Skip to main content

Full text of "Bulletin de la Société d'acclimatation"

See other formats


% 
] 
à 
{: 
; 
# 


d'e 
« 
« 
à 
S 
« 
« 


An, =". a æ''a ANæ "ia A A" «Ti 'A d'A: A 


Te 
EEE 
G = 
+ WE 
> : ra 
à Æ | 
TA 
: t Peu 7/1 
ul 4 
x ù 
A 
ù p_.\ 
UE 
Ë À 
à É 
£ p É 
Rx 
JL 
< 4 } g 
; « de 
D N | 
oi FE 
LA | 
fl À \ 
N\ 
LE Y 
EX 
53 
Ü «' 
= W 
He 
| 
1.5 
: « 
L ANS 
« ee 
CIE 
i 


BULLETIN 


® SOCIÊTÉ D'ACCLIMATATION 


Ne. 
ÇA 


BULLETIN MENSUEL 


DE LA 


SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION 


FONDÉE LE 40 FÉVRIER 1854 


RECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE 


PAR DÉCRET DU 26 FÉVRIER 1855 


SONSHRIE VEONRE CT 


ANNÉE 1874 


LISRARS 
ME YORK 


RUYT AN 


PARIS 
AU SIÉGE DE LA SOCIÉTÉ 


HOTEL LAURAGUAIS, RUE DE LILLE, 19 


1874 


SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION 


ORGANISATION POUR L'ANNÉE 1874. 


& En Ur LSR AR. 
ci ba NEV VOR& 
CONSEIL D’ADMINISTRATION EU 
: # BUREAU 
a un À 
F” k MM. DROUYN DE LHUYS, de l’Institut, Président. 
Ernest COSSON, de l’Institut, 
Le comte d'ÉPRÉMESNIL, À ns 
Fréd. JACQUEMART Vice-présidents. 
De QUATREFAGES, de l’Institut, 
A. GEOFFROY SAINT-HILAIRE, Secrétaire général. 
E. DUPIN, Secrétaire pour l’intérieur. 
Maurice GIRARD, Secrétaire du Conseil. 
C. RAVERET-WATTEL, Secrétaire des séances. 
Le marquis de SINÉTY, Secrétaire pour l'étranger. 
Paul BLACQUE, Trésorier. 
ne. A. RIVIÈRE, Archiviste. 
ji MEMBRES DU CONSEIL 
M H. Bovex, de l’Institut. MM. Alph. MILNE EpWaRps. 
Camille DARESTE. Edgar ROGER. 
DucHARTRE, de l’Institut. RUFFIER.. 
P. L. H. FcurY-HÉRARD. Le baron SÉGUIER, de l’Institut, 
LABARRAQUE. _ Le marquis de SELVE. à 
À. HENNEQUIN. CH. WALLUT. 


Vice-président honoraire : M. le prince Marc DE BEAUVAU. 


Membre honoruire du Conseil : M. RuFZ DE LAVISON, 
: # L 


Agent général : M. Jules GRISARD. 


7 
La 


DÉLÉGUÉS DU CONSEIL EN FRANCE. 


Bordeaux, MM. DuriEU DE Maï- | Lyon, 
SONNEUVE. | Marseille, 
Boulogne-sur-mer, Alex. Apam. | Poitiers, 


Douai, L. MAURICE. | Saint-Quentin, 
Le Havre, Henri DELARO- 
CHE. Toulon, 


La Roche-sur-Yon, D. GourDIN. | Toulouse, 


MM. C. BoucHarp. 
Ant. HESSE. 
MALAPERT père. 
THEILLIER - DES- 

JARDINS. 
TURREL. 
JOLY. 


DÉLÉGUÉS DU CONSEIL A L'ÉTRANGER. 


: Batavia,  MM.J. C. PLOEw. Philadelphie, M 
Cernay (Ha-Rln), A. ZURCHER. Québec, 
Constantinople, DuFour. 

Mexico, CHASSIN. Rio-de-Janeiro, 
Milan, Ch. BRoT. Sydney (australie) 
New-Orleans, Ed. SILLAN. Turin, 
Odessa, P. DE BOURAKOFF. | Téhéran, 


Pesth (Hongrie),  Ladislas DE WAGNER | Wesserling, 


COMMISSION DE PUBLICATION. 


M.Th. WILSON. 

Henry Jouy DE Lor- 
BINIÈRE. 
DE CAPANEMA. 

, MAC ARTHUR. 
Chevalier BARUFFI. 
THOLOZAN. 
GROS-HARTMANN. 


MM. Drouyn DE Luuys, de l’Institut, Président de la Société. 
A. GEOFFROY SAINT-HILAIRE, Secrétaire général, 


Ern. CossoN, de l’Institut, 
Comte D'ÉPRÉMESNIL, 

Fréd. JACQUEMART, 

DE QUATREFAGES, de l’Institut, 
E. DuriN, Secrétaire pour l'intérieur. 
Maurice GIRARD, Secrétaire du Conseil. 
RAVERET-WATTEL, Secrétaire des séances. 


Vice-présidents. 


e 


Marquis DE SINÉTY, Secrétaire pour l'étranger. 


Henri BouLey, de l’Institut, | 


Camille DARESTE, ( Membres du Conseil. 


DuCHARTRE, de l’Institut, 


+ 


COMMISSION DES CHEPTELS. 


MM. le PRÉSIDENT et le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, membres de droit. 


Membres pris dans le Conseil. Membres pris dans la Sociéte. 

MM. DARESTE. | MM. Martial BERTRAND. 

DUCHARTRE. P. CARBONNIER. 

à Sen n GINDRE-MALHERBE. 

Comte D'ÉPRÉMESNIL. LED 

Maurice GIRARD. Docteur Ed. MÈNE. 

Alph. MILNE ÉDWARDS. Ant. QUIHOU. 

A. RIVIÈRE. Arthur TOUCHARD. 


. Edgar RoGER. Eug. VAvIN. 


COMMISSION MÉDICALE. 


MM. le PRÉSIDENT et le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, membres de droil.. 


MM. DUCHARTRE. | MM. LABARRAQUE. 
DELPECH. … MAISONNEUVE. 
GOBLEY. " MARAIS. 
GUBLER. Édouard MÈNE. 


COMMISSION PERMANENTE DES RÉCOMPENSES. 
MM. le PRÉSIDENT et le SECRÉTAIRE GÉNÉRAL, membres de droit. 
Délégués du Conseil : 


MM. Camille DARESTE. MM. RAVERET-WATTEL. 
LABARRAQUE. A. RIVIÈRE. 


Délégués des sections : 


LE Première section, — Mammifères. — MM. A. GINDRE-MALHERBE, 
VX Deuxième section. — Oiseaux.  — CRETTÉ DE PALLUEL. 
Troisième section, — Poissons, etc. — C. MILLET. 
Quatrième section. — /nsectes. _ Maurice GIRARD. 
Cinquième section.— Végétaux.  — Docteur E. MÈNE. 


sa 
sr 


DIX-NEUVIÈME LISTE SUPPLÉMENTAIRE 


DES 


MEMBRES ET DES SOCIÉTÉS AFFILIÉES ET AGRÉGÉES 


Membres admis du 19 avril 14873 au 30 avril 14874, 


MM. 

ABRANTES (le duc d’), rue de Berry, 50, à Paris, et château de Bailleul, 
par Gorran (Mayenne). Ë 

ADay (Hippolyte), banquier, rue Siblequin, 35, à Boulogne-sur-mer (Pas- 
de-Calais). 

AGassiz (Charles), propriétaire, à Moudon, canton de Vaud (Suisse). 

ALLAIN (Gaston), rue du Bac, 95, à Paris. 

ALLEZ (Émile), au château de Bel-Ébat, par la Ferté-Alais et quai de 
Gèvres, 14, à Paris. 

ANDRÉ (Adrien), référendaire au Sceau, rue de Morny, 83, à Paris. 

ANDRÉ (Jean-Baptiste-Auguste), propriétaire, rue de la Pépinière, 16, 
à Paris. 

BAIN, pharmacien, rue d'Anjou-Saint-Honoré, 56, à Paris. 

BakaLow1cz (Ladislas), artiste peintre, rue de la Victoire, 32, à Paris. 

ARUTEL (E.), au château de Lavelanet, près Villefranche-de-Lauraguais 
(Haute-Garonne). 

Bary (François-Éléonore), notaire, à Boulogne-sur-mer (Pas-de-Calais), 

Baye (Joseph de), château de Baye, à Baye (Marne). 

BEAUMONT (le marquis de), rue de Laborde, 41, à Paris. 


‘BEAUPRÉAU (comte de), au château de Rive-du-Bois, près Neuville-au-Bois 


(Loiret). 

BétIZAL (le vicomte Louis de), propriétaire, au château des Granges, 
près Moncontour (Côtes-du-Nord). 

BELLANGER (Charles), rue de la Victoire, 58, à Paris. 

BENoIT-CHampy (Gabriel), au château du Faite, par Arnay-le -Duc (Côte- 
d'Or), et boulevard Malesherbes, 89, à Paris. 

BERGERAULT (Georges), propriétaire, rue Abbatucci, 21, à Paris. 

BERTHOULE (Amédée), avocat, à Besse (Puy-de-Dôme), et rue Fursten- 
berg, 2, à Paris. 

Besser (Louis Ch.), directeur général des mines de Montrelais, à la 
Grande-Mine, commune de La Chapelle-Saint-Sauveur (Loire-[nfé- 
rieure), 


LS 


LISTE. SUPPLÉMENTAIRE DES MEMBRES. IX 


Bezet (Félix), propriétaire, conseiller d’arrondissement du Loiret, rue 
Montaigne, 7, à Paris. ae 

BicLarp (Dominique), à Pontlevoy (Loir-et-Cher). 

BizrAUD (baron Frédéric), rue Laffite; 13 à Paris. 

BLANGEY (Camille de), docteur en médecine, à Saint-Léger-sur-d’Heune 
(Saône-et-Loire). 

BLEST-GANA (Alberto), ministre plénipotentiaire du Chili, avenue de Mes- 
sine, 49, à Paris. 

BLocx (Lucien), rue Charles-Laffitte, 40, à Neuilly (Seine). 

BOISSONADE DE FONTARABIE fils, agrégé à la Faculté de droit, rue Gay- 
Lussac, 28, à Paris. 

BonNeroyY (Ferdinand de), docteur en médecine, à Marseillan, par Agde 
(Hérault). 

Boucxez (Auguste), à Seurre (Côte-d'Or). 

BouILHET (Henri), propriétaire, rue de Bondy, 56, à Paris. 

BouiLLon fils (Loïs), à Saint-Léger-sur-d'Heune (Saône-et-Loire). 

BoutELLEAU (Edmond), propriétaire-gérant de la Société vinicole de 
Barbézieux (Charente). 

BouvIER (le baron), propriétaire, château de Francheville, par Lure 
(Haute-Saône). 

BRADY (Paul), colonel d'artillerie, abbaye de Saint-Nicolas, par Saint- 
Gobain (Aisne). ; 

BRETTE (Armand), propriétaire, à Pierrefitte (Seine), et boulevard De- 
nain, 4, à Paris, 

BRÔLEMANN (Henry), rue Marignan, 22, à Paris. 

BROQUETTE, à Seine-Port (Seine-et-Marne). 

BrossarD (Henri de), propriétaire, quai Voltaire, 47, à Paris. 

Bureau (Charles-Albert), pharmacien, à Carvin-Ville (Pas-de-Calais). 

CAFIN (Amédée), faubourg Poissonnière, 47, à Paris. 

CAILLOT (René), propriétaire, ancien adjoint de la ville de Strasbourg, rue 
Vezelay, 11, à Paris. 

CAwBoN (Adrien), propriétaire, rue Degron, 8, à Nimes (Gard). 

CamsourG (comte de), au château de Marchais, par Thouarcé (Maine-et- 
Loire). 

CammHoa (Luiz) (du Brésil), ingénieur agricole, rue Godot-de-Mauroy, 5, 
à Paris. 

CARCARADEC (le vicomte Anatole de), place de l'Opéra, 6, à Paris, et au 
château de Kérivan (Côtes-du-Nord). 

CaRENET (Maurice-Édouard), associé d'agent de change, rue de Londres, #, 
à Paris. 


x SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


CAsABIANCA (vicomte de), rue de Marignan, 2, à Paris. 

Cassanx-Froyrac (Denis de), propriétaire, avenue de Neuilly, 404, à 
Neuilly (Seine). 

CASTAING-DurAy, à Calais (Pas-de-Calais). 

CHAPELLE (de La), au château de La Chapelle, par la Celle-Bruère 
(Cher). 

CHARLOT, ancien notaire, propriétaire, à Borest, et rue Joubert, 34, à 
Paris. 

CHARPENTIER (Ârthur), professeur agrégé à la Faculté de médecme, rue 
Papin, 3, à Paris. : 

CHAUCHAT (Émile), rue de Suresnes, 3, à Paris, et au château d’Escor- 
pain, par Laons (Eure-et-Loir). 

CHAUVELOT (Alfred), propriétaire, boulevard Haussmann, 69, à Paris. 

CHEVALIER (Émile), membre du Conseil municipal de la ville de Paris, 
directeur du journal La Chasse illustrée, rue de Lourmel, 49, à 
Paris. 

CHEVALIER (Léon), conseiller référendaire à la Cour des comptes, rue de 
Rivoli, 216, à Paris. 

CHEVALLIER (Adrien), propriétaire, boulevard Haussmann, 119, à Paris. 

CHoLLET (Maxime), à (Coutençon, par Montigny -Lencoup (Seime-et- 
Marne), 

CLaussE (Jules), boulevard Malesherbes, 77, à Paris. 

CLIQUENNOIS-BaparT, rue de Douai, 100 bis, à Lille (Nord). 

Corriner (E.), avenue des Champs-Élysées, 452, à Paris. 

Come (le vicomte de La), propriétaire, au château de La Bretèche, près 
Hédée, par Montreuil-sur-Ille (Ille-et-Vilaine). 

CORRENSON (H.), à Saint-André-des-Ramiers, par Sablet, près Louvèze 
(Vaucluse). 

CoTTK (Ernest), rue de Clignancourt, 13, à Paris. 

CoTrIN (Eugène), propriétaire, à Verez (Indre-et-Loire). 

Courcy (le vicomte Max de), rue de Verneuil, 15, à Paris. 

COURTOIS (Émile), négociant, rue d'Aboukir, 411, à Paris. 

CRÉPEAU (Antoine J.-L.), propriétaire rentier, avenue de Wagram, 75, 
à Paris. 

CRÉPIN (Jacques-François), négociant, boulevard Ornano, 41, à Paris. 

CRÉPU, capitaine au 2° régiment de tirailleurs, à Daya (province d'Oran), 
Algérie. 

DANPIERRE (général comte Du Val de), à Lilie (Nord). 

DAMPIERRE (Réné de), au château de Saint-Simon, par Jonzac (Charente- 
Inférieure). 


LISTE SUPPLÉMENTAIRE DES MEMBRES. XI 


DELAURIER aîné, à Angoulême (Charente). 

DÉPINAY (Georges), négociant, boulevard de Strasbourg, 12, à Paris. 

DErBy-WELLES, avenue d’Iéna, 98, à Paris, et au château du Bourg- 

Saint-Léonard, par Argentan (Orne). 

DESROUSSEAUX (Édouard), membre du conseil général de la Marne, au 
château de Vandières, par Châtillon-sur-Marne, et rue de Londres, 
34, à Paris. 

Desronrs (Alexandre), propriétaire, au Tillay, par Gonesse (Seine-et-Oise), 
et rue Laffitte, 43, à Paris. 

DÉTRIMONT (Eugène), propriétaire, rue Laffitte, 27, à Paris. 

DevroLLe (Émile), naturaliste, rue de la Monnaie, 23, à Paris. 

Dinor (Alfred Firmin), éditeur, directeur de La Chasse illustrée, rue de 

à Varennes, 61, à Paris. 

DougLar (Alfred), rue de Rivoli, 214, à Paris. 

DROUILHET DE SIGALAS (le baron Paul), propriétaire, rue du Moulin, à 
Marmande (Lot-et-Garonne). 

Dusier (Alfred), propriétaire, rue de Montmorency, 11, à Boulogne-sur- 
Seine (Seine). 

DucrAY-CHEVALLIER, opticien, place du Pont-Neuf, 15, à Paris. 

Dumonr (E.), rue de Dunkerque, 24, à Paris. 

DupressoiR (Charles-Michel), cultivateur, à Ereuse, par Estrées-Saint- 
Denis (Oise). 

ELrier (Édouard d’), propriétaire, au château de Miélen, par Saint- 
Trond, province de Limbourg (Belgique). 

EspaGnY (le comte d’), trésorier-général du département du Rhône, à 
Lyon (Rhône). 

ESPERONNIÈRE (le comte René de l’), propriétaire au château de la Sau- 
laye, près Candé (Maine-et-Loire). 

ESTIENNE (Louis-Philippe), propriétaire, rue d’Aumale, 18, à Paris. 

Eu (S. A. TI. et R. monseigneur le comte d’), rue de Berry, 15, à Paris. 

FauRE-MILLER (le docteur John), rue de Matignon, 28, à Paris. 

FEASSE, propriétaire, rue de la Faisanderie, 44, à Paris. 

FeraRy (Claude-Achille), propriétaire, à Aurillac (Cantal). 

FERcOQ (Charles-Guy-René de), propriétaire, avenue Duquesne, 30, à. 
Paris. 

FicneT (Jacques), chimiste, rue de Lagny, 84, à Vincennes (Seine). 

ForGer (Pierre), rue du Marché, 36, à Neuilly (Seine). 

Fourp (Paul), rue du Faubourg-Saint-Honoré, 43, à Paris. 

Fourquer, consul général de la République de l’Équateur, rue des Petites- 
Écuries, 54, à Paris. 


XIf SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


FroJo (Joseph), professeur d’agronomie à l’École d'application de Naples, 
(Italie). 

F'USELLIER, propriétaire, rue Lafayette, 118, à Paris. 

GAILLARD (Alexandre), propriétaire, rue Billault, 16, à Paris. 

GARNOT (Émile), propriétaire, pavillon de Bellevue, près Avranches 
(Manche). 

GAUBERT (le docteur A.), rue Baudin, 15, à Paris. 

GAULLIER (Henri), domaine agricole de Bourmont, près Candé (Maine-et- 
Loire). 

GIBOTTEAU (Paul), à la Roche-sur-Yon (Vendée). 

Givry (Clément de), propriétaire, rue de la Chaise, 36, à Paris. 

GOSSELIN (Bertulphe), ancien maire de Boulogne-sur-mer, banquier, pré- 
sident de la Chambre et du tribunal de commerce, rue Neuve- 
Chaussée, 83, à Boulogne-sur-mer (Pas-de-Calais). 

GOUBIE {Jean-Richard), peintre, rue Pigalle, 57, à Paris. 

GRANDPRÉ [le comte de), à Montfermeil (Seine-et-Oise). 

GUERIN (J.), propriétaire, rue de Trévise, 43, à Paris. 

GUERLE (Charles de), publiciste, rue de Lisbonne, 51, à Paris. 

GuiBErT (Louis-Victor), rue Desbordes-Valmore, 18, à Paris. 

GUICHARDET (Alph.), propriétaire, passage Saulnier, 17, à Paris. 

GUILHOU (Ernest), propriétaire, avenue de Paris, 53, à Versailles (Seine- 
et-Oise). s 

GURY, vétérinaire militaire, pare de Montretout, à Saint- Cloud (Seine-et- 
Oise). 

HaLLoy (Léon d’), rue Porte-Paris, à Amiens (Somme). 

Hauor (Frédéric), propriétaire, rue de la Ville-l'Évêque, 40, à Paris. 

HAUSSONVILLE (le comte d’), membre de l’Institut, rue Saint-Dominique, 
109, à Paris. 

HÉmar (H.), avocat général, rue du Faubourg-Poissonnière, 52, à Paris. 

HÉRICART DE THuRY (Henri), capitaine au 27° d’artillerie, 8, rue Del- 
cambre, à Douai (Nord). 

HéricourT (Edgar d’), au château de Théribus, par Fresneau-Montche- 
vreuil (Oise), et rue de Berry, 47, à Paris. 

Hier (E.), palais de Brüubl, 612, à Varsovie (Pologne), Russie. 

HiiLEL (Isaac), rentier, rue d’Argenson, 9, à Paris. 

HumiÈres (le comte Roger d’), au château de Marcolès, par Saint-Mamet- 
la-Salvetat (Cantal). 

HURET (Charles), ancien inspecteur d'académie, avenue de Neuilly, 
126 Bis, à Neuilly (Seine). 

Husson (Charles), propriétaire, rue Malesherbes, 6, à Paris. 


LISTE SUPPLÉMENTAIRE DES MEMBRES. XIIT 


Huvor (Jules), graveur, rue des Saints-Pères, 34, à Paris. 

IzxiERS (le comte A. d'), propriétaire, au château de Jamonières, près 
Nantes {Loire-Inférieure), 

JACQUE (Charles), peintre, au Croisic (Loire-Inférieure). 

JACQUET, propriétaire, avenue d’Antin, 3, à Paris. 

_ JANSEN (Adolphe), propriétaire, boulevard Maillot, 50, à Neuilly (Seine). 

JOUENNE (Louis-Séverin-Athanase), avenue de Neuilly, 170, à Neuilly 
(Seine). 

LAÂGE (Paul de), au château de la Boivinière (Sarthe). 

LADEN (Antoine), avoué, rue Jean-Lantier, 7, à Paris. 

LA Fosse (E. de), conseiller référendaire à la Cour des comptes, rue de 
Lille, 93, à Paris. 

LA GARDE SAINT-ANGEL (le comte de), rue Saint-Pétersbourg, 4, à Paris, 
et au château de Saint-Angel, par Nontron (Dordogne). 

LamBErT (Désiré-Auguste), propriétaire, rue Bréa, 19, à Paris. 

LAMARCHE (Oscar), banquier, rue Louvrec, 70, à Liége (Belgique). 

LA ROUSSELIÈRE (le baron Arthur de), secrétaire de légation, au château 
de Fayenbois, près Liége (Belgique). 

La Toucne (comte Édouard-Robert-Marie de), à Saint-Brieuc {[Côtes-du- 
Nord). 

Laumont (Lucien-Benoit de), château de Wavrechain, près Bouchain 
(Nord). 

LAURENT (Abel), agent de change honoraire, ancien maire du VIII arron- 
dissement, propriétaire, rue François I’, 42, à Paris. 

LAVIGNE (Henri), ancien officier de marine, rue de l’Église, 17, à Neuilly 
(Seine). 

LECOUTEUx (Édouard), secrétaire général de Ja Société ‘des agriculteurs 
de France, boulevard Haussmann, 36, à Paris. 

Le Doux (Christian), sériciculteur, boulevard Saint-Michel, 83, à Paris. 

LEFEBVRE DE VIEFVILLE (Paul), substitut du procureur de la République, 
rue Taitbout, 51, à Paris. : 

LE GALLAYS (Célestin), propriétaire, au château des Timbrieux, commune 
de Crugnol (Morbihan), et rue Cassette, 26, à Paris. 

LerEMoIS (Léon), propriétaire, à Dives-sur-Mer (Calvados). 

LERAILLÉ, agriculteur, agent de change, à Bazemont, par Maule (Seine- 
et-Oise). 

LE SERGEANT DE MoNNecoOvE (Albert), propriétaire, rue de Dunkerque, 
125, à Saint-Omer (Pas-de-Calais). 

LiCHTENSTEIN, négociant, membre de la Société entomologique de France, 
à Montpellier (Hérault). 


XIV … ‘SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Livais (le docteur Eugène), ancien maire de Boulogne-sur-mer, rue de 
l'Écu, 7, à Boulogne-sur-mer (Pas-de-Calais). 

LUPEL (comte de), propriétaire, rue Abbatucci, 59, à Paris. 

MaGariKos-CERVANTES (Maleo), ministre résident de l’Uruguay, avenue de 
Friedland, 49, à Paris. 

MaLLer (le baron Alphonse), rue Caumartin, 64, à Paris. 

ManpausCH (Frederick), rue de la Michodière, 20, à Paris. 

ManSBENDEL (Henry), rue Clapeyron, 23, à Paris. 

MANHEIMER (Émile), rue Laffitte, 41, à Paris. 

MarcHAND (Amédée), rue Lafayette, 108, à Paris. 

MARCHAND (docteur), avenue de Neuilly, 45, à Neuilly (Seine). 

Marié-Davy, directeur de l’observatoire de Montsouris, boulevard Jour- 
dan, à Paris. 

MARTINET (Antoine), propriétaire, rue de Neuilly, 24, à Clichy (Seine). 

May | Ernest), secrétaire général de la banque franco-égyptienne, rue 
de la Chaussée-d’Antin, 29, à Paris. 

MAYRENA (David de), inspecteur de la compagnie des eaux, à Arcachon 
(Gironde). 

MESniz pu Buisson (le vicomte Victor du), château de Champobert, par 

| Exmes (Orne). 

MEuNIER (Félix-Jean-Baptiste), avenue de Neuilly, 136, à Neuilly (Seine): 

MiFFonis (Fernand de), employé à la Caisse des dépôts et consignations, 
rue du Petit-Chemin, 15, à Sceaux (Seine). 

MILLON (Claude), ancien député, au château des Merchines, par Vaube- 
court (Meuse). 

MiGNon (Alexis), propriétaire, rue Malesherbes, 18, à Paris, et à Fonte- 
nay-le-Comte (Vendée). 

MiNancoY (Henri), boulevard Haussmann, 105, à Paris, et au château 
de Lesigney (Seine-et-Marne). 

Mixo (Cesare), propriétaire, à Alexandrie (Égypte). 

Morsser (Adolphe), rue Neuve des-Petites-Écuries, 65, à Paris. 

MonTHIERS (Jean-Victor), propriétaire, rue d'Amsterdam, 70, à Paris. 

MonTrEnsiER (S. A. R. monseigneur le duc de), boulevard Suchet, ancien 
Â4 bis, à Paris. 

Moreau (le docteur H.), aux Herbiers (Vendée). 

MoREAU (Paul-Émile), conseiller à la Cour d'appel de Poitiers (Vienne). 

Moreau (J.-M.), notaire, à Couhé-Vérac (Vienne). 

MoroGues (le vicomte Alexandre de), au château de Villefalier, près 
Cléry (Loiret). 

Munier (M.-Ch.), notaire, à Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moseile); 


LISTE SUPPLÉMENTAIRE DES MEMBRES. XV 


Murer (Henri), place du Théâtre-Français, 4, à Paris. | 

Nogzet (docteur-médecin), agriculteur, à Château-Renard (Loiret). 

PACQuETEAU (Charles), avoué, à Fontenay-le-Comte (Vendée). 

PanxaRp (Félix), place Bréda, 13, à Paris. ; 

Passy (Frédéric), rue Labordère, 40, à Neuilly (Seine). 

PauLIN (Antoine), propriétaire de la grande vacherie d’Auteuil, rue La- 
fontaine, 27, à Paris. 

PÉRIN (Marcel), banquier, maire de Blancy, à la Pépinière, près Vitry-le- 
Français (Marne). 

PERRAUDIÈRE (Joseph de la), au château de la Devansaye, près Segré 
(Maine-et-Loire). 

PERRIEN (le vicomte Raoul de), au château de Locunoloy, près Henne- 
bont (Morbihan). 

PErsac (Charles-Georges-Ernest), avocat, à Saumur (Maine-et-Loire). 

PERSIN (Gustave), propriétaire, rue Bertin-Poirée, 16, à Paris. 

Petor (Auguste), au château de Thoires, par Brion-sur-Ource (Côte- 
d'Or). 

Pier (Gustave), conseiller général de la Côte-d'Or, à Dijon (Côte-d'Or). 

PINEL (Honoré), rédacteur du journal La Chasse illustrée, à Gonesse 
(Seine-et-Oise). 

Piorry (le professeur), membre de l’Académie de médecine, rue de la 
Chaussée-d’Antin, 15, à Paris. 

POyDRAS DE LA LANDE (Julien), à Nantes (Loire-Inférieure). 

PréÉvosT-RoussEAU (Antoine), maire, à Champigny (Seine). 

PULLIGNY (vicomte de), maire d’Écos, au château de Chesnay-Haguet 
(Eure). 

Queneney (Émile), négociant, rue des Francs-Bourgeois, 8, à Paris. 

RABUTÉ, pharmacien, rue du Bourg, 66, à Doullens (Somme). 

RATIER (Gustave), avocat, ancien préfet, conseiller général du départe- 
ment du Morbihan, à Lorient (Morbihan). 

RENESSE (le comte Frédéric de), propriétaire, place Saint-Jean, 23, à 
Liége (Belgique). 

REQUILLART (François), fabricant et propriétaire, rue Fosse-aux-Chênes, 
14, à Roubaix (Nord). 

Rey (Toussaint), sériciculteur, au Marquisat, près Annecy (Haute- 
Savoie). 


RiBan (Edmond-Jean), pharmacien, à Louvigné-du-Désert (Ille-et-Vi- 


laine). 
RiBEAUD (Georges), propriétaire, rue du Gravier, 17, à Porrentruy 
(Suisse). 


XVI SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. à 

RicHARD-HENNESSY, propriétaire, boulevard Haussmann, 85, à Paris, et 
au château de Bagnolet, près Cognac (Charente). . 

Rico (B.), inspecteur de l’école de pisciculture, à Clermont-Ferrand 
(Puy-de-Dôme). | 

Rarrar (Marc-Antoine), notaire, à Évaux (Creuse). 

RHEn (Edmond), propriétaire, rue Pigalle, 59, à Paris, 

RogLor (Étienne), rentier, rue Mozart, 40, à Paris. 

Romans (le baron de), propriétaire, au château de La Planche-d’Andillé, 
près la Ville-Dieu-du-Claire (Vienne). 

RouriGnac (Henri), propriétaire, à Ruffec (Charente). 

RoumAGnac (Charles), propriétaire, à Hendaye (Basses-Pyrénées). 

ROUVILLE, ingénieur ordinaire des ponts et chaussées, à Vitry-le-Fran- 
çais (Marne). 

SAINTE-ALDEGONDE (comte Emmanuel de), rue de Grenelle-Saint-Germain, 
47, à Paris, et au château de Troissy, par Port-à-Binson (Marne). 

SAINTE-MARIE (Robert de), avenue de Ségur, 13, à Paris. 


* Scan (le prince de), rue Saint-Dominique, 427, à Paris, 


SARLANDE (Albert), au château de La Borie, par Champagnac-de-Bel-Air 
(Dordogne). 

SARRUS (Jean), curé de Saint-Affrique-du-Causse, par Espalion (Aveyron). 

SCLATER (Philip Lutley), Hanover square, 11, à Londres (Grande-Bre- 
tagne). 

ScHMITT (Frédéric), négociant, rue de Charonne, 20, à Paris. 

SENET, boulevard d’Argenson, 10, à Neuilly (Seine). 

SÉRÉ-DEPOIN (Pierre-Ernest), président du Conseil d'arrondissement, 
boulevard Maillot, 46, à Neuilly (Seine). 

Souza (le docteur Pedro Luiz Pereira de), à Rio-Janeiro (Brésil), et 
avenue Friedland, 21, à Paris. 

TEISSEIRE (Auguste), propriétaire, rue de Trévise, 3, à Paris. 

THierry' (Edmond), propriétaire, rue Neuve - des - Mathurins, 89, à 
Paris. 

TILLY, propriétaire, avenue du Roule, 28, à Neuilly (Seine). 

ToLLu (Camille), rue Saint-Lazare, 48, à Paris. 

TonpEur (Oscar), propriétaire, rue Sainte-Cécile, 40, à Paris. 

TREDERN (le vicomte de), propriétaire, place Vendôme, 44, à Paris. 

TREMPÉ, propriétaire, rue du Canal-Saint Martin, 43, à Paris. 

Van TUYLL VAN SEROOSKERKEN (le baron E. L. L.), à Velsen, Nord Holland 
(Pays-Bas). 

VAN TUYLL VAN SEROOSKERKEN (le baron F.-W.-C.-H.), à Velsen, Nord 
Ho'land (Pays-Bas). 


& LISTE SUPPLÉMENTAIRE DES MEMBRES. XVII 
VAUTIER (Émile), ingénieur civil, à Larmeillière en Camergue, et rue 
Centrale, 46, à Lyon (Rhône). 
VerNeJOUL DE La Roque (de), inspecteur des forêts en retraite, et vice- 
consul de France au Brésil, à Nîmes (Gard). 
VipaL (le docteur A.), directeur de l’École de médecine, à Négato 
(Japon). 
VizLAUX, banquier, boulevard Poissonnière, 14, à Paris. 
VocEL, boulevard Poissonnière, 45, à Paris. 
Waizcy (Alfred), Clapham Road, 410, à Londres, S. W. (Grande-Bre- 
tagne). 
WALEY (S.-W.), agent de change, membre du Exchange, 22, Devonshire 
. place, Portland place, à Londres (Grande-Bretagne). 
Waru (Pierre de), rue de Téhéran, 16, à Paris. 
WEerTHEIM (Adolphe), propriétaire, rue de Trévise, 28, à Paris. 
Weyz (Édouard), rue Joubert, 8, à Paris. 
ZEDDE (Charles), propriétaire, rue de Trévise, 39, à Paris. 
Zevpes (Gabriel de), propriétaire, adjoint au maire, à Riceys (Aube). 


SOCIÉTÉ AFFILIÉE ÉTRANGÈRE. 


La Société royale d’horticulture et d’acclimatation de Liège (Belgique). 


SOCIÉTÉS AGRÉGÉES FRANCAISES. 


La Société d’horticulture de l'arrondissement d'Étampes (Seine-et-Oise). 
La Société d’horticulture des Vosges, à Epinal (Vosges). 


3° SÉRIE, T. |. — Séance publique annvelle b 


age 


FH» 


DIX-SEPTIÈME SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE 


SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION 


PROCÈS-VERBAL. 


Cette séance a été tenue dans la grande salle du Grard- 
Hôtel, 12, boulevard des Capucines, le vendredi 40 avril 

87h. 
Sur l’estrade siégeaient, avec M. Drouvn de Lhuys, membre 
à de l’Institut, président de la Société : 3S. A. FE. et R. le comte 
d'Eu; MM. le chevalier Nigra, ministre d'Italie; le baron de 
”  ZLuylen de Nyevelt, ministre des Pays-Bas; Torrès Caïcedo, 
On ministre du Salvador; le Secrétaire de l’ambassade britan- 
12 nique ; le Secrétaire de la légation de Belgique ; le Secrétaire 
de Ja légation du Brésil; de Quatrefages de Bréau, membre 
de l’Institut, vice-président de la Société; Elie de Beaumont 
et H. Bouley, membres de l'Institut; marquis de Vibraye; 
Albert Geoffroy Saint-Hilaire, secrétaire général; le barom 


L nr Jules Cloquet, membre de l’Institut et de l'Académie de 
: Là médecine; le docteur Maurice Girard, secrétaire du conseil; 
pe" Raveret-Wattel, secrétaire des séances. 


On remarquait, en outre, dans l’assemblée : MM. Paul 
Gervais, membre de l’Institut; Richard (du Cantal); le général 
Guiod; d’Arnaud-Bey ; le baron d'André, et un grand nombre 
d’autres notabilités françaises et étrangères. 

Parmi les dames de distinction, on remarquait M"° Drouyn 

de Lhuys, M°° la comtesse de La Croix de Vaubois, M"° de 
Lagrenée, M°° Geoffroy Saint-Hilaire, M°° la baronne Cio- 
quet, etc, elc. 
id e M. le marquis de Selve, membre du Conseil, avait bien 
| voulu se charger d'introduire les invités et de leur faire les 
honneurs de la séance, avec plusieurs commissaires qu’il avait 
te désignés. 


fs 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE. XIX 


L’orchestre de M. Danbé prêtait son concours à la so- 
lennité, 

— La séance a été ouverte par un discours de M. Drouyn 

M de Lhuys, président, sur la Naturalisation du Cafe. 

— M. H. Bouley a prononcé un discours sur la domestica- 
tion des animaux. 

— M. le Secrétaire général a présenté ensuite le rapport 
sur les récompenses. Il a fait remarquer que les prix encore 
à décerner sont au nombre de cent quatre, dont quatre-vingt- 
dix-neuf fondés par la Société, et cinq provenant de fonda- 
tions particulières. 


SS 


xx SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


PRIX EXTRAORDINAIRES ENCORE A DÉCERNER (1). 


NÉ : # 
GÉNÉRALITÉS. Fe 


19— 1863. — Primes pour les travaux théoriques relatifs à l’accli- 
matation, 


À partir de 4863, les travaux théoriques sur des questions relatives à 
l’acclimatation pourront être récompensés, chaque année, par des primes 
spéciales de 500 francs au moins. 

La Société voudrait voir étudier particulièrement les causes qui peu- 
vent s'opposer à l’acclimatation, et les moyens qui peuvent servir à pré- 
venir ou à combattre leurs effets. 

Les ouvrages devront être imprimés et remis à la Société avant le 1° juillet 
de chaque année, 


20 —48@%3.— Prix pour les travaux de zoologie pure, pouvant servir 
de guide dans les applications. 


La Société, voulant encourager les travaux de Zoologie pure (monogra- 
phies génériques, recherches d'anatomie comparée, études embryogéni- 
ques, etc.) qui servent si souvent de guide dans les applications utilitaires 
de cette science, et rendent facile l’introduction d’espèces nouvelles ou la 
multiplication ou le perfectionnement d'espèces déjà importées, décernera 
annuellement, s’il y a lieu, un prix de 500 fr. au moins, à la meilleure 
monographie de cet ordre, publiée pendant les cinq années précédentes. 

Elle tiendra particulièrement compte, dans ses jugements, des applica- 
tions auxquelles les travaux de zoologie pure appelés à concourir auraient 
déjà conduit, que ces applications aïent été faites par les auteurs de ces 
travaux ou par d'autres personnes. 


Un exemplaire devra être déposé avant le 1° juillet. 


3° — #S38. — Plantes de pleine terre utiles et d'ornement, intro- 
duites en Europe dans ces dix dernières années, 


Les auteurs devront indiquer dans un livre, ou dans un mémoire étendu, les 
usages divers de ces plantes, leur pays d’origine, la date de leur introduction, 
la manière de les cultiver ; les décrire et désigner les différentes variétés ob- 
tenues depuis leur importation, ainsi que les différents noms sous lesquels ces 
végétaux sont connus. 

En d’autres termes, les ouvrages présentés au concours devront pouvoir servir 
de guide pratique pour la culture des plantes d'importation nouvelle. 


Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1880 ; les ouvrages devront être im- 
primés et remis à la Société avant le 1° juillet. 


PRIX. — 900 francs, 


(1) Le chiffre qui précède l'énoncé des divers prix indique l’année de Ja fondation de ces prix. 
Tous les prix qui ne portent pas l'indication d'une fondation particulière sont fondés par la 
Société, 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE. XXE 


— 186%. — Prix perpétuel fondé par feu 1 M GUÉRINEAL, 
mée DEELALANIDE. 


Une grande médaille d’or, à l'effigie d’isidore Geoffroy Saint-Hilaire, 
het destinée à continuer les ao faites les années précédentes, dans 
Vintention d’honorer la mémoire de l’illustre et intrépide naturaliste 
voyageur Pierre Delalande, frère de M®° Guérmeau. 

Cette médaille sera décernée, le 10 février 1875, au voyageur qui, en 
Afrique ou en Amérique, aura rendu depuis huit années le plus de services 
dans l’ordre des travaux de la Société, principalement au point de vue de 
l'alimentation de l’homme. 

Les pièces relatives à ce concours devront parvenir à la Société avant le 47 dé 
cembre 1874. 


5° — #8SGA. — Introduction d'espèces nouvelles. 


Il pourra être accordé, dans chaque section, des primes d’une valeur de 200 à 
500 francs, à toute personne ayant introduit quelque espèce nouvelle. Les ani- 
maux introduits devront être adultes et par paires. 


6° ASGH. — Prix fondés par feu M. AGRON DE GERMIGNY. 


Deux primes, de 200 fr. et de 400 fr., seront décernées, chaque année, 
pour les bons soins donnés aux animaux ou aux végétaux, soit au Jardin 
d'acclimatation (200 fr.), soit dans les établissements d’acclimatation se 
rattachant à la Société (prime de 100 fr.). 

Les pièces relatives à ce concours devront parvenir à la Société avant 
le 1% décembre de chaque année. 


PREMIÈRE SECTION. — MAMMIFÈRES. 


1° — 1S3O®. — Introduction en France des belles races asines de 
l'Orient. 


On devra faire approuver par la Société d’acclimatation les Anes étalons im- 
portés, et prouver que vingt saillies au moins ont été faites dans l’année par 
chacun d’eux. 


Prix. — 1000 francs. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1875. 

2° — HSGS. — Domestication complète, application à l’agriculture‘ 
ou emploi dans les villes, de l’Hémione (Equus Hemionus) ou du Pauw 
(£. Burchelli). 

La domestication suppose la reproductien en captivité. 

Concours ouvert jusqu’au 1°! décembre 1880. 

Prix. — 1000 francs. 


3° — 186%. — Métissage de l’Hémione ou de ses congénères (Dauw, 
Zèbre, Couagga) avec la Jument. 

On devra avoir obtenu un ou plusieurs métis âgés au moins d’un an, 

Concours ouvert jusqu’au 1°" décembre 1876. 

PRIX, — 1000 francs. 


“KIT SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


— 186G%7.— Propagation des métis de l'Hémione et de ses congé- 


nères avec l’Anesse. ; 


Ce prix sera décerné à l’éleveur qui aura produit le plus de métis. (IL devra 
en présenter quatre individus au moins.) 
Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1876. à 


Prix. — 1000 francs. 


5° — #8@3. — Prime pour l'élevage de l'Alpaca, de l’Alpa-Lama 
et du Lama. 

Pour tout éleveur qui présentera au concours, avant le 1° décembre 
4878, douze sujets nés chez lui et âgés d’un an au moins. 

Prix. — 1500 francs. 


60 — 18@. — Prix perpétuel fondé par feue 
M°° Ad. DUTRONE, mée GALOT. 


Une somme annuelle de 100 fr. sera, tous les trois ans, convertie en 
prime de 300 fr. (ou médaille d’or de cette valeur), et décernée par con- 
cours au propriétaire ou au fermier qui, en France ou en Belgique, aura 
le mieux contribué à la propagation de la race bovine désarmée SARLABOT, 
créée par feu M. le conseiller Ad. Dutrône. 


Ce prix sera décerné en 1875 et 1878. 
7° — ES733. — Chèvres laitières, 


On devra présenter 4 Bouc et 8 Chèvres d’un type uniforme et justifier que 
trois mois après la parturition les Chèvres donnent 3 litres de lait par jour et par 
tête. 

Les concurrents devront présenter un compte des dépenses et recettes occa- 
sionnées par l’entretien du troupeau, et faire connaître à quel usage le lait a été 
employé (lait en nature, beurre, fromage). 


PRIX. — 500 francs. 
Concours ouvert jusqu’au 4° décembre 1878. 


° — #S34. — Multiplication en France, à l’état sauvage (dans un 
grand parc clos de murs ou en forêt), du Gerf Wapiti (Cervus Canadensis), 
du Cerf d’Aristote (Cervus Aristotelis) ou d'une autre grande espèce. 

On devra faire constater la présence de dix individus au moins, nés à l’état de 
liberté, parmi lesquels six Animaux seront âgés de plus d’un an. 

Prix. — 1500 francs. 

Concours ouvert jusqu’au 4€* décembre 1880. 


9°— #4S34. — Multiplication en France, à l’état sauvage (dans un 
grand parc clos de murs ou en forêt), du Cerf axis (Cervus aæis), du Cerf 
des Moluques (Cervus Moluccensis)ou d’une autre espèce de taille moyenne. 

On devra faire constater la présence de dix individus au moins nés à l’éfat de 
liberté, parmi lesquels six Animaux seront âgés de plus d’un an. 

Prix. — 1000 francs. 

Concours ouvert jusqu’au 1°" décembre 1880. 


40° — 4834. — Multiplication en France, à l’état sauvage (dans un 


grand parc clos de murs ou en forêt), du Cerf-cochon (Cervus porcinus), 
ou d’une autre espèce analogue. 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE. XXME 


On devra faire constater la présence de dix individus au moins més à l’état de 
linerté, parmi lesquels six Animaux seront âgés de plus d’un an. 


Prix. — 500 francs. 
Concours ouvert jusqu’au 1°! décembre 1880, 


. 119 — 4834. — Multiplication en France, à l’état sauvage (dans un 
grand pare clos de murs ou en forêt), du Cerf Pudu (Cervus Pudu) ou 
d’une espèce analogue. 


On devra faire constater la présence de dix individus au moins nés à l’état de 
liberté, parmi lesquels six Animaux seront âgés de plus d’un an. 


Prix. — 500 franes. 
Concours ouvert jusqu'au 1°" décembre 1880. 


42° — 834. — Multiplication en France, à l’état sauvage (dans un 
grand pare clos de murs ou en forêt), de l’Antilope Canna (Boselaphus 
oreas) ou d’une autre grande espèce. 


On devra faire constater la présence de dix individus au moins nés à l’état de 
liberté, parmi lesquels six Animaux seront àägés de plus d’un an. 


Prix. — 1500 francs. 
Concours ouvert jusqu’au 1€ décembre 1880. 


130 — 4834. — Multiplication en France, à l’état sauvage (dans un 
grand parc ou en forêt), de l’Antilope Nylgau (Portax picla) ou d’une autre 
espèce qe taille moyenne. 


On devra faire constater la présence de dix individus au moins nés à l’état de 
liberté, parmi lesquels six Animaux seront âgés de plus d’un an. 


Prix. — 1000 francs. 
Concours ouvert jusqu’au 4° décembre 1880. 


14° — HS34A. — Multiplication en France, à l’état sauvage (dans un 
grand parc clos de murs ou en forêt), d’Antilopes de petite taille. 


On devra faire constater la présence de dix individus nés au moins à l’état de 
liberté, parmi lesquels six Animaux seront âgés de plus d’un an, 


Prix. — 500 francs. 
Concours ouvert jusqu’au 1°7 décembre 1880. 


15° — #83B. — Introduction en France dé l’Hydropoles inermis 
(Ke ou Chang). 
On devra avoir introduit au moins 3 couples de Ke ou Chang, et faire constater 


que trois mois après leur importation, ces animaux sont dans de bonnes condi- 
tions de santé. 


Concours ouvert jusqu’au 127 décembre 1876. 
Prix. — 500 francs. 


160 — 483. — Multiplication en France de l’Hydropotes inermis 
(Ke ou Chang). 
: On devra faire constater la présence de dix individus au moins âgés de plus 
d’un an et issus des reproducteurs importés. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1876. 

Prix. — 1000 francs. 


XXIV SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


470 — HS6G®D. — Domestication en France du Castor, soit du Canada, 
soit des bords du Rhône. 


On devra présenter au moins quatre individus mâles et femelles nés chezle 
propriétaire et ägés d’un an au moins. 
Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1876. 


Prix. — 500 francs. — Le prix sera doublé si l’on présente des individus de 
seconde génération. 


18° — HS83@. — Multiplication en France, à l’état sauvage (dans un 
grand pare clos de murs ou en forêt), du Kangurou de Bennett. 

On devra faire constater la présence de dix individus au moins nés à l'état de 
liberté, parmi lesquels six animaux Rare âgés de plus d’un an. 

PRIX. — 1000 francs. 


Le prix sera doublé si le Kangurou multiplié à l’état sauvage ARPARUEON à l’une 
des grandes espèces (Macropus major, robustus ou rufus). 


Concours ouvert jusqu’au 4°’ décembre 1875. 


DEUXIÈME SECTION. — OISEAUX. 


1° — #SGA. — Introduction et acclimatation d’un nouveau gibier 
pris dans la classe des Oiseaux. 
Sont exceptées les espèces qui pourraient ravager les cultures. 
On devra présenter plusieurs sujets vivants de seconde génération. 
Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1880. 
Prix. — 500 à 1000 francs. 


20 #83®.— Multiplication et propagation en France ou en Algérie 
du Serpentaire (Gypogeranus Serpentarius). 

On devra présenter un couple de ces oiseaux de première génération, et justi- 
fier de la possession du couple producteur et des jeunes obtenus. 

Concours ouvert jusqu’au 17 décembre 1880. 

Prix. — 1000 francs. 


3° — HSGS. — Acclimatation du Martin triste (Acridotheres trisbis), 
. ou d’une espèce analogue en Algérie. 


On devra présenter cinq paires de ces oiseaux, adultes, de seconde génération. 
Concours ouvert jusqu'au 47 décembre 1880. 
PRIX. — 500 francs. 


4° — #83@®. — Multiplication en France, à l’état sauvage, de la 
Pintade ordinaire (Numida Meleagris). 

On devra faire constater l'existence, sur les terres du propriétaire, d’au moins 
quatre compagnies de Pintades de six individus chacune, vivant à l’état sauvage. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 14876. 

PRIX. — 250 francs. 


5°— 4869. — Multiplication en France, à l'état sauvage, du Faisan 
vénéré, 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE. XXV 


On devra faire constater l'existence d’au moins dix jeunes sujets vivant en 
liberté et provenant du couple ou des couples làchés. 

Concours ouvert jusqu'au 1° décembre 1874. 

Prix. — 1000 francs. 


6° — #83@®. — Création d’une race de Poules domestiques pondant 
de gros œufs. 


On devra présenter au moins douze Poules de même type donnant régulière- 
ment des œufs atteignant le poids de 75 grammes. Cette race, créée par la sélec- 
tion ou par croisement, devra présenter les caractères d’une variété de bonne 
qualité pour la consommation. 

Concours ouvert jusqu’au 12" décembre 1880. 


PRIX. — 500 francs. 


70 — #SGI. — Reproduction en captivité du Lophophore (Lopho- 
phorus refulgens) en France. 


On devra présenter au moins six sujets vivants nés chez le propriétaire. 
Concours ouvert jusqu’au 1€ décembre 1878. 
Prix. — 500 francs. 


8° — HSG3. — Reproduction en captivité du Tragopan (Ceriornis 
Satyra ou C. Temminckii) en France. 

On devra présenter au moins six sujets vivants âgés d’un an produits en cap- 
tivité et nés chez le propriétaire. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1875. 

PRIX. — 500 à 1000 francs. 


9° — 183@®. — Introduction et multiplication en France, en par- 
quets, du Tétras huppecol (Tetrao Cupido) de l’Amérique du Nord. 
On devra présenter au moins douze sujets, complétement adultes, nés et éle- 
vés chez le propriélaire. 
Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1875. 
Prix. — 250 francs. 


Le prix sera doublé si la multiplication du Tétras huppecol a été obtenue en 
liberté. 


10° — #S3®. — Multiplication en France, à l’état sauvage, de la 
Perdrix de Chine (Galloperdix Sphenura) ou d’une autre Perdrix per- 
cheuse. à 


On devra faire constater l'existence d’au moins six sujets vivant en liberté et 
provenant du ou des couples lächés. 


Concours ouvert jusqu’au 1°" décembre 1875. 
Prix. — 300 francs. 


119 — 4830. — Importation des grosses espèces de Colins (origi- 
naires du Mexique et du Brésil) et des grandes espèces de Tinamous de 
l’Amérique méridionale. 

On devra avoir importé au moins six couples de ces oiseaux. 

PRIX. — 250 francs. 


Concours ouvert jusqu’au 497 décembre 1875. 


XXVI SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


12° — 487@. — Multiplication en volière des grosses espèces de 
Colins originaires du Mexique et du Brésil, ou des grandes espèces 
de Tinanous de l'Amérique méridionale. 

On devra présenter dix sujets vivants nés des oiseaux directement importés du 
pays d’origine. 

Prix. — 300 francs. 

Concours ouvert jusqu’au 127 décembre 1876. 


13°—#483@. —Reproduction de la grande Outarde (Otis tarda) à l’état 
sauvage, 

On devra prouver que trois couples au moins de grandes Outardes ont couvé 
et élevé leurs jeunes en France, sur les terres du propriétaire. 

Concours ouvert jusqu’au 127 décembre 1875. 

Prix, — 250 francs. 


14° — #483@. — Domestication en France ou en Algérie de lIbis 
sacré (Ibis religiosa) ou de l'Ibis falcinelle (1bis Falcinellus), ou d’un 
autre oiseau destructeur d:s Souris, Insectes et Mollusques nuisibles dans 
les jardins. Sont exceptées les espèces qui pourraient ravager les cultures. 


On devra faire constater l’existence de quatre sujets au moins de première 
génération, vivant en liberté autour d’une habilation et nés de parents libres eux- 


A 


mêmes dans la‘propriété. 
‘ Concours ouvert jusqu’au 4° décembre 1880, 
Prix. — 500 francs. 


15° — #85%.— Introduction et domesticaiion en France du Dromée 
(Gasoar de la Nouvelle-Hollande, D. Novæ-Hollandiæ), ou du Nandou 
(Autruche d'Amérique, Rhea americana). 

On devra justifier de la possession d’au moins six Casoars ou Nandous nés 


chez le propriétaire et âgés d’un an au moins, ou de quatre Casoars ou Nandous 
de seconde génération. 


Concours ouvert jusqu'au 1° décembre 1878. 
Prix. — 1500 francs. 


160 — 4863. — Domestication de l’Autruche d'Afrique (Struthio 
Camelus) en Europe. 

On devra justifier de la possession d’au moins six Autruches nées chez le pro- 
priétaire et âgées d’un an au moins. . 

Concours ouvert jusqu'au 1° décembre 4880, 

PRIX. — 1500 francs. 


17° — 4833. — Domestication d'un nouveau Palmipède utile. 

On devra présenter au moins dix sujets vivants de seconde génération produit 
en captivité. 

Concours ouvert jusqu’au 1% décembre 1880. 

Prix. — 1000 francs. 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE, XXVII 


TROISIÈME SECTION. —REPTILES, POISSONS, MOLLUSQUES, 
CRUSTACÉS, ANNÉLIDES. 


REPTILES. 


1° — #83@. — Introduction et multiplication en France de la Gre- 
nouille bœuf (Rana mugiens) de l'Amérique du Nord. 

On devra justifier de la possession de vingt-cinq sujets nés chez le propriétaire. 

Concours ouvert jusqu’au 47 décembre 1875. 

PRIX. — 250 francs. 


POISSONS. 


0 — HSGO®. — Mémoire sur la transformation des marais salants 
en réservoirs à Poissons. 


Les auteurs des mémoires devront donner une instruction complète sur la 
meilleure manière de procéder à cette transformation, en se basant sur les faits 
déjà observés. 


Concours ouvert jusqu’au 4° décembre 1880. 
Prix, — 500 francs. 


0 — H83@®. — Stabulation des Poissons de la famille des Salmo- 
nidés. 
Démontrer la possibilité d'élever et de maintenir les Salmonidés dans 
des espaces restreints. 


On devra prouver que la chair de ces animaux a conservé ses bonnes quali- 
tés et que les poissons ont atteint une taille marchande (poids moyen de 1 ki- 
logramme et demi). 


Concours ouvert jusqu’au 12° décembre 1875. 
PRIX. — 500 francs. 


0 — #83. — Introduction dans les eaux douces de la France 
d’un nouveau Poisson alimentaire. 


Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins; on devra 
justifier qu’ils ont été importés depuis plus d’un an. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1880. 

Prix. — 500 francs. 


5° — #83. — Acclimatation dans les eaux douces de la France 
d'un nouveau Poisson alimentaire. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1880. 

Prix. — 4000 francs. 

6° — 1838. — Introduction dans les eaux douces de PAlgérie d'un 
nouveau Poisson alimentaire. 


Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins; on devra 
justifier qu’ils ont été importés depuis plus d’un an. 


XXVIIT SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1880. 

Prix. — 500 francs. 

Le prix sera doublé si le poisson introduit est le Gourami. 

7° — ES3e. — Acclimatation dans les eaux douces de l’Algérie 
d’un nouveau Poisson alimentaire. 

Concours ouvert jusqu’au 4° décembre 1880. 

Prix, — 1000 francs. 

Le prix sera doublé si le poisson acclimaté est le Gourami. 

8° — ES38. — Introduction dans les eaux douces de la Guadeloupe 
ou de la Martinique d’un nouveau Poisson alimentaire. 

Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins; on ie 

justifier qu’ils ont été importés depuis plus d’un an. 

Concours ouvert jusqu’au 4° décembre 1880. 


Prix. — 500 francs. 
Le prix sera doublé si le poisson introduit est le Gouraïmni. 
9° — 1S3%. — Acclimatation dans les eaux douces de la Guade- 


loupe et de la Martinique d’un nouveau Poisson alimentaire. 

Concours ouvert jusqu'au 4° décembre 1880. 

Prix. — 1000 francs. 

Le prix sera doublé si le poisson acclimaté est le Gourami. 

10° —483@.— Introduction en France du Salmo fontinalis de l’Amé- 
rique du Nord. 

Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins, et l’on devra 
justifier qu'ils ont été importés depuis plus d’un an. 

Concours ouvert jusqu’au 1°" décembre 1875. 

PRIX. — 500 francs. 

Si des multiplications du Salmo fontinalis ont été oblenues en France, le prix 
sera doublé. 

11° — 4874. — Introduction en France du Coregonus otsego de l'A- 
mérique du Nord. 

Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins, et l’on 
devra justifier qu’ils ont été importés depuis plus d’un an. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1880. 

Prix. — 500 francs. 

Si des multiplications du Coregonus otsego ont été obtenues en France, le 
prix sera doublé. 

12° — #S34. — Introduction en France du Salmo gunniai de l’'Amé- 
rique du Nord. 

Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins, et l’on 
devra justifier qu'ils ont été importés depuis plus d’un an. 

Concours ouvert jusqu’au 1°r décembre 1880. 

Prix. — 500 francs. 


Si des multiplications du Sa/no guaniat ont été obtenues en France, le prix 
sera doublé. 


439 — 183@.— Introduction en France d’un Poisson de l'Amérique 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE. XXIX 


du Nord, pouvant être multiplié dans les étangs, tel que le Black Buss 
(Grystes salmoides). 

Les poissons introduits devront être au nombre de vingt au moins, et l’on devra 
justifier qu’ils ont été importés depuis plus d’un an. 

Concours ouvertjusqu’au 497 décembre 1875. 

Prix. — 500 francs. 


Si des multiplications d’un Poisson d’étang originaire de l'Amérique du Nord 
ont été obtenues en France, le prix sera doublé. 


MOLLUSQUES. 


140 — 486%7.— Acclimatation et propagation d’un Mollusque utile d’es- 
pèce terrestre, fluviatile ou marine, resté jusqu’à ce jour étranger à notre 
pays. — Cette acclimatation devra avoir donné lieu à une exploitation 
industrielle ; ses produits alimentaires ou autres seront examinés par la 
Société. 

Concours ouvert jusqu'au 1% décembre 1880. 

Prix. — 596 francs, 


15° — #8@9. — Reproduction artificielle des Huîtres. — Un prix 
de 1000 francs sera décerné pour le meilleur travail indiquant, au 
point de vue pratique, les méthodes les plus propres à assurer cette re- 
production artificielle. L'ouvrage devra en outre faire connaître d’une 
manière précise les conditions à remplir pour obtenir les autorisations 
de créer des établissements huîtriers, et énumérer les travaux que com- 
portent les bancs d’Huîtres naturels, aussi bien que les caractères aux- 
quels on peut reconnaître qu'un banc est exploitable ; enfin quelles sont 
les mesures qu’il convient de prendre pour l’enlèvement du coquillage. 
En un mot, ce travail devra constituer un véritable manuel d'ostréiculture. 

Concours ouvert jusqu'au 407 décembre 1880. 


CRUSTACÉS. 


16°— 48@6%.— [Introduction et acclimatation d'un Crustacé alimen- 
faire dans les eaux douces de la France, de l’Algérie, de la Martinique 
ou de la Guadeloupe. 

Concours ouvert jusqu'au 1° décembre 1880. 

Prix. — 500 francs. 


QUATRIÈME SECTION. — INSECTES. 


19 — #SG%. — Acclimatation en Europe ou en Algérie d’un insecte 
producteur de cire autre que l’Abeille. 

Concours ouvert jusqu’au 1°° décembre 1880. 

PRIX. — 1000 francs. 


XXX : SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


SÉRICICULTURE. 


2°—4$%3. — Acclimatation accomplie en France ou en Algérie d’une 
nouvelle espèce de Ver à soie produisant de la soie bonne à dévider et à 
employer industriellement. 


Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 4880. 
Prix. — 1000 francs. 


3°— #S63.— Application industrielle de la soie des Attacus Cynthia 
et Arrindia, Vers à soie de l’Aïlante et du Ricim. 


On devra présenter plusieurs coupes d’étoffes formant ensemble au moins 
50 mètres, et fabriquées avec la soie dévidée en fils continus de l’Atiacus Cynthia 
ou de l'A. Arrindia, ou du métis de ces deux espèces et sans aucun mélange 
d’autres matières. Les tissus de bourre de soie sont hors de concours. 


Concours ouvert jusqu'au 4° décembre 1880. 
Prix. — 1000 francs. 


40—ESGA. — Prix fondé par M. BROULN DE LEHU 
Membre de l’Institut. 


Ver à soie du Chêne du Japon (Attacus Yama-mai). — Une médaille 
de 1000 fr. sera décernée en 4880 pour la meilleure éducation en grand 
du Ver à soie Yama-maï. : 


On devra: 4° Avoir obtenu, dans une seule saison, une récolte assez considérable 
pour pouvoir livrer à la filature, et transformer en soie grége de belle qualité, au 
moins 400 kilogrammes de cocons pleins, ou 40 kilogrammes de cocons vides. 


2° Avoir publié ou adressé à la Société un rapport circonstancié pouvant servir 
de guide aux autres éducateurs, et indiquant le système suivi et les résultats 
oblenus, au point de vue de la qualité, de la quantité et des bénéfices réalisés. 


Les-concurrents devront faire parvenir les pièces à l’appui de leur candidature 
avant le 4° novembre 1880. 


NoTA. — Les travaux accomplis, les observations ou les découvertes faites sur l'Vama-maï 
et sur son acclimatation et sa propagation d'ici au 4€ décembre, pourront prendre part aux 
récompenses ordinaires et annuelles de la Société, les droits des concurrents au prix spécial 
étant réservés. 


°— EÉS3:B. — Ver à soie du Chène de Chine (Aifacus Pernyi). — 
Une médaille de 1000 fr. sera décernée en 1880 pour la meilleure 
éducation en grand du Ver à soie de Perny. 


On devra : 1° Avoir obtenu, dans une seule saison, une récolte assez considé- 
rable pour pouvoir livrer à la filature, et transformer en soie grége de belle qua- 
lité, au moins 50 kilogrammes de cocons pleins, ou 5 kilogrammes de cocons 
vides. 

29 Avoir publié ou adressé à la Société un rapport circonstancié pouvant servir 
de guide aux autres éducateurs, et indiquant le système suivi et les résultats 
obtenus, au point de vue de la qualité, de la quantité et des bénéfices réalisés. 

Les concurrents devront faire parvenir les pièces à AFappul de leur candidature 
avant le 427 novembre 1880. 


NoTA. — Les travaux accomplis, les observations ou les découvertes faites sur l’Attacus 
Pernyi, sur son acclimatation et sa ‘Propagation d'ici au 1° décembre, pourront prendre part 
aux récompenses ordinaires et annuelles de la Société, les droits des concurrents au prix 
apécial étant réservés. 


22 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE, XXXI 


6° —ESG%. — Vers à soie du Müûrier, — Études théoriques et pra- 
tiques sur les diverses maladies qui les atteignent. Les auteurs devront, 
autant que possible, étudier monographiquement une ou plusieurs des 
maladies qui atteignént les Vers à soie, en préciser les symptômes, faire 
connaître les altérations organiques qu’elles entraînent, étudier expéri- 
mentalement les causes qui leur donnent naissance et les meilleurs 
moyens à employer pour les combattre. 

Concours prorogé jusqu’au 4° juillet 1874. 

47 Prix. — 2000 francs. 

2€ Prix. — 1000 francs. 


70 —_ 4876. — Vers à soie du Mürier. — Production dans le nord 


: de la France de la graine de Vers à soie de races européennes par de petites 


éducations. 

Considérant l'intérêt qu'il y aurait à encourager la production de la 
graine saine des Vers à soie du Mürier de races européennes, les prix sont 
institués pour récompenser dans les bassins de la Seine, de la Somme, de 
la Meuse, du Rhin, ainsi que dans la portion septentrionale du bassin de 
la Loire, les petites éducations qui permettront de mettre au grainage des 
cocons provenant d’éducations dans lesquelles aucune maladie des Vers 
n'aura élé constatée. 

La Société n’admettra au concours du grainage que les graines de Vers 
à soie de races curopéennes. 

Elle ne primera aucune éducation portant sur plus de 36 grammes de 
graine pour une même habitation. 


Mise au grainage de plus de 50 kilogrammes de cocons. 
Deux Prix de 500 francs chacun. 


Mise au grainage de 25 à 50 kilogrammes de cocons. 
Deux Prix de 200 francs chacun. 


Mise au grainage de 40 à 25 kilogrammes de cocons. 
QuATRE Prix de 100 francs chacun. 


Mise au grainage de 5 à 10 kilogrammes de cocons. 
Dix Prix de 50 francs chacun. 


Ces primes seront distribuées chaque année, s’il y a lieu, jusqu’en 1880. 

Les concurrents devront (cette condition est de rigueur) se faire connaître en, 
temps utile, afin que la Société puisse faire suivre par ses délégués la marche 
des éducations et en constater les résultats. 


APICULTURE. 


8°— 4S37@. — Études théoriques et pratiques sur les diverses mala- 
dies qui atteignent les Abeilles, et principalement sur la loque ou pourri- 
ture du couvain. 

Les auteurs devront, autant que possible, en préciser les symptômes, 
indiquer les altérations organiques qu’eile entraîne, étudier expérimenta- 
lement les causes qui la produisent et les meilleurs moyens à employer 
pour la combattre. 


L-20 


XXXIT SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 
Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1875. 
PRIX. — 500 francs. 
° — H$3@. — Propagation en France de l'Abeille égyptienne 


4 fasciata). 

On devra justifier de la possession de six colonies vivant chez le propriétaire 
depuis au moins deux ans, en bon état, sans dégénérescence ni hybridation, et 
de six bons essaims de l’année parfaitement purs, provenant des ruches mères 
ci-dessus désignées. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1875. 

Prix. — 500 francs. 


10° — ES3@. — Introduction en France d’une Mélipone ou Abeille 
sans aiguillon, américaine ou australienne. 


Présenter une colonie vivant depuis deux ans chez le propriétaire, 
Concours ouvert jusqu’au 127 décembre 1880. , 
Prix. — 500 francs. 


CINQUIÈME SECTION. — VÉGÉTAUX. 


1° — #8G6G. — Introduction en France et mise en grande culture 
d’une plante nouvelle pouvant être utilisée pour la nourriture des bestiaux. 


Concours prorogé jusqu’au 1° décembre 1880. 
4e Prix. — 500 francs. 
2e Prix. — 300 francs. 


2° — #87. — Introduction en France d’une espèce végétale propre 
à être employée pour l'alimentation de l’homme, ou utilisable dans l’in- 
dustrie ou en médecine. 

On devra justifier des qualités de la plante introduite, et prouver qu'elle a été 
cultivée en pleine terre, durant trois années au moins sous le climat de Paris, 
ou sous un climat analogue. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1880, 

Prix. — 500 francs. . 


3° — 4856. — Utilisation industrielle du Lo-za (Rhamnus utilis), qui 
produit le vert de Chine. 

On devra fournir à la Société, sous réserve des droits de propriété, les docu- 
ments relatifs aux méthodes et procédés employés. 

On devra également présenter des spécimens d’étoffes teintes en France avec 
les produits du Lo-za préparés en France. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1875. 

PRIX. — 500 francs. 


40 — _4SGS. — Utilisation industrielle de l’Ortie de Chine (han 
ulilis, tenacissima, etc. ). 


On devra fournir à la Société, sous réserve des droits de propriété, les docu- 
ments relatifs aux méthodes et procédés employés. 

Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1875. 

Prix. — 500 francs. 


AE 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE. XXXIII 


5° — #S3@. — Introduction en France des espèces de Chênes origi- 
naires du Japon (Quercus serrata, glanduligera et autres). 

Considérant les échecs éprouvés généralement dans les éducations des 
Vers à soie Yama-maï, nourris sur les Chênes européens, on pense qu'il 
y aurait intérêt à introduire en France les Chènes japonais. 

Le prix sera décerné à la personne qui pourra justifier de la plantation d’un 


millier de pieds de Chênes japonais, hauts d’un mètre au moins, et qui aura pu 
faire avec les feuilles de ses arbres une éducation de Vers à soie Yama-maï, 


Concours ouvert jusqu’au 4€7 décembre 1880, 
Prix. — 500 francs. 


6° — SGH. — Introduction, culture et acclimatation du Quinquina 
dans une des colonies françaises. 

Concours ouvert jusqu’au 1°° décembre 1880. 

Prix. — 1500 francs. 


7° — 483@. — Introduction et culture en France du Noyer d'Amé- 
rique (Carya alba), connu aux États-Unis sous le nom de Hickory (bois 
employé dans la construction des voitures légères). 

On devra justifier de la plantation sur un demi-heclare de Noyers d'Amérique 
hauts de 1,50 au moins. 

Concours ouvert jusqu’au 1% décembre 1880. 

Prix. — 350 francs. 


8° — HS3®. — Propagation du Mûrier du Japon (Morus Japonica) 
dans le nord de la France. 

La Société, pensant qu’il y a tout avantage à encourager les tentatives 
de sériciculture pour grainage, et par conséquent la plantation du Mürier, 
dans le centre et le nord de la France ; 

Considérant en outre qu'aucune variété de Mürier ne pourra donner 
des résultats plus assurés que le Mürier du Japon, récompensera les pro- 
pagations les plus importantes de cette plante, qui auront été faites dans 
les bassins de la Seine, de la Somme, de la Meuse, du Rhin et dans la por- 
tion septentrionale du bassin de la Loire. 

Ces primes seront distribuées chaque année, s’il y a lieu, jusqu’en 1880, 

Deux Prix de 100 francs chacun. 

QuATRE Prix de 50 francs chacun. 


9° — 18G6G. — Introduction ou obtention pendant deux années suc- 
cessives d’une variété d'Igname de la Chine (Dioscorea Batatas) joignant 
à sa qualité supérieure un arrachage beaucoup plus facile. 

Concours ouvert jusqu’au 1°! décembre 1880. 

4° Prix. — 600 francs. 

2° Prix. — 400 francs. 


10° — 483. — Culture du Bambou dans le midi de la France. 


Le prix sera accordé à celui qui aura : 


1° Cultivé avec succès le Bambou pendant plus de cinq années et dont les cul- 
tures couvriront, au moins pendant les dernières années, un demi-hectare. 


3e SÉRIE, T. I, — Séance publique annuelle. ( 


XXXIV SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


2° Exploité industriellement ses cultures de Bambou. 
Concours ouvert jusqu’au 4° décembre 1880. 
Prix. — 1000 francs. 


L 
119 — ÉS2@. — Culture du Bambou dans le centre et le nord de la 
France. 
Le prix sera accordé à celui qui aura : 
1° Cultivé avec succès le Bambou pendant plus de cinq années et dont les cul- 
tures couvriront, au moins pendant les dernières années, un demi-hectare. 


2° Exploité industriellement ses cultures de Bambou. 
Concours ouvert jusqu'au 47 décembre 1880. 
Deux Prix de 4000 francs chacun. 


49° — 483@. — Multiplication des Bambous. 
. On devra faire connaître et démontrer expérimentalement lés procédés les plus 
sûrs et les plus rapides pour multiplier les Bambous. 

Concours ouvert jusqu’au 4°" décembre 1880. 

Prix. — 500 francs. 

130 — #S32. — Introduction, par semis de glands truffers, de la 
Truffe noire dans une contrée où elle est aujourd'hui inconnue. La culture 


devra être faite suivant les données nouvelles, couvrir au moins un demi- 
hectare, et pouvoir livrer des produits de qualité marchande. 


Le Prix de 1000 fr. sera décerné dans dix ans (en 41882). 
149 — ES38. — Culture de l’Eucalyptus en Algérie, 


Le prix sera accordé à celui qui aura : 


19 Cultivé avec succès l’Eucalyplus pendant plus de cinq années et dont les 
cultures couvriront au moins, pendant les dernières années, 8 hectares. 


2° Exploité industriellement ses cultures d’Eucalyptus. 
Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 4880. 
Prix, — 1000 franes. 


45° — 4833. — Culture de l’Eucalyptus en France et particulière 
ment en Corse. 
Le prix sera accordé à celui qui aura : 


19 Cultivé avec succès l’Eucalyptus pendant plus de cinq années et dont les 
cultures couvriront au moins, pendant les dernières années, 2 hectares, 


20 Exploité industriellement ses cultures d’Eucalyptus. 
Concours ouvert jusqu’au 1° décembre 1880. 
Prix. — 1009 francs. 


La séance s’est terminée par la distribution des récom- 
penses. 

Il a été décerné cette année : 

Premièrement. — Une grande médaille d’or, offerte à la 
Société par M. le ministre de l’agriculture et du commerce. 


PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE. XXXV 


Deuxièmement. — Trois grandes médailles d’or. 

Troisièmement. — (Cinq prix s’élevant ensemble à la somme 
de 6800 francs. F4 

Quatrièmement. — 1° Vingt-trois médailles de première 
classe : 

2° Deux rappels de médailles de première classe; 

3° Seize médailles de seconde classe; 

. 4° Trois mentions honorables ; 

5° Les deux primes annuelles de 200 et de 100 francs, 
fondées par feu M. Agron de Germigny ; 

6° Quatre primes de 400 francs offertes par l’administra- 
tion du Jardin d’acchimatation. 

Le Conseil, par décision du 17 avril 1874, à arrêté que les 
discours et les rapports prononcés dans cette séance seraient 
insérés, #n extenso, dans le Bulletin mensuel de la Société, 
et placés en tête du volume en cours d'exécution. 


Le Secrétaire des séances, 


RAVERET-WATTEL. 


DISCOURS D'OUVERTURE 


Par M. DROUXN DE EHUXS 
PRÉSIDENT 


MESspaAMES, MESSIEURS, 


L'intérêt constant que vous témoignez à la cause de l’accli- 
matation nous impose le devoir de vous prouver qu’elle mérite 
en effet tous vos encouragements. Permettez-moi donc ce 
tenter une nouvelle excursion sur ce domaine des sciences n«- 
turelles appliquées, où j’ai déjà eu l’occasion de m’aventurer 
dans nos précédentes réunions annuelles. 

Il y a moins de trois siècles, végétait inconnue sur les pla- 
teaux de l’Abyssinie une plante qui, grâce à l’activité euro- 
péenne, s’est naturalisée dans de vastes régions de l’Asie, de 
l'Afrique et de l'Amérique, où sa culture prend chaque année 
plus d'extension. L'infusion agréablement aromatique de ses 
graines torréfiées constilue aujourd'hui la boisson favorite de 
plus de cent millions d'hommes. Cette plante, vous l’avez déjà 
nommée, c’est le Cafeier. 

Le Caféier forme un genre de la famille naturelle des rubia- 
cées, qui nous fournit aussi l’ipécacuanha, la garance et le 
quinquina. Ce genre comprend un certain nombre d'espèces 
secondaires, qui croissent à l’état sauvage ou sont cultivées 
sur une petite échelle au Bengale, à l’île Bourbon, sur la côte 
occidentale de l'Afrique, aux Antilles et à la Guyane. Mais l’es- 
pèce qui dépasse en importance toutes les autres, c’est le Ca- 
féier de l'Arabie. 

Le Caféier de l’Yémen, que vous pouvez voir dans les serres 
chaudes des jardins botaniques, est un bel arbuste au port 
pyramidal, aux feuilles d’un vert sombre et luisant, rappelant 
celles du Laurier. Ses fleurs, d’un blanc de neige, et d’une 
odeur suave, offrent tant d’analogie avec celles du Jasmin 
d’Espagne, qu'Antoine de Jussieu avait voulu donner à cette 


DISCOURS D'OUVERTURE. XXXVIT 


espèce la dénomination scientifique de Jasminum arabicum, 
mais celle de Coffea arabica, créée par Linné, a prévalu. A 
ces fleurs succèdent des baies rouges, pareilles à de petites 
cerises, et qui renferment, au lieu de noyau, les deux graines 
aplaties et à sillon longitudinal dont l'aspect vous est si fami- 
lier. Chaque pied, dans les plantations, rapporte en moyenne 
annuelle une livre de ces semences. 

À quelle époque remonte la découverte des qualités exci- 
tantes du café? Une modeste hypothèse l’attribue à un berger 
arabe, qui aurait observé qu'après avoir mangé des graines 
‘de Caféier, ses chèvres se livraient à de plus pétulants ébats. 
D'un autre côté, peu satisfaits de cette humble origine, cer- 
tains commentateurs de la Bible ont voulu trouver dans le 
café le breuvage fortifiant qu'Abigaïl fit servir à David; et un 
voyageur italien de l’époque de la Renaissance, Pietro della 
Valle, a soutenu que c'était le Népenthès célébré par Homère ; 
mais ce ne sont pas là des articles de foi. On peut se contenter 
de croire que cette boisson a été d'usage immémorial chez les 
populations à demi barbares de l’Abyssinie, et que, vers le 
commencement du xv° siècle, un mufti d’Aden, nommé Djemai- 
ed-Din, la fit connaître à ses concitoyens. Le goût du café ne 
tarda pas à se propager parmi les habitants de la Mecque et 
de Médine. De là, d'innombrables pélerinsle répandirent dans 
tout le monde musulman, malgré lanathème des rigides sec- 
tateurs de Mahomet, qui pensaient devoir proscrire le café, 
parce qu'il n’était pas mentionné dans le Coran. Ses partisans 
finirent par l'emporter, si bien que le docte orientaliste Gal- 
land, traducteur des Mille et une nuits, nousassure, dans une 
lettre publiée en 1699 sur l’origine et les progrès du café, 
que toute femme turque à qui son mari refusait cette boisson 
avait le droit de demander le divorce. 

Du Levant, l’usage du café passa en Europe, où il suscita de 
non moins vives controverses. Parmi ses adversaires, je citerai 
M°° de Sévigné, qui le frappait de la même sentence que les 
tragédies de Racine, et le grand Frédéric, qui ne comprenait 
pas qu'on püt lui sacrifier la soupe à la bière. 

Revenons au Caféier, dont j’ai à vous raconter les pérégri- 


XXX VIT SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


nations. Le premier savant européen qui ait donné une des- 


cription du Caféier d'Arabie est le médecin botaniste de Pa-. 


doue,, Prosper Alpin, auteur d’un traité latin sur les plantes 
de l'Égypte, imprimé à Venise en 4594, Les Hollandais eurént 
l’heureuse idée de naturaliser cette plante dans leurs posses- 
sions d'Asie, et partagèrent plus tard avec les autres peuples 
d'Europe cette précieuse conquête. 

Dans son catalogue des végétaux du jardin de l’Académie de 
Leyde, publié en 1732, l’illustre Boerhaave nous apprend que, 
vers l’année 1690, Nicolas Witsen, gouverneur des Indes néer- 
landaises, pressa vivement Van Hoorn, directeur de la compa- 
gnie des Indes, résidant à Batavia, de faire venir d’Arabie des 
semences de Caféier et de les planter à Java. Van Hoorn suivit 
ce conseil. La culture du Gaféier, qui s’est propagée ultérieu- 
rement dans les autres îles voisines, est devenue une source 
de prospérité pour la métropole. 

Parmi les colonies françaises, Bourbon est la première qui 
se livra à cette culture. Imbert, agent de noire compagnie des 
Indes, obtint de l'amitié d’un cheik arabe soixante plants de 
l’Yémen, qu'il fit venir à Bourbon, et qui fructifièrent au point 
que la compagnie put en distribuer des graines aux colons 
en 4710. D’après un rapport du lieutenant du roi Desforges- 
Boucher, la production était déjà fort considérable en 1720, 
et, en 4792, elle versait dans le commerce 90 000 balles d’un 
café qui a toujours gardé le premier rang après celui de 
Moka. De Bourbon, le Caféier a été introduit à l’île de France, 
où sa culture a beaucoup prospéré. 

Un Caféier, envoyé de Java à Witsen, et confié par lui au 
jardin d'Amsterdam, avait donné des graines qui produisirent 
des pieds nouveaux. M. de Resson, lieutenant-général d'artil- 
lerie, amateur de botanique, en obtint un spécimen qu’il céda 
au Jardin des plantes de Paris en 1743. Cet arbuste, le pre- 
mier de son espèce qu'on eût vu en France, fut le sujet d’un 
excellent mémoire d'Antoine de Jussieu, inséré la même année 
dans le recueil de l’Académie des sciences. Le Caféier de M. de 
Resson mourut en 171%, mais cette perte fut presque immé- 


diatement réparée. Pancras, bourgmestre d'Amsterdam et in- 


DISCOURS D OUVERTURE. 000 


tendant du jardin botanique de cette ville, fit hommage d’un 
second arbuste en plein rapport à Louis XIV, avec qui la Hol- 
lande était réconciliée depuis la paix d'Utrecht. La nouvelle 
plante, haute de cinq pieds, et dont la tige mesurait un pouce 
de diamètre, était couverte de feuilles, de fleurs, et de fruits, 
les uns verts, les autres rouges. On l'avait amenée par eau, 
emballée avec grand soin, et protégée par une cage de verre 
contre les intempéries. Escortée par plusieurs membres de 
PAcadémie, elle eut les honneurs d’une présentation à Marlv, 


et Louis XIV la fit placer au Jardin des plantes, où elle fruc- 


tifia et devint la souche de toutes nos plantations des Antilles. 

Mais, pour atteindre ce but, que d'obstacles on eut à sur- 
monter! Dès 1716, de jeunes plants provenant du Caféier 
donné par Pancras avaient été remis à un médecin nommé 
Isemberg, qui décéda peu après son arrivée à la Martinique, 
avant d'avoir rempli l’objet de sa mission. Vers la fin de l’an- 
née, deux autres pieds, envoyés par le Régent, périrent dans 
la traversée, ainsi que le constatent deux lettres des 18 et 
90 mars 1747, conservées aux archives des Affaires Étran- 
gères. L’honneur de réussir dans une troisième tentative était 
réservé à un jeune officier d'infanterie, M. de Clieu d’'Erchigny. 
En 1721, au moment de retourner à la Martinique où l'appe- 
lait le service du Roi, il obtint du Jardin des plantes un jeune 
Caféier, et s'embarqua ‘avec son fragile dépôt sur un navire 
marchand. La traversée fut longue, l’eau vint à manquer, et 
de Clieu dut partager sa faible ration avec sa plante chérie, 
qui, dit-1l, n'était pas plus grosse qu’une marcotte d’œillet. 
Arrivé à la Martinique, il la mit en terre dans une situation 
favorable ; et comme ses voisins voulaient la lui dérober, il lui 
fallut la faire garder à vue par ses plus fidèles esclaves, jusqu’à 
parfaite maturité des graines, qu'ilrépartit entre les planteurs 
les plus capables. Quel fut le prix de sa persévérance ? Vingt 
ans après, les deux livres de café qu'il avait récoltées en 
avaient produit dix millions. J’emprunte ces détails à une 
lettre que de Clieu écrivit au botaniste Aublet, le 22 fé- 
vrier 1774, plus d’un demi-siècle après cet acte de dévoue- 
ment qui honore à jamais sa mémoire. 


XL SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


De la Martinique, le Caféier passa à la Guadeloupe et à Saint- 
Domingue. En 1738, les Jésuites établis dans cette dernière 
colonie reçurent de leurs confrères de la Martinique les pre- 
miers plants d’où devaient sortir un jour ces magnifiques 
récoites qui, en 1789, fournissaient 70 millions de livres de 
café au commerce de la mère patrie. La révolte des esclaves 
et l'émancipation anéantirent pendant plusieurs années cette 
immense production. Mais depuis, elle a repris peu à peu son 
activité. Dès 1825, l'exportation d'Haïti était de 30 millions 
de livres, et, en 1865, elle atteignait le chiffre de 85 millions. 

Je ne dois pas oublier Cayenne. En 171$, les Hollandais 
avaient introduit le Caféier à Surinam; mais, afin de s’assurerle 
monopole de cette culture, ils avaient interdit, sous les peines 
les plus rigoureuses, la sortie des semences vivantes. En 1722, 
M. de Lamothe Aigron, lieutenant du roi à Cayenne, ayant 
été envoyé dans la colonie voisine pour négocier un traité 
d’extradition, persuada à un ancien colon français réfugié à 
Surinam de revenir parmi ses compatriotes, en apportant 
avec lui une livre de café frais. Cet individu, nommé Mour- 
gues, réussit dans sa périlleuse entreprise, et mit le gouver- 
neur en possession d’un millier de graines qui donnèrent 
naissance aux plantations établies dans l’île de Cayenne et sur 
le continent voisin, dans la Guyane française. 

La dernière introduction du Caféier dans nos provinces 
d'outre-mer a eu lieu à la Nouvelle-Calédonie, où cette culture 
avait pris une certaine extension dès 1866. 

Il me reste à vous entretenir de la propagation de cette 
plante dans les colonies anglaises, espagnoles et portugaises. 
Mais, ne voulant pas abuser de votre attention, je me borneraï 
à en dire quelques mots. 

Le professeur Richard Bradley, dans son Traité sur le café, 
publié en 1715, parle d’un pied de Caféier qu’il avait reçu 
d'Amsterdam. Ce n’est cependant qu’en 1728 quesir Nicholas 
Laws inaugura la culture de cette plante à la Jamaïque. Les 
Hollandais avaient naturalisé le Caféier à Ceylan; mais c’est 
seulement sous la domination anglaise, et à partir de 1821, 
que cette colonie est devenue, après Java, le principal lieu 


ds 
137 


DISCOURS D'OUVERTURE. XLI 


de production du café en Asie. L’exportation du café de 
Ceylan s'élevait, dès 1860, à 24 millions de kilogrammes. 
Les Anglais ont introduit la culture du Caféier sur les côtes 
de Malabar et de Coromandel dans l’Inde, où elle est exclu- 
sivement pratiquée par les Européens, et donne d’excellents 
résultats. On leur doit aussi l’'encouragement de cette culture 
aux iles de Sainte-Hélène, de San-Thomé et du Prince dans les 
mers dé l’Afrique, ainsi que sur les côtes orientales et occi- 
dentales de ce continent. Les cafés de Zanzibar, de Mozam- 
bique, du Rio Nunez et de Liberia sont les plus connus parmi 
ces produits de récente date. 

Quoique le sol de plusieurs des colonies espagnoles soit 
très-favorable au Caféier, cette plante ne paraît pas avoir été 
connue aux Philippines avant la fin du xvin° siècle, et elle ne 
figure encore à présent, parmi les denrées de ces iles, que 
pour une proportion insignifiante relativement au sucre etau 
tabac. À Porto-Rico et à Cuba, les cafeteries cèdent de plus 
en plus la place aux cannes à sucre. Dans l’Amérique cen- 
irale, la production du café, introduite à Gosta-Rica vers 
1832, a élevé cet État à un degré de prospérité inconnu 
à ses voisins. Le Nicaragua suit son exemple, bien que des dif- 
ficultés de transport y aient entravé le progrès. Au Guatemala, 
introduction du Caféier ne date que d’une dizaine d’années; 
cette plante s’y développe rapidement, ainsi qu'au Vene- 
zuela, dont l'exportation était, en 4850, de 17 millions de 
kilogrammes. 

Je terminerai cette longue revue par le Brésil, où les Por- 
tugais, dit-on, avaient naturalisé le Caféier dès 1770. La 
culture en était demeurée pour ainsi dire nulle jusqu’au 
commencement du siècle actuel; et, en 1820, ce vaste empire 
ne produisait encore que 7 millions de kilogrammes. A partir 
de cette date, la cherté croissante des cafés, ainsi que le ra- 
lentissement des transactions sur cet article dans les colonies 
françaises et espagnoles, mirent en faveur le Caféier chez les 
propriétaires brésiliens, qui couvrirent de plantations la riche 
province de Rio-Janeiro. On vit monter successivement leurs 
exportations à 59 millions de kilogrammes en 1836, à 106 mil- 


XLH | SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


} 


lions en 1816, à 155 millions en 1860. Dés cette époque, le 
Brésil était devenu le plus grand marché du monde pour les 
cafés : sa production atteignait un chiffre 24 fois plus consi- 
dérable que quarante années auparavant, et l’on’ évaluait 
à 173 millions de kilogrammes sa récolte totale, contre 175 
millions fournis par tous les autres pays ensemble. 

Vous me pardonnerez, Mesdames et Messieurs, l’aridité de 
ces détails. En les résumant ici, j'ai voulu vous rappeler que 
quelques hommes intelligents, courageux et dévoués, avaient 
réussi, par l’acclimatation d'une seule plante, à doter leur 
patrie et le monde entier de richesses incalculables. Que ce 
soit pour nous un exemple et un encouragement! Mais ne 
l’oublions pas, pour obtenir de tels résultats, deux choses sont 
nécessaires : l'énergie du caractère, que ne rebuient ni les 
difficultés de l’entreprise, ni les sarcasmes de l’ignorante in- 
crédulité; puis les lumières de la science qui apprend à tenir 
compte des conditions celimatologiques. Notre devise a été 
tracée d’avance par Bacon, lorsqu'il formulait ce précepte : 
« C'est seulement en obéissant à la nature que l’homme par- 
vient à lui commander. » 


a 


COMMENT L'HOMME 


ASSUJETTI LES ANIMAUX DOMESTIQUES 


Ÿ 
ET 


LES A REFACÇONNÉS POUR SON USAGE 


Par M. EH. BOULEY 


Membre de l’Institut 


MespaMESs et Messieurs, 


Les Sociétés d’acclimatalion, en poursuivant leur but, pro- 
duisent ce résultat qui n’est pas le moins important de tous 
ceux de leur œuvre, qu’elles éveillent dans l'esprit du public 
la salutaire curiosité des choses de la nature, poussent à leur 
étude et la rendent attrayante, en exposant aux yeux dans ces 
jardins dont.se parent, aujourd’hui, quelques-unes des grandes 
villes de l'Europe, ces spécimens d'animaux et de plantes qui 
peuvent donner une idée de la beauté, de la grandeur et de 
la diversité de la création aux citadins que les activités de 
leur vie laborieuse contraignent à rester renfermés dans l’en- 
ceinte de leur ville. 

Mahomet ne pouvant faire venir à lui la montagne qu’il 
évoquait, prit le parti de se rendre vers elle pour ne pas faire 
mentir sa prophétie, puisqu'il fallait, paraît-il, qu’ils se ren- 
contrassent ! Les Sociétés d’acclimatation sont plus puissantes 
que le prophète. Le monde lointain qu’elles évoquent vient à 
elles, et elles tâchent à en faire bénéficier leur pays, non-seu- 
lement par le plaisir des yeux, mais encore et surtout par la 
possession réelle et durable de tout ce dont elles peuvent 
faire la conquête. 

Grave et difficile problème dont je veux essaver de donner 
une idée en esquissant devant vous ce qu'a été l’œuvre de la 
domestication des animaux que nous possédons, et en appe- 
lant aussi votre attention sur quelques-unes de ces conta- 
gions redoutables contre lesquelles nous avons incessamment 


XLIV SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


à lutter pour conserver cette grande richesse que nos animaux 
représentent. 

Peut-être cette entrée en matière va-t-elle jeter quelque 
effroi dans une partie de cet auditoire et lui donner le regret 
d’avoir affronté une séance qui prend des airs scientifiques 
par trop menaçants. Je vais faire tous mes efforts pour que 
ces appréhensions ne soient pas justifiées, en dépouillant mon 
langage des termes qui pourraient l’obscurcir et‘en restant 
dans ces justes limites au delà desquelles vient la fatigue pour 
ceux qui écoutent, et avec la fatigue ces manifestations que 
Piron disait être le seul motif qui empêchait de siffler les 
comédies de Voltaire. 


Impossible, en effet, de siffler quand on baille 


C’est le mot de Piron. 

J'arrive à mon sujet : 

La domestication est une sorte d’association entre l’homme 
et un certain nombre d'animaux de différentes espèces : asso- 
ciation dans laquelle l’homme s’est fait la plus grosse part, 
du droit de son intelligence supérieure, qui lui a donné les 
moyens de les forcer à accepter le contrat qu'il a fini par leur 
imposer. 

Car ce n’est pas voloñtairement, on doit bien le penser, 
que les bêtes que neus appelons domestiques sont entrées dans 
cette société humaine dont elles sont la base première, et qui 
n’a pu se constituer et progresser que par leur concouïs. 
L’innocent agneau n’est pas venu de lui-même, 


M PRE . victime obéissante, 
Tendre au fer de Calchàs une tête innocente; 


ni le Taureau poser sa tête sous le joug ; ni le cheval ouvrir 
la bouche, pour accepter le frein. 

Ce serait calomnier les bêtes que de prétendre que leur 
soumission a été volontaire. Les faits, même encore de nos 
jours, protesteraient contre cette prétention. Malgré le long 
amas de siècles écoulés depuis que l’homme est sorti triom- 
phant de sa lutte contre elles, l’asservissement n’est pas 


COMMENT L'HOMME S'EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. XLV 


accepté sans protestation, peut-on dire, par les générations 
qui se succèdent, et l’homme ne parvient à maintenir sur 
elles son empire que par une action spéciale sur chaque indi- 
vidu dans les races qui ont, pour elles, la puissance muscu- 
laire. Il faut que chacun individuellement soit dressé, c'est- 
à-dire dompté, assoupli, et qu’on réfrène en lui cette tendance 
à reprendre la liberté perdue, qui reste vivace dans l’espèce, 
et qui toujours renait, si puissante dans certaines races et si 
indomptable toujours, qu’on ne parvient à l’éteindre dans les 
individus que par une mutilation qui, en les destituant d’un 
de leurs attributs les plus essentiels, ne laisse plus vivre en 
eux que les instincts de leur propre conservation. 

Si aujourd'hui même encore, après tant de siècles de pos- 
session de nos animaux domestiques, nous trouvons toujours 
dans leurs descendants ce que j'appellerai volontiers l’idée 
innée de l'indépendance ; si le dressage des jeunes ne laisse 
pes que de présenter toujours d'assez grandes difficultés dans 
les espèces dont nous utilisons les forces motrices, on peut se 
figurer facilement ce que leur conquête a dû coûter, à l’hu- 
manité des premiers temps, d'efforts d'intelligence et de vo- 
lonté obstinée. 

La lutte, dans le principe, a dû être bien inégale, car les 
grands animaux dont l’homme aspirait à faire ses associés 
étaient armés contre lui de toute la puissance de leurs mus- 
cles et de toutes les ressources de leur instinct, qui les pous- 
sait à vivre en groupes, à former une société pour leur propre 
compte, et à multiplier leurs forces par leur union. Ce ne fut 
donc pas avec des individus isolés qu’il fut aux prises, mais 
bien avec des légions qui vivaient et marchaient sous la con- 
duite des plus forts, et luttaient, elles aussi, pour l'existence, 
en opposant à leurs ennemis des phalanges compactes, où 
chacun appuyait sa force sur celle de ses associés. 

Mais l’homme comprit sans doute, de bonne heure, que 
cet instinct de l’association qui centuplait la résistance des 
animaux qu’il voulait assujettir, s’il augmentait pour lui les 
difficultés de la lutte, deviendrait en revanche le plus utile de 
ses auxiliaires au jour de son triomphe. Une fois, en effet, 


XLVI SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


que l’homme fut parvenu à réduire en captivité un certain 
nombre de ces animaux qui vivaient en commun et formaient 
entre eux une véritable société, constituée pour la défense des 
plus faibles par les plus forts et de chacun par tous, l'in- 
stinct de sociabilité de ces bêtes devint la condition de leur 
plus facile soumission, car cet instinct qui leur faisait distin- 
guer, parmi les leurs, les plus dignes du commandement quand 
elles vivaient en liberté, dut les déterminer à se plier à la do- 
mination de ce maître nouveau, qui avait été assez fort pour 
s'emparer d'elles et leur limiter l’espace où elles devaient 
s’astreindre à vivre. 

Les animaux prédisposés à devenir domestiques, de par 
leur sociabilité même, ne firent donc que changer de chefs, 
quand l’homme eut fini par triompher de leur résistance. À 
ce point de vue, on peut dire que la domestication implique, 
non pas sans doute le libre consentement des animaux qui y 
ont été soumis, mais une disposition de leur nature qui les 
prédestinait à l'honneur, que l’on peut bien appeler dange- 
reux pour eux-mêmes et pour leur descendance, d’être incor- 
porés à la société humaine. 

Toutefois, ce n'est pas seulement parce qu'ils étaient so- 
ciables de leur nature, que l’homme a fait choix, parmi tant 
d’autres, des premiers animaux qu'il a conquis; guidé sans 
doute par l'expérience de ses chasses, il avait su discerner 
l'excellence de leur chair, de leur lait, de leurs œufs ; il con- 


naissait leur puissance musculaire ; il avait su apprécier le 


pari qu'il pouvait tirer de leurs dépouilles; et sans regarder 
à la peine, il s'attaqua de préférence à ceux qui pouvaient 
devenir ses plus utiles auxiliaires par leurs forces, une fois 
qu'ils seraient domptés, et fournir à sa propre existence le 
plus de ressources par tous leurs produits. 

A cet égard, l'œuvre de la conquête de la première huma-- 
nité a été si parfaite, qu’elle a reçu la consécration des âges 
qui ont suivi et que, dans la longue série des temps qui se 
sont succédé, bien peu de chose a été ajouté à cette œuvre des 
premiers ancêtres, 

Mais l’homme a fait plus que de s’associer un certain 


COMMENT L'HOMME S'EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. XLVIL 


groupe d'animaux pour vivre avec eux et par eux; il les a, 
je crois pouvoir le dire, sans être taxé d’exagération de lan- 
gage, il les a, dans une certaine mesure, refaçonnés pour les 
accommoder d'une manière plus complète aux usages aux- 
quels il voulait les faire servir et obtenir d'eux une plus grande 
somme des produits qu'ils pouvaient lui donner. 

C’est qu’en effet ce qu’on appelle l'organisme animal, c'est- 
a-dire le corps même des animaux, est susceptible de recevoir 
des modifications considérables, si ce n’est dans sa construc- 
tion fondamentale, au moins dans quelques-unes de ses dis- 
positions principales, et surtout dans ses dimensions et dans 
ses apparences extérieures. Quelle différence, par exemple, 
entre ce pelit cheval corse, qui fait ia joie des enfants dans 
le Jardin d’acclimatation, et ce cheval, aux proportions rela- 
hvement colossales, qui est le moteur des lourds fardiers et 
des pesants tombereaux qui circulent, animés par lui, dans les 
rues de nos villes. Quelle différence encore entre ce puissant 
animal et le cheval anglais, aux formes élancées, qui rivalise 
de vitesse avec les animaux les plus agiles de nos bois. 

De même dans l’espèce bovine. Quelle différence entre les 
petites vaches de la Bretagne et ces bœufs gigantesques que 
l’on promenait par les rues aux jours du carnaval ! Quelle diffé- 
rence, dans l’espèce ovine, entre les petits moutons des plaines 
arides, et ces animaux perfectionnés et agrandis de quelques- 
unes des racesanglaises qui sont, pour ainsi dire, la réalisation, 
par les proportions qu’elles ont acquises, de ces types imagi- 
naires dont Voltaire avait peuplé son pays enchanté de l'Eldo- 
rado. 

Et dans l’espèce canine, au milieu de ces innombrables 
variétés que Buffon avait renoncé à classer, tant le désordre 
d’une liberté excessive rend difficile de leur assigner des carac- 
tères, combien est grande la différence entre ces puissants 
molosses dont on utilise encore les forces motrices, et ces ani- 

maux que l’on peut appeler chimériques, tels que le King’s 
Charles ou le redoutable Bichon qui passent une partie de leur 
existence dans le manchon de leur maîtresse. 
. Ces exemples suffisent. 


qe 


XLVIII SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


Quelles sont les causes de ces variations si considérables que 
l’on peut constater dans chaque espèce? variations qui, bien 
que ne s’attaquant pas au type fondamental, peuvent aller 
cependant jusqu’à rendre les animaux d’une même espèce plus 
différents les uns desautres, par leurs apparences extérieures, 
par leur volume, par leurs aptitudes, que ne le sont entre eux 
des animaux d’espèces différentes? 

Ces causes sont multiples. 

On peut dire, d’une manière générale, que les animaux sont 
l'expression fidèle des lieux où ils vivent, et qu'ils en reflètent 
toutes lesinfluences, aussi bien les influences fatales dela nature 
que celles de l’homme lui-même. 

Sur une terre féconde qui offre aux animaux un riche 
banquet, toujours largement servi, comme dans notre grasse 
Normandie par exemple, l'organisme des bêtes peut acquérir 
les plus grandes proportions que comporte l’espèce à laquelle 
elles appartiennent. 

Sur une terre trop avare, au contraire, elles restent néces- 
sairement petites et rabougries. Comment pourraient-elles y 
grandir et s’y développer quand le sol ne leur fournit qu'avec 
parcimonie les matériaux de leur propre formation? 

La nourriture! Voilà l’une des conditionsles plus essentielles 
de ces changements de dimensions et de poids qui s’établissent 
dans les espèces et qui deviennent assez fixes pour rester les 
attributs d’un groupe déterminé, tant que durent et persistent 
les circonstances qui les ont fait naître. Une nichée de rats qui 
naîtrait dans un de ces fromages de Hollande où La Fontaine 
s'est plu à placer l’un de ses personnages de cette espèce, y 
acquerrait, à coup sûr, une bien plus belle corpulence qu’une 
nichée de la même famille qui, dès son entrée dans la vie, ne 
trouverait àse mettre sous les dents que la bien maigre pitance 
des feuillets de vieux livres, qui peuvent être pour notre esprit 
une forte nourriture, mais ne sauraient constituer, même pour 
des rats, un aliment corporel des plus substantiels. S'ils s’en 
servent pour cet usage et s’ils nous les dévorent avec l’achar- 
nement qu'ils y mettent, à notre grand désespoir, c’est 
parce qu’en définitive, ils ne trouvent pas mieux où se prendre 


COMMENT L'HOMME S'EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. XLIX 


pour assouvir leur appétit. Mais placez-les entre deux poids 
égaux de vieux papiers el de fromage, et vous ne les verrez 
pas, soyez en sûrs, comme l’âne légendaire, si fameux dans 
l’école : 
| De l'équilibre accomplissant les lois, 
Mourir de faim de peur de faire un choix, 


À supposer, maintenant que les descendants de l’une et de 
l’autre de ces nichées demeurassent, respectivement, pendant 
une longue série d’années, dans des conditions toujours sem- 
blables pour chacune d’elles, la théorie permet &e prévoir 
qu’on verrait se constituer, sous l'influence de régimes si 
opposés, deux variétés, j'allais presque dire deux races, de ces 
commensaux incommodes, l’une aux proportions superbes et 
l’autre, toute réduite, qui ne serait, à vrai dire, qu’une minia- 
ture de la premiére. 

Mais ce n’est pas la nourriture seule qui fait les races. 
D’autres influences y concourent, plus ou moins obscures ou 
appréciables, plus ou moins puissantes aussi. Tout marque son 
empreinte sur l'organisme animal et tend à le modifier dans un 
sens déterminé : Le soleil, l'air, l’eau, la nature du sol, le 
courant d’un fleuve, les marécages, l'humidité, la sécheresse, 
la montagne et la plaine etc., etc. Suivant la nature deslieux, 
enfin, les individus des mêmes espèces revêtent des caractères 
qui permettent d'établir des distinctions entre les groupes 
particuliers qu’ils constituent, et de leur assigner leur prove- 
nance. : | 

A côté de ces influences fatales et impérieuses comme toutes 
celles de la nature, vient se placer celle de l’homme qui est 
aussi créatrice : créatrice de seconde main, sije puis ainsi dire, 
mais qui, pour n'être pas souveraine, ne laisse pas, cependant, 
que d'imprimer à l'œuvre première de telles modifications 
qu’elle en fait autre chose, non pas dans son essence et dans 
son plan fondamental, mais dans sa forme el aussi, ce qui est 
plus essentiel, dans son aptitude à produire pour la société 
humaine ce qu’elle peut lui donner d’utile à ses besoins et à ses 
desseins. | 

3° SÉRIE, T. |. — Séance publique annuelle, d 


PRE RE 
+ 


ge 


L SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Mais cette influence de l’homme, si efficace de nos jours, elle 


est restée longtemps, si non tout à fait inactive, au moinsbien | 


faible comparativement à celles de la nature. 


Pendant une longue période de temps, l’homme s’est à peu 


près borné au rôle d’être le chef de ses associés. Il leur donna 
Vasile et la nourriture, et, en retour, il s’empara de leur toison, 
de leur lait, de leur chair, de leurs forces aussi, et même de 
leur instinct et de leur intelligence. Car les bêtes sont intelli- 
gentes, elles aussi, malgré la signification injurieuse qui 
s'attache à leur nom quand nous l’attribuons à un de nos 
semblables ; et, même trop souvent hélas, il se trouve des 
hommes qui se ravalent si complétement au-dessous d’elles que 
quand ils marchent de compagnie, on n’est que trop justifié 
de leur appliquer, avec quelque variante, ce vers connu du 
grand fabuliste : 


Le plus béte des deux n’est pas celui qu’on pense ! 
?P q 


Je reviens à mon sujet : Pendant longtemps, disais-je, 


l'homme s’est borné à être le chef des animaux qu'il s'était 
associés, satisfait de les avoir conquis et les acceptant tels que 


les lui avait livrés la nature qui, seule, présidait à leur produc- 
tion et à leur multiplication. Elle commandait en maître; 
l'homme assistait au spectacle de laccomplissement de ses 
œuvres, mais sans les comprendre encore. 

Mais l'esprit humain est construit pour saisir les rapports 
des choses et en déduire les lois qui les régissent; et quand 
bien même il ne s'applique pas activement à la recherche des 
causes, la simple impression qu'il reçoit des faits qui se succé- 
dent finit toujours par faire naître en lui l’idée du lien qui les 
unit et de la raison de leur succession dans l’ordre où ils appa- 
raissent. : 

‘C’est ainsi, par exemple, que les premiers observateurs ont 
dù être conduits à comprendre l'influence des lieux par la 
comparaison des animaux d’un pays à ceux d’un autre. 

De même, en voyant se produire, au milieu d’un même 
groupe d'individus, par le fait de circonstances fortuites, 
d'abord inconnues pour lui, des séries d’animaux, distincts du 


‘Jh 
nd 1 


COMMENT L'HOMME S'EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. LI 


groupe primitif de génération en génération, l’homme a fini 
par saisir le procédé que la nature met en usage pour établir 
ou créer les variétés et même les races dans les espèces. C’est 
ainsi que l’art de l’éleveur s’est peu à peu constitué et que, 
d'âge en âge, de siècle en siècle, par l'accumulation des 
connaissances, d’abord empiriquement acquises et, aujour- 
d'hui, raisonnées, il est arrivé à une puissance que l’on peut 
appeler créatrice, tant les animaux que produit l'industrie 
humaine portent sa forte empreinte et différent de ceux qui 
ne sont que naturels, si l’on peut ainsi parler. 

« Tout est parfait sortant des mains de la nature, tout 
dégénére entre les mains de l’homme, » a dit Rousseau, dans 
un de ces accès de mauvaise humeur auxquels si communé- 
ment il se laissait aller. Je ne saurais pour ma part souscrire 
à cette élrange proposition, même en limitant son application 
à l’espèce humaine que Rousseau avait particulièrement en 
vue lorsqu'il assénait sur elle ce paradoxe. L'homme au moment 
où il sortait des mains de la nature, pour parler le langage de 
Rousseau, m'était pas absolument scrupuleux dans sa lutte 
pour l'existence, et s’il mangeait les bêtes que sa chasse 
pouvait lui procurer, un morceau d’un de ses semblables ne 
lui répugnait pas. Qu'on me pardonnele jeu de mots : La faim 
alors justifiait le moyen. Mais si ce moyen de se restaurer 
s'explique et même s’excuse par les nécessités des temps où 
il était communément en usage, on ne saurait l’invoquer 
comme une preuve bien convaincante de la perfection de 
l'humanité primitive. 

Un grand progrès, au contraire, se trouva réalisé et l’hu- 
manité marcha vers un état meilleur le jour où, par la conquête 
des animaux domestiques, elle put assurer son existence du 


lendemain. Ce point de vue grandit singulièrement les services 


dont nous sommes redevables à ces frères inférieurs, comme 
les appelle saint François de Sales, qui ont sauvé l’homme 
contre lui-même, c’est-à-dire contre les fureurs de son ap- 
pétit inassouvi, qui le poussait à faire sa proie de ses sem- 
blables. | LA 
Cette grandeur des services que nous devons à nos animaux 


Les 


TIT : SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


explique les soins que de tout temps on en a pris, et cam- 
ment l’industrie humaine s’est appliquée à les perfectionner, 
c’est-à-dire à les accommoder dans leurs formes, dans leurs 


dimensions et dans leurs aptitudes, aux usages les plus com- : 


plets et les plus utiles que l’on puisse en tirer. Sans doute 
que dans ce refaçonnement, la beauté première, résultant de 


la juste harmonie des lignes et de l’équilibration des parties 


disparaît quelquetois. Témoin ces formes étranges que lin- 


dustrie de l’éleveur a su donner au porc domestique. Quelle 


différence entre cet animal et le sanglier dont on le prétend 
descendu ? C'est là une sorte de chimère. Son corps cylin- 
drique, soutenu par quatre piliers trés-grêles, qui s'élèvent à 
peine au-dessus du sol, ne laisse plus voir aucuns reliefs. Le 
squelette et ses muscles ont disparu sous une épaisse couche 
de graisse. Cet animal n’a presque plus de facultés locomo- 
trices. On ne l’a créé et on ne le fait vivre que pour manger, 
c’est-à-dire pour transformer, à notre profit, les matières dont 
on le nourrit, et en faire pour nous ces jambons et ces pro- 


duits multiples que l’art du charcutier sait confectionner et 


qui sont partout, pour lespopulations humaines, une si grande 
ressource. 

Les éleveurs anglais sont parvenus à imprimer à l'espèce 
bovine des transformations analogues. Dans les races destinées 
exclusivement à l’alimentation de l’homme, ils ont été assez 
habiles pour diminuer le volume du squelette et augmenter 
proportionnellement la masse des parties qui possèdent à un 
plus haut degré des propriétés alimentaires : les chairs et la 
graisse ; et ils ont précipité, pour ainsi dire, dans ces orga- 
nisations nouvelles, le mouvement vital, afin de rendre leur 
développement plus hatif, et que, grâce à cette précocité, le 
moment arrivât plus tôt où l’on peut mettre à profit, par un 
abatage anticipé, les matières alimentaires qu’on les a forcées 
à accumuler pendant ce peu de temps qu’on les à laissés 
vivre. 

Mèmes résultats obtenus dans l'espèce du mouton et par les 
mêmes procédés. 

Peut-être trouvera-t-on que c’est un peu abuser des mots 


per 


COMMENT L'HOMME S EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. LIIT 


que d'appeler perfectionnement ces étranges transformations 
que l’on a fait subir aux animaux pour les adapter plus parti- 
culièérement à l’une des plus importantes de leurs fonctions 
domestiques, celle de producteurs de matières alimentaires 
pour la société humaine ? Sans doute, si l’on se place au point 
de vue de la statuaire ou de la peinture. Mais l’esthétique de 
l’éleveur ne saurait être la même; pour lui l’idée du beau se 
confond avec celle de l’utile, et 1l réalise un perfectionnement 
véritable quand il parvient à rendre les animaux capables, 
même à leur propre détriment, de la plus grande somme des 
effets qui peuvent nous être profitables. 

. Rendre les animaux domestiques les plus utiles possible par 
leur vie et par leur mort, voilà l'idéal que se propose aujour- 
d’hui l’industrie qui s'applique à les produire; et quand elle a 
destitué un animal de son activité musculaire, en le forçant à 
accumuler en lui une masse de graisse qui le réduit, par son 
poids, à une impotence presque complète, elle l’a perfectionné 
non pour lui à coup sûr, mais pour nous, puisque sa destinée, 
de par les lois de la nature, est de nous servir d'aliments. 

Au point de vue de la production de la force, l'art de l’éle- 
veur s’est appliqué également à perfectionner nos animaux 
auxiliaires, de manière à les rendre capables d'une plus 
grande somme d'effets utiles, comme machines motrices. Mais 
ici le mot perfectionnement peut être pris dans l’acception 
que nous sommes habitués à lui donner, et le sentiment 
du beau, loin de trouver à reprendre aux changements 
imprimés aux corps des animaux refaçonnés par l’industrie 
humaine, ne peut qu'y applaudir. C’est qu’en effet, Join 
d’avoir élé défiguré par un embonpoint excessif, comme 
celui qui n’est entretenu que pour servir à l'alimentation 
de l’homme, l'animal dont on utilise la puissance musculaire 
possède, au contraire, au plus haut deoré, les attributs 
auxquels nous attachons l’idée de beauté, parce qu’ils sont 
justement pour nous l'expression de la force : la taille et le 
volume accrus, le relief des os, les saillies que forment les 
muscles, comme dans l’Hercule antique. 

Le cheval anglais, par exemple, c’est le cheval arabe, mais 


3 


. LIV SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


développé dans de plus grandes et, pour nous, dans de plus 
belles proportions. Il a hérité de son ancêtre cette grande 


énergie nerveuse qui se caractérise par l'attitude élevée dela 


tête, l’éclair du regard, l’impatience des mouvements, maïs il 
peut mettre au service de cette énergie des leviers osseux 
plus longs, un appareil musculaire plus puissant, et gräce à 
cette disposition mécanique perfectionnée, il est capable de 
parcourir l’espace avec plus de vitesse et de produire plus de 
force. 

De même le magnifique percheron que nous voyons ami- 
mer de sa vitesse, dans les rues de Paris, cette lourde masse 
des voitures omnibus qu’il traîne avec tant d’aisance et, dirai- 
je même, avec tant de superbe, tant il porte haut la tête et 
semble avoir conscience de ce qu’il vaut et de ce qu'il fait, au 
milleu de toutes les activités de la ville dont il est un des plus 
puissants organes. 

Qu'il descende ou non de l'arabe, grave question que je 
me garderai bien d'aborder ici, à coup sûr c’est encore un 
produit de l’industrie humaine ; c’est elle qui, en le façonnant, 
a résolu le problème d’en faire cette machine vivante qui est 
si merveilleusement adaptée à nos services, tout à la fois par 
la force qu’elle peut déployer et par la vitesse du mouvement 
qu'elle peut imprimer aux masses si pesantes qu'elle dé- 
place. 

La solution de ce problème n’était pas seulement dépen- 
dante de l’augmentation de la force du moteur; il fallait 
aussi que le mouvement produit le fut avec uniformité, et 
non pas par secousses incessamment répétées, comme celui 
qui résulte de l'allure du galop, c’est-à-dire de l'allure la plus 
naturelle au cheval lorsqu'il se meut avec vitesse. 

Ïci encore l’industrie humaine est intervenue, et ce n'a pas 
été sans doute la moindre des difficultés qu'il lui a fallu sur- 
monter que de déshabituer le cheval de son mode le plus na- 
iurel de progresser avec vitesse pour lui faire adopter de 
préférence, dans les mouvements rapides, cette allure du 
trot, que l’arabe connaît à peine, et dans laquelle la propul- 
sion est déterminée par les actions de deux membres qui se 


NL 
ue. 


COMMENT L'HOMME S’EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. LV 


succèdent par paires diagonales, et agissent respectivement 
avec une égale intensité, pour produire un mouvement uni- 
forme. 

“Quand on voit, par les rues, tous ces chevaux qui courent, 
avec plus ou moins de rapidité à l'allure du trot, il ne vient 
à coup sûr à la pensée de personne que ce ne soit pas là une 
allure qui leur soit naturelle, tant ils l'exécutent naturelle- 
ment, en effet. Il n’en est rien cependant; le cheval ne marche 
ainsi que par un commandement exprès de l’homme et s'il 
n'avait pas su s’y plier, les services qu’il nous rend comme mo- 
teur rapide eussent été singulièrement réduits, surtout dans les 
rues des villes populeuses, où le conducteur doit toujours être 
maître de son cheval, et en puissance de l'arrêter sur place 
s’il se trouve devant des obstacles inattendus, ou en présence 
de dommages qu’il peut causer. Avec l'allure du galop, la 
quantité du mouvement produit rend impossible um arrêt 
instantané, qui est relativement facile quand l'animal ne fait 
que troiter. 

Voilà donc encore un perfectionnement que le cheval a 
subi de par la volonté humaine et qui, à tous les points de 
vue, est un perfectionnement véritable, car il l’a embelli, en 
même temps qu’il nous a permis de Padapter d’une manière 
plus complète aux services que nous pouvons obtenir de sa 
force. Rien n’est beau, en effet, comme un beau trotteur, 
embrassant le terrain de toute l'étendue de ses membres qu’il 
développe avec une pleine énergie et franchissant l’espace, de 


. plusieurs mètres, à chacun de ses pas. Cette libre allure parti- 


> 


cipe quelque peu du vol de Poiseau. À chaque pas, en effet, il 


y à un moment rapide comme celui de l'éclair, mais toujours 
renouvelé, où le cheval qui trotte quitte la terre des quatre 


pieds et, comme fait l'oiseau, parcourent l’espace dans l'air. 


Mais je ne veux pas multiplier davantage les exemples. Il 
me suffit de ceux que J'ai cités pour montrer ce que l’homme 
a su faire des animaux qu'il s’est assujettis, et comment, s’em- 
parant d’eux tout entiers, il s’est substitué quelquepeu au 
rôle du Créateur pour en modifier l’œuvre primitive, et la mieux 
accommoder à ses propres usages. 


.LVI SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Comment ces étonnants résultats ont-ils été produits? La 
matière animale vivante n’est pas comme le bloc de marbre 
d'où l'artiste inspiré peut faire sortir, sous les coups de son. 


-ciseau, la forme idéale qu’il a conçue. Non sans doute; mais 


elle est susceptible cependant de subir des empreintes, de les 
conserver, et même de les transmettre, à la condition qu’on 
la façonnera avant qu’elle ait pris dans l'individu la forme qu'il 
doit revêur d’après le plan antérieur dort il procède. Ce n’est 
donc pas sur les individus déjà nés que peut porter, de la ma- 
nière la plus sûrement efficace, l'action modificatrice de 
l’homme, mais bien sur ceux qui doivent naitre, sur les géné- 
rations à venir. (est dans ces conditions et dans ces condi- 
tions seules que le plan humain peut se surajouter à celui de 
la nature et sans se substituer complétement à lui, —- chose 
impossible car il est immuable dans ce qu’il a de fondamental, 
— peut toutefois le modifier assez dans quelques-unes de ses 
disposilions, pour que les animaux, conçus sous Pinspiration 
humaine, revêtent ces formes et ces attributs qui les font si 
différents dans l’état de domesticité de ce qu'ils étaient avant 
que l’homme n’ait marqué sur eux son empreinte. 

Mais comment enfin parvient-il à l'accomplissement de cette 
œuvre? En ne laissant que le moins possible au hasard et à la 
fatalité des choses dans les conditions qui président à la nais- 
sance et au développement des animaux. 


JL faut des époux assortis 
Dans les liens du mariage. 


disait une romance, aujourd’hui bien vieillotte, qu’on chan- 
tonnait du temps que j'étais jeune. La poésie française compte 
à coup sûr des vers d’une plus haute inspiration. Mais comme 
le précepte est sage et comme les choses n’en iraient que 
mieux, si toujours, et à tous les points de vue, et, oserais-je 
dire, dans toutes les espèces, ce précepte était rigoureusement 
observé. 

Bien assortir les époux : Noïlà, en effet, la première et la 
principale des règles à l'observation de laquelle l'homme doit 
d'avoir résolu le problème du perfectionnement des espèces 


e. 


COMMENT L'HOMME S'EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. LVII 


. animales soumises à la domesticité. Bien assortir les époux, 


c’est-à-dire les choisir de telle sorte qu’ils réunissent en eux, 
au plus haut degré possible, les qualités de construction inté- 
rieure, de conformation extérieure, de dispositions, d’apti- 


* tudes, dont on se propose de faire hériter leurs descendants. 


Puis, quand un premier résultat a été obtenu avec ceux-ci, 
choisir toujours parmi eux les meilleurs pour arriver à des ré- 
suitats meilleurs encore et toujours ainsi : Voilà la règle. 

Et c’est ainsi que l’homme, empruntant à Dieu la sub- 
stance vivante, est devenu à son tour créateur dans la me- 
sure même où sa puissance peut s'exercer; car c’est créer, je 
le répète encore, que de modifier dans les animaux la taille, 
les formes, les aptitudes, les instincts, la marche, les poses, 
la couleur et jusqu'aux proportions respectives des parties. 

Mais il ne suffit pas de faire naître d’après un plan prémé- 
dité, il faut encore placer l'animal qui renferme en lui Pédée 
à réaliser dans de telles conditions, que tout, dans les cir- 
constances extérieures, concourt et, ce qui vaut mieux encore, 
conspire à son développement intégral. Ce serait en vain qu’on 
l'aurait fait naître le mieux possible, c’est-à-dire qu’on aurait 
tâché de lui assurer la plus grande somme possible des qua- 
lités que l’hérédité peut donner, si une fois venu au mondeil 
ne trouvait pas à sa disposition, et dans la mesure et avec les 
qualités nécessaires, les substances qui conviennent à sa for- 
mation d’après le plan qu'il porte en lui; si, en un mot, l'air, 
les eaux, les lieux n'étaient pas à sa convenance organique, 
si, enfin, sa nature essentielle était en contradiction flagrante 
avec les circonstances locales et ne pouvaient pas s’y accom- 
moder. 

L'art consiste donc non-seulement à bien faire naître, mais 
encore à bien entretenir, ce qui implique une appropriation 
bien étudiée entre les animaux et les lieux, de telle façon que 
loin d’avoir à lutter incessamment contre la nature, on trouve 
en elle l’assistance de ses forces toujours actives, et avec les- 
quelles l'homme doit toujours compter s’il veut rester maître 
de ce qu'il a conquis. Quelle erreur par exemple, et combien 
de fois commise, que de croire qu’il suffit pour grandir une 


LVIII SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


race dans un pays peu fertile, d’y importer des animaux de 
grande taille ! Lutte imprudente et toujours impuissante ! La 
taille, le volume, le poids ne peuvent s’entretenir et rester, 
entre eux, dans des rapports harmoniques, qu'autant que 
l'organisme trouve toujours à sa portée une nourriture qui 
leur soit proportionnelle. Faites naître des animaux destinés 
à devenir grands de par leurs ascendants dans un pays qu 
n’est pas assez fertile pour fournir aux nécessités de leur dé- 
veloppement intégral, et vous les verrez immédiatement se 
déformer. Autour de leurs os trop longs se grouperont des 
muscles trop maigres; le ventre qui ne sera pas suffisamment 
rempli se rétractera, et à la place de la petite race du pays 
parfaitement adaptée par son volume aux circonstances lo- 
cales, et très-harmonique dans ses formes, vous aurez uñe 
race toute manquée, aux os trop longs et trop lourds, maigre 
en Chairs, toute disloquée, toute dégingandée ; preuve vivante 
qu'il faut pactiser avec la nature si l’on veut réussir à per- 
fectionner ses œuvres et non pas la violenter, en la contre- 
carrant; car toujours elle reprend le dessus quand on s’obs- 
tine à agir contre elle, et elle sait bien nous montrer que 
c’est à la condition de l’imiter que nous pouvons réussir à 
constituer et à maintenir les variétés dans les espèces et dans 
les races. 

Ce n’est pas tout; il ne suffit pas de bien faire naitre, il 
ne suffit pas de bien nourrir, il faut encore que par l’action 
qu’il exerce sur lui l’homme dispose l'animal à la production 
la plus abondante possible de ce qu'il peut lui donner : sa 
laine, son lait, sa chair, sa force, son instinct, son intelli- 
gence, car il met à contribution tout ce qui est en lui, et il le 
perfectionne dans toutes ses facullés et toutes ses aptitudes. 

Il y a une manière de faire manger les bêtes pour que 
mieux elles s'engraissent; il y a une manière de les nourrir 
pour qu’elles soient plus fécondes en lait; il y a une manière 
de les exercer pour qu'elles soient plus puissantes en forces ; 
et c’est par ces pratiques variées, appropriées aux destina- 
tions des animaux, qu’on fait ce qu'on appelle leur éducation, 
c’est-à-dire qu’on développe en eux leurs facultés physiques, 


COMMENT L'HOMME S'EST ASSUJETTI LES ANIMAUX.  LIX 


fonctionnelles, instinctives et intellectuelles aussi : et tout cela 
avec un art qui, à notre époque, est devenu tout à fait supé- 
rieur, grâce aux Anglais, nos maîtres, et aux agriculteurs de 
tous les pays qui ont su s'inspirer de leurs exemples et mar- 
cher sur leurs traces. 

Ces différents procédés d'élevage des animaux donnent 
tous les jours et partout de si beaux résultais que ce serait, 
en vérité, réaliser un progrès que de s'en inspirer pour l’éle- 
vage et l'éducation des enfants. Que de pauvres nourrissons, 
par exemple, échapperaient à la mort qui fait, parmi eux, de 
si abondantes moissons, si l’on était aussi soucieux de les bien 
nourrir et intelligent dans l'emploi des moyens que le sont les 
_ éleveurs pour les veaux qu'ils engraissent. 

Et au point de vue de l'éducation physique, que de bons 
exemples à imiter ! | 

Si l’on parvient à donner au poulain, par la manière mn 
on sait l’élever, des chairs si fermes, des tendons si tenaces 
et une si grande puissance de respiration, est-ce que, par l’ap- 
plication de procédés analogues, on n’arriverait pas dans 
l'espèce humaine à des résultats semblables ? Est-ce qu'on ne 
pourrait pas doter les enfants, tout aussi bien que les fils des 
chevaux, d’un corps vigoureux et sain, d'autant plus impor- 
tant pour eux qu'ils ont une âme à y loger et que la santé du 
corps est pour l'âme la meilleure des conditions de sa santé à 
elle-même et de sa solidité dans les épreuves de Ia vie. 

Mens sana in corpore sano ! Ge devrait être là la devise de 
tous les éducateurs de la jeunesse et, comme dans les sociétés 
antiques, ils devraient avoir tout autant de soucis de former 
le corps des jeunes citoyens que de conduire leur esprit. Quel 
beau progrès se trouvera réalisé le jour où ils se glorifieront 
tout autant du développement des mollets de leurs élèves que 
dé la réussite de leurs thèmes. 

Mais hélas, que nous sommes loin d’en être là! le thème, 
un instant vaincu, a repris sur les âmes son trop puissant em- 
pire — les âmes universitaires s’entend — au grand dommage, 
je crois, de l'éducation physique à laquelle on s’obstine à ne 
pas faire une assez large place. Peut-être, me dira-t-on, avec 
Philaminte, 


EX SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Que c’est trop se baisser aux soins matériels 
Au lieu de se hausser vers les spirituels ; 


et que le corps, cette guenille, 


N'est pas d’une importance 
D'un prix à mériter seulement qu’on y pense. 


Mais je suis de l’avis de Chrysale; je trouve que la gue- 
nille doit nous être chère, dans nos enfants surtout et avant 
tout; et je voudrais, puisqu'aussi bien nous en avons les 
moyens, qu'on la constituât le plus possible en un vêtement 
solide et superbe. Voyez, dirai-je aux adorateurs du thème, 
dussent-ils me répondre que « mon discours grossier Îles. 
assomme terriblement », voyez, leur dirai-je, ces magni- 
fiques poulains qui viennent, dès l’âge de trois ans, se dis- 
puter les prix sur les hippodromes; voyez comme ils sont 
Peaux et forts, comme leur regard est fier, comme leur phy- 
sionomie exprime bien les passions généreuses qui les ani- 
ment; et combien, s’ils avaient une âme, elle serait super- 
bement logée dans un corps si bien fait pour répondre à 
toutes ses activités ! : 

. Quel mal y aurait-il à ce que les éducateurs de notre jeu- 
nesse se réglassent sur les leurs et que les descendants de la 
race humaine ressemblassent par ces beaux côtés à ceux de 
la race chevaline ? Peut-être que si l’on suivait ces errements, 
les premiers seraient moins forts en thème; mais si, comme 
les seconds, ils étaient forts et solides sur leurs jarrets, y 
aurait-il, vraiment, à cela un bien grand dommage ? 

Non, non! Poussons au thème, comme Hippolyte au 
monstre, et équilibrons un peu mieux les choses dans l’édu- 
cation de nos enfants, en consacrant un peu moins de temps 
à la culture de leur esprit et un peu plus à celle de leur corps. 
Ce sera tout profit et pour l’un et pour l’autre. 

Mais ce n’est pas seulement au point de vue de l'éducation 
physique de nos enfants, que l’étude de la domestication des 
animaux peut nous fournir d’utiles enseignements; il en est 
d’autres, tout autant précieux, dont la société humaine pour- 
rait encore tirer un bien grand profit si elle savait les com- 


COMMENT L'HOMME S’EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. EXI 


prendre : ce sont ceux qui sont donnés par la loi de l’hérédité, 
cette loi que l’on peut appeler fatale, qui veut que les qualités 
comme lesdéfauts, les bonnes comme les mauvaises aptitudes, 
les prédispositions heureuses ou malheureuses, les habitudes 
même, les formes, la couleur, jusqu'aux attitudes, jusqu'aux 
difformités; que les instincts enfin et les nobles facultés de 
l'intelligence; qu’en un mot tous les caractères, à quelque 
ordre qu'ils appartiennent, soient susceptibles de se trans- 
mettre avec une constance qui, dans les cas malheureux, est 
réellement effrayante. 

C’est cette loi qui sert de base à toutes les pratiques de 
l'éleveur, c’est d’elle qu’il s'inspire pour fixer les caractères 
et élever les qualités dans les races à ler plus haute puis- 
sance; c'est d’elle que procède aussi l’exagération des défauts. 
Dans l'étude des animaux domestiques, l'expérience des 
choses fait voir tous les jours ce qu’elle peut, pour le bien 
comme pour le mal, car elle est également puissante pour Pun 
et pour l’autre, et elle peut conduire tout aussi bien à la pro- 
duction des monstres qu’à celle des types les plus beaux. 

Ce sont là des notions qu'on ne saurait trop souhaiter de 
voir répandues et comprises; 1l faudraitles inculquer profon- 
dément dans les esprits, dans l’esprit des jeunes surtout, sur 
qui repose l'avenir. Et si elles pesaient de tout leur poids dans 
la balance des décisions d’où les unions dépendent, peut-être 
arriverait-il que l'éclat des beaux yeux des cassettes pourrait 
s’en trouver assez obscurei pour qu’on ne s’y laissât plus au- 
tant séduire ! Si la connaissance de la Loi de l’hérédité produi- 
sait, quelque jour, de pareils prodiges, jamais à coup sûr plus 
beau triomphe n'aurait été remporté par la science, et ce ne 
serait pas là non plus le moindre des services que nous au- 
rions tiré de nos animaux domestiques auxquels nous sommes 
tant redevables : si redevables que, sans eux, la société hu 
maine n'existerait pas. 

Jamais cette vérité n'apparaît plus frappante que lorsque 
quelque grande contagion vient à s'abattre sur eux, ou lorsque 
“Eee cause imprévue met obstacle, sur une grande échelle, 
à l’utilisation de ceux qui nous donnent le concours de re 


LXH: SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


forces. Que, par exemple, celles du cheval, le plus répandu et 
le plus utile de nos auxiliaires, viennent à nous manquer,.et 
voyez les conséquences : Dans les villes, tout s'arrête; la 
plupart des industries sont condamnées à l’inaction; le silence 
et l’immobilité succèdent partout au bruit et au mouvement 
par lesquels s’accuse la vie des cités industrieuses; dans les 
armées, tout est compromis : la victoire échappe et les revers 
s’agoravent. Que d'exemples et combien terribles il me serait 
facile de citer! 

Mais ce sont surtout les contagions qui montrent, par la 

erandeur de leurs coups, la grandeur des biens que repré- 
sentent, pour la société humaine, les animaux qu’elle s’est, on 
peut le dire, incorporés. 

Aujourd'hui, et en Europe, les dommages qu’elles nous 
causent ne constituent plus un malheur public d'une aussi 
erande importance que par le passé, paree que la richesse 
accrue et la facilité des communications permettent de pré- 
venir les famines dans les pays ravagés, en les repeuplant des 
bestiaux qu’ils ont perdus avec ceux des pays où la contagion 
ne s'est pas abattue. Mais autrefois, mais au moyen âge, et 
même encore au siècle de Louis XIV, glorieux sans doute 
quand on considère les sommets, mais tout plein dans ses bas- 
fonds d’épouvantables misères, autrefois il n’en était pas 
ainsi; et quand une épizootie désastreuse venait à sévir dans 
un pays et dépeuplait ses étables, la société humaine en ressen- 
tait si violemment le côntre-coup, que presque fatalement les 
populations ne tardaient pas à être décimées à leur tour, par 
des épidémies tout autant désastreuses, expressions des 
souffrances et des privations infligées aux hommes par la perte 
de leurs auxiliaires et cs leurs pourvoyeurs, c’est-à-dire de 
leurs bestiaux. 

Les vieux chroniqueurs ne racontent pas ces malheurs avec 
une grande prolixité; mais ils les laissent pressentir par les 
épithètes dont ils qualifient les maux dont ils parlent. 

Du reste, les faits dont nous avons été lémoiris dans ces 
derniers temps peuvent nous donner une idée de la grandeur 
des maux que les épizooties peuvent entraîner à leur suite. Il 


à 
Et 


# 


COMMENT L'HOMME S’EST ASSUJETTI LES ANIMAUX. LXIIE 


en est une, la plus redoutable de toutes, celle qu’on appelle la 
peste bovine, qui est venue fondre sur nous avec les armées 
étrangères et qui, malgré les résistances qu’on est parvenu à 
opposer à séSenvahissements, n’a pas laissé que de nous causer 
encore de très-grosses pertes, se chiffrant par des millions. 
Que devait-ce être lorsqu'on ne savait lui opposer aucune digue 
et que trouvant devant elle libre carrière, elle grossissait 
comme le torrent et acquérait cette force impétueuse qui résul- 
tait de sa masse incessamment accrue. Alors tout périssait, 
nous disent les chroniques; bien peu d'animaux survi- 
vaient après son passage. Toutes les campagnes se trouvaient 


comme dépeuplées de leur population animale. L'homme seul: 


restait dans son isolement, destitué de toutes les ressources 
que le bétail lui fournit par son travail, par son lait, par ses 
chairs, par l’ensemble de tous ses produits. Et comme dans 
son impuissance il ne pouvait accomplir la tâche qu’il impo- 
sait à la force de ses utiles auxiliaires, la terre incultivée 
restait en grande partie stérile et sa stérilité forcée venait 
ajouter sa part de malheurs à ceux qu'avait produits l’épizootie. 
Terrible cercle vicieux, où s’accumulaient toutes les misères 
et où couvaient ces fortes haines qui plus d’une fois ont poussé 
aux révoltes sanglantes dont l’histoire nous a retracé jies 
lamentables épisodes. 

C'estainsi que l'histoire de nos bêtes domestiques se rattache 
étroitement à celle de l'humanité, depuis le commencement 
des temps jusqu’à nos jours. 

On peut juger par cette rapide esquisse de tout ce que nous 
devons à ces frères inférieurs qui ont été la première condi- 
tion de l'établissement de la société humaine et demeurent. 
toujours la condition de sa durée et de son perfectionnement. 

C’est par eux que, dès les premiers temps, l’homme est par- 
venu à surmonter les fatalités de la nature, si fortes alors 
contre lui; c’est par eux qu’il continue sa lutte contre elles et 
qu'il poursuit sa grande tâche de conquérir le globe et d'y 
régner en maître. 


RAPPORT ANNUEL 


SUR LES 


TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION 


EN 1875, 


Par M. RAVERKT-WATTEE, 


Secrétaire des séances. 


MESSIEURS, 


De même que le marin engagé dans une longue navigation 
doit s'arrêter de temps en temps pour faire son point, c’est- 
à-dire pour reconnaître où 1l en est de son. voyage, il importe 
dans le cours de toute grande entreprise de faire halte à cer- 
tains intervalles pour constater la situation, inventorier les 
résultats obtenus, s'assurer par un coup d'œil en arrière que 
la route déjà parcourue était la bonne, envisager le chemin 
qui reste à faire et s'appuyer, pour achever son œuvre, sur les 
faits acquis et les observations relevées au jour le jour. 

Ce regard rétrospectif sur nos travaux, vous pouvez, Mes- 
sieurs, le jeler avec une parfaite confiance et j’ajouterai un 
légitime orgueil, car pendant l’année qui vient de s’écouler, 
comme durant la période décennale qu’elle termine, votre 
œuvre s’est montrée féconde en résultats heureux, qui ne peu- 
vent qu’affirmer davantage l'utilité de la mission que vous 
vous êtes donnée et augmenter votre foi dans l’avenir. 

Si, il ya dix ans, il vous était permis en faisant un sem- 
blable retour sur la première série de vos travaux d’enregis- 
trer déjà d'importantes acquisitions, depuis, vos efforts n’ont 
pas été moins largement récompensés ; telles espèces animales 
ou végétales, dont on pouvait dés cette époque, il est vrai, es- 
pérer la prochaine acclimatation, mais qui, somme toute, 
n'étaient nullement encore notre propriété, sont aujourd’hui 
parfaitement à nous, et bien des nouveautés utiles sont venues 
s'ajouter à ce premier avoir. 

Chacune de vos Sections compte de précieux succès. Pour 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. LXV 


ne rappeler que les plus remarquables, je dois citer parmi les 
Mammifères : l'Yack, maintenant parfaitement acclimaté dans 
plusieurs parties montagneuses de notre territoire, notamment 
dans les Basses-Alpes, où sa force, sa rusticité et sa sobriété 
lui permettent de « rendre plus de services que quelque race 
que ce soit des autres animaux domestiques, même les plus 
estimés » (1); le Lama et l’Alpaca, qui vivent sous notre climat, 
ets’ y multiplient sans que leur toison dégénère (2) ; la Chèvre 
d’Angora, qui se reproduit également chez nous, tout en con- 
servant son poil magnifique (3), et pour laquelle il serait gran- 
dement désirable que des essais sur une large échelle vinssent 
résoudre la question controversée (A) des avantages réalisables 
en France par l'élevage de celte espèce. 

Parmi les oiseaux ce sont : divers Colombidés, au nombre 
desquels les gracieuses Longhups (Ocyphaps Lophotes) occu- 
pent la première place; la charmante petite Caille de Chine 
(Coturnix Sinensis), les Céréopses d'Australie, si bien accli- 
matés, qu'ils ont changé l’époque de leurs pontes pour la 
mettre en harmonie avec nos saisons ; la grande Bernache de 
Magellan, cette belle espèce d’oie ornementale ; le Cygne noir 
d'Australie; les jolis Canards du Chili (Mareca Chiloensis), 
les Canards de paradis (Casarkas variegata), les Casarkas or- 
dinaires, etc., plusieurs Phasianidés au riche plumage, naguère 
à peine connus, même de nom, et devenus les hôtes de nos 
parcs : le Faisan versicolore du Japon ; le Faisan à collier de 
Mongolie, qui s’est reprodait même en complète liberté aux 
environs de Paris ; le Faisan de Swinhoë, bientôt aussi commun 
dans nos volières que le Faisan argenté ; l’Eperonnier (Po/y- 
olectron Clunquis) de YInde, qui multiplie non moins facile- 
ment ; le Faisan vénéré, dont le nombre des sujets élevés en 

(4) Richard (du Cantal), Rapport sur les cheptels de la Société (Bulletin, 
2e série, t. VI, p. 94). 

(2) A. Geoffroy Saint-Hilaire, Lettre adressée à M. Joly, à l’occasion de 
son rapport sur les Lamas (Bulletin, 2° série, t. VIL p. 155). 

(3) A. Geoffroy Saint-Hilaire et Gindre-Malherbe, Instructions aux 
chepteliers (Bulletin, 2° série, t. X, p. 4). 

(4) Richard (du Cantal), Observations relatives aux instructions données 
aux cheptelièrs (Bulletin, 2 série, t. X, p. 401). 


3 SÉRIE, T. I. — Séance publique annuelle, e 


Ne 


£ 


M Sd 


ss | = - 
LXVI SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


France est déjà considérable, etc., quantité d'oiseaux purement 
de luxe, tels que les Peace ondulées, les Perraches omni- 
colores et plusieurs autres Psitacidés. 

Deux poissons de luxe, le Macropode de Chine faux mœurs 
si intéressantes, et le bizarre Cyprin Télescope, également de 
la Chine, sont venus enrichir nos aquaria d'agrément. L’Axo— 
lotl, des lacs de Mexico, dont la chair, bien que comestible, 
érouverait sans doute difficilement des amateurs chez nous, 
a du moins fourni une page de plus à l’histoire des méta- 
morphoses des reptiles. 

Parmi les insectes séricigènes, les vers à soie du chêne dela 
Chine et du Japon (Bombyx Pernyi et Yama-maï) peuvent être 
considérés désormais comme à nous; on en est arrivé pour 
ces deux ES aux essais agricoles ; quant au Ver à soie de 
V’Aïlante, il n’est pas seulement acclimaté mais bien naturalisé, 
puisqu'il file chaque année son cocon jusque sur les arbres 
des squares de Paris. 

Parmi les végétaux, nous avons à signaler : le Ramié, ou 
Ortie de Chine, cet excellent textile qui n’attendait pour entrer 
dans la grande culiure que la découverte d’un procédé de 
teillage industriel, aujourd’hui à notre disposition ; plusieurs 
espèce de Bambous, cultivées sur une grande échelle et non 
plus seulement comme plantes d’ornements, mais en vue d’ap- 
plications utiles ; de nombreux arbres australiens appartenant 
aux genres Acacia, Grevillea, Casuarina, etc., précieux par 
leur bois ou leur rapide croissance, et, par-dessus tout, les Eu- 
calyptus, définitivement naturalisés dans notre colonie algé- 
rienne, pour laquelle ils constituent une véritable fortune. 

Si incomplet que soit ce rapide relevé de vos principales 
acquisitions depuis dix ans, il démontre assez que vos efforts 
ne sont point stériles et que notre œuvre justifie pleinement 
son titre d'établissement d'utilité publique. Dans l’année qui 
vient de s’écouler, de nouveaux progrès ont élé réalisés, 
et notre devoir est de vous en présenter le compte rendu 
fidèle. 

L’heureuse impulsion donnée à l’élevage du Chien par les 
belles expositions des races canines qui ont eu lieu sous votre 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. LXVI 


paironage en 1855 et 1865, ne pouvait qu'engager à recom- 
mencer. Grâce au généreux concours de personnes qui com- 
prennent tout ce qu'ont d’utile de semblables exhibitions conve- 
nablement faites, il a été possible à l'administration du Jardin 
d’acchimatation de réunir une troisième fois les types les plus 
variés et les plus beaux des races canines, L’Exposition de 
1873, qui comprenait environ 800 chiens, a offert un haut 
mtérêt et accusé un très-grand progrès sur ses devancières ; 
non-seulement l’ensemble des produits exposés était plus beau, 
mais il dénotait, de la part des éleveurs, une connaissance 
plus grande des qualités des différentes races et prouvait que 
la notion du chien est plus répandue qu’autrefois. 

L’attention qu'on accorde aujourd'hui dans la plupart des 
États de l'Europe à la qston des Pigeons voyageurs met la 
France en demcure de s’y intéresser également, et l’adminis- 
tration du Jardin d'acclimatation a pensé qu'il pourrait être 
utile de rappeler les services que nous devons, nous aussi, 
chercher à tirer de ces rapides messagers. Dans ce but deux 


lächers de pigeons, les plus importants qui aient jamais été 


organisés, ont eu lieu l'été dernier à l'établissement du bois 
de Boulogne, et, bien que peu favorisés par le temps, ils 
ont donné un nouvel exemple de la vitesse de cette poste 
aérienne. 

D’intéressants rapports (l) vous ont mensuellement tenus 
au courant, non-seulement de la situation de plus en plus 
prospère du Jardin, mais encore des fructueuses observations 
recueillies chaque jour à l'établissement, et ces notes pério- 
diques n’ont pas été la partie la moins attrayante et la moins 
instructive de notre Bulletin. Comme les années précédentés, 
il vous a, d’ailleurs, été présenté, sur les cultures faites au 
Jardin, un compte rendu général (2) signalant plusieurs ac- 
quisitions nouvelles, surtout parmi les plantes d'ornement. 


(4) A. Geoffroy Saint-Hilaire, Bulletins mensuels du Jardin d'acclimata- 
tion du bois de Boulogne (Bulletin, 2° série, t. X, p. 72, 188, 281, 368, 
504, 761, 998). 


(2) Quihou, Rapport sur les principales cultures faites en 1872 au Jar=: 


din d'acclimatation du bois de Boulogne (Bulletin, 2° série, t. X, p. 482). 


LXVIII SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


Rappelons, enfin, que des conférences (1) ont encore eu lieu 
au Jardin, dansle courantde la belle saison, réunissant chaque 
fois un cercle d’auditeurs d'élite. 

L'organisation nouvelle de vos cheptels (2) commence à 
porter ses fruits. L’empressement avec lequel les demandes de 
plantes et d'animaux sont adressées à la commission spé- 
ciale (3) prouve toutes les ressources que la Société peut 
trouver dans son sein pour multiplier les essais sur un grand 
nombre de points, seul moyen de les rendre véritablement 
efficaces et d’ariver plus vite à augmenter, à varier, les richesses 
du pays en bétail, en gibier et en végétaux. D’utiles instruc- 
tions (A) ont étérédigées en vue de guider ces eflorts, qui, sous 
une direction intelligente, permettront d'arriver aux résultats 
dans lesquels nous avons foi. 

L’appui bienveillant, le concours généreux (5) que vous 
trouvez en haut lieu prouvent assez, du reste, combien sont 
appréciés les services que vous rendez au pays. 

Des documents officiels, qu'a bien voulu nous communi- 
quer M. le ministre de la marine, vous ont fait connaitre 
l’état actuel des plantations d'Eucalyptus dans les colonies 
françaises (6), et particulièrement à la Réunion, où M. de 


(1) André Sanson, La production du lait (Bulletin, p. 678). — H. de 
la Blanchère, Trois cent millions à tirer des poissons par an (Ibid., 
p. 843). —- Raveret-Wattel, L’Eucalyptus et son avenir (Ibid., p. 966), etc. 

(2) Cheptels de la Société d'acclimatation (Bullet., 2° série, t. X,p. 529). 

(3) Bulletin, 2° série, t. X, p. vil. 

(4) A. Gcoffroy Saint-Hilaire et Gindre-Malherbe, Instructions aux 
chepteliers, 1'° section, Mammifères (Bulletin, p. 401). — A. Geoffroy 
Saint-Hilaire, Instructions aux chepteliers, 2° section, Oiseaux (Ibid., 
p.6). —Carbonnier, Instructions aux chepteliers, 8° section, Poissons, etc. 
(Ibid., p. 11). — Quihou et docteur Ed. Mène, Instructions aux chepte- 
liers, 5° section, Végétaux (Ibid., p. 151 et 231). 

(5) M. le Ministre de l’agriculture et du commerce a bien voulu cette 
année rétablir, au chiffre de 2000 francs, la subvention accordée à notre 
Société sur le budget de son département, subvention qui avait ‘été dimi- 
nuée depuis deux ans, par suite des événements (Bulletin, 2° série, t. X, 
p. A1). 

(6) Sur les plantations d'Eucalyptus dans les colonies françaises (Bul- 
Jetin, 2e série, t. X, p. 704). 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. LXIX 


Châteauvieux s’est occupé de la propagation de cet arbre 
australien avec un zèle méritoire. 

En Algérie, la culture de l'Eucalyptus prend chaque jour 
un développement plus considérable, et son heureuse in- 
fluence sur la salubrité publique se fait déjà largement sentir. 


Parmi les nombreux témoignages qui en font foi, il nous 


suffit de vous rappeler ceux de M. Ramel, de M. Lucy (1), et 
surtout de notre éminent confrère Monseigneur Lavigerie (2), 
qui vous a donné à ce sujet des renseignements péremptoires. 

Vous avez également reçu, concernant le degré de résis- 
tance au froid de certains végétaux, sous le climat d’'Hyères, 
des renseignements auxquels la création dans cette localité 
de la succursale du Jardin d’ cobtntanron donne un intérêt 
tout particulier (3). 

Le degré de rusticité, ainsi que la rapidité de croissance de 
diverses espèces d'Eucalyptus, ont d’ailleurs été l’objet d’ob- 
servations comparatives de la part de M. Marès (4) et de 
M. Cordier (5) qui, depuis longtemps, ont pris place au pre- 
mier rang parmi les plus zélés propagateurs de ces précieux 
végétaux dans notre colonie d'Afrique. 

M. Quihou(6) vous à rapporté de son récent voyage à Alger 
et dans le midi de la France des renseignements pleins d’in- 
térêt sur les progrès de l’horticulture, et ses notes vous ont 
fait voir combien de personnes s'occupent sérieusement au- 


(1) Procès-verbaux (Bulletin, p. 171). 
(2) Procès-verbaux (Bulletin, p. 440). 


(3) Docteur P. Marès, Note sur l'acclimatation de quelques ep 


d'Eucalyptus en Algérie (Bulletin, 2 série, t. X, p. 560). 

(4) Docteur A. Cordier, Renseignements sur la rapidité de croissance 
des Eucalyptus (Bulletin, 2° série, t. X, p. 811). — Procès-verbaux, p. 68, 
362. : 

(5) M. CG. Bonnet, inspecteur des ponts et chaussées, a fait, à ce sujet, 
particulièrement sur les genres Acacia, Agave, Eucalyptus, et sur plu- 
sieurs espèces de Palmiers, des observations très-soignées, que consulteront 
fort utilement les personnes désirant s’occuper de la culture de ces végétaux 
dans notre midi. (Notes sur la rusticité de quelques plantes exotiques 
sous le climat d’Hyères (Bulletin, 2° série, t. IX, p. 246). 

(6) Quihou, Notes sur un voyage à Alger et dans le midi de la France 
(Bulletin, 2° série, t. X, p. 34). 


GERS 


LXX SOCIÉTÉ D’ACCIIMATATION. 


jourd’hui de l'introduction des plantes et de la multiplication 
des végétaux nouvellement importés. 

Parmi ces amateurs distingués, qui rendent chaque jour 
de réels services au pays, nous devons une mention spéciale à 
M. Mazel (1), créateur de deux magnifiques jardins, l’un au 
golfe Jouan, l’autre à Anduze, près Nîmes. Véritables musées 
horticoles, les cultures de M. Mazel sont surtout des jardins 
d’acclimatation, car leur propriétaire yintroduit constamment 
des végétaux nouveaux tirés des pays les plus lointains. Plus 
de quarante plantes japonaises non encore déterminées ont 
été ainsi réunies par ses soins, et beaucoup d’entres elles ne 
sont pas seulement intéressantes au point de vue botanique 
où ornemental ; on y compte entre aütrés plusieurs espèces 


de Chênes qui seront des acquisitions précieuses pour la séri- 


ciculture, car leur feuillage sert au Japon à nourrir les Vers 
à soie que nous voulons acclimater. 

M. Nourrigat (2), de Lunel, vous a fait parvenir un mé- 
moire sur les avantages du Mürier du Japon, variété qu’il a 
contribué largement à répandre. Plus de 65 000 plants de ce 
Mürier ont été livrés par lui de 1868 à 1872. 

Votre attention a été plusieurs fois appelée (3) sur les res- 
sources que les flores étrangères peuvent fournir à la théra- 
peutique, et votre Commission médicale a été chargée de 
l'examen de diverses questions qui, dans le cercle de vos 
études, se rattachent à l’art de guérir. 


{1) Opois, Note sur le jardin de M. Mazel, au golfe Jouan, près Cannes 
(Bulletin, 2 série, t. X, p. 48). 

(2) Émile Nourrigat, Le Mürier du Japon (Bullet., 2esérie, t. X, p. 423). 

(3) M. Torrès-Caïcedo, ministre du Salvador, a fait parvenir à la Société 
des notes fort intéressantes sur le Guaco, le Cédron et divers autres sub- 
stances qui entrent dans la matière médicale en Amérique (voy. Procès- 
verbaux, p. 368, et Sur quelques produits soumis à l’eæamen de la So- 
ciété, p. 865). — On doit aussi à M. Brenier de Montmorand, ainsi qu'à 
M. J. Grisard, des renseignements sur le Boldo, plante médicinale du Chili, 
employée dans certaines affections du foie (Procès-verbaux, p. 897, 907).— 
Enfin, M. Balcarce a signalé l’utilisation faite au Mexique des propriétés 
bienfaisantes d’une variété de Tomate (/i-Tomate), dont on prépare un 
sirop très-eflicace contre les affections de l'appareil respiratoire (Procès-ver- 
baux, p. 899). 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. COXNIT 


Plusieurs de nos confrères vous on£ fait connaitre les ré- 
sultats de leurs cultures, et vous avez particulièrement re- 
marqué les rapports de MM. Genesley (1), Lecreux (2) et 
Vavin (3), sur divers végétaux; ceux de M. Masson (4), sur sa 
belle collection de Conifêres; de M. le marquis Séguier de 
Saint-Brisson (b), sur l’Orge de l'Himalaya; de M. Mau- 
menet (6), sur plusieurs espèces de Bambous, végétaux qui 
semblent réussir non moins bien dans le département du Gard 
que dans celui du Var, où un autre de nos zélés confrères, 
M. Auzende (7), obtient de si beaux résultats. 

D'un autre coté, vous avez appris avec plaisir qu’à l’étranger, 
comme chez nous, l’acclimatation des végétaux (8) fait 
des progrès aussi rapides que celle des animaux. D’ailleurs, 
surtous les points du globe, de nombreuses Sociétés, filles 
de la vôtre, se créent chaque jour, s’empressant de vous ap- 
porter le concours de leurs généreux efforts (9). 

Des mémoires sur diverses parties de la botanique appli- 
quée vous ont été adressés par MM. Cordier (10), Torrès- 


(1) Procès-verbaux (Bulletin, 2° série, te X, p. 741). 
(2) Jules Lacreux, Cultures diverses faites à Salomé (Bulletin, 2° série, 


4 X, p. 305). 


(3) Procès-verbaux (Bulletin, 2° série, t. X, p. 67). 

(4) 1bid., p. 64, 901. 

(5) Ibid., p. 61. 

(6) ibid., p. 182, 756. 

(7) Tbid., p. 904. 

(8) Procès-verbaux (Bulletin, p. 566).—M. Nieto, de Cordoba (Mexique), 
s’est occupé avec succès de l'introduction et de la culture des Cinchonas, 
de l’Eucalyptus, du Bambou et du Ramié. 

(9) Il s’est fondé, au mois de juin dernier, à Rio-de-Janeiro, une société 
d’acclimatation, constituée définitivement par décret impérial en date du 
13novembre. Cette société, par l'organe de son président, s’est immédiate- 
ment mise en relations avec la nôtre (Bulletin, 1873, p. 819). | 

Noïre confrère, M. Malingre, qui s'occupe avec tant de zèle depuis fort 
longtemps, de l'introduction de végétaux nouveaux en Espagne, va créer à 
Madrid, dans l’Olivar de Atocha, un jardin d’acclimatation pour lequel il a 
sollicité le patronage de notre Société (Bulletin, 1873, p. 577, 672). 

(10) Docteur A. Cordier, Note sur l’utilisation de l'Agave d'Amérique, et 
de la Férule (Bulletin, 2° série, t. X, p #00). 


LXXII SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Caïcedo (1), Michel Alcan (2), etc., et vous devez à M. Mé- 
rice (3) une note intéressante sur le Brésil, ce riche empire 
dont le souverain éclairé, que la Société d’acclimatation s’ho- 
nore de compter parmi ses membres, ne cesse de donner à 
vos travaux de nouvelles preuves d'intérêt (4). 

La propagation en Algérie d'arbres rustiques ou à crois- 
sance rapide, propres à faciliter un prompt reboise- 
ment, est depuis longtemps l’une de vos plus sérieuses préoc- 
cupations, et c’est ce qui vous a fait songer à divers emprunts 
utiles à faire dans ce but à la flore australienne (5). MM. Muel- 
ler (6) et Thozet (7), que vous comptez parmi vos plus généreux 
correspondants, s'efforcent, du reste, de faciliter votre tâche 
de ce côté par de riches envois de graines. Leurs envois, 
d’ailleurs, n’ont pas été les seuls, et nous avons contracté de 
tous côtés de nouvelles dettes de reconnaissance envers un 
grand nombre de nos confrères ou de personnes qui, bien 
qu'étrangères à la Société, nous témoignent leur intérêt 
par la plus gracieuse libéralité. 

On vous à entretenus, à plusieurs reprises, de certains pa- 
pyrifères (8) dont 1l importe de ne point laisser le monopole 


(L) Procès-verbaux (Bulletin, 2° série, t, X, p. 363). 

(2) Procès-verbaux (Bulletin, 2 série, t. X, p. 261). 

(3) Mérice, l'Agriculture au Brésil (Bulletin, 2 série, t. X, p. 881). 

(4) S. M. l'empereur du Brésil a daigné enrichir la bibliothèque de la 
Société de divers ouvrages, notamment ceux ayant pour titre : Climat, géo- 
logie, faune et géographie botanique du Brésil, par M. E. Liais, et l'Empire 
du Brésil à l'exposition de Vienne en 1873 (Bulletin, p. 365, 907). 

(5) Raveret-Wattel, De quelques végétaux australiens à propager en 
Algérie (Bulletin, 2° série, t. X, p. 593). 

(6) Bulletin, p. 262. 

(7) Bulletin, p. 577. 

(8) M. Mauban a signalé le parti qu’on peut tirer pour la fabrication du 
papier des fibres corticales du Palmier nain (Chamærops humilis), si com- 
mun en Algérie (Bulletin, p. 52). — M. Rivière a communiqué à la Société 
une note sur les caractères botaniques des diverses Graminées confondues, 
en Algérie, sous le nom vulgaire d’A//a, et employées sur une grande 
échelle par les papeteries anglaises (Bulletin, p. 62). — Enfin la même ques- 
tion a fait l’objet d’une note de M. Ravyeret-Wattel, De l'exploitation de 
l’Alfa en Algérie (Bulletin, p. 876). 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. LXXHIT 


aux étrangers, et votre attention a été appelée sur un certain 
nombre de végétaux récemment introduits, ou qu'il y aurait 
utilité à acquérir (1). Vous vous êtes occupés également de cer- 
tains légumes, soit nouveaux (2) et intéressants à divers titres, 
soit anciens déjà, mais dont il y a lieu de perfectionner et de 
propager les diverses variétés (3). La Pomme de terre, no- 
tamment, celte richesse inestimable que nous devons au nou- 
veau monde, a été l’objet de très-nombreuses communica- 
tions parmi lesquelles vous avez distingué, comme d’habi- 
tude, celles de notre zélé confrère M. Vavin (4). 

M. Vavin vous a signalé, en outre, les avantages que lui 
paraît offrir la culture du Chou marin (Crambe maritima). 
Cetie plante, d'une végétation rapide, occupe en Angleterre 
une place assez importante dans l'alimentation, et pourrait 
certainement prendre rang dans nos cultures maraïichères (5). 

M. Bossin (6), dont vous avez maintes fois apprécié les con- 
naissances pratiques, vous à fait parvenir, sur les qualités et. 
le mode de culture de plusieurs plantes potagères, des rensei- 
gnements qui arrivaient d'autant plus à propos qu’ils accom- 
pagnaient un gracieux envoi de graines de ces plantes. 

L’hygiène des animaux, avec toutes les questions qui s’y 


(1) M. Carlotti a rappelé l'intérêt qui s’attacherait à l’introduction en 
Corse du Palétuvie: de Madagascar (Bulletin, p. 55), et M. Durieu de Mai- 
sonneuve a signalé l’utilité de faire de nouvelles tentatives d'introduction du 
Téosinté (Reana luxurians), magnifique Graminée du Guatémala, dont 
M. Rossignon à bien voulu nous promettre de la graine (Bulletin, p. 168, 
346). 

(2) Diverses communications ont été faites par MM. Balcarte, de Chazelles, . 
Doûmet, Lambin, etc., sur la propagation et la culture du Zapallito tierno, 
par MM. Balcarce et Vavin, sur le Zucchetti et le Zucchettini, etc. (Bulle- 
tin, p. 267, 301, 825, 827, 905). 

(3) M. Vavin, notamment, a plusieurs fois insisté sur l'utilité de multiplier 
l’Igname par la voie de semis, en vue de parvenir à créer une race donnant 
des rhizomes non pivotants (Bulletin, p. 59). 

(4) Bulletin, p. 67, 267. 

(5) Eug. Vavin, Note sur le Chou marin (Bulletin, 2° série, t. X, 
p. 148). 

(6)- Bossin, Sur quelques plantes potagères (Bulletin, 2° série, t. X, 
p. A14). 


LXXIV SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


rattachent et celle de l'alimentation, en particulier, fait 
partie intégrante de la science de Pacclimatation. Pour con- 
server en bon état les animaux que nous voulons multiplier, 
il faut avant tout s’enquérir de leurs besoins et s’efforcer de 
les satisfaire. Souvent, sous notre joug, l'animal accepte des 
aliments qu’il rejeterait à l'état de nature. De là, parfois, des 
maladies graves qui déciment nos élèves et ruinent les plus 
belles espérances. Mais ce n’est pas seulement pour les espèces 
réduites en complète domesticité que le choix de la nourriture 
est d’une extrême importance; il y a lieu de s’en préoccuper 
également pour celles mêmes qui vivent dans une demi-liberté. 
Dans sa note sur la mortalité qui sévit sifâcheusement depuis 
quelques années sur le gros Sibier du parc roval de la Mandria, 
près Turin, M. Benvenuto Comba (4) a montré quelle est, en 
effet, la funeste influence d’une alimentation non conforme 
aux instincts des animaux, et il s’est attaché à formuler les 
règles qui doivent être suivies dans l'entretien d’un parc 
consacré à l'élevage du gibier. 

Vous attachez, non sans raison, un très-grand prix à être 
tenus fidèlement au courant des travaux analogues aux 
nôtres entrepris à l’étranger. C’est pourquoi votre Comité 
de rédaction a cru devoir faire, dans les colonnes du Bulletin, 
une large place aux faits intéressant l’acclimatation ou la 
domestication des animaux, lors même que notre climat ne 
nous permettrait que difficilement de mener à bonne fin des 
efforts semblables. On y trouve toujours, en effet, quelque 
utile enseignement (2). 

Des enseignements exacts sur la faune et la flore des pays 
étrangers ont également pour vous une sérieuse valeur, car 


(4) Benvenuto Comba, Sur la mortalité des cerfs, duims, chevreuils et 
antilopes du parc royal de la Mandria (Bull. de la Société d'acclimata- 
tion. 2° série, t. X, p. 612). 

(2) M. de la Blanchère a communiqué à la Société une note sur le La- 
mantin (Manatus latirostris), qu'a possédé pendant quelques mois le 
Jardin zoologique du Gentral-Park, de New-York (Bulletin, 1873, p.952). 

M. Raveret-Wattel a fait connaître les résultats de tentatives de domesti- 
cation du Vison en Amérique (Bulletin, p. 199), de l’Autruche, au cap de 
Bonne-Espérance (Bulletin, p. 956), etc. 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ.  LXXV 


ils vous permettent fréquemment d'agrandir le champ de vos 
travaux. Aussi avez-vous accueilli avec tout l'intérêt qu’elles 
méritaient les excellentes notes sur la zoologie du Thibet qu’a 
bien voulu faire parvenir à la Société M. l’abbé Desgodins (1), 
missionnaire apostolique, et celles que vous a transmises, sur 
le même sujet, M. Andelle (d'Épinac), au nom du R. P. Car- 
reau, également missionnaire apostolique (2). 

Fidèle continuatrice de la croisade entreprise contre le 
préjugé par son vénéré fondateur, la Société d'acclimatation . 
s’est constamment efforcée, par tous les-moyens en son pou- 
voir, de faire «adopter l'usage de la viande de cheval comme 
viande de boucherie. C’est en partie dans son sein que s’est 
recruté le Comité de propagande qui a si puissamment con- 
tribué à vaincre des répugnances mal fondées, et à faire rer 
enfin un meilleur parti de lune de nos espèces animales 
acclimatées depuis des siècles. M. Decroix (3), l'infatigable 
promoteur de cette œuvre philantropique, vous a donné, 
cette année, le compte rendu le plus satisfaisant des progrès 
de l’hippophagie en France, où l’on peut considérer la viande 
de cheval comme définitivement entrée dans l’alimentation 
publique. 

Depuis longtemps déjà, vous vous préoccupez de la domes- 
tication des Autruches. La rapide diminution de ces oiseaux à 
l'état sauvage, et le renchérissement progressif de leurs 
plumes, objet d’un commerce lucratif, donnent à cette ques- 
tion un réel intérêt. Les reproductions en domesticité obte- 
nues par M. le capitaine Crépu (4) viennent s’ajouter aux 
résultats que plusieurs d'entre vous sont déjà parvenus à 
réaliser, et 1ls ne peuvent que vous engager à persévérer dans 
celte voie. Du reste, les observations recueillies par M. Crépu 


(4) L’abbéDesgodins, Notes sur la zoologie du Thibet (Bulletin, 2° série, 
t. X, p. 309). 

(2) Bulletin, 2 série, &..X, p. 79. 

(3) Decroix, Note sur la consommation de la viande de cheval en 
France (Bulletin, 2° série, t. X, p. 97). 

(4) Crépu, Lettres relatives à la multiplication des Autruches en domes- 
ticité (Bulletin, 2° série, t, X, p. 624). 


LXXVI SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


sur les mœurs de l’Autruche, et consignées dans les diverses 
lettres qu'il vous a fait parvenir, ont eu du retentisse- 
ment même au dehors de noire Société et jusqu'à l'étranger, 
où elles ont été partiellement reproduites dans diverses publi- 
cations, ce qui prouve combien tout le monde savant a les 
yeux dirigés sur vos travaux. 

M. Dupont (1) vous a fait part de ses tentatives de multip!i- 
cation à l’état sauvage de la Pintade ordinaire (Nuwmida me- 
leagris), qui pourräit devenir un gibier de premier mérite, 
plus rustique que le Faisan et, comme lui, un excellent 
manger. Les résultats de ces essais démontrent qu’il ne 
serait pas très-difficile de doter nos chasses de ce riche 
présent, et qu'il suffira sans doute pour cela d’un peu de per- 
sévérance. 

M. le marquis d'Hervey de Saint-Denys (2) vous à raconté 
les plaisantes allures d’un des Talégalles qu’il détient en 
cheptel. Les faits observés par notre confrère semblent 
indiquer, comme il le dit lui-même, que l’acclimatation et 
même la domestication de ces oiseaux, aux mœurs si sin- 
gulières, pourraient bien ne pas présenter de fort grandes 
difficultés. 

D'un autre côté, vous êtes en droit d'espérer l'acquisition 
prochaine de nouveaux gibiers, d’après plusieurs communi- 
cations intéressantes qui nous ont été faites, notamment par 
M. Geoffroy Saint-Hilaire, sur la Poule de prairie (3), et par 
M. Cœffier sur la Calle de Chaine (h). 

Nos pares et nos volières continuent d’ailleurs à s'enrichir 
d’expèces exotiques remarquables à divers titres, et que plu- 
sieurs d’entre vous s'occupent de mullipler avec autant d’ha- 
bileté que de persévérance (5). Mais les espèces de luxe ne 


(1) Alf. Dupont, Notes pour servir à l'éducation de la Pintade, consi- 
dérée comme gibier (Bulletin, 2° série, t. X, p. 104). 

(2) Le marquis d’'Hervey de Saint-Denys, Rapport sur son cheptel de 
Talégalles, etc. (Bulletin, p. 538, 737, 917). 

(3) Bulletin, 2° série, t. X, p. 268. 

(4) Ibid., p. 891. 

(5) M. Georges de Marrast s’est occupé avec succès de la multiplication 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ.  LXXVII 


vous font point négliger-cependant celles de basse-cour, dont 
vous continuez à améliorer et à propager les meilleures 
races (1). 

Toutes les personnes qui s'occupent d’éducations d'oiseaux 
ont fréquemment besoin de pouvoir s'assurer si les œufs 
soumis à l’incubation sont fécondés ou non, et si l’évolution 
germinative marche régulièrement. M. Sauvadon (2) vous a 
indiqué un procédé de mirage fort simple, qui peut souvent 
dispenser de recourir à l’emploi des appareils spéciaux ima- 
ginés dans ce but. 

Le rôle de la Société d’acclimatation ne se borne pas à 
tâcher d'acquérir à la France les richesses naturelles qui lui 
manquent; la conservation de celles qu’elle possède est aussi 
dans vos attributions. C’est à ce titre que la protection à ac- 
corder au gibier, et surtout aux oiseaux insectivores, précieux 
défenseurs de nos cultures, continue à vous préoccuper tout 
particulièrement (3). Par une insistance respectueuse, 
vous avez su appeler sur cette question, vraiment d'intérêt 
général, l'attention bienveillante de l'administration (4), et 
provoquer l’étude de sages mesures protectrices en faveur 
des charmants auxiliaires que la nature nous a donnés pour 
combattre les ennemis déclarés de nos récoltes. 

D'importantes communications vous ont encore été faites 
celte année concernant l’industrie aquicole, qui a toujours 
occupé une large place dans vos travaux. 
de diverses espèces de Perruches, dont il à fait connaître les mœurs en cap- 
tivité (Bulletin, p. 256, 360). 

M. le docteur J. Jourdan a obtenu également des reproductions de plu- 
sieurs espèces d’oiseaux exotiques (Bulletin, p. 742). : 
M. Leroy a parfaitement réussi dans l'élevage du Faisan vénéré (Bulletin, 

p. 649). 

(L) M. le marquis Séguier, de Saint-Brisson, a signalé à la Société les 
avantages que lui paraît offrir le Canard d’Aylesbury, qu’il s’est attaché à pro- 
pager (Bulletin, p. 179). 

(2) Procès-verbaux (Bulletin, 2° série, t. X, p. 745). 

(3) Geite question a été l’objet de nombreuses communications, notam- 
ment de la part de MM. le docteur Blain des Cormiers, Malard, A. Mitivié, 


comte de Beaufort, etc. (Bulletin, p. 264, 568, 739, 908). 
(4) Procès-verbaux (Bulletin, p. 575). 


LXXYIIT SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Sans perdre de vue les causes multiples qui ont amené le 
dépeuplement des rivières (1), et qu’il importe de faire dispa- 
raître d’abord, si l’on veut arriver à un réempoissonnement 
sérieux, vous n’avez négligé aucun des moyens que la science 
met à votre disposition pour rendre à nos cours d’eau leur 
ancienne richesse: 

D’heureux essais de pisciculture vous ont été signalés de 
divers côlés, et vous avez accordé une attention spéciale 
aux notes de M. B. Rico (2), sur la multiplication de la Carpe 
jaune, ainsi qu'au rapport de M. Berthoule (3), qui obtient 
au lac Ghauvet des résultats forts remarquables. 

Les habitudes du.Poisson, les circonstances diverses qui 
influent sur son existence, doivent être le sujet des constantes 
recherches du pisciculteur. Avec cette patience d'observation 
qu'on lui connaît, M. Carbonnier (4) s’est préoccupé de 
l'action qu'exercent la température et la pression extérieure 
sur la vie des poissons, et nous lui devons un tableau indi- 


quant, pour toutes nos principales espèces fluviatiles, es 


profondeurs où elles séjournent suivant le degré de tempé- 
rature de l’eau. à 
Du reste, le zèle de M. Carbonnier pour l'acclimatation ne 
se dément pas un instant (5). Secondé avec dévouement par 
M. Paul Carbonnier, dont vous êtes déjà les obligés, il 
multiplie ses tentatives d'introduction de poissons exotiques, 
en y apportant ces soins et ce savoir pratique qui lui valent 
de si nombreux succès. À côté d'une charmante espèce de 
luxe, le Poisson arc-en-ciel, qui, par l'élégance, ne le céderait 
en rien au Macropode- de Chine pour l’ornementation des 
aquariums, notre confrère est parvenu à conserver vivant le 


(4) Raveret-Wattel, Quelques considérations sur les causes du dépeuple- 
ment de nos rivières (Bulletin, 2° série, t. X, p. 545). 

(2) Bulletin, 2° série, t, X, p. 818. 

(3) 1bid., p. 917. 

(4) Carbonnier, De l'influence de la pression extérieure sur la vie des 
poissons, etc. (Bulletin, 2° série, t. X, p. 16). 

(5) M. Carbonnier a réussi à introduire au Mexique plusieurs espèces de 
Cyprins, grâce à l’emploi des ingénieux appareils imaginés par lui, pour le 
transport du poisson vivant (Bulletin, p. 347). 


DRE 
Ent 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ.  LXNIX 


frileux Gourami, sous la froide température de l'hiver pari- 
sien (1). 

Un mémoire de M. de la Blanchère (2) sur les Chondros- 
tomes de France est venu nous prouver que nous ne connais- 
sons qu'assez imparfaitement certains habitants de nos 
rivières, et qu'il reste encore, pour les chercheurs, des dé- 
couvertes à faire dans la faune ichthyologique indigène. 

M. le docteur Vouga, qui joint l’enseignement par la pa- 
role (3) aux démonstrations pratiques, nous a entretenus de 
son projet de fonder une école de pisciculture (4) dans son 
bel établissement de Chanélaz (Jura-Suisse). On ne saurait 
trouver, en effet, de meilleures conditions pour inslituer les 
expériences scientifiques les plus complètes etles plus variées, 
principalement en ce qui concerne les questions controver- 
sées de métissage, de durée d’imprégnation possible des 
œufs, d'émbryologie, etc. 

En nous transmettant d’intéressants renseignements sur la 
nouvelle impulsion donnée au réempoissonnement du Léman 
par les gouvernements de Genève et de Vaud, notre savant 
confrère nous a fait parvenir plusieurs projets d’établisse- 
menis de pisciculture industrielle que consulteront fort utile- 
ment tous ceux qui désirent se livrer à celte exploitation, 
certainement susceptible de donner de sérieux profits. Rap- 
pelons enfin que, pendant la dernière campagne, M. Vouga 
est parvenu à opérer des croisements entre la Truite or- 
dinaire et lOmbre-Chevalier, avec un succès complet et sur 
une échelle tout à fait inaccoutumée. 

Vous avez suivi avec le plus vif intérêt les progrès rapides 


(4) Procès-verbaux (Bulletin, 2° série, t. X, p. 909, 912). 

(2) De la Blanchère, Les Chondrostomes de France (Bulletin, 2° série, 
t. X, p. 689). 

(3) M. le docteur Vouga a fait, à Lausanne et à Genève, des conférences 
publiques sur la pisciculture ; il cherche ainsi, avec le plus louable zèle, à 
répandre la connaissance de cette industrie sur laquelle on ne saurait trop 
attirer l’attention publique (Bulletin, p: 180). : 

(4) Docteur Vouga, Pasciculture en Suisse (Bulletin, 2° série, t. X, 
p- 465). 


LXXX SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION, 


de la pisciculture en Amérique (1), et vous avez applaudi avec 
bonheur au succès à l'étranger d’une industrie doni l'ini- 
tiative appartient à la France. 

Lastabulation des crustacés marins (Homardset Langoustes}, 
pratiquée avec tant de succès depuis quelque temps en Amé- 
rique et en Angleterre, commence à l’être non moins heureu- 
sement sur divers points de nos côtes, et particulièrement à 
Biarritz, dans l'établissement aquicole de M. le capitaine Sil- 
houette, dont notre confrère, M. Martial Bertrand (2), vous a 
fait connaitre la parfaite installation (3). À cet établissement se 
trouve annexé un aquarium peuplé de nombreux hôtes et créé 
en vue de faciliter les études pratiques sur les mœurs des pois- 
sons et autres habitants de la mer. Ce n’est qu'à force de pa- 
tience et d'observations que nous parviendrons, en eflet, à 
surprendre les secrets de la nature et à en tirer un utile parti. 

L’ostréiculture, cette branche importante de l’industrie 
aquicole, qui a dû lutter si longtemps contre l’incrédulité et 
les contradictions, est enfin entrée dans la période de produc- 
tion et d’affirmation industrielles. Vous avez appris par M. Gillet 
de Grandmont (4), qui en parle par expérience, ce que peut 
rapporter cette industrie à ceux qui s’en occupent sérieuse- 
ment et intelligemment. M. Féry d'Esclands (5) nous a fait 
connaitre en détail l’établissement ostréicole de M. le baron 
de Wolbock, à Kerriolet (Morbihan), qui réunit tous les élé- 


(1) Raveret-Wattel, Progrès de la pisciculture aux États-Unis (Bulletin, 
2e/série, tX, p. 785). 

(2) M. Bertrand, Note sur l'établissement de M. le capitaine Silhouette, 
à Biarritz (Bulletin, 2° série, t. X, p. 209). 

(3) M. Silhouette a constaté que la conservation de la Langouste, en 
captivité, est des: plus faciles. Dans les parcs, ce crustacé n’exige aucune 
autre nourriture que les animalcules contenus dans l’eau de mer, les Algues 
qui croissent dans les bassins; dans ces conditions, il acquiert, en quinze 
jours, une augmentation d’un tiers en poids. Chose remarquable, si on lui 
donne du poisson, il s’en repaît avec gloutonnerie, mais son poids diminue 
rapidement. 

(4) Procès-verbaux (Bulletin, 1873, p. 924). 

(5) Féry d’Esclands, Établissement ostréicole de M. le baron de Wolbock: 
(Bulletin, 2e série, t. X, p. 110). 


xt 


RAEPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ.  LXXXI 


ments d’un type appelé à servir de modéle. Grâce à des efforts 
persévérants la rivière de Crash, ou Trinité-sur-mer, est de- 
venue un foyer important de reproduction ostréicole et un 
magnifique chantier de travail pour toute la classe laborieuse 
du littoral. Là, comme à Arcachon, l’industrie nouvelle va en- 
richir des populations entières, et entrer, à bref délai, dans 
le mouvement commercial du pays pour un chiffre considé- 
rable (1). 

Sans se laisser rebuter par des objections qui lui paraissent 
réfutables, M. le docteur Turrel (2) continue, avec une persé- 
vérance dont on ne saurait trop le féliciter, sa croisade pour 
le rétablissement des madragues, vastes engins de pêche aux- 
quels les uns ne reconnaissent que des avantages, tandis que 
d’autres les condamnent comme pouvant porter préjudice aux 
pêcheurs en bateau. Nul doute que de cette longue discussion 
ne Jaillisse la lumière, et que satisfaction soit prochainement 
donnée, dans la mesure du possible, aux divers intérêts en- 
gagés. 

De nombreuses questions d’entomologie appliquée ont été 
abordées, soit dans la correspondance qui vous parvient de 
tous côtés, soit dans vos réunions bimensuelles toujours ren- 
dues siintéressantes par de savants débats. M** de Greffuhle (3) 
et M. Millet (4) vous ont entretenus des procédés fort simples 
au moyen desquels il est facile de se procurer en toute saison 
la larve du Ténébrion Meunier (Ver de farine), nourriture 
préférée et souvent indispensable de certains des hôtes de nos 
volières. MM. Decroix (5) et Delidon (6) ont continué à s’oc- 


(1) Commencé en 1869, l'établissement de Kerriolet, où M. de Wolbock- 
n'a pas dépensé, il est vrai, moins de 300 000 francs, représente aujour- 
d'hui une valeur de 500 000 francs. En 1871, il rapportait déjà plus de 
35 000 francs de naissain, et dès aujourd’hui la récolte annuelle dépasse 
dix millions d’huîtres. 

(2) Docteur Turrel, La controverse des madragues (Bulletin, 2° série, 
tu X, p. 24). 

(3) Bulletin, 1873, p. 259. 

(4) Ibid., p. 267. 

(5) Ibid., p. 355. 

(6) Ibid., p. 499. 

3° SÉRIE, T. [. — Séance publique annuelle. fl 


LXXXIT SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


cuper de l'influence qu’exerce sur la couleur du cocon un 
changement dans le régime alimentaire du Ver à soie, et du 
parti que l’industrie pourrait peut-être tirer de ce phénomène 
physiologique. M. Geoffroy Saint-Hilaire (4) vous a rappelé la 
faculté de résistance à l'action’du froid que: présentent, à un 
degré si remarquable, les œufs de certains insectes, et l’appli- 
cation utile qu’on en a faile en certaines circonstances. Cette 
question a été également étudiée, mais à un autre point de vue, 
par notre confrère M. Millet (2), qui se préoccupe des services 
que la météorologie peut rendre à l’agriculture (3). 

L’Abeille ligurienne, qui présente sur notre Abeille ordi- 
naire certains avantages, entre autres celui d’une fécondité 
plus grande, a été élevée avec profit par M. le docteur J.-J. 
Lafon, ainsi que par M. le comte de Morteuil, auquel revient 
le mérite d’avoir largement propagé cette utile espèce. 

Vous ne pouviez rester indifférents aux désastreux ravages 
exercés depuis quelques années chez nous par un insecte, 
d’origine américaine, mais qui ne s’est que trop facilement 
acclimaté de ce côté-ci de l'Atlantique, trouvant, paraît-il, 


sur les vignes d'Europe des conditions d'existence plus favo- 


rables que sur celles des contrées d’où il nous est venu. Le 


spécifique de cette nouvelle maladie, imfiniment plus grave 


et plus difficile à combattre que l’Oïdium, est encore à trou- 
ver ; mais vous devez aux soins de M. Ealiman (4) un cépage 


(4) Bulletin, 1873, p. 349. 
(2) On doit à M. Millet d’intéressanies observations sur le degré de résis- 


tance au froid des œufs et des chenilles de certains Lépidoptères nuisibles 


aux cultures. Notre confrère a vu des œufs de Liparis dispar, de Bombyx 
neustrid, etc. Supporter sans inconvénients des froids intenses, aussi bien 


que de brusaues variations de température. D'où il ressort que:les hivers: 


rigoureux n’ont pas pour résultat de détruire autant d'insectes que l’admet- 
tent en général les agriculteurs (Bulletin, 1873, p. 278, 348). 

(8) M. Millet a entretenu la Société d’observations paraissant établir qu’il 
existe une concordance encore inexpliquée, mais réelle entre les brouillards 
du mois de mars et les gelées tardives du mois de mai. Il a fait remarquer 
l'utilité pratique de semblables observations qui permettraient aux agricul- 
teurs de prendre à l’avance des précautions contre la gelée (Bulletin. 1873, 
p. 566). 

(4) L. Laliman, Un nouveau cépage (Bulletin, 1873, p. 673). 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ. LXXXIE 


hybride qui paraît résister aux atteintes du terrible Phylloxera, 
et M. Nourrigat, de Lunel, vous a fait part des heureux * 
tals qu’il croit pouvoir ends du déchaussage des vignes, 
pour la destruction des œufs de ce redoutable Hémiptère (1). 

Plusieurs de vos correspondants (2) ont répondu avec un 
soin tout particulier au questionnaire que vous leur aviez 
adressé concernant les Mélipones ou Abeilles sans aiguillon, 
et quelques-uns des mémoires qui vous sont ainsi parvenus 
fournissent des documents vraiment précieux pour l’histoire 
encore fort incomplète de ces intéressants insectes. 

Vous n'avez cessé d'accorder la: plus vive sollicitude à la 
sériciculiure, que son importance agricole et industrielle, 
d’une part, et de l’autre son état actuel de souffrance rendent 
si digne, en effet, de votre bienveillante attention. Des édu- 
cations expérimentales faites avec des Vers à soie d’espèces 
diverses ont eu lieu à la Magnanerie du Jardin d’acclimatation, 
sous la surveillance particulière de M. le docteur Maurice 
Girard. Bien qu’entreprises, par suite de circonstances fà- 
cheuses, dans des conditions exceptionnellement défavo- 
rables, ces expériences n'ont pas été vaines: elles ont permis 
de faire plus d’une utile observation soigneusement consignée 
dans son rapport (3) par notre savant confrère. 

M. Maurice Girard a, -de plus, enrichi le Bufletin d’une 
note (4) entomologique sur l’Attacus Atlas, ce papillon géant 
de l'Inde dont le volumineux cocon pourrait sans doute êlre 
utilisé comme celui de tous ses congénères. 


(1) Émile Nourrigat, Destruction du Phylloxera vastatrix (Bulletin, 
1873, 385). « 

(2) Notamment, MM. Brunet, de Bahia, et Salzedo, de Sainte-Marthe, 
qui ont envoyé des mémoires fort détaillés et d’un haut intérêt. Le travail 
de M. Brunei était en outre accompagné de spécimens de diverses espèces 
de Mélipones, d'insectes parasites de: ces Hyménoptères, d'échantillons de 
cire, de miel, etc. (Bulietin, 1873, p. 502). 

(3) Maurice Girard, Rapport sur les éducations des espèces séricigènes 
en expérience à la magnanerie du Jardin d’'acclimatation en 1872 (Bulle- 
tin, 1873, p. 215). 

(4) Maurice Girard, Note entomologique sur L'ATTAGUS ATLAS (Bulletin, 
1875, p. 408). 


LXXXIV SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Au Brésil, M. de Capanema poursuit avec succès ses tenta- 
tives de domestication de l'Affacus Aurota. Vous avez pu ad- 
mirer divers spécimens de la soie de cette espèce envoyés par 
Jai et dont le dévidage était dù aux soins de notre confrère 
M. le docteur Fargemol (1). 

Vous avez eu à enregistrer de remarquables progrès ac- 
complis par l’industrie séricicole dans certains pays où lon 
s’en était relativement peu occupéjusqu’ici; plusieurs notes de 
MM. Gélot (2), Mérice (3), Raveret-Wattel (4), Van-Eeden (5), 
vous ont donné à ce sujet des détails des plus satisfaisants. Vous 
avez été heureux d'apprendre aussi que sur divers points de la 
France, comme à l'étranger, la maladie n’exerce point ses 
ravages, et que, soit sous l'influence d’une nourriture parti- 
culièére donnée aux Vers, soit grâce à des soins spéciaux, on 
peut y obtenir de la graine parfaitement saine (6). 

M. G. Usébe (7) a pratiqué, à Milly (Seine-et-Oise), l'éduca- 
tion du Ver à soie de l’Ailante sur une échelle vraiment indus- 


(4) Procès-verbaux (Bulletin, 1873, p. 500). 

(2) M. Gelot a fait conncîre à la Société le développement considérable 
qu'a pris depuis quelques années au Pérou l'industrie séricicole (Bulletin, 
4873, p. 197, 571). 

(3) E. Mérice, Cullure du Ver à soie en Amérique (Bulletin, 1875, 
p. 387). . 

(4) Procès-verbaux (Bulletin, 1873, p. 438). 

(5) M. Van Eeden a rendu compte de limpuision donnée à l’industrie 
séricicole, dans les Pays-Bas, par la Société néerlandaise pour le progrès de 
l'industrie, de Harlem (Bulletin, 1872, p. 273). 

(6) Plusieurs communications de M. Hignet, de Varsovie, ont fait con- 
naître que la maladie des Vers à soie ne sévit point en Pologne, où les che- 
nilles sont nourties avec des feuilles de Mûrier sauvage, et doivent peut-être 
à cette alimentation un tempérament plus robuste (Bulletin, 1873, p. 351, 
755). 

M. de la Roquette nous a fait parvenir un Mémoire sur l'éducation du 
Ver à soie en Syrie, rédigé par M. Michel Médawar, propriétaire et grai- 
neur à Beyrouth, qui obtient depuis six ans de la graine japonaise ce bonne 
qualité, en quantité considérable (Bulletin, 1873, p. 820). 

En France, M. Touzac, de Montauban, est également parvenu, depuis 
plusieurs années, à produire de la graine saine de race européenne. 

(7) J. Usèbe, Éducation du Ver à soie de l’Ailante (Bombyx cynthia) 
faite à Milly (Seine-et-Oise) de 1866 à 1872 (Bulletin, t. X, p. 241). 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ.  ELXXXV 
trielle et avec un succès que vous avez élé heureux de récom- 
penser (1). La possibilité de l'éducation économique de cet 
insecte est aujourd'hui chose démontrée; la soie obtenue 


commence à être recherchée dans le commerce. La question 


appartient désormais au domaine de l’industrie. 

Avec son exactitude habituelle, M. de Saulev (2) vous a 
rendu compte de ses éducations d’Aétacus Yamma-mai (Ner à 
soie du chêne du Japon), et donné le résumé des précieuses 
observations qu’il doit à neuf années d'expériences. Une 
réussite complète pendant trois campagnes consécutives est 
le résultat des progrès successivement introduits par lui dans 
sa méthode, et la meilleure garantie d’un succès définitif. 

Toutes les espèces nouvelles de Vers à soie dont nous vou- 
lons doter notre industrie ont d’ailleurs continué à être, de 
la part d'un grand nombre d’entre vous, l’objet d’éducations 
sinon constamment heureuses, du moins toujours profitables 
par les observations qu’elles ont permis de faire. Il me suf- 
fira de rappeler les noms de M"° veuve Boucarut (3), de 
MM. Votte (4), Rousset (5), Astier (6), vicomte de Milly (7), 
Blondel (8), Deyrolle (9), etc., pour vous rappeler une foule 
de communications pleines d'intérêt, et pour établir que 
cette branche de vos études compte, aussi bien que les autres, 
une vaillante phalange de travailleurs non moins actifs que 
persévérants. 

Grâce, du reste, à cette noble attraction qu’exercent inévita- 
blement les œuvres vraiment grandes et utiles, vous voyez 


(4) La Société d’acclimatation a décerné, en 1873, une grande médaille 
d'or à M. Usèbe. 

(2) Ern. de Saulcy, Observations sur l’acclimatation du Ver à soie du 
chéne du Japon (Bulletin, t. X, p. 125). — Le même, Note sur l’éclosion 
des vers Yama-maï, en 1873 (Bulletin, t. X, p. 475). 

(3) Bulletin, 1873, p. 258. 

(4) Ibid., p. 274. 

(5) Ibid., p. 748. 

(6) Ibid., p. 749. 

(7) Ibid., p. 752, 998. 

(8) Ibid, p. 898. 

(9) Zbid., p. 896. 


LXXXVI SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


chaque jour de nouveaux collaborateurs venir grossir vos 
rangs et, par leur généreux concours, augmenter vos moyens 
d'action en multipliant les efforts. Des pays les plus lointains 
vous parviennent des preuves de sympathie, et vous avez reçu, 
jusque de l'extrême Orient, des témoignages d’une haute 
bienveillance (1). 

Ainsi, à tous les points de vue, la situation de notre So- 
ciété est des plus prospères. Le présent, comme le passé, 
permettent de bien augurer de l’avenir, et vous pouvez mar- 
cher d’un pas assuré dans la voie que vous vous êtes tracée. 

Pourquoi faut-il, Messieurs, qu’à tant de causes de satis- 
faction viennent se mêler de pénibles souvenirs? Pendant 
l’année qui vient de finir, de nombreux vides se sont faits 
dans nos rangs, vides d'autant plus regrettables que parmi 
ceux qui nous ont été enlevés figurent des noms illustres à 


plus d’un titre, et qui étaient à la fois l'honneur et la gloire 


de notre Société. | 

En tête de la liste bien longue, hélas ! de ces pertes regret- 
tables, nous avons à citer M. Antoine Passy, de l’Institut, 
vice-président de la Société depuis sa fondation; M. Passy 
contribuait largement à imprimer à nos travaux une impul- 
sion que l'élévation de son caractère, ses vastes connais- 
sances et son zèle constant rendaient puissamment efficace. Il 
avait embrassé avec dévouement la cause de l’acclimatation, 
et les paroles qu’il vous adressait naguère encore, dans une 
de nos réunions solennelles (2), attestent l'importance qu'il 
attachait à votre œuvre et la foi entière qu’il avait dans son 
avenir. La mort de ce collaborateur zélé, de ce savant dis- 
tingué, qui fut, avant tout, un homme de bien, a laissé au 
milieu de nous un vide difficile à combler, et dans nos cœurs 
un deuil profond et sincère. 


(4) S. M. le roi du Cambodge a daigné consentir à ce que son nom fût 
inscrit sur la liste des membres de Ja Société, et promettre de nous faire 
adresser les productions de ses États qui pourraient offrir de l'intérêt pour 
nos travaux (Procès-verbaux, Bulletin, 1873, p. 272). 

(2) Ant. Passy, Les Cheptels de la Société d’acclimatation (Bulletin, 
1873, p. xxx). | 


are IT 


RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ, : LXXXWIi 


M. Coste, de l’Institut, comptait également dans vos rangs 
depuis l’origine de votre association. Son grand nom scienti- 
fique et ses travaux si féconds en résultats utiles au pays 
l'avaient désigné pour occuper parmi vous une place dis- 
tinguée; malgré ses occupations si nombreuses, ilsut, durant 
‘de Jongues années, trouver le temps d’exercer les fonctions 
de membre de votre Conseil. La Société a fait en sa personne 
une perte vivement senfie. 

MM. Guérin-Méneville et Frédéric Davin, tous deux pen- 
dant fort longtemps membres du Conseil, étaient aussi 
parmi vous des ouvriers de la première heure. C’étaient 
deux fervenits adeptes des idées qui vous rassemblent et vous 
unissent; et 1l suffit de parcourir les pages de notre Bulletin 
pour constater la part considérable qu’ils prenaient à nos 
travaux. Leur zèle, leur savoir, leurs connaissances spéciales 
dans des ordres différents, rendaient leur collaboration pré- 
-cieuse ; leur concours nous fera bien souvent défaut. 

Nous avons aussi perdu deux de nos membres honoraires: 
M. le baron Rousseau, et M. l'amiral comte Cécille qui fut 
le promoteur de la culture de l’Igname en Europe, et auquel 
nous devons lintroduction de plusieurs races d’oiseaux de 
basse-cour originaires de l’Orient. 

Enfin, je rappellerai à votre souvenir, à vos regrets, 
MM. Barillet-Deschamps, directeur des promenades et planta- 
tions de l'Égypte; Odilon-Barrot, de l’Institut, ancien mi- 
nistre, ancien président du Conseil d'État; comte de Bouelle, 
Bouchard-Huzard, officier d’Académie, secrétaire général de 
la Société centrale d’horticulture de France; comte de Breda, 
comte de Chasseloup-Laubat, ancien ministre de la marine; 
Chevet, Darblay aîné, ancien député; Dardenne de la Gran- 
serie, secrétaire du syndicat de la presse française et étran- 
gère; Gravois, directeur général de la Caisse générale des 
Assurances agricoles; baron de Manderstroëm, ancien mi- 
nistre des affaires étrangères de Suède et Norvége; Alexandre 
Manzoni, Pierre-Louis Manzoni, de Metz, conseiller-doyen 
honoraire à la Cour de Paris, fondateur de la colonie agricole 
de Mettray; Pacot d’Yenne, S. Exc. M. Pahud, ancien mi- 


LXXXVIIT SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


nistre des colonies et ancien gouverneur général des Indes 
néerlandaises; vicomte da Praia, pair du royaume de Portu- 
val, et enfin l'Empereur Napoléon IT, qui, pendant toute la 
durée de son règne, nous a donné de nombreux témoignages 
de sa haute bienveillance. 

Ces pertes sont grandes, Messieurs, mais loin d’affaiblir 
nos courages, elles ne peuvent que nous faire sentir le besoin 
de redoubler de zèle. Dans le domaine expérimental, chacun 
doit fournir sa part de travail et apporter à l’œuvre commune 
le contingent de ses efforts, car il n’y a que faiblesse et im- 
puissance dans l'isolement et l’inertie. Luttons contre les diffi- 
cultés, sans nous laisser abattre, ni par les retards, ni par 
l'éloignement du but à atteindre. Toujours les conquêtes de 
la science et de l’industrie ont offert un caractère de lenteur 
et de gradation; celles que nous ambitionnons ne sauraient 
donc échapper à la loi commune. N'oublions pas que si la 
persévérance dans la lutte rend le travail méritoire, c’est elle 
aussi qui garantit le succès. 


RAPPORT 
AU NOM DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES (° 


Par M. A. GEOFFROY SAINT-HILAIRE, 
Secrétaire général, 


MEspaMEs, MESSIEURS, 


Pour la dix-septième fois nous sommes réunis dans le but de 
décerner les récompenses de la Société d’acclimatation à ceux 
qui ont servi notre cause en quelque pays que ce soit. Parmiles 
lauréats que nousallons proclamer devant vous, vous trouverez, 
comme toujours, les noms de nos coopérateurs des régions 
lointaines à côté de ceux qui expérimentent en quelque sorte 
sous vos yeux. La Société d’acclimatation est avant tout, vous le 
savez, une institution cosmopolite; elle apprécie, avec un égal 
intérêt, les succès obtenus dans l’acclimatation desanimaux ou 
la naturalisation des plantes, que les résultats soient acquis à 
notrepropre pays, à nos colonies, ou même aux pays rivaux du 
nôtre. 

Les fondateurs de la Société d’acclimatation ont donné à cette 
institution des bases généreuses ; et après vingt ans d'existence, 
après avoir enregistré bien des efforts, récompensé bien des 
succés, notre association se lrouve, pour ainsi. dire, aussi jeune, 
aussi ardente qu’au moment de sa naissance ; elle est pleine 
de vie. La Société recrute sans cesse de nouveaux adhérents, 
et ces recrues, renforts précieux, prendront leur part des essais 
qui améneront par la suite la conquête d'animaux nouveaux, 
de plantes non introduites. 

Je ne saurais, Mesdames et Messieurs, vous parler des nou- 


(1) La Commission des récompenses était ainsi composée : 
Membres de droit : M. Drouyn de Lhuys, président, et M. A. Geoffroy Saint- 
Hilaire, secrétaire général. 


ne us par le [Conseil : MM. Dareste, Milne-Edwards, Raveret-Wattel, 
ivière. 


Membres élus par les cing sections : MM. Gindre-Malherbe, de la PE here, 
Bertrand, Maurice Girard, D' Mène. 


XC SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


veaux adhérents de la Société, sans rappeler à vos souvenirs 
les noms des deux membres de notre conseil que la mort a 
frappés. Dansle cours del’année 1873, notre association a perdu 
plusieurs de ses plus persévérants soutiens, de ses promoteurs 
les plus aimés. Aucune de ces pertes ne laissera des regrets 
pius vifs que celle de notre vice-président M. Antoine Passy. Il 
laisse dans le conseil une place qui ne pourra. être remplie, 
il laisse aussi le souvenir de grands services rendus. Nos regrets 
seront durables, car aucun d’entre nous ne pourra oublier 
quelle place tenait dans la Société cet excellent homme de 
bien. Son équité, son expérience de toutes choses, sa science 
éclairée, ont élé bien précieuses pour la Société qu'il aimait. 
L'an dernier vous l’avez encore entendu, ici même ; il avait 
voulu, dans notre dernière séance annuelle, vous parler lui- 
même de ces cheptels qui sont appelés à rendretant de services 
à l’acclimatation. 

M. Frédéric Davin, l’habile manufacturier, que la mort nous 
a ravi, faisait partie de notre conseil depuis 1854, c’est-à-dire 
depuis la fondation de la Société, et nous devons conserver 
la mémoire de son amour pour notre œuvre, à laquelle il n’a 
cessé de donner jusqu’à ses derniers jours son concours le plus 
dévoué. 

Le souvenir des services rendus à notre association par ces 
morts regrettés doit être pour nous plein d’utiles euseigne- 


ments; nous redoublerons d’efforts et nous essayerons, sinon de 


les faire oublier, au moins de les imiter. 

Vousavezsousles veux, Mesdames et Messieurs, le programme 
des prix que la Société a proposés. Chacun de ces prix indique, 
en quelque sorte, un des pas que nous avons à faire. Ge sont 
autant de jalons jetés sur la route, et chaaue fois que nous 
pouvons donner une des récompenses proposées, nous devons 
nous en réjouir, puisque chacun des prix décernés marque en 
quelque sorte le chemin parcouru. 


Récompenses hors elasse. 


M. le général comte de Lacroix Vaupois, depuis la restau- 
ration du Jardin d’acclimatation du Bois de Boulogne, n’a 


RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES. XCI 


cessé de contribuer à l'enrichissement de nos collections. De 
nombreux animaux originaires de l'Algérie nous ont été en- 
voyés par les soins du général. La Société, reconnaissante de 
ce concours dévoué , décerne à M. le comte de Lacroix Vau- 
Bols la grande médaille d’or offerte par le Ministère de l’agri- 
culture. 

Dans la séance annuelle de 1873, la Société d’acclimatation 
a décerné à M. Ramel le titre de membre honoraire, c'est-4- 
dure la plus haute récompense qu’elle pûüt offrir à l’homme 
dévouéet persévérant auquel est due l'introduction de l’Ewca- 
lyptus en Europe. Nous vous avons dit, l’an dernier, quelle 
immense conquête devait être cet arbre pour le littoral médi- 
terranéen et l'Algérie, quelle richesse nouvelle devait en 
résulter pour les régions tempérées où peut prospérer cette 
plante. 

La Société récompense aujourd’hui ceux qui ont été les 
auxiliaires les plus ardents de M. Ramel, les premiers expéri- 
mentateurs de cet arbre nouveau, ceux qui en ont été les 
vulgarisateurs éclairés et persévirants. 

Elle décerne à MM. Trorrier, Corpter et LAMBERT de grandes 
médailles d’or. Les services Fe par chacun de ces lauréats 
méritent la plus sérieuse attention. 

M. Trottier, à Hussein-Dey, près Alger, a cultivé les Æuca- 
lyptus de la façon la plus heureuse, il les a multipliés en grand 
nombre et est devenu l’un des propagateurs les plus ardents 
de cet arbre nouveau qui peut donner, sous le ciel de l'Algérie, 
des rendements considérables, tout en assainissant les contrées 
ou il végète. Par ses publications M. Trottier a joint les conseils 
théoriques à l'exemple pratique, et a ainsi contribué àärépandre 
la connaissance des mérites de cette plante extraordinaire, 
bientôt l’une des principales richesses de l'Algérie. 

Les premiers essais de M. Trottier datent de loin; ils re- 
montent à 1860, c’est-à-dire au temps ou M. Hardy, alors 
directeur des jardins de Hamma, faisait connaître la croissance 
véritablement invraisemblable des Euwcalyptus et démontrait 
qu’en trois ou quatre ans, ces arbres australiens atteignaient 
une hauteur de dix à douze mètres, tout en donnant un bois 


XCII SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


assez dur pour être employé aux usages demandant la plus 
grande durée. En récompensant M. Trottier, la Société accom- 
plit un acte de justice envers l’un des vulgarisateurs les plus 
utiles de l'Eucalyptus. 

L'importance des efforts de M. Cordier ne le cède en rien 
à celle des travaux de M. Trottier. Si ce dernier a multiplié et 
répandu l'Eucalyptus avec un dévouement sans relâche, M. 
Cordier, étudiant la question sous un autre jour, n’a pas rendu 
moins de services. M. Cordier a planté auprès de son domaine 
de la Maison carrée, aux environs d’Alger, des massifs consi- 
dérables d'£ucalyptus. 

Il ne s’est pas contenté de cultiver l'Eucalyptus (lobulus, 
il a fait une véritable école des différentes espèces de ce genre 
précieux, et ces tentatives méritent les plus grands éloges. Le 
genre Eucalyptus compte en effet un très grand nombre 
d'espèces. Il est important de pouvoir discerner celles qui 
donneront les meilleurs résultats. 

L'Eucalyptus globulus, le plus connu, le plus répandu 
jusqu'ici de ces Myrtacées, est-il le meilleur ? Est-il celui qui 
donne, dans le moindre laps de temps, le bois le meilleur et le 
plus abondant”? Est-il celui dont la culture est la plus avanta- 
geuse? Enfin n’y a-t-il pas dans cegroupe d'arbres quelque autre 
espèce qui puisse résister à des températures plus basses que 
celles supportées par le ylobulus? Toutes ces questions, 
M. Cordier les étudie avec la patience du savant jointe à l’expé- 
rience du praticien, et la Société, en décernant à M. Cordier, 
comme à M. Trottier, une grande médaille d’or, réunit ces 
deux amis dévoués de l’acclimatation dans un même sentiment 
reconnaissant. 

M. Lambert, alors qu'il remplissait en Algérie les fonctions 
de conservateur des forêts, s’est livré avec succès à des tenta- 
tives de reboisement dans le Sahel, au moyen de l'Eucalyptus 
globulus. Ges tentatives intéressantes sont de nature à éclairer 
les planteurs actuels d’Eucalyptus. M. Lambert ne s’est pas con- 
tenté de ces démonstrations, pratiques. Revenu en France, il 
a voulu faire profiter le public de son expérience, et ül a 
rédigé un mémoire important sur l'accroissement annuel des 


RAPPORT DE LA COMMISSION DES- RÉCOMPENSES. XCITI 


arbres en question, et sur le rendement qu’on en peut ob- 
tenir. Ce travail important, rédigé avec soin, sera un guide 
précieux pour tous ceux qui s’occuperont de la question 
des Æucaliyptus. Une premiére édition du mémoire de 
M. Lambert a été l'objet d'assez vives critiques, à cause de 
évaluation faite par l’auteur du rendement, par l’hectare, des 
plantations d’Eucalyptus; une seconde édition, récemment 
publiée, a été corrigée, et aujourd’hui le travail du lauréat de 
la Société, débarrassé de chiffres exagérés (vrais peut-être, 
mais trop élevés pour qu’il soit permis de les admettre avant 
une démonstration expérimentale), ce travail, dis-je, est digne 
de récompense. 

I ne suffit pas en effet de faire et même de bien faire. Ne 
faut-il pas dire encore comment on a procédé et pouvoir faire 
ainsi profiter ceux qui veulent essayer des expériences heu- 
reuses et malheureuses qu'on a faites. 

M. Lambert a certainement rendu à l’Algérie des services 
importants en faisant les plantations d’Eucalyptus exécutées, 
il a peut-être rendu un service plus grand encore en publiant 
le mémoire si complet qui a trouvé place dans le Bulletin de 
notre Société, mémoire plein de faits et de leçons. 

La Société décerne à M. Lambert une de ses grandes mé- 
dailles d’or. 


Prix de 50909 francs. — Proposé par la Société pour la production 
de bonnes graines de Vers à soie du Mürier. 


En 1864, la Société reçut de M. Léon Roches, alors ministre 
de France a Yokohama, une certaine quantité de cartons de 
graines de Vers à soie japonais, destinés à fournir aux sérici- 
culteurs français les semences qui leur manquaient alors par 
suite de l’implacable maladie qui avait dévasté toutes les ma- 
onaneries de l’Europe, et en particulier celles du midi de la 
France. 

Les cartons de graines envoyés par M. Léon Roches coù- 
tèrent à la Société plus de 100 900 francs. Ils furent vendus 
dans les principaux centres séricicoles, et il résulta de ces 
ventes un certain bénéfice que la Société encaissa. 


ide > de ER UNE 
XCIV + SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Le Conseil voulut, en queique sorte, rendre à la séricicul- 
ture française ce que les sériciculteurs lui avaient donné aux 
enchères, et elle fonda plusieurs prix importanis. 

L'un de ces prix était ainsi conçu: «Production de la M. L 
» de Vers à soie de races européennes. » 

« On devra avoir obtenu, pendant quatre années conséeu- 
tives, de la graine saine, capable d’être utilisée dans les éduca- 
» tions industrielles d'au moins 10 onces. La graine elle-même 
» pourra. et devra presque avoir été obtenue par l'élevage 
» spécial de petites chambrées .» 

« Les concurrents devront fournir la constatation légale 
» des faits qu'ils auront obtenus 

« Concours ee au 17 juil 1878 ». 

« Prix. — 5000 francs . 

C’est ce prix que nous ne aujourd’hui à M. Touzac 
de Montauban, les conditions proposées ayant été parfaitement 
remplies par le lauréat. 


Ÿ 


Prix proposé par la Société pour la propagation em France 
de l’Abheiïilile italienne. 


La Société avait proposé, en 1870, un prix ainsi conçu : 

« On devra justifier de la possession de douze colonies vivant 
» chez le propriétaire depuis deux ans au moins, en bon'état, 
» sans dégénérescence ri hybridation, et de douze bons 
» essaims de l’année, parfaitement purs, provenani des ruches 
» mères ci-dessus désignées .» 

« Concours ouvert jusqu'au 1” décembre 1875 

« Ge prix de 500 francs est aujourd’hui décerné à M. le comte 
» de Morteuil qui a rempli toutes les conditions proposées. » 

M. de Morteuii, en réussissant cette importation, a rendu à 
lapiculture un service que la Société est heureuse de pouvoir 
reconnaître. 


Prix proposé par la Société pour les travaux théoriques relatifs 
à l’acclimatation. 


La Corse, comme l'Algérie et le Midi de la France, peut re- 
ürer de l’acclimatation de l’Eucalyptus les avantages les plus 


KL 


- RAPPORT DE LA Ci MMISSION DES RÉCOMPENSES. XCV 


précieux, et si bientôt, comme tout le fait espérer, l’île fran- 
çaise de la Méditerranée est largement planiée de l'arbre aus- 
tralien, elle le devra en grande parte aux efforts et aux publi- 
cations de M. Récucus CARLOT. 


Les travaux de cet acclimatateur zélé auront eu la plus heu- 


reuse influence sur la vulgarisation de l'Eucalyptus globulus 
en Corse, et la Société, appréciant les mérites des publications 


de M. Carlotti, leur décerne le prix dont elle peut disposer 


chaque année pour les travaux théoriques. 

Elle décerne un autre prix de la même nature à M. C. Ra- 
VERET WATTEL qui a pris le soin de réunir, dans un mémoire 
aussi substantiel que consciencieux, tout ce qui avait été dit 
sur l'Eucalyptus, sur ses avantages, sur ses propriétés. Le 
mémoire.de M. Raveret-Wattel est un véritable résumé de 
la question, résumé que devraient avoir dans les mains tous 
ceux qui sont soucieux d'ajouter quelque chose aux richesses 
naturelles du pays. 


LA 
Prix proposé par Ia Société pour les fravaux de zoologie pure: 


Le naturaliste qui fait connaître exactement les avantages 
et les inconvénients des animaux rend un véritable service. 
L'histoire naturelle en effet n’est pas seulement une science 
spéculative,elle peut à chaque instant, elle devrait surtout, 
devenir une science d'application. En créant le prix qu’elle 
décerne aujourd’hui, la Société a voulu pouvoir récompenser 
les naturalistes qui, dans leurs travaux, sauraient faire res- 
sortir l'intérêt pratique des animaux qu'ils étudient. 


Le Traité élémentaire d'entomologie que publie actuelle- . 


ment notre collègue M. Miurice GiraRp est un de ces livres 
dans lesquels la science est envisagée sous les points de vue 
les plus divers, un de ces livres dans lesquels le savant et 


l’homme pratique trouvent des renseignements utiles, des 


conseils précieux et des observations ingénieuses. 
La Société décerne à M. Maurice Girard le prix proposé 
pour les travaux de zoologie pure. 


XCVI | SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. ü 


PREMIÈRE SECTION. — Mammafères. 


La Société décerne à M. le général marquis DE GALLIFET 


une médaille de 1° classe pour le concours obligeant qu'il a 
bien voulu prêter, en toutes circonstances, au Jardin d’accli- 
malation, dans le but de l’enrichir des espèces algériennes qui 
lui manquaient. 

M. ARuAND GouBAUx, dans une récente publication, a étudié 
des faits physiologiques utiles à connaître pour ceux qui s’oc- 
cupent de la multiplication des animaux. La Société décerne à 
M. A. Goubaux une médaille de 4r° classe. 

Plusieurs envois d'animaux intéressants ont été faits de 
Cayenne au Jardin d’acclimatation par M. LouBÈRE gouverneur 
de Ja Guyane française. En outre, M. Loubère se préoccupe de 
l'introduction des Eucalyptus dans la Guyane, et cette question 
présente un véritable intérêt en ce pays; car l'arbre australien, 
éminemment propre à assainir les lieux ou il végête, serait 
pour la Guyane une acquisition inestimable. 

La Société décerne à M. Loubère une médaille de 4" 
classe. 

Dans le cours de l’année 1873, S. E, le général KRŒSEN a 
fait au Jardin d’acclimatation des envois d’animaux originaires 
de Java très-intéressants. La Société reconnaissante décerne 
à S.E. le général Krœsen un rappel de médaille de 1" 
classe. 


un 


DEUXIÈME SECTION. — Oiseaux. 


Si la Société récompense avec empressement les éducateurs 
qui ont su faire mulliplier une espèce d’oiseaux nouvellement 
introduite; quels doivent être ses sentiments reconnaissants 
pour ceux qui, loin de la patrie, songent à l'enrichir des espèces 
qui pourraient y prospérer ? 

Monseigneur CHAUVEAU (Joseph-Marie), évêque de Sébasto- 
polis et vicaire apostolique du Thibet, s’est préocupé d'envoyer, 
à plusieurs membres de notre Société, des spécimens vivants 
de quelques-unes des espèces d'oiseaux thibétaines les plus 


+ : 

. RAPPORT DELA COMMISSION DES RÉCOMPENSES.  XCVII 
précieuses. Grâce au concours de Sa Grandeur, plusieurs 
paires de faisans de Lady Amherst, un Crossoptilon Drouyn de 
Lhuys, un Tragopan de Cabot, un Ithagine de Geoffroy ont été 
importés en France. La Société est heureuse de pouvoir re- 
mercier Monseigneur Chauveau du concours donné à son œuvre 
en lui décernant une médaille de 4° classe. 

Les services rendus par M. Danican Puicipor, trésorier 
payeur général à Saïgon, sont de la même nature que ceux pré- 
cédemment rappelés. M. Danican Philidor a importé de Cochin- 
chine et offert au Jardin d’acclimatation un certain nombre 
d'animaux intéressants. La Société l’en remercie en lui décer- 
nant une médaille de 1" classe. 

Parmi les résultats pratiques obtenus, pendant ces dernières 
années, dans la culture des oiseaux, ceux qui sont dus à M. 
Doucras (du Cap de Bonne-Espérance) méritent une attention 
particulière. Chez cet intelligent colon, les Autruches vivent 
aujourd’hui à l’état domestique, et sont soumises, si l’on peut 
ainsi dire, à plusieurs tontes de plumes chaque année. 

Les troupeaux d'Autruches domestiques exploités par 
M. Douglas fournissent à l'industrie leurs plumes précieuses. 
La Société décerne à M. Douglas une médaille de 4° classe. 

La protection due aux animaux insectivores, protecteurs de 
nos champs, est une des questions auxquelles la Société ne 
cesse de prêter son attention. Aussi décerne-t-elle avec em- 
pressement à M. Dugors (de Bruxelles) une de ses médailles de 
1° classe pour le hivre et les tableaux peints qu’il a publiés. 
Ces publications, propres à faire reconnaitre les oiseaux qu'il 


importe de respecter, sont de nature à faire le plus grand 


bien. 

Ajoutons que le ministre belge à qui appartient l'initiative 
de ces publications ne saurait être trop loué. Par ses ordres, 
le livre et les tableaux de M. Dubois ont été introduits dans 


toutes les écoles, dans tous les lieux publics de la Belgique, de: 


telle sorte que peu à peu l'œuvre de protection à laquelle la 
Société applaudit se fera connaître, et, en se faisant apprécier, 
recrutera de nouveaux champions pour le plus grand bien des 


moissons. Émettons le vœu que l'administration française se 
32 SÉRIE, T. I. — Séance publique annuelle. 4 


XCVIIID SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. : 


montre en cette circonstance aussi éclairée que l’administra- 
tion belge. | 

Les services rendus à l’acclimatation par M. Cnarces Goup- 
CHAUX, agent des Postes embarqué, ne sont pas sans impor- 
tance. Voulant aider un des membres de notre Société à se 
procurer quelques-unes des espèces les plus intéressantes de 
la Ghine et de l'Inde, M. Goudchaux, à plusieurs reprises dif- 
férentes, s’est fait le convoyeur obligeant et désintéressé des 
précieux passagers qu’il avaitembarqués. Les soins de tous les 


instants, consacrés par M. Goudchaux à ces pauvres oiseaux 


dépaysés, n’ont pas été perdus, ei on lui doit une bonne part 
du succès des envois faits en Europe par Mer Chauveau. 

La Société décerne à M. Goudchaux une médaille de 4° 
classe. 

Une médaille de 2° classe est décernée à M. CHARLES Bové, 
capitaine au long cours, et commissaire à bord des Messageries, 
qui, lui aussi, a fait plusieurs importations intéressantes d’ani- 
maux exotiques. Nous ne saurions en effet remercier trop vive- 
ment, en leur décernant nos récompenses, ces coopérateurs 
obligeants de notre œuvre, sans le concours desquels nous ne 
pourrions nous procurer ces précieuses espèces dont quelques- 
unes Seront, avant peu d'années, la richesse de nos voliéres et 
de nos chasses. 

Nous manquerions à l'équité, lorsque nous remercions, au 
nom des amis de l’acclimatation, ceux qui ont prêté leur con- 
cours aux importations d'oiseaux dont 1l s'agit, si nous omet- 
tions de citer le nom de M. Borléve, l’ancien commandant du 
steamer le Tigre, récemment décédé. M. Boilève à eu da plus 
orande part danslesimportations qui nous occupent, etnousne 
devons pas négliger de rappeler son nom dans cette circon- 
stance. 

La petite Gaille de Chine (Cofurnix Sinensis) a été multipliée 
en 1873, pour la première fois en Europe, par M. Coëffier (de 
Versailles). Cet amateur distingué a déjà mérité souvent les ré- 
compenses de la Société; la médaille de seconde classe, que nous 
lui décernons aujourd’hui, lui rappellera le nouveau succès 
obtenu pour la multiplication de ces élégants oiseaux qu'il a 
su observer si bien. 


& ae © 
| FR. 


# ‘ : . 


(4 


RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES.  XCIX 


M. le capitaine CRépu se préoccupe avec ardeur de la domes- 
tication des Autruches en Algérie, et les résultats déjà obtenus 
et publiés dans notre Bulletin méritent l’attention. La Société 
espère que M. Crépu réussira dans sa tentative, et elle récom- 
pense d’une médaille de 2° classe les premiers succès de cet 
expérimentateur qui cherche à doter l’Afrique française de ces 
animaux domestiques qui sont exploités déjà par les colons 
du cap de Bonne-Espérance, comme M. Douglas que nous 
avons récompensé aujourd hui 

_- La Société décerne à M. Leroy (de Fismes) une médaille de 
seconde classe pour le succès qu'il a obtenu en 1873 dans la 
multiplication des Faisans vénérés de la Chine. 

Si la Société avait beaucoup de chepteliers comme M. .. 
ses essais d'introduction d'animaux exotiques iraient vite et 


bien, car on trouve dans cet expérimentateur, avec le goût le 


plus vif pour les animaux, le sentiment le plus intelligent de 
ce qui peut favoriser le succès des tentatives. 

La Société a proposé dans ces dernières années un prix des- 
tiné à celui qui aurait réussi à transformer notre Pintade do- 
mestique en gibier. Elle décerne une mention honorable à 
M. Aurerèpe Duponr qui a plusieurs fois tenté, et avec un cer- 
tain succès, de remplir les conditions du prix proposé. 

Une autre mention honorable est décernée à M. le D: Jourpan 
(de Voiron), pour les reproductions de Passereaux et de Per- 
ruches obtenues dans ses volières. Les observations faites par 
M. le D' Jourdan présentent un réel intérêt. 


TROISIÈME SECTION. — Poissons, Crustacés, etc. 


La culture des eaux est un art trop négligé aujourd'hui. 
Aussi la Société est-elle heureuse de pouvoir récompenser 
ceux qui s'en préoccupent et savent obtenir des résultats pra- 
tiques. 

À ce titre, M. ÂMÉDÉE BERTHOULE mérite la médaille de 4'° 
classe que nous lui décernons aujourd’hui, car il à réussi de la 
façon la plus pratique Pempoissonnement du lac Chauvet (Puy- 
de-Dôme) par des Salmonides, 


ë SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION, 


Plus prévoyant que la plupart de ses devanciers, M. Ber- 
thoule a su purger le lac Chauvet de tous les poissons pisci- 
vores qui l’habitaient, et il leur a substitué des poissons 
herbivores qui, devenant la proie des Truites, Ombres, Feras et 
Saumons introduits dans les eaux du lac, ont été les éléments 
les plus importants du très-remarquable accroissement obtenu 
des poissons que M. Berthoule voulait produire. 

La Société décernait, l’an dernier, à M. PAUL CARPONNIER, 
mécanicien à bord des Messageries, une médaille de seconde 
classe pour l’encourager dans les importations de Chine et du 
Japon qu’il avait tentées avec succès. Nous décernons aujour- 
d’hui à M. Paul Carbonnier une médaille de 1° classe. 

C’est qu’en effet le zèle de ce lauréat n’a fait que grandir, et 
les poissons qu'il a rapportés à son parent notre collègue, 
M. Pierre Carbonnier, présentent un réel intérêt. Ces animaux 
placés dans les mains de l’ingénieux expérimentateur du quai 
du Louvre seront multipliés à coup sûr ; certains hommes 
n’ont-ils pas en quelque sorte le don de réussir à tout ce 
qu'ils entreprennent. 

M. CHaNTRAN a fait sur la vie, la fécondation et le développe- 
ment des Écrevisses, des études d’un réel intérêt. Les travaux de 
cet observateur patient et consciencieux sont de nature à éclai- 
rer ceux qui voudraient se livrer à la culture des Écrevisses. 
La Société décerne à M. Chantran une médaille de 1" classe. 
En décernant cette récompense, nous sommes heureux de 
rappeler que ce lauréat a élé, pendant de longues années, le 
collaborateur modeste et dévoué du savant illustre qui peut 
être considéré à bon droit comme le fondateur des études rela- 
tives à la pisciculture : M. Coste. 

M. Hans FASLER a créé, près d'Interlaken, en Suisse, un éta- 
blissement industriel pour l'éducation et la vente des Truites. 
La Société décerne à M. Hans Hasler une médaille de 14°° 
classe pour récompenser le succès de son entreprise qui est 
devenue tout à fait pratique, et dans laquelle les Truites 
peuvent être livrées au commerce à l’âge de trois ans, pesant 
250 grammes en moyenne. 


+ 
| 
RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES. CI 


QUATRIÈME SECTION. — /nsectes. 


” M. Léonce BERGIs, de la Société d’horticulture et d’acclima- 
tation de la Haute-Garonne, a envoyé à la Société un mémoire 
relatif aux précautions à prendre, dans les petites éducations 
séricicoles, pour arriver à la production de graines parfaite- 
ment saines. Ce mémoire contient de bonnes observations, 
des vues ingénieuses, et confirme des faits connus. La Société 
décerne à son auteur une médaille de 1”° classe. 

La Société porte, on le sait, le plus vif intérêt aux essais d’ac- 
climatation faits sur le Ver à soie du Chêne du Japon Yama- 
mai; aussi récompense-t-elle M. A. BiGor qui a obtenu à Pontoise, 
en 1873, un très-bon résultat des Vers japonais qu’il élevait. 
Le travail que M. Bigot nous a adressé sur ses éducations est 
intéressant et contient des observations nouvelles. La Société 
décerne à M. Bigot une médaille de 1° classe et l’engage à 
continuer ses intéressants essais. 

La Société décerne à M. Bruner, de Bahia (Brésil), une mé- 
daille de 1° classe pour les études qu’il a faites sur les Méli- 
pones ou Abeilles sans aiguillon. M. Brunet a tenté des 
efforts heureux pour faire arriver en Europe des colonies de 
ces insectes mellifères, et ilaen outre adressé des échantillons 
conservés dans l’alcool qui seront, pour la détermination de 
ces animaux mal connus, des éléments de recherches pré- 
cieux. 

M. de CAPANEMA, directeur général des lignes télégraphiques 
du Brésil, a tenté avec persévérance de domestiquer dans son 
pays l’Aftacus aurota, espèce séricigène propre à fournir à 
l’industrie une soie de bonne qualité. Les essais de notre col- 
lègue brésilien n’ont pas eu tout le succès qu’il en espérait. 
La Société lui décerne néanmoins une médaille de 1"° classe. 
C’est qu’en effet M. de Capanema, tout en poursuivant ses es- 
sais de domestication, se préoccupait de faire faire dans le pays 
la recherche des cocons produits à l’état sauvage, et avec les 
cocons récoltés il a pu faire faire en France, par les soins de 
la Société, des essais de dévidage qui ont parfaitement réussi 


LA 


en ji SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 
et donnent à penser qu’on trouvera dans la soie de l’Affacus 
aurota une malière précieuse pour l’industrie. Fe 

Parmi les espèces séricigènes dont l'introduction est vive- 
ment désirée par la Société figure l’Affacus Pernyi, ou Ver 
à soie du Chêne de Chine. Cette espèce, dont la soie sert à 
vêtir des millions de Chinois pourra s’acclimater, nous en avons 
l'espérance, comme le sera bientôt le Vama-maï du Japon. 

Grâce à M. DE GEOFROY, ministre de France en Chine, nous 
pouvons reprendre les essais de naturalisation que nous avions 
entrepris sur le Ver à soie de Chine qui se nourrit de la feuille 
du Chêne. En effet, M. de Geofroy, en même temps qu’il nous 
expédiait des semences de plantes chinoises intéressantes, nous 
adressait des cocons vivants du précieux Ver à soie. Ges cocons 
éclosent en ce moment, et les papillons que nous recueillons 
nous donnent des œufs nombreux qui nous permettront de 
faire, dans le cours de l'été prochain, d’intéressantes éduca- 
tions. 

La Sociéte décerne à M. DE MizLiy une médaille de 1° classe 
pour ses éducations d’Aftacus Cynthra (Vers àsoie de l'Aïlante). 
Le mémoire rédigé par M. de Milly sur ses travaux séricicoles 
est d’un grand intérêt, et les conseils qu'il donne aux éduca- 
teurs seront précieux à suivre. 

Aujourd'hui quelasoie du Ver de l’Aïlante, récemment intro- 
duit en Europe, est acceptée par l’industrie, il y a le plusgrand 
intérêt à attirer l'attention sur des essais comme ceux de 
M. de Millv, et sur des mémoires comme celui que nous lui 
devons. 

En 1873, comme les années précédentes, M. DE SauLey a 
élevé des Vers à soie Yama-maï du Japon. La Société applaudit 


à la bonne réussite obtenue chaque année par M. de Sauley, 


et le remercie des notes précieuses et des observations soi- 
oneuses qu'elle doit à cet expérimentateur persévérant. La 
Société décerne à M. de Saulcy un rappel de médaille 
de 1" classe. 

Madame BLanDEN NEILL et M. BrAnDy se sont occupés avec 
une infatigable ardeur d'introduire en Australie la culture des 


… Vers à soie. Dans quelques années peut-être, la sériciculture 


RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉ CONPEN TE CU 
aura pris pied dans le continent australien, et cette féconde 
industrie devra son importation aux antipodes, à Madame 
Neïll et à M. Brandy; la Société décerne à chacun d’eux une 

“édaille de seconde classe, comme témoignage de sympathie 
pour leur tentative. 

M. le vicomte d’ADHÉMAR DE CASEVIEILLE a reçu, l’an dernier, 
de la Société plusieurs lots de graines de Vers à soie du Mürier 
qu'il y avait intérêt à faire expérimenter. Le rapport fait par 
M. d’Adhémar de Casevieille sur ses éducations est très-inté- 
ressant, et la Société décerne à son auteur une médaille 
de 2° classe. 

M. BLonpeL (de Toulouse) a réussi, en 1873, une petite 
éducation de Vers à soie Fama-maï du Japon, et une petite édu- 
cation du Ver à soie du Chêne de Chine (Pernyi). Ces éduca- 
tions faites avec soin ont été remarquables par la rapidité 
avec laquelle les Vers ont accompli leur évolution. La Société 
espère que M. Blondel continuera à s’occuper de l’éducation 
de ces insectes séricigènes, et lui décerne une médaille de 
2° classe. 

M. le docteur J.-J. LAFoN, s’est occupé, pendant plusieurs 
années, de croiser les Abeilles ordinaires avec les Abeilles 
italiennes. Ces essais n'ont pas toujours été heureux; cepen- 
dant ils méritent d’être encouragés, et la Société décerne à 
M. Lafon une médaille de 2° classe. 

On sait que l’un des grands obstacles que rencontre l’éle- 
veur qui veut se livrer à l'éducation des Vers à soie Yama-maï 
du Japon, c’est la précocité de l’éclosion des petites chenilles, 
qui, devançant la pousse des feuilles de Chêne, meurent faute 
d’aliment. 

L'an dernier la Société confia, à M. Christian LE Doux, des 
œufs de Yama-maï qui avaient été tenus durant plusieurs mois 
dans une glacière artificielle. Le succès des éducations de 
M. Le Douxest venu démontrer que, pour avoir été maintenus 
longtemps à une température froide, les œufs n'avaient pas 
perdu la vie. La Société décerne à M. Le Doux une médaille 
de 2° classe. 

M. SAzzepo (de Sainte-Marthe) a envoyé à la Société un. 


#S 


ET £ \ D 
S sa 1 - al s 


CIV SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


mémoire intéressant sur les Abeilles sans aiguillon ou Méli- 
pones, qui renferme des faits inconnus à ce jour. La Société, 
remerciant M. Salzedo de ces communications, lui décerne 
une médaille de 2° classe. 

M. USÈBE a réussi à Milly (Seine-et-Oise) une petite édu- 
cation de Vers à soie Yama-maï. La Société attache un certain 
intérêt au succès de M. Usèbe, car les éducations du même 
genre ont très-généralement échoué tout autour de Paris. 
La Société décerne à M. Usèbe une mention honorable. 


CINQUIÈME SECTION. — Végétaux. 


M. AuTARD DE BRAGARD, depuis 1857 jusqu’à ces temps der- 
niers, n’a cessé de faire les plus persévérants efforts pour en- 
richir l’île Maurice qu’il habitait, l'Égypte où il a résidé, et 
la France où :l fait de longs séjours, des végétaux et des 
animaux qu'il pensait pouvoir y naturaliser. C’est ainsi que, 
par les soins de M. Autard de Bragard, Maurice et la Réunion 
ont reçu le Vaniller et le Cerisier du Brésil, l'Égypte, en 1854, 
le Filao (Casuarina), et vers 1859, l'Embrevade. 

Ces persévérants efforts ne pouvaient manquer d’attirer 
l'attention de la Société, qui décerne à M. Autard de Bragard 
une médaille de 1" classe. 

Les applications thérapeutiques de l'£Eucalyptus etdes pro- 
duits pharmaceutiques qu’on en peut extraire ont élé étudiés, 
par M. le docteur Gimgerr (de Cannes), avee un soin particu- 
lier. La Société, appréciant le mérite de ces recherches, dont 
les résultats sont consignés dans plusieurs mémoires impor- 
tants, décerne à M. le docteur Gimbert une médaille de 
1° classe. 

Nos jardins et nos parcs sont ornés d'arbres résineux que 
nous négligeons trop de faire expérimenter au point de vue 
forestier. M. Victor Masson s'est préoccupé de démontrer 
qu’un grand nombre des arbres étrangers, dits d’ornements, 
sont susceptibles de devenir dans notre pays des arbres fores- 
tiers. Il a expérimenté, sur une grande échelle, un certain 
nombre d'espèces exotiques et en obtientlesmeilleurs résultats. 


A : Re PRES Ut!) 
{ PIOE + si RUE 


RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES. CV 


La Société décerne à M. Victor Masson, une médaille de 
1° classe. 


Observer avec soin les plantes de la culture desquelles on 
s'occupe, savoir rendre un compte fidèle des observations 
recueillies, sont des qualités malheureusement trop peu ré- 
pandues parmi nos coopérateurs en acclimatation. Aussi la 
Société est-elle heureuse de pouvoir décerner à M. Maumenet 
“de Nîmes), une médaille de 1" classe, pour ses diverses 
eultures de plantes exotiques, et en même temps pour les 
comptes rendus si intéressants qu’il veut bien nous adresser 
fréquemment. 

M. Maumenet a multiplié avec succès plusieurs variétés 
de Bambous, le Rhamnus utilis et d’autres plantes encore. 


On sait quel intérêt s'attache à la naturalisation des arbres 
à quinquina en dehors de leur patrie d’origine. Déjà la Société 
a récompensé les heureux efforts de ceux qui ont pu réussir 
l'introduction de ces plantes médicinales précieuses aux Indes 
et à Java. Elle décerne aujourd’hui une médaille de 4"° classe 
à M. Niero qui, dans les environs de Cordoba (Mexique), a su 
faire prospérer les Cénchona. Ges jeunes plantations com- 
mencent à donner des espérances sérieuses; la Société se 
réserve de décerner à l’auteur de celte intéressante tentalive 
une nouvelle et plus haute récompense pins il sera arrivé à 
exploiter ses nouvelles plantations. 


La Société a récompensé l’année dernière, par une mention 
honorable, M. le lieutenant-colonel Ch. BÉGiN, pour les envois 
de végétaux qui avaient été faits par lui. M. Bégin a continué à 
nous adresser des plantes dignes d'intérêt, et en particulier des 
Cannes à sucre éléphant (Mia voi), el aussi la variété que pré- 
férent les Annamites pour la fabrication du sucre {Wia laÿ). 
Reconnaissante de ces envois utiles pour nos colonies des 


Antilles, la Société décerne à M. le lieutenant-colonel Bégin 
une lle de 2° classe. 


M. CHAPPELLIER a introduit en France plusieurs variétés 
étrangères de Safrans utiles à l'industrie. Ces introductions ont 
été faites avec une ténacité digne d’éloges, et la Société est. 


CVI dr SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION, 


heureuse de pouvoir en remercier M. Chappellier, en lui décer- 
nant une médaille de seconde classe, 

Elle décerne également à M. MARCHENAY une médaille de 
2e classe pour les heureuses multiplications qu’il a faites des 
safrans importés par M. P. Chappellier. 

M. DE CHATEAUVIEUX s’est occupé avec dévouement de la 
vulgarisation de l'Eucalyptus dans l'île de la Réunion. Grâce 
aux efforts de cet administrateur éclairé, la colonie de Bour- 
bon voit aujourd'hui prospérer les plantations de l'arbre 
australien qui sera pour les mornes de cette île une précieuse 
acquisition. 

En outre, M. de Chateauvieux, s'étant procuré des semences 
de trente variétés d'Eucalyptus, a entrepris de les comparer 
entre elles, afin de pouvoir distinguer quelle est l'espèce qui 
pourra rendre le plus de services à la colonie. 

La Société a voulu témoigner à M. de Chateauvieux l'intérêt 
qu’elle prenait à ses efforts, elle lui a décerné une médaille 
de seconde classe. 

La Société a fondé, il y a quelques années, un prix pour 
récompenser la création d’une variété d'Igname de Chine, de 
forme bulbeuse.Plusieurs expérimentateurss étant mis en quête 
de semences de cette excellente plante féculente chinoise n’ont 
pu s’en procurer. La plante est dioïque, et par malheur tous 
les pieds cultivés se trouvaient du sexe mâle. 

Cependant M. CITERNE, jardinier chef du Jardin botanique 
de Clermont-Ferrand, avait conservé des pieds d’Igname fe- 
melle, et par ses soins des semences ont pu être obtenues. La 
Société, heureuse de pouvoir faire faire des semis d’Ignames, 
grâce aux plantes conservées par M. Citerne, lui décerne une 
médaille de seconde classe. 


Récompenses pécuniaires. —— Prix fondé par feu M, Agron 
de GermiIigny. 
La première prime est décernée à M.BLONDEL, gardien chef 
des Mammifères au Jardin d’acclimatation du bois de Bou- 
logne, dont les longs et excellents services méritent tous les 


- éloges. 


4p.. 1008 C ” FETE ] 
« L ; | 


RAPPORT DE LA COMMISSION DES RÉCOMPENSES. CVIT 


La seconde prime est décernée à M. LANCGELLE, gardien 
à la Ménagerie du Muséam d'histoire naturelle, qui s’est fait 
remarquer par les soins ingénieux donnés aux animaux con- 
fiés à sa garde. 


Primes offertes par l'administration du Jardin d'acelimatation, 


La première de ces primes est offerte au gardien Joseph 
RourY, pour le concours intelligent qu’il a apporté au dressage 
des Zèbres de Burchell, actuellement employés au service du 
Jardin d’acclimatation. 

La deuxième prime est accordée au sieur METZ, faisandier 
au Jardin d'acclimatation, qui s’est fait distinguer par son 
le: 

La troisième prime est donnée au sieur SuLPICE, employé 
à la poulerie du Jardin d’acclimatation, dont le service ne 
laisse rien à désirer. 

Enfin la quatrième prime est allouée au sieur PÉRÉARE, qui 
est chargé de la conduite des Autruches attelées, et qui s’est 
fait remarquer par sa douceur envers les animaux qui lui 
sont confiés. 


RAPPORT 


DE LA 
COMMISSION DE COMPTABILITÉ 


SUR L'EXERCICE DE 1873. 
PAR 
MM. Eug. DUPIN et F. JACQUEMART, rapporteur. 
Séance du 22 mai 1874. 
Messieurs, 


Nous venons, au nom de la Commission des finances, vous renûre 
compte des recettes et des dépenses de la Société, pendant l'exercice de 
1873, et de sa situation au 31 décembre dernier. 


Nous mettrons ensuite sous vos yeux le projet du budget pour l’année 
1874. 


Recettes de 1873. 


Les recettes se sont élevées pendant l'année 4873, conformément au 


tableau n° MP SCEjoML PAT AMEN ETS 1. à Re MODES 
Savoir : 
Recettes ordinaires applicables à 
liexercice AS TN IE LEA TpEe : 38,220 fr. 44 
Recettes extraordinaires . . . .. 26,893 82 


65,113 fr. 9€ 
Dépenses. 
Elles se sont élevées, conformément au tableau n° 2, 


APE ML Re à Ur. I ARNO RE . 61,303 fr. 83 
Mais à ce chiffre, il faut ajouter ce qui reste 
dû sur l'exercice 1873. 


Savoir : 
Sur le bulletin de1873 . . . . . . . 5,248 fr. 65 
Sur frais généraux. . . . . . . Lin: 887 40 
Sur graïnes et plantes . . . . . . . LAS 85 
Sur traitement du personnel et gra- : 
HAGALIONS MEME PE NS IR ADR TRS 1,450 » 
9,004 fr. 85 9,004 85 
C'est-à-dire que le total de la dépense est de. . . 70,308 fr. 68 
Savoir : 


Dépenses ordinaires ap- 
plicables a l’exercice1 873, 
PAYÉES AIMENT ARR 30,686 fr. 63 
A DAVER AL re 9,004 85 


ANTEpOrIEr. Re. 39,691 fr 073 


39,60: fr. 73 


RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ. CIX 


Report. . . . 39,691 fr. 73 
Dépenses extraordinaires dont 6,388fr. 
45 c. applicables à 1872... . . . . . . 30,616 fr. 95: 


70,308fr.68 70,308 fr. 68 

Si l'on compare les recettes et les dé- 

penses de 1873, on trouve : 
Pour les recettes encais- 

SEC. de ee 38,220 fr. lé 
Pour celles restant à en- 

caisser sur 2,070 fr. de 

cotisations en retard. . .}] 1,500fr. » 
EÉbpour la dépense "meta 39,691 fr, 73 
C'est-à-dire que pendant l'exercice 

1873, les recettes n’ont dépassé les dé- 

penses que la minime somme de 28 fr. 39. 

C’est bien peu ! 


39,720 fr. 12 


Situation au 1° janvier 1874. 
ACTIF. 


1° En caisse chez le trésorier. . . . , . . . : 
20 Cotisations arriérées à recouvrer : 
Cotisations définitives. . . 4,040 fr. 


USSR O TUE 


D. OC SEMMAREEEREES 75 

» 1870. . e 31 0 2=<0 

DE TrTUd 1,183 6,320soitnet. k,000 » 
DGA AR. 2. 1,671 

DL] E TE ROME 2,071 : 

3° Dù par la Société protectrice. (Loyer de 1873.) 700 s 


4° 374 obligations de chemins de fer; savoir : 
80 du Dauphiné, prix d'achat 24,014 fr. 40 : 


108%du Midi mo ue uns 30,934 35 
17 ‘prix du sultan. . . . . 4,990 25 | 
100 de l'Ouest. .. . . . . 29,926 39 111,503 70 
DARTO EST En 15,809 45 
20 des Ardennes {fondation 
Agron de Germigny). . 5,743 90 / 
374 
100 actions du Jardin d’acclimatation. . . . . . . . 25,000 » 
; Total de l'actif. . . . . . . 145,013 fr. 83 
PASSIF. 
Dû à divers, pour solde de 4873. 9,004 fr. 85 


Dü au Jardin d’acclimatation solde 
dolaisnbyentione et 43370 05 


Total du passif, . . . 29,374 fr. 90 92,374 90 
D'où l’excédant de l'actif sur le passif est de. . . . 122,638 93 


145,043 fr. 83 


Ex Éou SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


C'est-à-dire que la Société possède, au 1° janvier 4874, une valeur 
de 122,638 fr. 93 c. 

Mais en raisou de la dépréciation des actions du Jardin et des obliga- 
tions, il convient de réduire de 25,000 francs cette balance en faveur 
de l'actif, ce qui ramène le chiffre de l’uctif net à 97,638 fr. 93 c. 

Ce chiffre est plus élevé de 2,721 fr. 07 c., que l'actif net:au 31 dé- 
cembre 1872, | 

Au premier janvier 4874, le nombre des membres de la Société, déduc- 
tion faite des morts, des démissions et des radiations, s'élevait à 1629 

Savoir : 
36 membres honoraires, 
13 sociétés affiliées, 
320 souscripteurs définitifs, 
1260 membres payants 
dont : 
23 sociétés agrégées. 
1237 membres ordinaires. 
1260 


Total, . 4629 membres. 


Ce nombre est supérieur de 52 à celui des membres de la Société au 
1°" janvier 4873. 

Cette augmentation, quoique modeste en soi, a une valeur relative 
très-grande ; elle indique que le temps de la décroissance a cessé et per- 
met d'espérer qu'une ère nouvelle commence. 

Déjà au 1° mai, toutes compensations faites, la Société comptait 112 
membres de plus qu'au 4° janvier dernier. 

Pour compléter ce qui est relatif à la situation générale de la Sociéié ; 
nous devons vous faire remarquer que le capital de 80,000 francs (pro- 
duit de 320 souscriptions définitives) est plus que représenté par la 
réserve, qui est, comme vous l’avez vu, de 97,638 fr. 93 c., déduction 
faite de toutes charges. 


Détail des recettes de 1872. 
(Tableau n° 1). 


Nous vous avons dit, messieurs, que les recettes faites pendant l’an- 
née 1873 s’élevaient à 65,113 fr. 96 c. 
Elles se composent de : 


40 Aecettes ordinaires: 


2,740 fr. » Dons : du ministère 2000 fr. 
du roi de Cambodge 1000 fr., dont il faut déduire 
sa cotisation définitive de 260 fr. 
291 » Intérêts de la fondation Agron de Germiny, 


3,031 fr. » À reporter. 


RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITÉ, 


3,034 fr. » 


248 40 
5,203 49 
27,536 » 
700 » 
267 » 
1921 75 
682 50 

80 » 

50 » 


38,220 fr, 14 


16,943 fr. 84 


5,645 » 
4,350 50 
1% 48 


26,893 fr. 82 


65,113 fr. 96 


Les dépenses 


HT 
_ 1%,860 fr. 98 


25 » 
635 » 


15,520 fr, 98 


CXE 


Report. 

Intérêts du don du Sultan. 

Intérêts des fonds placés. 

Cotisations perçues. 

Loyer de la Société protectrice pour 1872. 
Abonnements au Bulletin. 

Ventes de Bulletins 4872 et 1873. 

Tirages à part remboursés. 

Vente de gravures et de médailles. 

Vente de Canards. 


Total des recettes ordinaires. 
20 Aecettes extraordinaires. 


En caisse au 1°" janvier 1873. 
22 cotisations définitives applicables à la réserve. 
Cotisations arriérées des années antérieures 


Savoir : 


60 fr. pour 4869. 

150 pour 1870. 

1,125 pour 1871. 

3,025 pour 1872. 
Encaissement pour la famille Rémy. 


Total des recettes extraordinaires. 


Total général des recettes. 


Détail des dépenses de 1873. 
(Tableau n° 2.) 


s'élèvent à 70,308 fr. 68 c. 


Savoir : 
4° Dépenses ordinaires. 


Bulletin de 4872. Ce Bulletin tiré à 2000 exemplaires : 
revient à 7 fr. 43 c., par exemplaire complet rendu 
à domicile. Ce prix est plus élevé de 1 fr. 05 que 
celui des années précédentes. L'attention de la Com- 
mission de publication a été appelée sur ce point, et 
nous sayons qu’elle s'efforce, sans diminuer le mérite 
du Bulletin, de proportionner la dépense qu’il occa- 
sionne aux ressources générales de la Société. 
(Cheptel) remboursement à M. de Morteuil. 
Vers à soie du Chêne : achat de graines 235 fr.; payé à 
M. Votte pour éducation 400 fr. 


À reporter: 


g 
Ex 
15,520 fr. 98 


188 60 
6,218 45 
6,213 40 
28,441 fr. 13 
40,727 75 
479 89 
39,691 fr. 73 
4,436 fr. 40 
9223 85 
1,170 » 
858 10 
23,500 » 

728 » 
30,616 fr. 95 
70,308 fr. 68 


L SOCIÉTÉ D'ACGLIMATATION. 
Report. 
Port de graines et plantes. 
Séance publique annuelle dont : 
Pour prix. ; ! 
Location de la salle et concert À 
Traitement du personnel en 1873. 


5,818 fr. 13 
700 00e 


Frais généraux. 


Savoir : 
3,500.fr. » Loyer. 
193 95 


70 Assurances. 
Chauffage. 

40 ES 
Éclairage. 


»  Uniforme pour le garçon de bureau. 


{ 
k,093 fr. 35 ui 


348 


1,663 20  Timbres-poste. 
2,427 85 Impression. 
6,535 40 654 30 Livres et reliure. 
| 376 70 Frais de bureau. 
\ 1,413 35 Frais divers. 


Frais de recouvrement des cotisations. 


Total des dépenses ordinaires. 


2° Dépenses extraordinaires. 


Solde du Bulletin de 4872, 

Solde, ports de graines et de plantes 1872. 

Solde des appointements du personnel de 1872, 

Soide des frais généraux de 1872. 

A valoir sur la subvention de 35,000 francs, donnée au 
Jardin d’acclimatation, savoir : 1,870 fr. intérêts, 
21,619 fr. 95 cent., capital. 

Rembour$ement pour solde de tout compte avec la fa- 
mille Rémy. 


Total des dépenses extraordinaires, 


Total général des dépenses de 1873. 


Nous allons, messieurs, vous présenter un aperçu des recettes et des 
dépenses pour 1874. 


feecettes. 
Souscriptions renouvelées (1350). . . . . . . . . . . 33,780 fr. 
AlOCation duministére fe À 4e ARTE 2,000 
LoyeridelarSociété protectrice. eur. foie eee 700 
Revenu des capitaux, net . . . . . . . DT OUEST CE 5,950 


Total des recettes probables en 1874. 


.. 42,000 fr. 


Le 


RAPPORT DE LA COMMISSION DE COMPTABILITE. CXIIT 


Dépenses. 
Loyer, impôts, assurances et HD PE dos 0 k,100 fr. 
Bulletin (2000 exemplaires) . dope Cire PAF U00 
Frais généraux : poste, imprimés, fournitures de bu- 

MEL © 0.0! 0 MONO MARNE ENS EEE SERA E 6,500 
Recouvrements CDÉPrONINCE PR APN NU 500 
DraemMeNtiAUL personnel NM MEN EN Ie 6,000 
Inspecienvdes/cheptels en ec 2,500 


Total des dépenses indispensables. . . .  33,600.fr. 


C'est-à-dire, messieurs, que la différence entre les recettes et les dé- 
penses étant de 8,400 fr., vous pourrez disposer de cette somme pour 
encouragements et récompenses. 

Ce n’est pas le rôle des commissions financières de provoquer des 
dépenses ; si donc nous avons maintenu dans ce projet de Budget la 
somme de 2,500 francs pour l'indemnité à allouer à un inspecteur des 
cheptels, c'est que nous avons la conviction que dans l'intérêt de la 
Sociélé, ce service devra être installé dès qu'il y aura lieu de le faire. 

Nous ne saurions terminer ce rapport, fait au nom de votre Commission 
financière, sans exprimer nos profonds regrets de la mort de son vénéré 
Président, M. Antoine Passy. 

Des connaissances étendues, une grande expérience des choses et des 
hommes ; un esprit sage, laborieux, toujours prêt ; un jugement sain; un 
caractère sûr, conciliant, attaché à ses devoirs ; des mœurs simples et 
pures, faisaient, de M. Antoine Passy, un éminent homme de bien. 

Pendant vingt ans, nous avons pu apprécier les nombreux et importants 
services qu'il a rendus à notre Société, et nous avons considéré comme un 
devoir d'exprimer, au nom de la Commission des finances, les sentiments 
de respect et de reconnaissance qu'il nous avait inspirés. 


3€ SÉRIE, T. |. — Séance publique annuelle. le 


F JAB DIN D'ACCLIMATATION DU BOÏiS DE BOULOGNE. 


RAPPORT 


PRÉSENTÉ AU NOM DU CONSEIL D'ADMINISTRATION 
PAR LE DIRECTEUR DU JARDIN 


M. A. GEOFFROY SAINT-HILAIRE 


À l’Assemblée générale du 27 avril 1814. 


Messieurs, 


En vous présentant ies comptes de l’année 1873, nous avons la satis- 
faction de pouvoir vous dire que les espérances que nous concevions pour 
la prospérité du Jardin d'acclimatation se sont réalisées. En effet, dans le 
cours de cette année, nous avons vu nos receltes de toutes sortes aug- 
menter notablement. Non-seulement le public s'est montré assidu à visiter 
l'établissement, mais tous les éléments de recettes qui assurent l’existence 
de l’entreprise se sont développés. 

L'exercice 14873 a eu à supporter la fin des travaux de restauration 
résultant de la reconstitution du Jardin, et les dépenses de cette nature 
ont eu assez d'importance pour absorber une notable partie de l'excédant 
des recettes réalisées. 

Nous vous soumettons, messieurs, l'inventaire et le compte d'exploita- 
tion relatifs à l'année 1873. 


Énventaire au - 


Actif. 

Espèces en caisse ...... 15722 
Espèces au Crédit foncier. 941 
Cautionnement ....... : 9,000 
ANIMAUX ES REPAS Le 232,482 
Mobilier: 204% tm AL 60 
Mobilier industrielet outil- é 

[age PE So be D IG Din 15,749 
Approvisionnements..... 15,567 


Comptes courants débi- 


LeUTS ee ete ce 00 000 


Total... 345,085 


Constructions nouvelles... 142,545 


Total égal...... 487,631 


3% décembre 1822. 


Passif. 

15 | Comptes créditeurs..... 243,341 66 
55 | Excédant de l'actif (Capi- 
» tal d'exploitation) . ... 


Total.... 345,085 55 
Capital immobilisé (con- 
structions nouvelles)... 142,545 63 


18 Total égal... MST TES 


101,743 89 


Des. 


SITUATION FINANCIÈRE DU JARDIN. CXV 
Compte d'exploitation de l'exercice 41893, 
Recettes. Dépenses. 
Inféretsaee tn. 3,069 35 | Conduites d’eau........ 244 » 
Dai ES A dei. 2700) | Magnanenen Pere 1,288 39 
Entrées du jardin. ...... 250,948 35) | Omnibus : ...:.” Dole 5,061 60 
Abonnements... ....... 6,310 » | Graines et plantes. ..... 3,055 25 
Dons d'animaux. ....... LPO SPA QUE LUNA NME MMA 6,856 15 
Vente de plumes....... 416 » | Entretien du jardin...,. 24,599 418 
DAUILIES EME 21e a puni heros AZ Nardindihiver Rene : 7,409 » 
Vente diŒufs2 7... 4,789 170 | Salon de lecture... .,..… 180 » 
Promenades et nr 14,940 10 | Outils de jardinage, . ... 1,738 20 
Chase Peer 3,771 25 | Mobilier industriel et ou- 
Mi RAiTIe A ERA EEE 78720 HEC 'anbbe be 10,063 75 
BUILE ARS RON AIRE ANS 8,900 » | Entretien et appropriation 
DallemerbHer 2 RQVar EU h,619 20 des bâtiments ...., 13,362 30 
Bénéfice sur la vente des Entretien des clôtures. .. 9941 85 
AMIAUX PE ele here 142.077 ONFBublicte ei EE En 13,620 35 
Exposition permanente. , 618 90 | Chauffage ...,,......, 6,623 90 
Subvention du ministère LOYEPHE ES ARR TnNS 1,000 25 
de l’agriculture... . .. 6,000 » | Frais de bureau.....,.. 7,422 75 
————— | Assurances ........... 373 50 
Toile 58e SH 0808 AU TM pOIS APE ER ER ER 2,285 55 
ne Nourriture des animaux.. 86,551 60 
Timbre des actions . .... 601 » 
Abonnement des eaux... 3,200 60 
; Assemblée générale... .. 503 70 
Concerts PAM ENNTER Ent 29,295 35 
Frais généraux. : -. .... 16,384 55 
Bersanpelii teen 63,406 35 
Rabais sur comptes débi- 
DORSALE 734 45 
Jardin d’Hyères........ 6,723 85 
Total ee 313,618 35 
k : Excédant des recettes. 37,250 05 
Total égal.... 350,868 40 Total égal...... 350,868 A0 
M ublanttdestnecetien de Dépenses extraordinaires. 
l'exploitation 1873... 37,250 05 | Intérêts aux souscripteurs 2 
des serres. , .. Cole 3,940 20 
Recettes extraordinaires. Travaux de restauration. 51,863 45 
Travaux neufs (Chenil).. 29,031 30 
Subvention de la ville de ARE 84,834 95 
ADI EL eee An : 60,000 » Augmentation de l'actif 
d None CAO ZE dlsles clos 12,415 10 
Dune -nn92e28000 Total égal... 97,250 05 
Inventaire. 


i! résulte de l'inventaire que l'actif de la Société était, au 34 décembre 


CXVI SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


4873, de 101,743 fr. 89. Chiffre supérieur de 12,415 fr. 40, à l'actif 
que nous possédions à la fin de l'année précédente. 

Vous remarquerez l'importance acquise par le Capital- Animaux que 
vous possédez ; il s'élevait au 31 décembre dernier à 232,482 francs, et 
il était représenté par 6,830 têtes. La collection valait, au moment de 
l'inventaire, environ 75,000 francs de plus qu'à l'inventaire précédent 

D'autre part, les comptes débiteurs atteignent le chiffre de 68,000. 

Le passif de la Société se trouve donc largement représenté par ces 
éléments sérieux : les comptes créditeurs et la collection. 

Il importe, en effet, pour ce qui concerne la collection, de faire obser- 
ver que les animaux que vous possédez sont évalués avec une excessive 
modéralion. Aussi pouvons-nous affirmer que la vente de notre mobilier 
vivant, si nous étions contraints à la faire, ne saurait donner de perte 
sérieuse. Elle donnera, dans la pratique, un bénéfice plus ou moins im- 
portant à l'exercice 1874; car, vous le savez, nous devons faire, chaque 
année, à l'automne, des approvisionnements considérables d'animaux pour 
pouvoir répondre aux demandes que le public acheteur nous adresse. 

La collection de nos animaux, complétement reconstituée aujourd’hui, 
se compose, comme avant les événements de 4870, de deux éléments 
distincts : Le premier, de beaucoup le plus important, est constitué par 
les animaux de fonds dont nous faisons l’emplette dans le but d'en tenter 
la multiplication ; le second élément de notre collection est formé par les 
animaux que nous achetons dans le but de les revendre. Lorsque nous 
vous parlerons du compte d'exploitation, vous verrez quel heureux déve- 
loppement prend notre commerce d' animaux . 


Compte d'exploitation. 
DÉPENSES ORDINAIRES. 


Ainsi qu'il résulte des tableaux annexés au présent Rapport, les dé- 
penses d’exploitation se sont élevées, en 1873, à 313,648 fr. 35. 

Les Concerts figurent dans ce chiffre pour 29,295 fr. 35. — L'éléva- 
tion de ce chiffre ne saurait vous surprendre, car la rétribution allouée 
pour les concerts est payée, en partie à forfait, en partie au prorata des 
entrées réalisées les jours de Concert. Il résulte de cette combinaison que 
notre habile chef d'orchestre, M. Mayeur, est, en quelque sorte, intéressé 
à ce que le public soit satisfait de la musique qu'on lui fait entendre. 
Votre Conseil se félicite d'avoir pu adopter cette combinaison ; elle nous 
assure le concours le plus empressé du chef d'orchestre, et, en outre, 
elle est équitable, puisqu'elle associe aux avantages que peuvent nous pro 
curer les concerts celui-là même de qui dépend en grande partie le 
succès. 

Nous avons donné, en 1873, un certain développement au service des 
Omnibus que nous avions établi dès 1872. Il est résulté de ce service de 
voitures une perte de 5,061 fr. 60; mais, tout en regrettant l'élévation 
du chiffre de cette perte, nous ne saurions passer sous silence quels avan- 
tages résultent pour notre exploitation de l'existence de ce service spécial! 
qui permet au public de venir commodément jusqu'au Jardin, et surtout 


SITUATION FINANCIÈRE DU JARDIN. CXVII 


de regagner Paris sans embarras. Rappelons aussi que la circulation de 
ces voitures dans Paris est un puissant moyen de publicité, et que l’appo- 
sition dans tous les bureaux d’Omnibus de Paris d'affiches indiquant 
l'existence du service spécial fait par ces voitures est encore un moyen de 
faire connaître au public le Jardin d’acclimatation. Il serait préférable, 
sans aucun doute, que la dépense fût moindre; mais, néanmoins, telle 
qu’elle est, nous ne saurions la regretter, car à notre avis, c’est une 
dépense fructueuse. 

La publicité que nous devons au service des Omnibus n’est pas la seule 
à laquelle nous ayons recours : les 13,620 fr. 35, portés sur les comptes 
de 1873, à l'article publicité, témoignent de l'importance que votre Con- 
seil attache à faire connaître au public le Jardin d’acclimatation. On ne 
saurait en effet négliger d'appeler l'attention du public sur l'établissement. 
La foule est indifférente ; elle a besoin d’être, en quelque sorte, sollicitée. 
Vous verrez, lorsque nous examinerons les recettes réalisées, si nos dé- 
penses de publicité ont été véritablement utiles. 

Les dépenses relatives au Jardin d’Acclimatation de Hyères se sont 
élevées à 6,733 fr. 85. Vous avez appris, par le Rapport que nous avons 
eu l'honneur de vous présenter l’an dernier, que votre Conseil avait accepté 
la concession faite, presque sans rétribution, par la municipalité de la 
ville de Hyères, d'un terrain de six hectares situé dans des conditions 
climatériques exceptionnellement favorables et dans lequel nous pourrons 
faire, sur une grande échelle, les multiplications de plantes et d'animaux 
que la rigueur du climat de Paris entrave trop souvent. Les revenus de 
ce nouvel Établissement ont été, dans le cours de l'exercice, absolument 
insignifiants, et il n’en pouvait être autrement. Avant de récolter, il faut 
semer ; et, dans le cas présent, ces mots sont l'expression même de la 
vérité. Les fruits viendront bientôt, et, dès cette année 1874, le Jardin de 
Hyères fera des recettes assez notables, nous pouvons l'espérer, pour que, 
dans notre prochain Rapport, les charges résultant de votre établissement 
provençal figurent pour des sommes de peu d'importance. 

Nous nous abstiendrons d'entrer dans le détail des autres dépenses 
portées au compte d'exploitation, car elles sont, en quelque sorte, nor- 
males. Si quelques-unes d'entre elles ont une importance plus grande 
que dans les années précédentes, vous en trouverez l’explication dans le 
nombre plus grand d'animaux que nous entretenons, et surtout dans les 
nécessités de service résultant de l'augmentation notable du nombre de 
nos visiteurs, 


EXPOSITION DES CHIENS. 


Vous ne voyez pas figurer, dans les comptes que nous avons l'honneur 
de vous soumettre, l'Exposition des races canines faite au Jardin d’Accli- 
matation par nos soins, du 25 mai au 2 juin 1873 ; c'est que cette Expo- 
sition ne nous a donné ni perte ni gain. 

Nous étions vivement pressés de faire une Exposition de races canines ; 
depuis 4865, aucun concours important n'avait été tenu pour permettre 
d'apprécier les progrès des éleveurs canins, et on pensait que le moment 
était venu de confier, pour la troisième fois, à la Société du Jardin d’ac- 
climatation la mission de faire une Exposition de chiens. 


GXVITI SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION. 


Votre Conseil ne pouvait pas accepter de faire cette Exposition, alors 
que toutes les réparations résultant de la reconstitution du Jardin d'ac- 
climatation n'étaient pas achevées ; alors surtout que l’état financier de 
la Société était encore précaire, nous ne pouvions, en effet, accepter aucune 
chance de pertes. Nous pouvions donner tous nos soins à l’organisation 
du concours, mais la Société ne devait pas s'engager pécuniairement. On 
l’a compris, et une circulaire signée par MM. le comte Le Couteulx de 
Canteleu et Pierre Pichot (1), fut adressée aux personnes qui pouvaient 


(1) Société de patronage pour l'organisation d’une Exposition des races canines, 
en 1873, au Jardin d'acclimatation du bois de Boutogne. 


Les Expositions de races canines ont incontestablement fait connaître aux Fran- 
çais et aux étrangers les immenses ressources de ce genre que possède notre 
pays, ressources généralement ignorées avant les Concours remarquables de 
1863 et de 1865 ; elles ont servi à perfectionner nos races, mettant en évidence 
les sujets de choix, et indiquant aux amateurs où ils peuvent les trouver. 

Les Expositions faites en 1863 et en 1865, par l'Administration du Jardin d’ac- 
climatation du bois de Boulogne, avaient donné d'excellents résultats. C’était done 
un encouragement pour recommencer. 

Depuis 1865, plusieurs tentatives ont été faites, en effet, pour stiiie des 
concours du imême genre. Mais, il faut bien le reconnaître, ces tentatives ont été 
plus préjudiciables qu ‘utiles aux questions qu’elles prétendaient servir, attendu 
qu’elles ont fait croire à beaucoup d'étrangers que les types placés sous leurs yeux 
représentaient ce que nous avions de Here tandis que beaucoup de nos meil- 
leures espèces étaient absentes, ou, sauf quelques belles et rares exceptions, 
représentées seulement par des animaux de rebut. 

Pour faire une semblable Exposition, il ne suffit pas de placer des Chiens les 
uns à côté des autres, et de leur donner des médailles, fl faut choisir les Chiens 
présentés avec discernement, rejeter les mauvais et n’accepter que les bons spé- 
cimens de chaque race, enfin les ranger méthodiquement. 

Autrement l'Exposition n’apprend rien au public, et son but utile est manqué. 

L’Exposition des races canines de 1867, à Billancourt, quoique réunissant quel- 
ques beaux lots, a été insuffisante, à tous les points de vues ; et les exhibitions 
failes, pendant ces dernières années, par l'initiative privée, si elles ont servi les 
intérêts de quelques marchands, sont loin d’avoir rendu les mêmes services que 
les grands Concours de la Société d’acclimatation. 

- Nous avons done cru devoir nous adresser encore à l'Administration du Jardin 
d’acclimatation, qui dispose de tant de puissants moyens d’action et jouit d’une 
considération si justement méritée, pour recommencer avec méthode et avec 
succès une troisième Exposition. 

Cette Administration nous a répondu qu’elle était prête à entreprendre cette 
tâche vraiment utile, mais que sa position financière, à la suite des désastres 
subis par le Jardin d’acclimatation, ne lui permettait pas de fournir les avances 
nécessaires ; que si nous voulions user du concours qu'elle était toute disposée à 
nous prêter de nouveau, il fallait courir les chances de l’entreprise et garantir 
le Jardin contre les pertes qui pourraient en résulter pour lui; en revanche, 
l'Administration nous offrait la moitié des bénéfices que pourrait donner l’opé- 
ration. 

Les motifs du Jardin d’acclimatation, pour ne pas s’exposer à une perte dans 
sa situation actuelle, nous ont paru sans réplique, et les offres qui nous ont été 
faites nous ont semblé acceplables. 

Les avantages que nous trouverions à faire l'Exposition dans le Jardin d’accli- 
matation sont nombreux, puissants, et assez évidents pour que nous nous dispen- 


SITUATION FINANCIÈRE DU JARDIN. OS ces 


apprécier l'intérêt de cette Exposition. On leur demandait de souscrire un 
fonds de garantie qui assurât, en quelque sorte, la Société du Jardin 
d’acclimatation contre les pertes résultant de l’entreprise. L'appel de ces 
messieurs fut entendu, et un capital de garantie de 40,000 fr. futsouscrit. 

L'Exposition s'ouvrit le 25 mai. Elle ne laissait rien à désirer au point 
de vue de l’organisation, et les 600 chiens et les 14 meutes qui y figu- 
raient excitèrent à un haut degré l'intérêt du public. Mais, dès le 26 mai, 
le temps devint mauvais au point de rendre, pour ainsi dire, impossible 
l'accès du Jardin et la visite de l'Exposition. Malgré ces circonstances 
défavorables, l'Exposition fut visitée par 40,000 visiteurs. 

Ce nombre, malheureusement, n'était pas suffisant pour couvrir les 
frais de l'Exposition, et, les comptes de l’entreprise soldés (4), il resta 


sions de les énumérer ici. Nous dirons séulement que le succès des Expositions 
de 1863 et de 1865 est une garantie irrécusable du succès que l’on peut attendre 
dé celle de 1873. 

Pour mener à bien cette nouvelle entreprise, nous faisons donc appel au con- 
cours des personnes qui s'intéressent à la conservation et à l'amélioration des 
races canines, persuadés qu’elles ne refuseront pas leur appui à une œuvre émi- 
nemmenñt utile. 

Et nous leur proposons de se joindre à nous pour constituer un fonds de 
sarantie de 50,000 francs, analogue à celui qui avait été souscrit pour couvrir 
les frais de l'Exposition universelle de 1867, avec ce tempérament important que 
les versements ne seront exigibles qu'après le règlement des comptes de l’Expo- 
sition projetée et dans le cas seulement où l’opération ne donnerait point un 
bénéfice auquel les souscripteurs seraient admis à participer pour moitié, au pro- 
rata de leur engagement. 


Cte LE COUTEULX DE CANTELEU, A, PIERRE PICHOT, 


(1) Compte de l'Exposition des races canines en 1873. 


RECETTES. DÉPENSES. 


Versements des exposants pour soins| Location des hangars, cours de meu- | 
etnourriture des chiens. 6,864 tes et bancs de chenil. 29,016 » 
Catalogues vendus. .... 2,479 Circulaires, règlements et 
M. le Cte de Greffulhe. 4,000 CALAÏOAU ESP CEE 
Cercle des Éclaireurs. 1,000 Affiches et annonces dans 
= JLa Ville de Neuilly.. 500 ‘| les journaux... :... 
M€ Furtadoheine .. Achats de chaînes, seaux, 
ni Jépignuls gamelles (etc... 0n. 
M. le baron Thénard. 500 Nourriture des chiens... 
Entrée des visiteurs.... 32,000 Personnel Een eee 
Revente du matériel, ga- Médaiiles données en prix 
melles, seaux, etc... 109 aux exposants ....... 
a Omnibus Pr 
HEART 45,692 E \Travaux de jardinage 1,740 
à (Frais de poste... ... 135 
Excédant des dépenses. 26,581 je généraux... . 912 70 
Concerts A6. 40 570 45 


Total égal... ... 72,383 55]  … Total égal... .. 72,333 55 


CXX SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


une perte de 26,581 fr. 05 à supporter par les souscripteurs du fonds &e 
garantie. 

L'échec financier de l'Exposition a été amené par l’inclémence du 
temps ; jamais on ñe vit semaine pareille à semblable époque. Sur les 
neuf jours que dura l'Exposition, la pluie tomba à torrents pendant sept. 


RECETTES. 


L'ensemble des recettes ordinaires réalisées par le Jardin d’Acclimata- 
tion, en 1873, est de 350,868 fr. 40. Il est donc de 37,250 fr. 05 supé- 
rieur au chiffre des dépenses ordinaires. 

Parmi ces recettes, la plus importante provient des entrées qui ont 
donné 250,948 fr. 35. Dans le cours de cette année, l'établissement a 
reçu, sans parler des actionnaires, des membres de la Société d'acclima- 
tation et des abonnés, 452,697 visiteurs (404,127 payants, 48,570 por- 
teurs de billets); 203,101 visiteurs payants et 24,461 non payants sont 
entrés les dimanches et 201,026 payants et 24,109 non payants en 
semaine. Ce résultat vous montre, messieurs, quelle est la faveur dont 
jouit aujourd’hui le Jardin d'acclimatation, et nous sommes heureux de 
pouvoir ajouter que, dans la présente année 1874, le public se montre 
encore plus assidu, car à ce jour, 27 avril 1874, les entrées du Jardin 
nous ont donné 20,413 fr. 60 de plus qu'au même jour de 4873 (1). 

À quoi devons-nous la faveur que nous accorde le public? À une publi- 
cité bien faite, aux concerts que nous donnons deux fois par semaine, aux 
amusements mis à la disposition des visiteurs, amusements institués, à 
l’origine, pour les enfants seulement, et dont aujourd'hui usent avec 
empressement les personnes de tout âge. 

A ces causes de la faveur du public, ajoutons-en une sans laquelle les 
autres n’auraient pu donner au Jardin qu’une faveur éphémère. L'intérêt 
que présentent nos collections est, en somme, toujours la grande at- 
traction, el il n'en peut être autrement en ce temps où le goût des choses 
de la nature prend chaque jour plus d'intensité. Le nombre de ceux qui 
suivent avec intérêt nos essais d'introduction et de multiplication d'ani- 
maux, de ceux qui viennent acquérir nos produits, de ceux qui prennent 


(1) Tableau du nombre des visiteurs de 4864 à 1875. 


; RECETTES | VISITEURS | VISITEURS TOTAL 
RANEES: EFFECTUÉES, PAYANTS. [NON PAYANTS. | DES VISITEURS. 


AE = El Ge 
GRR à 178,709 119293.895 185.245 259.440 


618.00 dc | 436,690 | 167.611 | 30.136 197.743 
421,937 | 154.503 | 28.306 182.809 
217,456 262.931 26.045 288.976 
ie 84,177 106.844 25.700 132.544 
Re eee 126,461 161.344 | 34.000 195.344 
ras eee 441,905 204.189 34.744 238.930 
rte 250,948 04.127 18.570 452.697 


eee 


SITUATION FINANCIÈRE DU JARDIN. CXxI 


? peine d'élever pour nous les animaux que nous revendons ensuite, crott 
de la façon la plus heureuse, et nous trouvons, dans cette sorte d’asso- 
ciation avec ces coopérateurs dévoués, la meilleure récompense des soins 
que nous prenons pour la gestion de l'établissement qui nous est confié. 

Avec les heureux progrès de nos recettes, nous pouvons donc enre- 
gistrer les progrès non moins neureux de notre œuvre, dont le but est de 
mieux en inieux compris. 

Le chiffre des ventes que nous avons réalisées vous montrera quelle est 
maintenant l'importance de ce commerce né d'hier en quelque sorte. Du 
1 janvier au 31 décembre 1873, nous avons vendu pour 295,472 fr. 
10 cent. d'animaux, et sur ces ventes nous avons réalisé un bénéfice de 
:1,204 fr. 30 (frais de transports et de mortalité déduits). 

Pour vous permettre d'apprécier les progrès accomplis, nous mettrons 
sous vos yeux le chiffre des ventes d'animaux depuis 1862 et aussi le 
chiffre du bénéfice réalisé. 


Ventes. Bénéfices. 
DÉCALÉ EE 73,464 fr, » 9,033 fr. 39 
SOS Tes vie 105,097 » 9,346 05 
MSG NAT Te La vs 103,477 » 16,153 » 
DÉDE NS EMEA ER 100,644 » 3,723 85 
HS OO PME 20 LE 452,554 » 31,832 25 
D'ACTE EAP 152,152 » 1,925 1) 
SOS EN LEA 190,805 " » 27,597 » 
OO ES ERP ENTENN 238. 285 25,981 30 
D'ETADSSS RRSEnE 302,305 (1) 30 17,069 45 
JTE TO PRE ER 283, 543 66 30,899 45 


LOTERIE 295.472 10 41,204 30 


RECETTES ET DÉPENSES EXTRAORDINAIRES. 


La ville de Paris nous a payé, dans le cours de l’année 4873, 60,000 fr. 
montant de la deuxième annuité (2) de la subvention votée par le Conseil 
municipal dans sa séance du 27 décembre 1871. 

Cette somme, ajoutée aux 37,250 fr. 25, excédant des recettes ordi- 
naires sur les dépenses ordinaires, forme un total de 97,250 fr. 25 qui a 
été en partie employé à acquitter les dépenses dites extraordinaires. 

Ces dépenses ont atteint une certaine importance. 51,863 fr. 45 ont été’ 
employés en travaux de restauration, 29,031 fr. 30 en travaux neufs, 

Depuis longtemps il était question de créer au Jardin d’acclimatation 
un chenil contenant une collection de chiens-étalons et de lices-portières. 
Votre Conseil a pensé que le moment était venu de faire exécuter cette 
construction ; elle ajoute un élément réel d'intérêt à la promenade du Jar- 


(1) L’élévation du chiffre des ventes effectuées en 1870 résulte de la quantité 
considérable d'animaux que nous avons vendus en septembre avant la guerre, et 
aussi pendant le siége. 

(2) La troisième et dent annuité que la ville de Paris avait à payer en 
1874 à la Société du Jardin d’acelimatation a été encaissée le jour même où se 
tenait l’assemblée générale (27 avril). 


nn 


CXXII SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


din, et nous sommes persuadés qu'elle a une action sérieuse sur nos 
recettes. Ajoutons que le chenil n’occasionne aucune charge à notre 
exploitation ; car ilest la source de recettes qui deviendront de plus en plus 
importantes, Les saillies des étalons, la vente des jeunes chiens donnent 
déjà et donneront plus encore, par la suite, des ressources suffisantes 
pour couvrir les frais du personnel erplous et ceux résuliant de la nour- 
riture des animaux. 

Nous nous abstiendrons de démontrer quels sont les services que notre 
chenil peut rendre au point de vue de la conservation et de l'amélioration 
des races canines ; vous l’avez, Messieurs, déjà apprécié, 

Pour les dépenses extraordinaires occasionnées par la restauration du 
Jardin d'acclimatation en 4873, le chiffre de 51,863 fr, 45 est le dernier 
que nous aurons à vous présenter, car les travaux de restauration qui 
n'avaient pu être achevés en 1872 le sont aujourd hui, 

Permetlez-nous, à ce propos, de récapituler devant vous quelles son£ 
les charges résultant pour la Société de la reconstitution du jardin d’ac- 
climatation. La ville de Paris nous a donné 480,000 francs, la Société 
d’acclimatation 35,000 francs, pour nous aider à relever notre entreprise 
qui succombai! après les événements de 1870-1871. 

Qu'avons-nous fait de ces 245,000 francs? Ont-ils été suMsqus pour 
permettre la restauration du Jardin d’Acclimatalion ? 


Les comptes de 1873 vous montrent une dépense relative à la restau- 


ration s'élevant à. . . RU 51,863 fr. 45 
L'augmentation de la collection d animaux pendant le 
cours de l'exercice 1873 a été de. . . . . . 74 Al fr. 95 


(Puisque de 158,370 fr. 80 le Capital-animaux in- 
ventorié le 31 décembre 1872 représente, le 31 dé- 
cembre 1873, 232,482 fr. 75). 

En 1872 les dépenses relatives à la restauration ont 
été les suivantes : 


Restauration des bâtiments et clôtures . . . . . . 39,965 » 
Travaux de ADR — Achat de végétaux et con- 

duites d’eau. . . . ; 11 49;429 » 
Dépenses diverses. — Aquarium et reconstitution de 

Voutillage::t 212.00 NO PANIERS EUR 14,200 » 
Voyages relatifs à la reconstitution ENS Ê 5,000 » 
Dépenses relatives à la formation de la nouvelle col- 

lection d'animaux és net EG MIS nes 06S 05 


314,630 fr. 45 


RUE jee animaux, arrêté au 34 décembre 1871, s'élevait à 
à5, 302 fr. : l'inventaire arrêté au 31 décembre 1879, s'élevait à. 
158,370 fr du différence 113,068 fr. 05). 

