le  maréchal  Caumont  la  Force,  retenu  dans 
le  Palatinat,  ne  poavait  pins  couvrir  suffisamment  la  haute 
Alsace.  Les  députés  de  Golmar  apprirent  à  Worms  qu'une 
nouvelle  armée,  f^ous  le  commandement  du  célèbre  Henri  de 

Rolian,  était  affectée  à  la  défense  du  pays.  A  leur  retour,  ils 
en  firent  part  à  leurs  commettants,  qui  envoyèrent  aussitôt 
au  général  une  députation  pour  le  complimenter  et  pour 
s'entendre  avec  lui.  Elle  était  porteur  d'une  lettre  du-^-j- 
décembre,  qu'elle  remit  au  duc  au  camp  de  Rambervillers. 
Il  remercia  la  ville  de  sa  courtoisie  et  lui  recommanda  d*étre 
attentive  à  tout  ce  qui  surviendrait  dans  son  voisinage.  Sa 
réponse  est  datée  du  8  janvier  1635. 

Le  25  janvier,  il  avait  son  camp  à  Anglesau  (Engelsod, 
Angeot),  d  où  il  annonça  à  la  ville  son  entrée  en  Alsace,  en 
la  priant  de  lui  envoyer  des  députés  pour  conférer  avec  lui 
sur  les  moyens  de  maintenir  la  tranquillité.  Il  leur  donnait 
rendez-vous  à  Montbéliard.  Ce  fut  encore  Mog^,  assisté  d'un 
antre  membre  du  magistrat,  qu'on  chargea  de  cette  mission. 


BIVTJB  D'ALfiAGB 


Ils  partirent  aussitôt  et  trouvèrent  le  duc  campé  à  Roppe 

(Roppacli). 

Plusieurs  lettres  insérées  dans  le  ProL  Miss,  mirent 
Strasbourg  au  courant  de  ee  qui  se  passait.  Uelfort  était  de 
nouveau  oonipé  par  les  Impériaux.  Le  due  de  Robaa  ne 
8*attendait  pas  à  de  la  résistance;  dans  le  cas  contraire,  il 
mettrait  tout  en  œurre  pour  rédnire  la  place  (lettre  du  16 
janvier,  v.  st.l.  Il  comptait  aussi  chasser  les  Impériaux  d'En- 
sisheim,  avec  le  secours  qu'il  tirerait  de  Colmar.  Le  duc 
avait  sous  ses  ordres  10,000  hommes  d'infanterie  et  1700 
chevaux.  Le  mercredi  21  janvier,  il  commença  à  battre  Bel- 
fort  a?ec  du  gros  canon  venu  de  Montbéliard.  Mais,  d'un 
antre  côté,  Jean  de  Werth  et  le  duc  de  Lorraine  s'avançaient 
vers  Brisach  avec  4000  dragons  et  6000  chevaux,  et,  pour 
prévenir  les  desseins  de  Varmée  firançaise,  la  garnison  d'En- 
sisheim  avait  été  renforcée  de  800  mousquetaires  (lettre  du 
23  janvier). 

Le  duc  de  Rohan  était  prévenu  de  ces  mouvements  par 
M.  de  Bourseville.  Dans  une  lettre  du  12  février,  n.  st., 
datée  du  camp  de  Roppe,  il  remercie  le  commandant  de 
Golmar  de  ses  avis  et  lui  annonce  que,  sous  peu  de  jours,  il 
allait  marcher  à  la  rencontre  de  Tennemi.  Entre  temps,  il  lui 
recommande  de  foire  bonne  garde,  pour  éviter  que  (blmar 
ne  subisse  le  sort  de  Philipsbourg,  dont  la  perte  C-^  janvier) 
avait  causé  à  tout  le  parti  protestant  une  émotion  dont  le 
dossier  offre  plus  d'une  trace. 

Pendant  celte  campagne  qui,  en  plein  hiver,  s'annonçait 
comme  devant  être  si  fertile  en  péripéties,  les  premiers 
bruits  qui  avaient  couru  à  Worms  d'un  traité  entre  rélec- 
teur de  Saxe  et  l'Empire  se  confirmèrent  de  toutes  parts. 
On  apprit  que  Jean-George  I*'  avait  signé,  le  18  novembre, 
à  Pirna,  les  préliminaires  de  la  paix,  ,<  à  condition  que  1« 
princes,  villes  et  états  protestants  jouiront  de  tons  leurs  pri- 
vilèges, libertés  et  franchises  >  comme  en  16S6.  L'électeur 


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mSTOmB  DE  LA,  GUERRE  DE  TRENTE  ANS 


473 


n*aTait  pas  négocié  fieiilement  en  son  nom  ;  il  entendait  com- 
prendre dans  le  traité  Télecteur  de  Brandebourg,  le  prince 
palatin,  le  duc  de  Wiirtemberi;  ot  la  ville  de  Ratisbonne. 
Une  lettre  de  Melchior  de  risle,  du  ^^^^^'^  ,ayaitapporté 
ces  détails  à  la  ville  de  Golmar,  en  lui  annonçant  que  l^nion 
protestante  tiendrait  une  nouvelle  diète  à  Worros,  <  pour  voir 
quelle  résolution  on  prendra  sur  le  traité  que  Saxe  a  fait  t. 
De  son  côté,  Mockhel  envoya,  en  diverses  rédactions,  le  texte 
même  de  ces  préliminaires. 

Un  des  textes  que  le  résident  de  Suède  avait  transmis  le 
81  décembre  avait  causé  une  vive  alarme  à  Golmar  :  à  ce 
moment,  ce  n'était  pas  la  situation  de  16S6  que  le  traité  devait 
prendre  pour  base  du  iiatu  quo  atUe.  On  prétendait  qu*il 
ramènerait  exactement  au  2  novembre  1627  le  terme  où 
devaient  se  renfermer  les  innovations  politiques  et  religieuses 
que  la  maison  d'Autriche  voulait  bien  tolérer. 

G*eût  été  une  menace  directe  pour  Golmar  et  pour  le  régime 
restauré  en  4682.  La  patente  impériale  qui  avait  conféré  à 
rarcbiduc  Lîopold  le  soin  d'extirper  Thérésie  de  Golmar,  était 

du  17  juillet  1627.  Ce  prince  avait  transmis  ses  pouvoirs  aux 
subdélégués,  le      octobre  coniniission  avait  terminé 

ses  opérations  du  novembre  au  dé«  cnil)re  II  y  aurait 
eu  là  une  question  litigieuse,  qu'il  importait  au  plus  baut 
point  à  la  ville  de  faire  résoudre  à  son  avantage.  Ce  Tut  dans 
ce  but  qu'elle  envoya,  le  6jan?ier,  le  greiïler-syudic  à  Stras- 
bourg, qui  se  montra  tout  disposé  à  défendre  les  intérêts  de 
ses  voisins,  le  jour  où  l*Union  aurait  à  se  prononcer. 

Même  au  résident  de  l'Isle,  il  paraissait  dillîcile  do  repous- 
ser la  paix  qu*on  offrait  aux  protestants.  A  ses  yeux,  Tappui 
de  la  France  n'était  ni  assez  patent,  ni  assez  vigoureux  pour 
les  en  détourner.  S'ils  la  refusaient,  disait-il,  «  il  faudrait 
catégoriquement  se  résoudre  à  une  guerre,  si  on  en  a  les 
moyens,  qui  seront  bien  difficiles  à  trouver  en  ce  temps  ». 


« 


474  BEVUB  D'ALBAGB 

Un  ag^ent  que  la  ville  commençait  à  employer,  Jean-Balthasap 
Sartorius  ou  Schneider,  lui  annonçait,  de  son  côté,  le  24  jan- 
vier, que  le  comte  palatin  de  Neubourg  était  sur  le  point 
d'aller  trouver  Tempereur,  pour  rentrer  eu  grflce  auprès  de 
lui,  et  qu'il  essayait  de  persuader  au  margraTe  de  Badeu* 
Durlaeh  de  racoompagner. 

A  ee  moment,  le  duc  de  Lorraine,  posté  i  Brisechi  repre* 
nait  roffeasîTe  sur  la  rire  gauche.  Le  jan?ier,  un  détaclie* 
ment  de  cavalerie  surprit  40  hommes  d'infanterie  du  colonel 
Wildei8en,dont  35  restèrent  sur  le  c  irreau.  Deux  jours  après, 
un  corps  d'Impériaux  sous  les  ordres  du  duc  de  Lorraine 
passa  le  Rhin  à  Brisach,  60  cornettes  de  cavalerie  à  Neuen- 
bourg,  et,  après  avoir  opéré  leur  jonction,  les  ennemis  se 
logèrent  dans  le  Rietb,  près  de  Markolsheim,  et  dans  les  viU 
lages  Tolsina.  On  annonçait  en  même  temps,  à  Golmar,  que 
4000  hommes  dlnfiinterie  allaient  déboucher  de  Brisach  avec 
de  la  grosse  artillerie,  pour  entreprendre  le  siège,  donthi  ville 
était  menacée  depuis  la  bataile  de  Nordlingen  (lettre  du  98 
janvier  à  la  ville  de  Strasbourg).  On  apprit,  en  outre,  que  le 
duc  de  Lorraine  formait  à  Brisach  un  parc  de  siège  avec  des 
mortiers,  et  qu'il  n'attendait  plus  que  l'arrivée  de  Jean  de 
Werth  ayec  l'infanterie.  A  Texoeption  des  chAteaux  de  Hor- 
bourg  et  de  Guémar,  il  occupait  tons  les  postes  autour  de 
Golmar.  Cette  situation  était  d*autant  plus  critique  que  la 
saison  et  les  grandes  eaux  mettaient  de  grands  obstades 
è  la  marche  du  duc  de  Rohan. 

Au  commencement  de  février,  des  avis  que  reçut  le  duc  de 
Lorraine  l'obligèrent  à  quitter  ses  posil ions.  Le  ,3-  février, 
de  grand  malin,  les  différents  corps  établis  sur  la  rive  gauche 
se  replièrerjt  sur  Brisach,  sous  les  ordres  du  prince  et  de  ses 
deux  lieutenants,  les  \vachtmeî>tres  généraux  deSaliselMercy. 
Les  Impériaux  ne  gardaient  que  Rouffach,  Riquewihr  et  le 
pont  dlllbœusem.  Ils  se  firent  suim  dans  leur  retraite  psr 
plusieurs  conseillers  de  Tflrkbdm  et  de  Ksysersberg,  pour 


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HISTOmS  DE  LÀ  GUERRE  DE  TRENTE  AKS 


475 


punir  ces  deux  villes  d'avoir  traité  avec  Louis  XUI.  Le  duc 
de  Lorraine  avait,  à  plusieur?  reprises,  sommé  le  comman- 
dant de  Guémar  de  se  rendre  et,  le  lundi  2  février,  il  s'était 
présenté  ane  dernière  fois  devant  le  fort,  avec  15  escadrons 
de  dragons;  le  commandant  répondit  qu'il  n'avait  à  lui  rendre 
que  de  bons  cott|M9.  La  conduite  de  ce  brave  officier  contraste 
arec  la  Iflcheté  du  gentilhomme  français  qui  commandait  à 
Rooffach  et  qui  capitula  sur  la  première  sommation  du  duc 
de  Lorraine.  Ramené  à  Colmar  sous  escorte,  il  passa  derant 
un  conseil  do  guerre  et  fut  condamné  à  mort  (lettre  du 
février  à  la  ville  de  Strasbourg). 

Le  duc  de  Lorraine  resta  à  Brisach  avec  son  état-major, 
tandis  que  sa  cavalerie  prenait  position  à  Fribourg  et  dans 
le  margraviat.  Mais  il  n'avait  pas  abandonné  ses  desseins  sur 
Golmar,  et  fiilsait  préparer  à  Brisach  des  échelles  de  siège. 
Cependant  on  profita  de  son  départ  pour  rompre  les  ponts 
d'FIlhteosern  et  de  Sundhofen,  de  sorte  qu'il  ne  restait,  pour 
passer  l'Ill,  que  le  pont  de  Horbourg.  défendu  par  le  château 
(lettre  du  -Jj  février  à  la  ville  de  Strasbourg).  De  son 
côté,  le  duc  de  Lorraine  faisait  travailler  à  un  pont  de 
bateaux  à  Neuenbourg,  où  il  avait  encore  une  fois  dirigé  sa 
cavalerie  (ProL  miss.y  lettre  du  14  février).  Peu  après,  les 
cavaliers  lorrains  battaient  de  nouveau  l'estrade  sur  la  rive 
gauche  du  Rhin. 

En  ce  moment,  Fermée  française  étaiten  pleine  marche  dans 
la  haute  Alsace.  Le  doc  de  Rohan  avait,  depuis  peu  de  jours, 
porté  son  quartier  général  successivement  à  Dannemarfe  et 
à  Zillit:hcini  {Zi/leis).  Le  II  février,  un  premier  corps  de  GOOO 
hommes,  sous  les  ordres  du  maréchal -de-camp  Tibaut.  prit 
ses  quartiers  à  Guebwiller.  Le  1 1,  il  arrivait  à  Rouffacli,  qu'il 
fallut  enlever  de  force.  La  garnison,  composée  d'environ  80 
soldats,  et  la  plupart  des  habitants  se  retirèrent  dans  le  cliâ- 
lean,  en  emportant  de  grandes  quantités  d*étain  pour  les 
convertir  en  balles.  Le  IS,  le  doc  de  Rohan,  accompagné  du 


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47» 


BBTUB  D'ALBAOE 


maréchal-de-carap  Tibaut,  du  colonel  Balilly  et  d'un  nom- 
breux état-major,  vint  inopinément  à  Col  ma  r,  sous  rescorte 
de  deux  compagnies  de  cavalerie.  On  lui  rendit  les  honneurs 
comme  à  an  prince  de  FEmpire,  et,  le  jour  suivant^  il  visita 
les  fortifications;  il  repartit  dans  la  joamée,  aprèH  avoir 
obtenu  de  la  ville  qn*elle  foomiraît  du  pain  à  son  année. 
Cette  visite  produisit  le  meillenr  effet,  et  tous  ceux  qui  appro- 
chèrent le  duc  étaient  pleins  d'espoir  et  enchantés  de  son 
accueil  {Prot.  miss.,  lettre  du  14  février  h  la  ville  de  Stras- 
bourg). 

Le  duc  de  Rohan  élait  retourné  à  Guebwiller  et  dn  là  à 
Zillisheim,  laissant  Tibaut  occupé  du  siège  du  château  de 
Bouffach.  Ce  général  écrivit,  le février,  à  Golmar, 
pour  demander  deux  canons  et  des  munitions.  Le  ,  il 
lui  envoya  un  cavalier  pour  lui  annoncer  que  ie  chftteau  s'é- 
tait rendu. 

,  Les  Impériaux,  de  leur  côté,  ne  restaient  pas  inactife-Dans 
la  nuit  du  44  au  15,  un  parti  de  1000  chevaux  es'^aya  d'en- 
lever la  cavalerie  française;  il  furent  «  vertement  repoussés 
et  le  champ  de  bataille  demeura  aux  Français  »,  qui  ne  per- 
dirent que  dix  hommes,  tandis  que  les  assaillants  en  laissèrent 
plus  de  trente  sur  la  place,  ainsi  que  quelques  prisonniers. 
En  faisant  part  de  cette  nouvelle  à  la  ville,  le-^  février, 
le  duc  de  Roban  ajoute  :  c  II  y  a  apparence  qu*une  autre 
fois,  ils  y  penseront  mieux  devant  que  nous  attaquer  >.  Mais, 
dans  une  seconde  lettre  du  même  jour,  «  unze  heures  da 
soir  »,  entièrement  de  sa  main,  il  se  montre  moins  rassuré', 
il  avait  appris  que  le  duc  de  Lorraine  avait  encore  une  fois 
franchi  le  Rhin  avec  toute  son  armée,  et  cette  nouvelle  le 
déterminait  à  se  rapprocher  de  Golmar,  «  afin  d'occuper  le 
premier  les  postes  et  logements  >  que  Tennemi  avait  pris  lors 
de  sa  première  invasion,  et  il  engage  à  faire  «  rompre  le  pont 
de  Horbonrg,  celui  qui  est  le  plus  loin  de  te  ville  et  le  plus 
proche  de  Brisach  >. 


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H18T0ISI  SB  LA.  GUIBBB  SB  TBBMIB  ANS  4^ 

Un  nouvel  échec  de  l'ennemi  an  arant  de  Neuenbonrg 
semble  l'avoir  fait  renoncer  pour  le  moment  à  ses  projets  sur 
l'Alsace  (lettre  du  20  février  à  la  yille  de  Strasbourg).  Le 
bruit  courut  qu'il  aTait  abandonné  le  Brisgao,  pour  se  retirer 
dans  le  mai^rariat  et  en  Wflrlemberg.  Quant  au  duc  de 
Rohan,  il  poursuint  tranquillement  sa  marche  vers  la  basse 
Alsace;  le  20  février,  il  coucha  à  Colmar  et,  le  22,  il  se  rendit 
à  Ribanvillé,  où  il  établit  son  quartier  général.  L'armée 
française  avait  pris  position  depuis  Saint-IIippolyte  jusqu'à 
Rouffach,  la  cavalerie  occupant  Saint-Hippolyle,  Guémar, 
Kiensbeira,  Ammerschwihr  et  Rouffach,  l'infanterie  Bergbeim] 
Ribauviilé,  Riquewihr,  Kaysersberg,  Ëgnisheim.  Certaines 
de  ces  petites  villes  avaient  à  loger  jusqu'à  2  et  8000  hommes 
(lettre  du  88  lévrier).  G^est  dans  cette  situation  que  le  duc 
de  Rohan  reçut  avis  de  Golmar  que,  le  -^^  mars,  vers  midi, 
l*ennemi  avait  de  nouveau  débouché  par  le  pont  de  Brisach, 
et  qu'il  avait  déjà  logé  quelques  troupes  à  Logelnheim.  Il 
répondit  que,  le  lendemain  soir,  il  serait  à  Golmar  avec 
toute  son  armée.  Il  y  était  encore  le  21  mars;  sous  cette  date 
et  du  camp  de  Colmar,  il  écrivit  au  commandant  de  Sélestadt 
pour  lever  la  défense  faite  précédemment  par  loi,  de  laisser 
las  villes  du  haut  pays  vendre  leurs  vins  et  leurs  autres 
denrées  en  tasse  Alsace  et  en  Lorraine. 

Pendant  qu'il  tenait  le  duc  de  Lorraine  en  échec  sur  le 
haut  Rhin,  les  maréchaux  Gaumont  la  Force  et  Brézét 
manœuvraient  dans  le  Palalinat  sur  les  deux  rives  du  fleuve, 
el  combinaient  leurs  mouvements  avec  ceux  du  duc  Bernard 
de  Saxe.  La  correspondance  du  résident  de  France,  Melchior 
de  risle,  intéressante  sous  plus  d'un  rapport,  les  lettres  de 
Strasbourg,  souvent  accompagnées  des  nouvelles  qui  lui  par- 
venaient des  deux  maréchaux,  mettaient  Golmar  au  courant 
de  ce  qui  se  passait  au  nord  de  l'Alsace.  Hais  ce  qui  loi 
tenait  peut-être  le  plus  à  cœur,  c'étaient  les  délibérations  de 
la  diète  de  Wbrms  sur  les  préliminaires  de  Pirna. 


47B 


KEVUB  D'AUSACE 


La  Tille  avait  reçu  de  Strasbourg»  le  14  février,  Tavis  que 
cette  assemblée  se  réunirait  de  oouyeau,  avec  iavitation  de 
8*y  foire  représenter;  mais  la  situation  était  trop  critique 
pour  mettre  ses  envoyés  en  route,  et,  le  16  février,  la  viUe 
remit  ses  pouvoirs  au  député  de  Strasbourg,  le  Imlin. 
Malgré  son  épuisement,  l'Union  protestante  ne  put  se  rési- 
gner à  ratifier  la  paix  conclue  sans  son  aveu  par  l'électeur  de 
Saxe.  La  France  fonicnt.iil  ses  répu^niances,  et  promit  plus 
que  jamais  de  venir  en  aide  aux  confédérés.  On  sait  quel  fut 
le  résultat  de  ses  efforts.  Les  préliminaires  de  Pirna  furent 
confirmés  à  Prague,  le  80,  mais  d'abord  rien  que  pour  le 
compte  de  la  Saxe,  et  les  états  qui  en  demeurèrent  exclus, 
cherchërentdans  Tappui  de  la  France  les  moyens  de  continuer 
la  guerre  contre  la  maison  d'Autriche. 

Ce  dossier  renferme  encore  une  lettre  dedel'Isle,  du 
avril,  qui  mérite  d'être  raeutiounée.  Un  sieur  Verdot  avait 
obtenu  de  la  cour  de  France  «  par  surprise  »  des  lettres 
patentes  eu  vertu  desciuelles  il  s'était  mis  en  possession  du 
prieuré  de  Saiat-Valentiu  à  Rouffach.  Mais  cet  établissement 
avait  été  incorporé,  sous  la  maison  d'Autriche,  aux  jésuites  de 
Sélestadt,  qui  eurent  le  crédit  de  faire  casser  et  annuler  les 
lettres  octroyées  à  Verdot.  Le  résident  de  France  fut  chargé 
d*aa8urer  Texécution  de  ces  nouvelles  dispositions,  et  il  écrivit 
à  la  ville  de  Colmar,  où  Verdot  s'était  retiré,  pour  la  prier 
dose  saisir  de  sa  personne  jusqu'à  ce  qu'il  eftt  restitué  les 
fruits  du  prieuré  perçus  par  lui  et  rendu  compte  des  con- 
cussions qu'il  avait  commises  à  Rouffach  et  à  Guebwiller 
c  comme  prétendu  commissaire  du  roy  ». 

X.  UOSSHAHN. 

fha  stttfe  procftotnement.^ 


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DOCUMENTS 


POUR  SERVIR  A 

LA  NUMISMATIQUE  DE  L'ALSACE 


N»  6 


Harii  tuffMl  iiédil  d  lgéidphe  de  Rikeiipierre 


MO.  NO.  EGENOLPHI.  D:  IN.  RVPESPOL:  Ecu  ccar- 
telc  au  premier  et  au  quatrième  d'argent  à  trois  tètes  de 
corbeaux  ou  de  faucons  arrachées  de  sable  couronnées  d'or, 
qui  est  Hohenack;  au  deuxième  et  au  troisième  d'argent 
semé  de  billettes  d'azur,  au  lion  de  gueules,  armé,  lam- 
passé  et  couronne  d'or,  qui  est  Geroldscck  am  Wasichm; 
sur  le  tout,  de  Ribeaupierre,  qui  est  d'argent  à  trois  écus- 
sonsde  gueules.  L'écu,  oraà  de  ses  lambrequins,  est  timbré 


4B0 


BBVUB  D'ALBAOB 


de  trois  casques  ;  celui  du  milieu  est  surmonté  d'un  homme 
ya  à  mi-corps,  coiffé  d'un  chapeauà  plumes  et  portant  sur 
la  poitrine,  répétés,  les  trois  écussons  de  Ribcaupierre: 
celui  de  droite  est  surmonté  d'un  demi-vol,  et  celui  de 
gauche  d'une  queue  de  paon.  —  A  droite  et  à  gauche  de 
récu,  la  date  15-64. 

Rf.  FERDINANDI.  IMPERAT.  AVGVSTL  P.  F. 
DECRETO.  Douhle  aigle  impériale,  nimbée  et  chargée  en 
cœur  d'un  globe  crucigère  portant  le  chiffre  60;  la  croix 
surmontée  d'une  couronne. 

GuldmAaUr,  Pds.  24  gr.445.— Mod.35.5mm.— anique? 
du  moins  jusqu'à  présent.  L'argent  parait  très  fin  et  la 
pièce  n'a  pas  drculé.  —  Musie  de  Carkrvhe, 


On  sait  que  Ribeauvillè  (en  allemand  Rapps&sweilir)  est 
une  petite  ville  située  à  16  kilomètres  nord  de  Colmar,  à 
rentrée  de  la  pittoresque  valléedu  Strengbach,et  dominée 
par  les  ruines  des  (fivers  châteaux  qui  ont  servi  de  rési- 
dence aux  seigneurs  de  Ribeaupierre  ou  Raffthtm. 

Le  florin  ci-dessus  emprunte  aux  circonstances  dans 
lesquelles  il  a  été  frappé  un  intérêt  tout  particulier  pour 
les  numismates  alsaciens.  C'est  de  plus  le  premier  monu- 
ment numismatique  que  l'on  puisse  classer  avec  certitude 
aux  Ribeaupierre,  et  le  savant  ouvrage  de  M.  Tabbé  Ha- 
nauer  va  nous  fournir  tous  les  rcnscip:ncments  nécessaires 
sur  le  monnayage  et  les  tentatives  de  monnayage  de  ces 
puissants  seigneurs. 

Les  Annaks  des  Dotninicaim  de  Colmar  nous  apprennent  qUC 
les  Ribeaupierre  ont  monnayé  dès  le  XIII*  siècle,  alors 
qu'ils  ne  possédaient  pas  encore  de  concession  de  mon- 
nayage. L'annaliste  s'exprime  avec  une  clarté  qui  ne  laisse 
aucun  doute  sur  la  réalité  du  fait:  Dominus  de  RappohUm 
incepit  mvam  vionetam  jaccre  qita  fève  cum  dtnariis  Friburgenssrm 
concordûbat.  Si  jusqu'à  présent  on  n'a  pu  reconnaître  les 
produits  de  cet  atelier,  c'est  parce  qu'ils  se  confondent 
sans  doute  avec  la  masse  des  deniers  muets  que  l'Alsace 


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&TUDB  SUB  LIS  M0NHAZB8  ALBiLdliniBS 


481 


a  émis  en  si  grande  abondance,  précisément  aux  XII«  et 
XIII*  siècles;  il  est  bien  évident  que  des  seigneurs  mon- 
nayant sans  autorisation  et  probablement  en  cachette  ne 
se  souciaient  guère,  sans  égards  pour  les  numismates  de 
l'avenir,  de  mettre  sur  leur  monnaie  —  qui  n'était  à  pro- 
prement parler  que  de  la  fausse  monnaie  —  leur  nom. 
ieurs  armes,  ni  aucun  symbole  qui  pùt  la  faire  reconnaître. 

Qn  fait  que  nous  n'entreprenons  pas  d'expliquer,  c'est 
que,  dés  que  la  liberté  du  monnayage  leur  fut  garantie  par 
des  diplômes  impériaux,  ils  négligèrent  d'en  user.  Nous 
parlons  ici  de  la  charte  de  Wenceslas,  accordée  à  Bruno 
de  Ribeaupierre  en  1596,  et  dudiplômedelSQO,  par  lequel 
Charles^uint  confirme  leurs  privilèges,  parmi  lesquels  il 
compte  même  celui  de  fabriquer  des  monnaies  d'or  et 
d'argent  {guUm  und  si&ermuntz).  Il  ne  parait  pas  que  les 
Ribeaupierre  aient  profité  de  ce  droit,  quoique  possédant, 
depuis  le  XVP  siècle,  des  mines  d'argent  considérables. 
M.Hanauer  Yoit,  certainement  avec  raison,  la  clef  de  l'énigme 
dans  c  l'opposition  que  la  confédération  de  la  Rappmmauz 
et,  après  sa  dissolution,  les  archiducs  d'Autriche  disaient 
à  tout  nouvel  atelier.  Si  les  Ribeaupierre  ament  monnayé, 
ils  auraient  travaillé  eux-mêmes  le  produit  de  leurs  mines, 
et  c'est  à  quoi,  ni  la  confédération,  ni  les  archiducs  ne  vou- 
laient consentir  >  \ 

Nous  voici  arrivés  à  la  fin  du  XVI*  siècle,  c  Dans  une 
cour  tenue  par  l'archiduc  à  Fribourg  en  1596  >,  dit 
encore  M.  rabbèHanauer,  cEgénolphe  de  Ribeaupierre 
manifesta  ouvertement  le  désir  de  monnayer.  Mais  on 
écarta  sa  demande.  Les  officiers  de  la  Régence  lui  répon- 
dirent qu'il  ne  trouverait  aucun  avantage  à  battre  mon- 
naie, et  que  l'amitié  des  princes  d'Autriche  était  le  meil- 
leur héritage  qu'il  pùl  laisser  aux  siens.  t> 

C'est  ici  que  vient  se  placer  la  curieuse  monnaie  en 
question,  que  nous  croyons  n'ctrc  qu  un  essai,  fabriqué  en 
vue  de  rappeler  et  d'aftirmer  le  droit  de  monnayage  reçu 

'  SUiéa  économiques  sur  fAka»  oneiduie  el  «UNfenw,  t.  II,  p.  104. 
Noavelle  Série  —  7*  Année. 


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482  BEVUË  D'ALSACE 

en  1550,  et  dont  les  bénéficiaires  n'avaient  pas  fait  usage 
jusqu'à  ce  moment.  Sa  conservation  parfaite,  la  circon- 
stance qu'un  seul  exemplaire  en  est  parvenu  jusqu'à  nous, 
le  soin  minutieux  apporté  à  sa  fabrication,  tout,  jusqu'au 
titre  du  métal  et  au  poids  même  de  la  pièce,  semble  annon- 
cer quelle  n'a  été  frappée  qu'en  vue  de  servir  de  type  à 
une  émission  future;  peut-être  même  l'  intention  d'E'^c- 
nolphe  était-elle  de  la  présenter  comme  modèle  à  la  cour 
de  1596:  rappelons  ici  qu'elle  porte  la  date  1594.  —  On  ne 
pourrait  affirmer  que  la  pièce  fat  sortie  d'un  atelier  exis- 
tant alors  à  Ribcauvillé,  qui,  certainement,  n'en  a  pas  eu 
à  ce  moment;  elle  a  pu  aussi  bien  être  frappée  à  Ensis- 
heîm,  à  GuebwUler,  ou  dans  tout  autre  atelier  du  voisi- 
nage. Elle  rappelle  assez  par  son  style  général  et  la  forme 
des  lettres,  les  écus  d*André  d'Autriche,  abbé  de  Murbach 
et  Lure  à  la  même  époque.  Ce  qui  semblerait  encore  con- 
firmer notre  supposition,  que  ce  florin  n'est  qu'un  essai 
et  une  simple  affirmation  du  droit  de  monnayage,  c'est 
qu'il  n'a  pas  été  connu  des  contemporains  ;  il  ne  se  trouve 
en  eflfet  dans  aucun  des  pbccats  et  muentzbwcher  du  temps  ; 
elle  n'est  comprise  dans  aucune  mturUzârJnwigj  et  Luck  lui- 
même,  dans  son  Syl/ogc  numismatumiiegantierttmt  paru  en  1620 
et  comprenant  les  monnaies  les  plus  remarquables  frap- 
pées de  1500  à  1600,  dans  cet  ouvrage  dédié  précisément, 
et  non  sans  une  certaine  pompe,  à  un  seigneur  de  Ribcau- 
pierre,  Luck  ne  mentionne  pas  notre  monnaie,  ce  à  quoi 
il  n'aurait  pas  manqué  s'il  en  eût  eu  connaissance. 

«  En  1619,  le  lils  d  E-enolphe,  Eberhard,  renouvela  ses 
démarches.  Il  ne  demandait  qu'à  feire  marquer  de  SOQ 
effigie  deux  ou  trois  mille  florins  à  la  monnaie  d'Ensisheim. 
Cette  demande  fut  encore  repoussée,  comme  un  empiéte- 
ment sur  les  droits  des  archiducs.  Eberhard  insista.  Pour 
montrer  qu'il  ne  monnayait  que  par  une  concession  spé- 
ciale de  ces  princes,  il  s'olTrit  de  fliire  mettre  sur  la  circon- 
férence de  ses  pièces  :  Dccnto  Imp.  Ferd.  II.  nec  non  archiiutm 
Austria:  (lettre  du  10  février  1G20).  Tout  fut  inutile. 

<  La  guerre  de  Trente-Ans  et  les  malheurs  qui  fondirent 


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ÉTOSB  8Dfi  LIS  UOMNABS  AI8ACIBNIII8  4B8 

sur  l'Alsace  amenèrent  ensuite  les  Ribeaupierre  à  perdre 
de  vue  ces  velléités  de  monnayage,  qui  étaient  pour  eux, 
avant  tout,  une  satisfaction  de  vanité,  s  ' 

Telles  furent  les  destinées  du  monnayage  des  Ribeau- 
pierre. Nous  ne  parlerons  pas  ici  de  certaines  monnaies 
bien  connues  frappées  ea  Allemagne,  dans  le  courant 
du  présent  stéde,  par  des  descendants  de  la  funiUe  des 
Ribeaupierre;  quoique  portant,  en  toutou  en  partie,  les 
armes  et  les  titres  des  anciens  seigneurs,  elles  ne  peuvent 
avoir  pour  nous  qu*un  médiocre  intérêt  et  ne  doivent 
certainement  pas  prendre  place  dans  une  suite  ezclusive- 
ment  alsacienne. 

Qu'il  nous  soit  permis,  en  terminant,  de  porter  tous  nos 
remerctments  à  M.  Ad.  Cahn,  de  Francfort,  qui,  le  pre- 
mier, nous  a  signalé  cette  intéressante  monnaie,  et'  à 
M.  le  Brambach,  conservateur  du  Musée  grand-ducal 
de  Carlsruhe,  qui  a  bien  voulu  nous  permettre  de  la 
publier. 

Arthdb  Ekoel. 

Paris,  25  mai  1878. 


*  Hanaubb,  1. 1,  p.  104. 


LA  BUCHE  DE  NOËL 


ET 


LE  REVENANT  DE  GENIVAL 


Voici  comment,  dans  une  noie  qu  il  nous  remet,  M.  Talion 
parlo  de  la  bûche  de  Noël  : 

.  Le  soir  de  Noël,  on  avait  I  habitude,  dans  les  villages 
des  cnTirous  de  Belforl,  de  se  réunir,  jeuoes  et  vieux,  autour 
d*un  grand  feu  qu'on  allumait  dans  une  Tasle  cuisine.  Les 
voisins,  les  amis  et  les  parents  goûtaient  de  la  douce  chaleur 
de  ce  feu,  en  attendant  Theure  d'aller  à  l'office  de  la  nuit  qae 
l'on  apptilait  les  Matines. 

t  Dcins  ces  réunions,  on  devisait,  on  racontait  à  tour  de 
rôle,  qui  un  conte,  qui  une  aveulure,  qui  une  histoire.  Les 
sorciers,  les  revenants  surtout  étaient  l'objet  de  ces  entretiens 
fàmiUers.  On  avait  soin  d'entretenir  le  feu  au  moyen  de 
menus  bois  ajoutés  à  la  grande  iranch»  =  tronc  =  bùcUe, 
que  l'on  appelait  la  bûche  de  Noël. 

t  A  l'heure  de  minuit,  quand  la  cloche  du  mâiU  =  mou- 
iier  appelait  les  fidèles,  on  se  rendait  à  l'église  pour  assister 
à  l'office  qui,  d'habitude,  durait  fort  longtemps.  Les  and^ 
gardaient  la  maison  et  entretenaient  le  feu  de  la  bûchCÛO 
Noël.  Au  retour  de  1  uftice,  on  faisait  un  repas  que  Ton  appe- 
lait reeeignm  =  remanger  —  recenare. 


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LA  BUCHE  DE  NOËL  ET  LE  REVENANT  DE  GENIVAL  485 

«  La  bûche  qui  avait  servi  au  feu  de  la  soirée  des  Matines 
était  conservée  dans  I  à  ire  pendant  toute  lu  journée  de  Noël. 
Le  soir,  quand  on  cleignail  le  feu,  elle  était  plus  ou  moins 
profondément  carLonisée.  On  ia.reUrait  de  l'âtre,  ainsi  que 
les  tisons  non  consumés,  pour  les  remettre  au  feu  le  jour 
des  Noaes.  Ce  qui  en  restait  i  Ja  fia  de  la  journée  était  reli- 
gieusemeut  recueilli  pour  un  usage  ultérieur.  Dans  le  courant 
de  l^été,  quind  un  orage  s'annonçait  menaçant,  le  clicf  de 
famille  allumait  un  petit  feu  snr  l'âtre,  au  moyen  des  tisons 
et  de  la  bûche  de  Noël.  Il  jetait  aussi  dans  la  Ikmme  des 
rameaux  de  buis,  bénis  le  jour  de  Pàques-ileuries.  Cet  usage 
avait  pour  but  de  préserver  la  maison  et  la  famille  des 
atteintes  de  la  tondre.  Après  l'orage,  ce  qui  restait  de  la 
bûche  était  encore  religieusement  recueilli  pour  être  remis 
au  feu  à  la  veillée  des  Matines  suivantes  qui  consumait  entiè- 
rement les  derniers  témoins  de  Tusage  pratiqué  et  respecté 
les  années  précédentes. 