De ces chiffres, il résulte que la restauration du Jardin nous a coûté 
environ 400,000 francs de plus que les ressources mises à notre disposi- 
tion pour faire renaître l entreprise. Les bénéfices réalisés nous ont per- 
mis, nous vous l'avons déjà dit plus haut, de mener à bien cette laborieuse 
restauration aujourd’hui terminée, 


. ? $ “ . # ART 
\ ‘ , : 1 Ms 
# 


ir 


Li 


SITUATION FINANCIÈRE DU JARDIN. CXXIIL 


Ces considérations, messieurs, sont de nature à vous donner confiance 
dans l'avenir. Sans doute le résultat de l’exercice 1873 n’est pas encore 
satisfaisant, puisque nous n'avons qu'un excédant de recette de 12,445 fr. 
20 cent. Mais si vous voulez bien vous rendre comple des charges de 
loutes sortes que nous avons eues à supporter pour reconstituer le Jardin 
d’acclimatation, vous vous féliciterez avec nous de l’œuvre accomplie. 
Nous pouvons maintenant entrevoir le moment où la Société du Jardin 
d'acclimatation, tout en payant sa dette au public, c’est-à-dire tout en 
servant les idées pour la vulgarisation desquelles elle a été fondée, pourra 
rémunérer le capital qui lui a permis de naître. 

Après la lecture de ce Rapport, un membre de l’Assemblée propose de 
voter des remerciments au Conseil d'administration, et à M. le Directeur 
du Jardin, pour n’avoir pas désespéré de l'établissement dans les moments 
les plus critiques, et pour être parvenus, par leurs efforts et leur dévoue- 
ment, à le sauver et à le remettre en voie de prospérité. 

L'Assemblée est unanimement d'avis que ces remerciments soient 
exprimés officiellement. 

En conséquence, Monsieur le Président, après s'être concerté avec le 
Bureau, rédige une note qui est proposée à l'Assemblée dans les termes 
suivants : 

« L'Assemblée remercie le Conseil d'administration de la Société et, 
» particulièrement, M. le Directeur du Jardin, qui, par son ardente per- 
sévérance, par son dévouement et son intelligence, a contribué, plus 
que personne, à relever le Jardin d’Acclimatation et à lui procurer 
» des ressources ‘inespérées, en y attirant la foule, et avec la foule, la 
» prospérité. » 

L'Assemblée adopte cette rédaction à l'unanimité. 


ÿ 


L-1 


ES 


Le gérant : JULES GRISARD. 


PARIS. == IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2. 


DEAIOU 


2 LB 


RMS NME TU LL PAR 


(DT HAL TE 
#À C « w 


ES 


& 
EYE 


BULLETIN .MENSUEL 


DE LA 


SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION 


TONDÉE LE 10 FEVRIER 1854 


RECONNUE ÉTABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE 


PAR DÉCRET DU 26 FÉVRIER 1855. 


I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ (1). 


RAPPORT 
SUR LES 
PRINCIPALES CULTURES FAITES EN 1875 


AU JARDIN D’ACCLIMATATION DU BOIS DE BOULOGNE 


Par M. QUEMHOU 


Jardinier en chef. 


Messieurs, 


Je ne vous éntretiendrai pas longtemps, cette année, des 
cultures du jardin, les arrivages des plantes et graines ayant 
élé presque nuls. D'où vient cet état de choses? est-ce la con- 
séquence de notre repos forcé pendant deux ans, ou toute 
autre cause? Je l’ignore, et me borne à constater le fait. . 
Voiei maintenant les quelques observations que j'ai à vous 
signaler. 

1° PLANTES ALIMENTAIRES. 


Hovenia dulcis, Hovenia à fruits doux, Rhamnées. Japon. 


Je vous ai déjà entretenus plusieurs fois de cet intéressant 
arbuste japonais, dont le pédoncule des fleurs, par suite de 


(4) La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises 
par les auteurs des articles insérés dans son Bulletin. 
30 SÉRIE, T. I. — Janvier 1874. ( 


D k SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


renflement, forme un petit fruit agréable à manger, au Japon 
et en Algérie. Les froids de l'hiver 4871-72 ont fait périr au bois 
de Boulogne ses tiges jusqu’au sol, mais elles ont bien repoussé ; 
ont atteint 3 mètres cette année, et ont donné des fleurs qui 
nous font espérer d’avoir des fruits dans une année chaude. 


DE 
Citrus trifoliata, Oranger à trois feuilles. Orangers. Japon. 


Quoique les grands froids (21°) que nous avons éprouvés 
n'aient pas détruit ce pelit arbre fruitier, ils l’ont fait assez 
souffrir pour l'arrêter dans son développement, et retarder le 
résultat que nous en attendons, c’est-à-dire des fruits. Il ne 
fait que se rétablir des rigueurs de l'hiver 1871 et 4872 et se 
trouve à peu près dans le même état qu'en 1870. 


Phaseolus vulgaris, Haricot de Chine. Légumineuses. Chine. 


Sous le nom de Haricot de Chine, M. Gaillard nous a donné 
un Haricot très-productif à fruits ronds, blanc jaunâtre, qu’il 
a cultivé avec succès, depuis plusieurs années à Menucourt, 
et qui lui vient de la Touraine. Nous en recommandons la 
culture dans les potagers d'amateurs. 

Nous avons également cultivé le Haricot chocolat venant de 
M. Vavin, mais la très-petite quantité que nous en avions, 
jointe au voisinage de variétés vigoureuses, ayant nui à son 
développement, nous sommes obligé d’ajourner notre juge- 
ment sur celte variété. 


Cucurbita zapallito. Lapallito de tronco. Cucurbitacées. 
Amérique méridionale. 


La culture de ce légume a continué à être bonne. Chaque 
pied nous a donné de cinq à neuf fruits de la grosseur de la 
tête et au-dessus ; tous nos pieds ont un peu rampé, aussi bien 
ceux provenant de notre récoite de l’année dernière que 
ceux provenant de graines nouvellement importées par M. Bal- 
carce. Nous avions ajourné notre jugement sur la qualité que 
devait posséder ce potiron de se conserver très-longtemps,. 
Aujourd'hui ceiie qualité :est acquise, puisque nous ayons 
présenté un fruit parfaitement conservé, à la séance de la So- 


CULTURES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. ë 
ciété d’acclimatation du 16 mai dernier. À celte époque, il avait 
encore toutes ses qualités culinaires supérieures à celles de 
nos potirons et de nos courges ordinaires. Ayant cultivé plu- 
sieurs pieds de ce légume, nous avons pu distraire quelques 
fruits jeunes de la grosseur du poing et au-dessus, pour Îles . 
déguster dans cet état ; nous avons été trés-satisfait du résul- 
tat, qui donne un mets délicat de plus pour nos tables. 


Talinum Lachaumei. Talinum de Lachaume. Portulacées. 
Chili. 

L'année dernière, nous avons parlé de cette plante sous la 
fausse dénomination de Boussingaultia, nous avons pu recti- 
fier cette erreur, nos pieds ayant fleuri et fructifié cetteannée. 
M. Lachaume, de la Havane, en nous la donnant, nous a dit 
que cette plante était doublement précieuse, puisque après 
avoir orné nos Jardins pendant l'été, elle pouvait au printemps 
donner un légume comparable aux asperges. Cette seconde 
qualité n'a pu être vérifiée, faute d’un assez grand nombre 
de pieds, mais nous sommes à même de vérifier le fait cette 
année ; nous ne manquerons pas de le faire en mars prochain. 
Quant à sa qualité ornementale, elle est acquise par un feuil- 
lage richement panaché, dans le genre de la véronique à 
feuilles panachées, par une panicule de 0°,50 à 0®,60 de hau- 
teur, qui donne des fleurs légères auxquelles succèdent des 
fruits de la grosseur d’un petit pois de couleur violacée. Plu- 
sieurs pieds de cette plante réunis, sont d’un élégant effet. 


Solanum tuberosum. Pomme de terre. Solanées. Chili. 


Notre collection composée des douze meilleures variétés que 
nous avons pu nous procurer dans les nouveautés, est à peu 
près la même que l’année dernière. Nous renvoyons à notre 
dernier rapport pour les détails de cette collection. 


Cucumis melo. Melon vert à rames. Cucurbitacées. Amérique 
septentrionale. 


Cest la première fois que nous le cultivons, nous l'avons 
lrouvé bon, mais sans toutefois le mettre au-dessus de nos 


l SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Cantaloups. Il donne beaucoup de petits fruits dont la succes- 
sion de maturilé dure assez longtemps. Selon la recomman- 
dation qui nous en avait été faite, nous avons rentré, à l’épo- 
que des gelées, tous les fruits non mürs (et le nombre en était 
assez grand), dans lespoir de les voir mürir dans la serre, 
mais notre espoir a été déçu, chaque fruit s’est gâté avant 
d’être mangeable. 


Punica granatum. Grenadier sans pépins. Granatées. Perse. 


Nous avons fait des boutures de la petite plante que nous 
tenons de la Société, nous souhaitons qu’elle justifie son titre 
sans pépins, ce serait rendre un grand service aux pays qui se 
livrent à cette culture. Plusieurs fois déjà on a livré des gre- 
nadiers soi-disant sans pépins, mais chaque fois on a été 
déçu; espérons qu’il n’en sera pas de même cette fois-ci. 


Collection de vignes. 


Les froids printaniers nous ayant presque complétement 
privé de récolte, notre travail d'épuration n’a pu faire un grand 
pas; nous sommes forcément obligé de lajourner à une 
abondante récolte quinous permettra de faire les comparaisons 
sur une grande échelle. 

Nousavons pu cependant déguster etfaire déguster un certain 
nombre de variétés parmi lesquelles il y en avait d'excellentes. 
Ce résultat, quoique minime, ajouté à ceux des années pré- 
cédentes, nous a permis de faire un travail où sont consignées 
toutes nos observations. Nous avons dressé un tableau où elles 
sont résumées en quatre grandes divisions : 

Dans la première, nous avons réuni tous les cépages que 
nous avons cru susceptibles d’être cultivés pour la production 
du vin. 

Dans la seconde, nous avons groupé les meilleures espèces 
destinées à la table. 

La troisième, qui est fort intéressante, est composée des 
plus jolis raisins de fantaisie, soit par la forme ou le volume 
des grappes, soit par la diversité des grains, si variés de gros- 
seur, de forme, de couleur et même de panachures. 


CULTURES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. à) 


La quatrième, enfin, contient les variétés insignifiantes que 
nous conlinuerons néanmoins à cultiver pour prouver leur 
mauvaise qualité, et maintenir la collection aussi complète 
qu'il nous sera possible, mais nous n'en recommanderons pas 
la culture. 

Bien que ce travail soit loin d’être achevé, et qu’il soit sus- 
ceptible de révision, nous n’en avons pas moins là des docu- 
ment sérieux, qui nous permeltront de guider les amateurs 
qui s’adresseraient à nous, pour obtenir des raisins à vin, de 
table, de fantaisie, et enfin de collection seulement. 

Plus tard, lorsque nous aurons des observations portant 
sur plusieurs années, nous indiquerons la couleur, la forme, 
la grosseur, la qualité et la fertilité de chaque cépage ; mais 
nous le répétons, il nous faut pour cela quelque temps encore 
et le conseil des hommes spéciaux dans cette intéressante 
culture. 


2° PLANTES INDUSTRIELLES. 


Bambusa sulphurea. Bambou jaune soufre. Graminées. 
Japon. 


Notre collection de Bambous, après avoir été retardée dans 
sa végétation, par suite de nos derniers grands froids, a repris 
sa végétation primitive, quelques-uns même ont donné des 
jets plus grands que ceux de ces années passées. Ainsi le 
Bambusa Quilioi a attéint 4 mètres, c’est du reste un des plus 
grands et peut-être le plus grand de notre collection qui se 
compose de quinze variétés. Celui qui fait le motif de cette 
note, le Bambusa sulphurea, nous est venu en 1864, par 
l'entremise du ministère de l'Agriculture. Nous avons d’abord 
pensé que c'était le B. aurea, puis, se caractérisant avec les 
années, 1l nous a donné un bois franchement jaune, bien dif- 
férent de celui du B. aurea avec lequel nous l’avions confondu 
d'abord. Ilest d’untrès-joli effetavecsa couleur rappelant celle 
de losier jaune, et si franchement distinct de tous ses congé- 
nères. Nous l’avons fait figurer pour la première fois cette 
année, sur le catalogue du Jardin. Les Bambous multipliés et 
répandus par le Jardin sont au nombre de quatre, ce sont : 


a 


6 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


les B. flerucsa, Quilioi, sulphurea et violascens. Nous en avons 
encore qui n’ont pu être jugés, faute d’un développement 
suffisant, et parmi lesquels il se trouvera sans doute des variétés 
nouvelles. 


Bœhimeria utilis où tenacissima. Ramié de Java. Urticées. 
Iles de la Sonde. 


Nous nous sommes procuré cette espèce, que nous n’avions 
pas encore, pour la comparer au China-grass ét à l’'Ortie co- 
tonneuse, que nous cultivions les années précédentes. Nous 
avons parlé de ces trois plantes dans nôtre rapport de l’année 
dernière, page 10, et dans le bulletin de la Société, juillet 
1873, p. 491, nous y renvoyons, n'ayant aucun fait nouveau 
à signaler que la possession du Ramié de Java qui nous man- 
quait précédemment. 

Eucalyptus. Gommiers variés. Myrtacées. Australie. 

Notre collection s’augmente chaque année de plusieurs va- 
riétés plus ou moins intéressantes ; les unes vigoureuses, les 
autres, au contraire, paraissant ne devoir produire que de 
petits arbrisseaux. Nous en avons réuni dans le jardin d'hiver, 


ne pouvant le faire dehors, une collection assez étendue, qui 
offre déjà quelque intérêt à visiter. 


3° PLANTES D'ORNEMENT. 


Distylum racemosum. Vistyle à grappe. Japon. 


Cet arbuste, sur la rusticité duquel nous ne sommes pas 
encore fixé, s’est couvert, le printemps dernier, d’une quan- 
tité innombrable de petites fleurs brunes, modestes, qui ne 
devaient leur effet qu’à leur grand nombre. Chaque œil se 
porte à fleur, de manière qu’il n’y a que quelques pousses 
terminales qui donnent de nouveau bois, ce qui nuit au dé- 
veloppement de l’arbuste. 

Les deux grandes Graminées de Chine, que nous avons 
reçues de M. Renard, ont doublé le développement qu’elles 
avaient acquis l’année dernière, mais sans nous donner de 


: CULTURES FAÎTES AU JARDIN D ACCLIMATATION. 7 


fleurs : il nous faudra donc attendre encore pour les juger. 
Ce plus grand développement nous fait croire que ce pour- 
raient bien être des Phalaris? 


Evonymus sulphureo-marginatus. Fusain marginé Jaune. 
Célastrinées. Japon. 


C’est incontestablement le plus beau fusain que nous ayons. 
Les feuilles amples, largement marginées de blanc d’abord, 
puis de jaune avec la maturité, en fait une plante tout à fait 
recommandable. Il nous reste encore des doutes sur sa rusti- 
cité, ne l’ayant livré à la pleine terre que l'hiver dermier. Les 
deux variétés à petites feuilles dorées, et surtout argentées, 
sont également recommandables, quoique inférieures à la pre- 
mière espèce. L'argenté, comme toutes les panachures mar- 
oinées, est très-constant dans sa panachure et très-élégant ; 
le doré, au contraire, comme toutes les panachures par ma- 
culature, est très-inconstant, tantôt il nous donne des bran- 
ches complétement vertes, tantôt complétement jaunes, et au 
milieu de tout cela des rameaux panachés, du plus brillant 
effet. 


Liqustrum Quihouï. Troène de Quihou. Jasminées. Japon: 


Ce magnifique arbuste continue à être admiré par les visi- 
teurs. Cette année, malgré les dégâts que lui ont fait éprouver 
les hivers rigoureux que nous avons traversés, il formait un 
buisson de 2 mètres de haut, sur 3 mètres de large, composé 
de 60 branches portant toutes une panicule de fleurs attei- 
onant 0",60 de long , sur 0",50 de large, d’un effet ra- 
vissant. 


Xylosteum Philomelæ. Chévrefeuille de Philomele. Japon. 


Il a fleuri cette année pour la première fois. Ses fleurs 
roses, petites, peu nombreuses, ne font pas beaucoup d’effet. 
Nous n’en recommandons pas la culture. 


Lilèum longiflorum. Lis à longues fleurs. Liliacées. Japon. 


Ce Lis est un des plus beaux, avec ses longues fleurs blan- 
ches, presque de la dimension du Datura en arbre; il est 


S - SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. : 


encore peu répandu, mais il ne manquera pas d'être apprécié 
par les amateurs de ce beau genre. Il réunit aux qualités 
éclatantes de ses fleurs, une rusticité à toute épreuve et une 
abondante floraison. 


Malus spectabilis-Kaïdo. Pommier à bouquet Kaïdo.Rosacées. 
Chine. 

Ge Pommier à fleurs doubles est plus joli que l’ancienne 
variété, par ses fleurs plus fortes et d’un coloris plus vif. 
Nous vous en avons déjà parlé en 1865, en promettant de le 
multiplier. C’est ce que nous avons fait, et nous sommes à 
même de le livrer aujourd'hui en beaux sujets de deux ans 
de greffe. I nous a été envoyé de Chine, en 1863, par 
M. Dabry, consul de France à Hang-Kéou. 


Bignoniacées. 


Nous avons annoncé que M. Bureau, botaniste distingué, 
s’était appliqué à réunir toutes les Lianes qu’il a pu se pro- 
curer, surtout au Bresil; que l’année dernière il nous en 
avait donné une nombreuse collection dont nous allions tenter 
la culture dans le jardin d'hiver. Nous y avons planté toutes 
celles que nous avons pu multiplier, et, à en juger par le ré- 
sultat de la végétalion pendant l'été, nous sommes en droit 
d'espérer en voir fleurir l'été prochain, si, comme nous en 
avons l'espoir, la température de la grande serre leur est 
suffisante. Nous citerons particulièrement les suivantes : 
Pithecoctenium vitalba. Bignonia ugnis. Melloa populifolia. 
Cuspidaria pterocarpa. Amplalophium Ranthieri. Stenolo- 
lobium stans. 

Dans le jardin d'expériences, nous avons réuni un certain 
nombre d'arbres et arbustes, de divers pays et particulière- 
ment du Japon, sur lesquels nous ne pouvons encore porter 
aucun jugement, faute d’un développement suffisant. Nous 
citerons particulièremerit les suivants, qui figurent sur le Ca- 
talogue des plantes que nous mettons en vente cette année. 

Cerasus pendula flor roseis. Enkianthus Japonicus. Rhus 
juglandifolia. Daphne salicifoha et Blagayana. Dimor- 
phantus Mandschuricus. Cytisus lepidumbellatus. Æsculus 


CULTURES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 9 


sinensis. Elæagnus pungens maculata et Simonti. Azalea 
mollis, Stuartia grandiflora. Baumannia geminispina. Idesia 
polycarpa. Cleyera Japonica var. Acer palmatum et ses 
variétés atropurpureum, dissectum et roseo-marginalum. 
Hydrangea paniculata grandiflora, etc. 

Parmi les Conifères, nous citerons : 

Abies firma et Nordmanniana. Arthrotaxis selaginoïdos. 
Cephalotarzus drupacea. Juniperus drupacea, excelsa stricta 
el fragrans. Picex Engelmannii et Sitchensis. Podocarpus 
Maki var. Retinospora, six variétés nouvelles. Thwopsis dola- 
brata et lætevirens. Torreya grands, etc. 

Il y a quelques années nous avons reçu des graines d’Abies 
reginæ Amalæ, que l’on disait nouveau, et qui avait le mé- 
rite, trés-rare chez les Conifères, de repousser après le re- 
cépage ; nous n'avons pu vérifier le fait, mais ce que nous 
pouvons dire dès aujourd’hui, c’est que l’Abres reginæ Ama- 
hæ doit être synonyme de l’Abies Cephalonica déjà ancienne- 
ment connu. 


Engrais minéral du docteur Jeannel. 


Comme nous en avons pris l'engagement l’année dernière, 
nous avons repris cette année les expériences de cet engrais 


r 


sur une plus grande échelle. Quarante espèces ou variétés 
appartenant à vingt-quatre familles différentes y ont été 
soumises dans les conditions suivantes : 

1° Culture en vase et enserre. 

Trois sujets de chaque espèce, choisis aussi semblables que 
possible, ont été cultivés : un, selon la culture ordinaire, 
c’est-à-dire rempoté dans un compost approprié à sa nature, 
selon la règle ordinaire de l’horticulture, et arrosé avec de. 
l'eau ordinaire sans engrais. Un autre a été laissé dans le pelit 
pot où il avait été élevé, sans rempotage aucun, mais soumis 
à l’engrais, comme il va être dit plus bas. Le troisième a été 
rempoté dans du sable non végétal, et soumis également à 
l'engrais. 

Dosage de l’engrais. —Nous avons fait dissoudre 3 grammes 


40 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


d'engrais par litre d’eau, nous avons appliqué 30 à 60 
grammes de cette eau, selon là force et la vigueur de la 
plante, par semaine, en deux arroséments pratiqués à trois 
ou quatre jours d'intervalle, indépendamment de l’eau ordi- 
naire que nous avons donnée aux plantes suivant leurs 
besoins, 

Ces expériences, commencées le 45 juin, ont donné les ré- 
sultats suivants le 4° juillet : 6 

La culture ordinaire l’emportait dans les genres Geranium, 
Anthemis et Maïs, tandis que l’engrais, dans les deux modes 
de culture employés, primait dans les genres 7radescantia, 
Navets, Carottés, Zapallito, Azalées de l'Inde. Pour toutes les 
autres plantes il n’y avait aucune différence appréciable. Ce 
résultat, quoique modeste, est intéressant, si l’on considère 
que lengrais n’est employé que sur des plantes non rempo- 
tées ou rempotées dans du sable pur, et que malgré cela, leur 
végétation est égale à celle des plantes cultivées richement et 
grandement. ; 

Dans l'esprit de pousser nos expériences, nous avons, 
après ces six semaines, doublé la dose de notre engrais, soit 
6 grammes par litre d’eau. Deux mois après, l’engrais l’em- 
portait dans les genres Arum, Sparmannia et Maïs, tandis 
que les Caladium menacent de mourir. 

Nous avons continué nos expériences, et nous comptons 
(au moins pour un certain nombre de plantes) les continuer 
tout l'hiver et les pousser l'été prochain pour savoir ce qui 
adviendra d’un traitement prolongé. 

Voici un tableau indiquant les résultats observés jusqu’en 
décembre, c’est-à-dire après plus de six mois d’expériences 
avec la culture en vase. 

J'ai été à même de constater, d’après des cultures faites 
par MM. Thibaut et Keteleer, horticulteurs à Sceaux, que 
l’engrais Jeannel ne produit presque pas d’eflet sur des 
plantes cultivées en pots et rempotées dans un compost de 
culture ordinaire. Ce n’est que sur des plantes laissées en petit 
vase, el presque sans (erre, que l'effet à été remarquable, 


CULTURES FAÎTES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 41 


Culture 
ordinaire, | ordinaire 
st — S 
D on RE 4 rempotage sans 
| rempotage epélige 
avec avec 
engrais. 


Culture 


Culturë 
à) 


PLANTES MISES EN EXPÉRIENCE. dans 


du “ra | 


se sans 
FAMILLES. ÉSPÈCES. 


engrais. |’ engrais. 


| Aroïdées ....| Arum d’Ethiopie: 

— Caladium esculentum 
Graminées.. 
Commeélinées. 

h Liliacées . . .. 


Tradescantia discolor.. 
Lis tigré 


h Labiées 


Ericacées ... 


Lin de la Nouvelle-Zélande... 
Coleus de Verschafelt 

— princesse Louise 
Azalée de l’Inde 


Troène de Quihou 
Chrysanthème frutescent 
pennatifide 
Geranium zonale M. Grosjean. . 
— bijou de Chussan. 
lateripes 
.| Sparmannia d'Afrique 
Agave d'Amérique 
Gommier globuleux (Eucalyptus). 
Rosier hybride remontant Jules 
Margottin : 
— * Rosier bengale prince Eugène. 
— — thé maréchal Niël 
Onagrariées. . | Fuchsia sans pareil 
Euphorbiacées| Ricin commun 
Conifères. . Thuia géant 


À Oléacées . . 
1 Radiées. 
Géraniées.... 
| Tiliacées . 
Narcissées... 
| Myrtacées . .. 
Rosacées . 


NN NN ND = NN D D ND D ND D ND D RE Fr ND © CO CS 
BR NEÉRE ND 02 D D D 
9 KO 02 O2 NO ND U2 9 ID NO KO ID NO KO UN D = À 


FS 


RO K9 NZ Co: ua 
DER  N9 
x Ro KO UT = 2 


C2 
“1 


: veut dire résultat inférieur à la culture ordinaire. 
2 — résultat égal à la culture ordinaire. 
3 — résultat Hd à la culture ordinaire. 


ile en de terre et plein air. 

Nous avons employé le même dosage de 6 grammes par 
litre, et nous avons appliqué 100 grammes par touffe, pour 
les cultures en touffe, et 200 grammes par mètre carré, pour 
les cultures en planche. 

Nos expériences ont été faites sur Les plantes suivantes : 

Pommes de terre, rien d’appréciable. 

Betteraves, les feuilles se sont plus développées, sans que 
les racines se soient modifiées. 


19 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Poires de terre Cochet, rien de saillant. 

Carottes, différence dans le développement des feuilles 
seulement. 

Navets, même observation. 

Choux, même observation. 

Pois, rien de saillant. 

Haricots, un peu plus de développement sans plus de 
grains. : 

Zapallito. Deux expériences ont été contradictoires : tandis 
qu'en pleine terre, Fengrais fait bon effet, sur vicille couche 
le résultat a été moins satisfaisant. é 

Laitue et Romaine, rien de saillant. 

Melon à rames, plus de développements en branches, sans 
plus de fruits. 

De ces faits, 1l semble résulter, que l’engrais Jeannel n’est 
pas, ou est très-peu efficace pour la pleine terre; qu'ilne l’est 
guère davantage dans une culture en pot, bien raisonnée ; 
mais qu'il triomphe avec les mauvaises terres, ou le manque 
de terre, ce qui peut rendre de grands services pour les 
plantes d'appartement, où, avec ce système, on n’a pas besoin 
de rempoter, ce qui est toujours désagréable et parfois même 
impossible, par suite de la petite dimension des vases ou 
jardinières qui doivent les contenir. Les services que l’engrais 
Jeannel peut rendre à la culture iront-ils au delà? Nous 
l'ienorons encore ; c’est pour cela que nous continuons nos 
expériences et que nous engagecns les amaleurs à nous 
imiter, car plus les essais seront répétés, plus ils seront 
concluants. 


Maintenant, Messieurs, permettez-moi de vous entretenir 
un instant d'un système de taille de la vigne, pratiqué depuis 
longtemps, et sur lequel les viticulteurs sont loim d'être 
d'accord. Bien que les expériences n’aient pas éié faites au 
Jardin d’acclimatation, le sujet étant intéressant pour toutes 
es personnes qui s'occupent de la culture de la vigne, j'ai cru 
devoir l'ajouter à mon rapport, espérant que cela pourrait 
vous intéresser. Voici les faits : 


CULTURES FAITES AU JARDIN D'ACGLIMATATION. 13. 

En acût dernier, M. Duchesne-Thoureau, de Ghâtllon-sur- 
Seine (Côte-d'Or), est venu me proposer de visiter avec lui 
les treilles de M. Coutant, à Gonesse, qui sont traitées, d’après 
ses indications, par l'inclinaison des sarments au-dessous de 
l'horizontale. Il à insisté sur ce point, que me sachant dégagé 
de prévention sur le traitement de la vigne, 1l tenait beaucoup 
à me faire apprécier les résultats obtenus. Le sujet m'intéres- 
sait trop, pour ne pas profiter de l’occasion qui m'était 
offerte, et le 15 août, accompagné de M. Duchesne, je me suis 
rendu à Gonesse, chez M. Coutant. Là, devant les treilles, 
M. Duchesne dit que ces treilles étaient vieilles et improduc- 
tives depuis longtemps, et que, grâce à sa méthode, elles 
étaient rajeunies et trés-productives, comme je pouvais le 
voir. Il ne m’appartient pas de chercher pourquoi les vieilles 
treilles étaient improductives, puisque je n’ai pas été à même 
de les voir dans cet état, ni de savoir quels soins elles rece- 
vaient alors. Je me bornerai à parler de ce que j’ai vu. 

Je vous parlerai d’abord du rajeunissement des freilles 
que j'avais devant les veux; voici comment on a procédé : 
On a coupé rez terre les vieilles souches dont les vieux 
troncs sont encore visibles, et l’année suivante, il s’est déve- 
loppé des sarments vigoureux, qui ont atteint 4, 6 et même 
8 mêtres de hauteur. Get état de choses ne m’a nullement 
surpris, c’est la conséquence naturelle de tout recépage, qu’on 
lapplique à une forêt, aux arbustes de nos jardins ou à une 
treille, le résultat est toujours le même, grandes et grosses 
pousses de bois mou et moelleux, qui a besoin de quelques 
années pour reprendre sa densité normale. Je n'ai done rien 
vu là qui puisse être attribué à la méthode de l’inclinaison 
des sarments, et, d’ailieurs, puisque les sarments ne subissent 
l’inclinaison que la seconde année, celte opération ne peut 
donc avoir d’effet sur la vigueur des jeunes sarments qu’on 
laisse pousser en toute liberté, dans la position verticale. 

Maintenant j aborde la question de l’inclinaison au-dessous 
de l'horizontale, pour obtenir une récolte plus abondante. 
Voici comment on a procédé : Les jeunes sarments de l’année 
précédente sont tenus verticalement Jusqu'à une hauteur 


1% SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 

d'un mêlre environ, puis arqués de manière que l'extrémité 
du sarment revienne vers le sol, où on l’arrête à 0",50 de 
terre, pour permettre le développement des jeunes bourgeons 
porte-fruits. Alors chaque œil se développe et donne naissance 
à deux, trois ou quatre grappes de raisin, ce qui forme une 
quantité prodigieuse de grappes. Chaque jeune sarment 
porte-fruit, est pincé à deux feuilles au-dessus de la dernière 
grappe. Généralement on traite ainsi deux ou trois sarments, 
à environ 0",50 à 0*,60 d'intervalle, ce qui produit le résultat 
dont vous pouvez vous faire une idée par les photographies 
prises sur ces treilles et que Je fais passer sous vos yeux. Les 
Jeunes sarments partant de la base de chaque cep, sont tenus 
verticalement, acquièrent un grand développement, et seront 
soumis l’année suivante au même traitement que les premiers, 
ceux-ci devant être coupés avec ousans leur fruit, selon 
qu'on les consomme sur la treille, ou qu’on les rentre au 
fruitier munis de leurs grappes. 

Il est incontestable qu’il se produit par ce moyen, une 
quantité de grappes, supérieure à celle que nous voyons 
ordinairement sur les treilles dites à la Thomery ; néanmoins, 
nous ferons remarquer que la partie supérieure du mur 
n’est pas garnie, tandis que par la méthode horizontale, tout 
le mur est garni. 

Maintenant, je dois vous parler de la qualité des raisins. 
Tout en reconnaissant que l’année n’a pas été favorable, en 
général, pour la qualité de ceux-ci, j'ai été frappé de la 
petitesse des grains, et j'ai manifesté à M. Coutant le désir de 
revoir ses treilles à la maturité des raisins, ce qui me fut 
accordé gracieusement. 

Je suis retourné seul à Gonesse, dans les premiers jours 
d'octobre, et les craintes que j'avais manifestées, à ma pre- 
mière visite, étaient justifiées : les grains avaient peu grossi, 
l'aspect général n’était pas beau, et malgré la mauvaise année 
ce que je voyais n’était pas de nature à me donner l’envie de 
suivre la méthode Duchesne-Thoureau. Sur l’observation que 
j'en ai faite à M. Coutant, il a reconnu, qu’en effet, le résultat 
laissait à désirer, qu’il comptait, les années suivantes, modi- 


CULTURES FAITES AU JARDIN D ACCLIMATATION. 15 


fier un peu la méthode, dans le but d'obtenir de plus beaux 
raisins, ce à quoi je l’ai beaucoup engagé. 

D'ailleurs, il n’y a rien là de nouveau, et je me rappelle que 
dans ma jeunesse, en travaillant les vignes avec mon père, je 
voyais des vignerons laisser des longs bois, que les uns 
appellent sautelles, les autres vinées, et que l’on attache au 
cep voisin, sans leur donner l’inelinaison au-dessous de l'hori- 
zontale. Ces longs bois se couvraient aussi de grappes, mais’ 
bien moins belles que celles sur coursons, ce qui faisait dire 
à mon pêre en parlant de son voisin altéré: IL fera une 
récolte plus abondante que la mienne, mais ce sera du vin 
de sautelle qui ne vaudra pas le mien. » Et le résultat justifiait 
ce raisonnernent. 

Dans le but de mieux juger la question, j'ai consulté des 
cultivateurs qui m'ont confirmé dans ce que j'ayance. J'ai 
aussi visité des cultures et notamment celles de M. Rivière, au 
Jardin du Luxembourg, et celle de M. Ravisy, près Avallon. 
Au Luxembourg, j'ai vu une fois de plus que linclinaison 
n’est pas indispensable à la grande production, et voici par 
quel moyen M. Rivière le prouve. 

Sur une charpente en fer, haute de 8 mêtres, sans mur, 
il a planté des vignes à 0",50 l’une de l’autre, il a recépé rez 
terre un cep sur deux, afin d'obtenir un sarment vigoureux, 
dépassant facilement le haut de la charpente en fer. L'année 
suivante, il s'est borné à supprimer l'extrémité du sarment 
excédant la charpente, en le laissant dans sa position verticale. 
Chaque œil, en se développant, a donné un petit sarment qui 
porte deux, trois et quatre grappes, comme dans le système 
Duchesne. Le cep voisin a été recépé rez terre et donne 
naissance à un long bois destiné à devenir porte-fruit l’année 
suivante. On continue chaque année à rabattre un cep sur 
deux, et de cette mamièére on a une treille complétement 
garnie sans vide aucun, ce qui n'a pas lieu dans Pautre 
méthode, qui laisse environ la moitié du mur inoccupée, par 
conséquent improductive et moins agréable à voir qu’une 
treille complétement garnie. Ces deux systèmes, excellents 
pour produire beaucoup de raisins, sont défectueux pour la 


46 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


beauté et la qualité des raisins qui sont loin de valoir ceux 
qu’en obtient sur les treilles dites à la Thomery. Sur lobser- 
vation que j'en ai faite à M. Rivière, il m'a répondu que 
généralement les jeunes bois ne donnent jamais de fruits 
aussi savoureux que les vieux bois, ce qui vient corroborer 
ce que j'ai dit plus haut des sautelles ou vinées. 

Dans un voyage que j'ai fait l’automne dernier dans l’Aval- 
lonnais, j'ai remarqué chez M. Ravisy une treille cultivée 
horizontalement qui était couverte de raisins. Il y avait cer- 
tainement moins de grappes que dans les deux cas précédents, 
mais comme poids, la différence était bien moins grande, et 
la bonne qualité remplaçait avec avantage la quantité moindre. 
J'ai également vu à Vauréal et à Jouv, près Pontoise, des 
cultures de vignes qui font un des plus beaux produits de ce 
pays. Elles sont toutes cultivées horizontalement et les pro- 
duits en raisins sont tout à fait hors ligne. 

En résumé, je ne dis pas d’une manière absolue, qu'il 
faille bannir complétement le système à longs bois (soit culti- 
vés horizontalement, soit inelinés au-dessous de l'horizontale): 
il y a certains cas où le praticien expérimenté pourra l'utiliser 
un peu, suivant l’âge de la vigne, la richesse du terrain dans 
lequel elle est plantée, par prévision contre les gelées printa- 
nières, sauf à les supprimer si le fléau ne se fait pas sentir, et 
pour toute autre cause dont le cultivateur intelligent sait 
profiter. Mais engager à le faire d’une manière générale, c’est 
exposer bien des propriétaires, plus amateurs que réellement 
cultivateurs et toujours partisans du merveilleux, à de cruelles 
déceptions. 


SUR 
LES DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES 


PRODUCTEURS DE SOIE 


ÊLEVES EN 1873 À LA MAGNANERIE EXPÉRIMENTALE DU BOIS DE BOULOGNE 
Rapport adressé à la Société d'acclimatation 


Par M. MAURICE GIRARD 


Docteur ès sciences naturelles 


L'année qui vient de s’écouler comptera parmi les années 
funestes à la sériciculture dans notre pays. Des températures 
printanières très-abaissées, une humidité persistante, ont pro- 
longé outre mesure la durée des éducations. Il est bien établi 
aujourd'hui, par les expériences démonstratives de M. Raulin 
(De l'influence propre de lu saison sur le phénomène de la 
flacherie; Bull. de la Soc. centrale d'agriculture de France, 
février 1873 ; Bull. de la Soc. d’acclimatation, août 1873, 
page 579) que la flacherie sévit surtout sur les éducations de 
la fin du printemps et du début de l'été. En outre les gelées 
intenses de la fin du mois d’avril ont atteint les müriers dans 
- un grand nombre de localités ; les jeunes vers, dont ce motif 
avait empêché la mise en incubation en temps opportun, n’ont 
trouvé à leur début que des feuilles de seconde pousse, trop 
jeunes et débilitantes, ce qui est une des grandes causes de la 
flacherie, affection de l'appareil digestif. On comprend com- 
bien ces fâcheuses dispositions ont été naturellement aggravées 
sous le climat de Paris, peu favorable à la sériciculture, qui 
ne permettra jamais d'opérations industrielles de ce genre, 
avec chanc s continues de succès. Au contraire on peut 
réussir souvent à Paris de bonnes éducations de grainage, sur 
une petite échelle; mais ce n’est pas en 1873 qu'il y avait à 
espérer en ce genre. Îl faut remarquer toutefois que la magna- 
nerie expérimentale n’a pas manqué à son titre. Si des échecs, 

3° SÉRIE, T. le — Janvier 1874. 2 


185 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


que J'avais prévus et annoncés à l'avance, ont atteint un 
grand nombre des races essayées, jamais la contagion de la 
maladie n’a été établie d’une manière aussi décisive que cette 
année. Des espèces indigènes, élevées par curiosité à côté des 
espèces exotiques, ont été atteintes après celles-ci, et une espèce 
bien acclimatée en France aujourd’hui, qui vit sauvage dans 
les squares et sur les boulevards de Paris, a péri au Jardin 
par la maladie communiquée. Un grand nombre d'amateurs 
de Lépidoptères ont échoué en 1873 dans les éducations 
diverses, qui servent d'ordinaire à renouveler en sujets frais el 
intacts les collections de papillons. Remarquons, en terminant 
ce préambule, combien nos essais justifient les assertions de 
M. L. Pasteur, et concordent avec les expériences rigoureuses 
au moyen desquelles ce savant a vérifié la contagion de la 
flacherie. Elles sont souvent trop oubliées dans les attaques 
passionnées dont il a été l’objet; la persévérance des adver- 
saires, la lutte acharnée de tous les jours, sont Le sort ordi- 
naire des hommes de grande valeur ; la médiocrité seule vit 
paisible au milieu d’éloges d’une indifférente banalité. 

Nous diviserons le compte rendu des éducations de 1873 
en deux séries : 1° le ver à soie du mürier (Sericaria mori); 
2° diverses espèces du genre Affacus, sur certaines desquelles 
se portent particulièrement les espérances de lavenir. 


|. ÉDUCATION DE VER A SOIE DU MURIER (Sericaria mort). 


La Société d’acclimatation avait reçu, comme à l'ordinaire, 
des graines de diverses provenances, et produites par les grai- 
neurs de localités les plus diverses. Je ferai remarquer en pas- 
sant que c’est ici le cas de retourner le proverbe, et de dire : 
abondance de biens nuit. Si l’on peut répondre en effet de 
certaines graines, dont les reproducteurs ont été scrupuleuse- 
ment vérifiés au microscope ou proviennent d’élevages par 
des procédés spéciaux, incompatibles avec toute maladie 
même latente, il est au contraire impossible de s'assurer de 
la pureté de graines envoyées de loin, et sur lesquelles les 
donateurs ne sont pas toujours renseignés. Ma conviction est 


RAPPORT SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES. . 49 


faite à ce sujet, et appuyée par plusieurs années d’expérience. 
Le mélange de nombreuses races dans notre petite magna- 
nerie, avec incertitude forcée sur la santé de plusieurs, est la 
cause première de nos mécomptes. Au risque d’indisposer 
certaines personnes par des refus, je suis résolu en 1874, 
sauf décision contraire et peu probable de la Société, à n’ac- 
cepter qu’un très-petit nombre de graines, d’une pureté hors 
de doute. 

Un graineur de Varsovie, M. Hignet, nous a fait parvenir, 
en deux fois, des graines provenant de cette locahté septen- 
trionale, et éloignée de tout centre de contagion. Un lot de 
oraines a été envoyé par M. Roland (d’Orbe, prés de Lau- 
sanne, canton de Vaud), et son origine est un certificat sani- 
taire, puisque le procédé de M. Roland consiste à élever 
à l'air libre des reproducteurs, qui se maintiennent depuis 
huit ans sans maladie. D’autres graines, préparées par la 
sélection cellulaire et l'éducation des pontes isolées, ont élé 
offertes à la Société par M. Raulin, chef du laboratoire de 
M. Pasteur, et leur pureté offre la plus haute garantie scienti- 
fique que l’on puisse désirer. Les graines de M. Bonnefon, 
syndic des graineurs de la Dordogne, de M. Bergis, secrétaire 
de la Société d’horticulture et d’acclimatation de Montauban, 
ont été soumises à l’étude microscopique des reproducteurs, 
et ces dernières aux essais précoces. On a également toute 
garantie pour les graines provenant de M. Sirand (de Greno- 
ble). lauréat de notre Société, et tout le monde peut voir, 
exposés à la magnanerie du bois de Boulogne, les beaux 
cocons de race ancienne obtenus par M. Bonnefon, en 1572. 

J'avais moins de garanties pour les graines suivantes : 
M. Van Eeden, graine produite en Hollande depuis plusieurs 
années d’une race acclimatée dans la république de l'Équa- 
teur ; M. Gelot, grains de l’Équateur et du Pérou, d'importa- 
tion directe ; M. Nagel, graineur de la Haute-Marne, échan- 
tillons de graines de diverses origines. Enfin une graine nous 
fut remise par M. Geoffroy Saint-Hilaire, et avait été obtenue à 
la suite d’une éducation faite l’année précédente au Muséum, 
chez madame Brongniart, avec succès, sans un seul malade. 


20% SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION. 


C'était une race à cocons d’un jaune paille, dont l’origine 
n’est pas connue. 

Les graines Raulin, Bonnefon et Nagel ont servi en partie 
à des expériences par la méthode des pontes isolées, imaginée 
par M. Raulin, en vue d’arriver à la régénération de nos races 
indigènes par une sélection complète. Un panier de fils de fer 
galvanisé reçoit les vers issus d’une même ponte ; on enlève 
les malades dès qu’il s’en présente. On est certain de cette 
manière d'éviter les contagions si fréquentes dans les éduca- 
tions ordinaires, où les vers de parents sains, et sains eux- 
mêmes, se trouvent souvent mêlés à des vers atteints d’affec- 
tions diverses. Jai tenu à ce que la magnanerie püt montrer 
aux visiteurs, sur une douzaine de pareilles corbeilles, une 
méthode d’élevage toute récente. Je suis certain que des 
magnaniers ont été témoins de cet essai, et pourront, si cela 
leur convient, répéter l’expérimentation en toute connais- 
sance. Il me paraît utile que notre magnanerie présente tou- 
jours un spécimen de toutes les nouveautés de sériciculture. 
Leur vulgarisation rapide est le meilleur moyen de contrôler 
leur efficacité, en sorte qu'elles soient définitivement admises 
ou rejetées. 

Je dois avant tout rappeler qu'un accident imprévu a fait 
le plus grand tort au début à toutes nos éducations. Le mois 
d'avril, où il eùt été si important de commencer les repas, a 
élé glacial. Les jeunes feuilles de mürier furent gelées en 
dix minutes, dans tout le jardin, à la suite d’une tempête de 
gréle le 26 avril 1873, jour dont tous les horticulteurs pari- 
siens se souviennent. Nous avons donc manqué de feuilles, ce 
qui nous a contraints à retarder les éclosions. Puis on a com- 
mencé certains lots avec des feuilles du Jardin des plantes, et 
avec des feuilles de müûrier trouvées au bois de Boulogne, 
feuilles qui, dans ces deux localités, avaient élé heureuse- 
ment abritées. Le désastre était général ; un de nos lauréats, 
M. Votte, m'’écrivait de Romorantin (Loir-et-Cher) le 17 mai, 
que les élèves de son école communale avaient baltu la cam- 
pagne de tous côtés, sans parvenir à rencontrer une seule 
feuille intacte, qu’il allait être forcé de Jeter les vers qui éclo- 


RAPPORT. SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES. 21 


saient chez lui, et exprimait tous ses regrets de ne pouvoir 
être utile à la Société par un envoi de feuilles. C’est seule- 
ment à la fin de mai que nous avons commencé à recevoir 
des feuilles de seconde pousse des bergeries de Sénars, où se 
trouvent encore quelques vieux müriers plantés en cet en- 
droit, sous la Restauration, pour alimenter une magnanerie 
modèle que le gouvernement y avait établie. Ces minutieux 
détails sont nécessaires pour montrer les difficultés de tout 
genre contre lesquelles nous avons dû lutter, et tous les efforts 
que l'administration du Jardin a déployés pour combattre des 
conditions détestables. 


Nous allons suivre les diverses races essayées aux princi- 
pales phases de l'éducation : 

1° Graine Hignet, de Varsovie. (Premier envoi.) 

Œufs très-petits, 1° mai 1873, éclosion. — 4 mai. Les 
jeunes vers vont bien et blanchissent à partir de la tête. — 
8 mai. Ils sont bien égaux ; le premier sommeil va commen- 
cer. — 11 mai. Se réveillent du premier sommeil ; bon état, 
bien égaux. — 15 mai. Se préparent à la deuxième mue ; très- 
égaux. Au réveil de cette seconde mue, au contraire, appa- 
raît quelque inégalité. — 22 mai. L’inégalité a diminué. — 
25 mai. Sommeil de la troisième mue ; réveil le 26.— 28 mai. 
Quelques petits (1). — 1° juin. Quatrième sommeil; beau- 
coup de petits; quelques mnoricauds (2). — 5 juin. La veille 
a eu lieu le réveil de là quatrième mue ; il y a moitié de petits. 
— 8 juin. Grande jrèze (3); vers un peu indolents. - . 
11 juin. Commencement de la montée (h).— 13 juin. Cocons 
très-variés, blancs et jaunes, ces derniers ressemblent à des 


(1) Cela signifie Vers cessant de croître , bien que souvent ils mangent; 
c’est un symptôme de faiblesse, une sorte de rachitisme, de prédisposition 
morbide, surtout à la flâcherie. 

(2) Vers d’un gris foncé, race rustique. Si les moricauds sont mélés à des 
Vers blancs, cela indique un croisement de races, ou des œufs mélangés de 
diverses races. 

(3) Période de la plus grande voracité des Vers. 

(4) Les Vers montent aux claies ou au bruyères pour filer leurs cocons. 


9 0) SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


petits milanais; ce sont des Japonais croisés, et des graines 
mêlées. Les cocons sont assez médiocres. — 15 juin. Les 
petits se sont refaits, ont subi la quatrième mue et vont assez 
bien. Cette éducalion n’a pas été atteinte de maladie. — Le 
premier lot a donné 116 cocons, Japonais, milanais et eroisés. 
— 19 juin. Le second lot est à la montée, et elle est achevée 
le 22 juin. — 26 juin. Le produit de la montée du second lot 
est de 87 cocons mêlés, blancs, verdâtres, d’un jaune pâle et 
d’un jaune vif. On a eu affaire à des graines mélangées, en 
dégénérescence, mais sans maladie. Les cocons sont assez 
durs, mais satinés ; Ce n’est pas une race à propager pour sa 
valeur. 

Les papillons du premier lot commencent à éclore et sont 
mis en accouplement. Je fais opérer un grainage cellulaire, 
comme spécimen pour le publie, et, au 3 juillet, se trouvent 
exposées une trentaine de toiles de grainage cellulaire pour 
ce premier lot. Les papillons sont robustes et bien portants, 
ardents à s’accoupler, mais il y a beaucoup plus de mâles que 
de femelles. — 6 juillet. Les cocons du second lot commen- 
cent à produire leurs papillons. 

13 Juillet. On s’aperçoit que la graine est bivoltine, c’est-à- 
dire sans valeur pour notre pays, car une seconde éclosion de 
vers a commencé dés la veille. Je fais opérer, pour exemple à 
montrer aux visiteurs, à une époque insolite, des élevages par 
pontes isolées, en corheilles de fil de fer galvanisé. Une partie 
des graines n’a pas encore fait éclosion. — 18 juillet. Le pre- 
mier lot éclos des bivoltins est dans le premier sommeil; les 
vers élevés cellulairement n’ont pas encore mué.— 20 juillet. 
Un lot se réveille du premier sommeil. Les vers élevés cellu- 
lairement dorment pour la première mue, et se réveillent le 
23 juillet, en même temps qu’éclôt un deuxième lot de la graine 
bivoltine.— 24 juillet, Le premier lot, en éducation commune, 
marche bien ; quelques vers commencent la deuxième mue. 
Elle est complète le 26 pour ce lot, et s’opère le 27 pour l’édu- 
cation cellulaire. — 30 juillet. Le second lot, le plus récem- 
ment éclos, se réveille de la première mue. — 4° août. Le 
premier lot commence la troisième mue. — L'éducation de 


RAPPORT SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES, 23 


seconde éclosion de ces vers a continué ensuite régulièrement 
et nous a procuré avantage de montrer des vers à soie vivants 
à une époque peu habituelle, et alors que le Jardin reçoit le 
plus grand nombre de visiteurs. On a obtenu en septembre 
des cocons mélés, jaunes et blancs, d’où sont sortis des pa- 
pillons bien sains qui ont été mis en grainage cellulaire à 
partir du 20 septembre, et quelques femelles pondaient encore 
sur les toiles isolées le 5 octobre. 

L'examen détaillé que nous venons de donner, comme 
modèle exact de notre surveillance, nous permet d’abréger 
beaucoup tout ce qui concerne les autres lots de vers mis en 
expérience, et qui ont tous été inspectés aux mêmes jours. 

2 Graine Hignet, race polonaise. (Deuxième envoi). La 
mise enéclosion s’est opérée le 15 mai 1873, et l’éclosion com- 
mençait dès le 16. Le 25 mai a eu lieu le premier sommeil, 
et le réveil le 26. À partir du 1% juin on a vu apparaître les 
petits, qui ont ensuite augmenté progressivement. On opère 
un triage de manière à former un premier lot des vers les plus 
vigoureux et un second avec les petits. Il y a un certain nom- 
bre de vers tigrés, c’est-à-dire à anneaux blancs, avec une 
ceinture transverse d’un gris noirâtre, caractère qu’offrent 
assez souvent les races d’origine chinoise. Les vers des deux 
lots n’ont pas souffert du violent orage du 26 juin. — La 
montée du premier lot commence le 29 juin. Il n’a pas offert 
de maladie ; la graine était mêlée, due à un métissage de ja- 
ponais. On a eu des cocons blancs, d’autres d’un jaune clair, 
d’autres d'un jaune foncé. 

Le second lot a marché plus lentement, sans autre maladie 
que quelques cas de jaunisse, affection peu redoutable, et dont 
les éducations de Sericaria mort sont rarement exembptes. 
Il a commencé à monter le 6 juillet, au moment où l’on s'ap- 
prête à déramer (1) les cocons du premier lot. — 43 juillet. 
Les cocons des deux lots ont été déramés, mais n'ont pas 
encore produit de papillons. — 48 juillet. Les papillons com- 


(1) En sériciculture on appelle de ce nom l'opération qui consiste à enle- 
ver les cocons des claies ou des bottes coconnières ou des bruvyères, 


2, SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


mencent à sortir, et les premiers accouplements ont lieu, ils 
continuent jusqu’au 24 juillet. Le grainage est opéré cellulai- 
rement, c’est-à-dire chaque femelle fécondée portée sur une 
toile séparée où elle fait sa ponte. Elle est roulée et attachée 
dans un coin de la toile pour l'essai ultérieur au microscope. 
Toutesles toiles sont enfermées pour l’hiver dans un manchon 
de gaze claire, afin de soustraire les corps des femelles et les 
graines aux attaques des Dermestes (Coléoptères) destruc- 
teurs, fléau des grainages cellulaires sans cette précaution. 
Ce lot a présenté beaucoup plus de mâles que de femelles; 
les inégalités entre les nombres des sujets de chaque sexe 
sont un des inconvénients que peuvent offrir les éducations 
de grainage, car elles diminuent le rendement. 

3° Graine Hignet (de Pologne), race tartare. — Cette graine, 
portée le 15 mai à la chambre d’incubation, a tardé à éclore, 
car les vers ne sont sortis des œufs que le 27 mai, assez régu- 
liérement. Jusqu'au 26 juin ces vers ont bien marché, très- 
égaux, ayant fait leurs deux premières mues. Le 29 juin la 
plus grande partie mourait de faiblesse, sans maladie, à la 
troisième mue. Geux qui restaient étaient morts le 6 6 juillet, 
- restés petits et en flacherie. 

4° Graine Roland, d’Orbe (canton de Vaud), provenant de 
reproducteurs Jet en plein air depuis huit ans environ. 
L’éclosion s’est faite en deux fois. Un lot, où quelques vers 
apparaissaient çà et là le 8 mai, est porté à la chambre d’in- 
cubation, L’éclosion de la plus grande partie a lieu en vingt- 
quatre heures, puis se prolonge irrégulièrement par des re- 
tardataires. La race paraît de petite taille. Les quatre mues 
s’opérent bien, avec un peu de petits. Le 26 juin, lors d’un 
violent orage, la plupart des vers périssent. Le reste, qui 
s'était remis à manger, était mort de flacherie le 8 juillet. 
Comme on le voit, cette affection a suivi sa marche insidieuse 
habituelle, détruisant l'éducation au moment où le séricicul- 
teur s'attend à être récompensé, par une montée prochaine, 
de ses soins et de ses dépenses. 

Un second lot de la graine Roland à commencé à éclore le 
14 mai, bien également. Le 5 juin ces vers se réveillent de la 


RAPPORT SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES. 29 


deuxième mue, et ont rattrapé en dimensions le premier lot. 
À partir du 8 juin nous voyons apparaître quelques petits. La 
quatrième mue se termine le 22 juin, et tous les vers sont 
morts de flacherie le 3 juillet, de même que le premier lot. 

5° Graine Raulin. La majeure partie de cette graine provient 
des éducations par pontes isolées d’Alais (Gard). En outre, il y 
a deux pontes dont l’origine est une excellente éducation de 
milanais jaunes faite en 1872 à l'École normale. L’éclosion de 
la première partie s’est opérée le 17 mai, bien régulièrement. 
L'éducation marche bien jusqu’à la première mue qui se ter- 
mine le 27. À partir du 1° juin apparaissent beaucoup de 
petits. On a jeté le 13 les trois quarts de ceux-ci, et les vers 
restants sont dans le troisième sommeil. La flacherie a tout 
enlevé le 29 juin, pendant le quatrième sommeil. 

Des deux pontes isolées dont nous venons de parler l’une 
est venue à éclosion le 41 mai, irrégulièrement, jusqu’au 15; 
la marche a été bonne jusqu’au début de la quatrième mue, 
puis commencent à se montrer des cas de flacherie. L'autre 
ponte est éclose à partir du 16, et aussi lentement que l’autre, 
avec inégalité. Le 29 juillet les derniers vers des deux pontes 
étaient morts de flacherie, et quelques-uns étouffés à la montée 
par la soie. Ce qui montre bien qu’on a eu affaire pour ces 
pontes à de la contagion communiquée par les éducations 
voisines aux vers issus d’une graine excellente, c’est que le 
23 juin 1873, j’admirais chez M. Pasteur, à l'École normale, 
une magnifique chambrée de la même graine, dont les gros 
vers bien portants, et de couleur de prune jaune, étaient en 
pleine montée, et filaient de superbes cocons jaunes de race 
milanaise. 

6° Graine Bonnefon, de Ribérac (Dordogne). Cette graine 
provient des excellentes éducations de M. Bonnefon en 1872, 
et dont les beaux cocons figurent comme spécimen à la ma- 
gnanerie du bois de Boulogne. Elle avait été obtenue en grai- 
nages cellulaires sur toiles. 

Ün lot de cette graine a été l’objet d’une éducation mixte, et 
a commencé à éclore le 17 mai. Les vers sont parvenus à la 
iroisième mue, mais tous, le 29 juin, étaient morts de flache- 


26 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


rie, sans avoir pu opérer la quatrième mue. L'autre portion 
des toiles de grainage a servi à opérer cinq éducations de 
pontes isolées. Leurs éclosions ont été très-tardives, du 21 au 
23 mai. La marche de ces pontes isolées a été bonne jus- 
qu'après la seconde mue; puis ont commencé à apparaître 
les petits. Puis les morts se sont accumulées sens que les vers 
aient pu opérer la quatrième mue, et tous avaient succomhé 
morts-flats au plus tard le 4 juillet. J’ai entendu dire, mais 
sans donner aucune affirmation à cet égard et espérant même 
un démenti, que M. Bonnefon n’a pas été heureux en 1873 
avec cette race jusqu'alors excellente. 

7° Graine Bergis (de Montauban), ayant subi l’épreuve des 
essais précoces, outre celle du microscope. L’éclosion a eu 
lieu le 16 mai et a été bien égale, et l'éducation s’est très-bien 
présentée pendant les deux premières mues, jusqu’au 5 juin 
où a commencé à apparaitre le fâcheux symptôme des 
petits. La quatrième mue s'est terminée le 22 juin, puis un 
assez grand nombre de vers sont morts à la suite de l'orage 
du 26 juin, et tout avait disparu le 3 juillet. 

8° Graine Sirand (de Grenoble), d’une réputation méritée 
par de nombreux succès, toujours essayée scrupuleusement, 
selon l'habitude de M. Sirand, par l'examen microscopique des 
reproducteurs. M. Sirand a obtenu une médaille de 1"° classe de 
notre Société, en 4873. L'échantillon mis en éclosion prove- 
nait d’une bonne éducation faite au Jardin en 1872 avec cette 
excellente graine ; il ne nous en restait qu'un seul carton, les 
autres ayant été pris par des visiteurs peu scrupuleux. L’éclo- 
sion eut lieu le 21 mai, et l’état des vers fut toujours excel- 
lent ; on fut obligé de dédoubler les vers le 22 juin après la 
troisième mue. Le 26 eut lieu le réveil de la quatrième mue 
et le 29 les vers mangeaient bien; l’invasion de la flacherie 
fut foudroyante, presque tous périrent le 38 juillet, et le reste 
peu après. ï 

9 Graine Van Eeden (de Hollande), originaire de Ecuador 
(Amérique centrale). L’éclosion s’est faite le 17 mai, et, 
comme cela arrive d'ordinaire avec l’insidieuse flacherie, lédu- 
cation a d’abord très-bien marché; les petits ont apparu le 


RAPPORT SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES, 27 


1° juin, entre le premier et le second sommeil. Les vers qui 
restaient ont commencé la quatrième mue le 23 juin, et dans 
cette phase critique les trois quarts sont morts; il ne restait 
le 29 juin qu’une dizaine de vers qui ont bientôt disparu. 

10° Graine Gelot (de l’Équateur). L’éclosion s’est produite un 
peu lentement, du 47 au 22 mai. Les deux premières mues 
accomplies chacune en vingt-quatre heures se sont terminées 
le 6 juin, et à cette date il n’y avait encore que très-peu de 
petits; la quatrième mue allait commencer le 19 juin, mais 
les vers ont été jetés le 24 juin, lorsque la flacherie se décla- 
rait. Une graine du Pérou remise par M. Gelot à la fin de 
juin, et non encore acclimatée par éducations préalables en 
France, a commencé à éclore très-irrégulièrement le 1% août. 
Cette éducation en dehors des convenances de notre climat 
n’a pas été suivie. 

11° Graines Nagel. M. Nagel avait envoyé à la Société des 
pelis lots de diverses graines, qui furent envoyés comme essais 
à la magnanerie du Jardin. Ces graines provenaient du Jardin 
des plantes de Châlons-sur-Marne. 

U y avail un lot de graine japonaise que nous n’avons pas 
mis en expérience, vu le peu de valeur de ces graines; toutes 
les tentatives des graineurs doivent se porter sur la régéné- 
ration des anciennes races d'Europe, si supérieures aux races 
japonaises, du moins celles que les marchands de ce pays 
livrent au commerce d’exportation. Deux pontes isolées furent 
élevées à part, en éducation également isolée. Les autres 
graines furent mise en éclosion Île 22 mai, époque trop tardive, 
mais ces graines étaient arrivées à une époque avancée. Il y 
avait une race de Portugal, une race d'Amérique, une race 
milanaise obtenue par la sélection microscopique, enfin un 
petit carton de graine étiquetée de l'Équateur, et dont l’édu- 
cation fut abandonnée dès le 4° juin, comme tout à fait défec- 
tueuse en qualité de vers. En outre se trouvait une graine 
indiquée de race jaune. La flacherie avait détruit aux derniers 
jours de juin tous les vers de Portugal, de sélection micro- 
scopique et de race jaune. Les deux pontes isolées vinrent à 
éclosion le 27 mai, et au 6 juillet les vers qui en provinrent 


28 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


étaient très-languissants, quelques-uns pou opéré la qua- 
trième mue. Le résultat fut nul. 

12° Graine d’une race à cocons d'un jaune vif, élevée au 
Muséum en 1872. L'aspect de cette graine était excellent, et 
l’éclosion s’opéra très-également en vingt-quatre heures du 9 
au 10 mai. Au 15 mai on pouvait pronostiquer une grosse et 
robuste race. Les petits apparurent dès le 22 mai au début 
de la seconde mue, et la flacherie communiquée par conta- 
gion dans une salle tout infectée enleva les derniers vers qui 
restaient, le 44 juin après la quatrième mue. 

En résumé cette année, comme en 1872, les insuccés ont 
été nombreux à notre magnanerie. On est donc en droit de se 
demander si, outre les conditions défavorables du climat de 
Paris, 1ln°y a pas quelque cause locale à faire disparaître. Nous 
avons eu de belles récoltes de soie à l’ancienne magnanerie 
du Jardin (le bâtiment actuel des singes). Le local où s’élèvent 
aujourd’hui nos vers à soie est humide, trop abrité, et ne rece- 
vant l'air complétement que d’un côté. Je vais essayer de 
combattre, en 1874, ces conditions défavorables en plaçant les 
tablettes au milieu de la salle, loin des murs, et en chauffant 
la salle par un poêle à fort tirage. Nous devons renoncer à 
l'élevage sans feu, qui était déjà une cause fâcheuse de retard 
pour notre ancienne magnanerie, et qui est bien plus perni- 
cieux depuis l'invasion intense de la flacherie. Si cette 
année 1874 est favorable à la sériciculture en France et si nos 
revers continuent, ma conviction sera complète, et je prierai 
la commission administrative du Jardin de vouloir bien aviser. 


Il. ÉDUCATION DE DIVERSES ESPÈCES D'ATTACUS PRODUCTEURS 
DE SOIE. 


Nous devons donner le pas, dans cette seconde partie du 
rapport, aux vers de l’espèce japonaise du chêne, l'A. yama- 
mai, G. Mén., en raison de sa grande importance industrielle. 

Nos essais ont porté sur des œufs provenant des éducations 
de M. de Saulcy à Metz, opérées depuis nombre d’années 
avec la plus louable persévérance, et sur d’autres, donnés 


RAPPORT SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES. 29 


par M. Berce, et qui ont pour origine des vers élevés depuis 
six ans à Clamart, d’abord par M. E. Devrolle, puis par 
M. Berce. Ce sont donc des graines suffisamment acclimatées 
qui sont mises en expérience. Un petit lot des graines de 
Sauley n’ont subi aucune préparation; la plus grande partie 
de ces graines, ainsi que celle de M. Berce, ont été portées au 
laboratoire de M. Pasteur, à l'École normale, et placées dans 
une des petites glacières arlificielles (1), si utiles pour les 
graines de ver à soie, pour les ferments, etc. J’ai cherché à 
remédier au plus grand obstacle qui s’est opposé jusqu'ici 
aux élevages de cette précieuse espèce, et qui cause notam- 
ment une si légitime préoccupation à M. de Saulcy. L’espèce 
japonaise éclôt presque toujours avant le développement des 
bourgeons de nos chênes, et souvent beaucoup de vers meu- 
rent sans nourriture. C’est là la principale raison qui s’op- 
pose à la propagation de cette précieuse espèce, car beaucoup 
d’'éleveurs, dans la crainte de cet insuccès, hésitent à faire la 
dépense assez considérable d’un achat de graines en grand 
J'ai voulu résoudre par là une question industrielle très-im- 
portante. J'étais, au reste, assez hésitant par la raison sui- 
vante : si le glaçage des œufs est une très-bonne pratique, 
bien admise aujourd’hui, pour le ver à soie du mûrier, on 
pouvait craindre qu’il en fût autrement pour l’Atfacus yama- 
mai. Dans cette espèce, par un fait spécial, la petite chenille 
est toute formée dans l'œuf quinze jours après la ponte, et 
l'expérience seule pouvait décider si le glaçage des œufs serait 
funeste ou favorable, devant ce développement précoce de 
l'embryon. 

Les œufs non glacés ont commencé à éclore le 5 avril 1878, 
avec une assez forte mortalité au début atteignant des vers 
languissants, incapables de se débarrassser de la coque de 
l'œuf. Les petites chenilles ont été placées sur des bourgeons 
bien élalés de rameaux de vieux chênes (les jeunes arbres 
donnent à toutes les espèces de chenille une nourriture trop 


(1) Indiquées à notre Bulletin de septembre 1873, p. 648, el au Bull. de 
la Soc. entomol. de France, séance du 22 octobre 1873. 


30 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


aqueuse et débilitante), en choisissant les sujets à foliation 
précoce ; on les a préférés aux chênes forcés en serre, d’après 
les bons soins de M. Quihou, parce que les grandes feuilles 
de ces derniers étaient flasques et peu goûtées des chenilles. 
Ces petites chenilles sont très-vagabondes, et se proménent 
souvent sur le carton large qui ferme le goulot de la carafe, 
au-dessous du bouquet de feuilles dont les rameaux trempent 
dans l’eau. On voit, par les amas de menus crottins sur ce 
carton, que les jeunes chenilles mangent. Il y avait environ 
quarante chenilles des œufs non glacés à ma visite du 
44 avril. Le 14 avril j'avais visité à l’École normale les œufs 
glacés, et je n'étais assuré, en ouvrant quelques œufs, que la 
petite chenille y était bien portante, très-dodue, d’un vert 
gai, avec quelques longues soies noires. 

Le 47 avril la graine de yama-mai fut retirée de la glacière 
où elle séjournait depuis cinq semaines environ ; 1 gramme 
de cette graine glacée est remis à M. Berce, 1 gramme à M. Le 
Doux pour être élevé à Ferrussac (Lozère), par 600 mè- 
tres d'altitude, et 2 grammes sont portés au Jardin. Chaque 
gramme contient de 126 à 128 œufs. A cette même date les 
petites chenilles des œufs non glacés étaient placées sur des 
rameaux de chêne bien feuillus, contenus ou dans des carafes 
avec de l’eau, ou dans des pots pleins d’un mélange de sable 
humide et de charbon pilé; elles sont mises en plein air à la 
fenêtre. Un carton blanc en cornet, recouvrant le pot ou le 
goulot de la carafe, permet de bien voir les chenilles qui tom- 
bent, et rend les évasions plus difficiles, Elles étaient alorsen 
bon état et mangeant bien ; recommandation expresse élait 
faite, pour renouveler les rameaux de chêne, de ne pas tou- 
cher les chenilles; on place des rameaux frais entre les an- 
ciens, et les chenilles v grimpent d’elles-mêmes; au besoin 
on coupe avec des ciseaux les feuilles auxquelles adhèrent des 
chenilles trop tenaces, et l’on place feuille et chenille sur les 
rameaux nouveaux. Le 20 avril il n’y avait encorefaucune 
mortalité, et les chenilles les plus avancées se réveillaient du 
premier sommeil. J’apporte un pulvérisateur destiné à impré- 
gner les feuilles d’une rosée imperceptible. 


RAPPORT SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES. 91 


À ce moment les œufs glacés ne sont pas encore éclos, et 
de même chez M. Berce. Cependant je m’assure que la petite 
chenille y est pleine de vie, luisante, gorgée de sang. Je 
constate le 27 avril, à l’École normale, que sur dix œufs 
olacés mis à l’étuve, maintenus jour et nuità 20 degrés, il y 
a neuf éclosions, et les petites chenilles se dispersent sur les 
murs de l’étuve. Je suis donc certain que le glaçage a retardé 
l’éclosion, un peu plus que je ne le voulais seulement, et que 
la bonne santé des vers n’est pas altérée. 

À cette date les œufs glacés commencent à blanchir, sur- 
tout ceux fournis par l'éducation de M. Berce. C’est le signe 
d’une éclosion très-prochaine, alors que la petite chenille ré- 
sorbe la membrane interne de l'œuf. Le 30 avril a commencé 
l’éclosion des graines Saulcy glacées. Leur éclosion continue 
parfaitement bien jusqu’au 8 mai. Les vers de la graine 
Berce glacée ont fait leur éclosion du 5 au 8 mai; mais ils ont 
très-vite rattrapé les précédents, car ils mangeaient plus 
activement, et ont aussitôt jauni et grossi. 

Le 11 mai les vers non glacés réduits à une trentaine 
ont été portés à l'air complétement libre, et certains dor- 
maient du troisième sommeil. Les chenilles sont protégées 
contre les oiseaux par une cage en grillage, précaution in- 
dispensable quand on opère sur un petit nombre de chenilles, 
surtout près des villes où abondent les moineaux. Les vers 
glacés Sauley et Berce sont aussi placés à l'air libre. Certains 
des premiers finissent la première mue ; il n’y a pas de morts. 
Les vers Berce, plus jeunes, mangent bien et n’ont pas encore 
de début de sommeil. 

Le 45 mai les vers Saulcy non glacés offrent quatre morts 
sans avoir pu muer, étranglés par la peau. Il reste une ving- 
taine de chenilles ayant fait la troisième mue. Les vers glacés 
Saulcy ont presque tous opéré la première mue; les vers 
glacés Berce vont bien et n’ont pas encore mué. Le 18 mai 
sur les vers tous glacés il y a deux morts, et les autres dor- 
nent du quatrième sommeil. Les glacés Saulcy sont réveillés 
de la première mue, et bien plus vigoureux que les anciens. 
Une partie des vers glacés Berce dort de la première mue ; les 


32 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


autres sont sortis de cette phase. Le 22 mai les vers restants 
de la graine non glacée vont bien ; une part dort du quatrième 
sommeil, d’autres s’en réveillent. Les vers glacés Sauley sont 
pour la plupart à la seconde mue, les vers glacés Berce se 
réveillent de la première mue. Au 25 mai les chenilles âgées 
vont bien, les vers glacés Saulcy sortent de la deuxième mue 
et six chenilles sont mortes, étranglées par la peau, à cette 
crise ; les vers glacés Berce n’ont encore subi que la première 
mue, et quatre sont morts en l’opérant. Le 28 mai tous les 
vers sont en bon état et sans mortalité nouvelle. Au 1° Juin, 
après plusieurs jours de grandes pluies et de nuits très- 
froides, une partie des anciens vers a terminé la quatrième 
mue, et l'aspect des quinze à vingt chenilles qui restent est 
bon. Sur les vers glacés, dix-sept sont morts étranglés à la 
mue par l’ancienne peau. Leur développement est très-lent. 
Au 15 juin arrive un accident; les moineaux parviennent à 
s’introduire sous le grillage et dévorent une grande partie des 
chenilles. On sauve de leur voracité dix grosses chenilles en- 
viron, dont quelques-unes prennent de mauvaises teintes, 
leur vert pâlissant. Au 13 juin, trois de celles-ci sont mortes 
en faisant leur quatrième peau; elles élaient flasques et sa- 
nieuses, la flacherie s’étant nettement déclarée, même à l'air 
libre. Au 15 juin, il n’y avait pas de morts nouvelles. Le 
19 juin, trois chenilles étaient mortes flachées et les aulres 
étaient tachées de points noirs et molles. Je les trempe à l’eau 
froide, moyen euratif indiqué dans un article du 15 juin des 
Petites nouvelles eniomologiques. Le 20 juin les quatre der- 
nières chenilles de la graine non glacée étaient mortes de fla- 
cherie. Le très-petit nombre de vers de la graine glacée 
échappés aux oiseaux ne tarda pas à éprouver le même sort, 
par contagion communiquée ; les rameaux de chêne étaient 
les uns près des autres. 

Pour la première fois depuis six ans les éducations du Yama- 
mai faites par M. Berce, avec des graines glacées et non gla- 
cées, échouaient en três-grande partie, ne donnant que quel- 
ques cocons el papillons. 

Je demeurais fort perplexe au sujet de cette question du 


RAPPORT SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPTÈRES. 33 


glaçage, si importante pour l’avenir des vers du chêne, lors- 
qu'une heureuse solution fut donnée à la question. J'avais 
remis à M. Le Doux, un de nos lauréats de 1873, 1 gramme 
de graine glacée, et il avait en outre 2 grammes de graine 
non glacée, également de M. Saulcy. L’essai eut lieu à Fer- 
russac, dans la Lozère (1), arrondissement de Klorac, par 
600 mètres d'altitude; la graine glacée produisit 38 beaux 
cocons, sans aucune maladie, d’où sont sortis des papillons 
sains et vigoureux. La graine non glacée n’a donné que 
68 cocons sur lesquels il y eut 14 papillons malingres et 
avortés. M. Le Doux envoya au Jardin du bois de Boulogne 
18 cocons de la graine glacée qui lui avait été confiée. Ils 
produisirent 12 femelles et 2 mâles seulement, ce qui n’a pu 
fournir que très-peu de graine. Au contraire, à Ferrussac, 
M. Le Doux eut beaucoup plus de mâles que de femelles, car 
il avait gardé les premiers cocons filés, et l’on sait que, chez 
les insectes, les mâles, par une prévoyance harmonique facile 
à comprendre, éclosent d'ordinaire un peu plus tôt que les 
femelles. Il n’a pu y avoir accouplement. Le point important 
relatif à l'excellence du glaçage des œufs est donc résolu, et 
je ne manquerai pas de glacer la graine que nous éleverons 
en 1874; seulement il faudra opérer sur plus de graine 
qu’en 1873, afin de mieux réparer les pertes accidentelles et 
d’avoir assez d'éclosions pour assurer les accouplements, la 
part de non-valeur étant faite aux éclosions prématurées ou 
tardives d’un seul sexe. 

Le 2 août 1873, notre magnanerie reçut des œufs du ver à 
soie du chêne de la Mandchourie (Atéacus Pernyi, G. Mén.) 
provenant de M. Comba, qui élève cette espèce au parc royal 
de la Mandria près de Turin. L’éclosion eut lieu dès le 3 août 
et fut bonne, et l’on eut environ deux cents chenilles pour 
commencer Ja seconde éducation de cette espèce, qui est 
bivoltine, tandis que le Yama-mai n’a qu’une éducation par 
an. Les vers firent très-bien leurs trois premières mues, sans 


(1) Et non la Haute-Loire, comme cela est indiqué par erreur au Bul- 
letin de 1875. 
3° SÉRIE, T. L. —- Janvier 1874 3 


»/ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


aucune mort à la première età la seconde mue ; mais la flacherie 
a commencé à paraître après la troisième mue. M. Berce a 
bien voulu suivre cette éducation en mon absence. Il y eut 
tous les jours des morts, beaucoup de chenilles ne parvenant 
pas à se débarrasser de la quatrième peau. Au 1° octobre 
tout ce qui restait était mort. 

Le résultat à été pareillement infructueux pour des vers de 
Fama-maï et pour ceux de Pernyt élevés par Guérin-Méneville, 
à sa magnanerie-école de Nogent-sur-Marne, et, en partie 
pour les derniers, au palais de l'Industrie des Champs-Ély- 
sées, lors de l’exposition des produits de l’extrême Orient. 

Les dernières survivantes des chenilles exposées ont été ap- 
portées au Muséum, mortellement atteintes, et ont été mises 
dans l’alcool pour la collection de larves. Ces exemples multi- 
pliés montrent la détestable influence de l'atmosphère pari- 
sienne, et contre quelles difficultés, dont le public ne se doute 
pas, nous avons à lutter à la magnanerie expérimentale de la 
Société. 

Une démonstration scientifique très-intéressante est sortie 
du reste de nos désastres, celle de la contagion de la flacherie 
à des espèces indigènes très-robustes. Pour satisfaire à la cu- 
riosité des visiteurs j'avais fait placer, contre les rameaux de 
chêne destinés au Yama-maï, des rameaux humectés par le 
pied sur lesquels furent élevés des pontes de nos deux Atfacus 
indigènes, l'A. pyri, Linn., le grand paon de nuit, dont cha- 
cun connaît la magnifique chenille verte, avec des tubercules 
terminés par des étoiles d’un bleu de turquoise, et l'A. car- 
pini, Linn., espèce de plus petite taille, le seul Aftacus qui 
existe dans le nord de la France et en Angleterre. Les œufs 
nous avaient été donnés par MM. Fallou et Berce, et ce der- 
nier a bien voulu me donner pour la surveillance de toutes 
nos éducations, un concours actif et dévoué, dont je le re- 
mercie au nom de la Société. L’A. pyre fut nourri avec le 
cerisier, l'A. carpini avec l’aubépine. Un grand manchon de 
vaze, lié aux deux bouts à la branche, empêchait les jeunes 
chenilles vagabondes de ces deux espèces rustiques de se dis- 
perser, tout en conservant l'avantage deles élever à l'air libre. 


RAPPORT SUR DIVERSES ESPÈCES DE LÉPIDOPIÈRES. 99 


Ces larves ont peu à peu disparu, décimées par la flacherie 
que leurs voisines du Yama-mai leur communiquèrent, et cela 
des premiers jours de mai au 1° août. 

Il nous reste pour terminer à faire mention du ver à soie 
de Pailante (Atéacus Cynthia, Drury; vera, G. Mén.) si bien 
acclimaté en France aujourd’hui, et dont les cocons pendent 
en hiver aux ailantes de nos squares et boulevards, ainsi que 
sur le boulevard des Italiens lui-même. Nous avions des cocons 
provenant des belles éducations de 1872 de M. de Milly, et 
qui passèrent l'hiver dans le hangar sec et froid où nous main- 
tenons nos graines. Dès le commencement de mai Je fis arroser 
ces cocons au pulvérisateur Fallou, afin de les maintenir dans 
l’état de légère humidité qui facilite l’éclosion des chrysalides. 
L’éclosion des papillons commença le 18 mai, et ne se termina 
que le 9 juillet; il y eut en général plus de femelles que de 
mâles. Cependant on put opérer de nombreux accouplements. 
C'est le 16 juin que les premières petites chenilles sortirent 
des œufs pondus. Elles sont aussitôt placées à l'air libre sur 
des rameaux d’ailante plongés dans des carafes pleines d’eau. 
On peut remarquer la sociabilité de ces petits vers, qui se pla- 
cent tous les uns près des autres sur la même feuille, ces asso- 
ciations étant le caractère naturel des êtres faibles. Au 26 juin 

les premières chenilles écloses ont fait ‘une mue et sont d’un 
beau jaune. Le 3 juillet certaines chenilles avaient fait deux 
mues, et la plupart une. Le 6 juillet quelques-unes commen- 
çaient la troisième mue, tandis que de nouvelles petites che- 
nulles ne cessent pas d’éclore. Le 43 juillet beaucoup de che- 
nilles meurent de flacherie, bien qu’à l'air libre. Cela montre 
l'intensité de cette affection en 1873 dans la zone de Paris. 
On place des graines dans des cornets entourant une planta- 
tion d’ailantes sur pied, disposée devant la magnanerie, et à 
6 à 8 mètres des vers du chêne. La flacherie continue. Le 
20 juillet les jeunes vers éclos sur les ailantes en pied n’ont 
pas encore offert de flacherie ; des colimaçons viennent dans 
les cornets manger les œufs. Les oiseaux et les guêpes enlè- 
vent aussi beaucoup de chenilles. Tous les œufs ont achevé 
leur éclosion le 24 juillet. La flacherie sévit tellement intense 


36 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


que, le 1° août, 1 ne reste que quelques chenilles qu’on élève 
sur rameaux d’ailante en carafe aux fenêtres de la magnanerie. 
Ces chenilles ont donné quelques cocons, mais dont les pa- 
pillons ne sont pas sortis, de sorte que nous n’avons pu faire, 
comme d'habitude, une seconde éducation. Ce résultat ne 
doit pas étonner, car dans une lettre lue au Conseil le 30 jan- 
vier 1874, M. Usèbe nous avait informés que ses éducations 
de l'Aftacus Cynthia vera à Milly, canton d'Étampes, Seine- 
et-Oise, ont été très-peu favorisées, qu'il n’a pu obtenir une 
récolte de cocons pour le commerce, et que le nombre des 
cocons filés par les chenilles n’est que justement suffisant 
pour la reproduction et le grainage de l’éducation de 1874. 


En à 


+ sbiés 


NOTICE NÉCROLOGIQUE 


SUR 


JULES VERREAUX 


Voyageur et aide-naturaliste du Muséum d’histoire naturelle de Paris, 


Par M. ©. DES MURS. 


Nous sommes de ceux qui pensent qu'il n’est pas bon de 
laisser s’éteindre une existence aussi bien remplie que celle 
de Jules Verreaux, sans l'accompagner d’un témoignage de 
souvenir non-seulement au nom de l’amitié, mais encore au 
nom de la science dont il était une des brillantes étoiles, et de 
notre Société qui le comptait au nombre de ses membres et 
même de ses lauréats. 

La science vient en effet de faire, en sa personne (le 7 sep- 
tembre 1873), une perte qui sera vivement ressentie par tous 
les naturalistes du monde, car son nom est attaché en quelque 
sorte à chacun de leurs travaux. Qu'il s'agisse des Gray, de 
Sclater et des Newton, etc., en Angleterre ; du prince de 
Wied, de Kaup, de Hartlaub, etc., en Allemagne; de Tem- 
minck, de Schlegel, etc., en Hollande; d'Isidore Geoffroy 
Saint-Hilaire, de Lesson, du baron de la Fresnaye, du prince 
Ch. Bonaparte, de Toussenel, de Gerbe de Vian, de Paul 
Gervais, de MM. Milne Edwards, etc., en France ; de Tittler 
et Jerdon, etc., dans l'Inde; de sir Cabot, de Cassin, d’El- 
liot, elc., en Amérique ; il n’est pas un d’entre eux qui n’ait 
eu recours à ses lumières et ne l’ait consulté avec fruit. 
C’est qu’il réunissait en lui les connaissances spéciales aux 
connaissances générales, et le talent d'observation à l’avan- 
tage inappréciable d’avoir constamment voyagé pour sur- 
prendre et étudier les secrets et les mystères de la nature. 

Ajoutons que, né le 24 août 1807, il était le doyen et le 
dernier survivant en France, avec Claude Gay, qui vient de 
succomber aussi, de nos nombreux voyageurs ; et que, sachant 
combien noblesse oblige, son but unique avait été, instincti- 


38 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


vement et presque dès son enfance, de marcher sur les traces 
des Péron, des Lesueur, des Levaillant, des Delalande, des 
Quoy, des Gaimard, des Lesson et des d’Orbigny. 

Nous avons cité Delalande: ce nom nous amëne à entrer 
dans quelques détails, que l’on nous pardonnera sans doute, 
en faveur du motif qui dirige notre plume. 

D'abord qu'était et qu'a fait Delalande? Écoutons à ce sujet 
ce qu'en disait, en une séance publique de 1861, Isidore 
Geoffroy Saint-Hilaire : 

«Trente-huit ans se sont déjà écoulés depuis que s’est re- 
fermée sur Delalande cette tombe si religieusement honorée. 
Mais les services de ce voyageur ne sont pas de ceux que le 
temps efface. Successivement envoyé par le Muséum d’histoire 
naturelle pour enrichir les collections en Espagne et en Por- 
tugal en 1808, dans le midi de la France en 18138, au Brésil 
en 4816, dans l’Afrique australe en 1818, Delalande a su aller 
partout au delà des espérances qu’on avait mises en lui. On 
connaissait peu, avant lui, les productions du vaste empire 
brésilien; Delalande y a fait de si riches moissons, qu’où il 
avait passé, ses successeurs n’ont plus trouvé qu’à glaner. Ce 
n’est encore là, cependant, qu’un des mérites secondaires de 
Pelalande : son grand titre, celui qui en a fait le modéle 
presque incomparable des voyageurs naturalistes, c’est cette 
orande exploration de l'Afrique australe, faite, durant trois 
années, avec un courage, une énergie, un dévouement, qui 
ne seront Jamais surpassés. Quatorze mille animaux, déposés 
par Delalande, à son retour, dans les collections du Muséum, en 
sont encore aujourd’hui, dans ce grand établissement, l’écla- 
tant témoignage ; parmi ces quatorze mille animaux, on comp- 
tait plusieurs baleines, et tous ces gigantesques animaux dont 
la terre africaine, cette patrie des monstres, comme l’appe- 
laient les anciens, est le lieu privilégié. Voilà ce qu'a fait 
Pierre Delalande, n’ayant d’autres aides qu'un enfant, son 
digne neveu, Jules Verreaux, alors âgé de douze ans, et quel- 
ques Hottentots toujours prêts à déserter leurs postes quand 
leshasards de la chasse devenaient trop semblables aux périls 
de la guerre. » 


. shot 


NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR JULES VERREAUX. 39 


Quel meilleur maître pour former un excellent élève ? C’est, 
en effet, sous les auspices de Delalande, son oncle, que Jules 
Verreaux, à l’âge de douze ans, débuta dans la carrière si 
pénible des découvertes scientifiques, par un voyage qu'il fit, 
en 1818, au cap de Bonne-Espérance, où il resta deux années 
occupé à préparer et à classer presque tous les objets dont ce 
naturaliste enrichit à cette époque les galeries du Muséum 
de Paris, lorsqu'il ne l’accompagnait pas dans ses périlleuses 
excursions et dansses chasses plus dangereuses encore. 

À son retour en Europe, il s’attacha au laboratoire de cet 
établissement, y profitant des lecons et des conseils de 
Georges Cuvier, d'Étienne Geoffroy Saint-Hilaire et de Vicil- 
lot, depuis 1820, jusqu’en 1825, qu'il repartit âgé de dix- 
huit ans, seul, pour le Cap. Delalande, son oncle et son pre- 
mier initiateur, venait de s’éteindre à Paris épuisé des fatigues 
en 1823, dans la pleine force de l’âge, quarante ans! 

Cest de l’époque qui précéda ce départ que date une des 
découvertes les {plus intéressantes en ornithologie, qui fait voir 
l'instinct d'observation dont était naturellement doué J. Ver- 
reaux. L'étude qu’il venait ainsi de faire des oiseaux à plu- 
mage coloré et métallique, dont fourmille l'Afrique australe 
qu'il avait parcourue avec Delalande, lui en fournit l’occasion, 
Il s’agit du phénomène de ptilose, que nous avons appelé, 
avec le baron Müller, depuis une vingtaine d'années, le méta- 
chromatisme, chez les oiseaux. 

On sait que le changement de couleur de leurs plumes 
constitue ce qu'on désigne généralement sous le nom de nue. 
Mais la mue ne s'opère pas de la mème manière pour tous : 
les uns, et ce ne sont peut-être pas les plus nombreux, per- 
dent successivement, à certaines époques de l’année, leurs 
pennes et leurs plumes du premier âge; les adultes, celles 
d'hiver ou d'été, qui, dans les deux cas, sont remplacées par 
des plumes nouvelles qui leur succèdent. 

On à cru longtemps, G. Cuvier tout le premier, et quelques 
ornithologistes croient encore que ce mode de substitution de 
plumage est uniforme chez tous les oiseaux. Il n’en est cepen- 
dant pas ainsi; et c’est à J. Verreaux qu’en appartient la dé- 


hÔ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


couverte. Il a reconnu, ce qu’il est facile de vérifier, sur les 
soui-mangas notamment, que, chez ces derniers oiseaux, les 
plumes du premier âge ne tombaient pas pour faire place à 
d’autres colorées différemment et plus vivement, mais que ces 
mêmes plumes, à une certaine époque .de l’année, ou plutôt 
de l’âge de l'oiseau, revêtaient graduellement leurs couleurs 
définitives, et se teignaient peu à peu de ces couleurs en com- 
mençant par la pointe. Ainsi, lorsque chez ces oiseaux encore 
jeunes, et ayant la livrée terne et uniforme de leur âge, on 
aperçoit quelques plumes portant à leur pointe un commen- 
cement de la coloration propre à l'adulte, il ne faut pas croire 
que ces plumes soient nouvellement poussées; ce sont les 
mêmes, qui n’ont pas quitté la peau ; il n’y a de nouveau que 
la teinte qui vient de s’y ajouter. Un examen attentif démon- 
tre que cette teinte augmente graduellement en remontant 
vers la base de la tige; seulement, cette métamorphose se 
produit dans l’année chez quelques espèces, et au bout de 
deux ou trois ans chez d’autres. 

Tel est le fait mis en évidence, à ses débuts, par J. Verreaux, 
depuis longtemps, on le voit, quoique tardivement établi dans 
la science, et de la réalité duquel, en raison de son jeune âge, 
il ne put jamais convaincre alors G. Cuvier, tant le résultat 
contrariait les idées de l’illustre anatomiste. Il s'ensuit que, 
si le métachromatisme a pu être confondu avec la mue et 
donner lieu à des erreurs trop longtemps accréditées, il n’a 
cependant avec elle qu’une très-fausse analogie. 

Après cinq années de séjour dans l’intérieur de l’Afrique, 
où il eut pour compagnon de ses chasses et de ses études 
l'excellent docteur À. Smith, chirurgien en chef de la colonie 
et auteur de la Zoologie du sud de l'Afrique, J. Verreaux y 
avait recueilli, en objets d'histoire naturelle, des trésors tels, 
qu'il se vit obligé de faire venir de Paris son frére Édouard, 
pour l'aider à les coordonner, et pour le charger de surveiller 
et accompagner l'envoi qu’il en faisait en France. C’est en 1830 
que cet envoi arriva à Paris, où 1l fut exposé dans les vastes 
et belles galeries de M. le baron Benjamin Delessert, alors 
l’un des plus zélés protecteurs des sciences ; et les contempo- 


2 


NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR JULES VERREAUX. Al 


rains se souviennent encore comme nous de la sensation que, 
malgré les préoccupations politiques du moment, causèrent 
chez les savants la richesse et la nouveauté de cette collection 
zoologique, jointe à des trésors de haute curiosité, amassée à 
si grands frais, et sans aucun encouragement de l'État, par de 
simples particuliers abandonnés à leurs seules ressources. 

En 1832, Jules Verreaux rappela de nouveau son frère au- 
près de lui, et, depuis ce temps jusqu'en 1837, ils firent en 
commun divers voyages aux Philippines, en Cochinchine, 
toujours dans le seul intérêt de la science. 

Enfin, en 1838, après avoir derechef rassemblé une col- 
lection tout aussi riche que la première, et dont 1l confia le 
chargement, sans assurance, au navire de commerce le Zu- 
cullus, J. Verreaux revint, sur un autre bâtiment, en France, 
pour y refaire sa santé, jouir un peu du fruit de ses travaux, 
et mettre en œuvre les immenses matériaux abandonnés à la 
destinée du Lucullus. Maïs, vain espoir! à peine arrivé, il 
apprend le naufrage complet, corps et biens, de ce bâtiment 
qui renfermait le labeur pénible et consciencieux de ses 
douze plus belles années. En effet, outre une prodigieuse réu- 
nion d'objets d'histoire naturelle dans tous les règnes, notam- 
ment le règne animal, se trouvait une suite précieuse de 
dessins d'animaux faits sur les lieux et d’aprèsle vivant; de 
minutieuses études, observations et descriptions manuserites 
sur les oiseaux de proie dont l’intérieur de l'Afrique est si 
riche, et dont la détermination est généralement si fautive et 
si difficile par suite du métachromatisme, auquel il venait de 
découvrir qu'ils étaient tout aussi bien soumis que les souiïs- 
mangas. 

Pendant quelque temps, le découragement d’une perte 
aussi grande et dont l’objet avait exigé de sa part une si forte 
mise de fonds et l’emploi de la plus riche partie de son exis- 
ience, s'était emparé de J. Verreaux, qui voyait tous ses rêves 
d'avenir engloutis dans les débris du Zucullus. Mais bientôt, 
réfléchissant qu’il n’avait encore que trente-cinq ans, que son 
zèle et son ardeur pour l’étude et les progrès de la science, 
loin de s’être ralentis, s’en étaient encore accrus s’il se pou- 


R2 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


vait, il pensa, müri par l'expérience, qu’il devait encore 
espérer lui payer son tribut, ainsi qu’à son pays (qu’il a tou- 
jours su préférer aux pays étrangers, même pour ses intérêts 
pécuniaires), et leur rendre ce que le sort leur avait fait per- 
dre dans ce désastre. 

Cette noble idée ne fit que s’accroître et se consolider, chez 
J. Verreaux, par la réflexion, et nous le remerciâmes en ces 
temps-là, dans la Revue de zoologie, de n'avoir désespéré ni 
de lui-même, ni de la justice des hommes. Dès lors, ses soins, 
ses études, furent dirigés vers un nouveau vovage ; ilne négh- 
gea rien pour y marcher d’un pas ferme et assuré. Travaux 
assidus dans les musées étrangers ; conférences avec les divers 
voyageurs accrédités dans la science ; acquisitions d'ouvrages, 
il ne recula devant aucun obstacle ni aucun sacrifice pour se 
mettre à la hauteur du but de sa Jouable ambition. Stimulé 
par les objets si curieux et si intéressants rapportés de la 
Nouvelle-Hollande, par Gould, c’est vers cette terre, presque 
encore vierge des investigations scientifiques qui venaient à 
peine de l’effleurer, qu’il porta ses regards ; et c’est vers elle 
aussi qu'il obtint de l'administration du Muséum, par la bien- 
veillance d’Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, de de Blainville et 
de M. Milne-Edwards, qui tous appréciaient ses connaissances 
et ses aptitudes, de se diriger, ainsi que dans la Tasmanie, 
et que nos vœux et ceux de ses nombreux amis l’accompa- 
onérent. 

C'est alors que nous nous empressâmes d'annoncer à tous, 
wrbr et orbi, la bonne nouvelle. 

Cinq années des plus laborieuses furent consacrées par lui 
à ce pénible voyage, dont les résultats furent inespérés pour 
les collections déjà si riches du Muséum. Passer ses nuits 
comme un vrai sauvage à travers bois et montagnes pour 
observer, récolter et chasser Insectes et Lépidoptères, Oi- 
seaux et Mammifères nocturnes, était tout plaisir pour lui, 
pourvu qu'il contribuât à enrichir la science. 

Par une singulière fatalité, une fois obtenu le succès utile, 
les chances de son étoile voulaient que rarement les événe- 
ments fussent favorables à la publicité sur laquelle, comme 


NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR JULES VERREAUX. Là 


tout voyageur du Gouvernement, il avait droit de compter. De 
même que la Révolution de 1830 avait quelque peu paralysé 
cette publicité pour son premier envoi, de même les événe- 
ments de 1848 vinrent nuire à son deuxième envoi, en en 
retardant indéfiniment l'exposition publique. Si tardif que 
füt ce moment, 1l n’en fut pas moins solennel; car ce ne 
furent pas trente mille, comme Delalande, mais plus de cent 
cinquante mille sujets, dans toutes les branches de l’histoire 
naturelle, qui frappèrent les yeux éblouis du public. 

L’activité que J. Verreaux avait déployée dans ce voyage 
accompli avec tant de distinction ne faiblit pas à son retour. 
Il s'agissait, pour lui, de mettre en œuvre tout ce qu’il avait 
amassé de connaissances spéciales en ornithologie. 

Le Systema de Linné, sur cette branche du règne animal, 
laissait à désirer, par suite de l'accumulation des richesses et 
de la multiplication des découvertes ; toute la synonymie des 
oiseaux était à refaire, ou plutôt à créer. C’est ce travail gigan- 
tesque que J. Verreaux entreprit de reconstituer, et depuis le 
premier moment où il en jeta les principaux fondements, il y 
consacra quinze années consécutives, et s’en occupait encore 
ardemment, trois Jours avant son dernier soupir, laissant de 
quoi remplir plus de dix volumes de synonymies. 

Entre temps, il réorganisait, place Royale, les magnifiques 
magasins de son frère Édouard, et en faisait, comme Musée, 
un modèle d'école, où venaient étudier et s’instruire tous les 
savants et les voyageurs, et qu’admirait le fout Paris d'alors. 

Tantôt c'était le riche Musée de Leyde, qu’il aidait cet 
excellent Schlegel à ordonner, à ranger et à nommer; et l’on 
sait avec quel talent d'investigation il l’amena à reconnaître 
et à découvrir les faux types de Levaillant; c’est également 
de ses communications que s’inspira ce savant pour la publi- 
cation de son remarquable Mémoire sur les variations de cou- 
leurs du plumage des oiseaux. Puis, c’étaient les directeurs 
des musées de Douai, de Boulogne, etc., qui l’appelaient à 
leur aide. 

Toujours dévoué au service de la science et à sa propaga- 
tion, il ne reculait devant aucun déplacement, dans lequel, 


AU SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


ainsi qu’il le disait avec son aimable naïveté, «il y avait tou- 
jours à apprendre, même pour lui ». 

Ce n’est pas tout. Après son séjour en Hollande, où il avait 
reçu, durant son exil, une hospitalité si cordiale, le prince 
Ch. Bonaparte posait bientôt les bases de son fameux Con- 
spectus generum avium. Que pouvait-il faire de bien sans un 


conseiller sûr, sans un collaborateur égal à lui-même en con- 


naissances, mais plus versé dans l’étude spéciale des oiseaux? 
C’est à J. Verreaux qu’il s’adressa, en se fixant à Paris; et, 
pendant près de huit ans, 1l vint presque tous les jours, de sa 
personne, le prendre en voiture pour l'emmener aux galeries 
du Muséum, où tous deux consacraient leur temps à étudier 
et spécifier les oiseaux des collections, en compagnie souvent 
d'Isidore Geoffroy Saint-Hilaire et du docteur Pucheran, nous 
demandant parfois de nous y associer. 

Mais, avec la conscience de sa valeur et sa fierté native, 
J. Verreaux ne concentit jamais à travailler en sous-ordre 
avec le prince; et c’est d’égal à égal qu’il traita toujours avec 
lui, ne se bornant pas à lui donner ses avis, et lui imposant 
d'autorité sa manière de voir et de procéder ; aussi le prince 
l’avait-il en profonde estime. 

C’est par suite de cette double direction et de cette asso- 
ciation que, commencé, ainsi qu’on ne l’ignore pas, par une 
simple et aride nomenclature des espèces, le Conspectus, 
sous l’heureuse influence et la force de volonté de Verreaux, 
finit par comprendre, avec les noms des espèces, leur diagnose 
linnéenne et leur synonymie. En telle sorte, qu’en bonne jus- 
tice, le prince, au lieu de se borner à rendre hommage à 
l’obligeant concours de son docte collaborateur, aurait dû, 
ainsi qu’il le lui promit bien des fois, accoler son nom au sien 
en tête de son ouvrage resté unique, et qui fixe une des étapes 
les plus remarquables de la science : car la classification et la 
synonymie sont l’œuvre personnelle de J. Verreaux, et presque 
toute la copie envoyée à l'impression fut de sa main. 

Parlerons-nous enfin de l’aide qu’a trouvé auprès de lui 
notre illustre Toussenel, pour la deuxième édition de son ini- 
mitable Ornithologie passionnelle, devenue, à l'heure qu’il 


NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR JULES VERREAUX. A5 


est, un ouvrage presque classique, concours à l'adresse du- 
quel il s’est plu souvent à formuler les éloges les plus chaleu- 
reux et les plus mérités. 

Certes, une existence si activement et si utilement employée 
demandait à se survivre à elle-même dans ses œuvres propres 
et non dans celles des autres. Malheureusement, tout en 
sachant écrire et rédiger aussi bien que tout le monde, trop 
méfiant de sa plume, il sentait que le style lui manquait quel- 
que peu et, de plus, que le temps lui faisait défaut; puis, fina- 
lement, la difficulté de trouver un éditeur le décidérent à 
renoncer à toute idée de publication. En telle sorte qu'il ne 
reste de lui que quelques Mémoires et descriptions disséminés 
dans les Archives du Muséum, la Revue et magasin de zoolo- 
gte etles Bulletins de la Société d'acclimatation, en France; 
eten Angleterre dans les Proceedings zoologiques et l’Ibis. 

Singulière destinée que celle de cette intéressante famille 
de voyageurs-naturalistes ! 

Delalande meurt, et entraîne avec lui dansla tombe, comme 
le disait si éloquemment Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, une 
partie des fruits de son mémorable voyage ; ses souvenirs, 
sesinnombrables observations sur les mœurs des animaux ; ses 
études géographiques sur les régions, alors si peu connues, 
où il avait pénétré ; n’ayant publié qu’une relation sommaire, 
et privant la science du livre qui devait être le véritable monu- 
ment de cette noble victime de l'amour des voyages et de 
l’histoire naturelle. 

Il attend trente-huit ans! qu’une voix d’en haut évoque 
son souvenir à la science, grâce à une circonstance inespérée, 
et lui assigne enfin son rang parmi les plus zélés de nos voya- 
geurs naturalistes. ; 

La mémoire de J. Verreaux attendra-t-elle aussi lontemps 
celte juste réparation ? Si nous ie craignons, nous n’osons le 
croire. 

Toujours est-il qu'il meurt à son tour, sans n'avoir égale- 
ment, comme son oncle, rien, ou que peu publié; ne laissant 
que de volumineux manuscrits, recueils précieux de toutes ses 
notes et observations prises aux cours de ses multiples péré- 


A6 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


grinations, au plus grand nombre desquelles cependant, pour 
l’ornithologie, nous nous sommes sans cesse empressé, depuis 
vingt-cinq ans, de prêter la modeste publicité de nos propres 
ouvrages. 

Que d’autres, mieux autorisés, en fassent autant pour les 
diverses branches d'histoire naturelle comprises dans ses 
notes ! et la science lui aura élevé l'unique monument qu'il a 
tant caressé de ses rêves. Or, nous ne croyons pas trop pré- 
sumer, en nous en rapportant de ce soin, qui nous paraît 
même un pieux devoir, aux souvenirs de MM. Alphonse 
Milne Edwards et Émile Blanchard, pour l’un des plus méri- 
tants, après eux, des aides que se soit jamais attachés le Mu- 
séum, grâce à la bienveillance éclairée de son célèbre doyen, 
M. Mine Edwards. 

Mais quelle variété de sujets à traiter ou à développer! 
Aussi bien, pour qui voudra utiliser ces matériaux, la moisson 
promet d’être riche : indépendamment des détails sur les 
végétaux et leurs usages, sur l'instinct et les habitudes des 
Insectes, des Poissons et des Reptiles, ainsi que. sur les 
mœurs des Oiseaux et des Mammifères ; les relations intimes 
que J. Verreaux avait su établir avec les différents gouverneurs 
et consuls du Cap et de l'Australie, notamment M. Faramond 
et l'infortuné sir Franklin dont il était resté l’ami, lui avaient 
valu les communications officielles les plus importantes sur 
l’état de la colonie hollandaise et de la colonie anglaise, leur 
constitution, leur organisation, le système pénitentiaire de 
cette dernière, à l'égard desquelles il a amassé une foule de 
documents originaux, accompagnés de ses observations et de 
ses impressions personnelles. 

À ces richesses il faut ajouter encore une série d’études, de 
tableaux à l'huile et d’aquarelles, exécutés sur les lieux et 
d’après nature, représentant les costumes, les huttes, les habi- 
tations, les camps, les portraits et les armes des chefs, les 
cérémonies religieuses ou guerrières, des scènes de combats 
entre les Caffres et les Boërs, ces malheureux colons hollan- 
dais, de 4828 à 1832; enfin des types d'hommes et de 
femmes hottentots, caffres. hochsmans, elc., pouvant servir, 


\ 

& 

5 

Le de DES 


NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR JULES VERREAUX. A7 


avec leurs descriptions, à l'illustration d’une des plus belles 
et des plus instructives publications, et qui n’ont jamais vu le 
jour depuis près d’un demi-siècle qu’elles existent. 

Le Muséum, du reste, a bien compris l'importance de ces 
manuscrits et de ces peintures, de même que celle de la 
richissime Bibliothèque qui y était jointe, en en faisant l’ac- 

quisition. Aussi ne demandons-nous qu'une chose à son 
habile admimistration : c’est qu’elle ajoute à ce fonds, d’un si 
grand prix, le nom de Jules Verreaux, ainsi qu’elle l’a fait 
pour le prince Ch. Bonaparte. 

Émettre un pareil vœu, c’est être assuré à l'avance de le 
voir accomplir par l'honorable membre de l’Institut qui en 
est, depuis longues années, le savant conservateur, nous 
avons nommé M. Jules Desnoyers, si connu des lecteurs du 
Muséum, pour son exquise et inépuisable obligeance. 

Nous aurons tout dit de Jules Verreaux en ajoutant qu'il 
fournit encore au moraliste l'exemple d’une de ces valeurs 
deméurées presque inconnues ou négligées, à faire entrer en 
ligne de compte dans la somme des intelligences de ce monde, 
et dont la justice exige que l’on prenne note, pour établir la 
part de chacun, et marquer la pierre, si humble soit-elle, 
apportée à l'édifice commun et toujours incomplet des 
sciences humaines. 


Il. EXTRAITS DES PROCES-VERBAUX 
DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 9 JANVIER 4874, 


Présidence de M. DROUYN DE LHUYS, président, 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. 

— M. le Président proclame les noms des membres nou- 
vellement admis par le Conseil : 


MM. Présentateurs. 
Léopold Bloch. 
Drouyn de Ehuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
BouTELLEAU (Edmond), propriétaire-gérant ne 
la Société vinicole de Barbezieux, à Barbezieux { Maurice Girard. 
(Charente). Jules Grisard. 
Drouyn de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
J. Poupinel. 
us Gaillard. 


BLocx (Lucien), rue Charles-Laflitte, à Neuilly | 
(Seine). 


CLAUSSE (Jules), boulevard Malesherbes, 77, à 
Paris. 
CREPEAU CPE Neue Les propriétaire , iles Ge 
avenue de Wagram, 75, à Paris. 
Ferd. Rousseau. 


Adrien André. 
Aug. André. 
Jules Bocquet. 


GUICHARDET (Alphonse), propriétaire, passage | ProuYR dette 


: CRE { Jules Grisard. 
Saulnier, 47, à Paris. lbonsaid: 


Drouyn de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Edgar Roger. 


[us @ de Lhuys. 


DEPINAY (Georges), négociant, boulevard de 
Strasbourg, 12, à Paris. 


HEMAR, avocat-général, faubourg Poissonnière, 
52, à Paris. 


MaAnNDAUSCH (Frédérick), entomologiste, rue de 


la Michaudière, 20, à Paris. ne Ga 


Maingonnat. 

Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
J. Poupinel. 

Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Ponsard 


Moisser (Adolphe), rue Neuve-des- Petits - 
Champs, 65, à Paris. 


PÉRIN (Marcel), banquier, maire de Blacy, à la 
Pépinière, près Vitry-le-Français (Marne). 


: 
D Le ee 


PROCÈS-VERBAUX. 19 


Réné Caillaud. 


POYDRAZ DE LA LANDE (Julien), rue d’Argentré, | DrouyA de lEluys 
| 


à Nantes (Loire-[nférieure). À CcoTeune Hilaire 


Alex. Gaillard. 
Jules Grisard. 
Ferd. Rousseau. Î 


Rogcor (Élienne-Isidore), rentier, rue Mozart 
10, à Passy-Paris. 


THLERRY (Edmond), propriétaire, rue ne 
des-Mathurins, 89, à Paris. | J ne 


Drouyn de Lhuys. 
A. de Gréhan. 
Ed. Schmidt. 


VipaL (le D’), directeur de l’École de médecine 
de Negato (Japon). 


— M. le Secrétaire procède au dépouillement de la corres- 
pondance. 

— MM. Brette, général de Dampierre, de Fercoq et Sar- 
lande adressent des remerciments pour leur récente admission. 

— MM. Durand-Gonon et le comte du Hauvel demandent à 
prendre part aux cheptels de la Société. (Renvoi à la Commis - 
sion spéciale.) | 

— M. le Ministre des affaires étrangères transmet un extrait 
d'un rapport que vient de lui adresser M. le Consul de France 
à Bangkok, sur les principales productions du royaume de 
Siam. (Remerciments.) 

— M. le Consul de France à Malte fait parvenir un mémoire 
répondant au queslionnaire qui lui a été adressé, en août 
dernier, sur les productions animales et végétales de l’île de 
Malte. (Remerciments.) 

— Suivant la promesse qu'il a bien voulu faire, dans la 
dernière séance, M. le docteur Forgemol transmet les rensei- 
enements fournis, par la Commission publique des soies, sur 
un échantillon de soie de Saturnia aurota dont il avait 
demandé l'examen. 

— M. le marquis de Ginestous fait connaître les résultats 
obtenus avec diverses graines de Ver à soie du chêne, de 
l’ailante et du mürier provenant de la Société. 

— M. Émile Nourrigat adresse un rapport sur l'éducation 
de plusieurs lots de graines de Ver à soie du mûrier confiés à 
ses soins par la Société. 

32 SÉRIE, T. |. — Janvier 1874, 


ESS 


50 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


— M. Marais, membre de la Commission médicale, adresse 
la notc suivante sur les divers produits médicinaux qui ont 
été soumis à son examen : 

«1° La petite tomate du Mexique (Physalis edulis), envoyée 
par M. Balcarce, et cultivée par lui avec succès à Brunoy, 
mérite un encouragement pour sa culture en France: Elle est 
très-commune sur les marchés de Mexico, où on la trouve 
presque loute l’année. La plante est très-robuste ; ses feuilles 
sont mangées comme des épinards. Le fruit est doué d'une 
saveur aigrelette, due à un mélange d’acides malique et tar- 
trique; son arôme est agréable. J'en ai préparé un sirop 
mucilagineux qui passe pour adoucissant et même calmant 
dans les bronchites. J’en ai déposé un échantillon au siége 
de la Société. Mais pour ces questions de thérapeutique et 
d'action des médicaments composés, tel que le remède 
antitétanique de M. Romero, de Venezuela, je pense qu'un 
pareil sujet est du ressort exclusif de l’Académie de médecine 
et je pense aussi que le rôle de notre Commission médicale 
doit se borner à déclarer sil y a opportunité de saisir l’A- 
cadémie de la question. Par ses relations très-étendues, la 
Société d’acclimatation peut rendre de trés-grands services 
à l’art de guérir, en se plaçant simplement à ce point de 
vue. 

» 2° Les feuilles de Bo/do (Peumus boldu) (envoi de M. Bre- 
nier de Montmorand, ministre de France à Santiago de Chili) 
ont été déjà présentées, 1l y a quelques mois, à la Société de 
pharmacie de Paris. M. Baillon, professeur de la Faculté de 
médecine, en donne une description très-exacte et très-dé- 
taillée, et leur accorde des propriétés médicales remarquables 
comme toniques, carminatives et diaphorétiques. De l’échan- 
tillon que j'ai reçu de M. Grisard, il en a été adressé une 
grande partie à M. le docteur Gubler, qui fera des expé- 
riences et observations à l’hôpital Beaujon. 

» En ce momentil se fait une thèse à l'École de pharmacie 
au point de vue chimique et pharmaceutique. J'espère m’en 
procurer un exemplaire pour loffrir à la Société. 

» 3° Le Guaco (Mikania quaco) (envoi de M. Torres Gaïcedo) 


PROCÉS-VERBAUX. 51 


est intéressant au point de vue de la matière médicale. Mais 
pourrait-on en avoir une certaine quantité? » 

— M. Malingre écrit de Madrid que, n’ayant point de serre- 
chaude à sa disposition pour essayer des semis de C2nchona, 
il préfère renvoyer les graines qui lui ont été adressées. 
Notre confrère signale plusieurs végétaux dont il compte 
tenter l’acclimatation en Espagne, et d’autres au contraire 
qui, cultivés dans ce pays, pourraient être intéressants à pro- 
pager ailleurs. « J'ai mis, l’autre jour, dit-il, la main sur une 
Grenade sans pepins, ou du moins dont les pepins sont atro- 
phiés et si fins qu'on ne les sent pas en mangeant le fruit; 
après beaucoup de pas et de démarches j'ai trouvé le pro- 
priétaire de l’arbre, qui m’a promis deux plants et des greffes 
dont je vous enverrai la moitié, c’est-à-dire un plant et la 
moitié des greffes. C’est à Jativa, province de Valence, que 
cet arbre existe ; mais on m'a assuré que la variété est aussi 
connue dans la province de Tarragone, où j'ai écrit. 

» Mon jardin sera non-seulement utile à l'Espagne, mais 
aussi à la France : si j'ai beaucoup à recevoir, j'aurai bien 
aussi à rendre, car il existe çà et là perdues dans de petites 
localités de bonnes variétés de fruits, légumes et autres végé- 
taux économiques. Je me fais adresser les variétés les plus 
renommées dans chaque contrée pour les cultiver compara- 
tivement. 

» Ainsi on voit sur les catalogues de Paris : Fêve de Séville. 
Eh bien, la Fève de Séville que vous possédez est tout à fait 
dégénérée et ne peut pas souffrir la comparaison avec la 
légitime ; j'avais l’une et l’autre lan dernier, et j'ai pu en 
constater la différence. Je voulais vous en envoyer un échan- 
illon, malheureusement mon jardinier n’a pas compris mes 
ordres : il.a semé toutes celles qui venaient de Séville et a 
conservé une petite quantité du lot que j'ai reçu de Paris. Ce 
sera pour l’an prochain. » 

M. Malingre annonce, en outre, qu'il espère fonder pro- 
chainement à Madrid une Société d'agriculture et d’acclima- 
tation, et 1l fait parvenir deux numéros de la Gazette des 
chemins de fer renfermant des articles à ce sujet. 


52 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 

— Madame la maréchale Francesca de Santa-Cruz offre 
de procurer à la Société les végétaux alimentaires ou aütres 
de la Bolivie dont on désirerait essayer la culture en France. 
. (Remerciments.) 

— En accusant réception d’un lot de graines de tomate du 
Mexique qui vient de lui être adressé, M. Bossin informe qu’il 
a constaté l'identité du Æaricot de Bethléem, mis en distribu- 
tion l’année dernière par la Société, avec le Haricot d'Espagne 
blanc. « J'ai, d’ailleurs, reconnu une fois de plus, ajoute 
M. Bossin, que, dans mon terrain sec, ce haricot est supérieur 
en produit et en qualité au Haricot de Soissons à rames ; il 
supporte plus facilement la sécheresse que ce dernier. » 

— MM. Bonnet, Collardeau, Schlossmacher et madame 
Léonor Aguirre accusent également réception des graines 
qu'ils ont reçues de la Société. 

— M. le baron von Mueller, directeur du Jardin botanique 
de Melbourne, annonce l'envoi d’une caisse de graines de 
Spaforthua elegans et de Livistona (Corypea) australis, deux 
des plus beaux palmiers de l’Australie. 

— M. le marquis de Sinéty signale en ces termes la bonne 
qualité du Petit Melon vert, grimpant, à rames, dont la graine 
a été donnée à la Société par M. le marquis de Selve : « Ce 
melon, de la grosseur d’une carafe à peu près, donne beau- 
coup et est excellent. Je crois pouvoir le recommander d’une 
manière toute particulière, car tous les fruits qu'il a produits 
chez moi (et j'en ai eu au moins cent cinquante) ont été égale- 
ment bons, ce qui n'arrive pas avec les Cantaloups et autres 
Melons à chair rouge. 

» Après avoir fait lever les graines sous châssis, on les 
repique en: pots, et quand les plants sont assez forts on les 
plante sur de bonnes buttes de fumier, comme on ferait pour 
des Potirons. Il faut naturellement les abriter sous des clo- 
ches tant qu'on craint les gelées ou les nuits trop froides. 
Chaque pied doit être placé à 1 mètre ou 1 mèêtre 1/2 de son 
voisin. Quand les plantes se développent, il faut avoir soin de 
ne pas les tailler ni même les pincer, mais de les faire grimper 
sur cinq ou six bonnes rames que l’on met pour cela autour 


PROCÈS-VERBAUX. 53 


de chaque pied. Au début les tiges ont besoin d’être aidées au 
moyen d'un jonc, mais bientôt elles s’accrochent d’elles- 
même aux rames. » 

M. Vavin fait également l’éloge de cette variété de Melon. 
dont la qualification de grimpant lui paraît toutefois un peu 
usurpée; selon lui, on ne peut je cultiver sur treillage ou 
sur rames qu’à la condition de le palisser constamment. 

— M. Geoffroy Saint-Hilaire communique à l'assemblée une 
lettre de M. Graëlls rendant compte que pendant les événe- 
ments politiques qui se sont accomplis dernièrement en Espa- 
one, le Jardin zoologique du musée de Madrid et le Parc 
zoologique de la Gasa de Campo ont été complétement dé- 
vastés, les constructions démolies, et les animaux tués ou mis 
en vente. Bien que vivement affecté par la ruine de ces deux 
établissements, dont il était le directeur, et qui, en raison 
des résultats déjà obtenus, lui donnaient de très-belles espé- 
rances pour l'avenir, M. Graëlls n’en reste pas moins tout 
dévoué à la cause de l’acclimatation, et il veut bien promettre 
à nos travaux la continuation de son utile concours. 

— M. Maurice Girard donne lecture d’une note sur la 
Saturnia aurota. (Noy.au Bulletin.) 

— M. de la Blanchère met sous les yeux de l’assemblée des 
échantillons de drap de plume et donne d’intéressants détails 
sur ce nouveau produit. (Voy. au Bulletin.) 

— M. Geoffroy Saint-Hilaire donne lecture du Bulletin du 
Jardin d’acclimatation pour le mois de décembre 1873. (Voy. 
au Bulletin.) En rendant compte de la situation prospère de 
l’établissement, qui voit augmenter chaque jour le nombre et 
l'importance de ses acquisitions, en même temps que l’affluence 
de ses visiteurs, M. Geoffroy saisit celte occasion pour adres- 
ser de nouveaux remerciments à la Société d’acclimatation et 
au Conseil municipal de Paris, qui, en accordant au Jardin 
un généreux concours, dans des circonstances difficiles, lui 
out permis de se reconstiluer promptement à la suite de dou- 
loureuses épreuves. 

Il est fait don à la Société : 

De la part de M. Nourrigat, de graines de Serricaria mori 
et trois bruyères chargées de cocons. 


54 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


— Ilest déposé sur le bureau : 

4° De la part de M. le docteur Martin, Pékin, sa météorolo- 
qie, son édilité, sa population (28 pages) ; 

2e Dela part de M. Gaspard Bellin, Rapport fait à la séance 
publique de la Société protectrice des animaux de Lyon, 
1873 ; 

3° De la part de M. A. Feddersen (de Viborg), Nordisk 
Tidsskrft for Fiskeri, 1873 ; 

4° Rapport ace sur la colonie agricole et pénitentiaire 
de Mettray. 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 23 JANVIER 1874. 
Présidence de M. DROUYN DE LHüys, président. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. 

— M. le Président fait connaitre les noms des membres ré- 
cemment admis par le Conseil. 


MM. Présentateurs, 

BESSET (Louis-Charles), directeur-général des{ Ch. de Ja Brosse-Flavigny. 

mines de Montrelais, à la Grand’mine, com- Re de Lhuys, 

mune de la Chapelle-St-Sauveur (Loire-[nfér°).( A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
l'as de Lhuys. 
À. Geoffroy Saint-Hilaire, 
Raveret-Wattel. 
Baron G. de Chemellier. 
À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Marquis de Sinéty. 


ii de Lhuys. 


BILLAUD {le baron Frédéric), rue Laflitte, 13, à 
Paris. 


GAmBOURG (comte de), au château du Marchais, 
par Thouarcé (Maine-et-Loire). 


GASABIANCA (vicomte de), rue de-Marignan, 2, 


ry-d’Esclands. 
à Paris. Féry-d’Esclands 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire, 
A. Salmon. 

Gabriel de Brossard. 
Drouyn de Lhuys. 

Réné Cara de Vaux. 
Drouyn de Lhuys. 

Jules Grisard. 

| Raveret- Wattel. 


CHARLOT, ancien notaire, propriétaire, à Borest, 
et rue Joubert, 34, à Paris. 


Givry (Clément de), propriétaire, rue de la 
Chaise, 36, à Paris. 


JACQUET, propriétaire, avenue d’Antin, 3, Paris. 


PROCÈS-VERBAUX. 99 


Drouyn de Lhuys. 
J. Lecreux. 
averel-Wattel. 

{ Drouyn de Lhuys. 
MARCHAND (Amédée), rue Lafayette, 108, Paris. j" Geoffroy Saint-Hilaire. 
H. Hémar. 
Drouyn de Lhuys. 
J. Lecreux. 
Raveret-Wattel. 
J. Audiffred. 
? Drouyn de Lhuys. 
| Raveret-Wattel. 


LE GALLAYS (Célestin), propriétaire, au château 
des Timbrieux, commune de Crugnel (Mor- 
bihan), et rue Cassette, 26, à Paris. 


MONïTHIERS (Jean-Victor), propriétaire, rue 
d'Amsterdam, 70, à Paris. 


ZEDDES Cabrel de), propriétaire, adjoint au 
maire, à Riceys (Aube). 


Le Conseil a en outre admis au nombre des Sociétés agré- 
gées : 

LA SOCIÈTÉ D'HORTIGULTURE DES VOSGES. 

— M. le Président fait ensuite part de la perte regrettable 
que la Société vient de faire dans la personne de M. le comte 
de Kergolay, ancien député. 

— M. le Secrétaire procède au dépouillement de la corres- 
pondance : 

— M. le baron Georges de Chemellier accuse réception du 
couple de Faisans vénérés qui vient de lui être adressé. 

— M. Geoffroy Saint-Hilaire communique l’extrait suivant 
d’une lettre de M. Rampon (de Lavaur) : « Maintenant que la 
viande et le gibier sont à un prix très-élevé, on devrait élever 
le Lapin de Saint-Pierre, qui s’'accommode, pour nourriture, 
de la bruyère, thuya, rameaux d’arbres verts, sauge (Arbustus 
unedo), débris de céleri, un peu de son et d'avoine, mais ra- 
rement. 

» Je puis vous assurer que ma cuisinière m'a fait, avec des 
animaux âgés de cinq mois, un pâté qui ne laisse rien à 
désirer. Les jeunes de trois mois sont exquis à la broche et 
peuvent aller au marché à cet âge. Ils sont plus délicats que 
les sauvages. 

» Ordinairement huit à la nichée. 

» Sans doute il vaudrait mieux élever de vrais Léporides ; 
mais 1ls sont plus chers. Pour les petites bourses il vaut mieux 
les Saint-Pierre. 


36 SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


» Les Saint-Pierre de cinq mois pêsent 2%! ,500 ; ceux de 
irois mois, 11,300...» 

— M. le docteur Turrel écrit de Toulon, à la date du 
12 janvier : « Je vous envoie une épreuve de mon plaidoyer 
en faveur du Pivert, si cruellement condamné à mort par 
M. d’Esterno. Cette note a paru dans le Journal d'agriculture 
pratique de M. Lecouteux, et un forestier, M. Crinon, a, dans 
le numéro du 8 janvier du même journal, appuyé sur la domi- 
nante. C’est la petite escarmouche en attendant le gros de 


l'engagement sur le travail de M. Perris. Ma réponse se pré- 


pare... 

» M. Grisard a eu la prévenance de me transmettre une 
note de M. Malingre sur le Grenadier sans pepins, trouvé par 
l'honorable horticulieur à Jativa, province de Valence (Espa- 
gne). J’espère bien que l'envoi de ce Grenadier réjouira nos 
horticulteurs. Mais cet avis n'est pas nouveau, et M. le baron 
Cloquet avait déjà signalé ce Grenadier dans la Catalogne, où 
il existe et est cultivé aux environs de Tarragone : de sorte 
que l'obtention de cette variété ne nous dispense pas de récla- 
mer le Grenadier de la frontière de Perse, confins du Tur- 
kestan. Soyez assez bon pour ne pas perdre de vue ce deside- 
Fatum... D 

M. Turrel transmet en outre la note suivante, envoyée par 
son fils, M. Victor Turrel, aide-médecin de l’aviso /e d’Estrées, 
actuellement dans l’Indo-Chine, sur une curieuse industrie 
qu'il a observée dans la rivière de Tourane (Cochinchine), 
celle des gardiens de Canards : | 

« Le Canard en Cochinchine supplée à la viande de bou- 
cherie, car, sauf dansles grands centres, Saïgon et Hué, on n’y 
abat point de bœufs. L'élevage du Canard s’y fait donc sur 


une large échelle, et d’une manière simple et économique, 


avec un cachet curieux d'originalité. 

» Les gardiens de Canards, pasteurs de ces troupeaux aqua- 
tiques, passent leur vie sur les rivières, qu'ils parcourent sur 
une légère nacelle en tresses de rotin enduite de résine anna- 
mile qui la rend imperméable. 

» Chaque gardien conduit à lui seul des bandes de trois ou 


Tor 


PROCÉS-VERBAUX. 57 


quatre mille Canards, qu'il dirige à contre courant, le long 
des berges, où ces barboteurs trouvent une abondante pä- 
ture. Le soir il s'arrête, et à un coup de sifflet particulier, 
tous ces oiseaux rallient leur gardien sans qu'il en manque 
un seul. 

» Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que lorsque plusieurs 
gardiens sont groupés vers les mêmes berges, les Canards ne 
se mêlent jamais à ceux des bandes voisines, et jamais il ne 
s'élève de contestation ou de revendication entre ces gardiens. 

» Lorsque les bandes arrivent dans un centre de population, 
ces animaux gras et nourris sans frais se vendent au prix de 
75 centimes l’un, ce qui constitue un joli bénéfice. » 

— M. Gabriel de Féligonde, au château de Saint-Genest, 
par Riom (Puy-de-Dôme), annonce l'envoi prochain d’un rap- 
port sur son établissement de pisciculture, qui date de quel- 
ques années déjà, et lui donne les résultats les plus salis- 
faisants. 

— M. Chabot-Karlen, ex-régisseur de l'établissement d'Hu- 
ningue, adresse de Thun (Suisse) les détails ci-après sur 
l'établissement de pisciculture fondé près d’Interlaken par 
M. Hans Hasler : « Ayant eu occasion de visiter cet établisse- 
ment, le 12 du courant, nous y avons constaté l'existence de 
20000 œufs de Truite et 10 000 de Saumon, mis en incuba- 
üon dans d'excellentes: conditions; il y en a déjà plus d’un 
tiers d’éclos; le reste nous laisse supposer une réussite de 
plus de 80 à 85 pour 100. Dans le bassin des Truitons d'un an, 
nous fimes pêcher quelques sujets dont le poids moyen était 
de 32 grammes environ. Ceux de deux ans pesaient en 
moyenne 125 grammes. Enfin, ceux de trois ans atteignaient 
250 grammes ; c’est RE à cet âge qu'on les vend 
aux maîtres d'hôtel d’Interlaken.…. 

— M. Drory (de Bordeaux) a à la disposition de la So- 
ciété lrois colonies d’espèces différentes de Mélipones du 
Brésil, qui lui ont été envoyées en double par M. Brunet (de 
ne. 


— M. Bigot adresse un rapport sur ses éducations d’Ar- 
tacus Yama-maï. 


58 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


— M. de Geofroy, ministre de France à Pékin, annonce à 
M. Drouyn de Lhuys, dans une lettre datée du 10 novembre 


1873, qu'il expédie, par l'intermédiaire de M. Godeaux, con-: 


sul général de France à Chang-haï, une petite caisse de cocons 
de Vers à soie du chêne, provenant du Chantong. 

Cet envoi est malheureusement arrivé dans le plus triste 
état; nous espérons cependant obtenir quelques éclosions. 

— M. Léonce Bergis, président de la Société d’horticulture 
et d’acclimatation de Tarn-et-Garonne, écrit de Montauban: 
« Je viens, comme les précédentes années, mettre notre ate- 
lier d’essais précoces au service de la Société d’acclimatation 
(à titre gracieux, bien entendu). La mise à l’incubation est 
pour le 17 courant. Nous réservons quatre ou six casiers pou- 
vant contenir chacun un lot à essayer. Je recevrais avec inté- 
rêt des renseignements sur les graines que j'ai fournies l’an 
passé à la Société d’acclimatation. 

» À simple titre de témoignage de bonne volonté, je vous 
adresse les quelques renseignements ci-après au sujet de 
l’arrivée des oiseaux émigrants. Prévenu cette année en temps 
opportun, j'espère vous donner plus entière satisfaction : 

» Bergeronnette printanière, 6 mars; Hirondelles, 15 mars; 
Loriot, indigène ; Caille, 8 avril; Rossignol, arrivé 20 mars, 
chante 45 avril; Coucou, 10 avril ; Ortolan, 18 août. 

» Linot, Verdier, Pinson des Ardennes, Canterlines, Tito- 
nets (sorte de petite Alouette), arrivent fin septembre pour 
partir les premiers jours d’avril. » 

— M. Bureau, pharmacien à Carvin, rend compte de ses 
éducations de Bombyx Yama-maï et Pernyi, et demande à 
recevoir de la graine d’autres espèces séricigénes. 

— M. Turrel écrit à M. le Secrétaire général : « Je m’em- 
presse de vous accuser réception des sept paquets de graines 
de Quinquina qui me sont exactement parvenus le 24 décem- 
bre. Pareil envoi me fut fait il y a trois années ; les graines, 
confiées aux bons soins de M. Joseph Auzende, du Jardin de 
la ville de Toulon, ne levérent pas, quoique surveillées et 
traitées avec une intelligente sollicitude. Aussi je me propose 
de confier celles de votre récent envoi à la maison Ch. Huber 


PROCÈS-VERBAUX. 59 


et Ce, d'Hyères, qui est outillée de manière à avoir raison de 
ces graines, quelque réfractaires qu’elles soient à la germi- 
nation. | 

» Avez-vous pu donner suite à vos bonnes intentions au 
sujet du Grenadier sans pepins des frontières de la Perse? La 
saison est favorable pour l'envoi des boutures que vous espé- 
riez obtenir par l'intermédiaire du docteur Tholozan, et notre 
Jardin est en mesure de les recevoir. 

» Un officier des Messageries maritimes espère pouvoir me 
rapporter de Chine des Gouramis vivants ; il les conserverait à 
l’abri des températures excessives de la mer des Indes et de la 
mer Rouge, en les logeant dans la glacière du navire. Nous 
préparerons dans notre jardin, sile Ministère de l’agriculture, 
auprés de qui M. Drouyn de Lhuys a bien voulu intercéder, 
nous accorde un subside suffisant, un bassin d’eau douce pour 
les recevoir dès leur arrivée. 

» Vous avez pu voir par l'échantillon de nos cultures de 
Bambous expédié le 9 décembre, que cette graminée réussit 
bien chez nous. Je pourrais vous montrer des B. mihis aussi 
beaux que ceux de provenance chinoise. C’est une richesse 
décidément acquise et qui portera ses fruits dans un prochain 
avenir. » 

— M. le Président de la section d'industrie et d’agriculture 
de l’Institut national génevois adresse un rapport détaillé sur 
les résultats de la culture de divers végétaux et de graines 
provenant de notre Société. 

— M. Sandford, ministre des États-Unis à Bruxelles, de- 
mande que la Société veuille bien lui procurer de la graine 
d'Eucalyptus globulus pour des essais d’acclimatation en 
Floride. 

—M. le docteur Régulus Carlotti, d’Ajaccio, demande à 
concourir pour quelqu’une des récompenses instituées par la 
Société d'acclimatation, en raison de ses efforts pour propager 
la eulture de l’Eucalyptus dans les parties malsaines de la 
Corse. | 

— M. le Président dépose sur le bureau : 1° Un mémoire 
que vient de lui faire parvenir M. Autard de Bragard, sur ses 


60 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


tentatives d'introduction d'animaux et de végétaux utiles dans 
diverses contrées, et notamment en Égypte : 

2° Des feuilles et la photographie d’un Æucalyptus colossea, 
espèce récemment introduite en Algérie par M. P. Ramel. 
Le sujet représenté provient d’une graine semée le 20 octo- 
bre 1872 ; mis en place fin mars, il mesurait 2°,95 le 26 no- 
vembre 1873. Il est venu sans arrosage. Le feuillage de 
VE. colossea est trés-élégant et abondant, d’un vert tendre, 
qui fonce avec le temps. Il peut atteindre 490 pieds. Son bois 
est de première valeur. 

— M. Maurice Girard fait hommage à la Société d’un exem- 
plaire de la quatrième édilion qui vient de paraître de son 
ouvrage : les Métamorphoses des insectes. 

Notre confrère indique quelques-unes des nombreuses ad- 
ditions introduites par lui dans cette nouvelle édition, no- 
tamment : l'histoire des Cécidomyes du froment, ces minus- 
cules Diptères dont les larves dévorent les jeunes grains de 
notre plus précieuse céréale ; l'étude des Hyménoptères para- 
sites, précieux auxiliaires qui nous débarrassent des ennemis 
de nos récoltes, etc. 

— M. de la Blanchère complète sa précédente communica- 
tion sur le drap de plume, et donne de très-intéressants 
détails sur les diverses applications que l’industrie a su faire 
des plumes, notamment pour la fabrication des tapis, des 
fleurs artificielles, ete. (Voy. au Bulletin.) 

À cette occasion, M. Vavin rapporte qu'il y a cinq ou six ans 
un inventeur a présenté à la Société centrale d’horticulture 
des paillassons confectionnés avec de la plume, et qui sem- 
blaient excellents pour couvrir le vitrage des serres. 

—M. Maurice Girard donne lecture d’un rapport sur les 
éducations faites à la magnanerie du Jardin d’acclimatation 
en 1873. (Voy. au Bulletin.) 

— M. Vavin dépose entre les mains de M. le Président un 
pli cacheté renfermant la description d’ur procédé de conser- 
vation prolongée des œufs, dont il est l’inventeur, et qu'il 
désire ne faire connaîlre que dans quelque temps, lorsque 
le moindre doute ne sera plus possible sur son efficacité. Dès 


PROCÈS-VERBAUX. 61 


1870, notre honorable confrère faisait déjà des expériences 
suivies sur ce procédé, particulièrement avec des œufs pro- 
venant du Jardin d’acclimatation et marqués, dans un but de 
contrôle, par M. Geoffroy Saint-Hilaire. Les résultats obtenus 
étaient très-satisfaisants, quand la guerre vint interrompre 
ces intéressants essais. Un des fils de M. Vavin, capitaine de 
frégate, a, de son côté, expérimenté ce procédé dans ses nom- 
breux voyages au Mexique, à la Guyane, au Sénégal, et il l’a 
toujours trouvé excellent, même sous ces chaudes latitudes. 

M. le Président prie M. Vavin de transmettre à son fils les 
remerciments de la Société pour les preuves d'intérêt qu'il a 
plusieurs fois données à nos travaux, et il espère qu’il voudra 
bien continuer à nous faire part des observations ou des pro- 
duits qui lui paraîtraient susceptibles d’une application utile. 

M. Vavin met ensuite sous les yeux de l’assemblée divers 
végétaux et graines provenant de ses cultures, sur lesquels il 
donne les renseignements ci-après : 

1° Le Haricot de Bethléem, provenant de la Société, lui a 
donné de très-forles gousses et un grain três-gros ; ce haricot, 
qui exige de très-hautes rames, ressemble complétement au 
Haricot d'Espagne. 

2° Le Haricot chocolat ou Haricot Vavin, mis en expérience 
sur divers points, a élé reconnu de qualité supérieure. (est 
une, variété naine, produisant des aiguilles très-longues, 
très-étroiles et trés-vertes; cuites, elles sont fort tendres 
et restent d'un vert superbe. Ce [aricot a été, de la part 
de M. le Secrétaire de la Société d’horticulture de Meaux, 
l'objet d’un essai comparatif avec le Haricot flageolet jaune et 
une autre variété innommée ; l'avantage est resté en tous points 
au Haricot Vavin, qui, sorti de terre le premier, resté vert le 
plus longtemps, a donné une récolte en sus de 10 pour un. 
Voici, du reste, les chiffres du rendement, pour A9 graines 
semées de chaque espèce, formant huit touflées : 


Haricot chocolat ou Vavin.................. L£,A50 
INOMINENS ASIE CN AIG Er 3:,600 
MTS COLE RE SJ eue PARC 9K,500 


M. Vavin rend compte ensuite de ses essais de greffe sur a 


62 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Pomme de terre, en vue de constater l'influence de la greffe 
sur le sujet, et vice versa, question pour laquelle l’arboricul- 
ture fournit des faits assez contradictoires. En opérant sur des 
variétés trés-distinctes, telles que la Chardon (ronde jaune) 
et la Canada (ronde rouge foncé), notre confrère a obtenu 
des produits tenant manifestement des deux iypes, ce qui pa- 
rait mettre hors de doute l’action réciproque du sujet et de la 
greffe. Comme conséquence pratique de ses observations, 


M. Vavin espère arriver à créer des variétés mixtes, et obtenir 


à la fois : qualité, précocité et abondance, en greffant des 
Pommes de terre hâtives et très-productives, mais souvent 
de qualité secondaire, avec des variétés de premier choix. 
Parmi les échantillons qu’il dépose sur le bureau, notre con- 
frère fait surtout remarquer la Pomme de terre dite rubanée, 
laquelle se reproduit exactement depuis plusieurs années, et 
se reconnaît aisément à la raie rouge bien marquée qui lui a 
valu son nom. 

M. Rivière demande comment M. Vavin opère pour grelïer 
des Pommes de terre. 

M. Vavin pratique, à l’aide d’un vide-pomme, dans le tu- 
bercule sujet, une entaille suffisamment profonde, dans 
laquelle il place la greffe, c’est-à-dire un œil, accompagné 
d’un morceau de tubercule exactement de la même dimension 
que l’entaillé, et enlevé avec le même instrument. La re- 
prise n’a pas toujourslieu ; néanmoins ce procédé fort simple 
donne d’assez bons résultats pour pouvoir être conseillé en 
attendant mieux. 

Enfin, M. Vavin met sous les yeux de l'assemblée d'énormes 
gousses de Haricots qu'il tient de M. Masson, officier de ma- 
rine, commandant du Loiret, sur la côte occidentale d'Afrique ; 
ces gousses, longues de 35 centimètres et grosses en propor- 
tion, auraient été obtenues au Gabon avec le Haricot de Sois- 
sons, qui, sous ce climat, se serait développé d’une façon 
aussi extraordinaire. Mais n’y a-t-il pas eu erreur de déter- 
mination,etne s'agit-il pas d’une variété nouvelle? Aussi M. le 
Président engage-t-1l M. Vavin à prier M. Masson de vouloir 
bien faire parvenir à la Société les renseignements qu’il pour- 


PROCÈS-VERBAUX. 63 


rait se procurer sur la culture au Gabon et sur les divers pro- 
duits de cette colonie. 

Il est offert à la Société : 

1° De la part de M. Thozet, des graines d’Acacia harpo- 
phylla et de Graptophyllum earlii; 

2° De la part de M. Vavin, quelques gousses de Haricots de 
Bethléem ou d’Espagne. 

Il est déposé sur le bureau : 

1° Études sur la nouvelle maladie de la vigne, par 
M. Maxime Cornu, docteur ès sciences, délégué de l’Académie ; 

2 Rapport verbal sur l'Exposition wuverselle de Vienne, 
présenté à l’Académie des sciences morales et politiques par 
M. Wolowski ; 

3° Programme de la Société hollandaise des Sciences de 
Harlem, 1873 ; 

4° Rapport sur le concours de 1873 sur l'enseignement in- 
sectologique entre les instituteurs qui y ont pris part ; 

5° Almanach de la Suisse romande 1874, ouvrage dans 
lequel se trouvent reproduits divers articles ou circulaires 
publiés par la Société d’acclimatation (offert par M. le Prési- 
dent de la section d'industrie et d'agriculture de l’Institut 
génevois) ; 

6° Études sur le vin de Saint-Raphaël, par M. Germond de 
Lavigne, broch. in-8° ; 

7° De l'écart entre nos institutions politiques et notre état 
intellectuel et moral, lecture faite à l’Académie des sciences 
de Caen par M. J. Ferrand, président de cette Académie, 
préfet du Calvados. 


Le Secrétaire des séances, 


RAVERET-WATTEL, 


II. CONFÉRENCES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 


Y a-t-il des poissons à acclimater ? 
Conférence faite au Jardin d’acclimatation, le 29 juillet 1873, 
Par M. H. DE LA BLANCHÈRE. 


Mesdames, messieurs , 


Je me suis efforcé, il y a quelques semaines à peine, de vous faire com- 
prendre non-seulement que la France .éprouvait chaque année une perte 
réelle en négligeant la culture de ses eaux, c’est-à-dire leur empoissonnement 
et leur aménagement, mais encore que cette perte était énorme, puisqu'elle 
se chiffrait par un total d’au moins 309 méllions. Nous n'avons pas craint 
de comparer notre apathie malheureuse à l’activité fébrile des Nord-Amé- 
ricains, et nous allons revenir aujourd’hui quelquesinslants sur ce parallèle 
instructif avant d'aborder la question principale de cet entretien : Y a-t-il 
des poissons à acclimater ? ce qui revient à demander si, parmi nos espèces 
indigènes, nous ne possédons pas largement tout ce qui peut nous être 
ulile. 

Nous avons constaté, dans la conférence dont je parle, que le régime des 
eaux élait, aux États-Unis, différent du nôtre, que leur pauvreté n’était 
que relative et passerait, chez nous, pour de la richesse; mais que, en pré- 
sence de la diminution évidente des poissons d’eau douce, — rareté confirmée 
par l'élévation de leurs prix sur le marché de New-York, par exemple, 
— la nation s'était émue, avait chargé un certain nombre d'hommes com- 
pétents de remédier au mal constaté, et nous pouvons assurer que l’argent 
ainsi dépensé a rapporté déjà et rapportera d’énormes intérêts. 

L'ensemble des travaux dont nous allons parler a élé exécuté par l’État 
de Connecticut. Il y a consacré une somme d'environ 500 dollars, soit 
2500 francs! Ce n'est pas ruineux ! 

Maintenant que nous connaissons les dépenses, voyons le détail des 
travaux. 

N'oublions pas que les immenses fleuves américains sont, chaque année, 
parcourus par un nombre énorme de poissons anadromes, — c’est-à-dire 
remonleurs, si le mot était français, — véritable marée vivante cherchant 
des conditions favorables pour la réussite de sa ponte. Nos fleuves partagent 
avec les fleuves américains celte aubaine, et nous voyons, chèque prin- 
temps, les Aloses, les MHulets, remonter en troupes nombreuses la Loire, la 
Garonne, le Rhône. Nous constatons en d’autres saisons que d’autres 
espèces également précieuses remontent de la mer dans nos eaux douces: ce 
sont les Saumons, les Lamproies, dans la plupart de nos rivières et fleuves 
océaniques ; ce sera l’Ésturgeon pour le Rhône, la Plie, l'Eperlan, pour la 
Seine, la Somme et les autres cours d’eau de Ja Manche. 


CONFÉRENCES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 65 


On voit donc, — cette courte et incomplète nomenclature n’a pas d’autre 
but que de le montrer, — on voit donc que les espèces de premier choix ne 
manquent pas plus à nos eaux qu'aux eaux américaines. Toute proportion 
gardée du volume de ces eaux comparées les unes aux autres, nous avons 
été aussi riches qu'eux et nous le serons encore dès que nous le voudrons 
sérieusement. 

Tel est le point capital. C'est celui qu’il faut se bien mettre dans la mé- 
moire, et qui peut se formuler ainsi : nous possédons, dans nos eaux, des 
espèces excellentes, appropriées, nationales pour ainsi dire, capables de les 
empoissonner abondamment et d’une manière rémunératrice. La réussite 
n’est qu’une question de volonté, la récolte qu’une question d’ensemence- 
ment. N'est-ce donc pas la même chose pour toutes les récoltes connues en 
ce monde ? 

Les Américains ont été parfaitement inspirés en portant leurs efforts sur 
l'amélioration de leurs récoltes adventives des poissons anadromes. Frappés 
du nombre immense d'individus qui composent ces bandes remontantes, 
ils ont jugé qu’une telle multiplication ne pouvait provenir que de pontes 
extrêmement nombreuses, et ils ont pensé qu’en agissant sur ces pontes ils 
arriveraient, pour la même somme de travail, à un résultat plus avantageux 
qu’en s'adressant à des espèces pauvres en œufs. 

Ils ont eu raison, et nous, nous avons eu tort en nous adressant à des 
espèces, de premier ordre, il est vrai, mais pauvres en œufs, tels que les 
. Salmonidés. Tout le monde sait que les Truites, Saumons, Ombres, Féras, 
pondent des œufs gros, libres, faciles à manier, à incuber, à faire éclore, 
mais dont le nombre ne peut être comparé à celui des œufs d’Alose, sem- 
blables à la plus fine graine du pavot des champs. 

Qu'il nous soit permis de nous arrêter un instant devant ce dernier frai pro- 
digieux auquel nous ne pouvons comparer que celui de ja Morue, et dont ce 
dernier va même nous servir à révéler la prodigieuse fécondité. Il existe, 
dans Ja nature, certains dénombrements qu’il ne faut pas négliger de pré- 
senter à l’imagination, parce qu'ils ouvrent à l'esprit plusieurs perspectives 
à la fois, non-seulement sur la grandeur des œuvres du Créateur, mais 
encore sur l'importance des résultats qu’atteindra l’homme quand il saura 
lirer parti des ressources que Dieu a mises partout à sa portée. 

La Morue, puisque nous en parlons, sera, un jour venu, cultivée par 
l’homme pour repeupler la mer, et le nombre de kilogrammes de viande 
qu'il en recueillera est incalculable. Qu’on en juge par les chiffres suivants, 
tout à fait applicables à l’Alose! 

Un frai de Morue pèse jusqu’à 3jet 4 kilogrammes ; dans ce cas, l’animal 
qui l'a porté ne pèse guère moins de 25 kilogr. Lorsque M. Buckland reçut 
un pareil frai, il avoua que c'était bien la plus grosse masse d'œufs qu’il eût 
vue de sa vie. « Gela ressemblait assez, dit-il, à deux monstrueuses coquilles 
» de noix placées dos à dos. Je coupai alors un petit morceau du frai pesant 
» 129 milligrammes, et le trempai dans de l’eau salée bouillante, ce qui eut 


3° SÉRIE, T. |. — Janvier 1874. 0) 


86  . SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


» pour effet de solidifier en quelques minutes l'aibumine à demi-fluide qui 
» compose ces œufs minuscules, et de me permettre, les ayant fait durcir 
» ainsi, de les séparer les uns des autres. Au moyen d’un peu d’eau, je les 
» étendis facilement sur le fond d’une assieite et les comptai. le recom- 
» mençai ces opérations, sur une seconde portion absolument du même poids 
» que la première. 
» Cela fait, je procédai aü comptage, qui me donna 278 œufs pour Île pre- 
» mier essai, 283 pour le deuxième ; la moyenne formait 440 œufs par grain 
» anglais, soit déjà 61320 œufs à l’once anglaise, qui contient un peu plus 
» de 31 de nos grammes. Cela représentait, pour 100 de nos grammes, 
» 198 mille œufs environ ! 
» Si, enfin, sur le poids total du frai de notre Morue, nous mettons de 
» CÔté 900 grammes pour la pellicule et les membranes enveloppant les 
» œufs par masses, nous Conslaierons que notre frai renfermait aw moins 
6 millions 876 mille œufs !..… soit 7 MILLIONS en chiffres ronds ! » 
Eh bien, de semblables nombres ne forment-ils donc pas un excellent 
point de départ pour calculer ce que peat être le repeuplement de la mer ? 
Si nous agissions sur mille Morues, c'est 7 milliards d'individus créés au 
même moment !... La nature est encore plus riche que notre grande nation !.… 
Quel dommagé, allez-vous dire, messieurs, que nos modestes et com- 
muns poissons d’eau douce ne nous fournissent point un ensemencement 
aussi abondant! Comme on marcherait vite à repeupler nos belles rivières, 
si la nature, dans son inépuisable bienveillance, nous fournissait une graine . 
si abondante tout en demeurant si précieuse !.… 
Eh bien, gens de paresse, Ô mes compatriotes ! sachez que ce frai si 
merveilleusement fécond de la Morue des grands fonds n’est rien en com- 
paraison de celui de la modeste Perche d’eau. douce! Et cependant vous: 
méprisez cetie Perche, encore assez répandue dans nos cours d’eau, qu’elle 
dépeuple! Maintenant que je vais vous ouvrir les yeux, vous la regarderez # 
avec une certaine admiration, comme un prodige de fécondité, tout en la | 
craignant, — en cela, je vous autorise pleinement, — dans vos étangs, 
rivières et réservoirs | 
Comme je n’avance rien à la légère, il faut que je prouve mon dire. Rien 
n’est plus aisé : les chiffres ont une logique irréfutable. & 
Nous avons pris une Perche ordinaire : ce n’était pas un monstre, tan! 
s’en faut; on trouve partout la pareille. Elle pesait 250 grammes, une mo- 
deste demi-livre ! Le sac de ses œufs, compté par la méthode que je vous ai 
indiquée tout à l'heure pour la Morue, en contenait 375 mille. C’est déjà 
joli, convenez-en, mesdames; mais cela neus va conduire à cette singulière 
et imprévue conclusion que le nombre des œufs, chez la Perche, est infini- 
ment supérieur à celui de la Morue, que l’on regardait jusqu’à présent 
comme le plus fécond des poissons connus. 
En effet, tout nous permet de supposer que chez les poissons le nombre des 
œufs croît proportionnellement au poids de l’animal, c’est-à-dire à son âge. 


S 
Ÿ 


CONFÉRENCES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 67 


Gette loi est vraie pour les Salmonidés et vérifiée annuellement par des 
milliers d'expériences. On sait, à n’en pas douter, — et l’on vend en con- 
séquence, — que le Saumon femelle porte mille œufs par kilogramme de 
son poids, c’est-à-dire qu'un Saumon de 10 kilos donnera 10 mille œufs, 
un Saumon de 20 kilos, 20 mille. Le nombre des œufs de la Truite est un 
peu plus considérable au kilo, parce que ces œufs sont proportionnellement 
plus petits; mais la loi est sensiblement la même. En l’adoptant pour la 
Perche, dont les œufs sont beaucoup plus petits que ceux des Salmonidés, 
nous restons très-probablement beaucoup au-dessous de la réalité. 

Or, notre Perche de demi-livre avait 375 mille œufs. Une Perche de 
L kilo, et qui n’est pas un animal introuvable, en aurait 1 méllion et demi ! 
Mais une Perche de 25 kilos, aussi grosse que notre Morue de tout à l’heure, 
ne contiendrait pas moins de 37 millions et demi d'œufs! 

Une telle fécondité n'est-elle pas mer veilleuse ? Et quand on possède chez 
soi des poissons doués de facultés semblables, est-il donc besoin d’aller 
chercher au loin de quoi repeupler nos eaux ?.… 

Mais il est temps de revenir à nos Américains, car, en matière semblable 
à celle qui nous occupe, il est si facile de se laisser entraîner par le mer- 
veilleux à droite ou à gauche, que j’on en est littéralement réduit à avancer 
non en ligne droite, mais en zigzag, semblables aux pêcheurs qui remon- 
tent au vent, courant leurs bordées ! 

Nous avons donc constaté que les Nord-Américains avaient demandé aux 
espèces anadromes de leurs fleuves un prompt repeuplement des eaux, 
Parmi les espèces que leur offrait la nature, ils ont choisi l’Alose, un beau 
et bon poisson aussi apprécié chez nous que chez eux, mais qui, chaque 
année, diminue en nombre sur noire marché parisien, et par conséquent 
augmente en valeur vénale, hélas ! sans espoir de mouvement rétrograde 
vers le bon marché, car les Américains ne travaillent pas pour la France ! 

L'Alose, mesdames, n’est pas autre chose qu’ane grosse Sardine ! Toutes 
deux appartiennent à cetle admirable famille des Poissons clupéoïdes qui, à 
elle seule, nourrirail presque le genre humain, et qui lui rend de si immenses 
services. Vous en serez mieux convaincues encore quand je vous aurai nommé, 
— comme voisins et intermédiaires, entre lAlose et la Sardine, que je me 
plaisais tout à l'heure à rapprocher l’une de l’autre comme types extrêmes, 
— les Harengs,les Anchois et cette myriade de petites espèces qui repré- 
sentent en mer les nuées d’Ablettes et de Vérons qui scintillent au soleil dans 
nos rivières. En mer, on les appelle le Sprat, le Harengule, le Célan, la 
Melette, la Blaquette, et tout cela constitue dans son immense population 
la masse bienfaisante dont vivent les auires poissons. L'Alose est le géant 
de la famille, puisque sa taille peut atteindre 4 mètre. 

D'un bout à l’autre de la famille des Clupéoïdes, il faut constater une 
fécondité considérable. Les bancs innombrables en individus de chacune des 
espèces que nous avons nommées en est une preuve évidente. 

L’œuf de l’Alose est petit et extrêmement abondant : c’est pourquoi les 


68 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Américains ont particulièrement peuplé d’Aloses le Connecticut, l’Hudson et 
le Merrimac, trois énormes fleuves. 8 millions environ d'œufs d’Alose ont été 
incubés et menés à éclosion, l’an dernier, dans l’Hudson seul. Cette année, 
ce chiffre a été singulièrement accru: ; 

Sur le nombre-des jeunes obtenus, 220 mille ont été mis dans la rivière 
au-dessus du barrage de Troy : 80 mille dans le lac Champlain; 20 mille 
dans le lac Owasco ; 50 mille dans la rivière Genesée ; 30 mille dans la 
rivière Alleghany, à Salamanca ; 25 mille dans le Mississipi à deux milles au- 
dessous de Saint-Paul. Le reste a été restitué au fleuve lui-même au-dessous 
de Castleton. L’ensemble de ces opérations a duré quarante-trois jours, du 
18 mai au © juillet. 

Les œufs, éclos l’an dernier, 1872, dans le Connecticut, élaient au nombre 
de 60 millions. Nous n’avons, en notre pays, aucune idée d’éclosions exé 
culées sur des nombres semblables ! Les opérations avaient duré moins 
d’un mois, mais elles étaient plus tardives : du 44 juin au 18 juillet. Les 
poissons en expériences étaient beaucoup plus gros que les années précé- 
dentes, et leur frai produisit 92 millions d'individus, un tiers de plus que 
ce qu'on avait obtenu l’année d'avant. Les chaleurs des premiers jours de 
juillet ont eu pour effet d’augmenter considérablement la ponte des femelles. 

N'oublions pas un seul moment, je vous prie, que tout cela a coûté 
500 dollars, 2500 francs ! 

Nous n'avons pas encore fini. Deux millions de jeunes ont été répartis 
dans les rivières Alleghany, White et Plate : 1/2 million a été affecté aux 
cours d’eau de Rhode-Island ; un autre 1/2 million au Sangatuck, et le même 
nombre à peu près au Great-Broock. Le reste a été reversé encore dans le 
Connecticut, jusle au-dessous des chutes de Hadley. 

Voilà donc la piscifacture appliquée, depuis cinq ou six ans seulement, 
dans deux ou trois des plus grands cours d’eau du Connecticut, appliquée 
sur une seule espèce de poisson, et déjà les commercants constatent que le 
prix de l’Alose a très-notablement diminué sur le marché de New-York! 
Qu'on juge des résultats futurs lorsque les divers États de l’Union, profitant 
de l'exemple, auront entrepris le repeuplement général ! Qui oserait, dès à 
présent, mesurer la portée et les conséquences de cette nouvelle industrie ! 

N’en doutons pas, n’en doutons pas un seul instant, cet exemple va être 
suivi là-bas ! Les Américains, — dont je ne veux certes pas faire un modèle 
en tout, il s’en faut de beaucoup ! — forment un peuple trop pratique pour 
que des résultats pareils à ceux que nous venons de rapporter restent sans 
continualeurs. Ils vont marcher, tous, d’un pas égal, continu, convaincu, 
vers le maximum de cette fabrication facile, assurée, économique, de chair 
vivante pour la nourriture des masses. 

Et nous? au’allons-nous faire ? 

Hélas! hélas ! nous allons retomber béatement dans notre sommeil ordi- 
naire.… Nous manquerons de viande comme hier, comme avant-hier…. 
Ceux qui auront beaucoup d'argent achèteront un peu de chair; ceux qui 


CONFÉRENCES FAÎTES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 69 


n’en auront pas. s’en passeront !.. et tout ira ainsi dans le meilleur des 
mondes possibles. Que voulez-vous de plus ?.. Vraiment... 

Ne sommes-nous pas trop riches pour daigner ramasser une récolte qui 
enrichit nos voisins ?... Le malheur nous a visités, c’est vrai ; la guerre nous 
a meurtris, c’est vrai; les impôts s'accumulent sur nous et tarissent les 
sources de notre bien-être, c’est encore vrai... Et puis? Et puis, nous 
dormons dans la routine... et tout est dit ! 

Tout cela se ramène fatalement à une conclusion d’une vulgarité désespé- 
rante : l’eau ne manque pas chez nous, l’Alose n’y manque pas non plus ; 
si nous n’imitons pas les Américains, c’est que... nous ne le voulons pas! 

— Mais, dira-t-on peut-être, leurs moyens d’incubation nous sont 
inconnus ! 

— Hélas! répondrons-nous, vous n’avez même pas cette excuse à invo- 
quer. Les Américains ont abandonné dès longtemps lappareil à incubation 
de Coste, que nous nous obstinons à conserver malgré son infériorilé évi- 
dente. Il y a dix ans, tout à l'heure, qu'on ne gardait cet appareil à Hu- 
ningue que par condescendance, et qu’on lui substituait, pour toutes les 
opéralions sérieuses, l'appareil Coumes à courant continu. C’est à ce der- 
nier appareil, rappelons-le puisque l’occasion s’en présente, que la France 
doit l’acclimatation de la Féra ‘dans ses eaux. À notre avis l'appareil 
Coumes répond à tous les besoins possibles. Mais cependant, si la pratique 
en démontrait l'insuffisance pour ceite condition spéciale, qui nous empêche 
donc de nous procurer celui dont ils se servent là-bas ? 

L’appareil que l’on emploie au Connecticut est celui de Seth-Green ; 
adressons-nous à ce directeur des opérations de piscifacture de l'État, et il 
nous en enverra dix, s’il en est besoin. D’après nos observations particu- 
lières, nous n'avons rien à demander à M. Seth-Green, dont l'appareil 
n’est qu’une modification de celui de Jacobi. Nous ferons tout ce qui sera 
utile avec l’appareil Coumes à courant continu. 

Ce serait d’ailleurs là un sujet d’études bien vite élucidé, et, de plus, on a 
bien envoyé un savant ces jours-ci, en Amérique, pour étudier le terrible 
Phylloxera qui dévaste nos vignes, oh pourrait tout aussi bien envoyer au 
onnecticut un autre savant pour voir comment les pisciculteurs du pays 
repeuplent, en un an, leurs rivières de 99 millions d’Aloses !… 

Il ne faut pas douter que les œufs de nos poissons de mer, — et c’est sur 
ceux-là que je veux insister maintenant, — exigeront probablement des 
traitements spéciaux, appropriés aux conditions dans lesquelles ils sont dé- 
posés par les parents; mais découvrir ces conditions, approprier les mé- 
thodes aux natures spéciales, n'est-ce donc pas là le rôle de la science ? N'est-ce 
donc pas là ce que nous demandons à faire ?.… 

Déjà nombre de faits sont acquis : nous pouvons partir de ce principe, que. 
certains œufs de poisson redoutent les trépidations pendant leur incubation, 
mais les expériences nous manquent encore pour décider si tous sont dans 
ce cas, De ce qu'il est démontré que ceux de la Féra sont ainsi constitués, et 


79 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


que le non-succès qui allait presque faire renoncer à l’acquisilion de celle 
admirable espèce tenait, iout bonnement, à l'emploi de l’appareil Coste à 
cascades, il ne s’ensuit pas nécessairement que les œufs des espèces marines 
aient le même tempérament. Au contraire, l'œuf de la Féra, espèce essen- 
tiellement lacustre, est approprié à un milieu calme et sans mouvement, au 
bord duquel l'œuf semé par la mère demeure immobile. iù 

Il peut en être tout autrement de l'œuf des espèces marines, qui, s’il est 
déposé près du rivage, peut être soumis aux mouvements des marées et, 
par conséquent, plus ou moins bercé ou roulé par les vagues. Qui sait si 
l'on ne serait pas amené à modifier les appareils d’ineubation de manière 
à imiter ces mouvements, qui, pour les espèces littorales, sont peut-être 
nécessaires ? 

Tout cela, convenons-en, est matière aux études les plus intéressantes : 
pour le moment, nous neipouvons que confesser une ignorance presque 
complète sur ces questions. L'initiative personnelle ne peut entreprendre 
des expériences de cette importance : elles ne dateront réellement que du 
jour où la France comprendra que pour récolter il faut semer ! 

fl convient de distinguer encore parmi les œufs des poissons de mer ceux 
qui sont placés ou peut-être semés par les parents à de très-grandes pro- 
fondeurs. On peut supposer que ceux-là ne sont déposés en ces endroits que 
parce que l’immobilité Ieur est nécessaire. Nous avons trouvé sur des algues 
de grand fond arrachées par la tempête, des œufs vivants et microscopiques 
de poissons que nous n’avons malheureusement pas pu déterminer autre- 
ment. L’embryon mourut au bout de quelques heures, malgré nos soins : la 
profondeur minimum de la mer dans l'endroit d’où il venail n’était pas 
moindre de 60 brasses, soit 120 mètres; or, nous ne possédions point l’ap- 
pareil nécessaire pour soumettre cette petite bestiole à la pression baromé- 
trique de dix atmosphères à laquelle elle était habituée, et faute de laquelle,» 
sans doute, elle ne pourrait pas vivre. 

Un grand nombre de questions se présentent à l'esprit en présence de 
faits semblables. Qui peut savoir sices œufs, si petits, ne sont pas ceux d’es- 
pèces vivant elles-mêmes adultes à ces profondeurs ? Ne peuvent-ils pas, 
comme nous le disions tout à l'heure, être pondus tout fécondés ainsi que 
nous le voyons opérer par certains coftes ? d’autani plus que l'embryon 
trouvé par nous rappelait ces poissons par sa forme. En ce cas, la femelle 
le sèmerait dans la mer en nageant, ainsi que nous voyons les Éphémères 
semer les leurs en volant à la surface de l’eau. Cet œuf descendrait lente- 
ment de lui-même au fond de la mer, enduit d’avance d’une matière vis- 
queuse, et viendrait se coller aux algues, où il opérerait ses évolutions à l'abri 
de tout danger. Ne pourrail-ce pas être aussi un œuf pondu et fécondé sur 
place par le mâle et la femelle descendant exprès pour celte grave opéra- 
tion à de telles profondeurs ? 

Tout cela est encore inconnu et le sera iongtemps sans doute, car les 
faits ont démontré déjà qu’il y avait en ces matières, terriblement loin de 


CONFÉRENCES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 71 


la pratique à la théorie, et « c’est à peine, dit M. Vidal, si quelques expéri- 
» mentateurs paiienis, — et il est du nombre, — qui ont entrepris des 
» recherches en ce genre, sont parvenus à constater, sur divers sujets, la 
» possibilité scientifique de réaliser la fécondation artificielle des poissons 
» de mer. de 

» Quant à aller plus loin, à poursuivre l'éducation, jusqu’à l’âge adulte, 
» des jeunes nés par un procédé artificiel, nul, que nous sachions, n’y est 
» encore parvenu. Ces essais, nous les avons tentés nous-même sur des 
» Vieilles, — Labres divers, — et sur des Muges ou Mulets de différentes 
» espèces. Dans les deux cas, il y a eu fécondation et développement de 
» l’embryon mais les œufs des Labres sont seuls éclos et les jeunes n’ont 
» vécu que quelques jours. 

» Pourtant ils étaient dans une eau aussi renouvelée que possible et dans 
» des conditions de température analogues à celles qui existent dans le cas 
» d’éclosion naturelle. En général, les œufs de nos principales espèces de 
poissons marins comestibles sont tellement petits, même après le .déve- 
» loppement embryonnaire, que l’animal qui en sort au moment de l’éclo- 
» sion est filiforme et presque invisible. Nulle trame n’est assez fine pour 
» arrêter au passage ces êtres minuscules, avides d’eau vive, attirés instinc- 
» tivement vers l’espace infini, pour obéir à la nature, qui leur a assigné 
» comme habitation l’immensité de la mer. Mais si un tissu assez fin per- 
» met de les retenir prisonniers durant quelques jours, C’est au détriment 
» du renouvellement de l’eau et de l’existence même de ces poissons, qui ne 
» peuvent impunément supporter cette captivité conire nature. » 

Nous avons lenv à citer cesintéressantes expériences, faites loin de tout 
et sans les appareils perfectionnés que nous possédons actuellement. Elles 
conservent toujours un grand intérêt et vérifient, une fois de plus, cette 
idée, souventes fois émise par nous, que la grande mer, avec son étendue 
indéfinie, toute peuplée de myriades d'organismes élémentaires: fourhis par 
l'air qui en lèche la surface, devait être le champ d'élevage de la plupart des 
poissons et des crustacés. Nous savons, depuis longtemps, qu’à peine nés 
les Phyllosomes, ces larves de Homards et de Langoustes, fuient vers {la 
haute mer comme une nuée de moucherons que rien ne peut arrêter. Au- 
jourd’hui ce sont les embryons naissants des Labres qui prennent d’instinct 
le même chemin, ; 

Que reste-t-il donc à faire? Il reste à favoriser ce mouvement, au lieu de 
l’entraver. cAEU 

Il reste, — et ici nous ne doutons nullement de la réussite depuis lPappli- 
cation de la table Coumes aux œufs de la Féra, — il reste à placer les œufs 
dans un état tout à fait semblable à l’état sauvage. L’éclosion une fois obte- 
nue, reste la partie difficile, — ompossible selon M. Vidal, parce qu'il ÿ a 
échoué, — c’est-à-dire la conservation des alevins microscopiques. Sans 
doute, — si tant est qu’il faille les retenir, ce dont je doute pour ma 
part, — on ne les retiendra pas sans efforts et il faudra imaginer des combi- 


) 


Ÿ 


2 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION, 


naisons adaptées aux lieux dont on dispose: mais cela n’est point au-dessus 
des moyens humains. 

Que faut-il, en effet, à ces petits animaux? Il leur faut beaucoup d’eau et 
une eau légèrement agitée. Ge n’est point là, surtout au bord de la mer, une 
condition irréalisable, surtout au bord d’une mer à marées dont les chan: 
gements de niveau prévus permettent un emmagasinement d’eau aussi grand 
qu'on le voudra. Sur les bords de la Méditerranée, je comprends les in- 
succès de l’expérimentateur que nous avons cité. Sous une température 
torride en été, on était incapable de fournir à ces pauvres petits poissons 
naissants ce qu’on peut appeler réellement de l'eau; le maigrissime filet 
d’eau qu’on élevait à grand’peine était mille fois insuffisant pour entretenir 
la vie chez des êtres qui ne vivent, pour ainsi dire, que par imbibition ! 

On peut donc affirmer hardiment,— et c’est là où nous voulions en venir, — 
que les rares expériences tentées par l'initiative individuelle n’ont pas été 
faites dans des conditions suffisantes de réussite. On doit, en même temps, 
constater que les installations et iâtonnements qu’elles exigent sont peu en 
rapport avec les moyens dont dispose un simple particulier, Par conséquent, 
on est amené forcément à tirer de ceci la conclusion que de tels essais, de 
tels travaux doivent être entrepris et poursuivis sous la tutelle du gouver- 
nement, de l’État. Alors, seulement alors, on verra où l’on peut arriver, 
Mais d'ici là 2... 

D'ici là 2... On se contentera de remercier les courageux et désintéressés 
expérimentateurs qui se dévouent à chercher selon leurs moyens, on enre- 
gistrera leurs travaux, on étudiera leurs insuccès non sans une nuance 
d’ironie, et l’on attendra qu’il plaise au bon sens public de peser assez 
fort sur le gouvernement pour le faire sortir de son inertie et lui faire entre- 
prendre les travaux qui décupleront en peu d'années la fortune publique. 

Mais il est temps de revenir à nos poissons d’eau douce proprement dite, 
c’est-à-dire à ces espèces qui ne sont poussées par aucun instinct particu- 
lier de migration, comme celles que nous avons appelées anadromes ou re- 
montantes, où mème celles que nous pourrions appeler descendantes, car 
il y en à aussi de cette catégorie. 

En effet, si parmi les remontants nous comptons le Saumon, la Truite 
saumonée, l’Alose, l'Esturgeon, la Lamprote, etc., nous sommes presque 
forcé de ranger l’Anguille en tête des descendants, si nous supposons que 
tous les poissons soient poussés à leur changement de lieu par un seul 
besoin, celui, très-impérieux, d'assurer la multiplication de l’espèce. Mais il 
ne faut pas perdre de vue que, oulre ceux-ci, nous possédons dans nos eaux 
douces un nombre de genres plus que suffisant pour les repeupler à foison, 
et si, parmi cette population, un changement quelconque était jugé bon à 
provoquer, ce ne serait point une augmentation qu’il faudrait introduire, 
mais tout simplement une épuration. 

Voici pourquoi. Parmi tous les êtres de la création, les Poissons ne con- 
naissent que deux catégories, par rapport à eux: les mangeurs et les 


CONFÉRENCES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 73 


mangés ; eux-mêmes remplissent le plus souvent la deuxième catégorie. 
Mais une concurrence véritable s'établit tout naturellement entre les man- 
geurs : à ce point de vue, le Brochet, la Perche, l'Anguille, sont les véri- 
tables concurrents de l’homme, comme rendement des eaux en poissons 
comestibles. Par conséquent les espèces que nous venons de citer devront 
nécessairement être détruites par l’homme, par celte raison simple et sans 
réplique qu’il est le plus fort! Nous ajouterons, nous piscifacteurs, que plus 
tôt il les détruira, mieux il fera ! Il n’y a point à tergiverser en semblables 
matières : qui veut la fin veut les moyens! Qui veut élever des moutons 
doit purger le pays des loups. C’est absolument la même chose. Il n’y aurait 
qu’un seul cas où la proposition pourrait être renversée; ce serait celui où 
le produit, la valeur du Loup serait supérieure à celle des brebis qu'il aurait 
croquées. 

Eh bien, quand il s’agit de poisson, la valeur du Loup-Brochet est nota- 
blement inférieure. Voici pourquoi. C’est qu’il résulte d’expériences très- 
anciennes el très-bien faites dans e pays des Dombes, que chaque kilogramme 
de Brochet provient de la consommation de 30 kélogrammes d’autres pois- 
sons. Or, donnons à ces poissons consommés une valeur, quelle qu’elle soit, en 
rapport avec celle de nos marchés, et nous verrons tout de suite que le Bro- 
chet n’est pas un poisson de chair et d’arêtes, mais un vrai poisson d’or 
digne de la table des rois! Voilà pourquoi le Brochet et tous les poissons 
d’or, mangeurs, de quelque provenance qu’ils viennent, doivent être détruits, 
s’ils existent, évités, si l’on veut les introduire ! 

D'où résulte que l'introduction d'espèces nouvelles dans nos eaux de 
France ne doit être tentée qu'avec la plus grande circonspection. D'abord, 
parce qu'on n’obtiendra des résultats intéressants qu’au prix des plus 
sérieux sacrifices de temps, de soins et d'argent: puis, parce qu'il faut 
craindre d’augmenter, sans le vouloir, le nombre des mangeurs, qui tendent 
de plus en plus à rester seuls possesseurs de nos rivières. 

IL est malheureux, selon nous, que toutes les acclimatations tentées ou 
encouragées jusqu’à présent aient eu pour objectif des poissons carnassiers 
Comme si le Brochet, la Perche, la Truite, le Saumon, l'Anguille, —- indi- 
gènes tous ceux-là, — ne suffisaient pas, — et au delà, — à consommer nos 
espèces inoffensives ! Comment ? tous les jours on constate une prééminence 
fâcheuse, et chaque fois plus marquée, des espèces carnivores : nous venons 
de voir à quel prix en revient la chair, et nous ne nous occuperons pas de 
réagir contre ce véritable gaspillage ? 

Gardons-nous d’ajouter au nombre, déjà trop grand, de ces goulus ! Que 
mangera, Chez nous, la Perche colossale d'Australie, à moins qu’elle ne nous 
rende le service de croquer nos Brochets ? La chair en est très-délicate, dit- 

. C’est fort bien, mais ces énormes assimilateurs de matières animales 
sont utiles, sont à leur place dans lesfleuves des pays sauvages, où les cada- 
vres roulent, où les proies abondent dans la plénitude de la vie primitive, 
Mais chez nous que dévoreront-ils ?..… 


fl: RE SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Le Gouram? lui-même, cette friandise étrangère, tant cherchée depuis 
Lacépède, est un rapace. Il ne trouve grâce à nos yeux qu’à cause de sa 
taille réduite et de ses goûts omnivores. 

Mais que dire de l'introduction favorisée des Bass ou Bars américains, 
Perches pullulantes qui ne valent ni plus ni moins que les nôtres ? De celle 
du Sandre, essayée, mais heureusement manquée? De celle du Silure, 
hélas! trop certainement réussie dans nos caux de l’est ? Un mangeur pesant 
150 kilogrammes!…. 

Ce n’est point ainsi que nous entendons l’acclimatation des poissons nou- 
veaux dans nos pays civilisés, Nous altendons impatiemment ces fameux 
poissons chinois dont nous parlait notre collègue M. Dabry de Tiersant, 
poissons que l’on nourrit à la main, comme des Canards, d’herbes aquati- 
ques hachées, herbes qui pullulent, — au moins leurs analogues, — dans nos 
étangs, nos rivières, et y pourrissent chaque année sans emploi! Voilà les 
véritables acquisitions à faire! Voilà où il faut accumuler soins et sacrifices! 

Ge sera !€ grand honneur de la Société d’acciimatation d’avoir encouragé 
Pacquisition du White fish et celle du Binny. 

Le White fish canadien, ou Poisson blanc, est un cousin de la Féra, accli- 
matée désormais chez nous et originaire, sous le nom de Lavaret ou La- 
venche, des lacs suisses. Les Français du Canada appellent souvent ce 
poisson Gizzard fish, les sauvages du Nouveau-Brunswick Attihaiomey ? 
c’est un-nom peu agréable pour nos oreilles ; le poisson qu'il désigne est 
plutôt un habitant des lacs que des fleuves. On le trouve en immense quan- 
tité dans les grands lacs du Canada, surtout dans le lac Huron, où il donne 
lieu à une pêche très-abondante et !rès-avantageuse, de même que dans 
toutes les eaux intérieures du continent jusqu’à la hauteur des régions 
arciiques. 

Celie espèce dépasse rarement un pied et demi de lorg et un poids de 
cinq livres : en sa qualité de Corégone à la petite bouche, il vit d'insectes 
et de larves, peut-être de petits œufs. Mais on n’en est pas bien sûr!!. 

Plusieurs lacs, entre autres celui de Temis-conato, sont célèbres par les 
pêches que l’on y fait de cet excellent poisson; le Saint-Laurent et plusieurs 
rivières qui s’y déchargent en nourrissent un grand nombre, ce qui prouve 
que nos fleuves pourraient en nourrir aussi. Le White fish visite quelquefois 
les eaux salées, et les pêcheurs en prennent souvent à l'embouchure des 
rivières qui se jettent dans le golfe: la rivière Petite-Romaine est peut-êlre 
celle où on le rencontre le plus souvent. Quelle aubaine pour l'estuaire de 
nos fleuves ! | 

Quant au Binny égyptien, lorsqu'on veut provoquer ur noble effort, ré- 
sumer une bonne pensée, il suifit d'ouvrir le remarquable ouvrage, sur 
l’acclimatation, du père du directeur actuel de ce Jardin, d’Isidore Geoffroy 
Saint-Hilaire ; empruntons-lui ses vœux pour l'introduction du Binny dans 
notre belle France. $° 

« Forskland, en faisant connaître ce poisson, disait déjà de lui : ilest 


CONFÉRENCES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 75 


» extrêmement commun dans le Nil et très-bon à manger. Mon père, — 
» c'est d'Étienne Geoffroy Saint-Hilaire qu'il s’agit, — à retrouvé depuis, 
» soit dans le bas, soit dans le haut Nil, ce poisson célèbre par l'excellence 
» de sa chair. Pour en exprimer l’exquise délicatesse, on se sert en Égypte 
-» de cette phrase devenue proverbiale : Si {uw connais meilleur que moi, ne 
» me mange pas ! 

» Ce qui prouve peut-être encore mieux que ce proverbe combien le 
» Binny est estimé en Égypte, c’est qu’il y a, principalement à Syont et à 
» Kené, des hommes qui n’ont point d'autre état que celui de pêcheur de 
» Binnys. Ge poisson est, d’après les déterminations faites par mon père, le 
» fameux ZLepidotus des anciens, le seul poisson qui, suivant Strabon, 
» partageât, avec l'Oxyrhynchus, les honneurs d’un culte étendu à toute 
» l'Égypte. 

» Le Binny a communément un demi-mètre de long, mais il n’est pas 
» rare de renconirer des individus de pius d’un mètre, Remarquable entre 
» tous les poissons du Nil, — comme il est dit déjà dans un passage du 
» faux Orphée, — par la grandeur et l’éclat argentin de ses écailles, le 
» Binny deviendrait bientôt, selon toute apparence, si nous parvenons à 
» Pacquérir, un des poissons d’eau douce les plus recherchés sur nos 
» tables, dont il serait un des ornements. 

» [ly a dans d’autres pays des poissons non moins estimés par leur chair, 
» continue l’ancien président du Jardin d’acclimatation; si j'ai choisi, pour 
» le mentionner de préférence, le Binny, qui n’a encore été l’objet d’aucune 
» tentative d’acclimatation, ce n’est pas seulement en raison du prix que 
» j'attacherais particulièrement à l'introduction d’un poisson dont les bonnes 
» qualités alimentaires ont été surtout signalées par mon père, c’est aussi 
» parce que cette introduction me semble une de celles qu’il est le plus 
» facile d'essayer, Grâce aux perfectionnements de la navigation, le Nil 
» n’est plus qu’à quelques jours du Rhône et de nos vastes étangs du Midi...» 

En sa qualité de Cyprin, et de Cyprin voisin du Barbeau, nous acceptons 
le Binny comme un sujet d'élite, digne conquête à tenter, et sur laquelle 
nous aimerions à voir accumuler toutes les faveurs et toutes les sommes 
dont peut disposer la Société. 

Non pas que les Gyprins soient toujours absolument incapables des dégâts . 
que nous reprochons aux poissons de rapine.…. Au contraire, le siruggle 
for life, la bataille de la vie, est, du haut au bas de l'échelle animale, la 
grande loi nécessaire. Croire que les poissons s’y soustraient serait une 
grave erreur. Ils s’y soustraient, au contraire, moins que loutes les autres 
classes d'animaux. Sous l’apparence la plus débonnaire, sous l’aspect le 
mieux désarmé, les poissons possèdent encore, pour la plupart, de très- 
puissants moyens de nuire à plus faible qu’eux. 

Cela tient à la structure particulière de leurs mâchoires, 

Il y a, chez les Poissons, les dents qu’on voit et celles qu’on ne voil pas. 
Chez les mangeurs, chez les forbans, les dents se voient et se sentent fort 


76 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


bien. Le Brochet en montre sept cents, disposées en bordures, en rangées, 
et, comme elles sont arquées et crochues en arrière comme les épines de la 
ronce, il ne fait pas bon oublier ses mains dans la gueule d’un de ces ani- 
maux. La Perche, armée d’autre facon et pour des proies différentes, porte 
seulement plusieurs milliers de dents, mais si petites, qu’on leur donne le 
nom de dents en velours, ce qui n’en diminue point le nombre prodigieux. 

Si, au contraire, nous mettons le doigt dans la bouche d’une Carpe... — 
remarquez qu'on dit ia gueule du Brochet et la bouche de la Carpe : évi- 
demment à cause de la présence ou de l'absence des dents ! Ô erreur des 
observateurs superficiels !... — si nous mettons, dis-je, le doigt dans la 
bouche d’une Carpe, d’une Tanche, d'un Barbeau, d'un Chevesne, d’une 
Vandoise, nous trouverons des mâchoires douces et lisses. pas apparence 
de dents! à les pauvres bêtes inoffensives! à les infortunés moutons! 
Comme ils sont bien incapables de se défendre et, par cela même, prédes- 
tinés à servir de proie aux dévorants ! Et ceci, et cela... 

Malheureusement... in cauda venenum! Non in cauda, sed in pha- 
rynge ! 

Lorsque vous tenterez sur la Carpe, mesdames, l'expérience que nous vous 
indiquons ici, avancez votre doigt un peu plus avant, tout à fait au fondd u 
gosier… et vous sentirez que là se trouve toute autre chose que les gencives 
lisses de la bouche extérieure. C'est que là, chez tous ces poissons inoffen- 
sifs, sur le compte desquels nous nous apitoyions tout à l'heure, là se trouvent 
des mächoires, et de solides màchoires, non plus lisses et désarmées, mais 
garnies de dents solides et, la plupart du temps, aiguës! Il ne faut donc pas 
en ceci, comme en beaucoup d’autres choses, se fier aux apparences ! 

Ces dents sont implantées dans deux mâächoires mues par des muscles 
puissants placés à l’entrée du pharynx...— Le pharynx, mesdames, c’estle 
conduit que, chez nous, on nomme plaisamment quelquefois la rue du pain, 
et qui est placé en arrière du larynæ, celui-ci formant le conduit de l’air et 
dela voix. — Ces dents ont pour objet de broyer les aliments qui se présen- 
tent, avant leur entrée dans l'estomac, parce que, cet organe, peu musculeux 
chez les poissons, a besoin que la nourriture lui soit servie dans un état de 
trituration, de désagrégation convenable. De ceci résulte, bien évidemment, 
que ces dents cachées, — que l’on appelle dents pharyngiennes, — varient 
de forme suivant les fonctions qu’elles doivent remplir en broyant ou divi- 
sant telle ou telle nourrilure. 

C’est ce qui arrive. 

Si nous examinons les dents pharyngiennes de la Carpe, nous les trou- 
vons semblables à des dents de Fuminants : elles sont plates, épaisses, à 
couronne montrant les circonvolutions de l'émail au milieu de Pivoire : ce 
sont de véritables meules broyantes. Elles nous révèlent le mode de nourri- 
ture le plus ordinaire de ia Carpe, c'est-à-dire les graines, les herbes, les 
bourgeons, réduits par ces meulières en pulpe épaisse. 

Examinons les dents pharyngiennes de la T'anche : elles ne sont plus que 


CONFÉRENCES FAÎTES AU JARDIN D ACCLIMATATION. 77 


demi-meulières, les dernières se montrent pointues : ce sont déjà des la- 
nières, des dents de Carnassiers, rappelant celles du Chat et du Lion. … 

Passons maintenant aux dents pharyngiennes du Barbeau, du Chevesne, 
du Chondrostome, de la Vandoise... marchons! avancons, descendons tou- 
jours !.. Arrivons au Goujon, à l’Ablette, au Véron lui-même, le plus faible 
des poissons de nos rivières, et toujours, partout, chez tous, nous trouve- 
rons les dents carnassières ! Ici sur un rang, là sur deux et même sur érots 
à chaque mâchoire! Et non-seulement ces dents aiguës, ou crochues, ou 
coupantes, sont opposées et enchevêtrées, mais toujours un os se trouve 
placé en face d’elles, faisant office d’enclume, de pièce de résistance, sur 
laquelle se croisent les autres dents pour déchirer, dilacérer plus sûrement, 

- Telles sont les armes de nos poissons inoffensifs !.. 

Que de considérations curieuses seraient encore à développer, et sur les- 
quelles nous devons passer ! Mais il nous semble que le peu de mots que 
nous venons de dire sur ces organes trop peu connus suffit pour arriver où 
nous voulions en venir, C’est qu'aucun poisson n’est inofjensif. Tous sont 
carnassiers, à leur manière et à l’occasion ! Ce mode de carnivorie suffit 
seul pour décider s’il nous sont utiles ou nuisibles et, par conséquent, si 
nous devons les acclimater ou les rejeter, les multiplier ou les détruire. 

Tons ceux qui sont carnivores d’insectes et autres organismes analogues 
sont utiles. 

Tous ceux qui mangent le poisson en nature nous font concurrence : 
donc tous ceux-là doivent être impitoyablement détruits ! Ils sont nuisibles, 

Ge n’est pas plus difficile que cela! 

Non que nous n’ayons quelques reproches à faire même aux porteurs de 
molaires les mieux caractérisées ; nous ne pouvons oublier que les grosses 
Carpes d’un étang nous ont humé, l’un après l’autre, plusieurs milliers de 
jeunes Truites et Saumons, de la grosseur d’un Véron, que nous versions 
dans la rivière pour la réempoissonner ! Nous avons vu, dans notre aqua- 
rium, — ceci est encore plus fort ! — un poisson blanc, un Chevesne, avaler 
sans remords, et sans difficulté aucune, un Véron qui ne lui faisait aucun 
iort! Que dirai-je? Nous avons le travers d’être pêcheur, et il nous est 
arrivé plusieurs fois de prendre les gros Chevesnes, — appelés Meunrers 
parce qu'ils se plaisent aux environs des moulins, — avec les petits poissons 
vifs tendus en vue de la Perche... Ce qui prouve, sans objection possible, 
que les dents pharyngiennes pointues du Chevesne lui servent volontiers à 
aulre chose qu’à déchirer au passage les gros insectes dont il fait le plus 
souvent sa nourriture, en les recueillant à la surface de l’eau dès que leurs 
ailes fatiguées les y laissent tomber. 

— Que conclure de tout ceci? 

— Plusieurs vérités intéressantes à formuler, 

D'abord, que tous les gros poissons mangent les petits ; par conséquent, 
qu’il faut ne mettre ensemble que des individus, sinon du même âge, au 
moins à peu près de même taille, Cette remarque, trop négligée, a été cause 
de non-réussite pour la majeure partie des repeuplements tentés. 


78 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


En second lieu, que tous les carnassiers directs du poisson doivent être 
impitcyablement séquestrés ou détruits. C’est une question semblable à 
celle des mauvaises herbes dans les blés : elles ne mangent pas le blé en 
nature, c’est vrai, mais elles l’étoutfent : le résultat est le même. 

Comment se fait-il que toules ces vérités ne soient point devenues banales 
chez nous, à force d’avoir été répétées ? Est-ce donc parce que nous n’étions 
pas assez nombreux sur notre territoire, que jusqu’à Ces temps-ci nous nous 
sommes désintéressés d’en cultiver la meilleure partie? On serait tenté de 
le croire quand on compare ce que font les Chinois, ces soi-disant barbares 
de l'extrême Orient. 

En gens pratiques, et peut-être en gens pressés et avertis par l’inexorable 
nécessité, ils ont, depuis des siècles, tiré parti de tout. N’avant pas assez de 
gros animaux de boucherie, ils se sont rejetés sur le poisson et se sont bien 
gardés de multiplier les espèces carnassières ! Grâce aux méthodes de pisci- 
culture tout à la fois les pius élémentaires et les mieux éprouvées, le poisson 
pullule partout. On repêche à la ligne, au filet, au Cormoran : c’est la nour- 
riture habituelle de plus de 250 millions d'hommes ! 

Après lep oisson, les Canards, doni les bandes innombrables couvrent litté- 
ralement la surface des eaux et que les enfants surveillent en bateau ; après 
les Canards, les Chèvres, les Rats, les Chiens. 

En un mot, les Chinois ont eu le bon esprit d'apprendre à faire de la 
chair, et c’est ce qui explique comment 4(0 millions d'hommes peuvent 
vivre sur une surface à peine grande comme quatre fois la France. Hélas! 
que de chemin nous avons encore à parcourir avant d’en être arrivés là! 

Il en est du poisson comme de tous les animaux de boucherie, car, pour 
nous, nous ne le considérons pas autrement : #! est bon tant qu'il n'est pas 
mauvais ! Cette vérité, qui semble digne de M. de la Palice, est parfaite- 
ment exacte quand il s’agit de nos viandes habituelles : le Veau est bon 
tant qu’il ne devient pas Bœuf; auquel cas, il n’est plus Veau. Le Bœuf et 
le Mouton vieux deviennent mauvais, parce qu'ils ne sont plus bons. Donc, 
chaque animal présente une période spéciale pendant laquelle il est au 
maximum de sa valeur : — les Anglais disent : en condition! — donc, lors- 
qu’il dépasse cette période, à perd. 

Nous ne voulions pas arriver à autre chose qu’à constater ce. FH É 

Pour le poisson, il en est absolument de méme. 

Dès qu'il est arrivé à son meilleur point, il doit être consommé, Tout 
retard est une perte! 

Nous avions besoin de constater ceci, afin de pouvoir faire comprendre 
que cette différence dans la vie, dans la durée, forme le point de départ des 
méthodes d'aménagement dont nous avions plusieurs fois prononcé le nom 
sans appuyer sur la définition. Désormais, nous pouvons soupconner 
quelles seront ies méthodes de culiure, puisqu'elles seront basées sur la 
longévité des espèces, sur leur aptitude à la croissance, à l’engraissement, 
à la précocité. 

— D'accord, m'objeciera-t-on ; mais il faut des expériences pour asseoi 


CONFÉRENCES FAITES AU JARDIN D'ACCLIMATATION. 79 


des opérations sérieuses. Et ces expériences, qui les a jamais faites ? Sait- 
on ce que vivent les poissons ? Sait-on même comment ils meurent ? 

— Si on le sait, avouons qu’on ne le sait guère !.… 

— Sait-on même comment meurent les animaux aériens qui vivent 
autour de nous ? 

— Si on le sait, avouons encore..qu'on ne le sait guère ! On s’est cepen- 
dant souvent demandé : pourquoi ne trouve-t-on jamais ou presque jamais 
le cadavre des nombreux oiseaux, par exemple, qui périssept chaque jour 
de leur belle mort ? Tous les oiseaux ne servent point, vivanis, de proie aux 
bêtes carnassières …. Que deviennent-ils ? 

On le saura le jour où l’on voudra sérieusement en faire le relevé. Pour 
les poissons, la question était encore plus obscure, s’il est possible. Cepen- 
dani, grâce aux soins d’un de mes excellents amis, M. Gobin, ingénieur des 
ponts et chaussées chargé du service du haut Rhône, nous sommes parvenus 
à soulever un coin du voile mystérieux pour une espèce seulement, mais 
pour une des plus précieuses. 

Les gardes trouvaient de temps en temps sur les rives du fleuve des pois- 
sons morts rejetés par les eaux, et surtout d'énormes Truites. Je soupconnai 
qu’il pourrait y avoir quelque concordance entre la mort de ces animaux 
évidemment très-vieux et quelque phénomène annuel, critique de leur vie. 

Tout le monde sait que la Truile commune commence à frayer dès le 
mois d’octobre, qu'en novembre et décembre le frai est dans ioute son 
activité, et que cette importante opération se continue jusque vers le com- 
mencement de février, parce que les différents âges ne frayent pas ensemble. 
Les jeunes, les plus petits individus, commencent généralement, les vieux se 
montrent plus tardifs : d’où l’on peut inférer que novembre est la période 
des jeunes, c’est-à-dire de ceux qui peuvent et doivent la traverser sans 
accident. 

Or, voici le relevé de novembre 1869 à janvier 1870, sur 200 kilomètres 
de fleuve : , 

Novembre. — Point de Truites mortes. 

Décembre. — Un assez grand nombre de grosses Truites mortes ou expi- 
rantes : une de 13kil,500, une de 14kil,500, de 9 kilogr., de 14 kilogr., de 


12 kilogr., deux de 10 kilogr., puis deux de 13 kilogr., puis deax de : 


12 kilogr., eic., etc. Ainsi donc onze individus de première grandeur, par 
conséquent très-àâgés, 

Janvier. — On continue à trouver les gros individus morts, mais ce sont 
encore des échantillons plus énormes, s’il est possible: on en ramasse qui 
pèsent jusqu’à 18 kilogrammes ! 

La conclusion naturelle que nous avons tiré du rapprochement de ces 
faits, c’est que l’évolution du frai à laquelle les vieilles Truites ne peuvent 
se soustraire, est pour la plupart d’entre elles une époque critique qui leur 
est fatale. 


Ce qui permet de conclure immédiatement qu'il y «a perle, de toutes 


80 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


manières, pour le propriétaire des eaux, à laisser parvenir ses Truites jusqu’au 
moment où elles tombent en non-valeur. 

Cet exemple, que nous trouvons frappant par sa nouveauté et son impor- 
tance, montre combien d’études manquent chez nous pour que nous con- 
naissions seulement les mœurs des habitants naturels de nos eaux, Jusqu’à 
ce que toutes ces lacunes soient comblées, que nous servirait donc d’aller 
introduire des espèces nouvelles? Comment, nous ne savons pas encore nous 
servir de ce que la nature nous a si libéralement donné, et nous serions 
assez fous pour embrouiller encore la question par l'introduction, à tort et 
à travers, d'espèces étrangères dont nous ne connaissons pas mieux, — et 
peut-être encore moins ! — les mœurs, les habitudes, l'appétit, le rende- 
ment, elc., etc, ? 

Disons-le hautement en terminant: ce serait folie! 

Aussi avons-nous le droit de conclure, avec une conviction parfaite, qu’a- 
vant de demander à l’acclimatation des ressources nouvelles, il faudrait 
savoir parfaitement ce que nous pouvons faire des anciennes. 

. Or, nous en sommes loin ! 


IV. FAITS DIVERS ETSEXTRAITS DE CURRESPONDANCE. 


Le Coq de bruyère américain où Tétras huppecol 
(Tetrao cupido) et son acclimatation. 


(Extraits du Journal The Field des 10, 24 et 31 janvier 1874.) 


Neus empruntons au Daily News la lettre suivante du major Bates, re- 
lative à l’introduction en Angleterre du Tétras huppecol, dont plusieurs 


spécimens sont exposés actuellement chez les marchands de volailles de 
Londres et de Paris. 


« Un ami et moi, nous avons pris, vivants, vingt et un Tétras huppecols. 
J'avais précisément, dans un dîner d'amis, mangé de ces mêmes oiseaux, 
et John Ball, s’il le voulait, pourrait avoir bientôt des centaines ou des 
milliers de ces oiseaux, pour les élever ou les chasser, et les manger. Il y 
a des milliers d’endroits, dans la Grande-Bretagne où ce gibier pourrait 
prospérer. Je crois qu'il pourrait se multiplier plus rapidement en Angle- 
terre, en Irlande et en Écosse qu’il ne le fait en Amérique. Ces oiseaux sont 
très-vivaces et ne détruisent pas les moissons. 

» Les femelles commencent à pondre vers le milieu d'avril et font éclore 
en juin. Elles produisent, par chaque couvée, de douze à trente jeunes. J’en 
ai même vu un plus grand nombre dans une couvée. 

» Le poids moyen de cet oiseau est d'environ 5 livres avec une petite aug- 
mentation pour Îles mâles. 

» Ils peuvent, en toute sécurité, être mis vivants, en grand nombre, dans 
des cages, ei je crois qu’ils pourraient être apportés vivants et bien portants 
ea Angleterre, à un prix n’excédant pas dix schellings par tête (4). 

» Pourquoi don£ n’avons-nous pas de ces oiseaux en grand nombre, dans 
les bas-fonds, dans les marécages, dans les forêts toujours vertes de notre 
vieille Angleterre ? Si une trentaine ou plus de gentlemen, propriétaires dans 
les différenies parties de l’Angleterre, souscrivaient pour avoir deux mille 
ou trois mille de ces oiseaux, également répartis entre eux, ils feraient un- 
véritable cadeau au peuple de la Grande-Bretagne. Cette bonne action don- 
nerait, avec le temps, un supplément important pour la table des riches et 
même pour celle des pauvres. Deux mille oiseaux et même plus pourraient 
être encagés et envoyés en un seul lot, et, si l’on avait un nombre suffisant 
de personnes pour les soigner, bien peu mourraient dans le trajet de l'Ouest 
américain en Angleterre. 

» Qu'on importe deux mille de ces oiseaux, vivants et bien portants, en 
Angleterre, en Irlande et en Écosse; qu’on les mette en liberté dans des 


(1) Le Jardin d’acclimatation a reçu en janvier une certaine quanlité de ces in- 
téressants oiseaux. (Rédaclion.) 


3° SÉRIE, T. 1. — Janvier 1874, 6 


82 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


terrains favorables à leur existence, et l’on peut assurer qu’ils produiront 
plus d'oiseaux de leur espèce, en sept ans, qu’il n’y a maintenant d’habi- 
tants dans la Grande-Bretagne. » 


« MAJOR BATES, » 
Saybrook, Maclean County. Illinois, décembre 1875. 


Si, en lisant cette lettre, quelques personnes désirent des informations que 
je puisse leur donner, ou si elles veulent essayer en Angleterre l’importation 
des oiseaux dont il s’agit, je ferai tout mon possible pour les aider. 

La proposition d'introduire les Tétras huppecols en Angleterre n’est pas 
nouvelle. Elle a été faite dans notre journal (Field) plusieurs fois, par divers 
correspondants, durant les vingt dernières années, et divers essais ont été 
faits pour mettre cette idée en pratique. Un petit nombre de ces oiseaux sont 
nés en Angleterre, mais ils sout morts où ont été tués sans perpétuer leur 
race. Les expériences ont presque généralement avorté, ou donné à peine 
quelques résultats. Un gentleman américain demanda, dans notre journal, 
il ya peu de temps, ce qui était advenu de quelques grandes importations 
de ces oiseaux, faites en Angleterre par des marchands de New-York. Mais 
nous confessons que nous n'avons jamais entendu parler d’aucune importation 
approchant d’un pareil nombre. On en a à peine introduit quelques couples. 
L'offre du major Bates est une occasion favorable de faire l'épreuve sur 
une grande échelle, et beaucoup de nos lecteurs seront sans doute charmés 
que nous leur en ayons donné connaissance. (Field du 10 janvier 1874.) 


Sur lintroduction proposée du Tétras huppecol 
(Tetrao cupido). 


Relativemeat à la proposition d'introduction du Tétras cupidon américain, 
je peux mentionner que cette expérience a été essayvée, à plusieurs reprises, 
mais toujours sans succès. Îl y a quelques jours à peine, je causais, à ce 
sujet, avec M. Gould, et il me disait qu’il s'était lui-même parfaitement con- 
vaincu de l’impossibilité d’acclimater ce Coq de bruyère en Angleterre, à 
moins, disait-il, qu'on ne puisse introduire, en même temps, une ceniaine 
de mille carrés de prairies appropriées à la nourriture de ces oiseaux. Et 
en lisant l'ouvrage récemment publié de M. Gouid, sur les oiseaux de la 
Grande-Bretagne, j’y trouve cette même opinion exprimée par lui en ces 
termes : 

« On a souvent essayé d'introduire certaines espèces dont l'acquisition 
» était regardée comme désirable. Ges essais ont généralement été inutiles, 
» La nature ayant généralement approprié chaque espèce à une certaine 
» localité, il faudrait que le climat et la nature de la contrée où des ani- 
» maux nouveaux seraient introduits fussent changés et rendus propres à 
» la nature de ces animaux, pour qu'il y eût à cetteintroduction la moindre 
» chance du succès. 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 59 


» On a souvent voulu établir les Poules des prairies du nord de l’Amé- 
» rique dans nos bruyères, et la Perdrix américaine (Ortyxæ virginianus) 
» dans nos champs et dans nos hois. Mais que pouvait-il résulter de bon de 
» ces essais ? La Poule de prairie devait-elle prendre la place de nos grouses, 
» et la petite perdrix serait-elle une amélioration de nos espèces ordinaires ? 

» Non; il n’est pas à penser que ces tentatives puissent jamais êire 
» accomplies, et il est à désirer qu’on oublie ces rêves trompeurs. » 

Je suis parfaitement de l’avis de M. Gould. 

La Poule de prairie, au point de vue comestible, n’est pas égale à la 
grouse, et il est très-douteux qu’à défaut de sa nourriture naturelle qui con- 
siste principalement en baies de Gaultheria, la baie des arbustes ordinaires 
à notre perdrix commune lui réussisse toujours, si l'expérience est faite sur 
une grande quantité d'oiseaux. 

L’Ortvx, ou Colin de Virginie, a été Souvent envoyé dans nos contrées, 
el il y a toujours vécu à l’état sauvage. Mais sa chair est pâle, bien infé- 
rioure à celle de notre perdrix, et n’ayant pas l’arome du gibier. 


(Field du 24 janvier 1874.) TeGETMEIER, 


introduction proposée du Tétras eupidon. 


J'ai pris le plus grand intérêt à la correspondance insérée dans votre 
journal, relativement à l'introduction en Angleterre de ce charmant oiseau, 
le Tétras des prairies (Cupidonia cupido) ; et, d’après mes propres obser- 
vations, faites dans sa contrée natale, sur les habitudes de cet oiseau, je 
crois être sûr que si un beau lot était amené dans quelque vaste propriété 
bien gardée, composée de terres arables et de prairies, il réussirait et re- 
produirait. 

Avec la déférence qui est due à l'opinion du naturalisie si compétent, 
M. Gould, cité par M, Tegetmeier, dans sa lettre au Field de la semaine 
dernière, je ne puis penser qu’il soit nécessaire, pour faire réussir ces 
oiseaux, qu'ils aient un espace de cent milles de prairies, ayant moi-même 
tiré sur des vingtaines de ces oiseaux dans des fermes des États de Wisconsin 
et de Minnesota, dont le climat, en hiver, est souvent très-rude, 

Quant à transporter ces Coqs de bruyère en Angleterre et en Écosse, per- 
sonne, connaissant ces habitudes de ces oiseaux, ne saurait douter que leur 
introduction dans ces îles ne püt définitivement réussir. Je voudrais voir 
des expériences résoläment faites, et je suis persuadé qu’elles réussiraient, 
et que ces oiseaux feraient une importante addition à la liste de nos gibiers 
et seraient un agréable sport. Je pense que toute personne ayant un beau 
lot de ces oiseaux à tirer sera de mon avis, 

(Field du 31 janvier 4874.) SETTER. 


8h SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Gibier pour les friches du Hampsire. 


Bien qu’une autorité comme celle de M. Tegetmeier paraisse coneluante 
sur l'impossibilité d'introduire les Tétras huppecols d'Amérique en Angle- 
terre, et sur l’inutilité d'essayer de supplanter notre gibier ordinaire, gibier 
vraiment meilleur, cependant nous avons, dans le sud de l’Angleterre, des 
centaines et des milliers d’acres de bruyères stériles et de marécages sur 
lesquels il y a eu des Coqs de bruyère ordinaires autrefois, et qui n’existent 
plus. e 

Nous serions vraiment désireux de voir quelque oiseau valant le coup de 
fusil occuper ces déserts, 

La Grouse commune a été essayé souvent ; mais elle ne peut pas y vivre, 
J’ai longiemps désiré y voir introduire les Tétras de Scandinavie. D’après 
ce que j'ai entendu dire, n'ayant pas visité moi-même la Norvége, je crois 
qu'avec un peu d'aide il y aurait chance d’acclimater ces espèces de gibier 
daus le Hants et le Dorset, s’il y avait des tentatives sur les terres de la 
Couronne ei sur celles des grands propriétaires fonciers. (The Field.) 


FRÉDÉRIC FANE. 


L’'Asclepiaæs syriacc. 


M. Fréd. Poux a présenté à la Société helvétique des sciences naturelles, 
dans sa session de 1873, des échaniillons de deux plantes textiles, l’Alfa et 
l’Asclepias syriaca L., qw’on peut utiliser pour la fabrication du papier. L’Alfa 
ou Stipa tenacissima,une graminée vivace, abondante en Espagne et surtout 
en Algérie, donne lieu depuis 1870 à un commerce important et alimente 
déjà de grandes papeteries anglaises; mais c’est surtout sur l’Asclepias 
syriaca que M. Roux voudrait attirer l'attention des cultivateurs, parce 
qu’elle pourrait plus aisément s’acclimater en Suisse, et qu’elle y deviendrait 
pour l’industrie une acquisition précieuse. Introduite à Nyon, il y a quelques 
années, dans la propriété de M.Roux, elle s’y est propagée rapidement, 
même à travers des couches assez profondes de graviers et malgré Îles soins 
qu’on a pris pour l’extirper. 

L’A.syriaca est originaire de l'Amérique du Nord, et non de la Syrie, 
comme son nom pourrait le faire croire. C’est une plante vivace dont les tiges 
annuelles, herbacées, s'élèvent jusqu’à six pieds. Ces tiges, outre qu’elles 
ont deux ou trois fois l'épaisseur de celles du Chanvre, présente une couche 
de tissu fibreux proportionnellement plus forte, et si nous établissons un 
parallèle entre ces deux plantes, nous voyons que l'avantage est à l’Asclepias. 
En effet, le Chanvre, plante annuelle, Gioïque, exige pour sa culture le meil- 
leur terrain, beaucoup de soins et d'engrais; il produit des tiges relative- 
ment minces, recouvertes d’une coùche de fibres assez minces aussi, 
et en plus sa graine est nue. L’Asclepias est une plante vivace très-rustique, 


Êr 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 85 


hermaphrodite, se développant presque sans soins ni engrais dans les ter- 
rains graveleux peu propres à d’autres cultures; elle fournit un précieux 
aliment aux abeilles, ses tiges épaisses sont recouvertes d’une couche épaisse 
aussi de tissu fibreux, et enfin dans les aigrettes de ses graines elle offre un 
édredon végétal qui aura bien sa valeur comme garniture de coussins et de 
duvets. 


La laque, manière de l’obtenir, préparation et 
application des vernis. 


Les Chinois ont une très-grande aptitude en ce qui concerne le travail du 
bois; dont ils savent tirer, pour toutes sortes d'ouvrages, un parti aussi 
utile qu’ingénieux. Sans parler de l'emploi considérable qu'ils en font en ar- 
chitecture, pour les colonnes, les lambris, les superbes toitures de leurs 
monuments publics, des palais des princes et des demeures des particuliers: 
opulents, ils ont un merveilleux talent pour en fabriquer des meubles de 
tout genre, des objets de fantaisie, tels que boîtes et coffrets, ornés de des- 
sins aux plus riches couleurs ou d’admirables incrustations d'ivoire, de nacre 
ou de tout autre matière, et toujours brillant de ce beau vernis dont la 
transparence et le poli sont inimitables. {ls utilisent de la sorte toutes les 
essences de bois, les plus rares comme les plus communes ; il n’est pas jus- 
qu’au bambou, dont leur sol ahonde, qu’ils n’emploient en des milliers d’ou- 
vrages utiles, vulgaires ou charmants. 

On a cru pendant longtemps que la laque, ce beau vernis que l’Europe 
envie à la Chine et au Japon, était une composition particulière dont les 
peuples de ces contrées avaient le secret. Les missionnaires catholiques, et 
particulièrement le P. d’Incarville nous ont appris les premiers que cette 
liqueur précieuse, qui donne tant de lustre et d'éclat aux ouvrages en bois, 
n’est autre chose qu’une espèce de résine de couleur roussâtre qu’on extrait 
par incision d’un arbre indigène des provinces de Ssetchouen, de Kiang-si, 
de Tche-kiang, de Ho-nam, en Chine et de celles d’Itsikoka, de Figo et de 
Jamatto, au Japon, Le même P. d'Incarville nous a donné sur la manière de 
préparer les beaux vernis qu’on obtient de cette résine des renseignements 
aussi sûrs que précicux. 

La première opération, dès qu’on a extrait la résine de l'arbre à vernis, 
appelé ési-chou (Rhus vernicifera), consiste à débarrasser cette matière des 
parties aqueuses qu’elle contient. Pour obtenir ce résultat, il suflit d'exposer 
la résine au soleil et de la remuer durant deux ou trois heures avec une 
spatule de bois. Gelte évaporation est nécessaire pour donner à la laque sa 
belle transparance. Pour obienir les autres variétés de vernis connues de 
l'industrie chinoise, on mêle à cette substance première, pendant qu’on la 
manipule, les différents ingrédients propres à les produire. C’est ainsi que 
pour avoir le beau vernis ordinaire connu sous le nom de Kouang-tsi (vernis 


86 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


brillant), on joint à la résine du fri-chou du fiel de porc et du vitriol 


remain dissous dans un peu d’eau. Si l’on ajoute à ce premier vernis, dans . 


des proportions déterminées, du charbon d'os de cerf réduit en poudre, ou 
du noir d'ivoire, comme on l’expérimenta sur l'indication du P. d’Incarville, 
avec @e l'huile de thé siccative, on obtient le yang-tsi ou beau vernis noir 
des Japonais, dont les Chinois ignorèrent longtemps la composition. 

Le vernis blanc se fait avec des feuilles d'argent broyées ét pétries, mé- 
langées au vernis ordinaire; le cinnabre minéral ou la fleur de carthame 
réduite en laque, donne le vernis rouge ; l’orpiment seul, le vernis jaune et, 
mêlé à lindigo, le vernis vert; pour le vernis violet, on fait usage d’une cer- 
taine pierre de cette couleur appelée fsé-ché, réduite en poudre impalpable. 
Plus les pièces de vernis qu'embellissent ces couleurs sont anciennes, plus 
celles-ci acquièrent de beauté et de brillant. Le hoa-kintsi, autre vernis 
composé, est celui dont se servent les peintres pour appliquer les ornemenis 
d’or dont sont enrichis tant de charmants objets, que le luxe européen 
demande à la Chine. 

L'application du vernis exige les soins les plus minutieux, On commence 
d’abord par planer aussi parfaitement que possible le bois du meuble que 
l’on veut vernir; on dégage de même, s’il en est besoin, les rainures d’as- 
semblage, pour y introduire une fine étoupe qu’on recouvre ensuite d’un 
léger canevas de soie ou de papier; puis on enduit le meuble que l’on veut 
vernir d’une sorte‘d’huile que donne le fong-chou (Elæococca vernicifera), 
arbre qui croît sur les montagnes et dans les forêts élevées de la Chine; 
dès que cette huile est sèche on applique le vernis. Avec deux ou trois 
couches seulement, celui-ci conserve toute sa iransparence et laisse aper- 
cevoir toutes les veines et les nuances du bois ; il suffit pour déguiser la 
matière et le fond sur lequel on travaille, d'augmenter ie nombre des couches 
jusqu’à ce que la surface de l’ouvrage devienne éclatante et polie comme 
une glace. C’est sur ce fond brillant qu’on peint en or et en argent les di- 
verses figures dont on veut embellir le meuble. On leur donne de l'éclat et 
l’on assure leur conservation par une légère et dernière couche de vernis. 

Une autre manière de laquer le bois consiste à en recouvrir la surface 
d’une composition faile de papier, d’éloupe, de chaux et de quelques autres 
malières amalgamées. On forme avec cette espèce de pâte un fond solide et 
uni, auquel le vernis s’incorpore ; on l’y applique par couches légères, qu’on 
laisse sécher l’une après l’autre. 

L'application du vernis se fait au moyen d’un pinceau plat et à poils très- 
fins, qu'on promène d’abord en tout sens sur l’ouvrage en appuyant égale- 
ment partout, mais qu’on passe ensuite dans le même sens et avec légèreté 
en finissant ; chaque couche de vernis ne doit avoir tout au plus que l’épais- 
seur de la plus mince feuille de papier, autrement, il s’y formerait des rides 
et des gercures, difficiles à faire disparaître ensuite, Les ouvriers chargés de 
ce travail ferment leur atelier hermétiquement de tous côtés, pour éviter 
que la poussière, en voltigeant du dehors, ne vienne gâter l’ouvrage; ils 


Ps 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 87 


poussent leurs précautions même jusqu’à n’entrer dans ce laboratoire que 
dépouillés de leurs vêtements, à l'exception d’un simple et léger calecon. 
Contrairement encore à ce qui'se pratique en Europe, on choisit pour sécher 
les pièces de vernis un lieu plutôt humide que sec. Les ouvriers chinois sont 
ingénieux dans l'emploi des moyens propres à maintenir la température dans 
leurs séchoirs au degré qui convient; aucun soin, du reste, ne leur paraît 
superflu pour réussir dans leur travail. 

Dès qu’une couche de vernis est suffisamment sèche, il faut faire dispa- 
raître, au moyen du polissage, les inégalités, même les plus légères, qui 
pourraient s’y trouver. On y parvient à l’aide d’un brunissoir fait d’une pâte 
durcie, composée d’un mélange de poudre. de brique extrêmement fine, 
d'huile {ong-yeou, de sang de cochon, d’eau de chaux et de fou-tsé, espèce 
particulière de terre très-commune en Chine. On se garde bien de toucher 
avec le polissoir à la dernière couche de vernis. Autrement, of nuirait à 
son éclat, car c’est de cette couche finale que dépend toute la perfection de 
l'ouvrage. Aussi, pour l'appliquer, redouble-t-on de soins et d’attention, afin 
que nul corps étranger, aucun atome de poussière n’en macule la brillante 
surface, 

La partie artistique du travail des ouvrages en laque consiste à les embel- 
lir de riches ornements avec l’or et les couleurs. Les dessins er or sont géné- 
ralement ceux que les Chinois préfèrent ; et leurs ouvriers décorateurs, grâce 
à la patiente minutie et à la finesse originale qui caractérisent leur talent, 
réussissent presque toujours à les exécuter avec une rare perfection. Pour 
tracer ces dessins, l’artiste chinois commence d’abord par esquisser sur le 
bois laqué, avec un pinceau blanchi de céruse, le sujet désigné; s’il juge son 
croquis satisfaisant, il en marque les contours avec une pointe d’acier très- 
fine, et trace alors tous les autres détails. Mais le plus souvent, il jette au 
crayon les premiers trails de son dessin sur le papier : il le termine ensuite 
au pinceau avec l'encre de Chine. Ge dessin passe tel aux mains des élèves 
ou apprentis de l'atelier, chargés d’en suivre tous les traits avec de l’orpi- 
ment délayé dans de l’eau. Dès qu’ils ont achevé ce travail, ils appliquent 


immédiatement sur la pièce de vernis ce dessin fraîchement colorié, et 


passent légèrement la main sur le papier, pour que tous les traits du dessin 
s’impriment et restent marqués sur la pièce. 

Après avoir enlevé le papier, ils repassent au pinceau avec de l’orpiment 
ou du vermillon, délayés dans une eau gommée, toutes les lignes du dessin. 
Ainsi fixé sur la laque celui-ci ne peut plus s’effacer. On en couvre de nou- 
veau les traits avec le hoa-kin-tsi, Ge vernis, qu’on a rendu plus liquide par 
addition d’un peu de camphre, devient en séchant un mordant destiné à 
recevoir l’or en coquille. On applique celui-ci en passant mollement sur tout 
le dessin un tampon chargé de cette riche poussière. I] suffit ensuite d’essuyer 
légèrement la pièce pour voir lor briller sur chaque linéament du dessin 
primitif. 

Lorsque les peintres en laque veulent obtenir des reliefs, comme ils sont 


L 


88 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


dans l’asage de le faire pour représenter les inégalités du tronc, les côtes et 
les nervures des arbres et des plantes, ils se contentent d’appliquer sur la 
première couche d’or une nouvelle couche de mordant et d’y passer à plu- 
sieurs reprises de l'or en coquille, jusqu'à ce qu’ils aient obtenu les lignes 
saillantes qu'ils désirent. Ils tracent au pinceau les ïignes qui dessinent les 
yeux, la bouche, la coiffure, les détails des costumes des personnages, cer- 
taines parties des paysages, en un mot, tous les ornements en miniature dont 
ils enjolivent leurs belles laques dorées. 

Quelque fini précieux, quelque délicatesse que mettent les Chinois dans 
leurs dessins en or, leurs pièces de vernis sont cependant jugés inférieures à 
celles du Japon. Le vernis transparent de Ja Chine, de teinte toujours un peu 
jaune, n’a ni la beauté, ni l'éclat du vernis japonais, transparent comme 
l’eau la plus pure. 

Le célèbre empereur Kang-hi, aussi ami des beaux-arts que connaisseur 
hors ligne, convenait lui-même de la supériorité des pièces de vernis du Ja- 
pon; mais il l’attribuait à une cause naturelle, et à une supériorité d’indus- 
trie. « L'application du vernis, dit ce prince, demande un air doux, frais, 
» humide et serein; celui de la Chine est rarement tempéré, et presque 
» toujours Chaud ou froid, ou chargé de poussière et de sels. Voilà pourquoi 
» les pièces de vernis qu’on y fait n’ont pas l'éclat de celles du Japon, qui, 
» étant au milieu de la mer, a un air plus propre à faire sécher le vernis 
» sans le rider, ni le ternir. » 

Ce prince attribuait aux mêmes causes ia beauté des vernis dont brillaient 
quelques meubles de l’Europe mêlés parmi les présents qu'il en avait recus. 
On sait assez généralement, en effet, que l’atmosphère de la Chine est 
souvent surchargée d’une poussière de sable que le vent, par un temps sec, 
transporte et fait pénétrer partout, et qui, mêlé à l’eau du ciel, tombe parfois 
en véritable pluie de boue. Il est donc très-possible qu'il y eût dans l’opi- 
nion du Louis XIV chinois plus de justesse d'observation que de jalousie 
nationale, (Extrait du Courrier de Saïqon.) 


Les pêcheries du Canada. 


Il est publié tous les ans un rapport officiel sur la situation des pêcheries 
canadiennes; celui qui vient de paraître pour l’année 1872 renferme quel- 
ques renseignements intéressants à enregistrer. Il paraît que chaque branche 
de l'industrie des pêches est, au Canada, l’objet d’une surveillance rigou- 
reuse ; l’année dernière, on n’a pas dépensé moins de 43683 dollars pour 
assurer l'exécution des lois et règlements concernant cette importante indus- 
trie. Huit navires ont été constamment occupés à l'inspection, tant de 
l'embouchure du Saint-Laurent que des côtes de Terre-Neuve et du Ea- 
brador. 

Le produit total des pêches du Canada s’est élevé, en 1872, à 9570146 dol- 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 89 


lars, donnant une augmentalion de 33 pour 100 sur l’année 1870. Les 
diverses espèces de poissons figurent dans ce total pour les sommes sui- 
vantes : , 


MORE PER ee. à 82/1,410 quintaux. Valeur. 3,490,188 dollars. 
Maquereaux ....... 119,809 barils. 4,675,212 » 
ARE EE 990,857 » 1,308,906  » 
SAUMONS 0... . 118727) 116,645 » 
HIER M... 7,586  » 60,688 » 
Whitefish (Corego- 

MASNGIDUS) EN IE 17,490 » 143,520  » 
Auires espèces el 

huile de poisson... H,466  » 2,475,557 » 


Environ 1000 navires pontés et 47 000 barques ont été employés à la 
pêche, occupant un personnel qui dépasse certainement 20 000 individus. 

Les chiffres ci-dessus ne comprennent point le produit des pêcheries du 
Manitobah et de la Colombie britannique, provinces dont les rivières sont 
d’une telle richesse en poisson, qu’elles n’ont été soumises à aucun règle- 
ment, à aucune surveillance ; aussi ne possède-t-on sur leur rendement que 
des données approximatives. 

Le Manitobah est réputé pour l'excellente qualité de son « Whitefish » 
(Coregonus albus), qui y est fort abondant. I pèse généralement de 3 à A livres: 
mais il n’est pas rare toutefois d’en voir de 10 ou 42 livres. On estime à 
70000 à 80 000 le nombre de poissons de cette espèce pêchés annuellement 
par les pêcheurs de profession, dans le lac Winnipeg ; quant aux Indiens et 
aux métis, qui habitent les bords du lac, sur un développement de 2/40 milles 
au moins, ils en consomment certainement de 40000 à 50 000 ; enfin, les 
employés de la Compagnie de la baie d’Budson en pêchent bien aussi une 
trentaine de mille. La Truite, le Brochet, ainsi qu’un poisson connu dans le 
pays sous le nom d’ « OEil doré », et qui ressemble assez au Hareng, sont 
également des espèces fort abondantes dans les lacs et rivières de cette 
province. 

La Colombie britannique paraît surpasser toutes les autres contrées connues 
par la variété et l'abondance de sa faune ichthyologique. La Truite, le Sau= 
mon (de plusieurs espèces), le White-fish, la Lotte où « morue d’eau douce», 
la Carpe, l’Esturgeon, l’Oulachan, la Morue, le Merlan, et plusieurs autres 
espèces de Gades, l’Éperlan, le Elet, le Flétan, le Hareng, la Sardine, l’An- 
chois, les Huîtres, les Moules, les Bucardes, les Grabes et les Crevettes, les 
Baleines et les Phoques y pullulent; mais on n’y trouve, chose assez 
remarquable, ni Brochets, ni Homards. 

La pêche de la Baleine prospère sur la côte occidentale, tandis qu’elle est 
presque éteinte sur la côte orientale, sans doute par suite d’une exploitation 
abusive. Du reste, dans ces parages, la campagne de 1872 a été peu fruc- 
tueuse, tant par suite des gros temps, que pour diverses autres causes. 


60 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATIOR. 


Dans quelques lacs de l’intérieur les pêcheries de Coregonus albus ont été 
ruinées par l’emploi des « filets d’étangs », sorte d’engin fort destructeur et 
qui, d’ailleurs, entrave la reproduction. Ges filets sont ordinairement relevés 
chaque jour ; mais il arrive quelquefois qu’on est fort longtemps sans les 
visiter: de sorte que le poisson capturé y meurt, et putréfie l’eau dans un 
grand rayon. 

Les bancs d’huîtres de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve, naguère 
très-productifs, sont aujourd’hui presque complétement épuisés; on propose 
d’en interdire l’exploitation pendant trois ans, dans l’espoir de les voir se 
reconstituer, et l’on désirerait que l’ostéiculture fût pratiquée sur les côtes, 
pour venir en aide aux ressources naturelles. 

L’Esturgeon n'est point exploité comme il pourrait l'être; on devrait 
essayer la préparation de lichthyocolle sur une large échelle, et rien ne paraît 
s'opposer à ce que le caviar vienne s'ajouter à la liste des conserves diverse 
de poisson que nous tirons d'Amérique. 

En ce qui concerne la Morue, il paraît que la quantité pêchée chaque 
année va en augmentant; des recherches sont faites sur la nourriture habi- 
tuelle de cette précieuse espèce, sur sa manière de frayer, et ses habitudes 
en général, Un tort considérable est fait aux pêcheries par la coutume que 
l’on a de rejeter à la mer les entrailles de morue et autres déchets de pêche; 
en se décomposant, ces matières infectent l’eau et éloignent le poisson. Ces 
déchets sont un embarras pour le pêcheur; mais on a proposé de les utili- 
ser comme engrais, et, dans ce but, d'employer de la terre à bord des ba- 
teaux, comme désinfectant. Ce procédé présente sans doute l'inconvénient 
de réduire l’espace affecté à la cargaison ; mais il y a lieu de croire que cet 
inconvénient serait très-largement compensé par la pêche plus fructueuse 
qui résulterait de la plus grande pureté de l’eau. 

On est généralement d'avis que le poisson tué et saigné aussitôt que pêché 
est meilleur que celui qu’on laisse mourir au fond du bateau. La méthode 
hollandaise, considérée comme la préférable de toutes, consiste à trancher 
avec un couteau la moelle épinière el les artères du cou, juste derrière la 
tête. On désirerait la voir adopter par les pêcheurs du Bas-Canada, qui lais- 
sent leurs morues s’asphyxier lentement, et souvent en plein soleil, Le même 
reproche pourrait être fait aux pêcheurs de Saumon. 

D'utiles tables pluviométriques et thermométriques ont été dressées cette 
année, sur divers points de l'État, et l’on s’est occupé activement de travaux 
de sondage dans le golfe Saint-Laurent, tant pour reconnaître la nature des 
fonds que pour y étudier la faune et la flore maritimes. 

La question de la souillure des rivières a fixé l'attention de l’administra- 
tion; on a constaté que plusieurs cours d’eau avaient perdu de leur fertilité 
par suite du voisinage d'établissements industriels qui y déversent des eaux 
sales ou autres résidus. 

La destruction du poisson causée par l'emploi des filets traînants est aussi 
une question dont on se préoccupe; on craint que ces pêches épuisantes, 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 91 


pratiquées pour satisfaire à une exportation considérable, ne finissent par 
ruiner les fonds les plus poissonneux. 

Des quantités considérables de Homards sont pêchées chaque année sur 
.es côtes de Terre-Neuve et du Nouveau-Brunswick pour la préparation de 
conserves en boîtes. Il en résulte une diminution sensible dans l’abondance 
de ces crustacés ; aussi l'autorité songe-t-elle à prohiber cette pêche pendant 
une partie de l’année. 

Il est également question de réviser loutes les lois sur la pêche actuelle- 
ment en vigueur dans les diverses parties de l'État, et de prendre, avec le 
gouvernement des États-Unis, des dispositions communes pour les deux rives 
des cours d’eau et des lacs séparant les possessions anglaises des États de 
l’Union. : 

Depuis la promulgation des lois sur la pêche, dans la Nouvelle-Écosse et 
le Nouveau-Brunswick, plus de 100 échelles à poisson ont été construites, 
occasionnant une dépense de 8200 dollars, presque entièrement supportée 
par les propriétaires de moulins. Dans l'Ontario et la province de Québec, il 
en a été établi environ 80, au prix total de 13 184 dollars. 

L'élevage artificiel du Saumon et du « White fish » a été pratiqué sur une 
large échelle et un nouvel établissement vient d’être construit par le gou- 
vernemeni sur la rivière Restigouche. Get établissement, qui a coûté 4109 dol- 
_ars, pourra largement faire éclore un million d'œufs tous les ans. 

Un grand nombre d’alevins et d'œufs fécondés ont été distribués dans 
tout le pays. Le mode de fécondation généralement employé est celui connu 
sous le nom de méthode sèche, c'est-à-dire que la laitance est versée sur 
les œufs placés sans eau dans un vase. 

Le rapport officiel conclut en se félicitant de l’application du système 
protecteur, qui assure un accroissement de propriété aux pêcheries du 
Saint-Laurent et de l’intérieur des terres, aussi bien qu’à celles des côtes. 


RAVERET-WATTEL. 


Chronique d'Amérique. 


Produits d'exportation du Pérou. — L’exploitation de produits résineux aux États- 
Unis. — Les usages du bois de Pin. — Statistique des produits de ferme de 
l'Union. — La Société des apiculteurs de l'Amérique du Nord, — Le tannage 
des peaux d’Écureuils. — La Société d’acclimatation de Cincinnati. — La pro- 
Lection due aux oiseaux. — De l’utilité des Crapauds. — Le Rhododendron ca- 
lifornien. 


Le sucre est, sous beaucoup de rapports, le produit le plus important du 
Pérou. M. James Orton, dans un‘travail sur les exportations de ce pays, 
s'étend avec complaisance sur la beauté des champs de canne qui couvrent 
la côte, partout où le sol est humecté par des cours d’eau naturels ou par 
des canaux d'irrigation. Les régions qui exportent le plus sont celles d’Éten, 
de Pacasmayo, de Malabrigo, de Huanchaco, de Chancay et de Pisco. On 


92 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


cultive dans l’intérieur, à Abancay, une canpe de qualité supérieure, dont 
le produit est envoyé en Bolivie. À Guadalupe, auprès de Pacasmayo, il existe 
de petites cultures de café très-vanté. Cette qualité lui vient de ce que la 
plante est cultivée à l'ombre et avec un soin extrême. Ce café, qui porte le 
nom de Goyburu, se vend un demi-dollar la livre sur le lieu de production. 
On fait un choix es plus pelits grains qui vaut le double, mais qui n’est 
pas dans le commerce. On récolte aussi de beaux cafés dans le Huanuco et 
l’Urubamba. Cette dernière province a presque le monopole de la culture du 
coca (Erythroæylon coca), elle en approvisionne les départements de Cuzco, 
de Puno et d’Arequipa. On le regarde toutefois comme inférieur au coca 
d’Yungas en Bolivie. La cascarille est de moins en moins abondante ; il faut 
aujourd’hui aller loin dans l’intérieur des terres pour trouver cette écorce. 
La plus grande partie vient maintenant de la Bolivie par l'Amazone. 

Après le guano et le sucre, la laine d’alpaca est l’article dont l’exportalion 
est la plus considérable. Elle vient tout entière des départements d2 Puno 
et de Cuzco, mais Arequipa est le grand centre de ce commerce. Les alpa- 
cas prospèrent à merveille sur les plateaux marécageux et presque dénudés, 
situés à des altitudes de 4000 à 5000 mètres. La tonte commence au milieu 
de décembre ; mais l'animal n’est tondu qu’une fois chaque deux ou trois 


ans. Les toisons de trois ans sont naturellement les meilléures et aussi les 


plus chères. Elles valent aujourd’hui 70 dollars le quintal à Arequipa. La 
laine de vigogne en vaut 100, mais il s’en exporte peu. 

La laine de mouton du Pérou (cholc) est de qualité inférieure au «mes- 
tigo » de la République Argentine. Elle s’exporie d’Arica et d’Islay. IH sert 
annuellement de Payta, pour les États-Unis, environ 4000 peaux de chèvres 
et quelques peaux de chinchilla d'Arica. 

Le nitrate de soude fait une rude concurrence au guano; on le trouve 
dans la province de Tarapaca et surtout dans la Pampa del Tamorugal. Mêlé 
au guano, le «caliche », comme on l'appelle à l’état brut, est le meïlleur des 
engrais pour la culture des céréales. Dans le dépôt de La Pena Grande, des 
oiseaux fossiles ont été découverts à 3 mètres de profondeur, 


Les immenses forêts de pins des États-Unis alimentent de produit résineux 
une grande partie du continent européen. Bien que les exportations n’aient 
pas atteint, depuis la guerre de la Sécession, les chiffres qu’elles avaient en 
4860, l’industrie des résines, térébenthine, goudron, etc., est en voie de 
progrès constant et elle est appelée à prendre un développement immense. 
Les documents publiés par le ministère du commerce fournissent sur ces 
points des renseignements pleins d'intérêt. Les marchés principaux pour 
l'exportation des résines américaines sont Welmington (Caroline du Nord), 
qui centralise aujourd’hui la plupart des commandes de l’Europe, Charleston 
(Caroline du Sud), Savannah (Géorgie), Jacksonville (Floride). Beaucoup 
d’affaires se font aussi à New-York. 

Le début de cette industrie est due en partie à des colons d’origine alle- 


DT PA 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 93 


mande. Possesseurs de petits lots qu'ils cultivaient de leurs mains, ils 
cherchaïent naturellement à tirer partie de toutes les ressources du sol, que 
dédaignaient les grands propriétaires. La culture du coton laissée exclusi- 
vement aux soins des noirs tenait ceux-ci étrangers à l'exploitation des pro- 
duits résineux. Quand éclata la guerre de la Sécession, l’industrie des résines, 
de prospère qu’elle était, fut rapidement entravée et sevrée de ses débouchés 
en Europe. Toutefois, depuis huit ans, les distilleries américaines se sont 
relevées de leurs ruines. La division du sol, en multipliant les petites pro- 
priétés, a donné un nouvel essort à l’exploitation du produit des pins. Beau- 
coup d’anciens planteurs dépossédés ou ne se suffisant plus avec le coton, 
ont porté leurs vues de ce côté. Le champ d’ailleurs sur lequei les Améri- 
cains peuvent s'exercer est immense ; les forêts de pins couvrent, sur une 
profondeur variant de 150 à 200 kilomèires, les rivages des deux Carolines, 
de la Géorgie, de la Floride et de l’Alabama, de la baie de Chesapeake à 
celle de Mobile. 

Les arbres résineux les plus appréciés sont les « Pinus australis, serotina, 
cæda, strobus et rigida».En général, c’est dans le voisinage des chemins de 
fer que s’établissent les exploitations et les distilleries. Le transport des pro- 
duits est alors plus facile et moins coûteux. Quand, au bout de quelques 
années, ous les arbres ont plus ou moins souffert des saignées qu’on y pra- 
tique, la distillerie se transporte sur un autre point non encore exploité, et, 
comme les lignes de fer se multiplient partout, le choix d’un nouveau site 
n’est jamais embarrassant. En ce moment, on tend en général vers le sud- 
ouest : Caroline du Sud, Géorgie et Floride, 

On sait quel arbre précieux à tous égards est le pin; son bois est très 
recherché aux États-Unis pour les chemins de fer et tousles genres de con« 
struction. La presque totalité des maisons de la Floride, des Carolines et de 
la Géorgie sont entièrement bâties en planches provenant du « Pinus aus- 
tralis »; le « Cupressus disticha » fournit, lai, tous les bardeaux de la toi- 
iure. C’est aussi le « Pinus australis » qui entre pour la plus grande part 
dans les différentes pièces des constructions navales. Le « Pinus mitis », qui 
zxoît en abondance dans les États du Nord, a contribué plus qu'aucun autre 
bais à l'édification de New-York, de Philadelphie, de Washington, de Balti- 
more. Le « Pinus cœæda » a été employé largement dans la construction des ‘ 
quais de Charleston etle « Pinus sirobus » dans celle des superbes ponts de 
bois du Schykih à Philadelphie et de Trenton sur la Delaware, ainsi que 
des ponts de 1000 mètres et de 187 mètres qui unissent Boston à Char- 
leston, 

Le « Pinus strobus » est celui des arbres résineux qui résiste le plus eff- 
cacement aux alternatives de la chaleur et de l'humidité. On le tient en 
grande estime dans toute la Nouvelle-Angleterre et les Américains en font 
une exportation considérable en Europe. Malgré cet emploi à outrance des 
bois de pin, rien ne décèle encore la moindre diminution de cette précieuse 
essence dans les richesses forestières de l’Union, 


9} SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


Sous la main active de l’homme, la nature se montre prodigue dans ce 
pays privilégié qui réunit comme à plaisir tous les sols et tous les climats. Le 
tableau des produits de ferme aux États Unis a été dressé dans le dernierre- 
censement officiel en prenant pour base les statistiques des récoltes de 
1869. Les évaluations totales des produits de ferme pour l’année se sont 
élevées à 2447538658 dollars. La valeur des animaux abattus a été de 
399 millions de dollars ; produits des forêts, 37 millions ; jardinage, 24 mil- 
lions ; fruits, 47 millions; gages payés, 310 millions. Les principales ré- 
coiles ont été : 288 millions de boisseaux de blé ; 17 millions de Doisseaux 
de seigle; 767 millions de boisseaux de maïs ; 82) millions de boisseaux 
d'avoine; 30 millions de boisseaux d'orge ; 10 millions de boisseaux de blé 
noir ; 3 011 996 balles de coton (de 400 livres l’une); 27 millions de livres de 
lin ; 142 746 tonnes de chanvre ; 400 millions delivres de laine ; 27 millions 
4/2 de tonnes de foin; 74 millions de livres de houblon ; 253 millions de 
livres de tabac; 87 043 quintaux de sucre de canne : 28 millions de livres de 
sucre d'érable; 23 millions de gallons de mélasse ; 165 millions de bois- 
seaux de pommes de terre; 44 millions de livres de miel et 3 millions de 
gallons de vin, Le stock vivant est évalué à 4525 millions de dollars. Il y 
avait 8 millions de chevaux ei de muleis, 23 millions de bétail, 28 millions 
de moutons et 25 millions de porcs. Les produits des laiteries étaient de 
544 millions de livres de beurre, 53 millions de livres de fromage et 285 mil- 
lions de gallons de lait livré à la vente. 

Rappelons, pour qui voudrait faire la conversion de ces chiffres en équi- 
valenis français, que le dollar vaut 5 fr. 37 centimes; que.le boisseau 
(bushel) répond à 35 litres 24 centilitres; le gallon à 3 litres 78 centilitres ; 
la tonne (ton) à 1016 kilogrammes ; la livre à 373 grammes. 


La troisième réunion de la Société des apiculieurs de l'Amérique du Nord 
à eu lieu récemment à Louisville (Kentucky). Elle n’était pas nombreuse, 
comparée aux réunions des deux années précédentes. Un des membres a 
raconté la perte qu’il avait faite de trente essaims par suite de la singulière 
disparition des reines, enlevées par l’épidémie qui a sévi pendant l’année 
sur les abeilles et qui s’est montrée particulièrement fatale aux reines. 
Celles-ci mouraient des premières et très-peu de temps après l'invasion de 
Ja maladie dans la ruche. Cette affection a été le sujet d’une longue discus- 
sion générale et tous les avis ont été unanimes en faveur du sirop de sucre 
pur candi blanc à donner aux essaims comme nourriture pendant l'hiver, 
de préférence au dernier miel de Ja saison, Un membre a proposé d'y mé- 
langer une infusion de café faite dans la proportion de 1 litre de grains 
moulu pour 59 centilitres d’eau, ce qui nous semble donner un café bien 
concentré. Dans tous les cas, il se serait bien trouvé de ce trailément pour 
ses essaims, On a aussi fortement recommandé comme pâture à donner aux 
abeille le trèfle commun, jugé préférable au blanc et au rouge. Le public 
américain est enchanté, paraît-il, de rencontrer dans le miel qu’on lui vend en 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 95 


pot des fragments de rayons ; il croit trouver là une garantie de la pureté de 
la marchandise ; or c’est une erreur qu’il imporie de combattre Rà où elle 
se rencontre, et elle existe chez nous aussi bien qu’en Amérique. A la 
réunion de la Société dont nous parlons il a été nettement déclaré que les 
marchands qui font commerce de miel falsifié sont justement ceux qui ap- 
portent le plus de soin à y introduire ces fragments de rayons qui charment 
tant le consommateur. Avis aux acheteurs des deux mondes, 


En lisant, dans le dernier numéro du Bulletin, la communication d’un 
propriétaire de Chatillon-sur-Seine, relative aux dégâts commis dans ses 
plantations d’arbres résineux par les écureuils, dégâts tels qu’un arrêté pré- 
fecioral a dû autoriser la chasse de ces rongeurs en toute saison, nous nous 
sommes souvenu que les Américains de la Californie s’étaient mis à tanner 
les peaux d’écureuils et qu’ils tiraient de ce produit un profit très-respec- 
table. L’écureuil donne, paraît-il, un cuir ou, si l’on aime mieux, une peau 
remarquablement forte, très-propre à la fabrication des gants, dits gants de 
chevreau. La Russie, d’ailleurs, exporte de ces peaux en assez grande 
quantité, et l'Amérique en envoie quelque deux cent mille en Angleterre. 
À ce point de vue, l'élevage des écureuils pourrait devenir une industrie 
régulière, et loin de détruire ce joli petit animal, il faudrait en favoriser la 
multiplication. 


Îl s’est formé récemment à Cincinnati une Société d’acclimatation qui se 
propose surtout d'élever des oiseaux remarquables par leur chant et pré- 
cieux par les services qu'ils peuvent rendre aux fermiers et aux horticul- 
teurs. Au printemps dernier, la Société n’a pas dépensé moins de 25 000 fr. 
pour élever une quinzaine d'espèces différentes d'oiseaux. Elle a si bien 
acclimaté l’alouette d'Europe, que celle-ci se voit aujourd’hui en troupes 
nombreuses dans le voisinage’ de Cincinnati. Actuellement la Société tra- 
vaille à acclimater et à répandre la mésange, qui fait une grande consom- 
mation dinsectes nuisibies à la végétation. Nous n’en sommes pas encore là 
de ce côté-ci de l'Océan, et malgré les avis répétés de notre Bulletin et la pro- 
pagande de beaucoup de Sociétés agricoles, on persiste, dans un assez grand 
nombre encore de localités, à faire aux petits oiseaux une guerre d’exter- 
mination. Heureux quand cette incroyable erreur n’est pas encouragée par 
des primes, ainsi que nous l'avons vu faire plus d’une fois, comme sil 
s'agissait de loups ou de vipères. 


S’il est à propos de protéger les petits oiseaux en raison de leurs instincts 
insectivores, il ne l’est pas moins, on l’a dit bien avant nous, de couvrir de 
la même protection un autre animal utile aussi au même point de vue, mais 
d’un extérieur infiniment moins agréable. Le crapaud fait une consommation 
grande d'insectes de tout genre, particulièrement d'insectes nuisibles aux 
produits des potagers. Rien, paraît-il, ne rebute l'appétit de la hideuse bête 


96 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


ventrue. Un journal d’horticulture de New-York, qui prend chaudement la 
défense du crapaud, raconte qu’un certain M. Harris offrit à un crapaud de 
sa connaissance une vingtaine de punaises des espèces à odeur infecte «pu- 
naise des bois » et Pentatoma oleracea, que le batracien accepta avec une 
satisfaction évidente et qu’il mangea sans autre signe de répugnance que 
la «légère grimace » à laquelle l’obligeaient jes longues antennes filiformes 
de ces scutellériens en passant par son gosier. La ration de punaises épuisée, 
le crapaud fut placé au milieu d’une colonie de larves noirâtres, gluantes 
et longues d'un pouce, découvertes sous l'écorce d’un bouleau. Ge nouveau 
met ne lui parut pas moins délicieux et, ajoute le narrateur, « ce n’est 
qu'après s'être gorgé d'une centaine de ces créatures si peu appélissantes 
qu'il se retira dans son trou, où il dormit pendant quatre jours du sommeil 
du juste. » 


Le rhododendron de l’Orégon et de la Californie septentrionale (À. cali- 
fornicum) a été introduit en Angleterre vers 1850, mais personne alors ne 
paraissait lui accorder grande estime ni grande attention. Un horticulteur 
éminent de Sumingdale, M. Noble, fut à peu près le seul qui s’en soit servi 
pour l’hybridation. De ces essais naquit une belle espèce de rhododendrou 
au’on peut aujourd’hui recommander et qui garnit bien plus que le Rhodo- 
dendron panticum si largement employé. 11 ne donne pas d’ailleurs les 
pousses tardives de ce dernier, qui sont souvent nuisibles à la plante ; ses 
fleurs aussi sont d’un rose plus vif et il est très- vigoureux. En somme c’est 
une bonne acquisition que nos parterres doivent là à F Amérique. 


SCTAVE SACHOT. 


Le gérant : JULES GRISARD. 


PARIS: = IMPRIMERIE DE E., MARTINET, RUE MIGNON, 2. 


1. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 


SITUATION 


DE 


L'USAGE ALIMENTAIRE DE LA VIANDE DE CHEVAL 


Par M. DECROIX. 


Chaque année, vers cette époque, je me fais un devoir de 
donner quelques renseignements sur la consommation de la 
viande de cheval, en mémoire du fondateur de notre Société, 
J. Geoffroy Saint-Hilaire, et en reconnaissance de la partici- 
pation pécuniaire que la Société a prise le 20 janvier 1865 à 
la souscription ouverte par le Comité de la viande de cheval. 

Je ne chercherai pas à faire ressortir les qualités nutritives 
du nouel aliment, je me bornerai à résumer mon opinion en 
ces termes : la viande de cheval est à la viande de bœuf 
comme le pain de deuxième qualité est au pain de première 
qualité, moins agréable, mais plus saine et plus nourrissante, 
ce qui tient en partie aux fourrages plus sains et plus sub- 
stantiels donnés aux chevaux, et aussi à ce que, chez eux, 
l’engraissement n’est pas poussé, comme chez le bœuf, à un 
degré outré, prématuré et indigeste. 

Toutefois, il ne suffit pas qu'une substance soit propre à : 
l'alimentation; il faut surtout qu’elle soit acceptée comme 
telle. La viande de cheval a toujours eu les mêmes propriétés, 
cependant elle à élé rejetée de la consommation jusque dans 
ces derniers temps. 

C’est vers 1847 que notre fondateur a mis la question de 
l’hippophagie à l’ordre du jour en France, et c’est seulement 
en 1866, cinq ans après sa mort, que la première boucherie 


a élé établie à Paris. Mais une fois entrée dans le domaine 
3° SÉRIE, T. L. — Février 1874, 7 


98 SOCIËTÉ D'ACCLIMATATION. 


public, la viande de cheval a été de plus en plus estimée, et sa 
consommation a sans cesse augmenté, ainsi que le démon- 
tre la statistique authentique ci-dessous. 


On a livré à la boucherie, à Paris seulement : 


s ENS OO PE RE EE ÉRS-MeARE 2758 — 
En1870 2 CRETE 0732 — 
“ PAS TO CREER SY7ARES 2" (P) 


Dans ce chiffre de 8977, sont compris 1092 ânes et 51 mu- 
lets ; les trois espèces réunies ont donné 1552750 kilog. de 
viande netle, c’est-à-dire sans la cervelle, la langue, le cœur, 
:4É 0 le foie, etc., qui sont aussi consommés comme ceux du bœuf. 

Ï y avait à Paris, au 4° janvier 1874, quarante-huit bou- 

cheries chevalines, et c22g dans la banlieue. (Pour les adresses, 
“4 voir page 404.) Au 1% janvier 1575, il y en avait quarante. 
à Comme pour la boucherie bovine, il y a des industriels qui 
% ferment leurs établissements, d’autres qui en ouvrent de nou- 
‘4 veaux, de sorte que d'année en année il y a des. variations. 
Rappelons, au point de vue culinaire, que la viande de che- 
yal se prépare à toute sauce comme la viande de bœuf, dont 
4. elle est une précieuse succédanée (1). 
4 Les causes de la livraison des animaux à la boucherie sont, 
6e.. 0 par ordre de fréquence : vieillesse, boiterie, efforts, fractu- 
ne res, pousse, cornage, rectivité, cécité, et autres accidents 
Ne n’altérant pas les qualités de la viande. Une lettre que nous 
Le adresse M. Paruit, médecin-vélérinaire à Charleville, nous 
“à montre que les choses se passent partout de même, 

En province, l’hippophagie est également en progrés: 
mais le Comité de propagation n'a pas de chiffres officiels ; 
aussi a-t-il pris la décision, dans sa dernière séance, de prier 
F': M. le ministre de l’agriculture de demander à MM. les préfets 


(4) Nombre supérieur à celui des achats annuels de la remonte pour l’ar- 
-mée, avant la guerre contre l’Allemagne. 
(2) La description des différents modes de préparation culinaire à été in- 
ds sérée dans le Bulletin de la Société, 1870, p. 648. 


‘ 
A. à 
2 CNVEPERITANN “2g) DAS 


USAGE ALIMENTAIRE DE LA VIANDE DE CHEVAL. 99 


le nombre de boucheries existant dans leurs départements et 
la quantité de chevaux, ânes et mulets livrés à la consomma- 
tion en 1573. 

La fabrication du saucisson augmente également; dans 
toutes les boucheries de Paris on en trouve à un prix en rap- 
port avec la bourse des travailleurs (70 à 80 centimes la livre). 
La fabrique de M. Vincent Giraud, à Beaucaire (Gard), est 
incontestablement la plus importante de France : en 1872, 
elle a transformé en saucissons la chair de 400: chevaux ; en 
4873, le nombre s’est élevé à 500 chevaux. 

Rappelons que la viande de cheval peut être mise en con- 
serve comme la viande de bœuf. M. Couder, membre de notre 
Comité, est le premier, je crois, qui ait fait des conserves de 
cheval, en France, au moins ostensiblement. 

Il y a dans Paris quarante-huit boucheries chevalines, 
inspectées par des médecins-vétérinaires de ladministration. 
Le prix de la viande est à peu près moitié . celui du bœuf 
par morceaux correspondants. 

Les chevaux propres à l'alimentation, qui valaient autrefois 
30 à 50 francs pour l’équarrisseur, sont vendus maintenant 
de 130 à 150 francs en moyenne aux bouchers, qui trouvent 
leur avantage à les loger et à les nourrir convenablement 
pour avoir de bonne et belle, viande : d’où 1l ressort que la 
fortune publique est augmentée, par l’admission des chevaux 
dans le commerce de la boucherie, de 3 à 400 millions de 
francs pour la population chevaline de la France, et que nos 
ressources alimentaires, pour les 8 à 4 millions de chevaux. 
ânes et mulets, se sont accrues de 60 milliards de kilogrammes 
de viande sur pied. 

Le commerce des chevaux de boucherie s'établit peu à peu 
sur le même pied que celui des bœufs. Îl y à maintenant des 
marchands qui parcourent le pays et vont aux foires pour 
acheter et revendre ensuite les chevaux de boucherie. 

Le Comité de la viande de cheval continue à décerner de 
temps en temps des médailles d'honneur aux bouchers quise 
sont le plus distingués. 

HDernieement il a accordé une de ces médailles à M. Victor 


400 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Tétard, qui a établi six boucheries, un abattoir spécial et 
deux bonnes écuries pour son industrie. 

Maloré l’insuffisance de la viande dans l’alimentation publi- 
que, plusieurs contrées laissent encore perdre la viande de 
cheval; toutefois, l'exemple de ce qui se passe en France 
commence à fixer l'attention, ainsi qu’on peut en juger par le 
fait suivant : 

A la suite d’un entretien sur l'hippophagie, avec des per- 
sonnes américaines et anglaises, il fut convenu qu’un dîner 
de viande de cheval aurait licu chez moi. 

Voici le menu : potage à la viande de cheval, bouili de 
cheval, saucisson de cheval, cheval à la mode, langue de che- 
val braisée, pommes de terre frites à la graisse de cheval, 
rôui de cheval, salade à l’huile de cheval, beignets de pommes 
à la graisse de cheval. (Pas de poisson, pas de volailles.) 

Parmi les convives se trouvaient plusieurs dames de l’Amé- 
rique et de l’Angleterre, qui, parfaitement édifiées mainte- 
nant par leur propre expérience, vont contribuer, comme 
Pont déjà fait mes amis, M. le docteur Bowditch, de Boston, 
et M. S. A. Bicknell, de Londres, à propager dans leur pays 
usage d'un aliment sain, économique et très-nourrissant. 

Mais n'est-il pas à craindre que les boucheries hippiques 
ne diminuent d’une manière compromettante la population 
chevaline, déjà bien au-dessous des besoins du moment, sur- 
tout en chevaux de guerre ? 

Pour répondre à cette question, il faut connaître le nombre 
de chevaux livrés à la boucherie par toute la France, et le 
comparer à notre population chevaline. 

Disons d’abord que les bouchers ne peuvent employer pour 
leur industrie que des chevaux usés, tarés, dangereux, tra- 
vaillant mal, coûtant autant d'entretien que les bons chevaux, 
et dont, par conséquent, il y a avantage à se débarrasser 
pour faire manger les fourrages par les animaux se trouvant 
dans de meilleures conditions de rendement en travail, en 
chair, etc. 

Cela posé, passons aux investigations. 

Les boucheries chevalines de Paris ayant livré à la consom- 


USAGE ALIMENTAIRE DE LA VIANDE DE CHEVAL. 101 


mation 8977 chevaux, ânes et mulets en 1873, on peut bien 
admettre qu'en: province on en a livré 21 à 22000, soit, en 
chiffre rond, pour toute la France, environ 30 000 chevaux. 
Ce nombre est encore peu élevé, eu égard aux pertes par ma- 
ladies, accidents, vieillesse, qui sont annuellement, d'après 
M. le marquis de Croix, grand éleveur de la Normandie, de 
300 009 individus environ. | 

Voyons maintenant les statistiques officielles des chevaux, 
ânes et mulets, en remontant une trentaine d'années, afin de 
savoir si la population de nos solipèdes est en croissance ou 
en décroissance : 


Chevaux. Anes. Mulets. Totaux. 
1840.... 2 818 A96 h13 519 973 844 3 605 856 
1852.... 2 €66 054 380 180 315 831 3 562 065 
1862.... 291 A12 396 237 330 987 9 641 636 
1872.... 2 882-851 150 625 299 129 3 692 605 


En tenant compte de l'annexion de la Savoie, qui a 
augmenté le nombre des chevaux de 12568, et de la sup- 
pression de l’Alsace-Lorraine, qui en a diminué le nombre de 
78153, on constate, par le tableau ci-dessus, que la popula- 
tion chevaline de la France a auginenté, lentement, il est vrai, 
mais enfin a augmenté, entre le recensement de 1540 et celui 
de 4872, de 429 840 (1). 

La consommation de la viande de cheval peut donc faire 
encore de grands progrès sans que l’on ait à craindre de: 
porter atteinte à nos ressources en animaux de guerre et de 
travail; au contraire, la production répondant toujours, dit-on, 
à la demande, plus les bouchers diminueront le nombre des. 
chevaux hors de service, plus les bons chevaux seront abon- 
dants. Toutefois nous ferons ici une remarque importante. 


(1) La population bovine était, d’après les chiffres officiels ù 


En 1810 de.... 9 936 538 têtes. 
En 1852 de.... 13 954 294 — 
En 1862 de.... 12 811 589 — 
En 1872 de.... 11 28/1 &14 — 


En tenant compte des modifications du territoire, l'espèce bovine a dimi- 
nué, en vingt ans, de 4 600 000 têtes environ. 


402 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Pour produire de bons chevaux, il faut avoir de bons éta- 
lons et de bonnes juments. La France manque actuellement 
des uns et des autres; c'est un fait avéré, et l’on ne peut 
trouver à remonter convenablement la cavalerie, faute de 
trouver un nombre suffisant de chevaux de guerre. 

En présence de ceite pénurie, n'est-il pas bien regrettable 
de voir l'armée elle-même acheter les meilleurs étalons et les 
meilleures juments et les condamner à lastérilité ? 

Les bons étalons dont je veux parler se trouvent parmi les 


40 000 chevaux entiers achetés en Algérie pour les régiments 


de cavalerie légère. Je suis convaincu que l’on peut choisir 
dans ces chevaux des étalons susceptibles de donner de meil- 
leurs produits, pour la cavalerie et le trait léger, que les éta- 
lons ordinaires. 

Quant aux juments, chacun sait que celles que choisit la 
remonte sont, en général, les plus belles, les plus énergiques 
et les mieux conformées du pays ; que l’éleveur trop souvent 
ne conserve pour son usage que les juments refusées par les 
commissions de remonte. 

Pour éviter cetle pratique désastreuse, et favoriser la pro- 
duction du cheval de guerre, qui fait le plus défaut en France 
en ce moment, l'État doit puiser dans sa cavalerie les étalons 
dont il a besoin, l’industrie privée étant impuissante à les 
lui fournir. D'autre part, il doit laisser les juments dans Île 
-civil, comme cela a lieu en Algérie, ou bien les faire produire 
lui-même dans les régiments et vendre les poulains à l'âge 
de trois ou quatre mois. Mais ne nous écartons pas trop de 
notre sujet (1). 

Au point de vue de l'alimentation, la production du en 
autrefois simplement animal auxiliaire, mais aujourd'hui 
utilisé en outre comme animal alimentaire, doit être l’objet 
d’une grande sollicitude; on doit tendre à augmenter la po- 


(1) Les propositions ci-dessus sont développées dans une brochure inti- 
tulée : Moyen d'augmenter la production et de prolonger la conservation 
du cheval de guerre, par M. Decroix, (Chez Tanera, rue de Savoie, 6, à Pa- 
ris. Prix : 75 centimes.) 


ñ 
4 


USAGE ALIMENTAIRE DE LA VIANDE DE CHEVAL. 403 


pulation chevaline, même au détriment de l'espèce bovine, si 
Tinsuffisance de-fourrages l'exige, 

De temps à autre, des épizooties meurtrières font périr en 
quelques semaines des quantités considérables de bétail, ‘tan- 
tôt d'une ‘espèce, tantôt d’une autre, parce que les maladies 
épizooliques qui attaquent les Chevaux épargnent les bœufs, 
et réciproquement ; exemple : les épizooties d’affections mor- 
veuses et typhoïdes, auxquelles ceux-ci sont réfractaires ; ‘et, 
d'autre part, la peste bovine, la péripneumonie contagieuse, 
inconnues chez ceux-là. Ayant deux espèces alimentaires au lieu 
d’une, nous aurons moins à craindre d’être affamés de viande. 

Nous avons vu précédemment que le nombre des chevaux 
livrés à la consommation n'avait guère été, en 1873, que 
de 30 000. D’un autre côté, M. le marquis de Croix admettant 
que la vie moyenne des chevaux est de dix ans, qu'ilen naît 
et qu'il en meurt annuellement 300000, on constale que les 
boucheries chevalines n’absorbent que le dixième des pertes 
pour cause de vieillesse, accidents et maladies. 

Il y a encore beaucoup à faire, comme on levoit, pour que 
la moitié au moins serve à l'alimentation, et que l’autre moitié 
seulement soit dirigée sur les équarrissoirs comme étant 
impropre à l'alimentation. 

Le Comité de la viande de cheval aura donc encore sa rai- 
son d’être pendant plusieurs années, pour propager le nouvel 
aliment dans les départements, et habituer les propriétaires 
à se défaire de leurs chevaux sans attendre leur décès par 
maladies ; et cela, au grand détriment des vétérinaires, dont 
l'importance de la clientèle est en rapport avec le nombre des 
chevaux maladifs ou frappés par les infirmités. Rappelons, tou- 
tefois, que les vétérinaires, avec un désintéressement philan- 
{hropique trop peu apprécié, ont élé les plus chaleureux 
_propagateurs du nouvel aliment. 


CONCLUSION. 


La consommation de la viande de cheval fait sans cesse des 
progrès par toute la France. 


HO. | SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


La boucherie chevaline augmente de 100 francs en moyenne 
la valeur des vieux chevaux. 

I n’est pas à craindre que les bons eaux soient livrés à 
la boucherie, leur prix étant trop élevé. 

Plus l'hippophagie se propagera, plus la production sera 
encouragée, et plus les mauvais chevaux disparaîtront pour 
faire place à de meilleurs. 

Pour assurer et accroître les ressources en viande, il est 
bon d’avoir deux grandes espèces domestiques alimentaires 
au lieu d’une seule, qui peut être décimée par les épizooties.. 

Les neuf dixièmes des chevaux échappant encore à la bou- 
cherie chevaline, le Comité de la viande de cheval doit done 


persévérer dans son entreprise de philanthropique propa- 
gande (1). 


ÉTAT DES BOUCHERIES CHEVALINES EN SERVICE A PARIS 
AU AT JANVIER 187/. 


MM. MM. 
Richomme, rue de Paris, 38. Latour, rue de la Chapelle. 
Baudart, au marché de Montrouge. — rue de l'Orillon, 31 
— boulevard de Charonne, 86. | Masson, rue Esquirol, 49. 
Portier, place Maubert, 1. — rue de la Tombe-lssoire, 60. 
— rue Basfroi, 51. — rue Boutin, 4. 
Cartier, rue des Trois-Couronnes, 11. Piot, rue d'Angoulême, 37. 
Landry, rue Nationale, 9, Duvinage, rue Balaguy, 7. 
Grabout, rue de l'Ouest, 24. Couterel, rue de Bagnolet, 28. 
— rue des Poteaux, 39. Labesse, place d'Italie, 3. 
Poisson, rue de Meaux, A7. — place d’Alligre, 5. 
Latour, rue de Flandre, 10, Mme Dainaut, r. des Amandiers, 34. 
— rue de Ménilmontant, 20. Foucault, rue Petit, 16. 
—  ruede la Fidélité, 30. Baron, rue de Belleville, 254, 


(1) Il a consutué son bureau pour 1874 de la manière RME : prési- 
dent, M. Goubaux, professeur à l’École d’Alfort ; vice-président, À . Albert 
Geoffroy Saint-Hilaire, directeur du Jardin d’acclimatation ; LES 

-_néral, M. Decroix, vétérinaire militaire ; secrétaire des séances, M. Petibon, 
rentier ; trésorier, M. Bourrel, médecin-vétérinaire; archiviste, M. l'abbé 
Dufour, 

Au st décembre 1873, les recettes s'élevaient à 5919 fr. 50; les dé- 
penses, à 5791 fr. 80, et il restait en caisse 127 fr. 70. (Siége du Comilé, 
rue rene 12, à Paris.) 


USAGE ALIMENTAIRE DE LA VIANDE DE CHEVAL. 


Baron, rue des Poissonniers, 66. 
Gilbert, rue de la Gaîté, 26. 

— rue Jean-Nicot, 23, 

— rue de Javel, 77. 
Allenne, rue du Théâtre, 109. 
Dubost, rue Monffetard, 63. 
Leboiteux, rue Rebeval, 70. 
Trémerel, r. Denoyez, 10 (Belleville) 

— rue de la Roquette, 91. 
Tétard, rue des Amandiers, 39. 
— place d’Alligre, 17. 


Fr 


103 


Tétard, rue d’Alligre, 45. 

— rue du Temple, 81. 

— rue Ramey, 20. 

Bourson, au marché Montmartre. 
Dravelle, rue Riquet, 42. 

— rue Levis, à Batignolles. 
Larieux, boulevard de la Villette, 82. 
Lenoble, passage Saint-Louis. 
Mareille, rue Pajol, à la Chapelle. 
Merkel, rue des Cinqg-Diamants, 44. 


BANLIEUE. 


Peffert, à Clichy-la-Garenne. 
Richomme, à Saint-Denis. 
Cosson , à Boulogne. 


Couillard, à Levallois-Perret. 


Mabille, rue Compoise, à Saint-Denis. 


OBSER VATIONS 
SUR 
L'ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAÏ 
| EN 1873 
LETTRE ADRESSÉE A M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL 


Par SEL de SAULCY. 


Par suite de circonstances imprévues, je ne me suis pas 
trouvé en mesure de vous faire parvenir aussitôt que j'aurais 
désiré le résultat de mes observations sur l’éducation de 
l'Attacus Yama-maï en 1873. Veuillez agréer, je vous prie, 
mes excuses de ce retard involontaire et permettez-moi 
d'espérer que vous accueillerez avec votre bienveillance habi- 
iuelle la communication que j'ai l'honneur de vous faire 
aujourd’hui. 

J'ai la confiance que vous ne la trouverez pas dépourvue 
d'intérêt, car J'ai à vous signaler un nouveau succès, qui 
dépasse la portée de ceux que j'avais obtenus jusqu'ici. Il me 
permet, je crois, d'affirmer que non-seulement le Yama-maï 
est facile à élever, mais encore qu’il est d’une rusticité remar- 
quable et d’une résistance à lépreuve contre l’âpreté des 
mauvais lemps, qui peuvent malheureusement coïncider, 
trop souvent chez nous, avec l’époque d’apparition de ce pré- 
cieux insecte. 

Dans la séance du 2 mai dernier, j'ai eu l'honneur d'in- 
former la Société qu’il m'était éclos 377 larvés sur la quan- 
tilé d'œufs supposés bons que je m'étais réservée pour pour- 
suivre mes études en 1573. | 

En tenant compte des moyennes de mortalité que mes 
observations antérieures m'ont permis d'établir, je pouvais 
légitimement espérer un rendement final de 192 cocons, 


k ? 


ÉDUCATION DE L'ATTACUS YAMA-MAIÏ. 107 


puisque la part proportionnelle du déchet inévitable est très- 
sensiblement de 49 pour 400 sur le nombre total des nais- 
sances. 

C’est bien probablement le résultat que j'aurais atteint, si la 
saison de printemps s'était présentée dans des conditions ordi- 
naires. Mais les froids tardifs, et on peut dire excessifs, qui 
sont arrivés quatre ou cinq jours aprés l’éclosion des jeunes 
larves, vers le 24 avril, et qui ont persévéré pendant la pre- 
mière parlie du mois de mai, avec un abaissement de tempé- 
rature de A degrés et même 5 degrés au-dessous de zéro, ont 
mis tout en péril et m'ont fait appréhender un désastre, non- 
seulement parce que les petites chenilles pouvaient être tuées 
par le froid, mais encore et surtout parce que les bourgeons 
de chênes, que des chaleurs prématurées et tout à fait intem- 
peslives avaient rendus trop précoces, ont été gelés radicale- 
ment à peu près parlout, et que si les larves échappaient à la 
rigueur du temps, ce qu’on pouvait obtenir aisément en leur 
faisant du feu, le manque de feuilles en temps opportun 
devait inévitablement les faire mourir de faim dans un délai 
rapproché, trop facile à prévoir. 

Je n'avais que six jeunes chênes forcés, et encore n’étaient- 
ils pas bien gros ! C’élait avec de si minces ressources qu'il 
me fallait attendre la fin du mois de mai, selon toute appa- 
rence, et subvenir à l'alimentation de 300 chenilles. Aussi 
j'entrevoyais la douloureuse nécessité, pour moi, d’en sacri- 
fier la bonne moitié, sinon plus, pour sauver le reste, et je 
me serais tenu pour très-satisfait si l’on avait pu me garantir 
alors une cinquantaine de cocons comme résultat certain de 
Véducation. 

J'avais bien en ma faveur le déchet fatal des A9 pour 400 
pendant la première quinzaine, et même ce chiffre devait 
considérablement s’augmenter en raison du froid; pourtant 


je n'étais pas tranquille, et au fond du cœur j'avais grand 


peur de tout perdre! 
Malgré toutes mes perplexités, je n’ai pas songé un instant 

à faire à mes élèves une témpérature artificielle plus douce 

que celle de la chambre où je les avais placés. Pas ‘un seul 


108 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


jour je ne leur ai fait du feu, parce que j'aimais mieux les voir 
engourdis et comme en élat d'hibernation, que d'activer chez 
eux une énergie de vilalité qui aurait stiulé leur appétit et 
les aurait infallhiblement condamnés à mourir de faim dés 
que mes petits arbres auraient été dépouillés de toutes leurs 
feuilles. 

Que risquais-je de plus avec le froid? Mes Yama-mai ne 
imangeaient plus, ou ils mangeaient à peine; mais du moins 
ils se maintenaient quand même sur les feuilles. Peut-être y 
avait-il là une chance en ma faveur! Je l’espérais un peu; le 
fait est qu’elle a bien tourné pour moi. 

Tout le mois de mai m'a causé de bien vives inquiétudes. 
En effet, ce n’est qu’à partir du 8 au 10 juin que les chènes 
des bois ont commencé à redevenir verts ! Très-heureusement 
j'avais, dans mon jardin de Plappeville, quatre à cinq beaux 
sujets d'une dizaine d'années qui avaient été relativement 
épargnés ; en les taillant un peu brutalement dès le 20 mai 
j'ai pu conduire lant bien que mal mes pauvres vers, si rude- 
ment éprouvés, jusqu’au moment où l'élan vigoureux de la 
séve m'a permis de leur donner une nourriture substantielle 
et abondante. 

J'ai échappé ainsi à un grave danger, et pour si grande que 
je considère aujourd'hui la force de résistance du Yama-muaï, 
je ne voudrais pas me voir souvent à pareille épreuve. Il y a 
trop d'émotions pénibles à soutenir une lutte dont rien ne 
prouve que le succès doive être le prix. 

Grâce donc à cetie ressource providentielle de quelques 
chênes qui n'avaient pas trop souffert chez moi, mes pertes se 
sont trouvées réduites à celles qui m'ont été infligées par le 
froid ; je n’ai pas été obligé de sacrifier moi-même la majeure 
partie de mes larves el j'ai obtenu en fin de compte 165 co- 
cons, au lieu de 192 que j'aurais dû avoir dans des conditions 
ordinaires (1). 


(4) On peut juger par cet exemple combien il ést indispensable de s’ap- 
provisionner abondamment de jeunes pieds de chênes qu’on puisse forcer 
en temps opportun, afin de ne pas être exposé à voir misérablement périr 


RATES 


ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAÏ. 109 


Le froid m’a pris, comme on voit, 27 cocons, et cette perte, 
que je lui attribue, équivaut à 14 pour 100 de déficit dans le 
rendement final auquel je pouvais prétendre. Une réduction 
de 14 pour 100, c’est beaucoup sans doute ; mais quand je 
songe qu’à la fin d'avril tout était compromis et qu'au mois 
de mai je pouvais craindre de voir toutes mes larves mourir 
de faim, j'ai lieu de me féliciter d'un résultat qui établit 
péremptoirement la rusticité du Yama-mai et sa remarquable 
faculté de résistance contre l’inclémence du temps. 

Durant l'éducation, trois ou quatre larves qui n'avaient pas 
pu se remettre des alteintes trop fortes du froid, ou peut-être 
qui avaient trop souffert de la faim, sont mortes, soit au troi- 
sième, soit au quatrième âge. L’une d’elles a même accompli 
sa quatrième mue ; mais elle est restée toujours chétive, elle 
avait quinze jours de retard sur toutes les autres, et comme 
au lieu de profiter je la voyais dépérir et s’amoindrir en 
quelque sorte de jour en jour, j'ai fini par m'en débarrasser 
le 1° août, six jours après la formation du dernier cocon. 

Sur les 165 chenilles qui ont filé, pas une n’a manqué de 
se transformer, et pas une nymphe n’est morte dans son 
cocon. Un mâle pourtant n'a pas pu se dégager; mais du 
moins il avait déchiré sa chrysalide. 

Les 165 papillons de cette année ont donné 83 mâles et 
82 femelles. 

En 1872, il y avait eu sur 120 cocons 61 mâles contre 
39 femelles. 

Pour 1871, de 20 cocons il est sorti 10 mâles et 9 femelles. 
Un mâle en outre n'avait pas pu percer son cocon. 

Enfin en 1870 j'avais obtenu 175 papillons dont 79 mâles 
et 96 femelles, de 185 cocons. En admettant que toutes les 
nymphes mortes eussent donné des mâles, ce que j'avoue 
n’avoir pas vérifié, vu la triste situation d'esprit où je me trou- 
vais alors, le nombre des femelles aurait encore dépassé de 1L 
celui des mâies. 


de faim une éducation bien préparée, et cela par des gelées tardives contre 
lesquelles il faut toujours se tenir en garde, surtout dans nos régions du 
nord-est. 


410 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Je signale ces chiffres de 1870 afin qu'on ne puisse pas sup- 
poser que Jj'écarte volontairement ceux qui sont en opposi- 
tion avec la thèse que je soutiens. Je crois, en effet, que dans 
une éducation normale les deux sexes se présentent en nom- 
bres à peu près égaux, avec un léger avantage toutefois en 
faveur des mâles; et que plus le nombre des sujets est consi- 
dérable, plus les nombres représentant chaque sexe se rappro- 
chent de la parfaite égalité. 

La totalité des papillons s’est trouvée, cetle année, dis- 
tribuée pour les mâles en quatre variétés distinctes, de 
nuances parfaitement tranchées, et en trois seulement pour 
les femelles, comme l'indique le tableau suivant : 


Couleur. Mäles. Femelles. 
JAUNE Re eee RC = rate OU LE A6 29 
Gris ENV EN Se MARS UN, SA 20 17 
Gris sombre presque noir ...:........0 9 0 
Brun roux, plus ou moins intense...... 8 36 
83 82 


Le gris sombre presque noir ne s’est montré que chez les 
mâles, à l’exclusion des femelles ; le jaune semble dominant 
chez les mâles, et le brun roux plus ou moins intense paraît 
au contraire la nuance prépondérante chez les femelles. 

Parmi les mâles éclos cette année, un gris n’a pas eu la 
force de percer son cocon, ainsi que Je lai dit précédemment; 
un aulre de même nuance a été saisi, en sorlant, par un fil 
qui lui a entravé les deux ailes du côté gauche près du point 
d'attache au thorax : je l'ai trouvé mort dans cette situation 
et comme pris au piége dans un nœud coulant. Un troisième 
enfin a été trouvé à terre, vivant, mais avec les ailes recro- 
quevillées; il a dû se laisser tomber au moment même où 1àl 
venait de se dégager du cocon, et ses ailes ont séché sans 
pouvoir se développer. Ces chutes ne sont pas très-fréquentes 
et semblent affecter plus particulièrement les mâles, plus 
légers de corps, plus brusques et moins prudents que les 
femelles, au moment où ils sortent tout humides de leur enve- 
loppe. Il ne s’en est présenté qu’une en 1873 sur 164 papil- 


27 a 
Re A 


ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAÏ. 114 


lons ; l’année passée, j'en avais constaté deux sur 119, et elles 
avaient porté encore sur deux mâles, 

Le dernier papillon venu, qui est éelos dans la nuit du 14 
au 15 septembre, de même que les premiers qui se sont mon- 
trés dans la nuit du 8 au 9 août, étaient des mâles. Je n’ai 
reconnu la présence des femelles que dans la matinée du 
14 août; ce jour-là j'étais en possession de 22 papillons dont 
plusieurs femelles, mais je n’ai vu des œufs que le 16, c’est- 
à-dire deux eu trois jours après la venue de ces dernières. 

Quand j'ai fait le recensement de tous les papillons éclos 
cetle année, j'ai constaté que 9 femelles étaient mortes sans 
avoir pondu, ou bien n'ayant émis, — pour quelques-unes, — 
qu’une si minime quantité d'œufs, que c’était tout comme; de 
sorte qu’on ne peut guëre admeltre qu'il y en ait eu plus de 
73 pour donner de la graine. 

Quatre-vingts mâles, tout au plus, ont pu coopérer à leur 
fécondation, puisqu'il faut exclure à priori l’avorton, le pri- 
sonnier et celui qui n’a pas pu sortir de son cocon. Mais je 
crois prudent de défalquer, en outre, les 8 mâles qui sont 
éclos les 9, 11 et 12 août avant qu'il ait paru aucune femelle. 
Dans ma pensée, 1l n’y en a que 72 qui aient eu la faculté de 
s’accoupler utilement. 

Cette année, la première larve sortie de l’œuf a paru le 
13 avril et le dernier papillon s’est montré le 15 septembre ; 
entre ces deux termes extrêmes 1l s’est écoulé 155 jours. 

En 1872, les premières larves avaient fait leur apparition 
le 17 avril et le dernier papillon était éclos le 7 septembre, ce 
qui donnait pour la période équivalente 143 jours. L’éduca- 
tion de l’année dernière a donc duré 12 jours de moins que 
celle de 1873. Quoi d'étonnant avec une saison aussi contra- 
riante, on pourrait dire aussi désastreuse que celle qui a pesé, 
celte année, sur les jeunes Yama-maï, pendant plus de 
quinze jours, à compter du 24 avril, six jours après le fort de 
l’éclosion des larves ? 

Si nous. décomposons ces deux périodes totales pour com- 
parer entre elles chacune de leurs grandes divisions, à savoir 
la durée d'existence à l’état de larve et celle à l’état de cocon, 


112 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 

nous arrivons à ce résultat, que tout le retard de l'éducation 
de 1873 à porté sur la vie de l'insecte depuis sa sortie de 
l'œuf jusqu’au moment où il a pu filer, ce qui est rendu sen- 
sible par l tableau suivant : 


TABLEAU COMPARATIF DES ÉDUCATIONS 


En 1872. 
Prenmieriver-éclostle 25 RP 17 avril. 
Dennis RES UE CURE PR RU 2 mai. 
Premier cocon. commencé le......... 28 juin. 
DORDIORe ere die tie CNE 20 juillet, 
Premier papillon sortile............. 11 août. 
D'ERRLREERT MAR ele eleuer ce ele en 7 septembre. 

En 1873 
Premier ver éclos le..:..:......:.+. 15 avril. 
Derniers'5. ea $.Rurio ze AE 22 avril. 
Premier cocon commencé le.......... 5 juillet. 
Derniers 24 ue tele tte 25 juillet. 
Premier papillon sorti le............ 9 août. 
Derniers ete mac as OMR 15 septembre. 


En 1872, la période d’éclosion des larves a duré 16 jours; 
en 1873 elle n’en a comporté que 9. 

En 1872, il s’est écoulé 72 jours entre la première nais- 
sance et le commencement du premier cocon, et 79 entre la 
dernière larve venue etle dernier cocon commencé : ce qui 
donne pour la vie moyenne apparente des chenilles 75 jours 
et demi. 

Pour l'année 18738, nous avons 83 jours entre l'apparition 
de la première larve et le commencement du premier cocon, 
et94 entre la dernière naissance et le dernier cocon, soit pour 
l'existence moyenne apparente des chenilles 88 jours et demi : 
ce qui conslitue une différence en plus de 13 jours au désa- 
vantage de 1673. 

Cette différence notable qui correspond sensiblement à une 
des cinq périodes de la vie des larves (activité et sommeil 
compris), ne peut être attribuée qu’au temps d’arrêt qui a été 


ÉDUCATION DE L’'ATTACUS VAMA-MAI. 113 


pour les jeunes Vers la conséquence du froid qui les à saisis 
peu de jours après leur naissance. 

En 1872, il y a eu 4h jours d'intervalle entre le commence- 
ment du premier cocon et l'apparition du premier papillon, 
et comme le dernier cocon a été commencé A9 jours avant 
la sortie du dernier papillon, il en résulte que la durée 
moyenne des cocons a été de A6 jours et demi. 

Elle se trouve ramenée au contraire, en 1873, à A3 jours 
et demi, puisque les termes extrêmes sont de 35 jours entre 
le plus précoce des cocons et le plus précece des papillons, 
et de 52 entre le dernier des cocons et le dernier papillon. 

En résumé, la vie moyenne des larves a été allongée de 
43 jours, en 1873, tandis que la durée du cocon s’est trouvée 
raccourcie de 2 et demi. 

J’ai tenu à faire cette année une expérience qui fût la contre- 
épreuve des observations de 1871 et de 1872, à la suite des- 
quelles j'avais émis l'opinion que les femelles Yama-mai 
cherchaient de préférence, pour déposer leurs œufs, les en- 
droits où ils devaient être soumis à l'influence de la lumière. 
J'ai eu soin, en conséquence, que la fenêtre, dont les volets 
avaient élé fermés les deux années précédentes, fùt cette fois 
parfaitement accessible au jour afin de lui permettre de péné- 
trer largement dans la chambre nuptiale. 