«  On  employait  de  préférence  une  bûche  de  bois  de  hêtre, 
appelé  dans  le  pays  Foyard=zFoda     Fée.  . 


On  raconte  qu'à  Bessoocourt,  pendant  une  soirée  de  Noël, 
il  fut  question  du  revenant  de  Genival.  Ce  revenant  a  Ja 
mission  de  détourner  de  leur  chemin  les  personnes  qui  pas- 
sent près  de  la  colline  des  bloueehies  =  pruniers,  après  dix 
heures  da  soir,  de  les  égarer  jusqu'à  la  pointe  du  jour  et  de 
les  empêcher  ainsi  de  rentrer  chez  elles  dans  la  nuit.  Aussi, 
le  revenant  inspire  au  village  une  grande  terreur  quand  on 
parle  de  lui  et  de  ses  victimes.  Une  des  jeunes  lillcs  qui 
étaient  à  la  veillée  traita  de  conte  de  vieille  femme  ce  (îii'rlle 
avait  entendu.  J'irais  sans  trembler,  dit-elle,  au  haut  du 
Genival,  persuadée  que  le  revenant  n'y  viendrait  point  et, 
en  tous  cas,  ne  me  ferait  pas  perdre  mon  chemin  pour 
revenir  à  la  maison.  Les  jeunes  garçons  la  prirent  au  mot  et 


« 


BIYUB  D'aLBAiGB 


excitèrent  son  amour-propre.  La  jeune  fille  se  leni,8'engi- 
geant  à  erier,  à  bien  haute  Toiz,  quand  elle  serait  arrivée  : 
m  vùichi  ff  hâ  dê  dfnM!  Une  Tieille  domestique  de  la 
fiimillc,  qui  avait  entendu  le  défi  et  qui  sayait  qoe  la  jeune 

fille  ne  reculerait  pas,  lui  remit  discrètement,  au  sortir  de  la 
maison,  du  beurre  et  du  sel  qu'elle  lui  conseilla  de  placer 
dans  sa  poche.  Munie  de  ce  viatique,  la  jeune  fille  s'élança 
comme  une  flèche  dans  la  direction  de  la  colline  et,  lors- 
qu'elle se  fut  bien  assurée  d'être  arrivée  sur  la  crête,  elle 
cria  de  toute  la  forée  de  ses  poumons: 

M»  wiM  y  M  de  dfnii4\ 
Mais  bientôt  une  voix  caverneuse  lui  répondit  : 

Sain  im  beurre  et  tai  sâ 

Te  n'  fen  iro'p  de  d'fnivâf 
Catherine,  pleine  de  frayeur,  regagna  avec  précipitation  la 
maison  d'où  elle  était  sortie  et,  depuis  ce  moment,  on  croit 
plus  que  jamais,  à  Bessoncourt,  au  revenant  de  Genival  pu 
au  génie  de  la  hauteur  qui  domine  le  vallon  situé  entre 
Bessoncourt  et  Denn^. 

Poar  les  gens  de  Denney,  le  revenant  de  Genival  est  deveoa 
uu  mouton  noir  qui  apparaît  la  nuit  au  fond  du  vallon  et  qui 
a  donné  au  pont  jeté  sur  le  ruisseau  le  nom  de  PorU  du 
mouton,  J  L. 


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HISTOIRE 


DE 


L'ANCIEN  COMTÉ  DE  SAAIiWEKDEN 

m  DB 

LA  PRÉVOTÉ  DE  HERBITZHEIM 


Fin 


CHAPITRE  VI 
Le  pays  de  Saarwerden  pendant  la  Révolution 

A  Taurore  de  la  Révolulioii,  lorsque  la  France  reçut  une 
nouvelle  organisation  et  fut  divisée,  par  le  décret  de  l'Assem- 
blée cûDstiluanle  du  26  février  1790,  en  83  départements, 
la  yilie  de  Bouqaenom  et  le  village  de  Vieuz-Saarinrerden 
forent  réunis  an  département  de  ia  Moselle  et  compris  dans 
le  district  de  Bitche;  il  formèrent,  arec  les  villages  de  Kal- 
hausen,  Rahlingen  et  Schmittwîiler,  une  justice  de  paix  dont 
le  siège  fut  établi  à  Bouquenoni  et  qui  ressortissait  au  tri- 
bunal fivil  de  Bitche. 

Pendant  la  tourmente  révolutionnaire,  Bouquenom  ressentit 
le  contre-coup  des  grandes  commotions  qui  boulerersaient 


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488 


la  France.  Le  eoaTint  de  la  congrégation  de  Notre-Dame  fot 
sopprimé  et  lee  relîgieaees  rentrèrent  an  sein  de  leur  ûuniUe. 
Le  cnré  et  ses  deux  vicaires  dédarirent  publiquement^  en 
chaire,  que  leur  eonsdence  ne  leur  permettait  pas  de 

prêter  serment  à  la  conslilulion  civile  dû  clergé;  ce  refus 
entraîna  leur  destitution  et  ils  furent  remplacés  par  des 
prêtres  assermentés.  L'abbé  Restignac,  principal  du  collège, 
et  tous  les  professeurs  donnèrent  leur  démission  de  fonction- 
naires publics,  sans  préjudice  pour  leur  qualité  de  religieux,  à 
laquelle  ils  déclarèrent  tenir  toujours;  un  seul  d'entre  eux, 
M.  Jacques  Gunther,  prêtre,  régent  de  sixième,  renonça  à 
son  état  de  religieux  et  se  retira  du  eollége'.  Cet  établisse' 
ment  fonctionna  encore  quelque  temps,  puis  il  fut  fermé. 

Le  comté  de  Saanverden,  la  seigneurie  rhingravienne  de 
Diemeringen  et  celle  d'Asswiller,  enclavés  dans  le  territoire 
français,  ne  oonserraient  que  des  rapports  politiques  avec 
rAllemagne,  et  lorsque,  sous  le  règne  de  Louis  XYI;  Tesprit 
d'innoration,  aTant-eoureur  des  grandes  crises  politiques, 
agitait  toutes  les  têtes  et  que  rhorison  s*assombrissait,  le 
prince  Louis  de  Nassau -Starbruck,  malgré  sa  résistance  au 
mouvement,  s'efforçait  de  conjurer  la  tempête  qui  allait 
s'élever  sur  ses  Etals  en  faisant  quelques  sacrifices  au  bien 
général;  il  décréta  Tabolition  de  tous  les  monopoles  et  de  tous 
les  privilèges,  la  réforme  d'un  grand  nombre  d'abus  et  de 
droits  féodaux,  la  liberté  du  commerce  du  tabac  et  des  eaux- 
de-Tie,  la  supprossion  de  la  dime  des  pommes  de  terre  et  des 
conrées  personnelles,  la  libre  exportation  des  grains,  la  dimi- 
nution des  impôts  et  des  amendes  et  donna  au  peuple  une 
tardive  satisfaction  par  le  renvoi  de  M.  de  Hammerer',  préai- 
dent de  son  conseil  de  Régence,  à  qui  les  préjugés  de  la  nais- 

*  Registre  de  la  municipalité  de  Bouqaenom. 

*  C'était,  dit  le  priaea de  llonibwrey,  dans  ses  JtfiAnoûvs,  tlH,  p.*»» 
un  intrigant  habile,  le  prince  de  Nassau  en  fit  son  agent  principal,  tut 
pour  ses  amoon  que  pour  ses  afbiros  de  finance  et  de  poiiliqae. 


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SAABWBRDSN  ET  HBBBIXZHBIM  489 

sance  et  de  l'éducation  rendaient  ces  réformes  odieuses.  Il  se 
flattait  vainement  de  tenir  continuellement  ses  sujets  dans 
la  dépendance  et  ne  prévoyait  guère  quUls  s'empresseraient 
d'adhérer  anx  grands  changements  qui  allaient  avoir  lien  en 
France.  Vesprit  public  da  comté  de  Saarwerden  était  d'ail- 
lenrs  fevorable  anx  Français,  surtout  dans  la  partie  qui 
appartenait  au  prince  de  Nessau-Weil bourg,  où  il  sciait 
introduit  un  amour  plus  grand  d'indépendance,  que  le  voisi- 
nage de  Bouquenom  favorisa.  Le  prince  de  Nassau-Weilbourg, 
qui  voyait  arriver  Torage,  donna  ordre  à  ses  officiers  de 
vendre  les  nombreux  biens  qu'il  possédait  dans  la  prévôté  de 
Herbitsheim  et  qui  étaient  connus  sous  la  dénomination  de 
èmg  vaemUét,  Ses  ofSders  vendirent  par  adjudications  publi- 
ques, des  20  et  80  novembre,  1"  et  2  décembre  1791,  une 
assez  grande  quantité  de  ses  biens  à  plusieurs  habitants  de 
la  commune  de  Herbitzheim.  Ces  ventes  étaient  faites  à  termes 
payables  à  la  recette  de  New-Saarwerden,  les  procès-verbaux 
qui  les  constatent  furent  ratifiés  par  la  Régence  de  Weil- 
bourg'. 

Les  habitants  du  comté  de  Saarwerden,  bien  qu'ils  ne  par- 
lassrat  pas  la  langue  française,  aimaient  la  France,  avec 

laquelle  ils  étaient  constamment  fn  relation;  ila  savaient 
apprécier  l'avantage  des  grandes  agglomérations  politiques. 
Excités  d'ailleurs  par  le  décret  de  la  Convention  nationale,  du 
10  novembre  1792,  qui  engageait  tous  les  peuples  voisins  de 
la  frontière  à  se  soulever  contre  leurs  souverains,  et  séduits 
par  les  mots  sonores  de  liberté,  de  constitution,  d'égalité  et  de 
fraternité;  ils  étaient  las  d'être  toujours  tenus  dans  une 
espèce  d'asservissement;  ils  exprimai^^nt  partout  le  votu  de 
leur  annexion  à  la  France.  Les  habitants  des  seigneuries  de 
Diemeringen  et  d'Asswiller,  résolus  à  secouer  un  joug  devenu 
désormais  insupportable,  demandaient  à  grands  cris  d'être 
fondus  dans  la  grande  nation.  Une  fermentation  générale  et 
BiteiÊia  éa  arrUt  de  fa  eour  d^apfdéeCoImmr,  année  1841,  p.  297. 


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480  BEVUB  D*AL8A€B 

•ztnordinaire  agitait  tous  les  esprits  et  des  cris  de  liberté 
s'échappaient  de  toutes  les  boaches.  Toutes  les  communes 
de  ces  états  microsoopîques  enclavés  dans  le  territoire  fran- 
çais, après  aTOîr  réclamé  leurs  droits  de  souveraineté,  se  réu- 
nirent en  assemblées  primaires  et  adressèrent  à  la  Conm- 
tion  nalionalede  nombreuses  pétitions  pour  la  prier  de  décider 
du  sort  de  leur  pays  et  demander  qu'il  fût  admis  à  participer 
au  nouvel  ordre  de  choses  qui  régnait  en  France.  Le  comité 
diplomatique  de  la  Gonvenlion,  après  avoir  examiné  la  légi- 
timité du  vœu  des  habitants  de  cette  contrée,  le  droit  qu'ils 
avaient  de  se  prononcer  en  faveur  de  la  réunion  à  la  France; 
la  situation  topographique  de  ce  pays,  entièrement  enclavé 
dans  le  territoire  de  la  République,  et  les  intérêts  de  ses 
habitants,  entièrement  identiques  à  ceux  des  Français,  pro- 
posa de  leur  ouvrir  le  sein  de  la  France  et  d'accepter  leur 
vœu  d'être  admis  dans  la  grande  famille.  Le  décret  de  réunion 
fut  adopté  d*enthousiasme,  le  14  février  1793;  il  porte  : 

«  La  Ck>nvention  nationale,  constante  dans  ses  principes 
d*aider  et  de  secourir  tous  les  peuples  qui  voudront  conquérir 
leur  liberté,  sur  le  vœu  libre  et  formel  qui  lui  a  été  adressé 
par  plusieurs  communes  étrangères,  ci rcon voisines  ou  encla- 
vées, réunies  eu  assemblées  primaires,  faisant  usage  de  leur 
droit  inaliénable  de  souveraineté,  à  l'effet  d'être  réunies  à  la 
France  somme  partie  intégrante  de  la  République,  après  avoir 
entendu  le  rapport  de  son  comité  diplomaUque,  déclare  au 
nom  du  peuple  français  qu'elle  accepte  ce  vœu  et,  en  consé- 
quence, décrète  ce  qui  suit  : 

«  Les  communes  du  pays  de  Saarwcrden  et  de  Harskirchen, 
ainsi  que  celle  d'Asswillcr,  sont  réunies  au  territoire  de  la 
République  et  seront  réparties  entre  les  départements  du  Bas- 
Rhin,  de  la  Moselle  et  de  la  Meurthe,  suivant  le  mode  qui 
sera  déterminé  par  un  décret  particulier.  » 

Pendant  que  les  habitants  du  comté  de  Saarwerden,  dans 
lenr  élan  vers  Tindépendance,  demandaient  avec  m  seul 


Digitizec  i 


AAABWXRDBN  ET  HEBBITZHBIM 


m 


esprit  et  d^one  seule  voix  leur  réunion  à  la  France  et  expri- 
maient leur  TŒu  de  toute  manièro,  le  prince  Louis  de  Nissau- 
Saarbruck  comprit  enfin  que  les  droits  des  peuples  ne  pou- 
vaient plus  être  regardés  comme  chimériques  ;  il  s'efforça  de 
calmer  refFervescence  populaire  par  de  nouvelles  concessions 
et  décréta,  le  20  janvier  1703,  rabnlition  du  servage  {Lei-b- 
eigemchaft).  Mais  ces  hommes,  qu'on  considérait  encore  vers 
la  fin  du  XVIIl"  siècle  comme  une  adhérence  à  la  glèbe, 
avaient  appris,  dans  leur  vie  flpre  et  laborieuse,  le  sentiment 
le  plus  noble  du  cœur  humain,  Tamour  de  la  liberté,  et  aspi- 
raient au  plus  précieux  de  tous  les  biens,  à  Tlndépendance 
et  à  l'affrancbissement  des  liens  qui  les  attachaient  au  sol. 

Tous  les  biens  domaniaux,  toutes  les  propriétés  des  princes 
de  Nassau  furent  réunis  au  domaine  de  la  République.  Le 
prince  de  Nassau-Saarbruck,  qui  venait  de  perdre  quatre- 
vingt  mille  florins  de  revenus,  fit  d'infructueuses  représen- 
tations à  la  Convention  nationale,  qui  les  rejeta  sous  le  pré- 
texte que  les  habitants  du  comté  de  Saarwerden  avaient 
brisé  eux-mêmes  les  liens  qui  les  attachaient  à  leur  ancien 
gouvernement  et  qu'ils  n'avaient  fait  que  ressaisir  leurs  droits 
de  souveraineté. 

Tandis  que  les  communes  du  pays  de  Saarwerden  arbo- 
raieut  le  drapeau  tricolore,  plantaient,  selon  l'usage  du  temps, 
des  arbres  de  liberté  et  célébraient  leur  annexion  à  la  France 
par  des  IStes  et  des  réjouissances  publiques,  la  Convention 
nationale,  malgré  ses  importantes  occupations,  donnait  ses 
•oins  à  leur  organisation,  d'après  les  institutions  en  vigueur 
en  France,  et  comme  leur  répartition  entre  les  départements 
limitrophes  avait  fait  naître  des  dilTicultés  locales  et  que  la 
célèbre  assemblée  désirait  ménager  tous  les  intérêts  et  attacher 
tous  les  cœurs  à  la  Révolution,  elle  donna  à  cette  contrée  la 
preuve  la  moine  équivoque  de  sa  aympatbie  par  l'adoption 
des  mesures  suivantes  : 

Après  avdr  entendu  le  rapport  de  son  comité  de  division, 


BEVUE  D*ALBA,GB 


elle  décréta,  le  8  frimaire  de  l'an  II  (28  novembre  1798) 
que  la  partie  do  décret  du  14  février  relative  à  la  répartition 
de  ces  oommaDea  entre  les  départements  da  Baa-Rliin,  de  la 

Moselle  et  de  la  Meurthe  était  rapportée  ;  elle  érigea  en  dis- 
Irict,  qu'elle  incorijora  au  département  du  Bas-Rhin,  les 
communes  du  pays?  de  Saarwerdcn,  celle  d'Aswiller,  et  celles 
de  La  ci-devaut  seigneurie  de  Dieraerini^^en,  dont  romission 
dans  ce  décret  lui  avait  été  signalée.  Les  commîmes  de  Bou- 
qneDom  et  de  Yieax-Saarwerden  furent  dîAtraite^  du  district 
de  Bitche  et  incorporées  au  nooyeao  district  dont  le  chef-lieu 
fut  établi  à  New-Saarvrerdeu.  Le  siège  du  tribunal  civil  fat 
fixé  à  Bouquenom.  Le  district  fut  divisé  en  six  cantons 
microscopiques  dont  les  chefs-lieux  furent  établis  dans  les 
communes  de  Bouquenom,  New-Saarwerden,  Harskirchen, 
Drulingen,  Diemeringen  et  WoifBkircben. 

Le  premier  comprenait  les  communes  de  Bouquenom  el 
Yienx-Saarwerden  ; 

Le  second  se  composait  de  New-Saarwerden,  Keskastel, 

Herbitzheim,  Silzbeim  et  Oermingen; 

Le  troisième  comprenait  Harskirchen,  Willer,  Bîsseii»  Hm- 
singen,  Altwiller,  Dieileiidorf,  Scliopperten  et  Zollingen; 

Le  quatrième  renfermait  Drulingen,  Weyer,  Siewiller, 
Mackwiller,  Asswiller,  Biist,  Rexingen,  Berg,  Thaï,  Eywiller 
et  Ottwiller  ; 

Le  cinquième  comprenait  Diemeringen,  Ratzwiller,  Deh- 
lingen,  Lorentzen,  Domfessel,  TcBllerdiogen,  Rimsdorf  et 
Bfltten  ; 

Et  le  sixième  renfermait  Wolfskirchen,  Pistorf,  Burbach, 
Hirschland,  Gœrlingen.  Kirberg,  Rauweiler,  Eschweiler  et 
Bisreodorf. 

Le  représentant  du  peuple  RObl'  avait  été  chargé  de  i  or- 

»  Rûhl  (Philippe-Jacques),  théologien  protestant  elconselller  du  comte 
de  Linange,  naquit  &  Strasboorg;  il  fut  député  à  l'Assemblée  législative, 
puis  à  la  Convention  nationale  ;  il  fut  membre  da  Comité  desahitpnbuc 


SAARWBBDBN  ET  HBBSITZHEIM 


498 


ganîsation  du  nouveau  district  et  de  prendre  les  mesures  les 
plus  propres  à  coosolider  Tannexiob  de  ce  ptys  au  territoire 
français.  Mais,  ayant  été  obligé  de  se  tendre  &  son  poste  à 
Paria,  il  fit  nommer  les  citoyens  Karcher  et  Uichaad  commis- 
saires chargés  de  la  formation  des  manidpalités  et  des  jus- 
tices de  paix  cantonales.  Les  citoyens  Chrétien  Teutsch,  juge 
de  paix  de  Drulingen,  et  Henri  Kari'lier,  procureur  de  la 
commune  de  Bouquenom,  furent  chargés,  par  un  arrêté  des 
représentants  du  peuple  à  l'armée  de  la  Moselle,  Richard  et 
Ëhrroann,  du  6  du  deuxième  mois  de  Tan  U  (S7  octobre  179S}» 
de  l'administration  provisoire  et  de  la  surveillance  des 
revenus,  capitaux,  rentes  et  redevances,  qui  devaient  être 
perçus  au  profit  de  la  République  dans  les  ci-devant  pays  de 
Nassau  et  de  Salm  (DiemeringenJ  et  la  ci-devant  seigneurie 
d*AsswiIler,  ainsi  que  celle  des  biens  et  effets  des  émigrés  de 
ces  pays. 

Appelé  à  élire  un  député  à  la  Convention  nationale,  le  nou- 
veau district  envoya  siéger  sur  ses  bancs  le  citoyen  Karcher, 
de  Bouquenom,  connu  par  son  ardent  patriotisme  et  Ténergie 
de  son  caractère.  Le  Directoire  du  district  était  à  peine  installé 
qu'il  s'occupa  à  dresser  l'état  des  personnes  éraigrées;  cet 
état  fut  approuvé  le  26  ventôse  de  Tan  II  (16  mars  171I4J  par 
le  Directoire  du  département  du  Bas-Rhin;  il  comprend  cent 
quarante-quatre  personnes  de  tout  rang  et  de  toute  condi- 
tion, depuis  la  princesse  Joséphine-Charlotte  de  Nassau- 
Saarbruck,  qui  depuis  son  veuvage  avait  résidé  au  cbftteau 
de  Lorentzen,  jusqu'à  son  nègre  Coma. 

Quelque  temps  après,  les  communes  de  Bouquenom  et  de 
New-Saarwerden,  qui  n'étaient  séparées  que  par  la  Saar, 

et  entra  au  Comité  de  sûreté  gonéralo.  Ce  fut  lui  qui  brisa  la  sainte 
anif)oule  h  Ileiins.  Aprts  la  chute  de  Robespierre,  il  s'opposa  aux 
mesures  réactionnaires.  Arrêté  comme  complice  des  insurrections  popu- 
laires, il  prévint  sa  condamnation,  eu  se  donnant  la  mort  en  ITUÔ.  Ou 
a  de  Ini  :  Redierehes  hi^oriques  et  généalogique»  amr  ta  maison  de 
iànange-nabo,  Stnsbonrg  1789,  grand  iii-4«. 


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^  HBVUB  D'ALBAGE 

exprimèrent  le  yoeu  d'être  réunies  en  une  seule  commune; 
le  comité  de  divisioa  de  la  Convention  fui  chargé  d'examiner 
les  avantages  réciproques  de  celte  réunion  ;  il  proposa  une 
nouvelle  division  du  district  de  New-Saarwerden,  que  la 
Convention  sanctionna  par  un  décret  du  28  prairial,  an  U 
(16  juin  1794).  L'ancienne  ville  de  Bouquenom  et  la  ville 
neuve  de  Saarwerdeu  furent  réunies  en  une  seule  commune, 
sous  la  dénoininalioii  de  Saar-Union.  La  nouvelle  commane 
fut  divisée  en  deux  sections  :  la  première  se  composait  de 
Bouquenom  et  la  seconde  de  New-Saarwerden.  Le  siège  de  la 
justice  de  paix  et  de  la  municipalité  fut  fixé  dans  la  première 
section,  ou  au  ci-devant  Bouquenom,  où  la  maison  commune 
présentait  les  emplacements  et  les  aisances  nécessaires  pour 
le?  services  publics.  Le  district  prit  le  nom  de  district  de 
Saar-Union.  Le  canton  fut  composé  de  la  nouvelle  commune 
et  de  celles  de  Vieux-Saarworden  et  d'Oermingen.  Les  com- 
munes de  KeskasteL  Herbitzlieim  et  Silzheim,  qui  avaient  fait 
partie  du  canton  supprimé  de  New-Saarwerden,  furent  réu- 
nies au  canton  de  Harskirchen.  Le  canton  de  la  Petite-Pierre 
fut  distrait  du  district  de  Wissembourg  et  réuni  à  celui  de 
Saar-Union.  Les  communes  de  Hambach,  Weislingeu  et 
Volcksburg  furent  détachées  du  canton  et  réunies  à  celui  de 
Diemeringen;  celles  de  Gungwiller,  Durslel,  Adamswiller  et 
Beltwiller  furent  distraites  du  même  canton  de  la  Petite-Pierre 
et  incorporées  à  celui  de  Drulingen. 

La  Constitution  du  5  fructidor  an  III  (22  août  1795)  sup- 
prima les  districts  et  décida  que  chaque  déparlement  serait 
divisé  en  cantons;  elle  mit  fin  à  nmportancede  la  commune 
en  réunissant  toutes  les  communes  en  une  seule  inunicîpalité. 

Saar-Union  perdit  1  espoir  d'obtenir  le  siège  d'un  tribunal 
civil  par  Teffet  de  cette  Goastitu lion,  qui  ne  laissa  subsister 
qu*un  tribunal  par  déparlement,  chargé  de  juger  en  première 
Instance  les  causes  du  département  et  en  appel  celles  des 
départements  venons.  Une  cour  criminelle,  composée  de  cinq 


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8AAKWKRDBN  ET  HEBBITZHEIM 


416 


membres  et  d'un  jury,  fut  instituée  dans  chaque  cbef-lieu  de 
département.  Quatre  tribunaux  de  police  correctionnelle 
furent  établis  dans  le  département  du  Bas-Rbin  ;  les  cantons 
de  Dîemeringen,  Drulingen,  Harskirchen,  Saar-Union  et 
Wolfekirehen  furent  compris  dans  Farrondissement  judiciaire 
de  Saverne  et  soumis  au  tribunal  correctionnel  de  cette  ville. 
LfC  canton  de  la  Petite-FMerre  rossorlit  au  tribunal  correc- 
tionnel de  Wissemi)Ourg.  Ot  élal  de  ciioscs  n'eut  qu'une 
durée  éphémère,  il  fut  modifié  par  la  loi  du  7  ventôse  an  VII 
(25  février  1799)  qui  créa  dans  le  déparlement  du  Bas-Rhin 
un  cinquième  tribunal  de  police  correctionnelle  dont  le  siège 
fat  fixé  à  Saar-Union  ;  on  détacha  pour  le  former  les  cantons 
de  Diemeringen,  Drulingen,  Harskirchen,  Saar-Union  et 
Wolfskirchen  de  Tarrondissement  judiciaire  de  Saverne,  et 
le  canton  de  la  Petile-Pierre  de  Tarrondissemcnt  judiciaire  de 
Wissembourg.  Ce  Irihunal  fut  installé  le  29  ventôse  an  Vil 
(19  mars  1799);  il  tenait  ses  audiences  le  6  et  le  9  de  la 
décade  pour  les  affaires  correctionnelles,  et  les  tridis  étaient 
consacrés  aux  affaires  des  délits  ruraux  et  forestiers.  L'exis- 
tence de  ce  tribunal  fut  éphémère  et  il  fut  supprimé  en  1800 
par  la  nouvelle  organisation  que  reçut  la  France. 

Les  niunicipalités  colleclives  furent  supprimées  et  chaque 
commune  reçut  un  corjis  municipal,  composé  d"un  maire,  d'un 
ou  plusieurs  adjoints,  suivant  la  population,  et  d'un  conseil 
municipal.  La  ville  de  Saverne  fut  élevée  au  rang  de  cbef-lieu 
d'arrondissement  du  département  du  Bas-Rhin,  siège  d*une 
sous-préfecture,  par  la  loi  du  17  ventôse  an  VIII  (8  mars 
1800).  Son  arrondissement  fut  formé  des  communes  qui  com- 
posaient les  cantons  de  llarskirclien,  Saar-Union,  Wolfskir- 
chen, Drulingen,  Diemeringen.  la  Petite-Pierre,  Ingwiller, 
Bouxwiller,Hoclifelden,  Saverne  et  Marmoutier.  Ces  communes 
étaient  alors  au  nombre  de  cent  soixante-quatre,  villes, 
bourgs  on  villages,  dont  quarante-neuf  étaient  situées  au  delà 
(tes  Vosges,  et  le  reste  faisait  partie  de  la  Basse-Alsace  ;  elles 


496  REWn  D'ALBàOB 

fùreiit  soumises  à  la  jaridiction  du  tribunal  ciril  de  première 
instance  dont  le  siège  fiit  éUbli  à  Sarsrne. 

Un  arrêté  des  consuls  du  21  brumaire  an  X  (18  norembre 
1801)  créa  une  nouTelle  circonscription  dos  cantons  de 

Tarrondissement  de  Saverne,  réduisit  leur  nombre  deODse  à 
sept,  et  fit  perdre  à  Ingwillcr,  Diemeringen,  Harskîfcben  et 
Wolfskirchen  leur  rang  de  chef-lieu  et  leur  siège  de  justice 
de  paix. 

Le  sort  du  canton  de  Saarwerden  fut  définitivement  fixé 
par  la  paix  de  Luné?iUe,  qui  fat  signée  le  9  ttyrier  180i. 
Par  ce  traité,  la  France  eut  en  toute  souveraineté  tout  les 
paya  situés  sur  la  rive  gauche  du  Rhin  qui  ayaisnt  fait  partie 

de  l'Empire  germanique. 

Quelque  temps  après  la  réunion  du  comté  de  SaarwerdeD 
à  la  France,  la  commune  de  Herbitzheim  se  prévalut  de  la 
loi  du  28  août  1792,  qui  avait  été  rendue  pour  rattaclier  les 
masses  à  la  Révolution  et  qui,  dans  Tensemble  de  ses  dispo- 
sitions, décidait  que  les  biens  vacants,  possédés  ou  vendus  par 
les  seigneurs  féodaux,  étaient  une  usurpation  des  droits  de  la 
commune  où  ces  biens  étaient  situés,  pour  soutenir  que  les 
anciens  biens  vacants  situés  sur  son  lerritoîrs  étaiMlt  sa  pro- 
priété. Elle  introduisit  contre  l'Etat,  qui  se  trouvait  aux  droits 
du  prince  do  Nassau-Weilbourg,  une  action  en  revendication, 
et,  par  jugement  arbitral  du  9  vendémiaire  an  IV,  elle  obtint 
la  possession  de  ceux  qui  n'avaient  pas  été  vendus  et  la  délé- 
gation du  prix  de  ceux  qui  avaient  été  aliénés  en  1791 

En  1802,  lors  de  la  réorganisation  du  culte,  les  paroisses 
de  SaHr-Union  et  de  Weyer  forent  érigées  en  cures  csnto- 
nales  de  l'évêché  de  Strasbourg,  l'une  pour  le  canton  de  Ssa^ 
Union,  l'autre  pour  celui  de  Drulingen. 

Après  que  le  traité  de  Lunéville  eut  validé  l'annexion  do 
comté  deSaarwerden  au  territoire  de  la  République  française, 
M-  la  comtesse  tfOttwiller,  veuve  donsirière  de  feu  le 

*  ArrttB  de  to  cour  d^appél  de  Colmar,  année  18A1,  p*  S96. 


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SAABinmDIN  KP  BBBBmBBDf 


497 


Pimce  Louis  de  Nasiau-Saarbruck,  fit  feîre  des  démarches 
auprès  du  gouvernement  français  pour  se  faire  reconnaître 

bailliage  de  Harskirchen,  pour  une  somme  assez  considérable 
ainsi  que  pour  les  înléréts  qui  en  étaient  dus  depuis  1789 
Les  communes,  de  Jeur  côté,  formaient  contre  la  comtesse  des 
conlre-prétentions  qui  ne  reposaient  que  sur  des  présomp- 
lons  Un  décel  impérial  du  8  mars  mi  «connut  la  légi- 
imi.té  des  prélention.  de  Ja  comtesse,  fixa  le  monUnl  de  «a 
créance  à  ia  somme  principale  de  22,618  fr.  61  c,  et  ordonné 
que  cette  somme,  ensemble  les  intérêts  arriérés,  Jui  serait 
acquittée  par  lesdlles  communes,  au  moyen  d  une  rcpartiUon 
a  faire  entre  elles. 

A  peine  ce  décret  était-il  rendu  que  la  comtesse  douairière 
d  Oltwiller  écrivit  à  M.  le  préfet  du  Bas-Rhin  différentes  let- 
tfM,  où  elle  réclamait  le  paiement  de  sa  créance  arec  les 
intérêts  arriérés  depuis  1789.  Mais,  comme  un  décret  du 
«vendémiaire  an  Xlll  (n  octobre  J804)  sur  la  liquidation 
des  dettes  des  quatre  départements  de  la  rive  gauche,  inter- 
disait  toutes  poursuites  pour  les  arrérages  et  intérêts  des 
dettes  anlérieure^i  au  1-  vendémiaire  an  Vfll,  le  préfet  du 
Bas-Rhin  prit,  le  6  mars  1812,  un  arrêté  portant  que  la 
comtesse  d'Ollwiller  ne  pouvait  prétendre  que  les  intérêts  dus 
depuis  ledit  jour.  1«  vendémiaire  an  VIII,  que  la  créance 

•  élevant  en  capital  à   22,3 18  fr.  51 

et  en  intérêts  arriérés  de  11,861  fr.  85  à 

^«  6  %   8,760  .  84 

de  10,666  fr.  66  à  raison  de  6  %   6,648  i  11 

Ensemble   37^97  fr.  46 

wrait  répartie  entre  les  communes  de  l'ancien  bailliage  de 
Harskirchen,  au  centime  le  franc  de  la  contribuUun  foncière 
acquittée  en  1811. 

Les  événements  politiques  qui  ont  amené,  en  1S7K  l  an- 

NoDvelle  Série  -  7'  Anti«e  33 


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^(jQ  BsyoB  d'albaob 

nezion  de  FAlsace  et  de  U  Lorraine  à  l'Empire  germanique, 
sont  connus;  l'ancien  comté  de  Saarwerden,  qai  s'était  donné 
librement  à  lu  France,  soixante-dlx-huit  an8  aapara?ant,  lui 
fut  enlevé  par  la  conquête  avec  les  pays  que  la  conquête  loi 
avait  donnés. 


APPENDICE 


A.  Législation  du  comté  de  Saaffwerden 

Le  comté  de  Saarwerden  était  un  pays  de  droit  éïirit,régi 
par  les  principes  du  droit  romain,  modifié  par  une  coutume 
locale  qui  a  été  recueillie  et  consignée  par  écrit,  en  1777, au 
moyen  d'une  enquête  faite  parmi  les  avocats  et  les  hommes 
de  loi  de  la  juridicUon  de  Harskirchen,  réunis  en  assemblée 
par  les  officiers  da  prince  de  Nassau-Saarbruck;  transmise 
d'ancienneté,  comme  toutes  les  coutumes,  elle  était  fondée 
sur  un  usage  qui  avait  force  de  loi  et  qui  avait  lieu  de  plcm 
droit  à  défaut  de  contrat  de  mariage;  elle  élait  ainsi  conçue; 

1.  En  cas  de  décès  de  l'un  des  conjoints,  s'il  y  a  des  enfants, 
les  meubles  et  choses  réputées  telles  se  partagent  par  moiUe 
entre  le  survivant  et  les  enCuits  du  prédécédé;  en  cas  de 
non  existence  d'en&nte,  le  survivant  des  époux  est  seul  Iien- 
tier  de  tous  les  meubles,  à  charge  néanmoins  d'acquitter 
toutes  les  dettes  personnelles,  réelles  et  hypothécaires;  « 
époux  ont  fait  une  disposition  contraire,  cette  difipOMhon 
servira  de  loi  entre  eux. 

8.  Les  acquêts  des  biens,  meubles  et  immeubles,  faits  pen- 
dant le  mariage,  sont  communs  entre  le  mari  et  la  femme  e 
plein  droit  et  sans  qu'il  soit  nécessaire  d'en  faire  menUon 


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8AARWEBDEN  BT  HBBBirZHEIM 


489 


dans  le  contrat  d'acqaisiUoo,  mais,  qaand  l'un  des  époux 
wndra  faire  l'acquisiUon  d'un  bien  dont  il  pourra  disposer 
de  plein  droit,  il  fout  que  l'autre  y  consente  et  q.ie  son 
eonsentement  soît  exprimé  dans  le  contrat  d'acquisition;  il 
est  permis  au  mari  de  disposer  des  acquêts  du  nrant  de  sa 
femme,  cependant  ii  est  bon  d'exiger,  s'U  eat  possible,  l'acces- 
sion de  la  femme  au  contrat. 