Le résultat a pleinement justifié mes prévisions ; les femelles 
ont pondu dans tout l’espace qui leur était accessible, plus 
abondamment toutefois devant chacune des deux fenêtres, et 
la partie la moins illuminée, c’est-à-dire l’entre-deux des 
croisées, s’est trouvée aussi la portion la moins bien garnie 
d'œufs. 

Ces deux épreuves inverses se trouvent donc parfaitement 
concordantes quant au fait que je désirais établir, et je crois 
qu'il demeure bien acquis que les femelles Yama-mai fixent 
leurs œufs, par préférence, là où ils sont le mieux exposés à la 
lumière, qui est probablement indispensable pour la parfaite 
évolution des germes. 

Ne serait-il pas permis de conclure de ce fait que la portion 


considérable — A9 pour 100 — des larves ‘qui périssent fata- 
3° SÉRIE, T. L. — Février 4874. 8 


117 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


lement dans la première quinzaine qui suit leur naissance, 
peut et doit être attribuée à un mode vicieux de ramasser et 
surtout de conserver la graine dans des boîtes privées de lu- 
micre, {rois semaines ou un mois après que les pontes sont 
terminées? C’est un point que je me propose d'étudier l’année 
prochaine, si Dieu me prête vie. 

Il me reste maintenant à rendre compte de la quantité de 
graine que J'ai obtenue celte année, et à en comparer leren- 
dement avec celui qui a été constaté en 1872 

J'ai récolté, à la date du 15 novembre, 67 grammes d'œufs 
gris, plus 45,58 d'œufs blancs ou à peine colorés , (ous sup- 
posés bons, ensemble 715,38. J'avais séparé à la même date 
et pesé 15,32 de graine présumée douteuse alors, et dont la 
majeure partie semble évidemment mauvaise aujourd’hui. 
Enfin J'ai pesé à la même époque 235,49 d'œufs très-certai- 
nement mauvais, de sorte qu'il y a un total de 116,19 pour 
représenter en 4873, à.la date précitée, l’ensemble des pontes 
de 73 femelles. 

En 1872, vers la même époque, ou plus exactement dans 
les premiers jours de décembre, j'avais constaté pour 57 fe- 
melles un poids total de 69°,17, dont 425,91 pour tous les 
œufs supposés bons et 26: 26 Dr tous les autres, tant dou- 
teux que mauvais. 

Si les femelles de 1873 avaient été dans les mêmes condi- 
tions que celles de 4872, ilest clair que la proportionnalité 
des nombres aurait dû me donner pour le poids total des 
œufs de toutes catégories 885,58. Mais J'ai en réalité 110*,19, 
soit un excédant de 215,61, qui représente 24%,38 pour 100 
d'augmentation. 

En ne considérant que les œufs présumés bons, la même 
règle de proportion aurait donné 54%,95, tandis qu'il y en a 
745,38, c'est-à-dire 16,43 en plus, soit 295,88 pour 400 
d'augmentation. 

Si enfin on établit la proportion pour l’ensemble des œufs. 
douteux et mauvais réunis, on aurali dù avoir un poids de 
33,63, et comme le poids-réel est de 385,81, il'y a là encore 
une augmentalion de 5%,18, mais qui ne représente plus 


ÉDUCATION DE IL'ATTACUS YAMA-MAÏ. 445 


qu’un accroissement de 15%,40 pour 100, de beaucoup infé- 
rieur à celui qui correspondiaux œufs supposés bons (1). 

Nous ne nous arrêterons pas à ce dernier chiffre qui pour- 
rait bien n'être qu’une :sonte de trompe-l'œil, en raison du 
nombre ‘extrêmement variable des ‘œufs reconnus mauvais 
qui «entrent dans le poids d’un gramme, selon qu'ils ‘sont 
pesés secs ou humides (2); je me bornerai à appeler l’atten- 
tion sur l'accroissement des ‘œufs admis comme bons, parce 
que les œufs de cette catégorie varient fort peu de pesanteur, 
ce qui laisse peu de prise pour les erreurs d'appréciation. Cet 
accroissement est de plus d’un quart. 

De la comparaison de ces nombres divers, il me semble 
permis de conclure : 

1° Que les Fama-mai de 4873 ont donné des pontes plus 
abondantes que ceux de 1872 

2° Qu'ils ont donné des ne présumés bons en nombre 
sensiblement plus considérable ; 

3° Que la race a progressé et qu'elle se forüifie d'année en 
année, à mesure qu'elle s’éloigne du moment d'importation, 
qui avait fâcheusement influencé la graine d’origine, par suite 
d’un long voyage du Japon en Europe. 

Je n’ai rien à modifier au mode d'élevage que j'ai indiqué 


(4) L’accroissement des œufs tant douteux que mauvais représente à peu 
près le sixième de ce que la proportion aurait donné ; celui des œufs présu- 
més bons est entre le quart et le tiers; et celui de la toialité des œufs de 
toute catégorie est à bien peu près le quart. J'ai compté tous les œufs d’une 
forte femelle qui n’avait pas pondu et j’en ai trouvé 200. Une opération 
semblable, pratiquée en 1872, n’en avait donné que 166. Je ne me permet- 
trai pas de lirer de conséquence de ce fait isolé, parce qu’il est incontes- 
table que les femelles Yama-maï varient quelque peu dans leur taille et que 
si les petites sont rares les énormes le sont aussi. 

(2) Comme le vernis qui enduit les œufs est très-hygr Se si l’on 
opère par un temps quelque peu humide, comme il arrive presque toujours 
vers la fin de l’automne, 137 œufs franchement ombiliqués suflisent pour 
peser À gramme ; mais si on les a gardés deux ou trois jours dans une cham- 
bre sèche où l’on a fait du feu, il en faut alors 180 et même quelquefois plus. 
Le poids des œufs présumés bons ne varie au contraire, quelles que soient 
les conditions de l’atmosphère, que dans des limites assez resserrées. On 
peut estimer que le gramme en comporte 125 en moyenne. 


116 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


dans mon étude de l’année dernière. Plus je vais et plus je 
suis convaincu de l'efficacité des moyens que j’emploie et que 
j'ai signalés, persuadé qu'en les mettant en pratique chacurm 
doit réussir comme Je réussis moi-même. 

Je tiens à la disposition de la Société 30 grammes de graine 
choisie avec soin, ce qui ne veul pas dire que chaque gramme 
donnera 125 larves! Il en sortira, je suppose, à peu près une 
centaine, sur lesquelles la mort prendra son contingent fatal. 


S NOTE 


À PROPOS 
DE L'INTRODUCTION DE PLANTES ET D'ANIMAUX 


DANS DIVERSES CONTRÉES 


NOTAMMENT EN ÉGYPTE 


Far M. AUTARD DE BRAGARD. 


Membre de la Société d’acclimatation de Paris. 


ël existe dans l'avenue principale du magnifique jardin des 
Pamplemousses, à l’île Maurice, une pyramide de marbre 
blanc, présent de M. Liénard père, l’un des membres les plus 
vegrellables de la Société d’acclimatation. Sur l’une de ses 
faces on lit les noms des membres qui se sont distingués par 
des services rendus à la colonie dans l’agriculture, les sciences 
ei les arts; sur une autre à été gravée, en lettres d’or, cette 
pensée de Bernardin de Saint-Pierre : « Le don d’une plante 
ulile est plus précieuse à l'humanité que la découverte d’un 
trésor. » En effet, quel trésor peut surpasser en valeur l’ac- 
quisiton d’une plante telle que la Pomme de terre? Un 
trésor s'épuise, mais la plante se renouvelle sans cesse, et 
les placers de la Californie, de l'Australie, auront cessé de 
produire alors que le Blé, le Café, la Vigne, la Canne à 
sucre, le Cacao, refleurissant avec chaque saison, continue- 
ront à nourrir, fortifier et réjouir l’homme. — Cette pensée 
ajoute à la vérité qu’elle proclame le mérite de nous faire 
comprendre que tout homme peut, sans l’apanage de la 
science réservé à un pelit nombre, rendre d’utiles services à 
ses semblables. Quoi de plus simple, de plus facile à réaliser 
que l’idée d'introduire d’un pays dans un autre telle plante ou 
£el animal dont l’un d’eux est privé. Et pourtant la bonne 
volonté manque souvent à bien faire, témoin les exhortations 
éloquentes de notre honorable président pour nous encoura- 
ser à marcher dans la voie que, pour ma part, J'ai suivie 


418 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


d'instinct et de longue date. En effet, dès l’année 1837, 
j'étais assez heureux pour introduire, de la Réunion (alors 
Bourbon) à l’île Maurice, deux plantes nouvelles : le Cerisier 
du Brésil et le Vaniller. Le premier, arbuste au fruit 
agréable, ornement du jardin par l'élégance et le brillant de 
son feuillage, se couvre, à la saison, d’une multitude de 
fleurs blanches éloilées dont il se fait comme un voile de 
mariée, qu'il. ne porte, comme elle, qu’un seul jour. Le 
Vaniller était le. second en. date : Un color, illustre parmi 
ses compalriotes, M. Adrien d'Epinay, dont le fils a conquis 
en Europe une première place dans la sculpture, m'avait de- 
vancé d’un mois dans cette précieuse acquisition, je venais 
pour ainsi dire à la rescousse, doubler les chances de son 
initiative. Aujourd’hui, les marchés de Londres et de Paris 
offrent aux consommateurs de la varille de l'île Maurice, com- 
parable par la beauté, par le givrage, à la vanille du Mexique. 


Un vieillard octogénaire, M. Richard, qui dirigeait alors le 


Jardin de l’île Bourbon, et dont la mémoire est impérissable 
chez les colons de cette île, avait préparé les sujets destinés 
à Maurice; notre reconnaissance devait se traduire par une 
satisfaction donnée à sa passion; je lui adressai des plants. et 
des graines d’un arbre qui lui manquait, le Gampêche, très- 
répandu à Maurice, où, il borde les allées et les routes qu’il 
protége en les couvraut d’une voûte impénétrable au soleil, 


et préserve les plantations en opposant à l’invasion des ani- 


maux une haie épaisse. Le Lierre n'existait pas à l'île Mau- 


rice, pays riche en forêts où croissent abondamment les 


Fougères, les Orchidées, les Lianes. Ce que l’homme désire 
le plus, en général, c’est ce qu’il n’a pas. Aussi bien le grà- 
cieux parasite rappelait aux colons d’origine française le 
Chêne, le manoir ou la muraille écroulée du pays des aïeux; 
j'en emportai un pied de Londres à Maurice,.en l’année 1557. 
Pris au bord d'une tombe dans le cimetiére de Chelsea il sup- 
porta une traversée de 103 jours par le cap de Bonne-Espé- 
rence, et placé au milieu des Orchidées du jardin des Pam- 


plemousses, y prospéra jusqu’au jour de mon départ pour 


l'Europe. 


INTRODUCTION DE PLANTES ET D'ANIMAUX EN ÉGYPTE. 419 


L'année 1854 comptera dans ses fastes deux créations fran- 
çaises d’un intérêt universel, le percement de l’Isthme de 
Suez et l'établissement de la Société d'acclimatation de Paris, 
toutes deux destinées à multiplier les relations des peuples 
les plus éloignés. La petite île Maurice, située dans la mer 
des Indes, en rapport constant avec les différentes contrées 
du globe, se passionna pour l’œuvre de M. Lesseps, dont elle 
comprenait toute la grandeur et s’associa de bonne heure 
à celle que préside lhonorable M. Drouyn de Lhuys. 
D'une part j’expédiai à M: Lesseps des plants et des graines 
de Filao (Casuarina), dont je parlerai tout à l’heure, de 
l’autre, des Gouramis à notre Société. M. Georges Aubin, 
qui se chargea de ces poissons, réussit à les porter à Mar- 
seïlle ; et la Société se souvient d'avoir récompensé par une 
médaille le zèle et le succès de M. Aubin. Même distinction me 
fut accordée en 1865 pour une entreprise pareille. En 1867, 
je fus plus heureux; les Gouramis que j’apportai arrivèrent à 
Paris et furent les premiers que les savants purent observer 
vivants au Jardin des plantes où 1ls vécurent deux mois. 

Il est bon de rappeler qu’un de nos collègues, mon compa- 
triote et ami, M. Élysée Liénard, digne héritier des vertus de 
son père, m'avait devancé dans les tentatives d'introduction 
du Gourami en France. Animés tous deux du même zèle, 
cédant à l’influence exercée par la Société de Paris, nous par- 
vinmes à fonder à Maurice une Société d’acclimatation. Les 
débuts en furent heureux : par ses soins l’Ewcalyptus globu- 
lus se propagea dans l’île, M. Liénard lui adressa les se- 
mences d’un grand nombre de plantes; de retour à Paris, 
Je payai mon écot par l’envoi de Colins de Californie, dé 
Perdrix de Syrie, de deux paires de Cygnes d'Europe. Les 
Golins confiés aux soins de la Gouvernante du pays, lady 
Barkly, produisirent bientôt. Les Perdrix furent lâchés dans 
les champs. Quand aux Cygnes, ils élaient les premiers qu’on 
eût jamais vus dans la colonie, bien que cet oiseau eût été 
choisi comme emblème de l’île. Il figure en tête du Cernéen, 
le doyen des journaux de Maurice; ses fondateurs ayant tra- 
duit par le mot Cygne les noms de Cirné, Cerné, Cysné, portés 


420 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


sur leurs cartes par les Portugais qui ont découvert l'ile. 
Le Cygne, tout à fait inconnu à Maurice, eût été remplacé avec 
justice par le Dronte ou Dodo, cet oiseau indigène si curieux, 
dont l’espêce est à jamais perdue. 

Peu de temps avant de me sépar er de la Société Made 
cienne d'acchimatation, je lui avais apporté un plant de Fran- 
cicea, dont la fleur prend feu sans se consumer, grâce à 
l’évaporation d'un gaz inflammable. Il était accompagné de 
ceps de vingt-sept variétés de Raisin de table, obtenus de 
M. [ardy, directeur du jardin du Hamma, à Alger, en échange 
de provins de Letchis, l’un des meilleurs fruits de Maurice, 
d’origine chinoise. À la même époque, c'est-à-dire dans le 
courant de 1867, M. Barthélemy Lapommeraye, directeur du 
musée de Marseille, recevait à mon arrivée de Maurice le Fran- 
chipanier, qu'il réussit, ainsi qu'ilme l'a affirmé de son vivant, 
à faire pousser en plein air dans le parc du magnifique châ- 
teau de M. Talabot, à Marseille. 

Revenons maintenant aux envois faits en Égypte, aux Filaos 
dont j'ai dit un mot au début de cette notice: « Voici, écrit 
M. Jules Voisin, l'un des ex-employés de la Compagnie du 
» canal, le relevé textuel de mon cahier de notes du mois 
d'avril 1863. Envoi de M. de Bragard à M. le président de la 
Compagnie universelle du canal de Suez : une caisse conte- 
nant des plans de Filao et graines de Filao. Cette caisse fut 
envoyée par M. de Lesseps à Tell-el-Kebir (Ouadv), à l'adresse 
de M. Guichard, chef du service agricole. Une partie de ces 
plants et graines furent plantés et semés par mes soins dans 
les jardins de la propriété, où ils prospérérent #rès-promp- 
tement. Plus tard, le service agricole expédia à Ismaïlia une 
partie des plus beaux plants qui furent mis dans les jardins 
de M. de Lesseps et des principaux emplovés de la Compa- 
gnie. » — À cette attestation, M. de Lesseps ajoute : « Les 
plants et semences de Filaos envoyés de Maurice par 
M. À. de Bragard, ont parfaitement réussi à Ismaiïlia. On 
admire dans les jardins d'Ismailia des Filaos âgés de six à 
sept ans, qui ont atteint une hauteur de 15 à 18 mèêtres. » 
Ainsi, mes prévisions ne m'avaient pas trompé, le Filao 


“ : g RS 2e 
SES MCE CT ESRI ET SORT 


L 2 


INTRODUCTION DE PLANTES ET D'ANIMAUX EN ÉGYPTE. 491 


étail bien l'arbre qui convenait au sol et au climat de l'Égypte. 
Ces plants hauts de quelques centimètres, ces semences 
grosses comme un grain de poudre, étaient devenus en moins 
de dix ans, à l'inauguration du canal de Suez, des arbres 
hauts de 45 mêtres! Gros en proportion, riches de feuillage, 
ils couvraient de leur ombre les chalets d’Ismailia, qu’ils signa- 
laient de loin aux vapeurs de passage. Arbres de haute futaie, 
d’une croissance rapide, propres à la construction, ils sont 
destinés à convertir un jour le désert de l’isthme en une 
grande forêt ; à protéger les abords du canal contre la marche 
des sables, à donner aux nuées humides assez de fraîcheur 
pour les résoudre en pluie. 

L’acclimatation du Filao était un don offert directement au 
créateur du canal. Après l'hospitalité, sans exemple, donnée 
aux visiteurs de l'Égypte, par le vice-roi, à l’occasion de l’ou- 
verture du canal, il était naturel de se demander par quel 
moyen on pourrait la reconnaître. J'y songeais, sans me 
préoccuper de la disproportion entre les ressources et la 
distance entre les acteurs en jeu. Un service rendu à l'Égypte 
répondrait aux vœux du libéral Ismail. Quel service? Le don 
d’une plante utile. Ce fut le Cocotier qui me vint dès d’abord 
à l'esprit. Son absence m'avait frappé : Nulle part, depuis le 
Delta jusqu'à la première cataracte, un seul exemplaire ne 
s'était montré à mes yeux, en revanche, son rival en grandeur, 
en utilité, le daitier, était partout largement représenté. M. de 
Lesseps m'apprit que Mehemeh-Ali avait vainement tenté 
lacclimatalion du Cocotier en Égypte. La preuve qu’il a été, de 
temps immémorial, une rareté en Égypte ressort d’un texte 
hiéroelyphique traduit par M. Goodwin, savant égyptologué 
anglais. Ce texte donne la description d'un jardin appartenant 
à un grand personnage. Parmi d’autres arbres connus, il est 
fait mention d’un arbre ayant 66 pieds de haut et appelé 
Mama-n-Khanen-t. Le fruit est appelé Koukou. Le texte ajoute 
qu’il y a des Khanani, c’est-à dire des Amandes dans le Kou- 
kou et de l'eau dans les Khanani. Le signe déterminatif, qui 
complète le texte, suivant la méthode hiéroglyphique, ne 
laisse aucun doute sur la nature de l'arbre, c’est bien le Coco- 


499 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


tier, tel que nous le connaïssens de nos jours et tel qu’il est 
resté, c’est-à-dire un arbre essentiellement intertropieal. I 
n’y fallait plus songer; le hasard vint à mon aide. C'était l'é- 
poque ‘du courrier des Indes et de Maurice; en écrivant à 
l'agent d’une de mes propriétés, j'avais à lui recommander la 
plantalion d’Ambrevades. On en couvre annuellement des 
milliers d'hectares pour assoler les terres et se procurer un 
grain dont les hommes et les animaux se nourrissent dans toute 
l’île. Vu la nature de cette légumineuse, je ne doutai pas qu’elle 
ne prospérât en Egvpte. Par le même courrier, J'en deman- 
dai à mon gendre plusieurs livres de différentes qualités 
qu’il se hâta d’expédier à l’adresse que je lui donnai, dans 
la prévision de mon prochain départ d'Égypte. C’est ainsi que 
le jardinier du vice-roi, M. Delchevalerie, devint le dépositaire 
et fut chargé de la plantation d’une légumineuse dont le nom 
et la nature étaient entièrement ignorés en Ésypte. Le suc- 
cès dépassa toute espérance. Le Bulletin de la Société, 2° sé- 
rie, tome VII, page 663, année 1871, constate ce fait en ces 
termes : « L’Ambrevade ou Cajan est une plante indienne... 
» Un de nos confrères les plus dévoués aux progrès de laceli- 
» matation, M. Autard de Bragard, a pensé, pendant son sé- 
» jour en Égypte, qu'il serait utile d'introduire dans cette 
» contrée cette plante qui est très-recherchée comme aliment 
» à Pile Maurice. D’après une note publiée par M. Delchevale- 
» rie, la culture de l’Ambrevade à parfaitement réussi en 
» Égypte.» C’est donc une plante nourricière aequise aujour- 
d’hui à l'Égypte, produisant beaucoup, couvrant le sol et le 
fertilisant par la chute de ses feuilles, donnant, à sa mort, un 
excellent combustible, appelé à remplacer chez les Fellahs le 
Doura et les tourteaux fails de déjections d’animaux. En 
revendiquant le mérite qu’a bien voulu me reconnaître M. Del- 
chevalerie d’avoir été l’introducteur de la plante en Égypte, 
il est juste de dire que l'honneur de l’avoir cullivée et sauvée 
lui revient tout entier. Ce qu’on ignore encore en Égypte 
comme en France, c'est que l'Ambrevade peut aussi rendre 
un très-orand service à une industrie qui à beaucoup 
souffert en France et qui en Égypte est susceptible d’un plus 


INTRODUCTION DE PLANTES ET D'ANIMAUX EN ÉGYPTE. 41923 


grand développement. Avant que d'en parler, je tiens à dire 
qu'un créole de Maurice, M. Lewis Michel, zélé voyageur, a 
transporté: lAmbrevade d'Égypte en Terre-Sainte et qu’elle 
prospère aujourd’hui dans les environs de Jérusalem. I est 
probable qu'elle fera évalement son chemin dans le midi de 
la France comme plante: alimentaire, si ce n’est pour l'usage 
que je vais indiquer. Dans l’île de Madagascar, l'Ambrevadier 
remplace le Mürier et lesautres arbres dont les feuilles servent 
à la nourriture des Vers à soie. Voici à ce sujet la traduc- 
tion d’un passage de l’Æstoire de Madagascar du révérend 
Ellis, tome I[, page 305 : « L'éducation des Vers à soie occupe 
» une grande parte:des soins et du temps des habitants d’Is- 
» merina (Émyrne). Les Vers à soie de Madagascar sont d’une 
» espèce différente de ceux de l'Inde; ils sont plus gros et 
» trés-velus; ils se: nourrissent des feuilles du Poais-pigeon, 
» Cytisus Cajan, appelé Ambarivatry (Ambrevade). La graine 
» de cette plante, qui ressemble au Pois commun, est semée 
»sur une étendue de: trois à quatre arpents; quand la plante 
»a grandi et s’est couverte de feuilles, om y place les Vers à 
»soie qui s’en nourrissent et filent leurs cocons en plein 
» air ». N'y aurait-il pas là, pour l'Égypte particulièrement, 
une nouvelle source de:richesse? 

IL me reste à parler d’une plante que je crois appelée aussi 
à rendre un trèés-grand service à la France, du moins à sa 
principale colonie, l'Algérie, aussi bien qu’à l'Égypte. Vous 
vous rappelez que j'ai déposé sur le bureau de la Suciété dans 
sa séance du 12 décembre dernier, des graines de Kouémé, ou 
Telfarria. Elle fut d'abord nommée Liane Lejoh/f, du nom d'un 
Français, capilaine de marine marchande, qui l'avait le pré- 
mier importée de la côte orientale d'Afrique. Plus tard, une 
nouvelle introduction eut lieu par les soins d’un naturaliste 
allemand, Bojer, mort à l’île Maurice. Il l'a surnommée Tel- 
farria, du nom du docteur Telfair, ami et protecteur des 
sciences dans la colonie. Le Te/fairia figure au nombre des 
plantes de Maurice dans l’Hortus mauritianus de Bojer, bien 
qu'elle ait disparu de:la colonie: pour la seconde fois. Voici 
ce qu'en disent les: auteurs qui l'ont déerite : « Le Telfaima 


494 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


pedata, Koëme de Zanzibar est une cucurbitacée dont 
les graines sont employées comme aliment par les 
indigènes et fournissent une notable quantité d’huile 
douce et susceptible d’être utilisée pour la table. Cette 
espèce, qui se trouve aussi à Madagascar où elle porte le 
» nom de Kouëème Souali, a été introduite à l’île de France 
» par M. Lejoliff. Elle est grimpante et porte des fruits 
» qui contiennent de 200 à 300 grosses graines. Cinquante 
» livres de ces graines peuvent donner huit livres d'huile. La 
» chair du fruit est amère et non comestible. Cette plante est 
» dioïque et vivace; mais les pieds femelles sont beaucoup 
> moins nombreux, aussi a-t-on proposé de multiplier ces 
» pieds par greffe ou par marcotte ». J'ajoute que cette rareté 
de femelles a été cause que deux fois la plante a disparu de 
Maurice; que dans la saison froide elle perdait ses feuilles; 


COL CUS EN] 


que la fécondation était pratiquée au moyen de l'insertion de 


la fleur mâle dans la fleur femelle. Il me souvient que dans 
mon enfance, mon père avait fait préparer une salade avec de 
l’huile de Telfairia, el que tous les convives la prirent pour 
de lhuile d'olive de la meilleure qualité. Elle avait le défaut 
de se rancir promptement, ce qui élait dû probablement au 
procédé imparfait d'extraction. En tous cas, la fécondité de 
cette plante ne peut manquer d'offrir à l’industrie un nouveau 
produit d’une défaite assurée. 

Je. croyais avoir été le premier à l’introduire en France 
comme je l'ai fait pour l'Égypte, mais déjà M. Devienne, con- 
sul français, à qui je l'avais demandée à Zanzibar, l'avait ap- 
portée à Paris et en avait offert des graines à la Société 
comme en fait foile Bulletin du 27 mai 1870, 2? série, VIT, 
p. A75) où il est dit que M. Devienne les tenait de M. Kirck 
vice-consul d'Angleterre à Zanzibar. Le Bulletin ajoute : « que 
» ces graines ont été remises à M. Rivière pour en tenter la 
» culture en Algérie. » Que sont devenues ces graines ? Quels 
essais ont élé tentés? Que! rapport a été fait à la Société à leur 
égard? Si cette première introduction n’a pas eu de résultat 
favorable, souhaitons que la mienne rencontre ici et en Égypte 
une meilleure chance. Son Excellence Nubar Pacha, ministre 


INTRODUCTION DE PLANTES ET D'ANIMAUX EN ÉGYPTE. 125 


des affaires étrangères de Son Altesse le khédive d'Égypte, est 
déjà en possession du Telfairia. Son goût éclairé pour l’agri- 
culture, l'attention apportée aux cultures de ses vastes pro- 
priélés, me font croire que ectte cucurbitacée envahira bien- 
tôt, comme l’Ambrevade, la vallée du Nil. 

Ma crainte, en présentant cette notice, est qu’elle n’appa- 
raisse avec un caractère trop personnel. S'il est vrai qu’elle a 
été inspirée en parlie par le désir de constater le zèle 
d’un membre de la Société d’acclimatation de Paris, son 
principal but a été de fournir des dates certaines à l'his- 
toire de l’acclimatation en général. D’après les indications 
qui précèdent, on peut affirmer qu’à l'ile Maurice le Va- 
niller et le Gerisier du Brésil ont été introduitsen 1837. Le 
Colin de Californie, le Cygne d'Europe en 1865 ; le Franciscea 
en 1866 ainsi que les variétés de raisin inconnues jusque-là ; 
le Lierre au commencement de 1860 ; que le Campêche passa 
de Maurice à l’île Bourbon en 1837. En parlant du Gourami,on 
fixera à l’année 1867 l’arrivée des premiers qui aient élé vus vi- 
vants à Paris; àla même année l'introduction du Franchipanier 
à Marseille. Enfin en Égvpte celle du Filao en 1863, de l’Am- 
brevade à la fin de 1869 et au mois de décembre 1873 l’en- 
voi du Telfairia. 

Pour ne parler que de ce dernier pays, la Société d’acclima- 
tation de Paris n’est-elle pas en droit de se réjouir que l’œuvre 
du canal de Suez ait été accompagnée de ces introductions qui 
tendent aussi au bien-être général des populations, teiles le Filao 
dans le désert, l'Auwbrevade dans les plaines cultivées, et bien- 
1ôt sans doute le Telfairia offrant à la fois un abri à la cabane 
du cultivateur, une addition à sa nourriture, un produit lu- 
cralif à son industrie. Les travaux de chacun de ses membres 
appartiennent à la Société entière; les miens, si modestes 
qu'ils soient, n’auraient pas été continués avec la même per- 
sévérance si je ne m'étais senti encouragé par son influence 
et sa proteclion. 


NOTE 


SUR 


L'INTRODUCTION DE LA CULTURE DU THÉ 


À JAVA 


Par M. Éd. PRILEIEUX. 


La culture du Thé, dont l'introduction due au gouvernement 
hollandais est encore bien récente à Java, y a pris déjà une 
extension assez considérable : la production annuelle y ‘était 
en 1867 de 800 000 kilogrammes. En présence d'un tel résul- 
tat, je pense qu'il ne sera pas sans intérêt de retracer briève- 
ment, à l’aide de renseignements qui ont été mis à ma dispo- 
sition par lacommission néerlandaisede l'exposition universelle 
de 1567, la marche qu'a suivie le gouvernement hollandais 
pour introduire la culture de cette plante «et en assurer de 
développement. 

C'est en 1826 que lecommissaire général, qui était alors ke 
vicomte du Bus de Ghisignies, fit semer dans le jardm bota- 
nique de Buitenzorg des graineside Thé.de la meilleure qualité 
envoyées de Decima au Japon par le docteur Van Sieboldt. 
Cette première tentative réussit complétement et fit concevoir 
l'espoir d'introduire la culture du Thé à Java. Des essais furent 
dès lors tentés sur une plus grande échelle. 

La première plantation de Thé fut établie dans le courant 
de l’année 1527 dans la résidence de Buitenzorg et ne tarda 
pas à promettre les meilleurs résultats. 

Les échantillons de ce nouveau produit javanais parurent à 
la première exposition de l’industrie des Indes néerlandaises 
qui-eut lieu en 1828. 

L’année suivante, il en fut envoyé en Hollande. Déjà avant 


celte époque on avait établi avec un succès complet une 


seconde plantation de Thé à Caroet (régence des Préanger). 
Ces premiers succès se consolidèrent sous les auspices du 


| 
à 
3 


à 
1 Le. 4 


INTRODUCTION DE LA CULTURE DU THÉ A JAVA. 127 


gouverneur général comte Van den Bosch, et dès 1833 le 
nombre des arbustes à Thé, dans la seule régence de Krawang, 
s'élevait à plus d’un demi-million. 

Les plants de Thé cultivés à Java, bien que provenant des 


semences japonaises, ont élé reconnus de bonne qualité et ne 


présentant pas de différence notable avec les plants originaires 
de Chine; et grâce au choix convenable et au chaulage des 
terrains où on les cultive, grâce surtout aux soins donnés à la 
cueillette, à la manipulation et à l'assortiment des feuilles, on 
ne tarda pas à obtenir du thé vert et du thé noir de bonne 
qualité et même.du Souchon et du Péko. 

À Java, le meilleur Thé se cultive comme le Café à une hau- 
teur de 3000 à 4060 pieds au-dessus du miveau de la mer. Cest 
sur les versants des montagnes de la résidence des Préanger, 
de Bagelen et de Banjoemaas que se voientles plus belles cul- 
tures de thé. 

Les plants sont obtenus de semis; on en récolte les feuilles 
dès la deuxième ou la troisième année. 

Jusqu'en 1842, le Thé a été cultivé à Java presque exclusi- 
vement par le gouvernement sous la surveillance de ses fonc- 
tionnaires. À cette époque on comptait 13 millions et demi 
d’arbustes à Thé. Le nombre d'ouvriers nécessaires pour la 
culture et surtout pour la préparation des feuilles de Thé était 
très-considérable, la surveillance très-difficile et en fin de 
compte la production du Thé à Java très-onéreuse. 

Le gouvernement résolut dès lors de céder une partie des 
plantations à des particuliers auxquels il ‘’engagea à acheter 
chaque année le thé produit, à un taux fixé d’avance. 

Le résultat de cette opération fut l'amélioration des produits . 
et l'extension de la culture du Thé; mais les prix trop élevés 
rendaient encore ce sysième trop onéreux pour le gouverne- 
ment; aussi, au bout de sept ans obtint-il la résiliation d’une 
partie des contrats qui le liaient avec les particuliers et n’ac- 
cepia plus le thé qu’à des prix réduits. 

Par suite de cette importante modification, la culture du Thé 
cessa d'exister ailleurs que dans les régences des Preanger et 
de Bagelen et dans les districts de Buitenzorg et de Krawang. 


128 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Les travaux furent interrompus dans sept des établissements 
gouvernementaux, un huitième fut définitivement fermé. Les 
cultures du gouvernement se trouvaient ainsi réduites à des 
proportions plus modestes. Elles continuèrent à être menées 
de front avec celles des particuliers de 1849 à 1860 avec plus 
ou moins de succès. On ne tarda pas toutefois à se convaincre 
que la différence entre la culture gouvernementale et la cul- 
ture privée était de plus en plus à l'avantage de cette dernière. 
Ainsi pour l’année 1858, l’une des plus favorables pour la cul- 
ture du Thé, les plantations des particuliers produisirent en 
moyenne 1 kilogramme de Thé pour 7 à 8 arbustes; celles du 
gouvernement 1 kilogramme de Thé pour 33 arbustes. 

En présence de tels résultats, le gouvernement colonial 
décida en 1860, l’abandon de la culture, par le gouvernement, 
du Thé dans la régence de Bagelen, la seule depuis 1854 où 
elle existât encore. En même temps il facilita aux particuliers 
la conservation de leurs établissements, après l'expiration de 
leurs contrats, en leur cédant à bail, moyennant un prix fixe, 
les terrains appropriés à la culture du Thé et au même taux 
que les terrains incultes. 

Aujourd’hui la culture du Thé à Java est abandonnée à ses 
propres forces : elle prospère librement, sans tutelle, entre les 
mains des particuliers. 


_ IT. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX 


DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, 


SÉANCE GÉNÉRALE DU $ FÉVRIER 1874, 


Présidence de M. le Marquis DE SELVE, Membre du Conseil. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. 

— M. le Président proclame les noms des membres nou- 
vellement admis : 


MM. Présentateurs. 


AUS ro Sa En laires 
BERTHOULE (Amédée), à Besse “io eco naine 


à De la Blanchère, 
et rue Furstemberg, 2, à Paris. 


Jules Grisard. 
: dr C. Dareste. 
a propriétaire, rue de Bondy, | ue Cd 
1 | Marquis de Sinéiy. 


0 « . C. D > e 
BuREAU (Charles-Albert), pharmacien, à Carvin, | a 


Jules Grisard. 
(Pas-de- Calais). larauis de Selve. 


A. Geoffr int-Hilaire. 
Dugier (Alfred), propriétaire, rue de To roy Saint-Hilaire 


: ; Lesserteur, 
rency, 11, à Boulogne-sur-Seine. 


A. Rivière. 
€ Bar ; ; 
FROJO (Joseph), professeur d’agronomie à l’École \ éroe G'AGUTE 


d'application de Naples, à Naples (Italie). | 2 HCHLD ARIANE 


D. Gallotti. 
LAAGE (Paul de), au château de la Pr a 
(Sarthe). Marquis de Selve. 


Drouyn de Lhuys. 
Louvrier. 
Marquis de Selve. 


PuzLIGNY (le vicomte de), maire d’Écos (Eure), | A: Geoffroy Saint-Hilaire. 


? Gindre-] F 
au château du Chesnay-Haguei. LAAIRerDe 
Raveret-Wattel. 


Carbonnier. 

A Gillet de Grandmont. 
l Maurice Girard. 
3° SÉRIE, T. |. — Février 1874, 9 


Moreau (Isidore-Marcel), notaire, à Couhé-Vé- 
rac (Vienne). 


RICO (B.), inspecteur de l’École de pisciculture, 
à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). 


130 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Maurice Girard. 
Jules Grisard. 
Ponsard. 


ROUVILLE, ingénieur ordinaire des ponts et 
chaussées , à Vitry-le-François (Marne). 


— M. le Président fait part à l’Assemblée de deux pertes 
bien sensibles que la Société vient encore d’éprouver par suite 
du décès de M. le comte de Galbert et de M. Guérin-Méne- 
ville, membre fondateur, qui s'était acquis un rang si hono- 
rable dans les siences par ses nombreux travaux intéressant 
surtout la sériciculture. 

— MM. Le Gallays, Monthiers et B. Rico adressent des 
remerciments pour leur récente admission. 

— M.le Secrétaire de la Société zoologique de Londres 
accuse réception et remercie du tome X, 2° série, de notre 
Bulletin qui vient de lui être adressé. 

— MM. Victor Fleury, vicomte de Bélizal, docteur E. Bes- 
sette, de Surigny, docteur Tenain, de Vernejoul et la Société 
d'agriculture de l'Ardèche demandent à prendre part aux 
cheptels de la Société. (Renvoi à la Commission spéciale.) 

— M. de Saint-Quentin accuse réception des Perruches on- 
dulées qui lui ont été adressées dernièrement. 

— M. Dreyfous rend compte de l’état de son cheptel de 
Perruches ondulées. 

— M. le Secrétaire général fait connaître que les cheptels 
suivants ont été accordés par la Commission : 


ANIMAUX. 
MM. 

Baye (J. de), château de Baye, à Baye (Marne). Une paire 
Verrats Essex améliorés; un lot d'un coq et deux poules de 
Houdan. 

Bizcarn (Dominique), à Pontlevoy (Loir-et-Cher). Une 
paire Léporides. 

Brapy (Paul), abbaye de Saint-Nicolas, par Saint-Gobain 
(Aisne). Une paire Lapins argentés; un lot d’un Coq et deux 
Poules Bréda. 

BrionvaL, à Lunéville (Meurthe-et-Moselle). Une paire Fai- 
sans de Mongolie. 


PROCÈS-VERBAUX. 131 


Brosse-FLAvIGNY (Ch. de la), à la Venrière, par Candé 
(Maine-et-Loire). Une paire Lapins argentés ; une paire Lapins 
à fourrure. 

Dampierre (René de), au château de Saint-Simon, par 
Jonzac (Charente-Inférieure). Une paire Lapins argentés. 

DesPortTes (le docteur), rue d’Alger, 12, à Paris. Une paire 
de Perruches ondulées. 

Ducnastez (Ch.), à Vernantes, par Saumur (Maine-et-Loire). 
Une paire Canaris mandarins. | 

Duranp-Gonon (L.), à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord). Une 
paire Canards Casarka. 

Leroy (Pierre-Ernest-Ovide), à Fismes (Marne). Une paire 
Faisans Swinhoë. 

MorreuiL (Comte de), à Laboryte, près Paulhaguet (Haute- 
Loire). Une paire Faisans vénérés. 

Munier, à Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle). Un mâle et 
deux femelles de Kangurous de Bennett d'Australie. 

ParTior (Gaëtan). Un couple Perruches ondulées. 

RaBuTÉ, à Doullens (Somme). Une paire Perruches ondulées ; 
une paire Colombes Lophotes. 

SAINT-QUENTIN (Auguste de), à Cette (Hérault). Deux paires 
de Perruches ondulées. 

Simon (L.-H.), rue de Rome, 66, à Paris. Trois paires Moi- 
neaux mandarins. 

Toucae (Comte Edmond de la), à Saint-Brieuc (Côtes-du- 

Nord). Une femelle Léporide. 

TouLmox (de), rue des Saint-Pères, 7 bis, à Paris. Une paire 

Faisans Mongolie. 


VÉGÉTAUX. 
MM. 

Barnsgy, directeur du Jardin des plantes à Tours (Indre-et- 
Loire). Diverses espèces de Bambusa, Acacia, Casuarina, 
Urtica,, Arundo festucoïdes, Lygeum spartum, Oryza, 
Morus Japonica, Pinus sabiniana, Polymnia edulis, Stipa 
tenacissima. 


Baye (J. de), château de Baye, à Baye (Marne). Betterav: 


A ?, SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


rouge globe, Chou fourrager mille têtes. Pomme de terre 
Caillaud, Pomme de terre Chave, Pomme de terre Marjolin. 

KRaLIK (Louis), à Tresserve, par Aix-les-Bains (Savoie). 
Variétés de Bambous. 

LecLeR (docteur), à Rouillac (Charente). Bambusa flexuosa, 
violascens, viridi qlaucescens, Pêcher de Tullius, Séipa tena- 
CiSSima. 

VauTiER (Émile), à Lyon (Rhône). Collection de graines 
potagères et Polymnia edulis. 

— M. Federico Muntadas adresse à M. Drouyn de Lhuys 
la lettre suivante : « J’ai l'honneur de vous informer que le 
23 du courant, mon régisseur a envoyé à S. E. M. le marquis 
de Bouillé, à Madrid, quatre boîtes avec 20000 œufs de 
Truites embrvonnés, provenant de mon établissement de 
pisciculture de Piedra (Aragon), et destinés à la Société 
d’acclimatation. » — Remerciments. 

— M. Hignet de Varsovie (Pologne) adresse ses remerci- 
ments pour l'envoi qui lui a été fait de graines et cocons 
vivants de Vers à soie, il ajoute : «Je serai sans doute à même 
» de vous envoyer une petite partie d'œufs provenant du gou- 
» vernement de Kiew. Savez-vous que nous faisons dans ces 
» pays-ci nos éducations avec des müûriers sauvages ? Je vois 
» par vos Bulletins que vous recommandez celte méthode, 
» peut-être la bonne santé de nos vers tient-elle à ce genre de 
» nourriture ? » 

— M. Usèbe fait parvenir un rapport sur ses éducations des 
Attacus Yama-maï et cynthia. 

— M. P. Chappellier demande que la Société veuille bien 
mettre à sa disposition une petite quantité de graine de Vers 
à soie de lAïlante et du Mürier ainsi que des graines de 
Zapallito et de Melon vert à rames. 

Une autre lettre de M. Chappellier transmet un intéressant 
compte rendu de la culture de Safrans étrangers introduits en 
France par la Société d’acclimatation. (Voy. au Bulletin.) 

— M. Mora, ancien ministre de l’empereur Maximilien, qui 
a contribué avec le plus louable zèle à la propagation de lE- 
calyptus au Brésil, offre à la Société d’acclimatation la tra- 


PROCÈS-VERBAUX. 133 


duction en espagnol d’une notice de M. le docteur Gimbert 
sur l'utilité de cet arbre. — Remerciments. 

— M. le baron Ferdinand de Mueller, directeur du Jardin 
botanique et zoologique de Melbourne (Australie), adresse à 
M. le Président la lettre ci-après : « Le profond intérêt que 
Votre Excellence a montré, comme président de la Société 
française d’acclimatation pour l'extension de la culture fores- 
tiére en Algérie, me porte à vous faire observer que, sous vos 
auspices, un complément d'introduction de diverses espèces 
d'Eucalyptus pourrait avoir lieu, et que le gouvernement 
éclairé de votre nation pourrait procurer au zèle de M. Ramel 
une occasion de réaliser les projets qu’il a formés pour aug- 
menter la production des bois en Algérie par de nouvelles 
importations de végétaux australiens. 

» Personne ne sait mieux que V. E. que c’est principale- 
ment aux efforts persévérants de M. Ramel qu'est dû le pro- 
digieux développement de la culture de l'Evcalyptus dans 
votre colonie ; mais, parmi les cent quarante espèces décrites 
par M. Bentham et moi dans le troisième volume de la Flora 
Australiensis, un grand nombre sont totalement inconnues sur 
le littoral de la Méditerranée. Le territoire algérien est si 
vaste et la demande des bois de chauffage et de construction 
s'est tellement accrue avec la prospérité de la colonie, que 
l'extension de la sylviculture y doit offrir d'importants et 
durables avantages. 

» Ce serait aussi, de la part de votre grande patrie, rendre 
un légitime hommage au mérite de M. Ramel, que d’utiliser 
les dernières années de son existence et de le placer dans une 
position qui lui permit de consacrer toute son énergie à l’objet 
que Jai eu l'honneur de vous indiquer. 

» Quant à moi, je procurerais successivement de nouvelles 
espèces d'Eucalyptus et d’autres arbres appropriés à votre 
sol aloérien, qui, s'ils ne pouvaient pas croître avec la même 
rapidité que l’Eucalyptus globulus, seraient néanmoins de 
nature à s'acclimater facileraent, et donneraient de précieux 
produits diflérents de ceux que vous avez déjà. 

» En remerciant V. E., etc., je la prie d’agréer, elc. 

» Signé Baron FERDINAND VON MUELLER. » 


4134 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


— En adressant des remerciments pour le lot de Pois et de 
Pommes de terre qui lui a récemment été expédié, M. Bossin 
fait parvenir une note sur les avantages de la culture du Chou- 
fleur impérial. (Voy. au Bulletin.) Notre confrère veut bien 
joindre à son envoi vingt paquets de graines de ce Chou-fleur, 
pour être mis en distribution par la Société. — Remerciments. 

— M. Marais offre un exemplaire d'une étude chimique et 
micrographique sur le Boldo, faite par M. Claude Verne, en 
collaboration avec MM. les professeurs Baillon et Bourgoin. 
M. Marais prie la Société de vouloir bien seconder M. Verne 
dans ses recherches sur le Bo/do, en mettant à sa disposition 
les feuilles de ce végétal qu’elle possède. 

— À l'occasion du travail de M. Verne sur le Boldo, M. Ri- 

vière émet l'avis qu’il serait intéressant d’essayer la culture de 
ce végétal en Algérie, où elle paraît avoir de grandes chances 
de réussite. Il existe, en effet, au Jardin du Hamma deux pieds 
de cet arbre qui sont d'une magnifique venue. 
& M. Rivière donne ensuite d’intéressants détails sur la cul- 
ture des Eucalyptus en Algérie. L’E. resinifera, peu exigeant 
sur la nature du sol, et qui résiste bien à la sécheresse, lui 
semble appelé à plus d'avenir encore que l'E. globulus, au- 
quel il faut toujours un terrain frais et profond pour prospérer 
réellement et se développer avec cette rapidité phénoménale 
qu’on lui connaît. 

Notre confrère signale aussi ce fait que les plantations 
d'Eucalyptus, entreprises sur des terrains nouvellement dé- 
frichés, ont fréquemment à souffrir des attaques de certains 
insectes Coléoptères, dont les larves, qui vivaient, avant la 
mise en culture, aux dépens des Graminées couvrant le sol, 
envahissent promptement les racines des jeunes arbres et 
peuvent leur causer un tort sérieux. Un de ces insectes est le 
Rhizotroqus euphytus (Buquet), espèce du nord de l'Afrique. 

— M. Millet donne lecture de la première partie d’un tra- 
vail relatif à la police de la chasse et aux oiseaux insectivores. 
(Voy. au Bulletin.) 
illieux communique à l’assemblée une note sur 
l'introduction de la culture du Thé à Java. (Voy. au Bulletin.) 

— M. Decroix rend compte de l’état actuel de la consom- 


PROCÈS-VERBAUX. 135 


mation de la viande de cheval, tant à Paris qu’en province et 
à l'étranger. (Voy. au Bulletin.) 

Sur l'observation, faite à ce sujet par M. Salmon, que ies 
propriétaires des boucheries de cheval refusent généralement 
d'acheter les chevaux blancs, M. Decroix dit que ces chevaux 
présentent, en effet, l’inconvénient d'être quelquefois atteints 
de mélanose ; la couleur de la viande peut être alors répu- 
gnante pour certaines personnes, bien que la qualité n’en 
soit nullement atteinte. 

À l’appui des assertions de M. Decroix sur les progrès de 
Pemploi du cheval comme viande de boucherie, M. Geoffroy 
Saint-Hilaire rend compte que le prix de cette viande a telle- 
mentaugmenté, qu'on s’est vu forcé de renoncer à son usage, 
au Jardin d’acclimatation, pour la nourriture de certains 
oiseaux, tels qué les Cigognes, par exemple, qu’il n’est plus 
possible de conserver en troupes nombreuses pendant l'hiver 
dans des conditions suffisamment économiques. 

En constatant les services que rend aujourd'hui à Palimen- 
tation publique l’usage de la viande de cheval, M. Geoffroy 
Saint-Hilaire rappelle que M. Decroix est le fondateur du 
comité de propagande qui a fini par triompher des préjugés, 
-et par faire réellement entrer celte viande dans la consom- 
mation journalière. Si toute la population parisienne s’est 
résignée aussi facilement à son emploi pendant les jours 
néfastes du siége, c’est qu’elle y avait été en quelque sorte 
préparée à l’avance ; c’est que ses répugnances étaient déjà 
en grande partie vaincues par les efforts philanthropiques de 
quelques hommes, au milieu desquels M. Decroix occupe 
certainement là première place. 

— M. Vavin met sous les yeux de l’assemblée un lot superbe 
de Cerfeuil bulbeux et donne lecture d’une note sur la culture 
de cette plante dans sa propriété de Bessancourt,. 

— Il est donné lecture d’un rapport de M. le comte de 
Malartic sur la propagation du Ramié en France et en Algérie. 
Ce travail soulève quelques observations de la part de MM. Ra- 
veret-Wattel et Rivière. 

— M. Geoffroy Saint-Hilaire dépose sur le bureau une 


136 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


vingtaine de fruits de Zapallito, provenant du Jardin d’accli- 
matation d'Hyères; il rappelle les divers avantages de ce 
petit potiron, qui est d'excellente qualité, ne trace pas et se 
conserve fort longtemps. M. le Secrétaire général invite, du 
reste, ceux de nos confrères qui désireraient déguster ce 
légume, à profiter du lot qu’il offre aujourd’hui à la Société. 

M. Vavin reproche au Zapalhto de dégénérer rapidement par 
suite de croisements avec d’autres courges. 

M. Rivière fait observer que c’est là un inconvénient com- 
mun à toutes les Cucurbitacées, dont on est obligé de sur- 
veiller la fécondation quand on tient à conserver les types 
purs. Pour éviter l’hybridation, il est nécessaire de protéger 
les fleurs femelles à l’aide d’un sac en mousseline, contre les 
visites des insectes, qui charrient toujours du pollen étranger, 
et de recourir à emploi de la fécondation artificielle. 

— Il est déposé sur le bureau : 

4° De la part de M. K. W. Van Gorkom : Verslag nopens de 
kina-kultuur op Java, over het jaar 1872. Batavia, 1873. 

2 De la part de M. Raveret-Wattel: un exemplaire de la loi 
du 22 janvier 1874, portant promulgation des art. 3 et 9 de 
Ja loi du mai 1544, sur la police de la chasse. 

3° De la part de M. le docteur Georges Camuset : Sur le de- 
veloppement pathologique de l'œil chez le Cyprin dit Porsson- 
TÉLESCOPE. 

— Il est offert à la Société, de la part de M. Forbes Watson, 
directeur de l’{ndia Museum, à Londres, des graines de 
Cedrus deodara. — Remerciments. 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 20 FÉVRIER 1874. 


Présidence de M. le Marquis DE SELVE, Membre du Conseil. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. 

M. le Président proclame les noms des membres nouvelle- 
ment admis par le conseil. 


2% 


PROCÈS-VERBAUX. 137 


MM. Présentateurs, 
Ernest Bellecroix. 
Réné Caillaud. 
Rufñier, 
BEenoiT-CHAMPY (Gabriel), boulevard Malesher- { A. Geoffroy te 
bes, 89, à Paris, et château du Faite, par ; Ruffier. 
Arnay-le-Duc (Côte-d'Or). lusequie de Sinéty. 
Ernest Bouillod, 
Loïs Bouillod. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Bouillod père. 
À. Geoffroy Saint-Hilaire, 
-Ruffier. 
DErByY-WELLES, avenue d’[éna, 98, à Paris, et! A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
château du Bourg-Saint-Léonard, par Argen-! Raveret- Wattel. 
ion (Orne). Dobcteur Ricord. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Ruffier. 
Marquis de Sinéty. 
Ê Geoffroy Saint-Hilaire. 


BAKALOWICZ (Ladislas), artiste-peintre, rue de 
la Victoire, 32, à Paris. 


BLANGEY (Camille), docteur en médecine, à Saint- 
Léger-sur-d’Heune (Saône-et-Loire). 


BouILLOD fils (Loïs), à Saint-Léger-sur-d'Heune | 
(Saône-et-Loire), 


DEYROLLE (Émile), naturaliste, rue de la Mon- 
naie, 23, à Paris. 


DROUILHET DE SIGALAS (le baron P.), proprié- 


Saint-Yves Ménard. 
taire, à Marmande (Lot-et-Garonne). 


Rufier. 

À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 

| Ruflier. 

Richard (du Cantal). 
Ruffier. 

Marquis de Sinéty. 

re de la Brosse-Flavigny. 


FEASsE (L.), propriétaire, rue de la Faisanderie, 
LA, à Paris. 


FÉRARY (Claude-Achille), propriétaire agricul- 
teur, à Aurillac (Cantal). 


GAULLIER (Henri), domaine agricole de Bour- 


à ffr ç 0 x 0 de à 
mont, près Candé (Maine-et-Loire). SG nros SRE AIaIrE 


| Raveret-Wattel. 

Jules Grisard. 

Rufler. 

A. Salmon. 

LEcouTEUx (Édouard), Secrétaire général de la { Drouyn de Lhuys. 
Société des agriculteurs de France, boulevard ! A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Haussmann, 36, à Paris. lSintevves Ménard. 

LICHTENSTEIN, négociant, membre de la Société / Deyrolle fils. 
entomologique de France, à Montpellier (Hé-/ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
raull). | Raveret- Wattel. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Saint-Yves Ménard, 

Ruffier. 


GUuÉRIN (J.), propriétaire, rue de Trévise, 43, 
à Paris. 


MANSBENDEL (Henry), associé d’agent de change, 
rue Clapeyron, 24, à Paris. 


138 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Duchastel. 
? Jules Grisard. 
| Raveret-Wattel. 
Saint-Yves Ménard. 
Léon Simon. 
Louis Simon. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Ruffier. 
Marquis de Sinéty. 


PERrsAC (Charles-Georges-Ernest), avocat, ancien 
magistrat, à Saumur (Maine-et-Loire). 


PERsiIN (Gustave), propriétaire, rue Bertin-Poi- 
rée, 16, à Paris. 


Rey (Toussaint), sériculteur au Marquisat, près 
Annecy (Haute-Savoie). 


Romans (le baron de), propriétaire, membre de 
la Société entomologique de France, au châ- Dr dot 
teau de la Planche d’Andillé, près la Villedieu- } -"OUYA CE ns: 
du Clain (Vienne). J. de la Perraudière. 

Ernest Bellecroix. 

‘ René Caillaud. 

Ruffier. 


Ch. de la Brosse-Flavigny. 


TREMPÉE, propriétaire, rue du Canal Saint- 
Martin, 43, à Paris. 


Le Conseil a en outre admis au nombre des Sociétés 
agrégées : 

La SOCIETÉ D'HORTICULTURE DE L'ARRONDISSEMENT D'ÉTAMPES 
(Seine-et-Oise). 

— M. le Président fait part de la perte regrettable que la 
Société vient de faire de deux deses membres, MM. Reintjens 
et S. Exc. le comte André Citadella-Vigodarzere. 

— M. le Secrétaire procède au dépouillement de la corres- 
pondance. 

M. V. Adam, président de la Société d’horticulture des 
Vosges, transmet les remerciments de cette Société pour sa 
récente agrégation à la nôtre, et proteste du zèle des mem- 
bres de cette association pour les travaux que nous poursuivons. 

— MM. Charton et B. Rico adressent des remerciments 
pour leur récente admission au nombre des membres de la 
Société. 

— M. Besset remercie également de son admission, et 
demande à recevoir en cheptel des Lapins argentés. 

— M. le Président de la Société centrale d’agriculture du 
département du Pas-de Calais demande que cette Société, 
agrégée à la nôtre, soit comprise dans les distributions de 
graines et de végétaux qui sont fréquemment faites. 

— M. le docteur Turrel demande divers cheptels d'animaux 


PROCÈS-VERBAUX. 139 


et de végétaux au nom de la te d’horticulture et d’accli- 
malation du Var. 

— MM. André, Barnsby, Bellaigue de Bughas, Bouillod, 
Brady, Collardeau et de Montrol demandent à recevoir vds 
animaux ou végétaux en cheptel. 

— M. Duchastel accuse réception des Canards mandarins 
qui lui ont été adressés, et prie la Société de lui accorder un 
lot de graine de Ver à soie de l’ailante. 

— MM. le docteur Brette, Hémar, baron Larrey et Réné 
Cara de Vaux accusent réception et remercient des envois 
de graines qui viennent de leur être faits. 

— MM. Brady et le comte de Morteuil adressent des remer- 
ciments pour les animaux qui leur ont été accordés par la 
commission des cheptels. 

— M. Joseph de Baye accuse réception de son cheptel de 
Poules de Houdan, qui lui est parvenu en bon élat. 

— MM. Barailon et Ribeaud rendent compte de leurs 
cheptels de Léporides et de Canards mandarins. 

— M. de Capanema, délégué de la Société à Rio-Janeiro, 
accuse réception à M. le Secrétaire général des Canards man- 
darins, Faisans argentés et Poules andalouses qui lui ont été 


adressées. M de Capanema remercie en outre la Société de ta 


collection de sarments de Vignes qui lui a été offerte et des 
collections d'Orangers, Figuiers et Pêchers qui lui ont été 


envoyées. 


—M. Leroy, de PME adresseses remerciments pour 
le cheptel de Faisans Swinhoë qui lui a été accordé et ajoute: 
« Le cheptel de vénérés (4 coq et 2 poules) et celui de Canards . 
» mandarins qui mont élé confiés antérieurement sont dans 
» un excellent état de santé ; le canard et la cane mandarins 
» ne se quittent pas ; ils sont toujours ensemble, ce qui me 
» paraît d’un bon augure pour la reproduction prochaine. » 

— M. Chagot ainé, écrit pour attirer l'attention de la So- 
eiêté sur l'intérêt qu'il y aurait à encourager les amis de 
Jacclimatation qui habitent la Plata à tenter l’introduction 
des Autruches africaines. 

« La dépouille d’une Autruche mâle vaudra toujours de 


1 


4110 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


300 à 500 francs, dit M. Chagot, celle de la femelle moitié à 
peu près, tandis que la plume du Nandou ou Autruche d’Amé- 
rique se vend de 15 à 20 francs le kilogramme. Il y aurait 
profit pour les éducateurs et profit pour le commerce des 
plumes qui manque de plus en plus de plumes d’autruche. » 

— M. Margarot-Pauc, écrit de Nimes à M. le Directeur du 
Jardin d’acclimatation : « Je n’éjointe plus mes Oies d'Égypte 
par la raison qu’elles sont pour ainsi dire domestiques. 
Vous vous apercevrez que celles que je vais vous envoyer 
viennent manger à la main; encore une ou deux générations 
et elles ne bougeront plus de la basse-cour comme tant d’au- 
tres oiseaux très-sauvages, qu'avec de la persévérance j'ai 
réduits à cel état. » 

— Madame la maréchale de Santa-Cruz écrit, en réponse 
aux deux lettres qui lui ont été adressées les 13 et 18 du cou- 
rant, par M. le Président : « Parmi les animaux que vous 
me signalez, Je puis vous procurer plusieurs variétés de Ca- 
nards du lac de Titicaca ; el pour ce qui concerne les Agamis, 
je vous prie de m’en indiquer le nom en espagnol ou de 
m'en fournir les traits caractéristiques. I y a sur les bords de 
ce lac plusieurs oiseaux du genre des Échassiers, et je ne 
sais auquel s'applique le nom d’Agamis. Les Tapirs et les 
Cygnes n'existent que dans la partie sud du versant oriental 
de la Cordillère des Andes, et nous sommes plus difficilement 
en cominunication avec ces régions (très-peu peuplées quoique 
irès-fertiles) qu'avec l’Europe. Aussi, je renonce à vous pro- 
curer des animaux de celte espèce. 

» En revanche, parmi ceux qui habitent le plateau des Andes, 
il en est de très-intéressants, et ce sont ceux-là que j'ai essayé 
à plusieurs reprises de vous procurer. Je veux parler de l’AI- 
paga et de la Vigogne. Un de mes fils, qui est actuellement 
en France, et qui doit repartir prochainement pour la Bohvie, 
accepte avec plaisir ia mission de vous en chercher quelques- 
uns, en ayantsoin, avant de vous les envoyer, de les garder 
quelque temps chez lui, pour les apprivoiser et les habituer 
au genre d'alimentation qu’ils pourront avoir à bord des bäti- 
ments. Il prend sur lui de leur faire traverser les 80 lieues 


PROCÈS-VERBAUX. 141 


de désert qui séparent la Paz de la côte, sous la conduite 
d'Indiens de ses propriétés, et de vous les faire mettre à 
Taena ou à Arica, où vous avez sans doute quelque agent 
consulaire qui pourra s'occuper de leur embarquement. 

» Je vais dès à présent demander en Bolivie des semences 
d'Hoca et Arracacha que vous désirez avoir ; et c’est préci- 
sément de ces plantes que je voulais parler dans ma lettre 
précédente, en y joignant la Quinoa, plante comestible qui 
pourra s’acclimater facilement en France. C'est un genre dont 
la tige fournit une graine d’une alimentation très-saine en 
même temps que très-substantielle, et dont les feuilles se pren- 
nent en guise d'Épinards. Ce sera, je n’en doute pas, une 
acquisition des plus précieuses, si vous réussissez à en pro- 
pager l’usage. 

» Les différentes variétés de Pommes de terre que nous avons 
sont toutes cultivées. [1 y en a dont la pulpe est d’un jaune 
doré et d’autres violacée. Ce sont celles que je veux vous faire 
envoyer, parce que Je crois qu'elles n'existent pas en France. » 

—- M. Millet rappelle à la Société combien il importe de 
faire, dans le courant de mars, des observations sur les 
brouillards qui peuvent se produire, afin de mettre les agri- 
culteurs, les horticulteurs et surtout les viticulteurs, en mesure 
de prendre des précautions contre les gelées tardives du mois 
de mai. 

— M. Alexandre Misset, notaire à Aïgnay-le-Duc (Côte- 
d'Or) écrit, à la date du 9 février : « Je viens, cette année 
encore, vous rendre compte de l’état du cheptel que m'avait 
confié la Société, dès 1869. Il ne me reste qu’une Poule mére, 
sa compagne est morte, et je n’ai obtenu sur douze œufs couvés. 
chez moi que deux produits : un coq et une poule; neuf des 
œufs étaient clairs et un avait été brisé par la couveuse. 

» Je ne sais à quoi attribuer ce fait, que je remarque depuis 
quatre ans. Les œufs sont clairs, dans une proportion des 
irois quarts environ. 

» J'ai remarqué, en outre, que ces poules de Houdan ne se 
plaisaient pas dans une basse-cour étroite comme celle que je 
possède, et qu'elles aimaïent avoir un vaste espace à parcourir. 


142 SOCIËTÉ D’ACCLIMATATION. 


Mes volailles, en liberté dans toute ma propriété, pendant 
l'hiver, sont renfermées l'été, et à cette époque j'ai toujours 
des poules malades. Elles ont pourtant de l'herbe, du sable 
et de l’eau, et leur nourriture se compose d’orge, de sarrazin 
et d'avoine, avec des distributions fréquentes de salade et 
d’oseilie. 


» Mes poules de races croisées se trouve bien de ce régime 
et pondent abondamment. 

» Si celte année je ne réussis pas mieux, je laisserai les 
croisements se faire définilivement et je crois que les produits 
seront supérieurs à ceux que j'ai obtenus jusqu'alors. 

» Si je n'ai pas été heureux dans mes essais d'élevage de 
volailles, j'ai, depuis quatre années, réussi à conserver dans 
une pièce d’eau des Saumons éclos chez moi. 

» J'avais obtenu en 1869 et 1870. des œufs fécondés de 
Huningue, et j’ai pu verser dans un ruisseau qui se jette dans 
la Seine, à 6 kilomètres de là, six mille poissons: Truites, 
Ombres et Saumons. J’ai voulu conserver sous mes yeux ces 
différents poissons et, dans un réservoir qui contient de la 
Carpe et des poissons blancs qui y alevinent, J'ai placé cent 
alevins, des trois espèces. La Truite et l'Ombre se plaisent 
dans ces eaux ; mais le Saumon n’a pas grossi ; il s’allonge et 
conserve une tête énorme. Je crains bien qu’après cet hiver 
les derniers n’aient été la proie des Truites, qui sont déjà de 
belle taille et leur font la chasse. 

» Que sont devenus les poissons mis dans la rivière? La 
ligne les a décimés, et le peu qui a pu échapper a gagné des 
eaux plus profondes. La pêche est ouverte le 1% février, et 
le 1* mars on verra encore des Truites sur les fravères. 
Comment conserver du poisson, avec ce mode de faire!» 

— M. David de Mayréna adresse la note suivante : 
« MM. Hennequin et Millet nous ont montré d’une façon par- 
faite, dans leur rapport sur l’ostréiculture (1), la nature de 
l’huître, sa reproduction par elle-même, son naissain et les 


(4) Hennequin et Millet, De l’aquiculture marine. (LA PRODUCTION ANr- 
MALE ET VÉGÉTALE. Paris, 1867, au siége de la Société d’acclimat tion.) 


PROCÈS-VERBAUX. 4113 


moyens obtenus pour la reproduction de cet intéressant mol- 
lusque. Ils nous ont parlé des travaux remarquables entrepris 
par notre regretté M. Coste, pour l'établissement des parcs 
de. Grand-Cès, de Castrobe et de Lahillon, dans le bassin d’Ar- 
cachon. 

» Ce que l'on doit ajouter, c’est qu'avant M. Coste, M. de 
Bon, directeur des services administratifs au ministère de la 
marine, avait, dès 1852 (c’est-à-dire deux ans avant l’époque 
où il rédigea son premier rapport sur les huîtrières natu- 
relles), tenté des expériences couronnées de succès, dans la 
baie de Saint-Servan. 

» En effet, chargé par M. Ducos, ministre de la marine, 
d'assurer le repeuplement des anciennes huitrières, M. de 
Bon fit avec la péniche /a Railleuse, construite à ses frais, 
iransporter des huîtres sur les bancs de la Rance et la rade 
de Saint-Mâlo qu'il repeupla de la sorte. Secondé par M. Mou- 
lac, actuellement vice-amiral préfet maritime, M. de Bon 
avait en 1854 obtenu un résultat d’un million d'huîtres envi- 
ron. Il constatait dès lors : 

» 1° Que les huîtres transportées d’un point à un autre se 
reproduisaient. 

». 2° Que le même résultat était atteint avec des huîtres 
recueillies dans des conditions différentes, lorsqu’elles sont 
déposées sur des étalages. 

» 3° Qu’à Saint-Servan, l’huîtrière, formée par lui à l’en- 
trée du port Solidor, donnait des résultats qui rendaient 
indiscutable la reproduction des huîtres transportées. 

» En 1855, les expériences de M. de Bon étaient compléte- 
ment démonstralives, et il avait résolu la possibilité d’acclima-, 
tation et de reproduction, alors même que la portion du 
rivage qui a reçu les huîtres se découvre chaque jour dans 
les marées de vives eaux. Peu de temps après, il trouvait la 
grande question de recueillir le naissain au moyen d'une 
orille formée de lattes, de cercles ou de bois percée de trous 
de 0",50 carrés; cette grille est placée à 15 ou 20 centimètres 
au-dessus du coquillage. Vers la fin de mai 1859, au moment 
de la reproduction, les appareils se couvraient de naissain, et 


14h SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


en décembre suivant M. de Bon obtenait des élèves de 1 à 
2 centimètres de diamètre. 

» Ces faits m'étant parfaitement démontrés, je ne puis 
m'empêcher de rendre à M. de Bon la part de louanges qui 
lui reviennent pour cette admirable découverte (1). 

» Les principaux établissements huîtriers en France sont : 

» 1° arrondissement maritime. — CoursEuLLES : Dépôt, 
reproduction. 

» 2° arrondissement maritime.— QuiMPER : Parcs, élevages, 
reproduction, étalages, établissement de M. de Cuzolles. — 
CaNcaLE : Étalage. 


» 3° arrondissement maritime. — Auray : Reproduction, 


élevages, parcs dans les rivières d’Auray. — VANNES : Parcs, 
élevage, reproduction. 


» ° arrondissement maritime. — NorRMouTIERS : Parcs. 
— SABLES D'OLONNE : Parcs. — ILE DE RÉ : Pas de résultat. — 
OLÉRON : Pas de résultat. — Marennes : Engraissage de 


lhuître. — La Tesre-nE-Bucu : Parcs, élevage, reproduction, 
huitrières naturelles. 

» De tous ces établissements, celui de la Teste-de-Buch, 
dans le bassin d'Arcachon, est le plus productif ainsi que 
MM. Millet et Hennequin l’ont démontré dans leur rapport, 
Malheureusement les parqueurs d'Arcachon vendent les pro- 
duits du bassin dès qu'ils ont atteint la dimension réglemen- 
taire (5 centimètres minimum de diamètre). Ils ne laissent 
donc pas à l’huître le temps d’acquérir une grosseur et une 
qualité qui la feraient certainement beaucoup plus apprécier 
des amateurs. Il faut dire pour leur justification que les 
moyens actuellement en leur pouvoir pour l'engraissage de 
l’huître sont insuffisants ; le département de la Marine songe 
à réparer cette lacune. 

» J'ai fait moi-même des expériences sur celte partie si 
intéressante de l’histoire naturelle, et, secondé par notre 
savant président M. Drouyn de Lhuys, je pourrai, je les- 
père, d'iei peu de temps, en faire connaître le résultat. » 


(4) Le premier rapport de M. Coste est de février 1858. 


ES eu 


PROCÈS-VERBAUX. 415 


— M. Vauvert de Méan, vice-consul de France à Sunder- 
land, transmet un article extrait du Gardener’s Magazine 
rendant compte de la marche envahissante de l’insecte co- 
léoptère, désigné sous le nom de Doryphora decemlineata, 
qui attaque la pomme de terre en Amérique. Cet article 
signale le danger dont nos cullures se trouvent menacées par 
suite de lPimportalion considérable de pommes de terre 
d'Amérique qui se fait chaque jour. 

A cette occasion, M. Vavin communique à l’Assemblée une 
note extraite au 7emes, qui donne également quelques rensei- 
onements sur le Doryphora et sur les moyens employés pour 
le combattre. 

— M. Ch. Nicolas écrit de Guébar-bou-Aoun, à M. le direc- 
teur du Jardin d’acclimatation : « Fixé depuis quelques années 
en Algérie, J'ai pris la résolution d'y demeurer à tout jamais. 
Mon intention est de profiter de mon séjour pour faire des 
études sérieuses sur l’acclimatation. C’est vous dire, M. le 
directeur, combien vos conseils seront précieux pour moi et 
que je revendique l'honneur de devenir votre élève de prédi- 
lection. 

» Je recueille en ce moment des renseignements théori- 
ques et pratiques auprès d’agronomes et d’horticulteurs dis- 
tingués de nos contrées et des régions méridionales de notre 
France, en vue de la création très-prochaine d’un jardin 
d’acclimatation. 

» Dès le principe, je me consacrerai exclusivement à l’accli- 
matalion des végétaux, mais plus tard Je compte adjoindre à 
mon exploitation l’acclimatation de cerlaines espèces animales 
dont la multiplication offre des avantages sérieux (Autruches, 
oiseaux utiles au point de vue de la destruction des insectes, 
mammifères, gibier, poissons, elc.). 

» J'ai l'espoir de commencer mes premières plantations 
dans quelques mois; mais je suis pressé de jouir de mon 
œuvre naissante et je cherche de tous côlés des végélaux 
pouvant me donner des semences en peu de temps : je cher- 
che donc des sujets d’un certain âge. » 


— M. Fahlman, consul de Suède, à Stockholm, demande 
32 SÉRIE, T. |, — Février 1874, 10 


LT Late PR En 


416 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


s’il serait possible d'obtenir une notice sur l'emploi thérapeu- 
Ex tique du £oldo, ainsi que quelques feuilles de cet arbre pour 
en faire l'essai sur un malade. 

M. À. Rivière annonce qu’il a donné des ordres pour 

| qu'on récclle au jardin du Hamma une certaine quantité de 
feuilles de Boldo (Peumus boldu) destinées à la Société d’accli- 
malation, afin de lui permetire de satisfaire aux demandes 
qu'elle reçoit concernant ce nouveau médicament. — Re- 
mercimenis. 

— M. Ramel adresse à M. le Secrétaire général la lettre 
suivante : « J'ai l'honneur de vous prévenir que je remets au 
courrier de ce jour un sac de 300 grammes de semences 
d'Eucalyptus globulus. Deux paquets renfermant ensemble 

Æ les semences ci-après : Eucalyptus coriacea, résisia en 1866- 
Fe 67 à — 8 degrés de froid, près Paris; Æ. amygdalina (white 
me. Gum), alpesire; E. Gunnai, demi-alpestre ; E. urnigera, al- 
pestre; Æ. calophylla; E. resinifera (c'est le Red Gum du 
L côté de Svdney), pour les terrains secs; Æ. rostrata (c’est le 
De Red Gum de Victoria), aime le bord des rivières; Æ. tereti- 
cornis ; E. exserla, environs de Sydney, terrains secs. 
F » Je joins à la présente la photographie d’une lettre qui m'a 
= élé agressée par M. Ed. Wilson, comme témoignage du pro- 
3 grès de l'Eucalyptus globulus, dans le rôle qu’il commence 
‘1 à jouer comme arbre destiné à soulager les misères hu- 
| maines. 
» Agréez, etc. 
no » P.-S. J'ai reçu vos envois de graines et je vous en re- 
Le mercie. 
| » Les Cinchona n’ont pas de chance à réussir tei chez moi 
pas plus qu'au Hamma. Maintenant que l'Atlas se déblaye, il y 
aura peut-être quelque localité favorable. En attendant, je 
fais prendre des renseignemenis sur ce qu'on avait fait à 
ne leur sujet à la Chiffa, et quand j'en aurai de sûrs, je vous le 
dirai. » 
— M. le Secrétaire général informe l'Assemblée des dispo- 
sitions récemment prises par le Conseil pour assurer lenvoi 
gratuit aux membres de la Société du journal bi-mensuel, 


DS TS D RE TN AT CN AS 
LS LOC FA # 
à L * 
{ 


 PROCÈS-VERBAUX. A7 


L'Acclimatation, que vient de fonder M. Deyrolle, naturaliste 
à Paris. M. Geoffroy Saint-Hilaire fait ressortir les services que 
celte feuille est appelée à rendre en publiant toutes les nou- 
velles intéressant l’acclimatation, et en insérant les diverses 
demandes et offres d'animaux ou de végélaux que ses abonnés 
pourront avoir à faire. 

M. Geoffroy profite de cette occasion pour signaler les 
articles que notre confrère M. de La Blanchère publie fré- 
quemment dans la Chasse sllustrée, sur les travaux de notre 
Société et sur les faits intéressants d'histoire naturelle appli- 
quée. 

— Pour faire suite à ses précédentes communications sur 
l'utilisation des plumes dans l’industrie, M. de La Blanchère 
met sous les yeux de l'Assemblée un spécimen de tapis fabri- 
qué avec ce produit animal, et fait connaître les diverses 
maisons qui s’occupent de ce genre de fabrication. 

— M. Prillieux donne lecture d’une note sur les proauc- 
tions agricoles et forestières des possessions hollandaises des 
Indes Orientales. (Voyez au Bulletin.) 

— M. Millet fait une communication relative à la législation 
sur la chasse et à la conservation des oiseaux. (Voyez au Bul- 
letin.) 

— M. Rivière donne lecture d’un mémoire sur la culture 
de la Férule. (Voyez au Bulletin.) 

— M. Radiguet offre à la Société quelques bulbes d’écha- 
Jotes d'Algérie cultivées en Bretagne. 

— M. Geoffroy Saint-Ililaire donne au nom de M. Edgar 
Roger, qui ne peut assister à la séance, des détails pleins 
d'intérêt sur la reproduction du Talégalle obtenue par notre 
confrère dans son domaine de Nandy (Seine-et-Marne). (Voyez 
au Bulletin.) 

— Îl est déposé sur le bureau : 

1° De la part de M. A. Rivière : 

L’Alfa et le Sparte (extrait du journal de la Société cen- 
trale d’horticulture de France). 


2 De la part de M. Édouard Morren, membre de l’Acadé- 
mie royale de Belgique: 


AS SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


L'énergie de la végétation, ou application de la théorie 
mécanique de la chaleur à la physiologie des plantes. 

3° Un prospectus de la Compagnie générale des pêcheries 
françaises, Société anonyme ayant pour but l'exploitation des 
pêches et des industries qui en dépendent. 

h° Une circulaire adressée par le Comité central de secours 
aux blessés militaires espagnols. 


Le Secrétaire des séances. 


RAVERET-WATTEL. 


Le # ré 


418 


BULLETIN MENSUEL 


DU 
YARDIN D'ACCLIMATATION DU BOIS DE BOULOGNE 


(JANVIER ET FÉVRIER 1874) 


Par M. A. GEOFFROY SAINT-HILAIRE, 


Directeur de l'Établissement. 


(Janvier... Maximum +142. Minimum — {4° 


à 5 re extéri à 
Température extérieure. | Février … dj L5e. rh 70,5 


Le mouvement des entrées et sorties d'animaux pendant le 
mois de janvier et février 1874, a donné les chiffres suivants : 


Entrées. Sorties. 
dJanvier.... 457 mammif. 4101 oiseaux. 4159 mammif. 1117 oiseaux. 
Février.... 178 — 4546  — 151 — 4409  — 
Totaux... 339 — 2647 — 990 — 2526 — 


Dans le Bulletin, publié dans le numéro de décembre der- 
nier, nous avons cherché à montrer quelle avait été dans le 
courant de l’année 1873 l’activité du mouvement des entrées 
et des sorties d'animaux dans l’établissement. 

On voit par les chiffres qui précèdent, que cette activité 
ne se ralentit pas. 

Pendant les mois de janvier et février, le Jardin d’acclima- 
{ation a reçu un certain nombre d'animaux intéressants, que 
nous signalons à votre altention. Parmi les Mammifères, if 
convient de citer un Maki-Mococo (Lemur Catta) qui a rejoint 
au pavillon des Singes, les Maki-Mongous, Maki à front noir 
at Maki roux, que nous possédons depuis longtemps déjà. 

Une femelle de Papion sphynx nous a donné un Jeune, c’est 
ie premier que nous ayons obtenu de ces Cynocéphales. La 
mère répond au nom de Jeannette et vit depuis plusieurs 
années déjà dans une intimité réelle avec un Singe de même 
espèce qui habite notre singerie depuis cinq ans déjà. Coco, 


150 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


c'est le mari de Jeannette, règne en maître dans le comparti- 
ment affecté à ses semblables et Jeanuelte est l’objet de ses 
soins les plus attentifs et en même temps, avouons-le, de la 
tendresse la plus jalouse. Malheur au cynocéphale trop galant 
qui essaie d’attendrir la compagne du maître. Il est châtié 
sur l'heure. 

Jeannette est seule de son sexe au milieu d’une vingtaine de 
Papions, et grâce à la force de son conjoint et à la terreur 
qu’il inspire, elle vit entourée de respect et n’accorde ses 
faveurs qu’au seul titulaire de son affection. 

Le chenil s’est enrichi de plusieurs Braques Dupuy, cette 
race aujourd’hui bien connue a de nombreux partisans. Elle- 
a aussi ses critiques. Nous ne saurions entrer ici dans la dis- 
eussion de ses qualités et de ses défauts, qu’il nous suffise- 
d'affirmer qu’elle à pour tenants tous ceux qui l'ont employée. 

Nous avons acquis un nouveau Braque allemand. Quoique 
moins beau que l’étalon (Drago) qui est au chenil depuis 
plusieurs mois déjà, le nouveau venu (Feldman) a son mé- 
rite. C'est un représentant bien caractérisé de celte variété de 
chiens d'arrêt si estimée de l’autre côlé du Rhin. Il est lourd, 
prés de terre, la patte est trop grasse peut-être, mais l'animal 
a sa distinction, et quoique empâlées, ses formes sont belles ; 
sa queuc bien placée et relativement fine témoigne du mé- 
rite de ses ancêtres. 

Le beau chien allemand (Drago) qui a précédé Feldman, 
est sans doute incomparablement supérieur, mais n’a-1-il pas 
puisé quelques-unes des qualités d'élégance qui le distinguent 
dans le sang de quelque vieux Braque français ? Quoi qu’il en 
soit, les deux élalons dont nous parlons sont dignes d’atten- 
tion et seront des pères, estimés de ceux qui voudront obte- 
nir des chiens d’arrêt de grande taille (Drago mesure au 
garrot 0,67, Feldman 0,60). Il convient d'ajouter que les 
animaux en question ont chassé pendant deux saisons et qu’ils 
sont excellents chiens d’arrêt. 


Notre chenil a reçu pendant les mois écoulés, deux Chiens. 


courants de Saint-Hubert ou Bloodhounds provenant de l'é- 
quipage du comte Le Couteulx de Canteleu. Nous n’avons pas 


BULLETIN MENSUEL DU JARDIN D'ACCLIMATATION. 454 


à nous étendre sur l'intérêt que présente celte nouvelle acqui- 
sition, car toul le monde a admiré au dernier concours canin 
la meute exposée par M. le comte Le Couteulx, et a applaudi à 
la réacclimatation en France de ces nobles animaux, devenus 
exclusivement anglais pendant un siècle, après avoir élé 
les chiens d'ordre les plus estimés de notre ancienne vénerie. 

Les Bloodhounds sont d’un pied suffisant pour prendre 
quelque animal que ce soit, dans un pays convenable. Ils 
ont des qualités de change extraordinaires, un grand fonds, 
une grande docilité et un nez très-fin. Froids au début, ils 
poussent beaucoup l'animal quand il commence à être mal- 
mené ; ils sont en général peu mordants et demandent à être 
bien en curée pour tenir les abois. M. le comte Le Couteulx 
de Cantelen et tous les veneurs qui ont vu son équipage chasser 
soit seul, soit avec les meutes de M. de Vatimesnil ou de M. le 
comte d’Onsenbray avec lesquels ils prennent Cerfs et San- 
gliers dans les forêts de Gisors et de Lyons, ont conçu la plus 
grande opinion de cetle race, qui est destinée dans l'avenir à 
former beaucoup d’équipages en France. Sept ou huit maîtres 
d'équipage ont déjà prié M. le comte Le Couteulx de leur céder 
de ses élèves, el nous avons vu celte année, en Angleterre 
même, se former une meule entiérement composée de Blood- 
hounds, pour chasser le Cerf. La réintroduction de ces 
chiens en France les a donc mis en évidence, non-seulement 
chez nous, mais encore en Anoleterre, où depuis de longues 
années ils n'avaient plus été que bien rarement utilisés pour 
la grande vénerie, mais où l'on avait conservé précieusement 
leur race dans toute sa pureté au lieu de la laisser perdre 
complétement comme en France. 

Nous devons vivement souhaiter que le chenil du Jardin 
d’acclimatation puisse se développer le plus possible et le plus 
tôt possible, car cette nouvelle création est destinée à rendre 
les plus grands services pour aider au maintien et à l'amélio- 
ralion de nos races françaises. Mettre sous les yeux de nos’ 
visileurs des animaux de choix, permettre au public d’user 
d’étalons remarquables par leurs caractères, la pureté de la 
race et des aplitudes éprouvées, amènera, on n’en saurait 


452 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


douter, dans un temps très-courl, des résultats que nous 
pourrons certainement apprécier dans notre prochaine ex- 
position de Races canines (en 1876 probablement). L'espace 
nous manque aujourd'hui pour donner à notre nouvelle 
création les développements qu’elle comporte; il faut que 
nous puissions tripler le nombre des loges que nous avons 
construites. Nous pourrons bientôt, il faut l’espérer, ache- 
ver ce que nous avons commencé; nous y serons en quelque 
sorte contraints, car l’accueil fait par le public à notre 
chenil et aux quelques animaux que nous y avons réunis 
dépasse nos espérances. 

Parmi les Mammifères reçus au Jardin, il convient de signa- 
ler un couple de Phascolomes noirs, les premiers de cette 
variélé que nous ayons possédés. Ces curieux Marsupiaux sont 
l’objet de nos soins particuliers. Nous possédons actuellement 
quatre Phascolomes wombats, cinq Phascolomes à front large et 
enfin les deux Phascolomes noirs que nous avons cités. Jusqu'ici 
les animaux de ce genre n’ont jamais reproduit en caplivité et 
nous serions heureux de les voir multiplier. Leur viande est 
esimable, leur rusticité parfaite. Reproduiront-ils? Dans 
l'état de la question, on ne peut savoir siles Phascolomes pré- 
senteraient quelque intérêt au point de vue de l’acelimatation. 
I faut, avant de se prononcer, avoir pu étudier le problème. 
Sans doute, l'intérêt qui pourrait s’attacher à cette conquête 
n’est pas de premier ordre, elle vaut pourtant qu’on s’en 
occupe. Le rôle d’un établissement comme le nôtre est 
d'essayer, d’échouer même parfois dans ses tentalives, afin 
de pouvoir guider ceux qui marchent dans la même voie 
que lui. 

Signalons encore parmi nos nouveaux pensionnaires un 
certain nombre de petites vaches de Bretagne, destinées à 
donner leur lait aux visiteurs du Jardin. Sobres, rustiques, 
ces excellents animaux ont aujourd’hui un grand défaut, celui 
de coûter très-cher. Le prix de ce bétail, autrefois à bas prix, 
s’élève considérablement, et parmi les causes de celte plus- 
value, il en est une faite pour intéresser les membres de la 
Sociélé. 


BULLETIN MENSUEL DU JARDIN D'ACCLIMATATION. 193 


: Il y a peu d’années, nous ignorons pourquoi, il survint une 
très-grande rareté des bêtes à lait dans le pays Basque, et on 
eut l’idée d’essayer, pour remplacer les animaux manquant, de 
faire venir par mer un chargement de Bretonnes. Elles furent 
trés-scoûlées, et aujourd’hui, àce qu’on m’assure, l’acclimata- 
tion des vaches dont il s’agit, dans le pays Basque, se fait sur 
une grande échelle. 

Pour vous parler des oiseaux que nous avons acquis pen- 
dant les mois de janvier et février, nous éprouvons quel- 
que embarras, car nous ne savons par où commencer. Cest 
par centaines, par milliers, qu’arrivent les hôtes nouveaux de 
notre Jardin. Les uns sont destinés à y faire un long séjour ; 
d’autres, au contraire, restent nos pensionnaires quelques 
jours seulement. Parmi ces derniers, les plus importants, par 
le nombre, sont les Pigeons, les Poules et les Canards. 

Pour n’être pas les plus rares, ils ne sont pas sans intérêt. 
Les ventes de volailles que nous faisons et dont l’importance 
augmente chaque jour, ont amené un grand bien. Combien 
de basses-cours se sont formées d'animaux acquis au Jardin ! 
Du château, les volailles passent à la ferme, au grand profit de 
ceux qui les élévent, et aussi à la grande satisfaction de ceux 
qui les consomment. 

Le concours qui a eu lieu en février, au Palais de l’indus- 
trie, nous a fait sentir peut-être plus vivement qu'aucun aulre 
les progrès obtenus. Les volailles de Crèvecæur et de Hou- 
dan er particulier présentaient une uniformité de type des 
plus satisfaisantes, dépassant ce que nous voyions naguère. 
Nous ne devons pas, à coup sûr, reporter au Jardin seul Ja 


source de ce progrès, et cependant il serait injuste de nous 


en dénier notre part. Par l’exhibition constante que nous 
faisons de types choisis, nous avons aidé à l'éducation du 
public, nous avons contribué à former son goût. Par nos 
ventes, nous avons mis des animaux de mérite dans les mains 
des éleveurs, enfin nos œufs répandus par milliers chaque 
année au quatre coins de la France ont aidé à ces efforts. 
Parmi les Faisans entrés au Jardin, nous pourrions citer en 


grand nombre des vénérés, des Swinhoë, des versicolores, 


454 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


des mongoliens. L’abondance de ces arriviges témoigne des 
succès obtenus par nos nombreux coopérateurs. Comme nous 
ie disions dans un précédent Bulletin, le nombre de ceux qui 
s'occupent de la culture des oiseaux augmente sans cesse, et 
pour la plupart de ces amateurs, le plaisir de la volière n’est 
plus une dépense; la vente des produits leur paye soins et 
nourriture. C’est là un résultat digne d’intérêt, car il met ce 
charmant délassement à la portée de tous; l’amateur qui 
réussit est aussitôt imilé dans son voisinage, et, de proche en 
proche, l’acclimatation fait son chemin. On commence par 
élever des oiseaux faciles, puis le goût se développe, on cher- 
che la difficulté, on essaie des oiseaux précieux, et c'est ainsi 
que peu à peu les animaux les plus rares se Dénele pes se 
répandent et deviennent nôtres. 

Ne croyez pas que notre tâche d’introducteurs d'animaux 
exotiques soit près de finir. Les espèces à conquérir sont 
pour ainsi dire sans nombre, et les nouvelles importations 
qui se font sans relâche nous fournissent de nombreux sujets 
d'expériences. Parmi ces nouveaux venus, les uns resteront 
des ciseaux de luxe, comme le Faisan de Swinhoë qui, intro- 
duit en 1864, est aujourd’hui conquis; d’autres deviendront 
des gibiers, tel Je Faisan vénéré importé pour la première 
fois sur le continent par M. Dabry de Thiersant en 1565, et 
dont en France, seulement, il existe aujourd’hui pius de 
trois cents exemplaires nés sur notre sol. D’autres aussi 
deviendront des oiseaux domestiques. 

L'une des espèces de Faisans les plus récemment intro- 
duites, le Faisan de Vieillot (Ewplocomus Vieillot), de Java, 
n’était représenté au Jardin, dans ces derniers temps, que 
par une femelle ; nous avons eu la satisfaction, il v a quelques 
jours, de remplacer le mâle que nous avions perdu. Cest un 
bel oiseau; de la taille d’un Coq ordinaire, il est d’un noir 
bleuâtre flammé de blanc sur les flancs; sa queue, assez 
courte et fortement arquée, est ornée à la partie supérieure 
de deux plumes blanches recoarbées qui tranchent sur les 
autres de couleur sombre; la tête esl ornée d’une huppe 
droite fort originale; enfin les joues nues, comparables à celles 


BULLETIN MENSUEL DU.JARDIN D'ACCLIMATATION. 1455 


du Faisan argenté, au lieu d’avoir les tons rouges pourprés 
que chacun connaît, sont d’un bleu tendre. 

Le Faisan de Vieillot a déjà reproduit en Europe (au Jardin 
zoologique d’Anvers), nous allons pouvoir à notre tour en 
essayer la multiplication. 

Nous nous sommes enrichis de plusieurs espèces de Per- 
drix intéressantes. Un couple de Perdrix percheuses de Chine 


(Galloperdix sphenura) est venu rejoindre ceux que nous 


possédions déjà. Une trentaine de Téiras huppecols (Tetrao 
cupido), de l'Amérique du Nord, ont été acquis. Des Gangas 
unibandes (Pterocles arenarius) nous sont arrivés d'Algérie 
ainsi que plusieurs Tinamous (Rynchotes rufescens) de la 
Plata. Nous ne saurions trop recoumander ces derniers oiseaux 
aux amateurs, car ils reproduisent abondamment, et leur chair 
est un des nets les plus exquis que l’on puisse déguster. Les 
muscles pectoraux des Tinamous ont un développement véri- 
tablement extraordinaire el sont un manger parfait. 

Une Autruche mâle, adulte, est venue remplacer le magni- 
fique spécimen que nous avions perdu il y a quelques se- 
maines, et deux Jeunes Emeus ont été acquis. L'un d’eux 
s'élaut cassé la jambe-dans le voyage a élé abatlu et nous 
l'avons dégusté. Plusieurs fois déjà, nous avions pu apprécier 
les qualités de la chair de cet oiseau de boucherie, nous n’a- 
vons donc pas été surpris de la trouver encore une fois de 
très-bon goût. 

Les Émeus adultes que nous possédons, et qui malheureu- 
sement sont tous deux du sexe féminin, nous ont donné une 
quantité de gros œufs d’un vert foncé et dont le volume est 
de peu inférieur à celui de l'Autruche. L’un de ces œuts a été 
envoyé à M. Chevet, du Palais-Royal, qui l'ayant dégusté, nous 
a demandé à recevoir toute la ponte pour la placer dans sa 
clientèle. Nous avons souscrit à ce désir, el depuis quelques 
jours l’omelette à l'œuf de Casoar est de mode à Paris. 

Les palmipèdes arrivés au Jardin pendant les mois de jan- 
vier et de février sont en grand nombre : Canards utiles, 
comme les Aylesbury et les Rouennais ; Canards d'ornement, 
comme les Siffleurs, les Milouins, les Pilets et autres que nous 


156 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


faisons prendre en Hollande, sont venus augmenter la popula- 
tion de nos pièces d’eau. 

Ces oiseaux subissent, il faut le reconnaître, bien des fati- 
gues et bien des maux avant de pouvoir être mis à la dispo- 
sition de ceux qui veulent en orner leurs jardins. Pris dans 
ces immenses filets qu’on appelle pêcheries à Canards, ils 
nous arrivent sans avoir voulu accepter aucune nourriture. 
Notre premier soin est de leur apprendre à manger le grain, 
aliment nouveau pour eux, car à l’état sauvage ils n’ont Ja- 
mais consommé que des débris végétaux ou des petits animaux 
aquatiques. Une fois habitués à la nourriture, ils sont éjointés, 
c’est-à-dire amputés de la partie de l'aile qui correspond à 
notre main. 

Cette préparation des oiseaux demande un certain temps, 
et pour être faite sans trop de pertes, il faut, pour la réussir, 
toute l'habitude et l’expérience des agents intelligents qui 
nous prêtent leur concours. 

En outre des oiseaux dont nous venons de parler, nous 
avons acquis 29 Oies de l'Inde (Anser Indicus). Belle espèce 
qui nous arrive de l’Indoustan, et qui, si elle reproduit faci- 
lement en captivilé, sera pour nos parcs une précieuse acqui- 
sition. Les pattes et le bec d’un jaune vif, le plumage gris, 
plus foncé sur les ailes, plus clair sur le cou et la poitrine, la 
tête blanche ornée de chaque côté de deux traits noirs très- 
nets, celte Oie est très-ornementale. Elle est d’une rusticité 
parfaite, comme nous avons pu nous en convaincre en conser- 
vant depuis bientôt dix ans un couple de ces oiseaux. 

Signalons aussi dix Anseranas melanoleuca, cet australien 
bizarre, que les naturalistes désignaient autrefois sous le nom 
de Canard-pie à pieds demi-palmés; il mérite l'attention, 
car ses formes et ses caractères s’éloignent considérablement 
des tvpes de palm'pèdes connus. 

Citons également l’arrivée d’un Canard de l'Inde (Anas 
pæcilorhyncha), que nous n'avions pas encore possédé et dont 
l'aspect est très-remarquable. Le bec est jaune orangé vif à 
sa naissance, noir au milieu, et extrémité d’un blanc pur. Le 
plumage est gris comme celui de la Cane sauvage, mais 


VAI 


BULLETIN. MENSUEL DU JARDIN D'ACCLIMATATION. 197 


rehaussé par deux plumes blanches qui font partie des cou- 
vertures des ailes et se voient sur le dos lorsque les ailes sont 
fermées. 

Nous terminerons ces notes en annonçant que le Jardin 
d’acclimatation à reçn de la Société d’acclimatation de Berlin, 
par les soins de M. L. Buvry, Secrétaire général, une collec- 
tion de 84 variétés de Pommes de terre (allemandes, anglaises, 
suédoises et chiliennes), dont l’étude présentera, pensons- 
nous, quelque intérêt. Ces 8h variétés, jointes à celles que 
nous possédons, seront cultivées dans notre petit jardin 
d'expériences du bois de Boulogne, et nous espérons pouvoir, 
après la récolte, mettre à la disposition des Membres de la 
Société un certain nombre des tubercules recueillis. 


IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CURRESPONDANCE. 


Exposition d'oiseaux au Palais de cristal. 


L'exposition de Serins et autres oiseaux chanteurs a été ouverte au Palais 
de cristal, le 13 février 1874. C’est la plus complète en ce genre qui ait 
encore eu lieu en Angleterre. Il n’y a pas moins de treize cents sujets ex- 
posés, dont six cents Serins. et le reste en Grives, Bouvreuils, Chardonne- 
rets, Métis, Rossignols, Étourneaux, Loriots, Perroquets et Perruches. Les 
cages sont rangées sur deux lignes ; un joli pavilion a été élevé dans la nef 
du Sud pour ces hôtes emplumés, les uns chantant, les autres parlant ou 
criant ; chaque cage est disposée pour que les spectateurs puissent s’en ap- 
procher sans difficulté. Le jeudi 42, à deux heures de l'après-midi, le grand 
orgue de la nefse mit à jouer; les petits citoyens du pavillon engagèrent avec 
lui une lutte acharnée, et ce ne fut qu’à grand’peine que l'instrument géant 
put maintenir sa supériorité et dominer leur ramage. 

Les deux principaux exposants de Serins sont M. Mackley, de Norwich, 
et M. Newmarch, du Palais de cristal. Norwich est une cité anglaise aussi 
renommée pour ses Serins que pour ses tissus, et l'exposition actuelle fait 
voir qu’elle entend conserver sa réputation. Les oiseaux de Norwich sont tous 
de première classe, et, sans se préoccuper du règlement de l'Exposition, ils 
paraissent icnir à faire montre de leurs qualités vocales. Ils s’épargneraient 
cette peine, s’ils connaissaient les articles d’après lesquels les prix sont ac- 
cordés à la race, au plumage, et au développement physique, sans égard au 
chant ou au parler. Les Serins d’autre provenance ne le cèdent pas à ceux 
de Norwich sous le rapport musical, mais les juges ont été sourds à leurs 
voix, et ont décerné les prix à des concurrents muets, tout aussi bien qu’à des 
oiseaux babillards. 

Le Serin, cet hôte familier du salon anglais, dont il égaie la fenêtre, est 
représenté à l'Exposition par des spécimens de toute sorte, comme on peut 
le voir en parcourant le livret. On y remarque le jaune clair de Norwich, 
le chamois clair de Norwich, le jaune panaché de Norwich, le coutil, le 
huppé, le gris huppé, et une foule d’autres ; collection attrayante où se re- 
trouvent toutes les qualités et toutes les nuances qui ont valu à celte inté- 
ressante espèce ornithologique une faveur si éclatante et si durable. 

Si de Norwich on jette un coup d'œil sur la Belgique, dont les Serins ont 
un plumage jaune clair, on se retrouve ensuile au milieu des produits in- 
nombrables connus sous le nom de : à la mode de Londres, et comprenant la 
collection du Palais de cristal, et des oiseaux jonquille, farine, pailletés, ta- 
chetés, avec ou sans huppe, à huppe tronquée ou dressée, yorkshire et ca- 
nelle. On voit, par tous ces noms, plus où moins clairs pour un étranger, 
que les Anglais poussent très-loin, sinon la science de l’ornithologie, du 
moins les procédés et les pratiques ornithologiques. Il y a même à Londres 


Ni 
FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 459 


un certain nombre d'individus qui spéculent sur amour que portent aux 
oiseaux les Anglaises de tout âge. L’un proinène dans les rues des captifs 
pris au trébuchet ou à la glu, et, pour les rendre à la liberté, se fait payer 
leur rançon par quelque charitable et crédule passante. Un autre, emprun- 
tant à la peinture et à la chimie quelques-uns de leurs secrets, teint de cou- 
leurs variées un vulgaire moineau, et le vend à une jeune lady, sous le nom 
de Verdier ou de Bouvreuil. Il est inutile de dire que ces industries ne figu- 
rent pas à Cristal palace. 

Après les Canaris pur sang, viennent les Métis, dont l’un, élève de 
M. James Doel, est coté à la modeste somme de 25 000 francs. C’est du 
reste, à ce qu’on croit, le seul sujet de l'Exposition où se rencontrent tous 
les points de supériorité indiqués par le programme. Le Chardonneret, 
dont le plumage n’a tout son éclat qu’en liberté, et dans son pays d’origine, 
se trouve bien représenté à l’Exposition, à en juger par les prix élevés 
qui figurent dans le catalogue en regard des oiseaux de cette catégorie. 
Puis, on voit le Verdier, la Linotte, l’Alouette, ct, en dernier lieu, quoi- 
que jouissant d’une popularité de premier ordre, le Rouge-Gorge el le Merle. 
I y à un bon choix d'Étourneaux ; l’un d’eux, du moins à ce que prétend 
l’exposant, pourrait faire entendre tout un répertoire de sentences et de pro- 
verbes ; par malheur, quand le jury a passé, l'oiseau savant avail l'air foul 
mélancolique, et on n’a pu en tirer un seul moi. Les autres oiseaux, pré- 
tendus parlants, sont également restés muets; la Pie, inscrite comme pou- 
vant siffler et appeler un chien, les Geais, les Corneilles, et même les Perru- 
ches, les Perroquets, les Loriots, et tous les oiseaux mignons, ont gardé un 
silence obstiné. A la différence des Serins, ils paraissaient décidés à ne pas 
jeter leur poudre... aux échos. 

Un amateur d'histoire naturelle peut jouir là du spectacle le plus varié : 
oiseaux voyageurs de toute sorte, Rossignols de Virginie, races australiennes 
aux mille couleurs, oiseaux mouches splendides, encore non décrits, de 
l’ouest de l’Afrique. Quant aux Perroquets, verts ou gris, s’ils disent seule- 
ment la moitié de ce qu’on annonce d’eux, ce sera charmant; mais, jeudi 42, 
il faut convenir qu'ils ont été, presque tous, d’un mutisme absolu. Quand 
même on s’en tiendrait aux Serins, qui forment Le corps d'armée principal, 
avec Jeurs auxiliaires de l'étranger et des colonies, on peut être sûr de ne 
pas regretter la visile qu’on fera à l'Exposition des oiseaux. 

Ces détails sont empruntés au Daily News du 14 de ce mois; si, comme 
on l'espère, cette exposition réussit, elle sera sans doute imitée prochaine. 
ment à Paris. 

E. MEÉRICE. 


La reine des Abeïlles. 


Dars une intéressante communication récemment faite à Ja Société d’his- 
toire naturelle d’East-Kent, à Canterbury, M. le major Munn a donné la 


160 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


preuve expérimentale de ce fait que la reine des Abeilles est incapable de 
se servir de son aiguillon contre l’homme et la plupart des animaux. Il a 
manié et fait manier par diverses personnes de l'assistance plusieurs de ces 
insectes, qui cssayèrent bien, il est vrai, d'infliger des piqûres aux doigts 
qui les tourmentaient, mais sans jamais réussir à en percer l’épiderme. 

M. Munn a expliqué ce fait par la structure particulière de l’aiguillon de 
la femelle féconde, très-différent de celui des neutres. Ainsi que l’a montré 
M. Georges Gulliver jun., l’aiguillon des ouvrières est droit, très-acéré, et 
fortement barbelé (il a 8 ou 10 dents), tandis que celui de la reine est au 
contraire mousse, courbe et à peine barbelé. 

On se demandera peut-être comment,-:néanmoins, deux reines, mises en 
présence, se livrent ces combats acharnés, qui ne se terminent jamais que 
par la mort de lune d’elles. Cette question, le major l’a résolue en enfer- 
mani deux reines dans un bocal, où l’on pouvait suivre toutes les péripéties 
du duel. Durant la lutte, on vit chaque femelle essayer de mettre son adver- 
saire hors de combat, en se servant pour cela de ses puissantes mandibules. 
En même temps, elle cherchait à introduire son aiguillon (trop faible pour 
percer les téguments des anneaux du corselet ou de l’abdomen) dans un des 
stomates de sa rivale. C’est là, en effet, le seul point vulnérable : dès que le 
dard a pénétré ainsi dans une trachée, l'absorption du venin est si rapide 
que la mort est presque instantanée, 

M. Munn a terminé sa communication en rappelant la réputation de char- 
meur d’abeilles que s'était acquise, vers la fin du siècle dernier, un certain 
Thomas Wildman, Ce faiseur de tours, qui donna des représentations jusque 


devant le roi, se montrait entouré d’abeilles, qu’il excitait sans être piqué. 


Il faisait lancer après lui des bull dogs dont il se débarrassait en détachant 
contre eux plusieurs de ses insectes. A la cour, on lui offrit cent guinées de 
son secret, qu’il refusa néanmoins de faire connaître. 

Le prétendu pouvoir magique de ce charlatan consistait tout simplement 
à n’employer pour ses tours que des femelles, qu’il savait être parfaitement 
inoffensives, et qu'il pouvait ainsi manier sans la moindre appréhension ; 
mais le bourdonnement de ces insectes suffisait pour effrayer des chiens en 
s'introduisant dans leurs poils. (Land and Water.) — RAVERET-WATTEL. 


Le gérant : JULES. GRISARD. 


ERRATUM. 


Page 52, rétablir ainsi la ligne dix-huitième : 
Seaforthia elegans et de Livistona (Corypha) australis, deux 


PARIS. => IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 8. 


I 2 


1. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 


ESSAIS | 
D'ACCLIMATATION, A TOURS, EN 1872-73 


(PARG DE BEAUJARDIN) 


Par M. Jos. M. CORNÉLY 


Membre correspondant de la Société zoologique de Londres. 


Je mets sous les auspices de la Société d’acclimatation ces. 


quelques notes prises au jour le jour. Puissent-elles encou- 
rager d’autres à entrer dans la voie de la domestication des 
animaux, et ne pas décourager ceux qui y sont entrés, par 
l'exemple de la non-réussite, laquelle n’est souvent qu’une 
affaire de climat ou de terrain. Succès et insuccès, j'ai fidèle- 
ment tout rapporté. L'espace restreint de 8 hectares dont je 
dispose est cause que plusieurs animaux n’ont pu réussir. 


I. MAMMIFÈRES 


CHEVROTAIN MEMINNA. (Zraqulus Meminna). 


Ces charmants petits ruminants, tout gracieux qu'ils soient, 
ne donnent pas grande satisfaction à leur propriétaire : Ne 
commençant leur vie active qu'au crépuscule, ils cherchent, le 
Jour, à se dérober à la vue autant que possible. De plus, je crois 
qu'ils ne supportent pas le froid; au moins un de mes mâles 
que je lâchai dans un assez grand parc succomba à une très- 
légère gelée. La femelle mit bas un petit au mois de décembre 
mais mourut le lendemain, son petit ne voulut pas boire de 
lait et périt également. Il me restait un mâle qui se tua en s’é- 
lançant contre un barreau de la cage. 


KANGUROOS. (Halmaturus Bennetti, Petrogale xanthopus 
et pericillatus). 


Un des animaux les plus aptes à vivre dans un climat tem- 


péré est le Kanguroo; se nourrissant de peu, résistant aux plus 
3° SÉRIE, T. 1. — Mars 1874. 41 


162 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


grandes chaleurs comme aux froids de — 12°, cet animal ne 
paraît craindre que l'humidité. Dans les terres basses (par 
exemple en Hollande)les Kanguroos sont souvent atteints d’hy- 
dropisie. Une autre maladie que j'ai souvent observée, etqui 
me semble occasionnée par l’avoine, est la cataracte. Jai eu 
plusieurs de ces animaux atteints, et devenant borgnes ou 
aveugles, mais depuis que j’ai supprimé l’avoine je n’ai plus 
eu un seul cas. 

Les Kanguroos font peu de dégâts dans un pare, quel- 
quefois l’un d'eux prend la mauvaise habitude de ronger 
l’écorce des arbres ; cette manie, généralement contagieuse 
chez les Kanguroos comme chez les Cerfs, est guérissable, du 
moins j'ai réussi à la corriger en enfermant quelque temps 
les animaux dans un enclos sans verdure ; quand on les laisse 
sortir ensuite, ils sont tellement contents de trouver de l’herbe 
fraîche à tondre qu'ils oublient les arbres. 

Je n’ai pu expérimenter que sur le Kanguroo de Bennett 
dont je possède un petit troupeau de treize, et sur les Kan- 
guroos de roche ou Petrogale xanthopus et P. penicillatus. 
Ce dernier ne pouvant être tenu que dans une cage couverte, 
franchissant aisément 3 et même 4 mêtres de haut, ne peut 
œuêre réussir dans ma propriété trop restreinte; les mouve- 
ments de ce Pétrogale tiennent plus du vol de l'oiseau que des 
actions d’un quadrupède. Le couple que Jj'essayai ne dura 
qu'une huitaine de jours. Il disparut sans laisser de traces. 

Le Pétrogale à pieds jaunes (Xanthopus) réussit pendant 
quelques temps à merveille à Beaujardin. De six femelles et 
deux mâles, j’obtins en un an un petit troupeau de dix et tout 
alla bien jusqu’à la fin de 1872, où le grand nombre de 
mâles (pas une femelle n’était née) porta le trouble dans 
la famille; à chaque moment nous en trouvions de morts, 
d’autres avec les jambes cassées, d’autres encore sautaient 
par-dessus les murs, sans jamais pouvoir nous bien rendre 
compte comment les accidents arrivaient. Je ne puis que 
supposér de terribles combats nocturnes, car le jour, ces 
animaux vivaient en paix sous les massifs. Une seule fois je 
vis un Bennett attaqué par un Pétrogale, que je dus supprimer, 


F4 CT 
NTM IN So} 


ESSAIS D'ACCLIMATATION A TOURS. 163 


ear la victime, quoiqu’ayant le double de la taille de son adver- 
saire, aurait fini par succomber. | 

D'après mes expériences je conclus que de ces trois espèces, 
le Kanguroo de Bennett est le plus apte à lacclimatation dans 
un parc restreint, tandis qu'en forêt les Pétrogales doivent 
mieux se défendre. La chair du Kanguroo de Bennett est de 
bonne qualité et supérieure à celle du Pétrogale. En pâté les 
deux sont excellents. 


WOMBATS OU PHASCOLOMES. (Phascolomys latifrons.) 


Comme ces animaux me semblaient offrir les meilleures 
chances de réussite, je fus très-heureux de pouvoir acquérir 
trois de ces Marsupiaux (deux femelles et un mâle) au jardin 


d’acclimatation. Au bout de peu de jours, ils étaient parfai- 


tement habitués aux autres animaux; 1ls avaient fait connais- 
sance avee mon chien de garde et furent lâchés en liberté 
dans mon parc. 

D'un pas lent et paisible, indifférents à tout, les Phasco- 
lomes se promenaient sur les pelouses et sous les massifs ; le 
lendemain le jardinier trouvait leurs traces partout, dans les 
primeurs comme dans les carrés de choux, 1ls avaient visité 
tout. Le surlendemain nous en retrouvions un seul ; ilse tenait 
dans un petit abri isolé et caché avec som, et y rentrait avec 
obstination chaque fois qu’on l'en sortait. Au bout de quel- 


ques jours, las de le retrouver toujours à la même place, je 


le fis remettre en cage et trouvai à l’échanger dans ja suite. 
Des autres, aucune trace. Je fis fouiller partout, et malgré les 
recherches les plus minutieuses, malgré lappât d’une forte 
récompense, personne ne put Jamais dire ce qu'ils étaient 
devenus. 

L’emplette que j'avais faite était venue aux oreilles d’un 
jeune représentant de la presse parisienne, qui, dans un excès 
de zèle pour l'acclimatation, se mit à broder sur ce thème; 
à l'entendre, mes trois Phascolomes étaient devenus un trou- 
peau, j'en élevais aussi facilement que j'élevais des lapins... 


Les journaux reproduisant l’article, on m'adressa une ava- 


164 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


lanche de lettres me demandant des Phascolomes. Tout le 
monde comprendra (et les intéressés me pardonneront) que 
je n’aie pas répondu à plus de cent lettres. Dans le commen- 
cement, je désillusionnai les personnes qui m’écrivaient, je 
commençai par répondre, puis les leitres m'arrivant par 
douzaines, je renonçai à cette correspondance. 


LAMAS. 


Le climat de Touraine paraît agréer parfaitement aux Lamas. 
Au Jardin des plantes de Tours, M. Barnshy en élève chaque 
année un superbe produit. J’ai été moins heureux, ayant perdu 
la femelle Lama d’uneirritation des intestins dontj'attribue l’ori- 
gine à l’absorption d’une grande quantité de feuilles de balisiers 
(Canna indica) qu’elle avait mangée. Je tenais ces animaux en 
pleine liberté dans le pare, et sauf leur faible pour les bali- 
siers, ils ne commettaient pas de dégâts. 

Mon faisandier a dressé en trés-peu de temps le Lama mâle 
qui me reste à tirer une petite charrette, l'animal s’acquitte 
parfaitement de sa tâche, obéit au licol et fait le service d’un 
fort baudet. 


AGOUTIS (Dasyprocta acuti, D. nigrescens) ET MARMOTTES. 


Jamais tentative d’acclimatation ne me réussit aussi mal 
que celle de ces animaux. Rongeant les plus grosses branches, 
mangeant tous les œufs (même les œufs de bois que je place 
dans les nids de mes Palmipèdes), se battant à outrance 
entre eux et avec d’autres rongeurs, les Agoutis me devinrent 
si antipathiques, que je donnai ordre de les massacrer. 

Enfermés dans un très-petit local, ils me donnaient jadis 
quelques reproductions, mais mis en liberté ils ne reprodui- 
saient pas. | 

J'avais un magnifique Paca (Cœlogenys paca), familier au 
point de me suivre comme un Chien; un beau matin Je le 
trouvai mourant, les Agoulis avaient pénétré jusqu’à lui, son 
corps était couvert de leurs morsures. 

Un seul rongeur leur résistait, c’est la Marmotte d Europe, 


ESSAIS D ACCLIMATATION A TOURS. 165 


dont je reçus de Suisse six magnifiques exemplaires, malheu- 
reusement sauvages au possible. Les Marmottes m’arrivèrent 
au mois de novembre à moitié engourdies, j'en lâchai deux 
au mois de décembre ; pour commencer je les mis dans un 
terrier préparé ; le lendemain je les retrouvai le long d’un 
mur, mortes apparemment de froid. Des quatre restantes, que 
je gardai en cage jusqu’au printemps trois passérent par- 
dessus les murs, la dernière, une femelle, s’est creusé de 
profondes galeries, où elle se retire au moindre bruit, 
cette femelle, très-méchante, sut résister aux Agoutis; un 
Lapin que je fis mettre auprès d'elle fut mis en piéces; 
avec les Kanguroos elle fait bon ménage. : 

Il y a quelques années, j’ai vu au Jardin zoologique de 
Hambourg des Marmottes admettre des Agoutis dans leur 
terrier, cette méchanceté semble donc tout à fait indivi- 
duelle. 

Je possédai une autre espèce de Marmotte. La Marmotte de 
Quebec (Arctomys empetra), très-jolie avec sa couleur brune ; 
elle est très-douce et familière; le couple que je possédais 
était né au Jardin zoologique de Londres — (c’est là le seul 
exemple de reproduction en captivité que je connaisse de ce 
genre de rongeurs) malheureusement ces gentils animaux 
furent atteints de maladie (carie des os) et moururent. 

Je possède encore la Marmotte des prairies ou Chien de 
prairie (Cynomys ludovicianus), qui n’a du Chien que lenom et 
une espèce de cri qu'avec beaucoup de bonne volonté on peut 
prendre pour un aboiement. J'en lâchai un couple, pour 
commencer, dans un terrier énorme creusé par une Marmotte 
d'Europe, et où ce méchant animal se trouvait encore. Espé- 
rant qu'une affinité de race empêcherait toute querelle, et 
croyant que la Marmotte, qu'on ne voyait plus depuis quel- 
ques jours, avait commencé son sommeil d'hiver, ce ne fut 
pas sans une désagréable surprise que je trouvai mes Chiens 
de prairies déchirés en morceaux le lendemain de leur mise 
en terrier. 

La Marmotte fut prise au piége et deux autres Chiens de 
prairies lâchés. Ceux-ci résistèrent très-bien, le nid bien 


166 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


chaud de leur prédécesseur semblait leur convenir ét ces 
petits animaux firent un court sommeil d'hiver. Le 8 février, 
nous les vimes sortir pour la première fois, et paître l'herbe. 
Des ouvriers me dirent pourtant en avoir vu un (reconnais- 
sable à sa taille plus petite) plusieurs fois durant l'hiver. Un 
de ceux que je gardai en cage dormit jusqu’à la fin de février, 
tandis que son compagnon était alerte tous les matins. Je 
m'explique la divergence des naturalistes dont les uns sou- 
tiennent que les Chiens de prairie s’engourdisseñt l’hiver, 
tandis que d’auires disent qu’ils ne dorment pas. Le grand 
avantage de ces animaux sur les Lapins est qu’ils ne rongent 
pas les plantes, se contentant de tondre très-court l'herbe. 


LIÈVRES VARIABLES. 


Vers la fin du mois de septembre 1871, par les bons soins 
de M. Pierre Pichot, directeur de la Revue britannique, je reçus 
quatre Lièvres variables de Russie. C’était les derniers survi- 
lants de dix que lui avait envoyés le comte Gustave de Mon- 
tebello, alors secrétaire d’ambassade à Saint-Pétersbourg. 

Depuis bien longtemps déjà j'avais grand désir d'étudier ces 
animaux, mais malgré toutes mes relations en Allemagne et 


en Russie, jamais je n’avais réussi à m'en procurer. Un des 


Lièvres (tous avaient énormément souffert) mourut quelques 
jours après son arrivée, et je lâchai les autres dans un encios 
d'environ A0 mètres carrés, entouré d’un grillage d’un mètre 
de haut, que jamais ils ne franchirent. Ces animaux, malgré 
leur séjour en cage, pendant le long voyage, se montraient 
trés-sauvages, et pour entrer dans leur enclos il fallait prendre 
de grandes précaulions par crainte de les voir se briser la 
tête contre les montants de la clôture. On les nourrissait de 
foin, de châtaignes, de carottes et de biscuit, et chaque semaine 


on leur jetait une bonne quantité de branches de pin et 


d’autres arbres qu’ils écorçaient consciencieusement. 

Vers le mois de novembre, leur couleur rougeâtre, fort 
différente de celle des Lièvres français, se changea peu à peu 
en blanc pur; au mois de février, le poil roux revenait. Ce 


FA 


ESSAIS D'ACCLIMATATION A TOURS. 467 


changement de couleur ne se faisait pas également chez les 
Lièvres; l’un était encore tout blanc alors qu’un autre com- 
mençait seulement à prendre son poil d’été. 

Voyant qu'ils ne donnaient aucun signe d’accouplement 
dans leur enclos trop restreint, j’ouvris les portes et les lâchai 
dans le parc (fin février). Iss’habituërent bientôt à la localité, 
creusèrent des formes très-peu profondes, et surent parfaite- 
ment se meltre à l’abri le jour sous les touffes de sapin. En une 


année j'eus près de vingt de ces animaux. 


La réussite paraissait assurée, lorsqu’à la fin de novembre 
1872, je trouvai une magnifique Hase morte, aucune blessure 
n'était visible; grosse et grasse, la bête n’offrait aucun signe 
de maladie; le lendemain trois autres Lièvres furent trouvés 
morts, puis encore un, bref, j'en perdis une quinzaine en 
quelques jours. M. Barnsby, professeur à l'École de médecine 
de Tours, voulut bien examiner les intestins de ces animaux, et 
malgré toutes les recherches possibles ne put trouver la cause 
de ces morts subites ; j’envoyai deux Lièvres à Paris, où 
M. Ménard, directeur adjoint du Jardin d’acclimatation, les 
examina sans rien pouvoir préciser. Étail-ce la maladie con- 
tagieuse dont les Lièvres sont quelquefois attaqués dans les 
parcs trop peuplés, était-ce un empoisonnement, je n'en sais 
rien, mais, au commencement de l’année 1873, je restai avec 
quatre Lièvres variables seulement. Au mois de mars ils se 
poursuivaient, et peu de temps après on vit de petits Levrauts, 
et peu à peu le petit troupeau s’est refait; je pourrai donc 
envoyer bientôt quelques couples de ces Lièvres au Jardin 
d'acclimatation. Une Hase du pays, que je lâchai avec les 
Lièvres russes, ne fut jamais fécondée, elle mourut de la même 
maladie que les autres, et fut une des dernières victimes. 


11. OISEAUX. 


OUTARDE CANEPETIÈRE, 


Plusieurs fois j’ai tenté de conserver l’Outarde canepetière 
sans jamais bien réussir. En volière, il me parut impossible 


168 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


de faire reproduire ces oiseaux, ils y languissaient et, en gé- 
néral, ne résistaient qu'une année à peine; toutes les Cane- 
petières que j'ai Jâchées (quatre couples) allaient se noyer dans 
les bassins d’où elles auraient pu aisément sortir. Il m’est ar- 
rivé de voir une Canepetière retirée une fois déjà de la rivière, 
y retomber le lendemain et s’y noyer. Un des aliments favoris 
de la petite Outarde est le trèfle blanc. 


CROSSOPTILON. 


Partout, en Angleterre comme en France, on se plaint que 
Jes Crossoptilons qui promettaient tant au commencement de 
leur introduction ne donnent plus d'œufs ou ne donnent que 
des œufs clairs. Est-ce aux accouplements consanguins ou à 
une nourriture mal appropriée qu’il faut attribuer ce résultat, 
je ne trancherai pas la question, mais je penche pour la 
première hypothèse. J'ai possédé une demi-douzaine de ces 
oiseaux de troisième génération, nés en Europe, j'ai eu près 
de soixante œufs en plusieurs années, mais jamais un seul 
ne fut fécondé. J'ai essayé de garder ces oiseaux enfermés 
dans des volières restreintes, comme je l’ai vu faire chez 
M. Polvliet, à Rotterdam, qui réussit très-bien. La femelle tua 
le mâle. 

Les Crossoptilons que je lâchai étaient tous familiers au 
point de se laisser marcher sur le corps, mais ils ne pondirent 
que des œufs clairs. Il serait fort désirable que de nouveaux 
sujets fussent introduits pour rafraîchir le sang. 


LOPHOPHORES. 


J'eus la même mauvaise chance avec les Lophophores : sur 


quatre œufs que j'obtins, deux étaient de forme vicieuse, les 
autres ne contenaient rien, et la femelle mourut sans cause 
apparente. 

TRAGOPANS. 


Les Tragopans (Ceriornis Temminkü) ont pondu six œufs 
dont deux étaient clairs; les jeunes oiseaux s’élêvent on ne 
peut plus facilement, et cependant nous n'avons pu leur donner 


: +120 


.$ 
C4 
+. $ ESSAIS D’ACCLIMATATION A TOURS. 169 


des œufs de fourmis que très-peu de temps. Le vieux mâle est 
très-méchant pour les hommes, qu'il attaque toujours, mais vit 

- en paix ayec des Éperonniers, des Colombes et des Cardinaux. 
Les Tragopans résistent très-bien au froid. 


ÉPERONNIERS. 


Les Éperonniers (Polyplectron chinquis), qui m’ont donné 
six Jeunes en 1872, ont fait trois pontes encore, mais les deux 
premiers œufs ont été brisés en tombant à terre. Les quatre 
autres ont produit trois petits. Toutes les Poules ne sont pas 
bonnes pour élever les jeunes Éperonniers, car es premiers 
jours ces oiseaux attendent que la nourriture leur soit mise dans 
le bec. De trois Poules que j’essayai, une seule les embecquait 
et leur faisait ainsi accepter les Vers à farine dont je nourris 
les Éperonniers; les autres Poules les mangeaient elles-mêmes 
ou les laissaient, et en ce cas la main du gardien devait sup- 
pléer. Ces petits animaux apprennent du reste très-vite à 
connaître leur gardien. 


% 


FAISANS VÉNÉRÉS ET DE SWINHOE. 


Le Faisan vénéré (Phas. Reevesi) ne paraît pas réussir aussi 
bien. De trois couples de ces oiseaux que je possède depuis 
deux ans, je n'ai pas eu un œuf. Deux femelles moururent 
sans cause apparente. Je lâche ces oiseanx (éjointés) au mois 
de juin, et ne les remets en parquet qu’au mois de mars. 
J'en fais de même pour les Faisans de Swinhoë (Euplocomus 
Swinhoëi) qui s'élèvent en pleine liberté avec aussi peu de 
soins que des Poulets. Tous les jeunes que j'ai obtenus de 
cette manière sont des oiseaux forts et robustes. 


PAONS. 


Paon spicifère. Paon à ailes noires ou nigripennis.— Pour 
la première fois J'ai réussi en 1873 à élever des Paons 
spicifères. Chaque fois que j'étais parvenu à former une paire 
de ces beaux oiseaux, je perdais l’un d’eux avant d’avoir une 
ponte. 


1 
À 
à 


170 _ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. vs. 


Cette année de deux Paonnes qui ne me paraissent pas avoir 

plus de deux ans, j'obtins sept œufs. L’une des Paonnes voulut 
couver elle-même, et quoique j'aie fait de mon mieux pour l'en 
empêcher, elle s'épuisa et mourut. Les jeunes s’élèvent très- 
facilement. Le Paon nigripenne ou à ailes noires, aussi nommé 
(mais mal à propos) Paon du Japon, est aussi beau que le Spici- 
_ fère, et parfaitement rustique. Longtemps on a cru que c'était 
une variété du Paon ordinaire, on ne paraît pas avoir songé 
à la couleur de la femelle qui est d’un gris clair. Il est avéré 
maintenant que ce Paon vient de la Cochinchine (Sclater). 
Depuis plusieurs années le Paon nigripenne produit à Beau- 
jardin, et pas un jeune ne se perd. 


DINLON OCELLÉ. 


Les Dindons ocellés (Meleagris ocellata) ne m'ont pas si bien 
réussi. Deux de ces magnifiques gallinacés venant du Hondu- 
ras semblerent d’abord s’habituer on ne peüt mieux; arrivés 
un peu déplumés par leur long séjour en mer, ils furent 
bientôt en magnifique état, on ne pouvait voir de plus beaux 
oiseaux. Jereçusun mâle demi-sang de M. Bartlett, de Londres, 
et au inois de mai 1872, j'obtins 10 œufs que je mis à couver 
sous une Dinde ordinaire. La femelle ocellée qui les pondit en 
fit encore quatre dans un endroit très-caché, et ne fut trouvée 
couvant qu'après une dizaine de jours. (’en était trop déjà, 
quelques semaines après elle mourut épuisée malgré tous les 
soins possibles. La seconde femelle mourut également après 
deux années de séjour en Europe, phthisique. Malheureuse- 
ment les produits étaient quatre mâles et une seule femelle, 
cette dernière très-chétive ne passa point l'hiver. 


HOCCOS. 


De cinq Hoccos (Crax Daubentoni, Crax Sclateri), je n’eus 
que trois pontes de deux œufs chacune. Le mâle Hocco de Dau- 
benton (le seul que j’eusse au commencement) devint malade, et 
quand je parvins à le remplacer, il était trop tard; les six œufs 
étaient clairs ; le seul désagrément que causent ces oiseaux en 


+ ESSAIS D’ACCLIMATATION A TOURS. 471 


liberté (1) estleur grande friandise à l'égard des fruits: Figuiers 
et Cerisiers sont dépouillés en un instant. Ils vivent en bonne 
mtelligence avec tous mes autres animaux, et quoique en pos- 
session de leur plein vol ne passent jamais les raurs du pare. 


TALEGALLE. 


L’acclimatation du Talégalle (Catheturus Lathami) est un 
fait accompli. Partout où ces oiseaux ont été mis en liberté, 
ils n’ont pas tardé à pulluler. L’an dernier j'en ai obtenu plus 
de soixante-dix jeunes, malheureusement les visites d’un Pu- 
tois, longtemps ignorées parce que l'animal emportait ses vic- 
mes, en diminuèrent le nombre. Mis en trop grand nombre, 
dans un espace restreint, les Talegalles sont attaqués d’un 
piquage plus violent que les autres oiseaux. Chose curieuse, 
ces oiseaux, dont la chair est si exquise, pondent des œufs 
d’un goût détestable, et les voyageurs australiens qui les van- 
tent doivent avoir eu bien faim pour les manger. 


OCYDROME. 


Le Râle de la Nouvelle-Zélande ou Weka (Ocydromus 
Novæ-Zelandiæ) me semblant donner quelque espoir de do- 
mestication, je m'en procurai un couple à Londres, qu'après 
quinze jours de captivité je mis en liberté vers le mois d’octo- 
bre. Ils étaient parfaitement familiers déjà, venaient à un coup 
de sifflet et mangaient à la main, le reste de la journée ils se 
tenaient cachés dans les massifs, leur nourriture consistait 
en maïs, pain et surtout en Souris. Au mois de novembre, je 
trouvai la femelle couvant sous un buisson, de peur de la 
troubler, je ne pus qu’entrevoir un œuf, tout alla bien pendant 
trois jours, le quatrième au matin, je trouvai la place vide, 
un Putois avait enlevé mère et œufs. 


ÉCHASSIERS BIVERS. 


Ibis (Ibis religiosa, Ibis falcinellus). — Le couple d’Ibis 
sacrés que j'ai possédé me venait du Jardin d’acclimatation, où 


(1) Je me suis aperçu depuis que les Hoccos mangent les œufs. 


172 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


chaque année il menait à bien sa couvée. Ces oiseaux étaient 
excessivement familiers, venaient manger à la main, et mal- 
gré leur liberté complète (ils n'étaient pas éjointés) ne firent 
chez moi jamais mine de pondre. 

L’Ibis falcinelle n’est pas un oiseau recommandable, il 
craint beaucoup le froid et ne me paraît pas à beaucoup près 
aussi intelligent que lIbis sacré. Je n’en possédai qu'une 
paire qui ne donna jamais rien. 

L'Œdicnème, faussement appelé grand Courlis en Touraine, 
grand Pluvier de Buffon (OEdicnemus crepitans), est un 
oiseau digne d’attention, non-seulement le plus apte à prendre 
la dangereuse Courlilière, nocturne comme lui, mais encore 
très-recommandable pour déterrer les Souris. Je n'avais qu’à 
mettre mon (Edicnème pendant quelques jours dans une vo- 
lière pour voir disparaître les Souris qui y pullulaient et sans 
qu'aucun petit oiseau fût molesté ; faute de Souris il se con- 
tentait de pain trempé, et quand je le perdis (par accident), 
il était gros et gras. 

Talèves ou Poules sultanes (Porphyrio madagascariensis, 
P. pulverulentus, P. melanotus).— Rien de plus joli que le 
petit troupeau de Poules sultanes sur le gazon; leur bec et leurs 
pieds rouges, le beau bleu de leur corps, tout cela ressort 
bien autrement que dans une cage. Inoffensives envers les 
animaux plus faibles qu'elles, je n’ai à leur reprocher qu’un 
grand penchant pour les œufs des autres oiseaux, qu’elles man- 
gent où elles les trouvent. En peu de jours, toutes mes Poules 
sultanes étaient assez familières pour venir à l’appel, et plu- 
sieurs d’entre elles apprirent bien viteà manger à la main. Vers 
ie mois de juin, il y eut entre les mâles des combats très-ano- 
dins, les oiseaux se contentant de se donner des coups de 
pattes en criant, quelquefois même ils se servent de leur bec, 
mais sans jamais se faire grand mal. Leur nourriture con- 
siste en blé et sarrazin, et de temps en temps un peu de pain. 
Les Poules sultanes, sauf celles d'Australie (P. melanotus) 
souffrent du froid humide, et il est essentiel qu’elles arentun 
réduit garni de paille ou de foin, à leur disposition, où elles 
savent fort bien se mettre à l’abri. La Poule sultane d'Austra- 
lie résiste aux plus grands froids. 


ESSAIS D'ACCLIMATATION A TOURS. 4173 


GRUES. 


Les Grues (Grus virgo, G. antigone, G. canadensis, Ba- 
learica requlorum). — Quoique ces quatre espèces de Grues 
soient représentées à Beaujardin, chacune par un couple, 
une seule a donné reproduction, c’est la Demoiselle de Nu- 
midie (G. virgo), qui depuis deux années avait fait deux 
pontes, mais dont jusqu’à présent, je n'avais pas eu de petits. 
Les oiseaux couvaient parfaitement bien, mais dès qu’un 
Kangourou, Lièvre, Chevreuil ou un autre animal à eux 
bien connu pourtant s’approchait, ils abandonnaient le nid 
pour le défendre, et l’on comprend que la couvée en pâtis- 
sait. Cette année-ci (1573), je mis les deux œufs sous une 
Dinde, elle amena deux petits. 

Ce fut là que les difficultés commencèrent : les jeunes Grues 
avaient bon appétit, mais attendaient que les morceaux leur 
vinssent tout seuls dans le bec ; mon faisandier, avec la plus 
grande patience, les nourrissait cinq ou six fois par jour; 
Vers à farine, morceaux de Lombric et larves de Fourmis leur 
étaient administrés souvent à grand’peine, puis ont été peu à 
peu remplacés par des morceaux de cœur de bœuf et de pain. 

Rien de plus charmant que de voir ces jeunes oiseaux suivre 

leur père nourricier, se frotter à ses jambes, et luitémoigner 
l'attachement d’un Chien ; malheureusement, les jeunes Grues 
étant déjà de la taille de la mère, un Paon spicifère vint dans 
leur enclos, et maltraita si fort l’une d’elles, que je dus la 
faire tuer. Jamais je ne regrettai autant un animal. 
_ La seule de mes Grues qui se montre un peu difficile est 
la Grue couronnée du Cap, qui s'attaque principalement aux 
pantalons des étrangers, auxqueis elle fait souvent des trous, 
tandis qu’elle vit en profonde paix avec tous les animaux. 

Peu d'oiseaux sont aussi agréables que les Grues. Dès 
qu’elles s’aperçoivent qu’on ne leur veut pas de mal, elles 
deviennent familières, distinguent leur maître, dont souvent 
elles recherchent les caresses. J’ai vu des Grues communes 
empêcher les combats entre des Cogs rivaux. 


174 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Leur nourriture coûte peu, et sauf la Grue couronnée du 
Sénégal, toutes supportent les hivers de France. Une chose 
essentielle est de les éjointer, car en les prenant chaque année 
pour leur couper quelques plumes on les rend défiantes. Il 
est nécessaire de couper le fouet de l'aile à la seconde joim- 
ture. J'ai perdu quatre Grues de Numidie éjointées à la pre- 
mière phalange. En voyant passer des Oies sauvages, elles 
s’enlevèrent, et jamais Je ne les revis. 


OIES. 


: 7 
Oie magellanique où Chloephaga magellanica, Cereopsis 


Novæ Hollandiæ, Bernicla Sandwicensis, Anser (Sarcidiornis) 


melanotus ou Ote cabouc, Anser (Chaitenessa) Jubatus, Oie” 


Bernache où Anser Bernicla, Oie cravant ou Bernicla Brenta. 

Une des principales conditions pour mener à bien l'élevage 
de la plupart des espèces d’Oies est d’avoir du gazon frais. 
Presque tous les oisons des Oies magellaniques, céréopses, 
Oies des moissons ne vivent que d'herbe. 

J’obtins en 1872 de deux pontes, neuf jeunes Oies magella- 
niques ; malheureusement les vents secs et le manque d'hu- 
midité avait tellement desséché mes pelouses que je dus recou- 
rir àune autre nourriture ; pain et biscuit trempé, son mouillé, 
tout fut essayé en vain, toutes mes petites Oies périrent l’une 
après l’autre; il en fut de même pour mes jeunes Céréopses. 
Les parents de ces derniers étaient tellement méchants (le 
mâle tua deux grues adultes, voyez Vie des animaux de Brehm, 
article CÉRÉOPSES), que je dus les mettre en pension chez un 
ami complaisant, plus heureusement partagé en fait de gazon, 
malheureusement un renard entra nuitamment, le reste se de- 
vine. 

L'Oie de Sandwich (Bernicla Sandiwicensis), quoique aimant 
aussi beaucoup l’herbe tendre, ne dédaigne pas les graines, ni 
le pain surtout; chaque année j’obtenais la reproduction de 
ces oiseaux, cette année, afin de mettre leurs œufs hors portée 
des Talèves, je les renfermai vers la saison de la ponte dans un 
enclos assez grand, elles ne firent rien du tout. Le mâle Oie des 


ESSAIS D’ACCLIMATATION À TOURS. 175 


Sandwich s’est épris d’une vive amitié pour mon chien de garde: 
où va le chien, on est sûr de trouver les Oies de Sandwich, 
même lorsque la femelle couvait, le mâle prenait tous les jours 
une heure de congé qu'il allait passer près de la niche du chien. 
Quand un autre chien s'approche de leur ami, les Oies mon- 
trent une grande jalousie contre l’intrus qu’elles pourchassent 
de leur mieux. 

L’Oie Cabouc(Anser (Sarcidiornis) melanotus) est un magni- 
fique oiseau, beaucoup trop rarement introduit des Mascarei- 
ones où on le dit domestiqué. Cette oie différant de ses congé- 
nères, aime une nourriture animale, et quoiqu'on puisse la 
tenir en vie avec du pain, et mêmé en la nourrissant de 
oraines, je crois essentiel de lui donner des vers de terre 
(Lombrics) ou des œufs de Fourmis, à moins qu’étant sur un 
erand étang elle ne puisse chercher elle-mêmeune nourriture 
animale. J'ai possédé trois Oies cabouc en parfait état, peu 
d'oiseaux peuvent rivaliser avec celui-ci pour la richesse de 
son plumage d’un beau bleu acier sur le dos. C’étaient trois 
mâles, et jamais je ne pus trouver à me procurer une femelle. 

L'Oie à crinière Anser (Chaitenessa) jubata est une très- 
jolie petite Oie, d’un caractère très-pacifique, et vivant en paix 
avec tous les autres aquatiques ; je n’en possède qu’un mâle, 
que Je cherche à accoupler. 

Oie d'Égypte (Anser (Chenaloper) Ægyptiacus, Oie Cra- 
vant (Anser Brenta), Bernache, (A. Bernicla). Une des plus 
querelleuses entre les querelleuses est l’Oie d'Égypte. Sa haine 
est si tenace que souvent la victime reste sur la place. J'eus 
ainsi un couple de Canards Casarkas tué en quelques instants 
par une de ces enragées, et quoique l’Oie d'Égypte soit un 
fort bel oiseau reproduisant très-facilement, je fis tuer les 
miennes ; malgré ce qu’on en a dit, la chair de cette Oie n’est 
pas mauvaise du tout. 

La Bernache reproduit facilement (pourvu qu’elle ait de les- 
pace), elle vit en grande partie d’herbage, sans dédaigner en- 
tièrement les graines, mais jamais encore à mon su l’Oie Cra- 
vant n’a reproduit en captivité. J'ai toujours eu plusieurs cou- 
ples de ces petites Oies qui supportent très-bien la captivité, 


” A a 4 É 
: FE 

176 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 
mais jamais je n'ai vu seulement un accouplement. Son hu- 
meur douce, le peu de soin qu’elle réclame, son bas prix, la 
recommandent ainsi que la Bernache à tous les amateurs. 

Üne des plus récentes introductions est l’Oie (domestique) 
à caroncule du Japon ou Oie de Chine. Le Jardin d'Anvers 
recut trois de ces Oies, il y a quelques années, et ce n’est 
que faute d’être isolées qu'elles ne reproduisirent pas. La 
première année qu’on les mit seules, tous leurs œufs furent 
bons, et bientôt tout le monde pourra se procurer de ces 


oiseaux dont les formes sont très-différentes des races con- 
nues. Elles sont moins querelleuses (du moins les miennes). 


que les Gies ordinaires, mais elles sont de moins bonne garde 
aussi (1). 
CYGNES. 


Le Cygne à col noir (C. nigricollis), le Cygne sauvage (C. mu- 
sicus), le Cygne noir (C. atratus) et le Cygne trompette (C. buc- 
cinator). Les Cygnes ne m'ont guère réussi.Je perdis mon mâle 
à col noir, peu après l'avoir reçu, d’un abcès intérieur. Ces ani- 
maux me paraissent plus paisibles que ies Cygnes domesti- 
ques, du moins les miens ne se querellaient jamais avec les 
nombreux aquatiques qui partageaient leur enclos. 

Les Cygnes sauvages se conduisirent très-bien, ils aidèrent 
même au nid que faisaient les Oies du Danube, en y apportant 
des brindilles de paille qu’ils rangeaient autour de la couveuse, 
mais quand les oisons devinrent plus grands ils s’éprirent 
d’une telle haine pour toutes les Oies que je dus les séparer. 
Quoique mes Cygnus musicus paraissent bien mâle et femelle 
ils n'ont pas niché. 

Je ne dirai rien du Cygne noir, si bien connu de tout le 
monde à présent, ni du grand Cygne buccinaior d'Amérique 
que je possède depuis trop peu de temps pour pouvoir en 
parler. 

CANARDS. 


Dendrocygnes (D. viduata, arborca et autumnalis), Ca- 


(1) Leur grande qualité est leur fécondité, elles font 3 et même 4 pontes 
par an, la première quelquefois de 30 œufs. 


Re” 


is FAN, ? L"Y rt “ ae % cu 
| TE. " 
ESSAIS D'ACCLIMATATION À TOURS. 277 


sarka variegata, Tadorna vulpanser, Aix sponsa (carolin), 
Aix qalericulata (mandarin), Da/ila spinicauda, Anas super- 
ciliosa et xanthorhyncha, Mareca chiloensis et Querquedula 
formosa. Une des principales conditions pour réussir l'élevage 
des canards est de leur fournir des lentilles d’eau (canille, 
canetée ou cannée). Les insectes que l’eau contient se réfu- 
gient souvent dans ces herbeset contribuent énormément à la 
nourriture des aquatiques, et sans lentilles d’eau il est bien 
difficile d’avoir des animaux forts et bien portants. 
- Un grand parcours me semble plutôt nuisible. M. Pol- 
… yvliet (1), à Rotterdam, l’homme qui a le mieux réussi à 
acclimater les nageurs, se contente de cuves de 1°,10 à peu 
près de diamètre entourées d’un treillage de bois ; tout l’en- 
€los pour 5 ou 6 couples de Mandarins n’a pas plus de 5 mètres 
de superficie, et pourtant c’est dans un si petit espace que 
furent élevés des Gygnes noirs, des Cygnes à col noir, des Ca- 
nards, Mandarins, Carolins, Bahamas en foule et jusqu’à des 
Casarkas, et cetle année, même de jeunes Sarcelles de For- 
F mose. 

Je crois aussi que la réunion d’une grande quantité de Ca- 
nards nuit à la reproduction; les mâles jaloux se battent et le 
plus faible doit se cacher sans pouvoir arriver à féconder sa 
femelle que le vainqueur délaisse généralement. 

Sur 80 œufs de Mandarins que j'ai obtenus annuellement 
depuis 1870, à peine s’il y en a une douzaine de bons. 
L'an dernier je cédai 2 couples de ces oiseaux à un ami, 
qui eut tous ses œufs fécondés. Les Dendrocygnes divers, les 
Mandarins, Carolins et Bahamas s’entendent bien entre eux, 
les premiers sont des oiseaux charmants, quoique leurs cou- 
leurs ne soient pas aussi vives que celles d’autres. Ils sont 
bientôt familiers ; ils sont en outre d’un grand courage. 

Voici la liste des jeunes produits obtenus en 1873 : 

Mandarins, 10; Carolins, 8 ; Bahamas, 2h ; Dendrocyqnes 
arborea, 3; Dafila spinicauda, 6 ; Casarkas variegata, 5. 


3 


(1) Voyez la note publiée sur l'établissement de M, Poilvliet, de Rotterdam. 


Fra 


(Bulletin, 2° série, 1872, tome IX, page 553). (Rédaction.) 
32 SÉRIE, T. |, — Mars 1874. 42 


Em 


178 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Beaucoup d'œufs clairs de quelques autres ; à mon grand 
étonnement, une femelle Dendrocygna autumnalis qui avait 
pondu l’année précédente en volière, chez mon collègue M. Ge- 
nêve, ne fit rien quoiqu elle parût bien accouplée. 

Colombes à double huppe (Lopholæmus antarticus), Lu- 
machelle (Phaps chalcoptera), C. poignardée (Phlogænas 
cruentata), Turvert (Chalcophas indica), Colombe Eonghup 
(Ocyphaps lophotes), Colomhi-qallines du Mexique. 

La Colombe à double huppe (Co/umba dilopha ou Lopho- 
lœæmus antarcticus) est une des plus rares. J'en reçus un cou- 
ple de Londres au printemps dernier. Pendant le voyage 
(d'Australie), ces oiseaux n’avaient été nourris que de maïs 
cuit, et je perdis bientôt la femelle, qui n'avait plus que la 
peau sur les os. J’amenai peu à peu le mâle à manger des 
figues coupées en petits morceaux, et cet oiseau est main- 
tenant en magnifique état. La femelle était déjà trop faible 
quand je la reçus. 

Toutes ces Colombes résistent bien au froid modéré, sauf 
peut-être la Colombe poignardée que je n’ai pas osé exposer. 
Toutes aussi produisent bien. 

J'ai vu il y a quelques années, chez un amateur belge, 
le Turvert de Java, dans une volière ouverte par devant, ex- 
posé au nord, nourri de chénevis, produire en plein hiver, et 
mener à bien plusieurs couvées. La Lumachelle et la Longhup 
se multiplient également sans ja moindre difficulté ; cette der- 
nière est quelquefois très-querelleuse, et je l'ai vue tuer non- 
seulement des Lumachelles, mais encore des Faisans dorés, à 
force de les poursuivre. Je dois ajouter que ce fait est indivi- 
duel, car d’un autre côté j'ai vu ces oiseaux habiter des 
volières avec d’autres oiseaux, même de leur propre espèce, 
et sans jamais causer aucun désagrément. | 

La Colombe poignardée est très-reconnaissable par la tache 
pectorale qui ressemble tout à fait à une blessure ressortant sur 
le fond blanc de la poitrine. J’ai eu grande difficulté à me-pro- 
curer ces oiseaux ; je les trouvai à Londres pendant la dernière 
euerre, et malgré tout, je dus les payer un prix très-élevé. Les 
Poignardées mises en volière commencèrent bientôt à porter 


PRE A 
D 
1 une | 


ESSAIS D’ACCLIMATATION A TOURS. 479 


des brindilles de bois dans un des pelits paniers à pigeons à 
elles réservés et firent 2 pelits. À mon grand étonnement je 
les vis nourrir ces derniers de vers de terre (Lombrics\ et 
ayant mis des vers à farine (fénébrions) à leur disposition, les 
Colombes les dévoraient avec le plus grand appétit. Au mois 
de septembre j'avais 2 couples de jeunes Poignardées, la 
troisième nichée ne produisit qu’un seul. Au commencement 
de Phiver, je les mis toutes en cage; les vieilles supportérent 
parfaitement la captivité étroite, mais les jeunes contractérent 


une maladie des jambes et je dus les tuer. La cinquième, restée 
en volière ouverte résista, et se porte à merveille. Il est vrai 
que l’hiver fut exceptionnellement doux, et que le thermo- 


mètre ne tomba qu'à 2 degrés au-dessous de zéro. 

Au mois de mai (1873), ma vieille paire fut de nouveau 
mise en volière et fit trois pontes successives, abandonnant 
chäque fois les œufs au bout d’une dizaine de jours d’incu- 
bation ; tous ces œufs contenaient un petit. Je changeai les 
Colombes poignardées de place et les mis dans un très-grand 
parquet, et bientôt elles eurent deux petits en bonne santé, 
qui, malheureusement, me furent tués par une Belette, entrée 
dans la volière on n’a jamais su comment (le grillage étant à 
maille de 2 centimètres et demi). En ce moment (septembre), 
elles couvent de nouveau. i 


CILOUGARIS ET CORNEILLES. 


Les Choucanis (Barita (Gymnorrhina) hibicen et leuconota) 
sont des oiseaux très-amusants. En leur coupant le fouet de 
Vaile, on peut se fier à une clôture de 1 mètre de haut pour 
les garder. Leur nourriture est très-simple, ils se contentent 
de débris de cuisine, et ils récompensent bien eur proprié- 
taire par leur chant harmonieux et par leur familiarité. fl 
faut pourtant bien faire son choix, car il m’est arrivé d'acheter 
des Choucaris vieux et sauvages que jamais je ne pus rendre 
familiers. Leur talent, comme celui des Perroquets, est très- 
individuel; l’un apprenant très-vite un air, un autre, malgré 
ioutes les peines, ne pouvant êlre instruit. 


180 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Un de mes Choucaris s’était établi le protecteur des nids de 
Canards; il chassait tout ce qui s’en approchait, et à notre 
étonnement se mit plus tard à surveiller les jeunes couvées. 
Je crus d'abord que c'était avec des vues gastronomiques qu’il 
prenait tant d'intérêt aux canetons, mais bientôt nous pûmes 
nous convaincre qu'il ne leur voulait que du bien. Cet aimable 
oiseau, parfaitement familier et ayant un beau chant, me fut 
enlevé avec trois autres par un putois, qui s'était établi dans 
un bâtiment à moitié en ruines de mon voisinage. Ces Chou- 
caris avaient construit un énorme nid dans les basses branches 


* d’un sapin très-touffu ; comme ce nid ne fut découvert que. 
longtemps après la perte des oiseaux, je ne sais pas si des 


œufs avaient été pondus ou non. 

Un oiseau pius intéressant encore, si c’est possible, est 
la Corneille de roche (Freqilus graculus). Jouissant de leur 
vol, mes) rneilles de roche viennent à l'appel se percher sur 
l'épaule et se laissent caresser avec la plus grande confiance. 
Plusieurs fois ces oiseaux ont fait un nid à Beaujardin, mais 
leurs œufs disparurent toujours, mangés probablement par 
les rats qui de temps en temps font une apparition chez moi. 


STRUTHIDEA. 


Le Struthidé (Séruthidea cinerea) est un oiseau qui n’est 
arrivé que depuis peu en Europe et dont les mœurs rappellent 
un peu celles du Geai. Attaquant les oiseaux malades, le Stru- 
thidé ne doit pas être laissé en compagnie de petits oiseaux, 
il est très-intelligent, et se prive très-facilement. Jusqu'à 
présent je n'ai pas encore remarqué le moindre signe de 
nidification chez lui. 


PERRUCHES. 


Le Platycerque de la Nouvelle-Zélande (P/atycercus Novæ 
Zelandiæ ou Cyanorhamphus Novæ Zelandiæ), comme chez 
plusieurs amateurs, a fait son nid de plumes chez moi. 
Ces oiseaux semblent préférer leurs propres plumes à celles 
d’autres oiseaux. Mon faisandier vint me dire un jour que 


4 


ne ki id 
: Fe 
ESSAIS D'ACCLIMATATION A TOURS. 1SL 


les souris étaient parvenues à arriver dans les buches sus- 
pendues au plafond, et comme preuve il m’apporta une 
poignée de plumes qu'il en avait Ôlé, c'était le nid des Per= 
ruches, et elles n’en firent pas d'autre pour la saison. 

Chaque année j'obtiens des produits de la Perruche à 
croupion rouge (Psephotus hæmatonotus). L’année dernière 
quoique cet oiseau eût des büches à sa disposition, il mena 
à bien une couvée de quatre jeunes dans un vieux panier 
suspendu à l'intention des Éperonniers. 

La Perruche multicolore (Psephotus multicolor) et la Per- 
ruche de Bourke (Platycercus (Euphema) Bourkt), quoiqu’en 
excellent état, sont restées stériles jusqu’à présent. 

Vaines aussi ont été mes tentatives d'obtenir la reproduction 
des Platycerques omracolores, de Pennant et d’'Adélaïide. 
J’achetai six couples à la fois de chaque espèce, et quelques 
semaines après, malgré tous les soins, il ne m’en reslait que 
quelques têtes des unes et la peau des autres, sans que je 
pusse me rendre compte des causes de cette mortalité 
anormale. ‘ 

Rien ne réussit mieux que l’acclimatation de la Perruche 
ondulée. Chez moi une grotte, assez obscure dans le fond, leur 
sert de volière; quoique l'avis de tout le monde fût que les 
Ondulées n'auraient pas assez de jour, et quoique moi-même 


Je doutasse du résultat, elles réussirent à merveille, et, chose 


remarquable, jamais je ne perdis une Ondulée par un accident 
irès-fréquent ailleurs, celui de ne pouvoir pondre. A ce pro- 
pos, je dois engager les amateurs qui liraient dans un 
ouvrage allemand irès-répandu, que pour faciliter la ponte des 
Ondulées il faut leur donner de la chaux vive, de se garder 
de ce remède. Un an après l'apparition de l’ouvrage en ques- 
tion, une rectification parut, mais plusieurs personnes avaient 
suivi le conseil... On peut se douter avec quel succés. 


…_ AXOLOTLS, TORTUES DE TERRE ET D EAU (Emnys Europea 
et E. quitata). 


Ces divers reptiles résistent très-bien aux hivers de Touraine, 
mais jusqu’à présent je n'ai pu constater aucune reproduction. 


M. 


182 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


PLANTES. 


Les Bambous »uñfs, nigra et Quilioi ont parfaitement ré- 
sisté, le plus grand est toujours le Mitis qui donne des tiges 
d’une hauteur de 3",75. 

Ont encore résisté : l’Agave de Miller, le Fuchsia gracilis, la 
Macadamia ternifolia. 


Hésultat des productions obtenues en 4833. 


Œufs. Jeunes. Œufs. Jeunes. 
Paon spicifère...... Ô nl | Casakra variegata . .. 6 5 
Ceriornis Temmünki . 6 ll Canard carolin...... 25 l 
Polyplectron chinquis. A 3 | Ocyphaps lophotes... mA 3 
Paon nigripennis.... 0 D  Geopelia humeralis.. 2 2, 
Gus VITRO AR 2 2 | (octobre.) 
Canard mandarin.... 78 2 | Columba cruentata..… voy. mes notes 

— de Bahama.. 24 21 | Ocydromus N.-Zél°.. œufs. 

Dafila spinicauda.... 5 l | 


Une femelle Bahama produisit 14 petits d’une couvée, maïs les Grues du Canada 
en enlevèrent une partie avant qu’on pût les prendre. 

4 Hocco pondit 6 œufs clairs (crax Daubentoni). Une Oie caronculée du Japon: 
pond son douzième œuf au 9 novembre et veut couver. 

L’Ocydrome couvant sur ses œufs fut enlevé par un putois. 


LT REPAS 
HRK r 
32 ; 


LE VER A SOIE BRÉSILIEN 


NOTICE ENTOMOLOGIQUE 


SUR 


L'ATTACUS AUROTA, CGramer, 


Par M. MAURICE GIRARD, 


Docteur ès sciences naturelles, 


L’attention?publique est appelée en ce moment d'une ma- 
nière spéciale sur une espèce de Lépidoptère producteur de 
soie, trèés-abondant dans toute celte immense région orientale 
de l'Amérique du Sud, qui comprend les Guyanes et les diver- 
ses provinces du vaste empire du Brésil. On entreprend en ce 
moment même des'essais dans ce dernier pays et, comme 
nous le savons, fsous la] haute et intelligente protection du 
souverain; on cherche à tirer part de cocons très-abondants 
partout et dont la soie est remarquable par -sa ténacité et sa 
finesse (1). Un industriel, qui désire garder l'anonyme, a de- 
mandé à M. de Capanema 800 à 1900 kilogrammes de ces 
cocons pour faire un essai sur une assez grande échelle, et il 
soumettra les produits obtenus à notre Société. 

Il ya déjà trés-longtemps que l’on a été frappé de la richesse 
soyeuse du cocon de ce papillon ; ainsi, mademoiselle Sibille 
Mérian (Op. cit., p. 52) nous a fait connaître, äl y a plus d’un 
siècle et demi, qu’elle à obtenu à Surinam de la soie de cette 
espèce ; elle l’ohservait dans les jardins sur les orangers. Elle 
ajoute avoir rapporté un grand nombre de ces cocons en 
Hollande, et qu’on pourrait tirer un très-grand bénéfice de ce 
Ver à soie. Dans les essais de dévidage à la main faits autre- 
fois au Conservaloire, sur un certain nombre d'espèces à 
cocons soyeux, Pérsoz signale le cocon de l'Affacus aurota, 


(1) Bull. de la Soc. d’accl. Novembre 1873, p. 841. 


EE 


æ” 
18/ SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


comme trés-facilement dévidable (1). En 1867, lors de l’'Expo- 
sition universelle, une grande quantité de cocons d'A. aurota 
furent envoyés à la magnanerie expérimentale du bois de 
Boulogne, par M. Dionisio Martüns, commissaire du Brésil à 
FExposition. Ils vinrent parfaitement à éclosion, grâce à la 
chaleur de l'été, et les visiteurs, au mois de juillet, contem- 
plèrent avec plaisir de magnifiques Papillons aux larges ailes 
marquées de taches nacrées trigones, transparentes comme 
du mica, et veinées d’une belle bande pourpre. La reproduc- 
tion eut lieu, pour la première fois en France (2), etles petites 
chenilles qui sorürent des œufs furent nourries avec des feuilles 
de fusain. Onne parvint pas à les élever, ce qui est dû certai- 
nement aux froids de l'automne; car l’espèce, qui se reproduit 
toute l’année, exige un climat chaud. Son introduction n’est 
pas à tenter en France, et l’on serait forcé de l’abandon- 
ner, comme cela estarrivé pour le Ver à soie du Ricin (Atfacus 
arrindia, Milne Edwards) ; mais on ne saurait trop encourager 
la culture de cette espèce dans son pays d’origine, etson impor- 
tation dans les climats analogues. Dans la séance du 26 dé- 
cembre 1873, notre confrère, M. Forgemol, a lu à notre 
Société une note intéressante sur le dévidage des cocons 
d’Attacus aurota, envoyés par M. de Capanema, et la Société 
a été frappée de la finesse et de l’éclat de la soie grége qui lui 
a été présentée. Tous ces motifs nous déterminent à indiquer 
dans une note succincte les caractères entomologiques de 
l’'Attacus aurota, à Vétat adulte et en chenille, ses mœurs et 
les moyens de l’élever, enfin les notions acquises en ce mo- 
ment à la science sur le dévidage des cocons et la qualité de 
la soie. L'espèce appartient à ce grand genre Aftacus de Lin- 
næus qui nous a donné déjà le Ver à soie de l’Aïlante, si bien 
acclimaté en France aujourd’hui, grâce surtout aux soins per- 
sévérants de notre Société et de quelques-uns de ses membres, 
ainsi, notre honoré président et Guérin-Méneville, et les Vers 


(1) Maurice Girard, Les auxiliaires du Ver à soie (Bull. de la Sociéte 
d'accl. N°S d'avril, mai, juin et juillet 1864). 

(2) La production animale et végétale à l'Exposition universelle de 1867, 
p. 245. 


NOTICE SUR L’ATTACUS AUROTA. 185 


à soie du Chène de la Chine et du Japon, dont l'introduction 
en France, en Italie, en Autriche, en Angleterre, est l’objet 
des travaux continus et intelligents de nombreux entomolo- 
gistes et sériciculteurs. 


[. SYNONYMIE ET DESCRIPTION DE L'’ATTACUS AUROTA, Cramer, 
ET DE SES DIVERS ÉTATS.— COMPARAISON AVEC LES ESPÈCES 
VOISINES. 


Üne confusion scientifique comiplète a régné longtemps à 
l'égard des Attacus à taches vitrées, dont les espèces abon- 
dent surtout dans les régions chaudes des deux hémisphères ; 
encore aujourd'hui, on est loin de connaître toutes ces espèces, 
et plusieurs d’entre elles sont fort difficiles à distinguer par 
des caractères nets, et doivent parfois produire des hybrides 
naturels, fait bien reconnu pour certaines espèces très-voisines 
de Lépidoptères, ce qui doit encore augmenter les incertitudes 
de détermination. Il est bier certain que Linnæus et Fabricius 
connaissaient l’Atéacus dont nous faisons l’histoire, et qui 
devait venir assez souvent chez les amateurs, mais ils ne le 
regardaient que comme une variété de petite taille de l’Aféacus 
Atlas, espèce asiatique (4). L'espèce brésilienne est figurée 
dans l’ouvrage de Séba (t. IV, pl. 57, fig. 56), iconographie 
confuse où ce curieux de la nature a représenté, à peu près 
pêle-mêle, tous les objets d’histoire naturelle de son riche ca- 
binet. L'espèce est nommée pour la première fois sous Le nom 
d'aurota, par Cramer (Papillons exotiques, t. I, p. 41, pl. 8, 
fig. 1, 1779), et assez exactement figurée, avec les belles ban- 
des roses dentelées des ailes bien visibles. Le Papillon est plus 
petit dans les deux sexes que l'A. Atlas; ses ailes supérieures 
ne sont que faiblement recourbées en faucille à leur extrémité, 
et les couleurs sont un peu différentes. Les supérieures sont 
d’un fauve rougeûtre, et elles ont une petite bande blanche 
coudée vers leur base, doublée extérieurement de noir, et 
une autre, courte et arquée, au bord interne, sans bordure 


(1) Maurice Girard, Note entomologique sur l'Attacus Atlas (Bull. de 2 
Soc. d’accl., 1873, p. 408). 


186 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


noire. Une tache irrégulière transparente, sans couleur ni 
écailles, el assez grande, est placée au milieu de l'aile; puis, 
en allant vers l'extérieur, on voit une bande un peu sinueuse 
qui coupe laile transversalement. Elle est formée, en allant 
de dedans en dehors, de quatre couleurs distinctes, savoir : 
noire, blanche, rougeâtre et obscure. Ensuite vient une série 
de taches triangulaires d’un rose rougeâtre, placées à côté les 
unes des autres, confondues ensemble par leurs bases, les som- 
mets libres ; enfin, il v a une petite bande irrégulière, d’un 
jaune fauve, vers le bord postérieur de l'aile. Les ailes infé- 
rieures de l’Attacus aurota diffèrent un peu des supérieures. 
Elles sont, commeelles, d’un rouge fauve etont, vers leur base, 
une pelite bande blanche, convexe vers l’intérieur, bordée ex- 
iérieurement de noir, une tache vitrée transparente au milieu, 
puis, extérieurement à ce mwroër, comme disent les anciens 
entomologistes, la même bande quadruple, transverse et un 
peu sinueuse, qu'aux ailes supérieures, puis la même série de 
taches triangulaires d’un rose rougeàtre, enfin, plus extérieu- 
rement, la même bande d’un jaune fauve, mais parsemée de 
petites taches noires subovales à la suite les unes des autres. 
Le dessous des quatre ailes est presque de la même couleur 
que le dessus. Les deux ailes offrent aux bords latéraux une 
assez large bande brune ; les antennes pectinées sont roussà- 
tres ; le corselet poilu, d’un rouge fauve, offre postérieure- 
ment un large anneau de poils blancs; l’abdomen, roux en 
dessus, est annelé de sept bandes blanches aux bords des 
segments. 

Dans son Mantissa insectorum (t. I, 1787, p. 108, n° 3), 
Fabricius indique, dans son genre Bombyx, une espèce qu'il 
nomme B. aurotus, et qu’il place après ses B. Atlas et Hes- 
perus. I lui donne pour diagnose : ailes étalées falquées (elles 
ne sont réellement que subfalquées), concolores, flavescentes, 
avec une bande blanche et une lunule fenestrée sur le disque. 
Puis: de la forme et presque de la grandeur du précédent 
(Hesperus) ; toutes les ailes jaunâtres, avec une ou deux 
petites bandes blanches à la base, une grande tache transpa- 
rénite en croissant, placée au milieu, laquelle se termine 


NOTICE SUR L’ATTACUS AUROTA. 187 


postérieurement par une lunule jaune. On voit ensuile une 
large bande blanche, puis une tache oculée noire, et une 
table blanche en croissant à l'extrémité des ailes supérieures. 
Fabricius ne parle-pas des ailes inférieures. Cette diagnose 
est fort vague, et s'applique aux Aéfacus æthra, Augias, spe- 
culum, etc., aussi bien qu’au véritable awrota. Fabricius dit 
seulement que son Bombyx aurotus fait partie de la collec- 
tion de Hunter; Olivier (Encycl. méth. hist. des insectes, 1. V, 
1790, p. 25) ne fait que traduire le latin du Mantissa de Fa- 
bricius pour le Bombyx aurotus, son Bombyx aurote. Comme 
localité il dit vaguement: il se trouve en Amérique; en réa- 
lité l'insecte lui est resté inconnu. Olivier se trompe égale- 
ment (op. cit., p. 24), quand il confond l’awrota de Cramer 
avec l’œæthra de Fabricius, et donne les caractères du premier 
pour ceux du second. 

La chenille de l’Affacus aurota, Cramer, a été assez bien 
dessinée par mademoiselle Marie Sibille Mérian (1) avec un 
peu de boursouflure aux segrnents; c’est sur l’oranger qu’elle 
l’observait dans un jardin. Elle est verte avec des lignes trans- 
versales d'un jaune vif aux bords antérieur et postérieur de 
chaque anneau; ceux-ci n’ont pas d’épines, mais portent 
chacun quatre tubercules d’un rouge orangé entourés de petits 
poils. Les stigmates ovales se détachent en blanc, et au-des- 
sous d’eux règne une large bande blanche sur les côtés des 
anneaux abdominaux, au-dessus de l'insertion des pattes ab- 
dominales, qui sont vertes et ornées de poils noirs; celte 
bande latérale est jaune sur les trois derniers segments. Le 
cocon de notre espèce est d’un gris plus ou moins ocreux, 
oblong, avec un pédicule d’attache plus ou moins développé. 
Il est très-mal figuré dans le dessin de mademoiselle Mérian, 
où il est trop voisin d’un sphéroïde et sans pédicule. Le pa- 
pillon est également représenté, sans aucun nom, comme tous 
les insectes et autres animaux de cette célèbre iconographie ; 


(1) Sibille Mérian, Dissertatio de generatione et metamorphosibus insec- 
torum Surinamensium. 1719, Amsterdam, p. 52, pl. LIT, et (latin et fran- 
çais) Histoire générale des insectes de Surinam, etc. Paris, 1761, p. 52, 
pl. LIT. 


188 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


mais il est beaucoup moins bon que celui figuré plus tard 
par Cramer. 

Il est utile de passer en revue rapide quelques espèces d’Ar- 
tacus qui doivent être distinguées de l'A. aurota. Écartons 
tout d’abord l’espèce d'Asie, À. Atlas, Linn., de taille notable- 
ment plus grande, à ailes antérieures très-falquées. C’est 
probablement la même espèce que l'A. Silheticus du docteur 
Helfer, la plus grande espèce du genre. Le cocon est de la 
même forme qne celui de FA. aurota, mais plus gros. Il me- 
sure 6 à 7 centimètres de long, et son diamètre est de 3,5 
centimètres. Il est peu rétréci à l’orifice de sortie, et la bourre, 
très-adhérente au cocon, en est à peine distincte. La soie à 
une couleur gris de lin ; elle est plus. forte et plus épaisse que 
celle de l'A. aurota, de sorte, que sans être aussi riche, ce 
cocon donnerait presque autant de soie en poids que celui de 
l'A. aurota. La chenille, d’un vert bleuâtre, avec des poils 
noirs, est le Ver du Fagara ou Fagarier de la Chine, pays où 
l'on cultive l'espèce depuis longtemps, et où elle est beaucoup 
plus commune que dans l'inde. 

Ge sont surtout plusieurs espèces américaines dont la dis- 
tinctüion avec l'A. aurota offre plus de difficultés. L'espèce qui 
s’en rapproche le plus à l’état parfait est l'A. æthra, Fabr., 
papillon commun en Colombie, aux Guyanes à Bahia, rare à 
Rio-de-Janeiro. Chez æthra comme chez aurota 1] existe près 
de la pointe de l’aile supérieure un ocelle noirâtre, entouré 
de fauve ; dans ces deux espèces les antennes du mâle sont 
très-pectinées, celles de la femelle le sont moins. Le fond de 
la couleur d’æthra est d’un roux jaunâtre, il est plus rou- 
ocâtre dans aurota. Les ailes de PA. æthra ont une bande 
transverse moitié noire du côté interne, puis ii-transparente 
et à bord externe rougeâtre; on n’y trouve pas la garniture de 
taches triangulaires roses; elle est remplacée par un espace oli- 
vâtre pointillé de points. La forme des ailes diffère notablement 
entre ces deux papillons : æ{hra a les ailes antérieures subfal- 
quées comme aurota, mais les ailes inférieures du mâle d'æ- 
thra sont bien plus arrondies que celles du mâle d’aurota. Le 
bord coslal de l’aile antérieure de l’A. æthra est grisâtre, 


74 


Papillon mäle (sujet très-petit). — Cocon. — Chenille sur le ricin. 


RSR 
de xt 
<i 


Ha 


NOTICE SUR L’ATTAÇGUS AUROTA. 4191 


tandis qu'il est de la couleur du fond chez awrata. Enfin les 
taches fenestrées d’aurota sont subtriangulaires aux ailes 
inférieures, tandis qu’elles sont subovales, plus grandes que 
les antérieures et à sommet aplati chez æthra. 

Le cocon del’A. æthra est demême forme et de même valeur 
soyeuse que celui de l'A. aurota, la soie étant un peu plus 
brune. La chenille, d’après M. A. Chavannes, au lieu d’être verte 
comme celle de l’awrota, est d’unrouge orangé, aveclesincisions 
des anneaux et des tubercules d’un noir velouté. Elle vitsurles 
Térébinthacées. Je crois fort que c’est la chenille de l’æthra, 
son papillon et son cocon qui sont représentés par Sibille Mé- 
rian (op cit., p. 65 et pl. LXV). Le cocon est allongé et d’un 
jaunâtre pâle, avec la chenille d’un beau jaune en dessus, et 
rouge sous le ventre, sans gros tubercules ni poils, avec une 
bande blanche entre les anneaux, et un angle blanc dessiné 
en-dessus sur les trois derniers segments, le sommet à la 
pointe anale. Mérian dit que linsecte vit sur le Citronnier, 
mais est rare, ce qui doit s'entendre des jardins des environs 
de Surinam où elle observait et dessinait les insectes. Les 
Attacus Atlas, aurota et æthra, tous trois à cocon ouvert, ont 
été l’objet de quelques essais d’éducation, ainsi que l'A. spe- 
culum, Boisduval, dont nous parlerons plus loin. 

L'Amérique a encore d'autres Affacus très-voisins des pré- 
cédents. 

On trouve encore principalement à la Guyane et aussi au 
Brésil, l'A. Hesperus, Fabr., analogue à æthra pour les quatre 
taches vitrées, mais dont le sommet des ailes supérieures est 
très-différent de celui d'æthra et d’aurota en ce qu’il man- 
que de l’ocelle noir subapical. La chenille est glabre, mais 
tuberculeuse, donnant un cocon d’un jaune pâle ou nankin, 
très-serré et très-épais, ouvert en nasse, d’une sole très-forte 
mais d’un dévidage difficile. Il faut le décreuser par une solu- 
tion de carbonate alcalin. On a obtenu une filoselle roussâtre 
très-solide. Cette espèce, vivant sauvage et abondante près de 
Cayenne, peut fournir une branche intéressante d’exporta- 
tion. La chenille se nourrit d’un arbrisseau nommé Café- 
diable dans le pays (Caseoria ramiflora), et aussi des feuilles 
du Palétuvier- 


492 * SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


L’A. Augias, Boisd., ressemblant aux précédents pour le 
dessin, en est très-différent par la couleur du fond, qui est 
d'un jaune orangé, nullement rougeâtre. L’A. auwrota au con- 
traire se distingue tout de suite par la riche nuance pourprée 
du fond, bien moins sensible chez æthra et Hesperus. 
M. Boisduval à recu A. Augias du Brésil intérieur (Minas 
Geraes), et il existe aussi dans la province de Saint-Paul, et 
probablement dans d’autres parties du Brésil. Le papillon, de 
lataille d'aurota, a la bande transversale des ailes supérieures 
en général plus noirâtre, et n’offrant d’atomes roses qu’à sa 
partie inférieure. Le croissant du sommet des ailes supérieures 
est noir comme la tache ovoïde anale, celle-ci beaucoup plus 
grande que les autres. La chenille n’est que très-incomplé- 
tement connue, car M. A. Chavannes n’en a vu que la dé- 
pouille dans le cocon. Il la suppose verte, garnie de poils clair- 
semés, sans tubercules, la tête avec deux lignes noires incom- 
plètes; on trouve à la partie antérieure et latérale du corps 
deux taches ovales probablement noires ; les pattes membra- 
neuses sont noires. Le cocon ressemble à celui d’aurota, mais 
plus arrondi à l'extrémité céphalique, avec la première enve- 
loppe plus adhérente, le tissu plus compacte, plus gommé, plus 
brun, quelquefois de couleur un peu dorée. Il y a autant de 
soie que dans le cocon de l'A. aurota, et il ne me paraît pas 
impossible que cette espèce ne soit une variété fortement ca- 
ractérisée d'aurota. | 

Enfin on rencontre au Nicaragua et dans différentes pro- 
vinces du Brésil. l'A. speculum, Boisduval, celles de Rio, d'Es- 
pirito sonto, dos minas, etc. Le papillon paraît toute l’an- 
née en plus ou moins grand nombre. La femelle dépose en 
paquet des œufs de couleur Jjaunâtre, nuancés par quelques 
taches brunes, de 300 à 500 par ponte. Au bout de sept à 
huit jours, ces œufs deviennent d’un gris verdâtre uni- 
forme ; le huitième ou neuvième Jour ils éclosent. La pe- 
tite chenille, qui sort de son œuf le matin, a environ 4 mil- 
limètres de long. Elle est noire, et les couleurs qu’elle prend 
après la première mue persistent jusqu'à son entier déve- 
loppement. Elle vit trente à quarante jours avant de filer 
son cocon, et le nombre de jours de ses différents âges 


‘') TERRE 


ÿ 
NOTICE SUR L’ATTACUS AUROTA. 193 


correspond à peu prés à ceux du Ver à soie du Mürier. Par- 
venue à toute sa taille, elle est longue d’environ 70 milli- 
mètres, cylindrique, les premiers et les derniers anneaux un 
peu amincis. Leur couleur générale est d’un noiïr mat, et cha- 
cun offre deux lignes transversales oranges qui, sur les qua- 
trième et cinquième, s'étendent jusque sous le ventre; sur Île 
douzième, deux traits de cette même couleur forment un V 
ouvert au sommet. Le corps est parsemé de poils courts, la- 
nugineux, blanchâtres ; le ventre, la tête, les pattes et les 
stigmates sont noirs. Cette chenille vit en société Ausqu’au 
moment de filer son cocon, et se nourrit de feuilles d’arbres 
appartenant aux Lorantacées, aux Laurinées, et quelquefois se 
trouve sur le Ricin. Le cocon est grisâtre et beaucoup plus 
effilé que celui des espèces précédentes. Il n'offre pas de 
bourre extérieure et se termine par un long cordon. La soie 
est plus fine et aussi moins tenace que celle des cocons déjà 
cités ; elle est aussi un peu moins abondante. La longueur du 
cocon est de AO à 54 millimètres, et son diamètre transver- 
sal, de 12 à 16. La première enveloppe est très-adhérente 
aux couches sous-jacentes ; on ne peut l’en séparer qu'avec 
difficulté. Le tissu de ce cocon est très-serré, compacte, résis- 
tant à la pression et d’une couleur plus ou moins brune. 

Le papillon éclot, en général, au bout de deux semaines à 
un mois; beaucoup cependant ne paraissent qu'au bout de 
six semaines ou même d'une année entière, suivant la loi fré- 
quente du retard de l’éclosion des Affacus. Il est plus petit que 
les précédents, d’un dessin analogue, d’une envergure de 408 à 
130 millimètres. Le fond est d’un fauve plus pâle, plus blême, 
les taches vitrées, en général, moins angulaires, et dans cer: 
tains individus trés-petites et allongées. La bande transver- 
sale des ailes supérieures n'offre d’atomes roses qu’à sa moitié 
inférieure. Au sommet des ailes supérieures, il n’y a pas de 
croissant, mais des taches noirâtres semblables aux suivantes 
pour la forme; ces dernières ne sont pas circonserites cxté- 
rieurement par un filet noir, mais par une ligne brune moins 
arrêtée. La tache anale, seulement un peu plus grande que les 


autres, n'est pas tout à fait noire. 
3° SÉRIE, T. L. — Mars 1874. 13 


194% . SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


L’A. Encelades, Boisd., se trouve dans la province de 
Rio. La chenille est verte, avec des lignes blanches et des tuber- 
cules bleus, et vit sur les Jacobées. Elle file un cocon accolé 
aux tiges; la soie est d’un gris jaunâtre, comme celle de 
VA. speculum, et n'est pas en grande quantité. Il y a encore 
au Brésil plusieurs autres espèces d’Affacus, mais plus rares, 
à cocons plus petits et moins soyeux, ét que nous ne mention- 
nerons pas. 

Les régions chaudes de l'Amérique, autres que le Brésil, 
ont aussi d'assez nombreux Af/acus. Ainsi, jusque dans les 
rues de Mexico on trouve une espèce qui est probablement 
l'A. Orbignyanus, G. Mén., dont le cocon fournitune soie gris 
de lin, très-brillante et résistante. Il ressemble à celui de 
l’À. aurota, mais la bourre ou première enveloppe est liée 
pius intimement au cocon ; elle forme à l'extrémité supérieure 
une ouverture ovale au fond de laquelle on aperçoit le goulot 
du cocon. M. A. Chavannes pense que la soie tissée par les 
anciens Mexicains provenait de cette espèce. On trouve à 
Cuba le cocon d’une autre espèce, qui est pour la forme et 
pour la soie très-voisin de celui de l'A. speculum. Il est effilé 
et sans bourre distincte. Son pédicule n’a que quelques mil- 
limêtres de longueur, et se termine par un pelit anneau qui 
enveloppe la branche, à l'instar de l'anneau corné du pédi- 
cule du cocon fermé de l'A. myltta, espèce de l'Inde. Enfin, 
comme dans l’espèce précédente, la première enveloppe ou- 
verte en haut laisse apercevoir l'extrémité appointie du cocon. 

Nousavons tenu à faire cette énumération un peu longue des 
Attacus séricigènes del’Amérique chaude, et surtout du Brésil. 
En effet, en présence des nombreuses richesses textiles que. 
nous négligeons encore, on peut dire que la sériciculture est 
dans l'enfance. Un jour viendra, — et promptement si les na- 
tions pouvaient devenir assez sages pour mettre la politique au 
second plan, — où l'on recherchera partout les cocons soyeux. 
L'industrie a besoin non-seulement de belles soies, mais aussi 
de soies variées, même avec des qualités inférieures, pour 
satisfaire à toutes les exigences ; les caprices de la mode sont 
le pain de milliers de familles. 


NOTICE SUR L'ATTACUS AUROTA. 195 


Il. — B10LOGIE, ÉDUCATION, CARDAGE ET DÉVIDAGE DES COCONS. 


L'Attacus aurota, Cramer, est un des plus grands représen- 
tants du genre au Brésil, puisque certains sujets atteignent 
une envergure des ailes de 190 à 215 millimètres. C’est l’es- 
pèce la plus répandue, commune sur tout le littoral depuis 
Rio-de-Janeiro jusqu’au nord de l'empire et au delà, et exis- 
tant aussi dans les provinces centrales, ainsi celle de Minas- 
Geraes, mais ne s’élevant pas sur les montagnes, du moins 
celles de la province de Rio. L’insecte est polyphage, comme 
presque tous les Atfacus, mais cependant avec quelques végé- 
taux de prédilection. Tels sont d’abord le ricin, arbre ou 
arbuste selon le climat, et qui croît en abondance et de Iui- 
même dans les pays chauds des deux mondes, supportant des 
températures moyennes diurnes de + 36° à + 12°. L’insecte 
aime aussi beaucoup la feuille de deux Euphorbiacées. L’une 
est le Jatropha manihot, vulgairement le manioc, dont la 
racine pilée et privée par le lavage de son suc vénéneux, 
donne la fécule nutritive connue dans le commerce sous le 
nom de tapioca; l’autre est l’Anda Gomesii, lrès-énergique 
purgatif, grand arbre ayant le port du noyer, nommé au Brésil 
Andou-su, ou Anda-jasson. Un auteur brésilien, qui a écrit 
sur l’Attacus aurota, M. de Oliveira (Memoria sobre o bicho 
da seda indigena da provincia do Espirito Santo, por J. J. 
Machado do Oliveira, travail inséré dans le journal mensuel : 
O auxiliador da industria nacional, publicado pela Sociedade 
auxiliadore da industria nacional, Rio-de-Janeiro, tome IX, 
p. 361) indique encore divers végétaux brésiliens, apparte- 
nant aux Loranthacées, aux Malvacées, aux Rutacées. Il faut 
y joindre l’acajou (Anacardium occidentale), le bambou, le 
pêcher, le fusain, l’oranger, ete. Le papillon paraît pendant 
toute l’année en plus ou moins grand nombre, et parcourt les 
phases de son existence en été en vingt-huit jours, en hiver, 
par une température moyenne de 16°, en quarante jours. Les 
femelles pondent de 200 à 400 œufs pendant trois ou quatre 
nuits successives, en rangées isolées de 5 à 10 œufs. Ils sont 


196 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


blancs ovales, aplatis, offrant après quelques jours une légère 
dépression au centre; du 8° au 9° jour ils prennent une teinte 
bleuätre, la dépression centrale disparaît, et ils éclosent du 40° 
au 11° jour. Si la température s’abaisse au-dessous de 15° l’é- 
closion en est retardée de quelques jours. Il faut 210 de ces 
œufs fraîchement pondus pour former le poids d’un gramme. 
Les petites chenilles éclosent surtout le malin, fait général 
dans tous les Bombyciens et bien connu pour le Ver à soie du 
Mürier. 

Le L'éducation de cette espèce n’a pas encore élé tentée sur 
Le une grande échelle, mais a été essayée par diverses personnes 
en petites proportions, notamment par M. A. Chavannes, de 
1840 à 1844, dans son séjour au Brésil (1). Elle a l’avantage 
de durer toute l’année et par conséquent de donner un pro- 
duit rémunérateur continuel. On peut opérer à la chambre, 
2 comme pour le Ver à soie, ou bien faire éclore les chenilles, à 
proximité de la maison, sur les arbres qui leur conviennent. 
M. de Capanema conseille dans ce dernier cas(vov. Bulletin de 
la Société d'acclimatation, 1872, p. 524 et 1873, p. 500), 
pendant les premiers quatre à six jours, d'élever les petites 
chenilles sur des plantes en pots, pour les protéger contre des 
ennemis acharnés, les fourmis, les guêpes et les araignées, 
qui les détruisent complétement. M. A. Chavannes rapporte 
que le grand ennemi de ces éducations libres, plus commodes 
et moins coûteuses que celles en magnanerie, est une guëpe 
brune, très-commune à Rio-de-Janeiro et dans toutes les 
sucreries, et qui emporte d’un seul coup les jeunes chenilles, 
tandis qu’elle dépèce en plusieurs morceaux les grandes ; ce 
sont les mêmes mœurs que celles de notre guêpe commune et 
de la guëpe frelon. 


D SE de CEE fers ne”! 
LUN ES ; 


Fax 


(1) D' À. Chavannes, Mémoire sur les Saturnies sérigènes qu'il serait 
convenable d'introduire en France (Bull. de la Soc. d'acclim., 1855, t IH, 
p. 364).— Sur les Saturnies sérigènes (Même bulletin, p. 370). — Notice 
sur les Saturnies séricigènes et sur leur introduction en Europe (Bull. de 
la Soc. vaudoise des sc. natur. Séance du 17 janvier 1855). — Memoire 
sur quelques espèces de Saturnies sérigènes du Brésil (Journal de la So- 


ciété vaudoise d'utilité publiaue. Lausanne, février 1844, n° 137, p. 46). 


NOTICE SUR L’ATTAGUS AUROTA. 467 


Dans l’éducation domestique les premiers âgesexigent beau- 
coup de soins, et, malgré eux, il meurt un assez granû nombre 
de vers. Le mieux est d'élever pendant les deux ou trois 
premiers âges sur les arbres, en entourant la branche où sont 
les chenilles d’un grand manchon de toile légère, qui empêche 
l'attaque des guêpes; c’est le procédé des entomologistes pour 
élever les chenilles difficiles, supportant mal la captivité 
complète. Ces chenilles d’Atfacus aurota, remarquablement 
sédentaires en liberté, vagabondent beaucoup plus que le Ver 
à soie du Mürier, si on les élève dans les chambres. C’est 
aussi ce qu’on remarque pour le Ver du Chêne japonais, c’est 
que ces chenilles sont tourmentées et inquiêtes de leur capti- 
vilé. En outre, quoi qu'on fasse, il s’introduit toujours beau- 
coup d’inégalité entre les vers élevés à la chambre. L'éducation 
à l'air libre doit certainement être préférée. 

M. Chavannes cite encore d’autres ennemis que les guêpes. 
IL y à de trés-petites mouches, qui sont sans doute, non des 
Diptères, comme il Le dit, mais des Hyménoptères de la tribu 
des Braconiens, qui piquent les chenilles de petites taches 
brunes et dont les larves jaunâtres, dévorant le tissu graisseux, 
affablissent la chenille au point de empêcher de filer son 
cocon. Il indique en outre une mouche beaucoup plus grosse, 
qui n'empêche pas l’insecte de filer son cocon et de se chry- 
salider. Elle ne nuit donc en rien sous le rapport de la soie, 
mais seulement au point de vue de la reproduction. Cest pro- 
bablement l'Entomobie (Diptères, Brachocères, Muscides), 
dont j'ai parlé à la Société, et qui avait attaqué presque tous les 
sujets des cocons envoyés par M. de Capanema, ce qui nous à 
privé à la magnanerie du bois de Boulogne de l'éclosion des 
papillons. Ces parasites sont la maladie de l’oudyi des éduca- 
teurs Japonais. 

Les adultes de l’Aftacus aurota ne s’accouplent que rare- 
ment en caplivité, surtout lorsqu'il y a plus d'un couple en- 
fermé dans la même boîte. Il faut laisser les mâles s’envoler 
en liberté, et exposer les femelles en plein air, dans un en- 
droit où ceux-ci peuvent voler en liberté. M. A. Chavannes 
atlachait les femelles, sans les blesser, au moyen d’une ficelle 


198 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


passée entre les deux paires d’ailes autour du corselet, et dont 
les deux bouts sont cloués avec une épingle sur un morceau 
d’agave, que l’on suspend, à l'entrée de la nuit, à une branche 
d'arbre, dans un lieu abrité du vent. Au Bengale on attache 
aussi les femelles de l’Attacus mylitta. L’accouplement a lieu 
ordinairement de grand matin, bien que les mâles commen- 
cent à voler au crépuscule, et il dure ordinairement jusqu’au 
soir, Si les papillons ne sont pas dérangés. Les mâles qui 
fécondent les femelles sont, ou bien ceux qui ont été rendus 
libres à cet effet, ou bien des mâles sauvages, surtout si l’on 
opère à la lisière d’un bois, M. Chavannes a vu que le même 
mâle peut accomplir plusieurs accouplements, et féconder 
jusqu’à quatre femelles. Il est toujours convenable de lâcher 
le plus de mâles qu’il sera possible, car on n’en trouve pas 
toujours de sauvages à point nommé, et quelques-uns de ceux 
qu’on a laissés s'envoler sont, ou débauchés par des femelles 
sauvages, ou dévorés, soit par des chauves-souris, soit par des 
oiseaux nocturnes. Les femelles doivent être fraichement 
écloses, car dès le second jour elles commencent à pondre, 
et dès lors n’attirent plus les mâles. On reconnait que les 
femelles n’ont pas été fécondées, en ce que, la nuit suivante, 
elles ne pondent que quelques œufs. Il convient de retirer 
pendant le jour les femelles attachées, de peur qu’elles ne 
soient dévorées par les guêpes ou par les fourmis. Une basse 
température, telle que +12°, une forte pluie ou un grand vent 
empêchent les mâles de voler, etdès lors rendent infructueuses 
les expositions de femelles. M. de Capanema insiste beaucoup 
sur la nécessité d’attacher les femelles pour l’accouplement 
même en captivité, et de laisser les mâles voler dans une vaste 
chambre, de manière qu’ils puissent se regarder comme 
libres. Cependant je dois dire que nous avons obtenu des 
accouplements en 1867, à la magnanerie expérimentale de la 
Société, en enfermant les insectes, libres dans les deux sexes, 
à l'intérieur de cages vitrées, d’un mètre cube environ, où 
réussissent parfaitement les accouplements de l’Affacus cyn- 
thia vera (Ner à soie de l’Aïlante). Peut-être aurions-nous 
obtenu plus d'œufs féconds par la méthode précédemment 


NOTICE SUR L'ATTACUS AUROTA. 199 


indiquée. Cependant je dois faire cette remarque que M. Bigot 
qui a élevé avec succès l’Affacus Yama-maï, G. Mén. (Ver à 
soie du Chêne du Japon) à Pontoise (Seine-et-Oise), assure 
n'avoir presque pas eu d’accouplements, soit en renfermant 
ses papillons dans une cage placée à l’intérieur de lachambre, 
soit en les laissant voler librement la nuit dans la chambre 
fermée. Au contraire tous les accouplements réussissaient en 
mettant simplement la cage au dehors à l'air libre pendant la 
nuit. Il est probable qu’il y a des différences encore: fort mal 
connues dans les influences diverses qui agissent sur l'accou- 
plement des Aétacus. Il est beaucoup moins aisé que celui du 
Ver à soie du Mùrier (Sericaria mort), et ne commence que la 
nuit, pouvant après cela durer tout le jour suivant. 

Les femelles fécondées sont placées dans des boîtes fermées 
contenant des feuilles de papier flottantes ou des toiles, et elles 
pondent pendant trois nuits consécutives. On peut ensuite 
décoller les œufs, comme on le fait pour ceux du Sericaria 
Mor. 

L’éclosion des chrysalides renfermées dans les cocons exige 
une température de + 25° à 27°; c’est ce qui nous a empêché 
d'obtenir des papillons des quelques cocons non attaqués par 
les Entomobies, parmi ceux envoyés par M. de Capanema, 
car ils ont été apportés en octobre à notre magnanerie, et 
Jamais la température ne s’est élevée au degré voulu. Au reste 
il n’y a là que partie remise, car si d'ordinaire le papiilon 
éclot au bout de deux mois à deux mois et demi, il peut 

passer de nombreux mois et même des années sans éclore. 
Cest un fait fréquent chez les Bombyciens : ainsi on a vu des 
chrysalides de notre Grand Paon de nuit (Aftacus Pyri, Linn.) 
n’éclore qu'au bout de sept ans, et dans un genre voisin, celles 
du Bombyx lanestris, Linn., demeurer jusqu’à neuf années en 
vie latente. Les papillons d’Atacus aurota sortent de la chry- 
salide le soir ou pendant la nuit. 

Lachenille attache ordinairement son cocon au pétiole d’une 
feuille au moyen d’un cordon soyeux, plat, très-fort, long de 
25 à 75 millimètres environ, et faisant corps avec la partie 
supérieure de la première enveloppe du cocon. La couleur de 


200 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


celui-ci est d’un gris de lin plus ou moins obscur. La forme 
de la première enveloppe du cocon, qui correspond à la blaze 
de celui du Ver à soie du Müûrier est irrégulièérement ovoiïde. 
Son tissu, d’un fil grossier, est assez lâche pour se laisser aisé- 
ment déchirer à la main et séparer du cocon proprement dit. 
Ce dernier est ovoïde, appointi à une extrémité, qui est natu- 
rellement ouverte pour la sortie du papillon, à la façon des 
cocons de nos trois Affacus d'Europe (grand, moyen et petit 
Paon, A. Pyri, Linn, À. Spini, Linn, A. Carpini, Linn.) C’est 
à cette extrémité que correspond la tête de la chrysalide, afin 
que le papillon n'ait pas à se retourner, ce qui l’exposerait à 
blesser son corps très-mou lors de l’éclosion. A ce bout les fils 
de soie sont repliés en anse, à la façon d’une nasse, ouverture 
que ie papillon force aisément pour sortir. Le-cocon est long 
de 55 millimètres environ sur 25 à 30 de large; ses parois se 
laissent assez facilement déprimer entre les doigts. On y dis- 
tingue cinq couches concentriques, dont les plus internes sont 
plus serrées et d’un fil plus fin. Le cocon est luisant à l'inté- 
rieur, et parfois saupoudré d’une poussière blanche qui est 
de l'acide urique provenant des dernières évacuations de la 
chenille quand elle à terminé la filature de son cocon. La 
chrysalide est d’un brun rougeâtre, ressemblant beaucoup à 
celle de notre grand Paon de nuit (4. Pyr2, Linn.). 

M. de Capanema recommande, pour enlever le frison, de 
commencer par le bout opposé à l’ouverture de sortie, afin de 
ne pas courir le risque de rompre des fils, ce qui ralentirait 
la filature. Il dit que la soie obtenue se blanchit parfaitement 
au chlore, sans perdre son lustre. 

Le poids des cocons frais est assez variable, ce qui tient 
surtout à la différence de poids qui existe entre les chrysalides 
mâles et femelles. On trouve des cocons frais qui pèsent de 
7 à 8 grammes; les plus légers pèsent 3 grammes à 35,5. 
En général leur poids moyen est de 5 grammes; 1l en faut 
environ 180 à 200 pour arriver au kilogramme. La chrysalide 
forme à elle seule la plus forte partie de ce poids, puisqu’elle 
peut peser jusqu’à 7 grammes. Après l’étouffage de la chrysa- 
lide et sa dessiccation il faut environ 500 cocons pour 4 kilog., 


NOTICE SUR L’ATTACUS AUROTA. 991 


c'est-à-dire que chaque cocon pèse environ 2 grammes. Si 
les cocons à chrysalide sèche ont été débarrassés de la pre- 
mière enveloppe, propre seulement au cardage, il y en a 1000 
au kilogramme. Si la dépouille de la chenille et les débrisont 
été enlevés, le kilogramme en renferme 1200 à 1500, ce qui 
met le poids du cocon à 05,7 ou 0,8 pour la soie; mais 
en défalquant de ce poids la matière glutineuse qui colle les 
fils et l'acide urique, il reste 05,35 à 0%°,40 de soie pure, 


. c’est-à-dire qu’il faut 2500 cocons environ pour donner 1 kil. 


de bourre de soie plus ou moins cuite. Or, il faut environ, 
pour donner le même poids, 8000 cocons de Ver à soie du 
Mürier dans les mêmes conditions; nous voyons donc que 
l'Aétacus aurota offre trois fois plus de soie que le Sericaria 
Mori. Si l'on prend des cocons de choix, les plus beaux, on a 
par cocon 1%,20 à 1,50 de soie, ou 900 cocons vides 
au kilogr. Mais ce ne sont là que des nombres exceptionnels, 
qui feraient 7 fois plus de soie que le Ver à soie. L’épaisseur 
du brin est de 0"",035 à 0"",040; il supporte sans se rom- 
pre un poids de 15 à 20 grammes, ou en d’autres termes, le 
brin est deux fois plus épais que celui du Ver à soie du 
Mürier et trois fois plus fort. 

M. Chavannes a fait seulement, pour le dévidage de ce re- 
marquable cocon, quelques essais qui ne sont pas industriels; 
il s’est surtout occupé de leur cardage. Il faut, au préalable, 
opérer un décreusage du gluten des fils, ce qu’il obtenait, soit 
à l'eau de savon chaude, soit par une solution de carbonate de 
potasse à 5 degrés Baumé, ou par une lessive de cendres de 
bois additionnée d’un peu de ce carbonate, marquant A degrés 
Baumé. On enferme les cocons dans un sac qu’on place au 
milieu de la dissolution bouillante, jusqu'à ce qu’on puisse 
facilement, à la main, étirer les fils des couches les plus pro- 
fondes ; puis on retire les cocons pour les laver plusieurs fois 
dans l’eau pure; enfin, on fait sécher la masse prête alors à 
être cardée. Il faut remarquer que l’éclosion du papillon ne 
nuit en rien au dévidage, le cocon étant naturellement 
ouvert. 


M. de Capanema indique d'employer pour le dévidage une 


1 
LA 
? 

Y 


202 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


solution à 30 pour 100 de carbonate de potasse, à une tempé- 
rature qui ne doit pas dépasser 80 degrés centigrades. 

Je crois qu'il sera bon de substituer pour le décreusage le 
carbonate de soude à celui de potasse, comme donnant moins 
de risque d’altération de la soie. Il y aura avantage aussi de 
remplacer par l'acide sulfureux le chlore afin de blanchir les 
fils de soie grége ou la bourre, pour la même raison. C’est 
l'acide sulfureux, produit en brûlant du soufre à l'air, qui 
s'emploie en Europe de temps immémorial pour blanchir les : 
gréges Jaunes. 

M. A. Chavannes donne, dans une de ses notices, des indi- 
cations sur le transport des cocons, en caisses aérées, où les 
papillons, s’ils éclosent en route, puissent s’accoupler et pon- 
dre. Il propose d’expédier les cocons en octobre et novembre, 
de faire accoupler les papillons, et d’élever les jeunes Vers en 
orangerle, sur des végétaux en caisse. C’est qu’en effet, 
M. A. Chavannes croit que la température de l’Algérie ou celle 
du midi de la France, pourrait convenir à l’Aftacus aurota, 
qui se nourrirait facilement de végétaux indigènes, et donne- 
rait un rendement soyeux bien supérieur à celui de l’A. cynthia 
vera. La température de ces régions est peu différente de celle 
des montagnes des Orgues, province de Rio, où M. Chavannes 
a transporté l'espèce. Je ne partage pas, sur ce point, l’opi- 
nion du savant sériciculteur. Le midi de la France, et même 
l'Algérie, ont assez souvent des refroidissements brusques 
au-dessous de 10 degrés, qui pourraient surprendre l’insecte 
dans une période d’activité autre que l’œuf ou la chrysalide, 
et compromettre les éducations de la façon la plus grave. 
M. Chavannes reconnaît lui-même, au reste, que l’insecte 
n'existe pas naturellement dans les montagnes de la province 
de Rio. L'espèce séricigène qu'il conviendrait plutôt d'intro- 
duire dans les parties les plus australes de notre colonie al- 
gérienne, où certains insectes sénégaliens commencent à se 
mêler à la faune méditerranéenne, c’est l’Attacus Bauhiniæ 
du Sénégal, à beau cocon gris perle, à deux robes, riche en 
soie fine. L’Affacus aurota doit, au contraire, être élevé à 
l'air libre à la Guyane, à la façon des éducations à demi do- 


NOTICE SUR L'ATTACUS AUROTA. . 203 


mestiques, à demi sauvages, de l’Atfacus mylitta, Fabr., au 
Bengale. C’est au Brésil aussi que les cocons de cet insecte 
doivent être récoltés dans les forêts, indépendamment des 
éducations surveillées en enclos. Il y a là une source fructueuse 
de bénéfice, et le Brésil sait qu’il peut compter sur la sollici- 
tude éclairée de Pédro Il, que notre Société d’acclimatation 
s’honore de compter parmi ses membres, et dont elle n’ou- 
bliera jamais la gracieuse visite. 


DÉVIDAGE 
DES COCONS DE L’ATTACUS AUROTA 


Par M. le D' FORGEMOLI. 


Le 30 décembre 1861, M. Élie de Beaumont lisait à l'Aca- 
démie des sciences une lettre de M. Guérin-Méneville, qui 
annonçait la découverte du dévidage des cotons naturellement 
ouverts. Divers échantillons de soie grége accampagnaient 
celle lettre ct étaient présentés à l’illustre Compagnie. 

Je ne vous dirai päs, messieurs, que ces échantillons, qui 
étaient ma propriété, furent attribués le lendemain de la 
séance, par galanterie sans doute, à une gracieuse rivale, par 
les journaux plus ou moins scientifiques qui en rendirent 
compte, et que cette erreur fut reproduite plus tard par 
M. Louis Figuier dans son Année scientifique. M. Louis Fi- 
guier dit assez dédaigneusement, après un éloge très-grand 
de ma rivale : « Un médecin de Tournan paraît avoir fait la 
même découverte », et puis, c’est tout. Le vieux proverbe 
€ sic vos non vobis » exislera toujours. 

Mais je vous dirai que dans ces échantillons figurait de 
la soie grége provenant de cinq cocons de l’Attacus Aurota, 
mis à ma disposition par M. Guérin-Méneville. Toutefois, 
avant de paraître à l’Académie des sciences, cette sole vous 
avait élé soumise et vous aviez daigné lui accorder votre 
haute approbation. Le sujet, dont je vais avoir l'honneur de 
vous entretenir en quelques mots, n'est donc pas nouveau 
pour vous, messieurs. 

Dans ces derniers temps, on a semblé attacher à la culture de 
l’'Aurola quelque importance, et l’un de vos plus illustres pro- 
tecteurs, S. M. l’empereur du Brésil, a appelé sur elle votre 
attention ainsi que celle des savants, des sériciculteurs et des 
industriels. Pour coopérer à la solution de cette question, j'ai 


demandé à voire. Société quelques cocons de cet Attacus 


 DÉVIDAGE DES COCONS DE L'ATTACUS AUROTA. 205 


qu’elle a bien voulu m'adresser : et, comme le côté industriel 
prime tout en pareil cas, je me suis mis à l’œuvre pour dévi- 
der ces cocons et j'ai l'honneur d'en présenter la grége à 
votre examen. 

Vous le savez, messieurs, le Papillon de l’Awrota appartient 
au grand et beau groupe des Lépidoptères nocturnes et au 
senre Aftacus. Le Ver se nourrit des feuilles du Ricin. Les 
cocons qu’il forme sont naturellement ouverts, d’un gris blanc, 
beaucoup plus gros que celui du Cynthia et de l’Arrindia, et 
se rapprochent beaucoup de ceux du Chêne. 

Soumis à mon mode de dégommage et placés sur mes épin- 
gles à olive, ils m'ont donné une grége trés-belle, élastique et 
plate, tenant le milieu entre celle de l’Arrindia et du Pernyr, 
mais d’un éclat bien supérieur à celle de l’Arrindie. Ce sont 
là d'excellentes conditions pour un usage industriel facile et 
produetif. 

Le dévidage de ces cocons est des plus aisés. Il a lieu bien 
plus vite que celui des cocons de l’Arréndia. Il y a aussi un 
rendement plus grand en grége. Sur les cent cocons que la 
Société m'a donnés, 795 étaient passables et ces 75 ont donné 
20 grammes de soie : c’est à coup sûr un rendement remar- 
quable. La bourre, que je mets aussi sous vos yeux (avec le 
cocon et la grége) me parait parfaitement utilisable en in- 
dustrie. 

De ce qui précède, je crois pouvoir dire que la grége de 
l’Aurota est facile à étirer, qu’elle est belle, solide et brillante, 
et qu'il y a lieu d'encourager la culture de cet Atfacus par- 
tout où croissent les Ricins dont il se nourrit. 

Âssurés que seront les sériciculteurs de l’Auwrota, de retirer 
de ses cocons une grége magnifique, l'éducation en grand de 
ce Bombyx deviendra, à coup sûr, une source réelle de grande 
richesse. Au Brésil particulièrement où la plante du Ricin 
croi spontanément et en toutes saisons, le Ver, trouvant con- 
slamment des feuilles pour se nourrir, donnera des récoltes 
continues. La main-d'œuvre qui est en cela un point capital, 
est, dans cet empire, très-peu élevée, presque nulle. Le séri- 
ciculteur y trouvera par cela même une très-large et très- 


206 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. TER 


encourageante rémunération. Pour le Brésil donc, particu- 
lièérement, la culture en grand de l’Awrota méritera tout 
spécialement l'attention, les efforts et les entreprises du gouver- 
nement, des baccologues et des industriels. Pour la France, 
dans nos provinces du Midi surtout, comme aussi pour les 
contrées où l'on peut cultiver le Ricin sur une certaine 
échelle, l'éducation de notre Awrota me paraît devoir être 
vivement poursuivie, de préférence à celle de l’Arreèndia. En 
effet, les cocons de l’Aurota sont plus gros, plus beaux, et 
contiennent plus de grége. La soie en est plus belle et s’étire 
plus facilement. Quoi de plus encourageant pour tenter avec 
persévérance, avec certitude de succès, une acclimatation qui 
s'offre si facile et si productive ? 

Je sais que depuis plusieurs années, de mes honorables 
collègues ont entrepris parmi nous la tâche dont je parle; 
que quelques-uns même ont déjà obtenu des résultats très- 
remarquables. Mais il y avait selon moi une irès-grande 
importance à insister encore sur cette acclimatation en France, 
et votre éminente Société acquerrait un nouveau lustre et 
un nouveau titre à la reconnaissance du pays, si elle persistait 
à l’encourager vigoureusement. 

Vous le voyez, messieurs, à l’aide de mon procédé et de mon 
appareil, j'ai obtenu des gréges de l’Affacus Aureta, comme 
j'en avais obtenu de tous les cocons que la Société a bien 
voulu me donner. Avec mon appareil, j'ai retiré des gréges de 
tous les cocons naturellement ouverts et des cocons dépail- 
£onnés dits de graine. Ces grêges ont reçu diverses teintures : 
elles ont été transformées en fils, cordonnets et étoffes. J’ai 
eu l’honneur de vous montrer en maintes fois de nom- 
breux échantillons. L'expérience de cet appareil que j'ai fait 
fonctionner publiquement le 3 octobre 1865, au Palais de 
l'Industrie, à Paris, lors de l’exposition des /nsectes utiles, est 
donc aussi complète que possible; il me paraît difficile de la 
pousser plus loin, à moins d’en faire l'application en grand 
dans l'industrie. Si cette application est restée encore le der- 
nier desideratum de cette queslion, c'est que j’ai tenu à me 
consacrer aux devoirs de ma profession comme à rester dans 


ai 


_ DÉVIDAGE DES COCONS DE L’ATTACUS AUROTA. 207 


le domaine de la science, c’est que mon ambition plus res- 
treinte et plus haute en même temps a consisté surtout, mes- 
sieurs, à solliciter et à mériter vos suffrages. 

Je termine, en ayant l’honneur de mettre sous vos yeux 
les gréges que J'ai retirées des cocons de l’Aurofa. Vous 
pouvez voir combien ces soies sont supérieures à celles de 
l’'Arrindia et combien elles se rapprochent de celles du 
Chêne, dont l'éclat a depuis longtemps fixé, avec juste raison, 
l'attention des sériciculteurs de tous les pays. 

Si J'avais des cocons en assez grande quantité, je pourrais 
compléter cette communication en vous soumettant des éto/fes 
faites avec la grége de l’Aurota. En attendant que je puisse 
m'en procurer, la Société peut user de moi pour telles autres 
expériences qu’elle désirera; je reste, messieurs, à votre 
entière disposition. 

H. FORGEMOL. 


Nota. J'ai reçu, il y a quelques semaines, la visite de M. de 
Capanema, délégué de la Société à Rio-de-Janeiro; je lui ai 
montré mes gréges, mes soies teintes, mes fils et mes étofles, 
et il a bien voulu me féliciter des résultats que j'avais obtenus. 
Les soies de l’Aurota surtout ont fixé son attention, et je ne 
doute pas que, de retour au Brésil, il ne cherche à y intro- 
duire et patronner la culture en grand du très-remarquable 
Bombyx dont nous venons de parler. 

— Dans le Bulletin de la Société, novembre 1875, Chronique 
d'Amérique, il est parlé de la Saturnia Aurota. J'y vois la 
confirmation de ce que je dis de son cocon et surtout du fil de 
la soie qu’on en relire. 

— Si je n’ai pas décrit, dans ma communication, les carac- 
tères entomologiques de l’A. Awrota, c’est que j'ai appris 
qu’un sayant membre de la Société, M. Maurice Girard, avait 
promis une note étendue sur ce Lépidoptère, notre collègue 
était certainement plus autorisé que moi et je me suis borné à 
la question du dévidage que, seule, je visais. 


Tr sr 


: RS +53 
208 SOCIÉTÉ D'ACCLIMA 


soumis à la condition pi des soies ,4 donnë les 
suivants, par lesquels je clos celle ninunetion : = 
383 885 mètres au kilogramme. ee * 
ESSAI AU SÉRINÈTRE. 


Ténacité. _ Allongement. 


80 grammes. 14,0 pour 100. 
65 — _. 13,8 — 
70 — 13,6 «— 
60 — 41,0 — 
70 — 12 
70 — 10,8 — 
h5.,— 12,0 — 
SO 16,0 — 
OU AD 
45  — 22,0 — 

645 grammes. 145,6 pour 160. 

Moyenne... 64,6 Moyenne... 14,5 


Observations de la dévideuse. — N° 2817. Grége sauvage. 
Se dévide bien; déchet très-peu ; nette; un peu de duvet. 


TR 


ÉDUCATIONS D'ATTACUS CYNTHIA 


FAITES AU CHATEAU DE CANENX (LANDES) EN 1873 


Par M. le vicomte Léon DE MILEW. 


Il y a si longtemps que je n’ai eu l'honneur de vous entre- 
tenir de mes éducations d'A. Cynthia que vous avez, sans 
aucun doute, oublié les résultats obtenus précédemment, et 
que je vais vous rappeler en peu de mots. 

En 1861, 1862, 1863, je plantais successivement dans le dé- 
partement des Landes, au château de Canenx, près de Mont- 
de-Marsan, 6 hectares d’Aïlantes. 

Sur l'affirmation que cet arbre vient dans les plus mauvais 
terrains, j'avais choisi des terres que mes métayers avaient 
abandonnées parce que, sauf le Pin maritime, rien n’y voulait 
pousser ; l’Ailante lui-même, si peu difficile, eut beaucoup de 
peine à s’habituer à cette terre si maigre, et végéta pendant 
plusieurs années sans faire de progrès. 

Quelques pieds, cependant, finissant par trouver une veine 
de terre qui leur convenait, prirent leur essor et formèrent 
des buissons magnifiques. 

Peu à peu, en les recepant tous les ans, ces buissons acqui- 
rent une telle vigueur et une telle extension qu’ils se rejoi- 


.gnirent, et que tout le champ fut enfin complétement garni. 


Mais ce fut fort long, et il fallut la foi que j'avais dans 
l'avenir qui attendait une soie aussi précieuse que celle de 
l’A.Cyntha, pour persévérer et ne pas arracher tous les Vernis . 
et les remplacer par des Pins dont le succès était certain. 

Avant que mes Aïlantes n’aient pris le développement qu’ils 
ont aujourd'hui, j'avais hâte de commencer l'élevage de 
VA. Cynthia en plein air, et mes plantations n’étant pas encore 
en état de les nourrir, j’eus la bonne fortune de trouver à 
1 kilomètre de Mont-de-Marsan une superbe plantation de 
Vernis poussant sur un talus formant la clôture d’un champ 


et bordant une grande route irès-fréquentée. 
3° SÉRIE, T. L. — Mars 1874. 14 


hou, #64 TR CE Le 


NES RES NE TON PORN Pa 
E KE r ré 


x 


910 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. it Ai 


Le voisinage de cette route était fort avantageux pour frap- 
per les yeux des passants étonnés de voir élever en plein air 
des Vers à soie, ce qui ne s'était jamais vu. 

Aussi l’affluence fut-elle grande, lorsque j’eus déposé sur 
cette haie de Vernis, longue de près de 400 mètres et large 
de 3, une immense quantité de jeunes Vers. 

Noire honorable collègue, M. Guérin-Méneville, à qui je 
suis heureux de témoigner ici toute ma reconnaissance pour 
l'obligeance qu'il a mise à encourager mes premiers essais 
en me facilitant les moyens de mener à bonne fin mes éduca- 
tions, vint à cette époque dans le Midi, visita cet élevage en 
plein air, et parut émerveillé du résultat. 

Une médaille de bronze que notre Société me décerna vint 
ensuite récompenser mes efforts. 

Je continuai ainsi pendant trois ans l'élevage d'A. Cyn- 
thia, sans avoir éprouvé une déception. 

Il y avait certainement des pertes, très-considérables même, 
mais ] opérais sur une si grande échelle que ces pertes deve- 
naient insignifiantes ; notre climat du Midi me permettait de 
faire deux éducations, la première commencée fin mai et ter- 
minée au commencement de juillet, la seconde commencée au 
milieu d'août et finie au commencement d'octobre. C'est la 
faute que je commis d’abord, et que l'expérience m’a appris à 
ne plus commettre. 

Dans notre région du S.-0., il arrive fréquemment que des 


gelées hâtives viennent au commencement d'octobre geler 


toutes les plantes fragiles, c’est ce qui arriva pour les feuilles 
de Vernis qui ne résistent pas à la première gelée blanche. 

Le 6 octobre 1866, une gelée vint dans la nuit détruire 
toutes les feuilles d’Aiïlantes couvertes de Vers prêts à faire 
leurs cocons. 

Les Vers ne trouvant plus de nourriture périrent jusqu’au 
dernier. 

L'année suivante, je n’eus pourcommencer mes éducations 
que le peu de graine fournie par les cocons qui n'avaient pas 
laissé échapper les papillons pour la seconde éducation de 
l’année précédente. 


ÉpucaTrons DE L'ATTACUS CYNTHIA. 211 

ombre de Vers étant moins considérable, les pertes 

furent plus sensibles et, bien qu’en laissant les cocons dans un 

endroit frais, afin de retarder le plus possible la sortie des pa- 

pillons et de ne faire qu'une éducation, j'eus néanmoins une 

certaine quantité de graine éclose trop tard pour faire utile- 
ment une seconde récolte de cocons. 

Cet échec ne me découragea pas, mais je cessai néanmoins 
l'élevage de l'A. Cynthia, parce que je ne trouvais plus de dé- 
bouché pour la vente des cocons, depuis que la société l’A- 
lantine avait cessé d’exister. 

Cependant, comme j'avais honneur, messieurs, de vous le 
dire tout à l'heure, j'avais une telle foi dans l'avenir du Ver à 
soie de l’Ailante que je donnai tous mes soins à mes planta- 
tions, persuadé que dans un temps plus ou moins prochain je 
pourrais les utiliser. 

Ce moment est venu, et aujourd’hui que les cocons du 
Cynthia se vendent facilement, Jai recommencé l'éducation 
de ce précieux Ver. 

-Grâce à l’obligeance de M. Usébe à qui j'avais donné de la 
graine, il ya quelques années, et qui suivant mes conseils a 
créé une très-belle plantation sur laquelle il fait des élevages 
três-remarquables, et qui lui ont valu de la part de la Société 
une magnifique récompense, une médaille d’or; grâce à 
M. Usèbe, dis-je, J'ai pu cette année recommencer mes édu- 
cations. 

Mais cette fois, éclairé par l’expérience, je résolus de n’en 
faire qu'une, et je ne mis les Vers qu'au commencement 
d'août sur mes plantations. 

M. Usèbe m'avait envoyé 90 grammes d’œufs dont sont 
sortis A6 600 Vers. 

Les jeunes Vers, mis aussitôt après leur naissance sur les 
Vernis, finirent leurs cocons au milieu de septembre. 

L'éducation complétement terminée donnait 5900 cocons, 
que je renfermai dans un endroit frais et à l’abri de la gelée 
pour commencer l’année prochaine une três-crande éducation. 
Au commencement de novembre, cinq papillons sont sortis et 
ce fut tout. J’estime donc que la perte est des 7/8 puisque 90 


212 SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


grammes ont donné A6 600 Vers et que je n’ai récolté que 

9900 cocons. 

Dans l’éducation de VA. Cynthia, un point três-important, 
et que l’expérience seule peut apprendre, c’est de savoir d’une 
manière précise quelle sera la quantité de nourriture qu’ab- 
sorberont tant de grammes d'œufs. 

Ainsi les 5900 Vers provenant des 90 grammes d'œufs fé- 
condés que je possédais se sont nourris sur une étendue de 
trois ares, ce qui donnerait à l’hectare la quantité énorme de 
près de 200 000 Chenilles. [l faudrait donc déposer sur un 
hectare 3 kilogrammes de graines ou 1553 000 Vers, je 
néglige les fractions, pour obtenir 209 000 cocons. 

Or, comme il faut en moyenne 200 cocons pleins pour un 
demi-kilogramme, un hectare rapporterait, déduction faite des 
pertes, près de 500 kilogrammes ou 1000 francs bruts, puisque 
le kilog. de cocons pleins se vend 2? francs. 

En mettant 500 fr. de frais pour intérèt de l’argent, main- 
d'œuvre etc., ce qui est exorbitant et bien au delà du prix 
réel de la main-d'œuvre dans la plupart de nos départements 
à l’exception des environs de Paris, un hectare peut rapporter 
500 fr. nets. 

Quelle est la culture donnant un prix aussi rémunérateur? 
N'est-ce pas admirable, surtout quand on songe qu’un pareil 
bénéfice s'obtient dans les plus mauvais terrains. 

_ Les meilleures terres fromentales donnent 15 à 17 hectoli- 
tres à l'hectare; à 27 fr. l'hectolitre, l’hectare rapporte de 
h05 à 459 fr. bruts dans les bonnes années. 

Mais il ne faut pas se dissimuler que pour réussir d’une 
manière certaine, il ne faut faire l'éducation en plein air 
qu'avec une quantité considérable de jeunes Vers, je ne sau- 
rais trop insister sur ce point. 

Les ennemis de ces Chenilles sont innombrables : les Four- 
mis, la Guëêpe, le Frélon, la Sauterelle etc. et, lorsque les Vers 
sont gros, la Mésange à tête noire font éprouver des pertes 
incessantes. 

Je me suis bien trouvé de placer de distance en distance, des 
bouteilles à large orifice contenant de l’eau fortement miellée, 


2 


— 


200 : 


ÉDUCATIONS DE L'ATTACUS CYNTHIA. 213 


au bout de peu de jours, ces bouteilles étaient pleines de 
Fourmis, de Frélons, etc. etc. 

Quant à la Mésange, le fusil est le seul remède, mais c’est 
un remède quifaitsouvent plus de mal que de bien, les plombs 
qui n’ont pas touché l’oiseau frappent les Vers ou déchirent 
les feuilles et brisent les rameaux. 

Et pourtant la Mésange est le plus cruel fléau qu’un séri- 
ciculteur puisse redouter puisque non-seulement elle mange 
les Vers quand ils sont gros, mais encore elle perce les cocons 
pour aller y chercher la chrysalide. 

Je termine, messieurs, en vous citant un fait qui prouve 
une fois de plus que l'A. Cynthia se nourrit de plusieurs 
autres feuilles que celles de l’Aïlante. 

Dans mes rapports précédents, Je vous avais déjà dit que 
j'avais élevé des Vers avec la feuille du Châtaignier, avec celle 
de l'Acacia. 

Une haie d'Épine borde d’un côté la plantation sur laquelle 
javais fait mon éducation et, bien que les Vernis fussent 
abondamment garnis de feuilles, les Vers les quittaient souvent 
pour manger celles de la haie. 

Je dois avouer pour dire toute la vérité, que cette nourriture 
ne paraissait pas leur profiter beaucoup, ils ne grossissaient 
pas ; mais en cas de disette de feuilles d’Aïlante, il est toujours 
bon de savoir que les feuilles de l’Épine peuvent prolonger la 
vie de cet insecte si utile. 

L'année prochaine, messieurs, J'aurai l'honneur de vous 
rendre compte du résultat de mes travaux, puissent-ils être 
dignes de vous être présentés. 


-— 10 


I. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ. 


NOTE 
SUR 
LE SILPHION (PLANTE DE LA CYRÉNAÏQUE) 


Et sur les avantages qu'il Y aurait à acelimater celte plante, 


Par M. LAVAE, 


Médecin-major. 


Envoyé dans la régence de Tripoh de Barbarie pendant 


l'épidémie de peste de 1859 à 1860, je songeai à rechercher 
dans la Pentapole Gyrénaïque la plante que les voyageurs 


modernes, depuis della Cella (1817) jusqu’à Rholfs (1869), 
s'accordent à reconnaître comme étant le Si/phion des Grecs 
ou le Laserpitium des auteurs latins. 

D’après Théophraste, Dioscorides, Pline, etc., l’usage des 
sucs de Silphion remonterait aux temps mythologiques, à 


Aristée, mais ces sucs ne commencèrent à se répandre en 
Grèce qu'après la fondation de Gyrènc (600 ans environ 


avant J.-C.) au centre de la contrée où croissait cette plante. 

Les monnaies de ce pays portent gravée l’image du Sil- 
phion, en reconnaissance de la prospérité qu’il apporta à la 
Cyrénaïque malgré les vicissitudes amenées par les guerres et 
les révolutions de ces temps troublés. 

Les Romains, devenus maîtres de la Cyrénaïque, s’empa- 
rérent de tout le Silphion qu'elle produisait, et l’histoire nous. 
apprend que celte substance fut vendue au poids de l'or, lors- 
que le trésor public était vide. — A cause de lavidité de ces 
conquérants, on épuisa la plante; les racines, incisées trop 
fréquemment, furent rendues improductives pour plusieurs 
années. — Au dire de Pline, les habitants de la Cyrénaïque 
détruisirent eux-mêmes le Silphion, afin d'échapper aux exac- 
tions dont l'impôt sur le Laser (suc de Silphion) les faisait 
accabler. 


= 


NOTE SUR LE SILPHION. 245 


Oribaze, médecin de l’empereur Julien, estle dernier au- 
teur qui ait décrit, d’après sa pratique, les applications mé- 
dicales du Silphion; mais cette plante n’avait jamais disparu 
de la Uyrénaique, comme le prouve l'envoi du sue de Silphion, 
que Synésius, évêque de Gyrène, fit à l’un de ses amis. 

Le tableau que cet évêque fait des misères de la contrée 
explique l'oubli dans lequel tomba le Silphion. Abandonnés 
des légions rappelées par les empereurs, les habitants sé- 
dentaires ne furent plus en état de contenir les nomades, re- 
foulés autrefois dans les montagnes de l’Haroudjé noir et 
dans le Sahara. La population des campagnes se réfugia dans 
les villes; les canaux et les aqueducs, non entretenus, cessé- 
rent de répandre l’eau des sources sur une grande étendue : 
les famines survinrent, comme aujourd’hui, presque periodi- 
quement, et ce pays florissant devint une solitude, appelée le 
désert de Barka, fournissant à peine à la vie misérable de 
quelques nomades. 

La conquête musulmane passa sur la Cyrénaique ruimée 
sans s’y arrêter ; le nom en fut même oublié : les géographes 
arabes parlent du Dyebel akhdar (montagnes vertes), nom 


qu'ils donnent à la Cyrénaïque, comme d’une contrée dépeu- 


plée, mais possédant des arbres précieux, des pâturages et de 
nombreuses sources. L’invasion vint encore rompre tout lien 
scientifique entre les peuples soumis à l’islamisme et les Grecs 
du moyen âge ; aussi les commentateurs des médecins anciens 
ne surent-ils plus à quelle plante il fallait rapporter les qua- 
lités attribuées au Silphion. Les uns, parmi lesquels Kaempfer 
et Linné, dirent que le Silphion devait être l’Asa fœtida ; 
d’autres, comme Mathiole, etc., pensaient que la gomme-ré- 
sine de ce nom ne pouvait avoir aucune ressemblance avec le 
suc du Silphion, doué d’une odeur balsamique et dont l'usage 
était multiple, tant en hygiène qu’en médecine, puisqu'il ser- 
vait de condiment destiné à augmenter la saveur et les qua- 
lités nutritives des aliments. 

Les dissertations passionnées qui eurent lieu au xvrI et au 
xvIn° siècle sur ce sujet ne résolurent rien. Sprengel, après 
avoir résumé ces opinions diverses dans son histoire des plan- 


4 


216 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


tes, trouve dans la Ferula tingitana et dans la Ferula persica 
quelques-uns des caractères botaniques du Silphion, et con- 
clut à l'identité des deux plantes. 

En 1517, della Cella compara, en Cyrénaïque, l’'Ombellifére 
qui croît en abondance dans le pays, avec l'image empreinte 
sur les monnaies anciennes que lui apportaient les Arabes. Il 
sut par les indigènes que cette plante, sans usage à eux connu, 
était appelée Derias. Néanmoins, frappé par la ressemblance 
qui existe entre la plante et les empreintes monétaires, il finit 
par être convaincu que le Drrias était bien le Silphion des 
monnaies : il apporla donc quelques spécimens de Dirias 
au naturaliste Viviani, qui les classa parmi les Thapsiées 
(Thapsia Silphium). A la suite de della Cella, le général Minu- 
toli et le docteur Ehrenberg, ainsi que Pacho et notre consul à 
Benghazi, M. Courville, enfin Barth et Hamilton, qui tous 
traversèrent la Cyrénaïque, partagérent l’opinion de della 
Cella; mais aucun de ces voyageurs ne recueillit le suc du 
Silphion, ni ne chercha à se rendre compte de l’action de 
cette plante sur l’économie. 

Envoyé, comme je Vai dit, en Tripolitaine pendant une épi- 
démie de peste, je restai une année environ après la dispa- 
rition du fléau, désirant rechercher et étudier la plante si 
célèbre dans l’antiquité. Je m’assurai d’abord, comme mes 
devanciers, que le Dirias était bien la plante représentée sur 
les monnaies d’or et d'argent, que je me procurai assez facile- 
ment. Queiques-unes de ces monnaies conservent l’empreinte 
de la souche : ce sont les plus pures comme dessin, d’autres 
ne portent que la tige ou rameau floral, formée par des arti- 
culations montrant à chaque nœud une feuille amplexicaule 
et une ombelle solitaire. La hampe se termine par une grande 
ombelle entièrement sphérique. 

De plus, les caractères botaniques décrits par Théophraste se 
rapportentexactement à ceux du Dirias des plateaux cyrénéens. 
Les racines, nombreuses et charnues, naissant autour du ren- 
flement ou souche et se dirigeant horizontalement, la forme 
et la couleur des feuilles, leur mode de dessiccation avant et 
pendant la période de floraison, mais surtout les limites entre 


NOTE SUR LE SILPHION. 217 


Fesquelles on trouve encore le Silphion sont autant de traits 
communs à la description faite par Théophraste et à celle que 
J'ai donnée en ayant la plante sous les yeux, description dé- 
taïllée dans divers mémoires envoyés à des sociétés médicales. 

Les écrivains anciens rapportent que le Silphion n'existait 
que dans une étendue de 4000 stades, selon les uns, ou même 
de 1000 stades, selon Strabon, et croissait dans un terrain 
pierreux, quoique fertile. Or, en partant de Benghazi pour se 
rendre à Cyrène, on trouve les premiers pieds de Silphion à 
partir d’un coteau appelé Maraoua, qui forme une des limites 
occidentales du plateau le plus élevé de l’ancienne Cyrénaï- 
que. Tous les gens qui parcourent le littoral barbaresque, les 
smarabouts marocains et les Algériens appartenant à la secte 
de Sid-es-Snoussi, s'accordent à dire que le Drrias ne se ren- 
contre pas dans les pays voisins 'et qu'il est le propre du 
Djebel akhdar.— Ce coteau, situé à 100 kilom. sud-ouest de 
€Cyrène, peut être considéré comme l'angle S-0 d’un quadri- 
latère dont le cap Hamama (anciennement cap Phykus) for- 
merait la pointe nord sur le même côté, et qui aurait environ 
25 kilom., tandis que le côté de l’est commencerait au cap 
Raz-et-Tin (ou cap Chersonëèse) pour se diriger directement 
au sud, sur une longueur de 20 kilom. Comme le cap Raz- 
et-Tin se trouve à environ 120 kilom. de Cyrène, on peut 
considérer cette ville comme le centre de la production du 
Silphion, qui n'existe que sur cette surface ayant 200 kilom. 
en longueur et 20 à 25 kilom. en allant de la côte vers l’in- 
&érieur. Ces chiffres répondent aux 1000 stades de Strabon, 
si l’on considère seulement la longueur, et se rapportent aux 
#000 stades de Théophraste, etc., en les appliquant à l’éten- 
due occupée par le Silphicn. 

Il ne faut pas chercher dans la nature du sol, à peu près 
partout argilo-calcaire et variant quant à l'altitude de 0 mé- 
tre à 1200 mètres, la cause de l'espèce de restriction mise 
par la nature à l'extension du Silphion : un insecte de l’ordre 
des Hémiptères, dont j'ai remis plusieurs échantillons à M. le 
professeur P. Gervais, détruit annuellement toutes les graines 
du Thapsia Silphium, et en rend la reproduction impossible 


218 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


par la graine. Par contre, les bourgeons du corps et des ra- 
meaux de la racine multiplient cette plante au point qu’elle a 
envahi chaque portion du sol arable. Il y a des espaces de 
terrain, enclavés dans des roches quartzeuses et couverts de 
terre végétale, où le Silphion ne croît pas, ses racines n’avant 
pu y pénétrer. — On comprend ainsi que les quelques pieds 
existant au temps de Pline aient suffi pour reproduire le Sil- 
phion dans les siècles suivants. 

Mais l’identité se montre encore davantage, si l’on rapproche 
les sucs qu'on reurait du Silphion dans l'antiquité, de ceux 
que j'obtiens par les procédés dont j'ai donné les détails dans 
les mémoires précités. 

Toutes les parties de la plante fournissaient, au dire des 
anciens, un sucappelé Rliz1as pour celui des racines et Cau- 
lias pour celui des tiges; ce dernier suc était moins âcre que 
celui des racines. Selon Galien, on employait surtout à l’in- 
térieur le suc de la tige non encore parvenue à sa maturité, et 
les feuilles, les tiges, les racines mêmes des jeunes plantes, en- 
traient dans l'alimentation : j'ai fait cuire des tiges de Silphion 
sous la cendre, et elles m'ont paru d’un goût sucré et parfumé. 

Toute section praliquée sur les couches corticales des ra- 
eines, sur les tiges, sur les feuilles, les fleurs ou sur les se- 
mences est aussitôt suivie de l'issue d’un suc laiteux qui 
s’épaissit rapidement en formant une gouttelette d’un Jaune 
orangé. — C'est à l’aide de ce suc que je commençai mes 
expériences. Pris sur une plante pleinement développée, il 
est vésicant et ne pourrait être donné à l'intérieur, tandis que 
si on le recueille dans les feuilles ou dans les tiges avant la 
floraison, il ne produit pas d’action corrosive. Nous savons 
seulement que les anciens le mélangeaient à la farine et le 
soumettaient à la cuisson, afin de le conserver et d’affablir 
ses propriélés irritantes. 

J'ai trouvé que. les sucs ou gomme-résine du Silphion 
étaient composés de deux principes, l’un vésicant et pouvant 
être employé à ce titre, pour produire une action révulsive 
analogue à celle de la racine de Thapsia garganica ou de 
l’huile de Croton tiglium. 


NOTE SUR LE SILPHION. 219 


L'autre principe possède des propriétés essentiellement ré- 
solutives, c’est-à-dire qu'il détermine, par son contact avec 
les parties enflammées, l’apaisement des symptômes inflam- 
matoires et provoque les phénomènes liés à la terminaison 
par résolution. On comprend qu’une telle propriété rende 
les extraits de Silphion susceptibles de nombreuses applica- 
tions : inflammation entre, en effet, comme lésion principale 
ou comme complication dans le plus grand nombre des états 
morbides. 

J'ai trouvé le moyen d’enlever entièrement la propriété 
vésicante, de sorte que ce suc a pu être ingéré à doses suffi- 
santes pour produire dans les viscères enflammés les phéno- 
mèênes de résolution que j'avais observés dans les applications 
à l'extérieur, sur les teguments enflammés. 

Après avoir vu des phlegmasies simples (pneumonies, an- 
gines catarrhales, bronchites), traitées par le Silphion, de- 
puis quarante-huit heures, entrer dans la phase de résolution 
bien avant l’époque probable indiquée par lexpérience de 
ces maladies, j'ai cherché à combattre dans les phthisies 
pulmonaires les complications phlegmasiques développées 
autour des tubercules. 

Au bout d’un mois, en moyenne, ce médicament, employé 
au début de la tuberculisation, ne laisse plus subsister dans 
le poumon malade aucun signe stéthoscopique imdiquant la 
persistance des granulations ; de sorte que j'ai dù admettre 
le guérison du tubercule lui-même, sans que cette prétendue 
néoplasie eût parcouru une évolution conduisant nécessaire- 
ment au ramollissement et à l’ulcération, puisque je la voyais 
rétrocéder et disparaitre, tout comme la lésion d’une phleg- 
masie commençante, après que sa présence sous forme de 
tubercule cru ou au premier degré avait été constatée. 

Quant aux tubercules déjà en voie de ramollissement ou 
d'évacuation, au moment où le phthisique commençait à pren- 
dre du Silphion, ils ont abouti à une réparation en apparence 
complète, dans les cas où la destruction du tissu pulmonaire 
consistait en cavernules intéressant un seul lobe, ou dissémi- 
nées en nombre restreint dans le reste de l'organe respiratoire. 


290: SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Cette action du Silphion sur les tubercules à forme chronique 
est pour moi hors de doute, mais elle peut être plus rapide- 
ment appréciée dans la tuberculose aiguë et dans la méningite 
de même nature, maladies dont les symptômes répondant à 
la multiplicité ou à l'importance des organes envahis appel- 
lent l'attention des médecins sur les granulations encore à 
l’état de crudité. 

L'observation clinique a déjà établi la vérité des faits que 
je cherche à répandre: M. le docteur Chartier, médecin en 
chef de hôpital militaire de Valenciennes, ayant bien voulu 
employer le Silphion chez les phthisiques dont le diagnostic 
était constaté par lui et les autres médecins de la garnison, 
m'a remis quatorze observations qui confirment celles que 
J'avais réunies. Quatre phthisiques ont été traités jusqu'à gué- 
rison, et les autres ont pu être envoyés en convalescence, 
après être arrivés à un état d'amélioration suffisant pour 
faire espérer que le même résultat serait obtenu par un usage 
prolongé du Silphion, dont je leur avais remis une quantité 
suffisante avant leur départ. 

Ayant épuisé la provision que j'avais apportée lors de mon 
premier voyage, je retournai, il y a deux ans, dans la Cyré- 
naïque, afin d’y recueillir une nouvelle quantité de la plante 
en question, ainsi que des graines que j'étais parvenu à pré- 
server de l’insecte destructeur. J’engageai aussi des com- 
merçants de Benghazi à expédier le Silphion en France. 

En supposant que la gomme-résine du Silphion possède les 
qualités que je lui attribue, il est à craindre que l’on ne puisse 
dans quelques années s’en procurer une quantité suffisante 
pour les besoins des malades, quel que soit d’ailleurs le prix 
qu'on y puisse mettre. 

La Cyrénaïque n’a plus d'habitants auxquels 1l soit possible 
de demander du Silphion. L'accès de cette contrée est au- 
jourd’hui beaucoup plus difficile qu’à l’époque où une popu- 
lation industrieuse récoltait le Laser. Il y aurait donc utilité à 
apporter et à répandre, s’il est possible, cette plante dans un 
pays en relations faciles avec l'Europe. 

J'ai l'intention de tenter, pour la troisième fois, l’acclima- 


Fr TT 


NOTE SUR LE SILPHION. 221 


tation du Silphion, que je n'ai pu accomplir au retour de mes 
deux premiers voyages, à cause du peu de ressources dont je 
pouvais disposer. Les conditions de climat et de protection 
nécessaires à la conservation du Silphion semblent se trouver 
réunies en Algérie, comme en Provence. 

Je terminerai cet exposé de mes recherches en demandant 
à la Société d’acclimatation de vouloir bien me faire attacher, 
en qualité de médecin militaire, au consulat général de France 
à Tripoli de Barbarie, dans la dépendance duquel se trouve 
placée la Cyrénaïque.— Cette situation me donnerait les 
moyens d'être dans le pays, avant l’époque où les semences 
arrivent à maturité. 

S1 j'obtiens cette mission scientifique, je pourrai envoyer 
du Silphion en quantité telle, qu'il soit possible d’en fournir 
aux malades de l'assistance publique et de l’armée. 

J’expédierai aussi des souches et des semences de la plante, 
ayant la presque certitude que son acclimatation est possible, 
puisque je l'ai vue se reproduire dans une caisse où je l'avais 
renfermée. 


III. EXTRAITS DES PROCES-VERBAUX 


DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 6 MARS 1874, 
Présidence de M. DROUYN DE LHUYS, président. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté, après une rectification de M. le docteur Boisduval. 

— M. le Président fait connaître les noms des membres 
récemment admis. 


MM. Présentateurs. 

Drouyn de Lhuys. 

je Geoffroy Saint-Hilaire 
L larg de Selve. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Maurice Girard. 
Raveret-Wattel. 
Carbonnier. 

Comte d'Eprémesnil. 

Arthur Touchard. 

L'AILLOT (Réné), propriétaire, ancien adjoint au { A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
maire de la ville de Strasbourg, rue Vézelay, { Picquart. 

41, à Paris. Henri Ravisv. 

Comte d’Éprémesnil. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Alfred Renaud. 


CHEVALIER (Émile), membre du Conseil muni- Drouyn de Lhuys. 
cipal de la ville de Paris, directeur du journal 
la Chasse illustrée, 19, rue de Lourmel, à 
Paris. 


ALLEZ (Émile), au château de Bel-Ébat, par la | 
Ferté.-Alais, et à Paris, quai de Gèvres. 


BARUTEL (E.), château de Lavelanet, près Ville- 
franche de Lauraguais (Haute-Garonne). 


CarFIN (Amédée), propriétaire, rue du Fau- 
bourg-Poissonnière, 47, à Paris. 


change, rue de Londres, à Paris. 


s. Geoffroy Saint-Hilaire. 
C. Millet. 


Deyrolle fils. 

Comte d’Éprémesnil. 

à Geoffroy Saint-Hilaire. 
. Ch. Chevalier. 

: Geoffroy Saint-Hilaire. 

\ À. Rivière. 

Drouyn de Lhuys. 

À. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Saint-Yves Ménard. 


CARENET (Maurice-Édouard), associé d’agent d | 

CORRENSON (H.), à Saint-André-des-Ramiers, 
par Sablet, près Louvèze (Vaucluse). 

Courcyx (le vicomte Max de), rue de Verneuil, 
45, à Paris. 


DEsTors (Alexandre), rue Laflitte, 13, et au Til- 
lay, par Gonesse (Seine-et-Oise). 


PROCÈÉS-VERBAUX. S 293 


Dipor (Alfred-Firmin), éditeur, directeur-gé- Comte d’Éprémesnil. 
rant du journal la Chasse illustrée, rue de! A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Varennes, 64, à Paris. | Marquis de Sinéty. 

Édouard André. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Raveret-Wattel. 


À Lee LE Adrien André. 
ESTIENNE (Louis-Philippe), propriétaire, r [ 
ppe)>ARPARRERISE Ÿ larme André. 


d’Aumale, 3, à Paris. 
Jules Bocquet. 


{4 Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 
| Eâgar Roger. 
HÉRICART DE THurY (Henri), capitaine au eus de Lhuys. 
| 


DougLar (Alfred), propriétaire, rue de Rivoli, 
244, à Paris. | 


GUILHOU (Ernest), propriétaire, avenue de Paris, 
53, à Versailles (Seine-et-Oise). 


régiment d'artillerie, rue Delcambre, 8, à G. de Brossard. 
Douai (Nord). A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Héricourr (Edgar d’), rue de Berry, 47, etf A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
au château de Théribus, par Fresneau-Mont-! Fouquier de Mazières. 
Arthur Touchard. 
Jules Grisard. 
Ponsard. 
Raveret-Wattel. 
( Comte d'Éprémesnil. 
A Geoffroy Saint-Hilaire. 
Marquis de Sinéty. 
pans Grisard. 
Jacques Lefebvre, 
lRaseret: Wattel. 
LEFEBVRE DE VIÉFVILLE (Paul), substitut du pro- Adrien Chevailier. 


chevreuil (Oise). 


Hussox (Charles), propriétaire, rue Malesherbes, 
6, à Paris. 


Huyor (Jules), graveur, rue des Saint-Pères, 34, 
à Paris. 


JOUENNE (Louis-Séverin-Athanase), avenue de 
Neuilly, 170, à Neuilly (Seine). 


cureur de la République, rue Taitbout, 51, à { A. Geoffroy-St-Hilaire. 
Paris. Baron de Romeuf. 
Drougn de Lhuys. 
Comte d’Éprémesnil. 
À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Mirronis (Fernand de), employé à la Caisse des { Drouyn de Lhuys. 
dépôts et consignations, rue du Petit-Chemin, 4 À. Geoffroy Saint- Hilaire. 
15, à Sceaux (Seine). Jules Grisard. 
Drouyn de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
David de Mayrena. 
{ Drouyn de Lhuys. 
Comte d'Éprémesnil. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
MurET (Henri), place Lu Théâtre-Francais, | re Saint-Hilaire. 


à Paris. | raveret-Wattel. 


MALLET (le baron Alphonse), rue Caumartin, | 
64, à Paris. 


MizLoN (Claude), ancien député, au château de 
Merchines, par Vaubecourt (Meuse). 


MONTPENSIER (S. A.R. Monseigneur le duc de), 
boulevard Suchet, ancien 44 bis, à Paris. 


DD SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Drouyn de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 
Prorry (le professeur), membre de l’Académie / Comte d’Éprémesnil.… 
de médecine, rue de Ja Chaussée-d’Antin, 15, ? A. Geoffroy Saint-Hilaire- 
à Paris. Marquis de Sinély. 
Drouyn de Lhuys. 
Comte d'Éprémesnil. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire 
Bénion. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Henri Marie. 
Saint-Yves Ménard. 
£ RSA MES ae ae Bénion. 
a an propriétaire, rue de Frévise, [N° Geoffroy San EE 
Ê (samt-vves Ménard. 


NoBLET, docteur-médecin, agriculteur, à Chà- 
teau-Renard (Loiret). 


Bourgeois, 8, à Paris. 


XHEM (Edmond), propriétaire, rue Pigalle, 59, 
à Paris. 


SCHMITT (Frédéric), négociant, rue de Charonne, 


| 
QUENEDEY (Émile), négociant, rue des en 
20, à Paris. | 


— M. le Secrétaire procède au dépouillement de ia corres- 
pondance. 


— M. Persac adresse des remerciments pour sa récente 
admission. 

— MM. Barutel, Bergis, Brette, de Coutans, Gaullier, de 
Givry, Hesse, Mansbendel, abbé Maupied, docteur Milhaud, 
Nicolas, ainsi que la Société d’horticuliure et d’acclimatation 
de Tarn-et-Garonne, et la Société d'agriculture de Tonnerre 
demandent à prendre part aux cheptels de la Société. — Ren- 
voi à la commission spéciale. 

— M. le Consul général de France à Trieste fait parvenir 
une réponse au questionnaire qui lui à été adressé par la 
Société, dans le courant de l’année dernière, sur les produe- 
tions du pays. 

— M.le Gouverneur de la Guyane française écrit à M. Geof- 
froy Saint-Hilaire : « Jai l'honneur de vous annoncer l'envoi, 
par la frégate /a Cérès, de trois Hoccos et d’un Maraiïl, pour 
le Jardin d’acclimatation. Ces oiseaux, renfermés dans une 
grande cage, à grillage en fer, ont été spécialement recom- 
mandés à l'attention du commandant du bâtiment, M. Duerest 
de Villeneuve, capitaine de frégate. Comme il serait dange- 
reux de les faire voyager par petite vitesse, ils vous seronë 


|: 
FN TE 


PROCÈS-VERBAUX. 295 


expédiés, dès leur arrivée à Toulon, vers la fin de mars, par 


grande vitesse. 

» Je n’ai pas perdu de vue le désir que vous m'avez ex- 
primé, dans une de vos dernières lettres, d’avoir, pour le 
Jardin zoologique d'acclimatation, deux Tapirs ; mais, malgré 
les recherches que j'ai fait faire et les récompenses promises 
à ceux qui me les apporteraient, je n’ai pu encore me pro- 
curer ces deux animaux. Ils sont d’ailleurs très-difficiles à 
saisir vivants, à moins qu'ils ne soient très-jeunes, et, dans ce 
cas, leur alimentation exige des soins extrêmes. Je conserve, 
néanmoins, l'espoir d’être à même, un jour, de satisfaire à 
votre demande. 

» M. Prud’homme, mon secrétaire, possède une collection 
de Tortues d’eau douce, présentant plusieurs variétés. Il 
serait tout disposé à en faire hommage au Jardin d’acclima- 
tation, si cela peut vous être agréable. » 

— M. J. M. Cornély adresse un rapport sur divers essais 
d’acclimatation d'animaux tentés par lui dans son domaine de 
Beaujardin, à Tours : — «Je mets, dit-il, sous les auspices de 
la Société d'acclimatalion ces quelques notes prises au jour le 


jour. Puissent-elles encourager d’autres à entrer dans la voie 


de la domestication des animaux, et ne-pas décourager ceux 
qui y sont entrés, par l'exemple de la non-réussite, laquelle 
n’est souvent qu’une affaire de climat ou de terrain. Succès et 
insuccès, j'ai fidèlement tout rapporté. L'espace restreint de 
8 hectares dont je dispose est cause que plusieurs animaux 
n'ont pu réussir. » (Voyez au Bulletin, page 161.) 

— M. Ch. de la Brosse Flavigny fait parvenir un nouveau 
rapport sur son cheptel d’Agoutis. 

— M. Delaurier aîné, d'Angoulême, écrit en date du 24 fé- 
vrier : « Mes Perruches de la Nouvelle-Zélande (P/atycercus 
Novæ-Zelandiæ) ont en ce moment des œufs qu’elles couvent 
avec assiduité. » 

— M. Turrel écrit de Toulon : « Le bassin de notre Jardin 
vient de s'enrichir de deux Gouramis ayant depuis deux ans 
supporté le climat de notre Provence, dans des conditions qui 


me semblent mériter d’être mentionnées. Mais avant d’entrer 
3e SÉRIE, T. |. — Mars 1874, 15 


A DD 


RE 


296 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


dans le détail de cette introduction, je me demande si les 
poissons dont il va être question sont bien des Gouramis. 
Comme forme, ils ressemblent aux Gyprins ; comme dimension, 
ils ont à peu près 15 centimètres de longueur ; la couleur est 
bronze cuivré très-brillant. Voici l'historique de leur intro- 
duction, telle qu’elle m’a été racontée. 

» En 1872, M. Daniel, capitaine en 2° des Messageries mari- 
times, rapporta de Singapoore, à la Ciotat (Bouches-du-Rhône) 
près de 200 pelits Gouramis, dont A seulement survécurent. 
Ceux-ci furent placés dans un bassin non maçonné ayant 
2 mètres de profondeur, et sur le fond vaseux duquel des herbes 
aquatiques se développent. Dans cette pièce d’eau, les 4 pois- 
sons introduits ont passé deux hivers, plongeant au plus pro- 
fond de l'eau pour éviter les atteintes du froid, mais cepen- 
dant supportant dans ces conditions au moins A degrés de 
température. 

» Deux de ces poissons m'ont été donnés par un ami de 
M. Dauveld qui a obtenu de les recueillir danse bassin. Je les 
ai reçus le 13 février et les ai placés immédiatement dans le 
bassin de notre Jardin, peu profond, peu étendu, mais placé 
à exposition du midi et protégé contre le rayonnement par 
une rocaille en forme de grotte. » 

— M. Hignet, de Varsovie, demande quelques échantillons 
de graines de Ver à soie, de diverses provenances, et ajoute: 
« Je ne suis pas mécontent du résultat des éducations entre- 
prises avec ma graine, elles prouvent ce que je vous ai tou- 
jours dit: que nous n'avions pas en Pologne la maladie des 
Vers à soie qui sévit chez vous. Je ne sais si cette absence de 
maladie tient à la graine, au climat ou à la nature des feuilles 
que nous donnons à nos Vers, nos éducations se faisant avec 
du Mürier sauvage, mais dans tous les cas il y a là une consi- 
dération dont on ne peut pas ne pas tenir compte, et peut-être 
pourrait-on essayer de faire ici quelque grande éducation, qui 
permettrait de produire de la graine sur une grande échelle. 

» Nous avons aux portes de Varsovie une plantation de 
Müriers, d’une quinzaine d’arpents, qu’on pourrait utiliser ; 
il faudrait seulement se préoccuper d'organiser un local ap- 
proprié au but qu’on se propose, » 


PROCÈS-VERBAUX. 227 


— M. Léonce Bergis, de Montauban, renouvelle sa demande 
d’un lot de graines d’Attacus Yama-mai. 

— M. le docteur Dehaut écrit à M. le Secrétaire général : 
« La lecture du premier numéro du journal / Acclimatation 
ina suggéré une idée que je m'empresse de vous signaler. 
Il s'agit des Fourmis. Pour l’agriculteur, et surtout pour 
lhorticulteur, c’est un ennemi; mais les vrais chasseurs vous 
béniraient si, par votre initiative, on trouvait un moyen pra- 
tique de les élever, de les cultiver spécialement en vue de la 
produclion de ces nymphes que l’on trouve sur les marchés 
de Vienne, mais qu’il serait plus facile de recueiliir dans un 
coin du parc consacré à leur culture. » 

— M. J. B. Blaise annonce l'envoi d’un lot d’une variété de 
Pomme de terre qui lui paraîtrecommandable : « Cette variété, 
dit-il, est très-estimée dans notre pays. On plante vers le 
15 mars, à la charrue, en espaçant chaque pied d'environ 80 à 
90 centimètres en tous sens. On leur donne un premier labour 
à l’outil appelé crochet, pour ameublir la terre et enlever les 
mauvaises herbes, puis une seconde culture à la binette, 
quinze jours après la premiére, à la sortie de terre des jeunes 
tiges; enfin une troisième façon, pour les butter. La récolte a 
lieu fin août et cemmencement de septembre. Pour planter 
1 hectare il faut 10 hectolitres de tubercules ; le rendement 
est en moyenne de 200 hectolitres à l’hectare. » 

— M. Aug. Moret remercie des graines qui lui sont accor- 
dées par la commission des cheptels, 

= M. Audiffred rend compte des résultats qu’il a obtenus 
avec diverses variétés de Pommes de terre provenant de la 


Société, et dépose sur le bureau des échantillons de Pommes 


de terre Reine Blanche. 

—M. Colpaert écrit de Cuzco pour annoncer l’envoi d’une 
livre environ de graines de Coca, et fait espérer l'expédition 
prochaine d’une quantité plus considérable de cette même 
semence.— Remerciments. 

— Madame Sanford accuse réception de la graine d’Euca- 


lyptus adressée à son mari, M. Sanford, consul des États- : 


Unis à Bruxelles. 
— MM. André, Beau et de Givry remercient des graines de 


41 


228 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Pois et de Haricots, ainsi que des Pommes de terre qu’ils ont 
reçues. 

— M. Maumenet, de Nimes, écrit à M. le Secrétaire géné- 
ral: « La Société n’ignore pas sans doute la dévastation des 
vignes du midi par le Phylloxera ni la théorie de M. Laliman, 
de Bordeaux (confirmée par M. Planchon, après une étude 
dans le pays même), théorie d’après laquelle les cépages amé- 
ricains résistent aux attaques du terrible insecte. Par suite, 
tous les propriétaires de nos contrées sont à la recherche de 
ces cépages exotiques, qui ne figurent pas au catalogue de la 
collection du bois de Boulogne. Je me permets de faire re- 
marquer l'intérêt qu'il y aurait à en enrichir cette collection, 
et je crois qu’on le pourrait, dés cette année encore, en fai- 
sant une demande à MM. Bush et fils, de Saint-Louis (Mis- 
souri), ou à M. Berkmans, à Augusta (Géorgie), même en 
France, pour la plupart, à M. Pulliat, à Thiroubles (Rhône). 

» J'attends ma part d’un envoi de quelques milliers de 
Clinton d'Amérique, peut-être même de quelques Scupper- 
nong, dont je me ferais un plaisir de mettre la Société en 
participation si elle le désirait. J'ai même un certain nombre 
d’autres variétés bouturées l’an passé, dont il me serait pos- 
sible de joindre de minces pousses. 

» Le titre de notre Société ne lui permet pas, il me semble, 
de rester indifférente à l’acclimatation des Vignes améri- 
caines, qui va être tentée sur une grande échelle. Pour vous 
en donner une idée, nous pensons ici, à la Société d’agri- 
culture du Gard, à envoyer aux Étals-Unis un délégué chargé 
de nous rapporter quatre à cinq cent mille plants, s’il est 
possible, pour la saison prochaine... » 

— M. Albert de Surigny accuse réception et remercie des 
graines de petite Tomate du Mexique qui lui ont été adressées, 
et prie la commission des cheptels de vouloir bien donner suite 
aux diverses demandes qu’il lui a fait parvenir, notamment 
en ce qui concerne les Léporides. 

— M. le baron Jean de Bray écrit de Saint-Denis-du-Sig 
(Algérie), à M. le Directeur du Jardin d’acclimatation : 
« Venu ici pour diriger une plantation de 20000 plants de 


PROCÈS-VERBAUX. 299 


Ramié, j'en repartirai pour Alger dans quelques jours, non 
pas toutefois sans visiter sur ma route une plantation de 5 
à 6000 plants que nous avons fournis à l'Union agricole 
d'Afrique, et à Relizane deux autres plantations, l’une de 
5000 pieds, fournis aussi par nous, en 1873, à la Société 
marseillaise des Textiles algériens; l’autre de 10 000 plants 
que nous avons envoyés à M. le capitaine Tourtellemont. En 
passant, je visiterai également quelques autres plantations 
moins importantes. » 

— M. Rivière signale les avantages du bouturage souterrain 
de la Vigne, tel qu’il le pratique en Algérie, et met sous les 
yeux de l’assemblée des ceps dont la vigueur de végétation 
démontre en effet l’excellence de ce procédé. A la prière de 
M. le Président, notre zélé confrère veut bien promettre 
pour le Bullefin une note résumant sa communication. 

M. le marquis de Sinéty demande si M. Rivière a recours 
au moyen préconisé par certaines personnes pour assurer la 
reprise des boutures de Vigne, et qui consiste à gratter l’é- 
corce des fragments de sarments plantés. 

M. Rivière considère ce procédé comme défectueux et pou- 
vant amener la pourriture du sarment. Un moyen bien pré- 
férable est d'opérer une légère torsion de chaque mérithale, 
ce qui fend légérement le bois, et provoque le développement 
des racines. 

M. le baron d’Avène s’informe de l’époque à laquelle il 
convient de pratiquer la greffe de la Vigne. 

M. Rivière indique le mois d’avril comme le moment le 
plus favorable, sous le climat de Paris. Si l’on opère trop tôt, 
soit en mars, alors que le mouvement de la séve est considé- 
rable, on s'expose à noyer la greffe par l’afflux des liquides 
séveux ; plus tard, lorsque les bourgeons atteignent A à 5 cen- 
timètres de longueur, cet inconvénient n’est plus à craindre. 
ILest bon d’ailleurs d’affamer préalablement la greffe, comme 
disent les jardiniers, c’est-à-dire de mettre en jauge, dès 
décembre ou janvier, le sarment qui doit fournir cette greffe; 
celle-ci subit alors par évaporation une perte de liquide qui 
la prédispose à absorber la séve du sujet aussitôt sa mise en 


230 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


place. M. Rivière donne aussi quelques détails sur les incon- 
vénients de la greffe dite à la vrille, assez souvent pratiquée 
dans le Midi. 

— M. Lucy communique l'extrait suivant d’une lettre que 
lui adresse M. Mazel : « Vous me demandez des renseigne- 
ments sur le Jeospyros que M. Carrière appelle ÂMazeli. Je 
dois vous dire d’abord que pour tout ce qui concerne la des- 
cription botanique, je ne saurais mieux faire, je crois, que de 
vous engager à voir M. Decaisne, à qui j'ai adressé, dans le 
temps, des rameaux avec fleurs et avec fruits. 

» J'ajouterai que le pied de Diospyros en question m'a été 
apporté greffé du Japon par M. Mazauric, d’Anduze, Il fut 
planté en pleine terre, à l’exposition du midi ; il a fleuri et 
fructifié pour la première fois en 1868. Il a supporté sans 
souffrir, en 1870, 20 degrés centigrades au-desous de zéro. 
Sa hauteur est de 2",20 environ; il ne paraît pas devoir 
s'élever d'avantage. 

» Les fruits abondants, de la grosseur d’une orange moyenne, 
souvent sans côtes apparentes, de couleur brillante, rouge 
orangé violacé, persistent après la chûte des feuilles. Lors de la 
complète maturité, en décembre, la pulpe devient transparente 
et ressemble à de la gelée de coing ; le goût en est trouvé dé- 
licieux par les uns, médiocre par d'autres. Ces fruits se con- 
servent fort longtemps ; tenus en lieu sec, ls se dessèchent 
sans se gâter. Cette année-ci seulement, quelques fruits ont 
eu des graines en petit nombre. J’ai reçu à la même époque 
trois autres Diospyros greffés; ils n’ont pas encore fructifié. 

» En faisant le relevé des plantes nouvelles qui m'ont été 
apportées du Japon, j'arrive au chiffre de 53; parmi ces 
plantes figurent comme des plus intéressantes : 3 Bambous, 
3 Chênes, 2 Broussonetia et 1 Morus. Ces trois dernières 
plantes, données comme servant à faire le papier, me parais- 
sent devoir attirer l'attention. » 

M. Lucy insiste sur les renseignements contenus dans cette 
lettre, au sujet de la faculté de résistance au froid dont le 
Diospyros semble être doué, et qui pourrait faire espérer la 
naturalisation de cet arbre sous le climat de Paris. 


PROCÈS-VERBAUX. 231 


M. Rivière ne partage pas celte manière de voir. Il pense 
que si le Diospyros a supporté impunément chez M. Mazel, 
dans les environs de Nimes, un froid de — 20°, c'est qu’il 
avait végété vigoureusement pendant l’été précédent, grâce à 
un climat favorable. À Paris, l'arbre croîtrait moins bien, 
s’aoüterait mal, et ne pourrait plus, dès lors, résister aux 
basses températures de l'hiver. M. Rivière considère d’ailleurs 
le Diospyros comme peu intéressant au point de vue de ses 
fruits, qu'il a toujours trouvés fort médiocres et inférieurs à 
nos plus mauvais abricots 

M. le docteur Martin fait observer qu’en ce qui concerne les 
végétaux originaires de la Chine, ilesttrès-important d’en con- 
naître exactement le lieu de provenance. Les provinces 
méridionales du Géleste-Empire ont un climat fort chaud ; les 
plantes de cette région sont donc nécessairement très-sensi- 
bles au froid ; celles, au contraire, venant des environs de 
Pékin, ou de la frontière de Mantchourie, doivent réussir sous 
le climat de Paris, puisqu'elles supportent habituellement des 
hivers trés-rudes. 

M. Rivière rappelle qu’il existe, en effet, un assez grand 
nombre d'espèces ou variétés de Diospyros cultivées sur divers 
points de la Chine, et qui doivent être, par suité, de rusticité 
differente. Chez quelques-unes, la culture est parvenue à faire 
disparaître plus ou moins complétement les noyaux. On ne 
doit donc pas chercher à propager ces arbres chez nous par 
semis, on s’exposerait à n’obtenir ainsi que des sauvageons. 
Les variétés greffées sont les seules qu’on puisse songer à 
importer. 

M. le docteur Weber à vu beaucoup de Diospyros cultivés 
dans les environs de Pékin. Les fruits lui en ont paru trés- 
acceptables, à la condition d’être mangés blets. Somme toute, 
l'introduction du Diospyros en France lui semble intéressante 
à tenter. 

M. Autard de Bragard insiste à son tour sur l'importance 
de recourir, autant que possible, à des plants ou à des bou- 
tures, plutôt qu’à des importations de graines, pour propager 
les végétaux. Il rappelle qu’on n’est parvenu à introduire le 


23% SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Lit-chi (Nephelium) à Maurice qu’à l’aide de jeunes plants, 
les divers essais de semis n'ayant jamais réussi. 

— Pour faire suile à ses précédentes communications sur 
l'utilisation industrielle des plumes, M. de la Blanchère met 
sous les yeux de l’assemblée un spécimen de brosse confec- 
tionnée avec du Crin de plumes. Ce genre de brosse, qui sem- 
ble devoir être d'un bon usage, aurait l’avantage de coûter 
moitié moins cher que celles en véritable crin. 

— M. Ménard, sous-directeur du Jardin d’acclimatation, 
donne lecture d’une Note sur l’utilisation des Zébres de Bur- 
chell comme animaux de travail; c’est l’intéressant compte 
rendu du dressage au Jardin de plusieurs de ces animaux, 
qu'on est parvenu à atteler aux diverses voitures de service. 
(Voy. au Bulletin.) 

M. le Président prononce à cette occasion les paroles sui- 
vantes : 

«Je crois être le fidèle nn de l'assemblée en adres- 
» sant des félicitation à l’administration du Jardin zoologique, 
» pour ce beau succès, qui témoigne de son habileté non 
» moins que de sa persévérance. » 

— M. Millet revient sur une question dont il a déjà plusieurs 
fois entretenu la Société : la nécessité de l’emploi des xichotrs 
pour les oiseaux insectivores. Il dépose sur le bureau divers 
modèles de ces nichoirs en terre cuite, fabriqués par M. Ver- 
dier, et actuellement employés au bois de Vincennes. Ces jolis 
appareils, analogues à ceux mis depuis longtemps en usage 
par notre confrère, sont d’un prix bien plus élevé que ces 
derniers, qui ne coûtent que 12 à 15 francs le cent; mais ce 
sont de véritables objets d'art qui peuvent être un ornement 
dans les bosquets ou autour des kiosques. 

M. le docteur Boisduval craint que les nids artificiels ne 
rendent pas tous les services qu’on en attend ; tous les oiseaux 
insectivores, et particulièrement les Fauveites, ne nichant pas 
dans les trous des arbres. 

M. Millet répond qu’on a du moins la certitude d'en voir 
profiter beaucoup d’espèces utiles, telles que les Mésanges, la 
Sitelle, etc. 


PROCÈS-VERBAUX. 233 


M. le marquis de Sinéty déclare n’avoir jamais vu chez lui 
les Moineaux faire usage de ces nids. Un autre de nos con- 
frères craint, au contraire, que les Moineaux s’en emparent 
trop volontiers, au détriment des espèces utiles. 

C’est là, fait observer M. Millet, un inconvénient facile à 
éviter en rétrécissant l'entrée du nid, qui ne peut plus alors 
laisser passage qu’à des oiseaux de petite espèce. 

— M. Millet prie ceux de nos confrères qui ont reçu sa cir- 
culaire relative aux observations à faire sur les brouillards 
du mois de mars, de vouloir bien accorder toute leur 
attention à celte question de météorologie, poursuivie 
depuis de longues années; les remarques faites à ce sujet 
ont une valeur réelle. Mais il importe, dans les observa- 
tions, de ne pas confondre de simples brumes avec un véri- 
table brouillard, qui seul correspond généralement avec une 
gelée à la même date en mai. L'importance de prévoir les 
froids tardifs n’échappera à personne, puisqu'on peut alors 
prendre à l'avance des précautions contre la gelée, comme 
par exemple, pour les vignes, à l’aide de nuages artificiels de 
fumée. 

Notre confrère fait observer que les anciens Péruviens con- 
naissaient ce procédé. Sous le gouvernement des Incas, on 
savait prévenir le fléau des gelées tardives par le moyen de la 
fumée, procédé devenu obligatoire et associé à des cérémo- 
nies religieuses qui le rendaient plus respectable encore aux 
yeux des cultivateurs. Cet usage s’élait conservé jusqu’à la 
conquête du Pérou par les Espagnols, qui, y trouvant une 
apparence d’idolâtrie, l'ont presque entièrement supprimé. 

M. le docteur Weber dit que ce moyen est fort usité au 
Mexique, où le rayonnement terrestre est considérable sur les 
hauts plateaux. Il l’a vu employer efficacement pour protéger 
les Nopals dans la province d’Oajaca. On amasse au pied de 
ces Cactus du fumier, des feuilles, des détritus divers, qui 
donnent une fumée épaisse. Cette pratique n’est d’ailleurs pas 
nouvelle, puisqu'on la trouve recommandée dans le 7raité de 
la culture du Nopal, publié vers 1747, par Tiry de Ménou- 
ville. 


234 SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION. 


M. Millet fait remarquer que l’on a dans les huiles lourdes 
de gaz d'excellents combustibles producteurs de fumée. L'uti- 
lisation en est rendue très-facile par l'emploi des petits sodets 
en fer battu, munis d’un couvercle, imaginés par M. Rave- 
nau. Avec ces appareils fort simples, la dépense totale pour 
protéger contre la gelée 1 hectare de terrain ne s’élève pas à 
plus de 8 à 40 francs. Dans les vignes, l’action de la fumée 
ne se borne pas à empêcher le rayonnement terrestre; elle 
faiten même temps périr certains insectes nuisibles, tels que 
la Pyrale, l'Eumolpe, etc., ainsi que notre confrère l'a plu- 
sieurs fois constaté. 

A l’appui des faits cités pour établir combien est ancienne 
la connaissance de l’heureuse action des nuages artificiels, 
M. le Président rappelle qu’on trouve ce moyen conseillé dans 
le Théatre d'agriculture d'Olivier de Serres. 

— M. le Secrétaire général dépose sur le bureau une Note 
qui lui est remise par M. Pierre Pichot relativement à la polé- 
mique engagée entre divers auteurs anglais au sujet de lac+ 
climatation en Europe du Colin Houi et de la Poule dé 
prairie. (Voyez au Bulletin.) 

M. Geoffroy Saint-Hilaire rend compte ensuite de l’insuccès 
fort regrettable de l’envoi qu'avait bien voulu nousfaire M. F. 
Muntadas de 20000 œufs de Truite embryonnés, provenant 
de son établissement de pisciculture de Piedra (Aragon). Cet 
envoi nous avait été, pour plus de süreté, adressé par la voié 
de l'ambassade de France; mais, malgré l’obligeant concours 
de M le marquis de Vernouillet, qui remplace en ce moment à 
Madrid M. le marquis de Bouillé, les œufs sont restés près de 
vingt jours en route, par suite de difficultés résultant des événe- 
ments politiques, et, à leur arrivée en France, ils étaient com- 
plétement gâtés. Quelque ait été le résultat de cet envoi, nous 
n’en devons pas moins de reconnaissance à M. Muntadas, au- 
quel lé conseil a déjà fait parvenir les remerciments de la 
Société. 

Il est oflert à la Société : 

1° De la part de M. Jules Lecreux, un sac d’Orge de l'Hima- 
laya. (Notre confrère exprime le désir que les cultures expé- 


 
À 


PROCÉS-VERBAUX. 330 


rimentales qui seront faites avec cette semence aient Heu sur 
une échelle suffisante pour donner des résultats sérieux.) 

2 De la part de M. Paul Madinier, des graines de Tagasaste 
(Cystisus prohferus) et de Chicharraca (Lathyrus tingitanus). 

3° De la part de M. le marquis de Selve, des graines de 
petit Melon vert à rames. 

° De la part de M. Thozet, des graines d'Eucalyptus cre- 
bra, Ficus australis et de Ptychosperma Alexandra. 

5° De la part de M. le vicomte de Milly, des graines de 
Melon Prescott fond blanc. 

6° De la part de M. J. B. Blaise, des Pommes de terre de 
Choloy. 

Il est déposé sur le bureau : 

1° De la part de M. Boutarel : l'Agriculture en France, sa 
situation, son avenir, conditions de son développement. 

2 Tableaux de population, de culture, de commerce et de 
navigation, formant pour l’année 1870 la suite des tableaux 
insérés dans les notices statistiques sur les colonies françaises. 
(Pablication du ministère de la marine.) 

3° Le Phylloxera, appel aux propriétaires du Médoc, par 
M. J. Saint-Léon Boyer-Fonfrède. 

h° Bulletin périodique n° 5, de la Société centrale des chas- 
seurs pour aider à la répression du braconnage. 

5° Culture and manufacture of Ramie and Jute, in the 
United-Siates, by Emile Lefranc, of New-Orléans. 

6° Programme des concours ouverts par la Société des 
sn de l’agriculture et des arts de Lille, en 1874. 

° Progress reports and Final report of the exploration 
committee of the Royal Society of Victoria, 1872. 

8° De la part de M. Decroix : Remonte de l’armée ne 
et La vérité sur les étalons de l'État et sur ceux de l’industrie 
privée, 2 brochures, par M. le marquis de Croix. 

9° De la part de M. Raveret-Wattel: Rapport préliminaire 
sur le projet de loi prescrivant les mesures nécessaires pour 
arrêter les ravages causés par les insectes nuisibles à la- 
griculture, par M. Ducuing, membre de l’Assemblée nationale. 

10° Bulletin circulaire n° 1 de l'exposition internationale 


22 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


de Florence, en 1874, organisée par la Société royale toscane 
d'horticulture. 


11° Un prospectus du « Nouveau code du chasseur », par 
M. Vial, avocat. 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 20 MARS 1874. 


Présidence de M. DROUYN DE LHUYS, président. 


Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. 


— M. le Président proclame les noms des membres récem-. 


ment admis par le Conseil. 


MM. Présentateurs, 


AGASssIZ (Charles), propriétaire, à Moudon, can-| Te Fer Hilaire 
(onde Vaud (Ouisse) laisse Ménard. 


: Drouyn de Lhuys. 
pou (le marquis de), rue de Laborde, 11, | nr na ffroy a 
Paris. 
Edgar Roger. 
BOUVIER (le baron), ancien conseiller général de / Carbonnier. 
la Haute-Saône, propriétaire, au château de? Drouyn de Lhuys. 
Franchevelle, par Lure (Haute-Saône). Comte d'Éprémesnil. 
Drouyn de Lhuys. 
CASTAING-DurAy, à Calais (Pas-de-Calais) Jules Grisard. 
H. Petit. 
A. Firmin Didot. 
Drouyn de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
| Bakalowicz. 


CHAUCHAT (Émile), 3, rue de Suresne, à Paris, 
et au château d’Escorpain, par Laons (Eure- 
et-Loir). 


DÉTRIMONT (Eugène), propriétaire, rue Laffitte, 


À Ernest Bellecroix. 
27, à Paris. 


A. Geoffroy Saint-Hilaire, 

Drouyn de Lhuys. 

Comte d’Éprémesnil. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire 

ELPIER (Édouard d’), propriétaire au château de{ Drouyn de Lhuys. 
Mielen, par Saint-Trond, province de Lim-{ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
bourg (Belgique). Marquis de Sinéty. 

A. Geoffroy Saint Hilaire. 

A. Gillet de Grandmont. 

Th. Ogerdias. 


DcprEssoIR (Charles-Michel), cultivateur à | 
Ereuse, par Estrées Saint-Denis (Oise). 


GUERLE (Charles de), publiciste, rue de Listonne, 
51, à Paris. 


# 
TS 


Lee 


PROCÈS-VERBAUX. 237 


Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Lorient 

D' Martin. 

A. Rivière. 

Eug. Vavin. 


GuUIBERT (Louis-Victor), rue Desbordes-Valmore, 
Max (Ernest), secrétaire-général de la Banque ne de Lhuys. 


48, à Paris. 


LamBEerT (Désiré - Auguste), propriétaire , 
Bréa, 19, à Paris. 


franco-égyptienne, rue de la Chaussée-d’An-/ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
tin, 29, à Paris. Camille Tollu. 

Gabriel de Brossard. 
Drouyn de Lhuys. 
Marquis de Sinéty. 
Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 
Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 

L. Abaye. 

Drouyn de Lhuys. 

Jules Grisard. 


MESNIL DU Buisson (le vicomte Victor du), au 
château de Champobert, par Exmes (Orne). 


PACQUETEAU (Ch.), avoué à Fontenay-le-Comie 
(Vendée). 


PÉTOT (Auguste), au château de Thoires, par 
Brion sur Ource (Côte-d'Or). 


*EQUILLART (Francois), fabricant et proprié- 
taire, rue KFosse-aux-Chênes, 1/4, à Roubaix 
(Nord). 


M. le Président fait remarquer à ce sujet la notable pro- 
portion dans laquelle notre Société voit chaque jour s’aug- 
menter le nombre de ses adhérents, bien que nous ne puis- 
sions encore nous déclarer satisfaits. Que chacun de nous 
cherche à faire au moins une recrue dans sa famille, ou dans 
le cercle de ses connaissances, et notre elfectif se trouvera 
promptement doublé, sans de grands efforts. 

— M. le Secrétaire procède au dépouillement de la corres- 
pondance. 

— MM. Bakalowicz, Benoît-Champy, baron Drouillet de 
Sigalas, Joseph Guérin, Jouenne et baron Alp. Mallet adres- 
sent des remerciments pour leur récente admission. 

M. le Secrétaire-général fait connaître que les cheptels 
suivants ont été accordés par la commission dans sa dernière 
séance : 

ANIMAUX. 
MM. 


BaraAILON (J. B.,) propriétaire, à Chambon (Creuse). Une 
femelle Léporide. 


238 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


BarureL (E.), château de Lavelanet, près Villefranche de 
Lauraguais (Haute-Garonne). Un couple Colins de Californie; 
un couple Dindons sauvages. , 

BérizaAL (Vicomte Louis de), propriétaire, au château des 
Granges, près Moncontour (Côtes-du-Nord). Un couple Canards 
Labrador; un couple Perruches Callopsittes. 

BELLAIGUE DE BuGxas, château de Tournebise, près Poni- 
gibaud (Puy-de-Dôme). Un couple de Lapins argentés. 

Besser (Louis Ch.), directeur général des mines de Mon- 
trelais, à la Grand’Mine, commune de la Chapelle-Saint-Sau- 
veur (Loire-Inférieure). Un Coq et deux Poules Houdan; un 
couple de Lapins argentés. 

BEsseTTE (le docteur Edmond), à Angoulême (Charente). 
Un couple Canards Carolins ; œufs de Vers à soie de l’Aïlante. 

Dreyrous (Léon), rue Richelieu, 61, à Paris. Une femelle 
Perruche ondulée. 

DucrastTez (Ch.), percepteur à Vernantes, par Saumur 
(Maine-et-Loire). Œufs de Vers à soie de l’Aïlante, 

Fzeury (Victor), à la Drouetière, à Mauves, par Carquefou 
(Loire-Inférieure). Un couple de Lapins de Sibérie. 

GAULLIER, (Henri) domaine agricole de Bourmont, près 
Candé (Maine-et-Loire). Un couple de Lapins argentés; ur 
couple de Lapins de Sibérie; un Coq et deux Poules Houdan. 

Givrx (Clément de), propriétaire, 36, rue de la Chaise à 
Paris. 1/2 litre de montée d’Anguilles. 

Hesse (Antoine), banquier à Marseille. Un couple de Lapins 
à fourrure ; un couple de Lapins de Sibérie. 

MAnsBENDEL (Henry), 23,rue Clapevron, à Paris. Un couple 
de Perruches ondulées; un couple de Perruches Callop- 
sittes. 

Mavwprep (le docteur) à Lamballe (Côtes-du-Nord). Un couple 
de Perruches ondulées; un couple Golins de Californie. 

Mowresquiou (le comte Thierry de), au château de Char- 
nisay, par Loches (Indre-et-Loire). Un couple Macropodes de 
Chine. | 

Monrror (Henri de), à Juzennecourt (Haute-Marne). Un 
couple de Canards Carolins. 


PROCÈS-VERBAUX. 239 


PERRAUDIËRE (J. de La), au château de la Devansaye près 
Ségré (Maine-et-Loire). Un couple de Perruches ondulées. 

Rocues (Léon), 17, boulevard Malesherbes à Paris. Un 
couple Canards mandarins. 

SURIGNY (Albert de), propriétaire à Prissey par Mâcon 
(Saône-et-Loire). Un couple Léporides ; un couple Colombes 
Longhups. 

SUZANNE (Frédéric de), propriétaire, à Preysac, par Thenon 
(Dordogne). Un Coq et deux Poules Houdan; un couple de 
Cochons Vorkshsire. 

TENAIN (A.), docteur en médecine, 22, rue de Saint-Péters- 
bourg, à Paris. Un couple de Léporides. 

Turrez (le docteur L.), à Toulon (Var). Un Coq et déux 
Poules Dorking ; un Coq et deux Poules de Caussade; un Coq 
et deux Poules Houdan ; un couple Canards Avlesbury. 

VERNEJOUL DE LA ROQUE (de), à Nimes (Gard). Une paire 
de Lapins argentés; œufs de Vers à soie de PAïlante ; œufs de 
Vers à soie du Chêne du Japon. 


VÉGÉTAUX. 
MM. 

Besserre (le docteurE.), à Angoulême (Charente). Collection 
de Pommes de terre et Bambusa flexuosa, nigra, Qualior, 
vuridi glaucescens. 

CoLLARDEAU, 7, rue du Pré-aux-Clercs à Paris. Navets plats 
blancs hâtifs, long de Meaux, long des Vertus; Chou de Brun- 
swick pied court, de Hollande pied court, Milan de Norwége ; 
Porame deterre Baldou, douce blanche, quarantaine de la Halle. 

Doumer, au château de Baleine, par Villeneuve-sur-Allier 
(Allier). Graines de Zapalhto. 

FLeurx (Victor), à la Drouetière, à Mauves, par Carquefou 
(Loire-[nférieure), les diverses variétés de Bambusa et, Pelar- 
gonaumn. 

SURIGNY (A. de), à Prissey, par Macon (Saône-et-Loire). Ha- 
ricot nain mange-tout sans parchemin et flageolet blanc; 
Navets de Freneuse, long de Meaux, long des Vertus, blanc 
plat hâtif, Pommes de terre vitelotte rouge longue, mar- 
jolin vraie, fourragère grosse jaune. 


210 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


TENAIN (le docteur), 22, rue de Saint-Pétersbourg, à Paris, 
Bambusa aurea ; Begonia fuchsioides ; Begonia Rex ; Fuchsia 
sans pareil; Haricot nain mange-tout ; Pois mange-tout nain 
hâtif. 

VERNEJOUL DE LA ROQUE (de), à Nimes (Gard). Graines de 
Zapallito et du Mürier du Japon. 

SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE DE L'ARDÈCHE, à Privas, Pomme de 
terre Châve, saucisse, Jancée; Haricot mange-tout, beurre 
sans parchemin, mange-tout nain jaune du Canada, Bagnolet 
ou suisse gris, Saumon du Mexique. 

SOCIËTE D'AGRICULTURE DU PAS-DE-CALAIS, à Arras, (M. Pa- 
onoul, secrétaire). Collection de graines potagères. 

SOCIÉTÉ D'HORTICULTURE DES VOSGES, plantes ornementales 
et Pommes de terre Early rose et Reine blanche. 

— M. le Comte dela Touche accuse réception de la femelle 
de Léporide qui vient de lui être adressée. Notre confrère fait 
en même temps connaître l’état de son cheptel de Lapin ar- 
senté et de Léporide. 

— M. Alfred Firmin Didot écrit à M. le Secrétaire général : 
« Si vous désirez des Léporides, je puis vous en remettre. J’en 
ai chez moien cabane à lapin, et en tonneaux, avec une petite 
cour. Mais, chose assez singulière, les plus beaux, qui de leurs 
tonneaux peuvent se promener en liberté dans la cour, ne 
produisent point; tandis que ceux en cabane fermée pullu- 
lent. Probablement c’est qu'ils n’ont pas d’autre distrac- 
tion. » 

— M. Delaurier aîné, écrit d'Angoulême : « Ma paire de 
Perruches de la Nouvelle-Zélande a, en ce moment des jeunes 
qui ne paraissent nullement souffrir de ces derniers froids, 
malgré qu'ils soient en volière libre. » 

— M. Carbonnier rend compte qu’il vient de recevoir un 
nouvel envoi de dix Poissons arc-en-ciel. 

— M. Léonce Bergis, président de la Société d’horticulture 
et d’acclimatation de Tarn-et-Garonne, accuse réception du 
lot de graines d'Aféacus Yama-maï envoyé à cette Société. 

— En remerciant des graines de Melon vert à rames qui 
lui ont été adressées, M. Allibert exprime le désir de voir 
autant que possible des envois de graines ou de végétaux faits 


PROCÈS-VERBAUX. 21 


par la Société accompagnés de l'indication du n° du Bulletin 
où l’on pourrait trouver des renseignements sur le mode de 
culture de ces plantes. 

— MM. de Brossard, docteur Dagron, Le Vavasseur de Pré- 
court et Henri Petit, accusent réception des graines qui leur 
ont été envoyées. 

— M. le Vicomte de Pulligny adresse un rapport sur ses 
tentatives d'introduction en France de diverses espèces de 
Conifères d'Amérique. 

— M. F. Gallais, de Mamora, près Daouda (Algérie), 
remercie des graines de Quinquinas qu’il a reçues, et rend 
compte du résultat obtenu avec diverses graines provenant de 
la Société. «J’aireçu, dit-il, en 1873, fin septembre, c’est-à-dire 
unpeu tard pour la région quej’habite, un paquet de graineséti- 
quetées : « Sapindus acuminata » ; jeles ai semées moi-même, 
ainsi que les Acacias et les Arbres à suif, qui tous, m'ont donné 
de bons résultats. Quant aux prétendus Sapindus, je crois avoir 
retrouvé en eux le Zanthoxylum Americanum: ou Clavalier, 
arbre originaire de la Virginie et du Canada, mais qui s’ac- 
commode volontiers de nos terrains siliceux, supporte bien la 
chaleur, et résiste sur le rivage aux vents du sud-ouest. 
D’après le développement que je lui ai vu prendre, je crois que 
ce sera une bonne acquisition pour l'Algérie. Mes semis du 
22 septembre dernier ont aujourd’hui 1°,20 de hauteur, en 
moyenne; l'Eucalyptus ne croît pas plus vite. La tige verte et 
couverte d’épines est remarquable par sa vigueur. 

» Depuis deux ans, je cultive un Chou-fleur que je crois devoir 
signaler à votre attention. C’est une variété hybride dont la 
oraine a été récoltée dans ma propriété même. Ce Chou-fleur 
est très-rustique ; 1l ne craint point les vents de mer, supporte 
la chaleur et, comme les Choux cabus, reprend sa force aux 
premières pluies. La récolte peut en être faite en décembre, 
janvier, février ou mars, selon les soins donnés. 

» La tige qui atteint toujours À mêtre de hauteur, au mini- 
mum, a souvent besoin d’être tnteurée, surtout quand la 
pomme se développe ; celle-ci est d’une couleur Jaune paille, 


mais plus belle et plus claire que celle du Brocoli ; les feuilles 
3€ SÉRIE, T. L. — Mars 1874, 16 


y 

à 

SNA. 
Rs 


Ta PIRE | 
+ 4er P à 


da 


EP | SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 

_qui entourent sont petites, pointues, très-fermes. Soinme 
toute ce Chou-fleur est très-fin et tardif; son mérite est de 
donner de la feuille tout l'été, à la mode des Choux cavalier, 
branchu, etc., etc.» 

— M. Ramel écrit d'Hussein-Dey à M. le Président: « J'ar 
l’honneur de vous adresser quelques spécimens d’Æucalyptus 
colossea et globulus, ainsi que la photographie d'un colossea 
semé. 

» Ceci indique la méthode à suivre, quand on veut faire une 
plantation sérieuse. L'usage du pot est bon et presque indis- 
pensable pour le commerce. Mais le semis en place doit être 
la règle. Et c’est pour affirmer celte méthode, qui n’est que 
limitation de la loi naturelle, que je suis venu ici. 

» I faut avoir soin, quand on met en terre les arbres qui 
sont longtemps restés en pot, d'enlever ou de couper Le pivot 
et de débarrasser les racines circulaires anciennes. Par ce 
moyen, le sujet est rajeuni et peut fournir des spécimens sem- 
blables à ceux que vous eûtes au Ministère... » 

— M. L. Kralik, de Tresserve, près Aix-les-Bains, accuse 
réception des sarments de vignes qui lui ont été expédiés. 

— M. E. de Montigny écrit du château de Saint-Léger 
(Eure) : «Je vous adresse par ce même courrier un échan- 
tillon de coton, provenant de fleurs d’arbustes exotiques, que 
j'ai rapporté de mes derniers voyages; je me figure que cette 
production est utilisable, industriellement parlant, soit à lin- 
star du coton pour le tissage, la papeterie, la chapellerie, ou 
même la literie à titre d’édredon végétal. 

» Jeserais àmêmed'en tenter l’acchmatation très-facilement, 
mais je ne veux m'en occuper qu'autant que cette idée aurait 
un côté sérieusement pratique. » 

— M. Cordier, d'El Alia, demande à prendre part à 
la distribution de graines de Seafort/na eleqans et de Lives- 
tona australis dont M. von Mueller à bien voulu promettre 
l'envoi à la Société. M. Cordier transmet en même temps, au 
nom de son frère, propriétaire en Algérie, des graines d’'Eu- 
calyptus red-qum et flooded-jum accompagnées de la note 
suivante : 


’ it id y SZ 
j Cr 
PROCÈS-VERBAUX. " D'2131 
; à s CR ‘re 
« Parmi les diverses espèces d'Eucalyptus dont nous avons 


tenté la culture dans nos propriétés en Algérie, il en est un 
certain nombre qui y végètent d’une façon remarquable et 
nous paraissent appelées à prendre leur place dans les boise- 
ments du littoral méditerranéen. Les tableaux d'observations, 
sur leur croissance comparative, que nous avions remis à 
M. Ramel, l'infatigable vulgarisateur des végétaux australiens 
et qui ont été publiés dans le Bulletin de la Société d’accli- 
matation du mois de novembre dernier, indiquent déjà plus 
de vingt espèces, qui par leur accroissement exceptionnel doi- 
vent être préférées. 

» Deux de ces espèces précieuses nous ayant donné cette 
année une assez abondante quantité de graines pour pouvoir 
les propager, nous vous en adressons par la poste un paquet 
de chaque pour être distribuées aux personnes qui désireraient 
en essayer la culture. Ces deux espèces, nous ayant été don- 
nées sous les noms d'Eucalyptus red-qum et E. ue 
nous en ignorons le nom scientifique. 

» En 1868, nous avons reçu en même temps des graines 
sous les noms d’Æ. restufera et red-qum. Les graines d’E. 
red-qum nous ont donné des arbres dont les caractères diffé- 
rent peu du restifera, et pour nous ce n’est qu’une variété 
de celui-ci, bien que de port en soit plus régulier et plus droit, 
que ses fruits soient plus petits et que sa pleine floraison ait 
lieu vers le 45 juillet, tandis que le r'esinifera est en fleur dès 
Ja fin d'avril. Sa croissance ne le cède en rien, jusqu’à pré- 
sent, aux Æ. globulus avec lesquels il se trouve intercalé 
dans nos plantations. Ils’enracine mieux et résiste d’une façon 
remarquable aux vents et à la sécheresse : il ne nous paraît 
pas non plus craindre beaucoup l'humidité, car daus nos plan- 
tations faites à l’automne dernier, il a moins souffert que 
certaines autres espèces des pluies abondantes qui ont fait du 
solun véritable marais. | 

» Notre E. flooded-qum est au contraire l'arbre des ter- 
rains humides, qu'il affectionne. Dans l'ignorance où nous 
étions de son habitat naturel, lorsque nous eùmes les pre- 
mières graines en 1868, nous avons placé les jeunes plantes 


9h SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


que nous en avons obtenues dans des sols de diverses natures, à 
l'exception de celui qui lui convient réellement, mais où ils 
ont fait preuve d’une vitalité remarquable, puisque ceux 
plantés dans des terrains sablonneux et secs, quoique n’ayant 
végété qu'à l’état d’arbrisseaux, ne sont pas morts. Dans les bons 
terrains plus consistants, leur végétation a élé assez bonne, et 
l’un d’eux, qui profite parfois de l’arrosage des terrains voi- 
sins, croît à l’égal des gl/obulus plantés en même temps. 

» Ayant récolté, il y a deux ans, des graines fertiles qui nous 
ont mis à même de faire de nouveaux essais, nous en avons 
placé avec plusieurs autres espèces dans un ancien marais 
desséché, mais qui estsubmergé annuellementlors des grandes 
pluies; les ooded-qum sont les seuls qui aient résisté à l’inon- 
dation. Leur végétation ne laisse rien à désirer. » 

— M. Jules Lecreux donne lecture d’un rapport sur ses 
cultures de Pomme de terre Early rose, d'Orge de l'Himalaya 
et de Zapallito tierno. 

— Sur l'invitation de M. le Président, M. Lichtenstein, qui 
assiste à la séance, veut bien donner quelques détails sur la 
question du Phylloxera. Les ravages du terrible insecte s’é- 
tendent chaque jour d'avantage. En 1873, pour le seul dépar- 
tement de l'Hérault, le préjudice causé aux viticulteurs n’a 
pas été moindre de 20 millions de francs. Année moyenne, 
en effet, la récolte en vin dans le département s'élevait na- 
guëre à 44 ou 15 millions d’hectolitres ; l’an passé, elle n’a 
guère atteint que le chiffre de 11 millions d’hectolitres, ce qui, 
même en faisant la part des gelées tardives, porte à 2 mil- 
lions d’hectolitres au moins la perte causée par les divers in- 
sectes nuisibles et le Phylloxera en particulier. 

De tous les parasites de la Vigne, ce dernier est de beau- 
coup le plus redoutable, puisqu'il ne se borne pas à détruire 
la récolte mais qu’il amène la mort de la plante. Ses attaques 
font périr les souches en dix-huit mois ou deux ans, suivant 
que la vigne est plus ou moins vigoureuse, ou que les circon- 
stances sont plus ou moins favorables au développement de 
l'insecte. Celui-ci pullule d’ailleurs d’une façon désolante, 
chaque femelle pouvant, d'après les observations de MM. Ri- 


PROCÈS-VERBAUX. 48 N 219 
Jey, Balbiani, Maxime Cornu, etc., engendrer de 2à 
d'individus en une année. ! 

On présume que le Phylloxera a dù être importé en France 
avec des Vignes américaines, lorsque l’oïdium sévissant avec 
intensité, on cherchait au dehors des cépages qui résistassent 
mieux à la maladie. Ce qu’il y a de certain, c’est que la pré- 
sence de l’insecte fut constatée pour la première fois chez 
nous, en 1858, dans le voisinage d’une collection de cépages 
américains importée par M. Laliman en 1856 et 1857. 

Plus de 150 procédés différents de destruction ont été déjà 
mis en essai. Les uns sont restés sans action aucune; les au- 
tres, tels que l'emploi du sulfure de carbone, par exemple, 
tuent l'insecte, il est vrai, mais causent presque autant de tort 
à Ja plante. Un seul moyen, jusqu'ici, s’est montré réellement 
efficace : celui de l’inondation des souches, employé avec un 
grand succès à Graveson par M. Faucon. On laisse, en novem- 
bre ou décembre, les racines submergées pendant trente ou 
quarante Jours, et tous les insectes sont détruits. Peu de viti- 
culteurs, malheureusement, se trouvent en position d'utiliser 
ce moyen, qui nest praticable que dans certaines circon- 
stances. 

On s'occupe activement d'introduire chez nous des cépages 
américains résistant aux attaques de l’insecte. Tandis que notre 
Vigne européenne (Vitis vinifera) périt promptement, aux 
États-Unis (d’après M. Planchon, il est rare qu’elle y résiste 
plus de deux ou trois ans aux atteintes du Phylloxera) cer- 
taines Vignes du pays sont infiniment plus robustes. Quelques 
cépages résistent plus ou moins bien à la maladie; tels sont le 
Warren, le Cunningham et les autres variétés du V. æstiva- 
lis ; d’autres, variétés du V. vulpina (ou rotundifolia), n’en 
souffrent aucunement; tels sont les cépages CZ/fford, Clinton, 
Concord, Scuppernong (nom indien), ete. Ces Vignes ne 
fournissent qu’un vin de qualité inférieure; mais on pourra 
facilement les greffer avec nos variétés françaises, qui se 
trouveront désormais à l'abri des attaques de l’insecte. Dans 
les environs de Montpellier, on a déjà planté plus d’un million 
de pieds de ces Vignes américaines, et un propriétaire a fait 


3 millions | 


SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Clinton. 

M. Millet demande si, comme on l’a parfois avancé, le 
vahissement si rapide qu Phylloxera ne serait pas la consé- 
quence d’un état maladif de la Vigne. 

M. Lichtenstein ne saurait se ranger à cette opinion ; il con- 
sidère l’insecte comme la sause directe du mal. Selon lui, du 
reste, tous les insectes de la famille des Hémiptères, comme 
de celle des Lépidoptères, ne vivraient qu'aux dépens de 
plantes saines; ils abandonneraient immédiatementun végétal 
atteint de maladie. 

M. le docteur Boisduval ne partage pas cette manière de 
voir ; il est d'avis, au contraire, que les diverses espèces de 
Pucerons, les Coccides, etc., n’attaquent jamais que des 
plantes dont la végétation est languissante, et qu’ils dispa- 
raissent dès que par des soins de culture on rend aux plantes 
leur vigueur normale. Pareille chose a lieu, d’ailleurs, pour 
les animaux, chez lesquels l'apparition des parasites est ordi- 
nairement consécutive à un état maladif. Quant au Phylloxera 
qui peut être, en effet, la cause et non la conséquence de la 
maladie de la Vigne, on a tout lieu d’espérer qu’il disparaîtra 
plus ou moins complétement, avec le temps, sous l’influence 
de certaines circonstances, comme ont diminué ou disparu 
d’autres insectes qui furent à diverses époques fort nuisibles 
également. La Pyrale, qui causa tant de ravages il y a 80 ou 
35 ans dans le Mâconnais, et qui, gagnant de proche en 
proche, se montra jusqu'aux environs d'Argenteuil, finit par 
devenir trés-rare. 

M. Lichtenstein dit que dans le Midi, on a été, en effet, 
une vingtaine d'années sans avoir à souffrir des ravages de la 
Pyrale ; mais que cet insecte est devenu trés-nuisible de nou- 
veau par son abondance. L'année dernière, il a certainement 
occasionné une perte de 800000 hectolitres de vin dans le 
département de l'Hérault. 


M. Richard (du Gantal) rappelle que la Pyrale peut être 


facilement détruite par l'ébourllantage des ceps. Ce procédé, 
indiqué jadis par Raclet, consiste à jeter en hiver sur chacun 


3 venir à Jui ul d'Amérique pour 30 000 fr. de Le de ge 


E 


tof 18 


Li "+ PROCÈS-VERBAUX. 4 » 242 


# 


ne 


des ceps, une petite quantité d’eau très- che qui fait i immé- 


diatement périr les larves de Pyrale, réfagiées dans. les fis- 
sures des écorces. 

M. Lichtenstein reconnait l'efficacité de l'ébouillantage dans 
certains cas; mais il fait observer que si ce procédé est très- 
pralicable en Bourgogne et dans le Lyonnais, il ne saurait 
être utilisé dans le Midi, où les Vignes sont très-ramifiées au 
heu de ne former qu’une seule tige portée par un échalas. On 
est obligé, par suite, de râcler les écorces pour détruire les 
larves de Pvrale, 

— M. Vavin signale l'emploi avantageux qui peut être fait 
du Panais pour l'alimentation du bétail; il dépose sur le bu- 
reau un numéro du Journal de l’ Agriculture, renfermant un 
article dans lequel il à traité ce sujet. Notre confrère donne 
ensuite lecture d’une note sur ses tentatives d'introduction en 
France de l’Arracacha, et exprime le désir de voir la Société 
s'occuper de cette question qui lui parait intéressante. 

M. le Secrétaire général prie M. Vavin de vouloir bien ré- 
diger un préjet de programme pour le prix qu’il croirait 


devoir être fondé en vue de provoquer des essais dans ce 


sens. 

M. Rivière insiste sur les soins particuliers que réclame 
l'emballage des racines de l’Arracacha, surtout pour un long 
voyage, et sur la nécessité de se procurer désormais des ra- 
cines entières. Jusqu'ici on n’a reçu en Europe que des colles, 
qui ne donnent qu’une tige trop faible pour arriver jusqu’à 
fructification ; de là, les insuccès qu'on a toujours éprouvés. 
M. Rivière veut bien, du reste, promettre pour le Bulletin 
une note à ce sujet. 

— M. Geoffroy- Saint-Hilaire appelle l'attention de la Société 
sur l'intérêt qui s’attacherait à l'introduction chez nous des 
divers Canards percheurs (Dendrocygna), charmantes espèces 
qui sont d'un apprivoisement facile et pourront être sans 
doute domestiquées sans de grandes difficultés. 

— M. le Président offre à la Société, de la part de M. David 
de Mayréna, un spécimen empaillé de Macareux, provenant 
de la baie d'Arcachon. 


218 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


— Il est déposé sur le bureau : A 
LhGe à rh 
4° De la part de M. Decroix : CN 
sn 

Des moyens d'augmenter la production et de 2010 la 
conservation du cheval de querre. (Conférence faite à la Réu- 
nion des Officiers.) 

2 De la part de M. Paul Madinier : 

De la végétation aux îles Canaries des plantes des pays 
tempérés et des plantes des régions intertropicales, et physio- 
nomie générale de leur agriculture, par MM. les docteurs 
Pérez et Sagot. 

3° Observations sur la formation des pierres chez les écre- 
visses, par M. Chantran. (Extrait des Comptes rendus de l'A- 
cadémie des Sciences.) 

k° Un rapport sur l’état de culture de Cinchonas dans les 
Indes néerlandaises. 

Il est offert à la Société : 

1° De la part de M. Jules Lecreux des graines de Cocozzell. 

2% De la part de M. Franz Kreuter des graines de Mürier 
du Japon; variétés : Golden tree (Arbre d’or) et Red rood (Ra- 
cine rouge). 


Le Secrétaire des séances, 


RAVERET- WATTEL. 


ni 


IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CURRESPONDANCE. 
sara. 


M 
su 


Modifications dans les instincts animaux. 


EX 


Tout le monde connaît les observations si curieuses faites à Rouen, par 
M. Pouchet, sur la nidification du Moineau (Fringilla domestica), obser- 
valions qui semblent établir une certaine perfectibilité dans les instincts des 
animaux. Le savant professeur a constaté, on s’en souvient, que les nom- 
breux Moineaux qui peuplent les rues et les monuments de l'antique cité 
normande ont, depuis un certain temps, modifié, perfectionné le mode 
d'architecture de leurs nids, qu’ils ont su rendre plus sûrs et plus confor- 
tables pour les jeunes couvées. Tous les nids que l’on trouve sur les mai- 
sons des quartiers neufs de la ville sont établis d’après le nouveau plan 
adopté, et diffèrent sensiblement de ceux, déjà anciens, qui peuvent se 
voir encore sur quelques vieux monuments, tels que la cathédrale, par 
exemple, dans les parties non restaurées. 

L’Australasian signalait dernièrement certains faits du même ordre, 
qu'on lira peut-être avec intérêt. 

Antérieurement à l’arrivée des Européens en Australie, l’Hirondelle de 
ce pays (Hirundo frontalis) bâtissait son nid dans les cavernes et les cre- 
vasses de rochers; mais, depuis la construction des villes, cet oiseau, 
renonçant peu à peu à ses habitudes primitives, a pris complétement les 
mœurs de notre Hirondelle d'Europe ; comme elle, il établit son domicile 
dans les maisons, contre les cheminées, au coin des toits, etc.; jamais on ne 
le voit nicher là où il se plaisait autrefois. 

Un changement analogue s’est opéré dans les habitudes du représentant 
australien de notre Martinet d'Europe, le Fairy Martin (Lagenoplastes 
Ariel). Il y a vingt ans, jamais cet oiseau ne se montrait au milieu des 
villes, ni dans le voisinage de la mer ; il fuyait l’homme et nichait généra- 
lement dans les arbres creux. Aujourd’hui, on le voit construisant partout 
son nid en forme de bouteille à long col. Chaque année, de nombreux 
couples font élection de domicile sous les cloîtres de l’Université de Mel- 
bourne, sans se préoccuper du va-et-vient continuel des étudiants, ni de la 
proximité de la mer. 

Ge n’est pas, du reste, chez certaines espèces indigènes seulement que l’on 
constate, en Australie, d’aussi remarquables changements dans les mœurs. 
Des espèces récemment importées présentent des modifications non moins 
curieuses dans leurs habitudes. Le Friquet (Frèngilla montana), par 
exemple, introduit par les soins de la Société d’acclimatation, pour la des- 
truction des Chenilles et autres insectes nuisibles, a pris, en l’espace de deu 
ans, le même genre de vie absolument que le Moineau ordinaire, préférant 
aux champs les rues et les places publiques, et construisant son nid, non 
plus dans les arbres et les haies, comme il le faisait naguère, mais sur les 


A+ 


250 _ SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


toits, dans les gouttières, près des fenêtres, dans le lierre qui " ve 
murailles, elc. Fréquemment, il s’installe dans un nid abandonné a 

delle (Hirundo frontalis), ou de Fairy Martin (Lagenoplastes Ariel), deu 
espèces, comme lui, nouvellement civélisées, ainsi que nous le disions plu 
haut. 

Une modification certainement plus remarquable encore est celle con- 
statée chez un Lépidoptère nocturne du pays, l’Agarista, dont la Chenille, 
autrefois polyphage, ne vit plus que sur la Vigne, depuis l'introduction em 
Australie de ce végétal, botaniquement très-éloigné des plantes qui com- 
posaient primitivement le régime de l’inseete. Quel instinct a pu amener le 
Papillon qui, à l’état parfait, ne prend aucune nourriture et n’a qu’une 
très-courte existence, à pondre ses œufs sur une plante étrangère, et lui 
indiquer que sa progéniture y trouverait un aliment convenable et plus de 
son goût que les végétaux indigènes ? RAVERET-W ATTEL. 


Le Chou-fleur impérial. 


La Société d’acclimatation, qui s'occupe avec tant de zèle de la propaga- 
tion des végétaux utiles, voudra bien, nous l'espérons, nous permettre de 
Pentretenir un instant d’un légume nouveau, qui a fait ses preuves et quise 
maintient toujours au premier rang, dans notre jardin d'Hanneucourt, soit 
dans la culture de primeur sous châssis, soit dans celle de pleine terre. 
C’est le Chou-fleur impérial, aue nous cultivons depuis cinq ans, sans inter- 
ruption et qui nous a constamment offert de bons résultats à la récolte. 

Depuis 1869, nous cultivons en pleine terre et sous châssis ou distincte- 
ment, selon lasaison, deux variétés de Chou-fleur ; Pune dite Chou-fleur èm- 
périal, Yautre Chou-fleur Lenormand, bien connue par ses bonnes qualités, 
et sur laquelle nous croyons superflu de nous étendre. En 1570, malgré les 
difficultés causées par l'invasion étrangère, ces deux variétés furent semées 
chez nous, dans des conditions égales, au commencement du mois d’octebre ; 
un premier repiquage eut lieu aux environs de la Toussaint, sous cloches et 
sous châssis à froid ; et un deuxième en février, sur couche chaude sous des 
panneaux plantés en Pommes de terre Marjolin, Royal Kidney et Early 
rose ; d'où ils furent levés en grosses mottes avec précautiou et mis en plant 
sur couche tiède, vers le milieu de mars, dans la proportion de 15 pieds 
pour deux panneaux, quoiqu'il soit en usage de n’en mettre que six, das 
chacun, de Ja variété Lenormand (quelques jardiniers n’en mettent même sm. 
que quatre). On peut en placer facilement sept de Chou-fleur impérial, deux 
pieds sur chaque ligne bordant les planches du eoffre et trois dans le rang 
du milieu ; c’est ainsi que nous procédons chaque année, mais cette fois qui 
n’est pas une exception, 45 pieds de Chou-fleur garnissaient deux panneaux ; 
ils avaient été mis en plant très-forts et en motte, qu’on ne l’oublie pas, avec 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 291 


K# 
" 


beaucoup de précaution, ainsi qu’on a dû le remarquer plus haut, et nous 


appelons particulièrement l'attention de nos collègues sur cette importamte 
question, s’ils veulent réussir dans la culture du Chou-fleur sous châssis, 
culture irop négligée dans les châteaux et les maisons bourgeoises, nous ne 
savons trop pourquoi, puisque l’on a tout sous la main pour la mener 
à bien. 

A noire retour à Hanneucourt, le 23 mars, nous trouvâmes la maison et 
ses dépendances envahies par des Prussiens, mais notre Jardin était en bon 
état ; les Choux-fleurs impérial et Lenormand, malgré la mauvaise saison, 
offraient une belle végétation et nous faisaient présager une bonne et abon- 
dante récolte, ce qui eut effectivement lieu ; ils recurent les soins ordinaires, 
c’est-à-dire ceux qu’exige la culture sous châssis, on continua les arrose- 
menis à l’eau tiède, qu’il ne faut jamais oublier, mais le Chou-fleur impérial 
devancait de beaucoup en précocité la variété Lenormand, plantée à côté 
dans les mêmes conditions. Enfin, le 18 avril, nous commencämes à récolter 
le Chou-fleur impérial et à le faire servir sur la table, tandis que la variété 
Lenormand commençait à peine à tourner; beaucoup ne montraient pas 
leur grain ; ce n’est que le 20 mai que nous avons coupé les premiers choux- 
fleurs Lenormand ; le 7 juillet les graines du premier étaient presque mûres 
quand le dernier ne faisait qu’entrer en fleurs. 

De tout ce qui précède, il résulte pour nous que le Chou-fleur impérial 
est une très-bonne acquisition pour les jardiniers de maisons bourgeoises, 
pour les jardiniers maraîchers et pour les primeuristes ; c’est à MM. Duflot et 
Delaville, marchands de graines, quai de la Mégisserie, n° 2, à Paris, que 
nous sommes redevable de cette précieuse variété, dont ils nous ont gra- 
cieusement offert les semences, avec prière de l’éludier, et c’est ce que nous 
avons fait consciencieusement. 

La précocité du Chou-fleur impérial sur celui Lenormand est très va- 
riable; en 1870, elle a été de dix-huit jours ; en 1874, elle fut d'environ un 
mois ; en 1872, elle descendit à douze jours ; il en fut de même en 1875. 
Nous ne savons à quoi attribuer ces variations, que nous nous bornons à 
signaler sans le moindre commentaire ; mais nous pouvons affirmer que le 
Chou-fleur impérial est toujours plus hâtif que la variété Lenormand, soit 
sous châssis, soit en pleine terre. : 

Le Chou-fleur impérial donne des têtes aussi fortes ou à peu près que la 
variélé Lenormand, le grain est blanc, très-serré, très-uni, très-fin, et jamais 
une feuille ne paraît au milieu de la pomme ; son feuillage est d’un vert plus 
pâle ; l’ensemble de la plante est moins volumineux ; les feuilles sont allon- 
gées et moins eloquées ; c’est ce qui le fait reconnaître facilement des autres 
variétés. À la éégustation le Chou-fleur impérial est fin ; il est onctueux et 
moelleux, et ne dégage pas l’odeur forte de certains Choux-fleurs, il est hâtif 
et il ne demande pas plus de soins que ses congénères; ce sont tous ces 
avantages incontestables que cinq années de culture et d’expériences, con- 
sécutives et comparatives, nous permettent d'affirmer, qui lui feront prendre 


252 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


le premier rang, dans la série des bons et beaux choux-fleurs ; aussi d’après 
tous ces titres, nous n’hésitons pas à le recommander vivement à l'attention: 
de tous nos collègues. 

Dans nos semis de l’année dernière, nous avons remarqué tout spéciale- 
ment un Chou-fleur, qui nous à paru avoir quelque mérite ; il sort du Chou 
fleur impérial, et si nous parvenons à le fixer définitivement, nous aurons- 
l'honneur d'en entretenir la Société d’acclimatation, qui est toujours à Ja 
recherche des bonnes nouveautés. Ge Chou-fleur à la pomme aussi forte que- 
l’impérial, le grain en est aussi blanc et aussi fin; mais il a l’immense- 
avantage d’avoir les feuilles encore plus courtes et beaucoup moins volumi— 
neuses que celles de nos variétés connues et cultivées; nous en avons récollé- 
les graines que nous avons fait semer séparément ; il a élé repiqué de même 
que les autres, et nous attendons la récolte pour nous prononcer défiaitive-- 
ment'sur ses avantages, s'il en possède. : 1:11. 110 RSR NNEIMIENNRS 


e e e° e ° ° e . e e . e e e ° e e e ° e e æ e œ 


BOssiN, 


Propriétaire-cultivateur, à Hanneucourt-Gargenvilk.. 
par Mantes-sur-Seine (Seine-et-Oise). 


L’Abeiïlle italienne. 


Extrait d'une lettre adressée à M. le Secrétaire général de la Société 
d’acclimatation, par M. le D'J.J. LAFON, de Sainte-Soulle, par La Jarrie- 
(Charente-Inférieure). 


Reçu membre de la Société d’acclimatation en décembre 1872, je rechrer— 
chaï aussitôt parmi les concours proposés par la Société, à quels travaux 
utiles je pourrais bien me livrer. D’après mes modestes ressources je pris læ 
résolution d’atteindre le but proposé par la Société, pour la propagation, 
en France, de l’Abeille italienne, bien qu’apiculteur de fraîche date. 
En 1871 je possédais simplement deux ruchées logées en ruches à 
hausses et dont je ne m'occupais pas ; mais après avoir lu quelques articles. 
d’apiculture dite rationnelle au moyen des cadres mobiles, dans le journal. 
de M. le docteur J. Pelletan, je me fis l’élève assidu du principal rédacteur: 
pour la partie apicole, M. Ch. Dadaut, et c’est sa méthode que dans la suite 
j'ai cherché à mettre en pratique; je pris donc goût à cette étude, et je me- 
fis fabriquer des ruches à rayons mobiles, avec l'intention d’y loger les es— 


saims qui sortiraient de mes ruchées au printemps de 1872; mais le mois. 


de mai allait disparaître et avec lui l’espoir de voir sortir un essaim, l’impa— 
tience aussi s’en mêlant, fit qu'un beau jour, las de voir mes Abeilles. 
faire des préparatifs d’essaimage qui n’aboutissaient pas, je pris le parti de 
les transvaser. Pour moi, novice, ce ne fut pas une simple besogne, mais en- 
fin, après force labeur, du même coup, comme chacune de mes ruchées: 
possédait des alvéoles maternelles closes, de deux ruchées j'en fis quatre, et: 


TAPER 4 LORIE 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 253 


avec deux essaims que j’achetai, je me trouvais possesseur, au mois de 
juillet, de six colonies d’Abeilles noires logées en ruches à cadres mobiles: 
guis au mois d'août, je fis venir de chez M. Mona, de Bellinzona, canton du 
Tessin (Suisse), six mères d’Abeille italienne (Apis ligustica); de ces six 
wnères, à leur arrivée une était morte, etdes cinq autres, je parvins à en faire 
adopter quatre, la cinquième fut sacrifiée par les Abeilles noires auxquelles 
j'avais voulu la faire adopter. Grande fut ma joie, vingt-sept ou vingt-huit 
_jours après, lorsque je vis apparaître sur le tablier de mes ruches les pre- 
ænières Abeilles jaunes. Au moment de l'introduction des mères italiennes, 
zen prenant la précaution de conserver dans de petites rucheltes avec trois 
Æu quatre rayons et quelques Abeilles, mes mères noires, pour les remettre 
avec leurs anciennes populations, dans le cas de non-réussite d'introduction 
des mères jaunes, je commis, dans la saison où j'étais, la grave faute de 
amonler deux nouvelles ruchées, et je dus nécessairement pour les former, 
affaiblir les autres ruchées, et un hiver exceptionnel aidant, pendant lequel 
les Abeilles n’ont presque jamais cessé de sortir, et se sont sans cesse expo- 
-sées à périr sans profit et en consommant continuellement, je me trouvai au 
20 mars 1873, après avoir compté les morts et les vivants, avec trois ruchées 
seulement, deux jaunes et une noire; encore à cette époque une de mes jau- 
nes consistait tout bonnement dans la mère, bien entendu, et deux ou 
4rois cents d’Abeilles qui étaient insuflisantes à échauffer les œufs que pon- 
«ait la mère; indubitablement cette mère et ses rares compagnes eurent 
#té vouées à une mort certaine, si je n'étais venu à leur secours en leur 
donnant successivement des cadres chargés d’Abeilles el de couvains em- 
—Pruntés à ma ruchée noire, et de cette façon je suis parvenu à faire une ru- 
<hée des plus fortes en lui donnant plus tard des rayons vides. 

Vous le voyez, j'étais loin du programme proposé par la Société d’accli- 
amatation ; mon succès, si succès il y avait, n’étant pas grand, et un peu par 
ma faute ; cependant je ne désespérais pas encore, et deux voies me res- 
aient ouvertes pour atteindre le but. 

Dans l’une et dans l’autre, il me fallait acheter des colonies du pays, puis 
les fransvaser en ruches à rayons mobiles ; j’achetai donc dix ruchées et les 
Xransvasai en rayons mobiles, ce fut mon travail du mois d’avril, et il fut 
couronné d’un entier succès. 

Le moyen alors le plus simple, le plus expéditif, celui qui m'aurait donné 
Ae moins de peine pour italianiser mes colonies noires, étant de faire venir 
de chez M. Mona autant de mères jaunes que j'avais de ruchées noires et 
Ay introduire les mères italiennes. L'autre moyen beaucoup plus compli- 
qué, consistant à élever de jeunes mères, puis à les faire féconder par des 
mâles italiens et enfin les introduire dans mes ruchées noires ou plutôt in- 
Aroduire des rayons chargés d’Abeilles noires et de couvains dans les ru- 
<hes contenant les jeunes mères fécondées, c’est-à-dire à faire çe que 
M. Dadaut appelle l’essaimage progressif. C’est à ce dernier moyen et à ce 
sernier procédé que je me suis arrêté, pensant qu’agir ainsi C'était faire réel- 


# 
+ 
Î 


25% SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Jement de l’acclimalation, tandis qu'avec le premier moyen je ne faisais 
que de l'importation. Et si vous voulez bien me le permetre, je vais vous 
exposer sommairement de mon mieux, la série d'opérations auxquelles j’ai 
dû me livrer, les succès et les insuccès qui en ont été la conséquence, les 
difficultés et les accidents qui sont survenus. 

Avec des colonies jaunes aussi peu fortes que celles que je possédais, Es m'a 
fallu d’abord les nourrir et les fortifier par tous les moyens en mon pouvoir, 
pour les amener à produire des mâles, et je n’ai pu obtenir ce résultat qu’un 
peu tard, en juin. De mes deux ruchées jaunes, j’en destinais, l’une, celle 
dont les Abeilles et la mère me paraissaient les plus beïles, à me fournir 
les alvéoles maternelles ; l’autre, je la consacrais à me donner surtout le 
concours de ses mâles, espérant par là obtenir une progéniture moins sujette 
à dégénérer. Le la première, celle qui au 20 mars était réduite à deux ou 
trois cents individus, et qui dans ce moment possédait au moins huit cadres 
de couveuses de 30 centimètres carrés et tous chargés d’Abeilles, j’enlevai, 
avec trois cadres, la mère, pour la mettre dans une autre ruche vide avec 
trois autres rayons pris à des ruchées noires, La ruche privée de sa mère, et 
contenant des couvains de moins de trois jours se mit immédiatement à 
construire des alvéoles maternelles, neuf jours, après elles étaient closes, et 
après les avoir comptées, je préparai autant de ruchettes moins une qu’il 
y-avait d’alvéoles susceptibles d’être enlevées, puis dans chacune de ces ru- 
chettes au nombre de sept, séance tenante, j’introduisis autant de cadres 
pris à des ruchées noires contenant du miel et des couvains et chargés d’A- 
beilles, puis je portai ces ruchettes dans une chambre obscure jusqu’au len- 
demain dixième jour de l’orphelinat; j'ouvris alors ma ruche orpheline, 
j'en äétachai avec une main un centimètre de rayons autour de chaque al- 
véole maternelle, que j’insérai dans chacune des pelites ruchettes, après les 
avoir portées à la place que je leur réservais. Six jours après je vérifiai, en 
les recherchant, la naissance de mes jeunes mères, qui se trouvaient toutes 
écloses ; sur les huit une seule me parut mal conformée ; aussi ne fut- 
elle pas fécondée et ne sortit probablement pas pour se faire féconder ; une 
deuxième se perdit dans sa course nuptiale, je le suppose du moins, car 
je ne la rencontrai pas plus tard dans sa ruche, qui fut menacée de pos- 
séder une Abeille ouvrière pondeuse. 

Voici comment je procédai à la fécondation de mes jeunes mères par des 
mâles italiens: le dix-neuvième jour de l’orphelinat, le troisième jour au soir 
de la naissance de mes jeunes mères, je mis toutes mes rucheites contenant 
mes jeunes mères non fécondées dans la chambre obscure pour trois jours, 
j'y joignis aussi la ruche qui contenait les mâles, et le septième jour de la 
naissance, par un beau soleil, vers dix heures du matin, après avoir versé 
quelques cuillerées d’eau sucrée sur les rayons de chaque rucheite, et après 
avoir mis mes ruchettes à leurs places respectives, je donnai la liberté à 
mes Abeilles, mais quelle ne fut pas ma douloureuse sürprise en ouvrant la 
ruche contenant les mâles jaunes. en voyant les rayons au nombre de onze, 


TE 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 255 


tous détachés, et toutes les Abeilles au nombre au moins de 48 à 20 litres 
ensevelies sous les rayons chargés de miel et de couvains, et tout mon la- 
beur eût été irrévocablement perdu si la ruche qui avait fourni les alvéoles 
maternelles n’eût pas contenu de mâles jaunes ; heureusement elle en était 
abondamment pourvue, et la fécondation s’opéra selon mon désir, c’est-à- 
dire par des mâles jaunes, comme les produits me l'ont prouvé plus tard. 
Vous pouvez remarquer que j'avais provoqué la sortie de mes jeunes mères 
et des mâles italiens à une heure où les mâles ne sortent pas habituellement, 
et cela en les tenant captifs pendant trois jours, en un lieu obscur, puis en 
leur servant un bon repas cinq minutes avant de les exposer à un beau s0- 
leil. Par précaution j'avais placé devant l'entrée de mes ruchées noires un 
grillage de tôle perforée, qui ne permet pas au mâle de sortir, de cette facon 
j'augmentais la chance d’une fécondation par les mâles jaunes, au cas qu’une 
jeune mère paresseuse n’eût pas été eniraînée immédiatement après Ja 
sortie de la chambre obscure. 

En agissant de la sorte une seconde fois, je suis parvenu à élever en tout 
dix mères jaunes fécondées par des mâles jaunes, et qui sont maintenant à 
la tête d’autant de ruchées, avec la colonie qui a fourni ces jeunes mères. 
J’en possède onze, et si je n'avais perdu par accident ma ruchée jaune, qui 

tait destinée à fournir les mâles, je serais justement arrivé au chiffre de 
douze colonies, celui fixé pour le concours. En résumé avec trois ruchées, 
deux jaunes et une noire qui me restaient, fin mars 1873, — dix ruchées 
noires achetées et transvasées dans des rayons mobiles en avril 1873, je me 
trouve aujourd’hui, fin novembre 1873, avec dix-sept colonies, onze jaunes 
et six noires, possédant toutes de six à neuf cadres remplis de miel ; il me 
reste en outre 25 cadres de bâtisses vides, et j'ai récolté cent kilogrammes 
de très-beau miel au moyen de l’extracteur (c’estie modèle modifié par mon 
confrère, M. le docteur de Mirbeck, de Saint-Dié, que je possède). 

Je serais probablement parvenu à un résultat bien supérieur, si la 
maladie, la Loque, pourriture du couvain, n’était venue faire sentir ses terri- 
bles ravages, et justement dans ma ruche jaune souche. Je l’ai vue au mi- 
lieu de l'été, avec sept ou huit cadres de couvains, atteinte dans toutes ses 
larves sans exception ; je me suis contenté de lui enlever les gâteaux occu- 
pés par les larves pourries, de les remplacer par des bâtisses vides, d’as- 
perger le tout, de huit jours en huit jours, avec de l’eau contenant un dixième 
d’acide sulfurique, et j’ai vu cette ruchée se remonter complétement ei me 
présenter que quelques rares alvéoles à couvain pourri. Trois autres jeunes 
ruchées, dontles mères étaientissues de la souche au momentsans doute où elle 
commencait à subir l'atteinte de la maladie, s’en sont aussi ressenties; trai- 
tées de la même façon, j'ai cru voir leur santé s'améliorer, cependant je 
n’en ai pas la certitude, et ce n’est qu’au printemps prochain, si elles pas- 
sent l’hiver, que je saurais à quoi m’en tenir. 

Je suis tenté de rapporter l’origine de la maladie à une maladresse de 
ma part ; j'avais négligé à dessein de faire enfouir les débris de la ruchée 
jaune dont les rayons s'étaient détachés, je voyais avec regret une quantité 


256 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


prodigieuse de miel perdue, et j'avais voulu le faire lécher par mes abeilles : 
est-ce là qu’elles auraient contracté la maladie? A cette époque je n’avais 
qu’une seule colonie de jaunes, et c’est elle qui a été atteinte, tandis que de 
onze ruchées noires, toutes en ont été exemples ; et dans ce cas les jaunes 
auraient été punies de leur gourmandise. 

Chemin faisant, dans toutes ces fabrications, dans ces suppressions et ces 
substitutions d’abeilles mères, j’ai pu constater qu’une mère déja fécondée ne vit 
pas vingt-quatre heures séparée de ses abeilles, tandis qu’une jeune reine non 
fécondée a pu rester pendant quarante-huit heures sur la cheminée de ma 
salle à manger, dans un verre recouvert d’un morceau de tulle noir. Je me 
suisassuré aussi que deux mères fécondées, mises toutes les deux dans une 
ruchette d'observation avec une poignée d’abeilles, se livraient un combat 
jusqu’à la mort de l’une d’elles. Tandis que dans une ruche orpheline, par je 
ne sais quelle cause, et qui s’était fait des alvéoles maternelles, j’ai cru voir 
que c'était les abeilles qui se chargeaient de l’exécution des jeunes reines; 
voici sur quel fait repose cette opinion. 

Un matin, en passant devant mes ruches, j’apercus au-dessous du tablier 
de l’une d’elles, sept cadavres de jeunes mères ; l'ouvrir ne fut que l'affaire 
d’un moment, et je pus en compagnie de ma femme, qui me sert habituelle- 
ment d’aide, constater l’existence d’autant d’alvéoles maternelles plus une, 
qui venaient d'être habitées, qu’il y avait de cadavres hors de la ruche, puis 
une alvéole qui était intacte, mais dont la propriétaire paraissait disposée à 
rompre les parois; en continuant nos recherches, nous découvrimes une 
jeune reine qui se promenait gaiement au milieu des abeilles, et qui nous 
expliquait le nombre huit des alvéoles qui se trouvaient débarrassées de 
leurs habitantes; puis nous fimes ce raisonnement que d’autres avaient fait 
avant nous : la reine vivante qui se promène si fièrement au milieu de ses 
sujets est probablement l’aînée, celle qui se charge de tuer ses jeunes sœurs, 
et qui réserve le même sort à celle qui n’est pas encore éclose ; pour la sauver 
de cette cruelle fin, j’ouvris alors l’alvéole par sa partie inférieure, et aussitôt 
une magnifique reine tomba dans la main de ma femme, etfut emportée dans 
un verre à la maison. Deux jours après passant devant la même ruche, bien 
que j'avais eu soin d'enlever les sept cadavres de reines que j’v avais ren- 
contrés, je vis un nouveau cadavre de jeune mère ; nous inspectâmes aussitôt 
la ruche, et il nous fut impossible d'y découvrir la moindre trace de reire, 
alors nous nous rappelâmes que depuis deux jours dans un verre sur la che- 
minée de notre salle à manger, il y en avait une, peut-être celle qui était 
destinée à perpétuer cette ruchée, l’un de nous alla la chercher, elle était 
encore vivante, puis nous la déposâmes au milieu des abeilles qui lui firent 
bon accueil, et huit jours après il y avait des œufs d’ouvrières dans la ruche, 
ce qui prouve la fécondation dé la reine ! D' J.-J. LAFON. 


Le gérant : JULES GRISARD. 


PARIS, = IMPRIMENIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2 


2. 


I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 


UTILISATION 
DES ZÈBRES DE BURCHELL 


COMME ANIMAUX DE TRAIT 


Par M. Saint-Yves MÉNARD. 


On croyait autrefois et l’on croit encore trop généralement 
qu'il est impossible d’utiliser les espèces sauvages du genre 
Equus, lHémione, le Zèbre, le Dauw. 

Or, nous sommes en mesure, au Jardin d’accclimatation, 
de démontrer le contraire en ce qui concerne le Dauw ou 
Zèbre de Burchell, originaire du cap de Bonne-Espérance où 
il vit à l’état sauvage. 

Des Dauws se trouventen Europe dans tous les jardins z00- 
logiques, mais ils y sont entretenus simplement comme ani- 
maux de collection, soit qu'on ne se préoccupe pas de leur 
utilisation, soit qu'on ignore les moyens de l'obtenir. 

Chez nous, au contraire, depuis la fondation du jardin, ils 
ont été, suivant les vues de votre Société, l’objet d’essais et 
d'expériences tendant à les faire employer au service de 
l’homme. 

On était arrivé déjà, au Jardin d’acclimatation, il y a 
six à huit ans, à dresser un Zèbre de Burchell mâle et un Zébre 
yrai femelle. 

Ils étaient attelés seuls et à deux et pouvaient être employés 
d'une façon à peu près convenable. Ils avaient même été ar- 
telés à quatre, les deux Zébres au timon, et deux chevaux de- 
vant, c'est ainsi qu'ils marchaient le mieux, car ils suivaient 
volontiers les chevaux qui les précédaient. 

Mais je me propose surtout d'appeler votre attention, mes- 
sieurs, Sur une série d’essais qui se font d’une manière sui- 
vie sur sept animaux, depuis la restauration du Jardin, et dont 
les résultats sont des plus salisfaisants et surtout des plus en- 


courageants. 
3° SÉRIE, T. |. — Mai 1874. 17 


258 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


* 


À peine commencions-nous à renaître, après les doulou- 
reux événements qui nous avaient anéantis, notre directeur 
avait pu se procurer six Dauws, le 45 juin 1872, puis un sep- 
tième, cinq mois plus tard. C'était le cas de faire une tenta- 
tive sérieuse de domeslication. 

Les animaux, encore jeunes, importés depuis peu, se frou- 
vaient dans des conditions favorables en ce sens qu'ils n’a- 
valent encore subi aucun traitement, et aucun mauvais irai- 
tement; cependant tout était à faire. 

Il nous a paru, connaissant le naturel sauvage et la bruta- 
lité des Dauws, qu'il fallait s’occuper d’abord de les familia- 
riser, de les apprivoiser, à vrai dire. 

Dans presque tous les jardins zoologiques, les Dauws, aussi 
bien que les Hémiones et les Zébres, sont installés dans des 
boxes communiquant avec des paddocks et se trouvent entre- 
tenus d’une façon commode et hygiénique, c’est vrai, mais 
sans contact avec l'homme. 

Les gardiens nettoient successivement chaque partie du 
logement, quand elle est libre : ils jettent le fourrage dans le 
râtelier par-dessus les séparations, ils portent l’avoine et le 
son dans l’auge en l'absence de l’animal; où s'ils entrent dans 
le box ou dans la cour avec lui, c’est avec défiance, ils pré- 
viennent même ses attaques en l’écartant avec des bâtons, des 
fourches ou des fouets. 

Un pareil système n’est pas fait pour communiquer de la 
douceur aux animaux. Ceux-ci, en somme, sont les premiers 
attaqués, ce qui les rend toujours craintifs, souvent mé- 
fiants et méchants pour leurs gardiens. 

On traite ainsi comme des animaux dangereux tous ceux 
qui ne paraissent pas être susceptibles de domestication ou 
que lon ne cherche pas à utiliser. 

Quand sont arrivés nos Dauws, il a donc fallu d’abord les 
familiariser par un traitement tout différent. Le meilleur 
moyen semblait être de es soigner comme des chevaux, de ies 
attacher devant le râtelier avec des licous et des longes, de leur 
donner la nourriture directement, de leur faire le pansement 
comme à des chevaux. Ce moyen fut adopté. 


UTILISATION DES ZÈBRES DE BURCHELL. 259 


La difficulté que nous avons éprouvée pour les installer à 
l'écurie démontre que ces animaux étaient absolument dans 
les conditions ordinaires au début de la captivité, craintifs, 
brusques et indociles. 

On les avait placés d’abord, tous ensemble, en liberté dans 
un vaste box. Il n’était pas impossible d’y entrer avec eux, 
mais 1l était dangereux de les aborder et impossible de leur 
mettre le licou. Ils commençaient par se défendre des appro- 
ches par des ruades, puis ils cherchaient à mordre quand on 
les touchait à la tête. Saisis, ils se débarrassaient immédiate- 
ment par des mouvements brusques et désordonnés d’une vio- 
lence extrême. 

Nous avons dû les faire passer un à un dans un box voisin, 
et les prendre là par des moyens de contention. Le lacet est 
le seul qui nous ait bien réussi : un homme monté sur une 
cloison du box Jetait un nœud coulant sur la tête de l'animal, 
puis, en ürant la corde au dehors, on l’appliquait contre cette 
cloison ; on pouvait alors, avec quelques précautions, metire 
le licou. 

Le même lacet, passé de loin par son extrémité derrière un 
barreau du râtelier, servait à attirer le Dauw captif à sa place, 
où on l'attachait à deux longes quoi qu'il fit pour se débattre. 

Les six Dauws furent attachés au même râtelier, séparés les 
uns des autres par de simples bat-flancs. 

Il faut avouer que ce début n’a pas été encourageant. Nous 
avions affaire à de vrais animaux sauvages, leur installation 
n'était pas sans danger pour les bommes ni surtout pour eux- 
mêmes, et encore elle n’était pas parfaite. 

La rangée des six Dauws était presque inabordable. Quand 
on passait entre eux, 1ls ruaient, ils mordaient, ils sautaient, 
se portaient en avant ou se reliraient en arrière, se renver- 
saient. 

Cependant ils se comportaient assez bien, à l’attache, quand 
ils étaient abandonnés à eux-mêmes. 

C'est alors que nous avons eu l’idée d’intercaler des che- 
vaux de service dans la rangée des Dauws, de manière que 
chacun de ces derniers fût placé entre deux chevaux, séparé 


9260 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


d'eux par des bat-flancs ; jy attache une grande importance, 
persuadé que nous devons à cette installation le bon résultat 
obtenu. : 

On a pu ainsi, sans crainte et sans danger, aborder chaque 
animal des deux côtés, faire sa litière, lui présenter à boire, 
le nourrir, l'habituer au pansage peu à peu, enfin le familia- 
riser. On agissait d’ailleurs sur lui d’une manière constante, 
sans même s’en occuper spécialement, en donnant des soins 
aux chevaux voisins, en harnachant, en attachant et détachant 
ces chevaux suivant les besoins. 

Nous devons penser même avoir mis à profit l’instinct d'i- 
mitalion. Îl estincontestable qu’un animal, à peine apprivoisé. 
prend confiance peu à peu à l’approche de l’homme quand il 
voit son Voisin rassuré. 

Toujours est-il que nos six Dauws se sont montrés chaque 
jour de plus en plus familiers ; ils ont été assez calmes pour ne 
pas avoir d'accidents d’écurie (prises de longe ou autres), ils 
se sont habitués au contact du gardien, ils se sont laissé pan- 
ser régulièrement à la brosse el à l’étrille. 

Nous n'avons pas voulu les laisser longtemps immobiles 
dans leurs stalles. L’exercice nous paraissait indispensable 
dès les premiers jours. 

Nous les avons mis en liberté de temps à autre dans une 
erande pelouse entourée de grillage. Ce n’était pas chose aisée 
que de les détacher, et surtout de les rattacher, tant qu'ils ont 
craint d’être touchés à la tête, mais rien n’était plus simple 
que de les faire sortir et rentrer. Îl suffisait de les diriger 
un peu sur le chemin de la pelouse qu'ils ont vite appris à 
connaître; au retour, ils reprenaient d'eux-mêmes leurs 
places. 

Nous n’avons rien fait de plus pendant cinq mois. C'était 
peu en apparence, c'était beaucoup pour nous qui pouvions 
apprécier les progrès journaliers de familiarisation et qui en 
connaissions toute l'importance. Quelques essais prématurés 
de harnachement nous ont appris, au reste, qu'il ne fallait pas 
commencer le dressage avant d’avoir obtenu un apprivoise- 
ment complet. Par contre, la suite nous à démontré que, ce 


UTILISATION DES ZÈBRES DE BURCHELL. 261 


premier résultat atteint, chaque Dauw à son tour se prêtait 
trèés-aisément au dressage. 

La douceur et la patience étaient des moyens puissants; la 
force et la brutalité ne pouvaient que nous retarder. 

Disons ici que nous avons été fort bien secondés dès cette 
première période par un gardien des plus raisonnables, très- 
doux, très-calme, toujours disposé à caresser ses animaux et à 
les gâter à l’aide de quelques friandises. Il a pris à cœur de 
maitriser les Dauws confiés à ses soins, et il a contribué pour 
une grande part au résultat déjà obtenu. 

Au mois de novembre 1873, six mois après l’arrivée des 
Dauws, nous avons cru pouvoir commencer des essais d’atte- 
lage, et nous avons choisi deux femelles (Manette et Marianne) 
qui semblaient être les plus douces. Elles y avaient été prépa- 
rées déjà par le harnachement à l'écurie; on les avait habituées 
à porter la sellette, le collier, puis la bride et ensuite à rece- 
voir un harnais à bricole complet d'attelage à deux. Elles s’é- 
taient défendues d’abord par des sauts et des mouvements 
brusques, elles avaient cherché à mordre quand on leur met- 
tait la bride, mais nous en avions triomphé, grâce à l’installa- 
tion précédemment décrite. 

À cette époque, un dresseur de chevaux très-habile, M. C..., 
vint nous proposer de prendre trois de nos Dauws, se faisant 
fort de les atteler et de les dresser. 

Nous avons accepté ses services sans renoncer à nos pro- 
pres essais : trois animaux (Lion, Panthère, Léopard) lui fu- 
rent confiés le 5 janvier 1873. Il devait recevoir une prime 
fixée le jour où il nous conduirait au trot soutenu, sans arrêt 
ni galop, deux Dauws attelés à un breck, du Jardin d’acclima- 
tation à la place de la Concorde, puis, après un repos, de la 
Concorde au Jardin. 

Je dis tout de suite que nous n'avons pas eu à lui payer la 
prime. Son essai n’en est pas moins intéressant ; il nous a per- 
mis de comparer à nos moyens des moyens opposés. 

M. CG... a reçu trois Dauws en bon état, bien nourris, vigou- 
reux, incomplétement apprivoisés. Pour les soumettre au 
dressage immédiatement, il a dù lutter contre eux. Au lieu 


262 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


d'inspirer confiance, il se fit craindre. Impuissant par les 
moyens de contention, il eut recours à l’affaiblissement par la 
diète plus ou moins prolongée ou par l’alimentation insuffi- 
sante. 

À la voiture (charrette à deux roues) il fit prisonniers deux 
Dauws dans trois brancards, puis trois Dauws dans quatre bran- 
cards de manière que l’un des animaux, voulant se débattre 
ou s’écarter, fût maintenu par les autres : moyen grossier! De 
plus, il les conduisit brutalement, les prenant par une voix 
sévère el les frappant fortement du fouet. 

Bref, au bout de quatre mois et demi, il n’avait obtenu qu’un 
résultat médiocre. Après avoir tenté d'atteler deux de ses 
Dauws au breck, il renonçait à gagner sa prime et il nous 
rendait, le 23 mai, des animaux fatigués, amaigris, moins fa- 
miliers peut-être, hors d’état d’être utilisés ; un d’eux a mis 
plus de huit mois à reprendre un embonpoint normal. 

Toutefois, il nous avait montré jusqu’à quel point l’homme 
peui soumettre les Dauws à son influence. Il les avait domptés 
plutôt qu’apprivoisés, mais il n’en est pas moins vrai qu’au 
boui de quatre jours, il avait pu nous en présenter un con- 
duitau cavecon. Il a même soumis ces animaux à des exer- 
cices en liberté dans un manége. 

I faut remarquer qu’en pareil cas, l’influence cesse avec 
l’homme qui l’a exercée et ne se transmet pas. Quand nous 
avons repris les Dauws confiés à M. C..., il a fallu quelque 
temps pour les familiariser de nouveau avec leur gardien. 

Au contraire, ces mêmes animaux, trailés avec douceur, ad- 
mettent facilement, comme vous le verrez, la substitution 
d’un conducteur à un autre. 

Ainsi donc, toujours patients de notre côlé, nous avons en- 
trepris le dressage de nos deux femelles par les moyens de 
douceur. 

On a commencé à les promener une à une dans le jardin, 
le harnais sur le dos. Chose curieuse, il était difficile, même 
pour deux hommes, de les tenir à la longe ; elles n'avaient pas 
encore complète confiance. Au contraire, leur gardien babi- 
tuel pouvait aisément à lui seul les tenir en guide en les fai- 


UTILISATION DES ZÈBRES DE BURCHELL,. 263 


sant marcher devant lui. Bientôt il les a promenées de cette 
facon toutes deux ensemble et les a habituées à marcher côte 
à côte, comme dans l’attelage à deux, à sentir le mors et à se 
laisser conduire. 

Rien n’a été plus simple ensuite que de compléter l’atte- 
lage. On à approché un breck léger derrière les Dauws en 
dirigeant la flèche avec précaution, et l’on a pu fixer les traits 
et passer les chainettes. 

Cela ne s’est pas fait très-bien du premier coup, mais la 
chose est devenue facile quand les animaux ont élé habitués 
aux deux ou trois aides employés. 

Les deux Dauws ainsi attelés n’étaient pas tout à fait assez 
maintenus, il a fallu des plates-longes {pour empêcher les 
ruades, mais rien de plus. Le défaut de ruer était effective- 
ment à peu prés le seul à combattre. Ils ne cherchaiïent guère 
à se débattre, ils n'étaient pas du tout rétifs, ni peureux; ils 
tiraient assez régulièrement. 

Nous avons fait d’abord le tour du jardin, une fois, deux 
fois, trois fois de suite, puis nous sommes allés dans les che- 
mins du Bois de Boulogne, dans l’avenue de Neuilly, fréquen- 
tée par de nombreuses voitures allant et venant, enfin dans les 
rues de Paris. Après plusieurs exercices au pas, nous avons pu 
meltre nos Dauws au trot. Leur trot a étésoutenu, mais il est 
toujours resté lent. Quoi qu'il en soit, au bout de trois mois, 
ils ont fait au trot le trajet du Jardin à la Concorde, moitié de 
celui qui avait été exigé de ceux du dresseur, représentant 
près de A kilomètres. 

Ce premier essai nous à démontré qu'il était facile, en 
somme, parles moyens que nous avions adoptés, d'obtenir un 
travail sérieux des Dauws; mais ce n’était pas assez d’ obtenir 
un service de trait léger, au trot, d'animaux qui paraissaient 
aptes encore à déployer une grande force, aussi avons-nous 
résolu de les essayer à ce second point de vue. 

Mais nous arrivions à une époque de l’année où le service 
actif du Jardin ne nous permettait plus de consacrer beaucoup 
de temps aux Dauws. Nous avons dù interrompre le dressage 
pendant cinq mois pour Île reprendre seulement au mois de 
novembre dernier. 


26h SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Ce n’était pas du temps perdu tout à fait, et nous n'avions 
pas la crainte de rétrograder, toujours à cause des disposi- 
tions prises à l'écurie pour maintenir nos Dauws sous notre 
dépendance. 

Effectivement nous avons pu commencer de nouveaux 
essais sans difficulté; nous sommes même arrivés prompte- 
ment à obtenir un travail utile de trois sujets qui comptent 
aujourd'hui parmi nos meilleurs animaux de service. Depuis 
deux mois ils sont attelés au tombereau et employés chaque 
jour régulièrement au transport de la terre et du fumier dans 
l'intérieur du jardin. Cinq ou six fois déjà, nous leur avons fait 
ramener de lourdes charges de la gare des Batignolles. 

Il a fallu les faire conduire d’abord par leur propre gardien, 
puis par un aide, en présence du gardien, ensuite par l’aide 
seul; mais aujourd hui ils peuvent être confiés au premier 
venu, à de simples terrassiers. Aucune précaution n’est plus 
nécessaire pour harnacher, pour atteler, pour dételer. — [ls 
vont également bien seuls ou avec un cheval et deux chevaux 
devant eux, ils s'arrêtent ct repartent à la volonté du conduc- 
teur; en un mot, ce sont des animaux très-dociles. 

Mais là n’est pas leur seul mérite. Nous leur reconnaissons 
déjà de grandes qualités. 

Tout d’abord leur force est remarquable, eu égard à leur 
taille. C’est vraiment très curieux de voir un Dauw, aidé de 
deux petits chevaux, tirer du trou à fumier un demi-mèêtre cube 
environ sur une pente d'au moins 20 centimètres par mètre, et 
c'est lui qui prend la bonne part, courageux, franc des épaules, 
capable d’un effort prolongé, se laissant tomber sur le devant 
avant de céder. 

Dernièrement un Dauw, attelé au camion avec un cheval de 
sa taille, ramenait, au trot, 890 kilogr. de carottes du chemin 
de fer de Batignolles au Jardin d’acclimatation. Celui-là irait 
bientôt à un attelage léger avec une bonne vitesse. Il suit 
aisément le cheval qui l'accompagne, il se laisse exciter 
par le fouet sans en être effrayé, il est facile à conduire en 
ouides. 

Les Dauws résistent bien à la fatigue, nous nous en sommes 
rendu compte. 


| 


UTILISATION DES ZÈBRES DE BURCHELL. 265 


S ils demandent quelques ménagements, ce n’est pas sous le 
rapport de la quantité de travail dans un temps donné ; il faut 
seulement éviter des efforts trop violents, qu’ils font si volon- 
tiers. Les trois que nous utilisons sont jeunes (cinq ans, 
quatre ans et deux ans). Ceux de quatre ans et deux ans ont eu. 
de légères boiteries identiques avec celles que présentent com- 
munément les Jeunes chevaux, boiteries sans lésions appa- 
rentes, sans siége déterminé, qui sont dues sans doute à des 
tiraillements des liens articulaires ou à de petites inflamma- 
tions aux points de soudure des extrémités osseuses. 

J’en prends toute la responsabilité et je conviens que nous 
avons demandé trop à nos animaux, mais bien involontaire - 
ment. 

Je ne veux pas terminer cetie communication, messieurs, 
sans vous parler du ferrage de nos Zëbres, complément néces- 
saire de leur dressage et de leur utilisation. L'opération est 
souvent difficile, même pour certains chevaux indociles. 

Or, il ne fallait pas songer à maintenir nos animaux par les 
procédés ordinaires pour leur appliquer des fers. Nous y 
sommes parvenus cependant très-facilement au moyen d'un 
appareil fort simple établi dans ce but même au Jardin d’ac- 
climatation depuis plusieurs années déjà. C’est ce qu'on 
appelle un travail. Je ne vous le décrirai pas aujourd’hui; je 
me contenterai de vous dire qu'ilpermet une contention douce 
des animaux et qu'il prévient toute espèce de danger pour les 
maréchaux.Nous ferrons doncnos Dauws chaque fois que cela 


est nécessaire, de sorte que nous ne trouvons pas le moindre 


obstacle à leur utilisation régulière. 

Il nous reste trois sujets qui n'ont pas encore travaillé. Je 
tiens à vous parler d’eux pour que vous ne puissiez pas croire 
que le succès est limité. 

Le temps seul nous a manqué pour nous en occuper, jus- 
qu’à présent. Nous avons pris nos animaux un à un, et nous 
ne sommes passés au second qu'après avoir pu livrer le pre- 
mier au service ordinaire et ensuite au troisième. 

Vient maintenant le tour du quatrième qui ne parait pas 
moins bien disposé que les précédents. 


266 . SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Il est important même de remarquer que chaque Dauw, à 
son tour, s estsoumis au dressage sans présenter des difficultés 
particulières. Cela fait espérer que le résultat obtenu pourra 
se généraliser. 

Je signale un détail pour mémoire. Les Dauws ne se met- 
tent pas facilement en sueur et leur sueur, quand elle appa- 
raît, donne aux poils une teinte violet pâle. 


CONCLUSIONS. 


1° Le Dauw ou Zèbre de Burchell est un animal domesii- 
cable. 

2 Le meilleur moyen de le préparer au travail est de le 
familiariser en lui inspirant confiance et non pas de le dom- 
pter en lui inspirant de la crainte. 

3° Il peut être utilisé comme animal de trait. 

k° À ce titre, son principal mérite est dans sa force, sa vi- 
gueur, sa franchise; mais il n’est pas absolument dépourvu 
de vitesse, il semble, à ce point de vue, tenir le milieu entre 
l’âne et le cheval, comme aussi par son tempérament, par 
sa sensibilité. j 

5° Si nous cherchions à prévoir quelle serait sa place dans 
l'avenir, parmi les animaux domestiques, nous serions tentés 
de l’assimiler au mulet. 


. LES MALADIES DE LA VIGNE 


Par M. le D° L. TURREL 


Délégué de la Société à Toulon. 


De formidables maladies s’attaquent successivement aux 
sources les plus fécondes de notre production agricole. Hier, 
c'était le ver à soie, aujourd’hui c’est la vigne qui est me- 
nacée. | 

Donc c’est à bon droit que savants et praticiens se sont 
émuset se sont mis à l'œuvre avec une ardeur que surexcitent 
la récompense promise par l’État, mais surtout le dévouement 
pour tant et de si graves intérêts en souffrance. 

Mais le zèle ne suffit pas pour cette tâche ardue. et compli- 
quée, le bon vouloir ne supplée pas à la science. Si l’on par- 
venait à diriger méthodiquement les efforts incohérents qui 
se produisent de toutes parts, et n’aboutissent qu'à une pro- 
fusion de formules, à une stérile abondance de panacées, on 
ouvrirait la carrière à une solution rationnelle, l’émulation, 
irouvant une issue dans une voie Jalonnée, aurait enfin rai- 
son de ces redoutables fléaux. 

Ce qui a manqué jusqu'ici aux savants, c’est de rester 
fidèles aux principes qu'ils n'auraient jamais dû perdre de 
vue ; ce qui à fait défaut aux praticiens, c’est de posséder des 
notions suffisantes de physiologie et d'hygiène. 

De part et d'autre, en effet, on semble oublier que la vigne 
est un être vivant, par conséquent soumis à certaines lois, et 
que le fait de la violation de ces lois doit entraîner fatalement 
son dépérissement et sa mort. 

Ce que nous voyons se produire actuellement pour un végé- 
tal, nous l’avons observé naguère pour un animal, le ver à 
soie. Il y a douze ans, notre voix s’éleva pour rappeler que la 
guérison de ce précieux insecte n’était qu'une question d’hy- 
giène. [Il y avait, à cette époque, un certain courage à soute- 
nir cette doctrine, car l'engouement microscopique était alors 


268 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


à son apogée, et il était admis que le praticien armé d’une 
loupe était maître de la maladie. . 

Aujourd'hui on est revenu à de plus saines appréciations 
sur le rôle du microscope. S'il est admis sans conteste que ce 
moyen d'observation est indispensable pour faire une sélection 
méthodique des reproducteurs et un bon choix des graines, il 
n’est pas moins avéré que, placés dans de mauvaises condi- 
tions de nourriture et d'aération, les meilleurs œufs donnent 
de détestables résultats. 

Ce que nous essayâmes de démontrer pour le ver à soie, 
nous voulons le tenter aujourd'hui pour la vigne. Loin de 
nous la prétention d’être seul en possession d’une méthode 
scientifique. Nous ne sommes qu'un humble soldat dans un 
groupe où figurent avec autorité le très-regrettable Guérin- 
Méneville, MM. le baron Thenard, Dupont (de Bordeaux), de 
Gasparin, H. Marës et beaucoup d’autres observateurs. Mais 
nous ne croyons pas que la doctrine esquissée dans une note 
présentée l'an dernier à la Société des agriculteurs de France 
ait été coordonnée et synthétisée dans les termes où nous la 
formulons aujourd’hui. 

La physiologie nous enseigne le mécanisme des fonctions 
des organes dans les êtres vivants. Par l'hygiène, nous con- 
naissons les conditions favorables ou nuisibles au libre jeu de 
ces organes. Donc l'hygiène a pour but de replacer dans un 
milieu harmonique, les êtres que l'inobservation de ses pré- 
ceptes a jetés dans un état anormal appelé la maladie. Elle est 
par conséquent une partie essentielle de la médecine, et toute 
thérapeutique serait inefficace si l'hygiène était négligée. 

Pour tout médecin philosophe, la maladie est l’avertisse- 
ment donné par la nature aux êtres vivants qu’ils ont violé 
les lois auxquelles ils sont providentiellement soumis. 

Étudions d’après ces principes comment et pourquoi la 
vigne est si gravement malade. 

Un premier fléau était venu prédisposer le pauvre arbuste à 
l'invasion du phylloxera. Depuis près de trente ans, l’oïdium 
parti des serres anglaises avait ravagé presque tous les vigno- 
bles, et malgré d'énergiques et persévérants soufrages, nos 


LES MALADIES DE LA VIGNE. 269 


ceps n’ont pas recouvré toute leur vigueur. Toutefois, la végé- 
tation aérienne, même lorsqu'elle était attaquée par le crypto- 
game, laissait intactes les racines, et la vigne, si elle ne don- 
nait pas de récolte, continuait à vivre étant pourvue de ses 
appareils d'absorption et de nutrition. Cette existence, il est 
vrai, devenait chétive et précaire, car une partie notable d’un 
organisme ne saurait être malade sans entrainer dans le reste 
des perturbations plus ou moins profondes. 

Le phylloxera, au contraire, s'attaquant aux racines et les 
détruisant, cette nouvelle maladie entraine fatalement la mort 
du végétal qui avait pu résister à l'invasion de l'oïdium. 

Notons au préalable que le cryptogame de Tucker attaquait 
de préférence les vignes à constitution délicate et respectait 
celles qui sont douées d’un vigoureux tempérament. 

Cette circonstance, nous la retrouverons dans l’étude de la 
propagalion du phylloxera. Elle justifie donc la démonstration 
que nous voulons donner de l’affaiblissement de nos vignes, 
comme cause prédisposante essentielle à l’extension de ce 
fléau. 

Depuis un demi-siècle, la culture de la vigne a pris un dé- 
veloppement considérable, par suite du haut prix des vins. 
Elle est la seule rémunératrice là où manquent, comme dans 
presque tout le Midi, les canaux d'arrosage et les eaux utili- 
sables. Or, des côteaux où elle était primitivemeut cantonnée, 
et où elle se plaisait, aimant les sols pierreux et drainés natu- 
rellement, la vigne est descendue progressivement dans la 
plune. Elle occupe aujourd’hui même les alluvions et les sols 
argileux et compactes, inondés pendant l’hiver, crevassés pen- 
dant l'été, en un mot, reconnus expérimentalement les plus 
propres au cheminement du phylloxera. 

Plantée même dans les localités les plus favorables, la vigne, 
dans le cours de sa longue existence, extrait du sol, par ses 
profondes racines, une grande quantité de substances miné- 
rales nécessaires à son entrelien. Au bout d'une certaine pé- 
riode, elle en a soustrait surtout de la potasse, par les feuilles 
qu'emportle le vent et par les sarments que nous brülons dans 
nos foyers. Nos cultivateurs se préoccupent-ils du soin de 


270 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


rendre cet alcali à la terre? Nullement, et quelquefois, sans 
attendre qu’elle se soit reposée et de nouveau ferlilisée par un 
long assolement, ils font revenir le même végétal sur un vi- 
gnoble récemment arraché. Quoi d'étonnant dès lors que la 
nouvelle vigne végète misérablement dans ce milieu appauvri. 

Mais on ne s’expliquerait point par cette unique cause Pin- 
vasion des fléaux dans des localités où la vigne n'avait jamais 
été cultivée. [ci laffaiblissement proviendrait du mode de 
multiplication usité depuis les temps historiques. 

Les documents les plus anciens mentionnent la bouture et 
la marcotte comme modes uniques de plantation de la vigne. 
Or, le plant nominalement jeune, d’un vignoble nouvellement 
créé, est vieux en réalité de 2000 ans, puisqu'il ne fait que 
continuer à travers les siècles qu’un seul et même individu. 
On comprend dès lors que, malgré le choix des crosseltes, le 
cultivateur conserve et fixe par le bouturage les maladies et les 
prédispositions acquises pendant les phases continues d’une 
seule individualité. Une première cause d’affaiblissement peut 
s’aggraver par de longues erreurs de culture. Ainsi s'explique 
la destruction des nouveaux plantiers. La jeune bouiure n’a 
que des racines ou peu nombreuses ou superticielles; elle 
ne saurait donc résister aussi bien que la vieille vigne, qui 
plonge profondément dans le sol ses nombreuses et puissantes 
racines. 

Cet épuisement héréditaire par la série indéfinie des bou- 
turages est admis par M. H. Marés. Nous tenons d’un très- 
habile viticulteur, M. Meunier, qu’il a perdu 80 hectares de 
jeunes vignes plantées dans la Crau d’Arles, sur un sol vierge 
et où par conséquent ne manquaient pas les sels potassiques. 
Ceux qui, dans la maladie actuelle, ne veulent voir que le 
phylloxera comme cause unique et suffisante, trouveront dans 
ce fait la confirmation de leur doctrine. Mais alors comment 
expliquent-ils ’immunité de certains cénages ? comment sur- 
tout se rendent-ils compte de la résistance des plants issus de 
graines, dans un sol infesté de pucerons ? L’affaiblissement 
préalable de la vigne peut seul donner la clef de ces singulari- 
tés. Continuons sur ce point notre étude critique. 


LES MALADIES DE LA VIGNE. 274 


La physiologie nous enseigne que tout être débilité est 
exposé aux ravages des parasites. Les individus bien nourris 
et bien soignés résistent ou ne donnent pas prise à ces 
ennemis. 

La vigne ne fait pas exception à la loi commune. Appauvrie, 
elle est condamnée à subir la destinée de toutes les races 
vieillies. Elle disparaîtra parce que, épuisée par une longue 
existence, pendant laquelle elle a subi le combat pour la vie, 
elle n’oppose plus la même résistance aux agents de destruc- 
tion, auxquels sont, en défimitive, voués tous les êtres créés. 

Tant qu'un végétal est sain et vigoureux, par Pabonaance de 
sa séve, il noie les œufs des insectes xylophages déposés sous 
son épiderme, il ne laisse pas germer les spores des cryplo- 
games, moisissures ou champignons, qui ne prospèrent que 
sur les tissus en décomposition. S'il vient à s’affaiblir, son 
tronc se hérisse de nodosités et se sillonne de gerçures où 
pullulent les insectes, où s’épanouissent les lichens et les 
mousses. Plus il sera débilité, moins il offrira de résistance à 
leurs ravages, et plus s’accélérera l’œuvre de destruction des 
ennemis acharnés à sa perte. 

S'il succombe, rien ne fait plus obstacle à l’œuvre provi- 
dentielle des transformateurs. Au reste, dès que la séve a 
cessé de circuler dans un végétal, par la séparation des bran- 
ches du tronc nourricier, comme cela se fait par les tailles 
annuelles, nous voyons à l’œuvre l’armée des parasites ; au 
bout de peu de temps, les branches de l’olivier ou les sar- 
ments de la vigne se perforent de myriades de trous pro- 
duits par les tarières des insectes qui n'avaient pas pu s’v dé- 
velopper avant leur amputation. 

Toutefois, même dans la plénitude de la vie et de la sanié, 
la plante ne résiste pas indéfiniment aux attaques des para- 
sites. Si elle repousse les premières, elle perd à chaque nou- 
vel assaut un peu de sa force, et à la longue elle devient une 
pâture de plus en plus facile aux insectes qui vivent de sa sub- 
stance. 

Done, si l’homme avait un peu de prévoyance, convaincu 
qu'il ne peut rien pour diminuer le nombre des ravageurs de 


9272 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


q 


ses cultures, qui échappent par leur petitesse à sa vue et à 
ses moyens d'action, il ménagerait ses auxiliaires naturels, les 
oiseaux, qui seuls peuvent atteindre l’insecte dont ils font leur 
nourriture de prédilection. Au lieu de les aider dans l’accom- 
plissement de leur œuvre protectrice, l’homme fait à ses 
meilleurs amis une guerre acharnée ; par la destruction insen- 
sée des oiseaux, il laisse le champ libre aux insectes qui l’ap- 
pauvrissent et le ruinent. 

En ce qui concerne la vigne, nous nous rappelons qu’il y a 
quarante ans à peine, nous voyions toutes les années nos vi- 
onobles hantés par des milliers d’insectivores; des nuées de 
traquets et de fauvettes venaient se percher sur les coursons 
de la vigne. De ce poste d'observation, ils surveillaient les 
écorces et savaient y découvrir et en extraire les insectes, 
leurs œufs et leurs larves. 

Aujourd’hui, ces infatigables gardiens ont disparu. C'est à 
peine si de loin en loin on revoit quelques rares représentants 
de ces charmantes familles vouées à la destruction par notre 
imprévoyante gourmandise. À peine entrevus, ces auxiliaires, 
ces protecteurs, sont fusillés ou pris aux gluaux et aux ra- 
quettes. Quoi de surprenant que nos vignes restent sans dé- 
fense, en proie à la pyrale, à l’attelabe et au phylloxera. 

Ce qui a dù aussi singulièrement altérer la constitution de 
nos vignes européennes, c’est la violence faite par nos tailles 
annuelles aux dispositions si marquées de larbuste à employer 
les vrilles dont la nature l’a muni. 

Destinée à s'accrocher à tous les supports, à grimper sur 
toutes les sommités, à se percher sur toutes les saillies, la 
vigne a été presque toujours, dans nos cultures, taillée court 
et réduite à occuper un espace très-limité, en opposition à ses 
tendances naturelles à la folle végétation et au vagabondage. 
Nous avons réussi à dompier ces fougues, à réprimer ces 
expansions, mais n'est-ce pas au détriment de la constitution 
de ces espèces civilisées ? La mutilation des parties aériennes 
de la vigne ne contrarie-t-elle pas aussi le développement des 
racines qui s'étendent toujours proportionnellement aux ra- 
meaux et aux feuilles. 


LES MALADIES DE LA VIGNE. 273 


Nous ne prétendrons pas que le phylloxera soit l'effet et 
non la cause de la maladie qui détruit nos vignobles. Les 
expériences de M. Cornu, les faits observés et analysés avec 
une sagace pénétration par M. Planchon, prouvent que l’in- 
secte transporté sur les racines d’une vigne saine y produit 
les altérations caractéristiques qui accompagnent la pourri- 
ture des racines et entraînent la mort du végétal. Le fait de 
l'importation d'Amérique du terrible puceron paraît aussi 
tout à fait incontestable, et nous ne voyons aucune utilité à 
mettre en doute, et par conséquent en discussion, l’introduc- 
tion récente de ce nouvel ennemi de nos vignobles. Nous ac- 
ceptons donc que des œufs de ce microscopique aphidien ont 
élé apportés avec des ceps américains, car pour l’insecte vi- 
vant il ne saurait avoir été transporté, son mode d’existence 
le poussant à abandonner les racines, auxquelles il adhéraïit, 
dès qu’elles sont exposées à l'air. 

Donc le phylloxera, trouvant un milieu favorable, des vignes 
affaiblies par les causes que nous venons d’analyser s’est 
étendu et propagé avec une rapidité et une intensité ef- 
frayantes. L’affaiblissement préalable peut seul expliquer ses 
ravages, car ce sont parmi les variétés cultivées les plus déli- 
cates qui succombent. Nous avons vu, dans un champ de 
mourvêdes entièrement ravagé, un cep de Pascal blanc qui s’y 
irouvait accidentellement planté, végétant, vigoureux et sans 
atteinte apparente, au milieu des autres ceps desséchés et 
mourants. À côté de ce vignoble dévasté, un champ d’Ara- 
mons semblait indemne, bien que les racines de quelques 
ceps arrachés au hasard fussent couvertes de phylloxeras. 
Ceci a été vu par nous en 1872 dans la propriété Deleau, quar- 
tier du plan de la Tour à Ollioules (Var), et cette situation 
prospère des Aramons n’a pas varié depuis deux ans, tandis 
que les Mourvèdes ont disparu. 

Si donc le phylloxera était l’unique cause de la destruction 
des vignes, indépendamment des prédispositions que nous 
avons étudiées, pourquoi certains plants résisteraient-ile, tan- 
dis que d’autres succombent? N'est-ce pas évidemment affaire 


de constitution, de tempérament? la thérapeutique du phyi- 
3° SÉRIE , T. I. — Mai 1874, 18 


27h SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


loxera ne tend-elle pas invinciblement à se résoudre en une 
question d'hygiène ? 

Il en est, à notre avis, des épiphyties comme des épidémies. 
Le choléra ne se montre que de loin en loin dans nos cités, 
sous forme épidémique. C’est cependant une maladie impor- 
tée, et il est admis sans contestation aujourd’hui que les cas 
sporadiques qui apparaissent tous les ans au miliea des ag- 
glomérations urbaines ont tous les caractères du choléra 
indien. 

Donc les germes de la maladie préexistent, sont permanents 
et ne prennent le développement de l'épidémie que lorsque le 
milieu devient favorable à leur multiplication. Une observa- 
tion attentive des conditions qui activent la propagation de 
ces ferments prouve qu’elle n’a lieu que lorsque l'hygiène pu- 
blique éprouve de graves atteintes. Quand la santé est bonne, 
la maladie n’a prise que sur des individualités affaiblies et 
s'éteint faute d'aliments. 

Tel est le cas de l’épiphytie actuelle de la vigne, et nous 
n’hésitons pas à le proclamer, car c’est dans cette vérité que 
nous devons trouver les moyens de la combattre et de la gué- 
rir. Étudions par la méthode d'observation ce qui peut nous 
conduire plus sûrement à ce désirable résultat. 

Un fait domine dans les documents publiés jusqu’à ce jour, 
c’est la résistance de certains cépages aux attaques du phyl- 
loxera. 

Parmi les variétés européennes, les plus robustes, Pascal, 
Aramon, Pecoui-touar, sont plus indemnes que les Muscats 
et les Clairettes. Mais au-dessus de toutes ces espèces de notre 
vieux monde, brillent par leur immunité relative ou absolue 
les cépages américains. 

Tandis qu'aux États-Unis, du moins à l’est des montagnes 
Rocheuses, nos vignes européennes sont, au bout de trois ou 
quatre ans, détruites par le phylloxera, les vignes indigènes, 
vigoureuses et fécondes, ne semblent pas souffrir de ses at- 
teintes. 

De là l'entrainement de nos viticulteurs à importer les pré- 
cieux arbustes destinés dans leur pensée à remplacer nos vignes 


LES MALADIES DE LA VIGNE. 275 


mourantes, soit comme porte-greffes, soit comme production 
pour la cuve. 

Mais il y a à ce postulatum bien des difficultés. 

La première, c’est que les raisins américains sont en géné- 
ral médiocres, mürissent inégalement ou trop tard, même 
dans notre midi, doués de saveurs étranges, et incapables de. 
produire des vins acceptables pour nos palais, accoutumés aux 
suaves bouquets de nos crus en renom. 

La seconde, c’est que ces espèces reçoivent mal la greffe, 


-se multiplient difficilement par boutures et ne se comportent 


bien que par le marcottage. Enfin elles ne se prêtent pas à nos. 
modes de culture, ne produisent rien quand on les taille, et 
veulent être abandonnées à elles-mêmes sur de vastes espaces. 
Un pied de scuppernong, au dire de M. Pulliat, couvrirait de. 
2 à 3 acres (100 à 150 ares); un autre pied de ce même cé- 
page, dans la Caroline du Nord, au témoignage de M. Le Hardy 
de Beaulieu, étendrait sur près d’un tiers d’hectare ses innom- 
brables ramifications. 

Ce tempérament si différent de celui de nos vignes, cette 
vaillance avec laquelle les cépages américains supportent les 


_assauis du phylloxera s'expliquent d’un mot : toutes ces vignes. 


sont des sauvageons, des Lambrusques (Labrusca). Or, nous 
retrouvons chez nous, dans nos vignes spontanées, dans nos 
lambrusques qui jettent leurs désordonnées végétations sur 
les grands arbres de nos halliers et de nos berges, la même 
robusticité pour résister au fléau. Pourquoi donc aller cher- 
cher si loin ce que nous avons sous la main, à notre portée. 

Quand les Américains ont voulu produire du vin, en gens 
pratiques et connaissant le prix du temps, ils ont commencé 
par utiliser ce qu’ils avaient chez eux. [ls ont récolté les fruits 
de leurs lambrusques, et choisissant parmi ces sauvageons 
ceux qui réunissaient fécondité, saveur et beauté de la grappe, 
ils ont formé avec eux leurs premiers vignobles. 

Ainsi ont été distinguées et préconisées certaines variétés 
qui, suivant les régions, se disputent les préférences des plan- 
teurs. Ge sont ces lambrusques qui menacent de faire invasion 
chez nous et de perdre nos cuvées et leur antique réputation. 


276 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Faisons observer du reste que les Américains ne se sont pas 
bornés à faire un choix parmi leurs meilleurs sauvageons, 
comme dut procéder lui-même notre aïeul Noé (Dyonisios). Les 
viticulteurs de l'Union ont commencé à faire des semis, non- 
seulement de leurs lambrusques, mais encore de pepins pro- 
venant de grappes hybridées avec nos meilleures races. Ils ont 
ainsi créé de nouveaux cépages qui, au tempérament de leurs 
rustiques ascendants, joignent les qualités raffinées de notre 
séve française. 

Cest là précisément ce que nous recommandons à nos viti- 
culteurs : qu'ils sëment à leur tour des pepins de nos meil- 
leures variétés, qu'ils cherchent à obtenir, par une judicieuse 
sélection, des cépages plus robustes, parce qu'ils auront la 
jeunesse, et tout aussi méritants, comme le semis peut en 
produire, et ils auront sauvé notre grande industrie agricole 
qui fait la fortune et la réputation de notre chère patrie. 

Cette méthode a du reste été employée chez nous par quel- 
ques praticiens, mais point sur une assez grande échelle. 
M. Besson, pépimiériste à Marseille, a obtenu par le semis de 
nos raisins de table des variétés méritantes dont les fruits ont 
figuré avec honneur à diverses expositions méridionales. 
M. Bouschet, de l'Hérault, a créé par des hybridations raison- 
nées certains cépages de la section des feiénturiers, qui com- 
mencent à se répandre dans nos vignobles. Ces races nouvelles 
ont un tempérament très-robuste ; au témoignage de M. Pel- 
licot, président du comice agricole de Toulon, les fenfuriers 
Bouschet résistent au phylloxera d’une manière remarquable. 

M. Auban-Moët dont le nom est si connu dans la viticulture 
champenoise, nous a dit que le plant primitif des vignobles 
de la Marne, le Pinot de Bourgogne, à été presque partout 
remplacé par une variété de semis obtenue par un vigneron 
d’Aï, et connue sous le nom de vert doré, qui s’est montrée 
plus vigoureuse et plus productive que le plant originaire. 

M. Ch. Simon, vice-président de la Société d’horticulture et 
d’acclimatation du Var, m'a signalé le fait suivant : sur la li- 
mite d’un vignoble de Roussi/lon, ravagé par le phylloxera, 
se fait remarquer un cep provenant d’un pepin accidentelle- 


LES MALADIES DE LA VIGNE. 27 


ment semé, qui tranche par la vigueur luxuriante de sa végé- 
tation sur l'aspect misérable des vignes cultivées. Oublié près 
du sentier où il avait spontanément germé, 1l y a plus de 
quinze ans, ce cep, lorsque le vignoble fut attaqué, attira lat- 
tention du propriétaire, qui essaya de le cultiver, le soumit à 
la taille et crut ainsi le pousser à fruit. Peines perdues : lin- 
docile cep ne veut pas fructifier, tout simplement parce qu'il 
n’a pas l’âge adulte et qu’il faut à un arbre de semis, comme 
à tous les êtres doués d’une certaine longévité, une certaine 
préparation pour devenir apte à se reproduire par des 
germes. 

Donc le cep rebelle n’a pas été sacrifié. Quand il pourra 
montrer son fruit, s’il est de bonne qualité, le propriétaire se 
propose de le multiplier par le bouturage et de créer avec ce 
plant rustique un vignoble capable de résister aux parasites. 

Un autre vice-président de la Société d’horticulture et d’ac- 
climatation du Var, M. Honnoraty, semait, il y a cinq ans, 
des pepins d’un raisin de table qui ont produit des ceps d’une 
vigueur remarquable, qu'il essaya de pousser à fruit par la 
taille et la greffe sur de vieilles vignes. M. Honnoraty comprend 
aujourd’hui qu’il ne doit pas mutiler ces jeunes semis, 1l se 
borne donc à diriger leur charpente, et qu’il doit attendre 
leur âge adulte pour les voir fructifier. Mais il expérimente en 
ce moment leur degré de résistance au phylloxera, etil en a 
planté quelques sarments en plein vignoble infesté. Pour que 
l'expérience fût concluante, il aurait dû se servir de plants 
préalablement enracinés, car la bouture peut être détruite par 
les pucerons qui se porteront sur les jeunes racines au mo- 
ment où elles commenceront à se former. 

M. Laliman (de Bordeaux) a obtenu du semis d’un hybride 
américain un cépage à baies pulpeuses, sans pepins, réfrac- 
taire à l’oïdium et au phylloxera, car venu dans un sol em- 
pesté de ces pucerons, suivant l'expression de l'honorable viti- 
culteur, ce cépage a montré une vigueur exceptionnelle. Il a 
été offert et dédié à M. Drouyn de Lhuys, président de la So- 
ciété d’acclimatation et de la Société des agriculteurs de 
France. 


278 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


M. Cachard, grand propriétaire et négociant en vins à la 
Cadière (Var), nous affirme qu'un vigneron de sa commune 
ayant semé, il y a une vingtaine d'années, quelques pepins 
de Mourvèdes, intercala dans un vignoble une douzaine de 
ces semis. Toutes les vignes de ce champ ont été détruites par 
le phylloxera, sauf les douze plants de semis, qui donnent peu 
de fruits à la vérité ; mais les sujets sont encore jeunes, et ce 
vigneron, bien conseillé, multipliera cette jeune et robuste 
variété si exceptionnellement préservée. 

Cette immunité constatée des teinturiers Bouschet, des se- 
mis de certains cépages et de nos lambrusques, nous semble 
tracer la marche à suivre pour arrêter la ruine de notre viti- 
culture. 

Au lieu de demander à grands frais, et Dieu sait au prix de 
quelles déceptions, les sauvageons américains rebelles à la 
culture, au bouturage et à la greffe, semons nous-mêmes nos 
bonnes variétés de raisins de cuve, ou procurons-nous de vi- 
goureux porte-greffes en bouturant nos lambrusques indi- 
gènes. 

Les plants issus des semis seront nécessairement soumis à 
une sélection sévère, car tous ne seront pas doués de la même 
vigueur. 

Ceux qui montreront le tempérament le plus robuste seront 
choisis pour faire souche de variétés nouvelles. Lorsqu'ils au- 
ront montré leur fructification et donné la mesure de leurs 
qualités, par le bouturage, ils fourniront les races rajeunies 
capables de résister pendant encore de longs siècles aux causes 
de détérioration qui s'accumulent sur les races vieillies. 

Les sujets vigoureux dont les fruits seront reconnus mé- 
diocres fourniront néanmoins d’excelients porte-greftes. 

Mais la conséquence logique des prémisses que nous avons 
posées, c’est qu'il y a encore autre chose à faire que de se bor- 
ner à des semis, même sur une large échelle. 

Les expériences instituées par la commission spéciale de 
l'Hérault, dont M. H. Marëès a rendu compte à l'Académie des 
sciences, ne doivent pas être perdues poar nos viticulteurs ; 
il résulte de ces essais faits avec méthode et conscience, que 


D 


LES MALADIES DE LA VIGNE. 279 


les procédés de destruction du phylloxera, purement insecti- 
cides, ont tous échoué, les uns par impuissance, les autres 
parce qu’en même temps que l’insecte ils ont détruit la vigne. 
Le seul mode de traitement qui ait procuré une amélioration 
sensible est celui qui combine avec un insecticide quelconque 
un engrais approprié. En première ligne figurent les sels alca- 
lins, notamment le sulfure de potassium et les urines ou les 
substances ammoniacales. 

Il est juste cependant de mentionner hors ligne le procédé 
Faucon, qui consiste à submerger les vignobles attaqués au 
moins pendant trente jours consécutifs de la période hiver- 
nale. On a dit de cette méthode qu'elle produisait des effets 
complexes; que si elle asphyxie sûrement le phylloxera, elle 
apporte au sol, avec un colmatage plus ou moins riche, un 
apport de sels alcalins, et agirait dès lors à la manière des 
engrais. L'expérience de M. Gaston Bazille, culture en baquets 
immergés dans de l’eau de fontaine, prouverait que toute 
l'économie de la méthode Faucon consisterait uniquement 
dans la suppression du phylloxera par voie d’asphyxie. Toute- 
fois, elle ne fait qu’ajourner le danger. L'emploi de l’eau là où 
il est possible ne dispense pas non plus des fumures énergi- 
ques: Tous les jardiniers savent, en effet, que l’eaü est le dis- 
solvant infaillible des sels.qu’elle entraîne dans les profondeurs 
du sol; aussi la culture maraïîchère n'est-elle possible qu’à la 
condition de disposer d'engrais abondants ettrès-actifs. 

Il faut donc, en définitive, se préoccuper de fumer la vigne, 
et ne pas oublier que les engrais ammoniacaux sont en pre- 
mière ligne parmi les substances reconnues les plus efficaces 
contre le dépérissement des vignes phylloxérées. La nécessité 
de fortifier la vigne ressort de ce fait que, même des vignobles 
notoirement atteints du phylloxera ont pu vivre et donner des 
récoltes suffisantes depuis cinq ans. M. H. Marés cite notam- 
ment le vignoble de 20 hectares de M. Pieyre, près Tarascon, 
et 1l fait observer judicieusement que, dans la période initiale, 
le phylloxera vivait sur la vigne dont il se nourrit sans la faire 
périr, et qu’il n’est devenu son destructeur que sous l'influence 
des causes qui lui ont permis de se multiplier à l'excès : intem- 


289 : SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


péries, humidités ou sécheresses prolongées, gelées tardives, 
occasionnant des refoulements de la séve ; en un mot, comme 
nous l’avons établi, toutes les influences qui ont affaibli la vigne. 

Donc la recherche et la conservation des engrais sont de pre- 
mière nécessité pour notre viticulture. Heureuses les popula- 
tions urbaines si les cultivateurs recherchaient les déjections 
humaines douées de si prodigieuses qualités fertilisantes, qu’on 
laisse perdre aujourd’hui, non-seulement improductives, mais 
encore dangereuses pour la santé publique. 

Ajoutons que la méthode Faucon a eu le mérite d’attirer 
la faveur sur le projet de dérivation du Rhône de M. Aristide 
Dumont; considéré jusqu'ici comme chimérique, ce projet 
semble devoir être exécuté. Il pourrait arroser dans cinq dé- 
partements 200 000 hectares d’où la vigne disparaîtrait sans 
inconvénient, car avec de l’eau, dans notre midi, on créera 
des prairies, et par conséquent on produira de la viande, des 
engrais et du blé, bases de toute agriculture rémunératrice. 

Disons, en passant, que si le Var et les Bouches-du-Rhône 
étaient appelés à participer aux bénéfices de ces irrigations, 
l'élève du cheval de guerre pourrait s’y pratiquer sur une 
large échelle, etque les engrais obtenus y rendraient possible 
la culture lucrative de l’olivier et du froment, aujourd’hui mi- 
sérables faute de fumures suffisantes. 

Revenons à la destruction du phylloxera, et reconnaissons 
que nous ne saurions nous désintéresser des moyens acces- 
soires qui agiraient en détruisant le parasite sans nuire à la vie 
du cep. À ce point de vue, mentionnons les expériences faites 
à Hyères, avec le sulfure de carbone, par MM. M. Barnéoud 
et H. Dellort. 

Le sulfure de carbone, qui a la dose de 150 grammes par 
cep foudroie la vigne infestée, a été empiriquement reconnu 
très-efficace lorsqu'il a été par ces praticiens dosé convena- 
blement. 40 ou 50 grammes par cep, suivant la plus ou moins 
grande perméabilité du sol, ont été répartis autour de chaque 
cep au moyen d’un tube introducteur, et les vapeurs dégagées 
souterrainement ont suffi pour tuer les pucerons sans nuire à 
la vigne elle-même. 


“ 


LES MALADIES DE LA VIGNE. 281 


M. À. de Lavergne réussirait à préserver ses vignes en 
faisant enduire leur collet avec du coaltar, goudron de 
houille. 

Le directeur de l’usine à gaz de Toulon, M. Renaux, a eu 
l'excellente pensée d'utiliser les produits infects de la distilla- 
tion de la houille, en les associant avec du sulfate d’ammo- 
niaque qu'il produit en grandes quantités en traitant les eaux 
d'épuration par le sulfate de fer et de chaux. 

Il obtient par ses manipulations une poudre imprégnée 
d’'hydro-carbures de goudron, dontla fétidité est mortelle aux 
insectes, et il l’associe à une substance azotée très-riche, de 
sorte qu’il réunit l’engrais à l’insecticide. Ge produit peut être 
livré à 10 fr. les 100 kilogr.; une formule analogue vient d’être 
communiquée par un industriel du Nord à l’Académie des 
sciences et mentionnée avec éloges. 

Nous nous dispensons de mentionner les autres insecticides, 
car outre leur insuffisance, quand ils ne sont pas additionnés 
de substances fertilisantes, ils ne sauraient, même avec ces 
auxiliaires, remplir les indications tirées d’une culture ration- 
nelle et de l'observation des lois de la physiologie végétale, 
seules capables de maintenir la santé de la vigne et d'assurer 
sa fertilité. 

Nos économistes et nos législateurs n’oublieront pas qu'il 
est aussi de leur devoir d’assurer la conservation des oiseaux 
insectivores qui défendent contre la vermine le précieux ar- 
buste. 

Quant au mode de culture, il y a quelque chose à modifier 
dans le système des tailles courtes et des mutilations trop 
rigoureuses infligées à cet arbuste si expansif et si porté aux 
frondaisons exubérantes. 

Les Italiens, qui ont conservé les tradilions de Columelle et 
de Virgile, cultivent encore en treille, qu’ils laissent courir en 
longs festons sur de grands arbres. La vigne gagne à ce trai- 
tement, plus en harmonie avec son tempérament, une longé- 
vité fabuleuse. En Savoie et dans l'Isère, sans employer cette 
licence d’allures des Italiens, on pratique des échalassements 
en longs cordons, qui donnent aux vignes plus de vigueur et 


282%. SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


de fécondité, sans nuire à la finesse des vins que nous savons 
doués de bouquets fort délicats. 

Le regrettable D' J. Guyot avait du reste préconisé, non 
sans raison, les tailles longues, et il y aurait à notre avis avan- 
tage à y recourir dans une certaine mesure. Citons à l'appui 
de ce conseil un fait assez concluant : 

Il y a plus de trente ans, mon père voulut faire arracher 
une très-vieille vigne de l'étendue d’un hectare 1/2, qui ne 
donnait plus que d'insignifiantes récoltes. Il fit donc allonger 
la taille que l’on avait jusque-là conduite, comme il est d'usage 
en Provence, très-courte et très-sévère. 

La première récolte qui suivit la taille longue fut si abon- 
dante, que le sacrifice de la vieille vigne fut ajourné. La taille 
longue fut continuée, d'année en année, sans interruption 
jusqu’à ce jour, et c’est encore ce vignoble, surmené depuis 
un tiers de siècle, qui donne les plus abondantes vendanges. On 
s’est bien gardé d'appliquer ce procédé aux autres champs de 
vigne. Le résultat eût-il été aussi beau partout sans compro- 
mettre l’existence des ceps ? IL est impossible de l’affirmer ; 
mais ce que je puis dire, c’est que devenus plus hardis, mes 
fermiers laissent maintenant aux vignes peu fertiles un long 
sarment qui se couvre de grappes, et les dédommage de la 
paresse des parties taillées court. 


Résumant cette étude, nous affirmons que le salut de notre 
viticulture n’est pas dans la découverte d’un insecticide, maïs 
dans l'observation des lois naturelles et dans la pratique des 
moyens dont la science a démontré l'efficacité. 

Cette méthode rationnelle peut se formuler en ces termes: 

1° Planter la vigne dans les terrains et aux expositions qui 
lui conviennent. 

2° Restituer au sol où elle vit les agents de fertilité, engrais 
et substances minérales que sa végélation en extrait, el qui 
sont indispensables à sa santé. 

3° Conduire la taille de manière à ne pas trop violenter ses 
tendances natives. 

ke Chercher, dans le semis, des variétés que leur jeunesse et 


LES MALADIES DE LA VIGNE. 283 


leur vigueur mettraient à même de résister mieux que ies 
espèces vieillies aux causes de destruction. 

5° Protéger les oiseaux insectivores; prohiber absolument 
l'usage des piéges et lacets. 

6° Enfin délivrer les racines des pucerons au moyen d'agents 
spéciaux qui soient, pour la végétation souterraine, ce que le 
soufre a été pour la végétation aérienne. 

Mais 1l est constant que si l’on se borne à l'emploi des insec- 
ticides, fussent-ils encore plus infailibles, l’effrayante fécon- 
dité du phylloxera est telle, qu’un seul sujet échappé à la 
destruction peut encore être le point de départ d’une nouvelle 
invasion, .si la vigne reste faible et désarmée. 

Donc n’attendons pas notre salut d’une panacée. Le pro- 
blème est complexe ; si nous espérons un sauveur, il ne viendra 
jamais. Étudions, arrivons à la compréhension des lois natu- 
relles, appliquons-nous à ne pas les violer, mais à les observer, 
et rappelons-nous la virile devise de nos pères : Aide-toi, le 
ciel t'aidera. 


II. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ. 


ÉDUCATIONS 
D'ATTACUS YAMA-MAI 


FAITES À PONTOISE DE 4870 A 1873 


Par M. F. A. BIGOT. 


Messieurs, 


Sur la demande de M. le Secrétaire général de la Société, 
j'ai l’honneur de rendre compte à la Société d’acclimatation 
des éducations d’Atéacus Yama-mai, faites par moi de 1870 
à 1875. 

Avant de vous parler des quelques remarques que j'ai 
faites pendant le cours de mes éducations, permettez-mot, 
messieurs, de soumettre à votre examen les précautions et les 
soins que Jai cru devoir prendre pour mener à bien mes 
essais d’acclimatation du Yama-mai. 

Des précautions à prendre. — Depuis près de dix ans que 
je m'occupe particulièrement de l’élevage des Chenilles, j'ai 
tenté tous les moyens possibles pour arriver à conserver 
fraiches les plantes destinées à leur nourriture. 

C’est après de nombreuses expériences qu'il m’a été donné 
de constater que les plantes ou branches d’arbres récoltées le 
matin après le soleil levé et pendant tout le reste de la journée 
n'étaient pas susceptibles de conserver leur fraichenr plus de 
deux ou trois jours, tandis que, au contraire, celles cueillies 
vers le soir, c’est-à-dire. un peu avant et surtout après le 
soleil couché, se conservaient au moins huit jours dans un état 
de fraîcheur excellent, et je puis affirmer qu’il m’est arrivé 
souvent de donner à certains Bombyx pour quinze jours de 
nourriture sans que pour cela ils parussent en souffrir. Mais 
pour le Yama-mai, ne connaissant pas suffisamment son tem- 
pérament et craignant de compromettre l'éducation, j'ai cru 


ÉDUCATIONS D'ATTACUS YAMA-MAï. 255 


devoir restreindre l'expérience à huit jours jusqu à la fin du 
deuxième âge, je n’ai pas continué pour les deux derniers 
âges faute d'espace ; en eftet, pendant les deux dernières 
périodes les Chenilles mangeant de plus en plus, sil m'avait 
fallu leur donner pour huit jours de nourriture, je me serais 
vu dans l’obligation de tripler le nombre des baquets, et, 
comme j'avais l’honneur de vous le dire, l’espace me manquait 
complétement. 

Je fus donc obligé de réduire la ration à quatre jours pour 
le troisième âge et à deux jours pour le quatrième. 

Choix à faire pour la nourriture. — Maintenant je vous 
ferai remarquer, messieurs, que j’apporte une grande atten- 
tion dans le choix de la nourriture; je cherche des branches 
à feuillages bien verts et fermes et pouvant avoir de 1 mètre 
au moins à 2 mètres de hauteur. 

Baquets servant à l'éducation. — Vour recevoir des bran- 
ches j'ai des baquets de 0",20 de profondeur, fermés par des 
couvercles percés d’une certaine quantité de trous ; dans ces 
baquets je dépose une couche de sable de rivière et par-dessus 
une couche de charbon de bois, à seule fin d'éviter la corrup- 
tion de l’eau ; je perce les baquets à la hauteur de la couche 
de sable et j'y introduis une cannelle, de manière à pouvoir 
changer l’eau des baquets sans toucher aux branches sur 
lesquelles les Chenilles sont fixées. 

Du changement de nourriture. — Le Yama-mai est exces- 
sivement paresseux, il abandonne très-difficilement la feuille 
qu'il a choisie, quand bien même cette feuille serait fanée ; il 
en résulte que lorsque la faim se fait sentir il se contente de 
manger ces mauvaises feuilles, ce qui peut compromettre 
l'éducation. Pour obvier à cet inconvénient, je place les vers 
sur des branches trés-hautes (environ 2 mètres), par ce 
moyen je puis les laisser une huitaine de jours sans les changer 
de feuilles. Je considère comme très-dangereux de leur donner 
de la nourriture fraiche toutes les vingt-quatre heures, ainsi 
que le recommandent certains éducateurs ; car, en effet, malgré 
toutes les précautions que j'ai pu prendre pour laisser sur les 
vieilles branchesle moins de nourriture possible, j'ai remarqué 


286 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION, 


que la moitié au moins de mes vers étaient restés sur les vieilles 
feuilles et de temps en temps ils en faisaient leur repas. 

De la cage aux éclosions. — 1 me reste maintenant à vous 
parler de la cage aux éclosions. Je me sers de celle décrite par 
Ni. Camille Personnat, dans son rapport à la Société d’accli- 
matation sur ses éducations de 1864. Cette cage est excellente 
en tous points, je la considère comme supérieure à tous les 
systèmes employés jusqu’à ce jour. 

Des remarques faites pendant l'éducation de 1873. — Mes 
éclosions ont commencé le 15 avril et elles ont été terminées 
le 19 du même mois, la température était de 12 degrés; du 
21 au 23, le thermomètre est descendu à 3 degrés au-dessus 
de zéro, et du 23 au 25, il descendit à À degrés au-dessous 
de zéro, la glace atteignit, dans une cour voisine, À centi- 
mètre d'épaisseur. Après avoir laissé nos jeunes élèves sup- 
porter pendant deux jours et deux nuits ce froid rigoureux, 
je remarquai leur complète immobilité, et ce qui augmenta 
mon inquiétude, c’est qu'ils n’avaient pris aucune nourriture 
depuis quarante-huit heures ; il fallut absolument prendre 
une détermination, sous peine de perdre peut-être toute 
l'éducation, c’est ce que je fis. Le 25 au soir, je transportai 
mes jeunes pensionnaires dans une chambre bien close, ils 
trouvèrent là une température sensiblement élevée (10 degrés 
centigrades), ce qui leur permit de se réconforter un peu 
pendant la nuit du 25 et pendant la journée du 26; à partir 
du 27, ils avaient complétement repris leurs habitudes et ils 
paraissaient se trouver dans de très-bonnes conditions d’hy- 
giène. 

Le 1% mai le temps est très-beau et bien radouci, mais dès 
le lendemain le froid se fait de nouveau sentir ; le thermo- 
mêtre ne dépasse pas 12 degrés pendant le jour et il redescend 
à 8 vers le soir; malgré cela je réintègre mes élèves dans leur 
premier local, où je laisse la fenêtre ouverte jour et nuit. 

Première mue. — Du 4 au 10 mai, la moitié des vers subit 
son premier changement de peau, et du 10 au 16, pour l’autre 
moitié. Chose remarquable, bien que les vers soient tous 
éclos dans l’espace de quatre jours, les mues se sont divisées 


ÉDUCATIONS D’ATTACUS YAMA-MAÏ. 9287 


jusqu’à la fin de l'éducation en deux périodes. Faut-il attribuer 
le retard de la deuxième partie à ce qu’elle aura été plus 
vivement atteinte par le froid ? Tout porte à le croire, cepen- 
dant je n'ose l’affirmer. 

Après cette première mue, les vers grossissent rapide- 
ment; toujours la même température, temps froid surtout le 
soir et la nuit. 

Deuxième mue. — Du 21 au 26 mai, deuxième transforma- 
tion pour la première moitié, et du 26 au 31 pour la seconde. 
La température s'élève quelquefois à 20 degrés pendant le 
jour et elle redescend à 8 degrés vers le soir. 

Troisième mue.— Du 6 au 11 juin, troisième changement 
de peau pour la première partie, et du 11 au 16 pour la 
seconde ; le temps continue à être froid : du 1° au 8 le ther- 
momèêtre indique 10,12 et 14 degrés et il descend le soir à 
8 et 6 degrés ; le 9 et le 10 le temps est plus chaud, je con- 
stalai de 18 à 22 degrés. 

Quatrième mue. — Du 17 au 22, quatrième mue pour la 
première partie et du 22 au 27 pour la deuxième; par suite 
d'orages fréquents la température est toujours très-froide. 

Cocons. — À partir du 7 juillet, les vers commencent à 
filer : ce travail fut terminé dans la dernière quinzaine du 
même mois. 

De là disposition des cocons dans la cage. — Ners le 
10 août je fis la récolte de mes cocons, et après les avoir 
inis en chapelets je les plaçai horizontalement autour de la 
cage aux éclosions, de manière qu’ils soient distancés du fond 
de 3 à À centimètres à peu près; cette disposition peut par- 
raître accessoire, cependant je la considère comme trés-utile. 

Par exemple, supposons un instant que les cocons sont 
placés au milieu ou bien vers le sommet de la cage : il arrivera 
ceci, c’est que les femelles feront en partie leur ponte autour 
de ces cocons et la récolte des œufs sera plus difficile à faire, 
ensuite il y aurait à craindre que les papillons, en se fixant 
après les cocons, perdissent les crochets qui arment leurs 
pattes; alors n’ayant plus à leur disposition les moyens néces- 
saires pour se soutenir, soit pendant l’accouplement ou pen- 


288 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


dant la ponte, ils tomberaient épuisés et ils mourraient avant 
d'avoir accompli leur mission. 

Éclosion des papillons. —Y'ai suspendu dans une chambre 
la cage qui contenait les cocons. 

À partir du 15 août les éclosions ont commencé : elles se 
sont faites jusqu'à la fin d’une manière trés-réguliére, j'ai 
toujours eu un nombre égal de mâles et de femelles. 

Cependant je sais bien que des entomologisies trés-auto- 
risés prétendent que les mâles naissent avant les femelles et 
que dans ce cas, si l’on ne prend pas la précaution de retarder 
l’éclosion des uns et activer l’éclosion des autres, on peut com- 
promettre l’éducation. Il ne m’a pas été donné de le constater, 
et jusqu’à ce que l'expérience me l'ait prouvé, je croirai qu’une 
éducation bien faite doit donner des résultats semblables à 
ceux que J'ai obtenus, c'est du reste ce que je me propose 
d'examiner celte année. 


Tentative de reproduction en chambre. — Dans la chambre 
aux éclosions j'avais laissé la croisée ouverte jour et nuit de 
manière à ne pas priver d'air mes papillons; dans la cage, 
j'avais placé une éponge énorme et largement mouillée, de 
cette manière les papillons trouvaient l’air qui leur est indis- 
pensable et l'humidité qui leur est très-utile. Malgré toutes 
les précautions je n'obtins qu’un seul accouplement. 

Je voulus tenter alors un autre système, qui consiste à 
laisser les papillons en liberté dans une chambre; je fermai 
la fenêtre et j’eus soin d’ouvrir la porte de la cage; le soir 
une centaine de papillons voltigeaient dans cette chambre," 
mais, hélas! J'eus beau attendre trois ou quatre jours je ne 
pus rien obtenir. 


Reproduction en plein air. — Pendant ce temps j'avais eu 
soin de placer la cage en dehors de la croisée, c’est-à-dire 
en plein air, là seulement j’obtins un succès complet : autant 
d’éclosions le soir, autant d’accouplements j'avais à constater 
le lendemain matin. 


Remarques faites sur un des caractères de la chenille et 
des papillons. — Je dois ici vous faire part d’une remarque 


ÉDUCATIONS D'ATTACUS YAMA-MAI. 289 


assez singulière, et quije crois se trouve en contradiction avec 
des entomologistes beaucoup plus autorisés que mot. 

J'ai constaté pendant mon éducation de 1870 et celle de 
1873, que les chenilles, pendant le jour, paraissaient fuir la 
grande lumière ; si par exemple quelques-unes quittaient les 
rameaux de Chêne, c'était à coup sûr pour aller se reposer 
dans un endroit obscur, tandis que les autres se tenaient 
cachées dans le feuillage du côté opposé à celui d’où leur arri- 
vait le jour. 

Pour les papillons c’est l’effet contraire qui s’est produit : 
ainsi ceux que j'avais laissés en liberté dans la chambre se 
tenaient pendant tout le jour accrochés aux rideaux de la 
croisée, de même ceux renfermés dans la cage étaient pen- 
dant le jour continuellement tournés du côté d’où ils rece- 
vaient de la lumière. 

Grainage. — Il me reste maintenant à vous faire con- 
naître les résultats de ma récolte en graine. 

Sur 400 papillons j'en ai sacrifié 100 pour tenter la repro- 
duction en chambre fermée, les 300 autres me donnèrent 
environ 150.grammes de graines. 

Comme j'ai eu l'avantage de vous le dire, messieurs, l’année 
1873 a élé très-froide et par conséquent défavorable aux 
éducations de Vers à soie, il est donc présumable qu’avec une 
température plus égale et plus chaude on obtiendrait des 
résultats meilleurs, c’est ce qu’il me restera à observer. 

C'est là, messieurs, le résultat des remarques que j'ai faites 
d’une mamièére très-minutieuse cette année, et mon seul désir 
est qu’elles puissent vous être agréables. 


32 SÉRIE, T. L. — Mai 4874. 419 


III. EXTRAITS DES PROCES-VERBAUX 


DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 24 AVRIL 4874. 


Présidence de M. DROUYN DE LHUYS, président. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. 

— A l'occasion du procès-verbal, rappelant sa communi- 
cation sur l’emploi du Panais comme plante fourragère, 
M. Vavin rend compte que beaucoup de personnes lui ont de- 
mandé des renseignements sur celte question, et comptent 
tenter des essais, dont notre confrère promet de faire con- 
naître les résultats à la Société. 

— M. le Président proclame les noms des membres admis 
par le Conseil dans sa dernière séance : 

| MM. Présentateurs, 


ABRANTÈS {le duc d’), rue de Berry, 50, à Paris, { Comte d'Éprémesnil. 
et au château de Bailleul, par Gorrant A. Geoffroy Saint-Hilaire. 


(Mayenne). | Edgar Roger. 
lé 7, »1 
ADAM (Hippolyte), banquier, rue Siblequin, 55, nn. Adam: 
à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais). PuQnre 
à : Jules Grisard. 


f 


DE Tee Rss Alexandre Adam. 
Bary (Francois-Eléonore), notaire, à nu 


Dufour. 
sur-Mer (Pas-de-Calais). “one 


Jules Grisard. 

Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Saint-Yves Ménard. 

Drouyn de Lhuys. 

Marquis de Sinéty. 

Torrès-Caicedo. 

BoxneroY (Ferdinand de), docteur en médecine, PAS Re she Re 
a Un a ee (Ho el): Fe Geo roy Saint-Hilaire. 

? Moquin-Tandon. 

Jules Grisard. 

Henry Mars. 

Raveret-Wattel. 


2 


BEZET (Félix), propriétaire, conseiller d’arron- 
dissement du Loiret, rue Montaigne, 7, à 
Paris. 


BLEsT-GANa (Alberto), minisire plénipotentiaire 
du Chili, avenue de Messine, 19, à Paris. 


BRÔLEMANN (Henry), rue de Marignan, 22, à 
Paris. 


PROCÈS-VERBAUX. 291 


Doiue de Lhuys. 
Margarot-Pauc. 
Maumenet. 


j { 
CAMBON (Adrien), propriétaire, rue Deyron, 8 Ë 
Ê Geoffroy Saint-Hilaire. 


à Nîmes (Gard). 


2 


CAssAN-FLOYRAG (Denis de), propriétaire, ave- 


nue de Neuilly, 104, à Neuilly (Seine). Saint-Yves Ménard. 


Moquin-Tandon. 

Ernest Cottin. 

Mo d'Éprémesnil. 

{ a. Geoffroy Saint-Hilaire. 


Corri (Eugène), propriétaire, à Verez (Indre- 
et-Loire). 


DESROUSSEAUX (Édouard), membre du Conseil 
général de la Marne, au château de No 
dières, par Châtillon-sur-Marne (Marne), 
rue de Londres, 31, à Paris. 


. de Baudry. 
ue d'Épr émesnil. 
Jules Grisard. 


D 
EsPAGNy (le comte d’), trésorier général du dé- | NES 


Comte d’'Eprémesnil. 
partement du Rhône, à Lyon (Rhône). prenne 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Comte d'Éprémesnil. 
Henri Gaullier. 

Jules Grisard. 


ESPERONNIÈRE (le comte René de |’), proprié- 
taire, au château de la Saulaye, près Candé 
(Maine-et-Loire). 


FORGET (Pierre), rue du Marché, 56, à ai 
(Seine). 


{ Drouyn de Lhuys. 

Comte a *Éprémesnil. 
Jules Gisard. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Moquin-Tandon. 

Edgar Roger. 

Ch. Arnould. 

Drougn de Lhuys. 

Fréd. Jacquemart. 


3, à Paris. 


FUSELLIER, propriétaire, rue de Lafayette, 148, 
à Paris. 


GarNor (Émile), propriétaire, pavillon de Bel- Bon GE Buse 


levue, près Avranche (Manche). ei CA 


Foup (Paul), rue du Faubourg-Saint-Honoré, | 


GossELiN (Bertulphe), ancien maire de Bou- 
logne-sur-Mer, banquier, président du Tribu- 


( Alexandre Adam. 
nal et de la Chambre de commerce, à Bou- id 


logne-sur-Mer (Pas-de-Calais). Jules Grisard. 

Bonnat. 

Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Henri Bouley. 

Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Drouyn de Lhuys. 

| A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

| Saint-Yves Ménard. 


Gougi£ (Jean-Richard), peintre, rue Pigalle, 57, 
à Paris. 


GuRY, vétérinaire militaire, parc de Montretout, 
à Saint-Cloud (Seine-el-Oise). 


Hamor (Frédéric), propriétaire, rue de la Ville- 
l’Évêque, 40, à Paris. 


299 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


HumiÈres (le comte Roger d’), propriétaire, au { Gabriel de Brossard. 
château de Marcolès, par Mae an) Drouyn de Lhuys. 
Salvetat (Cantal). re de Sinéty. 

{ Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

| Marquis de Sinéty. 

(DrQuyn de Lhuys. 

} Comte d° Éprémesnil. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Drouyn de Lhuys. 


JANSEN (Adolphe), propriétaire, boulevard Mail- 
loi, 50, à Neuilly (Seine). 


LAMARCHE (Oscar), banquier, rue Louvrec, 70, 
à Liége (Belgique). 


LAURENT (Abel), agent de change honoraire, | 
ancien maire du VIII® arrondissement, pro-{ Jules Grisard. 
priétaire, rue François Ier, 12, à Paris. Pons 
LE SERGEANT DE MONNECOVE (Albert), proprié-{ De Bayenghem. 
taire, à Saint-Omer, rue de Dunkerque, 125, ce d’Éprémesnil. 
(Pas-de-Calais). À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
| Deyrolle fils. 
Drouyn de Lhuys. 
! Maurice Girard. 
Livais (le docteur Eugène), ancien maire de Alexandre Adam. 
Boulogne-sur-Mer, rue de lÉcu, 7, à Boulo-} Dufour. 
gne-sur -Mer (Pas-de-Calais). Jules Grisard. 
MARGARINOS-CERVANTES (Mâleo), ministre Dee Drouyn de Lhuys. 
dent de l’Uruguay, avenue de Friedland, 42, ne de Sinéty. 
à Paris. l: Torrès-Caïcedo. 
Marié-Davy, directeur de l'observatoire de es A. Geoffroy Saint-Hilaire. 


Le Doux (Christian), sériciculteur, boulevard 
Saint-Michel, 83, à Paris. 


Montsouris, à l’observatoire de Montsouris, / Maurice Girard. 
boulevard Jourdan, à Paris. Marquis de Sinéty. 

Jules Grisard. 

Jacques Lefebvre. 
Jouenne. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire 
Maurice Girard. 

Marquis de Sinéty. 

Comie d’Éprémesnil. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire, 
Saint-Yves Ménard. 
Comte d’Éprémesnil. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Edgar Roger. 


à : : Émile Chevalier. 
PiNEL (Honoré), rédacteur du journal /a Chasse | anne Dont 


illustrée, à Gonesse (Seine-et-Oise). À. Geoffroy Seb tite 
RATIER (Gustave), ancien préfet, avocat, con- | A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

seiller général du département du Morbihan, ? Maurice Girard. 

à Lorient (Morbihan). Marquis de Sinéty. 


MEUNIER (Félix-Jean-Baplisie), propriétaire, 
avenue de Neuilly, 156, à Neuilly (Seine). 


PanxaARD (Félix), place Bréda, 13, à Paris. 


Passx (Frédéric), rue Labordère, 10, à Neuilly 
(Seine). 


Pier (Gustave), conseiller général de la Côte- 
d'Or, à Dijon (Côte-d'Or). 


PROCÈS-VERBAUX. 293 


Drouyn de Lhuys. 
À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Moquin-Tandon. 


SAINTE-MARIE (Robert de), avenue de Sécu ie ie 
13, à Paris. | s roy Saint-Hilaire. 


RIFFAT (Marc-Antoine), notaire, à Évaux 
(Creuse). 


Edgar Roger. 

Comte d'Éprémesnil. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

P. E. O. Leroy. 

Souza (le docteur Pedro Luis Pereira de), à { Alph. Denis. 

, Comte d’Éprémesnil. 

Jules Grisard. 

| Ch. Arnould. 

F Drouyn de Lhuys. 

Fréd. Jacquemart_ 

Drouyn de Lhuys. 

D' Martin. 

Marquis de Sinéty, 

Alexandre Adam. 

Dufour. 

Jules Grisard. 
Drouyn de Lhuys. 

W£yL (Édouard), rue Joubert, 8, à Paris. ja Geoffroy Saint-Hilaire. 
Marquis de Sinéty. 


SARRUS (Jean), curé à Saint-Affrique-du-Causse, 
par Espalion (Aveyron). 


Rio-Janeiro (Brésil), et avenue Friedland, 21 
\ à Paris. 


TEISSEIRE (Auguste), propriétaire, rue de Tré 
vise, 3, à Paris. 


WarLLy (Alfred), 110, Clapham Road, London, 
S. W. (Grande-Bretagne). 


WALEY (S. W.), agent de change, membre du 
Stock exchange, 22, Devanshire place, Port- 
land place, à Londres (Grande-Bretagne). 


— M. le Président fait part ensuite de la perte regrettable 
que la Société vient de faire dans la personne d’un de ses 
membres, M. le général baron Girod (de l'Ain), qui fut le 
créateur du troupeau de mérinos de Naz. 

— La Société de géographie fait parvenir plusieurs lettres 
d'invitation, pour sa première assemblée générale de 1874. 

— MM. Blesit-Gana, ministre plénipotentiaire du Chili, 
comte d’'Espagny, comte de l’Espéronnière, Forget, A. Gos-: 
selin, Gury, A. Lambert, Le Doux, Margarinos-Cervantés, 
ministre résident de l’Uruguay, Pétot, T. Rey et E. Riban 
adressent des remerciments pour leur récente admission. 

— M. le Ministre des Pays-Bas fait connaître le décès de 
Son Excellence M. le général Krœsen, ex-commandant en chef 
de l’armée Indo-Néerlandaise, auquel la Société avait décerné 
cette année une de ses récompenses. 

— M. le prince de Joinville, Son Excellence M. le comte 


29h SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Apponyi, ambassadeur d’Autriche-Hongrie, et MM. les Mimis- 
tres de l’Intérieur, de l’Instruction publique et de l’Agricul- 
ture et du Commerce, s’excusent de ne pouvoir assister à la 
séance publique annuelle de la Société. 

— MM. Régulus Carlotti, Cordier, Crépu, Dubois, Dupont, 
Léonce Bergis, Maurice Girard, vicomte d’Adhémar de Case- 
Vielle, Gimbert, Goudchaux, docteur Lafon, Ernest Lambert, 
général de La Croix-Vauhois, Christian Le Doux, Maumenet, 
comte de Morteuil, Victor Masson, vicomte de Milly, Raveret- 
Wattel, de Sauley, Touzac et Usèbe adressent des remer- 
ciments pour les récompenses qui leur ont été décernées 
dans la séance publique annuelle. 

— M. le Consul général de France à San-Francisco rend 
compte de ses démarches, pour procurer à la Société les 
renseignements qu’elle lui a demandés sur les productions 
naturelles de la Californie. 

— MM. Rafael Barba, de Baye, Barutel, vicomte de Bélizal, 
Bessette, Émile Boigues, Brady, Dreyfous, Durand-Gonon, 
de Givry, Kralik, de Surigny, Tenain et de Vernejoul de La 
Roque, ainsi que la Société d’horticulture et d’arboriculture 
de la Côte-d'Or, accusent réception des envois d'animaux, 
de graines ou de végétaux qui leur ont été faits. 

— MM. Ch. Agassiz fils, Barutel, Berthoule, E. Boigues, 
comte de l’Espéronnière, Genesley, de Miffonis, vicomte de 
Perrien et marquis de Pruns demandent à prendre part aux 
cheptels de Ja Société. 

— MM. de Bouchaud de Bussy, de Coutans, Genesley et 
Ponsard rendent compte de l’état de-leurs cheptels d'ani- 
maux. 

— M. Gobin, professeur de zoologie et de zootechmie à 
l’école d'agriculture de Montpellier, fait hommage à la Société 
d'exemplaires de trois ouvrages qu’il vient de publier et ayant 
pour titre : 

1° Traité des oiseaux de basse-cour, d'agrément et de pro- 
duit ; 

2 Précis pratique de l'élevage des Lapins, Lièvres et Lé- 
porides ; 


PROCÈÉS-VERBAUX. 295 
3° Précis élémentaire de sériciculture pratique. 

M. Gobin demande que ces ouvrages soient soumis à l’exa- 
men de la Commission des récompenses. 

— M. le Secrétaire général communique deux lettres qui 
lui sont adressées par MM. Viel et Delaroa, attachés au Minis- 
ière de l'Intérieur. Ces Messieurs, qui ont dans leur service la 
rédaction des circulaires adressées aux préfets concernant la 
police de la chasse, désireraient insister dans ces instructions 
sur la nécessité de protéger les oiseaux inseclivores, et ils 
prient qu'on veuille bien leur fournir, à ce sujet, d’utiles 
indications. : 

— M. Victor Masson écrit de La Chassagne (Côte-d'Or) : 
« Je serais disposé à travailler, de concert avec M. Jules 
Vignon, mon gendre, au reboisement de tous ces sommets 
dénudés dont la vue attriste, dans notre contrée, le voyageur 
se rendant dans le Midi. Mais nous trouvons devant nous un 
obstacle dont les efforts privés ne triompheront jamais. Toutes 
ces friches arides appartiennent à des communes qui ne 
veulent n1 planter elles-mêmes, ni vendre aux personnes dis- 
posées à planter des terrains dont elles ne retirent aucun 
produit. 

» Le reboisement ne prendra de l’extension en France que 
lorsqu'une loi autorisera l’État à exiger des communes qu’elles 
plantent elles-mêmes leurs terrains vagues ou qu’elles les 
vendent avec la condition expresse que les acquéreurs plan- 
teront dans des délais déterminés. 

» Je pense que si la Société d’acclimatation prenait en main 
cette grave question, elle pourrait — peut-être de concert 
avec la Société des agriculteurs — provoquer la mise à l'étude 
d’une loi spéciale. Elle ajouterait ainsi un service signalé à 
tous ceux qu’elle rend chaque jour. » 

— M. Crépu écrit de Daya (Algérie) : « J'ai installé auprès 
de la ville d'Oran, dans le ravin de Misserghin, les quatre 
couples d’autruches adultes que je possède ; les pares, qui sont 
contigus, présentent 22 mètres de long sur 42 de large; les 
oiseaux ne peuvent se voir entre eux. 

» Dés le mois de novembre, trois mâles entraient en rut et 


296 SOCIËTÉ D’ACCLIMATATION. 


le 41° janvier la ponte commençait; à partir de cette date, deux 
couples, dont les sujets sont âgés de six ans, pondirent à peu 
près régulièrement un œuf tous les deux jours, dans le trou 
rempli de sable que je leur avais fait préparer dans l’angle le 
mieux exposé de leur parc. 

» Le premier couple s'arrêta à vingt-cinq œufs, le deu- 
xième à vingt-sept. 

» Le 28 février, un des mâles commença à se mettre régu- 
lièrement sur le nid qu’il ne quitta plus, et cela fort régu- 
lièrement, que de dix heures du matin à cinq heures du soir, 
temps pendant lequel la femelle venait y prendre sa place. 

Le 10 avril, jour où je recevais votre lettre du 2, une dé- 
pêche m’annonça l’éclosion de cinq petits, dont un fut trouvé 
mort le lendemain. Je n’attendais un résultat que le 45, le 
mâle continue à rester sur les œufs. Je pars ce soir pour 
aller voir mes nouveau-nés. 

» Chez le deuxième couple, après des tergiversations, le 
mâle se refusa à couver, et la femelle le remplaça dans ce pé- 
nible devoir, mais comme elle couve très-irrégulièrement, je 
ne compte plus sur un résultat de ce côté, ce que je regrette 
d'autant plus que l’année dernière le même couple n’a donné 
mes deux premiers produits. 

» Enfin le troisième couple qui se compose d’une femelle 
de six ans, sœur de la première, et d’un mâle de quatre ans, 
très-vigoureux, a donné 12 œufs, dont 11 sont régulièrement 
couvés depuis le 15 mars. 

» Bien que ces détails soient fort incomplets, ce qui tient 
à ce que je suis éloigné de 4150 kilomètres de mes oiseaux, 
j'ai pensé vous être agréable en vous les donnant, pour vous 
prouver que je continue sérieusement mes essais, malgré les 
difficultés que j'ai eues, ayant été obligé de changer trois fois, 
en six mois, le personnel chargé de soigner mes autruches. 

» Je terminerai en vous disant qu'ayant apporté ici 12 œufs 
frais, nous les avons mangés, un, deux et même trois 
mois après leur ponte. Ils étaient demeurés frais et ils ont 
été trouvés excellents de quelque manière qu’ils aient été 
accommodés. J’espère pouvoir vous en envoyer quelques-uns 


PROCÈS-VERBAUX. 297 


l’année prochaine pour les faire déguster à Paris, car je con- 
sidère ce produit comme un des plus importants dans l’ex- 
ploitation des autruches. » 

— M. de Fréminville écrit à M. le Directeur du Jardin d’ac- 
climatation : « Le mâle de Cigogne qui me reste est devenu 
irés-privé et me rend de grands services pour le Jardin. Il 
accompagne partout les jardiniers et ramasse les lombrics et 
autres insectes, à mesure qu’on bêche. Rien n’est plus amu- 
sant, au printemps et en été, que de lui voir faire la chasse 
aux petits hannetons de pré qui volent le soir. Ces Cigognes 
en font une consommation énorme et les attrapent au vol avec 
une dextérité et une rapidité étonnantes. » 

— M. Albert de Surigny adresse, à la date du 42 avril, la 
lettré suivante : « J'ai le regret de vous annoncer la perte 
d’une des Colombes lophotès que j'avais reçues de la Société 
d’acclimatation, le 5 avril. À son arrivée chez moi, j'avais placé 
ce couple dans un colombier fermé, et après cinq jours de 
captivité je lui ai donné la liberté, pensant que ces 
oiseaux, de même que tous les pigeons domestiques, se pose- 
raient sur les toits voisins ou sur les grands arbres de mon 
parc; mais j'ai été tristement surpris en les voyant partir à 
tre-d’ailes. Une des colombes a été retrouvée le soir même 
el ma été remise ; l’autre a été aperçue le lendemain dans 
un champ voisin, mais on n’a pu me la rapporter qu’aujour- 
d'hui et malheureusement trouvée morte dans un jardin. Elle 
n'offre aucune trace de coups de fusil ou de pierre, etje ne 
puis m’expliquer sa mort, car il me semble étrange qu'au mi- 
lieu de la verdure cet oiseau soit mort de faim en quarante- 
huit heures, sans chercher à revenir chez moi pour y retrou- 
ver du grain et à 2 à 300 mètres. 

» Les colombes étant parfaitement semblables par le plu- 
mage et la huppe de la tête, il est fort difficile de reconnaitre 
leur sexe; cependant je crois que c’est la femelle qui est 
morte. Je vous prie, Monsieur, de vouloir bien me dire ce 
que je dois faire de la colombe qui me reste, et que je 
n'ose plus mettre en liberté. Elle ne peut m'être d'aucune 
utilité toute seule, et je pense que le mieux sera, sur votre 


9298 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


ordre, de la renvoyer au Jardin d’acclimatation. Elle a déjà 
souffert en perdant beaucoup de plumes de la queue et semble 
assez triste de sa solitude. Si j'avais pu prévoir que ces ani- 
maux n'étaient nullement domestiqués, j’aurais fait construire 
une volière fermée d’un grillage, mais le but de l’acclimata- 
tion n'aurait guère été atteint. 

» Mon couple de léporides se porte très-bien. 

» P.S. Lundi matin, 43 octobre. 

» Pour utiliser la pauvre colombe morte, et la juger au point 
de vue culinaire, elle a été rôtie et dégustée ce matin, ce qui 
me permet de rectifier ainsi ma lettre : ce n’est pas la femelle, 
mais bien le mâle qui est mort; donc, c’est la femelle qui est 
vivante. J'avais cru le contraire, parce que la colombe vivante 
roucoulait un peu à la manière des mâles. La chair moins 
noire et d'un goût moins prononcé que celle du pigeon est 
un mets très-délicat, quoique offrant un oiseau moins volumi- 
neux que le pigeon ordinaire. » 

— M. Berthoule, lauréat de la Société, adresse deux truites 
pêchées dans le lac Chauvet (Puy-de-Dôme), et provenant des 
éclosions de février ou mars 1871. 

— M.le docteur Jean Odstrcil, professeur au Gymnase 
de Tessien (Silésie), demande si la Société pourrait lui pro- 
curer, soit des cocons, soit de la graine d’Aféacus Yama-maï, 
Mylitta, Paphia, Faidherbii, ete. 

Dans une autre lettre, datée du 42 avril, M. Odstrcil adresse 
les renseignements suivants sur les tentatives faites en Autri- 
che pour l’introduction de l’Attacus Pernyi : « Les premiers 
cocons en furent importés en Autriche dans l'hiver de 
1870-71, par Trieste, directement de la Chine, et les graines 
distribuées aux éleveurs par la station d'expériences de 
Gorice. J’en reçus quelques graines au printemps et j'en fis 
l'éducation, dans ma chambre, avec beaucoup de chenilles de 
Fama-maiï ; mais une maladie s'étant mise parmi ces der- 
nières, les Pernyi en furent aussi attaqués et je perdis la 
race. 

» En 1872, je reçus de Gorice encore quelques graines, dont 
l'éducation me fournit environ 80 cocons, et j'obtins de la 


PROCÈS-VERBAUX. 299 


seconde génération environ 109 cocons. La même année j'en 
fis en Moravie, en plein air, une culture de 1500 beaux cocons. 

» En 1873, j'exposai dans un jeune bois de Chênes, en plein 
air, environ 10 000 petites chenilles ; elles profitérent bien, 
et aucun symptôme de maladie ne se manifesta. Mais elles 
furent toutes dévorées par lesoise aux. 

» Dans ma chambre, j'ai produit environ 500 cocons. 
Quelques maîtres d’école, dans les villages voisins, ont élevé 
à peu près 1000 cocons. | 

» Cette chenille paraît moins exposée à la maladie que 
celle du Yama-maï, dont la race a presque entièrement dis- 
paru en Autriche. 

» Malheureusement, trop peu de personnes s'occupent de 
cette question. La plupart sont des maîtres d’école habitant 
des villes ou villages éloignés de forêts, et, par suite, peu en 
position de surveiller des éducations à l’air libre. 

» Si vous désirez des cocons ou de la graine d'A. Pernyi, je 
me ferai un véritable plaisir de vous en envoyer... » 

— M. Lichtenstein écrit de Montpellier : « Sur les 200 œufs 
de Fama-maï qui sont arrivés sans être éclos, j'ai pu sauver 
une cinquantaine de chenilles qui sont à leur seconde mue. 
Cependant elles n’ont pas la vigueur de celles qui sont nour- 
ries avec la feuille du chêne bien développé, et si la Société 
avait encore quelques œufs en glacière et voulait bien m’en 
envoyer un ou deux petits paquets, je crois que je serais à 
présent dans d'excellentes conditions pour réussir, mes chênes 
étant complétement feuillés et la feuille tout à fait grande. 

» Je serais aussi très-reconnaissant à la Société, si elle pou- 
vait disposer en ma faveur de quelques œufs d’Atéacus Pernyi, 
quand elle en aura. 

» J'attends d'Italie et d'Amérique quelques œufs d’autres 
espèces et notamment des À. Polyphemus et Cecropia, et je 
me propose de faire un travail comparatif sur ces divers pro- 
ducteurs de soie. » 

— M. Fausto Paterlini adresse un rapport sur ses éduca- 
tions de vers à soie et une boîte de cocons de diverses races 
élevées par lui. — Remerciments. 


300 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


— M. Léonce Bergis écrit de Montauban : « Les Atfacus 
Yama-maï que vous m'avez adressés, ont donné quelques 
vers dès le 31 mars, bien qu’ils aient été mis autant que pos- 
sible à l’abri de la chaleur; n'ayant pas dans la banlieue de 
Montauban des chênes en végétation, j’ai envoyé les jeunes 
vers dans un val boisé au nord de notre département ; la terre 
y est calcaire et fraîche, les arbres y sont abrités; tout cela 
produit une végétation hâtive, les bourgeons de chêne blanc 
y ont ? centimètres de long et j'espère que l'éducation pourra 
y être conduite à bien. 

> J'espère vous être agréable en vous marquant qu'à nos 
éducations anticipées, les divers lots indigènes se sont tenus, 
étant montés, d’une façon beaucoup plus satisfaisante que les 
précédentes années. Des renseignements analogues nous arri- 
vent des essais précoces de Cavaillon (Vaucluse). Cela peut 
faire espérer une campagne heureuse, et la possibilité d’exo- 
nérer enfin notre pays du lourd tribut qu'il paye à l'étranger 
pour obtenir des semences. » 

— M. de Saulcy écrit de Metz: « ….Aujourd'hui, 13 avril, 
pas une seule larve de Yama-maï n'a fait encore son appa- 
rition chez moi, tandis que l’année dernière à pareille époque 
J'avais malheureusement des éclosions. Je suis d'autant plus 
satisfait de pouvoir vous donner ce renseignement que lorsque 
je me suis présenté au bureau de la Société, le 1% avril, il 
m'a été affirmé qu’il y avait déjà des naissances même parmi 
les œufs que j'ai eu l’honneur de vous envoyer, et qu’il avait 
fallu les mettre dans la glacière..…. » 

— M. de La Roquette transmet sur le Diospyros les 
renseignements ci-après, qui lui sont fournis par l'élève — 
interprète du consulat de France à Yokohama : « Le Dios- 
pyros est connu vulgairement au Japon sous le nom de 
Kaki. 

» On distingue deux variétés de Kaki. 

» C’est au fruit de la première de ces variétés que se rap- 
porte la description donnée par M. Mazel (Bulletin, mars 
1874). Sa chair, assez semblable, en effet, à de la gelée de 
coing, renferme seulement cette infinité de fibres qu’on ren- 


PROCÈS-VERBAUX, 301 


contre dans les manques, en particulier dans celles de Sin- 
gapoor. 

» Le fruit de la seconde variété est plus petit et moins sa- 
voureux ; sa chair, marquée de petites taches brunes, est 
ferme comme celle de la pomme. 

» S. M. le Tennô a la coutume, lorsqu'il reçoit quelque 
haut fonctionnaire, de lui faire remettre dans la salle même 
d'audience, sur un plateau de laque d’or, quelques fruits secs 
de Kaki, une pièce d’argent appelée Dara et un 162 (sorte de 
crevette), qui sont regardés au Japon comme les symboles du 
bonheur, de la richesse et de la fécondité. » 

— M. le Directeur du Jardin d’acclimatation offre à la So- 
ciété, de la part de M. Pépin, ancien directeur des cultures au 
Muséum, des graines de Cryptomeria Japonica, Thuya Lobbu, 
Pinus monticola et Cupressus Laivsoniana. 

— M. le docteur Lecler, de Rouillac (Charente), accuse 
réception de Bambous qui lui ont été adressés et fait parvenir 
quelques sachets de graime de ver à soie provenant d’une édu- 
cation qui s’est fait remarquer par sa belle venue. 

— M. Maumenet écrit de Nîmes : « Je vous ai parlé, dans 
une précédente lettre, de la recherche des procédés d’extrac- 
tion du vert de Chine, des différentes partie du Lo-za, que je 
fournis à des chimistes s’occupant spécialement de teinture. 
Tout en s’aidant des ouvrages de Natalis Rondot et de Paul 
Champion, ils n’ont encore rien pu obtenir d’intéressant. Ce- 
pendant la Société sera peut-être bien aise de distribuer quel- 
ques semences de ce Rhamnus de Chine, qui est un assez 
joli arbuste, d’une rusticité remarquable, comme je l'ai dit, 
et, à tout hasard, je vous envoie un petit paquet de ses 
baies. ; 

» Par contre, je recevrais avec plaisir des graines de l'Eu- 
calyptus coriacea, dont un de nos bulletins a annoncé l’envoi 
par M. Ramel, et du resinifera qui est dans. le même cas; 
afin d’expérimenter ceux-ci, comme je le fais des autres. 
D’après ce que j'en sais, ce sont les variétés qui ont le plus de 
chances de réussite. » 

—- La Société d’horticulture et d’arboriculture de la Côte- 


302 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


d'Or demande à être comprise dans la distribution des graines 
de Chou-fleur impérial offertes par M. Bossin. 

— M. Durieu de Maisonneuve, directeur du Jardin des 
plantes de Bordeaux, annonce l’envoi des graines qui lui ont 
été demandées, ainsi qu’un rapport sur les résultats obtenus 
du semis de diverses graines provenant de la Société. » À ce 
sujet, dit M. Durieu de Maisonneuve, je reviendrai sur une 
plante potagère, une curieuse variété de pomme de terre, 
reçue sous le nom de Pomme de terre 7lez, sur laquelle il 
me sembla à propos d'appeler l'attention, il y a quelques 
années, et dont je signalai les qualités et les défauts. Or, une 
qualité nouvelle, que je n’avais pas remarquée et que j'ai re- 
connue depuis, celle de ne pas bourgeonner hors de l’état de 
culture, m'engage à revenir sur ce tubercule. 

» Nos graines n’élant généralement récoltées qu’au point 
de vue des jardins botaniques, elles ne le sont qu’en. petite 
quantité, ce qui ne permet pas d’en distribuer pour de nom- 
breux semis. Parmi celles demandées, ies propagules d'Oxales 
crenata ne consistent plus qu’en petits tubercules; ceux que 
leur volume permettait d'utiliser ont tous été distribués aux 
personnes qui désiraient expérimenter cet excellent légume. 
Les plus petits suffisent parfaitement pour la plantation. » 

— M. de Geofroy, envoyé extraordinaire et ministre plé- 
nipotentiaire de France à Pékin, adresse la note suivante sur 
le Pinus Bungeana : « Lorsqu'il est jeune, cet arbre a l’écorce 
verdâtre, s’enievant par écailles comme celle du Platane. Le 
tronc et les branches blanchissent en vieillissant et finissent 
par sembler passés à la chaux. Cet arbre acquiert des dimen- 
sions énormes. On en voit d'immenses dans les cours des pa- 
godes et dans les jardins impériaux qui doivent être aussi 
très-vieux. Il supporte le froid aride de Pékin (15 et 20 degrés 
au-dessous de zéro) et ne paraît réclamer aucun soin de cul- 
ture. 

— M. Dufour, notre délégué à Constantinople, rend compie 
de ses démarches en vue de procurer à la Société des graines 
de Grenadiers à petits pepins. M. Dufour espère pouvoir en 
faire un prochain envoi. « Quant aux drageons, dit-il, que 


PROCÈS-VERBAUX. 303 


vous préféreriez recevoir, 1l serait impossible, de les faire 
parvenir en bon état à leur destination, tant à eause de la 
grande distance qui sépare Constantinople des lieux de pro- 
duction, que de l'irresponsabilité des divers messagers qui 
font le transport des marchandises... » 

— M. le docteur Turrel écrit de Toulon : « ....A propos 
de l'utilité et de l’opportunité de la publication prochaine de 
mon mémoire sur les maladies de la vigne, je crois devoir 
vous signaler un fait qui ne manque pas de signification : j'ai 
recu hier la visite d’un commis voyageur en Clinton ; d’autres 
commis voyageurs en Scuppernong parcourent les campa- 
ones et les villes du Midi, exploitant la terreur de nos culii- 
vateurs propriétaires, et cherchant à placer à très-haut prix 
leur détestable marchandise. 

» Ge matin, j'ai vu l’un de nos collègues de la Société 
d’horticulture et d’acclimatation du Var, M. Cachard, maire 
de la Cadière (Var), grand propriétaire, et grand commission- 
naire en vins, qui m'a dit que la région qu’il parcourt depuis 
Bandol jusqu'à Cuers est sur le point de prendre des résolu- 
tions pour l'introduction des vignes américaines. Ce que je 
lui ai dit des arguments de mon mémoire l’a tellement 
frappé, qu'il veut réunir un congrès de propriétaires, pour 
leur soumettre mes arguments et les engager à surseoir à leurs 
souscriptions. Je lui communiquerai après-demain la minute 
de mon mémoire que j'ai conservée. 

» Vous voyez donc qu'il y a urgence et que c’est encore 
s'occuper d’acelimatation que de donner les raisons qui doi- 
vent faire repousser l'introduction. et SE en d’es- 
pêces qui ne répondent nullement à nos besoins. » 

— M. Léo d'Ounous, de Saverdun, annonce ie de se- 
mences de céréales et plantes de — Remerciments. 

— M. A. Cordier fait parvenir un tableau comparatif de la 
rapidité de croissance de diverses espèces d'Eucalyptus dont 
les graines lui ont été remises, soit par M. Ramel, soit par 
notre Société (voy. au Bulletin). 

— M. Alphonse Astier écrit de Bourg-Saint-Andéol (Ardé- 
che) : « Parmi les arbustes que je vous ai prié de m’expé- 


20% SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


dier il y a cinq ou six ans, les Chameærops et les Citronniers 
de pleine terre prospèrent, quoiqu'ils aient été changés de 
place plusieurs fois. » 

— En accusant réception de la graine d'Eucalyptus qui 
lui a été adressée, MM. Chauvin, de Lannion (Côtes-du-Nord), 
ajoute : « Cette graine a été distribuée entre dix de mes amis. 
Chez cinq d’entre eux, qui ont semé en pleine terre, la graine 
n’est point sortie; J'attribue ce résultat à la négligence ou 
aux jardiniers qui auront pris la première pousse pour une 
mauvaise herbe. Chez moi et chez les quatre autres, la graine 
semée fin mai est parfaitement sortie. Seulement, au commen- 
cement de décembre, nous avons eu trois nuits de gelées 
très-fortes. Le thermomètre est descendu à 8,50 au-dessous 
de zéro. Depuis, la plante à l’état d'herbe ne fait que végé- 
ter, et chez trois d’entre nous elle a entièrement disparu. 

:» Deux de mes amis ont été plus heureux; is ont semé la 
oraine en pots. L'un deux a eu l’idée d’enfouir ses pots dansune 
couche. Tous deux ont aujourd’hui des Eucalyptus mesurant 
de 0",60 à 0,70. Ceux qui ont subi le régime de la couche 
sont remarquables de vigueur; il est vrai d’ajouter qu'ils 
ont passé l’hiver dans un endroit clos. 

» J'avais répandu quelques graines dans le jardin du 
Cercle; pendant tout l’été et jusqu’à la fin de l'automne, elles 
ont fait l’admiration de tout le monde. Je pense que si la 
oraine était semée dans nos parages fin mars ou commen- 
cement d'avril, il ÿ aurait espoir de succès; c’est ur nouvel 
essai à faire. » 

— M. le Président annonce l’ouverture du scrutin pour 
l'élection du bureau et d’une partie des membres du Conseil, 
et désigne pour faire le dépouillement des votes une commis- 
“sion composée de MM. baron Billaud, de Brossard, Maurice 
Girard et Jules Lecreux. 

— M. le Secrétaire général rend compte qu'un nouvel envoi 
de Gouramis, qu'avait bien voulu nous faire M. Henry Rozyv, 
de Rangkasbetong (Java), vient encore malheureusement 
d’échouer. Malgré tous les soins dont ils ont été entourés, la 
plupart de ces poissons sont morts, avant même de pouvoir 


PROCÈÉS-VERBAUX, 305 


être embarqués ; le reste n’a pu supporter le voyage, et tous 
avaient péri lorsqu'est arrivé à Marseille le navire qui les 
transportait. 

— M. Geoffroy Saint-Hilaire annonce que la Mule d'Algérie, 
achetée l’année dernière par ile Jardin d’acclimatation, à 
cause de l'exemple rare de fécondité qu’elle avait offert, vient 
encore de mettre bas, et que son produit est arrivé à terme 
dans d’excellentes conditions. Ce fait si remarquable à déter- 
miné l’un de nos confrères, M. le comte d’Esterno, à faire sur la 
fécondité des Mules des recherches dont il compte porter les 
résultats à la connaissance de la Société. 

— Enfin M. le Secrétaire général fait mettre sous les yeux 
de l’assemblée une échelle construite pour le service de la 
bibliothèque, avec des Bambous provenant des cultures de 
M. Auzende. Cette échelle, établie par les soins de M. Steckler, 
ornemaniste en Bambous, est remarquable par son extrême 
légèreté, qui n'exclut pas la solidité. Haute de 4",10, elle ne 
pèse que 5“,050, bien que les Bambous employés dans sa 
construction ne soient pas encore complétement secs, et doi- 
vent par conséquent perdre encore de leur poids. Les mon- 
tants sont en Bambusa mitis; les traverses en tiges de 
diverses espèces, principalement de Z. nigra. 

— M. Millet rappelle à la Société les communications qu’il 
a faites en 1873 (Bulletin, pp. 366 et 432) et dans la séance 
du 6 mai dernier, sur les gelées printanières, et explique les 
circonstances dans lesquelles ces gelées ont lieu. Par l'effet du 
rayonnement, la terre et les végétaux perdent une certaine 
portion de leur calorique durant les nuits calmes et sereines 
du mois de mai; et c’est vers le lever du soleil que cette dé- 
perdition est la plus considérable. Les jeunes pousses, les 
fleurs et les fruits d’un grand nombre de plantes sont atteints 
lors même que la température de l’air marque À ou 5 degrés 
au-dessus de zéro. Notre confrère, rappelle en même temps, à 
l'assemblée que, par une lettre circulaire du 28 février der- 
nier, un questionnaire a été adressé à un grand nombre de nos 
confrères, répartis dans les diverses régions de la France, en 


les invitant à recueillir des renseignements précis sur les 
3° SÉRIE, T. I. — Mai 1874, 20 


306 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


brouillards de mars, afin de pouvoir constater si ces brouil- 
lards, selon les conditions ét les localités dans lesquelles ils 
se produisent, sont réellement suivis de gelées aux dates cor- 
respondantes en mai, lorsque le témps est c/air, calme et non 
pluvieux. 

M. Millet présente lé résumé des renseignements parvenus 
jusqu’à ce jour à la Société. Afin de mettre les agriculteurs, 
les horticulteurs et notamment les viticulteurs en position, soit 
de se prémunir contre les gelées tardives, soit de fournir des 
renseignements utiles, notre confrère a dressé un tableau 
dans lequel il indique, pour chaque département, la date des 
jours où l’on a observé des brouillards en mars, et où pour- 
raient se produire, dans le courant de mai prochain, des gelées 
blanches ou printanières. Ces dates, toutefois, ne seraient 
pas absolues, car on a remarqué que, dans certaines années, 
les gelées ont été en retard ou en avance d’un jour environ. 
D'autre part, les renseignements fournis par quelques obser- 
vateurs, peu familiarisés avec ce genre d’études, font sup- 
poser que l’on à désigné, sous le nom de brouillards, des 
brumes ou des vapeurs qui se forment souvent dans les val- 
lées ou à proximité des cours d’eau, et qui ne peuvent pas 
être considérées comme étant des brouillards proprement 
dits. 

M. Millet a personnellement suivi, dans toutes leurs phases, 
les brouillards des 4 et 24 mars de la région de Paris, brouil- 
lards qui se sont développés sur une grande étendue de nos 
départements. Il les signale, d’une manière toute particulière, 
comme pouvant être suivis de gelées, et recommande, en 
conséquence, de surveiller attentivement les soirées des 3 au 
5 et des 23 au 26 mai prochain. Si, dans ces soirées et vers 
trois heures du matin, le temps est couvert ou pluvieux, on 
Waura pas de gelées; mais si le ciel est clair et l'air calme, et 
si cet état persiste avant le lever du soleil, 1l faudra se hâter 
d'allumer les feux et d'entretenir une abondante et épaisse 
fumée pendant trois heures environ (de trois à six où sept 
heures du matin). On obtient une fumée suffisante par la com- 
bustion des huiles lourdes des usines à gaz, ou par celle de 


PROCÈS-VERBAUX. 207 


pailles et foins mouillés, d’herbes, mousses, gazons, feuilles 
sèches, etc., en y mêlant, autant que possible, des matières 
résineuses, du coaltar ou goudron de houille, des huiles 
lourdes, etc. La dépense devient insignifiante par l’associa- 
tion de plusieurs propriétaires dont les cultures sont conti- 
guës ou agelomérées. 

— M. le vicomte de Milly propose de demander à M. le 
Gouverneur des établissements français dans l'Océanie des 
graines ou de jeunes plants de Bourao (Hibiscus tiliaceus), 

Cet arbre précieux pourrait être acclimaté comme l’Euca- 
lyptus dans l'extrême midi de la France ou en Algérie. 

Le Bourao a une croissance très-rapide ; il prend de bou- 
tures avec une extrême facilité; son ombrage épais couvre un 
trés-orand espace et ses feuilles, employées comme émollient, 
sont préférables à la racine de guimauve et aux feuilles de 
mauve. 

Lors de la prise de possession des îles Marquises et de Taïti, 
nos chirurgiens en faisaient un très-grand emploi pour soi- 
oner les soldats malades ou blessés. 

— M. Lucy dépose sur le bureau des échantillons de 
Ramié brut et préparé, et communique à l'assemblée des ren- 
seisonements qui lui sont transmis, sur la culture de cette 
plante, par M. Abram, propriétaire du château du Merle, près 
Marseille. 

M. Lucy appelle ensuite l’attention de la Société sur les 
arrivages d'huîtres américaines, qui ont lieu depuis quelque 
temps à Paris. Ces huîtres paraissent être d'excellente qualité, 
et se conservent parfaitement fraîches, malgré la longueur du 
voyage. Celles qu'a reçues M. Lucy, et dont il met quelques : 
spécimens sous les yeux de l’assemblée, sont venues de Phila- 
delphie, par Liverpool, en vingt-deux jours ; la plupart étaient 
encore dans un état parfait de conservation. 

M. de la Blanchère fait remarquer qu’un des caractères de 
l'huître américaine est d’avoir le point d’atiache du nerf 
operculaire d’un violet foncé. Le test de ce mollusque est tou- 
jours très-épais ; la chair en est plus épaisse et plus coriace 
peut-être que chez notre huître ordinaire. 


308 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


— M. Raveret-Waitel communique l’extrail suivant d’une 
lettre adressée dernièrement, par un habitant de la colonie du 
Cap, au directeur du journal Forest and Stream : «Je 5os- 
sède en ce moment un troupeau de 27 Autruches, parfaite- 
ment apprivoisées el qui me suivent docilement. En fait, je 
ne crois pas qu'aucun animal offre plus de facilité pour la 
domestication. Je n’ai qu’à donner un coup de sifflet, en me 
présentant à ma porte, pour voir mes Autruches accourir de 
toute la vitesse de leurs longues jambes, dans l'espoir d’attra- 
per quelque friandise, et surtout de grains de maïs, dont elles 
se montrent gourmandes. Du reste, elles mangent presque 
de tout. 

» C’est à l’âge de huit mois que je fais sur mes oiseaux la 
première récolte de plumes; les autres se suivent à l’inter- 
valle de sept mois. Les premières plumes n’ont pas la valeur 
qu’elles acquièrent plus tard; cependant, elles permettent de 
réaliser déjà un bénéfice de 25 p. 100. Ce bénéfice augmente 
rapidement : il s’élève à 80 p. 100 dès la seconde récolte, et 
à 110 p. 100, au moins, pour la troisième et les suivantes. 
Les plumes sont alors de qualité supérieure, et le produit de 
chaque oiseau, mâle ou femelle, est, en moyenne, de neuf à 
dix livres (225 à 250 francs). J'ai l’intention de porter, cette 
année, mon troupeau à quarante-cinq têtes, et quand toutes 
auront atteint l'âge adulte, je compte bien obtenir un produit 
annuel de 750 livres (17750 francs), pour les plumes seule- 
ment, et sans compter les reproductions. 

» Les Autruches diminuent rapidement à l’état sauvage, 
dans la colonie, et l’on n’en trouve plus que de rares bandes, 
fort loin dans l’intérieur du pays; ce qui explique le renché- 
rissement rapide des plumes. Comme, d’un autre côté, les de- 
mandes du commerce augmentent journellement d’impor- 
tance, il s’écoulera encore du temps avant que le produit des 
oiseaux domestiques fasse baisser le prix sur les marchés. 

» Aucun élevage ne donne moins de peine ; des Autruches 
prospèrent là où l’on pourrait à peine nourrir un âne. » 

— M. le Président fait connaître le résultat du scrutin. Le 
nombre des votants était de 356. (Outre les billets de vote dé- 


PROCÈS-VERBAUX. 309 


posés dans l’urne, par les membres présents, beaucoup de 
bulletins avaient été envoyés sous pli cacheté et contre-signé). 
Les votes ont été répartis de la manière suivante : 


Président, MM. DROUYN DE LHUYS......... 396 
Vice-Présidents, Le comte D'ÉPRÉMESNIL..... 939 
Fréd. JACQUEMART......... CHU 
DT Ern. COSSON ........... 9304 
De QUATREFAGES.......... 90/ 
Secrétaire général, A. GEOFFROY SAINT-HILAIRE. 354 
Secrétaires, ME MDUPINCS ere CHAN 0550 
D' Maurice GIRARD......... 905 
RAVERET-WATTEL ......... 35 
Le marquis de SINÉTY...... 994 
Archiviste, ASREVIÉRENSA AE den che 354 
Membres du Conseil, MM. Henri BOULEY............. 395 
Camille DARESTE. .......... 905 
P. L. H. FLURY-HERARD..... 301 
D' LABARRAQUE ........... 303 
Edgar ROGER.- CR 95/4 


En outre, d’autres membres ont obtenu chacun une voix 
pour diverses fonctions. 
En conséquence, sont élus pour l’année 1874 : 


Président, MM. DROUYN DE LHUYS. 
Vice-Présidents, Comte d'ÉPRÉMESNIL 

Fréd. JACQUEMART. 

D' E. Cosson. 

De QUATREFAGES. 
Secrétaire général, MM. A. GEOFFROY SAINT-HILAIRE. 
Secrétaires, E. Dupin. 


Dr Maurice GIRARD. 
RAVERET-WATTEL. 
Marquis de SINÉTY. 
Archiviste, A. RIVIÈRE. 
Membres du Conseil, Henri BOULEY. 
Camille DARESTE. 
P. L. H. FLURY-HÉRARD. 
D' LABARRAQUE. 
Edgar ROGER. 
Il est déposé sur le bureau : 
4° De la part de M. Margarinos-Cervantès, ministre de 


l’Uruguay : 


310 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


La République orientale de l'Uruquay à l'Exposition de 
Vienne, par M. Adolphe Vaillant. 

2 De la part de M. Ed. Morren : 

Liste des jardins botaniques du monde, des chaires bota- 
niques et de quelques établissements de botanique. Liège, 
4874. 

3° De la part de M. Sirand : 

Le procédé Pasteur appliqué aux éducations de 1873 (plu- 
sieurs exemplaires). 

4° Un numéro du journal /e Var, qui reproduit en partie 
le mémoire de M. le docteur Turrel, ayant pour titre : La 
question des madragques. 

5° Un ruméro de l’/ndustrie progressive, renfermant un 
article sur les prix institués par la Société d'acclimatation. 

6° Plusieurs programmes du concours d'animaux de la 
race mulassière, qui doit avoir lieu à Niort, du 3 au 7 juin 
1874. 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 8 MAI 1874. 


Présidence de M. le Comte D’ÉPRÉMESNIL, vice-président. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. 

— À l’occasion du procès-verbal, rappelant la communica- 
tion de M. le docteur Turrel sur les maladies de la Vigne, 
M. Decroix exprime le désir de voir la Société essayer, par- 
ticulièrement au Jardin d’acclimatation, le procédé de culture 
recommandé par M. Duchesne-Thoureau, et qui lui paraît 
donner aux ceps une vigueur extraordinaire. 

M. Rivière rappelle que la méthode préconisée par notre 
confrère fut, il y a quelques années, présentée comme un pro- 
cédé nouveau par M. Daniel Hooïbrenk. On la trouve néan- 
moins décrite dans un Traité de culture publié en 1633; elle 
était même connue des anciens, car Pline et Columelle en font 
mention. Des cultivateurs de Montretout la pratiquent, de père 


PROCÈS-VERBAUX. 341 


en fils, depuis près de deux siècles. Cette méthode, qui repose 
sur une inclinaison particulière des rameaux, combinée avec 
la taille à long bois, peut offrir quelques avantages pour cer- 
tains cépages, tels que le Meunter, par exemple. Mais on ne 
saurait en considérer la pratique comme constamment avan- 
tageuse. Si l’on augmente la production en fruits, c’est au 
détriment de la qualité, le raisin müûrissant mal; ce qui arrive 
toujours avec le Gamay, par exemple. M. Quihou, jardinier 
en chef du Jardin d'acclimatation, a, d’ailleurs, on s’en sou- 
vient, donné récemment, dans le Bulletin, une semblable 
appréciation de cette méthode. 

M. Vavin, qui a visité à Brest un jardin où, non-seulement 
la Vigne, mais tous les arbres, étaient cultivés d’après le prin- 
cipe de l’inclinaison des branches, doit s'informer des résultats 
obtenus et en rendre compte à la Société. 

M. Rivière dit qu'à Rocquencourt, chez M°° Furtado, à Ver- 
sailles, chez M. Truffaut père, la taille à long bois a été mise 
en essai, et par M. Hooïbrenk lui-même; partout, on a dû y 
renoncer, après trois ans de pratique. Notre confrère offre, 
du reste, son concours pour les nouveaux essais qu’on désire- 
rait faire de cette méthode; mais il considère comme très- 
important de poursuivre l’expérience pendant trois années de 
suite, si l’on tient à obtenir des résultats concluants. 

— M. le Président proclame les noms des membres nouvel- 
lement admis par le conseil : 


MM. Présentateurs. 

BARBUAT DupLessis (Albert de), avenue Per-{ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
cier, À, à Paris, et au château de Sainte-Sa-/ Henri Ravisy. 
bine, par Pouilly-en-Montagne (Côte-d'Or). Edgar Roger. 

Bozsr D’ALHEMAR (le baron), propriétaire, au { D' Bonnafont. 
château de la Bulbe, près Bruxelles (Bel-{ Drouyn de Lhuys. 
gique). E. Dupin. 

SRE (Th.), conseiller + re : afp de Lhuys. 
Paris, et à Ponlault, par la Queucren-Brie | A Geofey Saint-Hikire. 
(Seine-et-Oise). ( (Edgar Roger. 


DEMaAyx (Louis-Chrysostome), propriétaire, rue ous Demay. 


Duperré, 10, à Paris, et quai des Bains, 5, à Drouyn de Lhuys. 
Boulogne-sur-Seine (Seine). E. Dupin. 


312 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Joseph M. Cornely. 
Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Drouyn de Lhuys. 

E. Dupin. 

\ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
‘Dr Bonnafont. 

Drouyn de Lhuys. 

E. Dupin. 

Drouyn de Lhuys. 


DEsrocHES (Eugène), curé, à Esvès-le-Moutier, 
par Ligueil (Indre-et-Loire). 


ERYEMONT (le comte d’), rue du Cirque, 3, à Paris. 


JANZÉ (le comte Albert de), propriétaire, à 
Neufchatel (Seine-Inférieure). 


LE MoINE (Gustave), propriétaire, rue de Condé, 
29, à Paris, et au château de La Chapelle { Maurice Girard. 
Godefroy, près Nogent-sur-Seine (Aube). Ch. Le Doux. 

PicarD (Ernest), député, avenue de la Grande-[ Drouyn de Lhuys. 
Armée, 80, à Paris, et aux Ambesys, par nl E. Dupin. 
Mesnil-Saint-Denis (Seine-et-Oise). A. Geoffroy Saint-Hilaire. 


— M. le Président invite les membres des diverses sections 
à assister exactement à la réunion qui doit avoir lieu le mardi 
12 mai, pour la nomination des délégués dans la Commission 
permanente des récompenses. 

— M. le Secrétaire procède au dépouillement de la corres- 
pondance. 

— M. Sarrus adresse des remerciements pour sa récente 
admission. 

— M.le ministre des affaires étrangères transmet la tra- 
duction d’une note que M. Frimen, conservateur du South 
African Museum, a bien voulu rédiger sur la demande de M. le 
consul de France au Cap. Cette note a pour objet de répondre 
à une demande de renseignements que la Société d’acclima- 
tation lui a adressée au mois d’août dernier. 

— M. de La Perraudière accuse réception du couple de 
Perruches ondulées qui vient de lui être accordé en cheptel. 

— MM. Ch. Agassiz fils et E. Barutel demandent à prendre 
part aux cheptels de la Société. 

— M. Mansbendel remercie du couple de Perruches ondulées 
qui lui a été accordé, et fait connaître, dans les termes sui- 
vants, les résultats qu’il a déjà obtenus dans l’élevage de 
diverses espèces d'oiseaux d'agrément : ù 

«1° Munias des Moluques. — Une première couvée en 
décembre dernier n’a pas réussi. La seconde m’a donné deux 


PROCÈS-VERBAUX. 313 


petits dont l’un est complétement blanc et l’autre marqué 
d’une seule tache grise partant de la tête et allant jusqu’à la 
queue. Ces deux spécimens en parfait état. 

» ®% Diamants à moustaches. — Une couvée de six petits 
qui ont dix jours et qui me font l’effet d’être très-sains. 

» 3° Becs d'argent. — Une couvée de quatre œufs qui doi- 
vent aboutir dans douze jours; mâle et femelle couvent en 
même temps. 

» 4° Gros-becs de Java. — Les deux œufs qu’ils ont couvés 
sont arrivés à éclosion, maïs les petits ont été rejetés du nid. 
J'ai remarqué que chaque fois que j'avais de nouveaux 
oiseaux, la première couvée ne réussissait pas, bien que les 
œufs fussent bons. J'espère avoir bientôt une nouvelle couvée, 
mais la femelle, en ce moment, est trop en mue. 

» Inutile de vous parler des Serins de Hollande. Je compte 
faire des Zgnicolores, des Combassus et des Ventre orange ainsi 
que des Cordons bleus, mais la saison est trop avancée pour 
eux, ce n'est qu'en juin ou juillet que je puis espérer réussir. 

» J’essayerai également des métis, soit d’Zgnicolores et Dia- 
mants, soit de Munias ou de Queue de vinaigre. 

» La nourriture est pour beaucoup dans le résultat que j'ai 
obtenu; la sèche pilée avec des jaunes d'œufs et du millet me 
semble donner aux oiseaux une vertu prolifique extraordi- 
naire. Toutes mes cages sont du reste pourvues d’un os de 
sèche dont ils sont très-friands et je ne leur ménage pas le 
millet en branche et la salade ». 

M. Mansbendel joint à son envoi une collection de semences 
de Pourpier à fleurs simples, pour le Jardin d’acclimatation.—- 
Remerciments. 

— M. Frémy rend compte de l’état de son cheptel de ne 
de Swinhoë. 

— La Société agraire de Trieste fait connaître que déjà 
depuis plusieurs années, on s'occupe de la production arti- 
ficielle des éponges pour bain, dans l’île de Lésina ; la Société 
manque toutefois de die précises sur le succès de cette 
industrie. 

La Société de Trieste signale, en même temps, à notre at- 


31% SOCIÉTÉ D'ACGCLIMATATION. 


tention les animaux et les végétaux désignés ci-après, dont la 
propagation lui semble recommandable. 

« Le Nephrops norveqicus, dit vulgairement Scampo. Ce 
crustacé se pêche dans le Quarnero, et est très-recherché par 
les marchands de Trieste, de Venise et de Fiume. 

» Le Pyrethrum cinerariafolium possède la vertu incon- 
testée de détruire les insectes, et a une efficacité égale, sinon 
‘supérieure, au Pyrethrum carneum, dont on extrait la poudre 
renommée dite persane. Cette plante appartient à la famille 
des Composées de la tribu des Anthémidées, et a été introduite 
ici de la Dalmatie où elle est cultivée aujourd’hui sur une 
grande échelle et forme un important article de commerce. 
Elle pourrait être introduite avec succès dans les départements 
méridionaux de la France. 

» Le Juniperus oxycedrus employé dans la fabrication de 
l'Oleum cadmi, dont on fait usage dans la pharmacie, croit 
irès-abondamment dans l’Istrie méridionale. 

» Dans l’île de Cherro, où il est très-commun également, 
on extrait du même végétal une espèce de mastic. 

» Le Somaco (Rlrus colmus) croît partout sur le littoral, et 
l’on fait de ses feuilles un commerce extérieur pour l’apprêt 
des peaux et pour la teinture. 

» Le Quercus pubescens dont on obtient les noix de galle, 
et dont l'écorce des jeunes sujets contient une quantité consi- 
dérable de tannin très-apprécié et pHélèEé partout pour la 
tannerie des peaux fines. 

» Le Celtis australis (Godogno) qui, près de nous, prospère 
très-bien, fournit un très-bon bois employé spécialement pour 
la confection des fouets qui forment ici une considérable 
branche d’exploitation ». 

La Société agraire annonce enfin qu’il serait question, à 
Trieste, de la formation d’une société pour les sciences natu- 
relles. Cette société serait très-disposée à entrer en relations 
avec la nôtre et à faire avec elle échange de publications. 

— M. Jules Grisard fait, à la Société la communication sui- 
vante: « M. Vavin, dans une des dernières séances de la 
Société d’acclimatation, a déposé un pli cacheté relativement 


PROCÈS-VERBAUX. 315 


à la conservation des œufs. Le dépôt de ce pli m’a remis en 
mémoire un procédé très-usité en Angleterre et dans quelques 
parties de la France, notamment en Bourgogne et en Cham- 
pagne; c’est celui-ci : 

» On verse une certaine quantité d’eau sur de la chaux vive 
(A litres et demi par 500 grammes de chaux) et on laisse le 
mélange s’opérer pendant vingt-quatre heures. 

» On prend ensuite des œufs, aussi frais que possible, que 
Von place dans cette eau de chaux; seulement il faut avoir 
soin de placer le vase qui les contient dans un endroit tel 
qu'on puisse facilement y puiser sans troubler l’eau. 

» Les œufs se conservent ainsi pendant une douzaine de 
mois. 

» M. Champion indique encore ce moyen employé par les 
Chinois : Ils emprisonnent sous une couche d’argile pétrie 
dans l’eau les œufs qu’ils désirent conserver. Cette espèce de 
pâte, en se desséchant, acquiert avec le temps une certaine 
äureté qui, tout en préservant les œufs des chocs, les met à 
l'abri de toute altération et les maintient ainsi frais pendant 
un temps assez long. » 

— M. Benvenuto Comba, directeur du Jardin zoologique 
de la Mandria royale, près Turin, annonce l'envoi de cocons 
d’Attacus Pernyi. — Remerciments: 

— M°° Boucarut fait parvenir à à la Société 50 grammes de 
graine de Ver à soie du mürier, provenant d’éducations faites 
avec succès en Algérie depuis plusieurs années. M"° Boucarut 
joint à cet envoi un rapport sur ses éducations de Ver à soie 
du mürier et d'Attacus Yama-mai. 

— M. Alfred Roland écrit d’Orbe, près Lausanne : « .…. De- 
puis pr ès de dix ans , Je m'occupe exclusivement de sér aitu 
ture, je consacre à cette épineuse branche de la science agri- 
cole mon temps et ma fortune, cela doit vous suffire pour 
comprendre tout lecas que j'en fais. 

» J'espère, d’ici à quelques années, pouvoir présenter à 
notre Société le résultat de mes travaux, appuyé sur des 
données pratiques. Jusqu’à présent je n’ai pu faire élever que 
peu de graines pour la soie. Cette année-ci, grâce à mes re- 


316 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


producteurs du Caucase et d'Australie, qui élèvent exactement 
d’après mon système, J'en ai pu livrer à la consommation 
pour soie un millier d’onces, tant en France qu’en Italie, sur- 
tout dans ce dernier pays; l’année prochaine je compte bien 
pouvoir en donner environ 10 000 onces. 

» Vous saisissez de suite que venant auprès de vous avec le 
résultat pratique de deux ou trois années de bonnes récoltes 
faites sur une grande échelle, cela vaudra mieux et sera plus 
probant que quelques maigres certificats d’éducateurs ayant 
élévé 400 ou 200 onces. 

» Je vous devais ces lignes pour bien vous assurer du cas 
que je fais de la Société d’acclimatation et vous prouver que 
je sais tout ce qu’il y à de noble et de philanthropique dans 
le but qu’elle s’est proposé. 

» Comme M. Maurice Girard s'occupe plus spécialement de 
la magnanerie, je regrette qu'il n’ait pu l'an dernier venir 
avec vous voir la mienne. J’en ai fait construire cette année 
une grande, je suis persuadé que si vous la voyiez vous en 
voudriez une pareille pour le Jardin; dans tous les cas vous 
seriez assuré chaque année de la réussite des races que vous 
élevez. » 

— M. Caullet, secrétaire général de la Société d’agriculture 
de l’arrondissement de Saint-Omer, adresse un rapport sur 
les résultats obtenus avec diverses graines provenant de la 
SOCIÉtÉ. 

— M. Augustin Delondre communique la lettre suivante, 
qui lui est adressée par M. Laval, médecin-major à l'hôpital 
militaire de Constantine : « ..... Je viens à vous avec la recom- 
mandation de M. le docteur Cauvet, professeur de l’ancienne 
Faculté de Strasbourg, et actuellement pharmacien en chef 
de la division de Constantine, qui prend un grand intérêt à 
ce que l’on réussisse à faire produire par l’Algérie, la plante 
dont j'ai demandé à la Société d’acclimatation de vouloir bien 
m'aider à tenter l'introduction, de la Cyrénaïque, où elle 
pousse exclusivement, sur le littoral méditerranéen de la 
France. 

» M. Cauvet a déjà reconnu, depuis mon arrivée auprès; de 


PROCÈS-VERPAUX. 317 


lui, que les gommes résines de cette plante, qui est le S2/- 
phion des Grecs ou,Laserpitium des Latins, différaient essen- 
tiellement des résines du Thapsia qgarganica, auxquelles, 
d’après une certaine ressemblance entre les caractères bota- 
niques du T’hapsia silphium de Viviani et ceux du Thapsia 
garganica, on avait voulu les assimiler. — En réalité, la 
forme des racines et des feuilles eût empêché de confondre 
ces deux espèces si notre Muséum eût possédé un échantillon 
du Thapsia silphium. 

» Depuis l’année 1859, dans laquelle j’ai annoncé mes pre- 
mières recherches à la Société de médecine de Constantinople 
et au Conseil de santé des armées, on n’avait pas voulu les 
répéter, sous le prétexte que j'expérimentais des extraits de 
Thapsia garganica que j'avais rapportés de la Cyrénaïque et 
que j'avais pris pour le Sz/phion de la médecine ancienne. 
Cette opinion, que M. le supérieur pharmacien militaire, et 
M. Bertherand, ex-directeur de l’École de médecine d'Alger, 
avaient opposée à mes premières publications, a arrêté pen- 
dant des années le bon vouloir de M. le professeur Gubler, qui 
a cependant consenti, il y a quelques jours, à soumettre mes 
assertions au sujet de la phthisie pulmonaire, par exemple, au 
contrôle de sa propre expérience. 

» Malheureusement je n’ai pu laisser à M. Gubler qu’une 
quantité trop peu considérable pour qu’il puisse poursuivre 
ses essais, ayant remis à M. le docteur Chartier, médecin en 
chef de l'hôpital de Valenciennes, le reste de la provision de 
plantes de Silphion que j'avais rapportée de la Cyrénaïque, 
plantes dont j'avais déjà employé la plus grande partie dans le 
traitement des maladies inflammatoires et de la tuberculose. 
M. Chartier, en effet, traite par le Silphion, depuis le mois de 
juillet dernier, les tuberculeux entrés à l'hôpital militaire de 
Valenciennes et avait réussi, au moment où je quittais cette 
ville, 23 observations de phthisies pulmonaires dans lesquelles 
l'amélioration et parfois la guérison avait toujours suivi 
l'emploi de ce médicament donné sous forme d’extrait. 

» Prenant confiance dans les résultats que je faisais con- 
naître le plus possible, des pharmaciens de Paris se sont 


318 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


procuré un approvisionnement de Silphion, afin d’en faire 
une spécialité, et voudraient arriver à être les seuls dispensa- 
teurs d’un produit pouvant devenir très-recherché. 

» Mon but, au contraire, serait d’abord de fournir à l’Assis- 
tance publique et à l’armée la plante cyrénéenne, que je crois 
le plus utile de tous les médicaments, et, en second lieu, de 
transporter chez nous la production du Silphion. 

» Jai demandé à venir en Algérie afin d'étudier préalable- 
ment le sol auquel je pourrais confier les racines ou les 
semences que je veux aller recueillir en Gyrénaïque. 

» Je crois que ces racines, rapportées dans des caisses 
pleines de terre, se développeraient sur les coteaux, aujour- 
d’hui incultes, .qui s'étendent de Philippeville au col des 
Oliviers, surtout entre les stations de Robertville et Damré- 
mont. 

» Si Je n’obtiens aucun secours des Sociétés savantes ou de 
l'État, je retournerai à mes frais, lorsque mes ressources et 
un congé ministériel me le permettront, chercher du Silphion 
en Cyrénaïque, car je souffrirais trop de mon impuissance en 
face des malades que je sais pouvoir soulager ou guérir par 
cette substance; J'essayerai, à mon retour, de la cultiver à 
l’aide de quelques racines que je rapporterai. 

» Mais les résultats seraient plus considérables et immédiats 
dans le cas où le Conseil de la Société d’acclimatation inter- 
viendrait pour me faire attacher, au moyen du ministère des 
affaires étrangères, au consulat général de Tripoli de Barba- 
rie; au lieu d'attendre un congé, toujours long à venir, je 
parürais à temps pour arriver avant la fin de mai sur les pla- 
teaux cyrénéens. — Après le mois de mai, on ne peut plus 
trouver de graines capables de germer, et l’on ne peut se 
rendre aux lieux où croît le Silphion que par une caravane 
partant de Bengazi, car il serait trop onéreux de fréter un 
navire allant directement à Derna. Les attaches consulaires 
me donneraient une grande facilité pour organiser une 
caravane, en même temps qu’elles m’assureraient la protec- 
tion des autorités turques... » 

— M. Le Faucheur, attaché à la cour de $S. M. le roi du 


PROCÈS-VERBAUX. 319 


Cambodge, adresse, de Phnom-Penh, une collection d’échan- 
tillons de boïs indigènes, accompagnée d’une note explicative 
ét de renseignements sur les richesses forestières du royaume. 
Deux caisses 4 la Ward, contenant de jeunes plants des 
éssences les plus intéressantes de ce pays, et qui faisaient 
également partie de l’envoi de M. Le Faucheur, sont malheu- 
reusernent arrivées en assez mauvais élat. 

M. Le Faucheur s'occupe activement de faire pénétrer dans 
le Cambodge les principes de la science agricole. Une vaste 
exploitation, sorte de ferme-école, créée par ses soins, vient 
de lui faire obtenir trois grandes médailles d’or, deux médailles 
d'argent de 4" classe et quatre médailles de bronze à l’expo- 
sition qui vient d’avoir lieu à Saigon. Notre confrère demande 
que la Société veuille bien lui faire parvenir diverses graines 
de végétaux des régions chaudes, dont il désire essayer la cul- 
ture au Cambodge. 

— M. Vavin annonce le prochain départ de son fils pour un 
voyage de long cours, pendant lequel sera mis de nouveau en 
essai le procédé de conservalion des œufs dont notre confrère 
a déjà entretenu la Société, 

— M. Decroix fait la communication suivante : « Dans la 
séance du 17 avril 1868, j'ai eu l'honneur d’annoncer à la So- 
ciété que M. Mignot, attaché au cabinet de l’empereur, m'avait 
assuré avoir obtenu, dans sa jeunesse, de la soie rouge, en 
nourrissant les Vers avee des feuilles de vigne, à défaut de müû- 
rier. (Voy. page 153 du Bulletin.) 

» Personne ne prit la parole pour combattre ou appuyer 
mon assertion. J’espérai toutefois que les quelques lignes insé- 
rées au procès-verbal appelleraient l'attention des séricicul- 
teurs sur la question, et que, à la fin de la campagne qui allaït 
s'ouvrir, on nous signalerait des faits pour ou contre. Mais 
aucune communication ne nous parvint pendant les années 
1868 et 1869, et à plus forte raison pendant les deux années 
de nos désastres. 

» Dans là séance du 24 mai 4872 (page 299), je rappelai 
ma première communication, et j'ajoutai que M. le docteur 
Chevreuse, de Charmes (Vosges), ayant obtenu du Hanneton 


320 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


des couleurs variant du jaune tendre au vert bouteille en 
nourrissant ces insectes avec diverses espèces de feuilles, il 
n’yavait rien d'étonnant à ce que la soie prit une teinte rouge 
en nourrissant les Vers avec des feuilles de vignes. Je termi- 
nai en engageant les sériciculteurs à faire des expériences 
pour éclairer la question. 

» M. AIb. Geoffroy Saint-Hilaire voulut bien tenter deux essais 
successifs au Jardin d’acclimatation ; mais tous les Vers mou- 
rurent, de sorte que je commençais à croire que M. Mignot 
s'était trompé, lorsque MM. Ruinet des Taillis et Delidon, 
répondant à mon appel, déclarèrent par lettres insérées au 
Bulletin de la même année (page 446), qu'ils avaient obtenu, 
non-seulement de la soie rouge en donnant aux Vers des 
feuilles de vignes, mais encore de la soie verte, violette, etc. 
en variant la nourriture. 

» M. Delidon donne, sur la manière de procéder, quelques 
renseignements dont mon ignorance avait causé les insuccès 
au Jardin d’acclimatation, ainsi : Les feuilles colorantes 
doivent être tendres, frappées entre deux linges pour enlever 
l'humidité et le duvet piquant, et surtout, on ne doit les don- 
ner qu'après l’usage, pendant une vingtaine de jours, des 
feuilles de mürier, en passant de celles-ci aux autres par un 
mélange progressif. 

» Le 18 juillet 1873, M. Delidon nous a écrit qu'il faisait 
des expériences; que déjà il avait obtenu un cocon jaune de 
chrome clair par la feuille du cerisier, et un autre d’un jaune 
de chrome foncé par la feuille du poirier. « Quatre jours, dit-il, 
» d’une autre nourriture que le mürier m'ont suffi pour 
» obtenir les teintes que je viens de vous signaler. » Enfin 
M. Delidon terminait en disant qu’il nous enverrait les cocons 
colorés. 

» Malheureusement, nous n’avons encore rien reçu, et ma 
communication a pour but de lui rappeler sa promesse, et, 
d'autre part, de l’engager de nouveau à faire des expériences 
multipliées, afin que nous puissions avoir ici des spécimens de 
soie naturelle de diverses couleurs. » 

M. Decroix met sous les yeux de l’assemblée deux échantil- 


PROCÈS-VERBAUX. 321 


lons de soie qui lui ont été donnés par M. Luraghi, de Castel 
Nuovo Serivia, chez qui il était logé pendant la guerre d'Italie, 
et dont l’un a une couleur yaune foncé, tandis que l’autre a 
une couleur blanc nacré. Dans les deux cas, les Vers étaient 
nourris avec les feuilles de mürier. M. Decroix ne se rappelle 
plus l'explication que lui a donnée M. Luraghi sur la cause de 
la différence des couleurs ainsi obtenues. 

M .Maurice Girard dit qu’à la magnanerie du Jardin d’accli- 
matation, on essaya, 1l y a deux ans, de nourir des Vers à soie 
du mürier avec des feuilles de vigne à raisin rouge, dans l’es- 
poir d’obtenir des cocons rouges. Mais tous ces Vers périrent. 
Ïl serait à désirer que M. Delidon, qui a été plus heureux dans 
ses essais, fit connaître en détail la méthode qu’il emploie et 
les soins donnés à ses Vers. 

M. Maurice Girard rappelle que des races de Vers à soie à 
cocons mêlés, dans une certaine proportion, de couleur rouge 
ont élé signalés depuis longtemps; il y a des races à cocon 
nankin, ou jaune rougeâtre. On élevait en Toscane, près de 
Pistoie, une race à cocon d’un rose pâle, et les anciens au- 
teurs ont mentionné des cocons de couleur pourpre. Quant 
aux modifications à obtenir dans la nuance de la soie, à l’aide 
d’une nourriture spéciale donnée aux chenilles, le succès 
paraît bien problématique, car le Ver à soie ordinaire est une 
espèce essentiellement monophage. Le changement d’alimen- 
tation amènera toujours une mortalité très-grande chez les 
Vers. Les Vers à soie nourris à la scorsonère arrivent à filer 
leur cocon, mais la soie est notablement moins bonne, et la 
race disparaît en peu de générations. 

M. Millet demande quel serait, au point de vue industriel, 
l'avantage d'obtenir de la soie de couleur, puisque celte ma- 
tière se prête si facilement à la teinture en toute nuance. 

M. Decroix pense qu’en dehors de lintérêt de curiosité 
qu'offriraient les expériences qu’il propose, on trouverait peut- 
être dans ces essais un moyen de créer des races plus rustiques. 
Beaucoup de Vers périraient sans doute, mais tous ceux qui 
résisteraient au changement de régime seraient assurément 


irès-robustes et fort aptes à donner une race vigoureuse. 
3€ SÉRIE, T. L. — Mai 1874. 21 


399 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


M. Geoffroy Saint-Hilaire estime que l’on a dans la méthode 
d'éducation en plein air, telle que la pratique M. Roland, un 
système de sélection naturelle très-efficace, qui doit être pré- 
féré à tout autre moins simple et moins pratique. Ce procédé 
a déjà fait ses preuves et donné les meilleurs résultats. 

— M. Chappellier fait une communication sur la culture 
etle commerce du safran indigène, ainsi que sur divers essais 
d'introduction en France de safrans étrangers (voy. au Bul- 
letin). 

— M. Millet dépose, sur le bureau, une liasse de divers 
journaux des départements, et plusieurs lettres de nos cor- 
respondants qui lui ont été adressées relativement aux gelées 
printanières des premiers jours de mai. Il résulte de ces 
documents, déjà assez nombreux, que les brouillards de mars 
ont été suivis de gelées blanches en mai. En général, et à part 
de rares exceptions, dans les périodes du 1° au 3 et du 3 
au 6, les gelées ont causé de graves désastres. 

Notre confrère donne ensuite d’intéressantes explications 
résultant des observations qu'il a faites les années précé- 
dentes et qu’il a répétées cette année sur le rayonnement 
nocturne. 

M. Élie de Beaumont, adoptant d’ailleurs les idées 
émises à cet égard par M. Millet, insiste sur la part qui revient 
au rayonnement terrestre dans les gelées printanières Par 
un temps serein et calme, les jeunes pousses des végétaux 
peuvent être atteintes sans que le thermomètre descende 
plus bas que <- 4e ou même 5°. Ainsi s'expliquent les dégâts 
constatés, souvent alors que la température de Pair paraissait 
complétement inoffensive. Il y a trente ou quarante ans, on 
sroyait qu’il fallait un froid d’au moins 4 ou 2° pour causer 
des dommages aux végétaux; mais on sait aujourd'hui que le 
phénomène de la gelée blanche se produit sans même que le 
thermomètre descende à 0°. 

M. Millet cite quelques faits qui établissent bien l'in- 
fluence du rayonnement terrestre : Lors des derniers froide, 
notre confrère ayant disposé des thermomètres à rninima et 
à mazima sur les pelouses du jardin des Tuileries et du bois 


PROCÈS-VERBAUX. 323 


de Boulogne, a vu. ceux de ces appareils posés sur le gazon 
accuser une température minima de —1° à —2°, tandis que 
ceux qui étaient placés à 0,50 ou 1 mêtre au-dessus du sol 
marquaient + 4°, 5° et même 6°. 

— M. Bigot donne lecture d’un rapport sur ses éducations 
d’Aétacus Yama-maï (voy. au Bulletin, page 284). 

Il est déposé sur le bureau : 

1° Une circulaire de la Société de géographie qui vient de 
se fonder à Lyon ; 

2 Une circulaire annonçant l'installation d’un observatoire 
météorelogique au sommet du pic du Midi de Bagnères-de- 
Bigorre. 

Le Secrétaire des séances, 


RAVERET-WATTEL. 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 22 MAI 1874. 


Présidence de M. DROUYN DE LHUYS, président. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu at 
adopté. 

— À propos de la communication faite à la dernière séance 
par M. Decroix, relative à la coloration des cocons, M. le 
vicomte de Milly fait connaître qu’il a remarqué sur les che- 
nilles d'Aftacus cynthia vera, G. Mén., à la 4° mue, certains 
vers se colorant en bleu très-intense, tous recevant cependant 
les mêmes soins et la même nourriture. 

— M. le Président proclame les noms des membres récem- 
ment admis par le Conseil : 


MM. PRÉSENTATEURS. 
Drouyn de Lhuys. 

À, Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 
Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy-Saint-Hilaire. 
Moquin-Tandon. 


BourDON (Henri), ancien sous-préfet, rue Jac- 
ques Dulud, 15, à Neuilly (Seine). 


CAtLLAVET (Armand de), 117, avenue des 
Champs-Élysées, à Paris. 


32/4 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


{ E. Cosson. 
Daviau, curé. 
À. Geoffroy-Saint-Hilaire. 
Comte d’Éprémesnil. 
Comte de Valon. 
ae Geoffroy-Saint-Hilaire. 
LuppE (le vicomte Olivier de), membre du Con- , Baron d’André. 
seil général de Lot-et-Garonne, 70, rue de! Drouyn de Lhnys. 
Bellechasse, à Paris ‘ Comte d'Éprémesni!. 
| Drouyn de Lhuys 
A. Geoffroy-Saint-Hilaire. 
! L. Simon. 


; 
MALMENAaYDE (Joseph), 15, rue de Bordeaux, à | DIOUVRIORONNE 


Charenton (Seine). Fe M Saint-Hilaire. 


Drouyn de Lhuys. 

Comte d’Éprémesnil. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Drouyn de Lhuys. 

À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
L. Simon. 

Drouyn de Lhuys. 
Jacques Lefebvre. 
Quihou. 

Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Léon Yves. 


| 
| 


CHAIGNEAU (Alfred), curé de Saint-Pierre, à 
Champ, par Argenton-Château (Deux-Sèvres). 


HOCQUART DE TUnTOT (le vicomte), rue Las- ( 
Cases, 10, à Paris. 


Mazuez (Joseph), propriétaire à Vasquehal, près 
Lille (Nord. 


MarTy(Félix), propriétaire au château de Gaillac, 
par Aurillac (Cantal). 


Micaon (Fulgence), à la Ferté-sous- Jouarre | 
(Seine-et-Marne). 


NorTier (Louis-Jules), propriétaire, boulevard 
d’Argenson, 27, à Neuilly (Seine). 


Nucaenr (le vicomte Pierre de), rue du Regard, 5, 
à Paris, et château des Mesnuls (Seine-et-Oise). 


PRIEU-CARRÉ (Victor), propriétaire à Gonnord, 


Daviau, curé. 
par Saint-Lambert-du-Lattray (Seine-et-Oise). 3 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Drouyn de Lhuys. 
Jacques Lefebvre. 
Quihou. 


QUATREMAIN (Émile-Francois), propriétaire, 5, 
rue Hurel, à Neuilly (Seine). 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 
Roncerya. 


RoBEerT (Edmond), banquier, au Cateau- Lt 
| Drouyn de Lhuys, 


brésis (Nord). 


RossiGnoz (Ernest-Conslant), 24, rue Chage, 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
à Meaux (Seine-et-Marne). ÿ Saintes 


L. Simon. 

Drouyn de Lhuys. 
Comte d'Éprémesnil. 
J. de la Perraudière. 


VauGuios (Félix de), château de la Jupellière, 
près Meslay (Mayenne). 


M. le Président annonce ensuilc à l'assemblée la perte 


PROCÉS-VERBAUX. 225 


recrettable que la Société vient de faire dans la personne de 
M. de Soubeyran, préfet honoraire. 

MM. Frédéric Jacquemart et Raveret-Wattel s’exeusent de 
ne pouvoir assister à la séance. 

MM. le vicomte de Nugent et Barbuat-Duplessis adressent 
leurs remerciments pour leur récente admission. 

— M. le docteur Vidal, médecin en chef de l'hôpital de 
Niigata (Japon), en remerciant de son admission, ajoute : 
« J'ai le regret de n’avoir pas connu plus tôt la haute portée de 
l'institution dont vous êtes le président; j'aurais probable- 
ment eu l’occasion, pendant les quelques années que J’ai déjà 
passées en Chine et au Japon, de rendre quelques services à 
la Société. Il ne me reste plus qu’à mettre à profit l’expérience 
que ces quelques années m'ont donnée du pays de l'extrême 
Orient, et à réparer de tout mon pouvoir ce temps déjà 
perdu. 

» J'habite en ce moment une des provinces les plus recu- 
lées du Japon, et l’une des moins connues des Européens. 
J'espère qu’il me sera donné d’y trouver quelques objets 
intéressants dont je ne manquerai pas de vous rendre compte, 
quand il ne me sera pas possible de vous les faire par- 
venir. 

» … J'ai pensé qu'il serait en tout cas utile de donner 
d'abord une idée sommaire du pays que j'habite et de ses 
principales productions, en attendant qu'il vous plaise de 
m'indiquer dans quelle direction il vous serait plus agréable 
que je porte mes investigations. 

» J'aurai donc l'honneur d’envoyer très-prochainement à 
la Société un petit travail de ce genre, pour lequel je demande 
à l'avance l’mdulgence que vous ne manquerez pas d'accorder 
à un débutant. » 

— M. Cambon fait à la Société ses offres de services, et 
remercie de sa nomination comme membre de la Société. 

— M. Ad. Lucy et M. Emery, secrétaire général de la 
Société d'horticulture et d’arboriculture de la Côte-d'Or, 
accusent réception et remercient des graines qui leur ont été 
adressées par la Société. 


326 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


— MM. Emile Nourrigat et vicomte d’Adhémar de Case- 
vielle adressent leurs remerciments pour les graines de vers 
à soie qu'ils ont reçues de la Société. 

— M. Fahlman accuse réception de mr qui lui a été 
ait d’un petit sac de feuilles de Boldo, destinées à un 
malade. : 

— M. le comte de l’Espéronnitre écrit pour rectifier une 
demande de cheptel qu'il avait adressée précédemment à la 
Société. 

— M. Lichtenstein, de Montpellier, écrit : « J’ai bien reçu 
votre honorée du 25 avril m’annonçant l’envoi d'œufs d'A. 
Yama-mai que j'ai reçus le 28, éclos en grande partie. 

» J'ai pu en sauver une centaine, et je les ai mis sur quatre 
jeunes chênes dans mon jardin. 

» Malheureusement, après avoir prospéré les cinq ou six 
premiers jours, il est venu une série de temps épouvantables, 
et le vent, soufflant en tempête, a fait périr presque tous mes 
élèves 

» Par contre, les vers élevés en chambre et qui avaient 
l'air de se mal porter, sont revenus à la santé par des arro- 
sages énergiques, et Je suis porté à croire que c’est autant la 
sécheresse que le vent qui a été fatale à mon élevage en plein 
air. 

» Bref, J'ai une soixantaine de vers en parfait état à la 
troisième mue en chambrée, et une douzaine de vers ma- 
lingres en deuxième mue extra muros. 

» J'ai des cocons d’Attacus Pernyi d'Italie, dont il m'est 
éclos trois femelles jusqu’à présent. J'attends impatiemment 
l’éclosion de quelque ©. 

» J'ai tenté sans succés le croisement de la © du Pernyi 
avec le 9’ de notre Bombyx indigène (Pyri); je n’ai pu obtenir 
d’accouplement. 

» Par contre, en mettant une femelle vierge d'A. Pyri sur 
ma fenêtre, j'ai attiré un © le même soir malgré une bour- 
rasque de mistral à tout rompre. Cette femelle m'a pondu 
171 œufs que je vais élever moitié en chambre et moitié en 
plein air. 


PROCÈS-VERBAUX. 327 


» Les cocons d'A. Cynthia ne sont pas encore éelos ici, 
ni en chambre ni en plein air. » 

— M. E. Barutel, de Villefranche-de-Lauraguais (Haute- 
Garonne) adresse à la Société une demande de divers ani- 
maux en cheptel, et communique la note suivante sur le 
couple de Colins qui lui avait été confié : « Les Colins furent 
placés, à leur arrivée, dans une cage à tourterelles. Je ne 
m'aperçus pas qu'aucun de ces oiseaux fût malade. Un jour 
plus tard, ils furent installés dans leur volière, qui se trouve 
dans mon cabinet de travail. J’ai donc été on ne peut plus à 
même de les observer. 

» Je leur donnai, ce même Jour, outre le blé et le millet 
dont ils ont toujours eu leurs mangeoires pleines, une feuille 
de chou à becqueter. Ils y coururent avec empressement, et 
la criblèrent de trous. 

» Le lendemain, je m’aperçus que la femelle était hérissée 
ettriste. Je remarquai en même temps que les laissées étaient 
presque liquides. Je supprimai aussitôt la verdure et la rem- 
plaçai par une petite ration quotidienne d’œuf dur. J’ajoutai 
une mangeoire pour de lalpiste, que les Golins paraissent 
aimer beaucoup, et je mélangeai à cette graine un peu de 
chènevis. Une ou deux fois par jour, je jetais dans la volière 
quelques mies de pain trempées dans du vin, ils en man- 
geaient tous deux. Je leur présentai des petits vers de terre, 
qu’ils refusèrent. Je songeai à leur donner des vers de farine : 
la femelle les mangea avidement. Quant au mâle, s’il les 
apercevait le premier, il se contentait d'appeler sa femelle, 
en les becquetant à la façon d’une glousse et comme pour les 
lui montrer. Je l'ai observé avec grand soin, et, de toutes les 
larves que je leur ai distribuées, le mâle n’en a pas mangé 
une seule, quoique J en misse quelquefois dans la cage trois 
ou quatre en même temps. Au reste, ces oiseaux s’aimaient 
d’une tendresse extrême et ne pouvaient passer un moment 
éloignés l’un de l’autre. 

» La maladie durait depuis deux ou trois jours. Jen étais 
surpris, Car, en pareil cas, les oiseaux que je suis accoutumé 
à soigner meurent ou guérissent immédiatement. J’espérai 


328 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


avoir le temps de recevoir du Jardin d’acclimatation un 
remède. La réponse se fit attendre et ne m’apporta aucun 
renseignement. Mais j'avais continué mes soins : j'avais donné 
de l’eau ferrée (boule de Nancy), et la maladie avait paru 
céder complétement. La Coline ne traînait plus les aïles ; son 
plumage était aussi lustré que celui du mâle. Elle était 
redevenue svelte et gaie. Je cessai de leur donner des vers 
de farine, que j'avais, d’ailleurs, assez de peine à trouver. 

» Je remarquai néanmoins que, de ces oiseaux qui m’étaient 
arrivés complétement privés de queue, le mâle seul avait 
repris cet ornement. En outre la femelle ne pondait pas, mais 
elle était fréquemment coquetée par le mâle, et je m’atten- 
dais chaque jour à voir des œufs. 

» Le 3 mai, il me sembla que la Coline était en boule : pas 
de diarrhée, cette fois, mais je remarquai que le cri du mâle, 
qui était devenu très-rare depuis la guérison de la femelle, 
se faisait entendre plus souvent. Ce cri, trés-différent des deux 
ou trois petits murmures qui sont habituels à cet oiseau, a 
été, dès le premier jour, traduit ici par le mot patois: 
Paüu-r6-t0 ! qui en donne une idée assez exacte. 

Qu’ajouterai-je ? Les soins, qui avaient paru réussir d’abord, 
sont restés sans succés, et la Coline est morte le 5, dans 
l'après-midi. Depuis lors le mâle, qui était resté tout près 
d’elle jusqu’à la fin de son agonie, pousse des cris déchirants 
et la cherche partout. Comme une main compatissante a, pour 
tromper son isolement, mis un miroir dans la volière, il s’en 
est approché à Ja hâte, a fait un mouvement brusque en aper- 
cevant l’image, et s'est mis à pousser le petit gloussement 
clin qui lui était ordinaire. Puis il a becqueté le verre 
jaloux. Puis il s’est écarté en poussant de grands cris. Enfin, il 
s’est perché à une petite distance, immobile et silencieux. 

» Je n'avais jamais vu un animal, et surtout un oiseau, 
donner de tels signes d’attachement et de regrets. Tantôt il 
pousse par deux ou trois fois le long gémissement dont il 
faisait quelquefois précéder son cri. Tantôt il appelle sa 
femelle d’une voix désespérée, non plus par ce cri à trois 
notes: « Paouroto! Paouroto ! » que néanmoins il jette fré- 


PROCÈS-VERBAUX. 329 


quemment, mais par une sorte de jappement soit isolé, soit 
multiple. Et, après s’être comme épuisé en recherches, en 
appels, en plaintes, il s'arrête et passe de longs moments 
sans bouger. 

> Je lui ai ouvertla porte de la volière : il est venu chercher 
son amie dans tous les coins de la chambre en l'appelant à 
voix basse ; ensuite ilest rentré pour la chercher encore. J'ai 
peur qu’il ne meure à son tour si on le laisse seul. » 

— M. Pichon, oiselier à Angers, écrit à M. le Directeur du 
Jardin d’acclimatation, en date du 5 mai: « Mes Ouistitis ont 
fait une seconde portée : la femelle a mis bas deux petits le 
11 avril dernier ; ils sont très-beaux et viennent parfaitement. 
Tous sont en bonne santé et les petits grossissent beaucoup 
plus vite que les premiers que j'ai obtenus au mois de sep- 
tembre 1573. Je crois que cela dépend de la saison. » 

— M. Leroy, de Fismes, fait connaître l’état de son cheptel 
de Faisans divers et Canards mandarins, qu'il tient de la So- 
ciété. 

— M. Rabuté écrit de Doullens (Somme) : « J'ai reçu au 
mois de février les Colombes Iophotès (une paire), et les Per- 
ruches ondulées (une paire), qui m'ont été attribuées par la 
commission des cheptels dans sa réunion de janvier. Ayant 
surtout à cœur de réussir dans l’éducation des Perruches, j'ai 
voulu les installer dans les conditions les plus favorables étu- 
diées chez des amateurs habitués au succès. Aussi je ne me 
suis pas contenté de la seule paire fournie par la Société, j'en 
ai acheté plusieurs au Jardin d’acclimatation et chez différents 
éleveurs. J'ai mis en volière 23 Perruches. Ce nombre s’est 
réduit à 18 par suite de la perte de Perruches tuées ou estro- 
piées dans les combats meurtriers qu’elles se livraient, soit 
pour s’accoupler, soit pour faire l'assaut des nids préférés. 
Cette perte eût été évitée si, au lieu d'introduire au fur et à 
mesure des nouveaux sujets dans la volière, j'avais pris mes 
mesures pour les y metire tous le même jour. Toutefois je 
suis largement dédommagé; toutes mes Perruches en sont à 
leur deuxième portée ou élèvent leur deuxième couvée. J'ai 
plus de quarante jeunes avec la première, tous superbes et 


330 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


robustes. Si, comme je l’espère, j'obtiens trois couvées sem- 
blables, c’est environ 120 Perruches que j'élèverai cette 


» J'ai lu dans le Bulletin de la Société d’acclimatation du 
mois de février une note de M. Misset, notaire à Aignay-le- 
Duc, quise plaint de son insuccès persistant dans l'élevage 
des Poules de Houdan, dont il possède depuis l’année 1869 
un cheptel qui ne donne aucun résultat, parce que le plus 
souvent les œufs sont clairs, et que ses Poules deviennent 
malades ou meurent dès qu’elles sont resserrées dans les 
limites d’une basse-cour. Mes observations personnelles dif- 
fèrent complétement de celles faites par M. Misset, et 
aucune race indigène ne me paraît égaler la belle race du 
Houdan. En effet j'ai essayé pendant quinze ans, avec des 
chances diverses, la plus grande partie des poules recher- 
chées par les amateurs. 

» J’ai eu quelques succès, mais surtout beaucoup de décep- 
tons. Enfin, depuis 1866, j'ai fait élection définitive de la 
Poule de Houdan, parce qu'aucune n'est plus productive, ni 
plus rustique, ni moins sujette aux maladies des races hup- 
pées: ophthalmie, catarrhe nasal, etc., etc. d'entretiens une 
collection toujours splendide de Poules de cette race. Il est 
vrai que je ne les laisse pas dégénérer par consanguinité, et 
c’est pourquoi je ne conserve jamais l’un de mes élèves 
comme reproducteur, quelque beau qu'il soit. Tous les trois 
ans, je fais choisir ce sujet chez l'un des éleveurs les plus 
renommés du canton de Houdan. Je donne presque tous les 
œufs pondus par mes Poules, œuf pour œuf. Aussi je ne puis 
faire un pas dans ma circonscription sans rencontrer les Poules 
de ma race, plus ou moins pures, suivant que l’éleveur est 
plus ou moins soigneux. » 

— M. de Coutans annonce la disparition de la femelle de 
Cygne noir que la Société lui avait confiée en cheptel. 

— M. Carbonnier adresse à M. le Président la lettre sui- 
vante : © La présente a pour but de rendre compte à la 
Société d'acclimatation d’un nouvel envoi de Gouramis fait par 
M. Paul Carbonnier, de Calcutta, et qui, s’il n’a pas donné 


PROCÉS-VERBAUX. 331 


les résultats que j'en espérais, vient néanmoins confirmer 
l'efficacité des moyens que nous employons pour le transport 
ds ces poissons. 

Voici ce que m'écrivait de Calcutta, le 9 avril, M. Paul 
Carbonnier : « Je suis en face de 60 Gouramis que j'ai depuis 
deux jours, et dont je n’ai encore eu à constater aucun décés, 
quoique terreux et couverts d’une poussière qui semblait les 
gêner quand je les ai reçus. Placés dans une piscine en terre 
cuite de 30 à 35 litres, avec des plantes aquatiques en abon- 
dance, à en juger par la vivacité de leurs mouvements et les 
bonds répétés qu'ils y font, il y a lieu de bien augurer sur 
leur compte. 

» C’est là-dedans que je vais les laisser quelques jours, 
pour qu’ils se purgent et se débarrassent à leur aise, avant de 
les transvaser dans d'autres vases définitifs et plus pratiques 
pour leur traversée. 

» Cette lettre te parviendra vers le 5 mai, c’est vers le 15 
ou 46 mai que tu recevras la visite de M. Galant, commissaire 
des postes, à qui je vais les remettre à Galles le 21 de ce 
MOIS... » 

» Il y avait donc lieu de fonder de grandes espérances sur 
ce nouvel envoi, puisque M. Galant allait me les rapporter 
directement à Paris. Mais, il y a huit jours, je recevais de 
Galles la lettre suivante de mon neveu : 

« Tu as peut-être appris le grand désastre qui a eu lieu fin 
mars dans les mers du Japon, Le W/, dans son voyage de 
Hong-kong à Yokohama, a coulé corps et biens, et du nombre 
des victimes s’est trouvé mon ami M. Galant, commissaire 
des postes, lequel devait se charger de nos poissons. » 

» Ces poissons ont été chargés à bord du Sindh.….. 
M. Paul Carbonnier continue ainsi : 

« Je t'envoie A0 Gouramis. De Calcutta ici, et pendant tout 
le temps que je les ai soignés, c’est-à-dire environ douze jours, 
je n'en ai pas perdu un seul, mais maintenant que les con- 
ditions aquatiques dans lesquelles ils vivent ne sont plus les 
mêmes, je ne sais quoi augurer de cette longue traversée que 
je leur vois à faire encore. Je fais suivre avec eux, pour la 


332 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


renouveler, une dame-jeanne d’eau de Calcutta, et aussi des 
plantes aquatiques pour n'avoir rien à me reprocher si mon 
envoi ne réussissait pas. Le voyage prochain, je t’enverrai de 
nouveau des Gouramis, et ainsi jusqu'à ce qu’il soit bien 
reconnu que leur introduction et leur acclimatation nous ap- 
partiennent à nous seuls... » 

» Ces poissons, confiés à Galles, aux soins de M. Paul, mé- 
canicien en second à bord du Sindh, sont arrivés le 15 mai 
à Marseille, au nombre de 33, tous bien portants. Jamais 
pareille réussite n'avait été obtenue, 7 seulement sont morts 
durant les 35 jours de voyage. 

» Ils furent portés immédiatement à M. Chevalier, gérant 
du cercle des mécaniciens à Marseille, chez qui je laisse tou- 
jours en dépôt des appareils de transport pour leur voyage 
complémentaire de Paris. Je dois ajouter que j'ai toujours 
trouvé en M. Chevalier l'homme le plus bienveillant et prêt à 
nous donner ses services avec le plus grand désintéressement. 
Ici commencent de nouvelles tribulations qui ont été des plus 
fatales et sont venues anéantir le précieux résultat obtenu au 
prix de tant d'efforts. 

» Le colis dépassant un peu le poids de 5 kilog., il a été 
impossible à M. Chevalier de vaincre la résistance des em- 
ployés du chemin de fer, qui n’admettent pas dans les trains 
express des objets supérieurs au poids de 10 livres. Il s’est 
adressé à plusieurs chefs de service, leur exprimant l'intérêt 
qu’il-y aurait à faire voyager ces animaux par la voie rapide; 
il n’a trouvé que des hommes à cheval sur le règlement. 

» Partis Le vendredi par le train de 10 h. 35 du soir, ces 
poissons ne m'ont été remis que le dimanche à midi 30; tout 
était mort et depuis peu de temps, à en juger par leur état de 
fraicheur. 

» La Société d’acclimatation n’ignore pas que c’est sous son 
patronage que ces tentatives sont faites, et que nous poursui- 
vons, mon neveu et moi, le but qu’elle a si bien indiqué. Je 
prierai donc M. le Président de notre Société de vouloir bien 
nous accorder le concours de sa haute influence pour obtenir 
de l'Administrateur général de la Compagnie des chemins 


PROCÈS-VERBAUX. 233 


de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée un ordre qui 
aplanisse les difficultés que nous rencontrons à la gare de 
Marseille. 

» Les 18 Gouramis que j'ai reçus en décembre vont très- 
bien ; ils sont doublés en taille, et, comparés à ceux de même 
provenance arrivés morts, on voit qu'ils sont de même 
âge, et que leur croissance s’est effectuée ici tout aussi régu- 
lièrement que dans les affluents du Gange. » 

— M. le docteur J.- Léon Soubeiran écrit à M. le Prési- 
dent : « Connaissant l'intérêt que vous portez au succès de 
l'introduction des Salmonides en Australie, j'ai l'honneur de 
vous communiquer l’exirait suivant d’une lettre que je viens 
de recevoir de mon ami, M. J. Voul : 

» Les dernières nouvelles de Tasmanie font connaitre qu'il 
yexiste aujourd’hui des milliers de Brown Trouts (Salmo 
Fario), et qu’on en pêche un grand nombre dans les rivières, 
dont le poids varie de 6 à 10 livres. 

» On a également capturé un Grise ou vrai Saumon, Salmo 
Salar, ainsi que plusieurs Salmon Trout. 

» La Tasmanie possède donc aujourd’hui trois des meil- 
leüres espèces de Salmonides, qu’elle doit à l’acclimatation. 

» Vous apprendrez sans doute avec plaisir aussi que 
M. J. Youl, auquel votre Société a décerné une médaille d’or, 
a reçu récemment de la reine d'Angleterre l’ordre de Saint- 
Michel et Saint-Georges, en récompense de ses travaux pour 
l'introduction des Saumons en Australie ». 

— M. Duchesne-Thoureau adresse une note sur son pro- 
cédé de culture de la vigne en déclivité. 

— M. Duclaux offre à la Société quelques entrées pour une 
conférence qu’il doit faire sur le Phylloxera dans la salle de 
la Société d'encouragement pour l'industrie nationale. 

— M. A. Geoffroy-Saint-Hilaire donne lecture, au nom de la 
Commission de comptabilité, du rapport sur l'exercice 1873. 
Les conclusions de ce rapport sont adoptées à l'unanimité, et 
des remerciments sont votés à M. le Trésorier pour l’excel- 
lente tenue de ses écritures. 

L'Assemblée s'associe chaleureusement aux regrets expri- 


33/ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


més par la Commission au sujet de la mort de notre regretté 
vice-président, M. Antoine Passv. 

— M. Millet fait une communication sur le Phyllorera 
vastatrir, et met sous les yeux de l’Assemblée : 1° une carte 
des départements viticoles de la France sur laquelle il a in- 
diqué les régions envahies par le redoutable insecte; ce sont 
presque tous nos départements de plus grande production 
vinicole qui sont aujourd'hui le plus fortement atteints; el 
2 des tableaux où le Phylloxera est représenté sous un très- 
fort grossissement à l’état de larve, de nymphe avec ou sans 
fourreau alaires, d’insecte aptère adulte et d’insecte aïlé 
adulte. Notre confrère énumère et discute les divers moyens 
employés contre le Phylloxera ; il insiste particulièrement sur 
l'opportunité qu'il y a de prendre des mesures promptes et 
énergiques pour arrêter l'invasion de cet insecte, qui, à l’état 
ailé, peut être transporté par le vent à des distances considé- 
rables. Dans l'opinion de M. Millet, les oiseaux insectivores 
sont, à cet égard, nos alliés naturels; il faut donc s'occuper 
de leur conservation et de leur propagation, non-seulement 
dans les régions envahies, mais aussi dans tous les départe- 
ments limitrophes, et former ainsi une zone de défense. (Voy. 
au Bulletin.) 

M. le marquis de Ginestous demande si lon a constaté, 
dans l'estomac d'oiseaux insectivores, la présence du PAyt- 
loxera vastatrix ailé. M. Millet répond qu’il n’a pas encore, à 
cet égard, d'observations très-précises parce que, d’une part, 
la destruction des pelits oiseaux a atteint, notamment dans 
le Midi, des proportions énormes, et que, d’autre part, l’acti- 
vité de la digestion chez les oiseaux dénature rapidement des 
insectes de très-petite taille et de très-faible consistance, mais 
qu'il a pu constater que les oiseaux insectivores sont très- 
avides du Phylloxera quercus, insecte qui diffère peu de celui 
de la vigne. 

M. de Ginestous fait observer qu'il n’y a là que des ana- 
logies, et qu'avant de prendre des mesures préventives, il faut, 
pour en encourager l'application, s'assurer d’abord si les o1- 
seaux mangent réellement le Phylloxera vastatrix. À cet effet, 


PROCÈS-VERBAUX. 335 


il conviendrait d'obtenir de l'administration l’autorisation de 
prendre ou de tuer des oiseaux dans les vignes à l’époque où 
cet insecte prend la forme ailée. 

M. de la Blanchère déclare se rallier complétement à 
cette opinion, et ajoute que les oiseaux n’aiment pas et ne 
recherchent pas les pucerons ; on en a la preuve, dit-il, dans 
les jardins où ces insectes pullulent, notamment sur les ro- 
siers ; d’ailleurs les oiseaux sont très-rares dans les vignes. 

M. Maurice Girard se joint à cette observation, et pense 
qu'avant toute dissertation et intervention en ce genre il faut 
s'assurer si, out ou non, les oiseaux mangent le PAylloxera 
de la vigne. La question peut se résoudre en juillet prochain, 
époque la plus ordinaire d'apparition du Phylloxera ailé. 

M. le marquis de Sinely dit que les oiseaux insectivores 
sont en effet peu nombreux dans les vignes et qu'il n’y a 
généralement trouvé que des traquets ou des torcols. 

M: Millet pense qu'on ne saurait trop recommander aux 
propriétaires des diverses régions viticoles de prendre, dès à 
présent, les mesures nécessaires pour assurer la conservation 
et la propagation des espèces d'oiseaux insectivores dans le 
pays, et pour y introduire des espèces essentiellement insec- 
tivores. Tout retard, tout ajournement aurait de désastreuses 
conséquences, parce que l’insecte ailé pouvant être transporté 
à des distances considérables, quelquefois à 20 et 30 kilom., 
et, jouissant d’une fécondité prodigieuse, il suffit de quelques 
individus seulement pour répandre la contagion dans un 
rayon éloigné et étendu, dès lors la Bourgogne et la Cham- 
pagne seraient promptement envahies. Un ajournement d’ail- 
leurs n’est pas nécessaire, car le Phylloxera aïlé diffère des, 
pucerons ordinaires; c’est une petite mouche semblable à 
celle dont les oiseaux sont trés-friands. Quant aux chasses 
exceptionnelles à faire dans les vignes, elles seraïent certai- 
nement mal interprétées par des populations déjä trop por- 
iées à la destruction des oiseaux, et à l’infraction des règle- 
ments, mieux vaut faire réviser et compléter les règlements 
qui seraient insuffisants, et prendre ensuite les mesures né- 
cessaires pour en adoucir l'exécution. Ce serait le cas aussi 


336 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


d'appliquer les sages dispositions résultant des modifications 
apportées par la loi du 22 janvier dernier, à l’article 9 de la 
loi sur la chasse, c’est-à-dire favoriser le repeuplement des 
régions viticoles en espèces d'oiseaux insectivores. Dans ce 
but, on installerait un grand nombre de nichotrs artificiels 
contre les murs des habitations, les troncs ou branches des 
arbres des jardins et des vergers, et au besoin sur des po- 
teaux plantés au milieu ou à proximité des vignes. Ces nichoirs 
remplaceraient avantageusement les trous et cavités des murs 
et des arbres où aiment. à s’abriter et à nicher les mésanges, 
le rossignol de muraille et autres espèces essentiellement 
insectivores. 

M. Geoffroy-Saint-Hilaire dit que la capture ou la chasse 
des petits oiseaux pour étudier le contenu de leur estomac 
serait de mauvais exemple dans les pays viticoles, et que, 
d'autre part, cette expérimentation serait inutile, à cause de 
la difficulté de reconnaître les débris d’un aussi petit insecte 
que le PAylloxera alé. 

M. de La Blanchère conteste l'utilité et l'efficacité des ni- 
choirs artificiels, par les motifs suivants : Il n’y a que peu ou 
point d'oiseaux inseclivores dans les vignes, parce que ces 
oiseaux ne s’y plaisent pas, et n’y trouvent pas les aliments 
dont ils se nourrissent; dès lors, les mésanges, le rossignol 
de muraille et autres espèces qu’on pourrait y introduire n'y 
resteraient pas. Îls ne se prêteraient pas à un régime alimen- 
taire qui ne leur est pas approprié. On peut, d’ailleurs, remar- 
quer qu'il y a, dans les vignes, un grand nombre d'arbres 
creux, et que ces espèces d'oiseaux ne les fréquentent pas. 

M. Millet fait observer que les oiseaux insectivores ne déser- 
tent les vignes que dans les localités où l’on a détruit les 
haies, les buissons, les bosquets, que quant aux arbres ils y 
sont généralement très-rares, parce qu’ils portent dommage 
par leurs racines et leur feuillage, et que s’il existe par 
hasard des creux ou cavités, le propriétaire a le soin de les 
boucher pour empêcher l’infiltration des eaux pluviales. Notre 
confrère ajoute que, dans les vignes, ce sont les abris qui 
manquent, et non les aliments recherchés par la plupart des 


+ 


PROCÉS-VERBAUX. 3937 


oiseaux insectivores; car on trouve à peu prés partout, en 
plus ou moins grande quantité : charançon, altise, noctuelle, 
teigne, pyrale; ces deux derniers deviennent quelquefois de 
véritables fléaux, lorsque les conditions atmosphériques leur 
sont favorables, et que les oiseaux insectivores sont en nombre 
insuffisant. 

M. Millet dit, en terminant, qu’il recevra avec grand plaisir 
les oiseaux ou les estomacs d'oiseaux provenant des régions 
viticoles, et qu'il s’empressera de faire connaître à nos con- 
frères le résultat de ses investigations. 

— M. le marquis deSinéty appelle attention de M. Millet sur 
une opinion accréditée parmi les populations des campagnes 
de quelques localités en France, relativement à une relation 
qui existerait entre les brouillards de novembre et ceux de 
mars. 

M. Millet répond que, depuis quelques années, il cherche 
à soumettre à l'épreuve de sérieuses observations les croyances 
et les pronostics relatifs à la prévision du temps. L'enquête 
ouverte sur les brouillards de mars et les gelées de mai a déjà 
révélé des observations intéressantes, que notre confrère se 
propose de faire connaître en résumant cette enquête dans la 
prochaine séance, et en précisant des faits qui sont de nature 
à infirmer ou à confirmer la concordance entre les brouil- 
lards et les gelées. 

— M. Jules Grisard donne lecture d’une note de M. Mau- 
menet sur les divers végétaux cultivés par notre confrère, à 
Nîmes (Gard). 

— M. le Ministre des affaires étrangères transmet une 
lettre et un mémoire de M. le consul de France à Jassy, re-. 
laufs aux productions de la Moldavie. À cet envoi est joint 
le catalogue des plantes cultivées au jardin botanique de 
Jassy. 

— M. Drouyn de Lhuvs dépose sur le bureau les cinq pre- 
miers volumes de la Flore d'Australie, précieux ouvrage offert 
à la Société par M. le docteur Baron von Mueller, de Mel- 
bourne. — Remerciments. 

— Il est remis sur le bureau : 

3° SÉRIE, T. I. — Mai 1874. 29 


tx 
FH 


338 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


1° Le programme du concours régional agricole qui doit 
avoir lieu à Soissons du samedi 6 au lundi 15 juin 18745 

2° De la part de l’auteur, M. le comte Léonce de Lambertye : 
Conseils sur les semis et la culture des léqumes en pleine terre, 
offerts aux habitants de la campagne du département du 
Rhône ; 

3° Le discours d'ouverture prononcé par M. Drouyn de 
Lhuys au concours agricole de Châteauroux ; 

h° Le premier numéro du Bulletin périodique de lasso- 
cation pour la recherche, l'application et la propagation des 
meilleures méthodes d'éducation : 

5° Recenseamento geral dos gardos no continente do reino 
de Portugal en 1870 ; Lisboa, 1873, 1 vol. gr. in-8° et Atlas 
pet. in-fol. (Recensement général du bétail du royaume de 
Portugal, en 1870 (chevaux, ânes, bœufs, moutons, chèvres, 
pores); 

6° La Kabylie et les coutumes kabyles, par MM. À. Hano- 
teau et À. Letourneux. Paris, 1873, 3 vol. in-8°. 


Le Secrétaire du Conseil, 


MAURICE GIRARD. 


d 
pi 


IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 


F7. 


qi 4 


Exposition d’Anes et de Mulets au Palais de Cristal. 


Le 8 de ce mois (mai 1874), a eu lieu à Londres, dans la salle de l'Opéra, 
la distribution des récompenses pour l'exposition d’Anes et de Mulets du 
Palais de Cristal. Le comte de Shaftesbury présidait cette solennité. Le 
théâtre était comble, el l’assistance paraissait prendre un intérêt très-vif à 
la cérémonie. La majorité des lauréats se composait de gens d’une condition 
fort modeste : petits détaillants, revendeurs, fruiliers, et autres commer- 
cants de même catégorie ; les animaux exposés n'étaient autres que les 
compagnons de leurs labeurs journaliers. 

Pour presque tous les snjets récompensés, on à pu établir que le repos 
du dimanche était religieusement observé. Cette constatation, annoncée à 
chaque fois en termes exprès par le secrétaire qui appelait les prix, pro- 
duisait toujours dans le public une vive sensation. L'un des lauréats pro- 
clamés a été l'archevêque de Cantorbéry ; mais Sa Grâce n’est pas venue 
recevoir en personne la récompense qui lui était destinée. Après la distri- 
bution des prix réglementaires, on en fit une autre, supplémentaire ou de 
consolation, due à la libéralité de la baronne Burdett Coutts et de M. Dawson. 
Le Président remettait les récompenses de sa propre main et trouvait pour 
chacun un mot aimable. 7. 

Ensuite, le comte de Shaftesbury, s'adressant au public, dit que la Pro- 
vidence avait créé les Anes et les Mulets pour l’utilité de l’homme, mais que 
l’homme, de son côté, pour en tirer tout le profit qu’il pouvait en attendre, 
devait les traiter avec bonté, avec égard, et même avec affection. Un mulet 
pouvait faire plus de service qu’un cheval, et un tel animal ne méritait pas 
les reproches qu’on lui ménageait si peu, de paresse, de stupidité et d’en- 
têtement. L’orateur exprima l’espérance de voir ce préjugé disparaître 
bientôt. Il ajouta que lui-même avait droit à la parole dans l’assemblée en 
qualité de marchand des quatre saisons, ayant été recu comme tel dans la 
corporation de Golden Lane... Il portait à la fois le titre de chevalier de la Jar- 
retière et celui de marchand des quatre saisons, et il était fier de l’un comme 
de l’autre. En finissant, il cita les résultats obtenus parles industriels ambu- 
lants qui trailaient avec égard leurs animaux. Ceux-ci travaillaient bien 
parce qu’on leur faisait observer le sabbat. La meilleure des économies était 
donc de les laisser reposer un jour sur sept. 

Quand l’orateur eut achevé son allocution, trois salves d’applaudisse - 
ments retentirent en son honneur. Puis, l’un des lauréats, M. Thomas 
Hughes, en termes dépourvus sans doute d’ornements oratoires, mais par- 
faitement sentis, remercia les personnes présentes d’avoir bien voulu honorer 
la fête de leur concours. La séance officielle était terminée. Mais, avant de 
se séparer, un grand nombre d’exposants prirent place à un repas abondant 


Dre 


340 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. + 


que leur offrait, dans l’une des salles de l'établiseme ne Burdett 
Coutts. C’est le cas de rappeler ici que l’exposition, pendant toute sa durée, 
qui a été de trois jours, n’a pas cessé d'attirer la foule. M. Wilson qui l'avait 
organisée, a recu des compliments de toutes parts, pour son heureuse ini- 
tiative. 

C’est à un point de vue plus scientifique, sans doute, que l’on va voir, 
au Jardin d’acclimatation du bois de Boulogne, les deux produits de l’union 
d’un cheval et d’une ânesse, et que ces phénomènes excitent l'attention des 
savants et la curiosité du public. L’empressement montré à cette occasion 
par la population parisienne semble d’un bon augure pour une tentative 
analogue à celle qui vient d’avoir tant de succès à Londres. Toutes les ques- 
tions zoologiques excitent en effet aujourd’hui un intérêt général, et on 
leur découvre tous les jours une portée plus étendue. L'exposition de Cristal 
Palace paraît avoir été l’œuvre d’une inspiration exclusivement morale. 
Dans cet ordre d'idées même, elle exercera nécessairement une heureuse 
influence sur la race des animaux exposés ; elle amènera à coup sûr l’amé- 
jioration du traitement et de la nourriture qu’ils recoivent ; elle fera mieux 
apprécier, enfin, les services de ces modestes et utiles auxiliaires de notre 
industrie et de nos travaux. 

E. MÉRICE. 


Le Bouc de Cachemire en Californie. 


L’acclimatation du Bouc de Cachemire, tentée en Californie il y a quel- 
ques années déjà, est, paraît-il, un fait actuellement accompli. Loin d’avoir 
dégénéré sous ce nouveau climat, animal y aurait acquis une taille plus 
élevée et ün poil encore plus beau que dans le pays d’origine. D’après un 
article du Land and Water, auquel nous empruntons ce renseignement, le 
nombre des individus de cette précieuse race (soit de pur sang, soit de demi 
ou de quart de sang) ne s’élèverait pas aujourd’hui en Californie à moins 
de 40 000. .  RavVERET-WATTEL. 


Le Colin Houi et la Poule de prairie. 


M. Tegeimeier doit se tromper certainement sur la valeur du Colin Houi 
comme oiseau de chasse, et s’il connaissait bien cet oiseau, il n’en aurait 
pas parlé comme il le fait dans sa lettre au Field du 24 janvier (1). J'ai 
peine à centredire une autorité aussi incontestable que la sienne; mais il n’est 
point exact d’aflirmer que le Colin Houi se branche dans l'arbre le plus 
rapproché lorsqu'on le fait partir. Il n’est pas possible que cet oiseau change 


(1) Voyez Bulletin, janvier 1874, p. 82. 


jf 


dal: Qi. 
ir DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 341 


à ce point sa manière d’être lorsqu'on le transporte en Angleterre. Je l’ai 
beaucoup chassé en Amérique et je puis certifier que c’est un des gibiers 
les plus amusants à tirer que l’on puisse rencontrer. Il s'envole comme une 
fusée, et dans ces belles chasses d'automne aux États-Unis, je vous réponds 
qu’il faut avoir l’œil prompt et le coup d’æœil juste pour les abattre. Franck 
Forester dans ses Field sports a bien décrit les mœurs du Colin, et son opi- 
nion diffère entièrement de celle de M. Tegetmeier. Frank Forester était 
Anglais et il connaissait bien les sports de l’Angleterre avant d’être venu 
étudier ceux de l'Amérique 


Harry GREENWOOD. (Field, 14 février 1874.) 


x 


En vous transmetlant celte lettre relative à la polémique engagée à 
propos de l’introduction de la Poule de prairie, je vous dirai que j’ai aussi 
une opinion toute différente de celle de M. Tegetmeier. La Poule de prairie 
n’a point besoin d’une nourriture spéciale comme les Tétras du Nord, ou 
les Grousses d'Écosse ; j'en ai tué en Amérique sur des points du territoire 
parfaitement cultivés et où ces oiseaux se nourrissaient autour des fermes 
comme ils pourraient le faire dans notre pays. A. Pierre PICHOT. 


La reproduction des Huîtres perlières aux îles 
Tuamotu. 


Le Messager de Taïti, journal publié par l’administration des établisse- 
ments français en Océanie, donne, dans son numéro du 14 novembre 1873, 
des renseignements intéressants sur le mode de reproduction des Huîtres 
perlières dans ces parages. 

Ces renseignements sont dus à M. Mariot, lieutenant de vaisseau, résidant 
à Tuamotu, pays où se fait sur une grande échelle la pêche de ces Huîtres. 
Les conclusions développées dans la courte notice qu’a publiée M. Mariot 
sur ce sujet, sont de nature à attirer l’attention de notre commerce national. 

Les îles Tuamotu sont soumises à l’autorité française, et l’on pourrait à 
très-peu de frais y développer la production d’une matière qui entre chaque 
jour davantage dans les besoins de l’industrie. L’épuisement des fonds qui 
produisent la nacre rend d’un intérêt extrême la multiplication artificielle 
des Huîtres perlières qui la fournissent. Aussi croyons-nous devoir repro- 
duire les renseignements contenus dans le travail de M. Mariot. 

Les nacres peuvent être placées dans des endroits sans courant ou avec 
courant. Il est préférable de les mettre dans des endroits où le courant existe 
sans être trop violent. 

Le fond de sable calcaire leur est mortel. 

Le fond de pierre leur est bon, mais leur développement y est peu 
rapide. 


342 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. é 


Le fond de gros gravier est bon, mais il a le même inconvénient que le 
précédent. 

Le fond de coraux vivants branchus est le meilleur et celui que l’on doit 
rechercher ; sion ne l’a pas, il faut le créer. 

Pour cela on enlève des séries de bouquets de coraux disséminés de ci de 
là ; on les transporte, en ne les laissant pas hors de l’eau plus d’une heure, 
et l’on en pave le lieu que l’on a choisi et qui ne doit avoir à mer basse qu’un 
mètre de profondeur. Les morceaux de coraux sont bons ; ils prennent sur 
le fond comme des boutures. 

Il faut entourer d’un mur en pierre sèche, qui restera sous l’eau, l’em- 
placement choisi, y faire des compartiments pour y mettre les coquilles par 
âge et faciliter leur visite ; les murs des compartiments servent à circuler 
autour des fonds de coraux impraticables à la chaussure et au pied. 

Le fond étant préparé, il faut chercher des coquilles de la taille d’une 
petite soucoupe et au-dessous (on en trouve beaucoup dans les endroits peu 
profonds). On doit enlever les coquilles sans arracher le byssus qui les 
attache. Si l’on peut emporter le morceau de pierre, il faut le faire ; sinon 
il faut couper le byssus avec un couteau. On place ensuite les coquilles le 
talon en bas, la bouche en l’air, le byssus du côté du courant ; on les met 
ainsi côte à côte, sans les serrer, comme les livres d’une bibliothèque. 

Douze mois après, la coquille, grosse comme une soucoupe, sera grande 
comme une assiette. A partir de ce moment elle ne grandit plus guère, elle 
épaissit davantage ; trois ans doivent suflire pour avoir de bonnes nacres. 
Du reste, la croissance des Huîtres varie avec les îles : ainsi, dans celles 
qui ont une ou deux passes communiquant avec la mer, la croissance est 
plus rapide que dans celles dont le lac est fermé. 

Lorsque la coquille lâche son naissain et l’abandonne au courant, ce nais- 
sain est recueilli par les pierres sèches du mur dont il a été question plus 
haut et sur lesqueiles on pourra plus tard prendre les nouveaux sujets que 
l’on voudra parquer. Les coraux vivants, au contraire, si favorables au 
développement de la coquille déjà formée, non-seulement laissent échapper 
le naïssain, mais encore le détruisent. Il est donc de la plus grande impor- 
tance d’avoir des récepteurs établis dans les meilleures conditions. 

Tout ce qui vient d’être dit a élé expérimenté ; en se conformant à ces 
instructions la réussite est assurée, (Journal officiel.) 


’Embrevade (Cajanus indicus, Sprengl.). 
Nous empruntons les extraits suivants au Catalogue raisonné de l'exposi- 
tion égyptienne à l'exposition universelle de Vienne en 1873 : 


« Arbrisseau atteignant en Égypte 3, 4 et 5 mètres de hauteur, à tiges 
droites, lisses, verdâtres ou rougeâtres suivant la variété, marquées de lignes 


te 


1% 


pans DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 3/43 


blanches longitudinales, à ramifications nombreuses de la base au sommet, 
se ramifiant de nouveau et formant au sommet des touffes compactes et 
volumineuses. 

» L’Embrevade est originaire de lInde orientale et cultivée au Brésil, aux 
Antilles, à Madagascar, dans l'Amérique et l’Asie tropicales et dans le centre 
de l'Afrique. A l’île Maurice elle est cultivée en jachère dans les terres de 
canne à sucre. Les premières graines que nous avons reçues en Égypte de 
l'Embrevade nous ont été envoyées de l’île Maurice par M. de Bragard, 
beau-père de M. F. de Lesseps ; cet amateur zélé d’agriculture, qui habita 
pendant longtemps l’île Maurice, me disait que cette plante précieuse était 
appelée à occuper un rang distingué dans les cultures égyptiennes. En effet 
les expériences que nous avons faites en Égypte sur la culture de cette légu- 
mineuse, notamment au champ d'expériences de l’École d'agriculture égyp- 
tienne, dans les domaines du khédive, sur tous les points de l’Égypte, et 
dans la propriété de S. A. le Prince héritier, à Koubbé, ainsi que dans plu- 
sieurs propriétés de S. E. Nubar Pacha, ont pleinement justifié cette asser- 
tion, et nous avons lieu de croire que cette légumineuse occupera sous peu 
un rang distingué à côté des fèves et des lentilles. 

» L’Embrevade se plaîl dans tous les sols, mais préfère ceux de nature 
sablonneuse ; cet arbrisseau semé au commencement de l'été, à 2 mètres de 
distance l’un de l’autre, commence à fleurir en octobre et produit ses 
premières gousses en novembre, qui se succèdent sans interruption pendant 
tout l'hiver et le printemps jusqu’au commencement de l'été. 

» Les graines de l’Embrevade constituent une excellente légumineuse ali- 
meniaire. On mange les graines en sec et en vert, comme les petits pois 
écossés, qui ont un goût plus fin que celui de la fève. 

» Mais le principal usage consiste à les faire cuire dans l’eau et à les assai- 
sonner à l’huile et au vinaigre. Par la cocticon, les graines acquièrent un 
volume beaucoup plus considérable. A lîle Maurice les indigènes mangent 
l’'Embrevade cuite dans l’eau, sans autre assaisonnement qu’un peu de sel. 
En Égypte, les indigènes la mangent à la manière des fèves en la faisant 
cuire dans l’eau, en l’assaisonnant ensuite de sel et parfois d’un peu d’huile. 

» L’Embrevade présente une composition riche en matières azotées, grasses, 
amylacées et en sels minéraux, qui en fait un aliment complet, appelé à 
rendre de grands services aux populations pauvres des pays chauds ; la 
culture de cette plante n’exigeant aucun soin et produisant des graines en 
abondance pendant les irois quarts de l’année, et cela pendant six ou sept 
ans successifs, sans aucun frais de culture que l’arrosage et la récolte, est 
à la portée des populations habitant sous un soleil tropical, où l’on ne peut 
cultiver que des plantes alimentaires d’une culture facile et n’exigeant pour 
ainsi dire aucun entretien. » 


34h 


SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


4! 


Croissance comparée de diverses espèces d’Eucalyptus, 


PROVENANCE 
NOMS DES ESPÈCES. des 
graines. 
4. E. globulus. El-Alia. 
2. colossea. Ramel et Soc. 
d’acclim, 
goniocalyx. — 
longifolia . Vilmorin. 


ot 


16. 


17. 
18. 


AE 


20. 
21. 


22 


23. 


24. 


29. 


Clarence plaine. |Ramel. 


spotted-gum. — 


rostrata. — 
LES Rivière. 
trachyphloia. — 
white gumtree. |Trottier. 
‘ spectabilis. Rivière. 
viminalis (Tasma-|Ramel. 
nie). 
risdoni — 


obliqua  (Stringy|Ramel et Soc. 


bark). d’acclim. 
pilularis. Rivière. 
urnigera. Ramel et Soc. 
d’acclim. 
fœld bay. Rivière. 
megacarpa. Ramel et Soc. 
d’acelim. 
miCroCcOrys. Rivière. 
robusta. — 


resinifera (red-cum|Ramel. 
de Sidney). 


amygdalina (white — 
pepper). 

paniculata, v. rose| Vilmorin. 
(dark iron bark). 

amygdalina (brown|Ramel. 
pepper). 

Stringy bark, — 


Teuterfiel, 


DATE 
de la 


plantation. 


avril 1873 


dans la 47° année de leur plantation en terrain sec et de moyenne consistance. 


OBSERVATIONS. 


au 4e avril 4874. 


Croissance en haut" 


= 
=) 
: 

Q 


9. 80 | Comme l'E. globulus. Végète bien 
dans diverses qualités de sols 
et est bien corsé. Toutes les 
graines lèvent bien et donnent 
des plants robustes. 

2, 70|N'est pas venu dans des terrains 
humides. 

2,50/ESst mieux venu en terre sèche 
qu'humide. 

2, 40!Le tronc se déjette et n'est pas 
très-droit, ce qui est dù proba- 
blement à sa végétation vigou- 
reuse en hauteur. 

Bien établi et bonne végétation. 


Ces deux Eucalyptus sont des 
espèces distinctes. 


0|Végète bien avec un tronc droit; 
propagation facile. 
9,00|Se rapproche du resinifera que 
À nous avons d’ancienne date. 
9. 00!Végète bien. 


2? 
2,00 |Végétation vigoureuse. 


9,2 
2,9 
2,0 
2 0 


4,90/Nous avons déjà quatre espèces 
parfaitement distinctes sous ce 
nom. 

1,90 Les jeunes plants fondent facile- 
ment. 


1,80 Bien établi de tronc etjoli feuillage 
luisant. 

1,80 Propagation difficile, les jeunes 
plants passant mal le premier 
été. 

1,75 | Bonne végétation. 

4,50 Tronc corsé. 


1,50 C'est, croyons-nous, le spotted- 
gum de M. Ramel, 
1,50 Le tronc n'est pas très-droit. 


1, 50|Espèce différente de celles que 
nous avons sous le nom de resi- 
nifera. 

1,50 Culture difficile dans le jeune âge; 
tige grêle. 


4,50!2e tronc n ‘est pas très-droit et M 
est peu ramnifié. 


4° A0|Comme le n° 22, dont il diffère 
peu par son port. 


1,40 Fond facilement dans son jeune 
âge. 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 3/9 


PROVENANCE DATE 


EU 
NOMS DES ESPÈCES. des de la 


OBSERVATIONS. 


graines. plantation. 


Croissance er haut’ 
au 4e avril 14874. 


m. C. 
26. E. paniculata, (dark|Vilmorin. avril 1873/1,40|Ne présente aucune différence 


iron bark). avec/le/n? 28: 
swWamp gum. Ramel. 4,40/\Nous parait être de même espèce 
/ que l'E. piperita que nous avons. 
coccifera. = 1,40 Propagation difficile; les jeunes 
plants résistent mal au premier 
été. 
white box. 4, 40 |Ressemble à l'urnigera. 
odorata. 1,40 |Très-corsé et bieu ramifié. 
calophylla. 4,10 |Souffre l'été de la chaleur et du 
froid l'hiver. 
Sp. megacarpa. 1,00 Espèce à feuilles velues trouvée 
dans les megacarpa. 
leucoxylon (yellow 4,00 !N'est pas de même espèce que ce- 
box). lui que nous cultivons depuis 
LE sept ans. 
eugenioides. Ramel et Ri- juin 4873 1 00!Bienramifié et parfaitement corsé. 
yvière. 
citriodora. Ramel et Soc. 0,80 Delta ae du so ê au 
, : chaleur et ne vient pas dans les 
L d'acclim. terres mouillées. 
marginata. Ramel. avril 487310. 60 |De croissance très-lente et d'une 
f élévation difficile; les jeunes 
plants fondent facilement avant 
leur mise en pleine terre. 
concolor. Antibes. juin 4873|0, 60 | Les branches partent du tronc très- 
À : vigoureuses. 
siderophloia. Rivière. nov. 487310,50/N'est pas notre E. Siderozylon. 
white gum, sp. W.|Ramel. D 0,40 |Feuillage de l'Occidentalis dans 
Australia. son jeune âge. 


Gunnii. 0. 40 | Espèce différente de celle que nous 
k “ possédons d’ancienne date. 
sp. Teuterfiel. = 0, 40 |Paraît devoir bien végéter. 
goniocalyx. Vilmorin. 0,40 Espèce différente du Goniocalyx de 
M. Ramel. 
sp. M. W. Ramel et Soc. |avril 187310, 40 | En buisson; végétation lente. 
d’acclim. 
sp. Port Adelaïde. |Trottier. 0.40 Espèce délicate dont il ne reste 
2 plus qu’un jeune plant. Il n’est 
probablement pas dans le ter- 
rain qui lui convient. 


À. CORDIER. 


Télescope d’eau. 


Les pêcheurs norwégiens emportent toujours dans leurs expéditions une. 
sorte de lunette dite « Télescope d’eau ». C’est un tube de 5 à 4 pieds de 
long, dont on plonge l’extrémité dans l’eau. En regardant par l’oculaire, on 
s’habitue promptement à distinguer les objets jusqu’à 10 ou 15 brasses de 
profondeur. Les pêcheurs découvrent souvent ainsi des bandes de poissons 


346 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


qu’ils eussent, sans cela, laissé passer inaperçues; ils les entourent avec 
d'immenses seines, et font quelquefois des pêches miraculeuses, là où, sans 
le secours de leur lunette , ils n'auraient peut-être pas même songé à jeter 
le filet. Le « Télescope d’eau » n’est point seulement utilisé par les pêcheurs 
de profession ; on le trouve aussi à bord de la plupart des navires de com- 
merce et des bateaux cabotiers. « Nous voudrions, dit le Northern Ensign, 
à qui nous empruntons les détails ci-dessus, nous voudrions voir ie Bureau 
de pêches faire connaître à nos pêcheurs les services qu'ils pourraient, eux 
aussi, tirer du « Télescope d'eau » et propager chez nous l’emploi de cet 
ingénieux instrument. » RAVERET-WATTEL. 


Productions du royaume de Siam. 


RES Er Le sol de Siam, grâce à la chaleur de la température, aux pluies 
abondantes qui règnent pendant cinq mois, et aux inondations périodiques, 
est d’une extrême fertilité. Les parties basses du pays, fécondées par le li- 
mon qu'y dépose le Mé-ham, produisent sans beaucoup d’efforts de la part 
des habitants, une grande quantité de riz (Oriza sativa) qui forme la base 
de la nourriture des indigènes et fournit au commerce son principal élé- 
ment d'exportation. L’excédant de la consommation locale est annuellement 
d'environ 2 000 009 de piculs (120 000 000 de kilogrammes) qui’irouvent en 
Chine des débouchés à peu près assurés. La culture de la canne réussit bien 
et la fabrication du sucre, susceptible de prendre un grand accroissement, 
fournit annuellement à l’exportation environ 4100 000 piculs (6 000 000 de 
kilogrammes). La récolte du Sésame donne en moyenne 50 000 piculs que 
l’on charge pour Marseille. On cultive aussi avec succès le Café, le Poivre, 
le Maïs et plusieurs espèces de plantes légumineuses, entre autres le Phaseolus 
radiatus dont les Malais et les Chinois font une grande consommation. Les 
fruits de Siam sont bons et variés : dans le nombre il convient de citer le 
Mangoustan (Garcinia mangostana), pour sa saveur exquise, et le Duriau 
(Durios) dont la pulpe est très-estimée des Siamois, malgré son odeur 
nauséabonde. La famille des Palmiers est représentée par le Cocotier, lA- 
réquier, le Sagoutier et le Palmier éventail (Chamærops humilis). Les forêts 
de l’intérieur fournissent en abondance du bois de Teck, précieux pour les 
constructions navales à cause de son incorruptibilité, du bois de Sapan, re- 
cherché pour ses propriétés tinctoriales, et divers bois odorants et d’ébé- 
nisterie, tels que le bois d’Aigle (en malais Agi-la) et le bois de Rose. 

La faune de Siam n'est, comme sa flore, que très-imparfaitement connue 
et sous ses aspects les plus vulgaires, à cause sans doute de la difficulté d’ex- 
plorer le pays, dont une grande partie est couverte de forêts épaisses, où 
l’on ne peut se frayer un chemin que la hache à la main ou à l’aide d’Élé- 
phants. Ce mammifère est commun dans les bois et dans les plaines où sou- 
vent il saccage les cultures sans qu’il soit permis de le chasser, les Éléphants 


a 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 9/7 


étant déclarés propriété royale, et l'Éléphant blanc étant l’objet d’une sorte 
de culte de la part des Siamois qui croient que tous les animaux albinos, 
Singes blancs, Moineaux blancs, mais surtout l'Éléphant blanc, sont animés 
par quelque héras ou puissant monarque qui deviendra un jour Bouddha. 

Les autres Mammifères qu’on rencontre le plus fréquemment sont le Tigre 
royal et la Panthère, dont les peaux sont recherchées des Chinois ; le Chat- 
Tigre, l’Ours, le Rhinocéros, le Buffle sauvage, le Cerf, le Sanglier. L’Orang- 
Outang se trouve dans la presqu'île malaise. Les animaux domestiques sont 
le Bœuf et le Buffle précieux pour les transports et le labourage des champs. 
Le Cheval est rare, de très-petite taille et de peu d'utilité dans un pays de 
rizières et sillonné de canaux. 

La classe des oiseaux est représentée à Siam par l’Aigle blanc, le Vautour, 
le Milan, le Corbeau dont l’impudence et la loquacité excessives ne cessent 
d’importuner les habitants. Le Moineau (Fringilla domestica), très-commun 
aussi, n’est pas moins familier. L’hirondelle, qui construit ces nids si estimés 
des Chinois (Hirundo esculenta), fréquente la partie occidentale du golfe de 
Siam. Les Gallinacés les plus communs sont le Paon, qui habite les forêts 
et dont les plumes sont exportées en Chine, le Coq et la Poule à l’état sau- 
vage et à l’état domestique, le Pigeon, le Faisan, et une petite espèce de 
Francolin. 

Siam est riche en oiseaux aquatiques; il suflira de citer la Mouette (Larus), 
l’Hirondelle de mer (Sterna), le Pélican (Pelecanus onocrotalus), le Cormo- 
ran, le Héron blanc, le Canard sauvage (Anas boschas), et le Canard domes- 
tique dont l’élève est pratiquée avec succès par les Chinois. 

Les Reptiles sont extrêmement nombreux à Siam et offriraient au natu- 
raliste un vaste sujet de recherches. La Tortue verte (Testudo mydas) est 
abondante dans le golfe et ses œufs font l’objet d’un monopole royal. Le 
Crocodile se trouve dans toutes les rivières de Siam. Les Lézards sont nom 
breux ; l'espèce la plus curieuse est celle que les Siamois nomment Toug- 
hay, onomatopée du cri retentissant de ce reptile. Avec la saison des pluies 
les Serpents se montrent partout, et plusieurs espèces sont réputées très- 
venimeuses. Le Boa constrictor se gîte quelquefois dans les habitations de 
la capitale, et on en prend qui atteignent une longueur de 5 ou 6 mètres ; 


sa chair est très-goûtée des Siamois. ... 
GARNIER. 


Incubateurs Brackett. 


Les publications techniques spéciales américaines font le plus grand 
éloge des appareils d’éclosion imaginés par M. Brackett, en vue de con- 
server les œufs de poisson dans un état de parfaite propreté, pendant toute 
la durée de l’incubation. Ce sont de simples cadres en bois, de 18 pouces 
de carrés, garnis d’un fond en toile métallique de 8 fils au pouce. Ces 


318 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


tamis sont recouverts d’un vernis à la paraffine, tant pour éviter l’oxydation 
de la toile métallique que pour empêcher le développement des byssus 
qui pourraient végéter sur le bois et envahir les œufs. Leur prix extrême- 
ment modique les fait préférer aux divers modèles de claies en baguette de 
verre employées généralement, et surtout aux lits de gravier ou aux bacs en 
houille, dont on se sert fréquemment en Amérique pour éviter l'invasion 
des byssus. Mais, c’est surlout quand on ne dispose que d’une eau très- 
sédimenteuse, que ces appareils sont précieux. Les œufs en incubation 
viennent-ils à se charger d’un dépôt nuisible, on enlève le tamis du bac 
formant ruisseau artificiel dans lequel il est placé, et on le met sous un 
robinet d’eau claire; en une minute ou deux le neltoyage est complet, 
sans aucune espèce de manipulation des œufs, qu’on ne dérange pas, et 
qui n’ont rien à en souffrir. L’économie de temps et de main-d'œuvre est 
considérable. 

Ces mêmes tamis peuvent être également employés avec grand avantag 
pour le transport des œufs embryonnés, qu’on y emballe avec de la mousse, 
selon la méthode habituelle. Chacun d’eux peut recevoir 2000 œufs envi- 
ron, et vingt-quatre de ces appareils peuvent être réunis en un seul ballot 
facile à manier et à expédier au loin. Quantité d’œufs adressés de l’État du 
Maine à l’établissement de Poquonnæ (Connecticut) ont parfaitement sup- 
porté le voyage. 

Les appareils Brackett sont adoptés à Bucksport (Maine) par M. le com- 
missaire des pêcheries Atkius, ainsi qu'à l'établissement de Poquonnæ, où 
ils donnent les meilleurs résultats et l'emploi ne tardera sans doute pas à 
s’en généraliser. RAVERET-W ATTEL. 


Chronique d'Amérique. 


Duvet végétal et crin végétal. — La mousse espagnole. — Le pu/u des Sand- 
wich. — Bananiers et Yuccas. — Le Ramié, — La Punaise de la pomme de 
terre. 


On utilise sur une assez grande échelle aux États-Unis les matières duve- 
teuses et soyeuses que fournissent en abondance certains végétaux trop 
longtemps négligés. Quelques-unes se tissent et se filent comme la soie véri- 
table et le coton; d’autres, en plus grand nombre, sont employées dans la 
carrosserie et la tapisserie pour bourrer les coussins, les siéges, les matelas 
en guise de laine ou de crins. C’est ainsi qu’on tire aujourd'hui un assez 
beau profit de la Calotropis gigantea et d’un certain nombre d’Asclépiadées 
dont la culture se propage de plus en plus. L’Echites suberosa donne un 
vérilable duvet soyeux et fin au point de pouvoir être substitué à l'Édredon. 
On commence aussi à faire grand cas du duvet du Fromager de la Guyane, 
Bombax pentandrum, et du crin végétal que donnent quelques Épiphytes, 
entreautresla Tillasidisca usneoides, plus connue en Amérique sous le nom de 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 9/9 


Mousse espagnole. Cette mousse abonde sur les arbres dans certaines parties 
de la Guyane et des États de l’Amérique du Sud. Il s’en fait un grand com- 
merce à la Nouvelle-Orléans. Les fibres qu’on en oblient possèdent une 
grande élasticité qui les fait rechercher dans l’industrie de la fabrication des 
siéges. Les naturalistes s’en servent aussi pour empailler les oiseaux. Au 
Texas on a monté des fabriques de papier dont cet épiphyte est la matière 
première. À la Trinidad on lui donne le nom de Barbe de vieillard ou 
Barba hispanica. À la Kloride il s'en vend de grandes quantités au prix 
variable de 2 dollars et demi à 5 dollars les cent livres, suivant la qualité. 

La préparation se fait comme il suit : on met la mousse verte dans des 
cuves immenses où elle macère quelque temps, puis on l’expose à la cha- 
leur, ce qui amène, dans l’espace de six ou huit semaines, la décomposition 
de l'écorce extérieure. La fibre noire dégagée de son enveloppe est ensuite 
séchée avec soin au soleil, puis soumise à un procédé mécanique de battage 
et de nettoyage qui en sépare toutes les substances étrangères ; après quoi, 
au moyen d'une presse, on en forme des balles du poids de 100 à 120 livres. 
Ainsi préparé ce crin végétal se vend à de très bons prix sur le marché de 
New-York. Dons certaines localités des États du sud on se contente d’amon- 
celer la mousse en tas et de la laisser ainsi pourrir pour débarrasser la 
fibre de son enveloppe. On l’étend ensuite au soleil et on la nettoie plus ou 
moins bien par un batiage au fléau. L’exportation de ce produit pour l’Europe 
prend de grandes proportions. 


Aux îles Sandwich, il se fait aussi un grand commerce d’une substance 
végétale analogue, la fibre de Pulu. Cet article n’est autre que la matière 
duveteuse qui enveloppe le rhizome et la partie inférieure de la tige d’une 
espèce particulière de fougère arborescente, le Cibotium. Bien qu’employé 
de fort longue date pour bourrer les oreillers, coussins, etc., ce duvet n’a 
commencé à être exploité réellement qu’en 1857. Aujourd’hui Honolulu 
l’exporte en quantité ‘assez considérable en Californie, à l’île de Vancouver, 
en Australie et même en Europe. 

La fougère qui produit le Pulu ne pousse, paraît-il, que sur les hautes 
terres à une altitude de 300 à 1200 mètres. Elle atteint un développement 
de 4 à 5 mètres de hauteur. La plante ne produit que peu de duvet, 60 à 
80 grammes par tige, encore faut-il qu’elle ait à peu près quatre ans pour 
rendre cette quantité. Gette récolte fait vivre aux Sandwich deux à trois mille 
personnes, hommes, femmes et enfants. C’est un travail as$ez pénible. La 
substance se recueille à l’état humide : il faut l’étendre sur des rochers ou des 
nattes pour la faire sécher, et à cette époque de l’année le climat est si plu- 
vieux dans les régions à Pulu que les indigènes sont forcés souvent d'attendre 
des semaines pour avoir leur récolte sèche et bonne à livrer sur le marché. 

Les crins végétaux tirés de diverses plantes sont aujourd’hui chose 
commune. L'Algérie, on le sait, fait un assez grand commerce du crin végé- 
tal que lui fournissent les feuilles du palmier nain. . 


350 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Les matières textiles sont maintenant recherchées partout et la liste des 
végétaux qui en livrent à l’industrie va tous les jours se grossissant de 
quelques noms nouveaux. La fibre du bananier est fort appréciée pour sa 
force et sa finesse. La famille des musacées est d’ailleurs précieuse à plus 
d’un titre. On en tire un grand parti dans toutes les régions inlertropicales. 
La banane, dont nous ne faisons pas grand casici, parce qu’elle n’y arrive 
jamais en bon état de maturité, est, en somme, un excellent fruit qui nourrit 
des populations entières. Il en existe des variétés nombreuses qui presque 
toutes s’acclimatent facilement dans tous les pays chauds. On tire du fruit 
fermenté une liqueur qui a des propriétés enivrantes très-prononcées. 

Outre le bananier, connu dans l'Amérique centrale et les États du sud de 
l’Union, on trouve plus au nord, dans le Mexique septentrional, par 
exemple, et dans le sud de l’Utah, un fruit analogue comme goût à la banane 
et dont il est rarement parlé en Europe, c’est celui de la variété d’Yucca 
appelée Yucca baccata par les botanistes. Il est jaune verdâtre, d’une nature 
pulpeuse, molle, très-sucré et a cela de remarquable qu’il ne paraît sur la 
plante que tous les deux ans. Les habitants du pays en font sécher en grande 
quantité et le conservent pour l’hiver comme nous faisons des figues. Vert, 
le même fruit se fait cuire sous la cendre ; on en fait autant de la fleur à l’état 
de bouton. La feuille en baïonnette de cette espèce d’Yucca produit une longue 
et forte fibre très-résistante. La plante pousse dans les sols les plus pauvres. 
Un journal californéen nous informe que cette culture a réussi sur des points 
nombreux de la Californie; nous ne saurions dire loutefois qu’elle ait été 
essayée sur une échelle un peu grande. Au Mexique la famille de tous les 
yuccas est fort en vogue sous le nom d’Amole dans tous les ménages pour 
remplacer le savon. Les nègres de la côte de la Caroline connaissent aussi 
fort bien cette propriété de la matière mucilagineuse saponacée de ses 
racines. 


Le New-York Sun a publié de la plante appelée Ramié ou ortie de la 
Chine une intéressante description dont M. W. Axon a reproduit les particu- 
larités principales en les complétant de données nouvelles dont nous profite- 
rons à notre tour. Dans certaines parties de l’Amérique du Sud on s'occupe 
maintenant beaucoup de la culiure de ceite plante qui pousse très-bien dans 
la Floride, la Géorgie, la Caroline du sud et, à vrai dire, presque partout du 
33° degré de latitude sud au golfe du Mexique. A la Louisiane, quelques plan- 
teurs remplacent la canne à sucre par le ramié qui n’a pas besoin d’être 
replanté, ne demande comparativement que peu de soins et n’entraîne pas 
srands frais de machines pour le préparer pour la vente. Autant qu’on a pu 
s’en assurer, il n’a pas d'insectes ennemis; ses fibres sont moins embarras- 
santes et plus facilement transportables que le coton, et les prix qu’on est sûr 
‘ d’en obtenir sont plus rémunérateurs. Pour le moment les fibres se vendent 
en Angleterre 240 dollars le tonneau de 2000 livres (soit 1288 francs les 
906 kilogrammes) ou 8 3/4 cents la livre. 


US 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 991 


Le ramié ou ortie de Chine est une plante de la famille des orties qui 
croît spontanément dans l’Inde anglaise, en Chine, à Java et autres pays de 
l'extrême Orient. La fibre qui en forme le produit commercial est l'écorce 
intérieure de la tige. Séparée de la première écorce elle a un aspect blanc 
lustré. Cette fibre est plus longue et plus uniforme qu'aucune autre, à part 
la soie. Elle est plus forte et plus élastique que le chanvre ou le lin. Elle 
prend la teinture aussi bien que la soie de bonne qualité. Quand elle.est 
bien préparée et débarrassée des matières qui l'entourent, on peut la filer en 
fils fins irès-propres à mêler à la laine dans la fabrication de certains lai-- 
nages. Seule elle fait des tissus qui surpassent la plus belle toile en finesse, 
en solidité et en durée. La fibre de ramié a aussi la propriété de se feutrer 
mieux que le poil ou la laine. La plus grande partie des ramiés qui se vendent 
aujourd’hui sont mal préparés; la fibre est généralement mélangée à des 
fragments de l’écorce extérieure qui nuisent à son aspect et en diminuent la 
valeur vénale. Ce fait est sans doute le résultat de l’inexpérience et du défaut 
d'appareils convenables pour la nettoyer. Les procédés de préparation 
s’amélioreront avec le temps et donneront aux producteurs de plus beaux 
profits de leurs récoltes. 

La Jamaïque abonde, parait-il, en plantes fibreuses qui peuvent servir 
égalemeni bien à la fabrication des tissus et à celle des papiers. Alors que 
la disette du coton affamait le Lancashire et‘réduisait à la misère des milliers 
d'ouvriers, d'immenses récoltes de matières fibreuses propres aux manufac- 
tures de Manchester et de Giasgow se perdaient dans cette colonie. Nous 
apprenons avec plaisir que le gouvernement colonial tourne son attention 
vers le développement de ces ressources restées si longtemps stériles. 


Les agriculteurs américains sont dans un complet désarroi relativement 
aux mesures à prendre contre l'invasion de plus en plus redoutable du 
Doryphora decemlineata ou punaise de la pomme de la terre du Colorado. 
Les ravages de cet insecte s'étendent sur une portion considérable de l’Union 
et il est à craindre, remarque le docteur Dudgeon auquel nous empruntons 
ces détails, qu’ils n’attaquent le reste de l'Amérique du Nord y compris les 
possessions britanniques. L’insecte, paraît-il, est connu depuis plus de qua- 
rante ans comme indigène aux montagnes Rocheuses, où il était, jusque dans 
ces dernières années, exclusivement cantonné et où il vivait sur une espèce 
de pomme de terre sauvage, le Solanum rostralum. Quand la pomme de 
terre ordinaire commença à être cultivée dans ces régions le Doryphora se 
jeta sur elle, et passant de proche en proche d’un champ à l’autre, il arriva 
de la sorte en 1859 à 100 milles à l’ouest de la ville d’Omaha dans le Nebraska. 
En 1861 il envahissait l’Iowa. En 1864-65 il traversait le Mississipi et passait 
dans l'Illinois, d’où il s’avance vers l’Atlantique à raison de 62 milles ou 
environ 100 kilomètres par an. On calcule qu’il atteindra le rivage de l'Océan 
en 1878. 

L'animal pond ses œufs sous la feuille de la plante, où ils éclosent rapi- 


352 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


dement. La larve peut avoir un centimètre de long ; elle est épaisse au centre 
et eflilée par les extrémités; elle est jaune pâle, semée de points noirs, avec 
tête et pattes noires, et porte aux flancs deux larges bandes noires. L’insecte 
à l’état complet est à peu près long d’un centimètre et large de cinq milli- 
mètres. Il est de forme ovale, bombé dessus et plat dessous. Il a une cui- 
rasse dure, lisse et brillante, d’un beau jaune paille; la tête et le thorax, 
quelquefois basanés, sont marqués de points noirs ; les élytres sont rayées 
chacune de cinq bandes noires dans le sens de la longueur. Les jambes sont 
jaune fauve et les pattes généralement noires. Il faut moins d’un mois à 
l'œuf pour parvenir à l’état d’insecte parfait. 

Tous les moyens employés jusqu'ici pour détruire ce dévorant, qui a déjà 
dévasté d'immenses régions, sont restés sans succès. On ne compte guère 
que sur les oiseaux, mais la bête est venimeuse dans son genre; les seules 
émanations de son corps écrasé ont causé, dit-on, de graves symptômes 
d’empoisonnement, qui ressemblent moins aux effets de la cantharide qu'à 
ceux du venin du crotale. Divers journaux de médecine ont enregistré 
des cas de morts de personnes atteintes seulement pour avoir ramassé 
les larves sur les feuilles de pommes de terre. Espérons'qu’il y a quelques 
exagérations dans les faits relatés. Il serait bien désirable, dans tous les cas, 
qu’on découvrit un moyen efficace de se débarrasser de ce nouvel ennemi 
aussi acharné contre le pain du pauvre que l’est le phylloxera contre la 
boisson du riche, et qui pourrait bien débarquer chez nous plus tôt qu’on 
ne le croïi. OCGTAVE SACHOT. 


Le gérant : JULES GRISARD. 


PARIS, = IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2. 


I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 


DÉVIDAGE 
DES COCONS DE L’'ATTACUS AUROTA, Cramer 


A LA BASSINE ORDINAIÏRE 


AU MOYEN DES CHRYSALIDES ARTIFICIELLES EN CAOUTCHOUC 


Par M. Christiam LE DOUX. 


L'année dernière la Société d’acclimatation me fit l'honneur 
de me comprendre au nombre de ses lauréats, ‘pour mon 
système de dévidage des cocons percés par te p2pillon à sa 
sortie de sa cellule, ou laissés ouverts par l'insecte pendant 
son travail. 

Ceute distinction était d'autant plus flatteuse pour l’inventeur 
que son idée se rattachait sealement à votre but principal 
comme auxiliaire des éducations d’Aftacus yama-mai et Per- 
nyt, dont la Société poursuit avec lant de soins et de persévé- 
rance l’acclimatation en France. Ma reconnaissance devait donc 
être encore plus grande que pour une récompense ordinaire, 
et m’imposait le devoir de seconder les efforts de la Société par 
tous les moyens dont je pourrais disposer, prêchant d’exem- 
ple dans le département de la Lozère. Mais, et c’est là où je 
voulais en venir, J'ai été assez heureux ces jours derniers 
pour pouvoir en témoigner d’une manière plus eflicace, et 
rentrer dans l’idée qui avait été accueillie d'une manière si 
bienveillante. J'ai satisfait aussi au désir qui m'a été manifesté 
de voir de la soie de l’Affacus aurota dévidée au moyen des 
chrysalides arlificielles. En effet, l'envoi que M. de Capa- 
nema a fait à la Sociélé pouvait me mettre à même de con- 
stater une fois de plus les avantages que présentent les chry: 
salides en caoulchoue, et je me suis empressé de profiter de 
l'offre que la Société à bien voulu me faire d’une partie de 
ces cocons : mais leur volume dépassant de beaucoup celui 

3C SÉRIE, T. L. — Juin 1874. 23 


5% 


35/4 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


des plus gros échantillons du Sericaria mort, de V'Aftacus 
yama-mañ et même de l’Affacus Pernyi, j ai dû faire fabri - 
quer un modèle plus volumineux que ceux employés précé- 
demment. 

Avec un outillage insuffisant, n'ayant à Paris ni bassine 
complète, ni tour de filature à ma disposition, j'ai pu cepen- 
dant obtenir une échevette de soie qui m'a paru satisfaire 
pleinement M. Geoffroy Saint-Hilaire, notre secrétaire géné- 
ral, et M. Maurice Girard, auxquels je l'ai présentée. C’est 
même à l’instigation de ces messieurs que j'ai pris la liberté 
de vous distraire de vos travaux pour vous soumetire ces quel- 
ques lignes, regreltant que mes éducations de Ferrussac, en 
exigeant ma présence dans la Lozère, ne m’aient pas permis 
de vous les lire moi-même, et de répondre verbalement aux 
questions qui auraient pu m'être adressées. 

Comme tous les cocons dans lesquels la chrysalide doit res- 
ter un temps considérable, celui de l'Aéfacus aurota est 
pourvu d’un grès assez dur pour résister aux intempéries des 
saisons, et par conséquent ne pouvant, comme celui du 
S. mort et de l’Atéacus yama-mai, se laisser ramollir à l’eau 
chaude pure. M. Forgemol, dans son mémoire, fait remarquer 
avec juste raison que c’est grâce à son décreusage qu’il a pu 
dévider l’Aféacus aurota : mais s’il est permis à tout le monde 
de passer sur la grand’ route, il ne peut en être ainsi pour les 
terrains clos, et le brevet d'invention étant précisément cette 
propriété fermée, il me fallait chercher un autre décreusage : 
c'est ce que j'ai fait. Au reste, messieurs, tous les filateurs 
savent que pour tirer en fin la soie des douppions ou cocons 
tissés par deux vers associés dans un même travail, chaque 
industriel a son système de bain alcalin; car il faut bien le 
dire, c'est par l’emploi des lessives que l’on arrive générale- 
ment au résultat désiré. Toute la question consiste à donner 
à cette lessive une force assez grande pour ramollir le grès, et 
à un degré tel que la soie ne puisse en être altérée. Les Chi- 
nois, nos maîtres dans l’industrie de la soie, ont eu aussi un 
grand nombre de préparations pour faciliter le tirage de la 
soie qu'il est inutile de signaler ici. 


DÉVIDAGE DES COCONS DE L'ATTACUS AUROTA. 355 


Confirmant de tous points ce que vous a dit notre collègue 
M. Forgemol, dans la notice insérée au Bulletin de mars de 
cetie année, sur la quantité et la qualité de la soie des cocons 
d’Attacus aurota, sur la facilité du dévidage, il me reste à 
ajouter qu’à l’aide de nos chrysalides artificielles en caout- 
chouc, sans aucun changement dans les appareils de tirage 
employés dans nos usines, on peut parfaitement dévider la 
soie de l’aurota, et que par conséquent non-seulement il n’y 
a aucun inconvénient, mais au contraire tout avantage à 
préconiser l’importation de ces cocons si riches en soie. 

En terminant, j'exprimerai le regret de n'avoir pu laisser 
la petite échevetle entre les mains de notre collègue M. Mau- 
rice Girard, qui a bien voulu se charger de vous lire cette 
courte explication; mais je tenais à la faire figurer dans le 
cadre que j'ai été admis à présenter à l'exposition du concours 
régional de la Lozère à Mende, où avec mes cocons d'yama- 
mai et de Pernyt, garnis de chrysalides en caoutchouc, elle 
sera un pelit élément de propagande d’acclimatation (4). 


(1) Cet échaniillon de soie d’Attacus aurota reviendra ansuite à ja Société 
et restera exposé en permanence à la magnanerie du Jardin d’acclima- 
lation. M. G- 


DE 
LA CULTURE DES SAFRANS ÉTRANGERS 


INTRODUITS EN FRANCE 


PAR LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION - 


Par M, P. CHAPPELENER 


À la’séance du 31 janvier 1862, j'ai appelé l'attention de: 


la Société sur le Safran, sa culture et ses maladies, et sur les 


avantages que présenterait l'introduction en France, soit des 


variétés de Safran déjà cultivées dans d’autres pays, soit 
d'autres espèces de Crocus non encore cullivées. (Bulletin de 
mai 1862, p. 418.) 

La Sociélé, accueillant favorablement mes vœux, a bien 
voulu les transmettre à ses correspondants, et deux d’entre 
eux ont répondu à cet appel. 

En 1665, M. Dufour a adressé du Safran Ana et en 
1868, M. Sn) en a envoyé de la Chine. 

Dans le Bulletin de novembre 1869, j'ai rendu compte des 
premières observations faites sur ces plantes. J'ai peu de 
chose à ajouter en ce qui concerne le Safran d’Anatolie. La 
légère différence qui paraissait exister tout d’abord entre ce 
Safran et celui du Gâtinais a complétement disparu après 
plusieurs années de cullure sous le même climat et dans les 
mêmes conditions. 

J'ai fait du reste la même remarque sur les Safrans qui 
m'ont élé envoyés à diverses reprises d'Avignon, d'Espagne, 
d'Italie et d'Autriche. 

On pouvait croire qu'il en serait encore de même du Safran 
de la Chine, et que la supériorité qu’il avait montrée dés le 
début, tenant uniquement à sa récente introduction, ne serait 
qu'éphémère et s’effacerait après quelques années de culture. 

Il ne paraît pas qu’il en soit ainsi. 

Je ne puis, à mon grand regret, vous parler de mes expé- 
riences personnelles, mes diverses collections de Crocus 


CULTURE DES SAFRANS ÉTRANGERS. 357 


ayant été en grande parlie détruites lors des événements de 
1870. 

Mais je viens vous communiquer le résultat d’une petite 
enquête faite à ce sujet dans une partie du Gâtinais. 

Les Safrans envoyés de Chine par M. Simon ont été par- 
tagés entre un certain nombre de culüvateurs et amateurs, 
qui, pour la plupart, il faut bien l'avouer, n’en n’ont pas tenu 
grand comple. 

Ces Safrans sont aujourd’hui en grande partie perdus ou 
confondus avec le nôtre dans les safranières. 

Quelques lots ont été détruits en 1870, notamment lors de 
la bataille de Beaune. 

Tous les cultivateurs n’ont pas été aussi négligents; quel- 
ques-uns ont conservé et même augmenté les lots qui leur 
avaient été confiés; leur opinion est généralement favorable 
au Safran de la Chine; ils le regardent comme supérieur à 
celui du Gâtinais. 

Parmi ces safraniers, il en est un qui paraît mériter une 
mention toute spéciale : c’est le sieur Édouard Marchenay, de 
Gaubertin. 

Il a cultivé et multiplié avec le plus grand soin les trente oi- 
gnons de la Chine qui lui avaient été remis en 1868, et au 
mois de mai prochain, époque de l’arrachage, il en récoltera 
environ 8500, 

Comme point de comparaison, il cultive dans le même 
champ des Safrans de Chine, d'Italie, d'Autriche et du Gâti- 
nais. 

Voici le résumé de ses observations : 

Végétation du Safran de la Chine ordinairement très-vigou= 
reuse, splendide cette année ; fleurs plus nombreuses que sur 
les autres Safrans; stigmate plus gros, plus long; produit su- 
périeur en quantité et qualité; en un mot le Safran de la 
Chine aurait une supériorité marquée sur tous les autres Sa- 
frans connus. 

Ce résultat favorable, s’il se confirmait, apporterait une 
amélioration très-importante à la culture du Safran, et ce 
serait une nouvelle conquête à inscrire aux états de service de 


358 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


notre Société, car c’est bien à elle qu'est due l'introduction 
du Safran de la Chine en France. 

Reste la question du Rhizoctone. 

Le Safran chinois résistera-t-il mieux que le nôtre aux at- : 
iaques de ce champignon, nommé vulgairement /a Mort? Les 
essais ont été faits Jusqu'à présent sur une trop petite échelle 
pour émettre aucune opinion à cel égard. 

J'ajouterai quelques mots qui ne concernent pas le Safran 
chinois, mais qui sont cependant le complément naturel de 
cette note. 

Sur ma demande, appuyée par notre éminent collègue M. le 
docteur Cosson, le conseil général du Loiret a fait venir de 
Syra à plusieurs reprises une grande quantité de Crocus græ- 
us. 

La distribution en a été faite à divers cultivateurs et ama- 
teurs du Gâtinais. 

Le Crocus græcus (je parle surtout de la variété que j'ai 
fait venir de Grèce en 1866) ne paraît avoir par lui-même au- 
cune valeur au point de vue de la culture pratique, son stig- 
mate étant inférieur en volume et en qualité à celui de notre 
Safran ; mais son pollen féconde facilement le stigmate du 
Safran et permet d’en obtenir des graines fertiles et par suite 
d'espérer la création de variétés améliorées. 

Pour ma part, je possède déjà plusieurs milliers de semis 
hybrides. 

L’hybridation, le semis et la création de variétés meilleures 
viennent donc se joindre à l’introduction par notre Société du 
Safran de la Chine pour marcher efficacement vers le but 
auquel tendent mes essais et mes études depuis plus de trente 
ans : l'amélioration du Safran du Gâtinais. 


# 


* 


SUR 
LES PRODUCTIONS AGRICOLES ET FORESTIÈRES 


DES POSSESSIONS HOLLANDAISES DES INDES ORIENTALES 


Par M. Éd. PRILLIEUX, 


Les possessions hollandaises des Indes orientales compren- 
nent un vaste groupe d'îles, situées entre le 5° degré nord et 
le 11° degré sud de latitude, et entre le 95° et le 140° degré 
est du méridien de Paris. 

Les plus considérables sont Java, Sumatra, Bornéo, Célèbes 
et les Moluques; parmi les iles secondaires, on peut citer 
Madoera, l'archipel de Riouw, Bangka et Biliton, Bali, Lom- 
bock, Timor et Soembawa. La superficie totale de ces îles est, 
en y comprenant la partie occidentale de la Nouvelle-Guinée, 
de 15274 myriamètres carrés, le triple de l'étendue de la 
France. 

Situées sous les tropiques, ces îles présentent, grâce à l'élé- 
vation de nombreuses montagnes et au voisinage de la mer, 
des climats très-variés, torrides dans les plaines basses, tem- 
pérés sur les hauteurs. 

Sur la plage de Batavia, la température moyenne est de 
28° centigr.; à Buitenzorg, situé à 300 mêtres au-dessus du 
niveau de la mer, la température moyenne n’est déjà plus que 
de 22° centigr.; dans les montagnes, le thermomètre descend 
au-dessous de zéro. 

Les îles des Indes néerlandaises sont d’une fertilité remar- 
quable, et grâce à la variété du climat les cultures les plus 
différentes y prospèrent, les produits les plus divers y sont 
récoltés en abondance. 

De toutes les cultures, la première est celle du riz qui 
fournit la principale nourriture des habitants : elle occupe une 
étendue de 4 million 500000 hectares à Java seulement, et 


Presse vitae NÉE UT CTI Te TP SN Te 


360 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


produit annuellement une récolte de 2 milliards 435 millions 
de kilogrammes. 

La culture du café à aussi une importance considérable. 
À Java, on en récolte 6 millions de kilogrammes par an, et 
l’on cultive encore le café dans d'autres îles, dans l’ouest de 
Sumatra, par exemple, où la production en est évaluée à 
915 000 kilogrammes. 

Lä culture de la canne à sucre occupe environ 28 000 hec- 
tares, et la production annuelle du sucre est évaluée pour 
Java à 121 millions de kilogrammes. 

La récolte annuelle du tabac monte à 9 millions de kilogr.; 
celle de lindigo, à 300 000 kïlogr. La culture du thé, bien 
que d'introduction récente, prend de l'extension, le produit 
annuelle en est déjà de 800 000 kilogr. 

Après de nombreuses tentatives la production du quinquina 
paraît aussi désormais assurée à Java. 

Outre les cultures si nombreuses et si variées qui occupent, 

Java surtout, un espace considérable, l'archipel Indien 
possède des forêts immenses et d’une valeur incalculable, où 
une foule d’essences précieuses, soit pour la marine, soit pour 
les constructions, soit pour l’ébénisterie, croissent en telle 
abondance que, pour n’en donner qu’un exemple, les forêts 
de Teck (Tectona grandis) couvrent, à Java seulement, une 
surface de 6000 kilomètres carrés. 

Mais ce n’est pas tout, le bois n’est pas la seule richesse 
des forêts de l'Inde; elles produisent encore un grand nom- 
bre de substances précieuses telles que le camphre, le caout- 
chouc, la gutta-percha, et une quantilé considérable de 
baumes, d’essences et de résines, dont l'exposition des Indes 
nécrlandaises à Paris, en 1867, a offert de fort intéressants 
échantillons. 

Les collections de bois, exposées à Paris en 1867, offraient 
un intérêt très-grand ; elles pouvaient donner une idée de la 
nature et de la valeur des bois si nombreux, si variés, si pré- 
cieux de l'archipel des Indes. J’en ai pu faire une étude com- 
plète, grâce aux catalogues faits avec grand soin et aux docu- 
ments divers qui m'ont été communiqués. 


-e 


|RU 
de. 


Fi 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES' POSSESSIONS HOLLANDAISES. 261 


J'ai classé dans l’ordre des familles naturelles tous ceux de 
ces bois qui ont pu être déterminés, et leur nombre ne s’élève 
pas à moins de 2/5, et à leur nom botanique jai joint, non- 
seulement les noms indigènes qui m'ont été fournis par les 
catalogues, mais de nombreux renseignements qui m'ont 
paru offrir un intérêt particulier sur la provenance de ces 
bois, sur leur valeur industrielle et les divers usages aux- 
quels ils sont plus particulièrement propres. 


Liste des espèces de bois provenant de l'archipel des Indes orientales 
qui ont été exposées à Paris, en 1867, à l'Exposition Re nenes 
par M. W. L. DE STURLER. 


PALMIERS. 


1. CaLaAmus Sp. Rotang noir. 


Croît dans les contrées occidentales de Borneo. — Canne d’une très- 


grande dureté et cependant flexible, propre à faire des manches de 
parasol, etc. 


ABIÉTINÉES. 


2. DammarA ALBA Rumph. Dammar Toeni où Dammar 
blanc, à Amboiïine. — Dammar Atapoetih, aux Lampongs. 


Get arbre n’est guère employé comme bois de charpente; il est estimé 
seulement pour la résine blanche que contient sa tige. 


PODOCARPÉES. 


3. Popocarpus Rumeut BI. Asoer. 


Gros arbre commun dans les Moluques. — Bois jaunâtre compacte 
employé pour les consiructions. 


A. Ponocarpus GuprEssiNA R. Br. Dyamoedpoe. 


Arbre des hautes régions des régences de Préangan. — Bois léger à 
grain fin, très-recherché pour la sculpture. 
5. Ponocarpus BRACTEATA BI. K2-merak où Ki-poetri. 
Arbre colossal des hautes régions montagneuses des contrées occiden- 
tales de Java. — Bois serré, durable, employé pour les constructions. 
6. Popocarpus Sp. Maloeh. 


Arbre de 50 à 60 pieds de haut, croissant à Menado. — Bois employé 
pour les constructions. 


362 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


CELTIDÉES. 


7. CELTIS RETICULATA Torr. Djoengkiel. 


Arbre de moyenne taille de la partie occidentale de Java, bois solide 
assez serré, se travaillant très-bien. 


8. SPONIA TIMORENSIS Den. Ropot ou Rofoe. 


Arbre de taille médiocre, croissant aux environs d’Amboine. — Bois 
jaunâtre à grain fin, se travaillant facilement, 


9. GIRONNIERA NERVOSA Planch. Oeloe Toepay. 
Arbre de taille moyenne, des Lampongs, — Bois d’un brun clair, 
dur, compacte, se travaillant assez bien. — Employé pour les construc- 
° tions. 


ARTOCARPÉES. 


40. STREBLUS AsPERA Lour. Seroet. 


Arbre des contrées centrales de Java ; de taille médiocre; bois grisâtre 
compacte irès-dur, mais noueux et difficile à travailler. — Employé 
comme bois de charpente, il est très-durable ; mis dans l’eau courante, il 
durcit encore davantage et sert à la fabrication de bracelets, d’orne- 
ments, elc. 


A1. ARTOCARPUS ALTISSIMA T. et B. Æ/oetoom Regis ou K. 
Arang. 

Arbre gigantesque des régions méridionales de Sumatra (Lamponys et 
Palembang). Bois de couleur brune, compacte, très-liant, aisé à travail- 
ler. Sous le régime des sultans, ces arbres ne pouvaient être coupés sans 
une autorisation spéciale ; ils servaient à la fabrication de barques de 70 à 
80 pieds de longueur sur 7, 8 et même 9 pieds de largeur. — Ce bois 
résiste admirablement à l’action de l’eau; il serait très-précieux pour les 
constructions navales. 


49, ARTOCARPUS Sp. Xloetoom-Toeda. 
Arbre moins gros que le précédent. — Bois moins serré, moins facile à 
travailler ; propre néanmoins aux mêmes usages. 


13. ARTOCARPUS INTEGRIFOLIA Linn. Nangka. 


Arbre fruitier d’environ 40 pieds de haut, très-répandu dans toutes les 
régions basses. — Fruit irès-gros, assez estimé. — Bois d’une assez jolie 
couleur jaune, très-employé pour la fabrication des meubles. 


4h. ARTOCARPUS RIGIDA BI. 4. Mollis Mig. Tampang. 


Arbre fruitier d’assez grande taille, — Fruit délicat. — Bois d’un jaune 
brun, compacte, empioyé pour les constructions, 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS :HOLLANDAISES. 363 


15. ARTOCARPUS Sp. Betila. 
Arbre fruitier dont le fruit est d’assez bon goût, mais le bois sans 
emploi. 
16. ARTOCARPUS Sp. Moümbr. 


Arbre de 60 pieds de haut. — Bois brun lustré, fort estimé des indi- 
gènes; ressemble beaucoup à celui du Cedrela febrifuga. BI. 


17. ArTocaRPus Sp. Soewhen. 


Petit arbre d’Amboine. — Bois brun, compacte, résistant très-bien à 
l’action de l’eau de mer. Employé par les pêcheurs à divers usages. 


48. Ficus Sp. Malamahoe. 


Arbre de 30 à A0 pieds de haut, croissant à Gorontalo, — Bois bru- 
nâtre dans le cœur, mais ayant beaucoup d’aubier. — On l’emploie 
comme bois de charpente. 


19. Frcus Sp. Waringngien-Aloes. 


Arbre de taille moyenne, croissant à Haroeko et en divers points des 
Moluques. — Bois jaunâtre veiné de noir, spongicux. — Sans emploi. 


URTICÉES. 


20. BoEuMERIA Sp. Nangsi. 


Petit arbre de 20 pieds de haut, des régions basses des contrées occi- 
dentales de Java. — Bois brun clair assez serré et aisé à travailler ; em- 
ployé pour le charronnage et les constructions. 


ANTIDESMÉES. 


91. ANTIDESMA PUBESCENS Roxb. Seu-ur. 


Petit arbre des basses régions montagneuses de la partie occidentale de 
Java. — Bois solide à grain fin. Employé pour les constructions. 


22. ANTIDESMA LITTORALE BI. Toemi-Toemu. 

Arbre fruitier de 20 pieds de haut, commun dans les îlots des environs 
d'Amboine. — Bois brun, dur, très-compacte, propre aux constructions, 
mais peu employé: le fruit, estimé par les indigènes, fait respecter l'arbre. 

23. ANTIDESMA Sp. Doewak. 

Arbre de taille moyenne des contrées centrales de Java. — Bois 
brun, compacte, à grain fin, facile à travailler; employé comme bois de 
charpente, 


BALSAMIFLUÉES. 


2h. LIQUIDAMBAR ALTINGIANA, BI. Rassamala. 
Arbre de 150 pieds de haut, croissant dans la régence des Préanger, à 


364 ‘© SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 
environ 3000 pieds au-dessus du niveau de la mer. — Bois d’un brun 
rougeâtre, pesant et serré, employé pour les constructions à la place du 
bois de Teck (Tectona grandis Linn), moins durable cependant que ce 
dernier. 


LAURINÉES. 


25. CINNAMOMUM SINTOK B'. Séntok. 
Aïbre de 20 pieds de haut, croissant dans plusieurs des îles de la 
Sonde. — Le bois ne sert qu'à faire des caisses d'emballage, Pécorce 
fournit une espèce de cannelle, qui n’est pas très-aromatique et dont 

l'odeur est analogue à celle du camphre. 


26. CINNAMOMUM PARTHENOXYLUM Meisn. Ladah. 
Arbre de taille médiocre. — Bois gris, solide, à grain fin, facile à tra- 
vailler. — Bois de charpente, propre aux constructions navales. 
27. CARYODAPHNE DENSIFLORA, Bl. Hoeroe Paoel où Kitedjeh. 


Arbre d’environ 50 picds de haut, croissant dans les hautes régions 
montagneuses de la partie occidentale de Java. — Bois de charpente 
excellent; très-propre aussi à la fabrication des meubles. 


28. TETRANTHERA FORSTENI BI. Aalaür. 

Arbre d'environ 60 pieds de haut, croissant dans plusieurs îles des 
Moluques et principalement à Ceram. — Bois mou, employé pour faire 
des planches. 

On trouve à Amboiïne, sous le nom de Halaür meira ou Ialaür rouge, 
un arbre qui est peut-être une variélé du précédent et dont le bois, assez 
dur mais peu durable, est employé pour les constructions par les indi- 
gènes. 

29. TETRANTHERA ELLIPTICA N. ab E. Hoeroe Medang. 
Arbre de grosseur moyenne, des contrées montagneuses de la partie 
occidentale de Java. — Bon bois de charpente facile à travailler. 
30. TETRANTHERA Sp. WMedang Begelang. 
Arbre de Palembang, répandu partout à Sumatra, à Bangka ei dans 
les contrées occidentales de Java, sous le nom de Hoeroe. — Bois d’un 
jaune verdâtre, d’une texture fine et compacte, se travaillant bien. 
31. TETRANTHERA Sp. Medang Bogelem. 

Autre arbre de Palembang. — Bois analogue au précédent, mais plus 
dense. 

32. TETRANTHERA Sp. Medang Empelem. 

Autre variété provenant aussi de Palembang et fort voisine de la précé- 
dente. — Bois moins résistant. 


33. TETRANTHERA Sp. Medang Taroom. 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 3695 


Arbre de Palembang, voisin des précédents. 
Le bois de Medang est très-employé pour les constructions. 
3h. TETRANTHERA Sp. Sihe ou Sicki. 
Arbre de 90 à 100 pieds de haut. — Bois brunâtre, compacte, employé 
pour les constructions. 
39. LauRuS Sp. Hrhir. 
Arbre d'environ 40 pieds de haut, d’Amboine. — Bois d’un brun clair, 
compacte, employé pour les constructions. 
36. EUSIDEROXYLON Zwacern T. et B. Oenglen ou Belian, 
Bois de fer. 


Arbre élancé de 60 à 70 pieds de haut, croissant en massifs dans les 
terres basses mais sèches des îles de Sumatra et de Bornéo et aussi à 
Bangka. — Bois d’une extrême dureté, mais aisé à travailler avec de 
bons outils. Employé pour les constructions; sert spécialement à faire 
des poteaux pour les maisons et des revêtements pour les quais et les 
bassins. Abondant surtout à Bornéo. 


37. EUSIDEROXYLON Sp. Lawang. 


Petit arbre des hautes régions des contrées méridionales de Sumatra. 
— Bois brun clair, dur et compacte, employé pour les constructions. 
L’écorce sert à purifier l’eau trouble poar la rendre potable. 


SANTALACÉES. 


38. SANTALUM ALBUM Linn. Kayoe Tendana ou Tjenduna, 
Bois de Sandal. 


Arbre de taille médiocre, croissant dans l’île de Sandal, à Timor, à 
Rotti, à Sawoe, à Smauw, à Bali et même dans la partie occidentale de 
Java dans les régions basses. — Le bois est recherché comme objet de 
commerce pour la Chine ; la sciure en est employée pour la confection des 
baguetles d’offrande que l’on fait brû'er. Le bois de Sandal est employé 
en outre pour la Scuipture et les ouvrages de tourneur. 


DAPHNOIDÉES. 


39. HernanptA sonorA Linn. Molomomoengonh. 


Arbre mince d’environ 30 pieds de haut, Ce AGO AS Em- 
ployé pour les constructions. 


AQUILARIÉES. 


h0. AquiLarIA MALACCENSIS Lam. Haling. 
Arbre de taille moyenne des Lampongs. — Bois jaunâire, propre à la 
charpente et au charronnage, se lravaillant bien. 


366 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


h1. AQuILARIA Sp. Haling seray. 
Bois jaune pâle, sert aux mêmes usages que le précédent. 
H2. AQUILARIA AGALLOCHA, Roxb. Tabah ou Mentabah. 

Arbre de taille moyenne, croissant à Bangka. — Bois de couleur paille 
veiné de noir, assez compacte, pouvant servir pour les constructions. La 
tige renferme une résine odorante analogue à celle du benjoin, et qui est 

- recherchée. 
A3. GoNYsTYLus BANKANA Miq. Boolo où Menboolo. 


Arbre d'assez grande taille, croissant à Bangka. — Bois d’un brun 
pâle, assez compacte; très-propre à la fabricalion des meubles. Il est 
estimé pour la résine que la tige contient en abondance, mais qui est 
inférieure à celle de Tabah (Aquilaria Agallocha). 


PROTÉACÉES. 


hh. Hericra Sp. Keriboetan. 


Arbre de taille moyenne des Lampongs. — Bois d’un jaune rougeälre, 
assez compacte ; se travaille bien mais est peu résistant. 


COMPOSÉES. 


h5. VERNONIA JAVANICA D. C. Djirak. 

Arbre de 50 à 60 pieds äe haut, croissant dans les basses régions mon- 
tagneuses de Java. — Bois serré, à grain fin, durable ei se travaillant 
bien. 

hG. GNAPHALIUM JAVANICUM Reinw. Semboeng, Sendoero. 


Arbre de 20 à 25 pieds de haut, des montagnes élevées de Java, de 
Sumatra, de Célèbes. — Bois à grain fin, mais cependant peu durable. 


RUBIACÉES. 


h7. Morinpa cirriroLra Linn. Bingkoedon. 
Arbre d’Amboine. — Bois peu employé, l’écorce sert pour la teinture. 
A8. GUETTARDA, Sp. Atidoe, Woerenga ou Taloor. 
Arbre de 50 à 60 pieds, des contrées septentrionales de Célèbes. — 
Bois de couleur de paille, compacte, employé comme bois de charpente. 
49, ANTHOCEPHALUS inpicus Rich. Visa ou Nieset. 
Arbre de taille moyenne; croit dans plusieurs îles des Moluques et 
spécialement à Amboine. — Bois jaunâtre à taches rouges, assez difficile 
à travailler. Employé pour les constructions; sert à faire des poteaux; 
conviendrait pour les ouvrages de iourneur. 


50. GREENIA LATIFOLIA T. et B. Zaharoen. 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 367 


Arbuste croissant à Boero, à Amboine et en divers points des Molu- 
ques. — Bois rougeâtre, dur et compacte, recherché pour les constructions 
parce qu'il est très-durable. 


91. NAUCLEA LANCEOLATA BI. Angriet. 
Arbre de taille moyenne, commun à Java. — Bois brun, compacte, 
noueux, cassant, difficile à travailler. — Employé cependant comme bois 
de charpente. 


52. NAUCLEA MACROPHYLLA Roxb. K/ampean. 

Arbre de taille moyenne, fréquent à Java. — Bois d’un jaune pâle, 
léger, poreux, ressemblant assez au bois de tilleul. Sert pour les con- 
structions. 

53. NAUCLEA FAGIFOLIA T, et B. Lasse, Ulassie ou Olasste. 

Arbre gros, bien que peu élevé, croissant à Ceram et à Boero, dans les 
Moluques. — Bois jaunâtre, assez compacte, propre aux constructions et 
à la menuiserie. On distingue des variétés de ce bois; l’une, plus foncée, 
est désignée sous le nom de Lassi Kœning : l’autre, au contraire, porte 
le nom de Lassi poetih où Lassi blanc. 

54. NAucLEA purPuREA Roxb. Tyantjaratan. 


Arbre des hautes régions de la partie occidentale de Java. — Bois léger, 
peu serré, facile à travailler. 

59. NaucLeaA parRviFOLIA Roxb. Bangkal. 

Arbre assez gros des Lampongs. — Bois tendre, un peu spongieux, 
facile à travailler, employé quelquefois pour les constructions. 

56. NAucLEA ARALIOIDES Miq. Nangi. 

Très-gros arbre des Lampongs. — Bois d’un jaune orangé nuancé, dur, 
très-solide, se travaillant très bien. — Sert aux indigènes comme bois de 
charpente, mais conviendrait très-bien pour la menuiserie et l’ébénisterie. 

57. NAUCLEA oxvPayLLA Miq. Broemboeng ou Groengang. 

Arbre de 50 à 66 pieds de haut, croissant dans les hautes régions de 
Paiembang. — Bois d’un brun rougeûtre, très-compacte, résiste très-bien 
à l'humidité. On l’emploie pour faire des charpentes et surtout des po- 
teaux et des pilotis dans les terrains humides. 

58. NaucLeA Sp. Tanoea. Bois de fer. 

Arbre d’environ 50 pieds de haut, croissant à Gorontalo. — Bois brun 
nuancé, dur et compacte, aussi pesant que le bois d’ébène. Les indigènes 
lemploient pour faire des poteaux, mais il serait très-propre à l’ébé- 
nisterie. 

59. NaucLEA Sp. Mojoengo. 


Arbre d'environ 30 pieds de haut, croissant à Gorontalo. — Bois jaune 
pâle, serré, compacte, particulièrement propre à la sculpture. 


368 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


60. NAUCLEA Sp. Hoemelhen. 


Arbre de 20 à 25 pieds de haut; d’Amboine. — Bois jaunâtre, dur et 
compacte ; employé pour faire des planches et des poutres. 


LOGANIACÉES. 


61. SrrycHNoOs coLUBRINA Willd. Bèdara Laoet. 


Arbrisseau de Java, dont le bois, d’un jaune pâle, dur et compacte, 


n’est employé que comme médicament. On le râpe et l’on en fait une 
infusion. 


62. FAGRŒA FRAGRANS Roxb. Tembesoe Talang. 

Arbre d'environ 70 pieds, qui croît isolé dans les régions monlueuses 
de Sumatra, Riouw et Bornéo. Le bois ressemble assez d'aspect à celui du 
sapin rouge. Il sert surlout pour faire des cloisons et est excellent pour 
cet usage. Il ne joue pas. 

63. FacrœaA Sp. Tembesoe-Bawang. 

Analogue au précédent. 


6h. FAGRŒA PEREGRINA BI. Tembesoe Rena. 

Arbre d'environ 40 pieds de heut, qui croît isolé dans les contrées hu- 
rides de Sumatra, Bornéo et Riouw. Bois brun, dur el compacte. Il résiste 
parfaitement à l'humidité et sert particulièrement dans les constructions 
pour faire des poteaux. Pour cet usage, il est préféré même au bois de 
Teck et au bois de fer. Les termites ne l’attaquent point. Il est cultivé 
régulièrement en bien des endroits par les indigènes. 


APOCYNÉES. 


65. ALSTONIA SPATHULATA BI. Lameh. 


Arbre d'environ 50 pieds de haut, des basses régions montagneuses des 
régions des Préanger. Bois de couleur claire, à grain fin et serré, se tra- 
vaillant bien. 

66. ALSTONIA HOEDTI À. et B. Poeli batoe. 

Arbre de taille moyenne, croissant dans diverses îles des Moiusques. 
— Bois jaunâtre serré; employé pour les GORUNEUGLE, mais conviendrait 
très-bien pour la menuiserie et l’ébénisterie. 

67. ALSTONIA ScHOLARIS R. Br. Age ou Soemering. 


Arbre atteignant une cinquantaine de pieds, croissant dans les conlrées 
sèches et montagneuses de Menado, province septentrionale de Célèbes. 
— Bois mou, aisé à travailler. 


C8. ALSTONIA Sp. Poeb. 


Arbre de 90 pieds de haut, croissant à Amboine. — Bois très-léger, 
mou, peu eslimé. 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 369 


VERBÉNACÉES, 


69. Virex corAssus Reinw. Govasa Tando ou Govasa cornu. 


Arbre de 20 à 25 pieds de haut, croissant à Amboine et dans plusieurs 
autres îles des Moluques. — Bois très-analogue par toutes ses propriétés 
à celui du Tectona grandis.— Très-estimé pour les constructions navales. 


70. Virex PUBESCENS Vahl, Laban ou Leban. 
Gros arbre croissant à Java, Sumatra, Bornéo et dans les Moluques. 


— Bois dur, compacte, résistant, se travaillant bien. Les Javanais l'em- 


ploient de préférence à tout autre pour les roues en disque de leurs 
chars. 


71. ViTEX PUNCTATA Schauer. Govasa. 


Arbre de taille moyenne, de Menado et des Moluques. — Bois de cou- 


leur pâle, assez compacte, employé pour les consiructions et pour la 
marine. Il résiste longtemps. 


72. VITEX MOLUCCANA BI. ze. 


Gros arbre croissant dans quelques îles des Moluques et particulière- 
ment à Amboine. — Bois léger, mais jouissant de la propriété précieuse 
de ne pas être attaqué par les larets. — Les indigènes lemploient pour la 
consiruction de leurs canots. 


73. CALLICARPA WALLICHIANA Walp. T'injaur. 


Gros arbre des Lampongs. — Bois dur et compacte, se fendant aisé- 
ment, mais assez mal aisé à travailler. 


7h. PREMNA TomenTosA Willd. Beboelang. 


Gros arbre des Lampongs. — Bois jaune pâle, compacte, employé pour 
les constructions. 


75. PREMNA Sp. Boenbolangq. 


Arbre de taille moyenne, des régences de Préanger. — Bois jaunâtre, 
se travaillant bien. Employé pour les constructions, 


76. TecTona GrAnDis Linn. Dati, Teck. 


Arbre de 100 pieds de haut, croissant en massifs. Le Teck ou Djati croît 
spontanément dans les vastes forêts des hautes régions du centre et de 
l’est de Java. C’est le meilleur des bois connus pour les constructions na- 
vales. Il n’est pas attaqué par les termites, mais il n’est pas à l'abri des 
ravages des tarets, tandis qu’un autre bois de la même famille, celui du 
Vitexæ moluccana, bien que plus mou, n’est jamais percé par les tarets. 

On distingue diverses variétés de Djati (ou Teck) : 

1° Le Djati Kapoor ou Djati calcaire, qui croît dans les terrains cal- 
caires. 


3° SÉRIE, T. [. — Juin 1874 24 


370 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


20 Le Djati Soengoe, ou véritable Djati. — Bois plus foncé, très-com- 
pacte, très-durable. 

3° Le Djati Doeri ou Doereng, ou Djali à épines. 

4° Le Djati Kembang ou Djati fleuronné. Bois brun nuancé, un peu 
difficile à travailler, mais propre, non-seulement aux constructions, mais 
à la fabrication des meubles. 

5° Le Djati Gèmbol ou Djati huileux, dont le bois est gras au toucher, 
irès-compacte, mais plus difficile encore à travailler que le précédent, 
dont il a, du reste, à un plus haut degré, les qualités et les défauts. 


77. PERONEMA CANESGENS Jck. Soergkay. 


Arbre de taille moyenne des Lampongs. — Bois de couleur paille, assez 
compacte. Employé pour les constructions. 


CORDIACÉES. 


78. CoRDIA sUBCORDATA Lam. Prono-Sodo, Salam-OEli ou 
Bala. 


Arbre de taille moyenne, des hautes régions des contrées orientales de 
Java et des Moluques. — Bois d’un brun noirâtre nuancé de noir, à 
texture compacte, recoit très-bien le poli et est très-propre à la fabrica- 
tion des meubles. 

79. CorprA Myxa Linn. C. Bantamensis, BL Aypaka ou 
Gondal; Kendal à Java. 

Arbre de taille moyenne, croissant à Amboine et dans les conirées 
orientales de Java. — Bois rougeâtre, compacie, mais peu durable. 
Employé pour les constructions. 


BIGNONIACÉES. 


80, SparnopeA RHEEDI Var. Koeda-perempoean ou Tojet. 
Arbre de 25 pieds de haut, croissant à Boero. — Bois jaunâtre, peu 
compacte, aisé à travailler. Employé par les indigènes pour faire des 
sabots nommés « tjaripoes ». 
81. SPATHODEA Sp. Kapoeng Kapoeng. 


Arbre de 40 pieds de haut, bois jaunâtre, assez compacte, se travaillant 
bien ; employé comme bois de charpente. 


SAPOTACÉES. 


82. Mimusops KAUKI Bo]. Sawoe. 


Arbre de taille moyenne, abondant sur la côte méridionale de l’île de 
Bali et dans les contrées occidentales de Java. — Bois rouge nuancé, 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 374 


très-compacte, se travaillant bien ; propre aux ouvrages de tourneur, à la 

fabrication des meubles et au charronnage. Il est tout particulièrement 
recherché pour faire des roues dentées, parce qu’il résiste sans se casser 
aux chocs et au frottement, et s’use régulièrement. 


83. BassiA LoNGiFoLIA Lam. Aylo-Asing. 
Arbre de 20 pieds de haut, d’Amboine. — Bois assez mou, employé 
seulement pour le chauffage. 
8h. Hapcoceras Leern Hskl, Ceratophorus Loerii Hskl. Ba- 
lem-Tjabeh où Balem-Tandoek. 


Arbre de taille moyenne, croissant dans les basses régions orientales de 
Palembang et de Bangka. — Bois rougeâtre, dur et compacte, mais ra- 
boteux et malaisé à travailler. Employé pour les constructions. 


ÉBÉNACÉES. 


85. MABa EBENUS R. Br. Arang. Bois d’ébène. 
Arbre de taille moyenne, des Moluques. — Le bois d’ébène de Boero 
est le plus recherché à cause de sa couleur d’un noir de jais. Ce bois est 
extrêmement lourd et compacte. 


86. Diospyros Sp. (An Diospyros melanoxylon ?) Behlo itam 
ou Behlo noir. 

Arbre de grande taille, dont on a souvent confondu le bois avec celui 
du Maba-Ebenus. Il est noirâtre, nuancé de jaune foncé. Le cœur est dur, 
très-serré et se travaille très-bien. Il recoit bien le poli. Il sert pour 
faire des meubles et est aussi recherché pour les constructions navales. — 
Il est propre à tous les ouvrages d’ébénisterie. 

On désigne sous le nom de Kamit-Kajasit une variété de Behlo-Itam, 
dont le bois est plus pâle et moins compacte, mais que les indigènes em- 
ploient aux mêmes usages. | 


87. Diospyros MAcROPHYLLA BI, Xitjaloeng. 

Gros arbre de la partie occidentale de Java. — Bois grisâtre à reflets 

verts, dur et compacte, employé comme bois de charpente. . 
88. Diospyros Sp. Arang. 

Arbre de la partie occidentale de Java. — Bois de couleur noire, mou- 
cheté de blanc et bigarré par. des îlots de tissu demeuré à l’état d’aubier et 
par conséquent de structure lrès-inégale. Sans emploi. Il est attaqué par 
les termites. 


STYRACÉES. 


89. SryYRAX BENZOIN Dryand. Menjan ou Kemenian. 
Arbre de taille considérable, croissant dans les basses régions méridio- 


372 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION, 
nales de Sumatra et dont la tige fournit la résine de benjoin. — Le bois, 
d’un jaune grisâtre, est assez solide, mais peu employé. 

90. HopEa CELANICA Roxb. Bapa. 

Arbre colossal atteignant 100 pieds de haut; d’Amboine. — Bois jau- 
nâtre, dur et compacte, se travaillant bien; sert à faire des mâts, des 
poutres, des planches, etc. 

91, SymPLocos Sp. Njari. 


Arbre de taille moyenne. — Bois d’un brun clair, pesant, dur et com- 
M »P D 

pacte ; fréquemment employé pour les constructions, bien qu’il soit assez 

difficile à travailler. 


ARALIACÉES, 


02, Panax o8rTusuM Bl. Todondong ; Kedondong à Java. 
Arbre des régions montagneuses de Menado. — Bois jaunâtre à grain 
fin, se travaillant bien. — Bon bois de charpente. 
93. SCIODAPHYLLUM PALMATUM BI. X7-jankoerang où Ketjang- 
koerang. 
Arbrisseau des régences des Préanger (Java). — Bois brun grisâtre, 
très-compacte, employé pour les constructions. 
94. HEDERA AROMATICA D. C. Poenga-poengoe. 
Arbre de 90 pieds de haut, croissant à Gorontalo, — Bois veiné gri- 
sàtre, peu compacte ; employé comme bois de charpente. 
95. ParATROPEA Sp. Sanggoe. 
Arbre de taille moyenne. — Bois d’un jaune citron, léger et mou, sans 
emploi. 
MYRISTICÉES, 


96. Myrisrica sYLvEsTRIS Hout. Palala. 
Arbre de 60 pieds de haut, croissant à Amboïne. — Bois assez mou, 
employé pour les constructions. 
97. Myrisrica Sp. Palla. 


Arbre de taille moyenne. — Bois mou, employé seulement pour le 
chauffage. 


ANONACÉES. 


98. BocacEa Sp. Lemay. 
Arbre de grosseur moyenne. — Bois brun, compacte, mais noueux et 
de peu d’emploi. 
C9. PozyarrHia Sp. Pamelesian. 
Arbre de taille moyenne, des hautes régions de Menado. — Bois gri- 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 373 


sâtre, veiné de brun, compacte. On en fait des poutres, mais il est atta- 
qué par les termites. 
100. UvariA PURPUREA BI. Xadjang. 


Arbre de taille moyenne, des contrées occidentales de Java. — Bois 
d’un brun pâle, compacte, se travaillant bien; employé comme bois de 
charpente. 


MAGNOLIACÉES. 


101. TALAUMA viLLosA Miq. Tjempaka-oetan où Pananaän 
et Tahas. 


Arbre élancé atteignant 90 pieds de haut, qui croît à Gorontalo. — 
Bois de couleur jaune, peu serré. Employé dans les constructions et parti- 
culièrement pour faire des planches. 

102. AROMADENDRUM ELEGANS BI. X-loengloeng. 

Arbre de 50 à 60 pieds, des régences des Préanger. — Bois léger, em- 
ployé pour les constructions. 

103. MicnezrA DOLTSAPA Buch. M. velutina. BL. Manglet. 


Arbre de taille moyenne de la partie occidentale de Java et de Suma - 
tra. — Bois d’un brun pâle, compacte, assez dur. 


DILLÉNIACÉES. 


104. Discenra ExIMIA Miq. Ranggang kakoh. 


Arbre de taille moyenne, des Lampongs. — Bois brun pâle, dur, 
compacte, se travaillant bien. Très-bon bois de construction. 


105. DILLENIA AUREA Sm. Sempoe. 

Arbre de taille moyenne, des régions centrales de Java. — Bois brun 
dur, compacte ; très-résistant, mais noueux et difficile à travailler. Em- 
ployé dans les constructions, surtout pour faire des poteaux, à cause de sa 
grande solidité. 


106. DizceniA spEcIosA Thbg. Sempoer-ayer. 


Arbre de taille moyenne. — Bois brunâtre, dur, pesant et de 
se travaillant bien et résistant longtemps aux influences atmosphériques. 
— Très-bon bois de constructions, particulièrement recherché pour les 
poteaux, etc, Plongé quelque temps dans l’eau courante, il devient dur 
comme la pierre et sert à la fabrication de colliers, bracelets, etc, 


407. DiLLENIA Sp. Sempoer-rantoe. 


Arbre de taille moyenne, dont le bois ressemble beaucoup à celui du 
Dillenia speciosa et est employé aux mêmes usages. 


374 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


DATISCÉES, 


108. TETRAMELES NUDIFLORA R. Br. Taboe. 
Arbre assez gros, des Lampongs. — Bois d’un brun pâle, dur, com- 
pacte, résistant à l’air ; sert pour les constructions. Employé pour faire les 
poteaux des lignes télégraphiques. LE 


BIXACÉES. 


109. FLACOURTIA RAMONTCHI Herit. Bogo. 


Arbre de taille médiocre, du centre de Java. — Bois dur et très-com- 
pacte, mais malaisé à travailler. 


110. FLacourTiA Sp. Djoekoem. 


Gros arbre des Lampongs. — Bois à texture spongieuse; n’est pas 
estimé. - 


111. PanGiuM EDULE Reinw. Pangi. 


Arbre fruitier de A0 pieds de haut. — Bois mou, servant cependant 
pour faire des charpentes, des lattes, elc. 


HOMALINÉES, 


112. BLAGKWELLIA TOMENTOSA Vent. G/ingsem. 
Arbre de taille moyenne, de la partie centrale de Java. — Le bois à 
l’aubier jaune et le cœur brun lustré, pesant et compacte, se travaillant 
très-bien. — Propre à tous les ouvrages de tourneur. | 


MALVACÉES. 


413. Hipiscus srmizis BI. Waroe. 
Arbre assez commun à Java et dans les îles de l’Archipel.— Bois com- 
pacte, se travaillant bien. 
414. Himiscus TiLiAcEUS, Linn. Waroe laoet ou Daoen-baroe. 


Arbre de taille médiocre, répandu dans tout Archipel. — Bois solide, 
bon pour le charronnage. L’écorce fournit des fibres, que l’on emploie 
pour faire des cordages très-durables. 


115. TnespesrA Sp. Waroe lot. 


Arbre de taille moyenne, de Java, — Bois brunâtre nuancé, à grain 
serré, propre à la menuiserie. 


STERCULIACÉES. 


116. STERCULIA NOBILIS Smith. Hantap. 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 979 


Arbre de 50 pieds de haut, des basses régions de Ja partie occidentale 

de Java et de Sumatra. — Bois mou, ne servant que pour le chauffage. 

117. HéRiTiERA LITTORALIS Dryand. Doengngoen-kontol, 
Poekon et dans les Moluques A/oeng-laoet. 

Arbre de taille moyenne, croissant sur le littoral des îles de la Sonde et 
des Moluques.— Bois dur, très-compacte et très-durable. Employé pour 
les constructions, mais qui sert tout particulièrement à faire des pilons 
pour piler le riz. 

118. HERITIERA Sp. Atoeng-makan. 

Arbre de lailie médiocre, d’Amboine, — Bois difficile à travailler et 
peu estimé. 

119. Durro zEBETHINUS Linn. Doerhen. 


Arbre fruitier à fruits gros et savoureux, quoique d’une odeur désa- 
gréable, atteignant 70 pieds de haut. — Bois d’un brun rougeûtre, peu 
serré, employé par les indigènes pour faire des charpentes. 


BUTTNÉRIACÉES. 


120, COMMERSONIA ECHINATA Frst. Maroon-Meira. 
Arbre de taille médiocre, croissant à Amboine, — Bois grisâlre, em- 
ployé seulement pour le chauffage. 
121. KzeinnovrA HospiTA Linn. Pelleth ou Ketimoho. 


Arbre de taille médiocre, répandu surtout dans la partie occidentale de 
Java et dans la Nouvelle-Guinée. — Bois blanc à taches brunes très- 
dures, assez rare. On en fait des cannes, des manches de lances, des poi- 
gnées de kriss (poignard). | 


122. PTEROSPERMUM DIVERSIFOLIUM BI. Baoor-lang ; à Java 


Tjerlang. 

Axbre de taille moyenne, à croissance rapide, abondant dans les con- 
trées méridionales de Sumatra et de Java. — Assez bon bois de char- 
pente. 


123, SCHOUTENIA OVATA Krths. Wal-koekoen. 


Arbre de taille moyenne, de Java. — Bois compacte, liant, tenace, 
employé pour faire des charpentes et particulièrement estimé pour le 
charronnage. 


TILIACÉES. 


124. ELÆOCARPUS ANGUSTIFOLIUS BI. Genitre. 


Arbre de A0 pieds de haut, croissant partout dans les îles de la Sonde, 
— Bois léger, peu estimé. 


125. Ezæocarpus Sp. Makila. 


376 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Arbre de 30 pieds de haut, d’Amboine, — Bois brun clair, assez mou, 
employé comme bois de charpente. 


126. ELæocarpus Sp. Makoeranga. 


Arbre de 60 pieds de haut, croissant à Menado. — Bois de couleur 
pâle, mou. Très-employé par les indigènes pour les constructions. 


DIPTÉROCARPÉES. 


127. DIPTEROCARPUS TRINERvIS PI. Palahlar. 


Arbre résineux gigantesque des régions montagneuses de Java. — Bois 
brun clair, pâle, compacte, sert pour les constructions. La tige contient 
une sorte de baume. 


128. Diprerocarpus Sp. Bang-bang. 


Arbre de taille moyenne des Lampongs. — Bois jaunâtre, dur et com- 
pacte, employé pour les constructions. 

129. HopEa MENGARAWAN Miq. Mençgrawan ou Norawan- 
tjinkang. 

Grand arbre abondant dans les basses régions de Palembang et des 
Lampongs et à Bangka. La tige contient une résine blanche fort estimée, 
lécorce renferme du tannin. — Bois brun clair, compacte, très-durable ; 
se travaille bien ; est employé comme bois de charpente et surtout pour la 
construction des barques. 

On désigne sous les noms de Mengrawan-Boengnga, Mengrawan-Djan- 
goet, Mengrawan-felor et Mangrawan-Batoe, des bois ressemblant beau- 
coup à ceux du Hopea-Mengarawan ct qui sont employés aux mêmes 
usages, bien qu’un peu moins durables. 


130. Hopea MArANTI Miq. Meranti-Sepanq. 
Grand arbre, croissant à Palembang, dans les Lampongs et à Bornéo, 
dans les contrées marécageuses. Sa tige contient une résine de peu de 


valeur. Le bois en est poreux et léger ; il sert d'ordinaire au floitage des 
bois lourds sur les fleuves. 


131. Hopra Sp. Mlekaras. 


Arbre de taille moyenne. — Pois léger, ne sert que pour le flottage. 
On doit encore rapporter probablement à la famille des Diptérocarpées 
les bois suivants : 


Damahoe. 

Arbre à bois, grisâtre et solide, estimé à cause de la résine contenue 
dans le tronc. 
Merkoenjiet. 


Arbre d'environ A0 pieds de haut, croissant à Palembang. — Bois de 
couleur pâle, compacte, veiné ; employé pour les constructions. La tige de 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 377 


cet arbre fournit une résine connue sous le nom de Damarbatoe (résine 
pierreuse). 


TERNSTROEMIACÉES, 


132. Eurya nitipA Krths. Salah. 
Arbre de taille médiocre, des Lampongs. — Bois de charpente, com- 
pacte, se travaillant bien. 
133. ADINANDRA GLABRA Miq. Ranoe. 


Arbre de taille médiocre, -— Bois d’an brun roux, compacte, employé 
dans les constructions. 


434. Gorponra Wazcican D. C. Poespa. 


Arbre de taille moyenne des régences des Préanger (Java). — Bois dur, 
pesant, compacte, employé comme bois de charpente. 


135. GorponIA Sp. Ximandjel. 


Arbre assez gros, des régions occidentales de Java. — Bois d’un brun 
roux, employé pour les constructions. 


136. GorponrA Sp. Aylapia. 

Arbre de taille médiocre, croissant à Amboïne. — Bois rougeûtre, ser- 
vant pour les constructions ; peu durable. 

157. GorponrA Sp. Nani ayer ou Nani moiré. 

Grand arbre de 60 pieds de haut, croissant à Amboine. — Bois très- 
beau, d’un brun nuancé et comme moiré. — Les indigènes l’emploient 
comme bois de charpente, mais en Europe il pourrait avoir pour la fabri- 
cation des meubles une valeur égale à celle de l’acajou. 

138. GARDoNtA Sp. Kloetoom bassah. 


Arbre des Lampongs. — Bois d’un brun rougeâtre violacé, très-com- 
pacte, employé pour charpente ct pour construction de barques, se tra- 
vaille bien et résiste longtemps. 


CLUSIACÉES. 


139. GARGINIA JAVANICA BI. Mangies oetan. 

Variété sauvage de l'arbre fruitier croissant à Amboiïne et atteignant 
environ 25 pieds de haut. — Bois dur et compacte, sert à faire des char- 
pentes. 

140. GARGINIA PICRORHIZA Miq. Oeba Sagehroe-Toeni ou bois 
de Sagouer. 

Arbre d’Amboine, de 50 pieds de haut. — Le cœur du bois est noi- 
râtre, veiné de blanc et d’une extrême dureté; le reste est jaunâtre, 
nuancé. On abat rarement cet arbre, dont les racines, qui contiennent 


378 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


une résine d’un goût queique peu amer servent à fabriquer une boisson 
nommée Sagoüer ou vin de palme. ; 

141. CALOPHYLLUM INOPHYLLUM Linn. Bientangngoor : à 
Java, Njamplong Penaqga où Capoorrantjang. 


Grand arbre, qui croît partout dans les Moluques et se plaît surtout 

. dans les terres basses le long des côtes. — Bois assez serré, un peu diffi- 

cile à travailler, mais prenant bien le poli et ressemblant à l’acajou. Il est 

recherché pour la fabrication des meubles, sert aussi à la construction 
des barques. 


OLACINÉES. 


142. STROMBOSIA JAVANICA BI. Æoyop, Ki-katjang ou Ki- 
laoet. | 
Arbre d'environ 60 pieds, croissant à Java et dans les régions monta- 
gneuses des autres îles de la Sonde. — Bois compacte et très-durable :; 
sert aux indigènes pour la charpente de leurs huttes. 
143. SrromBostA Sp. Petalinq. 


Arbre de 50 pieds de haut, croissant dans les hautes régions de Palem- 
bang et de Bangka. — Bois brun roux, très-compacte, sert pour faire des 
solives, des pilotis, etc. 


AURANTIACÉES. 


144. MuRRAYA SUMATRANA Roxb. Xemoening ou Dingo 
latoe. 


Arbre grêle d’enviren 25 pieds de haut, spontané dans tout l’archipel. 
— Bois jaune nuancé de noir, dur, à grain très-fin, très-estimé par les 
indigènes, qui en font des gaînes de poignard (kriss), des boîtes, des 
coffrets, elc. 
145. MurRayA Sp.  Dinqotto bintalahie. 
Très-voisin du précédent. — Bois un peu plus satiné, 
146. Murraya Sp. Molongotoh. 
Arbre de Gorontalo de 30 pieds de haut. — Bois jaune-paille, com- 
pacte. On l’emploie peu, bien qu’il se travaille bien. 
147. Citrus pEcuMaANA Linn. C. nobilis, Lour. Djerook 
matjan. 
Arbre fruitier, dont le bois est fin et serré, mais peu employé. L’arbre 
est estimé pour ses fruits, dont la saveur ressemble à celle des cerises, 


118. Cirrus pAPEDA Miq. Papehda. 
Arbre de 20 à 25 pieds de haut, d’Amboine. — Bois serré, à grain fin, 
d’un roux grisâtre, assez malaisé à travailler. 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 379 


MÉLIACÉES. 


419. DysoxyLum ACUTANGULUM Miq. Tembaloe où Ambaloe. 
Arbre de grande taille croissant à Java, Sumatra, Borneo, Bangka. 
— Bois jaunâtre, satiné, peu aisé à travailler, on l’emploie à la fabrica- 
tion des meubles. 
150. DysoxyLum Sp. Besaar ou Mawissar. 


Arbre de 60 à 80 pieds de haut de Menado. — Bois dur, pesant et 
compacte, analogue à celui du Tectona grandis. 


151. Dysoxyzum Sp. Tombawa. 
Arbre de 50 à 60 pieds, croissant à Menado. — Bois prut CORIDACE) 
employé pour les constructions navales. 
152. HARTIGHSEA MOLLISSIMA À. Juss. Koelit-bawang. Ki- 
bawang à Java. 
Arbre de taille moyenne qui croît dans plusieurs îles des Moluques. 
Bois peu serré; employé cependant pour les constructions. 
_ 153. EPicHARIS DENSIFLORA BI. Marang-inang. 


Arbre de très-grande taille, des contrées occidentales de Java. — Bois 
compacte et durable, mais raboteux et difficile à travailler. 


454. SANDORICUM NERVOSUM BL. Æetjapi. 
Arbre des Lampongs d'environ 30 pieds de haut. — Bois mou, Fa 
estimé. 
155. AGLAIA MINAHASSAE T. et B. Lansium sylvestre, AA 
Langsa oetan ou Langsa sauvage. 


Arbre de taille médiocre croissant dans plusieurs des Moluques. — 
Bois assez serré, très-liant employé pour les constructions. 


456. Miznea puzcis T. et B. Pesekh. 


Arbre de Menado, atteignant environ 50 pieds de haut. — Bois brun 
rougeâtre veiné, peu serré. On en fait des meubles grossiers. 


CÉDRÉLACÉES. 


157. CEDRELA FEBRIFUGA BI. Soerhen meira ou Soerhen 
rouge. 

Arbre gigantesque à croissance très-rapide de Java, de Sumatra, des 

Molaques et des Philippines. — Bois tenace, facile à fendre et à travailler. 


Employé pour faire des panneaux de carrosse, des caisses d'embal- 
lage, elc. 


3890 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


158. CEpreLA 1INODORA Hskl. Soerhen-poetih où Soerhen 
blanc. 


Arbre aussi gros que le précédent. — Bois moins solide, n’est guère 
employé que pour faire des caisses d’emballage. 
159. CEDRELA Sp. Tawhen. 
Arbre d’Amboine de 20 à 25 pieds de haut. — Bois dur, brun rou- 


geâtre clair, peu résistant, employé cependant pour les constructions par 
les indigènes. 


ÉRYTHROXYLÉES. 


160. ERYTHROXYLON RETUSUM Bauer. T’ngqiran poenay. 
Arbre d'assez grande taille des Lampongs. — Bois d’un brun rougetre 
très-dur, se travaillant bien, propre à la fobrication des meubles. 


SAPINDACÉES. 


161. NePHELIUM Sp. Ramboetan. 
Arbre de petite taille, estimé seulement pour ses fruits. — Bois peu 
solide, sans emploi. 
162. XEROSPERMUM NORONHIANUM BI. Æoë, Tjerogol-Monjeth 
ou Ramboetan-oetan. 
Petit arbre de 20 pieds de haut de la partie occidentale de Java. — Bois 
serré et durable, estimé pour les charpenties. 
163. IrINA GLABrA BI. Boeton qaleh. 
Arbre de Gorontalo d'environ 30 pieds de haut. — Bois de couleur 
rousse, compacte, n’est employé que pour le chauffage. 
164. CuPANIA SIDEROXYLON Cambess. (Sadmannia sideroxy- 
lon D. CG.) Behlo poetih, Kesambr. 


Arbre colossal des Moluques, des îles de la Sonde et de Timor. — Bois 
brun clair, compacte, très-liant et très-résistant. Employé par les indi- 
gènes pour faire des ancres de navires et, dans les constructions, pour des 
piliers. On en fait aussi des pilons pour broyer le riz. Le charbon de ce 
bois est fort estimé. Le fruit de cet arbre fournit l’huile connue sous le 
nom d'huile de Macassar. 


ILICINÉES. 
165. ILEx Sp. Warakies. 


Arbre de 50 pieds de haut, croissant à Menado. — Bois grisàtre peu 
serré, employé dans les constructions. 


166. Prinos Sp. Molongopoh. 


PRODUCTIONS AGRICOLES DE5 POSSESSIONS HOLLANDAISES. 981 
Arbre de 60 à 70 pieds, croissant à Gorontalo. — Bois compacte, mais 
difficile à travailler. 
RHAMNÉES. 


167. Zzvpaus Sp. Bedaroh. ‘ 


Arbre de taille moyenne, des régions occidentales de Bornéo. — Bois 
d’un brun pâle, dur, très-compacte et liant. On en fait des manches de 
parapluie, des cannes, etc. 


EUPHORBIACÉES. 


168. PrerarprA RAcEMOSA BI. Mentingq. 

Arbre de taille moyenne, des régions basses de Java et de Sumatra. — 
Bois assez serré mais raboteux. Employé dans les contrées où il pousse 
pour faire des charpentes. 

169. Lerocarpus Sp. Plangngas. 

Petit arbre commun dans les Lampongs. — Bois dur et compacte, em- 

ployé dans les constructions, mais peu durable, 
470. Payccanraus EmgricA Linn. Melaka, 

Arbre fruilier de taille médiocre. — Bois grisâtre assez mou, sans 
emploi. Fruit acide, mangeable. 

171. CERAMANTHUS Sp. Boerong. 

Arbre de grande taille commun à Amboine. — Bois mou employé néan- 
moins pour charpentes et servant même pour constructions navales. 

172. GLOCHIDION ARBORESCENS BL. Maremeh. 

Arbre de taille moyenne des basses régions de la partie occidentale de 

Java. — Bois solide estimé pour les constructions. 
175. GLOCHIDION MOLLE BI. Doenata. 

Petit arbre de Gorontalo. — Bois de couleur de paille, très-serré pour- 
rait être employé pour ouvrages de tourneur. 

174. STIPPELLARIA ZOLLINGERI Baill. Laloeta. 

Arbre de Gorontalo d’environ 70 pieds de haut. — Bois d’un biun rou- 
geâlre nuancé, compacte, se travaillant bien. Employé surtout pour faire 
des charpentes, sert aussi aux constructions navales. 

175. CARUMBIUM POPULIFOLIUM Reinw. Karoembt. 

Petit arbre de Java — Bois léger, mou, sans valeur, 

176. ExcOECARIA AGALLOCHA Linn. ÂMata hoeri ou Mata 
boeta. 


Arbuste d’Amboine qui p: duit une résine employée comme remède 
contre la diarrhée, — Le bois sert à faire des bois de fusil. 


382 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


177. PIMELEDENDRON AMBOINICUM Hasskl. Mamaina. 


Arbre de 20 pieds de haut; des petites îles voisines d’Amboine. — Bois 
mou utilisé seulement pour le chauffage. 


ANACARDIACÉES. 


178. Raus RuFA T. et B. Xambieng ou Tetoel. 

Arbre de 60 pieds de haut, croissant à Menado. — Bois d’un jaune 
rougeûtre très-solide, employé dans les constructions, de préférence pour 
faire des poteaux. Sert à faire les cercueils des Chinois. 

179. Raus Sp. Boeqtes. 

Arbre de 60 à 70 pieds de haut, croissant à Menado. — Bois brun 

compacte et résistant. Très-bon bois de eharpente. 
180. GLura BENGHAS Linn. Renghas ou Rengqas-pœtih. 

Arbre de grande taille croissant à Java et à Sumatra, dans les forêts des 
Lampongs et de Palembang. — Bois semblable à celui de l’acajou, bien 
que moins nuancé ; propre à la fabrication des meubles. 

181. SEMECARPUS HETEROPHYLLA BL. (S. Anacardium Linn.). 
Rengqas meira ou Rengqas rouge. 

Arbre de taille considérable des Lampongs. — Bois d’un brun rou- 
geâtre compacte. Ressemble beaucoup au précédent. Employé pour meu- 
bles et pour les constructions navales. 

182. ManGirera INDICA Linn. Batjang. 
Arbre fruitier de 40 pieds de haut, croissant à Amboine. — Bois assez 
_mou, peu facile à travailler, employé parfois par les indigènes pour 
faire des charpentes, 
183. Mançcirera Linnæt Krths. Vi/eA. 
Arbre fruitier d'environ 25 pieds de haut, de Gorontalo. — Bois brun 
_ clair veiné, résistant. Employé pour les constructions navales. 
184. MaxGirera Sp. WManga-beraboe. 
Petit arbre d’Amboine qui produit une résine employée comme enède 
 purgatif. — Bois peu solide et raboteux. 
185. MANGiFERA Sp. Manga. 

Arbre fruitier de 40 à 50 pieds. — Le bois est marbré. — Le fruit est 
assez bon. 

186. ManGiFERA Sp. Assem. | 

Arbre de taille moyenne des Lampongs. - Bois dur et pesant, peu 
employé par les indigènes. 


187. BouEA piversiFoLIA Miq. Raman. 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 353 


Arbre de taille médiocre des Lampongs portant un fruit mangeable. 
Le bois brun nuancé au cœur est dur et compacte ; il sert à faire des 
gaînes de poignard et des bois de fusil. 


BURSÉRACÉES. 


188. PRoTIUM Javanicuu N. L. Burm. Tangoelong ou Katos. 
Arbre assez gros, des îles de la Sonde et des Moluques. — Bois rou- 
geâtre, dur, compacte, résistant. Excellent bois de construction propre 
au charronnage, à la fabrication des meubles, des instruments aratoires, 
des poulies de navire, etc. 
189. CANARIUM ROSTRATUM Zipp. Damar itam où Damar noir. 
Arbre d’Amboine, d’environ 30 pieds de haut. — Bois grisâtre, se tra- 
vaillant assez bien, mais peu employé. On conserve l'arbre pour la résine 
que contient sa lige. 
190. CANARIUM SYLVESTRE Gœrtn. Nanary. 


Arbre des îles Moluques, de 30 pieds de haut, à fruits oléagineux. — 
Bois jaunâtre, compacte, employé pour les constructions navales. 
191. CanariuM Sp. Anda leboe. 
Grand arbre des Lampongs. — Bois d’un brun pâle, compacte, employé 
pour les constructions. 
SIMAROUBÉES, 


492. Pricrasma JAvANICA BI. Dyanglot. 
Arbre assez gros de la partie centrale de Java. — Bois assez tendre, 
mais serré ei très-liant. | 


ZANTHOXYLÉES. 


193. BiscHorFia JAVANICA BL Gadok. 


Arbre d'environ 50 pieds de haut, des régions montagneuses de Java. 
— Bois d’un brun rougeâtre à grain serré, employé surtout pour les 
constructions. 


DIOSMÉES. 
194. Evopra Sp. Moeloe. 


Arbre de haute taille des basses régions des Lampongs. — Bois roux 
nuancé de brun, dur et compacle, se travaillant bien quoique peu 
employé. 


COMBRÉTACÉES. 


195. EMBRYOGONIA ARBOREA T. et B. Xeloempit ou Ga- 
loempit. 


0] 


28/1 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 
Arbre de grande taille des contrées basses de Java. — Bois assez serré 
employé par les indigènes pour faire des roues pleines. 


196. TERMINALIA cATAPPA Linn. Ketapang-oetan. 
Arbre de 20 pieds de haut, d’Amboiïine. — Employé pour les construc- 
ions. 
197. TERMINALIA LAURINOIDES T. ct B. Djaha-kajoe. 
Arbre assez gros des Lampongs. — Bois grisätre compacle, employé 
pour les constructions. 
198. TERMINALIA RHopocArPA Hsskl. Kefapang. 


Arbre de 50 à 40 picds de haut, des basses régions des Lampongs. — 
Bois grisàlre peu serré servant pour les constructions. 


RHIZOPHORÉES. 


199. RHIZOPHORA CONJUGATA Linn. Lolaro ou Parpat el 
Possi-possi. 

Arbre de plus de 50 pieds de haut, croissant à Menado, daos des ter- 
rains saumâtres, près des côtes. — Bois dur, compacte, très-durable, fort 
estimé pour les constructions. 

200. RizoPioRA MucrONATA, Lam. Mangi-Mangi-Daoen- 
boental. 

Arbre d'environ 30 pieds de haut, croissant dans les petites îles voi- 
sines d’'Amboine. — Bois brun clair à grain fin, propre à lPébénisterie, 
peu employé. 

201. Rmzopnora Sp. Wangi-Mangi. 


Petit arbre d’une douzaine de pieds de haut d’Amboine. — Bois lrès- 
liant, employé pour faire des cercles de boîte, etc. 


202. KanpezrA Rep Wight et Arnt. Teng. 
Arbre de 60 à 70 pieds de haut, des terrains marécageux, saumätres, 


de Menado. — Bois rougeâtre, dur, compacte et très-durable, estimé 
pour les constructions. 


203, BrucuierA Sp. Makoerong. 


Arbre de 50 à 60 pieds, croissant à Menado, dans les terrains maréca- 
geux, saumâtres.— Bois dur ressemblant beaucoup à celui du Rhèzophora 
conjugala; employé aux mêmes usages. 


LYTHRARIÉES, 


204. Peupuis ACIDULA Forst. Doedoek. 
Arbrisseau croissant à Gorontalo, dans les endroits humides, sur les 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 93S0 


bords de la mer, — Bois brun à grain fin et serré, employé dans les 
constructions navales ; propre aux ouvrages de tourneur. 
205. LAGERSTRŒMIA OVATIFOLIA T. et B. Woengngoe ou 
Boengngoor. 
Arbre assez grand, croissant à Sumatra, à Java et à Bornéo dansles 


terres basses. — Bois compacte et durable employé pour les construc- 
tions navales. 


MYRTACÉES. 


206. MELALEUCA LEUCODENDRON Linn. ÆXaÿoe poetih ou 
Gelhen. 


Arbre de 25 à 30 pieds de haut, répandu dans tout l’Archipel. C’est 
à Boero que croissent les plus estimés de ces arbres, qui sont recherchés 


surtout pour l'huile qu’on en retire par la distillation des feuilles, — Bois 
dur, compacte et durabe. 


Il y à à Amboine une variété ou une espèce très-voisine, dont le boi 

est nuancé et très-propre à la fabrication des meubles. 
207. NaniA vERA Miq. Nani meira ou Nant rouge. 
Grand arbre répandu partout dans les Moluques et les régions sep- 
tentrionales des Gélèbes. C’est l’île de Ternate qui produit les meilleurs 
bis de cette essence, — Bois d’un brun rougeâtre, dur ct pesant ; très- 
précieux pour toutes les constructions marilimes à cause de la propriété 
qu'il a de n’être jamais atlaqué par les larets. 
208. NaNIA VERA LATIFOLIA Rumph. Syncarpia Vertholent, 
T. et B. Nani poetih ou Nani blanc. 

Bois moins dur et moins pesant que celui du Nan rouge ; sert, du 
reste, aux mêmes usages. 

209. SONNERATIA Sp. Sepat. 

Arbre de taille moyenne de la partie centrale de Java, — Bois de cox- 
leur rose, compacte, se travaillant bien. 

210, NecrTris PALLESGENS Miq. Demang. 

Arbre des Lampongs, de taille moyenne. — Bois d’un brun rou- 
geâtre, dur, compacte et pesant, se travaillant bien, employé pour les 
constructions. 

214, Psiprum GuayAvA Raddi. Djamboe biedji. 


Arbre fruitier, commun dans tout l’archipel des Indes et dont le fruit 
sert à faire des confitures très-estimées, — Bois grisâtre, très-dur et très- 
solide : sert à faire des manches d'outils. 

212. SYZYGIUM CARYOPHYLLIFOLIUM D. GC. K2 ou Kajoe tem- 
baga. Bois de cuivre. 
38 SÉRIE, T. |. — Juin 1874. 25 


386 SOCIÉTÉ D'ACGLIMATATION. 


Arbre de taille moyenne, répandu en divers lieux des Moluques. — 
Bois de couleur jaune, solide, mais un peu noueux; employé pour les 
constructions et la fabrication des meubles, 

213. SYZYGIUM cyMosuM D. C. Salam. 

Arbre de A0 pieds de haut, de la côte occidentale de Sumatra et des 
hautes régions de la partie occidentale de Java. Fort employé dans les 
constructions. 

214. CARYOPHYLLUS SYLVESTRIS Rumph. Tinkeh oetan. 

Arbre d’Amboine de 25 pieds de haut. — Bois grisâtre assez serré : 
employé pour les constructions. 

215. CarvoPayLLus Sp. Ling-seray. 

Arbre assez gros des Lampongs. — Bois brun, dur, pesant et com- 
pacte. 

216. Jamposa acumINaTissIMA Hssk], Xisirem. 

Grand arbre des régions montagneuses de la partie occidentale de Java. 
— Bois brunâtre, très-compacte, se travaillant bien. Employé pour les 
constructions. 

217. JamBosa Sp. Kajoe mera. 
- Arbre atteignant 90 pieds de haut. — Bois brun, veiné, employé sur- 
tout comme bois de construction, sert aussi pour faire des bois de lit, etc. 
218. JamBosa Sp. Dyamboe lacet. 

Arbre de 25 pieds de haut, d’Amboïine. — Bois grisâtre, serré, se 
travaillant bien, peu estimé cependant par les indigènes pour les con- 
structions. 

219. JamBosa Sp. Djamboe roetong. 

Bois analogue au précédent, mais plus raboteux. 

220. Jamposa Sp. Dyamboe-oetan où Waypaba. 


Arbre de 25 pieds de haut, de Boero. — Bois brun compacte, servant 
à la construction des barques. 


221. JamBosa AQUEA Rumph. Kembes ou Gorra oetan. 


Arbuste d’une quinzaine de pieds de haut, d’Amboine. — Bois de peu 
de valeur ; utilisé cependant par les indigènes pour les constructions. 


222, JamBosa Sp. Makoepa. 
Arbre de 50 pieds de haut, de Menado. — Bois serré, mais raboteux 
et difficile à travailler ; employé pour les constructions. 


223, JaAmBOsA Sp. Garah. 
Arbre des Lampongs, de taille moyenne. — Bois grisâtre. compacte, se 
travaillant bien. Employé pour les constructions. 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 987 


22h. BARRINGTONIA SPECIOSA Linn. Poetoen ou Boeten. 


Arbre de grande taille. — Bois cassant et peu durable; employé par 
les indigènes pour les constructions. 


295. BARRINGTONIA RUPRA BI. Hoetoen. 


Arbre d’une vingtaine de pieds, croissant dans plusieurs petites îles des 
Moluques. — Bois sans valeur. Le fruit de l’arbre est vénéneux. 


226. PLANCHONIA suNpaAïca Miq. Zp ou MNipil; à Java, 
Poetat. 


Arbre de 80 pieds de haut, — Bois dur et compacte employé pour les 
constructions. 


POMACÉES. 


227. PHOTINIA INTEGRIFOLIA Lndl. Tyantigr. 


Arbuste des montagnes de Java. — Bois rougeâtre un peu nuancé, dur 
et compacte; propre aux ouvrages de tourneur. 


CHRYSOBALANÉES. 


228, PaRINARIUM MULTIFORUM Miq. Æontameh. 


Arbre colossal croissant à Gorontalo. — Bois brun, assez compacte, 
très-durable ; fort estimé pour les constructions, bien qu’il soit peu aisé à 
travailler. 


229. PARINARIUM Sp. Wakis ou 1sim wikis. 


Arbre de grande taille, — Bois brun, clair, dur et compacte. Le fruit 
est mangeable. 


PAPILIONACÉES. 


230. AGATI GRANDIFLORA Dsv. T'oerr. 
Arbre de 25 pieds de haut. — Bois mou et spungieux ; sans valeur. 
281. ERYTHRINA Sp. Mangries. 

Arbre de 70 pieds de haut, de Palembang et de l’île de Bangka. — Bois 
d'un rouge, brun, compacte, très-dur et très-pesant, Employé pour les 
constructions : pourrait être ulilisé pour la fabrication des meubles. 

232, Prerocarpus INDicus Willd. Lingoum saxatile Rumph. 
Lingoea-kastoert. 

Très-grand arbre de Moluques et des régions septentrionales de Célèbes. 
— Bois brun, rougeâtre, nuancé. On distingue par des noms différents 
diverses vaïiélés du Péerocarpus indicus. On peut citer les suivantes : 


Lingæa batoe. 
Bois de couleur brune, plus solide que le précédent. 


388 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Lingæa batjang. 

Autre variété, d’un brun pâle et d’un grain plus serré. - 
Sonno kapoor ou calcaire. 

Bois mouchelé; on en fait des meubles d’un bel aspect. 


Sonno Kembang ou Sonno fleuronné. 
Des régions centrales et orientales de Java. — Employé pour la fabri- 
cation des meubles. 
283, Prerocarrus Sp. Sonno klieng où Sonno noir. 
Arbre de taille moyenne, des contrées orientales et centrales de Java. 
— Bois brun noirâtre, compacte. Sert à la fabrication des meubles qui ont 
l'aspect du palissandre. 
23h. Prerocarpus sANTALINUS Linn. Tjendana meira. 


Arbre rare, de taille médiocre, du territoire de Benkoelen. — Bois de 
couleur rouge nuancé de brun; noueux et dur comme le fer. Est em- 
ployé râpé comme médicament dans les maladies d’intestin. 


235. Prerocarpus MoLLIS. Rmph. Lingoea qaba-qaba. 

Arbre de 50 pieds de haut, croissant à Haroeko. — Bois gris pâle, 

veiné de blanc, serré, mais peu durable, employé pour les constructions. 
236. PrerocarPus Sp. Lingoea meira (Lingoea rouge) ou 
Agha. 

Arbre de Menado, voisin du précédent, en diffère par la couleur plas 
rouge du bois; employé pour la menuiserie. 

287. Prerocarpus Sp. Lingoea ou Nagamea poetih, Lingoea 
blanc. 

Très-voisin du précédent. 

238. Prerocarpus HyposTicrus Miq. T'arpandr. 

Grand arbre des Lampongs. — Bois brun clair, assez compacte, em- 

ployé par les indigènes pour les constructions navales. 
239, DaLBerGiA Sp. Lakka. 

Arbre de 20 pieds de haut, de Ternate. Très-voisin du D. Zollingeriana 
Miq., qui croît dans la partie méridionale de Sumatra. — Bois de chauf- 
fage, résineux, brûlant avec une flamme claire et intense. 

240. CæsALPINIA Sp. Kasamal, Samal où Lolan Tina. 

Arbre de Boero, de 25 pieds de haut. — Bois rougeâtre, dur, com- 
pacte, très-liant, très-bon pour les constructions et pour la marine. 

241. TamMarINDUS INDICA Linn. Assam, 


Arbre de 40 pieds de haut, répandu partout dans l’Archipel. = Bois 
dur, d’une grande solidité, marqué de taches brunes qui deviennent noires 


PRODUCTIONS AGRICOLES DES POSSESSIONS HOLLANDAISES. 389 


et dures comme le fer dans les vieux arbres ; recherché pour divers ou- 
vrages et en particulier pour faire des moutons pour enfoncer les pieux. 
242. Cassra FiSTULA Linn. Tangoel. 

Arbre de grosseur moyenne des terres basses de Java et de Sumatra. 
Bois dur et compacte, un peu raboteux. Employé pour les constructions : 
ne pourrit pas en terre et n’est pas attaqué par les insectes. 

2h43. CyNOMETRA, Sp. Lamoeto-dihetto. 

Arbre de Gorontalo, de 30 pieds de haut, — Bois serré, bien qu’assez 

léger ; employé seulement pour le chauffage. 
2hh. InTsrA AMBOINENSIS, Thouars. Kagoe besi ou Hati besi. 


Cœur de fer. 

Arbre de grande taille, des Moluques et de la Nouvelle-Guinée. — 
Bois brun clair, dur et cpmpacte, se travaillant bien. Employé pour les 
constructions, pour les estacades, les pilotis, etc. 

On désigne sous le nom de WWaroe-Assay une variété de l’Intsia- 
Amboinensis de Menado, dont le bois est plus foncé. 


2A5. INTSsiA PALEMBANICA Miq. Merbouw ou Marbo. 


Arbre de 70 pieds de haut, croissant dans les régions basses des Lam- 
pongs, de Palembang (Sumatra), de Riouw, de Bornéo et des îlots du dé- 
troit de la Sonde. Très-voisin du précéäent. Employé aux mêmes usages. 


246. SINDORA SUMATRANA Miq, Siendoer. 

Arbre de taille moyenne, croissant dans les terrains marécageux des 
Lampongs. — Bois léger, de couleur pâle; il n’est pas attaqué par les 
termites. La tige contient une malière résineuse qu’on en extrait par 
incisions. 

247. Drarium INpum Linn. Xrandpr. 


Arbre de 50 pieds de haut. — Bois br un, dur, compacte et tenace, 
propre aux Consiructiens navales. 


11. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ, 


——— 


LA QUESTION DES MADRAGUES 


LETTRE ADRESSÉE A MONSIEUR LE MINISTRE DE LA MARINE 


Par M. RIMBAUD. 


Président de la Société académique du Var, 


Monsieur le Ministre, 


Le rapport que j'ai eu l'honneur de vous adresser le 11 mars 
dernier, sur les causes de la cherté générale des produits de 
la mer, est resté sans réponse, bien qu’il témoignät de la 
vive sollicitude de l'assemblée que je préside pour un objet 
éminemment d'intérêt public. Néanmoins, et pour me con- 
former pleinement aux intentions de cette compagnie. Je viens 
vous entretenir du préjudice que cause aux populations de nos 
départements méditerranéens, l'interdiction de la madragne. 

D'abord, je prie Votre Excellence de vouloir bien remarquer: 

4° Que tout appareil de pêche, dont l’action ne consiste pas 
à bouleverser les prairies marines pour en déloger la popula- 
tion et l’envelopper en masse, n'offre aucun inconvénient au 
point de vue de la reproduction des espèces; 

2° Que, sous cerapport, la madrague n’est pas plus à répu- 
dier qu'aucun autre filet de parc ou de serre, fonctionnant sur 
place, et dont le pied repose immobile sur le sol sous-marin ; 

3° Que l’objet exclusif de la madrague est d'opérer la 
capture des divers genres de Scombéroïdes et autres poissons 
Pélagiens, que leur instinct migrateur entraîne partout, sans 
qu'ils se fixent nulle part, dans les eaux riveraines, du prin- 
temps à l'automne ; 

h° Que non-seulement elle ne prend quele poisson nomade, 
mais encore elle protége la multiplication du poisson local, 
en soustrayant une assez notable partie des rivages à l’action 
ravageuse des filets trainants ; | 

5° Enfin que la permanence et la puissance de cette pê- 
cherie réalisent la combinaison la mieux appropriée aux 


LA QUESTION DES MADPRAGUES. 391 


besoins dela pêche dans la Méditerranée, durant l’époque où 
les innombrables bandes de poissons voyageurs envahissent la 
zone côtière de cette mer. 

Après ces observations préalables, je passe à la discussion 
des motifs qui ont fait condamner d’une manière générale 
l'usage de la madrague. 

Dans une note adressée à M. le Président de la Société 
d’acclimatation et insérée dans le Bulletin de cette Société 
(janvier 1873), votre prédécesseur, M. l'amiral Pothuau, 
reprochait à cet engin : 

1° De gêner la navigation des bâtiments à vapeur, plus 
encore que celle des bâtiments à voiles ; 

2° De faire obstacle au développement de l’industrie ordi- 
naire du pêcheur, et par suite à l'accroissement des res- 
sources que cette industrie procure à l’alimentation publique ; 

3° D’être moins propre à la capture du Thon, que les filets 
ordinairement employés pour cerner ce Scombre. 

Ces griefs seraient graves s'ils étaient fondés; mais notre 
conviction est qu'ils ne le sont pas, qu'ils reposent, au con- 
traire, sur des indications erronées. Aussi désirons-nous que 
Votre Excellence soit informée de l’absence des éléments de 
la vérité dans les informations qui se rapportent au moins à 
deux des motifs de la suppression des madragues, autrefois 
établies sur les côtes des départements du Var et des Bouches- 
du-Rhône. 

Si M. le Ministre daigne suivre avec un peu d'attention 
l'examen que je vais faire de chacun de ces motifs, il pourra 
voir que l’on s’est, en effet, mépris en proscrivant un mode 
de pêche qui avait été pratiqué chez nous pendant deux sié- 
cles, et dont l’opinion publique persiste à réclamer le réta- 
blissement. 

Premier motif concernant la navigation. 

Sans doute, la navigation latérale peut avoir à souffrir 
quelque dérangement de l'existence d’une madrague dans le 
voisinage d’une passe à franchir ou d’une pointe à doubler au 
plus près du vent; mais cette cause de gêne, réelle quand 
tous les gros transporls commerciaux s’effectuaient par la 


ÿ 


3992 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


voie de mer, est devenue bien peu sensible depuis que les 
chemins de fer ont à peu près anéanti la navigation de port à 
port, et que la vapeur s’est substituée à la voile. D'ailleurs, 
dans le temps où presque tout le transport commercial 
 s’effectuait par le petit cabotage, il existait tant de madra- 
ques, du détroit de Gibrallar à lAdriatique, que si elles 
avaient apporté des entraves à la circulation des navires, cet 
inconvénient n'aurait pas manqué d’être vivement signalé. 

Il ya eu jusqu’à neuf de ces grandes pêcheries, dans les 
environs de Marseille : madragues de l’Estaque, de Morgiou, 
de Port-Miou, de Carry, de Montredon, de Podestat, de Nio- 
Jon, de Ginac, de la Pointe-Rouge. Il y en avait quatre dans 
les eaux de Toulon : madragues de Saint-Mandrier, de Ban- 
dol, des Rouveaux, de la Martelle. L'Espagne n’en avait pas 
moins d’une cinquantaine quelle possède encore, presque 
toutes du cap de Creux au détroit. Il serait trop long de faire 
le dénombrement de toutes celles qui ont existé et se sont 
maintenues pour la plupart, sur les côtes de la Sardaigne, de 
la Sicile, du royaume de Naples, de la Vénétie. N'est-il pas 
au moins surprenant, que l’on ne se soit aperçu en France des 
préjudices que ces établissements pouvaient porter à la na- 
vigation qu'à l'époque où la marine à voiles n’avait plus 
qu’un très-faible reste de son ancienne activité ? 

« Mais, » dit la note citée plus haut, «la navigation à 
» vapeur a beaucoup plus à craindre des madragues que la 
» navigation à voiles, parce qu’elle se fait de tout temps et à 
» Loute heure, par de nombreux bâtiments, qui, en passant 
» sur les établissements en question, seraient exposés à ce 
» que les nombreuses bouées qui les garnissent s'engageas- 
» sent dans leurs roues ou dans leur hélice. La marine à 
» voiles passait plus loin des côtes et avait donc moins à crain- 
» dre des madragues que la marine à vapeur ». 

Permettez-moi de penser, Monsieur le Ministre, que, s'il 
avait été mieux renseigné, votre honorable prédécesseur 
aurait refusé d’attacher son nom à cette allégation, et que, à 
défaut de bonnes raisons, il n'aurait pas voulu en donner une 
mauvaise. 


LA QUESTION DES MADRAGUES. 3938 

On avait demandé à Napoléon I‘ la suppression des ma- 
dragues, parce qu'elles nuisaïent, disait-on, aux mouvements 
des flottes. L'Empereur répondit : « Si ces pêcheries gênent 
» sur un point de la côte, 1l faut les transporter sur un autre 
» point, car on ne peut priver les populations du Midi des 
» bénéfices qu’elles en retirent. » Si la question étant alors la 
même qu'aujourd'hui, on avait proposé à ce souverain d'in= 
terdire les madragues, par le motif que la marine à vapeur 
passe plus prés de la terre que la marine à voiles, il est pro- 
bable qu’il eût repoussé la prétention en répondant que, pour 
se préserver de ces établissements, les navires à vapeur 
wavaient qu'à user de la faculté dont ils disposent à un plus 
haut degré que les navires à voiles, de les éviter ainsi qu'ils 
évitent les bas-fonds et les écueils, les obstacles permanents 
et accidentels qu’ils rencontrent sur leur route. 

Sous le régime libéral où nous vivons, M. le Ministre de la 
marine ne voudra pas que cette question d'intérêt public soit 
résolue moins équitablement qu'elle ne l’a été sous le régime 
omnipotent du premier Empire. Son Excellence sait d’ailleurs 
très-bien que, s’il est quelques points, tels que l’intérieur de 
la rade de Toulon, et certaines parties du golfe de Marseille, 
où une madrague pourrait présenter des inconvénients, 1! 
en est beaucoup d’autres, de Nice à Port-Vendres, où un éta- 
blissement de ce genre ne saurait causer la moindre gêne. 

Deuxième motif : Est-1l vrai que la madraguc soit un obsta- 
ele au développement de l’industrie du pêcheur, et par suile 
à l'accroissement des ressources que cette industrie procure à 
l'alimentation publique ? 

A cet égard, M. l'amiral Pothuau s’exprimait d’une manière 
très-affirmative. « Ce n’est pas, d’ailleurs, uniquement dans 
» l'intérêt de la sûreté de la navigation, disait-il, que diverses 
» madragues ont été supprimées. Elles l’ont élé aussi afin 
» de favoriser l'accroissement de la pêche côtière, et par 
» suite, de multiplier les ressources qu'offre cette industrie à 
» l'alimentation publique. » 

Les résultats de la pêche ne sont pas, comme ceux de la 
moisson des champs, proportionnés à la superficie de l’espace 


39/4 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


sur lequel opère un nombre déterminé de travailleurs. S'il 
en est peut-être ainsi, jusqu'à un certain point, pour la pêche 
du poisson sédentaire, il n’en est absolument rien pour celle 
du poisson nomade. Ce qui importe à celle-ci, ce n’est pas 
l'étendue de Paire des récoltes, c'est le nombre et la capa- 
cité des récipients, leur situation favorable, l'opportunité de 
leur mise en œuvre. 

On ne saurait, en effet, avoir trop d'engins, ni de trop 
grands filets à la mer, aux heures où passent rapidement sur 
notre littoral les avalanches de richesses alimentaires que 
l’Océan déverse dans la Méditerranée, et qui vont affluer jus- 
que dans la mer Noire. Quels que soient alors le nombre et la 
forme des engins employés à s'emparer de ce bien passager, 
on ne saurait soutenir que tels de ces instruments diminuent 
la part de butin de tels autres. Autant vaudrait prétendre que 
les filets mobiles ne prennent que le poisson qui n’a pas été 
arrêlé par les madragues. La vérité incontestable est que 
ceux-là comme ceux-e1 capturent le poisson qui passe là où 
ils sont établis, c’est donc affaire de chance ou d’habileté dans 
la position choisie. Mais dans tout état de choses, il est cer- 
ain que la quantité caplurée est bien faible, comparée à 
à celle qui s'échappe par insuffisance des moyens de les re- 
tenir. 

Ainsi, non-seulement l'appareil dont je prends la défense 
contre d’injustes préventions n’est pas un obstacle à l’accrois- 
sement des résultats de la pêche, mais encore il les étendrait 
considérablement : en eftet, lorsque les madragues existaient 
dans les eaux du département du Var, divers ateliers de salai- 
son leur devaient leur existence et leur prospérité, puisqu'ils 
ont disparu avec elles. 

Reconnaissons ‘toutefois, qu'à certains moments, l’action 
de cette pêcherie est nuisible aux intérêts particuliers des 
pêcheurs qui n’y participent pas. Le dommage se produit 
pour eux, chaque fois que, la madrague ayant fait d’abon- 
dantes captures, le prix du poisson vient à baisser sur le mar- 
ché. Si c’est là un inconvénient pour les pêcheurs, c'est en 
même temps un grand avantage pour les populations, et en 


# 


LA QUESTION DES MADRAGUES. 399 


toute circonstance où la cause de quelques-uns se trouve en 
compétition avec celle du plus grand nombre, l'équité.et la 
raison ne permettent pas que l'intérêt particulier l'emporte 
sur l'intérêt général. L’honorable amiral Pothuau reconnais- 
sait et admeltait ce principe d'économie sociale, lorsqu'il dé- 
clarait que la suppression des madragues était une mesure 
qui servait les besoins de l'alimentation publique. 

Il est bien vrai aussi que la madrague, calée sur une super- 
ficie de 12 000 mètres carrés, et exigeant un espace réservé 
du côté de l’arrivée du poisson migrateur, frappe d’interdic- 
tion une notable étendue du champ commun où s’exerce 
l’industrie des pêcheurs ordinaires. Le savant M. Sabin Ber- 
thelot, dans ses études sur les pêches maritimes, évalue à 
onze lieues carrées la surface des fonds qui étaient sous- 
traits à la pêche mobile, par les madragues situées sur les 
côtes du département des Bouches-du-Rhône, avant 1830. Il 
serait toutefois erroné d'admettre que la permanence de ces 
vastes appareils cause un préjudice à la pêche ordinaire. Le 
contraire est démontré, attendu que ces pares de filets en 
sparteries, établis dans le seul but d’opérer la capture des 
poissons de passage, le Thon, la Pélamide, l’Espadon, la Be- 
nite, le Maquereau, le Suvarel, l’Orphie, la Sardine, offrent 
l'avantage d’être essentiellement conservateurs des fonds sur 
lesquels ils se déploient. 

En effet, bien au delà de leur développement, les réseaux 
verticaux formant l'enceinte de la madrague remplissent le 
précieux rôle de préserver de la destruction le frai déposé 
aux alentours de ces barrières tutélaires. Par conséquent, au 
lieu de nuire au rendement de la pêche, la madrague con- 


tribue à l’accroître : elle oppose des entraves nécessaires à 
2 


l'activité stérilisante de la pêche à la traine, et ce qu’elle 
enlève à l'étendue du terrain d'exploitation, elle le restitue 
amplement par une plus grande abondance du produit récol- 
table : 
Troisième motif. Action de la madrague, comparée à celle 
des autres Scombrières. 
Selon ce que M. l'amiral Pothuau écrivait à M. le Président 


à , 


396 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


de la Société d’acclimatation : « Il serait inexact de dire que 
» les filets employés par les pêcheurs prennent moins de 
» Thons que les madragues, » et au contraire, « il aurait été 
» démontré que ces établissements étaient avantageusement 
» remplacés par les thonaires, et que le mode de pêche dit 
» seinche, usité par nos pêcheurs de la Méditerranée, permet 
» la capture des Thons en quantités pour le moins aussi 
» grandes que les madragues, sans en présenter les inconvé- 
» nients. » 

C’est principalement sur ce point que la vérité n’a pas été 
dite à M. le Ministre. Je vous demande la permission de la 
rétablir. 

La madrague fonctionnent à la façon d’une vaste souricière 
intercepte un large espace de mer sur le passage, non- 
seulement des bandes de Thons, mais encore de toutes les 
légions des poissons de surface. Elle pêche à toute heure et 
en toute circonstance de temps; elle est ouverte à un seul 
individu, comme à plusieurs milliers; elle prend aussi bien 
le petit que le gros poisson ; ses levées se font ordinairement 
deux fois par jour, le soir après le coucher du soleil, et le 
matin, vers l’aube. 

La Seinche est une manière de cerner et d'amener à la 
plage un troupeau de Thons dont l’arrivée a été signalée par 
des guelteurs, à des embarcations chargées de filets, et prêles 
à s’élancer à la rencontre des Scombres aperçus. Impratica- 
ble la nuit, ce mode de pèche ne peut s'exercer le jour que 
par un temps calme, puisqu'il faut que l’on puisse voir le sil- 
lage des poissons à attaquer. 

La madrague est à l’œuvre durant cinq ou six mois consé- 
‘cutifs, jour et nuit; la seinche, ne pouvant être pratiquée 
qu'à certaines heures propices, chôme trop souvent pour que 
ses captures puissent être comparées numériquement à celles 
que fait la madrague. 

Donc, entre ces deux méthodes, il existe une différence 
considérable, tandis que l’une constitue un acte de pêche 
permanent, l’autre n’en est qu’un expédient, une éventualité 
qui peut être, il est vrai, très-accidentellement aussi produc- 


% jt AE” % 
LA QUESTION DES MADRAGUES. 397 
tive qu’une des plus fructueuses levées de la madrague, mais 
qui, n'ayant pas la continuité d'action de celle-ci, ne saurait 
en avoir non plus les résultats réguliers et la somme défini- 
live de captures. 

Quant aux thonaires, qui, assure-t-on, auraient si avanta- 
seusement remplacé les madragues, elles n’ont pas même la 
puissance éventuelle de la seënche; calées sur la côte, à poste 
fixe, ou installées en filets flottants pour les usages de Ja 
pêche au large, ces nappes de rets simples n’ont, en effet, que 
la propriété d'enmailler le poisson. Cest bien différent de ce 
que font la madrague et la seinche. Le tronpeau de Thons 
qui a pénétré dans les enceintes de la premiére, ou s’est 
laissé envelopper par la seconde, y reste en entier, quelle que 
soit la taille des individus qui la composent. Au contraire, la 
bande de poissons qui butte contre une thonaire n’y laisse 
que les individus dont les opercules se sont engagés dans la 
maille. Tout ce qui, dans la bande, est trop gros pour passer 
entièrement la tête dans l'ouverture de la maille, rebrousse 
chemin ; les petits fuient au travers du filet. D’un seul coup, 
une madrague prend quelquefois cinq cents thons. Une tho- 
faire a fait une riche capture lorsqu'elle a retenu une aou- 
zaine de ces animaux. 

Ainsi, la seule chose qui soit commune aux trois procédés 
usités pour la pêche des Scombéroïdes dans la Méditerranée, 
c'est qu'ils contribuent à l’approvisionnement des marchés, 
non avec un succès comparable, mais chacun dans l'étendue 
du minimum au maximum des résultats qui lui sont propres. 
De sorte que supprimer un de ces procédés, c’est amoindrir 
les ressources de l'alimentation publique de tout le contin- 
bent de nourriture qu'il lui fournirait. Cela est indiscutable, 
puisque le rendement de la pêche des Scombres, des Clupes, 
de tous les poissons migrateurs, est toujours en proportion 
de l’activité que l’on a déployée pour la faire opportunément, 
J'insisie sur cette considération, que laisser perdre une occa- 
sion de saisir au passage le plus que l’on peut de ces visiteurs 
toujours en mouvement, e’esl généralement livrer aux étran- 
gers noS voisins une partie du contingent dont on aurait pu 
s'emparcr. 


a» 


398 | SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


D'ailleurs, nul n’ignore que l'usage simultané de la madra- 
ue, de la seinche et de la thonaire, existe de toute antiquité : 
que, dès le xvur° siècle, ces moyens différents de pêcher le 
Thon étaient employés sur les côtes du Roussillon et de la 
Provence, et que de nos jours, les Espagnols, nos maîtres en 
l’art d'exploiter les produits de la mer, sans négliger aucun 
des modes de la capture consacrés par la pratique, accordent 
cependant la préférence à la madrague. Comment donc ad- 
mettre que cette pêcherie est avantageusement remplacée 
par la thonaire ou par la seinche ? 

Dans ses Études sur les pêches maritimes, p. 35h, M. Sabin 
Berthelot dit: « D’après mes relevés statistiques, de 1825 à 
» 1842, la pêche annuelle de la madrague de Port-Miou, près 
» la Ciotat, produisait en moyenne 30 000 kilog. de Thons et 
» Pélamides, et 22 à 23600 kilog. de Maquereaux et Sar- 
» dines. » Ce n’était là qu’un médiocre résultat comparé à 
celui qu'obtenaient d’autres madragues mieux placées que 
celles de Port-Miou, et cependant, jamais la campagne an- 
nuelle, non d’une seule seinche, mais de plusieurs sur nos 
côtes de la Méditerranée, n’a donné un tel rendement. Il peut 
arriver qu'une seinche atteigne en quelques semaines une 
quantité de Thons considérable ; mais ces coups de hasard 
n’infirment nullement la supériorité de la madrague fixe sur 
cette espèce de madragne volante. 

Je vais plus loin, et j'admets un moment que l'action 
casuelle de celle-ci surpasse en puissance l’action continue de 
celle-là. Serait-il raisonnable de renoncer pour cela au mode 
permanent de pêche, qui, ne cessant d’agir pendant la saison 
du passage des Clupes et des Scombres, offre au moins l’avan- 
tage d'arrêter chaque jour une part de ce qui nous échappe- 
rait de ces ressources alimentaires ? Nous sommes là en face 
d’agolomérations animales cosmopolites qu'aucun de nos voi- 
sins n'a la simplicité de laisser passer impunément le long de 
ses côtes : n’est-il pas étrange que nous seuls nous n’en usions 
pas autant que le bon sens et l'intérêt public ordonneraient 
que nous le fissions ? 

Dira-t-on que les madragues supprimées occupaient les 
points de passage du Thon où s'exerce aujourd'hui la pêche à 


sé 


L” 

LA QUESTION DES MADRAGUES. 399 
la seinche? Cette assertion serait toute gratuite, car la sein- 
che n’est nullement pratiquée, ni en dedans, ni en dehors de 
la presqu'ile qui ferme la rade de Toulon, espace où fonc- 
tionnaient jadis plusieurs madragues. La seinche, occa- 
sionnellement pratiquée par les pêcheurs de la Giotat, de 
Marseille ou de Bouc, est presque inconnue de Toulon à 
Antibes, et pourtant cette étendue de trente-six licues de côtes, 
très-fréquentée par le poisson blanc, est visitée par les Thons 
et les Pélamides qui en font leur nourriture. 

En résumé : le premier motif alléguant une incommodité:et 
un danger pour les bâtiments à vapeur n’est pas suffisant 
pour justifier un refus à la demande de rétablissement des 
madragues, tant de fois renouvelée, depuis dix à douze ans, 
par les Conseils généraux du Var et des Bouches-du-Rhône, 
par diverses municipalités, notamment de Marseille et de 
Toulon, par la Chambre de commerce de cette dernière ville. 

Et comme les assertions qui ont servi de base aux deux 
autres motifs sont contredites et infirmées d’une manmiére 
absolue par l'expérience, il n’est aucune raison sérieuse de 
maintenir l'interdiction de ce procédé de pêche. 

Voilà brièvement, Monsieur le Ministre, l'avis consciencieux 
de la Société académique du Var sur une question économi- 
que, qui aurait sans doute depuis longtemps déjà reçu une 
solution conforme à l'intérêt général, si elle n’était primée 
par des intérêts particuliers. 

Nous sommes convaincus que la suppression des madra- 
gues, ainsi que la déplorable extension de la pêche à la traîne, 
sont la conséquence de la sollicitude assurément fort légi- 
time, mais imprudente, selon nous, même pour ses véritables 
intérêts, qu’excite au département de la marine la pénible et 
périlleuse profession de pêcheur. Nous avons essayé de dé- 
montrer dans un premier rapport à Votre Excellence que 
si la pêche a cessé de contribuer, pour une large part, à la 
subsistance de la population, c’est parce que les résultats de 
cette industrie souffrent de la tolérance trop bienveillante 
accordée aux hommes qui la pratiquent. 

Quand je dis : les résultats de l'industrie, j'entends parler 


h00 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


de son rendement en substances alimentaires, el non de sa 
situation au matériel, ni de son produit en numéraire. Mal- 
heureusement c'est par le côté revenus, que l’on en juge d’or- 
dinaire; on dit: la pêche est prospère, puisqu'elle accroît 
sans cesse le nombre de ses armements, et que son rapport en 
millions de francs augmente toujours. 

Ce langage est celui de l'illusion, celui des personnes qui, 
ne considérant qu'au point de vue maritime ce déploiement 
d'activité industrielle ne voient pas que la pêche ne joue plus 
qu'un rôle trés-secondaire dans le système économique, de- 
puis que ses produits, de plusen plus rares, ont acquis succes- 
sivement une plus grande valeur vénale. Ce qui est vrai, ce 
qui devient évident, pour peu que l’on aille au fond des choses, 
c'est que la pêche ne se soutiendrait plus, si ce n’était que le 
pêcheur trouve encore son avantage à recevoir d'une pelite 
quantité de poissons le même prix qu'il en avait autrefois 
d’une pleine batelée. 

En terminant, j'exprime le vœu, de la part de la Société 
dont je suis l’organe, que Votre Excellence daigne ordonner 
une enquête sur l’état de la pêche dans la Méditerranée, ainsi 
que sur les moûifs réels de la suppression des madragues. 


IL. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX 


DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, 


————— 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 5 JUIN 1874. 


Présidence de M. le D' LABARRAQUE, membre du Conseil. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. 

— M. le Président proclame les noms des membres récem- 
ment admis par le conseil : 


MM. Présentateurs, 


À À { Drouyn de Lhuys. 
Ê .. -P | sr 
ABzAG (le vicomte Jean-Louis-Paul), gérant . Fury Hérard: 


Consulat de France à la Nouvelle-Orléans. 
ÿ l A. Geoffroy Saint-Hilaire, 


Drouyn de Lhuys. 
E. Dupin. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Gustave Andelle. 
(rs de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Dugois DE MONTULÉ (Victor), négociant, tréso- Ê Delaurier, 


ADAM (Edmond), propriétaire, 23, boulevard 
Poissonnière à Paris et à la Ville des Bruyères, 
golfe Jouan (Alpes-Maritimes). 


BROUSSE, propriétaire, maire de Ste-Mélaine, par 
les Ponts-de-Cé (Maine-et-Loire). 


rier de la Société des chasses de la Draconne, { A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

à Angoulême (Charente). Raveret-Waitel. 

Drouyn de Lhuys. 

Jules Grisard. 

Touchard. 

Gustave Andelle. 

Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
xené Caillaud, 


Fessarr (Émile), propriétaire, 66, rue Richelieu, 
et 11, rue des Filles-Saint-Thomas, à Paris. 


FORTIN-HERMANN (A.), ingénieur, 158, bou- 
levard Montparnasse, à Paris. 


FourNié (Édouard), docteur en médecine à 
l’Institut des sourds et muets, 11, rue Louis- { Drouyn de Lhuys. 
le-Grand, à Paris. À. Geoffroy Saint-Hilaire, 

LAiR (Charles), château de Biou, par Longué as de Lhuys. 


(Maine-et-Loire), et 53, rue St-Dominique, à! À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Paris. Jules Grisard. 

LANGLE (le marquis de), 20, boulevard de La-/ Drouyn de Lhuys. ait 
lour-Maubourg, à Paris, et château du Plessis, / À: Geoffroy Saint-Hilaire. 

Se EEE ?) La Rochefoucauld duc de 

par le Sel (Ille-et-Vilaine). Doudeauville, 

A. d’Eichthal. 

À. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Edgar loger. 

3€ SÉRIE, T. |. — Juin 1874. 26 


 Lanauinais (le comte Paul-Henry), 31, rue de 
Luxembourg, à Paris. 


A92 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


LHÉRITIER (Lucien-Alexandre), propriétaire at Geoffroy Saint-Hilaire. 
château de Jutreau, par Saint-Pierre de Maillé Raveret-Wattel. 
(Vienne). ln Touchard. 
LIVONIÈRE (le comte Scévole de), propriétaire, È Bonnafont. 


au château de Chavigny-Beaufort (Maine-et- Drouyn de Lhuys. 
Loire). Marquis de Sinéty. 


. de Grehan. 
MoxoT (André), négociant, 66, rue Hauteville, ne de Lhuys. 
à Paris. A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
MoTTE D’ANNEBAULT (Henri de la), propriétaire, / Drouyn de Lhuys. 
à Saint-Lô (Manche), et 46, boulevard Maillot, ? A. Geoffroy Saint-Hilaire. 


à Neuilly (Seine). H. Marie. 
NicoLas (Louis), propriétaire de la terre d’Arcy An à a 
ÿ : ds : ; ? ZA. Geoffroy Saint-Hilaire. 
22, rue Paradis-Poissonnière, à Paris. : 
Raveret-Wattel. 


NICOLET (Jules), avocat à la Cour de Paris, 19, Aude. 
rue de la Ville-Lévêque et au château de}! A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Créurlle. Raveret-Wattel. 
Crépin. 
OLIVIER, négociant, 41, rue Richelieu, à ns. A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
| Raveret-Wattel. 
PoupARD (Jean), pisciculteur, aquarium et pois-{ René Caillaud. 
sons de diverses espèces, 5, rue ana, | Dre de Lhuys. 
à Paris. A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
PRIEUR (Victor), propriétaire-viliculteur, à la { Comte de Cambourg. 
Girardière-Rablay, par Saint-Lambert du ei 
tay (Maine-et-Loire). Prieur-Carré. 
{ Drouyn de Lhuys. 
E. Dupin. 
Flury-Hérard. 
a de Lhuys. 


SAINT-ROMAN (le comte de), propriétaire, 20, 
rue Taitbout, à Paris. 


VIETTE (Théodore), propriétaire, 60, rue Cau- 


DE ë A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
martin, à Paris. 


A. de Grehan. 


Le conseil a, en outre, admis au nombre des Sociétés 
agrégées LA SOCIËTÉ D'HORTIGULTURE DE LORIENT (Morbihan). 

— M. le Secrétaire procède au dépouillement de la cor- 
respondance. 

— MM. Monot, Prieur, vicomte de Luppé, Félix de Vau- 
guion et Vietle, adressent leurs remerciments pour leur 
récente admission. 

— MM. Eucien Ducloux et Duchastel accusent réception et 
remercient des graines qui leur ont été envoyées par la Société. 


PROCÈS-VERBAUX. 03 


— M. le vicomte de Perrien demande à recevoir divers 
oiseaux en cheptel. 

— M. À. Genesley, de Laval (Mayenne), renouvelle la de- 
mande de Kangourous en cheptel qu’il a faite l’année dernière. 

— M. de Saulcy accuse réception de la graine d’Aétacus 
Pernyi qui lui a été adressée, et fait part de ses craintes de 
ne pouvoir tenter utilement, sous le climat de Metz, l’éduca- 
tion de cette espèce bivoltine. Notre confrère adresse, en 
même temps, des détails sur l’éclosion de ses Affacus Yama- 
mai. as 

— MM. Barailon, Duchastel et Ribeaud rendent compte 
de l’état de leurs cheptels d'animaux. 

— M. Jourdan adresse le compte rendu suivant de ses 
éducationsde diverses espèces de Perruches : « Jusqu’à présent 
je n'ai obtenu que de faibles résultats; cependant je dois vous 
signaler un complet succès pour la Perruche de Swainson. Dés 
le mois de mars, la pariade a commencé ; le premier œuf a été 
pondu le 8 avril et le deuxième le 10 ; l’incubation s’est faite 
aussitôt ; le 1° mai j'ai eu un petit Perruchon, le3,un deuxième, 
par conséquent chaque œuf a donné son produit, la ponte 
s'étant composée de deux œufs seulement. 

« Les premiers jours, le mâle et la femelle couvaientensem- 
ble, ils ne se sont point quittés; au contraire,le mâle entrait le 
premier dans le tronc qui contenait les œufs. Ces oiseaux 
sont très-attachés l'un à l’autre, et leur affection ne s’est pas 
démentie un seul instant. Les petits, qui sont forts à ce jour, 
sontnourris par le père et la mère. La tête est déjà violette, la 
poitrine a la couleur de celle des parents ; le corps est recou- 
vert d’un duvet gris, le bec est tout noir. Les canons des 
ailes commencent à pousser ainsi que ceux de la queue, on 
aperçoit déjà des plumes vertes sur le dos ; la femelle quitte 
le nid pendant la journée, mais elle s’y tient pendant la nuit. 

» J'ai pensé que ces détails pourraient vous intéresser, 
c'est pourquoi je me permets de vous les transmettre, espérant 
vous être agréable, attendu que je crois être le premier qui 
ait obtenu cette réussite. 

» Mes Perruches de Penant et omnicolore s’aecouplaient, 


0h SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


ainsi que le Martin rose avec la femelle de Martin de Pagode 
qui, les uns et les autres, ont produit déjà l'an passé; si j’ob- 
tiens des résullats, je vous les ferai connaître. » 

— M. Bonnefon, de Ribérac (Dordogne), demande à prendre 
part aux concours fondés par la Société pour les bons graina- 
ges de Vers à soie obtenus par l’élevage spécial de petites 
chambrées.— Renvoi à la Commission des récompenses. 

— M. Decroix communique à la Société une lettre qui lui 
a été adressée par M. Delidon, au sujet de ses expériences 
d'élevage de Vers à soie avec d’autres feuilles que celle du 
mürier, en vue d'obtenir des cocons diversement colorés. 

— M. Delidon écrit à M. le Secrétaire général : « J’ai dû, 
l’an passé, par des circonstances tout à fait indépendantes de 
ma volonté, cesser presque complétement mes expériences 
sur l'obtention de soies de diverses GERS par différentes 
nourritures fournies aux Vers. 

» Par ma lettre du 18 mai 1873, je vous mentionnais le 
commencement de mes études à l’aide des sujets que je devais 
à votre obligeance. 

» Le 22 juin 1873, je vous faisais connaître la marche de 
l’expérience et, le 18 juillet de la même année, je vous donnais 
un certain détail avec indication de deux couleurs obtenues 
(feuille de cerisier, feuille de poirier). 

» J'avais étendu l'expérience à plusieurs autres feuilles que 
celles par moi tout d’abord indiquées. 

» Bien que le résultat obienu ait été imparfait, je crois 
pouvoir attribuer cela à la faiblesse des Vers, dont le corps est 
devenu flasque même avec la nourriture du mürier, ce qui 
m'a causé une grande mortalité de sujets. 

» J'ai perdu : ceux traités à la feuille de vigne; — à la 
feuille de ronce ou inûrier sauvage ; — à la feuille d’ortie ; 
— et aussi une partie notable de ceux traités avec les autres 
feuilles. 

» Je n'ai pas obtenu de cocons de vigne, ni de mürier sau- 
vage (ronce); j'ai eu un commencement de cocon d'orlie fai- 
blement teinté de vert, mais la teinte verdâtre a disparu et le 
Ver est mort avant d’avoir terminé son travail. 


PROCÈS-VERBAUX. 105 


» Les seuls cocons terminés sont ceux que je vous adresse 
par le même courrier : 

» N° 1. — Blanc (feuille de pommier), ayant une soie gros- 
sière et rude. 

» N° 2, — Jaune (feuille de poirier). 

» N° 3.— Jaunûâtre (feuille de laitue). 

» N° 4. — Jaunûtre (feuille de cerisier). 

» Plus, deux cocons blancs (feuille de mürier). 

» J'ai pu reconnaître qu’un Ver soumis pendant un très- 
petit nombre de jours à l'expérience produisait le changement 
de couleur de la soie. 

» Ainsi les Vers à expérimenter pourraient être tous nourris 
à la feuille de mürier (nourriture habituelle), puis placés sur 
des feuilles autres (vigne, ortie, laitue, etc.), seulement trois 
ou quatre jours et probablement moins avant l'époque de la 
sécrétion de la soie. 

» En agissant ainsi, les sujets ne paraissent pas souffrir et 
leurs descendants doivent être plus disposés qu’eux à la con- 
tinuation de l’expérience. 

» C'est le suc de la plante qui teinte la soie, et elle est suf- 
fisamment teintée lorsque les effets de la précédente nourri- 
ture ont compléternent disparu du corps du sujet. 

» Je me permets de relater ici une petite expérience que je 
viens encore de faire pour la troisième fois et qui réussit par- 
faitement. Cette expérience semble donner raison à l'opinion 
que je viens d’avancer. 

» Il existe dans la campagne, et même dans les jardins, 
principalement sur les choux de cuisine, une chenille dont la 
couleur change suivant les changements apportés aux feuilles. 
de choux par la sécheresse ou l’humidité. Lorsque la feuille 
du chou est d’un vert très-foncé, la chenille (quise nourrit de 
cette feuille) prend une teinte vert foncé; le contraire a lieu 
lorsque la sécheresse fait pâlir la première teinte. J'ai soumis 
plusieurs de ces chenilles à l'expérience sur des feuilles à 
teintes diverses (chou et autres), et j’ai obtenu des sujets tein- 
tés en vert foncé, vert clair, jaunâtre, rougeâtre. 

» Le Ver à soie, véritable chenille, à peau assez semblable 


06 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


à celle de la chenille du chou, doit, étant soumis à la même 
expérience, produire les mêmes effets. 

» Pour réussir parfaitement, il faut au résumé : 

» 4° Nourrir les Vers àsoie avec leur nourriture ordinaire. 

» 2° Ne les soumettre à l'expérience que peu de jours avant 
le commencement de la sécrétion de la soie. Je conseille, pour 
être sûr d'une bonne réussite, un très-petit nombre de jours, 
trois ou quatre; si toutefois il est possible de reconnaître 
les dispositions du Ver à produire le cocon. 

» J'affirme de nouveau que la soie peut être teintée diver- 
sement par la nourriture fournie au Ver. » 

— M. le docteur Turrel, délégué de la Société à Toulon, 
adresse à M. le Président la lettre suivante: « La Société 
d’acclimatation se préoccupe, avec une louable sollicitude, des 
moyens d'accroître les ressources alimentaires de notre pays. 
Non-seulement elle cherche à doter la France d’espèces ani- 
males domesticables, ou même pouvant y vivre en liberté dans 
nos parcs et nos forêts. Mais encore et surtout, elle accorde un 
vif intérêt à la conservation de nos richesses naturelles ; à plus 
forte raison s'explique sa sympathique intervention pour pro- 
curer au pays une nourriture saine et abondante qui ne coûte 
pour la produire que les frais de récolte. 

» Notre Bulletin a reçu ma plaidoirie en faveur du rétablis- 
sement des madragues, et ma réponse aux objections opposées 
par M. le Ministre de la marine. J'espère qu’il accueillera avec 
non moins d’empressement l’argumentation décisive du pré- 
sident de la Société académique du Var, M. Rimbaud, qu'il 
est de mon devoir de délégué de porter à votre connaissance. 
M. Rimbaud, ancien officier du Commissariat, a étudié à fond 
toutes les questions qui se rapportent aux pêches, à l’inserip- 
tion maritime, et il a écrit un livre très-remarquable, l’/ndus- 
trie des eaux salées. Il est donc juge très-compétent, et je ne 
doute pas que notre Société ne trouve dans cette remarquable 
lettre écrite à M. le Ministre de la marine des raisons suffi- 
santes et décisives pour prendre de nouveau en mains une 
cause qui intéresse à un si haut degré l’alimentation publique 
et la prospérité de nos populations riveraines. 


PROCÈS-VERBAUX. 07 


» Dans sa lettre à M. le Ministre de la marine, écrite au 
nom de la Société académique du Var, M. Rimbaud n'a pas 
pu ou voulu tout dire. Mais ce qu'il affirme, ce que j'ai dit 
moi-même dans la Controverse des madraques, c'est que 
toute l’opposition au rétablissement de ces puissants et pré- 
cieux engins de capture des Thons vient de l’obstination et 
du parti pris du Bureau des pêches, qui font perdre à nos po- 
pulations le bienfait de cette prodigieuse et providentielle mi- 
gration de poissons nomades dont elles jouissaient autrefois. 
Aujourd'hui les bandes de Thons, de Pélamides, de Bonites, 
longent impunément nos côtes et vont se faire prendre dans 
les madragues italiennes. Le Thon nous revient mariné d'Italie 
et d'Espagne, et nous perdons bénévolement les avantages de 
notre position qui nous permettrait d'en capturer des quantités 
considérables. 

» Ce que n’a pas dit M. Rimbaud, c'est que, si, comme l’ob- 
jeete M. le Ministre (voy. la Controverse des madraques), « le 
» poisson migrateur s’est éloigné de nos côtes par une raison 
» inexplhcable, » cela tient uniquement aux ravages exercés 
sur nos fonds de reproduction des espèces sédentaires par les 
filets traînants. Les poissons de proie recherchent le poisson 
sédentaire, plus délicat quele poisson blanc, dont ils font leur 
pâture habituelle. Done, ils ne viennent plus dans les golfes 
dépeuplés de leur population fixe. Les madragues, en favori- 
sant le frai des poissons locaux, seraient donc un appât pour 
le retour des Thons. Ils viennent encore à Marseille où il y a 
des madragues, ils s’éloignent de Toulon où il n’y a plus de 
poissons en quantités suffisantes pour les attirer. Mais il est 
constant que, venant d’Espagne, ils vont en Italie, et qu’il n'y 
a pas de raison pour qu'ils ne longent pas nos côtes qui sont 
intermédiaires. x 

» La Société des agriculteurs de France, saisie par la réu- 
nion départementale du Var, organe des vœux de nos popu- 
lations, de la question du rétablissement des madragues, ré- 
clame des arguments à opposer aux prohibitions de la 
marine. 

» J'espère, monsieur et très-honoré Président, que vous 


08 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


voudrez bien communiquer à cette Société, à la tête de la- 
quelle vous êtes aussi placé, notre collective polémique : et le 
moyenle plus convenable, je crois, de lui donner une publicité 
utile, serait son insertion dansnotre Bulletin. 

» P.S. L’honorable M. Rimbaud, aurait pu faire ressortir, 
que même l'abondance exceptionnelle du poisson, due à des 
captures extraordinaires par les madragues, ne saurait en- 
traîner un grand avilissement des prix avec les ressources 
d'expédition qu'offre le réseau des chemins de fer. Les pé- 
cheurs ordinaires n’ont donc pas à redouter aujourd’hui, au- 
tant qu’autrefois, le préjudice de dépréciation qui les menace- 
rait par le rétablissement des madragues. » 

— M. Vavin communique une lettre de M. le docteur Kem- 
merer, relative à ses collecteurs pour le naissain d’'Huîtres. 
« Les personnes qui s'intéressent à l’ostréiculture, dit M. Vavin, 
admireront sans doute avec nous les sentiments qui ont.dicté 
à M. Kemmerer le généreux abandon de son invention ». 

Voici cette lettre : 

« En 1861, j'ai publié ma brochure : Sur les ruches tuilées ; 
dans cette brochure, j'ai fait connaître la éuile mastiquée avec 
chaux hydraulique délayée avec quatre parties d’eau, ou avec 
chaux hydraulique mélangée d’une petite partie de ciment 
pour les préparations instantanées dans le pare même. J'ai 
dit alors que les collecteurs-ciment étaient le dernier mot des 
procédés à employer dans l’ostréiculture. 

» En 1863, j'ai publiéma brochure : Sur la graine d'huître 
et les collecteurs-ciment. 

» M. Coste a fait connaître mes procédés à l’Académie des 
sciences ; toute la presse européenne et américaine les a re- 
produits. Mes brochures ont été traduites en anglais, en italien, 
en allemand; toutes les Expositions m'ont décerné des 
médailles. 

» Personne ne peut donc contester l'invention des tuiles- 
ciment porte-graines. 

» Il ya dix ans, un médecin anglais m'a demandé la per- 
mission de prendre un brevet d'invention pour les #wles 
cimentées Kemmerer. Je le lui ai permis, en lui faisant obser- 


PROCÈS-VERBAUX. 09 


ver que je ne voulais pas qu'on en prit pour la France. Le 
brevet anglais a été pris à Londres. 

» Je voulais laisser aux parqueurs français la libre jouis- 
sance de mes procédés, 

» La question pour les ostréiculteurs d'Arcachon se réduit 
donc à celle-ci : 

» Quand un procédé esttombé dans le domaine public, depuis 
plusieurs années, est-il permis à un industriel de prendre un 
brevet d'invention pour ce procédé ? 

» Il y a quelques années, des propriétaires d'Arcachon 
m'ont adressé les mêmes demandes, parce que le même indus- 
triel a voulu les taxer en vertu d’un brevet d'invention; j'ai 
répondu ce que je réponds encore ici : « J’ar hvré gratuitement 
mes procédés à l'industrie francaise. » 

« Je désire que cette réponse soit publiée par la presse 
locale, pour éclairer les ostréiculteurs d'Arcachon. 

» Les éditions de mes brochures étant épuisées, je prépare 
une nouvelle brochure. » 

— M. le docteur H. Moreau écrit des Herbiers (Vendée) : 
« Jai l'honneur de vous adresser le résultat de mes observa- 
tions sur les gelées de mai 1874, conformément à l'instruction 
que j'ai reçue de vous. Les gelées ont été désastreuses pour 
ma localité : toutes les vignes sont à peu près complétement 
gelées. Les haricots ont été partout détruits ; une grande partie 
des pommes de terre ont été rasées. Les Jeunes pousses des 
bois ont été détruites dans de nombreuses portions de notre 
riche bocage. Je crois que l’abondance et l'étendue de notre 
végétation contribuent pour beaucoup, dans la partie que j’ha- 
bite, à la production des brouillards et des gelées blanches, 
surtout dans les vallées où se produit une énorme quantité de 
vapeur d’eau que condense l’abaissement de la température 
pendant la nuit. Nous sommes à 18 lieues de la mer, au sud, 
et nous sommes gardés, au nord, par une chaîne de monta- 
gnes de plus de 100 mètres au-dessus du niveau de la campa- 
gne. Chaque année les gelées de printemps nous font plus de 
dommages que tous les autres fléaux réunis. 

» Je profite aussi de cette occasion, monsieur, pour vous 


h10 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


faire part de mes observations relatives à mes volières. Les 
grains ayant été fort chers toute l’année, jai cherché un moyen 
économique d'alimenter mon assez nombreuse population 
ailée. Calculant les divers éléments de nourriture que mes 
oiseaux, à l’état libre, pourraient se procurer dans notre pays, 
j'avais déjà, depuis plusieurs années, présenté à mes élèves 
diverses graines sauvages, celles du houx, du pruneau des 
buissons, de l’aubépine, de la ronce, du lierre, de l’as- 
perge, etc. J’avais surtout remarqué qu’ils avaient, en d’autres 
temps, mangé avec plaisir le gland du chêne haché; or, les 
glands comme toutes les autres graines sauvages sont très- 
abondants dans notre bocage. Il y a trois ans, j'avais même 
observé que mes Faisans, nourris exclusivement avec ces diffé- 
rents fruits ou baies, étaient très-gras et très-bons, meilleurs 
qu'élevés avec les grains produits par l’agriculture. Cette 
année, les céréales étant très-chères, j'ai pensé à utiliser l’ex- 
périence restreinte que j'avais déjà tentée. Quoique les glands 
du chêne aient été rares en 1873, j’ai cependant réussi à m'en 
procurer une quantité suffisante pour l'alimentation de mes 
oiseaux depuis la Toussaint jusqu'à ce jour. Pendant toute 
celte période, mes jeunes n’ont vécu à peu près que deglands 
hachés auxquels j'ajoutais des pommes de terre et du son 
mouillé comme variété. Je n’ai jamais vu un seul malade : je 
les ai tous conservés dans un état de santé parfaite, et j'ai pu 
apprécier, ainsi que més amis, la délicatesse de leur chair et 
un degré d’embonpoint très-marqué. 

» J'ai, en outre, constaté une précocité et une fécondité 
surprenantes dans la ponte. Ainsi, dans la seconde quinzaine 
de mars, mes jeunes Faisanes argentées pondaient des œufs 
que je n'ai pas pris soin de soumettre à l’incubation, ils ont 
tous été employés à la cuisine. J'en faisais autant pour mes 
œufs de Faisanes dorées, nées en 1873, lesquelles ont pondu 
beaucoup et pondaient encore lorsque je les ai tout récem- 
ment renvoyées au Jardin d’acciimatation. Un jour, ma do- 
mestique, chargée du soin de ma volière, regrettant de voir 
consommer des œufs que je m'entêtais à déclarer inféconds, 
et piquée sans doute par la curiosité, mit une douzaine d'œufs 


PROCÈS-VERBAUX. A1 


de jeunes Faisanes dorées sous une poule. Vers le milieu de 
l’incubation, je brisai un de ces œufs: je fus bien surpris d'y 
irouver un germe saignant et palpitant. Mes Faisanes venaient 
de partir pour le bois de Boulogne. Je fis immédiatement 
placer sous une poule une dizaine d'œufs qui restaient et ve- 
naient d’être pondus. Je vais avoir prochainement le résultat. 
Quant aux onze œufs restants de l'essai tenté par ma servante, 
la poule ayant sans doute perdu un jour ou deux au début de 
son incubation, je pensais que les œufs ne vaudraient rien, car 
après un retard de plus de vingt-quatre heures de léclosion 
ordinaire, aucun œuf n'était béché: je cassai encore un œuf: 
un jeune Faisan doré, tout prêt à naître, remplissait la coquille. 
Le lendemain, les œufs restants étaient béchés, moins un qui 
s’est réellement trouvé clair sur douze, et j'ai eu neuf jeunes 
naissants qui, à l'heure qu’il est, s'élèvent très-bien, sans dif- 
férence de leurs frères produits par des Faisanes adultes. 

» Je ferai observer que mes Faisans dorés nés en 1873 ont 
toujours vécu ensemble dans le même compartiment et soignés 
de la même façon, et qu'aucun mâle adulte n’a jamais été à 
proximité pour qu'on puisse supposer qu'il ait fécondé de 
jeunes femelles. Les mâles de 1873, quoique n’ayant pas revêtu 
leur plumage adulte, étaient trés-ardents, trés-empressés au- 
tour de leurs sœurs : ils poussaient la nuit et le matin le cri 
du doré adulte, et j'ai été bien des fois à même de les voir 
accomplir l’acte de l’accouplement. Les années précédentes, 
les faisans dorés que j'avais élevés et nourris au grain ne 
m'’avaient pas paru si vigoureux, et des œufs que j'avais une 
fois fait couver avaient été clairs. 

» Quoi qu’il en soit, monsieur le Président, je vous livre Île 
résultat de mon expérience et mes observations dans l'intérêt 
de la science et pour le profit des éleveurs. Que ceux qui ont 
qualité pour juger jugent, s’il est possible, que la nourriture 
des faisans par les glands du chêne soit cause de la fécondité 
de mes jeunes dorés qui n’ont jamais goûté de chènevis ni 
autre alimentation excitante. 

» J'ajoute encore que mes Faisans ordinaires, élevés cette 
année chez moi el nourris presque uniquement de glands, ont 


12 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


pondu plus que d'habitude, et pondent encore régulièrement : 
j'ai peu d'œufs elairs ; les Jeunes naissants sont vigoureux, au- 
cun n'a encore péri. 

» Enfin, toujours à propos des glands, je vous dirai que les 
oiseaux que j'ai reçus l’hiver dernier du Jardin d’acclimata- 
tion (Faisans vénérés, Canards mandarins, carolins, Faisans 
argentés et dorés), et qui, sans doute, n’avaient pas mangé de 
glands jusqu'alors, s’en sont montrés très-friands une fois chez 
moi : généralement ils négligeaient le grain que je leur faisais 
donner de préférence, pour manger les quartiers de glands 
que je ne leur jetais en commençant qu’à titre d’essai et 
d'amusement. 

» Tous les ans je perdais une partie de Faisanes pondeuses 
ordinaires par la chute du rectum que provoquait la ponte des 
premiers œufs. Celte année aucune n’a présenté cet accident, 
malgré l'abondance des œufs que je recueille. Pourrait-on 
attribuer ce résultat à la qualité astringente du gland? 

» Veuillez mettre les éleveurs à même de tirer partie de 
mes remarques et de mes épreuves pour l'élevage et l’alimen- 
tation économique et avantageuse de nos oiseaux de volière. 
Dans les années de cherté des grains, on peut utiliser avec 
profit les graines du houx, de l’aubépine, de l’asperge, du 
pruneau sauvage, les mûres de la ronce, etc., mais surtout Île 
gland du chêne, et la châtaigne que j'ai essayée, mais qui coû- 
terait ordinairement trop cher.» 

— M. le Président de la Société des agriculteurs de France 
adresse le programme des prix fondés par cette Société pour 
l’année 1874 (voy. au Bulletin). 

— M. Dabry de Thiersant, consul de France à Canton (Chine), 
écrit à M. le Président: « Au mois d’août 1873, j'ai eu lhon- 
neur de vous informer que le Ministre des affaires étrangères 
m'avait confié une mission en Birmanie, et que je me mettais 
entièrement à la disposition de la Société d’acclimatation. Des 
circonstances indépendantes de ma volonté ne m'ont pas per- 
mis de faire ce voyage, et J'ai dû rejoindre mon poste. 

» Depuis mon retour à Canton, j'ai fait de nombreuses re- 
cherches que je vous communiquerai bientôt, et qui vous prou- 


PROCÉS-VERBAUX. 13 


veront que Je n’ai pas oublié les promesses que je vous ai faites 
avant mon départ. 

» En attendant, je suis heureux de pouvoir vous annoncer 
que je vous envoie par le paquebot l’Anadyr, qui quittera 
Hong-Kong le 23 de ce mois, un aquarium et deux grands pa- 
niers contenant 400 poissons de Chine, parmi lesquels se trou- 
vent les fameux Æia-yu ou poissons domestiques, dont l’accli- 
matation serait un véritable bienfait pour notre pays. 

» Les plus grandes précautions ont été prises pour que ce 
précieux envoi parvienne à sa destinalion dans les meilleures 
conditions possibles. MM. Rigodit, lieutenant de vaisseau, 
commandant de l’Anadyr, et Darcé, commissaire du même 
paquebot, m'ont promis de faire tous leurs efforts pour que 
mes petits protégés trouvent à leur bord les soins dont ils 
sont dignes. J’ai écrit, en outre, à M. A. Hesse, délégué de la 
Société à Marseille, pour le prier de les recevoir à leur arrivée, 
et de leur donner l’hospitalité jusqu'à ce que vos instructions 
lui soient parvenues. 

» Voustrouverez ci-joint quelques spécimens des principales 
plantes aquatiques qui sont données pour nourriture dans le 
sud de la Chine aux poissons domestiques. Par la prochaine 
malle, j'aurai l'honneur de vous adresser un mémoire sur la 
manière dont ces poissons sont élevés par les pisciculteurs de 
la province du Kouang-Tong. » 

Dix de ces poissons seulement sont arrivés vivants à Mar- 
seille où ils sont encore en ce moment dans les bassins de 
M. Hesse, notre délégué. 

— M. H. S. Thomas, de Mangalore (Inde anglaise), fait 
parvenir à la Société diverses dépouilles d'oiseaux et un 
spécimen préparé de Barbus Thomassi (Day). — Remerci- 
ments. 

— M. le professeur Spencer F. Baird, président de la com- 
mission des pêcheries nationales à Washington, annonce 
l'envoi d’un exemplaire de son rapport sur l'industrie des 
pêches côtières dans l'Amérique du Nord, ainsi que sur la 
faune ichthyologique de cette région. — Remerciments. 

— M. le Chargé d’affaires de la légation de France au 


hi SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Pérou adresse un lot de graine de Coca {Erythroxylon coca) : 
« La difficulté, écrit-il à M. le Président, de me procurer ici 
cette plante, qui n'existe que dans les régions éloignées de 
l'intérieur, m'avait fait différer jusqu’à présent de répondre à la 
Société. J'ai aujourd’hui la satisfaction de vous annoncer que 
M. Colpaert, auquel vous vous étiez adressé de votre côté, 
vient de m'envoyer de Cuzco un flacon de semences de cet 
intéressant végétal que j'ai fait remettre au paquehot Ville 
de Bordeaux en même temps que cette lettre. 

» En souhaitant plein succès aux essais de culture qui vont 
être tentés dans le midi de la France et en Algérie, je dois 
cependant vous faire part des doutes émis ici par des per- 
sonnes compétentes sur la réussite de ce projet. En dehors 
des difficultés que l’on rencontre même sur la côte du Pérou, 
pour faire germer cette plante, il paraît qu’on ne serait par- 
venu jusqu’à présent à aucun résultat lorsqu'un espace de 
plus de trente jours s’est écoulé depuis l’époque où la graine 
a été recueillie. 

» Dans ces conditions, un envoi de Coca déjà germé aurait 
seul quelque chance de satisfaire au but que se propose la 
Société d’acclimatation ; mais il reste à savoir si ce végétal 
si sensible serait en état d’affronter une aussi longue tra- 
versée. » 

— L'Association française pour l’avancement des sciences 
fait connaître qu’elle tiendra sa troisième session à Lille, du 
20 au 27 août 1874. Outre les séances générales et les séances 
de section, des excursions scientifiques seront organisées par 
les soins du Comité local de Lille. 

— La Société de géographie adresse divers documents re- 
latifs au Congrès international des Sciences géographiques, 
qui se réunira à Paris au printemps de 1875. 

— M. le Président informe la Société que notre collègue, 
M. le docteur Maurice Girard, vient d’être nommé délégué de 
l’Académie des sciences pour les études à faire sur le PAyl- 
loxera de la vigne. 

—— À l’occasion de l'envoi de poissons chinois fait par 
M. Dabry, M. Millet insiste sur la nécessité pour notre Société, 


# 


PROCÈS-VERBAUX. AL5 


de faire des démarches auprès des compagnies de chemins de 
fer, en vue d'obtenir des facilités pour le transport des ani- 
maux ou des végétaux qui lui sont adressés. Notre confrère 
rappelle, à ce sujet, que l’on a dans l’emploi de la glacière 
portative, proposée par M. Tellier, un excellent moyen de 
conservation des œufs ou des graines pour les longs voyages. 

— Au sujet de la lettre de M. Delidon, relative aux essais 
tentés en vue d'obtenir de la soie de diverses couleurs, à 
l'aide d’une nourriture spéciale donnée aux Vers, M. Maurice 
Girard dit qu'à sa connaissance on n’a jamais réussi à me- 
ner à bien des éducations de Sericaria Mori autrement 
qu'avec la feuille de mûrier. Quant aux variations de couleur 
de la peau signalées chez la Chenille du chou, M. Maurice 
Girard rappelle que de semblables observations ont déjà été 
faites sur d’autres espèces, qui paraissent emprunter leurs 
nuances aux plantes dont elles se nourrissent. Il semble même 
y avoir parfois une certaine relation entre la coloration des 
animaux et le milieu dans lequel ils vivent; c’est ainsi, par 
exemple, que les animaux du désert revêtent souvent des 
teintes rappelant celles du sable. 

M. le docteur Boisauval ne croit pas non plus à la possibi- 
lité d'élever utilement le Ver à soie ordinaire autrement 
qu'avec le mürier. Il fait remarquer combien sont chétifs les 
cocons envoyés par M. Delidon, et déposés sur le bureau ; leur 
coloration particulière ne lui paraît due qu'à l’état maladif 
des Vers, qui ont jeùné, faute d’une nourriture appropriée à 
leurs besoins. 

M. Geoffroy Saint-Hilaire partage cette manière de voir, et 
ne pense pas quil y ait lieu de poursuivre les expériences, en 
présence du très-petit nombre de Vers qui supportent le 
changement de régime, et ne donnent, somme toute, qu’une 
soie presque de couleur normale. 

— M. le Secrétaire général dépose sur le bureau un envoi 
fait par M. d'Eichthal, de diverses graines du San-Salvador, 
parmi lesquelles on remarque principalement des semences 
de Cédron et de Guaco, plantes employées contre la morsure 
des animaux venimeux, ainsi que des fruits de Pochote, arbre 


î 
16 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


de la famille des Bombacées, dont les graines sont entourées 
d’un duvet soyeux, souvent utilisé pour garnir des matelas, 
des coussins, etc., mais qui, malheureusement, perd vite son 
élasticité ; il est trop court, d’ailleurs, pour pouvoir être filé. 

M. le Secrétaire général dépose en outre, sur le bureau, un 
mémoire fort intéressant de M. Karl Berg, sur l’acclimatation 
de l’Atéacus Yama-maï, dans les provinces Baltiques (voy. au 
Bulletin). Ge travail renferme d'importantes observations sur 
l’utilisation du froid pour prévenir l’éclosion prématurée des 
œufs d’Affacus, sur le degré d’abaissement de température 
que ces œufs peuvent supporter impunément, et sur le nom- 
bre d’unités de chaleur nécessaire à leur éclosion. M. Berg 
fait remarquer que lintroduction de ce Ver à soie dans les 
provinces Baltiques, où 1l semble devoir prospérer parfaite- 
ment, peut devenir un véritable bienfait pour cette région, 
en général peu favorisée sous le rapport des cultures 
diverses, en raison de la rigueur du climat. 

M. Geoffroy Saint-Hilaire signale enfin l’arrivée au Jardin 
d’acclimatalion de plusieurs animaux intéressants à divers 
titres, entre autres : deux tout jeunes Orangs-outans (Simia 
Satyrus), de Bornéo; un Cerf Pudu (envoi de M. Brenier 
de Montmorand), petite espèce du Chili qui n’atleint pas la 
aille d’un chien d’arrêt, se montre irès-robuste, supporte 
facilement nos hivers et conviendrait parfaitement à l’orne- 
mentalion des pelits parcs et des jardins ; enfin, des Gallo- 
perdix sphenura, espèce de Perdrix percheuse qui, grâce à ses 
habitudes, échappe mieux qu’une autre aux attaques des 
bêtes fauves; elle paraît, d’ailleurs, s'accommoder très-bien 
de notre climat; on en a déjà obtenu plusieurs fois des 
reproductions au Jardin. 

— M. Maurice Girard dépose sur le bureau une note de 
M. Christian Le Doux, sur le dévidage du cocon de l’Attacus 
aurota (voy. au Bulletin). L'emploi des chrysalides artifi- 
cielles en caoutchouc, inventées par M. Le Doux, lui a permis 
d'obtenir avec facilité la soie de l’Awrota, sans autre outil- 
lage que celui partout adopté; le dévidage, pouvant se faire 
ainsi à la bassine ordinaire, rentre tout à fait dans le domaine 


, # 
PROCÈS-VERPAUX. A17 


industriel, eb rien ne saurait empêcher désormais nos fila- 
teurs danse cette sole, qu'on peut se procurer en abon- 
dance au Brésil, et dont les qualités diverses nous étaient 
récemment signalées par notre confrère, M. le docteur For- 
gemol. 

— En déclarant close la session de 1873-74, M. le Prési- 
dent adresse aux membres de la Société des remerciments 
pour le zèle dont ils ont fait preuve dans le cours de cette ses- 
sion, et il exprime l'espoir que l’année prochaine les retrou- 
vera lous animés du même dévouement pour l’œuvre com- 
mune. 

IL est déposé sur le bureau : 

1° De la part de M. Charpentier, éditeur : Aventures et 
chasses dans l'extrême orient, par M. Thomas-Anquetil. 

2° De la part de l’auteur, M. le comte Druilhet : 

Les plantes d'appartements ; histoire et culture. 

3° Programme général des concours pour 1875 et années 
suivantes, et questions posées aux correspondants de la 
Société centrale d'agriculture de France. 

h° Annuaire de la Société des études japonaises-clu- 
noîses, etc., publié par Émile Burnouf et Imamura Waran, 
secrétaires. 

5° Tableaux de population, de culture, de commerce et de 
navigation formant, pour l’année 1870, la suite des tableaux 
insérés dans les notices statistiques sur les colonies françaises. 
Paris, Imprimerie nationale, 1874. 


Le Secrétaire des séances, 


RAVERET-WATTEL. 


3° SÉRIE, T. [. — Juin 1874, 27 


Es 
IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE COBRESEONSE, 


Dépêche de S. M. l'Empereur du Brésil. 


Dans la dernière réunion du Conseil d’administration, M. le Président a 
donné lecture d’une dépêche des plus flatieuses qu’il venait de recevoir de 
S. M. l'Empereur du Brésil, protecteur de notre Société, qui témoigne du 
vif intérêt que S. M. prend à nos travaux. Nos confrères n’ont point oublié 
que, lors de son voyage en Europe, Don Pedro daigna honorer de sa présence 


deux de nos séances générales. 
Rio-de-Janeiro, le 5 juillet 1874. 


À Monsieur Drouyn de Lhuys, Président de la Société d'acclimatation. 


Notre Société ne travaille pas en ce moment, mais je ne veux plus tarder 
à vous prier d'accepter mes félicitations pour l'inauguration du télégraphe 
électrique entre l’Europe et le Brésil, et de les transmettre à notre Sociélé 
et à tous ceux qui ont été si bienveillants pour moi, 


DON PEDRO SECOND. 


Prix fondés par la Société des agriculteurs de France. 


Nous recevons de la Société des agriculteurs de France la circulaire sui- 
vante que nous nous empressons de reproduire : 


Monsieur le Président, 


Le Conseil de la Société des agriculteurs de France a décidé, dans sa séance 
du 25 mars, qu’un prix de 1000 francs serait attribué à l’entreprise de 
moissonnage mécanique qui, en 1874, aurait opéré sur la plus grande éten- 
due de terrain, dans les conditions les plus économiques. 

La nature de celte récompense et le chiffre de la prime vous indiquent 
assez l'importance que la Société attache à ce concours ; pour lui donner 
toute la sincérité et toute la publicité nécessaires, nous vous prions, Mon- 
sieur le Président, de vouloir bien nous apporter votre coopération en nous 
faisant transmettre les renseignements que peut posséder la Société que vous 
présidez, et en insérant dans son Bulletin un extrait de la présente lettre et 
le programme des prix de la Société des agriculteurs de France, dont l’énu- 
mération générale se trouve ci-jointe. 

Les concurrents doivent être inscrits avant le 20 juin, de facon à ce qu’on 
puisse suivre leur travail pendant la moisson. Nous vous prions, par consé- 
quent, de nous faire connaître, avant cette date, leurs noms et leurs rési- 
dences. 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 449 


Nous vous demanderons, de plus, de nous envoyer après la moisson les 
renseignements suivants : 

1° Nom de l'entrepreneur et sa résidence ; 

2° Nom de la machine; son genre d’attelage (chevaux, mulets ou bœufs); 

9° Nombre d'hectares moissonnés ; prix payé par hectare à l’entrepre- 
neur ; prix payé dans le pays par hectare aux ouvriers moissonneurs ; 

L° Nature des céréales coupées ; 

59 Prix par nature de céréales. 

Ces derniers renseignements devront être adressés avant le 1° octobre 
à la Société des agriculteurs de France, 1, rue Le Peletier, à Paris. 

Nous vous remercions à l’avance, Monsieur le Président, de l’aide que 
vous voudrez bien prêter à la Société des agriculteurs de France dans l’or- 
ganisation de ce concours. 

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments 
les plus distingués. 

Le Président, 
Le Secrétaire général, DROUYN DE LHUYS. 
ED. LECOUTEUX. 


La Société des agriculteurs de France décernera, durant sa session an- 
nuelle de 4875, cinq prix de 1000 francs chacun. 

1° Au meilleur procédé de destruction du Phylloxera vastatriæ ; 

29 À l’entreprise de moissonnage mécanique qui aura opéré, cette année, 
sur la plus grande surface, dans les conditions les plus économiques : 

3° À Ja weilleure et à la plus économique installation agricole de distille- 
rie, au point de vue de l’utilisation de la betterave et de ses résidus. Le con- 
cours aura lieu dans les départements de la Seine, de Seine-et-Marne, de 
Seine-et-Oise, de l'Oise et de la Somme; 

_ 4° Aux instituteurs primaires, communaux ou libres, des départements de 

la Marne, de la Haute-Marne, de Meurthe-et-Moselle, de la Meuse et des 
Vosges qui, par leur enseignement et la tenue de leur jardin, auront fait les 
plus louables efforts pour développer chez leurs élèves le goût de l’agricul- 
ture et auront obtenu les meilleurs résultats. 

Il appartiendra aux commissions qui seront ultérieurement formées, de 
diviser la somme de 1000 francs en autant de prix qu'elles le jugeront con- 
venable ; 

5° À ja meilleure jumenterie privée ou par association, dans les départe- 
ments du Finistère, des Côtes-du-Nord, du Morbihan, d’Ille-et-Vilaine et 
de la Loire-Inférieure, 

Le conseil, prenant, en outre, en considération les propositions faites par 
la section d'agriculture proprement dite et la section de sériciculture et 
entomologie, a décidé que deux des prix à décerner dans les concours ulté- 
rieurs seront attribués : 

1° Au procédé le meilleur et le plus économique pour la conservation des 
fourrages verts ; 


20 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


2° a. À la meilleure méthode d’apiculture; b. au fabricant qui pourra 
fournir, au plus bas prix, aux sériciculteurs des microscopes de 200 dia- 
mètres. 


Emploi de l’Osier par l’industrie anglaise. 


On se préoccupe depuis quelque temps, en Australie, de la culture de 
l'Osier, en vue de satisfaire en partie à la consommation considérable que 
font de ce produit l’industrie et le commerce anglais. Bien que récoltant 
beaucoup d’Osier, PAngleterre est loin d'en produire ce qui lui est néces- 
saire, et elle en importe chaque année plus de 5000 tonnes, représentant 
une valeur de 46 000 livres sterling environ. Get Osier sert à une multitude 
d'usages différents, et pour lesquels, en France, on emploie plus générale- 
ment le bois. C’est ainsi qu’en Angleterre beaucoup d’emballages se font 
dans de solides mannes, remplacées chez nous par des caisses, Il s’y fait aussi 
une grande consommation d’Osier pour des vanneries beaucoup plus fines, 
et même pour une foule d'objets de luxe. Aussi en distingue-t-on un grand 
nombre de qualités différentes, 

Nos voisins ne distinguent pas moins de trois cents variétés d’Osier. 
M. Scaling, de Basford, près Nottingham, possède les plus importantes cul- 
tures d’Osier d'Angleterre. Longtemps fabricant de vannerie, il a quitté sa 
manufacture pour cultiver lui-même le Saule et doter l’industrie de bonne 
matière première. On lui doit un excellent traité pratique de la culture de 
l’Osier (1), 

M. Scaling vient d’adresser à la Société d’acclimatation de Victoria une 
collection des variétés d’Osier qui lui paraissent le plus susceptibles de 
réussir en Australie; cet envoi était accompagné d’un mémoire sur l’im- 
portance qu’il y aurait à propager cette culture dans la colonie. 

(The Australasian.) RAVERET-WATTEL. 


Coloration des cocons de Vers à soie au moyen du 
régime alimentaire. 


Aü nombre des résullais les plus importants que m'ont fournis mes études 
sur les Vers à soie, je place ceux que j'ai obtenus en nourrissant ces animaux 
de feuilles de mûrier saupoudrées de garance, d’indigo ou de chica. 

Les voici résumées sous forme de conclusions : 

4° En obligeant les Vers à soie à se nourrir de feuilles de mürier, sau- 
poudrées de garance ou d’indigo, on peut oblenir, mais on n'obtient pas 
toujours, des cocons roses ou bleus; 

20 La teinte plus ou moins prononcée que présentent ces cocons est due 


(4) Chez Simpkin et Ce, Londres, 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. A21 


à un simple frottement de la peau du Ver sur la soie du cocon, et non à un 
acte essentiellement physiologique ; 

8° Il suffit de {eindre extérieurement, à l'aide d’un pinceau trempé dans 
l’indigo, un Ver nourri à la garance, pour obtenir un cocon bleu; 

h° En lavant avec soin un Ver à scie nourri à l’indigo, on voit l'animal 
produire un cocon blanc; 

5° Le régime à la garante et à l’indigo n’exerce aucune action sur les 
trachées. Done, les expériences basées sur ce régime ne sauraient être invo- 
quées en faveur de Ja prétendue circulation péritrachéenne des insectes. 
Du reste, nous avons prouvé, par d’autres considérations et d'autres expé- 
riences, l’êmpossibililé absolue de cette circulation ; 

6° Le régime à la garance et à l’indigo n’exerce non plus aucune action 
sur les réservoirs de la soie. Done, il serait irrationnel de chercher à donner, 
au moyen de ce régime, une teinte durable et uniforme aux cocons destinés 
à la filature. 

(Extrait de la Notice sur les travaux scientifiques et sur les titres uni- 
versilaires et académiques du D' N. Jorx.) 


Société d’acclimatation de Victoria. 


L’Australasian signalait dernièrement les principaux travaux accomplis 
depuis l’année dernière par la Société d’acclimatation de Victoria, qui pour- 
suit avec zèle et persévérance son utile mission. La pisciculture est toujours 
de sa part l’objet d’une attention particulière ! une somme de 357 livres ster- 
ling (8925 fr.) vient d’être affectée à la création de deux étangs pour l’éle- 
vage de la Truite, à Wooling, Mount-Macedon. L'un de ces étangs est 
consacré à la Truite saumonée, l’autre à la Truite ordinaire. Tous deux, 
déjà remplis d’alevins, serviront bientôt à peupler les divers cours d’eau de 
Ja colonie. 

Une importante faisanderie a été créée dans un endroit heureusement 
choisi, à 40 milles de Melbourne. L'installation paraît ne rien Jaisser à dé- 
sirer, et l'élevage annonce y fort bien réussir. 

Le troupeau d’Autruches que la Société entretenait à Wimmera vient 
d’être transféré à Murray-Downs, Swan-Hill, localités que l’on considère 
comme devant être un séjour plus favorable pour ces oiseaux. On compte 
y installer prochainement un appareil d’incubation artificielle, semblable à 
ceux dont on fait usage dans les fermes à autruches de la colonie du Cap. 

Le troupeau de Chèvres d’Angora continue également à prospérer sous 
Phabile direction de M. Samuel Wilson. Depuis l’année dernière il s’est élevé 
de 108 à 173 têtes, et la Société est déjà en mesure de céder aux éleveurs 


une cinquantaine de Boucs de race pure. 
R.-W. 


122 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


Introduction de l’Orfe en Angleterre. 


Lord Arthur Russel vient d'introduire dans un des étangs du duc de 
Bedford, à Woburn Abbey, où il espère en acclimater l’espèce, une cen- 
taine d’Orfes (Cyprinus orfus), provenant de Wiesbaden. Ces poissons, âgés 
d’un an, ont, grâce à la température peu élevée de la saison, supporté par- 
faitement le voyage ; un seui est mort en route. On les avait placés dans 
deux bacs en fer-blanc, où l’eau pouvait être facilement renouvelée pendant 
le transport. L’Orfe, qui ne se rencontre que dans quelques eaux de l’Alle- 
magne, peut atteindre, à son entier développement, un poids de trois livres. 
La variété de couleur rouge vermillon, connue des Allemands sous le nom 
de « Golden-orfe », était autrefois très-recherchée pour orner les pièces 
d’eau; mais l'introduction en Europe de la Dorade de Chine, lui a fait 
perdre la vogue dont il jouissait. Aujourd’hui, ce poisson n’est pas très- 
commun ; on en voit dans les étangs du palais impérial de Laxenburg, près 
Vienne et aux environs de Wiesbaden, où lord Russel a pu s’en procurer, 
par l'intermédiaire de M. Kirsch, directeur de l’Association de pisciculture 
de cette ville. RW. 


Le Saumon du Sacramento. 


Les Proceedin s of the American Fish Culturist's Association donnent 
quelques détails que nons croyons devoir reproduire en partie, sur une ten- 
tative faite aux États-Unis, en 1875, pour l'introduction, dans les cours 
d’eau des États du Sud, du Saumon propre à certaines rivières californiennes, 
le Sacramento en particulier, et qui paraît constituer une espèce distincte 
du Salmo salar. L'opération fut confiée aux soins de âl. Liviugston Stone, 
secrétaire de l’Association, qui a déjà mené à heureuse fin, on se le rap- 
pelle plusieurs missions analogues Cet habile praticien se rendit de bonne 
heure, en septembre, sur les bords de la rivière Mc-Cloud (un des affluents 
du Sacramento), où il pensait arriver fort en avance, supposant, d'accord 
en cela avec MM. les Commissaires des pêcheries de Californie, que le Sau- 
mon en question devait frayer vers la fin d'octobre. Quel ne fut pas son 
étonnement en s’apercevant, dès son arrivée, que l’époque de la fraye était 
déjà presque passée ; à tel point qu’il eut quelque peine à se procurer une 
vingtaine de mille œufs. Le produit de cette récolte fui immédiatement ache- 
miné sur l'établissement d’incubation de M. le docteur J.-H. Slack, de 
New-Jersey. Beaucoup d'œufs éclôrent en route ; mais on parvint cependant 
à en sauver suffisamment pour permettre un essai d'introduction dans les 
eaux de la Susquehanna. 

Les œufs du Saumon du Sacramento sont presque deux fois plus gros que 
ceux du Salmo salar; fait qui, joint à celui d’une fraye beaucoup plus 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 23 


précoce, semble nettement indiquer qu’il s’agit bien, en effet, d’une espèce 
distincte. 

D’après M. le professeur Spencer F. Baird, il y aurait, pour les États du 
Sud, un intérêt sérieux à s'assurer la possession de cette espèce, dont les 
frayères se trouvent généralement dans une région où la température esti- 
vale atteint, à midi, de 100 à 1400 (Fahr.). Tandis qu'avec le Saumon 
ordinaire, on ne peut guère compter réussir à peupler sérieusement les 
rivières coulant à l’ouest de l’Hudson, ou même du Connecticut, on a tout 
lieu de croire que le Saumon du Sacramento s’acclimatera facilement dans 
la plupart des cours d’eau tributaires de PAtlantique, et notamment la Dela- 
ware, la Susquehanna, le Potomac, etc. 

Une note, communiquée au journal Américain Forest and Stream, par 
M. G. H. Jérome, commissaire des pêcheries du Michigan, donne aussi 
quelques renseignements sur le Saumon du Sacramento. 80 000 œufs de 
celte espèce ont été mis en incubation, à la fin d’août dernier, dans l’éta- 
blissement fondé par M. Crouch, à 7 milles de la ville de Jackson. Ces œufs 
éclorent dans une période de 10 à 40 jours, la récolte en ayant été faite à 
diverses époques de la ponte. L’alevin, en général bien conformé, actif et 
bien portant, se développa rapidement pendant la résorption de la vésicule 
ombilicale, qui dura 59 ou A0 jours. M. Crouch alimenta ensuite ses jeunes 
poissons avec du foie de bœuf, finement haché et mêlé avec une petite quan- 
tité de crême pour le faire surnager. Cette nourriture était donnée deux ou 
trois fois chaque jour, par rations d’une petite cuillerée à dessert pour la 
totalité de l'élevage. 

Les eaux du Saint-Joseph, du Kalamazoo et de Grand-Rivers ont reçu, en 
moyenne, 15 000 de ces Saumoneaux, dont l’activité et la vigueur, dit M. G. 
H. Jérôme, étaient tout simplement une merveille. Leur rapidité de crois- 
sance n’est pas moins prodigieuse. M. Crouch prétend (et mes observations 
confirment cette manière de voir) que cette espèce double en volume, tous 
les juinze jours, pendant la première période de son existence. Il est d’ail- 
leurs établi que, dans des conditions favorables, elle atteint, en trois ans, le 
poids de 10 à 45 livres. 

« On en a déposé environ 3000 dans Gull-Lake (Kalamazoo-countv), 
pour voir s'ils prospéreront malgré l'impossibilité de se rendre à la mer. Les 
eaux de ce lac sont froides, profondes, lrès-pures, et par conséquent fort 
bien choisies pour cetie expérience. » R.-W. 


La Chèvre d’Angora. 


L’Australasian du 1% novembre dernier renfermait une lettre de 
M. Robert Brute, de Wallelberdina (Australie méridionale), donnant sur la 
Chèvre d’Angora quelques renseignements bons à noter. D’après cet éle- 


A2 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


veur, la Chèvre d’Angora ne serait pas excellente mère, et abandonnerait 
assez facilement son Chevreau, qui n’est, du reste, en état de la suivre qu’un 
jour ou deux après la naissance. Aussi, se trouve-t-on bien, quand faire se 
peut, d’enfermer chaque femelle et ses petits, pendant un certain temps, 
dans un étroit parquet. M. Bruce ne considère pas l’élève de la Chèvre d’An- 
gora comme devant être pratiquée avec avantage sur une très-grande 
échelle. Il pense qu’on aura tout intérêt à n’entretenir qu’un nombre peu 
considérable de bêtes, bien surveillées et mêlées à un troupeau de moutons; 
les deux espèces vivant en bonne intelligence, et présentant la plus grande 
communauté d’allures et d’habitudes. 

On ne peut espérer obtenir du beau mohair que dans un pays de prairies 
ondulées et pourvu de bonne eau. Sur des collines sablonneuses l’espèce 
prospère admirablement, mais le poil est très-inférieur et tombe en outre 
beaucoup plus tôt. 

« Quelques bêtes d’un pelage médiocre, nées chez moi, dit M. Bruce, 
ainsi que des béliers trois quarts de sang, que j'envoyai pendant un temps 
suffisant à Wonoko (à 20 milles de sa résidence), me donnèrent en moyenne 
8 livres de mohair, au prix de 2 sh. 3 d. (2 fr. 80), tandis que je n’aurais 
pas récolté ici (Wallelberdina) deux livres d’un poil grossier, valant tout 
au plus 15 deniers (1 fr, 50) sur le marché d’Adélaïde. En outre, les mêmes 
bêtes auraient chez moi dépouillé leur toison au moins trois semaines plus 
tôt, le terrain sablonneux et l’eau saumâtre de la localité leur convenant 
infiniment moins que les collines vertes et l’eau pure qu'on trouve à Wonoko. 
Ici, la race pure me donne du mohair à 4 sh. 3 d. (1 fr. 55) la livre. 

» Dans un pays favorable, on obtient, par un premier croisement, du poil 
valant 10 deniers (1 fr.) ; et chaque bête en produit à peu près une livre. Au 
second croisement (3/4 de sang) le produit double en quantité et fait plus 
que doubler en qualité. Au troisième croisement chaque bête peut donner 
8 livres de poil, à 2 sh. 3 d. (2 fr. 80). Au delà, on arrive presque à la race 
pure, et le poil n’est guère moins fin que chez les bêtes de pur sang. 

» La viande des métis est excellente: ici tout le monde la préfère à 
n'importe quel mouton ; les mâles en donnent à peu près 85 livres. 

» Je suis convaincu que de petits troupeaux donneront un produit très- 
rémunérateur, dans les localités propres à ce genre d’élève ; mais on n’éprou- 
verait que des mécomptes si le pays était sablonneux, à sous-sol salé, et sur- 
tout si la qualité de l’eau laissait à désirer. Les îles de peu d’étendue me 
semblent être surtout les endroits où la Chèvre d’Angora pourrait réussir. 

» Je parle avec l'expérience que peuvent donner six années de pratique; 
j'ai élevé plus de 2000 de ces animaux, et j'en possède aujourd’hui un 
troupeau de 600 individus, tant métis que de pur sang. 

» Un bon conseil en finissant : éliminer impitoyablement du nombre des 
reproducteurs, les animaux dont le pelage serait bleuâtre ou rougeûtre ; en 
ne parvient jamais que très-difficilement à se débarrasser de ces nuances 
défectueuses, aussi bien que du poil rude, qui persiste pendant un nombre 
considérable de générations. 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE, 25 


Aux détails qui précèdent nous croyons devoir ajouter les suivants, 
empruntés à l'important travail publié par M. Samuel Wilson sur la Chèvre 
d’Angora, dans les Proceedings of the =oological and acclimatation Society 
of Victoria (vol. IT, 1873). 

« D’après M. Polonneau, le lait de la Chèvre d’Angora donnerait un 
excellent fromage et du beurre exempt de toute saveur hircine ». M. Rarruel, 
qui a fait l’analyse chimique da lait d’une Chèvre de demi-sang, donne les 
chiffres ci-après, comparés à ceux du lait de Chèvre ordinaire : 


Chèvre d'Angora. Chiffre ordinaire. 


ButyEumM. 21:02 120.0 ee: 7,85 5,00 
Caséumes asie Mani 37,00 32,50 
Matière sucrée. ........ 39,25 24,25 
Matière extractive....... 8,50 7,50 
IÉDE dot 0 PEER 913,40 930,75 

1000,00 1000,000 


M. Wilson considère comme très-important, quand on possède un trou- 
peau un peu nombreux, de numéroter les animaux, mâles ou femelles, 
pour pouvoir toujours les distinguer facilement afin de n’employer à la 
reproduction que les plus beaux sujets, et arriver par la sélection, à per- 
fectionner la race. On les marque par des entailles faites aux oreilles, à 
l’aide d’une sorte d’emporte-pièce, comme cela se pratique pour les mérinos. 

Le mohair de haut choix atteint quelquefois le prix de 4 sh. la livre. La 
tonte dernière du troupeau appartenant à la Société d’acclimatation de Vic- 
toria et parqué à Longerenong, s’est vendue en moyenne 3 sh. G d. 
(4 fr. 35). 

Si l’on compare la Chèvre d’Angora avec le Bélier mérinos, au point de 
vue de la valeur des produits, on trouve que l’avantage appartient tout à la 
première. En effet, la toison d’une bête Angora donne ordinairement 4 livres 
de poil à 3 sh. 6 d., soit un prix total de 44 sh, (17 fr. 50); tandis que 
chaque Mérinos ne produit en moyenne que 3 livres et demie de laine lavée, 
à 2 sh. 6 d.; soit 8 sh. 9 d. (10 fr. 30) par tête. Quant à la nourriture, il est 
démontré que six Mérinos mangent autant que sept Chèvres d’Angora. 

«Je trouve grand avantage, dit M. Wilson, à tondre les Chèvres deux 
fois par an; le poil ayant des dispositions à tomber au printemps et durant 
le mois de septembre. En l’enlevant tous les six mois, il se salit moins et 
ne se feutre pas. D'ailleurs, la tonte paraît activer sa croissance ; en six 
mois, il atteint 6 pouces de longueur, ce qui est bien suflisant pour en trouver 
le placement dans le commerce. » 

Dans l’Asie Mineure, les bêtes bien soignées sont fréquemment peignées, 
afin de tenir le poil net et propre; cette précaution est fort utile, le poil ra- 
massant, en effet, beaucoup de poussière, de graines d’herbes sauvages, elc. 

Le Chevreau d’Angora est assez délicat et craint le froid ; aussi demande- 


126 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


t-il quelques soins. Quand on laisse les Chèvres paître en liberté, il est bon 
de les surveiller lorsqu'elles sont près de mettre bas, car elle cachent volon- 
tiers leurs petits. Elles ne se montrent pas, d’ailleurs, fort bonnes mères, et 
abandonnent assez facilement leurs chevreaux pour suivre le troupeau, si 
l'on n’a pas le soin de les parquer pendant quelques jours. 

« La chair de la Chèvre d’Angora n’est nullement inférieure à celle du 
Mouton. J’ai mangé du gigot d’une bête de demi-sang, et ne lui ai trouvé 
aucune différence de goût. M. Robert Simson donne même la préférence à 
cette viande, qu’il trouve plus savoureuse que celle du Mérinos .» 

On voit qu’en divers points, M. Wilson se montre ahsolument du même 
avis que M. Robert Bruce, et ces détails nous ont paru intéressants à con- 
signer, en présence des opinions contradictoires souvent émises chez nous, 
à l'égard de la Chèvre d’Angora. RAVERET-WATTEL. 


Chronique d'Amérique. 


La Gomme balata de la Guyane. — La race Shorthorns en Amérique. — Oiseaux 
Aléoutes : le Rissa tridactyla. — La Caille de Californie. — Les acclimateurs 
anglais. — Introduction du Quinquina, du Jalap et du Thé à la Jamaïque. — 
Les Oranges de Taïli et les Ananas des îles Bahamas, — Le Guano , sa com- 
position. — Nouveaux gisements. — Le poison du Bambou, 


La Guyane anglaise exporte depuis quelques années, sous le nom de 
« Balata gum », une nouvelle gomme élastique qui tient le milieu entre la 
gutta percha et le caoutchouc. Les diverses espèces de gomme élastique, 
quoique assez semblables entre elles comme composition chimique, pos- 
sèdent pourtant des propriétés différentes. Le caoutchouc, par exemple, 
s'étend dans toules les directions ; la gulta-percha ne s’étend que dans la 
direction des fibres, elle est aussi d’une nature plus poreuse. M. Melville a 
communiqué à la Société Royale, Agricole et Commerciale de la Guyane 
anglaise, à propos de cette nouvelle substance, un intéressant mémoire où 
nous voyons que l’arbre d’où elle est tirée, le Sapota Mullerii, est égale- 
ment commun à la Guyane francaise. Bien que dès l’origine de Ja colonisa- 
tion on se soit servi de ce Sapotiller comme d’un bois très-résislant pour 
les constructions, il est assez étrange que les abondantes sécrétions laiteuses 
de son écorce n’aient aitiré l’attentien que sirécemment. M. Melville aurait 
été, paraît-il, le premier à le signaler en 1860, sous ce dernier point de 
vue aux capitalistes anglais. Une particularité de cette gomme laiteuse, c’est 
qu’elle est parfois employée pour remplacer le lait dans le café. Elle est 
d’ailleurs parfaitement inoffensive à l’état frais. La gomme balata séchée 
ressemble beaucoup au caoutchouc; elle est supérieure à la gutta-peréha et 
la remplace avantageusement dans toutes les circonstances où celle-ci est 
employée. 

Aujourd'hui, la province de Berbice en exporte environ 4000 kilogrammes 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 127 


pour l’Angleterre. L'île de la Trinité commence aussi à en tirer un parti 
profitable. M. Day a fait ressortir l’année dernière, devant l'Association scien- 
tifique de Trinidad, les avantages à tirer de cet abondant produit naturel. 
Lä Guyane française ne doit pas rester en arrière ei abandonner à ses voi- 
sins tous les bénéfices d’une pareille ressource de son sol. 

Nos éleveurs de bestiaux pourraient souvent prendre exemple sur les 
éleveurs anglais qui, comprenant l'importance de la filiation dans les races, 
ne reculent devant aucun sacrifice, alors qu'il s’agit pour eux de se procurer 
des étalons de premier choix. Un fait assez étrange, c’est qu'après avoir 
amélioré des races au point de les avoir pour ainsi dire créées de toutes 
pièces, c’est souvent à l'étranger, et particulièrement en Amérique, que ces 
mêmes Anglais vont chercher les plus beaux types des originaux dus tout 
d’abord à leurs efforts. Il est vrai que, soit influence du climat, soit déploie- 
ment de soins plus intelligents encore dans les procédés d'élevage, les 
agriculteurs américains ont fait des merveilles avec le bétail d’origine an- 
glaise, C'est ainsi que le colonel King, de Minneapolis, État de Mumesota, 
s’est acquis une réputation incontestée pour ses Shorthorns. Exproprié 
par la ville d’une grande partie de son pâturage principal, M. King a mis 
en vente tout récemment 80 des plus belles bêtes äe son troupeau, Tau- 
reaux et Vaches. 

L’affluence des amateurs était considérable à Dexter Park, où la vente 
avait lieu. Un taureau de trois ans, bien connu sous le nom de « Second Duc 
de Hillhurst », de robe rouge et blanche et d’un modèle parfait, a surtout 
excité l'admiration des connaisseurs. La première enchère portée sur cet 
animal a été de 10 000 dollars, c’est-à-dire plus de 50 000 francs, enchère 
bientôt couverte par d’autres qui firent monter la bête à 14 000 dollars, soit 
plus de 75 000 francs, prix auquel elle fut adjugée à M. George Robbins de 
Londres, agissant pour le compte d’un fermier d'Angleterre. Une surenchère 
de 140 000 francs fut offerte à M. Robbins, qui refusa en déclarant que 
son commettant lui avait recommandé de pousser le taureau en question 
jusqu’à 20 000 dollars s’il ne pouvait l'avoir à moins. Le précieux animal 
doit être en ce moment bien près d’arriver en Angleterre. 

Deux ou trois Veaux produits du « Second duc de Hillhurst » ont atteint 
également des prix fort élevés. 

Quant aux Vaches, quelques-unes ont dépassé 5000 dollars. 

D’autres Taureaux de la même vente doivent aussi, paraît-il, franchir 
l'Océan. Voilà une espèce d’acclimatation bien entendue et dont le succès 
est suffisamment démontré par le total des sommes empochées par le colo- 
nel King. 


Depuis l'annexion de l'Amérique russe à l’Union, les nouveaux territoires 
ont été de la part de certaines Sociétés savantes américaines l’occasion 
d’études intéressantes dans les différentes branches des sciences naturelles. 
C’est ainsi qu'a paru récemment dans les « Transactions » de l’Académie 


128 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


des sciences de Californie un curieux mémoire de M. W. Dall, sur le Réssa 
tridactyla oiseau qu’on rencontre en grand nombre dans les parages des 
îles Aléoutes. Les nids, les œufs et les jeunes que s’est procurés M. Dall, 
en juillet 4872, viennent de l’île Ronde et de l'île Ounga. 

Ces oiseaux étaient, à celte époque, communs à Delaroff Harbor, on en 
voyait aussi à Kadiak, mais il ne s’en trouvait pas à Ounalaska, ni à 
l’ouest de la Passe d’Ounimak. M. Dall raconte qu’en entrant dans Coal 
Harbor, à l’île Ounga, Jui et ses compagnons furent frappés de l'espèce de 
ligne blanche bizarre qui entourait les rochers à pic de l’île Ronde et qui 
n’était autre qu’une rangée continue d’eiseaux. Dès qu'il le put, M. Dall prit 
un canot et alla voir de plus près ce singulier spectacle. Les nids parais- 
saient à première vue collés à la surface perpendiculaire du sol, mais, en y 
regardant avec plus d'attention, on reconnaissait qu’il existait dans le rocher 
deux couches parallèles superposées qui, pius dures que les couches voisines, 
n'avaient point été rangées comme elles par l’action du temps, et formaient 
une sorte de chemin de ronde d’une saillie, plus ou moins irrégulière de 
5 à 7 centimètres. C'était sur cette saillie et la dépassant de plus de la 
moitié de leur largeur, qu’étaient construits les nids. Les rangées de ces nids 
suivaient partout les contours des saillies en question et donnaient au rocher 
un aspect des plus étranges, surtout quand les oiseaux blancs étaient sur 
leurs œufs ou leurs petits. Les nids eux-mêmes étaient faits d'herbes sèches 
agglutinées ensemble et collées à la paroi, probablement par un mucus ad 
hoc secrété par l'oiseau. Le sommet de ces petits édifices avait une légère 
dépression dans laquelle étaient déposés deux œufs. La colonie ailée exha- 
lait une intolérable odeur de guano, et les nids étaient extrêmement mal- 
propres. 

« Les oiseaux, raconte M. Dall, ne s’inquiétèrent guère de notre approche; 
ils ne quittaient leurs postes que les uns après les autres à mesure que 
nous en arrivions en quelque sorte à portée du bras. Je grimpai contre le 
rocher et enlevai deux nids, l’un vide, l’autre contenant deux jeunes. Le 
vent qui s'élevait nous contraignit à nous éloigner. L'oiseau dépossédé 
revint alors s’abattre sur le point où avait été son nid et ses petits, et ne trou- 
vant plus rien il manifesia un étonnement évident. Après avoir voltigé à 
droite et à gauche pour bien s'assurer du fait de cette mystérieuse dispari- 
tion de ses pénates, le pauvre animal s’en prit à son voisin le plus proche 
et lui livra un combat à outrance. » 

Comme le canot gagnait le large, les deux oisillons qu'emportait M. Dall 
se trouvèrent désagréablement impressionnés par le roulis et donnèrent des 
symptômes non équivoques de mal de mer; ils ne tardèrent pas à vomir 
leur dernier repas sur le bord du nid. Ce repas s'était évidemment com- 
posé de petits poisons, mais la digestion était déjà trop avancée pour qu’on 
pût dire à quelles espèces appartenaient ceux-ci. 

M. Dall se procura vers la même époque fun certain nombre d'œufs, 
mais la plupart étaient couvés et bien près de l’éclosion. 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 429 


Ces oiseaux Aléoutes ont des mœurs curieuses. À l'approche d’un canot 
ou de quelque obiet inusité, des éclaireurs se détachent de la troupe, puis 
retournent promptement dans les rangs, et si les nouvelles qu'ils rapportent 
ne sont pas mauvaises, la bande tout entière vient examiner le phénomène 
qui les avait inquiétés d’abord. 

L’acclimatation de la Caille de Californie a été tentée sur divers points 
des États-Unis et aussi d'Australie, par les soins de différentes Sociétés 
de chasseurs ou de naturalistes. L’Advertiser de Bendigo annonce que 
dans ce territoire le succès a couronné les efforts des acclimatateurs. 
Ces oiseaux augmentent en nombre sur plusieurs points et mulliplient à 
souhait. Un nid contenant des œufs venait d’être trouvé dans le cimetière 
de Back Creek. D’autre part, les pigeons indiens se sont montrés à quelque 
distance de Sandhurst. Quant à la pisciculture, elle est également en bonne 
voie. Les réservoirs ont été remplis de poissons, et les Dorades, à Anderson’s 
Flat, ont atteint de très-belles proportions. Les Lièvres lâchés dans le dis- 
trict ont prospéré et multiplié. 


Les Anglais ne négligent rien de ce qui peut développer les ressources 
de leurs nombreuses possessions coloniales, transplantaïit de l’une à l’autre 
animaux et végétaux de toute sorte appropriés aux différents climats, aux 
différents sols, et s’assurant partout le concours des hommes de science et 
de progrès. L'Australie a reçu nos animaux domestiques et nos poissons, 
nos oiseaux, nos gibiers, nos vignes. Elle nous a donné en échange des 
arbres précieux, des plantes uliles. Aujourd’hui la plupart des colonies 
anglaises de la zone intertropicale dirigent leur attention sur la culture du 
Quinquina (chinchona), qui a très-bien réussi dans l'Inde. Mille arbres de 
cette espèce ont été plantés à Sainte-Hélène. La Jamaïque en a reçu un grand 
nombre qui y prospèrent à merveille. Le Jardin botanique de cette île en 
possède une culture d’une dizaine d’hectares, où des arbrisseaux de deux 
ans ont donné près de trois pour cent de quinine. Par les soins du même 
établissement, une petite plantation de Thé a été installée à une altitude de 
1200 mètres. On y a aussi introduit le Jalap, qui promet de donner des 
bénélices sérieux. On sait que l’fpécacuauha a élé acclimaté ainsi dans 
l’Inde ; le Sikkim, dans l'Himalaya, en a près de 7000 plants, et l’on en voit 
d00 ou 600 à Calcutta. Il nous serait facile de grossir cette liste, qui fait 
honneur aux efforts et à la persévérance des acclimatateurs anglais. 

Faute de pouvoir acclimater, on importe. Quand il s’agit de fruits, les 
résultats sont parfois bizarres. Il est curieux de penser, par exemple, qu’un 
certain nombre des Oranges qui se mangent à Chicago, la ville aux incendies 
gisantesques, se récoltent aux îles Marquises, en plein Pacifique. Le com- 
merce des Oranges entre Taïli et San Francisco, gagne tous les jours en 
importance. Nos statistiques coloniales nous montraient, dès la fin de 1869, 
onze navires d’un tonnage réuni de 1468 tonneaux partant de ce dernier 
port pour aller prendre des cargaisons d’Oranges à Taïli, et revenant chargés 


re a 
30 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


de ces fruits au commencementde 1870. Or, toutes ces Oranges ne se man- 
gent pas en Californie ; le chemin de fer en apporte jusqu’à New-York. 
Une importante maison de Papéiti en fournit aujourd’hui à elle seule plus 
de deux millions. 

D'un autre côté, l'Amérique et surtout les Antilles, nous envoient à l’état 
presque frais des chargements entiers d’Ananas. Depuis quelques années 
les Ananas se crient dans lesrues de Paris ; moins il est vrai qu’à Londres, 
où il s’en débite ainsi dans la saison 25 000 douzaines expédiées des îles 
Bahams seulement. 


Nous avions longtemps cru, et bien d’autres avec nous sans doute, que le 
Guano, ce puissant agent de fertilisation en agriculture, se composait des 
excrela accumulés depuis des siècles de myriades d'oiseaux de mer. Le doc- 
teur Hahel, qui de longue date s’est livré sur le guano à des expériences 
de diverses natures, chimiques, microscopiques, etc., renverse sur ce point 
toutes les idées en cours. En traitant le guano chimiquement, il a obtenu un 
résidu insoluble, composé d’éponges fossiles, d’animaux marins et le 
plantes marines. D’un autre côté, on sait que dans le voisinage des Chinchas 
et autres îles à guano, les ancres des navires ramènent quelquefois du 
guano du fond de l'Océan. De ces faits et d’autres encore, le docteur amé- 
ricain conclut que les dépôts du guano sont le résultat de l’accumulation de 
plantes et d’animaux fossiles dont la matière organique a été transformée en 
une substance azotée, la partie minérale restant intacte. 

Quoi qu’il en soit de cette opinion, l'épuisement rapide des bancs de guano 
du Pérou, fait qu’on s'occupe un peu partout, mais particulièrement en 
Amérique, de la création de guanos artificiels, dont les déchets de poissons 
sont la base principale. A vrai dire, si les nouvelles récentes recues äu 
Pérou ne sont pas empreintes de quelque exagération, il n’y aurait plus tant 
à s'inquiéter de la diminution des dépôts des îles Chinchas. Une commission 
scientifique, nommée par le gouvernement Péruvien pour étudier la question 
des gisements de guano, aurait annoncé la découverte de couches considé- 
rables de cette substance sur la terre ferme. Les anciens habitants du Pérou 
connaissaient l’existence de ces mines d’un nouveau genre, et l’on retrouve 
en grand nombre des traces de leur exploitation. A Pabellon de Pica, les 
sondages ont permis de constater l’existence d’une couche évaluée à six 
millions de tonnes. La pointe de Lobos en fournirait deux millions, et d’autres 
sites en auraient révélé deux autres millions encore, mais de qualité infé- 
tieure. Certaines couches mesurent en épaisseur 60 à 90 mètres. Elles sont 
recouverte, d’un siratum de formation calcaire. 

Les études auxquelles se livre la commission Péruvienne sur ces décou- 
vertes, jetteront sans doute une nouvélle lumière sur l’origine du guano! 
Les lieux où celte substance se rencontre en dépôts si considérables ne per- 


mettent guère de croire que les oiseaux ont été les seuls instruments de sa 
formation. 


FAITS DIVERSMET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 434 


Depuis que la culture du Bambou a été introduite en France, avec un 
certain succès, les plates-bandes du Jardin d’acclimatation en font foi, il 
n’esl peut-être pas inutile de signaler le mauvais renom qui commence à se 
répandre sur ce joli arbuste, ou tout au moins sur quelques-unes de ses 
variétés. Un journal américain, sur la foi d’un sien confrère de Singapore, 
le Séraits Times, insiste sur les propriétés vénéneuses du Bambou, jusqu'ici 
considéré comme un végétal fort inoffensif. À Java, paraît-il, les indigènes 
en extraient un poison subtil sans antidote. Ils l’obtiennent en coupant le 
Bambou à l'endroit des nœuds, et en détachant de la cavité en soucoupe 
que chaque nœud possède, certains petits filaments noirs couverts d’un im- 
perceptible duvet en aiguilles qui constituent le poison dénoncé. Avalés, ces 
filaments ne passent pas dans l’estomac, ils s'arrêtent dans la gorge, pénè- 
trent dans les voies respiratoires, produisent de violent accès de toux, et 
amènent fatalement l’inflammation des poumons et la mort. Des expériences 
auraient été faites sur des animaux avec ces résultats aux Indes et en Amé- 
rique. Nous ne saurions dire si l’on s’est occupé ici de cette question, qui 
n’est assurément pas sans importance. 


OCTAVE SACHOT. 


V. BIBLIOGRAPHIE. 


Précis pratique de lPélevage des Lapins, Lièvres et 
Léporides, en garenne et clapier. 


Par A. GoBin. 


Dans ce petit livre, l’auteur s’est particulièrement attaché à démontrer et 
à justifier, par la physiologie, les principes d'hygiène sans lesquels les éle- 
veurs n’éprouvent qu'insuccès et déceptions. 

Moins enthousiaste que ceux qui ont traité avant lui le même sujet, et qui 
ont souvent promis aux éleveurs, sinon la fortune, du moins des profits 
impossibles, M. Gobin ne fait espérer que des résultats modestes, et partant 
plus réels, si même les chiffres qu’ils donnent ne sont pas au-dessous de la 
vérité. 

M. Gobin a traité son sujet avec clarté et concision, et avec l’autorité que 
lui donnait une longue pratique. On lui saura gré d’avoir réservé une place 
importante dans son livre à l'élevage du Lièvre en domesticité et à son 
croisement avec le Lapin, en vue d'obtenir le Léporide, cet hybride qui 
paraît offrir un intérêt réel et dont la propagation commence à se vul- 
gariser. R.-W. 


Traité des Oiseaux de basse-cour, d'agrément 
et de produit. 


PAR LE MÊME, 


Beaucoup plus complet que la plupart des ouvrages publiés jusqu'ici, sur 
le même sujet, ce livre renferme toutes les noions théoriques et pratiques 
nécessaires pour assurer le succès. Il se recommande tout particulièrement 
aux personnes qui ont le goût de la villégiature, aux propriétaires comme 
aux fermiers, et même aux chasseurs, qui pourront y trouver le moyen de 
repeupler nos bois et d'augmenter les ressources cynégétiques qui tendent 
à faire défaut, 

L'auteur a fort sagement établi une rigoureuse distinction entre les espèces 
de luxe, dont le principal mérite est de faire l’ornement des basses-cours 
ou des volières, et celles que l’on élève spécialement pour le profit qu’on 
peut en tirer ; il s’est attaché à être clair, concis et surlout pratique. Son 
livre est donc un guide sûr à consuller et à suivre,  RAVERET-WATTEL, 


Le gérant : JULES GRISARD, 


PARIS: = IMPRINERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2, 


” 


I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 


UNE FERME D'AUTRUCHES 


(Extrait du Grahamstown Journal) 


TRADUCTION DE M. Raoul BOULARY. 


Un de nos confrères du Port Elisabeth, ayant exprimé le 
désir de visiter la ferme modèle d’Autruches de M. A. Douglas, 
à Hilton, et ce désir ayant été transmis à ce gentleman, l’au- 
torisation fut immédiatement accordée, et quelques jours 
après nous profitâmes nous-mêmes de cette aimable permis- 
Sion. 

Après le déjeuner nous allâmes voir quelques oiseaux âgés 
de plusieurs mois, qui se trouvaient dans un champ de 
luzerne, près de la maison. La luzerne ne montrait aucun 
signe de vie au moment de notre visite, la gelée ayant arrêté 
son développement et les jeunes Autruches ayant arraché 
toutes les tiges desséchées qui dépassaient le sol. 

Nous comprimes cependant que ce champ était très-néces- 
saire à la ferme et qu'il avait, pendant la dernière saison 
sèche, évité une perte en jeunes oiseaux, qui se serait soldée 
par plusieurs centaines de livres. On nous montra une des 
extrémités du champ où tout signe de végétation avait disparu 
et l’on nous expliqua que la cause en était due aux piétinements 
des jeunes oiseaux, qui, lorsqu'ils sont séparés pour la pre- 
mière fois de leur gardien (un jeune Hottentoi), se promé- 
nent d’une manière désespérée, çà et là, à l'extrémité du 
champ, et cela plusieurs jours après avoir été séparés de leur 
gardien et protecteur. Un semblable instinct de gratitude 
prouve assurément que l’Autruche est au moins susceptible 
d’une domestication complète. 

Dans ce champ, qui sert aussi d'hôpital, se trouvait un grand 
oiseau qui quelques jours avant avait été mordu par un Tigre. 
Une paire de ces animaux avait commis des déprédations sur 


les troupeaux de M. Douglas. Deux grands oiseaux de prix 
3° SÉRIE, T. I. — Juillet 1874. 28 


CE 
h34 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


avaient été tués, et celui en question présentait au cou une 
morsure sérieuse ; on voyait distinctement les marques non 
cicatrisées des dents du Tigre qui avaient pénétré dans la 
partie supérieure du cou de cet oiseau, ainsi que le sang 
coagulé dont s'étaient imprégnées les plumes. Il est étonnant 
que cet oiseau n'ait pas subi la destinée de ses compagnons. 
D'une manière ou d’une autre il y a échappé, et il est vrai- 
semblable qu’il se guérira. Nous sommes heureux de con- 
stater que lun des Tigres a été pris dans une trappe, et que 
tous les efforts tendent à faire subir à l’autre une semblable 
destinée. Des Autruches d’une valeur de 50 livres sterling 
chacune sont des morceaux par trop friands, pour qu’on 
permette même au roi des forêts de s'en régaler impuné- 
ment. 

L’inspection préliminaire étant achevée, nous nous prépa- 
râmes à monter à cheval, pour faire le tour des nombreux 
enclos. Dans ce but, cinq chevaux furent sellés, et l’un d’entre 
eux reçut un bât qui fut chargé de grain. Il nous suivit dans 
notre excursion, el à mesure que nous avancions, le grain 
était distribué aux Autruches, dans leurs différents enclos. 

En été, les oiseaux ne reçoivent de la nourriture qu'à 
intervalles considérables, mais à l'approche de l'hiver, et 
lorsque la végétation se dessèche, il est nécessaire de leur 
donner plus souvent à manger, et à cette époque de l’année, 
on leur donne de la nourriture, environ deux fois par semaine. 
Nous ne fümes pas longtemps à nous apercevoir que la pré- 
occupation de notre hôte avait été d'établir des clôtures, 
bien que la ferme ne fût que louée par lui, et que son bail 
touchât à sa fin. Le fait est qu’une ferme d’Autruches ne peut 
donner de résultats satisfaisants sans un système complet de 
clôture, etce qui prouve que M. Douglas l’a réalisé, ce sont 
les sept enclos qu'il a découpés dans la vaste surface dont il 
peut disposer, et dont les clôtures sont faites avec soin en fils 
métalliques reliés à des poteaux. C’est presque une nouveauté 
dans cette colonie de rencontrer sur sa route des clôtures, 
qu'on n'ouvre qu’en défaisant un cadenas fermé avec soin, 
et fixé solidement, et ce soin systématique prouve la peine 


UNE FERME D AUTRUCHES. 33 


que M. Douglas s’est donnée, peine qui a été couronnée d’un 
brillant succès. 

Cette réussite à laquelle ont abouti les efforts de M. Douglas 
est peut être, comme démonstration de résultats importants 
obtenus avec de faibles éléments, sans exemple dans l’histoire 
des tentatives des opérations de ferme. Nous nous aventurons 
à émettre l’opinion, qu'aucun autre animal domestique ne 
peut être comparé à l’Autruche, traitée par le système de 
M. Douglas, pour la production, et nous trouvons une confr- 
malion de cette opinion dans ce fait, que la production de 
G oiseaux, À poules et 2 coqs, a été l’année dernière de 130 
sujets. La dernière saison n'a pas été aussi favorable, ce 
qu’on peut attribuer sans aucun doute à l'extrême sécheresse, 
et le produit de 20 oiseaux reproducteurs n’a été que de 
120 jeunes. 

Si l'on songe que la valeur d’une Autruche âgée d’une 
semaine est de 10 livres sterling et que cette valeur aug- 
mente pendant le premier mois à raison d’un schillinge par 
jour, et plus encore dans la suite, on verra que le revenu 
d'une année, même mauvaise, est loin d’être à dédaigner, 
surtout si l’on ajoute à la valeur d’accroissement le produit 
des plumes, qui, pour chaque oiseau, est de 15 livres par an. 
Il faudrait un certain effort d'imagination pour estimer les 
résultats auxquels doit parvenir un fermier dans la position 
de M. Douglas, qui peut disposer de 300 oiseaux reproduc- 
teurs, arrivés à leur entier développement. 

Il ne faudrait pas croire cependant, parce que l'élevage des 
Autruches promet de devenir une industrie importante, que 
la tâche est facile. M. Douglas a fait une étude spéciale de ce’ 
sujet, et pendant les quatre années qui ont suivi son début, 
il a consacré tout son temps, son énergie et nous pouvons 
dire son génie, à apporter des perfectionnements dans l’éle- 
vage de ces oiseaux. Le rendement naturel des Autruches est 
loin d'être aussi considérable que celui dont nous avons 
parlé. C’est à l’incubateur, inventé par M. Douglas, qu'il faut 
attribuer le succès sans précédent qu’il a obtenu, et l’on doit 
ajouter que le fonctionnement de cet incubateur a été étudié 


36 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


dans tous ses détails, avec une exactitude scientifique, par 
l'inventeur, et que pas une personne sur mille, parmi celles 
qui l'ont essayé, ne pourrait obtenir des résultats semblables, 

Nous ne voulons pas dire pourtant par là qu’ilserait inutile 
de vouloir suivre l'exemple de M. Douglas à cet égard. 

D’autres personnes ont employé l'incubateur avec succès, 
mais soit qu'elles aient négligé de suivre les instructions en 
apparence de peu d'importance, mais en réalité très-néces- 
saires, soit aussi pour d’autres causes, elles n’ont réussi que 
sur une échelle très-limitée. Il n’est pas douteux que le temps 
remédiera à ces défauts, mais, en attendant, M. Douglas a une 
grande avance sur ses compétiteurs. Il les distancera proba- 
blement, et il aura réalisé de beaux bénéfices longtemps 
avant que les marchés ne regorgent de plumes d’Autruches. 

Ü yavait plus de dix-huit mois que nous n’avions eu le 
plaisir de visiter les troupeaux de M. Douglas. À cette époque 
ils comptaient 455 oiseaux de tout âge, et beaucoup d’autres 
n'étaient âgés que de quelques semaines. À notre seconde 
visite, les oiseaux qui nous parurent avoir presque atteint 
leur développement, et qui montraient de belles touffes de 
plumes, nous furent donnés comme ayant été mis au jour par 
l’incubateur, depuis notre dernière visite. En ce moment le 
nombre des Autruches s'élève à 220, sans compter plus de 
60 de ces oiseaux qui ont été vendus et distribués dans le 
pays. 

Le stock de M. Douglas n’était originairement que de 41 
ciseaux, et il n’a pus fait depuis de nouvelles acquisitions. On 
pourrait établir sur ce chiffre une simple règle de trois, et se 
demander quel serait le produit de 220 oiseaux en quatre 
années, 11 de ceux-ci ayant donné naissance, dans le même 
laps de temps, à 905 sujets. Ce serait cependant une mauvaise 
chose que de se montrer trop hardi, et n'avoir aucun doute, 
à l'égard d’une ferme de ce genre, car aucune entreprise, 
quelque soin qu’on y apporte, n'est exempte de défaillances 
et de contre-temps. Les jeunes Poules et les Coqs étaient 
placés par troupes dans les enclos spacieux, et les oiseaux 
reproducteurs étaient accouplés. Dans quelques cas nous 


UNE FERME D’AUTRUCHES. h37 


vimes deux poules pour un coq. Il n’est pas prudent d'entrer 
dans un enclos renfermant des oiseaux reproducteurs, à moins 
que le mâle ne soit emprisonné, et dans ce but un petit 
enclos ou kraal est ménagé à l'extrémité de l’enclos princi- 
pal. Le mâle y est attiré par des friandises et enfermé d’une 
manière qui ne laisse aucune crainte sur la possibilité d’une 
évasion de sa part. La plupart des mâles ont des noms fami- 
liers, tels que « Oatland, Hilton, ete. » ; le premier de ces 
noms étant celui d’une des Autruches qui sont louées au parc 
d’Oatland dans la ville. M. Douglas nous disait, à propos de ce 
mâle et des deux Poules qui sont placées avec lui, qu’une 
valeur de 4000 livres sterling ne lui payerait pas le prix de 
ces oiseaux. À Hilton, les Autruches commencent à se repro- 
duire à l’âge de trois ans, époque très au-dessous du terme 
de maturité généralement assigné. Il est habituellement 
reconnu que la vie des Autruches est longue, et ce qui sem- 
blerait confirmer ce fait, c’est la présence à Hilton d’oiseaux 
qui ont actuellement de quinze à dix-huit ans. 

Après le lunch, nous allâmes visiter une chambre remplie 
de plumes, provenant du dernier plumage partiel. Nous en 
vimes de toutes les catégories, depuis celles qui ne valent 
que 5 schilings jusqu’à celles dont la livre se paye 35 livres 
sterling. 

Nos montres nous avertirent alors que nous avions dépassé 
de plusieurs heures le temps que nous avions compté con- 
sacrer à notre visite, et que sinous ne voulions pas être surpris 
par la nuit nous devions nous dépêcher de partir. Il est plai- 
sant de noter que notre cheval de louage montra dans le re- 
tour un trot plus soutenu que dans l'aller, ce qui prouverait 
qu'il est habitué à de bons traitements dans son écurie, et 
qu'il sait les apprécier. Nous devons ajouter aussi que 
MM. G. et T. White et M. Atherstone s’empressent d'établir 
des clôtures dans leurs propriétés du voisinage, et qu’ils ob- 
tiennent dans l'élevage des Autruches plus ou moins de 
succés. 

Nous aurions rapporté l'opinion de M. Douglas sur les 
clôtures, si ce dernier ne nous avait pas devancé en faisant 


L3ä8 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. # 


connaître sa manière de voir dans une lettre publiée la semaine 
dernière. Comme il est probable qu’il parlera encore de ce 
sujet dans une réunion de fermiers, qui doit avoir lieu dans 
cette ville jeudi prochain, nous nous dispensons d’en parier 
aujourd’hui, et nous nous contentons de dire, que ses propo- 
sitions nous semblent très-sensées, et certainement plus pra- 
tiquables que ce qu’on a proposé. 

Nous avons le regret d'ajouter que l'avant-garde d’une 
armée de Sautereilles avait fait son apparition à Hilton, au 
moment de notre visite, 


* LES 


FERULA COMMUNIS er TINGITANWNA 


COMME PLANTES PAPYRIFÈRES 


Par M. A. RIVIÈRE 


Jardinier en chef du jardin du Luxembourg, directeur du jardin du Hamma d'Alger. 


Le genre Ferula forme un groupe de plantes vivaces 
appartenant à la famille des Ombellifères. Les espèces en sont 
relativement peu nombreuses; elles croissent spontanément 
dans l’Europe méridionale et dans le nord de l'Afrique; 
d’autres se rencontrent en Asie, particulièrement dans la 
Perse ; d’autres dans l'Amérique septentrionale. En France, 
trois espèces végêtent, çà et là, dans la résion méditerra- 
néenne : lerula communis, Ferula tingitana et Ferula 
ferulago ; je les ai souvent rencontrées dans mes excursions, 
depuis Marseille jusqu’au delà de Nice, en suivant le littoral. 
En Algérie, aux trois espèces que je viens de citer, il faut 
ajouter une quatrième, la Ferula sulcata. 

Il ne sera question ici que des deux espèces qui font le 
sujet de cette notice : la Ferula communis et la Ferula tinqi- 
tana ; ce sont, d’ailleurs, les plus communes et les plus vigou- 
reuses. 

Ces deux plantes, qui ont de l’analogie entre elles, sont 
assez répandues en Algérie ; on les y rencontre l’une et l’autre 
croissant tantôt dans les plaines, tantôt dans les parties mon- 
tagneuses, lorsque le sol y présente de la profondeur. La 
Ferula communs est assez répandue dans les trois provinces ; 
l’autre, la Ferula tingitana, est moins abondante, et c’est 
plus particuliérement dans la province d’Oran qu’on la trouve. 
Dans nos régions tempérées de la France, ces deux plantes se 
montrent également assez rustiques et peuvent vivre un 
grand nombre d'années; mais, particulièrement sous le eli- 
mat de Paris, les grandes gelées leur seraient contraires. 

Dans l’âge adulte, nos deux Férules forment de puissantes 


ge ne art ne doi) it pl pt ét RS EL SES SE SSÉS ÉS 


A0 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


souches qui se ramifient et d’où partent des racines assez 
nombreuses, charnues, pivotantes, très-grosses, très-longues, 
et s’enfonçant très-profondément dans le sol. Du sommet de 
la souche il se développe, à chaque bourgeon, plusieurs feuilles 
radicales extrêmement grandes, se subdivisant en un nombre 
infini de petites parties finement découpées. Portées sur un 
fort pétiole, ces feuilles mesurent parfois plus d’un mêtre de 
longueur et autant de largeur. J’ai été à même de constater 
bien des fois, dans nos jardins botaniques et dans nos jardins 
d'agrément, que l’ensemble des feuilles d’une même plante 
peut couvrir une surface de plus de 2 mètres de diamètre. 

Dans le courant du mois d'avril, plus ou moins tôt d’après 
la végétation plus ou moins avancée, il se développe du centre 
de toutes ces feuilles une ou plusieurs tiges, selon le nombre 
de bourgeons que porte la souche ; il n’est pas rare d’en ren- 
contrer de la grosseur du bras, et elles s'élèvent en très-peu 
de temps à une hauteur qui dépasse quelquefois 2 mètres. 
Chaque tige se ramifie et porte, dans toute sa longueur, des 
feuilles dites caulinaires, marquables par leur gaîne très-dé- 
veloppée. A leur tour, les ramifications des tiges se ramifient 
elles-mêmes, puis elles se terminent par des ombelles portant 
des ombellules garnies de nombreuses petites fleurs jaunâtres, 
auxquelles succèdent des fruits allongés, plats, un peu ovales, 
accolés deux à deux et de couleur brune; on les nomme 
communément des graines. 

Dans bon nombre d'espèces d’Ombellifères, les tiges sont fis- 
tuleuses, c’est-à-dire creuses à l’intérieur; mais, dans les deux 
Férules qui nous occupent ici, les tiges, au contraire, sont 
remplies d’une moelle très-abondante, parcourue par de 
petites fibres longitudinales très-grêles. 

C'est probablement en remarquant ce caractère dans les 
tiges des Férules qu’un de nos compatriotes a pensé pouvoir 
les utiliser avantageusement pour la fabrication du papier, 
dont les matières premières, de plus en plus recherchées 
aujourd'hui, tendent à devenir aussi de plus en plus rares. 

Il n’est pas douteux, en effet, que les tiges des Ferula com- 
munis et Tingitana, caractérisées par des écorces peu épaisses 


LES FERULA COMMUNIS ET TINGITANA. EU 


et par cette moelle extrêmement abondante, ne procurent un 
papier d’une excellente qualité ; toutelois, la grave question 
qui se présenterait ici, c’est de savoir si les produits de la cul- 
ture de ces plantes seront assez abondants pour la rendre 
rémunératrice. C’est un espoir qu'il serait de la plus haute 
importance de voir se réaliser aussi; quoi qu’il en soit de la 
réussite, vais-je essayer de décrire les moyens les plus pra- 
tiques qu'il y aurait à employer pour mener à bien une entre- 
prise de ce genre. 

Les deux espèces de Férules dont il est question ici ne sont 
pas d’une culture difficile ; elles sont même très-rustiques dans 
leur patrie, mais, par la nature de leur organisation, elles ne 
peuvent se reproduire avantageusement que par leurs graines; 
c’est même le seul moyen qu’on puisse mettre en pratique. Il 
faut donc récolter des graines ; celles-ci, selon les conditions 
climatériques dans lesquelles se trouvent les plantes mères, 
acquièrent leur parfaite maturité dans le courant des mois de 
juin, de juillet et d'août. Une fois récoltées, il faut les sécher, 
puis les enfermer dans des sacs et les placer en lieu sûr jus- 
qu’à l’époque où elles devront être confiées à la terre. Cette 
époque du semis différera selon qu’on opérera dans les pays 
septentrionaux ou dans les régions méridionales ; dans les 
premiers, en prenant, par exemple, Paris comme point cen- 
tral, la meilleure époque pour semer les Férules est comprise 
dans les premiers jours du mois de mars; dans les secondes, 
soit le midi de la France ou autres localités analogues, elle 
doit être avancée de quelques semaines. Quant à l'Algérie, où 
la température est plus élevée, les semis devront se faire en 
novembre ou au plus tard, dans le courant de décembre. 

Maintenant, il faut que le semis se fasse dans de bonnes 
conditions ; à cet effet, on choisira un terrain de bonne qualité, 
bien exposé au soleil ; on donnera un profond labour, puis l4 
surface sera hersée et nivelée. Le terrain sera alors divisé en 
planches larges de 1",33 environ, sur une longueur déter- 
minée d'après l'importance du semis ; une distance de 0",40 
à peu prés les séparera les unes des autres. Ceci fait, l’on tra- 
cera, dans chacune d’elles et dans toute leur longueur, des 


hA42 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


sillons peu profonds, de 5 à 6 centimètres, et distants les uns 
des autres de 0°,20 à 0®,25. C’est dans ces sillons que seront 
répandues les graines. On se gardera de semer dru, si l’on 
veut voir les jeunes pousses acquérir le plus de force possible; 
les graines, au contraire, seront clair-semées; après quoi, 
on les recouvrira de À ou 2 centimètres de terreau ou de terre 
légère. 

Si, à l’époque du semis, on avait à souffrir de sécheresses 
prolongées, il serait bon, de temps à autre, de bassiner le 
sol à l’aide d’un arrosoir à pomme percée de trous fins; cette 
humidité procurée au sol faciliterait la germination des 
graines. 

Il est une chose importante à remarquer, c’est que l’époque 
de germination des graines de Férule est très-limitée ; il est 
donc de toute nécessité de ne pas s’écarter des saisons ci-des- 
sus indiquées pour faire les semis; s’il en était autrement, 
c'est-à-dire si l’on opérait plus tard, ilen résulterait que la levée 
des graines n’aurait lieu que l’année suivante, un an après le 
semis, ce qui, on le conçoit, serait une perte de temps et 
d'argent considérable, sans compter qu’alors les graines 
séjournant longtemps dans le sol, on en perdrait une certaine 
quantité, soit par la pourriture, soit par les ravages des 
insectes, soit par toute autre cause de destruction. 

Je ne crois pas devoir conseiller le semis sur place, car, par 
suite des soins qu'il faudrait donner au sol, il me parail devoir 
entrainer à des dépenses assez considérables. 

Le semis fait, les soins consisteront à tenir le sol toujours 
très-propre, en le débarrassant de toutes les mauvaises herbes 
qui pourralent germer en même temps que les Férules et qui, 
certainement, leur seraient nuisibles ; à entretenir la terre 
modérément humide pendant toute la durée de la végétation 
de la plante, laquelle végétation ne cessera que lorsque les 
feuilles, après être devenues jaunes, seront complétement 
desséchées, ce qui aura lieu en mai ou juin; à donner quel- 
ques binages entre les sillons, dès que les jeunes Férules 
commencent à prendre un peu de force, excellent moyen pour 
rendre le sol plus meuble. 


LES FERULA COMMUNIS ET TINGITANA. UE) 


Une fois terminée la chute des feuilles, arrive la période 
de vie léthargique des plantes ; elie dure jusqu’au commence- 
ment du mois d'octobre. On fera bien de continuer à donner 
quelques arrosages, mais modérés, seulement afin d’entre- 
tenir la vie des jeunes élèves. Quelques binages pourront être 
également continués, pour empêcher le sol de se gercer, mais 
ouvrier chargé de cette dernière opération devra prendre 
tous les soins possibles pour ne pas approcher trop près des 
sillons, de peur de blesser les jeunes plants ou d’endommager 
les têtes avec l'outil. 

Cest vers le mois d'octobre que nos deux Férules commen: 
cent à manifester leur végétation, pour la continuer jusqu'aux 
environs du mois de juin; pendant les trois mois d'été, la 
vie, ainsi que je l’ai dit, est en quelque sorte suspendue. 

Arrivées à cette époque, en octobre, les Férules pourront 
avoir déjà des racines pivotantes de 0,15 à 0,25 et de la 
grosseur environ d’un crayon ordinaire; c'est à ce moment 
qu’il faudra, sous le climat de l'Algérie, songer à leur mise 
en place. Il pourrait se faire, toutefois, que l’on ne trouvât 
pas encore les jeunes plantes assez développées, assez fortes, 
pour être livrées à elles-mêmes ; il faudrait, dans ce cas-là, 
retarder d’une année, mais sans négliger de leur continuer 
les soins que nous venons d'indiquer. Les Férules, avant 
alors deux ans, seraient certainement plus d’une fois plus 
fortes. 

La qualité du terrain dans lequel aura lieu la transplanta- 
tion n’est pas sans importance, pour que les plantes puissent 
se développer de maniëre à donner de bons et abondants 
produits, un bon terrain assurément sera préférable, mais,. 
même sur un terrain pierreux, rocailleux, situé en plaine ou 
sur le versant d’une montagne, la culture pourra réussir, st 
ce terrain est profond; c’est là une condilion essentielle, 
indispensable, car je l'ai dit, les racines des Férules sont pivo- 
tanties. 

Une fois le terrain choisi, il sera labouré, soit à la pioche, 
soit à la charrue, et, autant que possible, à une profondeur 
de 0°,50 à 0°,60; il faudra ensuite le herser, afin de le nive- 


hhh SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


ler, tout en brisant les plus grosses mottes de terre. Des 
lignes ou plutôt des sillons distants entre eux de 1",30 
seront tracés dans la longueur, et les jeunes Férules plantées 
à 0,70 ou 0",80 les unes des autres. Ce travail peut se faire 
à l’aide d’un plantoir, ainsi qu'on agit habituellement pour 
les repiquages, mais en observant que le collet de la plante 
soit enfoncé dans le sol de 5 à 6 centimètres. 

On pourrait commencer le travail de la plantation dès que 
les jeunes feuilles sortiraient de terre; mais, en enlevant les 
sujets (et non en les arrachant), 11 sera nécessaire de le faire 
sans trop blesser les racines ; par mesure de prudence, on 
ferait bien de planter deux sujets ensemble. 

La plantation se faisant à l’automne, au moment des pluies, 
il n’y aura pas lieu de s'occuper des arrosements, à moins de 
.sécheresses exceptionnelles ; dans ce dernier cas, il faudrait 
donner au moins une fois de l’eau, et le mieux serait immé- 
diatement après la plantation. 

Si l’on voulait établir des cultures de Férules autre part 
qu'en Algérie, il faudrait, pour la mise en place, choisir les 
époques qui correspondent aux époques de semis. 

Pendant trois ou quatre ans, les opérations qui suivront la 
plantation en place définitive consisteront à entretenir la sur- 
face du sol toujours meuble, par le moyen de binages répétés 
plusieurs fois dans le courant de l’année ; ces binages auront 
de plus le grand avantage d'empêcher les mauvaises herbes 
de trop envahir le sol. 

Ce n’est que vers la quatrième ou la cinquième année après 
le semis, ou plutôt après la mise en place, que les Férules 
commenceront à développer leur première tige. Chaque pied 
en fournira d’abord une qui sera de faible dimension, mais 
le nombre en augmentera, ainsi que le volume, au fur et à 
mesure que les plantes vieilliront. 

Les tiges seules des Férules sont propres à la fabrication du 
papier. Pour ce qui est de leur récolte, il ne faudra la faire 
que lorsqu'elles se seront complétement desséchées sur pied; 
du reste, l'expérience sera le meilleur guide à cet égard ; 
mais, afin de ne pas endommager les souches, l’opération ne 


LES FERULA COMMUNIS ET TINGITANA. A5 


devra se faire qu’à l’aide d’un fort instrument bien tranchant. 
À l’endroit où les tiges auront été coupées, 1l en surgira 
d’autres qui, l’année suivante, si leur dimension le permet, 
seront bonnes à être coupées à leur tour. 

En Italie et en Corse, où ces plantes sont très-communes, 
les tiges sont parfois employées pour affiler les rasoirs, après 
toutefois avoir enlevé une partie de l’écorce sur l’un des 
côtés. 

Une fois la plantation bien établie et en pleine exploitation, 
les Férules n’exigent que peu de soins ; leur rusticité, leur 
vigoureuse végétation due aux puissantes racines qui s'enfon- 
cent profondément dans le sol, l'abondance de leur gigan- 
tesque feuillage qui étouffera une partie des mauvaises her- 
bes, tout contribuera à la facilité de leur culture ; un bimage 
où deux par an seront donc suffisants. 

A l’état naturel, la croissance des Férules se fait avec une 
extrême lenteur, à cause de l’état du sol, et aussi par suite 
des conditions où elles sont obligées de végéter. Il est donc 
probable qu’il leur faut au moins une dizaine d'années avant 
de donner leur première tige. 

Tels sont les procédés au moyen desquels la culture des 
Ferula communs et tingitana pourrait être entreprise, mais, 
je le répète, l'expérience seule saura dire si, sous le rapport 
commercial, elle sera suffisamment lucrative; pendant plu- 
sieurs années, quatre ou cinq ans pour le moins, le sol restera 
improductif ; les années suivantes, avec leurs nombreuses ré- 
coltes et les frais de main-d'œuvre grandement diminués, 
apporleront-elles une compensation suffisante ? c’est possible. 
On ne peut donc qu’encourager les personnes qui se livrent 
aux essais et leur souhaiter une réussite complète, aussi bien 
dans leur intérêt particulier que dans celui d’une industrie 
tellement indispensable à nos pays civilisés, et qui commence, 
sous le rapport des matières premières, à éprouver des 
craintes sérieuses. 


NATURALISATION 
DE DIVERS VÉGÉTAUX A NIMES (carp) 


Par M. MAUMENEN. 


À part les graïnes et plants reçus de la Société, j'ai expéri- 
menté à peu près tout ce qui m'a paru présenter quelques 
chances de succès, et quelque intérêt, dans les catalogues du 
Hamma (Algérie) et bien d’autres. Voici ce que je crois devoir 
vous faire noter : 

BamBous. J’ai maintes fois entretenu la Société de la rusti- 
cité et de la rapidité de croissance du Bambusa mitis que j’ex- 
périmente depuis les premières années de l'introduction par 
M. de Montigny. J'ai été le premier à le faire connaître dans 
le pays, même aux pépiniéristes, et je lai répandu tant que 
j'ai pu autour de moi. C’est une variété tout à fait acquise 
ici; les pousses de la dernière saison ont atteint Jusqu'à 8 mé- 
tres de haut et 15 centimètres de circonférence. 

Le nigra s’est montré aussi rustique. Il donne des tiges 
pouvant servir pour cannes de parapluies. 

Le verticillata est encore une acquisition éprouvée pour 
notre latitude, mais il n’a donné encore que des turions assez 
minces, quoiqu'ils aient atteint de 2 à 3 mètres de longueur. 

Le spinosa a résisté à deux hivers peu rigoureux. Il reste à 
l'étude. 

EucaiyPTus. Les nombreux essais de l’£. globulus, si 
désiré, ont tous échoué. Deux sujets seuls ont vécu trois ans. 
Îls étaient arrivés presque à 10 mètres de hauteur sur 25 cen- 
ümètres de circonférence. Circonstance à noter peut-être : 
c’est qu’ils étaient en terrain siliceux, tandis que ceux qui 
ont moins résisté étaient dans le calcaire. Il faut en prendre 
son parti; nous sommes un peu en dehors de la zone où ce 
bel arbre peut prospérer. 

Le Gunnii vient de traverser son troisième hiver parfaite- 


NATURALISATION DE DIVERS VÉGÉTAUX A NIMES. 47 


ment indemne. Je crois qu'il nous est acquis, maïs il pousse 
moins vite que le g/obulus. 

Les urnigera, goniocalyx, rostrata, en pleine terre depuis 
lan passé, paraissent encore à l'heure qu’il est en assez bon 
état. Les colossea, megacarpa, de la même plantation, qui 
s'étaient beaucoup plus développés, sont morts au contraire 
dès les premiers froids. Il semble pour cette famille que Ia 
résistance est en proportion inverse de la rapidité de crois- 
sance. Précédemment j'avais essayé, également sans succès, 
les opposinifoha, obliqua, salicifolia. De ce dernier, prove- 
nant de graines envoyées par la Société sous la fausse déno- 
mination de globulus, j'ai, dans le temps, expédié un plant 
au Hamma, qui ne le possédait pas, et l’on m’a dit qu’il est 
devenu très-beau. 

Pazmiers. Gertains pieds de Chamaærops humilis pros- 
pérent tandis que d’autres plus vieux ont été détruits par les 
hivers 1870-1871. L’excelsa a eu des chances diverses aussi. 
Le éomentosa résiste depuis plusieurs années, mais il ne prend 
guère de développement. 

Divers. Le Lo-za ou Rhamnus utilis de Chine, comme je le 
disais dernièrement, est parfaitement acclimaté chez mot, et 
tellement rustique que je pense qu’il pourrait remplacer nos 
vignes détruites par le Phylloxera, si l’on savait en ürer parti 
pour la teinture, comme le font les Chinois. Jai fourni des 
baies et des écorces à un ami qui, à l’aide des ouvrages de 
Natalis-Rondat et de Paul Champion, cherche à trouver la 
préparation du fameux vert de Chine. Je pourrais fournir à 
la Société des semences de ce joli arbuste, si elle en désirait. 

Andropogon squarrosus. Cette belle graminée indiquée 
comme de serre chaude dans /e Bon jardinier et les catalogues, 
a supporté parfaitement ici la pleine terre et les plus rudes 
assauts des hivers rigoureux. Elle est tout à fait acquise au 
climat de Nimes et donne un vétiver bien odorant. 

Le Laurus camphora, que j'ai cru un moment acclimaté, 
parce qu'il avait bravé impunément un rude hiver, n’a pas 
continué à prospérer. 

Le Rhus succedanea, arbre à cire, résiste depuis dix 


hh8 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


ans, mais en perdant souvent ses tiges pour repousser de la 
souche. 

Le Phytolacca dioica (Bella sombra) supporte nos hivers 
les plus doux à bonne exposition, repoussant au moins du 
collet des racines; mais on n’en peut faire un arbre ici. 

Pommes de terre. Tai reçu de la Société, l’année dernière, 
6 variétés que j'ai expérimentées avec soin. Les résultats très- 
détaillés que j'ai obienus sont consignés au Bulletin n° 10 
d'octobre dernier. Je viens de remettre en terre toute ma 
récolte pour en faire une étude plus en grand. 

La Patate douce m'a donné des recettes satisfaisantes. La 
seule difficulté de sa culture est la conservation des tubercules 
reproducteurs d’une année à l’autre. 

L’Igname de Chine s'est si bien acclimatée chez moi qu’il 
en repousse toujours dans les places où l’on en a cultivé. Elle 
fournirait à la cuisine des ressources assez utiles, mais la dif- 
ficulté de l’extraction m'y a fait renoncer. 

Je n'ai pu rien obtenir de la Poire de terre Cochet. 

Par suite d'accidents de culture, je n'ai obtenu qu’un fruit 
du Zapallito qui m'a simplement fourni des semences pour la 
saison prochaine. 

Le Gombo (Hibiscus esculentus) m'a donné des fruits, et 
pourrait être cullivé ici, mais nous ne savons pas utiliser ou 

goûter ses produits. Îl en est de même des pois oléagineux de 
Ja Chine; des Bardane et Amarante de même origine, offerts 
comme plantes comestibles, mais que notre goût, ou peut-être 
une moins grande pénurie d'aliments chez nous qu’en Chine, 
ne nous permet pas d'apprécier. 


Ii. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ, 


———— 


NOTE 


SUR 


LA CULTURE DE L'ERYTHROXYLON COCA 


Extrait d'une lettre adressée à M. le Secrétaire général de la Société 
d'acclimatation 


Par M. MARTINEZ. 


Vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 12 mai pour me 
demander à quelle cause j'attribuais l’échec éprouvé à Lima 
dans la culture de la Coca, échec dont vous a parlé M. le comte 
de Bellonnet. Je m'empresse de répondre à votre question et 
de mettre à votre disposition les quelques observations que 
J'ai faites sur la culture, à Lima, de l’Erythroxylon coca. 

Je me hâte de dire d’abord que nous n’avons pas complé- 
tement échoué dans cette entreprise. M. le comte de Bellonnet 
m'ayant dit que M. Drouyn de Lhuys lui demandait de la graine 
de Coca afin de faire cultiver cet intéressant végétal en France 
et en Algérie, je lui exposai le peu de chance de succès que 
me paraissait avoir cette entreprise, en me basant : 1° sur le 
peu de succès que nous avons obtenu au jardin botanique de 
la Faculté de médecine de Lima; 2° sur les conditions de sol 
et de climat de la France et de l'Algérie, et 3° sur la crainte 
que j'avais que les graines perdissent leur faculté germinative 
avant leur arrivée à destination. 

Je vais expliquer ma pensée pour chacun de ces trois points, . 
et pour qu'il soit plus facile de suivre les faits qui m'ont con- 
duit à raisonner ainsi, je vous dirai d’abord quelques mots 
des circonstances au milieu desquelles on cultive la Coca au 
Pérou. 

La culture de l’Erythroxylon coca au Pérou ne se vérifie 
guère que dans la partie située au delà de la Cordillère, c’est- 


à-dire la partie transandine que l’on désigne ici sous le nom 
3° SÉRIE, T. |. — Juillet 1874, 29 


ss 


50 SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


de Montana ei dont la hauteur varie entre 500 et 1700 mètres 
au-dessus du niveau de la mer. Dans cette immense région 
située à lorient de la chaîne des Andes la culture de la Coca 
ne peut pas se faire partout; ce n’est que dans les vallées 
boisées, chaudes et pluvieuses, que cette plante donne de bons 
résultats. Là, l’aimosphère est toujours très-hurnide, la cha- 
leur est assez forte pour que la température s’élève parfois à 
28 degrés centigrades, et ne descende jamais au-dessous de 
17 degrés de la même échelle. Approximativement on peut 
dire que la température moyenne des vallées où se cultive la 
Coca est de 20 à 21 degrés centigrades. Le sol de ces vallées 
est argileux et son aspect indique suffisamment la présence de 
quantités assez notables de fer. J’ajouterai que ce sol est privé 
de sel commun ou chlorure de sodium. 

La Coca peut être cultivée à des hauteurs plus considé- 
rables, et peut atteindre même le niveau de 2000 mêtres, à 
condition qu'à ce miveau la chaleur soit suffisante pour que 
la température ne soit pas inférieure à 47 ou 18 degrés, à 
condition, en outre, que l'atmosphère soit humide et les pluies 
fréquentes et copieuses. On sait, en effet, et il est facile de 
comprendre, que la direction des vallées joue un grand rôle 
sur leur température moyenne : par exemple, la température 
d’une vallée nord-sud sera beaucoup inférieure à celle d’une 
vallée est-ouest de même niveau, la première à cause de sa 
direction, recevant l’action du soleil beaucoup moins long- 
temps que la seconde. Il est donc assez difficile d'indiquer 
d’une manière précise les hauteurs entre lesquelles la culture 
qui nous occupe donne de bons résultats, mais en laissant de. 
côté les questions d'altitude nous pouvons dire que les ca- 
ractères des lieux où cetle culture se fait avec succès sont : 
vallées chaudes, boisées, pluvieuses, humides, de sol argilo- 
ferrugineux dans lequel manque le chlorure de sodium. 

Ceci dit, 1l est facile de deviner pourquoi nous n’avons pas 
obtenu de succès en cultivant à Lima l’Erythrorylon coca. 
En effet, les conditions que je viens d’énumérer font ici totale- 
ment où presque totalement défaut. Et d’abord, c’est la cha- 
leur qui nous manque. L'échelle des variations thermomé- 


CULTURE DE L’ERYTHROXYLON COCA. A51 


triques est à Lima assez limitée puisqu'elle se maintient entre 
13 et 30 degrés centigrades, à peu près, mais son maximum 
est suffisant pour que la culture en question s'effectue ici dans 
des conditions entièrement étrangères à celles qui lui convien- 
nent. 

Les plantes de Coca cultivées au Jardin botanique ont été 
semées il y a environ deux ans. Les graines se sont très-hien 
comportées à la germination et, en général, les jeunes plantes 
ont donné beaucoup d’espoir durant le premier été; mais 
pendant l'hiver suivant, qui cependant n’a pas été rigoureux, 
puisque le thermomètre n’est pas descendu au-dessous de 
1% ou 15 degrés, pendant cet hiver, dis-je, il est mort plus 
de 50 pour 100 de nos jeunes plantes, surtout de celles qui 
n’ont pas élé mises en serre. Les survivantes ont été divisées 
en deux groupes; les unes sont demeurées en serre, les autres 
ont été mises à air libre dans des pots. Les premières me- 
surent aujourd’hui de 25 à A0 centimètres de hauteur et les 
autres, dont il est mort encore un certain nombre, sont toutes 
petites, de 10 à 25 centimètres de hauteur, et offrent un aspect 
suffisamment souffreleux et maladif pour indiquer qu’elles 
sont loin de leur état normal et qu’elles vivent dans un milieu 
qui ne convient point à' leur organisation. 

C’est done, surtout, je crois, une température suffisante qui 
nous manque à Lima pour la culture de la Coca. Il y a cer- 
tainement d’autres conditions d’insuccès. Ainsi l'absence com- 
plète de pluies qui se note sur toute la côte du Pérou, pendant 
six mois de l’année, doit être mise au premier rang de ces 
causes secondaires. On peut même dire qu'il ne pleut jamais à 
Lima, car ce que nous appelons ici pluies d’hiver ne sont que 
des brouillards épais qui se résolvent en une petite pluie fine, 
froide, pénétrante, appelée ici garruas et entre parenthèse des 
plus désagréables. Je dirai également (et sous toutes réserves, 
car je n'ai pas de données expérimentales locales) qu’à 
Lima, comme dans beaucoup de pays chauds, il peut y avoir, 
pendant l’été, une très-grande quantité de vapeur d’eau dans 
l'atmosphère, mais, en raison de sa température relativement 
élevée, cette atmosphère se trouve cependant loin de l’état de 


52 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


saturation, d’où 1l résulte que si pendant l'hiver, l'atmosphère 
de Lima est très-humide, elle est très-sèche pendant l'été bien 
que contenant, je le répête, une quantité absolue de vapeur 
d’eau plus grande même que celle qu’elle contient pendant 
l'hiver. C’est donc encore, si l’on veut, l’une des causes d’in- 
succès de la culture de notre plante, puisque l’état hygromé- 
trique de l'air des vallées où on la cultive est considérable. 
D'autre part, le sol de Lima n'a rien d’argileux, il est composé 
de couches de sables et de cailloux sur lesquelles s’étend une 
assez mince couche de terre végétale; il est vrai, on peut ici 
considérer le sable comme une terre arable excellente, quand 
on peut lui donner de l’eau; nous voyons, en effet, les déserts, 
qui offrent une parfaite aridité pendant l'été, se couvrir d’une 
luxuriante végétation dès qu’apparaissent les fines pluies ou 
garruas de l’hiver. Enfin, si le fer n’est pas ici très-rare, en 
contre le chlorure de sodium et le nitrate de soude sont très- 
abondants. Je dois dire, il est vrai, que je n’ai absolument 
aucune donnée sur le rôle que jouent ces äiverses substances 
minérales sur la végétation de la Coca. Je ne fais que consta- 
ter la présence de la première et l’absence des autres dans 
les terrains où on la cultive avec succès. 

Tels sont les faits qui me permettent de me rendre compte 
de notre insuccés dans la culture que nous avons entreprise, 
car je ne saurais appeler succès les résultats que nous avons 
obtenus. 

En effet, un pied d’Erythroxylon coca de deux ans, cultivé 
au milieu des conditions propres à sa végétation, atteint aisé- 
ment un mêtre de hauteur. Cette plante est un véritable 
arbre. Dans la culture on la maintient naine par la taille, 
comme on fait du Müûrier, afin d'améliorer la qualité des 
feuilles, leur abondance et surtout de faciliter leur récolte; 
mais à l’état de liberté, elle forme des individus de 5 à10 mètres 
de hauteur et quelquefois plus. 

Si l’on tient compte de ce que je viens de dire, et étant 
donné, d’autre part, les conditions climatologiques de la 
France, je crois qu’on est suffisamment autorisé à craindre 
que les chances de succès de Ja tentative que vous voulez 


CULTURE DE L’ERYTHROXYLON COCA. 53 


faire soient trés-restreintes. Quant à l'Algérie, je ne connais 
ni la nature du sol, ni le climat. IL doit y avoir certainement 
des vallées chaudes et humides, n’en jugerais-je que par les 
fièvres que nous appelons vulgairement d'Afrique, lesquelles 
sont, Je crois, attribuées aux miasmes paludéens. Mais n'est-il 
pas à craindre que cette humidité ne soit point apte à pro- 
duire, sur la culture de la Coca, l'effet que produit celle des 
chaudes vallées de la région transandine du Pérou? 

Je crois pouvoir vous dire que l'Erythroxzylon qui nous 
occupe est un végétal très-délicat, quant au milieu dans lequel 
il vit. Il semble s’habituer à ce milieu, dont il se sépare dilfi- 
cilement, et les qualités de sa feuille (qualités excitantes du 
système nerveux) varient avec la nature de ce milieu. On cite 
ici parmi les meilieures Coca celles qui proviennent des vallées 
de La Paz, en Bolivie, près du rio Beni, celles de la vallée de 
Paucartambo, à l’est de Cuzcs, dans le département du même 
nom, au Pérou, celles de Santa-Anna, dans le même départe- 
ment et dans la vallée de l’Urubamba, au nord de Cuzco, en- 
fin celles de la vallée de Vitoc, voisine du rio Chanchamayo, 
dans le département de Junin. 

Je vous ai dit plus haut avoir manifesté à M. le comte de 
Bellonnet la crainte dans laquelle j'étais que les graines per- 
dissent leur faculté germinative avant d'arriver en France. Je 
m’appuyais sur les renseignements que m’a donnés une per- 
sonne tres au courant des questions scientifiques et des faits 
pratiques qui se rapportent au Pérou; pour mon compie, je 
n’ai fait, jusqu'alors, aucune expérience sur ce sujet, mais le 
naturaliste en question, M. Raimondi, me confirme ce qu’il 
m'avait déjà dit et pense qu'après deux mois de récolte, les 
graines ne sont plus aptes à entrer en germination. Cette 
opinion me semble corroborée par ce fait pratique (dont je 
ne garantis pas l’authencité), qu'ayant voulu acclimater la Coca 
de Vitoc dans la vallée de Santa-Anna, les tentatives ont 
échoué, les graines ayant perdu, dans le trajet, leur faculté 
germinative. 

Tels sont, Monsieur, les renseignements que je puis vous 
offrir sur l’intéressant végétal de la culture duquel vous vous 
occupez. 


h5A SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


Les graines qu'avait demandées le gouvernement français 
ont été remises par M. le comte Balny d’Avricourt, le 9 avril 
dernier, au capitaine Soubery, de la Vi/{e de Bordeaux, vapeur 
que la Compagnie transatlantique vient de retirer du Paci- 
fique. Vous serez à même par ces graines de juger de ce que 
l'on peut espérer quant au temps durant lequel elles gardent 
leurs propriétés germinatives. Comme il faut quinze jours ou 
un mois pour les apporter du lieu où on les récolte à Lima, 
et comme vous avez dù les recevoir vers le 25 mai dernier, il 
faut donc leur attribuer de deux à deux mois et demi de ré- 
colte au minimum. Je vous serai à mon tour très-obligé de 
me faire savoir les résultats que vous donneront ces graines. 

Prévoyant (je souhaite m'être trompé) que ce résultat serait 
mauvais, et faisant ce jour même et par le même vapeur un 
petit envoi d'objets d'histoire naturelle au Muséum, j'ai joint 
à cet envoi une caisse contenant douze pieds empotés d'Ery- 
throxylon coca en parfait état de santé. 

J'ai prié M. Decaisne, dans le cas où ces plantes arriveraient 
à bon port, de vouloir bien en remettre quelques-unes au 
Jardin d’acclimatation. Ce sont celles de nos plantes qui ont 
vécu en serre, c’est-à-dire les plus belles; elles sont âgées de 
deux ans e! j'ai choisi les plus vigoureuses. 

Dans les envois de plantes cultivées et vivantes, les trans- 
bordements qui s’effectuent par l’ishme de Panama sont une 
grave question si les plantes voyagent seules; c’est pour cela 
que j'ai profité du voyage de la Ville de Bordeaux par le dé- 
iroit de Magellan; le froid était à craindre, mais à ce point 
de vue je me suis reposé sur les bons soins que le capitaine 
Soubrey a bien voulu me promettre de prodiguer à ces déli- 
cates pelites voyageuses. Je suis fort impatient de connaitre 
le résultat de cet envol. 

Pour le cas où le gouvernement français voudrait cultiver 
en grand la Coca, et que la graine de cette plante perdrait sa 
faculté germinative avant d'arriver à destination, je pense que 
ce qu'il y aurait de mieux à faire serait d'effectuer le semis, 
soit au Pérou même, soit en mer à une époque qu’indiquerait 
l'expérience. Il va sans dire que l'envoi serait accompagné 
d’une personne compétente qui en prendrait soin. 


CULTURE DE L'ERYTHROXYLON COCA. 55 


Enfin, dans le cas où la nature du sol et surtout le climat de 
la France ei de l’Algérie seraient les seuls obstacles à l’intro- 
duction de l’Erythroxylon coca en France ou dans les colonies 
françaises, il ne faudrait pas hésiter, je crois, et tourner ses 
regards vers la Guyane. Là on trouvera le climat de la Coca 
par excellence, c’est-à-dire, comme dans presque toutes les 
terres équatoriales, un climat très-chaud, très-uniforme et très- 
humide. Je crois que l’échelle des variations thermométriques 
de la Guyane oscille entre 2h et 31 degrés centigrades, que 
les pluies y sont fréquentes et copieuses, et que l’hygrométrie 
atmosphérique est énorme malgré le climat très-chaud. 

En outre, dans les vallées des fleuves, après avoir dépassé 
les alluvions modernes, il existe des terrains de sol argilo- 
siliceux qui, ainsi que je l’ai dit plus haut, paraissent propres 
à la culture de la plante qui nous occupe. Ces argiles sont 
surtout communes dans les terres hautes, et c’est là une si- 
tuation avantageuse pour le cas où la température des vallées 
serait trop élevée. Il est vrai que sous l'équateur, ces altitudes 
n’étant pas très-considérables n’influent pas d’une manière fort 
sensible sur le climat. Enfin, pas même l’élément ferrugineux 
fait défaut dans les nombreuses portions de terre qui pro- 
viennent de la décomposition des diorites et des limonites 
ferrugineuses. 

Je désire ne pas m’exagérer la valeur de la Guyane au point 
de vue de son climat et de la nature de son sol pour la cul- 
ture de la Coca. Je n’ai pas visité la Guyane, je dois les ren- 
seignements que Je possède sur ce pays au docteur Sagot qui 
s’est occupé beaucoup et s’occupe encore des questions de 
culture dans notre colonie. Le docteur Sagot, actuellement 
professeur à l'École normale spéciale de Cle serait certai- 
nement heureux de mettre à votre disposition les données 
qu'il a acquises par un long séjour à la Guyane et qu’il s’oc- 
cupe, je crois, de publier en ce moment. 


Ill. EXTRAITS DES PROCES-VERBAUX 


DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 


SÉANCE DU CONSEIL DU AÀ7 JUILLET 41874, 


Présidence de M. DROUYN DE LHUYS, président, 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. 

— M. le Président proclame les noms des membres récem- 
ment admis par le Conseil : 


MM. Présentateurs. 


Mettray, près Tours (Indre-et-Loire). A5 GeofroypSainteHilaire, 
Raveret-Wattel. 


{ Deyrolle fils. 


r yn d 
BLANCHARD, directeur de la Colonie agricole de ‘ CN Ee LUE 


BRÉMANT (Léon), 9, rue de Grenelle Saint-Ger- rar. i ee 
main, à Paris. RE et TES OR QULE: 

CORDIER (Adolphe), propriétaire, à El Aliah, [Te ne un 
Maison-Carrée, près Alger (Algérie). ( ent 

CuvERVILLE (Ludovic de), au château de Ké- (He de Belizal. 
rauter, près Saint-Nicolas-du-Pélem (Côtes-! Drouyn de Lhuys. 
du-Nord). La. Geoffroy Saint-Hilaire. 

+ Deyrolle fil 

CAGE (Léon), docteur, 9, rue de Grenelle Saint- one 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Jules Grisard. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Jules Grisard. 

la. Maingonnat. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Comie de Lagarde. 

Edgar Roger. 

Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
E. Leroy. 

{ D' Bonnafont. 

‘ Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Raveret-Wattel. 


Germain, à Paris, | 


HIÉLARD (Charles-Léon), 43, rue du Caire, a| 
Paris. 


MawsiGny (ie comie de), propriétaire, à Avran- | 
ches (Manche). 


Micuez (Marie-Édouard-Adolphe), docteur en| 
médecine, à Anizy-le-Château (Aisne). | 


MOLEMBAIx (baron V. de), au château des Loges, 
à Fontaine-l’Évêque (Belgique). 


MONTEBELLO (le comte Adrien de), 81, rue de 
la Baume, à Paris. 


PROCÈS-VERBAUX. h57 


MonTroy (Phélippeau-Auguste de), propriétaire, 
à Montroy, commune de la Chapelaude, can- 
ton d’Huriel (Allier). 


Drouyn de Lhuys. 
Paul Gervais. 
Marié-Davy. 


Drouyn de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Ponsard. 


PrON (Charles), étudiant en droit, 15, avenue 
d’Antin, à Paris. 


Drouyn de Lhuys. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Alexis Godillot. 

A. Delaurier, 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Saint-Yves Ménard. 


Neuilly (Seine). 


Roy (Gabriel), avocat, propriétaire, à Lavalette, 
arrondissement d'Angoulême (Charente). 


Carbonnier. 
Ale de Lhuys. 
la. Geoffroy Saint-Hilaire. 


RICHARD, intendant militaire, 31, avenue à 


VARIN (Jules), propriétaire, à Baune, près La- 
Ferté-Alais (Seine-et-Oise). 


M. le Président informe ensuite le Conseil de la perte re- 
grettable que vient de faire la Société dans les personnes de 
MM. le docteur F.-S. Cordier, Édouard Maumenet et Paul 
Le Faucheur. 

— Des remerciments pour leur récente admission sont 
adressés par MM. de Montulé, Armand Brousse, Lhéritier et le 
docteur Michel. 

— M. Salzedo adresse ses remerciments pour la médaille 
qui lui à été décernée par la Société, et envoie une nouvelle 
note sur les Mélipones de Sainte-Marthe (Colombie). 

— MM. Prieur-Carré et Daviau demandent à prendre part 
aux cheptels de la Société. — Renvoi à la commission spé- 
ciale. 

— M. le D' J.-J. Lafon, en adressant l’état de ses cheptels, 
fait observer, à propos de la récompense qui lui a été attri- 
buée, que dans le rapport de M. le Secrétaire général une 
médaille de seconde classe lui est décernée pour ses croise- 
ments de l’abeille ordinaire avec l'abeille italienne, tandis 
que, au contraire, il s’est appliqué à conserver, au milieu 
de ruches noires, la race ligurienne dans toute sa pureté. 

— MM. de Vernejoul, Duchastel, Chappellier et la Société 
d’acclimatation de Montauban remercient des graines de Vers 
à soie ou de végétaux qui leur ont élé adressées. 


58 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


— M. le Secrétaire de la Commission de viticulture de la 
Société des agriculteurs de France accuse réception de envoi 
qui lui a été fait par la Société d’une note de M. Regnauld 
sur la destruction du PAylloxera. 

— M. le vicomte d’Adhémar de Case Vielle adresse le compte 
rendu de ses éducations de Vers à soie. 

— MM. Leroy, de Trubessé, de Coutans, Gaullier et de la 
Brosse-Flavigny font connaître la situation des cheptels qu’ils 
tiennent de la Société. 

— Il est adressé, pour prendre part au prix spécial fondé 
par la Société, un mémoire en italien sur la maladie des Vers 
à soie; il porte l’épigraphe : Viva la Francia. — Renvoi à la 
Commission des récompenses. 

— M. le comte de Castelnau, consul général de France à 
Melbourne, adresse une lettre de M. Gulliver qui offre ses ser- 
vices à la Société comme collecteur de graines. M. Gulliver 
donne en outre quelques détails sur les Eucalyptus globulus, 
amygdalina et marginata. 

— M. Carbonnier fait connaître qu’il vient de recevoir un 
nouvel envoi de poissons de l’Inde. 42 sur #4 sont arrivés 
vivants à Paris ; ils appartiennent au genre Anabas et ont été 
apportés par M. Ozias, mécanicien en second à bord du 
Hoojly. 

— M. le Directeur du Jardin d’acclimatation communique 
à la Société la lettre suivante, qui lui est adressée par M. le 
docteur Tholozan : « La grande Perdrix Téfraogalle dont vous 
me parlez se rencontre quelquefois aux environs de Téhéran; 
la difficulté est de la prendre en vie. Les jeunes s'élèvent 
très-difficilement, tous ceux que j'ai eu chez moi sont morts en 
quelques jours, les adultes vivent plus longtemps en captivité. 

Les Anes sauvages se trouvent à quelque distance d'ici, 
mais ils sont très-difficiles à apprivoiser et à transporter dans 
un pays où tout doit voyager à dos de mulet ou de chameau 
jusqu’à la mer Caspienne. Je n’ai trouvé jusqu'ici personne qui 
veuille se charger de conduire ces animaux. Il y a là, comme 
pour les Perdrix royales, un obstacle difficile à surmonter. Je 
vous promets d'étudier cette question et de saisir la meilleure 


PROCÈS-VERBAUX. A59 


occasion pour vous faire un envoi. La question des frais n’en 
serait pas une parce que Sa Majesté le Shah nous viendrait en 
aide. : 

» Quant aux grenades sans pepins ou plutôt avec pepins 
très-petits, elles existent à Pemnon, à trente lieues d'ici, et 
j'ai attendu jusqu’à présent un paquet de boutures que j'avais 
demandées dans cette localité. Ma commande n’est pas ar- 
rivée à temps pour pouvoir vous être expédiée; c’est un 
retard de neuf mois. Vous recevrez ces plantes au mois de 
janvier prochain. 

» Je vous remercie de vous être souvenu de moi. Si les 
Persans ont eu la mémoire un peu courte à leur passage à 
Paris, ce n’a pas été de mon fait; dans tous les cas, soyez sûr 
que je suis en entier à votre disposition. » 

— M. le Gouverneur de la Nouvelle-Calédonie écrit à M. le 
Président : « Jai l'honneur de vous accuser réception de votre 
lettre du 6 avril 1873, par laquelle vous voulez bien vous 
adresser à moi pour vous aider à obtenir de la Nouvelle- 
Calédonie les nombreuses plantes déjà connues qu’elle ren- 
ferme et celles qui n’ont pas encore été introduites en Europe. 

» J'ai accepté l’offre qui m'a élé faite par M. Armand, sous- 
commissaire de la marine, de se charger du soin de rassem- 
bler et d'expédier les végétaux que vous désirez introduire 
dans les terrains dont la Société d’acelimatation dispose sur le 
littoral méditerranéen. 

» M. Armand, qui est des environs de Cannes et qui sert de- 
puis plusieurs années en Nouvelle-Calédonie, est parfaitement 
à même d'apprécier les végétaux de la colonie qui sont suscep- 
tibles de s’acclimater facilement sur les côtes de la Provence, 

» Cet officier ne demandant aucune rémunération, je pense 
qu’ilest tout à fait inutile d'assurer d'avance un crédit pour faire 
face aux frais de ces envois. Toutes les dépenses qu'il y aura 
à faire et qui se borneront, probablement, à la confection des 
serres, seront prises en note et remboursées en fin d'année 
ou bien supportées par le budget local de la colonie, si, en 
échange des végétaux que la Nouvelle-Calédonie lui expé- 
diera, la Société d’acclimatation veut bien lui renvoyer les 


160 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


serres avec des plants de tous les arbres fruitiers d'Hyëres et 
de Cannes qui lui seront demandés. 

» Les envois se feraient, autant que possible, par tous les 
navires de guerre partant de la Nouvelle-Calédonie pour le 
port de Toulon; à défaut 1ls prendraient la voie des bâtiments 
du service régulier entre la France et notre colonie qui doi- 
vent partir de Brest tous les quatre mois. Ils seraient recom- 
mandés au préfet maritime de l'arrondissement, qui attendrait 
une personne munie des instructions de la Société d’acclima- 
tation pour les lui confier. 

» Au fur et à mesure que les envois seraient dirigés sur 
France, par la voie des navires de guerre, une lettre passant 
par la voie de Suez en informerait la Société d’acclimatation 
et lui indiquerait la date probable de leur arrivée à destination. 

» Telles sont, monsieur le Président, la marche pratique 
que j'ai l'honneur de vous proposer, pour la réussite de 
l’œuvre d'importation pour laquelle vous avez bien voulu ré- 
clamer mon concours. » — La Société à transmis ses remer- 
ciments à M. le Gouverneur de la Nouvelle-Calédonie. 

— M. de Geofroy, ministre de France à Pékin, écrit : « Par 
votre lettre en date du 45 janvier dernier, vous voulez bien 
me faire savoir qu’une caisse de cocons de Vers à soie du 
chêne que je vous avais adressée est arrivée en mauvais état, 
la moitié de ces cocons étant éclos. Une seule chose m'étonne, 
c'est que la totalité de l’envoi n'ait pas été perdue. J'avais, 
l'an dernier, au moment de mon départ de Tché-fou, com- 
mandé qu’on fit cette caisse et qu'on vous l’expédiât par le 
plus prochain bateau des Messageries. Je ne sais quel malen- 
tendu l’a fait garder deux mois à Shanghaï où elle a eu tout 
le temps de se détériorer (1). Je tâcherai d’être plus heureux 
cette année, c’est-à-dire cet automne, car il serait inutile de 
songer à faire traverser la mer des Indes aux chrysalides dans 
une autre saison que l'hiver. 

» J'aurai soin, d’ailleurs, de suivre les indications que vous 
me donnez pour l’emballage et l'expédition. 


(1) Geci nous explique les insuccès des graines. — R. 


PROCÈS-VERBAUX. A61 


» Peut-être ne connaissez-vous pas l’étoffe qui se fabrique 
avec la soie du chêne? J'en joins à cette lettre un échantillon 
provenant de la province de Chantong. C’est, comme vous le 
verrez, un tissu très-fort. On en peut fabriquer des vêtements 
d’été de bon goût. » 

— M. Lebeuf de Monigermont, de Coubert (Seine-et- 
Marne), adresse la lettre suivante : « M. Maingonnat, natu- 
raliste, me disait, il y a quelques jours, qu’on ne connaissait 
pas encore de Faisans vénérés élevés en liberté. 

» Dans l'intérêt de votre Société, et pensant vous être 
agréable, je puis vous affirmer qu'à ma connaissance j’ai dans 
mon parc, à Coubert (Seine-et-Marne), au moins une couvée 
de 12 jeunes faisans vénérés ; ils ont été vus encore hier matin 
avec la mère par le garde qui estime qu’ils sont gros comme 
des perdreaux ; ils étaient à 3 ou À mêtres de lai dans une allée. 

» J'avais déjà eu l’année dernière une compagnie de 6 à 
7 sujets, quelques-uns ont pu être repris, une poule et un 
coq se sont tués en faisanderie et ont été préparés par 
M. Maingonnat; à la fin de février, les gardes connaissaient 
dans les bois deux coqs et trois poules, aujourd’hui on voit 
presque constamment les deux coqs, mais on n’a encore revu 
qu'une poule avec les 12 jeunes. » 

— M. À. Waiïlly rend compte de ses éducations d'Aftacus 
Pernyi et sollicite un nouvel envoi de graines. 

— M. Victor Léolard fait connaître qu’il a élevé avec succès 
des Vers à soie à Paris; l’éclosion avait eu lieu le 20 avril 1874. 
Faute de mürier, les Vers furent nourris à la laitue les quinze 
premiers jours, ils ont supporté toutes les variations de la 
température de la saison et ont été amenés sans perte à filer 
leurs cocons. 

— M. le docteur Jourdan, de Voiron (Vienne), annonce que 
ses jeunes Perruches de Swainson sont sorties du nid et 
qu’elles vont parfaitement bien. 

— M. Collenot écrit de Semur (Côte-d'Or) : « Je viens de lire 
au Bulletin du mois de mai dernier un article de M. le docteur 
Turrel sur les maladies de la vigne et sur les moyens d'y por- 
ter remède. 


62 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


» M. Turrel donne d'excellents conseils et préconise, entre 
autres moyens, les semis de notre raisin indigène pour rendre 
à la vigne épuisée sa vigueur primitive. 

» Ce moyen me paraît très-bon, mais la vigne semée a l’in- 
convénient de se mettre tard à fruit. 

» Je propose un autre procédé, que j'aurais tenté depuis 
longtemps si j'avais à ma disposition le temps et un terrain 
d'essai. 

» Dans mes excursions dans le canton de Flavigny (Côte- 
d'Or), j'ai remarqué dans les bois et dans les fourrés les plus 
épais une quantité considérable de pieds de vigne sauvage, 
dont j'attribue le semis aux oiseaux. 

» Ces bois sont situés sur la pente de coteaux qui font face à 
d’autres coteaux couverts de vigne en culture où dominait au- 
trefois le pinot ou pineau. 

» On exploite le bois tous les quinze ou vingt ans et, quand 
il est arrivé à sa pleine croissance, la lambrusque atteint le 
semmet des arbres et porte des raisins à grains très- pelits, il 
est vrai; mais certains ceps, au dire des habitants du pays, 
donnent des fruits d’un très-bon goût, ce qui s’explique par 
ce fait qu'il y a véritable sélection dans le choix de semis, les 
orives et autres oiseaux friands du raisin préférant toujours les 
grains les meilleurs et les plus mürs. 

» Dans ces conditions tous les pepins ne germent pas; les 
mieux doués en résistance et les plus favorisés par le terrain 
parviennent seuls à prendre vie. 

» Quand on coupe le bois, on coupe aussi la vigne, mais elle 
repousse parfaitement. 

» Il faut que ces plants de semis soient extrêmement robustes 
pour n'être pas étouflés par la végétation arborescente qui les 
entoure, et il est certain qu'ils doivent présenter une grande 
résistance aux maladies et surtout à l’aitaque du PAylloxera. 
lis conviennent donc au moins aussi bien que les plants améri- 
cains, et ont l’avantage de n’être pas, comme ces derniers, 
porteurs des œufs de cet insecte nuisible. 

» N'y aurait-il pas avantage, pour certains viticulteurs, à 
planter des boutures de ces vignes sauvages dans un terrain 


PROCÈS-VERBAUX. 163 


non infesté, pour en assurer la reprise. [ls seraient plus 
prompts à se mettre à fruit que les semis. On pourrait, après 
la première récolte, faire un choix des espèces recomman- 
dables, et ii y en a, nous l’avons dit, parmi ces lambrusques, 
qui présentent des feuilles découpées de différentes mamières 
suivant les pieds. La cullure donnerait sans doute plus de 
volume aux grains. 

» Le reste serait employé comme porte-greffes. Je pense 
que, dans ces conditions, le semis par les oiseaux procurerait 
des variétés plus robustes que celles obtenues par le semis 
arüificiel, et qu’il présenterait au moins autant de chances 
d'acquérir, avec beaucoup plus de vitalité, des espèces pré- 
cieuses et relalivement d’un rendement plus précoce, en les 
soumettant aux méthodes usitées dans la culture de la vigne. 
— Seulement il faudrait peut-être, comme l’indique M. Turrel, 
leur donner une taille plus longue que celle ordinairement 
usitée. 

» Si quelques-uns de nos confrères voulaient tenter l'essai, 
je me mets entièrement à leur disposition pour leur faire par- 
venir des boutures vers la fin de l’hiver 1875. 

» Ces boutures seraient prises dans les jeunes taillis, sur 
les pousses nouvelles qui se développent après la coupe du 
bois. 

» Je désirerais pourtant être prévenu à temps, c’est-à-dire 
au mois d'octobre prochain, au plus tard (4). » 

— M. Victor Masson, de la Chassagne (Côte-d'Or), adresse 
le rapport suivant sur ses cultures : « Les glands de chêne 
iruffier que la Société m’a adressés ont bien levé, et forment 
déjà des tiges de 5 à 6 centimètres avec de A à 6 feuilles. 
— Nous sommes encore loin de la récolte du célèbre tuber= 


cule ! 
» Nous serait-il permis d'inviter le Conseil à utiliser ses 


(1) Il serait très-important, avant toute discussion théorique, de s’assurer 
si les lambrusques ou vignes redevenues sauvages par semis prennent ou 
non le Phylloxera; avant tout, il faut faire une expérience. On a annoncé à 
l’Académie des sciences que le Phylloxera peut attaquer les lambrusques; 
une vérification est indispensable. — M. G. 


A6A SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


relations avec nos représentants diplomatiques et consulaires 
en Espagne, pour se procurer de la graine swre d’Abies pin- 
sapo? Tous nos efforts pour trouver de cette graine ont échoué. 
Nous pensons qu’en dehors de l’ornement qu’il fournit au- 
jourd’hui à nos parcs, le Pinsapo, si rustique, pourra être 
cultivé au point de vue de l'exploitation. C’est, avec le Nord- 
manniana, à peu près le seul Abies dont la végétation soit 
assez tardive pour n'avoir rien à redouter de nos gelées de 
printemps, passées depuis quelques années à l’état chronique. 
Je ne parle pas de Abies grandis où Lasiocarpa, le plus élé- 
gant des Abtes, que la tardivité de sa végétation rendra pré- 
cieux pour nos pares, lorsqu'il sera devenu moins rare. Nous 
en avons essayé un semis; mais notre résultat est à peu prés 
nul : une quinzaine de sujets. Dans cette énumération des 
espèces tardives, je dois comprendre l’Abies Douglasiü que l’on 
pense se procurer maintenant à des prix qui permettent de 
le comprendre dans les arbres résineux à employer au reboi- 
sement. Il réussit admirablement chez nous et sa croissance 
est excessivement rapide. 

» Permettez-moi, monsieur le Président, de terminer cette 
bien longue lettre en mentionnant un succès encourageant 
que nous avons obtenu cette année avec le Pinsapo et le Nord- 
mannian«. 

» Nous avons, à l’automne dernier, planté plusieurs cen- 
taines de ces deux belles espèces, dans une terre provenant 
des déblais du canal de Bourgogne et portée sur un chaume 
dénudé. Bien que les plants eussent une hauteur de 60 à 
80 centimètres, ils ont tous repris et végêtent parfaitement en 
ce moment, sans avoir souffert de la gelée du 5 mai (— 5°) et 
malgré l’excessive chaleur de la saison. | 

»Nousne perdons pas de vue notre promesse de Pinus excelsa. 
Les petits sujets grandissent et nous pourrons vous en faire 
un envoi au mois de septembre prochain. Nous pourrions y 
joindre des Abres Cephalonica et Apollinis, dans le cas où ces 
espèces seraient agréables à des membres habitant l’ouest ou 
le midi. » 


— M.le vicomte de Belizal écrit des Granges (Côtes-du- 


PROCÈS-VERBAUX. 65 


Nord) : « Je crois pouvoir être utile aux membres de la Société 
d’acclimatation en vous transmeltant mes observations relati- 
vement aux essais que j'ai tentés ici en semant des graines 
d'Eucalyptus qu'un ami m'avaient envoyées de Corse. 

» J'ai semé, le 22 septembre 1873, des graines d'Eucalyptus 
globulus, elles ont parfaitement levé; j'ai empoté les jeunes 
plants dans des pots successivement plus grands à mesure que 
les racines s’étendaient, et le 3 mai 1874, les plus grands 
atteignaient 0",35. Ils ont passé l'hiver en serre tempérée; j'en 
ai obtenu ainsi trente-trois plants vigoureux. J'en ai distribué 
quelques-uns à quelques amis, et planté un certain nombre 
dans une propriété sur le bord de la mer. Ici j'en ai planté 
vinet, en leur préparant des fosses de 0",80 de profondeur sur 
1 mètre de diamètre, et j'ai rempli ces fosses de terreau con- 
sommé. J’en ai mis deux en caisse pour être rentrés en oran- 
gerie l’hiver. 

» Le 16 mai, j'ai planté en pleine terre le premier, comme 
je le dis plus haut, il atteignait de hauteur 0",47; aujourd’hui 
il mesure 1°,15, et en moyenne 1l pousse de 2 à 3 centimètres 
par jour. J’ai planté dix-sept autres le 30 mai, et le 4 juin, 
pousse de 1 à 2 centimètres par Jour; ils atteignent de 0",60 à 
0" ,80, selon la hauteur qu’ils avaient lors de la mise en terre. 

» J'ai semé aussi le 7 février des graines d’'£ucalyptus co- 
riacea; j en ai plus de cinquante plants, en pots, qui ont une 
hauteur de 0,10 à 0",15. Enfin je viens de semer, il y a quel- 
ques jours, sous châssis, des graines de Gunntü, amyqdulina, 
Bastard-qum, leucoxylon, qoniocalyx, latifolia ; quelques- 
unes lèvent à peine. 

» Je serais heureux si ces détails vous intéressent ; après 
l'épreuve de l’hiver je vous dirai quel sera le résullat ». 

— M. Léo d’Ounous adresse quelques détails sur les diverses 
espèces de végétaux qu'il cultive à Saverdun (Ariége). (Vov. 
au Bulletin.) 

— M. Barailon, de Chambon (Creuse), adresse à M. le Pré- 
sident la lettre suivante : « Dans l'intérêt de la sylviculture, 
permetlez-moi d'appeler votre attention et celle de nos col- 


lègues sur le Sophora du Japon (Styphnolobium Japonicum). 
3€ SÉRIE, Te. L. — Juillet 4874, 30 : 


A66 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


» Si l’on en juge par un sujet de cette essence, se trouvant 
à Évaux (Creuse) dans le jardin de M. Darchis, médecin, cer- 
tainement après l’Eucalyptus, c’est le végétal ligneux à bois 
dur poussant avec le plus de rapidité. Son Sophora, en 
effet, n’a que trente-cinq ans de plantation, néanmoins, à hau- 
teur d'homme (je l'ai mesuré moi-même), il n’a pas moins de 
2", 15 de circonférence. Ses branches portant préjudice à la toi- 
ture de l'habitation, abattues et exploitées, ont donné un bois 
de travail trés-dur et d’un beau poli; son écorce a des fila- 
ments très-longs et tenaces qu’en pourrait fort bien utiliser 
pour cordes et voiles de navires. 

» Le Japon, qui a obtenu le premier prix à la dernière 
exposition universelle de Paris, ne pourrait-il pas les employer 
pour la confection des papiers dont il se sert pour vêtements 
et couvertures d'habitations? Son bois ayant beaucoup de 
rapport avec le frêne, ne pourrait-il pas être employé pour 
ébénisterie, charronnage et même pour constructions navales? 
Ne pourrait-il pas donner à nos cuisines et à nos usines un 
charbon de bonne qualité? Telles sont les questions que je 
m'adresse, et sur lesquelles il me semble important d'appeler 
l'attention de notre Société d’acclimatation. 

» Voulant essayer sa culture comme arbre forestier, j'en ai 
fait, au commencement du printemps, semer et planter, en 
plusieurs localités, dans différentes espèces de terrains. Malgré 
la sécheresse, mes semis ont réussi, mes jeunes Sophoras 
n’ont été, à mon grand étonnement, indisposés ni par le froid, 
ni par la sécheresse. Mes plantations, faites dans des terrains 
exempts d'humidité, ont poussé avec vigueur. Je suis heureux 
de pouvoir vous assurer que leurs pousses ont beaucoup 
moins souffert des gelées du printemps que celles du Noyer, 
du Frêne et même du Chêne. Tout me porte donc à penser 
qu’on pourra le cultiver, avec grand avantage et profit, dans 
le midi, le centre de la France et sur les bords de la mer, où 
les hivers sont peu rigoureux. 

» Tout, jusqu’à présent, me fait bien augurer de sa culture. 
Le seul inconvénient que je connaisse à cette essence, c’est 
qu’elle indispose, par une odeur désagréable, les ouvriers qui 


PROCÈS-VERBAUX. h67 


l’exploitent et travaillent son bois, odeur qui passe prompte- 
ment, mais qui se renouvelle toutes les fois qu’on la met en 
œuvre. * 

» Lorsque le moment sera venu, je compte bien vous faire 
part de mes résultats bons ou mauvais sur sa culture fores- 
tière, sur les avantages et les inconvénients de son bois. 

» À mon passage à Paris, je me propose de déposer, rue de 
Lille, 19, un échantillon de ce bois. » 

— M. À. de La Roquette écrit : « Par ure letire du 28 avril 
dernier, le ministre de France à Téhéran, M. Mellinet, informe 
le département des affaires étrangères que, parmi les remèdes 
employés par les habitants du Khoraçan pour combattre la 
peste bovine, connue dans le pays sous le nom de gavé mer- 
gni, le seul qui ait eu quelque succès serait une décoction 
très-concentrée d’une plante fort commune sur les plateaux 
de la Perse, et que les indigènes appellent Mokhaléceh. Cette 
plante n’étant pas encore, en cette saison, arrivée à la florai- 
son, il a été impossible d’en déterminer le nom botanique; mais 
M. Mellinet nous en adresse quelques graines dont j'ai cru de- 
voir prélever un échantillon pour la Société d’acclimatation. 
J'ai l'honneur, monsieur le Président, de vous envoyer ces 
graines, dans la pensée qu’il y aura peut-être quelque intérêt 
à les expérimenter. » 


Il est offert à la Société : 


4° Portraits zoologiques, par M. Fulbert Dumonteil, 4 vol. 
in-8° carré, illustré. Paris, 1874. De la part de M. le directeur 
du Jardin d’acclimatation. 

2% Sixth annual report of the department of marine and. 
fisheries. À vol. in-8°. Ottawa, 1874. 

3° Entretiens d'un instituteur sur l'utilité des oïseaux, par 
M. Ch. Viel, avocat. 

h° Exposition du 14 mai 1874, à la Halle de Nevers (Compte 
rendu). 

5° Division fondamentale des sciences, suivie de lettres sur 
la division des pouvoirs et le gouvernement le meilleur, par 
Bernard Pequin. 


h68 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


6° Quelques documents pour l'histoire de la Pomme de 
terre, par le docteur D. Clos, de la part de l’auteur. 

7° Visite à l'Exposition de Vienne, par M. Bernardin, de la 
part de l’auteur. 

8° Agriculture de la Guyane française, 1855-1860, par P. 
Sagot. 

9° Notice sur les travaux scientifiques et sur les titres uni- 
versitaires et académiques du docteur N. Joly. 

10° L’ostréiculture. Son passé, son présent, son avenir. — 
Graines d’Huîtres. — Collecteurs-ciments, par le docteur 
Kemmerer. De la part de M. Eug. Vavin. 

11° Le projet de loi de M. Destremx et le rapport de M. de 
Grasset, relatifs aux ravages causés par le Phylloxera. De la 
part de M. Raveret-Wattel. 

12° Trois numéros de divers journaux (Gazzetta piemon- 
tese, 2 juillet 1874; Moniteur du Calvados, k juin 1874; 
Presse, 20 juin 1874), contenant des articles qui intéressent la 
Société d’acclimalation. 

43° Un compte rendu des plantations de Quinquinas, à 
Java en 1874. — Une feuille imprimée, en hollandais. De la 
part de M. Van Gorkom. 

Il a été remis à la Société : 

1° De la part de M. Blondel, des œufs d’Attacus Yama- 
mai G. Mén. 

2° De la part de M. Thozet, six espèces de graines de végé- 
taux de Queensland (Australie). 

3° De la part de M. de la Roquette, des graines de Mokha- 
léceh. 

4° De la part de M. Baraïlon, un échantillon de bois de 
Sophora Japonica. 

5° De la part du Jardin botanique de Howrah, près Calcutta, 
une collection de diverses espèces de graines de l'Inde. 

6° De la part de M. de Fleurville. — Divers échantillons et 
graines de végétaux de la Nouvelle-Calédonie. 


Le Secrétaire du Conseil, 
MAURICE GIRARD. 


IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 


Acclimatation de l’Antherea Yama-mai G. M. dans les 
provinces Baltiques 


Par WITH. CARL BERG (traduction). 


Par suite de l’apparition dévastatrice de la muscardine et de la gattine 
parmi les vers à soie du mürier, et de la circonstance que le mûrier est 
difficile à acclimater dans les régions septentrionales, les efforts des sérici- 
culteurs et des Sociétés d’acclimatation furent dirigés vers l'introduction 
d’autres espèces de la Chine, du Japon et des Indes en Europe, qui fussent 
exemples autant que possible de maladies, et tentèrent de faire passer cette 
branche d'industrie dans des climats plus froids. En effet, plusieurs espèces 
nouvelles parurent ou d’autres déjà connues en Europe, mais, mises de côté 
comme étant sans valeur à la suite d’essais d'élevage insuffisants, reprirent 
leur chemin vers nous et trouvèrent meilleur accueil par l'emploi de moyens 
intelligents acquis dans l'intervalle. Le plus grand mérite relativement à 
l'introduction età l’acclimatation de nouveaux vers à soie revient incontesta- 
blement à M. le professeur Guérin-Méneville. 

Parmi les différentes espèces nouvelles dont on a poursuivi l’acclimata- 
tion sous notre climat depuis une quinzaine d’années, le ver à soie du chêne 
du Japon, Antherea (Attacus) Yama-maï, G. M., paraît être la plus impor- 
tante et le rival d’un grand avenir du Sericaria mori, L. Il s’est répandu 
promptement sur une étendue considérable, et même naturalisé dans des 
régions où la culture du mûrier est difficile ou impossible à cause du milieu 
climatérique défavorable. 

La première graine du Yama-maï, envoyée par le consul de France au 
Japon, M. Duchesne de Bellecourt, parvint en 1861 à Paris, où la Société 
d’acclimatation fitle premier essai d'élevage, qui n’eut cependant pour résultai 
que d'élever une seule femelle. Mais en 1863, M. Pompe van Meerdervoort, 
oflicier de la marine hollandaise, réussit à apporter une plus grande quan- 
tité de graine en Europe, qui, restée en France et en Hollande, donnait des 
produits si nombreux que, dans l’espace de quelques années, plusieurs 
autres pays pouvaient être abondamment pourvus de graines. A partir de 
1865, époque à laquelle l’exportation de la graine, autrefois punie de la peine 
de mort, fut permise par les Japonais, des envois considérables nous ont été 
faits; dans l’année mentionnée, la Suisse à elle seule recut de Yokohama 
6 kilogr., et l’on a obtenu en partie avec celle-ci, en partie avec la 
graine des élevages de 1863 et 1864, des résultats d'élevage très-satisfaisants 
en France, en Hollande, en Italie, en Allemagne, en Suisse, en Autriche et 
en Russie. 

C’est donc ici que je me propose de rendre compte des premiers essais 
avant eu lieu en Russie, el spécialement dans les provinces Baltiques, à Riga 

9 


h70 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


où j’ai été le premier, à ce qu'il paraît, à m'occuper de l’acclimatation du 
ver à soie du chêne du Japon, maintenant que la série d’essais est close. 

Vers la fin de l’année 1867, la Société des naturalistes de Riga m'’invita à 
faire un essai d’acclimatation avec le ver du Japon en question. 

Pour l'obtention de la graine, je m’adressai à M. Baumann, directeur des 
postes à Bamberg, dont la femme s’était occupée depuis deux ans de l’élevage 
du ver du chêne, et avait obtenu des résultats favorables. 

La graine qui arriva ici le 4 avril 1868 provenait de la seconde généra- 
tion des Yama-maï élevés à Bamberg, et ces derniers venaient à leur tour 
de la graine qu’on avait tirée en 1865 directement du Japon, par l'entremise 
de M. le professeur D' Hoffmann, à Leyde. 

Aussitôt après la réception, une partie de la graine fut mise à un endroit 
aéré et sec d’une température aussi basse que possible (+ 4 à 6 degrés Réau- 
mur), mais déjà, au bout de peu de jours, quelques petites chenilles 
commencçaient à sortir, suivies pendant les heures matinales des jours posté- 
rieurs de plusieurs autres. Le soin le plus important fut par conséquent 
de procurer la nourriture nécessaire à celles déjà écloses, ainsi qu’à celles 
qui pouvaient naître ensuite. 

Comme on ne devait pas s'attendre à voir bourgeonner les chênes, qui en 
moyenne ne déploient leurs premières feuilles ici que vers le 20 mai, qu’au 
bout de quatre semaines, on mit des branches de chêne dans des vases 
remplis d’eau et exposées à la chaleur des appartements, ainsi qu’au soleil 
afin de les faire pousser. Je ne manquais pas en même temps de me rendre 
auprès de tous les jardiniers, horticulteurs et fleuristes pour chercher du 
feuillage de chêne, et fus assez heureux pour trouver deux petits chênes 
munis de feuilles qui avaient séjourné dans un appartement pendant l'hiver. 

Mes jeunes élèves avaient refusé la veille les feuilles de chêne, vieilles en 
effet, mais ramollies dans de l’eau distillée et non distillée, et n’avaient pas 
touché aux bourgeons de chêne ; je croyais donc qu’elles se jetteraient avec 
d'autant plus d’empressement sur les feuilles vertes ; mais je me vis désa- 
busé, car elles refusaient également cette nourriture d’une manière absolue. 
— Quelques-unes mouraient déjà. J’essayai alors des feuilles de quarante- 
trois espèces de plantes différentes de plein air et des serres des jardiniers, 
mais également sans succès. Il fut seulement prouvé, ce qu’on me confirma 
plus tard de divers côtés, que la chenille du Yama-mu ne prend d’autre 
nourriture que les feuilles de chêne, et pendant sa première période seule- 
ment les petites feuilles les plus tendres. Je n’ai pu les nourrir des feuilles 
de Cydonia vulgaris, pendant leur premier âge, comme le Dr Rein le pré- 
tend, parce qu’it m'a été impossible d’en trouver; le fait n’a été confirmé, 
du reste, par aucun autre. Il ne m'était pas non plus possible d’essayer de 
les nourrir de Carpinus lectulus, Photinia glabra, proposés par le profes- 
seur Haberland ; on trouve ici des espèces de Sorbus précités, le Sorbus 
aucuparia, auquel les chenilles ne touchaient pas. 

Comme les feuilles de chêne écloses à la chaleur d'appartement ne leur 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. A74 


convenaient pas non plus, je m’empressai de remettre le reste de la graine 
dans une boîte de fer-blanc et de la placer sur de la glace. 

Je retardai de cette façon effectivement l’éclosion des chenilles jusqu’au 
moment où il y avait des feuilles de chêne, mais elles étaient alors si faibles 
que plusieurs ne pouvaient rompre la coquille; celles qui sortaient ne pre- 
naient pas de nourriture et mouraient peu après. Il résultait donc de là, ce 
qui me fut confirmé plus tard, qu’il est nuisible aux jeunes chenilles de 
transporter la graine qui s’est trouvée déjà dans une température plus élevée 
dans une plus basse. 

Je pouvais donc, le 9 juin 1868, relativement à mon premier essai d’éle- 
vage, faire seulement communication à la Société des naturalistes que 
10 pour 100 de la graine n’avait pas été fécondée, que 25 pour 100 des 
chenilles étaient étouffées dans l’œuf, 55 pour 100 sorties trop tôt, et 
que 10 pour 100 avaient traîné jusqu’au développement des feuilles de chêne, 
mais qu’elles avaient alors péri d’épuisement. 

Mais le véritable motif de cet insuccès était le suivant : la graine avait déjà 
souffert en routé de la chaleur printannière ; arrivée à Riga un samedi, elle 
était restée le dimanche, le lundi (à cause d’une fête de Marie) et la matinée de 
mardi à la douane, dans une petite chambre et dans le voisinage d’un poêle 
Chauffé, les chenilles avaient donc subi la somme de chaleur nécessaire à leur 
éclosion, qui, par des calculs établis plus tard, se chiffrait à 270-293 degrés R. 
et ne pouvaient plus être retenues dans l’œuf même à 7,5 degrés R. 

Il y avait espoir de mieux réussir une seconde fois en observant certaines 
mesures de précaution. Je l’ai tenté et j’ai le plaisir de pouvoir rendre 
compte du succès de l’acclimatation du Yama-mañ. 

Pour ne pas exposer la graine à la tempéraiure du printemps, je la fis 
venir cette fois à l’arrière-saison (en octobre) et la divisai par petites parties 
dans de petites boîtes de carton, dont les couvercles étaient percés de trous 
d’air, ainsi que dans des petits sacs de tulle, que je suspendais en différents 
endroits secs et aérés, tels que verandas, bûchers, entre les croisées, etc. 
Partout, dans leur voisinage immédiat, je placai des thermomètres pour 
constater journellement la température. 

La graine du vestibule et-du bûcher avait à subir le froid le plus vif, 
— 13 et — 12 degrés R. pendant trois jours. 

L’exposer à un tel froid était hasardeux, car ailleurs la graine était con- 
servée jusque-là à une chaleur de 4 à 6 degrés R. pendant l'hiver. 

Lorsque au mois de mars la température s’éleva à + 8 à 10 degrés R., je 
mis la graine de chaque boîte et de chaque petit sac séparément dans des 
cornues à Jong cou, que je plongeai dans l’eau de façon à ne laisser dépas- 
ser qu’une partie du tuyau. L’eau fut renouvelée journellement, et le réser- 
voir contenant les vases placé dans un bûcher exposé au nord. 

C’est ainsi que je réussis à empêcher l’éclosion des chenilles jusqu’au 
7 mai, lorsque les premiers bourgeons de chêne commencaient à s'ouvrir, 
quoiqu'elles fussent déjà entièrement développées un mois après la ponte, 


h72 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


du moins en apparence. (D’après le Dr Verson, la petite chenille n’atteint son 
entier développement qu’au printemps (1). Je pris alors la graine des cornues 
et l'étalai, encore séparément, sur de petites toiles couvrant des éponges hu- 
mides, et l’exposai à une température de H 14 à 16 degrés R. 

Les petites chenilles commencèrent à sortir déjà dans la soirée du jour 
même de la graine qui, pendant l'hiver, avait subi 3 degrés, puis 8 à 10 degrés 
de températ:ire en mover”e, serendirent vivement aux branches de chêne, 
appüyées contre les cpongu»s, : commencèrent à manger avec avidité. De la 
graine qui s'était trouvée à une température de 12 degrés pendant trois 
jours, et qui avaient eu tout l'hiver une température plus basse que la pré- 
cédente, l'éclosion ne commenca qu’au bout de trois jours et se termina le 
sixième jour: mais de celle qui avait subi un froid de 13 degrés, il n’en 
sortit point, le froid les avait tuées. Ces dernières s’élevèrent à 10 pour 400 
de la totalité, 6 pour 100 farent non fécondées ; il n’arriva donc à l’éduca- 
tion que 84 pour 100. 

Le fait ainsi constaté me paraît intéressant et important en prouvant que 
la graine de Yama-maï peut supporter une température aussi basse de 
12 degrés sans avoir des suites funestes pour ses habitants. Cela indique une 
fermeture bien sûre de l’œuf ou une insensibilité extraordinaire des petites 
chenilles contre le froid. Ce fait de l'élevage du Yama-maï a son impor- 
tance en ce sens que la graine, conservée pendant l’hiver à une température 
très-basse, n’a nullement besoin d’être préservée d’une température plus 
élevée au commencement du printemps, car il fut prouvé les hivers suivants 
que la graine qui avait eu en moyenne une température de 2 degrés, sup- 
portait plus tard en mars, avril el au commencement de mai, assez long- 
temps une chaleur de 10 à 12 degrés, sans produire l’éclosion des chenilles, 
par conséquent la conservation minutieuse dans des verres sous l’eau était 
tout à fait superflue et même nuisible au développement des chenilles. 

D’après le calcul le plus exact possible, il résultait qu’au printemps la 
somme de température nécessaire à l’éclosion des chenilles, dont j'ai déjà 
parlé, élait pendant trois ans 272, 285 et 295 degrés R. 

Sur cette donnée, et en tenant compte de la température, on peut donc 
calculer d'avance l’éclosion des chenilles et se garantir, presque avec certi- 
tude, contre des surprises désagréables. 

J'ai lu avec intérêt que M. le professeur Haberland, à Goritz, a trouvé 
également une somme de température de 288 à 300 degrés R. pour le dé- 
veloppement des chenilles au printemps. 

Il n’est pas à conseiller de tenir la graine conservée l’hiver et exposée à 
l'éclosion trop humide ou de l’asperger même d’eau, il paraît que les che- 
nilles ne peuvent alors pas percer l’enveloppe devenue tenace et périssent 
dans l'œuf. Le meilleur moyen à l’éclosion est de répandre la graine à plat 
sur des bandes de toile humides. 


(4) Ceci est en contradiction avec les anciennes observations que la chenille 
de cette espèce est formée très-promptement après la ponte de l'œuf. — M. G. 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. A73 


Je ne donnais d’abord aux jeunes chenilles que les petites feuilles tendres 
des bourgeons de chêne à peine éclos pendant leur première période, c’est- 
àa-dire depuis l’éclosion jusqu’à la première mue, deux fois par jour des 
fraîches, plus tard, une fois seulement ou même tous les deux jours. 

Les branches de chêne à feuillage, après avoir été lavées et nettoyées avec 
soin des araignées et des insectes, élaient mises dans des carafes et pots de 
grès. Les ouvertures en étaient minutieusement bouchées avec du papier 
à filtrer, parce que les chenilles sont très-avides d’eau et s’y noyent fré- 
quemment. 

On ne doit pas jeter immédiatement celles qui sont tombées à l’eau et 
mortes en apparence, car celles qui n'y ont pas séjourné trop longtemps se 
réveillent et s’en remettent. Une chenille, qui avait passé presque douze 
heures dans l’eau revint. Les griffes brun clair terminées en dedans de 
l'abdomen, montraient les premiers mouvements, et beaucoup plus tard 
seulement les autres parties du corps. 

Le changement des branches se faisait en appuyant d’autres vases à bran- 
cles aux anciennes pour faciliter ainsi aux chenilles le passage. 

Il va sans dire qu'avec la croissance des chenilles des branches toujours 
plus grandes étaient employées. Je les fis venir des localités distantes d’un 
à deux milles parce qu’il ne s’en trouvait pas dans le voisinage. 

Des espèces de chêne qu’on rencontre ici, Quercus pedunculata et sessili- 
{lora, les chenilles préféraient les feuilles de la première. 

Quoiqu’une nourriture tendre et égale parût leur convenir le mieux, elles 
mangeaient cependant plus tard les jeunes et les vieilles feuilles également 
bien, et à la dernière période, elles ne dédaignaient même pas les feuilles 
presque séchées, dont elles mangeaient les côtes du milieu à moitié. 

Une des principales conditions de bonne réussite paraît être l’air le plus 
humide possible du local d'élevage. Pour l'obtenir, jy placais des vases 
assez grands, remplis d’eau pour l'évaporation, et aspérgeais fortement 
le plancher deux fois par jour. On avait choisi en outre pour l'élevage une 
chambre dans laquelle ne pénétrait directement que très-peu de lumière de 
soleil. 

L'envie de migration des chenilles, provoquée à ce qu'il paraît par leur 
désir de boire, fut combattue le mienx possible en improvisant une pluie fine 
arlificielle, moyennant une brosse trempée dans l’eau dont on aspergeait les 
branches de chêne), selon la température de la chambre, une, deux et jusqu’à 
trois fois par jour. Des éponges mouillées placées entre les branches, ainsi 
que des vases d’eau fixés sur des supports, et fermés par de la gaze atta- 
chée de façon à pendre dans l’eau, remplissaient parfaitement le but. Les 
chenilles s’en servaient assidûment pour se désaltérer. Je recommande par- 
ticulièrement ce moyen qui, à ma connaissance, n’a été encore nulle part 
employé. 

Les animaux sont à préserver de la poussière, et les excrémenis doivent 
être enlevés plusieurs fois par jour ; de même lorsque l’élevage eut lieu en 


A7 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


chambre on aérait fréquemment, car un air salubre et abondant est une des 
principales conditions hygiéniques des vers à soie. 

Au commencement, les chenilles se trouvaient dans des petites boîtes de 
carton recouvertes de gaze ou de tulle, parce que les petites chenilles s’égarent 
facilement. Lorsque ces boîtes devenaient trop élroites, je mettais les branches 
avec les chenilles librement sur une table. Gomme il arrivait que quelques 
chenilles s’en allaient et se cachaïent derrière les armoires et d’autres meu- 
bles de la chambre d'éducation, je mettais les pieds de la table dans des 
vases profonds d’où elles ne pouvaient plus sortir ei étaient faciles à rame- 
ner aux branches. Celles qui voulaient émigrer étaient toujours les mêmes 
et furent plus tard reconnues malades. 

Comme les chenilies varient d’âge par suite de leur éclosion non simul- 
tanée, il vaut mieux réunir ensemble celles d’un même âge, car dans le cas 
contraire il peut survenir des dérangements nuisibles, surtout pendant les 
mues, qui exigent les plus grands ménagements. 

On recommande, dans la plupart des instructions relatives à l’éducation 
du Yama-maï le maintien d’une chaleur égale. Cependant, pour expéri- 
menter l'influence de notre climat sur la réussite des chenilles, je laissais 
lors du premier élevage, la fenêtre le plus souvent ouverte, et les exposais 
aussi plusieurs fois à la pluie et au vent. Aux élevages suivants, une partie 
des chenilles passaient plusieurs jours et nuits tout à fait en plein air, et 
supportaient même dehors sans inconvénient deux jours de pluie forte et 
continuelle, à une température de 110,8 R. 

Je n’ai pu me convaincre si les jeunes chenilles peuvent être exposées 
sans résultat fâcheux aux gelées de nuit printanières, comme Baumann, 
à Bamberg, le prétend. 11 me semble cependant convenable de les garder 
jusqu’à la première mue dans un local fermé, moins exposé aux variations 
de température, et de les transporter seulement plus tard dans des baraques 
d'élevage aérées. On doit surtout éviter un changement brusque de tempéra- 
ture pendant les mues, et surtout la première, car les animaux sont très- 
sensibles à ces époques. 

Les observations exactes, renouvelées trois fois par jour, relatives à la 
température du local d’élevage, donnaient pour les cinq périodes de leur 
vie, les résultats suivants : 


TEMPÉRAT. 
MAXIMUM 
moyenne 


De l’œuf à la première mue....| 9 jours. 
De la première à la deuxième..| 8 » 

De la deuxième à la troisième..[14 » 

De la troisième à la quatrième. . [16 

De la quatrième jusqu’au cocon.|15 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 175 


Il fallait donc aux chenilles pour leur développement entier, soixante-deux 
jours. Le maximum de la température de 18 degrés R. durait dix-huit 
heures, et eut lieu pendant la première période; le minimum de 8°,5 R. 
prit place à la seconde mue qui est très-dangereuse et durait trente-six 
heures ; la mue en fut très-retardée, mais ne coûta la vie qu’à une seule 
chenille. Aux élevages suivants je fus empêché par des absences répétées de 
contrôler exactement les variations de température ; on pouvait calculer en 
moyenne le temps d'éducation des chenilles à cinquante-huit jours. 

Les mues duraient deux à quatre jours, pendant ce temps on traitait les 
chenilles avec les plus grands ménagemenis. 

Peu après la troisième mne, il se déclarait à tous les élevages chez quel- 
ques-unes des signes de maladie. 

Sans avoir fait des investigations microscopiques suffisantes, je les crus 
d’abord atteintes de la pébrine (maladie de taches), parce qu’il se formait 
des taches noirâtres, d’abord au-dessus des pieds du ventre, elles souffraient 
d’évacuations et se fondaient à la fin en un liquide noir et dégoûtant. Des 
expériences microscopiques auxquelles je soumettais, en 1869, les chenilles 
malades et fondues, il ne résultait pas la présence de corpuscules de Cor- 
nalia, mais à leur place je constatais les petits cristaux qui caractérisent la 
léthargie du ver à soie du mûrier, et qui, d’après Verson ou Bratton, est 
occasionnée par les feuilles atteintes de nielle. Est-ce que des feuilles très- 
humides,données en nourriture aux chenilles, ne pourraient pas à elles seules 
produire cette formation de cristaux dans les sucs de la chenille ? Je ne pou- 
vais découvrir rien de particulier dans ces corpuscules carrés et oblongs ; 
mes feuilles de chêne qui servaient de nourriture ne trahissaient pas non 
plus la présence de champignons. 

D’autres indispositions des chenilles qui se déclaraient de temps en temps 
furent très-facilement combattues en les baignant souvent dans l’eau froide 
ou en les mettant sur des éponges mouillées. 

Le cocon demandait quatre à six jours; le temps de repos était de qua- 
rante-trois à quarante-six jours. 

Les papillons mâles viennent d’habitude à éclore quelques jours plus tôt 
que les femelles, ce qui est très-désavantageux pour la production de la 
nouvelle graine, parce que les premiers sont jusqu’à l’éclosion des femelles 
tout abîmés en voltigeant, el souvent déjà impropres à la génération. J'ai donc 
trié les cocons d’après les sexes, rangé sur des cordons et conservé les mâles à 
une température de 44°,5 à 15 degrés, les femelles par contre, de 17à17°,5R. 
J'ai obtenu cette différence de température dans le même local, en suspen- 
dant les femelles au plafond et mettant les mâles dans le poêle, nettoyé au- 
paravant avec soin et fermé hermétiquement. 

Par ce moyen, sur iequel j’aitire particulièrement l’attention des éleveurs 
futurs, j'avais je grand agrément de voir éclore les deux sexes en même 
temps. 

Le meilleur moyen pour distinguer les cocons mâles des femelles est celui 


h76 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


indiqué par le professeur Chavannes, On détermine le poids d’une certaine 
quantité de cocons, on tire la moyenne, puis on pèse chaque cocon séparé- 
ment. Ceux qui restent au-dessous du poids moyen, sont à considérer avec 
certitude comme mâles, ceux qui le dépassent comme femelles. Mes propres 
pesages confirment l’exactitude de cette méthode. 

Le poids moyen des cocons avec les larves était : 

Pour les mâles, 48',872 ; pour les femelles, 65,679 ; le minimum, pour 
les mâles, 487,141; pour les femelles, 55°,963 ; le maximum, pour les mâles, 
58r,907 ; pour les femelles, 78,186. 

Le poids moyen des cocons vides de 08,791. 

Les papillons sortaient dans la soirée entre six et huit heures (temps de 
Riga), et comme les deux sexes parurent presque toujours simultanément, 
je les mettais le soir même à nombre égal de paires dans les boîtes recou- 
vertes de gaze ou de tulle. L’accouplement eut ordinairement lieu dans la 
seconde nuit. Les femelles commencaient à pondre la seconde ou la troisième 
nuit après, et continuaient quatre à huit jours. A une température basse de 
9 degrés R., qui durail vingt-quatre heures, les mâles se tenaient compléte- 
ment tranquilles, tandis que d’habitude ils voltigeaient vivement après le 
crépuscule. En enfermant dans les premiers temps beaucoup de papillons 
dans une même boîte, l’accouplement fut souvent empêché, et plusieurs 
femelles n’étaient pas fécondées. 