3.  Le  siirnvant  des  époux  a  rusufniit  des  acquêts,  qu'il  y 
ait  des  enfants  ou  non  de  leur  mariage. 

4.  Le  survivant  des  époux  n'a  aucun  droit  sur  les  biens 
propres  du  prédecédé.  Si  celui-ci  n'a  pas  laissé  d'enfants,  ses 
biens  retombent  à  ses  plus  proches  parents,  pourvu  qu'il 
n'en  ait  pas  disposé  par  testament  en  fareur  de  son  conjoint 
survivant;  si  l'époux  prédécédé  a  laissé  des  enfants,  I  usa- 
fruit  de  ses  biens  appartient  à  son  conjoint  surviv  ant,  à  char-e 
par  celui-ci  d'entretenir  lesdils  enfanis.  Cet  usufruit  se  perd 
par  le  convoi  en  second  maria-e.  En  cas  de  décès  de  l'un  des 
enfants,  l'autre  liérile  ses  biens,  et,  si  tous  les  enfants  vien- 
nent à  mourir,  leurs  biens  retombent  au  plus  proche  parent 
de  la  famille,  à  l'exclusion  du  survivant. 

o.  Les  père  et  mère  ont  la  jouissance  de  t(»us  les  biens  géné- 
ralement quelconques  appartenant  à  leurs  enfants.  Le  temps 
de  la  jouissance  n'e^t  jamais  réglé  sur  l'âge  des  enllints,  parce 
qu'elle  cesse  aussitôt  qu'ils  ne  sont  plus  à  la  charge  des  père 
et  mère;  cette  jouissance  ne  produit  aucune  obligatio/i  parti- 
culière que  celle  de  la  nourriture. 

6.  Les  époux  peuvent  s'avantager  pendant  le  mariage,  soit 
qu'il  y  ait  des  enfants,  soit  qu'il  n'y  en  ait  point. 

7.  Les  descendants  succèdent  ab  irUestat  selon  la  disposition 
du  droit  commun,  les  ascendants  et  les  collatéraux  n'ont  rien 
à  prétendre  à  la  succession  ab  infestai  entre  descendants. 


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gQQ  BEVUE  D'ALSACE 

8.  Le  retrait  lignager  n  a  pas  Iteu  en  CM  de  tente  *  biens 
propres  ou  acquêts  ^ 

9  Quand  une  succession  s'ouvre,  si  le  défunt  a  disposé  de 
ses  biens  pnr  un  Icslament  fait  dans  les  formes  présentes 
ses  lici  iiiers  doivent  exécuter  cet  acte  de  sa 
s'il  n'en  a  pas  disposé,  son  héritage  est  échu  à  ses  hénticrs 
naturels  et  légitimes,  selon  les  us  et  coutumes  ci-dessus  men- 
tionnés et  la  disposiUon  du  droit  commun . 

Ces  deux  règles  s'observenl  pour  la  succession  d'un  noble 
aussi  bien  que  pour  celle  d'un  roturier. 

Les  tuteurs  ou  curateurs  sont  proposés  ou  approuvés  par 
le  procureur  d'office  au  grand-bailUage  ;  ils  sont  tenus  de 
prêter  serment  en  justice  de  bien  exercer  cette  charge  et  ne 
procurer  en  toute  chose  Tavantagc  et  le  profit  du  ^mineur, 
les  inventaires  seront  dressés  par  les  procureurs  d  office,  en 
présence  des  héritiers  majeurs  et  des  tuteurs  des  enfants 
mineurs,  et  description  exacte  y  sera  faite  des  biens,  meubles 
et  immeubles,  titres  et  dettes  de  la  succession. 

10.  Quand  le  survivant  ou  l  un  des  conjoints  meurt,  le 
maire  est  tenu  d'informer  de  ce  décès  le  procureur  d  office  , 
celuiHîi,  sll  le  juge  à  propos,  apposera  les  scelles,  qui  ne 
seront  lev#8  qu'au  moment  où  on  dressera  l'inventaire  Le 
survivant  ne  peut  pas  se  dispenser  de  faire  dresser  inven- 
taire de  la  succession  de  son  conjoint,  sous  prétexte  de  vouloir 
rester  en  vi.luité.  Les  officiers  du  prince  ne  sont  pas  assu- 
jettis à  cette  prescripllon,  et  il  dépend  uniquement  d'eux  a 
faire  dresser  un  inventaire  des  successions  de  leurs  épous 
prédécédées,  aussi  longtemps  qu'Us  restent  en  viduilé  et  qui» 
ne  convolent  pas  en  secondes  noces. 

11.  Nonobstant  que  la  loi  civile  ne  déclare  majeurs  que 

>  Le  retrait  lignager  éUdt  anciennement  usité  au  comté  de  Saar^r; 
den;  les  sujets  iias.nnviena  exerçaient  sur  les  l)ieiis  aciuis  ^'^^J"^^^ 
gers  le  droit  de  reUait,  ex  eapUe  iniigeMtus  incoagnamus  veiciv 


SAABWEBDEN  ET  HEBBTTZHEIH  601 

ceux  qui  ont  alteint  la  vingt-cinquième  année,  il  est  cepen- 
dant permis  aux  garçons  de  se  marier  k  Tàge  de  ?iQgt  ans, 
et,  à  partir  de  lear  mariage,  ils  jouissent  des  pririi^ges  des' 
miyears  et  ils  ont  la  Jibre  disposition  de  leurs  biens. 

12.  Les  testaments  doivent  être  faits  dans  les  formes  près- 
crites  par  les  loin  civiles.  Il  est  défendu  aux  ecclésiastiques 
de  dresser  des  testaments  pour  leurs  paroissiens,  et  les  legs 
en  faveur  des  établissements  de  main-morte  sont  expressément 
interdits. 

18.  Les  douaires  ou  pensions  que  les  maris  laissent  après 
leur  mort  à  leurs  veuves  doivent  être  proportionnés  à  la 
fortune  de  celui  qui  l'assigne  sur  son  i)ien  propre;  en  outre, 
ils  ne  sont  que  rarement  constitués  et  seulement  par  les 
veufs. 

14.  La  femme  se  trouve  sous  la  puissance  du  mari,  et  les 
effets  de  celte  puissance  regardent  l'honneur,  le  proGl  et  le 
devoir  du  mari. 

15.  Si  la  femme  possède  des  biens  paraphernaux,  leur 
administration  ou  leur  aliénation  ne  dépend  qna  d'elle-même, 
à  moins  qu'elle  n'ait  cédé  son  droit  au  mari  par  un  coûsen- 
lement  formel. 

16.  Il  est  loisible  au  prince  de  changer  quand  il  veut  les 
dispositions  des  anciennes  coutumes  ou  seulement  l'une  d'elles. 
Ce  droit  loi  appartient  en  qualité  de  souverain,  et  sa  volonté 
fait  la  loi  de  ses  sujets,  pourvu  qu'elle  ne  soit  pas  contraire 
aux  constitutions  de  l'Empire  germanique. 

17.  Il  n'existe  aucun  recueil,  ni  par  écrit  ni  imprimé,  des 
us  et  coutumes  usités  dans  le  grand- bailliage  de  Harskirchen; 
ils  sont  établis  par  un  usage  immémorial  qui  les  a  tellement 
autorisés,  qu'ils  tiennent  depuis  longtompe  lien  de  loi  dans  le 
comté  de  Saarwerden. 


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g03  BEVUE  D'ALSACB 

Telles  sont  les  lois  et  coutumes  qoî,  de  tous  temps,  ont 
été  en  vigueur  dans  le  comté  de  Saarwerdcn,  et  l'acte  de 
notoriété  qui  fut  rédigé  à  cet  efBet,  le  10  février  1777.  par 
les  officiers  du  grand-bailliage  de  Harskirchen,  le  procureor 

d'oflice  et  les  jurisconsultes  de  son  ressort,  fut  cerliflé  véri- 
table par  le  Conseil  de  la  Régence  de  Saarbruck,  le  22  avril 
suivant 

dette  Régence  était  à  la  fois  un  conseil  judiciaire  et  admi- 
nistratif, un  tribunal  intermédiaire  entre  le  premier  juge  et 
le  tribunal  suprême  de  TEmpire,  et  une  cour  féodale  chargée 
de  juger  les  différends  que  le  seigneur  direct  pouvait  avoir 

avec  ses  vassaux,  les  contestations  que  les  vassaux  pouvaient 
avoir  entre  eux  et  les  difficultés  entre  les  vassaux  et  leurs 
justiciables.  La  partie  qui  se  croyait  lésée  par  la  justice  locale 
pouvait  appeler  à  la  Régence  de  Saarbruck,  depuis  la  sup- 
pression de  la  Régence  de  New-Saarwcrden  qui  a  eu  lieu 
par  suite  du  partage  du  comté  de  Saarwerden. 

Dans  le  principe,  le  GeriM  ou  Conseil  municipal  de  chaque 
villaiTC  exerçait  l'administration  de  la  justice  et  sa  compé- 
lence  s'étendait  à  toute  espèce  de  causes;  il  exerçait  aussi  la 
juridiction  gracieuse  ou  volontaire  et  recevait  les  acles  de 
vente,  de  transport,  de  dernière  volonté,  les  contrats  de 
mariage  et  généralement  tous  les  actes  et  contrats  (lue  les 
parties  voulaient  revèUr  du  caractère  d'authenticité.  Chaque 
GeriefU  ou  Conseil  municipal  était  composé  d'un  maire 
(Maier),  de  plusieurs  échevins  (Sdiëffen)  et  d'un  bourgmestre 
{IJeimaier).  Le  nombre  des  éclievins  devait  être  au  moins  de 
deux;  ils  élaient  nommés,  ainsi  (lue  le  maire,  par  le  seigneur 
ou  son  représentant;  le  Etimaier,  qui  était  chargé  de  la  col- 
lecte des  deniers  seigneuriaux,  était  élu  par  les  Imbifants  du 
village,  mais  son  élection  était  soumise  à  la  confirmation  de 
l'autorité  seigneuriale\  Dans  la  suite,  la  juridicUon  gracieuse 
Ait  confiée  au  greffier  du  bailliage,  dépositaire  et  garde  du 

*  Arcliives  du  Bas-Ubin,  E  5136. 


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8AAKWERDKN  BT  HBRBITZHBIM 


008 


sceau  du  bailliage  (Amstachreiàert  VeruM&r  uné  Bukr  des 
Sigêb  der  Cfrf^achaff).  Le  grefiOer  était  en  même  temps  chargé 
de  la  rédactioa  des  arrêtés  et  de  Pexpédition  des  diverses 
affaires  d^administration.  Le  Geriehi  local,  qui  était  dirigé  on 

présidé  par  le  maire  du  lieu,  exerçait  aussi  l'administration 
de  la  justice  criininelle,  mais  rinformation  des  crimes  et  des 
délits  était  faite  par  les  odiciers  du  bailliage.  Dans  la  suite,  la 
jaridiclion  criminelle  fut  exclusivement  attribuée  à  ces  ofli- 
clers,  et,  aussi  longtemps  que  le  comté  de  Saarwerden  était 
indivis  entre  les  branches  de  Nassau-Saarbruck  et  de  Nassau- 
Weilbourg,  elle  appartenait  aux  officiers  des  deux  branches 
en  commnn\ 

Les  comtes  de  Nassau-Saarbruck  introduisireut  dans  le 
comté  de  SaarvvenJeti  la  loi  qui,  de  loule  anciennolé,  régissait 
le  comté  de  Saarbruck.  Aux  termes  de  cette  lui,  aucun  sujet 
du  comté  ne  pouvait  se  vouer  à  l'état  ecclésiasliquc  sans  la 
permission  du  souverain,  et  il  était  interdit  formellement  au 
fils  unique  d'embrasser  cet  état  \ 

En  1573,  les  comtes  Albert  et  Philippe  de  Nassau-Saar^ 
bruclv,  comtes  de  Saarwerden,  lirenl  publier  par  Jean  Streîf 
de  Lauensteiu.  leur  bailli  à  Bouquenora,  un  règlement  sur 
les  contrats  de  mariage,  de  vente,  d'échange  et  d'engagement, 
sur  le  retrait  lignager  et  sur  les  ofticiers  ministériels  du 
bailliage.  Ils  ordonnèrent  en  même  temps  l'abolition  et  la  sup- 
pression de  la  jouissance  alternative  des  prairies.  On  sait  que 
ces  prés,  appelés  WetAsehnaUen,  étaient  laissés  dans  Tindi- 
vision  quant  à  la  propriété,  qu1ls  n'étaient  partagés  que  par 
rapport  à  la  jouissance  et  (jiie  tous  les  ans  chaque  propriétaire 
obtenait  en  jouissance  un  autre  lot  que  celui  dont  il  avait 
oui  l'année  précédente,  l/existeiice  de  ces  prairies  était 
aussi  ancienne  que  rétablissement  de  la  propriété  ûxe  et 

*  Là  même. 

*  Kremer,  Histoire  de  la  race  ardfmoùe,  tomo  P-  202,  et  t.  U, 
p.  634. 


004  BBVOE  S*AL8Aiai 

limitée  cbes  les  Germains.  On  sait  que,  dans  l  origine,  ils 
n^araient  pas  de  champs  particuliers  et  délimités,  et  que  le 
maîçistrat  leur  faisait  chaque  année  le  partage  des  terres. 

Lorsqu'ils  furent  devenus  propriétaires  du  sol,  ils  laissèrent, 
par  altacfiement  aux:  anciennes  coutumes  nationales,  en  com- 
munauté les  pàtura!^^'^s,  les  arbres,  les  forôls,  les  terres  vaines 
et  vagues,  en  un  mot  les  propriétés  qui  offraient  à  l'iiomme 
des  produits  spontanés. 

Dès  que  Léopold  I«,  duc  de  Lorraine,  eut  recouyré  ses 
Etats,  en  conformité  de  la  paix  de  Ryswick,  il  introduisit  à 
Bouquenom  et  à  Saarwerden,  qui  yenaient  de  lui  être  attri- 
bués, la  coutume  de  son  duché,  laquelle  a  été  imprimée  pour 
la  première  fuis  à  Nancy,  en  1596,  sous  le  titre  de:  Coustunus 
du  dudié  de  Lorraine  ès  bailliages  de  JSancy,  Vosges  elAlk- 

Lors  du  partage  du  comté  de  Saarwerden,  en  1745,  le 
prince  Charles-Auguste  de  Nassau-Weilbourg  introduisit 
dans  les  terres  qui  ▼enaient  de  lui  être  attribuées  la  coutnme 
de  Wellbourg,  laquelle  stipulait  que  les  apports  des  époox 

étaient  réservés  et  que  la  communauté,  réduite  aux  acquêts, 
était  partageable  dans  les  proportions  suivantes  :  savoir,  deux 
tiers  pour  le  mari  ou  ses  héritiers  et  un  liera  pour  la  femme 
ou  ses  héritiers. 

Les  juife  qui  étaient  établis  dans  les  terres  nassauviennes 
étaient  considérés  comme  des  étrangers  qui  n'appartenaient  a 
aucun  pays  allemand;  ils  vivaient  sous  l'empire  de  réglemente 
qui  les  protégeaient  à  peine  contre  la  violence  et  les  inauvais 
traitements;  ils  ne  pouvaient  acheter  de  maisons  ni  dun- 
nieubles  quelconques  sans  l'autorisation  préalable  des  auto- 
rités, ni  être  admis  au  titre  de  bourgeois,  ni  avoir  la  jouÎB- 
sanœ  du  droit  d'incolat  et  étaient  lenus  de  payer  un  droit  de 
capitatlon  au  seigneur  qui,  par  contre,  s'engageait  à  les  pro- 
téger et  à  les  tolérer  dans  ses  Etals.  Le  trafic  auquel  ils 
avaient  l'habitude  de  se  Umr,  et  les  nombreux  abus  qud 


SAABWEBDEN  ET  HESBITZHEIM 


505 


entraînait  à  sa  suite,  décidèrent  le  prince  de  Nassaa-Weil- 
lK)urg  à  donner  aux  gens  de  cette  nation,  qai  s'étaient  domi- 
ciliés dans  ses  Etats,  le  2  février  i771,  un  nonyeau  règle- 
ment au  sujet  des  formalités  à  observer  dans  les  marchés  et 
les  transactions  iïiteryenus  entre  juifs  et  chrétiens. 

Ce  règlement  renferme  des  dispositions  qa  on  ne  lira  peut- 
être  pas  sans  intérêt  :  il  prescrit  la  tenue,  dans  chaque  com- 
mune, d*un  registre  particulier  où  le  préFÔlou  maire  inscrira 
jour  par  jour  les  contrats  et  marchés  que  les  jnife  feront  avec 
les  chrétiens,  et  qui  ne  dépasseront  pas  quinze  florins.  Lorsque 
les  contrats  et  marchés  dépassent  cette  somme,  ils  doivent  être 
rédigés  au  bailliage.  Tout  prêt  excédant  cinquante  florins  est 
interdit,  mais  il  leur  est  permis  de  faire  des  niarciié.-^  de  bes- 
tiaux dépassant  cette  somme.  Toute  usure  est  défendue,  et 
les  seuls  intérêts  qu'ils  peuvent  exiger  sont  les  intérêts  légaux. 
Il  leur  est  interdit  d'acheter  des  fruits  pendants  par  branches 
on  par  racines,  et  ils  ne  peuvent  acheter  des  immeubles 
qu'après  en  avoir  reçn  Tautorisation  spéciale  de  l'autorité 
supérieure. 

Nous  avons  précédemment  dit  que  le  Conseil  de  la  Régence 
de  Saarbruck  était  le  tribunal  d'appel  pour  les  Imbilants  du 
bailliage  de  Harskirchen.  £n  matière  contentieuse,  la  juridic- 
tion s'y  exerçait  de  deux  manières  ;  il  connaissait  en  dernier 
ressort  des  actions  personnelles  et  mobilières,  jusqu'à  la 
valeur  de  six  cents  florins  de  capital,  et  des  actions  immobi- 
lières jusqu'à  vingt-quatre  florins  de  rente  onde  fermage;  il 
décidait  eu  deuxième  instance  sur  toutes  les  sommes  supé- 
rieures à  ce  taux,  sauf  l'appel  devant  la  Chambre  impériale 
de  Wetzlar  qui  était,  à  l'égard  de  la  Régence  de  Saarbruck, 
la  Cour  suprême*.  Le  comte  Louis  de  Nas^^au  Saarbruck 
modifia  l'organisation  de  la  Régence  et  y  introduisit  des 
réformes  qni  avaient  pour  but  d'éviter  aux  plaideurs  des  frais 
inutiles.  Le  règlement  qu'il  émit,  le  S  janvier  1778,  sous 

*  FûRSTBNTHAL,  Real^EncyclopœdU,  t.  1",  p.  86. 


S06 


BEVUB  l>*AIi8A0B 


le  nom  de  :  Kamlei  md  Process-Ordnuug.  établit  une  chan- 
cellerie de  ressort,  un  tribunal  d'appel  dont  toutes  les  attri- 
butions étaient  clairement  définies.  Ce  règlement  (ut  imprimé 
à  Saarbruck,  dans  Timprimerie  de  Tadministration,  dans  le 

format  in-folio,  et  se  compose  de  trois  cent  vingt-huit  pages. 

Les  justices  villageoises  élaient  restées  longtemps  en  droit 
de  rendre  la  juslice,  mais  les  magislrals  étaient  tenus  déjuger 
toujours  en  corps;  aucune  des  branches  de  leur  pouvoir  judi- 
ciaire ne  pouvait  se  déléguer  à  un  seul  d'entre  eux.  Le  règle- 
ment du  S  janvier  1778  leur  enleva  enfin  le  droit  de  juger  et 
attribua  la  connaissance  des  affaires  litigieuses  exclusi- 
vement aux  juges  des  bailliages.  Ceux-ci  statuaient  en  dernier 
ressort  jusqu'à  cinquante  florins. 

Antérieurement  à  raniiexion  de  Bouquenora  et  de  Saar- 
werden  à  la  Lorraine,  les  poids  et  mesures  étaient  uniformes 
dans  tout  le  comté;  on  s'y  servait  du  pied  du  Rhin,  qui  équi- 
valait à  0*814.  La  perche  contenait  di.x  pieds  du  Rhin.  L'aune 
était  égale  à  la  demi-aune  de  Paris,  équivalant  à  0"o94.  Oa 
s'y  servait  de  la  livre  poids  de  marc.  La  mesure  pour  les  vins 
et  antres  boissons  était  la  même  que  la  mesure  (Ohm)  de 
Strasbourg,  et  était  égale  à  45,81,  mais  elle  se  divisait  en 
vin!j:l-deux  pots,  le  pot  en  quatre  quarts  ou  chopinos,  et  la 
chopiae  eu  quatre  quarts  de  chopine.  La  mesure  pour  les 
grains  était  un  boisseau  appelé  Simmer,  qui  cuuleuail 
trente-deux  litres,  il  fallait  quatre  de  ces  boisseaux  pour  faire 
un  sac  ou  rezal  de  cent  vingt-huit  litres  ;  chaque  boisseau  se 
divisait  en  moitié,  quarts,  huitièmes  et  seizièmes  de  boisseau; 
on  donnait  le  nom  de  Mass  au  seizième  de  boisseau.  H  «t 
à  présumer  que  ces  boisseaux  dérivaient  des  mômes  étalons 
que  le  boisseau  de  Wissembourg,  duquel  il  ne  différaient  que 
d'un  soixantième;  on  employait  dans  les  deux  contrées  le  nom 
de  Smmer  pour  désigner  des  mesures  de  grains.  Le  pied  de 
Lorraine,  qui  a  0-291  ou  10  pouces  9  lignes  de  Paris,  était 
en  usage  à  Bouquenom  et  Saanverden  depuis  leur  annexioa  à 
la  Lorraine. 


8AABWEBOEN  ET  BZRBITZHEIM 


507 


B.  Hommes  remarquables  nés  dans  le  comté  de 

Saarwerden 

Vieaz-Saarwerden  a  diinné  nai&sance,  vers  la  ùn  du  XV* 
siècle,  à  Jean,  qui,  né  de  parents  obscurs,  embrassa  la  vie 
monastique  et  fut  appelé  par  son  mérite  à  la  tôte  de  Tabbaye 
de  Sturlzeibronn :  il  figure  dans  le  cataloji^ne  des  abbés  de  ce 

monastère  sous  le  nom  de  Jean  de  Saarwerden,  il  finit  ses 
jours  eu 

New-Saarwerden  est  la  patrie  de  Jeaii-Jacciues  Sdiilt 
général  de  brigade,  ne  le  15  mai  1761.  Il  était  volontaire 
dans  la  légion  de  Nassau,  le  26  janvier  1779,  fit  partie  de 
l'armée  sur  les  côtes  de  Bretagne  pendant  les  années  1779  et 

1780  et  se  trouva  à  1  attaque  de  Ttle  de  Jersey,  le  19  février 

1781  ;  il  servit  comme  of&cier  à  l'armée  des  Pyrénées  orien- 
tales jusqu'à  la  paix  avec  l'Espagne,  qui  eut  lieu  en  l'an  III: 
il  y  était  parvenu  au  grade  de  général  de  brigade,  le  19  ven- 
démiaire an  111.  Passé  à  l'armée  de  l  Ouest,  il  contribua  à  la 
soumission  dos  habitants  de  la  Vendée.  Eu  l'an  VUl,  il  fit 
partie  de  larmée  de  réserve;  en  Tan  IX,  il  fut  appelé  au 
commandement  de  l'armée  de  Milan  ;  il  était  commandeur  de 
l'ordre  de  la  Légion  d'honnenr  et  se  dislingua  dans  plusieurs 
batailles  ^angée9^  Mis  à  la  retraite  lors  de  la  seconde  Restau- 
ration, il  se  relira  à  Mongclol. 

Bockenheimer  (Jean),  qui  fut  ainsi  appelé  de  la  ville  qui 

l'avait  vu  naître,  fut  justicier  des  mines  et  receveur  de  Wal- 
drevanges;  il  fut  annbli  par  Charles  111,  duc  di^  Lorraine,  en 
considéralion  des  services  qu'il  avait  rendus  à  ce  prince,  par 
lettres  données  à  Nancy,  le  6  novembre  1570.  v\  à  la  vérifi- 
cation desquelles  la  Chambre  des  comptes  de  Lorraine  pro- 
céda sans  aucune  taxe  de  finance.  Il  porta  <f  argent  à  deux 

*  Hertzog,  Elsasser  Chronkk,  lib.  III,  p.  51. 

*  Victoires  cl  conquêtes,  l.  XXVi,  p.  190. 


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506  BBVDB  D'AIAàOB 

ehevroM  étaw,  accompagné  de  irok  quintefenUks  de  gueules 
pointées  dor,  deux  m  chef  et  me  enpoiiUeK 

Bonquenom  (Jean)  était  originaire  de  la  ville  dont  il  por- 
tait le  nom;  il  fut,  pendant  trente-deux  ans,  châtelain  et  rece- 
Tcur  de  Lunéville.  Il  fut  anobli,  en  considéralion  de  ses  ser- 
vices,  par  Henri  IH,  duc  de  Urraine,  suivant  lettres  du 

\G  avril  1624.  Il  portait  d'or  à  trois  huretles  damr,  à  m 
bmc  saillant  d'argent  mis  en  pal  sur  le  tout*, 

Henri  de  Bouquenoin,  architecte,  vivait  au  XVI-  rfècle  et 
donna  des  preuves  remarquables  d'une  grande  aptitude  pour 
les  travaux  du  génie  militaire  et  lart  des  foriifications;  il 
construisit  la  tour  neuve  de  la  Porte  des  Allemands  qui  est 
une  des  portes  historiques  de  Metz,  avec  le  pont  et  les  côlés 
de  ce  pont*. 

Bouquenom  a  vu  naître,  le  22  mars  1780,  le  baron  Antoine- 
Virgile  Schneider,  qui  entra  au  service  comme  adjoint-surnu- 
méraire du  génie  en  1800.  Schneider  se  distingua  en  Espagne 

dans  les  campagnes  de  1808  et  1810,  et,  lors  de  la  campagne 
de  Russie,  ou  siège  de  Danlzick,  et  particulièrement  dans  une 
reconnaissance  qui  tVit  exécutée  le  6  juillet  1815,  sous  les 
murs  de  Strasbourg,  sur  les  positions  autrichiennes;  il  fit  la 
campagne  d'Espagne  en  18-23;  il  fut  nommé  maréchal  de 
camp  en  1825;  il  commanda  le  corps  d'occupation  de  Murée 
en  1828  et  fut  nommé  lieutenant-général  le  12  août  1830. 
Ministre  de  la  guerre  du  12  mai  1889  au  1"  mars  1840,  il 
améliora  le  sort  des  officiers  par  diverses  ordonnances  sur  la 
solde  et  la  remonte;  le  28  novembre  1840,  il  fut  investi  du 
commandement  des  troupes  de  la  division  hors  Paris,  qui  ont 
puissamment  coopéré  aux  travaux  des  fortifications  de  la 

>  Pelletier,  yobiliaire  ou  Armoriai  général  de  la  Lorraine,  toi  60. 

*  Là  même,  folio  07. 

•  Oaubt,  BiMioihè^  ââ  lorraine,  p.  483. 


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SAARWEBDEN  ET  HERBIXZHEDC  fiOO 

capitale;  il  était  grand-croix  de  Tordre  royal  de  la  Légion 
d'honneur,  président  do  Ciomité  consultatif  dlofanterie,  direc- 
teur du  personnel  et  des  opérations  au  ministère  de  la  guerre; 
il  est  l'auteur  d'une  histoire  des  Iles  lonniennes;  les  élec- 
teurs de  l'arrondissement  de  Saneguemines  l'envoyèrent, 
pniidanl  plusieurs  législatures,  siéger  à  la  Chambre  des 
députés,  où  il  prit  place  dans  le  rang  des  conserrateurs;  il 
est  mort  à  Paris  le  11  juillet  1847,  âgé  de  67  ans'. 

Besançon  (Nicolas),  maréchal-des-iogis  au  17-  régiment  de 
dragons,  dont  le  nom  mérite  d'être  arraché  à  un  injuste 
oubli,  naquit  à  Boiiquenom.  Les  exploits  de  ce  brave  soldat 
sont  racontés  de  la  manière  suivante  par  les  auteurs  des 
Tables  du  Ttmpla  de  la  gloire'  ;  t  Le  4  prairial  an  IL  il 
chargea  seul  deux  cents  hussards  de  Wurmser,  se  fit  jour 
jusqu'à  un  général  autrichien  qu'il  attaqua  au  milieu  de  sa 
troupe;  il  allait  le  Ikire  prisonnier,  lorsque  l'Autriehien,  pour 
se  sauver,  se  laissa  glisser  de  cheval  et  s'enfonça  dans  un 
marais,  où  il  fut  impossible  de  l'atteindre.  Deux  ans  après, 
Besançon  se  distingua  dans  un  engagement  qui  eut  lieu  près 
de  liopfingen  :  sept  chevau-légers  menaçaient  trois  chasseurs 
de  notre  infanterie  légère;  il  courut  aussitôt  sur  les  cavaliers 
ennemis,  renversa  les  trois  premiers,  en  blessa  un  quatrième 
qu'il  fit  prisonnier,  et  força  les  autres  à  prendre  la  fuite.  Le 
SO  vendémiaire  an  Y,  ce  sous-offîcier,  près  d'Ëinmedingen, 
se  précipita  sur  un  peloton  de  hussards  qui  sabraient  nos 
tirailleurs,  et  l'obligea  à  la  retraite;  ce  brave  l'ut  frappé  au 
front  d'une  balle  au  moment  où,  vainqueur  dans  un  combat 
singulier,  il  enlevait  un  drapeau.  » 

Schœll  (Maximilien-Samson-Frédéric)  naquit  en  1766,  à 
Harskirchen.  Il  fit  ses  premières  études  au  gymnase  de  Boux- 

*  MxiLLIÉ,  Biographie  des  célébrités  militaires,  l.  II,  p.  522. 

•  Victoires  et  conquêtes  des  Français,  t.  XXV,  p.  39. 


BEVUE  D*ALSACB 

wîUer,  8008  le  8avanl  Bast,  et  alla,  à  quinze  ans,  à  l  Univer- 
sitô  de  Slraslwarg  où  il  étudia,  sous  le  célèbre  Koch,  riiistoire 
et  le  droit  public.  Il  fut  successivement  précepteur,  avocat, 
Hbrah  e  et  diplomalc.  Après  avoir  rempU  plusieurs  missions 
diplomalique^,  il  resta  attaché  à  Tambassade  de  Prusse,  à 
Paris.  Ou  a  de  lui  :  V  Collection  des  actes,  pièces  offidOes, 
règlements  et  ordonnances  relatifs  à  la  confédération  du  Jm. 
1808,  iu-8°;  2"  Mt^erlom  de  liltératnre  ancienne  ou  CJmx 
dfmUrsdMÎques,  grecs  et  latins,  i8Û2,  deux  parties,  in-8'; 
8*  T^hm  des  peuples  de  tEurape,  classés  d'après  leur 
lafigm.  e'c.  iSlO.         1812,  in-8-;  4*  Prém  de  la  Révolu- 
non  française.,  1810,  in-i8;  5*  DesmpUm  abrégée  de  Rom 
ancienne,  daprès  Ligorius,  etc.,  1811,  in-18;  6- JSWrtWft  * 
chronologie,  1812,  2  vol.  in-18;  T  Histoire  abrégée  dè  la 
UUérature  grecque,  depuis  son  origine  jusqna  la  pnse  de 
CkmsUmtmople  par  les  Turcs.  1813,  2  vol.  in-8-  2'  édition, 
182S-1824,  8  vol.  in-8»;  8»  Recueil  de  pièces  officielles  desti- 
nées à  détromper  les  Français  sur  les  événenmie  qui  se  sont 
passés  depuis  quelques  aimées,  1814-1816,  9  vol. 
9»  Histoire  abrégée  de  la  liU&atnrerommneASih,  iiVoUn  S'j 
4œ  Congres  de  Vienne,  recueil  de  pièces  offUMes,  1816, 
2  vol.  iu-8';  11"  Histoire  abrégée  d^  s  traités  de  paix  entre  ks 
ptdssances  de  r Europe,  depuis  la  paix  de  WestphaliejusguW 
IraUéde  FOris  duÈO  novembre  i815, 1817-1818, 15  vol.  m  8-. 
Sehœll  a  entièrement  refondu  Touvrage  de  Kocli,  qu  il  a  aug- 
menté et  continué.  Il  est  éditeur  déâ  Tables  géMogiqm  de 
maisons  souveraines  rf«  nord  et  de  rest  de 
posthume  de  ce  savant.  Plusieurs  articles  de  la  Biograpm 
universelle  sont  de  M.  SchœU\  Son  Histoire  des  iraUés  de  poix 
est  le  seul  de  ses  ouvrages  que  l  oii  consulte  encore.  Il  moorol 
le  6  août  18S3. 

»  IUbbe,  ViEiLH  DE  BoisjouN  ET  Saditb-Bbovb,  BtofffOpWe 
vmelU  de$  eontmporains,  t.  IV.  p.  1S86. 


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HAABWBRDBN  BT  EBRBITZHBIM 


611 


G.  La  Bonne-Fontaine 

Dana  l'une  des  visites  que  fit  le  comte  GuîHanme-Henri 
de  Nassaa-Saarbruck  à  son  comté  de  Saarwerden,  les  sources 
qui  jaillissent,  dans  une  situation  charmante,  sur  le  territoire 
du  villa^^e  d  Allvviller,  près  de  la  censé  de  Neuweyer,  à  quatre 
kiiomètres  de  Ilar.skirclien,  attirèrent  ses  regards  et  réml- 
lèrent  chez  lui  le  goût  des  construclions.  La  plus  considérable 
de  ces  sources  a?aifc  reçu  le  nom  de  la  Bonne-Fontaloe,  elle 
n'a  été  découverte  qu'au  commencement  du  XYIH*  siècle; 
la  seule  analyse  qui  en  ait  été  faite  date  de  4761».  Sa  fraî- 
cheur n'est  pas  au  degré  de  leau  commune;  l'eau  en  est 
claire  et  limpide,  elle  a  une  odeur  légère  cl  fugue,  sa  saveur 
est  saline  et  un  peu  astringente;  elle  paraît  froide  en  été  et 
chaude  en  hiver,  de  temps  en  temps  on  voit  s'y  former  de 
petites  ébulitions;  elle  jouit,  dit-oo,  d'une  vertu  apéritive, 
diuréUque,  tonique,  détersive,  stomachique  et  légèrement 
purgative.  Le  comte  Guillaume-Henri  la  fit  encaisser  dans 
nn  bassin  d'une  belle  construction  en  pierres.  Ce  bassin  a  une 
profondeur  de  trois  mètres  vingt-cinq  centimètres  et  une 
ouverture  de  près  de  deux  mèlres;  son  trop  plein  s  écoule 
dans  l'étang  de  Neuweyer,  par  un  canal  qui  est  couvert  d'un 
enduit  jaunâtre  et  ochrocé. 

Le  prince  Guillaume-Henri,  voulant  signaler  son  règne 
dans  cette  contrée  par  la  construction  d'une  maison  de  plai- 
sance qui  attestât  tout  l'orgueil  de  sa  race,  tourna  ses  regards 
«nr  la  censé  de  Neuweyer,  dont  la  situation  agréable  parais- 
sait fkvorable  à  ses  vues.  11  construisit  dans  le  voisinage  de 
celte  ferme  un  château  pour  lui  servir  de  demeure  quand  il 
venait  visiter  son  comté  de  Saarwerden  et,  en  môme  temps, 
de  rendez- vous  de  chasse,  et  fonda,  près  de  ce  château,  un 
établissement  de  bains  qui  était  composé  de  douze  cuves. 

»  FAluaàs-MâBiaouRT,  Annuaire  du  naa-lUun  pour  1808,  p.  67,  et 
^^eicriptMnieStraébourg,  p.  S20. 


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BKVUB  D*AIJBàOB 

Malgré  toutes  les  dépenses  qu'il  Ût  pour  doter  cet  établisse- 
ment  de  toutes  les  commodités  désirables,  sa  vogue  n  eut 
qu'une  durée  éphémère  et  il  fut  peu  fréquenté. 

La  Révolution  française,  qui  derait  bouleverser  toute 
l  Allema;.ne.  ravit  au  prince  Louis  de  Nassau-Saarbruck,  non 
seulemenl  ses  Etals,  mais  encore  ses  propriétés  privées  qui 
furent  placées  sous  séquestre.  Trop  sensible  au  malheur  de 
sa  patrie  et  à  la  perte  de  son  patrimoine,  il  termina  sa  ear- 
rière  k  Aschaffenbourg,  to  2  mars  1794,  ne  laissant  qu  un  fils, 
Henri-Louis-Charles-iUbert,  à  qui  il  transmit  ses  droits  sur 
les  Etats  de  Nassau-Saarbruck.  Trois  années  s'étaient  a  peine 
écoulées  que  ce  prince,  qui  résidait  à  Klosler-Heilbronn 
rnourui  à  la  fleur  de  1  âge,  d'une  chule  de  cheval,  en  voulant 
se  rendre  à  Anspacli.  Il  rendit  l'âme  le  Î7  avril  1797,  à  lâg» 
de  vingt-neuf  ans  un  mois  et  dix-huit  jours. 

Charles-Guillaume,  prince  de  Nassau-Usingen,  son  cousin, 
hérita  de  ses  prétentions  sur  les  Etats  de  Nassan-Saarbruck. 
A  cette  époque,  il  existait  encore  deux  tantes  du  jeune  prnice 
qui  venait  de  périr  d'une  manière  si  misérable.  C'étaient  les 
deux  sœurs  de  son  père  :  !•  Anne-GaroUne,  princesse  de 
Nassau-Saarbruck,  veuve  en  premières  noces  de  Frédéric- 
Henri-Cxuillaumc,  duc  de  Holstcin-Glucksbourg,  etépouseen 
secondes  noces  de  Frédéric-Gharlcs-Ferdinand,  ducdeBruns- 
wick-Bevern,feld.marôclial  danois»;  2°  Wilhelmine-Henrietle, 
princesse  de  Nassau-Saarbruck,  veuve  douairière  de  Louis- 
Armand  de  SeîgUères  et  BeUeforières,  marquis  de  Soyecourt, 
en  son  vivant  Ueutenant-général  des  armées  du  roi  de 
France'. 

»  Elle  devint  veuve  de  son  eeeond  mari  en  1809  et  se  retira  à  Glucto- 

bourg(Schleswig);  elle  finit  ses  jours  en  182 î.  «UaYécul 

»  Après  la  mon  de  son  m.iri,  arrivée  le  7  septembre  1/90,  « 
relirôe  à  Pari.;  arrêtée  pcnthnt  la  Terreur,  elle  fut  <^«'*JJ*' * 'VrSle 
trii'ie  .'t  ne  recouvra  la  liberté  qu  apres  la  chule  de  RoWWW» 
uiana,  en  1800,  sa  fille  unique  Adrienne.  marquise  de  Soyecou  ,  . 
eomte  de  Saliitfr-Anlaire.  et  prit  son  domicile  à  Saarbraek,  ou  elle  vécu 


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BAàxmaaaax  et  bbbbiizbbdi  518 

Ses  deux  tantes,  qui  étaient  habiles  à  se  porter  héritières, 
chacune  pour  moitié,  et  à  recueillir  ses  propriétés  allodialee 
qui  étaient  frappées  de  séquestre,  n'attendirent  qu'un  moment 
ftYorabie  pour  faire  valoir  leurs  prétentions.  Lorsque  la  réro- 
loUon  du  18  brumaire  de  l*an  VIW  eut  amené  un  ordre  de 
choses  nouveau,  elles  sollicitèrent  du  gouvernement  consu- 
laire la  levée  du  séquestre  qui  frappait  les  propriétés  que 
leur  avait  délaissées  leur  neveu.  Le  gouvernement  ayant 
déféré  à  leur  demande,  elles  recueillirent  toutes  les  propriétés 
aliodiales,  tous  les  domaines  qui  araient  appartenu  à  leur 
neveu  dans  raneien  comté  de  Saarwerdeo,  c'est-à-dire  dans 
les  cantons  de  Saar-Union  et  de  Drnlingen.  Ces  biens  et 
ces  domaines  consistaient  en  fermes,  en  belles  prairies,  en 
terres  labourables  et  eu  magnifiques  forêts,  de  la  contenance 
de  plus  de  trois  mille  six  cents  hectares,  et  étaient  situés  aux 
bans  et  communes  de  Bust,  Oltwiller,  Weyer,  Biltten,  Loren- 
zen,  Domfessel,  Oermingen,  Harskirchen,  Altvilier,  Dieden- 
don^  Woliiiidrehen,  Bnrendori;  Rauwlller,  Escbwiller  et 
Ratzwiller.  M**  la  duchesse  de  Brunswick-Bevern  et  M""  la 
msrquise  de  Soyccoart,  arant  même  qu'elfes  eussent  pris 
possession  de  cet  opulent  héritage,  en  vendirent  les  deux 
dixièmes  à  M.  Augustin-Nicolas  Ghœl,  propriétaire  à  Paris, 
suivant  contrat  passé  devant  M*  Demantart,  notaire  en  ladite 
ville,  le  12  fructidor  an  XII  (30  août  1804).  Il  paraîtrait  que 
l'administration  des  domaines  eût  refusé  de  faire  la  délivrance 
de  tous  les  biens  délaissés  par  le  prince  de  Nassau,  préten- 
dant qu'ils  dépendaient  du  domaine  de  TEtat  nassaurien,  et 

joiqa'en  1827.  An  mois  d'août  1818,  Uademoiselle  de  Sainte-Aulaire 
donna  sa  main  à  SI. le  duc  Decazcs.  En  considération  de  ce  mariage  et  à 

la  demande  de  Louis  XVIII,  roi  de  France,  le  roi  d^.  Daii-^inarck  donna 
aux  futurs  époux  et  à  leur  descendance  le  titre  et  la  terre  de  Glucks- 
bonrg.  En  1827,  M°"  la  marquise  de  Soyecourt  se  rendit  chez  la  com- 
tesse deSaiutc-Aulaire,  sa  lille,  et  mourut  le  21  seplombrc  au  château  de 
la  Grave,  près  de  Libonrne,  à  l'âge  de  77  ans.  Avec  elle  s'éteignit  la 
&mille  de  Nassaa-SBarbraek-Saarbmek. 

MmnreUe  Séile  -  7*  Année.  83 


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514  BBVDE  D'AUBACE 

qu'ils  étaient  retombés  au  domaine  français  par  l'effet  du 
traité  de  Lunéville.  Mais  après  la  chute  de  l'Empire,  lorsque 
les  événements  politiques  eurent  ramené  pour  la  seconde 
fois  le  roi  Louis  XVIIl  sur  le  trône  de  ses  pères,  M»'  la 
duchesse  de  Brunswlck-Bevera  et  M-  la  marquise  de  Soye- 
court  sollicitèrent  de  la  bienveillance  du  monarque  restauré 
la  rcslitulion  pleine  et  entière  des  domaines,  terres,  prés, 
forêts,  maisons,  termes,  droits  et  actions,  rentes,  cens  et 
redevances,  connus  el  inconnus,  qui  dépendaient  de  la  succes- 
sion de  leur  neveu  et  qui  étaient  situés  dans  l'arrondissement 
de  Sayerne.  Le  roi  déféra  à  leur  prière  et  rendit,  le  4  octobre 
1815,  une  ordonnance  aux  termes  de  laquelle  tous  les 
domaines  et  leurs  dépendances  et  appartenances,  qui  prove- 
naient du  dernier  prince  de  Nassau-Saarbruck,  leur  fiiient 
restitués  sans  en  rien  excepter  ni  réserver.  Elles  en  forent 
mises  immédiatement  en  possession;  le  procès-verbal  qui 
en  fut  dressé,  le  23  décembre  1815,  nous  donne  la  longue 
nomenclature  de  tous  les  domaines  et  de  tous  les  biens  qui 
furent  restitués  aux  héritières  du  prince  de  Nassan»  quoique 
la  plupart  ne  fussent  pas  des  propriétés  allodiales  transmis- 
sibles  par  succession,  mds  dépendissent  du  domaine  de 
l'Etat. 

A  peine  M"""  la  duchesse  de  Brunswick-Bevem  était-elle 
mise  en  possession  de  sa  part  d  héritage,  qu'elle  vendit  les 
deux  cinquièmes  des  immeubles  qui  en  dépendaient,  à 
MM.  Jean-François^oseph  Menuet,  banquier,  et  à  Georges- 
Adolphe  Ostertag,  docteur  en  médecine,  demeurant  à  Stra:^- 
bourg,  moyennant  la  somme  de  «MOOO  firancs,  suivsnt 
contrat  passé  devant  M*  Zimmer,  alors  notaire  audit  Stras- 
bourg, le  15  juin  1816.  Quelques  semaines  plus  tard.  M"" la 
marquise  de  Soyecourt  leur  vendit  aussi  un  dixième  de  son 
héritage,  moyennant  la  somme  de  iOUOOO  francs,  suivant 
acte  passé  devant  le  môme  notaire  Zimmer,  le  14  août 
suivant 


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SAABWEBIffiN  ET  HBRBITZBEIH  515 

Presqu'au  môme  instant,  la  totalité  des  biens  qai  dépen- 
daient de  la  succession  du  prince  de  Nassau,  et  qui  étalent 
situés  dans  l'ancien  comté  de  Saarwerden,  passa  aux  mains 
de  M.  Christophe  Mérian-Hoffmann,  riche  propriétaire  à  Bàle. 
M.  Ghœl  lui  revendit  les  deux  dixiètne.s  de  ces  immeubles, 
par  contrat  passé  devant  M-  Blanchard,  pour  lors  notaire  à 
Haningue,  le  27  juin  1816.  Les  trois  dixièmes  de  ces  biens 
que  lu  marquise  de  Sayecourt  s'était  réaerFés  furent  vendus 
par  elle  à  M.  Mérian-Hoffmann,  suivant  contrat  passé  devant 
M«  Lacombe,  alors  notaire  à  Strasbourg,  le  14  août  1816,  et 
les  sienro  Mennet  et  Ostertag  lui  en  vendirent  les  cinq 
dixièmes  par  eux  acquis  et  loi  en  passèrent  contrat  devant  le 
notaire  Lacombe,  le  19  du  même  mois. 

M.  Mérian-Iîoffraann,  séduit  par  ia  situation  de  la  source  de 
Bonne-Fontaine  et  l'abondance  de  ses  eaux,  s'est  plu  à  res- 
taurer et  à  embellir  le  château  de  ce  nom  et  Taicien  établis- 
sèment  des  bains  et  à  leur  donner  tons  les  attraits  capables 
de  fixer  les  baigneurs.  Mais  les  généreux  efforts  et  les  grands 
sacrifices  qu*il  fit,  pour  donner  à  ces  eaux  plus  qu'innocentes 
une  célébrité  à  laquelle  la  nature  ne  les  avait  pas  destinées, 
furent  stériles,  et  rétablissement  des  bains  a  été  converti  en 
une  ferme  qui  est  l'une  des  exploitations  les  plus  considérables 
de  TAlsace-Lorraine. 

Le  domaine  de  Bonne-Fontaine,  avec  ses  dépendances,  resta 
aux  mains  de  M.  Mérian-Hoffmann  pendant  vingt  ans;  enfin, 
par  contrat  sous  signatures  privées,  du  40  octobre  1836, 
d^é  en  réInde  de  M*  Triponé,  notaire  à  Strasbourg;,  le 
décembre  suivant,  il  le  vendit  à  la  Société  civile  de  Bonne- 
Pontaine,  composée  de  MM.  Nicolas  Kœchlin,  député,  Edouard 
Kœchlin  et  Carlos  Forel,  manufiicturiers,  les  trois  domiciliés 
à  Mulhouse.  Cette  société  le  revendit  à  M.  le  baron  Frédéric 
de  Meckienbottiig,  pour  la  somme  d*un  million  deux  cent  mille 
franc^  suivant  contrat  passé  devant  M*  Piet  et  Hailig,  notaires 
à  Paris,  le  i4  août  1844;  il  passa  ensuite  aux  mains  de 


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516  BBVUB  D*AL8AGB 

If.  RaphtSl  de  Ferrari,  marqais  de  Galliera,  propriétaire  à 
Paris,  qui  le  revendit  à  M.  Louis-Alexandre,  baron  de  Klop- 
steîn,  maire  dé  la  commune  de  VaUet-Châtillon  pieurthe), 

suivafit  contrat  reçu  par  M*  Gripon,  notaire  à  Parie»  le 

i2juinl8Gt. 

Originairement,  ce  domaine  se  composait  de  trois  mille  six 
cents  hectares  ;  il  a  été  morcelé,  des  parties  ont  été  vendues, 
et  aujourd'hui  il  se  trouve  réduit  à  environ  treiz  ecents  hect- 
ares. 

Il  y  avait,  dans  le  comté  de  Saarwerden,  deux  fiefs  qui 
relevaient  de  la  maison  de  Nassau-Saarweiden  :  le  château 

de  Diedendorf  et  la  belle  ferme  dite  Lauterbâcherhof,  située 

dans  la  banlieue  de.  Vœllerdingen. 

D.  Le  château  de  Diedendorf 

Jean  IV,  comte  de  Nassau-Saarbruclv,  et  ses  cousins  Albert 
et  Philippe,  de  la  branche  de  Weilbourg,  donnèrent,  à  titre  de 
fief,  à  Jean  Streif  de  Lauensteln,  bailli  du  comté  de  Saar- 
werden, une  métairie  sise  à  Diedendorf,  avec  tous  les  biens 
qui  en  dépendaient,  suivant  lettres  d'investiture  du  12  février 
1670».  Le  château  qui  s'élève  dans  le  Toisinage  de  cette  ferme 
paraît  avoir  été  construit  à  cette  époque,  ainsi  que  Hodique 
la  date  de  1577  qui  se  trouve  sculptée  intérieurement  au- 
dessus  de  la  porte  d'entrée  do  la  cour.  Jean  Streif  de 
Laueubtein  en  ût  sa  résidence  et  le  transmit  à  ses  descendants, 
qui  le  possédèrent  pendant  plus  d'un  siècle  et  demi. 

Otto-Ferdinand  Slreif  de  Lauenstein,  seigneur  de  Nieder- 
willer,  capitaine  de  cavalerie  au  service  de  France,  mourut 
à  Diedendorf,  le  19  février  1622,  à  Tâge  de  76  ans,  sans 
laisser  de  postérité. 

Sa  nièce,  Ciiailolle-Quadt  de  Lanseron,  épouse  d'Ernest 
Friedmanu  de  Muuchhausen,  prit  possession  du  château  de 

»  Archives  dn  Bas-Rhm,  S.  E.  5196. 


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8AABWBBDEK  ET  HERBITZHBIM 


617 


Dîedendorf  et  en  reçut  rinvestiture  da  prince  de  Nassan- 
Saarhruck.  Quoiqu'elle  fût  la  plus  proche  parente  du  dernier 
rassal,  son  agnat,  Charles  Streif  de  Laaenstein,  lieutenant- 
colonel  au  régiment  de  cavalerie  Royal-Allemand,  an  service 
de  France,  forma  opposition  à  cette  investiture;  il  eu  résulta 
un  litige  qui  se  termina  d  une  manière  désavantageuse  pour 
M"*  de  Mtinclîhausen.  Le  liculenant-colonel  Streif  de  Lauen- 
stein  reçut  la  co-investiture  du  (ief  de  Dîedendorf,  dont  il  prit 
possession  conjointement  avec  M"**  de  Mttnchhansen.  sa  cou- 
sine, mais  il  y  renonça  en  faveur  de  cette  dernière,  aux 
termes  d*une  transaction  intervenue  entre  eux  le  28  jan- 
vier 1780. 

A  peine  M.  et  M™*  de  Mûnclihausen  étaient-ila  tranquilles 
possesseurs  du  château  de  Dîedendorf  que,  du  consentement 
du  seigneur  direct,  ils  le  vendirent  à  M.  Auguste-Guillaume 
de  LUder,  grand-bailli  du  comté  de  Saarwerden,  par  acte  du 
17  septembre  1730. 

Ce  seigneur  mourut  en  1781,  laissant  le  château  de  Dîe- 
dendorf à  ses  quatre  fils,  Frédéric^hrétien,  Gbarles-Auguste, 
Gharles-Frédérie  et  Charles-Henri,  qui  en  furent  investis  le 
17  août  1782*.  Quelque  temps  .-iprès,  Charles-Frédéric  de 
Lilder,  grand-bailli  du  comté  de  Saarwci  den,  réunit  sur  sa 
tête  toutes  les  parties  du  fief  délaissé  par  son  père,  mais  il 
le  réfuta  en  1758  en  faveur  du  prince  de  Nassau-Saarbruck. 
A  partir  de  ce  moment,  le  château  de  Dîedendorf  passa  rapi- 
dement dans  diverses  mains. 

Guillaume-Henri,  prince  de  Nassau-Saarbrnck,  le  vendit 
en  toute  propriété  à  Gustave,  baron  de  Geisspitzheîm,  et  à 
Henriette-Louise-Ghristine-Frédéri(|iie  de  Bode,  son  épouse, 
moyennant  la  somme  de  dix-neuf  mille  florins,  suivant 
contrat  du  16  février  1763.  La  propriété  vendue  consistait 
dans  le  château  de  Diedendorf  et  ses  dépendances,  une 
métairie  (Sehwêiierei),  sa  cour  et  ses  écuries,  quarante-six 

*  Aiehives  dn  Bas-RhiB,  S.  E.  5186. 


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518 


BBVUE  D*ALaACB 


arpente  et  quart  de  jardins  et  vigaes,  quatre-vingt-ox  arpents 
et  quart  de  prés  et  deux  cent  quarante  arpents  et  quart  de 
terres  labourables,  aux  bans  de  Diedendorf  et  de  Wol6- 
kireben. 

Ea  1769,  le  baron  de  Geispilzheim  et  sa  femme,  née  de 
Bode,  vendirent  ce  cliàteau  et  ses  vastes  dépendances  à 
M.  Jean-Baptiste  de  Verlhac,  lieutenant  du  roi  et  commandant 
de  Fort-Louis,  en  se  réseryant  le  banc  d'honneur  et  le  droit 
d'inbumation  à  Téglise.  En  1791,  M.  de  Verlhac  revendît  ce 
domaine  au  général  de  Frimont,  sons  les  mêmes  réserves  et 
y  compris  la  dlme  et  tous  les  droite  que  les  princes  de  Nassan- 
Saarbruck  avaient  reconnus  aux  précédents  propriétaires. 
M.  de  Friment  le  vendit,  à  fonds  perdus,  à  M.  Braun,  de 
Fénélrange,  qui  plus  lard  en  fut  dépouillé  par  une  expropria- 
tion forcée.  Le  sieur  Jenn-Lébrecht  Rauscti  fils,  négociant  à 
Strasbourg,  s*en  rendit  adjudicataire  à  la  barre  du  tribunal 
civil  de  Saveme,  et  le  vendit  à  H.  Glaude-Josepb  Harmand, 
inspecteur  des  domaines  à  Lunéville,  pour  la  somme  de 
vingt-trois  mille  francs,  suivant  contrat  passé  devant 
M*  Rencker,  alors  notaire  à  Strasbourg,  le  11  août  4819. 

M.  Harmand  revendit  ce  château  à  M.  Bella.  M.  Mérian- 
Ildffmann,  de  Bàle,  qui  était  créancier  de  ce  dernier,  reçut 
cette  propriété  en  déduction  d'une  partie  des  fonds  qu  il  lui 
avait  prêtés.  M.  Christophe  Mérian-Hoffmann,  rentier  à  Bàle, 
la  recueillit  dans  la  succession  de  sa  mère,  Valérie  Hoffmann, 
dont  il  était  le  seul  héritier,  suivant  acte  de  partage  entre 
M.  Mérian,  son  père  et  lui.  dressé  à  Bâle  le  8  décembre  1884, 
et  la  vendit,  par  contrat  du  10  octobre  1836,  à  M.  Nicolas 
Kœchlin,  ancien  député,  agissant  pour  et  au  nom  de  la  Société 
civile  de  Bonne- Fontaine,  dont  il  était  administrateur.  La 
maison  de  commerce  éteblie  à  Tbann  sous  la  raison  Kestner 
père  et  fils,  acquit  ce  domaine  de  la  Société  civile  de  Bonne- 
Fonlaine,  suivanf.conlrat  reçu  par  M*  Glaudon,  notoire  à 
Mulhouse,  le  29  janvier  1845.  La  maison  de  commerce 


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SÂABWEBDEN  ET  HBBBEIZHBDC 


519 


Keslner  père  et  fils  le  revendit,  par  acte  passé  derank 
M*  Mulotie,  Dolaire  à  Saar-UnioD,  ie  17  septembre  1858,  à 
IL  Raphaël  de  Ferrari,  marquis  de  Ferrari,  doc  de  Galliera, 
domicilié  à  Paris.  Gelui-ci  le  reyendit,  avec  le  domaine  rural 
de  Bonue-Pontaine,  à  M.  Louis-Alexandre  baron  de  KIopsteIn, 
propriélaire  et  maire  de  Val-et-Cbàlilloii,  près  de  Girey,  sui- 
vant contrat  du  ii  juin  1861. 

Le  château  de  Diedeodorf  coosiste  en  maisons  d'habitation 
et  bâtiments  économiques,  tels  que  grange,  écuries,  fenil,  cel- 
lier, cave,  avec  cours,  jardins  potager  et  rerger,  vignes,  prés^ 
source,  pnîts  et  manège  hydraulique,  le  tout  d*un  seul  tenant 
et  d*une  superficie  de  neuf  hectares  et  ceint  de  murs  et  de 
clôtures  en  palissades. 

Peu  de  temps  après  avoir  fait  l'acquisition  de  ce  domaine, 
Di.  le  baron  de  KIopstein  le  revendit  à  M.  Striûler. 

E.  La  ferme  dite  Lutterbacherhof 

La  métairie  appelée  Lutlerbach,  Lauterbach  ou  Lutter- 
bacberhof,  située  au  territoire  de  Ymllerdlngen,  rillage  dépen- 
dant du  comté  de  Saarwerden,  a  été  possédée  pendant  plu- 
sieurs siècles  par  les  nobles  de  Nimsgern,  qui  la  tenaient  en 

foi  et  hommage  des  comtes  de  Saarwerilen,  puis  des  comtes  de 
Nassau-SaarbruckV  Kri  1608,  Bernard  Nimsgern  de  Langen- 
feld  en  reçut  une  nouvelle  investiture  et  se  recoiinul  le  vassal 
du  comte  de  Nassau-Saarbruck.  Il  vendit  en  1613  Ja  moitié 
de  cette  ferme  à  Philippe  Eberbard  Streif  de  Lauenstein,  bailli 
de  Herbilzheim,  qui  la  transmit  à  ses  descendants.  Celte 
moitié  fut  partagée,  en  1670,  entre  les  Streif  de  Lauenstein 
et  M.  de  Bousée.  L'autre  moitié  resta  aux  mains  des  héritiers 
de  Nimsgern,  qui  en  vendirent,  en  1700,  les  neuf  dixièmes  à 
M.  de  Hoffmann,  de  Deux-Ponts.  Celui-ci  en  acquit  aussi, 

'  Archivas  da  Ba»-Rhin,  E.  5184. 


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520  filVUB  D'ALBàOB 

rannée  d'après,  l'autre  dixième  de  Jeaa-Jacqaes  Uaydn,  à  qni 
il  était  advenu  par  héritaf e. 

H.  de  Hoffmann  acquit  encore,  en  1702,  la  moitié  de  Tantre 
moitié  de  cette  ferme,  d*Ottion-Eberliard  Streif  de  Laaenstein, 

de  manière  qu'il  réunit  sur  sa  téte  les  trois  quarts  de  la 
totalité,  pour  lesquels  il  reçut  Tinvesliture  en  1707.  Le  der- 
nier quart,  qui  avait  été  transmis  par  héritage  à  Marie- 
Catherine  de  Bousée,  épouse  de  Jean-Guillaume  de  Belten- 
dorf,  ad?int  aussi  dans  la  suite  à  M.  de  Hoffmann.  Celui-ci 
transmit  la  totalité  de  ce  flef  à  son  fils,  M.  de  HofDDann  de 
Pfettersbdm,  oonsdller  du  duc  de  Deuz-Pûnts,  qui,  à  la 
suite  d'un  long  procès,  dut  le  rétrocéder  au  comte  de  Nassau* 
Saarbruck. 

Lors  de  l'annexion  du  comté  de  Saarwerden  à  la  Répu- 
blique française,  en  1793,  ce  domaine  devint  propriété  de 
l'Etat;  il  consistait  alors  en  deux  parties  disUnclfis;  l'une  com- 
prenait les  bâtiments  de  la  ferme,  les  terres  arables  et  les 
prairies  et  avait  une  superfide  de  cent  cinquante*neuf  hect- 
ares quatre-vingt-onze  arcs  et  trois  centiares;  et  l'autre  se 
composait  d'une  forêt  de  haute-futaie,  de  la  contenance  de 
deux  cent  vingt-neuf  hectares  quatre-vingt-sept  arcs  quatre- 
vingt-quinze  centiares. 

.  Tout  le  diimaine  est  entièrement  délimité  par  des  pierres- 
bornes  et  forme  la  section  A  du  plan  cadastral  de  Vœller- 
dingen;  il  a  pour  limites  les  bans  de  Saa^Union,  Keskastei, 
Oermingen  et  Yoellerdingen. 

Gomme  les  férmages  ne  se  payaient  pas  régulièrement,  le 
gouvernement  crut  qu'il  serait  dans  l'intérêt  de  la  nation  de 
vendre  tout  le  domaine  par  adjudication  publique,  et  le  fit 
diviser  en  trois  lots.  Le  premier  comprenait  la  forêt;  le  second, 
la  ferme  avec  le  tiers  des  biens  en  dépendant,  ou  rinquante- 
trois  hectares  trente  ares  vingt-quatre  centiares  ;  et  le  troi- 
dème  lot  se  composait  des  deux  autres  tiers  des  biens,  avec 
cent  six  hectares  quatre-vingts  ares.  La  fofèt,  quoique  estifflée 


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à  TÎI  prix,  ne  trouva  pas  d'amateur  et  fut  déclarée  forêt  doma- 
niale. Le  deuxième  lot,  arec  la  ferme  et  le  tiers  des  bieoa, 
fiit  adjugé  aa  fénnier,  le  sieur  Baeh,  qui  l*a  transmis  à  ses 
descendants,  et  le  troisième  lot  fut  acquis  par  le  sieur  Georges 
Staath,  négociant  à  Herbitzheim\  pendant  son  mariage 
avec  Suzanne  Halde;  quelques  années  après  cette  acquisition, 
Georges  Staath  eut  la  douleur  de  perdre  sa  femme,  et,  comme 
elle  ne  lui  avait  pas  donné  d'eniants,  il  se  vit  dans  la  pénible 
nécessité  de  vendre  les  biens  qu*ll  avait  acquis  pendant  son 
union  arec  ladite  défonte.  Il  s'entendit  fadiement  avec  ses 
liéritiers  collatéraux  pour  vendre  les  cent  six  hectares  quatre- 
vingts  ares  (cinq  cent  dnqnante-quatre  arpents)  de  terres  et 
de  prés,  faisant  autrefois  partie  de  la  censé  dite  Luderbacher, 
à  Anne-Gilbert,  baron  de  Laval,  général  de  division,  comman- 
deur de  l'ordre  de  la  Légion  d'honneur.  Le  contrat  en  fut 
passé  devant  M'  Lacombe,  notaire  à  Strasbourg,  le  22  mars 
1808.  Le  général  de  Laval  construisit,  dans  une  position 
avantageuse  et  sur  un  terrain  riche  en  sources,  une  ferme 
consistant  en  maison  d'habitation,  grange,  écuries  et  autres 
bâtiments  nécessaires  à  une  grande  exploitation  rurale.  Il 
laissa,  à  son  décès,  la  moitié  de  ce  domaine  à  son  fils  unique, 
Camille  de  Laval;  l'autre  moitié  en  advint  à  Marie-Anne- 
Hypolite  de  Bourg,  veuve  du  général,  demeurant  à  Rodern 
(Haute-Alsace),  à  cause  de  la  communauté  de  biens  qui  avait 
existé  entre  elle  et  son  mari. 

M.  Anne-Marie-Mathias,  baron  de  Laval,  propriéUire  à 
Huratel  (Puy-de-Dôme),  et  Louise-Marie  Malay  de  Laval,  son 

épouse,  seuls  héritiers  de  Camille  de  Laval,  s'entendirent  avec 
la  veuve  du  général  pour  vendre  ce  domaine,  avec  d'autres 
biens  situés  aux  bans  d'Oermingen  et  de  Herbilzheim,  à 
M.  Joseph  Jannesson,  ancien  préfet  de  TËma  oriental,  domi- 

'  Commonication  bienveillante  da  M.  le  maire  de  Vœllerdiogen. 


BKVUB  D'ALSàOB 


cilié  à  Strasbourg'.  La  Tente  en  fut  faite  moyennant  la  somme 
de  soijnnfe  mille  francs,  soirant  acte  passé  devant  M*  Ren- 
cfcer,  notaire  à  Strasbourg,  le  18  novembre  1810. 
M.  Jannesson  agrandit  les  bâtiments  de  cette  censé,  embellit 

la  maison  de  maître  et  en  fit  une  habitation  d'été  aussi 
confortable  que  saine. 

Celte  censé  a  toujours  élc  exploitée  par  des  fermiers; 
M.  Jannesson  la  transmit  à  ses  enfants,  qui  en  vendirent  la 
plus  grande  partie  à  des  particuliers  de  Saar-Uriion,  d'Oer- 
mingea  et  de  Vwllerdingen.  Les  bâtiments  de  la  ferme,  avec 
trente-huit  hectares  vingt-et-un  ares  8oîxante^ou»e  centiares 
de  terres  et  de  prés,  furent  vendus  à  M.  Germain,  qui  en  est 
encore  propriétaire.  Le  Lutterbacherliof  est  actuellement  un 
petit  hameau  composé  de  six  maisons  d  habitatîon. 

On  raconte  que  c'est  dans  la  ferme  de  Lutterbacherliof' 
située  au  milieu  des  forêts,  que  Philippe  Melanchton  étoit 
venu,  en  1524,  tenir  des  conférences  auxquelles  assistèrent 
les  religieuses  de  Herbitzbeim,  qui  ne  tardèrent  pas  à  par- 
tager ses  opinions  réformatrices  et  à  embrasser  le  luthéra- 
nisme, sauf  deux,  qui  s'enfuirent  à  Saint-Nabor  (Sdnt- 
A?old). 

F.  Moulins  du  comté  de  Saarwerden 

Le  comté  de  Saanverdcn  et  Pancienne  prévôté  de  Her- 
bitzbeim étaient  émaillés  de  vingt-sept  moulins  à  fiirine,qni 
tous  étaient  des  emphylhéoses,  savoir:  vingt-quatre  relevaient 
de  la  maison  de  Nassau-Saarwerden;  deux,  ceux  de  Burbach 
et  de  Gœrlingen,  dépendaient  du  château  de  Diedendorf  :  et 
la  directe  de  celui  de  Drulingen  eu  appartenait  aux  nobles 
de  Steincallenfels,  seigneurs  d*Â8Swiller*.  Dans  ce  nombre 
n'étaient  pas  compris  les  moulins  de  Saarwerden  et  de  Boo- 

*  Jannesson  na(juit  à  Savei  ne,  le  33aoât  1770  et  mourut  à  Slrasboiirg, 
le  20  janvier  186-i,  à  1  ùge  de  85  ans. 

*  Archives  de  la  Baise-Alsaee,  S.  E.  5136. 


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6AAKWEKDBN  ET  HBBBITZHEIH 


m 


(laenom,  qui  étaient  des  emphythéoses  relevant  da  duché  de 
Lorraine. 

6.  Appendice  au  chapitre  r* 

Nous  aTQns  dit  au  chapitre  I"  de  eette  histoire^ -que  Fol- 
mar,  comte  de  Saarwerden,  avait  épousé  Stéphanie,  dont  le 

nom  de  famille  est  demeuré  inconnu.  Depuis  l'impression  de 
ce  chapitre,  des  documents  francomtois  nous  ont  appris  que 
Stéphanie,  Tépousedu  comte  Folmar  de  Saarwerden,  élaitfille 
de  Thierry  ou  Théodorlcil,  comte  de  Monlbéiiard  et  arrière- 
petite-filie  de  Louis,  comte  de  Moncion,  et  de  Sophie  de 
Lorraine.  Elle  était  cousine  issue  de  germain  de  Renaud  ou 
Reginald,  le  dernier  comte  de  Lutselbourg,  qui  était  également 
arrière-pelit-tils  du  comte  Louis  de  Moncion. 

Ce  sont  probablement  les  prétentions  que  le  comte  Folmar 
de  Saarwerden  forma  sur  l'opulent  héritage  du  dernier  descen- 
dant de  Tillustre  maison  de  Lutzelbourg,  qui  donnèrent  lieu 
à  la  guerre  que  lui  firent  Etienne  de  Bar,  évôque  de  Metz, 
et  Mathieu,  due  de  Lorraine;  et  il  paraîtrait  que  son  fils 
Louis  I*'  ait  aussi  cherché  à  faire  valoir  les  prétentions  que 
sa  mère  Stéphanie  de  Monlbéiiard  loi  avait  transmises  sur 
le  château  de  Lutzelbourg.  Ce  seigneur  a  joué  en  Franche- 
Comté  un  rôle  assez  important  comme  légat  ou  juge  institué 
par  l'empereur  Frédéric  I"  pour  maititenirson  autorité  dans 
ce  pe|8.  Il  est  cité  plusieurs  fois  dans  les  documents  fran- 
comtois. 

Cornes  Luékwkus  de  Sarreverdê  figure  comme  témoin  dans 
une  charte  émise  le  S6  aoôt  i486  à  Mulhouse  par  l'empereur 

Frédéric  I",  en  faveur  de  l'abbaye  du  Lac  de  Joox".  Une 
autre  charte  de  la  môme  année  se  termine  ainsi  :  Actumapud 
'  Page  118,  t.  VI  delaiïeutt*. 

'  Nous  devons  la  communication  de  ces  documents  h  l'oblif^'oance  de 
M.  I>éon  Viellard,  de  Morvi liais,  et  nous  l'en  remercions  bien  vivement. 
•  M.  de  GmoiNS  de  Sabaz,  Rectorat  de  Bourgogne,  p.  190. 


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6M 


BBVUB  D*AL8AaB 


OrottMuryiwBtàBmkm  dum  cornes  de  Saloemia  curiam  mm 

kgaU  tft  Burgundia  sont  cités  dans  une  charte  de  1188'. 
Ludovieus  Dei  ffraUa  cornes  ds  Sahsmia  hnperiaSs  auk  én 

Btirgimdia  justfciarius  figure  dans  un  document  de  la  même 
année*.  Cornes  Ludovieus  de  Sarwerde,  magister  Daniel,  tune 
legaius  Burgundiœ  apparaissent  comme  témoins  dans  une 
charte  que  l'empereur  Frédéric  1*'  donna  à  Haguenau  en 
làTeur  de  l^abbayede  Saint-Etienne  de  Be8ançon^  Ludomeus 
eomss  d$  Salnema  est  cité  comme  témoin  d*ane  charte  du 
1**  juillet  1196  en  faveur  des  possesseurs  du  château  de 
Rosières  ^  et  cornes  Lmhvicm  de  Sokkrdo  figure,  vers  il98, 
comme  témoin  d'une  charte  en  faveur  deTéglise  de  Baume*. 

D.  Fiscera. 


'  Clerc,  ffMoirt  tft  Fnmthê'ComU,  1 1,  p.  388. 

'  Ibidem . 

^  Archives  départementales  de  Qaata-Saône.  EUU  iespenonnett  i  1 

p.  283. 

*  E.  Bealrix  de  Chàlons,  p.  87. 

'  Gbbvalibr,  HiiMn  dû  Poligny,  1. 1,  p  332. 

*  anImh  1 1,  p.  asts. 


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NOTES  BIOGRAPHIQUES 

SUR  LES 

HOMMES  DE  LA  HÉVOLUÏION 

A 

STRASBOURG  ET  LES  ENYIRONS 


Suite 


BERGER  (JAQQtnss). 

1750.  Né  à  Lyon. 

1789.  Artiste  dramatique  de  peu  de  mérite,  attaché  au 
théâtre  de  Strasbourg. 

1791 .  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Constitution. 
7  février  1792.  Il  passe  aux  jacobins. 

1792.  Chargé  du  dépôt  général  des  ornements  religieux 
confisqués  dans  les  églises,  chapelles  et  couvents. 

a  novembre  1793.  L'administration  départementale  du  Bas- 
ïUiin»ayant  été  cassée  parSainWust  et  Lebas,  Berger 
et  quatre  autres  sont  maintenus  en  fonction,  et  for- 
mèrent une  commission  provisoire  pour  Fexpédition 
desaffoirea 

6novembre— .  Membre  du  Comité  de  surveillance  de  la 
Société  des  jacobins. 