La durée de la vie des mâles était à peu près de six jours, celle des fe- 
melles de huit à quatorze jours. Ces dernières déposaient en moyenne cent 
œufs aux parois des boîtes de gaze, en voltigeant vivement çà et là. Les 
femelles non fécondées se tenaient tranquilles. 

La durée de vie du Yama-maï, à partir de l’éclosion de l'œuf, par consé- 
quent le véritable temps d’élevage, était à Riga, en moyenne, de seize se- 
maines et demie, dont neuf pour les chenilles, six pour les cocons, et pour 
les papillons une semaine et demie. Mais comme la durée de vie dépend 
beaucoup de la température, elle pourrait être réduite à treize ou qualorze 
semaines dans des locaux chauffés. 

De la graine mise ici à éclosion, 73 pour 100 en moyenne arrivait aux 
cocons, dont plus tard tous les papillons sortaient. 

Après avoir fait des essais d’élevage pendant trois ans et distribué de Ja 
graine acclimatée non-seulement dans les provinces Baltiques, mais aussi 
envoyée plus loin en Russie, où elle a produit de nombreux élèves, on a 
donc acquis la certitude qu’il est bien possible de cultiver le Yama-ma dans 
un climat assez froid et exposé à des changements de température conti- 
nuels. Plus on répétera ces tentatives, mieux on connaîtra toutes les cir- 
constances qui sont à prendre en considération, et plus on saura écarter les 
difficultés que rencontre la vulgarisation de cet élevage. Les rapports des 
deux dernières années relatifs à l'élevage du ver à soie du chêne sont de 
plus en plus favorables, et promettentde devenir une source de bénéfice pour 
certaines contrées, par suite de la facilité de l'éducation, la prompte accli- 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 77 


matation de la chenille à l'étranger, la facilité de se procurer du feuillage 
du chêne et autres circonstances favorables aux éleveurs. 

Les habitants des provinces Baltiques, qui ont suivi de tout temps avec le 
plus vif intérêt toutes les manifestations de l'intelligence, et ont pris beau- 
coup de part à la popularisation de la physique dans le sens pratique, 
n'exerceront probablement pas l'élevage du Yama-maï dans un bnt indus- 
iriel, Lant qu'il y a encore des sources de prospérité exploitées de longue 
date ; cependant il offre aux maîlres d'école à la campagne, qui ici, comme 
partout ailleurs, ne sont pas dans une situation pécuniaire brillante, dès à 
présent un bénéfice secondaire très-agréable, comme il en est de même en 
Allemagne du ver à soie du mûrier. 

Je tiens à mentionner ici enccre brièvement que des essais d'élevage du 
ver à soie du mûrier ont donné chez nous des résultats favorables, ainsi que 
la culture du mûrier (Horus alba). 

Tous les documents, qui n’existent du reste qu’en petit nombre et par 
fragments, relatifs au commencement de la culture du mûrier et de l'élevage 
du ver à soie en Livonie, Esthonic et Courlande, nous ramènent à un homme 
dont le nom mérite d’être cité honorablement, car il ne servait pas seulement 
d’exemple à son pays natal sous ce rapport, mais il était partout un auxi- 
liaire zélé, utile et expérimenté: c’est L. de Fôlkersahm. 

Fôlkersahm s’employait ardemment à exciter l’intérêt pour les acclima- 
tations, et surtout pour la culture du müûrier dans son pays natal et à 
l'étranger, et dans ce but il publia dans différents écrits périodiques en 
1840 et 1841 (comme cela ressort d’un article, traitant de la culture du 
mûrier, de la Gazette de Riga de 1859, n° 42), des traités dans lesquels il 
s’efforca de démontrer que partout où les fruits du pommier mûrissent, 
le mûrier doit également prospérer. 

Les petites plantes de Morus qu'il avait fait venir de l'étranger à sa pro- 
priété de Papenhof en Courlande (d’où n’a pu être constaté), gelèrent du 
grand froid ou rabougrirent, tandis que ceux provenant de graine se dé- 
veloppèrent admirablement et résistaient aux hivers les plus rudes, si 
bien que Fülkersahm ne se bornait pas à faire ses propres expériences, 
mais était à même de pouvoir distribuer des arbrisseaux acclimatés en 
grand nombre. 

Fülkersham a coopéré d’une manière efficace à l’introduction de la séri- 
ciculture en Bavière et à Berlin. Car lorsqu’une société de dames pour la 
sériciculture s'était formée à Munich, et que la culture du müûrier ne réus- 
sissait pas bien, on s’adressait de là à Fôülkersham, en Courlande, pour de- 
mander ses conseils. Fülkersham a dû s’y prêter de la meilleure grâce, à en 
juger d’après les euvois considérables d’arbrisseaux acclimatés qu’il fit et 
qui venaient parfaitement bien dans leur nouvelle patrie. Il secondait d’une 
manière semblable la Société de sériciculture fondée à Berlin, qui retrouva 
à son tour le reste des mûriers plantés par Frédéric le Grand et organisa 
de nouvelles plantations. 


A78 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


Ces deux Sociétés nommèrent Fôlkersham leur membre honoraire. 
Malgré ces travaux préliminaires favorables, malgré les efforts que faisait. 
Fülkersham en expédiant des arbrisseaux et en organisant des expositions de 
sériciculture (il avait mené à bonne fin des éducations considérables de Ver 


* à soie du mürier, notamment en 48/7), cette branche d'industrie ne trouvait 


cependant pas d’écho ici et dépérissait, jusqu’au moment où la Société des 
naturalistes, en 1858 (lorsque Fülkersham était tout à fait tombé dans l’ou- 
bli}, reprenait de nouveau l'affaire en main. Mais, par suite de divers obsta- 
cles, surtout faute de jardins d’essai et privée de tous les moyens matériels, 
elle était déjà, en 1864, de nonveau obligée de suspendre son activité. 

La Société des naturalistes a également fourni l’épreuve que le Morus 
alba, quoique des grands froids peuvent en partie compromettre sa réussite, 
est cependant facile à cultiver au point nécessaire pour la sériciculture ; on 
a obtenu des troncs de 20 centimètres de grosseur qui portaient des fruits. 
Les essais d'éducation récemment entrepris du ver à soie du mâûrier, dont 
j'étais à même de parler il y a un an, ont prouvé que cette éducation, avec 
quelque savoir-faire, n’offre point d’aussi grandes difficultés qu’on le pré- 
tend souvent. 

Notre climat rude et inconstant ne peut nous priver de cette branche d’in- 
dustrie ; n’avons-nous pas à Moscou, où il y a un climat continental avec 
un froid d’hiver très-fort et constant (température moyenne 7°,8 R.), et où, 
jusqu’en 1830, on ne savait rien de plantations de mûriers et de séricicul- 
ture, une production actuelle de soie telle qu’elle dépasse les besoins de 
cette ville de 400 000 habitants. 

Le mérite d’y avoir introduit le mûrier et la sériciculture revient à feu 
Jacob Mich. Judizky, à sa femme et ses filles. 

Judizky, émigré de la Russie méridionale à Moscou, avait emporté une 
petite quanlité de graine de mâûrier, qu’il sema dans son jardin, et lorsque 
les arbrisseaux réussirent, il fit venir de la graine et se livra, dans sa mo- 
deste chambre, à des essais d'élevage qui étaient couronnés du meilleur 
succès. Lorsque la première soie obtenue à Moscou fut envoyée par Judizky 
à l’impératrice, on lui accorda, après avoir demandé l’avis du conseiller 
Longinow, un logement et un espace considérable dans le jardin impérial 
de Studinez, où, grâce à son zèle, il eut le bonheur d’acclimater complé- 
tement le mürier et de pouvoir fonder une magnanerie considérable. 

Déjà, en 1855, il y avait à Moscou sept grandes plantations de mûriers, 
appartenant tant à la Societé impériale d'agriculture qu’à des entreprises 
privées. 

Dans le courant de la même année, une de ces sociétés était à elle seule 
en état de pouvoir vendre 50 000 arbrisseaux élevés dans le pays de un ét 
deux ans, et récoltait pour la première fois, de dix-huit arbrisseaux d’un 
an, déjà 109 kilog. de mûres pour les semailles prochaines. 


#. 
, 4 
FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 1479 


ÿ 


Mn Le Phormium tenax ou lin de la Nouvelle-Zélande. 


Les étoffes fabriquées avec la fibre du Phormium tenax exposées à 
Vienne attiraient les regards de tous les industriels; cette Liliacée, que le 
capitaine Cook fit connaître en 1769, croît dans la Nouvelle-Zélande, jus- 
qu’à A6°,30 S., elle est vivace, ses feuilles ont de 5 à 10 pieds de longueur, 
elles atteignent leur entière longueur la troisième année, la plante produit 
tous les trois ans une hampe de 9 pieds toute chargée de fleurs ; les natu- 
rels distinguent dix variétés de Phormium tenax, dont trois sont plus ca- 
ractérisées que les autres : le Tihore, celle de marais, SWamp-variety et la 
petite; la première et la troisième produisent une fibre douce et fine et 
cependant forte, leurs feuilles ont 5 pieds de longueur, la seconde variété 
s'élève au doubie et donne ua plus fort rendement de fibre employée dans 
la colonie pour la fabrication de cordes et du papier. 

Le Phormèum peut se cultiver sur tout terrain perdu, soit sur les berges 
de la mer, soit sur une déclivité de rocher, on peut l’abandonner à lui- 
même, aucun animal n’y touchera; naturellement plus le sol sera riche, 
plus la plante sera vigoureuse, elle aime au reste à être de temps en 
temps arrosée, mais ne veut pas vivre continuellement dans l’eau; dans les 
terrains marécageux, on doit même creuser des tranchées pour enlever 
l’excès d'humidité. La quantité disponible dépendra bientôt de la culture ; 
c’est une erreur de croire qu’il en existe un approvisionnement illimité à 
l’état sauvage, et ceci n’est pas à regretter, car la culture améliorera la fibre 
et les meilleures variétés seront seules cultivées. Cette culture se fait déjà 
au reste à la Nouvelle-Zélande et on l’a commencée avec succès à la Réunion, 
aux îles Acores, en Algérie, au midi de la France, etc. La plante s’y natu- 
ralise très-faciiement. 

Les Maoris retirent de 4 à 4 1/2 tonneaux de feuilles vertes, un tonneau 
de fibre ; un acre (402,467) de terre planté de Phormium à 1 mètre de 
distance l’un de l’autre donne 16 quintaux (731 kil.) de fibre ; par la culture, 
la plante s’améliore et a donné jusqu’à 2 1/2 tonneaux par acre. En Russie, 
À 1/2 tonneau de chanvre par 5 acres est regardé comme un bon rendement 
et le produit vaut en moyenne Ad £, tandis qu’à une basse évaluation 
o acres de Phormium produisent 4 tonneaux de fibre à 20 £ — 80 £. 

Le professeur -Lindley donne pour la ténacité comparative des fibres 
les chiffres suivants: Soie 34, Phormium 23, Chanvre d'Europe 16, Lin 
d'Europe 11. 

Les cordes en Phormium sort excellentes, quoiqu’elles n’absorbent pas 
facilement le goudron ; en 4862 M. Lloyd, d’Auckland, reçut une médaille 
à l'Exposition de Londres, pour un câble en Phormium; en 1865, à l'Expo- . 
sition de Dunedin (Nouvelle-Zélande) se trouvait un ouvrage sur le Phor- 
mium, imprimé sur papier fabriqué avec sa fibre. Le Thames advertiser, 
journal de la Nouvelle-Zélande, est imprimé sur un papier fabriqué dans la 


qui 
Pae 


180 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


colonie et dont le Phormium fournit une partie notable de la matière pre- 
mière. La graine peut donner 17 pour 100 d’huile; la fibre brute, frisée, 
s'emploie pour rembourrage de matelas. Cependant de grandes difficuités = … 
se sont rencontrées jusqu’à présent dans la préparation, soil mécanique, 
soit chimique, de la fibre pour le tissage ; la méthode des Maoris n’est pas 
praticable dans un pays où le temps et le travail ont de la valeur ; avec une 
coquille tranchante ou un fragment de cercle de fer, ils divisent la feuille en . 
deux, en séparent l’épiderme et c’est en graltant et lavant alternativement. 
qu’ils obtiennent la fibre ; le grand obstacle à la préparation est une espèce 
de résine soluble seulement en partie dans l’eau chaude, et résistant, paraît 
il, à tous les agents chimiques qui n'altèrent pas en même temps la fibre. 
Les Macris radoucissent cette dernière avec l'huile de Weka (?). Après avoir 
passé une première fois à l’eau chaude, la partie restante de la résine est in- 
soluble, reste dans la fibre à l’état granulaire et la rend brisante par le frot- 
tement. Un échantillon de cette résine figurait aussi à l'Exposition de 
Dunedin (Nouvelle-Zélande), en 1865. Lorsque la manière de traiter la 
plante sera mieux comprise, celte gomme sera sans aucun doute un article 
de valeur; les bases des feuilles sont à certaines époques couvertes d’une 
substance gommeuse ayant la consistance et l’apparence d’une forte colle, 
cette matière glutineuse se trouve répandue en plus ou moins grande quan- 
tité dans toute la plante, et en préparant les feuilles pour en retirer les fibres, 
on pourra recueillir cette gomme et l’utiliser ; elle pourrait s’employer au 
lieu de la gomme arabique. 

M. C. Thorne de Londres est parvenu à préparer maintenant la fibre de 
Phormium de manière à la faire servir à la fabrication des étoffes. Les pro- 
duits très-remarquables qu’il exposait consistaient en : 

Fibres extraites des feuilles, grosses et fines. — Cordes fabriquées avec les 
fibres préparées par lui. — Toile pour sacs à grain, toile pour sacs à laine, 
toile dite Hessian, toile à voile, toile croisée pour draps de lit, écrue et blan- 
chie ; tous ces tissus en pur Phormium. — Toile à voile écrue et blanchie, 
fabriquée avec un mélange de 25 pour 100 de Phormium et 75 pour 100 de 
lin de Riga, — Deux nappes damassées en fil de Phormium préparé par les 
indigènes. 


BERNARDIN. (Visite à l'Exposition universelle de Vienne. 
Broch. in-8, Gand, 1874.) 


Le gérant : JULES GRISARD. 


PARIS. — IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2. 


LAS 


“#% 


* CHEPTELS DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION 


Fr 


RÉGLEMENT ET LISTE DES ANIVNAUX ET DES PLANTES 
. QUI POURRONT ÊTRE DONNÉS 


EN CHEPTEL AUX MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 


EN 1874-1875 


RÉGLEMENT. 


Le Conseil de la Société, désirant multiplier les expériences 
d’acchmalation qui se poursuivent en France, a résolu de 
confier aux sociétaires des animaux et des plantes en plus 
grand nombre que par le passé ; pour assurer le succès de ces 
expériences, un inspecteur spécial sera chargé de les suivre 
et d’en rendre compte à la Société. 

C’est en multipliant les essais dans les différentes zones de 
notre pays que nous pourrons hâter les conquêtes que nous 
poursuivons, et la vulgarisation des espèces déjà conquises 
que nous voulons répandre. 

Pour obtenir des cheptels, 1l faut : 


12 Être membre de la Société. 


2 Justifier qu’on est en mesure de loger et de soigner con- 
venablement les animaux, et de cultiver les plantes avec discer- 
nement. 

Les membres auront soin d'indiquer les conditions favora- 
bles et les avantages particuliers qui les mettent en mesure 
de contribuer utilement à l’acclimatation et à la propagation 
des espèces dont ils demandent le dépôt. 


3° s'engager à rendre compte, dans un rapport trimestriel, 
des résultats bons ou mauvais obtenus. 
Ce rapport devra contenir tous les détails pouvant servir à 


l'éducation et à la multiplication des animaux à l’état domes- 


3° SÉRIE, T. I. — Août 1874, 31 


» 
#, de 
oi pe ” 
182 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


tique ou sauvage (mœurs, nourriture, reproduction, soins 
donnés aux Jeunes, etc.; pour les oiseaux : époque de I 
ponte et de l'éclosion, etc.). 


L° S'engager à partager avec la Société les produits obtenus. 

Les conditions du partage et la durée des baux à cheptel ne. 
sauraient être les mêmes pour toutes les espèces d’animaux el 
de plantes. Aussi chacun des engagements passés avec les 
chepteliers stipulera-t-il quelle sera la part de la Société dans 
les produits et la durée des baux. 


5° Si les chepteliers ne se conformaient pas aux conditions 
ci-dessus proposées, ou si leur négligence comprometiait le 
succès des expériences qui leur auraient été confiées, les ani- 
maux ou les végétaux pourraient être retirés par la Société, 
sur la décision du Conseil. 


6° Les membres de la Société qui solliciteront une remise 
de plantes ou d'animaux devront adresser leur demande par 
lettre à M. le Président. 

Ces demandes seront soumises à la Üommission des chep- 
tels, qui statuera sur la suite qui pourrait y être donnée. 


7° Le port des objets envoyés par la Société à ses chepte- 
liers sera à la charge des dits chepteliers, ainsi que les frais 
de nourriture, de soins, de culture, etc. 

Réciproquement, le port des objets expédiés par les chep- 
teliers à la Société sera à la charge de la Société. 

Les frais d'emballage resteront à la charge de celle des par- 
es qui fera l’expédition. 

8° La Société se réserve le droit de faire visiter, chez les 


chepteliers, les animaux et les plantes remis en cheptel. 


9 Les chepteliers ne pourront disposer des étalons à eux 
confiés sans en avoir obtenu préalablement l'autorisation du 
Conseil. 


40° La Commission ne pourra confier à un mème chepte- 
lier plus de deux espèces d'animaux. 


e 
CHEPTELS DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 183 


. 11° Un registre spécial, comprenant autant de comptes spé- 
Ciaux qu’il y aura d'espèces animales on végétales remises en 
cheptel, sera institué et constamment tenu à jour; de cette 
facon on pourra, à toute époque et d’un seul coup d'œil, sa- 
voir à qui sera confiée chaque expérience. 


12 Un autre registre sera également institué, sur lequel 
un compte sera ouvert à chacun des chepteliers, de manière 
à pouvoir toujours suivre les rapports de la Société avec les 
détenteurs des animaux et des plantes. 


13° Les chepteliers pourront recevoir, en même temps que 
les animaux qui leur seront confiés, un programme d’observa- 


tions à faire qu’ils seront tenus de remplir et d’annexer à leur 
rapport trimestriel. 


4h° En cas de mort d’un animal confié à un membre, ce 
membre en informe sur-le-champ le Conseil par un rapport 
contenant, autant que possible, des détails sur les causes qui 
ont amené la. mort. 


15% Le Conseil décide, s’il y a lieu, de la destination à 
donner aux restes des animaux morts appartenant à la So- 
ciété. 


16° Devra être restitué : tout cheptel décomplété par suite 
de décès, perte ou accidents quelconques d’un des animaux 
formant le cheptel primitif. 


LISTE 
DES ANIMAUX ET VÉGÉTAUX 


QUI POURRONT ÊTRE DONNÉS EN CHEPTEL 


EN 1874-1875 


ANIMAUX. 


1'C SECTION. — MAMMIFÈRES. 
{ Yorkshire (grands). 


| Races anglaises. / Leicestershire. 
Verrals et truies..../ | Essex améliorés. 
{ craonnaise. 
{ Races francaises. 
(limousine. 


Par paires... € Agoutis du Brésil. 
Léporides. 
jeter 
BEA DIS A TRACER AC CE à fourrure. 
| de Sibérie. 
naines du Sénégal. 
CRÈVEES PPEEREEEE i 
d’Angora. 
Par lots de 4 mâle et 2 fe-\ Moutons chinois prolifiques. 
melles. Kangurous de Bennett d’Australie. 
le | d’Aristote. 
\ ) cochons de l’Inde. 
— des Moluques. 


20 SECTION. — OISEAUX. 
{de Bréda. 
de Campine. 
de Caussade. 
\de Crèvecœur. 
Par lots de 4 coq et 2 poules. Volailles......... { négresses. 
de Dorking. 
Espagnol. 
| de Houdan. 
\de Nangasaki. 
/ Aylesbury. 
| Bahama. 
cuis 
: de la Caroline. 
Par Dairess-e 22e CMP dus 0000 À Lab 
| Mandarins. 
| de Rouen. 
\ spinicaudes. 


CHEPTELS DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. hAS5 


barrées de l'Inde. 
Oise MARSCEN EN de Guinée. 

de Toulouse. 
Céréopses d'Australie. 
Cygnes noirs. 


[ argentés. 
dorés. 
Et (e Mongolie. 
FAISANs EE CCC nes 
vénérés. 
\ versicolores. 
Dindons sauvages. 
; Houïis. 
en Golngsecotmosesree de Tan 
Talégalles d'Australie. 
Pigeons de volière. 
| Celombes........... do cAophoEs 
Lumachelles. 
/ ondulées. 
d'Edwards. 
de paradis. 
de la Nouvelle-Zélande. 
POLTUCNES MEET CT ke 
omnicolores. 
de Pennant. 
à croupion rouge. 
\ Callopsittes. 
Moineaux mandarins. 
Casoars ou Émeus d'Australie. 
92 SECTION. — POISSONS. 


Grenouilles-bœufs. | Axolotls. 
OEufs et alevins de Saumons. Montée d’Anguille. 
— — de Truites. Macropode de Chine. 


Tortue commune (Testudo Europæa). 


L° SECTION. — INSECTES. 


du mûrier (Pombyx mori). 

du chêne du Japon (Attacus Yama-maï). 
— de Chine (Attacus Pernyi). 

de l’ailante (Bombyx cynthia). 


OEufs de Vers à soie 


CINQUIÈME SECTION. 


— VÉGÉTAUX. 


NOMS BOTANIQUES. 


à Acacia lophanta..... 
| —  melanoxylon. 
—  mollissima... 
Anona Cherimolia.…. 
Ù Arundo festucoides.… 


À Pambusa aurea. ; 
= flexuosa. Re 
nn I ULR acêlis . 
= nibie 
OUI To ce ; 
mn  LOUTIONS RCE | 


— Simontt. .... 
—  stricta......…. 


—  violascens.... | 
—  oiridi-glauces- 
RONCENSE ALARME se 
à Begonia fuchsioides. .… 
À —  Desgwiiliana. 
— - JiGBoos 


— — 
eee uece 


_—_. CINTONT 


/ 


| Beta vulgaris... .... 


| 
! \ 
| Bœhmeria candicans. 
DU US EE UN 


| Brassica Napus..... 


! Betterave fourragère diselte blanche à collei! 


NOMS VULGAIRES, 


Acacie lophanta. 
— à bois noir. 
—  irès-mou. 

Cherimolier. 

Diss des Arabes. 

Bambou doré. 

—  flexueux. 
— grêle. 

— comestible. 
— neir. 

— du Quilio. 


— de Simon. 
— roide. 


—  violâtre. 


— vert glauque. 
Bégonie à fleurs de Fuchsia. 
—  Desgwilliana. 
= © FOI. 
— — duchesse de Brabant. 
Pootsii. 
Queen Victoria. 
supeltata rubra. 
— à feuilles de ricin. 


rose. 

— — — d'Allemagne. 

— — —  négresse. 
ou géante. 

— jaune longue d'Allemagne. 

— rouge Crapaudine ou écorce. 

— rouge plate de Bassano. 


| 
” | 
rouge ovoide | 


USIGES. 


Inde. 
Alime 
Inde. 


— — noire plate d'Égypte. 
ronde Turneps. 

— à sucre à collet gris. 
amélioré Vilmorin. 
allemande acc'imatée. 
à collet vert. 


China grass. 

Ramié de Java. 

Navet fourrager jaune d’Aberdeen à collet| 
vert. 

Navet fourrager jaune d’Aberdeen à colle 
rouge. 


— rave d'Auvergne. 
— rose du Palatinat. 
— Turneps. 


Navet fourrager jaune de Malte. 
| 


|Alime. 


ZONES. 


Palmier. 
Olivier. 


Olivier, maïs et vigne. f 


Palmier, olivier. 
—  maisel vigrre.} 
Oüivier, maïs et vigne, 
blé. 
Palmier, 


olivier. 


Olivier, maïs el vigne, À 
blé. 


Maïs el vigne, bié. 


IMaïs et vigne. 
|Palmier, olivier. 
Il 


Maïs et vigne, blé. 


NOMS BOTANIQUES. NOMS VULGAIRES. 


Navet gris de Morigny. 
— long de Briollay. 
no. deMeauxe 
—  — des Vertus. 
— noir long. 
* — blanc plat hâtif à feuilles entières. 
— rouge plat hâtif à feuilles entières. 
| Chou fourrager branchu du Poitou. 
= — cavalier ou à vache. 
— — mille têtes. 
—= — moellier. 
— — — blanc. 
— — — rouge. 
— Bacalan hâtif. 
— — tardif. 
\ — Brunswick pied court. 
— Milan pancalier de Touraine. 
—  — —  hâtif de Joulin. 
—  — de Norvége. 
—  — de Pontoise. 
—  — des Vertus. 
— de Vaugirard d'hiver. 
quintal. 
Saint-Denis. 
Cajanus bicolor...... | Ambrevade. 
| Casuarina (div. esps). | Casuarina. 
| Cephalotaxus drupacea | Gephalotaxus drupacé. 
| Chamærops humilis.. | Palmier nain. 
L Cichoriumintybus var. | Chicorée sauvage améliorée. 
Cucumis Zapallito... | Zapallito de Tronco. 


(a 


| 
U — — — améliorée d’Or- 
the. 
— — — des Vosges. 
—- — rouge à collet vert. 
nes M Se = — longue. 

| Daucus Carota.....? oc CONTE. 

—  —  demi-longue. 

—  — — obtuse. 

—  —  Jongue d’Altrincham. 
| —  — pâle de Flandre. 


| Carotte fourragère blanche à collet vert. 
— — jaune longue. 
—  — —. nantaise. 
—  —  très-courle à châssis. 


Dioscorea Bataias.... 
Eucalyptus globulus et 


Igname de Chine. 


autres espèces ..... | Gommiers 
Faba vulgaris....... Fève de Séville à longue cosse. 
( Paniel-Lambert. 
DCR... =... ....« Marginata. 


Sans pareil. 


| 


USAGES. 


ZONES. 


Alim, | Maïs et vigne, blé. 


Palmier. 
Olivier. 
Maïs et vigne. 


Olivier, blé. 


.| Palmier, olivier. 


Maïs et vigne. 


Olivier, blé. 


Palmier, olivier. 


Olivier, blé. 


Maïs et. vigne, 


blé. 


PARSRN 


fl 
fl 
ll 


| 
Ê 
14 
| 
| 
| 


— plumosa.…. 


—  plumeux. 


Pomme de terre fourragère Chardon. 


Solanum tuberosum. . ! 


— grosse jaune. 
= Segonzac. 
confédérée. 
douce blanche. 


| 


| 
| 


Olivier, maïs et vigne. 


Maïs et vigne, blé. 


ZONES. 


Maïs et vigne, blé. 


Palmier. 


Olivier, maïs et vigne. 


|Olivier, blé. 
| = 


| 
| 


| Palmier. 
Olivier, blé. 


| 


NOMS BOTANIQUES. | NOMS VULGAIRES. | TMGES. | 
| | 
IHUCRSL0 1 CRRREPERE SighOra |Orn 
Vainqueur de Pucbla. | — 

| Helianthus tuberosus. | Topinambour. Inde, 

| Lygeum spartum..... Sparte. 5 

À Morus japonica ..... Mürier du Japon. — 
Musa sapientium . ... | Bananier des sages. Alim. 

DOrYEGS NEA Riz sec. Re 

/ Destinée. ,Qrne. 
: Docteur Nélaton. j — 

| La Vestale. = 

| Pelargonium zonale.. { M°'° Nilsson. — 

} Lorenza. — 

fu. Grosjean. — 
| M. Barre, — 

L Re Auriol. | — 
Persea gratissima.... | Avocatier. ‘Alime, 
RERSICO LEE AE EEE bécher de Tullins. Des 

Haricot nain mange-tout de la Chine jaune.| — 
nn — — quarantaine blanc.| — 
—  — à parchemin Soissons ou gros! 
pied. | — 

UE Haricot nain à parchemin flageolet jaune.| — 
Phaseolus vulgaris. {om rs SO l 

— — = — rouge.| — 
— à rame mange-tout beurre noir. — 
— — —— Prédane. —— 
— — à parchemin de Lima. — 
CRE — — du Cap. ie 
À Phormium tenax.… Lin de la Nouvelle-Zélande. Inde. 
| Pinus Sabiniana.…. .. | Pin de Sabine. — 
/Pois mange-tout sans parchemin nain hâtif. Alime 
— — — ridé nain.| — 
— nain de Hollande. | — 
—  — très-hàâtit à châssis. — 
| Pisum sativum..... — à rame Michaux de Ruelle. = 
_ — Mridéivert- (ES 
— nain ridé vert impérial. | — 
— — mange-tout ridé. | — 
. — ridé nain blanc hätif. F— 

NN entihatifs RE 

| Polymnia edulis.. . Poire de terre Cochet. | Inde. 
4 Psidium pyriferum... | Goyavier. Alime, 
| Retinospora pisifera.. | Relinospora pisifère. (Orne. 


Alime | 


| 
1 


Palmier 


Olivier, 


Olivier, 


Palmier 


vigne. 
blé. 


, olivier, maïs 


et vigne. 
Palmier. 


\Inde. |Olivier, blé. 


Olivier, blé. 


NOMS BOTANIQUES. NOMS VULGAIRES. | USAGES. 


Pomme de terre early rose. Olivier, blé. 
farineuse rouge. _  — 
jaune longue de Brie. — — 
Jancée. —  — 
Kidney rouge. = 

Solanum tuberosum. . ] Marjolin à œil rose. 
à — pousse debout ou rosée 
do Conflans. 

Pomme de terre rouge longue de Hollande. 

— truffe d'août. | 
Collection non jugée, vingt-cinq variétés 
par deux tubercules. du 
Stipa tenacissima.... | Alfa. Olivier. 
Thuiopsis dolabrata.. | Thuiopsis en doloire. Olivier, blé. 
j'iene Raisin à vin cinquante sarments. Vigne. 
—  — detable — — 
— de fantaisie — — 


Zea mays... Ïs. Olivier, maïs et vigne. 


Vitis vinifera (1).... 


(1) Le Catalogue des vignes du Jardin d’acclimatation est adressé gratuitement sur demande affranchie. 


1. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 


STABULATION DES SALMONIDES 


DANS DES ESPACES RESTREINTS 


Par M. B. RICO. 


Inspecteur de l’École de pisciculiure de Clermont-Ferran. 


Depuis 1857, époque de la création de l’École de piscicul- 
ture de Clermont-Ferrand, j'ai reçu mission, comme chef de 
service, d'organiser et de diriger les travaux et manipulations 
nécessaires pour mener à bien les opérations de cet utile 
établissement. 

Les bassins d’alevinage sont situés au sud de la ville dans 
un espace de 40 mètres sur 25 mètres, en contre-bas du bâti- 
ment À, indiqué au plan ci-joint. Ces bassins sont limités au 
nord par une façade haute de 25 mètres, formée de quatre 
étages éclairés par trente-deux ouvertures. Les côtés est et 
sud, attenants à des jardins très-fréquentés, sont séparés de 
ces jardins par des fils de fer. Le côté ouest est limité par des 
claires-voies placées à peu de distance d’un mur. Ce mur est 
dominé par des maisons situées en face; d’où il résulte que, 
comme pour la maison du sage de l'antiquité, le public peut 
à son aise voir et entendre, de tous côtés, ce qui se fait et se 
dit à l’École de pisciculture. En outre, de nombreux voya- 
geurs attirés par les remarquables produits piscicoles, sont 
journellement admis à visiter l’École. 

La surface, la profondeur et la distribution des bassins 
réservés à l’élevage des Salmonides sont indiquées au plan 
sous les n° 4, 2, 3, A, 8, 9 et 10. Les deux premiers bassins, 
ainsi que le quatrième, sont deslinés aux alevins de première 
année, ils sont séparés par une toile galvanisée dont la maille 
n’a que 2 millimètres d’écartement. Des bouquets de plantes 
aquatiques sont placés de 2 en 2 mètres pour servir d’abri aux 
alevins. Les bords sont gazonnés et élevés au-dessus de la sur- 


aondeurs egene Profondeurs 
idées pieoesd eat L se ie j er) 
Pre x AA TE Eee GER nn Ie rann re PORTE 7 ges gn 

7 Pécedéemrde'e.preriere année rues 0,79] Lu "Loi" Cutueel de RINee 029  Rochers s 
-2—4 PTE. = 27070 ES des LE Penn Re ap G-Liate bandes et corbeilies le feux 
3 éd dell it2 “unnéæ@rbrahe ezo|- 14 — 2d __ cprins carpesjaurasl 800] 1 Ile gare de plates aqruttequees 


=" 1274 saumérseom*o,7o| 75 dd __ cyprirscarpescon DÉC 2$o sroruu de frayère au cyprès 
_ 5 id cyprb:spourde reproductéorr 060 # Laboratoire destine tr eclosions 2 _ Grilles de Sepxrction 
eé éd E éd 0 de salmonides. . Cascate lies 2) 
DAT Te prénsenyespeurnes Yaroiceo8o| 1 Éspureait el archires ÆK_Condruites et trop pleins des ea 
ec," ur Des ia ée — 2,808 laboratoire pendant fyfeconaations | Reservoir, rigotes et pets bassirts 
9 id Truitesk annee Z4o| 3 LPS œufs de sumorides | s'hrtes ur celosions d'été 1 
10 EE — Truites Mann és —— 09|E Meter détramc HMPerronet descente por Commune 


apec dos basstuus d'alevinage el 


22 = id cyprérslœnnee 
l'aquarium. 


2 1G _ AUOT 
D Fonàs 


: 


PLAN 


PISCICULTURE DE CLERMONT - FERRAND 


— Et — 


l a 


SL ÉTTTTE, 
OLD OP Dm - 4 


77 
7] 
£ 


NIGUY£ 


RÉEL SRE PENSE ES SAPIN EE SE DLL rev 
NS 5 
= [fe Fe SÈ = g & 
| ’ 


Es 


YLEL pATUCUATI) PO CIIOTEULLE PLOÉEO OPEL JT OP STUULOS EHRIT NT LOL PO 


re 
j 
[7 
> fl 
EZZ CE h 
TZ ë / 
=YZ 
: = ÿ 
© D: LITE Z ZZA} 
et EVA ; 
EN j 


qu 
: 


Boonpnner inventer Des 


Qatar ressmeerrsreresstetirer res sit 


DU 


REC PET ENT 


MIINAAVOMA 


5 


RTS RON SE 


FUOUI2,) D HOTINIANL N  2P ASP A € 


PLANTES 


JARDIN 


h92 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


face de l’eau de 0",40. Aux trop-pleins de pièces d’eau n° 8, 
9, 10, sont placées des grilles qui descendent devant les vannes 
de fond; ieur écartement, calculé d’après la grosseur des 
alevins, permet de vider l’eau à volonté sans que le poisson 
puisse s'échapper. Sur les bords gazonnés de ces bassins est 
placée une légère barrière de 0",60 à 0",70 de hauteur, car 
sans cette précaution les Salmonides de deuxième, troisième 
et quatrième année sautent hors de Feau et meurent. Le 
bassin n° 10 est entouré de plantes vivaces et de rochers suf- 
fisamment élevés. 

L'École de pisciculture reçoit par heure environ 800 litres 
d’eau pure à + 12 degrés pendant les six mois les plus rigou- 
reux de l'année, et environ 2000 litres par heure pendant les 
autres six mois. Cette eau est divisée en trois conduites dis- 
tinctes, celle de la première conduite passe au laboratoire A, 
alimente 99 auges ou rigoles ainsi que les bassins n° 40 et 42, 
puis elle se jette dans les pièces d’eau n° 8 et 9. Celle de la 
deuxième est dirigée au laboratoire B, elle sert à féconder les 
œufs de Salmonides et permet de conserver les poissons dans 
ces réservoirs pendant le nettoyage et pendant la réparation 
des viviers extérieurs ; la même eau alimente six cases de 
l’aquarium C, else jette en cascatelle dans le bassin n° 4. La 
troisième conduite est celle qui reçoit le supplément d'eau 
pendant l'été; elle se hifurque au laboratoire C, pour aller 
d'une part former une seconde cascatelle au rocher établi en 
tête des bassins, et d’autre part, fournir un plus fort volume 
d’eau aux bassins n° 8 et 9. Cette disposition a permis d’éta- 
blir au laboratoire A un réservoir d'environ 4 miêtres cubes 
dont l'eau se renouvelle sans cesse. Ce réservoir, qui est 
d’une grande utilité lorsque, par une cause quelconque, l'eau 
estmomentanément supprimée, permet également de la diri- 
ger à volonté là où le besoin se fait sentir, et de conserver 
partout en été une température de 15 à 20 degrés. 

L’empoissonnement se fait tous les ans au mois de mars ou 
avril, en introduisant dans les viviers n° 4 et 2? deux mille 
alevins de Truites, âgés de trois mois : leur longueur moyenne 
est de 25 millimètres. Le vivier n° 4 est peuplé à la même 


STABULATION DES SALMONIDES. 193 


époque de 600 Ombres Chevalier et Saumons communs du 
même âge; les premiers ont la même taille que les Truites ; 
les seconds mesurent 0",03. Ces Salmonides, éclos en février 
ou mars, provenant d'œufs fécondés artificiellement, ont élé 
déjà nourris au laboratoire avec du sang tamisé et du jaune 
d'œuf cru. Ce moyen, simple et facile, occasionne peu de pertes 
après la résorption de leur vésicule, et rend les alevins forts et 
bien portants ; ils résistent mieux aux brusques changements 
de la température extérieure. 

Dans ces trois bassins, les jeunes poissons trouvent une 
nourrilure abondante et de leur goût ; car nous sommes par- 
venus, en employant les débris de viandes et divers excré- 
ments, etc., à y propager en grande quantité de nombreuses 
espèces d'insectes aquatiques. 

Les alevins reçoivent de temps à autre de ces mêmes in- 
sectes jusqu’au mois de septembre, ainsi qu’un mélange com- 
posé de cinq parties de viande de cheval hachée et délayée 
dans cent parlies d’eau, tamisée ensuile afin d'enlever les plus 
grosses parcelles qui seraient nuisibles aux petits poissons. 

Vers le mois d'octobre, ces alevins sont pêchés, et les bas- 
sins bien nettoyés, pour remeltre ensuite 130 jeunes Truites 
seulement dans les deux premiers, et 60 à 100 Ombres Che- 
valier et Saumons communs dans le quatrième vivier. Tous 
les poissons restants sont vendus à raison de 10 francs le cent; 
leur taille varie de 0",05 à 0",40. 

A l’âge de quatorze mois, 100 alevins de Truite sont mis au 
n° 10. Ils mesurent en moyenne 0",14. Les Ombres Chevalier 
et les Saumons du même âge sont mis au bassin n° 3. Ainsi 
que dans l'aquarium, les premiers sont un peu plus forts) et 
s’apprivoisent mieux que les Truites et Saumons. 

L'année d’après, à la même époque, ces Saimoñides sont 
mis au vivier n° 8. Ils sont âgés de vingt-six mois et mesurent 
en moyenne 0",25. Leur poids varie de 200 à 300 grammes. 

Au mois de mars de la troisième année, 1ls peuplent le 
bassin n° 9. Leur poids varie de 500 à 700 grammes, et ils 
mesurent en moyenne 0",30. Au bout d’un an, le manque 
d'espace nous oblige à les livrer à la consommation, ils sont 


PAST -SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


A 


alors âgés de cinquante mois, leurs poids varie de 800 à 
4500 grammes, et leur taille est en moyenne de 0",40. 

Tous les Salmonides de l'École de pisciculture, âgés de sept 
mois à quatre ans, sont nourris avec environ À kilogramme 
de viande de cheval hachée, qu’on leur distribue une fois par 
jour. 

Les pertes éprouvées pendant la première année sont d’en- 
viron 5 pour 100. Elles sont peu sensibles pendant les trois 
années suivantes, à moins de causes majeures; cependant 
nous avons à lutter contre bon nombre d'animaux nuisibles 
qui s’acharnent contre nos élèves; mais nous atténuons ces 
mauvais effets à force de soins et de surveillance, soit en dé- 
truisant l'ennemi, soit en le tenant éloigné. 

Les essais que nous avons faits pour obtenir des Salmonides 
plus forts que ceux que nous venons de signaler n’ont pas 
donné de résultats avantageux, car dans les petits bassins 
où les poissons n’ont pas un espace suffisant pour éviter une 
brusque attaque, les morsures des plus forts déterminent sou- 
vent la mort des blessés, et il est à remarquer que, plus il y 
a dans les bassins d’abris pouvant servir de repaires, plus les 
victimes sont nombreuses. Pour éviter un tel inconvénient, 
nous avons supprimé les plantes et les rochers des n° 8 et 9, 
etles Truites de trois et quatre ans y vivent depuis en trés- 
bonne inteiligence. Celles que nous avons conservées jusau’à 
l’âge de six ans dans une des cases de l’aquarium contenant 
environ 600 litres d’eau, ont péri en se blessant contre les 
rochers qui décorent cet aquarium; le poids de l’une d'elles 
était de 2 kilogrammes, et sa longueur de 0",60 ; nous con- 
servons le squelette. 

En considérant le peu d’espace, le peu de ressources 
dont nous disposons, on sera vite convaincu des avantages 
réels que l’aquiculture promet si l’on adopte une bonne mé- 
ihode d’alevinage, et si on l’applique avec soin et persévé- 
rance. 

Ainsi, pendant qu’au bout de quatre à cinq ans, nous ob- 
tenons à Clermont des Truites dont la moyenne est de 
1150 grammes, nous trouvons dans un rapport sur la piscicul- 


STABULATION DES SALMONIDES. 595 


ture faite au lac Saint-Front, rapport présenté et lu par M. le 
docteur Langlois à la Société d'agriculture, sciences et arts 
du Puy, séance du } mai 1865, ie renseignement suivant : 
« Les Truites se règlent en presque totalité à 500 grammes, 
et c’est là le poids acquis en cinq ans d’après les estimations 
du propriétaire et du fermier du lac. » 

Nos poissons adultes ont fourni depuis 1865, jusqu’au mois 
de janvier dernier, 292853 œufs de Truites qui, fécondés 
presque à sec, ont donné de lrès-bons résultats. | 

Il a été livré à la consommation pendant celte même pé- 
rlode : | 


Truites âgées de deux à quatre ans........ 59 kilog. 
Ombres Chevalier de deux à quatre ans..... L,540 
Saumon du Danube de deux à trois ans..... 4,970 
Saumon commun de deux à trois ans....... 2k 660 
5 NON LENS RTS 68k,170 


Ont été donnés ou conservés en collection : 


Truites âgées de un à quatre ans............... 20 
Ombres Chevalier de un à quatre ans........... 18 
Saumons du Danube ou Heuch de un à irois ans... 7 
Saumons communs de un à!irois ans. ........... 8 

BOTAÏEES A CaAnr 53 


En outre, 1l a été verdu : 


Truites âgées de sent mois à un an .......... 1928 
Ombres Chevalier de sept mois à un an........ 228 
Saumons communs de sepl mois à un an..... 12/ 

OAI TE EE Ua 9280 


Aujourd'hui l'aquarium et les bassins n° 3, 8, 9 et 10, 
sont peuplés par : 


Truites âgées de dix-sept mois à trois ans passés. 230 

Ombres ou hybrides, Ombres Chevalier et Truites 
âvées de dix-sept, MOIS... . ........... 109 

Saumons communs de dix-sept mois............ 8 


RO TA RSS A EC uNLOERE AUS 338 


196 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Les bassins n°® 1, 2 et 4 renferment les alevins suivants : 


Truites âgées de sept mois 


SERRE. 2000 
Ombres Chevalier de sept mois............... 20 
Saumons communs de sept mois. ............, i4l 

Total. CET > à 238! 


Les faits que nous venons de signaler et dont ci-joint nous 
fournissons les preuves, ont été constatés dans les rapports 


officiels déposés tous les ans à la préfecture du département 
du Puy-de-Dôme. 


LES OISEAUX ET LES INSECTES 


Par M. le D' TURREL 


Secrétaire général de la Société d’horticulture et d’acclimatation du Var. 


Nous avons relu à plusieurs époques le travail d’un profond 
entomologiste, M. Édouard Perris, membre de plusieurs so- 
clétés savantes, sur les /nsectes et les Oiseaux. Publiée d'abord 
dans les Mémoires de la Société royale des sciences de Liége, 
reproduite par les Annales de l'agriculture francaise, et en- 
suite par le Bulletin de la Socicié d'acclimatation, l'œuvre 
de notre éminent compatriote mérite en effet d’être connue 
et discutée. Après y avoir longuement réfléchi, nous avons 
cru devoir en faire la critique, car 1l est difficile de distinguer 
nettement quel but l’auteur se propose, et par conséquent 
quelles sont les conclusions pratiques qui en découlent. 

Avec sa logique inflexible de spécialiste, M. É. Perris limite, 
preuves en main, à un rôle très-réduit, l’action protectrice 
des oiseaux, comme destructeurs d'insectes. La conséquence 
inévitable de ses démonstrations serait donc qu’il est in- 
différent pour l’agriculture qu’il n’y ait plus d'oiseaux, et 
le sévère entomologiste est amené par ses Ctudes de prédilec- 
tion à s'étonner dés mesures conservatrices proposées en 
faveur des Insectivores, objet d'un engouement inconsidéré. 

Il est donc de notre compétence d'examiner les doctrines 
de ce mémoire, qui peut faire beaucoup de mal à la cause 
dont nous nous honorons d’avoir été, en France, l'un des pre- 
miers avocats. C’est en effet sur notre iniliative, el par notre 
plume, que fut rédigée, en 1861, la pétilion en faveur des 
oiseaux inseclivores qui eut la bonne fortune de trouver un 
éloquent défenseur dans le regretté sénateur Bonjean. Il ne 
faut pas que le bien produit par Le plaidoyer convaincu du 
magistrat que la France à si tragiquement perdu soit com- 
promis par les réserves de M. Perris. Le savant ami des 
insectes nous semble un peu trop oublieux des lois de léqui- 

3° sÈRIE, T. IL. — Août 1874. 32 


98 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


libre providentiel, ou trop porté à ne le voir réalisable que 
dans l’ordre des créatures objet de ses préférences, et nuile- 
ment dans le rôle pondérateur des oiseaux. 

À. Perris partage judicieusement en deux grandes sections 

la classe des insectes : les phytophages et les carnassiers. I 
décrit sommairementles mœurs desdestructeurs des végétaux. 
pt Isque tous nocturnes, et par suite inaccessibles aux atteintes 
des oiseaux, et il affirme que ces prétendus protecteurs de 
Pet ‘attaquent indistinctement aux deux catégories 
d'insectes, avalant autant de phytophages que de carnassiers, 
par conséquent, à quelques rares exceptions près, il les pro- 
clame presque aussi nuisibles qu’utiles. 

En effet, les oiseaux feraient obstacle au rôle pondérateur 
qu'exercent les insectes vivant de proie. Done àl ne faut plus 
se préoccuper des insectivores, et tout en ne contestant pas 
les légers services que quelques-uns d’entre eux peuvent rer- 
dre, il faut les laisser disparaitre sans remords et sans protes- 
tation. Les insectes carnassiers, les parasites et les circon- 
stances atmosphériques se chargeront d'arrêter les ravages 
des insectes nuisibles à nos cultures. Telle est la docirine qui 
se dégage probablement, à l'insu de son auteur, du mémoire 
que nous prenons à partie. 

Mais il est de règie rigoureuse que les animaux qui se 
nourrissent de proie vivante sont infiniment moins nombreux 
et moins féconds que ceux qui leur servent de nourriture. Il est 
aussi constant que les carnassiers ont une chair moins délicate 
que les herbivores. Donc c’est à ceux-ci que les oiseaux s’atta- 
quent de prédilection, et c'est lamême catégorie qu’ils rencon- 
trent en plus grand nombre quand ils quêtent leur nourriture. 

Remarquons, en oulre, que pour les besoins de son ali- 
reentalion ou de son industrie, l’homme a multiplié sur d’im- 
menses étendues certaines cultures exclusives qui favorisent 
d'autant la pullulation des insectes se nourrissant de ces 
plantes. Si nous ne voyons pas les oiseaux suffire à réprimer 
leurs ravages, c’est que le nombre de ces auxiliaires, loin de 
s’accroilre en proportion des végétaux qu'ils devraient proté- 
ser, décroit au contraire d'une façon inquiétante. 


LES OISEAUX ET LES INSECTES. h99 


Sous le régime féodal, non-seulement les cultures étaient 
relativement fort restreintes, mais de plus on ne chassait 
guère aux oiseaux, et les lois qui protégeaient le gibier étaien 
si sévères qu’on ne s’exposait pas pour un si maigre butin, 
et que les oiseaux étaient respectés. 

Or, les ravages des insectes étaient alors peu considérables, 
et ce n’est que dans des circonstances climatériques tout à fait 
exceptionnelles que le nombre de ces ravageurs s’augmentait 
notablement. Il n’en est malheureusement plus ainsi : non- 
seulement les bois qui servaient d’asile et de domicile d'amour 
aux oiseaux diminuent d’étendue ou disparaissent, mais de- 
puis le commencement de ce siècle il est facile d'établir que 
la destruction des petits oiseaux va se consommant de plus 
en plus, et que parallèlement à cette guerre sacrilége et insen- 
sée, livrée par les braconniers et les enfants à ces precieux 
auxiliaires, on voit s’aceroilre et grandir l’effrayante armée 
des insectes ravageurs. 

EH y a quaranic ans, les Traquets étaient, en Provence, 
nombreux et réguliers dans leurs migrations. Vers l'automne 
on les voyait, en compagnie des Fauvettes, se percher sur les 
coursons de la vigne. De ce poste d'observation ces infatigables 
éplucheurs d'écorces surveillaient les insectes, découvraient 
les larves et les œufs déposés dans les fissures des troncs, 
et se livraient à la chasse incessante de leur proie vivante. 

Or, ces gracieux protecteurs de la vigne ontaujourd’hui pres- 
que totalement disparu, en même temps que nous voyons nos 
vignoblesenvahisetmenacés par desmaladiesparasitaires. Nous 
voulons bien ne voir dans ces deux ordres de faits qu’une for- 
tuile coïncidence ; nous n'avons nullement la prétention de sou- 
tenir que l’oidium, parasite végétal, que le phylloxera, importé 
ou non d'Amérique, n'aient dù leur effrayante extension qu’à 
la disparition des oiseaux. Mais ce qui est hors de litige, c’est 
qu'un végélal affaibli par les attaques des insectes es! moins 
en état de repousser l'envahissement des parasiles; c’est que 
la vigne, privée de ses défenseurs ailés, a été livrée aux assauts 
de la Pyrale, de l'Eumolpe, de l’Attelabe et du Gribouri, donc 
prédisposée à succomber par l'invasion de ses nouveaux 
ennemis. 


500 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Nous ne reprouuirons pas les thèses éloquentes des Tschudi, 
des Glôger, des Florent Prévost, des Toussenel. Les faits 
consignés dans leurs écrits et que nous avons relatés dans 
plusieurs mémoires sur la protection due aux insectivores, 
les documents présentés au Sénat par le président Bonjean 
concordent pour signaler le fléau de la pullulation des 
insectes en même temps que les oiseaux sont détruits. Nous 
nous limiterons aux informations les plus récentes. 

M. H. Marès écrit à l’Académie des sciences, juin 1873 : 

« Nous voyons, cette année, une prodisieuse quantité d'in- 
» sectes nuisibles de toute nature. La vigne est réellement 
» accablée; Altises, Pyrales, Attelabes, Gribouris, Phyl- 
» loxera, etc., tout se déchaîne sur elle à la fois. J’observe 
» que depuis les gelées des 26 et 27 avril, la situation s’est 
» agoravée pour les vignobles, et que dans une foule de loca- 
» lités ils se développent mal. Le Gribouri, qui est un produit 
» des années hnmides, fait un mal considérable ; je crains que 
» dans beaucoup de cas il ne soit le précurseur du Phylloxera. » 

Remarquons que dans la pensée de l’habile et consciencieux 
observateur de Montpellier, l'invasion par les insectes des 
parties aériennes de la vigne est une cause d'affaiblissement 
qui prédispose au complément de sa destruction par les para- 
sites souterrains. Constatons aussi que les gelées, dans les- 
quelles M. Perris voit un moyen de limitation de la fécondité 
des insectes, n'ont pas nui au Gribouri. Les œufs des insectes 
résistent en effet à des froids intenses et prolongés; quant aux 
larves, elles pressentent d’instinct les intempéries et s’enfon- 
cent préventivement, d'autant plus bas dans le sol, que les 
celées doivent être plus fortes. 

A propos de cette communication de M. H. Marès, M. le 
baron Thenard a fait remarquer que « cette irruption énorme 
» d'insectes nuisibles n’a pas été spéciale aux vignes du Midi, 
» car toutes les plantes, sauf l’avoine, ont été généralement 
» envahies par ce fléau. Dans la Côte-d'Or, les betteraves, les 
» mais, les haricots, ont été détruits par des nuées d'insectes. 
» fl en a été de même aux environs d'Auxerre. » 

Nous n'ignorons pas que les multiplications excessives 
d’insceles ont été de tout temps signalées exceptionnellement 


LES OISEAUX ET LES INSECTES. 5u4 


à des périodes variables. Mais en dehors de ces foisonne- 
ments favorisés par diverses circonstances climaiériques, nous 
voyons l'augmentation régulière et permanente de l'armée des 
ravageurs de nos récoltes, en même temps que disparaissent 
les oiseaux qui font des insectes leur principale nourriture. 

Les fruits de nos vergers sont piqués, les arbres succombent 
sous Jes attaques des Scolytes, nos légumes se couvrent de 
Chenilles et de Pucerons, nos blés avortent par la piqûre des 
Cécydomies, et les marchés de nos villes offrent à Pimpré- 
voyante gourmandise des riches consommateurs des masses 
de petits oiseaux que Dieu avait préposés à la protection de 
os cultures. Même en temps prohibé, au printemps, au mo- 
ment où l'oiseau qui émigre en quête d’insectes revient en 
France prendre possession de son nid, nos côles méditer- 
ranéennes se couvrent de piéges qui altendent, amorcés d’une 
proie vivante, une Fourmi ailée, limprudent et affamé voya- 
geur. Le soir, surtout aux jours de passage, quand le tiède vent 
d’est souifle légèrement, tel habitant de la côte, tel employé 
du gouvernement sur les ilots à phares, pourra vous vendre 
50 et quelquefois 80 douzaines de Becs-fins, Culs-blancs, Culs- 
roussets, Traquets et Fauvettes, capture illicite de sa journée 
de printemps. 

Un témoin honorable, M. Nonay, avocat, nous affirme avoir 
vu en un seul jour, le 23 avril 14873, prendre par un seul de 
ces braconniers 125 douzaines d'oiseaux, 1500 insectivores, 
et c'était un gardien de phare, un employé dugouvernement, 
qui avouait se faire avec cette chasse violatrice de la loi un 
revenu annuel de 7 à S00 francs, 

Or, cette destruction insensée de ces utiles Becs-fins se fait 
tous les ans, sans répression aucune, sur toutes nos côtés, 
depuis Nice jusqu’au cap de Creux. L'État qui vend 25 francs 
un permis de chasse à l'honnête chasseur au fusil qui aura à 
parcourir 10 à 12 kilomètres pour tuer cinq ou six petits 
oiseaux, l'État ne reçoit rien de l’effronté coquin qui tue la 
poule aux œufs d’or, ruinant notre agriculture, el rendant de 
plus en plus problématique le plaisir du chasseur patenté, 
déçu dans sa légitime attente. 


502 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Si nous touchons à la question du braconnage, étrangère à 
notre rélutation du travail de M. Perris, c’est qu’il nous semble 
utile à notre cause de démontrer que si nous réclamons la 
protection des oiseaux, nous ne sommes nullement l’adversaire 
des chasseurs au fusil, et que nous n’avons pas la pensée de 
lhniter leurs salutaires exercices (4). Nous voulons au contraire 
rendre leurs plaisirs plus certains, moins précaires, convain- 
cus que nous sommes qu’en les satisfaisant nous ne compro- 
mettrons pas sérieusement la conservation de la gent emplu- 
mée. Le braconnage, l'emploi des piéges et des gluaux, la 
destruction des nids, voilà la véritable cause de la disparition 
des espèces utiles. Or, M. Éd. Perris affirme que le sentiment 
irraisonné, et par conséquent déraisonnable en faveur de 
l'utilité des oiseaux n’est nulle part aussi développé qu’en 
France. Si malgré ce préjugé protecteur, nous voyons dans 
notre pays combien le braconnage et l’œuvre de destruction 
des insectivores sont difficiles à réprimer, que deviendraient 
ces précieux auxiliaires si, par malheur, les idées de M. Perris 
et du groupe des entomologistes de son école venaient à 
prévaloir ef à rassurer les consciences encore hésilantes 
à accomplir des œuvres préjudiciables à l'intérêt public. 

Mais cette assertion même de M. Perris est mal fondée, ear 
nul pays en Eurcpe, sauf l'Italie, n’est moins hospitalier 
pour l'oiseau que la France. 

Nous avons, il est vrai, un peu plus agité la question des 
oiseaux et démontré leur utilité. Mais que nous sommes loin 
des nations voisines dans l’application des moyens pratiques 
d'assurer la réalisation de nos théories. 

En France, la latitude attribuée aux préfets pour la régle- 
mentation de la chasse a pour conséquence de rendre légal 
dans un département ce qui devient illicite dans les autres. 
Dans le département de Meurthe-et-Moselle, à Champi- 
gneulles, près Nancy, le maire a mis en adjudication publique, 


(4) La migration des insectivores étant généralement terminée dans Îles 
premiers jours d’octobre, il faudrait toutefois que la chasse aux petits 
oiseaux ne fût ouverte qu’à celte époque. Les insectivores seraieuül, par 
“cette mesure, soustraits à la destruction par le fusil. 


LES OISEAUX ET LES INSECTES. 503 


pour six années consécutives, la chasse aux petits oiseaux, au 
moyen des piéges dits sauterelles, dans toute l'étendue des 
bois communaux qui sont fort considérables. (Bulletin de la 
Société protectrice des animaux, septembre 1873, p. 199.) 

Dans le Var, le préfet bien conseillé avait, dans son arrêté 
sur la police de la chasse pour 1874, interdit toute auire 
chasse que celle au fusil. Mais, par une concession fâcheuse, 
il a permis ultérieurement l'emploi des gluaux pour la chasse 
aux Grives pendant le mois de novembre, comme siles gluaux 
ne prenaient pas aveuglément tout oiseau qui s’aventure 
sur ces perfides perchoirs. 

Dans les Prrénées-Orientales, la chasse au filet est permise 
pendant toute la durée d’automne et de printemps. Durant 
les journées de grand vent; les oiseaux qui accomplissent 
leurs migrations rasent les coteaux du littoral et sont pris en 
quantités considérables, dans de vastes filets manœuvrés avec 
une déplorable habileté. 

Dans le Gard, l'Aude et l'Hérault, la chasse printanière est 
d'usage pour les Gailles dites vertes. En avril, mai, temps pro- 
hibé, on voit ces oiseaux servis sur les tables des plus hauts 
fonctionnaires et figurer dans les diners officiels. En outre, 
l’empoisonnement des Alouettes est toléré, le gibier tué par la 
moix vomique circule librement dans tous les rarchés du Midi. 

Aux environs de Paris, la chasse des Alouettes se fait au 
moyen du traineau, filet promené de nuit dans les emblavures; 
un traineau convenablement manié ne rapporte pas moins 
de 1090 à 1200 francs par saison (Journal /e Temps, 47 octo- 
bre 1873). 

Ces exemples et ce que nous avons rapporté des chasses de 
printemps avec des piéges sur le littoral de la Méditerranée 
prouvent combien peu est fondée Passertion de M. Perris que 
la France est le champ d’asile des oiseaux. 

Ils sont bien plus efficacement protégés dans bien des pays 
d'Europe, et leur conservation y est assurée par des disposi- 
tions légales efficaces etintelligentes. 

En Angleterre vient d’être promulguée une loi de protec- 
tion analogue à celle qui en France reste à l'état de lettre 


590% SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


morte. La Société protectrice des animaux de Londres s’est 
empressée de la faire connaître aux paysans au moyen d’une 
grande quantité d'affiches, plus de 59900, posées dans tous les 
centres ruraux de population. 

En Danemark, en Suisse, on reconnait si bien l'utilité des 
oiseaux insectivores, que lon y favorise leur multiplication au 
moven de nids artificiels. M. Héritte, consul de France à Else- 
neur, rapporte que les règlements les plus sévères y sont en 
vigueur pour prévenir ou réprimer la recherche et la destruc- 
tion des couvées. Ce n’est que pendant l'hiver qu’il est permis 
de trafiquer des oiseaux quelconques territoriaux, la cireula- 
tion en est absolument interdite, comme celle du gibier en 
France, pendant les temps prohibés. 

En Autriche, un congrès agricole et forestier, présidé par 
le ministre de l’agriculture, a eu lieu en septembre 4873 ; 
parmi les questions qui v oni élé trailées, se trouve celle de 
la protection des oiseaux utiles. M. Boitel, inspecteur général 
de l’agriculture, y a représenté la France. 

La Belgique nous a dépassé dans les mesures conservairices 
des oiseaux inseclivores ; une loi promulguée le 21 avril 1873 
protége les oiseaux Insectivores; leurs œufs et leurs couvées. 
L'article 12 punit de l'amende tout individu portant ou usant 
des engins prohibés. Les pièges visés par la loi sont tous ceux 
qui servent à prendre le gibier mort ou vivant, même les cages 
à bascule, les gluaux et la pipée au moyen d’oiseaux de proie 
nociurnes. 

En Allemagne, un impôt qu'il serait facile d'appliquer en 
France frappe les propriétaires d’oiseaux en cage. 

En présence de dispositions si favorables à la cause des o1- 
seaux, de la part de presque toutes les puissances européennes, 
il nous semble qu'il n'y aurait pas beaucoup d'efforts à faire 
pour obtenir un concert international, qui prendrait des me- 
sures générales de protection des oiseaux sur tout le conti- 
nent européen. 

Il importe donc de démontrer le bénéfice que l’agriculteur 
retirerait de ces dispositions conservatrices, contrairement 
aux doctrines de M. Perris, que nous allons analyser. 


LES OISEAUX ET LES INSECTES. 505 


L’éminent entomologiste ne conteste pas que les oiseaux 
consomment prodigieusement d'insectes ; il admet comme un 
fait hors de douie qu’un nombre incalculable d'insectes de- 
vient la proie des oiseaux; mais cette pàlture quotidienne se 
compose-t-elle d’ennemis de nos cultures? Ne tombe-t-1il sous 
le bec de nos vigilants chasseurs que ceux qui causent des 
dommages réels aux plantes industrielles ou alimentaires, 
aux hommes eux-mêmes et aux animaux domestiques”? Faï- 
sant l'énuméralion des 34 500 espèces d’insectes connues en 
Europe, il réduit à 350 celles qui sont nuisibles ou peuvent 
le devenir; d’où il calcule que sur 100 insectes pris par les 
oiseaux, il peut, en moyeune, s’en trouver un qui soif malfai- 
sant : sur les 99 autres, la plupart nous importent peu ou ont 
pour mission de nous faire du bien. 

La statistique est une belle science, mais ne fourmit-elle 
pas à l'imagination des arguments contre lesquels M. Perris 
lui-même nous met en garde avec raison. il faudrait, pour que 
ce calcul füt juste, que les oiseaux prissent indistinctement 
tous les insectes qui sont à leur portée. Il n’en est pas ainsi, 
et 1ls ne recherchent que la proie qui leur convient, n’en ac- 
ceptant d'autre que lorsque celle qu'ils préfèrent vient à leur 
manquer. Ainsi les Traquets, notamment le Traquet tarier, 
recherche de prédilection les insectes de la vigne, et c’est 
pour cela qu'il vit dans les vignobles dont, pendant la saison 
froide, il inspeete les écorces et sonde les fissures de son bec 
inquisiteur. 

M. Perris ne conteste pas, du reste, cette élection de nour- 
riture, puisque c’est par une analyse détaillée qu’il montre 
dans chaque classe d’insectes ceux qui peuvent devenir la 
proie des oiseaux, et ceux bien autrement nombreux que leurs 
mœurs noclurnes ou leur petitesse rend inaccessibles à 
la chasse de la gent ailée. L’argument tiré de la petitesse des 


larves revient si souvent dans le cours de l’étude de M. Per- 


ris, que nous devons l’examiner. 

L'oiseau possède une subtilité de vue tout à fait exception- 
nelle : c’estau moyen de ce sens si admirablement perlectionné, 
qu’il reconnaît sa route et aw’il recherche sa nourriture. Par 


506 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


conséquent, dire que parce qu’il n’a que 2 millimètres de 
long, un insecte échappe aux oiseaux, c’est émettre une asser- 
tion gratuite. Je n'admets pas non plus que l'oiseau ait donné 
à M. Perris mission d’affirmer en son nom qu’il ne daignerait 
pas ouvrir le bec pour avaler un petit sauteur d’un millimètre 
de long. M. Florent Prévost a trouvé dans l'estomac des Hiron- 
delles des centaines d’Altises que ces utiles oiseaux avaient 
cueillies au vol sur une luzernière, et le Roitelet ne se nourrit 
que des œufs microscopiques et invisibles pour nos yeux 
myopes, qu'il sait parfaitement récolter sur les écorces des 
chênes. 

Les Alouettes ne dédaignent nullement les petites larves de 
la Cécydomie du froment. Si ces oiseaux protecteurs des cé- 
réales n'étaient pas détruits en si grandes proportions par les 
filets et le poison, nos récoltes de blé seraient moins souvent 
compromises par suile des attaques des bestioles qui vivent 
aux dépens de nos graines. 

M. Perris admet que les Bergeronnettes débarrassent les 
bestiaux de quelques-unes des Mouches qui les incommodent ; 
mais il se hâte de faire observer que leur action bienfaisante 
ne saurait produire une notable diminution de ces insectes 
agaçants. À qui la faute si l’on détruit ces charmants oiseaux 
qui ne sont plus en nombre suffisant pour remplir leur mis- 
sion. J'ai vu, aux mois d'avril etmai873, en temps prohibé, 
vendre hbrement sur le marché de Châteauroux des masses 
de ces jolies Bergeronnettes et de Farlouses, prises dans les 
prés au moyen d’un crin, par les bergers et les vachères, qui 
ne trouvent que ce mode de remerciment pour les bienfaits 
que les pauvres pelits oiseaux rendent aux animaux confiés à 
leurs soins. 

Les Taons et les Œstres, que M. Perris déclare n'être pas de 
la compétence des oiseaux, trouveraient cependant de vigi- 
lants destructeurs dans le Héron garde-bœufs. Mais notre stu- 
pide manie de chasse et de meurtre le voue à une disparition 
imminente, au grand détriment des troupeaux de bœufs qui 
devraient, à son action protectrice, d'être débarrassés de leurs 
persécuteurs. Le Héron garde-bœufs est une espèce victime 


LES OISEAUX ET LES INSECTES. 507 


qui tente le coup de fusil par son plumage blanc et son élé- 
gante aigrette. 

Les seules espèces d'oiseaux dont M. Perris admet l’utilité 
sans contestation seraient les Pics, les Goucous, les Mésanges, 
les Engoulevents. Les autres insectivores ne nous procure- 
raient qu'un avantage relatif et limité, aussi, plusieurs d’entre 
eux pourraient disparaitre de la scène du monde sans que 
probablement 1l en résultât des désordres appréciables, tandis 
ue la suppression d’un seul insecte parasite pourrait avoir 
les plus graves conséquences. Et qu’on ne dise pas que j’exa- 
cère ou que Je cite infidélement : M. Perris dit textuellement : 
« Aussi, parmi les oiseaux, les Pics et les Mésanges sont-ils 
» les plus utiles, pour ne pas dire les seuls utiles sous le rap- 
» port des insectes, et précisément il est à remarquer qu’on 
» n’a pas de protection à demander pour ces oiséaux, puisque 
» personne ne leur fait la chasse. » 

Je renvoie sur ce point M. Perris à M. le comte d’Esterno, 
qui prêche et pratique la destruction du Pivert avec des argu- 
ments que M. Perris n'avait pas prévus. Mais il me semble 
impossible que s'il y eût réfléchi, M. Perris, savant et con- 
sciencieux observateur, qui sait si bien rappeler au respect de 
Péquilibre providentiel, lorsqu'il s’agit de laclasse des insectes, 
aurait hésité à envisager avec cette calme sérénité la dispari- 
tion des Rossignols et des Fauvettes, et à proclamer que cette 
effroyable lacune dans l'œuvre de Dieu ne produirait pas dans 
l’équilibre des êtres de dangereuses perturbations. 

Mais n’eussions-nous même pas à invoquer l'utilité qui est 
incontestable, même pour M. Perris qui, bon gré mal gré, 
concède que les oiseaux mangent une énorme quantité d’in- 
sectes, la disparition d’un seul groupe d'oiseaux chanteurs ne 
serait-elle pas une calamité au point de vue du charme et des 
jouissances esthétiques. Imaginez une campagne où l’on ne 
verrait pas voler un seul oiseau, un bosquet où l'on n’enten- 
drait pas les cadences suaves du Rossignol, un guéret sur 
lequel ne planerait pas le chant joyeux de l’Alouette matinale. 
M. Perris appartiendrait-il à cette école puritaine qui n’es- 
time les choses que par leur étroite utilité, qui proscrirait le 


508 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


parfum et l'éclat de la fleur parce qu’elle ne se mange pas, et 
qui considère la peinture et la musique comme choses dam- 
nables et à proscrire de toute société bien ordonnée? 

Évidemment, ces corollaires sont outrés, mais il importe de 
les déduire des prémisses de M. Perris, et s’il ne trouve 
comme argument contre l’utihté des oiseaux que l’exiguité de 
la taille de leur proie vivante, nous avons le droit de qualifier 
celte asserlion de gratuile et de dogmatique. 

Mêmes affirmations sans preuves, dans diverses parties 
de ce mémoire. X. Perris affirme que l'Espagne n’est dépeu- 
plée d’arbres que parce que les agriculteurs de ce pays 
redoutent de laisser ur asile, un abri, un berceau, aux oiseaux 
dont ils attendent pius de dommages que de bienfaits. 

Or, on sait que l’Espagnol comme l’Arabe, qui à infusé 
dans la race ibéro-cantabre ses idées et son sang, est un 
peuple pastoral qui, systématiquement, détruit la forêt pour 
créer le pâturage. Voilà la seule et véritable raison du déboi- 
sement de l'Espagne et de l'Algérie. 

Les Arabes ne sont, du reste, pas plus que les Espagnols, 
les ennemis systémaliques des oiseaux. En voici une preuve : 

Il y a deux ans, les environs de Sidi-Bel-Abbès, province 
d'Oran, furent assaillis par des nuées de Sauterelles (Criquet 
pèlerin) qui étaient escorlées par des bandes d'Étourneaux 
acharnées à la poursuite de cette succulente proie. A la vue 
de ces masses d'oiseaux, les colons français sentant se réveiller 
leurs instincts de chasseurs s’arment de tous les fusils dispo- 
nibles et se meltent en campagne contre les Étourneaux : Heu- 
reusement les Arabes, voyant les intentions hostiles des colons, 
se précipitèrent au devant d’eux les suppliant de ne point ürer 
sur les Étourneaux qui les débarrasseraient du fléau des Cri- 
quets. Les colons se soumirent à l’expérience des Arabes, et 
bien avisés, laissèrent les Étourneaux faire paisiblement leur 
besogne protectrice. Quelques jours suffirent pour nettoyer la 
plaine sur laquelle les ravageurs s'étaient abattus. Les Arabes 
se rendent donc parfaitement compte des services que les o1- 
seaux peuvent rendre à l’agriculture. 

Donc la manie du déboisement, si nuisible aux oiseaux dont 


LES OISEAUX ET LES INSECTES. 569 


elle détruit asile naturel, n’a d'autre cause que la nécessité 
de produire des herbes pour les troupeaux en quête d’une 
nourriture problématique. En regard de cette aberration im- 
prévoyante à plus d'un ütre, rappelons les intelligentes intro- 
ductions d'oiseaux faites aux États-Unis, en Australie et à 
l'ile Bourbon, où le Martin rose a eu raison des Sauterelles, 
et a arrêté les ravages de plus en plus funestes du Ver de la 
canne à sucre. 

Il est cependant un argument de M. Perris qui mérite qu’on 
l'examine de près. L’éminent entomologiste, avec une inten- 
tion railleuse, parfaitement légitime à première vue, réclame 
contre certaines exagérations qui tendraient à attribuer à la 
seule action bienfaisante des oiseaux un rôle protecteur suffi- 
sant contre tous les fléaux qui envahissent nos cultures. 

Mais en ce qui concerne le Phylloxera, question capitale et 
brülante qui agite si légitimement les viticulteurs, faisons 
remarquer que, pour bien des esprits observateurs et scienti- 
fiques, le Phylloxera serait une résultante et non une cause 
du dépérissement de la vigne. 

Rappelons, avec M. Trimoulet, le savant entomologiste de 
Bordeaux, que le Phvlloxera n’est pas, une création nouvelle, 
qu'il a de tont temps existé en Europe, et qu'il n’a pris la 
redoutable extension dont souffre notre agriculture que sous 
l'influence complexe de causes dont l'analyse a été faite par 
des agronomes et des physiologistes. 

La conséquence des diverses causes génératrices de cette 
invasion, c'est un affaiblissement des ceps prédisposés ainsi 
aux attaques des insectes. 

Un sait, en effet, que par un merveilleux instinct, ou plutôt 
parce que la résistance à leurs assauts est plus complète chez 
les végétaux vigoureux, les insectes ne s’allaquent où ne pro- 
duisent de ravages apparents qu'aux plantes affaiblies. M. Per- 
ris rapporte qu'il a vu aux environs de Mont-de-Marsan des 
ormes tués par les Cossus lijniperda, mais 1] ajoute que ces 
arbres étaient plantés dans des conditions peu favorables, et 
qu'il n'a pas le souvenir d'arbres vigoureux tués par cet insecte. 

M. Ed. Duffour, secrétaire de la Commission départemen- 


mer am tatin 


LE 


APT RLE VE 


ALES 


Li a TAIT  AIRE 


4 
1 


510 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


tale de l'Hérault a écrit : « Lorsqu'on met une plante à végé- 
» ter dans une terre qui ne lui convient pas, un des effets les 
» plus ordinaires de l’état de souffrance où elle se trouve est 
» d’atürer sur elle de nombreux parasites, tels que Pacerons, 
» Kermés, Trips et Acarus. » Ces observations sont vraies. La 
physiologie nous enseigne que tout être vivant est, dès qu'il 
s’affaiblit, envahi par les parasites animaux ou végétaux. 
Devant ce fait d'observation, il est facile de conclure. 

Que sile Phylloxera n’est pas une proie possible pour les. 
oiseaux en raison de son-existence souterraine, les atiaques 
des insectes aériens qui pullulent sur les parties des végétaux 
situés hors de terre ont pour conséquence l’affaiblissement du 
sujet et le prédisposent par conséquent aux attaques du parasite. 

Donc, le rôle des oiseaux, en protégeant les parties 
aériennes des plantes contre leurs envahisseurs, sera de con- 
tribuer à maintenir la vigueur de ia plante, et par conséquent 
d'agir indirectement en augmentant la force de résistance des 
végétaux contre l'extension de leurs ennemis souterrains. 

Nous concluons, en conséquence, contre les assertions de 
M. Perris, que les oiseaux sont éminemment utiles, qu’ils ont 
leur raison d’être dans la série des créations destinées à s’équi- 
librer dans le plan del harmonie providentielle; que nous de- 
vons one par tous les moyens que la raison suggère, la 
destruction de ces utiles auxiliaires, et réclamer avec persévé- 
rance, les réformes légales qui assureront leur protection 
contre les braconniers et les pilleurs de nids. 

M. Perris nous fournit du reste, en faveur des oiseaux, un 
argument décisif, et c’est par lui que nous terminerons notre 
étude crilique. 

« La puissance de l’homme contre les insectes, écrit-1}, est 
» fort discréditée aujourd'hui, et c'est l'insuffisance de ses 
» efforts, c’est l'observation attentive des faits qui a conduit à 
» celte conclusion. À l’époque où l’on crovait le plus à l'effi- 
» cacité de son intervention, lorsque de toutes parts on l'in- 
» vitait à courir sus aux insectes, et qu'on cherchait à mettre 
» à sa disposition des moyens de défense, je proclamais son 
» Impuissance. » 


LES OISEAUX ET LES INSECTES. 511 


Nous sommes surpris que cette doctrine n'ait pas conduit 
léminent entomologiste à cette conclusion, que, puisque 
l’homme ne peut rien contre les insectes, 1l doit ménager 
soigneusement les êtres doués d’une vue merveilleuse et 
d’une agilité surprenante qui se nourrissent des ennemis de 
nos cultures. 

Mais, ainsi que nous l'avons vu, M. Perris n'entend pas que 
la répression des ravageurs, puisse être le lot des insectivores. 
Il prend à tâche de nous faire admirer l'équilibre providentiel 
ménacé dans la classe des insectes au moven des carnassiers 
et des parasites, mais il se refuse à accepter le même rôle 
chez les oiseaux, et il ne veut pas voir dans cette création, 
superflue à son avis, la sagesse infinie qui ne se révèle à Jui 
que parmi les êtres qui font son étude de prédilection. 

Nous ne serons pas auss! exclusifs que lui. Nous voudrions 
que l'instruction fût plus libéralement répandue. Nous aspi- 
rons surlout à la diffusion des notions utiles, venant retrem- 
per et armer pour la luite de lexistence nos jeunes gens trop 
exclusivement voués aux études purement littéraires. Nous 
serions heureux de voir les études entomologiques assez ré- 
pandues pour que la moyenne de notre population pt distin- 
guer les insectes carnassiers des insectes herbivores, et ne 
confondit pas toutes les espèces dans une brutale et inintelli- 
gente réprobation. 

Enfin, si la physiologie enseignait à nos enfants que les 
insectes sont les ministres de la destruction pour les êtres 
affaiblis ou épuisés, ils sauraient que tout ce qui tend à insti- 
tuer une bonne hygiène des êtres vivants est aussi un moven 
d'écarter les fléaux de cette nature, ct cette conception ration- 
nelle leur permettrait d’entourer d’une sollicitude intelligente 
et l'oiseau qui veille sur nos cultures et les bonnes méthodes 
qui assurent la santé des végétaux dont nous tirons notre sub- 
sistance, nos boissons et nos vêlements. 


I. TRAVAUX ADRESSES ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ. 


NOTE 
SUR 
LES ANIMAUX ET LES PLANTES UTILES 
DU CAP DE BONNE-ESPÉRANCE 


Par M. Roland ÆTRIMEN 


Conservateur du Musée du sud de l'Afrique. 


Les nombreux ruminants à cornes creuses {Cavicornes) sont 
tous plus ou moins utilisés comme nourriture à la fois parles 
Européens et les indigènes. Cependant les plus communs 
dans les limites de la Colonie du Cap sont seulementceux qui 
appartiennent aux petites espèces d’Antilopes, tels que les 
Springhbok (Axéidorcas euchore), Duiker (Cephalophus 
grinumia), Steimbok (Calotraqus camgestris), Rheebok (Pelea 
capreola), etc. Les grandes espèces ne se trouvent aujour- 
d’hui que fort loin au nord et ne s’obtiennent par conséquent 
qu'avec difficulté. L'Élan (Boselaphus oreas), qui est de ce 
nombre, est un des plus gros d'apparence ct réputé pour son 
excellente chair. Cet animal a été élevé en Europe et sa na- 
ture douce le rend admirablement propre à la domestication. 
Un grand nombre des petits mammifères, presque tous même 
saut les carnivores, servent à la nourriture desindigènes, et ie 
Porc-épic (Hystrir cristata) est regardé par les Européens 
comme assez bon. Les Lièvres du pays (Lepus capensis, Lepus 
saxatilis, etc.) sont tous bons à manger, quoique les Hollan- 
dais paraissent avoir contre eux une sorte de prévention. Les 
Cochons sauvages ou Sangliers (Potamochærus africanus ei 
Phacochærus ætliopicus constituent, à ce que disent les chas- 
seurs, une nourriture qui n’est point désagréable. 

Le seul mammifère du Cap qui fournisse un produit utili- 
sable en médecine est le Coney ou Dassie (Hyrax capensis). 
La sécrétion de cet animal, Lyrace ïn, est bien connue; on 
en peut trouver une description dans l’ouvrage au docteur 


ANIMAUX ET PLANTES UTILES DU CAP DE BONNE-ESPÉRANCE. 913 


Pappe : Æoræ capensis medicæ prodromus appendir, 
p. A6-A8. 

Beaucoup de mammifères africains preduisent de bonnes 
fourrures. Les peaux sont assouplies et préparées par diffé- 
rentes tribus indigènes et sont cousues ensemble avec art, de 
façon à former ces couvertures appelées karosses, qui obtien- 
nent toujours des prix assez élevés sur le marché. Les four- 
rares les plus appréciées sont celles du Léopard (Felis pardus) 
et le Renard à dos noir (Vulpes mesomelas), mais on en pré- 
pare beaucoup d’autres, telles que les peaux de Chacal (Vul- 
pes vartegatoides), celles du Serval ou Chat-tigre (Felis serval), 
de la Loutre (Aonix Lalandu), et de nombreuses Antilopes dont 
la plus commune espèce est le Springbok (Antèdorcas euchore). 
Les peaux de Lion sont généralement préparées seules. Pour 
le cuir, on exporte en Europe les peaux de Buffalo (Bubalus 
capensis), et celles des grandes Antilopes; celle de l'Hippopo- 
tame sert à faire des cannes ou séicks et des cravaches fort 
lourdes, connues sous le nom de «djamhoks ». Les cornes des 
ruminants sauvages, aussi bien que celles des diverses espèces 
de Rhinocéros, forment un article important d'exportation. 

I n’y à pas de mammnifère propre à l'Afrique Australe qui 
soit employé comme bête de somme ou de trait, quoiqu'on 
puisse citer des exemples de domestication de Zèbres (Asinus 
cebra et A. Burchelli.) L'Éléphant, le Buffalo et le Quagga 
(Asinus quagqa), ne paraissent pas avoir jamais été appri- 
voisés ou habitués à un travail quelconque. 

Les animaux regardés comme gibier, comprennent toutes 
les grandes espèces de mammifères. 

Les diverses Outardes sont en général un excellent manger 
et, à ce point de vue, le plus grand spécimen de Afrique du 
Sud dans cette famille, l'Eupodotis kori, est un des meilleurs. 
Ce magnifique oiseau, appelé par les colons hollandais « gom 
paawn », pèse de 30 à 35 livres. Le Faisan des colons (}ran- 
colinus clamator) et les Perdrix (F. afer et F. Levaillantu), 
quoique ayant la chair un peu dure, sont três-bons Jors- 
qu’on les cuit avec soin. Quelques Anatidées (Ganards) du Cap 


(particulièrement le Pæcilonelta erythrorhyncha et l'Anas 
32 SÉRIE, T. |. — Août 1874, 33 


51/4 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


sparsa) sont très-appréciés pour la table, et l’on peut en dire 
autant de la Bécassine (Gallinago macrodactyla) et de la Bé- 
cassine dorée ou peinte (Rhynchæa capensis). 

L’Autruche (Sruthio camelus) vient au premier rang pour 
la valeur de ses plumes, et les fermiers de la Colonie en font 
l'élève sur une grande échelle. On a dit souvent que les 
plumes des Autruches apprivoisées sont d’une qualité infé- 
rieure à celles que fournissent les Autruches sauvages, mais 
cette opinion est encore discutée. Malgré de fréquentes pertes 
dans les troupeaux, cette industrie est en somme très-profi- 
table et promet de sauver d’une extinction probable le plus 
bel animal de l’ordre des échassiers. 

Beaucoup d’oiseaux plus petits fournissent un plumage em- 
ployé plus ou moins comme ornement. Les plumes de la 
queue et des ailes sont les plus recherchées, comme dans le 
cas du Loriot des colons (Corythaix persa) et du « Kasir 
Fink » (Chera Progne). La peau entière des oiseaux comme le 
Loxia oryx ei le Loxia capensis et les divers « Sugar-birds » 
(Sucriers), Cinnyris chalybea, C. violacea, Nectarinia famosa 
(Sucrier malachite), etc., est fréquemment employée pour or- 
ner les chapeaux de dames. 

Outre le Secrétaire (Sagittarius secretarius) quelques es- 
pèces de Faucons et de Hibous, comme dans les autres parties 
du monde, rendent de grands services en diminuant le nom- 
bre des serpents, des rats, des sauterelles, etc. Non moins de 
quatre espèces de Faucons et deux espèces de Milan (Wz/vus 
migrans et Milvus Forskalii) détruisent les multitudes de 
fourmis blanches, Termites ; outre ceux-là, les Locust-birds, par 
exemple, Céconia alba et Glareola melanoptera attaquent les 
légions innombrables de Locustes (Pachytylus pardalinus), 
qui visitent principalement les frontières du nord et du nord- 
est de la Colonie. Le sud de l’Afrique est aussi abondamment 
pourvu de F/ycatchus appartenant aux familles Muscicapideæ et 
Dicruridæ. 

Les Outardes, dont nous avons déjà parlé, sont vraiment des 
oiseaux d'ornement, surtout l’£Evpodotis cærulea et le grand 
E. kori, Les Grues Stanley et couronnées ou Kasir Cranes 


ANIMAUX ET PLANTES UTILES DU CAP DE BONNE-ESPÉRANCE. 54 3 


(Tetrapteryx paradisea ei Balearica requlorum) sont bien 
connues dans les jardins zoologiques d'Europe pour leur beauté 
et leur élégance. 

il n’est pas nécessaire de rappeler les nombreux oiseaux 
du Cap qui seraient par leurs formes agréables dignes de 
remplir les volières ou les cages. On pourrait peut-être élever 
les délicieux Sun-birds dans de spacieuses serres à jour, bien 
garnies de plantes dont les fleurs composent leur nourriture. 
Parmi les oiseaux aquatiques, le gracieux petit Netfapus au- 
ritus avec son dos d’un vert brillant est bien digne d'obtenir 
une place dans les petits lacs d'agrément. Beaucoup de petits 
oiseaux de l’Afrique australe ont un cri doux et court, ou quel- 
ques notes perçantes qui ne sont pas désagréables, mais il ny 
en a aucun qui puisse lutter pour le chänt avec les oiseaux 
connus d'Europe. Le Canari du Cap (Serinus canicollis) est le 
meilleur chanteur que j'aie eu l’occasion de rencontrer ici, 
mais le Cinnyris felatala doit le surpasser de beaucoup si l’on 
en juge d’après le récit de feu G.J. Anderson, un observateur 
atientif et expérimenté. (Notes sur les Oiseaux de Demara- 
land, etc. Londres, 1872.) 

Le Cap est abondamment pourvu de poissons qui sont une 
grande ressource pour l’alimentation de ce pays; on peut s’en 
rendre compte en parcourant la publication du docteur Pappe 
intitulée : Synopsis of the edible Fishes of the Cape of Good 
Hope. Parmi les reptiles, certaines espèces de Tortues (Pe/- 
tastes, Chersina homopus), VIguane et le Monitor (Regenia 
alboqularis), sont quelquefois employés comme nourriture, 
mais leur chair quoique blanche est sèche et insipide. 

Je ne connais aucun replile ni aucun poisson de l'Afrique 
australe qui fournisse quelque substance médicale, ou dont 
les peaux et les écailles soient utilisées dans l’industrie. Les 
poissons de rivière sont, à irès-peu d'exceptions près, petits et 
d’une couleur terne. Beaucoup de poissons de mer ont une 
teinte brillante et pourraient bien servir à l’ornement des 
aquariums, mais il serait très-difficile sinon impossible de les 
conserver, et plus difficile encore de les transporter dans d’au- 
ire pays. 


| 
| 


516 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Les Fourmis blanches servent de nourriture aux indigènes 
orsqu’ils ne peuvent se procurer d’autres aliments, et les chas- 
seurs européens prétendent qu'elles ont un goût agréable 
ressemblant à un mélange d'amandes et de sucre. Le Homardä 
(Palinurus Lalandü) très-abondant à Table-bay forme un ap- 
point important de la nourriture des classes pauvres de Cape- 
town, et les jeunes sont d’un goût agréable. 

Les seuls insectes qui me semblent devoir être de quelque 
utilité pour la médecine sont les nombreuses espèces de My- 
labris, de la famille des Cantharides. Ces insectes sont nom- 
breux, se nourrissent de pétales de fleurs, et il serait facile 
d’en amasser une grande quantilé. 

En fait d'insectes produisant de la soie le plus connu est un 
Bombycide appelé Gonometa postica dont les larves se trou- 
vent abondamment sur les Acacia horrida, dans les provinces 
de l’est de la Colonie et en Cafrerie. Les cocons sont excessi- 
vement durs, et le fil ne doit s’en détacher qu'avec une très- 
grande difficulté. Mais des échantillons envoyés à Londres ont 
été appréciés comme devantavoir quelque valeur commerciale 
(5 shillings 3 pence la livre, je crois), malgré les nom- 
breuses épines de larve que contiennentles cocons. Il est pro- 
bable que quelques Saturnidæ de Natal et de la Cafrerie 
forment des larves produisant de la soie, mais je n’ai pas con- 
naissance qu'on ait songer à en utiliser aucune jusqu'ici. 

Une espèce de Cochenille est très-abondante sur le Cactus 
opuntia qui aété importé ici, c’estle Coccus Cacti. Comme cette 
plante est presque naturalisée et répandue dans toute la colo- 
nie, que l’insecte parait avoir été introduit accidentellement 
avec elle, et qu’il se propage pariout où la plante elle-même 
se développe, il est plus que probable que la culture de la Go- 
chenille serait irès-profitable si on la propageait sur des éten- 
dues de terrains impropres à la culture agricole. 

Une espèce d'Huitre (Osfrea tuberculata) n’est pas rare 
sur la côte du Cap. Elle est d'assez petite dimension avec une 
écaille fort épaisse; mais son goût est excellent. Mossel-bay est 
l'endroit où elle abonde le plus. — Le White Mossel, Donax 
denticulata ele Mytilus crenatus sont mangés à Cape-town. 


# 


ANIMAUX ET PLANTES UTILES DU CAP DE BONNE-ESPÉRANCE. 51Â7 


Une sorte de Malotis (M. Midæ) et un Turbo (T. sarma- 
ticus) sont abondants à Table-bay où ils sont connus sous le 
nom de X/phost.Ces mollusques n’ont pas mauvais goût ; mais, 
à moins qu'ils ne soient cuits avec soin, ils sont durs et résis- 
tants. 

Les Perles de qualité inférieure sont communes sur Îles 
côtes du sud de la Colonie. Elles sont produites par une va- 
riété du genre Avicula margaritifera. Quelques spécimens 
larges et ronds, colorés d’un rose vif, sont d’une grande 
beauté. 

Les fruits sauvages ne sont pas nombreux. La Groseille à 
Maquereau du Cap (Physalis pubescens) est naturalisée dans 
tout le pays et sert à faire de très-bonnes cenfitures. Divers 
Rubus produisent une sorte de Mûre, et le Kec apple (Pommier 
du kei) (Drospyros) donne un fruit agréable; une Vigne sau- 
vage (Cessus capensis) produit de grosses 2rappes dont on fait 
aussi de fort bonnes conserves. 

De nombreuses plantes sauvages sont utilisées pour la table 
comme légumes; les meilleures sont les Asperges (A. capensis) 
qui poussent en quantité sur le promontoire du Cap. Gette 
plante a un bon goût et la culture en serait profitable. 

Le travail du docteur Pappe intitulé : Floræ capensis me- 
dicæ prodromus, donne toutes les informations désirables sur 
les plantes de l'Afrique australe que l’on peut utiliser en mé- 
deeine. 

Un autre travail du même auteur : Sylva capensis, expose 
en détail la nomenclature des arbres propres aux forêts du 
Cap. à 

Les nombreuses et belles espèces de Gnaphalium, helichry- 
sum et autres fournissent des mortelles qu'on emploie 
en quantité pour des petits objets de décoration. 

Il n'est pas nécessaire de détailler la richesse et la variété 
de la flore du Cap au point de vue de l’ornement; les jardins 
d'Europe doivent à ce riche pays quelques-uns de leurs prin- 
cipaux trésors parmi les arbres, cependant il n’y en a que 
peu de remarquables; le plus frappant est le célébre Arbre 
d'argent (Leucadendron argenteum) sorte de Protée qui ne 


518 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


se trouve que sur le promontoire’ du Cap et dont la culture 
est très-difficile partout ailleurs, même dans les limites de la 
Colonie. 

I est difficile de dire quelles espèces d'animaux et de plantes 
il serait désirable d'introduire ici; les conditions d'existence 
dans PAfrique australe sont spéciales à ce pays et rendent 
toujours douteux le succès de l’acclimatation. Les Daims et les 
Faisans seraient des additions heureuses à notre faune. Ils 
pourraient s’accroître dans les parties boisées de la Colomie, 
mais ils auraient à lutter contre des races ennemies et une sé- 
cheresse de quelques mois. L'introduction d’oiseaux chan- 
ieurs serait aussi désirable, mais ils auraient à défendre leur 
vie contre les attaques des nombreux oiseaux indigènes. Nos 
cours d’eau étant à sec pendant une partie de l’année, l’accli- 
matalion des poissons de rivière y serait impossible. 

E n'y a en ce moment que la Société d'agriculture du cap 
de Bonne-Espérance qui puisse faciliter échange des animaux 
et des plantes entre ce pays et d’autres. Celte société, qui im- 
porte constamment de meilleures variétés d'animaux domes- 
tiques et de plantes cultivées, consentirait peut-être à étendre 
ses opérations aux animaux et aux plantes sauvages. 

Il n’y a à Cape-iown d'autre société que celle qui vient 
d’être désignée. Mais Grahamstown possède une société appe- 
liée: Albany natural History Society, dont le docteur Athers- 
tone est président. Malheureusement, aucune de ces deux so- 
ciétés ne publie de bulletins, quoique les journaux locaux 
contiennent des comptes rendus de leurs séances. 


HT. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX 


DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, 


SÉANCE DU CONSEIL DU 24 AOUT 1874. 


Présidence de M. le D' LABARRAQUE, membre du Conseil. 


Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. 
— M. le Président proclame les noms des membres récem- 
ment admis: 


MM Présentateurs. 

Courex (le général comte de), commandant la Comte d’Éprémesnil. 
subdivision de Vannes, au château de Korn-} A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
er-Houet, par Kolpo (Morbihan). Maure Girard. 

DEvrez (Désiré-Henri-Louis), architecte du gou- ( Henri Bourdon, 
vernement et de la Ville de Paris, 25, rue DE Geofroy Saint-Hilaire. 
ques-Dulud, à Neuiily (Seine). Saint-Yves Ménard. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Dogre (Émile), à Ermont (Seine-et-Oise). { Maurice Girard. 

Henry Mansbendel. 


La : Comte d’Éprémesnil. 
Dussoz (Louis), propriétaire, au château de st-| P 


À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Palarg, par les Quatre-Routes (Lot). | Félix os 


ÿ ; .. (A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
GÉRARD (J. B. J.), notaire, 1, rue Saint-Louis, Maurice Girard 


à Toulon (Var). lpx Turrel 


Comte d’Éprémesnil. 

À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Maurice Girard. 

Joseph Cornély. 

Drouyn de Lhuys. 

À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Comte d'Éprémesnil. 
À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Camille Tollu. 

MépaL {le docteur M. A.), interne des hôpitaux À. Geoffroy Saint-Hilaire. 


GREFFULHE (le vicomte Henri de), 10, rue d’As- 
torg, à Paris. 


Hewri (S. A. R. le Prince des Pays-Bas), au pa- | 
lais de Soestdyk (Pays-Bas). 


MaNpDroOT (Bernard), 29, boulevard Malesherbes, 
à Paris. | 


civils de Bruxelles, hôpital Saint-Jean, à | Maurice Girard. 

Bruxelles (Belgique). Jules Grisard. 

À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Gindre Malherbe, 

Maurice Girard. 


Mayer (Nicolas), interprète-juré, 55, quai des 
Grands-Augustins, à Paris. 


520 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Morier (Gilbert-Francois-Jacques), directeur de {/ Bourdon. 
la Caisse d’épargne, 25, rue Jacques-Dulud, a) Devez. 
Neuilly (Seine). Saint-Yves Ménard. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
< D' H. Labarraque. 
\ Saint-Yves Ménard. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Maurice Girard. 
Ponsard. 
RAVENEAU-HuARD (Théodore), propriétaire, 35, { A. Geoffroy Saint-Hilaire, 
faubourg Saint-Jacques, à Angers (Maine-et-4{ Maurice Girard. 


PAssEROTTE (Ch.), boulevard du Château, 45, 
à Neuilly (Seine). 


PizouT, membre du Conseil général de la 
Marne, 7, place Jussieu, à Paris. 


Loire). E. Leroy. 
RENARD (Edmond), médecin- vétérinaire, à Moy- GORE 
neville, par Revigny (Meuse) AOC 
RE CR ROSES E. Renard. 


RITTATORE (Alphonse-Dominique), directeur depenene Calcagno. 
la filature Barbaroux, à Pancalieri Circondario/ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
di Torino (italie). rues Grisard. 


. { Comte d'Éprémesnil. 
RODELLEG DU Porzic (E. de), au château de Pe-\ + a SR 
.« f nul Has 


zennaü, par Quimper (linistère). | MUC CE 
Mauri irard. 


{ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
| Jules Grisard. 
| A. Maingonnat. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Jules Grisard. 
Maingonnat. 
(os Geoffroy Saint-Hilaire. 
SANS, sous-préfet, à Barbezieux (Gharenle). Ron 
Maurice Girard. 
VAN HEEMSTRA (le baron G.), officier d’ordon-| Joseph Cornély. 
nance de S. M. le Roi des Pays-Bas, à la are Drouyn de Lhuys. 
(Pays-Bas). | A. Geoffroy Saint-Hilaire. 


RONDEAU (Pierre), étudiant en médecine, rue 
Bonaparte, 31, à Paris, 


RONDEAU (Daniel), négociant-commissionnaire, 
28, rue des Petites-Écuries, à Paris. 


— Des remerciments pour leur récente admission sont 
adressés par MM. G. Roy, Ch. Lair et J. Varin. 

— MM. Alf. Dupont, J. de la Perraudière, Barutel, docteur 
Michel, comte de Perrigny, et la Société d’horticulture de 
l'arrondissement d’Étampes demandent à prendre part aux 
cheptels de Ja Société. — Renvoi à la commission spéciale. 

— Des remerciments pour les graines qui leur ont été 
adressées par la Société sont transmis par MM. Rivière, Ghap- 


PROCÈS-VERBAUX. 521 


r. 


pellier, Ch. Huber, Naudin, Denis et les Sociétés d’acclimata- 
tion de Nice et d’horticulture d'Étampes. 

— Des comptes rendus sur l’état de leurs cheptels sont 
adressés par MM. 3. de la Perraudière, docteur Maupied, 
Munier, Bessette, Ribeaud, de Saint-Quentin, Brionval, Séné- 
quier, Genesley, docteur Tenain, J. Clarté, vicomte de Béli- 
zal, René de Semailé, Duchastel, Fremy, Bouchez, D. Billard, 
Durand-Gonon, E. Barutel, de Vernejoul, Ch. Huber, comte 
du Hauvel et P. Gullard. 

— MM. Douglas et Paul Carbonnier adressent leurs remer- 
ciments pour les récompenses qui leur ont été décernées dans 
la dernière séance publique annuelle. 

M. Ch. Bégin fait connaître qu'il vient d'être nommé com- 
mandant supérieur des troupes au Sénégal, et se met à la 
disposition de la Société dans le cas où il pourrait lui être 
utile. 

— Des offres de services sont également faites par M. d. 
Varin pour la Russie, et par MM. Louis Bert et Désiré Lefebvre 
pour l'Amérique. 

—M. le marquis de Pruns, maire de Brassac-les-Mines 
(Puy-de-Dôme), adresse à M. le Président la lettre suivante 
que nous nous empressons de reproduire : « Examinateur des 
écoles primaires de la montagne, où les maitres d'école ont 
de nombreux loisirs, j’ai pensé que le bon vouloir d’un grand 
nombre d’entre eux, qui ne demanderaient pas mieux que 
d'occuper le temps que leur laisse leurs fonctions à l’utile 
réercation de l'acclimatation, pourrait profiter fort utilement 
au but humanitaire poursuivi par notre association. Je viens 
donc vous exprimer ie désir qu'il pût être mis à leur disposi- 
tion un ouvrage d’acelimatation, à très-bas prix, que leurs 
minces émoluments leur permettent d'acheter. Éloignés des 
centres scientifiques, sans guides, ne connaissant de l’accli- 
matation que le nom, il leur est sinon impossible, du moins 
bien difficile de tenter rien de sérieux; et pourtant leur imi- 
tative, la considération dont ils jouissent, presque leur auto- 
rilé morale sur nos paysans, pourraient en faire d'utiles 
ouvriers pour la marche prospère de notre Société. Leur 


529 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


initiative éclairée par vous, messieurs, pourrait rendre d'im- 
portants services en engageant les populations laborieuses 
des champs à avoir de bons reproducteurs en volaille, et 
à tenter dans nos montagnes l'élève plus en grand, soit de la 
Pintade, Dindons d'Amérique et autres volailles. 

» J'ai donc l'honneur, monsieur le Président, de vous 
demander, qu'à la prochaine réunion, il soit émis le vœu que 
la Société d’acclimatation donne à des prix plus modérés aux 
insituteurs, les ouvrages qu'elle jugera convenables pour 
servir de guide à ces modestes pionniers de l'instruction 
populaire. 

» Qu'il soit donné également aux prix les plus modestes, 
soit aux bibliothèques communales et scolaires, soit encore 
aux instituteurs dans les mêmes conditions, des ouvrages 
sur la protection des animaux, oiseaux et autres animaux 
utiles, et sur ceux qui sont à détruire. 

» Je serais très-fier, M. le Président, que vous voulussiez bien 
vous associer à celte pensée, que je crois très-utile, et la pré- 
senter avec la juste autorité que vous avez dans notre Société.» 

— M. E. Barutel adresse une note sur les Dindons sauvages 
qu’il tient en cheptel de la Société. 

— M. A. Vailly remercie de l'envoi qui lui à été fait de 
cocons d'A. Cynthia, et sollicite l’envoi de diverses autres 
espèces de vers à sole. 

— M. le Directeur du Jardin d’acclimatation transmet l’ex- 
irait suivant d’une lettre qui lui est adressée par M. Mairet, 
faisandier au château de Ferrières (Seine-et-Marne) : «M. Cor- 
nély (de Tours), dans une lettre qu’il m'a adressée dernière- 
ment en parlant des Talégalles, me disait que la production 
en volière était chose impossible. Je serais heureux si un Fran- 
çais était le premier qui vous annoñcât qu'il a ramassé ces 
jours derniers trois jeunes nés en volière. Comme il y a encore 
des œufs, j'ai l'espoir que les éclosions continueront. 

» Parmi la production des Faisans rares, j'ai obtenu des 
Amherst purs, Amherst demi-sang, vénérés, versicolores et 
Swinhoë. J'ai également des produits d’une femelle Colombe 
poignardée, et d’un chiffre assez rond. » 


PROCÈS-VERBAUX. D925 


— M. le marquis d’'Hervey de Saint-Denys, écrit du châ- 
teau de Bréau, par Ablis (Seine-et-Oise) : «Je viens vous 
donner aujourd’hui quelques nouvelles des animaux qui m'ont 
été confiés en cheptel, à savoir : quatre Talégalles et deux 
Gochons-Cerfs. 

» Les Cochons-Cerfs se portent à merveille; c'est tout ce que 
je pouvais désirer pour cette année, puisque le mâle qui m’a 
été remis n'était pas enccre adulte. Tandis qu’on réparait 
une brèche aux murs du pare le mois dernier, j'ai fait enfer- 
mer ces animaux dans une enceinte, et je dois dire qu'ils se 
sont montrés moins discrets que l’année dernière à l'égard 
des arbustes. J'ai eu cependant l’occasion de remarquer un 
petit fait que je vous signalerai en passant, parce que le Jar- 
din d’acclimatation pourrait, au besoin, en faire son profit. 
Dans l'enceinte où les Gochons-Cerfs furent enfermés se trou- 
vaient plusieurs pieds de Phytolacca ou raisin d'Amérique, 
plante d'ornement qui produit des touffes d’un très -bel effet. 
Or, ces pieds de Phytolacca n’ont pas reçu un coup de dents, 
et sont demeurés parfaitement intacts. Il me paraît probable 
que les animaux des espèces voisines du Cochon-Gerf les 
respecieraient de même. Ce serait done une plante qu'on 
pourrait cultiver à l’intérieur des enceintes sans inconvé- 
nient. 

» Pour ce qui est des Talégalles, je ne vous cacherai pas 
que je suis vraiment désespéré. S'ils s'étaient sauvés, s’ils 
étaient morts, s'ils avaient été dévorés par les bêtes fauves, 
j'en aurais certainement du regret, mais ce ne serait pas ce 
regret violent que j'éprouve en voyant que pas un des oiseaux 
n'a quillé le parc, que pas un accident ne leur est arrivé, 
qu'ils sont devenus tout à fait sauvages au point d’avoir passé 
l'hiver sans qu’il fût besoin de leur donner à manger, qu’ils 
élèvent des nids à qui mieux mieux, en un mot qu'ils se trou- 
vent dans les meilleurs conditions d’acclimatation imaginables, 
et que cependant tout cela demeure inutile, par suite de cette 
étrange mauvaise chance de n'avoir pas reçu une seule fe- 
melle..…… 

».… D’après ce que j'ai lu dans le Bulletin sur les Talégalles, 


524 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


et d'après ce que j'ai pu observer moi-même de la part du 
maître Coq s’il en fut, dont je vous ai raconté les exploits l’an- 
née dernière, ce sont les mâles qui construisent les nids. Or 
tous les oiseaux que j'ai ici se livrent du matin au soir et iso- 
lémenit à cet exercice. Ils en élèvent partout, le long des allées 
et dans le bois. Nous en connaissons déjà sept, parmi lesquels 
il en est un que je viens de mesurer, et qui n’a pas moins de 
4 mêtre 64 centimètres de hauteur sur 11 mètres 80 centi- 
mètres de circonférence à la base ! 

» Franchementn’est-ce pas désolant de voir un pareil travail 
accompli en pure perte ! Mais comment en espérerais-je quel- 
que chose de bon ? 

» Quant à l’observation que tous les oiseaux font des nids se 
joint cette autre observation, qu’ils ne sont jamais ensemble et 
qu'ils ne se rencontrent point sans se battre et se poursuivre 
comme des furieux. Quelque bizarrerie que l’on puisse sup- 
poser dans la facon dont les coqs Talégalles manifesteraient 
leurs empressements aux poules de leur espèce, il est difricile 
d'imaginer que leurs rapprochements aient de pareils préli- 
minaires. 

» Je vous disais tout à l'heure que sept nids ont élé recon- 
nus (sans compter ceux que l’on n’a pas encore aperçus et qui 
existent peut-être); tous ces nids ont été construits par éroës 
des Talégalles, car le quatrième est enfermé dans une volère. 
Ce quatrième c’est le terrible batailleur qui mettait le désordre 
dans tous les poulaillers. Il s'était domestiqué complétement, 
n'allait presque plus dans le parc, attaquait lous les coqs, 
poursuivait toutes les poules et faisait le désespoir des filles 
de basse-cour. Dans un de ses combats contre un paon, ilavait 
perdu une de ses griffes. Je n'avais nul besoin de lui puisque 
J'étais certain d’avoir au moins un autre coq. Je l'a donc 
interné en lui donnant une demi-douzaine de poules ordinaires 
pour compagnie, attention à laquelle il se montre d’ailleurs 
trés-sensible. Je fais renouveler ces poules de temps en temps 
et leurs œufs sont recueillis soigneusement pour être couvés. 
Jusqu'ici les résultats sont négalifs, mais s’il est bien constaté 
que l’accouplement du Talégalle et de la Poule ordinaire 


PROCÈS-VERBAUX. 525 


demeure absolument stérile, ce sera toujours une observation 
acquise... 

».…… Il est évident que mon parc convient admirablement à 
ces animaux sous tous les rapports, puisqu'ils ne cherchent 
pas à en sortir, bien que leur vol leur permette de s'élever 
très-haut. Si j'avais eu dès le début une paire bien assortie, 
la multiplication se fût opérée dans les conditions les plus 
favorables, et grâce aux murs qui eussent retenu les petits 
tant qu'ils n'auraient pas eu des ailes complétement poussées, 
j'aurais pu en attraper plusieurs et vous les envoyer comme 
produits du cheptel qui m’a été concédé. » 

— M. le capitaine Crépu écrit de Tiaret (Algérie) : « Dans 
une lettre que j'ai eu l’honneur de vous écrire au mois d'avril 
dernier, je vous ai fait part des résultats que je venais d’ob- 
tenir à cette époque pour mes reproductions d’Autruches, et 
je vous anncnçais une seconde couvée de onze œufs dont 
j'avais bon espoir, malgré la jeunesse du couveur qui prenait 
seulement ses quatre ans. 

» Je n'ai pas été déçu, car après avoir couvé quarante-six 
jours avec une assiduité des plus remarquables, cet oiseau 
m'a donné trois éclosions. Un mois après la naissance de ces 
jeunes Autruches, une d'elles, qui était demeurée faible et 
chétive, est morte. Mais les deux autres étaient devenues ma- 
onifiques et presque aussi fortes que celles qui étaient nées 
un mois plus tôt. Aussi, craignant de voir se produire les 
accidents qui, en 4873, m'ont privé de mes deux premiers pro- 
duits, j ai séparé de leurs parents mes six Autruchons et je les 
ai mis dans une cour à part, où ils croissent à vue d'œil et se 
familiarisent comme de jeunes poulets. Ils entrent dans les 
chambres et en sortent, viennent quand on les appelle cet 
suivent jusque dans les champs la personne qui est chargée 
de leur donner des soins. 

» Maintenant que vous connaissez le résultat final de mes 
essais de l’année, permettez-moi de mettre sous vos yeux 
quelques chiffres qui feront mieux ressortir les difficultés de 
la reproduction de ces grands oiseaux. 

» Les quatre couples que je possède sont répartis de la ma- 


526 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


nière sûivante. En regard de chacun d’eux je mets ce qu'il a 
produit : 

» 1° Un mâle de six ans et une femelle de cinq ans : néant. 

» 2 Un mâle de quatre ans et une femelle de six ans : 13 œufs, 
14 couvées, 3 éclosions. 

» 3° Un mâle de six ans et une femelle de neuf ans : 27 œufs. 


Â7 couvées, 5 éclosions. 

» Résultat final, sur 65 œufs : 8 éclosions, 6 produits vivants. 

» À quoi attribuer un aussi mince résultat? les deux mâles, 
couples 1 et 3, ayant déjà couvé, et l’un d’eux ayant eu des 
petits en 4873. L'expérience seule pourra me donner plus 
tard l'explication de cet insuccès. Tout ce que j'ai pu consta- 
ter cette année, c’est qu’en dehors des 8 éclosions tous les 
œufs qui ont élé couvés sont demeurés clairs. 

» Je crois vous avoir dit dans une de mes précédentes lettres 
que j'espérais avoir découvert le moyen de distinguer les sexes 
chez les Autruchons d’un à deux mois. Pour m’assurer de lexac- 
titude de mes observations, je fais marquer dès aujourd’hui 
les bêtes que je présume être des mâles. Plus tard j'aurai l'hon- 
neur de vous faire connaître si je ne me suis point trompé 
dans mes appréciations. » 

— M. Brierre, de Saint-Hilaire-de-Riez (Vendée), adresse 
un plan des travaux exécutés par lui, de 1871 à 1874, pour la 
transformation des marais salants de sa grande marchaussée. 

— M. Carbonnier écrit à M. le Président la lettre suivante : 
« Je suis heureux de vous faire connaître trois nouveaux 
succès dans l’importation de poissons exotiques. 

» Le premier envoi se compose de quarante-quatre Anabas 
recueillis dans les eaux de Calcutta par M. Paul Carbonnier, et 
qu'il a rapportés à Galles sans aucune perte. Confiés alors aux 
soins de M. Ozias, deuxième mécanicien à bord de l’Æooqly, 
quarante-deux de ces poissons me sont arrivés vivants; il ne 
m'en est mort qu'un depuis. Dans sa lettre, M. Paul Carbon- 
aier m'écrit qu’on rencontre souvent ces poissons, par bandes 
nombreuses, à plusieurs centaines de mètres des cours d’eau, 
rampant sur le sol,et effectuant ainsi des voyages terrestres. 


PROCÈS-VERBAUX. Lo! 


Certains voyageurs ont même prétendu que ces poissons grim- 
paient sur les arbres; ceci est à vérifier. Néanmoins, sur le 
sol, ils exécutent des marches fort singulières : la partie pos- 
térieure du corps et la queue font une succession de mouve- 
ments, dont la conséquence a pour but de rejeter le corps en 
avant, et comme ses énormes opercules, ouverts en ce mo- 
ments, sont armés à leur base de fortes dentelures acérées, 
ces parties s’implantent fortement sur le sol et empêchent 
tout recul; les deux nageoires pectorales lui servent à main- 
tenir son équilibre; les phoques ne rampent pas mieux. Mais 
ce qu'il y a de plus remarquable dans ces poissons, c'est leur 
mode de respiration, qui paraît être uniquement aérienne. 
Dans l’eau, leur bouche est presque close et ne s'ouvre que 
pour manger; les opercules sont immobiles, une mince mem- 
brane iapissant l’intérieur de cet organe s’agite légèrement, 
le poisson saute à chaque instant à la surface pour renouveler 
les bulles d’air de ses cellules pharyngiennes et en faire une 
nouvelle provision ; en cela il se comporte comme le Gourami, 
le Macropode et l’Arc-en-Giel, mode de respiration que j'ai 
fait connaître à l’Académie des sciences dans une note de 
février 1874. L’Anabas est un poisson qui atteint le poids de 
L à 500 grammes; il est trés-délicat à manger. Aux Indes, les 
naturels accordent à sa chair plusieurs vertus. 

» M. Gaston Bordas, deuxième mécanicien à bord de l’Ava, 
rapporta de la Chine l'an dernier trois poissons télescopes, et 
voulant mériter la faveur dont plusieurs de ses collègues ont 
été l’objet de la part de la Société d’acclimatation, 1l m’écrivit 
au mois de mars dernier pour me faire ses offres de services, 
et avoir quelques indications sur les poissons de la Chine qu’il 
y aurait intérêt à introduire en France. Je lui recommandai 
le poisson domestique chinois que l’on trouve à Shang-Haï, 
puis ce ravissant petit poisson combattant de notre colonie de 
Cochinchine. M. Bordas n’a pu se procurer les poissons de 
Shang-Haï, il aurait faliu faire 60 kilomètres dans les terres, 
et son service ne le lui permettait pas; mais il a recommandé 
qu’on les lui prépare pour le prochain passage de l’Ava. En 
revanche, en passant à Saïgon il a fait une provision de pois- 


528 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


sons combattants et a réussi à en ramener cinquante à Mar- 
seille. Quarante-six m'ont été envoyés. Les nageoires et toutes 
les parties du corps, altérées par un aussi long voyage, se 
sont bien rétablies, et maintenant ils se portent tous bien. 

» Ces poissons, à os pharyngiens labyrinthiformes, ontla vie 
très-dure, et peuvent vivre hors de l’eau plusieurs heures sans 
mourir. [ls sont aussi très-amusants : il suffit d’en choisir deux, 
les plus foncés en couleurs, puis de les mettre chacun sépa- 
rément dans un verre ou dans un flacon bien transparent. 
Rapprochant les flacons l’un contre l’autre, on voit les pois- 
sons s’observer d’abord, changer de couleur, devenir presque 
noirs, les opercules des ouies se renversent et forment autour 
de la tête une collerette du plus joli effet ; la queue et les na- 
geoires prennent un aspect phosphorescent, ainsi que les 
veux, et se nuancent des plus vives couleurs. Ils cherchent 
alors à se précipiter lun sur l’autre, mais les paroïs du verre 
les arrètent. Lorsqu'on juge leur colère arrivée à son pa- 
roxysme, on les transvase dans le même bocal; on voit aus- 
sitôt le combat s'engager à coup de queue et de nageoires, 
jusqu’à ce que le vainqueur poursuive le vaincu, qui cherche 
alors son salut dans la fuite et redevient d’un blanc grisâtre ; 
il arrive souvent qu'éperdu 1l saute par l’orifice du flacon. 
J'ai cru prudent de ne pas pousser l'expérience plus loin, vou- 
lant simplement vérifier si ces divers moyens de récréation 
pratiqués par les Annamites élaient exacts. 

» La troisième introduction a été faite au point de vue expé- 
rimental. Vingt-deux Anabas et six Gouramis ont été rapportés 
de Calcutta à Galles par M. Paul Carbonnier, et ils m’ont été 
expédiés de ce dernier lieu dans un récipient transparent; 
l’ezu n’a pas été changée en route et personne ne s’est occupé 
de les soigner. Dix Anabas et trois Gouramis sont arrivés vi- 
vants à Marseille le 1° août ; dans le même vase se trouvaient 
les squelettes de ceux qui étaient morts en route. Ce succès 
a son importance, attendu qu’il donne la preuve que tous les 
poissons appartenant au groupe des Pharvngiens labyrimihi- 
formes peuvent se dispenser de prendre dans le milieu am- 
biant l'oxygène nécessaire à leur respiration, et le puiser 


PROCÈS-VERLBAUX. 529 


durant un certain temps directement dans l'atmosphère. 
Ceux qui sont morts dans le trajet de Galles à Marseille sont 
probablement morts de faim. Le portrait que m’en fait notre 
précieux correspondant à Marseille, M. Chevalier, m'en donne 
la certitude. 

» Je ne terminerai pas sans remercier notre respectable 
Président pour sa bienveillante intervention auprès de la Com- 
pagnie Paris-Lyon-Méditerranée. Le chef de l’exploitation de 
cette Société nous a accordé l'autorisation de faire voyager 
par les trains rapides, jusqu’à concurrence de 400 kilogram- 
mes, tous les colis de poissons vivants qui nous sont adressés 
par M. Chevalier, et comme M. Chevalier est l'agent direct 
des mécaniciens des paquebots des Messageries maritimes, à 
arrivée de chaque navire il se rend à bord, prodigue les 
premiers soins aux poissons qui nous sont destinés, et nous 
les expédie tout de suite; aussi dans ses trois derniers envois 
n'ai-je eu à constater aucun décès ». 

— M. Duchesne de Bellecourt, ccnsul de France à Batavia, 
informe la Société de l'envoi fait par M. Henry Rozy d'une 
caisse de plantes diverses, savoir : deux Cocotiers verts, deux 
arbres de Boua-nonna, Vingt-huit arbres de Tjenkoudou ou 
bois de teinture, six arbres de Katepenqg Badak. 

Cet envoi est accompagné de la note suivante : « Le Coco- 
tier vert donne des cocos verts dont l’eau esl très-Gouce et 
très-fraiche. 

» L'arbre de Nonna donne d'excellents fruits ; le bois est 
très-solide et très-souple ; les indigènes s’en servent ici, quand 
l'arbre est vieux et ne donne plus de fruits, pour faire des 
cercles de roues et des cerceaux de barriques. 

» Les racines du Tjenkoudou sont longues et grosses, et 
elles donnent une belle teinture rouge ; les indigènes les em- 
ploient pou? teindre leurs sarongs et autres habillements. 

» Le Katepenq Badak est une plante médicinale ; les indi- 
gènes se servent du jus de ses feuilles comme purgalion; c’est 
un purgatif à la foisdoux et?efficace ; de plus, les indigènes 
usent de ses feuilles pour guérir les maladies de peau et toute 
espèce de démangeaisons. 

3C SÉRIE, T. |. — Août 1874. 3! 


530 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


» Comme cette plante offre de très-crands avantages à la 
médecine, je pense bien que messieurs les docteurs ne res- 
teront pas en arrière pour faire les expériences nécessaires. 

» À cet effet, si les résultais obtenus sont favorables, je 
m engage à leur envoyer, en outre, des plantes de Xctepeng, 
des feuilles sèches et des graines pour en multiplier la plan- 
taüon en France. » 

Deux Cocotiers seulement sont arrivés en assez bon état; la 
caisse ne paraissait pas avoir contenu d’autres plantes. 

— M. le Directeur du Jardin d’acclimatation communique 
la letire suivante, qui lui est adressée par M. Delchevalerie : 
« J'avais oublié lors de l'entretien que j'ai eu lPhonneur 
d'avoir ces jours derniers avec vous de vous offrir une petite 
plante que j'ai apportée d'Égypte, et qui conviendrait pour 
faire des gazons résistant au soleil et à la sécheresse dans le 
midi de la France, notamment dans votre futur jardin d’accli- 
matation de Cannes. C’est le Lippia Æqyptiaca, Delch., plante 
nouvelle trouvée par moi à l’état spontané sur la lisière du 
désert d'Alexandrie il v a six ans. J'ai emporté au Caire des 
boutures de cette petite plante en 1869, et depuis cette époque 
elle fut propagée avec tant de rapidité, qu'aujourd'hui elle 
forme les pelouses et les gazons d'ornement de tous les jar- 
dins de l'Égypte, résistant au soleil et à la sécheresse là où 
les Graminées ne pourraient prospérer, le Lisma Æqyptraca 
est infiniment supérieur au Lippra repens, déjà cultivé dans 
les jardins du midi de la France. Le Lippia repens donne 
dans le Midi un feuillage microphylle et des petites ramifi- 
cations s’étalant sur la terre et fleurissant beaucoup trop, ce 
qui est nuisible aux fleurs plantées en corbeilles ou autour des 
massifs sur les pelouses ; tandis que le Lippia Ægyptiaca, 
d’une végétation infiniment plus vigoureuse, s'étale moins sur 
la terre, atteint jusqu'à 10 centimètres de hauteur et n’a 
jamais besoin d’être fauché. Il est d'un beau vert pendant 
toute l’année, ne fleurit presque pas, et les corbeilles de fleurs 
disposées sur des gazons de ce nouveau Lippia font plus d'ef 
fet et ressortent beaucoup mieux que celles que l’on étabhi 
sur des pelouses de l’ancien Lippia repens fleurissant beau- 
coup trop, et dont le feuillage, excessivement fin dans les pays 


PROCÈS-VERPAUX. 531 


chauds, s’étale trop sur la terre et ne donne qu'une mauvaise 
verdure d’un aspect grisâtre. Je tiendrai volontiers à votre 
disposition quelques plantes de ce nouveau Zippia, et en les 
plaçant dans de bonnes mains. vous pourrez en avoir de 
orandes surfaces gazonnées en peu de temps, car il se mul- 
tiplie très-facilement de boutures et de graines. » 

— M. Durieu de Maisonneuve, en remerciant d’une collec- 
tion de semences de végétaux qui lui à été adressée, ajoute : 
« Parmi les neuf sortes de graines que je reçois, j’apprécie 
particulièrement celles d’un Vefis qui n'existe pas dans nos 
cultures, bien que les graines de ce Vatis antarctica parais- 
sent appartenir plutôt à un Cessus qu’à un vrai Prés. 

» Naturellement je m'atiache à la question qui préoccupe à 
un si haut degré les contrées vinicoles, mais seulement dans 
le cercle de ma spécialité de jardinier. Profondément con- 
vaincu que la recherche des remèdes directs a fait son temps, 
je pense qu’il faut chercher le salut ailleurs. Sans rien pré- 
juger de ce que nous réserve l'avenir, je me borne, quant à 
présent, à étudier le plus ou moins de résistance des espèces 
nord-américaines aux atteintes du Phylloxera. J'élève de semis 
la plupart de ces cépages, isolés dans des pots, et soumets 
chaque espèce à l’épreuve du PAylloxera. Déjà j'ai pu con- 
stater que certaines de ces espèces (Waris monticola, Buckl., 
et Vois Lincacumu, Buckl.), réputées indemnes, accueillent 
parfaitement le puceron. Par contre, j'ai l'espoir, si j'obtiens 
cetie année la confirmation de mes expériences, que les deux 
espèces dont la vigueur est la plus puissante seront, comme 
les viticulteurs américains l’ont déjà annoncé, complétement 
indemnes : ce sont Vatis rotundifolia, Mich. (Scuppernong 
des Américains) et Varis candicans Engel. (Mustang). Si l'Eu- 
rope n'a rien à attendre des produits de ces deux vigoureuses 
espèces, ne pourraient-elles un jour servir de porte-greffes ? » 

— M. Théodore Pavie, de Chazé-sur-Argos (Maine-et- 
Loire) adresse les renseignements suivants sur ses cultures de 
divers végétaux : « Vers la fin de mars, M. Ch. de la Brosse- 
Flavignv, notre confrère, a eu l’obligeance de me remettre 
quelques graines de Zapallito qu 1l avait reçues de la Société 
d’acclimatation. 


RÉ Rs DR D 2 


592 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATIOZ. 


» Le 44 avril, j’en ai semé quatre ; trois dans de petits pots, 
le quatrième en pleine terre. Ce dernier a été recouvert d’une 
cloche et les autres mis sous bache. Le 23 et le 24 du même 
mois ils étaient tous levés. Quinze jours après, je faisais repi- 
quer les trois semis en pot à côté de l’autre, à un mètre de 
distance, non dans le potager, pour éviter l'hybridation, mais 
à l'angle d’une pelouse, dans une terre meuble, bien préparée 
et fumée comme pour recevoir des fleurs. 

» Ces Zapallito n’ont pas tardé à végéter vigoureusement, 
malgré la saison froide et sèche. Pendant une parüe du mois 
de mai, il fallut les recouvrir d’une cloche, à cause des gelées 
persistantes, et les arroser un peu, les pluies étant trop rares. 
Ils ont fleuri à merveille; beaucoup de fruits se sont formés 
et ont grossi à vue d'œil. Enfin, le 20 juillet il y en avait trois 
qui mesuralent de 35 à 40 centimètres de cireonférence. 

» Étant sur le point de m’absenter pour trois semaines, j'ai 
voulu goûter de ce Cucurbitacé sous sa première forme, d'après 
les indications fournies par M. Balcarce. Ce même jour, 20 juil- 
let, j'ai cueillt le plus gros et l’ai fait préparer exactement 
comme les Aubergines. Le succès a été complet; ce mets a été 
trouvé vraiment excellent. La chair est fondante, succulente 
et d'un goût savoureux. Je me propose de les essaver sueces- 
sivement, et selon les époques, en salade comme les concom- 
pres, en légumes de pot au feu et en purée. 

» Il y a quelques années, on m'a remis des graines d'un 
Potiron dit de Bordeaux, couleur jaune pâle à l’intérieur, de 
grosseur moyenne, à la peau presque unie et donnant beau- 
coup; la chair en est fortement sucrée, très-fine et supérieure 
à celle de la grosse Citrouille. Je crois que c’est le Potiron 
d'Espagne. Toutes les personnes qui l’ont goûté se sont em- 
pressées d’en adopter la culture. 

» L'an dernier, à Saint-Nazaire, il m'a été donné une poignée 
de Haricots 2o2rs, sous le nom de Pois du Mexique. Semés 
le 24 juin, ils étaient levés sept jours après. Le feuillage en 
est foncé ; 1ls rameni un peu, poussent vigoureusement et pro- 
duisent des Haricots succculents, couleur de chocolat quand 
ils sont réduits en purée. C’est une espèce qui, je crois, mé- 
rite d’être cultivée. [1 v a aussi une espèce de Ilaricots très- 


PROCÈS-VERBAUX. 533 


bons en vert et en sec, jaunes, presque ronds, à ombilic noir, 
dont je me procure la graine à Saint-Servan (Ille-et-Vilaine). 
Ils cuisent en très-peu de temps et la purée en est supérieure 
à celle des autres Haricots. Tous les fermiers m’en ont de- 
mandé, et ils en ont dans leurs jardins. On les nomme en 
Bretagne Pois à la crème, et on les a apportés du Canada. Ce 
sont probablement les Haricots de Chine, indiqués: dans tous 
les livres ; mais la graine que je prends à Saint-Servan m’a 
toujours paru plus franche et préférable à celle que je trouve 
chez les jardiniers de notre pays. 

» [ia été question dans les Bulletins de la Société d’une pe- 
tite Tomate mexicaine, qui a goût de citron; c’est une Solanée 
connue ici depuis bien longtemps sous le nom vulgaire de 
Coqueret ; depuis plus de quarante ans on la cultive dans ma 
famiile. Cette plante se sème d'elle-même, et on la traite ab- 
solument comme les Tomates. Quand le feuit est devenu bien 
jaune on peut le manger cru, et il est d’une saveur assez 
agréable, relevée d’un parfum de citron qui plaît. Un de mes 
amis qui habite près d'Alger m’ayant conseillé d’en faire des 
taries (comme en Angleterre, avec des groseilles à peine 
muüres), jai suivi son avis et men suis bien trouvé. Depuis 
octobre jusqu’en décembre, quand l'automne n’est ni trop 
pluvieux, ni trop froid, on peut confectionner jusqu’à dix ou 
douze de ces tartes, qui sont fort appréciées de ceux qui les 
goütent.… 

» .… Dans notre arrondissement de Segré, le moins hâtif 
et par conséquent le moins chaud de Maine-et-Loire, les 
arbres et arbustes étrangers qui s’acclimatent le mieux sont 
ceux qui viennent de la Californie : le Sequoia giqantea, et le 
Taxodier; du Chili et de Chiloe : les Vinetiers Dariwinii, — à 
fleurs jaunes et paraissant au premier printemps, — à longues 
épines, plus grands, plus vigoureux, se couvrant de fruits 
blancs ; du Japon et de la Chine : Ærobotrya, Mahonia de 
Fortune; du Nepaul : le Cedrus Deodara (j'en ai un qui m’a 
donné l’an passé deux cônes énormes), l’Alisier (Cratæqus 
Nepalensis) aux larges feuilles drapées de blanc; enfin je ci- 
terai aussi le Diospyros, dont les baies sont fort bonnes à 
manger quand la gelée a passé dessus. Les Chênes verts 


53! SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


d'Amérique et les Chênes liéges, un peu abrités, supportant 
bien nos hivers. Nul doute que le Chamaærops ercelsa ne réus- 
sisse aux environs d'Angers. Dans la gare d’Ancenis, sur le bord 
de la Loire, à dix lieues de Nantes, on en voit un fort remar- 
quable, haut de 3 à 4 mètres et d’une magnifique végétation. 

» J’ai semé aussi quelques graines de Melon arabe, que je 
devais à lobligeance de M. de la Brosse-Flavigny. Une seule 
a levé; beaucoup de fleurs et de fruits qui commencent à se 
nouer, port élégant et végétation vigoureuse. » 

— La Société centrale d’apiculture et d’insectologie géné- 
rale fait parvenir le programme de son exposition, qu’elle doit 
ouvrir en septembre prochain dans l’orangerie des Tuileries, 
à Paris. Queiques cartes d’entrée sont jointes à cet envoi. — 
Remerciments. 

Il a été déposé sur le bureau : 

1° Mémoire sur la reproduction du Phylloxera du Chêne, 
par M. Balbiani, broch. in-h°. (Extrait des Mémoires présentés 
par divers savants à l'Académie des Sciences, 1874.) 

2 Mémoire sur la maladie de la Vigne et sur son traite- 
ment par le procédé de la submersion, par M. Louis Faucon, 
broch. in-h°. (Extrait des Mémovres présentés par divers 
savants à l’Académie des Sciences, 1874.) 

3° Rapport sur les mesures administratives à prendre pour 
préserver les territoires menacés par le Phylloxera, broch. 
in-/4°. (Extrait des Comptes rendus de l’Acad. des sc., 187h.) 

4° Mémoire sur les moyens de combattre l'invasion du Phyl- 
loxera, par M. Dumas, broch. in-4°. (Extrait des Comptes 
rendus de l’Académie des Sciences, 187.) 

5° Cours pratique d’apiculture, k° édition. Offert par l’au- 
teur, M. Hamet, 1 vol. im-12. 

6 Æistoire naturelle des poissons du bassin du Léman. Of- 
fert par l’auteur, M. Godefroy-Lunel, 1 vol. in-fol., planches. 

7° Nouvelles études sur les Quinquinas. Offert par l'auteur, 
M. 3. Triana, 1 vol. in-fol., planches. 

Remerciments aux donateurs. 


Le Secrétaire du Conseil, 
MAURICE-GIRARD. 


IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 


Emploi du gland pour la nourriture des Faïisans. 


Extrait d'une lettre adressée à Monsieur le Président de la Société 
d’acclimatation, par M. le D' H. MOREAU. 


Depuis que le Bulletin a publié ma lettre du 2 juin dernier, relative à la 
nourriture des oiseaux de volière, particulièrement du Faisan, par le gland 
de chêne et autres graines sauvages jusqu'ici négligées et inusitées, je recois 
de plusieurs de mes honorables collègues de diverses contrées des demandes 
de renseignements que je crois plus utile et plus commode de vous trans- 
mettre peur en donner communication à la Société d’acclimatation, et, si 
vous le jugez convenable, pour que vous en fassiez la mention dans le 
prochain Bulletin afin que tous mes collègues soient à même de trouver la 
réponse aux demandes que chacun pourrait m'adresser ; je tâcherai de ré- 
pondre à toutes les questions qui m'ont déjà été posées ou que je peux pré- 
vcie. 

Mon expérience, je dois le dire avant'tout, est complétement neuve; elle 
est d’hier, en quelque sorte. Il faut donc le contrôle d’un essai prolongé, 
auquel je convie tous les éleveurs. Quoique je n’aie jamais fait l’analyse 
chimique du gland, je sais, comme tout le monde, qu’il contient une fécuie 
abondante et serrée, du tannin éminemment astringent et antiseptique, un 
principe amer, etc. J'ai donc, à priori, considéré la fécule comme devant 
être la substance alibile pour l’animal qui se nourrit de glands, le tannin 
comme un agent de préservation contre certaines maladies (le dévoiement 
fréquent chez nos oiseaux de volière, les vers intestinaux, elc.), et le prin- 
cipe amer comme un excitant de la digestion. J’ai souvent remarqué que les 
oiseaux sauvages, notamment les pigeons ramiers, les canards, dont j’ai vu 
parfois le jabot littéralement plein de glands, devenaient bien plus nom- 
breux dans notre bocage lorsque les glands étaient abondanis ; que ces 
fruits étaient pour eux une sorte d’attrait el un grenier d’abondance pen- 
dant l'hiver, et qu’ils étaient alors très-gras et très-bons. Pourquoi, d’après 
ces remarques, ne pas songer à utiliser le gland qui se perd inutilement 
tous les ans sur nos sillons, pour nourrir avantageusement nos oiseaux de 
volière soumis à l’acclimatation ou à la domestication, mais sauvages par 
leur nature et leur origine ? Le choix, pour eux, d’une nourriture qui leur 
est naturelle à l’état de liberté, qui doit par conséquent leur être agréable, 
profitable et surtout hygiénique, en même temps qu’elle est économique, a 
donc toute raison d’être adopté. 

Conduit à ces réflexions par l'observation, le raisonnement et beaucoup 
aussi par la nécessité de réduire mes dépenses d'élevage et d’entretien, j'ai 
donc essayé dès l’année 1870-71, féconde en glands, d’en nourrir mes 
oiseaux. La cherté des grains pendant 1873-1874 m'a engagé à utiliser et 


536 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


renouveler mon expérience antérieure : j'en ai déjà exposé le résultat, et 
j'ai cru devoir le faire dans l'intérêt général, espérant que j'aurai des imita- 
teurs pouvant faire même mieux que moi et qui viendront corroborer mon 
assertion et améliorer ma pratique. 
Les glands, cetle année, sont d’une abondance inouïe. Je n'ai que quel- 
ques mètres à parCourir pour cueillir, au premier chêne venu, autant de 
glands que je veux. Je m'amuse déjà à jeter à mes jeunes élèves des glands 
nouveaux, que je coupe avec mon couteau. Tous ces jeunes friands se préci- 
pitent sur ce qui tombe devant eux : le gland, qui est encore loin de sa ma- 
turité, est plus amer qu'il ne le sera plus tard; aussi Ces animaux saisissant 
un quariier de gland qui leur tombe semblent décontenancés par son amer- 
tume, ils le rejettent, se secouent la tête et se délournent; mais une sorte 
d’aitrait les y ramène : ils becquètent de nouveau le morceau qu'ils ont 
abandonné, se le disputent, finissent par détacher la partie pulpeuse de l’é- 
corce, et, après une déglutition longiemps hésitante, manifestent une cer- 
taine satisfaction. Ils ne tardent pas à rechercher un autre quartier et re- 
nouvellent le même manége. Au bout de quelque temps, je remarque que 
les glands coupés que j’ai jetés au travers de la volière n’ont plus que leur 
écorce épaisse et verte. Cela prouve donc, selon moi, l'appétit instinctif des 
Faisans pour ces fruits sauvages, qui sont en ce moment d’ane amertume 
excessive, et que ces oiseaux avalent quand même, reconnaissant sans 


x 


doute une qualité convenable à cet aliment d’une sapidiié pourlant peu 
agréable à leur goût. Et j'ajoute que rien ne manque à la nourriture de 
mes élèves, et qu'ils sont constamment pourvus des aliments ordinaires et 
choisis pour l'élevage. 

Je me suis souvent fait une auire réflexion et j'invite d’autres éleveurs 
plus fortunés et mieux outillés que moi à en tenter l’expérience. J'ai Ja con- 
viction que le gland, séché à l’époque de sa maturité et réduit en farine 
serait une excellente pâture pour l'élevage des jeunes et que, incorporée 
dans les diverses sortes de pâtées que chacun faconne de son mieux, celte 
farine serait très-nourrissante pour les jeunes oiseaux et pourrait les préser- 
ver de bien des maladies qui nous font si souvent éprouver des déceptions 
et presque des chagrins. En outre le gland conservé sec et réduit en farine 
pendant les années d’abondance deviendrait une réserve alimentaire pré- 
cieuse pendant les années de disette. 

Les premières fois que je donne des glands comme nourriture principale 
les Faisans et auires oiseaux ne les mangent pas avec la même activité ni en 
aussi grande quantité qu’ils le feront plus tard; ils en laissent beaucoup sur 
le sol de leur compartiment, mais ils ne tardent pas à s’y habituer, et lors- 
qu’on les voit consommer toute leur provision, et que d’cilleurs ils sont 
grands et élevés, on diminue d’abord graduellement puis on leur supprime 
les grains qu’on leur avait jusque-là donnés. L’année dernière lous mes pen- 
sionnaires, environ cent vingl, ne m'ont pas mangé un hectolitre de sar- 
razin depuis la Toussaint jusqu’au mois de juin; je donnais seulement une 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 997 


poignée de grain l'hiver, pendant les grands froids et à de très-rares inter- 
valles, à chaque famille. 

Jusqu'ici, pour diviser les glands, j’ai employé un moyen tout à fait ru- 
dimentaire. Le soir, au coin du feu, mes domestiques et moi coupons, en 
quatre ou en huit, suivant leur grosseur, les glands pour le lendemain avec 
un simple couteau. J'ai, à cela, reconnu l'inconvénient de se noircir les 
doigts, de se hacher la peau, surtout du pouce droit, et de ressentir à la fin 
de la soirée une fatigue douloureuse de la main. Il serait très-facile, ce me 
semble, de construire un petit instrument peu coûleux, commode pour la 
main mais assez fort, armé de plusieurs lames tranchantes, coupant du 
même coup le gland du plus petit ou du plus fort volume en morceaux assez 
menus pour être facilement avalés par les divers oiseaux que nous élevons 
en volière. Je m'inscris pour mon comple chez le fabricant qui n'offrira ce 
petit appareil dans de bounes conditions. Il est facile, pendant une veillée, 
de couper entre deux personnes 20 litres de glands avec le couteau, à plus 
forte raison avec un instrument plus avantageux. Je possède environ deux 
cents pensionnaires susceptibles de manger des glands. D'après mes re- 
marques, 20 litres coupés par jour suflisent à leur nourriture, en y ajoutant 
autant de pommes de terre cuites et de son mêlés ensemble et de la ver- 
dure à discrétion. 

Les oiseaux qui mangent des glands les digèrent très-bien mais lentement, 
ce qui tient évidemment à la densité considérable de la pulpe de ce fruit, 
aussi n’en absorbent-ils pas des quantités considérables chacun. J’ai essayé 
de triturer les glands au lieu de les couper, c’est un mauvais procédé : 
écrasés ils deviennent noirs immédiatement et les oiseaux ne les mangent 
guère, tandis que coupés ils les avalent avec avidité quoique la surface de 
section soit brune. Le gland coupé et jeté à la volée dans la volière ne pourrit 
pas, ne s’altère pas, surtout s’il fait un temps humide; ii peut ainsi rester 
très-longtemps sur le sol, et les oiseaux en se promenant trouvent toujours 
quelque quartier à déguster; cela les occupe, ils savent très-bien séparer 
eux-mêmes la pulpe de r’écorce lorsqu'elle est adhérente. Une machine pour 
hacher les glands pourrait devenir avantageuse pour des éleveurs en grand, 
mais pour un nombre assez limité d’élèves, comme chez moi, je crois qu’il 
vaut mieux se servir d’un petit instrument tel que j’en ai exprimé le deside- 
ratum, dauiant plus qu’il est préférable de ne couper les glands qu’au fur 
et à mesure du besoin : les oiseaux les mangent mieux frais coupés. 

Pour la récolte et la conservation des glands voilà ce que je puis répondre 
aux questions qui s’y rettachent, c’est la pratique que j'ai suivie : Je fais 
récolter les glands lorsqu'ils sont bien mûrs, tombés d'eux-mêmes sous les 
chênes et en conséquence dépourvus de leur cupule ; c’est ordinairement en 
octobre et novembre. Je les paye entre 9 et 50 centimes les 20 litres suivant 
leur abondance, et ce petit travail occupe des infirmes, des femmes, des en- 
fants qui peuvent ainsi gagner facilement 2 à 3 francs par jour. Afin de me 
préserver de la petite fraude que commettent sciemment ou involontaire- 


538 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


ment les ramasseurs, voici le procédé très-simple que j’emploie : les glands 
véreux, secs ou pourris qui, sous les arbres, se trouvent mêlés aux bons 
dans des proportions souvent énormes, seraient en pure perte et pourraient 
faire gâter les bons; ils doivent être abandonnés. Aussi lorsqu'on m'apporte 
un sac de glands, je le fais délivrer dans un bassin plein d’eau; cette 
épreuve hydrostatique permet d'éliminer immédiatement tous les mauvais 
qui flottent, tandis que les bons vont au fond où on les reprend pour les 
mesurer. 

Pour leur conservation j’en étends une couche de 40 centimètres environ 
sur le sable, je les recouvre d’une couche égale de sable, puis une autre de 
glands et encore de sable, et ainsi de suite; en un mot je fais une véritable 
siratification. Quand tout est logé je recouvre le tas d’une couche de paille, 
que je charge elle-même de sable, afin de préserver l’approvisionnement des 
gelées et de permettre pendant l’hiver, lorsque la croute est gelée, de péné- 
trer, en retirant de la paille qui ne se prend pas en masse comme le sable, 
jusqu’au cœur de la réserve et d’y puiser la provision quotidierne de glands 
non gelés. Les glands qui ont fortement gelé deviennent noirs et se perdent 
Promptement. Si l’on veut, avant de les hacher, se débarrasser du sable qui 
adhère aux glands, il suffit de les laver. Les oiseaux ne mangent guère les 
quartiers de glands devenus secs, ce qui m’a engagé à les conserver toujours 
frais; jy ai parfaitement réussi par le moyen que j’indique. 

Au printemps, vers la fin de mars et même avant, les glands germent : je 
crois que cette germination doit nuire à leur qualité, mais les oiseaux les 
mangent très-bien quand même; on peut du reste détruire les germes, si 
l’on veut, c’est une œuvre de temps et de patience. Cette année j’en ai donné 
jusqu’à la fin de mai, alors que chaque gland avait produit un petit chêne, 
mes Faisans les mangeaient encore. 

J'ai déjà fait connaître antérieurement, Monsieur le Président, en partie 
le résultat de la ponte et de l'élevage actuel à la suite de l’alimentation par 
les glands. Comme complément je puis ajouter que mes quatre Faïisans or- 
dinaires ont pondu ensemble cent trente-neuf œufs que j’ai soumis à l’incu- 
bation. J'ai obtenu cent naissances ; j’ai eu sept petits morts dans les coques 
avant de naître ; vingt-neuf œufs clairs ou dont le germe s'était peu déve- 
loppé ; trois disparus. Mes jeunes Faisandeaux ont été 1rès-vigoureux, je les 
ai à peu près tous élevés sans accident. Ce n’est que depuis quelques jours 
que j’ai observé une terrible maladie qui, depuis plusieurs années, survient 
à cette époque : c’est une laryngite et une véritable angine couenneuse dont 
je recherche la cause et le traitement. Cette maladie m’a enlevé six de mes 
jeunes élèves qui sont déjà grands et commencent à se mailler. On m'a dit 
que le chènevis que j’emploie dans la proportion environ d’un cinquième, 
pour mon élevage, pourrait bien être la cause de cette angine et laryngite 
dont je ne trouve nulie part la description et qui ne se produit que chez 
le Faisan ordinaire; je me propose d’en faire la preuve, lan prochain, en 
supprimant le chènevis pour l’élevage. Je crois cependant que, cette année, 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 599 


Ja maladie a moins d’intensité et me fera moins de victimes que les années 
précédentes ; beaucoup de mes malades toussent moins et avalent mieux 
qu’ils n’ont fait, malgré le temps froid et humide que nous subissons. J’ac- 
cueillerais avec plaisir et reconnaissance, d’ailleurs, toute communication 
qui me serait adressée au sujet de la maladie que je viens de signaler et qui 
est à peu près la seule dont j’ai eu à souffrir jusqu'ici. 


Note sur divers végétaux cultivés à Saverdun 
(Ariége). 


Extrait de diverses lettres adressées à M. le Président de la Société d’ac- 
climatation, par M. LEO D’OuNous. 


..-.. Vous vous souvenez sans doute du bruit que fit lors de son 
introduction en France le Maïs panaché du Japon. Notre éminent collègue 
et ami M. Pepin, dans une notice très-concise, nous fit connaître ses qua- 
lités ornementales et le grand nombre de ses épis. Introduit plus tard dans 
le Sud-Ouest, j'insistais surtout sur sa fertilité et sur ses abondants pro- 
düuits en matières fourragères. Cette belle plante haute de 12,35 à 42,/0» 
indépendamment de son heau panicule floral, donne de trois à quatre jets 
partant du pied de la tige principale. J’ai eu le malheur de perdre cette 
belle plante, et il peut être utile de le faire connaître pour éviter à l'avenir 
pareils accidents, Mon jardinier eut la malheureuse idée de la semer dans le 
voisinage d’un champ de petit millet. Les moineaux le ravagèrent d’abord 
puis se jetèrent sur le Maïs japonais et n’en laissèrent pas un seul grain ; un 
bon moyen pour éviter ces ravages, c’est, après avoir supprimé après fé- 
condation le panicule mâle, d’entourer les deux épis de sommet de Ja feuille 
supérieure du maïs, et de l’attacher avec ur jonc ou un osier, les moineaux 
ne sachant où se poser, n’attaquent jamais les épis inférieurs qui arrivent 
ainsi à parfaite maturité. 

Deux Maïs nouveaux ont été décrits et figurés dans les dernières livraisons 
de la flore des serres de M. Van Houtte. Les épis sont très-beaux, fort longs 
et productifs. On cultive à l’orphelinat de Saverdun sept à huit espèces de 
Maïs quarantain : le Maïs nain roux de montagne, le Maïs perle ou Maïs à 
bec (Zea Maïs rostrata, Bonafous), le petit Maïs à poulet, excellent pour 
l'élevage des jeunes poulets, le Maïs à grains rouges, le Maïs blanc dit 
millette, généralement adopté pour grains et fourrages. Nous serions heu- 
reux d'en offrir à ceux des membres de la Société qui désireraient les 
(CHINOIS 0e 

. . - : Par des températures élevées et des pluies suflisantes, la floraison 
et la fructification des résineux se sont opérées ou s’effectuent dans les plus 
favorables conditions. Déjà les cônes des Æpicea, des Pins du Nord, d’Alep, 
de Laricio noir d'Autriche, d’Abies pinsapo, ont acquis leur grosseur normale, 


040 SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


ceux des ulipiers et des Magnolia paraissent en grand nombre, des cen- 
taines de chatons mâles naissent sur les hautes branches durobuste Gèdre de 
l'Atlas bien plus vigoureux daus mes cultures du Vigné que ceux du Liban 
et de l’Inde. Les strobiles des Sequoia sempervirens font gracieusement 
incliner les jeunes branches du sommet de ce gigantesque conifère. Leurs 
graines, dans les années chaudes, ont müri en 4869 et 4871. La floraison 
des Oliviers, Pistachiers, Grenadiers à fruits et Jajubiers, nous donnera plus 
tard des fruits assez abondants. Je n’ai pas observé en 1874 celles des 
Bibacées et des Gingko biloba, mais les touffes ou tiges des Grenadiers à 
fleurs doubles et celles dn charmant Grenadier de Legrelle, sont dans ce 
moment dans leur estivale beauté. 

Une forte iouffe @e Yucca pendula à donné en juin cinq hautes hampes 
florales belles encore après un mois. 

Les Bambusa mitis, nigra, arundinacea ont produit des tigelles de 2 à 
o mètres de hauteur. 

Les fruits des Abricotiers, Pêchers, Poiriers, Pommiers et Pruniers, don- 
nent une récolte des plus abondantes. Les abricots suriout sont beaux et 
excellents, on en mange depuis un mois et leur récoite est loin d’être ter- 
minée. J'ai pu compter plus de trente-cinq belles poires sur deux lambourdes 
de Beurré d’Amanlis, on pourrait déjà récolter de beaux chasselas dorés sur 
les nombreux cordons et sur les treilles du jardin fruitier de l’orphelinai de 
SAMCTUUNE RENE AU 

. . . . . Parmiles arbres qui végètent, fructifient et sont naturalisés sur 
les bords de l’Ariége, je citerai : . 

Abies pinsapo (Le Vigné), arbre âgé de vingt-cinq ans, qualre gros cônes 
droits érigés. Troisième année de fructification. Graines fertiles. 

Sequoia sempervirens, vingl-cinq ans, 37,50 de tour, 35 de hauteur, 
d’une très-remarquabie vigueur; strobiles très-nombreux faisant courber les 
branches et rameaux de sommet (graines non essayées, présumées fertiles). 

Sequoia gigantea, douze ans, 10 mètres de hauteur, douze à quinze 
petits cônes autour de la tige, au sommet, deuxième fructification. 

Pins noirs d'Autriche, vingt-cinq à trente ans, cônes petits très-nombreux 
sur les branches, restent deux ans avant d'arriver à parfaite maturité ; arbres 
très-robustes et très-vigoureux, 

Pins d'Écosse et de Corse (Laricio), cônes très-gros, bonnes graines 
fertiles. 

Pins pignons ou d'Italie, arbres mesurant de 6 à 7 mètres de tour ; têtes 
arrondies énormes, d’un grand effet paysager. Cônes irès-gros, abondants. 
Pignons fertiles excelients, très-recherchés ; il en a été vendu pour plus de 
150 francs en 1875. 

Cèdre robuste ée l’Atlas, quinze ans, d’une très-remarquable végétation. 
Cônes mâles irès-nombreux sur toutes les branches supérieures. Pas d’appa- 
rence de cônes fertiles. 

Cèdre du Liban, cinquante ans, cônes assez nombreux à graines fertiles. 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 941 


Cèdres Deodara, âgés de quarante-six ans, 2 mètres, floraison chatons 
mâles, pas de graines. 

Pins du lord Weymouth, âgés de cinquante ans, 3 mètres de tour, 35 de 
hauteur, cônes très-longs, graines infertiles. 

Tulipiers d'Amérique, cinquante-cinq ans, 3,50 de tour, 35 mètres de 
hauteur. B2lle floraison, cônes à graines fertiles. Semis naturels. 

Magnolia ferruginea, cinquante-cinq ans, 1,40 de tour ; admirable flo- 
raison en 1673-187/, cônes nombreux, graines infertiles. 

Sophora du Japon, soixante-dix ans, 4°,50 de tour, superbe tête arrondie, 
floraison luxuriante en acût 1873 et 4874 ; graines abondantes fertiles. Bois 
d'œuvre de première qualité pour meubles de luxe, prenant un très-beau 
poli sous le rabot. 

Paulownia imperialis, rente ans, d’une croissance vraiment prodigieuse, 
recépé et produit les trois ou quatre premières années, feuilles énormes de 
plus d'un mètre de tour; graines innombrables se ressemant un peu 
partout. 

Noyers noirs et cendrés de l’Amérique du Nord, de cinquante-cing à 
soixante ans, 3%,20 de tour, 52 à 40 de hauteur, très-fertiles, semis na- 
turels un peu partout ; arbres de toute première qualité. 

Févier inerme de la Chine, quinze ans, d’une admirable végétation, de 
9 mètres à 2",50, à longues siliques, graines très-dures, fertiles, semis 
naturels. 

Févier triacanthe, cinquante-cinq ans, 3,20 de tour sur 80 de hauteur. 
Tête superbe arrondie, longues siliques renfermant six à huit graines cho- 
colat foncé ; semis naturels. 

Noyers hâtifs de Barthère, à feuilles laciniées, N. à bijoux, N. à bouquets, 
N. monophylle, arbres originaires du Sud-Ouest, donnant des fruits dès la 
quatrième où cinquième année de la plantation. Je puis offrir des fruits et 
des greffons à ceux de mes collègues qui désireraient cultiver ces rares et 
précicuses variétés. 


Objections au procédé de l’arrachage des vignes pour 
la destruction du Phylloxera; indication d’un autre 
procédé. 9 


Lettre de M. CH. NaupiN à M. Élie de Beaumont. 
Collioure, le 23 juillet 1874. 


J'ai lu, avec la plus grande attention, à peu près tout ce qui à été écrit 
sur le Phylloxera, et il en est résulté pour moi la conviction de l’inutilité ou 
de l’impraticabilité de tous les movens préconisés jusqu'ici pour le com- 
battre, sauf la submersion des vignobles, qui n’est possible que dans des 
circonstances exceplionnelles. L’arrachage des vignes, quoique palronné par 


542 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


les plus hautes autorités scientifiques, ne me paraît pas devoir être plus pra- 
ticable ni plus efficace que les autres. Je lui oppose les raisons suivantes : 

49 En proposant l'arrachage des vignes, on ne semble pas se rendre sufi- 
samment compte de l’énormité de ce travail. C’est sur les dernières racines 
de la vigne, les plus jeunes et les plus succulentes, que le Phylloxera 
s'établit de préférence, et c’est là seulement qu’il peut vivre. Or, ces der- 
nières radicelles sont les plus profondément enterrées et, pour les atteindre, 
il faudra fouir le sol au moins à 0,60 de profondeur, et souvent même 
beaucoup plus bas. Un pareil travail équivaudrait au défoncement du terrain, 
et l’on sait ce que coûtent ies défoncements. Si maintenant nous songeons 
que c’est par milliers d’hectares que s’évalue la surface des vignobles enva- 
his, on voit d'emblée que ce seul travail engloutira des millions, et que, s’il 
est rendu obligatoire par une loi, ce sera contraindre les propriétaires à des 
sacrifices auxquels ils ne se résoudront qu’avec la plus grande répugnance, 
et demander à l'État des indemnités que notre budget, déjà chéré, ne com- 
porte guère. 

2° Cet arrachage ne servira à rien, Car il est matériellement impossible 
que, même par le fouissement le plus minutieux du sol, on en extraye la 
totalité des racines phylloxérées. Aïnsi que je l’ai dit tout à l'heure, cesont 
les racines les plus jeunes qui sont le principal siége du mal, et comme elles 
sont en même temps les plus faibles, elles ne résisteront pas à la traction 
qu’on exercera sur les racines plus volumineuses et plus fortes ; elles se 
briseront et resteront en terre avec les insectes qui s’y seront fixés. On ré- 
pondra sans doute que ces insectes ne pourront pas vivre longtemps sur des 
racines que n’alimenteront plus les parties vertes de la plante; incontesta- 
blement, mais je fais observer qu’on peut obtenir ce résultat avec beaucoup 
moins de frais, ainsi que je le dirai tout à l'heure. 

3° L’arrachage des vignes sera dangereux, Car il pourra devenir, et il de- 
deviendra même probablement un nouveau moyen de propagation pour le 
Phylloxera. En remuant un sol infesté, en ramenant à la surface la terre du 
fonc des tranchées, on y amènera inévitablement un nombre incalculable 
de ces insectes. Tous ne périront pas, et il y en aura toujours, et en trop 
grande quantité, qui, soit en cheminant sur le sol, soit en s’atlachant aux 
brindilles, aux herbes sèches ou aux feuilles de vignes tombées à terre, et 
que le vent poussera dans toutes les directions, finiront par atteindre les 
vignes restées saines jusque-là. À mon avis, c’est un danger qu’il ne faut 
point courir. . 

4° Avracher les vignes (et il faudra s’y mettre dès les premiers symptômes 
du mal), c’est, en définitive, faire à grands frais et rapidement la besogne à 
laquelle le Phylloxera travaille plus lentement et à meilleur compte; car on 
ne voit guère où cet arrachage pourra s’arrêier, puisque la surface envahie 
ne cesse de s’élargir. J'ajoute à cela que le progrès du Phylloxera deviendra 
d'autant plus rapide qu’on favorisera davantage sa dispersion par l’ameu- 
blissement du sol infesté. 


# 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 543 


Telles sont les principales objections que je crois pouvoil faire à la 
mesure proposée. Il y en aurait d’autres encore ; mais celles-l1 me parais- 
sent suflisantes pour motiver la recherche d’un moyen plus acceptable par 
les viticulteurs et offrant plus de chances de succès contre l’insaisissable en- 
nemi de la vigne. Après y avoir bien réfléchi, j'arrive aux conclusions sui- 
vantes, que je recommanderais au moins à titre d'essai. Ce serait : 

1° De n’arracher aucune vigne malade et de se bien garder de fouiller le 
sol environnant; 2° de scier les ceps entre deux terres, c’est-à-dire au ni- 
veau de la naissance des grosses racines ou un peu au-dessus, soit à 42 ou 
15 centimètres de profondeur, et de recouvrir de terre les souches ampu- 
tées ; les ceps coupés seraient brûlés sur place, et leurs cendres répandues sur 
le terrain : 5° sans plus de retard, ensemencer le vignoble, ou la partie de 
vignoble mise en traitement, de quelque plante fourragère appropriée au 
climat et à la nature du sol, telle que lupin, trèfle, sainfoin, luzerne, ete., et 
couvrir cette semence par un simple coup de herse, qui n: ferait que gratter 
la surface de la terre, tout en l’égalisant. 

Ce mode de médication, dans lequel il n’est pas question d’insecticides, et 
qui ne sort point des méthodes agricoles ordinaires, serait par lui-même 
très-peu coûteux et ne trouverait vraisemblablement pas grande opposition 
chez. les cultivateurs. A cette considération, qui déjà a du poids, il faut 
ajouter les suivantes : 1° la presque certitude, sinon même la certitude ab- 
solue, de l'entière destruction du Phylloxera dans un espace de temps qu’on 
he saurait fixer, mais qui ne pourrait être bien long. Cet insecte, réduit à 
sucer des racines déjà mourantes, et qui ne seraient plus alimentées par 
une végétation aérienne, ne tarderait pas à périr d’inanition ; il ne pourrait 
pas d’ailleurs percer l’épaisse couche de terre, plus ou moins durcie, qui le 
recouvrirait, et, le pût-il, il trouverait dans le fourré des herbes fourragères 
un obstacle insurmontable à sa marche; 2° le cultivateur, en perdant quel- 
ques récoltes de vin, serait dédommagé, dans une certaine mesure, par la 
production fourragère, doni il ferait, suivant les lieux et les saisons plus ou 
moins favorables, une, deux ou même plusieurs coupes par année. Au bout 
de deux ou trois ans, quand on aurait acquis la preuve qu’il n'existe plus de 
Phylloxeras vivants dans le sol, l’herbe serait enfouie sur place, en qualité 
d'engrais vert, ce qui n’empêcherait point d’y ajouter d’autres fumures 
plus particulièrement convenables à la vigne, et l’on procéderait au rétablis- 
sement du vignoble. 

Dans cet intervalle, que seraient devenues les souches de vigne laissées 
dans le sol ? Les plus malades auraient sans doute péri; mais si lon n'avait 
pas attendn au dernier moment pour appliquer le remède, et si les vignes 
conservaient encore une certaine vitalité au moment de la résection des 
ceps, la plupart repousseraient, sinon la première année, du moins à la 
deuxième ou troisième, et ce serait aulant d’acquis pour la reconstitution du 
vignoble. De nouveaux ceps se formeraient, plus vigoureux et plus vivaces 
que les anciens, et cela parce que la terre se serait reposée dans une culture 


[4 


" 


5h 4 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


pu 

intercalaire, et que les fourrages enfouis y auraient introduit de nouveaux 
principes de fertilité. À 

Pour le moment, je ne vois pas d’autre manière d’attaquer le Phy! 0 era. 
Si j'osais me servir d’une expression triviale, je dirais qu'il faut le tenir 
enfermé sous terre et l'y laisser cuire dans son jus, en lui coupant les 
vivres. Je regarde comme illusoire tout emploi des insecticides, tant à cause 
de la manière de vivre de linsecle, qu’à cause de l'immense étendue de 
pays qu'il occupe. 


(Extrait des Comptes rendus de l’Académie des sciences.) 


Boisement des plateaux arides. 


M. Bouché, inspecteur du Jardin botanique de Berlin, a présenté à la 
Société dacclimatation de Berlin une notice sur deux arbrisseaux originaires 
de PAmérique du Nerd, dont l'introduction en France pourrait être tentée 
avec succès pour Île reboisement des plateaux arides où les essences fores- 
tières de nos pays ne prospèrent pas. 

Ces arbrisseaux sont le Ghêne chincapin (Quercus prinus chincapin) et le 
Châtaignier nain (Castanea pumila); tous les deux couvrent d'immenses 
étendues sur les versants des monts Apalaches. Ils forment d’épais buissons 
dont la hauteur ne dépasse pas 5 mètres. Ce n’est pas au point de vue de 
la production ligneuse que ces végétaux sont précieux, mais ils produisent 
une telle quantité de fruits que les immenses troupeaux de Perces élevés dans 
ces contrées ne suflisent pas à les consommer. 

Le Chêne chincapin et le Châtaignier nain ne sont pas difficiles sur le choix 
des terrains, ils croissent avec vigueur sur les sols les plus arides, et leurs 
détritus sont assez abondants pour permeitre de cultiver des céréales immé- 
diatement après le défrichement. 

Les fruits forment de lourdes grappes, faciles à récolter, et que les Porcs 
recherchent avec avidité. 


Le gérant : JULES GRISARD. 


PARIS. — IMPRIM£ERIE DE E. MNARTINET, RUE MIGNON, :Z. 


1 


+ 


I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ “db. 


METIS DE PERDRIX ROUGE ET GRISE 


Par M. G. DUWARNET, 


J'avais souvent oui conter par de vieux chasseurs, et 
J'avais lu, que les Perdrix rouge et grise étaient des ennemis 
irréconciliables, se livrant de furieux combats, et que fort 
souvent, l'espèce la plus nombreuse finissait par chasser du 
canton celle qui ne pouvait mettre en ligne de batulle un 
aussi grand nombre de champions. On ajoutait qu’il n’y avait 
pas d'exemples qu’un accouplement se fût produit, même en 
domesticité, entre individus de ces deux espèces. N'ayant pu 
vérifier le fait, je le tins pour certain, ou tout au moins pour 
probable, quand, un jour, je vis, chez un marchand de gibier, 
une Perdrix qui portait évidents les caractères de l’hybri- 
dation. Son bec el ses tarses élaient rouges. Les plumes des 
flancs, bien qu'un peu moins vives de couleur, étaient celles 
de l'espèce rouge. Les ailes, le dessus du corps étaient ceux 
de la grise, avec des tons un peu plus chauds. J’avais certai- 
nement sous les yeux un mélis. Il n’était donc pas vrai que 
Jamais accouplement ne s’opérait entre individus des deux 
espèces ; et ce qui était surtout remarquable, c’est que l’ac- 
couplement, dont j'avais la certitude matérielle, avait eu lieu 
en liberté, dans les champs, et non en cage ou en parquet. 
Je voyais dans ce fait une rarelé tout exceptionnelle, mais qui 
cependant empéchait qu’on pût dire d’une façon absolue que 
cela n'avait jamais eu lieu. 

Pendant plusieurs années mon opinion ne fut ni modifiée 
ni corroborée par aucun fait nouveau, quand, par hasard, 
jappris qu'un chasseur de mon voisinage, grand amateur 
de gibiers vivants, avait en cage, accouplés, une femelle de 
Perdrix rouge et un mâle gris. J’y allaiet voici ce que je vis 

el ce qu’il me conta: Il avait un couple de Perdrix qui depuis 


sept ans vivait chez lui dans une vaste cage. Chaque prin- 
3° SÉRIE, T. I. — Septembre 1874, 39 


A6 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


temps la femelle pondait des œufs inféconds. Une année elle 
en pondit trente-deux, mais Jamais elle ne manifesta le désir 
de couver. La septième année le mâle mourut; en même 
temps, dans une cage voisine, mourait une femelle de l’es- 
pèce grise, laissant son mâle dépareillé. L'idée vint au mai- 
tre de réunir les deux survivanis. La femelle rouge dut 
donc partager sa cage avec le mâle gris, qui, bien qu’ägé de 
trois ans, et parfaitement robuste, fut accueilli par une grêle 
de coups de bec et de coups d’ailes, auxquels il paraissait ne 
pas oser répondre. Ces scènes se renouvelérent pendant près 
d’une année, quand un jour, on s’aperçut que la paix était 
faite. (C’est à ce moment que je les vis.) Alors le maître se 
mit à guetter, et fut Llémoin d’un premier accoupiement. Un 
petit réduit fut préparé dans un des coins de la cage. Jus- 
qu'alors la femelle avait pondu à toutes places, mais la petite 
niche à peine finie, elle en prit possession et le lendemain 
elle y pondait son premier œuf. Elle cessa au quatorzième. 

Dans la crainte qu’elle fût mauvaise couveuse, ou qu’elle 
fût dérangée par son mâle, ce qui est fréquent chez les gal- 
linacés, les œufs furent enlevés et donnés à une petite poule 
qu’on emprunta, et qui fit éciore neuf petits. On comprendra 
étonnement du propriétaire quand il reconnut que sur ce 
nombre 1l y avait, distincts de couleur, sans aucun mélange, 
cinq Perdreaux rouges et quatre gris. Grâce à une intelli- 
gente nourriture, la nichée prospéra, grossit vite, «1 bien qu'à 
deux mois, on avait la certitude qu'il y aurait bien, dans 
toute l'exactitude du plumage typique, cinq rouges et quatre 
grises. À ce moment la petite poule couveuse fut réclamée 
par sa propriétaire : on crut que l’état avancé des petits, la 
chaleur de la saison, pouvaient permettre cette séparation : 
on enleva la mère ; mais la couvée, privée pendant la nuit de 
la chaleur des ailes maternelles, mourut bientôt. 

Le croisement des Perdrix rouges et des Perdrix grises est 
donc praticable. Celui dont je viens de raconter les phases 
s’est produil sous mes yeux. 


RTS 


LES COLOMBIERS MILITAIRES 


Par M. V. LA PERRE DE RO. 


Deuxième article (1). 


Dans un rapport que j’eus l'honneur d'adresser, en 1871, 
à M. le général de Cissey, ministre de la guerre sous la Pré- 
sidence de M. Thiers, je proposai à Son Excellence d'organiser 
des colombiers militaires dans les diverses forteresses de la 
France, en prévision de nouveaux siéges; d’en confier la di- 
rection à l'administration des postes, pour des raisons «déjà 
énoncées dans une précédente publication qu'il est consé- 
queminent superflu de répéter ici, et de créer un pigeonnier 
central, pour l'élève du pigeon voyageur, au Jardin d’accli- 
_mataiion. 

La réparation des désastres de la guerre et la réorganisation 
de l’armée absorbaient alors toute l'attention du ministre de 
la guerre, qui, tout en prenant mon idée en sérieuse consi- 
dération, ne put lui donner aucune suite immédiate. 

Entre temps, les divers articles que j'avais publiés, dans le 
Bulletin de la Société d'acclimatation, firent le tour de l’Eu- 
rope, furent traduits en allemand, en anglais et en espagnol; 
et je reçus successivement la visite des représentants de plu- 
sieurs puissances européennes qui me réclamérent mes opus- 
cules et des renseignements sur les pigeons voyageurs. 

C’est ainsi que la Russie, l'Italie, l'Autriche et l'Angleterre 
profitèrent de mes idées qu’elles mirent immédiatement en 
pratique, à l'exception cependant de la Grande-Bretagne qui 
hésila, craignant que les brouillards perpétuels dont cette île 
est enveloppée pendant les trois quarts de l’année, n'entra- 
vassent les aptitudes des pigeons voyageurs. 


(4) Voyez Bulletin, 2 série, t: IX, p. 809. 


518 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


La Prusse, comme toujours, distança toutes les autres na- 
lions ; organisa des colombiers militaires sur divers points de 
l’Allemagne, immédiatement après le siége de Paris, et encou- 
ragea simultanément l’organisation de sociétés colombophiles 
civiles. 

Voici ce qu'écrivait à ce sujet le journal /'Épervier, de 
Bruxelles, le 27 octobre 1872 : 

« M. de Roon, feld-maréchal et ministre de la guerre de 
l'empire germanique, dont l’activité ne se ralentit pas, vient 
de faire élaborer les bases d’une nouvelle loi militaire qui 
sera bientôt soumise à la sanction de la Diète. Il n’y à pas le 
moindre détail qui échappe à la prévoyance du département 
de la guerre dont il est le chef. A l'appui, je n'ai qu'à vous 
rappeler que des stations de Prgeons voyageurs ont été 
élablies dernièrement à Hambourg, Metz, Berlin et Cologne, 
et que les places fortes de Magdebourg, de Minden et de 
Wesel en seront pourvues prochainement. L'expérience de la 
dernière guerre a fourni la preuve que les pigeons sont ca-. 
pables de rendre de grands services, pour le cas où les com- 
municalions télégraphiques seraient coupées ou impossibles. » 

Nous avons déjà dit que des achats importants de pigeons, 
au nombre de plus de six cents, ont été faits en Belgique pour 
l'empire d'Allemagne. 

Le gouvernement allemand se rappelant les services que 
les Sociétés colombophiles de Paris avaient rendus au gou- 
vernement français pendant le siége, encouragea chaleureu- 
sement l'initiative privée ; et c’est ainsi qu'aujourd'hui il y a 
en Prusse déjà plusieurs sociétés civiles très-importantes qui 
ne se gênent pas pour faire lâcher leurs facteurs ailés à la gare 
du Nord, 4 Paris, afin de leur apprendre, sans aucun doute, 
à connaître la route de l'Allemagne, en prévision d'une nou- 
velle invasion. 

À l'appui de mes allégations, voici deux lertres qui ont été 
adressées par un membre de la Société la Concorde, de 
Cologne, à M. E. Cassiers, ancien président de la Société 
l'Espérance, de Paris : 


LES COLOMPIERS MILITAIRES. 519 


Golcgne, le 8 juillet 1874. 
Monsieur Cassiers, 

Vous nous obligeriez infiniment si vous nous permettiez d'envoyer à volre 
adresse un panier de pigeons voyageurs pour les lâcher à Paris, dimanche, 
à cinq heures du matin. 

Si vous vouliez avoir la bonté de vous charger de cette commission, je 
vous prie de vouloir bien nous en informer par lettre ou par dépêche, afin 
que nous puissions vous expédier nos pigeons vendredi prochain. 

Ne désirant pas que vous déboursiez de l'argent pour nous, je vous prie 
de m'indiquer le montant des frais, etc. Je vous les payerai d'avance. 


Mille remerciments. 
Agréez, etc. P. HERSCHBACH. 


Membre de la Société colombophile 
Concordia, de Cologne. 


DEUXIÈME LETTRE. 
Cologne, le 19 juillet 1874. 
Monsieur Cassiers, 
Je suis chargé par la Société la Concorde de vous communiquer les résul- 
tats du Concours de Paris de ce jour : 


Lächer, à Paris, à 5 heures du matin. 
Heures de l’arrivée. 


CR. Sd RS 
4. Howbé, de Mulheim, près de Cologne..,...,.....,.... 19 h. 27 m. 
D: Nolan COTON ARE PRE RNRERRE Re EP 12 1,29 
SAASCIWALZIOSe NU UIDSTES EST. PE UP A PTT 142 50 
HBHerschbachAGologne:s.L se RER EN ENRE ANQUR EE Sne 151 
5 Daho COTE RER nE CR AE ne 19/0159 
CMHowWbe: EMUlReMenERMO LIENS DNS IIEEUAR A REA TEILR 12 54 
ARCTIC NRCOID ONE RAR EEE MR NA AS 2e 42 56 
8. — D A La RUES slam ls ere Te Et te 2 RE AT Ne » » 
DARDEMNAIURNMANURN LES ARE NET, OLA RE PAS LRTEN 410036 
10: NOR RS SUEDE RCE PR AS ee D 2410) 
Mille remerciments, à votre service. 
Agréez, elc. P. HERSCHBACH. 


Ce résultat est brillant, mais ne m'élonne pas; car les 
Prussiens n’ont reculé devant aucun sacrifice d’argent pour 
s'emparer des meilleurs pigeons de la Belgique; on les à vus 
payer jusqu’à 4000 fr. pour soixante pigeons voyageurs, dans 
une vente publique qui eut lieu à Bruxelles le 1% mars 1574. 
Voici la liste officielle des prix d’adjudication de chacun de 
ces pigeons : 


550 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Nos Frs Nos Frs N° Frs N° Frs Nos Frs 
1 175 414. 39 27e M0 DEL 30 93 120 
2 99 152,420 28-5000 1 99 54 40 
3 110 AE OPMEU PA )S eo M) 42 60 55 Lu 
l 85 TAPERMAU 30 60 |""43, 10 56 12 
5 JOIE SE DD 31 40 4 32 | 57 un 
6 18 195.af: O0 8%. 90e 45 47 58 32 
7 105 DOPPRNETS IE S PS 46 60 | 59 27 
8 90 210 AS 34 45 47 65 60 (mort) 
9 65 DD NE 0e | SORT 0 ee NTS 42 61 24 

10 50 | 23 75]! 36..:.140 49 16 62 28 

11 150 | 24 00 | 37. 30 50 34 

42 39 25 3 382.0 51 50 

1920210206 22 39 60 | 52 12 


En comptant les 10 pour 100 pour frais de vente, le montant 
des adjudications a presque atteint le chiffre de A000 francs; 
la moyenne peut être évaluée à 65 francs par pigeon, tandis 
qu'à la vente des pigeons de M. Cleempoel, de Gand, la 
moyenne n'avait atteint que 55 francs par pigeon. (Journal 
l'Épervier.) 

Il est vrai que la Société colombophile /4 Concorde, de 
Cologne, est une société civile; mais il convient d’ajouter, 
cependant, que c’est précisément une société privée, /’Espeé- 
rance, de Paris, qui prêta ses pigeons voyageurs à M. Chassi- 
nat, administrateur de la poste aux pigeons pendant le siége. 
Or, le cas échéant, rien n’empêchera la Société de Cologne 
d'imiter, en Allemagne, l'exemple patriotique de ses confrères 
de Paris. 

On ne peut blâmer les Prussiens ; on est au contraire obligé 
de les admirer tristement, lorsqu'on les voit à chaque instant 
mettre tout à profit et avoir recours sans hésitation à toutes 
les ressources de l’art et de la science pour s'assurer d'avance 
les chances de la victoire, si une nouvelle guerre venait à 
éclater. Dans cette pénible situation, ce qu'il convient de 
faire, c’est de suivre immédiatement leur exemple et de tâcher 
de faire mieux qu’eux. 

Cependant, M. le général de Cissey, avant de quitter mo- 
mentanément le pouvoir, fit étudier par le général Ragon la 
question des pigeons voyageurs et des services qu'ils seraient 
capables de rendre à l’armée en cas de guerre. Le général 


LES COLOMBIERS MILITAIRES, 551 


Ragon, commandant le génie du 4° corps de l’armée de Ver- 
sailles, me fit l'honneur de me faire plusieurs visites, se munit 
de renseignements puisés à de bonnes sources et adressa au 
ministre de la guerre un rapport en tous points favorable à 
la création de colombiers militaires dans les diverses forte- 
resses du pays. En effet, peu de temps après j'appris avec un 
sentiment de vive satisfaction que mon projet avait été adopté 
en principe par le général du Barail, successeur du général de 
Cissey au ministère de la guerre, qui m'en informa par les 
lignes suivantes que Son Excellence m’adressa en date du 
13 octobre 1873 : 


Monsieur, 


A la suite du rapport qui a été établi le G juin dernier, par la commission 
mixte, instituée auprès des deux départements de la guerre et des finances 
pour éxaminer les conditions d'organisation d’un système de correspon- 
dances militaires par ballons et par pigeons, il a été décidé, conformément 
aux conclusions de ce rapport, que l'Administration des postes serait char- 
gée des pigeons, dont le colombier central serait installé au Jardin d’accli- 
matation, et que le département de la guerre s’occuperait de l’organisation 
du système aérostatique, elc. 

Agréez, elc. Le Ministre de la guerre, 


P. ©. 
Le général de division, chef d'état major 
général et chef du cabinet, 


BOREL 


Je me mis ensuite en rapport direct avec M. Le Libon, di- 
recteur général des postes, et avec M. Chassinat, le vaillant 
directeur de la poste aux pigeons pendant le siége de Paris, 
qui me dit qu'en effet le ministre des finances avait chargé 
l'Administration des postes d'organiser des colombiers mili- 
taires pour le service de l'armée ; mais que Son Excellence 
ne lui ayant ouvert absolument aucun crédit pour faire face à 
une dépense d'environ cinquante mille francs qu’exigerait 
la construction du colombier central, au Jardin d’acclimata- 
tion, et l’achat des pigeons producteurs, il n’entrevoyait 
guère la possibilité de donner suite au projet pour le moment, 


552 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


attendu que le budget de l'Administration était complétement 
équilibré et ne permettait d’en rien distraire. 

Dès que la création des colombiers militaires en fut réduite 
à une simple question d'argent, le directeur du Jardin d’ac- 
climatation et moi ne vimes plus d’obstacle à la réalisation 
immédiate d'un projei qui avait été l’objet constant de notre 
sollicitude, depuis bientôt quatre ans, et dont l'utilité avait 
été prouvée jusqu'à l'évidence, pendant l'investissement de 
Paris, lorsque les aimables pigeons voyageurs portèrent aux 
malheureux assiégés, par-dessus les têtes des Prussiens ébahis, 
dans un petit tube de métal attaché à l’une de leurs plumes 
caudales, des milliers de dépêches et de mandats-poste 
photomicroseopiques de la part d’affections absentes. 

Les greniers qui surmontent les bureaux du Jardin d’aecli- 
matation furent aménagés en colombier, et je fus autorisé 
à en offrir l'usage à titre obligeant à l'Administration des 
postes. 

Je fis simultanément appel aux sentiments de générosité et 
de sympathie pour la France de deux de mes amis et compa- 
triotes, MM. Florent Joostens, capitaine commandant de ca- 
valerie dans l’armée belge, et Georges d’Hanis, d'Anvers, 
qui s’élaient déjà distingués pendant la dernière guerre, par 
les soins assidus qu’ils avaient prodigués aux blessés français 
dans les ambulances belges. Mes dignes compatriotes, fidèles 
à leur dévouement inébranlable pour la France et sensibles 
aux injustes malheurs qui avaient frappé coup sur coup une 
nation généreuse et chevaleresque, m'autorisèrent spontané- 
ment à offrir de leur part, à titre gratuit, au gouvernement 
français, quatre cents pigeons voyageurs de la meilleure race, 
dont la majorité s'étaient distingués et avaient remporté de 
nombreux prix dans les grands concours colombophiles en 
Belgique ; j’ajoutai à ce chiffre une vingtaine de pigeons de 
choix de mes propres élèves, et j’eus la satisfaction de voir 
nos offres acceptées par le ministre des finances. C’est ainsi 
que la France, sans bourse délier, se trouve aujourd’hui en 
possession d’un colombier militaire garni de quatre cent vingt 
des meilleurs pigeons voyageurs du monde, dont la progéni- 


LES COLOMPIERS MILITAIRES. 553 


Lure peuplera incessamment les colombiers à établir dans les 
forteresses du pays. 

Dès lors M. Le Libon, directeur général des postes, pénétré 
de toute sa responsabilité et de l'importance du service qui 
venait d’êlre ajouté à son administration, résolut de ne rien 
négliger pour développer rapidement ce nouveau système de 
communication en conformité des besoins éventuels du pays, 
fit des démarches auprès du ministre des finances et obtint 
de Son Excellence le crédit nécessaire à la construction d’un 
colombier central au Jardin d’acclimatation. 

Dans le concours fédéral de Vendôme, à Anvers, du 23 avril 
1874, les pigeons voyageurs du gouvernement français, alors 
encore la propriété de leur généreux donateur, M. Georges 
d’Hanis, se sont tellement distingués, que je ne puis résister 
au désir de faire connaitre les mérites de ces remarquables 
oiseaux en publiant les résultats de ce concours. 


FÉDÉRATION COLOMBOPHILE D’ANVERS. 


Dimanche 23 août, 
GRAND GONCOURS FÉDÉRAL DE VENDOME 
Organisé par la Société la Pomme de Grenade. 
408 jeunes Pigeons lâchés (par convoyeur) à 6 heures ; temps clair, vent N.-E. 
Prix d'honneur : M. Delderenne,.de la Société Pomme de Grenade. 


Prix de série : M. @. d'Æamis. —— 
Prix d'honneur (de la Société organisatrice) : M. Delderenne. 


(le 23) 13 GG. d'Hanis........... 98 
1 Dellerenner 7." l TAEMAPMIBOPACLIS AE PE TE E Al 
27. van Schingen....... GAS DORIUTIER SEE ere se 5 
DR NDICE CR. LR TOM AGE GE GISI RATS 05 
HBMEMDEÉCREr. URI DOM TON EDiICLC KA PP EEE EE 56 
5 Van Kalderkerken...... TS Van derteden ere 6 
GMME Michielss 2-7... 7 8 19 GG. &d’'Hanis.........., 
HAAGÉEBOEVKENS 0e SD 0 Van Scheyndels es" 8 
SMMACEMANS AU 0 EU GRO RIAD AMIE EUR er PP  mranercn aeR 1 
RAP PE REA DOME GE DICIS Re CRETE 15 
MOST MRENNIS APE Cie re DR DS RE PIE ESA 4ë 
APR EMAELE PEER SEP LORD IG Huyhrech fs 20020 7 
ANT; -Verheyen.: 2.20 DORA MU PILIENAR RENE RRERES 9 


©5-©@9 © C2: N 
DS EE © D À © © 


©5 ©2 O2 CS 


I 


EROLDEE= 


SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


(le 24) CAP Pau WeIs #70 ER 
SOMNÉ. AL FRERE 5 15 | 63 H. Bessems........... 
J.;Decleyns sie Ses 6 35 | 64 G. Matthyssens....... 
Volckaerte ae ce 10%65 ESBoussery...:...R0e 
ÉsSCheWYyCKe See KL 66 7 Hi Sofflé 4. ER 10 
He MOTTE re cme 05 | 67 E. van Ishoven ....... 
Van den Houten....... 719% 0/68 Dierckxipere FETE 
FWerhagensie nu Aie 25:+| 69: Baselére JAI EUEN 
Mertensin ae ue. 206 70%: GxDielis CREER 
SALENS...... see L2,4} 71146 Boeykens F6 C0 
Dicrckkiperes nc. 5172 3 Smolderen 2€ ue 
SMOIURrS RER creie HA°°1 73 VD: Jacobs: 22226800 
BHellémans.. 2.0 45 | 74 J.van Schingen....... 
Gi COURIR E RARE 6 | 75 @&. d'Hanis.......... at 
JDeiBruyn!. 5531 8 76 GI Gits LL ENTARNE 
G, d'HHamis. .........e A4 77ieNandleeur 40.000 : 
Delderenne............ 20 178 LE Boumanse-t 0e 
Hiéllemansies Re DETTE EL KEY ne PAPERS 
JACODS. Le re cie sine 25180 Poele mere 
PANOOSEN PER RCEREr 26 "81 SIMONns. PR ANERr 
J. van Schingen.:.:4.:.. 82 Vanderheyden........ 
G. Dielis.............. 28.484 41F. Pittevil.. ee RRRE 
Fa Pitevile recrue 9982 1Sels serres RLRTE 12 
Ji Décleyn 2. R Re SUB NNPA Sans EEE 
J.-B. Pottieuw..:...... 36 | 86 E. Boumans.......... 
P. Helemans.......... 8 16 0 87 Jean Dierckx= "00e 
G. d'Hanis........... AT ITSS Nos. Dierckx CET 0EEer : 
Simonssie simuler 50 | 89 J. de Bruyn......... e 
HUBEL EEE Ces au 51 | 90 P. van Groeningen .... 
Jacobs: AAA 02 HEAIS9IL Le ISerruren re So 4 
ChDaems "7000 99) G. Merlens::72 "10008 2 
GAGITS PANNE NES 9 JS. CUX CEE A SPAAEDE | 
P. van Groeningen..... LOIR O M ISeIS LA CES CPMARRERRE 
FAPIHeviIReE CERTES 189540 de Vos SEE 
G. BoéykKens.....:..... 924 | 96 A. Delderenne..-.." 
JeDiclemans, re reRRE 5 | Bouq. : Huger............ 
EFOCNEMYCK ECC ER PRE 9 


‘Heeft die heeft : 


A. Delderenne. 5 E. Michiels. 
Van Schingen. 6 J. Hellemans. 
Jean Dierckx. 7 F. Pittevil. 
Van Kalderkerken. 8 F.Kennis. 


LES COLOMRIERS MILITAIRES, 555 


Poule par 1 : 


1 A. Delderenne. 8 GG. d’'Hanis, 
2 Van Schingen. 9 G. Gits. 
9 J. Dierckx. 10 GG. d'amis. 
A E.Michiels. 11 G. Dielis. 
5 Boeykens. 12 F. Pittevil. 
6 P. Hellemans. 13 Huybrechts. 
7 F. Piltevil. 14 EF. Pittevil. 
Poule par 2 : 
AOF PITEEVI ELA OU DPI SN p E MINUG MN BLETE Il ERP ENER 2pr., 105 p'. 
2 Van Schingen .... 9 7 7 APitevil. sie. 105 2 106 
9 @. d'Hanmis...... 2 53 SA TACADS LR ANUS 2 127 
L @.d’Hanis...... 2 70 Ode Brun 0002 128 
5 Hellemans....... 2 87 
Poule par 3 : 
1 G. d'Hanis..... 3 pr.,104 p. | 4 Hellemans....... 2pr., 87 p". 
2 Van Schingen... 3 191 5 &. d'Hanis,..... 2 9/4 
GUTACONS ee 9 170 
Poule par 4 : 
1 G@. d'Hanis...... h pr., 128 p. | 3 Van Schingen.... 3pr.,121 p". 


DNPIEMEEr HER UE, ll 4140 hr Jacabs:;5 #28 0: à 470 


Poule par 6 : 
MENTON RSS ER pi 211p# #19 Delderenne ©" DD LAND. 


Poule par 8 : Pittevil, avec 6 prix. 


Tout a-t-il été dit, écrit, et publié maintenant sur les 
pigeons voyageurs et leur merveilleux instinct d'orientation ? 

M. Félix Rodenbach, d'Assche, en Belgique, n’est pas de 
cet avis ; et, pendant que les divers peuples de l'Europe sont 
assaillis par des inquiétudes cruelles de nouvelles guerres et 
s’ingénient avec une implacable ténacité à l'invention de nou- 
veaux engins destructeurs de vie humaine en masse, le savant 
colombophile belge consacre ses heures de loisir à poursuivre 
paisiblement le cours de ses expériences sur les pigeons 
voyageurs et en expose les résultats, avec une lucidité remar- 
quable, dans une série de lettres fort intéressantes qu’il adresse 
hebdomadairement au journal /’Épervier, de Bruxelles. 


556 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Dans {a Poste par pigeons voyageurs pendant le siége de 
Paris (1), j'ai déclaré sans ambages que la perte des trois 
quarts des pigeons qui firent le service de la poste, pendant 
l'investissement, élait due à l'incapacité sans exemple et sans 
excuse des délégués du Gouvernement de la défense nationale, 
qui, dans leur déplorable ineplie et dans leur ignorance ab- 
solue en matière colombophile, ordonnèrent des lâchers à des 
heures indues, lorsque le givre et la neige entravaient com- 
plétement le vol de ces charmants oiseaux. 

Or, il résulte des expériences faites l’année dernière, par 
M. Rodenbach, que je ne m'étais nullement trompé et que le 
pigeon voyageur perd entièrement la puissance de son instinct 
d'orientation lorsque le sol est couvert de neige. 

“En effet, le savant colombophile belge raconte que, par 
amour de la science pigeonnière, il lâcha l'hiver dernier, à 
diverses reprises, des pigeons voyageurs, à une distance de 
5 kilomètres seulement de leur colombier et que pas un 
seul ne retourna à son gîte le même jour. M. Rodenbach 
ajoute que les pigeons avec lesquels il fit ses intéressantes 
expériences étaient des sujets adultes de la meilleure race; 
qui, dans leur jeunesse, avaient été soumis à l’entraînement 
réglementaire et s’élaient même distingués dans les grandes 
luttes colombophiles ou voyages de long cours. 

La neige offusque-t-elle la vue généralement si perçante du 
pigeon voyageur ou change-t-elle tellement l'aspect des lieux 
qu'ilne s’y reconnait plus? ou paralyse-t-elle peut-être ses 
surprenantes aptitudes ? C’est ce que je n’entreprendrai pas 
de dire. Je ne mettrai pas non plus mon esprit à la torture 
pour essayer de pénétrer ce mystère, attendu que personne 
n’est parvenu jusqu'ici à expliquer d’une façon irréfutable 
Vinetinct d'orientation qui guide ces oiseaux dans la direction 
de leur colombier, sans se tromper de route, lorsque la neige 
ou de violentes perturbations atmosphériques r’entravent pas 
leur vol. 

En présence de ce résultat concluant, sans chercher même 


(1) Vovez Bulletin, 2° série, t. IX, p. 625. 


LES COLOMBIERS MILITAIRES. 597 


à en approfondir les causes, je me bornerai à signaler le fait 
et à recommander particulièrement à l'Administration des 
postes de ne jamais exposer gratuitement à une perte cer- 
taine les pigeons voyageurs àäes colombiers militaires, en les 
faisant voyager en temps de neige (1). 

Comme suite à ses expériences, tout en admeltant que le 
pigeon voyageur retourne indistinctement à son colombier 
de tous les points cardinaux, honorable M. Rodenbach affirme 
que le pigeon voyageur qui est habitué à se diriger dans un sens 
quelconque, disons, par exemple, qui a l'habitude de voyager 
du midi au nord, tournera instinctivement, comme l’aiguille 
d’une boussole, vers le septentrion, chaque fois qu’on le fera 
voyager. 

Cette observation est moins nouvelle que la première ; mais 
elle mérite cependant d’être mentionnée ici; car il est incon- 
testable que les pigeons voyageurs qui ont l'habitude, par 
exemple, de faire le voyage de Paris à Bruxelles, finissent 
par connaître leur route à tel point qu’ils s'impatientent dans 
les paniers qui les retiennent capufs du moment qu'ils ren- 
lent à la gare du Nord où ils ont l'habitude d’être lâchés , se 
montrent agités du besoin de voyager, s'élèvent d’un bond 
jusqu’à la couche atmosphérique où l'air offre le moins de 
résistance à la rapidité de leur vol, quand on leur accorde la 
liberté, et, sans tracer des circonvolutions maltiples dans le 
ciel, comme de jeunes pigeons qui s’orientent pour la pre- 
mière fois, filent sans hésitation comme des flèches en droite 
ligne dans la direction de la Belgique. 

Les amateurs comme les incrédules pourront facilement 
s'assurer de l'authenticité de mes assertions, en se rendant 
un dimanche à la gare du Nord, à Paris, où se font les lâchers 
des pigeons belges. 

Ges lâchers se font ordinairement avant sept heures du ma- 
in. C'est un spectacle fort intéressant que d'assister au 
départ de ces bandes composées de plusieurs milliers de voya- 
geurs ailés qui prennent simultanément leur vol et disparais- 

(1) Voyez Bulletin, 2° série, t, IX, p. 829, Les colombiers militaires, 
(premier article). 


558 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


sent à l'œil avec la rapidité de l’hirondelle dans la direction 
du nord. 

Mais si, au contraire, ces mêmes pigeons sont transporlés 
à une égale distance de Bruxelles, dans un lieu dont la silua- 
tion géographique est diamétralement opposée à celle de 
Paris, ils sont beaucoup plus résignés dans les loges où ils 
sont enfermés; et, quand on leur donne la volée, ils tracent 
de longues spirales au-dessus du point de départ, s'élèvent à 
une altitude incommensurable, font osciller gravement leur 
bec en tous sens comme pour explorer tous les points de 
l'horizon, prennent avec hésitation leur vol tantôt dans une 
direction tantôt dans une autre, reviennent en arrière, Jus- 
qu’à ce qu'enfin on les voie filer résolüment dans une direc- 
tion très-souvent opposée à celle qui mêne à leur colombier. 

C'est pour ces motifs que M. Rodenbach conseille de diviser 
les pigeons voyageurs des colombiers militaires en quatre 
oroupes, qu'il recommande de dresser respectivement au re- 
tour des quatre points cardinaux, 

Ce conseil me paraît trop judicieux pour quejenel'approuve 
pas en principe ; mais Je dois faire remarquer ici que le sa- 
vant colombophile écrit pour la Belgique et ne s'adresse pas 
à la France. 

Or, Paris se trouve dans une posilion exceptionnelle et est 
trop rapproché des frontières au nord et à l’ouest pour qu'il 
y ait nécessité de dresser des pigeons voyageurs à diriger leur 
vol spécialement de ces deux points cardinaux; et Je suis 
d'avis qu’il suffira, en France, de diviser les colombiers mi- 
litaires en deux bandes, l’une qui serait entraînée spéciale 
ment de l’est et l’autre du midi. 

Je persiste néanmoins dans mon opinion, qu'il faut absolu- 
ment que fous les Pigeons des colombiers militaires, indé- 
pendamment de leur éducation spéciale, soient soumis éga- 
lement à un entrainement général; c’est-à-dire qu’on doit 
leur apprendre par des étapes progressives à retourner à 
leurs colombiers de tous les points de lhorizon, dans un 
rayon de # à 500 kilomètres; car un commandant d’un corps 
d'armée quise met en campagne ne sait guëre d'avance 


LES COLOMBIERS MILITAIRES. 559 


d’où l'ennemi va débusquer ; il peut aussi très-bien se diriger 
aujourd’hui vers le nord et recevoir ordre, le lendemain, de 
marcher sur le midi. 

Dans cettehypothèse, ilestévidentquel’éducationdes pigeons 
des colombiers militaires limitée à une seule direction serait 
aussi défectueuse que regrettable; et,quel que soit le nombre 
de pigeons qu’on s’expose à perdre annuellement, par l’en- 
trainement général, cet entrainement est absolument indis- 
pensable et cela n'admet pas même de discussion. Le colom- 
bier central est là du reste pour combler les vides par la 
reproduction continuelle. D'ailleurs, il:ne ressort nullement 
des observations de M. Rodenbach et du docteur Chapuis que 
les pigeons voyageurs ne dirigent pas leur vol de tous les 
points de l’horizon, comme les personnes peu imitiées aux 
aptitudes de ces messagers ailés pourraient le croire; car les 
deux savants écrivains disent, au contraire, qu'ils retournent 
très-bien à leur colombier de tous les points cardinaux ; 

mais 1ls font remarquer, avec raison, qu’ils voyagent avec 
infiniment plus d’exactitude lorsqu'ils ont déjà fait plusieurs 
fois le même trajet, et il ne faut guère être un colombophile 
très-expérimenté pour ne pas se ranger à cet avis. 

L'expérience suivante que j'ai faite moi-même me con- 
firme du reste entièrement dans celte opinion : il y a quelques 
années je me rendais d'Anvers à Londres par le bateau à 
vapeur le Vector, dont j'étais l’armateur, lorsqu'un ardent 
colombophile de Schaerbéek-lez-Bruxelles mit l’occasion à 
profit pour me remettre un petit panier contenant huit Pigeons 
voyageurs, avec prière de les lâcher à Londres. 

Je m'acquittai avec plaisir de celte commission ; Je pris les 
pigeons à bord de mon sleamer, et le lendemain, à six heures 
du matin, après une traversée heureuse, nous arrivâmes de- 
vant l’hôpital de Greenwich, près de Londres. 

Le temps était splendide. Cependant, craignant qu'à Londres 
il n’y eût eu du brouillard, comme d'habitude, je fis servir à 
boire et à manger aux pigeons, et je les mis immédiatement 
en liberté au milieu d’une forêt de mâts de navires qui en- 
combraient la Tamise. 


560 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 

Après avoir plané pendant longtemps au-dessus de l’obser- 
vatoire de Greenwich, ils disparurent soudainement à nos 
regards dans la direction de Londres, et je les crus perdus; 
mais à mon retour à Bruxelles, je fus agréablement surpris 
lorsque les huit voyageurs ailés me furent présentés par leur 
heureux propriétaire, qui me déclara qu’ils étaient rentrés tous 
à leur colombier le jour du lâcher, à sept heures du soir. 

Or, ces pigeons n'avaient jamais fait que les voyages du 
midi de la France à Bruxelles, n'avaient jamais traversé la mer 
auparavant, et, sans avoir fait les étapes réglementaires de 
Bruges, Ostende, Douvres, etc., avaient élé transportés d’un 
bond à Londres, contrairement à tous les usages en pratique 
dans la Belgique. 

Après ces résultats concluants, je ne puis que répéler que 
je ne comprends rien à la merveilleuse faculté de s'orienter 
que la Providence a donnée aux pigeons voyageurs. 

Une autre expérience fort intéressante a été faite par 
M. Rodenbach, ce sont des lâchers nocturnes, au clair de 
lune, à une distance de 5 kilomètres, qui, chose étrange, ont 
parfaitement réussi. 

M. Cassiers, un Belge qui est sorti en ballon pendant le 
siége, me rapporte un fait également curieux : Il m’affirme 
qu'à une altitude de 1800 mètres il lâcha trois pigeons, et 
que les pauvres oiseaux se laissérent tomber comme des 
pierres, sans même essayer d'ouvrir les ailes, jusqu à ce 
qu'ils fussent arrivés à environ 100 mètres du sol. 

M. Cassiers ajoute que ces pigeons ne sont jamais retournés 
à leur colombier à Paris, comme si celte chute dans le vide les 
eut étourdis au point d'anéantir leur facullé d'orientation. 

Les colombophiles belges, et le plus souvent ceux qui s’oc- 
cupent avec le soin le plus jaloux de leurs colombiers, ont la 
déplorable manie d’avoir recours constamment aux croi- 
sements dans le but de maintenir et d'améliorer l’excellente 
race de leurs pigeons qui est recherchée, à juste titre, par 
toutes les puissances européennes pour servir de fond aux 
colombiers militaires. Or, il résulte de mes expériences sur 
huit générations successives de frères et de sœurs que J'ai fait 


LES COLOMPIERS MILITAIRES. 561 


reproduire constamment entre eux, que cette prétendue né- 
cessité d'introduire du nouveau sang dans un pigeonnier ou 
dans un poulailler ne repose absolument sur aucun fondement 
et n’est qu'une grossière erreur. | 

Pendant quinze ans je me suis spécialement occupé de la 
solution de cette grave question de consanguinité entre poules, 
pigeons et oiseaux reproducteurs, et, dans une prochaine 
lettre, j'exposerai mes nombreuses expériences ainsi que les 
résultats absolument négatifs que j'ai obtenus. 

IL est évident, lorsque deux pigeons consanguins sont ou 
étiques ou de mauvaise race, que leurs produits le seront dou- 
blement, et qu’en ce cas il faut avoir recours au croisement 
pour corriger les vices du sang, ou mieux encore, à la sup- 
pression radicale de la race défectueuse; mais mes longues 
expériences m'ont prouvé, lorsque deux sujets consanguins 
sont parfaitement sains et de bonne race, qu'ils produisent 
aussi bien que deux oiseaux de sang différent. Et pourquoi ne 
le feraient-ils pas? 

J'arrive donc à la conclusion, lorsque les jeunes d’une paire 
de beaux pigeons voyageurs se distinguent dans les concours, 
qu'il faut toujours les laisser s’accoupler ensemble et qu’on 
peut continuer ce système de génération en génération, avec 
la certitude que les qualités physiques et instinctives des pa- 
rents se transmettront perpétuellement aux descendants. 

Pour maintenir une bonne race de pigeons à son niveau 
de perfection, ou, pour m'expliquer plus catégoriquement, 
pour empêcher qu'une race ne dégénére, il faut imiter les 
Anglais, qui sont nos maîtres à tous dans l'art d'élever des 
oiseaux de choix, ce qu’ils appellent dans leur langue «prize 
birds ». 

Les amateurs anglais ne permettent pas à leurs pigeons de 
choix d’épuiser leurs forces et de se fatiguer inutilement par 
la reproduction pendant l'hiver, et, dès le mois d’août ils sé- 
parent les mâles des femelles afin de les empêcher de nicher. 

Les pigeons, comme les chiens d'hiver, ne forment du reste 
jamais de sujets remarquables. 


Vers le 45 du mois de février, ils rendent ies femelles à 
3° SÉRIE, T. |. — Septembre 4 74. 36 


an. mmmantles: 2-0 usres RS LS Éd ét te Le ed ES mn de 


562 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION, 


leurs mâles; et, après ce long repos, les pigeons pleins de vi- 
gueur produisent des jeunes d’une force et d’une beauté hors 
ligne. 

Lorsque nos voisins d'outre-mer élèvent de jeunes pigeons 
dans l'intention de les exhiber au Palais de eristal de 
Sydenham, ils ne laissent élever qu’un seul jeune à la fois, par 
une paire de pigeons. 

Or, il est évident que ce pigeonneau se trouvant seul à être 
nourri par les parents, reçoit double ration et partant atteint 
une taille extraordinaire. 

Le cinquième jour, dans bien des cas, et surtout lorsqu'ils 
élèvent des pigeons romains pour l'exposition, ils enlèvent aux 
parents le seul jeune qu'ils leur avaient laissé et le donnent à 
élever à des doublures choisies parmi de gros pigeons com- 
muns dontles petits viennent d’éclore, afin que le pigeonneau 
reçoive deux fois de suite le lait ou liquide jaunâtre que les 
pigeons sécrètent dans le jabot, pendant les cinq premiers 
jours après l'éclosion. 

Les pigeons élevés d’après cet excellent système, qui est gé- 
néralement en usage en Angleterre, surpassent en beauté et 
en taille tous les pigeons de leur race qui n’ont pas été élevés 
de la même façon. 

Voilà comment il faut régénérer un colombier et se créer 
une race de pigeons d'élite, sans avoir recours aux croise- 
ments qui, le plus souvent, détruisent les races au lieu de les 
améliorer. 

Il faut avoir soin, cependant, lorsqu'on enlève le dernier 
pigeonneau à ses parents, de le remplacer par un autre peut, 
autrement on risque que la sécrétion qui reste dans leur jabot 
n’engendre la ladre et ne les fasse périr. 

Je sais bien que je vais soulever les foudres de cent théo- 
riciens qui ont toujours agi sous l'impulsion de l’erreur ; mais, 
à toutes leurs critiques gratuitement prodiguées, j'oppose un 
argument sans réplique : ce sont les résultats concluants de 
quinze années d'expériences. 


Il. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ. 


SUR 
- LES OISEAUX ET LA CHASSE 


Par M. J. BEC 


Membre de la Société d’horticulture et d'acclimatation du Var. 


Lettre adressée à M. le docteur Turrel, délégué de la Société d'acelimatation de Paris 
à Toulon. 


Vous me demandez, monsieur le docteur, quel est mon avis 
sur les oiseaux et Ja chasse, sur le bien ou le mal qui peuvent 
en résulter au point de vue de l’agriculture. 

Je vous réponds franchement, en homme pratique et con- 
vaincu, après plus de trente années d'expériences et d’obser- 
vations passées au service de l’agriculture. Quel est le résultat 
de ces observations”? Je diviserai ce travail en trois parlies : 
1° les oiseaux Insectivores ou Becs-fins d’abord; 2°les Gra - 
nivores ou Becs-durs, et 3° quelle serait, à mon point de vue, 
la meilleure réglementation que l'on pourrait demander pour 
l'exercice de la chasse, tout en sauvegardant les intérêts bien 
compris de l’agriculture et des chasseurs. 


I 
DES INSECTIVORES OÙ BECS-FINS. 


En traitant la question des oiseaux insectivores, je com 
mence par dire que tous les agriculteurs intelligents et sérieux 
ne peuvent avoir une autre opinion que la vôtre, et je dis, 
avec vous, que les Insectivores sont pour lagriculture les 
auxiliaires les plus grands, etj’ajoute les moins coûteux, par 
le rôle que la Providence, dans sa sagesse, leur a dévolu, et 
que l’homme dans son imprudence, et j'ose dire sa folie, ne 
sait pas respecter, 


564 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Eh bien! je demande avec vous, et avec tous les agriculteurs, 
protection entière et complète pour ces oiseaux. 

J'indiquerai plus loin les moyens qui doivent, à mon avis, 
rendre cette protection efficace. 

L’émigralion de presque tous les oiseaux insectivores com- 
mence dans nos pays, comme chacun sail, juste à l’ouverture 
de la chasse, c’est-à-dire dans la dernière quinzaine d’août, 
pour continuer en septembre et finir dans les premiers jours 
d'octobre. 

Ainsi le Cul-Blanc ou Motteux, le Traquet, la Pie-Grièche 
ou Darnaga, la Pive-Ortolane ou Pit-Pit, la Courentille, le 
Torcol ou Fourmilier, le Mosquille, le Bec-Figue, le Rossignol, 
les Martinets noirs et blancs et toutes les autres Fauvettes qui 
comptent un si grand nombre de variétés, ont terminé à celte 
époque leur migration, sauf quelques retardataires comme il 
s’en trouve toujours et partout. 

Tous ces oiseaux reviennent dans nos contrées en mars ou 
avril, chacun sait cela. Mais là n’est pas la question. La question 
où tout le monde est d'accord, c’est la rareté, pour ne pas dire 
la disparition presque complète, de ce genre d'oiseaux. Je 
n'hésite pas à dire que c’est un malheur, et tout doit être 
ienté pour y porter remêde. 

En effet, pour peu que cela continue, le dernicr Insectivore 
aura vécu. La défense de la chasse à la glu n’y sera pas pour 
grand chose, puisque les années précédentes à l’époque où cette 
chasse était permise (du 5 au 31 octobre), ie passage des 
Insectivores est à peu près terminé, et ensuite ce ne peut êlre 
qu'accidentellement qu’un Insectivore vienne se prendre à un 
poste à la glu ou se faire tuer à un poste au fusil, par une 
raison bien simple, c’est que, soit à la glu, soil au poste au 
fusil, on ne prend ou l’on ne tue que les espèces dont on a des 
appeaux, ct qu'il n’y a guère moyen d’avoir des Insectivores 
en cages pour appeaux. Aussi, Je le répète, ce n’est que par 
exception ou hasard que quelques-uns de ces oiseaux sont pris 
à la glu ou tués au poste. 

Il y a donc une autre cause de destruction que celle signalée 
jusqu'à ce Jour. Eh, mon Dieu! cette cause la voici : ce sont 


LES OISEAUX ET LA CHASSE. 565 


tout simplement les chasseurs au fusil qui vont, sitôt que la 
chasse est ouverte, à tort et à travers dans les campagnes, 
dans les plaines, sur les coteaux, sur les grands chemins 
même, tuant ou blessant tout ce qu'ils rencontrent, tout ce 
qu'ils voient, ce qu’ils ne voient pas même, car il arrive qu'ils 
se tuent ou se blessent entre eux, taüt ils y mettent de la pas- 
sion. Je ne parle pas des pauvres diables de paysans ou pro- 
priétaires qu'ils éborgnent, quand ils ne font que les ébor- 
gner (1)! Ils tuent tout aussi bien un Rossignol, une Fauvette 
qu'un Moineau. D'ailleurs c’est leur droit, jusque aujourd’hui 
celte chasse est parfaitement licite. Il est permis de se deman- 
der : Doit-elle l'être à l'avenir? 

Avant de faire un simple aperçu de statistique, je tiens à 
faire celte remarque, c’est qu'à partir du jour de l'ouverture 
jusqu’à la fin septembre, il n’y a et il ne peut y avoir que des 
Insectivores, par la raison que les autres oiseaux ne com- 
mencent à passer qu’en octobre, qu'il y a très-peu ou presque 
pas d'oiseaux du pays, excepté les Moineaux. 

Eh bien, comptons si c’est possible la quantité de ces oiseaux 
qui sont tués au fusil, pendant ces quarante-cinq jours, dans 
le Var seulement; car exceplé les vrais amateurs, qui ne 
chassent que le Lièvre, le Lapin, le Perdreau et la Caille (et 
qui, soit dit entre nous, ne sont pas déjà si nombreux), le res- 
tant des chasseurs tue tout ce qui se présente. 

Le département du Var compte environ 150 communes. On 
m'accordera bien que chaque commune fournit, l’une dans 
l’autre et par jour,deux chasseurs au fusil et aux petits oiseaux, 
ce qui nous donne un nombre de érois cents chasseurs. Je ne 
veux rien exagérer et me tenir plulôt en dessous qu’en dessus. 
de la réalité. Chaque chasseur tuera bien six oiseaux par jour, 
surtout s'ils ne sont que deux dans la commune. N’en prenons 
que quatre, Si l'on veut : nous arrivons au chiffre de douze 
cents. 


(1) L’auteur de cet article en sait malheureusement quelque chose. Son 
père, en travaillant dans son jardin, au quartier de l’Abattoir, reçut en plein 
visage une partie de la décharge d’un fusil d’un chasseur imprudent: un 
plomb creva l'œil gauche qu’il perdit complétement, 


566 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Douze cents oiseaux par jour multipliés par guarante-cinq 
nous donnent le chiffre de cinquante-quatre nulle, tous ou 
presque tous Insectivores. 

Et que l’on ne dise pas que ce calcul est ne car la 
commune de Toulon, les jours de beau temps, et le dimanche 
surtout, à elle seule les fournit, et ces jours-là c’est par 
milliers qu'il faudrait les compter; mais n’en prenons que 
cinquante mille. Quelle quantité effrayante et dans si peu de 
temps! Et notez en passant que la plupart de ces oiseaux, qui 
nous reviennent au printemps, séjournent dans nos contrées, 
y nichent et ne nous quittent plus qu'en septembre. Si une 
partie seulement de ces oiseaux qui sont tués au fusil pouvait 
se reproduire, dans quelques années une quantité prodigieuse 
d’Insectivores peupleraient nos campagnes et nos jardins, et 
incontestablement nos récoltes n’en iraient que mieux. 

Je crois avoir signalé, pour tout homme de bonne foi et 
qui n'a pas de parti pris, une des causes principales de la 
destruction des Insectivores. Je sais bien qu’il existe encore, 
et je dois le dire, une espèce de destruction (que je n’appel- 
lerai pas une chasse, car ce n'en est pas une) qui consiste à 
tendre des milliers de piéges sur les terres avancées dans la 
mer et sur certaines îles, où les oiseaux qui reviennent et 
débarquent au printemps, fatigués et affamés par une longue 
traversée, sont pris en grandes quantités par de nombreux 
braconniers qui en font un commerce illicite; mais chacun 
sait que cette espèce de carnage n’est point permis, et c'est 
aux autorités à veiller à le faire cesser. 

Nous sommes d'accord sur le mal, et après l'avoir signalé, 
voyons s’il est possible d’y porter remède. 

Je ne me dissimule pas qu'il est très-difficile par une loi ou 
par un arrêté d'en arriver là; généralement, nous n'avons 
pas assez le respect de la loi, et si quelque chose doit nous 
toucher c’est notre intérêt; c’est, Je crois, le côté le plus sen- 
sible. 

Il faudrait apprendre à nos concitoyens à ne pas nous 
priver de nos alliés les plus utiles en les tuant; c’est une 
question du plus haut intérêt, elle touche tout le monde et il 


LES OISEAUX ET LA CHASSE. 567 


ne faut pas désespérer d’y arriver avec le temps; car, un 
exemple à citer : avant que la loi eût interdit la chasse aux 
Hirondelles, on voyait tous les jours des chasseurs les tuer; 
quelques-uns même les tuaient, histoire de s'amuser, ou mieux 
pour apprendre à tirer au al 

Eh bien, cela ne se voit plus, ou du moins très- rarement : 
les oran s ont compris que chaque Hirondelle qu’ils tuaient, 
c’étaient des millions d’insectes qu'ils laissaient vivre aux dé- 
pens de nos récoltes; aussi je ne vois pas pourquoi ce qui a 
été bon et efficace pour les Hirondelles ne le serait pas pour 
les autres Insectivores. Je dis aussi que le grand intérêt de 
l'agriculture le commande et que cet intérêt doit dominer le 
plaisir de la chasse. 

Je termine ce premier article en émettant les vœux sui- 
vanis : 

Que la chasse soit ouverte le plus tard possible; qu’elle ne 
soit, à partir de l'ouverture jusqu’à la fermeture, absolument 
autorisée que pour le gros gibier, tels que Lièvres, Lapins, 
Perdreaux, Cailles, etc. 

Que les Insectivores ou Becs-Fins soient protégés par un 
arrêté de M. le préfet, qui en interdirait complétement la 
chasse. 

Que la chasse aux Granivores ou Becs-Durs ne soit autorisée 
qu’à partir du 1 octobre, époque où les Insectivores ont à 
peu près terminé leur migration. Avant cette époque, défense 
absolue et complète de toute espèce de chasse aux petits 
oiseaux, quels qu’ils soient. 

Ordre aux employés de l'octroi de dresser des contraven- 
tions à ceux qui, aux époques prohibées, seraient trouvés 
possesseurs de petits oiseaux. Visite par la police sur les 
marchés et établissements publics. Contraventions contre tous 
les délinquants. 

Je suis persuadé que par tous ces moyens réunis, un peu 
de bonne volonté et de bon sens de la part de toutle monde, 
nous arriverons au résullat que nous désirons, ef nous aurons 
rendu un immense service à l’agriculture 


568 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Il 


LES GRANIVORES OU BECS-DURS. 


Il est possible, monsieur le docteur, que sur ies Granivores, 
notre manière de voir ne soit pas précisément la même, car 
l'utilité de ces oiseaux ne m'est pas encore démontrée, au 
contraire. 

J’accorde bien qu’à l’époque des nids, des sauterelles et 
quelques autres insectes sont donnés en pâture aux petits; 
mais ce n’est absolument qu’à cette époque, d’ailleurs fort 
restreinte, qu'ils peuvent être utiles à l’agriculture. 

D'après les observations que j'ai pu faire moi-même, voici 
ce qui à lieu le plus souvent : Aussitôt qu’une semaille est 
faite, peu importe la saison et la semence, on voit apparaître 
tous les Granivores des environs, qui viennent jouer du bec 
et des pattes, enlever et manger d’abord les graines qui n’ont 
pas été enfouies à la profondeur voulue, et le plus souvent, ce 
qui est le plus fâcheux, celles qui commençant à germer sont 
tirées avec le bec et détruites. Quant aux Jeunes pousses des 
plantes maraichères, fourragères et légumineuses, un grand 
nombre de Granivores en sont irès-friands, et naturellement 
ils ne s’en font pas faute. Il est inutile d’ajouter que sitôt l’'ap- 
parition de la moindre récolte, ils ne se nourrissent presque 
que de graines et de grains; aussi les agriculteurs sont una- 
nimes sur ce point, et je suis de leur avis : si les Granivores 
rendent quelques services à l’agriculture à l’époque des nids, 
d'un autre côte le mal qu'ils font au moment des récoltes est 
si grand, que l’on doit tenir la balance égale entre les services 
qu'ils rendent et le mal qu'ils font. 

Je suis persuadé qu’en agriculture pratique, on ne doit s’en 
préoccuper que jusqu'à un certain point, et que toutes les 
prohibitions que nous demandons pour les Insectivores ne 
doivent pas leur être accordées. 

IL y a un Granivore que tout le monde connaît et dont il 
faut que je dise quelques mots : c’est le Moineau. Malgré tout 
ce qu'on a dit et tout ce qu'on pourra dire pour ou contre cet 


LES OISEAUX ET LA CHASSE, 569 


oiseau, j'avoue franchement que si je connaissais un moyen 
de les exterminer tous, je l’emploierai el nous en serions 
débarrassés d’un seul coup ; je suis sùr que peu de proprié- 
taires et agriculteurs en seraient fâchés. Je ne veux point 
énumérer les méfaits dont ils se rendent coupables; ils sont 
trop nombreux, et d’ailleurs ils sont toujours présents à la 
mémoire de ceux qui en sont les victimes. Si à l’époque des 
nids, un moyen quelconque pouvait être trouvé pour ne prendre 
que les Moineaux, je ferais des vœux pour qu'il fùt employé ; 
inais je ne demanderais jamais qu'aucune tolérance soit 
accordée par les arrêlés sur la chasse, parce qu’il est arrivé 
et il arrivera toujours ceci, qu'au lieu de se contenter de ne 
prendre que les Moineaux, la plupart de ceux qui font cette 
chasse prennent et détruisent presque tous les Insectivores 
qui ont niché aux environs, cette chasse ne pouvant se faire 
qu'à l’abreuvoir, au moment des chaleurs et de la sécheresse. 

Je me trouve tout naturellement amené à parler, à cause 
de cela, d’un fait qui m'est personnel. Tout le monde peut se 
rappeler qu'une année, je ne saurais dire laquelle, mais peu 
importe la date, M. le préfet du Var, fatigué sans doute des 
plaintes qu’il recevait contre les Moineaux, autorisa la chasse 
à l’abreuvoir pour les prendre. 

Je connaissais particulièrement à cetle époque un Génois 
ne vivant absolument que de braconnage. Un jour de l’année 
dont je parle, il me dit: «J'ai trouvé un endroit trés-favorable 
pour établir un poste à labreuvoir; je l'ai arrangé à ma con- 
venance, et dans quelques jours, lorsque les Moineaux en 
auront pris l'habitude, j'espère en prendre une grande quan- 
tité.» M'ayant beaucoup vanté l'endroit, me l'ayant fait con- 
naître et dit le jour qu'il devait y aller chasser, je fus le trouver 
pour me rendre compte de ce qu'il aurait pris. Je trouvai un 
poste parfaitement établi sous tous les rapports. Mon chasseur 
était radieux ; il me montra les Moineaux qu’il avait pris et 
qu’il avait avec lui dans sa cabane : il devait y en avoir près 
de cent. Selon moi, dans un poste si bien choisi, un si habile 
chasseur, et le premier jour de chasse surtout, ce n’élait pas 
trop. Je le lui donnai à comprendre. Alors, comme il n'avait 


570 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


aucun motif pour se méfier de moi, il me montra une cachette 
dans les broussailles à quelques pas de la cabane, et là, dans 
un petit sac qu'il me renversa pour mieux me les montrer, je 
vis à peu près autant d’Insectivores que ce qu’il avait de 
Moineaux. Rossignols, Fauvettes, Mésanges, quelques Pinsons 
et Verdiers, mais en plus petit nombre, s’y trouvaient; jeunes 
et vieux, tous étaient confondus. Je fus étonné d'un pareil 
résultat, et je lui dis : «Je comprends que vous vendiez les 
Moineaux, la chasse en est autorisée ; mais ces Becs-Fins, qu’en 
ferez-vous? En les achetant, on commet un délit. — Bah! me 
répondit-il, je sers quelques restaurateurs qui me payent ces 
oiseaux le prix que j'en veux. Ils préfèrent un Bec-Fin à tous 
les Moineaux ; par conséquent, les Moineaux n'étant pas prisés 
par les gourmets, je prends de préférence les Becs-Fins : le 
bénéfice est plus grand. » Que répondre à cela ? 

Eh bien, voici ce que je dis, et je ne cesserai de le répéter: 
Si les perquisitions de la police dans les restaurants, hôtels et 
marchands de volaille étaient faites plus sérieusement et se 
renouvelaient de temps en temps, on finirait iôt ou tard par. 
mettre la main sur quelques délinquants ; les tribunaux alors 
en feraient prompte et bonne justice. 

Il y a un vieux proverbe qui peut trouver son application 
ici 


Pas dé recéleur, pas de voleur. 


Le jour où le braconnier ne trouvera plus à vendre le pro- 
duit de ses rapines, le braconnage sera détruit. 

Avant de terminer cet article, je dois dire quelques mots 
sur le passage de ces oiseaux. 

Les Granivores ou Becs-Durs ne commencent à passer que 
dans les premiers jours d'octobre, encore faut-il pour cela 
que les temps soient favorables, c’est-à-dire qu’il ait déjà 
bien plu et que les vents qui règnent à celte époque soient à 
l'ouest ou au nord-ouest; si le contraire a lieu, ce qui arrive 
assez souvent, et que nous ayons les pluies, le passage natu- 
rellement se trouve retardé. Le plus fort du passage a lieu 
généralement, pour ne pas dire toujours, dans les dermiers 


LES OISEAUX ET LA CHASSE. 571 


jours d'octobre ou au commencement de novembre; il n’est 
pas rare pendant cette période de temps, surtout sl règne 
une légère brise de nord-ouest, de voir passer des nuées de 
Pinsons, Verdiers, Chardonnerets, Linottes, etc., etc., mais 
les plus en nombre sont toujours les Pinsons ; il en passe telle- 
ment, surtout sur le littoral de la mer, que l’on est ravi, et 
l’on se demande d’où nous peuvent venir tant d'oiseaux. Que 
l'on ne se figure pas que j'exagère, chacun peut le voir et s’en 
rendre compte, 

Qu'il me soit permis à ce sujet de faire quelques remarques : 
Premièrement, je dis qu'on est obligé de convenir que les 
oiseaux qui habituellement sont chassés au poste avec appeaux 
ou à la glu, sont encore les plus nombreux. 

Que depuis très-longtemps, ces deux chasses se font dans 
notre pays; il faut encore y ajouter les filets, qu'il ne faut 
pas oublier. Eh bien, j'affirme, sans crainte d’être démenti 
par les hommes compétents, que depuis plus de vingt ans, le 
passage de ces oiseaux est toujours ou à peu de chose près 
resté le même; les années où le passage est moins fort sont 
celles où les temps sont contraires, les oiseaux prennent alors 
une autre direction. 

La conclusion à faire, c’est que ces chasses ne font absolu- 
ment rien au passage. 

Deuxièmement, si ces oiseaux que nous voyons passer en si 
grand nombre, et dont la plus grande partie nous viennent de 
l'étranger, puisque nous n'avons presque pas d’oiseaux du 
pays, puisqu'ils ne font, je le répète, absolument que passer, 
sans séjourner un seul instant, de quelle utilité peuvent-ils 
être pour l’agricullure, en admettant même l'hypothèse qu'ils 
soient utiles? 

La troisième remarque que J'ai à faire est celie-ci : c’est la 
différence qui existe entre le passage des Granivores et des 
Insectivores. Les Granivores, comme je l’ai dit plus haut, 
passent par familles et par vols, le plus souvent fort nombreux, 
et ne s'arrêtent qu’à la voix des appeaux. Pour les Insectivores, 
au contraire, 1l n’est pas nécessaire d’avoir des appeanx : ils 
passent isolés, l'un après l’autre, ne faisant pour ainsi dire que 


572 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


sauter. En effet, voyez le Cul-Blanc, le Traquet, dans un champ 
labouré ou pioché ; on les voit, perchés sur une motte, porter 
leurs regards de droite à gauche, épier les insectes, en 
descendre s'ils en voient un, le saisir et remonter ensuite sur 
une autre élévation pour se livrer à la même besogne. Il en 
est de même pour les Rossignols, toutes les Fauvettes, les 
Mésanges et généralement tous les Becs-Fins ; on les voitsuivre 
les haies, s'arrêter à tous les buissons, sauter d’une branche 
à l’autre, saisir par-e1 par-là tous les insectes qu’ils voient; 
le Torcol est toujours posé à la naissance des branches d’un 
arbre, cherchant à découvrir une fourmilière, dont il est le 
destructeur acharné. | 

Tous les oiseaux à bec fin semblent provoquer, pour ainsi 
dire, par leur insouciance et leur manière de faire, les chas- 
seurs à les tuer; c’est tellement ainsi qu’on est étonné d’en 
voir encore quelques-uns arriver à leur destination. C’est une 
des raisons principales qui me font souhaiter que la protection 
à leur accorder n’en soit que plus grande (1). 

Je reviens maintenant, pour terminer cet article, aux Gra- 
nivores ou Becs-Durs. Tous les Granivores ont à peu près fini 
leur passage à la fin de novembre ; je pourrais être même plus 
absolu, et dire que les oiseaux qui n’ont pas fait leur migra- 
tion à cette époque ne la font plus; ils restent et séjournent 
où ils se trouvent, ct généralement habitent nos contrées. 
C’est ce que nous appelons, en terme de chasse provençale, 
les Trévadis (sédentaires). 

Cette catégorie d'oiseaux tend aussi à disparaître tous les 
jours, et je tiens à signaler la cause des disparitions. Si l’on 
veut avoir des oiseaux sédentaires qui habitent et nichent 
dans nos pays, le moyen est bien simple. J'ai dit dans ce 
qui précède, que le passage était terminé à la fin de novem- 
bre; que les oiseaux qui n'avaient pas fait leur migration 


(1) Cette observation très-judicieuse confirme notre argumentation en 
faveur des Insectivores ; la différence dans la manière d’être des Bees-Finset 
des Becs-Durs résulte de leur régime, et justifie, pour la conservation des 
espèces auxiliaires, les mesures recommandées avec logique par M. Bech. 

(Note du docteur lurrel.) 


LES OISEAUX ET LA CHASSE. 573 


ne la faisaient plus : j'ajoute que le nombre de ces oiseaux 
est très-grand. Beaucoup de personnes peuvent se rappeler 
qu'aux environs de Toulon même, sans qu’il fût nécessaire 
d'aller bien loin dans les campagnes, on voyait de tous les 
côtés des vols innombrables de ces oiseaux. Eh bien, si l’on 
tient à les avoir, à les conserver, qu'on ne les détruise pas! 

Une simple mesure restrictive doit suffire pour amener ce 
résultat ; cette mesure la voici: ne permettre l’usage des ap- 
peaux et appelants que pendant les mois d’octobre et de 
novembre, c’est-à-dire que les chasses qui se font aux postes 
soient absolument réduites à l’époque du passage des Grani- 
vores et terminées en même temps que celui-ci. Par consé- 
quent, n’auloriser à partir du 1° décembre que la chasse à tir 
et à courre pour les Granivores. Fermer la chasse le 31 jan- 
vier el ne laisser après que le gibier de marais. 

Je suis persuadé que par cette simple mesure, nous arrive- 
rons à avoir des oiseaux de pays, qui nous font absolument 
défaut maintenant. 


IT 


DE LA CHASSE EN GÉNÉRAL. 


Sur cetle troisième question, je ne vous dirai rien, mon- 
sieur le docteur, que tout le monde ne sache et que vous ne 
sachiez vous-même mieux que moi, c’est-à-dire que la chasse 
a été et est encore de «nos jours la passion dominante du plus 
grand nombre. En effet, riches et pauvres, tous aiment à se 
procurer ce plaisir; Je crois qu'iln’y en a pas de plus honnête 
et de plus innocent, de plus salutaire pour la santé du corps 
et de l'esprit; par conséquent, le plaisir de la chasse doit être 
respecté. 

Les personnes qui s'occupent des questions sociales à l’ordre 
du jour devraient s’en préoccuper : il y a là une question dehaute 
moralité que l’on ne devrait pas oublier (des questions pareilles 
n'étant pas de ma compétence, ce n’est pas à moi à les traiter); 
mais je dirai seulement à ceux qui demandent la prohibition 
complète des seules chasses possibles dans notre pays : il n’est 


PR RE ER ER 


574 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


point permis à tout le monde d’avoir la passion des voitures, 
des chevaux, du théâtre, des bals, cercles, etc., etc., 1l y a des 
passions et des plaisirs qui sont peut-être moins innocents 
que les nôtres, nous ne demandons pas qu’ils soient défendus, 
mais nous vous dirons : laissez à nous, travailleurs des cam- 
pagnes et des villes, le seul plaisir honnête que nous puissions 
nous procurer ; 1l ne nous est pas donné de faire ces grandes 
chasses dont nous lisons parfois la description dans les jour- 
naux, nous ne les envions pas même, mais laissez-nous les 
seules chasses que nous puissions faire, c’est notre unique plai- 
sir, noire seule distraction. 

La loi et les arrêtés sur la chasse ne doivent servir qu'à pré- 
venir et à réprimer les abus; toute entrave, toute vexation à 
ce sujet, ne servent qu'à aigrir une partie honnête de la popu- 
lation sans aucune utilité pour la société. 

Les plus grands abus de la chasse sont d’abord le bracon- 
nage, et ensuite ceux qui, sans être précisément braconniers, 
en font aux époques autorisées un métier. Eh bien, détruisons 
s’il est possible le braconnage, et l'habitude de ceux qui en 
font un métier ; faisons en sorte que la chasse ne soit qu'un 
délassement, qu’un plaisir accessible à tous, à partir du plus 
riche jusqu’au plus pauvre : à chacun selon ses moyens, et Je 
crois que nous aurons fait une bonne œuvre sous tous les 
rapports. | 

Comme le braconnage est le plus grand abus de fa chasse, 
je tiens à donner encore quelques renseignements sur les bra- 
conniers. Ces gens-là ne vivent que d’une maniére illicite, 
quand ils ne braconnent pas, ils sont contrebandiers : tous les 
moyens pour ne pas travailler honnêtement leur sont indiffé- 
rents. J'en ai eu un à mon service à qui une condamnation 
pour contrebande avait donné l’idée de se remettre au travail, 
il n’a pas pu y tenir, et après quelques semaines d’assiduité, 
il est parti, sans doute pour se livrer de nouveau à son ancienne 
manière de vivre. fl me disait qu’il est impossible de se figu- 
rer la quantité de gibiers gros et petits qui sont détruits par 
eux; je ne veux pas citer le nombre de Levreaux, Lapins et 
Perdreaux surtout, qu'il me disait être introduits dans Toulon 


LES OISEAUX ET LA CHASSE. 579 


seulement, avant même l'ouverture de la chasse, de la complai- 
sance qu'ils trouvent auprés des conducteurs des voitures et 
des omnibus des villages des environs de Toulon pour cette 
introduction, et de la facilité que l’on trouve dans cette ville 
pour s’en débarrasser à des prix toujours très-élevés. 

Qu’une seule remarque me soit permise à ce sujet: Qui 
est-ce qui consomme tous ces gibiers en temps défendu? 

Assurément, ce ne sont pas les pauvres gens! 

Généralement la manière de faire des braconniers est celle-ci, 
ils ont toujours quelques associés, et pendant que l’un d’eux 
se livre à une chasse quelconque, les autres font le guet, Ils 
parcourent ainsi un grand nombre de communes, et jamais à 
époques fixes; tous les moyens de chasse sont connus et em- 
ployés par eux. J'avoue qu'il est très-difficile d’avoir raison 
de ces gens-là ; mais avec les moyens que j'ai indiqués et ‘que 
je renouvellerai dans mon résumé, le nombre peut en être 
considérablement diminué. 

J'arrive maintenant à la chasse au poste, à tir et à la alu 

pour les oiseaux de passage, avec appeaux. 

Gelte question est brülante et toute d'actualité ; J'avoue que 
je ne la traite qu'avec perplexité. Cependant je crois, sans être 
iéméraire, que sur cetle question, on voudra bien m’accorder 
une certaine compétence ; et c’est surtout à cause de cela que 
je tiens à dire le fort et le faible de ces deux modes de chasse. 

Je considère la chasse au poste et la chasse à la glu 
comme pouvant marcher ensemble et de pair quant au résul- 
tat. Ge que je soutiens ici peut paraitre paradoxal, c’est pourtant 
la vérité; Je le prouverai chiffres en main et quand on vou- 
dra. Avant d'aller plus loin, je dois faire une observation très- 
importante à mon point de vue : j'ai dit plus haut que, outre 
les braconniers proprement dits, il existe une autre catégorie 

- de chasseurs qui font de la chasse un métier : cela ne devrait 
point être, c'est encore un abus à signaler et à détruire. Le 
plus grand nombre de ces chasseurs sont des étrangers : il y a 
pourtant aussi quelques gens du pays qui se livrent à ce com- 
merce. lis abandonnent aux époques vouiues les occupations 
ou le travail manuel qui les faisaient vivre, pour se livrer ex- 


576 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


clusivement à la chasse à la glu, et ils prennent, je ne dirai 
pas les quantités qu’on veut bien leur faire prendre, mais 
enfin tout ce qu'ils peuvent, et qu'ils font vendre vivants au 
marché. 

Ce sont ce que j'appellerai les braconniers de la qlu. 

Voulez-vous que ces gens-là reprennent les occupations 
journalières qui les faisaient vivre auparavant, et ne plus 
tolérer cette espèce de braconnage ? le moyen que j'indique 
est celui-ci : 

Nul ne pourra à l'avenir se livrer à la vente des oiseaux 
vivants, sur les marchés, places publiques, et n'importe en 
quel endroit que ce soit, sans avoir été soumis auparavant à 
une patente de 100 francs par an pour se livrer à ce come 
merce. 

Aux bureaux de l'octroi, que pas une quittance ne soit déli- 
vrée à ceux qui déclareraient, ou seraient trouvés porteurs 
d'oiseaux vivants pour la vente, sans avoir prouvé qu'ils sont 
soumis à celte patente; car il ne faut pas oublier qu'il y a 
mille moyens pour ne pas déclarer et entrer en fraude quel- 
ques douzaines d'oiseaux morts; mais il devient impossible 
de dissimuler, aux yeux des employés de l'octroi, des cages 
pleines d'oiseaux vivants destinés à la vente. 

Par ces moyens, je suis sûr que peu de chasseurs de cette 
catégorie y résisteraient, et que la chasse à la glu réduite à 
ces proportions devient tout à fait inoffensive. 

Jde reviens maintenant à la chasse au poste et à ur: chacun 
sait que cette chasse se fait au moyen d’appeaux, el sur des 
cimeaux placés sur des arbres; qu'il y a une cabane où se 
tient le chasseur, etc., etc.; je ne vois pas la nécessité d’en- 
trer dans des détails que tout le monde connait aujourd’hui. 
Je constate seulement que cette chasse est faite par toutes 
sortes d'individus, appartenant à presque toutes les classes de : 
la société ; mais plus particulièrement elle est le partage de 
l'âge mùr et de l’homme reliré des affaires, par la raison que 
cette chasse n’occasionne aucune fatigue, ne demande aucune 
peine, aucun travail. 

La chasse à la glu, au contraire, est pour ainsi dire l’apa- 


LES OISEAUX ET LA CHASSE. 5/7 


nage de la jeunesse ou tout au moins d’un homme alerte et 
vigoureux; celui qui se livre à cette chasse est obligé de se 
lever matin, de préparer ses gluaux, de les placer ensuite sur 
l'arbre où se fait cette chasse ; d’endurer l’humidité et le froid 
de la matinée; une fois la chasse terminée, enlever tout cela 
pour recommencer la même opération, chaque fois qu’il vou- 
dra s’y livrer de nouveau : voilà la cause qui fera que cette 
chasse ne sera jamais très-répandue. 

En effet, figurez-vous nos 9ros bourgeois, nos rentiers, nos 
employés ou fonctionnaires en retraite, tous plus ou moins 
ventrus, faire de la gymnastique sur un arbre, sauter d’une 
branche à l’autre pour prendre un oiseau; non-seulement ce 
serait peu agréable, mais ce jeu pourrait leur être fatal. D’un 
autre côté, faites donc engluer des pieds à la tête nos jeunes 
dandys, à qui 1l faut une tenue complète de chasseurs fashio- 
nables quand ils vont à la chasse, et qui ne chargent leur fusil 
qu'avec des gants, crainte de se salir les doigts. On est obligé 
de convenir que c’est impossible. [l ne reste donc que quel- 
ques jeunes gens, quelques rares amateurs, gens pénibles 
entre tous, qui ont, comme tous les chasseurs, le droit que 
leur passe-temps et leur plaisir soient respectés. 

J’ai dit que la chasse au poste et à tir peut aller de pair avec 
la chasse à la glu quant au résultat : je ne veux pas entrer dans 
des détails aujourd’hui sur cette question, j'y reviendrai plus 
tard si c’est nécessaire ; je ferai cependant une remarque. Au- 
tant les chasseurs à la glu vont devenir rares parle moyen que 
J'ai indiqué, autant les chasseurs au poste sont nombreux, et 
tendent tous les jours à le devenir davantage (1). 

J'ai encore une observation à faire, et que l’on ne doit pas 
oublier, c’est que les individus qui chassaient à la glu, et qui 
en prenaient le plus grand nombre, sont ceux précisément qui 
en faisaient un métier, qu'ils ne pourront plus faire à l’avenir. 

Voilà toute la vérité que je tenais à dire, dégagée de toutes 
les exagérations dont on se plaît à entouter les questions les 


(1) On en compte dix mille aux environs de Marseille. (Voyez Les chasses 
de la Provence devant le Sénat, par L. Gay, avocat. Page 62.) 
3° SÉRIE, T. |. — Septembre 1874. 37 


578 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


plus claires et les plus simples. Car je me rappelle, à cette 
occasion, qu'une pétition du Comice agricole de Toulon faisait 
prendre, à chaque chasseur à la glu, cinq à six cents oiseaux 
par jour; ces messieurs ne réfléchissaient pas que le fait qu’ils 
avançaient est matériellement impossible. Sans chercher à dé- 
montrer le temps qu’il faut pour prendre seulement un oiseau, 
je dirai à ces braves gens : Si le fait que vous avancez est vrai, 
je ne vois pas que vous ayez raison de vous plaindre de la 
rareté des oiseaux (1). 

Tout ce que je viens de dire pour la chasse à la glu peut 
s'appliquer exactement aux filets ; pour l’une ou l’autre de ces 
chasses, il ne peut et il ne doit y avoir que des amateurs. Qui 
que ce soit doit avoir le droit de s’y livrer, si tel est son plai- 
sir. Liberté entière et complète pour ces chasses, aux époques 
autorisées el aux oiseaux permis. 

A propos des chasses et des oiseaux autorisés, je dois faire 
encore une observation pour bien me faire comprendre. J'ai 
dit que tous les Insectivores ou Becs-Fins devaient être proté- 
oés ; J'ajoute que pas un de ces oiseaux ne peut et ne doit être 
autorisé pour appeaux, mais ce que ie n’admets pas et ce que 
tout homme sensé ne peut admettre, c’est qu’au moment du 
passage, alors que je me livrerai à une chasse permise, quel- 
qu'un ait le droit de me faire une contravention, parce qu’il 
aura pris la fantaisie à un Bec-fin quelconque de venir se faire 
tuer, expressément pour me faire commettre un déht, ne 
l'ayant pu reconnaître et étant de bonne foi. | 

Je le répète, on ne peut admettre cela. Voyons ce qui peut 
arriver aux chasseurs celte année. La chasse à la glu est auto- 
risée, mais pour les Grives seulement. On peut admettre faci- 
lement que là où l’on prend des Grives, d’autres oiseaux peu- 
vent aussi venir s’y prendre : un Pigeon, par exemple, un 
Geai, un Pinson, rarement, si vous voulez, je l’admets, car il 


(1) Cette asserlion est vraie, et même bien au-dessous de là vérité pour 
les braconniers qui chassent aux piéges dits sauterelles, et n’est pas aussi 
exagérée que le dit M. J. Bech, pour les chasses à la glu des braconniers 
piémontais dont il flétrit avec raison la coupable industrie. 

(Note du docteur Tuartel.) 


LES OISEAUX ET LA CHASSE, 579 


faut supposer la bonne foi, et dans ce cas, vous n'avez pas 
d’autres appeaux que les Grives, mais enfin ce cas peut se 
présenter. Croyez-vous que le chasseur aux Grives, qui verra 
un Pigeon pris à ses gluaux, le laissera s'envoler ? allons donc! 
il aura pourtant et forcément pour ainsi dire commis un 
délit. 

Eh bien, je dis que la loi doit prévoir ce cas, et ne jamais 
placer le chasseur entre l’alternative de satisfaire sa passion 
en s emparant d’un oiseau qui est venu de lui-même se faire 
prendre, ou de commettre un délit en le prenant. 

Si la chasse doit et ne peut être qu’un délassement et un 
plaisir, ce n’est qu’à la condition qu’il n’y ait pas d’équivo- 
ques possibles ; différemment, mieux vaut ne pas chasser du 
tout. 

Je n’ai pas la prétention de croire que par les moyens que 
J'ai indiqués, tous les abus que j’ai signalés soient détruits ; 
non, je sais parfaitement qu’en tout et partout, les abus ne 

disparailront qu’avec l’homme; mais je suis persuadé que le 
nombre peut en être diminué, et par conséquent il peut en 
résulter quelque bien, au point de vue de l’agriculture surtout. 
de profiterai de cette occasion, avant de terminer ce travail, 
pour dire à nos concitoyens, sans exagéralion comme sans 
faiblesse : oui, vous le savez aussi bien que nous, le mal existe, 
vous ne pouvez vous le dissimuler; je ne vous dirai pas la 
famine est à nos portes, non, il faut espérer qu'avec l’aide de 
Dieu nous ne la verrons jamais, mais soyons prudents; je 
vous répéterai ce que les hommes de la science nous disent 
tous les jours : la plus grande partie de nos végétaux sont as- 
saillis et dévorés par les insectes; laissons donc vivre les. 
oiseaux inseclivores, puisque Dieu les a créés pour manger les 
insectes; aucun remède efficace n'a encore été trouvé pour 
la vigne, c’est pourtant un insecte qui la tue, essayons toujours 
les insectivores, ce remède sera peu coûteux, raison de plus 
pour l’employer. 

Soyons donc conséquents une fois, et sachons faire un sacri- 
fice à nos véritables intérêts. Si nous n'avons plus de Becs-Fins 
à chasser parce qu'ils nous sont utiles, il nous reste encore 


580 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


les Granivores que nous chasserons à l’époque du passage; 
notre passion et notre plaisir pourront encore être satisfaits. 

Nous aurons au moins là consolation de pouvoir dire que 
nous avons été prévoyants, et que nous avons tout fait, dans la 
limite du possible, pour arriver au résultat que tout homme 
de bien doit désirer pour son pays, c’est-à-dire l'abondance 
des récoltes, la prospérité et le bien-être pour tous. 

Il ne me reste plus maintenant qu’à me résumer et à for- 
muler les vœux suivants : 

1° Que la chasse soit ouverte le plus tard possible et fermée 
le 31 janvier, qu’elle ne soit autorisée, à partir de l’ouverture 
jusqu'à la fermeture, que pour le gros gibier tels que Lièvres, 
Lapins, Perdreaux, Cailles, etc. 

2° Que les oiseaux insectivores ou Becs-Fins soient protégés 
par un arrêté de M. le Préfet, qui en interdirait absolument 
le chasse en tout temps. 

3° Que la chasse aux Granivores ou Becs-Durs au moyen 
d'appeaux et appelants, soit avec gluaux et filets ou au poste et 
à tir, ne soit autorisée qu’à partir du 1° octobre pour cesser 
complétement le 30 novembre. A partir du 1° décembre jus- 
qu’à la fermeture, ne laisser absolument que la chasse à tir et 
à courre pour les Granivores. Soumettre à une patente de 
190 francs par an tout individu qui voudra se livrer au com- 
merce des oiseaux vivants, n'importe en quel endroit que ce 
puisse être. 

h° Que le colportage el la vente des oiseaux pris à des chasses. 
autres que celles autorisées dans notre département soient 
formellement interdits; par conséquent, que les oiseaux qui 
arrivent par milliers sur nos marchés, par les chemins de fer 
ou autrement, soient confisqués ; attendu qu'il est incontesta- 
blement prouvé que ces oiseaux n’élant pas tués au fusil, sont 
pris à des chasses non autorisées dans notre département (1). 


(4) Cette mesure est la conséquence logique de la défense de la chasse 
dans notre département. Si elle n’était pas adoptée rigoureusement, à quoi 
servirait cette défense ? À nous faire jouer un rôle de dupes. En effet, tandis 
que nous, Chasseurs du Var, nous ne pourrions pas même tirer un Serin 
avec appeaux, nous aurions l'agrément de voir regorger, sur nos marchés, 


LES OISEAUX ET LA CHASSE. 581 


5° Que les visites et perquisitions de la police sur les mar- 
chés et établissements publics, hôtels, restaurants, marchands 
de gibier, voitures et ommibus desservant les environs de Tou- 
lon, soient faites aussi sérieusement et aussi souvent que pos- 
sible. 

6° Avant l’époque des nids et pendant cette période, que 
des affiches soient apposées par le soin des Maires dans toutes 
les communes du département, portant défense de les détruire 
et rendant les parents responsables des dégâts commis par 
leurs enfants. Ordre aux gardes champêtres, gardes particu- 
liers et gardes forestiers de parcourir les fermes et habitations 
éloignées des villages, afin que tous soient prévenus, et que 
nul ne puisse prétendre l’ignorer. 

Tel est, monsieur le docteur, mon avis sur les oiseaux et la 
chasse, et les divers moyens que je propose pour en détruire 
les abus. Je vous ai répondu sincèrement, sans chercher à dé- 
guiser la vérité, sur toutes les questions que vous m'avez 
posées. Je sais parfaitement qu’en vous adressant à moi, vous 
n’aviez pas l’idée de vous adresser à un savant, vous vouliez 
avoir affaire à un homme des champs qui ne devait ses convic- 
tions à aucune autorité sur ces matières, mais seulement à sa 
propre expérience et d’après ses observations journalières. 

J'ai fait mon possible pour vous être agréable; puisse ce 
simple aperçu être de quelque utilité et vous servir à quelque 
chose (1)! 


l’excédant des chasses de nos voisins plus heureux que nous. Il faut avouer 
que ce serait de la dernière injustice. 

(1) M. J. Bech, président de la Société des jardiniers-maraîchers de 
Toulon, est, nous n’avons pas besoin de le démontrer après la lecture de 
son apercu, un homme pratique, excellent observateur et fort intelligent ; 
aussi devons-nous, à sa louange, ajouter que, bien qu’il ne croie pas devoir 
réclamer la protection de la loi contre la chasse à la Grive, le plus gros 
gibier des postes, il ne méconnaît point pour cela les services que cet oiseau 
rend à l’agriculture par ja quantité d’insectes qu’il consomme, et qu’il le 
classe parmi les plus utiles. (Note du docteur Turrel.) 


GRAINAGE CELLULAIRE 
DE L'ÉDUCATION D’UNE ONCE 


D'APRÈS LE SYSTÈME PASTEUR 


Lettre adressée à M. Maurice Girard, secrétaire du Conseil de la Société d'acclimatation 


Par M. le D  ÆE. MONGRAND. 


Monsieur, 


Au mois de juillet, vous m'avez fait l'honneur de venir 
visiter mon atelier de grainage (1). Vous étiez bien au courant 
des travaux de M. Pasteur sur la maladie des Vers à soie, et 
vous désiriez connaître avec plus de détail ce que pouvait être 
le grainage cellulaire d'une éducation d'une once. Vous avez 
pris un grand intérêt à m’entendre vous expliquer toutes les 
parties de celte opération, et pensant que sa description pour- 
rait intéresser bien des personnes, vous m’avez fait promettre 
de vous adresser une lettre sur ce sujet. Je vais m’acquitter 
de ma promesse. 

Une once de graines de 25 grammes, élevée en petite 
éducation, en vue de la reproduction, donnera au moins 25 ou 
26000 cocons. Sur le nombre, environ 5 pour 100 seront 
probablement rejetés comme défectueux. Parmi les papillons, 
on aura encore à éliminer ceux qui seront mal conformés, et 
dans certains moments, la disproportion des sexes fera perdre 
un certain nombre de papillons. Le nombre probable des 
couples sera de 12 000 environ. C’est sur celle quantité que 
l’on peut établir des prévisions. 

Il faudra préparer d’avance les linges nécessaires pour rece- 
voir les 12000 couples. Pendant l'hiver, des ouvrières seront 
chargées de confectionner les poches ou cellules, elles divise- 
ront du calicot commun en morceaux de 6 centimètres de 
larseur sur 18 de longueur, il faudra environ 210 mètres de 
calicot. À une extrémité du petit linge on fait un pli dont les 


(4) A Saintes, Charente-Inférieure. 


GRAINAGE CELLULAIRE D'UNE ONCE. 583 


deux bords latéraux sont faufilés avec un fil peu résistant, afin 
que lors de l’examen, on puisse facilement le casser pour 
ouvrir la poche el en retirer le papillon. Si le fil était trop 
solide, il faudrait avoir recours à des ciseaux; cette manœuvre 
ferait perdre quaire secondes à chaque linge, ou treize heures 
sur l’ensemble. Le pli faufilé des deux côtés forme une poche 
de 3 centimètres de profondeur. 

Le prix de revient des poches est d’environ 16 francs le 
mille. 

Il est indispensable de recommander aux ouvrières de livrer 
leurs cellules par paquets de cent, de les disposer toutes de 
la même manière et dans le même sens ; enfin de faire, à l’ex- 
trémité opposée à la poche, un pli d’un centimêtre et demi 
qui permettra de le déposer à cheval sur la ficelle. Si l'on ne 
suit pas ces indications, dans l’ensemble des opérations, on 
perdra au moins vingt-trois heures dans des moments où les 
minutes sont précieuses. 

Au commencement de mai on fera son éducation. On n’élè- 
vera que des graines que l’on aura faites soi-même, afin d’être 
assuré que l'éducation qui les a produites n’a pas présenté de 
traces de flacherie. On aura examiné soi-même les pontes au 
microscope à huit ou dix champs, pour être assuré qu’elles 
sont totalement privées de corpuscules : l'éducation faite en 
vue du grainage cellulaire ne doit pas être considérable. 
Avec deux onces ce serait déja beaucoup ; elle sera faite à large 
surface, on ne cherchera pas à pousser les Vers par la chaleur 
et de nombreux repas; 20 degrés ceniig. sont convenables ; 
quatre repas par jour dans les deux premiers âges, trois dans 
les trois derniers sont très-suffisants. 

Les cocons doubles étant généralement rejetés des graina- 
ges, il y aura grand avantage à abandonner la bruyère ; avec 
des claies Davril on a si peu de doubles, qu’en deux années 
les bons cocons qui auront remplacé les doubles produiront 
de quoi payer les claies. 

Après le déramage, on réjettera les cocons doubles, faibles, 
mal conformés, satinés, etc. ; si l’on se sert de claies Davril, 
cela ne réduira le nombre des cocons que d’environ 5 pour 400. 


584 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Les cocons, débourrés et disposés en filanes de 200, sont 
suspendus en attendant la sortie du papillon. Il serait bien 
utile d’espacer les naissances pour éviter un travail excessif 
dans certains jours; mais il ne faut pas trop espérer que les 
cocons tenus en lieu frais donneront leurs papillons beaucoup 
plus tard que ceux qui restent à la température ordinaire de 
cette époque ; à peine gagnera-l-on vingt-quatre heures. 

Nous voici arrivés à la sortie du papillon, la grande opéra- 
tion va commencer. 

Un chais frais et aéré, long de 40 mètres et large de 7, n’est 
pas trop spacieux pour le grainage de 42000 couples. Qua- 
ire rangs de montants de bois, fixés au plancher et au sol, 
serviront à soutenir les ficelles, les montants seront espacés de 
2 mètres dans chaque rangée, ei les rangs seront à 4",50 d’in- 
tervalle. Perpendiculairement à chaque montant, et à 12 cen- 
timètres de distance, sont clouées de petites traverses, le 
dépassant ; les unes de 15 centimètres supporteront les rangées 
paires de ficelles, les autres de 7 centimètres 1/2 supporteront 
les rangées impaires de chaque côté des montants. On pourra 
donc mettre deux rangs de ficelles sur deux plans différents. 
Avec cette disposition on pourra facilement étendre 4200 mé- 
tres de ficelles, ce qui est plus que suffisant. 

Les 120 filanes sont suspendues à 10 ou 15 centimètres du 
mur qu’elles tapisseni sur une longueur de & à 10 mètres. 

Il faudra se munir de 24 000 épingles grandes et fortes ; 
une moitié servira à fixer les linges sur les ficelles, l’autre à 
fermer les poches. Quelques jours à l’avance on tend les fi- 
celles sur les traverses les plus courtes, de manière que le 
plan profond soit fini le premier. Une personne dépose les 
linges sur les ficelles, à 2 centimêtres l’un de l’autre : cela se 
fait rapidement grâce au pli préparé d'avance ; une autre per- 
sonne passe après et fixe chaque linge avec une épingle. 

Lorsque les naissances deviennent nombreuses, voici com- 
ment il faut organiser le service, afin d’agir avec ordre et 
ménager le temps. De huit à onze heures du matin, quatre 
personnes saisissent de la main droite les papillons accouplés 
sur les filanes, et en garnissent une tablette tenue dela main 


GRAINAGE CELLULAIRE D'UNE ONCE. 585 


gauche ; ces tablettes sont alors déposées sur des tables posées 
à portée. D’autres personnes viennent les prendre et vont 
déposer les couples un à un sur chaque linge. Deux autres 
personnes surveillent tous les détails. Dans ces moments, huit 
à dix personnes sont à peine suffisantes pour qu’en trois heures 
de travail tous les couples soient en place. 

De cinq à sept heures du soir, quatre ou cinq personnes sont 
nécessaires pour désaccoupler les papillons, descendre le mäle 
dans la poche et la fermer avec une épingle. 

Quand le grainage est bien en train, le milieu de la journée 
est employé à mettre les femeiles dans la poche où le mâle est 
déjà renfermé. Il faut trois ou quatre personnes travaillant de 
midi à quatre heures; on attend pour enfermer les femelles 
que les œufs aient pris la teinte grise. 

Lorsque le premier plan est terminé, on tend les ficelles 
pour établir le deuxième plan sur les traverses les plus lon- 
gues. 

Au bout de six à sept jours, tous les papillons seront sortis, 
on aura alors d’autres occupations ; on ne se figure pas tout 
le travail que nécessite le grainage d’une éducation d’une 
once, et l’activité qu'il faut déployer pour la conduire avec 
ordre. 

Citons un exemple : il faudra 72000 mouvements d’épin- 
gles ; un premier pour fixer le linge, un deuxième pour l’en- 
lever plus tard, un troisième pour fermer la poche sur le mâle, 
un quatrième pour l'ouvrir et descendre la femelle, un cin- 
quième pour clore la poche sur la femelle, un sixième et der- 
nier pour ouvrir la poche lors de l'examen des papillons. Total 
6 mouvements d’épingles répétés sur 12000 linges. En met- 
tant cinq secondes en moyenne par mouvement, on voit qu'il 
faudra vingt heures pour ce seul détail. 

Quand les pontes auront pris la teinte grise qu’elles doivent 
conserver, 1l faudra les rassembler par paquets de cent, et les 
suspendre au plafond de l'atelier pour éviter les atteintes des 
souris. J’ai trouvé commode de les enfiler dans un fil de fer 
coudé en triangle ; une exirémité est limée en pointe, l’autre 
s’enroule autour de la première. Entre les deux coudes il y a 


586 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


une longueur de 50 centimètres, bien suffisante pour que les 
pontes soient aérées. 

Il y a avantage à commencer tout de suite l’examen micro- 
scopique ; les papillons vivent jusqu’à un mois dans les poches; 
encore frais, ils sont très-faciles à brover, et l’on avance 
beaucoup. 

Pour une aussi longue opération, il est indispensable d’éta- 
blir un atelier monté avec méthode. On fera bien de se munir 
d’un grand nombre de mortiers et de beaucoup de lames et de 
lamelles, trente ou quarante mortiers ne sont pas de trop; à 
2 francs 75 l’un, c’est une dépense notable que je conseille 
d'éviter. J’en ai quatorze, et je les trouve moins commodes 
que les tasses massives des cafés, les pilons en porcelaine 
tombent souvent et se cassent facilement ; on peut les rempla- 
cer avantageusement par des pilons de buis ou de cormier, 
que l’on fera tourner pour 50 centimes. Avec de semblables 
pilons on pourra se servir, comme mortiers, de petits bols en 
faïence de 26 à 25 centimes. Ce sera une économie de 2 francs 
sur chaque ustensile. 

Il est fort ennuyeux de laver chaque jour sa provision de 
lames et de lamelles. Je conseille d’avoir trois cents lames et 
au moins six cents lamelles ; tous les deux ou trois jours on 
prendra une femme de journée pour les nettoyer ; le procédé 
de lavage employé par les micrographes est interminable. 

Voici comment je fais : à mesure qu’elles ont servi, leslames 
et les lamelles sont déposées dans de grands bcls contenant 
beaucoup d’eau que je change tous les jours. Quand ces vases 
en contiennent une grande quantité, je brasse lames et la- 
melles à la main dans quatre ou cinq eaux, elles sont alors 
parfaitement nettes. Les lames se cassent peu, mais les lamelles 
se brisent si facilement, surtout quand on les essuie, que 
l’on doit chaque année compter sur un déchet d’un tiers. 

Pour aller vite dans l'examen microscopique des couples, il 
faut au moins cinq personnes. La première ouvre les poches, 
retire les papillons, les met dans le mortier qui est déposé sur 
le linge: assise devant une longue table sur laquelle une 
quarantaine de mortiers sont alignés, elle en termine la série. 


GRAINAGE CELLULAIRE D'UNE ONCE. 587 


En suivant le même ordre, une deuxième personne écrase les 
papillons et met avec un tube de verre effilé la quantité d’eau 
nécessaire pour que la bouillie soit au point convenable. Une 
troisième porte sur une table à portée de l’examinateur trois : 
cellules et dépose dessus les trois mortiers correspondants. 
Après l’examen, elle enlève les pontes et les enfile dans un fil 
de fer. Une quatrième enlève les mortiers, les lave, et va les dis- 
poser pour une nouvelle série. Pour faire bien et vite ce lavage, 
il faut un premier vase qui reçoit la bouillie; dans un deuxième, 
contenant huit à dix litres d’eau, on plonge le mortier et le 
pilon en les agitant vivement, enfin on rince dans un pareil 
vase. Les cruches, les tables en caoutchouc, les pinces de 
Moorb, etc., tout cela est bon pour ceux qui travaillent à loisir 
dans leur cabinet et n’ont à examiner que quelques centaines 
de pontes. 

Je préfère examiner à la lumière artificielle, même le jour ; 
l'éclairage est plus favorable, plus uniforme, et la fatigue des 
yeux est moindre. Il est indispensable d’entourer le microscope 
d’un demi-cylindre de fort carton, formant écran; dans la par- 
tie inférieure on ménage une ouverture pour le passage de la 
lumière ; il est utile d'établir à hauteur convenable un sup- 
port qui, en soutenant Ja tête, diminue la fatigue du corps. 

Chaque lame reçoit trois souttes prises dans la bouillie des 
trois mortiers, elle sert donc à l'examen de trois pontes. La 
main gauche fait mouvoir la lame pour montrer plusieurs 
champs; la droite tient la vis, elle doit être sans cesse en mou- 
vement pour l’exploration de toute la profondeur du liquide. 

Avec quatre aides, en travaillant deux heures le jour et deux 
heures dans la soirée, on peut en deux mois examiner les 
12000 pontes de l'éducation d’une once. Un travail plus pro- 
longé ne pourrait se faire sans inconvénient pour la vue. 
Quand on a fait de suite cent cinquante explorations, on a 
grand besoin de se reposer. 

L'examen des papillons terminé, il ne reste plus qu’à déta- 
cher les œufs et à les conserver dans un lieu convenable; il 
faut encore bien du temps pour détacher les œufs. Avec de 
l'activité, on arrive à ne meltre que dix secondes en moyenne 


a 


588 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


par linge. Cela fait trente-trois heures auxquelles il faut ajouter 
le temps consacré aux préparatifs, puis au lavage des œufs à plu- 
sieurs eaux, à leur asséchement, au pesage et à la mise en boîte. 

Ceux qui auront bien saisi les détails que je viens de donner 
ne seront plus étonnés que des graines dont la confection de- 
demande tant d’ordre, de soins, de travail, je dirai même de 
fatigue et occasionne tant de frais, que ces graines, dis-je, 
soient d’un prix élevé et qu’on ne veuille pas les livrer à moins 
de 30 francs l’once de 25 grammes. Heureusement que les 
éducateurs sont arrivés à comprendre qu'il leur est plus avan- 
tageux d'acheter 30 francs une graine aussi parfaite que pos- 
sible, qui leur donnera aux environs de 50 kilog. de cocons à 
l'once, plutôt que de payer 15 ou 20 francs une graine médiocre 
qui ne leur donnera qu’une moyenne de 25 ou 30 kilos. 

On peut cependant avoir à meilleur compte de la graine, 
moins parfaite il est vrai, mais qui donnera encore des récoltes 
satisfaisantes. Je veux parler des graines dites graines indus- 
trielles préparées par le système Pasteur. C'est la graine que 
confectionnent les personnes qui ont monté de vastes établis- 
sements, et qui font des trois, cinq et dix mille onces. Cette 
graine demande infiniment moins de soins et de travail, etsi 
elle est faite consciencieusement elle peut encore être sufi- 
samment bonne. 

Pour préparer celte graine, voici comment on doit procéder : 
on achète des chambrées bien réussies, et dont on a surveillé 
l'éducation, on prélève dans chaque chambrée un kilog. de 
cocons pris au hasard, on le chauffe pour hâter les chrysalides, 
huit à dix jours avant l'apparition des papillons de la masse. 
On commence l'examen au microscope de toutes les chrvsalides 
du lot d'essai. Si dans ces chrysalides on en trouve plus de 
10 pour 100 de malades, on s’empresse d’étouffer la cham- 
brée; la graine serait mauvaise. Si l’on trouve moins de 
10 pour 100 de malades, chiffre que M. Pasteur tolère pour la 
graine industrielle, on fait grainer la chambrée sur de grandes 
toiles, et l’on obtient une graine que l’on suppose, avec assez 
de raison, ne devoir contenir que la proportion de maladie 
trouvée dans les chrysalides. 


GRAINAGE CELLULAIRE D’UNE ONCE. 589 


Cette supposition ne mérite cependant pas une confiance 
absolue. Ainsi dans le grainage d’une once que j'ai fait cette 
année, J'ai trouvé et brülé 98 pontes malades sur 10 940 
examinées ; c'est un peu moins de 1 pour 100. Du 24 au 27 sep- 
tembre, Je suis tombé sur une série de 748 pontes qui ne 
m'ont pas offert un seul corpuscule. Ces pontes représentent 
1500 cocons pesant 2°,625 ; si le hasard m'avait fait tomber 
sur un kilog. semblable, dans un essai de graine industrielle, 
j'aurais pu affirmer que ma future graine serait complétement 
exempte de corpuscules ; du 21 au 25,au contraire, j’ai examiné 
une série de 1128 pontes corpusculeuses à 2 pour 100. Dans 
un essai, cela m'aurait fait penser que la graine que j’obtien- 
drais contiendrait le double de pontes malades qu'elle n’en a 
contenu en réalité. 

Malgré cela, il n’en est pas moins vrai que trés-généralement, 
cet examen préalable donne une idée assez exacte de la qua- 
lité des œufs que l’on obtiendra, et si l’on est éloigné de la pro- 
portion extrême de 10 pour 100, on peut avoir confiance dans 
Ja qualité de la graine que l’on se propose de faire. Cela est fort 
heureux, car si toute la graine que l’on doitélever en France ne 
devait être que la graine parfaite, dite graine cellulaire, com- 
bien ne faudra-il pas encore d’années avant que nous soyons 
délivrés du lourd tribut que nous payons au Japon! 

Pour ceux qui veulent une graine aussi parfaite que pos- 
sible et ne regarderont pas à son prix, il y a la graine cellu- 
larre ; les autres n’auront pas à se plaindre s'ils élèvent de la 
graine industrielle consciencieusement préparée par Le procédé 
de M. Pasteur. 


NOTA. — J'ai visité à Saintes, à l’occasion de ma mission dans les Cha- 
rentes pour le Phylloxera, l'atelier de grainage de M. le docteur Mongrand, 
et je puis confirmer ce qu’il annonce. Le résultat de l'examen microscopique 
de cette bonne graine, préparée loin des lieux d’infection, démontre que 
M. Mongrand avait donné à l'éducation, terminée lors de ma visite, les 
mêmes soins minutieux qu’au grainage proprement dit, et ces détails peuvent 
être très-utiles comme conseils aux débutants. M. GIRARD, 


PGA ET NOR CA EU LE 


LEE 


L 
l 


Ill. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX 


DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 


SÉANCE DU CONSEIL DU 25 SEPTEMBRE 1874. 


Présidence de M. CAMILLE DARESTE, Membre du Conseil. 


Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. 
— M. le Président proclame les noms des membres récem- 
ment admis : 


MM. Présentateurs, 
BuzARE (Alfred), propriétaire à la More, com-, Camille Dareste. 
mune de Montalembert, canton de en) A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Vaussais (Deux-Sèvres). Lu. Roufignat, 
Joseph M. Cornély. 
Camille Dareste, 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Fe TEL : Camille Dareste, 
arr) (Philippe), négociant, à Jarnac ee Maurice Gard 
\ Jules Grisard. 
FONTEINNE (le R. P. Dom Auguste), bénédictin { Louis-Charles Besset, 
cellérier de l’abbaye de Solesmes, près Sablé-{ Camille Dareste. 
sur-Sarthe (Sarthe). Maurice Girard. 
GAILLARD père, négociant, membre du Conseil { Camille Dareste, 
général, à la Chaize, arrondissement de Bar-{ Gellineau. 
bezieux (Charente). Maurice Girard, 
Camille Dareste,. 
Maurice Girard. 
Juies Grisard. 
Balcatce. 
Camille Daresie, 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
E, Bellecroix. 
Détrimont. 
Trempé fils. 
RocHEMAcE (Félix de la), propriétaire au château { Camille Dareste. 
de la Roche, commune de Couffé, par Oudon ! Maurice Girard. 
(Loire-[nférieure). come de Maupassant: 


f 


CRONAU, directeur des chemins de fer de l’Al- 
sace, à Strasbourg (Alsace-Lorraine). 


MARTINET (Émile), imprimeur, hôtel Mignon, 
2, rue Mignon, à Paris. 


Moreno (Antonio-Gonzales), 20, rue de Tilsitt, 
à Paris: 


MourLon (Louis-Alexandre), propriétaire, à 
Chambon-sur-Voueize (Creuse). 


— Le Conseil s'associe aux regrets du monde savant en 
apprenant le mort de M. Elie de Beaumont, l’illustre secré- 


PROCÉS-VERBAUX. 591 


taire perpétuel de l’Académie des sciences. Nous n'avons pas 
à rappeler les travaux géologiques qui ont immortalisé son 
nom; quil nous suffise de remettre en mémoire l'intérêt 
qu'il prenait à notre œuvre commune, attesté par sa fréquente 
présence, lors de nos séances générales, au bureau de Ja 
Société. 

—- Des remerciments pour leur récente admission sont 
adressés par MM. de Rodellec du Porzic, J.-B.-J. Gérard, 
Raveneau-Huard , Passerotte, le baron Van Heemstra et 
Cordier. | 
MM. de Vauguion, Ribeaud, Rabuté, marquis de Pruns, 
Raveneau-Huard, Riffat, Michel, Cambon et de Toulmon de- 
mandent à prendre part aux cheptels de la Société. —Renvoi 
à la Commission spéciale. 

— Des comptes rendus de leurs cheptels sont adressés par 
MM. Bellaigue de Bughas, Baudoin, L. Chevalier, Bouchez, 
Cliquennois-Badart, de Surigny, Rabuté, Dreyfus, Delvaille, 
duc d’Aumale, J. de Baye, Turrel, comte d'Éprémesnil , 
comte de Maupassant, Lefort des VYlouses, de la Brosse Fla- 
vigny et de Toulmon. 

— M. Danican-Philidor, en remerciment de la médaille qui 
lui a été décernée dans la dernière séance publique annuelle, 
annonce qu'il est sur le point de quitter la Cochinchine. « J’em- 
porterai, dit-il, ce que j'aurai pu recueillir d'animaux pou- 
vant avoir quelque intérêt pour la Société. 

» Ceux que je n’aurai pu me procurer seront envoyés ulté- 
rieurement par deux de mes amis fixés ici pour quelque 
temps. » 

— MM. de Vernejoul et Duchastel remercient des cocons 
d'Aétacus Cynthia qui leur ont été adressés. 

— M. le docteur H. Moreau, des Herbiers (Vendée), adresse 
un rapport complémentaire sur ses éducations de Faisans, et 
une note sur l’emploi du gland dans leur nourriture. (Voyez 
au Bulletin, page 553.) 

— M. À. Delaurier écrit d'Angoulême, en date du 23 août, 
à M. le directeur du Jardin d’acclimatation: « Mes élevages 
sont terminés, mon unique paire de Ganards mandarins m'a 


592 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


donné quatre mâles et huit femelles, mes Faisans vénérés dix- 
neuf femelles et dix-sept mâles. Les mâles de Vénérés de la 
première couvée auront quatre mois fin août, ils sont à peu 
près maillés et presque aussi gros que les adultes. » 

— M. Rico adresse un mémoire sur la stabulation des Sal- 
monides dans les espaces restreints. (Voyez au Bulletin, 
page 1990.) 

— M. F.-A. Bigot écrit à la date du 19 août qu’il a obtenu 
un accouplement d’Atfacus Yama-maï mâle avee un Attacus 
Pernyi femelle, et il annonce l’envoi d’un rapport détaillé sur 
les remarques qu’il a faites pendant son éducation d’Yama- 
mai. 

Dans une autre lettre, en date du 12 septembre, M. Bigot 
informe la Société que les œufs provenant de ces croisements 
sont éclos. 

Les petites chenilles paraissent, au point de vue physiolo- 
gique, sensiblement raodifiées ; du reste, ajoute M. Bigot, 
toutes mes observations seront notées jour par jour et une 
fois l’éducation terminée, je me ferai un plaisir d'en faire 
connaître les résultats à la Société d'acclimatation. 

À ce propos, M. Maurice Girard fait remarquer que M. Berce, 
lauréat de la Société, a fait, en 1874, une éducation de métis 
des Aftacus Yama-maï et Pernyi dont il sera rendu compte. 

— La Société reçoit un mémoire en espagnol de M. Vicente 
de La Roche sur le Dévidage des cocons du genre Attacus. 

— M. le D' Turrel, délégué de la Société à Toulon (Var), 
éerit : « Nous avons semé les graines de l’E/æococca vernicia 
qui nous ont été données par la Société d’acclimatation. Jus- 
qu'à présent sur quarante graines soignées d’une manière 
identique, huit seulement ont levé. Nous les cultivons avec 
sollicitude.…. 

» J'ai fait, il y a quelques jours, une trouvaille que je crois 
devoir vous signaler. Un pêcheur de nos côtes, qui va tendre 
ses lignes et caler ses palangres jusque dans les eaux de 
Saint-Tropez, m'a montré une magnifique éponge prise par 
lui le 14 juillet dans les eaux du Lavandou, près Bormes (Var). 
Cette éponge érés-fine, en forme de plat à barbe, mesure 


PROCÈS-VERBAUX. 593 


0",40 de diamètre. Je la trouve aussi belle que les éponges 
de Syrie. Je vous l’enverrai si vous désirez la voir et si je 
puis obtenir du pêcheur qu’il s’en dessaisisse. Mais voilà une 
démonstration pratique de la possibilité d’acclimater dans 
nos eaux méditerranéennes les belles éponges des mers du 
Levant. Le fond sur lequel cette éponge a été recueillie est 
du schiste quartzeux. » 

— M.E. Collin, de Verdun (Meuse), adresse la note suivante 
sur la Rhubarbe de Chine, qu’il cultive depuis quelques an- 
nées : « En 1572, monseigneur Chauveau m’envoya environ 
200 grammes de semences de véritable Rhubarbe chinoise ; 
elles me parvinrent dans un excellent état de conservation, 
bien différentes en cela de celles que j'avais reçues en 1871 
par le même intermédiaire. Au mois de mars 1872, quel- 
ques-unes de ces graines ont été semées dans différents ter- 
rains et m'ont donné une plante qui, vers le mois d’août, pos- 
sédait des feuilles d'environ 45 à 50 centimètres de longueur. 
J'ai essayé ces semences dans divers terrains afin d'observer 
les conditions les plus favorables au développement de la 
plante, et j'ai pu observer ainsi que cette espèce ne pousse 
pas également bien dans tous les terrains. En ce moment ma 
Rhubarbe est très-belle, elle est âgée d’une année et demie, 
et n'a pas encore fleuri. Elle se distingue, par plusieurs carac- 
ières, des différentes espèces de Rheum cultivées en France. 
Il est bien évident que c’est là une espèce nouvelle quant à la 
feuille. ignore encore quels caractères me fournira la racine, 
que je ne pourrai probablement pas soumettre à l’examen 
microscopique avant la fin de l’année prochaine... 

» ….. Je n'ai pu donner un grand développement à la cul- 
ture de ma Rhubarbe, parce que je ne savais pas si javais 
affaire à une espèce nouvelle ou si, comme tant d’autres de 
mes devanciers, je n'avais que des semences d’une espèce 
déjà connue. Maintenant que je suis à peu prés fixé, j'ai l’in- 
tention de semer une grande partie de ma graine au mois de 
mars prochain, et de développer la culture de la Rhubarbe 
dans le département de la Meuse. » 


— M. Collardeau fait connaître les résultats qu’il a obtenus 
32 SÉRIE, T,. L: — Septembre 1874. 38 


59% SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


des graines d’Igname provenant du Jardin botanique de Cler- 
mont, et qui lui avaient été confiées au printemps dernier. 

— Il est déposé sur le bureau : 

41° Le programme de l’Exposition et Concours de produits 
agricoles et horticoles qui doivent avoir lieu à Compiègne en 
octobre prochain. 

2° L'annonce de la création d’un journal de géographie 
commerciale. j 

3° Le programme des sujets mis au concours en 1875, par 
la Société académique de Saint-Quentin. 

4° Une note sur les plantations de Quinquina de Java, de 
la part de M. Van Gorkom. 

5° Notice sur quelques espèces et variétés de Lis, suivie 
d’un catalogue raisonné des Lis, par M. J.-H. Krelage. 

6 Annual Report of the Trustees of the Museum of com- 
parative zoûlogy at Harvard college, in Cambridge, 1872. 

7° Le même pour 1873. 

& Additions to the Lists of the principal timber trees and 
other select plants readily eligible for Victorian industrial 
culture, by baron Ferd. von Mueller, de la part de l’auteur. 

Remereîments aux donateurs. 


Le Secrétaire du Conseil, 


MAURICE GIRARD. 


IV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 


Chronique d'Amérique. 


L’Agave mexicaine, la fabrication du pulque. — La Vanille à la Guyane. — La 
graine de Carapa. — Le Niin de l’Yucatan. — Acclimatation de l’Acajou aux 
Indes; mode d'expédition des graines. — Thé du Brésil et Thé indien, — Le 
Taro. 