Quelques  jours  après,  Baudot  le  nomme  membre 
d'mi  Ciomité  de  salubrité,  ayant  mission  d'épurer  les 
Sodétés  i^tlipies  de  Strasbourg. 


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BBVQB  D'ALBAOB 


24décembre  1793.  L'iniporUuice  do  la  dénonciation  du  sans- 
culotte  Mas.sé  contre  Rumplor,  secrétaire,  Soniniervo- 
gel  et  Finck,  Toblijj^e  à  envoyer  la  pièce  au  Comité  de 
sûreté  générale  pour  y  faire  droit. 

26  janvier  1794 .  Il  assiste  à  la  levée  des  scellés  chez  le  sans- 
culotte  Massé. 

Peu  de  temps  après,  il  est  arrêté,  mais  appuyé  par 
Monet,  il  fût  mis  en  liberté  en  mars  suivant 

23  avril  — .  Elu  notable  de  la  commune. 

2  août  —  n  signe  Tadreese  de  la  municipalité  à  la  Conven- 
tion nationale  lors  de  la  conspiration  de  Robespierre 
et  autres. 

5  septembre  — .  Notable  sous  le  maire  André. 

17  Janvier  1795.  BaiUy  le  nomme  membre  du  comité  révo- 
lutionnaire du  district  de  StraEft>ourg. 

1796.  n  occupe  une  place  de  commissaire  de  police  ft  Stras- 
bourg, car  c'est  en  cette  qualité  qu'il  est  élu,  la  môme 
année,  pour  représenter  le  canton  de  Strasbourg  aux 
Assemblées  priniaii'es  du  Bas-lUiin. 

Sous  l'empire,  il  donnait  dos  leçons  de  danse  et  de 
maintien,  rue  des  1^  rères,  18,  à  Strasbourg. 

BERGHAUER, 
deBarr. 

11  abjura  la  prêtrise. 
1793.  Il  fut  appelé  à  la  présidence  du  district  de  Barr.  A 
peine  instidlé,  le  Conseil  général  de  ce  district  exposa 
ses  plaintes  sur  la  conduite  de  ce  fonctionnaire,  dans 
une  délibération  présentée  aux  représentante  du 
peuple  à  Strasbourg;  mais,  appuyé  comme  il  1  était 
par  son  intime  ami  Euloge  Schneider,  rafiGûre  n'eut 
point  de  suite. 

24  octobre  — .  La  municipalité  de  Barr  répéta  ses  accusa- 

tions, en  ajoutant  deux  procès-verbaux  à  l'appui,  qui 
démasquaient  la  manière  despotique  et  drâgereose 
de  cet  individu.  ^ 


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LES  HOMKBB  DE  Lk  RfiTOLimON  SSfi 

21  et  22  novembre  1793.  Sur  ses  rapports,  le  tribunal  révolu- 
tionnaire du  Bas-Rhin  condamne  : 

lo  Samuel  Chayen,  de  Niedernai,  âgé  de  20  ans,  à 
six  ans  de  fer  et  au  poteau,  pour  avoir  demandé  8 
livres  pour  une  livre  de  plumes  de  lit; 

2o  François-Mathias  Ausel»  chairon  à  Dambach, 
41  ans,  à  mort  et  confiscation  de  ses  biens,  pour  avoir 
dit  que  Pennemi  viendra  en  Alsace; 

8«  Joseph  Labni,  aubergiste  à  Saint^Maurice^  58  ans, 
à  6000  livres,  pour  vente  de  vin  au-dessus  du  maxi- 
mum. 

Le  soir  de  la  fête  de  la  Raison  à  Barr,  prenant  Tes- 
prôtre  Funckparlebras,  il  lui  fitfedre  le  four  delà 
salle,  le  présenta  auxBarroises,  espérant  que  Tune  ou 
l'autre  lui  oflHraitsa  main,  et  à  la  même  soirée,  quand 
Schneider  demandait  à  la  société  une  contrilDution 
volontaire  en  faveur  de  Funck,  Bergliauer  ajoutait 
qu'il  espérait  que  personne  n'oserait  offi^ir  de  misé- 
rables pièces  de  cinq  livres. 

10  janvier  1794.  Les  représentants  du  peuple  chaigent  le 
général  Dièche  de  Tarrèter  dans  la  nuit,  comme  sus- 
pect et  dangereux,  ses  papiers  seront  visités  et,  de 
suite,  il'sera  transféré  à  Dijon  sous  bonne  escorte. 

10  avril  ~.  Le  comité  de  surveillance  et  de  sûreté  générale 
du  BasHEUiin,  ayant  demandé  à  la  Société  populaire 
épurée  de  JBarr  des  renseignements  sur  les  làits  et 
gestes  de  Berghauer,  reçut  les  suivants  : 

Berginiier  était  tout  moulé  sur  Schneider,  sa  manière  de  pen- 
ser et  d*agîr  fat  conforme  an  caractère  de  celui-ci.  Us  se  ressem- 
blaient surtout  en  vengeance,  envie  de  régner  et  despotisme.  C'é- 
tait en  outre  un  fimatiqne  qui  faisait  ûter  par  un  de  ses  agents 

la  consécration  aux  ornements  d'éylise,  lorsqu'ils  furent  trans- 
portés au  dt-partement.  Si  les  citoyens  et  citoyennes  ven;ii(>iil  au 
district  pour  présenter  des  pétitions  ou  pour  consulier  Ifs  ;idmi- 
nistraleurs,  il  les  regardait  d'un  air  méprisant,  il  les  abordait 
rudement  et  ne  leur  répondait  qu'en  les  menaçant  de  la  guillo- 
tine. U  disposait  arbitrairement  des  détenus,  prétendant  être 
Investi  de  ce  pouvoir  par  le  Goinité  de  sAreté  générale.  Il  mit  en 


IBS  BOmisS  SB  ImL  BftvoumoN 


liberté  les  aristocrates  connus,  sans  en  avertir  le  district.  11  fit 
trembler  tout  le  monde  par  son  despotisme  saivrdotal.  Un  jour^ 
il  menaça  le  maire  Uc  Saint-Pierre  pour  avoir  trop  imposé  Bûcher, 
rifibe  aristoeratef  dans  b  lépArtiiioD  de  la  eontribattoo  léioltt- 
ttonnalre,  loi  donnant  à  entendre  qoe  ce  crime  loi  ooftienit  b 
téte.  n  fit  mettre  Bncher  en  liberté  sans  oonsenteaie&tdn district, 
qni  l'avait  fait  arrêter  comme  suspect. 

En  un  mot,  toute  sa  conduite  à  Barr  ne  respirait  que  despo- 
tisme, tyrannie  el  extravagance. 

A  la  fin  de  sa  carrière,  il  semblait  avoir  beaucoup 

de  liaisons  avec  des  fEtmilles  aristocrates,  quil  avait 

ci-devant  détestées. 

BERNADON  (Pibrrb). 

1729.  Né  à  Boisseron,  district  de  Castres. 
1789.  Sous  aide-nujor  à  Forl-Loais. 

2  juillet  1794.  Retraité  à  Strasbourg,  U  se  fiBdt  leœvoir  à  la 
Société  des  jacobins,  dissoute  six  mois  après. 

BËRNARD  (Louis). 

1731 .  Né  à  Tonneiis,  CMe-d'Or. 
Avant  1789.  Imprimeur  c;n  taille-douce,  à  Strasbourg. 
Juillet  1790.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Consti- 
tution. 

7  février  1792.  Il  passe  aux  jacobins. 

10  septembre  1793.  Gomjnissaire  d'un  comité  de  cette  So- 
ciété, il  déclare,  avec  ses  cinq  collègues,  que  le  club  a 
décidé  et  arrêté  d'envoyer  une  députation  à  la  muni- 
cipalité, pour  rinviter  à  fiaire  incaicérer  sans  hésiter 
Dietterich,  professeur,  qui  a  insulté  Téchaipe  tricolore, 
ainsi  que  Noisette  et  WUd,  qui,  depuis  Icmgtemps,  ont 
mérité  ce  traitement 

Cette  même  députation  se  rendra  chez  le  comman- 
dant de  la  place,  pour  quMl puisse  prendrelesmesoreB 
convenables,  afin  que  ces  oiseaux  ne  s*évadeDt  pB, 
et  malheur  à  celui  qui  oserait  leur  donner  asile. 


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LB8  ROinCBS  DE  LA  BÉTOLOTION  529 

BERRUYER  (Jean-François). 
6  janvier  1787.  Né  à  Lyon. 
1753.  MiUtaire. 

1766.  Sergent  au  régiment  d'infanterie  d'Aumont,  il  assiste 
an  siège  de  Mahon. 

1761 .  Lieutenant  pour  une  action  d^éclat  pendant  la  guerre 
de  sept  ans. 

1767.  Capitaine. 

1787.  Lieutenant-colonel. 

1791.  Colonel  des  carabiniers  royaux  et  aide-de-camp  du 
maréchal  Luckner. 

13  mars  1792.  Membre  de  la  Société  des  jacobins,  il  pro- 
nonce un  discours  à  sa  réception  au  Miroir. 

8  mai  — .  Réunion  extraordinaire  des  jacobins,  pour  appro- 
fondir les  motifs  de  son  départ  précipité  de  Strasbourg 
et  de  celui  du  maréchal  Luclmer. 

La  même  année  il  est  nommé  colonel  général  des 
carabiniers  royaux. 

1793.  Générai  en  chef  de  Parmée  de  rOuest. 

17  avril  1804.  Décédé  gouverneur  des  Invalides. 

BERTRAND  (Jean). 
Avant  1789.  Négociant  et  ftibricant  de  draps  à  Bischwiiler. 
26  août  1791.  Membre  de  l'administration  départementale 
du  Bas-Rhin. 

1792.  Membre  de  la  Société  des  jacobins. 

2  septembre  — .  A  Haguenau,  il  est  élu  député  à  la  Conven- 
tion nationale;  mais  n'étant  pas  à  Paris  en  janvier 
1793,  il  ne  prit  aucune  part  au  jugement  de  Louis 
XVI. 

1793.  Membre  du  Conseil  général  du  Bas-Rhin. 

Mara  — .  n  alla  à  Besançon  déposer  contre  le  maire  de  Die- 

tiich,  qui  fot  acquitté. 
1793.  Dans  les  derniers  mois  de  cette  année,  à  son  tour,  il 

fut  transporté  et  emprisomié  à  Metz. 
U  mars  1794.  Remis  en  liberté  par  ordre  du  représentant 

Rougemont  et  principalement  sur  les  sollicitations 
MouveUe  Séri».  —  T-  Aiuto.  34 


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530  BEVUE  D*AL8ACB 

de  la  Société  des  jacobina  de  Strasbourg,  dont  il  était 
membre. 

Mai  1794.  Membre  du  district  (]o  Haguenau. 

21  octobre  1795.  Elu  député  à  FAssemblée  législative. 

m  avril  1798.  Administrateur  du  département  du  Bas-Rhin. 
179B-1799.  Membre  du  Conseil  des  Ginq-Gents,  en  vertu  de 

rélection  de  1795. 
17  juillet  1799.  PrésîdentderadministrationcentraleduBas^ 

Bhin. 

1805.  Maire  de  Bisdiwmer. 

BESSON. 

1792.  SoMat  au  10"  bataillon  d.;  la  Côte-d'Or;  meiiibre  du 
club  des  jacobins  à  Strasbourg. 

14  novembre  1793.  La  caisse  de  la  Trésorerie  révolution- 
naire lui  verse  cent  livres  de  gratilication  pour  sa. 
dénonciation 

12  décembre  — .  Le  Comité  de  surveillance  et  de  sûreté 
générale  autorise  son  président,  Mainoni,  d'écrire  au 
Conseil  d'administration  du  10*  bataillon  de  la  Côte- 
d'Or  pour  l'inviter  à  permettre  à  Besson  de  remplir  la 
fonction  de  sous-secrétaire  au  Condté  de  sùretè  géné- 
rale du  Bas-Rhin. 

24  décembre  — .  C'est  au  général  Dléche  qu'il  feut  s'adres- 
ser. 

20  décembre  — .  Avant  de  rc  séparer,  le  Comité  de  surveil- 
lance et  d(î  sûr(>té  générale  lui  verse  deux  cents  livres, 
à  titre  de  gratilication.  11  retourne  à  son  bataillon. 

BEVALEÏ  (L'abbé). 
Mars  1791.  Vicaire  épiscopal  de  Tévéque  constitutionnel 
Brendel  et  secrétaire  du  Conseil  épiscopal. 

22  octobre  — .  U  désavoue  le  discours  de  son  coUègue  et 

ami  Schneider  sur  le  mariage  des  prêtres. 
27  novembre  — .  Membre  affilié  aux  Sodétés  populaires  de 
Strasbourg,  Colmar  et  Belfort;  il  se  rend  au  son  de 


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LB8  H0M1IB8  DB  LA  BÉVOLDTION  581 

celle  de  Savei  ue,  dont  il  était  aussi  membre,  pour  lui 
présenter  Bentabole, 

patriote  fameux  dans  la  Réîolulion  et  membre  du  clab  des  Jaco- 
bins de  Strasbourg. 

Inutae  d'^ioutep  qu'à  l'aide  de  ce  cerliûcat,  Benta- 
bole fut  admis  haut  la  main. 

7  février  1793.  A  son  tour,  U  se  fkit  recevoir  membre  de  la 
Société  des  Jacobins  de  Strasbourg. 

7 novembre—.  U  informe  les  prêtres  enfermés  au  Sémi- 
naire, en  vertu  de  la  loi  du  2G  août  1792,  que,  sur 
l'avis  de  Dércser,  supérieur  du  Séminaire  et  du  Con- 
seUépiscopal,  ils  pourront  célébrer  leurs  messes  dans 
la  cathédrale  a  telle  heure  qu'ils  voudront. 

BEYER  (JEàN-DANIEL). 

1748.  Né  à  Platan,  en  Pologne. 

Avant  1788.  Tondeur  de  draps  à  Strasbourg. 

1703.  Membre  des  jacobins  ou  Société  populaire  après  le 

7  février  1)92. 

1793.  Comme  membre  do  la  Société,  il  déclare  que  tous  les 
traîtres  à  la  patrie,  tous  les  royalistes,  fédéralistes  et 
intrigans,  doivent  être  punis  de  mort;  mais  justice 
pour  rinnoeence. 

Une  autre  fois,  à  la  même  Société,  il  prédit  la  mort 
à  tous  les  traîtres  à  la  patrie,  et  demande  justice  pour 
l'innocence. 

25  octobre  1794.  Il  est  encore  aux  jacobins. 

BIERLYN  (Jean-Henri). 

1758.  Né  à  Strasbourg. 

Candidat  en  théologie. 

1789.  Instituteur  protestant  à  Strasbourg. 

1792.  Membre  du  dub  des  jacobins. 

3  octobre  1798.  Traducteur  au  département,  les  représen- 
tants Milhaud  et  Guyardin  le  nomment  membre  de 
la  municipalité. 

18  octobre  — .  Avec  la  Commission  municipale,  il  assiste  à 


932  BBVUB  D*ALSAOB 

la  fête  célébrée  dans  le  temple  de  la  Raison  ;  il  a  pu 
entendre  un  propagandiste  demander  que  le  peuple 
énonçât  son  vœu  sur  les  prêtres. 

Noos  n'en  voulons  plus  rcconnatlre,  fol  ta  réponse  des  assis- 
tants et  de  l>x-thèologien. 
5  novembre  1793.  Elu  notable  par  la  Société  populaire. 
22  novembre  — .  Avec  vingt-neuf  autres  sans^ulottes.  il 
demande  aux  représentants  du  peuple  SaintrJoal  et 
Lebas  la  suppression  de  la  permanence  des  don» 
sections  de  la  viUe  et  répurement  des  Comités  de  BU^ 
vaillance. 

24  novembre  — .  Il  appuie  la  motion  de  Téterel,  de  feîre 
abattre  la  Tour  de  la  cathédrale  jusqu'à  la  plate-forme. 
Elevée  par  la  superstition  du  peuple,  elle  en  rappelle 

les  anciennes  iTreurs. 
2  décembre  — .  Il  n  adliére  pas  à  Tarticlc  111  de  rairété 
municipal,  s'opposant  à  la  destruction  des  statues  ea 
pierre  du  même  édiiice. 
8  mars  1794.  Il  signe  la  délibération  de  la  municipalité, 
nommant  le  maire  et  Tagent  national  pour  installer 
le  .nouveau  Comité  de  sur\'eiUance  de  la  commune, 
l**  mai     Il  signe  un  avis  incendiaire  aux  Strasbourgeois  : 
L'sristocratie  paraît  se  relever  avec  confiance,  un  cri  odieux 
(Vive  le  Roi  !)  s'est  fait  entendre,  il  fout  que  la  lumitTe  et  le  glaive 
soient  portés  dans  Tanlre  des  conspirateurs,  pour  sauver  la  hbcric 
et  la  patrie. 

26  et  30  mai  — .  Officier  municipal,  il  prend  part  à  la  con- 


damnation  de  cent  vingt^ix  personnes  susj 
y  en  avait  déjà  près  de  trois  mille  enfermées  dans  les 
prisons  à  Strasbourg. 
13 juin—,  Monet, dans  son  rapport  au  Conseil  municipal, 
le  qualiûe  administrateur  du  bien  public  et  le  pro- 
pose comme  tel  pour  faire  partie  d'une  Commission 
chargée  de  présenter  des  mesures  de  sûreté  générale 
et  de  salut  public. 

Le  même  jour,  commissaire  de  police,  il  compli- 
mente la  munidpaUté  d'avoir  débarrassé  la  RépuDU- 


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LBS  HOMMBS  DE  LA.  RÉTOLIITION 


583 


que  d'un  tas  d'ennemis  de  la  souveraineté  populaire; 
mais  la  mesure  n'est  pas  radicale,  il  y  en  a  encore 
beaucoup  à  mettre  au  sec,  et  il  est  urgent  d'aviser; 
il  s'en  occupera, 
juillet  1794.  Sur  la  proposition  du  jacobin  Morelle,  le  club, 
en  jurant  la  mort  aux  tyrans  et  principalement  aux 
Anglais,  comme  le  peuple  le  plus  avili  et  le  plus  exé- 
crable du  globe,  Bierlyn  si<Tne  la  liste  de  souscription 
pour  la  confection  d'un  grand  vaisseau  de  guerre  qui 
devra  contribuer  à  la  destruction  de  la  perfide  Al- 
bion. La  chose  en  est  restée  à  Tétat  de  proposition. 
2  août  — .  Signataire  de  l'adresse  envoyée  par  le  Conseil 
général  do  la  ville  de  Strasbourg  aux  membres  de  la 
Convention  nationale,  lors  de  la  conspiration  ourdie 
par  Robespierre^  Couthon,  Saint-Just  et  Lebas^  qui 
semblaient»  dit  Tadresse,  n'avoir  rendu  des  services  au 
peuple  que  pour  acquérir  des  moyens  plus  sûrs  de 
le  trahir. 

15  août  — .  Comme  administrateur  du  bien  public,  chargé 
de  la  surveillance  des  maisons  de  suspicion,  Stoiinaire 
et  CioUége^  il  ordonne  que  les  détenus  mangeront  tous 
à  une  table  commune. 

9  septembre  Le  représentant  Foussedoire  le  raye  du 
corps  municipal,  dont  il  était  alors  le  vice-président, 
pour  le  remplacer  par  Mattheus,  et  son  rôle  fut  pour 
ainsi  dire  terminé. 

BIRCKICHT. 

1789.  Teinturier  à  Strasbourg. 

1792.  Membre  du  club  des  jacobins. 

8  octobre  1793.  Membre  suppléant  du  C!omité  de  surveil- 
lance et  de  sûreté  générale  du  fias-Rhin. 

3 novembre— .  Il  condamne  Pierre  Mayno,  reconnu  pour 
le  plus  riche  de  Strasbourf,^  à  ijuaLre  heures  d'expo- 
sition au  poteau  de  la  guillotine. 

3  — .11  approuve  une  liste  de  248  personnes  de  la  ville. 


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.1-  • 


534  BBYUB  D'ALSACE 

leooDiMies  suspectes  par  le  Comité  de  sûreté  géiiérale 

du  Bas^Bhîn. 
5  novembre  1793.  Offlder  municipal. 
S5~.  Avec  Zizentzer,  il  est  chargé  de  sceller  les  papiers  de 

Gomba,  chasseur  du  Ciomité  secret»  mis  en  état  d•a^ 

restation. 

1"  décembre  — .  Il  autorise  D.  Stamm  à  prélever  une  con- 
tribution sur  les  riclies  des  communes  du  district  de 
Strasbourg,  à  payer  dans  les  vingt-quatre  heures,  de 
faire  arrêter  tous  ceux  qu'il  croira  suspects,  et  notam- 
ment les  déportés  de  Strasbourg,  qui  devront  88 
retirer  à  vingt  lieues  des  frontières. 
2—.  Il  s'oppose  à  l'ordre  de  Saint-Just  et  Lebas,  d'abattre 

les  statues  de  la  cathédrale  et  de  dégrader  rédifice. 
13—.  Il  dénonce  les  fuyards  du  village  de  Wierscbeim. 
2î  - .  Signataire  du  procès-verbal  du  Comité  de  surveillance 
et  de  sûreté  générale,  ordonnant  que  tous  ceux  qui 
ne  paieront  pas  la  somme  exigée  par  les  représentants 
Saint-Just  et  Lebas,  seront  enfermés  au  Séminaire. 
23—.  A  la  séance  suivante,  il  approuve  la  proposition  de 
déchausser  les  riches,  pour  procurer  des  souliers  aux 
troupiers  qui,  dans  les  plaines  de  Bischwiiler  et  de 
Haguenau,  poursuivent,  pieds  nus,  Fennemi. 
23—.  Envoyé  au  Séminaire  pour  y  examiner  les  péUtioDS 

des  détenus  et  en  rendre  compte  au  Comité 
25—.  Il  clôture  le  procès-verbal  des  séances  du  Comité  do 
surveiUance  et  de  sûreté  générale,  aboU  par  une  loi. 
27—11  adhère  à  une  lettre  coUeclive  rédigée  en  feveur 

d"E.  Schneider. 
30  janvier  1794.  Elu  de  rechef  officier  municipal. 
8  mars  — .  Il  installe  les  nouveaux  membres  du  Comité  de 

surveillance  de  la  commune. 
7  avril  — .  Il  fait  appel  aux  Strasbourgeois  pour  obtenir  des 
vêtements,  du  linge  et  des  chaussures. 

A  rarrivée  du  représentant  Bailly,  il  retourne  à  ses 
cuves  de  teinture,  place  Dauphine,  qu  il  n  aurait  ja- 
mais dû  quitter. 


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LES  HOMMES  DE  LA.  BÊVOLUTIOH 


533 


BLàNIER  (lUniOND). 

1753.  NéàCnhors. 

Avant  1789,  nLgociaiit  à  Strasbourg. 

1790.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Constitution. 

7  février  1792.  Il  la  suit  à  rAudltoire. 

17  février  — .  Il  y  prononce  un  discours  disculpant  le  maire 
Dletrich  d^avoir  proposé  la  mise  en  état  de  guerre  de 
la  ville  de  Strasbourg. 

Juillet  — .  Il  passe  au  club  et  devint  un  jacobin  de  la  pire 
espèce.  Plus  tard,  il  fut  agent  secret  du  pouvoir  exé- 
cutif à  Paris. 

25  novembre  1798.  La  Société  des  jacobins  le  nomme  d'une 
commission  qui  aura  à  présenter  des  moyens  de  levée 
des  citoyens  du  Bas-Bbin. 

12  décembre — .  Il  se  présente  au  Comité  de  surveillance 

et  de  sûreté  générale  pour  lui  faire  part  des  inquié- 
tmles  et  des  méfiances  qu'il  a  sur  quelques  employés 
du  Comité  secret  de  Tarmée  du  Rhin. 

11  janvier  179  A.  Au  club,  il  se  plaint  amèrement  de  la  non 
valeur  toujoui-s  croissante  des  assip^naLs  et  i)roî)ose 
de  déclarer  les  personnes  qui  no  les  respectent  pas, 
indignes  du  nom  do  républicains  et  de  les  exclure  de  la 
Société  des  hommes  libres.  Adopté. 

19  février  1791.  De  retour  à  Paris,  il  écrit  aux  jacobins  do 
Strasbourg  : 

.\près  avoir  satisfait  au  service  do  la  lîi'i)ubliqiu\  je  me  suis 
occupé  aussitôt  à  remplir  la  promesse  (pie  j'ai  fiile  à  la  Société 
pour  les  bustes  ilcs  martyrs  de  la  liherlé,  j'espère  que  nous  en 
orneruiis  bieutùt  toute  notre  salle,,  et  qu  aucua  n'en  sera  excepté, 
puisque  je  les  ai  tous  achetés.  Toot  va  bien,  à  Paris  on  travaille 
d'importance  les  notaires  qui  ont  trempé  dans  les  emprunt  pour 
fiiire  la  contre-révolution.  j*ai  appris  que  plusieurs  imagos  de  ces 
soi-disant  patriotes  se  sont  empoisonnés  ou  assassinés,  c'est  la 
le  son  (les  traîtres  et  des  conspinitenrs.  mais  c'est  nu  déjeuner 
de  moins  pour  l;i  j^nilliaiiie.  N  )us  avons  besoin  de  lunle  la  sur- 
veillance pour  les  deinas(iiier;  tenez  ferme  et  «jue  l:i  terre  ou  la 
calotte  du  lirmament  s'ouvre  ;  restons  termes  et  ça  ira  comme 
nous  voudrons.  Le  premier  d'entre  nous  qui  oseroit  flécbir  quil 


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596 


BEVDB  D'ALSAGB 


périsse,  ar  nous  devuns  garder  jusqu'à  la  fm  la  fermeté  et  la 
fierté  des  jacobins.  Je  ne  doute  pas  que  Baudot  et  Lacost  ne  tr»« 
vaillent  ceux  qui  oseroieat  manifester  le  moindre  acte  atlentolre 
à  la  République.  Vive  les  sans^nlottes  de  toute  la  République  t 

5  septembre  1791.  A  la  préfecture  et  devant  le  représentant 

Foussedoire,  il  fut  le  premier  qui  osa  attaquer  le  maire 
Monet,  lui  reprochant  cFavoir  abusé  do  son  pouvoir 
*      on  encourageant  les  horreurs  de  la  Terreur. 
25  octobre  — .  Il  est  encore  aux  jacobins. 

juillet  1822.  Un  mémoire  est  soumis  aux  créanciers  de 
la  masse  de  feu  Haimond  Blanié,  négociant  et  entre- 
preneur à  Strasbourg. 

BLEINGE. 

Octobre  1793.  Membre  de  la  propagande  révolutionnaire 
casernée  au  collège  de  Strasbourg,  à  raison  de  15  livres  • 
par  jour. 

Tous  avaient  la  même  tenue.  Une  longue  capotte, 
un  bonnet  rouge,  un  grand  sabre  traînant  à  terre;  la 
majeure  partie  portait  la  barbe  et  la  moustache. 
13  décembre  — .  Aux  jacobins,  il  vote  la  mort  de  tous  les 
gens  suspects»  après  quelaCSonvention  nationale  aura 
établi  une  Commission  populaire  pour  les  ju|(ér. 

BŒLL  (Jean-Gaspard). 

1790.  Avocat  à  Wissembourg,  où  il  est  né. 

1791.  Il  quitte  l'académie  mUitaire  de  Golmar,  à  laquelle  il 
fut  attaché  cinq  ans  comme  professeur  et  secrétaire 
intime  du  fondateur,  le  célèbre  PMel,  pour  retourner 
dans  sa  ville  natale. 

1793.  Juge  au  tribunal  du  district  de  Wissembourg  et  peu 
après  directeur  du  jury. 

Février  1793.  Juge  pendant  trois  mois  au  tribunal  criminel 
du  BafikRhin  à  Strasbourg,  puis  président  de  ce  tribu- 
nal en  remplacement  d^wert. 

1798.  Envoyé  à  Paris  au  ConseU  des  Canq-Cents,  et  un  des 
opposants  au  général  Buonaparte  au  18  brumaire 
an  Vm  (8  novembre  1799). 


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LES  HOIOIES  DB  LA.  BtVOLVTION 


587 


De  retouràWissembourg,  ily  fut  nommé  président 
du  tribunal  clvii;  mais  son  sincère  attachement  au 
maintien  et  à  Texécution  des  lois,  le  jetèrent  dans 
Topposition  au  consulat  à  vie,  et  plus  tard  à  la  recon- 
naissance de  Tempire,  ce  qui  lui  valut  dix  mois  de 
détention  dans  la  citadelle  de  Strasbourg.  La  cata- 
stnophe  du  duc  d'Enghien  àEttenheim,  fut  le  prétexte 
de  cette  détention,  et  il  n^obtint  sa  liberté  qu'en  don- 
nant sa  démission  de  président  du  tribunal  civil  de 
Wissembourg. 

Sans  fortune,  mais  fier  de  son  indépendance,  il 
refusa  tous  les  emplois  qui  lui  furent  offerts  par  l'em- 
pire, et  de  ce  moment  k'i,  il  fut  surveillé  par  la  police. 

Lors  des  Cent  jours,  sollicité  par  ses  concitoyens, 
il  accepta  et  fut  nommé  député  de  l'arrondissement 
de  Wissembourg;  mais  Tarrivét]  des  troupes  alliées 
en  France,  Tempècha  de  se  rendre  à  son  poste  à  Paris. 

C'est  en  vain  que  la  Resta aration  et  le  Gouverne- 
ment de  juillet  frappèrent  à  sa  porte.  Il  refusa  tout 
emploi,  pour  ne  s'occuper  que  de  ses  alïaires  et  de  sa 
femille. 

li  est  décédé  à  Wissembourg  le  18  décembre  1833, 
entouré  des  regrets  et  de  Testime  de  ses  concitoyens. 

BŒTIGER  (Michel). 

1736.  Né  à  Strasbourg,  où  il  était  jardinier. 

1791.  Membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Constitution. 

7  février  1792.  Il  passe  aux  jacobins. 
25  octobre  1794.  Il  y  est  encore. 

BOHN  (La  citoyenne). 

17  novembre  17d3.  Ayant  dénoncé  au  Comité  de  surveil- 
lance et  de  sûreté  générale  du  Bas-Rhin,  Valentin 
Bûrel,  laboureur  à  Yendenheim,  elle  touche  de  la 
caisse  de  la  trésorerie  révolutionnaire  cent  livres,  à 
titre  de  récompense. 


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53B  BBVUB  D'ALSAOE 

BONTEMPS  (Jbam-Baptistb). 

1774.  Né  à  Strasbourg. 

1793.  Agé  de  19  ans,  employé  aux  Charrois,  il  est  reçu 

membre  de  la  Société  des  jacobins. 
25  octobre  1794.  Il  est  encore  inscrit  comme  tel. 

BORIE-GAMBORT  (Jean]. 

Â.vaiitl789.  avocat  Plus  tard  administrateur  du  départe* 

ment  de  la  Gorràze. 
1791.  Député  de  oe  département  à  FAssembiée  législative. 
Septembre  1792.  A  la  Cionvention  nationale,  où  il  appuya 

les  dénonciations  portées  contre  le  général  GuBline; 

il  se  fit  remarquer  par  rezaltation  de  son  républioa- 

nisme. 

5-19  janviw  1798,  Il  vota  la  mort  de  Louis  XVI  sans  appel 
au  peuple  et  sans  sursis 

Il  montra  beaucoup  d'animosilé  contre  les  proscrits 
du  31  mai,  et  fut  le  plus  impitoyable  ennemi  des 
prêtres  et  des  fonctionnaires  publics,  contre  lesquels 
il  sévit  avec  une  ri^nieur  qu'on  peut  nommer  cruauté. 

uillet  — .  Commissaire  de  ia  Convention  nationale  à  ^a^ 
mée  du  Rhin. 

19  août  — .  De  StrasbourjT,  avec  ses  collègues  Ruamps  et 
Milhaud,  il  informe  le  Comité  de  salut  public  à  Paris 
qu^ils  sont  sans  cesse  occupés  à  procurer  à  Tarmee 
et  aux  forteresses  tout  le  nécessaire  en  vivres  et  ea 
munitions  de  guerre,  qu'ils  ne  prendront  de  repos 
que  lorsque  les  hordes  des  despotes  seront  extermi- 
nées. Qu'il  ont  pris  des  arrêtés  sévères  pour  rechauffer 
lecréditdes  assignats-Enfin,  sur  leur  appel,  3000  répu- 
blicains des  campagnes  se  sont  ralUés  à  la  garde 
nationale  de  PEaffenhoffen,  et  gardent  les  gorges  du 
Bœrenthal,  prêts,  au  moment  d'une  bataiUe  décisive 
à  enfoncer  de  toute  part  les  rangs  ennemis. 

6  octobre  De  Wissembourg,  tt  approuve  les  desUtutions 
et  les  remplacements  des  autorités  de  Strasbourg, 


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LES  HOUMBS  DE  LA  BfiVOLUTIOM 


S80 


arrêtées  par  ses  coUôgaes  Mîlhaud  et  Guyàrdin  le 
8  courant. 

15  octobre  1798.  Avec  huit  de  ses  collègues  aux  armées  du 
Rhin  et  Moselle,  il  établit  à  Strasbourg  une  armée 
révolutionnaire  provisoire  de  1000  hommes,  extraite 
de  celles  de  Rhin  et  Moselle. 

Plus  deux  tribunaux  provisoires  de  trois  juges  cha- 
cun, qui  suivront  Tarmée  révolutionnaire.  Tout  indi- 
vidu reconnu  coupable,  puni  de  mort,  sera  exécuté 
dans  les  vingt-quatre  heures,  et  de  suite  livré  à  Texé- 
cuteur. 

Et  enfin  une  Commission  ele  quatre  membres  auto- 
risée à  s'adjoindre  les  personnes  nécessaires  pour 
rexécution  de  cet  arrêté. 
28  décembre  — .  Euloge  Schneider,  enfermé  à  Tabbaye,  dans 
une  adresse  aux  jacobins  de  Paris,  dit  : 

Les  Feuillants  brisèrent  la  guiUoUne  devant  ma  iwrle.  Elle  y 
resta  jusqu'au  lendemain  à  dix  heures  du  matin,  sans  qu'aucun 
ronc.tionnnire  public  ail  ose  rr<  hercluir  les  coupables,  et  pourlaat 
le  représentant  liorie  était  alors  à  Strasbourg. 
Fin  1793.  L'ennemi  taisait  des  eHorts  désespérés  pour  péné- 
trer en  France.  Borie  et  Riiainps  multipliaient  leurs 
appels  ^ux  départements  voisins  : 

Ne  marchez  pas,  mais  volez,  accourez  de  toutes  parts  1  et  vous 
sauverez  la  patrie. 

Un  instantils  crurent  conjurer  le  péril,  en  recourant 
au  procédé  &vori  du  temps  :  ils  firent  arrêter  les 
généraux  Férino  etLandremont;  mais  le  dénouement 
prévu  n^en  arriva  pas  moins. 
Novembre  1793.  Rappelé  à  Paris, ilfut  chargé  d'une  mission 
dans  la  Lozère  et  le  Gard,  où  il  se  montra  féroce.  Il 
avait  promis  de  réunir  les  protestants  et  les  catholi- 
ques de  ces  contrées;  il  les  réunit  en  efifet,  mais  sur 
l  échafaud,  dans  la  tombe.  Joignant  la  dérision  à  la 
férocité,  il  conduisait,  en  habit  de  représentant,  les 
farandoles  autour  de  l'écliafoud  et  forçait  les  parents 
d'assister  à  ces  fêtes  sauvages  et  sanglantes.  Uzès» 


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540 


BEVCT  D'ALSACB 


Mais,  Nime&  et  autres  lieux  furent  le  théâtre  de  ces 
horreurs. 

ao  mai  ITdS.  Borie,  contre  lequel  le  cri  général  s'était  élevé, 
fut  décrété  d'accusation,  comme  auteur  de  cette  joa^ 
née  qui  a  coûté  la  vie  au  député  Feraud 

25  octobre  1796. 11  eut  encore  assez  d'amis  pour  se  foire 
amnistier  et  assez  de  partisans  pour  devenir,  après  le 
18  brumaire,  an  Vni  (8  novembre  1799),  juge  du  tri- 
bunal civil  de  Cîognac 
Il  mourut  en  1805,  retiré  à  Sarlat  (Dordogne). 

BORNERT. 

1789.  Instituteur  à  Strasbourg. 

1792.  Membre  au  club  des  jacobins. 

1798.  U  dénonce,au  Comité  de  surveillance  decette  Société, 
le  baron  de  Dampierre,  ex-capitaine  au  régiment  ci- 
devant  Artois,  qui  doit  loger  chez  l'imprimeur  Heitz, 
pi  oche  du  Temple-neuf. 

25  octobre  1794.  Il  est  exclu  de  la  Société  des  sans-cubUes. 

BOSSÉNIUS  (Ghrëhen-Geoffroi). 

11  juillet  1789.  Notaire  royal  à  Strasbourg. 

1793.  Membre  du  club  des  jacobins. 

80  janvier  1794.  Secrétaire-greffler-ac^oint  provisoire  du  Con 

seil-général  de  la  municipalité  de  Strasbourg. 
23  avril  — .  Remplacé  par  Duron. 
25  octobre  — .  11  ne  fait  plus  partie  des  jacobins. 
20  avrU  1818.  U  céda  son  étude  à  M"  Hickel. 

•  BOURdER  (La  citoyeune), 
de  Stnisbourg. 
14  décembre  1798.  Le  Comité  de  surveillance  et  de  sûreté 
générale  du  Bas-Rhiu  lui  fait  payer  150  Uvres  pour 

dénonciations. 

BOURGIGNON  (Jacques). 
1769.  Né  à  Metz. 

1789.  Musicien  au  5*  régiment  d'artillerie  à  Strasbourg. 


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LBB  HOmiBB  DB  LA  BfiVOLUTKIN 


5él 


Mai  1790.  Agé  de  21  ans,  il  est  reçu  membre  de  la  Société 
des  amis  de  la  Constitution  au  Miroir. 

7  février  1792.  Il  passe  aux  jacobins. 

21  juillet  1794.  Le  comité  de  surveillance  de  la  commune  le 
propose  pour  compléter  son  Comité,  réduit  à  six 
membres,  au  lieu  de  douze  quMl  était  en  principe. 

25  octobre  — .  Il  est  encore  inscrit  aux  jacobins. 

fiOUBIOT  (François). 
1764.  NéàFavemay. 

Juin  1792.  Militaire  en  garnison  à  Strasbourg,  quand  il  fut 

reçu  au  club  des  jacobins. 

25  octobre  1794.  Il  y  ligure  encore. 

BOUTEILLE. 

1792.  Membre  de  la  Société  des  jacobins. 

26  novembre  1793.  Secrétaire-adjoint  de  Hermann,  commis  - 

saire  du  Comité  de  sûreté  générale  duBas-Hhin  pour 
la  levée  de  Timpôt  forcé  et  des  taxes  révolutionnaires 
dans  les  communes  du  département;  il  certifie  que 
Gerst,  dePfafifenho£fen,  agent  nommé  par  E  Schnei- 
der, a  perçu   113,973  Uvres, 

sur  lesquelles  il  a  versé  au  payeur 

Blanchot   108,677  » 

n  reste  pour  frais  et  dépenses  de 
cinquante-sept  hommes,  tant  à  pied 
qu'à  cheval,  pendant  dix-neuf  jours  . .     5,296  livres. 
3  septembre  1791.  Il  dresse  le  compte  de  Jacques  Vix,  de 
Dossenheim,  collecteur,  de  Daniel  Stamm,  qui  a  en- 
caissé  27,619  livres 

et  versé  à  Blanchot  que   26,559  » 

I  Différence  en  moins   1090  livres 

BOY  (Adrien). 

1764.  Né  à  Ghamplitte. 

Avant  1789.  Il  y  était  chirui'gien. 


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5tô  BBVUS  d'alsacs 

1792.  Devenu  chirurgien  en  chef  de  Tarmée  du  Rhin,  il  est 
reçu  membre  de  la  Société  des  jacobins. 

31  juillet  — .  En  cette  qualité,  il  informe  l'imprimeur  Treut- 
tel  que  c'est  cette  Société  qui  s'est  chargée,  par  amitié 
pour  Laveaux,  de  rédiger  le  Courrier  de  Strashourg. 
C'est  à  Mainoni  qu'il  devra  envoyer  toutes  les  pièces. 
La  Société  exige  o[ae  rien  ne  soit  inséré  dans  ce  jour- 
nal, sans  avoir  passé  sous  ses  yeux,  et  qu'il  ne  se 
permette  jamais  de  retrancher  un  seul  mot  des  arti- 
cles à  imprimer,  etc. 
octobre  1793.  Proposé  pour  foire  partie  d'un  Gionaeil 
rédamé  par  les  représentants  du  peuple,  mais  auquel 
on  n^a  pas  donné  suite. 

21  octobre  ~.  DMne  commission  qui  aura  à  nommer  vingt- 

etrun  autres  citoyens,  lesquels  auront  à  composer  les 
trois  corps  administratilà  révolutionnaires  du  Bas- 
Rhin. 

20  novembre  — .  Jour  de  la  féte  de  la  Raison,  célébrée  pour 
la  première  fois  dans  la  cathédrale  de  Strasbourg,  il 
prononce  un  petit  discours  démocratique,  portant 
pour  devise  : 

Point  (Je  '^viia  aux  fripons,  aux  aristocrates,  aux  iiilriganiset 
aux  modérés.  S'ils  sont  connus,  la  fille  de  GnUtotta  teur  leod  te 
braSr  nous  le  demandons,  nous  le  voulons. 

22  novembre— .  Avec  vfaigt-neuf  autres  jacobins,  il  demande 

à  Saint-Just  et  Lebas  la  suppression  de  la  permanenœ 
des  douze  sections  de  la  ville,  et  Tépurement  des 
comités  de  surveillance  d'après  la  censure  des  sans* 
culottes. 

26  janvier  1794.  Aux  jacobins,  il  demande  au  président  poui^ 
quoi  il  a  lu  la  lettre  du  sans  culotte  Massé  avec  tant 
de  nonchalance,  tout  connne  si  ce  frère  ne  méritait 
pas  un  pou  plus  d'énergie 

18  février  -.  Au  temple  de  la  Haison,  il  lient  un  nouveau 
discours,  se  terminant  ainsi  : 

J'aime  mieux  qiii>  Ton  iruilloiinc  dix  mille  aristocrates,  dU 
mille  si  élérals,  que  de  voir  périr  un  bon,  un  vertueux  républi- 
cain, etc. 


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LES  HOinOBB  DB  LL  BftTOUJTIOlI  648 

11  mars  1791.  Membre  d'une  commission  qui  doit  suivre  la 

piste  d'une  conspiration,  à  la  tète  de  laquelle  doit  être 
Euloge  Schneider,  et  dont  la  perle  des  ligOHS  dd  Wis- 
sembourpf  a  peut-être  été  une  suite. 

12  mars  — .  Au  club,  il  lit  un  projet  d'adresse  à  la  Cionven- 

tion  nationale,  portant  : 

L'aristocratie  est  expirante;  elle  n'est  plus  à  craindre;  i'intri- 
goe,  rnmbition,  riromoralité,  la  corruption;  voilà  les  ennemis 
rciloulables  de  la  pairie,  etc..  Il  faut  les  surveiller. 

Nous  ne  connaissons  de  pouvoir  que  celui  du  peuple  et  le  vôtre, 

etc. 

liraves  montajînards,  mcmbivs  du  salul  public,  fiai»pe7.  les  intri- 
gants, les  monarchistes  cl  les  ambitieux,  parlez  cl  tous  les  enne- 
mte  de  la  lilwrté  seront  anéantis. 

Cette  adresse  est  vivement  api)laudie  par  le  ser- 
ment «  à  la  terreur  des  ambitieux  et  des  intrigants.  > 

BRiËNDLÉ  (Sébastien). 

1790.  Expéditionnaire  au  bnreaa  de  comptabilité  du  district 
de  Haguenau. 

Janvier  1791.  Secrétaire  du  district  de  Strasbourg,  il  est  reçu 
membre  de  la  Société  des  amis  de  la  Constitution. 

7  février  1792.  Il  passe  aux  jacobins. 

5  décembre  1793.  Secrétaire  du  Comité  de  sûreté  frénérale 
du  Bas-Rliin,  il  expédie  l'arrêté  de  ce  comité,  qui  en- 
joint au  directeur  do  la  poste  de  ne  plus  ouvrir  les 
lettres  arrivant  à  Strasbourn^,  (ju'on  présence  des 
membres  de  la  propagande,  de  Jung  et  de  Vilvote  du 
Comité. 

8  décembre      Le  même  Comité  le  charge  de  prendre  des 

renseignements  sur  la  fortune  des  jardiniers  des 
faubourgs. 

15  décembre—,  n  expédie  Parrété  du  môme  Comité,  por- 
tant que  moyennant  le  don  de  8000  francs  offert  par 
George  Méder,  lénnier  de  la  censé  Altbronn,  il  sera 
mis  en  liberté. 

S5  décembre  ^.  Il  lai  est  accordé  1800  livres,  savoir  : 


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BSVUB  D'AUa&CB 

!•  300  livres  pour  traitement; 
2»  300  livres  pour  gratitication; 

1900  livres  pour  voyage  à  Paris  avec  Dopet. 

a  janvier  1794.  n  signe  les  interrogatoires  de  Schneider, 
Taffin.  Clavel,  Anstett  et  Nestlin.  Il  était  alors  secré- 
taire du  Comité  de  sûreté  générale  de  la  commune. 

28 janvier-.  Administrateur  du  Directoire  du  district  de 
Strasbourg.  U  ordonne  la  levée  des  sceUés  sur  les 
caves  des  riches  et  le  transport  des  vins  dans  celle  de 
rhôtel  des  Deux-Ponts,  sous  la  surveillance  de  ^ 
municipalité  et  de  douze  braves  sansHîulottes  nommés 

par  la  Société  populaure.  ^  ^  a 

6  février      Président  du  Ctonseil  général  du  dteWct  de 
Strasbourg,  il  dénonce  au  représentant  BwUy  un 

projet  de  noyades  :  ,    ^  .^^ 

Au  mois  de  décembre  1793.  étant  secrétolwHM^oint  du  dismd 
de  Strasbourg,  je  fils  requis  par  un  nommé  Claner,       ;  ^ 
eette  administration,  de  remplir  provisoiremeui  la  [dace  dt  s 
taire  d'un  soi-disant  Comité  de  sftrelé  t;énérale  eiab l.  par  Sa>n^ 
Justet  Lebas  dans  ce  département.  J'ai  exercé  cette  onction  pe^ 
dant  quinze  jours.  Dièche,  {général  commandant  la  Pl^ce, Jin*™ 
malin  au  Comité,  j'entendis  parler  de  bateaux. 
usage  on  les  destinait;  lorsqu'on  s'apperçut  que  Je  P««MS 
ratiention  au  discours  qui  se  tenait,  on  fit  silence  en  r^opman- 
dantàDiècbede  feite  son  rapport  par  , 
soir;  en  effet,  le  soir  arrive  une  lettre  de  Diècbe,  elle  ne  fu  i 
hautement  lue;  je  ne  Tal  jamais  eu  entre  les  nia.ns  e   l  ui 
seulement  arrêté  que  le  compte  qu'avait  ren.lu  D.echc,  elat  j^ 
ment  aux  bateaux,  serait  renvoyé  ù  qui  de  droU.  i  lus  que 
mettait  de  soins  à  me  caclier  celte  affaire,  plus  que  je 
découvrir  le  secret.  Je  demandai  le  lendemain  à  iWMnU  mem»^^^^ 
du  dit  Comité  (aujourd'hui  chef  de  brigade  à  l'armée  du  Rmn , 
ce  que  c^élalt  donc  que  ces  bateaux  ;  apprends»  me  dit-i , 
représentami  qui  sont  ici.  veulent  sacrifier  6000  c.^>en.  de 
Strasbourg;  mate  ceU n'aura  certainement  pas  . 
ment  veut-on  s'y  prendre,  continuai-je?  On  veut,  reprit  Marnons 
commander  le  nombre  en  «luestion  à  poste  flxe;  on  ^^^^T^ 
générale,  toute  la  garde  nationale  serait  sous  les  ^'"'"^J'^fg^ii 
désii;nés  seulement  marcheraient  vers  le  Rhin,  on         .  . 
acroire  qu'il  y  aurait  une  expédition  sur  KeW,  quaml  ^^^^^ 
embarqués  et  éloignés  du  bord,  on  tirerait  de  nos  nw"» 


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LES  HOMMES  DE  Là.  BÉVOLUTION 


545 


quelques  coups  do  canon  sur  la  rive  paiichn  opposée,  pour  enga- 
ger reniiemi  au  cr»mlial.  cl  ;i  mitraille  sur  les  bateaux  ;  de  eette 
manière  ceux-ci  seraient  entre  deux  feux  et  ne  pourront  échapper 
k  la  Duni;  étant  à  présent  dans  le  secret,  Moinoni  me  dit  que,  dès 
que  ce  cruel  projet  serait  arrêté,  il  m'en  donnerait  avis,  pour  que 
nous  deux  en  instruisions  nos  concitoyens;  mais  lieureusement 
les  choses  en  sont  restées  là!  Voilà,  citoyen,  ce  que  Je  sais  des 
bateaux;  puisse  celte  déclaration  désiller  les  yeux  de  quelques 
individus,  «[ui  ne  veulent  pas  croire  aux  maltieurs  qui  ont  acca- 
blé notre  commune. 

23  avril  17d4.  Président  du  Directoire  du  district  de  Stras- 
bourg. 

2  août  —.Administrateur  du  Directoire  du  district  de  Stras- 
bourg, il  signe  une  délibération  motivée  par  les 
événements  qui  viennent  d'avoir  lieu  à  Paris»  assu- 
rant les  Alsaciens  que  toutes  les  mesures  énergiques 
sont  prises  pour  maintenir  la  tranquillité  publique  et 
empêcher  les  malveillants  de  lever  une  téte  insolente. 

U  est  chargé  de  remettre  cette  délibération  au 
représentant  Duroy  présent  à  Strasbourg. 

25  octobre  — .  Il  n'est  plus  aux  jacobins. 

17  janvier  1795.  Bailly  le  nomme  du  Conseil  général  deTad- 
ministration  du  district  de  Strasbourg. 

1795  à  1807.  Notaire  à  Marlenlieim  avec  cautionnement  de 
400  francs. 

BRAMAEBAS. 

Un  des  quatre-vingt-dix  de  la  propagande  révolutionnaire, 
trempé  au  fer  chaud  du  père  Duchesne,  caserné  à 
Panden  collège  des  jésuites  à  raison  de  15  livres  par 
jour. 

Octobre  1793.  Dans  une  des  séances  publiques  des  jacobins, 

il  qualifie  les  habitants  du  Bas-Rhin  de  traîtres,  ven- 
dus à  l  Autiiche.  Il  faut  les  transporter  dans  l'inté- 
rieur du  pays  et  conûsquer  leurs  biens. 

BRAS  Dm 

1793.  Cailrargien-dentiste  à  Strasbourg. 
23  avril  1794.  Membre  du  club  des  jacobins,  il  est  élu  nota- 

85 


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546 


RBVUB  D*ALSàGB 


ble  du  Conseil  général  de  la  commune,  sous  riu- 
fluence  de  Monet. 

2  août  1794.  Signataire  de  l'adresse  de  la  municipalité  de 
Strasbourg  à  la  C!onvention  nationale,  lors  de  la 
découverte  de  la  conspiration  contre  elie,  par  Robes- 
pierre, Gouthon,  Saink^Just,  Lebas  et  autres. 

25  octobre  — .  Il  avait  quitté  la  Société  des  jacobins. 

BRAUN  (Jean-Daniel),  aîné. 
1730.  Né  à  Strasbourg,  où  il  était  négociant  commission- 
naire-ezpéditeur. 

1789.  n  propose  de  former  un  Comité  permanent,  composé 
de  deux  échevins  de  chaque  tribu,  renouvelable 
par  année,  et  ayant  mission  de  surveillance  sur  le 
magistrat. 

Février  1792.  Membre  des  jacobins  au  Miroir. 

31  octobre  179;î.  Imposé  par  Saint- Just  et  Lebas  à  30,000 

livres  qu'il  paie  les  5  et  7  suivant. 
25  octobre  1794.  Encore  au  club  des  jacobins. 

BRÂUNWÂLD  (Louis). 

Avant  1789.  Teintui'ier  à  Strasbourg. 

1792.  Président  du  Comité  central  de  la  Société  des  amis 
de  la  Constitution  ou  dos  Feuillants  au  Miroir,  qu'il 
ne  quitta  qu'à  sa  dissolution,  le  27  juin  1792  à  i" Audi- 
toire, pour  passer  aux  jacobins. 

21  janvier  1793.  Nommé  notable  par  les  représentants  Cou- 
turier, Rulil  et  Dentzel. 

8  octobre,  5  novembre  1793,  30  janvier  et  23  avril  1794.  Les 
jacobins  le  maintiennent  notable. 

25  octobre  1794.  il  est  encore  inscrit  au  club. 

BRËGK. 

1790.  Entrepreneur  des  fortifications  à  Landau. 
Août  179B.  Il  habite  Strasbourg. 

octobre    Saint-Just  et  Lebas  rimposent  dans  rempront 
de  neuf  millions  à  30,000  livres;  il  réclame. 


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LES  HOmiES  DE  LA.  BÊVOLVTION 


547 


23  novembre  1793.  Membre  da  club  des  jacobins,  avec  vingt- 
neuf  autres  sans  culottes,  il  demande  à  SaintJust 
et  Lebas  Tépurement  des  comités  de  surveillance, 
entachés  d^aristocratie  et  de  modérantisme.  H  leur 
demande  en  outre  la  suppression  de  la  permanence 
des  douze  sections  de  la  commune. 

25  novembre  — .  Lui-même  est  en  cause  devant  les  jaco- 
bins, qui  veulent  le  radier  de  la  Société,  comme  fils 
d'émigré  et  n'ayant  jamais  donné  des  preuves  d'un 
civisme  pur  et  énergique.  Il  inont(?  à  la  tribune  pour 
se  disculper  des  attaques,  et  déclare  que  son  père  est 
actuellement  à  Neuf-Brisach,  donc  en  Alsace,  qu'il 
est  surpris  que,  depuis  trois  mois  qu'il  est  à  Stras^ 
bourg,  on  porte  un  jugement  aussi  faux  sur  ses  sen- 
timents. C'est  lui  qui  est  le  fondateur  de  la  Société 
populaire  de  Landau,  le  premier  qui  monta  la  garde 
aux  portes  de  cette  petite  place  frontière,  qui  Ta 
député,  en  1790,  aux  fédérations  de  Paris  et  de  Stras- 
bourg. Au  10  août  dernier,  il  fut  chargé  d'aller  pré- 
senter le  vœu  de  son  pays  pour  Tacceptation  de  la 
Constitution  républicaine,  et  c'est  au  retour  de  ce 
voyage  que,  trouvant  Landau  bloqué,  il  8*est  retiré  à 
Strasbourg,  ce  qui  explique  sa  présence  dans  cette 
ville. 

Les  jacobins  lui  reprochent  d'avoir  correspondu 
avec  un  prêtre  émigré;  pour  la  justification,  il  oppose 
celle  quMl  a  reçue  des  représentants  Saint-Just  et 
Lebas,  mais  on  lui  objecte  que  ces  citoyens,  mal 
informés  ou  trompés,  ont  pu  être  induits  en  erreur. 
KnanitA  u  doit  dire  les  motifs  de  son  arrestation  et 
de  son  élargissement  : 

Il  y  a  deoxmois,  que  je  fis  passer  à  un  prêtre  ml^ré  une 
somme  d'argent,  mais  ce  caloUn  n'étoat  pas  inscrit  sur  la  liste 
des  émigrés,  on  m'a  absout. 

Toutes  ces  explications  n'ayant  point  para  suffi- 
santes, sa  radiation  des  jacobins  et  maintenue. 


548  BEvm:  d'alsaob 

Le  comité  de  surveillance  et  de  sûreté  générale  du 
Bas-Rhin  maintient  les  30,000  Uvres  de  tax»\ 
7  décembre  1793.  Le  même  Comité  en  arrête  le  paiement 
sans  délai. 

16  et  18  décembre  — .  n  règle  cette  somme. 

10  mai  1794.  Monet,  dans  un  discours  à  la  Société  des  jaco- 
bins, sur  la  conjuration  de  rétranger  dans  le  Bas- 
Rhin,  approuve  la  proscription  de  son  sein  de  Bredt 
et  autres. 

1804.  Agent  correspondant  des  transports  militaires  de  la 

5*  division  à  Stradaourg. 

BREMSIN6ER  (ktœiBÈ). 

Avant  1780.  Homme  do  loi  à  Strasbourg. 

31  mars  1790.  L\m  des  deux  secrétaires  de  la  Société  de 
correspondance  nationale  de  Strasbourg,  formée  pour 
la  fête  de  la  fédération  tenue  sur  la  plaine  des  bou- 
chers le  5  avril  suivant. 

5  décembre  1793.  Au  comité  de  surveillance  et  de  sûreté 
générale  du  Bas-Rhin,  le  président  Mainoni  dépose 
sur  le  bureau  une  loltre  adressée  au  maire  Monet,  par 
Bremsinger,  et  datée  de  Metz  le  2  dit,  à  Tépoque  où 
pinceurs  patriotes  strasbourgeois  s'y  trouvaient  em- 
prisonnés. 

2  septembre  1794  au  12  septembre  1797.  Notaire  à  Stras- 
bourg. 

1798  à  1799.  Elu  juge  au  tribunal  civil  de  Strasbourg. 
ÎW  août  1800  au  13  janvier  1811.  Ayant  cessé  ces  foucUons, 
U  ireprit  son  notariat 

BRENDËL  (François-Antoine). 
4  octobre  1736.  Né  à  Lahr  (Bade),  û  passa  son  enfance  à 

Memmelshoflfen,  viUage  au  canton  de  SoulU-sous- 

forôts,  où  ses  parents  avaient  un  petit  commerce. 
1789.  Depuis  vingt  ans  docteur  en  théologie  et  professeur 

de  droit  canon  à  PUniversitô  éitoîopale  ouStounaire 

catholique  de  Strasbourg. 


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LES  HOMMES  DB  hk  BÉTOLUTION 


549 


8  février  et  11  novembre  1790.  Elu  notable  du  Conseil  mu- 
nicipal de  Strasbourg. 

dO  février  1791.  n  prête  le  serment  civique  dans  la  cathé- 
drale et  comme  on  lui  adressait  des  reproches  à  ce 
sujet,  il  disait  à  qui  voulait  Tentendre,  que  ce  serment 
n'avait  rien  de  contraire  à  ses  convictions  et  au  dogme 
de  la  religion  catholique  apostolique  et  romaine, 
qu'au  surplus  il  l'avait  d^jà  prêté  comme  conseiller 
municipal,  et  qu'il  était  tout  prêt  à  le  renouveler 
comme  prêtre,  si  lescirconstuncosroxigeaient,  consi- 
dérant Tori^anisation  civile  du  clergé  français  comme 
anti-canûni([uo  mais  non  anti-catholique. 

Après  la  suppression  de  l'ancien  évèchô  de  France, 
les  évêquos  devant  être  élus  d'après  la  loi  du  24  août 
1790  par  les  assemblées  électorales  des  départements, 
Brendel  réunit  les  suffrages  et  fut  proclamé  évèque 
du  Bas^Bhin  le  6  mars  suivant 

On  assure  que  des  électeurs  protestants  prirent 
part  au  vote  1  C'était  assez  pour  le  décrier  et  le  perdre 
dans  Topinion  publique.  Avant  son  entrée  en  fonc- 
tions, il  fut  qualifié  d*évôque  luthérien,  même  mena  cé. 
Les  commissaires  du  roi,  Dumas  Foissey  et  Hérault, 
alors  en  mission  à  Strasbourg,  se  virent  obligés  de  le 
protéger  et  de  Tabriterdans  leur  hôtel  Dans  la  cathé- 
drale il  fut  insulté  par  Jteglé,  curé  de  Saint-Laurent, 
au  moment  où  il  allait  officier  pour  la  première  fois 
comme  évéque  constitutionnel  assermenté. 

12 mars—.  Le  cardinal  de  Rohan,  le  Grand-Chapitre  et 
autres  fonctionnaires  ecclésiastiques  protestèrent 
contre  son  élection  et  déclarèrent  que,  par  son  accep- 
tation, il  se  rendait  coupable  auteur  d'un  schisme. 

13  mars—.  Consacré  à  Paris  évêfiuo  du  Bas-Rhin. 

25  mars  — .  Installé  dans  la  cathédrale  de  Strasbourg  avec 
ses  douze  vicaires  apostoliques. 

1"  mai  — .  La  Société  populaire  de  Saverne  Tassure  du  res- 
pect, de  Tobéissanco  et  du  dévouement  de  tous  les 
citoyens  (jui  la  compose. 


550  BSVUE  D'ALSiLOB 


13  mai  1791.  Il  répond  : 

Les  amts  d*iiiie  Constitiuion  qui  sMdenlifle  si  parfaitement  avec 
resprit  de  noire  sainte  roli^-ion,  seront  toujours,  aux  veux  d'un 
pasteur  citovon,  la  partie  la  plus  précieuse  de  ses  ouailles,  a 
raison  des  principes  religieux  et  à  la  fois  civiques,  dont  ils  (ont 
professiou  de  donner  chaque  jour  des  leçons  publiques  et  Texe»- 

Pidële  à  ce  double  devoir  que  tous  tous  êtes  ptrtieBliènnait 
imposés,  frères  et  concitoyeos.  votre  Société  naissante  ménte  de 
Êxerles  regards  de  te  pairie  sous  un  autre  aspect  encore.  Telle 
une  terre  robuste  n'attend  pour  réparer  le  relard  de  sa  force 
végétatrice  que  l'action  d'un  soleil  plus  ardent,  telles  vos  âmes . 
généreuses,  déjà  patriotiques  avant  la  réunion,  n'ont  ^^f^ 
que  de  la  chaleur  résulUnl  d'un  foyer  commun,  pour  s'éUocw 
avec  plus  d  énergie  dans  la  bonne  vole,  et  pour  atteindre»  piesip» 
dès  votre  début,  vos  sœnn  aînées. 

ie  regarderai  toujoure  comme  une  obligation  des  plu^  s  u  r^s 
et  en  même  temps  des  plus  chères  à  mon  cœur,  d'alimeiiier  en 
vous,  par  la  double  relation  de  pasteur  et  de  frère,  cette  flamme 
épurée  de  civisme,  qui  vous  donne  entiu  une  patrie,  qui  vous  la 
fait  aimer  et  qui  est  sans  contredit  le  seul  droit  au  litre  glorlMX 
de  citoyen  français;  ce  qui  doit  vous  engager,  frtws  «JJ»^ 
toyens.  à  marcher  d'un  pas  fermeel  soutenu  ws  le  but  gieneia 
que  votre  patriotisme  se  propose,  c'est  le  spectacle  des  succè 
avec  lesquels  nos  frères  des  autres  départements  se  sont  déjà 
montrés  dans  la  même  carrière.  Voyez  comme  le  ténébreux  lana- 
tisme  a  déjà  fui  à  l'aspect  du  flambeau  lumineux  qu'ils  «"^  P|^"* 
devant  eux  et  présente  à  de^  citoyens  abusi-s  par  rmgratitudew 
la  mauvaise  foi.  Vovez  l'avide  hypocrisie  se  sentant 
chaque  jour  un  coin  de  son  voile  perttde,  être  obligée  de  WO"" 
de  porte  en  porte.  Il  lui  reste  encore.  Il  est  vrai,  un  dennw 
retrancbement,  mais  vous  nMves  pas  hésité  d*en  faire  les  app^- 
cbes.  vous  avex  eu  le  bon  esprit  de  le  reconnaître,  et  déjà  une 
part  vous  eslassurte  à  Thonneur  de  le  forcer  avec  les  seules  armes 
de  l'instruction  que  vous  propagerez  et  de  votre  sou^nssion  ao» 
lois  qu'il  ne  faut  que  connaître  pour  les  admirer,  pour  les 

Vos  suiïra-es,  frères  et  concitoyens,  m'iionorent,  ^^J^^V 
gérai  rien  pour  les  justifier.  Vos  sentiments  mon  é^  M"  " 
nature  à  adoucir  les  amertumes  dont  on  tente  de  hérisser  mo 
apostobt  ;  puissé-Je  m'en  rendre  digne  ainsi  que  du  uire  œ 
votre  ami,  frères  et  concitoyens  ! 
11  juin  im  II  lance  sa  lettre  pastorale, 

prières  publiques  dans  toutes  les  églises  du  dlocôse 


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LES  HOUMBS  DE  LA  RÉVOLTITIOM 


551 


pour  la  prospérité  et  les  succès  des  armes  de  la 
nation. 

3  septembre  1793.  A  Haguenau,  à  Têlection  des  députés  du 

Bas-Bliin  à  la  Convention  nationale,  il  est  élu  prési- 
dent du  bureau;  son  concurrent  était  Thomassin. 

1793.  La  Société  des  jacobins  demande  sa  mise  en  arresta- 
tion avec  onze  autres  prêtres  des  deux  cultes. 

20  novembre  1793.  Il  dépose  ses  lettres  de  prêtrise  sur  l'au- 
tel de  la  i)atrie  dans  le  temple  de  la  Raison,  pour  y 
être  brûlées. 

Tout  culte  religieux  public  oyant  cessé  en  France 
en  1794,  ce  nouvel  évôijue  cessa  ses  fonctions  pour 
ne  plus  les  reprendre.  11  n"y  eut  plus  d'évèques  à 
Strasbourg  qu'après  le  concordat  du  15  juillet  1801. 

4  juin  1802.  L'abbé  J.-P.  Sa  urine  le  remplaça;  comme  évéque 

constitutionnel,  il  n'a  jamais  été  reconnu  par  le  pape. 
1798.  Chef  du  bureau  des  archives  du  département  du  Bas- 
Rhin,  où  il  resta  jusqu'à  sa  mort,  le  22  mai  1800.  Un 
cort^  de  plus  de  quatre  cents  citoyens  accompa- 
gnait le  sarcophage;  l'administration  centrale  était  en 
téte,  et  toutes  les  religions  y  étaient  représentées. 

Le  citoyen  Bottin  tint  un  discours,  qui  fut  imprimé 
dans  les  deux  langues. 

BREVET  (François). 
1763.  Né  à  Monchant,  district  d'Etampes. 
1788.  Il  y  était  étudiant. 

8  septembre  1794.  Nommé  commissaire  des  guerres  à  Stras- 
bourg, il  est  reçu  membre  des  jacobins,  et  quitte  la 
Société  quelque  temps  après  pour  aller  à  Farmée. 

Etienne  Barth. 

(la,  suite  à  la  prochaine  liv raison.  J 


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BULLETIN  BIBLIOGRAPHIQUE 


BlbltothètiiM  de  M.  SohwelgluBnfl«r,  archiviste-paléographe. 
Lingoistiqae  —  Origine  des  langues  —  Roman  et  Provençal  -  Patois 
—  Argot  —  Tronbadonra  —  Tronvères  —  Poêles  des  XV,  XVI*  et 
Xm*  siècles— M|slères  —  Moralités  —  Farces  —  Soties  —  Romans 
de  chevalerie  —  Contes  —  Nouvelles  —  Facéties  —  Chroniques  - 
Histoire  de  Paris  —  Histoire  littéraire  —  Paléographie  -  Bibliogra- 
phie -  Histoire  de  l'imprimerie  —  Bibliothèque  nationale  et  biblio- 
thèques spéciales.  —  Paris,  imp.  de  Ch.  Noblet,  1878. 1  vol-  gr-«n  S^ 
de  vm-S(H  pages. 

Le  catalogue  de  cette  bibliothèque  a  été  dressé  par  M.  Ch. 
Mehl,  ami  et  émule  (V Alfred  Schweighœuser.  11  est  précédé 
d'une  note  introductive  à  laquelle  nous  ferons  un  emprunt 
discret  pour  donner  au  lecteur,  qui  n'a  point  connu  Schweig- 
IwBUser,  une  idée  de  l'estime  et  de  l'affection  qu'avaient  pour 
cette  intelligence  et  ce  caractère  d'éUte  ceux  qui  ont  eu  la 
bonne  fortune  de  le  connaître  et  de  le  fréquenter.  Après  avoir 
dit  sa  pensée  au  s^Jet  des  collections  qui  ont  été  livrées  aux 
enchères  depuis  vingt  ans,  M.  MéU  ajoute  qu'on  ne  trouvera 
presque  jamais  dans  ceUe  de  son  ami  «  le  goût  d'un  homn^ 
«  cherchant  &  s'entourer  de  ces  œuvres  historiques  ou  lit»- 


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BULLETIN  BIBLIOGBAPHIQUB 


55a 


«  raires  appelées  à  le  seconder  dans  ses  études  et  ses  travaux, 
«et  destinées, suivant  l'heureuse  image  d'un  délicat,  ««  à 
a«  nous  accompagner  dans  notre  vie,  pour  ensuite  nous  servir 
««  de  témoignage  après  notre  mort 

Les  livres,  ajoute-tril,  qui  composaient  la  bibliothèque  de 
notre  regretté  ami,  ne  font  point  éprouver  ce  sentiment  Ils 
ont  été  réunis  par  un  bibliophile  aussi  érudit,  aussi  savant 
qu'il  était  modeste,  et  tous,  si  Ton  en  excepte  quelques-uns 
qui  ont  été  offerts  par  des  amis,  se  rapportent  aux  études 
qu'il  avait  tant  affectionnée?.  M.  Mehl  pense  que,  de  long- 
temps,  il  n'a  paru  en  vente  publique  une  collection  de  livres 
aussi  complète^  aussi  bien  conditionnée,  aussi  parfaite  dans 
sa  spécialité  que  celle  dont  il  a  accepté  la  douloureuse  mis- 
sion de  publier  le  catalogue. 

Ce  catalogue  renferme  1732  numéros  des  ouvrages  se  ratta- 
chant aux  origines  de  la  langue  et  à  l'histoire  littéraire  de 
France.  M.  Mehl  a  ajouté  à  chacun  de  ces  numéros  les  indi- 
cations bibliographiques  les  plus  précises;  il  a  ainsi  fait  de 
sou  travail  un  modèle  qui  no  peut  être  imité  que  par  un 
homme  instruit  et  un  bibliophile  éclairé.  C'est  un  monument 
modeste  mais  solide,  qui  donne  à  la  bibliothèque  de  Schweig- 
hœuserune  des  meilleures  places  dans  les  annales  philolo- 
giques et  Uttéraires  de  l'Alsace,  à  laquelle  Schweighccu.er 
appartenait  par  la  naissance,  par  l'éducation  et  par  la  fidélité 
h  toutes  les  amitiés  qull  y  comptait. 

Le  plus  ancien  de  ses  amis  d'enfance,  M.  Auguste  Himly, 
a  prononcé  sur  sa  tombe  quelques  mots  auxquels  s'associent 
tous  ceux  qui  ont  été  à  môme  de  bien  connaître  l'ami  défunt. 
«  Alfred  Schweighœuser,  »  art-il  dit  en  terminant,  «  laisse 
«  gravé,  au  plus  profond  de  nos  cœurs,  le  souvenir  d'une  came 
•  loyale  et  sincère  entre  toutes,  —  d'une  âme  à,  toquelle  je  dis 
«  avec  espoir  et  confiance  :  Au  revoir  !  » 

Recherches  sur  la  consillufion  de  la  comiDlinB  à  Colmar.  —  Nou- 
velle édition  augtnerilée  des  Hstes  nominaUves  des  prévôts,  bourg- 
mestres et  obrisn.estres  de  Colmar,  par  X.  MoasiiAHH,  archiviste  de 
la  ville.  -  Colmar.  imp.  de  V  J.-B.  Joog,  187a  Ia-8*  de  175  p. 