Ceux de nos soldats qui ont fait la cafnpagne du Mexique connaissent par- 
faitement l’espèce de bière qui se boit dans le pays sous le nom de pulque. 
Ce breuvage, plus spiritueux d’ailleurs que notre bière et qui enivre facile- 
ment, n’est autre que la séve fermentée qu’on extrait de l’Agave. L’acclima- 
tation de l’agave mexicaine, qui du reste a des variétés, communes aux 
Antilles, et qui se cultive aussi sur une assez grande échelle dans quelques 
États de l'Amérique centrale, a été essayée non sans succès dans plusieurs 
États du sud de l’Union. La tige de cette amaryllidée s’élève jusqu’à 45 ou 
16 mètres de hauteur; coupée et creusée, elle forme un réservoir naturel 
dans lequel toute la séve va se rendre, Cette séve continue d’y couler du- 
rant deux ou trois mois; le réservoir est vidé trois ou quatre fois par jour 
au moyen d’un siphon. On se figure peu le rendement de cette plante vi- 
goureuse. D’après M. Squiers, il est quotidiennement d'environ 400 pouces 
cubes anglais par sujet, soit une moyenne de 1500 litres pour la période 
d'écoulement. Un seul individu peut recueillir, sur 60 pieds d’agaves, 
12 où 1500 litres de séve par semaine. Ce liquide contient 9 ou 10 pour 
100 de sucre. L’abondance de ce preduit est d'autant plus remarquable que 
les plantations d’agaves sont ordinairement situées sur des sols arides, sur 
des rocs à peine recouverts de terre végétale. La plante résiste à la fois à la 
sécheresse et à l'humidité, à la chaleur et au froid, — car il y a de tout céla 
dans les hautes Cordillères du Mexique. Elle périt après la floraisoh, mais elle 
se reproduit par des jets sortant des racines, et cela avec une prodigieuse 
facilité. Dans les bons sols, l’agave rapporte dës la cinquième année ; dans 
les mauvais terrains, ce n’est guère qu'après la dix-huitième. Le suc qu'on 
en soutire par incision et qui, adäitionné d’eau, donne la boisson appelée 
pulque, ressemble assez à du cidre, mais il a une odeur fort désagréable à 
laquelle il faut s'accoutumer. Par la distillation, on en extrait une eau-de- 
vie très-forte désignée sous le nom dé mescal ou d’aguardiente de Maguey. 
En soinme, or triomphe assez vite, paraît-il, de la répulsion qu'inspire tout 
d’abord l’odeur d'œuf pourri du pulque, et l’on finit par aimer tellement 
ceite boisson, qu'après en avoir fait usage pendant plusieurs années, on ne 
peut plus s’en passer sans danger pour la santé. On raconte à ce sujet que, 
lors de l'émancipation du Mexique, nombre de vieux Espagnols, menacés 
d'expulsion par la nouvelle république, pétitionnèrent à l'Assemblée natio- 
nale pour qu’il leur fût permis de rester sur le territoire mexicain, par cette 


596 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


unique raison qu'habitués de longue date à boire du pulque (qu’il n’était 
pas possible de se procurer en Espagne), leur vie serait mise en danger s’il 
leur fallait renoncer à cette boisson. 

La préparation de pulque demande certains soins. Une portion du suc de 
la plante fraîchement recueilli et qu’on appelle eau de miel, aguamel, est 
mise à part pour fermenter, et l’on s’en sert comme d’une espèce de levûre 
pour le reste. La fabrication de cette levûre, appelée mère-pulque, madre- 
pulque, exige une quinzaine de jours. Une faible quantité introduite dans 
les outres ou les tonneaux qui contiennent l’aguamel y amène la fermenta- 
tion dans l’espace de vingt-quatre heures. On varie le procédé en mettant 
directement un peu de mescal dans la cavité de la plante où il se mélange 
à la séve à mesure qu’on la recueille. 

Cette soustraction continuelle de la séve finit naturellement par faire pé- 
rir la plante. Mais, comme nous l'avons dit, avant qu’elle meure tout à fait 
le pied donne toujours de nouvelles pousses qui ne tardent pas à produire à 
leur tour. L’agave mexicaine acquiert souvent des proportions énormes ; 
les feuilles de cette espèce d’aloès ont ordinairement de 2 à 3 mètres de hau- 
teur sur 30 centimètres de largeur, avec une épaisseur en proportion. Elles 
donnent une fibre très-résistante, avec laquelle on fabrique aujourd’hui, 
entre autres choses, d’excellent papier. Dans certaines parties du Mexique, 
il n’est pas rare de rencontrer des plantations étendues d’agaves à raison de 
10 à 12000 sujets par hectare, ayant chacun en moyenne une quarantaine 
de feuilles de 2 mètres à 2 mètres 1/2 de haul. 

L'introduction raisonnée de ce végétal sur certains points de l’Union pour- 
rait donner de beaux profits qui n’ont pas échappé à la perspicacité toujours 
en éveil des cultivateurs de l'Amérique du Sud. 


La maladie qui sévit à la Réunion sur les vanilleries laisse dans le com- 
merce français une lacune qu'il est bon de combler au plus vite; aussi 
l'administration supérieure de nos autres colonies a-t-elle pris des mesures 
pour favoriser la culture de cette orchidée suivant des méthodes spéciales 
applicables aux différents climats. On étudie en même temps le perfection- 
nement des espèces sauvages qui poussent spontanément dans les forêts el 
qui paraissent être d’une nature plus robuste que les espèces depuis long- 
temps cultivées. Toutes les variétés sont loin de réussir partout au même 
titre, même lorsque les conditions de climat et de sol paraissent identiques. 
Ainsi, à la Guyane, la variété planifolia, qui fournit en abondance la vanille 
du commerce, ne donne pas de fleurs dans le nord de la colonie. C’est la pe- 
tite espèce indigène connue sous le nom de vanille aromatique à laquelle 
il faut jusqu'ici s’en tenir dans ces parages. On parle de tenter à Cayenne 
l’acclimatation d’une variété rouge à petite gousse originaire de Madagascar. 


On cherche aussi à tirer parti d’un autre produit de la Guyane appelé à don- 
ner de grands bénéfices, mais que jusqu’à présent on a laissé se pourrir en 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 597 


pure perte sur le sol : il s’agit des graines ou noix oléagineuses de Carapa. 
Cet arbre forme des forêts immenses, surtout dans le district de Cachipour. 
La chute de ses graines commence en février et cesse en juin ou juillet. 
Elle est alors si abondante que sur plusieurs lieues d’étendue le sol est jon- 
ché d’une couche de plus de 10 centimètres d’épaisseur. Une autre récolte 
moins importante se fait en septembre, mais elle donne une huile inférieure 
de beaucoup à celle de la grande récolte. Celle-ci est excellente pour la sapo- 
nification quand la noix est traitée à temps. Par malheur, cette noix, qui 
rend alors 36 pour 100, ne se conserve guère plus de huit semaines fraîche 
On peut toutefois garder les amandes oléagineuses jusqu’à quatre mois en 
les faisant bouillir et en les enfutaillant hermétiquement une fois séchées. 
Pour le moment actuel, la presque totalité des graines de Carapa reste sur 
le sol, où elle ne tarde pas à être dévorée par divers insectes, entre autres 
par un ver qui en est très-avide. 

Le service de l’exposition permanente des colonies a recu en juillet un 
envoi considérable (une vingtaine de tonnes) de graines de carapa destinées 
à être expérimentées sous la presse hydraulique Thomasset à Paris même, 
puis à Saint-Denis, à Beaumont-le-Roger et à Rouen. Si, comme il y a lieu 
de s’y attendre, d’après les premières expériences, les résultats sont satis- 
faisants au point de vue pécuniaire de la question, c’est-à-dire suffisam- 
ment rémunérateurs, la Guyane trouvera en France même un rapide dé- 
bouché à un produit naturel qui entrait jusqu'ici pour peu de chose dans 
l'actif de ses ressources. En attendant que des usines d’une certaine impor- 
tance s’établissent dans le voisinage des forêts de carapa, la commission de 
surveillance de l’exposition permanente a décidé d’envoyer à Cayenne une 
petite presse Thomasset donnant une pression de 30 000 kilogrammes et 
du poids de 350 kilogrammes seulement, ce qui en permettra facilement le 
transport sur les lieux mêmes de production qui, il faut le dire, ne sont pas 
d’un accès facile. 

L'Afrique a aussi des variétés de carapa. Le C. Guineensis donne une 
huile appréciée des naturels de la côte occidentale, qui s’en frottent le corps 
à la facon des luiteurs antiques. A Sierra Leone, cette huile se prescrit 
comme purgatif ; elle est beaucoup plus active que notre huile de ricin. Le 
Carapa Touloucouna de la Sénégambie rend aussi beaucoup d'huile. Le ré- 
sidu de l’amande exprimée constitue un bon aliment pour les bestiaux. Cette 
huile s’importe à Londres sous le nom de mote grease ; elle arrive générale- 
ment à l’état concret. Les graines des espèces africaines sont plus denses, 
plus triangulaires et plus foncées que celles d'Amérique. Au Brésil, où le 
Carapa Guyanensis abonde dans la province de Para, l’huile qu’on en tire 
porte le nom d'huile d’Andireba. Elle est extrêmement amère. Purifée, 
elle donne un éclairage excellent. 


La question du développement à donner à la multiplication du Min est 
revenue ces temps derniers devant plusieurs sociétés agricoles du Sud-Amé- 


598 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


rique. Le Niin, dont il a été parlé précédemment dans quelques feuilles 
scientifiques, ici et en Angleterre, à l’occasion d’une communication d’un 
chimiste de Mérida, est un insecte de l'Yucatan de l’ordre des hémiptères, 
auquel appartiennent, comme on sait, les cochenilles. Le chimiste de l’Yu- 
tacan qui l’a pris sous sa protection le croit nouveau dans la science et pro- 
pose de lui donner le nom de Coccus adipofera. On le trouve sur des arbris- 
seaux de la famille des térébinthacées, particulièrement sur les céruclos. Il 
y adhère en bataillons épais au point de recouvrir presque entièrement le 
végétal. Le mâle est long de 15 millimètres ; il est pourvu de deux ailes, 
noires à l’intérieur et rouges à l’extérieur. La femelle, d’un rouge plus 
clair, est plus grosse: elle a 25 millimètres de long sur 45 à peu près de 
large. Elle pond environ 1500 œufs rougeàtres et fournit une espèce de 
graisse ou de pâte jaune sombre douée d’une odeur particulière et qui, fon- 
due et traitée par certains agents chimiques, donne un beau vernis jaune 
d’or très-siccatif. Dans certaines parties de l’Yutacan, les fabricants de gui- 
tares mêlent la pâte du Nän avec de la chaux et se servent de ce mélange 
pour colorer le bois de leurs instruments. Gette couleur, très-résistante, pa- 
raît avoir servi aux anciens indigènes pour décorer leurs habitations ; on 
en retrouve des traces bien conservées sur des ruines datant de trois 
siècles. 


Les Anglais travaillent de longue date à introduire l’acajou dans leurs pos- 
sessions de l’Inde. Cet arbre américain paraît appelé à réussir à merveille 
dans plusieurs provinces de l’empire indo-britannique. Au Bengale surtout, 
les plants distribués dans ces cinquante dernières années sur différents points 
de la Présidence ont donné de très-heureux résultats. Il en à été de même 
à Saharunpore et à Madras, où cependant le sol sec et poreux ne ressemble 
en rien aux terrains d’elluvion du Bengale. Le bois qu'ont denné les acajous 
de Calcutta renversés par les cyclones de 1864 et 1867 a atteint de très- 
hauts prix ; il valait, dit-on, en qualité, l’acajou d'Amérique. Au dire du 
docteur King, directeur des jardins botaniques royaux du Bengale, aucun 
arbre exotique ne paraît mieux réussir là que l’acajou. Il s’accommode de 
tous les terrains, à l’exception des sols marécageux et salins. Le revers de 
la médaille pour cetie acclimatation, c’est la lenteur avec laquelle l'arbre 
pousse et le fait que la semence ne peut s’obtenir que d’arbres devenus 
grands. Aussi l’éminent botaniste insiste-t-il pour que le gouvernement an- 
glais lui fasse parvenir régulièrement chaque année des approvisionnements 
de graines tirées de l'Amérique, de la Jamaïque, du Honduras, de Cuba, de 
Saint-Domingue. Dans le cours de ces deux dernières années, une assez 
grande quantité de graines étaient parvenues au docteur King ; mais, embal- 
lées qu’elles étaient dans des boîtes de fer-blanc soudées, elles y avaient fer- 
menté et étaient arrivées pourries. Aussi recommande-t-il de simples caisses 
de bois percées latéralement de petits trous donnant libre accès à l’air. Sous 
aucun prétexte, il ne faut employer pour ce genre d'expédition des boîtes 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 9599 


métalliques soudées. L’avis peut être bon à retenir; toutefois, la fermenta- 
tion signalée a bien pu venir d’un emballage fait dans de mauvaises condi- 
tions avec des graines humides. 


En attendant que les plantations de thé du Brésil soient en mesure de 
faire concurrence au thé d'importation anglaise sur les marchés d'Europe, il 
est fort curieux de suivre la progression du développement sans exemple de 
la culture de cette plante dans les possessions britanniques de l'Inde. Les 
chiffres suivants, que nous empruntons au dernier rapport de la chambre de 
commerce du Bengale, représentent la valeur des exportations annuelles du- 
rant les dix années finissant au 30 avril 1874 : 


Valeur du thé 
exporté de Calcutta, 


OO Or ne MR et Dé ED 229 282 livres sterling. 
SGH Gb Re 408 HDÉ 00 00e UOTE AU) — 
A6 DE ME en e e . 226 506 — 
BHO PE ne . 362 703 — 
HOOEOB TE RME mia 683 067 — 
IE CRAGC ES RC FRE en Eee 860 441 — 
HÉCETITo no RER eNEe s 1 016 978 — 
OO TENTE EN RES 1 083 502 — 
OTET OL ER CARRE .. 1358 858 — 
1727 EN M ele 1 523 527 — 
ÉTISETENSERENNRRRS no 00921699 — 


Il y a tout lieu de supposer, dit le rapport, que cette progression conti- 
nuera. Voilà certes un bel exemple à citer des heureux effets pour un pays 
de l'introduction d’une culture nouvelle, et l’on conçoit que, malgré la con- 
currence, les Brésiliens s’attachent à poursuivre le développement de leurs 
plantations de thé, qui d’ailleurs donnent déjà d’excellents produits. 


Ajouter au nombre des substances végétales dont l’homme se nourrit est, 
on l’a dit plaisamment, faire un acte plus profitable à l’humanité que de 
découvrir une planète. Que de plantes nutritives une culture intelligente uti- 
liserait dans la cuisine à l’égal de la pomme de terre, qui pourtant n’a pas” 
pour nous deux siècles d'existence ! Le Food Journal nous dit qu'il n°y a pas 
moins de 1000 variétés de racines comestibles et de fruits précieux qui 
croissent dans les archipels de l’océan Pacifique. Le plus connu de ces pro- 
duits du sol est le taro ou chou caraïbe qu'on a appelé, non sans raison, le 
soutien de la vie des insulaires de la mer du Sud. La partie qu’on mange est 
le tubercule de l’Arum esculentum, plante à l’aspect noirâtre, assez peu sé- 
duisant en somme. On le cultive dans des fosses de 60 centimètres de pro- 
fondeur, dont le fond est semé de trous. Dans ces trous, on place les racines 
de la plante et l’on inonde la fosse. Quand l’évaporation s’est faite, la récolte 


600 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


est prête. D’ordinaire, on n’enlève de la racine que ce dont on a besoin pour 
la consommation de la journée. Le haut de la plante est soigneusement repi- 
qué dans le trou. Quand le propriétaire est arrivé à Ja fin de sa première 
récolte, les rangées de taros enlevées les premières ont redonné des racines 
nouvelles : comme les plantations d’agaves du plateau mexicain, un Carré 
de taros aux îles du Pacifique une fois établi ne cesse plus de rapporter, et 
cela sans exiger ni soins ni dépenses. 

Le taro est vénéneux jusqu’à ce qu'il soit bouilli. Bouilli, on peut le man- 
ger comme la pomme de terre ou l’écraser en farine et en faire des gâteaux. 
Les indigènes ont l’habitude d’en faire une pâte avec de la graisse et de lais- 
ser cet amalgame surir dans une calebasse durant plusieurs jours avant de 
le manger. On vante beaucoup le chou caraïbe comme un aliment agréable 
et nourrissant. Il en existe une variété en Egypte, mais elle nous a paru 
dans le pays très-inférieure, disons-le, à notre pomme de terre. Elle s’accli- 
materait facilement, croyons-nous, en Europe, et pourrait alors s’améliorer 
par la culture. D’ailleurs, on pourrait essayer l'introduction d'espèces plus 
choisies. 


OCTAVE SACHOT. 


Le gérant : JULES GRISARD. 


ERRATUM. — OMISSION. 


Par suite d’une erreur dans la mise en pages, l’alinéa suivant a été omis dans 
le travail de M. le D' Turrel : Les oiseaux et les insectes ; il doit prendre place 
après la quatorzième ligne de la page 509. 


Il est constant qu'aucun oiseau ne peut se nourrir du Phylloxera de la vigne, 
et l'honorable M. de Ginestous, en demandant une enquête sur la recherche de 
ce puceron dans le gésier des oiseaux insectivores, risque fort de provoquer un 
inutile massacre de l’innocente matière à expériences. 


PARIS, — IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2. 


I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ 


DE 
LA DOMESTICATION DES ANIMAUX 


Par M. Sabim BERTHELOT 


: Membre honoraire de la Société d’acclimatation 
Ancien Directeur du Jardin d’acclimatation d'Orotava (Canaries) : 


Les différentes races d'animaux domestiques sont en géné- 
ral très-anciennes, et les Hébreux des premiers temps, qui 
s’appuyalent du verset 25 de la Genèse : « Dieu fit les bêtes 
sauvages de la terre selon leurs espèces, les animaux domes- 
tiques et tous les reptiles, chacun selon son espèce..., » 
croyaient que ces animaux constituaient des créations indé- 
pendantes, similaires d'animaux sauvages; mais 1l leur eût 
été bien difficile de prouver que leur domestication n’était 

pas le fait de l’homme. Cependant M. A. Rimbaud pense diffé- 
 remment et ne craint pas d'avancer, dans sa remarquable 
Réfutation du transformisme (1), que « l'aptitude à la vie 
domestique est la conséquence d'une appropriation naturelle 
qui a placé dès le principe tous les animaux sous la dépen- 
dance de la créature privilégiée (2). » Quant à moi, je ne 
puis me ranger à cette opinion et n’oserai affirmer que « les 
animaux que l'homme asservit et qu'il fait multiplier autour 
de lui, sont les mêmes dont les débris se trouvent mèlés abon- 
damment aux siens, dans les restes fossiles de l’âge où il a 
fait son apparition (3). » 

J'en demande pardon à mon ami, mais je doute fort que 
les géologues, même les plus anatomistes, puissent constater 
avec certitude la différence qui existe entre les débris fossiles 
des espèces sauvages et de leurs races domestiques, surtout 
quand je vois que les produits de la domestication ne mon- 


{1) Réfutation du transformisme ou les théories devant les faits, etce., 
par J. B. À Rimbaud. Paris, 1873, Challamel, édit. 
(2) Op. cit., p. 254. 
(3) Ibid. 
30 SÉRIE, T. L, — Octobre 1874, 39 


602 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


trent aucun changement bien appréciable sous le rapport de 
la forme typique. S'il est bien reconnu, comme on le pense 
généralement, que « c’est dans les eaux, dans les mers princi- 
» palement, que se manifeste l’inaltérabilité du principe phy- 
» siologique qui enchaine les êtres vivants à leur adaptation, 
» et que, parmi les produits des océans, il n’est rien que 
» l’industrie humaine ait réussi à détourner de la vie sau- 
» vage (1), » pourquor done, chez certains animaux terres- 
tres, la nature se serait-elle affranchie de cette loi et n’aurait- 
elle créé que quelques espèces seulement plus portées que les 
autres à s’assujettir instinciivement à l’homme, si l'homme 
lui-même n'avait fait vers elle les premiers pas dans un but 
intéressé ? 

Pour nous, ce n’est nullement dans cette propriété nalu- 
relle qui rendrait les animaux si dociles et exclurait chez 
l’homme toute idée de conquête, que nous jugeons du fait de 
la domestication, mais par le plus ou moins d’aptitude des 
espèces à la domesticité. Aussi voyons-nous que beaucoup y 
résistent, et parmi celles qui s’y soumettent, la domestication 
n’est complète que quand nous avons pu, par des soins intel- 
ligents, obtenir une race qui s’alimente d'elle-même dans nos 
champs ou dans nos fermes, qui soit facile à nourrir et que 
son instinct ramène à l'habitation au lieu de l’en éloigner. 

Dans l’ancien de même que dans le nouveau continent, pas 
plus qu’en Italie, où il existe encore plusieurs espèces de 
mammifères et beaucoup d'oiseaux dont la possession pour- 
rait nous être ulile, on ne saurait citer aucun exemple de do- 
mestication naturelle, c’est-à-dire volontaire. 

Les éléphants de l’Inde vivent toujours à l’état de liberté 
dans les grands bois, non loin des endroits habités où l’on 
soigne et où se propage la race des éléphants domestiques, et 
on à besoin de toute l’intelligence et de la docilité de celte 
race lorsqu'on veut s'emparer de l'espèce sauvage et domp- 
ter sa résistance désespérée. Les Lamas et les Vigognes, que 
les anciens Péruviens élevaient en troupeaux, vivent encore 


(4) À. Rimbaud, op, cût., p. 254. 


DOMESTICATION DES ANIMAUX. 603 


en grande partie à l’état libre, et les tentatives d’acclimata- 
tion qui, de nos jours, ont été faites à grands frais, sont res- 
iées infructueuses. — Les chevaux et les taureaux transportés 
sur le nouveau continent à l’époque des premiers établisse- 
ments des Espagnols à Buenos-Ayres ont repris la vie sauvage 
dans les immenses plaines des Pampas, où on les laissa en 
liberté, et il faut aujourd’hui toute l’habileté et l'adresse des 
Gatchos pour les ramener à la Estancia ; ce n’est qu’armés du 
_lazo qu'ils parviennent à s'emparer de ces bœufs si robustes 
et souvent si farouches, de ces chevaux si fiers de leur indé- 
pendance, La hardiesse, le courage et le sang-froid d’un 
Araucano, vrai centaure des Andes chiliennes, peuvent seuls 
dompter ces sauvages coursiers. 

Dans un autre passage de sa Réfutation, M. Rimbaud s’ex- 
prime en ces termes: « Îl est tant de ruminants et de ron- 
» geurs restés sauvages, tant d'oiseaux qui ressemblent à la 

» poule et au canard, si ce n’est qu'ils volent, tandis que ceux-ci 
» ne volent pas, qu'il est impossible que la vocation à la do- 
_» meslicité ne soit pas déterminée par d'autres causes que 
» celles qui sont indiquées. » (1). 

Ces causes, notre savant ami croit les reconnaître dans 
J'aptitude naturelle de certaines espèces à vivre en compagnie 
de l’homme, à se prêter volontairement à ses fantaisies, à se 
soumeltre à son empire; mais rien ne confirme ces disposi- 
tions naturelles auxquelles, au contraire, la majorité se 
montre rebelle. — L'instinct de la liberté, cette faculté innée 
en eux, fait préférer aux animaux l’état sauvage, la vie indé- 
pendante avec toutes ses chances et ses péripéties. Non, l’apti- 
tude à la domesticité n’est pas un don de naissance qu'ils. 
reçurent le premier jour de la création, ce n’est qu'une dis- 
position acquise par l'éducation et l'habitude d’un nouveau 
mode d'existence : le milieu où on les a placés et le régime 
auquel on les a soumis, pour le but qu'on s’est proposé, ont 
changé leur tempérament; l'espèce s’est accouplée dans des 
conditions favorables, elle a procréé et une nouvelle race en 


(1) A. Rimbaud, op. cit., p. 255. 


604 SOCIÉTÉ D 'ACCLIMATATION. 


est sortie. Voilà notre éroyance en présence des faits que l’ex- 
périence nous enseigne dans les rares exemples d’acclimata- 
tions modernes qui ont été tentées et qui ont réussi. Citons en 
passant le dindon : ici nous sommes devant une espèce qui 
existe encore à l'état libre et qui ne vit en même temps en 
domesticité que depuis trois siècles. Sous ce second rapport, 
c’est une race acquise, modifiée par l’éducation, qui a perdu 
l'habitude du vol et que sa gloutonnerie naturelle porte à 
l'engraissement. Maintenant le dindon est nn oiseau de basse- 
cour, qui passe son temps à faire la roue et n’étend plus ses 
ailes que pour se battre les flancs. Maïs dans les forêts de lIl- 
linois et de l'Ohio, où, laissé à lui-même, il peut se livrer à 
tous ses ébats, on le voit s’éloigner des fermes et fuir le chas- 
seur, dont 1l se méfie; aussi perche-t-il sur les hautes bran- 
ches des plus grands arbres et ne descend-il guère à terre que 
pour y chercher sa nourriture. Ce n’est qu’en s’emparant de 
ses œufs et en les donnant à couver à une dinde déjà privée 
ou bien à une grosse poule, qu’on obtient un premier produit 
qui, à la seconde génération, commence à se présenter avec 
les caractères de la race domestique, sans cette teinte bronzée 
qui se montre sous un si brillant reflet chez le dindon sau- 
vage ; puis de générations en générations, de croisements en 
croisements, se prononcent des colorations moins foncées, 
quelquefois même l’albinisme avec des panachures blanches 
sur un fond nankin et même blanc sale, mais toujours le 
même tvpe quant aux formes. Ces phénomènes de la domesti- 
cation sont l'œuvre de l’homme, c’est lui qui les a motivés; la 
nature l’a aidé sans doute, mais sans intention de sa part, car 
les changements de couleur, de taille, de tempérament et 
d’allure, qui se sont opérés pour constituer une nouvelle 
race, ce n’est pas elle qui les a provoqués. Resté à l’état sau- 
vage, le dindon aurait continué à fuir le chasseur au lieu de 
venir à lui. L'instinct de la hberté et de leur propre conser- 
vation est dominant chez tous les animaux de la création. 

« La domestication de certaines espèces animales, que l’on 
» croit être une œuvre de l’homme, est, à n’en pas douter, si- 
» non l’ouvrage même de la nature, au moins la suite de ces 


DOMESTICATION DES ANIMAUX. 605 


» lointaines prévisions que la conscience humaine rencontre 
» partout dans le spectacle de la vie universelle, une de ces 
» prévisions dont le secret, comme les ressorts, se trouve 
» dans une expresse combinaison des substances organi- 
» sables (1). » Ainsi s'exprime M. Rimbaud dans l'important 
ouvrage que nous avons cité. Il convient que toutes les espèces 
animales ne sont pas propres à la domeslication, que beau- 
coup y résistent et que, dans certains genres seulement, on 
n’en rencontre que quelques-unes qui s’y soumettent (2) : 
« Tout ce qu'il y a d’espèces domesticables, dit-il ailleurs, 
» semble avoir été domestiqué avant même que leur maître 
» se füt dépouillé de sa propre sauvagerie (3). » Rien ne le 
prouve, et le fait observé par le naturaliste vient ici contredire 
l’assertion du philosophe : le coq et la poule, à l’état sauvage, 
mais différant peu de nos races de basse-cour, ont été trouvés 
aux Carolines par les premiers navigaleurs qui visitérent cet 
archipel, et, chose remarquable, dit Lesson, les naturels de 
ces iles ignoraient que ces oiseaux fussent bons à manger. 
Faut-il nous étonner du reste que des insulaires, presque en- 
core à l’élat primitif, n'aient pas pensé à mettre à profit l’ap- 
titude de ces gallinacés à la domesticité, lorsque nous voyons 
tant d’autres espèces de la même famille, qui pourraient aug- 
menter non moins avantageusement nos ressources alimen- 
taires, laissées encore à la vie sauvage par les peuples les plus 
civilisés. 

Nous croyons, avec M. Rimbaud, « que l'aptitude à la do- 
mesticité est inaltérable et indéniable chez les animaux qui la 
possèdent; qu'on peut les rendre et reprendre ensuite à la 
nature sauvage, comme nous l'avons fait observer pour les 
chevaux et les taureaux des Pampas; nous pensons même que 
leur éloignement plus ou moins prolongé de la vie domes- 
lique, leur croisement libre, ne changent n1 n’affaiblissent 
leur appropriation à la vie captive et que /« malléabilité de 
leur caractère fait que l'art est bien plus que la nature le 


(1) Rimbaud, op. cit., p. 249. 
(2) Id., p. 250. 
(3) Id., p. 256. 


606 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


moyen de varier les races. » Mais nous ne saurions admettre 
que ce penchant vers la domesticité, qu’on leur suppose pent- 
être un peu trop gratuitement, soit chez eux une appropria- 
tion naturelle qui les place sous notre dépendance. Nous re- 
connaissons en eux, au contraire, un instinct qui ne cesse de 
les porter vers la vie indépendante, même dans l’état de do- 
mesticilé. Plusieurs espèces d’échassiers et bien des palmi- 
pèdes, parqués au Jardin d’acclimatation dans des enceintes 
réservées ei qui para!ssent si paisibles (nous pourrions mieux 
dire si tristes), au bord de pièces d’eau aw’on leur a ménagées, 
auraient depuis longtemps repris leur vol vers d’autres ré- 
gions, sans l’amputation du fouet de l’aile qui les empêche de 
s’élancer dans l'espace. Nous eiterons principalement plu- 
sieurs espèces de sarcelles, des oies et des cygnes exotiques, 
des oiseaux de marécages ei surtout, parmi les grands échas- 
siers, la demoiselle de Numidie, celte espèce de grue couron- 
née que les anciens Égyptiens, nos maitres en fait de domesti- 
cation, élevèrent par grandes bandes avec leurs troupeaux de 
gazelles, d’antilopes et, on croit même, de girafes. 

Nous convenons que beaucoup d’espèces sociables ont déjà 
une grande aptitude à la domestication. Ces animaux se pré- 
tent d'autant plus facilement aux tentatives dont ils sont 
l’objet, qu’ils trouvent auprès de nous plus de sécurité et 
plus de ressources pour la vie. On peut donc établir comme 
un principe de la domestication que la sociabilité est une con- 
dition indispensable pour que certains animaux se soumettent 
à l’homme et se fassent un besoin de sa protection. — Toutes 
nos espèces domestiques, dont les types primitfs existent en- 
core à l’état sauvage, appartiennent aux mêmes espèces qui 
vivent encore ou vécurent jadis en troupes plus ou moins nom- 
breuses, tandis qu'aucune espèce solitaire dans l’état de na- 
ture, quelque facile qu’elle soit à apprivoiser, n’a jamais donné 
de race domestique. Les exceptions du moins sont bien rares. 

Ainsi, lorsque l’homme s’est attaché une espèce sociable, 
il a fait tourner à son profit sa disposition à vivre en troupes 
et à se laisser diriger par un conducteur; mais n'oublions pas 
que c’est parmi les ruminants, les solipèdes, les pachydermes 


DOMESTICATION DES ANIMAUX. 607 


el quelques rongeurs, tous herbivores, de même que, parmi 
les oiseaux, chez plusieurs espèces de pigeons, de gallinacés 
et de palmipèdes, que nous devons espérer d'obtenir les ani- 
maux domestiques que la nature nous réserve encore. 

Les animaux solitaires, aux habitudes vagabondes, la plu- 
part rôdeurs de nuit, toujours en quête d'aliments, laissent 
peu à espérer des services qu'ils pourraient rendre, ni des 
profits qu’on pouvait tirer de ces carnassiers, dont l'éducation 
est difficile et très-coùteuse. Parmi ceux qu’on à apprivoisés 
jusqu’au point de les laisser libres, il n’y a guêre que le chien 
et le chat qui nous sont réellement utiles, car pour les 
autres, alors même qu'on parvint à les rendre aussi familiers, 
cel apprivoisement serait encore bien loin de la domestica- 
tion. — Une espèce sauvage, enlevée isolément à la vie libre, 
pour soumise el docile qu’elle soit, ne sera jamais un animal 
domestique dans le sens que nous l’entendons. Il y a entre 
celle-ci et celle-là une différence capitale, surtout si l’espèce 
qu'on veut posséder n’est pas facile à nourrir comme les her- 
bivores, et en même temps d’une facile propagation. — « Si 
» l’action des hommes, disait F. Cuvier, s'était bornée aux 
» individus, s'il eût fallu à chaque génération recommencer 
» le même travail, nous n’aurions point obtenu d'animaux do- 
» mesiiques ; mais heureusement les modifications qu’on a 
» fait éprouver aux premiers animaux soumis n’ont pas été 
» perdues pour ceux de leurs espèces qui leur ont dû lexis- 
» tence. » — En ellet, d’heureux changements se sont pro- 
duits sous l'influence de la domesticité ; les modifications or- 
ganiques, opérées d’abord sur quelques individus isolés, se 
sont transmises par l’hérédité génératrice; des instincts plus 
développés ont remplacé le sentiment bestial, et les orga- 
nismes une fois en harmonie avec le climat et des habitudes 
nouvelles, de bonnes races nous ont récompensés de nos peines. 

Il est évident que de simples essais d’apprivoisement sans 
mulliplication ne pourraient nous donner que des résultats 
temporaires qu'il faudrait renouveler par les mêmes moyens, 
c’est-à-dire acquérir toujours de nouveaux esclaves pour répa- 
rer nos pertes. — l’illustre Isidore Geoffroy Saint-Hilaire l’a 


608 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


dit avant nous: « La domestication d’une espèce n’est pas 
» seulement sa conquête une fois accomplie au profit de ceux 
» qui l’ont réalisée, mais sa possession transmise par un peuple 
» à tous les autres, car, dès l’instant qu'on s’est rendu maître 
» d’une race, on a le pouvoir de la multiplier indéfiniment et 
» partout. La transmission perpétuée d’une première modifi- 
» fication, l'habitude devenue un besoin, un instinct, tel est 
» le merveilleux résultat de la race. » 

On éprouve souvent bien des désappointements dans les 
premières tentatives d’acclimatation et de domestication ; ces 
contrariétés sont la conséquence des habitudes contractées 
dans l’état libre. Le besoin d'indépendance est un instinct na- 
turel chez tous les animaux, et cet amour de la liberté se con- 
serve chez les espèces déjà à demi privées et en apparence 
des plus domesticables ; il n’y a guère que le bien-être qu’elles 
éprouvent de pouvoir satisfaire au besoin incessant de pâture 
qui les retienne autour de nous. Les oiseaux surtout éprou- 
vent un désir irrésistible de déplacement à l’époque des mi- 
grations qui précèdent les nichées. Plusieurs faits observés 
viennent l’attester. 

Audubon avait blessé à l'aile un jeune cygne trompette qu'il 
parvint à guérir et qu'il lâcha dans son jardin. Très-farouche 
d’abord, l'oiseau devint bientôt des plus familiers; il accourait 
aux appels et venait manger dans la main; mais chaque fois 
qu'il trouvait la porte du jardin ouverte, 1l prenait sa course 
vers l'Ohio, et il fallait beaucoup de peine pour le ramener au 
logis. «Ces oiseaux favoris, dit le chasseur naturaliste, finissent 
toujours mal : par une nuit sombre et pluvieuse, un domes- 
tique ayant négligé de fermer la porte du verger, TROMPETTE 
s’esquiva, et depuis lors jen’en ai jamais entendu parler. » 

L'autre fait est plus curieux encore et en même temps très- 
caractéristique : 

Un oiseau de l'espèce des grands goëlands à manteau noir, 
assez communs dans les régions septentrionales de l’'Améri- 
que, avait été pris tout jeune et donné en cadeau au docteur 
Néill (d'Édimbourg). Cet oiseau s'éleva avec des canards do- 
mestiques ; il partageait leur nourriture et se fit tellement fa- 


DOMESTICATION DES ANIMAUX. 609 


milier qu’il se présentait de lui-même à la fenêtre de la cui- 
sine pour recevoir des débris de poisson et autres rejets. 
Devenu adulte et très-fort, il prit son vol au printemps 1822, 
mais revint en octobre de la même année, quand on le croyait 
perdu pour toujours. Depuis cette époque, ce goéland continua 
ses échappées temporaires et revint même une année avec un 
jeune de sa race, un de ses petits sans doute, blessé à l’aile et 
qui mourut bientôt. Le vieux reprit ses excursions vers les ré- 
gions inconnues où il allait prendre ses ébats et rester tout le 
temps des nichées. Cet oiseau était connu de tous les enfants 
du village de Canounille, qui l'appelaient /e goëland de Néull. 
L'instinct qui guidait périodiquement cet oiseau dans ses mi- 
grations lointaines, à l’époque des accouplements, est des plus 
admirables, car ce goëéland, en partant au printemps des en- 
virons d'Édimbourg, ne pouvait aller nicher que sur la côte 
du Labrador ou à Terre-Neuve, c’est-à-dire à mille lieues au 
moins de son point de départ! Et pourtant, pendant vingt-sept 
ans, il continue ce manége, passant alternativement de la vie 
libre à la vie privée. — Le journal dans lequel le docteur Néill 
tenait compte de ses observations s'arrête à 1837: « Mainte- 
nant, écrivait-il à cette date, 7e ne lattends plus qu'en na- 
vembre.., » mais 1l ne revint plus. 

Ces faits expliquent pourquoi l’on trouve encore si peu 
d'espèces qui manifestent leur tendance vers ia sujétion et 
qui se décident à passer sans résistance de l'existence indé- 
pendante à cet élat de soumission si voisin de l’esclavage, 
même alors qu’on les entoure de tous les soins que leur pro- 
curent une vie plus douce et un bien-être plus assuré. 

Mais est-ce à dire pour cela que nous devions renoncer à : 
de nouveaux essais? — Non, certes; les résultats déjà obtenus 
sur des espèces dociles et bien préparées à accepter les condi- 
tions de vie que nous leur imposons, doivent au contraire 
nous encourager à de nouvelles conquêtes. Les animaux do- 
mestiques que nous possédons sont la plupart des acquisitions 
qui datent de loin ; je l'ai ditailleurs il v a bien longtemps (1), 


(1) Considérations sur l’acclimatement et la domestication, par S. Ber- 
thelot. Paris, 1844, Béthune et Plon, édit. 


610 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


mais il est bon de le répéter encore : l’histoire des premuères 
tentatives pour soumetire à la domesticité les espèces que les 
plus anciennes annales nous montrent dans cet état, nous est 
entièrement inconnue; si nous avions des données pour 
l'écrire, elle formerait un livre précieux pour les renseigne- 
ments qu'on pourrait en tirer. — « Avant toutes les histoires 
» partielles des peuples et des empires, » a dit le savant pro : 
fesseur auquel on doit la première pensée de notre Société 
d’acclimatation et la création de son Jardin zoologique, «il 
» est une histoire bien plus grande, bien plus philosophique 
» encore : histoire de luttes toutes pacifiques el toujours fé- 
» condes, dont le théâtre est ie globe terrestre, et le héros 
» l’homme de tous les pays et de tous les temps. C’est celle 
» des développements graduels de la puissance humaine et de 
» cette suite séculaire de progrès par lesquels notre espèce 
» confondue à l’origine dans le sein de la création, comme 
» une humble partie dans un vaste ensemble, s’est faite fina- 
» lement la dominatrice de tout ce qui l’entoure et la pre- 
» mière après Dieu (1). ». 

En effet, l’homme a tout modifié chez les espèces domesti- 
ques, organismes, instinets, habitudes, patrie, et si l’on con- 
sidère jusqu'où peut s'étendre le pouvoir illimité qu'il exerce, 
si, poursuivant à son tour l’œuvre des âges passés, notre gé- 
nération, qui a tout reçu de celles qui l'ont précédée, continue 
la noble tâche d'ajouter quelque chose à l’héritage de bien- 
faits et de richesses qu’elle doit transmettre aux générations à 
venir, quelle gloire ne doit-elle pas se promettre d’une pareille 
entreprise | 


P.-S.— Qu'on ne se méprenne pas sur mes intentions dans 
les observations qu’on vient de lire; les opinions que J’émets 
sur la domesticalion ne sont pas dirigées dans un esprit de 
critique. Je ne suis véritablement en opposition avec les idées 
de M. Rimbaud que sur un point : il croit que l’apütude de 
certains animaux à la domesticité est, chez eux, une faculté 


(4) I. Geoffroy Saint-Hilaire, Æssais de zoologie générale. Noue: Nou- 
welles suites à Buffon, supplément, p. 250. 


DOMESTICATION DES ANIMAUX. 611 


innée que la nature, dans ses prévisions, leur concéda dés le 
principe dans un but déterminé, et je pense, au contraire, 
que ce penchant vers la vie domestique, loin d’être une appro- 
priation naturelle qui les convie à se placer sous notre dépen- 
dance, n’est qu'une qualité acquise qui, développée par des 
soins intelligents, finit par dominer l'instinct brutal. 

Mais peut-être jouons-nous sur des mots? — Ne confondons 
pas la sociabilité avec la domesticité. La sociabilité est une 
qualité naturelle qui ne s’acquiert pas; elle esi spéciale à un 
très-grand nombre d'animaux comme qualité native et reste 
chez eux la même à l’état sauvage comme à l’état de domesti- 
cité parmi les différentes races conquises. La domesticité, au 
contraire, est une qualité acquise qui se perfeclionne par 
l'éducation chez les animaux que nous soumettons à nos be- 
soins ou à nos jouissances et dont les modifications de tempé- 
rament, obtenues par lacclimatation et des habitudes nou- 
velles, nous donnent de nouvelles races. -— Mais bien que les 
instincts naturels auxilient puissamment la domestication et 
qu'on reconnaisse, à l’état sauvage chez certaines espèces, des 
prédispositions particulières à la domesticité, ces tendances 
ne pourraient se développer sans notre action directe. — En 
résumé, la sociabilité, comme disposition préalable de la do- 
meslicité, est une des conditions essentielles de la domestica- 
tion et fait le passage, le trait d'union d'une faculté native à 
une qualité acquise. 

Sur tous les autres points de cette question, nous sommes 
d'accord avec M. Rimbaud, et je tiens d’autant plus à cette 
déclaration de ma part, que l’ouvrage de mon savant ami a 
été écrit pour combattre un système dont je suis loin d’être 
le partisan. Je saisis done cette occasion pour le proclamer 
hautement: je partageais déjà les opinions de M. Rimbaud 
sur le #ansformisme avant la publication de sa Ré/utation, 
et aujourd’hui, après avoir lu le livre où il met si opportuné- 
ment les théories devant les faits, dans le grand débat du dé- 
veloppement de la vie sur le globe, je suis encore plus con- 
vaincu. 


SUR 
L'ÉLEVAGE DES DINDONS SAUVAGES 
Lettre adressée à M. le Secretaire général de la Nocièté d'acelimatation 


Par M. Ermest BOUILL9OD. 


J'ai l'honneur de vous transmettre les renseignements que 
vous m'avez demandés sur mes élevages de Dindons sauvages. 
Je vous ferai part des quelques observations que j’ai recueillies 
à ce sujet, et vous exposerai le mode d’élevage que j'ai cru 
devoir adopter et qui, cette année, a été couronné de succès. 

Je possédais au mois d'avril un coq et quatre femelles de 
Dindons sauvages, dont deux âgées de deux ans, les autres 
et le coq étaient jeunes. La ponte commença en avril et fut 
d’abord peu régulière ; elle se régularisa peu à peu, et même 
pendant un certain temps on trouva chaque jour quatre œufs 
pondus tous et toujours au même endroit : progrès à signaler, 
car l’année précédente les Dindes faisaient leurs œufs un peu 
partout, dans les massifs d'arbres, dans les pelouses, sur les 
murs; beaucoup furent ainsi perdus. Chaque soir les œufs 
étaient enlevés et remplacés par des œufs de porcelaine. Gette 
précaution est nécessaire chez moi, à cause des fouines, pu- 
tois et autres bêtes malfaisantes qui s’y introduisent souvent. 
Une première ponte me donna une moyenne de 45 à 18 œufs 
par femelle, et aussitôt les Dindes commencérent à couver. 
La Dinde sauvage couve parfaitement, il est même difficile de 
lui faire quitter son nid; j'avais donc là des couveuses toutes 
trouvées. Néanmoins je ne crus pas prudent de leur confier 
des œufs, craignant que quelque autre oiseau ne vint les dé- 
ranger. L'année passée, en effet, je laissai quelques œufs sous 
une Dinde qui couvait parfaitement. Un jour que la couveuse 
s'était dérobée un moment aux soins de l’incubalion pour 
chercher sa nourriture, un Talégalle qui l’épiait depuis long- 
temps, perché sur un arbre voisin, se précipite sur le nid, 


ÉLEVAGE DES DINDONS SAUVAGES. 613 


brise les œufs et en avale le contenu. Je fis prendre bien vite 
ce terrible animal, coupable de bien d’autres méfaits, et le 
mis en volière. Ne voulant pas cette année exposer mes 
couvées à un sort semblable, je confiais les œufs à des Dindes 
privées. 

L'endroit où se fait l’incubat'on, le couvoir, est un compar- 
timent en briques, couvert en tuiles, mesurant 1°,30 de pro- 
fondeur sur deux de largeur. J’ai ainsi vingt-cinq comparti- 
ments contigus et exposés au levant. Sur la façade, à 1",30 de 
hauteur, se trouve une ouverture grillée de À pied carré pour 
l'aération. Dans le bas, au milieu, s'ouvre une triple porte ainsi 
combinée : 

1° Première porte extérieure, pleine, percée à son centre 
d’une petite ouverture grillée. 

2° Deuxième porte, grillée, s’ouvrant après la précédente. 
Ces deux premières portes sont à charnières. 

3° Porte à claire-voie, mobile dans une coulisse, et dont le 
rôle ne commence qu'après l’éclosion. 

Pendant tout le temps de l’incubation les portes 1 et 2 
restent fermées, l’ouverture pratiquée dans la première lais- 
sant la couveuse dans une demi-chbscurité, et l’empêchant 
d’être distraite par la vue des objets extérieurs. Le nid, fait 
de paille et de foin, est creusé dans une légère dépression du 
sol, et placé dans un des angles du compartiment, à droite ou 
à gauche de la porte. Un sable abondant et fin en tapisse le 
fond. Chaque matin on distribue la nourriture, composée 
exclusivement de mais et blé : on nettoie ensuite sans jamais 
toucher la couveuse, malgré l'avis de beaucoup d’éleveurs qui 
veulent que chaque jour on retre la couveuse de son nid, et 
qu’on lui fasse faire des repas réglés. Cette méthode, quoique 
excellente en principe, présente bien des inconvénients dans 
son application. Elle demande des soins nombreux et intelli- 
gents que la première personne venue ne peut pas donner; 
elle exige beaucoup de temps : en outre il arrive souvent que 
les œufs sont cassés par suite des mouvements brusques que 
fait la couveuse au moment où on la retire de son nid. Cet 
inconvénient est surtout à craindre lorsque les couveuses sont 


51 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


des Dindes, oiseaux lourds et maladroits. Chez moi les cou- 
veuses sont entièrement livrées à elles-mêmes : leur instinct 
les pousse toujours à faire seules les actes que nos soins veulent 
les forcer à accomplir, souvent dans un temps inopportun. J'ai 
soin de faire placer leur nourriture loin d’elles, afin qu’elles 
soient obligées de quitter leur nid pour manger. C'est là la 
vieille méthode, je l'ai toujours suivie, et m'en trouve bien. 
Le temps de l'incubation est de vingt-neuf à trente jours. 
L’éclosion dure souvent vingt-quatre heures et même quel- 
quefois davantage. Aussitôt les jeunes éclos, on ouvre la porte 
pleine n° À, pour laisser arriver la lumière et le soleil. Le 
lendemain on leur jette quelques larves de fourmis que la 
mère leur apprend à manger. Le surlendemain, lorsque les 
jeunes oiseaux sont bien réchauflés, les deux premières portes 
étant ouvertes, la troisième (à claire-voie) est placée dans la 
coulisse, et les jeunes oiseaux en passant à travers les bar- 
reaux, trop étroits pour permettre à la mére de les suivre, 
peuvent sortir dans un parquet extérieur, mobile, et que l'on 
ne met en place qu’au moment de l’éclosion. Ce parquet se 
compose de cinq châssis en fer grillés, mesurant 2 mètres de 
longueur sur 1*,10 de hauteur. Deux de ces châssis, maintenus 
par des pieux, sont placés de chaque côté de la porte perpen- 
diculairement à la façade et à la distance de 2 mètres; un 
troisième, formant porte, parallèle à la façade, vient rejoindre 
les deux premiers, le tout est couvert par les deux autres qui 
supportent eux-mêmes, dans leur partie allenant à la façade, 
un double châssis vitré incliné pour l’écoulement des eaux. 
Système simple, peu coûteux, et qui permet, aussilôt l'élevage 
fini, d'enlever les grillages qui peuvent alors trouver ailleurs 
un autre emploi. 

En outre, l’espace ainsi obtenu (4 mètres carrés) est suffi- 
sant pour les jeunes oiseaux dans les premiers jours de leur 
naissance... C’est là que quatre fois par jour on leur distribue 
leur nourriture dont les larves de fourmis forment le point 
capital. On y ajoute une pâlée sèche, composée de pain 
émietté, œufs cuits durs, orties hachées et chènevis pilé, le 
tout bien mélangé. Comme boisson je donne, outre l'eau 


ÉLEVAGE DES DINDONS SAUVAGES, 615 


fraîche, du lait à discrétion : c’est un agent très-nourrissant, 
substantiel, rafraichissant et dont les jeunes Dindons se mon- 
trent très-friands. De temps en temps une petite ration de vin 
sucré. Au bout du dixième jour, si le temps est beau, on 
ouvre la porte du parquet extérieur, et lâchant la mére avec 
les jeunes oiseaux, on les laisse sortir dans un vaste clos d’une 
contenance de 16 hectares, planté de vignes, luzernes, prés, 
avoines, etc. et entouré de toute part de murs élevés. On doit 
avoir bien soin d’altendre, pour lâcher les jeunes oiseaux, que 
le soleil ait séché toute la rosée du matin, et qu’il n’y ait plus 
aucune humidité à terre. Le Dindon ne craint pas le froid, 
mais l'humidité lui est fatale dans son jeune âge. Observation 
qui s'accorde parfaitement avec celle faite par M. Gayat (1), 
relatée dans une étude spéciale sur le Dindon sauvage, publiée 
en 1567 par les soins de la Société d’acclimatation. 

Les Dindes ayant l'habitude de mener souvent très-loin 
leurs petits, 1l est nécessaire, pendant les premiers temps, de 
faire rentrer les Dindons trois ou quatre heures après leur 
sortie; car, encore faibles et délicats, ils pourraient être fati- 
gués d’une course trop prolongée. Ils s’habituent vite à ren- 
trer et reviennent d'eux-mêmes à l’heure des repas; s'ils 
s’attardent, la personne chargée de les soigner les appelle 
d’une façon particulière, on les voit alors arriver tous à tire- 
d’aile, souvent de fort loin, semblables à une nombreuse com- 
pagnie de perdreaux. Tous les soirs on les enferme dans l'abri 
intérieur avec la mère. 

Lorsqu'ils ont atteint la grosseur d’une poule commune, on 
leur jette quelques poignées de millet en plus de leur nourri- 
ture habituelle et tout en leur donnant toujours la même, 
quantité de larves de fourmis. Je les change alors de local, et 
les fais placer dans une cour spacieuse, entourée de hauts 
treillages, s’ouvrant devant une large chambre abondamment 
pourvue de perchoirs. Une claire-voie sépare les deux com- 
partiments : les mères restent dans l’abri intérieur ; la nour- 


(1) La production änimale et végétale, études faites à l'Exposition ani- 
verselle de 1867, page 83. 


616 SOCIËTÉ D ACCLIMATATION. 


riture des dindonneaux se donne dans la cour extérieure. 
Tous les matins, après le premier repas, on les lâche avec 
leurs mères, et tous ensemble ils partent en volant. On ne les 
voit plus de toute la journée. Le soir, à l’approche de la nuit, 
ils reviennent manger un peu et rentrent se coucher. 

Au milieu du troisième mois on peut considérer les jeunes 
Dindons comme sauvés, car alors les caroncules rouges de la 
tête et du cou sont poussées, ils ont piqué le rouge, moment 
critique. On cesse alors graduellement de leur donner des 
œufs de fourmis, on remplace cette nourriture par du millet, 
des petits-blés mélangés de quelques graines de chènevis. 

La liberté aussi complète que possible, des larves de 
fourmis distribuées en quantité suffisante, me paraissent être 
les conditions importantes que l’on doit s’efforcer de remplir 
pour mener à bien l'élevage du Dindon sauvage. Je suis loin 
de partager l'opinion de quelques amateurs qui conseillent de 
renfermer les jeunes Dindons dans des greniers sablés au 
moment de la pousse des caroncules rouges. Dans de pareilles 
conditions il me paraît difficile de sauver un seul oiseau. 

Mes quatre femelles me donnèrent en totalité plus de 
120 œufs. Je n’en mis que Ah en incubation. Un nombre à 
peu prés égal fut confié aux soins intelligents d’un amateur 
distingué de nos environs, qui, comme élevage, obtient chaque 
année des résultas remarquables. Nul doute que sa réussite, 
dans l'élevage du Dindon sauvage, ne vienne s'ajouter à la 
longue liste de ses succès. Des 44 œufs que je fis couver, 
A1 sont éclos et ont donné des sujets forts et bien constitués; 
les trois autres n'étaient pas fécondés. Sur mes A1 dindon- 
neaux, 2 périrent quelques jours après leur naissance et 
2? autres furent pris et mangés par des chats, alors qu'ils 
avaient déjà atteint la taille de gros perdreaux. Les 37 survi- 
vants sont maintenant en bonne santé. Il est à remarquer que 
je n’en ai pas perdu un seul au moment du rouge : succès que 
J'attibue à la liberté presque complète dans jaquelle je les ai 
toujours tenus, et à la grande quantité de larves de fourmis 
qu'ils ont toujours eue à leur disposition. L’année passée, avec 
ie même nombre d'œufs, je ne pus élever que 6 Dindons : 


ÉLEVAGE DES DINDONS SAUVAGES. G47 


l’année précédente le résultat était encore bien inférieur. 

Il est regrettable que ce magnifique oiseau ne puisse pas, 
comme gibier, venir repeupler nos chasses. Îl est robuste, et 
trouverait une nourriture suffisante dans nos contrées, car, 
peu difficile, il mange indifféremment toute espèce de graines, 
des feuilles d'arbres et des baies dont il se montre très-friand. 
Malheureusement, parvenu à l’état adulte il devient lourd, 
vole difficilement, court mal, et ne saurait ainsi se soustraire 
aux poursuites du chasseur. Nous pouvons néanmoins, el 
même dès à présent, le compter au nombre de nos oiseaux de 
basse-cour, où ce hel oiseau au luisant plumage: remplacera 
avantageusersent son congénère indigène, si lourd, si disgra- 
cieux de forme, et qui du reste lui est bien inférienr comme 
grosseur. 


3° SÉRIE, T. I. — Octobre 1874, A0 


Il. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES À LA SOCIETE. 


SUR LE 
DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS 


Extraits d'un Mémoire adressé à M. le Président de la Nociété d'acclimatation 


Par M. Manuel Vicenéie de fa ROCHE. 
(TRADUIT DE L'ESPAGNOL) 


Mon savant compatriote, M. José Maria Torres Caicedo, 
vous a adressé une note qui traitait d’une découverte que 
j'ai faite en Colombie, le 12 juin 1869, d’un lépidoptère, le 
Bombyce spondiæ (1) du genre Affacus, découverte applicable 
au dévidage de ses cocons et de ceux de ses congénères, cyn- 
tlua, arrindia, etc. (Bulletin de la Société d'acclim., ?° série, 
t. VI, p. 467). 

Vous avez soumis cette note à la délibération de la corpo- 
ration honorable que vous présidez si dignement. Le savant 
conseil de la Société n’a pas, à ce qu'il me paraît, rendu défi- 
nitivement son verdict, parce que la découverte a été objet 
d’une discussion qui n’a pas élé terminée. Le membre chargé 
de l'examen de cette découverte, quoiqu'il l’eût déjà com- 
battue par un mémoire qu'il lut devant la Société le 24 dé- 
cembre 1869, n’a pas achevé sa commission, ayant lui- 
même déclaré insuffisants les faits sur lesquels il s’appuyait 
(Bull. de la Soc. d’acclim., 2° série, t. VIE, p. 167), puisqu'il 
attendait avec impatience la prochaine saison pour faire 
d’autres essais. Et M. de Grandmont, rapporteur des tra- 
vaux de la Société en 1869, les a aussi déclarés incomplets 
(Bull, de la Soc. d'acclim., 2° série, t. VIT, p. xzui). 

Le 16 janvier 1870, j'ai perfectionné ici ma découverte, en 
définissant bien la loi qui régit les Affacus, et appuyant mes 
asserlions sur de meilleures bases, Le commissaire cité, chargé 
de l'examen de ma découverte, présenta à la Société partie 
de mes écrits sur cette affaire, traduits en français (Bull. de 


(4) Peut-être À. œthra, Fabr. — M, Girard: 


DÉVIDAGE DES COUONS DES ATTACUS. 619 
la Soc. d'acchim., 2° série, t. VIL p. 271); et dans cette 
traduction il promet de nouveau qu’il « ne discutera pas mes 
curieuses expériences tant qu'il ne les aura pas répétées lui- 
même » (p. 272). 

Jusqu à présent, je n'ai vu aucun travail de M. le Commis- 
saire, postérieur à Ces promesses. Son mémoire, ses notes 
et ses commentaires sur ma loi des Affacus ont laissé la 
question pendante. Le savant tribunal de la Société d’accli- 
malation n’a donc pu rendre définitivement son verdict. 

Mais comme il s'est écoulé un laps de temps plus que suffi- 
sant pour faire ces expériences ou essais, etles présenter à la 
Société, et qu’elles n’ont pas été présentées, et que, d’un autre 
côté, j'ai des notions claires et évidentes de ce que ma décou- 
verte s'applique à l'industrie des cocons du Cynthia (Moni- 
teur des soies de Lyon, n° 581), et que chaque jour elle se 
oénéralise davantage, puisque déjà le dévidage de ces cocons 
les a fait monter à un prix élevé, à 6 francs le kil. de cocons 
avec chrysalides étouflées (lAcc/imatation, n° 2). Il est donc 
juste qu'aujourd'hui j’élève ma voix pour que ma découverte 
soit examinée et mes asserlions discutées de nouveau, en 
ayant présentes les notes et les observations de mon contra- 
dicteur, les propositions principales de mon annonce, la loi 
des Atfacus, que j'ai découverte, et sa démonstration, et mes 
dernières expériences que j'ajoute aujourd’hui sur l'analyse 
chimique du gluten de ees cocons d’Aféacus, sur quoi l'on 
a discuté. Ainsi, avec cette réunion de données, le savant 
conseil de la Société d’'acclimatation pourra mieux qualifier 
ma découverte, et m accorder la récompense que me semble 
mériter ma tâche. 

Il est vrai que l'on me dira que l’honcrable Société m’a 
déjà concédé une récompense, ou une médaille de seconde 
classe pour mes premières études, ce dont je lui suis extrême- 
ment reconnaissant; mais ce ne fut pas pour ma découverte, 
parce qu’elle a été amoindrie par la discussion, si l’on donne 
créance aux paroles de celui qui fit le rapport sur les travaux 
de la corporation, de 1869, parce qu'il dit : « Si l’auteur (moi) 
de ce travail s’est certainement trompé dans ses assertions, il 


620 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


a eu au moins le mérite de tächer de tirer parti d'un bomby- 
cien, producteur de soie, très-commun dans son pays » 
(Bull. de la Soc. d'acclim., 2° série, t. VIT, p. xzin). 

Et à qui doit-on cette confusion de croire que j'ai seule- 
ment le mérite de tächer de tirer parti d'un bombycien 
producteur de soie dans mon pays ? À ceci, que le mémoire du 
rapporteur de mes études a nié les assertions de l’annonce de 
ma découverte, trompé par ses propres expériences et obser- 
valions très-précipitées, comme il l'avoue plus tard, et que 
M. le Rapporteur des travaux de la Société qualifie d’in- 
complètes. 

Il a fait consister la principale difficulté pour dévider les 
cocons du Cynthia dans les procédés chhniques qui ensei- 
gneralent à amollir le gluten sans altérer les fils de soie 
(Revue de sériciculture comparée, par M. G. Méneville, 1866, 
p. 190). Cest sur cette thèse qu’il m'a fait ses attaques. 
Il a professé aussi des principes diamétralement opposés à 
ceux qui sont annoncés comme vérifiés dans ma découverte. 
Il a dit, d'accord avec un savant de renom, que les mandibules 
d'un ver du genre Aftacus, le Cynthia, ne mordent ni ne 
coupent les fils de ses cocons (car elles ne mordent ni ne 
coupent rien). (L’Ai/ante etson Bombyx, par H. Givelet, p. 40.) 

Le défenseur est un Colombien adonné aux études sérici- 
coles, humble observateur des beautés de la création, qui a 
découvert une de ses lois et l'a proclamée à haute voix, afin 
que le monde civilisé en profite, et ensuite pour que l'Amérique 
jouisse de ce bienfait, parce qu’elle possède dans ses forèts 
de riches espèces d'Af{acus, rivales de celles de l'Asie. Il à 
annoncé cette découverte depuis le commencement presque 
telle qu’elle est, n’hésitant plus que sur le mode de l’apphiener 
à l’industrie. il en a défini les détails plus tard, et chaque 
jour accumule de nouvelles preuves pour la démonstration. 

Les forêts vierges de l'Amérique, si riches en ces espèces, 
seront exploitées, parce que le prix de ces cocons se triplant 
et se quintuplant par le dévidage, l'industrie de ses habi- 
tants s’augmentera beaucoup. 

Les travaux de la Société d’acclimatation ont tant d'influence 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS. 624 


sur la propagation des connaissances utilesau monde, que l’an- 
nonce seule de ma découverte dans son Bulletin et la discus- 
sion qui a eu lieu ônt suffi pour que les fileurs l’appliquent 
à l’industrie, et abandonnent les anciens appareils que l'on 
emploie pour dévider les cocons à fils continus, conime ceux 
du märier, avec lesquels ils prélendaient dévider ceux des 
Attacus à fils coupés, inventant d'autres appareils nouveaux. 

Pour mieux coordonner ce qui concerne mon mémoire, je 
vais le resserrer en trois points principaux qui se rapportent 
aux assertions que j'ai émises dans mes écrits, déjà connus 
de la Société. 

1° Les Vers du genre Attacus préparent une ouverture dans 
leurs cocons, et coupent les réseaux qu'ils y tissent pour se 
remettre à leur travail intérieur. 

2° Ils préparent celte ouverture et coupent ces réseaux 
parce qu'ils manquent du liquide dissolvant le gluten qu'ont 
les Bombyx à cocons fermés. 

3° La principale question qu’il fallait résoudre pour le dé- 
vidage des cocons n’était pas le problème de savoir amollir 
le gluten, mais celui qui a été résolu par la loi des Aftacus, 
que j'ai publiée. 


J'ai dit d’une manière explicite, dès le commencement de 
l'annonce de ma découverte : que le Ver coupait avec ses mandi- 
bules les fils de soie qu’il tissait lui-même à la porte ou orifice 
de ses cocons. Ge fait, je l’ai affirmé le 12 juin 1869 (voy. le 
Bull. de la Soc. d’acclim., 2° série, t. VE, p. 468). Depuis, le 
16 janvier 1870, j'ai dit aussi que le Ver coupe non-seulement 
une fois, mais deux, et même trois fois (voy. la loi des Aftacus 
indiquée par moi, Bull. de la Soc. d’acclim., 2° série, t. VIF, 
p. 272 et suiv.). Et je l'ai prouvé par la description minu- 
lieuse que j'ai faite du travail de cet insecte, en le suivant 
dans ses plus petits détails. 

Lors de ma première annonce. j'ai cru que le Ver terminait 
son travail à la formation de ses deux premières couches, et 


622 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION., 


quand je l'ai publiée, je n'avais pas encore eu le temps né- 
cessaire pour perfectionner ma découverte. Mes expériences 
avaient été faites sur un petit nombre de Vers, que j'élevais 
pour la première fois, et dont je devais conserver quelques- 
uns pour la reproduction. C’étaient ceux d’une race nouvelle 
de mon district, récemment découverte, et qui correspondait 
au genre dont les Européens avaient déjà acclimaté une espèce 
de l’Asie, et se préoccupaient beaucoup du dévidage des 
COCOns. 

M. le Rapporteur a fait ses expériences pour corroborer 
les miennes, la saison étant très-avancée, et il n’a pu avoir 
à sa disposition qu'un petit nombre de Vers pour filer, et, 
malheureusement, comme il l’a avoué depuis, il a plutôt ob- 
servé le travail que l’ouvrier ; non-seulement c’est ce qui lui 
est arrivé, mais 11 n’a pas compris, en examinant l’ouvrage 
de l’insecte, que J'indiquais que le Ver coupait les fils à la 
porte ou orifice des cocons, et il a cherché ailleurs : Je dis 
la vérité, c’est que le Ver... et prévoyant par instinct que 
däns ce dernier état il ne pourra briser le RÉSEAU qu'il a 
fait à luimême..…., OUVRE LA PORTE qu'il vient de fermer en 
coupant AVEC SES MANDIBULES LES FILS DE SOIE QUI LA BOU- 
CHAIENT (Bull. de la Société d'acclimatation, 2° série, t. VE, 
p. 468). 

Dans un mémoire que M. le Rapporteur m'a envoyé le 
3 décembre 4869, écrit et signé de sa propre main, il ma. 
assuré, parlant du résultat de ses expériences, ce qui suit : 
« Je commençais à croire que, son travail fini (le Ver), il cher- 
chait, comme dit M. de la Roche, à détruire le réseau de la 
couche extérieure, maïs j'eus plus tard, par l'examen d’autres 
cocons, la preuve que je me {rompais dans celte apprécialion.» 

Ce n’était pas ce réseau que j’indiquais que le Ver rompait, 
car ce réseau de la couche extérieure n’est autre que la 
premiére monture que le Ver tisse pour faire un cocon. 
L'ouverture, porte ou orifice, qui est une même chose, est 
préparée et faite par le Ver après qu’il a terminé ce premier 
réseau ou charpente, et tant qu’il ne ferme pas les éléments 
de cette ouverture, il ne commence pas à tisser les réseaux 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS. 623 


qu'il coupe. Ce n’est pas le réseau de la couche extérieur 
qu’il coupe, mais les réseaux qu'il tisse dans son orifice. 

M. le Rapporteur dira à la Société que dans son mémoire 
publié dans le Bulletin de la Soc. d'acclim., ?° série, t. VIT. 
p. 459, ne se trouve pas le texte que je cite, mais cet autre : 
« Je commençais à croire que son travail fini (le Ver), il cher- 
chait, comme dit M. de la Roche, à détruire le réseau qui 
fermait sa prison, mais il n’en est rien.» 

Je crois que M. le Rapporteur dirait mieux, qu’il a corrigé 
ce paragraphe en lisant le 24 décembre 1869 son mémoire 
devant la Société, ou en le publiant dans le Bulletin de février 
1870; parce que j'ai le document authentique, son mémoire 
et sa lettre d'envoi de la date déjà citée, du même mois de 
décembre, et d’où j'ai tiré le texte que j'ai cité en premier. 

Mais, ayant fait cette correction au texte de son mémoire 
original, comme cela est arrivé, ne dois-je pas croire, de même 
que les membres du jury à qui jé soumets ces considérations, 
que ses expériences ont été faites plutôt conformément à son 
mémoire inédit qu'il m'a envoyé, que d’accord avec celui 
qui a été corrigé. 

J'ai dit à M. le Secrétaire de Hacienda (Finances?) de notre 
État, en lui remettant la loi sur les A/tacus, le 31 janvier 4870 
(Bulletin officiel de l'État, n° 379), que le rapporteur de 
ma découverte à adressé ses observations d’un autre côté, 
attendu qu’il s’est écarté du véritable point de vue; j'indique 
le dommage que cause le Ver à la porte ou orifice de son co- 
con, j'ai été clair et positif, et il a cherché ailleurs. 

Quoique ledit rapporteur ait traduit ma loi, il n’a ajouté 
à ses notes et commentaires aucun fait nouveau qui contre- 
dise mon assertion que le Ver coupe le fil et laisse libre la porte 
ou orifice, pour naître sans inconvénient converti en brillant 
papillon, comme je l'ai annoncé dés le commencement. 

L'une de mes observations était conçue dans les termes sui- 
vants: Les Vers Affacus comme le Spondiæ sont attaqués par 
des mouches Tachinarres de la grande tribu des Entomobres, 
ou par celles du second type de quelques entomologistes, 
c’est-à-dire par des diptères avec trompe qui n’ont pas de man- 


62/4 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


dibules cornées, ni de tarière comme celles du premier type, 
Hyménoptères, véritables Zchneumons. Ces mouches #achi- 
naires, dont les larves dévorent les chrysalides du Spondiæ, 
forment leurs pupes dans les cocons, et ensuite elles y nais- 
sent et sortent avec une entière liberté par son orifice. J'ai vu 
ce fait bien des fois répété pour mon Bombyx sauvage, ce 
fait pris de l’observation de la manière de vivre de ces mou- 
ches. Ce même fait doit être observé dans le Cynthia, parce 
qu'il y a des mouches tachinaires dans les deux hémisphères, 
et il sera facile de le prouver. Nous dirons donc que cette 
liberté qu'ont ces Mouches de sortir par l’orifice du cocon, 
sans avoir de mandibules cornées, comme les Zchneumons, 
avec lesquelles elles pourraient rompre les fils, démontre que 
le Ver a rompu d'avance les réseaux qu’il a tissés (1). 

J'ai observé un autre fait singulier avec ces espèces de 
mouches, carle Ver du mürier ne leur à pas non plus échappé; 
elles y déposent aussi leurs œufs et le sacrifient à leur posté- 
rité vorace. J’ai vu des larves de ces mouches Tachinaires, 
qu'à première vue j'ai cru être de l’espèce de l’Ouwye du Japon, 
dévorer quelques chrysalides de l'espèce du mürier, et sorür 
des cocons en en séparant les mailles un peu faibles, sans les 
rompre, avec leurs têles coniques et aiguës, pour s’endormir 
et former au dehors leurs nymphes ou pupes. 

Qui a averti ces larves que si elles s’endormaient dans les 
cocons fermés du Ver du mürier, elles mourraient en ressus- 
citant ? Admirable instinct! de vils insectes savent dans quel 
lit ils doivent reposer ! Ces mêmes larves des Tachinaires font 
leurs nymphes dansles cocons ouverts des Afiacus, parce que, 
étant transformées en mouches, elles pourront librement 
sortir, et dans les cocons du Ver du mürier, les larves sortent 
auparavant pour former les nymphes, parce qu’elles manquent 
des moyens de se tirer de leur prison, au lieu que les réseaux, 
que les Vers Affacus lissent dans les orifices des cacons, sont 
déjà rompus. 


(4) Ceci n’est nullement une preuve, l’crifice pourrait être formé par le fil 
replié en passe que les Diptères sortiraient tout aussi bien, — M. G. 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS. 625 


M. le Rapporteur me fait encore une argumentation de 
peu d'importance. Il me dit à la page 282 du Bulletin, tant 
de fois cité, dans lequel à été publiée la loi que j'ai décou- 
verte, quil ne comprend pas ma pensée, parce qu'il lui est 
difficile d’admetire que le Ver ne puisse rompre le dernier 
réseau qu'il tisse comme de la toile d’araignée à la fin de 
son travail, que mot, je le provoquais à le faire. Je répète 
aujourd'hui que cela peut s’expliquer médicalement par 
l'influence du froid sur le système nerveux de l’animal, à quoi 
il est resté soumis dans les expériences dont il était l'objet, 
car je l’ai exposé à son action quand je l'ai forcé à le faire ; 
mais je donnerai une autre exphcation : le Ver n'ayant plus 
de couches à tisser dans son cocon, et l’ayant obligé à faire 
ce réseau, il ne le coupait pas alors parce qu'il avait terminé 
son travail troublé par l'observateur. 

IL parait que M. le Rapporteur cherche à appeler l’atten- 
tion sur les différences qui existent (qu'il appelle divergences) 
entre les cocons du Cynthia et de mon Spondiæ, sur lequel 
j'ai fait mes principales expériences, afin d’infirmer mes asser- 
tions, quoiqu'il ne le déclare pas positivement. Ensuite, dans 
une autre partie de ses commentaires sur cette loi, il dit que, 
comme Alexandre le Grand, j'ai tranché le nœud gordien pour 
vaincre la difficulté du dévidage, sacrifiant la première couche 
de soie des cocons pour la convertir en bourre. 

* Quant au premier point, je repliquais : que cette loi est ap- 
plicable à toutes les espèces du genre Attacus, à cocons ou- 
verts, quoique leurs formes extérieures soient différentes. Peu 
importe que leurs couthes extérieures ne le montrent pas, 
ou que les bords de leurs orifices soient plus ou moins ren- 
forcés de bourrelets. 

Ceite loi des Affacus fait voir bien clairement que les Vers 
Attacus préparent une porte par laquelle doivent sortir leurs 
papillons, sans aucun obstacle, et que dans cette porte ou ori- 
fice ils tissent quelques réseaux qu’ils coupent ensuite, pour 
éviter d'être troublés dans leur labeur principal qui est la for- 
mation de leurs couches intérieures, plus régulières et plus 
faciles à dévider que la couche externe ou enveloppe extérieure. 


626 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


La différence dans la forme de cette enveloppe importe peu, 
je le répète. Ne voyons-nous pas qu’il en est de même dans 
les cocons des diverses races du mûrier, qui sontles unes plus, 
les autres moins abondantes en bourre ? Dans les cocons fer- 
més des Vers sauvages, on remarque la même chose entre les 
semblables : celui du Pernyi a une couche extérieure très- 
lâche, et celui du tussah (1) ne l’a pas. 

Sans aucun doute, le Faidherbia (2), le Cynthia, Arrindia 
et le Spondiæ différent dans leur couche extérieure; le pre- 
mier excède les deux autres, en un tissu lâche dans sa pre- 
mière couche, et l'inégalité est plus remarquable en le compa- 
rant avec le dernier qui est dans la proportion comme le 
tussah au Pernyi; mais on ne manque pas pour cela de voir 
dans tous ces Aftacus des orifices ou ouvertures dans toutes 
leurs couches, avec des réseaux de précautions qui y sont tissés 
et ensuile rompus. 

Quant au second point, je ne conseille pas une absurdité, 
parce que la même chose a lieu pour le dévidage des cocons 
du mürier. Cette doublure, cette couche extérieure commence 
à s’enlever aussitôt la récolte, et ensuite le reste s’enlève en 
cherchant les fils dans les chaudières d’eau chaude, avec la 
différence que dans le dévidage des cocons des Affacus cette 
enveloppe extérieure ne se sépare qu’au moment de cette opé- 
ration, parce que leurs fils ont un autre gluten (colle) et sont 
plus solidement entrelacés. 

Parce que j'ai travaillé de nouveau sur ma découverte et 
éclairci l'affaire par mes dernières expériences consignées 
dans la démonstration de la loi, par moi trouvée, et parce 
que j'ai dit que maintenant on ne tuait plus le Ver pour le 
dévidage des cocons, le rapporteur s’écrie : Le pauvre Ver 
surtout y a beaucoup gagné (Bull. de la Soc. d'acclim., 
t. VII, p. 286), c’est-à-dire que l’industrie n’a rien gagné par 
mon ennuyeux travail, mais seulement le pauvre Ver. 


(1) Attacus mylitta, Fabr. — M. G. 
(2) Attacus Bauhiniæ, G. Mén. — M. G. 


si 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS, 62 


Il 


La principale question, la base de ma découverte est con- 
tenue dans le thème précédent. Celui dont je vais m'occuper 
maintenant le corrobore en toutes ses parties. 

Non-seulement j'ai avancé que le Ver coupe les fils de ses 
cocons, sans expliquer le motif pour lequel 1l le fait, mais j'ai 
dit que c’est parce qu'il manque de liquide dissolvant des 
Bombyx à cocons fermés. 

Cette proposition a été annoncée aussi dès le commence- 
ment de ma découverte, mais non avec l'assurance avec 
laquelle je l'ai dit ensuite en expliquant la loi, et je le répète 
aujourd'hui, parce que, dans ce premier temps, J'ai posé ce 
fait comme une supposition certaine. 

Je reviendrai à la supposition sur laquelle M. le Rapporteur 
s’est beaucoup arrêté. Elle le préoccupe tant qu’il lui dédie 
les principales expériences auxquelles il se réfère dans son 
mémoire déjà cité. Dans l’une d’elles, il a vu que dans les 
efforts que faisait une chrysalide pour se débarrasser de sa 
coque, qui couvrait encore incomplétement sa tête, elle sécré- 
taii par sa tête quelques petites gouttelettes d’un liquide que 
M. le Rapporteur à cru que l’insecte possédait pour lancer à 
l’orifice du cocon, et être ainsi un préparateur du liquide cor- 
rosif que vomissent les Pombyx à cocons fermés. EL, pour 
corroborer ce fait, il fit quelques expériences dont je n’ai pas 
à m'occuper, parce qu'elles sont maintenant consignées dans 
son mémoire (p. 160 et 161 du Bulletin déjà cité). Je lui 
répondis, dans la démonstration de la loi, par d’autres expé- 
riences faites par moi et légèrement modifiées, (1) et je lui 
expliquai l'usage de ce liquide que possédaient les chrysa- 
lides, et je lui dis que si elles l'avaient, c’était en si petite 
quantité qu’elles n’arrivaient pas à lacher les petits papiers 


(4) M. le Rapporteur a donné une erreur typographique du Bulletin 
de cet état comme étant de moi. Elle fut corrigée dans le Travail périodique 
que l’on publiait alors à Medellin, bien avant qu’il la fit connaître, et on lui 
a envoyé ce journal qu’il aura recu après la correction. 


628 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


réactifs que j'avais employés dans mes expériences. Mais 
comme 1l m'a fait une contre-réplique en me disant que si ce 
liquide n’avait pas faché mes petits papiers réactifs, c'était 
parce qu'il S'était évaporé, je n’admets pas cette explication, 
parce que je ne la crois pas fondée. Il faut donc traiter de 
nouveau celte matière. 

1° Je lui ai dit (à la page 289 du Bulletin, 2° série, t. VIT), 
que le petit papier réactif qu'il avait employé dans ses expé- 
riences avait été taché non par le liquide que rendait la tête 
de la nymphe, mais par celui que contenait le cercle (cône 
soyeux ou sétacé du cocon), qu’il avait coupé et séparé momen- 
tanément pour placer le petit papier, et ensuite le remettre 
dessus. Que ce cône soyeux (sétacé) aurait pu être rendu hu- 
mide par les liquides que ses Vers avaient vomi d’avance 
pour endurcir le cocon, et que ces liquides étaient acides. 
En effet, ils le sont, et non de la nature de ceux que vomis- 
sent les Papillons à cocons fermés qui sont extrêmement 
alcalins. Quant à l’alcalinité de ces derniers, il n’y a pas le 
moindre doute, car si l’on imbibe une bande de papier réactif 
dans celui que jette le Bombyr du Müûrier en naissant, on en 
aura la preuve. Quant à l'acidité des autres, j'en parlerai plus 
tard, quoique ce soit le répéter, parce que je lai fait con- 
naître dans la démonstration de la loi que j'ai donnée, à la 
page 289 du volume déjà cité. 

Le cône de papier que j'ai placé sur la tête de la nymphe, 
dans mes expériences, ne s’est pas taché de couleurs rouges, 
parce que je n’ai pas replacé, comme M. le Rapporteur, le 
cône soyeux sur celui de papier, et non parce que le liquide 
que sécrétait la tête de mes nymphes se serait évaporé, car il 
serait resté probablement collé à la coque qui avait couvert 
cette tête. 

2 Je dirai aussi que ce liquide que sécrétait la tête de sa 
nymphe pouvait être de la même qualité que celui qu’exha- 
laient les Vers pour se débarrasser de leur vieille peau dans 
leurs mues. J'ai appliqué des bandes de papier de tournesol 
sur ces vieilles peaux récemment abandonnées, et c’est ce 
qui me l’a fait connaître, car elles sont aussi acides. 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS. 629 


Ces liquides sécrétés par les nymphes élant donc acides, 
ou d’une qualité différente de celle des liquides alcalins dis- 
solvants des Bombyx à cocons fermés, ne peuvent avoir le 
même usage que ces derniers, et l'argument principal de 
M. le rapporteur tombe par là. 

J’exposerai maintenant, pour donner plus de force à mon 
assertion, que les Af{acus à cocons ouverts manquent des li- 
quides dissolvants des Bombyx à cocons fermés, me référant 
à la seconde observation de la note dont J'ai parlé antérieu- 
rement, que j'ai ajoulée à la traduction du mémoire du 
rapporteur. 

J'ai dit à M. le Rapporteur qu'il lui serait facile de 
prouver la force corrosive, comme il l'appelle, du liquide 
des Atfacus indiqués, s'ils en avaient, en retournant leurs 
nymphes, avant leur résurrection, avec la tête vers la 
partie opposée à l’orifice du cocon; car il faut avertir que 
ces Vers Atfacus qui se tranforment en Nymphes restent 
toujours la lête à l’orifice. Sage prévision de leur insunct ! 
Si M. le rapporteur avait fait cela, c’est-à-dire ce qui est 
contraire à l'instinct de l’insecte, je lui assure que tous ses 
papillons auraient péri, parce qu'ils n’auraient pu naître. 
Qu'on fasse cette même opération en changeant la position 
des nymphes des cocons fermés, quelle que soit celle que les in- 
sectes auraient prise naturellement, ils ouvriront avec leur li- 
quide dissolvant toute extrémité de leurs cocons et naitront heu- 
reusement. J'ai fait les expériences auxquelles se réfère cette 
observation sur les chrysalides de l’Affacus spondiæ, et sur 
celles du Bombyx du Mürier, et elles m'ont donné les résultats 
que Je viens d'indiquer, conséquences que Je Juge applicables 
à leurs congénères respectifs. 

J'ai dit en outre dans la démonstration de cette loi (p. 287 
du Bulletin déjà cité) que si les Bombyx cynthia et spon- 
diæ avaient un liquide dissolvant, il serait proportionnel- 
lement en beaucoup plus grande quantité que celui du 
Mürier, et je m’appuyai sur ce que l'abondance de ce der- 
nier arrivait non-seulement à imbiber la partie du cocon 
sur laquelle ce liquide était vomi, mais encore d'autres 


630 SOCIËTÉ D'ACCLIMATATION. 


cocons qui étaient contigus. M. le rapporleur, en même 
temps traducteur de cette loi, n’a pas compris ma pensée, 
parce qu'il a traduit le verbe espagnol empapar, imlhiber 
(imbuere) (Dichonnaire espagnol-francais et francais-espa- 
gnol, par Joseph da Fonseca), par manchar, tacher (ma- 
culare), qui ont par conséquent un sens trés-dilférent. Un 
liquide transparent, limpide et incolore, peut s’imbiber dans 
un tissu sans le tacher; mais étant donné ce cas que le 
liquide dissolvant du Bombyx du Mürier tacherait légérement 
les autres cocons en contact avec celui qui est imbibé par le 
Bombyx, comme on a traduit qu'il tache, la supposition vague 
que me fait le rapporteur, que j'aie pu confondre cette tache 
avec celles que cet insecte laisse sur ses cocons par ses excré- 
ments est erronée. 

Comment pourrais-je confondre les excréments de ce 
Bombyx qui sont quelquefois rosés, opaques, jaunes, 
iroubles, en somme, sales et dégoütants, avec le liquide 
abondant, incolore, transparent, admirable, parce que le tissu 
compacte de soie qui s’oppose à la résurrection de l’insecte se 
réduit presque à rien ? 

Maintenant que j'ai indiqué ane erreur dans la traduction 
de cette loi, il est convenable d’en mentionner, entre plu- 
sieurs, une autre, comme celle qui se trouve à la page 2738 
du même Bulletin. M. le Rapporteur a traduit : « Le liquide 
que insecte projette sur l'orifice en sortant du cocon n’est 
pas dissolvant ». Je n’ai pas dit cela, mais ceci : « Le liquide 
que celle-ci (la nymphe) exhale pour rendre la porte humide 
n’est pas dissolvant. Ni le sujet, ni le verbe de cette propo- 
sition n'ont été rendus en français comme ils auraient dû 
l'être, {nsecte n’est pas la même chose que Nymphe, le pre- 
mier substantif est plus général que l’autre; par ce mot, 
on peut exprimer le Ver, la nymphe et le papillon, et avec 
l'autre, rien de plus que la nymphe, un état de l’insecte. Le 
verbe français, jeter (yacere) ou projeter (projicere) n’est 
pas celui qui correspond à l'espagnol exhalar, mais exha- 
ler (exhalare), de manière donc que mon idée n’est pas 
passée en français comme je l'avais conçue et exprimée. Le 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS. 631 


traducteur a dit que l’insecte /ance le liquide sur l’orifice, et 
moi, j'ai dit que la nymphe l’exhale pour le rendre humide. 

Pour expliquer un peu plus cette idée qui est en tout d’ac- 
cord avec ce que J'ai soutenu sur cette affaire dans ce second 
point, Je dis : que je crois que la nymphe des Affacus exhale 
ou transpire un liquide par tout son corps en naïssant, pour 
se délivrer de son enveloppe et pour humecter légèrement 
l'orifice; mais je ne crois pas, ou plutôt je nie que l’insecte 
parfait possède aucun liquide qu'il lance sur l’orifice pour 
dissoudre ses fils. C’est pourquoi je ne veux pas qu’on me 
fasse dire en français que lénsecte Le lance sur l’orifice. 

M. le Rapporteur.a été heureux de comprendre mes prin- 
cipales assertions sur le travail de l’insecte qu’il résume, 
de la page 283 à 284 de la traduction de ma loi, et qu'il 
conclut en disant : « Si tout se passe bien, comme M. de la 
Roche croît l'avoir constaté, si réellement le cocon est con- 
stitué comme nous venons de le voir, gue devrent le dévi- 
dage en présence de ces faits ? » 

_ En réalité, tout arrive comme je lai exprimé, et les fila- 
teurs n'ont pas eu beaucoup à faire pour dévider les cocons 
du Cynthia, et ils n'auront pas travaillé beaucoup non plus 
pour dévider ceux de l'Awrota, industrie à laquelle Pempe- 
reur du Brésil pense à donner l'impulsion, et ils dévideront 
ensuite avec facilité le Faëdherbia, V'Arrindia et le Cecropia, 
et tant d’autres qu'offriront dans l'avenir les deux Améri- 
ques (1). 

JU 


La principale question qu’il y avait à résoudre dans le . 
dévidage des cocons des Aéfacus, avant 1869, n’était pas 
d'ignorer comment se dissolvait leur gluten sans détériorer 


(1) On dévide très-bien en soie grége les cocons ouverts de l’Atfacus au- 
rota, élevés à l’état sauvage, la chenille laissée à elle-même, et le fil n’est 
nullement coupé, mais replié à l’orifice en nasse de sortie du papillon. La 
question posée par M. de la Roche ne sera résolue que si nous par venons à 
voir filer la chenille de l’espèce dont il parle ; jusque-là c’est de la discussion 
stérile, — M. G; 


632 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 
les fils, mais celle qui résulte de la loi que j'ai découverte, 
qui règle l’instinct de ces Vers. 

Avant la publication de ma découverte, on savait déjà en 
Europe comment ce gluten s’amollissait, non-seulement celui 
des Affacus, mais encore de tous les vers sauvages bombyciens 
qui, selon moi, est de la même nature. Le liquide glutineux 
collant les fils, que possèdent tant les Bombyr sauvages à co- 
cons ouverts que ceux à cocons fermés, n'exclut pas que ces 
derniers, après s'être convertis en insectes parfaits ou en pa- 
pillons, n’en aient sécrété un autre qu'ils lancent comme dis- 
solvant, pour amollir le gluten et perforer leurs cocons, mais 
d’une composition différente de celle de l’autre, comme nous 
l'avons déjà dit, de mamière que les Affacus à cocons ouverts 
possèdent le premier, mais non le second, c’est pourquoi, 
ces vers Attacus font usage de leurs mandibules pour couper 
les fils qui empêchent le libre passage du papillon par leurs 
orifices. 

Les liquides qu'élaborent tous ces vers pour endurcir leurs 
cocons, comme je l'ai déjà dit, sont acides, et leur principal 
élément est l'acide tannique, le même que l’on emploie dans 
le tannage des peaux. L'analyse chimique que j'ai faite de ces 
liquides me l’a démontré. 

J'ai vu que M. le Rapporteur s’est donné beaucoup de peine 
depuis l’année 1860 (p. 190 de la Revue de sériciculture com- 
parée, déjà citée), pour appeler l'attention des filateurs, afin 
de leur faire savoir que la principale difficulté du dévidage 
des cocons des At{acus provenait de l'ignorance de la compo- 
sition du gluten; et avec les mêmes idées émises dans ce 
lemps, il me combattit en 1870, par les observations consi- 
onées dans les commentaires sur ma loi (p. 293 du Bulletin 
cité). 

Îl continuait à objecier depuis ce temps que les bains 
alcalins dans lesquels on submergeait ces ecocons pour le 
dévidage n'étaient pas appropriés à cela, parce qu'ils détrui- 
sent les fils de soie, et quoiqu'il ait observé que c’est l'excès 
d’alcali qui les détériore, 1l n’a pas compris que Pon pouvait 
éviter cela. Il dit en outre que, pour les dévider, il faut amol- 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS. 6353 
lir et non dissoudre le gluten. Je ne comprends pas comment 
on amollit le g/uten sans qu'il se dissolve. Il serait mieux de 
conseiller de ne pas dissoudre du tout le gluten en graduant 
la quantité d’alcali. Pour amollir une matière qui est soluble, 
il faut la dissoudre, à moins que l’on ne fasse usage de la cha- 
leur seulement, comme quand on amollit les résines, sans au- 
cun véhicule ; mais pendant qu’on se sert de véhicules, comme 
l’eau, pour soutenir les cocons flottants, eau dans laquelle 
sont mêlées des substances dissolvantes , il faut alors que 
ce gluten se dissolve, quand même ce ne serait pas 
entièrement. 

M. le Rapporteur, préoccupé de cette idée, dédaignait 
l'étude des procédés mécaniques que d’autres filateurs, 
comme M. le docteur Forgemol, essayaient. Si de ces procédés 
il avait passé à l'examen de la matière que l’on voulait dévider, 
c’est-à-dire le cocon, pour voir comment il était organisé et 
de quelle manière le petit ouvrier, ou l’insecte, le fabriquait, 
les difficultés auraient toutes été vaincues. Pour dévider les 
cocons du Ver du Mürier, il y a cette différence qu'aucune 
substance n’est à ajouter à l’eau pour dissoudre le gluten, mais 
seulement qu’il faut l'aider par la chaleur, parce que le fil de 
ces cocons est continu el leur gomme facilement soluble. Il en 
aurait coûté plus de travail pour dévider les cocons fermés 
des Vers sauvages, quoique leurs fils fussent continus comme 
ceux du Ver du Mürier, parce que la qualité du gluten était 
différente. Mais le dévidage des cocons ouverts des Aéfacus 
a exigé plus d’études, et de plus avancées, parce qu’il y avait 
un autre élément ; leurs fils étaient rompus, et leurs tissus 
étaient un peu différents. 

Je ne me suis pas trompé en disant précédemment que les 
filateurs européens restaient confondus en dévidant ces 
cocons, parce qu'ils trouvaient ces fils rompus; quelquefois 
ils ont cru, comme M. le Rapporteur, que les alcalis les rom- 
paient, et d’autres fois que leurs mauvais appareils et leurs 
procédés mécaniques n'étaient pas appropriés à cet objet. 

La difficulté du dévidage des cocons ne consiste pas à amol- 


ir, à dissoudre le gluten, parce qu'avant la publication dans 
3€ SÉRIE, T. L. — Octobre 1874. 41 


û 


63/ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


le Bulletin de la Société d’acclimatation de la loi que J'ai 
découverte, on savait déjà cela, et quand j'ai dit qu’on amol- 
lissait le gluten avec une solution de carbonate de potasse, 
je n'ai rien avancé de nouveau, j'ai seulement réduit à une 
simple expression scientifique la pratique de la Chine, qui de 
puis un temps immémorial s'employait pour amollir le gluten 
des cocons de beaucoup de Vers sauvages. 

Pour prouver cela je ne citerai pas beaucoup de passages 
des divers écrits se rapportant au dévidage des cocons fermés 
des Vers sauvages à tissu bien compacte par leur gluten, 
comme ceux du Mylitta el autres, ainsi que ceux du Fama- 
maï, aux bains desquels il faut ajouter des cendres de certains 
végétaux. Je me contenterai d'appeler seulement l’attention 
sur le mémoire de « Sériciculture de la Chine », de MM. Gasch- 
kevittsch et Motschulsky, que M. G. Méneville a inséré dans 
la Revue de sériciculture comparée de 1865, et dont les pages 
les plus notables de cette insertion sont celles 234 et 239. On 
y voit clairement le procédé pratique des Chinois pour amolhr 
ce gluten, qui endurcit les cocons de certains Vers sauvages, 
au moyen des lessives, sans qu’il y ait dommage pour leurs 
fils, ce que craint tant M. le Rapporteur. 

J'ai dit dans la démonstration de ma loi (page 292 du Bulletin 
de la Soc. d'acclim.), que le meilleur moyen de déterminer la 
nature de l’agent dont on doit se servir pour dissoudre le qlu- 
ten avant le dévidage, était l'analyse chimique de cette dernière 
substance, et cette analyse confirme que la pratique de la Chine 
est rationnelle en emploÿant des lessives, ce que j'ai simplifié 
en disant que l’on mette du carbonate de potasse dans les bains 
parce que cette substance est l'élément principal des cendres 
de plantes terrestres qu’emploient de préférence les Chinois 
dans leurs lessives. 

En effet, j'ai fait une analyse de la nature des liquides 
que vomissent (projettent) et sécrètent mes Atfacus spon- 
diæ, pour endurcir les couches de leurs cocons, analyse 
qui, dans mon idée, est applicable à tous les cocons de leurs 
congénères, et au gluten desdits Vers sauvages à cocons 
fermés. 


DÉVIDAGE DES COCONS DES AÏTACUS. 630 


J'avais pour filer dix de ces Vers, sur lesquels j'ai eru suffi- 
sant de faire cette analyse. J’attendis que, successivement et 
à des jours différents, ils commençassent à filer pour pouvoir 
m'emparer de leurs liquides et répéter ainsi les expériences. 
La température de la saison, qui était de 22 à 23 degrés cen- 
tigrades, fit que mes Vers terminèrent leurs deux premières 
couchés de leurs cocons en vingt-quatre ou vingt-cinq heures 
après les avoir commencés, et qu’à ces heures ils rompirent, 
pour la première fois, les soies qu'ils tissaient dans les orifices. 
Je choisis le moment où le Ver sortait sa tête et deux anneaux 
de son corps, opération qu'ils exécutent comme pour mesurer 
s'ils y seront contenus en ressuscitant; et ensuite celui où ils 
auraient vomi le liquide avec lequel ils imbibent le cocon pour 
l’endurcir, et alors je fis tomber légèrement par lorifice et 
goutte à goutte une demi-once d’eau disullée qui filtrait très- 
bien par le cocon, et je la recueillis dans des vases appropriés 
à cela, ou dans des éprouvettes à expériences chimiques. 

Les Vers, au commencement, rétiraient leur tête en sentant 
tomber l’eau, mais aussitôt qu'ils s’aperçcevaient que les 
gouttes continuaient, 1ls s’efforçaient de resserrer les bords de 
l'orifice et de le fermer. Quand quelques-uns y arrivaient, je 
l’ouvrais de nouveau avec des pinces trés-neltes. J'ai fait, 
sur quelques cocons, une expérience que je mentionneral 
ensuite. 

Le liquide recueilli entraînait ce qui avait été vomi par le 
Ver, et il avait les caractères suivants : 

1° IL était de couleur opaline trouble ; 

2° Il rougissait légèrement le papier de tournesol: 

5° En y mettant quelques gouttes de perchlorure de fer, 
il donnait un précipité noir ou de tannate de fer ; 

4° Abandonné à la température ordinaire, au bout de vingt- 
quatre heures, 1! changeait la couleur opaline trouble qu'il 
avait pour une couleur d’ambre transparente, laissant au fond 
de l’éprouvette un sédiment blanc : au bout de quarante-huit 
heures, la couleur du liquide était plus foncée. En mettant une 
goutte du liquide de vingt-quatre heures sur le porte-objét 
du microscope, on y voyait quelques infusoires, et les germes 


À 


636 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 

de beaucoup d’autres. Une autre gouite du même liquide, 
celui de quarante-huit heures, laissait voir le développement 
total des infusoires. C’est, je crois, la fermentation gallique 
dont parlent MM. Pelouze et Frémy, dans leur ouvrage de 
Chimie, tome IV, aux pages 299 et 505, qui n’est pas autre 


chose, selon eux, que l'oxydation rapide du tannin, en se 


transformant en acide gallique quand il est mêlé à une matière 
azotée en décomposition, qui agit comme ferment ; 

5° Le liquide opalin trouble se disso/vait dans une solution 
de carbonate de potasse qui le rendait transpareut et légère- 
ment rosé; 

6° Ce liquide, ainsi dissous par le carbonate de potasse, se 
précipitait en couches albumineuses avec les acides chlorhy- 
drique et nitrique ; 

7° Le liquide opalin trouble filtré par le papier, pour lui 
ôter l’excès de sel qui le troublait, a donné aussi les résultats 
antérieurs ; 

8° Le sédiment blanc qu'abandonnait le liquide opalin se 
dissolvait avec quelques gouttes d'acide chlorhydrique, et 
après avoir été filtré et neutralisé par l’ammoniaque, le hi- 
quide exubérant nous a douné, avec l’oxalate d’ammoniaque 
qui troublait le liquide transparent, de l’oxalate de chaux. 
Ce sel terreux, dissous par l'acide chlorhydrique, a donné 
aussi un précipité blanc de sulfate de chaux avec l'acide 
sulfurique. 

De tous ces faits, je déduis que le liquide que vomit le Ver 
pour endurcir son cocon, et qu'avait amené dissous l’eau dis- 
tillée de mes expériences, se cowpose : 

D’acide tannique dont la présence se manifeste par les faits 
n12 37et ie 

D’albumine, par ceux n° 4, 5, 6 el 7; 

Et de sels calcaires, par le n° 8. 

J'ai voulu encore plus: porter mes analyses sur la question 
de savoir si non-seulement le liquide que vomissait et excrétait 
le Ver (car il me parait que les sels sont excrétés par le Ver) 
contenait du tannin, mais encore le gluten du Ver que porte 
son fil. Comme le pédicule du cocon qui sert pour l’attacher 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS. 637 


au pétiole de la feuille n’est pas mouillé par ce liquide, mais 
uniquement par le gluten qui sort par la filière du Ver avec son 
fil, c'était facile à savoir. Pour faire cette recherche, j'imbibai 
beaucoup de pédicules de ces cocons récemment faits par le 
Ver, dans une solution de perchlorure de fer, etils noircirent 
à l'instant. Je fis encore plus: je fis une coupure longitudinale 
dans un cocon, après que le Ver eut terminé sa seconde cou- 
che ; ayant bien lavé le cocon avec son pédoncule dans de 
l’eau distillée, et ayant tiré le Ver, j'imbibai le cocon dans la 
solution de perchlorure de fer, et alors tout le cocon avec son 
pédicule devinrent noirs, sans cependant que la soie perdit 
son brillant dans les points nombreux où le tannin n'existait 
pas libre. 

De toute cette analyse, je conclus que ce liquide vomi et ce 
gluten contiennent cet acide tannique qui, combiné avec l’al- 
bumine, sert pour endurcir ces cocons, pour les rendre im- 
perméables à l’eau, et les faire résister aux influences atmo- 
sphériques. Cette simple opération du Ver, de vernir avec ce 
liquide et ce gluten, que l'action de l'atmosphère termine 
ensuite, est toute semblable à ce que font les hommes pour 
les peaux d'animaux afin de les tanner. L’oxydation du tannin, 
en devenant acide gallique, donne la couleur grise à la soie. 
L'endurcissement des cocons est dû à cette espèce de tannage 
de la soie. Mais comme le carbonate de potasse a la propriété 
de dissoudre, comme nous l’avons prouvé, ce liquide opalin 
trouble qui contient ces substances, il est clair qu'il est très- 
propre à dissoudre le gluten des cocons, et ainsi les amollir 
pour le dévidage, 

Cette analyse chimique précédente explique bien clairement 
combien est rationnelle la pratique chinoise de mêler des 
cendres ou lessives dans les bains préparés pour le dévidage 
de certains cocons de Vers sauvages. 

Donc, la principale difficulté, que M. le Rapporteur disait 
exister pour le dévidage des cocons des Aféacus, était déjà 
résolue par ces pratiques orientales, et ce n’était pas cela qui 
empêchait le dévidage des cocons du Cynthia en Europe. 

Cette autre difficulté, c'était la rupture des fils par les Vers, 


638 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


que j'ai fait connaître et que j'ai démontrée parfaitement par 
ma loi. 

Les heureux résultats que l’industrie du dévidage des co- 
cons du Cynthia a obtenus à la fin de l'année passée, sont dus 
à cette découverte que j'ai faite, à cette vérité niée par divers 
savants, et rendue trés-claire par mes études et un grand 
travail. 

Et cela, ce n’est pas moi qui le dis, mais la presse française, 
en parlant de l’heureuse application que l’on fait maintenant 
des soies du Cynthia, par le dévidage de ces cocons. Je cite 
textuellement le peu de mots du Moniteur des soies de Lyon, 
que j'ai déjà mentionnés, qui se rapportent à mon assertion 
antérieure. [l dit : Cette soie (celle du Cyntlua) ne pouvait 
pas, dans le principe, se dévider en soie grége, au moyen 
des appareils employés pour celle du Mürier. Cela tient à ce 
que la chenille du Bombyx se ménage une issue dans son 
cocon pour la sortie du papillon, et BRISE AINSI LA CONTINUITÉ 
DE SON FIL (Moniteur des soies de Lyon, n° 58, art. : CONGRÈS 
INTERNATIONAL DES ORIENTALISTES). 

Vous voyez par ce texte, monsieur le Président, que c’est 
précisément ce que j'ai soutenu dans ma loi, et annoncé dans 
ma découverte que les Vers des Atlacus préparent une porte 
pour la sortie des papillons, et rompent les fils des réseaux 
qu'ils tissent dans leurs orifices. 

L'article, ConcrÈs pes OrteNTALISTES, est pris de } Écono- 
miste français, et est reproduit dans la Gazette de France du 
h novembe 1873. 

La création de nouveaux appareils, autres que ceux que l'on 
employait avant pour tenter de dévider les cocons du Cynthia, 
est due à ce que l’on savait déjà par ma loi des Atéacus que 
les fils étaient rompus, et que ces cocons ne pouvaient se 
dévider avec les appareils qu’on employait pour les cocons du 
Ver du mürier. 

Les divers échantillons de soie grége ou dévidée, qui ont 
été présentés au Palais de l’industrie, et dont parlait ledit 
article du Moniteur des soies, ainsi que les tissus préparés 
avec ces soies, tels que les’ quatre petits châles 4rochés, de 


DÉVIDAGE DES COCONS DES ATTACUS. 639 


couleurs différentes et du brillant le plus vif, sont dus, je le 
répète, à ce que ma découverte a servi aux filateurs de ces 
soies dévidées et de ces Lissus, pour faire leurs nouveaux 
appareils, 

Depuis ce temps, la culture de l’Ailante et de son Bombyx 
a pris spontanément, dit le même journal, une grande exten- 
sion; et déjà un peu avant, en novembre 1572, j'ai vu que 
dans le Bull. de la Soc. d'acclim. on annonçait (2° série, 
t. IX, p. 784) qu’un industriel qui voulait garder l'anonyme, 
offrait de payer le kilog. de cocons pleins ? francs, et 7 francs 
le kilog. les cocons vides. Déjà, à cette époque, à ce que je 
pense, cet industriel commençait à appliquer ma décou- 
verte (1). 

L’Acclimatation, n° 2, du 20 février dernier, journal 
publié à Paris, offre d'acheter au nom de plusieurs indus- 
iriels, des cocons du Cynthia avec Chrysalides étouffées, 
à 6 francs le kilogr. Gela me parait fabuleux. Monter en si 
peu de temps, par leur dévidage, à plus du quintuple du prix 
auquel le comte Lamotte-Baracé espérait qu'il monterait, 
celui de 2 à 3 francs le kil. de cocons vides, qu'il avait en 
1851; c’est un progrès très-notable dans l’industrie. 

Ce prix, au-dessous de 2 à 3 francs, s’est soutenu jusqu’au 
mois de novembre 1872, jusqu'à l’annonce que j'ai men- 
tionnée précédemment. 

Je résume maintenant en peu de mots ce que j'ai dit, de 
la manière suivante : ‘ 

1° Que J'ai fait ma découverte dès juin 1869, et que, dès 
cette époque, J'ai établi ses bases principales : coupe des fils 
de soie par le Ver dans les cocons ouverts des Attacus, et la 
supposition certaine du motif pour lequel ils le font. 

2° Obscurité de cette découverte par la discussion, parce 
qu'elle contrariait des principes entièrement opposés à ceux 
qu’elle annonçait, et qui étaient généralement admis. 

3° Perfection de la découverte en janvier 1870, en la dé- 


(1) Je crois qu’il ne s’agit toujours pour cette espèce que de cardage. — 
M. G. 


640 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


finissant bien par la loi qui régit les Affacus à cocons ou- 
verts. 

4° L'unique difficulté qu’il y avait à résoudre pour le dévi- 
dage de ces cocons, je lai éclaireie par ma loi susdite. 

5° Heureuse application de cette loi à l’industrie du Cyn- 
thia, et utilisation de sa soie sur une grande échelle. Sécurité 
de ce qu’elle sera féconde en bons résultats quand on exploi- 
tera la multitude de ses congénères, qui sont communs aux 
deux hémisphères. Les deux Amériques jouiront de ces biens, 
et en auront la meilleure partie. 


II. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX 
DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, 


SÉANCE DU CONSEIL DU 46 OCTOBRE 1874, 


Présidence de M. le comte D'ÉPRÉMESNIL, vice-président. 


Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. 
— M. le Président proclame les noms des membres récem- 
ment admis : 
MM. Présentateurs, 
BouLLENC (M.-Eug. de), propriétaire en Brela- { Ch. Besset. 
tagne et en Anjou, au château de la Combeau- { Comte d’Éprémesnil. 
dière, près Ingrandes (Maine-et-Loire). A. Geoffroy Saint-Hilaire, 
DERRÉ (Almire-René-Henri), notaire à Sablé- (es oo à 
Comte d’Eprémesnil. 
sur-Sarthe (Sarthe). | 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Camille Dareste. 

Comte d’Éprémesnil. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
P. Carbonnier. 

Jules Grisard. 
Raveret-Wattel. 


LEBOUVIER, propriétaire, à Corné (Maine-et- 
Loire). 


ROBIN (Auguste), propriétaire, à Semur .. 
d'Or). 

— Des remerciments pour leur récente admission sont 
adressés par MM. le R. P. Fonteinne, de la Rochemacé, Ph. 
Delamain, Martinet, Buzaré. 

— MM. E. de Rodelle du Porzic, général comie de Courey, 
Buzaré, demandent à prendre part aux cheptels de la Société. 
— Renvoi à la Commission spéciale. 

— M. Cornély (de Tours) fait connaître qu’il a obtenu en 
liberté, dans son pare, plus de dix Kangurous de Bennett, et 
demande en conséquence à être inscrit au nombre des con 
currents au prix fondé par la Société pour la propagation de 
cet animal. 

— M. Sabin Berthelot, membre honoraire de la Société, 


consul honoraire de France en retraite, écrit de Sainte-Croix 
de Ténériffe : 


« Monsieur le Président, 


» La domestication des animaux, de même que l’acclima- 


à \ 
642 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


tation des plantes, a pour base des principes reconnus que la 
nature nous révèle, Il y à plus de trente ans que notre regret- 
table I, Geoffroy Saint-Hilaire les proclama dans ses Essais 
de zoologie générale, après les avoir développés dans ses leçons 
publiques. J’exposai moi-même ces principes en 1844 dans 
mes Considérations sur l’acclimatation et la domestication. 
Ce fut à partir des premiers enseignements de notre illustre 
fondateur que prit naissance l’idée de la création de notre 
Société, et, comme conséquence, celle de l'établissement du 
Jardin du bois de Boulogne, qui vint compléter la pensée de 
Geoffroy en nous dotant d’un champ d'expérience. 

» Notre belle entreprise a porté ses fruits ; son état de pros- 
périté et les succès obtenus en sont la meilleure preuve. Et 
pourtant un ouvrage sérieux, que je viens de lire, écrit par : 
un homme de conscience et de talent dont j'apprécie tout le 
mérile, émet, en traitant incidemment la question de la do- 
mesticalion des animaux, une théorie tout à fait contraire aux 
principes qui ont servi de base dans l’entreprise que nous 
poursuivons, et de laquelle les vicissitudes des temps et les 
crises terribles que nous avons traversées ne nous ont pas fait 
dévier, Cette théorie, si elle n’était combattue en en démon- 
tirant l’impuissance, tendrait sinon à décourager, du moins à 
refroidir notre zèle. Comme membre honoraire de la Société 
d’acclimatation, j'ai eru devoir prendre l'initiative. 

» Telle est, M. le Président, la pensée qui m’a dominé dans 
les observations que j'ai l'honneur de vous adresser pour 
qu’elles soient insérées dans notre Bulletin mensuel, si on les 
trouve dignes d'y prendre place. 

» Malgré mon grand âge (plus de quatre-vingts ans), je suis 
heureux aujourd'hui, que la retraite qui vient de m’être ac- 
cordée me permette de me livrer entièrement à des études que 
les devoirs du service interrompaient trop souvent... » (Voy. 
au Bulletin, page 60.) 

— M. Éd. Barrachin adresse le compte rendu suivant de 
ses éducaiions d'oiseaux : « Voici la seconde année que je 
m'occupe un peu sérieusement de l'élevage d'oiseaux rares du 
genre Faisan. 


PROCÈS-VERBAUX, 613 


» La première année j'avais acheté une paire de Vénérés 
jeunes, une paire d'Éperonniers Chinquis, et une paire de 
Tragopans Temminck, mâle adulte, femelle jeune. 

» Les Vénérés n’ont pas produit, les Éperonniers sont morts, 
mais la femelle de Tragopan, quoique jeune, a donné 10 œufs 
tous fécondés ; 2 ont été cassés sous les poules (manque de 
solidité dela coquille, je pense), des autres j'ai élevé 4 jeunes, 
plus 4 qui s’est échappé à trois mois. 

» Cette année-ci j'avais la même paire de Tragopans, les 
Vénérés, une paire de Chinquis, une paire de Faisans Amherst, 
femelle jeune, et une paire de Crosoptilons adultes. 

» Les Éperonniers ont donné leur premier œuf le 17 mars, 
et en tout À pontes de 2 œufs, tous bons ; des 8 jeunes j’en ai 
perdu ? dont un écrasé, les 6 autres se sont élevés trés-facile- 
ment. 

» Les Tragopans ont donné leur premier œuf le 6 avril, 
en tout 11 œufs dont un clair; des 10 jeunes éclos, je n’en ai 
élevé que 4, un 5° a été tué déjà fort. 

» Le couple de Vénérés 22 œufs, la moitié environ clairs; 
de 8 jeunes qui sont bien éclos un a été tué, les antres se sont 
élevés avec une facilité très-remarquable. 

» La femelle Amherst jeune a donné son premier œuf le 
16 avril, je l’ai trouvé cassé probablement par le mâle; elle 
en à pondu en tout 26 ou 27; des premiers une dizaine environ 
étaient clairs, 5 jeunes parfaitement éclos ont été trouvés 
morts sous les poules (chapitre des accidents) ; restants une 
dizaine de Jeunes dont j'ai élevé 7. 

» Les Crossoptiles n’ont pas produit, 

» Je ferai observer que mettant mes œufs à couver par 
petits lots, je ne perds généralement pas de jeunes des der- 
nières couvées, ce qui tend à prouver qu’un peu d’expérience 
donne immédiatement de bons résultats. 

» J’ajouterai que ces deux années une paire de Casarkas 
varegata n'a pas produit, mais la situation n’est pas du tout 
convenable pour les aquatiques en général. 

» L'année dernière j'avais élevé quelques Mandarins et Ca- 
rolins, mais cette année-ci, je n'en ai pas élevé. Je dois dire 


644 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


que m'intéressant bien davantage à d’autres oiseaux, je les ai 
négligés. 

» De même pour des dindons sauvages, l’année dernière 
j'en ai élevé 6 ou 8; cette année-ci, quoique ayant 2 femelles, 
je n'ai que 6 jeunes. » 

— Des comptes rendus de leurs cheptels sont adressés par 
MM. Brady, Victor Fleury et Ch. de La Brosse-Flavignwy. 

— M. Ch. Duwarnet adresse à la Société une notice sur le 
croisement des Perdrix rouge et grise (Voyez au Bulletin, 
p. 545). 

— M. Leroy écrit de Fismes (Marne) : « Les Canards man- 
darins et les Faisans de Swinhoë, qui sont des jeunes, n’ont 
pas reproduit cette année, ainsi qu’il résulte de mon dernier 
compte rendu. L'état de ces oiseaux, pleins de santé et en 
plumage brillant, ne laisse rien à désirer, et tout fait présager, 
de ce côté, une bonne réussite pour le printemps prochain. 

» En ce qui concerne les Faisans vénérés, ma dernière 
situation établissait 17 petits, dont quelques-uns en très-bas 
âge, et, circonstance regrettable, la plupart des élèves des 
premières couvées atteints de goutte. J’en ai perdu 5 de ce 
chef malgré les soins, les frictions à l’alcool camphré, etc. J’ai 
eu à leur sujet un instant d'espoir. J’espérais que les oiseaux, 
en commençant à se brancher, faciliteraient la guérison de 
celle de leurs deux pattes qui était atteinte dans le principe, 
en remettant les muscles et les os dans leur état normal. [l n’en 
a malheureusement pas été ainsi et le mal, loin de disparaître, 
a gagné la seconde patte et a fini par tordre les pieds des 
oiseaux comme des cordes. 

» Ils ont néanmoins vécu longtemps ainsi à cause des soins 
dont ils étaient l’objet, mais à la pousse des grosses plumes 
ils ont fini par périr. 

» De ces cinq oiseaux ainsi atteints il n’y a pas lieu d’avoir 
grand souci, car, en supposant qu'ils eussent vécu, ils n’au- 
raient guère eu de valeur qu’au point de vue comestible, et 
encore. 

» Restaient 12 sur lesquels les vers intestinaux d’une part, 
la mue de l’autre, m’en ont enlevé 5, 


PROCÈS-VERBAUX. 645 


» Il en reste actuellement neuf que je considère comme 
assurés : trois coqs dont deux de toute beauté et un plus petit, 
et six poules. » 

— M. le docteur Turrel fait parvenir à la Société un mé- 
moire sur les oiseaux de M. Bech. (Voyez au Bulletin, p. 563.) 

— M. Seth Green accorde à la Société l'autorisation de tra- 
duire son ouvrage Trout culture, dont il annonce l’envoi d’un 
nouvel exemplaire, accompagné de rapports officiels contenant 
des renseignements sur le même sujet. Dans une autre lettre 
M. Seth Green fait connaître qu’il vient d'inventer un appareil 
servant à l’incubation et au transport des œufs de Salmonides, 
il offre d’en envoyer à la Société un modèle garni d'œufs de 
Salmo fontinalis (Brook Trout des Américains). 

Le Conseil a accepté l'offre génereuse de M. Seth Green, et 
nous serons heureux de mettre à la disposition de nos con- 
frères, qui désireraient en tenter l’acclimatation, des œufs de 
cette utile espèce. Nous lesinvitons dans ce but à nous adresser 
leur demande dès à présent, afin qu'il puisse être procédé à la 
répartition d’une façon aussi équitable que possible. 

— M. Rico fait connaître qu'il vient d’être chargé d’orga- 
miser un établissement piscicole dans le pare de M. le comte 
de.Pontgibaud pour le compte de la Société des mines, et où 
il espère qu’à partir de cette année on pourra trouver à des 
prix modérés des œufs embryonnés de Truites. 

— M. Maurice Girard fait déposer sur le bureau deux 
Mémoires de M. Mongrand, de Saintes, relatifs à ses éducations 
de Vers à soie du Mürier et du Chêne. (Voy. au Bulletin.) 

— M. de Sauley fait parvenir le compte rendu de ses édu- 
cations de Yama-maï en 1874. (Voy. au Bulletin.) 

— M. Ch. Bureau, de Carvin (Nord), écrit : « Jai l’honneur 
de vous adresser les résultats de mes élevages de Vers à soie 
du Mürier obtenus cette année à Carvin. 

» Je vous dirai d'abord que, placé dans une localité où le 
Mürier n’est pas abondant, j'ai dû restreindre le nombre de 
mes élèves, mais je suis parvenu à mener à bien el sans aucune 
maladie 4000 chenilles de différentes races. 

» Les graines ont été placées, le 10 mai, à une température 


646 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


de 48 à 20 degrés, Jusqu'au moment de l’éclosion qui a eu lieu 
du 24 au 28 du même mois, à une température de 22 degrés. 

» Voici les différentes phases par lesquelles a passé la 
chenille : 


» Premier changement de peau du 30 mai au 4 juin. 


» Deuxième — — A juin. 
» Troisième _ — FREE 
» Quatrième — He AGX 2 


» Au moment de l’éclosion, le Mürier noir commençait à 
peine à montrer ses petites feuilles, mais elles m'ont été d'un 
grand secours, Car je n'ai pas été obligé de leur donner des 
feuilles de laitue, aliment qui influe toujours sur la bonne 
réussite. 

» La chenille au premier âge réclame une feuille tendre et 
choisie, après le premier âge on peut lui donner toutes les 
feuilles qui torabent sous la main, lorsqu'on à un Mürier à 
proximité, qui permet de distribuer les feuilles au moment où 
on les cueille. Les repas ne doivent pas être trop répétés. J'ai 
remarqué que le Vér à soie se trouvait mieux de trois repas 
dans la journée : le matin de quatre à cinq heures, à midi et 
de six à sept heures du soir; la nuit il aime le répos et ne 
souffre pas d’être chagriné. La température influe peu sur son 
organisation, sauf une température trop élevée qui peut le 
tuer. 

» Voici les différents degrés de température observés pen- 
dant l'éducation. 


Le juin ssh. . 950148 juin.......... 450195 juin......... 16° 
D re 28 4 AAA 0 MER 15496 ANR 99 
ERA GPA «= RER 17 | 97. EURE 20 
A ae GI (5 RSR re 15 08 2 TETE 23 
HARLLE BAR FOUR E DENTS ANR: SH: = NE 20: (00 ES REN 23 
CRE RS DER) RAREN US Q 2: | 30 NEA 93 
TE AO CL 20 | der juillet........ 27 
nt 20 120 Foi ha Not 85 
CAE Rs 07 OA... an 99 | 5 2 TRS 97 
0 ce 06 |OJE Oh Luib = CE 95 
A DA Eee SAIS Si A aa 


_Ee 
© 
> 
Lee] 
[Ke] 
= 
| 
82 À 
© 
(æ: 
[=] 
CH 
ca 
@ 


Poe OL OUI TMER re en 07e 6 Se TR 


PROCÈS-VERBAUX. 647 


» 2 juillet, température de 35 degrés, aération abondante, 
prostration des Vers; retour à la santé le 3 juillet. 

» On peut donc compter trente-cinq joursentre la naissance 
et le filage, 

» Le Ver à soie se plaît mieux dans une température de 20 
à 22 degrés. Cependant les changements subits au-dessous de 
25 degrés semblent ne point l’atteindre. 

» J'ai remarqué que pendant la nuit le Ver ne se prépare 
pas à filer, la lumière est donc à mon avis un élément indis- 
pensable à la formation de la soie. 

» La chenille n’aime pas à être gênée; elle se plaît mieux 
par groupes de A0 à 59 dans un espace de 0",25 carrés, ou 
mieux dans un carré de 9",25 de côté, parvenue à sa grosseur. 
C’est done un espace de 0,15 carrés qu'il lui faut. Du reste, 
sa nourriture peut être plus convenablement répartie, et Les 
soins sont donnés plus facilement. » 

—— M. A. Buzaré écrit de Lamore (Deux-Sèvres) : « Les 
pommes de terre que nous cuitivons dans nos contrées, étant 
complétement dégénérées, J'ai fait venir de chez MM. Paillet 
et Vilmorin l’Early rose. Douze litres ont élé semés le 25 
avril dahs une terre profonde, fortement fumée. L’étendue 
était de L are 10 centiares. Le 28 août, sans avoir eu d’eau 
pendant les quatre mois écoulés, je les cueillais en parfaite 
maturité; le rendement a été de quarante pour-un et plus, 
car j'en ai eu 5 hectolitres. Je les ai dégustées, elles sont très- 
farineuses et très-cuisantes. 

= M, Julien Laberenne écrit de Robertiville (Algérie). J’ai 
reçu de la Société d’actlimatation en avril dernier diverses 
espèces d'Eucaliyptus, je les semai le 28 du même mois, et ce 
n'est que vingt-six Jours après qu'ils commencérent à lever. 

Les espèces qui m'ont le mieux réussi sont le calophylla 
et l’exserta. 

Voici du reste la hauteur des divers plants au 16 septembre 
1874 : 


Eucalyptus ? Flooded gum ... 0,35 | Eucalyptus sp. Red gum:.... 0,30 
— CHASUPALTS ot nd 0,30 — rostrata : .... 1020 
— calophylla..... + 0,65 — lereticornis. . .... 0,50 


(7 SOCIËTÉ D’ACCLIMATATION. 

— Ilest déposé sur le bureau : 

1° Le programme du Congrès international séricicole et 
viicole qui doit se tenir à Montpellier, du 26 au 31 octobre. 

2° Le programme du cinquième grand congrès de la Société 
d’acclimatation de Berlin. 

3° Le programme de la Société hollandaise à Harlem, en 
1874. 

h° Les maladies de la Vigne. Le Phylloxera, par M. Ernest 
Ballet, in-8°; de la part de l’auteur. 

5° Jstruzione popolare sulla Rabbia degli animal: domes- 
ice di Alberto Mirone dottore in medicina veterinaria; de la 
part de M. le professeur Baruffi. 

6° Du quano dissous du Pérou et de son emploi, in-5, 
Paris, 1874. 

7° Rapport sur l'état de la pisciculture en France et dans 
les pays voisins, par M. Bouchon-Brandely, secrétaire adjoint 
au Collége de France; de la part de M. le marquis d'Hervey 
de Saint-Denys. 

8° Les Reports of the Commussioners of fisheries of the 
state of New York, pour 1869, 70, 72, 73 et 7h; de la part 
de M. Seth Green. 

® Trout culture by Seth Green; de la part de l’auteur. 

10° Du Framboisier, par M. Eugène Vavin; de la part de 
l’auteur. 

11° Un numéro du journal de la Perseveranza de Milan, 
renfermant un article qui intéresse la Société. 

Voici en outre la liste des dons de graines faits à la Société 
dans cette séance, ou omis dans les procès-verbaux précé- 
dents : 

4° De la part de M. Van Gorkom, Cinchona succirubra. 

> De la part de M. R. Barba, deux envois de graines de 
l'Équateur. : 

3° De la part de M. Neumann, Æ/æococca vernicia. 

h° De la part de M. Thozet, envoisde graines de végétaux 
utiles d'Australie. | 

5 De la part de M. le comte Druilhet, Wägandia Vi- 
giert. 


PROCÈS-VERBAUX. 649 
6° De la part de M. Kreuter, graines de diverses espèces de 
Melon et de Radis colossal du Japon. 
7° De la part de M. Partiot, Balsamine géante du Malaga. 


8° De la part de M. Fleurville, graines diverses de la Nou- 
velle-Calédonie. 


9% De la part de M. F.-G. de Luzarraga, Tomate sauvage du 
Mexique. 


Remerciments aux donateurs de livres et de graines. 


Le Secrétaire du Conserl, 


MAURICE GIRARD. 


3° SÉRIE, T. |. — Octobre 1874, 


IV. FAÏTS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 


Congrès viticole de Montpellier. 


Discours prononcé par M. Drouyn de Lhuys, président, 
le 26 octobre 1874. 
Messieurs, 

C’est un grand spectacle que celte vaste conspiration de toutes les forces 
vives de la science et de Ja pratique pour combattre le phylloxera, ce fléau 
qui menace de tarir l’une des principales sources de la richesse de notre pays. 
L’entomologie consulte ses annales ; la chimie épuise ses arsenaux ; l’hydro- 
logie lui prête son assistance ; l’art de la culture invente de nouveaux pro- 
cédés; les Sociétés savantes de nos départements mettent cette question à 
l’ordre du jour; l’Assemblée nationale en fait le sujet de ses délibérations ; 
le gouvernement s’en émeut ; l’Institut de France ouvre une enquête solen- 
nelle. L’air, le feu, la terre et l’eau sont mis à contribution pour nous fournir 
des moyens de défense ; de toutes paris s'organise la levée en masse des 
populations viticoles pour repousser linvasion, et les plus magnifiques récom- 
penses sont promises au libérateur. 

La grandeur de l'effort n’est que trop justifiée par l'importance des intérêts 
qu'il s’agit de sauver. Mais quel est donc le terrible ennemi qui les met en 
péril, et provoque de notre part de si formidables préparatifs de guerre ? 
Mesurez sa taille, examinez ses armes, visitez ses remparts: que trouvez- 
vous? Un puceron microscopique, une imperceptible tarière, une étroite 
fissure dans le sol. O cruelle ironie! O contraste étrange entre l’impuissance 
physique de l’homme et les forces mystérieuses de la nature, entre l’appa- 
rente exiguité de la cause et l’immensité des effets, entre les moyens de détruire 
et les moyens de conserver! 

Ici la petitesse de l'individu est, il-est vrai, compensée par le nombre; le 
phylloxera est doué d’une effrayanie fécondité; suivant les calculs d’obser- 
vateurs atientifs, un seul couple peut devenir la souche de vingt-cinq milliards 
de pucerons dans l’espace de temps compris enire le 45 mars et le 15 octobre. 
De là cette propagation rapide et celte série de migrations dont nous trou- 
vons l’exposé dans ie rapport présenté à l’Académie des sciences par M. Du- 
claux, professeur de chimie à la faculté de Clermont. 

Parcourons ces lugubres étapes : 

En 1865, l’insecie apparaît pour la première fois sur un seul point du 
département de Vaucluse. 

En 1866, il envahit une portion de ce département, en se reproduisant sur 
des points peu distants les uns des autres. On le signale également dans deux 
communes des Bouches-du-Rhône. 

En 1867, on remarque une large tache dans ce département, et la contrée 
située au nord d'Avignon est envahie. 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 601 


En 1868, les deux rives du fleuve, depuis la mer jusqu’à Pierrelatle, sont 
attaquées. 

En 1869, l’épidémie arrive aux portes de Nîmes, d’Aix, de Montélimarte 
de Valence; des vignes sont atteintes dans l'Hérault et le Var. 

En 1870, le mal prend un grand développement dans la même direction, 

En 1874, toute la vallée du Rhône, de Valence à la mer et jusqu’à Au- 
bagne, est sous le coup du phylloxera ; les taches deviennent de plus en plus 
larges dans le Var et l'Hérault. 

En 1872, le fléau gagne du terrain dans ces deux départements ; on signale 
sa présence aux environs de Tournon. 

Enfin, en 4873 et 1874, soixante communes du Bordelais sont plus ou 
moins entamées, et l’insecte destructeur fait son apparition dans le Beaujolais 
et dans les deux Charentes. 

Ne croyez-vous pas, messieurs, entendre comme un écho de ces paroles 
de nos livres saints : 

« Tu planteras une vigne, ta la faconneras, mais tu n’en auras pas de vin, 
et tu n’en tireras rien, parce qu'elle sera détruite par les insectes. 

» La vendange est attristée, la vigne languit, les larmes gagnent ceux qui 
avaient la joie au cœur. Tout divertissement est abandonné; le sourire de 
la terre s’est évanoui. 

» Le Carmel perdra sa gaieté et son allégresse. Il n’y aura plus de chan- 

. sons dans les vignes. » 

La Société des agriculteurs de France, jalouse de témoigner sa sollicitude 
pour tous les intérêts en souffrance, au midi comme au nord, tenait à hon- 
neur de porter sa bannière dans la croisade entreprise contre un odieux en- 
vahisseur, qui, avec un instinct funeste, semblait avoir choisi, entre toutes 
les plages de l’ancien monde, les plus florissantes et celles où ses ravages 
seraient le plus désastreux. 

Dès 1868, dans notre première session générale, nos inquiétudes se tra- 
duisaient en des termes malheureusement prophétiques : « Le monde vili- 
cole, disait notre rapporteur, M. le comte de la Vergne, reste dans l’appré- 
hension d’un immense désastre, et la science est encore à la recherche de la 
vraie cause du mal et d’un moyen de salut. » Après une discussion, à laquelle 
prirent part les viticulteurs les plus distingués, une commission fut nommée 
pour aller sur les lieux étudier sans délai, aux frais de la Sociélé, la nouvelle : 
maladie de la vigne. 

Au congrès de Lyon, organisé en avril 1869 par la même Société, la ques- 
tion du phylloxera occupe une large place. 

On la retrouve encore amplement traitée dans le compte rendu des tra- 
vaux du congrès de Beaune, tenu sous nos auspices en novembre 1869, et 
que j'avais également l'honneur de présider ; une médaille d’or y est décernée 
à M. Planchon. 

L'annuaire de notre deuxième session générale, ouverte le 24 janvier 1870, 
contient l’exposé des intéressants débats engagés dans le sein de la section 


63% SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


de viticulture sur ce sujet qui, peu de mois après, appelait l'attention du 
congrès de Valence. 

Après la guerre, la question revient à l’ordre du jour devant l’Assemblée 
générale. Dans la séance du 95 janvier 1872, M. Gasion Bazille présente son 
rapport annuel sur la marche du fléau et sur les moyens employés pour le 
combattre. Les pouvoirs de la commission d’étude sont prorogés. 

Au mois de septembre 1872, nouveau congrès viticole tenu à Lyon, dans 
les mêmes conditions. Les voix les plus autorisées s’y font entendre. 

Les quatrième et cinquième sessions générales, en 1873 et 1874, offrirent 
à la Société l’occasion de prouver que son zèle ne s’était pas ralenti. 

Enfin le Conseil, par décision insérée au Bulletin du mois de juillet de 
cette année, a décidé qu’un prix sera décerné en 1875 à l'inventeur du 
meilleur procédé pour arrêter ou prévenir les ravages du phylloxera. 

Vous le voyez, messieurs, en répondant à votre bienveillant appel, je ne 
fais que continuer la tradition de la Société qui m'a honoré de ses suffrages. 
Je viens, sur un nouveau champ de bataille, combattre un ancien ennemi 
sous le même drapeau et avec les mêmes alliés. 

Nos études qui, depuis l’origine, se sont suivies sans interruption, avaient 
pour objet, d’abord, la connaissance de la maladie elle-même, en second lieu, 
la découverte des remèdes destinés à la guérir. 

On a dû commencer par écarter les hypothèses qui attribuaient le fâcheux 
état de la vigne, soit aux froids des hivers précédents, scit aux sécheresses 
des printemps, et l’on a reconnu tout de suite que c'était dans une autre voie 
qu'il fallait chercher la canse du mal. Tout le monde sait aujourd’hui que 
d'habiles et patients observateurs, après avoir examiné dans tous leurs organes 
les ceps altaqués, ont apercu enfin, sur les racines, des milliers de pucerons 
jaunâtres, fixés au bois el sucant la séve ; tous à des états divers de déve- 
loppement, attachés à la partie souterraine de la vigne, dont ils dévorent la 
substance, et qu'ils n’abandonnent qu'après l'avoir détruite. Multipliam, 
comme nous l’avons dit, dans des proportions qui défient le calcul et épou- 
vantent l’imagination, ils sont protégés contre les agressions de l’homme 
par la profondeur du sol qui leur sert à la fois de retraite et de défense. On 
préten& qu’un hectare de terre infestée livre chaque jour aux courants atmo- 
sphériques un demi-millien d’émigrants qui, s’abandonnant à tous les vents 
du ciel, vont implanter au loin leurs imalfaisantes colonies. 

Une fois l’insecte découvert, bien étudié, bien connu, on s’est demandé 
d’où il venait. Peut-être est-il originaire de l’Inde, où l’on a vu récemment 
les vignobles détruits sur une grande étendue par une cause qui n’a pas en- 
core été scientifiquement constatée ; sa première apparition, à peu de distance 
de Marseille, ce grand entrepôt des marchandises de l’Orient, semblait donner 
quelque probabilité à celle assertion. Mais on admet assez généralement qu’il 
nous a élé amené de l’Amérique du Nord, et sa présence a été ofliciellement 
vérifiée sur les cépages indigènes par les entomologistes des États-Unis. Là 
son action serait restreinte et, pour ainsi dire, insensible ; exercée sur des 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 693 


ceps à demi sauvages et non encore épuisés par des siècles de culture forcée, 
elle n’a pas, en général, au nouveau monde, le pouvoir destructeur qu’elle 
prend dans nos contrées. 

C’est ici que se place le débat qui divise encore les meilleurs esprits : le 
phylloxera n'est-il qu’un des symptômes de l'épuisement de nos vignes, 
signalé déjà par l’apparition de l’oïdium et d’autres maladies qui n’en auraient 
été que les avant-courrières? ou bien son arrivée parmi nous est-elle le 
résultat d’un simple hasard ? En un mot, le phylloxera est-il cause ou effet ? 
Ses ravages et sa multiplication n’ont-ils pas été déterminés par un état 
anormal de la plante ? Une telle question n’est pas purement spéculative. Si 
l'invasion de l’insecte est un accident, indépendant de la condition des vignes, 
il faut chasser le phylloxera comme on traque le loup dans uos bois et l’ours 
sur nos montagnes, ou bien les rats et les souris dans nos greniers. Alors il 
serait possible, par une guerre d’extermination, soit de le faire absolument 
disparaître, comme l'Angleterre y a réussi à l’égard du loup, soit au moins 
d'en diminuer le nombre, comme nous essayons d’y parvenir à l'égard du 
hanneton. 

Si, au contraire, la multiplication du phylloxera résultait d’une rupture 
inconnue d'équilibre dans la constitution de nos vignes, comme on voit le 
champignon pulluler sur les vévétaux morts, ou les vers sur les cadavres, 
on essayerait inutilement d’en entraver la diffusion et la propagation, Il se 

retrouverait, en dépit de tous les efforts, partout où il rencontrerait des cir- 
constances propices, conformément à cette loi universelle qui fait sourdre la 
vie comme un torrent sans digue, dans tout milieu prépre à la recevoir. On 
soulient, à l'appui de cette thèse, que le puceron a dû exister de tout temps 
sur la vigne, mais qu’il y est resté inaperçu, tant qu’il n’a pas trouvé des 
éléments suffisants d'alimentation et de fécondité. Ce seraient alors nos vignes 
qu’il faudrait régénérer, pour supprimer ou restreindre en elles les conditions 
favorables au développement du phylloxera. 

Sans prendre parti dans ce grave différend, on peut constater qu'il n’est 
pas encore vidé. Le problème se présente à l'esprit de tous ceux qui, savants 
ou praticiens, se préoccupent du salut de nos vignobles. Il en résulte une 
division naturelle pour le classement des moyens curatifs qui ont été pro- 
posés, et qui, au nombre de quelques centaines, sont soumis en ce moment 
à l’Institut et au ministère de l'Agriculture. Les uns ont pour but direct la 
destruction ou l'éloignement du phylloxera, au moyen d’insecticides ou de 
divers procédés ; les autres tendent à modifier ou à fortifier la séve, l'écorce 
ou la plante, soit dans son ensemble, soit dans ses parties. 

Au premier ranz des procédés expérimentés jusqu'ici, se place la submer- 
sion hivernale, dont les résultats sont incontestables. L’inventeur de cette 
méthode, aussi simple qu’ingénieuse, vient d’être récompensé par une flat- 
teuse distinction qui en consacre le succès. Il a déjà de nombreux imitateurs, 
et personne n'hésite aujourd’hui à recourir à la submersion partout où elle 
est possible. Elle noie le phylloxera sans porter préjudice à la vigne, qu; 


“654 SOCIËTÉ D'ACCLIMATATION. 


semble, au contraire, puiser dans l'immersion une vigueur nouvelle. Seule- 
ment l’application de ce système ne peut être étendue aux terrains éloignés 
des cours d’eau, ou que leur configuration rend impropres aux irrigations. 
On propose, il est vrai, de faire dériver par un canal les eaux du Rhône dans 
plusieurs de nos départements viticoles, et la Société des agriculteurs de 
France, dans sa dernière session, a recommandé ce projet à l'attention du 
gouvernement. On ne peut, néanmoins, se dissimuler que l’exécution en 
sera longue et assez dispendieuse. Il faut reconnaître, d’ailleurs, que la sub- 
mersion ne sauvegarde les vignes qu’à la condition d’être renouvelée chaque 
année. Elle ne met pas définitivement un vignoble à l'abri des attaques du 
phylloxera; mais, par une purification périodique, elle détruit l’insecte à 
mesure qu'il tente de s’y fixer. 

Une autre méthode, basée sur le même principe, est l’enfouissement de 
la partie inférieure de la tige dans une couche de sable, On a observé, en 
effet, que le phylloxera ne pénètre jusqu'aux racines qu’à la faveur des cre- 
vasses causées par la sécheresse dans un sol argileux. On a remarqué aussi 
l'immunité dont paraissent jouir les vignes dans les sables, du côté d’Ai- 
gues-Mortes par exemple, au foyer même de l'infection. Ne serait-il pas 
possible de fermer tout accès au phylloxera en entourant chaque cep d’une 
espèce de rempart de sable, où l’insecte ne pourrait creuser ses chemine- 
ments? On a garanti plusieurs vignobles en leur créant ainsi un sol arti- 
ficiel. 

Certains savants ont espéré faire échec au phylloxera, en acclimatant d’au- 
tres insectes en antagonisme naturel avec lui; mais celte idée s’est trouvée, 
au fond, plus séduisante que solide. Où rencontrer cet ennemi, qui irail 
combattre le phylloxera dans la profondeur du sol, qui lui serait assez sem- 
blable pour l'atteindre, assez hostile pour le détruire ? On a songé aussi à 
cultiver, au milieu des vignes, des plantes dont l'odeur éloignerait le phyl- 
loxera, et à semer dans les vignobles des poudres insecticides. De telles me- 
sures seroni-elles assez énergiques contre un si tenace ennemi, et ont-elles 
jusqu’à ce jour produit des effets appréciables ? L'emploi des engrais forte- 
ment azotés, des sels de potasse, et surtout du sulfure de carbone expéri- 
menté pour la première fois à Bordeaux, en 1869, par M. le baron Thenard, 
a donné d’heureux résultats. Toutes ces substances dégagent des gaz délé- 
tères pour les insectes, et, convenablement dosées, elles sont inoffensives 
pour les végétaux. 

D’autres personnes conseillent d’arracher les vignes infestées et de les 
livrer aux flammes avec les insectes qui sont attachés aux racines. Ce sys- 
ième a soulevé de graves objections. Si le phylloxera, disent les adversaires 
de ce nouveau remède, n’avancait que pas à pas, on pourrait espérer l’ar- 
rêter, en créant un désert entre la frontière du pays qu'il occupe et les ré- 
gions demeurées saines. Mais sa marche procède au contraire par bonds, et 
on le trouve établi au milieu de vignobles éloignés de tout centre de conta- 
gion. Peut-on être assuré de détruire radicalement les germes de ce fatal 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 655 


insecte, en extirpant les seules vignes dont l’état morbide se révèle par des 
symptômes évidents ? N'y a-t-il pas une époque pour ainsi dire d’incuba- 
tion, pendant laquelle l’animal existe sans trahir sa présence par de visihles 
ravages, et alors, si vous épargnez cette semence cachée, ne deviendra-t-elle 
pas le point de départ d’une nouvelle invasion ? Pourquoi d’ailleurs devancer 
en quelque sorte l’arrêt du sort, et consommer d’un seul coup la ruine que 
le puceron n’achèverait qu’à la longue ? En se plaçant à un auire point de 
vue qui n’est pas sans importance, quelles indemnités, ajoute-t-on, une 
telle mesure n’entraînerait-elle pas ? De pareils sacrifices ne sont-ils pas 
hors de proportion avec leur utilité présumée ? 

Telle a été la direction des efforts opposés immédiatement au phylloxera : 

on le noie, on l’asplryxie, on l’empoisonne, on le brûle, Ces procédés ont sans 
doute leurs avantages, et nous apportent un réel secours ; maïs ils ne s’at- 
taquent pas au principe du mal lui-même. Les employât-on partout, ils ne 
pourraient avoir partout une efficacité absolue. Un seul phylloxera survivant 
suffirait, en deux ans, à renouveler la race, Peut-on espérer traiter d’une 
manière suffisante les espaces immenses déjà envahis ? Tout sera donc à 
recommencer chaque année : l’ennemi est là, toujours menaçant, poussant 
de tous côtés ses masses profondes, que d’autres remplaceront sans fin, tant 
qu’il existera un sarment dans nos campagnes. 
_ Aussi, convaincus des dangers de Ja situation et de l’issue fatale d’un tel 
conflit, un grand nombre de viticulteurs ont-ils pris une autre roule : ils ont 
cru qu'il fallait régénérer la vigne, soit par des amendements et des engrais, 
soil en modifiant profondément ses conditions constitutionnelles, ou en se 
rapprochant davantage de l'existence qu’elle aurait si elle restait livrée à 
elle-même. 

On a pensé à recourir au semis. N’est-il pas, en effet, conforme au vœu de 
la nature, qui multiplie annuellement à linfini le nombre des grains, dont 
chacun porte en lui le germe d’une fécondité sans limites ? En prodiguant 
les semences avec une telle profusion, ne semble-t-elle pas avoir voulu indi- 
quer à l'homme que cet humble pepin, impropre à sa nourriture, doit être 
utilisé par lui et rendu à sa destination primitive ? Les semis produisent à 
la fois des sujets plus robustes, plus souples, s’accommodant mieux aux 
changements de climats et de traitement. Partant de ces données, ne serait-il 


pas permis d'espérer que de nouveaux sujets, nés pendant l’époque que l’a- 


venir appellera l’âge ou l'ère du phylloxera, seront pourvus d’une assez 
grande force de résistance pour faire face à l'ennemi contre lequel leurs 
ascendants, âgés d’ailleurs et créés pour des temps moins difficiles, n’étaient 
pas suffisamment prémunis ? Ge n’est là qu’une probabilité ; mais, quelque 
faible que soit une espérance, on est tenté de s’y rattacher, après que d’au- 
ires expériences ont successivement échoué. La pratique sans doute se plaît 
à déjouer les combinaisons du raisonnement, et le grand air fait évanouir 
bien des théories conçues dans le cabinet. Ici cependant la pratique semble 
donner raison d'avance à la spéculation, et la préférence accordée aux ceps 


re re Sr 


656 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


issus de semis n’a jamais été, je crois, contestée. Deux raisons ont fait ob- 
stacle à la généralisation des semis : la première et la principale est la longue 
enfance du sujet, qui reste au moins cinq ans sans rien produire, et qui n’est 
en plein rapport qu’après un temps double, tout en exigeant des soins assidus. 
La seconde était le désir de conserver la fixité de l’espèce, toujours variable 
à chaque génération, et jamais identique à elle-même dans l’évolution qui la 
reproduit. On se disait que la perfection était atteinte, soit pour Le rapport, 
soit pour la qualité et le parfum. De là, le désir si légitime de conserver sans 
altération un trésor que tout changement devait déprécier. Mais peut-être la 
nature se refuse-t-elle, au delà de certaines bornes, à prolonger l’existence 
des êtres soumis à la destruction et à la mort, et n’a-t-elle voulu leur laisser 
recevoir une seconde vie que dans les générations qui les suivent. Peut-être 
refuse-t-elle d’enrayer, par une fixité artificielle, ce vaste courant qui entraîne 
la vie dans un perpétuel mouvement. Or les provins, les marcottes, les 
greffes, les boutures, les crosses, ne sont que la continuation artificielle de 
l'existence du sujet dont ils sont tirés. 

D'un autre côté, ne peut-on pas supposer que les tailles nombreuses et 
périodiques que subit la vigne ont fini par altérer son essence et amoindrir 
sa vigueur ? La culture basse sur souche, qui fait d’ailleurs les meilleurs 
vins, empêchant le développement normal de la plante, a peut-être, à la lon- 
gue, contribué à en détruire ja force constitutive. Portant atteinte au sys- 
ième aérien de l’arbuste, n’en a-t-on pas en même temps affaibli le système 
radiculaire ? Une vigoureuse vigne, poussant de plus profondes racines, ne 
serait-elle pas, dans sa partie souterraine, inaccessible au phylloxera ? Il y 
a là, pour nos viticulteurs, matière à de sérieuses réflexions. Sans essayer 
d'aborder ici les délicats problèmes de la taille, ne peut-on pas conjecturer 
qu’en modifiant le système actuel, qui tend à réprimer l’essor du bois pour 
porter sur le fruit toute l’activité de la végétation, on donnerait plus de force 
à l'élément ligneux, à la séve et aux racines, tous points faibles dans notre 
mode de culture, et où se concentre l’attaque du phylloxera ? 

En contemplant les ravages causés par le dévastateur de nos vignes, la 
pensée se reporte involontairement à deux fléaux analogues : la maladie des 
vers à soie et celle des pommes de terre. 

La première a éclaté quand les magnaneries prenaient un accroissement 
inconnu jusque-là, et rassemblaient sur un même point des multitudes de 
vers, Ni les soins hygiéniques, ni les précautions les plus minutieuses n’ont 
réussi à la faire disparaître ; elle renaît dans toute agglomération excessive, 
et, seules, les petites éducations parviennent à y échapper. 

La pomme de terre était devenue la culture principale de l'Irlande. Le sol 
humide, léger, suffisamment chaud, s’y prête merveilleasement. Elle y était 
d’une abondance et d’une qualité incomparables; elle y nourrissait toute la 
population, qui avait pour elle renoncé aux céréales. Tout à coup, la trop 
‘ameuse pourriture se déclare. Vous savez la famine et l’émigration qui en 
furent les douloureuses conséquences. Depuis, la pomme de terre n’est plus 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 697 


cultivée que comme accessoire : les céréales ont repris possession du sol, et 
la maladie perd peu à peu de son intensité. 

En France, la vigne occupait plus de deux millions d'hectares : tout le 
Midi allait devenir un immense vignoble. À ce moment le phylloxera appa- 
raît ! 

En rapprochant ces terribles phénomènes, quelques personnes ont voulu 
leur attribuer une origine commune. Suivant elles, une loi inconnue d’équi- 
libre naturel s’opposerait à la multiplication de certaines espèces au delà 
d’une limite également inconnue. De cette considération hypothétique, elles 
tirent la conséquence qu’il faudrait restreindre, au moins pour un temps, la 
culture de la vigne, en la bannissant des plaines et des terrains bas. 

Je m’arrête, messieurs ; je dois me borner ici à poser des problèmes qu’il 
vous appartient de résoudre. Au milieu des autorités si compétentes réunies 
dans celte enceinte, je viens apprendre et non pas enseigner. Je porte le dra- 
peau ; d’autres mains porteront le glaive. 


Acclimatation en Allemagne des Attacus Yama-maï 
et Pernyi. 


M. K. H. Ulrichs, de Stuttgard, dont nous avons déjà signalé les éduca- 
tions d’Attacus Yama-maï et Pernyi, continue ses tentatives avec succès. 
Il a, du reste, des imitateurs heureux sur divers points de l’Allemagne, no- 
tamment en Wurtemberg, en Bavière, en Moravie, en Silésie et ailleurs. 
Même à Copenhague, l’éducation du Pernyi a fort bien réussi Pété dernier. 
Des échantillons de soie des deux espèces, qui figuraient, en 1875, à l’Expo- 
silion universelle de Vienne en prouvaient la qualité supérieure ; ils étaient 
de provenance autrichienne. Depuis quelque temps déjà, on travaille à Ber- 
lin la soie du Pernyi qui est même entrée dans le commerce ; mais il est 
vrai de dire que la Prusse l’importe de la Chine. Gette soie, telle que la 
fournit le cocon, est presque incolore ; elle ne présente qu’une légère teinte 
chamoïs. Une maison de Falkenau, près Chemnitz (Saxe), achète les cocons 
percés de Yama-maï de 6 à 12 thalers le kilogramme, selon la qualité. Les 
cocons non percés et, par suite, susceptibles d’être dévidés et filés, sont d’un 
prix beaucoup plus élevé. 

Les tissus fabriqués avec la soie du Pernyi sont estimés pour leur durée, 
leur élasticité, et un certain lustre doux et agréable à l’œil. La soie du Yama- 
ma tient à peu près le milieu entre celle du Pernyi et la soie ordinaire, 
au point de vue du brillant ; en écheveau, elle semble avoir un reflet plus 
lustré que celle du Pernyt. 

M. Ulrichs expédie au loin, paraît-il, non-seulement de la graine, mais 
aussi des chenilles vivantes. Chaque mue de l’insecte est accompagnée d’une 
période de sommeil qui dure trois jours environ, et dont on peut profiter 


658 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


pour les voyages. Des expéditions auraient été faites jusqu’à Odessa et même 

à Madère. Les prix de vente sont : un thaler (3 fr, 70) pour 36 œufs bien 

fécondés, ou 6 chenilles vivantes, dans leur premier sommeil (elles ont alors 

de huit à dix jours), ou 8 chenilles arrivées à leur seconde mue ; pour deux 

thalers : 408 œufs, ou 15 chenilles de premier âge, ou 8 dans leur second : 
sommeil; pour trois thalhers : 180 œufs, ou 25 ou 15 chenilles respecti- 

vement, et ainsi de suite dans une progression correspondante. Les prix 

sont d’ailleurs les mêmes pour les deux espèces. 

M. Ulrichs a aussi commencé l'élevage de l’Attacus cecropia, qui, on se 
le rappelle, a son habitat dans les Montagnes-Rocheuses, et sur les rives du 
Mississipi, où il vit sur le Peuplier, et file un énorme cocon. (Traduit du 
journal Land and Water.) R. W. 


Culture du Jute au Bengale. 


Une commission a été dernièrement chargée, dans l’Inde, d’une enquête 
sur la culture du Jute, ce végétal dont la fibre est devenue, dans ces der- 
niers temps, l’objet d’une exportation si considérable. 

Le nom de jute paraît avoir été mis en usage, à la fin du dernier siècle, 
par le Dr Roxburgh, qui l'aurait appris de son serviteur Uriya, du vieux 
jardin botanique de la compagnie des Indes à Seebpore. Les mots Jhout et 
Jhot sont, en effet, les noms vernaculaires habituels de la fibre même, dans 
les districts de Guttack-Pooree, Balasore et Midnapore ; et comme PEast In- 
dia Company avait de grandes manufactures de cordes et de canevas sur le 
bord de la mer, il paraît probable que le nom actuel de la plante n’est 
qu'une corruption de l’orissa Jhot et du sanskrit Jhat. 

Quoi qu’il en soit, les recherches de la commission ont démontré que le 
jute du commerce est produit par deux espèces distinctes de Tiliacées : le 
Corchorus olitorius et le C. capsularis. Au Bengale, on confond ces deux 
espèces avec quelques autres du même genre sous le nom de nalita; mais 
le nom spécial des deux plantes productrices de la fibre est pat. Dans la 
langue courante du Bengale, pat signifie indifféremment la plante et sa 
fibre. Toutefois, dans le Bengale oriental, on désigne plutôt la fibre sous le 
nom de koshta. Les deux espèces se ressemblent beaucoup quant aux di- 
mensions, à la forme et à la couleur des feuilles ; elles diffèrent simplement 
par le fruit, qui est globulaire, avec une surface ridée, chez le capsularis, 
tandis que la capsule de l’olitorius est lisse comme un tuyau de plume et 
long de deux pouces. 

Les deux plantes sont annuelles et atteignent de cinq à dix pieds de haut, 
avec une tige de la grosseur du doigt, rarement branchue, sauf vers le som- 
met. Les feuilles, qui sont dentelées ei d’un vert clair, ont quatre ou cinq 
pouces de long et se terminent en pointe. 

D’autres espèces, également appelées jute, ne donnent point de fibre et 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 699 


par conséquent ne sont point cultivées, Dans le Bengale inférieur, on cultive 
indifféremment les deux espèces textiles; mais dans le centre et les districts 
de l’est, on donne la préférence au capsularis, tandis que c’est au contraire 
l’olitarius qui domine aux environs de Calcutta. 

Le jute est cultivé aux Indes depuis un temps immémorial, mais l’expor- 
tation de ce textile n’a commencé à se faire sur une grande échelle que de- 
puis quelques années seulement. 

La plante semble croître à peu près partout, cependant un sable téger lui 
est peu favorable; elle se plaît surtout dans les terres d’alluvion, sous un 
climat chaud et humide. Les époques de semis et de culture sont les mêmes 
que pour le riz de printemps. Plus le terrain est fréquemment et profondé- 
ment labouré, en même temps que copieusement fumé, plus la végétation 
est luxuriante. On sème à la volée, du milieu ou de la fin de mars au com- 
mencement de juin, et l’arrachage se fait du 15 août au 45 octobre, 

La commission a signalé le défaut d’attention qu’apportent, en général, 
les cultivateurs au choix de la graine ; pour le plus souvent, on se contente 
de réserver un coin du champ pour laisser la plante venir à maturité, sans 
donner aucun soin particulier aux porte-graines ; de là une certaine dégé- 
nérescence de la plante, qui s’est manifestée dans certaines localités. C’est 
là un poivt à surveiller, si l’on veut perfectionner la culture ; il y aurait 

aussi quelque amélioration à introduire dans le mode de récolte et dans 
l'extraction de la fibre. 

L'extension prise par la culture du jute paraît avoir exercé une heureuse 
influence dans beaucoup de districts ; une plus grande aisance règne parmi 
les cultivateurs, et l’on n’a signalé nulle part, pour l'hygiène publique, aucun 
effet fâcheux résultant des émanations produites par le rouissage des tiges. 

On a constaté quelquefois, dans ces derniers temps, la présence sur les 
marchés d’un jute de qualité un peu inférieure; ce n’est pas toujours la 
conséquence de la dégénérescence signalée plus haut, mais le fait d’un moins 
bon choix des fibres. Les prix étant plus élevés que par le passé, le produc- 
teur tâche de vendre même la partie la plus grossière de sa récolte. 

On estime la superficie des terres cultivées en jute à 56/4 000 acres pour 
les districts du nord du Bengale ; à 229 000 acres pour ceux de l’est, et enfin 
à 79 000 acres pour les environs de Calcutta, soit en tout 921 000 acres. : 
(Journal of applied science.) 

RAVERET-WATTEL, 


Oiseaux et insectes 


Monsieur le Rédacteur, 


Vous avez inséré dans votre numéro de vendredi dernier une lettre dont 
l’auteur prétend que l'interdiction de la chasse aux petits oiseaux serait 
sans influence sur la multiplication des insectes nuisibles. 


660 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Je crois pouvoir établir par des faits positifs que cette défense aurait des 
conséquences très-graves, même dangereuses, et complétement opposées à 
celles qu'en attendent les promoteurs de cette mesure. 

Il est incontestable que s’il y a des insectes nuisibles, il y en a d’autres qui 
nous sont utiles. 

Avant d'accorder aux oiseaux insectivores une protection extraordinaire, 
il faudrait donc savoir s’ils mangent plus des premiers que des seconds. Or 
c’est précisément le contraire qui a lieu, au moins dans nos contrées, de 
sorte que Ja multiplication des oiseaux n’y aurait d'autre résultat que la di- 
minution des insecies utiles et la multiplication des autres. 

Il est constant qu'aucun oiseau, excepté le Coucou, ne mange les chenilles 
velues. Or, presque toutes celles qui attaquent nos jardins, celles qui y cau- 
sent le plus de dommages, sont couvertes de poils, et n’ont par conséquent 
rien à craindre des oiseaux. D’ailleurs, au moment des passages, il n’y a 
presque plus de chenilles ; mais les oiseaux trouvent à celte époque une 
quantité considérable de mouches, parmi lesquelles les Ichneumons et les 
nombreuses espèces qui ont la même manière de vivre auraient contribué 
l’année suivante à la destruction des chenilles. 

C’est d’après la connaissance de ces faits que, lorsqu’après le rapport si 
éloquent, mais si erroné de M. Bonjean, le Préfet de la Meuse interdit la ten- 
due dans le département, je ne craignis pas de lui déclarer qu’au bout de 
trois ans les chenilles, qui depuis 1838, n'avaient pas causé de dommages 
sensibles dans le pays, y exerceraient de véritables ravages. La protection 
accordée aux oiseaux devant amencr la première année une plus grande 
destruction des Ichneumons, la seconde année il y aurait moins de chenilles 
piquées, el par conséquent un plus grand nombre qui parviendraient à l’état 
de papillon, d’où une plus grande quantité d'œufs, et la troisième année une 
plus grande quantité de chenilles. 

Beaucoup de personnes peuvent se rappeler que ces prévisions se réalisè- 
rent avec une précision si déplorable que, pendant cette troisième année 
et pendant plusieurs de celles qui l'ont suivie, il ne restait pas à la fin de 
mai une feuille entière sur les arbres. Gela dura jusqu’à ce que, en vertu des 
lois qui maintiennent l’équilibre entre les espèces, l'extrême abondance des 
chenilles eût amené une multiplication correspondante des parasites char- 
gés par la Providence d’en limiter la propagation. 

J'ai parlé des ravages causés par les chenilles en 1838. C’est à cette épo- 
que que j’ai eu occasion d'apprécier l'efficacité du rôle que la Providence à 
attribué aux Ichneumons. Pendant cette année et les précédentes, presque 
tous les arbres étaient aussi nus au mois de juin qu’en hiver; j'avais en 
partie préservé mon verger en faisant une guerre assidue aux chenilles. Maïs 
lorsqu'elles furent en chrysalides, je les recueillis soigneusement, dans Pin- 
tention de détruire les papillons qui écloraient, et de rendre la liberté aux 
mouches qui pourraient sortir de quelques-unes d’entre elles, et sur le 
concours desquelles je comptais pour l’année suivante, Or, il arriva que 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 661 


sur plus de six cents chrysalides il n’y en avait que trois qui n'étaient pas 
piquées. Aussi en 4839 il n°y avait presque plus de chenilles. 

On fit alors sur les causes de leur disparition les conjectures les plus va- 
riées ; mais personne ne songea aux Ichneumons qui seuls nous avaient 
délivrés de ce fléau, aux Ichneumons, les véritables, les seuls auxiliaires 
que la nature nous ail donnés contre les chenilles, et qu’il importe de 
ne pas livrer à la pâture des oiseaux dans une proportiou plus forte que 
celle que la Providence leur a assignée. 


Veuillez agréer, Monsieur le Rédacteur, etc. 
A. BUVIGNIER 
(Extrait du Courrier de Verdun.) 


Premiers essais de domestication de P’Autruche 
dans la colonie du Cap. 


L’Australasian donnait dernièrement, sur les premières tentatives faites 
pour la domestication de l’Autruche, dans la colonie du Cap, les détails sui- 
vanis, empruntés à une lettre de M. Thomas Bain, de Wolfs Sprint, Modder- 
River, Orange Free State : 

C’est en 1874 que M. A.-H. Bain, établi près de Bloemfontaine, dans une 
. localité où des Autruches sauvages se montraient assez fréquemment, concut 
la pensée d'élever quelques-uns de ces oiseaux en domesticité. Il se mit à la 
recherche de plusieurs nids, dont il enleva des œufs, choisissant ceux du 
centre, qui lui paraissaient s’être trouvés tout d’abord dans les meilleurs con- 
ditions d’incubation naturelle. Avant apporté ces œufs chez lui, il les mit au 
soleil, entre des peaux de moutons, formant une sorte de couveuse artifi- 
cielle. Le soir venu, il plaça les œufs dans son propre lit, afin de les main- 
tenir toute la nuit à une certaine température; puis les remit au soleil le 
lendemain matin, et ainsi de suite jusqu’à l’éclosion, qui se fit plus ou moins 
attendre, suivant que les œufs avaient déjà été plus ou moins couvés dans 
le nid. Dans l’espace de cinq à huit jours, presque tous éclorent; fort peu 
avortèrent, et les Autruchons en sortirent tout seuls sans le moindre se- 
cours. 

Tout d'abord, ils paraissaient mal conformés, ayant le cou très-volumineux, 
et les jambes démesurément grosses ; à ce point que l’on considéra les pre- 
miers éclos comme des sujets monsilrueux, incapables de vivre longtemps 
et qu’on n’en prit nul soin, jusqu’à ce qu’un bushman ait assuré que tous 
les Autruchons naissaient en cet état. 

Pendant un jour ou deux, les jeunes sont hors d’état de marcher et doivent 
être tenus très-chaudement. Dès qu’ils commencent à prendre de la nourri- 
ture, on les voit surtout rechercher et becqueter les objets brillants ou de 
couleur claire, principalement les coquilles d'œufs brisées. Une espèce de 
grande Pâquerette, désignée vulgairement dans le pays sous le nom de goose- 


662 SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


bloom (fleur d’oie), ainsi qu’une auire plante, connue des colons sous le nom 
de doubletjie, constituent leur nourriture habituelle; on les leur donne 
écrasées entre des pierres, pour qu'ils puissent les déchiqueter et les bec- 
queter plus facilement. On y ajoute un peu de millet. 

Au bout de quelques jours, ils sont assez robustes pour aller librement 
sous la surveillance d’un enfant, auquel ils s’habituent très-bien, accourant 
docilement à son appel. Dès l’âge d’une semaine, on peut les laisser sortir 
toute la journée, après leur avoir donné une ration de millet, avec un peu 
de coquille d'œuf pilée ou de menu gravier. 

C’est ainsi, du moins, qu’étaient traités ceux élevés par M. Bain. Le soir on 
les faisait rentrer, et on les enfermait pour la nuit dans une vieille caisse 
d'emballage, enveloppée d’une couverture, afin de les tenir chaudement. A 
deux mois, on les mit librement dans un enclos, en prenant toutefois grand 
soin de les préserver de l'humidité, qui les eût fait périr tous. Ils se mon- 
traient gourmands d'ail sauvage, plante très-commune dans les environs de 
la ferme d'élevage, et fort recherchée aussi, d’ailleurs, par les Autruches 
adultes, 

A dix-huit mois, M. Bain fit sur ses oiseaux une première récolte de plumes, 
s’élevant, pour chaque sujet, à une demi-livre environ. Plus tard, on obtint 
annuellement, de quelques mâles, près d’une livre de plumes du prix de 
30 liv. sterl. (650 fr.) 

Par suite de la difficulté de tenir en parc clos de nombreux individus 
adultes, qui sont d’humeur farouche et peu traitable au moment de Ja pa- 
riade (bien que se montrant au contraire fort doux et dociles, en tout autre 
temps), M. Bain s’est généralement défait de ses élèves vers l’âge de deux ans, 
au prix de 10 livres, et après avoir déjà fait sur eux deux récoltes de plumes. 
Il vendit même jusqu’à 400 livres un troupeau de vingt têtes. 

Cet éleveur a constaté que les Autruches se plaisent, comme certains de 
nos oiseaux de basse-cour, à se gralier et à se rouler sur les cendres sèches, 
probablement pour se débarrasser de leurs parasites, 

Bien dirigée et faite dans des parcs suffisants, l'élève de l’Autruche paraît 
devoir être réellement très-profitable. Mais il est indispensable d’avoir à sa 
disposition un espace clos, et bien clos, de quelques milles carrés; autrement, 
dans les localités fréquentées par les Autruches sauvages, des mâles viennent 
du dehors, attaquent les mâles domestiques et emmènent les femelles. Toute- 
fois, il n’est pas rare que celles-ci, après s'être absentées le temps d'élever 
leur couvée, reviennent au logis avec tous leurs petits, et quelquefois même 
suivies de leur ravisseur qui, la saison des amours passée, a perdu son ca- 
ractère brutal et sauvage. R.-W, 


Transport du poisson vivant aux États-Unis. 


Le journal Land and Water noùûs apprend que l'opération toujours si 
délicate du transport, à de grandes distances, du poisson vivant, se pratique en 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 663 


Amérique sur une échelle encore tout à fait inconnue chez nous. Un envoi 
considérable de poissons adultes et prêts à frayer, appartenant à diverses 
espèces, a eu lieu tout récemment des côtes de l’Atlantique (État de New- 
York) à celles du Pacifique (Californie), par les soins de l’habile et infatigable 
M. Stone, à l’aide du wagon particulier de l’United states fish Commission. 
Ce wagon esl une voiture à bagage légèrement modifiée, en vue de l’usage 
spécial auquel elle est destinée. Le centre en est occupé par une banquette 
pour les gardiens du poisson ; tout autour sont rangés les bacs de transport, 
bacs de dimensions aussi réduites que possible, pour en faciliter la manu- 
tention. Tous sont pourvus de siphons en caoutchouc, qui permettent de 
renouveler l’eau à chaque station, si cela est nécessaire, sans troubler le 
poisson. Un appareil Spécial assuré d’ailleurs l’aération constante de l'eau ; 
voici comment : Deux ouvertures, pratiquées au plancher du wagon, laissent 
circuler une Courroie sans fin, qui passe sur l’essieu des deux roues de devant 
de la voiture, et qui fait ainsi, dès que le train est en marche, tourner la 
manivelle d’une double pompe à air. Cette pompe est en communication 
avec un tube en caoutchouc qui règne le long des parois latérales du wagon, 
ét projette une branche dans Chacun des bacs à leur partie inférieure. Tout 
le système fonctionne automatiquement et sans qu’on soit obligé de s’en 
occuper autrement que pour régler, à l’aide de robinets, la quantité d'air 
refoulé par la pompe. 

Grâce à cette ingénieuse disposition, plus de 150 sujets reproducteurs, 
appartenant à neuf espèces différentes (Saumons, Perches, Black-Bass, etc.), 
ont pu être transportés sans pertes sérieuses, d’un côté à l’autre du continent 
américain. Il esi vrai de dire que pour les espèces marines, pour lesquelles 
il avait été naturellement impossible de renouveler l’eau en route, on envoya 
fort à propos de Californie au-devant du train amenant le poisson, une pro- 
vision de 550 litres d’eau de mer. Cette précaution n’était pas inutile pour 
divers poissons, qui n’auraient peut-être pas pu achever le voyage sains et 
saufs. 

RAVERET-WATTEL, 


V. BIBLIOGRAPHIE. 


Aventures et chasses dans l'extrême Orient 


Par M. THOMAS-ANQUETIL. 


La librairie Charpentier vient de publier sous le titre : Aventures et chasses 
dans l’extréme Orient (première partie : Hommes et bétes), un volume d’é- 
pisodes dû à la plume de M. Thomas-Anquetil, l’intrépide voyageur qui 
avait associé sa fortune à celle du général d’Orgoni, à l'effet d’aller, en 
Birmanie, organiser l’armement des troupes du Yasa Mendoon-Mheng, sur 
le modèle des armées européennes. 

Ces récits sont écrits avec beaucoup d’entrain, et M. Thomas-Anquetil 
promène le lecteur, de l'Égypte à la presqu'île d’Aden, au Bengale, au Né- 
paul et en Birmanie. Il le fait assister à ses exploits cynégétiques contre les 
Gerboises, les Gazelles, les Paons, les Faisans de la Chine ; il se met même 
assez particulièrement en scène, avec une bonhomie charmante, dans une 
chasse au Coq de bruyère. Peut-être devrions-nous faire quelques réserves 
en ce qui touche le combat d’un Rhinocéros avec deux Panthères noires et 
le triomphe vraiment extraordinaire du narrateur; mais il faut intéresser 
avant tout el même étonner quelque peu. 

Du reste, chez M. Thomas-Anquetil, le zèle du savant et du naturaliste 
l'emporte de beaucoup sur la passion du chasseur. Son plaisir n’est pas d’a- 
battre du gibier, mais bien de l’étudier. Son livre respire, à toutes ses pages, 
une préoccupation constante, celle de l’acclimatation, et c’est à ce titre qu’il 
nous appartient de le signaler. On y trouve des renseignements très-variés 
sur les mœurs et les habitudes des Cogs de bruyère, des Paons, du Babi- 
roussa (Sus babyrussa, Cochon-Cerf), du Thau-thay ou Lézard chanteur, 
et des diverses espèces de Faisans. Enfin, une nouvelle intitulée : Moines et 
nonnes bouddhistes, contient une nomenclature intéressante des arbres et 
arbustes de l’extrême Orient. 

M. Thomas-Anquetil annonce la publication prochaine d’un ouvrage plus 
important, sous le titre de : Voyage en Birmanie. Nous sommes persuadé 
que ce livre contiendra des indications fort utiles pour l’objet de nos tra- 
vaux. 


Le gérant : JULES GRISARD, 


PARIS, — IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, =. 


I. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIETÉ 


LE FONDULE 


(FUNDULA CYPRINODO NTA, Cux.) 


Par M. P. CARBONNIER 


———— 


Dans sa première séance du mois de décembre 1871, j’eus 
l'avantage de présenter à la Société d’acclimatation quelques 
exemplaires d’un poisson de l'Amérique du Nord, ayant une 
certaine analogie avec le Goujon de nos pays, et dont je venais 
de recevoir vingt-huit individus. 

La manière dont ces poissons s'étaient comportés durant 
la traversée d'Amérique en France, leur mortalité très-faible 
en route, dénotaient chez eux une grande vitalité. Il est vrai 
de dire aussi que c'était la première application que je faisais 
d'appareils de transport spéciaux permettant à la lumière de 
pénétrer dans toute la couche liquide, principe découvert par 
moi, et qui depuis a permis d'importer chez nous huit à dix 
espèces nouvelles, au nombre desquelles figurent le Gourami 
l’Anabas, les Colises de l'Inde, ete. 

Ce poisson américain a été désigné par Cuvier sous le nom 
de Fundula cyprinodonta. Sa taille est petite, de 12 à 15 cen- 
timètres au maximum, le corps est allongé, presque cylin- 
drique, ses joues sont écailleuses, les yeux três-distants. 

La disposition quadrillée des écailles, nuancées de diffé- 
rentes couleurs passant d’un noir sombre au gris clair, 
donne à sa robe l’aspect d’une mosaïque d’un très-bel effet. 

La ligne latérale, presque droite, est accompagnée de nom- 
breuses lignes parallèles s’opposant au mariage de la teinte 
sombre du dos avec celle plus claire de l'abdomen. 

Sa chair, dit-on, est excellente à manger et peut être com- 
parée à celle du Goujon ou à celle de la Loche de nos pays. 

Le Fondule se plaît et prospère dans toutes les eaux douces 
de l'Amérique du Nord, dans les eaux froides et courantes 
aussi bien que dans les eaux dormantes et tempérées, et il 

3€ SÉRIE, T. 1. — Novembre 1874, Pire 43 


EE 


666 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


-peut, comme j'ai eu l’occasion de le constater, supporter tan- 


tôt des chaleurs de 25 à 26 degrés centigrades, tantôt les 
froids les plus rigoureux; de plus, la latitude de son pays 
originaire étant sensiblement la même que celle de la France, 
j'augurais bien de la possibilité de le faire vivre chez nous et 
d'en obtenir la multiplication. 

Supposant, et avec raison, qu'à l'exemple de nos Cyprins 
les Fondules ne se reproduiraient qu’au printemps, et dési- 
rant avant tout les étudier afin de les surprendre dans l'acte 
reproducteur, je confinai mes vingt-huit poissons dans un 
aquarium transparent d'une capacité de 50 litres. Là, rien 
dans leur manière de vivre ne pouvait m'échapper et il m'était 
facile de les observer à l'aise. 

Voyant qu'ils aimaient à se cacher, je plaçai dans l’aqua- 
rium plusieurs briques de terre cuite percées de nombreux 
trous pouvant leur offrir des refuges commodes et dans les- 
quels ils eurent bientôt élu domicile. Du sable au fond et 
quelques plantes aquatiques complétérent l'installation, et pen- 
dant tout l’hiver l’eau fut régulièrement changée une fois par 
semaine. 

Sous linfluence d’un régime alimentaire copieux, et qui 
consistait en petits vers rouges, mes poissons se maintinrent 
tout l'hiver en parfait état de santé et grossirent d’une ma- 
nière sensible, les femelles surtout dont la taille et le volume 
sont le double de ceux du Fondule mâle. 

Vers la fin du mois de février 1872, l'abdomen des femelles 
prit un grand développement, symptôme d’un travail qui 
s’opérait dans les ovaires, bien qu'aucun changement ne se 
fût encore produit dans la coloration et la manière d’être de 
ces poissons. Le 2 mars il n’en était plus ainsi; pendant la 
nuit une grande transformation s'était opérée : les quinze 
femelles étaient devenues, en douze heures, noires comme 
du charbon ; elles paraissaient inquiètes, l’immobilité qui est 
un caractère de cette espèce, et dans laquelle ces poissons se 
complaisent, leur était devenue impossible. Ces femelles na- 
geaient sans cesse en tous sens ; parfois elles montaient à la 
surface de l’eau pour respirer un peu d’air et redescendaient 


LE FONDULE. 667 


tout aussitôt, pour remonter au bout de quelques minutes 
d'intervalle. 

Chez les mâles aussi des changements s’élaient opérés dans 
la coloration : mais, au lieu de prendre, comme certaines 
espèces, une parure de noce éclatante ou, à l'exemple des 
poissons femelles, une robe foncée, ils étaient devenus d’un 
gris excessivement pâle. Les organes locomoteurs présen- 
tèrent une modification plus frappante encore dans leur cou- 
leur. La nageoire anale surtout s'était fortement irisée en 
bleu azur, les ventrales et la caudale l’étaient aussi, mais plus 
faiblement. 

En cet état, ils poursuivaient les femelles avec une persé- 
vérance extrême. Montaient-elles à la surface ? trois ou quatre 
mâles placés vers l’extrémité de l'abdomen les accompagnaient 
dans leurs mouvements et semblaient les suivre à la piste. 
Quittaient-elles le sol? plusieurs mâles, les ouies dilatées et 
les opercules légèrement redressés en avant, accouraient et 
se disputaient la place qu’elles venaient d'abandonner. . 

Enfin, le même soir, jugeant mes vingt-huit poissons trop 
à l’étroit pour en obtenir des œufs bien fécondés, je les divi- 
sai en deux groupes et les plaçai dans des récipients un peu 
plus spacieux ; l’un, entre autres, bien au jour. 

Jusqu'au matin du À mars, rien ne vint modifier les allures 
‘de ces poissons ; les poursuites de la veille se continuëèrent 
avec le même acharnement. Je notai la température de l’eau 
qui était de 14 degrés centigrades. 

Sur le soir du même jour, je vis l’une des femelles, posée 
sur le gravier du fond, et s’efforçant de rompre le cercle 
formé par plusieurs Fondules mâles qui lui barraïent le pas- 
sage. Cherchait-elle à s'élever vers la surface? un ou deux 
mâles se plaçaient sur son dos et paralysaient ainsi son ascen- 
sion. Sans doute alors les poissons mâles pressentaient la 
prochaine émission des œufs, conséquence de leur détache- 
ment des ovaires déjà opéré. En effet, au bout de quelques 
instants, la femelle se souleva mollement et, par la contrac- 
tion volontaire de son abdomen, expulsa cinq à six œufs, qui 
tombérent sur le sol de l'aquarium. En quelques minutes 


668 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


irois ou quatre pontes se succédèrent de la même façon. Les 
mâles, qui jusqu'alors s’opposaient à sa fuite, s'étaient rangés 
dans le voisinage de la région anale, et attendaient avec une 
impatience marquée que la femelle leur laissât le champ libre 
pour l’accomplissement de leur fonction. Bientôt la femelle, 
dont les nageoires s’agitaient avec des mouvements fébriles, 
se souleva lentement et livra passage aux nombreux mâles qui 
ne traversèrent qu'une seule fois et par un mouvement instan- 
tané la place occupée par les œufs. Quelques instants aprés, 
nouvelles et fréquentes pontes de la femelle ei nouveaux pas- 
sages des mâles. 

Ce qu'il y a de particulier dans l'émission des œufs de cette 
espèce de poisson, c’est que jamais, pour les déposer, la 
femelle ne se frotte sur le sol, elle papillonne quelques instants 
à 2 centimètres de sa surface, s’abaisse d'un nouveau cen- 
timètre et laisse tomber les œufs. Tant que ces derniers n’ont 
pas reçu les principes fécondants, ils ne sont l’objet d'aucun 
soin particulier ; mais, aussitôt après le passage des mâles, 
la femelle les hume dans sa bouche et paraît prendre plaisir 
à les y rouler, néanmoins elle les replace au même endroit 
et, agitant au-dessus toutes ses nageoires, elle établit ainsi des 
courants dont l'effet ne peut être que bienfaisant. 

Pendant toute la durée du travail de la ponte, les mâles, 
à distance respectueuse, paraissent attendre un ordre de la 
femelle pour s'approcher : souvent un coup d'œil de cette 
dernière suffit pour que tous s’écartent à la fois. Ces poissons, 
par un langage qui leur est particulier, se comprennent très- 
bien, et j'ai parfaitement reconnu chez eux tantôt des ordres 
de s’écarter et tantôt des invitations à s'approcher. 

Quand les œufs se trouvent un peu disséminés, et que la 
femelle ne peut plus tous les abriter de sa protection, les 
mâles aussi les hument dans leur bouche, er se les passent de 
l'un à l’autre. Les mouvements qu’ils exécutent alors avec 
leurs nageoires dénotent chez eux une grande satisfaction. 
Comme ils reposent ces œufs sans altération et sans dom- 
mages, la femelle n’a pas l'air de ’en inquiéter ; néanmoins, 
quelquefois elle tourne la tête et leur fait prendre la fuite. 


LE FONDULE. 669 


J'ai dit elle tourne la tête, et avec intention, car cet organe 
chez le Fondule paraît ne pas être invariablement soudé à la 
charpente du tronc, et jouit, au contraire, d’une certaine 
mobilité. Veut-il saisir une proie quelconque ? il courbe la 
tête comme la tortue et s’en empare. 

Pendant tout le temps que dure l’incubation, qui est de 
treize à quatorze jours, la femelle veille avec une tendre sol- 
licitude sur ses œufs. Elle écarte et emporte avec soin tous 
les sédiments terreux qui pourraient être une cause d’altt- 
ration, et ne souffre même pas qu'un petit ver ou un insecte 
s'approche de sa progéniture ; car elle le saisit au passage et 
l'emporte au loin. 

Quand par hasard des œufs s’altérent, ce qui est très-fré- 
quent en aquarium, elle les écrase dans sa bouche et les 
éloigne de ceux embryonnés. 

Toutes mes femelles ont ainsi pondu à quelques jours d’in- 
tervalle, et les mêmes mâles ont servi à la fécondation de 
leurs nombreux œufs, qui, un peu moins gros qu’un grain de 
millet et légèrement visqueux, sont au nombre de trois à 
quatre cents pour chaque femelle. 

Malgré des soins assidus et la mise en pratique, pour leur 
incubation, de tous les moyens imaginables, je perdis la 
presque totalité du produit de toutes ces pontes. 

Du 18 au 25 mars, j'obtins en tout une soixantaine d’éclo- 
sions. 

Les embryons offraient une particularité remarquable : ils 
avaient la bouche pointue et semblable à un bec d’oiseau. 
J'étais satisfait cependant, car l'étude de leur développement 
allait sans doute être pour moi la source d’observations inté- 
ressantes : mais un accident survenu deux jours après vint 
encore détruire cette espérance. L’auge dans laquelle se trou- 
vaient mes embryons se renversa, et tout fut perdu en un 
instant. | 

Je dus donc ajourner à l’année 1873, et la continuation de 
mes expériences et la publication de mes observations. 

Durant la campagne de 1873, un de mes Fondules mourut, 
ce qui réduisit leur nombre à vingt-sept. Cette même année, 


670 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


les pontes furent en retard d’un mois ; je ne sais pour quelle 
cause, la température s'étant maintenue sensiblement la même 
que celle de l’année précédente; et, malgré un filet d’eau 
continu, sous lequel je maintins les œufs durant l’incubation, 
les résultats furent tout aussi négatifs. 

Je crois maintenant en avoir trouvé l'explication : c’est que 
ces œufs n'ont jamais reçu la lumière que par côté et non 
perpendiculairement, comme à l'état naturel. 

Au mois de juillet 1873, six poissons femelles et six mâles 
furent placés dans un petit bassin de 4 mètres de dia- 
mètre, que Je possède aux environs de Paris. Ils ont parfai- 
tement résisté aux froids de l’hiver, se trouvant parfois empri- 
sonnés sous une épaisse couche de glace ; et, au printemps 
dernier, ils ont reproduit comme dans mes aquariums ; mais 
avec celle différence que les œufs embryonnés, se trouvant 
dans des conditions normales, se sont bien développés et 
m'ont rendu possesseur de plusieurs centaines d’alevins, qui 
ont aujourd'hui, comme vous le pouvez voir par les spéci- 
mens placés sous vos yeux, de à à À centimètres de long: 
population destinée à faire souche dans les nombreuses ten- 
tatives de propagation que je vais faire. 

À part l’utililé résultant, au point de vue alimentaire, de: 
l’acelimatation et de la reproduction du Fondule américain, 
nous trouvons encore dans l'étude de cette espèce un nouvel 
exemple de cet instinct merveilleux, de cette intelligence, 
dirai-je presque, qu’apportent, pour la conservation de leurs 
petits, des êtres classés jusqu’à ce jour parmi les plus bornés 
de la création. 

Un savant regretté et dont le nom est inséparable de l’his- 
toire de la pisciculture, M. Coste, a dépeint et poétisé presque: 
la nidification de l’Épinoche, — j'ai pu depuis vous entre- 
tenir des merveilleuses pontes du Macropode chinois, du ra- 
deau aérien auquel il confie ses œufs, des soins intelligents 
que le mâle prodigue à ses petits à l’état d’embryons et à 
l'état d’alevins. 

Aujourd’hui encore, nous retrouvons dans le Fondule amé- : 
ricain, et, j'espère que nous pourrons dire bientôt le Fondule 


ï LE FONDULE, 671 


français, les mêmes soins, la même prévoyance pour la con- 
servation de espèce. 

Sans nul doute, une étude plus approfondie des habitants 
des eaux, non plus au point de vue purement abstrait de ja 
classification, mais au point de vue des mœurs, des habitudes 
de chaque espèce, nous mettra en présence de merveilles inat- 
tendues, et nous rendra doublement intéressant un monde 
que l’homme n’a considéré, jusqu'à ce jour, que comme un 
auxiliaire matériel de son industrie et de son alimentation. 


ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAÏI 


FAITE A METZ EN 1874 
Lettre adressée à Monsieur le Secrétaire général 


Far M. de SAULCY 


Je viens vous exposer aujourd’hui, cowume j'ai l'honneur 
de le faire chaque année, le résultat de l'éducation de mes 
Fama-mai en 1874, éducation qui s’est heureusement ter- 
minée le 16 septembre, par l’éclosion du dernier papillon. 

Je n’ai plus rien de nouveau à dire à nos honorables con- 
frères sur la méthode que j’emploie pour mener à bien ces 
éducations, qui réussissent maintenant, sans que j'aie à modi- 
fier quoi que ce soit au mode d'alimentation ni aux soins 
hygiéniques auxquels je me suis arrêté depuis les années 
1870 et 1871. Le Yama-mai, dont l'avenir me semble à peu 
près assuré, s’accommode trés-bien du traitement auquel je le 
soumets depuis cette époque. 

Je vais récolter bientôt la graine qui me donnera la cin- 
quième génération née en France; si je ne fais pas compte 
de celle qui a été élevée en 1870, c’est par la raison toute 
simple que les œufs d’où elle était sortie avaient été pondus 
au Japon. 

Depuis que la Société m’a fait la faveur de me confier un lot 
de ces œufs qu’elle venait alors de recevoir directement, Je 
n'ai plus eu besoin de recourir à la générosité de personne 
pour me procurer de nouveaux générateurs, et j’ai eu la bonne 
fortune, au contraire, de pouvoir offrir à d’autres expérimen- 
tateurs de la graine bien choisie, provenant de parents ro- 
bustes et irréprochables. 

J'éprouve néanmoins une sorte d’appréhension, dont je ne 
saurais me défendre, quand je vois bon nombre de personnes, 
qui se sont livrées aussi à l’étude de ce précieux insecte, venir 


ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAIÏ. 673 


signaler tour à tour de ces insuccès, qui m’ont fait passer, 
pendant quatre ou cinq ans, par de si pénibles épreuves. J’ai 
fait du mieux que j'ai pu pour les épargner à d’autres, je n’ai 
rien dissimulé et jai signalé tout simplement la méthode que 
j'emploie, méthode bien facile à mettre en pratique et je crois 
aussi bien rationnelle. Quiconque voudra l’expérimenter réus- 
sira comme je réussis. | 

Quand tout le monde réussira de façon ou d’autre, quand 
enfin on sera sûr de posséder le Yama-maï, c’est-à-dire quand 
ce beau Ver à soie se sera moulé sur notre climat, alors le 
moment sera venu de chercher un procédé pratique pour 
l’élever économiquement et industriellement, sans le déranger 
par trop de ses allures tant soit peu sauvages. Pour moi, je 
l’avoue, depuis que je m’en occupe, etil y a déjà dix ans, je me 
suis toujours borné à n'avoir pas plus de deux cents chenilles à 
diriger, c'était bien suffisant pour l’étude que je voulais faire. 
Une seule fois je me suis départi de cette prudente réserve, 
c'était en 1865 ; c’est précisément l’année où j'ai éprouvé la 
plus amère déception. 

Il me semble qu’il n’y a plus grand’chose à craindre main- 
tenant au sujet de la rusticité du Yama-maï, et Dieu sait si 
J'ai passé par de rudes transes et mes Vers par de dures 
épreuves ! Aujourd’hui que nous en sommes sortis à notre 
honneur, j'ai laconfiance que ce précieux producteur de soie 
sera définitivement acquis à notre industrie, avant qu’il s’é- 
coule trop longtemps désormais. Plaise à Dieu que je puisse 
voir réaliser cette espérance que je caresse au fond du cœur; 
mais Je crains bien que la véritable acclimatation, celle que 
j'avais ambitionné d’obtenir, ne m'’échappe ! Qui sait, en effet, 
ce qu’il me sera permis de faire encore? Certes, les ouvriers 
ne manqueront pas à la tâche! Un plus heureux touchera le 
but auquel j'aurais tant voulu atteindre. 

Si je ne me propose pas de revenir sur le mode d'éducation 
du Yama-maï, je tiens du moins à mettre sous vos yeux quel- 
ques anomalies qui se sont produites celle année, dans les 
débuts de la campagne, ainsi que les vicissitudes inquiétantes 
qui les ont caractérisées. Si elles ne l’ont pas fait avorter, 


674 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


elles ont semblé la compromettre, tout d’abord, assez grave- 
ment pour m'inspirer les plus vives appréhensions. 

J'ai eu l'honneur de vous dire, dans mon compte rendu de 
l'année passée, que j'avais récolié en 1873 environ 410 gram- 
mes de graine dont 71, après un scrupuleux triage, pouvaient 
être considérés comme de bonne qualité. 

Ces 71 grammes ont été répartis de la maniére suivante : 


Offert à la Société d’acclimatation .......... 30 grammes. 

Envoyé à mon ami Guérin-Méneville, de re- 
grettiblemmémoiresz SNL Ne "02 © 30 — 

Donné à plusieurs expérimentateurs........ 71 

Réservé pDourmes expériences ere I "— ë 


71 grammes. 


Dans mon lot j'avais gardé un gramme d’œufs blancs, et j'y 
ai joint ceux qu’au mois de mars, par suite d’un dernier exa- 
men, j'avais extrait des catégories regardées primitivement 
comme douteuses ou même mauvaises, qui avaient pu être 
condamnées, à la rigueur, au premier triage, mais qui sem- 
blaient offrir encore quelque chance d’éclosion. | 

A partr du 13 avril, date de l'apparition des premières 
larves en 1873, j'ai surveillé ma graine avec une attention 
quelque peu anxieuse, d'autant que j'avais été prévenu qu’à 
Paris, les éclosions s'étaient manifestées depuis les derniers 
jours du mois de mars, et qu’on avait dû mettre les œufs en 
glacière pour éviter une explosion de naissances prématu- 
rées. 

À propos des glacières, dont je n’ai pas fait usage Jusqu'ici, 
je crois bien qu'elles peuvent être d’un heureux emploi, à la 
condition d'y déposer les œufs dès le mois de janvier ou de 
février, et de ne les en retirer qu'au mois de mai, quand les 
chênes commencent à feuiller. Mais je crois aussi qu’elles 
doivent être tout à fait pernicieuses, si l’on y met de la graine 
déjà émue et dont les larves ne demandent qu’à sortir. Ii me 
paraît incontestable qu’en pareille condition, la compression 
par le froid doit, sinon tuer les petites chenilles, au moins 
altérer assez profondément leur organisme pour les disposer 


ÉDUCATION DE L'ATTACUS YAMA-MAÏ. 675 


à contracter toute espèce de maladies en leur faisant une 
constitution par trop chétive. 

Je vous prie d’excuser cette réflexion, qui ne peut avoir 
d'autre portée que celle d’une opinion que je crois utile d’é- 
mettre, afin d'appeler l'attention sur une-question qui n’est 
nullement indifférente. Si le Fama-maï ne fait pas comme le 
Cynthia, qui a modifié ses évolutions en les appropriant à 
notre pays; s'il ne retarde pas successivement l’époque de la 
venue de ses larves, jusqu'au moment de l’épanouissement 
naturel des bourgeons du chêne ; il est certain qu’il faudra 
comprimer sa graine par le froid, et cela d’une manière per- 
manente, à partir du cœur de l'hiver, jusqu’au moment favo- 
rable de la mettre en incubation, moment dont l'opportunité 
devra toujours être appréciée par chaque éducateur, en raison 
du climat sous lequel 1l devra opérer. 

. Geci dit, je rentre dans mon sujet. 

Chaque jour de retard, à compter du 13 avril, était évidem- 
ment pour moi un jour de rattrapé sur ce qui avait été perdu 
en 1873, et c'était avec satisfaction que je voyais les journées 
se succéder sans qu'aucune petite chenille vint se montrer. 

Elles sont restées bien tranquilles jusqu’au 18. Ce jour-là 
il y eut 2 naissances, le 19 il s’en est présenté encore 2, et le 
20 il en est venu 4. 

Évidemment l’éclosion allait se produire sérieusement. 

En effet, 


Me 1RTAITQUVÉ AE CEE 24 jeunes chenilles. 
HER NE CARMEN OA RETIRE 66 — 
Leo MOMENT IRNEZS. RERO IE 143 = 
Beer Eh else bé ere 2821 95 —- 
MOD M res 28 — 
OR OP D EN se are cs) — 
909 — 


Puis plus rien! 

Soit en tout, avec les 8 premières, 367 larves. 

J’ai cru devoir laisser mourir les huit petites chenilles qui 
étaient nées dans les trois premières journées, et Je n'ai mis 
que le22 sur des chênes celles qui étaient sorties le 21. On peut 


676 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


bien, ce me semble, faire abstraction des journées du 18, du 
19, du 20 et du 26, et considérer l’éclosion de 1874 comme 
s'étant accomplie entre le 21 et le 25 avril, ces deux dates. 
comprises. 

Au moment de l’incubation, j'avais 690 œufs, dont 168 
gris, et 222 blancs; mais sur les gris il ne s’en trouvait que 
367 classés comme bons, en novembre 1873, de même qu'il 
n’yen avait que 182 parmi les blancs. Cenx en surplus, 101 gris 
et 40 biancs, avaient été retirés, au mois de mars dernier, de 
ceux séparés primitivement comme douteux ou comme mau- 
vais, parce qu'ils semblaient, comme je l’ai dit, grâce à leur 
forme peu altérée, permettre d’en attendre encore quelques 
naissances. 

D’après les probabilités que j'avais cru pouvoir établir il y 
a deux ans, les 468 œufs gris, à raison de 78 pour 100, au- 
raient dû fournir 365 petites chenilles, mais je n’ai trouvé 
que 271 œufs percés : ce qui accuse un déchet de 94, chiffre 
considérable puisqu'il implique un déficit de A2 pour 100 au 
lieu de 22. De même les 222 œufs blancs, à raison de 73 pour 
100, auraient dû me donner 162 larves tandis que 134 seu- 
lement ont été percés. La différence en moins est pour eux 
de 28, et le déchet réeliest de A0 pour 100 au lieu de 27. 

Il semblerait, à première vue, que cette différence consi- 
dérable, que je trouve en moins dans le nombre des naissances 
sur lequel je croyais pouvoir compter, ne peut tenir qu’à la 
maladresse que j'ai commise, en introduisant, moi-même, un 
élément d’erreur par l'addition de 144 œufs de mauvais aloi 
à ceux que j'aurais dû mettre exclusivement en éclosion. 
Mais, je dois le reconnaître, mes calculs de probabilité se 
trouvent, quand même, fortement ébranlés par l’autorité 
du fait. 

Si je ne considère, en effet, que 367 œufs gris, classés tout 
d’abord comme bons, la proportion de 78 centièmes devait 
amener 286 petites larves, tandis qu’il n’est pas possible d’en 
compter plus de 274. Il y a donc toujours un déficit, qui n’est 
plus à la vérité que de 15 sujets ; mais l’écart est encore sen- 
sible, puisqu'il dénote un déchet de 27 pour 100, au lieu 


ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAÏ. 677 


de 22. D'autre part, avec les 182 blancs, le nombre propor- 
tionnel 73 demandait 133 naissances, et il s’en est trouvé 134, 
une de plus! Devons-nous voir, ici, une confirmation de la 
proportionnalité établie les années précédentes, ou ne serait- 
ce tout simplement qu’une coïncidence de pur hasard ? Peut- 
être ! Toujours est-il que je suis forcé de constater que, cette 
année, les œufs supposés bons ont donné un plus grand 
nombre d'œufs clairs qu'ils n’avaient fait jusqu’à présent; 
que ce sont les œufs gris surtout qui ont eu tort, et que les 
œufs blancs ont donné le meilleur résultat. 

Si je m’attache enfin à une autre combinaison et que je 
prenne en bloc les 367 œufs gris regardés comme bons, dès 
le début, avec l’ensemble des 222 blancs, ce qui fait un total 
de 589, le nombre proportionnel 78 accuse un déficit de 54 
larves, puisqu'il en exigerait A59 au lieu des 405 sorties, et 
le déchet réel se trouve de 33 pour 100 au lieu de 22 qu’il 
aurait dù être. Avec la proportion de 73 centièmes même, il 
existerait toujours une différence qui ne peut être imputée, 
bien évidemment, qu'aux œufs gris, d’après ce que nous 
avons vu dans le paragraphe précédent. 

Ce bariolage de chiffres me paraît de nature à infirmer 
singulièrement les moyennes que j'avais cru pouvoir établir 
quant aux naissances à attendre des œufs Yama-mai, soit 
gris, soit blancs, présumés bons. 

Vous voyez, Monsieur, que je fais bon marché des résultats 
théoriques auxquels j'étais arrivé les années précédentes, et 
que je sais, à l’occasion, mettre mes chiffres de côté. Mes 
études ne sont que ce qu’elles doivent être, la constatation 
sans arrière-pensée des faits qui se produisent sous mes yeux 
et que je puis affirmer en conscience. Ge que j'ai vu, je l’ex- 
pose loyalement, et si l’expérience vient déranger mes prévi- 
sions et mes calculs, tant pis pour mes calculs : c’est l’expé- 
rience qui à raison. 

En comparant le nombre 367 des petites chenilles recon- 
nues de visu à leur naissance avec le nombre 405 des œufs 
trouvés percés et vides, il est certain que 38 larves m'ont 
échappé, sans que j’en aie pu retrouver traces. Comment 


678 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


ont-elles disparu ? je ne saurais Le dire ; mais le fait est que 
je n'ai pas su les trouver. 

Ici se présente une question : ces petites chenilles perdues 
doivent-elles figurer dans le contingent fatal, condamné à 
mourir dans les sept ou huit premiers jours de toute éduca- 
tion, que je maintiens provisoirement de 49 pour 100, tant 
qu’une étude plus approfondie n’aura pas donné lieu de le 
modifier ? 

Si oui, il faut du moins défalquer du nombre des naissances 
les 8 larves sorties les premières, que j'ai volontairement 
laissé mourir de faim, et c’est sur 397 chenilles, au lieu de 
405, qu’il convient de prélever les 49 centièmes, soit 194,53, 
en chiffre rond 195. Dans cette supposition, le nombre à re- 
trancher aurait dû me laisser 202 cocons, et je n’ai eu que 
465 Vers qui se soient transformés en nymphes. Il est vrai 
de dire qu’une très-belle larve est morte malade, ayant été 
comprimée et froissée pendant que je changeais les branches 
sèches pour les remplacer par des fraîches, et que deux autres 
ont été asphyxiées par suite d'immersion trop prolongée. Sans 
ces trois accidents, qui ne prouvent rien contre la bonne con- 
stitution des insectes, j'aurais obtenu 168 nymphes. Je dis 
nymphes parce que j'ai eu cette année, avec le Fama-maï, 
ce qui ne m'était pas encore arrivé Jusqu'ici: trois cocons 
doubles! Deux gros cocons renfermaient chacun deux femelles, 
et le troisième contenait deux mâles. Ces trois cocons n’ont 
pas donné de sujets pour la reproduction et, qui pis est, l’une 
des femelles n’a pas pu se transformer en papillon ; sa chry- 
salide, dont j'ai reconnu le sexe à l'empreinte des antennes, 
n’ofirait intérieurement qu'une masse liquide en putréfaction. 

De 168 à 202, il y a une différence en moins de 34 qui ont 
été enlevés, selon toute apparence, par la série des temps 
froids qui a signalé la fin d'avril et les dix-neuf premiers 
jours du mois de mai. 

Si, au contraire, il convenait de défalquer des 405 nais- 
sances, indépendamment des 8 larves que j'ai volontairement 
sacrifiées, les 38 dont je n’ai pas pu découvrir les traces et 
qui par conséquent n’ont pas été mises en position de se dé- 


ÉDUCATION DE L'ATTACUS YAMA-MAÏ. 679 


velopper, de tenter la bataille de la vie; si, en un mot, je ne 
devais appliquer le nombre fatal de A9 pour 100 qu'aux 
jeunes Vers qui ont été déposés sur les chênes, je n'avais plus 
affaire alors qu'à 359 chenilles, dont le déchet proportionnel 
475,91, en chiffre rond 176, aurait donné 183, et, en tenant 
compte des trois accidents ci-dessus mentionnés, 180 pour: 
le nombre des chrysalides qu’il aurait fallu trouver. La perte 
infligée par le froid serait dans ce cas réduite à 45, et je crois 
bien, en effet, que c’est là réellement la part d'influence qu’il 
est juste de lui attribuer. 

- J'ai hâte de sortir de cette discussion de chiffres, que je 
n’ai abordée, du reste, qu’afin de montrer le peu de fond 
qu’il convient de faire sur les statistiques, établies de bonne 
foi, je le veux bien, comme la mienne par exemple, mais trop 
tôt et avec des éléments insuffisants, et qu'il est prudent de 
ne pas toujours croire les chiffres d’une manière absolue. 

Ce qui est constant, c’est que l’éclosion de 1874 s’est pro- 
duite entre le 21 et le 25 avril, et qu’elle peut être considé- 
rée comme concentrée dans la journée du 23 qui a donné le 
plus grand nombre de naissances ; qu’elle a reculé de sept 
jours snr celle de 1873 qu’on peut rapporter au 18, et qu’elle 
est revenue sensiblement à la même date qu’en 1872, dont le 
fort de l’éclosion a donné les 23 et 24 avril. 

Au moment de l’éclosion Le temps était favorable et la tem- 
pérature assez douce, de façon que tout allait à souhait et que le 
28 plusieurs larves dormaient déjà de leur premier sommeil. 

Malheureusement, dans la nuit du 27 au 28, la tempéra- 
ture s’est brusquement abaissée et, chose déplorable, le temps 
s’est établi trés-aigre, accompagné de gelée presque toutes . 
les nuits, et a persisté de la sorte jusqu’au 19 mai inclus, soit 
pendant vingt-deux jours pleins. Pendant tout ce temps-là 
mes Yama-maï ont supporté une température qui n’a pas été 
au-dessus de + 10 degrés centigrades, et qui descendait en- 
core chaque nuit de 5 et même de 6 degrés. 

Que faire ? du feu à mes Vers pour les réchauffer ? 

Mais alors le but que je me suis toujours proposé n'aurait 
été nullement atteint ! Je n’aurais plus été en droit de dire 


680 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


que je cherchais à constituer une race rustique. Au fait, j’au- 
rais préféré tout perdre plutôt que de ne pas essayer d’obte- 
nir des Vers à l'épreuve d’un temps rigoureux, et j'ai pris 
mon parti d'une manière à peu près désespérée. 

Comme il y a maintenant des Yama-maï un peu partout, 
et que, quand même j'aurais échoué, l'espèce n’aurait pas 
été compromise pour cela, j'ai osé ce qui a fait reculer beau- 
coup d’autres. Au risque de ce qui pouvait advenir, j'ai ré- 
solu d'attendre le résultat d’une expérience singulièrement 
aventurée, et il m’a fallu, je crois pouvoir le dire, une bonne 
dose d’opiniâtreté pour ne pas faiblir dans ma résolution 
pendant plus de vingt jours! 

Voici, en effet, ce que je retrouve dans les notes quoti- 
diennes de mon journal d'éducation : 

12 mai: « Le temps est désolant, les Vers ne font aucun 
» progrès. Les mues se font de misère ; les larves ont froid ; 
» elles n’ont point au sortir de la mue leur couleur normale. 
» Mais il me faut à tout prix une race robuste ! Je les laisse à 
» la température de la chambre où elles sont nées. J'en per- 
» drai très-certainement beaucoup ! La saison détestable que 
» nous avons depuis le 28 avril se chargera de faire la sélec- 
» tion pour moi. » 

13 mai: « Une vingtaine de Vers n’a pas encore dépassé la 
» première mue. Année pire que 1873, car si les chênes n’ont 
» pas été gelés, le froid se poursuit aigrement déjà depuis 
» quinze jours. » 

19 mai : « Les Vers mangent, mais sans énergie. Ce matin 
» j'en trouve six qui sont encore dans leur premier sommeil. 
» Récapitulation faite, il ne me reste plus que 181 larves, tan- 
» dis que le 5 j’en avais encore 207. » 

21 mai : « La chaleur est revenue depuis hier; les Vers 
» reprennent de l'énergie ; ils se remettent à manger. Donc 
» j'ai bien fait de ne pas les chauffer. » 

22 mai : « Plusieurs vers qui étaient restés trop longtemps 
» dans leur premier sommeil sont morts. Ce n’est pas impu- 
» nément que des-chenilles peuvent traverser une période de 
» froid de vingt-deux jours, presque sans manger ! » 


ee 


ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAÏ. 681 


Comme vous voyez, mes Yama-maï ont supporté cette an- 
née une sorte de jeûne de vingt-deux jours. C'était roide assu 
rément! Mais du moment qu’ils ont surmonté victorieuse- 
ment nne pareille épreuve, ne m’est-il pas bien permis de 
dire, aujourd hui, que ces précieux Vers sont réellement très- 
rustiques, aussi robustes, en quelque sorte, que les chenilles 
originaires de notre pays. Que l’éclosion de ses larves retarde 
encore de trois semaines sur l’époque de cette année, et le 
Yama-mai sera véritablement bien à nous! 

C’est là, je le sais bien, le nœud de la question, le point im- 
portant à obtenir. Mais le Cynthia s’est bien plié, s’est bien 
façonné aux exigences de notre climat; pourquoi le Fama- 
mai ne ferait-l pas de même? C’est vers ce résultat tant dé- 
siré que doivent converger les efforts persévérants de ceux 
qui ont foi dans l’avenir et que ne rebutent pas les lenteurs 
inhérentes à de semblables tentatives. 

Mais si l’on est pressé, si l’on ne veut point attendre l’évolu- 
tion plus lente du temps pour meltre ce Ver magnifique en 
rapport complet avec le régime physique du pays où nous 
voulons l’acclimater, alors il n’y a pas à hésiter, il faut mettre 
sa graine en glacière, à partir du mois de février, pour ne 
l'en retirer que vers le 15 mai. De cette manière on restera 
maître de l’éclosion, et rien n’empêchera de la faire coïncider 
avec l'épanouissement naturel des bourgeons du chêne. 

J'ai eu de la graine qui a supporté, en janvier 1872, pen- 
dant plusieurs nuits, un froid de 15 degrés au-dessous de 
zéro, sans qu'elle ait paru en soufirir; en glaciére elle ne 
sera soumise qu’à la température de la glace fondante, mais 
elle y restera près de trois mois et demi. Ce sera peut-être un 
peu long ; mais je suppose que ce sera sans danger pour les 
petites chenilles abritées dans leur coquille, et même que leur 
éclosion n’en sera que plus rapide et plus spontanée dès qu’on 
les sortira de ce milieu de compression, à un moment devenu 
favorable et sans chance alors de retour fâcheux. C’est là une 
expérience que je me propose de tenter l’année prochaine, en 
faisant deux parts de la graine que je compte me réserver. 


La mise habituelle en glacière aura-t-elle, oui ou non, une 
3° SÉRIE, T.. L. — Novembre 1874. ur 


AE 


652 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


influence mauvaise sur la constitution des Vers? C’est une: 


question dont l’étude et le temps pourront seuls donner la 
solution. Comme la réponse est impossible à faire dès à pré- 
sent, je pense qu'il serait très-fâcheux ‘qu’on ne poursuivit 
pas parallèlement des essais d’acclimatation naturelle, comme 
je che de la pratiquer pour ma part, depuis que je me suis. 
livré à celte étude intéressante. Il est pénible pour moi de 
songer qu'elle exigera encore un certain nombre d’années 
de persévérance, car je ne saurais me dissimuler que c’est 
là, selon toute apparence, l'élément qui me fera défaut : le 
temps ! 

Vous m'avez habitué jusqu'ici à tant d’indulgence, que j'ose 
espérer qu'il vous en restera encore un peu pour les digres- 
sions dont ce compte rendu est beaucoup trop chargé, je le 
sens, et je vous prie d'en agréer mes excuses. Comme je ne 
sais pas ce que l’avenir me réserve, ni s’il me sera donné d’en 
faire encore d’autres, je n’étais pas fâché de dire ce que je 
pense sur un sujet qui m'intéresse trop vivement pour que je 
n'exprime pas le désir que son étude soit poursuivie jusqu'à 
réussite complète. 

À dater du 24 mai, l'allure de mes Yama-mai a changé du 
(out au tout, ei mes appréhensions se sont rapidement éva- 
nouïes. Le 31 je n'avais plus, à la vérité, que 172 larves; 
mais presque toutes ont accompli leur carrière, car il y en 
a eu 165 qui se sont transformées en nymphes. 

Trois jeunes Vers sont entrés en deuxième âge dans la 
journée du 1° mai ; ils avaient par conséquent franchi, sous 
l'influence d’une température douce, en dix Jours au plus, 
la première période de leur existence. Cinq des derniers 
éclos et qui avaient été soumis, au contraire, dès le second 
ou le troisième jour aprés leur naissance, à l’action perni- 
cieuse d’un temps froid continu, ne sont arrivés au même 
point que le 20 mai, vingt-quatre Jours au moins après être 
sortis de l'œuf; et ce retard, causé par l’inclémence du 
temps, à constitué pour les cinq derniers venus, compara- 
tivement aux trois premiers, un allongement de quatorze 
jours dans le premier âge. 


ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAÏ. 683 


La deuxième période, toujours sous l’influence d’une tem- 
pérature trop basse, a duré, sommeil compris, vingt-trois 
jours pleins du 1° au 24 mai, pour le premier vec; puis le 
temps étant redevenu favorable, les larves attardées ont fran- 
chi toute cette seconde phase en onze jours, du 20 mai au 
1° juin, et l'intervalle de vingt-quatre jours, qui les séparait 
auparavant de la plus précoce, s’est trouvé réduit à douze. 

Le troisième âge, jusqu’au réveil pour le quatrième, a duré 
du 24 mai au 1° juin, huit jours, pour le ver le plus hâtif, et 
dix pour le plus en retard, du 1° au 11 juin. L’intervalle qui 
séparait les larves à leur entrée au quatrième âge n’est plus 
que de dix jours. 

Ce quatrième âge a été de sept Jours pour la première larve, 
du 1° au 8 juin, et de vingt, au contraire, du 9 au 29, pour la 
dernière. L’intervalle qui sépare les vers au sortir de leur 
quatrième mue s’est allongé, on le voit, et nous le trouvons 
de vingt et un Jours. 

Il est bon de noter ici, qu'entre le 12 et le 26 juin, des 
orages fréquents et assez forts nous ont amené un temps 
maussade avec un abaissement sensible de température qui a 
impressionné les vers, et dont l'influence s’est fait sentir éga- 
lement pendant le cinquième àge. 

Le dernier âge des larves à duré jusqu’au cocon vingt jours 
pour la première, du 8 au 28 juin, et dix-neuf pour la plus 
arriérée, du 29 juin au 18 juillet. L’espace de temps qui sé- 
pare le premier cocon du dernier est de vingt jours. 

Enfin il s’est écoulé trente-huit jours entre le commence- 
ment du premier cocon et la venue du premier papillon, du 
28 juin au 5 août ; et soixante entre la formation du dernier 
cocon et l’éclosion du dernier papillon, du 18 juilletau 16 sep- 
tembre. 

Nous avons ici un écart de soixante-douze jours entre le 
premier et le dernier Fama-mai arrivés à leur parfait déve- 
loppement; cet écart n'était que de cinq jours au sortir de 
l'œuf; il a été de quatorze à l'entrée en deuxième âge, de 
douze au commencement du troisième ; il s’est réduit à dix 


en entrant dans le quatrième; il est remonté à vingt et un 


684 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


pour le cinquième et à vingt pour la formation des cocons. 

On voit combien ces intervalles sont variables. Ce qu’il y a 
de remarquable, et le fait s’est manifesté cette année d’une 
façon toute particulière, c’est qu’ils s’étalent ou se resserrent, 
à chacune des phases de la vie des insectes, selon que la 
température a été plus ou moins régulière, plus ou moins fa- 
vorable à leur développement. Pour l'ordinaire, l’espacement 
s'élargit de plus en plus, mais assez régulièrement à parür 
du deuxième âge, et l'intervalle le plus long est toujours celui 
qui sépare l’éclosion des papillons. 

J'ai obtenu ceite année 165 chrysalides en 162 cocons d’où 
sont sortis 158 papillons en bon état, dont 69 mâles, et S9 
femelles. 

Deux mâles qui s'étaient enveloppés dans un même cocon 
pour faire leur chrysalide y sont devenus papillons, mais 
n’ont pas pu en sortir. Quatre femelles qui s'étaient réunies 
également, deux à deux, chaque paire dans un cocon unique, 
ont eu le mème sort et, qui plus est, une des nymphes est 
morte sans devenir papillon. Enfin, un troisième mâle est mort 
à moitié sorti de son cocon, sans avoir pu se dégager complé- 
tement. 

En contrôlant après la ponte tous les papillons morts, il 
s’est trouvé quatre femelles qui ne s'étaient pas débarrassées 
de leurs œufs, de sorte qu’on ne peut en compter que 55 
comme ayant contribué à la reproduction. 

Je ne dirai rien des variétés de coloration chez les sujets 
éclos en 1874; on retrouve toujours les mêmes nuances en 
proportions variables, et, sauf erreur de ma part, je considère 
le fait comme de minime importance. d’en ai tenu compte 
cependant dans mes notes; mais je crois inutile d’allonger 
encore ce comple rendu qui me semble dépasser déjà les 
bornes raisonnables, J'y joins pourtant un tableau comparatif 
des éducations que j'ai faites depuis 1870. 

Il me manque aujourd'hui quelques dates de cette année 
malheureuse, ce qui fait que le tableau n’est pas entièrement 
complet. 


Pour 1871, les nombres, de même que les époques, pré- 


ÉDUCATION DE L'ATTACUS YAMA-MAÏ. 685 


sentent quelques discordances avec ceux des autres années. 
Il y a lieu de tenir compte que j'ai perdu à cette époque, par 
famine, presque toutes les larves qui m'étaient écloses, et que 
J'ai dû me considérer comme très-heureux encore d’avoir pu 
en élever 23 qu’un retard providentiel n’a fait naître que du 
3 au 6 mai. 

Pour 1874, il faudra aussi prendre en considération que 
J'ai laissé périr volontairement les larves sorties de l'œuf les 
18, 19 et 20 avril, et que mes évaluations ne peuvent et ne 
doivent partir que du 21. 

Ce tableau d'ensemble vous permettra de juger que, quelles 
que soient les vicissitudes qui viennent à la traverse d’une 
éducation, la période totale n’en est pas beaucoup altérée, et 
que les différences extrêmes qu’il m'a été possible de consta- 
ter jusqu'ici sont comprises entre douze et vingt-quatre 
Jours. pour les quatre dernières. 

En terminant cette note dont je vous prie d’excuser l’éten- 
due, j'ai le regret de devoir vous informer que pas un seul 
des œufs d’Atfacus Pernyi, que vous avez eu la bienveillance 
de m'envoyer, n’a donné de larve. Tons se sont déformés et 
aplatis en très-peu de jours, de façon à ne me laisser aucune 
espérance. J'ai lieu de croire que la femelle qui les a pondus 
n'avait pas élé accouplée, ou tout au moins qu’elle n'avait 
point été fécondée. 

Anssitôt que j'aurai récolté la graine que les Yama-maï 
m'ont donnée cette année, j'aurai l'honneur de vous expédier 
la part que je me propose d'offrir à la Société. 

Je joindrai à l'envoi queiques cocons attachés encore à 
leur fil de suspension, ce qui vous expliquera bien mieux que 
je ne saurais le faire par écrit, la manière dont je les dispose, 
sous le plafond de la chambre nuptiale. pour obtenir à coup 
sûr des accouplements. Ce procédé que j’emploie depuis quatre 
ans avec un plein succès, me dispense de toute intervention 
dès que les cocons ont été accrochés, et laisse aux papillons 
l'entière liberté de se livrer à leurs ébats, selon que linstinct 
les pousse. Vous y trouverez aussi les trois cocons doubles 
étiquetés, et vous jugerez immédiatement que le concours fâ- 


686 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


cheux de deux vers se réunissant pour filer un cocon a rendu 
nécessairement six papillons inutiles, en les condamnant à 
mourir dans des enveloppes communes, sans pouvoir s’en 
dégager. 


Tableau comparatif des éducations de l’Attacus Yama-maiï. 


POUR LES ANNÉES 1870 1871 | 1873 1874 


Éclosion des premières larves.. 15? avril. 12 avril. |17 avril. 13 avril. 18 avril. 
— des dernières (on les a | | | 

laissé mourir, en 1870, à partir | | 
- du 16 mai) :h LS | 6 mai. | 2 mai. 22 avril. 
Plus grande intensité de l’éclo-| | 

sion 15 avril. -193et24 avril. 18 — 
Durée extrême de l’éclosion.... plus de 305.193 jours. 15 jours. 9 jours. 
Durée utile de l’éclosion | | Che | = 
Nombre des larves placées sur) | 

des chênes | 3 210 Per 
Nombre des larves qui ont filé ou! | | 

qui ont fait leur chrysalide... | 185 | | 120 165 
Premier cocon commencé le.../|4® juillet. |12 juillet. |98 juin. 5 juillet. 28 juin. 
Dernier cocon commencé le....114 août. 126 20 juillet. 195 — 18 juillet. 
Sortie du premier papillon le... | 6 août. 22 août. 11 août. | 9 août. 5 août. 
Sortie du dernier papillon le...}11 octobre. 30 — | 7 septembre 15 septembre|16 septembre 
Nombres relatifs des mäles et| | | 

des femelles ...............| 19.960 10. 9Q 161 7. 59 Q.188 G'. 82 Q.172 1. 93 O. 
Nombres des papillons ayant pu Ë pal | 0. 

s’accoupler | 104. 90158 <. | . 82 C.169 x. 85 Q. 
niervalle écoute entre la nais-| | g “4 | oj ° 

sance de la première larve et] | | 


| 


70 jours. | 72 jours. 68 jours. 

Intervalle écoulé entre la nais- | 
sance de la dernière larve et 
le commencement du dernier| 
cocon | 
Intervalle écoulé entre la nais- 
sance de la première larve et 
la venue du premier papülon. |! 
Intervalle écoulé entre la nais- 
sance de la dernière larve et 
la venue du dernier papillon... |44 
Intervalle écoulé entre le com-| 
mencement du premier cocon 
et le commencement du der- 


Intervalle écoulé entre le com- 
mencement du premier cocon 
et la venue du premier pa- 

36 

Intervalle écoulé entre le com- 
mencement du dernier cocon| 
et la venue du dernier pa-| 
pillon 

Intervalle écoulé entre la nais- 
sance de la première larve et| 
la venue du dernier papillon. 11 ? 


ÉDUCATION DE L'ATTACUSY AMA-MAIÏ. 687 


Note ajoutée pendant l'impression. — J'ai l'honneur de vous expédier, 
ainsi que je vous l’ai annoncé dans le compte rendu de ma dernière édu- 
cation de Yama-maï, une boîte contenant 36 grammes d’œufs choisis avec 
soin et 14 cocons tenant encore aux rameaux qui leur avaient servi de sup- 
ports. Vous en remarquerez trois plus volumineux, que j'ai ouverts et dé- 
barrassés de tous débris de chrysalides et de larves ; ce sont ceux qui con- 
tenaient chacun deux nymphes, et que je vous ai signalés pour l’étrangeté 
du fait. J'avais vu déjà bien des fois des larves souder leur cocon à un cocon 
déjà formé; mais c’est en 1874 que j’ai vu, pour la première fois, deux che- 
milles Yama-ma* s’envelopper dans un seul cocon filé en commun. 

J’ai récolté, en tout, cette année, 105 grammes d'œufs tant bons que 
mauvais : cing de moins qu’en 1873, et pourtant j'avais 5 femelles de plus 
qui auraient pu être fécondées, 85 au lieu de 82! 

Voici comment est répartie ma cueillette de cette année : 


“OEufs gris supposés bons.............. 57/09 
Eufs blancs supposés bons............ 91,45 
D —— } 
Ensemble. ...... 62,97; (625,97 
OEufs gris mauvais ........ Se à: CLS OUEN 
OEufs blancs mauvais. ..............,. 57,9 
OEufs gris très-douteux............... 61,55 
Ensemble... H29,07  A21,07 
Total notes de 105,04 


Pius on jspiene de l’époque de la ponte et plus aussi le poids des œufs 
diminue, et à chaque inspection, parmi les œufs reconnus bons tout da- 
bord, on en tronve un certain nombre à retrancher comme évidemment 
mauvais, leur dépression ayant mis plus ou moins de temps à se manifester. 

Ce qui ne laisse pas de m'inquiéier, c'est l'énorme proportion d'œufs sté- 
riles qui se montre chaque année. Je ne suis pas le seul, malheureusement, 
à constater ce fait sur lequel il n’y a guère moyen de se faire illusion. Je le 
crois inhérent à la race, car j'ai reconnu que cetle proportion n’était pas 
moindre pour la graine de provenance directe du Japon, chaque fois que 
j'en ai eue en ma possession. 

N’est-il pas à craindre que ce soit là une cause qui rebute nombre d'édur 
cateurs, qui s'étaient probablement bercés de l'espérance qu'ils trouveraient 
dans le Yama-maï un producteur de soie aussi fécond, toute proportion 
gardée, que le Sericaria mort? 

J'ai cherché à établir un parallèle entre les deux races, et, pour y parve- 
nir, je viens de consulter des notes et des chiffres qui remontent à des an- 
nées assez éloignées, quand je m’occupais du Ver à soie du Mürier, et en 
particulier de la magnifique race milanaise. 

La comparaison de ces documents avec’ les observaiions qu’il m’a été 


68S SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


donné de faire sur le Yama-maÿ, sans être par trop désavantageuse pour ce 
dernier, ne me laisse pas cependant libre de toute appréaension. 

Voici en effet ce que je trouve : 

Une feme:le saine de la race milanaise pond, en moyenne, 390 œufs, pres- 
que tous féconds, sinon tous. 

1 gramme de graine contient 4400 œufs. 

Quatre femelles saines suffisent amplement pour donner 1 gramme de 
graine. 

Un cocon de race milanaise pèse en moyenne, quand il cst dépouillé de 
tous débris de chrysalide et de larve, 09,195. 

Il en faut, pour peser 1 kilogramme, 5130. 

Pour obtenir 5150 cocons il faut 31° ,664 de graine de bonne qualité, soit en 
nombre rond { grammes. ñ 

Donc il faut pour obtenir 1 kilogr. de matière à exploiter, la ponte de 
16 femelles et par conséquent la coopération de 32 papillons. 

En prenant les mêmes éléments de calcul pour le Yama-maï, on arrive 
aux nombres snivants : 

Une femelle Yama-maï* pond, en moyenne, 182 œufs dont on ne peut 
guère compter, pour donner larve, que 90. 

Un gramme de graine féconde en contient 195. 

Un cocon Yama-maï débarrassé de tous débris pèse, en moyenne, 0!" ,408. 

Il en faut, pour faire le poids d’un kilogramme, 24/49. 

2449 divisé par 90 donne, pour le nombre de pondeuses, 27, et par con- 
séquent la coopération de 54 papillons est nécessaire pour fournir 4 kilo- 
gramme de matière à exploiter. 

24h9 divisé par 125 donne, pour la quantité de graine, 198,60. 

Pour obtenir le nombre 90 qui correspond, selon moi, à celui des œufs 
féconds qu’il est permis d’attendre d’une pondeuse Yama-maï, voici com- 
ment j'ai procédé : 

J'ai pesé aussi exactement que possible 1 gramme d’œufs incontestable- 
ment mauvais, et au moment où j'ai opéré il en fallait 184. J'ai multiplié ce 
nombre par 42, poids des œufs reconnus mauvais cette année, et j’ai trouvé 
ainsi pour le chiffre des œufs stériles 7728. , 

Le nombre 125, reconnu depuis plusieurs années comme représentant 
celui des œufs féconds qui entrent dans À gramme de graine Yama-maÿ, 
multiplié par 63, nombre de grammes récoltés en 1874, m’a donné pour le 
chiffre des œufs féconds 7775. 

Ces deux nombres sensiblement égaux m'ont prouvé que dans une ponte 
normale il y a toujours autant d'œufs stériles, à très-peu près, que d'œufs 
féconds ; et leur somme 15 503 divisée par 85, le nombre des pondeuses, 
m'a donné pour expression de la ponte moyenne 182,40 dont la moitié 90, 
pour m’arrêter à un chiffre facile à retenir, m’a fourni la quantité d'œufs 
féconds sur lesquels il est raisonnable de compter pour chaque femelle bien 
conforinée. 


ÉDUCATION DE L'ATTACUS YAMA-MAÏ. 689 


En admettant que la gomme et la hourre, qui entrent dans la formation 
des cocons des deux espèces, puissent représenter des poids équivalents à 
défalquer d’une part sur 5130 cocons milanais, et de l’autre sur 2449 co- 
cons de Yama-maï (ce qui est à vérifier), il est certain qu’il faudra toujours 
27 couples de Yama-maà au lieu de 16 couples du Ver du Môûrier de race 
milanaise, pour donner une quantité de graine capable, dans des éducations 
également bien réussies, de fournir sensiblement le même poids de sub- 
stance textile. 

Si cette disproportion notable du nombre des cocons nécessaires de Yama- 
maï et des cocons de race milanaise (Sericaria mori), pour donner un grai- 
nage utile équivalent, quant au résultat définitif, n’est pas de nature à dé- 
courager, toujours est-il qu’elle sera de nature à maintenir la graine Yama- 
mat à un taux assez élevé, et par suite la soie de ce Ver. 

Je vous livre ces appréciations sous toute réserve, car la question a be- 
soin d’être sérieusement étudiée et bien approfondie. Mes calculs reposent 
d’ailleurs sur des observations 1rop restreintes encore, et j’ai déjà eu occa- 


sion de dire qu'il est prudent de se tenir en garde contre les chiffres trou- 
vés trop vite. 


NOTE 


SUR 


UN BAMBOU RUSTIQUE 


CONFONDU A TORT AVEC LE BAMBUSA GRACILI 


Par M. le D'° L. TURREL 


Délégué de la Société d’acclimatation à Toulon (Var). 


La Société d’hortisulture et d’acclimatatior du Var, à Tou- 
lon, reçut en cheptel en 4869, de la Société d’acclimatation, 
six Bambous innommés, portant les numéros 1, 2, 3, 6,7. 
et? + 

Confiés à M. Jh. Auzende, jardinier en chef de la ville de 
Toulon, ces Bambous furent mis dans de grands pots, et pen- 
dant deux hivers, ils restèrent en plein air, à une exposition 
abritée, soumis à des températures de — 5 degrés à — 5°,5, 
d'autant plus dangereuses que les pots n’étant pas enterrés, 
le froid agissait également sur la partie aérienne et les racines 
de ces végétaux. Ils ne parurent cependant pas souffrir de ces 
froids excessifs pour notre région et, mis en pleine terre au 
mois de février 1871, ils poussèrent très-vigoureusement. Les 
tiges de ces belles plantes, que J'ai adressées au commence- 
ment de 1874 à la Société d’acclimatation, prouvent la rusti- 
cité non moins que la luxuriante végétation de ces six variétés. 

Leur résistance au froid est attestée par les relevés des ob- 
servations thermométriques faites dans trois stations diffé- 
rentes de notre ville. 

M. Jh. Auzende a constaté, au Jardin de la ville, des mi- 
nima de — 8 degrés le 24 décembre 1870 et de — 7 degrés 
dans la nuit du 15 de ce même mois. 

M. Raoulx, directeur des travaux hydrauliques de la marme, 
a noté sur le thermomètre minima de l'arsenal, situé en plein 
nord, sans aucun obstacle devant lui, dans la nuit du 24 dé- 


SUR UN BAMBOU RUSTIQUE. 691 


cembre 1870, — 8°,5. À S heures du matin, il ne marquait 
plus que — 5 degrés. 

Le 15 décembre 1871, au même thermomètre, le froid a 
été de — 7 degrés. : 

Enfin le minimum observé à l'Observatoire de la marine, 
contigu à notre Jardin d’acclimatation, a été pour cette même 
nuit du 24 décembre — 7°,4. Le matin à 8 heures la tem- 
pératnre s’était élevée, mais la moyenne de cette nuit a été 
de — 5,6. 

Pendant ces froids extrêmes, qui n’ont pas eu heureusement 
une longue durée, mais qui équivalent à une gelée profonde, 
puisque les racines n'étaient pas enterrées, aucun des six 
Bambous en expérience n’a paru souffrir. [ls semblaient au 
contraire, dans leurs pots placés sur le sol, plus verts et comme 
‘retrempés par le froid. 

En 41870 le Jardin d’acclimatation donna la dénomination 
de ces Bambous, moins le n° 7 qui n’a pas été déterminé. Le 
n° 12 fut déclaré identique avecle B. gracilis. Mais nous n’ac- 
ceptâmes pas cette synonymie et, croyant à une erreur dans Île 
-numérotage des échantillons, nous désignâmes par le nom de 
flezuosa le Bambou n° 12 dans notre rapport sur ce cheptel 
envoyé en 1874. 

Cette appellation toute hypothétique nous avait été suggérée 
par le souvenir du beau Bambou de ce nom que nous avions 
admiré dans le Jardin d'hiver du Bois de Boulogne. Ii nous 
avait semblé qu'il y avait comme port, abondance de feuilles 
menues et végétation en touffe serrée, une étroite parenté 
entre le superbe végétal de Paris et notre Bambou rustique, 
et nous comprenions que pour un espace limité, comme l’est 
le Jardin d'hiver, on eût choisi une espèce à racines non tra- 
çantes (1). 

Nos souvenirs nous avaient mal servi, et nos raisonnemenis 


(1) Une note de M. Quihou, qui nous parvient au moment de la correc- 
tion des épreuves, nous apprend que le Bambou que nous avons vu dans le 
Jardin d'hiver est bien un B. gracilis donné par le Muséum de Paris. Mes 
souvenirs étaient donc exacts, mais je m'étais trompé sur le nom de ce mé- 
nechme de notre Bambou rustique. 


692 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


avaient porté à faux. Vérification faite, le 2. feruosa fait 
partie du groupe des Bambcus à rhizomes. Il trace évidem- 
ment moins que ses congénères, mais n'offrit-il que cette 
seule différence capitale, 1l ne saurait être confondu avec 
notre Bambou qui pousse st dru, que sur une touffe d’un 
mètre de diamètre, nous avons compté cent cinq tiges et de 
nombreuses tigelles. 

Il était indispensable de donner son vrai nom à notre espèce 
si robuste ; aussi profitai-je du passage à Toulon de M. A. 
Geoffroy Saint-Hilaire pour lui en remettre deux tiges, qu’il 
voulut bien examiner avec le concours d’un juge compétent, 
M. Quihou, chef des cultures du Jardin du Bois de Boulogne. 

Voici la réponse que M. A. Geoffroy Saint-Hilaire nous a 
adressée sur cette délicate question : 

« Votre observation relative à la rusticité de cette plante 
» a de l'intérêt. Nous avons reçu, en eïfet, directement de 
» Chine et par divers correspondants, des Bambous qui, 
» présentant les caractères du gracilis, ont été dénommés 
» comme tels. 

» Peut-être parmi ces sujets y avait-il une variété plus rus- 
» tique, mais elle n’est pas déterminée ici comme distincte 
» du gracilis. » 

Devant cette déclaration notre devoir était tout tracé. Il ne 
nous restait plus qu'à comparer notre Bambou rustique avec 
le B. gracilis qui existe chez plusieurs amateurs de notre ville, 
M. Honnoraty, M. Reverdit et madame Tassain (1). Nous ne 
pouvions pas accepter l'identité affirmée par le Jardin du Bois 
de Boulogne, car chez ces amateurs, à des expositions même 
plus abritées que celle du Jardin de la ville où est notre Bam- 
bou rustique, les B. gracilis avaient été gelés, soit dans une 
partie de leur feuillage, comme chez M. Honnoraty, soit dans 
la totalité de leur végétation aérienne, comme chez ma- 
dame Tassain, tandis que le Bambou controversé était sorti, 


(1) Ces Bambous proviennent du Jardin da Hamma, près Alger. Sont-ils 
identiques avec le B. gracilis du Muséum, c’est ce que la culture en pleine 
terre d’un sujet de cette provenance nous permettra de vérifier. 


SUR UN BAMBOU RUSTIQUE. - 693 


de ce baptême du froid, plus vert et plus brillant qu'avant la 
gelée. 

Procédant méthodiquement à notre diagnostic différentiel, 
nous avons, M. J. Auzende et moi, visité à plusieurs reprises 
les deux espèces en observation et voici les différences que 
nous avons constatées : 


B. gracilis. Feuilles : largeur, mesu- | B. rustique: Feuilles : largeur, de 


rée au centre du limbe, de 2 à 
4 centimètres ; longueur, de 13 
à 20 centimètres. 

Entre-nœuds : longueur, de 20 à 
9 centimètres. 

Tiges: diamètre, de 7 millimètres 
à 2 centimètres; longueur to- 
tale, de 3,50 à 4",50. 

Gaînes desj eunes pousses : jaune- 
paille, striées de lignes violettes. 

Les turions sont de couleur vio- 


22 millimètres à À centimètre; 
longueur, de 14 à 20 centimè- 
tres. 

Entre-nœuds : longueur, de 15 à 
18 centimètres. 

Tiges : diamètre, de 165 millim. à 
2 centimètres; longueur totale 
de 4,50 à 5 mètres. 

Gaînes des jeunes pousses : jaune- 
paille. 

Les turions sont verts dès leur 


lette, et à mesure que les jeunes 
tiges s'allongent, elles conser- 
vent la coloration violette et 
sont couvertes d’un enduit ci- 
reux très-abondant ; les tiges 
verdissent finalement à l’état 
adulte. 


première pousse, et les tiges 
restent verles et peu cireuses 
dans toute leur croissance. 


Les ressemblances entre les deux Bambous consistent dans 
le mode de végétation serrée, dans une certaine similitude 
d'aspect qui résulte de la disposition identique des verticilles 
des feuilles, alternant sur les tiges dont ils embrassent un 
tiers de la circonférence, enfin dans cette circonstance que les 
feuilles terminales des jeunes pousses sont plus amples que 
les feuilles des verticilles. 

Mais les différences capitales résultent de la couleur des 
gaînes et des jeunes pousses, des dimensions des mérithalles 
et des feuilles, enfin et surtout du degré de résistance au 
froid. 

La comparaison topique dont nous donnons le détail n’a 
pas pu, nous le éomprenons, se faire à Paris, où ne se trou- 


694 . SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


vent probablement que de petits sujets de l’une et l’autre 
espèce; en admettant même que le pied mère d’où a été tiré 
le sujet qui nous a été envoyé en 1869 existe encore au Bois 
de Boulogne, il est à supposer que M. Quihou n'aura pas osé le 
risquer en pleine terre, le croyant identique avec le B. gracilis, 
qui ne saurait résister aux hivers de Paris. Maïs après nos 
observations, il y aurait un grand intérêt à constater quel de- 
oré de froid notre Bambou rustique peut supporter. Il faudrait 
donc, ou que le pied mére fût expérimenté en pleine terre, ou, 
s’il a disparu, notre modeste Jardin de Toulon serait fier de 
pouvoir fournir à M. Quihou des sujets pour les expériences 
que nous sollicitons de son zèle intelligent. 

Nous estimons en effet que notre Bambou rustique doit 
jouer un rôle important, au moins dans notre région où il a 
bravé victorieusement les plus grands froids, pour servir de 
brise-vents, à la place du Roseau de Provence. 

La raison qui s’est jusqu'ici opposée à l'extension de la 
plantation des Bambous comme rideaux de protection, c’est 
que les espèces rustiques, qui appartiennent toutes à la caté- 
gorie des Bambeus à rhizomes, rayonnent dans toutes les 
directions avec une excentricité si prononcée, qu'elles empiè- 
tent au loin sur les terres cultivées, dont il faut incessamment 
les extirper (1). En outre elles feuillent peu relativement aux 
Bambous à pousse serrée, leurs tiges espacées les rendant 
moins propres à arrêter el à amortir les grands courants 
d'air. 

Avec notre Bambou rustique, une ère nouvelle s'ouvre pour 
ces intéressantes cultures. Il servira incontestablement de 
brise-vents de premier mérite, par sa végétation ramassée, son 
port touffu et la grande masse de feuillage qui, à partir de la 
base jusqu’au sommet des tiges, forme un obstacle insurmon= 
table aux brises les plus violentes. Les Bambous à rhizomes 


(4) Cet inconvénient leur est commun avec le Roseau de Provence, mais 
celui-ci est en possession séculaire de la fonction de brise-vents, et l’on sait 
combien il est difficile de modifier les habitudes inv De de nos cultiva- 
teurs. 


SUR UN BAMBOU RUSTIQUE. 695 


seraient uniquement cultivés pour les usagés industriels aux- 
quels ils sont si particuliérement appropriés. 

M. J. Auzende, qui apprécie l’importance du rôle que doit 
jouer notre Bambou rustique, se propose du reste de le mul- 
tiplier au mois de mars, en éclatant la touffe de notre Jardin 
dont il n'avait pu tirer jusqu'ici que deux multiplications. 
Nous serons donc, l’année prochaine, en mesure de fournir 
aux divers jardins d'essai de France, les moyens de vérifica- 
tion de la limite extrême de résistance aux froids, dont cette 
intéressante espèce est susceplible sur le sol de notre pays (1). 


(4) Le Jardin d’acclimatation a reçu successivement un certain nombre 
de Fambous, les uns lui ont été envoyés de la Chine et du Japon, d’autres 
avaient été préalablement cultivés en France ou dans les pays voisins. 

Naturellement la plupart de ces plantes étaient envoyées sans avoir été 
préalablement déterminées spécifiquement. Elles furent cultivées au Bois de 
Boulogne sous différents numéros, et lorsque leur développement eut acquis 
quelque importance, une commission, composée de MM. Carrière, Keteleëér, 
Quihou et Rivière, fut chargée de les déterminer. 

Ces juges compétents avaient accepté une tâche délicate, car les Bambous 
sont difficiles à distinguer les uns des autres, surtout dans leurs premières 
années de végétation. 

En ce qui touche le Bambusa gracilis qui fait l’objet de la note de M. le 
docteur Turrel, il peut très-bien avoir été inexactement déterminé. Le 
Jardin d’acclimatation a reçu, de trois origines différentes, trois Bambous 
qui, après plusieurs années de culture, ont été considérés comme identi- 
ques. Non-seulement leurs caractères étaient semblables, maïs ils man- 
quaient également de rusticité. Chaque année les tiges de ces trois exem- 
plaires gelaient à — 3 degrés, pour repousser du pied au printemps. Enfin, 
en 1871 ces plantes périrent par l’excès du froid. 

Cette explication permet d'expliquer une erreur de détemnination ; puis- 
qu’on n’a eu sous les yeux que des pousses d’une année , les plantes pou- 
vaient ne pas accuser leurs caractères. 


II. TRAVAUX ADRESSÉS ET COMMUNICATIONS FAITES A LA SOCIÉTÉ. 


ÉDUCATIONS D’OISEAUX 


A LA FAISANDERIE DU CHATEAU DE FERRIÈRES (SEINE-ET-MARNE) 


Lettre adressée à M. le Directeur du Jardin d'acelimatation 


Par MN. Al. MAIRE. 


REPRODUCTION DES COLOMBES POIGNARDÉES. 


En 1869 M. le baron de Rothschild acheta, au Jardin d’ac- 
climatation du Bois de Boulogne, une paire de Colombes 
poignardées (Colomba cruentata,) nouvellement importées. 
Peudant deux années, la femelle donna des œufs sans coquille 
en toute saison, au mois de janvier comme au mois de juillet. 
Après (rois années de séjour à Ferrières, elle succomba à une 
maladie intestinale sans avoir reproduit. M. le baron de 
Rothschild racheta, au jardin de la Société royale de zoologie 
d’Anvers,.une seconde femelle qui ne vécut que quelques mois 
sans avoir donné un seul œuf. 

Cette année, grâce à l’amabilité de M. Cornély, de Tours, 
qui a bien voulu nous confier en cheptel la femelle qu'il avait 
obtenue l’an dernier de son couple et qui arriva à Ferrières 
à la fin d’avril, nous avons pu reprendre nos essais. Après 
quelques jours de repos, je réunis la femelle à notre mâle qui 
était -très-ardent, et ils commencèrent à bâtir leur nid avec 
des débris de nids d'oiseaux que je leur avais donnés. 

La femelle commença de tenir le nid ie 18 mai et, le 20, 
elle pondit son premier œuf qu’elle abandonna trois jours 
après. Les oiseaux recommencèrent à porter au nid, et les 30 
et 31 du même mois la femelle pondit deux nouveaux œuïs 
qui, cette fois, furent couvés par eux. 

Tous les mois nous eûmes une ponte semblable, ce qui 
donne aujourd'hui un total de treize œufs pondus qui ont 
donné douze tourtereaux ; onze purent être élevés et un suc- 
comba le quinzième jour, à la suite de congestion cérébrale. 


ÉDUCATIONS D'OISEAUX. 697 


Cette jolie Colombe, qui se fait remarquer par une tache 
rouge couleur sang ressortant sur le fond blanc de la poi- 
trine, ferait croire, au premier coup d'œil, que loiseau est 
blessé ou peint; le mâle porte la tache plus large et est, 
comme volume, un tiers plus gros et monté plus haut sur 
pattes. 

Ces oiseaux habitent les îles Philippines et Manille, crai- 
gnent le froid de nos hivers, et il faut les retirer dans des 
chambres ou le thermomètre ne descend pas au-dessous de 
zéro ; pendant la belle saison on les met dans des volières 
à l'air libre. 

Les Colombes poignardées mangent le blé, le millet et le 
chènevis; c’est ce dernier aliment qu’elles aiment de préfé- 
rence. Elles mangent également le pain, la viande rouge 
hachée, les vers de terreetles larves de fourmis dont elles sont 
très-friandes. Dans le moment des pontes, j'engage les per- 
sonnes qui se livreront à l’éducation de cet oiseau à mettre 
dans leûr volière des débris de platras pilés afin d’éviter les 
œufs sans coquille. 

Pendant le temps qu’ils ont des jeunes, il faut leur donner 
une nourriture abondante. 


LE FAISAN AMHERST, DE LA CHINE. 


M. Stone, de Londres, ayant donné sur le Faisan de Lady 
Ambherst, dans le Bulletin (1), des notes pratiques, et tous les 
amateurs pouvant l’admirer dans les volières du Jardin d’ac- 
climatation, je n’entrerai pas dans de grands détails. 

Au mois de juin 1873, cinq de ces oiseaux, deux mâles et. 
trois femelles, arrivèrent directement de la Chine à la fai- 
sanderie de Ferrières ; l’époque de la ponte étant avancée, 
aicun œuf ne fut recueilli. Au mois d'avril 1874, la ponte 
commença par une femelle, la seule que j'avais pu faire 
prendre à un mâle; une seconde femelle que j'ai pu réunir 
au même mâle, fin d'avril, après beaucoup d'efforts pondit 


(4) Voy. Bull., 2° série, tome IX, p. 1. 
32 SÉRIE, T. |. — Novembre 1874. 45 


698 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


son premier œuf le 5 mai; les deux femelles pondirent en 
iout quarante-cinq œufs. Sur ce nombre j'ai obtenu vingt et 
une naissances et j'ai conservé seize jeunes, cinq méles et onze 
femelles. Les pertes que j'ai éprouvées pendant l'élevage pro- 
venaient de faiblesse dans les articulations des genoux, ce qui, 
par la suite, rendait les poussins paralysés. 

Quant au mâle que je n’ai pu accoupler avec aucune femelle 
de son espèce, Je le mis avec deux femelles dorées; j'ai pu 
obtenir ainsi onze hybrides, quatre mâles et sept femelles. 


Pontes. 


PONTES. OBSERVATIONS (1). 


VIVANTS. | 


| 
| 
| 
AADITrENENS DAER | { |Couvé trois jours, abandonné; mis 
| sous une Colombe. 

h 30-31 mai..:.. | 2 |Couvés et élevés jusqu’au neuvième 
s | jour. ps 
29-30 juin! . | il Mis sous une Colombe ordinaire. 


re 


11-12 juillet... | 2 |Couvés et élevés jusqu'au dixième 
| | | jour. | 
AMD OUET AI |Couvés et élevés. jusqu’au huitième 

jour. 
12-13 septembre | Couvés et élevés Jusqu'au huitième 
jour. 


| ; ë TR 
20-21 octobre..|! | 4 | 4 |Couvés par eux. Un œuf clair. 
. | | 


Totaux... 43 œufs. 42 |411 


(1) Une paire de Colombes ordinaires m'a aïdé à faire l'élevage. 


DEUX ÉDUCATIONS D'ATTACUS YAMA-MAÏ 


FAITES EN 1873 ET 1874 


Par M. E. MONGRANI 


Médecin principal de la marine en retraite, à Saintes. 


Depuis quelques années, un certain nombre de personnes 
ont essayé d'élever l'Attacus Yama-maï, G. Mén., et tenté de 
l’acclimater en France. Cet intéressant insecte produit un 
cocon volumineux, facilement dévidable, et dont la soie est de 
fort belle qualité. 

Doter la France d’un nouveau producteur de soie, et aug- 
menter par ce moyen les sources de sa richesse, voilà un but 
bien capable d'encourager les personnes qui ont quelque goût 
pour ce genre d'occupation. 

J'ai fait deux éducations de Yama-maï, je vais en faire la 
relation. Je donnerai une foule de détails qui paraîtront peut- 
être bien longs à ceux qui n’envisagent la question que super- 
ficiellement, mais qui seront jugés fort utiles par ceux qui 
se proposent de suivre la même voie. Le peu d'expérience 
que j'ai acquise permettra peut-être aux nouveaux éducateurs 
d'éviter des fautes qui, en compromeitant la réussite, pour- 
raient les décourager; et certains détails, en apparence insi- 
gnifiants, seront peut-être le point de départ de perfectionne- 
ments d’une grande importance. 

Le 12 mars 1873, je reçus de M. Guérin-Méneville, 2 gram- 
mes d'œufs de Yama-maï. Il y en avait 257. Mon but prin- 
cipal était d'obtenir des papillons. 

M. Guérin-Méneville ayant appris par ma lettre que, pour 
constituer ma collection, je m'étais familiarisé avec l’éduca- 
tion des chenilles, me recommanda vivement de poursuivre 
un but plus important, et de travailler à l’acclimatation de ce 
bombycien. J'entrai dans ses vues. La brochure qu’il m’envoya 
me parut un guide bien incomplet et peu sûr. Comme j'avais 


700 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


élevé des chenilles bien autrement difficiles à réussir, je 
résolus de n'en pas tenir compte, et je me mis à l’œuvre sans 
douter du succès. 

Je déposai les œufs dans une cave à 10 degrés C., en atten- 
dant que la végétation des chênes s’annonçât. Dans la Sain- 
tonge, on trouve dans les bois trois espèces de chêne : le 
premier, dit chêne blanc, commence à ouvrir ses bourgeons 
dans les derniers jours de mars ou au commencement d’avril; 
le chêne bâtard ne commence à montrer ses feuilles que vers 
le milieu d'avril; enfin le chêne noir n’entre en végétation 
que dans la première quinzaine de mai; le Yama-maï mange 
indifféremment les trois variétés sans manifester de préfé- 
rence. 

Le 28 mars, après m'être assuré que quelques chênes pour- 
raient me fournir de jeunes pousses, je montai 50 œufs dans 
mon cabinet, à une température de 15 degrés; le 31 je mon- 
tai le reste. 

Le 2 avril, quelques vers commencèrent à sortir dans les 
deux lots. Les naissances se prolongèrent jusqu’au 8 avril. 
Presque tous les œufs furent bons. 

J'ai élevé à leur naissance une partie de jeunes vers avec de 
jeunes pousses de chêne. Ceux qui ne les gagnaient pas étaient 
transportés sur les rameaux avec une barbe de plume. Les 
rameaux étaient plantés dans un carton blanc recouvrant le 
vase où ils étaient plongés dans l’eau. Les feuilles touchaient 
le carton pour que les vers tombés eussent la possibilité de 
remonter sur les rameaux. La température du cabinet était, le 
jour, d'environ 10 degrés C. 

Pendant les deux premiers jours, les vers ne se tenaient pas 
sur les feuilles; à tout instant ils tombaient sans pouvoir re- 
monter, ils erraient et gagnaient les bords du carton; c'était 
un travail fastidieux que d’êlre sans cesse occupé à le rele- 
“ver avec une barbe de plume. 

J'essayai d’en mettre dans une couveuse où je faisais naïtre 
des vers à soie. La température y était à 25 degrés, et l’air 
irès-humide. L'expérience ne réussit pas, les vers tombérent 
eucore plus vite, et allérent se noyer dans l’écuelle où l'eau se 


DEUX ÉDUCATIONS D’ATTACUS YAMA-MAÏ. 701 


vaporisait. Il fallait essayer autre chose. J'en mis un certain 
nombre sur ma fenêtre, dans un coin abrité, pensant que pour 
des vers nés à la température ordinaire et destinés à vivre en 
plein air, un peu de froidure n’aurait pas d’inconvenient ; les 
vers tombèrent et périrent encore plus abondamment. Le 
froid et le chaud ne leur convenant pas, je les transportai dans 
une orangerie non chauffée, où la température ne descendait 
pas au-dessous de 10 degrés la nuit, et montait le jour 
à 18 ou 20 degrés. Je m’aperçus promptement que les vers 
tombaient moins, et des croties m'indiquérent que quel- 
ques-uns commençaient à manger. Convaincu que mes vers 
étaient morts de froid, j'installai un poêle que je chauffai le 
soir et le matin, de façon à élever la température à 26 ou 
28 degrés. Le feu ne durait qu’une heure, la chaleur tombait 
peu à peu, et je me tenais la plupart du temps à une tempé- 
rature moyenne de 20 degrés. 

Après trois ou quatrejours, je me suis aperçu que le résul- 
tat était satisfaisant, les vers grossissaient à vue d'œil, et les 
crottes de plus en plus épaisses annonçaient qu’ils mangeaient 
de bon appétit. Je changeai mes branches contre de plus 
grosses, J'y transportai les vers comme j'ai toujours fait par 
la suite, c’est-à-dire en coupant les feuilles avec un fragment 
de la tige faisant crochet, et facile à suspendre à une branche 
fraiche. Aprés avoir compté mes vers, j’ai trouvé qu’il m’en 
restait 91. C’est avec ce nombre que je me considère comme 
ayant commencé mon éducation. La mortalité des deux Liers 
que j'ai essuyée est due à mes fautes et à des tâtonnements 
inévitables dans un premier essai. 

Le seizième jour, la plupart des vers dormaient, quelques- . 
uns étaient déjà réveillés. Le dix-huitième, le réveil était 
général. Le reste de leur existence s’est bien passé. Les vers 
ont vécu dans le même local. Pendant quelques jours de gelée, 
j'ai chauffé jusqu’à trois fois. A partir du troisième âge, je 
n'ai plus chauffé et j’ai laissé la porte ouverte, sauf la nuit. 
À cette époque, j'en ai mis 25 sous un hangar ouvert, ils se 
sont comportés comme les autres ; ils ont seulement été retar- 
dés de quatre à cinq jours. 


792 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Au commencement du troisième âge, j'ai changé mon 
installation. Sur un grand vase de terre contenant environ 
50 litres d’eau; j'ai mis un couvercle rond fait de plan- 
ches très-épaisses, percé d’une dizaine de trous d’un centi- 
mêtre et demi de diamètre. Par les trous de cette planche 
recouverte de papier, j'enfonçais de 30 à A0 centimètres 
de grosses branches de chêne. Pendant un mois, je n’ai pas 
jugé utile de changer l’eau qui est restée limpide et inodore. 
Le papier empêchait les crottes de tomber dans l’eau, et les 
vers d’aller s’y noyer. J'ai perdu 3 vers de maladie, 3 autres 
ont été trouvés coupés en deux, probablement par des souris. 
J'en ai perdu certainement plusieurs dans les branches jetées, 
car dans les changements, il arrive souvent qu’on ne voit pas 
des vers même fort gros, tant leur couleur se confond avec 
celle du feuillage. 

Le 41 juin un ver a commencé son cocon. En supposant 
qu'il ait été un des rares survivants des premiers jours, il au- 
rait eu soixante-dix jours ; tout porte à penser qu'il n’enavait 
que soixante-quatre ou soixante-c1nq. 

Le 18 juin, presque tous avaient fait leur cocon. 

Le 27, j'ai détaché tous les cocons des feuilles qui les enve- 
loppaients il y en avait 60. Je les ai enfilés en chapelet comme 
on fait pour ceux des vers à soie, et je les ai suspendus dans 
mon cabinet. 

Pesés sept ou huit jours après la formation du cocon, 59 ont 
donné 360 grammes, ce qui fait 6*,10 par cocon, et 164 co- 
cons au kilogramme. Dix-huit jours plus tard, ils ne pesaient 
plus que 337 grammes, ce qui donne 175 au kilogramme. 

Le 22 juillet, il est sorti 5 papillons. Leur naissance a eu 
lieu au plus quarante et un jours après la formation du cocon. 
Le dernier papillon a paru Le 28 août, c’est-à-dire soixante- 
cinq jours au moins, soixante-quatorze jours au plus après la 
formation du cocon, ce qui donne un écart de trente-trois 
jours. Fe 

Il n’est resté que 2 cocons, l’un à chrysalide morte, l’autre 
à chrysalide probablement vivante. 

34 cocons percés, pris au hasard, ont été pesés; leur poids 


DEUX ÉDUCATIONS D'ATTACUS YAMA-MAÏ. 703 


a été de 245,60, ce qui donne un poids moyen de 72 centi- 
grammes, ou 1388 cocons au kilogramme. 

Les cocons vides du Yama-mai pèsent un peu plus du triple 
des cocons vides de ver à soie de la race dite petits milanais 
-de Perpignan. 

Quelques jours avant l'apparition des papillons, j'avais dis- 
posé dans un endroit aéré et éclairé de mon grenier une cham- 
bre nuptiale d'environ 5 mètres cubes, bien elose avec des 
rideaux et fermée aux deux bouts par des discrets transpa- 
rents pour voir ce qui se passerait au dedans. Des branches de 
chêne garnies de feuilles étaient plongées dans des bouteilles 
pleines d’eau. Le cinquième jour j'avais 15 papillons, mais 
une seule femelle. Quelques autres femelles sortirent les 
jours suivants. Bien que visités plusieurs fois par jour, je ne 
voyais ni accouplement ni trace de ponte. Je commençais à 
mal augurer du résultat. Me souvenant d’avoir lu quelque part 
que les Japcnais renfermaient leurs femelles dans des cages à 
iravers les interstices desquelles les mâles sauvages venaient 
s’accoupler, je préparai une grande manne d’osier de 60 cen- 
timêtres cubes, convenablement garnie à l’intérieur de pa- 
piers à déliter les vers à soie. J’y mis trois couples. L’expé- 
rience ne fut pas heureuse ; en peu de temps mes papillons 
eurent les ailes en lambeaux, et les jambes réduites à des moi- 
gnons informes. Je renonçai aux paniers. En visitant l’inté- 
rieur, je recueillis une cinquantaine d'œufs semés çà et là. 

M. Guérin-Méneville m'envoya à ce moment une brochure 
extrêmement intéressante de M. de Saulcy, dans laquelle je 
trouvai des renseignements fort utiles sur la manière de pro- 
céder au grainage. Je m’occupai tout de suite de convertir en 
chambre nuptiale une chambre de domestique située au gre- 
nier, cubant environ 48 mètres, assez bien éclairée par une 
fenêtre à l’ouest. Après l’avoir démeublée, les murs ont été 
tapissés de draps ou de claies Davril ; j'ai suspendu deslisières 
pour permettre aux papillons de se reposer; mais ils ont tou- 
jours préféré se grouper, pendant le jour, sur les châssis de la 
petite fenêtre qui est restée constamment ouverte, masquée 
par un filet à mailles étroites (pendant les journées de chaleur 


704 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


j'ai versé plusieurs litres d’eau pour donner de l'humidité). 
C’est là que je déposai, le 4 août, 9 mâles et 4 femelles. La . 
récolte dans les paniers et la première chambre nuptiale me 
donna 863 œufs. 

Quelques jours après je fis une nouvelle tentative; ayant 
fait, cette même année, deux éducations successives de vers à 
soie, j'avais remarqué que le grainage que j'avais fait dans un 
bûcher frais et sombre m’avait donné des pontes plus rapides, 
plus abondantes, et que les papillons avaient été plns tran- 
quilles que dans le grainage opéré dans une chambre de la 
maison beaucoup plus chaude; je transportai au bûcher un 
certain nombre de couples. Malheureusement les chats, contre 
lesquels je croyais m'être suffisamment précautionné, déchi- 
rèrent deux fois les voiles de la chambre, et détruisirent six ou 
sept papillons dont au moins deux femelles. Je fus obligé de 
reporter les survivants au grenier. Je recueillis encore là un 
certain nombre d'œufs. 

En fin de compte, j'ai récolté 2446 œufs. Je les ai détachés 
en les imbibant d’eau pendant quelques minutes, et en les en- 
levant doucement avec l’ongle. 

Cette manœuvre demande beaucoup de temps, parce que les 
œufs sont collés par une matière noirâtre, très-gluante, qui fait 
qu'ils s’attachent aux doigts et n’en tombent pas facilement. A 
l’autopsie des femelles on trouve dans le ventre une bouillie 
noirâtre, qui est la matière qui enveloppe les œufs à leur sortie 
et sert à les coller. Les œufs bruns, mouillés et frottés, devien- 
nent blancs, maïs pas aussi nets que ceux qui sont sortis na- 
turellement blancs. 

Les œufs étaient quelquefois isolés, le plus souvent on les 
voyait par petits amas de 3, 5, 10, tantôt sur les linges, sou- 
vent sur des triques de fagot; deux fois seulement j'en ai 
trouvé sur des branches de chêne garnies de feuilles fraîches; 
une seule fois j'ai obtenu une ponte agglomérée de 101 œufs 
sur une brindille qui pendait au-dessous du chapelet des cocons. 

Les chats m’ayant causé des dégâts, je ne puis donner avec 
une parfaite exactitude la proportion des sexes; cependant je 
crois que sur 59 papillons, je n’ai eu que 18 femelles. 


DEUX ÉDUCATIONS D'ATTACUS YAMA-MAÏ. 705 


Les papillons du Fama-mai présentent de nombreuses va- 
_ riétés de couleur qui sont communes aux deux sexes. La plus 
commune est la variété gris brun jaunâtre, tirant un peu sur 
le chamois (20 mâles et femelles sur 59). 

Après vient la variété gris brun rougeâtre (13), puis la va- 
riété gris brun olivâtre (7); enfin, la moins commune est celle 
aux belles couleurs jaune-citron et jaune rougeûtre (5). 

Sur les 18 femelles, une a été piquée vierge pour ma col- 
lection. Une deuxième a été piquée après accouplement pour 
voir si elle se comporterait comme les femelles d’une foule de. 
bombyciens qui, après avoir été piquées, se vident entière- 
ment de leurs œufs. C'eût été un procédé utile; le ramassage 
des œufs eût été simplifié. Je n'ai pas réussi, la femelle est 
morte sans pondre. L’opération césarienne m’a permis d’ex- 
traire de son ventre 107 œufs blancs, qui ne sont pas nés. 
Deux autres femelles ont été probablement détruites par les 
chats ; en admetiant qu’elles aient pondu avant leur mort, il 
faut réparlir les 2146 œufs entre 16 femelles, ce qui donne 
une moyenne de 152 œufs par femelle. 

Assez satisfait des résullats de mon éducation de 14873, et 
en possession de 2416 œufs, j'avais dressé un beau plan pour 
la campagne de 1874. Je me proposais d'élever 5 ou 600 vers 
dans mon orangerie, de metire 5 ou 600 œufs sur de jeunes 
chênes, que j'avais taillés et préparés pour qu'ils pussent faci- 
lement être enveloppés de filets de pêcheurs; enfin, un peu 
plus tard, pareil nombre de vers devaient aussi être transpor- 
tés à la campagne ‘après la première mue; je comptais donc 
essayer immédiatement l'élevage complet en liberté. 

Mes œufs, contenus dans des boîtes bien aérées, furent dé- 
posés dans une cave peu humide. Au mois de janvier, je les 
visitai, et quel ne fut pas mon désappointement en les trou- 
vant secs et déprimés! Il n’y en avait pas un seul de bon. Je 
pensai d’abord que cela pouvait tenir à ce que les œufs avaient 
été détachés trop tôt; mais ceux attachés encore à des feuilles 
de papier, à des écorces , ceux agglomérés sur des brindilles, 
étaient tout aussi mauvais que les autres. Il ne reste aucun 
doute dans mon esprit, les œufs n’avaient pas été fécondés. 


706 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Complétement découragé par cet échec imprévu, je renon- 
çai à poursuivre mes tentatives d’acclimatation. J'écrivis à 
M. de Sauley une longue relation de mon éducation. J'avais 
vu dans son mémoire qu’il avait été plus heureux que moi dans 
ses grainages, et pensant qu'il poursuivrait ses tentatives, je 
ne voulais pas que l’expérience que je venais de faire fût per- 
due pour tout le monde; il pouvait y avoir quelque chose 
d’utile à recueillir dans ce que j'avais fait. M. de Sauley a 
tenu à me mettre à même de recommencer mes essais, et il a 
eu l'extrême obligeance de m'envoyer 4 grammes de graines, 
la moitié de sa réserve. 

C'est avec ces œufs que j'ai fait mon éducation de 1874. Il 
y avait dans ces À grammes 506 œufs, 260 gris très-pàle pré- 
sumés bons, et 246 gris foncé. 

Ces œufs ont commencé à naître dans la cave le 8 avril. Les 
naissances se sont prolongées jusqu'au 17. Environ 62 œufs 
ne sont pas nés. 

Les vers ont été élevés dans l'orangerie. Tous les soirs le 
poêle à été allumé. Les vers ont été mis sur des chênes en pot, 
dont la végétation avait été activée sous châssis. Ils ont été 
levés distinctement avec des pinces. Les chutes ont été fré- 
quentes, mais moins nombreuses que l’année précédente. Le 
15 j'ai commencé à placer des œufs sur des pains à cacheter 
humectés et collés au milieu des feuilles. Il m’a paru que les 
vers qui n'avaient pas eu à subir la manœuvre des pinces tom- 
baient beaucoup moins que les autres, et je me propose une 
autre année de suivre un procédé analogue. 

Voici maintenant quelques notes relevées sur mon journal. 

18 avril. Les vers ne tombent plus, ils croissent à vue 
d'œil. 

20. Bon nombre des plus gros sont endormis. Les feuilles 
des petits chênes sont en grande partie mangées. Préparé le 
grand vase contenant 50 litres d’eau. On le garnit de 
branches grosses comme le doigt, les vers sont transportés 
avec les branches auxquelles ils sont attachés. À partir de ce 
moment, l'éducation marche avec régularité. 

Le 25. Plusieurs vers sont réveillés ; sommeil général. 


é 
DEUX ÉDUCATIONS D’ATTACUS YAMA-MAÏ. 707 


Le 25. Changement des branches. Les vers sont superbes; 
ils ont l’attitude des vieilles chenilles. Température à 25 degrés 
le jour. 

Le 1° mai. Mue générale. Quelques-uns sont réveillés. 

Le 3 mai. Je choisis 50 vers qui paraissent avoir fait leur 
première mue et je les transporte à la campagne, sur une 
touffe de chêne à sa deuxième pousse. La touffe est soigneuse- 
ment enveloppée de filets pour éloigner les oiseaux. 

Du À au 12 mai le temps devient froid pendant la nuit; il y 
a le matin quelques gelées blanches. Vers le 10 une gelée plus 
forte atteint les vignes, les châtaigniers et les chènes nouvelle- 
ment épanouis aux environs de l'endroit où J'ai déposé les vers. 

Le 7. Changé les branches. Les vers sont comptés, 1l y en 
a 179; avec les 50 portés à la campagne, cela fait 229. 

Le 40. Les vers portés à la campagne se comportent parfai- 
tement. 

Le 22. Sortie de la mue. : 

Le 24. Les vers paraissent souffrir. Les grandes occupa- 
tions d’une éducation de vers à soie ne me permettent pas de 
leur donner tous les soins nécessaires. Plusieurs sont ramas- 
sés errants, 2 sont morts, À s’est noyé. On change les bran- 
ches et l’eau par précaution. 

Le 26. ? gros vers morts de maladie. 

Le 29. De gros vers sont en mue. Quelques-ans ont leurs 
points argentés. | | 

Le 31. Encore 2 morts. 

Le 5 juin. Grand délitage, 2 morts, il reste 183 vers vivants. 

Le 9. Les vers, un peu négligés, sont restés un jour sans 
nourriture, 2 gros sont morts. Beaucoup sont ramassés er- 
rants. On change l’eau qui n’a point d’odeur, mais a une mau- 
vaise teinte. On met en place un énorme fagot de branches. 

Le 13 juin. Les vers font leurs cocons. 

Le 16. Ils disparaissent de plus en plus. La plus grande 
partie a filé. 

1% juillet. Récolte des cocons; il y en a 150. 

Le 10. Les cocons sont ramassés, enveloppés de leur feuille ; 
ils sont attachés à des ficelles et suspendus en chapelets au 


708 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


plafond de l’orangerie, qui est dégagé autant que possible. 
Les murs sont revêtus de draps, les fenêtres et la porte qui 
resteront constamment ouvertes, sont garnies de filets, et le 
plancher recouvert de journaux étalés. 

Le 23 juillet. Sortie de 3 papillons, les naissances conti- 
nuent irrégulièrement les jours suivants. 

Le 6 août. Il a dû sortir jusqu'ici 22 papillons. On n’en re- 
trouve que 6. Les souris et les lézards ont dû manger les 
autres, dont on ne voit que des fragments. Il est temps de 
prendre d’autres dispositions et de quitter ce local funeste. 
Les œufs y sont cependant assez abondanis. 

Au commencement de juin j'avais visité plusieurs fois les 
vers mis en liberté à la campagne, et J'avais JONEE qu il 
était de plus en plus difficile de les apercevoir. Le 10 j’ai vu 
dans les branches un mâle et une femelle de superbes lézards 
verts. Je ne doutai plus qu’ils ne se fussent engraissés avec 
mes Yama-maï. J'entrai dans la cage et je ne pus en trouver 
un seul. J’enlevai le filet, pensant que l'expérience avait 
complétement échoué. Le 10 août, j'appris de M. Moyne, 
chasseur de papillons très-expérimenté, qu’il avait pris sur 
le tronc d’un chêue situé à environ 300 mètres de l’endroit 
où J'avais déposé les vers, un mâle et une femelle de Fama- 
mai, reposés près l’un de l’autre. Les papillons figurent au- 
jourd’hui dans sa collection. J’ai cherché avec le plus grand 
soin les deux coques vides, en visitant les feuilles une à une; 
il m'a été impossible de les retrouver. Mais j'ai rencontré un 
cocon plein qui n’est point né ultérieurement, et que je con- 
serve pour voir s’il naîtra l’année prochaine. 

Dans la première quinzaine d'août le temps a été froid et 
pluvieux, les naissances se sont ralenties pour reprendre dans 
la deuxième quinzaine. Le dernier papillon est sorti le 1° sep- 
tembre, il n’est resté que deux cocons, l’un à chrysalide des- 
séchée, l’autre à chrysalide vivante. 

Les cocons enlevés de l’orangerie ont été transportés dans 
la chambre du grenier, seul endroit dont je puisse disposer. 
Elle était arrangée, comme l’année précédente. Seulement la 
croisée est restée toujours ouverte, 


DEUX ÉDUCATIONS D’ATTACUS YAMA-MAÏ. 709 


4 


Le 15 septembre, j'ai commencé à reconnaître les œufs 
pondus dans l’orangerie. Quelques-uns avaient été déposés sur 
les filets qui garnissaient la porte, le plus grand nombre sur 
les châssis d’une croisée; d’autres çà et là par petits groupes 
de 8 à 10. 

: Nouveau désappointement! Presque tous ces œufs étaient 
secs et déprimés, un cinquième à peine paraissait bon. Les 
œufs de la chambre du grenier ont été trouvés dans le même 
état. L'ensemble de la récolté a pu contenir dans une hoîte 
d'œufs de vers à soie de 2 onces, et sur cette masse, j'estime 
à 3 ou 400 le nombre des œufs de bonne apparence et qui 
sont bons, comme on peut s’en assurer en en brisant quel- 
ques-uns, pour trouver la chenille déjà formée. 

Après avoir exposé le résultat de mes deux éducations, je 
crois utile de formuler les conclusions que me suggèrent 
l'expérience acquise et des connaissances assez approfondies 
en sériciculture. 

Je crois que l'Affacus Yama-maï peut être acclimaté en 
France, maïs je tiens pour assuré que, non-seulement il n’en- 
trera jamais en concurrence avec le Ver à soie du Mürier ; mais 
encore qu'il ne sera Jamais une source de revenus pour ceux 
qui seront tentés d’en élever. 

Il paraît qu’au Japon, la soie du Yama-maï est très-esti- 
mée, et qu'on en fabrique des étoffes. Il n’en sera pas de 
même en France. 

Il ya deux maniéres de concevoir l'éducation industrielle 
du Yama-maiï ; L° en esclavage; 2° en liberté. 

1° En esclavage, loin de donner un revenu, l'éducation de 
cette chenille serait une occasion de ruine. En effet, pour 
faire une éducation devant produire 100 kilogrammes de co- 
cons seulement, il faudrait élever 17 à 18000 vers. Il serait 
nécessaire d’avoir un vaste bâtiment capable de contenir à Ja 
quatrième mue au moins cent récipients d’une cinquantaine 
de litres, couverts de planches percées, garnis d’un fagot de 
branches de chêne. Ces branches auront besoin d’être chan- 
gées tous les quatre ou cinq jours. Chaque changement de- 
mande beaucoup de soins et énormément de temps pour ne 


710 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


pas blesser ou perdre des vers. La difficulté s’augmente en- 
core de linégalité des vers, qu'il est presque impossible 
d'éviter, et qui fait que, les uns dormant quand les autres 
mangent encore, on ne sait done quel moment choisir pour 
opérer ce changement. A la fin, cette inégalité produit un 
autre inconvénient bien plus grave; les vers viennent ronger 
la feuille dans laquelle un voisin plus avancé a commencé sa 
coque, et ce dernier tombe à terre entravé dans son opéra- 
tion. 

Difficulté pour trouver un local convenable, dépense consi- 
dérable en récipients, main-d œuvre énorme, en voilà plus 
qu'il ne faut pour faire monter le prix des cocons à un taux 
où le commerce refusera de les prendre. 

2° En liberté. Serait-on plus favorisé en faisant l’éducation 
en pleine liberté dans les bois? Je ne le crois pas davantage. 

D'abord, l'éducation ne pourra se faire que sur des taillis à 
leur deuxième ou troisième pousse. Sur des arbres de la qua- 
trième année, la récolte des cocons deviendrait à peu près im- 
possible, car toutes les branches et tous les paquets de feuilles 
devront passer dans la main, sans cela on perdra une grande 
partie des cocons qui échappent à la vue malgré l'attention la 
plus minutieuse. 

Ensuite il faudra semer dans les taillis une prodigieuse 
quantité de graines, car il faut songer que l’on ne récoltera 
que ce que laisseront les pies, les geais, les rossignols, les 
fauvettes, etc., les couleuvres, les lézards, les mulots, etc., etc. 
Les filets pourraient protéger des oiseaux, mais comment 
songer à couvrir de filets un bois si petit qu’il soit. 

On ne peut donc élever qu’en pleine liberté. 

Pour cela, il faudra beaucoup de graine, qui coûtera fort. 
cher, puisque ces capricieux papillons sont si difficiles à faire 
pondre. Admettons que l’on trouve le moyen d’obtenir des 
pontes toutes fécondées, il n’en est pas moins vrai que chaque 
femellene pondra qu'environ 125 œufs, et c’est bien peu. 

Des éducateurs expérimentés admettent qu'il faut compter 
sur 30 pour 100 d’œnfs non fécondés, et ils pensent que sur 
les vers qui naîtront des autres, 50 pour 100 périront dans le 


DEUX ÉDUCATIONS D'ATTACUS YAMA-MAÏ.' 741 


premier âge. Admettons encore que par l'expérience on arrive 
à réduire un déchet aussi considérable, il n’en est pas moins 
vrai qu’il faudra toujours une ‘énorme quantité de couples, 
pour produire la graine nécessaire pour une éducation en 
liberté, qui devra produire 100 kilogrammes de cocons. 

On pense peut-être qu’une fois l’ensemencement opéré, la 
main-d'œuvre ne consistera plus qu’à récolter les cocons. 
C’est une erreur. Si l’on veut un produit, il faut chasser les 
oiseaux et éloigner les reptiles. 

Pour cela faire, il faudra que les jeunes taillis soient plan- 
tés comme des müriers, dans des champs cultivés spéciale- 
ment dans ce but. Pour éloigner les serpents, les lézards, les 
mulots, etc., il faudra que les jeunes chênes soïent en bon 
guéret et complétement débarrassés des herbes et des hrous- 
sailles. Il faudra jour et nuit des gens de garde pour tirer des 
coups de fusil ou faire des bruits de toute nature pour chas- 
ser les oiseaux. En Chine, les frais ne sont pas à considérer ; 
pour 100 sapeques ou 50 centimes on a un homme qui pas- 
sera sa journée à nettoyer le champ, ou à frapper un gong. 
En France il faudra le payer 3 francs. 

On dit qu’au Japon, le souverain et sa famille portent des 
vêtements de soie du Yama-mai, et que seuls ils ont le droit 
de se servir de cette soie. IL importe peu dès lors que son prix 
de revient soit plus ou moins élevé ; mais en France, je doute 
que l’on trouve des industriels qui consentent à payer un prix 
plus considérable que celui des cocons de vers à soie. 

Ainsi donc, on ne peut songer à faire des éducations in- 
dustrielles rémunératrices avec l’Aftacus Yama-maï. Il est 
bon que les esprits ardents qui seraient tentés de se lancer 
dans celte voie, pèsent toutes ces considérations avant de 
faire des dépenses qui seraient en pure perte. 

Les résultats obtenus jusqu’iei prouvent que le Yama-mai 
vit etse reproduit en France, et que l’on peut parfaitement en 
élever pour obtenir des papillons qui orneront les collections 
des amateurs de lépidoptères. Il me paraît enfin très-probable 
que des essais judicieusement conduits, pourront, avant peu, 
doter nos bois d’une éspèce nouvelle vivant en pleine liberté. 


CL 


749 +4 : SOCIÉTÉ D’'ACCLIMATATION. 


C’est ce dernier but que je me propose d’atteindre l’année 
prochaine; J'élèverai la moitié de mes œufs à la manière ordi- 
naire pour en obtenir des papillons de collection et une petite 
quantité de graine pour l’année suivante. Le reste sera con- 
sacré à diverses expériences, pour arriver à peupler les bois 
de la Saintonge d'une nouvelle espèce de POP, qui fera 
la joie des amateurs. 

Le résultat obtenu cette année me fait espérer que je réus- 
sirai. Une nouvelle expérience est en train de se faire, Le 
15 juillet, j'ai transporté, dans un jeune taillis de ma cam- 
pagne, deux couples de papillons sortant du cocon. J'espère 
qu'en liberté ils se seront accouplés, et que les femelles au- 
ront eu l'instinct de déposer leurs œufs sur des chênes assez 
précoces pour pouvoir nourrir leur progéniture. 


Nota. — Les conclusions de ce mémoire sont un peu sévères. Il est cer- 
tain que le Yama-maï peut s’acclimater, et l'expérience faite par M. le doc- 
teur Mongrand en donne une preuve de plus; quand on voudra faire les frais 
d’une éducation sur une très-grande échelle et en plein air, il arrivera la 
même chose que pour l’Attacus cynthia vera, G. Mén. Les chances de 
perte croissant moins rapidement que le nombre de vers, on pourra obtenir 
un excédant de reproducteurs robustes, capables de fixer l'espèce dans nos 
bois de chêne, comme l’autre espèce, devenue maintenant sauvage dans 
toutes les plantations d’ailante. Les petites éducations en chambre donnent 
souvent des résultats très-médiocres, qui ne doivent pas être regardés 
comme définitifs, suivant l’exemple que nous venons de citer. — M. G, 


PROGRÈS ET DÉVELOPPEMENT À 
DE 


LA CULTURE DE L'EUCALYPTUS 


D'APRÈS LES TRAVAUX DE M. P. RAMEL 


Par M, E. MÉRICE. 


L'Eucalyptus, sur lequel tant de remarquables travaux ont 
été publiés dans le Bulletin, sera sans doute considéré par 
l'avenir comme l’une des plus belles conquêtes de la bota- 
nique moderne. Originaire de terres lointaines et séparé de 
nos contrées par l’immensité des mers, il semblait destiné 
par la nature à rester toujours inconnu à nos climats ; aujour- 
d'hui, cependant, à la suite de couragenx et persévérants 
efforts, il se répand dans le midi de l’Europe et dans le nord 
de l'Afrique, ornant de son feuillage les pentes les plus sté- 
riles, chassant les maladies, assainissant les campagnes et 
embaumant l’atmosphère de ses salutaires effluves. Ce sera 
l'une des gloires de la Société d’acclimatation que d’avoir 
encouragé la culture de ce noble végétal, d’en avoir signalé 
les nombreux avantages, d’avoir enfin plaidé et, on peut le 
dire aujourd'hui, gagné une cause si utile à la civilisation 
et au progres. 

Pour nous tous, pour la France, et ajoutons sans crainte 
pour la postérité, le nom du savant et‘infatigable M. Ramel . 
est à jamais lié à celui de l'Eucalyptus. C'est grâce à lui que 
ce bel arbre repeuple les côtes dénudées de l'Algérie; c’est 
par son initiative que nos départements méridionaux voient 
s'élever des forêts d’une essence inconnue à nos péres, et que 
notre sol, suivant l’une des plus heureuses expressions de Vir- 
gile, se pare de feuillages nouveaux et de fleurs étrangères ; 


Miraturque novas frondes, et non sua poma. 
(Géorg. IL, 82.) 
3° SÉRIE, T. l, — Novembre 1874, 46 


714 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


Î. -— PLANTATIONS. 


ilne sera pas inutile de jeter un coup d'œil rapide sur 
l’état de la culture de l'Eucalyptus en Afrique. On va ici, à 
l’aide des indications fournies par M. Ramel, essayer d’en 
donner une idée exacte. 

Il faut d’abord constater la popularité dont jouit l’Euca- 
lyptus : c'est un fait acquis et incontestable. Partout on en 
considère la plantation comme un bienfait, et nulle part on ne 
se laisse arrêter ni décourager par des circonstances con- 
traires. Parmi les différentes espèces du genre, c’est l’Euca- 
lyptus qlobulus qui reste en possession de la préférence 
générale. Malheureusement, cette année, la graine en est 
trés-rare. 

On sait que l’Eucalyptus résiste bien à la sécheresse. Mais 
il faut pour cela qu'il soit parvenu à l’âge adulte, et, en Algé- 
rie, l'été est toujours un temps de crise pour les plantations 
récentes. Cette année, au 45 septembre, il n’était pas encore 
tombé une goutte d’eau à Hussein-Dey. Gependant les Euca- 
lyptus de celte localité n’ont pas souffert; les plantations 
du génie militaire sur les terrains vagues des environs d’AI- 
ger ont également bien résisté. La chaleur n’a fait que quel- 
ques rares victimes parmi les jeunes plants; et une averse, 
arrivant hors saison, a produit le meilleur eflet sur l’en- 
semble, quoiqu’elle ait entraîné et déraciné quelques sujets 
encore insuffisamment affermis dans les ravins. Commencées 
il y a trois ans, ces plantations forment déjà de petites forêts, 
où les Eucalyptus globulus de 8 à 10 mêtres de haut sont 
en majorité considérable. 