554  REVUE  d'alsàcb 

• 

M.  MoBsmaim  continue  à  s'occuper,  avec  une  ardeur  et  une 
patience  dignes  d*encouragements,  de  la  Constitution  et  du 
droit  municipal  de  Vancienne  yille  libre  dont  il  est  le  zélé 
archiviste.  En  d'autres  temps,  M.  Mossmann  avait  publié,  sur 
ce  siqet,  dans  le  BuUetin  de  Tune  de  nos  sociétés  savantes, 
une  première  étude  qui  fiit  remarquée.  Revenu  à  son  précieux 
dépôt,  il  reprend  ce  travail  en  sous-œuvre,  le  complète  au 
moyen  des  titres  qu'U  a  sous  la  main,  donne  souvent  le  texte 
de  CCS  titres  au  bas  des  pages,  commente  ou  éclaircit  cps 
textes  dans  le  cours  de  son  récit  Tel  est  en  peu  de  mots 
l'objet  de  l  intéressant  fascicule  que  nous  avons  le  plaisir  de 
signaler  aux  lecteurs  de  la  Rtu-iie. 

Si  ce  consciencieux  travail  n'est  pas  encore  rhistoirede 
Tune  des  plus  importantes  cités  qui  formèrent  l'ancienne 
décapole,  ou  i)eut  afrirmer,  sans  risquer  d'être  contredit,  qu'il 
en  renferme  les  matériaux  authentiques  les  plus  indispen- 
sables. 

On  ne  se  rend  généralement  pas  compte  du  labeur  auquel 
un  arcbiviste  est  condamné  pour  reconnaître  et  déchiffrer  des 
documents,  sans  lesquels  aucun  écrivain  ne  peut  jeter  quelque 
lumière  sur  l'histoire  d'une  viUe,  diine  province  ou  d'un 
£Ut  :  c^est  le  travail  le  plus  ingrat  et  d'ordinaire  le  plus  mal 
apprécié  par  cela  môme  qu'il  est  l'unique  source  de  la  scieuce 
historique.  Ce  que  M.  Mossmann  a  fait,  depuis  de  longues 
années,  à  titre  accidentel  pour  la  ville  de  Mulhouse,  il  le  fait 
en  ce  moment  pour  la  ville  de  Golmar,  h  titre  officiel,  et  c  est 
à  ses  heures  de  loisir  que  le  public  est  redevable  des  connais- 
sances spéciales  qu'il  jette  dans  la  circulation.  On  ne  peut 
que  Ten  féliciter  et  Ten  remercier. 

Le  travaflde  M.  Mossmann  a  d'ailleurs  un  mérite  autre 
que  celui  de  la  mise  en  lumière  de  textes  inédits.  Les  faits,  les 
événements  que  ces  textes  appuient,  sont  fortcompétemmwit 
rattachés  par  l  aut.nir  à  Thistoiro  générale  des  Etats  et 
Souverains  dont  la  ville  de  Colniar  dépendait  C'est  surtout  a 
ce  point  de  vue  que  la  lecture  du  fascicule  devient  instructive 
et  souvent  attrayante,  quoique  dépourvue  de  toute  Circon- 
stance anecdotique,  c'est-à-dire  que,  sans  s'écarter  des  règles 


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BULLETIN  BIBLIOGBAPHIQUB  556 

de  récole,  M.  Mossmann  sait  encore  tirer  de  son  propre  fond 
de  quoi  répondre  aux  exigences  d*un  public  éclairé. 

La  partie  qui  nous  a  le  plus  intéressé  se  compose  des  cha- 
pitres qui  se  rapportent  à  Thistoire  des  XV*  et  XVI*  siècles. 
A  rin?erse  de  ce  qui  se  passe  dans  la  plupart  des  provinces, 
les  auteurs  alsaciens  se  sont  surtout  attachés  aux  siècles  qui 
se  rapprochent  le  plus  de  nos  origines.  Le  second  moyen-âge 
a  eu  aussi  sa  part  dans  leurs  rocherches,  mais  celles-ci  se 
sont  circonscrites  aux  événements  ou  aux  éi>isotlcs  saillants, 
et  presque  tous  nos  écrivains  ont  négligé  de  mettre  au  jour 
les  textes  sur  lesquels  étaient  basés  leurs  récits.  C'est  à  peine 
si,  pour  riiistoiie  de  Colmar,  on  avait  quelques  points  de 
repère  certains.  'M.  Mossniann,  (\u\  aurait  pu  se  montrer 
moins  avare  des  textes  i)our  ci-tte  époque,  ne  laisse  pas  que 
de  combler  jusqu'à  un  certain  ])oint  la  lacune  dont  il  s*a,i;it, 
eu  incorporant  la  substance  des  i)ièces  qu'il  a  sous  la  main, 
dans  la  rédaction  des  chapitres  auxquels  nous  faisons  allusion. 

Un  appendice  excellent  termine  son  travail.  11  contient  la 
liste  des  Scbulthciss  (prévôts)  et  de  leurs  lieutenants  de  1220 
à  1521  ;  celle  des  bourgmestres  et  des  obrismestres  de  1296  à 
1781.  Voilà  de  précieux  documents  pour  la  future  histoire 
consulaire  du  chef-lieu  de  Fancien  département  du  Haut- 
Bhin. 

Aperçu  sur  l'histoire  politique  et  religieuse  de  l'Alsace, 

par  F.-J.-E.  SrrzMANN.  —  IJfilfort,  imp.  et  lib.  de  Pélol  fils,  1878. 
In-12  de  8i  pages.  —  i*rix  :  2  francs. 

Edité  dans  la  forme  des  petits  livres  destinés  aux  écoles, 
cet  aper(;u  peut,  avec  d*autres  du  môme  genre,  occuper  une 
place  à  la  suite  des  abrégés  de  Thistoire  d'Alsace  de  Strohel, 
du  chanoine  Hunckler,  de  Ragon  et  autres.  Ses  parties  histo- 
riques révèlent  des  efforts  pour  s'élever,  sans  y  parvenir,  à 
la  hauteur  dus  abrégés  dont  il  est  question.  Le  travail  de 
M.  Sitzmann  fait  un  peu  d'histoire  contemporaine,  dans  quel- 
ques pages  qui  lui  ont  valu  une  médaille  à  l'exposition  sco- 
laire du  territoire  de  BeU'ort  en  1870. 


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556  BBTDB  D*AL8A0B 

Soldat,  moine  et  maître  de  danse,  on  tncmoires  d'un  Alsacien 
duXVIIP  siècle,  par  RoD.  Reuss.  —  Strasbourg,  imp.  de  G.  Fisch- 
bacb,  1878.  In-12  de  46  pages. 

Ghannante  biographie  dont  il  suflira  de  reproduire  les  pre- 
mières lignes  pour  donner  au  lecteur  une  idée  du  sentiment 
qui  Ta  engendrée. 

fl  Les  législateurs  et  les  conquérants  fameux,  les  grsn& 
poètes  et  les  savants  de  génie  sont  assurés  de  Vimmortalité, 
de  cette  immortalité  relative  au  moins,  que  Thistoire  peut 
seule  garantir  aux  hommes,  et  qui,  trop  souvent,  s*efface  avec 
les  monuments  qui  devaient  en  perpétuer  le  souvenir.  S'ils 
ne  cèdent  pas  eux-mêmes  à  la  tentation  de  transmettre  aux 
siècles  futurs  le  récit  de  leurs  exploits,  de  leurs  inventions  et 
de  leurs  triomphes,  cent  plumes  adulatrices  en  retraceront  le 
tableau.  La  haine  elle-même  et  l'envie  contribueront  involon- 
tairement à  préserver  leurs  noms  de  Toubli,  eu  les  dénigrant 
dans  leurs  satires  et  leurs  pamphlets. 

«  Pendant  de  longs  siècles,  l'histoire  s'est  contentée  de  con- 
naître ainsi  la  vie  et  la  carrière  des  grands  et  des  puissants 
de  ce  monde,  dédaignant  la  foule  obscure  qui  ne  semblait 
créée  que  pour  féconder  les  sillons  par  la  sueur  de  ses  veilles 
et  fertiliser  de  ses  ossements  les  champs  de  bataille.  De  nos 
jours  cependant,  le  lent  mais  irrésistible  avènement  de  la 
démocratie  a  produit  un  changement  dans  l'esprit  des  histo- 
riens et  les  idées  du  puhlic.  On  a  compris  que  le  Uvre  de 
l'histoire  n'est  point  tout  entier  le  Uvre  des  £ois  et  que  l'étude 
des  classes  inférieures  et  moyennes  donne  en  définitive  un 
tableau  plus  exact  et  plus  fidèle  que  celle  de  quelques  indivi- 
dualités privilégiées,  vivant  en  dehors  deThumanité,  parce 
qu'elles  vivent  au-dessus  d'elle.  » 

Cest  dans  ces  dispositions  d'esprit  que  l'auteur  aborde 
l'esquisse  de  son  héros,  Jean-Balthasar  Schaeffer,  de  Ribeau- 
villé,  qui  fut  soldat,  moine  augustin  et  ensuite  mattre  de 
danse.  Le  récit  de  cette  existence  traversée  par  les  plus  tra- 
giques caprices  du  sort,  est  d  une  lecture  attrayante  et  en 
même  temps  instructive  par  le  tahleau  des  mOBUTS  et  des 
institutions  du  temps  oii  iSchœffer  vivait 


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BULLETIN  BIBHOQBAPHIQU& 


557 


Reiseschilderungen  und  natiirgeschlchtliche  Aufzeioh- 
nungen  von  i.  August  Michel.  —  Tableau  dcx  exrui\<ions  et  des 
travaux  scientifiques  dp.  L  Aug.  Michel,  avef.  ime  planche  représen- 
lanl  le  pavillon  du  glacier  de  l'Aar,  par  Alg.  Stœbkr.  —  Mulhouse, 
imp.  de  liriistlein  et  C",  1878.  Petit  ïnS"  de  267  pa-tjs. 

Ce  recueil  est  une  dette  du  cœur  que  M.  Auguste  Stœber  a 
voulu  payer  à  la  mémoire  de  son  collègue  et  de  son  ami, 
^r.  J.-A.  Michel.  L^édition  eu  langue  allemande  était  com- 
mandée par  la  nature  du  sujet;  il  s'agissait  de  réunir  en  un 
volume  les  travaux  et  les  écrits  du  défunt.  Or,  la  plupart  de 
ces  écrits,  qui  datent  de  longtemps,  étaient  en  langue  alle- 
mande et  M.  Aug.  Stœber  a  bien  fait  de  les  colliger  sans 
altération.  Précédemment  M.  Stœber,  sur  la  demande  de  la 
Société  industneOe,  avait  consacré  à  M.  Michel  une  notice 
nécrologique  dans  laquelle  il  a  mis  en  lumière  les  qualités 
que  tout  le  monde,  à  Mulhouse,  reconnaissait  à  l'homme  qui 
a  rendu  de  grands  services  à  l'enseignement  public  en  cette 
ville.  Aujourd'hui  il  achève  de  solder  ce  qui  était  dû  à 
l'homme  de  science  et  à  son  caractère.  M.  Michel  fut  brillam- 
ment apprécié  dans  le  monde  scientifique  :  «  Entomologiste 
passionné,  dit  M.  A.  Gerber-Bœrwart,  tous  les  moments  qu'U 
pouvait  dérober  à  ses  occupations  multiples,  étaient  consar 
crés  à  la  recherche  et  à  l'étude  de  tous  les  ordres  d'insectes, 
mais  plus  spécialement  des  lépidoptères  dont  il  avait  unefort 
belle  collection.  C'est  lui  qui,  à  Mulhouse,  a  le  plus  puissam- 
ment contribué  à  répandre  dans  la  jeunesse  le  gOÛtde  cette 
science  cliarmaiite....  Comme  collection  locale,  ceUe  de 
M.  Michel  a  une  grande  valeur,  car,  pendant  plus  de  quarante 
ans,  il  a  recueilli  un  nombre  considérable  d'espèces,  dont 
beaucoup  étaient  enUèremcnt  nouvelles  pour  la  faune  alsa- 
cienne. » 

A  ce  titre  et  k  beaucoup  d'autres  qu'il  serait  trop  long  d  c- 
numérer,  M.  Stœber  a  fait  une  œuvre  méritoire  de  consacrer 
à  la  mémoire  de  son  ami  le  recueil  que  nous  annonçons. 


ggg  BEVUE  D'ALBA^CE 

Colmererditschi  Komedi.  —  Comédies  en  allemand  colfflarieD, 
par  J.  Mangûld.  pâtissier.  —  Colmar,  inip.  de  V*  I.-B.liing,  1878. 
In-12  de  128  pages. 

Ce  petit  volume,  imprimé  avec  soin,  contient  Vœuvre  patrio- 
tique d'un  poète  dont  tous  les  produits  sont  forts  goûtés  àCol- 
mar.D'exeellentspfttés,  de  savoureuses  compositions  poétiques 
font  les  délices  des  concitoyens  de  M.  Mangold.  La  réputation 

des  pâtés  n'a  guère  franchi  les  limites  de  l'ancienne  ville 
libre,  tandis  que  celle  des  poésies  est  répandue  dans  toute  la 

province.  Quelques-unes  de  celles-ci  ont  même  eu  les  hon- 
neurs de  la  traduction  en  vers  français,  qui  ne  manquent  p^ 
non  plus  d'originalité.  On  a  bien  fait  de  ri^unir  en  un  petit 
livre  :  L'éloge  du  célihat,  les  trois  mariages  dans  la  vallée  i» 
halaù  et  le  boniieur  de  Jean  et  de  Margicerite  en  légitim 
mariage. 

Compte-rendu  des  travaux  de  la  Chambre  de  commerce  de  Colmar 
pour  l'année  l«77.  —  Colmar,  imp.  de  V  C.  Decker,  187B.lB-8*de 
60  pages. 

La  question  des  postes  pour  l'encaissement  des  effets  de 
commerce,  les  voies  navigables,  canaux  et  rivières,  les  che- 
mins de  fer,  les  douanes,  la  législation  commerciale  et  indu 
strielle,  l'administration  intérieure  et  afEaires  diverses  sont . 
les  questions  d'intérêt  public,  dont  la  ChanAre  de  commerce 
s'est  occupée  pendant  l'année  et  au  sujet  desquelles  son 
compte-rendu  donne  d'utiles  informations. 

Etat  de  régUse  d'Alsaoe  avant  la  RéTolution,  par  M.  Scai«w.<i 
caré  de  Saales,  officier  d'Académie.  —  1"  partie  :  te  diocèse  de  Stras- 
hoorg.  —  Colmar,  imp.  de  M  Hoffmann,  1877.  1  vol.  în-«*  de  XU- 
S03  pages.  Chea  Louis  Lorber,  libraire,  place  Nen?e,  8,  et  à  Stras- 
bourgs  chez  X.-H.  Uroni,  libraire,  84,  rue  des  Hallebardes. 

Le  clergé  alsacien  se  livre,  depuis  des  années  et  avec  une 
louable  ardeur,  &  l'étude  de  notre  histoire  locale.  M  le  curé 
de  Saales  est  un  de  ceux  qui,  de  prime^ut,  prend  une  bonne 
place  parmi  ses  devanciers. 


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BDLLETIN  BmUOO&APHIQUE 


559 


On  nous  apprend  cVunc  fa(;on  si  incomplète  notre  passé  et  on 
oublie  si  vite  en  ces  temps  de  crise  verti<^ineus(\  (iiie  M.  Sclii- 
ckelé  n'a  point  dédaigné  de  nous  redire,  avec  l  autorité  d'un 
écrivain  qui  ne  veut  avancer  que  preuves  en  mains,  quelle 
était  Torganisation  de  l'Eglise  en  Alsace  dix  ans  avant  la 
Révolution,  qui  a  modifié  de  fond  en  comble  cette  organisa- 
tion. C'est  presque  de  l'histoire  contemporaine.  Après  avoir 
lu  son  premier  essai,  on  est  obligé  de  convenir  que  si  ce  qu'il 
nous  retrace  n'était  point  chose  absolument  inconnue,  c'était 
du  moins  chose  presqu'entièrement  oubliée. 

Deux  diocèses,  sans  compter  ce  que  leur  prenaient  les  dio- 
cèses limitrophes,  se  partageaient  alors  la  province  d'Alsace. 
C'étaient  le  diocèse  de  Strasbourg  et  celui  de  B&le.  Quelle 
était  leur  organisation?  Voilà  le  champ  d'étude  que  M.  le 
curé  de  Saalcs  s'est  proposé  d'explorer. 

Quant  au  premier  de  ces  diocèses,  les  archives  de  l'évôché 
de  Strasbourg  lui  ont  fourni  le  moyen  de  nous  renseigner. 
On  trouve,  en  effet,  dans  le  premier  fascicule  de  son  travail 
la  description  précise  des  circonscriptions  ecclésiastiques 
dudit  diocèse.  Ce  document  manquait  à  nos  sources  de  l'his- 
toire locale  et  Ton  ne  peut  (pie  louer  Tauteur  de  Tavoir  mis 
en  lumière.  Ses  recherches  devaient  forcément  Tamener  à 
nous  donner  préalablement  des  notions  générales  sur  la  con- 
stitution et  les  droits  de  l'Eglise  de  Strasbourg;  ces  notions 
font  l'objet  do  Tintroduction,  et  ce  n'est  pas  la  partie  la  moins 
intéressante  ni  la  moins  instructive  de  son  travail,  car  1  intro- 
duction est  un  petit  traité,  ex  professa,  de  droit  canonique 
mis  à  la  portée  de  toutes  les  intelligences.  Sous  ce  rapport 
encore,  M.  le  curé  de  Saales  a  rendu  service  à  notre  petit 
monde  littéraire,  qui  le  consultera  fréquemment  dans  le  cours 

de  ses  travaux. 

La  deuxième  partie  du  livre  de  M.  le  curé  embrassera  le 
diocèse  de  BAle.  Elle  nous  fournira  des  points  de  comparaison 
intéressants.  Tandis  qu'au  diocèse  de  Strasbourg  les  anciens 
archiprêtrés  ont  subsisté  jusqu'à  la  Révolution,  nous  les  ver- 
rons au  diocèse  de  Bâle  devenir  les  doyennés  ou  décanats 
que  l'on  y  rencontre  à  la  même  époque  et  dont  le  Uber  nuxr- 


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500  RSVirB  D*AL840B 

earum  de  Trouillat-Vautrey  nous  donne  déjà  une  définition 
assez  complète.  Il  ne  faut  pas  douter  que  M.  le  curé  de  Saales 
saura  jeter  sur  ce  sujet  autant  de  lumière  qu^il  en  a  répandu 
dans  la  première  partie,  relativcuient  à  la  composition  des 
paroisses,  sur  la  constitution  du  diocèse  de  Strasbourg. 

Kous  attendons  avec  impatience  ce  complément  d'un  livre 
auquel  nous  souhaitons  bon  succès  dans  notre  BépubUque 
des  lettres  alsaciennes. 

BnUetIn  de  la  Société  belfortaine  d'émulation.  -  3'  année, 
lff75-1876.  -  Belfort,  imp.  de  Pélot  lils,  1877.  1  voU  io-S-  de 
256  pages 

Ce  Bulletin  e?^t  plus  considérable  que  les  deux  précédents. 
Il  contient  une  notice  de  M.  Léon  Viellard  traitant.^  un  point 
de  vue  assez  original,  do  la  défense  de  la  trouée  de  Belfort 
dans  les  temps  anciens  et  subsidiairement  de  la  constitution 
de  la  propriété  entre  les  mains  des  hommes  de  guerre  OU  dc 
la  noblesse  du  pays.  Il  y  a  dans  les  seize  pa-es  de  cettenot^ 
des  idées  qui,  pour  être  adniistîs,  auraient  ])esoin  d  une  justi- 
fication que  l'on  ne  saurait  rencontrer  dans  un  cadre  aussi 
restreint,  mais  que  l'auteur  pourra  peut-être  produire  dans 
les  Bulletins  suivants.  Cette  notice  est  suivie  de  deux  lettres 
inédites  des  généraux  Boyer  et  Kléber,  puis  d'une  notice 
intéressante  sur  U  principauté  de  Bénévent  et  son  gou- 
Temeur  pour  le  compte  du  prince,  M.  de  Taleyrand.  Le  gou- 
verneur dont  il  8'a^t,  M.  de  Beer,  était  issu  d'une  fannile 
alsacienne,  et  les  renseignements  que  l'auteur  do  la  notice, 
M.  Dietrich,  fournit  sur  ce  personnage,  ont  leur  place  mar- 
quée dans  notre  histoire  biographique. 

Le  reste  du  BuUetin  est  consacré  h.  la  deam^tion  géologm^ 
etmmèràhgiqm  di*  territoire  <te5e{^ort.  par  M.  Pansot  Ce  te 

description  complète  d'une  manière  compétente  et  avan  a- 
geuse  celle  que  MM.  Joseph  Kœchlin-ScWumberger  et  Bei^ 
donnèrent,  en  d'autres  temps,  du  même  territoire  aux  trm 
de  Fancien  département  du  Haut-Rhin. 

Le  travail  de  U.  Parisot  peut  être  considéré 
bonne  fortune  pour  lascieuce  et  pour  le  Bulletin  quilepuD 


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BULLETIN  BIBLlOGlUkPHIQUB 


561 


Sstoire  des  comtes  souverains  de  Montbéliard,  d  après  les 
docaments  authentiques,  par  P.  E.  TLEFbP.uu,  doclour  en  droit,  juge 
WBL  tribanal  civil  de  Montbcliard.  —  Monlbéliard,  impriui.  de  H. 
Barbier,  1877. 1  toI.  iii-8*  de  VlII-660  pages,  avec  un  supplément  de 
77  pages  et  ano  carte  de  rancienne  prineipauté  avant  1789. 

Le  livre  que  nous  annonçons  ne  pouvait,  eu  égard  &  son 
importance^  être  publié  que  par  la  Société  ffEmuUMon  de 
MmithéMardf  dont  il  forme  une  des  meilleures  et  des  plus 
solides  parties  de  ses  mémoires.  Aussi  n*a-t-elle  pas  hésité  à 
livrer  le  manuscrit  à  Timpression  dès  que  Tauteur  a  été  en 
mesure  de  le  lui  fournir. 

La  manière  de  faire  de  l'auteur  a  ceci  de  particulier  :  c'est 
qu'elle  ne  couipreiul  pus  seuhnueiit  que  l'histoire  des  princes 
et  des  comtes  de  Montl)éliard.  M.  Tucfferd  a  écrit  simultané- 
ment, et  sans  qu'il  paraisse  l'avoir  voulu,  Tiiistoire  politique, 
relitifieuse,  civile  et  militaire  de  Tancienne  principauté.  On 
trouve,  en  eftet,  réunis  dans  son  livre  les  divers  éléments  des 
annales  et  jusqu'à  un  certain  point  les  principaux  traits  de 
la  vie  populaire  de  la  contrée.  De  plus,  le  pays  de  Montbéliard 
ayant  presque  toujours  partagé  le  sort  politique  de  l'Alsace, 
il  en  résulte  que  ce  livre  est  un  aUatique  du  premier  degré, 
et  comme  aucune  de  ses  pages  n'est  marquée  au  coin  de  la 
fantaisie  littéraire,  la  Berne  doit  le  signaler  spécialement  à 
Tattention  de  ses  lecteurs. 

Le  curieux  et  le  travailleur  trouveront  dans  la  succession 
proprement  dite  des  dynastes,  le  récit,  bien  écrit,  ou  Texposi- 
tion  des  événements  qui  n'ont  cessé,  durant  le  mojcn-âge,  de 
rattacher  directement  le  comté  de  Montbéliard  à  Thistoire  de 
rancienne  province  d'Alsace,  depuis  l'origine  dudit  comté 
jusqu'à  son  retour  à  la  France. 

Le  supplément  de  cet  excellent  livre  n'en  est  pas  la  partie 
la  moins  précieuse,  ni  la  moins  intéressante.  Il  est  certaines 
pages  qui  ont  pour  but  et  pour  conséquences  de  faire  dispa- 
raître bien  des  obscurités  sur  nos  origines,  de  mitrailler  bien 
des  erreurs  professées  par  de  bons  esprits  et  répandues  dans 
presque  tous  les  livres  ou  monographies  composés  au  moyen 
de  recherches  insuffisantes  ou  en  l'absence  d'une  critique 
RooTeUe  Série.  ~  7>  Année.  ^ 


RKVUB  D'ALBAGB 


quelque  peu  approfondie.  Sans  &îre  de  ces  erreurs  Tobjet  de 
dissertations  ennuyeuses  pour  le  public  de  nos  jours,  M.  Tuefr 
ferd  a  cependant  jugé  nécessaire  d*en  prendre  quelques-unes 
k  partie  et  de  les  réduire  à  néant. 

Nos  félicitations  aussi  pour  la  loyale  bibliographie  qui  lui  a 
fourni  la  matière  de  la  note  N"  1  du  supplément. 

Bulletin  de  la  Sooièté  pliUomatiqiM-vo8oi«ime^  V*  année, 
1875.  —  Saint  Oié»  imp.  de  L.  flambert,  1876.  1  toI.  ia^  de  69  p. 
et  plnaieiin  plancties. 

Après  des  efforts  ininterrompus,  après  des  luttes  prolongées, 
un  ami  des  sciences  et  du  progrès,  M.  Henri  Bardy,  est  pa^ 
venu  h  constituer  à  Saint-Dié  une  société  héritière  des  tradir 
tions  et  du  patriotisme  dont  Fréd.  Eirschleger  fut,  il  y  a  ]»en 
des  années,  le  digne  et  sympathique  représentant  à  Stras- 
bourg, ainsi  que  dans  toute  TAlsace  et  les  Vosges.  G*est  de 
son  premier  Bulletin  que  nous  venons,  tardivement,  entrete- 
nir un  instant  les  lecteurs  de  la  Berne* 

Ce  Bulletin  renferme,  outre  les  statuts  de  la  Société,  la  liste 
de  son  bureau  d'administration  et  celle  des  associés,  divers 
petits  travaux  qui  permettent  d'aftirmer  a  ;)rion  que  la  Société 
possède,  les  éléments  nécessaires  pour  remplir  d'une  façon 
brillante  le  programme  qu'elle  s'est  tracé  :  «  Développer  le 
«  goût  des  choses  littéraires,  scientifiques  et  artistiques; 
«  rechercher  et  conserver  tout  ce  qui  se  rattache  à  Thistoire 
«  du  pays;  former  un  musée  de  toutes  les  richesses archéolo- 
n  git^ues  et  naturelles  de  la  contrée  et  des  montagnes  des 
«  Vosges.  » 

Pour  justifier  l'opinion  émise  plus  haut,  il  nous  suffira  de 
transcrire  le  titre  des  communications  faites  au  Bulletin  de 
début.  Ce  sont  :  1«»  Une  notice  historique  sur  l'ancien  château 
de  Taintrux,  par  G.  de  Golbéry.  Elle  est  accompagnée  de  deux 
planches  représentant  l'ancien  manoir  et  la  construction 
relativement  moderne  qui  l*a  remplacé;  2*  Une  journée  dans 
la  ville  d'Arles,  par  G.  de  la  Comble.  A  six  pages  de  texte  sont 
annexées  cinq  planches  représentant  le  portail  de  Saint-Tro- 
phime,  la  vue  intérieure  du  cloitre,  une  vue  intérieure  de  la 


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BOLLBTiN  BmuocaiAnnQUK 


563 


ruine  des  arènes,  la  vue  de  l'église  des  Aliscamps  et  enfin  la 
porte  sarrazine  avee  une  tombe  à  tuiles  de  recouvrement,  la 
base  et  le  chapiteau  dHine  colonne  de  la  porte  de  Téglise  des 
Aliscamps  et  trois  monogrammes  ou  signes  maçonniques; 
3»  Une  note  de  M.  CL  Grad  sur  l'existence  de  lliomme  dans 
les  Vosges  à  l'époque  glaciaire;  4*  Le  résumé  des  observa- 
tions météorologiques  à  Scbirmeek  de  1854  à  1864,  par  Billot 
5*  Le  commencement  d'une  bibliographie  vosgienne,  compre- 
nant le  Catalogne  des  ouvrages  de  géologie  et  de  minéralogie, 
et,  pour  clore  le  Bulletin,  les  procès-verbaux  des  séances  du 
bureau  d'administration. 

De  l'organisation  judiciaire  et  de  la  législation  d'Alsace  avant 
1789,  par  Julrs  Kruc-Bassr,  président  du  tribunal  civil  de  Bergerac. 
Paris,  imp.  Arnoud  de  Rivière  etC«,  1874.  Broc.h.  petit  in-S*»  de  20  p. 

L'Alsaoe  avant  1789  ou  État  de  ses  institutions  provinciales  et 
locales»  de  son  régime  ecclésiastique,  féodal  et  économique,  de  ses 
mœurs  et  de  ses  eonlnmes  sous  Tancienne  administration  française, 
par  J.  Kbuo-Bassb,  président  da  tribwial  civil  de  Betgarac.  ^  Berge- 
rac, imp.  Falaaodier,  1877. 1  toI.  in-B"  de  361  p. 

Bans  le  premier  de  ces  écrits,  M.  Krug-Basse  s^est  borné  à 
donner  une  définition  sommaire  des  diverses  Juridictions  qui 
existaient  en  Alsace  avant  la  Révolution.  Le  Conseil  souve- 
rain, les  Bégences  de  Saveme  et  de  Bouzwiller,  le  Directoire 
de  la  noblesse  immédiate,  les  tribunaux  intermédiaires  formés 
par  le  Magistrat  de  Strasbourg,  les  justices  inférieures  des 
villes  et  des  villages,  les  justices  seigneuriales,  les  tribunaux 
extraordinaires  ou  officialités  et  justices  des  rabbins,  maî- 
trises des  eaux  et  forêts,  sièges  de  maréchaussée,  juges-gardes 
des  monnaies,  forment  le  cadre  de  ses  recherches  sur  l'an- 
cienne organisation  judiciaire  de  l'Alsace. 

Dans  le  second,  M.  Krug-Basse  est  moins  laconique  que 
dans  le  premier;  s(\s  études  embrassent  un  horizon  beaucoup 
plus  étendu  et  son  livre  a  nécessairt  iiient  des  proportions 
plus  volumineuses.  Quant  à  sa  méthode  ({"«wposition,  elle  ne 
diffère  guère  de  celle  (li\s  nombreux  méuioires  inédits  que  les 
premierâ  agents  de  l'adoiinistration  française  rédigèrent  aux 


564 


BBVUB  D'ALSAGB 


XVn*  et  XVIIP  siècles  sur  la  consistance  de  la  province  au 
point  (le  vue  des  divers  .services  dont  ils  étaient  chargés.  Cette 
méthode  est  excellente;  elle  a  le  mérite  de  présenter,  dans  un 
cadre  relativement  restreint,  un  aperçu  d'ensemble,  tidèle  et 
compétent,  des  matières  ayant  des  points  de  contact  qui  les 
classent  logiquement  dans  une  catégorie  spéciale.  Les  pre- 
miers rédacteurs  de  nos  annuaires  l'avaient  suivie  avec  plus 
ou  moins  de  succès,  et  il  faut  reconnaître  que  cette  méthode 
n*a  pas  peu  contribué  à  vulgariser  les  notions  que  tout  dtojen 
doit  posséder  sur  la  topographie,  la  consistance,  TorganisatioD 
administrative  et  Téconomie  politique  de  son  pays. 

n  ya  de  soi  que  le  livre  de  M.  Krug-Basse  doit  être  placé 
sur  un  échelon  beaucoup  plus  élevé.  On  va  en  juger  à  la 
simple  lecture  des  tètes  de  chapitre  que  nous  transcrivons  et 
qui  suffiront,  en  même  temps,  pour  porter  &  la  connaissance  du 
lecteur  les  matières  contenues  dans  le  volume  que  nous  avons 
rhonneur  de  recommander  à  son  attention. 

Le  chapitre  I"'  traite  de  TAlsace,  de  son  étendue,  de  sa 
population  et  de  ses  divisions  territoriales;  le  chapitre  II 
est  consacré  h  radministratimi  générale;  le  chapitre  111  à 
Tadministration  des  villes  et  des  cenniiunautés;  le  chapitre  IV 
à  ladministration  de  la  justice;  le  chapitre  Và  l'état  militaire; 
le  chapitre  VI  au  culte  catholique;  le  chapitre  VII  aux  cultes 
dissidents  ;  le  chapitre  VIII  au  régime  féodal  ;  le  chapitre  IX 
à  la  noblesse  et  à  la  bourgeoisie;  le  chapitre  X  à  l'instructiou 
publique;  le  chapitre  XI  à  la  situation  économique  de  TAlsace, 
et  le  chapitre  XII  aux  mœurs  et  coutumes  des  gens  du  pays. 

Histoire  des  institutions  politiques,  constitutionnelles  et 

juridiques  de  l'évêché  de  Bâle.  dos  villes  et  des  sei-iieuries 
de  cet  Klat,  par  A.  QuiguEHKZ.  —  Oel.^moiil,  imp.  de  J.  Dœcbat, 
1811.  1  vol.  in-S**  de  VI-5i8  pages.  —  Prix  :  5  fraacs. 

Voici  un  livre  important  qu'A  faut  ajouter  au  catalogue, 
déjà  très  riche,  des  travaux  historiques  de  M.  Quiquerez.  Lln- 
fàtigable  écrivain,  le  patriote  à  toute  épreuve  du  Jura  bernois, 
Pami  et  le  collaborateur  de  toutes  les  publications  scienti- 
fiques ou  littéraires  du  pays,  a  voulu  tirer  encore  des  inépnî- 


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BULLETIN  BIBLIOGRAPHIQUE 


S65 


sables  richesses  qu'il  a  amassées,  la  matière  de  l'une  de  ses 
meilleures  et  de  Time  de  ses  plus  précieuses  publications.  Le 
livTe  que  nous  annonçons,  résume  en  effet,  dans  un  cadre 
condensé,  les  éléments  concernant  les  institutions  politiques 
et  judiciaires  de  Tancien  évêché,  des  villes  et  des  seigneuries 
qui  étaient  comprises  dans  la  circonscription  diocésaine. 

Nous  n'aurions  que  rembarras  du  choix,  si,  au  moyen  de 
citations,  nous  voulions  donner  au  lecteur  autre  chose  qu'une 
idée  générale  de  la  substance  de  ce  volume.  Les  matières  les 
plus  diverses  y  sont  abordées  et  il  nous  suffira  d'en  énumérer 
un  certain  nombre  pour  atteindre  le  but  que  cette  annonce 
doit  viser.  Le  droit  du  souverain,  l'étendue  du  territoire,  la 
division  ecclésiastique  de  Tévêché,  l'origine  de  la  puissance 
temporelle,  le  pouvoir  lé.i^islatif,  les  lois  criminelles  et  cinles, 
les  lois  ecclésiastiques  et  financières,  le  droit  de  paix  et  de 
guerre,  les  subsides  et  les  déi)enses  publiques,  les  impôts,  les 
corvées,  les  droits  de  cours  d'eau,  les  di'oits  réguliers  sur  le 
sel,  les  mines,  carrières,  postes, èi)aves,  pontena<;e,  désbérence, 
aubaine,  naturalisation,  bâtardise,  noblesse,  foires  et  marchés, 
la  banalité,  le  retrait  lignager,  les  biens  de  main  morte,  les 
poids  et  mesures,  le  droit  monétaire  de  l'évêché,  ses  mon- 
naies et  ses  médailles,  les  monnaies  de  la  ville  de  Bàle,  les 
droits  de  justirr.  de  tabollionage,  le  haut  chapitre  de  l'évêché, 
les  grands  olhciers  héréditaires,  les  conseils  du  prince,  le 
catalogue  des  évêques,  les  Etats  du  pays  et  leur  origine, 
l'ordre  de  préséance,  l'institution  des  villes  et  des  campagnes» 
la  condition  primitive  de  celles-ci,  etc.,  etc.,  sont  les  princi- 
pales choses  dont  il  est  traité  dans  le  livre  I"  de  Texcellent 
ouvrage  qui  nous  occupe. 

Le  livre  II  est  non  moins  riche  en  renseignements,  notices 
et  documents  divers.  On  sent,  au  premier  examen,  que  l'au- 
teur a  voulu  nous  donner  la  primeur  ou  la  crème,  soigneuse- 
ment épurée,  des  innombrables  richesses  entassées  dans  ses 
collections.  Le  monde  littéraire  lui  en  sera  reconnaissant  et 
les  travailleurs  auront  recours  à  ses  lumières  quand  Us  vou- 
dront approfondir  Tune  ou  l'autre  des  questions  que  M.  Qui- 
querez  s'est  contenté  d'effleurer. 


Ô66 


BEVUE  D' ALSACE 


Une  réserve  en  terminant  Nous  aurions  désiré  un  peu  plus 

de  lo'^iquc  ou  de  méthode  dans  le  groupement  des  matières. 
La  lec^ture  en  fût  devenue  plus  facile,  plus  attrayante»  en  ne 
forçant  pas  l'attention  à  passer  trop  brusquement  à  des  siijetB 
disparates  ou  dMne  nature  trop  différente  les  uns  des  autres. 
Les  recherches  aussi  seraient  devenues  plus  faciles.  A  cette 
critique  près,  nous  n'avons  que  le  plus  grand  bien  à  dire  du 
travail  de  l'un  des  plus  anciens  et  des  plus  lidèles  collabora- 
teurs de  la  Heuue  d'Alsace, 

Pages  InMItes  pour  servir  à  l'Ustoire  dM  pènàUtét  de 
VmudiWkB  République  de  Mulhouse  avx  XVX*.  XVU*  et 
mil*  Môcles.  par  Àvo.  &eœbrh.  —  Molhonse.  imp.  de  V*  Bader  elC, 
1877.  In-8  de  40  paxes.  Tiré  à  80  exemplaires. 

Cette  plaquette,  toute  de  circonstance,  retrace,  en  peu  de 
pages,  les  diverses  transformations  que  le  droit  administratif 
et  le  droit  judiciaire  ont  subies  depuis  l'an  1231  jusqu  à  1  ac- 
cession dé  la  petite  BépubUque  de  Mulhouse  à  la  République 
française.  M.  Stœber  foit  suivre  ces  pages  de  l'analyse  de 
soixante-quatre  décisions  ou  jugements  concernant  autant  de 
crimes,  délits  ou  contraventions  réprimés  par  les  juridictions 
auxquelles  ils  ressortîssaient  Chacune  de  ces  analyses  som- 
maires est  suivie  de  notes  fort  intéressantes  pour  Thistoire 
de  Mulhouse. 


BiBtge  Notlsen  sur  Staiistik  des  Tabakbanes  in  Elsass-Iothrin^en.  - 
Quelque»  note»  relatives  à  la  sUUstiqne  de  la  caltare  du  tabac  en 
Alsace-Lorraine,  par  Auo.  Schmittsi,  direcleor  de  la  manufacture  de 
Strasbourg,  publiées  par  le  IF  Bickea,  assesseur  de  la  présidence. 
Strasbourg^  imp.  de  G.  fisebbaeh,  1877.  Inrl2  de  64  pages,  cbes 
Noiriel,  libraire. 

Au  lendemain  du  désastre,  tout  ce  qui  était  empreint  de  la 
marque  française  fiit  ûnpitoyablement  dénigré,  dédaigné, 
repoussé.  Il  y  eut  même  de  vulgaires  fanatiques  qui  voulurent 
expurger  la  langue  allemande  des  mots  usuels  empruntés  à  la 


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BULLETIN  BlBLIOORAPHiqUI 


567 


langue  française.  Tout  ce  qui  n^était  pas  d^ongine  gotMque, 
était  par  cela  même  inflexiblement  condamné.  Louis  Yeuillot 
éprouva,  au  lendemain  du  2  décembre,  la  même  frénésie  à 
Tendroit  de  nos  auteurs  classiques  quil  voulut,  lui  aussi, 
expurger  de  tout  ce  qui  respirait  les  souvenirs  de  Tantiquité. 
Ces  ridicules  entreprises  ont  toutes  échoué  devant  la  con- 
science publique  et  rimperturbable  bon  sens  des  peuples.  A 
sept  années  de  distance,  nous  voyons  en  Alsace-Lorraine  de 
grands  efforts  se  produire,  pour  réhabiliter  les  choses  et  les 
institutions  que  la  conquête  avait  supprimées.  Ainsi  on  est-il 
de  la  culture  du  tal)ac,  morte,  bien  morte  aujourd'hui  en 
Alsace,  et  à  laquelle  on  cherche,  avec  raison,  à  rendre  la  vie 
en  adorant  le  lendemain  le  monopole  ou  Tidolc  que  l'on  avait 
brisée  la  veille.  Les  notes  de  M.  l'assesseur  tendent  à  ce  but, 
qui,  d'ailleurs,  est  aussi  celui  de  la  pensée  gouvernante. 

La  démonstration  statistique  est  faite  ex  professa,  mais  il  y 
a  gros  k  parier  que  la  conclusion  pratique  ou  légale,  si  jamais 
on  y  arrive,  ne  sera  point  celle  que  l'on  prône  et  qu'une  fois 
remise  sur  jambes,  Tinstitution  sera  boiteuse,  parce  que  Ton 
se  sera  évertué  à  lui  donner  un  cachet  différent  de  celui 
qu*elle  avait  avant  1870  en  Alsace-Lorraine. 


Œuvres  Inédites  de  Dom  Galmet.  —  Origine  de  h  cérémonie 
dn  Roy-boit.  —  Conjectures  sur  les  coquillages  qu*on  trouTe  sar  la 
terre  et  sur  les  montagnes,  par  F.  Dinago,  aroeat.  —  Saînt-Dié,  imp. 
de  L.  Homberl,  1877.  —  In-8*  de  67  pages. 

Cet  opuscule  est  le  second  de  la  série  que  IL  Dinago  s*est 
engagé  à  fournir.  Il  nous  réserve  pour  le  troisième  fasdcule 
soit  l'histoire  de  l'abbaye  de  Senones,  soit  ITdstoire  de  Tab- 

baye  de  Munster.  Ces  deux  publications,  dit-il,  seront  très 
intéressantes  et  plus  importantes  que  les  autres  études  de 
Dom  Calmet  non  encore  imprimées.  Nous  sommes  de  ceux 
qui  engagent  vivement  notre  compatriote  h  poursuivre  son 
projet  jusqu'à  l'entière  divulgation  des  reliques  du  bénédictin. 


568 


BBVOB  D'ALBACB 


Lunéville  et  ses  environs,  par  Arth.  Benoit.  —  Lanéville,  imp. 
de  G.  George,  1877.  In  8  de  54  pages 

Ce  petit  écrit  est  la  relation  d'une  excursion  Mstorico-pitto- 
resque  écrite  par  un  ho  m  me  de  goût  et  un  patriote  dans  k 
bonne  acception  du  mot.  Blamont  est  la  première  localité 
qu'il  visite  et  quMl  fait  connaître  au  lecteur  dans  son  pa^sé 
et  dans  le  présent.  Il  en  est  de  même  pour  Lunéville,  beau- 
coup plus  riche  en  souvenirs.  Le  précepteur  Jean-George 
Keyssler  est  mis  à  contribution  à  cet  égard  et  on  lit  avec 
intérêt  les  lettres  qu'il  écrivait,  en  1731,  au  père  do  ses  élèves 
sur  Lunéville  et  la  cour  du  duc  de  Lorraine.  On  y  trouve  la 
biographie  on  ne  peut  plus  intéressante  du  professeur  Jamerai 
Du  Val»  à  Tacadémie  des  cadets,  et  de  Philippe  Vayringe, 
mathématicien.  L'itinéraire  de  Lunéville  à  Nancy  y  a  sa  place 
et  à  plus  forte  raison  aussi  l'ancienne  capitale  du  duché  de 
Lorraine. 

La  Franœ  et  TAlaaoe  dans  le  passé,  par  H.  Daksas.  —  Psris, 
Amyot,  éditear,  S»  rue  de  la  Paix.  Broch.  in-8"  de  67  ptfes. 

Cette  brochure  est  un  extrait  à\x  Précis  des  travaux  de 
l'Académie  des  sciences,  belles-lettres  et  arts  de  Rouen,  année 
1872-73,  imp.  de  IL  Boissel.  L'auteur  est  d'origine  alsacienne; 
son  savoir  et  son  caractère  ont  laissé  au  pays  des  scmveuu'S 
durables  et  une  estime  à  l'abri  de  toute  atteinte.  L'homme 
tout  entier,  le  patriote  patient  et  digue,  l'homme  de  foi  se 
retrouve  intact  dans  le  mémoire  qu'il  a  écrit  pour  VAcaclémie 
de  Rouen.  Pour  ceux  qui  ont  connu  l'auteur,  pas  n'est 
besoin  d'ajouter  que  la  science  et  le  style  font  de  son  étude 
un  byou  précieux  à  incorporer  dans  nos  bibliothèques  alsa- 
tiques. 

L'Alsace  à  Moral.  —  Etude  historique  publiée  h  l'occasion  (iu 

centenaire,  par  P.  Ristrlhlbf.r  —  Pari»,  cheï  H.  Cbampion,  libraire, 

15,  qnai  Malaipiais.  In-S"  de  50  pages. 
Centenaire  de  Voltaire.  —  Un  tourisle  allemand  à  Fciney  on  1770. 

par  P.  RisTKLHi  BER.  —  Paris,  Isidore  Lizeux,  éditeur,  2,  rue  Bow 

parte,  1878.  in-12.dd  35  pages. 


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BULUETIN  BIBUOOBAIHIQUK 


569 


Qaalre  Ballades  suivies  de  notes,  par  P.  RisiBLemi.  —  Génère, 
iinp.  de  J.-G.  Fick,  1876.  In-S*  de  44  pages. 

M.  Paul  Ristelhuber  a  réuni  dans  la  première  de  ces  bro- 
ehures  tout  ce  qui  se  trouve  disséminé  dans  nos  alsatiques  et 
tout  ce  quMl  a  découvert  dans  nos  archives  concernant  la  par- 
ticipation de  TAlsace  et  des  Alsaciens  à  la  guerre  soiftenue 
par  les  Suisses  contre  le  duc  de  Bourgogne  et  spécialement 
k  la  bataille  de  Morat  M.  Ristelhuber  «  a  préféré  laisser 
parler,  tour  &  tour,  les  témoins  de  ce  passé  »,  que  de  tirer 
lui-même  «  des  différentes  chroniques  un  récit  pondéré  ». 
Cette  manière  de  faire,  que  nous  approuvons  sans  réserve 
dans  cette  circonstance,  a  le  mérite  de  nous  donner,  dans  un 
cadre  restreint,  le  texte  même  des  écrits  se  rapportant  au 
fait  de  guerre  qui  a  assuré  le  triomphe  de  la  nationalité  suisse 
sur  un  de  ses  plus  redoutables  ennemis. 

M.  'Ristelhuber  ajoute  d'ailleurs  de  précieux  renseignements 
biographiques  à  chacun  des  })ara<^rapli(^s  concernant  les  Alsa- 
ciens qui  prirent  une  part  active  à  la  résistance  des  Suisses 
contre  Charles-le-Téméraire.  Cela  donne  i\  son  modeste  tra- 
vail de  circonstance  une  valeur  hi:>toriquo  que  nous  aimons 
à  faire  ressortir. 

Non  moins  érudit,  non  moins  consciencieux  et  sagement 
critique,  est  son  Tonrhte  allemand  à  Ferwsy,  écrit  à  Tocca- 
sion  du  centenaire  de  Voltaire.  C'est  une  superbe  plaquette, 
imprimée  avec  un  certain  luxe  et  dans  laquelle  on  lira  avec 
plaisir  le  jugement  que  les  célébrités  allemandes,  contempo- 
raines de  Voltaire,  portaient  sur  cette  grande  individualité. 
«  Nous  sommes  tous  plus  ou  moins  voltairiens,  sans  le  savoir 
et  sans  nous  nommer  ainsi...  La  puissance  de  Voltaire  a  été 
telle,  qu'aujourd'hui  les  biens  intellectuels  pour  lesquels  U  a 
lutté  toute  sa  vie  avec  un  zèle  infatigable,  un  dévouement 
passionné,  avec  toute  arme  de  Tesprit  et  surtout  sa  terrible 
ironie,  la  tolérance,  la  liberté,  la  dignité  humaine,  la  justice, 
sont  devenues  pour  nous  des  éléments  vitaux  aussi  naturels 
que  l'air  auquel  nous  ne  songeons  que  quand  il  nous  manque  ». 

Le  Touride  alkitmid  qui  a  fourni  à  M.  Ristelhuber  le  point 


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570  REVUE  d'alsa.cs 

de  départ  de.  sa  charmante  esquisse  voltairienne,  est  Frédéric 
de  Stolberg,  le  condisciple  et  Tami  de  Gœthe.  Ls  s'étaient 
donné  rendez-vous  à  Francfort,  et  c'est  Frédâncqiii  se  fit 
a  le  narrateur  du  voyage  à  Fcrney.  Les  lettres  sont  adres- 
sées à  sa  sœur  Henriette,  qu'il  appelait  Poulette.  » 

M.  Ristelhuber  traduit  en  français  ces  lettres  sur  le  texte 
donné  par  Jansscn  dans  sa  vie  de  Frédéric  de  Stolberg.  Elles 
sont  d'un  intérêt  marqué,  et  cheuiin  faisant,  M.  Ristelhuber 
ne  manque  pas  de  rectifier,  par  des  notes  très  compétentes, 
les  erreurs  géographiques  ou  autres  qu'il  rencontre.  Bref,  son 
travail  est  celui  d'un  érudit,  d*un  critique  et  d'un  littérateur 
de  mérite. 

Quant  aux  Quak-e  baUades  dont  il  nous  reste  à  dire  quelques 
mots,  voici  quelle  en  est  Torigine  et  quel  en  est  l'objet  : 

En  1875,  la  section  littéraire  de  l'institut  genevois  offrait 
un  prix  àflameilleure reproduction  en  vers  firançais  des  quatre 
ballades  intitulées  :  DU  Kraniehe  des  Iby<m  =  Les  grues 
ajhycui,éd  Schiller;  KlemBoland  =  Le  PetU  Bohnd,  d'Uh- 
land;  Der  getreue  EdcaH  =  Le  fidèle  Eckari,  de  Gœthe,  et 
DasUedvom  hwmMann  ^*Lahaïladedii  brave  hmme, 
de  Btirger. 

M.  Ristelhuber  se  mit  à  l'œuvre  et  fit  des  efforts  pour  repro- 
duire la  poeti(iue  des  originaux,  mais  en  se  conformant  aux 
rhythmes  consacrés.  M.  Ristelhuber  ne  fut  pas  le  lauréat  du 
concours,  bien  que,  selon  le  rapporteur  du  jury,  le  travail  du 
vainqueur  contint  des  vers  inadmissibles  dans  la  poésie 
française. 

La  traduction  de  notre  compatriote  a  été  imprimée  magni- 
fiquement par  M.  Fick  avec  des  notes  fort  intéressant^ 
du  traducteur  sur  chacun  des  auteurs  allemands  dont  il 
avait  essayé  de  rendre  en  français  les  créations  poétiques 
mises  au'concours.  La  ballade  de  Bttrger  nous  paraît  surtout 
bien  sentie  et  bien  rendue. 

Diabnrgundisch.Hlstorie,  eineReim-Chronik  von  Hans-Euhart 
TcscH,  1477.  Als  Beilragzura  vierten  Jahrhunderlfeier  der  Schiacht 
von  Marten  (82.  Joni  1876)  «  BiHmr»  de  Bourgogne.  Chronique  en 


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BULLETIN  BDUOOBAPHIQtm 


671 


▼ers  de  Jp.an-Frard  Tusoh,  1477.  Editée  à  l'occasion  du  quatrième 
centt'iiaire  iK'  \.\  h  ilaille  df  Monit,  par  Edmond  Uk.ndling,  archiviste 
et  bihiiolh  nMire  dt;  la  ville  d'î  Schi-^stadt,  avec  la  collaboration 
d*AiT,.  Stœber,  bibliotlu  caire  et  conservateur  du  Musée  tiistorique 
de  Mulhouse.  —  Mulhouse,  itnp.  de  Brùsllein  et  C%  1876.  In-8'  de 
111  pages  ;  chez  Eug.  Barth,  hbraire  à  Coimar. 

Cette  poétique  composition  parut  à  Strasbourg  en  Tannée 
1477.  On  n*en  connaît  plus  en  Alsace  qu'un  seul  exemplaire; 
il  appartient  iklabibliothèque  de  Sehlestadt,  qui  en  est  devokue 

propriétaire  par  Pacquisition  de  la  collection  de  livres  sur 
TAlsace,  composée  par  feu  M.  Dorlan,  ancien  représentant 
du  peuple  et  avocat  en  cette  ville.  On  a  supposé  que  cet  incu- 
nable sortait  des  presses  de  Mentelin  et  que  le  nom  de  l'au- 
teur cachait  sous  un  pseudonyme  le  fils  du  beau-frère  de 
riniprimeur.  Les  nouveaux  éditeurs  se  livrent  à  cet  égard  à 
d'intéressantes  recherches  bi])li();^M  aphiques  pour  éclairer  la 
question  et  pour  déterminer  quelle  fut  l'édition  princeps  de 
ce  poème  sur  la  guerre  de  Bourgogne. 

Ils  ont  jugé  que  roccasion  du  quatrième  centenaire  de  la 
bataille  de  Morat  était  favorable  pour  faire  revivre  ce  poème 
et  en  enrichir  nos  collections.  Nous  ne  pouvons  que  les  féli- 
citer d'avoir  eu  ce  courage  et  les  en  remercier. 


FrAdArig  Kurtz. 


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TABLE  DES  MATIERES 

CONTENUES  DANS  LE  TOME  VII  DE  LA  NOUVELLE  SÉRIE  — 


JANVIER  -  FÉVRIER  -  MARS 

Pagej 

Arthur  Kngei..  —  Documents  pour  servir  a  la  niimism?itiqiipdc 
iWlsare  —  iN*  A  —  Recueil  de  hrai-Jlèates  alsacu'iiiics  j'"'»^ 
ou  ivu  connnt'i  tirées  des  Vnni  ipnux  cabinpis  P""'' 

types  iiicounus  à  Uerslell  ou  même  compléieiueiil  inédits  . . . .  it=M 
fitisTnVK-\i)i)i.iMiR  llinN.  —  Ln  miisi(|UO  et  rnmistique  — 
ApiT(,u^oiii'r;tl  sur  Unirs  rapports  ft  Imirs  '^'''■''''"^''''V''^'^^^ 
La  science  rsl  piirvcuut'  ;i  ^Hniiiailn'  lo  rni'cam^iik- 
son  —  La  théorie  et  rexperiineiilation  niii  :iin'iiit  k-?^  1*'*''^'^ 
du  merveilleux  —  F.xi)ositioii  «m  :ui;tl\se  dos  '"'0*^"^_~",P'^ 
section  des  matériaux  avec  lesquels  fart  P^o^m'^  ses  créatiuua 
—  Stru(;ture  des  gammes  —Moyens  de  veriin  andii  des  prn= 
Mi''mes  rt^solus  —  Exemples  —  Accords  consounanis  cl 

sonants  —  Discussions,  etc.  elc   *  

Arthur  Benoît.  —  Dépêches  militaires  inédites  sur  IMovasion 
de  iSlo  —  Vos^-ps  et  Alsnce  —  l)epêrli''s  lUi  '''''''■'''''''^ 
ral  comte  l*achti)d  —  Du  miiiisiiv  de  i;i  ^nierre.  prinrr  d  b  k- 
mùhl  —  Dm  préfet  de  la  Meiirllie  de  Miipie  -  Du 
de-camp  César  de  Lnville      Du  baron  .MarchauL  - 
Evain  —  Du  lieutenant-général  Moliior  —  Du  m  ire  lial-ite- 
f^mp  Mandeville  —  Du  duc  de  Keiire  ei  du  t;*^"»?"''  „ . 

mont  

G.  MoHLENBECK.  —  LMnstructioH  obli^^atoire  dans  le  comté  de 
Riliaupierre  -  1739-1773  —  Deux  pièces  concernant  cette 

mal  ère  

Ed.  Ensfei.der.  —  l/école  latine  de  Riguewihr  —  C^^P^^*^ 
rhistoir.'  scolaire  d'Alsace  —  Riiiuewihr  =^..P'^'^^^'''''', 
155Î)  jus(|u'en  1789,  une  école  latine  —  Histoire  J^'j^^ 
école  —  Professeurs  et  instituteurs  qui  i  ont  succeb^vemcni 

dirigée   

Ch.  Grad.  —  Scènes  et  paysages  des  Vosges  —  Le  lac  Noir  — 
Descriptions  —  Altitudes  —  Barrages  —  Leurs  consiruaions 

—  Résultats    

Dagobkrt  Fisr.HF.R.  —  Histoire  de  Tancien  comté  de  Saarwerden 
et  de  la  prévole  d  llei  hil/.heiin  -  Cliap.  IV  —  Le  '"umte  sous 
la  domination  de  la  maison  de  Nassau-Saarl)ruck  --  P-'^tage 
du  comté  entre  le.s  fUs  de  Jean-Louis  de  iNassau-i^aarbTTO 
etc..  etc   mJï^ 


TABLS  DES  MATIÈRES 


573 


PafM 

Etienne  Barth.  —  Notes  biographlqaes  sur  les  hommes  de  la 

Révolution  à  Stra^boiiri,'  et  U's  environs  — Jean  de  Turekheim 
père —  Bei  iUiard-KreUéric  de  Turckheira  fils  —  André  Ulrich 
F.  Vo^t  père  —  Loois  Wangen  de  Géroldseck  —  Samuel  Ber- 
nard Wcher  —  Daniel-Frcdt^rii;  Weber  —  Louis  Wevpt-r  — 
Jean-Gt'ofTrui  Wild  —  VVîlheIrn  —  Jean-Frédéric  Zirainer  père 
—  Georgu-Frcderic  Ziramer  fils   127-144 


AVRIL  -  MAI  —  JUIN 


E.  MoHLERBRCK.  —  £lude  sur  quelques  points  obscurs  ou  con- 
troversés de  l'histoire  de  Safiite-Marie-aux-Mines— Au  millen 

du  XVI«  siècle.  Siiinti -Murie  nVlait  qu'un  fiameau  —  Le  côté 
Alsace  était  s*)umis  aux  UihaupiHrrc  —  Le  coté  Lorraine  con- 
linua  à  dêpeudr»*,  des  ducs  de  Lorraine  —  Il  y  eut  ainsi  eleux 
administrations  juxtaposées  —  Les  deuK  côtes  étaient  de 
langue  franvaise  -  La  ianftue  alleinandi'  ne  fut  introduite  que 
par  les  mineurs  venus  de  la  Saxe  —  Ils  tinissenl  par  former 
une  Société  qui  eut  son  r^lemenl  particulier  et  qui,  au  XVIh 
siècle,  fut  t  (Hinue  .sous  le  nom  de  Knapi schafj't  et  embrassa 
le  lulliéranisme  —  Ses  premières  cérémonies  —  Ses  premiers 
pasteurs,  etc..  etc  145-172 

6.-A.  HiRN.  —  La  musique  et  Tacousllque  ~  Aperçu  général  sur 

leurs  rapports  et  leurs  dissemblances  —  La  science  peut-elle 
expliquer  l'action  des  sons  et  de  leurs  (combinaisons  sur  la 
partie  sensitive  de  notre  être?  —  Question  purement  physlo* 
logique  examinée  par  l'auteur  —  Le  défiîut  d'éduc  ation  musi- 
cale est  l'ori;;ine  des  erreurs  (jue  l'on  professe  iiéneraleraenl  à 
cet  égard  —  Citation  de  faits  et  d'anecdotes  à  l'appui  de  ia 
thèse,  etc.,  etc   173-810 

P,-E.  Tlefferd.  —  Pierre  de  Ila^enbach  —  Berceau  de  sa 
femille  —  Déinèlés  de  l'archidnc  Sij,'ismond  avec  les  Suisses 

—  Ilenffafîc  le  Sundgau,  le  Brisgau  et  d'autres  terres  à  Cliar- 
les-le-Téméraire  —  Pierre  de  Hagenbach  est  insiitué  par  lui 
Landvojt  des  pays  engagés  —  Faits  et  gestes  dndit  Landvogt 
dans  radmniislr'aiion  de  ce  pays  — L'orage  s'amoncelle  —  Ou 
Jure  de  secouer  la  tyrannie  —  Pierre  est  saisi  à  Vieux-Brl> 
sach  —  1!  est  mis  en  jn;^'emerit  —  Sa  dëfCDSe  pariselio  — Sa 
condamnation  —  Son  exécution  îil-225 

X.  MossMAMN.  —  Matériaux  pour  servir  à  l'histoire  de  la  guerre 
de  Trente  ans,  tiré  des  archives  de  Colmar  —  Négociation  du 

résident  de  Suède,  Mockhel,  av.'c  le  résident  de  I  rance,  Mcl- 
chior  de  l'Isle,  pour  procurer  à  Colmar,  de  l'aveu  de  la  ville, 
du  chancelier  Oxenstirn  et  du  rhingrave  Othon-Louis,  la  pro- 
tection de  la  France  —  Recours  au  maréc.al  de  Caumoiit  de 
la  Force  —  Traité  conclu  sous  la  réserve  des  deux  couronnes 

—  Travaux  de  fortilication   226-238 

E.  DiKTz.  —  Documents  inédits  pour  servir  à  l'histoire  de  Tan- 
cienne  seigneurie  du  Ban-de  la-Rochc  —  InlroductioD  à  ces 
docnmeDts  —  Courte  notice  sur  te  comté   239-244 


574  BEWB  d'alhage 


Dag.  Fischer.  -  Histoire  de  Tanoien  comté  de  ^^arwerfen  el 
de  la  prévôté  de  Herblltheim  -  Bn  1641,  Charles  IV  de  Lor- 
raine se  saisit  de  nouveau  du  comté  -  Le  traité  d  Osnabruck 
en  ordonne  la  reslUulioa  auxcomles  de  iNassau-SrarbrucW  — 
Le  traité  de  Munster  met  (In  à  la  guerre,  mais  ne  rétablit  pas 
encore  la  bonne  intelligence  entre  le  Lorrain  çt^  le  eoinle  de 
Nassjui  Saarbrm  k  —  intervention  de  Louis  XIV,  garant  de 
rexéculiou  du  naitê,  etc.,  etc  •  w-w» 

Etienne  Bartii.  -  Notes  biopraphiques  snr  les  hommes  de  la 
Révolution  à  Strasbourg'  et  les  environs  —  Les  b8;>  i'/'  t '«^ 

—  \chard.  Adam.  Adurne,  Albert,  Alcan,  Alexandre,  Alhery.. 
Allinayer,  Ammann.  André,  Anstett,  Arbogast,  Armand-Mai- 
sière/Arnest,  ArrUa.  Aubry.  Aubugeo»,  Aobnsson,  Aymal, 
B«r  

JUILLET  —  AOUT  —  SEPTEMBRE 

F  -G  Frantz.  —  L'assassinat  du  comte  André  de  Sonnenberg 
'Herraannde  Brandschdl,  refugiéà  Brisach,  est  soupçonné  d  y 
avoir  pris  part  active  —  Renseigoemenis  sur  la  femilte  Son- 
neoberg  el  le  comte  André  

Artm.  Benoit.  —  Le  Schneeberg  et  le  comté  de  Dabo  en  1778. 

—  Elude  sur  les  montagnards  vosgiens  par  un  professeur 
allemand  —  Notice  sur  le  professeur  et  la  conit-ee  explorée 

par  lui  —  Di  s.  ription  humoristique  de  la  contrée  par  ledit  ^ 
professeur  —  Appenilices  destinés  à  compléter  sa  relation...  aw^«» 
E.  DiETZ.  —  Documents  inédits  pour  servir  à  Thlstolre  de  l'an- 
tienne seigneurie  du  BaiHle-la-ftoehe  —  Notes  sur  le  domame 

—  Premiers  et  derniers  possesseurs —  D'Andlau  el  Rainsam-  ^^^^ 


haust'n  —  Titres  et  pièces  concernant  le  ban.. 

Artu.  Engel.  —  rk>cuments  pour  servir  à  la  n"»!;"*?^  ^  «.-osi 
TAlsace  —  N«  5  —  Demi-toumols  de  la  ville  de  Thann  

E.  MoHLBKBECK.  -  Etudc  sur  quelques  points  obscurs  ou  con- 
troversés  de  l'histoire  de  Sainle-Marie  aux-Mines,  cOlé  Alsace 

—  Les  frères  d'Echery  sont  grandement  troublés  —  Legnse 
Françoise  de  Straslwurg  envole  des  commissaires  —  Inierven- 
lion  du  baron  de  Ribaupierre  —  L-^s  refu;îiés  fran(;ais,^  lor- 
rains ou  savoyards  sont  renvoyés  —  Itigueurs  d  s  Suédois  — 
La  Knapmhaft  disparaît  —  Après  la  guerre  de  Trente  ans, 
le  val  était  un  désiMt  h  n^peupler  —  Censures  du  (-oiisisioire 

—  Gestion  de  la  fortune  des  pauvres  —  Saxons  et  "a"^y"f:U^ 
accourus  pour  reprendre  l'exploitation  des  mines  —  Conciu-  ^jj^^^ 
sloa  

Dag.  Fischer.  —  Histoire  de  l'ancien  comté  de  Saarwerden  et 
de  la  prévôté  de  llerbilzlieim  —  Chap.  V.  l>émemj)remeniau 
comté  de  Siarwcrden  -  La  paix  de  Ryswick  rend  à  Léopoio 
flls  du  duc  de  LomLie,  s^s  EUts,  mais  sans  places  fort» 
ni  troupes  —  Bouquenom  est  érigé  en  prévôté  ''*"]'*8e'^ 
Conditions  faites  aux  dissidents  —  Eublisseraent  de  U  con- 
grégation des  ReUgleotts  de  Notre-Dame  à  Bouquenom  — 


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TABUB  DBS  UATIÉRE8  575 

2î!î?r«^!îî'^ ^' J^^^  ^^f^""'  impnsÔPs  niix  dissidents  furent  ^ 
encore  rès  Ourdes  -  Recoiislruclioo  Uu  collège  des  Jésim  " 
-  Modifications  à  la  monde  Stanislas- Besiiiue  aux  omuîs 
de  Nassau  Sa.rwPrden,  Taneien  comlé  reçut  une  organlMtton 
nouvelle  -  Une  Réjîence  est  établie  à  Novy-Snarwc^deTete:  37S400 

^^^^  IJiographiques  sur  les  hommos  de  la  Révtf- 
lution  à  Slrasbourc  et  les  environs  -  Bailloud,  B  iilh  de  Jiiiliv. 

Barlholmé.  Bast,  Bataut.  Baudier,  Baudot,  Baudrllloo.  Ban- 
gj|2j^g2"'"^'^''i"cr,  Beauseigncur,  Beck,  Becker,  Benoit. 

  4i6-433 

OCTOBRE  -  NOVEMBRE  -  DÉCEMBRE 

"enri  Bardy.  —  Notice  sor  la  situation  de  la  vifle  de  Belfort 

lors  de  son  investissement  par  les  allies,  le  U  décembre  1813 
tial-majur  de  la  place  -  Garnison  —  Conseil  de  défense 

p  _    m-uo 

îr»nl«''^*î'  T  Horarocs  de  guerre.  François-Christophe 
iieiiermann,  duc  de  Valmy   441.443 

dépêches  inédiles  concernant  l'armée 
de  lUiin  et  Mose  le  -  1793  à  179o  -  Mouvements  militaires 
pniaïî.  ^  ^^"^  l'habillement  —  Le  conveuUounel 
riiieger  ,  44^60 

^'lJ^,\^7-  r  '^^^''^^  '^"'"^^  'l'édites  de  JérémleJacquesOberlid. 
ae  Uieirich  ei  du  chevalier  de  Keralio    461^464 

X.  MossMANiN.  —  Matériaux  pour  servir  à  l'histoire  de  la  guerre 
ae  1  rente  ans  —  Arrivée  des  troupes  françaises  à  Colmar  — 
M-^siires  transitoires  —  Traité  de  protection  —  U  France 
î^ilfS  feconnaitre  —  Défense  du  pavs  contre  le  du(;  de 
iwralne  et  Jean  de  Werih  -  Pl^limiuairês  de  Pirna— Mou- 
jemenis  du  duc  de  lorraine  sur  la  rive  gauche  du  Rtiin  — 
i-e  duc  de  Bohan  va  à  sa  rencontre  —  L*union  protestante 
«adhère  pas  à  la  paix  de  Pra-ue    465-478 

Arth.  Engel.  —  Documents  pour  servir  à  la  numismatique  de 
I  Alsace  —  N-  6  —  Florin  d  argent  inédit  d'Ej;enulphe  de  Ri- 
oaupierre  —  Représ^Miiaiion  par  une  jjravure—  Description 
spécifique  —  Rensei^^nements  historiques   479-483 

^*  LâiL'  ~~  ^"Pcrstitions  et  usages  populaires  au  territoire  de 

wiiort  —  La  bûche  de  Noël  —  Le  revenant  de  Genival   484-486 

Dac.  Fischer.  —  Histoire  de  l'ancien  comté  de  Saarwerden  et 

de  la  prév(Mé  d'Herbitzh.  im  —  Fin  —Le  pays  de  Saarwerden 
pendant  la  Révolution  —  Appendice  —  A.  La  lej^islation  du 
comté  —  B.  Ses  hommes  remar(|uables  —  C.  La  Bonne-Fon- 
Jniie  —  I).  Le  (  hâteau  de  Diedendort*  —  E.  La  ferme  dite 
Lutterbacherbûf  —  F.  UouUn  du  comté   487-524 


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576  REVUE  D* ALSACE 


EnBNins  BABTH.  ~-  Notes  biographiques  sur  es  hommes  de  la 
Révolution  ù  Slrasbour-  et  ses  environs  -  l^»-*- "'^«f.f  ~" 
Berghauer-Bernadon  -  Bernard -Berrayer- Bertrand - 
Sn  -  Bevalet  -  Beyer  -  Bierlyn;-  B.rp.  hi  -  H  an  er 
I_  n,i.ll  -  Bohn  -  Rontenips  -  R.)rie-C;inil)ort  -  Bornerl 

—  Bossénius  —  Bûurcier  —  Bour«mi<n..n  -  Boulei  le  — 
Itov  —  Brandié  —  Bramarbas  —  Brasd  or  —  Braun  — 
Sannwild -  Brendel  -  Brevet  -  Breck  -  Bremsinger...  5«5^l 

Frédéric  Kurti.  -  Bil)lio^rapliie  -  l.  ^^^^^Ijl^^Pf 
mi\m  d'Alfred  Schweighaeuser,  par  Ch.  -^i^hl  -  il.  we- 
chefches  sur  la  constiluflon  de  Colmar,  par  \  M9fJ"^^J""  " 
m.  Aperçu  sur  Thistoire  d'Alsiu  e,  par  J  -K- \"  ^ 

IV.  Soldai,  moine  et  maître  de  danse,  par^od.  ««"^s  7 

V.  Tableau  des  travaux  seienlifiquasde  J.-A.  Micnei,  pr  '!"»' 

Slœber- VI.  Comédies  populair.«s  P^'-/»-^»«"S^'*'vm  pi;.  îê 
vaux  de  la  rhamiir.'  de  commerce  de  C*>»niar  -  VUl- tU^l^ 
l'Eglise  d'Alsace  avant  la  Uév.duiion,  par  M.  le  caré Scwaeic 

—  IX.  Bullclln  de  la  Société  belforlaine^  ^If")"  i^îa  " 
X  Histoire  des  comtes  de  MMiubdiard.  par  P.-b  »  jen^^*»  , 
xi.  Bullelin  de  la  Sodété  pliilomaiitiue  vosgienne  -  I.  Al- 
sace avant  4789,  par  Krng-Basse  —  MU.  Histoire  des  insll- 
tulions  politiques  de  révè.  hé  de  Bàle,  par  A.  " 
XIV.  Pages  inédites  des  péualilés  de  rancicane  l\iM'''l;'''l^*, 
de  Mulhcmse.  par  Aug.  Slœber  -  XV.  Çnltare  dii  tabac,  par 
A.  Schmitler  -  XVI.  Oeuvres  inédits  de  Dom  Calmet,  p.irF. 
Dina^o  —  WIl.  Lnnéville  et  ses  environs,  par  A  Beiiou 

XVIII.  La  France  et  l'Alsace  dans  le  passe,  par  H.  IWnws  , 

XIX.  L^AIsace  à  Moral;  le  centenaire  de  Vultaiiv  ;  <1» ' 
lades,  par  P.  Kist-lhuber  —  XX.  Chronique  de  Jean-Liara 
Tusch,  par  Ed.  Wenitliiig  et  Aug.  Stœber  

Table  des  maiières  •  


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