L’ Eucalyptus a subi également celie année le fléau de sau- 
terelles, mais il ne s’en est pas ressenti. Depuis la grande inva- 
sion du Sénégal, l'expérience a appris aux colons que ces ter- 
ribles insectes ne s’attaquent jamais à l'arbre adulte, au moins 
de l'espèce globulus. Les jeunes plants seuls sont quelquefois 
atteints, quand ils n’ont pas eu le temps de constituer leurs 
éléments ligneux. Voici au surplus une note de M. Cordier, 


CULTURE DE L'EUCALYPTUS. 745 


propriétaire à la Maison-Carrée, qui fournit à ce sujet des 
détails intéressants et authentiques : 


Si depuis quatre à cinq ans la réussite des plantations d'£ucalyptus en 
Algérie n'a pas toujours été satisfaisante, la cause en est due principale- 
ment à l’insuflisance des pluies de ces dernières années ; aussi, en est-il 
résullé des déceptions pour les plantations d’une certaine importance où 
il a été impossible de remédier à la sécheresse par des arrosages et des 
soins de binages exceptionnels ; ce sont des échecs d'autant plus graves, 
qu'il est reconnu que les remplacements sont peu avantageux ; les quel- 
ques jeunes arbres rejelons de la première plantation prenant le dessus 
et empêchant que les remplacants deviennent jamais des arbres de va- 
leur, il faudrait avoir le courage de faire le sacrifice de ces quelques jeunes 
arbres, et opérer une nouvelle plantation sur toute la surface. 

Les plantations que nous avions faites dans l'automne de 1873 (novembre) 
et au printemps de 1874 (mars et avril), ayant été favorisées par des pluies 
opportunes et plus abondantes que les années précédentes, avaient très-bien 
réussi; aussi, au mois de juin, elles présentaient une végétation luxuriante 
qui promettait un plein succès ; malheureusement nous étions alors sous le 
coup d’un fléau dont la colonie avait déjà été victime en 1855 et 1656 ; 
une des sept plaies d'Égypte, les sauterelles, dont la patrie, paraît-il, est 
le centre de l'Afrique, avaient envahi notre littoral, 

L’invasion des sauterelles sur le territoire où se trouve la propriété que 
j habite a commencé dans l'après-midi du 23 mai et s’est continuée sans 
interruption, par des vols innombrables, jusqu’au 31, c’est-à-dire pendant 
neuf jours ; la direction suivie, et qui n’a pas varié, était celle du nord- 
est; les pérégrinations cessaient entièrement vers le soir; puis les sau- 
terelles repartaient le lendemain matin, lorsque l’action du soleil les avait 
aégourdies, mangeant là où il n’y avait personne pour les tourmenter et 
les chasser, atteignant de préférence les légumineuses et les herbages 
tendres ; aussi, les Eucalyptus ont-ils eu peu à souffrir de cette première : 
invasion, mais beaucoup de ces locustes, qui étaient arrivées à la période 
d’accouplement, choisirent pour cette œuvre les terrains labourés en ja- 
chère ou piochés récemment, les parties à sec des oncds (ruisseaux), et 
principalement les dunes de la mer qui, généralement, présentent de 
vasies surfaces sablonneuses, surlout sur notre territoire ; Jà, elles dépo- 
sèrent leurs œufs qui, à pattir du 10 juin, donnèrent lieu à l’éclosion 
d’une nouvelle génération quarantuplant le nombre de la première (les: 
pontes étant en moyenne de 80 œufs), Malgré les efforts de destruction 
faits par la population agricole aidée de 60 militaires et de 25 détenus 
du pénitencier de la Maison-Carrée, que l'Administration avait bien voulu . 
mettre à sa disposition, des masses de jeunes locustes réunies en colannes 
serrées, sorlant des dunes, ei s’ayançant comme une vague de la mer, 
envahirent les terres de culture. Gest de cette nouvelle invasion, qu’il 


716 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


nous a fallu combattre pendant près de deux mois (du 40 juin au 6 août), 
que nous avons eu le plus à souffrir (4). 

Celte note étant destinée à la Société d’acclimatation, je me bornerai à 
constater le préjudice causé à nos plantations d'Æ£ucalyptus. 

Dans nos anciennes plantations les dommages sont sans importance ; les 
l. globulus ont été respectés par les locustes qui ont attaqué de préférence 
les £. red-qum, E, resinifera et E. viminalis, et mieux encore les diverses 
espèces de Casuarina, qui ont été dépouillés de leurs feuilles et de l'écorce 
des jeunes rameaux; ces arbres paraissent morts, mais ce ne sera qu’un 
retard apporté à leur croissance ; ils reverdissent actuellement, et bientôt 
les nouvelles pousses auront fait disparaître le triste aspect qu’ils présentent. 

Malheureusement, il n’en est pas de même des récentes plantations, la 
plupart des jeunes plants, dépouillés de leurs feuilles et décortiqués jus- 
qu'aux racines, sont morts. Cependant, il est à constater que les jeunes 
E. globulus, provenant de semis de mars et plantés en novembre 1873, 
ont été moins attaqués que ceux plantés en mars et qui provenaient de 
semis d'automne ; cela tient à ce que ces derniers étaient encore à l’état 
herbacé. Déjà, en 1866, nous avions éprouvé les mêmes dommages ; sur 
1000 jeunes Æ, globulus parfaitement repris, il n’est resté après l'invasion 
qu'une trentaine de survivants, tandis qu'une ligne circulaire entourant 
celte plantation et plantée l’année précédente avait été respectée. 

Généralement les plantations d’Eucalyptus de cette année, qui promet- 
taient une réussite complète, seront à refaire, car toutes celles qu’on n’a pu 
défendre contre la seconde invasion, que nous appelons celle des Criquets, 
ont été détruites presque entièrement, puisque dans plusieurs il ne reste 


de survivants pas plus de 10 pour 100. 
À. CORDIER. 
El-Alia, ce 12 novembre 1874. 


Dans les plantations faites aux alentours d’Alger, M. Ramel 
signale comme une heureuse innovation l'introduction de 
l'Eucalyptus colossea, qui a été mélangé aux autres espèces 
dans les massifs et qui y à été planté par milliers. Égal en élé- 
gance aux autres espèces du même genre, le co/ossea parait 
l'emporter sur elles toutes, et en particulier sur le globulus, 
par sa rusticité et sa résistance aux variations de la tempéra- 
ture. Sa croissance est à peu près aussi rapide, et ses périodes 


(4) Les locustes mettent de trente-six à quarante jours à partir de leur nais- 
sance pour se transformer en sauterelles ailées ; alors leur marche est parfois d’un 
kilomètre dans la journée; elles dévorent tout ce qui est à leur convenance sur 
leur passage. De même que dans les deux dernières invasions, elles ont disparu en- 
tièment quelques jours après leur transformation, dirigeant leur vol vers le sud. 


CULTURE DE L'EUCALYPTUS. 717 


de végétation sont plus marquées. Il a parfaitement réussi, 
soit ou l'ait planté l’hiver, soit même qu’on ne l'ait repi- 
qué qu’au printemps. Îl promet aux paysages de l’Algérie un 
décor enchanteur. 

Dés 1870, le commandant supérieur du génie en Alec) 
M. le général Farre, a fait planter en Eucalyptus globulus le 
vaste plateau de la Maison-Carrée. Cette plantation, exécutée par 
M. Trottier, est d’une admirable venue, et elle forme à présent 
une futaie épaisse et spacieuse, dont les émanations régénéra- 
trices emplissent le voisinage et se répandent jusque dans Alger. 
Des boulevards de cette ville, la vue du promeneur se repose 
agréablement sur ce massif d’arbres verdoyants, couronnant 
d’une manière pittoresque le plateau qui domine la plaine de 
Ja Mitidja. Quand on aura tracé des allées dans ce jeune:tail- 
lis, et qu’on y aura fait les appropriations indispensables, 
notre métropole africaine se trouvera dotée d’une promenade 
incomparable, pleine d’arbres, de verdure et de parfums, 
et où les vieux croyants s’étonneront de trouver, grâce à 
l'industrie des infidèles, un avant-goût du paradis de Ma- 
homet. 

Encouragée par le succés de la plantation faite sur le pla- 
teau de la Maison-Carrée, l'administration du génie, pour 
compléter son œuvre, en a fait planter les versants en essences 
variées, où dominent les Eucalyptus globulüs, colossea et 
resinifera. On y compte aussi beaucoup d'acacias et de casua- 
rinas. Malheureusement, les arbres de ces deux dernières 
essences ont eu beaucoup à souffrir des sauterclles et des 
criquets; mais ils ont repris depuis et, à la faveur des ar- 
rosements qu'on leur a donnés, leur énergique vitalité a 
fini par triompher. 

Les environs de la Maison-Carrée doivent à l’Eucalyptus 
une métamorphose qui paraît féerique au voyageur qui revoit 
ce pays après quelques années d'absence. La côte, naguère 
désolée, s’est couverte d’une riante verdure. Les murs blanchis 
de la prison sont entourés d'Eucalyptus globulus, qui ôtent à 
l'édifice la tristesse de son aspect; plus loin est une jolie église, 
entourée d’allées d'arbres de même essence. De l’autre côté 


718 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


de la route, s'élève la maison mauresque de M. Van Masevyk, 
protégée par de majestueux Ewcalyptus globulus, les pre- 
miers, sans doute, qui aient été semés en Algérie. (était 
en janvier 1863. Alors nouvelles venues d'Australie, ces 
graines ont tellement prospéré sur le sol africain, qu’elles 
forment à présent un parc magnifique, ayant à peine besoin, 
pour devenir une futaie géante, du temps que demandent 
nos lentes espèces du Nord pour donner un taillis suffisant 
aux besoins élémentaires de la boulangerie ou de la tonnel- 
lerie. 

Éclairé et déterminé par ce résultat inattendu, M. Van Ma- 
seyk a fait planter en Eucalyptus globulus de nouveaux ter- 
rains, d’une superficie dix fois plus grande que celle qu’il 
avait originairement consacrée au parc de sa résidence. Getle 
nouvelle plantation est traversée par une belle avenue, cail- 
loutée en petites pierres de l’'Harach ; piétons et cavaliers 
viennent admirer la splendide végétation des arbres qui des- 
sinent la nouvelle route, en bénissant le propriétaire intelli- 
gent qui a transformé en bosquets riants et salubres, une val- 
lée hier encore empestée par des eaux siagnantes, dont les 
miasmes meurtriers faisaient l’effroi du voyageur. M. Van 
Maseyk se trouve avoir fait la plus heureuse des spéculations : 
il a tiré parti de terrains sans valeur, etil à assaini le pays, où 
il est maire, et qu’il administre, parait-il, aussi bien que ses 
propres domaines. 

Son exemple a trouvé de nombreux imitateurs. Dans la 
commune de la Maison-Carrée, il n’est pas une cour, pas une 
porte, que n’ombragent un ou plusieurs Eucalyptus. Aussi, 
comme par enchantement, y voit-on la salubrité remplacer 
l'infection ; la santé en permanence y succède à la fièvre endé- 
mique. Le territoire de la commune se compose en grande 
partie des alluvions de l’Harach, et il était réputé l’un des 
plus dangereux de l'Algérie. Aujourd’hui on y compte à peine 
quelques cas de fièvre ; la maladie n’a plus sa malignité d’au- 
trefois, et ceux qui en sont atteints savent où trouver un infail- 
lible remède. 

_ On ne peut passer ici sous silence la belle création de 


CULTURE DE L'EUCALYPTUS. 719 


Mer de Lavigerie, l’orphelinat agricole de la Maison-Carrée ; 
l'Eucalyptus y prend la première place, et 1l ouvre la voie aux 
défrichements et à l'agriculture. Voici en quels termes $’ex- 
prime l’adminislrateur de cet établissement : 


Saint-Chamond, le 24 octobre 1874, 
Mon cher Monsieur Ramel, 


Je tiens à vous donner quelques renseignements sur nos plantations 
d'ÆEucalypéus, à la Maison-Carrée, auxquelles vous voulez bien vous inté- 
resser, 

Cette propriété, qui est devenue aujourd’hui notre maison mère, était, 
vous le savez, il y a six ans un immense territoire couvert de broussailles, 
«de palmiers nains, et que le voisinage des eaux croupissantes de l'Harach 
rendait des plus malsains, 

En 1869 et 1870, à mesure que les broussailles s’arrachaient, nous y 
avons, planté une quantité considérable d’Æ£ucalyptus, en massifs et en 
allées, le long de nos champs ou de nos vastes jardins, ce qui donne à 
celte propriété toute nouvelle l’aspect d’un vieux domaine aux arbres et 
aux forêts séculaires, ainsi que vous avez pu le constater de visu. 

Mais le résultat le plus merveilleux, c’est que la fièvre intermittente 
qui venait si souvent arrêter nos orphelins dans leurs trayaux agricoles 
a disparu peu à peu, en sorte qu'aujourd'hui cette propriété est une des 
plus saines des environs d'Alger, après avoir élé la plus fiévreuse. De 
plus, nous avons cessé complétement l’usage du sulfate de quinine pour 
cembattre les accès de fièvre intermittente qui persistent encore à se 
montrer de temps à autre chez quelques-uns de nos enfants. Depuis plu- 
sieurs années nous ne faisons plus usage que de la tisane de feuilles d’Eu- 
calyptus prises à de jeunes plants, et nous avons pu remarquer, ce que, 
du reste, ont constaté beaucoup de médecins en Algérie, que ce remède 
consérvait toute son efficacité, même dans cerlains cas où Je sulfate de 
quinine restait impuissant, et surtout qu’il n’avait pas comme lui l'incon- 
vénient de délabrer l’éstomac et de ne guérir quélquelois de la fièvre ih- 

termiltehte que pour laisser après elle la maladie que no5 colons appellent 
fièvre quinine, si connue en Algérie. 

Ces services que nous a rendus et nous rend encore Pene 
vous ont élé, vous vous en souvenez, aflirmés par Monseigneur larche- 

vêque d'Alger lui-même, il v a quelque deux ou trois ans. . , . , 


CHARMETANT. 
À deux kilomètres de la Maison-Uarréé commence la pro- 


priété d'El-Alia, Une plantation d'Eucalyptus globulus borde 
la routé. Ils ont eu à résister à la fois au vent du noïd, qui 


DE 
Mb 


720 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


leur apporte les émanations salines de la Méditerranée, à la 
poussière de la plaine et à la sécheresse de cette année. 
Malgré toui, ils prospérent, et leur succès est pour les colons 
un encouragement et un exemple. 

Quand l'administration française se trouva chargée d'ouvrir 
à la colonisation le sol que venait de conquérir l’épée de nos 
soldats, elle comprit tout de suite la nécessité du reboisement 
etdes plantations. Abstraction faite de leurs qualités ornemen- 
tales, les arbres peuvent seuls dessiner et former les routes, 
assainir les habitations, préparer les dessèchements, et enfin 
donner un rapport aux terres que le manque de bras ne per- 
met pas de mettre en culture réglée. En débarquant en 
Afrique, le voyageur apercevait des coteaux couverts de cactus 
et d’agaves, les plaines sans autre végétation que des palmiers 
nains et des broussailles. Que faire pour substituer à cette 
flore sauvage et stérile, des arbres utiles, compagnons et 
auxiliaires de la civilisation ? Les ingénieurs des premiers 
temps de la conquête ont tout essayé, mais en vain; les arbres 
d'Europe semblaient, sous le ciel de l'Algérie, atteints d’une 
nostalgie contre laquelle tous les soins étaient impuissants. 
On a perdu à ces tentatives beaucoup de temps, de peines et 
d'argent, sans atteindre un autre résultat que la conviction de 
leur inutilité. 

Aujourd’hui, la découverte et la réussite des essences ausira- 
liennes sont en voie de changer la face du pays. 

Si l'Eucalyptus qlobulus n'a pas la grâce et l'élégance 
des essences des régions tempérées, une culture raisonnée 
etun choix judicieux parmi les variétés atténuent ce défaut. 
Les Eucalyptus qglobulus de M. Cordier, par exemple, sont 
du plus bel aspect, notamment celui qui se trouve à gau- 
che, en entrant dans le jardin potager ; ce dernier a grandi 
isolé, ayant de l'eau en quantité suffisante. Il a le port et la 
forme arrondie d’un orme ou d’un tilleul, et quand il est 
en pleine floraison, il atteint à une beauté qui ne le céde 
à aucun autre type végétal. C’est du reste à El-Alia que 
l’on voit réunie, dans les pépinières de M. Cordier, une 
admirable collection de sujets empruntés à la flore austra- 


CULTURE DE L’EUCALYPTUS. 721 


lienne, destinés à peupler successivement ses différentes pro- 
priétés. C’est lui qui le premier à planté l'Eucalyptus en 
massif, et qui en distribue des plants à tous les colons dis- 
posés à en essayer la culture. 


IT. — RAPPORT DES COUPES. 


M. Trottier a supputé le produit d’un hectare de terre, en 
admettant qu'il contienne 1000 pieds d'Eucalyptus globulus. 
La croissance moyenne des plantations en lignes isolées qui 
existent au jardin du Hamma est de 13 centimètres par an. En 
la réduisant à 10 centimètres seulement pour les sujets agglo- 
mérés, il trouve que les 1000 pieds, coupés à 


5 ans, donneraient un produit de....... 1200 francs, 
10 _ ON DD AN 
45 Mn dd Rene nt 11798 — 
20 D QE AR RDS RC EEE 25366 — 
26 Sa DA IC R ER EtAAVSY 93254 — 


Ce calcul est basé sur la supposition que les 1000 ÆEuca- 
lyptus trouvent dans un hectare de sol assez d’espace pour y 
accomplir toutes les périodes de leur croissance. 10 mètres 
suffiraient donc pour un arbre de grandes dimensions, tandis 
qu’en Europe on sait qu’un chêne ou un hêtre se développent 
sur plusieurs centaines de mèêtres. Aussi M. Cordier réduit-il 
les chiffres qui précèdent à un total de beaucoup moins élevé, 
qu’il analyse ainsi : 


En plantant 1000 pieds sur un hectare, au bout de cinq ans 


on pourra abattre 500 baliveaux valant.. 600 francs. 
Au bout de dix ans, 250 pieds valant...... 1513 — 
À quinze ans, on abattra 125 pieds valant.. 1473 — 
A vingt ans, 60 pieds valant............. 1521 — 
Enfin à vingt-six ans, les 60 pieds restant, va- 
Jantes Nan een ee LR OR nr 9195 — 


Produit total des cinq coupes. 8102 — 


En se basant sur ce total, bien modeste pourtant quand on 
le compare aux évaluations de M. Trottier, on arrive à un 


7129 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


revenu annuel de 300 fr. par hectare, qui dépasse encore de 
beaucoup le produit des bois en Europe, et qui, s’il est vérifié 
par l'expérience, offrira un attrait suflisant aux colons et 
aux capitalistes. [l est superflu d'ajouter que le produit des 
plantations en lignes isolées doit être plus considérable que 
celui des arbres en massif. 


IT. — CLASSIFICATION ET MÉTHODE DE CULTURE. 


Voici le classement établi .par M. Ramel pour les espèces 
du genre Æucalyptus, dans un travail daté du mois de mars 
de cette année : 


1° Eucalyptus globulus, Labill. 

Blue Gum tree de la Tasmanie. Rapide éroissance, très-grand arbre. Bois 
de grande valeur. Ayant de plus une action remarquable sur la salubrilé 
de l'air, 

29 E, marginata (Sm). 

« Jarrah »,Mahogany de l’Austr. occidentale. Sa croissance n’est pas aussi 
rapide que celle du précédent, mais les qualités de son bois le classent au 
premier rang comme beauté et utilité. Nul insecte de terre ou de mer ne 
l’attaque. Sans ce bois, l’Inde anglaise n'aurait pas eu de traverses durables 
pour son immense réseau de chemin de fer, la fourmi blanche ayant détruit 
toutes celles faites avec les bois indigènes. M. Ramel l’a appelé äl ÿ a long- 
temps le Diamant des forestiers, et il s’efforce à attirer l'attention sur cet 
utile végétal qui vient sur les montagnes ferrugineuses voisines de la mer. 

30 E, resinifera (Sm). 

Grand arbre, de croissance rapide, et approprié aux terrains secs; il résiste 
mieux, dit-on, à la chaleur que l’E. globulus. On le connaît sous le nom 
vulgaire de « Red Gum ». Il faut pour éviter l’équivoque, qui n'arrive que 
trop avec les noms vulgaires, ajouter son nom d’habitat, et l'appeler « Red 
Gum de New-South-Wales » pour le distinguer du suivant : 

Lh° E. rostrata (Schlect). 

Mahogany ou Red Gum de Victoria. 

Celui-ci vient le long des cours d’eau et dans les lieux frais, son bois est 
très-beau et presque incorruptible. 

Comme mérite, il est le second bois de l'Australie. 

5° E. obliqua (l’Héritier), vel gigantea (Hook lil.), vel fabrorum 
(Schlect). « Stringhy bark ». 

Très-grand arbre, de croissance rapide, à tige droite comme un mät, 
atteignant les plus grandes dimensions. Il couvre des espaces immenses des 
montagnes les plus arides de la Tasmanie et de Victoria. Son bois fissile est 


CULTURE DE L'EUCALYPTUS, Ê 78) 


trois fois résistant comme le chêne. Son écorce très-épaisse sert à faire des 
huttes, des cordes, du papier. Il ne vient pas dans les lieux bas, ni au 
Hamma, ni dans la plaine, mais très-bien sur les hauteurs de Baynen, en 
face du phare, 

Si l’on veut combattre l'influence paludéenne par les bienfaisantes éma- 
nations des Æucalyptus, cette collection répond pleinement à ce but. 

Tous les Eucalyptus, quoique à des degrés différents, renferment au 
moius les trois produits suivants : menthe, camphre, essence des pins (téré- 
benthine). 

On peut y ajouter quelques autres espèces d’un groupe d’Eucalyptus 
très-intéressants : les anygdalina.Leur bois a du mérite ; quelques-uns attei- 
gnent les plus grandes proportions, et leur feuillage fournit aux arts des 
essences estimées. 

Le Blue Gum (£ucalyptus globulus\ croît rapidement sur le sol le plus 
pauvre, à la condition que l’eau ne le contrarie pas. 

Les avantages des grandes plantations sont considérables, surtout dans 
les contrées non boisées, et tous les propriétaires, grands ou petits, en re- 
tireraient un grand profit en enrichissant la colonie. 

Il est utile d’ajouter les espèces suivantes, qui complètent une bonne 
représentation des Æucalyptus les plus estimés parmi ceux déjà connus : 

6° Eucalyptus amygdalina, White Pepper; menthe poivrée, blanc ; 

7° E. amygdalina, Brown Pepper ; menthe poivrée, brun ; 

8° E,. Gunnii (du même groupe), très-odorant aussi et demi-alpestre ; 

99 Æ£. Sp. (non décrite). 

Cette variété est arrivée pour répondre à une demande expresse d’arbres 
propres à des terrains secs comme la vallée de Chélif. Elle s’est très-bien 
comporiée et semble remplir le desideratum à souhait. 

10° Eucalyptus calophylla, grand et bel arbre de l'Australie occidentale, 
à feuillage splendide. Aime les terrains frais. Signalé pour avenue. Délicat. 

110 ÆE, fissilis, C’est un amygdalina qui, dans des circonstances très- 
favorables, dans les montagnes de Dandenong, près de Melbourne, à atteint 
509 pieds de haut. 

190 ÆE, robusta, Swamp Gum ou Gommier de marais. Il vient aussi dans 
les terrains secs. Très-rustique. 

Quant à l’Æ. colossea, le Kary de l'Australie ca lenles il en a été parlé 
ci-dessus. 


A cette nomenclature, M. Ramel ajoute les conseils sui- 
vants, spécialement destinés aux colons algériens : 


C’est en terre de bruyère, en terrines ou caisses, qu’on sème les plantes 
de la Nouvelle-Hollande. Ces terrines, pots ou caisses sont exposés à une 
température de 15 à 20 degrés Réaumur ; les semences étant très-légèrement 
recouvertes de terre entretenue fraîche: | 

On peut, quand on n’a pas de terre de bruyère, en faire de factice ; mais 


794 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION, 


quand on en a, on doit procéder comme au Jardin des plantes de Paris: la 
terre étant débarrassée de ses racines au moyen d’un crible est mise dans 
des terrines garnies de terreau. On presse, et l’on place la terrine dans l’eau 
de facon que l’orifice ne soit pas couvert. L'eau remonte par-dessous, tasse 
la terre, comble les vides. 

On fait égoutter une, deux ou trois heures. La semence est alors posée 
à la main, ou jetée à la volée, et recouverte au moyen d’un crible à 4, 2 ou 
8 millimètres, suivant l’espèce, et l'on met sur couches. On n’a plus besoin 
d’arroser jusqu’à la venue des jeunes sujets, si ce sont des Eucalyptus, qui 
croissent en six ou douze jours en général. 

Mais en Algérie, la terre quelle qu’elle soit, faisant presque toujours 
croûte, on procède différemment : On remplit les vases de la terrè pré- 
parée, on sème, on recouvre les graines, et l’on arrose après avoir 
semé, et chaque fois que la terre le réclame. Elle doit toujours être tenue 
fraîche. 

Les sujets nés et ayant atteint la troisième feuille au moins, on repique 
en godets de 8, 10, 12 centimètres. 

Il faut bien se garder, comme cela s’est pratiqné, de les y laisser trop 
longtemps, parce que le pivot y contracte une forme de tire-bouchon très- 
nuisible à l'avenir de l'arbre. Un planteur bien avisé a soin, quand cela est 
arrivé, de couper ce pivot tire-bouchon et d’arracher l’excès de vieux che- 
velu. La jeune plante ainsi débarrassée se refait un ou plusieurs pivots, et 
ses racines se régénèrent rapidement. 

Comme transition au semis en place préconisé lors de l'envoi des pre- 
mières graines en Algérie (1857), on peut se dispenser de recourir aux 
godets, en semant en pots, terrines, caisses ou abris; et quand les sujets 
sont un peu forts, c’est-à-dire à la quatrième ou cinquième feuille, on 
repique directement en place, là même où l'arbre doit grandir. En ce cas 
il faut avoir soin d’entourer les jeunes racines d’un sable fin, d’un terreau 
bien fait ou de terre très-ameublie, 

La plantation de cette manière ne le cède en rien aux arbres retirés des 
pots avec leur motte de deux ou trois mois. 

En plantant des Æ. globulus, on plante des géants; il leur faut de la 
pâture en conséquence, et le terrain, les trous ou fossés ne seront jamais 
ou trop bien préparés ou trop grands. 

On plante généralement en espaces réguliers comme une vigne avec un 
écart plus considérable, soit à 4, 6 ou & mètres de distance. M. Ramel 
aime mieux planter serré et élaguer l'arbre entier; il éclaircit parce que 
serrés les arbres se protégent mieux conire la sécheresse et les vents. 


On peut comparer à ces données, d’après le Melbourne 
Arqus, numéro de juillet 1873, la méthode suivie en Anstralie 
pour la culture de l’'Eucalyptus globulus. 


En hiver (juin à septembre) on laboure la terre à 5 pouces de profondeur 


CULTURE DE L'EUCALYPTUS, 725 


et l’on fait les sillons assez rapprochés pour qu’ils ne soient pas effacés quand 
on les retourne. 

A la fin de juillet, en août, au commencement de septembre, suivant 
convenance on herse le terrain, l’outil fonctionnant dans le sens des sillons, 
afin de ne pas retourner les mottes; et immédiatement après le dernier 
coup de herse, on sème à la volée, à raison de deu onces par acre (150 à 
200 grammes à l’hectare). L'émiettement de la terre et la pluie suffisent 
pour recouvrir la semence. 

L'été suivant, les jeunes arbres auront atteint une hauteur suffisante 
pour se défendre contre les herbes poussées après eux. 

Naturellement, on garantit les semis contre l’incursion des animaux ; 
mais dans deux ans, à partir de l’époque où l’on à semé, les agneaux 
peuvent êlre admis à venir paître parmi les Blue Gum sans le moindre 
. inconvénient pour ceux-ci. 


L'influence assainissante des Eucalyptus sur l'atmosphère 
une fois reconnue, il était naturel de leur supposer des qua- 
lités officinales. Cette supposition a été pleinemeut justifiée 
par l’analyse scientifique, ainsi qu’on a pu le v oir d’après les 
renseignements déjà donnés par le Bulletin. Il serait superflu 
de les répéter ici. 

Grâce donc à l’'Eucalyptus, on peut, sans être taxé d’exa- 
gération, exprimer l'espoir d’une phase nouvelle dans la co- 
lonisation de l’Algérie.Ces hauts plateaux, dénudés et solitaires, 
dont les vœux de notre Société (1) appellent depuis longtemps 
le boisement, ont enfin trouvé l’hôte qui leur convient. C’est 
l’arbre qui, vainquéur du désert, va aplanir la vie au colon. 
(Juel triomphe pour la France si elle pouvait réaliser la con- 
quête pacifique de tant de régions encore inaccessibles et 
infécondes ! Un tel prodige s’accomplira-t-il? On peut dés à 
présent affirmer du moins qu'il est possible. Enfin, la norñen- 
clature des plantes acclimatées, si magnifiquement esquissée 
dans le Discours d'introduction aux travaux de la Société (2), 
vient de s'enrichir d’une acquisition nouvelle, appelée à 
rendre à l'humanité d’incalculables services. 


(1) M. E. Cosson, Considér. génér. sur l’Algérie. Annuaire de 1863. 
(2) M. Drouyn de Lhuys, même Annuaire, p. 109. 


iV. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 


Projet d’une Académie européo-chinoise. 


r 1 


Letire adressée à M. DROUYK DE Luvÿs, président de la Société 
d'acclimatation. 


\onsieur et bien honoré Président, 


La série de mes travaux sinologiques touche à son terme. Dans deux où 
trois mois, le dernier volume qui est sous presse sera terminé. Depuis un 
an et plus, j'ai souvent réfléchi dans le silence de ma solitude au moyen de 
rendre encore quelques modestes services à la science et à la religion. L’an 
de ces moyens serait celui de la fondation d’une académie européenne au sein 
même de Ja Chine. C’est de ce projet, Monsieur le Président, dont je désire, si 
vous voulez bien me le permettre, vous entretenir dans cette lettre. 

La Chine est peut-être le pays où l’acclimatation de productions étran- 
cères a fait le plus de progrès. Tout ce que les Chinois ont trouvé.d’utile et 
d’agréable daus les pays qui entourent leur vasle empire, ils l’ont acclimaté 
chez eux, Aussi la Chine est-elle uu des pays les plus riches sous le rap- 
port des productions naturelles, La sagacité n’est pas une des moindres qua- 
lités des Chinois. Ils ont, outre une potience invincible, le don d'observation 
au suprême degré. Leurs naturalistes ont étudié, avec un soin minutieux, 
les propriétés des plantes et de tous les autres objets de la nature. Non-seu- 
lement, ils sont arrivés à les connaîlre d’une manière étonnante, mais ils 
savent en faire une grande application aux arts et aux métiers. 

Les anciens missionnaires ont commencé à faire connaître la Chine. Mais 
alors les moyens de communication avec l'Europe étaient difficiles. Les tra 
vaux des missionnaires ne leur permettent point de s'occuper trop exclusi- 
vement de choses étrangères à leur ministère apostolique. Leur pauvreté 
met un obstacle aux désirs qu'ils auraient d’envoyer en Europe des produc- 
tions utiles à leur pays. Par défiance ou pour tout autre motif, la Chine est 
encore fermée aux Européens, à l'exclusion des missionnaires catholiques 
dispersés dans tout l'empire. Les missionnaires peuvent seuls nous faire 
connaître en détail ce vaste empire, à cause de la position qu'ils y occupent, 
de la connaissance de la langue et de leurs relations avec les habitants du 
pays. 

Le gouvernement français a envoyé à plusieurs reprises des savanis élu- 
dier la Chine. La plupart n’ont même pu pénétrer dans l’intérieur de l’em- 
pire. Les autres n’ont pu le faire que sous la tutelle et la protection des 
missionnaires. Ces excursions, faites à la hâte par des savants étrangers à la 
langue du pays étaient fort dispendieuses et, en somme, peu productives en 
résultats pratiques. 

Le seul moyen de bien connaitre la Chine à tous les points de vue est, je 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 727 


crois, celui d’une institution permanente au sein même de la Chine, telle 
que l’académie dont je propose la fondation. Cette académie, dirigée par 
de vieux missionnaires qui ont passé vingt ans, trente ans et plus au milieu 
des Chinois, serait destinée à rendre à la science comme à la religion d’im- 
menses services. La Chine n’est connue que très-superficiellement; nos 
membres de l’Institut ignorent même qu'il existe à Pékin une Académie 
dont les travaux sont gigantesques. Ainsi, l’empereur Kiên-Lông, qui vivait 
du temps de Louis XV, a tracé lui-même le plan d’une encyclopédie géné- 
rale des connaissances humaines, telle qu’il n’en existe aucune dans tout 
l’univers. On travaille activement à cetie encyclopédie. Près de cent mille 
volumes ont paru ; il en reste encore soixante mille à publier pour remplir 
le cadre tracé par l’empereur. Les Chinois ont des encyclopédies de plus de 
trois cents volumes sur l’agriculture, l’horticulture, la pisciculture, etc. Ces 
Ouvrages sont à peine connus de nom chez nous; ce sont autant de mines 
à exploiter. 

Une académie sur le plan de celle que je propose peut seule traduire ces 
ouvrages chinois, en faire des extraits exacts et entretenir des relations sui- 
vies avec la France savante. Le programme de la nouvelle académie, bien 
que très-succinct, suflira pour faire comprendre toute l'importance de l'œuvre 
proposée. Cette œuvre intéresse directement la Société d’acclimatation de 
Paris. La nouvelle académie pourra seule faire des envois réguliers, de pro- 
ductions utiles, et fournir des connaissances précieuses sur les méthodes et 
les procédés chinois. Au moyen de cinq ou six cents souscripteurs, la nou- 
velle académie pourra être fondée. J'attends beaucoup du concours de 
l'honorable Président de la Sociéié d’acclimatation, dont l'influence dans le 
monde savant est si considérable, que son patronage bienveillant gagnera 
au projet de la nouvelle académie les sympathies de tous les membres de 
la Société d’acclimatation. 

En terminant cette longue lettre, j'ai l'honneur de prier Monsieur le 
Président de la Société d’acclimatation de vouloir bien communiquer à 
* messieurs les membres de la Société le programme de la nouvelle Académie 
européo-chinoise,. 

Veuillez agréer, etc, PAUL PERNY. 


Ancien provicaire apostolique de Chine. 
Saint-Cloud, le 26 novembre 1874. 


Essais de pisciculture et d’ostréiculiure dans le 
grand Lac Salé de l’Utah. 


Une leitre adressée récemment au journal Forest and Siren contenait 
l'analyse intéressante d’un rapport adressé par M. A.-P. Rockfort, esq., 
surintendant des pêcheries de Salt-Lake-City, à l’United States fish Comimis- 
sion. Les jeunes Aloses déposées dans le lac il y a quelque temps, lors de 


798 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


l'envoi fait de New-York jusqu’en Californie par les soins de M. Seth-Green, 
ont été aperçues récemment ; elles ont aujourd’hui trois pouces de long envi- 
ron. Les œufs de Saumon du Sacramento, envoyés l'été dernier par M. Stone, 
ont éclos dans la proportion de 97 pour 100. Les alevins placés, les uns 
dans des étangs artificiels, les autres dans quelques cours d’eau tributaires 
de la rivière Jordan, réussissent bien, les derniers surtout. Ils ont dix mois, 
et atteignent de 4 à 6 pouces de long. Des Huîtres californiennes ont été 
déposées dans divers endroits du lac. Sur quelques points, des courants d’eau 
douce, devenus fangeux par suite de l’abondance des pluies, ont envasé les 
dépôts; mais dans une crique, près d’une source salée, ainsi que dans un 
étang alimenté par le lac, les huîtres semblent jusqu'ici parfaitement réussir. 


RAVERET-WATTEL, 


Sur l’emploi des déchets de Lin contre Île Phylloxera, 


Lettre de M. La Perre de Roo à M. Dumas. 


« J’ai employé avec le plus grand succès, durant plusieurs années, un 
remède d’une efficacité incontestable contre la vermine, en général, qui 
s’attaquait aux racines et aux feuilles de mes arbres fruitiers. 

» C’est une couche de déchets de Lin, d’une épaisseur de 5 centimètres, 
que j’étends au pied de l’arbre, à une profondeur de 10 centimètres. J’arrose 
abondamment de jus de Lin, c’est-à-dire de l’eau dans laquelle la récolte du 
Lin ou la plante verte a séjourné pendant plusieurs semaines. 

» Ce jus pénètre jusqu'aux racines des arbres et détruit simultanément 
les vers blancs, les vers de terre, les fourmis, et tout ce qui vient en contact 
avec lui ; et si l’on s’en sert pour arroser la plante même, il détruit tous les 
insectes qu’il atteint, C’est au mois de juin que les fermiers belges font le 
rouissage du Lin ; et, lorsqu'ils le retirent de l'étang ou il a séjourné, l’eau, 
devenue noire comme de l’encre, exhale une odeur fétide qui empoisonne 
l'atmosphère après avoir fait périr tous les poissons, sans exception. 

» Cette eau détruit toutes les variétés d'insectes. Ce remède a les immenses 
avantages : 4° de n'être aucunement nuisible à la plante; 2° d’être d'une 
application facile ; 5° de se trouver en abondance dans plusieurs départements 
de la France et de ne rien coûter. » 


(Extrait des Comptes rendus de l’Académie des sciences.) 


Le gérant : SULES GRISARD, 


PARIS, == IMPRIMERIE DK E, MARTINET, RUE MIGNON, 2e 


J. TRAVAUX DES MEMBRES DE LA SOCIETÉ 


DE 


L'UTILITÉ D'INTRODUIRE LA SÉRICICULTURE 


A LA NOUVELLE-CALÉDONIE 


Par M. €. RAVERET-WATTEL,. 


« Là où croist la Vigne, là peut venir 
la soye.» 
OLIVIER DE SERRES. 


La Société d’acclimatation s’est plusieurs fois préoccupée 
déjà des diverses espèces animales ou végétales qui pour- 
raient être le plus utilement introduites dans nos possessions 
de l'Océanie, et, en particulier, à la Nouvelle-Calédonie. Au 
moment où l’on est à la recherche d'industries faciles, n’exi- 
geant qu'une très-petite mise de fonds, et qui soient ainsi à la 
portée, soit des colons peu aisés de notre établissement, soit 
surtout de cette classe particulière d'habitants qui s’y trou- 
vent par suite de nos malheurs publics, il nous a paru utile 
de signaler l’importance toute particulière qu'offrirait, préci- 
sément à ce point de vue, l'introduction dans la colonie du 
Mûrier et du précieux insecte qu’il nourrit. 

Les petites éducations de Ver à soie, dont on a su tirer un 
si utile parti à l'étranger, et auxquelles nous avons chez nous 
le grand tort de ne point accorder toute l'attention qu'elles 
méritent, seraient Justement une de ces exploitations simples 
ne réclamant point de soins absorbants, et. cependant lucra- 
tives, une de ces exploitations, en un mot, dont le besoin se 
fait sentir. 

On sait que dans plusieurs contrées voisines de la France, 
et notamment dans certaines parties de l'Allemagne, la séri- 
ciculiure prend, depuis quelque temps, un développement 
considérable, grâce à l'adoption du système des petites édu- 
cations, qui créent pour les populations rurales une ressource 


précieuse et justement appréciée. Déjà, sur beaucoup de 
3e SÉRIE, T. IL. — Décembre 1874. A7 


730 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


points, la sériciculture est comprise dans le programme de 
l’enseisnement primaire (1); elle se vulgarise ainsi dans les 
campagnes, où presque chaque famille, dans la classe des 
petits cultivateurs, élève une certaine quantité de Vers à soie, 
s’en faisant un revenu qui vient très-utilement s'ajouter à 
celui de la basse-cour ou du bétail. Les femmes, les jeunes 
filles, les enfants mêmes, y trouvent, sans quitter la maison 
paternelle, une occupation, des travaux, en rapport avec leurs 
forces, et néanmoins trés-rémunérateurs (2). à 

En outre, ces éducations isolées et jamais considérables 
échappent à bien des chances d’épidémies, de mortalité, 
inhérentes aux exploitations faites sur une grande échelle. 
De là les excellents résultats presque constamment chtenus (3), 
tandis que la maladie sévit toujours plus ou moins dans les 
centres séricicoles, où prédomine le système des grandes 
chambrées, qui entassent dans un espace restreint des myriades 
de Vers. 

Chez nous, ces faits passent à peu près inaperçus, mais 
ailleurs on s’en préoccupe vivement, et cela jusqu’en Aus- 
tralie, où la sériciculture, si récemment introduite, annonce 
devenir prochainement une des plus importantes industries 
du pays. Avec leur grand sens pratique, les Anglais ont tout 
de suite compris de quelle ressource pouvait être, sous ce cli- 
mat privilégié, l'élevage du Ver à soie, et ils se sont mis à 
l’œuvre avec une ardeur, une activité que les résultats déjà 
obtenus ne peuvent que stimuler encore. La soie récoltée, de 
qualité supérieure, fut d’abord exportée principalement sur 
l'Italie (4); mais des cocons, parvenus sur le marché de Lyon, 


(1) Si la sériciculture n’est pas obligatoire dans les écoles normales pri- 
maires (Schullehrerpræparandia, Lehrerbildungsanstallen, etc.) et les. 
écoles primaires, ou populaires (Volksschulen), elle y est, du moins, facul- 
talive et fort recommandée par le ministère de l'instruction publique. 

(2) Voyez le Journal général de sériciculture (4llgemeine Seidenbauzei- 
tung), 1868, et l’Annuaire du ministère de l’agriculture autrichien (K, K. 
Ministerium für Handel-und Volkswirthschaft). 

(3) Voyez le Journal autrichien de sériciculture (0Esterreichische Seiden- 
bauzeitung). 

(4) D'importantes maisons de banque de Milan, de Rome et de Florence, 


D] 


SÉRICICULTURE À LA NOUVELLE-CALÉDONIE. 754 


furent tellement appréciés, qu'immédiatement d'importantes 
commandes s’ensuivirent (1). 

Ce n’est pas, toutefois, de la production de la soie que les 
éducateurs se sont principalement occupés. En constatant la 
vigueur particulière que manifeste le Ver à soie élevé sous le 
climat australien (où il semble subir une sorte de régénéra- 
tion qui se traduit par l'absence de maladie, ainsi que par 
l'abondance et la qualité de la soie), les producteurs ont parli- 
culièrement porté leur attention sur les éducations de grui- 
nage, certains de trouver pour leur graine, parfaitement saine 
et robuste, un placement facile et avantageux en Europe, où 
l’on paye si cher de la graine souvent si médiocre. Et c’est, 
en effet, ce qui est arrivé ; les graineurs australiens reçoivent 
aujourd’hui plus de commandes qu’ils n’en peuvent satisfaire; 
l’un d'eux, M. Brady, de Sydney, n’a pas livré cette année au 
commerce moins de 2000 onces de graine, à raison d’une 
livre sterling (25 fr.) l’once, sans répondre cependant à toutes 
les demandes qui lui étaient parvenues. 

De pareils chiffres se passent de commentaires. Il ne fau- 
drait pas en inférer toutefois que cette exploitation soit en 
quelque sorte monopolisée par un petit nombre de maisons 
importantes. Ce qui caractérise au contraire l’industrie séri- 
cicole en Australie, c’est la mise en pratique du système des 
petites éducations, système que l'administration locale s’at- 
tache surtout à propager (2), fort bien secondée qu’elle est, 
d’ailleurs, dans ses efforts, par l'initiative privée. IL s’est 
formé à Melbourne une association pour favoriser le dévelop- 


ont actuellement des sommes considérables engagées dans le commerce 
d'importation de la soie australienne. Certains lots de cette soie, parvenus. 
dernièrement à Venise, y ont été considérés comme égalant en beauté les. 
meilleurs produits italiens de l’époque où la maladie était encore inconnue. 

(1) D’après l’Australasian du 13 juin 4874, MM. Denis frères, de Mel- 
bourne, auraient expédié en France des cocons au prix de 18 francs le kilog. 

(2) Ilest fortement question d'introduire la sériciculture dans le pro- 
gramme de l’enseignement primaire. — Une magnanerie expérimentale à 
été créée par le Domaine, dans le South-Yarra. Elle est complétée par une 
pépinière centrale en vue de répandre les meilleures espèces ou variétés de 
Mûrier. Dans la Nouvelle-Galles du Sud, le Gouvernement prête tout son 


73? SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


pement de la sériciculture (1); des dames patronnesses, ou 
zélatrices, se sont chargées de faire gratuitement des cours 
pratiques pour les femmes et les jeunes filles de la classe 
ouvrière (2), afin de répandre, autant que possible, une 
industrie qui peut être pratiquée en famille, s’il est permis de 
s'exprimer ainsi, et qui n'oblige pas celles qui s'y livrent à 
s'éloigner pendant de longues heures du foyer domestique, 
pour aller travailler dans des ateliers, où elles ne respire- 
raient, au physique comme au moral, qu'une atmosphère 
trop souvent viciée. : 

Un mode particulier de cheptels met les adhérents de l’As- 
sociation en possession de graine saine, parfois du matériel 
nécessaire aux éducations, ainsi que de plants ou de semences 
de Mürier, et leur permet de s'acquitter en rendant une partie 
de leur récolte, soit en graine, soit en cocons. 

La méthode d'élevage en plein air, si heureusement mise 
en pratique à Orbe (près Lausanne), par M. Rolland, qui en 
a obtenu, comme on le sait, les plus magnifiques résultats, ne 
pouvait rester inaperçue des éleveurs australiens. Par les 
soins de M" Blanden Neiïll, dont tout le monde connait l’in- 
fatigable dévouement pour tout ce qui concerne le progrès de la 
sériculture en Australie (3), de la graine provenant des éduca- 
tions de M. Rolland a été introduite dans la colonie de Vic- 


appui à M. Brady, dont le nom est inséparable, en Australie, de celui de la 
sériciculture, M. Brady vient d'obtenir la concession gratuite de 1200 acres 
de terrain pour une exploitation modèle du Mûrier; avec l’assentiment de 
l'administration, il va prendre en apprentissage des jeunes gens des districts 
voisins, pour les travaux de cette sorte de ferme-école, où ils se trouveront 
dans les conditions les plus avantageuses pour leur instruction séricicole. 

(4) The Victorian ladies sericicultural Society. — Une société sem- 
blable s’est constituée dans le district de Beechworth (Victoria), pour la pro- 
duction spéciale de la soie, et une autre association s’est également formée 
dans la colonie de South-Australia. 

(2) Une école normale pratique de sériciculture est d’ailleurs installée déjà 
chez M° Blanden Neill, 7 Barkley-Terrace, Grey Street, East Melbourne. 

(3) Mme Neill a créé, à Corowa, une pépinière et une magnanerie modèle, 
qui ne peuvent qu’exercer la plus heureuse influence sur le développement 
de la sériciculture sur ce point. 


SÉRICICULTURE A LA NOUVELLE-CALÉDONIE. 733 


toria, et cette race vigoureuse est déjà culüvée sur plusieurs 
points, aux environs de Melbourne, d’après la méthode et les 
principes qui ont permis à M. Rolland de refaire, pour ainsi 
dire, la constitution du Ver à soie étiolée dans les magna- 
neries. 

En présence de ce qui se fait, de ce qui s'obtient en Aus- 
iralie, nous est-il permis de rester indifférents ? N°y a-t-il pas 
lieu de chercher à doter notre établissement de la Nouvelle- 
Calédonie, si voisin du continent australien, d’une industrie 
qui pourrait y devenir également prospère et une source 
sérieuse de richesse ? L'administration coloniale, qui s’est 
occupée avec lant de sollicitude et d'une façon si éclairée, de 
la création, sur divers point de la colonie (notamment à l’em- 
bouchure de la Foa (1), à la presqu’ile Ducos, etc., de même 
qu’à l’île des Pins) de centres agricoles ayant pour but de 
faciliter l'introduction et la propagation de plantes et d’ani- 
maux uliles, administration, disons-nous, accueillerait cer- 
tainement avec bienveillance les communications qui lui 
seraient faites sur cet objet. Ne serait-il pas dans le rôle de la 
Société d’acclimatation de lui signaler les importants services 
qu'on serait en droit d'espérer, dans un court délai, de l’in- 
troduction du Mürier et du Ver à soie. 

Puisque, suivant l’aphorisme du père de l’agriculture fran- 
çaise « là où croist la Vigne, là peut venir la soye » (2), nul 
doute que la culture du Mürier ne réussisse parfaitement à 
la Nouvelle-Calédonie. Quant au Ver à soie, il est inutile de 
faire remarquer qu'il y trouverait un climat des plus favo- 
rables. Mais une considération sur laquelle nous croyons 
devoir insister, c’est que l’éducation en plein air, dont il ne 
reste plus aujourd'hui à démontrer les avantages, pourrait y 
être pratiquée avec d'autant plus de facilité qu’on n'aurait 

pas à se préoccuper des attaques de deux genres d’ennemis 


(4) Notice sur la déportation à la Nouvelle-Calédonie, publiée par les 
soins de M, le contre-amiral marquis de Montaignac, ministre de la marine 
et des colonies. Paris, imprimerie nationale, 1874. 

(2) Olivier de Serres, La cueillette de la soye, par la nourriture des vers 
qui la font. 


731 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


avec lesquels, ailleurs, il faut toujours compter : les oiseaux et 
les insectes carnassiers. La pauvreté de la faune de l’île serait 
un grand avantage à ce point de vué, et permettrait de se 
dispenser de lPemploi des filets et autres abris protecteurs 
généralement employés pour défendre contre leurs ennemis 
les Vers à soie élevés sur les arbres mêmes. On se trouverait, 
par suite, dans des conditions exceptionnellement favorables, 
non-seulement pour la production de la soie, mais aussi pour 
s'occuper des éducations de grainage d’après la méthode 
Rolland; et, alors que suivant l'observation si juste d’un de 
nos savants vice-présidents, nous devons faire l'impossible 
pour nous remettre en graine (1), il paraît y avoir lieu de s’oc- 
cuper sérieusement des ressources qu'offrirait à notre indus- 
trie séricole ce nouveau champ à exploiter. Sans doute, on 
peut du moins lespérer, la nécessité pour nos magnaniers 
de s’approvisionner de graine à létranger n’aura qu'un 
temps: la maladie qui nous cause aujourd'hui de si grandes 
pertes, diminuant d'intensité, les éducateurs pourront, de 
nouveau, produire eux-mêmes la graine qui leur est néces- 
saire ; mais on ne saurait se dissimuler toutefois qu’il s’écou- 
lera encore bien du temps avant que nous cessions d’être tri- 
butaires de l’étranger ; à ce point de vue, et d'ici Ià, on ne 
saurait rien négliger pour chercher à réduire le chiffre si 
lourd de 16 millions de francs que l’importation de graine 
étrangère coûte chaque année à la France. 

Le premier soin à prendre pour tenter l'introduction du 
Ver à soie à la Nouvelle-Calédonie serait naturellement d’y 
propager la culture du Mürier, mettant ainsi en pratique le 
sage conseil d'Olivier de Serres: «/atre provision de pasture | 
avant qu'estre chargé de bestail.» 

Toutes les variétés de Mürier paraissent réussir en Aus- 
tralie, et prospéreraient sans doute également bien dans notre 
colonie. Les Müriers du Cap, le Mürier Lou, le multicaule, 
ont été principalement essayés, avec le-plus grand succès, 
comme culture; mais d’après l'expérience de ces deux der- 


(1) De Quatrefages, Études sur les maladies actuelles des Vers à soie. 


SÉRICICULTURE À LA NOUVELLE- CALÉDONIE. 739 


nières années, il a été reconnu que les Vers nourris avec la 
feuille de cette dernière espèce donnaient des cocons plus 
légers, plus mous, et d’une valeur commerciale infiniment 
moindre que ceux provenant de chenilles élevées avec cer- 
taines variétés de Morus alba également mises en essai; ce 
qui est, d’ailleurs, conforme aux observations faites en 
Europe, où le Morus multicaulis est aujourd’hui peu estimé. 
Quelques éleveurs australiens se sont particulièrement bien 
trouvés jusqu'ici, de l’emploi du Müûrier 4 feuilles roses et du: 
Moretti (M. Moretti) (1). La variété connue sous le nom de 
Mürier du Japon mériterait surtout d’être essayée, en raison 
des nombreux avantages qu’elle présente et dont les princi- 
paux sont: un développement des plus rapides, les qualités 
éminemment nutritives de ses feuilles, et l'extrême facilité avec 
laquelle il se multiplie par le bouturage. 

En Australie, les semis se font en juin et juillet. Quant aux 
boutures, qui font gagner beaucoup de temps, elles sont 
plantées en pépinière la premiére année, puis mises en place 
l’année suivante, vers le mois de juillet. On les plante à deux 
métres les unes des autres, et en lignes espacées de trois 
mètres. 

En vue des éducations à l’air libre et sur les arbres mêmes, 
il ÿ aurait lieu de cultiver surtout les Müriers en haies, dispo- 
sition qui facilite l'installation et la surveillance des chenilles, 
ainsi que la récolte des cocons. N'ayant pas, en effet, à 
craindre, là-bas, les gelées qui atteignent chez nous la végé- 
tation ordinairement plus précoce des arbres ainsi dirigés, 
on aurait tout intérêt à profiter du développement beaucoup 
plus rapide qu’on obtient par ce système; l'arbre sans tige, 
buissonne et fournit considérablement de feuilles. 

Au lieu de faire éclore la graine sur les arbres mêmes, 
comme on le fait chez nous pour le Ver à soie de l’Aiïlante, les 
chenilles pourraient être tout d’abord élevées en chambres, 


(4) Chez nous, cette dernière espèce est généralement peu recommandée 
depuis les beaux travaux de M. Rohinet sur la valeur relative des diverses 
espèces de Mûrier au point de vue de l’alimentation des Vers. 


736 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


d’après la méthode ordinaire, et réparties sur les buissons de 
Müriers après la seconde mue seulement. Cette précaution, 
peut-être superflue, nous semblerait toujours bonne à pren- 
dre, au moins en commençant; tel est d’ailleurs également 
l'avis de M. A. Gélot que nous entretenions dernièrement de 
cette question, et qui est une autorité si compétente en pa- 
reille matière. 

Le choix de la race de Ver à soie à employer ne serait pas 
non plus indifférent. À ce sujet, quelques essais devraient 
avoir lieu d’abord ; mais il paraîlrait indispensable, dans tous 
les cas, de laisser complétement de côté les petites races japo- 
naises qui donnent des cocons notablement inférieurs à ceux 
de nos vieilles et bonnes races indigènes, et qui doivent se 
retirer devant ces dernières, partout où l’on aura la possibilité 
d'obtenir des graines francaises régénérées (1). 

Ce point a une importance qui n’échappera à personne ; il 
est bien évident, en effet, que les produits qui seraient dirigés 
sur les marchés d'Europe auraient une valeur commerciale 
d'autant plus grande qu'il s'agirait d’une graine, non-seu- 
lement saine et robuste, mais recommandable, en outre, par 
la qualité et l'abondance du rendement en soie. 

D'ailleurs, l'avenir de l’industrie séricicole, à la Nouvelle- 
Calédonie, ne serait pas limité aux seules éducations de grai- 
nage. On pourrait également s’occuper de la production de la 
soie, pour laquelle les éducations devraient alors se pratiquer, 
non plus, sans doute, à même les arbres (où l’élevage ne sau- 
rait être que fort restreint), mais toujours, du moins, dans 
des conditions aussi voisines que possible de l’état de nature, 
seul moyen rationnel de conserver l’insecte en bonne santé. 

Pour les très-petites éducations, on pourrait recourir avec 
avantage à l'élevage aux rameaux tel qu'il est pratiqué en 
Orient (2), c’est, comme chacun sait, un mode très-favorable 


(4) Notre race commune à cocons jaunes et la race Sina à cocons blancs, 
qui ne le cèdent à aucune autre en qualité, devraient suriout être essayées. 

(2) B. J. Dufour, De la sériciculture en Orient, dans ses rapports avec 
l'Occident. 


SÉRICICULTURE A LA NOUVELLE-CALÉDONIE. 7197 


à la santé des Vers, et qu’il est assurémont fort regrettable de 
ne pouvoir utiliser dans les grandes exploitations (1). | 

Pour les éducations un peu plus importantes, on aurait la 
magnanerie à l'air libre (système Rolland), qui satisfait aux 
exigences d'élevage économique des grandes chambrées, tout 
en plaçant l’insecte däns d'excellentes conditions hygié- 
niques (2). 

En résumé, nous croyons qu'on arriverait facilement à 
doter notre établissement de la Nouvelle-Calédonie d’une 
industrie qui pourrait devenir en peu de temps un sérieux 
élément de richesse pour le pays, et il nous semble qu’on ne 
saurait hésiter à faire quelques efforts dans ce but, lorsque 
l'Angleterre obtient déjà de si beaux résultats dans une de ses 
colonies, placée, au point de vue du climat, à bien peu de 
choses près, dans les mêmes conditions que la nôtre. 


(4) Guérin-Méneville, Nouvelles études et expériences séricicoles. — De 
Quatrefages, Études sur les maladies actuelles des Vers à soie. 

(2) Alfred Rolland, Traité pratique d'éducation en plein air, sur le Mu- 
rier et en magnanerie 


ÉDUCATION DE L’'ATTACUS YAMA-MAIT, G. Mén. 
A LONDRES, EN 1874 


Lettre adressée à M. le Secrétaire général de la Société d'acclimatation 


Par M. A. WWAIELY 


J'ai l'honneur de vous rendre compte de mon second essai 
d'éducation de l’Aftacus Yama-maï, à Londres. 

La graine qui m'a généreusement été envoyée par la Société 
m'est arrivée le 27 avril, après de grandes chaleurs qui ont 
amené léclosion d’une partie des Vers pendant le trajet; ces 
Vers ont succombé. Les autres sont sortis presque tous le 27, 
et les éclosions se sont terminées Le 1° mai. 

Avant cet envoi, j'avais déjà 410 Vers éclos au milieu d’avril 
et qui provenaient d’une ponte que j'avais obtenue en 1873. 
A Pexception de ces 10, tous les autres Vers issus de cette 
ponte étaient morts, probablement parce que le mâle, lors 
de l’accouplement, avait déjà cinq jours d’existence. 

Déduction faite des morts et des Vers perdus par accidents, 
il m'est resté en tout 65 Vers qui sont presque tous venus d’une 
beauté remarquable. 

Mon système d'éducation pour le Yama-maï, comme pour 
les autres espèces de chenilles, consiste à les placer, dès leur 
sortie de l'œuf jusqu'après leur premier ou leur deuxième 
changement de peau, sous des cloches en verre qui ont un 
orifice à leur sommet. Ces cloches reposent sur des soucoupes 
remplies de sable sec couvert d’une feuille de papier. 

Les petites branches de Chêne, piquées dans le sable à tra- 
vers le papier, s’y conservent fraiches environ huit jours. Le 
papier sert à maintenir la propreté dans le local, car il suflit de 
souffler dessus pour enlever toutes les déjections. On peut re- 
nouveler lair en levant la cloche de temps en temps et en 
mettant un petit morceau de bois sous le bord, lorsque les 
chenilles sont plus fortes. Tous les huit jours, je fais un net- 
toyage complet et je renouvelle le papier. 


ÉDUCATION DE L'ATTACUS YAMA-MAIÏ. 739 


J’ai adopté ce système pour ne pas perdre de chemilles , et 
je sais, par expérience, que dans leur jeune âge elles vivent 
parfaitement bien sous verre. J'ai élevé de cette manière di- 
verses espèces de chenilles jusqu’à leur transformation; en- 
tre autres des À. cyntlua qui m'ont donné de fort beaux €co- 
cons (1). 

Mes Yama-mai élevés sous cloche jusqu’après leur premier 
changement de peau ontété mis à l’air libre le 28 mai, sous 
un abri que j'ai fait construire et où le soleil ne peut jamais 
pénétrer. 

Les Vers, vivant aiors sur de fortes branches de chêne, ont 
été constamment maintenus à l'humidité au moyen d’arrosa- 
ges. Les premiers Vers ont commencé à filer le 13 juillet, et 
les autres ont continué presque sans interruption jusqu’au 
15 août. 

Amsi l'éducation des chenilles, du moins celles écloses du 
27 avril au 1% mai, a duré cent dix Jours. 

Cette éducation, d’une longueur extraordinaire, a eu cepen- 
dant cet avantage, que les cocons obtenus des Vers dont la 
vie a été très-longue, ont été beaucoup plus forts que les pre- 
miers obtenus, et ont pesé jusqu’à 8,553 pour les femelles et 
65,276 pour les mâles; j'aurais pu hâter les évolutions, mais 
j'ai préféré laisser les Vers constamment à l'ombre et à l’hu- 
midité (2). 

(4) Jai aussi expérimenté sur un Yama-maï (cocon n° 54) que j’ai élevé 
jusqu’à sa transformation, sur une toute petite branche de chêne, dans une 
cave très-humide, presque privée d’air et entièrement dépourvue de lumière. 
Cette chenille a opéré ses changements de peau avec plus de facilité que 
celles qui étaient à l’air libre; sa peau toujours humide se déchirait facile- 
ment d’une extrémité à l’autre. Ses changements de peau ont eu lieu le 
26 mai, le 8 juin, le 25 juiu et le 43 juillet. La formation du cocon a com- 
mencé le 2 août et le 16 septembre, il en est sorti un beau papillon femelle. 
Le cocon plein, quoique gros, ne pesait cependant que 59,823. 

(2) J'ai remarqué que les chenilles des lépidoptères indigènes produisent 
de plus grosses chrysalides lorsque leur existence est prolongée. Ainsi, j'ai 
élevé plusieurs espèces de Sphinx, qui en Angleterre, à l’état de nature, 
n’ont qu’une seule génération,quoiqu’en France ils en aient quelquefois deux. 


Les chenilles de la première génération n’ont vécu, à la grande chaleur, 
qu'un mois et quelques jours jusqu’à leur transformation. Chenilles, chry- 


740 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


L'éclosion des papillons a commencé le 3 septembre et a 
fini le 28; 1l y'a eu 33 mâles et 30 femelles. Deux cocons 
n’ont rien produit ; lun était mal conformé et l’autre conte- 
nait un papillon femelle qui n'avait pu sortir: 

J'ai pris celte année la peine de numéroter tous les cocons 
et d'indiquer dans un tableau la date de la formation du cocon 
ainsi que celle de la sortie du papillon. L’inspection de ce ta- 
bleau prouve que les papillons mâles ne sont pas toujours plus 
précoces que les papillons femelles, et qu'il sérait imprudent 
de retarder l’éclosion des mâles. 

Les cocons n’ont pas tous été maintenus à la même tempé- 
ralure. Les derniers, à partir du n° 47, ont été mis dans une 
chambre aussitôt après leur formation. Les n° 21 jusqu’à 46 
ont élé rentrés le 4 septembre. Les 20 premiers sont restés à 
l'air libre jusqu'à l'éclosion des papillons. 

(L'auteur donne un tableau de l’ordre dans lequel ont eu 
lieu les éclosions.) 

Puis un tableau indiquant ie numéro de chaque cocon avec 
la date de sa formation et celle de léclosion du papillon.) 

Mes cages à éclosions, continue M. Wailly, ont de 75 à 
50 centimètres sur les trois dimensions. 

Je me propose d’en faire confectionner de nouvelles pour 
l’année 1875, et d'essayer un nouveau système pour obtenir 
des accouplements ; car, si j'ai bien réussi à élever les che- 
milles, il n’en a pas été de mème pour les accouplements. 

Comme j'ai eu Fhonneur de vous le dire, le mois de sep- 
tembre, qui souvent est le plus beau mois de l’année en An- 
gleterre, a élé, cette année, trés-défavorable : des pluies pres- 


salides et papillons ont été de petite taille. Cependant les accouplements du 
mois d’août ont produit une deuxième génération, dont les chenilles, ayant 
vécu plus longtemps, par suite d’une température moins élevée (surtout au 
mois de septembre, qui, cette année, a été froid et très-pluvieux), sont de- 
venus plus grosses et ont produit par conséquent de plus grosses chrysa- 
lides. 

D’après les observations que j'ai faites, je serais porté à croire, bien que 
je n’ose l’affirmer, que plus les chenilles vivent logtemps, plus elle devien- 
nent fortes, si ce prolongement d’existence est obtenu en les maintenant à 
l'ombre et au frais, ce qui semblerait aussi les protéger contre les maladies. 


ÉDUCATION DE L’ATTACUS YAMA-MAÏ. 7h 


que continuelles et une température trés-basse, ce qui, très- 
probablement, a empêché l’accouplement de la presque totalité 
des papillons. Ce n’est que le 23 septembre au matin que j'ai 
eu la certitude qu’un accouplement avait eu lieu pendant la 
nuit du 22 au 23, dans une cage exposée à l'air Kbre. 

J'ai obtenu en tout à peu près 5500 œufs qui sont divisés 
en trois lots, et je les ai examinés jusque vers le milieu de 
novembre. 

Dans le premier lot où il y a plus de 2400 œufs, il m'a été 
impossible de trouver un seul œuf de bon, quoique j'en aie ou- 
vert un nombre considérable, toujours choisis parmi Les plus 
beaux. Dans les deux derniers lots, j'ai trouvé des œufs con- 
tenant la petite chenille vivante, de sorte que j'ai au moins 
deux pontes contenant des œufs fécondés. 

Les œufs provenant de la femelle fécondée dans la nuit du 
29 au 23 septembre contiennent la chenille tout à fait déve- 
loppée et remplissant entièrement l'œuf où il ne reste plus 
de liquide. Dans les œufs de l’autre ponte fécondée, au con- 
traire, la chenille, quoique formée, est plus petite et nage dans 
le liquide où on la voit se mouvoir. 

Maintenant, doit-on accepter comme un fait incontestable 
que tous les œufs fécondés contiennent une chenille vivante 
quelques semaines après la ponte? Ne serait-il pas possible 
que certains œufs fécondés n'eussent qu'un germe pendant 
l'automne, et que la chenille ne se développât qu’en février ou 
mars de l’année suivante? C’est ce que je me propose d’exa- 
miner plus tard, en mettant à part des œufs de femelles fé- 
condées. 

Le résultat définitif de ma deuxième éducation de l’A.Yama- 
mai n’a pas été aussi satisfaisant que j'avais lieu de l’espérér 
après avoir obtenu d'énormes cocons et de magnifiques et vi- 
goureux papillons, puisqu'il n’y a que deux pontes sur les- 
quelles je puisse compter pour continuer mes expériences en 
1875. 

Cependant, ces deux pontes provenant de la fin de septembre 
me font espérer que l’éclosion des Vers n'aura lieu qu’au mois 
de mai, en maintenant tout simplement les œufs dans des sacs 


742 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


de mousseline suspendus à l’air libre. Si ce retard d’éclosion 
a lieu, l'éducation de mes Fama-maï deviendra plus facile en 
1875 qu'elle ne l'a été cette année-c1, car alors la tempéra- 
ture sera plus favorable et les chênes seront probablement en 
plein feuillage aux environs de Londres, où la végétation est, 
je crois, plus précoce que dans le nord de la France (1). 


(1) L'observation fort intéressante de M. Wailly sur les papillons de petite 
taille, résultant des éducations rapides à haute température, est tout à fait 
conforme à ce qu’on sait sur le nanisme produit par les incubations à tempé- 
rature forcée, sur les papillons rabougris obtenus par Réaumur, qui plaçait 
des chrysalides dans des œufs de verre couvés par des poules, etc. J’ai 
publié des observations du même genre sur des sujets de la Vanesse Petite- 
tortue (Vanessa urticæ, Linn.), tous de petite taille, bien conformés du 
reste, provenant de chenilles et de chrysalides élevées au milieu de l’été, en 
chambre complétement fermée, avec température élevée. M. Wailly a 
étendu ce même genre d'observations à une tribu de Lépidoptères, les 
Sphingiens, autre que les papillons diurnes sur lesquels on a généralement 
expérimenté. — M. G. 


NOTE 
SUR 


LES USAGES DU BAMBOU 


Par M. le D'° J. VIDAL 


Les dernières lignes qui terminent le Bulletin de la So- 
ciété d’acclimatation, du mois de juin 1874, m'ont appris 
récemment que la culture du Bambou a été introduite en 
France avec un certain succès. Malheureusement, ces mêmes 
lignes contiennent sur le compte de ce végétal une appré- 
ciation insuffisante et une calomnie injustifiable. 

Comme appréciation, le Bambou y est simplement qualifié 
de joli arbuste; certes, cela est vrai, et n’eût-il que cette 
qualité, elle suffirait déjà pour lui donner droit de cité dans 
nos parcs et dans nos bosquets. Mais ce n’est là que le 
moindre de ses avantages; il est, avant tout, utile au point 
de vue de l’économie domestique et de l'alimentation. Toute- 
fois, avant d'en donner quelques preuves, il est bon de faire 
justice de l’accusation d’empoisonnement portée contre cet 
arbuste, considéré, est-il dit, Jusqu'ici, comme un végétal 
fort inoffensif. 

Je n’ignore pas que l'injustice de cette accusation a déjà 
altiré l'attention et les protestations de plusieurs personnes 
compétentes, entre autres de M. Hubert Boens, de Charleroi, 
qui a publié, dans le numéro 37 de l’Union médicale du 
29 mars 1873, un excellent article destiné à la réhabilitation 
du Bambou. Néanmoins, comme l’Union médicale est un 
journal spécial qui ne s'adresse qu'à la classe restreinte des 
médecins, il me semble que cette réhabilitation doit être faite 
surtout par les soins de la Société d’acclimatation; parce que, 
par son intermédiaire, tout ce qu’on pourra dire de vrai et 
d’encourageani à l'avantage du Bambou ira droit à son 
adresse, c’est-à-dire à celle des agriculteurs zélés et sérieux 


744 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


qui désireraient expérimenter la culture de ce végétal. Il me 
paraît d'autant plus opportun de rétablir la vérité à ce sujet, 
qu’il semble que des doutes existent encore sur les réelles 
propriétés de cette intéressante graminée, doutes qui peuvent 
avoir d'autant plus de portée qu’ils ont été accueillis par la 
Société d’acclimatation. 

Si, après d’autres, je viens encore prendre la défense du 
Bambou, c’est uniquement parce que je commence à con- 
naître ce végétal de longue date. Voilà, en effet, une douzaine 
d'années que je vis, pour ainsi dire, au milieu des Bambous 
et des populations qui en font un continuel usage, et j'espère 
que cette longue expérience qui m'est personnelle contri- 
buera à donner plus de poids à ce que je pourrai en dire. 

Le journal américain qui, sur la foi du Sérait Times, de 
Singapore, insiste sur les prétendues propriétés vénéneuses 
du Bambou, me paraît avoir émis une opinion erronée, mal- 
gré toutes les expériences qui ont pu être faites sur les ani- 
maux, et il suffit de se reporter au texte même de ce journal 
pour y trouver des preuves contraires à l’assertion qui y est 
énoncée. 

Voici ce que je lis, en effet, dans le Bulletin de la Société 
d'acclimatation (page 431, juin 1874) : « À Java, paraît-il, 
» les indigènes en extraient (du Bambou): un poison subtil 
» sans antidote. [ls l’obtiennent en coupant le Bambou à 
» l'endroit des nœuds, et en détachant de la cavité en sou- 
» coupe que chaque nœud possède, certains petits filaments 
» noirs couverts d’un imperceptible duvet en aiguilles qui 
» constituent le poison dénoncé. Avalés, ces filaments ne 
» passent pas dans l'estomac, ils s'arrêtent dans la gorge, pé- 
» nêtrent dans les voies respiratoires, produisent de violents 
» accès de toux, et amènent fatalement l’inflammation des 
» poumons et la mort. » 

Ainsi, voilà qui est bien entendu, le prétendu poison con- 
siste dans ces petits filaments noirs qui viennent irriter les 
muqueuses trachéale et bronchique : mais, c’est justement à 
cause de cette action qu'ils ne constituent pas du tout le 
poison dénoncé. Il suffit, en effei, d'ouvrir le premier livre 


USAGES DU BAMBOU. 7h5 


venu de toxicologie ou de médecine, pour s'assurer que l’on 
appelle poison un agent qui, introduit dans l’économie par 
une voie quelconque, détruit la santé ou anéantit compléte- 
ment la Vie, sans agir mécaniquement. Or, les filaments du 
Bambou n’agissent que mécaniquement; donc, ils ne’ sont 
pas un poison subtil, ils ne sont pas un poison du tout. S'ils 
ont üne action quelconque, elle est identique avec celle de tous 
les corpuscules solides qui peuvent accidentellement pénétrer 
dans les cavités naturelles; une pincée de sciure de bois, par 
exemple, aurait le même effet. Certes, 1l n’est jamais venu à 
l'idée de personne d'appeler poisons ces myriades de petits 
insectes, de molécules et de poussières sans nom qui rem- 
plissent l'air que nous respirons : parfois, ces choses-là nous 
font tousser, éternuer, larmoyer, mais assurément elles ne 
nous empoisonnent jamais. 

Ces filaments noirs existent-ils bien réellement avec les 
propriétés qu’on leur attribue? Je veux bien le croire, puis- 
qu'on l’affirme, bien que je ne les aie jamais vus. Mais que 
peut-on conclure de leur existence qui soit défavorable au 
Bambou? Ne sont-ils pas pour toujours enfermés dans la ca- 
vité centrale de la tige, et n'y sont-ils pas si étroitement em- 
prisonnés qu'il faudrait se servir de la scie pour les en 
extraire, lout en sacrifiant l’arbuste? Et à qui une pareille 
idée pourrait-elle venir et dans quel but? Serait-ce pour ob- 
tenir un poison qui n’en est pas un? Mais si ce n’était que 
pour cela, nos champs et nos jardins sont remplis de plantes 
bien autrement vénéneuses. Sont-ce les Apocynées, les Euphor- 
biacées, les Ombellifères et Solanées vireuses, etc., qui 
manquent sous nos pas”? et toutes ces familles et bien d’autres 
ne fournissent-elles pas de vrais poisons et des plus dange- 
reux? Nous écartons-nous, par exemple, avec horreur, d’un 
laurier-cerise, sous prétexte que ses feuilles contiennent de 
l'acide prussique? Loin de là, car nous ne craignons pas de 
faire entrer ces mêmes feuilles dans certaines préparations 
culinaires. l 

Il ya un arbre qui, en France, fait souvent l'ornement des 


allées et des promenades publiques; un arbre auquel per- 
3° SÉRIE, T. L. — Décembre 1874. 48 


7h6 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


sonne ne prête une attention toute particulière, dont personne 
ne se plaint, et qui, cependant, possède bien réellement les 
inconvénients que l’on attribue bien à tort au Bambou. Cet 
arbre, c’est le Platane. Un confrère distingué, le docteur 
Durwell, de Guebwiller (Alsace), a rapporté dans l’Union 
médicale (n° 97, 19 août 1873) l'exposé des accidents que 
peut produire le Platane : histoire d'autant plus précise que 
quelques-uns de ses clients et lui-mêine ont été les victimes. 
Je ne saurais mieux faire que de citer textuellement ses pa- 
roles à ce sujet. A l’occasion d’une promenade faite dans les 
pépinières de Platanes de MM. Baumann, de Bollwiller, il 
s'exprime ainsi : 

« — Les feuilles que nous avions agitées sur notre passage 
» avaient répandu autour de nous une poussière d’une finesse 
» extrême, assez abondante pour déposer sur nos habits une 
» couche de duvet blanc très-apparente : cette poussière pro- 
» vient de la face inférieure des feuilles, où elle forme une 
» couche assez épaisse, peu adhérente, s’envolant au moindre 
» souffle : elle est d’autant plus abondante que la feuille est 
» plus jeune; en automne, elle a presque entièrement dis- 
» paru, et la feuille est glabre sur ses deux faces. Ce fomentum 
» est constitué par des poils intriqués et comme feutrés, dont 
» la structure est très-remarquable. En les examinant au mi- 
» croscope, on voit que chacun d’eux est formé d’une tige 
» centrale en forme d’aiguille, présentant de distance en dis- 
» tance des nœuds ou renflements également espacés; de 
» chacun de ces nœuds naissent six à sept pointes beaucoup 
» plus petites, disposées en verticilles. Dans son ensemble, ce 
» petit organe rappelle assez bien l'image réduite d’un egui- 
» setum. Il se brise sous la moindre pression dans l'intervalle 
» des nœuds, et les tronçons qui en résultent ressemblent 
» pour la plupart à des grappins d’abordage en miniature. Le 
» mécanicien le plus habile imaginerait difficilement un petit 
» engin plus favorablement disposé pour s’accrocher facile-" 
» ment à la surface des muqueuses. Quand on connaît les 
» eflets nuisibles des poussières de soie, de grès, etc., il n’en 
» coûte guêre d'admettre que ces atomes crochus que je viens 


USAGES DU BAMBOU. 7h47 


» de décrire doivent produire des accidents plus rapides et 
» plus sérieux que d’autres corpuscules moins artistement 
» travaillés. Ces traumatismes, si minimes qu'ils soient, lors-" 
» qu'ils se répètent à l'infini, finissent par occasionner des 
» troubles plus ou moins graves dans les organes sur lesquels 
» se porte leur action... » 

Ainsi s'exprime le docteur Durwell, à propos de Paction 
nuisible des platanes, et il n’a pas la prétention d’avoir fait 
une découverte, puisqu'il eite des passages de Diascoride, de 
Pline et de Galien qui attestent le fait. Voilà donc deux mille 
ans et plus que les platanes (particulièrement les Jeunes) font 
tousser, cracher, étefnuer, larmoyer, sans que personne, sauf 
quelques jardiniers pépiniéristes, y prête la moindre atten- 
üon. Et après cela, le Bambou qui, depuis la création du 
monde, n’a Jamais fait de mal à personne, serait accusé d’être 
un empoisonneur! Il serait difficile de trouver un exemple 
plus frappant des inconséquences auxquelles peut conduire 
un défaut suffisant d'examen. 

Mais, pour examiner les choses, 1l faut les avoir sous la 
main. En Krance, pour étudier, apprécier et juger les qua- 
lités du Bambou, il faut commencer par le cultiver sur une 
assez grande échelle, puisqu'il n’y est jusqu’à présent qu’à 
l’état de cultures d’essai restreintes et isolées. Or, si l’on dé- 
bute par répandre le bruit qu'il est un empoisonneur, quel 
est l’agriculteur qui voudra le cultiver? Certes, je suis sûr 
que beaucoup de personnes, à la vue de ceite élégante gra- 
minée, auront le désir de se lapproprier. Mais si on leur dit: 
Vous voyez cet arbuste si élancé de formes, si gracieux, si 
souple et si robuste à la fois, et qui séduit par son innocente 
apparence? Eh bien, méfiez-vous-en! 1} recèle un poison 
mortel contre léquel 1l n’y.a point de reméde! Qui aura, dés 
lors, le courage d’entourer sa maison de Bambous, et d'en 
faire des bosqueis destinés à protéger de leur ombre les 
membres de la famille? Qui voudra consacrer à cette culture 
un terrain suffisant, et se servir ensuite des produits pour 
toute sorte d’usages? Personne, assurément. 

Il est donc important que l’on sache bien que le Bambou 


748 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


est non-seulement le végétal le plus inoffensif, mais encore 
qu'il est un des plus utiles. Cette importance d’éclairer le 
public sur les véritables propriétés du Bambou n’a pas échappé 
au docteur Hubert Boens, qui termine ainsi son article cité 
plus haut : « J'aime à espérer, en conséquence, que mon 
» appel sera entendu par l'opinion publique, et par l’Union 
» médicale, qui est l’un de ses grands juges, et que, devant 
» cette nouvelle juridiction, le. Strait Times n'aura pas la 
» cruauté de persister dans l'accusation d'empoisonnement 
» qu'il a formulée à la charge du Bambou. » 

J'ai dit, en commençant, que le Bambou est surtout utile 
au point de vue de l’économie domestique et de l’alimen- 
taüon; quelques mots suffiront à démontrer celte double 
vérilé. 


UTILITÉ DU BAMBOU POUR LES USAGES DOMESTIQUES 


Pour bien se faire une idée des ressources innombrables 
que le Bambou offre aux populations, il faudrait avoir passé 
quelques années dans l’Indo-Chine ou au Japon. Dans ces 
contrées, à la ville comme à la campagne, on trouve partout 
et toujours le Bambou sous toutes les formes, employé à des 
usages si nombreux qu'un volume serait nécessaire pour les 
énumérer. Je me souviens que, lorsqu’en 1862, je vins ré- 
sider pour la première fois en Chine, je fus tellement frappé de 
l’étonnante variété d'objets auxquels on employait cet arbuste, 
que l'idée me vint d’en dresser une liste : mais le nombre 
en était si grand, que je fus obligé d’y renoncer. Je passerai 
sous silence ces mille ustensiles de ménage et autres, employés 
par les populations astatiques : J’admets que, dans les pays 
d'Europe, l'industrie fournit mieux que cela, même aux plus 
pauvres. Mais, en France et en Algérie, en dehors de ces pe- 
tits services d'intérieur, le Bambou aurait un rôle plus im- 
portant à Jouer. 

Et d’abord, les Bambous sur pied, en haie ou en bosquet, 
sont un excellent moyen de protection contre le vent : Sous 
ce rapport, in v a ni arbres de haute futaie ni bois taillis qui 


USAGES DU BAMBOU. 7h9 


puissent lui être comparés. Aussi, en Chine et au Japon, 
peut-on dire qu’il n’y a pas un village, une ferme ou chau- 
mière, pas une cabane de pêcheur qui ne s’abrite des vents 
régnants derrière un bosquet de superbes Bambous. Veut-on 
avoir un abri aussi impénétrable qu'une muraille? On laisse 
pousser les tiges un peu serrées sans couper leurs rameaux 
inférieurs : Ceux-ci finissent par s’enchevêtrer si bien, qu'ils 
arrêtent les vents violents, et qu'ils ne livrent passage ni aux 
bêtes ni aux rôdeurs de nuit. Que si, au contraire, on ne veut 
avoir qu'un ombrage suffisant, et se procurer en même temps 
la faculté de jouir de la brise, pendant la saison chaude, il 
suffit pour cela de tenir les tiges plus éclaircies et d’ébrancher 
ensuite jusqu’à deux ou trois mêtres du sol. De cette ma- 
nière, les rameaux supérieurs forment une voûle de verdure 
impénétrable aux rayons du soleil, tandis que la brise passe 
aisément à travers les intervalles des tiges. Naturellement, on 
choisit pour ces usages une des plus grandes espèces. Au 
Japon, c’est ordinairement celle qui est appelée Médaké, ou 
bien Onnataké qui est employée pour les plantations autour 
des maisons : toutefois, elle est quelquefois remplacée par 
une autre espèce de presque aussi grande taille, mais 
plus grêle, qui est appelée AMatchkou. Si l'on veut 
seulement entourer un enclos d’une haie épaisse mais peu 
élevée, on se sert d'une des petites espèces qui poussent 
dru et ne s'élèvent qu’à deux ou trois mètres de hauteur : 
Une espèce souvent employée dans ce but au Japon 
est celle qui couvre à profusion les montagnes, et qu’on 
nomme Cenodaké S'il n'est question que de garnir, 
comme ornement, un petit coin de jardin, on se sert 
volontiers d’une petite espèce à tige noirâtre ou mouche- 
tée de noir, que l'on appelle Soudzoutake. En Chine, elle 
sert au même usage; on en fait aussi des tuyaux de pipe. 

Les bosquets de Bambous ne servent pas seulement à orner 
et à ombrager les habitations, à les abriter des grands vents, 
à les défendre contre les animaux nuisibles et contre les mal- 
faiteurs ; ils forment encore une sorte de réserve que le fer- 
-mier et le pêcheur ont toujours à leur disposition pour une 


# 


750 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


foule d’usages journaliers; faut-il, par exemple, un mât, une 
vergue, une gafle pour le bateau de pêche? A-t-on besoin 
d’un étai, d’un tuteur quelconque, de barres ou de lattes 
pour palissades, clôtures, treillages, ou bien de tuyaux pour 
la conduite des eaux, etc., etc.? Le bosquet de Bambous est à 
côté, prêt à satisfairé à toutes ces exigences, sans frais comme 
sans perte de temps. | 

Pour tout ce qui concerne les travaux de vannerie, le 
Bambou remplace très-bien et souvent avec ‘avantage les 
meilleures espèces d’osier : paniers et corbeilles de toute 
sorte, malles,. tamis, vans, râteaux, chaises, tabourets, 
nattes, etc., etc., tout cela, en Chine et au Japon, est fait 
avec le Bambou, et mille autres choses encore, dont l’énu- 
mération est impossible. L'esprit inventif des Asiatiques a su 
l’employer à tout propos, et souvent l’on demeure éfonné 
d'en voir les applications les plus ingénieuses. Entre autres, 
j'ai vu en Chine, dans les environs de la ville de Chao-Chun 
(province de Tché-Kiang), les pêcheurs faire sur les lacs et 
les rivières des barrages pour prendre le poisson à l’aide de 
petits Bambous plantés verticalement et formant claire-voie ; 
ce qui n’empêchait nullement la navigation des jonques. Dans 
le même pays, mais dans les districts montagneux, j'ai vu 
aussi les paysans faire avec des Bambous de longs radeaux 
qu’ils chargeaient de fagots ou de charbon de bois; ces ra- 
deaux pouvaient naviguer sur les petits torrents, flottant sur 
trois ou quatre pouces d’eau; grâce à ce moyen, les monta- 
gnards pouvaient facilement apporter dans la plaine les pro- 
duits de leurs montagnes qui, sans cela, auraient été de nulle 
‘valeur, à cause de la difficulté des transports. Dans une des 
provinces du nord du Japon, j'ai vu un énorme cäble, fait de 
lanières minces de Bambou tressées ensemble, et tendu entre 
les deux rives d’une large rivière, servir à maintenir tout un 
pont de bateaux. 

Je ne cite ces exemples, pris au hasard, que pour monirer 
à combien d’usages variés le Bambou peut être employé. Mais, 
s’il est peu probable qu’en France on éprouve le besoin de 
l'utiliser de cette manière, sous combien d’autres rapports ne: 


* 


USAGES DU BAMBOU. 7h 


pourrait-il pas être précieux, en dehors de toute imitation 
des procédés asiatiques! 

Que de fois n’ai-je pas été frappé, principalement dans les 
départements du midi de la France et en Algérie, de la pé- 
nurie où se trouve le paysan, pour une foule d'objets de né- 
cessité quotidienne, tels que barres, tuteurs, échalas, etc. En 
beaucoup d’endroits, on n’a guëre que la ressource des 
branches dû saule et du peuplier, et encore est-elle souvent 
insuffisante; l'embarras est encore plus grand, s’il est besoin 
de soliveaux, d’échelles, ete., et la confection de ces objets 
devient une dépense réelle. Or, le Bambou remplace avec 
beaucoup d'avantages les bois de peuplier, saüle, et beaucoup 
d’autres, dans un grand nombre de circonstances; c’est, en 
effet, le végétal dont la tige offre peut-être les meilleures 
conditions de solidité, de légèreté et de résistance. Comme 
celle de la plupart des graminées, elle constitue un cylindre 
creux, offrant de distance en distance des nœuds auxquels 
correspondent de fortes cloisons qui subdivisent la cavité in- 
térieure en autant de compartiments hermétiquement ‘clos ; 
de plus, les fibres ligneuses, bien que serrées et formant un 
tissu très-compacte, sont régulièrement longitudinales et pa- 
rallèles, ce qui permet de diviser la tige dans toute sa lon- 
gueur en faisceaux aussi déliés qu’il est besoin. Cette même 
disposition fait que le Bambou est élastique et fiexible, de 
sorte que, semblable à son parent, le roseau de la fable, il 
plie et ne rompt pas. Quant à ses conditions de légèreté, elles 
se üurent de ce qu'il est formé par un cylindre creux, et il 
flotte aussi très-aisément pour la même raison. Enfin, à toutes 
ces qualités, 1l jouit celle de présenter, sans travail préalable, 
une tige parfaitement droite, unie, cylindrique, laquelle, dans 
les grandes espêtes, peut atteindre une longueur de plus de 
vingt mètres. Mais naturellement, dans ces espèces, la tige 
perd en élasticité ce qu’elle gagne en force de résistance; il 
n’est pas rare de voir de ces tiges, dans l'espèce appelée 
MO si par exemple, qui ont de quinze à vingt centimé- 
tres de diamètre, et dont le ligneux a près de deux 
centimètres d'épaisseur. Ce sont alors de véritables arbres 


150) SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


creux, mais plus forts que des arbres de même diamètre à bois 
plein. Je me rappelle avoir vu, entre autres, aux abords de la 
célèbre pagode du Ting tong. en Cliine, une magnifique 
avenue de ces Bambous géants; dans la tige de quelques-uns, 
entre deux nœuds, les Bonzes avaient pratiqué des niches 
dans lesquelles ils avaient placé de petites idoles. Mais, depuis 
les espèces qui atteignent ces grandes proportions jusqu'aux 
plus humbles, jusqu'aux Bambous nains qui recouvrent le sol 
à la manière des herbes ordinaires, on rencontre tous les in- 
termédiaires, ayant tous les mêmes qualités, et ne différant 
les uns des autres que par la taille et quelques caractères par- 
ticuliers seulement appréciables pour les botanistes. 

Les quelques explications qui précèdent suffisent, je pense, 
à montrer que le Bambou est essentiellement utile; reste à 
savoir s’il ne faut pas payer trop cher les ressources qu'il 
offre. Eh bien! sous ce rapport encore, l'avantage lui reste, 
car on peut dire qu'il ne coùle réellement que la peine de le 
prendre. Il y à peu de végétaux aussi rustiques et s’accom- 
modant aussi aisément de tous les terrains et de tous les cli- 
mats : s'il prospère, s’il pullule dans les régions tropicales et 
équatoriales, il est aussi florissant dans les provinces septen- 
trionales de la Chine et du Japon, où l'hiver est aussi rigou- 
reux que dans le nord de la France. Seulement, dans ces 
dernières contrées, les feuilles, au lieu de rester toujours 
verdoyantes comme dans les climats chauds, se flétrissent et 
tombent en partie pendant l'hiver, pour se renouveler au 
printemps suivant. Dans les pays où il tombe beaucoup de 
neige, il est prudent de lier les liges en faisceaux de cinq ou 
six ensemble, de crainte que le poids de la neige ne les courbe 
jusqu'à terre. C’est ce que J'ai vu faire aux paysans japonais 
dans les provinces de Yetchigo et d’Aïdzou. 

Tous les genres de terrain, à peu près, paraissent propres 
à la culture du Bambou : il vient admirablement dans les 
terres d’alluvion les plus modernes, dans ces vastes plaines 
inondées et marécageuses qui se trouvent à l'embouchure des 
grands fleuves de l’Indo-Chine, tels que le Gange, le Cam- 
bodge, le Donaï, le Yang-tse kiang, ete. On a un exemple frap- 


USAGES DU BAMBOU. 753 


pant de ce fait dans nos possessions de la basse Cochinchine: 
là, comme je l’ai vu dans les environs de Saïgon, on rencontre 
de superbes bosquets de Bambous le long des rizières et des 
aroyo, où ils enfoncent leurs racines dans le limon, en em- 
piétant sur le domaine des palétuviers. En Chine et au Japon, 
le Bambou prospère dans les terrains les plus divers, aussi 
bien dans les dunes sablonneuses du littoral que dans les 
plaines fertiles des rizières, aussi bien dans les vallées om- 
breuses que sur le flanc des montagnes escarpées et arides. 
Néanmoins, les terrains qui me paraissent le plus favorables 
à la culture du Bambou sont les terrains meubles, sablon- 
neux, les terres légères en général, absorbant facilement 
l’eau des pluies et dans lesquelles les rhizomes peuvent 
s'étendre et se développer avec facilité. Comme les terrains 
calcaires sont fort rares ou même font complétement défaut 
dans les pays de la Cochinchine, de la Chine et du Japon que 
J'ai visités, je ne saurais dire si ces terrains sont favorables; 
les moins propices seraient peut-être les terres trop exclusi- 
_vement argileuses : toutefois, je ne donne ces opinions que 
Sous toute réserve, car le Bambou est tellement rustique, qu’il 
me parait devoir réussir à peu près dans tous les terrains ; ce 
qu'il y a de certain, c’est qu’on le trouve dans toutes les par- 
ties du Japon, dont le sol est une vraie mosaïque formée, je 
crois, de toute la série des terrains géologiques. 

Quant aux soins que réclame sa culture, ils se réduisent à 
presque rien. De fait, une fois le Bambou planté, on n’a pour 
ainsi dire plus à s’en occuper. Dès la première année, une 
demi-douzaine de jeunes pousses sortent de terre autour du 
pied primitif, et atteignent rapidement plusieurs mètres de 
hauteur. La deuxième année, de nouvelles pousses plus nom- 
breuses viennent s'ajouter à ce premier groupe qui devient 
déjà un massif : il suffit de quelques sujets plantés à cinq ou 
six mêtres de distance les uns des autres, pour obtenir en 
deux ou trois ans un joli bosquet. J'ai été témoin de ce ré- 
sultat en Uhine, pour des plantations que nous avions faites 
autour de nos habitations, à Foutcheou, dans la province du 
Fokhien; il est vrai que, en raison de la différence entre ce 


754 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


climat et celui de la France, il pourrait y avoir aussi quelque 
différence pour la durée de la croissance; mais je pense 
qu'elle serait peu considérable, et peut-être même nulle, si l’on 
expérimentait avec des espèces originaires du nord de la Chine 
ou du Japon. 

Il est inutile de travailler le sol des plantations de Bambou, 
ce que je n’ai vu faire nulle part, et je crois même qu’en 
France cette pratique serait nuisible. D'abord, on s’expose- 
rait presque à coup sûr à blesser les rhizomes qui rampent 
généralement à une petite profondeur; ensuite, un sol re- 
couvert d'herbes entretient mieux la fraicheur et l'humidité. 
Or, s’il est une crainte à avoir pour le succès, c’est celle de 
voir une sécheresse trop grande nuire aux plantations, car il 
ne faut pas oublier que le Bambou prospère dans les pays 
chauds où règne toujours, comme chacun sait, une grande 
humidité qui se retrouve encore dans les zones tempérées de 
la Chine et‘du Japon. Tout ce qu’on pourrait faire, au moins 
dans les commencements, ce serait de débarrasser le sol des 
grandes herbes et des arbustes : plus tard, il ne serait plus 
guëre la peine de prendre ces précautions, car bien peu de 
plantes, sauf quelques graminées, peuvent vivre sous l’om- 
brage épais des bosquets de Bambous. 

Ainsi donc, en fait de culture, il suffit de planter une fois 
pour toutes; ei l’on n’a presque plus de soins à donner. Chaque 
année surgissent spontanément de nouvelles tiges qui viennent 
remplacer avec usure celles qui ont été prises par la consom- 
mation. C’est du moins ainsi que les choses se passent dans 
lIndo-Chine et au Japon, etje ne doute pas qu'il n’en soit de 
même en France, en Algérie, et dans tous les pays tempérés de 
l'Europe. 

UTLITÉ DU BAMBOU COMME ALIMENT 


Le Bambou fournit réellement une substance alimentaire, 
et à ce titre, il est trés-estimé des Chinois et des Japonais, qui 
en font une consommation considérable : pendant toute la 
durée du printemps, on le trouve en abondance en vente sur 
tous les marchés. 


USAGES DU BAMBOU. 755: 


Ge que l’on mange du Bambou, ce sont les jeunes pousses, 
alors que, à peine sorties de terre, elles sont encore très- 
tendres et que leur longueur varie, selon les espèces, entre 
trois ou quatre pouces, et un pied ou un pied et demi. Bien 
que probablement toutes les espèces puissent à la rigueur être 
comestibles, il n’y en a seulement qu’un petit nombre dont 
on fasse usage comme aliment. Les plus usitées sont celles 
qui, en japonais, sont appelées : Môsô, Otétchikou, Hatchikou, 
ét médaké, ou bien omnataké. Dans ces jeunes pousses, le 
tissu ligneux n’est pas encore développé, et leur substance 
blanche, parenchymateuse, homogène, constitue tout à la fois 
et la partie qui sera plus tard la tige creuse, et les cloisons 
qui la divisent; celles-ci sont très-rapprochées, le mérithalle 
étant trés-court, et vers le haut de la jeune pousse elles 
finissent par se toucher. De plus, les feuilles étant étroitement 
invaginées, leur partie recouverte est également blanche, 
tendre et comestible. Les Chinois et les Japonais, pendant 
toute la durée du printemps, mangent ces jeunes pousses dont 
ils sont friands, à l’état frais. Mais ils en préparent aussi des 
conserves qu’ils consomment pendant le reste de l’année, en 
les faisant macérer pendant quelque temps dans une sorte de 
saumure et les laissent sécher ensuite. 

Ce ne sont pas seulement les indigènes de l’extrême Orient 
qui emploient le Bambou comme comestible : les résidents 
étrangers soint loin de le dédaigner. Je me souviens que, 
dans les premières années que j'habitais Shanghaï (de 1862 
à 1864), les plats de Bambou figuraient à peu près quotidien- 
nement sur la table des Européens : il est vrai qu'à cette 
époque, les légumes d'Europe, qui ont été depuis ce temps 
importés et cultivés avec succès, faisaient complétement dé- 
faut et que nous n’avions pour ressource que les légumes du 
pays, parmi lesquels le chou du Shaniong, la patate douce et 
le Bambou tenaient le premier rang. Ce dernier était donc 
pour nous un objet de réelle nécessité. Nécessairement, il est 
peu probable que, sous ce rapport, il ait à jouer un rôle aussi 
considérable dans les pays d'Europe où abondent les pommes 
de terre et les légumes de toute sorte. Néanmoins, un végétal 


. 756 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


alimentaire n’est jamais à dédaigner, alors surtout que, comme 
le Bambou, il vient spontanément et presque sans culture 
dans les terrains les moins ferules, et qu’il est sain, nourrissant 
_etde saveur agréable; d’ailleurs, il y aura toujours des contrées 
et des circonstances où il pourra être une ressource précieuse. 

Toutes les personnes qui voudront essayer de ce nouvel 
aliment ne le trouveront peut-être pas, de prime abord, à la 
hauteur de la réputation que j'essaye de lui faire; mais, en 
ceci, il faut tenir compte de la diversité des goûts et du dé- 
faut d'habitude : N’a-t1l pas fallu de longues années pour 
que la pomme de terre fût appréciée comme elle le mérite ? 
Mais, aujourd'hui que l’on accepte plus volontiers les inno- 
vations, j'ose prédire que, si l’on fait des essais sérieux, le 
Bambou sera apprécié, non pas certainement à légal de la 
pomme de terre, par exemple, mais comme un supplément 
économique pour l'alimentation. Ma confiance à cet égard 
est d'autant plus grande, qu’il m'est arrivé souvent de faire 
manger de jeunes pousses de Bambous à de nouveaux débar- 
qués en Chine et au Japon, et que les trois quarts d’entre eux 
les trouvaient d'emblée excellentes. Pour mon compte, voilà 
une douzaine d'années que je mange du Bambou presque 
tous les jours, à la saison, et j'ai pour ce produit une estime 
particulière que je ne crois pas trop exagérée, en raison des 
nombreux services qu’il m'a rendus en maintes circonstances. 

Comme, pour bien juger une substance alimentaire, il est 
nécessaire qu’elle soit présentée sous la forme la plus conve- 
nable, je vais me permettre de donner quelques conseils sur 
la manière d'employer le Bambou comme aliment. 

Et d’abord, il ne faut choisir que les jeunes pousses fendres, 
c'est-à-dire faire exactement pour le Bambou ce que lon fait 
pour l’asperge; ensuite, il ne faut pas prendre les premières 
espèces venues, mais s'adresser de préférence à celles que j'ai 
citées plus haut. Une fois les jeunes pousses récoltées, on les 
lave à grande eau et on les fait bouillir telles quelles, sans en 
arracher les feuilles, dans de l’eau ordinaire à laquelle on 
ajoute seulement un peu de sel. Il est tout à fait indispensable - 
de les faire bouillir longtemps, au moins une heure et demie 


USAGES DU BAMBOU. 757 


ou deux, et même plus, selon leur taille et leur espèce. Cela 
fait, on rejelte la partie inférieure et les feuilles les plus infé- 
rieures et externes, qui sont toujours dures et coriaces, et 
alors il n’y à plus, à ma connaissance, que deux manières 
d’accommoder le Bambou. 

La première, qui est la plus simple, consiste à le manger à 
la poivrade, comme on fait pour les artichauts. Comme pour 
ces derniers on peut, avant de manger la partie centrale, dé- 
tacher. les feuilles une à une, et en manger la partie infé- 
rieure, qui est blanche et tendre; ou bien, si l’on rejette les 
feuilles, n’en manger que la tige, comme on ferait d’une 
asperge en branches. 

La deuxième manière consiste à ne garder que la tige des 
pousses, que l’on coupe en petits morceaux et que l’on pré- 
pare à une sauce blanche, comme on fait pour les carottes, 
salsifis, panais, etc. C’est, du reste, de cette dernière façon 
que j'ai vu, en Chine et au Japon, servir les pousses de Bam- 
bou, sur les tables européennes. 

Comme résumé de ce qui précède, je terminerai par les 
propositions suivantes : 

1° Le Bambou est un végétal tout à fait inoffensif, à tous 
les points de vue; 

2° Il est extrêmement utile pour une foule d’usages domes- 
tiques, et surtout dans les établissements agricoles ; 

3° Il constitue, par son élégance et la rapidité de sa crois- 
sance, un ornement facile pour les jardins, pares, promenades 
publiques, etc. ; 

h° Il peut fournir, sans aucun frais, une ressource parfois 
précieuse, toujours agréable, pour l’alimentation ; 

5° Il y a donc un intérêt réel à tenter sérieusement et à pro-: 
pager sa culture. 

Depuis les temps les plus reculés, des millions d'hommes 
emploient le Bambou, devenu pour eux objet de première 
nécessilé, à ce triple point dè vue de l'utilité, de l’ornemen- 
tation et de l'alimentation, et il n'ya pas de motif sérieux qui 
empêche les Européens detrouver en luiles mêmes avantages. 


Il. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX 


DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ, 


SÉANCE GÉNÉRALE DU 4 DÉCEMBRE 1874. 


Présidence de M. le D' Cosson, vice-président. 


— M. le Président déclare ouverte la session de 1874-1875, 
et se félicite d’avoir à signaler à l'assemblée les nombreuses 
adhésions reçues pendant la durée des vacances; 75 admis- 
sions nouvelles ont été prononcées par le Conseil. 

M. le Président est heureux d'annoncer également que 
S. À. R. le Prince Henri des Pays-Bas a bien voulu autoriser 
l'inscription de son nom parmi les protecteurs de. notre 
œuvre. 

Mais, d’un autre côté, la Société a éprouvé des pertes regret- 
tables par le décès de plusieurs de ses membres : MM. Elie de 
Beaumont (de l’Institut); le duc de Montebello, ancien séna- 
teur, membre fondateur; l’abbé Chaigneau; Pâris-d’Ilins; 
Poupard; docteur Gaubert; Paul Albert, ancien agent de 
change; docteur Beaude, Margarot-Pauc, banquier; marquis 
de Niza, pair du royaume de Portugal; Théophile Boucher, 
ancien membre du Conseil général de la Vendée; Son Excel- 
lence Jkeda-Tsikougo-no-Kami, premier ambassadeur du 
Taïcoun du Japon, et Auguste Robin. 

— Le procès-verbal de la dernière séance générale ayant 
été, conformément au réglement, approuvé par le Conseil, il 
n'y a pas lieu d'en donner lecture. 

— M. le Président proclame les noms des membres admis 
par le Conseil, dans sa séance du 27 novembre dernier. 


MM. Présentateurs. 
D' H. Labarraque. 
Maurice Girard. 
Jules Grisard. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
D: H. Labarraque. 
\ L. Nicolas. 


AMEZAGA (Camilo de), 13, cours du XX X Juillet, 
à Bordeaux (Gironde), et à Madrid (Espagne). 


ANATOLIE, 403, rue Neuve-des-Mathurins, à 
Paris. 


PROCÈS-VERBAUX. 759 


Comte d'Éprémesnil. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
D' H. Labarraque. 
Deyrolle fils. 

Maurice Girard. 

D' H. Labarraque. 


jrs de Lhuys. 


ANDRE (Oscar), industriel, 49, rue Charles Laf- 
fitte, à Neuilly (Seine). 


BERTHON, ingénieur, rue Mademoiselle, à Ver- 
sailles (S eine-et-Oise). 


BLANCHARD (Charles), banquier, 4, boulevard 


À : , Gabriel Fache. 
des Italiens, à Paris. 1 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Drouyn de Lhuys. 

Gabriel Fache. 

A. Geoffroy Saint-Hilaire. 

Comte de Beaupréau. 
Baron G. de Chemellier. 

Edgar Roger. 

D’ H. Labarraque. 

Ch. Pacqueteau. 

Edgar Roger. 

Comte de Beaupréau. 

Baron G. de Chemellier. 

Edgar Roger. 

res fils. 

{ 


FONTAINE (Alfred), propriétaire du domaine et 
des chasses de la Bristinière et de la forêt de 
l'Épar, près Rambouillet (Seine-et-Oise), et à 
Paris, 61, rue de l’Arcade. 

FREMEUR (le comte de), propriétaire, 90, rue 
Montaigne, à Paris. 


_rondissement de Fontenay-le-Comite (Vendée). 


HEÉBRARD (d”), ancien officier, 76, rue de la Vic- 


{ 
GÉLOT (Paul), notaire, à Saint-Cirq-du-Gats, ar- | 
toire, à Paris. 

\ 


LAMBERT-Lassus, propriétaire, 113, boulevard 


Maurice Girard. 
de la Reine, à Versailles (Seine-et-Oise). 


D' H. Labarraque. 
Comte de Beaupréau. 
Baron G. de Chemellier. 
Edgar Roger. 

Lun. d’Armaillé. 


LESTRANGE [le vicomte de), propriétaire, 37, rue | 
Joubert, à Paris. 


LEZzANI (le marquis Maximilien), palais Lezzani, 


place Barberine, à Rome (ftalie). D' H. Labarraque. 


Edgar Roger. 
MAiNDONALD (Thomas), propriétaire, au Gand-{ Augustin Delondre. 
Belle, paroisse de Saint-André, île de Guer- onde 
nesey (Angleterre). Armand Goubaux. 
ii Cambon. 
MarGaROT-Pauc (Ali), banquier, à Nimes (Gard). / Jules Grisard. 
D' H. Labarraque. 
Paul Blacque. 
Baron G. de Chemellier. 
F. Jacquemart. 
MULLER-SOEHNIÉ (Charles Eugène), 38, boues eonte de Beaupréau. 
vard Eugène, au pare de Neuilly, à ji ae Ch. de Chemellier. 


Mexou (le vicomte Emmanuel de), au château 
du Mée, par Pellevoisin (Indre). 


(Seine). Edgar Roger. 
Bouguet. 
OsER (Adam), DÉS GS Bâle (Suisse). A. Geoffroy Saint-Hilaire. 


Dr H. Labarraque. 


760 . SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


| Frémy. 

D' H. Labarraque. 
Saint-Yves Ménard. 
POEY D'AVANT (Tony), propriétaire, suppléant | Jules Grisard. 

de M. le juge de paix de Maillezais, à Maillezais ® D° H. Labarraque: 

(Vendée). (Ch. Pacqueteau. 
{ Maurice Girard. 
{ D' H. Labarraque. 
(Marquis de Pruns. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
D' H. Labarraque. 
Saint-Yves Ménard. 
RAGoT (Édouard), 177, rue du Faubourg-Pois- | & A au AUS 
Vi. Nicolas. 
Comte d’Éprémesnil, 
Drouvn de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
. age SEE { Comte de Beaupréau. 
SOMMIER (Eugène), propriétaire, à Flavy-le-| Baron Ce Ce 

Martel (Aisne). Edgar Roger, 
VAN Dee cn PROPRrE one de / D' H. Labarraque. 

Suède et de 1 vége, à la Papiaunerie, près L 

La Cüaillère, arrondissement + te | Che racqUe en 

Comte (Vendée). (Raveret-Wattel. 


PERRONNE (Auguste), percepteur des contribu- 
tions directes, à Manthelan (Indre-et-Loire). 


PonNTET (Francois), propriétaire, à Aurillac 
(Cantal). 


PRAMPAIN (Victor), percepteur, à Plancoët (co- | 
tes-du-Nord). 


sonnière, à Paris. 


f 
RouRE (baron du), au château de Barbegal, près \ 
Arles (Bouches-du-Rhône). 


— MM. de Quatrefages, André Franche et Ramel expriment 
leurs regrets de ne pouvoir assister à la séance. 

—_ MM. Arthur Douglas, de Hilton (colonie du Cap},-et P. 
Salzedo, de Sainte-Marthe (Nouvelle-Grenade), adressent des 
remerciments pour les récompenses qui leur ont élé décer- 
nées par la Société. 

— M. de Amezaga fait parvenir ses remerciments pour sa 
récente admission. Il accuse en même temps réception des 
graines qui lui ont été adressées. 

— MM. Mansbendel, H. Cliquennois-Badart, de Chemellier, 
Auguste Bouchez, Charles Nicolas, comte de Beaupreau, Loïs 
Bouillod, Ernest Bouillod, comte de Perrigny, Ch. Dela- 
main, Raveneau-Huard, comte de lEspéronnière, E. Garnot, 
E. de Coutans, Calcagno, Martel-Houzet, Paul Gervais, Jean 
Sarrus, Riban, Bureau, Derré, vicomte Clary, Abaye, Cam- 
bon, Crevoisier et Ravisy demandent à prendre part aux 
cheptels de la Société. 


PROCÈS-VERBAUX. .. 761 


— Des demandes de graines de divers végétaux sont adres- 

sées par MM. Brady, comte de Mansignv, Trempé, J. Lebeau, 
Alph. Astier, H. de Montrol, Cambon, de Rodeilec du Porzic, 
et par la Société d'agriculture d'Étampes. 
Christian Le Doux, Lefort des Ylouses, 
René de Dampierre, comte de Morteuil, H. de Montrol, 
de la Brosse-Flavigny, vicomte de Bélizal, Ravisy, de Surigny 
et de Givry adressent des comptes rendus sur l’état de leurs 
cheptels. 

— M. le Secrétaire annonce que les cheptels ci-après ont 
êlé accordés par la Commission spéciale, dans sa séance du 
25 novembre dernier. 


ANIMAUX. 
MM. 

ABAYE, château du Sart, à Flers-les-Lille (Nord). Un litre 
montée d’Anguille ; un Coq et deux Poules Houdan. 

BEAUPREAU (comte de), château de Rive-au-Bois; prés 
Neuville-au-Bois (Loiret). Un lot de Chèvres naines du 
Sénégal. 

BERTHOULE (A.), à Besse (Puy-de-Dôme). Un Coq et deux 
Poules Négresses; une paire Canards Carolins. 

BorGues, à Brain, par Nevers (Nièvre). Une paire Oies de 
Toulouse. 

Boucuez (A.), à Seurre (Côte-d'Or). Une paire Colombes 
Longhups. 

BourLLon (Ernest), à Saint- Léger-sur-d' Heune (Saône-et- 
Loire). Une paire Casoars. 

Bouizcop (Loïs), à Saint- Léger-sur-d’ Heune (Saône-et- 
Loire). Un couple Oies barrées de l'Inde ; un couple Canards 
spinicaudes. 

BRionvaL, à Lunéville (Meurthe-et-Moselle). Une paire 
Lapins à fourrure. 

CAmBon, à Nimes (Gard). Une paire Canards de Rouen; une 
paire Lapins à fourrure. 

CLARY (vicomte), rue Barbet-de-Jouy, 17, à Paris: Une 
paire Faisans Swinhoe. 

3° SÉRIE, T. |. — Décembre 1874, 49 


76? SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


Gourex (comte de), château de Korn-er-Houet, par Kolpo 
(Morbihan). Une paire Cochons craonnais. ù 

CourTE (comte de), 11, rue Bel-Respiro, à Paris. Une paire 
Faisans argentés. 

Courans (E. de), château de la Dureauderie, par Chatelle- 
rault (Vienne). Une paire Faisans vénérés. 

CREVOISIER (Gustave), à la Barrasse (Bouches-du-Rhône). 
Une paire Agoutis du Brésil ; une paire Léporides. 

DELAMAIN (Ph.), à Jarnac (Charente). Une paire Perruches 
de Paradis. 

DErRRÉ (Almire), à Sablé-sur-Sarthe (Sarthe). Une paie 
Grenouilles-bœufs ; une paire Canards Mandarins. 

Duponr, à Ba Duc (Meuse). Une paire de Lapins à four- 
rure. 

ESPÉRONNIÈRE (comte de |’), château de la Saulaye, près 
Candé (Maine-et-Loire). Une paire Canards Bahama. 

Garnor (Émile), pavillon de Bellevue, près Avranches 
(Manche). Une paire Canards Labrador. 

GERVAIS (Paul), 14, rue Rollin, à Paris. Une paire Canards 
Carolins ; une paire Perruches ondulées. 

LEFORT DES YLOUSES, 23, rue Bréa, à Paris. Une paire 
Faisans vénérés. 

MarTEL-Houzer, à Tatinghem, près Saint-Omer (Pas-de- 
Calais). Une paire Canards Mandarins. 

Micuez (docteur), à Anizy-le-Château (Aisne). Une paire 
Faisans versicolores. 

Mirronis (de), à Sceaux (Seine). Une paire Faisans Swinhoe. 

PERRIEN (vicomte de), au château de Locunolay, près 
Hennebont (Morbihan). Un Coq et deux Poules Dorking. 

PerriGNy (comle de), à Versailles (Seine-et-Oise). Une 
paire Canards Mandarins. 

Ravisy, à Vault-de-Lugny, par Avallon (Yonne). Une paire 
Faisans vénérés 

Ripan, (E.) à Louvigné-du-Désert (Ille-et-Vilaine). Un Coq 
et deux Poules de Crévecœur ; une paire Canards de Rouen. 

RicHarp-BÉRENGER, à Mens (Isère). Un couple Canards 
Carolins. 


PROCÈS-VERBAUX. 763 


Rirrar, à Évaux (Creuse). Une paire Faisans vénérés. 

RonELLEG Du Porzic (de), château de Pezennan, par 
Quimper (Finistère). Une paire Canards Carolins. 

SARRUS (Jean), curé à Saint-Affrique-du-Causse, par 
Espalion (Aveyron). Une paire Colins de Californie; une 
paire Faisans Swinhoe. 

Varin (Jules), à Boulne, près la Ferté-Alais (Seine-et- 


Oise). Une paire Faisans vénérés, 


VÉGÉTAUX. 
MM. 

Boiques, à Brain, par Nevers (Nièvre). Igname de Chine. 

CaAmBon, à Nimes (Gard). Collection de Pommes de terre, 
Pois, Haricots. 

DEerRÉ, à Sablé-sur-Sarthe (Sarthe). Diverses variétés de 
Begonias. 

Nicozas (Gh.), à Bône (Algérie). Collection de Bambous 
et de Begonias. 

PERRAUDIÈRE (de la), château de la Devansaye, près Segré 
(Maine-et-Loire). Collection de Pommes de terre et de Bam- 
bous pleine terre. . 

RonELLEG pu Porzic (de), château de Pezennan, par 
Quimper (Finistère). Bambusa Quilior, violascens, nigra, vi- 
ridi-glaucescens. 

Turrez, à Toulon (Var). Bambusa flexuosa. 

Varin (Jules), à Boulne, près la Ferté-Alais (Seine-et-Oise). 
Begonia Rex etricinifolia. 

LA SOCIÈTÉ D'HORTICULTURE D'ÉTAMPES (Seine-et-Oise). 
Collection de Pommes de terre, Pois, Haricots. 

— M. Henri de la Blanchère fait parvenir un exemplaire 
de la deuxième édition de son Traité des Oisacux utiles 
et des Oiseaux nuisibles de France, ouvrage que notre con-. 
frère désire voir concourir pour l’une des primes fondées par 
la Société. — Renvoi à la Commission des récompenses. 

— M. Ernest Bellecroix adresse également un exemplaire 
de l’ouvrage qu'il vient de publier sous le titre de : La 
chasse pratique, et qui traite de la destruction des animaux 


764 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


nuisibles, ainsi que de l’élevage des gibiers indigènes et 
exotiques. — Renvoi à la Commission des récompenses. 

— M. FKôlsch, consul de Suède et de Norvége à Mar- 
seille, prie la Société de vouloir bien mettre des graines 
de plusieurs espèces d'Eucalyptus à la disposition d’un de 
ses parents, M. James Jackson, actuellement aux États-Unis, 
et qui désirerait essayer d'introduire dans le Texas cette pré- 
cieuse essence d'arbres. M. Fôlsch transmet en même temps 
les offres de services de M. Jackson qui doit prochainement 
visiter les îles Sandwich, le Japon, la Chine, etc., et qui est 
déjà chargé d’une mission par la Société de géographie. 
— Remerciments; il est envoyé à M. Jackson les diverses 
espèces de graines dont la Société dispose en ce moment. 

— M.]le marquis de Pruns signale l'utilité de vulgariser 
dans les campagnes la connaissance des services que peut 
rendre l’acclimatation de nouveaux animaux domestiques; 
il désirerait que la Société publiât, ou, du moins, encoura- 
seat la publication de petits traités pratiques d’acclimatation 
qui seraient mis, à très-bas prix, à la disposition des instilu- 
icurs mieux placés que qui ce soit pour répandre d’utiles 
notions sur une scieuce malheureusement encore trop peu 
connue. 

Le Conseil a décidé, dans sa séance du 27 novembre der- 
nier, que la proposition de M. le marquis de Pruns serait 
renvoyée à la Commission des récompenses, qui examinera 
s’il y aurait lieu d'instituer des primes pour les meilleurs 
traités usuels sur l’acclimatation. 

— M. Louis Auméran écrit de la Chartreuse de la Verne 
par Colobrières : « L’attention des propriétaires des mon- 
tagnes des Maures (Var) ne saurait être trop vivement attirée 
sur la race bovine que je possède et qui vit à moitié sauvage 
dans les bois de la Verne. Cette race, digne, par sa saveur, 
d'alimenter la boucherie des plus gourmets, peut rendre de 
vrais services à l’agriculture et à la sylviculture, puisqu'elle 
est réellement la seule capable de bien débarrasser nos bois des 
herbes qui, en été, sont le plus redoutable élément d'incendie. 

» À céfaut d'herbes les bœufs des Maures se nourrissent de 


PROCÈS-VERBAUX. 765 


bruvyères et d’arbousiers et d’autres bois rampants, ils ram- 
placent les chèvres sans en avoir les inconvénients. » 

— M. le marquis d'Hervey de Saint-Denys écrit du château 
du Bréau (Seine-et-Oise) à M. le Directeur du Jardin d’accli- 
malation : « Je vousentretiens encore aujourd’hui de mes Talé- 
galles, non pour vous annoncer de très-heureux résultats, mais 
pour vous confirmer ce que j'aieu déjà l'honneur de vous dire, 
à savoir que si ces animaux ne se sont pas mullipliés chez 
moi, cela a dépendu de causes ‘tout à fait étrangères aux 
conditions dans lesquelles ils se trouvent placés dans le pare 
re MER EE MT MR EMORL UE EN SL 

) Sur les cinq oiseaux Gite NOTE m'avez Snbuie succes- 
an la seule poule que j'ai reçue a été Le dernier oiseau 
envoyé cetété, et en échange duquel je vous ai, de mon côté, 
réexpédié un coq. Depuis l’arrivée de cette poule, les plus 
grands changements se sont opérés dans les habitudes des 
oiseaux lâchés dans mon parc. Ils vivaient tous isolément, se 
fuyant et construisant tous des nids aux extrémités du parc 
les plus opposées. À l’arrivée de la poule, les trois coqs se sont 
livré des combats acharnés durant plusieurs jours. Enfin, le 
plus fort est resté maître de la situation, et tandis que les deux 
Talégalles sans poule ont continué à vivre séparés, les deux 
oiseaux que je suppose appariés perchent sur la même bran- 
che et ne s'éloignent point beaucoup dé leur nid. Ce nid, objet 
d’une préoccupation continuelle, a atteint des proportions 
que je n'avais pas encore vues. Il n’a pas moins de 1 mêtre 
60 centimètres de hauteur, et dernièrement encore le coq 
y bravaillait avec une ardeur extrême, le’ recouvrant de 
feuilles mortes, tandis que la femelle, perchée au faite, égali-. 
sait sur la surface les feuilles que le coq lançait d’en bas par 
gros paquets. D'autre part, les deux coqs isolés avaient aban- 
donné leurs nids et cherchaient, de temps à autre, à trou- 
bler le ménage établi. 

» Je me crois donc certain maintenant d’avoir un couple 
de Talégalles, mais aussi de n’avoir eu que des coqs durant 
les deux premières années de mon cheptel. L'expérience 
pratique qui ressort de cette mésaventure est évidemment 
que les Talégalles, comme les Paons, ne deviennent adultes 


766 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


qu’à leur seconde année, et que jusque là il est extrêmement 
facile de les confondre avec des femelles. 

» En ce qui concerne le couple si tardivement formé, il 
n’était plus possible, ceite année, d’en espérer des résultats 
satisfaisants. Je m’imagine que ces oiseaux doivent avoir à 
peu près les mêmes époques que les Paons, dont les couvées 
étaient écloses depuis longtemps déjà quand mes Talégalles 
ont pu s’apparier. Par cela même que les jeunes Talégalles 
s’envolent et se suffisent à eux-mêmes dès leur sortie du nid, 
cette sortie doit nécessairement s'effectuer avant que la belle 
saison ne soit terminée. Il est donc présumable que mes deux 
sujets ont commencé leur travail trop tard, la poule étant 
arrivée trop tard, qu'ils ont pu être trompés par la dou- 
ceur exceptionnelle de l’automne, mais que les œufs, s'il 
en a été pondu, n’ont pu éclore, ni surtout éclore en temps 
utile. 

» Cela me désole d'autant plus que toutes les meilleures 
conditions pour l’acclimatation et la reproduction des Talé- 
galles se trouvaient réumies três-évidemment dans les bois du 
Bréau, puisque mes pensionnaires ont pu y passer déjà deux 
années, abandonnés à eux-mêmes, sachant pourvoir à leur 
nourriture et se préserver des fouines et autres destructeurs, 
travaillant activement à faire des nids, et enfin ne sortant 
jamais du pare. Bien que jouissant d’une liberté absolue, ils 
ne sont point devenus farouches; ils se laissent approcher 
et accourent même du fond des bois, quand on les appelle 
pour leur donner du pain, occasionnellement. Le moment des 
grandes neiges m'a permis, du reste, de constater la facikté 
des Talégalles à se domesliquer. Cinq ou six jours après que 
le sol fut entièrement recouvert de neige,ces oiseaux, qui de- 
puis plus d’un an n’approchaient jamais du château et vivaient 
à l’état sauvage, vinrent tout àcoup se mêler aux Paons et: 
partager avec eux les distributions de grains faites dans la 
basse-cour. Ajoutons toutefois qu'au lendemain du dégel on 
ne les revit plus. 

» À l’égard de mes Cerfs-Cochons, le mâle, qui m'a été 
envoyé à l’état de faon, me paraît maintenant adulte. J'espère 
qu'il saura se rendre utile au printemps prochain. 


PROCÈS-VERBAUX. 767 


» Un détail assez important, que j'avais oublié de vous 
mentionner, c'est que les Talégalles mangent des glands de 
chêne en abondance, et font de cet aliment la base de leur 
nourriture, à l’arrière-saison (1). » 

— M. Daviau écrit à M. le Secrétaire général : « Vous 
m'avez demandé une petite note sur mon élevage de Faisans 
vénérés. Je suis bien aise de pouvoir répondre, à ce sujet, 
que j'ai été vraiment heureux. Grâce aux excellents reproduc- 
teurs que la Société m'a livrés l’année dernière, j'ai obtenu, 
d'une seule poule, 43 œufs, dont 37 bien fécondés. Je n’ai perdu 
qu'un petit, sans pouvoir me rendre un compte exact de la 
cause de sa mort ; 6 petits ont été étouflés par une couveuse. 
Toutes mes couvées ont été élevées à la mie de pain, les œufs 
durs et la salade, et sans un œuf de fourmis, mais seulement. 
beaucoup de liberté. » 

— M. Ribeaud adresse de Porrentruy le compte rendu sui- 
vant de son cheptel de Canards Mandarins : « Depuis qu’ils sont 
installés chez moi, ces oiseaux n’ont présenté aucun symptôme 
de maladie. La mue s’est faite sans accident et, aujourd’hui 
qu'ils ont revêtu leur beau plumage, ils sont magnifiques. 

» Leur nourriture a consisté en un mélange de sarrasin, de 
blé et de millet. Dans les temps froids et humides, j'ajoute une 
pincée d'œufs de fourmis, de mie de pain et de chènevis. En 
outre, ils ont reçu chaque jour, comme hors-d’œuvre, tantôt 
de la laïtue, tantôt de la poirée. Après la lentille d’eau, la 
verdure qu’ils semblent préférer est la poirée. 

» Après avoir lu le Bulletin d'août, je leur ai jeté quelques 
glands coupés en petits morceaux; ils les ont très-bien man- 
gés. Mais, craignant qu'à la longue les glands n’engendrassent 
quelque maladie, je n'ai pas osé continuer à leur en don: 
ner. » 


- (4) Note ajoutée pendant l'impression. — On a trouvé hier (9 janvier), 
dans les bois, l’un des pauvres Talégalles mort et à demi dévoré par un oiseau 
de proie. 

On pense que cet oiseau de proie aura profité de l’engourdissement causé 
par le froid pour attaquer la malheureuse bête à la tête. Le Talégalle mort 
était un des mâles qui vivaient solitaires. 


768 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


— M. Jourdan, de Voiron, écrit à M. le Directeur du Jardim 
d’acclimatation qu’il a obtenu cette année cinq jeunes Perru- 
ches de Swainson (Trèchoglossus Swainsoni), en trois nichées 
différentes. 

— M. Duchastel écrit de Vernantes (Maine-et-Loire) : 
» Les Canards Mandarins que j'ai reçus en cheptel au prin- 
temps dernier sont très-visgoureux. Depuis quelques jours, 
suivant le conseil de notre collègue, M. le docteur Moreau, 
je m'amuse à leur jeter des glands coupés en huit morceaux ;. 
ils en sont tellement friands qu'ils oublient leur sauvagerie 
naturelle, jusqu’à venir à mes pieds chercher cette nourri 
ture. : 

» Les Canards Labrador que j'ai achetés au Jardin d’accli- 
matation m'ont donné un assez grand nombre de petits cette 
année. On peut considérer cette espèce comme tout à fait 
accliniatée, car une cane de l’année, qui m'avait dérobé quel- 
ques œufs, m'a amené aujourd’hui, 10 novembre, trois petits 
naissants très-vigoureux, je les ai enfermés aussitôt dans une 
serre tempérée, ou j'espère les élever. 

» Les graines de Melons à rames ont parfaitement réussi : 
ces graines, semées le 4° juin, m'ont donné un grand nombre 
de Melons tardifs, qui, au mois d'octobre, étaient délicieux. 
J'aurai l'honneur de vous adresser quelques graines de ces. 
Melons. » À 

— M. À. Delaurier aîné écrit d'Angoulême à M. le Direc- 
teur du Jardin d’acclimatation : « Je vous avais annoncé à 
Paris qu’une paire de jeunes Perruches de la Nouvelle-Zélande, 
nées chez moi en mars dernier, s'étaient accouplées en août 
et m'avaient donné des jeunes. À mon arrivée à Angoulême, 
s’ai trouvé la femelle morte, probablement par suite des fati- 
oues de l’incubation. 

» Deux petits étaient éclos quelques jours avant. Ils ont été 
nourris et réchauffés par le jeune mâle avec une telle sollici- 
tude, qu'ils n’ont point paru souffrir un seul instant de l’ab- 
sénce de la femelle, et aujourd’hui ils sont sur le point de 
sortir du nid. » 

— M.E. Chauchat, écril a. M. le Directeur du Jardin d’accli- 


PROCÈS-VERBAUX. 769 


mation : « J'ai à vous signaler un fait assez curieux; J'avais 
conservé l’an dernier dans une grande volière un couple de 
Perdreaux; non-seulementils ont pondu, mais la poule a couvé 
ses œufs, et J'ai sept Perdreaux qui sont avec le père et la 
mére. » 

— M. le Directeur du Jardin d’acclimatation communique 
un extrait d’une lettre de Son Excellence Abraham Pacha, qui 
donne la liste suivante des multiplications obtenues en 4874, 
dans les faisanderies et sur les pièces d’eau du Jardin z0olo- 
gique de Beïcos récemment créées par Son Excellence : 


Goura couronné, Goura coronata.....:................ 4 
Éperonnier. Polyplectron chinquis (d’un seule poule). ..... 7 
HABoDan CC ERonnISETeMmMINEN NEA EEE EN CERN 3 
Faisanrvde Wallich. Catreus Wallichiv "0. 8 
— de Revnaud. Euplocomus Lineatus.............. a14 
— de Swinhoë. Euplocomus Siwinhoer ............. 17 
— , argenté. Phasianus nycthemerus................ 03 
TT VEISICOLONe PAUSTUNUSADENSICOlOM- CERN CE 8 
ne VÉNCLC NUS TAN USPREEUES LS CARE CE EEE EEE 21 
— de Mongolie. Phasianus Mongolicus............. 14 
mn ONE AU MA TEQNDICIA EEE RER CEE RER 63 
— de lady Amherst. Thaumalea Amherstiæ ......... 12 
= = DHANSANEE DEP TLC nt 
— — 1 DS ADS ES Pr RER DE UE 13 


Poulets de races diverses de choix (Padoue, Hambourg, etc.). 228 
CYAeRARCOUMMOoIr CYyYNUSNIYnICOUIS EE RUE CNE CCEL 2 
Céréopses cendrés. Cereopsis Novæ-Hollandiæ........... li 
Bernaches Nonettes. Bernicla Leucopsis................ 2 
Canards de la Caroline. Aix Sponsa.............. AO 

mt Mandarins. AP GAlEnNCULAlA ER REC EEE 3 

nn … IMIENONS (VALIÉLÉS AAOMESIIQUES) Ne % 6 


À la date de la lettre reçue de Son Excellence Abraham 
Pacha, ces A93 élèves étaient en bon état. 

— M. Carbonnier écrit à M. le Président : » Je suis heureux 
de vous faire connaître l’arrivée à Paris, en date de ce jour, 
de A8 Gouramis, et 14 autres poissons appartenant au genre 
Cyprin, le tout recueilli à Calcutta et rapporté jusqu’à Galles par 


TA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


M. Paul Carbonnier, puis expédié sur Marseille par le paquebot 
l'Ava. 

» Arrivés vendredi dans ce dernier port, ces poissons ont 
été reçus par notre bienveillant correspondant, M. Chevalier, 
qui leur a prodigué des soins jusqu’à ce qu’une élévation de 
température permit de les diriger sur Paris, opération qui 
vient d’être couronnée d’un plein succès. 

» Ces ÀS Gouramis, joints aux 22 que j’ai déjà, forment un 
total de 70 sujets en ma possession. 

» Je vous prierais, M. le Président, de vouloir bien faire 
examiner par notre Société, s’il n’y aurait pas lieu d'offrir dés 
maintenant, au Gouvernement, 20 sujets de cette précieuse 
espèce pour notre colonie algérienne. » 

M. Louis Livet transmet une demande de graines d’A ffacus 
Yama-mai et de Sericaria mori formée par M. Hignet. 

Dans une lettre ayant trait au même objet, M. Hignet com- 
munique l'extrait suivant d’une dépêche qui lui est adressée 
de Slatenegg (Carniole) par M. J. Mach, au sujet de ses édu- 
cations d'Attacus Fama-mai en pleine forêt. « Nous avons 
eu cette année, au mois de juin, une chaleur tropicale : 36° 
Réaumur au soleil! Mes chenilles avaient dévoré tout le feuil- 
lage, dans les taillis, et ne trouvaient plus ni à manger ni à 
s’abriter contre la chaleur. Je les fis transporter dans une vallée 
plus fraiche, espérant les y conserver; mais toutes néanmoins 
périrent en l’espace de quelques jours. Cependant, au mois de 
juillet, mon garde revenant d’une tournée en forêt m'apporta 
une magnifique chenille en train de filer sor cocon. Cet homme 
me raconla qu'ayant été visiter un endroit où j'avais, ya 
plusieurs années déjà, fait une éducation à même la forêt, 
il remarqua à terre des excréments de chenilles Yama-mai ; 
s'étant aussitôt mis en chasse, il ne tarda pas à trouver, en 
effet, sur les arbres voisins, plusieurs de ces chenilles qui se 
portaient à merveille, ainsi que le prouvait, d’ailleurs, le spé- 
cimen qu’il m'en rapporta. Ces chenilles descendent évidem- 
ment de quelques individus abandonnés sur ce point à la 
suite de mes essais ; l'espèce est donc bien positivement accli- 
matée. » 


PROCÈS-VERBAUX. 771 


— M. de Sauley adresse un nouveau rapport sur ses édu- 
cations d'Aftacus Fama-mai en 1874 (voy. au Bulletin, 
p. 672), et fait parvenir 36 grammes de graines de cette espèce 
provenant de sa récolte. — Remerciments. 

— La Section de sériciculture du Comité d” ao de 
Moscou, prie notre Société de vouloir bien lui procurer une 
certaine quantité de graines d’Atfacus Yama-mai, pour être 
distribuées à divers éducateurs. — Pour satisfaire à cette de- 
mande, le Conseil a décidé qu’il serait fait don au Comité de 
Moscou de 20 grammes de graine, dont moitié provenant 
des éducations de M. de Sauley, et moitié de celles de M. Bigot, 
afin d'augmenter l'intérêt des expériences qui doivent avoir 
lieu. : 

— M. le docteur Turrel accuse réception des graines d’Eu- 
calyptus globulus qui lui ont été envoyées, et exprime le désir 
d’essaver la culture du Sé/phion, dont il lui semble que 
la Société pourrait facilement se procurer de la graine, en 
recourant à l’obligeance de M. le consul de France à Tunis. 

À ce propos M. le docteur Cosson signale l'identité du 
Silphion de la Cyrénaïque avec le Thapsia garganica, 
dont il n’est tout au plus qu’une variété, et qui en partage 
toutes les vertus médicinales. Le Thapsia se rencontre en 
abondance sur certains points de nos possessions algériennes, 
particulièrement sur les hauts plateaux. Il serait donc inu- 
ile de faire venir de trés-loin et à grands frais une plante 
que nous avons sous la main. 

— M. Bossin adresse un rapport sur ses cultures de Tomate 
mexicaine (Physalis edulis), et y joint vingt paquets de graines 
de cette plante. — Remerciments. , 

— M. le général Khérédine annonce le prochain envoi 
d’un rapport sur la continuation de ses essais de naturalisation 
de végétaux dans la régence de Tunis. 

— M. Chatin écrit à M. le Président : « Je suis heureux 
d'offrir à la Société, afin qu'elle en complète la vuloarisa- 
tion, des noyaux de la belle et bonne pêche de Tullins. Le 
pêcher de Tullins, qui prospère dans les vignes de la vallée 
de l'Isère et dans celles de la Bourgogne exposées au midi, 


779. SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


demande sous le climat de Paris lPespalier, ou tout au moins 
le contre-espalier, à bonne exposition. On sait que cet arbre, 
toujours franc de noyau, dure en quelque sorte éternellément, 
par le simple recépage des pieds devenus trop vieux. 

» La glandée ayant été cette année d'une rare abondance, il 
ÿ aurait opportunité que la Société demandât à ses cor- 
respondanis des glands truffiers, pour ies répartir entre les 
membres. Il serait urgent de penser à cet approvisionnement 
afin que les glands passassent l'hiver stratifiés dans le sable, 
précaution qui devra être prise aussi pour les noyaux de pêche, 
sous peine de ne les voir lever qu'à la seconde année. Pour les 
olands la non-stratification aurait des conséquences encore 
plus graves, attendu que la plupart ne germeraient plus une 
lois que la dessiccation les aurait atteints. 

» Les noyaux de pêche m'ont été envoyés par mon ami 
M. Julien Bertrand, conseiller général de l’fsère, à qui la 
Société était déjà redevable d’un important envoi, récom- 
pensé, Je crois, par une de ses médailles. » — Des remer- 
ciments sont adressés à M. Chatin, pour son obligeant 
envol. | ; 

— M. Cordier, d'El-Alia (Algérie), accuse réception et 
remercie d’un envoi de graine d'Eucalyptus, et fait parvenir 
quelques renseignements sur les résultats que lui ont donnés 
diverses graines provenant de la Société. Notre confrère ajoute 
qu'ayant récolté cette année, pour la première fois, des graines 
d'Eucalyptus maculata, se fait un devoir de nous adresser 
un petit paquet de ces graines, qui, dit-il, sont excellentes et 
lèvent bien. 

» (LE maculata, est un arbre élégant par son feuillage 
d’un vert sombre luisant, la régularité de ses branches laté- 
rales et de son tronc droit; il résiste bien à la sécheresse, ce 
qui est une qualité; sa croissance, quoique moins rapide que 
certains de ses congénères, est bonne; quelques-uns, à la 
cinquième année, mesurent de 6 à 8 mètres de hauteur et 
35 à 40 centimètres de circonférence, à 1 mètre au-dessus du 
sol. » 

— M. Nicolas, de Mondovi (Algérie), remercie d’un envoi 


PROCÉS-VERBAUX. 71718) 


de graines qui lui a été fait, et prie la Société de vouloir bien 
continuer à le comprendre dans ses distributions. « J'ai vu 
dans un journal de France, que lon attendait un envoi consi- 
dérable de Silphion on Thapsia de Gyrénaïque, découverte 
précieuse due au docteur Laval. Vous m'obligeriez en me 
réservant quelques racines de cet intéressant végétal, et je 
serais heureux de pouvoir en tenter Pacclimatation dans notre 
contrée. 

» Le Thapsia pousse chez nous dans quelques îlots de terre 
privilégiés. Nul doute que son congénère ne réussisse pareille- 
ment avec quelques soins. » 

— M Ja maréchale de Santa-Cruz adresse la lettre sui- 
vante : 


Monsieur le Président, 


» Conformément à l'offre que je vous fis l’an passé, j'ai fait 
venir de Bolivie plusieurs semences de plantes alimentaires. 
Il est à regretter qu'en raison de la longueur du voyage et de 
leur passage à {ravers des latitudes extrèmement chaudes 
quelques-unes de ces semences soient arrivées en un si mau- 
vais élat qu'on a dù en jeter une grande partie, et que d’au- 
tres, telles queles Arracachas, ont été complétement perdues. 

» Ce qu'on à pu réunir, et c’est ce qui forme l’envoi que je 
vous adresse aujourd’hui, se compose de Pommes de terre de 
différentes espèces, d’Ocas ou hocas, de Quinoa, de Maïs et de 
Cañaqua. En laissant de côté les Pommes de terre et le Maïs, 
je ne vous parlerai que des espèces qui ne sont pas connues 
en France, ou qui ne le sont qu’imparfaitement, telles que le 
Quinoa(Chenopodium quinoa). Ce dernier produit une graine 
excellente et très-substantielle, et ses feuilles remplacent avan- 
tageusement les Épinards. C’est sur les plateaux de la Cordillère 
qu’on le cultive en Bolivie, ce qui fait supposer qu’il s’accom- 
mode mieux des climats froids et secs que d’une température 
chaude et humide. C’est une plante des plus intéressantes au 
point de vue de l’alimentation. Dans le même cas, sous le rap- 
port de la culture, se trouve la Cañaqua, dont la tige fournit 
une graine très-menue, et qui forme une partie de la nourri- 


774 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


ture des Indiens de Bolivie, sous forme de bouillie ; je crois 
peu probable que l’usage s’en répande en France ; mais peut- 
être pourrait-on l'utiliser en médecine, où elle pourrait de- 
venir un agent précieux par ses qualités antiphlogistiques, et 
surtout par son action sédative daus les accès de fièvre : on 
prend cette graine torréfiée et mélangée avec de l’eau, après 
l'avoir édulcorée. C’est en outre un spécifique contre le mal 
des montagnes c’est-à-dire ce malaise accompagné de dys- 
pnée et de congestion cérébrale qui se produit dans les alti- 
tudes élevées par suite de la raréfaction de lair. Enfin, les 
Ocas (Oxalis crenata) sont des tubercules féculents et assez 
sucrés, et sont employées de la même manière que les Pom- 
mes de terre. Elles demandent un climat plus doux et plus 
humide que les plantes dont Je viens de m'occuper. 

Voilà, Monsieur le Président, tout ce que j'ai reçu jusqu’à 
présent de Bolivie, en dehors des Arracachas; et, tel qu'il est, 
je prends la liberté d’offrir cet envoi à la Société d'acclima- 
tation. Je vous prie de l’agréer comme un faible témoignage 
de l'intérêt que je porte à l’œuvre si éminemment utile 
que vous poursuivez depuis plusieurs années, avec autant de 
persévérance que de succès, elc. — Remerciments. 

— M. Vavin écrit à la date du 16 novembre : « Un de mes 
collègues de la Société centrale d’horticulture, M: Masson, 
officier de marine, actuellement à Dakar (Sénégal), où 1l com- 
mande le Loiret, me prie de lui envoyer des graines d'Eu- 
calyptus de diverses espèces. La Société pourrait-elle en mettre 
une certaine quantité à sa disposition ?..……. 

» M. Masson voudrait chercher à acclimater l'Eucalyptus 
au Sénégal, et serait très-reconnaissant qu'on voulüt bien lui 
envoyer également d’autres graines. J'espère le présenter un 
de ces jours à notre Société, dont il deviendrait un des mem- 
bres les plus actifs. / 

» Mon fils ainé, qui est à bord de la Loire en qualité de 
commandant en second, actuellement à Nouméa, vient de 
m'envoyer une collection de Haricots de l'Ile de la Réunion, 
qui me semblent intéressants à étudier ; il me dit que la plu- 
part sont excellents. Nous verrons!..… 


PROCÉS-VERBAUX. 775 


» Mes pieds d’Arracacha continuent à bien végéter. Mon 
collègue Verlot m'a appris jeudi que ceux que je lui avais 
offerts. étaient aussi en très-bon état au Jardin des plantes. » 

— M. Albuquerque adresse de Rio-de-Janeiro des rensei- 
onements sur ses essais d'introduction de la culture de la vigne 
dans diverses parties du Brésil : « Pendant l’année 1873, ajoute 
notre confrère, J'ai créé à Rio-Grande-do-Sul un établis- 
sement d'horticulture, qui ne vécut que d'introductions faites 
d'Europe; je pense y avoir introduit en plantes vivantes, plus 
de 3000 espèces ou variétés. Rio-Grande-do-Sul n'étant qu’une 
ville de province, sans aucune importance, je viens de trans- 
férer ma résidence à Rio-de-Janeiro, toujours dans l'intention 
de m'occuper d’introductions horticoles ; le climat de Rio-de- 
Janeiro étant bien différent de celui de Rio-Grande, j'ai été 
obligé de me défaire de la presque totalité de mes collections; 
mais j'ai pu apporter encore à Rio-de-Janeiro A93 espèces et 
variétés de plantes introduites par moi, sans compter ma collec- 
tion de vignes qui compte aujourd’hui 169 variétés (en 1874 
et 1872, j'en ai reçu 15 variétés envoyées par le commissaire 
d'agriculture dés États-Unis, et quelques variétés envoyées par 
notre confrère M. J. Engaurran. de Toulon). 

» Je m’empresse donc, Monsieur le Président, de vous com- 
muniquer ma nouvelle adresse, en me mettant tout à fait à 
voire disposition, ainsi qu’à celle de notre Société, des desi- 
derata de laquelle je me ferai un vrai plaisir de m'occuper. Je 
vous prierai de vouloir bien me comprendre dans les distribu- 
tions de graines dont l'introduction pourrait être de quelque 
utilité au Brésil, surtout des graines d’arbres fruitiers des 
pays intertropicaux, ainsi que de celles des plantes indus- 
trielles de même provenance; des graines de Palmiers, de 
Cycadées, Pandanées, etc., me seraient aussi très-agréa- 
bles. » 

— M. P. Marés, propriétaire à Alger, demande à prendre 
part aux distributions de graines faites par la Société. 

— M. Joseph de Baye, en rendant compte de ses cultures de 
Chou à mille têtes et de Betterave globe rouge, dont les grai- 
nes lui ont été envoyées par la Société, demande à re- 


776 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


cevoir des semences de Mais et de Pommes de terre de 
Bolivie. 

— M. de la Rochemacé adresse quelques renseignements 
sur la variété de Blé, dite de la Roche, dont il offre un échan- 
tillon pour être mis en essai par la Société, et signale di- 
verses races ou variétés locales d’animaux et de plantes 
suivantes qui lui semblent particulièrement intéressantes à 
propager : « Comme l’un de ses membres récemment admis, 
voici le contingent de renseignements que je crois devoir lui 
fournir. Je Jui signalerai : 

» 1° La culture des panais aux environs de Morlaix, variété 
supérieure à celle de Paris comme plante fourragère (graine 
de Morlaix). 

» 2 La race porcine de Saint-Nicolas-du-Pelem (environs de 
Corlay) issue, dit-on, de croisements avec le sanglier; poids 
au moins égal sinon supérieur à celui des craonnais; entre- 
tien moins dispendieux, puisque les porcs que j'ai vus là cher- 
chaient eux-mêmes leur provende. Le fait s'explique zoologi- 
quement par l’ampleur de la poitrine en largeur et profondeur, 
la courbure cylindrique des côtes, la largeur du rein; ils sont 
énorraes et près de terre? 

» 3° Le vin de Kotnar Moldare ou Valachie), le seul vin du 
monde qui ait, avec les qualités des autres, une teinte ver- 
dâtre qui lui est propre et rappelle celle de l’absinthe ; con- 
naître et obtenir le cépage qui le produit. 

» 4° Les raisins comestibles vendus sur les bateaux à vapeur 
du Danube aux escales de Belgrade, Semendria, Widdin : 
ampleur de forme et de grain, poids des grappes, qualité et 
belle couleur rousse. — Dénomination inconnue. » 

‘erdun, à la date du 25 


septembre : 

» Je prépare, pour être offerte aussi à ceux de mes collègues : 
qui s'occupent d arboriculture, une nombreuse collection de 
fruits et de graines fertiles de presque toutes les essences 
exotiques cultivées et naturalisées dans le midi et le sud-ouest 
(essences résineuses ou à feuilles caduques, dont la seule 
nomenclature remplirait plusieurs feuillets). 


PROCÈS-VERBAUX. 777 


» J’ai en préparation un mémoire fort étendu sur les 
produits en fruits, graines, qualités industrielles ou com- 
merciales de ces mêmes essences, que vous voudrez bien 
recommander tout spécialement à l'attention de la Section 
des végétaux et à la Commission des récompenses. 

» Ces détails nombreux et vrais ouvriront, je crois, une 
voie toute nouvelle, à l’arboriculture française malheureuse- 
ment tributaire de contrée lointaines, où mal intentionnées 
pour notre France si éprouvée. 

» J'ai un Cèdre blanc de l'Atlas à peine âgé de seize ans, 
mais très-visoureux, qui est couvert en ce moment de centaines 
de petits cônes remplis de polien d’un Jaune d’or qui se répant 
par épais nuages dès qu’on agite légèrement les branches de 
moyenne hauteur. Le Cèdre de l’Inde n’en porte que 
sur celles qui sont les plus élevées ainsi que le Cèdre du 
Liban. 

* Un Sequoia sempervirens de vingt ans, qui mesure à hau- 


teur d'homme 3 mètres 70 centimètres, va bientôt entrou- 


vrir les strobiles qui ne paraissent qu’à l'extrémité des plus 
jeunes ramilles. Les vieux strobiles encore infertiles jonchent 
le sol, et les folioles couvrent le sol d’une épaisseur de 15 à 
16 centimètres. Les très-nombreux strobiles foni gracieuse- 
ment inchiner les branches de sommet et n’empêchent point 
néanmoins la tige supérieure de fournir un jet de plus de 
4 mètre 20 de longueur. Presque tous les conifères exoti- 
ques donneront des cônes à graines ferules. Je ne m'explique 
pas l’infécondité de ceux des Epicéa et de ceux de Pin du Lord 
âgés de quarante à cinquante ans, tandis qu'un Abies .Pin- 
sapo âgé de trente ans donne pour la deuxième fois de 
gros cônes droils, érigés el à graines fertiles. 


Colombes Longhups ; il y joint les renseignements ci-après : 
« J’ai acheté le 48 avril dernier au Jardin d’acclimatation 
des semences de Zapallito et de Melon à rames; les graines 


de Zapallito ont été mises en pleine terre bien fumée au 


commencement de mai, j'ai conservé trois pieds seulement 


qui sont devenus forts et. m'ont donné quelques fruits; j'en 
3€ SÉRIE, T. I. — Décembre 1874. 50 


M. J. Clarté adresse un rapport sur son cheptel de 


778 SOCIÉTÉ D ACCLIMATATION. 


ai fait cueillir à partir du 10 septembre et préparé successi- 
vement comme l’indique M. Balcarce ; farcis, ils ont été trouvés 
exquis ; cuits dans le pot au feu, c’est un légume délicieux ; en 
purée, c’est également un mets excellent. 

» Ce petit potiron (le plus gros de ceux que j'ai récoltés 
mesure 50 centimètres de circonférence) laisse bien loin 
derrière lui toutes les autres variétés de citrouilles, courges 
et potirons gros et petits ; 1l n’a en réalité de commun avec 
elles que le nom et l'apparence. 

» Les graines de Melon à rames ont été plantées en petits pots 
mis sous cloche et ont levé assez vite ; mais les jeunes replans 
mis en pleine terre et préparés comme les autres melons ont 
été mangés par les limaces. J'ai planté de nouvelles graines 
cette fois en pleine terre sous cloches au commencement de 
juin seulement; sous l'influence de la chaleur elles ont levé 
rapidement, et les jeunes plantes sont devenues fortes très- 
vite; j'en ai ramé quelques-unes et ai laissé courir les autres ; 
celles ramées ont vite garni les rames, mais les fruits sont 
restés plus petits que ceux du pied que j'avais laissé courir ; 
quelques-uns seulement sont arrivés à maturité dans le 
courant de septembre; la chair, qui en est verte, est fine, 
fondantie, très-juteuse, succulente, ayant de l’analogie avec 
celle de la pêche, et bien supérieure à la plupart des autres 
melons. » 

— M. Geoffroy Saint-Hilaire dépose sur le bureau une 
note de M. le docteur Turrel sur une espèce. rustique de 
Bambou, confondue jusqu'ici à tort avecle Bambusa gracilis. 
(Voy. Bull., p. 690.) 

— M. le docteur Maurice Girard fait connaître les heureux 
essais de croisements tentés par M. Berce, entre les Affacus 
Yama-maï et Pernyi. M. Berce a obtenu, de ces deux espèces, 
des métis féconds dont la race, très-vigoureuse, paraît offrir 
un véritable intérêt. Notre confrère promet de donner pro- 
chainement de nouveaux détails sur ce fait curieux de 

métissage. 

— M. Maurice Girard fait hommage à la Société d’un 
exemplaire de l'ouvrage qu’il vient de publier sous le titre : 


PROCÈS-VERBAUX. 779 


« Le Phylloxera de la vigne, son organisation, ses mœurs ; 
choir des procédés de destruction », travail dans lequel notre 
savant confrère s’est attaché à condenser les notions les plus 
précises et les plus utiles sur ce redoutable hémiptère, et 
à combattre maintes erreurs répandues à son sujet. C’est un 
petit volume indispensable à tous ceux dont les vignes sont 
envahies par l’insecte, car ils y trouveront des indications pré- 
cises sur les moyens employés pour combattre ce fléau. — 
Remerciments, 

— M. Millet donne d’intéressants détails sur le Phylloxera, 
les travaux du congrès viticole de Montpellier et les divers 
moyens proposés ou mis en pratique pour détruire le fléau. 
M. Millet n’en connaît qu'un efficace contre le Philloxera ailé, 
c’est la protection et la multiplication des oiseaux ennemis 
nés de l’insecte. Notre confrère signale également les services 
qu’on est en droit d'attendre de l'introduction chez nous des 
cépages américains. 

— M. Carhonnier donne lecture d’une note (voy. le Bull.) 
sur les mœurs du Fondule, Gyprin de Amérique du Nord, 
introduit par ses soins en Europe et dont il a obtenu des 
reproductions. Des spécimens vivants de ce poisson, de 
divers âges, sont mis par notre confrère sous les yeux de 
l’Assemblée. 

— M. Rampon dépose sur le bureau un échantillon de Haricot 
américain qui lui paraît intéressant à cultiver, et donne lecture 
de la note suivante sur le Tomate du Mexique et sur la culture 
de cette plante : «En lisant le Bulletin mensuel de la Société 
d’acclimatation, je me suis aperçu que quelques erreurs, 
. provenant sans doute de mauvais renseignements, se sont 
glissées dans la description de la Tomate du Mexique; je vais 
tâcher ici de les rectifier en garantissant l’exactitude des 
détails que je donne, car je les puise dans mes souvenirs 
encore frais (il n'y a que deux ans que je suis revenu pour Ja 
dernière fois du Mexique, où j'ai fait trois voyages). 

» Le Physalis edulis s'appelle dans le pays Tomate, corrup- 
tion de son véritable nom aztèque qui est Tomatl. Le nom de 
Ji-iomate sert à désigner notre Tomate rouge (Lycopersicum), 


780 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


» Le Tomate n’est pas employé au Mexique en médecine ou 
en pharmacie proprement dites ; seulement les gens du peuple 
l’emploient en cataplasmes sur la gorge lorsqu'ils ont une irri- 
tation du larynx, et les commères le préconisent dans une 
foule de cas qu’il serait trop long d’énumérer, et qui sont 
plutôt du domaine du charlatanisme que de celui de la mé- 
decine ; un pharmacien mexicain a pu tenter de faire un sirop 
avec ce fruit, mais cela ne veut pas dire que son usage soit 
répandu dans le pays; je n'avais jamais entendu parler des 
propriétés médicales du Tomate ; mais pour plus de sécurité, 
j'ai interrogé à ce sujet plusieurs personnes compétentes, 
entre autres M. Lamarque, qui a exercé longtemps la pharma 
cie à Puebla; elles n’en ont jamais entendu parler non plus. 

» La grande quantité de mucilage contenue dans la capsule 
qui recouvre le fruit, propriété du reste commune aux graines 
de Solanées, est utilisée par les dames mexicaines ; elles font 
macérer ces capsules dans de l’eau froide, en retirent le mu- 
cilage par expression, et composent ainsi une bandoline excel- 
lente et qui passe pour très-tonique pour la chevelure. 

» Je nai jamais mangé ni entendu dire qu’on en mangeäi 
les feuilles en guise d’épinards; la personne qui aura donné 
ce renseignement aura confondu la feuille du Tomate avee 
celle d’une espèce de plante qui s'appelle Quelite dans le 
pays. 

» Le goût du Tomate, légèrement aigrelet, surpasse de 
beaucoup en finesse celui de notre Tomate rouge; la quantité 
prodigieuse de baies que produit un seul pied, le peu de 
soins que nécessite sa culture, mérite qu’on lui fasse les hon- 
neurs de l’acclimatation. Cependant je doute qu’il donne un : 
produit marchand dans ces régions, car, lorsqu'il est en plein 
développement, les premières gelées viennent entraver son 
rendement ; il lui faut un climat plus chaud ; celui du midi de 
la France et de l'Algérie lui conviendrait parfaitement; ïl 
est vrai que l’on peut hâter son rendement en le semant de 
bonne heure sous châssis et le repiquant lorsque les geléés ne 
sont plus à craindre ; mais malgré cela, la‘ plante ne donne 
pas tout ce que l’on peut attendre d'elle. 


PROCÈS-VERBAUX. 781 


» ]l y a plusieurs variétés de cette plante et j'en cultive deux 
en France depuis 1867, l’une donne les fruits vert jaunâtre 
dont parle M. Balcarce ; l’autre produit un fruit violet dont je 
m'engage à donner de bonne graine à la Société. 

» Devant partir prochainement pour PAlgérie, je vais y 
tenter l'introduction de diverses plantes du Mexique qui me 
paraissent uliles, et je tiendrai la Société au courant de mes 
essais. » 

— Il est déposé sur le bureau : 

1° Congrès viticole de Montpellier. Discours prononcé par 
M. Drouyn de Lhuys, président, le 26 octobre 1874. 

2 De la part de M. Vavin: 

° Un numéro du Journal des Campagnes renfermant un 
article de notre confrère sur le Cerfeuil bulbeux et sa 
culture. 

3° Un numéro spécimen de la Revue illustrée des Lettres, 
Sciences, Arts et Industrie dans les deux mondes. Paris. 

h° “vision des espèces Indo-archipélagiques du Groupe 
des Apogonini, par P. Blecker. Harlem, 1874. 
5° L'Agriculture à l'Exposition de Vienne, par M. Eugène 
Tisserand, inspecteur de l’agriculture. (Rapport publié par 
le ministère de l'Agriculture et du Commerce). 

5° De la part de l’auteur, M. Ladislas de Wagner : 

Documents sur l’économie rurale en Hongrie (Land-und 
golkswirthschaftliche Zustände in Ungarn). 

Notice sur le Tabac. (Extrait de son Handbuch der Taback- 
und Cigarren-Fabrication.) 

6° Discours prononcé par M. Dumas, aux funérailles de 
M. Élie de Beaumont. 

7°*Discours d'inauguration des conférences de la salle 
Oller, par M. Wilfrid de Fonvielle. 

8 Notice biographique sur Eugène-Louis-Melchior Patrin, 
sunéralogiste lyonnais, par le docteur P. Bertrier. De la part 
de l’auteur. ? 

9% Programme de la première session du Congrès inter- 
national des Américains, qui se tiendra à Nancy du 19 au 
22 juillet 1874. 


782 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. 


10° Programme du concours de 1874, à Thiberville, de la 
Société libre d'agriculture, sciences, arts et belles-lettres de 
l'Eure. 

41° Bibliographie ichthyologique (Brbliotheca ir 
et piscatoria) par D. Mulder Bosgoed, in-5°. Harlem, 1874. 

4% Documents relatifs aux travaux de la Commission de 
géographie commerciale. Paris, octobre 1874. 

13° Classification de 160 huiles et graisses végétales ; 
2° édition, suivie de la classification de 95 huiles et graisses 
animales par M. Bernardin, in 8°. Gand, 1874. De la part de 
l’auteur. 

14° Fish culture compared in ünportancewith avan 
speech of Hon. Robert B. Roosevelt of New-York in the 
house of representatives. May 13, 1872. De la part de M. Seth 
Green. 


SÉANCE GÉNÉRALE DU A8 DÉCEMBRE 4874. 


Présidence de M. DROUYN DE Lauys, président. 


— Le procès-verbal de la séance précédente est lu et 
adopté. | 

— M. le Président proclame les noms des membres admis 
par le Conseil, dans sa séance du 11 décembre : 


MM. Présentateurs. 
BADin (Édouard), directeur de la Compagnie spé- { E. ‘Badin. 
ciale d’assurances et réassurances marilimes, | Drouyn de Lhuys. 
21, rue Vivienne, à Paris. N. Meyer. 
Dupin. 


BARTHELEMY (Gustave), propriétaire), 10, rue | AlGcofRro sant aimes 


Saint-Séverin, à Paris. | Camille Tollu 
Deyrolle fils, 
BELLOT DE Buüsy, propriétaire, 81, boulevard | ae 
de la Reine, à Versailles (Seine-et-Oise). | raveret-Wattel 


{ E. Bessel.' 
/ Drouyn de Lhuys. 
A. Geoffroy Saint-Hilaire.. 


CorGnarD (Octave), garde général des forêts, à 
Sablé-sur-Sarthe (Sarthe). 


 PROCÈS-VERBAUX. 788: 


LAcOURTIE (Adrien), propriétaire au château de 


Comte d’Éprémesnil. 
la Planche, par Ponthierry (Seine-et-Marne). P à 


D: Labarraque. 

DELLARD (le baron Paul), attaché au cabinet du | Drouyn de Lhuys. 
ministre de la guerre, 17, boulevard Bourdon, / A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
à Paris. Raveret-Wattel. 


BORDÉ (Louis-Alphonse-Émile), à Saint-Gond, | Pau 


commune d’Oyes, par Baye (Marne). | ds ina 


| P. Blacque. 


| Drouyn de Lhuys. 


GONIDEG (le comte Constantin le), 6, cité Marti- 


k Vicomte de Lestrange. 
gnac, Paris. 


Edgar Roger. 
JAMONIÈRES fils (Arthur des), ancien RE Drouyn de Lhuys. 
au château de la Gérardière, commune du) A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Cellier (Loire-Inférieure). | de la Rochemacé. 
LABUYÈRE (Julien-Francois-Georges), avocat, 8,{ Drouyn de Lhuys. 
place de la petite Hollande, à Nantes (Loire-{ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 


Inférieure). Jules Grisard. 
Dupin. 
LAMBERT (Léon), avocat, 2, rue du A septembre, : uv 
f j }» jt Sp A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
à Paris. ù 
L. Nicolas. 
Blanchard. 


LeBAuDY (Julien), 73, boulevard Haussmann, à 


Paris. Drouyn de Lhuys. 


A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
LE CEswe (Charles), au château de la Ricodière, / Jules Grisard. 
par Vire (Calvados), et à Paris, 45, Ra Guichardet. 


Joséphine. Ponsard. 
in. 

LEGLISE, conseiller général, maire de Saint- PR 

Martin-de-Seignaux (Landes). “iee 

Poupinel. 


D' Bonnafont. 
À. Geoffroy Saint-Hilaire. 
Maurice Girard, 
PoussiNEAU (Auguste), propriétaire, au château { Blanchard. 

de Bélair, près Mettray (Loire-Inférieure), et à { Drougn de Lhuys. 

Paris, 14, rue Boissy-d’Anglas. A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
REGNIER (Georges), négociant, à Dijon (côte: | © a 

l'Or EÉPDESRE ? J  Drouyn de Lhuys. 

mou [ A. Geoffroy Saint-Hilaire. 
| Drouyn de Lhuys. 


MARISMAS (marquis de Las), 10, rue de l'Élysée, 
à Paris. 


RENAN (Allain), ancien banquier, 34, rue de 


Longchamps, à Neuilly (Seine). FC 'eONON EAN ENRTe. 


Le Fort des Ylouses. 


__ M. le Président donne lecture d’une lettre par laquelle 


784 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


notre savant confrère, M. l’abbé Perny, sollicite le concours 
de la Société pour la création d’une académie européenne au 
sein de la Chine. — Cette demande est renvoyée à l'examen 
du Conseil. 

— \. le Secrétaire procède au dépouillement de la corres- 
pondance. | 

— M. Blest-Gana, ministre plénipotentiaire du Chili, 
adresse la lettre suivante : 


« Monsieur le Président, 


» J'ai l'honneur de vous remettre un programme et autres 
publications, touchant une Exposition internationale qui doit 
s'ouvrir à Santiago du Chili, en septembre 1875. 

» J'ai pensé que la Société d’acclimatation pourrait avoir 
de l’intérêt à se faire représenter dans ce concours, qui a lieu 
dans un pays avec lequel la Société pourrait établir des 
échanges mutuellement avantageux. 

» C’est dans ce but, Monsieur le Président, que je vous 
envoie les documents dont J'ai fait mention. En parcourant 
le programme, vous trouverez qu'il y a parmi les groupes 
dans lesquels on a divisé les différentes sections de l'Exposi- 
tion, une place importante où la Société, dont vous êtes le 
digne Président, pourrait exposer les produits qu’elle cultive, 
et cette Exposition aurait l’avantage de nous faire profiter des 
acquisitions et des progrès que la Société d’acclimatation a 
faits, en même temps que celle-ci serait à même de chercher, 
ae les produits du Chili, ceux qui pourraient avoir de 

limportance pour ses travaux. 

» Me mettant à voire disposition pour tout autre renseigne- 
ment, dont vous pourriez avoir besoin sur l'Exposition du 
Chili, je vous prie d’agréer, etc. 

— La Société de géographie adresse des lotte d'invitation 
pour sa deuxième assemblée générale de 1874. 

— M. Thomas Maindonald fait parvenir des remerciments 
pour sa récente admission. 

—- M. Perronne, percepleur à Manthelan (Indre-et-Loire), 


PROCÈS-VERBAUX. 785 


remercie de son admission, et demande à recevoir en cheptel 
un couple de Faisans vénérés. 

— M. de Amezaga remercie également de son admission 
et adresse quelques renseignements sur des éducations 
d’Attacus Yama-mai faites sous sa direction, chez son père, 
M. le marquis de Riscal : 

«On commença en 1871,dit M. de Amezaga, avec 25 grammes 
de graine achetée à MM. Bérard, de Romorantin. Tous les 
vers, nés trop tôt, moururent ; mais j’eus le temps de faire 
venir 10autres grammes, avec lesquels, à la fin de la dernière 
campagne, nous sommes arrivés à produire 880 grammes de 
graine, malgré diverses circonstances défavorables. 

» Les vers sont habituellement tenus dans une chambre 
pendant les premiers Jours qui suivent leur naissance, puis 
placés jusqu’à la fin de lPéducation dans. un taillis de chêne 
tauzin. Aucune précaution n’est prise ni contre les oiseaux, 
ni. contre les guêpes. Nous avons voulu que les vers soient 
vainqueurs par le nombre, selon le mot de M. Personnat. 

» Le taillis, où a lieu l'élevage, fait partie d’une terre 
située dans la province de Cacères (Estremadure), à deux 
kilomètres de la ville de Guadalupe, sur le versant nord des 
montagnes qui séparent les bassins du Tage et du Guadiana. 

& hauteur au-dessus du niveau de la mer, que je préciserai 
plus tard, doit être d'environ 1000 mètres. » 
M. Gorry-Bouteau, de Belleville (Deux-Sèvres), demande 
à prendre part aux concours de la Société. (Propagation de 
divers végétaux utiles et particuliérement du Galéga et du 
Pastel.) — Renvoi à la Commission des récompenses. 

— M. de la Rochemacé adresse une note sur la situation 
chmatérique, la nature du sol, elc., de sa propriété de Couffé 
(Loire-Inférieure), où il désirerait tenter l’acelimatation, en 
liberté, du Colin de Californie, du Léporide et de lAgouti, 
ainsi que la culture de l’Eucalyptus, à l'aide de recépages 
annuels. 

— MM. Richard-Bérenger, Alfrède Dupont, Garnot et de 
Miffonis, accusent réception des divers animaux qui viennent 
de leur être envoyés à titre de cheptels. 


786 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


— M. Abaye demande à recevoir en cheptel des Lapins à 
fourrure, et prie de considérer comme non avenue la dé- 
mande de montée d'Anguille qu'il avait primitivement 
adressée. 

— M. Léon Simon fait parvenir un rapport sur l’état de 
son cheptel de Faisans vénérés. 

— M. Paul Gervais demande que la Société veuille bien lui 
remplacer le mâle de son couple de Canards Carolins qu'il 
vient de perdre. 

— M. H. de Montrol, de Juzennecourt (Haute- Marne), de- 
mande à recevoir, en cheptel, un couple de Canards Manda- 
rins. 

— M. E. Rossignol, adresse une demande de Faisans ver- 
do. en ue et d’un lot de Pommes de terre Marjolin 

à œil rose. 

— M. Genesley, de Laval (Mayenne), rend compte de son 
cheptel de Cygnes noirs, et renouvelle sa demande de Kan- 
gourous de Bennett. 

— M. Bussière de Nercy demande à recevoir en cheptel 
quelques Poules de Crevecœur, de Houdan ou de Padoue, 
ainsi qu'un couple de Colins de Californie. 

— M. Almire Derré, de Sablé-sur-Sarihe, accuse réception 
du couple de Canards Mandarins qui vient de lui être expé- 
dié, et adresse une demande en cheptel de volailles de très- 
grosse espèce. — Dans une seconde lettre, M. Derré demande 
quelques renseignemeuts au sujet des divers cheptels d’ani- 
maux qui lui sont accordés. 

— M. Fessart demande à recevoir en cheptel une paire de 
Faisans vénérés et une de versicolores. 

— M. Billard, de Pontlevoy, exprime le désir de ne point 
conserver plus longtemps les Léporides qu'il détient en 
cheptel. 

— M. Raveneau-Huard, d'Angers, prie la Société de lux 
faire connaître s’il a été donné suite à sa demande d’un cheptel 
de Faisans vénérés, et que, dans le cas où cette demande ne 
pourrait être accueillie, on veuille bien lui accorder au 
moins des Faisans de Swinhoé ou de quelque autre espèce. 


PROCÈS-VERPBAUX. 787 


— M. Spencer Baird, commissaire général des pêcheries 
des États-Unis, annonce l’envoi de nouveaux exemplaires de 
son rapport sur les pêcheries maritimes, ainsi que la première 
partie d’un travail sur le même sujet qu'il vient de livrer à 
l'impression. M. Baird veut bien offrir d’adresser également 
à la Société les divers ouvrages publiés dans ces derniers 
temps sur la pisciculture en Amérique. —Remerciments. 

— M. Hignet, de Varsovie, rend compte de ses éducations 
de Vers à soie, et renouvelle sa demande de graine d’Attacus 
Yama-mai. 

— En accusant réception du lot de graine d’Affacus Yama- 
mai qui lui a été adressé, M. le docteur Il. Dorner, secré- 
taire de la Société zoologique de Hambourg, annonce que cette 
association doit prochainement organiser une exposition de 
toutes les espèces de Vers à soie connues, en même temps que 
des produits bruts où manufacturés de ces insectes, ainsi que 
des appareils et machines utilisés en sériciculture et dans 
l’industrie des soies. M. Dorner demande que notre Société 
prenne part à cette exposition, et prévient que les frais de 
toute nature occasionnés par l'envoi des objets exposés se- 
raient généreusement supportés par la Société de Hambourg. 
— Renvoi à l'examen du Conseil. 

— M. Waillyadresse de Londres à M. le Secrétaire général 
an rapport sur ses éducations d’Atfacus Yama-maï en 1874. 

— MM. Robert Propach et Cie, manufacturiers à Lyon, dé- 
sirant mettre en œuvre de la soie d’Affacus Yama-maï, 
prient la Société de vouloir bien leur céder des échantillons 
de cette soie ou leur indiquer les personnes qui pourraient en 
mettre à lear disposition. 

— M. Gellineau, de Barbézieux (Charente), demande à re- 
cevoir divers végétaux en cheptel. 

— MM. Heuzey-Deneirouse, de Montrol, de Rodellec et 
Trempé, ainsi que la Société d’horticulture d’Étampes, accu- 
sent réception et remercient des divers envois de graines el 
de tubercules qui leur ont été faits. 

— M. Xavier Bernard, qui a introduit à Champagny-sous- 
Varennes (Haute-Marne), la culture du cépage américain dit 


788 SOCIÉTÉ DACCLIMATATION. 


Cancord noir, originaire de l'Illinois, signale les avantages 
que présente cette variété, dont il offre quelques plants à la 
Société. Devant, d’ He rre se rendre prochainement en Amé- 
rique, M. Bac) se mêt à notre disposition pour rapporter 
de ces plants autant qu’on en pourrait désirer. 

— M. de Coutans demande de la graine de Maïs de Bo- 
livie. 

— M. Vavin adresse un numéro du Journal des campagnes 
renfermant un article dans lequel il donne quelques détails 
sur un nouveau légume, le Daicon ou Radis du Japon. Notre 
confrère y joint quelques graines de cette plante. — Remer- 
ciments. 

— M. Lebeau accuse réception et remercie des diverses 
araines ou tubercules qui lui ont été adressés, et demande 
quelques renseignements sur le mode de culture le plus con- 
venable pour ces végétaux. 

-— M. le docteur Weber dépose sur le bureau de la graine 
et des spécimens d’une variété particulière de Courge sur la- 
quelle ii donne les renseignements suivants: € Cultivée depuis 
quelques années en Alsace, où elle est connue sous le nom de 
Concombre d'hiver, cette Courge paraît être entièrementnou- 
velle pour l’horticulture parisienne, et son introduction offri- 
rait, Je crois, un grand intérêt. Elle se conserve parfaitement 
pendant tout l’hiver, et peut se manger de diverses façons, 
soit comme hors-d’œuvre frais, sous forme de salade, soit 
comme légume, préparé au jus ou autrement. Elle serait cer- 
lainement une ressource précieuse pour nos tables pendant 
hiver, d'autant plus que sa saveur est entièrement diffé- 
rente de celle des autres Courges. » — Remerciments. 

— M. Maurice Girard donne lecture d’une note sur les édu- 
cations faites par M. Berce, de métis des Vers à soie du chêne 
de la Chine et du Japon (Aéfacus Pernyr et Fama-mai). — 
Voy. au Bulletin. 

— M. Ramel rend compte de la parfaite réussite en Algérie, 
du Haricot chocolat ou Haricot Vavin, qui résiste fort bien à 
la température élevée du pays. 

Notre confrère signale, en outre, un article de la Pal: 


 PROCÈS-VERBAUX. 789 


Mall Gazeti2, sur l'utilité de propager la Truffe en Australie, 
par des semis de glands de chênes truffiers. 

M. Millet pense qu’on ne saurait trop enconrager les ten- 
tatives d’acchmatation de la Truffe en Australie, mais il fait 
observer qu'il ne faudrait pas se méprendre sur la dénomina- 
tion de chénes ou glands truffiers. La Truffe n’est pas, comme 
certaines personnes le croient, le produit d’une galle ou le 
résultat d’une piqüre d'insectes sur les racines du chêne; car, 
c'est un cryptogame souterrain d’une nature analogue à celle 
des championons comestibles qu'on récolte au milieu des 
taillis peuplés de chênes ou d’autres bois. M. Millet insiste sur 
ce fait que la présence du chêne n’a d’autre action que de favo- 
riser la production des Truffes par le couvert que son feuil- 
lage donne au sol, ainsi que cela à lieu, d’ailleurs, pour 
d’autres essences forestières. 

— M. Geoffroy Saint-Hilaire donne lecture du bulletin 
mensuel du Jardin d’acclimatation (voy. au Bulletin). 

— M. Collardeau dépose sur le burean des échantillons, pro- 
venant de ses cultures, de plusieurs variétés de Pommes de 
terre qu'il ent de la Société. 

M. Vavin présente quelques observations au sujet des 
noms sous lesquels sont désignées ces diverses Pommes de 
terre. 

— M. le Directeur du Jardin d’acclimatation met sous les 
yeux de l'assemblée de remarquables échantillons de plusieurs 
variétés d’Aubergines cultivées au Jardin d’Hyères. 

— M. Millet rend compte des diverses questions séricicoles 
traitées au congrès de Montpellier (voy. Bulletin). 


ILest déposé sur le bureau : 


4° De la part de M. Carbonnier : 

Cataloque raisonné des Mollusques terrestres et d'eau 
douce de la Gironde, par M. T.-B. Gassiees. 

2 Tableaux de population, de culture, de commerce et 
de navigation, formant, pour l’année 1871, la suite des ta- 
bleaux insérés dans les notices statistiques sur les Colonies 
françaises. 


“ 


790 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. é 


3° De la part de M. l'abbé Perny: * 

Projet d'une Académie européenne au sein de la Chine 
(plusieurs exemplaires). 

h° Compte rendu des travaux de la commission de surveil- 
lance de l'Exposition permanente des Colonies en août et sep- 
tembre 1874. 

Il est offert à la Société : 

4° De la part de M. Wailly (de Londres) : 

Des graines de Sericaria mori provenant des éducations 
faites par son fils. 

2° De la part de M. le baron Von Mueller : 

Des graines de treize espèces d'Eucalyptus. 

3° De la part de M. P. Ramel : 

Des graines d’Eucalyptus globulus. 

h° De la part de M. Léo d’Ounous : 

Des graines de divers végétaux. 

5° De la part de M. le docteur Mongrand : 

Une collection de graines de Chine. 

6° De la part du Jardin d’acclimatation : 

Des graines de Soja hispida. 

7° De la part de M. Thozet : 

Une collection de graines de végétaux australiens. 


Le Secrétaire des séances, 


RAVERET-WATTEL. 


“# 


IT. FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 


Pisciculture et élevage des animaux domestiques 
en Chine. ; 


M. Colton-Salter, ex-consul des États-Unis à Hankow., ville située à sept 
cents milles (112 myriamètres 63) en amont du Yang-tse-Kiang, a envoyé au 
New York Times les renseignements suivants sur la pisciculture en Chine, 
et sur les procédés artificiels employés dans ce pays pour la multiplication 
de toutes espèces d’animaux comestibles. 

Sur le Yang-ise-Kiang, grand fleuve de trois mille milles (480 myriamè- 
tres 27) de longueur, on trouve des milliers d’établissements consacrés à 
la culture artificielle du poisson. Par les traités, le fleuve n’est ouvert au 
commerce qu’a Ching-Tsing, Kin-Kian et Houkow, mais je l’aiexploré jus- 
qu’à Yochow et jusqu’au lac Yung-Tsing, le grand lac de l'empire. 

Les Chinois sont surtout un peuple ichthyophage, et si l’on songe que 
d’après quelques géographes ce grand pays a 500 millions d'habitants, on 
peut imaginer l'énorme consommation de poisson qui s’y fait et à laquelle 
on ne peut suflire que par la culture artificielle, L’alose (sam-li), par exem- 
ple, qui est forte et excellente au goût, est produite presque exclusivement 
‘par des moyens artificiels, et transportée dans toutes les parties de l’empire 
dans de grands vases en porcelaine grossière. 

La densité extrême de la population de la Chine a surexcité en quelque 
sorte l’industrie humaine en ce pays, et il en est résulté des efforts considé- 
rables et suivis de succès pour arriver à produire des moyens de subsistance 
suffisants. 

C’est ainsi, en ne prenant pour exemple que l’incubation artificielle, que 
le voyageur qui parcourt le monde verra combien peu l'Amérique et PEu- 
rope sont avancées sur ce point. En Chine, au contraire, il verra dans chaque 
village des troupeaux de poulets, de canards et d’oies, et qui comptent jus- 
qu’à cinq cents têtes à la fois. Un enfant, ayant à la main une baguette de 
bambou, les conduit, et tous ces volatiles sont venus par des procédés arti- 
‘ficiels. 11 en résulte qu’en Chine la volaille est à très-bon marché et que l’on 
peut acheter jusqu’à dix bons poulets pour mille pièces de cuivre (5 francs 
environ). Les œufs sont également à bon marché, parce que les Chinois 
possèdent des moyens d’accroître la fécondité des oiseaux, et l’on peut acheter, 
même dans les villes, cinq œufs pour l'équivalent de 5 centimes. 

On est encore profondément ignorant, il faut le reconnaître, dans tous les 
autres pays, des ressources de cette merveilleuse contrée. 

(Journal officiel.) 


LL: : 


# 


7192 


SOCIÉTÉ, D’ACCLIMATATION. 


Acclimatation du Chameau aux États-Unis. 


Dans l'État de Nevada (États-Unis), près de la rivière Larson, il y a dans 
une ferme un troupeau de vingt-six chameaux qui tous, excepté deux, y ont 
été élevés. Il y a quelques années, neuf ou dix de ces animaux ont été im- 
portés dans la contrée, mais deux seulement s’y sont acclimatés et ont Fine 
naissance aux vingt-quatre qui existent actuellement. L 

Ces Chameaux appartiennent à des Francais, qui n’ont pas eu, pour les 
élever, plus de difficultés qu’ils n’en auraient eu avec le même nombre d’ânes 
ou de chèvres. La ferme où ils se lrouvent est sablonneuse et stérile à l’ex- 
trême, mais les animaux s’y développent d’une facon satisfaisante, bien 
qu'ils n’aient comme nourriture que les arbrisseaux à feuillage épineux et 
ies herbes amères que le bétail dédaigne. 

Abandonnés à eux-mêmes, leur plus grand plaisir est, après avoir rempli 
leur estomac des produits du désert, de se rouler et de se coucher dans le 
sable brûlant. Ils sont employés à porter aux moulins établis sur la rivière 
le sel qui vient des marchés situés dans le désert, seize lieues plus à l’est. 

R. 


Exposition permanente des colonies. 


Compte rendu des travaux de la Commission de surveillance à l'Exposition 
permanente des colonies en août et septembre 1874. 


L’attention de la Commission s’est principalement portée, pendant les 
mois d’août et de septembre, sur l’étude du meilleur mode d'extraction de 
l'huile des noix de Carapa envoyées, à titre d’échantillon commercial, pax 
le comité central de la Guyane. Ces graines oléagineuses étaient malheu- 
reusement trop vieilles pour donner un rendement moyen très-élevé, mais 
une pesée opérée sur les moins avariées à fourni 35 pour 100 d’une huile 
aromatique excellente, et l'on croit pouvoir affirmer qu'à létat frais et 
exemptes de l’eau résultant de la cuisson à la vapeur elles donneraient 56 
pour 100. Ces expériences ont été faites sur des noix pourvues de leur 
coque, par MM. Thomasset, Noël et Gie, 8, boulevard de Vaugirard, au moyen 
d'appareils sterhydrauliques de leur invention; il en résulte que deux homr- 
mes et une presse peuvent manipuler, en dix heures de travail, 500 kile- 
grammes de noix non écrasées ou 800 à 4000 kilogrammes de noix broyées 
au pilon par un troisième ouvrier, dans une cuve ad hoc ; par suite des faci- 
lités de transport de la machine, ce travail peut être fait de la manière la 
plus pratique, c’est-à-dire sur les lieux de production, sans atelier et sans 
vapeur. 

M. Roguier, 41, rue Martel, a également obtenu d’excellents résultats en 
traitant les noix entières ; tandis que les essais faits par des industriels sur des 
noix décortiquées ont été très-peu satisfaisants. 


me . » 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE GORRESPONDANCE. 795 


Les huiles obtenues vont êlre traitées à la savonnerie de MM. Michaud 
frères, à Aubervilliers, et l’on espère pouvoir les appliquer aussi avec avan- 
tage au graissage des machines. ‘ 

Des expériences analogues vont être faites sur sept tonnes de noix de ban- 
coul provenant de Taïti; citons encore, parmi les essais en cours, ceux du 
Conguérécou (Xilopia frutescens) employé à Cayenne comme condiment 
remplacant le poivre, et, en même temps, un remède efficace contre la leu- 
corrhée. 

Nous avons parlé, dans un bulletin précédent, des bois d’ébénisterie de 
la Guyane et de leur emploi en grand pour les boiseries dans l’industrie du 
bâtiment, à raison de 250 francs le stère; une première vente de bois de 
marine n’a pas été moins avantageuse : quarante-six Lonneaux d’angélique 
(Dicorenia paraensis) ont trouvé preneur à 200 francs, el cent soixante au- 
tres à 485 francs ; ce bois, possédant toutes les qualités du teck, sans en 
avoir les défauts, est inatlaquable par Jes insectes et les tarets, et particu- 
lièrement propre au bordé sous blindage des navires de guerre ; il est très- 
commun à la Guyane et donne des pièces de 46 à 20 mètres de long sur 
0,50 à 0®,50 d’équarrissage ; sa pesanteur spécifique n’est que de 0,746 
à l’état sec. Nous espérons donc que le commerce de cette essence, si pré- 
cieuse pour les grandes constructions navales, prendra prochainement un 
sérieux essor. 

Il à été également vendu, comme échantillon, pour le compte de la 
Guyane, 20 000 litres de tafia. 

Les comités locaux de nos principales colonies ont continué à apporter, 
pendant les mois d’août et de septembre, le concours le plus dévoué à l'œuvre 
de la Commission. 

A la Martinique, l’organisation d'expositions locales annuelles a été dé- 
cidée en principe, dans l'intérêt de l’agriculture et de l’industrie sucrière, el 
l’on s’y occupe très-sérieusement de la question de l’assolement des terres au 
moyen de la ramie introduite depuis longtemps déjà dans la colonie par 
M. Bélanger, le savant directeur du jardin botanique de Saint-Pierre. On 
s'occupe, en même temps, d'y développer la culture de Ja vanille et du 
caoutchouc, et de rechercher les moyens de contrôler la valeur des engrais 
de commerce. Le comité demande enfin l'envoi d’une machine à extraire 
les fibres de ramie, d’un appareil pour la fabrication des essences d’oranges 
et de citrons et d’un azotimètre. 

Le comité central du Sénégal demande, de son côté, des boutures de 
ramie, pour en propager la culture le long des marigots, et étudie la question 
du reboisement des rives du fleuve au moyen des cocotiers, jusqu’au point 
où remonte l’eau salée. Des sous-comités vont être établis dans les postes de 
l'intérieur et de la côte, et tous les produits encore non connus de la co- 
lonie seront tour à tour l’objet de sérieuses expériences. Déjà, d’après les 
renseignements fournis par le service de l'exposition, le commerce des plumes 
de parure et de la colle de poisson commence à y prendre une certaine im- 


32 SÉRIE, Te 1, — Décembre 1874, 51 


es L's F2 
F OR = 
A. Eh 
794 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION. # à 


portance ; enfin, des indications viennent d’y être envoyées sur la manfère 
de préparer les écailles de tortues qui s’y trouvent en assez grande quan 
tité. “3 

A la Réunion, le comité a obtenu les fonds nécessaires à la création de 
treilles vierges pour la multiplication de la vanille, et s’est concerté avec les 
chambres d'agriculture et de commerce, pour provoquer la demande au 
conseil général de la colonie de la création de stations agronomiques. 

La culture de la ramie, comme moyen d’assolement desterres, y est éga- 
lement préconisée. 

En Cochinchine, l'administration fait entreprendre une série d'expériences 
pour l'introduction du jute dans Ja colonie ; on s’occupe de lutilisation des 
écorces de palétuvier pour le tannage et la teinture et, sur l'initiative de 
M. Spooner, un des principaux négociants de la colonie, on va tenter de 
substituer aux espèces indigènes, très-difliciles à blanchir, vu l'irrégularité 
des grains, le riz Caroline dont la naturalisation a si bien réussi à Java ; enfin, 
le comité fait les plus grands efforts pour propager, suivant des méthodes 
perfectionnées, la culture du tabac qui couvre déjà environ 4000 hectares. 

L'administration a fait distribuer aux colons autant de boutures de vanille 
qu’ils ont pu en désirer, deux cents cannelliers de Ceylan, quinze cents ca- 
caoyers et quatre mille cinq cents caféiers, sans parler de cinquante mille de 
ces derniers qui seront disponibles vers le mois de janvier. Les premiers 
échantillons de café ont été cotés sur le marché de Paris de 138 à 110 francs 
les 50 kilogrammes pris en entrepôl. 

A la Guyane, le comité s’occupe de la propagation de la culture de la va- 
nille et de l'introduction dans la colonie du Litchi et du Mangoustan de ia 
Réunion. 

Le comité de la Guadeloupe continue à rechercher les bois propres à la 
gravure et annonce,, dans ce bwt, l’envoi prochain, au service de l’exposi- 
tion, de quelques variétés de Chysophyllum, de gaïac et de Myrcia. 

Les colons de la Nouvelle-Calédonie continuent à s'occuper activement de 
la recherche ei de l’extraction des métaux, et surtout des sulfures de cuivre 
de la mine Higginson, sur le territoire du Diahot. Suivant une analyse faite . 
au laboratoire de MM. Lair et Cie, ces derniers contiennent : 


DOUÉTES cle ec ere sorte LS 
PÉP Tin ee LL NDS DO 
GUIVERS 2 ones ry Ce +. H2DS 07) 
SIC D ee Ce PL Eee Si 1500) 
Eau et matières non déterminées... 1,50 

400,00 


Les cultures de la canne à sucre et du café s’y développent en outre très- 
rapidement, et l’ouverture de routes dans l’intérieur semble devoir permettre, 
dans un temps peu éloigné, l'exploitation des richesses naturelles que ren- 
ferment ces forêts. 


0 


; FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 799 


On remarque, en un mot, dans presque toutes nos possessions d’oulre- 
mer, des tendances progressives du meilleur augure pour l'avenir. 


Chronique d'Amérique. 


Le Quinquina; son acclimatation à la Réunion. — L’apicullure et la Wéstaria 
sinensis. — L’'Azalea viscosa. — La pèche du Saumon dans la Colombie 
anglaise. — Acclimatation du Cèdre de Virginie. 


« S'il existe un médicament, écrivait naguère M. Chevreul, dont l’action 
soit efficace dans la plupart des cas où la thérapeutique le prescrit pour cou- 
per la fièvre de l’homme de tous les pays, de tout âge et de toule condition, 
c’est assurément le Quinquina. » Et l’illustre savant ajoulait : « Aucune 
des malières employées pour ramener l’homme malade à la santé ne pré- 
sente des faits d’un intérêt comparable à ceux que nous offre en ce moment 
l’histoire des Quinquinas au point de vue multiple de la botanique, de la 
chimie, de la culture et du commerce. » 

Originaire des Cordillères le précieux végétal a été l’objet de tentatives 
d’acclimatation sur différents points du globe; entre autres, depuis 1866, dans 
notre colonie de la Réunion. Des graines semées sur le littoral de cette île, 
puis transplantées à des altitudes de 700 et 800 mètres, ont immédiatement 
fourni des sujets de la plus belle venue. Dans l’espace de quatre ans, des 
boutures provenant des premiers plants ont donné des arbres de 6 mètres 
de haut, lesquels ont produit des fleurs et des graines fécondes et des écorces 
utilisables, M. le docteur Vinson a entrepris la eullure en grand des Quin- 
quinas ; il possède aujourd'hui plus de trois cents de ces arbres, dont 1 
moilié n’ont pas moins de 3 mètres de haut. L'influence des cyclones, mal- 
heureusement fréquents à la Rénnion, ne paraît pas, dit l’intelligent accli- 
matateur, être plus dangereuse pour ces arbres que pour ceux des autres 
essences. Les ierrains meubles, légèrement et naturellement humides, sont 
particulièrement propres à la propagation par boutures. Autour de la sec- 
tion vive, il se développe rapidement une couronne de radicelles. Les bou- 
tures faites en plates-bandes sont ensuite transplantées au lieu définitif par 
un temps de pluie. La reproduction par bouture est plus rapide que celle 
par semis. On emploie aussi, avec succès, le système des marcottes. 

Les analyses faites au laboratoire des Arts et métiers sur des échantillons 
d’écorces prélevées sur des sujets de huit ans, c’est-à-dire n’ayant pas ai- 
teint encore leur plein développement, ont donné pour le Cenchona ofjice- 
nalis, tout près de 15 grammes de quinine sur 4000 d’écerce. A l’état nor- 
mal, les arbres fournissent de 15 à 25 grammes de quinine pour la même 
proportion d’écorce. 

On voit que les plantations de l’île de la Réunion sont dans une ex- 
cellente voie. Elles sont dignes, à tous égards, d’être encouragées. Les co- 
lonies néerlandaises possèdent aujourd’hui, comme les Indes britanniques, 
des plantations d’un avenir assuré, Ainsi se trouve bannie la crainte qu'on 


796 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


avait au commencement du siècle de voir disparaître bientôt l’arbre pré- 
cieux à son berceau même, lant était grande déjà la consommation qui se 
faisait partout de son écorce. 

L'usage du fébrifuge américain n’est pas dû à la science, mais aux Indiens 
d’une région des Cordillères où il est indigène. Voici comment M. Che- 
vreul rappelle le fait: Lopez y Ruiz, envoyé à la Nouvelle-Grenade et au 
Pérou, dans la seconde partie du xvir1® siècle, rapporte comment, en 1636, 
les autorités espagnoles du Pérou connurent la vertu du Quinquina. Juan 
Lopez de Canizares, corregidor de Loxa, avait été guéri des fièvres inter- 
miltentes avec le remède indien. Apprenant que la vice-reine, comtesse de 
Chinchon, avait les mêmes fièvres, il informa de sa propre cure le vice- 
roi son mari. Le comte de Chinchon fit venir le corregidor à Lima, et la 
comtesse fut guérie de la même manière ; c'était en 1638. Deux ans après 
le comte et la comtesse revenaient en Espagne rapportant avec eux de l’é- 
corce de Quinquina. Toutefois, la connaissance du fébrifuge ne se serait 
pas répandue en Europe si rapidement,.si un an avant de quitter le Pérou 
le comte de Chinchon n’avait pas fait explorer les affluents de l’Amazone, de 
Quito à l'embouchure du fleuve. Un jésuite nommé Acuna, qui faisait partie 
de l’expédition, en écrivit la relation, et telle fut l'origine des missions des 
Jésuites dans les contrées de l’Amazone où se trouvaient des Quinquinas dis- 
séminés dans les forèts. En 1670, le cardinal Lugo reçut à Rome de nom- 
breux approvisionnements d’écorce, et cette écorce, les Jésuites répandus 
partout en Europe la firent connaître aux populations. En 1679, Louis XIV 
acheta de sir Robert Talbot la recette d’une préparation dont l'écorce de 
Quinquina était le principe actif, et sept ans plus tard il en faisait sur lui- 
même l’expérience avec le plus heureux succès. Enfin, le fameux médecin 
Fagon publia, en 1703, un livre intitalé : Les admirables qualités du Quin- 
quina, confirmées par plusieurs expériences, avec la manière de s'en ser- 
vir dans toutes les fièvres pour toute sorte d’äge. Plus tard encore Mutis 
et La Condamine éclairèrent l’histoire des Cinchonées, histoire que dans le 
cours des années 1871-1874, M. J. Triana, de Bogota, a complétée et abso- 
lument élucidée par une admirable publication à laquelle ont concouru les 
gouverneinents d'Angleterre et de France, 3 


L'apiculiure est, on le sait, une industrie très en faveur dans certains États 
de l’Union américaine. Les Sociétés savantes ne dédaignent rien de ce qui 
s'y rapporte. L'Académie des sciences de Philadelphie a entendu ces temps 
derniers la lecture d’un mémoire de M. Meechan sur la plante connue en 
botanique “sous le nom de Wistaria sinensis. Les fleurs de cette plante 
passent généralement, en Amérique, pour donner la mort aux Abeilles qui 
vont butiner sur elles. L'auteur du mémoire déclare avoir même vu, nom- 
bre de fois, des centaines d’Abeilles mortes autour de plantes de cette espèce 
en fleurs ; comme tout le monde, il croyait au poison de la Wéstaria. Or, 
celte année, il a observé des faits qui renversent complétement les idées en 


FAITS DIVERS ET EXTRAITS DE CORRESPONDANCE. 797 


cours: il a vu les Abeilles visiter avec empressement les dangereuses fleurs 
sans en être le moins du monde incommodées. Il en conclut que si les fleurs 
de Wistaria sinensis sont parfois entourées de cadavres d’Abeilles, la mort 
de ces insectes doit être attribuée à une autre cause qu’au prétendu poison 
distillé par la plante. 


Les Azalées, depuis longtemps, ne sont plus une rareté ; ce charmant ar- 
buste figure aujourd’hui dans toutes les serres, dans tous les jardins. L’es 
pèce qu’on appelle en Amérique Azalée de marais (Azalea viscosa), peut 
être utilement employée pour se délivrer des Fourmis, des Mouches et au- 
tres insectes nuisibles ou importuns. Dès que ceux-ci touchent la fleur, ils 
sont retenus par ses filaments visqueux, et c'en est fait des imprudents : 
plus ils essayent de se dégager, plus ils s’'empêtrent dans cette glu fatale. 
Un pot d’Azalée placé sur une fenêtre au soleil peut devenir de la sorte un 
«atlrape-mouche » précieux, si nous en devons croire l'American natura- 
list. La question a bien son intérêt et l'expérience est à la portée de tout le 
monde. 


On nous écrit de la Colombie anglaise que la pêche des Saumons a été 
très-fructueuse durant la saison de 1874 et qu’on s’attend à la voir donner 
des résulats encore plus beaux en 1875. Les conserves de poisson se font 
là sur une grande échelle et sont en grande réputation ; on n’a pas mis 
en baril moins de treize millions de livres de poissons, dont le prix de gros 
a atteint 400 000 livres sterling, ou environ 10 millions de francs. 


La fabrication des crayons emploie des quantités considérables de bois de 
Cèdre de la Floride, ou Cèdre de Virginie, espèce particulière de Genévrier. 
Ge bois se vend séché et au poids, c’est un commerce important ; une seule 
fabrique du continent européen en achète annuellement 12 à 15 000 kilo- 
grammes. La célèbre maison Faber en fait une consommation assez grande 
pour opérer elle-même directément son importation. La supériorité du Cè- 
dre de la Floride (Juniperus Virginiana) sur tous les autres bois employés 
aux même fins est un fait admis. La maison Faber a appelé l'attention du 
gouvernement bavarois sur les avantages qu'il y aurait à tenter l’acclima- 
tation de cet arbre dans les forêts royales bavaroiïses. Elle à fait venir des 
graines avec lesquelles elle pratique des semis, et plus tard ellelivre les jeunes 
plants à l'administration forestière. M. Johann Lothair Faber à déjà élevé sut 
son propre domaine plus de 5000 pieds de Gèdre de Virginie; grâce à lui 
aussi, des plantations de ce Genévrier ont été faites dans l'Allemagne du 
Nord et en forêts et en bordures le long des voies ferrées, Nos compagnies 
de chemins de fer ont là un bon exemple à suivre. 

OCTAVE SACHOT. 


Le gérant : JULES GRISARD. 


, UN Fo. Moi url 
j : Robe ; Mida ci 
à | ; she CEE thé 1h 
A 1 ROPHEPRR ET ALTE 
ï è ras Ne ét 14 Sr avi Lie LUE 
art es à 
; ta HE Le PRET AÙ ME HA Sex 
De : Un LC 0 
FAITES ir Le 
i SEE 1 ; 
e de De 
En , A 
‘ 


ÉTAT DES DONS 


FAITS À LA SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION 


du 4€ janvier au 31 décembre 1874, 


R ENVOI 


recteur du Jardin zool. dela 


ÎMandria, près Turin (Italie). 
| 


DONATEURS. OBJETS DONNÉS. AU 
BULLETIN, 
MM : | 
AupirrRen (F. J.), à Pommes de terre Reine Blanche. |997 
Paris. | 
AurArD DE BraGarn(G.),| Graines de Tefairia pedata. 
à Paris. | 
BARAïLON (J.B.), àCham-| Un échantillon de bois de Sophora 
bon (Creuse). Japonica. 168 
_Barga (Rafaël), à Quito| Graines de végétaux de l’Équa- 
| (Équateur). teur. 648 
BExTHOULE (Amédée), à| Deux Truites pêchées dans le lac 
Paris. Chauvet. . 298 
BLAIsE (J. B.) (Meurthe-[ Pommes de terre de Choloy. 235 
et-Moselle). 
BLonpeL (N.M.), àTou-|  OEufs d'Affacus Yama-mai. 168 
louse (Haute-Garonne). 
Bossin, à Paris. Vingt paquets de graines de Chou- 
fleur impérial. 134 
Vingt paquets de graines de PAy- 
salis edulis, 771 
BoucaruT (Mme veuve).| Cinquante grammes de graines de 
Ver à soie du mürier. 315 
CaariN (le D'), à Paris.|  Noyaux de pèche de Tullins, 771 
COLLARDEAU, à Paris. Diverses variétés de Pommes de 
terre. 789 
_Corrarrr (Émile), à] Un flacon de semences d’Ery- 
Cuzco (Pérou). throxylon coca. AAA 
Cousa (Benvenuto), di-|  Cocons d’Atffacus Pernyi. 315 


S09 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION, 


0 NE RC 


RENVOI 
DONATEURS. | OBJETS DONNÉS. AU 
| BULLETIN, 


| 
| 
—— } = D 

| 

| 


CorpiEer, à El-Aliah,| Graines d'Eucalyptus red-gum et| 
près Alger. | flooded-gum, 242 
j Graines d’Eucalyptus maculata.  |772 

DaBry DE THIERSANT,| Collection de Poissons de Chine. |413 
consul de France, à Can- 
ton (Chine). 


DELboN, à Saint-Gilles-|  Cocons de Ver à soie du marier. |405 
sur-Vie (Vendée). 


DRUILHET (le camte). Graines de Wigandia Vigiert. 648 
EicarHAL (d’). Graines diverses du San-Salvador, | 415 


FLEURVILLE (de), à Paris.| Graines diverses de la Nouvelle- 


Calédonie. 168,649 

GEOFROY (de), ministre!  Cocons d’Aftacus Pernyi 58 

de France, à Pékin (Chine).| Graines de Pinus Bungeana. 302 

Un échantillon d’étoffe fabriquée | . 

avec la soie de l’Affacus Pernyr. 461 

Jardin d’acclimatation| Fruits de Zapallito. 136 

du Bois de Boulogne. Graines de Soja hispida. 790 
Jardin botanique de! Collection de graines de végétaux 

Howrah (Inde). de l'Inde. 468 

KREUTER (Franz), à| Graines de Mürier du Japon. 248 
Vienne (Autriche). Graines de diverses espèces de Me- 


lon et de Radis colossal du Japon, 649 


LecLer (le D'), à Rouillac OEufs de Ver à soie du mürier, 301 
(Charente). 


LECREUX (Jules), à Paris.| Un sac d’Orge de l'Himalaya. 234 
Graines de Cocozzelli. 248 


Le FAuCHEUR (Paul), à| Collection d’échantillons de bois 
Phnom-penh (Cambodge).| du Cambodge et plantes vivantes du 
même pays, 319 


LUZARRAGA (F. @. de), à| Graines de Tomate sauvage du 
Paris. Mexique, 649 


Mapinier (Paul), à Pa-| Graines de Cyfisus proliferus et 
ris. Lathyrus tingitanus. 235 


DONATEURS. 


Maumexer (Édouard), à 
Nimes (Gard). 


Mayréna (David de), à 
Arcachon (Gironde). 


Muzzy (le vicomte Léon 
de), à Paris. 


MONGRAND (le Dr), à Sain- 
tes (Charente-Inférieure). 


Mowriexy (E. de), au 

| château de Saint-Léger 
(Eure). n, 

Muescer (le baron F. 


von), à Melbourne (Aus- 
tralie), 


Muxrapas, à Piedra (Es- 
pagne). 
NEUMANN (Louis), à Paris, 


NonrriGar (Émile), à 
Lunel (Hérault). 


Ouxous (Léo d’), à Sa- 
verdun (Ariége). 


PARTIOT (Gaëtan). 

PATERLINI (Fausto), à Lo- 
nato (Italie). 

PÉPIN. 

RADIGUET, à Paris. 


RAMEL (Prosper), à Hus- 
| sein-Dey (Algérie), 


RAMPON. 


blanc. 


OBJETS DONNES. 


Graines de Lo-za, 


Un Macareux empaillé, | 


Graines de Melon Prescott fond 
Collection de graines de Chine. 


Un échantillon de Coton, | 


Graines de Seaforthia elegans et 
de Corypha australis. 

Collection de graines de treize 
espèces d’Eucalyptus. 


Œufs embryonnés de Truites, 


Graines d’Elæococca vernicia. 


Graines de Sericaria mort et bru- 
yères chargées de cocons. 


Graines de divers végétaux, 
Graines de Balsamine géante de 
Malaga. 


Cocons de Ver à soie du mürier. 


Graines de divers conifères, 
Échalotes d'Algérie, 
Une photographie de l’Evcalyptus 


colossea. 
Graines de diverses espèces d’Eu- 


|calyptus. 


Graines de Haricots du Mexique et 
de Physalis edulis. 


| RENVOI 
AU 


| BULLETIN. 


301 


|247 


648 


53 


303,790 


649 


299 


301 


147 


60,242 


146,242 


779 


802 SOCIÉTÉ D’ACCLIMATATION, 


RENVOI 
DONATEURS, OBJETS DONNES. AU 
BULLETIN. 
ROCHEMACÉ (de la). | Blé de la Roche. 776 
ROQUETTE (de la), à Pa-| Graines de Mokhaléceh, 467 


ris, 


Rozy (Henry), à Rang-| Végétaux des Indes néerlandaises, | 529 
xasbetong (Java). 


SanTa-Cruz (Me la Ma-| Graines et tubercules de végétaux 


réchale), à Versailles. alimentaires de la Bolivie, 773 
SauLcy (de), à Metz. OEufs d’Afiacus Yama-mai. 116 
SELVE (le marquis de),| Graines de petit Melon vert à ra- 

à Paris. mes. 235 
Taomas (H. S.), à Man-| Un Barbus Thomassi Day, et di- 

galore. (Inde). verses dépouilles d'oiseaux. 113 

 THozer (Anthelme), à Collections de graines de végétaux 63,235 

Rockhampton,  (Queens- utiles d'Australie. 468,648, 

land). 790 
VAN GORKOM (Indes né-| Graines de.Cinchona succirubra. | 648 

erlandaises). 

Vavix (Eug.), à Paris. Haricots de Bethléem, 63 

WaiLLy, à Londres. OEufs de Sericaria mort. 790 

Warsox (Forbes), à Lon-| Graines de Cedrius deodara. 136 
dres. 

Wéger (le Dr), à Paris. | Graines de Concombre d’hiver. | 788 


DONS 


FAITS A LA BIBLIOTHÈQUE DE LA SOCIÉTÉ. 


Almanach de la Suisse romande pour 1874. Offert par l’Institut gene- 
vois. 


Annual report of the Trustees of the Museum of comparative zoülogy 
at Harvard college, in Cambridge, 1872-1873, 


Compte rendu de l'exposition du 14 mai 1874, à la halle de Nevers, 


Compte rendu des travaux de la Commission de surveillance de l’Expo- 
sition permanente des Colonies en août et septembre 1874. 


Documents relatifs aux travaux de la Commission de Géographie : 
commerciale. Paris, octobre 1874. 


Du guano dissous du Pérou et de son emploi. 


Programmes de l'Exposition internationale de Santiago du Chili en sep- 
tembre 1875, Offert par M. Blest-Gana. 


Progress reports and final report of the exploration committee of the 
Royal society of Victoria, 1872. 


Rapport sur le concours de 1873, sur l’enseignement insectologique 
entre les instituteurs qui y ont pris part. 


Rapport annuel sur la colonie agricole et pénitentiaire de Mettray 1873, 


Rapport sur les mesures administratives à prendre pour préserver les 
territoires menacés par le phylloxera. 


Recenseamento geral dos gados no continente do reino de Portugal 
em 1870, 


Sixth annual report of the department of marine and fisheries. 


Tableaux de population, de culture, de commerce et de navigation 
formant pour 1870 la suite des tableaux dans les notices statistiques sur 
les colonies francaises, Imprimerie nationale, Offert par le ministère de 
Ja marine, 


Le même ouvrage pour 14871. 


Reports of the commissioners of fisheries of the state of Newtors 
pour 1869-70-72-73-74. Offert par M. Seth Green. 


60h SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


BazBraxt. — Mémoire sur la reproduction du phylloxera du chêne. 
Barter (Ernest). — Les maladies de la vigne. Le phylloxera. Offert par 
l’auteur. 


Bezcecroix (Ernest).— La chasse pratique. Offert par l’auteur. 


BELL(X (Gaspard). — Rapport fait à la séance publique de la Société 
protectrice des animaux de Lyon, 1873. Offert par l’auteur. 


BENTHAM.— Flora Australiensis (6 vol. de parus), Offert par M. le baron 
F. Von Mueller. 


BerNarDiN. — Visite à l'Exposition de Vienne. Offert par l'auteur. 
BERNARDIN. — Classification de 160 huiles et graisses végétales, 2° édi- 


tion suivie de la classification de 95 huiles et graisses animales, in-8°, 
Gand 1874. Offert par l’auteur. 


BerTHiER. — Notice biographique sur Eugène-Louis-Melchior Patrin, 
minéralogiste lyonnais. Offert par l’auteur. 


BLaxcHÈRE (H. de la). — Traité des oiseaux utiles et des oiseaux nui- 
. Sibles de France. Offert par l’auteur. 


BLecker (P.). — Révision des espèces indo-archipélagiques du groupe 
des Apogonini. Harlem 1874. 


Boucaox-BraxpeLy. — Rapport sur l’état de la pisciculture en France 
et dans les pays voisins. Offert par M. le marquis d'Hervey de Saint-Denys. 


Bourarez. — L'Agriculture en France sa situation, son avenir, conditions 
de son développement. Offert par l’auteur. 


Burour et Imamura Wanax. — Annuaire de la Société des études japo- 
naises-chinoises, 1873. 


Cawuser (Georges). Sur le développement pathologique de l'œil chez le 
Cyprin. Offert par l’auteur. 


CHanrrax. — Observation sur la formation des pierres chez les Écre- 
visses. Offert par l’auteur. 


GLos (docteur). — Quelques documents pour l’histoire de la pomme de. 
terre. Offert par l’auteur. 


Cornu (Maxime). — Études sur la nouvelle maladie de la vigne. 


Croix (le marquis de). — Remonte de l’armée française et la vérité sur 
les étalons de l’Étatetsur ceux del’industrie privée. Offert par M. Decroix. 


Decroix. — Des moyens d'augmenter la production et de prolonger Ia 
conservation du cheval de guerre. Offert par l’auteur. 


Destrem et Grasse. — Projet de loi de M. Destrem et rapport de 
M. Grasset relatifs auxravages causés par le phylloxera. Offert par 
M. Raveret-Wattel. 


Drouyx pe Lauys. — Discours d'ouverture prononcé au concours agri- 
cole de Châteauroux. Offert par l’auteur. 


DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. 805 


Drouyx pe Luuys. — Discours prononcé au Congrès viticole de Mont- 
pellier. Offert par l’auteur. 


DeuiLuet (comte). — Les plantes d'appartements, histoire et culture, 
Offert par l’auteur. 


Ducuinc. — Rapport préliminaire sur le projet de loi prescrivant les 
mesures nécessaires pour arrêter les ravages causés par les insectes nui- 
sibles à l’agriculture. Offert par M. Raveret-Wattel. 

Dumas. — Mémoire sur les moyens de combattre Le phylloxera. 


Dumas. — Discours prononcé aux funérailles de M. Elie de Beaumont. 


Dumonteiz (Fulbert). — Portraits zoologiques. Offert par le Directeur 
du Jardin d’acclimatation. 


‘Faucon (Louis). — Mémoire sur la maladie de la vigne et sur son traite- 
ment par le procédé de la submersion. 


FerRanD (J.). — De l'écart entre nos institutions politiques et notre état 
intellectuel et moral. 


Fonviezce (Wilfrid de), — Discours d'inauguration des conférences de 
la Salle Oller. 


Gassiges (F.-B).— Catalogue raisonné des Mollusques terrestres et d'eau 
douce de la Gironde. Offert par M. Carbonnier. 


Gimsert [le docteur). — Traduction en espagnol de sa brochure sur 
l’Eucalyptus globulus. Offert par M. Mora. 


GirarD (Maurice). — Les métamorphoses des insectes. 4° édition. Offert 
par l’auteur. 


Girarp (Maurice). — Le Phylloxera de la Vigne, son organisation, ses 
mœurs, choix des procédés de destruction, Offert par l’auteur. 


GoBix. — Précis élémentaire de sériciculture pratique. Offert par 
l’auteur. 
Gogin. — Traité des oiseaux de basse-cour, d'agrément et de produit. 


Offert par l’auteur. 


Gomix., — Précis pratique de l'élevage des lapins, lièvres et léporides. 
Offert par l’auteur. 


Goperroy-LuneL. — Histoire naturelle des poissons du bassin du Léman. 
Offert par l’auteur. 


GREEN (Seth). — Trout Culture. Offert par l’auteur. 
Hauer. — Cours pratique d’apiculture. 4° édition. Offert par l'auteur, 
Havoreau et À. Lerourveux. — La Kabylie et les coutumes kabyles. 


Joy (N.). — Notice sur les travaux scientifiques et sur les litres uni- 
versitaires et académiques du docteur Joly. Offert par l'auteur. 


Kemuerer. — L'ostréicullure, son passé, son présent, son avenir. Offert 
par M. Eugène Vavin. 


806 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


KERLAGE (J.-H.). — Notice sur quelques espèces et variétés de Lis. 
Offert par l’auteur. 


Lauger1yE (comte Léonce de), — Conseils sur les semis et {a culture des 
légumes en pleine terre, offerts aux habitants de la campagne du dépar- 
tement du Rhône. Offert par l’auteur. 


Laviexe (Germond de). — Études sur le vin de Saint-Raphael. Offert 
par l’auteur. ; 


Lerraxc (Émile), — Culture and manufacture of ramie and jute, in the 
United-Slates. 


Martix (le docteur). — Pékin, sa météorologie, son édilité, sa popula- 
tion. Offert par l’auteur. 


Miroxe, — Îstruzione popolare sulla rabbia degli animali domestici. 
Offert par M. Baruffi. 


More (Édouard). — L'énergie de la végétation ou application de la 
théorie mécanique de la chaleur à la physiologie des plantes. Offert par 
l’auteur, : 


Morrex (Ed.). — Liste des jardins botaniques du monde, des chaires 
botaniques et de quelques établissements de botanique. Offert par 
l’auteur. - 


Mveccer (baron Von). — Additions to the Lists of the principal timber 
trees and other select. plants, readily eligible for Victorian industrial cul- 
ture. Offert par l’auteur. 


Mvuzper-Boscorn. — Bibliographie ichthyologique (Bibliotheca ichthyo- 
logica et piscatoria). Harlem 1874. 

Pequix (Bernard). — Division fondamentale des sciences suivie de let- 
tres sur la division des pouvoirs et le gouvernement le meilleur. Offert 
par l’auteur. É 

Perez et SAGoT. — De la végétation aux îles Canaries. des plantes des 
pays tempérées et des régions intertropicales et physiologie générale de 
leur agriculture. Offert par M. Paul Madinier. 


Perxy (Paul). — Projet d'une académie Européenne, au sein de la Chine. 
Offert par l’auteur. 


Riviëre (A). — L'Alfa et le Sparte (extrait du journal de la Société cen- 
trale d’horticulture de France). Offert par l’auteur. 


RooseveLr. — Fish culture compared in importance with agriculture. 
Offert par M. Seth Green. 


Sagor (P.). — Agriculture de la Guyane francaise 1855-1860. 


SaNt-LEON BOYER-FONFRÈDE (J.). — Le phylloxera. Appel aux propriétaires 
du Médoc. Offert par l’auteur. 


SIRAND:— Le procédé Pasteur appliqué aux éducations de 4873. Offert 
par l’auteur, 


Tuowas-ANQUETIL, = Aventures ét chasses dans l’extrème Orient. Offert 
par l’auteur. 


DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ. 507 
TisserAnD (Eugène). — L'agriculture à l'Exposition de Vienne. 
TriaxA (J.). — Nouvelles études sur les quinquinas. Offert par l’auteur. 


VaizLanr. — La République orientale de l’Uruguay à l'exposition de 
Vienne. Offert par M. Margarinos Cervantes, 


Van Gorkom. — Comptes rendus des plantations de quinquinas aux 
Indes Néerlandaises. Offert par l’auteur. 


Vavix (Eugène). — Du framboisier. Offert par l’auteur. 
Verne. — Étude sur le Boldo. Offert par M. Marais, 


Viez (Ch.). — Entretiens d’un instituteur sur l’utilité des oiseaux. Offert 
par l’auteur. 


Wacxer (Ladislas de). — Documents sur l'économie rurale en Hongrie. 
Offert par l’auteur. 


Wacner (Ladislas de). — Notice sur le Tabac (extrait de son Hanbuch 
der Taback und Cigaren-Fabrication). Offert par l’auteur. 


Wocowsxr. — Rapport verbal sur l'Exposition universelle de Vienne, 


INDEX ALPHABÉTIQUE DES ANIMAUX 


MENTIONNÉS DANS CE VOLUME. 


Abeille, 94-95, 159-160, 796-797, 

— italienne, 252-256. 

Agarista, 250. 

Agouli, 164-165. 

Alpaca, 92. 

Anabas, 526-527, 528-529, 

Anas sparsa, 513. 

— pæcilorhyncha, 156-157. 

Ane, 339-340, 458. 

Animaux, xLuiI-LxI, 149 156, 182, 
346-347, 601-611. 

Anser Ægyptiacus, 175. 

 — Bernicia, 175, 

— Bbrenta, 175. 

— Indicus, 156. 

Jubatus, 175. 

melanotus, 175. 

anas melanoleca, 156. 

Antherea yama-mai. VNoy. Ver à soie 
du chêne du Japon. 

Antidorcas euchore, 512, 513. 

Antilope, 512, 513. 

Aonix Lalandii, 513. 

Arctomys empetra, 165. 

Asinus Burchelli, 513. 

— Quagqga, 513. 

— Zebra, 513. 

Atlacus, 618-640. 

aurota, 183-208, 353-555. 

" æthra ? 618. 

carptit, 34 

cecropia, 698. 

cynthin, Noy, Ver à soie de l’ai- 

lante, 

Pernyi, Noy. Ver à 

chène de Chine. 

prri, 34, 

Yama mai. Noy. Ver à soie du 

chêne du Japon. 

Autruche, 139, 295-297, 308, 421, 
433-438, 514, 525-526, 661- 
662. 

Avicula margarilifera, 517. 

Axolotl, 181. 


on 


aa 


soie du 


Î 


] Balearica regulorum, 515. 


Barila, 179. 

Bec d'argent, 313. 

Bécassine, 514. 
Bernache, 175. 
Bernicla Sandwicensis, 174-175: 
Boa constrictor, 347. 
Bœuf, 764-765. 

Boselaphus oreas, 512. 
Bouc de Cachemire, 340. 
Brown trout, 333. 

Buffalo, 513. 

Bubalus capensis, 513, 
Caille de Californie, 429. 
Calotraqus campestris, 512. 
Canard, - 56-57, 155-156, 

513. 

— de l'Inde, 156-157. 
— Labrador, 768. 

— mandarin, 767, 768. 


176-177, 


| Canari (du Cap), 515. 


Catherus Lathami, 171. 
Cephalophus qrimnia, 512, 
Céréopse, 174. 

Cerf-cochon, 523. 

Ceriornis Temminkii, 168-169, 
Chacal, 513. 

Chaitenessa jubata, 175, 
Chalcophas indica, 178, 
Chameau, 792, 

Chat-tigre, 513, 

Chenaloper Ægypliucus, 175. 
Chera progne, 514, 

Chersina homopus, 515. 
Cheval, 97-105, 135. 
Chèvre, 92. 

— d'Angora, 121, 123-126. 
Chevrotain meminns, 161. 
Chien, 150-152. 

Choucari, 179-180. 
Ciconia alba, 514. 
Cigogne, 297. 

Cinnyris chalybea, 514. 

— lelatala, 515. 


INDEX ALPHABÉTIQUE DES ANIMAUX. 


Cinnyris violacea, 514. 
Coccus adipofera, 598. 
— cacli, 916. 
Colin, 327-329. 
— de Californie, 119. 
— Houi, 340-341. 
Colomba cruentata, 696-697. 
— dilopha, 178. 
Colombe, 178-179. 
— à double huppe, 178. 
— Longhup (lophotes), 178, 297- 
298, 329 
— poignardée, 178-179, 696-697. 
Coney, 512. 
Coq de bruyère américain, 81-83., 
Corneille de roche, 180. 
Corythaix persa, 514. 
Crapaud, 95-96. 
Crax Daubentoni, 170-171. 
— Sclateri. 170-1714. 
Crossoptilon, 168. 
Cupidonia cupido, 85. 
Cyanorhamphus Novæ-Zelandie, 180- 
184. 
Cygne (Cygnus), 119,176. 
Cynomys ludovicianus, 165. 
Cyprin, 769-770. 
Cyprinus orfus, 422, 
Dassie, 512. 
Dasyprocta acuti, 164. 
— nigrescens, 161, 
Dauw, 257-266. 
Diamant à moustaches, 313. 
Dindon ocellé, 170. 
— sauvage, 612-617. 
Donax denticulata, 516. 
Doryphora, 145, 351-352. 
Duiker, 542. 
Ecureuil, 95. 
Elan, 512. 
Eléphant, 346-347, 513. 
Emeu, 155. 
Emys, 181. 
Eperonnier, 169. 
Euplocomus Swinhoeï, 169, 
Eupodotis cœrula, 514. 
— hkori, 513. 
Fairy martin, 249. 
Faisan, 153-155, 410-412, 421, 513, 
522, 535-539, 642-643. 
— d'Amherst, 697-698. 
— de Swinhoë, 169. 
— vénéré, 169, 461, 644-645, 767. 
Faucon, 514. 
Felis pardus, 515. 
— serval, 513. 


32 SÉRIE, T. 1. — Décembre 1874, 


809 


Flycatchus, 514. 
Fondule, 665-671. 
Fourmi blanche, 516. 
Francolinus afer, 513. 

— clamator, 513. 

— Levaillantii, 513. . 
Fregilus graculus, 180. 
Fringilla domestica, 249, 347, 

— montana, 249. 
Friquet, 219, 
Fundula cyprinodonta, 665-671. 
Gallinago macrodactyla, 514. 
Galloperdix sphenura, M6. 
Glareola melanoptera, 514. 
Gom paawn, 513. 
Gonometa postica, 516. 
Gourami,119,225-226, 305,330-333, 

928-529, 769-770. 

Gros-bec de Java, 313. 
Grue (Grus), 173-174, 514-515. 
Gymnorrhina, 179. 
Halmaturus Bennetti, 161. 
Hibou, 514. 
Hippopotame, 513. 
Hirondelle, 249. 
Hirundo frontalis, 249. 

— esculenta, 347. 
Hocco, 170. 
Homard, 516. 
Huitre, 142-144, 307, 341-349, 546, 

727-728. 

Hyrax Capensis, 512. 
Hystriz cristata, 512. 
Ibis, 171-172. 
Iguane, 515. 
Insectes, 196-511, 659-661. 
Kanguroo, 161-163. 
Kasir cranes, 514. 

— fink, 514. 
Kia-yu, 413. 
Klipkost, 517. 
Lagenoplastes Ariel, 249. 
Lama, 164. 
Lapin, 432. 

— de Saint-Pierre, 55-56. 
Léopard, 513. 

Léporide, 240, 432. 
Lepus Capensis, 512. 
saxzatilis, 512. 
Lézard, 347, 


| Lièvre, 432, 549, 


— variable, 466-167. 
Lion, 513. 
Locust-bird, 514. 
Locuste, 514. 
Lopholærius anturcticus, 178. 
592 


1 
jte 
ë 


Æ 


S:0 SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Lophophore, 165. 

Loriot, 514. 
Loutre, 515. 

Loxia Capensis, 514. 

— oryx, 514. 
Maliotis, 517. 
Marmotte, 165-166. 
Martinet, 249. 
Meleagris ocellata, 170. 
Milan, 514. 
Milvus Forkalii, 514, 
— migrans, 914. 
Moineau, 249. 
Monitor, 515. 
Mouton, 92. 
Mule, mulet, 305, 339-340, 
Munias des Moluques, 312-313. 
Mylabris, 516. 
Mytilus crenatus, 516. 
Nettapus auritus, 515. 
Niin, 597-598. 

Ocydrome, 171. 
Ocydromus Novæ-Zelandiæ, 171. 
Ocyphaps lophotes, 178. 
Œdicnème, 172. 
OŒdicnemus crepitans, 172. 
Oie, 174-176. 

— Cabouc, 175. 

— à caroncule, 176. 

— à crinière, 175. 

— d'Égypte, 140, 175. 
— de l'Inde, 156. 

— Magellanique, 174. 
.— de Sandwich, 174-175. 


Oiseaux, 58, 95, 347, 432, 496-511, | 
563-581, 642-644, 659-661, 


769, 794. 
Orfe, 422, 
Ostrea tuberculata, 516. 
Ouistiti, 329. 
Outarde, 913, 514. 

— canepetière, 167-168: 
Pachytylus pardalinus, 514, 
Pæcilonettu erythroryncha, 513. 
Palinurus Lalandii, 516. 

Paon, 169-170. 
Papion sphinx, 149-150. 
Pelea capreola, 512. 
Peltastes. 515. 
Perdrix, 458, 513, 545-546, 769. 
Perruche, 180-181. 
— à croupion rouge, 181. 


— de la Nouvelle-Zélande, 180- 


181, 225, 240, 768. 
— ondulée, 181. 
— de Swainson, 403, 768, 


| Petrogale penicillatus, 161. 


— æanthopus, 161. 


| Phacochærus Æthiopicus, 519. 


Phascolome, 152, 163-164. 

| Phascolomys latifrons, 163-164. 
Phasianus Reevesi, 169. 
Phlogænas cruentata, 178-179. 


541-544, 650-657, 728, 779. 
Pigeon, 547-562. 
Platycereus Novæ-Zelandiæ, 180-181, 
295. 
Poissons, 64-80, 88-91, 347-348, 
| 390-400, 406-109, 515, 662-663, 
727-798, 794. 
— combattant, 527-598. 
— domestique, 413. 
Polyplectron chinquis, 169. 
Porc, 776. 
Porc-épic, 512. 
Porphyrio, 172. 
Potamochærus Africanus, 512. 
Poule, 153. 
— de Houdan, 141-149, 330. 
— de prairie, 340-341. 
— sultane, 172. 
Psephotus hæmatonotus, 181. 
Quagga, 513. 
| àle de la Nouvelle-Zélande, 171. 
Regenia albogularis, 515. 
Renard, 513. 
| Rheebok, 542. 
Rhinocéros, 513. 
Rhizotroqus euphytus, 134. ‘ 
Rhynchæa Capensis, 514. 
Rissa tridactyla, 498. 
Rynchotes rufescens, 155. 
Sagittarius secretarius, 514. 
Salmo, 333, 645. 
| Salmonides, 490-196. 
Sarcidiornis melanotus, 175. 
Saturnia aurota. Noy. Atlacus aurota. 
Saumon, 97, 142, 422-123, 797, 
Secrétaire, 514. 
Sericaria mori. Noy. Ver à soie du 
mürier. 
| Serin, 158-159. 
| Serinus canicollis, 515. 
| Serval, 543. 
Springbok, 512, 513. 
Steinbok, 512. 
Struthidea cinerea, 180. 
Struthio camelus, 514. 
Sucrier, 514. 
— malachite, 514. 
Sugar-bird, 514. 


Phylloxera, 24h 947, 334-3837, 531, 


“ 


INDEX ALPHABÉTIQUE DES ANIMAUX. 811 


Sun-bird, 515. 


Vers à soie, 17-36, 132, 226, 515- 


Talégalle, 1714,522,523-525, 765-667. | 316, 319-322, 103-406, 415, 


Talève, 172. 
Taureau Shorthorns, 126. 
Testudo mydas, 347. 
Tetrapteryx paradisæa, 515. 
Tetrao cupido, 81-83. 
Tétras huppecol, 81-83. 
- — de Scandinavie, 84. 
Tinamou, 155. 
Tortue, 181, 515, 794. 
— verte, 347. 
Toughay, 347. 
Tragopan, 468-169. 
Tragulus Meminna, 164. 
Truite, 57, 132, 234, 421. 
Turbo sarmatieus, 517. 
Turvert de Java, 178. 


Vache de Bretagne, 152-193. 


— Shorthorns, 427. 
Vectarina famosa, 514; 


420-124, 729-737. 
— del'ailante, 35-36,209-213, 323. 
— du chêne de Chine, 33-34, 298- 
| 299, 460-461, 592, 657-658. 
— du chêne du Japon, 28-33, 34, 
106-116, 284-289, 269, 300, 
326, A16, 469-178, 599, 657- 
658,672-689, 699-712, 738-712, 


| 


770, 785. 
— du mürier, 18-28, 477-178, 
582-589, 645-647. ; 


| Vulpes mesomelas, 513. 
— variegatoides, 513. 
Weka, 174, 
| White Mossel, 516. 
| Wombats, 163-164. 
Zèbre, 513. 

— de Burchell, 257-266, 


à 
RE 


INDEX ALPHABÉTIQUE DES VÉGÉTAUX 


MENTIONNÉS DANS CE VOLUME. 


Abies, 464, 540, 
Acajou, 598-599. 
Adinandra glabra, 377. 
Agati grandiflora, 387. 
Agave, 595-596. 
Aglaia minahassae, 379. 
. Alstonia, 368. 
Ambarivatry, 123. 
Ambrevade, 122-123. 
Andropogon squarrosus, 447. 
Angélique, 793. 
Antidesma, 363. 
Anthocephalus Indicus, 366. 
Aquilaria, 365-366. 
Arbre d'argent, 517. 
Aromadendrum elegans, 373, 
Arracacha, 247,779. 
Artocarpus, 362-365. 
Arum esculentum, 599-600. 
Asclepias Syriaca, 84-85. 
Asparagus Capensis, 517. 
Asperge, 917. 
Azalea viscosa, 797. 
Bambou (bambusa), 59, 182, 305, 
431, 446, 690-695, 743-797. 
— jaune-soufre, 5-6. 
Bananier, 3950. 
Barba hispanica, 349. 
Barbe de vieillard, 349. 
Barringtonia, 387. 
Bassia longifolia, 371. 
Bignoniacées, 8. 
Bischoffia Javanica, 383. 
Blackwellia tomentosa, 374. 
Blé, 776. 
Bocagea, 372. 
Bœhmeria, 6, 363. 
Bois d’aigle, 346. 
— de rose, 346. 
Boldo, 50, 134. 
Bombazx pentandrum, 348. 
Boua-nonna, 929. 
Bouea diversifolia, 382-383. 
Bourao, 307. 


Bruguiera, 384. 

Cacaoyer, 794. 

Ceæsalpinia, 388, 

Caféier, xxxv-xLzir, 92, 360, 794. 
Cajanus indicus, 342-343. 


| Calamus, 361. 


Callicarpa Wallicluana, 369. 
Calophyllum inophyllum, 378. 
Calotropis gigantea, 348. 
Campêche, 118. 

Cañagua, 773-774. 

Canarium, 383. 

Canne à sucre, 91-92, 346,360, 79. 
Cannellier, 794. 


| Carapa, 596-597, 792-793. 


Carumbium populifolium, 381. 
Caryodaphne densiflora, 364. 
Caryophyllus, 386. 

Castanea pumila, 544. 

Cassia fistula, 389. 
Casuarina, 119. 

Cèdre, 540-541, 777,797. 
Cedrela, 379-380, 

Celtis reticulata, 362. 
Ceramanthus, 381. 

Cerisier du Brésil, 118. 
Chamærops, 447. 
Châtaignier, 9544, 

Chêne, 535-539, 772. 

— chincapin, 544. 
Chenopodium Quinoa, 773. 
Chèvrefeuille de Philomène, 7. 


Chou-fleur, 241-242. 


— impérial, 250-252. 


| Chrysophylium, 794. 


Cibotium, 319. 


| Cinchona, 429, 795-796. 


Cinnamomum, 364. 
Cissus capensis, 517. 
Citrus, 378. 

— trifoliata, 2. 
Clavalier, 241. 

Coca, 94, 414, 449-455. 
Cocotier, 121-122. 


INDEX ALPHABÉTIQUE DES VÉGÉTAUX. 815 


Cocotier vert, 529. 

Coffea arabica. Voy. Caféier. 

Commersonia echinata, 375. 

Conguérécou, 793. 

Conifères, 9, 777. 

Concombre d'hiver, 788. 

Coqueret, 533. 

Corchorus, 658-659. 

Cordia, 370. 

Courge, 788. 

Cucumis melo, 3-4, 

Cucurbita Zapallito, 2-3. 

Cupania sideroxylon, 380. 

Cupressus distichia, 93. 

Cynometra, 389. 

Cytisus cajan, 123. 

Dalbergia, 388. 

Damahoe, 376. 

Dammara alba, 364. 

Dialium indum, 389. 

Dicorenia paraensis, 793. 

Dillenia, 373. 

Diospyros, 230-231, 300-301, 371, 
517. 

Dipterocarpus, 376. 

Dirras, 216. 

Distyle à grappe, 6-7. 

Distylum racemosum, 6-7. 

Duriau, 346. 

Durio zebethinus, 375. 

Durios, 346. 

Dysoxylum, 379. 

Echites suberosa, 348. 

Elæocarpus, 375-376. 

Elæococca vernicia ou vernicifera, 
86. 

Embrevade, 342-343. 

Embryogonia arborea, 383-384. 

Epicharis densiflora, 379. 

Erythrina, 387. 

Erythroxylon coca, 92, A1, 449- 
155. 

— relusum, 380. 


Eucalyptus, 6, 133, 134, 146, 249- | 


244, 304, 344-345, 147-148, 
465, 647, 713-725. : 

— colossea, 60. 

— globulus, 119, 465. 

— maculata, 772. 

— resinifera, 134. 

Eurya nitida, 377. 

Eusiderozylon, 365. 

Evodia, 383. 

Evonymus sulphureo-marginatus, 7. 

Excæwcaria agallocha, 381. 

Fagræa, 368. 


Ferula eommunis, 439-445. 
— tingitana, 439-445, 
Fève de Séville, 51. 
Févier, 541, 
Ficus, 363. 
Filao, 1419, 120-121. 
Flacourtia, 374. 
Franchipanier, 120. 
Francicea, 120, 
Fromager, 348. 

Fusain marginé jaune, 7. 
Gaïac, 794, 

Garcinia, 377-378. 

— mangostana, 346. 
Genevrier, 797. 
Gironniera nervosa, 362, 


| Glochidion, 381, 
| Gluta Benghas, 382, 


Gnaphalium, 517. 

— Javanicum, 366. 
Gombo, 448. 

Gommier, 6. 

Gonystylus Bankana, 366. 
Gordonia, 377. 

Greenia latifolia, 366-367. 
Grenadier, 4, 51, 56, 302-303, 459. 
Groseille (du Cap), 517, 
Guaco, 50-54. 

Guettarda, 366. 

Haploceras Leerii, 371. 
Haricot, 532. 

— de Bethléem, 52-61. 
— de Chine, 2, 533. 

— chocolat ou Vavin, 61. 
— d’Espagne, 52-61. 

— de Soissons, 62, 
Hartighsea motlissima, 379. 


| Hedera aromatica, 372. 


Helichrysum, 517. 
Helicia, 366. 

Heritieru, 375. 
Hernandia sonora, 365. 
Hibiscus, 374. 

— esculentus, 48. 
— tiliaceus, 307. 
Hoca, 774. 

Hopea, 372, 376. 


Hovenia dulcis, 1-2, 


Ilex, 380. 
Igname, 418. 
Immortelle, 517. 


| Intsia, 389. 


Ipécacuanha, 429. 


| Lrina glabra, 380. 
| Jalap, 429. 


Jambosa, 386. 


sé 


81ñ 


Jasminum arabicum. Voy. Caféier. 
Juniperus oxycedrus, 314. 

— Virgininna, 797, 

Jute, 658-659, 794. 
Kandelia Rhedii, 38h. 
Katepeng Badak, 529-530. 
Kei apple, 517. 

Kleinhovia hospita, 375. 
Koëme, 124. 

Kouémé, 123. 

Lagerstræmia ovatifolia, 385, 
Laserpitium, 214, 316-318. 
Laurus, 365. 

— camphora, 447. 
Leiocarpus, 381. 
Leucadendron argenteum, 517. 
Lianes, 8. 

— Lejoliff, 123. 

Lierre, 118. 

Ligustrum Quihoui, 7. 
Lilium longiflorum, 7-8. 
Lin, 728. 


— de la Nouvelle-Zélande, 479- | 


480. 

Lippia Ægyptiaca, 530-531. 

— repens, 530-531. 
Liquidambar, 363. 

Lis à longue fleur, 7-8, 
Li-tchi, 794. 
Lo-za, 447. 
Maba ebenus, 371. 
Magnolia ferruginea, 511. 
Maïs, 539. 
Malus spectabilis-Kaïdo, 8. 
Mangifera, 382. 
Mangoustan, 346, 794. 
Melaleuca leucodendron, 385. 
Melon vert (petit), 3-4, 52-53, 768 

778. 

Merkoenjiet, 376. 
Michelia doltsapa, 373. 
Mikania quaco, 50-51. 
Milnea dulcis, 379. 
Mimusops Kauki, 370. 
Mokhaléceh, 467, 
Morinda citrifolia, 366. 
Mousse espagnole, 349. 
Mürier (Morus), 477-478, 734-735. 
Murraya, 378. 

Myrcia, 794. 
Myristica, 372. 
Nania, 385. 
Nauclea, 367-368. 
Nelitris pallescens, 385. 
Nephelium, 380. 
Nonna, 529. 


2 


SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


| Noyer, 541. 
Oca, 774. 
Oranger, 2, 429-130. 
Oriza sativa, 346, 
Ortie de la Chine, 350-351. 
Osier, 120. ’ 
| Oxalis crenata, 771. 
Palétuvier, 794. 
Panais, 776. 
Panazx oblusum, 372. 
Pangium edule, 37h. 
| Paratropea, 372. 
Parinarium, 387. 
Patate douce, 448. 
| Paulownia imperialis, 511. 
Pêcher de Tullins, 771-772. 
Pemphis acidula, 384-385. 
Peronema, 370. 
Peumus boldu, 50. 
Phaseolus vulgaris, 2. 
Phormium tenax, 479-480. 
Photinia integrifolia, 387. 
Phyllanthus emblica, 381. 
| Physalis edulis, 50, 779-781. 
— pubescens, 517. 
Phytolacca, 523. 
| — dioica, 448. 
Picrasma javanica, 383. 
Pierardia racemosa, 381. 
Pimeledendron amboinicum, 382. 
Pin {Pinus), 92-94, 540, 5414. 
Pinus Bungeana, 302. 
| Planchonia sundaica, 387. 
Pochote, 415-416. 
Podocurpus, 361. 
Pois à la crème, 533. 
— du Mexique, 532. 
Polyalthia, 372. 
Pomme deterre, 3, 61-62, 141, 647. 
— Velez, 302. 
Pommier à bouquet kaïdo, 8. 
— du Kei, 517. 
Potiron de Bordeaux, 532, 
| Premna, 369. 
Prinos, 380-381. , 
Protium javanicum, 383. 
Psidium quajava, 385. 
Pterocarpus. 387-388. 
Pterospermum diversifolium, 373. 
Pulu, 349. 
Punica granatum, A. 
Pyrethrum cinerariafolium. 344. 
Quercus prinus chincapin, 844. 
— pubescens, 314. 
Quinoa, 141, 773. 
| Quinquina, 58-59, 429, 795-796. 


INDEX ALPHABÉTIQUE DES VÉGÉTAUX. 815 


Raisin d'Amérique, 523. 


| Syzygqium, 385-386. 


Ramié, 6, 228-229, 350-351, 793, | Tabac, 360, 794. 


79h. 
Rhamnus utilis, 447. 
Rheum, 593. 
Rhizophora, 384. 
Rhododendron, 96. 
Rhubarbe de Chine, 593. 
Rhus, 382. 

— colmus, 314. 

— vernicifera, 85. 

— succedanea, 447-448. 
Riz, 346, 359-560, 794, 
Rotang noir, 361, 

Rubus, 517. 

Safran, 356-358. 

Sandoricum nervosum, 379. 
Santalum album, 365. 

Sapan, 346. 

Sapota Mullerii, 426-427. 
Schoutenia ovata, 375. 
Saodaphyllum palmatum, 372. 
Semecarpus heterophylla, 382. 
Sequoia gigantea, 540. 

— sempervirens, 540, 777, 
Sésame, 346. 

Sülphion, 214-221, 316-318, 771, 
Sindora Sumatrana, 389, : 
Solanum tuberosum, 3. 

Somuco, 314. 

Sofneratia, 385. 

Sophora, 465-467, 541. 
Spathodea, 370. 

Sponia timorensis, 362. 

Sterculia nobilis, 374-375. 
Stipellaria Zollingeré 381. 
Streblus aspera, 362. 
Strombosia, 378. 

Strychuos colubrina, 368. 


Styphnolobium japonicum, 465-467. 


Styrax berzoin, 371-372, 
Symplocos, 372. 


| Talauma villosa, 373. 

Talinum Lachaumei, 3. 

Tamarindus Indica, 388-389. 

Teck, 346-360. 

| Tectona grandis, 360, 369-370. 

|  Telfairia pedata, 123-125. 

Terminalia, 384. 
Tetrameles nudiflora, 374. 

| Tetranthera, 364-365. 

| Thapsia, 216, 316-318, 771. 

Thé, 126-128, 360, 429, 599, 

| Thespesia, 374. 

| Tillasidisca usneoides, 348, 

| Tjenkoudou, 529. . 

Tomate du Mexique (petite), 50, 
533, 779-781. 

| Tong-chou, 86. 

Troene de Quihou, 7. 

Tsi-chou, 85. 

Truffe, 789. 

Tulipier, 541. 

Uvaria purpurea, 373. 

Vaniller, 118, 596, 793, 794. 

Végétaux, 1-16, 533-524, 539-541. 

Vernonia Javanica, 366. 

Vigne, 4-5, 12.16, 228, 229-230, 
245, 267-283, 303, 310-311, 
461-463, 517, 541-544, 650- 
657, 776. 

Vitex, 369. 

Wistaria sinensis, 796-797. 

Vitis, 245, 531. 

Xerospermum Noronhianum, 380, 

Xilopia frutescens, 793. 

Xylosteum philomelæ, 7. 

Yucca baccata, 350. : 

Zapallito, 2-3,136,531-532,777-778. 

Zanthoxzylum Americanum, 244. 

Zea mais, 539. 

Zizyphus, 381. 


TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 


MENTIONNÉS DANS CE VOLUME. 


re 


Anonyine. La Laque, maniere de; 


l'obtenir, préparation et appli- 
cation des vernis, 85. 
L’Embrevade (Cujanus Indicus 
Sprengl.), 342. 
Boisement des plateaux arides, 
044. 
Acclimatation du Chameau aux 
Etats-Unis, 792, 

Exposition permanente des Colo- 

nies, 792. 

Chargé d'affaires de la Légation de 
France au Pérou. Envoi de 
graines de coca, 413. 

Empereur du Brésil, (S. M. L’). Dé- 
pêche à M. le Président de la 
Société d’acclimatation, 418. 

Gouverneur de la Guyane. Envoi d’a- 
nimaux de la colonie, 224. 

Gouverneur de la Nouvella-Calédo- 
nie. Offre de végétaux de la co- 
lonie, 459. 

ABRAHAM-PacHA. Multiplications d’oi- 
seaux à Beïcos, 769. 

ALBUQUERQUE. Naturalisation de végé- 
taux au Brésil, 775. 

AMÉZAGA (de). Aftacus Yama-mai, 785. 

AuUMÉRAN. Race bovine des Maures, 
764. 

AUTARD DE BrAGarp. Note à propos 
de l'introduction de plantes et 
d'animaux dans diverses con- 
trées notamment en Égypte, 117. 

BaRAILON. Le sophora du Japon 
comme arbre forestier, 465. 

BarRAciN (Éd.). Éducation d'oiseaux, 
642. 


BaruTEL (E.). Sur son cheptel de | 


Colins, 327. 

Bates (Major). Le coq de bruyère 
américain ou Tétras huppecol 
et son acclimatation, 81. 

Becu (J.). Aperçu sur les oiseaux et 
la chasse, 563. 


Bécizat (Vicomte de). L'Eucalyptus 
dans les côtes du Nord, 464. 

BerG (With. Carl). Acclimatation de 
Antherea Yama-mai G. M. 
dans les provinces baltiques, 
469, 

BErGis (L.). Arrivée des oiseaux 
émigrants dans le Tarn et Ga- 
ronne, 98. 

— Attacus Yama-maï, 300, 

BerNarDiN. Le Phormium tenax où lin 
de la Nouvelle-Zélande, 479. 

BERTHELOT (Sabin). De la domestica- 
tion des Animaux, 601,641. 

Bicor (A.). Éducations .d’'Affacus 
Yama-mai, faites à Pontoise de 
1870 à 1873, 284. 

— Croisement des Attacus Yama-mai 
«et Pernyi, 592. 

Braise. Pomme de terre de Choloy, 
227. 

BLANCHÈRE (H. DE La). Ya-til des 
poissons à acclimater?, 64. 
BLEsT-Gaxa. Exposition internatio- 
nale du Chili en septembre 1875, 

784. : 

Bossix. Haricot de Bethléem, 52. 

— Le chou-fleur impérial, 250. 

BouiLLop (E.). Sur l'élevage des din- 
dons sauvages, 612. 

Bourarr (Raoul). Une ferme d’Au- 
truches, 433. 

Bouzey (H.). Comment l’hemme s’est 
assujetti les animaux domesti- 
ques et les a refaconnés pour 
son usage, XLIIT. 

Bray (Le baron Jean de). Le Ramié 
en Algérie, 228... 

Bureau (Ch.). Ver à soie du Mürier, 
645. 

Buvicnier. Oiseaux et insectes, 659, 


| BuzZARÉ (A.). Pomme de terre Early 


rose, 647. 
CaRBONNIER. Envoi de Gouramis, 330. 


5 


TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS. 


CARBONNIER. Importation de poissons 
exotiques, 926. 

—— Le Fondule, 665. 

— Nouvel envoi de gourumis et cy- 
prins, 769. 

Cuasor-KaRLeN. Établissement 
pisciculture d’Interlaken, 57. 

CuaGor ainé. Acclimatation de l’Au- 
truche à La Plata, 139. 

CnAPPELLIER (P.). De la culture des 
safrans étrangers introduits en 
France par la Société d’acclima- 
tation, 356. 

Caarin. Pêche de Tullins et glands 
truffiers, 771. 

CHaucHaT. Reproduction de la Per- 
drix en captivité, 768. 

CHauvix. L’Eucalyptus dans les Côtes- 
du-Nord, 304. 

Cheptels de la Société d'acclimatation. 
Règlement et liste des animaux 
et des plantes qui pourront être 
donnés en cheptel aux membres 
de la Société en 1874-1875, 
le) 100000 

CLarTÉ. Zapallito et petit melon vert 
à rames, 777. 

CozcexoT. Résistance des Lambrus- 
ques au Phylloxera, 461. 

Cozuix (E.). Culture de la rhubarbe 
de Chine dans la Meuse, 593. 

Corron-Sarrer. Pisciculture et éle- 
vage des animaux domestiques 
en Chine, 791. à 

Corpier. Sur les Eucalyptus red-gum 
et flooded-gum, 242. 

— Croissance comparée de diverses 
espèces d’Eucalyptus, 344. 

— L'Eucalyptus maculata, 772. 
CorNELY (J.). Essais d’acclimatation 
à Tours en 1872-1873, 161. 
CRÉPUT. Sur ses éducations d’Autru- 
ches en Algérie, 295, 525. 
Dasry de TuiersanT. Envoi de pois- 

sons de Chine, 442. 

Davrau. Cheptel de Faisan vénéré, 
767. 

Decroix. Situation de l’usage alimen- 
taire de la viande de cheval, 97. 

— Usage de la viande de cheval, 
434. 

— Coloration des cocons de vers à 
soie an moyer dun régime ali- 
mantaire. 319. 

DELAURIER. Education d'oiseaux, 225, 
240, 591, 768. 


de 


817 

DELCcHEVALERIE, Le Lippia Ægyptiaca, 
530. 

Derinox. Coloration des cocons de 


vers à soie au moyen du régime 
alimentaire, 404. 

Dinor (A. Firmin). Léporides, 240, 

Drouyx pe Luuvs. Naturalisation du 
café, XXxvI. 

— et Lecoureux. Prix fondés par la 
Société des Agriculteurs de 
France, 118. 

— Discours prononcé au Congrès 
viticole de Montpellier, 650. 
Ducuastez. Cheptel de Canards man- 

darins, 768. 

DucHEsve DE BELLECOURT. Sur diverses 
plantes de Batavia, 529. 

Durix et JacquemartT. Rapport de la 
Commission de comptabilité sur 
l'exercice 14873, cvrrt. 

Duriäu DE Maisonneuve. Pomme de 
terre Velez, 302. 

— Vignes américaines, 531. 

Duwarner. Métis de perdrix rouge et 
grise, 545. 

FANE. Gibier pour les friches du 
Hampshire, 84. 

ForGEmor. Dévidage des cocons de 
l’Attacus Aurota, 204. 

FRémiNviLce. Utilité de la cigogne, 
297. 

GazLais. Culture de divers végétaux : 
en Algérie, 241. 

Garnier. Production du royaume de 
Siam, 346. 

GEOFFROY SAINT-HicaiRe. Rapport au 
nom de la Commission des ré- 
compenses, LXXXIX. 1 

— Rapport présenté au nom du 
Conseil d'administration par le 
directeur du Jardin, exiv. 

— Zaypallito, 135. ù 

— Bulletin mensuel du Jardin d’ac- 
climatation du bois de Boulogne 
(janvier et février 1874), 149. 

— Fécondité d’une mule, 305. 

G£orroy (pe). Note sur le Pinus Bun- 
geana, 302. 

— Envoi .d’échantillon de soie du 
chène de Chine, 460. 3 
GinarD (Maurice). Rapport sur les 
diverses espèces de Lépidoptères 
producteurs de soie, élevés en 
1873, à 14 inagnanerie du Jardin 

d’acclimatation, 17. 


— Le ver à soie Brésilien. Notice 


818 


entomologique 
aurota, 183. 

Girarp (Maurice). Coloration des co- 
cons au moyen du régime ali- 
mentaire, 415. 

— Procès-verbal de la séance du 
Conseil du 17 juillet 1874, 456. 

— — 21 août 1874, 519. 

— — 25 septembre, 590, 

— — 16 octobre, 641. 

GoBix (A.). Précis pratique de l’éle- 
vage des Lapins, Lièvres et Lépo- 
rides en garenne et clapier, 432. 

— Traité des oiseaux de basse-cour, 
d'agrément et de produit, 432. 

GR£ENwWoOOD (Harry). Le Colin Houi et 
la poule‘de prairie, 340. 

Grisarp (Jules), Conservation 
œufs, 314. 

Hervey DE Saint-DEnys (le Mis D’). 
Compte rendu de ses cheptels, 
523, 765, 

Hiexer. Éducations de vers à soie en 
Pologne, 132, 226. 

TAcQuEmaRT et Dupix. Rapport de la 
Commission de comptabilité sur 
l'exercice 1873, var. 

Jouy. Coloralion des cocons de Vers 
à soie au moyen du régime ali- 
mentaire, 420. 

Jourpax. Compte rendu de ses édu- 
cations de diverses Perruches, 
103 ,768. 

KemMERER. Sur les ruches tuilées, 408. 

LABERENNE (Julien). Croissance de di- 
verses espèces d'Eucalyptus à 
Robertville, (Algérie), 647. 

Larox (9.7 ). L’abeille italienne, 252. 

La 


sur  l’Aflacus 


des 


militaires, 947, 

— Sur l'emploi des déchets de lin 
contre le Phylloxera, 728. 
Lavar. Note sur le Si/phion et sur les 
avantages qu'il y aurait à accli- 

mater cette plante, 214, 316. 

LEBOEUF DE MonTGERMoNT, Faisans vé- 
nérés en liberté, 4641. 

Lecoureux et Drouyn pe Lauys. Prix 
fondés par la Société des Agri- 

. culteurs de France, 418. 

Le Doux. Dévidage des cocons de 
l’Attacus aurota, à la bassine or- 
dinaire au moyen des chrysalides 
artificielles en caoutchouc, 353. 

Leroy. Comptes rendus de l’état de 
ses cheptels, 139, 644. 


Pere pe Roo. Les colombiers 


SOCIÉTÉ D'ACGCLIMATATION. 


LicarexsTeIN. Ravages du phylloxera, 
dans l'Hérault, 244, 

— Éducation d’Aftacus Yama-mai, 
299, 326. 

Lucy. Sur le Diospyros, 230. 

— L'’huitre américaine, 307. 

Mac (J.). L'Attacus Yama-mai 
Caruiole, 770. 

Mairer. Éducations d'oiseaux à la 
faisanderie de Ferrières (Seine- 
et-Marne), 522, 696. 

ManspENDEL. Elevage de diverses es- 


en 


pèces d'oiseaux d'agrément, 
312. 
MALINGRE. Grenade sans pepin et 


fève de Séviile, 54. 

Marais. Sur divers produits médi- 
caux soumis à son examen, 50. 

Marcaror-Pauc. Sur les Oies d’É- 
gypte, 440. 

Marior. La reproduction des huîtres 
perlières aux îles Tuamotu, 341. 

ManTiner. Note sur la culture de 
l'Erythroxylon coca. 449, 

Massox (Victor). Reboisement des 
montagnes de la Côte-d'Or, 295. 

— Rapport sur ses cultures, 463. 

Maumexer. Vignes américaines, 228. 

— Rhamuus de Chine et Eucalyptus, 
301. È 

— Naturalisation de divers végétaux 
à Nimes (Gard), 446. 

Maynéva (David de), Ostréiculture 
112% 

MexañDp (Saint-Yves). Utilisation des 
Zèbres de Burchell, comme ani- 
maux de trait, 257. 

Mérice (E.). Exposition d'oiseaux au 
Palais de Cristal, 158. 

— Exposition d’ânes et de muletsau 
Palais de Cristal, 339. 

— Progrès et développement de la 
culture de l'Eucalyptus d'après 
les travaux de M. P, Ramel, 7438. 

Mizzer. Nids artificiels, 232. 

— Brouillards de mars, 253. 

— Gelées printanières, 305, 322. 

— Sur le Phylloxera vastatrix, 334. 

— sur la Truffe, 789. 

Mizry (Vicomte de). Éducations d’At- 
tacus cynthia en 1873, 209. 

— Le Bourao, 307. 

Misser, Compte rendu de son cheptel 
de Poules Houdan. Pisciculture 
dans la Côte-d'Or, 441. 

MoxGranp (E.). Grainage cellulaire 


“à 


TARLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS. 


de l'éducation d’une once, d’après | Raverer-WaATTer. Rapport annuel sur 


le système Pasteur, 582. 

Moxeranp (E.). Deux éducations d’At- 
tacus Yama-mai, faites en 1873 
et 1874, 699, 

Mongau (H.). Emploi du gland pour 
la nourriture des Faisans, 409, 
535. 

— Geléés printanières, 409. 

Muezrer (Baron F. Von). Naturalisa- 
tion de diverses espèces d'Euca- 
lyptus, 133. 

Muwrapas..ÆEnvoi d'éufs embryonnés 
de truites, 132, 234. 

Murs (0. Des). Notice nécrologique 
sur Jules Verreaux, 37. 

Naupix. (Ch.). Objections au pro- 


cédé de l’arrachage des vignes 


pour la destruction du phyl- 
loxera; indication d’un autre 
procédé, 541. 

OpsrréiL (Jean). Sériculture en Au- 
triche, 298. 

Ounous (Léon d’). Sur divers végétaux 
cultivés à Saverdun (Ariége), 
939, 776. 

Pavie (Théodore). Sur les cultures 
de divers végétaux, 531. LR 

Penny (Paul). Projet d’une académie 
européo-chinoise, 726. 

PicHox. Reproduction de Ouistiti, 329. 

Picnor (Pierre). La poule de prairie, 
341. 

Prizrieux (Édouard). Note sur l’in- 
troduction de la culture du thé 
à Java, 126. 

— Sur les productions agricoles et fo- 
restières des possessions hollan- 
daises des Indes Orientales, 359. 


Pruxs (Marquis de). Guide d’accli-| 


matation pour les instituteurs, 
521, 764. 

Quinou. Rapport sur les principales 
cultures faites en 1873, au Jardin 
d’acclimatation du bois de Bou- 
logne, 1. 

Raguré. Compte rendu de ses édu- 
cations de divers oiseaux, 329. 

RaueL. Sur diverses espèces d’Eu- 
calyptus, 60, 146, 242. 

Ramponx. Sur le Physalis edulis, 779. 

Rampon (de Lavaur). Le lapin de 
Saint-Pierre, 95. 

RavererT-WaATTEL. Procès-verbal de la 
dix-septième séance publique 
annuelle, XVI. 


les travaux de la Société d’ac- 
climatation pendant l’année 
1873, Lxiv. 

— Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 9 janvier 1874, 48. 

Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 23 janvier 1874, 54. 

Les Pêcheries du Canada, 88. 

— Procès-verbal de la séancé géné- 
rale du 6 février 1874, 129. 

Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 20 février 1874, 136. 

La Reine des Abeilles, 159. 

Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 6 mars 1874, 222. 

Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 20 mars 1874, 236. 

Modifications dans les instincts 
des animaux, 249. 

Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 24 avril 1874, 290. 

Sur la domestication de l’Au- 
truche au Cap, 308. 

Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 8 mai 1874, 310. 

Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 22 mai 1874, 323, 

Le Bouc de cachemire en Cali- 
fornie, 340. k 

Télescope d'eau, 345. 

Incubateurs Brackett, 347. 

Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 5 juin 14874, 401. 

Emploi de l'osier par l’indus- 
trie anglaise, 420. 

Société d’acclimatation de Vie- 
toria, 421. 

Introduction de l’orfe en Angle- 
terre, 422. 

Le saumon du Säcramento, 422. 

La chèvre d’Angora, 423, 

— Précis pratique de l'élevage des 
lapins, lièvres et léporides en ga: 
renneet clapier par A.Gobin,432. 

Traité des oiseaux de basse-cour 
d'agrément et de produit par 
A. Gobin, 432. 

Acclimatation en Allemagne des 
Attacus Yama-mai et Pernyi, 657. 

Culture du jute au Bengale, 658. 

Premiers essais de domestication 
de l’Autruche dans la colonie 
du Cap, 661. 

— Transport du poisson vivant aux 

États-Unis, 662. 


819 


L'4 


& - 


0 


_ Raverer-WarteL. Essais de piscicul- 


ture et d’ostréiculture dans le 
Grand lac salé de l'Utah, 727. 

— De l'utilité d'introduire la sérici- 
culture à la Nouvelle-Calédonie, 
729} 

— Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 4 décembre 1874, 758. 

— Procès-verbal de la séance géné- 
rale du 148 décembre 1874, 782. 

Ruiseaun. Compte rendu de son chep- 

tel, 767. 

(B.). Stabulation des salmo- 
nides dans des espaces restreints 
490. 

RimBaup. La question des Madragues, 
390, 

Rivière. Le Boldo et l'Evcalyptus en 
Algérie, 134, 

— Bouturage souterrain de la vigne, 
229, 310. 

— Les Ferula communis et tingitana, 
439. 

Rocue (DE LA). Sur le dévidage des 
cocons des Attacus, 618. 

RocHEmACÉ (DE LA). Sur quelques 
plantes ou animaux à propager, 
776. 

Rozanp (A.). Sériculture en Suisse, 
315. : 
ROQUETTE (DE LA). Sur le Diospyros, 

300. 

—.Don de graines de Mokhaleceh, 
h67. 

Roux (Frédéric). L'Asclepias Syriaca; 
84. 

Sacaor. Chronique d'Amérique, 91, 
348, 426, 595, 795, 

Saxra-Cruz (Mme la Maréchale). Ani- 
maux et plantes utiles de la 
Bolivie, 440, 773. 

SauLcy (De). Observations sur l’éde- 
cation de l’Atfacus Yama-mai, en 
41873, 106. 


Rico 


SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


SauLcy (ne). Éducation de l’Attacus 


Yama-mai, faite à Metz en 1874, 


672. 

SETTER. Introduction proposée du 
Tétras cupidon, 83. 

SINÉTY (Marquis de). Sur le petit me- 
ion vert à rames, 52. 

SOCIÉTÉ AGRAIRE DE TRIESTE. Animaux 
et végétaux utiles de l’'Illyrie, 
343: 

SURIGNY (A. de), Sur son cheptel de 
colombes Lophotes, 297, 458. 

TEGETMEIER. Sur l'introduction pro-- 
posée du Tétrashuppecol, 82. 

THocozax. Perdrix et ânes sauvages 
de Perse. Grenade sans pepins, 

THOMAS-ANQUETIL. Aventures et 
chasses dans l’extrème Orient, 
664. 

Trinex- Note sur les animaux et les 
plantes utiles du Cap de Bonne- 
Espérance, 512. 

TurreL. L'élevage des canards en 
Cochinchine, 56. 

— Les maladies de la vigne, 267. 

— Sur le gourami, 225. 

— Vignes américaines, 303. 

— Des madragues, 406. 

— Les oiseaux et les insectes, 497. 

— Pêche d’une éponge dans les 
eaux du Lavandou. (Var.) 592. 

— Note sur un Bambou rustique 
confondu à tort avec le Bam- 
busa gracilis, 690. 

Vavix. Sur la conservation prolon- 
gée des œufs. Haricots de Beth- 
léem et chocolat. Greffage des 
pommes de terre, 60. 

— Arracacha, 247. 

VipaL (le Dr J.). Note sur les usages 
du Bambou, 743. 

Waizzy. Éducation de l’Attacus Yama- 
-mai, à Londres, en 1874, 738. 

Weser. Concombre d'hiver, 788. 


— Éclosion des œufs d’Aftacus Yama-|Your (J.) Acclimatation du saumon 


mat, 300. 


en Tasmanie, 333. 


4 RE 
ks 
| “à * 
é Le: 
4 ÿ 
TABLE DES MATIERES 
DOCUMENTS RELATIFS À LA SOCIÉTÉ. 
Organisation pour l’année 1894, 
Bureau et Conseil d'administration. ......... Lors REA 0 Got v 
Délégués de la Société en France et à l’étranger............. Me Re VI 
Commission de publication.......... CAD OM Db DIE DD TB OI ste VI 
Commission des cheptels................. A A AN EN EE PTS . vil 
Comnissionpmedicale SRE EE EEE TS En VII 
Commission permanente des récompenses ................ EN AERS vil 


Dix-neuvième liste supplémentaire des Membres et des Sociétés affiliées 

Gt AERÉGÉCT OO ONE RE 6 SE co ébons PS EL En 3 x 
Rapport de la Commission de comptabilité sur l'exercice 1873, par 

MM. Eug. Dupin et Fréd. JACQUEMART, rapporteur............... CVILL 


DIX-SEPTIÈME SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE 
DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


Procès-verbal de la dix-septième séance publique annuelle, tenue le 
‘ A0 avril 4874, dans la grande salle du Grand-hôtel..........., XVII 


Prix extraordinaires encore à décerne. 


CN CRALLLES ER ee RM OP AT TS ne ee Le nn EN VENT 
Prix perpétuel fondé par feuc M€ GUÉRINEAU, née DELALANDE. XXL 
Prix fondé par feu M. AGRON DE GERMIGNY.......... ND XXI 
Première section. — Mammifères. ............ MN der ENTER XIV 
Prix perpétuel fondé par feue Mme Ad. DuTRÔNE, née GALOT... XXII 
Deuxième section. — Oiseaux ....,....................4...  XXIV-XXVI 


Troisième section..,.......... nas ic cet Oo c à ob D'OR De 9 QYITES SD 
Reptiles . ...... AR RRILRRES MAÉ balrane SeNaEMEN UR ne CC CNEVIT 
POISSONS ere D RON RE EE SUN ARRETE TS: DIE TD O QUIL 
MGILUSQUES 220 0e RON NE en SO a eee lo XXIX 
Crustacés Sont Lee À PP to 0 à OO UE XXIX 
ÿ 
#, 


SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 


+ %e ; 
Quatrième section. -- Insectes... 
SORICICULEUTE 0e are AE 


Prix fondé par M. Drouyn DE Luuys.. 
ADICULEUrER AR ere 


oo soso es ee 
ns soso se 


ose ss orne esse so eee ee 


Cingiième section, =dWégétaux. ff, MUR ARE Moi 


Discours prononcés à la séance. 


MM. Drouyx DE Lauys. — Discours d’ouverture.................. 
H. Boucey. — Comment l’homme s’est assujetti les animaux do- 
mestiques et les a refaçonnés pour son usage...... TE Ne 
C. RAveRET-WATTEL. — Rapport sur les travaux de la Société 
d’acclimatation en 1873... 
À. GEOFFROY SAINT-HiLAIRE. — Rapport au nom de la Commission 
des récompenses, . ... 


ee © 6 © © 0 © 0 0e © © © # + 6e & + » 0 + © + « + + 


Sover es eee es esse see eee ee ee 0 


GÉNÉRALITÉS, 


À, GEOFFROY SAINT-HILAIRE. — Rapport présenté aux actionnaires au nom 
du Conseil d'administration du Jardin d’acclimatation. Assemblée gé- 
nérale du 27 avril 1874 ... 

O. pes Murs. — Notice nécrologique sur Jules Verreaux,. .... 


CCC CC 


La laque, manière de l'obtenir, préparation et application des vernis. … 


consonnes ess serve XXIX-XXXII 


k CO 
XXX de 


XXX F4 


XXXI 


=XXX1V 


XLIII 
LXIV 


LXXXIX 


EXIV 
37 
85 


Oct. Sacnor. — Chronique d’Amérique.......... 91, 348, 426, 595, 795 


AurARD DE BRAGARD. — Note à propos de l'introduction de plantes et d’a- 
nimaux dans diverses contrées, notamment en Egypte ............ 
À. GEoFFRoY Saint-Hiratre. — Bulletin mensuel du Jardin d’acclimata- 


ON ET ER Sn US Re ne TT RS SR 


Jos. M. Cornezy. — Essais d’acclimatation à Tours, en 1872- 1873. 
Raverer- Warrez. — Modifications dans les instincts animaux. 
Le même, — ‘Télescope d'eau, ......,.... 


oo. 


so sense see 0 


GARNIER. — Productions du royaume de Siam.,.................... 
RavereT-WaTtELz. — Incubateur Brackett . DS ER ON UV 
RimBaAUD. — La question des madragues. AA IENEU | AB 6: 00 0010 8.0 


S. M, L'EMPEREUR DU BRÉSIL, — Done dréeels à M. le Président. 
Drouvx be Luuys et Le Coureux. — Prix fondé par la Société des agri- 
culteurs de France. ......... 
Raverer-WATTEL. — Société d’acclimatation de Victoria ............ 
Cheptels de la Société d’acclimatation. — Règlement et liste des Animaux 
et Végétaux qui pourront être donnés en PCHEDIE aux membres de la 
Société en 187475 RME, Le 
Docteur TuxrEz. — Les oiseaux et les insectes... 
Roland TRrIMEN. 


Note sur les animaux et les plantes utiles du Cap de 
Bonne-Espérance. . 4,4... 


une ea MelrNoete els Te: 5 AE é 0 OEPDACUS 


# PERTE : g 5 + 


# APE À 
Pal SR k. 24 La - 14 ’ L % + F4 ÿ 
| 0 7 . 0 bi UM ut” 
ER. | ; hs cuil a MO 
” #” # Mrs de 4e ds a 1 NS qu” 
ù rs D TABLE DES MATIÈRES.  : . 825 
Docteur H, Moreau. — Emploi du Gland pour la nourriture des Faisans.… 539 
…  Naunix. — Objections au procédé de l’arrachave des vignes pour la des-. Fe 
” truction du Phylloæera ; indication d’un autre procédé. ......,.... Rat PE 
J. Bec. — Aperçu sur les oiseaux et la chasse. .................. ‘ 563 
al S. BerrueLor. — De la domestication des animaux... ....... A 604 
ee” Drouyx pe Luuys.— Discours prononcé au congrès viticole de Montpellier. 650. 
À. BUVIGNIER. — Oiseaux et insectes ....................,....1.. 669: 
Paul PErNy. — Projet d’une Académie européo-chinoise ............ 726 
La PErr£ DE Roo. — Emploi des déchets de lin contre le Phylloxera... 728 
Exposition permanente des colonies. .....,.4...,:,..........,... 792: 
MAMMIFÈRES. 
Decroix. — Situation de l’usage alimentaire de la viande de Cheval... 97 
SAINT-YyEs MÉvaRD. — Utilisation des Zèbres de Burchell comme ani- ke 
TO CLEA LR ee ce tt ee D A eee Re ce | di AOBSN CAR 257 
 E: Mérice. — Exposition d’Anes et de Mulets au Palais de cristal. .... 339 
RAVERET- WATTEL. — Le Bouc de Cachemire en Californie. .......... 310. 
Le mème, — La Chèvre DATE OPA AE EG ne Lie pe AN 423 
Acclimatation du Chameau aux États-Unis, ......,,.. ee el le 792 
OISEAUX, 
Major Baïes. — Le Coq de bruyère américain où Tétras huppecol et son 
dec lMA LAON Ne UE dc ahabbe rente eo deb be ai 01 
VecermErEr, — Sur l'introduction proposée du Tétras huppecol....... 82, 
Serter. — Introduction proposée du Tétras cupidon............,... T0 
_ Fréd. Fang. — Gibier pour les friches du Hampshire . . DA a 8 
r E. Mérice. — Exposition d'oiseaux au Palais de cristal. ............. 158 
Harry Gngexwoop et Picuor. — Le Colin houi et la Poule de prairie.. 340 
Raoul Bourart, — Une ferme d’Autruches,.......:......,... de eR 39 
. G. Duwarwer, — Métis de Perdrix rouge et grise............ diet 2e) OM 
NV. La Perre DE Roo. — Les colombiers militaires (2° article). ........ 947 
Ernest BouiLcon, — Sur l'élevage des Dindons sauvages. ........... . 612 
Ravener-WATTEL, — Premiers essais de domestication de l’Autruüche dans : 
1H Colonie:du\iCap au seen Ris miahe dote tele ere elle 6 ler 661 
Al. Maurer. — Éducations d'oiseaux à la faisanderie de Ferrières (Seine- 
et-Marne)..... A OP 30000 AO O0 0 00 0 DATE IDE 
LD 


POISSONS, CRUSTACÉS, ANNÉLIBES, ETC. 


H. px LA BLaxcuèrt, — Ÿ a-t-il des poissons à acclimater? (Conférence 
utelanJardinid'accnataton) ele ee te OT teen 6 


Raverner-Warrez. — Les pêcheries du Canada, .,.,444,.,,,,,,,,.., 88 
si à 


Fa 


PE 


£ 
Au no” # 
Le " +" 
SÉ pe F 
ONE CR SOCIÈTÉ D'ACCLIMATATION. 
Marior. — La reproduction des Huîtres perlières aux iles Tuamotu.. . 


B. Rico. — Stabulation des Salmonides dans des espaces restreints.... 
Raveret-WATTEL. — Introduction de l’Orfe en Angleterre. — Le Saumon 
du Sacramento ........ 0 


soso sas ses ses esse ess eo + 


Le même. — Transport du poisson vivant aux États-Unis. ........ airs 
CaRBoNNIER. — Le Fondule (Fundula cyprinodonta Gux.)......,..4..… 


RavereT-WATTEL, — Essais de pisciculture et d’ostréiculture dans le 
Grand Lac Salé üäe l'Utah ...... ë 


Cocron-SaLtER. — Pisciculture et élevage des animaux domestiques en 
Chire RARE ere AU 0 Cd m0 B0ia dd ee A ES ALES 2 
INSECTES. 


Maurice GirArD, — Rapport sur les diverses espèces de Lépidoptères 
producteurs de soie, élevés, en 4873, à la magnanerie expérimentale 


du BorstdenBoulogne. it pi RP EL RPMNTeErE MMS 0 Blot 
E. DE SAuLCY. — Observations sur l'éducation de l’Aftacus Yama-mai, en 
ASS 7 OUT pq M M EL) à à Me at eve M Me tot S. 
RAverer- Wartez. — La Reine des Abeilles .............. Fe see 


Maurice Girarv. — Le Ver à soie brésilien, Note entomologique sur 
ALIQCS aunote.2 2, 1 LU ARONE TS Ne RECOURS 
Docteur ForGEMoL. — Dévidage des cocons de l’Atffacus aurola....... 
Vicomte L. ne Mizzyx. — Éducations d’Attacus Cynthia, faites au château 
de’@anenx!{Landes);/en 1876 Eee CNE er er CS 
Docteur J.-J. Larox. — L’Abeille italienne... .................. ARGUS 
F.-A, Bicor. — Éducations d'Affacus Yama-maï faites à Pontoise, de 
MOORULS 78:50 RES ARRET EAN A PAT TR FÉSIRENSRE 
LE Doux. — Dévidage des eocons de l’Attacus aurota au moyen de chry- 
salides artificielles en caoutchauc ...................... Ci A ARR : 


Docteur N. Joy. — Coloration des cocons de Vers à soie au moyen du 


régime alimentaire....... CS NO RES AM AT eee Ne NO #2 
W. Carl BerG. — Acclimatation de l'Antherea Yama-mai dans les pro- 
vinces Baltiques.....,. NE PR AR EAN ER PRE Fee SE. VITE USERS 
Docteur E. MonGranD. — Grainage cellulaire d’une éducation d’une once 
d’après le système Pasteur. ...... UE AE 2 DR ee es 2 RAT ETAT 
Vicente pe LA RocuE. — Sur le dévidage des cocons des Attacus...... 
RaverEr-WVATTEL, — Acclimatation en Allemagne des Attacus Yama-mai 
CÉSAR à 018 à PALAIS ARRETE NO ERN Die 14 à AVE © PA de Le NE SE 
De SauLrcy. — Éducation de l'Aftacus Yama-maï, faite à Metz, en 1874. 
E. Moncranb. — Deux éducations d’Attacus Yama-mai, faites en 1873 
FE BOL PAPE à pe ANNEES CARRE UNR NES Se Are Pig Sn rs 
C. RAvEREr-WATTEL, —- De l'utilité d'introduire la sériciculture à la 
Nouvelle-Calédonie .....,.......... A NE ANNE tr Re AE NE Ne qu 
Waizry. — Éducation de l'Atracus Yama-mai à Londres, en 1874.... 


791 


303 
420 
469 


582 
618 


657 
672 


699 


'è 


TABLE DES MATIÈRES. PATES. 
At" 2 je Xe 
VÉGÉTAUX. 
Quisou, — Rapport sur Les principales cultures, faites en 1873, au Jardin « 

d’acclimatation du Bois de Boulogne. .............. LAS SE s 44 
PredéaRoux. FA sclepias Symacang Ve... M ME RE 84 
Ed. Prizuieux. — Note sur l'introduction de la culture du Thé à Java.. 126 
LAvaL. — Note sur le silphion (de la Cyrénaïque) et sur les avantages 

qu'il yaurait à acclimater cette plante. MEL ......"..... m0 mn 214 
BossiN.—"Le Chou-fleur impétaléé.. .:...... ent... 0 250 
Docteur L. Turrez. — Les maladies de la Vigne............. © AN 707 
Anonyme. — L'Embrevade (Cajunus Indicus, Shrengla ER -e: CEn . 342 
A. CoRpiEr. — Croissance comparée de diverses espèces d'Eucalyptus.. 544 
P. CHapreLLier, — De la culture des Safrans étrangers introduits en 

France par la Société d’acclimalation.......................... 1808 
Ed. Prizcieux. — Sur les productions agricoles et forestières des posses- 

Sions hollandaises des Indes orientales. ............. SHOT ES .. 399 
RavererT- Warez. — Emploi de l’osier par l’industrie anglaise. ...... . 420 
À. Rivière. — Les Ferula communis et fingitana comme plantes papy 

DRE SE ARE AMAR D. 0e 2e te Suede Le fee mit e ere ele e el ojele : EN 139 
MaumeNEr. — Naturalisation de divers végétaux à Nimes (Gard)...... 446 
E. MarriNer. — Note sur la culture de l'Erythroxylon coca......... = Aie) 
BERNARDIN. — Le Phormium tenax ou Lin de la Nouvelle-Zélande.... 479 

: Léo »’Ounous. — Note sur divers végétaux cultivés à Saverdun (Ariége). 939 
Boisement des plateaux arides. ............+.-........, 0... 1.8. ul 
RAvEeRET-WaTTEL. — Culture du Jute au Bengale. ................. 658 
Docteur L. Turrez. — Note sur un Bambou rustique confondu à tort 

avec le Bambusa gracilis....,...... 5650800000 Se So 0 a ao cie > 1690 
E. MÉRICE. — Progrès et développement de la culture de l'Eucalytus, 

d'après les travaux de M. P. Ramel....................: AT ON 713 
Le DT Vipar, — Note sur les usages du Bambou....,............ .. 743 

EXTRAITS DES PROCÉS-VERBAUX. 
PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES GÉNÉRALES DE LA SOCIÉTÉ. 
Séance du 9 janvier........ 48 | Séance du 24: avril. ........ « 290, 
1 29 Janvier CPC 54 — SNA Se dre + 310. 
— Gufévriern.# "PRE » 429 999 mañ a à. DD 
— 20 février. ....... 136 — SAIT ENS ENRONRTE h014 
— GPmars. enr 222 — & décembre, ..... 758 : 
— 20 mars...... 00986 —, 18 décembre..,... 782 
PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DU CONSEIL DE LA SOCIÉTÉ, 
. Séance du 17 juillet... 456 | Séance du 25 septembre... ,.. 590 
PURES ion 519 | NO MGROCtObTe EAN CAT 


(A) 
©2 


9° SÉRIE, T, D — Décembre 1874, 


RAVERET- Écis. 4 de ré evage des Lavins ii 
cé orides, er e et en clapier, par A. Gobin. — “pa 
eaux de “basse- =Co1 TE et de produit, par le même 
LA entures et chasses dans l’extrème Orient, Fr 


FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES, 


= à es 


_ ; F7 


— IMPRIMERIE DE 8. MARTINET, RUE IERON, 1 


PE: