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Full text of "Bulletins de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique"

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MUSEUM  OF  COMPARATIVE  ZOÔLOGY. 


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BULLETINS 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE 

DES 

SCIENCES  ,  DES  LETTRES  JJ  DES  BEAUX-ARTS 

HF,     BFXGIOIÎE. 


40""  A^^ÉE,  2"-SER..  T.  XXXVIII. 


1874. 


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Bruxelles, 

F.    HAYEZ,    IMPRniEUK    OE    L  ACADÉMIE    liOVALE    DE    BELGIQUE. 


MDCCCLXXIV. 


BULLETINS 


L'ACADÉMIE  ROYALE   DES  SCIENCES, 


LETTRES  ET  DES  BEAUX-AUTS  DE  BELGIQUE. 


BULLETINS 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE 


DES 


SCIENCES,    DES   LETTRES   ET    DES   BEAUX-ARTS 


DE    BELGIQUE. 


QUARANTE-TROISIÈME  ANNÉE.  —  2-^  SER.,  T.  XXXVIII. 


BRUXELLES, 


F.  HAYEZ,  IMPRIMEl'U  DE  L  ACADEMIE    ROYALE  DE  BELGIQUE. 


1874 


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BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 

DES 

LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIQUE. 
1874.  —  No  7. 


CLASSE   DES   SCIE]«CES. 


Séance  du  â  juillet  187â. 

M.  E.  Candèze,  directeur, 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  WSl.  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van  Beneden  , 
Edm.  de  Selys  Longchamps,  H.  Xyst,  Gluge,  Melsens, 
F.  Duprez,  G.  Dewalque,  H.  Maus,  M.  Gloesener,  F.  Donn y, 
Ch.  Montigny,  Éd.  Dupont,  C.  Malaise,  membres;  E.  Cata- 
lan, associé;  Éd.  Mailly,  Alph.  Briart,  F.  Folie,  F.  Pla- 
teau, J.  De  Tilly,  F.  Crépin,  correspondants. 

2"°'  SÉRIE ,  TOME  XXXVIII.  i 


(2) 
CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  avait  demandé  à  la  classe 
des  beaux-arts  de  déléguer  quelques-uns  de  ses  membres 
pour  juger  du  mérite  artistique  et  de  la  ressemblance  du 
buste  de  feu  Adolphe  Quetelet ,  commandé  au  statuaire 
Fraikin. 

La  classe  des  sciences  se  rallie  à  l'avis  unanime  émis  par 
la  classe  des  beaux-arts,  savoir,  qu'en  présence  de  l'opinion 
favorable  exprimée  par  tous  les  académiciens  à  l'égard  de 
ce  buste,  exposé  dans  les  salles  de  la  Compagnie,  il  n'y  a 
pas  lieu  de  nommer  de  commissaires. 

La  classe  apprend  avec  un  égal  sentiment  de  satisfac- 
tion que  M.  le  iMinistre  vient  de  commander  au  statuaire 
Van  Oemberg  le  buste  de  feu  le  colonel  Dandelin,  l'un  de 
ses  anciens  membres  titulaires.  Selon  le  désir  de  M.  le 
Ministre,  le  modèle  de  ce  buste  fera  l'objet  d'un  examen , 
afin  d'avoir  un  avis  sur  le  mérite  et  la  ressemblance  de 
l'œuvre. 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  offre,  pour  la  biblio- 
thèque de  l'Académie,  un  exemplaire  du  tome  YIll  des 
Annales  de  la  Société  malacologiqiie  de  Belgique.  —  Remer- 
cîments. 

—  M.  Duprez  présente  le  résumé  de  ses  observations 
météorologiques  faites  à  Gand  pendant  l'année  1875. 
M.  Cavalier  transmet  un  résumé  semblable  pourOstende, 
relatif  au  mois  de  juin  dernier. 


(  5) 

—  M.  C.  Malaise  fait  hommage  d'un  exemplaire  de  son 
Rapport  sur  une  excursion  scientifique  en  Allemagne  et  à 
l'Exposition  universelle  de  Vienne  en  1873;  brochure  in-S". 

Des  remerdmenls  sont  votés  à  M.  Malaise  pour  ce  don, 
ainsi  qu'à  MM.  de  Saporta  et  Marion ,  pour  l'exemplaire  de 
leur  ouvrage  :  Essai  sur  l'état  de  la  végétation  à  l'époque 
des  marnes  heersiennes  de  Gelinden,  publié  dans  le  tome 
XXXVII  des  Mémoires  couronnés  et  des  Mémoires  des 
savants  étrangers. 

M.  le  directeur  Candèze  offre  au  nom  de  l'auteur, 
M.  Sinkel,  un  exemplaire  d'un  ouvrage  intitulé  :  Ma  vie 
de  marin.  —  Remercîments. 

—  L'Académie  des  lettres,  sciences,  arts  et  agriculture 
de  Metz  envoie  son  programme  de  concours  pour  l'année 
I87o. 

—  M.  G.  Dewalque  annonce  par  écrit,  en  sa  qualité  de 
secrétaire  général  de  la  Société  géologique  de  Belgique, 
la  fondation  de  cette  institution  et  propose  l'échange  de 
ses  Annales  avec  les  publications  académiques.  —  Un  avis 
favorable  est  émis  sur  celte  demande,  qui  sera  commu- 
niquée à  la  commission  administrative. 

Une  proposition  semblable,  faite  par  la  Société  de  géo- 
graphie de  Lyon,  de  fondation  récente,  sera  renvoyée 
aussi  à  la  commission  administrative. 

—  Les  établissements  scientitiques  suivants  remercient 
pour  le  dernier  envoi  annuel  de  publications  académiques, 
et  adressent  leurs  récents  travaux  :  la  Société  entomolo- 
gique  italienne  de  Florence,  la  Société  des  sciences  natu- 
relles de  Milan ,  la  Société  scnckenbergeoise  des  natura- 
listes à  Francfort-sur-Mein,  l'Observatoire  de  Prague, 


(4) 

l'Instilul  impérial  et  royal  géologique  de  Vienne,  l'Acadé- 
mie royale  de  Hongrie  à  Peslli,  l'Instilut  royal  géologique 
de  Hongrie,  de  la  même  ville,  le  Bureau  pour  la  recherche 
géologique  de  la  Suède  à  Stockholm,  l'Université  de  Hei- 
delberg,  l'Académie  impériale  des  sciences  de  S'-Péters- 
hourg  et  la  Société  des  sciences  et  des  arts  à  Batavia. 

—  M.  le  gouverneur  du  Brabant  adresse  un  exemplaire 
du  volume  contenant ,  avec  les  procès-verbaux  des  séances 
et  les  documents  recueillis,  le  rapport  fait  au  conseil  pro- 
vincial par  la  commission  nommée  pour  l'examen  des 
questions  relatives  à  la  distribution  d'eau  dans  l'agglomé- 
ration bruxelloise.  —  Bemercîments. 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  feront  l'objet  de 
rapports  : 

1"  Nouvelles  recherches  sur  la  constitution  des  acides 
poh/thioniques,  par  M.  Walthère  Spring.  — Commissaires  : 
MM.  Stas  et  de  Koninck; 

2"  Description  d'un  Spizaète  nouveau,  par  M.  Alph. 
Dubois,  conservateur  au  Musée  royal  d'hisloire  naturelle 
de  Bruxelles.  —  Commissaires:  MM.  de  Selys  Longchamps 
et  Éd.  Dupont. 

CONCOURS  DE  1874. 

La  classe  reçoit  pour  le  concours  de  l'année  actuelle, 
dont  le  terme  fatal  expire  le  1'^''  août  prochain  ,  un  mémoire 
en  réponse  à  la  première  question  :  Perfectionner  en  quel- 
que point  important^  soit  dans  ses  principes ,  soit  dans  ses 
applications ,  la  théorie  des  fonctions  d'une  variable  ima- 


(    3   ) 
(jinaire.  Ce  mémoire  est  accompagné  d'un  billet  cacheté, 
qui  porte  pour  devise  :  JN'e  rien  faire  contre  la  science  et 
pliilosop/ter  sans  souci  des  sots  ni  des  méchants. 

Les  commissaires  chargés  de  l'examen  de  ce  mémoire 
seront  désignés  dans  la  prochaine  séance. 


RAPPORTS. 


L'étalon  prototype  universel  des  mesures  de  longueur, 
par  M.  C.  Rodenbach. 

nappoi't  de  M.   te  eolonet  Liagfe. 

a  Ce  volumineux  mémoire,  qui  a  demandé  à  son  au- 
teur de  nombreuses  lectures  et  un  temps  considérable ,  a 
pour  objet  d'établir  que  tous  les  systèmes  de  mesures  qui 
ont  été  employés  dans  l'antiquité,  et  même  à  une  époque 
plus  rapprochée  de  nous,  se  rattachent  à  un  type  primor- 
dial unique,  la  coudée  de  O'",o40.  Celte  longueur  repré- 
sente exactement,  suivant  l'auteur,  le  tiers  de  la  stature 
moyenne  de  l'homme  sur  le  globe;  c'est  elle  qui,  avant  la 
dispersion  des  races  humaines ,  a  servi  à  dresser  les  plans 
de  la  tour  de  Babel;  c'est  elle  enfin  que  l'on  retrouve, 
diversement  subdivisée,  modifiée  et  altérée,  dans  les  sys- 
tèmes métriques  de  tous  les  peuples. 

L'ouvrage  de  M.  Rodenbach  est  un  traité  général  de 
métrologie,  plutôt  qu'un  mémoire  sur  un  point  spécial  de 
cette  science.  L'auteur  y  fait  preuve  de  beaucoup  d'éru- 
dition ;  il  met  à  profit  la  philologie  comparée,  l'archéologie 
orientale,  l'ethnographie  et  l'histoire.  Dans  un  style  clair  et 


(6  ) 
correct,  bien  que  parfois  un  peu  recherché,  il  passe  en 
revue  les  systèmes  métriques  des  Chaldéens,  des  Égyp- 
tiens, des  Perses  et  de  quelques  autres  peuples  de  l'Asie, 
des  Juifs,  des  Arabes,  des  Hindous,  des  Chinois  et  des 
Japonais,  des  Grecs  et  des  Romains.  Malheureusement 
l'esprit  se  perd  au  milieu  de  l'abondance  des  détails;  l'ac- 
cessoire noie  le  principal ,  et  l'impression  qui  reste  après 
cette  lecture  fatigante  est  celle  du  vague  et  du  conjectural. 

L'idée  fondamentale  de  M.  Rodenbach,  la  seule  qui, 
dans  son  volumineux  travail,  puisse  prétendre  à  l'origina- 
lité, est  celle  qui  consiste  à  rattacher  toutes  les  mesures  à 
une  coudée  primitive  de  0™,540,  dérivant  de  la  stature 
humaine.  Or,  celte  idée  a  déjà  été  exposée  par  lui  dans  nos 
Bulletins  (année  1870,  n"  5);  la  note  qu'il  a  consacrée  à 
ce  sujet  porte  exactement  le  même  titre  que  le  mémoire 
actuel,  et  elle  a  fait,  dans  le  sein  de  la  classe  des  lettres, 
l'objet  d'un  rapport  de  la  part  de  MM.  le  baron  De  Witte, 
Ad.  Quetelet  et  Nève. 

A  la  suite  de  son  mémoire,  l'auteur  a  placé  un  très- 
grand  nombre  de  notes,  indiquant  les  sources  auxquelles 
il  a  puisé,  ou  fournissant  des  détails  complémentaires  qui 
n'ont  pas  trouvé  de  place  convenable  dans  le  texte.  Ces 
notes,  qui  s'élèvent  au  nombre  de  512,  sont  propres  à  faire 
juger  de  l'étendue  du  travail  bibliographique  auquel  l'au- 
teur a  dû  se  livrer  depuis  longtemps  sur  la  métrologie. 

En  résumé,  le  résultat  obtenu  n'est  pas  en  rapport  avec 
le  travail  dépensé;  l'ouvrage  de  M.  Rodenbach  n'est  propre 
à  intéresser  qu'une  classe  fort  restreinte  de  lecteurs,  et  il 
ne  me  semble  pas  de  nature  à  trouver  place  dans  un  recueil 
académique.  A  mon  avis,  la  classe  doit  donc  se  borner  à 
adresser  des  remercîments  à  l'auteur.  Toutefois,  si  M.  Ro- 
denbach se  décidait  à  publier  son  livre,  il  mériterait  d'être 


(7) 
encouragé,  et,  dans  ce  cas,  l'Académie  ferait  acte  de  jus- 
tice en  recommandant  à  la  bienveillance  du  gouvernement 
le  travail  d'un  fonctionnaire  aussi  intelligent  que  studieux.  » 

MM.  Monligny  et  Mailly  ayant  adhéré  aux  conclusions 
du  rapport  de  M.  Liagre,  la  classe  les  a,  en  conséquence, 
également  adoptées. 


Aréographie  ,  ou  étude  comparative  des  observations  faites 
sur  l'aspect  physique  de  laplanète  Mars  ;  par  M.  F.  Terby , 
docteur  en  sciences. 

Mtappoft  tle  n.    Ei'»».   Quetetet. 

«  Le  mémoire  de  M.  Terby  est  précédé  d'une  introduc- 
tion étendue,  dans  laquelle  l'auteur  passe  en  revue  les 
travaux  des  astronomes  qui  se  sont  occupés  de  l'étude  des 
taches  de  Mars,  depuis  Fontana  qui  a  donné  la  première 
représentation  de  la  planète  en  l'an  1636. 

Le  mémoire  lui-même  a  pour  principal  objet  de  com- 
parer les  dessins  obtenus  à  diverses  époques  et  par  diffé- 
rents observateurs.  11  est  divisé  en  six  chapitres,  qui  traitent 
chacun  d'une  région  spéciale  de  la  planète. 

Chapitre  I.  Mer  de  Kaiser  et  océan  de  Dawes. 

—  II.  Détroit  d'Herschel  II. 

—  III.  Océan  De  la  Rue  et  mers  de  Dawes  et  de 

Lockyer. 

—  IV.  Mers  de  Hook  et  de  Maraldi. 

—  V.  Mers  de  Tycho  et  de  Delambre. 

—  VI.  Mers  de  Béer  et  d'Airy. 


(8) 

L'auteur  prend  pour  base  de  sa  nomenclature  la  carte 
de  Mars  dressée  par  M.  Proctor. 

Après  un  examen  approfondi  et  comparatif  des  dessins, 
M.  Terby  est  amené  à  conclure  que  certaines  côtes  des 
mers  Martielles  ont  des  contours  exactement  relevés, 
tandis  que  d'autres  parties  offrent  des  discordances  qui , 
aux  prochaines  oppositions  de  la  planète,  doivent  attirer 
toute  l'attention  des  astronomes  qui  se  livrent  à  ce  genre 
de  recherches.  Comme  le  principal  intérêt  du  mémoire 
réside  dans  cet  appel  aux  observateurs  pour  élucider  des 
points  obscurs  ou  contestés,  je  crois  devoir  profiter  de  la 
publication  rapide  des  Bulletins  et  de  leur  circulation 
étendue  pour  faire  connaître  ici  les  questions  qui  termi- 
nent chacun  des  chapitres  du  mémoire. 

Chapitre  I.  —  1°  Les  mers  de  Zôllner  et  de  Lambert 
sont-elles  en  communication  avec  la  mer  de  Phillips?  Se 
partagent-elles  en  plusieurs  branches? 

2°  N'existe-t-il  pas,  entre  la  mer  de  Phillips  et  la 
limite  méridionale  de  l'océan  de  Dawes,  une  autre  mer 
parallèle  à  celle  de  Phillips? 

5°  Quelle  est  l'étendue  exacte  de  la  terre  de  Cassini? 

4°  La  mer  de  Main  est-elle  simple  ou  composée  de  plu- 
sieurs lobes  ? 

6°  Le  détroit  de  Nasmyih  est-il  ondulé  et  envoie-t-il 
des  prolongements  dans  le  continent  de  Dawes?  Se  ter- 
mine-t-il  brusquement  à  l'E.  {!),  ou  est-il  en  communication 
avec  la  mer  de  Tycho  ? 

6°  Quelle  est  la  configuration  des  côtes  de  la  mer  de 
Kaiser  et  de  l'océan  de  Dawes? 


(1)  Ces  indications  sont  relatives  à  l'observateur  terrestre  qui  a  sous  les 
yeux  le  disque  de  la  planète. 


(  9) 

7°  Existe-t-il  des  solutions  de  continuité  dans  cette 
grande  tache,  notamment  :  a.  entre  la  mer  de  Kaiser  et 
l'océan  de  Dawes;  b.  entre  l'océan  de  Dawes  et  le  détroit 
d'Herschel  II;  c.  entre  l'océan  de  Dawes  et  la  mer  de 
Hook? 

8°  Quelles  sont  les  régions  plus  sombres  que  l'on  ob- 
serve dans  celte  tache  de  Mars?  Ces  régions  sont-elles 
permanentes  ? 

Chapitre  II.  —  \°  Le  détroit  d'Herschel  II  présenle-t-il 
des  solutions  de  continuité?  Confirmer  notamment  l'exis- 
tence de  celle  qui  semble  se  trouver  entre  les  baies  de 
Dawes  et  de  Béer. 

2"  Ce  détroit  communique-t-il  avec  l'océan  de  Dawes? 

5°  Quelle  est  la  configuration  exacte  de  la  région  située 
immédiatement  au  sud  de  ce  détroit?  L'existence,  la  forme 
et  l'étendue  des  détroits  d'Arago ,  de  Newton  et  des  îles 
de  Phillips  et  de  Jacob  ont  besoin  d'être  confirmées. 

4°  La  configuration  exacte  des  baies  de  Dawes,  de  Béer 
et  du  détroit  de  Dawes  doit  encore  être  étudiée,  ainsi  que 
leur  direction  si  variable  dans  les  divers  dessins. 

5°  Confirmer  l'existence,  à  l'occident  de  la  baie  de 
Dawes,  d'une  sorte  de  cap  ou  de  presqu'île  s'avançanl 
dans  le  détroit  d'Herschel. 

6°  Existe-t-il  une  baie  encore  inconnue  entre  la  mer  de 
Kaiser  et  la  baie  fourchue  de  Dawes? 

7°  Il  faudrait  encore  examiner  soigneusement  les  diffé- 
rences de  nuances  que  montrent  ces  régions,  et  y  recher- 
cher les  pénombres  que  M.  Lockyer,  M.  Kaiser  et  d'autres 
y  ont  représentées. 

Chapitre  III.  —  1»  L'océan  De  la  Rue  se  termine-t-il  du 
côté  du  nord  par  une  limite  angulaire  ou  arrondie? 

2°  Fixer  la  limite  méridionale  de  l'océan  De  la  Rue  et 


(  10  ) 
ses  relations  avec  la  mer  polaire  de  Phillips  el  avec  la  mer 
de  Maraldi. 

5"  Étudier  les  relations  de  l'océan  De  la  Rue  avec  les 
détroits  d'Arago ,  de  Newton  et  d'Herschel  If. 

4"  Rechercher  les  solutions  de  continuité  qui  pour- 
raient exister,  suivant  certains  observateurs,  dans  l'océan 
De  la  Rue. 

5"  Rechercher  la  tache  neigeuse  de  Dawes. 

6"  Étudier  les  régions  plus  sombres  qui  s'offrent  dans 
l'océan  De  la  Rue. 

7"  La  communication  des  mers  de  Dawes  et  de  Lockyer 
avec  l'océan  De  la  Rue  est-elle  incontestable  ? 

8°  Quelle  est  la  véritable  forme  des  mers  de  Dawes  et 
de  Lockyer? 

9°  Existe-t-il  une  communication  entre  la  mer  de 
Dawes  et  celle  de  Maraldi? 

Chapitre  IV.  —  1°  Quelle  est  l'extension  exacte  de  la 
mer  de  Hook  relativement  à  celle  de  Maraldi? 

2"  Existe-t-il  une  bande  sombre  entre  les  mers  de  Hook 
et  de  Maraldi  et  celle  de  Phillips? 

5"  Confirmer  l'existence  de  la  Terre  de  Webb  (1). 

4°  Examiner  la  situation  des  régions  plus  sombres  qui 
existeraient  dans  les  mers  de  Hook  et  de  Maraldi. 

5°  Fixer  la  configuration  exacte  du  bord  septentrional 
des  mers  de  Maraldi  et  de  Hook,  et  des  baies  qu'il  pré- 
sente, ainsi  que  des  passes  de  Huggins  et  de  Ressel. 

6"  Quelle  est  la  configuration  exacte  de  la  mer  de  Huy- 
gehs? 


(1)  L'auteur  propose  de  donner  ce  nom  à  une  solution  de  continuité  de 
la  mer  de  Maraldi,  qui  ne  figure  pas  sur  la  carte  de  M.  Proclor. 


•       (  H  ) 

1°  Rechercher  la  petite  tache  blanche  que  MM.  Webb 
et  Gledhill  ont  vue  près  de  la  passe  de  Huggins. 

8"  Mieux  définir  les  taches  faibles  qui  se  trouvent  dans 
le  continent  d'Herschel  I ,  et  surtout  immédiatement  à 
l'occident  de  la  mer  de  Kaiser. 

Chapitre  V.  —  1"  Quelle  est  la  forme  exacte  des  mers 
de  Tycho  et  de  Delambre?  Est-elle  semblable  à  celle  que 
leur  attribue  M.  Proctor  ,  ou  à  celle  que  leur  attribuent  les 
observations  de  4871  et  de  1873?  En  d'autres  termes,  la 
terre  de  Rosse  est-elle  un  isthme  permanent,  ou  ce  trait 
brillant  était-il  dû,  lors  des  observations  de  M.  Dawes,  à 
un  nuage  passager? 

2°  Quelles  sont  les  relations  de  cette  tache  de  Mars 
avec  la  mer  de  Reer  et  avec  le  détroit  de  Nasmyth? 

3°  Étudier  la  configuration  exacte  des  deux  bandes 
sombres  qui  relient  la  mer  de  Tycho  et  celle  de  Delambre 
aux  régions  plus  occidentales,  et  examiner  si  elles  ne  sont 
point  en  réalité  les  prolongements  de  ces  deux  mers,  con- 
fondues seulement  à  l'orient? 

4°  Quelle  est  la  forme  exacte  du  faible  prolongement 
qui  va  de  la  mer  de  Tycho  vers  l'orient,  et  quelles  en  sont 
les  relations  avec  la  mer  d'Airy? 

5"  Vérifier  la  présence  d'une-  solution  de  continuité 
entre  la  mer  de  Tycho  et  ce  prolongement  faible. 

6"  Vérifier  l'existence  des  mers  de  Lassell  et  de  Lever- 
rier,  dont  on  ne  voit  de  traces  certaines  que  dans  les  des- 
sins de  M.  Dawes. 

7°  Étudier  la  configuration  de  la  mer  polaire  de  Schrœter. 

8°  Rechercher  la  blancheur  que  M.  Knobel  et  M.  Green 
notamment  ont  aperçue  immédiatement  à  droite  de  la  mer 
de  Tycho. 

Chapitre  VI .  —  L'auteur,  à  la  fin  de  ce  chapitre,  appelle 


(  12) 
spécialement  l'attention  des  observateurs  sur  cette  partie 
très-peu  connue  de  la  surface  de  Mars  (passe  d'Ouderaans, 
passe  de  Bessel,  etc.),  afin  que  les  recherches  futures 
viennent  apporter  de  nouvelles  lumières  sur  sa  configu- 
ration. 

En  résumé,  le  mémoire  de  M.  Terby  offre  de  l'intérêt 
et  j'ai  l'honneur  d'en  proposer  l'impression  dans  le  recueil 
des  Mémoires.  » 


Mtappot't  de  M.  Ed.  JUailly. 

a  Le  mémoire  de  M.  Terby  me  paraît  digne  à  tous 
égards  de  l'approbation  de  l'Académie  :  il  est  le  fruit  de 
longues  et  patientes  recherches,  poursuivies  sans  relâche 
depuis  l'année  4871,  et  présente  l'ensemble  des  données 
fournies  par  plus  de  deux  siècles  d'observations,  sur  l'état 
de  la  surface  de  la  planète  Mars. 

M.  Terby,  dans  l'étude  qu'il  a  faite  de  ces  données,  a 
cru  devoir  se  borner  à  la  configuration  des  taches  sombres. 
Le  sujet  était  bien  déterminé  et  suffisamment  vaste;  c'était 
celui,  du  reste,  qui  offrait  le  plus  d'utilité  et  d'à-propos, 
puisqu'il  s'agissait  d'établir  les  points  douteux  qui  devront 
être  élucidés  par  les  oppositions  de  la  planète,  en  1875 
et  en  1877. 

L'auteur  se  propose  de  traiter,  dans  un  mémoire  séparé, 
d'autres  sujets  parmi  lesquels  il  cite  l'étude  des  phéno- 
mènes polaires,  l'examen  des  faits  de  coloration  observés 
sur  Mars,  celui  des  recherches  spectroscopiques  entre- 
prises sur  la  lumière  de  cet  astre,  et  un  nouveau  calcul  de 
la  période  de  rotation. 

J'engage  M.  Terby  à  continuer  ses  intéressants  travaux 


(  i3) 

et  je  me  joins  à  mon  honorable  confrère  M.  Ern.  Quetelet 
pour  demander  l'impression  du  mémoire  qui  nous  est 
soumis,  et  celle  des  planches  qui  l'accompagnent  :  les  M 
figures  choisies  par  M.  Terby  parmi  les  1092  dessins  de  la 
planète,  qu'il  est  parvenu  à  réunir,  sont  presque  toutes 
inconnues  des  astronomes.  » 

La  classe  adopte  les  conclusions  des  rapports  précédents, 
auxquels  M.  Liagre,  troisième  commissaire,  a  adhéré.  Elle 
décide  que  le  travail  de  M.  Terby  sera  imprimé  dans  les 
Mémoires  in-4.°. 


Considérations  générales  sur  la  détermination ,  sans  calcul^ 
de  l'ordre  d'un  lieu  géométrique;  par  M.  Louis  Saltel. 

MtappofI  de  Ht.  F.  Folie. 

«  L'objet  du  mémoire  de  M.  Saltel ,  dont  l'Académie  a 
déjà  favorablement  accueilli  plusieurs  travaux,  est  de  géné- 
raliser le  beau  principe  de  correspondance  dû  à  M.  Chasles, 
et  d'appliquer  cette  généralisation  à  différents  problèmes 
de  géométrie  et  d'analyse. 

L'auteur  a  fait  précéder  son  travail  de  quelques  consi- 
dérations générales  sur  les  avantages  respectifs  de  l'analyse 
et  de  la  géométrie  pure.  A  en  juger  par  les  deux  passages 
qui  suivent,  il  serait  assez  malaisé  de  dire  de  quel  côté  se 
portent  ses  préférences  :  d'une  part  il  affirme  avec  M.  Pain- 
vin  «  que  sous  la  puissante  impulsion  des  Chasles,  Steiner, 
Poncelet,  etc.,  la  géométrie  pure  a  laissé  bien  loin  derrière 
elle  l'analyse;  et  quelques  lignes  plus  bas  nous  lisons  :  «  on 
se  gardera  bien  de  contredire  un  illustre  géomètre.  Lamé, 


(  1^) 

proclamant  hautement,  après  avoir  débuté  par  des  études 
de  pure  géométrie,  la  prééminence  de  l'analyse  sur  celte 
dernière.  » 

Sans  vouloir  ici  discuter  à  fond  la  question  de  la  supé- 
riorité de  l'une  des  méthodes  sur  sa  rivale,  nous  ne  pou- 
vons nous  empêcher  d'opposer  à  l'assertion  de  M.  Painvin 
quelques  remarques  qui  nous  semblent  de  nature  à  la 
réfuter: 

1"  S'il  est  des  théorèmes  qui  appartiennent  plus  spécia- 
lement au  domaine  de  la  géométrie  pure,  ce  sont  bien 
certainement  ceux  de  Desargues  et  de  Pascal.  Or  la  pre- 
mière extension  qui  ait  été  donnée  au  théorème  de 
Desargues  est  due  à  Sturm,  qui  l'a  trouvée  par  l'analyse  ; 
celle  que  nous  avons  donnée  au  théorème  de  Pascal  a  été 
découverte  par  la  même  voie.  Veut-on  un  autre  exemple, 
le  problème  de  la  description  d'une  surface  du  second  degré 
déterminée  par  neuf  points,  problème  qui  avait  exercé  la 
sagacité  de  tous  les  géomètres  depuis  1825,  a  été  résolu 
par  Hesse,  qui  a  également  fondé  sa  construction  sur 
Tanalyse.  Que  d'autres  découvertes  n'a-t-il  pas  faites  par 
la  même  méthode,  etcombien  n'en  doit-on  pas  à  Riemann, 
Plûcker,  Kummer,  Wierstrass,  Joachimstahl ,  Clebsch, 
Cayley,  Salmon,  pour  ne  citer  que  les  géomètres  analystes 
les  plus  illustres! 

2"  A  part  Sleiner,  qui  éprouvait  pour  l'analyse  une 
véritable  aversion,  il  n'est  peut-être  pas  un  savant  qui  n'en 
ait  usé  directement  ou  indirectement  dans  ses  travaux  de 
géométrie  pure  ; 

5°  Malgré  la  prétendue  supériorité  de  celte  dernière 
méthode,  l'école  de  Sleiner  n'a  fait  que  languir  en  Alle- 
magne, comparativement  à  sa  rivale,  depuis  la  mort  de 
son  fondateur;  en  Angleterre  également  les  géomètres  se 


(IS  ) 

sont  lancés  avec  ardeur  dans  la  voie  nouvelle  ouverte  par 
l'analyse;  et  c'est  peut-être  en  France  que,  grâce  à  la 
longue  et  légitime  influence  des  Poncelet  et  des  Chasles ,  la 
géométrie  pure  est  encore  le  plus  cultivée  aujourd'hui, 
quoique  M.  Saltel  se  plaigne,  avec  M.  de  Jonquières,  de 
la  voir  délaissée. 

Abordons  maintenant  le  fond  du  mémoire,  qui  consiste 
essentiellement  dans  l'extension  donnée  par  l'auteur  au 
principe  de  correspondance  de  M.  Chasles,  dont  la  démon- 
stration est,  par  parenthèse,  tout  algébrique. 

Ce  principe,  qui  avait  été  énoncé  par  son  illustre  auteur 
pour  deux  séries  de  points  correspondants  sur  une  droite, 
était  naturellement  susceptible  de  deux  généralisations. 

On  pouvait  se  demander  s'il  n'avait  pas  lieu  pour  deux 
séries  de  points  situés  sur  une  courbe  :  c'est  ce  qu'a  fait 
M.  Cayley,  qui  a  réussi  en  efl'et  à  étendre  le  principe  aux 
courbes  unicursales  (1). 

On  pouvait  se  demander  en  second  lieu  s'il  n'était  pas 
possible  d'étendre  le  principe  à  k  séries  de  points  corres- 
pondants sur  une  droite  :  et  c'est  là  le  résultat  auquel  est 
arrivé  M.  Saltel. 

En  combinant  ces  deux  extensions,  il  est  aisé  de  voir 
qu'on  arrivera  à  donner  au  principe  de  correspondance  toute 
la  généralité  dont  il  est  susceptible  :  l'auteur  annonce  à  la 
fin  de  son  mémoire  qu'il  traitera  ce  point  dans  un  prochain 
travail. 

L'idée  de  M.  Saltel  a  pour  point  de  départ  la  génération 
d'un  lieu  par  le  déplacement  d'un  point  mobile  déterminé 
par  l'intersection  de  k  lieux  de  même  espèce,  ce  qui  est  au 


(1)  Comptes  rendus,  t.  LXII,  p.  bSO. 


(  16  ) 
lond,  comme  on  voit,  l'idée  de  Bobillier  et  de  Pliicker 
transportée  des  coordonnées  rectilignes  aux  coordonnées 
curvilignes  dans  le  plan  ou  dans  l'espace. 

On  conçoit  que  celte  généralisation  du  principe  de  cor- 
respondance doit  être  excessivement  féconde  en  applica- 
tions, et  que  l'auteur  n'ait  pas  encore  eu  le  loisir  d'en 
rechercher  un  grand  nombre  ;  toutefois  il  en  indique  déjà 
dans  son  travail  quelques-unes  qui  permettent  déjuger  de 
l'importance  de  son  principe  dans  la  recherche  de  l'ordre 
d'un  lieu  géométrique  ;  mais  il  se  réserve  surtout  d'y  reve- 
nir plus  tard.  Signalons  une  application  analytique  à  la 
recherche  du  nombre  des  solutions  finies  communes  à  un 
système  d'équations  générales  d'un  degré  quelconque, 
recherche  dont  le  résultat  revêt  une  forme  très-élégante. 

Il  n'est  guère  possible  de  résumer  les  théorèmes  donnés 
par  l'auteur  :  il  faudrait  les  énoncer  en  entier,  et  tel  ne 
peut  pas  être  l'objet  d'un  rapport;  mais  la  brève  analyse 
que  nous  venons  de  faire  du  travail  de  M.  Saltel  montre 
assez  quelle  en  est  l'importance. 

Nous  aurions  désiré  pouvoir  louer  également  le  fond  et 
la  forme  :  l'auteur,  qui  est  un  jeune  homme  non-seulement 
fort  laborieux,  mais  très-occupé,  n'a  pas  eu  le  loisir  de 
s'attacher  à  cette  dernière;  on  remarque  quelques  obscu- 
rités dans  les  énoncés  et  les  démonstrations,  et  quelques 
résultats  qui  ne  sont  donnés  que  comme  une  induction 
probable;  enfin,  et  surtout,  une  grande  négligence  dans  les 
citations ,  vice  considérable  dans  un  travail  académique, 
et  qui  obligé  les  commissaires  à  de  nombreuses  recherches. 
L'auteur  pourra  faire  disparaître  aisément  la  plupart  de  ces 
défauts  en  corrigeant  les  épreuves. 

En  résumé,  j'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  classe  de 
voter  l'impression  du  travail  de  M.  Saltel  dans  les  Mémoires 


H7) 

de  l'Académie,  et  d'adresser  des  remercîments  à  l'auteur 
pour  son  intéressante  communication.  » 

La  classe  adopte  les  conclusions  du  rapport  de  M.  Folie, 
auxquelles  a  adhéré  le  second  commissaire,  M.  Catalan. 


L'électricité  statique  exerce-t-eUe  une  influence  sur  la 
tension  superficielle  des  liquides?  par  M.  G.  Van  der 
Mensbrugghe. 

Rapport  de  M.  .•/'  Flateau. 

«  L'auteur,  qui  a  déjà  publié ,  dans  les  Recueils  de 
l'Académie,  plusieurs  Notes  et  deux  Mémoires  sur  la  ten- 
sion superficielle  des  liquides,  poursuit,  dans  le  Mémoire 
actuel,  ses  recherches  relatives  à  ce  sujet.  Il  commence 
par  exposer  le  petit  nombre  de  travaux  ayant  quelque  trait 
à  la  question  qu'il  s'est  proposé  de  résoudre,  question 
énoncée  dans  le  titre;  puis  il  fait  connaître  une  suite  d'ex- 
périences ingénieuses  et,  selon  moi,  décisives,  qui  le  con- 
duisent à  une  solution  négative  du  problème,  c'est-à-dire 
à  conclure  que  l'électricité  statique  n'exerce  absolument 
aucune  influence  sur  la  tension  superficielle  des  liquides. 

Citons  deux  de  ces  expériences  :  1°  J'ai  rapporté,  dans 
le  §  172  de  ma  Statique  des  liquides  soumis  aux  seules 
forces  moléculaires,  une  expérience  de  mon  fils,  qui 
montre  qu'il  suffît  d'une  cause  excessivement  légère  pour 
amener  une  variation  dans  la  tension  superficielle  d'une 
lame  liquide  :  si  l'on  approche  le  bout  du  doigt  à  une  très- 
petite  dislance  du  sommet  d'une  bulle  de  liquide  glycé- 

2"^  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  2 


(18) 

rique  déposée  sur  un  anneau ,  la  minime  élévation  de  la 
température  de  ce  sommet  diminue  la  tension  au  point  de 
faire  changer  complètement  la  teinte  de  toute  la  portion 
de  la  bulle  qui  avoisine  le  sommet.  Or  M.  Van  der  Mens- 
brugghe  approche,  au-dessus  d'une  semblable  bulle,  un 
conducteur  électrisé ,  et  voit  simplement  la  bulle  s'allonger 
fortement  vers  celui-ci,  sans  que  la  teinte  du  sommet 
éprouve  la  moindre  variation. 

2"  L'auteur  suspend,  par  le  procédé  de  M.  Duprez,  une 
colonne  d'eau  distillée  dans  un  tube  vertical  ouvert  à  son 
extrémité  inférieure;  une  tige  métallique  traverse  le  bou- 
chon qui  ferme  le  haut  de  ce  tube,  et  descend  jusque  près 
de  l'orifice.  La  plus  grande  valeur  du  diamètre  intérieur 
pour  laquelle  M.  Duprez  ait  pu  réaliser  la  suspension ,  était 
de  19™",85',  le  diamètre  extérieur  du  tube  employé  par 
M.  Van  der  Mensbrugghe  était  de  i9"™,14,et,  par  consé- 
quent ,  un  peu  moindre  que  la  limite  ci-dessus;  mais,  sans 
doute  à  cause  de  quelque  imperfection  de  l'appareil,  la 
stabilité  de  la  colonne  était  encore  extrêmement  faible,  et 
la  cause  la  plus  légère  suffisait  pour  faire  écouler  le  liquide. 
La  pression  atmosphérique  (voir  le  Mémoire  de  M.  Duprez) 
ne  soutient  la  colonne  que  si  l'équilibre  de  la  surface  libre 
inférieure  est  stable  au  point  de  vue  des  forces  capillaires, 
ou,  ce  qui  revient  au  même,  de  la  tension  superficielle; 
une  très-minime  diminution  de  cette  tension  devait  donc, 
dans  les  conditions  de  l'expérience ,  amener  la  chute  de  la 
colonne;  or  l'auteur  a  électrisé  fortement  la  tige  métal- 
lique dont  j'ai  parlé  plus  haut,  et,  par  suite,  la  surface 
libre  inférieure  du  liquide,  et  la  colonne  s'est  parfaitement 
maintenue. 

Après  avoir  nettement  établi,  par  la  série  de  ses  expé- 
riences, la  nullité  de  cette  influence  de  l'électricité  statique 


(  i9  ) 
sur  la  tension,  l'auteur  en  déduit  cette  conséquence,  qui 
doit  paraître  importante  au  point  de  vue  des  théories  de 
l'électricité,  que  la  couche  électrique  qui  se  porte  à  la 
surface  des  corps  est  entièrement  extérieure  à  cette  sur- 
face, et  se  trouve  simplement  appliquée  contre  elle. 

D'après  ce  qui  précède,  la  classe  n'hésitera  pas,  je 
pense,  à  ordonner  l'impression  du  travail  de  M.  Yan  der 
Mensbrugghe  dans  le  recueil  des  Mémoires  de  l'Aca- 
démie. » 

La  classe  adopte  les  conclusions  du  rapport  de  M.  J.  Pla- 
teau, auxquelles  a  adhéré  le  second  commissaire,  M.  Duprez. 


Remarques  sur  la  variabilité  de  certaines  espèces  du  genre 
Calliste,  par  M.  Alphonse  Dubois. 

Rapport  de  M.  de  Setya  M.ongchatnpg . 

«  En  étudiant  les  différences  qui  séparent  les  diverses 
espèces  d'oiseaux ,  on  a  été  successivement  porté  à  aug- 
menter le  nombre  des  espèces  connues  ;  mais  depuis  long- 
temps déjà,  on  a  constaté  que  ces  formes  diverses  ne  sont 
pas  toutes  également  tranchées  et  que  plusieurs  d'entre 
elles,  quoique  se  reproduisant  toujours  les  mêmes  dans 
les  mêmes  localités,  sont  si  rapprochées  d'autres  formes 
habitant  des  contrées  voisines  que  l'on  doit  y  voir,  non  de 
véritables  espèces  dans  le  sens  propre  du  mot,  mais  bien 
plutôt  des  races  locales  issues  originairement  les  unes  des 
autres,  et  ne  se  séparant  souvent  que  par  des  dimensions 
plus  ou  moins  fortes  ou  par  des  nuances  dans  l'intensité 
•Je  la  coloration. 


(20) 

Quelle  que  soil  l'opinion  théorique  que  l'on  adopte  sur 
l'origine  primordiale  des  espèces,  il  me  semble  utile,  en 
considérant  l'état  actuel  de  la  vie  sur  notre  globe  et  l'état 
présent  de  la  science,  de  bien  constater  l'importance  rela- 
tive des  caractères  qui  différencient  les  formes  spécifiques 
connues. 

Dès  4844  notre  savant  confrère  le  D""  Schlegel  (de 
Leyde)  est  entré  dans  cette  voie  en  publiant  sa  Revue 
critique  des  oiseaux  d'Europe.  Après  avoir  désigné  les 
espèces  en  suivant  la  nomenclature  binominale  de  Linné, 
il  ajoute  pour  les  races  locales  un  troisième  nom  ou  ad- 
jectif. Ainsi  la  race  italienne  du  moineau  est  appelée  Passer 
domesticus  cisalpimis;  la  race  à  gorge  blanche  de  la  Berge- 
ronnette jaune  Mutacella  flava  cinereocapilla ,  celle  à  tête 
noire  M.  flava  melanocephala;  le  Tétras  des  saules,  race 
d'Ecosse,  Tetrao  saliceti  scoticus,  etc. 

Dans  son  grand  ouvrage  non  encore  terminé  (Muséum 
d'histoire  naturelle  des  Pays-Bas,  Revue  de  la  collection 
d'oiseaux,  années  i 862 et  suivantes),  il  a  continuée  appli- 
quer ce  système.  Il  emploie  souvent  les  termes  de  conspe- 
cies  pour  désigner  les  races. 

Le  travail  que  M.  Dubois  nous  soumet  repose  sur  les 
même  principes.  Il  concerne  les  espèces  du  genre  d'oiseaux 
nommé  Calliste  par  Boie,  démembrement  des  Tanagra  de 
Linné,  et  qui  est  particulier  à  l'Amérique  tropicale.  L'au- 
leur,  ayant  eu  sous  les  yeux  un  bon  nombre  de  types  et 
d'exemplaires  du  Musée  de  Bruxelles,  les  a  étudiés  avec 
soin ,  et  j'ai  tout  lieu  de  croire  que  ses  appréciations  sont 
justes. 

Les  animaux  de  l'Amérique  tropicale  présentent  dans 
presque  toutes  les  classes  de  grandes  difficultés  lorsqu'on 
vent  en  circonscrire  les  espèces.  Dans  ce  vaste  centre  de 


(21  ) 

création  il  existe  des  lamilles,  des  sous-familles,  des 
grands  genres  absolument  distincts  de  ceux  de  l'ancien 
continent  et  de  la  région  circumpolaire  de  l'hémisphère 
boréal;  on  peut  citer  parmi  les  oiseaux  les  familles  fon- 
dées sur  les  grands  genres  Tanagra,  Dendrocaloptes,  Gal- 
biila,  Tï'ochilns,  Momotus,  Ramphastos,  etc.,  mais  lorsqu'on 
en  arrive  à  l'élude  des  espèces  on  constate  l'existence  (l'un 
grand  nombre  de  formes  représentatives  excessivement 
voisines  et  à  peine  distinctes  les  unes  des  autres,  et  qui 
sont  cantonnées  dans  les  différentes  régions  de  ce  conti- 
nent :  Brésil,  Guyane,  Haut-Amazone,  Pérou,  Venezuela, 
Amérique  centrale,  Mexique,  Antilles,  ou  même  localisées 
dans  certaines  îles  de  ce  dernier  Archipel  (1). 

Le  rang  [espèces  ou  races)  à  attribuer  à  ces  formes  voi- 
sines est  certainement  assez  arbitraire,  et  dépend  en  partie 
de  l'équation  personnelle  de  l'observateur;  mais  malgré 
la  difficulté  de  mettre  d'accord  les  naturalistes  sur  le  juge- 
ment à  porter  dans  chaque  cas  spécial ,  il  me  semble  évi- 
dent que  la  subordination  que  l'on  cherche  à  établir  est 
juste  en  principe. 

A  ce  point  de  vue,  le  moment  me  semble  arrivé  d'en- 
courager les  études  faites  dans  cette  direction,  et  je  pense 


(1)  Qu'il  me  soit  permis  de  faire  remarquer,  en  passant,  que  si  cet  élal 
de  choses  est  irès-favorabie  à  la  ibéorie  d'un  tra)isformisme  restreint  à  la 
formation  des  espèces  ou  races  voisines  d'un  même  genre,  la  séparation 
absolue  entre  les  grandes  familles  américaines  que  j'ai  citées ,  et  leur 
absence  d'alBniié  avec  les  familles  de  l'ancien  continent  me  paraissent 
difficiles  à  concilier  avec  l'hypothèse  d'un  transformisme  général  et  sans 
limites.  Par  ces  considérations  je  me  sens  sous  ce  rapport  plus  porté  à 
l'admission  du  système  d'Agassiz  :  celui  des  centres  de  création  qui  n'ex- 
clut pas  l'interposition  des  migrations  ultérieures  d'un  centre  de  création 
à  un  autre  favorisées  en  particulier  par  les  changements  géologiques  et 
climatériques  qui  se  sont  produits. 


(  22  ) 

que  l'Académie  fera  bien  d'accueillir  avec  faveur  l'essai 
tenté  par  M.  Alph.  Dubois,  et  de  décider  qu'il  sera  im- 
primé dans  ses  Bulletins.  » 

MtappofI  de  .ff.  P.-J.    Vat*  Beneden. 

a  Je  partage  complètement  l'avis  de  notre  savant  con- 
frère, M.  de  Selys  Longchamps,  sur  la  valeur  de  la  notice 
de  M.  Alphonse  Dubois,  ayant  pour  objet  certaines  espèces 
d'oiseaux  de  l'Amérique  tropicale,  que  l'on  a  séparées  des 
Tanagra.  Quelle  que  soit  l'opinion  que  l'on  professe  sur 
l'origine  de  l'espèce ,  les  travaux  du  genre  de  celui  qui  est 
soumis  à  noire  examen  ont  une  valeur  réelle  quand  ils  sont 
faits  avec  soin,  et  ils  méritent  d'être  recueillis  dans  les 
Bulletins.   » 

La  classe  adopte  les  conclusions  des  rapports  précé- 
dents. 


Nouvelles  recherches  sur  la  constitution  des  acides  poly- 
thioniques,  par  M.  Wallhère  Spring. 

nappoft  de  .IV.   Slas. 

«  Le  travail  présenté  par  M.  W.  Spring  au  jugement 
de  la  classe  est  la  continuation  des  recherches  qu'il 
a  entreprises  pour  parvenir  à  dévoiler  la  structure  des 
acides  du  soufre  et  notamment  la  constitution  des  acides 
polythioniques.  Le  présent  travail  renferme  le  résultat  de 
ses  investigations  sur  l'action  de  l'iode  et  du  sodium  sur 
les  sulfures  monoatomiques,  les  sulfites  et  les  polythio- 
nates.  L'action  de  l'iode  sur  un  mélange  de  poids  molécu- 
laires égaux  de  sulfure  et  de  sulfite  de  sodium,  et  de 


(25) 
sulfite  et  d'hyposulfile  de  sodium  lui  a  permis  de  réaliser 
la  synthèse  des  hyposulfîtes  et  des  trithionates.  Et  inver- 
sement l'action  du  sodium  sur  les  hyposulfîtes  et  sur  les 
trithionates  et  les  tétrathionates  l'a  conduit  au  dédou- 
blement de  ces  sels  en  sulfure  et  sulfites  d'une  part  et  en 
sulfure  et  hyposulfite  d'autre  part.  Le  sodium  et  l'iode 
exercent  donc  des  effets  opposés  ;  le  métal  dissocie  les 
composés  que  l'iode  a  unis.  M.  Spring  déduit  naturellement 
de  ces  actions  que  les  atomes  de  soufre  dans  les  acides 
polythioniques  sont  en  contact  entre  eux. 

Le  nouveau  travail  de  M.  Spring  est  bien  conçu  et  bien 
exécuté;  il  révèle  un  esprit  de  sagacité  remarquable.  J'ai 
l'honneur  de  proposer  à  la  classe  d'en  ordonner  l'impres- 
sion dans  le  Bulletin  de  la  séance  et  de  voter  à  l'auteur  des 
remercîments  pour  sa  communication.  » 

La  classe  adopte  les  conclusions  de  ce  rapport,  aux- 
quelles a  adhéré  le  second  commissaire,  M.  de  Koninck. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Note  sur  l'importance  du  gisement  de  phosphate  de  chaux 
des  environs  de  Ciply  [province  de  Hainaut);  par 
M.  Melsens,  membre  de  l'Académie. 

OBSERVATIONS  PRÉLIMINAIRES. 

L'existence  du  phosphate  de  chaux  dans  la  province  de 
Hainaut,  notamment  à  Ciply,  a  été  soupçonnée  par  feu 
Charles  Lebardy  de  Beaulieu,  professeur  à  l'École  des 
mines  de  Mons. 


(24) 

En  1866, MM.  Cornet  et  Briart  ont  constaté,  en  effet, 
que  les  galets  et  les  moules  de  fossiles  que  l'on  rencontre 
dans  le  poudingue  de  la  Malogne  sont  constitués  par  une 
substance  brunâtre,  dure,  mais  rayée  par  l'acier,  et  dans 
laquelle  ils  ont  reconnu  la  présence  du  phosphate  de  chaux 
soupçonnée  par  M.  Lehardy  de  Beaulieu. 

Le  poudingue  de  la  Malogne,  qui  s'étend  sur  une  vaste 
surface  comprenant  une  partie  des  territoires  de  Cuesmes, 
Hyon,  Mesvin  et  Ciply,  ne  possède  qu'une  puissance  faible 
et  souvent  irrégulière  ;  cependant  on  a  pu  l'exploiter  dans 
deux  endroits  situés  aux  confins  des  territoires  de  Cuesmes 
et  de  Ciply,  où  le  poudingue  est  rempli  de  poches  creusées 
dans  la  craie  blanche  et  la  craie  grise  sous-jacente;  il  est 
donc  très-probable  que  dans  ces  conditions  l'exploitation 
ne  fournira  pas  pendant  longtemps  des  quantités  notables 
de  phosphate  calcaire  à  l'industrie  et  à  l'agriculture. 

Dans  son  article  Mines  et  carrières  publié  dans  la  Patria 
belgica,  notre  savant  confrère  M.  F.-L.  Cornet  a  attiré 
l'attention  sur  la  craie  grise  de  Ciply,  produit  naturel, 
abondant,  exploitable  avec  la  plus  grande  facilité  et  riche 
en  phosphate  calcaire. 

Dans  une  note  de  MM.  Cornet  et  Briart  que  ces  savants 
m'ont  communiquée,  ils  estiment  à  1-4,500,000  mètres 
cubes  la  quantité  de  craie  grise  qui  recouvre  environ 
180  hectares  au-dessus  de  la  couche  aquifère;  il  serait 
facile  de  l'exploiter  dans  des  excavations  à  ciel  ouvert  ou 
par  des  puits  de  peu  de  profondeur  à  l'aide  de  galeries  ;  mais 
une  grande  partie  passe  sous  la  couche  aquifère,  et  pour 
l'exploiter,  il  faudrait  employer  des  machines  à  épuise- 
ment. D'après  l'estimation  faite  par  nos  savants  confrères, 
on  sera  convaincu  qu'il  y  a  dans  ce  gisement  une  ressource 
énorme  pour  l'agriculture  et  l'industrie  si  importante  des 
engrais  artificiels  et  des  amendements. 


(  25  ) 


§    l^\   —    Valeur  vénale  des   phosphates    et  de   Vacide 
phosphorique. 

On  importe  aujourd'hui  en  Angleterre,  en  France,  en 
Belgique,  du  phosphate  de  chaux  provenant  de  mines 
considérables  qui  se  trouvent  en  Espagne  et  en  Portugal, 
sous  la  forme  d'apatite;  ces  produits  contiennent  au  delà 
de  60  pour  cent  de  phosphate  de  chaux  ;  on  en  rencontre 
qui  ne  titrent  pas  moins  de  80  pour  cent;  ils  se  prêtent 
parfaitement  à  la  fabrication  des  superphosphates  de  chaux 
dont  l'agriculture  fait  un  emploi  considérable,  car  ils  ne 
renferment  que  10  pour  cent  de  carbonate  calcaire. 

Je  pense  que  l'on  reste  dans  les  bornes  de  la  vérité  en 
disant  que  la  poudre  de  ces  phosphates ,  riches  à  70  pour 
cent,  rendue  dans  la  plupart  des  localités  belges  qui  ne  sont 
pas  trop  éloignées  des  chemins  de  fer,  peut  être  estimée 
à  15  francs  les  100  kilogrammes  (soit  environ  21  centimes 
par  kilogramme  de  phosphate  ordinaire  en  poudre  fine); 
par  grandes  quantités  ce  prix  peut  s'abaisser  jusque  vers 
fr.  15  50  c%  soit  19  '/j  centimes,  ce  qui  donne  une  valeur 
de  50  ou  42  centimes  par  kilogramme  à  l'anhydride  phos- 
phorique P/i^O-^  contenu  dans  le  phosphate  calcaire. 

En  effet,  certains  guanos,  dont  les  prix  s'élèvent  jusqu'à 
20  francs  les  100  kilogrammes,  ne  contiennent  presque 
que  du  phosphate  de  chaux,  c'est-à-dire  80  pour  cent;  les 
phosphates  espagnols,  qui  renferment  environ  70  pour  cent 
de  phospate  calcaire,  reviennent  à  11  ou  12  francs  au 
minimum  avant  leur  pulvérisation.  Le  noir  animal  qui  a 
servi,  dont  le  prix  de  vente  ne  s'élevait  guère,  jadis,  qu'à 
2  francs  les  100  kilogrammes,  atteint  aujourd'hui  par- 


(  26  ) 
fois  le  prix  de  15  francs;  les  nodules  dont  la  richesse  en 
phosphate  de  chaux  varie  de  30  à  60  pour  cent  sont  vendus 
à  des  prix  assez  variables  après  leur  pulvérisation,  mais 
qui  ne  s'écartent  pas  beaucoup  du  prix  des  phosphorites 
espagnols  ou  mieux  du  prix  auquel  on  paye  la  somme  de 
phosphate  dans  ce  produit,  c'est-à-dire  eu  égard  à  leur 
richesse  en  phosphate  de  chaux  ordinaire. 

Depuis  une  vingtaine  d'années  on  a  commencé  à  exploiter 
les  nodules  de  phosphate  de  chaux  ou  pseudo-coprolithes  en 
France,  après  que  M.  de  Molon  eut  signalé  l'existence  de 
ce  produit  sur  différents  points  de  ce  pays  et  notamment 
dans  le  département  du  Nord  et  dans  les  Ardennes.  La 
richesse  de  ces  nodules  provenant  de  onze  localités  diffé- 
rentes est  très-variable  ;  la  moyenne  générale  de  leur 
richesse  en  phosphate  tricalcique  s'élève  à  41,4  pour  cent 
dans  la  matière  supposée  sèche  et  à  40.4  dans  la  matière 
naturellement  humide  ;  le  minimum  est  de  29.9  pour  cent, 
le  maximum  de  65.5  pour  cent;  mais  pour  les  mêmes 
localités  les  échantillons  différents  peuvent  posséder  des 
richesses  que  je  vois  varier  de  42.1  à  65.5  pour  cent ,  bien 
qu'en  général  les  différences  ne  s'élèvent  qu'à  2  pour  cent 
environ.  Les  nodules  pulvérisés  se  vendent  à  Paris  5  francs 
les  100  kilogrammes,  mais  le  transport  en  augmente  le 
prix  pour  les  localités  éloignées  et  peut  s'élever  jusqu'à 
8  francs  (voir  De  Herain,  Cours  de  chimie  agricole)  ;  le  phos- 
phate reviendrait  donc  de  12.5  centimes  à  20  centimes 
par  kilogramme  et  l'acide  phosphorique  anhydre  Ph^  0^  à 
22  ou  43  centimes  environ. 

Un  chimiste  très-habile,  M.  A  Peeterman,  directeur  de 
la  station  agricole  de  Gembloux,  estimait  que  la  poudre  de 
phosphate  provenant  de  nodules  riches  à  35.3  pour  cent 
pouvait  valoir  environ  5  francs  les  100  kilogrammes;  en 


(  27) 
prenant  la   composition  2(P/iO^)3Ca  et  en  calculant  la 
valeur  de  l'acide  phosphorique  anhydre  : 


PA205    ....     142  45.81 

ôCaO      ....     168  54.19 


510         100.00 


on  trouve  que  55  kilogrammes  de  PA^ 0^ 5 CaO  contiennent 
sensiblement  4 5  kilogrammes  PlfiO"^  d'anhydride  et  produi- 
raient 21  kilogrammes  VlfiO^^ZlPO  d'acide  phosphorique 
normal, 

P/i^O»  ....  142    72.43 
SH^O   ....   54    27.55 


196    100.00 

Ce  qui  porte  le  prix  de  l'anhydride  phosphorique  VlfiO^ 
à  55.5  centimes  environ,  et  celui  de  l'acide  Vh^O^oU^O 
ou  P/iO-*H^  qui  en  proviendrait  à  25  ^/i  centimes. 

Ces  données,  assez  différentes  entre  elles,  seraient  de 
nature  à  pouvoir  faire  admettre  comme  base  de  calculs  et 
en  nombres  ronds  les  prix  suivants  : 
20  centimes  pour  le  phosphate  tricalcique  Vh'^O'^oCaO 
55        —       pour  l'anhydride  phosphorique  P/i^O^. 

Ce  dernier,  en  s'adjoignant  les  éléments  de  l'eau,  aug- 
mente de  poids  sous  le  rapport  del42à  196;  il  reviendrait 
donc  à  25  centimes  environ. 

Nous  pouvons  nous  permettre,  je  pense,  de  faire  usage 
de  nombres  ronds,  car  je  vois  l'acide  phosphorique  anhydre 
et  supposé  être  à  l'état  insoluble  comme  dans  le  phosphate 
tricalcique  coté  à  50  centimes  par  kilogramme,  tandis  que 
lorsqu'il  a  été  rendu  soluble  sa  valeur  s'élève  au  delà  du 


(28) 

double,  mais  nous  nous  contenterons  du  prix  de  1  franc. 

Encore  un  prix  aûn  de  nous  guider  dans  l'évaluation  de 
la  valeur  de  la  craie  grise  de  Ciply. 

Les  superphosphates  renfermant  (*)  tout  l'acide  phospho- 
rique  provenant  d'un  phosphate  contenant  un  tiers  de  son 
poids  de  phosphate  tribasique,  mais  dans  lequel  l'acide 
phosphorique  est  rendu  soluble,  peut  s'estimer  à  environ 
15  francs,  et  nous  aurons  en  nombres  ronds  une  valeur  de 
75  centimes  par  kilogramme  pour  l'acide  rendu  soluble; 
les  frais  pour  le  rendre  soluble  s'élèvent  donc  à  plus  que  sa 
valeur  réelle,  car  celle-ci  se  trouve  doublée  et  au  delà. 
M.  De  Herain  estime  l'acide  phosphorique  soluble  de  1  franc 
à  fr.  i  20  c^ 

§  2.  —  Propriétés  physiques  et  analyse  mécanique  de  la 
craie  grise  phosphatée  de  Ciply. 

Telle  que  je  l'ai  recueillie  avec  notre  savant  confrère 
M.Cornet,  à  diverses  reprises  depuis  le  mois  de  septembre 
1873,  dans  le  talus  d'un  chemin  creux  près  du  bois  de  Ciply, 
la  craie  constitue  une  masse  peu  cohérente  d'une  couleur 
d'un  gris  jaunâtre  tirant  vers  le  brun  ;  mais  on  reconnaît 
à  l'œil  nu  que  les  blocs  ne  sont  pas  homogènes;  ils  res- 
semblent à  un  mortier  sec  non  cohérent  qui  serait  formé 
de  chaux  et  de  sable  coloré  grenu  ;  on  voit  en  effet  des 
espèces  de  stratifications  microscopiques  de  matière  plus 
brune  alternant  d'une  façon  irrégulière  avec  de  la  matière 
plus  grise  un  peu  jaunâtre;  la  matière  brune  est  constituée 


(*)  Les  superphosphates  titrant  de  13  à  14  pour  cent  d'acide  phospho- 
rique soluble  se  cotent  fr.  1-i  13  c'  par  100  Ivilogrammes  dans  le  com- 


merce. 


(  29  ) 
par  des  grains  arrondis  de  diamètres  différents,  mais  dont 
les  plus  gros  ne  dépassent  pas  le  volume  d'une  petite  tête 
d'épingle;  la  matière  grise  est  absolument  pulvérulente 
comme  la  craie  ordinaire;  les  petits  blocs  se  divisent 
mécaniquement  avec  la  plus  grande  facilité;  on  rencontre 
cependant  des  fragments  très-cohérents  peu  abondants  à 
l'endroit  où  j'ai  prélevé  des  échantillons.  Ces  blocs  durs 
renferment  aussi  des  phosphates  et  de  petits  nodules 
bruns  encastrés;  on  pourrait  aisément  trier  ces  blocs  et  les 
transformer  en  chaux  riche  en  phosphate  calcaire.  Quelques 
fragments  moins  durs  que  les  précédents  paraissent  résul- 
ter de  l'agglomération  de  la  matière  des  premiers. 

En  délayant  la  craie  phosphatée  naturelle  dans  une 
grande  masse  d'eau  pure  et  en  agitant  vivement,  une  poudre 
gris-jaunâtre  reste  longtemps  en  suspension,  tandis  que 
les  petits  grains  tombent  rapidement  au  fond  de  l'eau;  on 
peut  donc,  par  un  simple  lavage  à  grande  eau,  séparer 
facilement  les  grains  de  la  folle  farine  dans  laquelle  ils  sont 
disséminés. 

Une  série  de  lavages  exécutés  sur  des  blocs  différents 
m'a  prouvé  que  le  rapport  moyen  entre  la  folle  farine  et 
les  grains  ne  s'écarte  pas  beaucoup  d'un  minimum  moyen 
formé  de  : 

Grains 73  pour  cent. 

Folle  farine    ....      25        — 


100 


les  nombres  ont  varié  entre  70  et  85  pour  cent  pour  les 
grains;  en  adoptant  75  on  reste  incontestablement  dans 
des  conditions  parfaitement  réalisables  dans  l'industrie;  j'ai 
toujours  opéré  sur  la  matière  desséchée  spontanément  à 


(  50  ) 
l'air  ou  chauffée  légèrement.  La  séparation  de  deux 
matières  qui  constituent  la  craie  phosphatée  de  Ciply  me 
paraît  difficilement  exécutable  au  moyen  du  blutage  de  la 
matière  désagrégée  et  sèche;  en  effet,  il  y  a  des  grains 
arrondis  d'un  diamètre  si  faible  qu'ils  passent  à  travers  les 
mailles  des  toiles  métalliques  les  plus  fines  du  commerce 
et  même  à  travers  des  tamis  de  soie  à  mailles  très-fines. 
Je  pense  cependant  qu'il  ne  serait  pas  bien  difficile  de 
séparer  les  grains  au  moyen  du  vannage  et  que  l'industrie 
réaliserait  facilement  un  appareil  qui  serait  spécialement 
adapté  à  la  craie  de  Ciply;  car  il  en  existe  déjà  pour  d'au- 
tres matières ,  la  craie  proprement  dite  étant  très-divisée 
et  peu  dense;  elle  se  dissout  dans  l'acide  chlorhydrique  en 
ne  laissant  qu'un  très-faible  résidu  ;  cette  dissolution  acide, 
additionnée  de  sel  ammoniac,  ne  précipite  que  très-faible- 
ment ou  pas  du  tout  par  l'ammoniaque,  preuve  que  tous 
les  phosphates  se  trouvent  dans  les  grains  denses,  mais  je 
n'ai  pas  cru  devoir  faire  une  analyse  exacte  de  cette  folle 
farine,  que  l'on  peut  regarder  comme  essentiellement  com- 
posée de  carbonate  de  chaux  exempt  de  phosphate. 

§  3.  —  Action  de  Veau  sur  la  craie  phosphatée. 

L'eau  n'enlève  à  la  craie  phosphatée  que  des  traces 
insignifiantes  de  matières  salines  solubles;  sous  ce  rapport 
elle  se  comporte  comme  un  produit  préalablement  lavé 
par  de  l'eau  pure  froide. 

L'eau  distillée  qui  a  servi  à  laver  la  craie  se  colore  légè- 
rement en  jaune;  lorsqu'on  la  concentre,  elle  montre  une 
très-faible  réaction  alcaline;  évaporée  à  siccité,  elle  char- 
bonne  faiblement;  le  charbon  brûle  avec  facilité  en  déga- 
geant une  odeur  particulière  difficile  à  définir,  car  elle  ne 


(  .>!  ) 
rappelle  que  d'une  façon  vague  l'odeur  des  matières  végé- 
tales ou  animales;  parfois  cependant  il  m'a  paru  qu'elle  se 
rapprochait  un  peu  de  l'odeur  de  pain  brûlé  ou  de  l'odeur 
empyreumatique  de  certains  acides  bruns  (ulmiques) azotés, 
comme  ceux  de  la  tourbe,  par  exemple  ;  les  gaz  sont  alca- 
lins. 

§  4.  —  Action  de  la  chaleur  sur  la  craie  phosphatée. 

La  craie  phosphatée  à  l'état  naturel ,  desséchée  sponta- 
nément, renferme  2  à  o  pour  cent  d'eau  que  la  chaleur 
chasse  facilement;  en  continuant  à  la  chauffera  la  lampe 
dans  des  tubes  de  verre,  on  voit  la  matière  décrépiter 
légèrement  et  perdre  de  l'eau;  on  reconnaît  la  présence  de 
l'ammoniaque;  la  matière  noircit  un  peu  et  se  comporte 
comme  si  elle  renfermait  des  traces  de  matière  susceptible 
de  se  charbonner  par  l'action  de  la  chaleur;  la  craie  phos- 
phatée débarrassée  de  son  carbonate  de  chaux  par  un  lavage 
à  grande  eau,  composée  essentiellement  des  petits  grains 
denses,  se  comporte  de  la  même  façon,  mais  paraît  ren- 
fermer un  peu  plus  de  matière  d'origine  organique,  car  en 
général  le  produit  chauffé  dans  les  tubes  ou  dans  des  creu- 
sets de  platine  couverts  devient  plus  noir  ;  l'eau  qu'elle  perd 
est  alcaline  par  des  sapeurs  ammoniacales.  La  folle  farine 
desséchée  spontanément  perd  de  l'eau  par  la  chaleur  et 
dégage  de  petites  quantités  d'ammoniaque. 

La  présence  de  coquilles  fossiles  pouvait  du  reste  faire 
prévoir  ces  résultats ,  mais  nous  verrons  plus  loin  que  les 
grains  lavés  renferment  une  matière  organique  particu- 
lière et  caractéristique. 

En  poussant  l'action  du  feu  jusqu'à  la  décomposition  com- 
plète du  carbonate  de  calcium,  les  pertes  totales  accusées 


(  3-2  ) 
varient  dans  un  sens  qui  corrobore  au  point  de  vue  indus- 
triel ou  agricole  les  données  générales  de  ma  note  :  en 
effet,  la  craie  naturelle  perd  par  la  calcination  de  29  à  51 
pour  cent,  tandis  que  la  matière  légère  essentiellement 
formée  de  carbonate  terreux  perd  au  delà  de  42  pour  cent 
et  que  les  grains  denses  qui  renferment  presque  tout  le 
phosphate  calcaire  du  produit  naturel  ne  perdent  que  26 
à  28  pour  cent. 

Je  crois  devoir  faire  remarquer  expressément  que  les 
nombres  moyens  que  je  donne,  obtenus  sur  des  produits 
provenant  d'échantillons  différents,  ne  doivent  être  consi- 
dérés industriellement  et  provisoirement  que  comme  des 
approximations  suffisantes  peut-être;  car  pour  donner  une 
valeur  moyenne  de  tout  le  gisement,  il  aurait  été  néces- 
saire de  faire  un  échantillon  moyen  en  prélevant  des  frag- 
ments à  divers  endroits  et  à  différentes  profondeurs. 

Si  l'on  fait  abstraction  de  2  pour  cent  de  silice  environ , 
de  fer,  de  magnésie,  d'alumine,  etc.,  et  que  l'on  con- 
sidère le  produit  comme  chimiquement  pur,  il  y  aura  lieu 
de  déterminer  plus  tard  par  une  étude  plus  attentive  la 
véritable  valeur  de  la  craie  phosphatée  qui,  en  nombres 
ronds,  et  se  basant  sur  des  expériences  isolées,  peut  se 
représenter  par  les  quatres  hypothèses  suivantes  : 

70  matière  phosphatée  et  carbonate  de  chaux. 
50  carbonate  de  chaux  enlevé  par  le  lavage. 


100 


75  matière  phosphatée. 
:25  carbonate  de  chaux. 

100 


(  33) 


80  nialière  phosphatée. 
20  carbonate  de  chaux. 


100 


85  matière  phosphatée. 
15  carbonate  de  chaux. 

100 


Or,  la  matière  phosphatée  contenant  très-sensiblement 
le  tiers  de  son  poids  de  phosphate,  on  aurait  pour  le  phos- 
phate tricalcique  dans  la  matière  naturelle  supposée  pure 
et  sèche,  25,  23,  27  ou  28  pour  cent  et  respectivement 
77,  7o,  75  et  72  pour  cent  de  carbonate  de  chaux  ;  voici  ces 
données  traduites  en  formule  : 


25  P/i^O^ôCaO. 
47  CO^CaO    .  , 


50 


100 


50  COT-aO.  . 


100 


CflO 
CflO 

co^ 
(  co^ 

(  CflO 


10.6 
12.4 
26.5 
20.7 

15. 2 
16.8 

S  00.0 


1 

\ 

25  P/i-^O'ôCflO.  . 
50  CO^CflO.  .  .  . 

25  CO-^CflO.  .  .  . 

100 
MIE  XXXVIII, 

(  P/(-0\   .  . 

■  ■  ^  CaO    ... 

j  CO^    .  .  . 

■  ■   (  CaO    ... 

(  co-^    .  .  . 

■  ■  (  CflO    ... 

11.5 
1Ô.5 

■=>•) 

22.0 
28.0 

II.O 

SÉRIE, 

T( 

14.0 

100 

100.0 

9m  e 

5 

(34) 

27  Ph'O^ÔCaO.   . 


80 


53  GO'CaO. 
20 20  CO^CrtO. 


P/i»0«.  ...  12.4 

CflO  ....  14.6 

f  CO*  ....  24.4 

(  C«0  ....  28.6 

(  CO^  ....  8.8 

(  CaO  .  .  .  .  11.2 


100  100  100.0 

/  28  P/t-O^ÔCaO. 

83 [ 

57  CO-CaO,  .  . 

15 13  CO''C«0.  .  .  . 


(  P/i^05.  . 

.     12.9 

!  CaO    . . 

.     13.1 

(  CO^    .  . 

.     25.1 

(  CaO   .  . 

.     .31.9 

[  co-^   .  .  . 

.      G. 6 

(  CaO    .  . 

.       8.4 

100         100  100.0 

Ces  nombres  prouvent  que  la  malière  brute,  comme  la 
matière  lavée,  mérite  l'attention  de  l'industrie  et  de  l'agri- 
culture, car  si  la  richesse  en  phosphate  est  un  peu  faible 
comparativement  à  d'autres  coprolithes,  au  moins  l'exploi- 
tation en  est  très-facile;  la  pulvérisation,  peut-être  même 
inutile,  se  ferait  à  très-bas  pri.\;  le  transport  pour  tous  les 
points  du  pays  se  trouve  être  dans  les  conditions  les  plus 
avantageuses,  puisque  la  gare  d'Hyon-Ciply  est  à  une 
petite  distance  du  gisement. 

Les  produits  calcinés  obtenus  dans  un  violent  feu  de 
forge  sont  assez  cohérents;  mais  soit  que  l'on  opère  sur  le 
produis  naturel,  la  folle  farine  ou  les  grains  provenant  du 
lavage,  on  obtient  des  chaux  qui  ne  foisonnent  pas  et 
qui  ne  s'échauffent  presque  pas  au  moment  où  on  les 
humecte. 

Les  roches  dures,  faciles  à  séparer,  peuvent  se  transfor- 
mer en  chaux  phosphatée  par  les  procédés  ordinaires  qui, 


(53) 

tlaiis  ce  pays  hoiiiller,  ne  reviennent  qu'à  IV.  7  50  c'  par 
mèlre  cube  environ. 

Ces  petits  blocs  durs  sont  de  nature  assez  différente, 
comme  je  raidéjàdit,et  livrent  par  la  calcinalion  des  chaux 
qui  foisonnent  plus  ou  moins;  mais  si  Ton  prend  un  échan- 
tillon moyen  en  détachant  de  petites  parcelles  d'une  série 
de  fragments,  on  y  constate  la  présence  d'une  quantité 
notable  de  phosphate  calcaire;  ils  ne  sont  donc  pas  à 
négliger  en  vue  de  l'utilisation  de  l'ensemble  qui  constitue 
la  craie  phosphatée  grise  de  Ciply  et  les  nodules  empâtés 
dans  du  calcaire  résistant. 

§  5.  —  Action  des  acides  svrle  produit  lavé.  —  Propriétés 
de  la  matière  organique  insoluble  dans  les  acides  dilués. 
—  Présence  des  fluorures. 

L'action  de  l'acide  acétique  dilué  à  o"  B'  sur  le  produit 
lavéendégagedirectemenlde  l'acidecarbonique;  maison  ne 
parvientpasà  neutraliser  complètement  l'acide;  en  chauffant 
et  en  mettant  un  excès  d'acide,  celui-ci  passe  en  partie  à 
l'état  de  vapeur;  en  lavant  le  produit  inattaqué  par  décan- 
tation et  en  employant  de  nouveau  de  l'acide,  il  arrive 
un  instant  où  l'attaque  ne  se  fait  presque  plus;  la  dis- 
solution acétique  précipite  parfois  légèrement  par  l'am- 
moniaque; en  général  elle  ne  renferme  que  de  faibles 
traces  de  phosphate;  en  traitant  le  résidu  solide  [»ar  l'acide 
chlorhydrique,  le  dégagement  d'acide  carbonique  reprend 
et  tout  se  dissout  à  l'exception  d'un  peu  de  silice;  mais  il 
est  convenable  de  chauffer  le  liquide;  indépendamment  de 
la  silice,  il  reste  une  matière  brunâtre  en  suspension;  elle 
est  très-ténue  et  colle  au  filtre.  Si  l'on  attaque  directement 
la  matière  par  de  l'acide   chlorhydrique  du   commerce 


(  56  ) 
étendu  d'eau  et  à  chaud,  presque    tout   se   dissout  en 
chauffant,  et  en  opérant  sur  quelques  cents  grammes  du 
produit  lavé  on  constate  qu'il  reste  un  peu  de  silice  et  l'on 
peut  recueillir  la  matière  organique  brune. 

Cette  matière  ressemble  aux  acides  dits  ulmiques;  elle 
est  soluble  dans  les  alcalis  et  dans  l'ammoniaque;  elle  est 
précipitée  de  ces  dissolutions  par  les  acides  en  flocons  bru- 
nâtres; elle  est  azotée;  si  on  la  distille  en  la  chauffant  dans 
une  petite  cornue,  elle  se  décompose  en  laissant  un  résidu 
charbonneux ,  donne  des  huiles  empyreumatiques  qui  rap- 
pellent, mais  sans  qu'elle  soit  caractéristique,  l'odeur  qui 
se  dégage  de  matières  animales  azotées,  mélangées  de  pro- 
duits non  azotés;  les  vapeurs  sont  franchement  alcalines 
par  suite  de  la  présence  de  l'ammoniaque. 

Cette  observation  me  paraît  importante  en  ce  sens 
qu'elle  permettra  sans  doute  de  mieux  comprendre  plus 
tard  l'origine  de  cet  énorme  amas  de  phosphate  de  chaux 
jouissant  de  propriétés  physiques  si  singulières. 

Un  autre  point  me  paraît  important  à  noter.  L'acide  car- 
bonique qui  se  dégage  quand  on  traite  par  l'acide  chlorhy- 
drique  a  une  odeur  particulière  qui  rappelle  l'odeur  des 
marais;  lorsque  tout  dégagement  d'acide  carbonique  a 
cessé  et  que  l'on  chauffe  le  liquide  acide,  cette  odeur  de 
marais  s'exalte  et  rappelle  assez  bien  celle  de  l'odeur  des 
vases  d'étangs. 

On  sait  que  les  os  fossiles  renferment  du  fluor;  les  phos- 
phates espagnols  et  la  plupart  des  phosphates  en  renfer- 
ment des  quantités  plus  ou  moins  considérables;  il  en  est 
de  même  de  la  craie  grise  de  Ciply,  dans  laquelle  sa  pré- 
sence est  très-facile  à  constater. 

D'après  un  renseignement  que  je  tiens  de  M.  le  D'Peter- 
mann,  les  phosphorites  d'Espagne  contiennent  des  quan- 


(  57  ) 
tités  appréciables  d'iode;  ce  savant,  comptant  faire  une 
étude  plus  détaillée  sur  le  gisement  de  Ciply,  se  propose 
d'en  donner  une  analyse  complète  et  exacte. 

L'acide  sulfurique  à  oô"  ou  l'acide  sulfurique  des  cham- 
bres de  plomb  attaque  la  matière  lavée  et  non  pulvérisée 
et  transforme  la  majeure  partie  du  produit  en  plâtre  et 
acide  phosphorique  soluble  ou  superphosphate  soluble, 
mais  il  faut  opérer  à  chaud;  il  est  convenable  d'employer 
un  excès  d'acide  sulfurique  pour  celte  transformation.  Il 
est  bien  vrai  que  l'on  obtient  ainsi  un  produit  dont  la  des- 
siccation est  lente  ou  difficile;  or  il  faut  offrir  à  l'agricul- 
ture un  produit  d'un  manienrient  commode  lorsqu'on  le 
répand  sur  le  sol. 

Il  m'a  paru  qu'un  procédé  mixte  remplirait  parfaite- 
ment ce  but;  ainsi,  après  avoir  rendu  soluble  tout  l'acide 
phosphorique,  on  ajouterait  à  la  matière  pâteuse  une  cer- 
taine quantité  de  matière  naturelle  absorbanteet  la  dessic- 
cation serait  obtenue  rapidement.  I!  est  vrai  que  l'on  s'ex- 
poserait à  avoir  du  phosphate  rétrogradé,  mais  celui-ci, 
facilement  soluble  dans  l'acide  carbonique,  agirait  encore 
efficacement. 

Il  y  a  encore  une  observation  à  faire  au  sujet  de  l'action 
de  l'acide  acétique;  en  général,  on  peut  dire  qu'il  ne  dis- 
sout qu'environ  la  moitié  du  poids  de  la  craie  phosphatée 
lavée.  J'avais  pensé  qu'en  calcinant  fortement,  de  façon  à 
chasser  tout  l'acide  carbonique,  l'action  de  l'acide  acétique 
serait  plus  complète;  mais  le  produit  bien  calciné  se 
comporte  à  peu  près  comme  le  produit  naturel  :  environ 
la  moitié  de  son  poids  résiste  à  l'action  de  l'acide,  le  résidu 
se  dissout  dans  l'acide  chlorhydrique  sans  effervescence; 
l'acide  acétique,  agissant  sur  le  produit  calciné,  paraît 
dissoudre  un  peu  plus  de  phosphate  que  lorsque  l'on 
emploie  la  matière  naturelle.  J'ai  vainement  essayé  en 


(  38  ) 
traitant  le  produit  naturel,  le  produit  lavé,  calcinés  ou 
Don,  de  dissoudre  du  carbonate  de  chaux  en  respectant  les 
phosphates  par  l'acide  chlorhydrique  Irès-dilué;  j'espérais 
pouvoir  parvenir  à  enrichir  le  produit  en  phosphate,  mais 
celui-ci  se  dissout,  en  même  temps  que  le  carbonate,  en 
quantité  trop  considérable  pour  que  l'opération  puisse  se 
faire  dans  de  bonnes  conditions  industrielles,  qui  permet- 
traient de  livrer  au  commerce  un  produit  d'un  transport 
moins  coûteux. 

J'ai  essayé  dans  ce  même  but  les  résidus  encombrants 
de  la  fabrication  du  chlore,  mais,  au  point  de  vue  du  tra- 
vail industriel,  celte  opération  ne  m'a  point  paru  donner 
des  résultats  réellement  pratiques. 

Cependant  c'est  une  direction  qu'il  ne  faudrait  pas 
abandonner;  la  question  industrielle  à  résoudre  consiste  à 
savoir  si  la  perte  que  l'on  fait  en  phosphate  ne  serait  pas 
compensée  et  au  delà  en  offrant  au  commerce  un  produit 
riche  pouvant  s'exporter  loin  de  Ciply  avec  avantage,  en 
livrant  à  l'industrie  une  matière  première  susceptible 
d'être  transformée  sans  frais  de  pulvérisation,  etc.,  etc., 
à  la  façon  des  phosphorites  riches. 

L'acide  sulfureux  en  excès  dissout  la  craie  grise  de 
Ciply  en  entier  après  un  contact  prolongé  et  en  employant 
un  grand  excès  d'acide  sulfureux. 

Il  faudra  étudier  l'action  de  l'acide  carbonique  à  la  pres- 
sion ordinaire  ou  à  de  fortes  pressions. 

§  6.  —  Composition  des  grains  denses  de  la  craie  grise 
phosphatée  de  Ciply. 

Nous  avons  vu  l'analyse  mécanique  du  produit  naturel 
et  nous  avons  constaté  qu'il  ne  cède  rien  ou  presque  rien 
à  l'eau  pure,  ce  qui  exclut  la  présence  des  sels  de  potasse 


(39) 

OU  de  soude  facilement  solubles;  le  produit  lavé  pour  le 
débarrasser  du  carbonate  de  chaux  contient  de  51  à  54 
pour  cent  de  phosphate  tricalcique  correspondant  à  14.2 
ou  lo.2  d'anhydride  phosphorique;  c'est  le  résultat  d'ana- 
lyses faites  sur  des  produits  de  préparations  et  d'échantil- 
lons différents  par  des  méthodes  différentes  évitant  la  pré- 
cipitation de  l'alumine  et  du  fer  avec  le  phosphate  de 
magnésie. 

Si  l'on  se  contente  de  doser  le  phosphate  calcaire  en  trai- 
tant la  dissolution  acide  par  l'ammoniaque,  comme  cela  se 
pratique  à  tort  parfois  encore  pour  le  commerce  des  en- 
grais, on  obtient  nécessairement  des  nombres  plus  élevés, 
le  phosphate  calcaire  étant  accompagné  d'oxyde  de  fer  et 
d'alumine;  par  ce  procédé  on  trouve  environ  58  pour  cent 
de  phosphate.  Je  ne  mentionne  ces  résultats  qu'en  vue 
d'attirer  l'attention  sur  la  portée  de  l'erreur  que  l'on  com- 
met en  se  contentant  de  ce  procédé  pour  l'analyse  du  pro- 
duit au  point  de  vue  du  commerce. 

Je  crois  donc  pouvoir  conclure  que  les  grains  denses  de 
la  craie  de  Ciply  renferment  très-sensiblement  le  tiers  de 
leur  poids  de  phosphate  calcaire,  soit  50  à  55  pour  cent  au 
moins. 

^  1.  —  Valeur  du  gisement  de  la  craie  grise  de  Ciply  ou 
craie  phosphatée  de  Ciply. 

Comme  MM.  Cornet  et  Briart  l'ont  fait  remarquer,  l'ex- 
ploitation des  nodules  de  coprolilhes  dans  le  poudingue  de 
la  Malogne  ne  fournira  pas  longtemps  du  phosphate  cal- 
caire à  l'industrie  et  à  l'agriculture. 

Eu  reprenant  les  nombres  de  ma  note  on  voit  que  les 
180  hectares  de  craie  renferment  14,500,000  mètres  cubes 


(  ^0  ) 
de  cette  substance  facilement  exploitable;  or  chaque  mètre 
cube  pèse  environ  1,500  kilogrammes;  le  gisement  contient 
donc  environ  21,750,000,000  de  kilogrammes  de  produit 
brut  dont  les  ^/i  ou  les  ^^j  sont  riches  à  50  ou  55  pour  cent 
de  phosphate,  soit  16,512,500,000  ou  17,400,000,000  de 
kilogrammes  de  matière  renfermant  5,500,000,000  de  kilo- 
grammes environ  de  phosphate  des  os;  si  Ton  admet  avec 
M.  Élie  de  Beaumont  que  la  moyenne  du  poids  de  phos- 
phate calcaire  contenu  dans  l'homme  vivant,  femmes,  en- 
fants, adultes  et  vieillards,  est  de  2  kilogrammes,  on  voit 
que  la  craie  de  Ciply  contient  de  quoi  pourvoir  au  système 
osseux  de  plus  de  deux  fois  la  population  humaine  du 
monde  entier,  estimée  à  1,000,000,000. 

On  peut  présenter  ces  nombres  sous  une  autre  forme  et 
en  comptant  en  nombres  ronds  :  sur  la  population  de  la 
Belgique  il  meurt  par  an  environ  150,000  individus,  en 
supposant  la  perle  totale  en  phosphate  à  2  kilogrammes  par 
tète,  ce  qui  n'est  pas,  on  voit  que  le  phosphate  de  chaux 
du  gisement  de  Ciply  suffirait  pour  assurer  à  la  population 
belge  du  phosphate  pendant  plus  de  180  siècles. 

Voici  les  bases  du  calcul  : 

5,500,000  habitants. 

2,77  pour  100.  —  Mortalité  par  an. 

2  kii.  (le  phosphate  par  individu. 

152,.350  décès  par  an  en  Belgique. 

301,700  kilogrammes  de  phosphate. 

Soit  5,500,000,000:  505,000  =  18000  ans  environ. 

On  voit  du  reste,  par  ce  calcul ,  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de 
craindre  un  manque  de  phosphate  dans  notre  pays. 

Si  H.  Davy  a  cru  pouvoir  attribuer  à  l'exportation  de 
céréales  et,  par  conséquent,  à  l'épuisement  du  sol  en  acide 
phosphorique,   la  stérilité   des   pays  qui    anciennement 


(41) 

avaient  été  les  greniers  d'abondance  de  Rome,  cet  é(at  de 
stérilité  n'est  pas  à  craindre  en  Belgique  avec  la  ressource 
du  gisement  de  Ciply. 

Ce  que  je  dis  à  propos  du  gisement  de  Ciply  peut,  je 
crois,  à  juste  titre,  se  dire  aussi  de  tous  les  gisements  que 
l'on  découvre  partout  en  Europe  et  qui,  à  ce  point  de  vue  , 
assurent  l'avenir  de  la  culture  européeime,  comme  plu- 
sieurs savants  l'ont  déjà  fait  remarquer.  Mais  ainsi  qu'on 
le  verra  plus  loin,  l'homme  dissipe  pendant  sa  vie  au  moins 
trente  fois  plus  de  phosphate  qu'il  ne  s'en  enfouit  avec  sa 
dépouille  mortelle,  et  le  dépôt  de  Ciply  ne  suffirait  qu'à  la 
consommation  de  six  siècles  si  tout  était  perdu. 

Si  l'on  peut  attacher  quelque  intérêt  à  des  calculs  de  ce 
genre,  il  ne  faut  cependant  pas  oublier  que  les  phosphates 
existent  dans  presque  toutes  les  terres  et  parfois  en  quan- 
tités assez  considérables;  on  en  trouve  dans  une  foule  de 
roches,  enfin  sa  dissémination  est  excessive.  L'illustre  De 
Gasparin  d'une  part,  M.  Schloesing  de  l'autre,  en  ont  con- 
staté des  quantités  considérables;  ce  dernier  pense  pou- 
voir n'admettre  pas  moins  de  six  à  sept  tonnes  par  hectare 
dans  les  terres  qu'il  a  analysées.  Je  ne  connais  pas  toutes 
les  analyses  des  terres  arables  de  Belgique  au  point  de  vue 
du  dosage  des  phosphates;  je  signale  seulement  celle  faite 
sur  la  terre  des  environs  de  Bruges  par  M.  le  D""  A.  Peter- 
mann;  un  hectare  sur  une  profondeur  de  0'",1S  ne  con- 
tient que  255  kilogrammes  d'acide  phosphorique,  corres- 
pondant à  oOO  kilogrammes  de  phosphate  tribasique 
environ;  c'est  une  provision  qui ,  d'après  l'auteur,  ne  suffit 
qu'à  couvrir  les  besoins  d'un  assolement  de  quatre  années. 

Nous  avons  vu  que  le  prix  du  phosphate  calcaire  peut 
s'évaluer  à  environ  20  centimes  par  kilogramme  pulvérisé 
et  rendu  dans  la  plupart  des  gares  de  notre  réseau  de 


(42) 

chemin  de  fer,  c'est  donc  une  valeur  de  1,100,000,000  de 
francs  qui  sera  mise  en  jeu  par  l'exploitation  totale  du 
banc  situé  au-dessus  de  la  couche  aquifère;  le  banc  sous- 
jaccnt  est  encore  plus  puissant. 

Je  présente  maintenant  les  chiffres  sous  une  autre  forme 
afin  de  jeter  les  premiers  jalons  capables  d'intéresser  l'in- 
dustrie et  l'agriculture  et  de  les  engager  à  étudier  la  ques- 
tion chacune  à  leur  point  de  vue. 

Un  mètre  cube  de  craie  de  Ciply,  pesant  1,500  kilo- 
grammes, perdra  '/i  ou  Vs  ('^  son  poids  par  le  lavage  ou  le 
vannage,  et  il  restera  un  produit  pesant  de  1100  à  1200 
kilogrammes,  contenant  au  minimum  500  kilogrammes  de 
phosphate  à  20cenlimes,  soit  une  valeur  de  60  francs. 

Voyons  les  frais  par  mètre  cube  (1)  : 

Redevance  au  propriétaire.    .    .    .  fr.  2,50 

Extraction 5,00 

Lavage  ou  vannage 1,00 

Pulvérisation 6,00 

Dessiccation 1,00 

Emballage  (sacs) 2,50 

Imprévu,  environ  '/s  en  plus  ....  3,00 

Fr.    21,00 

Il  reste  donc  une  somme  de  59  francs  pour  les  frais  de 
transport  et  les  bénéfices;  c'est  une  large  marge  et  eu 
égard  aux  bases  douteuses  du  compte,  je  crois  que  cette 
somme  est  un  minimum,  les  frais  étant  pris  au  maximum  ; 

(1)  Je  fais  remarquer  que  toutes  ces  estimations  sont  trop  fortes;  je 
doute  qu'il  soit  nécessaire  de  pulvériser  le  produit;  la  pulvérisation  en  est 
très-facile,  car  elle  se  pulvérise  avec  la  plus  grande  facilité  dans  des  mor- 
tiers de  verre  ou  de  porcelaine;  son  état  de  ténuité  est  déjà  très-avancé  et 
n'exigerait,  sans  doute,  qu'une  faible  dépense  dans  des  meules  ordinaires 
horizontales;  j'ai  exagéré  les  dépenses  imprévues. 


(  45  ) 
mais  il  est  à  remarquer  que  le  phosphate  de  chaux  con- 
tenu dans  le  noir  animal  vaut  encore  aujourd'hui  environ 
20  l'rancs  les  60  kilogrammes,  c'est-à-dire  53  centimes 
par  kilogramme  ou  une  valeur  de  99  francs  pour  les  500 
kilogrammes  (De  Herain). 

D'un  autre  côté  les  nodules  pulvérisés  riches  à  40  pour 
cent  de  phosphate  se  vendent  5  francs  pris  sur  place;  la 
valeur  de  la  craie  de  Ciply  lavée  et  pulvérisée  serait  donc 
au  minimum  pris  sur  place  de  500x0,  12o=57  fr.  50, 
ce  qui  laisse  encore  une  marge  industrielle  Irès-conve- 
nable,  même  en  faisant  la  réduction  pour  la  moins  value 
57.oX-7i=28. 

Ces  données  contradictoires  prouvent  surabondamment 
que  le  commerce  des  engrais  est  loin  d'être  régularisé  et 
que  l'agriculteur  doit  être  encore  souvent  victime  de  son 
ignorance,  quand  il  n'est  pas  victime  des  fraudes  qui  par- 
fois atteignent  des  proportions  réellement  désastreuses. 

§  8.  —  De  remploi  agricole  du  phosphate  de  Ciply. 

Il  est  incontestable  que,  dans  l'état  actuel  de  la  récolte 
des  détritus  des  grandes  villes,  la  quantité  de  phosphate 
qui  se  perd  ou  qui  n'est  pas  restitué  au  sol  est  énorme;  le 
sol  ne  peut  donc  pas  le  rendre  sous  forme  de  comestibles 
d'origine  végétale  ou  animale  et  il  y  a  une  perte  constante. 
L'homme  pendant  sa  vie  est  un  dissipateur  de  phosphates 
alcalins  et  alcalino-terreux  et  la  quantité  de  ces  corps 
qu'il  entraîne  dans  la  tombe  ne  constitue  qu'une  fraction 
minime  de  celle  qu'il  a  perdue  pendant  sa  vie.  Bien  qu'il 
soit  très-difficile  de  poser  des  données  positives  à  cet  égard, 
on  reste  dans  des  termes  qui ,  ce  me  semble,  ne  doivent 
pas  être  très-éloignés  de  la  vérité,  en  admettant  qu'un 


(  U) 
homme  perd  par  jour  dans  ses  urines  et  ses  excréments 
une  quantité  de  phosphates  correspondant  au  moins  à 
5  grammes  de  phosphate  tricalcique;  la  vie  moyenne  étant 
de  trente-trois  ans  (environ  12,000  jours),  il  aura  perdu 
60  kilogrammes  de  phosphate,  trente  fois  phis,  par  con- 
séquent, qu'il  ne  s'en  trouve  dans  l'homme  moyen  d'après 
l'estimation  de  M.  Élie  de  Beaumont;  quoi  qu'il  en  soit,  à 
tous  égards  il  faut  chercher  à  profiter  de  tous  les  gisements 
de  phosphates  et  utiliser  les  moyens  les  plus  convenables 
de  les  confier  au  sol  (i). 

Examinons  donc  rapidement  quelques  procédés  en  vue 
de  la  craie  de  Ciply. 

Fabrication  des  superphosphates  par  Vacide  sulfurique. 

La  fabrication  du  produit  auquel  le  commerce  a  donné 
le  nom  de  superphosphate,  est  très-facile  avec  les  produits 
riches  en  phosphates  calcaires;  pour  les  coprolithes  même 
à  40  pour  cent  de  phosphate ,  il  faut  forcer  la  dose  d'acide 
sulfurique  et  mélanger  des  os  ou  des  coprolithes  très-riches 
avec  les  coprolithes  pauvres;  les  produits  obtenus  par  ce 
moyen  sont  plus  riches  et  d'une  dessiccation  plus  facile, 
condition  essentielle  pour  qu'on  puisse  bien  les  répandre 
sur  le  sol,  après  une  fabrication  qui  doit  nécessairement 
être  courante,  comme  on  dit. 

Il  y  aura  donc  des  difficultés  à  vaincre  et  des  frais  d'acide 
sulfurique  en  plus  pour  transformer  la  craie  de  Ciply  en 
superphosphate  ou  en  acide  phosphorique  et  sulfate  de 


(1)  Je  dirai  dans  un  Iravaii  sur  les  cimetières  et  la  crémation,  que  je 
compte  publier  sous  peu  ,  pourquoi  j'ai  été  amené  à  cherclier  à  me  rendre 
compte  de  ces  données  sur  les  pliospliates. 


(«) 

calcium,  comme  je  l'ai  déjà  dit  §  o,  en  proposant  un  pro- 
cédé mixte  qui  me  paraît  capable  de  fournir  un  produit 
très-convenable  pour  les  usages  agricoles. 

En  effet,  en  la  supposant  lavée  et  pure,  la  craie  phos- 
phatée grise  de  Ciply  renferme  : 


67  CO-,  CaO      ....      57.S2CrtO 
29.  48  CO^ 


55.  34  Ca  0 


Il  faudrait  employer  100  kilogrammes  d'acide  sulfu- 
rique  à  50" B*^  et  l'on  obtiendrait,  en  supposant  le  produit 
parfaitement  sec  : 

Ph- 0-^ 15  18  I  19,60  acide  pliospliorique 

3H*0 4.42)  noimal  soluble. 

SO' 79  00\ 

CaO 53  54>  170.  v  sulfate  de  chaux  hydrate. 

2  H2  0 35  66  ) 

189.60 

soit  environ  J90  kilogrammes  de  produit  renfermant 
19,60  d'acide  phosphorique  soluble  P/i^O">oir-0  ou  10,30 
pour  cent  correspondant  à  8.00  pour  cent  d'anhydride 
phosphorique  PA^O-J. 

La  réaction  de  l'acide  sulfurique  sur  les  33  de  phosphate 
se  faisant  d'après  l'équation  : 

P/i2  03,3Ga0  4-3(S03,H^O)  +  6H-0  =  P/*20s3H'0-+-3(SO\CaO, 211^0) 

équation  préférable  à  celle  dans  laquelle  on  suppose  qu'il 
doive  se  produire  du  phosphate  acide  de  chaux  : 

P/(20=,3CaO-H2(S03,H-^0)+4H20=P/i-O^CaO,2H20-t-2(S05,CaO,H'02). 

Dans  le  premier  cas  on  évite  la  rétrogradation  d'une 


(  -^-6  ) 
manière  à  peu  près  complète.  Ce  point  est  important 
puisque  nous  avons  vu  que  l'on  cote  de  J  franc  à  fr.  1  20  c' 
l'acide  phosphorique  soluble  et  que  dans  les  coprolithes  le 
prix  du  kilogramme  de  phosphate  insoluble  renfermant 
environ  46  pour  cent  d'anhydride  phosphorique  peut  des- 
cendre jusque  0^^12o.  Le  phosphate  rétrogradé  aurait-il 
une  valeur  moyenne?  question  indécise  encore. 

Si  j'insiste  sur  ces  détails,  c'est  que  dans  le  commerce 
des  engrais  et  des  superphosphates,  il  arrive  souvent  des 
confusions  et  des  contestations  et  qu'il  y  a  lieu  de  bien 
signaler  ces  données  à  l'agriculture;  elle  devrait  toujours 
bien  stipuler  ce  que  l'on  entend  par  acide  phosphorique 
soluble,  phosphate  acide  de  chaux  ou  phosphate  de  chaux 
rendu  soluble.  Voici  leurs  formules  : 

Équiralenl. 

P/t*  0^  anhydride  phosphorique iiû        ('). 

P/i^  0^  3  H''  0  double  équivalent  de  l'acide  phospho- 
rique normal  (PO  iH'')     190 

l  phosphate  de  chaux  ordinaire    \ 

P/rO^,  ôCaO         I  phosphate  iribasique.     .     .    .  (     510 

'  phosphate  Iricaicique     .     . 

(  superpliosphale    .... 

P/i-03,CrtO,2H^O  ]  phosphate  acide  de  calcium. 

(  phosphate  monocalcique     . 

Ces  nombres  indiquent  qu'en  supposant  que  tous  ces 
produits  soient  rendus  solubles,  leur  valeur  dans  un  en- 
grais donné  sera  représentée  par  des  sommes  qui  sont  en 
raison  inverse  des  équivalents  ou  rapports  de  combinai- 
sons; et  il  y  a  lieu  de  bien  spécifier  ce  que  l'on  achète  au 
vendeur. 


(')  Les  valeurs  admises  pour  les  rapports  de  combinaisons  sont  H  =  l  ; 
C=12;  P/j=3!  ;  0  =  16;  S  =  52;  Crt  =  40. 


(  47  ) 
La  valeur  comme  engrais  réel  étant  la  même  respecti- 
vement pour  142,  196,  310  et  2ôi  kilogrammes  du  pro- 
duit livré,  une  mauvaise  stipulation  dans  le  contrat  expo- 
serait l'acheteur  à  payer  234,  310,  196  francs  au  lieu  de 
1-42  pour  la  même  quantité  de  matière  active  ou  environ 
23,  40,  31  au  lieu  de  14  francs. 

Fabrication  du  phosphate  de  chaux  précipité  au  moyen  de 
l'acide  ch lorhydrique. 

Les  quelques  essais  tentés  pour  voir  si  le  procédé  de 
MM.  E.  Pelouze  et  Dusart  serait  applicable  à  la  craie  grise 
phosphatée  de  Ciply  me  paraissent  mériter  l'attention  à 
cause  du  bas  prix  de  l'acide  chlorhydrique  et  de  l'état  dans 
lequel  le  phos[)hate  insoluble  de  chaux,  dissous  dans  les 
acides  et  précipité  ensuite  devient  facilement  soluble  dans 
l'eau  chargée  d'acide  carbonique. 

Quand  on  traite  un  excès  de  craie  de  Ciply  débarrassée  de 
la  folle  farine  par  l'acide  chlorhydrique  soit  assez  concen- 
tré, soit  étendu,  et  que  l'on  chauffe  le  produit  pendant  quel- 
ques heures  à  feu  nu,  en  maintenant  constante  la  quantité 
d'eau,  ou  en  faisant  passer  un  courant  de  vapeur  d'eau  à  la 
pression  ordinaire,  on  constate  I"  que  l'acide  chlorhydrique 
dégage  CO'^  de  la  matière  non  dissoute;  2"  que  la  dissolu- 
tion acide  encore  filtrée  renferme  une  quantité  notable  de 
phosphate,  ce  qui  se  constate  en  ajoutant  du  sel  ammo- 
niac par  excès  de  précaution  et  en  précipitant  ensuite  par 
l'ammoniaque;  5"  qu'une  partie  de  la  matière  insoluble 
s'est  transformée;  en  effet,  au  lieu  de  grains  denses,  le 
liquide  renferme  un  solide  très-ténu,  restant  longtemps  en 
suspension  et  contenant  beaucoup  de  phosphate  et  peu  de 
carbonate;  une  partie  de  ce  produit  Irès-divisé  se  dissout 


(  48  ) 
dans  l'acide  acétique;  il  contient  en  outre  du  phosphate 
de  fer  insoluble  dans  ce  véhicule. 

La  dissolution  complète  de  la  craie  de  Ciply  dans  l'acide 
chlorhydrique  et  la  neutralisation  du  produit  dissous  par 
un  lait  de  chaux  donnerait  incontestablement  un  excellent 
produit  précipité,  d'un  emploi  très-convenable,  mais  les  fd- 
trations  destinées  à  enlever  le  chlorure  de  calcium  ou  la 
séparation  industrielle  du  produit  offrent  des  difficultés 
réelles  quand  on  opère  sur  de  grandes  masses. 

On  obtiendrait  un  produit  meilleur  encore  en  précipi- 
tant par  l'ammoniaque,  mais  dans  ce  cas  la  matière  pré- 
cipitée offre  aussi  des  propriétés  telles  qu'il  serait  difficile 
d'établir  une  industrie  sur  cette  réaction,  bien  que  l'ammo- 
niaque puisse  constamment  rentrer  en  fabrication. 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  est  bon  qu'on  ait  toujours  présent  à 
l'esprit  que  les  phosphates  précipités  au  sein  de  l'eau  sont 
dans  un  état  des  plus  convenables  et  que  l'on  exagère  peut- 
être  la  valeur  vénale  qu'il  faut  attribuer  à  l'acide  phospho- 
rique  rendu  soluble  sans  l'intervention  des  sels  de  soude 
et  de  potasse,  cette  dernière  base  ayant  une  valeur  consi- 
dérable comme  amendement  ou  engrais. 

Quant  au  procédé  indiqué  au  §  o,  il  serait  à  étudier  in- 
dustriellement. 

Procédé  de  M.  Jean. 

On  sait  que  la  calcination  des  phosphates  alcalino-terreux 
avec  certains  sels  alcalins  en  grand  excès  transforme  une 
partie  de  ceux-ci  en  phosphates  solubles;  le  procédé  ne 
m'a  point  paru  applicable  à  la  craie  phosphatée  grise  de 
Ciply;  le  procédé  de  M.  Jean  qui  calcine  un  équivalent  de 
phosphate  de  chaux  avec  6  équivalents  de  sulfate  de  sodium, 
du  charbon  et  de  la  craie,  ne  me  paraît  pas  susceptible 


(49) 
d'une  application  industrielle  directe  en  vue  de  produire 
un  amendement  commercial  renfermant  du  phosphate  de 
sodium  soluble;  les  superphosphates  seraient  préférés  à 
juste  litre,  ce  me  semble. 

Procédé  de  M.  Boblique. 

Comme  on  se  trouve  à  Ciply  dans  les  conditions  les  plus 
favorables  pour  obtenir  le  combustible  à  bas  prix ,  peut-être 
le  procédé  de  M.  Boblique  (décrit  dans  le  t.  II,  p.  277,  de 
V Enquête  sur  les  engrais  industriels ,  Paris,  imprimerie 
impériale,  1866),  mériterait-il  une  étude  sérieuse.  Ce  pro- 
cédé a  pour  but  de  livrer  des  phosphates  de  soude  et  de 
potasse  en  passant  par  la  fabricatiou  du  phosphure  de  fer. 

Fabrication  de  la  chaux  phosphatée  avec  la  craie  de  Ciply 
et  les  fragments  durs  qu'elle  contient. 

L'agriculture  belge  emploie  énormément  de  chaux, soit 
pour  la  répandre  directement  sur  le  sol,  soit  pour  en  faire 
des  composts,  espèce  de  nitrières  artificielles.  Bien  que  peu 
cohérente,  la  craie  pourrait  être  tranformée  en  chaux 
phosphatée  et  servir  dans  le  même  but  que  les  chaux  ordi- 
naires. 

Il  est  bien  vrai  que  le  phosphate  s'y  trouvera  à  l'état 
insoluble,  mais  on  peut  se  demander  très-sérieusement  s'il 
est  absolument  nécessaire  à  l'agriculture  d'avoir  des  phos- 
phates directement  solubles? 

L'expérience  a  démontré  le  mauvais  effet  des  super- 
phosphates dans  les  terrains  peu  calcaires  ou  sablonneux , 
leur  excellent  effet,  au  contraire,  dans  les  terrains  renfer- 
mant du  carbonate  de  chaux  qui  fait  rétrograder  ou  salure 

2"*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  4 


(50) 
l'excès  d'acide  phosphorique;  c'est  par  double  décomposition 
avec  les  sels  à  base  alcaline  ou  par  sa  dissolution  dans  l'eau 
chargée  d'acide  carbonique  que  les  phosphates  de  chaux 
peuvent  alimenter  la  plante.  La  craie  de  Ciply,  employée 
à  l'état  naturel  ou  pulvérisée,  paraît  donc  constituer  un 
amendement  convenable. 

On  en  obtiendrait  des  effets  meilleurs  en  la  mélangeant 
directement  avec  des  sels  alcalins  et  ammoniacaux;  elle 
serait  utile  dans  les  fumiers  de  ferme  avec  lesquels  on  la 
stralifierait;  elle  servirait  parfaitement  comme  absorbant 
des  urines  dans  les  écuries  et  les  rigoles  qui  conduisent  les 
liquides  au  fumier,  comme  aussi  dans  les  fosses  à  purin, 
voire  même  dans  les  urinoirs  des  stations  de  chemin  de  fer 
et  des  grandes  villes. 

Autant  que  l'on  peut  en  juger  par  l'expérience  agricole 
acquise,  elle  serait  de  la  plus  haute  utilité  soit  à  l'état  na- 
turel, soit  après  lavage  et  pulvérisation  dans  les  bruyères 
récemment  défrichées;  en  un  mot,  elle  paraît  pouvoir  agir 
exactement  comme  agit  la  poudre  d'os  calcinés;  ceux-ci  ne 
sont  que  très-difïicilement  dissous  par  les  acides  faibles  et 
cependant  ils  agissent  efficacement, mais  coûtent  bien  plus 
cher  que  la  craie  de  Ciply;  nous  avons  vu  que  le  rapport 
du  prix  du  phosphate  calcaire  dans  ces  deux  produits  peut 
aller  de  1  à  3  environ. 

L'Académie  pourra  peut-être  trouver  que  je  suis  entré 
dans  trop  de  détails,  mais  je  la  prierai  de  considérer 
l'importance  agricole  de  la  question.  On  ne  saurait  trop 
attirer  l'attention  de  l'agriculture  sur  l'immense  richesse 
que  la  découverte  de  nos  savants  confrères  MM.  Cornet  et 
Briart  met  à  la  disposition  de  nos  campagnes  au  profit  de 
la  richesse  générale.  Quand  nous  voyons  l'agriculteur  si 
souvent  trompé,  il  est  bon  aussi  de  lui  enseigner  à  se  défier 


(  31  ) 

ot  à  juger  les  choses  lui-même.  Nos  stations  agricoles,  dont 
la  première  est  dirigée  par  un  jeune,  savant  et  zélé  chi- 
miste, M.  le  D"^  A.  Petermann,  qui  rend  tant  de  services 
signalés  au  commerce  des  engrais,  sauront  apprécier  et 
faire  expérimenter  les  produits  pouvant  être  livrés  par 
les  industriels  qui  exploiteront  honnêtement  cette  mine  si 
riche,  dont  le  pays  doit  la  découverte  à  nos  savants  con- 
frères. 


APPEiNDICE. 


La  note  précédente  était  presque  entièrement  rédigée 
lors  de  la  séance  de  juin.  J'ai  depuis  fait  parvenir  une 
petite  collection  de  mes  échantillons  moyens  à  M.  le  D'  A. 
Petermann  que  je  cite  dans  ma  note;  le  savant  directeur 
de  la  station  agricole  se  propose  d'en  faire  une  étude  com- 
plète; dans  une  lettre  qu'il  m'a  adressée,  il  me  donne  le 
dosage  du  phosphate  et  du  carbonate  de  chaux  dans 
l'échantillon  moyen  de  craie  grise  débarrassée  de  la  folle 
farine. 

61.20  pour  cent  de  carbonate  de  chaux 
31.01        id.      de  phosphate  de  chaux  Iribasique. 
1.8a        id.      sable,  silice  insoluble. 

La  folle  farine  entraînée  par  l'eau  lui  a  donnée  94.98  pour 
cent  de  carbonate  de  chaux. 

Un  lavage  de  la  craie  naturelle  lui  a  donné  78.9  pour 
cent  de  grains  denses  et  21.1  pour  cent  de  folle  farine. 

Ces  nombres  correspondent  assez  bien  à  ceux  que  j'ai 
donnés  en  moyenne;  j'admets  volontiers  qu'ils  sont  plus 
exacts  que  les  miens.  Il  ajoute  que  sur  huit  analyses  faites 


(52) 

antérieurement  sur  des  échantillons  de  craie  grise  de  Cipl_\ 
il  avait  trouvé  : 

Minimum.     .     .    20,24  pour  cent  de  phosphate  calcaire. 
Maximum     .    .    50,34         ici.  id. 

A  Ja  date  du  26  juin  ce  même  savant  agronome  me  fai( 
parvenir  le  rapport  imprimé  récemment,  mais  dont  le 
manuscrit  avait  été  adressé  depuis  longtemps  déjà  à  M.  le 
jMinistre  de  l'intérieur,  sur  les  Emjrais  et  matières  ferti- 
lisant le  sol,  II*  groupe  de  l'Exposition  universelle  de 
Vienne,  11  rappelle  dans  ce  travail  les  divers  échantillons 
de  phosphate  exposés  à  Vienne  par  le  Département  de 
l'intérieur  et  recueillis  par  notre  confrère  M.  Malaise  dans 
sa  collection  de  terres.  On  y  trouve  signalée  la  découverte 
de  phosphates  par  M.  Dethier  à  Baelen,M.  Dora  Ramelet, 
les  calcaires  phosphatés  de  la  Faille-de-Pnj,  le  calcaire 
à  polypiers  de  M.  Bortier  de  Ghistelles,  le  phospharite  et 
le  calcaire  à  polypiers  de  Ciply,  de  Maestricht  et  de  Folx- 
les-Caves,  un  échantillon  de  phosphate  récemment  trouvé 
à  Orp-le-Grand  par  M.  Malaise, 

Des  analyses  nombreuses  ont  été  faites  par  M.  Peter- 
mann;  il  a  trouvé  22.48  pour  cent  d'anhydride  phospho- 
rique  dans  un  échantillon  provenant  du  poudingue  de  la 
Malogne;  16.57  pour  cent  dans  l'échantillon  recueilli  à 
Orp-le-Grand  par  M.  Malaise  et  19.02;  25.72;  15.17;  17.82 
dans  des  échantillons  de  phosphate  de  Ciply,  soit  en 
moyenne  pour  ces  derniers  19.45  pour  cent  d'acide  phos- 
phorique  anhydre  correspondant  à  42.42  de  phosphate  de 
chaux,  dans  quatre  échantillons  de  phosphate  de  Ciply  qui 
lui  ont  été  adressés  par  M.Laduron.  Je  vois  dans  ce  rapport 
que  MM.  Laduron  et  Roland  ont  pris  un  brevet  à  la  date 
du  8  avril  pour  la  préparation  du  phosphate  granulaire  de 
Ciply. 


(53) 


Note  sur  la  consenaiion  du  virus  vaccin;  par  M.  Melsens, 
membre  de  l'Académie. 

J'ai  prouvé  en  1870  que  la  levure  de  bière  résiste  à  la 
température  produite  par  la  pâle  d'acide  carbonique  et 
d'éther  et  que  le  virus  vaccin  soumis  à  ce  même  froid 
conserve  son  activité  spéciale,  puisque  des  enfants  vaccinés 
par  M.  le  D""  Jacobs  ont  présenté  tous  les  phénomènes  dus 
au  vaccin  naturel  non  refroidi. 

Ma  conviction  que  le  virus  vaccin,  qui  présente  quelque 
analogie  avec  certains  ferments,  capables  de  se  reproduire 
en  dehors  de  l'économie  animale,  pourrait  être  semé  dans 
des  liquides  albuminoïdes  et  se  multiplier  en  dehors  de 
l'économie  comme  sur  les  bras  des  vaccinés,  loin  d'être 
ébranlée,  se  confirme;  mais  les  expériences  sont  délicates 
et  jusqu'à  présent  je  n'oserais  affirmer  que  les  faits  que 
j'ai  observés  et  qui  ont  été  constatés  par  M.  le  D""  Jacobs 
permettent  cette  conclusion  d'une  manière  certaine. 

J'y  reviendrai  plus  tard  si,  comme  je  l'espère,  je  suis 
secondé  dans  cette  recherche  que  j'ai  entamée  depuis  long- 
temps, par  des  médecins  praticiens  et  vaccinateurs. 

Le  but  de  cette  note  consiste  à  rappeler  l'attention  sur 
un  mode  de  conservation  que  j'ai  cru  pouvoir  préconiser 
dès  1871  :  il  consiste  à  recueillir  le  virus  vaccin  dans  des 
tubes  capillaires,  scellés  ensuite  à  la  lampe;  il  me  paraît 
préférable  aux  autres  moyens  employés,  qui  ne  sont  pas 
toujours  certains,  bien  que  l'on  connaisse  des  exemples 
de  conservation  prolongée. 

Je  crois  bien  faire,  le  procédé  étant  peu  connu  et  très- 
peu  appliqué,  de  le  décrire  de  nouveau. 


(  S4  ) 

On  puise  le  vaccin  à  la  manière  ordinaire;  quand  une 
quantité  convenable  a  été  introduite  dans  le  tube  capil- 
laire, on  fait  couler  le  liquide  dans  le  tube  en  lui  donnant 
de  légères  secousses;  on  laisse  ainsi  une  petite  colonne 
d'air  à  l'extrémité  du  tube  par  laquelle  le  vaccin  a  étéintro- 
duit.  Cette  extrémité  est  ensuite  plongée  dans  une  goutte 
d'eau  étalée  sur  une  lame  de  verre;  l'eau  s'introduit  par 
suite  de  l'inclinaison  donnée  au  tube  et  par  capillarité; 
mais  le  vaccin  reste  séparé  de  cette  colonne  d'eau  par  le 
petit  cylindre  d'air  interposé.  On  arrête  l'arrivée  de  l'eau 
lorsque  le  vaccin  se  trouve  poussé  à  quelques  millinîetres 
au  plus  de  l'extrémité  opposée  qui  est  restée  sècbe;  il 
faut  éviter  de  lui  laisser  atteindre  cette  extrémité.  On 
ferme  celle-ci  en  l'introduisant  dans  la  flamme  d'une  petite 
lampe  à  alcool  ou  dans  les  bords  de  la  flamme  d'une  bougie 
ordinaire.  La  fermeture  obtenue  par  la  fusion  du  verre  ne 
laisse  aucun  doute  sur  l'occlusion  parfaite  et  inaltérable; 
la  faible  conductibilité  du  verre  ne  permet  pas  à  la  cha- 
leur de  coaguler  ou  d'altérer  le  vaccin  qui  se  trouve  de 
ce  côté  du  tube. 

On  fait  ensuite  la  même  opération  à  l'extrémité  opposée; 
l'eau  a  lavé  cette  partie  du  tube  et  entraîné  le  vaccin 
déposé  sur  ses  parois;  à  la  première  application  de  la 
chaleur,  une  petite  explosion  due  à  la  vapeur  d'eau  qui  se 
forme  brusquement  achève  le  nettoyage  ;  une  partie  de  l'eau 
étant  chassée,  il  est  facile  de  sceller  cette  extrémité  par  la 
fusion  du  verre;  la  fermeture  est  complète  sans  que  l'on  ait 
à  craindre  d'avoir  pu  provoquer  la  moindre  trace  de  pro- 
duits empyreumaliques. 

Au  commencement  du  mois  de  novembre  i87i, 
M.  E.  Van  Hertsen,  inspecteur  en  chef  de  l'abattoir  de 
Bruxelles,  m'a   remis  du    vaccin  provenant  de  pustules 


-  (  5d  ) 
Irès-belles,  bien  ombiliquées,  d'un  diamètre  de  20  milli- 
mètres environ,  aux  mamelles  et  au  périnée  d'une  génisse 
vaccinée  avec  du  vaccin  récollé  sur  une  autre  génisse. 
Celle-ci  avait  été  vaccinée  avec  du  vaccin  pris  de  pis  à  pis 
à  une  autre  génisse  qui  avait  été  inoculée  par  du  vaccin 
que  M.  le  D"^  Janssens  avait  reçu  d'Italie, 

Le  vaccin  qui  m'a  été  remis  avait  été  recueilli  le  4  no- 
vembre, c'est-à-dire  huit  jours  après  l'inoculation;  il  était 
conservé  depuis  trois  jours  dans  des  tubes  capillaires 
fermés  au  moyen  de  la  cire  à  cacheter. 

Le  7  novembre  suivant,  je  le  transvasai  dans  d'autres 
tubes  capillaires  que  je  scellai  à  la  lampe  comme  il  vient 
d'être  dit;  je  les  ai  conservés  depuis  dans  le  tiroir  d'une 
table  de  mon  cabinet  d'études,  c'est-à-dire  sensiblement  à 
l'abri  de  la  lumière. 

M,  le  D""  L.  Buys,  chargé  par  l'administration  commu- 
nale de  Bruxelles  de  la  direction  du  bureau  des  vaccina- 
tions établi  à  l'hôtel  de  ville, a  fait  usage  de  ce  vaccin  et  a 
obtenu  des  succès  qui  ne  laissent  aucun  doute  sur  l'effet 
du  vaccin  conservé  depuis  deux  ans  et  sept  mois. 

M.  le  D"^  Buys  décrira  au  point  de  vue  médical  toutes 
ses  expériences  avec  les  détails  qu'elles  comportent;  je 
me  contente  de  constater  plusieurs  heureux  résultats  obte- 
nus par  l'emploi  de  ce  vaccin:  ainsi  un  enfant  vacciné  sans 
succès  le  51  mai  avec  du  vaccin  humain  récent  a  été  vacciné 
avec  succès  dans  le  courant  de  juin  avec  du  vaccin  de 
génisse  conservé;  d'un  autre  côté,  je  vois  l'enfant  vacciné 
sur  l'un  de  ses  bras  avec  du  vaccin  humain  et  sur  l'autre 
avec  le  vaccin  de  génisse  conservé,  ne  présenter  de  belles 
pustules  que  sur  le  bras  où  l'on  avait  employé  le  vaccin 
conservé. 

On  a  pris  ensuite  du  vaccin  aux  enfants  qui  avaient 


(36) 
donné  de  belles  pustules  après  la  vaccination  avecle  vaccin 
conservé  et  d'autres  enfants  vaccinés  à  leur  tour  avec 
ce  nouveau  vaccin  l'ont  été  avec  succès. 

Le  25  novembre  1871 ,  j'ai  reçu  de  feu  M.  le  D"^  Tallois 
du  vaccin  d'origine  jennérienne  recueilli  depuis  quelque 
temps  déjà  par  M"''  Thérèse  Marcelis,  surveillante  à  l'hos- 
pice des  enfants  trouvés;  il  était  contenu  dans  quatre  petits 
tubes  capillaires  fermés  à  leurs  extrémités  par  de  la  cire 
à  cacheter;  il  fut  transvasé,  étendu  d'environ  dix  fois  son 
volume  d'eau  et  introduit  dans  cinq  tubes  neufs  qui  furent 
scellés  à  la  lampe.  Deux  de  ces  tubes  ont  été  remis  à  un 
médecin  vaccinateur;  j'attends  les  résultats.  Le  vendredi 
27  juin  187-4,  le  contenu  de  trois  de  ces  tubes  fut  recueilli 
dans  la  concavité  d'une  glace  employée  aux  recherches 
microscopiques.  Une  partie  a  été  utilisée  par  mademoi- 
selle la  surveillante  pour  vacciner  un  enfant  de  7  à  8 
mois. 

M.  le  D"^  Ch.  Delstanche  a  eu  l'obligeance  d'observer  cet 
enfant  et  il  m'annonce  que  le  succès  de  mon  expérience 
lui  semble  désormais  assuré.  Cependant  sur  six  piqûres 
qui  avaient  été  faites,  une  seule  a  donné  une  pustule 
vaccinale  parfaitement  caractérisée;  —  il  continue  les 
expériences  et  en  fera  l'objet  d'une  publication  particu- 
lière (1). 

Ce  qui  restait  de  ce  vaccin  a  été  de  nouveau  enfermé 
dans  un  tube  capillaire,  après  avoir  eu  le  contact  de  l'air 


(1)  J'apprends  depuis  le  dépôt  de  ma  noie  que  le  vaccin  pris  sur  celle 
puslule  unique  a  servi  à  vacciner  avec  succès  un  autre  enfant.  Le  doute 
n'est  donc  plus  possible;  cependant  l'éruption  variolique  semble  subir  un 
léger  retard.  Un  docteur  en  médecine  m'apprend  qu'il  a  observé  le  même 
fait  plusieurs  fois  cette  année;  les  pustules  semblent  subir  un  point  d'arrêt 
dans  leur  évolution  normale. 


(37) 

pendant  15  à  20  minutes;  il  servira  plus  tard  à  d'autres 
expériences. 

Je  crois  devoir  faire  observer  que  la  grande  quantité 
d'eau  qui  a  servi  à  délayer  ce  vaccin  en  1871  a  pu  inter- 
venir et  que  c'est  probablement  à  cet  excès  d'eau  que  l'on 
doit  qu'une  piqûre  sur  six  a  seule  réussi;  l'enfant,  en 
outre,  est  très-jeune;  on  voit  du  reste  des  enfants  être 
vaccinés  de  bras  à  bras  sansprésenler  la  pustule  vaccinale 
très-facile  a  caractériser. 

Je  crois  que  les  expériences  que  je  viens  de  citer  suffi- 
sent pour  confirmer  l'hypothèse  que  j'ai  émise  en  1871  : 
je  me  demandai,  en  effet,  si  le  ^vaccin  conservé  dans  les 
conditions  que  j'indique,  peut  longtemps  encore  après  sa 
récolte  déterminer  la  virulence  ou  Yinfecfion  particulière 
qui  lui  est  propre?  Ne  ressemble-t-il  pas  à  ces  cadavres 
enfermés  dans  des  bières  hermétiques  et  qui,  mis  à  nu 
à  la  suite  d'accidents  survenus  lors  du  déplacement  des 
tombes,  répandent  autour  d'eux  parmi  les  vivants  exposés 
à  leurs  émanations  putrides,  l'infection  particulière  et  la 
maladie  qui  avait  été  la  cause  de  la  mort? 

Ne  puis-je  pas  aujourd'hui  afiSrmer  ce  que  j'exprimais 
en  1871  sous  forme  de  doute  en  disant  dans  ma  note  pré- 
liminaire : 

«  Si  des  expériences  exactes  constataient  la  conserva- 
»  tion  parfaite  de  la  virulence  du  vaccin  naturel  humide 
»  pendant  un  temps  assez  long  dans  des  tubes  fermés  à  la 
»  lampe,  puis  mis  à  l'abri  de  la  chaleur  et  de  la  lumière, 
»  il  paraît  incontestable  qu'ils  rendraient  des  services 
»  signalés  pendant  les  épidémies  de  la  variole.  » 


(  'ÔS  ) 


ISole  sur  les  cliarbons  décolorants ,  leur  production  artifi- 
cielle et  la  révivification  des  noirs  employés  dans  Vin- 
duslrie;  par  M.  Melsens,  membre  de  rAcadémie. 

Dans  mon  travail  sur  l'absorption  des  gaz  par  le  charbon, 
j'ai  été  conduit  à  faire  quelques  expériences  comparatives 
sur  l'absorption  et  la  condensation  des  solides  dissous  et 
entre  autres  des  matières  colorantes,  principalement  en  vue 
des  besoins  de  l'industrie.  Autant  que  je  puis  en  juger 
maintenant  par  l'expérience  acquise  et  par  mes  propres 
recherches,  exécutées  avec  des  chai  bons  presque  chimi- 
quement purs,  ceux-ci  n'agissent  pas  comme  décolorants. 
Le  charbon  d'os  ou  le  charbon  animal  seul  est  employé 
dans  l'industrie,  soit  comme  noir  neuf  ou  comme  noir  révi- 
vifié, ayant  chacun  des  propriétés  plus  ou  moins  tranchées 
comme  absorbants  des  matières  colorantes  ou  des  sels  de 
chaux  et  de  l'excès  de  chaux  des  liquides  sucrés  dans  l'in- 
dustrie du  sucre  pendant  la  fabrication  et  le  raffinage. 

Le  prix  élevé  du  charbon  animal  a  engagé  beaucoup 
d'ingénieurs  à  chercher  les  moyens  de  lui  trouver  des  suc- 
cédanés, mais  jusqu'à  présent  les  essais  tentés  n'ont  pas 
été  couronnés  de  succès  industriels;  la  calcination  de 
mélanges  d'argile ,  de  phosphates  fossiles  avec  des  ma- 
tières organiques,  des  goudrons,  des  brais,  du  sang,  du 
fumier,  etc ont  été  essayés;  je  ne  sache  pas  que  ces  pro- 
duits soient  utilisés  dans  la  grande  industrie. 

Si  l'on  se  demande  pourquoi  le  charbon  animal  possède 
un  pouvoir  absorbant  et  décolorant  si  considérable,  en  ne 
tenant  compte  que  de  ses  propriétés  physiques  bien  en- 
tendu, on  doit  reconnaître  d'abord  qu'il  présente  une  sur- 


(59) 

face  énorme  et  que  le  carbone  proprement  dit  se  trouve 
réparti  intimement  sur  des  matières  minérales  dont  la 
division  est  extrême,  bien  que  formant  une  masse  com- 
pacte. 

Au  point  de  vue  chimique,  nous  voyons  dominer  les 
phosphates  terreux  et  leurs  carbonates, mais  tous  les  noirs 
que  l'on  rencontre  renferment  de  faibles  quantités  de  sul- 
fures, de  la  silice  et  des  composés  de  fer. 

Au  point  de  vue  le  plus  général, on  est  tenté  d'admettre 
que  la  décoloration  est  un  phénomène  physique,  et  ce  n'est 
que  très-exceptionnellement  qu'il  peut  y  avoir  en  même 
temps  phénomène  chimique.  C'est  l'opinion  exprimée  par 
]\I.  E.  Filhol  et  généralement  adoptée. 

Le  charbon  animal  enlevant  les  sels  de  chaux  aux  sirops 
tandis  que  le  charbon  végétal  agit  tout  autrement,  on  peut 
cependant  mettre  en  doute  cette  opinion;  en  effet,  le  sul- 
fure de  calcium  reste-t-il  inactif?  Les  phosphates  basi- 
ques ne  peuvent-ils  pas  se  transformer?  Le  phosphate  de 
magnésie,  par  exemple,  au  contact  des  sels  de  chaux  ou  de 
la  chaux  ne  pourrail-il  pas  être  décomposé,  de  façon  à 
laisser  de  la  magnésie  insoluble  et  du  phosphate  de  chaux 
insoluble;  on  expliquerait  ainsi  le  pouvoir  bien  plus  con- 
sidérable du  noir  neuf  comme  absorbant  de  la  chaux,  que 
celui  du  noir  régénéré  sans  l'intervention  des  sels  de  ma- 
gnésie et  l'on  comprendrait  qu'il  serait  utile  d'ajouter  du 
phosphate  de  magnésie  ou  ses  sels  décomposables  par  la 
chaleur  et  la  vapeur  d'eau  au  charbon  auquel  on  voudrait 
rendre  ses  propriétés  premières  en  le  régénérant. 

Lorsqu'on  étudie  tous  les  charbons  artificiels  qui  ont  été 
proposés  par  MM.  Ziegler,  E.  Rousseau,  Hamelle  et  peut- 
être  d'autres  encore,  on  s'aperçoit  bien  vite  que  des  char- 
bons fabriqués  dans  des  conditions  analogues  ne  réalisent 


(60) 
rien  de  ce  que  le  charbon  animal  doit  être  au  point  de  vue 
physique  ou  au  point  de  vue  chimique. 

Je  crois  que  l'on  s'en  rapproche  davantage  par  les  pro- 
cédés dont  je  dois  me  contenter  d'indiquer  le  principe,  car 
ce  n'est  que  dans  l'industrie  que  des  procédés  pareils  peu- 
vent être  étudiés  convenablement.  Les  expériences  entraî- 
nent du  reste  des  frais  considérables. 

La  première  condition  à  réaliser  me  paraît  d'abord  être 
celle  qui  aurait  pour  but  de  disséminer  la  matière  minérale 
(jui  restera  après  la  calcination  dans  le  sein  même  de  la 
matière  organique,  afin  qu'elle  se  trouve  répartie  dans  celle- 
ci  comme  les  phosphates  sont  répartis  dans  la  matière  des 
os  naturels  ou  au  moins  d'une  façon  qui  s'en  rapproche. 

A  cet  effet,  je  dissous  des  phosphates  calcaires  dans 
l'acide  chlorhydrique  de  manière  à  obtenir  des  dissolutions 
très-concentrées;  ces  dissolutions  servent  à  imprégner  de 
matières  organiques  des  fragments  de  bois  taillés  normale- 
ment à  la  tige,  de  la  sciure,  du  vieux  tan  épuisé,  des  tourbes, 
des  lignites,  des  bois  à  peine  carbonisés  et  même  des  char- 
bons ou  leur  poussière  et  les  noirs  de  fumée  communs. 
Quand  ces  corps  sont  saturés  en  les  maintenant  à  chaud 
dans  ces  dissolutions,  on  les  laisse  égoutter  pour  enlever 
l'excès  de  liquide  et  on  les  calcine  ensuite;  l'excès  d'acide 
est  chassé  et  d'après  la  nature  des  coprolithes  ou  des  phos- 
phori  tes  employés  on  obtient  un  charbon  plus  ou  moins  riche 
en  phosphate  neutre  de  chaux  et  en  chlorure  de  calcium; 
lecharbonlavéàreau,récalcinéensuite,  est  décolorant;  par- 
fois il  m'a  paru  l'emporter  sur  le  noir  crivoiredu  commerce; 
j'ai  préparé  de  cette  façon  de  petits  cubes  de  charbon  de 
bois  qui,  à  poids  égal,  avaient  un  pouvoir  décolorant  supé- 
rieur au  noir  animal  du  commerce  de  première  qualité; 
mais  au  point  de  vue  des  applications  il  se  présente  ici  une 


(  «1  ) 

diftïcullé  industrielle;  en  effet,  le  noir  animal  du  commerce 
est  très-dense;  mes  charbons,  au  contraire,  même  ceux  qui 
contiennent  au  delà  de  40  pour  cent  de  cendres,  sont  légers 
et  exigeraient  des  filtres  d'une  capacité  très-considérable 
comparativement  à  ceux  que  l'industrie  emploie  actuelle- 
ment; une  partie  de  ces  charbons  surnage  les  dissolutions 
plus  ou  moins  étendues  de  mélasse  pendant  un  temps 
assez  long  et  même  après  l'ébullition  des  liquides;  on  peut 
cependant  en  obtenir  qui  n'offrent  pas  cette  propriété  à  un 
aussi  haut  degré  en  s'arrangeant  de  façon  à  faire  dominer 
la  matière  minérale.  A  cet  effet  les  petits  blocs  de  bois  ou 
la  sciure  passaient  plusieurs  fois  dans  la  dissolution  de 
phosphate,  on  les  desséchait  jusqu'à  commencement  de 
décomposition  du  bois,  on  les  lavait  pour  enlever  le  chlo- 
rure de  calcium  et  l'on  recommençait  le  traitement. 

Les  eaux  acides  provenant  de  la  fabrication  de  la  géla- 
tine des  os  peuvent  servir  et  apportent  avec  elles  une  cer- 
taine quantité  de  matière  organique  qui  se  décompose  au 
sein  des  cellules  végétales  si  l'on  opère  sur  des  fragments 
de  bois  ou  des  sciures,  par  exemple;  ces  matières  orga- 
niques fusibles  avant  leur  décomposition  par  le  feu  ainsi 
que  d'autres,  telles  que  des  mélasses  communes,  glucose, 
dextrine,que  l'on  pourrait  ajouter  aux  dissolutions  de  phos- 
phates minéraux  donnent  des  charbons  boursouflés  et  col- 
lants et  produisent  plus  de  cohésion  bien  qu'employées  en 
faible  quantité;  des  goudrons,  des  résines  ou  de  la  houille 
interposée  ne  m'ont  en  général  pas  donné  de  bons  résul- 
tats. 

J'ai  parfois  mélangé  à  des  sciures  imprégnées  de  phos- 
phate des  argiles  et  calciné  ce  mélange  sans  observer  que 
le  produit  obtenu  fût  plus  décolorant  que  celui  qui  était 
préparé  sans  cette  addition. 


(  6^2  ) 

J'espérais  obtenir  un  produit  meilleur  en  employant  des 
dissolutions  de  sulfate  d'alumine  que  je  calcinais  plus  ou 
moins  fortement  avec  les  bois  ou  les  charbons,  mais  les 
résultats  en  général  ont  été  négatifs,  c'est-à-dire  que  des 
charbons  ou  des  bois  imprégnés  de  sulfate  d'alumine  et 
calcinés  jusqu'à  décomposition  complète  de  ce  sel  ne  m'ont 
jamais  fourni  des  charbons  décolorants  de  bonne  qualité; 
la  matière  minérale  active  paraît  donc  bien  être  le  phos- 
phate calcaire. 

Il  ne  faudrait  cependant  pas  conclure  que  certains  sels 
décomposables  à  une  très-haute  température  ne  puissent 
absolument  pas  donner  des  charbons  décolorants.  En  effet, 
j'ai  fait  absorber  par  de  petits  cubes  de  bois  léger  (sapin, 
bois  blanc,  etc.)  du  sulfate  de  magnésie  en  excès;  les  blocs 
desséchés  ont  été  introduits  dans  un  grand  creuset;  calcinés 
pendant  longtemps  à  une  haute  température,  ils  ont  fourni 
un  charbon  renfermant  environ  50  pour  cent  de  cendres  ma- 
gnésienne; il  était  plus  énergiquement  décolorant  que  plu- 
sieurs noirs  en  grains  de  première  qualité,  que  ces  mêmes 
noirs  réduits  en  poudre  et  que  le  noir  d'ivoire  le  plus  fin. 

Un  habile  et  savant  ingénieur  qui  s'occupe  spéciale- 
ment de  la  question  des  sucres,  assistait  à  l'essai  de  ce 
charbon  et  l'estimait  comme  étant  de  beaucoup  supérieur 
à  tous  les  autres  charbons  essayés  en  sa  présence. 

La  même  expérience  répétée  en  employant  du  charbon 
de  bois  ou  de  la  braise  au  lieu  du  bois  en  nature ,  ne  m'a 
donné  que  de  mauvais  résultats  dans  plusieurs  expé- 
riences. 

Le  chlorure  de  magnésium,  sel  si  facilement  décompo- 
sable  par  la  chaleur  en  présence  de  vapeur  d'eau ,  donne- 
rait sans  doute  les  mêmes  résultats  et  pourrait  être  utilisé 
au  même  titre;  je  m'en  suis  servi  en  l'ajoutant  à  la  dissolu- 


(  63  ) 
lion  de  coprolithes,  et  préparant  ainsi  du  charbon  artificiel, 
je  n'ai  pas  constaté  de  grands  avantages  sur  le  procédé  qui 
consiste  à  employer  la  dissolution  de  coprolithe  seule;  par- 
fois même  j'ai  obtenu  des  charbons  moins  décolorants  que 
par  le  procédé  plus  simple. 

Il  arriveque,  tout  en  suivant  très-exactement  un  procédé 
ayant  donné  d'excellent  charbon,  on  obtient  un  mauvais 
charbon  ;  je  n'ai  trouvé  d'autre  cause  de  non-réussite  que 
dans  la  conduite  du  feu  pendant  la  calcination;  il  faut  donc 
prendre  toutes  les  précautions  employées  dans  l'industrie 
de  la  fabrication  et  de  la  révivificalion  du  noir  animal. 

Les  charbons  artificiels  en  grains  sont  susceptibles  de  se 
révivifier  à  la  façon  du  noir  animal ,  mais  ils  sont  beaucoup 
plus  friables  que  les  grains  du  commerce;  leur  révivifica- 
tion  m'a  paru  se  faire  très-facilement  en  les  traitant  de  nou- 
veau par  les  dissolutions  de  coprolithes  et  en  les  calcinant, 
mais  comme  les  dissolutions  contenaient  en  général  un  peu 
de  matière  organique,  j'en  ajoutais  toujours  lors  que  je  vou- 
lais révivifier;  à  part  ce  petit  détail  pour  la  révivificalion, 
on  observera,  du  reste,  que  les  circonstances  dans  les- 
quelles je  me  place  sont  précisément  celles  dans  lesquelles 
se  plaçaient  MM.  Leplay  et  Cuisinier  [Répertoire  de  chimie 
appliquée,  t.  IV.  p.  71,  186!2)  qui  ont  fait  agir  le  biphos- 
phate  de  chaux  pour  rendre  au  charbon  animal  épuisé  ses 
propriétés  décolorantes  et  absorbantes. 

Dans  l'industrie  du  sucre  on  tient  beaucoup  à  posséder 
des  charbons  absorbant  les  sels  de  chaux  ou  la  chaux;  on 
comprend  que  des  charbons  renfermant  à  volonté  du  phos- 
phate mono-calcique  ou  bicalcique  agisse  efficacement  dans 
ce  but;  cependant  j'ai  constaté  un  fait  qui  paraît  assez 
curieux  soit  au  point  de  vue  chimique, soit  au  point  de  vue 
physique,  c'est-à-dire  des  phénomènes  de  condensation 


(64) 
d'une  matière  en  dissolution  sur  un  solide  suspendu  dans 
l'eau, 

En  effet,  les  divers  phosphates  de  chaux  et  de  magnésie 
obtenus  par  précipitation  et  même  chauffés  ensuite,  y  com- 
pris le  phosphate  tricalcique  préparé  par  l'acétate  ou  le 
chlorure  de  calcium  ammoniacal  et  le  phosphate  de  soude, 
enlèvent  la  chaux  à  l'eau  de  chaux;  l'expérience  marche 
mieux  à  chaud  qu'à  froid,  bien  entendu  qu'il  faut  dans  ce 
cas  tenir  compte  de  la  différence  de  solubilité  de  l'hydrate 
de  calcium,  plus  soluble  à  froid  qu'à  chaud.  Le  phosphate 
tricalcique  se  comporte  comme  s'il  existait  des  phosphates 
capables  de  contenir  au  delà  des  trois  équivalents  de  cal- 
cium qui  existent  dans  le  phosphate  neutre  de  calcium  et 
comme  s'il  existait  des  sels  basiques  renfermant  plus  de 
5Ca0pourP/i2  0''. 


CONCLUSION. 


Il  résulte  des  quelques  expériences,  que  je  décris  som- 
mairement comme  simple  essai  de  laboratoire,  qu'il  est 
possible  de  fabriquer  des  charbons  décolorants  en  cher- 
chant à  se  rapprocher  de  la  constitution  physique  et  de  la 
composition  chimique  du  charbon  fabriqué  au  moyen  des 
os  et  que,  à  poids  égal,  ces  charbons  peuvent  être  aussi 
absorbants  et  aussi  décolorants  que  les  noirs  d'os  de  pre- 
mière qualité. 

C'est  à  l'industrie  qu'il  appartient  de  résoudre  le  problème 
industriel,  qui  ne  laisse  pas  que  d'offrir  certaines  difficultés; 
elles  ne  me  paraissent  pas  insurmontables. 


(6o) 


Quelques   nouveaux  théorèmes  sur  les  cubiques  gauches; 
par  M.  F.  Folie,  correspondant  de  l'Académie. 

Dans  le  Bulletin  du  mois  de  juin  dernier  nous  avons 
indiqué,  en  termes  généraux,  de  quelle  manière  il  serait 
possible  d'étendre  à  de  certaines  courbes  gauches  les  théo- 
rèmes pascaliens  que  nous  avons  découverts  pour  les  cour- 
bes planes  jusqu'au  cinquième  ordre;  et  nous  avons  l'ondé 
cette  extension  sur  la  propriété,  dont  jouissent  les  démon- 
strations que  nous  avons  données  de  ces  théorèmes ,  de 
ne  s'appuyer  sur  aucune  relation  métrique. 

Tous  les  théorèmes  sur  les  courbes  planes,  qui  se 
démontreront  d'une  façon  analogue,  pourront  naturelle- 
ment s'étendre  de  même  à  des  courbes  gauches. 

C'est  ainsi,  par  exemple,  que  nous  allons  énoncer,  pour 
les  cubiques  gauches,  les  théorèmes  que  nous  avons  démon- 
trés pour  les  cubiques  planes,  à  l'exception  de  ceux  qui 
renferment  des  relations  métriques  :  non  que  celles-ci 
n'existent  pas  pour  ces  premières  courbes  (1);  mais  elles  sor- 
tiraient du  cercle  des  applications  que  nous  avons  ici  en  vue. 

Les  courbes  dont  nous  allons  nous  occuper  seront  tou- 
jours supposées  tracées  sur  un  même  hyperboloïde. 

Deux  coniques  tracées  sur  cette  surface  ne  peuvent  évi- 
demment se  couper  en  j^lus  de  deux  points;  mais  il  y  existe 
des  coniques  particulières  qui  ne  se  coupent  qu'en  un  seul 
point,  et  qui  sont  caractérisées  par  cette  propriété  d'être 

(1)  M.  P.  Serret  leur  a  étendu,  clans  sa  Géométrie  de  direction,  le  théo- 
rème de  Desargues  auquel  nous  étions  également  arrivé  de  notre  eôt«;  et 
nous  avons  complété  cette  extension  en  transportant  aux  courbes  gaucbes 
du  troisième  et  du  quatrième  ordre  le  théorème  de  Desargues-Sturm. 
2""=  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  5 


(66  ) 
complètement  déterminées  par  deux  de  leurs  points  :  nous 
les  appellerons  provisoirement,  à  cause  des  analogies  que 
leurs  propriétés  présentent,  sur  la  surface  de  l'hyperbo- 
loïde,  avec  celles  de  la  droitesur  la  surface  plane,  coniques 
du  premier  ordre;  les  noms  de  sécante,  ou  de  transver- 
sale, ou  de  côté,  seront  pris  comme  synonymes  de  ce  der- 
nier; et  par  quadrilatère  nous  entendrons  un  polygone 
curviligne  formé  de  quatre  de  ces  côtés. 

Une  conique  du  premier  ordre  et  une  cubique  gauche 
tracées  sur  un  même  hyperboloïde  se  coupent  en  trois 
points,  dont  deux  peuvent  être  imaginaires. 

Ces  préliminaires  exposés,  il  nous  suffira  de  transcrire 
presque  littéralement  les  théorèmes  que  nous  avons  démon- 
trés relativement  aux  cubiques  planes  (1)  pour  avoir  autant 
de  théorèmes  nouveaux  sur  les  cubiques  gauches. 

Le  théorème  fondamental  s'énoncera  : 

Étant  données,  sur  la  surface  dun  hyperboloïde ,  deux 
sécantes  qui  coupent  chacune  en  trois  points  une  cubique 
gauche,  si  l'on  joint  les  points  d' intersection  de  la  première 
à  ceux  de  la  seconde  par  trois  transversales  qui  ne  partent 
pas  d'un  même  point  de  la  cubique,  ces  transversales  cou- 
peront celle-ci  en  trois  points  qui  seront  situés  sur  une 
conique  du  premier  ordre. 

Il  est  superflu,  pensons-nous,  d'énoncer  également  les 
cas  particuliers  auxquels  ce  théorème  donne  lieu. 

L'extension  que  nous  avons  faite  du  théorème  de  Pascal 
aux  cubiques  planes,  transportée  aux  cubiques  gauches, 
donnera  lieu  à  ce  théorème  : 


(1)  Fondements  d'une  géométrie  supérieure  cartésienne.  (Extrait  du 
i. XXXIX  des  Mémoires  de  l'Académie  rottale  de  Belgique, pp.  20  à  23.) 


(  67) 
Dans  un  système  de  deux  quadrilatères  conjugués   in- 
scrits ànne  cubique  fjauche  sur  la  surface  d'un  hyperboloïde^ 
les  côtés  opposés  se  coupent  en  quatre  points  situés  sur  une 
conique  du  premier  ordre. 

Nous  nous  proposons,  dans  une  prochaine  communica- 
tion, d'étendre  également  aux  courbes  gauches  nos  théo- 
rèmes sur  les  courbes  planes  d'un  ordre  supérieur  au 
troisième. 


Sur  la  généralisation  de  la  formule  de  Binety   par 
M.  J.  De  Tilly,  correspondant  de  l'Académie. 

Le  Bulletin  du  mois  d'avril  1874  contient  (')  une  récla- 
mation de  priorité,  adressée  à  l'Académie  par  M.  Genocchi 
et  ainsi  conçue  : 

«  Je  ferai  remarquer  que  les  séries  semblables  à  celle  de 
Binet,  données  par  M.  Gilbert  dans  le  §  IV  de  son 
Mémoire  ("),  avaient  déjà  été  publiées  par  moi,  dans  deux 
écrits  qui  ont  paru,  en  1855  et  1839,  dans  les  Annales  de 
M.  Tortolini  (Intorno  ad  alcune  formole  sommatorie.  — 
Série  ordinate  per  fattoriale  inversi),  avec  quelques  autres 
résultats  qui  ne  sont  pas  dépourvus  d'intérêt.  » 

Ayant  été  l'un  des  commissaires  chargés  par  l'Académie 
d'examiner  le  Mémoire  auquel  s'applique  la  réclamalion  de 
M.  Genocchi,  j'ai  voulu  me  rendre  compte  de  la  portée 
de  cette  réclamation  et  je  crois  avoir  reconnu  que  celle-ci, 


C)  Tome  XXXVII,  page  351. 

(*')  Recherches  sur  le  développement   de  la  fonclion  r,t.  XLIdes 
Mémoires  de  l'Académie. 


(68) 

bien  que  fondée  en  partie,  est  conçue  en  des  termes  trop 
généraux  et  trop  absolus. 

En  effet,  les  deux  Mémoires  du  savant  professeur  de 
Turin,  d'ailleurs  très-intéressants,  pleins  d'érudition  et  de 
recherches  délicates  ingénieusement  conduites,  ne  con- 
tiennent pas /oî<^es  les  formules  du  §  IV  du  Mémoire  de 
M.  Gilbert,  comme  cela  semblerait  résulter  du  texte  de  la 
réclamation.  Au  contraire,  l'une  des  formules  de  ce  der- 
nier Mémoire  est  plus  générale  que  toutes  celles  qui  sont 
données  par  M.  Genocchi,  pour  le  développement  de 
I.  r  (y.)  ou  de  cT  (y)  (*),  dans  les  deux  écrits  signalés  par  le 
géomètre  italien,  et  les  renferme  comme  cas  particuliers. 
La  formule  en  question  est  la  suivante  (")  : 


■w=    5 


-  y  — 


-k){^- 


(3  —  x)  [-  —  X  jdx 
-]/('s-.)(.3. 


A)(r 


P) 


X 


r 


\P  —  JC)  1- 


x\((x 


^ • 

l^„  [y.  -+-  [î  -+-  A)  ((Ci  -H  (3  -+-  A  H-  ;^)  •••  (pi  -+-  p  -4-  A-  -+-  np) 

'  (3  —  x)  (p  -+-  p  —  x)  ...  ([3  -+-  np  —  x)  (l 


fx.  -^  k  -\-  X 
OÙ  /)  est  un  entier  quelconque. 


xjdx, 


(*)   ^(,u)=l.r(A')  -il.2r-(,u-  1)1.  M 
('•)  Page  25  du  Mémoire  de  M.  Gilbert. 


(69  ) 
Si  l'on  y  faisait  :  ;>  =  l ,  (3  =  0,  elle  donnerait  la  série 
de  Binet,  dont  il  a  été  question  dans  les  tomes  XX  et  XXI 
{V'  série);  XXXV  et  XXXVI  (2-^  série)  des  Bulletins.  Si  l'on 
fait  y;  =  i,  en  laissant  (3  indéterminé,  elle  devient  (*)  : 

'=^C")= — -  r  {p-x)[--x]dx + \ , 

X     /"(S  — x)(/3  +  l— x)fi-xjrfx^-... 


n  [u.  -t-  p)  (^  -H  S  -f-  1)  •..  [u.  -t-  s  -+-  n  —  \) 
X  J^[p  -  X)  (3  +  1  -  x)  ...  (3  +  «  -  1  -  x)fi  -  x)r/. 

-i-5 

A=o  (/"  -H  S  -t-  A;)  [u.  -4-  S  -f-  A:  H-  I)  ...  (a  -+-  |5  -t-  A;  -+-  n) 


/ 


\S  —  x)  (S  -H  I  —  x) ...  (5  -+-  «  _  x)  /l 


X      /     -^ — — — -[-  —  x]dx; 

J  (j.  -\-  k  ■\-  X  \2         / 

0 

et  cette  dernière  formule  me  paraît  être  la  plus  générale 
qu'il  soit  possible  de  déduire  des  deux  Mémoires  insérés 
dans  les  Annales  de  M.  Tortolini,  et  en  particulier  des 
résultats  trouvés  aux  §§  2  et  i  du  Mémoire  de  I8oo  et  au 
§  4  de  celui  de  1839,  par  de  simples  changements  de  no- 
tations ou  développements  de  calculs  indiqués,  sans  trans- 
formations nouvelles. 

Ainsi  l'une  au  moins  des  séries  trouvées  par  M,  Gilbert, 
et  la  plus  générale,  lui  appartient  en  propre  et  échappe  à 
la  réclamation  de  priorité,  laquelle  est  fondée  en  ce  qui 

{*l  Page  26  du  mémoire  de  M.  Gilbert. 


(70  ) 
concerne  les  autres  séries  du  §  IV,  répondant  à  l'hypo- 
thèse p  =  i. 

J'ajoute  que  la  méthode  suivie  par  M.  Gilbert  diffère 
essentiellement  de  celle  de  M.  Genocchi,  ce  qui,  du  reste, 
n'est  point  contesté. 


Sur  quelques   roches  porphyriques  de  Belgique;  par 
M.  G.  Malaise,  membre  de  l'Académie. 

Mes  recherches  sur  les  terrains  anciens  de  l'Ardenne  et 
du  Brabant  m'ayant  mis  à  même  de  faire  quelques  obser- 
vations sur  les  roches  porphyriques,  j'ai  l'honneur  de  les 
communiquer  à  la  Classe  des  sciences. 

Les  roches  porphyriques  de  Belgique  que  Ton  considère 
comme  plutoniennes  ou  métamorphiques  se  trouvent  dans 
le  massif  de  Stavelot  et  dans  celui  du  Brabant  et  de  Sambre- 
et-Meuse.  Une  seule  eurite  a  été  observée  dans  le  terrain 
dévonien  inférieur,  à  Piroy  (Malonne). 

L'époque  précise  de  leur  apparition  et  difficile  à  déter- 
miner. On  sait  seulement  qu'elles  sont  postérieures  aux 
terrainscambrien  et  silurien,  dont  elles  traversent  plusieurs 
assises,  et  antérieures  au  terrain  dévonien  dans  lequel 
elles  ne  pénètrent  pas,  à  une  seule  exception  près,  l'eurite 
de  Piroy  (Malonne).  Elles  sont  tout  au  moins  antérieures 
au  poudingue  de  Burnot  pour  le  Brabant,  Dumont  ayant 
trouvé  parmi  les  cailloux  de  ce  poudingue  des  fragments 
d'eurite  et  de  chlorophyre  (1)  dont  l'identité  avec  les  roches 


(1)  A.  Dumont,  Mémoire  sur  les  terrains  ardennais  et  rhénan.  (Mé- 
moires de  l'Académie  royale  de  Belgique,!.  XX,  1"  partie,  1847,  et 
t.  XXII,  "2'  partie,  18iS.)  2"  partie,  p.  517. 


(  71  ) 

en  place  lui  a  paru  assez  bien  établie  pour  en  conclure 
que  ces  derniers  sont  antérieurs  au  poudingue.  On  n'a 
jusqu'à  présent  trouvé,  à  notre  connaissance,  aucun  frag- 
ment de  roche  plutonienne  dans  le  poudingue  de  Fépin, 
à  moins  toutefois  que  l'on  n'admette  que  ce  poudingue  et 
les  arkoses  qui  lui  sont  supérieures  et  qui  ont  générale- 
ment comme  gangue  des  substances  feldspathiques  ne  soient 
des  débris  de  roches  plutoniennes  injectées  dans  les  terrains 
cambrien  et  silurien  ;  il  est  donc  à  supposer  que  les  masses 
éruptives  leur  sont  antérieures.  Leur  âge  d'apparition  ne 
peut  être  fixé  que  d'une  manière  approximative;  et  en  se 
basant  sur  cette  considération  que  les  éruptions  des  roches 
sont  en  rapport  avec  les  mouvements  du  sol ,  on  serait 
porté  à  prendre  comme  date  d'apparition  de  ces  roches 
éruptives  en  Ardenne,  l'époque  de  la  formation  du  pou- 
dingue de  Fépin  qui  repose  en  stratification  discordante 
sur  le  terrain  cambrien.  Il  n'est  pas  non  plus  prouvé  que 
les  roches  porphyriques  de  l'Ardenne,  du  Brabant  et  de 
Sambre-et-Meuse  soient  arrivées  à  la  même  époque. 

Ces  roches  ont  attiré,  à  différentes  reprises,  l'attention 
des  géologues.  Dumont  a  donné  de  nombreux  détails  sur 
leurs  caractères  et  leurs  gisements  dans  son  mémoire  sur 
les  terrains  ardennais  et  rhénan  (1),  détails  basés  sur 
ses  observations  et  sur  celles  faites  antérieurement  par 
MM.  Cauchy,  C.  Davreux,  d'Omalius  d'Halioy,  Drapiez, 
Galeotti,  H.  Lambotte,  Sauvage  et  Buvignier,  etc.,  et  par 
la  Société  géologique  de  France. 

Depuis  le  remarquable  travail  de  Dumont  (2),  quelques 
observations  ont  été  faites,  au  sujet  des  roches  porphyri- 


(1)  A.  Dumont,  Mémoire  cilé,  l'*  et  2«  parties. 
(i)  Mémoire  cité. 


(72) 

qoos  par  MM.  Delesse(l),  G.  Dewalque  (2),  J.  Gosselet  (5) 
et  nous-même  (4).  Ces  diverses  roches,  qui  avaient  été  dé- 
crites par  Diimont  (5)  sous  les  noms  de  eurite  simple, 
quartzeuse,  et  phylladeuse;  albite  chlorilifère  et  phylladi- 
fère;  hyalophyre;  ehlorophyre  massif  et  schistoïde;  por- 
phyre schisloïde;  diorite;  hypersthénite,  ont  été  groupées 
par  M.  G.  Dewalque  (6)  en  1.  Ecrites,  II.  Orthophyres, 
lll.  Oligophyres  comprenant  l'hypersthénite,  le  ehloro- 
phyre et  le  diorite.  IV.  Porphyres  schistoïdes  renfermant: 
!e  porphyre  schistoïde,  le  ehlorophyre  schistoïde,  l'albite 
phylladifère  et  l'eurite  phylladeuse.  Nous  avons  suivi  la 
marche  suivante  dans  notre  Manuel  de  minéralogie  pra- 
tique (7)  :  Roches  FELDSPATHiQUES  SIMPLES,  eurite.  Roches 
FELDSPATHiQUEs  COMPOSÉES:  hypcrsthénilc,  ehlorophyre, 
diorite;  porphyres  schistoïdes  Comprenant  le  porphyre  schis- 
toïde, le  ehlorophyre  schistoïde,  l'albite  phylladifère  et 
l'eurite  phylladeuse.  M.  J.  Gosselet  (8)  les  a  désignés  sous 
les  noms  de  Porphyres  présentant  deux  types,  le  porphyre 


(1)  Sur  le  porphyre  de  Lessines.  Lettre  à  M.  d'Omalius.  (Bulletins  de 
l'Académie  royale  de  Belgique,  l.  XVI,  1",  p.  528.) 

(2)  Société  géologique  de  France.  Réunion  extraordinaire  à  Liège, 
en  186Ô. 

(5)  Mémoire  sur  les  terrains  primaires  de  la  Belgique,  etc.  (Bulletins 
de  la  Société  géologique  de  France,  etc. 

(4)  C.  Malaise,  Mémoire  sur  le  terrain  silurien  du  centre  de  la  Bel- 
gique. (Mé^ioires  couronnés,  etc.,  de  l'Académie  royale  de  Belgique, 
î.XXXVlI,pp.  70et71.) 

(o)  Mémoire  cité. 

(6)  Prodrome  d'une  description  géologique  de  la  Belgique.  Liège, 
^868; pp. 295  à  ô02. 

(7)  Mons,  1875;  p.  253  et  pp.  264  à  268 

(8)  Esquisse  géologique  du  département  du  Nord  et  des  contrées  voi- 
sines, pp.  59  et  60.  (Bull,  scientif,  du  départ,  du  Nord, etc.,  3»  année. 
Lille;  1871.) 


(75) 

quartzifère  de  Deville  et  l'eurile  de  Gerabloux  et  les  Por- 
PHYRiTEs  se  rapportant  à  trois  types  que  l'on  trouve  à 
Quenast  [chlorophyre  ^  Dumont),  à  Laifour  [diorite,  Du- 
monl)  et  à  Hozémont  {hijpersthénite,  Dumont). 

Les  roches  dont  nous  allons  nous  occuper  peuvent  se 
diviser  en  deux  groupes  :  i°  les  eurites  d'apparence  simple; 
2°  les  roches  porphyriques  composées  que  l'on  considère 
comme  ayant  apparu  à  une  même  époque,  mais  différentes 
par  la  nature  des  éléments  et  le  plus  ou  moins  de  lenteur 
du  refroidissement. 

Les  tranchées  de  chemin  de  fer  et  celles  nécessitées 
par  certaines  routes  nous  ont  permis  de  reconnaître  quel- 
ques faits  nouveaux  sous  le  rapport  des  gisements.  Toute- 
fois ceux  que  l'on  a  découverts  depuis  Dumont  ne  sont  pas 
nombreux.  Citons  : 

Le  diorite  près  de  Stavelot;  l'hypersthénite  entre  Les 
Tombes  et  l'abbaye  de  Grand-Pré  (Mozet);  des  traces 
d'eurite  à  Ottignies,  etc. 

Dumont  a  signalé  l'eurite  simple,  pailletée  et  quartzeuse 
(hyalophyre  pailletée,  Dumont),  dans  le  massif  de  Stavelot, 
à  Spa,  au  bout  de  la  promenade  de  Sept-Heures.  Elle  y 
constitue  un  filon  qui  se  divise  en  deux  branches  à  la 
partie  supérieure,  dont  l'une,  injectée  dans  le  joint  de 
stratification,  s'étend  vers  la  surface  du  sol,  et  dont  l'autre 
remplit  une  fissure  et  se  termine  en  coin.  Ce  filon  se  pro- 
longe suivant  une  direction  parallèle  à  la  direction  feuil- 
letée du  phyllade  et  se  retrouve  près  du  cimetière  de  Spa, 
où  il  consiste  principalement  en  orthophyre  quartzifère, 
dans  la  promenade  sur  la  colline  au  NE.  de  Spa,  entre  Spa 
et  Arbespine  (1). 

(1)  A.  Dumont,  Mémoire  cité,  1"  partie,  pp.  134  et  133. 


(74) 

La  variété  nommée  par  Dumont  liyalophyre  peut  être 
considérée  comme  un  orthophyre  quartzifère;  elle  est 
composée  d'une  pâte  euritique  contenant  des  cristaux  de 
feldspath  et  de  quartz  et  l'on  y  trouve  fréquemment  des 
paillettes  noirâtres  hexagonales  (chlorite?)  et  de  petits 
points  noirâtres  (amphibole?). 

Les  nouvelles  promenades  tracées  aux  environs  de  Spa 
nous  ont  permis  de  constater  les  mêmes  roches  dans 
quelques  nouveaux  points.  Nous  avons  trouvé  de  Teurite 
en  deux  endroits  au  NO.  de  la  ville,  dans  la  promenade  des 
Français,  près  d'un  petit  abri.  Elle  est  pailletée  et  plus  ou 
moins  fissurée  ;  la  plupart  de  ces  joints  inclinent  N.  20°  0. 
Dans  le  point  le  plus  rapproché  de  la  promenade  de  Sept- 
Heures,  elle  est  plus  pailletée,  tachetée  de  points  noirs  et 
renferme  de  petits  cubes  de  pyrites,  en  partie  transformés 
en  limonile  épigène. 

Nous  avons  rencontré  à  Spa,  dans  l'eurite,  des  frag- 
ments de  phyllades  et  des  morceaux  de  quartz  provenant 
de  filons,  et  qui  indiquent  que  cette  eurite  est  postérieure 
à  ces  phyllades  et  aux  filons  quartzeux  qu'ils  contiennent. 

On  observe  l'eurite  aux  environs  de  Nivelles  :  1°  sur 
la  rive  gauche  d'un  ruisseau  en  deux  points  dans  une 
prairie  entre  le  moulin  de  Monslreux  et  le  hameau  d'Ar- 
denelle,  dans  celui  le  plus  à  l'E.  l'eurite  est  en  couches 
inclinées  au  SO.  de  80";  2"  au  NE.  de  ce  point,  près  du 
chemin  de  Bornival  à  Nivelles,  où  elle  est  exploitée,  les 
couches  paraissent  incliner  au  SO.  de  70";  5"  dans  une 
prairie  située  au  S.  de  ce  point,  on  a  fait  des  recherches, 
inclinaison  au  SO.  de  75";  A°  près  des  remparts,  à  l'O.  de 
Nivelles,  où  elle  est  exploitée;  5"  en  fragments  dans  le 
ruisseau  à  l'E.  de  Nivelles. 

Cette  eurite  est  la  plus  belle  et  la  plus  pure  des  diverses 
localités  où  l'on  rencontre  cette  substance;  aussi  est-ce  celle 


(  75  ) 
qui  est  la  plus  exploitée  et  la  plus  recherchée  pour  la 
fabrication  de  la  porcelaine. 

«  Ces  divers  gîtes  étant  situés  à  peu  près  suivant  une 
ligne  droite,  on  peut  croire  que  celte  droite  est  une  ligne 
de  fracture  et  que  les  gîtes  font  partie  d'un  même  lilon. 
La  direction  de  la  droite  est  de  l'O.  20"  N.  à  l'E.  20"  S., 
et  sa  position  s'écarte  peu  du  prolongement  de  la  ligne  des 
chlorophyres  schistoïdes  d'Enghien  à  Fauquez  (1).  » 

On  rencontre  dans  le  chemin,  entre  Bel-Air  et  Mon- 
streux,une  eurite  porphyroïde  à  petits  cristaux  d'albite 
au  voisinage  de  laquelle  les  roches  sont  très-altérées  et 
très-métamorphiques. 

Ainsi  que  l'a  indiqué  Dumont(2),  on  observe  quelques 
fragments  d'une  espèce  d'eurite  schistoïde,  à  quelques 
centaines  de  mètres  au  N.  de  la  roche  porphyroïde  de 
Fauquez,  à  l'E.  de  la  Voilée,  sur  la  rive  gauche  de  la 
Senne.  La  même  roche  forme,  près  de  l'écluse  de  Yoiri- 
chev,  deux  filons  voisins  dont  on  voit  la  tête  dans  le 
chemin  qui  conduit  au  Iluteux;  ils  n'ont  que  quelqu.es 
décimètres  d'épaisseur. 

De  curieux  gîtes  d'eurite  se  trouvent  dans  la  station 
d'Ottignies.  Elle  imprègne  en  partie  des  phyllades  gri- 
sâtres altérées,  qui,  dans  certains  cas,  offrent  une  appa- 
rence qui  les  rapproche  des  mêmes  roches  dans  lesquelles 
on  rencontre  des  graptolithes  à  Grand-Manil. 

L'état  de  la  tranchée  ne  nous  a  pas  permis  de  juger  de 
leur  position  exacte;  nous  croyons  qu'elle  forme  également 
quelques  filons  couchés  parallèles  aux  couches.  (Inclinai- 
son au  N.) 


(1)  A.  DunioiU,  Mémoire  cité,  2'"  partie,  pp.  511  et  312. 

(2)  Ibid.,  p.  311. 


(  76  ) 

On  trouve  des  traces  d'eurite  dans  la  tranchée,  entre 
Villers-la-Ville  et  Strichon,  au  milieu  de  couches  très- 
aï  térées. 

On  ohserve  à  Grand-Manii,  près  Gembloux,  de  l'eurite 
quartzeuse,  formant  plusieurs  bancs  ou  fdons  couchés, 
présentant  pour  la  plupart  des  caractères  particuliers, 
alternant  avec  des  couches  de  quartzite,  le  tout  paraissant 
métamorphique;  au  N.  se  trouve  de  l'eurite  porphyroïde, 
sans  stratification  et  probablement  éruptive. 

L'eurite  quartzeuse  et  l'eurite  porphyroïde,  véritable 
porphyre  feldspathique  (orthophyre),  sont  intercalées  au  N. 
et  au  S.  entre  des  phyllades  siluriens  altérés,  contenant 
des  impressions  scalariformes  de  graptolithes. 

Nous  avons  trouvé  sur  la  rive  droite  un  affleurement 
d'eurite  quartzeuse  qui  est  dans  le  prolongement  de  celle 
de  la  rive  gauche.  L'une  et  l'autre  occupent  la  même  posi- 
tion par  rapport  au  phyllade  fossilifère. 

Dumont  a  signalé (1)  des  fragments  d'eurite  à  800  mètres 
de  Grand-Manil ,  dans  le  chemin  de  Corroy-le-Château. 

Le  même  savant  a  reconnu  (2)  l'eurite  quartzeuse  à  Som- 
breffe,  entre  Vieille-Maison  et  la  ferme  de  l'Encombrie,  et 
à  rO.  d'Ottiamont,  dans  le  chemin  de  Sart-Molé  à  Bruyère. 
On  ne  rencontre  plus  dans  ces  deux  localités  que  des 
fragments  d'eurite  altérée.  Le  prolongement  de  la  ligne  qui 
joint  ces  points  passe  par  Grand-Manil. 

On  observe  sur  la  rive  gauche  de  la  Méhaigne,  entre 
Fallais  et  Fumai ,  sous  la  chapelle  du  Saint-Sauveur,  un 
typhon,  formé  d'albite,  à  grands  cristaux,  passant  à  une 


(1)  A.  Dumont,  Mémoire  cité  'i"  partie,  p.  315. 

(2)  76«U,p.  286. 


(  77  ) 
eurile  compacte  grisâtre  (1);  on  rencontre  le  prolongement 
de  ce  typhon  sur  la  rive  droite  de  la  Méliaigne. 

Dumont  a  signalé  en  outre  (2)  «  un  second  typhon  très- 
remarquable  par  sa  texture  et  par  les  modifications  qu'il 
a  produites  dans  le  phyllade,  sur  la  rive  gauche  de  la 
Méhaigne  près  de  Pitet.  Ce  typhon  a  environ  25  mètres 
de  base  sur  50  mètres  de  hauteur.  Les  parties  septen- 
trionales et  moyennes  consistent  en  cristaux  d'albite  de 
i  à  2  millimètres  de  longueur,  entremêlés  de  phyllade 
gris-bleu  subluisant,  offrant  une  texture  schisto-lamel- 
laire,  une  couleur  d'un  gris  mêlé  et  renfermant  des  frag- 
ments de  phyllade  modifié  par  la  chaleur;  vers  la  partie 
méridionale  du  typhon,  l'albite  passe  à  l'eurite  compacte 
gris-bleuâtre  et  présente  à  2"'80  de  sa  limite  extrême,  une 
longue  fissure  parallèle  au  joint  d'injection.  » 

Le  typhon  a  une  direction  EO.;  les  roches  plongent  d'un 
côté  au  S.  et  de  l'autre  au  N.,  ce  qui  indique  qu'il  leur  est 
postérieur  et  les  a  redressées,  en  même  temps  qu'il  leur 
faisait  subir  certaines  altérations. 

Dumont  (5)  a  signalé  un  monticule  d'eurite  quartzeuse 
au  hameau  de  Piroy  (Malonne);  il  en  figure  deux  sur  la 
carte  géologique  de  Belgique.  Le  premier  typhon  se  trouve 
sur  la  rive  gauche  du  ruisseau  de  Piroy.  On  en  observe  un 
second  sur  la  rive  droite  du  même  ruisseau  ,  mais  celui-ci 
se  trouve  dans  le  terrain  devonien,  c'est  le  seul  gîte  des 
roches  plutoniennes  ou  considérées  comme  telles,  observé 
dans  ce  terrain,  en  Belgique.  Des  traces  de  la  même  roche 


(i)  A.  Dumont,  Mémoire  cité,  2«  partie,  p.  310. 
(2)  Ibid.,  p.  510. 
(5)  Ibid.,  p.  525. 


(  78  ) 
se  rencontrent  à  la  ferme  de  Halleux  ,  entre  Neuville-sur- 
Meuse  et  Ombret. 

La  grande  quantité  de  quartz  que  contiennent  ces  roches 
les  rend  difficilement  fusible  contrairement  aux  caractères 
des  eurites,  dont  le  nom  veut  dire  aisément  fusible;  nous 
sommes  porté  à  croire  que  ce  sont  plutôt  des  quartziles 
imprégnés  de  matières  feldspathiques  à  base  de  potassium 
et  plus  fréquemment  du  sodium.  Elles  ont  été  nommées 
indifféremment  eurite  ou  albite.  L'hyalophyre  pailleté  de 
de  l'Ardenne  et  l'albite  phylladifère  du  Brabant  se  rappro- 
chent de  ce  type.  Les  diverses  couches  d'un  même  gîte  pré- 
sentent très-souvent  des  caractères  particuliers. 

L'eurile  perd  sa  cohérence  et  devient  terreuse  par  alté- 
ration; lorsqu'elle  est  porphyroïde,  le  feldspath  se  trans- 
forme en  kaolin  et  la  masse  devient  celluleuse  et  friable. 

La  forme  que  présentent  les  typhons  de  chlorophyre  ou 
porphyrite  de  Lessines  et  de  Quenast  est  des  plus  remar- 
quables; c'est  celle  d'un  golfe  ou  d'un  cratère  rappelant  la 
forme  de  certaines  îles  d'origine  volcanique.  Au  SE.  de 
Lessines,  il  forme  sur  la  rive  droite  de  la  Dendre  un 
demi-cercle  qui  s'étend  de  l'extrémité  occidentale  du  bois 
de  Lessines  par  Campmillon,  jusqu'au  N.  de  la  ferme 
Bronchenne  entre  Lessines  et  Ollignies(l).  Il  forme  au  S. 
de  Quenast, sur  la  rive  droite  de  la  Senne,  une  masse  aussi 
considérable  qu'à  Lessines,  dans  laquelle  on  a  ouvert  un 
grand  nombre  de  carrières,  situées  les  unes  à  côté  des 
autres  dans  une  zone  demi-circulaire  (2).  Il  constitue  une 
masse  homogène  sans  divisions  apparentes;  cependant  dans 

(1)  A.  Dumont,  Mémoire  cilé,  2«  partie,  p.  500. 

(2)  Ibid.,  p.  301. 


(  79  ) 
quelques  carrières  il  est  divisé  par  des  fissures  très-éten- 
dues qui  sont  souvent  parallèles  entre  elles  et  qu'on  pour- 
rait prendre  alors  pour  des  joints  de  stratification ,  mais 
qui  en  diffèrent  parce  qu'elles  n'ont  pas  une  direction  con- 
stante; d'autres  lîssures  transversales  les  subdivisent  en 
polyèdres,  qui  rappellent  un  peu  les  colonnades  de  basalte. 
Dans  la  carrière  dite  des  Boules,  le  porphyre  a  une  ana- 
logie de  plus  avec  le  basalte,  car,  par  suite  de  la  décom- 
position, chaque  polyèdre  tend  à  perdre  ses  arêtes  et  à 
prendre  la  forme  sphéroïdale,  comme  la  coulée  de  lave 
basaltique,  où  se  trouve  creusée  la  célèbre  grotte  des  Fro- 
mages, près  de  Bertrich  [i). 

«  On  peut  se  demander  si  les  masses  porphyriques  de 
Quenast  et  de  Lessines  ne  représentent  pas  la  matière 
éruptive  qui  a  rempli  les  cratères  par  où  sont  sorties  les 
éruptions  porphyriques  ou  des  amas  de  lave  qui  ont  comblé 
d'anciennes  \'allées  (2).  » 

Dumont  a  nommé  chloropliijre  schistoïde  une  roche 
composée  d'une  pâte  euritique  gris-verdàtre,  de  cristaux 
feldspalhiques,  clinaxiques  ou  non,  simples  ou  maclés,  de 
un  à  cinq  millimètres  de  grandeur,  et  de  chlorite  d'un 
vert  sombre  ou  noirâtre,  en  petites  masses  finement  lamel- 
laires; on  y  trouve  accessoirement  des  grains  de  quartz 
et  des  lames  phylladeuses.  ïl  est  strato-porphyroïde  ou 
schisto-porphyroïde ,  d'un  gris  verdâtre  clair  tacheté  de 
blanc  et  de  vert  foncé. 

Dumont  l'a  indiqué  au  Vert-Chasseur,  près  de  Steenkup 


(1)  J.  Gosselel.  Esquisse  géologique,  elc.  (Bulletin  scientifique  du 
DÉPARTEMENT  DU  NoRD ,  elc,  3^  année,  p.  81.) 
("2)  /6iV/,p.  81. 


(80) 
(Bierghes);  l'exploitation  est  actuellement  inondée.  On 
l'observe  encore  près  de  Rebecq ,  au  N.  des  fermes  de 
Grande-Haie  et  de  Petite-Haie  et  à  100"  au  N.  de  la  ferme 
du  Croiseau.  On  le  rencontre  aussi  à  Chenois  (inclinaison 
E.  20"  N.=6o°  (Hennuyères)  et  entre  Chenois  et  le  hameau 
des  Ardennes  (Hennuyères). 

Cette  roche  se  retrouve  à  quelques  centaines  de  mètres 
au  S.  du  château  de  Fauquez  sur  la  rive  gauche  de  la  Senne 
où  elle  forme  de  pittoresques  escarpements  dans  l'endroit 
nommé  Bois  des  Rocs;  elle  y  présente  un  très-bel  affleu- 
rement et  y  est  divisée  par  de  nombreuses  lissures  obliques, 
l'une  par  rapport  à  Tautre.  La  même  roche  s'observe  sur 
la  rive  gauche  de  la  Senne,  où  l'on  a  tenté  d'en  faire  des 
pavés.  Sur  la  rive  droite  elle  se  dirige  au  NO.  Sur  l'une  et 
l'autre  rive,  les  roches  siluriennes  présentent  une  inclinai- 
son diamétralement  opposée  au  N.  et  au  S.  de  la  roche 
porphyriques. 

Le  diorite  constitue  à  Lembecq  une  masse  granitoïde, 
d'un  vert  clair,  pointillé  de  vert  foncé.  On  a  tenté  d'y  faire 
des  pavés,  mais  l'exploitation  est  actuellement  abandonnée. 

Le  diorite  se  rencontre  à  2  kilomètres  à  l'E.  de  Stavelot, 
sur  la  rive  droite  de  l'Amblève,  au  confluent  de  cette 
rivière  et  de  l'eau  rouge  à  Challes.  Il  constitue  un  filon 
couché,  de  cinq  mètres  de  puissance,  incliné,  ainsi  que 
les  couches  voisines,  au  S.  25°  E  =  70".  11  présente  quel- 
ques fissures  obliques  à  cette  direction.  Nous  y  avons  ren- 
contré de  la  pyrite,  de  la  chalcopyrite,  et  dans  les  fissures, 
de  l'abeste  rouillée  par  des  composés  ferrugineux.  On  y 
avait  établi  une  carrière  de  pavés,  actuellement  aban- 
donnée. Nous  l'avons  également  observé  sur  la  rive  gauche 
de  l'Amblève  et  l'on  en  trouve  des  fragments  roulés  parmi 
les  cailloux  de  celte  rivière  vers  Coo. 


(81  ) 

On  rencontre  de  l'hyperslbénite  granitoïde  entre  Hozé- 
mont  et  le  château  de  Lexliy  ou  Dumont  l'avait  signalée. 
Elle  est  traversée  en  tous  sens  par  des  fissures  qui  la 
divisent  en  fragments  irréguliers  etquelquefois  sphériques. 
Une  très-belle  hypersthénite  porphyroïde  a  été  exploitée 
dans  une  carrière  remblayée  depuis,  près  du  château  de 
Lexhy.  Elles  ont  été  utilisées  pour  pavés,  pour  moellons  et 
pour  l'empierrement  des  chemins. 

J'ai  signalé  l'bypersthénite  entre  LesTombes  et  l'abbaye 
de  Grand-Pré  (Mozel)  (1).  Cette  roche  y  constitue  une  tête 
de  typhon  dont  les  fragments  sont  plus  ou  moins  altérés; 
les  gros  fragments  montrent  à  l'intérieur  une  texture  gra- 
nitoïde; elle  est  composée  de  lamelles  d'oligoclase  gris- 
verdàlre,  mélangées  de  grains  vert-noirâtre  d'hyperslhène. 

Dumont  a  désigné  dans  le  Brabant,  sous  le  nom 
d'arkose  et  de  porphyres  schistoïdes,  des  roches  que  Ton 
rencontre  dans  le  voisinage  des  roches  plutoniennes  et  qui 
parfois  ne  sont  que  des  quartzites  ou  des  phyllades  modi- 
fiés par  le  contact  des  roches  ignées  et  imprégnés  de 
matières  feldspathiques  cristallines,  etc.  Les  premières 
sont  donc  des  arkoses  cristallines,  ou  des  quartzites  méta- 
morphiques, et  les  secondes  des  phyllades  métamorphiques 
que  Dumont  avait  proposé  de  nommer  phylladophyres.  Les 
unes  et  les  antres  renferment  des  cristaux  de  feldspath  de 
nature  variable,  et  ont  une  texture  plus  ou  moins  porphy- 
roïde. Elles  contiennent  aussi  plusieurs  substancesdemême 
nature  que  celles  des  filons,  telles  que  la  chlorite,  l'oli- 
giste,  la  chalcopyrite,  l'épidote,  que  Ton  rencontre  dans  le 


(1)  Mémoire  sur  te  terrain  silurien  ,  etc.,  p.  70. 
2""'  SÉRIE,  TOME  XXXVHI. 


(  82  ) 
chlorophyre  el  le  diorite.  Elles  indiquent  des  relations  entre 
leur  âge  d'injection  et  les  roches  précitées. 

Les  quartzites  métamorphiques  se  rencontrent  au  voi- 
sinage des  roches  pluloniennes;  ils  sont  devenus  tels  en 
s'imprégnant  de  matières  feldspalhiques;  dans  d'autres 
cas,  l'action  métamorphique  s'est  fait  sentir  à  distance, 
les  quartzites  ont  été  imprégnés  de  grains  ou  de  lamelles 
feldspathiques  cristallines  provenant  d'émanations  gey- 
seriennes.  Ils  sont  fréquemment  chloritifères  comme  les 
quartzites  de  l'assise  deTubize  où  on  les  rencontre  princi- 
palement. On  en  trouve  au  NE.  de  liai,  dans  le  chemin  qui 
conduit  à  Buysinghen;  alternant  avec  des  quartzites  dans 
des  carrières  abandonnées  au  S.  de  Hal.  On  les  retrouve 
àMalheyde  (Lembecq),  en  bancs  presque  verticaux,  alter- 
nant avec  des  phyllades  métamorphiques  (inclinaison  E.  15° 
N.=80");  ils  renferment  ici  des  filons  quarlzeux  avec 
chlorite,  oligistes  et  épidole.  Les  mêmes  roches  se  rencon- 
trent au  N.  de  Tubize,  dans  d'anciennes  carrières  de 
quartzites  aimantifères.  Elles  se  trouvent  également  aux 
environs  de  Clabecq,  où  elles  contiennent  beaucoup  d'épi- 
dote.  Elles  se  rencontrent  dans  le  voisinage  ou  dans  le 
prolongement  de  certaines  roches  plutoniennes:  diorite 
de  Lembecq,  chlorophyre  de  Quenast;  souvent  même, 
ainsi  que  l'a  fait  remarquer  M.  J.  Gosselel,  elles  ont  plutôt 
l'aspect  d'un  porphyre  stratifié.  On  les  rencontre  encore 
au  voisinage  des  roches  por[)hyriques  de  Fauquez.  On  les 
trouve  également  entre  Clabecq  et  Braine-le-Chàteau  et 
entre  Rebecq  et  la  ferme  de  Petite-Haie.  Elles  présentent 
quelquefois  la  texture  granitoïde;  elles  sont  alors  composées 
de  grains  de  quartz  hyalin,  de  cristaux  ou  grains  anguleux 
de  feldspath,  et  fréquemment  de  chlorite. 

Les  porphyres  schistoïdes  ou  phyllades  métamorphiques 


(  83) 
imprégnés  de  feldspath  ont  la  texture  schisto-porphyroïde; 
ils  sont  formés  d'une  pâte  de  pliyllade  contenant  des 
cristaux,  des  lamelles  ou  des  grains  cristallins  de  feldspath. 
Ils  proviennent  d'imprégnation  feldspathique  au  contact 
des  roches  plutoniennes  ou  sous  l'influence  d'émanations 
geysériennes. 

Cette  roche  forme  des  hancs  ou  des  couches  que  l'on 
rencontre  au  voisinage  des  roches  plutoniennes  et  notam- 
ment aux  environs  d'Asquempont  (Ittre),  Fauquez,  Lem- 
becq,  Clabecq,  au  S.  des  roches  porphyriqucs  de  Sainte- 
Catherine,  près  de  Pitet,  etc.  La  pâte  phylladeuse  a 
généralement  augmenté  de  dureté  et  peut  rayer  les  phyl- 
lades  \oisins,  non  métamorphiques.  Les  phyllades  en- 
globés dans  les  roches  plutoniennes  sont  devenus  méta- 
morphiques. On  se  demande  si,  dans  certains  cas,  elles 
ne  sont  pas  contemporaines  des  roches  |)Iutoniennes  dont 
elles  oflt  la  même  composition  (chlorophyre)  et  dont  elles 
constitueraient  les  cendres  volcaniques;  dans  d'autres  cas, 
elles  peuvent  provenir  de  l'altération  des  mêmes  roches 
plutoniennes.  Elles  ressemblent  également  à  des  roches 
analogues  interstratifiées,  désignées  souvent  en  Angleterre 
sous  le  nom  de  feldspathic  ashe,  et  considérées  habituel- 
lement comme  le  résultat  d'éruptions  sous-marines. 

Les  phyllades  métamorphiques,  plus  imprégnés  de  ma- 
tières feldspathiques,  constituent  ce  que  Dumont  a  décrit 
sous  le  nom  de  porphyre  schL^toïde.  Dumont  a  isidiqué 
celui-ci  entre  Marcq  et  Enghien  où  il  est  constitué  par  une 
pâte  euritique  renfermant  des  cristaux  de  fcldspnih  ou  de 
petites  cavités  qui  proviennent  de  leurdestrucliun;  il  incline 
au  N.  On  le  rencontre  à  la  ferme  Sainte-Catherine,  à  une 
demi-lieue  au  SO.  de  Rebecq  ;  Dumont  l'a  observé  sur  une 
longueur  d'environ  quarante-cinq  mètres,  dans  un  chemin 


(  84  ) 
CI  eux;  l'état  du  chemin  et  la  décomposition  des  roches  ne 
permettent  pas  de  vérifier  cette  assertion  :  celte  roche  est 
constituée  ici  par  une  pâte  renfermant  des  cristaux  de 
feldspath  ordinairement  décomposés  et  transformés  en 
kaolin.  On  peut  également  observer  cette  roche  dans  la 
tranchée  de  la  route  de  Rebecq  à  la  station  du  chemin  de 
fer,  et  sur  la  rive  gauche  de  la  Senne  dans  la  tranchée  du 
chemin  de  fer;  elle  paraît  incliner  au  SE.  de  68".  Dumont 
Ta  encore  signalée  au  S.  du  château  de  Fauquez.  Nous  en 
avons  trouvé  des  traces  à  Asquempont. 

M.  J.  Gosselet,  dans  son  remarquable  mémoire  sur  les 
terrains  primaires  de  la  Belgique,  dit,  à  propos  des  por- 
phyres schistoïdes  de  la  ferme  Sainte-Catherine  :  «  Je  crois 
|)Ouvoir  regarder  comme  certain,  dans  le  cas  qui  nous 
occupe,  que  toute  la  roche  était  primitivement  à  l'état  de 
schiste.  Sous  rinfluence  d'émanations  venues  de  l'intérieur 
(le  la  terre,  elle  s'est  chargée  de  cristaux  d'oligoclase,  de 
quartz  et  de  chlorite;  c'est  en  quelque  sorte  un  schiste 
imprégné  de  porphyre.  Il  faut  remarquer  en  outre  que  ces 
émanations  porphyrogènes  étaient  sous  la  dépendance  des 
éruptions  porphyriques  de  Quenast.  Leurs  relations  étaient 
analogues  à  celles  qui  unissent  aujourd'hui  le  Vésuve  et 
I  Etna  avec  les  émanations  carbonées  ou  sulfurées  du  sud 
(le  l'Italie  et  de  la  Sicile  (1).  » 

11  est  très.-remarquable  de  voir  des  roches  aussi  profon- 
dément transformées  à  plusieurs  kilomètres  du  centre 
d'éruption,  tandis  qu'à  Quenast,  au  contact  du  chloro- 
phyre,  les  phyllades  ne  sont  pas  modifiés.  Notre  vénéré 
maître  M.  d'Omalius  d'fïalloy  avait  conclu  de  l'observation 


(1)  J.  Gosselet ,  A/f'moire  sur  les  terrains  primaires  de  la  Belgique,  etc. 
Paris,  1860;  p.  57. 


(8d  ) 

de  ce  lait  (1)  :  «  (jue  les  éjaculations  inlérieures  exerçaient 
une  action  métamorphyque  moins  forte,  lorsqu'elles  pou- 
vaient se  faire  à  l'état  liquide,  que  quand  elles  agissaient 
à  l'état  gazeux.  » 

Notre  manière  de  voir,  pour  ce  qui  concerne  les  quart- 
zites  et  les  phyllades  métamorphiques,  trouve  donc  un 
appui  dans  l'opinion  d'un  habile  observateur  et  d'un  géo- 
logue impartial. 

Dumont  a  également  appelé  l'attention  sur  les  modifi- 
cations où  le  métamorphisme  produit  sur  les  roches  silu- 
riennes par  l'action  des  émanations  intérieures  :  «  Ces 
injections  n'ont  pas  produit  de  modifications  de  contact 
très-marquées;  mais  la  partie  septentrionale  du  massif  du 
Brabant  a  subi  tout  entière,  probablement  par  l'influence 
de  masses  plutoniennes  sous-jacentes ,  une  action  méta- 
morphique très-énergique  (2).  »  La  zone  qui  comprend  la 
métamorphose  avait  été  désignée  par  Dumont  sous  le  nom 
de  Zone  de  métamorphose  du  Brabant.  Il  avait  reconnu 
des  zones  analogues  dans  la  partie  inférieure  du  devonien 
inférieur  de  l'Ardenne,  plus  ancienne  que  le  poudingue 
de  Burnot.  Il  est  étonnant  que  ces  faits  aient  échappé 
à  ceux  qui  se  sont  occupés  du  métamorphisme. 

Il  n'est  pas  sans  intérêt  de  rappeler  que  Dumont  a  fait 
remarquer  que  les  masses  plutoniennes,  formées  de  roches 
semblables,  sont  généralement  disposées  dans  le  même 
alignement,  et,  de  plus,  que  les  angles  que  ces  aligne- 
ments forment  entre  eux  paraissent  être  des  multiples  de 


(1)  .l.-J.d'Omaliusd'Halloy.  Abrégé  de  géologie.,  Bruxelles,  1855,  p.  ÔTi 

(2)  Dumoul.  Mémoire  cité  ,  2'  partie,  p.  â-42. 


(  86  ) 
6"  7-2  (M-  Quelques-uns  de  ces  alignements  concordent 
avec  des  lignes  de  fracture  ou  des  directions  de  roches 
bien  déterminées. 

Dumont  a  également  fait  observer  que  les  roches  qu'il 
nommait  chlorophyre  et  porphyre  schistoïdes  se  montrent 
en  divers  points  d'une  ligne  de  fracture  dirigée  de  l'0. 26"  7^ 
à  TE.  26  '/2  S.  passant  près  d'Enghien,  de  la  ferme  Sainte- 
Catherine,  de  Rebecq,  du  Croiseau  ,  de  Chenois,  de  Fau- 
quez  et  de  Monstreux  (2). 

Nous  croyons  utile  de  mentionner  quelques  faits  que 
nous  avons  observés  dans  le  massif  de  Rocroy. 

Les  diverses  roches  porphyriques  de  ce  massif  ont  été 
nommées  par  Dumont  hyalophyre,  diorile  et  albite  phyl- 
ladifère.  Elles  se  rencontrent  fréquemment  dans  le  même 
(ilon. 

L'albile  phylladifôre  est  formée  de  grains  fins  plus  ou 
moins  distincts  de  feldspath  et  de  phyllade  réunis.  Elle 
constitue  des  filons  couchés  ou  schisto-lamellaire.  Cette 
albile  phylladifère  présente  des  caractères  extérieurs  qui 
la  séparent  complètement  de  la  roche  désignée  sous  le 
même  nom  par  Dumont,  dans  le  Brabant,  et  des  eurites. 

Sur  les  bords  de  la  Meuse  on  observe  à  l'E,  et  près  de 
Revin  un  filon  d'albite  phylladifère  de  près  de  7  mètres  de 
puissance;  il  contient  de  la  pyrite, delà  pyrrhotine  et  del'al- 
bite  en  cristaux  simples  ou  maclés  (5);  inclinaison  S.=38". 
Nous  avons  observé  la  même  roche  au  N.  de  Revin,  où  elle 
forme  un  filon  de  l'",80  environ  de  puissance,  intercalé 


(1)  Dumont.  Mémoire  cilé,  2"^  partie,  p.  ôlG. 

(-2)  Ibid.,  p.  504. 

(ô)  Ibid.,  1'^  pariie,  pp.  90  et  91. 


(87  ) 

dans  le  phyllade,  direction  E.  8°  S.  à  0.8°  N.  Nous  avons 
revu  la  même  roche  à  l'angle  de  la  Meuse  et  du  moulin  de 
la  Pille,  à  100  mètres  environ  au  N.  du  ravin  ;  cette  roche 
incline  au  S.,  elle  ressemble  plutôt  à  une  lentille  qu'à  un 
filon  couché.  On  la  rencontre  encore  entre  Mairus  et 
Laifour,  etc. 

Nous  avons  en  outre  trouvé  au  S.  du  moulin  de  la  Pille, 
en  remontant  le  ruisseau,  sur  une  longueur  d'environ 
\  kilomètre,  des  blocs  de  diorite;  ces  blocs  volumineux 
sont  arrondis  et  polis. 

Nous  avons  également  observé  au  N.  de  Mairus,  dans 
la  tranchée  du  chemin  de  fer,  un  filon  couché  de  diorite, 
de  2  mètres  de  puissance. 

Les  diorites  du  massif  de  Rocroy  sont  plus  calcareuscs 
que  celles  des  autres  massifs.  L'albite  chloritifère  de 
Dumont  qui  paraît  se  rapprocher  du  diorite  en  diffère  géné- 
ralement par  l'absence  ou  la  moindre  quantité  de  composés 
amphiboliqnes;  ces  roches  passent  de  l'une  à  l'autre  et  se 
trouvent  presque  toujours  dans  le  même  filon.  Toutes  les 
albites  chlorilifères  de  Dumont  ne  sont  cependant  pas  des 
diorites  et  plusieurs  doivent  se  ranger  dans  les  roches  qu'il 
nommait  albite  phylladifère. 

Toutes  ces  roches  sont  encore  très  peu  connues  quant  à 
leur  composition.  Les  diverses  opinions  émises  à  leur  sujet 
montrent  combien  on  est  peu  d'accord;  Dumont  lui-même 
a  désigné  sous  le  même  nom  des  roches  d'aspect  assez 
variables.  Nul  doute  que  les  procédés  actuellement  pra- 
tiqués en  Allemagne,  et  surtout  l'analyse  microscopique, 
ne  réservent  plus  d'une  surprise,  et  la  découverte  de 
faits  des  plus  curieux  à  celui  qui  se  livrera  à  ce  genre  de 
recherches. 


(  88) 


Quelques  réflexions  sur  le  problème  de  Malfatti;  par 
M.  Simons,  répétiteur  à  l'École  militaire. 

De  toute  antiquité,  les  géomètres  ont  dû  se  poser  la 
question  que  Malfatti  a  partiellement  résolue;  mais  il  ne 
suffit  pas  de  la  poser  pour  la  résoudre,  et  c'est  en  1803 
que  nous  voyons,  pour  la  première  fois,  une  réponse 
livrée  à  la  publicité  {Mémoires  de  la  Société  italienne  des 
sciences). 

Les  Annales  de  Gergonne  ont  repris  la  question  (I,  II  et 
X  volume),  puis  le  Journal  de  Crelle  (tomes  I,  X,  XLV  et 
LXXVI). 

Malgré  les  70  ans  écoulés  depuis  1803,  et  malgré 
l'immense  publicité  que  le  problème  a  reçue  par  suite  de 
son  apparition  dans  les  journaux  que  je  viens  de  citer, 
nous  ne  voyons  jusqu'aujourd'hui  paraître  aucune  solution 
bien  satisfaisante. 

J'en  excepte  une  seule  dont  je  parlerai  plus  loin. 

La  solution  de  Malfatti  est  la  plus  simple  des  solutions 
connues;  malheureusement  elle  n'éclaire  pas  sur  les 
moyens  par  lesquels  l'auteur  l'a  obtenue;  elle  se  borne  en 
effet,  comme  le  dit  Gergonne,  à  former  les  équations  du 
problème ,  et  à  constater  ensuite  que  les  quantités  trouvées 
satisfont  à  ces  équations. 

La  solution  de  Gergonne  conduit  à  une  formule  très- 
compliquée,  que  son  auteur  n'a  pas  su  ramener  à  la  for- 
mule de  Malfatti. 

La  solution  de  M.  Steiner  est  un  véritable  chef-d'œuvre 


(89) 

relativement  au  problème  plus  général  qu'il  a  considéré: 
mais  en  ce  qui  concerne  le  problème  de  Malfatti  propre- 
ment dit,  c'est-à-dire  le  cas  particulier  du  triangle  recti- 
ligne,  la  solution  de  Sleiner  conduit  à  une  construction 
trop  longue  (comparée  à  celle  de  Malfatti),  et  dès  lors  elle 
ne  peut  plus  être  considérée  comme  une  solution  de  ce  cas 
particulier,  mais  seulement  comme  une  propriété  très- 
remarquable  de  la  figure. 

La  solution  très-élégante  de  M.  Schellbach  a  le  défaut 
de  celle  de  Malfatti,  c'est-à-dire  celui  d'être  donnée 
à  priori,  et  vérifiée  seulement  sur  les  équations. 

Il  me  semble  donc  à  désirer  que  l'attention  des  géo- 
mètres soit  attirée  sur  les  questions  suivantes  : 

1°  Donner  une  solution  analytique  complète  du  pro- 
blème, conduisant  au  résultat  le  plus  simple  possible; 

2°  Donner  une  solution  purement  géométrique  de  la 
question,  ainsi  qu'un  exposé  méthodique  des  principales 
propriétés  de  la  tigure. 

Les  réflexions  qui  suivent  ont  pour  but  principal  d'épar- 
gner une  partie  du  travail  à  ceux  qui  voudront  s'occuper 
de  ces  questions;  et  à  ce  titre  je  ne  les  crois  pas  indignes 
d'èfre  présentées  à  l'Académie,  attendu  que  :  Necesse  est 
multi  pertranseant,  ut  augeatur  scientia. 

§   \.  —  CONCERNAMT  LA  SOLUTION  ANALYTIQUE  DU  PROBLÈME. 

(J'adopte  les  notations  employées  dans  les  Annales  de 
Gergonne,  t.  I,  p.  545;  seulement  pour  éviter  les  accents 
je  désigne  les  côtés  du  triangle  par  a,  b,  c.) 

Gergonne,  après  avoir  très-habilement  ramené  la  ques- 
tion au  premier  degré,  trouve  pour  valeur  du  rayon  de  la 


(  90) 
première  circonférence  : 

R  \hc  —  {d~d'){d  —  d") 


p  b{c—d+d'f-h'2d{c—d-hd'){lj—d-\-d"}-hc{b—d-^d")'' 

Mais  il  dit  ensuite  :  «  il  ne  paraît  pas  facile  de  ramener 
»  cette  expression  à  celle  de  Malfalti,  savoir  : 

r  =—  (s  -+-(/  —  d'  —  d"  —  R). 

»  La  difficulté  tient  à  ce  que  parmi  le  grand  nombre  des 
»  relations  qui  existent  entre  les  données,  on  n'aperçoit 
»  pas  facilement  quelles  sont  celles  qui  peuvent  le  mieux 
»  opérer  la  transformation.  » 

C'est  pour  avoir  vu  la  difficulté  là  où  elle  n'était  pas  que 
Gergonne  ne  l'a  pas  surmontée. 

En  effet,  la  difficulté  provient  simplement  de  ce  que 
d,  d',  d",  R  et  s,  n'étant  pas  des  quantités  indépendantes 
les  unes  des  autres,  on  empêche,  en  conservant  ces  sym- 
boles particuliers,  les  réductions  de  s'effectuer. 

On  arrive  assez  naturellement  à  la  transformation  dési- 
rée, de  la  manière  suivante  : 

Omettons  d'abord  le  facteur  -  commun  aux  deux  résul- 
tats; il  restera  le  facteur  non  commun,  qui  doit  évidem- 
ment, dans  l'un  comme  dans  l'autre,  représenter  la 
distance  entre  le  point  de  contact  du  cercle  cherché  avec 
le  côté  du  triangle,  et  le  sommet  voisin. 

Dans  le  facteur  non  commun  du  premier  résultat,  on 
remplacera  d,  d',  d"  et  R,  par  leurs  valeurs  en  fonction  de 
o,  b  et  c,  quantités  indépendantes  les  unes  des  autres. 
Représentons  la  fraction  qu'on  obtiendra  de  cette  manière 
par  ^;  et,  comme  le  dénominateur  contiendra  trois  termes, 
représentons-les  par  D',  D"  et  D". 


(91  ) 
On  aura  donc  : 


K  ==  1 6c  -  (y/'"^'^-"'  _ y/î^iiT^l)  (y/'iffi:^) 


_v/^)f 


D._^-         ^  //;c(s-a)       ^  /ac{s  —  b) 


-    //jc(s  — o)        -    / 


D--        i!V/'""~"'(c      %  /'"^'■^''')  ,  \  /°^(^-'')j 


6-\/^"^-"'-^V/^ 


6  (S  —  c) 


Effectuons  toutes  les  opérations  indiquées,  ce  qui  est 
long,  mais  n'offre  aucune  difficulté,  et  se  fait  sans  aucun 
artifice. 

Remarquons  seulement  qu'au  lieu  de  mettre  en  évidence 
le  facteur  ^,  ce  qui  semble  plus  naturel  au  premier 
abord,  nous  ne  mettrons  que  ^  afin  de  conserver  leurs 
dénominateurs  aux  expressions  correspondantes  à  c/,  rf',  d" 
et  R. 

De  cette  façon  nous  obtiendrons  : 

label  ,       ,  ,        2a6c       2c— s, /-j- — r. 

N  = \8^~ah—ac—hc-\ 1 V  ab{s—a)[s—h] 

s     \  s  s 

25 g 9(1  —  s      .\ 

-4- Vac{s  —  a){s  —  c) \/bc{s  —  b){s —c)j 


(  92  ) 

D'-+-D"'  =  ^^^ —  2  s"  — 06— ftc — 2  \/bcs{s—a)  -+-  \/acs{s  —  b) 

s    \ 


-V  Vabs  (s—c)  —  1/  a6  (s  —  a)  (5  —  6)  —  V^ac  (s  —  a)  {s  —  c) 


26c  /  ,  y-, «   /b  c(s  —  a) 

D"= [abhac—hs  —  cs-^'2Vbcs{s — a)-^a  \/  ■' 

-(s -a)  y (s  =  «)V 

H-  [/a b  {s  —  a) {s  —  b)  -^  \/a  c  {s  —  a)  {s  — c  ) 


,    ^^/is-a){s-b)(s-c)\ 
Ajoutant  les  deux  dernières  égalités,  on  aura  : 


labc  I         .    /bcis — a)       -    /acis—b)      -    /ab{s~c) 
^       /{s-a)(i-b){s-c)) 


La  suppression  du  facteur  commun  ^  donnera  : 

2  ctbc     2c— "5     ^bs      2ct*5      _.^^_^^^ 

s^-ab-ac-bc+ + V^ ab{.s-a){s-b  +  ^^—  V ac  (s-a)(s-c)  -  ~- V^ bc  (s-b){s-c) 

N  s  s  s  s 


D  ^_\/bc{s-a)      \/ac  js-b)      l/ab  (s-c)      \/{s-a)(s-b)(s-c) 

s  s  s  s 

On  voit  par  là  que  la  fraction  est  ramenée  à  la  forme 
frf  ;  6t  parmi  les  moyens  de  simplification  les  plus  usités, 
il  est  naturel  de  se  demander  si  y  n'est  pas  le  carré  de  x. 
On  élèvera  donc  au  carré  la  partie  du  dénominateur  repré- 
sentée par  X.  Faisant  cette  opération  on  ne  trouvera  pas 


bc{s — u) 


(  95) 
x^  =  y^  mais  bien  x^-  =  2y  -h  s^;  ou  y  =  ^  {x^  —  s^)\ 
donc  «2  —  y  =  i-  («2  —  x^)  ;  et  par  conséquent  : 

D  s  —  X  .s  —  x  '  -\V 

\ /"^(•^'  — ^)       %  /«^(-s-c)      y/(s  —  (t){s  —  b){s—c)\ 

=  1  (.s  -i-  d  —  d'  —  </"  —  R). 

Ce  qui  est  exactement  le  résultat  de  Malfatti. 

Complétée  de  cette  façon ,  la  marche  suivie  par  Gergonne 
lournit  une  solution  analytique  qui  me  paraît  provisoire- 
ment satisfaisante. 

Cependant  elle  ne  me  semble  pas  encore  réduite  au 
dernier  degré  de  simplicité  dont  elle  est  susceptible;  ce  qui 
le  fait  surtout  supposer,  c'est  que  l'on  obtient,  pour  les 
inconnues  auxiliaires,  x'  et  x",  des  fractions  dont  les  deux 
termes  sont  du  o"""  degré,  tandis  qu'elles  peuvent  très- 
simplement  être  exprimées  par  des  fractions  dont  les  termes 
soient  du  I"  degré. 

En  effet 


-Vl^ 


'2\/r"r'       d  -+-  R  —  s  -+-  a 


-  \/7^       (/'-+-  R  —  .s  -f-  6 


Cette  dernière  égalité  est  justifiée  par  la  remarque  que 
2V^r"/'=d-hR  —  s-^a,  faite  dans  l'excellent  article  écrit 
sur  la  même  question  parM.Tédenat.  (Voir  Annales  de  Ger- 
gonne, t.  H.) 

V' Remarque  :  (Hg.  1)  Soient  respectivement  m,  n  p  les 


(  94) 
points  (Jeconlacl  des  trois  cercles  cherchés;  désignons  .1  m 


Fig.   I. 


par  X,  Bp  par  y  et  Cn  par  z.  On  aura ,  en  vertu  du  résultat 
de  Malfatti  : 

X  —  z  =  d  --  d"  =  AO  ~  OC. 

On  a  d'ailleurs 

X  -\-  z  =b  —  mn  =  h  —  kq. 

Ces  deux  égalités  donnent 

b  —  kq  —  (/  -+-  d" 


résultat  plus  simple  de  Malfatti  en  ce  sens  qu'après  avoir 
obtenu  le  point  n;  on  obtiendra  le  point  m  en  portant 
mn  ==  kq,  et  le  point/) en  portant  n'p  =  k'q'. 

Il™*  Remarque.  —  L'égalité  a;  —  z  =^  d  —  d" ,  donne 
encore  d  —  x  =  à"  —  z.  Or,  si  nous  remplaçons  x  par  sa 
valeur  trouvée  plus  haut,  nous  aurons 

d—x=d—{{s^d—d'-d"—Vy]=\{d-^d'-\-d"-^R  —  s); 


(  95  ) 
et  comme  celte  dernière  quantité  est  tout  à  fait  symétrique 
en  a,  6  et  c,  ce  sera  encore  la  valeur  de  d'  —  y. 

L'égalité  de  ces  trois  quantités  d  — x,  d'  —  ?/,  d"  —  z, 
nous  fournira  la  solution  suivante,  un  peu  moins  simple 
que  celle  de  Malfatti,  mais  plus  symétrique  (fig.  i)  :  du 
centre  0  du  cercle  inscrit  ou  triangle,  et  avec  le  rayon. 
Ld  ^  cl'  -+-  d"  -h  R  —  s) ,  on  décrit  une  circonférence  qui 
coupe  respectivement  les  bissectrices  Ao,  Bo,  Co  aux 
points  f,  i,  h;  puis  des  points  A,  B,  et  C  comme  centres, 
respectivement  avec  les  rayons  A^  Bi,  C/i,  on  décrit  des 
arcs  de  cercle  qui,  par  leurs  rencontres  avec  les  côtés  du 
triangle,  donneront  les  points  de  contact  des  circonférences 
cherchées. 

Ou  bien,  si  on  le  préfère,  on  peut  énoncer  le  théorème 
suivant  :  Les  circonférences  décrites  des  sommets  du 
triangle  donné  comme  centres,  et  qni  coupent  respective- 
ment à  angle  droit  les  circonférences  cherchées,  passent  à 
la  même  distance  du  centre  du  cercle  inscrit. 

Ill^  Remarque.  La  solution  donnée  par  M.  Schellbach 
{Journal  de  Crelle,  t.  XLV)  est  on  ne  peut  plus  élégante; 
seulement  elle  joint  à  l'inconvénient  de  la  solution  de 
Malfatti  celui  de  conduire  à  une  construction  géométrique 
moins  simple.  Remarquons  cependant  que  l'on  peut  facile- 
ment, de  cette  solution,  déduire  celle  de  Malfatti.  A  cet 
effet,  rappelons  que 


^  -  V         s  {s  —  c) 

et  remplaçons  x  par 


(96) 

Développons  ensuite ceUc  dornière  l'oiiiuik',  cl  remplaçons 
dans  le  développement  sin  ^  par 


;cos— pai'X/   

21/ s  2'      V  21/, 


;siii-par  etc. 


Le  calcul  est  long,  mais  n'offre  aucune  difliculté,  et 
conduit  directement  à  la  formule  de  Malfatti. 

W""^  Remarque  {{\g.  2).  Déplaçons,  par  un  mouvement 
de  rotation  autour  de  A,  la  circonférence  dont  le  centre 
est  en  e,  jusqu'à  ce  que  ce  centre  arrive  d'une  part  en  e' 
sur  le  côté  AC,  et  de  l'autre  en  e"  sur  le  côté  AB.  Amenons 
semblablement  la  circonférence  /"en  f  et  en  /"',  et  la  cir- 
conférence g  en  g'  et  g".  Les  bissectrices  OA  et  OC  seront 
respectivement  tangentes  aux  circonférences  e'  et  f";  et 

Fig.  2. 


comme,  d'après  la  remarque  II,  ces  tangentes  sosl  égales, 


(  97) 
il  s'ensuit  que  le  centre 0 du  cercle  inscril  au  triangle  ABC 
appartient  à  la  ligne  des  puissances  égales  des  deux  circon- 
férences e'  et  f".  Cette  ligne  des  puissances  égales  doit 
d'ailleurs  être  perpendiculaire  à  AC,  donc  les  trois  points 
L,  H  (rencontre  des  circonférences),  et  0  se  trouvent  sur 
une  même  perpendiculaire  à  AC.  Même  raisonnement  pour 
f  Qig" \  puis  pour  cj'  et  e" .  Or,  la  corde  LH  prise  dans  /" 
est  égale  à  la  corde  KM  prise  dans  f  ;  donc  entin  les  trois 
cordes  communes  LH,  KM  et  NP  sont  égales. 

Mais  ce  qui  est  plus  remarquable,  c'est  que  ces  cordes 
ont  précisément  la  même  longueur  que  celles  qu'on  obtien- 
drait dans  le  cercle  0  inscrit  au  triangle  ABC  (lig.  1)  en 
élevant  des  perpendiculaires  aux  bissectrices,  respective- 
ment aux  points  f,  i,  h. 

Pour  le  démontrer  il  suffit  d'établir  qu'en  élevant,  au 
point  f,  une  perpendiculaire  égale  à  la  moitié  de  celte  lon- 
gueur, et  en  joignant  au  centre  0,  on  aura  une  ligne  égale 
au  rayon  du  cercle  inscrit. 

Or,  la  moitié  de  la  longueur  en  question  est  HQ  (lig.  2) 
et  l'on  a,  en  désignant  toujours  par  x  la  distance  du  point 
A  au  point  de  contact  de  la  circonférence  e  : 


110 


/•'^  —  e'  Q-  =  y   :r2  tang--  —  (AQ  -—  A  e' 


=  \/^' 


A         /                     X 
■^  tani;^ I  s  —  a 


2       (  Al 

cos-  I 

^2  I 


-V 


A  X  .x' 

x'^  taii"- (.s  —  ar  H-  2  [s  —  a) . 

"2  'a  a 

cos  —  (.'Os- 

2  2 


2'"*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII. 


(98  ) 
Si  donc  nous  élevons,  au  point /(lig.  1),  une  perpendi- 
culaire égale  à  HQ,  nous  aurons  : 

A 


=  n.n 


os'  =  0 


fs'  =  x^  tang^  Ty  —  i^  —  "'  -*  -('^  —  ") 


A 

cos — 


1-  rf^  —  2  (Ix  +■  x' , 


cos^  — 


Le  i"  terme  du  second  membre  s'annule  avec  le  4""'  et 

le  6'"". 

Le  3'"'  terme  du  second  membre  s'annule  avec  le  5'"% 

donc 


os 


=  \/(P—  {s  -  af  =\/ \d  —  [s  —  a)  |  j (/  -+-  (s  -  a) | 


moyenne  proportionnelle  entre  la  sécante  entière  menée  du 
point  0  (au  cercle  décrit  de  A  comme  centre  avec  [s-a) 
comme  rayon)  et  sa  partie  extérieure;  égale,  par  consé- 
quent, à  la  tangente  OQ  (fig.  2)  à  ce  cercle  C.  Q.  F.  D. 

Les  défauts  reprochés  jusqu'ici  aux  solutions  anté- 
rieures sont  capitaux  et  consistent  donc  :  1°  en  ce  qu'elles 
donnent  une  réponse  à  priori,  c'est-à-dire  non  déduite 
régulièrement  des  équations  du  problème;  2°  en  ce  qu'elles 
ne  conduisent  pas  à  la  construction  géométrique  la  plus 
simple  possible. 

Il  est  vrai  que  la  solution  donnée  par  M.  Lechmiitz 
[Annales  de  Gergonne,  t.  X)  est  exempte  de  ces  deux 
défauts  marquants,  mais  il  en  a  un  autre,  qui,  sans  être 
comparable  aux  précédents,  est  encore  bien  grave. 

La  longueur  excessive  des  calculs  ne  permet  pas  d'y 
retrouver  un  plan  d'ensemble;  et  pour  peu  qu'on  les  ait 


(  99  ) 
perdus  de   vue  pendant  quelque  temps,  il  devient  hien 
difficile  de  les  reconstituer. 

J'estime  donc  que  M.  Catalan  a  rendu  un  véritable  ser- 
vice à  la  science,  en  ramenant  cette  solution  à  des  propor- 
tions raisonnables  [Nouvelles  Atmales,  t.  V,  p.  60). 

Il  a  donné  ainsi  du  problème  la  première  solution 
exempte  des  défauts  graves  qui  entachaient  les  précé- 
dentes. 

D'ailleurs  il  a  donné  en  même  temps  la  démonstration 
la  plus  simple  connue,  d'une  propriété  que  M.  ïédenat  a 
en  vain  cherché  à  établir;  comme  il  résulte  de  la  phrase 
suivante  [Annales  deCergonne,  t.  H)  :  on  voit  combien  la 
solution  de  ce  problème  deviendrait  facile,  si  ron  ponçait 
parvenir  à  démontrer  à  priori  qne 

2\/r'  r"=  d   -t-  R  —  o 


'■2ï/r"r  =rf'  -4-  R  — p' 


^Vrr"  =(/"-+-  R— p" 

Voilà  donc,  sous  le  rapport  analytique,  deux  solutions 
très-satisfaisantes;  nous  considérons  cependant  comme 
très-probable  qu'on  parviendra  encore  à  les  simplifier 
davantage. 

!^  ±  —  Concernant  les  proprïktés  géométriques  de  la 

FIGURE. 

M.  Zornow  a  donné  [Journal  de  Crelle ,  t.  X)  une  très- 
bonne  démonstration  de  la  propriété  découverte  par 
Steiner.  Comme  ces  démonstrations  sont  très-propres  à 
faire  ressortir  les  propriétés  de  la  figure,  nous  en  donne- 
rons ici  une  nouvelle. 


(  100  ) 
Lemme  :  Je  mène  les  bisseclrices  des  angles  du  triangle 

ABC  (tig.  3);  je  porte  sur 
Tune  d'elles  AO,  une  lon- 
gueur AD,  telle  que  BDC 


Fis.  ô. 


jdr 


semblable- 


R 

c  sin  — 


A0=. 


ment  je  fais  AEC  =  2"' 
—  -,.  Je  dis  que  :  sin  OCl) 
sin  OCE  =  sin^- 

En  effet  :  les  triangles 
ACD  et  ADB  sont  sembla- 
bles; car  ÂBD+ Bl5r= 
2^' — ^;  et,  d'autre  part, 
ABD+DCA=-4^'^  — A 

f^dr  A\  cii^  A 

Cesdeux  égalités  donnent 
BDA  =  DCA.  Par  suite, 
les  triangles  ACD,  ADB 
ont  les  angles  égaux.  On 
tire  de  là  AD  =  1/^(1). 
Ensuite 

osin  — 
9 


C 

oos  - 

y) 


W 


cos 


Pienant  une  moyenne  proportionnelle  entre  ces  ûeu\ 
dernières  quantités,  on  aura  : 

\n       \  / •    ^        '%         ^       ^    / ,     \    /(-^'-^ifs^O       %    /[>i—a)is~h) 
AO  =  \  /   o  •  iinig-la.ig     ==  %    /   u  \  /   ; -—^x  \/   ^ 


V 


(  101  ) 

Retranchant  (2)  de  (1)  on  obtient 


^^           ' ,         %.   /^c  (s  —  «) 
0D=  W  fjc  —  Y  —^- ^  (ô). 


Le  triangle  ADC  donne  : 


^        oc 


Dans  le  triangle  COD,  dont  l'angle 


A        C         ,        B 

0=-  +  -  =  i"'- 

9         »>  i 


on  aura  : 

ODsInDOC 


sinOCD  = 


CD 


V/.s(.s— 6)-l/ {s—a}(s—b}      Vs—b        \    s  —  \/s  —  a 


[^a{b-^c  —  ''2\/s,s  —  a}  Va       |/6-+-c— 2l/'.s(.s— «j 

mais  le  second  facteur  de  cette  dernière  quantité  est  égal 
à  l'unité,  car  les  deux  ternies  de  la  fraction  sont  égaux, 
comme  on  s'en  assurera  facilement  en  les  élevant  au  carré; 
donc  enfin 


sin  OCD 


^         a 
Changeant  6  en  a  et  a  en  b,  on  obtiendra 


-    /s  —  a 
in  OCE  =  y  -^  ; 


(  m  ) 

donc  miiliiplianl  ces  deux  dernières  égalités,  ou  oijliendra  : 


sinOCDsiiiOCE  =  \/ 


(.s  —  a)  [s  —  /;) 


ce  qui  est  la  valeur  connue  de 

C 
siii  -  C.  Q.  r.  I). 

Corollaire  I.  J'abaisse  OF  perpendiculaire  à  CD,  et  OG 
perpendiculaire  à  Cli,  je  tire  FC  ;  je  dis  que  cette  droite 
FG  est  tangente  au  cercle  inscrit  dans  le  triangle  ABC. 

En  effet,  à  cause  de  la  circonférence  dont  OC  est  le  dia- 
mètre, on  auia  OGF  =  OCE;  on  a  donc  OF  =  OC  sia 
OCD,  puis  la  hauteur  OH  =  OF  sin  OFG  =  OC  sin  OCD 
sin  OCG;  d'autre  |)arl  01  =  OC  sin  ,^. 

Corollaire  \\\.  Si,  du  point  0  comme  centre,  avec  OG 
comme  rayon,  on  décrit  une  circonférence  qui  rencontre 
respectivement  AC  et  BCaux  points  K  et  I.,  les  angles  COK 
et  COL  sont  égaux  à  BCD. 

En  ctlet,  si  COK  =  BCD,  les  triangles  OIE  et  OCK 
seront  semblables  comme  ayant  les  angles  égaux;  donc  on 
aura  OF  -t-  OK  =  OI  +  OC;  d'autre  part  le  lemme  donne 
OF  +  OG  =  01  ^  OC;  donc  enfin  OK  =  OG,etc. 

Théorème  :  Le  problème  de  Malfatti  étant  résolu  pour 
le  triangle  abc\  a.  étant  le  centre  du  cercle  inscrit  dans  ce 
triangle;  la  tangente  commune  aux  cercles  inscrits  dans  les 
ansfles  rt  et  h,  est  aussi  commune  aux  cercles  inscrits  dans 
les  triangles  y.ca  et  ac6  (ibéorème  découvert  par  Sleiner). 

Remarquons  d'abord  que  si  les  points  w,  n  elp  (fig.  4), 
qui  doivent  d'ailleurs  se  trouver  sur  les  bissectrices  des 
angles  du  triangle  ahc,  étaient  connus,  ce  dernier  triangle 


(  103  ) 
lui-même  pourrait  être  reconstruit;  car  il  n'y  a  qu'un 
moyen  de  décrire  trois  circonférences  tangentes  deux  à 
deux  extérieurement, et  ayant  respectivement  pour  centres 
les  points  m ,  n  et  />;  et  ce  moyen  consiste  à  mener  les  bis- 
sectrices des  angles  du  triangle  mn/),  bissectrices  qui  se  ren- 
contrent en  0,  à  abaisser  de  ce  point  des  perpendiculaires 
sur  les  côtés,  lesquelles  déterminent  les  rayons  ne,  pe,  pf. 
Les  perpendiculaires  elles-mêmes  seront  les  tangentes 
communes. 

Fig.  4. 


Menons  deux  de  ces  tangentes  communes  eg  et  dh,  et 
prolongeons-les  jusqu'à  leur  rencontre  en  g  et  h,  avec  le 
côté  ac  du  triangle  donné;  cherchons  le  centre  du  cercle 
inscrit  au  triangle  ogh.  Ce  centre  est  le  point  i  de  rencontre 
des  bissectrices;  la  première  de  ces  bissectrices  s'obtienl 
en  menant  gp;  car  ge  et  gh  sont  tous  deux  tangents  à  la 
circonférence/);  la  seconde  bissectrice  s'obtient  de  même 
en  tirant  mh  ;  la  troisième  noik  est  en  même  temps  bissec- 


(  104  ) 

irice  de  l'angle  i7inp,  comme  le  prouve  l'égalité  des 
triangles  ndo,  neo.  Je  dis  ensuite  que  oj  étant  la  tangente 
commune  à  m  et  p,  ij  sera  le  rayon  de  la  circonférence 
inscrite  au  triangle  goh.  Pour  le  prouver,  c'est-à-dire  pour 
établir  que  ij  est  perpendiculaire  à  ac,  il  suffît  de  prouver 
que  les  points  i  et/  sont  tous  deux  également  distants  de 
mr  et  de  pq  (perpendiculaires  tous  deux  à  ac).  Le  point  i  est 
à  la  fois  sur  ni  bissectrice  de  mnp^  sur  pi  bissectrice  de 
epq,  et  sur  mi  bissectrice  de  nmr,  c'est  donc  le  centre 
d'une  circonférence  tangente  aux  quatre  lignes  vm,  mn, 
np ,  pq\  le  point  i  est  donc  également  distant  de  iiiv  et  de 
pq.  Le  point  j  l'est  aussi;  car  les  tangentes  jq  et  jr  sont 
égales  à  la  tangente  commune  jf.  Donc  ij  est  perpendicu- 
laire à  ac. 

Évaluons  le  rayon  ij.  Dans  le   triangle  ijp  on  aura  : 

ip  s'inipj 
sin  ijp 

.Mais  à  ijp  je  substituerai  ^*;  en  effet,  opm  ='i!|i*  et  mpj 
=^^',  ajoutant  on  aura  opj  =='^  =  npi,  et  retranchant 

la  partie  commune  opi,  il  reste  ipj  =  '^.  A  l'angle  ijp]e 
substituerai  opi;  en  effet,  l'angle  mjp  est  droit,  la  circon- 
férence décrite  sur  mp  comme  diamètre  passe  donc  par  /, 
son  centre  s  se  trouve  sur  ji  prolongé;  le  triangle  sjp  est 
donc  isoscèle  et  on  a  :  ijp  =  spj  =  opi.  Donc,  enfin,  nous 
trouvons  pour  valeur  du  rayon 

ip  sin  opm 
sin  opi 

Cela  posé,  je  vais  démontrer  que  si  du  j)oint  i  j'abaisse 
une  perpendiculaire  sur  la  bissectrice  cp,  cette  perpendi- 
culaire il  sera  égale  à  ij;  dès  lors  on  démontrerait  de 


(    iOD    ) 

même  pour  la  perpendiculaire  abaissée  du  point  /  sur  la 
bisseclrice  (un,  et  par  suite  la  circonlërenee  inscrite  dans 
le  triangle  ogh  sera  en  même  temps  inscrite  dansie  triangle 
formé  par  ac  et  les  deux  bissectrices  ani  et  cp.  Puis  comme 
on  démontrerait  semblablement  qu'une  même  circonfé- 
rence est  inscrite  au  triangle  formé  par  bc,  fo  et  do,  et  en 
même  temps  dans  le  triangle  formé  par  bc  et  les  bissec- 
trices cp  et  bn,  il  en  résultera  que  la  tangente  dh  commune 
aux  circonférences  m  et  w,  est  aussi  tangente  commune 
aux  circonférences  inscrites  dans  les  triangles  formés  res- 
pectivement par  acet  6c  et  les  bissectrices  correspondantes. 
Or  le  triangle  ilp  donne  //  =  ip  sin  ipl.  Pour  évaluer 
ipl,  nous  prendrons  la  somme  des  deux  intérieurs  opposés 
pgc  -+■  pcg.  L'angle  prjc  =  pge=  l""""  —  opi  —  ope.  Pour 
évaluer  pcg  ==  '-^'',  nous  retrancherons  de  4'""  les  trois 
autres  angles  du  quadrilatère  cjot;  ainsi  acb  =  k^^  [jot  -+- 
2jop  -+-  ^otp)  =  4.""  —  (2"^'  —  mpn  —  ^omi  +  lonV). 
\  Remarquons  que  ojp  =  omi,  car  ojp  est  complément  de 
fpj  qui  dans  la  circonférence  s  a  pour  mesure  la  moitié  de 
l'arc  sous-tendu  par  mj\  et  omi  =  pwj  a  pour  mesure  la 
moitié  de  l'arc  sous-tendu  par  jp.\  On  aura  donc  pcg  = 
i**""  —  ope  —  omi  —  onî".  Ajoutant  on  aura  ipl  ^='2'^'  —opi 
—  omi  —  oui'  =  S*^""  —  l"""  —  oni'  =  l"""  —  oui'  =  opi'. 

La  valeur  trouvée  pour  il  est  donc  :  il  =  ip  sin  opi'. 

Enfin  cette  valeur  est  égale,  en  vertu  du  lemme  précé- 
dent, à  celle  que  nous  avons  trouvée  plus  haut  pour  ij.  Ce 
lemme  est  applicable,  car  omi  et  opi  étant  complémen- 
taires, on  a  : 

mlp  =  5''''  —  mop  =  ô''""  —  niOi  —  lop  =  ô*""  —  "t  —  " 

p  n 

__  L  =  O""^  —  -  .  C.  O.  F.  D. 


(  106  ) 

Théorème  :  Supposons  les  trois  cercles  m,  n,  p,  (fig.  o) 
inscrits,  comme  plus  haut,  dans  le  triangle  abc  dont  nous 
regardons  le  plan  comme  horizontal.  Considérons  en  même 
temps  la  circonférence  o,  inscrite  dans  le  triangle  obcf 
comme  la  projection  horizontale  d'une  circonférence  égale, 
placée  à  une  distance  quelconque  du  plan  horizontal;  cette 
dernière  circonférence, avec  chacune  des  précédentes,  déter- 
minera une  surface  conique;  ces  cônes  auront  évidemment 
leurs  sommets  projetés  respectivement  en  a,  b  et  c,  et  je 

dis  que  le  plan  de 
ces  trois  sommets 
aura  pour  trace 
horizontale  la  tra- 
ce du  plan  langent 
aux  trois  sphères 
qui  alliaient  res- 
pectivement les 
circonféiences  m, 
il  et  p  pour  grands 
cercles. 

En  effet,  la  trace  horizontale  de  la  droite  qui  joint  les 
deux  sommets  projetés  en  a  et  b  se  trouve  évidemment  sur 
ba;  puis  le  plan  passant  par  ces  deux  sommets  et  le  point 
0,  coupe  le  plan  horizontal  suivant  mu,  qui  rencontre  ba 
au  centre  de  similitude  externe  des  deux  circonférences 
m  et  n,  etc. 


Théorème  :  Si  par  le  centre  du  cercle  inscrit  à  abc,  on 
mène  des  parallèles  aux  côtés  du  triangle  innp,  ces  paral- 
lèles rencontreront  respectivement  les  côtés  correspon- 
dants du  triangle  abc,  en  trois  points  qui  seront  en  ligne 
droite. 


(  107  ) 
En  effet,  celte  ligne  droite  sera  la  trace  du  plan  des 
trois  sommets   de   cône  cités 
pins  haut ,  sur  le  plan  de  la  base 
/Q\  commune  de  ces  cônes. 

/  \        V-       Problème    (fig.   6)   :   Étant 

yK    ^./"'"T-Sc-         donné  une  circonférence  m  in- 
/[    ^y::^::S:--'"'-''  j\       scrite  dans  l'angle  c  d'un  Irian- 
/|^^K^^J^^y^  gle  donné  abc,  construire  une 

^'^         ^  circonférence  inscrite  dans  l'an- 

gle 6  et  tangente  à  la  première. 

Solution  :  Par  le  centre  m,  je  mène  une  parallèle  à  la 
bissectrice  bo,  jusqu'à  la  rencontre  en  d  avec  ^c;  je  prends 
mf=  md ,  je  mène  bf,  et  je  dis  que  i/ rencontre  la  circon- 
férence m  au  point  du  contact  g  des  deux  circonférences, 
et  que  par  suite  il  suffit  de  tracer  mrj,  pour  obtenir  en  n  le 
centre  cherché. 

En  effet,  supposant  le  problème  résolu,  menons  dmf 
parallèle  à  6o  et  joignons  b(j.  Les  triangles  semblables  bn(j 
et  fnifj  donnent  :  ng  :  mg  =  bn  :  fin. 

D'autre  part,/;  et  q  étant  les  points  de  contact  des  cir- 
conférences m  et  n,  les  triangles  semblables  bnq  dmp 
donnent  nq  :  mp  =  bn  :  dm.  Les  premiers  rapports  de  ces 
proportions  sont  égaux,  donc  fm  =  dm  C.  Q.  F.  D. 

Sc/iulie  :  Dans  le  cas  du  triangle  isoscècle  (fig.  7),  ce  qui 
précède  permettra  de  résoudre  très-simplement  le  pro- 
blème de  Malfalti.  En  effet,  à  cause  de  la  symétrie,  deux 
des  circonférences  seront  égales,  et  inscrites  respective- 
ment dans  les  angles  bda  et  bdc.  Pour  les  obtenir,  on  por- 
tera ce  =  cd,  puis  bf=  be;  le  milieu  g  de  fd,  sera  le  point 
de  contact  des  deux  circonférences  cherchées;  en  élevant 


(  108) 
donc  en  ce  point  ^  une  perpendiculaire  à  fd,  et  lui  donnant 

de  part  et  d'autre  une  longueur 
gh  =  gi  =  gd,  on  aura  les  cen- 
tres des  deux  circonférences 
égales.  Puis  la  troisième  circon- 
férence s'obtiendra  par  le  moyen 
indiqué  dans  la  solution  précé- 
dente. Le  problème  est  ainsi  ré- 
solu beaucoup  plus  simplement 
que  ne  l'avait  fait  Bernoulli 
{OEuvres  de  Bernoulli,  t.  f, 
Genève,  1744.). 

Ajoutons  pour  terminer  que 
mon  travail,  tel  que  je  l'avais 
conçu  d'abord ,  contenait  encore  la  démonstration  de  ce 
théorème  :  dans  le  problème  de  iMallatti,  si  l'on  compare 
deux  angles  du  triangle  donné,  dans  le  plus  petit  angle, 
se  trouvera  la  plus  grande  circonférence. 


Noucellcs  recherches  sur  la  constitution  des  acides  polij- 
Ihioniqnes;  par  M.  Walthère  Spring. 

Les  réactions  que  j'ai  instituées  en  vue  de  dévoiler  la 
constitution  de  l'acide  hyposulfurenx  ont  démontré,  je 
crois,  que  l'on  devait  admettre  dans  cet  acide  l'existence 
d'un  sulfhydryle  à  côté  d'un  oxhydryle,  en  d'autres  termes, 
que  l'acide  dérivait  du  type  conjugué 


"^0 
H  -^  ^ 

H  ^^ 


*^l  non  (lu  ivpe      „ 


(  109  ) 

Une  partie  du  problème  était  résolue;  il  en  restait  une 
autre  plus  importante,  puisque  de  sa  solution  dépendait  !e 
jugement  à  prononcer  sur  l'exactitude  des  idées  que  les 
chimistes  professent  aujourd'hui  sur  la  constitution  de 
tous  les  acides  du  soufre;  cette  autre  partie  consistait, 
comme  on  se  le  rappelle,  à  rechercher  si  le  radical  SO-  que 
renferme  ces  acides,  est  symétrique  ou  non. 

Dans  la  dernière  note  que  j'ai  eu  l'honneur  de  présen- 
ter à  l'Académie  [Bulletins,  l.  XXXVII,  n"  1,  janvier  1874), 
j'avais  émis  l'opinion  que  la  question  serait  résolue  si  l'on 
parvenait  à  démontrer  que  dans  l'acide  hyposulfureux  les 
deux  atomes  de  soufre  sont  en  contact  immédiat  et  non 
réunis  par  l'intermédiaire  d'un  atome  d'oxygène  :  il  suflil 
en  effet  de  considérer  les  formules  suivantes,  les  seules 
actuellement  possibles  d'ailleurs , 

HS . soo . OH 
HS.OSO.OH 
HS.OOS.OH 

pour  se  convaincre  que,  si  l'on  parvient  à  démontrer  que 
les  deux  atomes  de  soufre  sont  en  contact  immédiat,  il 
faut  admettre  la  première  de  ces  formules  comme  devant 
être  la  formule  rationnelle  de  l'acide  qui  nous  occupe  pour 
le  moment  et  de  plus  que  le  radical  SO-  n'est  pas  symé- 
trique. 

Il  est  bien  évident  que  cette  argumentation  n'a  de  valeur 
que  pour  autant  que  l'atome  de  soufre  soit  biatomique  et 
cela  d'une  façon  constante  dans  une  même  molécule  du 
moins.  Dans  ces  derniers  temps  on  a  émis  plusieurs  opi- 
nions sur  ce  point  :  suivant  plusieurs  chimistes  l'atomicité 
serait  une  fonction  de  la  température.  (Michaelis,  Ann. 
der  Cheniie  nd  P/iarm.,  p.  1,  t.  CLXX,  1875.)  Cette  idée 
n'a  pas  encore  été  développée  avec  assez  de  clarté  ni  de 


(  iio) 

«Iclaiis  poiiiqiie  l'on  puisse  s'y  rallier  ou  la  combatlrc;  je 
continuerai  donc  à  admettre  l'atomicité  du  soufre  comme 
constante  et  égale  à  2. 

Depuis  assez  longtemps  déjà  l'action  de  l'iode  sur  les 
sulfures  et  sur  les  mercaptides  était  enregistrée  dans  la 
science;  ce  métalloïde  jouit  en  effet  de  la  propriété  d'unir 
deux  molécules  d'un  monosulfure,  de  façon  à  donner 
naissance  à  une  molécule  de  bisulfure  avec  formation  de 
deux  molécules  d'iodure  d'après  les  équations  : 

2M'S  +  P  =  M'^S^-H^M'I 
2CM1=SM'  -4-  F  =  fCMPy'S'  +  m'\. 

Plus  tard  MM.  Fordos  et  Gélis,  en  étudiant  l'action  de 
l'iode  sur  les  hyposulfiles,  découvrirent  l'acide  lélratliio- 
nique.  Ce  corps  paraît  donc  se  former  d'une  manière  ana- 
logue à  la  génération  des  bisulfures.  Reprenant  l'étude  de 
ces  réactions  de  l'iode,  MM.  Kekulé  et  Linnemann  {Ueber 
die  Einwirknny  von  Jod  auf  einige  organisc/ie  Schwefel- 
verbindungen,  Ann.  d.  Chemie  und  Pharm.,  B.  CXIII,  270), 
émirent  l'opinion  que  chaque  fois  que  dans  une  molécule 
il  se  trouvait  le  groupe  mlfligdryle,  l'iode  réagissait  de  façon 
à  souder  deux  de  ces  molécules,  avec  formation  de  deux 
molécules  d'iodure ,  pour  donner  naissance  à  des  polysul- 
fures.  Si  celte  manière  de  voir  était  exacte,  les  thiacétates 
et  les  sulfocarbonatcs,  dans  lesquels  on  admettait  déjà 
l'existence  du  groupe  SH,  devaient  se  comporter  d'une 
façon  analogue  en  présence  de  l'iode.  On  sait  que  l'expé- 
rience a  justifié  complètement  cette  manière  de  voir  et 
l'on  put  considérer  depuis  lors  comme  très-probable  que 
l'iode  engendrait  chaque  fois  des  polysulfures  par  suite  de 
son  action  sur  les  corps  renfermant  du  soufre.  Cela  étant, 
on  peut  avancer  que  si  l'on  parvient  à  opérer  au  moyen  de 


(  m  ) 

l'iode  la  synthèse  des  acides  polylliioniques  non  encore 
oblenus  par  celte  voie,  il  faut  considérer  ces  derniers 
également  comme  des  polysulfiires  et  de  plus  admettre 
dans  la  molécule  des  corps  sur  lesquels  on  opère  l'exis- 
tence du  groupe  siilffiydrijle. 

1"  Si/nl/ièse  des  lii/posulfites. 

Si  à  un  mélange  d'une  molécule  de  sulfure  de  sodium 
et  d'une  molécule  de  sulfite  neutre  de  sodium  en  solution 
aqueuse  on  ajoute  une  molécule  d'iode,  celle-ci  disparaît 
en  quelques  instants  et  la  liqueur  reste  claire.  Si  l'on  y 
verse  ensuite  une  quantité  suffisante  d'alcool,  le  liquide 
se  divise  en  deux  couches,  la  supérieure  est  de  l'alcool 
étendu  renfermant  en  solution  de  l'iodure  de  sodium  et 
la  couche  inférieure  est  une  solution  concentrée  cVhypo- 
sulfite  de  sodium. 

En  renouvelant  l'alcool  qui  se  trouve  à  la  partie  supé- 
rieure, on  détermine  la  formation  de  heaux  cristaux  d'hy- 
posulfite  de  sodium  que  l'on  peut  soumettre  à  l'analyse. 

Cette  synthèse  si  simple  démontre  à  l'évidence, je  crois, 
que  l'acide  hyposulfureux  renferme  un  sulfhydryle,  et  de 
plus  qu'il  peut  être  considéré  comme  un  polysulfure,  c'est- 
à-dire  que  les  deux  atomes  de  soufre  doivent  se  trouver 
en  contact  immédiat.  Il  devient  donc  très-probable  que  le 
radical  SO'^  soit  constitué  ainsi-S-0-0  dans  l'acide  sulfu- 
reux. 

2°  Synthèse  de  l'acide  fritliiomque  (*). 

En  vue  d'obtenirdes  trithionates  par  l'union  des  sulfites 


(*)  Je  n'ai  (m  oblenir  des  dilhionales  par  l'action  de  l'iode  sur  les  sul- 
liles;  en  quelques  conditions  que  je  me  sois  placé,  j'ai  obtenu  invariable- 
ment des  sulfates.  Croyant  que  cette  action  oxydante  que  l'iode  exerce 
sur  les  sulfites  dissous  dans  l'eau  était  exaltée  par  la  tendance  qu'ont  ces 


(  ii2  ) 

et  des  iiyposulliles,  j'ai  lait  réagir  comme  précédemment 
une  molécule  d'iode  sur  un  mélange  d'une  molécule  d'iiy- 
posuHltede  potassium  et  d'une  molécule  de  sulfite  de  potas- 
sium. L'action  est  plus  vive  que  dans  le  cas  précédent, 
l'iode  disparaît  en  peu  d'instants. 

De  l'alcool  étendu  ajouté  à  la  liqueur  a  déterminé  la 
formation  d'une  poudre  blanche  qui  s'est  rapidement 
déposée.  L'alcool  décanté  a  été  refroidi  et  il  s'est  produit 
une  belle  cristallisation  de  Irithionate  de  potassinni.  La 
poudre  blanche  qui  s'était  déposée  lors  de  l'addition  de 
l'alcool  était  un  mélange  de  trithionate  de  potassium  et  de 
létrathionate  ;  j'ai  pu  les  séparer  avec  netteté  au  moyen 
de  l'alcool  étendu;  le  tétrathionale  de  potassium  est  beau- 
coup moins  soluble  dans  ce  liquide  que  le  trithionate  :  j'ai 
aussi  constaté  la  présence  du  sulfate  de  potassium  dans 
les  produits  de  cette  dernière  réaction,  mais  il  m'a  été 
impossible  de  constater  la  présence  de  la  moindre  trace 
desoufre  libre.  Ce  dernier  point  est  important,  car  il  fait 


derniers  à  se  laisser  oxyder,  j'ai  répélé  les  réactions  sur  les  séléniles  ,  ces 
derniers,  loin  de  s'oxyder  facilement,  étant  plutôt  eux-mêmes  des  oxydants. 
Les  expériences  sont  restées  sans  succès,  l'iode  n'agit  pas  sur  les  sélé- 
niles si  ce  n'est  toutefois  sur  le  sélénite  d'argent  qu'il  transforme  en 
séléniate.  Il  est  pourtant  peu  probable  que  l'acide  dilhionique  ail  une 
autre  constilulion  que  celle  que  M.  Mendelejeff  lui  a  supposée,  car  tout 
récemment  M.  Bunte  {Bericlile  d.  deutschen  chem.  Gesellschaft,  t.  VII, 
p.  446)  vient  de  le  démontrer  par  une  élégante  synthèse.  Ce  chimiste,  en 
faisant  réagir  le  bromure  d'élhyle  sur  de  l'Iiyposulfile  de  sodium ,  a  obtenu 
un  élber  mixte  de  l'acide  hyposulfureux  qui  se  décompose  sous  l'influence 
de  la  chaleur  en  bisulfure  d'élhyle  et  en  dithionate  de  sodium;  ce  dernier 
se  décompose  ultérieurement  en  anhydride  sulfureux  et  en  sulfate  de 
sodium.  Il  est  digne  de  remarque  que  M.  Bunte  soit  arrivé,  par  une  voie 
toute  différente  de  celle  que  j'ai  suivie,  aux  mêmes  conclusions  que  celles 
que  j'ai  déduites  de  mes  recherches  sur  la  constitution  de  l'acide  hypo- 
sulfureux. 


(  113) 

voir  (jue  lo  liilliionate  Je  potassium  ainsi  obtenu  provient 
bien  de  l'action  de  l'iode  sur  le  sulfite  et  l'Iiyposulfite  et 
non  de  la  décomposition  du  létrathionate  également  formé 
qui  peut  abandonner  du  soufre  pour  se  transformer  en 
trithionale.  En  résumé  l'iode  a  donc  réellement  agi  sur 
le  mélange  du  sulfite  et  de  l'iiyposulfite,  tantôt  pour  former 
du  tétrathionate,  tantôt  du  sulfate  et  tantôt  du  tritliionate 
de  potassium,  selon  que  son  action  se  faisait  sur  l'hypo- 
sulfite,  sur  le  sulfite  ou  sur  les  deux  à  la  fois. 

Ces  dernières  synlbèses  démontrent  donc  que  l'action  de 
l'iode  est  beaucouj)  plus  générale  qu'on  ne  l'avait  cru  jus- 
qu'à ce  jour  et  de  plus  que  l'on  doit  considérer  tous  les 
acides  polylhioniques  inorrjaniqnes  comme  des  polysul- 
fnres.  Cette  manière  de  voir  trouve  du  reste  une  belle  con- 
firmation dans  les  analyses  suivantes  des  acides  polythio- 
niques.  Nous  allons  voir  en  effet  que  l'on  peut  scinder  tous 
les  acides  polytbioniques  en  d'autres  plus  simples  par  une 
réaction  entièrement  inverse  de  celle  de  l'iode.  Ces  acides 
sont  donc  décomposés  p«r  dichotomie,  s'il  m'est  permis 
d'employer  cette  expression,  de  façon  à  être  ramenés  fina- 
lement à  des  composés  ne  renfermant  plus  quun  seul 
atome  de  soufre. 

Le  corps  permettant  de  décomposer  de  celte  façon  les 
acides  polytbioniques  est  le  sodium.  Toutefois,  comme  on 
ne  peut  l'employer  tel  puisqu'on  doit  le  faire  agir  sur  les 
sels  de  ces  acides  en  solution  dans  l'eau,  je  l'ai  em[»lové  à 
l'état  d'amalgame.  Cet  amalgame  était  composé  de  trois 
parties  de  sodium  pour  cent  parties  de  mercure. 

De  prime  abord  j'ai  cru  devoir  lenoncer  à  étudier  l'ac- 
tion du  sodium  sur  les  pentatbionates  ;  ces  sels  n'ont  ja- 
mais en  effet  été  obtenus  à  l'état  pur.  Les  analyses  les  plus 
récentes  qui  en  ont  été  publiées  ont  démontré  qiie  l'on 

2""^  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  8 


(  114  ) 
avait  eu  chaque  lois  à  faire  à  un  mélange  d'un  penlathionale 
et  (l'un  télralliionate. 

]''  Action  (lu  sodinin  sur  le  bisulfure  de  sodium. 

Du  l)isulfure  de  sodium  obtenu  en  solution  aqueuse  par 
l'action  d'une  molécule  d'iode  sur  deux  molécules  de  mono- 
sulfure de  sodium  a  été  additionné  d'une  quantité  pesée 
d"amalgame  de  sodium  représentant  exactement  une  molé- 
cule de  sodium  pour  une  molécule  de  bisulfure.  Dès  que 
l'amalgame  se  trouve  dans  la  solution  du  bisulfure  de  so- 
dium, le  mercure  apparaît  avec  tout  son  éclat  métallique  et 
au  bout  de  très-peu  de  temps  les  morceaux  d'amalgame  ont 
abandonné  leur  sodium  en  ne  provoquant  que  le  dégage- 
?ïient  de  très-peii*  d'hydrogène.  Le  sodium  agit  donc  dans 
ces  conditions  sur  le  bisulfure  avec  une  énergie  beaucoup 
plus  grande  que  sur  l'eau  et  le  ramène  à  l'état  de  mono- 
sulfure; on  peut  s'en  convaincre  en  versant  dans  une  por- 
tion de  la  liqueur  de  l'acide  snifurique  étendu;  il  va  déga- 
gement de  sullide  hydrique  sans  précipitation  de  sou fre,  il 
se  produit  seulement  un  faible  louche,  ce  qui  ne  doit  pas 
surprendre  quand  on  considère  qu'une  portion  du  sodium 
a  agi  sur  l'eau  de  la  solution  et  devait  laisser  par  là  une 
portion  du  bisulfure  intact.  On  peut  donc  dire  que  le  so- 
dium s'est  glissé  entre  les  deux  atomes  de  soufre  pour 
engendrer  deux  molécules  de  monosulfure  d'une  molé- 
cule de  bisulfure,  comme  l'équation  suivante  le  montre  : 

NflSSNft  -^-  NaN«  =  2NhS.\«. 

Nous  verrons  plus  loin  qu'on  ne  peut  pas  interpréter 
cette  réaction  en  disant  (|ue  la  molécule  de  sodium  a  de- 
svlfuré  une  molécule  de  bisulfure;  la  démonstration  de  ce 
fait  étant  plus  aisée  dans  le  cas  des  acides,  je  ne  l'entre- 
prendrai pas  ici. 


(  -115  ) 

iXous  allons  retrouver  chez  tous  les  acides  polythioni- 
(jiies  ce  trait  caractéristique  que  nous  venons  de  voir  chez 
le  bisulfure  de  sodium  ;  j'ai  mentionné  ici  celle  propriété 
du  bisulfure  afin  de  faire  voir  qu'elle  est  complètement 
indépendante  des  atomes  d'oxygène  que  la  molécule  peut 
encore  contenir. 

2°  Action  du  sodium  sur  les  hyposulfites. 

J'ai  fait  réagir  une  molécule  de  sodium  sur  une  molé- 
cule d'hyposulfite  de  sodium  en  solution  concentrée  dans 
l'eau.  La  réaction  marche  d'une  manière  beaucoup  plus 
facile  que  précédemment,  le  sodium  disparaît  au  fur  et  à 
mesure  qu'on  projette  l'amalgame  dans  le  liquide;  si  la 
liqueur  a  une  température  de  40°  à  50°,  il  n'y  a  pas  même 
dégagement  d'hydrogène;  ce  n'est  qu'à  la  fin  de  l'opéra- 
tion, lorsque  l'hyposulfite  de  sodium  est  presque  complète- 
ment décomposé  que  ce  dégagement  se  fait. 

La  liqueur  donnait  après  la  fin  de  l'opération  avec  nel- 
leté  les  réactions  des  sulfures.  Je  l'ai  additionnée  d'assez 
de  sulfate  de  zinc  pour  précipiter  tout  le  sulfure  de  so- 
dium formé.  La  liqueur  filtrée  renfermait  du  sulfite  de 
sodium  à  côté  de  très-peu  d'hyposulfite  qui  avait  échappé 
à  l'action  du  sodium. 

Ainsi  une  molécule  de  sodium  agit  sur  une  molécule 
d'hyposulfite  de  sodium  de  façon  à  la  scinder  en  deux  nou- 
velles molécules,  l'une  de  sulfure,  l'autre  de  sulfite. 

Pour  répondre  à  toute  objection  que  l'on  pourrait  faire 
contre  cette  manière  de  voir,  j'avais  l'intention  de  m'as- 
surer  par  des  pesées  si  les  quantités  de  sulfure  et  de  sulfite 
de  sodium  ainsi  produites  se  trouvaient  exactement  dans 
le  rapport  de  leur  poids  moléculaire;  j'ai  du  abandonner 
ce  projet  parce  que  je  me  suis  assuré  que  l'hydrogène  qui 
se  produit  toujours  pendant  la  réaction  agit  sur  le  sulfite 


f  116  ) 
vléjà  formé  pour  le  réduire  peut-être  à  Tétat  d'hydrosuKîte. 
Comme  pendant  cette  réduction  il  y  a  constamment  une 
certaine  quantité  de  sulfure  de  sodium  produite,  fait  que 
j'ai  véritié  par  une  expérience  spéciale,  les  résultats  que 
m'auraient  donnés  les  pesées  ne  pouvaient  plus  avoir  une 
bien  grande  valeur  et  j'ai  préféré  m'abstenir  de  les  exécuter. 
Quoi  qu'il  en  soit, on  pourrait  encore  interpréter  la  réac- 
tion en  disant  que  le  sodium  a  désulfuré  rbyposuHUe  sans 
le  scinder.  Il  n'en  est  cependant  pas  ainsi  :  on  peut  s'en 
assurer  avec  facilité  en  faisant  réagir  une  molécule  de 
sodium  sur  une  molécule  d'hyposuUite  de  potassium;  dans 
ce  cas,  s'il  y  avait  réellement  désulfuration  de  l'hyposulfite, 
la  réaction  devrait  se  passer  comme  suit  : 

c'est-à-dire  que  l'on  devrait  obtenir  un  mélange  de  sulfure 
de  sodium  et  de  sulfite  de  potassium;  si .  au  contraire ,  il  y  a 
scission  de  la  molécule  d'hyposuUite,  la  réaction  doit  se 
passer  ainsi  : 

K2S0'  -^  N'(-  =  NrtKS  -f-  .\«KSO' 

en  d'autres  termes,  au  lieu  d'obtenir  simplement  du  nullité 
de  potassium,  on  doit  obtenir  du  sulfite  double  de  potas- 
sium et  de  sodium.  L'analyse  démontre  qu'il  en  est  réel- 
lement ainsi  :  un  dosage  du  sodium,  du  potassium,  du 
soufre  et  de  l'eau  de  cristallisation  que  ce  sel  renferme 
m'a  donné  les  résultats  suivants  : 

K....'21  .01  % 
Nff  . .  . .  1 2  .  36  Vo 

s....  17.  48% 
-2a.î....  19.69"/, 

nombres  (jui  conduisent  à  la  formule  KNaSO'  +  "laq. 


(  M7  ) 
Il  \  a  en  réalité  un  petit  excès  du  sodium  sur  le  potassium 

21  .51      12.50 


=  10:  11 


mais  il  est  accidentel  et  provient  de  l'action  ultérieure  du 
suHure  de  sodium  sur  le  sulfite  double  formé  d'après 
l'équation  : 

iNaKS  +  NaKSO^=  Na'-SO-  -+-  K^S. 

Je  me  suis  assuré  qu'il  en  était  effectivement  ainsi  en  fai- 
sant cristalliser  du  sulfite  de  potassium  dans  une  solution 
de  sulfure  de  sodium;  il  y  a  en  effet  du  sulfite  de  sodium 
produit. 

Ces  analyses  démontrent  donc  qu'il  y  a  réellement  scis- 
sion de  la  molécule  d'hyposulfite  en  deux  autres,  l'une  de 
sulfite  et  l'autre  d'hyposulfite. 

5°  Action  du  sodium  sur  les  dithionales. 

J'ai  en  premier  lieu  fait  réagir  le  sodium  sur  le  ditliio- 
nate  de  baryum.  Dans  ce  cas  la  réaction  est  très-lente,  le 
sodium  réagit  avec  plus  d'énergie  sur  l'eau  dans  laquelle 
le  sel  est  dissous  que  sur  le  sel  lui-même.  Au  bout  de 
quelques  minutes,  les  morceaux  d'amalgame  de  sodium 
sont  couverts  d'une  pellicule  blanche  insoluble  dans  Peau 
qui  empêche  le  contact  du  liquide,  et  la  réaction  est 
enrayée.  Pour  cette  raison  j'ai  fait  ensuite  réagir  le 
sodium  sur  le  dithionate  de  sodium  pur.  La  réaction 
marche  mieux  que  dans  le  cas  précédent,  elle  n'est  plus 
enrayée;  cependant  elle  est  incomparablement  plus  lente 
qu'avec  les  sulfures  et  surtout  les  hyposulfiles;  il  faut  près 
de  vingt-quatre  heures  pour  terminer  la  réaction  du  so- 
dium sur  50  grammes  de  dithionate.  Comme  pendant  tout 
oe  temps  le  dégagement  d'hydrogène  est  assez  intense,  une 


(118) 
portion  du  sulfite  produit  se  réduit  à  l'état  d'hydrosuHite 
avec  production  de  sulfure.  La  liqueur  contient  après  réac- 
tion du  sulfite,  de  l'hydrosulfite  et  du  sulfure  de  sodium; 
ces  deux  derniers  produits  étant  accidentels  (voir  plus 
haut),  on  peut  donc  écrire  l'équation  : 

No''S-0«  +  N«2  =  2Na^S0^ 

4-°  Action  du  sodium  sur  les  Irithionates. 

Bien  plus  énergique  est  l'action  du  sodium  sur  les  Iri- 
thionates. Le  trilhionate  de  sodium  étant  trop  peu  stable 
en  solution  aqueuse,  j'ai  employé  le  trithionale  de  potas- 
sium. Dans  une  première  expérience  j'ai  fait  réagir  une  mo- 
lécule de  sodium  sur  une  molécule  de  trithionate.  L'action 
est  tellement  vive  qu'il  n'y  a  aucun  dégagement  d'hydro- 
gène si  la  solution  est  concentrée.  Une  molécule  de  trithio- 
nale est  décomposée  nettement  en  deux  autres  de  sulfite  ei 
d'hyposulfite  d'après  l'équation  : 

KO'S'O^K  -+-  Nrt  Na  =  NaS^O^K  -+-  NaSO'K. 

On  peut  séparer  ces  sels  avec  facilité  par  le  moyen 
suivant  :  on  ajoute  à  la  liqueur  de  l'alcool ,  le  mélange  des 
deux  sels  doubles  ne  se  précipite  pas,  mais  se  dépose  à 
l'état  sirupeux  au  fond  du  vase  dans  lequel  on  opère;  si  à 
cette  dernière  liqueur  on  ajoute  du  sulfate  de  cadmium  , 
il  se  forme  un  précipité  lloconneux  de  sulfite  de  cadmium 
et  l'hyposulfite  reste  en  solution.  Les  caractères  de  ces 
sels  sont  si  nets  qu'il  m'a  paru  superflu  de  les  identifier 
par  une  analyse  quantitative. 

En  second  lieu  j'ai  fait  réagir  deux  molécules  de  sodium 
sur  une  molécule  de  trithionate  de  potassium;  dans  ce  cas 
on  obtient  en  résultat  final  un   mélange  de  sulfure  de 


(  H9  ) 
sodium  et  de  sulfite  double  de  sodium  el  de  potassium , 
Faction  se  passe  donc  en  deux  phases  comme  il  suit  : 

(2)  KNttS'^O'^  -f-  NV(-  =  K.\«S05  -+-  Nn^S. 

Ces  réactions  ont  lieu  avec  une  netteté  surprenante.  Si 
l'on  emploie  exactement  le  poids  d'amalgame  de  sodium 
nécessaire  pour  la  réaction  exprimée  par  l'équation  (1),  on 
ne  peut  constater  que  la  présence  de  sulfite  et  d'hyposul- 
fite  dans  la  liqueur;  si,  au  contraire,  on  n'emploie  que  quel- 
ques centigrammes  d'amalgame  de  trop,  ce  qui  ne  corres- 
pond qu'à  un  milligramme  environ  de  sodium,  la  liqueur 
précipite  en  noir  les  sels  de  plomb,  ce  qui  démontre  la 
présence  d'un  sulfure,  ou,  en  d'autres  termes,  que  l'excès 
de  sodium  a  agi  d'après  l'équation  (2). 

4"  Action  du  sodium  sur  les  tétrathionates. 

J'ai  fait  réagir  l'amalgame  de  sodium  sur  le  tétrathionate 
de  potassium  :  l'action  est  un  peu  moins  énergique  que 
dans  le  cas  précédent,  mais  elle  est  tout  aussi  nette.  Une 
molécule  de  sodium  décompose  exactement  une  molécule 
de  téthralhionate  de  potassium  en  deux  molécules  d'hypo- 
sulfite  double  de  sodium  et  de  potassium,  qui ,  en  présence 
d'un  excès  de  sodium,  se  scinde  en  sulfure  de  sodium  et 
en  sultite  double  de  potassium  et  de  sodium. 

Ayant  obtenu  un  hyposulfile  double  de  sodium  et  de 
potassium  constitué  ainsi  iNaSSOOOK,  j'ai  voulu  m'assurer, 
en  répétant  la  réaction  du  sodium  sur  le  tétrathionate  de 
plomb,  s'il  ne  serait  pas  possible  d'arriver  ainsi  à  un  hypo- 
suKite  double  de  plomb  et  de  sodium  isomère  de  celui 
connu  jusqu'à  ce  jour.  On  doit  en  eflet  admettre  que  les 
liyposulliles  doubles  de  plomb  et  de  sodium  sont  constitués 


(   120  ) 
connue  siiil  : 

SSOOO.Na 

Pb  < 

en  d'aulrcs  termes,  que  le  plomb  se  trouve  à  l'état  de  sul- 
fure et  non  d'oxyde  dans  ces  sels  et  cela  à  cause  de  la 
facilité  avec  laquelle  le  sulfure  de  plomb  se  sépare  pour 
donner  naissance  à  des  tritliionales  (voir  :  Biillelins  de 
r Académie  royale  de  Belgique^  2'"''  série,  t.  XXXVII,  n"  1, 
1874).  J'ai  constaté  récemment  que  même  la  lumière  solaire 
produit  cette  précipitation  de  sulfure  de  plomb  et  qu'on 
peut  la  mener  très-loin  si  l'on  a  soin  de  tiltrer  constam- 
ment la  liqueur  pour  enlever  le  sulfure  formé.  D'autre  part 
l'action  du  sodium  sur  le  tétrathionale  de  plomb  se  faisant 
comme  suit  : 

^  OOOSS  OOOSSNrt. 

^  OOOSS  ^  OOOSS.Nrt 

je  devais  arriver  à  un  byposullile  double  isomère  des  pre- 
miers et  n'abandonnant  probablement  plus  du  sulfure  de 
plomb. 

Dès  l'instant  où  l'on  introduit  l'amalgame  de  sodium 
dans  la  solution  de  tétratbionate  de  plomb,  les  morceaux 
se  couvrent  d'une  pellicule  blancbe  qui  empècbe  le  con- 
tact du  liquide  et  de  l'amalgame  et  l'action  est  enrayée,, 
mais  elle  se  continue  sur  le  précipité  blanc  à  l'endroit  où 
celui-ci  touche  l'amalgame.  Ce  précipité  n'est  que  l'hyposul- 
fite  cherché;  par  l'action  subséquente  du  sodium  il  se  forme 
du  sulfite  de  plomb  et  du  sulfure  de  sodium  qui  précipite 
le  plomb  à  l'état  de  sulfure.  Il  me  fut  donc  impossible  de 
recueillir  de  grandes  quantités  de  ce  sel  en  vue  d'en  faire 
raualyse.Quoi  qu'il  en  soit,  on  pourrait  peut-être  invoquer 


(  121  ) 
le  lait  (le  l'insolubilité  de  ce  sel  dans  l'eau  comme  preuve  de 
son  isomérie  avec  le  sel  connu,  ce  dernier  étant  soluble. 

5"  Action  de  VamaUjame  de  sodium  sur  les  hyposulfiles 
coujufjués. 

L'action  de  l'amalgame  de  sodium  sur  les  hyposulfiles 
conjugués  ne  devait  pas  manquer  d'intérêt;  on  sait  en  effet 
qu'ils  prennent  naissance  par  l'aclion  d'un  sulfure  alcalin 
sur  le  chlorure  du  radical  d'un  acide  sulfo-conjugué.  Pen- 
dant celte  réaction  il  y  a  précipitation  de  soufre,  mais  ce 
dernier  se  dissout  ensuite  et  donne  naissance  à  l'iiyposulfite 
conjugué.  Comme  on  ne  peut  admettre  que  le  soufre  rentre 
dans  ce  cas  à  la  place  qu'il  a  abandonnée  lors  de  sa  préci- 
pitation ,  on  reste  indécis  sur  la  question  de  savoir  s'il  s'est 
placé  entre  les  deux  atomes  d'oxygène  restant  ou  bien  s'il 
s'est  placé  entre  un  atome  d'oxygène  et  le  second  atome  de 
soufre  comme  les  formules  suivantes  le  montrent  : 

C^H^SOSOK     (1) 
C^H^SSOOK     (2) 

la  seconde  de  ces  formules  est  la  plus  probable.  Si  l'amal- 
game de  sodium  agit  sur  ce  corps  comme  sur  les  polylhio- 
nates  inorganiques,  il  devait  se  former  du  mercaptate  de 
sodium  d'une  part  et  un  acide  iMK  SO-  d'autre  part.  L'expé- 
rience a  démontré  entièrement  l'exactitude  de  ces  prévi- 
sions. 

L'amalgame  de  sodium  que  l'on  projette  dans  une  solu- 
tion d'éthylhyposultite  de  sodium   (*)   ne  donne   lieu  à 


(*)  Jai  employé  rélliylhyposulfile  de  sodium  el  non  le  loluylhyposulfile 
qui  esl  réellement  le  sel  que  M.  Blomstrand  a  découvert,  pour  vériGer 
à  cette  occasion,  dans  la  série  grasse,  le  fait  de  la  précipitation  du  soufre 
lors  de  l'action  du  sulfure  alcalin  sur  le  chlorure  acide  comme  cela  a  lieu 


(  122  ) 
aucun  dégagement  d'hydrogène  et  abandonne  au  bout  de 
peu  de  temps  son  sodium.  La  liqueur  ainsi  obtenue  a  été 
divisée  endeux  parlies;la  première  additionnée  de  quelques 
gouttes  d'acide  sulfurique  a  dégagé  une  forte  odeur  de 
mercaptan  qui  suffisait  pour  s'assurer  de  sa  présence;  la 
seconde  partie  possédant  des  propriétés  réductives  éner- 
giques et  renfermant  une  notable  quantité  de  sulfure  de 
sodium.  Ce  dernier  m'a  empêché  d'identifier  avec  certitude 
le  corps  réducteur  que  renfermait  la  liqueur,  chaque  fois 
que  j'ai  tenté  d'opérer  la  séparation  du  sulfure  de  sodium, 
les  propriétés  réductives  étaient  fortement  diminuées  et 
complètement  éteintes  après  quelques  traitements. 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  peut  pourtant  formuler  cette  réac- 
tion comme  suit  avec  quelque  probabilité  : 

(  I  )  C'H^S^OWa  H-  Na^  —  CnPSNa  H-  Na^SO^ 

^2)  >VS02  -f-  2Na2  -+-  4H'^0  =  Na^S  -+-  4NflH0. 

le  sodium  agirait  donc  sur  les  hyposuHiles  conjugués 
comme  sur  les  hyposulfites  inorganiques  avec  cette  diffé- 
rence qu'au  lieu  de  donner  naissance  à  un  sullile  à  côté 
d'un  sulfure,  il  donnerait  naissance  à  un  corps  de  formule 
Na^SO-  (peut-être  un  hydrosulfile?)  qui  subit  une  action 
ultérieure  de  la  part  du  sodium  et  qui  est  réduit  à  l'état  de 
sulfure. 

Il  résulte  de  l'ensemble  de  ces  faits  que  le  sodium  n'agit 
pas  sur  les  polylhionates  dissous  dans  l'eau  à  la  façon  d'un 


•lans  la  série  aromatique  (voir  les  Bulletins  de  IWcadcmie  royale  de  Bel- 
gique,  I.  XXXVI,  11"  8,  1875).  J'ai  pu  constater  que  la  substitution  de 
Pélhyle  au  loluyle  ou  au  phéiiyle  n'avait  aucune  influence  sur  la  précipita- 
lion  du  soufre,  et  que  les  phénomènes  se  passaient  avec  les  acides  siilfo- 
niquosde  la  série  grasse  comme  avec  ceux  de  la  série  aromatique. 


(  123  ) 
corps  réducteur;  dans  aucun  cas  ces  acides  ne  passent  à  un 
degré  d'oxydation  moindre;  le  sodium  scinde  ces  sels  en 
d'autres  plus  simples  et  effectue  de  point  en  point  la  réaction 
inverse  de  l'iode.  Ces  deux  réactions  se  corroborent  donc 
et  montrent  toutes  deux  que  ces  acides  peuvent  être  con- 
sidérés comme  des  polysult'ures. 


APPENDICE. 

D'après  ce  que  l'on  vient  de  voir,  l'action  de  l'iode  sur 
les  corps  sulfurés  est  générale;  il  devenait  donc  probable 
qu'au  moyen  de  ce  réactif  on  pourrait  obtenir  les  acides 
dont  Mendelejeff  a  prévu  l'existence  en  se  laissant  guider 
par  des  vues  théoriques  générales;  on  se  rappelle  que  ces 
acides  auraient  pour  formules  : 

H^S^O^     et     H^S'O^. 

L'iode  devrait  donc  les  engendrer  par  son  action  sur  un 
mélange  d'une  molécule  de  monosulfure  de  sodium  et 
d'hyposullite  de  sodium  ou  d'une  molécule  de  bisulfure  de 
sodium  et  d'hyposullite  de  sodium  d'après  : 

Na^S^O'  -+-  Na^S  -+-  1^  =  Na*S'0'  H-  2i\al 

il  m'a  été  impossible  de  constater  la  moindre  trace  de  ces 
acides  dans  les  produits  de  la  réaction;  il  paraît  donc  que 
les  forces  moléculaires  ne  permettent  pas  l'existence  de 
corps  ainsi  constitués;  l'on  n'est  donc  pas  autorisée  com- 
pléter hypothétiquement  les  lacunes  que  présente  la  série 
ihionique. 


(  J24  ) 


Remarques  sur  la  variabililé  de  certaines  espèces  clu  genre 
Calliste,  par  M.  Alph.  Diihois,  conservateur  au  Musée 
royal  d'histoire  naturelle  de  Belgique. 

Chargé  depuis  plusieurs  années  de  l'étude  des  collec- 
tions oruithologiques  du  Musée  de  l'État,  mon  attention  a 
été  attirée,  dès  le  début  de  mes  travaux,  par  les  ressem- 
blances qui  rapprochent,  dans  un  même  groupe,  certaines 
formes  que  l'on  a  érigées  au  rang  d'espèces.  Aussi  ai-je 
cherché,  il  y  a  quelques  années,  à  rattacher  aux  types 
européens  anciennement  connus,  les  variations  locales 
dont  on  avait  fait  des  espèces  distinctes  (1).  Aujourd'hui 
je  crois  être  arrivé  au  même  résultat  pour  plusieurs  genres 
exotiques,  grâce  aux  belles  séries  d'oiseaux  réunies  jadis 
à  Bruxelles  par  les  soins  de  M.  le  vicomte  B.  Du  Bus,  et 
complétées  par  divers  envois  récents,  dont  plusieurs  pro- 
viennent de  localités  encore  peu  explorées. 

Parmi  les  groupes  que  j'ai  été  amené  à  reviser  se  trouve 
le  magnifique  genre  Callisle,  dont  M.  Sclater  a  publié  une 
remarquable  monographie  (2). 

Ce  genre  m'a  paru  intéressant  à  un  double  point  de  vue  : 
d'abord  il  se  subdivise  en  un  grand  nombre  d'espèces  net- 
tement caractérisées  et  complètement  distinctes  les  unes 
des  autres;  mais  à  plusieurs  de  ces  formes  contrastantes 


(1  )  Voy.  mon  Couspeclus  syst.  et  geogr  avium  europœarum ,  Bruxellis , 
1871,  et  ma  note  De  la  variabilité  de  certains  oiseaux.  (Rev.  et  mac.  de 
ZOOL.,  1875,  p  386.) 

(2)  A  Monoyraph  of  tlie  Tanagrine  genus  Calliste.  London,  1837. 


(  425  ) 
correspondent  (les  formes  beaucoup  plus  rapprochées,  qui 
n'en  diffèrent  en  réalité  que  par  des  caractères  très-secon- 
daires. Puis,  chacune  de  ces  formes  types  se  groupe  avec 
ses  variantes  dans  une  région  bien  définie,  et  chacune  de 
ces  variantes  ou  race  est  elle-même  propre  à  une  partie 
distincte  de  cette  région. 

Les  Callistes  sont  donc  un  bon  sujet  d'étude  pour 
rechercher  les  rapports  qui  peuvent  exister  entre  les  varia- 
tions des  types  spécifiques  et  leur  répartition  géogra- 
phique. 

Si  l'on  admet,  comme  on  le  fait  encore  généralement  en 
ornithologie,  la  fixité  absolue  de  l'espèce,  il  est  clair  que 
toutes  ces  modifications,  qu'elles  soient  importantes  ou 
secondaires,  prendront  aux  yeux  du  naturaliste  la  valeur 
des  types  spécifiques.  On  serait  naturellement  amené,  dans 
cette  manière  de  voir,  à  multiplier  de  plus  en  plus  le  nom- 
bre des  espèces  dans  la  plupart  des  genres,  ce  qui,  à  mon 
avis,  pourrait  être  considéré  comme  un  progrès  très-con- 
testable. 

Mais,  si  l'on  considère  le  type  spécifique  comme  pouvant 
subir,  dans  l'espace,  des  variations  assez  étendues,  les 
faits  de  la  nature  de  ceux  que  je  viens  de  signaler  s'inter- 
prètent difléremment.  Au  lien  de  diviser  le  genre  en  un 
aussi  grand  nombre  d'espèces,  les  unes  offrant  des  con- 
trastes considérables  et  les  autres  d'étroites  affinités,  on 
ne  distinguera  comme  types  s|)écifiques  que  les  formes 
contrastantes,  tandis  qu'on  réunira  autour  de  ces  types,  à 
titre  de  variétés  ou  races,  les  formes  moins  tranchées  qui 
leur  sont  res[)ectivement  apparentées.  En  outre,  comme 
ces  dernières  caractérisent  des  régions  plus  ou  moins  voi- 
sines de  celle  habitée  par  la  forme  type,  elles  prendront 
l'importance  de  variétés  géographiques,  et  nous  pourront 


(  426  ) 
ainsi  formuler  l'élendue  des  écarts  morphologiques  dans 
leurs  rapports  avec  les  aires  de  dispersion. 

C'est  ce  point  de  vue  que  j'ai  cru  devoir  adopter  pour 
la  révision  du  genre  Callistc,  et  j'ai  l'honneur  de  le  sou- 
mettre à  l'Académie. 

Genre  CALLISTE,  Boie,  182G. 

Espèces  litigieuses  : 

{.  C.  coELicoLOR,  Sciai.  {MoHOcjr.  uf  the  gcn.  Callislc,  pi.  1,  f.  2). 
—  Ne  diffère  du  type  lalao  que  par  uue  taille  un  peu  plus  forte  et 
un  plumage  plus  brillant. 

2.  C.  YEM,  Lafr.  (Sclat.,  /.  c,  pi.  il).  —  Se  distingue  du  précédent 
par  l'absence  de  jaune  sur  le  croupion. 

3.  C.  GUTTATA,  Cab.  (Sclat.,  l.  c,  pi.  IX).  —  C'est  une  race  locale 
du  C.  punctata,  caractérisée  par  la  teinte  verte  plus  vive  et  les  par- 
ties inférieures  bleuâtres;  la  disposition  des  taches  est  entièrement 
comme  chez  le  punctata. 

i.  C.  XANTHOGASTRA,  Sclat.  (/.  C. ,  pi.  X).  —  Sc  distingue  du  même 
type  par  la  prédominance  du  jaune  sur  les  parties  ventrales;  la  teinte 
verte  est  aussi  moins  uniforme  et  passe  au  jaunâtre  sur  le  croupion 
ainsi  que  sur  les  flancs. 

8,  C.  ScLATERi,  Lafr.  (Sclat. ,  /.  c,  pi.  XIV,  f.  2).  —  Diffère  très- 
peu  du  C.  aurulcnta;  il  est  même  impossible  de  lui  assigner  un 
caractère  qui  puisse  le  faire  admettre  comme  variété,  d'autant  plus 
qu'il  habite  la  même  région  que  ce  dernier.  C'est  du  reste  ce  que 
M.  Sclater  lui-même  a  reconnu. 

6.  C,  PULCHRA,  Tsch.  (Sclat..  /.  c,  pi.  XV).  —  Se  distingue  au 
contraire  avec  assez  de  facilité  du  C.  aMr«</en?«,  par  une  taille  plus 
forte  et  par  le  jaune  de  la  gorge  et  du  haut  de  la  poitrine  passant  au 
brun-marron.  Mais  ces  caractères  sont-ils  suffisants  pour  le  consi- 
dérer comme  un  type  spécifique  à  part?  Je  ne  le  pense  pas.  Une  col- 
lection de  la  république  de  TÉquateur  dont  M.  de  Ville,  consul  de 
Belgique  à  Quito^  vient  de  gratifier  le  Musée,  contenait  trois  beaux 
exemplaires  de  cet  oiseau;  l"un  d'eux,  qui  doit  cire  une  femelle  ou  un 


(  127  ) 

jeune  vu  l'éclat  atténué  des  teintes,  n'offre  pas  la  moindre  trace  de 
brun  à  la  gorge.  Les  deux  autres  sont  des  mâles  adultes,  mais  la 
teinte  brunâtre  de  la  gorge  y  est  si  peu  perceptible  qu'elle  ne  peut 
plus  servir  sérieusement  de  caractère  dislinctif.  Quant  à  la  taille,  elle 
est  fort  variable  chez  le  C.  aurulenta,  et  par  conséquent  il  serait  diffi- 
cile qu'elle  caractérisât  le  pulchra  (1). 

7.  C,  cYANOL^MA,  Bp.  (nou  figuré).  —  La  ressemblance  de  cet  oiseau 
avec  le  C.  cuyana  esl  tellement  sensible,  qu'on  est  généralement 
d'accord  pour  le  réunir  à  ce  dernier.  Il  diffère  cependant  du  type 
de  la  Guyane  par  une  taille  moins  forte  et  un  plumage  plus  bril- 
lant. 

8.  C.  GVROLoiDEs,  Lafr.  (Sclat.,  /.  c,  pi.  XXVI).  —  Cet  oiseau  dif- 
fère du  C.  (jrjroUi  par  la  présence  de  quelques  plumes  bleues  sur  le 
croupion,  par  la  couleur  bleue  des  parties  inférieures  qui  monte  jus- 
qu'aux plumes  brunes  du  menton,  sans  être  isolée  par  du  vert; 
enfin,  par  l'absence  de  jaune  aux  épaules,  qui  sont  d'un  vert  très- 
jaunâtre. 

9.  C.  Desmaresti,  Gray.  (Sclat.,  l.  c,  pi.  XXVIl).  —  Cette  variété 
du  gyrola  se  caractérise  par  l'absence  complète  de  bleu  :  tout  le  corps 
est  d'un  vert  vif. 

\0.  C.  FLAVivENTRis,  ViciU.  (Sclat.,  /.  c,  pi.  XXIX).  —  Se  dis- 
tingue principalement  du  C.  bi'asilicnsis  par  la  teinte  jaune  pâle  des 
parties  ventrales,  et  par  la  couleur  des  épaules  qui  est  bleue. 

II.  C.  ViEiLLOTi,  Sclat.  (mcxiccaia,  Bp.)  non  figuré.  —  Cet  oiseau 
ne  diffère  que  fort  peu  du  fluviventris  ;  il  s'en  distingue  par  les  couver- 
tures inférieures  des  ailes  qui  sont  jaunes,  tandis  qu'elles  sont  d'un 
blanc  légèrement  jaunâtre  chez  le  fluviventris. 

42.  C.  BoLiviANA,  Bp.  I  Sclat.,  /.  c,  pi.  XXX).  —  Se  distingue  de 
ce  dernier  par  les  parties  inférieures  qui  sont  d'un  jaune  vif  et  par  le 
manque  de  bleu  aux  épaules. 

13.  C.  cvANEscENS,  Sclat.  {l.  c,  pi.  XXXV).  —  Je  ne  connais  pas 
cet  oiseau  en  nature;   mais  h  en  juger  par  la   figure  donnée  par 


(1)  J'ai  sous  les  yeux  neuf  individus  du  C.  aurulenta  dont  la  taille  varie 
entre  10  '/^  et  15  centimètres;  celle  des  trois  individus  du  pulclira  varie 
entre  1-i  et  lîi  centimètres. 


(  128  ) 

M.  Sclatcr,  je  ne  puis  le  considérer  que  comme  une  var.  du  C.  niyri- 
iuridis,  dont  la  taille  est  plus  forte  et  la  teinte  verte  plus  ou  moins 
bleuâtre. 

14.  C.  Fa.nny,  Lafr.  (Des  M.,  le.  orn.,  pi.  LVI,  f.  1).  —  Le  Musée 
vient  de  recevoir  de  Guatemala  un  envoi  dans  lequel  se  trouvaient 
plusieurs  individus  de  cet  oiseau.  Comparé  à  Texemplaire  type  du 
C.  larvata  figuré  par  M.  Du  Bus,  je  n'ai  rien  pu  remarquer  qui  puisse 
séparer  le  C.  Fanmj  de  ce  dernier ,  si  ce  n'est  la  taille  qui  est  plus 
petite  chez  les  spécimens  de  Guatemala. 

15.  C.  LUNiGERA,  Sclat.  [L  c,  pi.  XLII).  —  Je  ne  remarque  que 
fort  peu  de  différence  entre  cet  oiseau  et  le  C.  Parzudakii.  Le  lunigera 
se  distingue  principalement  de  ce  dernier  par  la  couleur  jaune  d'or 
de  la  tête  qui  s'arrête  à  l'occiput,  tandis  que  cette  couleur  descend 
jusqu'à  l'origine  du  dos  chez  le  Parzudakii;  il  se  caractérise  en 
outre  par  les  rémiges  secondaires  qui  sont  marginées  de  vert  sur  leur 
bord  externe. 

16.  C.  VENLSTA,  Sclat.  (l.c,  pi.  XLIV,  f.  2).  —  N'est  qu'une  variété 
d'u  C.  xanthocepliala.  La  teinte  jaune  d'or  uniforme  de  la  tête  et  la 
taille  moins  forte  àuvctmsfa,  ne  sont  pas  des  caractères  sufiisautspour 
en  faire  une  espèce  distincte. 

En  résumé,  je  propose  de  rapporter  les  oiseaux  men- 
tionnés ci-dessus  aux  types  avec  lesquels  ils  ont  d'étroites 
aftinités,  tout  en  les  distinguant  comme  races  ou  variétés. 
Nous  aurons  donc  : 

c.  TATAO,  Gr.  ex.  L Rio-Negro,  Giiyanes. 

var.:  Jc.  Cte//co/or,  Sciai.  .     .     .  .Nouvelle-Grenade. 

;3.    Ye?ii,  Lafr Equateur,  Pérou  or.,  tîolivie. 

C.  l'LNCTATA,  Gr.  ex.  L Cayenne. 

var.  :  a.  G'u.'tofa,  Cab Guyaneangl, Venezuela,  Trinité. 

13.  Xanthoijastra  ,Sc\3il.    .  Nouv. -Grenade,  Equateur, 
Pérou  or. 

C.  AiJRVLEMA,  Gr.  ex.Lafr Nouv.-Grenade,  Equateur. 

var.:  Pu/c/ira,  Tsch E(iuateur,  Pérou  or. 

C.  CAYANA ,  Gr.  ex.  L Guyanes. 

\3r.:Cyanolœma,B[>  .    .     .     .  Rio-Negro. 


(  129  ) 

€.  GYROLA,  Gr.  ex.  L Guyanes. 

var.  :  œ.  Gyroloides,  Lafr.      .    .    Amérique  centr.,  Nouv.-Grenadt-. 

Equateur,  Pérou  or.,  Bolivie. 
!3.  Desmaresli,  Gr.  .     .     .    Trinité,  Venezuela. 

<;.  BRASiLiENSis,  Gr.  ex.  L Brésil  mérid. 

var.:  a.  Flavi venths, \ ieiW.  .    .    Brésil  sept.,  Rio-Negro, Guyane.s. 
j3.  Vieilloti,  Sclat.     .     .     .     Trinité. 

y.  Botiviana,  bp.     .    .    .     Xouv.-Grenade,  Equateur,  Pérou 

or.,  Bolivie. 

<-.  MGRiviRiDis,  Gr.  ex.  Lafr Nouv.-Grenade,  Equateur. 

var.  :  C(/ant;sce/!.s,  Sciai.     .     .    .    Venezuela. 

G.  LARVAT.\,  Du  Bus Mexiquc  luér. 

var.  :  FaHTiy,  Lafr Guatemala,  Nouv.-Grenade. 

G.  PARZUDAKii,  Gr.  ex.  Lafr Nouv -Grenade,  Equateur. 

var.  :  Lunigera  ,  Scliall.     .     .    .     Pérou  or.,  Equateur. 
C.  XAMHOCEPHALA  ,  Scl.  cx.  Tsclj  .     .     .    Pérou  or.,  Bolivie. 

var. :  Venwsfa,  Sciai Nouv. -Grenade, Equateur. 


Description  d'un  Spiz.iëtus  nouveau,  par  M.  Alpli.  Dubois, 
conservateur  au  Musée  royal  d'histoire  naturelle  de 
Belgique. 

SPIZAÉTUS  DEVILLEI.  —  Spizaète  de  de  Ville. 

Ad.  capite,  collo  et  sublùs  albus;  plumis  summi  capitis  ,  cervicis, 
t'pigastrii  lateruni  et  crurum  stria  fuscà  longitrorsum  notatis;  cristâ 
albà,  fusco  tfrminalà,  sed  omnibus  plumis  cristae  minimâ  margine 
albâ  terminatisj  dorso  et  tectricibus  majoribus  alarum  cinereis,  albo 
marginatis;  tectricibus  minoribus  alarum  fuscis,  albo  marginatis; 
remigibus  primarils  cinereis ,  fusco  Icrrainalis ,  quinque  vel  sex  fasclis 
nigris  notatis  et  albis  in  marginc  interna  a  base;  remigibus  secun- 
dariis  fuscis,  albo  terminalis,  fasciis  nigris  plus  minusve  distinclis 
notatis,  albo  marmoralis  in  margine  interna;  tectricibus  subalaribus 
ilbis,  fusco  striatis  aut  maculatis;  caudà  cinereâ,  fusco  marraoratû  et 
2™'  SÉRIE,  T03IE  XX.WIH.  9 


(  130  ) 

tribus  fasciis  nigris  ornalâ.  Rostro  unguibusque  nigris;  cerâ  pedi- 
busque  flavis? 

Ad.  Tète,  cou  et  parties  inférieures  blancs;  plumes  du  dessus  de 
la  tète,  de  la  nuque,  des  flancs  et  des  jambes  marquées  d'une  strie 
longitudinale  brune;  plumes  de  la  huppe  blanches  à  la  base,  brunes 
à  leur  extrémité,  mais  toutes  terminées  par  un  petit  bord  blanc;  dos 
et  grandes  tectrices  alaires  cendrés,  toutes  les  plumes  plus  ou  moins 
bordées  de  blancs;  petites  tectrices  des  ailes  brunes,  bordées  de 
blanc;  rémiges  primaires  cendrées,  brunes  à  leur  extrémité,  mais 
terminées  par  un  petit  bord  blanc,  traversées  par  cinq  ou  six  bandes 
noires  et  marginées  de  blanc  à  leur  bord  interne  sur  les  trois  quarts 
de  leur  étendue  à  partir  de  la  base;  5""=  rémige  la  plus  longue;  rémiges 
secondaires  brunes,  terminées  de  blanc,  à  bandes  noires  plus  ou 
moins  distinctes  et  à  bord  interne  marbré  de  blanc;  tectrices  sub- 
alaires  blanches,  striées  ou  tachées  de  brun;  queue  gris-cendré, 
marbrée  de  brun,  terminée  de  blanc  et  ornée  de  trois  bandes  noires. 
Bec  et  ongles  noirs  ;  cire  et  pattes  probablement  jaunes. 

Jeune  :  tête  et  cou  fauves  tachés  de  brun  ;  gorge  blanche,  avec 
quelques  plumes  noires  sous  le  bec  et  entourée  d'un  demi-collier  éga- 
lement noir;  dos  noir;  ailes  formées  dun  mélange  irrégulier  de 
plumes  noires  et  brunes,  ces  dernières  souvent  bordées  de  blan- 
châtre; rémiges  comme  chez  l'adulte;  parties  inférieures  d'un  brun 
roussâtre  mélangé  de  blanc ,  mais  toutes  les  plumes  d'un  brun  foncé 
au  centre  et  généralement  bordées  de  blanc;  plumes  des  jambes  et 
sou5-caudales  d'un  fauve  pâle;  queue  comme  chez  l'adulte,  mais  ter- 
minée de  fauve;  le  noir  terminal  de  la  rectrice  médiane  s'ctendant 
jusqu'à  la  seconde  bande. 

Dimensions  : 

Longueur  totale  66  centimètres  chez  l'adulte,  70  chez  le  jeune. 

—  des  ailes  M  centimètres. 

—  de  la  queue  52  centimètres. 

—  des  tarses  1 1  centimètres. 

—  dudjigt  médian  6  centimètres  (ongle  non  compris). 

—  —      interne  4  centimètres. 

—  de  l'ongle  du  doigt  interne  o  centimètres. 

—  —         pouce  6  centimètres. 
Uab.  République  de  1  Equateur. 


!      Bull,  Je  lAcad.  2r  Série  T.3a, 


PLI. 


AJ)id)ois,  (xd.  ivat  del  â:ljt7v 


Imp  0:Severe7^its,£narelles^ 


SPIZAETUS      DEVILLEl,    a    dubois 

Adulte 


Bull,  de  lAcad.  i:  Série  T.:î8. 


PLU. 


A. D: dois  oudjzat  aUl  S^litlv. 


Imp  G-.Se.vereyJis.£nc3aelles. 


SPIZAETUS      DEVILLEl,    a    dubois 


(  131   ) 

Le  5.  Devillei  ne  présente  de  ressemblances  à  signaler, 
parmi  les  espèces  américaines,  qu'avec  le  S.  omatun,  dont 
l'aspecl  d'ensemble  est  assez  analogue;  mais  il  en  diffère 
principalement  par  la  coloration  des  plumes  des  jambes, 
qui  sont  toujours  rayées  de  noir  chez  le  S.  ornatus,  tandis 
que  ces  plumes  n'offrent  qu'une  strie  très-étroite  et  longi- 
tudinale chez  l'adulte  du  S.  Devillei.  Une  autre  différence 
réside  dans  le  nombre  des  bandes  noires  de  la  queue  :  il  y 
en  a  six  chez  le  S.  ornatus  et  seulement  trois  chez  le 
S.  Devillei. 

L'espèce  avec  laquelle  ce  dernier  a  le  plus  de  rapports  est 
peut-être  le  S.  bellicosus  d'Afrique  ;  mais  celui-ci  a  les  ailes 
beaucoup  plus  longues  et  la  queue  ornée  de  huit  bandes. 

Le  jeune  de  notre  espèce  diffère  également  de  celui  des 
autres,  surtout  en  ce  qu'il  présente  déjà  plusieurs  des 
caractères  les  plus  saillants  de  l'adulte,  qui  résident  dans 
les  dimensions  des  diverses  parties  et  dans  la  coloration  des 
rémiges  et  des  rectrices. 

Les  deux  individus  dont  la  figure  est  jointe  à  celte  notice 
ont  été  capturés  à  Baïza  (république  de  l'Equateur)  et 
envoyés  au  Musée  de  Bruxelles  par  M.  E.  de  Ville,  consul 
de  Belgique  à  Quito. 

En  dédiant  cette  espèce  à  M.  de  Ville,  j'ai  voulu  rendre 
hommage  aux  généreux  donateur  qui  a  gratifié  le  musée 
de  l'État  de  collections  importantes  et  variées  de  cette 
région,  dont  l'histoire  naturelle  est  encore  peu  connue. 


(  i32  ) 


CLiUSSE   DES   LETTRES 


Séance  du  6  juillet  187 1. 

M.  ïî.  tiiALOA,  directeur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  Steur,  J.  Grandgagnage ,  J.  Roulez, 
Gachard,  Paul  Devaux,  P.  De  Decker, M.-N.-J.  Leclercq, 
Ch.  Faider,  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove,  J.-J.  Tho- 
nissen,  Th.  Juste,  F.  Nève,  Alphonse  Wauters,  Em.  de 
Laveleye,  G.  rs'vpels,  Alp.  Le  Roy,  membres;  J.  Noietde 
Brauwere  van  Steeland,  Aug.  Scheler,  Alp.  Rivier,  asso- 
ciés ;  J.  Heremans,  Edm.  Pouilet,  Ferd.  Loise,  G.  Rolin- 
Jaequemyns,  Stan.  Bormans,  correspondants. 

M.  Ch.  Monligny,  membre  de  la  classe  des  sciences , 
assiste  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M'"'  Sylvain  Yaii  de  Weyer  adresse,  par  lettre,  ses  re- 
mercîments  pour  les  sentiments  qui  lui  ont  été  exprimés 
par  l'Académie  au  sujet  de  la  mort  de  son  époux. 

Conformément  à  la  demande  qui  lui  en  a  été  laite,  lors 
de  la  dernière  séance,  M.  Th.  Juste  écrit  qu'il  accepte 
riionneur  de  rédiger,  pour  le  prochain  annuaire,  la  notice 


(  i35  ) 
académique  concenianl  M.  Van  de  Weyer.  Cette  notice 
sera  accompagnée  du  portrait  du  défunt. 

—  MM.  Ch.-Aug.  De  Ceuleneer  et  l'abbé  Van  Weddin- 
gen  accusent  réception  de  leur  médaille  de  concours ,  et 
remercient,  à  cette  occasion,  pour  la  distinction  dont  ils 
ont  été  l'objet. 

—  M.  Gachard  annonce  la  publication  du  tome  IIl  des 
Monuments  pour  servir  à  l'histoire  des  provinces  de 
Natnur,  de  Hainaiit  et  de  Luxembourg,  faisant  partie 
des  Chroniques  de  la  Commission  royale  d'histoire. 

—  La  Société  des  Amis  de  l'antiquité  de  la  Prusse 
thénane,  à  Bonn ,  remercie  pour  les  dernières  publications 
académiques  et  envoie  ses  récents  travaux. 

M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenbove  fait  hommage,  au 
nom  de  la  commission  académique  de  publication  des 
grands  écrivains  du  pays,  du  Glossaire  que  M.  Aug.  Scheler 
a  rédigé  pour  les  oeuvres  de  Froissart.  Ce  volume  forme 
le  tome  XIX"  des  Chroniques. 

Le  même  académicien  offre  ensuite  le  tome  III  des 
Lettres  et  négociations  de  Philippe  de  Commines,  qu'il 
vient  de  publier  dans  la  collection  précitée. 

La  classe  vote  des  remercîments  à  MM.  Kervyn  et 
Scheler. 

Elle  vole  également  des  remercîments  à  M.  Heremans, 
pour  les  ouvrages  suivants  : 

1"  Deknople  nederlandsche  metriek  (  Iweede  druk), 
in-12. 

2°  Over  den  inxloed  van  Noord-Aederland  op  de  letter- 
kunde  in  de  zuidelijke  provincien,  gedurende  het  tijdperk 
1815-1830.  In-8°. 


(  154  ) 

M.  Alph.  Wauters  présente  le  second  volume  du  Car- 
tulaire  de  Vabbaye  de  Flines,  par  M.  l'abbé  Hautcœur.  — 
Remercîmenls. 

M.  Alphonse  Le  Roy  fait  hommage,  au  nom  de  M.  Fayen, 
de  Liège,  d'une  photographie  représentant  deux  pièces  de 
monnaie  d'or  de  l'empereur  Magnence  (5o0  à  335  après 
J.-C),  trouvées  en  1868  à  Juslenvilie,  près  deTheux, 
dans  la  propriété  de  M.  De  Thiers. 

Il  offre  ensuite,  de  la  part  de  M.  Léon  Jacques,  ingé- 
nieur à  Seraing,  les  deux  volumes  suivants  de  cet  auteur  : 

1°  Étude  sur  la  houille  du  bassin  de  Liéye,  première 
partie  {houille  grasse),  in-S"; 

2°  Griffes  roses,  poésies,  pet.  in- 12. 

La  classe  remercie  M.  Léon  Jacques  et  décide  que  la  note 
suivante  lue  par  i\l.  Le  Roy,  au  sujet  de  ce  dernier  volume , 
paraîtra  dans  les  Bulletins. 

«  Le  volume  tout  coquet,  tout  élégant  dont  j'ai  mission 
de  faire  hommage  à  l'Académie,  a  pour  auteur  un  homme 
dont  la  profession  semble  peu  s'accorder  avec  le  culte  des 
Muses.  Mais  l'esprit  souille  où  il  veut.  M.  Léon  Jacques, 
ingénieur  à  Seraing,  est  bien  connu  dans  le  monde  indus- 
triel par  son  invention  d'un  nouveau  gaz  d'éclairage,  dont 
le  succès  est  aujourd'hui  plus  qu'européen;  en  dehors  de 
la  province  de  Liège,  on  savait  à  peine,  jusqu'ici,  qu'il  est 
aussi  un  véritable  poète  :  on  le  saura  maintenant  partout, 
grâce  à  la  publicité  parisienne.  M.  Jacques  a  eu  l'heureuse 
idée  de  réunir  ses  essais,  qui  sont  des  coups  de  maître; 
ardent  patriote,  mais  surtout  cœur  jeune,  chantre  de  la 
jeunesse  et  de  l'amour,  il  se  rattache  essentiellement  à  la 
famille  d'Alfred  de  Musset,  et  comme  ce  maître  il  brille 
non-seulement  par  une  franche  désinvolture,  parfois  un 


(  155  ) 

peu  trop  franche  peut-être,  mais  par  une  rare  distinction 
de  langage.  Son  œuvre,  toute  légère  qu'elle  peut  paraître, 
mérite  à  ces  titres  un  accueil  favorable  dans  cette  enceinte; 
à  n'en  considérer  que  la  forme,  les  connaisseurs  m'accor- 
deront que  bien  peu  d'écrivains  belges  se  sont  montrés 
aussi  délicatement  artistes,  aussi  habiles  ciseleurs  que 
M.  Jacques.  » 

Le  même  académicien  offre,  au  nom  de  M.  Ed.  Barlet , 
professeur  à  l'athénée  royal  de  Liège,  un  exemplaire  de 
son  livre  intitulé  :  Les  rues  de  Liège  :  biographies  et  no- 
tices. 

Les  remercîments  de  la  classe  seront  également  expri- 
més à  cet  auteur,  ainsi  qu'à  M.  Henri  Hardouin,  de  Douai, 
qui  envoie  un  exemplaire  de  son  Essai  sur  Vaboliiioit  de 
la  contrainte  par  corps. 


PROGHAMME  DE  CONCOURS  POUR  1876. 


Conformément  à  l'article  19  de  son  règlement  intérieur, 
la  classe  entend  la  lecture  des  rapports  de  ses  commis- 
saires chargés  de  lui  présenter  trois  sujets  de  littérature 
française,  (ï histoire  nationale  et  de  jurisprudence  \iom' 
le  choix,  dans  chacune  de  ces  branches,  d'une  question 
destinée  à  compléter  le  programme  de  concours  de  1876, 
dont  elle  s'est  déjà  occupée  dans  sa  réunion  de  juin.  Elle 
a  déjà  adopté  une  question  de  littérature  flamande  et  une 
question  d'histoire  générale. 


(  156  ) 
Après  avoir  choisi  les  trois  sujets  précités,  elle  arrête 
son  programme  de  la  manière  suivante  : 

PREMIÈRE    QUESTION. 

Esquissera  grands  traits  V  histoire  littéraire  du  Hainaut. 

Les  concurrents  s'altacheront  spécialement  aux  écri- 
vains de  premier  ordre  ;  ils  apprécieront  leur  influence  sur 
le  développement  de  la  langue  française,  et  feront  ressor- 
tir le  caractère  et  le  mérite  de  leurs  travaux. 

DEUXIÈME    QUESTION. 

On  demande  une  étude  historique  sur  les  institutions  de 
charité  en  Belgique  depuis  V époque  carlovingietme  jus- 
qu'à la  publication  du  concile  de  Trente. 

Faire  connaître  les  sources  de  leurs  revenus ,  leur  ad- 
ministration^ leurs  rapports  avec  l'Église  et  avec  le  pouvoir 
temporel,  leur  régime  intérieur  ;  apprécier  leur  influence 
sur  la  condition  matérielle  et  morale  des  classes  pauvres. 

TROISIÈME    QUESTION. 

Faij'e  l'histoire  du  droit  de  chasse  et  de  la  législation 
sur  la  chasse  en  Belgique  et  dans  le  pags  de  Liège. 

Ajouter  à  cette  histoire  des  notions  sommaires  sur  le 
même  sujet  en  France,  en  Angleterre ,  en  Allemagne,  en 
Italie  et  en  Hollande. 

QUATRIÈME    QUESTION. 

Faire  l'histoire  de  la  philologie  thioisc  jusqu'à  la  fin  du 
AT/'"'  siècle. 


(  157  ) 

CINQUIÈME    QUESTION. 

Faire  un  exposé  des  négociations  qui  aboutirent  au 
traité  de  Westphalie  (1648).  Indiquer  le  caractère  et  les 
résultats  de  cet  acte  célèbre  par  rapport  aux  Pays-Bas. 

L'Académie  désire  que  les  concurrents  consultent  les 
documents  inédits. 

Le  prix  de  la  première,  de  la  deuxième  et  de  la  troi- 
sième question  sera  une  médaille  d'or  de  la  valeur  de  six 
cents  francs;  ce  prix  est  porté  à  mille  francs  pour  la  qua- 
trième et  la  cinquième  question. 

Les  auteurs  des  mémoires  insérés  dans  les  recueils  de 
l'Académie  ont  droit  à  recevoir  cent  exemplaires  de  leur 
travail.  Ils  ont,  en  outre,  la  faculté  d'en  faire  tirer  un 
plus  grand  nombre,  en  payant  à  l'imprimeur  une  indem- 
nité de  quatre  centimes  par  feuille. 

Les  mémoires  devront  être  écrits  lisiblement,  et  pour- 
ront être  rédigés  en  français,  en  flamand  ou  en  latin;  ils 
devront  être  adressés,  francs  de  port,  avant  le  l*"""  février 
1876,  à  M.  J.  Liagre,  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie, 
au  Musée. 

L'Académie  exige  la  plus  grande  exactitude  dans  les 
citations,  et  demande,  à  cet  effet,  que  les  auteurs  indi- 
quent les  éditions  et  les  pages  des  livres  qu'ils  citeront. 

On  n'admettra  que  des  plancbes  manuscrites. 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leur  nom  à  leur  ouvrage; 
ils  y  inscriront  seulement  une  devise,  qu'ils  reproduiront 
dans  un  billet  cacheté  renfermant  leur  nom  et  leur  adresse. 
Faute  par  eux  de  satisfaire  à  celte  formalité,  le  prix  ne 
pourra  leur  être  accordé. 

Les  ouvrages  remis  après  le  temps  prescrit,  ou  ceux 


(  ^58  ) 
dont  les  auteurs  se  feront  connaître,  de  quelque  manière 
que  ce  soit,  seront  exclus  du  concours. 

L'Académie  croit  devoir  rappeler  aux  concurrents  que, 
dès  que  les  mémoires  ont  été  soumis  à  son  jugement,  ils 
sont  et  restent  déposés  dans  ses  archives.  Toutefois,  les 
auteurs  pourront  en  faire  prendre  des  copies  à  leurs  frais, 
en  s'adressant,  à  cet  effet,  au  secrétaire  perpétuel. 


GRAND  PRIX  DE  STASSART. 


CONCOURS  POUR  UNE  QUESTION  d'HISTOIRE  NATIONALE. 

Conformément  à  la  volonté  du  fondateur  et  à  ses  géné- 
reuses dispositions,  la  classe  offre,  pour  la  troisième  pé- 
riode sexennale  de  ce  concours,  un  prix  de  trois  mille 
francs  au  meilleur  travail  en  réponse  à  la  question  sui- 
vante : 

Apprécier  l'influence  exercée  au  AT/"'"  siècle  par  les 
géographes  belges,  notamment  pur  Mercalor  et  Orlclius. 

Donner  un  exposé  des  travaux  relatifs  à  la  science  fjéo- 
graphiquc  qui  ont  été  publiés  aux  Pays-Bas,  et  de  ceux 
dont  ces  pags  ont  été  Cobjet  depuis  l'invention  de  l'impri- 
merie  et  la  découverte  de  l'Amérique,  jusqu'à  ravénement 
des  archiducs  Albert  el  Isabelle.  On  s'attachera  à  la  fois  à 
signaler  les  œuvres,  les  voyages,  les  tentatives  de  toute 
espèce  par  lesquels  les  Belges  ont  augmenté  la  somme  de 
tios  connaissances  géographiques  ,  et  à  rappeler  les  publi- 


(  139  ) 

calions  spéciales  ,  de  quelque  nalure  qu'elles  soient,  qui 
ont  fait  connaître  nos  provinces  à  leurs  propres  habitants 
et  à  l'étranger. 

Les  concurrents  devront  se  conformer  aux  formalités  et 
;iux  règles  des  concours  annuels  de  l'Académie. 

Le  terme  fatal  pour  la  remise  des  manuscrits  expirera 
le  1"  février  1877. 


RAPPORTS. 


Notice  sur  l'origine  des  magistrats  communaux  et  sur 
l'organisation  de  la  marke  dans  nos  contrées  au  moyen 
àrje;  ^iârU.  Léon  Vanderkindere. 

Hnp/nn-l  fie   .7t.  de    l.nreleyc 

«  Le  travail  de  M.  Vanderkindere  me  paraît  offrir  le 
plus  grand  intérêt  et  être  digne,  sous  tous  les  rapports, 
d'être  imprimé  dans  le  recueil  des  Bulletins  de  l'Aca- 
démie. » 

SSn/ijun't  ilf   .11.    yaideè'. 

«  J'ai  lu  ce  travail  avec  beaucoup  d'intérêt  ;  il  révèle  une 
érudition  vaste  et  raisonnée,  et  je  dois  dire  que  le  seul 
défaut  de  l'œuvre  est  sa  brièveté.  Je  pense,  comme  mon 
honorable  confrère  de  Laveleye,  qu'il  y  a  lieu  à  l'impres- 
sion, et  j'espère  que  M.  Vanderkindere  complétera  son 
œuvre.  » 


(  MO  ) 


Kapitofl  de  .W .  .ilpitonse   ll'aulefs. 

«  Le  travail  que  la  classe  m'a  chargé  d'examiner  me 
paraît  de  nature  à  être  imprimé  dans  ses  Bulletins;  je  dois 
toutefois  déclarer  que  j'y  ai  rencontré  des  faits  qui  m'ont 
paru  dénaturés,  des  opinions  que  je  ne  puis  accepter  en 
aucune  manière.  L'auteur  me  semble  avoir  adopté  à  priori 
une  thèse  qu'il  défend  par  tous  les  moyens  possibles,  et  à 
laquelle  il  sacrifie  de  la  manière  la  plus  absolue  le  dévelop- 
pement du  corps  social  dans  nos  contrées. 

Cette  thèse,  la  voici  telle  qu'il  la  résume  dans  ses  con- 
clusions :  «  Nos  magistrats  communaux  ont  une  double 
»  origine  et  un  double  caractère  :  les  échevins  sont  les 
»  juges  de  la  centène  franque,les  conseillers  sont  les  admi- 
»  nistrateurs  de  la  Markgenosseiiscliaft  (terme  que  l'on 
»  pourrait  rendre  en  français  par  celui  de  voisinage)  ger- 
»  manique.  » 

La  première  question  que  l'on  soulève  d'ordinaire,  dil 
l'auteur  (p.  1),  lorsqu'on  étudie  l'origine  de  nos  communes 
au  moyen  âge,  est  celle  de  savoir  si  elles  doivent  leur 
constitution  à  l'insurrection  ou  si  leur  développement  a  été 
tout  pacifique.  —  J'admets,  comme  l'auteur,  que  la  discus- 
sion à  ce  sujet  est  quelque  peu  oiseuse,  mais,  pour  montrer 
combien  ses  conclusions  sont  erronées ,  j'ajouterai  :  le  corps 
social  dont  le  mot  commune  est  l'expression  énergique,  la 
bourgeoisie,  si  l'on  veut,  existait-elle  avant  le  onzième 
siècle  sur  les  mêmes  bases  que  depuis  cette  époque?  En  un 
mot,  y  avait-il,  dans  les  premiers  temps  de  l'époque  féodale, 
une  classe  de  citoyens  qui  réglaient  de  commun  accord  et 
librement  leurs  intérêts. 


(  f4l  ) 

Jusqu'à  présent  on  a  généralement  admis  qu'à  Ja  suite 
(les  ravages  des  Normands  le  commerce  et  l'industrie  avaient 
lentement  repris  quelque  activité,  principalement  sur  les 
bords  de  la  Méditerranée  et  à  proximité  de  la  mer  du  Nord 
cl  des  fleuves  qui  s'y  jettent,  et  que  ce  réveil  des  travaux 
pacifiques,  quelquefois  secondé  par  la  politique  habile  des 
princes,  avait  neutralisé  le  morcellement  à  l'infini  de  l'auto- 
rité, morcellement  qui  est  le  caractère  propre  de  l'époque 
léodale.  Dans  cette  période  mémorable,  l'Élat,  tel  que  nous 
le  comprenons,  c'est-à-dire  la  réunion  des  particuliers  sous 
une  seule  autorité,  reparut,  non  plus  immense  comme 
il  l'était  du  temps  de  Cliarlemagne,  mais  amoindri,  sous  la 
forme  de  royaumes,  de  duchés,  de  comtés;  dans  chacun 
de  ces  États, les  centres  de  population,  les  ports,  les  grands 
marchés  virent  se  constituer  des  populations  qui  récla- 
mèrent des  droits  et  des  immunités,  qui  leur  furent 
accordés,  tantôt  à  la  suite  d'une  révolte,  tantôt  d'une  ma- 
nière bénévole  ou  à  prix  d'argent.  Cette  théorie,  simple  au 
delà  de  toute  expression,se  concilie  assez  bien  avec  les  faits; 
elle  se  démontre  surtout  à  l'aide  de  la  géographie.  Partout 
où  il  y  eut  commerce  ou  industrie ,  c'est-à-dire  prospérité, 
naquit  la  liberté,  et,  par  un  heureux  retour,  partout  où  la 
liberté  fut  sagement  maintenue,  elle  perpétua  et  augmenta 
cette  même  prospérité.  Ces  vérités,  dont  nous  voyons  de 
nos  jours  d'éclatants  exemples,  illuminent  le  passé.  L'his- 
toire du  commerce  et  celle  de  la  liberté  ont  été  inséparables 
dans  tous  les  temps.  Les  pays  écartés,  les  pays  montagneux, 
au  contraire,  ne  connurent  la  liberté  que  très-tard  ;  elle  ne 
leur  arriva  qu'à  la  suite  d'un  développement  général  bien 
accentué. 

Ces  prémisses  acceptées,  il  faut  en  conclure  que  c'est 
dans  les  centres  commerciaux  que  la  liberté  communale 


(   i.42  ) 

est  née,  en  Belgique  comme  ailleurs.  Si  le  duché  de  Luxem- 
bourg, l'ancien  Limbourg,  le  comté  de  F.ooz  ne  l'ont 
connue  que  tard,  si  le  Naraurois  ne  Ta  connue  qu'excep- 
tionnellement, les  villes  bâties  sur  les  bords  de  la  Meuse  et 
de  l'Escaut,  à  proximité  de  la  mer  et  sur  la  grande  artère 
commerciale  passant  par  le  cœur  du  Brabant,  l'ont,  au  con- 
traire, possédée  ou  revendiquée  de  bonne  heure.  L'odieux 
servage,  qui  régna  dans  un  grand  nombre  de  nos  villages 
jusqu'à  la  fin  du  siècle  dernier,  a  été  répudié  par  elles  dès 
les  premières  années  du  douzième  siècle. 

Partout,  la  population  des  campagnes  est  en  général 
restée  asservie.  Pour  elle  le  mot  de  liberté  n'eut  de  sens 
que  rarement.  Mais,  par  cela  même  qu'elle  avait  moins  que 
celle  des  villes  accepté  les  innovations,  c'est  chez  elle  qu'on 
devrait  retrouver  le  type  primitif  de  l'organisation  germa- 
nique. Si,  comme  le  prétend  l'auteur  du  mémoire,  l'an- 
cienne société  d'Oulre-Rhin  a  connu  la  séparation  de  l'au- 
torité administrative  et  de  l'autorité  judiciaire,  c'est  dans 
les  campagnes  que  nous  pourrions  trouver,  à  côté  de  l'éche- 
vinage,  souvenir  de  la  centène  franque,  ce  corps  de  jurés 
à  qui  l'administration,  et  en  particulier  la  surveillance  des 
biens  communaux,  aurait  été  spécialement  attribuée. 

Or  rien  de  pnreil  n'existe  dans  les  villages,  au  moins 
dans  ceux  du  Brabant,  dont  j'ai  particulièrement  étudié 
les  institutions.  Dans  la  plupart  d'entre  eux  les  échevins, 
sous  la  présidence  du  maire,  exercent  le  double  mandat  de 
juges  et  d'administrateurs;  il  est  vrai  qu'à  côté  d'eux  il 
existe  des  répartiteurs  de  l'impôt  {bedesetters),  des  maîtres 
d'ôgiise,  des  maîtres  de  pauvres,  mais  avec  des  aftributions 
dont  l'origine  s'explique  historiquement.  Ce  sont  les  éche- 
vinsqui  ont  la  surveillance  et  la  police  des  biens  commu- 
naux, et  s'ils  ne  peuvent  en  disposer  sans  l'assentiment 


(  i45  ) 
delà  majorité  de  la  population,  c'est  que  cette  dernière  a 
le  plus  grand  intérêt  à  en  conserver  autant  que  possible  la 
libre  disposition.  Ce  lien  que  M.  Vanderkindere  prétend 
établir  entre  le  corps  des  magistrats  de  la  commune,  à 
l'exclusion  des  échevins,  et  les  biens  communaux,  ne 
s'aperçoit  nulle  part.  Seulement,  dans  les  villes  où  les 
échevins  furent  réduits  à  ne  plus  être  que  des  juges,  on 
attribua  aux  chefs  nouveaux  de  la  commune,  comme  nous 
le  verrons  plus  loin,  ce  service  administratif  ainsi  que  tous 
les  autres.  Mais  ce  fut  une  innovation. 

Croirait-on  que  l'auteur  du  mémoire  transforme  le  maire 
en  représentant  de  la  commune  et  en  administrateur  de 
ses  biens.  «  Une  corporation  comme  celle  de  la  marke, 
»  dit-il  (p.  56),  exigeait  des  fonctionnaires;  il  fallait  une 
»  autorité  pour  régler  l'usage  des  communia,  pour  exercer 
I)  la  réciprocité  des  droits  et  des  devoirs,  pour  diriger  les 
»  travaux  communs,  lever  les  impôts,  etc.  Cette  autorité 
»  était  celle  du  major,  maire,  nommé  aussi  prévôt,  bourg- 
»  meslre,  etc.,  etc.,  souvent  seul,  quelquefois  entouré  de 
»  conseillers.   » 

Ici  éclate  la  confusion  la  plus  complète.  M.  Vanderkin- 
dere confond  le  maire,  officier  essentiellement  féodal,  man- 
dataire du  prince  ou  du  simple  seigneur,  avec  le  prévôt  ou 
le  bourgmestre,  chef  de  la  population  urbaine,  de  la  bour- 
geoisie, et,  dans  les  temps  anciens,  presque  toujours 
constitué,  élu,  maintenu  par  elle,  contrairement  aux 
volontés  du  pouvoir  supérieur.  D'autre  part,  il  distingue  le 
maire  du  bailli,  de  l'écoutète,  de  l'amman.  Or,  tous  ces 
noms  et  celui  de  maire  désignent,  suivant  les  localités,  le 
même  fonctionnaire.  Il  existe  pourtant  des  nuances;  quel- 
quefois, à  côté  du  bailli  il  va  un  écoulète;mais,  enBrabant, 
par  exemple,  l'on  me  pardonnera  de  citer  de  préférence 


(  \U  ) 

cette  contrée,  bien  savant  serait  celui  qui  trouverait  un 
atome  de  différence  entre  les  attributions  du  maire  de 
Louvain,  du  maire  de  Tirlemont,du  bailli  de  Nivelles,  de 
l'amman  de  Bruxelles,  de  l'écoutèle  d'Anvers.  Les  prévôts 
du  comté  de  Hainaut,  les  baillis  de  Flandre,  etc.,  eurent 
les  mêmes  attributions. 

Excepté  dans  quelques  grandes  villes  (Douai,  Amiens, 
etc.),  où  l'élu  du  peuple,  son  chef  véritable,  a  porté  le 
nom  de  major,  excepté  dans  quelques  villages  où  par  une 
large  concession,  qui  paraît  n'avoir  pas  été  respectée  et 
qui  attribuait  aux  habitants  la  nomination  du  maire  (à  Ma- 
rilles,  près  de  Jodoigne,  notamment),  le  maire,  dans  notre 
pays,  en  Hollande,  en  France,  en  Allemagne,  etc.,  est  le 
représentant,  dans  une  circonscription  plus  ou  moins 
étendue,  du  seigneur,  soit  laïque,  soit  ecclésiastique, 
soit  prince,  soit  simple  particulier.  De  même  que  le  duc 
de  Brabant  a  un  maire  pour  délégué  direct  dans  sa  bonne 
ville  de  Louvain  et  tout  le  territoire  environnant,  cbei 
militaire  quand  il  n'y  a  pas  de  châtelain,  de  burggraeve , 
dans  la  circonscription  à  laquelle  il  est  préposé  (comme  à 
Tirlemont,  par  exemple),  de  même  chaque  seigneur  a  un 
ou  des  maires,  nommés  par  lui,  révoqués  par  lui,  pour- 
suivant les  coupables  en  son  nom,  faisant  exécuter  les  sen- 
tences rendues  par  les  échevins  (qui  presque  toujours  sont 
aussi  nommés  par  le  seigneur),  présidant  aux  exécutions 
capitales  (quand  le  seigneur  a  la  haute  justice  en  entier), 
rendant  compte  du  produit  des  amendes.  Le  plus  petit 
seigneur  a  son  maire  qui  joue  un  rôle  analogue  sur  une 
échelle  moindre.  Ce  maire  n'est  nullement  le  chef  de  la 
communauté,  soit  urbaine,  soit  villageoise.  Cette  dernière 
lui  doit  le  respect,  parce  qu'il  est,  vis-à-vis  d'elle,  le  man- 
dataire du  prince  ou  du  seigneur;  et,  de  son  côté,  il  doit 


(  14d) 
appui  et  protection  aux  habitants  de  la  juridiction.  Mais 
voilà  les  seuls  liens  qui  existent  entre  eux,  et,  lorsque  des 
débats  éclatent  entre  la  communauté  des  habitants  et  le 
seigneur,  le  maire  est  nécessairement  le  défenseur  des  pré- 
rogatives de  celui-ci.  Les  échevins,  au  contraire,  peuvent 
se  prononcer  pour  le  peuple;  car,  si  ce  dernier  a  raison  à 
leurs  yeux,  ils  ont  d'ordinaire  la  faculté  de  refuser  de 
rendre  la  justice  et  d'arrêter  ainsi  l'exécution  d'une  me- 
sure arbitraire.  Cette  distinction  établie  entre  eux  et  le 
maire  ruine  par  sa  base  la  théorie  défendue  dans  le  mé- 
moire, où,  sous  prétexte  de  parler  des  magistrats  commu- 
naux, on  s'attache  à  préciser  les  attributions  des  baillis  et 
des  maires. 

Après  cela,  que  l'administration  de  h  justice  ait  été 
rendue  par  les  échevins  dans  les  comtés  sous  la  présidence 
du  comte  ou  dans  les  centènes  sous  celle  du  centenier, 
c'est  une  question  qui  me  paraît  loin  d'être  décidée,  bien 
que  M.  Vanderkindere  se  prononce  de  manière  à  ne  pas 
admettre  le  doute  et  en  raillant  ceux  qui,  comme  moi,  ne 
partagent  pas  son  opinion.  Voici  à  ce  sujet  l'avis  d'un 
auteur  trop  peu  connu  (Lehuëron,  Histoire  des  instilutions 
carolingiennes,  t.  II,  p.  588),  laquelle  à  nos  yeux  est  cor- 
roborée par  des  textes  d'une  importance  capitale  : 

«st  Quant  à  la  compétence  réelle,  elle  n'est  pas  moins 
»  nettement  tracée  {sous  les  Carlovingiens)  que  celle  des 
»  personnes.  Toutes  les  causes  qui  touchaient  à  la  pro- 
»  priété  des  héritages  ou  à  la  liberté  des  citoyens,  toutes 
»  les  affaires  criminelles  sans  distinction,  ne  pouvaient 
»  être  portées  ni  devant  le  centenier,  ni  devant  le  viguier 
»  ou  vicomte,  mais  devant  le  comte  ou  les  tnissi,  qui  seuls 
»  avaient  pouvoir  d'en  connaître.  »  {Ut  ante  vicarium  et 
centenarium  de  proprictatc  aiit   libertate  judicimn  non 

2™^  SÉRIE,  TOME  XSXVIil.  10 


(  14.6  ) 

tcnniiietur  ant  aâquiratur ,  nisi  semper  in  praesenlia 
missoritm  imperialinm  (hit  in  praesenlia  coniilum.  Capi- 
tulaire  d'Aix-la-Chapelle ,  de  l'an  810.  —  Ut  mdlus  homo 
in  placito  centenarii,  neqne  ad  niorlem,  neque  ad  liber- 
tateni  suain  amitlendani,  ant  ad  res  reddendas  vel  man- 
cipia  jndicelur,  sed  ista  aut  in  praeaentia  comitis  vel 
missonun  nosirorum  judiccntur.  Capilulaire  de  Tau  812). 
La  juridiclion  des  centeniers  et  des  plaids  qu'ils  présidaient 
a  donc  été  fort  limitée,  du  moins  à  certaines  époques. 
Qu'elle  se  soit  étendue,  plus  tard,  que  des  cenlènes  aient 
été  qnaliiiées  de  pagi^  tout  cela  est  possible,  mais  ne 
détruit  pas  rohjection,  le  principe. 

M.  Vanderkin<lere,  dont  je  me  plais  à  louer  l'ardeur  au 
travail  et  l'esprit  d'investigation,  bien  que  je  ne  puisse 
adopter  sa  manière  de  voir,  a  touché  à  la  vérité  lorsqu'il 
dit  (p.  251)  que  les  villes  ne  tardèrent  pas,  elles  aussi,  à 
jouir  du  privilège  de  l'immunité.  C'est  ainsi,  comme  nous 
l'avons  fait  remarquer  en  parlant  des  gildes  du  onzième 
siècle,  que  les  marchands  de  Thiel  obtinrent  ou  préten- 
dirent avoir  obtenu  d'un  empereur  d'Allemagne  le  droit  de 
juger  eux-mêmes  les  différends  qui  éclataient  entre  eux. 
Nous  touchons  du  doigt  la  vraie  origine  des  libertés  com- 
munales. Échappant  à  la  juridiction  ordinaire:  les  échevi- 
nages  de  comté  (ou,  pour  ne  pas  offusquer  l'auteur  du 
mémoire,  de  cenlènes),  les  bourgeoisies,  h  mesure  qu'elles 
naquire;ït  ou  s'organisèrent,  voulurent  avoir  des  juges 
distincts,  des  juges  choisis  dans  leur  sein.  Et  comme  leurs 
origines  furent  pacifiques  et  modestes,  comme  leur  ardeur 
belliqueuse  ne  s'éveilla  que  lorsqu'on  voulut  les  opprimer 
ou  restreindre  leurs  droits,  il  ne  fut  question  d'elles  et  de 
ces  derniers  que  lorsqu'ils  existaient  déjà.  Mais  cela  ne  veut 
pas  dire  que  la  liberté  communale,  telle  que  nous  l'enten- 


(  i'^'7  ) 
'Ions,  n'ait  |):is  eu  son  heure.  Pour  éc!at(>r  an  grand  jour, 
pour  subsister,  il  lui  fallut  un  point  d'appui;  ce  point  d'appui, 
elle  le  trouva  dans  ces  corporations  de  marchands,  dans  ces 
vieilles  gildes  dont  j'ai  eu  l'honneur  de  vous  entretenir. 
Aujourd'hui  encore,  si  quelque  part  la  liberté  entière,  abso- 
lue, se  manileste  avec  énergie,  c'est,  sans  citer  notre  pays, 
dans  les  palais  que  les  marchands  de  Londres,  de  New- 
York,  d'Amsterdam  consacrent  à  leurs  réunions,  et  d'où  les 
capitaux  et  les  arts  s'exileraient  avec  la  liberté  le  jour  où 
le  despotisme  parviendrait  à  y  Taire  taire  la  voix  de  l'opinion 
publique. 

Au  onzième  siècle  les  centres  commerciaux  de  la  Flandre, 
les  ports  de  celte  contrée  nous  offrent  le  même  spectacle. 
(]itons-en  deux  exetnples  bien  remar(piahles  : 
Dans  l'ancien  par/us  Flandrensis ,  ce  que  l'on  appela 
depuis  le  Franc  de  Bruges,  il  y  avait  un  échevinage  spé- 
cial ;  cet  échevinage ,  dont  l'origine  germanique  est  incon- 
testable, eut  sa  législation  particulière,  sa  keure,  dont 
on  a  conservé  un  ancien  texte  datant  de  l'époque  de 
Philippe  d'Alsace.  C'est  au  milieu  de  cette  enveloppe 
primitive  que  naît  un  germe,  je  ne  dirai  pas  étranger,  je 
ne  dirai  pas  révolutionnaire,  je  me  bornerai  à  le  qualifier 
de  nouveau  :  la  commune  de  Bruges;  cette  commune  com- 
mence lorsque  cette  ville  devient  un  port  ou  un  entrepôt 
de  commerce.  Son  territoire,  plus  tard  accru  par  des  acqui- 
sitions successives,  est  d'abord  extrêmement  restreint,  et 
la  population  qui  y  habite  est  aussi  pacifique  que  celle  du 
Franc  est  turbulente.  Lisez,  pour  vous  en  convaincre,  la 
vie  de  Charles  le  Bon.  Ce  ne  sont  pas  des  tenanciers  du 
comte  de  Flandre,  car  ces  tenanciers  sont  soumis  à  une 
autre  juridiction,  celle  du  prévôt  de  Saint-Donatien.  Les 
bourgeois  de  Bruges  forment  une  corporation  tout  à  fait 


(  1^8  ) 
distincte,  une  vraie  gilde  éclose  au  centre  d'un  comté  et 
qui,  d'abord  simple  société,  devient  un  corps  politique. 
Ces  marchands,  ces  bourgeois,  ont  des  lois  différentes  de 
celle  du  Franc.  Ils  ont  leurs  magistrats  particuliers,  et 
remarquons-le  bien,  ceux-ci  ne  sont  pas  tout  d'abord  qua- 
lifiés d'échevins.  Comme  dans  les  communes  d'Aire,  de 
Furnes  et  encore  ailleurs,  ce  sont  des  jiidices ,  des  juges. 

A  Gand  la  commune  se  forme  de  la  même  manière. 
C'est  une  gilde  de  marchands  qui  naît  à  côté  des  grandes 
abbayes  de  Saint-Pierre  et  de  Saint-Bavon;  elle  bataille 
contre  les  châteaux  du  voisinage  qu'en  M127  elle  était  déjà 
exercée  à  démolir.  Son  territoire  est  des  plus  restreints, 
car  il  est  limité  par  les  quatre  portes  de  la  ville.  Il  n'y  a,  ni 
là  ni  à  Bruges,  possibilité  de  rattacher  l'échevinage  com- 
munal à  une  antique  centène. 

Mais  où  nous  différons  plus  encore  d'opinion,  c'est  dans 
ce  qui  se  rapporte  à  l'origine  et  à  la  formation  du  corps  des 
jurés,  ou,  si  l'on  veut,  du  corps  administratif  de  la  com- 
mune. M.  Vanderkindere  y  voit  la  continuation  de  l'insli- 
tution  qui  avait  géré  la  niarke.  Nous  rejetons  d'une  manière 
absolue,  —  comme  ne  s'appliquant  en  aucune  façon  à 
notre  pays,  ni  à  l'époque  de  la  naissance  des  libertés  com- 
m  maies  : 

1'  L'assertion  que  la  propriété  du  sol  aurait  été  collec- 
tive; 

2"  L'assimilation  de  la  centène  à  la  marke  ,  territoire 
l'orniant  d'ordinaire  plusieurs  villages  et  qui  aurait  été  pos- 
sédé collectivement. 

Tout  cela  peut  avoir  existé  ailleurs,  mais,  dans  notre 
pays,  il  n'y  a  pas  de  traces  d'une  organisation  semblable. 
Les  biens  communaux,  c'est-à-dire  les  prairies,  les  bruyères 
et  les  bois  dont  la  propriété  est  commune,  sont  très-étendus 


(  149) 
et  Tétaient  encore  pins  autrefois.  Mais  pourquoi  ?  Parce 
que  les  bras  manquaient  à  Tagricurture ,  parce  que  le  sol 
serait  resté  abandonné  si  les  grands  possesseurs  n'avaient 
par  mille  moyens  permis  aux  petits  d'élever  du  bétail  dans 
les  prés,  d'exploiter  les  bois  pour  réparer  leurs  chaumières 
ou  se  procurer  du  chauffage,  de  défricher  les  bruyères  par 
parcelles.  Ces  terrains  concédés  constituaient  en  quelque 
sorte  les  déchets  du  territoire  fertile ,  où  la  population 
gallo-romaine  et  après  elle  les  conquérants  francs  avaient 
sinon  établi,  du  moins  affermi  le  droit  de  propriété  dans 
toute  sa  rigueur.  Il  ne  suffît  pas  d'avancer  une  hypothèse, 
il  faut  la  justifier.  Dans  quelles  limites  le  sol  aurait-il  été 
possédé  collectivement,  sous  quelles  charges,  voilà  ce  que 
l'auteur  du  Mémoire  n'établit  pas  assez  clairement. 

Toutes  les  coutumes  par  lesquelles  l'esprit  de  voisinage 
et  de  confraternité  était  jadis  entretenu  :  le  droit  de  pâture 
dans  les  prairies  communales,  les  obligations  des  proprié- 
taires de  biens  compris  dans  les  wateringues,  la  faculté 
accordée  aux  proches  parents  du  vendeur  d'une  propriété 
d'en  opérer  le  retrait,  l'obligation  d'accourir  lorsqu'on  pous- 
sait les  cris  de  ;  aux  armes  ^  aux  armes ,  ou  de  commune, 
constituent,  pour  M.  Vanderkindere,  autant  de  traces  de 
l'organisation  de  l'ancienne  marke  germanique.  Il  y  a  là, 
à  mes  yeux,  à  la  fois  confusion  entre  les  contrées  et  les 
époques. 

Parmi  ceux  de  ses  arguments  dont  la  valeur  est  contes- 
table, je  n'en  citerai  qu'un,  parce  qu'il  établira  d'une  ma- 
nière frappante  combien  il  est  facile  d'abuser  du  membre 
de  phrase  le  plus  simple.  Par  exemple,  l'anleiir  du  Mémoire 
dit  (p.  SG^):  «  Dans  l'origine  chaque  compagnon  était  libre 
p  de  défricher  une  certaine  partie  des  terres  incultes  de 
»   la  marke;  c'est  ce  qu'on  appelait  un  pourpris  de  sart, 


(  m  ) 

1»  en  flamand  btjcaiifj.  Plusieurs  villes  du  moyen  âge  nous 
»  montient  leurs  bijvanfj,  qui  conservèrent  longtemps  ce 
j>   nom ,  tel  est  le  cas  pour  Lierre.  » 

Or,  pour  asseoir  cette  association  d'idées  entre  un  pour- 
pris  de  sart  et  une  grande  juridiction  comme  la  banlieue 
de  Lierre,  que  cite-on?  un  passage  d'une  charte  de  Jean  V, 
où  il  n'est  question  en  aucune  façon  d'une  emprise  sur  la 
bruyère,  mais  d'une  maison  appelée  le  Manoir  de  Sart  et 
son  «  pourprise  »  ,  situé  à  Wavre,  que  le  duc  Jean  l"  com- 
prend parmi  les  biens  dont  il  cède  la  propriété  à  Jean, 
seigneur  de  Wavre  (le  7  lévrier  1292).  L'éditeur  des  Bra- 
baiitsche  Yecsien  (  t.  1 ,  p.  680)  a  traduit  les  mots  :  pou)- 
prise  de  sart,  par  :  ce  qu'on  enlève,  ce  qu'on  cultive  au 
champ.  Le  pontpris  est  en  réalité  l'enclos  adjacent  à  la 
maison,  c'est-à-dire  la  cour,  le  jardin,  en  un  mot  les  dé- 
pendances immédiates  d'un  manoir.  Le  pourpris  wallon 
c"est  Vlwfstadt  tlamand,  terme  dont  nous  pouvons  trouver 
des  exemples,  tous  les  jours,  dans  les  affiches  de  vente.  1! 
n'y  a  pas  là  de  souvenir  de  la  marke. 

Avant  de  terminer,  [)ermellez-moi  d'alfirmerciue  le  mou- 
vement communal,  tel  qu'il  se  produisit  à  la  lin  duXI'^  siè- 
cle, compléta  un  ordre  de  choses  tout  nouveau  et  dont 
l'organisation,  au  lieu  d'être  simple  ainsi  que  l'étaient  les 
institutions  primitives  d'un  peuple  guerrier  et  à  moitié 
nomade  comme  les  Germains  d'Outre-Rhin,  se  déploya 
avec  une  variété,  une  richesse,  une  complication  de  détails, 
qui  dénotent  chez  ceux  qui  conduisirent  ce  mouvement  des 
connaissances  dont  on  tient  trop  peu  compte.  Les  noms 
de  sénateurs,  de  consuls,  de  jurés,  de  maîtres  de  la  com- 
mune ou  des  citoyens  furent  à  la  fois  empruntés  aux  sou- 
venirs de  ranti(|uité  et  à  la  situation  nouvelle;  le  partage 
de  l'autorité  entredescheissuprèmes,  l'introduction  de  for- 


(  i^l  ) 

malités  minutieuses  dans  les  élections,  l'établissement  de 
collèges  spéciaux  et  de  grands  conseils  rappellent  les  com- 
binaisons à  l'aide  desquelles  on  avait  essayé,  dans  le  monde 
ancien,  de  neutraliser  les  intrigues  des  personnages  in- 
fluents ou  les  entraînements  de  la  multitude.  L'influence 
germanique  subsiste  :  cela  est  incontestable  et  on  ne  pour- 
rait la  nier,  mais  elle  se  modifie  profondément  sous  l'in- 
fluence de  besoins  nouveaux  et  d'idées  nouvelles. 

Quel  lien  commun  pourrail-on  trouver  entre  la  simple 
administration  des  biens  communaux  et  ce  type  de  magis- 
trature dont  Tournai,  Yalenciennes  et  Saint-Omer  ofl'rent 
des  exemples  très-anciens,  type  qui  fut  accepté  à  Liège  au 
XIV''  siècle  et  à  Bruxelles  au  XV'=  et  qui  peut  être  consi- 
déré comme  le  véritable  modèle  d'une  commune  vigou- 
reuse, telle  qu'on  la  comprenait  au  moyen  âge. 

La  composition  de  la  corporation  municipale  varie  en  ce 
sens  qu'à  Tournai  elle  se  compose  de  tous  les  chefs  d'hôtel, 
à  Liège  des  membres  des  métiers  sans  exception,  appren- 
tis aussi  bien  que  maîtres,  à  Bruxelles  des  métiers  et 
des  familles  patriciennes;  mais  dans  les  trois  villes  le  pou- 
voir suprême,  la  direction  delà  commune  est  conliée  à 
deux  chefs,  véritables  duumvirs:  deux  prévôts  à  Tournai, 
deux  maîtres  de  la  commune  à  Liége,deux  bourgmestres  à 
Bruxelles.  Ces  bourgmestres  président  le  corps  du  magis- 
trat, l'administration  municipale,  dont  eux-mêmes  font 
partie.  Ils  sont  à  la  fois  les  premiers  juges,  les  premiers 
administrateurs,  les  généraux,  les  ambassadeurs  de  la  cité. 
Ils  siègent  :  à  Tournai,  avec  vingt-huit  jurés,  à  Liège, 
également  avec  des  jurés,  à  Bruxelles,  avec  dix-neuf  autres 
personnes  :  sept  échevins,  six  receveurs  et  six  conseillers. 
Des  collèges  et  des  conseils  nombreux ,  chargés,  les  uns  de 


(  io2  ) 

la  gestion  de  branches  spéciales  de  l'administration,  telles 
que  la  levée  et  l'emploi  des  impôts,  la  surveillance  des 
hospices  et  des  léproseries,  celle  delà  voirie,  etc.  ;  les  autres 
de  représenter  les  différentes  catégories  d'habitants  et  se 
recrutant  surtout  parmi  les  doyens  des  métiers,  fortifient 
ce  corps  central,  qui  constitue  à  la  fois  un  tribunal  et  un 
corps  administratif. 

Si  à  Bruxelles  les  échevins  restent  associés  à  l'adminis- 
tration, il  n'en  est  pas  de  même  dans  les  deux  autres  villes, 
où  leur  compétence  est  limitée  à  la  justice  civile.  C'est  là 
en  effet  le  caractère  par  lequel  les  échevins  sont  distingués 
de  l'institution  des  jurés  dans  la  plupart  de  nos  villes, 
contrairement  à  ce  que  Warnkônig  a  prétendu.  Là  où  il  y 
avait  un  ancien  échevinage,  les  jurés  eurent  spécialement 
dans  leurs  attrihutions  l'application  des  peines  comminées 
par  les  keures,  par  les  lois  nouvelles,  par  les  chartes  cri- 
minelles accordées  aux  bourgeoisies  et  qui  modifièrent 
considérablement  l'ancien  droit.  Comme  le  dit  un  texte 
cité  par  M.  Vanderkindere  lui-même,  les  échevins  d'Arqués, 
la  loi  d'Arqués,  jugent  de  ce  qui  concerne  l'échevinage, 
tandis  que  les  choremanni  (ou  hommes  de  la  keure)  main- 
tiennent la  paix  , s'occupent  des  affaires  de  la  communauté 
et  de  la  punition  des  crimes.  Ces  choremanni  n'ont  rien  de 
commun  avecune  marke  dont  nous  n'avons  jamais  entendu 
parler;  ce  sont  les  magistrats  nouveaux  institués  en  même 
temps  que  la  commune,  tandis  que  les  échevins  subsis- 
taient de  temps  immémorial  et  étaient  inféodés  plus  ou 
moins  au  pouvoir  seigneurial,  celui  de  l'abbé  de  Saint- 
Bertin.  La  même  distinction  se  montre  à  Soignies,  où  les 
jurés  sont  déclarés,  en  H 42,  être  les  juges  des  habitants 
de  la  ville,  de  la  bourgeoisie,  tandis  que  tout  ce  qui  con- 


(  133  ) 
cerne  le  dehors  reconnaitra  l'autorité  des  échevins  (1). 

Ainsi  qu'on  peut  le  voir,  les  idées  que  je  viens  d'émettre 
et  dont  j'ai  fréquemment  entretenu  le  public  dans  les 
conférences  que  je  donne  depuis  plus  de  douze  ans,  sont 
tout  à  fait  différentes  de  celles  de  M.  Vanderkindere.  Il  me 
paraît  avoir  admis  trop  facilement  des  idées  qui  sont  très- 
acceptables  en  Allemagne,  où  la  domination  romaine  n'a 
pas  exercé  son  action  comme  dans  notre  pays,  pendant 
plus  de  quatre  siècles.  Je  ne  puis  ni  adopter  son  assimila- 
tion de  nos  échevins  urbains  aux  tribunaux  des  centènes 
carlovingiennes,  ni  rechercher  l'origine  de  la  fraction  la 
plus  caractéristique  de  nos  vieilles  municipalités  dans  de 
prétendus  administrateurs  d'un  sol  possédé  collectivement, 
administrateurs  et  possession  collective  dont,  sauf  les 
réserves  que  j'ai  signalées,  je  ne  trouve  aucune  trace  dans 
notre  histoire  au  commencement  du  moyen  âge. 

Devant  une  pareille  divergence  d'opinions,  au  sujet  de 
questions  essentielles,  la  classe  me  pardonnera  d'être  entré 
dans  des  détails  que  j'aurais  pu  étendre  démesurément  si 
je  n'avais  craint  d'abuser  de  l'attention  qu'elle  veut  bien 
m'accorder.  » 

Conformément  aux  rapports  de  ses  commissaires,  la 
classe  vote  l'impression  de  la  notice  de  M.  Vanderkindere 
au  Bulletin  de  la  séance. 


(1}  Si  quis  incolarum  in  causam  ducelur,  coram  ministro  ecclcsie  el 
villico,  verejuratorum  judicio  decidatur.  Si  vero  de  rehus  exlrinsecis 
agatur,  scabinorum  judicio  decidatur.  Wauters,  De  l'origine  des  libertés 
communales,  preuves,  p.  18. 


(  1^4  ) 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Le  cardinal  Beiitivor/lio.  Sa  nonciature  à  Bruxelles.  Par 
M.  Gachard,  membre  de  l'Académie  {i). 

Guido  Bentivoglio  lut  appelé  à  remplir  le  poste  dénonce 
à  Bruxelles  en  1607;  à  celle  occasion  ,  Paul  V  le  lit  arche- 
vêque de  Rhodes;  il  avait  alors  vingl-huit  ans.  La  Nun- 
ziatura  di  Fiandra  était  de  créatioïi  récente;  elle  avait 
été  établie  seulement  en  1596,  quelque  temps  après  la 
nomination  de  l'archiduc  Albert  au  gouvernement  des 
Pays-Bas  (2).  Le  premier  titulaire  en  l'ut  Oltavio  Mirto, 
évèque  de  Tricarico  et  depuis  archevêque  de  Tarenle;  il 
eut  pour  successeur  Decio  Caraffa,  que  l'archevêque  de 
Rhodes  vint  remplacer.  Bentivoglio  arriva  à  Bruxelles 
au  mois  d'août;  il  fit,  le  9,  son  entrée  publique  dans 
cette  capitale  en  grand  apparat;  il  était  à  cheval,  entouré 
de  toute  la  cour,  qui  s'était  portée  à  sa  rencontre  jusqu'à 
un  mille  de  distance  de  la  ville;  le  marquis  de  Guadaleste, 
ambassadeur  d'Espagne,  les  ducs  d'Aumale ,  d'Ossuna, 
d'Arschot,  Ambroise  Spinola  et  d'autres  personnages  de 
marque  figuraient  dans  son  cortège.  Le  jour  suivant  il 
eut  son  audience  des  archiducs  Albert  et  Isabelle,  qui  lui 


(1)  La   première   partie  de  ce   travail  a  été    lue  dans   la  séance  du 
«avril  1874. 

(i)  L'!S  Archives  du  VuLican  ,  p.  52. 


' 


C  lo5  ) 
firent  le  plus  bienveillant  accueil  (1).  Jamais  auparavant 
Benlivoglio  n'avait  vu  les  Pays-Bas  ;  mais  il  les  connais- 
sait beaucoup  par  ouï-dire  :  a  Je  suis  venu  ici  »  — écrit-il 
de  Bruxelles  à  son  ami  l'évèque  de  Borgo  San  Sepolcro  — 
«  avec  les  oreilles  si  pleines  de  la  Flandre  qu'avant  d'y 
»  arriver  il  me  semblait  l'avoir  habitée  par  les  yeux.  J'ai 
»  eu  dans  ces  guerres  quatre  frères  et  deux  neveux;  je 
»  trouve  encore  ici  un  de  ces  neveux  et  un  de  ces  frères  : 
»  de  sorte  que  presque  en  naissant  j"ai  entendu  parler 
»  de  la  Flandre,  et,  à  mesure  que  j'ai  avancé  en  âge, 
»  les  choses  de  ce  pays  me  sont  devenues  si  familières 
>  qu'il  ne  me  restait  qu'à  y  venir  en  personne  pour  être 
B  tout  à  fait  flamand  (2).  »  >i"entrevoit-on  pas  déjà,  dans 
ces  paroles  si  sympathiques  j)Our  notre  nation,  le  futur 
historien  de  la  révolution  du  seizième  siècle? 

Benlivoglio  fut  rappelé  en  1615;  il  partit  de  Bruxelles 
pour  Bome,  selon  ses  propres  expressions,  «  presque  plus 
»  flamand  qu'italien  (5).  »  L'année  suivante  Paul  V  lui 
conlia  la  nonciature  de  France,  Tune  des  {principales  de  la 


(1)  Lellrp  cli^  Benlivoglio  à  niitnsiynor  di  MoiHj^liana ,  évèque  de  lîorgo 
San  Sepolcro  ,  écrite  de  Bruxelles  le  1 1  aoùl  1607.  (  Opcre,  1648  ,  iu-lbl., 
p.  589.) 

(2)  t  ....  Ho  poi'lale  qua  l'orecchie  si  piene  di  Fiandra,  che  prima  di 
giungervi  mi  par  ((uasi  d'iiaverla  aiichè  habitala  coii  gli  occhi.  Hohavuli  iii 
qiiesle  guerre  qualro  l'ralelli  e  due  nipoîi  e  trnovo  hora  qui  pur  tultavia 
uno  di  essi  fralelli  el  un  de'  nipoli  :  onde  quasi  nascendo  ho  udilo  parlar 
di  Fiandra,  e  ne!  crescer  de  gli  anni  mi  si  sou  fatte  in  modo  familiari  le 
cose  di  qua,  ch'apunio  non  reslava  altro  che  il  venir  qua  io  medesimo 
par  diventar  tiammiugo  del  lutlo....  »  (  Lettre  citée  à  la  note  précédente.) 

(3)  "  ....  Mi  son  partilo  di  costa  quasi  più  fiammingo  che  ilaliano  ....  » 
(Lettre  au  P.  Bivero,  confesseur  espagnol  des  archiducs,  écriledeRome 
le  10  avril  1C16  ,  dans  Opère,  etc.,  p.  GÛÔ.) 


(  156  J 

chrétienté;  il  l'occupa  jusqu'en  I6!2I ,  où  ce  pontife  l'éleva 
à  la  dignité  cardinalice. 

La  correspondance  de  Bentivoglio  avec  le  cardinal  Bor- 
ghèse,  neveu  et  secrétaire  d'État  de  Paul  V,  pendant  sa 
nonciature  en  France,  a  été  publiée  (1);  mais  jusqu'au- 
jourd'hui on  ne  connaît  rien  des  dépêches  qu'il  lui  adressa 
alors  qu'il  représentait  le  sainl-siége  à  Bruxelles. 

Dans  le  voyage  que  je  lis  en  Italie  à  la  fin  de  1867,  ces 
dépêches  furent  l'un  des  objets  de  mes  recherches.  En 
plusieurs  des  villes  de  la  Péninsule  je  trouvai  des  copies 
de  celles  que  Bentivoglio  avait  écrites  tandis  qu'il  était  à 
la  cour  de  France;  je  ne  rencontrai  qu'à  Rome,  et  là  en 
original,  les  lettres  concernant  sa  nonciature  aux  Pays- 
Bas:  non  pas  toutes,  mais  du  moins  la  plus  grande  partie 
de  celles  qui  durent  former  sa  correspondance  diploma- 
tique. 

J'en  ai  déjà  ailleurs  donné  l'indication  (2);  il  convient 
néanmoins  que  je  la  reproduise  ici.  Je  rappellerai  donc 
qu'à  la  Bibliothèque  Barberina  se  conservent  six  recueils 
reliés  et  une  très-grosse  liasse  de  dépêches  de  Bentivoglio 
des  années  1610, 1611,  1612,  1615,1614,  1615,  et  que 
d'autres  dépêches,  de  1609,  1610,  1611,  sont  contenues 


(1)  La  Nunziatura  di  Francia  del  cardinale  Guido  Bentivoglio.  Let- 
tere  a  Scipione  Borfjhese,  cardinal  nipote  e  secretario  di  Stato  di 
Paolo  V ;  traite  dagli  originali  e  pubblicale  per  cura  di  LuiGi  de  Stef- 
FAM.  Quatre  vol.  iii-12  ,  Florence,  Le  Moniiier ,  1863-1870. 

Ces  lettres  ont  été  publiées  d'après  les  originaux  mis  à  la  disposition 
de  M.  de  SlefFani  par  le  marquis  Xiccolo  Bentivoglio ,  de  Ferrare. 

En  1832  M.  Luciano  Scarabelli  lit  paraître  à  Turin  un  recueil  des 
mêmes  lettres:  mais  celles-ci,  selon  M.  de  Steffani,  avaient  été  fabriquées. 

(2)  Les  Archives  du  Vatican,  ])\t.  43  et  103. 


(  ^^7  ) 
dans  un  des  registres  de  la  ISunzialura  di  Fiandra,  aux 
Archives  du  Vatican. 

Au  Vatican,  ainsi  qu'à  la  Barberina,  la  correspondance 
de  Bentivoglio  ne  comprend  pas  les  réponses  du  cardinal 
Borghèse.  Les  originaux  de  celles-ci  reposent  dans  les 
archives  de  M.  le  marquis  Niccolô  Bentivoglio,  à  Ferrare. 
On  ignore  où  s'en  conservent  les  minutes,  si  toutefois  elles 
existent  encore  :  des  transcriptions  en  sont  contenues, 
pour  les  années  1609  à  1615,  dans  un  des  vingt-cinq 
registres  de  Porfirio  Feliciani,  secrétaire  d'État  de  Paul  V, 
que  possède  la  Bibliothèque  Angelica  (1). 

Je  m'étais  proposé  de  parcourir  toutes  les  dépêches  de 
Bentivoglio  et  d'analyser  les  plus  intéressantes;  j'accomplis 
ce  dessein  par  rapport  à  celles  qui  sont  au  Vatican;  à  la 
Barberina  je  ne  l'exécutai  qu'en  partie,  je  vais  en  dire 
la  raison.  Par  une  faveur  spéciale,  dont  je  saisis  cette 
occasion  d'exprimer  publiquement  ma  gratitude  envers 
M.  le  prince  Barberini,  cette  Bibliothèque,  où  le  public 
est  admis  un  jour  de  la  semaine  seulement,  me  fut  ouverte 
deux  autres  jours  encore,  et  je  profitai  avec  ardeur  de  la 
permission  qui  m'était  accordée.  Mais,  dans  la  magnifique 
collection  d'archives  et  de  manuscrits  qui  est  rassemblée 
au  palais  Barberini,  il  n'y  a  pas,  en  ce  qui  concerne  la 
nonciature  de  Flandre,  que  les  dépêches  de  Bentivoglio; 
on  y  trouve  aussi  les  lettres  des  nonces  et  des  internonces 
qui  se  succédèrent  à  Bruxelles  de  1621  à  1645  (2).  Je 
crus  devoir  compulser  d'abord  celles-ci,  afln  d'examiner 
plus  à  loisir  les  autres;  je  supposais  qu'il  me  resterait 


(!)  Les  Archives  du  Vatican  ,  p.  48. 
(2)  Les  Archives  (lu  Vatican,  p.  44. 


(  lo8  ) 

assez  de  temps  pour  remplir  celte  tâche.  Malheureusement 
je  m'étais  trompé  dans  mes  calculs,  et  une  partie  assez 
considérable  de  la  correspondance  de  Bentivoglio  me  res- 
tait à  parcourir  lorsqu'il  me  fallut  quitter  la  ville  éternelle. 
Le  regret  que  j'en  éprouvai  s'augmenta  de  l'impossibilité  où 
je  m'étais  vu  de  faire  copier  beaucoup  de  belles  dépêches 
que  j'avais  lues  avec  un  plaisir  infini  :  les  copistes  ne  sont 
pas  communs  à  Rome;  après  bien  des  recherches,  j'étais 
parvenu  à  en  découvrir  un;  il  ne  fut  pas  agréé  de  M.  l'abbé 
Paralisi,  conservateur  de  la  Bibliothèque. 

Si  incomplète  que  soit  mon  analyse  de  la  correspon- 
dance de  Bentivoglio,  il  m'a  semblé  qu'elle  n'était  pas 
dénuée  d'intérêt  au  point  de  vue  de  notre  histoire  natio- 
nale, et  c'est  ce  qui  m'engage  à  en  donner  communication 
à  la  Classe.  Une  autre  fois  j'aurai  l'honneur  de  lui  pré- 
senter les  résultats  de  l'examen  que  j'ai  fait  des  corres- 
pondances des  nonces  et  des  internonces  par  lesquels, 
dans  les  années  162Î  à  164-3,  fut  occupé  le  poste  de 
Bruxelles. 

I. 

C'est  au  mois  de  mai  1609  que  commence  le  volume 
de  la  correspondance  de  Bentivoglio  conservé  aux  Archives 
du  Vatican. 

Le  roi  d'Angleterre  Jacques  l*""',  en  réponse  à  la  lettre 
fameuse  où  le  cardinal  Bellarmin  cherchait  à  détourner  les 
catholiques  de  son  royaume  du  serment  d'allégeance, 
venait  de  publier  son  Admonilio  ad  principes  christianos. 
Ne  doutant  pas  que  ce  monarque  n'eût  l'intention  de  faire 
présenter  son  livre  aux  Archiducs,  Bentivoglio  fit  auprès 
d'eux  des  démarches  afin  qu'ils  refusassent  de  le  recevoir  : 


(  159  ) 

il  n'eut  pas  (Je  jx^inc  à  Icfs  y  dclerminer;  l'infante  surtout, 
ainsi  qu'il  l'écrivait  au  cardinal  Borghèse,  montrait  une 
véritable  horreur  de  l'ouvrage  du  roi  de  la  Grande-Bre- 
tagne et  des  maxiuies  impies  qui  y  étaient  contenues  (î). 
Comme  le  nonce  l'avait  prévu,  l'ambassadeur  de  Jac- 
ques 1",  sir  Thomas  Edmunds,  ht  demander  audience  à 
l'Archiduc.  Le  président  Richardot  (2)  alla  le  trouver  et 
lui  donna  à  entendre,  comme  de  lui-même,  que  si  c'était 
pour  présenter  le  livre  composé  par  le  roi  son  maître  qu'il 
sollicitait  l'audience,  il  pouvait  s'en  épargner  la  peine, 
car  l'Archiduc  ne  recevrait  pas  ce  livre.  L'ambassadeur  se 
montia  scandalisé  des  paroles  de  Richardot  :  il  lui  dit  qu'il 
était  à  Bruxelles  pour  exécuter  les  ordres  de  son  roi,  et 
qu'il  ne  ()0uvait  se  dispenser  d'y  donner  exécution  en  ce  qui 
concernait  VAdmonilio  ad  principes  christianos ;  il  ajouta 
qu'il  n'aurait  jamais  cru  que  l'Archiduc  témoignât  ce 
mépris  du  roi  de  la  Grande-Bretagne  de  refuser  quelque 
chose  qui  lui  serait  présenté  en  son  nom.  Des  mots  plus 
ou  moins  aigres  s'échangèrent  là-dessus  entre  les  deux 
interlocuteurs.  L'ambassadeur  voulut  savoir  si  le  langage 
qui  lui  avait  été  tenu  par  Richardot  l'avait  été  au  nom  de 
l'Archiduc.  Le  président  lui  répondit  que  les  termes  dont 
il  s'était  servi  étaient  ceux  mêmes  qui  étaient  sortis  de  la 
bouche  du  prince,  et  qu'il  était  prêt  à  les  lui  confirmer  par 
écrit;  que  la  résolution  de  l'Archiduc  touchant  le  livre  du 
roi  ne  pouvait  être  autre,  ce  livre  étant  contraire  à  sa 
religion,  à  l'obéissance  qu'il  devait  au  pape  et  que  toute  la 

(1)  «  ....  Non  potrei  espriinir  a  V.  S.  111™"  rabborrimento  mosU'ato  clalP 
Inlanla  al  libro  et  a  i  coiiceUi  empii  clie  si  centengon'  in  eslo....  "  (Dé- 
pèdifilu  n  juillet  1609.) 

(2)  Jean  Ricliarclot,  elief  et  piésidoiit  Ju  conseil  privé.  Il  mourut  à 
Arras  le  5  septembre  IG'^O. 


(  160  ) 

maison  d'Autriche  avait  toujours  professée.  L'ambassadeur, 
transporté  de  colère,  répliqua  que  l'Archiduc  se  faisait 
ainsi  l'esclave  du  pape;  que  ses  procédés  n'étaient  pas 
ceux  que  le  roi  devait  attendre  de  lui;  qu'il  aurait  pu 
accepter  le  livre  et  ne  le  lire  pas;  que  les  grands  princes 
se  devaient  des  égards  qui  n'avaient  rien  de  commun  avec 
les  scrupules  et  les  superstitions  de  moines  papistes;  que 
son  roi  ne  manquerait  pas  de  moyens  de  se  venger  d'une 
manière  d'agir  aussi  injurieuse.  Richardot  riposta  sur  le 
même  ton  :  «  A  quoi  pensez-vous  aboutir  » —  dit-il  à  l'am- 
bassadeur—  «  avec  ces  livres  que  vous  publiez?  On  vous 
»  fera  mille  réponses,  qui  feront  enrager  votre  roi  et  lui 
»  feront  comprendre  qu'il  eût  été  plus  sage  à  lui  de  gou- 
j)  verner  son  royaume  en  roi  qu'en  docteur  sectaire  (1).  » 
Il  est  presque  superflu  de  dire  qu'après  une  pareille  scène, 
sir  Thomas  Edmunds  n'insista  pas  sur  l'audience  qu'il 
avait  demandée  :  quelques  semaines  après  il  partit  de 
Bruxelles;  de  son  côté,  l'archiduc  Albert  rappela  le  baron 
d'Hoboken,  qui  le  représentait  en  Angleterre.  Cet  incident 
n'entraîna  pourtant  point  une  rupture  entre  les  deux 
cours  :  les  lettres  que  les  Archiducs  et  Jacques  l"  s'écri- 
virent à  l'occasion  du  rappel  réciproque  de  leurs  ambassa- 
deurs ne  respirent  aucun  mécontentement,  aucune  aigreur; 
elles  sont  conçues  dans  la  forme  habituelle  (2).  A  Londres 
les  ministres  anglais  avaient  tenté  de  faire  accepter,  par 
l'ambassadeur  d'Espagne,  don  Pedro  de  Zûniga,  le  livre 
du  roi,  pour  qu'il  l'envoyât  à  Philippe  III;  il  s'en  était 
excusé  malgré  toutes  leurs  instances  (3). 


(1)  Dépêche  du  8  aoùl  1609.  Voy.  l'Appendice  n"  I. 

(2)  Archives  du  royaume  :  reg.  Ncgocialions  cV Angleterre. 
(5)  Dépêche  du  2j  juillet  IGO'J. 


1 


(  i6l  ) 

Le  prince  d'Orange  Philippe-Guillaume,  le  même  qui 
fut  retenu  en  Espagne  pendant  près  de  trente  années,  avait 
épousé,  en  1606,  Éléonore,  fille  d'Henri  de  Bourbon, 
1"  du  nom,  prince  de  Condé,  et  de  Charlotte-Catherine 
de  la  Trémoille.  La  princesse  vint  à  Bruxelles  en  1609; 
elle  se  flattait  d'être  reçue  et  traitée  à  la  cour  comme  prin- 
cesse du  sang  royal  de  France;  l'ambassadeur  d'Henri  IV, 
au  nom  de  son  souverain ,  appuya  avec  chaleur  cette  pré- 
tention. Bentivoglio  nous  apprend  qu'Éléonore  de  Bourbon 
fut  déçue  de  son  attente,  les  Archiducs  ne  voulant  voir  en 
elle  que  la  femme  d'un  de  leurs  vassaux.  La  princesse 
partit  pour  le  château  de  Breda  sans  avoir  rendu  visite  à 
l'infante  (1),  et  jusqu'à  sa  mort,  arrivée  en  1619,  elle  ne 
parut  point  au  palais  de  Bruxelles. 

Dans  les  lettres  de  ratification  qu'il  donna  de  la  trêve 
de  douze  ans,  Philippe  HI  exprimait  l'espoir  que,  durant 
cette  trêve,  les  états  généraux  feraient  un  bon  traitement 
aux  catholiques  de  leurs  provinces  :  les  états  évitèrent  de 
s'expliquer  sur  ce  point,  soit  par  écrit,  soit  verbalement; 
ils  firent  même  quelque  difficulté  d'accepter  la  ratification 
du  roi  (2).  Les  succès  qu'ils  avaient  obtenus,  l'appui  que 
leur  prêtait  la  France,  les  rendaient  fiers.  Ils  ne  voulurent 
pas  admettre  les  pouvoirs  de  commissaires  qu'Albert  et 
Isabelle  députèrent  en  ce  temps  à  la  Haye ,  pour  discuter 
diff'érentes  questions  qui  intéressaient  les  deux  pays,  parce 
que  les  Archiducs  y  prenaient,  comme  ils  les  avaient  tou- 
jours pris,  les  titres  de  comte  de  Hollande  et  de  Zélande, 
et  il  fallut  qu'ils  fussent  remplacés  par  d'autres  pouvoirs 
oîi  ces  titres  étaient  omis.  Bentivoglio  blâme  vivement  la 


(1)  Dépêd)edu  11  juillet  1609. 

(2)  Dépêches  des  25  juillet ,  8  et  29  août  1609. 

2""^  SÉRIE,  TOME  XXXVIH.  1  1 


(  ^62  ) 
condescendance  que  l'Archiduc  montra  en  cette  occasion; 
il  trouve  qu'elle  porte  une  grave  atteinte  à  sa  réputation^ 
et,  ce  qui  est  pire  encore,  qu'elle  sera  d'un  très-grand 
préjudice  à  son  autorité  :  car  les  états  prétendront  qu'ayant 
renoncé  au  titre,  il  avoue  par  là  qu'il  n'a  aucun  droit  sur 
les  deux  provinces  (1). 

II. 

L'attention  que  Bentivoglio  donnait  aux  choses  de  la 
politique  ne  lui  faisait  pas  ouhlier  que  les  intérêts  de 
la  religion  formaient  l'objet  principal  de  la  mission  d'un 
ministre  du  saint-siége  :  pour  le  mieux  remplir,  il  prit  à 
tâche  de  se  mettre  en  communication  directe  avec  le  clergé 
des  différents  pays  qui  vivaient  sous  le  sceptre  des  Archi- 
ducs, et  de  se  rendre  compte  par  lui-même  de  letat  des 
diocèses. 

Au  mois  d'août  1609  il  alla  à  Anvers.  Le  jour  de  l'As- 
somption il  dit  la  messe  dans  l'église  des  Jésuites,  qui  était 
remplie  de  monde,  et  particulièrement  de  catholiques 
accourus  des  Provinces-Unies;  il  leur  avait  fait  donner 
avis  de  son  voyage  par  les  religieux  répandus  dans  ces 
provinces.  Pour  les  encourager,  il  leur  administra  lui- 
même  la  communion  ;  tel  fut  le  concours  de  ceux  qui  se  pré- 
sentèrent à  la  sainte  table  que  la  cérémonie  ne  dura  pas 
moins  d'une  heure  et  demie.  «  Je  ne  pourrais  vraiment  » 
—  écrivit-il  au  cardinal  Borghèse  —  «  exprimer  par  des 


(I)  .  È  seguilo  ciôcon  gran  vilipendio  della  riputazionedi  S.  A.;  e 

quel  ch'è  peggio ,  queslo  sarà  termine  di  grandissimo  pregiuditio  anchè 
nelle  autorità  e  giiirisdilione ,  poicliè  prelenderaniio  gli  slati  che  S.  A., 
havendo  deposlo  il  tilolo  sodeUo ,  è  venuta  a  confessai-  di  non  haver  dirilto 
di  sorte  alcuna  sopra  quelle  provincie »  (Dépêche  du  29  août  1609.) 


(  l^ô  ) 
1)  paroles  les  signes  de  dévotion  qui  se  voyaient  en  ces 
»  simples  et  bons  catholiques  au  moment  où  je  leur  ad- 
»  ministrais  le  très-saint  sacrement,  et  la  ferveur  avec 
»  laquelle  ils  voulaient  l'un  avant  l'autre  le  recevoir  de 
»  ma  main.  »  Le  lendemain  il  présida  à  la  procession 
solennelle  qui,  chaque  année,  se  faisait  ce  jour-là  en 
l'honneur  de  la  Vierge  et  à  laquelle  assistaient ,  avec  le 
clergé  séculier  et  régulier,  tous  les  corps  de  métiers  et  le 
magistrat  de  la  ville.  La  procession  avait  parcouru  à  peine 
la  moitié  du  tour  qu'elle  devait  faire,  lorsqu'elle  fut 
assaillie  par  une  pluie  battante.  Quelques-uns  conseillaient 
à  Benlivoglio  de  se  mettre  à  couvert  :  mais  lui,  jugeant  que 
les  hérétiques,  qui  étaient  là  en  grand  nombre  pour  être 
témoins  d'une  chose  si  nouvelle,  la  procession  conduite  par 
un  nonce  apostolique,  en  auraient  murmuré,  et  que  peut- 
être  les  catholiques  eux-mêmes  en  auraient  reçu  peu 
d'édification,  résolut  de  tenir  bon  contre  l'orage,  comme 
il  le  fit  jusqu'à  ce  que  la  procession  fut  rentrée.  Dans  la 
matinée  du  même  jour  plus  de  cent  cinquante  personnes, 
venues  au  palais  épiscopal,  où  il  était  logé,  lui  avaient 
témoigné  le  désir  d'avoir  sa  bénédiction  :  les  ayant  réunies 
dans  une  salle,  il  leur  adressa,  en  latin,  une  allocution 
que  le  neveu  de  l'évêque,  Aubert  Le  Mire,  l'auteur  des 
Diploniata  bclgica  et  de  tant  d'autres  ouvrages  d'érudition, 
traduisit  en  flamand;  après  quoi  il  leur  donna  sa  bénédic- 
tion et  leur  distribua  des  médailles  dont  il  s'était  muni. 
«  J'espère  »  —  mande-t-il  au  cardinal  secrétaire  d'État  — 
«  que  ce  voyage  d'Anvers  n'aura  pas  été  de  peu  d'efl'et 
»  pour  maintenir  dans  leur  constance  en  notre  sainte  foi 
»  les  catholiques  des  Provinces-Unies,  et  même  à  l'égard 
»  des  hérétiques,  parmi  lesquels  il  en  est  beaucoup  qui, 
»  vivant  dans  l'hérésie  plutôt  parce  qu'ils  ont  été  trompés 


(  iU  ) 
»  que  par  un  mauvais  esprit,  pourraient  ouvrir  les  yeux 
»  et  reconnaître  Terreur  dont  ils  sont  imbus  par  la  fausse 
»  opinion  qu'ils  ont  de  l'Église  romaine  et  des  ministres 
»  et  prêtres  dépendants  du  souverain  pontife.  »  Il  ne  dis- 
simule pourtant  pas  au  secrétaire  d'État  que  la  liberté  du 
commerce  attire  à  Anvers  un  grand  nombre  de  protestants, 
lesquels,  les  jours  de  fête,  vont  entendre  les  prêches  au 
fort  de  Lillo,  occupé  par  les  Hollandais.  Jusqu'ici,  dit-il, 
on  n'a  pu  y  remédier,  quoique  l'évêque  (1)  soit  d'une  vigi- 
lance exemplaire  (2). 

L'automne  suivant,  les  Archiducs  étant  allés  à  leur 
château  deMariemont,  Bentivoglio  en  profita  pour  faire  une 
excursion  en  Flandre  et  en  Artois.  Il  commença  sa  tournée 
par  Gand;  je  n'ai  pas  trouvé  la  lettre  contenant  la  relation 
de  cette  partie  de  son  voyage.  A  Bruges,  où  il  se  rendit 
ensuite,  il  rencontra  dans  l'évêque  (o)  un  bon  et  zélé 
prélat,  et  dans  les  chapitres  de  la  cathédrale  et  des  deux 
collégiales  une  infinité  de  personnes  pieuses  et  de  vie  irré- 
prochable. Les  guerres  des  dernières  années  et  les  troubles 
qui  les  précédèrent  avaient  causé  beaucoup  de  mal  à  cette 
ville  ainsi  qu'au  pays  d'alentour,  sous  le  rapport  de  la  reli- 
gion en  particulier  :  Bentivoglio  exhorta  l'évêque  à  pour- 
voir les  villages,  ceux  surtout  qui  confinaient  au  territoire 
des  Provinces-Unies,  de  pasteurs  ayant  les  qualités  requises 
pour  remplir  avec  succès  leur  charge;  ce  prélat  lui  dit  que 
c'était  une  de  ses  principales  préoccupations,  mais  que  la 
difticulté  était  grande  à  cause  de  la  pénurie  des  sujets. 


(1)  Jean  Le  Mire,  évèque  d'Anvers  depuis  1601. 

(2)  Dépêche  du  22  août  1609.  Voy.  l'Appendice  n*»  II. 
(5)  Charles-Philippe  de  Rodoan. 


(  165  ) 
Bentivoglio  visita  toutes  les  églises  paroissiales  et  toutes 
les  maisons  religieuses  :  il  lui  parut  que  la  population  de 
Bruges  était  plus  affectionnée  à  la  religion  catholique  que 
celle  de  Gand;  il  lui  fut  même  assuré  qu'on  n'y  comptait 
pas  un  seul  hérétique.  Il  adressa  tour  à  tour  aux  magistrats 
de  la  ville  et  du  Franc  des  allocutions  où  il  s'appliqua 
à  exciter  leur  zèle  pour  que  la  pureté  de  la  foi  ne  reçut 
aucune  atteinte  dans  les  lieux  soumis  respectivement  à  leur 
juridiction  :  il  fut  accueilli  et  écoulé  avec  beaucoup  de 
déférence  par  ces  deux  collèges  (1). 

Le  12  octobre  il  partit  de  Bruges  pour  Ostende,  où  il 
passa  la  nuit.  «  Je  trouvai,  »  dit-il,  «  cet  endroit  très-mal 
»  fourni  d'édifices  et  d'habitations  ordinaires  ;  presque 
»  tous  ont  été  détruits  au  temps  du  long  siège  qu'y  sou- 
»  tinrent  les  ennemis,  par  Timpièlè  desquels  une  église 
»  fort  spacieuse  et  d'une  très-belle  construction  a  été 
»  réduite  à  un  état  déplorable.  On  a  commencé  de  réparer 
»  cette  église  depuis  que  la  ville  est  dans  les  mains  des 
»  nôtres,  et  je  ne  manquerai  pas  d'agir  auprès  du  séré- 
»  nissime  Archiduc  afin  que  la  réparation  soit  complète. 
B  La  paroisse  est  pourvue  d'un  bon  et  diligent  curé  ;  je  lui 
»  ai  donné  les  instructions  convenables,  l'exhortant  à 
»  continuer,  avec  toute  la  vigilance  possible,  ses  soins 
»  à  son  troupeau,  qui  peut  être  d'environ  mille  âmes, 
»  outre  une  garnison  d'un  chiffre  à  peu  près  égal,  entre 
»   Espagnols,  Allemands  et  Irlandais  {!2).  ■>■>  Le  futur  his- 


(1)  Dépèche  du  11  octobre  1609.  Voy.  l'Appendice  n°  III. 

(2)  «  .. .  Trovai  quel  luogo  mollo  mal  foniilo  d'edificii  et  d'habitationi 
ordinarie,  le  quali  sono  quasi  lutte  andate  per  terra  nel  lempo  del  lungo 
assedio  ciie  v'hanuo  soslenuto  deiitro  i  iieuiici ,  dalla  cui  impietà  è  stata 
ridolta  a  mal  termine  una  chiesa  che  v'èmolto  ampla  e  di  struttura  assai 


(  466  ) 

torieii  (les  guerres  des  Pays-Bas  examina  avec  beaucoup 
de  curiosité  ia  silualion  et  la  forme  de  la  ville,  et  recueillit 
une  foule  de  particularités  du  siège  qui  avait  excité  en 
Europe  un  si  vif  intérêt  (1). 

Dans  le  trajet  d'Ostende  à  Dunkerque  Benlivoglio  s'ar- 
rêta à  l'endroit  où  avait  été  donnée  la  bataille  de  Nieuport. 
Le  gouverneur  de  Meuport,  qui  à  celte  bataille  avait 
rempli  la  charge  de  commissaire  général  de  la  cavalerie, 
était  venu  à  sa  rencontre;  il  lui  fit  par  le  menu  le  récit  de 
tout  ce  qui  s'y  était  passé.  Il  lui  dit  quelles  positions  les 
deux  armées  avaient  occupées,  comment  l'action  s'était 
engagée  entre  elles,  avec  quelle  valeur  on  avait  de  part 
et  d'autre  combattu,  quelles  avaient  été  les  causes  de  la 
défaite  des  troupes  hispano-belges,  enfin  de  quel  noble 
sang  ces  champs  avaient  été  abreuvés.  «  Ce  ne  fut  pas  »  — 
écrit  Bentivoglio  —  «  ce  ne  fut  pas  sans  une  grande  dou- 
)»  leur  que  j'écoutai  ce  récit,  car  il  représenta  à  mes  yeux 
»  non-seulement  la  mort,  mais  presque  la  terre  qui  avait 
»  été  rougie  du  sang  de  deux  des  miens,  l'un  mon  frère, 
»  Taulre  mon  neveu,  lesquels,  arrivés  au  camp  par  la  poste 
»  le  jour  précédent,  restèrent  tous  les  deux  sur  le  champ 
»   de  bataille  (2).  » 


nobile.  A  questa  cliiesa  tuUavia  si  vanno  facendo  vaiii  riparamenti  doppo 
ch'  è  in  mano  de'  nostri ,  et  io  non  lascierô  di  far  offilio  col  serenissimo 
arciduca  per  ia  total  sua  riparatione.  E  provista  la  chiesa  di  buono  e  dili- 
gente cura,  al  quai  lio  dato  i  rioordi  che  mi  son  pars!  a  proposilo,  et 
essortalolo  a  conlinuar  con  ogni  possibil  diligenza  nella  cura  del  suo 
gregge,  che  puô  esser  di  cirea  mille  anime,  oltre  ad  un  piesidio  che  vi  è 
di  quasi  oltre  tante,  fra  Spagnuoli,  Alenianni  et  Irlandesi....  »  {  Dépêche 
du  18  octobre  1609,  datée  de  Saint-Omer.) 

(1)  Autre  dé[»èche  du  18  octobre. 

(2)  X  ....  Venue  ad  incontrarmi  il  governalore  medesimo  di  Neuporlo, 
soldalo  vecchio,  spagnuolo,  e  clie  nella  baliaglia  islessa  era  commissario 


(  167  ) 
Après  Dunkerque  Benlivoglio  visita  Saint-Omer,  Ypies, 
Courlrai  et  Tournai.  Il  fait  une  longue  description  du 
séminaire  anglais  de  Saint-Omer,  où  il  passa  toute  une 
journée,  y  ayant  le  matin  célébré  la  messe,  donné  la  com- 
munion aux  élèves ,  présidé  à  une  procession  revêtu  d'une 
chappe  qui  avait  appartenu  à  Henri  Mil  et  que  l'on  con- 
servait précieusement  dans  la  maison;  l'après-midi  ayant 
examiné  en  détail  l'établissement  et  entendu  un  concert 
vocal  et  instrumental  exécuté  par  les  élèves  ;  le  soir  ayant , 
à  la  grande  joie  de  ceux-ci,  soupe  au  réfectoire  pendant  que 
quatre  d'entre  eux  disputaient,  en  grec  et  en  latin ,  sur  un 
sujet  sacré  qui  leur  avait  été  proposé  à  l'improviste.  Ce 
séminaire  était  gouverné  par  les  pères  de  la  compagnie  de 
Jésus.  Les  élèves  étaient  au  nombre  de  plus  de  cent  :  c'était 
la  fleur  des  catholiques  d'Angleterre;  beaucoup  appar- 
tenaient à  des  familles  nobles;  quelques-uns  étaient  des 
lils  de  prolestants  ou  du  moins  de  personnes  politiques 
lesquelles  extérieurement,  se  conformant  aux  circon- 
stances ,  vivaient  dans  la  foi  que  Tintérèl  leur  faisait 
adopter.  11  s'y  trouvait,  entre  autres,  le  fils  de  l'interprète 
des  langues  du  roi  Jacques;  son  père,  quoiqu'il  fît  profes- 
sion de  la  religion  anglicane,  tenait  à  ce  qu'il  fût  élevé  dans 
cette  maison.  Bentivoglio  termine  sa  lettre  en  recomman- 


generale  dclla  cavaleria.  Da  lui  seppi  distiiuamente  quanto  passo,  corne 
furon  posli  in  ordinanzegli  esserciti , corne  s'incoiitrarono,  quanto  valoro- 
sanienle  fù  combatlulo,  quali  furoii  le  cagioni  délia  rolta  de'  nostri,  e  di 
quai  sangue  fii  nobilitata  quella  campagna.  Ne  lu  senza  mio  gran  senli- 
nienlo  il  raguagiio,  poicliè  rae  rappresenlô  inanzi  a  gli  occhi  non  solo  la 
morte  ma  quasi  il  terreno  macchiato  del  sangue  di  due  de'  miei ,  l'uno 
fralello  e  l'altro  nipote,  che  giunti  per  le  poste  al  campo  il  di  inanzi ,  res- 
larono  ambedue  niorli  nella  baiaglia •>  (Deuxième  dépêche  du  18  oc- 
tobre ci-dessus  citée.  ) 


(  168  ) 
danl  le  séminaire  à  la  protection  du  cardinal  Borghèse  : 
«  Pendant  le  temps  que  j'y  ai  passé»  —  lui  dit-il  —  «  il  m'a 
»  semblé  véritablement  que  j'étais  en  un  paradis  au  milieu 
»  des  anges  (!)•  » 

De  Courtrai  et  de  Tournai  Bentivoglio  dit  peu  de  chose; 
il  avait  déjà,  à  la  suite  d'un  voyage  fait  l'été  précédent, 
rendu  compte  au  cardinal  Borghèse  de  l'état  de  l'Église 
dans  cette  dernière  ville,  A  Ypres,  où  il  descendit  chez 
l'évêque  (2),  il  fut  reçu  par  le  clergé  et  par  le  magistrat 
avec  toutes  les  marques  d'honneur  qui  étaient  dues  à  son 
caractère.  Comme  Bruges  et  Gand,  Ypres,  dans  les  années 
qui  suivirent  la  mort  du  grand  commandeur  de  Castille 
D.  Luis  de  Requesens,  avait  vu  les  réformés  devenir  les 
maîtres  de  la  ville  :  mais,  après  qu'Alexandre  Farnèse  l'eut 
fait  rentrer  sous  l'autorité  de  Philippe  II,  la  réforme  en 
avait  disparu;  tout  au  plus,  à  l'époque  de  la  visite  de 
Bentivoglio,  aurait-on  pu  y  trouver  quelques  personnes 
professant  le  protestantisme  en  secret.  Les  jésuites,  qui  y 
avaient  fondé  un  collège,  avaient  beaucoup  contribué  à  ce 
résultat;  le  nonce  se  promettait  aussi  de  grands  fruits  de 
l'exemple  et  des  prédications  des  PP.  capucins  que  l'évêque 
venait  d'y  introduire  (5). 

En  quittant  Tournai,  Bentivoglio  se  dirigea  vers  Binche, 
pour  aller  faire  sa  cour  aux  Archiducs,  qui  étaient  encore 
au  château  de  Mariemont.  Albert  et  Isabelle  se  plaisaient 
beaucoup  en  cette  résidence,  pour  les  chasses  qu'ils  y 


(J)  Troisième  dépèciie  du  18  octobre  1009.  Voy.  l'Appendice  n»  IV. 
(2)  Charles  Maes,  l)riixeiloi.s,  ancien  doyen  de  la  calhédrale  d'Anvers. 
Il  avaitélé  sacré  le  2i,juin  1607. 
(5)  Dépèche  du  29  octobre  1609.  (Appendice  n'  V.) 


(  169  ) 

avaient  eî  auxquelles  l'Infante  surtout  prenait  un  plaisir 
singulier  (1). 

III. 

Les  Archiducs  étaient  en  ce  temps-là  préoccupés  d'une 
affaire  qui  présageait  de  graves  complications  politiques. 

Jean-Guillaume,  duc  de  Clèves  et  de  .luliers,  était  mort 
le  25  mai  1609  sans  laisser  de  postérité.  De  nombreux 
compétiteurs  prétendaient  à  sa  succession;  on  comptait, 
parmi  eux,  Jean-Sigismond ,  électeur  de  Brandebourg, 
Philippe-Louis  de  Bavière,  duc  de  Neubourg,  tous  deux 
luthériens;  Charles  d'Autriche,  marquis  de  Burgau,  et  la 
maison  de  Saxe.  Les  deux  premiers,  par  un  arrangement 
fait  à  Dortmund  le  51  mai  et  auquel  les  états  de  Clèves 
donnèrent  leur  assentiment,  convinrent  de  prendre  en 
commun  l'administration  des  duchés  jusqu'à  ce  que  des  ar- 
bitreseussent  prononcésur  leurs  droits  respectifs;  ils  furent 
reçus  et  reconnus,  en  qualité  de  gouverneurs,  à  Dusseldorf. 
L'empereur  Rodolphe  H  cependant,  envisageant  la  con- 
vention de  Dortmund  comme  attentatoire  à  l'autorité  im- 
périale, la  déclara  nulle;  il  évoqua  à  sa  personne  et  à  son 
conseil  l'affaire  de  la  succession  du  duc  Jean-Guillaume,  et 
ordonna  qu'en  attendant  un  jugement  définitif,  les  terres 
contestées  fussent  mises  en  séquestre  entre  les  mains  de 


(1)  .,  Le  caccie,  délie  quali  gusta  grandemente  in  parlicolare  la 

serenissima  infanta... .  «  (  Dépèche  du  3  octobre  1609.) 

Au  mois  de  juillet  1611  Bentivoglio  alla  visiter  le  Brabant  septentrional 
et  la  Gueidre;  il  alla  à  Cambrai  au  mois  de  septembre  suivant.  Ses  dépè- 
ches contiennent  sur  ces  différents  voyages  bien  des  détails  intéressants. 
J'ai  beaucoup  regretté  de  n'avoir  pu  eu  faire  prendre  copie  et  de  n'avoir 
pas  eu  le  temps  de  les  extraire. 


(  ^70  ) 
l'archiduc  Léopold,  évoque  de  Strasbourg,  sou  cousin  (1), 
Dès  qu'il  avait  été  instruit  de  la  mort  du  duc  Jean- 
Guillaume,  et  même  auparavant,  pendant  la  maladie  de  ce 
prince,  Henri  IV  avait  agi  auprès  de  l'électeur  de  Brande- 
bourg et  du  duc  de  Neubourg  alin  qu'ils  s'accordassent 
sur  leurs  prétentions  à  la  succession  de  Clèves;  il  apprit 
avec  une  vive  satisfaction  l'entente  qui  s'était  établie  entre 
eux,  avec  l'adhésion  des  états  du  pays.  H  écrivit  à  ceux-ci 
pour  les  en  féliciter  et  les  exhorter  à  prêter  tout  leur  appui 
à  l'électeur  et  au  duc  :  «  Quoy  faisant,  »  —  leur  disait-il  — 
«  vous  recevrez  de  moy  la  faveur  et  assislence  que  vous 
»  debvez  espérer  d'un  roy  qui  affectionne  la  prospérité 
»  desdicts  princes  et  de  leurs  maisons,  et  la  justice  en 
»  toutes  choses  (2).  »  Lorsqu'il  sut  que  l'empereur  avait 
annulé  la  convention  deDortmund,  il  annonça  l'intention 
de  soutenir  par  les  armes  les  deux  princes  protestants  :  il 
ordonna  que  des  troupes  fussent  levées,  pour  être  dirigées 
vers  les  frontières  de  son  royaume  qui  conlinaientau  pays 
de  Luxembourg.  A  la  nouvelle  de  ces  ordres,  l'archiduc 
Albert  fut  fort  ému  (5).  Autour  de  lui  les  opinions  sur  ce 
qu'il  en  fallait  augurer  étaient  diverses.  Le  marquis  de 
Guadaleste  supposait  des  desseins  ambitieux  au  roi  de 
France;  il  conseillait,  si  ses  troupes  tentaient  de  traverser 
la  province  de  Luxembourg,  d'y  mettre  obstacle  par  la 
force  (4).  Ambroise  Spinola  ne  croyait  pas  qu'Henri  JV 
voulût  rallumer  la  guerre,  après  avoir  tant  contribué  à  la 


(1)  Dépêches  des  1 1  et  18  juillet  1609. 

(2)  Lettre  du  24  juin  1609,  conservée  en  original  dans  les  Archives 
royales  de  Dusseldorf. 

(3)  V.  ....  A  quest'aviso  reslù  grandissiniamente  turbato...  "  (Dépèche 
du  18  juillet  1609.) 

(4)  IbvJ. 


(  ■171  ) 
conclusion  de  la  trêve  de  douze  ans;  il  pensait  que  l'objet 
principal  de  ce  monarque,  celui  qui  lui  tenait  le  plus  au 
cœur,  était  d'assurer  sa  succession  à  son  iils;  que  c'était 
dans  ce  but  qu'il  avait  si  vivement  insisté  pour  que  l'Es- 
pagne et  les  Provinces-Unies  licenciassent  leurs  armées, 
ôtant  par  là  aux  mécontents  de  son  royaume,  catholiques 
et  protestants,  l'espoir  dont  ils  s'étaient  flattés  peut-être 
de  trouver  de  l'appui  auprès  de  l'une  ou  de  l'autre  des 
deux  puissances  (1).  Bentivoglio  n'était  pas  aussi  optimiste 
que  Spinola  :  «  La  réputation  du  roi  de  France  »  — écrit-il 
au  cardinal  secrétaire  d'État  —  «  est  très-grande;  ses 
»  forces  sont  toutes  prêtes;  les  conjonctures  lui  sont 
»  favorables  :  car  ici  nous  manquons  de  tout;  les  princes 
»  prétendants  d'Allemagne  n'ont  ni  troupes  ni  considé- 
»  ration  ni  argent  ;  les  Provinces-Unies  sont  à  la  discrétion 
»  du  roi,  étant  tenues  en  bride  par  les  4,000  Français 
»  qu'elles  ont  chez  elles  et  qui  ne  les  laisseraient  pas, 
»  encore  qu'elles  le  voulussent,  entraver  l'exécution  de 
»  ses  desseins  (2).  » 

Albert  chargea  son  ministre  à  Paris  de  demander  au  roi 
des  explications  sur  les  armements  qu'il  faisait  (5).  A  l'am- 
bassadeur d'Henri  IV,  qui  vint  l'assurer  des  dispositions 


(1)  Dépêche  du  18  juillet  1009. 

(2)  «  ...  Vedesi  esser  grandissima  la  riputatione  de!  re,  le  sue  forze 
prontissime,  e  la  congiuiilura  mollo  favorevole  ,  nientre  clie  iioi  qua  siamo 
sprovisti  di  tulle  le  cose,  mentre  che  i  principi  preteiidenti  d'Alemagua 
son  disarmali  e  son  senza  riputatione  e  danaro,  e  mentre  le  Proviucie 
Unité,  ancorchè  non  volessero,  sarebbon  coslrette  a  dipendere  lutte  dal 
re,  per  liaver  esse  un  freno  in  bocca  di  4,000  Francesi,  ch'inipedirebbono 
ogni  distuibo  ch'esse  pensassero  di  dar  al  re  per  non  lasciarlo  far  questi 
uuovi  progressi  e  diventarior  prencipe  confinante,  con  troppo  loro  spa- 
venlo  e  pericolo....  •'  {Ibid.) 

(5)  rbid. 


(  172  ) 
pacifiques  et  désintéressées  de  son  maître,  il  déclara  net- 
tement que,  si  le  roi  entendait  intervenir  pour  lui-même 
dans  la  querelle  de  Clèves,  il  s'y  opposerait  de  tout  son 
pouvoir  (1).  Ce  langage  énergique  lui  avait  été  inspiré  par 
Spinola  (2). 

Sur  ces  entrefaites  l'archiduc  Léopold  arriva  à  l'impro- 
viste  à  Juliers;  il  y  fut  parfaitement  accueilli  de  la  popu- 
lation, surtout  de  la  noblesse,  qui  avait  refusé  de  recon- 
naître l'électeur  de  Brandebourg  et  le  duc  de  Neubourg  (5), 
Cet  événement  produisit  une  grande  sensation  à  Bruxelles, 
à  Paris  et  à  la  Haye.  En  France  et  dans  les  Provinces- 
Unies  on  fut  persuadé  que  l'envoi  de  Léopold  avait  été 
concerté  entre  l'empereur,  le  roi  d'Espagne  et  les  Archi- 
ducs; on  en  tira  la  conséquence  que  les  trois  cours  avaient 
en  vue  de  s'emparer  des  duchés  au  profit  de  la  maison 
d'Autriche. 

Bien  n'était  pourtant  plus  éloigné  de  la  vérité  :  Henri  IV 
put  s'en  convaincre  par  la  démarche  que  fil  auprès  de  lui 
le  nonce  apostolique  Ubaldini,  en  son  nom  et  en  celui  des 
ambassadeurs  d'Espagne  et  des  Pays-Bas;  ce  ministre  lui 
proposa  d'envoyer  le  président  Jeannin  ou  un  autre  de  ses 
conseillers  à  l'archiduc  Léopold  ,  ainsi  qu'aux  deux  princes 
prétendants,  pour  les  inviter  à  sortir  des  duchés,  lesquels 
seraient  administrés  par  les  états  ou  par  un  magistrat  que 


(1)  »  ....  Perché  pareva  a  Sua  Altezza  fosse  contro  ogni  verisiniiliiudine 
clie  Sua  M'^  si  meUesse  tanlo  inanzi  nelle  cose  di  Cleves,  se  non  havesse 
qualche  disegiio  per  se  medesimo,  si  diehiarava  iiberamenle  l'Altezza  Sua 
di  non  esser  per  soffrir  in  modo  alcuno  clie  quesli  disegni  passassero 
inanzi,  ma  ch'avrebbe  procurato  d'inlerrompergii  e  dislurbargli  con 
mue  quei  modi  ch'  liavesse  potulo ■>  (Dépêche  du  18  juillet  1609.) 

(-2)  Dépêche  du  -25  juillet  1609. 

(5)  Dépêche  du  I"  août  1609. 


(  i75  ) 
ceux-ci  éliraient,  jusqu'à  ce  que  les  parties  intéressées  se 
fussent  mises  d'accord  ou  qu'elles  se  fussent  soumises  au 
jugement  de  l'autorité  légitime  (1).  Henri  parut  goûter 
cette  proposition  (2). 

L'archiduc  Albert,  doutant  que  le  Roi  lut  sincère  en 
cela,  envoya  à  Paris  le  président  Richardot,  par  lequel  il 
fit  suggérer  au  nonce  de  mettre  en  avant,  au  besoin, 
une  autre  combinaison  :  celle-ci  aurait  consisté  en  ce  que 
Léopoid  ,  l'électeur  de  Brandebourg  et  le  duc  de  Neubourg 
restassent  avec  ce  qu'ils  tenaient  respectivement  (5)  ;  mais 
le  principal  objet  de  la  mission  de  Richardot  était  de  s'as- 
surer, auprès  du  roi  lui-même,  en  lui  parlant  avec  une 
entière  franchise ,  des  desseins  de  ce  monarque  à  l'égard 
de  la  succession  de  Clèves,  et  s'il  voulait  conserver  ou 
rompre  la  paix  avec  l'Espagne  et  les  Pays-Bas  catho- 
liques (4).  Henri  IV  répondit  au  président  du  conseil  des 
Archiducs  qu'il  n'avait  nulle  envie  de  faire  des  nouveautés 
ni  de  donner  lieu  à  ce  que  la  guerre  se  rallumât,  mais 
qu'il  ne  pouvait  ni  ne  voulait  abandonner  ses  amis  (5).  Et 
il  continua  ses  dispositions  militaires  ainsi  que  ses  négo- 
ciations avec,  les  princes  protestants. 

La  conduite  d'Henri  IV  dans  ces  circonstances  inspire 
à  Benlivoglio  des  réflexions  qui  me  paraissent  mériter 
d'avoir  place  ici  :   «  En  vérité  »  —  écrit  l'archevêque  de 


(1)  Lettre  du  nonce  L'baldini  à  Benlivoglio,  du  4  aoîil  1609. 

(2)  a  ....  Sua  M'a  ha  inteso  voloutieri  questa  propositione....  »  (Ibid.) 

(3)  Dépêche  du  lôaoiit  1609. 

(4)  a  ....  Ha  risoluto  FArciduca  di  niandar  il  présidente  Ricciardotto  in 
Fraucia  per  Irattar  co'l  re  e  per  saper  liberamente  da  Sua  Maeslà  quai 
animo  è  il  suo  e  quello  che  pensi  e  disegni  sopra  le  cose  di  Cleves,  e  se 
Sua  Maeslà  vuol  continuar  o  pur  roniper  la  pace  co'l  re  cattolico  e  con 
Sua  Altezza....  »  (Dépêche  du  8  aoùl  1609.) 

(3)  Dépêche  du  ^9  août  1609. 


(  174  ) 

RhoJes  —  «  la  ruse  et  les  arlifices  du  roi  de  France  sont 
»  si  grands  qu'on  ne  sait  se  faire  aucun  jugement  de  ses 
»  véritables  intentions.  Dans  le  même  temps  il  favorise  les 
B  hérétiques  et  il  prête  l'oreille  aux  pratiques  qui  se  font 
»  contre  eux;  il  proteste  qu'il  ne  veut  pas  la  guerre  et  il 
»  lève  des  troupes;  il  se  déclare  médiateur  et  il  se  montre 
»  partie;  il  négocie  d'une  manière  avec  le  nonce  et  il 
B  traite  différemment  avec  d'autres;  il  accueille  des  arran- 
»  gements  conformes  à  son  intérêt  et  puis  il  les  aban- 
»  donne;  il  se  transforme  enfin  de  tant  de  façons  et  prend 
»  tant  de  visages  qu'on  perd  l'esprit  à  vouloir  le  péné- 
»   trer  (1).  » 

Aussitôt  après  son  arrivée  à  Juliers,  l'archiduc  Léopold 
avait  envoyé  à  Albert  un  de  ses  gentilshommes  pour  l'en 
avertir  et  réclamer  son  assistance  (2).  Bentivoglio  aurait 
voulu  qu'il  lui  fut  donné  au  moins  quelque  secours  d'ar- 
gent; il  fit  dans  ce  but  des  démarches  auprès  de  l'Archi- 
duc, du  marquis  Spinola  et  de  l'ambassadeur  d'Espagne  : 
mais  Albert  se  montra  fermement  résolu  à  éviter  tout  ce 
qui  aurait  pu  servir  de  motif,  de  prétexte  même  de  rup- 
ture à  la  France  et  aux  Provinces-Unies  (5);  il  se  borna 


(1)  «  ....  Sono  si  grandi,  per  dir'  il  vero,  l'astulie  e  Tarli  del  re  di 
Fraucia  che  qui  non  si  sa  far  giudilio  aiciino  siguro  de'  suoi  disegni.  In 
un  niedesimo  tempo  favorisée  gli  herelici  e  dà  orecchie  a  pralicclie  contro 
di  loro;  protesta  che  non  vuoi'  guerra  e  fa  muover  génie;  si  dichiara 
mezzano  e  si  mostra  parte  ;  negotia  in  un  modo  co'l  nuniio  e  tratta  diver- 
samente  con  altri;  inclina  a  parlili  di  suo  proprio  interesse  e  poi  non  gli 
va  secondando,  e  si  trasforma  in  tante  foggie  e  ligure  che  si  perde  il 
giudilio  in  voler  rilrovarle....  •   (  Dépêche  du  15  août  1609. ) 

(2)  Dépèche  du  8  août  1609. 

(3)  «  ....  Fù  vana  Topera  niia  per  la  ferma  risolutione  ch'io  trovai  in 
S.  A.  di  fuggir'  ogni  occasione  di  rompere  co'l  re  di  Francia  e  con  Je 
Provincie  Unité....  »  (Dépêche  du  15  août  1609.) 


(  173  ) 
à  l'aire  parvenir  à  son  cousin  des  choses  dont  celui-ci  avait 
besoin  pour  son  usage  personnel,  un  carrosse ,  des  chevaux 
de  selle,  un  service  d'argenterie,  du  linge  de  table,  des 
objets  d'ameublement  :  Léopold,  étant  venu  Tort  à  la  hâte, 
était  dénué  de  tout  (1).  En  agissant  ainsi,  Albert  faisait 
preuve  de  prévoyance  et  de  sagesse  :  aider  Léopold,  c'eût 
été  fournir  à  Henri  IV  l'occasion  qu'il  épiait  d'intervenir 
dans  la  querelle  de  Clèves.  L'ambassadeur  français  à 
Bruxelles,  dans  une  conversation  qu'il  eut  avec  Spinola, 
ne  lui  laissa  pas  ignorer  le  parti  que  son  maître  aurait  tiré 
d'une  pareille  imprudence  (2). 


IV. 


Les  choses  étaient  dans  cet  état  lorsqu'un  événement 
étranger  à  la  politique  vint  brouiller  les  cours  de  Bruxelles 
et  de  Paris. 

Fatigué  des  obsessions  dont  sa  jeune  épouse,  Marguerite 
de  Montmorency,  était  l'objet  de  la  part  d'Henri  IV,  le 
prince  de  Condé,  Henri  H  de  Bourbon,  prit  la  détermi- 
nation ,  au  mois  de  novembre  1609,  de  se  retirer  avec  elle 
aux  Pays-Bas.  Le  roi  vert-galant  en  conçut  une  vive  irri- 
tation :  les  Archiducs  refusant  de  lui  remettre  celle  dont  il 
s'était  épris,  il  était  près  de  leur  déclarer  la  guerre  quand 
le  couteau  de  Bavaillac  trancha  ses  jours  (3). 


(1)  Dépêche  du  8  août  1609. 

(i)  Dépêche  tiu  29  octobre  1609. 

{7i)  Ce  fait  hisloiique  donna  lieu,  en  1790,  à  l'assemblée  nationale  de 
France ,  à  une  controverse  quMl  n'est  pas  hors  de  propos  de  rappeler  ici. 

C'était  à  la  séance  du  16  mai.  L'assemblée  discutait  la  question  sui- 
vante :  «   La  nation  doit-elle  déléguer  au  roi  l'exercice  du  droit  de 


(  176) 
Une  main  illustre,  qui  manie  la  plume  comme  elle  a 
manié  l'épée,  a  naguère  retracé  cet  épisode  de  l'histoire 


n  guerre?  >'  Charles  de  Lameth  ,  pour  démoiilrer  que  cette  prérogative 
devait  être  réservée  au  corps  législatif,  dit  entre  autres  cLoses  :  «  Il 
»  en  coûte  à  des  Français  de  rappeler  des  traits  nuisibles  à  la  gloire 
«  d'Henri  IV.  Quand  la  France,  par  un  crime  horrible,  a  perdu  le  meilleur 
>i  des  rois,  ce  monarque  allait  embraser  l'Europe  pour  la  possession  de  la 
n  princesse  de  Coudé.  » 
A  ces  mots  l'abbé  Maury,  se  levant,  s'écria  :  «  C'est  une  calomnie.  » 

Lameth  reprit  »  J'ai  avancé  qu'Henri  IV,  au  moment  où  un  crime 

>'  détestable  nous  a  privés  d'un  bon  roi,  allait  faire  une  tache  à  sa  gloire 
»  et  sacrifier  le  bonheur  de  son  peuple  à  sa  passion  insensée  pour  la 
.>  princesse  de  Condé.  (Nouvelle  interruption  de  l'abbé  Maury.)  Je  le 
'^  prouverai  par  dix  monuments  historiques,  par  les  Mémoires  de  son 
•>  ami  Sully  :  il  est  impossible  qu'ayant  toujours  aimé  la  mémoire 
»  d'Henri  IV ,  il  est  impossible  qu'avec  le  culte  dont  je  fais  profession, 

»  j'aie  inventé  ce  trait • 

Le  comte  deVirieu,qui  parla  immédiatement  après  Lameth,  débuta 
ainsi  :  •  L'inculpation  faite  à  la  mémoire  d'Henri  IV  est  injuste.  Suivant 
•'  tous  les  historiens ,  il  ne  devait  faire  la  guerre  que  pour  abaisser  la 
.    maison  d'Autriche,  et  pour  parvenir  à  réaliser  une  paix  perpétuelle 

.'  qu'Henri  IV  a  la  gloire  d'avoir  le  premier  tentée » 

Le  tour  de  parole  de  l'abbé  Maury  ne  vint  qu'à  la  séance  du  18. 
Dans  son  discours  il  ne  manqua  pas  de  répondre  à  Lameth  :  «  On  nous  a 
dit  qu'Henri  IV  allait  allumer  la  guerre  dans  toute  l'Europe  ,  à  cause 
d'une  passion  insensée  pour  Chariolle  de  Montmorency,  princesse  de 
Condé.  Permettez-moi,  permettez  à  un  représentant  de  la  nation  de 
réclamer  une  grande  pensée  pour  la  gloire  de  Henri.  Non,  il  n'allait  pas 
mettre  l'Europe  en  feu  pour  une  passion  insensée;  il  allait  exécuter  un 
projet  médité  depuis  vingt  et  un  ans,  qu'il  avait  concerté  avec  la  reine 
Elisabeth,  que  pendant  longtemps  il  n'avait  pu  persuader  à  son  ami 
Sully,  et  que  Sully  reconnut  ensuite  pour  être  facile,  juste  et  glorieux; 
il  allait  former  de  l'Europe  une  grande  confédération.  On  voit  pour- 
quoi Henri  IV  écrivait ,  la  veille  de  sa  mort  :  v  Si  je  vis  lundi ,  ma  gloire 
commence  lundi.  «  Et  ce  fut  le  vendredi  qu'un  monstre  rendit  les  Fran- 
çais orphelins  et  fit  verser  à  la  France  des  larmes  que  deux  siècles  n'ont 
encore  pu  tarir.  J'ai  cru,  dans  une  discussion  de  cette  importance,  devoir 
celle  réparation  publique  à  la  mémoire  d'Henri  IV.  Ainsi  il  n'est  pas 


(  177  ) 
des  princes  de  Condé  d'après  des  documents  inédits  tirés 
pour  la  plupart  des  archives  royales  de  Bruxelles  (1). 

Le  même  sujet  a  été  traité  ex  professa,  et  d'une  manière 
vraiment  remarquable,  par  un  officier  de  notre  armée, 
M.  le  capitaine  commandant  Henrard  (2). 

On  sait  que  Benlivoglio  écrivit  une  Relation  de  la  fuite 
d'Henri  H  de  Bourbon  (5),  qui  fut  imprimée  de  son 
vivant.  Certes  son  intimité  avec  Ambroise  Spinola  et  la 
confiance  que  lui  témoignait  l'archiduc  Albert  l'avaient 
mis  à  même  de  connaître,  mieux  que  personne,  toutes  les 
circonstances  de  cette  affaire;  aussi  sa  Relation  ne  laisse- 
t-elle  rien  à  désirer  sous  le  rapport  de  l'exactitude  des 
faits  qu'elle  contient.  Mais  on  comprend  qu'il  ne  dit  pas 
là  tout  ce  qui  était  parvenu  à  sa  connaissance,  et  que  ses 
dépêches  renfermaient  bien  des  particularités  réservées 
pour  le  cardinal  secrétaire  d'État. 

Plusieurs  de  ces  dépêches  manquent  dans  les  volumes 
du  Vatican  et  de  la  Barberina.  La  première  en  date  qu'on 
lise  dans  ces  volumes  est  du  15  mars  1610,  et  ainsi  pos- 
térieure au  départ  de  Condé  pour  l'Italie;  Bentivoglio  y 
marque  que,  s'il  s'était  agi  de  rompre  son  mariage,  ce 


>'  vrai  qu'aucune  iiileiition  ail  pu  afTaiblir  le  inéiile  d'un  grand  projel 
■    conçu  par  Henri  IV.  »  {Moniteur  universel.) 

On  demeurera  convaincu,  je  crois,  après  avoir  lu  les  dépêches  de 
Benlivoglio,  que  Lamelh  élail  plus  près  de  la  vérité  que  l'abbé  Maury  et 
le  comte  de  Virieu. 

(1)  Histoire  des  princes  de  Condé  pendant  les  seizième  et  dix-septième 
siècles ,  par  M.  le  duc  d'Aumale  ;  Paris,  1865-1864,  l.  II ,  p.  233. 

(2)  Henri  IV  et  la  princesse  de  Condé ,  1609-1610  :  Précis  historique, 
suivi  de  la  correspondance  diplomatique  de  Pecquius  et  d'autres  docu- 
ments inédits;  par  Paul  Henrard,  capitaine  commandant  d'artillerie, 
l'.ruxelles,  1870.  (  Société  de  l'histoire  de  Delgique.  ) 

(ô)  Belatione  délia  fuga  di  Francia  iVHenrico  II  di  Borbonc. 
2""''  SÉRIE,  TOME  XXXVm.  ^- 


C  178  ) 
prince  y  aurait  consenti  volontiers,  ayant  dit  au  marquis 
(le  Spinola  que  c'eût  été  pour  lui  la  meilleure  nouvelle  du 
monde,  mais  qu'il  pensait  tout  différemment  sur  le  point 
du  divorce,  auquel  en  aucune  façon  il  ne  donnerait  son 
consentement,  de  crainte  qu'on  n'en  prît  occasion  de  con- 
duire sa  femme  en  France  et  de  la  livrer  aux  désirs  du 
roi  (1). 

Une  dépêche  très-longue,  datée  du  1"  mai,  concerne 
la  mission  que  le  sieur  de  Préaux  (2)  reçut  en  apparence 
du  connétable  de  Montmorency,  père  de  la  princesse  de 
Condé,  et  de  sa  tante,  madame  d'Angoulême,  mais  eu 
réalité  d'Henri  IV,  de  venir  à  Bruxelles  réclamer  la  prin- 
cesse. Avant  de  la  faire  connaître,  je  crois  devoir  donner  la 
traduction  d'une  curieuse  lettre  que  dans  le  même  temps  l'in- 
fante Isabelle  écrivit  de  sa  main  à  Philippe  111  (3)  :  «  Sire,  » 
lui  disait-elle,  «  ici  on  ne  s'occupe  que  de  guerre.  Le  roi 
»  de  France  rassemble  en  grande  hâte  son  armée;  il  veut 
»  rompre  avec  nous,  parce  qu'on  ne  lui  remet  pas  cette 
»  femme,  laquelle  est  bien  gagnée  par  lui,  ou  perdue  pour 
»  mieux  dire.  J'en  ressens  une  très-grande  peine,  car  c'est 
B  la  plus  jolie  personne  du  monde  et  la  plus  agréable 
»  et  de  la  meilleure  nature  :   mais  les  mauvais  conseils 


(1)  a  M'hadetto  il  marchese  che  Coudé  a  lui  disse  già  ch'il  romper 

queslo  matrimonio  sarebbe  stata  per  lui  la  migiior  nuova  del  moudo. 
Diverso  pei-5  è  il  senso  di  Condé  sopra  il  punto  del  divorlio  :  a  ciô  non 
consentira  egli  in  modo  alcuno,  per  dubbio  che  si  pigli  quesl'  occasione 
di  tirar  la  moglie  in  Francia  ,  e  d'esporla  aile  voglie  del  re » 

(2)  Charles  de  l'Aubespine,  abbé  de  Préaux,  conseiller  au  parlement  de 
Paris. 

(3)  Cette  lettre,  en  date  du  22  avril  1610,  est  conservée  en  original  à 
la  Bibliothèque  nationale ,  à  Madrid  ,  MS.  I  151 ,  fol.  700.  Elle  a  été  pu- 
bliée ,  en  1863,  dans  la  Coleccion  de  documenfos  inéditos  para  la  liis- 
toria  de  Espafia,  t.  XLlll ,  p.  182. 


(  179  ) 
»  qu'elle  a  el  qu'elle  a  eus,  les  présents  et  les  lettres 
»  qu'elle  reçoit,  l'aveuglent  au  point  que  je  tiens  sa  perte 
»  pour  certaine.  Nous  faisons  tout  ce  qui  est  en  notre 
»  pouvoir  pour  lui  complaire  et  gagner  sa  confiance,  mais 
»  c'est  du  temps  perdu,  et  l'on  ne  peut  l'empêcher  de 
»  parler  à  ceux  qui  lui  apportent  les  messages  et  les 
»  lettres.  Les  intermédiaires  ne  manquent  pas.  Les  prin- 
»  cipales  sont  la  femme  de  l'ambassadeur  que  le  roi  de 
»  France  a  ici  (I),  quoique  son  mari  soit  un  homme  très- 
»  honorable,  et  une  vieille  qui  l'a  élevée  et  par  là  a  beau- 
»  coup  d'empire  sur  elle.  On  a  ôté  celle-ci  d'auprès  de  sa 
»  personne,  mais  elle  demeure  chez  la  femme  de  l'ambas- 
»  sadeur,  et  tous  les  jours  elle  lui  mande  ce  qu'elle  doit 
»  faire  et  ce  qu'elle  doit  écrire  au  roi.  La  princesse  a 
fi  quelque  chose  de  si  céleste  que,  si  l'on  voulait  faire  son 
9  portrait,  on  ne  pourrait  mieux  la  peindre  que  sous  les 
»  traits  d'un  ange;  et  quand  je  me  rappelle  la  ligure  du 
»  galant,  je  ne  puis  m'empècher  de  rire,  malgré  la  guerre 
j>  qu'il  veut  nous  faire.  » 

C'est  qu'en  effet  Henri  IV  annonçait  hautement  l'in- 
tention de  délivrer  la  princesse  de  Condé  de  la  prétendue 
prison  dans  laquelle  on  la  tenait,  et  de  la  venger  de  l'offense 
grave  qui  lui  avait  été  faite  par  les  bruits,  attentatoires  à 
son  honneur,  qu'on  avait  répandus  après  qu'elle  avait  tenté 
de  s'enfuir  du  palais  de  Bruxelles  :  choses,  disait-il,  qui 
touchaient  son  honneur  propre ,  indépendamment  de 
l'appui  qu'il  devait  à  une  cause  aussi  juste  que  celle  du 
connétable  (2), 


(1)  Le  sieur  de  Berny. 

(2)  «  11  re  diceva  liberameiKe  di  voler  liberar  di  prigione  la  prenci- 

pessa  di  Condè,  e  risenlirsi  delP  ofTesa  d'esser  stata  ella  dishonorata  cosi 


(  i80  ) 
Je  reviens  à  la  dépêche  du  d"  mai.  Dans  sa  Relalione 
Bentivoglio  rapporte,  en  substance,  la  demande  que  le 
sieur  de  Préaux  fil  à  rArcliiduc  et  la  réponse  de  ce  prince  : 
le  tout  est  conforme  aux  termes  de  la  dépêche.  Le  langage 
d'Albert  ne  satisfit  point  de  Préaux  ni  l'ambassadeur  de 
France;  ils  allèrent  se  plaindre  au  nonce  du  tort  qui  était 
fait  à  la  princesse  et  de  l'injure  qui  en  résultait  pour  le  roi. 
L'Archiduc  appela  Bentivoglio  :  il  lui  dit  que,  s'il  pouvait, 
en  gardant  son  honneur,  restituera  princesse,  il  le  ferait 
sans  hésiter,  car  elle  ne  lui  causait  que  de  l'embarras  et 
des  désagréments  (1).  il  demanda  conseil  au  nonce.  Ben- 
tivoglio s'excusa  d'intervenir  dans  une  affaire  aussi  déli- 
cate :  «  Je  vois  »  — écrit-il  au  cardinal  Borghèse  —  «  je  vois 
»  l'Archiduc  très-enclin  à  rendre  la  princesse,  et  je  pense 
»  qu'il  le  ferait,  s'il  en  avait  le  moindre  prétexte.  Son 
»  Altesse  abhorre  incroyablement  la  guerre;  elle  ne  se 
>  dissimule  pas  qu'elle  serait  grandement  inférieure  au 
»  roi  de  France,  trop  bien  pourvu  de  deniers,  de  gens, 
»  d'amis  et  de  réputation.  Ces  ministres  français  qui  sont 
»  ici  font  entendre  ouvertement  des  menaces  au  cas  qu'on 
»  ne  restitue  point  la  princesse;  et  s'ils  ne  disent  pas  que 
»  la  guerre  se  fasse  pour  elle,  ils  disent  du  moins  que 
»  c'est  un  motif  à  mettre  en  ligne  de  compte  avec  ceux 
»  que  les  Espagnols  leur  ont  donnés  déjà  de  la  faire.  Ils 


noiabilmente  per  quelle  voci  clie  si  sparsero  di  quella  nolle  cli'ella  haveva 
volulo  fuggir  di  Brusseiies  :  cose  lutte  clT  empegnavano  i'honor  proprio 
di  S.  IM'%  e  cir  oltre  di  quesli  rispelli  non   poteva  la  M''  S.  abbandoiiar 

una  causa  si  giusta  comm'  eia  quella  del  conteslabile »  (Dépêche  du 

24  avril  1610.) 

(1)  • Poichè  rhaverla  in  casa  non  gli  arreca  senon  desturbo  et  in- 

comnioJo.  ...  « 


(  181  ) 
!>  ajoulcnl,  en  souriant,  que  s'il  est  vrai,  comme  ils  ap- 
î  prennent  qu'on  ralïlrme,  que  le  roi  est  amoureux  de 
B  la  princesse  et  qu'il  déclare  la  guerre  pour  elle,  il  fera 
»  cette  guerre  d'autant  plus  joyeusement  et  avec  d'autant 
D   plus  de  cœur  (1).  » 

Les  ministres  espagnols  qui  étaient  à  la  cour  de  Bruxelles 
s'indignaient  de  la  faiblesse  de  l'Archiduc  {%.  Ambroise 
Spinola  disait  que  c'étaient  des  subtilités  plus  propres  à  des 
docteurs  en  droit  qu'à  des  princes,  que  celles  auxquelles 
l'Archiduc  s'arrêtait;  que  Son  Altesse  ne  pouvait  pas  ou- 
blier la  parole  donnée  par  elle  à  Condé;  que  c'étaient  là 
les  lois  qui  devaient  être  observées  par  les  princes;  que, 
sous  le  prétexte  d'intenter  une  action  en  divorce,  on 
n'avait  d'autre  but  que  de  livrer  la  princesse  à  la  sensualité 
du  roi  de  France  (5);  que  tout  ce  que  faisaient  le  conné- 
table et  madame  d'Angoulême,  ils  le  faisaient  violentés 
par  le  roi  (4),  mais  que  le  fissent-ils  sponlanémeiU,  en 


(1)  « Veggo  TArciduca  incliiiatissimo  a  resliluir  la  prencipessa,  e 

oon  ogni  leggiero  preteslo  mi  par  di  veilere  clie  lo  tarebbe.  Abbonisce 
incrcdibilnienle  S.  A.  la  guerra,  e  si  vede  in  lermino  di  dover  trovarsi 
grandemenle  inferiore  al  re  di  Francia,  troppo  hen  furnito  di  danari, 
d'buomini,  d'aniiei  e  di  riputatione  E  quesli  ministri  fraiicesl  qui  minac- 
ciano  allamenle,  quando  non  si  restiluisca  la  prencipessa;  e  se  ben  non 
dicono  cbe  la  guerra  si  iaccia  per  lei,  dicono  perôclie  con  le  altre  cagioni 
c'hanno  date  gli  Spagnuoli  di  farla ,  entrera  quesla  ancora;  el  aggiungono 
sorridendo  clie  se  egli  è  pur  vero  fcome  enlendono  che  qui  s'aftirma  cos- 
lantamente)  ehe  'I  re  sia  innanioralo  di  lei,  e  che  por  lei  niuova  l'arnii, 
lanto  più  allegramenle  e  lanlo  piii  di  cuore  S.  M.  l'ara  quesla  guerra....  » 
(Dépêche  du  1"  mai  1610.) 

(2)  «  ....  Gli  Spagnuoli  fremono  incredibilmenle  nel  veder  che  S.  A.  si 
vada  disponendo  tanto  alla  reslilution  della  prencipessa....  «  (Ibid.) 

(3)  »  Che   d'espor'  la  prencipessa   alla  libidine   del   re  di   Fran- 
cia  f  'Jbid.) 

(i)  «  ...  .  Per  violenza  del  re »  {Ibid.) 


(  182  ) 

déshonorant  avec  tant  d'infamie  le  sang  dont  ils  étaient 
issus  (1) ,  Son  Altesse  ni  Sa  Majesté  Catholique  ne  le  de- 
vaient souffrir;  qu'un  aussi  grand  prince  que  l'Archiduc 
était  tenu  de  persévérer  dans  la  constance  qu'il  avait 
montrée  jusqu'alors;  que  lui  et  tous  les  ministres  espagnols 
et  tous  les  autres  vassaux  du  roi  catholique  aux  Pays-Bas 
étaient  résolus  de  se  jeter  à  ses  genoux,  pour  le  supplier  de 
ne  permettre  point  que  la  parole  qu'il  avait  donnée  à  Condé 
fût  faussée,  et  de  ne  se  faire  ainsi  l'instrument  de  la  perte 
de  sa  femme  :  car  ce  serait  la  plus  abominable  action 
qu'aucun  prince  du  monde  eut  jamais  commise  (2). 

Au  nonce  le  marquis  déclara  que  personne,  plus  que 
lui,  ne  souhaitait  que  la  guerre  ne  se  rallumât  point,  et 
qu'indépendamment  des  considérations  d'intérêt  public, 
ce  souhait  lui  était  inspiré  par  l'état  de  ses  affaires  privées, 
car  les  dépenses  excessives  qu'il  avait  faites  et  qu'il  faisait 
encore  aux  Pays-Bas  avaient  consumé  une  grande  partie 
de  ses  biens  :  d'oîi  était  né  en  lui  le  dessein  d'aller  s'établir 
en  Espagne  avec  ses  enfants,  et  d'y  chercher  quelque 
moyen  de  réparer  les  pertes  de  sa  maison,  mais  que,  s'il 
était  ami  de  la  paix,  c'était  sauf  son  honneur  et  celui 
de  son  roi  ;  que,  pour  les  sauvegarder,  il  était  prêt  à  rester 
à  Bruxelles  et  à  sacrifier  ce  qui  lui  restait  de  biens  et 
sa  vie  même.  Il  ajouta  que,  s'il  était  vrai  que  l'Archiduc  se 
décidât  à  rendie  la  princesse,  il  aimerait  mieux  mourir 
que  d'être  témoin  d'une  chose  aussi  indigne  (5). 

(1)  <■  ....    E  s'iiiducessero  con  tanla  loro  iiidignilà  a  dishonorar  il  lor 
saugre  ....  •  (Dépécliedu  !«•'  mai  1610.) 

(2)  » Perché  questa  sarebbe  la  più  indigna  e  la  più  ahominevol 

allione  c'  havesse  mai  fatta  prencipe  al  mondo  ....  « 

(â) M'ha  detto  di  più  il  marcliese  que  niiino  più  di  lui  ha  desi- 

deralo  la  quicle  e  clie  non  si  havesse  di  nuovoa  rompiT  la  gueira,  poichè. 


(  ^83  ) 

Albert,  ne  voulant  pas  manquer  à  sa  parole  et  désirant 
cependant  donner  quelque  satisfaction  au  roi  de  France, 
lit  offrir  à  l'ambassadeur  d'Henri  IV,  le  sieur  de  Berny,  et 
au  sieur  de  Préaux  de  soumettre  à  un  juge  compétent, 
c'est-à-dire  au  pape,  la  question  de  savoir  si  la  princesse 
devait  être  remise  à  sa  lamille.  Les  Français  rejetèrent 
absolument  cette  offre,  disant  qu'elle  n'était  qu'un  moyen 
dilatoire;  que  la  même  proposition  avait  déjà  été  faite  par 
l'ambassadeur  de  l'Archiduc  en  France  et  repoussée.  Ils 
ne  s'en  tinrent  pas  là,  mais  ils  déclarèrent  que  leur  roi 
était  assez  puissant  pour  venir  se  faire  remettre  par  force 
la  princesse,  et  même  pour  aller  enlever  de  Milan  le  prince 
son  mari  (1). 

Il  devenait  évident  qu'Henri  IV  se  préparait  à  la  guerre. 
Il  avait,  le  H  février,  conclu  un  traité  d'alliance  avec  les 
électeurs  palatin  et  de  Brandebourg,  auxquels  s'étaient 
joints  depuis  le  duc  de  Wurtemberg,  le  prince  d'Anhalt  et 


tilire  aile  considéra tioiii  pubbliche,  l'han  faUo  entrai-  in  questo  desiderio 
i  siioi  bisogni  privali  ,  havendo  consumata  grau  parle  délia  sua  robba  con 
le  spese  eccessive  c"ba  faUe  e  che  fa  tutlavia  qui  :  dal  che  nasce  ch'egli 
sommainente  desideri  d'andar  in  Ispagna  a  quivi  fermarsi  co'  suoi  figliuoli, 
e  trovar  qualche  rimedio  per  rislorar  i  danni  della  sua  casa;  baver  egli 
perô  desideralo  questo  co'l  debilo  risguardo  dell'  honor  suo  e  del  suo  re  : 
ond'hora,  convenendo  per  questo  risguardo  niedesimo  ferniarsequi,  esser 
pronlo  a  consumar  quanto  gli  resta  di  roblw  et  aspender  la  vila  niede- 
sinia  per  quesl'  effetto;  e  quando  pur  fosse  vero  che  l'Arciduca  s'inducesse 
lion  tanla  inlamia  a  r^sliluir  la  prencipessa  ,  più  toslo  desiderar  egli  la 

morte  slessa  che  veder'  un'  attione  si  indegna »    (Dépèche  du  1"  mai.) 

(1)  »  Non  baslo  a  quest'  ambasciator  di  Francia  di  ri])uttar  sola- 

mcnte  il  predetlo  partit© ,  che  soggiunse  ancora  parole  piene  di  sdegno  e 
piene,  per  dir  il  vero,  di  troppa  temerità,  dicendo  che  ritenesse  pur  S.  A., 
quanio  voleva,  la  prencipessa ,  che  '1  suo  re  era  bastante  di  venir  a  levarla 

per  forza  di  qua,  e  di  levar  ancora  per  forza  il  prencipe  di  Milano » 

(Dépèche  du  8  mai  1610.) 


(  184  ) 

les  frères  des  deux  électeurs.  Il  ne  cessait  d'augmenter  ses 
forces.  Il  comptait,  malgré  la  trêve,  d'entraîner  les  Hol- 
landais, par  l'influence  du  comte  Maurice  de  Nassau, 
à  renouveler  les  hostilités  (1). 

Les  Pays-Bas,  s'il  les  attaquait,  n'étaient  guère  en  état 
de  lui  résister;  les  troupes  réunies  du  roi  d'Espagne  et 
des  Archiducs  dans  ces  provinces  ne  s'élevaient  pas  à 
quinze  mille  hommes.  L'archiduc  Albert  lit  à  la  hâte 
quelques  levées.  Il  renforça  les  garnisons  des  places  fron- 
tières. Il  assigna  Philippeville  pour  rendez -vous  à  son 
armée.  Il  devait  en  prendre  lui-même  le  commandement, 
ayant  sous  ses  ordres  le  marquis  Spinola  comme  mestre 
de  camp  général,  D.  Luis  de  Velasco  et  le  comte  de  Buc- 
quoy  en  qualité  de  généraux  respectivement  de  la  cavalerie 
et  de  l'artillerie  (2). 

Tout  cet  appareil  de  guerre  cessa  par  l'assassinat  du  roi. 

A  la  nouvelle  du  crime  de  Bavaillac,  la  princesse  de 
Condé  témoigna  la  plus  grande  douleur.  Elle  n'en  persista 
pas  moins  à  demander  la  dissolution  de  son  mariage.  Les 
agents  français  lui  avaient  fait  accroire  que  le  roi  voulait 
l'unir  au  dauphin,  alors  âgé  de  neuf  ans  à  peine;  elle 
s'imaginait  qu'il  en  pouvait  être  encore  ainsi  :  elle  montra 
à  l'infante  Isabelle  une  lettre  que  ce  jeune  prince  lui  avait 
écrite  avant  sa  sortie  de  France;  dans  cette  lettre  il  lui 
déclarait  son  amour  et  l'appelait  sa  dame  (5).  De  leur 


(1)  Sismondi,  Histoire  des  Français,  t.  XV,  pp.  236  et  242. 

(2)  Dépèches  tlu  2i  avril  et  du  1"  mai  1610. 

(3)  <■ La  preiicipessa  tiiltavia  inlende  di  traltar  del  divortio  anzi 

délia  dissolution  del  matrimoiiio  ,  per  quanto  ni'ha  detto  l'infanta.  Ha 
moslrato  a  queslo  proposito  S.  A.  di  ridersi  o  piii  toslo  d'haver  compas- 
sione  délia  simplicità  délia  prencipessa  ,  o  delT  inganno  in  che  l'han  posta 
questi  Francesi  cou  haverle  dato  ad  intendeie  cli'l  re  voleva  maritarla  al 


(  183  ) 
côté,  les  sieurs  de  Berny  et  de  Préaux  continuaient  leurs 
instances  pour  que  la  princesse  pût  retourner  dans  sa 
famille;  ils  le  faisaient  afin  qu'on  se  persuadât  que  c'était 
l'intérêt  du  connétable,  de  madame  d'Angoulème  et  de  la 
princesse  elle-même  qui  avait  été  le  mobile  de  leurs  pré- 
cédentes démarches  (1). 

Condé  arriva  de  Milan  à  Bruxelles  le  19  juin;  il  se 
rendit  chez  le  marquis  Spinola.  Bentivoglio  alla  lui  rendre 
visite;  il  dit  au  nonce  que,  vu  la  mort  du  roi,  il  ne  ferait 
plus  de  difficulté  de  consentir  à  ce  que  la  princesse 
retournât  en  France  (2).  Une  quinzaine  de  jours  aupa- 
ravant, le  connétable  avait  envoyé  son  secrétaire  aux 
Archiducs,  pour  réclamer  sa  fdle  et  pour  qu'elle  ne  fût 
pas  remise  à  son  mari  :  Albert  et  Isabelle  avaient  répondu 
au  sieur  de  Préaux,  qui  leur  avait  présenté  les  lettres  de 
Montmorency,  qu'ils  ne  remettraient  pas  la  princesse  à 
son  mari,  mais  qu'ils  ne  la  laisseraient  point  partir  de 
Bruxelles  sans  le  consentement  du  prince  (3). 

Le  20  juin  Condé  avec  Spinola  et  le  comte  d'Aîiover  (4.) 
se  rendit  à  Mariemont,  où  étaient  les  Archiducs.  Il  remercia 


deltino,  credendo  ella  tutavia  c"hoia  potrebb' esser  l'istesso.  In  confir. 
malion  délia  quale  speranza  ni'ha  delto  S.  A.  c'ha  fatlo  vedere  hora  la 
prencipessa ,  doppo  la  morle  del  re  ,  uoa  leUera  scrittaie  dal  dellino  prima 
ch'ella  uscisse  di  Francia,  iiella  quale  letlera  esso  delfino  le  discopriva  il 
suo  amore  e  la  cliianiava  sua  dama.  Sono  stali  grandissimi  i  pianti  délia 
prencipessa  per  la  morte  del  re «  (Dépêche  du  22  mai  1610.) 

(1)  Ibid. 

(2)  i.  C'iiora  ,  slante  la  morte  del  re,  egli  non  farà  diflBcoUà  nel 

prestar  il  suo  consens»)  per  eirella  lorni  quando  vorrà...  (Dépêche  du 
19  juin  1610.) 

(3)  Dépêche  du  3  juin  1610. 

(4)  D.  Rodrigo  Lasso,  créé  comte  dWnover  par  Philippe   III   l'année 
précédente. 


(  '186  ) 
Albert  et  Isabelle  de  la  faveur  qu'ils  lui  avaient  faite  de 
garder  si  longtemps  auprès  d'eux  la  princesse  sa  femme, 
leconnaissant  qu'il  leur  était  redevable  en  grande  partie 
de  l'bonneur  et  de  la  vie.  Il  leur  dit  ensuite  que  la  princesse 
pouvait  retourner  à  Paris  à  sa  volonté  ;  qu'il  n'y  faisait 
plus  d'opposition.  L'Arebiduc  s'empressa  de  faire  savoir 
au  connétable  qu'il  pouvait  envoyer  cbercber  sa  (ille  quand 
et  de  la  manière  qu'il  le  jugerait  à  propos  (I). 

Condé  ne  resta  à  Mariemont  que  le  temps  nécessaire 
pour  voir  les  Archiducs;  le  même  jour  il  était  de  retour 
à  Bruxelles,  où  il  trouva  le  prince  d'Orange,  son  beau- 
frère,  accouru  de  Breda  pour  le  recevoir  dans  son  palais. 
Ils  allèrent  ensemble  faire  un  pèlerinage  à  Notre-Dame  de 
Montaigu  :  la  princesse  d'Orange  les  attendait  à  Malines; 
ils  revinrent  tous  trois  à  Bruxelles  le  25  juin  (2). 

Les  prétentions  de  Condé,  au  moment  où  il  se  disposait 
à  rentrer  en  France,  étaient  grandes;  il  ne  voulait  rien 
moins  que  la  charge  de  lieutenant  général  du  royaume  :  il 
montra  au  marquis  Spinola  quantité  de  lettres  qu'il  avait 
reçues  de  Paris  et  dont  les  signataires  le  pressaient  de  se 
rendre  sans  délai  dans  celte  capitale,  l'assurant  qu'il  aurait 
toute  l'autorité  dont  il  pouvait  désirer  d'être  revêtu.  Il 
hésitait  toutefois  à  partir;  il  aurait  souhaité  qu'auparavant 
sa  situation  fût  fixée  :  mais  Spinola  fit  cesser  ses  irréso- 


(1)  «  Andô  poi  Condé  a  Marinionle,  per  ringratiar  queste  AA.  dell' 

haver  tratlenula  lanti  mesi  appresso  di  loio  sua  moglie,  et  con  termini 
pieni  d'ossequio  e  d'obbligo,  disse  di  riconoscer  daiP  AA.  loro  in  gran  parte 
l'honorée  la  vita.  Dichiarossi  poi  di  eontenlarsi  che  la  moglie  tornasse  a 

suo  piacere  a  Parigi In  lanto  i'Aiciduca  lia  falto  sapere  al  conteslahile 

che  potrà  enviar  per  la  figliuoia  quando  vorrà »  CDépèche  du  26  juin 

1610.) 

(2)  Ibid. 


(  187  ) 
liJlions  (I).  Beiilivoglio,  en  transmettant  ces  détails  au 
cardinal  Borghèse,  les  accompagne  de  réflexions  qui  ne 
laissent  pas  d'être  curieuses  :  «  Sans  doute  »  —  dit-il  — 
«  Condé  va  retourner  en  France  avec  une  très-grande 
»■  réputation  :  mais  saura-t-il  la  soutenir?  Condé  est  jeune; 
»  il  a  l'esprit  fin  et  vif  :  mais  ni  son  âge  ni  son  naturel 
»  ne  le  portent  à  la  prudence.  Il  aura  donc  besoin  d'un 
»  bon  conseil  (2)  :  or  les  deux  personnes  dans  lesquelles 
»  il  a  le  plus  de  confiance  sont  le  duc  de  Bouillon,  héré- 
»  tique,  et  le  président  de  Thou,  catholique,  mais  plus 
»  impie  en  ses  histoires,  que  j'ai  lues  ici,  que  ne  le  sont 
»  beaucoup  d'auteurs  hérétiques  mêmes  :  toutefois  il  est 
»  catholique,  et,  d'après  ce  que  j'ai  appris,  il  excuse 
»  l'impiété  de  sa  plume  en  se  fondant  sur  la  liberté  de 
»  l'histoire  (3).  » 

Le  nonce  eut  avec  Condé,  au  sujet  du  président  de 
Thou,  une  longue  conversation  dont  il  rapporte  la  sub- 
stance au  cardinal  secrétaire  d'État  :  «  Le  prince  »  —  lui 
écrit-il  —  «  avoue  que  le  président  est  son  très-grand 
»  ami,  et  il  aftirnie  et  jure  qu'il  est  un  des  meilleurs 
»  catholiques  de  toute  la  France.  Quant  à  son  histoire,  il 
»  dit  que  la  malice  des  temps  et  la  liberté  naturelle  de  la 
>>  nation  lui  servant  d'excuse;  qu'elle  a  été  écrite  à  une 
p  époque  où  Vol  voyait  en  France  des  armées  des  papes 


{])  Dépêche  du  20  Juin  1610. 

(H)  "  ...  .  Seiiza  (iubbio  seguirà  qucsto  suo  rilorno  con  graiidissima 
riputaiione.  Ma  la  somma  consiste  in  sapeiia  niantenere.  Condè  è  gio- 
vanné,  acuto  e  vivace;  ma  ne  per  l'età  ne  per  la  disposition  di  natura  è 
punto  prudente.  Havrà  per  ciô  bisogno  di  chi  io  consigli....  «  (Ibkl.) 

(5)  1'  Callolico,  nia  più  enipio  neliesue  historié,  ch'io  ho  lelte  qui, 

che  non  sonomoKi  aulori  herelici  stessi  :  pure  caltolico,  e  per  quant'  ho 
inteso,  egli  scusa  l'iinpietà  délia  penna  con  la  libertà  dell'  historia » 


(  188) 
»  qui  y  étaient  venues  à  l'instigation  des  Espagnols  ;  que 
»  le  royaume  était  alors,  par  ce  motif,  mal  disposé  envers 
»  le  siège  apostolique,  et  que  la  liberté  de  parler  et  d'écrire 
»  des  Français  est  si  grande  qu'elle  ne  sait  se  plier  aux 
»  règles  qui  seraient  nécessaires.  Quoi  qu'il  en  soit,  il 
»  affirme  constamment  que  de  Thou  est  un  catholique 
B  très-zélé,  et  il  déclare  qu'il  attache  un  grand  prix  à  ses 
»  conseils,  par  lesquels  il  s'est  laissé  guider  jusqu'à  pré- 
»  sent  (1).  » 

Le  connétable  cependant  cherchait  à  réconcilier  sa  tille 
avec  son  mari;  il  envoya  dans  ce  but  un  gentilhomme  à  la 
princesse  à  Mariemont.  Marguerite  de  Montmorency  se 
montra  peu  disposée  d'abord  à  un  raccommodement;  elle 
répondit  qu'elle  voulait  retourner  à  Paris  avant  tout  (2). 
Le  connétable  supplia  les  Archiducs  d'user  de  l'intluence 
qu'ils  avaient  sur  elle  pour  lui  faire  entendre  raison;  en 
même  temps  il  s'efforça  de  se  justilier  de  l'écrit  qui,  au 
mois  d'avril ,  leur  avait  été  présenté,  en  son  nom  ,  contre 
son  gendre.  [1  accusa  de  cet  écrit  son  secrétaire,  qui,  ayant 


(1).  « Habbiamo  poi  parlato,  Condé  e  yo,  molio  a  lungo  del  prési- 
dente Tuaiio.  Confessa  egii  ch'el  présidente  è  siio  grandissimo  aniico,  et 
afferma  e  giura  ch'è  uno  de'  migliori  cattoliei  di  tutla  Francia.  Quant'  alT 
hisloria ,  lo  scusa  no  men  su  la  malvagità  de'  tempi  che  su  la  libertà  natu- 
rale  délia  natione.  Dicechefù  scritta  in  tempo  che  si  vedevano  in  Francia 
gli  essercili  de'  papi  ad  instigatione  degli  Spagnuoli ,  e  perciô  cL'era  ail" 
hora  mal  affello  el  regno  verso  la  sede  apostolica,  e  che  la  libertà  del 
parlare  e  dello  scrivere  de'  Francesi  è  tanto  grande  che  non  sa  ristringersi 
aile  regole  cbe  sarian'  necessarie.  Comunque  si  sia  ,  aftîrma  egli  costanta- 
menle  che  'I  Tuano  è  caltolico  zeiantissimo,  et  si  dichiara  di  dover  dav 
gran  fede  a  suoi  consigii,  da'  quali  dice  essersi  lasciato  indrizzare  sin 
hora....  "  (Dépèche  du  ."5 juillet  1610.  ) 

(2)  »  La  prencipessa  non  si  voleva  lasicar  dispoire  in  modo  alcuno 

ad  accomodarsi  qua  ,  ma  voleva  prima  toniar  a  Parigi..  .  »  [Ibid.) 


(  ^89  ) 
été,  disait-il ,  corrompu  par  le  roi  (I),  l'avait  trompé  :  car, 
comme  il  ne  savait  ni  lire  ni  écrire,  ce  secrétaire  lui  avait 
lu  une  chose  pour  une  autre,  et  l'avait  aidé  à  apposer  sa 
signature  au  papier  qui  lui  était  présenté  (2).  Les  exhor- 
tations des  Archiducs  à  la  princesse  ne  furent  pas  infruc- 
tueuses :  elle  finit  par  déclarer  qu'elle  était  prête  à  se 
soumettre  à  la  volonté  de  son  père  et  à  reconnaître  ses 
torts  envers  son  mari  (5). 

Condé  ne  se  laissa  pas  loucher  par  la  soumission  de  sa 
femme  :  ses  parents,  sa  mère  surtout  et  sa  sœur  la  prin- 
cesse d'Orange,  ainsi  que  le  duc  de  Bouillon  et  de  Thou, 
étaient  opposés  à  une  réconciliation.  A  la  vérité,  de  graves 
reproches  pouvaient  être  faits  à  Marguerite  de  Montmo- 
rency :  mais  il  fallait  tenjr  compte  de  sa  jeunesse  et  des 
pièges  qui  avaient  été  tendus  à  son  innocence  :  <i  Un 
»  volume  »  —  écrivait  Bentivoglio  au  cardinal  Borghèse  — 
«  ne  suffirait  pas  à  raconter  toutes  les  maudites  inventions 
»  dont  on  s'est  servi  pour  la  détourner  de  ses  devoirs  (4).  » 

Condé  partit,  le  6  juillet,  avec  Spinola  et  Bentivoglio 
pour  Mariemont,  afin  de  prendre  congé  des  Archiducs, 
à  qui  il  fit  de  nouveau  ses  remercîments.  De  là  il  se 
rendit  à  Binclie,  où  l'attendait  le  sieur  de  Barrault,  chargé 
par  Louis  XIII  et  Marie  de  Médicis  de  lui  exprimer  le  désir 
de  le  voir  en  France.  Bentivoglio,  toujours  préoccupé  de 


(I;  « Ch'era  corrolto  dal  re....  »  (Dépèche  du  5  juillet  1010.) 

(2)  '< Poichè  non  sapendo  esso  couteslabile  ne  leggei'e  ne  scrivere 

il  segrelario  gli  lesse  una  cosa  per  uu"  allra  ,  el  l'aiiilo  a  sottoscrivere 
quello  chenon  doveva....  »  (Ibid.) 

(5)  « Hora  sarebbegià  disposta  la  preucipessa  a  far  quanto  vuole  il 

pa  jre  et  ad  humiliarsi  al  marilc...  »  {Ibid.) 

(4)  » Tutte  le  malvaggie  inventioni  clie  soiio  slale  usate  per  cor- 

romper  l'animo  délia  prencipessa....  »  {Ibid.) 


(  190  ) 

l'influence  que  le  duc  de  Bouillon  et  le  président  de  Thou 
pouvaient  exercer  sur  les  affaires  de  ce  royaume,  s'entre- 
tint d'eux  avec  l'envoyé  français.  Barrault  lui  dépeignit 
le  duc  comme  «  un  homme  dont  les  vues  étaient  sus- 
»  pectes  (1);  »  il  dit  de  de  Thou  qu'il  passait  pour  un 
catholique  peu  zélé  «  et  chez  lequel  prévalaient  dès  long- 
»  temps  les  sentiments  politiques  à  l'égard  de  la  religion  : 
»  opinion  qui,  depuis  la  mort  du  roi,  lui  avait  nui  beau- 
»  coup  auprès  de  la  reine;  aussi,  ayant  aspiré  à  la  pre- 
»  mière  présidence  du  parlement,  en  vertu  de  la  renon- 
»  ciation  qu'aurait  faite  en  sa  faveur  le  premier  président 
»  en  exercice,  son  parent  (2),  n'avait-il  pu  l'obtenir  à 
B  cause  de  son  peu  d'affection  à  la  religion  catholique  (5).  » 
Le  8  juillet  Condé  quitta  Binche,  prenant  le  chemin  de 
Paris;  un  grand  nombre  de  gentilshommes  français  étaient 
venus  aux  Pays-Bas  pour  lui  faire  cortège.  Avant  son 
départ,  il  fit  présent  à  l'Archiduc  d'un  cimeterre,  de  travail 
turc,  enrichi  de  pierreries,  d'une  valeur  de  neuf  mille 
écus,  et  au  marquis  Spinola  d'un  poignard  estimé  à  trois 
mille  écus.  Le  comte  d'Anover,  le  secrétaire  d'État  Man- 
cicido  et  la  camàrera  mayor  de  l'infante  reçurent  aussi 


(1)  a Huonio  inclinato  a  disegni  torbidi....  »  (Dépêche  du  10  juil- 
let 1610.) 

(2)  Achille  de  Harlay ,  son  beau-frère. 

(ô)   « Del  Thuano,  che  è  in  opinione  di  catlolico  poco  zelante,  et 

in  cui  prevagliono  di  gran  lunga  i  sensi  politici  al  rispetlo  délia  religione  : 
concello  che  gli  ha  nociuto  raolto  hora  doppo  la  morte  del  re  appresso  alla 
regina ,  poichè  havendo  egli  procurato  d'esser  fallo  primo  présidente  del 
parlamento,  in  virlù  d'una  rinuntia  di  questo  carico  che  gli  havrebbe 
fatta  il  primo  présidente,  il  quaîe  è  congiunto  seco  di  parentela,  non  ha 
esso  Thuano ,  corne  poco  ben  disposlo  verso  la  religion  caltolica ,  potuto 
conseguire  relFetto....  •  (Dépêche  du  10  juillet  1610.) 


(  liH  ) 
(le  lui  (les  objets  de  prix.  L'Archiduc,  qui  lui  avail  donné 
deux  superbes  chevaux  magnifiquement  enharnacbés,  fit 
difficulté  d'abord  d'accepter  le  cimeterre,  mais  enlin  il 
céda  aux  instances  du  prince.  Condé  ne  voulut  point  voir 
sa  femme,  quoiqu'elle  lui  eût  écrit  pour  le  prier  de  la 
mener  en  France.  Sa  conduite  en  cette  occasion  donna 
lieu  de  croire  qu'il  avait  des  vues  particulières  :  on  parlait 
de  la  duchesse  veuve  de  Monipensier,  qui  avait  une  très- 
grande  dot  et  qu'il  aurait  pu  épouser  si  son  mariage  avec 
Marguerite  de  Montmorency  était  rompu;  on  disait  aussi 
que,  dans  ce  cas,  la  reine  mère  serait  disposée  à  lui  donner 
une  de  ses  filles  (I). 

A  Cambrai  il  rencontra  la  comtesse  d'Auvergne,  fille 
du  connétable,  qui  était  envoyée  pour  ramener  en  France 
la  princesse  sa  femme  :  la  comtesse  lui  parla  de  réconci- 
liation; il  répondit  qu'il  devait  consulter  sur  ce  point  sa 
mère  et  ses  parents.  Arrivée  à  Binche  le  15,  madame 
d'Auvergne  se  rendit  le  jour  suivant  à  Mariemont;  elle 
présenta  aux  Archiducs  des  lettres  de  compliment  du  roi 
et  de  la  reine  mère,  avec  des  lettres  du  connétable  pleines 
d'expressions  de  gratitude.  Le  16  la  princesse  partit  pour 
la  France,  en  témoignant  une  grande  satisfaction  de  la 
manière  dont  elle  avait  été  traitée  à  la  cour  deBruxelles  (2). 
Les  Archiducs  lui  firent  présent  d'un  joyau  qui  ne  valait 
pas  moins  de  huit  mille  écus. 

La  réconciliation  entre  les  deux  époux,  qui  paraissait 
si  difticile,  s'opéra  à  Chantilly  dans  les  premiers  jours  du 
mois  suivant  (5). 


(1)  Dépêctie  cilée  du  JO  juillet  1610. 

(2)  «  Ha  moslrato  la  prencipessa  di  partir  sodisfalissima  de'  tralta- 

menti  ricevuli  in  questa  corip....  >^  (Dépêche  du  17  juillet  1610.) 

(3)  Henrard,  p.  167. 


(  492 


La  mort  d'Henri  IV  était  venue  soudainement  changer 
la  face  des  affaires.  Les  périls  auxquels  les  Pays-Bas  se 
voyaient  exposés  étaient  conjurés  :  «  en  descendant  dans 
»  la  tombe,  »  —  dit  M.  Henrard  —  «  le  roi  Henri  y  entraî- 
»  nait  avec  lui  le  fantôme  sanglant  de  la  guerre  qui  tant 
»  d'années  avait  plané  sur  ces  provinces;  pour  elles  la 
»  mort  du  roi  était  la  délivrance  (1).  »  A  la  réception  des 
dépêches  qui  lui  apportaient  la  nouvelle  du  tragique  évé- 
nement, l'archiduc  Albert  manda  le  marquis  Spinola,  le 
comte  d'Anover,  le  secrétaire  d'État  Mancicidor  et  son 
confesseur,  fray  Inigo  de  Brizuela,  pour  délibérer  sur 
le  parti  qu'il  convenait  de  prendre;  c'étaient  les  ministres 
qu'il  consultait  principalement  en  de  semblables  occur- 
rences (2)  :  le  président  Richardot,  en  qui  il  avait  une 
grande  et  légitime  confiance,  était  mort  depuis  quelques 
mois  (5).  Spinola  exprima  l'avis,  auquel  tous  se  rangèrent, 
que  les  troupes  qui  avaient  été  envoyées  aux  frontières 
vers  la  France  fussent  rappelées  et  dirigées  vers  les  pays 
de  Clèves  et  de  Juliers,  afin  de  soutenir,  par  cette  dé- 
monstration, l'archiduc  Léopold,  dont  la  situation  était 
critique.  Des  ordres  furent  aussitôt  expédiés  en  consé- 
quence. Le  régiment  italien  de  Lelio  Brancaccio  occupa 
Rhinberg  et  Stralen,  celui  de  Pompeo  Giustiniano  Rure- 
monde  et  Gueidre;  les  Bourguignons  a,vec  une  partie  des 


(1)  Henri  IV  el  la  prince!>se  de  Condé ,  p.  141. 

(2)  «  Cbe  sono  i  miuistri  che  più  de  gli  altri  sono  adoperali  da 

S.  A.  in  quesle  luaterie  di  Slalo....  »  (  Dépêche  du  22  mai  1610.) 

(3)  Voy.  p.  159,  noie  2. 


(  495  ) 

Wallons  entrèrent  dans  Maestricht;  les  Espagnols  et  les 
Irlandais  furent  cantonnés  au  duché  de  Limbourg.  Quelques 
jours  auparavant  Albert,  pour  ôter  aux  Hollandais  tout 
prétexte  de  rupture ,  avait  déclaré  qu'il  ne  s'opposerait  point 
à  leurs  entreprises  contre  Juliers  ;  il  avait  engagé  l'archiduc 
Léopold  à  sortir  de  cette  ville,  en  y  laissant  une  garnison , 
et  l'archiduc  était  prêt  à  le  faire.  On  lui  dépêcha  quelqu'un 
en  hàle  afin  qu'il  n'abandonnât  point  la  place  (1). 

Léopold  en  sortit  cependant,  mais  pour  venir  à  Bru- 
xelles (2).  Dans  une  dépèche  du  29  mai  1610  Benlivoglio 
trace  ainsi  le  portrait  de  l'archiduc  :  «  C'est  un  prince  qui 
»  vraiment  montre  un  zèle  très-ardent  pour  le  service  de 
»  Dieu,  de  la  religion  catholique  et  de  la  maison  d'Au- 
»  triche.  On  ne  peut  nier  que  ce  zèle  ne  soit  accompagné 
»  d'un  esprit  élevé  et  d'un  grand  cœur,  de  beaucoup  de 
»  vigilance  et  de  capacité  dans  le  maniement  des  affaires 
»  et  d'autres  dons  signalés  de  la  nature  et  de  Dieu.  Ce 
»  qu'on  pourrait  désirer  en  Son  Altesse,  ce  serait  que 
»  plus  de  maturité  secondât  les  espérances  auxquelles  la 
»  chaleur  de  la  jeunesse,  le  manque  d'expérience  et  peut- 
»  être  les  conseils  de  personnes  peu  prudentes  font  qu'elle 
»  s'abandonne  facilement  (3).  » 


(1)  Dépèche  du  22  mai  1610. 

(2)  Il  y  arriva  le  23  mai  1610. 

(5)  « È  prencipe  veraraente  cbe  mostra  un  zelo  ardentissimo  verso 

il  servilio  di  Dio  e  deila  religion  cattoiica  e  délia  sua  casa ,  ne  si  puo 
negare  che  con  questo  zelo  non  vada  accompagnato  un  spirilo  grande  el 
un  grand'  animo,  nel  Irattar  i  negotii  molla  vigilanza  e  capacità  ,  e  npi;li 
altri  coslunii,  e  nelP  aspetlo  parlicolarniente ,  talenli  e  doni  grandi  della 
natura  e  di  Dio.  Queilo  che  si  potrebbe  desiderar  in  S.  A.  sarebbe  forse 
un  poco  di  maggior  malurità  nell'  andar  secondando  le  sue  sperauze, 
dalle  quali  il  caido  délia  giovenlii ,  la  poca  esperienza  e  forse  i  consigli  di 
persone  poco  prudenli  lo  fanno  trasporlar  facilmenle....  <■ 

2™"  SÉRIE,  TOME  XXXYIII.  «3 


(  194  ) 

Lcopold  venait  solliciler  les  Archiducs  de  l'aider  à  con- 
server Juliers.  Alberl  se  montra  disposé  à  faire  pour  lui 
tout  ce  qui  était  en  son  pouvoir,  sans  aller  jusqu'à  risquer 
la  guerre  avec  les  Hollandais  et  les  princes  de  la  Germanie, 
auxquels  les  Français  se  joindraient  infailliblement  (1).  Il 
lui  donna  une  certaine  somme  pour  le  payement  de  sa 
cavalerie,  prit  à  sa  solde  400  hommes  d'infanterie  que 
ï.éopold  ne  savait  où  loger,  promit  de  favoriser  le  ravi- 
taillement de  Juliers,  consentit  à  laisser  pendant  quelque 
temps,  aux  frontières  vers  les  deux  duchés,  les  troupes 
qu'il  y  avait  envoyées  (2).  Léopold  quitta  Bruxelles  le 
5  juin  :  il  avait  eu  l'intention  d'abord  de  retourner  à  Juliers, 
mais  il  se  décida  à  prendre  le  chemin  de  Prague,  où  était 
l'empereur  (5). 

Tout  le  monde  était  convaincu  que  la  ville  de  Juliers  ne 
pourrait  pas  longtemps  résister  aux  attaques  de  l'électeur 
de  Brandebourg  et  du  duc  de  Neubourg,  dont  les  troupes 
allaient  être  prochainement  renforcées  par  celles  qui  de- 
vaient venir  de  France  et  de  Hollande.  Dans  ces  circon- 
stances, Spinola  aurait  voulu  que  l'archiduc  Albert  prît 
l'une  ou  l'autre  de  ces  deux  déterminations  : 

Ou  de  faire  marcher  toute  l'armée  vers  Bhinberg,  atin 
d'observer  de  là  les  mouvements  des  Hollandais  et  des 
Français,  en  s'abstenant  de  tout  acte  d'hostilité  comme 
de  toute  déclaration  qui  aurait  impliqué  l'engagement  de 
soutenir  Juliers  et  pu  ainsi  conduire  à  la  guerre  :  il  pensait 


(1)  El  en  effet  Louis  XIII  et  Marie  de  Médicis  faisaient  déclarer,  le 
15  juin  1610,  aux  états  de  Clèves  qu'ils  étaient  résolus  à  leur  donner  le 
même  secours  et  assistance  que  le  feu  roi  leur  avait  promis.  (Archives 
royales  de  Dusseldorf) 

(2)  Dépêches  des  29  mai  et  5  juin  1610. 
(5)  Dépêche  du  12  juin  1610. 


(  195) 

(jue  celle  simple  démotistralion  suffirait  pour  empêcher 
l'inlervenlion  des  Provinces-Unies  et  de  la  France,  car 
les  Français  n'oseraient  intervenir  seuls,  et  les  Hollandais 
ne  se  hasarderaient  pas  à  s'avancer,  de  crainte,  ou  que  le 
passage  ne  leur  fût  barré  par  l'armée  du  roi  catholique  et 
des  Archiducs,  ou  qu'après  les  avoir  laissés  passer,  on  ne 
les  prît  à  revers  (1); 

Ou  bien,  lorsque  l'armée  aurait  été  rassemblée  à  Rhin- 
berg,  de  publier  que  le  roi  catholique  et  les  Archiducs  ne 
voulaient  faire  la  guerre  à  personne  ni  occuper  les  États 
d'autrui;  qu'il  convenait  que  leurs  voisins  se  montrassent 
animés  du  même  esprit  et  que  toute  violence  fût  mise  de 
côté;  qu'en  conséquence  Sa  Majesté  et  Leurs  x4Itesses 
trouvaient  nécessaire  un  accommodement  de  l'affaire  de 
Juliers  et,  pendant  qu'on  y  travaillerait,  la  cessation  des 
hostilités  de  part  et  d'autre.  Selon  Spinola  une  telle  décla- 
ration ,  en  écartant  les  soupçons  qu'on  aurait  pu  concevoir 
que  le  roi  et  les  Archiducs  eussent  des  vues  sur  les  pays 
du  dernier  duc  de  Clèves,  serait  de  nature  à  produire 
l'effet  désiré  :  elle  engagerait  les  Français  et  les  Hollandais 
à  suspendre  leur  marche;  quant  aux  deux  princes  préten- 


(1)  « L'uno  rimedio,  che  si  facesse  marchiar  subito  tuuo  l'esser- 

cito  verso  Rinbergh ,  e  che,  quivi  fana  la  piazza  d'arme,  s'osservassero  gli 
andamenti  d'Oilanda  e  di  Francia,  ne  si  facesse  dimostrazione  alcuna 
d'hostililà  Ile  si  venisse  ad  alcuna  allra  dichiarazione  per  la  quai  s'en- 
Irasse  in  oblige  di  voler  sostenlar  Giuliers  e  romper  la  guerra.  Con  questo 
semplice  niovimento  stimerebbe  il  marchese  che  ne  d'Oilanda  ne  di 
Francia  s'ardirebbe  d'attaccar  Giuliers,  poichè  i  Francesi  soli  noardireb- 
bero,  e  le  genti  d'Oilanda  non  passarebbon  piii  inanzi,  o  por  limor  d'haver 
chiusi  i  passi  da  quesl'  essercito,  o  per  dubbio  (quando  pur  si  lasciassero 
passare  di  non  restar  in  pericolo  troppo  grande  con  quest'  essercito  che 
rimanesse  loro  aile  spalle....  »  (Dépèche  du  :26  juin  1610.) 


(  196  ) 

dants,  ils  seraient  bien  obligés  de  se  soumettre  à  l'accord 
qui  se  ferait  (1), 

Mais,  d'après  les  dernières  dépêches  arrivées  d'Espagne, 
Philippe  III  n'entendait  se  mêler  directement  ni  indirec- 
tement de  l'affaire  de  Clèves;  il  recommandait  même  à 
l'archiduc  Albert  de  ne  pas  toucher  à  l'argent  qu'il  lui 
avait  envoyé  au  moment  où  l'on  s'attendait  à  voir  les  Pays- 
Bas  envahis  par  la  France.  Spinola  n'aurait  donc  pas  trouvé 
l'Archiduc  disposé  à  adopter  sa  manière  de  voir  :  aussi  se 
contenta-t-il  de  lui  demander  que  les  troupes  levées  avant 
la  mort  du  roi  Henri  fussent  tenues  sur  pied.  Albert  y 
consentit,  non  sans  quelque  scrupule  (2). 

Sur  ces  entrefaites  les  nonces  du  pape  à  Paris  imagi- 
nèrent de  nouveaux  moyens  d'accommodement  :  ils  pro- 
posèrent que  Juliers  fût  remis  entre  les  mains  d'un  prince 


(1)  (. L'allro  rimedio  porterebbe  seco  titoli  più  speciosi  e  più  mani- 
festa dichiarazione  del  disegiio  che  s'havesse  da  questa  parle.  Dovrebb" 
esser  il  disegno,  seconde  il  marchese,  di  metter  pur  anchè  insieme  tutto 
l'essercilo  ne!  modo  ch'  ho  dello  di  sopra  e  ridurlo  ail'  islessa  piazza 
d'arme  e  negli  allogiamenli  medesimi.  Fatlo  questo,  dice  il  marchese  che 
si  dovrebbe  poi  publicare  che  né  Sua  Maeslà  Callolica  ne  queste  Allezze 
voglion  far  guerra  ne  occupar  in  modo  alcuno  gli  Stati  d'ailri,  ma 
ch'essendo  conveniente  ch'i  vicini  habbiam  l'islessa  inlenzlone  e  che  si 
lasci  ogni  violenza  da  parte,  stimar  perciô  necessario  Sua  Maeslà  e  queste 
Altezze  ch'il  negoliato  di  Giuliers  ad  ogni  modo  s'accomodi,  e  in  lanlo  si 
posin  l'armi  e  si  pensi  a  parlili  amicabili.  Da  quesla  dichiarazione  e  da 
questo  movimento  e  dal  procedere  moderato,  fuggendo  oga'  alto  d'hos- 
tilità  et  ogn'  altro  sospetto  che  si  polesse  pigiiarne  d'haver  disegni  pro- 
prii  da  questa  parle  sopra  gli  Slali  del  mono  duca  di  Cleves,  parebbe  al 
marchese  che  si  polrebbe  sperar  qualchè  accordo,  poichè  sicuramente 
sospenderebbero  ogni  progresse  i  Francesi  e  gli  Ollandesi ,  e  |)er  l'islrac- 
chezza  Brandeburg  e  Nioburg  caderebbono  in  qualch'  accordo....  »  (Dé- 
pêche du  :26,juin  1610.) 

("1)  Ibid. 


[  li)7  ) 
catholique  neutre  ;  que  l'électeur  de  Brandebourg  et  le 
duc  deNeubourg  demeurassent  possesseurs  des  lieux  qu'ils 
tenaient;  que  le  différend  touchant  la  succession  de  Clèves 
fût  décidé  par  une  diète  générale  de  l'Empire  à  convoquer 
à  bref  délai;  que,  dans  l'intervalle,  toute  hostilité  cessât. 
Cette  proposition  fut  accueillie  favorablement  par  les  mi- 
nistres de  la  reine  régente;  l'archiduc  Albert,  qui  y  trou- 
vait une  garantie  du  maintien  de  la  paix,  non-seulement 
y  accéda,  mais  encore  écrivit  en  termes  chaleureux  à 
l'Empereur,  pour  qu'il  y  donnât  aussi  son  adhésion  (1). 

Le  caractère  de  Rodolphe  II  ne  le  portait  pas  aux  réso- 
lutions promptes,  et,  comme  le  remarque  Bentivoglio, 
de  la  cour  de  Prague  les  remèdes  venaient  toujours  plus 
tard  que  ne  l'exigeaient  les  maux  auxquels  ils  devaient 
être  appliqués  (2)  :  aussi  il  était  à  craindre  que,  en  atten- 
dant la  réponse  de  l'empereur,  Juliers  ne  tombât  au  pou- 
voir des  princes  protestants.  Pour  prévenir  un  événement 
aussi  fâcheux,  Spinola  suggéra  l'idée  d'une  suspension 
d'armes  de  deux  ou  de  trois  mois  pendant  laquelle  ces 
princes,  ainsi  que  l'empereur,  auraient  à  se  déclarer  sur 
l'arrangement  proposé  en  dernier  lieu  à  Paris.  S'ils  l'ac- 
ceptaient, toute  hostilité  serait  suspendue  jusqu'à  ce  que 
la  diète  de  l'Empire  eût  décidé  le  différend  qui  lui  serait 
soumis;  si  l'une  ou  l'autre  des  deux  parties  le  rejetait,  les 
.\rchiducs,  la  France  et  les  Provinces-Unies  s'obligeraient 
réciproquement  à  ne  lui  prêter  aucune  assistance.  L'archi- 
duc Albert  chargea  son  ambassadeur  à  Paris,  Pecquius,  de 
communiquer  cette  idée  aux  nonces  et  d'en  conférer  avec 


(1)  Dépèches  du  26  juin  et  du  5  juillet  1610. 

(2)  -.  Di  la  sempre  veiiKOii  piii  tardi  i  riniodii  que  non  richiedonoi 

lîiali...  »  (Dépèche  du  ."juillet  1610.) 


(  198  ) 
les  minisires  français  (1).  Le  chancelier  répondit  à  Pecquius 
d'une  manière  évasive  (2).  Spinola  avait  déjà  tenté,  sans 
succès,  d'engager  l'Archiduc  à  envoyer  quelques  régiments 
sur  les  frontières  vers  le  pays  de  Juliers;  il  renouvela 
cette  tentative  lorsqu'il  sut  la  réponse  que  le  chancelier  de 
France  avait  faite,  mais  ce  fut  tout  aussi  vainement  (5). 
Albert  ne  voulait  pas  courir  le  plus  petit  risque  de  donner 
lieu  à  la  guerre  (4). 

Tandis  qu'à  Bruxelles  on  s'abstenait  avec  soin  de  toute 
mesure,  de  toute  démarche  qui  aurait  pu  dénoter  des 
desseins  hostiles  aux  deux  princes  protestants,  les  états 
généraux  s'apprêtaient  à  soutenir  ceux-ci  avec  vigueur: 
ils  avaient  formé  un  corps  de  troupes  qui  ne  tarda  pas  à 
marcher  vers  le  pays  de  Juliers  sous  la  conduite  du  comte 
Henri  de  Nassau,  général  de  la  cavalerie  de  la  république; 
le  comte  Maurice  se  transporta  de  sa  personne  à  Meurs, 
pour  en  diriger  de  là  les  mouvements  au  besoin  (5).  Les 
Français  qui  devaient  seconder  cette  expédition  mar- 
chèrent de  leur  côté  ;  ils  atteignirent  Metz  vers  le  milieu 
du  mois  (le  juillet.  Dans  le  même  temps  les  Hollandais 
s'avancèrent  jusque  près  de  Rhinberg  (6). 

La  cour  d'Espagne  avait,  à  plusieurs  reprises,  manifesté 


(1)  Dépêche  du  ô  juillet  1610. 

(2)  Dépèche  du  10  juillet  1010. 
(5)  Dépèches  du  5  et  du  10  juillet. 

(4)  .  M'aggiunse  il  marchese  ch'  egli  haveva   proposto  a  Sua  Al- 

tezza  che  si  mandasse  qualchè  parle  délia  gente  predetla  ad  allogiar  nellr 
frontière  verso  il  paese  di  Giuliers,  ma  che  l'Arciduca  non  l'ha  voluto,  e 
che  non  vuol  in  somma  Sua  Altezza  correr  alcun  rischio  ,  per  lontano 
che  sia,d'accender  laguerra....  "  (Dépêche  du  5  juillet.) 

(5)  Dépêche  du  17  juillet  1610. 

(6)  Dépèche  du  :2.i  juillet  1610. 


(  199  ) 
la  volonté  de  rester  étrangère  aux  différends  que  pouvait 
faire  naître  la  succession  deClèves;  tout  récemment  encore 
l'archiduc  Albert  avait  reçu  de  Madrid  des  dépêches  qui 
l'invitaient  à  licencier  le  plus  tôt  possible  les  troupes  qu'il 
avait  levées  en  dernier  lieu  (1).  Quelques  jours  après, 
cependant,  Philippe  III  donna  l'ordre  à  son  ambassadeur 
à  Paris,  don  Ifiigo  de  Cardenas,  de  témoigner  à  la  reine 
mère  et  aux  ministres  français  l'étonnement  avec  lequel 
il  avait  appris  que  la  première  action  du  nouveau  règne 
devait  être  de  secourir  les  protestants.  Don  Inigo  était 
chargé  de  leur  dire  que,  comme  il  avait  à  cœur  la  paix  et 
le  bien  de  la  chrétienté,  il  souhaitait  trouver  en  eux  la 
même  inclination;  que,  s'il  n'en  était  pas  ainsi  et  qu'ils 
persistassent  dans  leur  projet,  il  était  résolu,  lui,  d'aider 
les  catholiques  (2).  Un  courrier  qui  arriva  à  Bruxelles  le 
22  juillet  apporta  à  l'Archiduc  une  leltre  du  roi  contenant 
les  mêmes  déclarations  (3). 

Cardenas  étant  malade  quand  l'ordre  de  son  maître 
lui  parvint,  ce  fut  l'ambassadeur  belge  qui  l'exécuta  à  sa 
place.  Pecquius  en  conféra  avec  plusieurs  des  ministres 
de  la  reine  régente  et  en  particulier  avec  le  secrétaire  d'État 
Villeroi.  Toute  la  réponse  qu'il  obtint  fut  que  le  gouver- 
ment  français  s'en  tenait  à  ce  qui  avait  été  proposé  par  les 
nonces  ;  qu'il  ferait  en  sorte  que  l'électeur  de  Brandebourg 
et  le  duc  de  INeubourg  y  acquiesçassent;  qu'il  ne  pouvait 
suspendre  le  mouvement  de  marche  des  troupes  destinées 
à  secourir  ces  princes,  dans  l'incertitude  où  l'on  était  du 
parti  que  prendrait  l'empereur  (4). 


(1)  Dépêche  du  17  juillellGlO. 
(-2)  Dépêche  du  21  juillet  1610. 

(3)  Ibid. 

(4)  Ibid. 


(  200  ) 

Au  milieu  de  ces  pourparlers  diplomatiques,  une  nou- 
velle qui  ne  causa  pas  moins  de  surprise  à  Bruxelles  qu'à 
Paris,  parvint  presque  en  même  temps  dans  les  deux  capi- 
tales :  l'empereur  venait  de  donner  l'investiture  des  États 
de  Clèves  et  de  Juliers  (1)  à  l'électeur  de  Saxe  Christian  II. 
Cet  acte  avait  une  grande  importance  :  d'abord  il  prouvait 
que  Rodolphe  ne  songeait  point  à  se  mettre  personnelle- 
ment ou  à  mettre  quelque  prince  de  sa  dynastie  en  la  pos- 
session de  Juliers  ni  d'une  partie  quelconque  des  États  du 
feu  duc  Jean-Guillaume,  et  ainsi  les  reproches  d'ambition 
qu'on  faisaità  la  maison  d'Autriche  tombaient  d'eux-mêmes; 
ensuite  Christian  Ilétait  luthérien  :  les  protestants  n'avaient 
donc  plus  de  motifs  de  prendre  fait  et  cause,  dans  l'in- 
térêt de  leur  religion ,  pour  l'électeur  de  Brandebourg  et  le 
duc  de  Neubourg.  L'archiduc  Albert,  considérant  tout  cela, 
jugea  que  ce  qu'il  y  avait  de  mieux  à  faire,  c'était  que  les 
puissances  étrangères  laissassent  les  princes  de  l'Allemagne 
résoudre  entre  eux  la  question  qui  s'était  élevée  par  rapport 
à  la  succession  de  Clèves,  sans  s'y  immiscer  en  aucune 
façon  ;  il  chargea  son  ambassadeur  à  Paris  de  faire  des 
ouvertures  en  ce  sens  au  gouvernement  français  (2). 

Mais  ce  gouvernement,  de  même  que  celui  des  Pro- 
vinces-Unies, avaient  pris  des  engagements  envers  les 
deux  princes  signataires  du  compromis  de  Dortmund,  et, 
sans  égard  à  la  décision  de  l'empereur,  ils  ordonnèrent  à 
leurs  troupes  de  continuer  leur  marche  en  avant.  Arrivées 


(1)  Le:27  juin  1610. 

(2)  «  ....  Ail'  ainhasciarlore  di  Fiandra scrive  Sua  Allezza  che  'I 

meglior  ospedienle  sarebbe  lasciar  che  Ira  i  prencipi  d'  Aleniagna  si  ter- 
minasse la  dillerenza  e  se  ne  lirassero  i'uoii  luUi  gli  altri  che  si  sono  falla 
comune  la  causa.  Ordina  percib  Sua  Altezza  al  detto  anibasciadore  che 
Iralti  in  questa  forma....  »  (Dépêche  du 2i  juillet  1610.) 


(  201  ) 
au  pays  de  Jnliers, celles-ci  se  joignirent  à  celles  de  l'élec- 
tenr  de  Brandebourg  et  du  duc  de  Neubourg  pour  faire 
le  siège  de  la  capitale.  La  garnison  de  Juliers,  qui  souffrait 
déjà  du  manque  de  vivres  et  de  munitions  de  guerre,  ne 
pouvait  tenir  longtemps  contre  des  forces  aussi  supérieures; 
elle  capitula  dans  les  derniers  jours  d'août.  On  avait  craint 
à  Bruxelles  que  les  Hollandais  ne  voulussent  s'emparer  de 
la  ville  pour  eux-mêmes  ;  il  n'en  fut  pas  ainsi  :  ce  furent 
des  détachements  des  troupes  brandebourgeoises  et  neu- 
bourgeoises  qui  en  prirent  possession  (1). 

Par  là  fut  terminé,  au  moins  provisoirement,  un  débat 
qui,  durant  dix-huit  mois,  avait  été  pour  les  Archiducs  un 
sujet  de  beaucoup  d'inquiétudes. 

Un  peu  moins  de  trois  années  après  la  querelle  se 
réveilla,  mais  cette  fois  ce  fut  entre  la  maison  électorale 
de  Brandebourg  et  la  maison  palatine  de  Neubourg.  Wolf- 
gang-Guillaume,  fils  et  successeur  du  duc  de  Neubourg 
Philippe-Louis,  ayant  embrassé  la  religion  catholique,  le 
roi  d'Espagne  et  les  Archiducs  prirent  fait  et  cause  pour 
lui,  tandis  que  les  Provinces-Unies  soutinrent  l'électeur 
de  Brandebourg.  Je  n'ai  pas  à  m'occuper  ici  de  ces  événe- 
ments, les  dépêches  de  Bentivoglio  des  années  1614  et 
1615  étant  restées,  par  les  raisons  que  j'ai  dites  plus  haut, 
en  dehors  de  mes  investigations  (2). 


(1)  Dépèches  des  -iel  11  septembre  1610. 

(2)  Bentivoglio  en  a  d'ailleurs  retracé  l'histoire  dans  son  excellente 
Relalione  de  la  mossa  d'arme  che  seguï  in  Fiandra  l'anno  M.  DC.  XIV 
per  occasione  d''haver  le  Procincie  Unité  occtipata  la  terra  e  caslillo  di 
Ciuliers,  etc.  {Opère,  p.  151.) 


(  202  ) 

VI. 

A  l'époque  où  les  gazettes  n'existaient  pas  encore,  c'est 
dans  les  dépêches  des  ambassadeurs  qu'il  faut  chercher 
des  détails  sur  les  faits  qui  se  passaient  dans  les  cours 
auprès  desquelles  ils  étaient  accrédités  :  je  parle  ici  des 
faits  qui  n'avaient  pas  un  caractère  politique,  tels  que  les 
cérémonies  publiques,  les  fêtes,  les  nominations  aux  prin- 
cipales charges  de  l'État,  le  départ  ou  l'arrivée  de  person- 
nages éminents,  la  réception  d'envoyés  des  princes,  tout  ce 
en  un  mot,  que  le  journalisme  actuel  place  sous  la  rubrique 
des  faits  divers.  Comme  tous  les  diplomates  de  son  temps, 
Bentivoglio  a  soin  de  tenir  le  cardinal  secrétaire  d'État  au 
courant  des  choses  de  cette  nature.  Je  vais  rapporter, 
d'après  lui,  celles  qui  m'ont  paru  offrir  le  plus  d'intérêt. 

Sous  le  règne  des  Archiducs  les  défis,  les  duels  n'étaient 
pas  moins  fréquents  aux  Pays-Bas  qu'en  France;  peut-être 
même  l'étaient-ils  pins  encore,  surtout  dans  l'armée  (1).  Une 
dépêche  de  Bentivoglio  nous  apprend  qu'Albert  avait  les 
duels  en  horreur  (2)  :  aussi,  au  mois  de  septembre  1610, 
ayant  été  informé  que  des  gentilshommes  principaux  de  sa 
cour  s'étaient  défiés  et  qu'ils  allaient  sur  le  terrain ,  envoya- 
t-il  des  arquebusiers  de  sa  garde  pour  les  prendre  et  les 
conduire  prisonniers  au  château  d'Anvers,  avec  ordre  de 


(1)  Bentivoglio  écrit,  le  11  septembre  IGIO.  que  dans  le  régiment 
d'infaïUerie  italienne  de  Pom[)eo  Giustiniano,  composé  de  1,400  têtes,  la 
plupart  des  soldats  s'étaient  déliés. 

(2)  ..  Il  serenissimo  Arciduca  abhoirisce  inestremo  queste  mateiie 

di  duelli....  »  (Dépèche  du  11  septembre  IGlO.) 


(  205  ) 

les  tuer  sans  miséricorde  en  cas  de  résistance  {\).  Quelques 
mois  auparavant  (27  février)  il  avait  fait  promulguer  contre 
les  duels  et  les  duellistes  un  édit  rigoureux.  Cet  édit  défen- 
dait à  tous  ses  sujets  et  vassaux  de  défier  ou  provoquer 
quelqu'un  au  combat,  comme  aussi  d'accepter  un  pareil 
défi  ou  provocation ,  à  peine  d'être  dégradés  d'armes 
et  de  noblesse,  d'être  déclarés  infâmes  et  roturiers,  de 
perdre  leurs  états,  offices,  pensions,  s'ils  en  avaient,  avec 
la  moitié  de  leurs  biens  qui  seraient  appliqués  à  des  œuvres 
pies,- au  cas  qu'ils  eussent  comparu  au  lieu  assigné,  il  les 
déclarait  coupables  du  crime  de  lèse-majesté;  comme  tels 
il  prescrivait  qu'ils  fussent  punis  du  dernier  supplice  et 
leurs  biens  confisqués  au  profit  du  fisc.  Les  témoins  encou- 
raient de  même  la  confiscation  de  corps  et  de  biens  (2). 
Ces  dispositions  étaient,  du  reste,  empruntées  pour  la 
plupart  de  lordonnance  qu'Henri  IV  avait  rendue  au  mois 
de  juin  4609  (3).  A  l'exemple  du  roi  de  France,  Albert 
déclarait  «  erronée,  fausse  et  mensongère  »  l'opinion, 
enracinée  aux  cœurs  de  la  noblesse  et  des  gens  de  guerre, 
qu'on  ne  pouvait,  sans  s'exposer  au  reproche  de  lâcheté, 
rechercher  laison  d'une  injure  reçue  par  une  autre  voie 
que  celle  du  combat  singulier;  il  prenait  sur  lui  et  en  sa 
protection  et  sauvegarde  l'honneur  de  ceux  qui  obéiraient 
à  son  édit;  pour  les  outrages  d'une  nature  tout  à  fait  excep- 
tionnelle, il  ordonnait  aux  personnes  offensées  de  s'adresser 
à  lui  ou  au  mestre  de  camp  général  de  l'armée, lequel  avec 
deux  autres  chevaliers  formerait  un  tribunal  d'honneur 
pour  entendre  les  parties. 


(1)  « Con  ordine  d'ammazzar  detli  cavalieri  in  caso  che  non  vo- 

lessero  lassarsi  pigliare....  «  (Dépêche  du  11  septembre  1610.) 

(2)  Placards  de  Flandre,  liv.  II,  p.  70-t. 

(5)  IsAMBERT,  Recueil  des  anciennes  lois  françaises ,  l.  XV ,  p.  531. 


(  204  ) 

Dans  une  dépèche  du  15  janvier  J61I  Bentivoglio 
raconte  la  mort  de  l'évêque  d'Anvers,  Jean  Le  Mire.  Ce 
prélat  assistait,  le  il,  à  Bruxelles,  à  un  grand  souper 
donné  à  l'occasion  du  mariage  du  comte  d'Hoogbstraeten 
avec  M"''  de  Berlaymont.  A  minuit  il  se  retira.  Arrivé  chez 
lui,  il  fut  subitement  frappé  d'apoplexie,  et  d'une  manière 
si  violente  qu'en  moins  de  deux  heures  il  avait  cessé  de 
vivre.  Il  était,  dit  Bentivoglio,  très-corpulent,  et  quoique 
ce  soir-là  il  eût  été  sobre,  peut-être  que  les  humeurs  qu'il 
y  avait  en  lui  se  ressentirent  violemment  de  ce  qu'il  avait 
été  plusieurs  heures  dans  un  appartement  très-chaud  à 
cause  de  la  multitude  de  lumières  qui  l'éclairait  et  de  la 
nombreuse  compagnie  qui  y  était  rassemblée  (1).  Le  nonce 
déplore  la  perte  de  Le  Mire  dont  il  ne  peut  assez  louer  la 
bonté,  la  doctrine  et  le  zèle  :  «  Ce  qui  nous  a  été  particu- 
»  lièrement  désagréable,  »  ajoute-t-il  «  c'est  que  les  héré- 
»  tiques  se  prévaudront  de  cet  accident  pour  calomnier  les 
»  prélats  de  ces  pays,  en  les  taxant  d'incontinence  (2).  » 

Depuis  que  toute  crainte  de  guerre  avait  disparu, 
Ambroise  Spinola  sollicitait  de  Philippe  lll  la  permission 
d'aller  à  sa  cour;  il  l'obtint  au  commencement  de  1611 
et  partit  pour  l'Espagne  le  26  mars  (5).  «  Le  pauvre  gen- 
»  tilhomme  »  —  écrit  à  celle  occasion  Bentivoglio  —  «  se 


(1)  0 Egli  era  niollo  corpuleiito,  el  sehcii  quella  sera  si  IraUeiiesobria- 

meiile  alla  cena,  luUavia  puo  essere  clie  gli  buinori  disposti  per  prima  si 
risenlissero  con  violenza  daii'  esser  eeli  stalo  alquaiile  hore  iii  una  slanza 
niolto  caida  per  il  gran  numéro  di  lumi  e  per  la  frequeiiza  di  molle  per- 
sone  che  v'  erano....  » 

(2)  « Questo  che  parlicolarmeiile  è  dispiacciuioall"  uiio  el  alT  altro 

di  iioi,èche  di  questo  accidente  seguito  in  laie  occasione  si  valerano  gli 
luM'elici  per  calumniar  d'incontinenza  i  prelali  di  quesle  parli....  » 

(5)  Dépêche  du  même  jour. 


(  205  ) 

»  trouve  ruiné  par  les  dépenses  excessives  qu'il  a  faites.  Il 

»  avait  cent  mille  écus  de  revenu, outre  quatre  cent  mille 

»  écus  d'argent  comptant;  aujourd'hui  il  n'a  plus  d'argent, 

»  et  son  revenu  est  diminué  au  point  qu'il  ne  s'élève  plus, 

»  je  crois,  à  quarante  mille  écus.  Il  a  en  Espagne  deux 

»  fjls,menins  de  la  reine,  qu'il  entretient  avec  luxe;  il  a 

»  une  maison  à  Gènes  où  habitent  sa  femme  et  sa  mère 

»  et  qui  lui  coule  beaucoup;à  Bruxelles  il  dépense  encore 

»  davantage  :  il  voudrait,  pour  rétablir  ses  affaires,  n'avoir 

»  plus  qu'une   maison,  et  en   Espagne.  Un  jour,  entre 

»  autres,  qu'il  soupirait  en  pensant  à  ses  Uls,  il  me  dit 

»  que,  s'il  n'avait  pas  eu  ce  caprice  de  se  faire  soldat, 

»  il  serait  indubitablement  le  plus   riche   gentilhomme 

»  d'Italie,  et  il  aurait  pu  accumuler  assez  de  trésors  pour 

»  qu'il  lui  fût  facile  d'acquérir  un  grand  État.  Certes  »  — 
ajoute  Bentivoglio  —  «  c'est  un  digne  gentilhomme,  et  il 

»  a  rendu  au  roi  des  services  signalés.  Les  Espagnols  même 

»  les  plus  passionnés  en  conviennent;  ceux  qui  le  sont 

»  moins  reconnaissent  que  le  roi  lui  doit  toute  espèce  de 

»  faveurs.  Et  sans  aucun  doute,  s'il  était  espagnol,  cette 

»  nation   s'enorgueillirait   d'un  tel  sujet,  d'une  activité 

»  infatigable,  d'une  rare  perspicacité  dans  les  conseils, 

»  d'une  grande  pureté  de  foi  et  non-seulement  recom- 

»  mandable,  mais   encore  exemplaire  par  sa   vie  chré- 

»  tienne  (1).  » 


(1)  «  Si  truova  il  povero  cavalliere  coiisunialo  dalle  spese  ecces- 

sive;  e  di  100,000  scudi  d'enlrata  c'haveva,  oltre  a  400,000  scudi  di 
danari  conlanli,  hora  non  si  truova  plii  danaii,  et  ha  per  modo  sminuita 
l'enlrata  che  da  quel  ch'  io  ho  potulo  laccogiiere  da  varii  suoi  ragioiia- 
menli  passati  nieco  in  gran  confidenza,  non  credo  che  gii  restino  40,000 
scudi  d'enlrata.  Ha  duetigiioli  in  Ispagna,  menini  délia  regina,  e  perché 


(  200  ) 

Spiiiola  revint  d'Espagne  au  mois  de  juin  161±  Phi- 
lippe 111  avait  jugé  sa  présence  nécessaire  aux  Pays-Bas;  en 
récompense  de  ses  services,  il  lui  avait  conféré  la  grandesse. 
Les  Archiducs  se  réjouirent  de  son  retour;  ils  faisaient  un 
grand  cas  de  lui.  La  plupart  des  généraux  de  l'armée 
royale  se  portèrent  à  sa  rencontre  jusqu'à  Mons  (i). 

Quoique  les  Archiducs  fussent  des  princes  très-religieux, 
qu'une  grande  sévérité  de  mœurs  régnât  dans  leur  palais, 
les  plaisirs  n'étaient  point  exclus  de  la  cour  de  Bruxelles; 
Bentivoglio  assure  même  qu'il  n'y  en  avait  pas  de  plus 
gaie,  par  les  tournois,  les  chasses  et  les  autres  divertisse- 
ments qui  s'y  donnaient  (2).  Dans  une  dépêche  du  J9  fé- 
vrier i611  il  décrit  un  tournoi  qui  y  avait  eu  lieu  le  dernier 
jour  du  carnaval  (IS  février).  Ce  tournoi  se  fit  à  la  quin- 
taine  devant  le  palais.  Quatre  bandes  y  prirent  part,  ayant 


gli  manliene  cou  splendor  grande,  et  ha  un'  altra  casa  in  Geuova  délia 
moglie  e  délia  madré  che  gli  fa  sentir  niolta  spesa,  e  la  sente  egli  piii  che 
piii  in  questa  sua  di  Brusseles  :  percib  egli  desidera  si  ridurre  lutte  queste 
case  insieme  in  Ispagna,  e  veder  di  sollevare  le  cose  sue  nel  miglior  modo 
che  gli  sarà  possibile.  Una  volta,  tra  l'altre,  quasi  sospirando  per  la  pietà 
de'  suoi  figli,  mi  disse  che  s'egli  non  havesse  havuto  questo  capricio 
d'esser  soldalo ,  senza  dubbio  sarebbe  slalo  facile  di  far  acquisto  d'un 
gran  Slato.  Certo  ch'  egli  è  un  digno  cavalliere  e  sono  grandissimi  i  suoi 
meriti  nel  servitio  del  re.  Confessanlo  gli  Spagnuoli  anche  piii  appassion- 
nati,  eti  meno  appassionati  dicono  ch'  ogni  mercede  se  gli  deve  da  Sua 
Maeslà.  E  senza  dubbio,  s'egli  fosse  spagnuolo,  triunferebbe  quella  na- 
tione  d'un  tal  soggello,  indefesso  nelle  faliche,  acculissimo  ne'  consigli, 
di  somma  integrilà  nella  fede.e  ne'  coslumi  chrisliani  non  solo  commen- 
dabile  ma  essemplare....  »  (Dépêche  du  18  décembre  1610.) 

(1)  Dépèches  des  5  mars,  9 et  16  juin  1612. 

(2)  «  Non  si  pu6  veder  corte  più  allegra  di  questa  in  lutte  le  occor- 

renze  che  nascono  o  di  tornei ,  o  di  caccie,  o  d'altre  ricrialioni  che  si 
sogiiano  goder  uelle  case  reali  com'  è  questa  di  Fiandra....  »  {Relatione 
di  Fiandra.  Cap.  I.  Délia  natura  e  costumi  degli  Arciduchi.) 


(  207  ) 

à  leur  uHe  D.  Luis  de  Velasco,  général  de  la  cavalerie, 
D.  Alonso  Pimentel,  fils  du  comte  de  Benavente,  le  prince 
d'Épinoy  et  le  chevalier  Melzi,  lieutenant  général  de  la 
cavalerie.  Le  comte  de  Furstemberg,  gentilhomme  de  la 
chambre  de  l'Archiduc,  d'une  des  plus  illustres  familles 
d'Allemagne,  s'y  présenta  seul  comme  aventurier.  Seul 
aussi  y  vint  le  marquis  Alfonso  Gonzaga,  l'un  des  menins 
de  rinlanle,  qui  ne  comptait  que  treize  ans.  Les  Archiducs 
et  tous  ceux  qui  étaient  là  prirent  le  plus  grand  plaisir  à 
le  voir,  dans  un  âge  aussi  tendre,  lutter  de  courage  et 
d'habileté  avec  des  hommes  faits.  Au  reste,  le  spectacle 
réussit  de  tout  point;  les  gentilshommes  qui  y  figurèrent 
avaient  tous  revêtu  de  riches  costumes.  La  même  nuit  il  y 
eut  au  |)alais  un  bal  magnifique  (1). 

Les  Archiducs  avaient  une  grande  dévotion  à  saint 
Albert,  évêque  de  Liège  et  cardinal,  assassiné  à  Reims 
en    1192;  ils  désiraient  beaucoup    posséder    son    corps, 


(1)  «  L'ullima  noUe  di  carnovale  si  passô  qui  co'l  trallenimento 

d'un  bellissimo  torneo  alla  quinlana  che  si  fece  avanli  il  palazzo  de'  pren- 
cipi  serenissinii.  Compariiero  ca|)i  di  squadra  e  con  inventioni  don  Luigi 
de  Velasco,  gênerai  délia  cavalleria,  don  Alonso  Piraenlello,  figliuolo  del 
conle  di  Benavente,  il  jn-encipe  di  Pinoi,  cavalliere  de'  prinii  del  paese,  et 
il  cavalliere  Melzi,  luogoleniente  gênerai  délia  cavalleria.  Solo  como  ven- 
turiero  eomparuèil  conte  di  Fustenbergh,  cavalliere  principalissimo  ale- 
nianno,  deila  caméra  delT  arciduca  serenissinio;  solo  parimente,  ancorchè 
con  inventione,  coniparuè  il  niarchese  Alfonso  Gonzaga,  giovanetto  di 
Iredici  anni  ,  che  sirve  qui  di  menino  la  serenissima  infanla.  Fù  gran- 
dissinio  il  gusto  ch'  hebbero  le  Allezze  Loro,  e  grande  il  piacere  che 
generalmente  fii  sentilo  da  ognuno ,  di  vedere  in  età  cosi  tenera  tanto 
spirilo  et  habilita  bastante  a  poler'  entrar  nelle  atlioni  di  quesla  sorte 
eou  gli  huomini  niaturi.  Nel  reslo  lo  spettacolo  riusci  per  ogni  parte  vago 
e  dilellevole ,  e  lu  molto  ricco  l'adornanienlo  di  tutti  i  cavallieri.  La  mede- 
sima  nolte  si  fece  anchè  in  palazzo  una  bellissima  festa  con  diversi  balletti 
délie  dame  e  délie  menine  délia  serenissima  infanta....  » 


(  208  ) 
qui  se  conservait  en  celle  dernière  ville,  pour  le  déposer 
dans  l'église  du  couvenl  des  Carméliles  qu'ils  venaient  de 
fonder  (4).  Les  négociations  entamées  par  eux  dans  ce  but 
ayant  réussi,  le  corps  d'Albert  arriva  aux  portes  de 
Bruxelles,  accompagné  de  deux  cbanoinesde  Reims,  dans 
les  premiers  jours  de  décembre  ICI 2.  Le  8,  après  une 
procession  à  laquelle  assistaient  tous  les  métiers  et  tout  le 
clergé,  il  fut  introduit  solennellement  dans  la  ville.  La 
châsse,  couverte  d'un  drap  de  brocard  d'or,  était  portée 
par  quatre  abbés  mitres;  quatre  autres  l'entouraient;  les 
archevêques  de  Malines  et  de  Cambrai  et  un  évèque  sutfra- 
gant  devienne  marchaient  ensuite.  Les  Archiducs  étaient 
allés  à  l'hôtel  d'Egmont,  aujourd'hui  d'Arenberg,  situé  à 
proximité  du  monastère  des  Carmélites,  pour  voir  défiler 
la  procession.  Lorsque  le  corps  du  saint  arriva  devant 
l'hôtel ,  Albert  et  Isabelle  descendirent  dans  la  rue  ;  l'Archi- 
duc voulut  le  porter  lui-même  sur  ses  épaules,  aidé  de 
l'ambassadeur  d'Espagne,  du  marquis  de  Spinola  et  du 
prince  d'Orange;  l'Infante,  précédée  du  nonce,  accompagna 
la  procession.  Le  corps  étant  entré  dans  l'église,  la  cha- 
pelle de  la  cour  entonna  le  Te  Deitm;  l'archevêque  de 
Malines  dit  une  oraison  ;  puis  un  des  chanoines  de  Reims 
prononça  un  discours  en  latin  sur  la  consignation  l'aile  aux 
Archiducs  de  la  sainte  relique.  Le  jour  suivant,  dans  la 
même  église,  ces  princes  entendirent,  après  la  messe, 
un  très'beau  sermon  (2)  en  français  de  l'abbé  Montgail- 
lard  (o).  Le  20  ils  y  retournèrent,  pour  faire  aux  religieuses 
la  remise  en  forme  du  corps  de  saint  Albert.  Le  nonce  ou- 


(1)  Hisloire  de  Bruxelles,  par  MM.  Henné  et  Waulers,  t.  III,  p,  386. 

(2)  o  Bellissinio  sermone....  » 

(5)  Dépêche  du  15  décembre  1612. 


(  209  ) 
vrit  la  châsse  en  présence  des  chanoines  venus  de  Reims; 
toutes  les  reliques  qu'elle  renfermait  en  furent  retirées  et 
placées  dans  une  autre  châsse  richement  ornée,  et  celle-ci 
avec  sa  clef  fut  délivrée  à  la  prieure.  Un  notaire  dressa  acte 
de  ce  dépôt.  L'Archiduc  lit  don  aux  chanoines  rémois,  afin 
qu'ils  le  rapportassent  à  leur  église,  d'un  os  de  la  cuisse 
du  saint  contenu  dans  une  magnifique  cassette  d'ébène 
incrustée  de  figures  d'argent.  Il  garda,  pour  sa  dévotion 
particulière,  quelques  petits  morceaux  d'os  et  l'anneau 
pontifical  d'Albert,  qui  était  un  saphir  monté  en  or  (1). 

On  a  dit,  et  Bentivoglio  lui-même  (2),  qu'Albert  et  Isa- 
belle, malgré  les  grandes  qualités  dont  le  ciel  les  avait 
doués ,  s'étaient  fait  plutôt  respecter  qu'aimer  des  Belges  ; 
on  leur  a  reproché  de  n'être  point  assez  communicatifs, 
assez  affables,  d'observer  trop  cette  gravité  espagnole 
qui  était  incompatible  avec  le  caractère  des  peuples  des 
Pays-Bas,  Albert  cependant  donnait  audience,  chaque 
jour,  matin  et  soir,  à  tous  ceux  qui  voulaient  lui  parler, 
et  il  les  écoutait  avec  autant  de  bienveillance  que  d'atten- 
tion (3);  lui  et  l'Infante  se  plaisaient  à  prendre  part  aux 
fêtes  populaires,  surtout  à  celles  des  serments  qui  étaient 
si  chères  à  nos  ancêtres.  Le  1"  mai  1615  ils  assistaient 
à  la  réunion  des  arquebusiers  convoqués  pour  un  tir  au 
papegay.  Après  que  l'Infante  et  l'Archiduc  eurent,  les 


(1)  « Dentro  una  bellissima  casselta  d'ebeno,  intarsiata  di  figure 

d'argenlo,  diede  l'Arciduca  a  i  delti  canonici  l'osso  d'una  délie  coscie  del 
sanlo,  da  riportare  con  loro  a  Rens,  e  S.  A.  volse  rilenersi  per  sua  parli- 
colar  divolione  alcuni  piccioli  pezzi  délie  ossa  e  l'anello  pontificale,  ch'è 
un  zafBro  in  semplice  ligatura  d'oro....  »  (Dépêche  du  22  décembre  1612.) 

(2)  Relatione  di  Fiandra.  Cap.  I.  Délia  natura  e  coslumi  deyli  Arci- 
duchi. 

(3)  Ibid. 

2™*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  14 


(  210  ) 

premiers  suivant  la  coutume,  tiré  trois  ou  quatre  coups, 
il  arriva  qu'au  moment  où  l'un  des  arquebusiers  venait  de 
décharger  leur  arme,  le  canon  lui  en  creva  dans  les  mains, 
et  l'un  des  éclats  de  bois  alla  frapper  et  blesser  l'Infante  à 
la  joue  droite.  Quoique  le  sang  coulât  en  abondance  de  sa       J 
blessure,  Isabelle  ne  voulut  pas  quitter  le  lieu  de  la  fête       I 
jusqu'à  ce  que  le  papegay  eut  été  abattu.  On  peut  juger  si       ^ 
cette  résolution  lui  valut  les  acclamations  des  membres  du 
serment.  Le  coup  qu'elle  avait  reçu  n'eut  d'ailleurs  pas  de 
suite  sérieuse  (I). 

Je  terminerai  cette  analyse  de  la  correspondance  de  Ben- 
tivoglio  en  donnant,  d'après  ses  dépêches,  une  indication 
sommaire  et  chronologique  des  ambassades  envoyées  et 
reçues  par  les  Archiducs  dans  les  années  1611,  1612  et 
1615;  ces  détails  peuvent  être  utiles  aux  historiens. 

21  juin  WiO  (2).  Envoi  du  comte  de  Bucquoy  (Charles 
de  Longueval),  général  de  l'artillerie,  à  Paris,  pour  com- 
plimenter le  nouveau  roi  et  la  reine  mère  de  France. 

^5  janvier  i6U.  Nomination  du  licencié  Ferdinand  de 
Boisschot  à  l'ambassade  d'Angleterre  et  du  conseiller  au 
grand  conseil  Le  Bailly  à  l'ambassade  de  France.  L'ambas- 
sade d'Angleterre  était  vacante  depuis  le  rappel  du  baron 


(1)  u Tirandosi  coii  l'archibugio,  havevano  l'Infanla  e  l'Arciduca 

lirati  tre  o  quatre  colpi  per  una  prima  di  tutti,  seconde  il  solito,  quando 
avvenne  clie  nell'  atto  dello  scaricare  crepo  in  mano  ad  uno  di  detli 
arteggiani  la  canna  dell'  archibugio ,  e  fece  volar'  alcune  scheggie  délia 
canna,  una  délie  quali  percosse  e  feri  l'Infanta  nella  guancia  destra,  con 
effusione  di  molto  sangre.  Non  volse  con  tutlo  ci5  S.  A.  partir  dal  luogo 
délia  festa  sinchè  il  pappagallo  non  fù  abbatluto.  E  ritornata  poi  S.  A,  in 
corte,  si  vide  che  la  ferita  non  era  di  momento,  e  l'Altezza  Sua  ne  sarà 
presto  dellutto  guarila....  »  (Dépêche  du 4 mai  1613.) 

(2)  Les  dates  que  je  cite  sont  celles  des  dépèches. 


2il  ) 

d'Hoboken;  celle  de  France  était  occupée  par  Pierre  Pec- 
quius,  qui  sollicitait  son  rappel  (1).  Bentivoglio  dit  de 
Boisschot  qu'il  est  réputé  homme  de  talent  et  de  beaucoup 
d'habileté  dans  les  affaires  (2).  Sur  Le  Bailly  il  n'a  pas  de 
renseignements  particuliers;  seulement  on  lui  rapporte 
que  la  capacité  de  ce  nouveau  diplomate  n'est  pas  grande, 
et  que  dans  le  maniement  des  affaires  son  expérience  est 
médiocre  (3). 

'19  mars  4611.  Arrivée  à  Bruxelles,  le  17  mars,  en 
qualité  d'ambassadeur  ordinaire  de  France,  du  sieur  de 
Préaux,  le  même  qu'Henri  I\  y  avait  envoyé  pour  réclamer 
la  princesse  de Condé.  «  Tl  est  très-jeune,  dit  Bentivoglio, 
»  car  il  n'a  guère  plus  de  trente  ans  ;  mais  l'esprit  qu'il 
»  montre  fait  bien  augurer  de  lui.  II  jouit  d'une  abbaye 
»  en  France,  bien  qu'il  aille  en  habit  séculier  (4).  » 

n  septembre  1611.  Envoi  du  comte  de  Solre,  chevalier 
de  la  Toison  d'or,  conseiller  d'État  et  grand  écuyer  de 
l'Archiduc,  à  Vienne,  pour  assister,  en  son  nom,  au  ma- 
riage de  son  frère  Mathias,  roi  de  Hongrie  et  de  Bohême, 
avec  Anne  d'Autriche,  hlle  de  Ferdinand,  comte  de  Tyrol. 

5  octobre  161 1.  Envoi  du  comte  de  Bucquoy  en  Espa- 


(1)  En  anuonçanl,  dans  une  (.lépèche  du  30  avril ,  le  retour  à  Bruxelles 
de  Pecquius,  Bentivoglio  dit  qu'il  a  rempli  sa  charge  à  la  très-grande 
satisfaction  des  Archiducs,  et  qu'il  s'y  est  acquis  beaucoup  de  réputation 
par  la  prudence  et  le  talent  dont  il  y  a  fait  preuve  [Ha  soslenuto  quel 
caricho  con  sodisfation  grandissima  délie  Loro  Altezze  e  con  acquisto 
di  moUa  riputazione ,  per  haver'  egli  data  segui  di  gran  prudenza  e 
valore). 

(^)  « É  giudicalo  huomo  di  buon  ingegno  o  di  molta  hahililà  mi' 

negotii....  » 

(3)  «  Et  che  non  sia  mollo  versato  ne'  negotii » 

(4)  Egli  è  assai  giovane  d'età,  non  potendo  passar  di  nioltoi  Ireiiia 

anni;  ma  lospiritoch'egli  mostra  promette  di  lui  buona  riuscita.  Gode  in 
Francia  una  abbadia,  aucorchè  qui  vada  in  habilo  di  secolare....  » 


(  212  ) 

giie,  pour  solliciter  du  roi  ranlicipation  du  subside  destiné 
à  rentretien  de  l'armée. 

15  octobre  J6i  I.  Envoi  de  D.  Diego  Mesia,  gentilhomme 
de  la  chambre  de  l'Archiduc,  en  Italie,  pour  présenter  au 
duc  de  Mantoue,  Vincent  P',  et  au  prince  son  fils  les  com- 
pliments de  condoléance  d'Albert  et  d'Isabelle,  à  l'occasion 
de  la  mort  de  leur  épouse  et  mère ,  Éléonore  de  Médicis. 

5  novembre  161 1.  Envoi  du  comte  Ottavio  Visconti,  de 
la  chambre  de  l'Archiduc,  en  Espagne,  pour  présenter  de 
pareils  compliments  à  Philippe  ïll,  à  l'occasion  de  la  mort 
de  Marguerite  d'Autriche,  sa  femme. 

5/  mars  4612.  Arrivée  à  Bruxelles  du  baron  de  Reck- 
heim,  envoyé  par  Ferdinand  de  Bavière,  électeur  de 
Cologne  et  évoque  de  Liège,  qui  venait  récemment  de 
prendre  possession  de  ces  deux  principautés.  —  Arrivée 
d'un  ambassadeur  du  duc  de  Lorraine  Henri  II,  chargé 
de  complimenter  les  Archiducs  à  l'occasion  de  la  mort  de 
l'empereur  Rodolphe  IL 

23  juin.  1612.  Envoi  à  Vienne  du  comte  Ottavio  Visconti, 
pour  féliciter  l'empereur  Mathias,  au  nom  des  Archiducs, 
.sur  son  élection. 

18  août  1612.  Envoi  en  Espagne  du  comte  de  Furstem- 
berg,  gentilhomme  de  la  chambre  de  l'Archiduc,  avec  la 
mission  de  complimenter  le  Roi  sur  les  deux  mariages 
conclus  avec  la  couronne  de  France. 

•/«'"  septembre  1612.  Envoi  de  Pecquius  à  l'empereur 
l\lathias,  alin  de  traiter,  au  nom  de  l'Archiduc,  du  partage 
de  la  succession  de  l'empereur  défunt  (I). 


(1)  Pecquius  revint  de  Vioiine  au  mois  de  mars  1613.  Entre  autres 
objets  de  prix  qu'il  rapporta  à  l'archiduc  Albert ,  était  une  bague  en 
diamant  d'une  valeur  de  cinquante  mille  florins  d'Allemagne.  (Dépêche 
(lu  6  avril  161ô.) 


(  213  ) 

49  janvier  1615.  Nomination  du  comte  de  Soire  pour 
aller  complimenter  Ferdinand  de  Bavière,  à  l'occasion  de 
l'entrée  qu'il  devait  l'aire  à  Liège. 

9  février  1615.  Envoi,  par  Ferdinand  de  Bavière,  du 
grand  commandeur  de  Maestriclit ,  de  l'ordre  Teutonique, 
chargé  de  complimenter,  en  son  nom,  les  Archiducs. 

W  avril  1615.  Envoi  à  la  diète  de  Ratisbonne  du  comte 
Frédéric  de  Bergh,  chevalier  de  la  Toison  d'or. 


APPENDICES. 

Lettres  de  Bentivoglio  au  cardinal  Borghèse,  secrétaire  dl^lat 
de  Paul   V. 


iV  I. 


Illustrissimo  et  Reverendissimo  Signorc,  padrone  colon- 
dissimo, 

Il  présidente  Ricciardotto  fù  quegli  tliandô  a  trovare  Tam- 
bassadore  d"lnghilterra  e  gli  fece  iiitendere,  come  da  se,  che 
non  andasse  aitrimenli  ail'  audienza  del  soroiiissimo  Arcidnca 
con  animo  di  présentai'  a  Sua  Altezza  il  libro  del  suo  ro, 
perché  Sua  Altezza  non  l'havria  ricevulo.  Si  commosse  gran- 
dementc  a  queste  parole  lambassadore,  e  rispose  al  présidente 
ch'  egli  era  qui  per  essequir  gli  ordini  del  suo  re,  e  che  non 
poteva  far  di  nieno  di  non  presentar  il  libro;  soggiunse  che 
teneva  per  fermo  che  l'Arciduca  non  havria  iisato  mai  ter- 
mine taie  col  suo  re  ,  et  un  disprezzo  si  grande  di  ribustar 
cosa  che  gli  fosse  presentata  in  nome  di  Sua  Maeslà.  Rcplicù 
il  présidente  ail  ambassadore  ch'  egli  haviia  fatlo  bene  a  de- 


(  214  ) 

porre  qiiest'  aninio,  i;  clie  poteva  dar  fede  a  quanto  gli  veniva 
detto  da  lui,  e  chc  non  dovcva  ripularlo  pei*  delto  a  caso. 

Con  questa  forma  di  ragionamento  del  présidente  restô 
sospeso  l'anibassadore,  e  non  risolse  per  alF  hora  d'andar  ail' 
audienza.  Andô  poi  duc  di  dopo  a  Irovar  csso  présidente,  e  gli 
disse  ch'avendo  considerato  meglio  quelle  parole,  desiderava 
in  ogni  modo  sapere  se  fossero  parole  uscite  d'ordine  dell' 
Arciduca.  Replicô  Ricciardotto  ail'  ambassadore  ch'  egli  poteva 
ben  ci'edere  che  non  fossero  parole  uscite  a  caso.  E  rinnovando 
pur  l'instanze  l'anibassadore  per  saper  s'eran  uscite  d'ordine 
deir  Arcidu(;a ,  rispose  finalmente  Ricciardotto  cb'  crano  pa- 
role di  bocca  propria  dell'  Arciduca,  e  cb'  egli  bavria  confir- 
mato  cio  per  iscritto ,  se  non  gli  fosse  bastato  a  voce;  e 
soggiunse  di  più  ch'  egli  bavria  posto  ancora  per  iscritto  il 
suo  parère  sopra  questa  risolutione  presa  da  Sua  Altezza  in 
materia  dcl  libro,  e  che  jicr  la  sua  parte  bavria  dicbiarato 
liberaniente  ad  ogn'  uno  che  Sua  Altezza  non  baveva  potuto 
far  meglio  di  quel  ch'  aveva  fatto  in  non  volere  ne  pur  ve- 
dere  il  libro,  non  che  ricevcrlo  ,  poicbè  era  contre  la  sua 
religione,  contro  l'obbedienza  dovuta  al  papa  e  professata 
senipre  da  tutla  la  casa  d'Austria  con  termini  di  tanto  rispetlo 
verso  la  Chiesa  romana. 

A  questa  risposta  di  Ricciardotto  non  si  commosse  ma 
s'infiamô  di  rabbia  l'ambassadore.  Et  uscendo  quasi  di  se  me- 
desimo,  corne  frenetico,  rispose  impertinenze  grandissime  che 
Iroppo  lungo  saria  il  raccontarle.  Disse  particolarmente  che 
l'Arciduca  se  faceva  schiavo  del  papa,  c  che  non  usava  quai 
termini  che  doveva  aspettar  il  suo  re  da  Sua  Altezza ,  e  che 
ben  havrebbe  potuto  Sua  Altezza  ricever  il  libro  e  non  leg- 
gerlo,  e  che  altri  crano  i  termini  e  le  creanze  che  s'usa vano 
'  tra  i  prcncipi  grandi ,  altri  gli  scrupuli  e  suj)erstitioni  de' 
fraticelli  papisti,  e  che  non  sarian  mancati  modi  al  suo  re  di 
risentirsi  di  tanto  disprezzo,  con  altri  impertinenze  ch'  egli 
aggiunse  di  questa  sorte.  Aile  quali  jierô   rispose  il  présidente 


(  215  ) 

con  quei  terraini  risentiti  che  conveniva ,  ribattendo  l'insolenza 
deir  arabassadore  con  dire,  tra  Taltre  cose  :  «  E  che  vi  pensate 
»  con  questi  vostri  libri?  Vi  fioccheranno  adosse  mille  risposte, 
»  che  faranno  arabbiar  il  vostro  l'e,  e  che  lo  faranno  ravedere 
»  quanto  meglio  havria  fatto  a  governar  il  suo  regno  come  re 
»  che  come  dottore  délia  sua  setta.  »  Il  présidente  in  somma 
si  porto  in  modo  che  mostrè  molto  bene  quant'  egli  fosse 
zelante  e  del  rispetto  délia  sua  religione  e  dell'  honor  del  suo 

prencipe 

Di  Bruxelles ,  H  8  di  agosto  1G09. 

Di  Vostra  Signoria  Illustrissima  e  Reverendissima 
hurailissimo  e  devotissimo  servitore, 

GuiDO,  Arcivescovo  di  Rhooi. 

L'ambassadore  d'Inghilterra  è  per  modo  arrabiato  che  non 
ha  mai  più  voluto  andar  ail'  audienza,  e  l'Arciduca  medesimo 
me  lo  disse  hieri. 


N°  II. 

Illustrissimo  e  Reverendissimo  Signore,  padrone  colendis- 
simo, 

Giunsi  poi  il  venerdi  sera  délia  settimana  passata,  per  Dio 
gratia,  a  salvamento  in  Anversa.  Il  sabbato  mattina,  che  fù  il 
giorno  del  Assuntione,  lasciai  celebrar  la  messa  solenne  al 
vescovo,  per  non  impedirgli  le  sue  funtioni  ordinarie,  et  io  me 
ne  andai  alla  chiesa  de'  padri  gesuiti ,  e  quivi  dissi  la  mia 
messa  privata.  Era  piena  di  gente  la  detla  chiesa,  e  v'  eran 
particolarmente  molti  catlolici  d'Ollanda  e  dell'  allre  Provin- 
cie  Unité  :  ond'  io,  giudicando  di  potcr  dar  molto  esempio  e 
raolt'  edificatione  col  comunicar  io  medesimo  quelli  che  si 


(  216  ) 

trovavano  quivi  raddunati ,  per  quest'  effetto  comminciai 
queir  attione,  e  la  continuai  finchè  non  vi  resté  persona 
che  non  fosse  di  mia  mano  coraraunicata.  Durô  la  santa  co- 
munione  più  d'un'  hora  e  mezza.  E  perché  fu  cosa  nova  ne 
più  veduta  da  molli  anni  in  qua  in  Anversa,  ne  intesa,  si  puô 
dire,  da  quei  cattolici  forestieri,  clie  per  tant'  anni  di  guerra 
cran  vivuti  sepolti  fra  le  ténèbre  de  gli  heretici ,  perciô  rai  fù 
alFermato  che  il  gusto  spirituale  e  la  veneratione  verso  il 
nostro  santo  rito  cattolieo  fù  straordinario  in  quelli  che  si 
trovarono  presenti  a  cosi  fatta  attenlione,  e  che  vi  furono  a 
parte.  E  veramcnte  non  potrei  esprimer  con  parole  li  atti  di 
devotione  che  si  vedevano  in  quei  semplici  e  buoni  cattolici 
neir  atto  di  ricever  il  santissimo  sacramento,  e  nel  fervor  di 
voler  l'un  prima  dell'  altro  riceverlo  di  mia  mano. 

Il  doppo  desinare  dell'  istesso  sabbato,  io  risolsi  poi  di 
cantar  il  vespro  che  doveva  precedere  alla  solenne  messa 
délia  domenica  seguente,  ch'  era  il  giorno  délia  processione 
pur  solenne  che  doveva  farsi.  Cantato  il  vespro  con  gran  con- 
corso,  con  molto  maggiore  cantai  poi  anche  la  messa,  poichè, 
com'  ho  detto,  era  cosa  affato  nuova  et  appena  intesa,  ch'  un 
nuntio  apostolico  célébrasse  quella  solennità,  e  conducesse 
quella  processione  che  da  tanto  popolo  s'aspettava.  Passé  la 
processione  con  quest'  ordine.  Precedevano  tutte  l'arti  délia 
città,  che  sono  nummerosissirae,  e  doppo  seguivano  molti 
inventioni  di  carri,  di  navi,  di  giganti  e  di  molt'  altre  varie 
forme  di  cose  che  soglion  rappresentar  diversi  spettacoli 
popolari  in  queste  città  di  Paesi  Bassi,  et  in  particolare  in 
Anversa,  come  città  più  ricca  e  di  maggiore  splendore  dell' 
altre.  Seguivano  poi  doppo  varii  ordini  di  religiosi ,  e  doppo  i 
religiosi  il  clero,  e  doppo  il  clero  io  medesimo,  portando  una 
croce  in  mano,  solto  un  baldachino  (ch'  in  tal  giorno  non  si 
suoi  portar  il  santissimo  sacramento),  e  doppo  la  mia  persona 
veniva  portata  un'  imagine  délia  Madonna,  ch'  è  protettrice 
d'Anversa,  et  in  honor  délia  quale  si  faceva  la  processione. 


(  247  )    . 

Queir  imagine  fù  portata  prima  da  i  canonici,  e  poi  dal  ina- 
gistrato,  e  poi  da  altri  ordini  di  persone  inferiori,  di  man  in 
mano.  II  giro  fù  di  più  d'un'  hora  di  camino,  e  le  strade  e  le 
finestre  erano  piene  di  gran  quantità  di  popolo.  Il  giorno  era 
nuvoloso.  Pure  sin'  alla  meta  del  giro  non  cadette  la  pioggia 
che  minacciava  di  cadere,  ma  dalla  meta  sin'  al  fine  venue  poi 
in  grandissima  copia.  Alcuni  erano  di  parère  ch'io  mi  fer- 
massi  e  mi  ricovrassi  in  qualchè  casa  :  ma  io ,  stimando  che 
gli  heretici ,  i  quali  per  curiosità  di  veder  cose  nuove  eran' 
concorsi  in  gran  numéro ,  facilmente  havrian  mormorato,  e 
forse  i  cattolici  stessi  presa  poca  edifîeatione,  risolsi  di  conti- 
nuar  la  ceremonia,  e  di  mostrarc  che  quello  e  maggiore 
disaggio  si  sapeva  tollerar  facilmente  in  honor  délie  cose  sacre. 
Fini  a  questo  modo  la  processione. 

L'istezza  mattina,  prima  ch'  io  andassi  a  cantar  la  messa  so- 
lenne  nella  chiesa  maggiore,  vennero  molti  cattolici  in  casa 
del  vescovo,  per  ricever  da  lui  la  confirmatione.  E  perché  di 
già  essi  sapevano  ch'io  era  nella  medesima  casa  alloggiato, 
desideravano  di  haver  la  mia  beneditione.  Ond'  io,  valendomi 
di  cosi  fatta  opportunità,  andai  in  una  sala  dov'  essi  erano 
radunati  in  numéro  di  più  di  150,  et  havendo  prima  fatto  un 
raggionamento  publico  in  latino,  con  quelle  essortationi  che 
mi  parvero  necessarie  (il  quai  raggionamento  fù  interpretato 
in  fiamengo  da  un  cattolico  nipote  del  vescovo),  diedi  poi  lor 
la  beneditione,  che  da  molti  fù  ricevuta  con  lagrime  e  con 
spirito  si  vivo  di  fede,  ch'a  me  medesimo  commossero  un 
affetto  interno  incredibile.  Feci  distribuir  poi  doppo  a  tutti 
buon  numéro  di  medaglie,  di  quelle  perô  che  mi  trovavo 
apprcsso,  non  di  quelle  ch'  aspettavo  da  lloma,  poichè  queste, 
per  diffetto  de'  corrieri  e  per  mia  disgratia,  non  giunsero  se 
no  martedi  prossimo  passato ,  che  fù  il  giorno  del  mio  ritorno 
in  Brusselles.  Son  restato  perô  col  vescovo  d'Anversa  d'inviar- 
gliene  quantità,  perch'  egli  possa  per  diverse  vie  farle  passar 
in  mano  di  quelli  che  son  rimasti  in  grandissimo  desiderio 
d'haverle. 


(  218  ) 

Spcro  nella  gratia  del  Signore  clie  questa  mia  attione  pu- 
blica  d'Anversa  non  sarà  stata  di  poco  giovamcnto  per  man- 
tener  nella  costanza  della  nostra  santa  fede  i  cattolici  délie 
Provincie  Unité,  e  per  far  frutto  ancora  appresso  gli  heretici, 
molli  de'  quali ,  vivendo  hereticamente  più  per  inganno  che 
per  malattia ,  potrian  forse  aprir  egli  occhi  e  conoscer  gli 
fraudi  in  che  stanno  involti  con  le  false  opinioni  ch'  anno 
della  Chiesa  romana  e  de'  ministri  e  sacerdoti  dipendenti 
dal  somme  pontefice.  Certa  cosa  è  che  quei  cattolici  che  si 
sono  trovati  in  Anversa  hanno  ricevuto  grandissima  consola- 
tione  di  veder  présente  il  nuntio  apostolico,  et  in  quella  forma 
solenne  in  che  io  mi  sono  mostralo.  Ciô  m'  è  stato  affîrmato 
da  molti.  E  perch'io  havevo  procura lo,  col  mezzo  di  varii  reli- 
giosi,  che  la  mia  venuta  in  Anversa  giungesse  a  notitia  de 
predetti  cattolici,  e  che  fosse  lor  detto  che,  per  ordine  di  Sua 
Santità,  io  era  venuto  principalmente  per  consolation  loro, 
essi  di  ciô  hanno  ricevuto  raaraviglioso  contenlo,  et  hanno 
ringraziato  Dio  che  da  Sua  Beatitudine  si  tenga  tanto  conto 
di  loro,  et  tanto  si  compatisca  aile  loro  calamilà. 

Queste  calamità,  per  quel  ch'  ho  inteso  hora  in  Anversa,  par' 
che  sieno  più  tosto  cresciute  che  sminuite  doppo  la  conclusion 
della  tregua.  Son  seguiti  dall'  hora  in  qua  alcuni  esilii  di 
sacerdoti  et  alcuni  editti,  particolarmente  in  Frisa,  più  rigorosi 
del  solito.  Pur  tultora  si  spera  che  nella  présente  giunla  de 
gli  slati  generali  sia  per  determinarsi  qualchè  cosa  a  beneficio 
de'  cattolici,  e  gli  olTicii  del  re  di  Francia  (com'  ho  scritto  altre 
volte)  saranno  giovevoli ,  s'efïicacemente  saranno  impiegati. 

Il  vescovo  d'Anversa  ha  confirmato  questi  giorni,  e  va  tut- 
tora  sempre  confirmando  buon  numéro  di  cattolici.  Mi  disse 
particolarmente  il  priore  di  San  Domenico  che,  dalla  tregua 
conclusa  in  qua,  erano  entrati  piùdi  mille  cattolici  nella  com- 
pagnia  del  Rosario  del  suo  convenlo.  Ma  in  questo  guadagno 
che  noi  facciamo,con  l'occasione  del  comertio  libero  corriamo 
rischio  ancora  di  qualche  perdita. 


(  219  ) 

In  Anversa  particolarmente  son  molti  infetti,  e  di  questi 
molti  vanno,  i  giorni  difesta,  aile  prcdiche  heretiche  di  Lilo, 
ch'è  un  gran  forte  del  inimico,  due  leghe  appresso  la  mede- 
sima  città.  Ne  sin  hora  s'è  potuto  por'  niano  al  rimedio, 
essendo  neeessario  di  veder  prima  l'essito  délia  ratificatione 
di  Spagna.  II  vescovo  perô  è  vigilantissirao,  et  io  qui  non 
mancherô  d'accender  tuttora  maggiorniente  il  zelo  di  questi 
j)rencipi,  sempre  acceso  pcr  se  medesimo  nel  servitio  di  Dio. 

E  pcr  fine  a  Vostra  Signoria  Illustrissima  bacio  humilissi- 
raamcnte  le  mani. 

Di  Brusselles,  li  22  d'agosto  1609. 

Di  Vostra  Signoria  Illustrissima  e  Reverendissima 
hurailissimo  e  devotissimo  servitore, 

GuiDO ,  Arcivescovo  di  Rhodi. 


N"  m. 

lUustrissimo  e  Reverendissimo  Signore  mio,  padrone  colen- 
dissimo, 

Doppo  haver  scritto  a  Vostra  Signoria  Illustrissima  le  raie 
ultime  de'  gli  8  di  questo  mese,  me  ne  venni  da  Gante  à 
Bruges.  Mi  son  fermato  in  questa  città  parimente  due  giorni, 
che  sono  stati  spesi  da  me  in  quel  medesimi  ofîicii  ch'io  havea 
fatti  prima  in  Gante.  Ho  trovato  questa  città  di  Bruges  pro- 
vista  d'assai  buono  e  zelante  vescovo ,  e  i  capitoli  dclla  cathé- 
drale e  di  due  altre  chiese  collegiate  ripieni  di  persone  molto 
pie  e  di  buona  vita ,  per  Tinformatione  c'ho  procurato  d'haver 
da  più  parti.  Hanno  patito  grandemente  anco  i  luoghi  sacri  di 
questa  città  pcr  cagion  di  moti  passali ,  e  molto  più  in  questi 
ultimi  anni  per  la  gucrra  che  s'è  fatta  sotto  Ostende,  ch'è 
terra  lontana  di  qui  non  più  di  quattro  leghe,  in  modo  taie 


(  220  ) 

che  nel  conlado  particolarmente  era  molto  intermcsso  e  raf- 
freddato  il  culto  divino,  che  hora,  col  bcneficio  délia  trcgiia  e 
con  la  diligenza  dell'  prelato,  si  piiô  sperar  che  sia  ogni  di  più 
per  restituirsi.  A  questa  cura  et  a  qiiesto  pensiero  di  rimetter 
in  pie,  di  quanto  mcglio  sia  possibile,  le  cose  della  religion 
nostra  nell'  contorno  di  questa  ciltà,  ho  essortato  eiïicacemente 
il  vescovo,  con  usar  ogni  maggior  vigilanza  e  col  proveder  di 
buoni  e  sulïicienti  curati  i  villaggi  e  le  parocchie  vicine  al 
paese  heretico.  M'ha  risposto  il  vescovo  esser  questo  una  délie 
principali  mire  cli'  egli  habbia,  e  di  trovar  in  ciô  dilTicultà 
grande  per  la  penuria  che  patisce  il  paese  di  persone  atte 
alla  cura  délie  anime,  essendo  ridotti  a  pocchissimo  nuni- 
raero  i  soggeti  habili  a  tal  peso,  e  non  potendo  esser  solle- 
vata  la  detta  penuria  con  huomini  che  si  chiamino  di  fuori  di 
questa  provincia  propria  di  Fiandra,  per  rispetto  della  lingua 
diversa.  Mi  ha  nondimeno  soggiunto  esso  vescovo  d'essersi 
adoprato  e  di  dover  adoprarsi  in  ciô  con  ogni  sollecitudine  e 
mezzo  possibile. 

Doppo  haver  visitati  i  religiosi  secolari,  ho  visitate  ancora  le 
chiese  e  conventi  de'  regolari,  che  son  qui,  si  puô  dir,  d'ogni 
religione,  et  in  ogni  luogho  ho  dato  quei  ricordi  e  fatti  gli 
olïicii  che  raison  parsi  a  proposito,  havendo  sopra  ogni  cosa 
inculcato  il  punto  della  clausura.  Ho  trovato  qui  fondato 
particolarmente  e  con  molto  frutto  un  buon  colleggio  di  padri 
gesuiti. 

Nel  resto  è  questa  citta  di  gran  lunga  meglio  affetta,  che 
non  è  la  citta  di  Gante,  verso  la  religion  cattolica,  non  havend' 
io  potuto  penetrar  che  neanchè  la  tentemente  vi  sia,  si  puô  dir, 
alcun  heretico  :  di  che  mi  son  rallegrato  con  i  due  magistrati 
che  sono  in  questa  città,  separati  l'uno  dall'  altro,  i  quali 
constituiscono  due  de'  quattro  membri  della  provincia  di 
Fiandra.  A  questo  doppio  magistrato  ho  fatto,  separatamente 
a  ciascuno,  un  elTicace  raggionamento  ,  essortandoli  non  solo  a 
non  consentir  che  si  machi  in  loro  quella  purità  della  vera 


(  221  ) 

religione  ch'hanno  conservata  sin  qui,  ma  a  procurar  ancora 
d'arapliarla  nel  lor  dislretto  con  ogni  via  possibile.  lo  da  loro 
sono  stato  ricevuto  et  ascoltato  con  segni  di  grandissima  rive- 
renza  et  ossequio  verso  la  sede  apostolica,  et  oltre  a  ciô  non 
lian'  lasciato  di  presentarmi  di  vino,  secondo  il  costume. 

Domattina,  ch'  è  lunedi,  alli  12,  partirô  verso  Ostende,  per 
veder  quella  piazza,  e  per  passar  poi  ad  altri  luoghi  di  questa 
provincia.  In  tanto  ho  voluto  scriver  hoggi,  ch' è  domenica, 
questa  lettera  per  vantaggiar  tempo ,  acciocchè  possa  giungcr 
sabbato  prossimo  ,  prima  che  parla  il  corriero  dltalia,  a  Brus- 
selles,  donde  allontanandomi  io  tuttavia  più,  non  sô  s'io  potrô 
far  che  Vostra  Signoria  Illustrissima  non  resti,  da  qui  inanzi, 
mentre  io  starô  fuori,  qualch'  ordinario  senza  mie  lettere.  E  le 
bacio  humilissimamente  le  mani. 

Di  Bruges,  li  H  d'ottobre  1609. 

Di  Vostra  Signoria  Illustrissima  e  Reverendissima 
humilissimo  e  devotissimo  servitore , 

Glido,  Arcivescovo  di  Rhodi. 


N°  IV. 


lUustrissimo  e  Reverendissimo  Signo*'c,  padrone  raio  colen- 
dissimo, 

Richiede  una  lunga  lettera  a  parte  la  relatione  ch'io  debbo 
dar  a  Vostra  Signoria  Illustrissima  del  seminario  inglese  di 
San  Omero.  Venni  in  questa  città  con  grandissimo  desiderio 
di  visitar  esso  seminario  e  di  far  tutto  quello  ch'avessi  potuto 
in  suo  servitio.  Ho  speso  perciô  un  giorno  inticro  fra  questi 
alunni,  e  l'ho  compartito  nel  modo  che  Vostra  Signoria  Illus- 
trissima inlenderà.  Andai  la  mattina  per  tempo  al  seminario, 


(  222  ) 

e  doppo  esservi  stato  ricevulo  con  la  débita  forma ,  célébrai 
messa;  celebrata  la  quale  ministrai  il  santissimo  sacramento 
a  tutta  la  gioventù  del  seminario  cou  grandissimo  gusto  e 
conforto  spirituale  di  tutti.  Doppo  la  messa  fù  fatta  una  pro- 
cessione  dentro  al  circuito  délia  casa,  e  precedendo  a  me 
tutti  gli  alunni ,  io  seguitava  poi  con  un  piviale  che  fù  già  del 
re  Henrico  ottavo,  e  che  si  conserva  qui  per  una  ricca  e  rara 
memoria.  Portai  nella  processione  un'  imagine  délia  Madonna 
fatta  del  legno  dell'  arbore  dove  essa  apparse  miracolosamente 
nel  bosco  di  SIchem  ;  e  finita  la  processione,  mi  furono  rappre- 
sentate  varie  attioni  sacre  da  detti  alunni  con  segni  e  di  gran 
ingegno  e  di  gran  pietà.  Con  questo  terminô  il  tempo  délia 
mattina.  Tornai  poi  subito  doppo  desinar  a  riveder  più  dis- 
tintamenle  la  casa  del  seminario.  Fui  trattenuto  per  un  pezzo 
da  gli  alunni  con  musica  dinstrumenti  e  di  voci ,  nella  quai 
virtù  essi,  per  maggior  condimento  dclle  cose  sacre,  pongono 
molto  studio  e  riescon  ancora  con  non  minor  profitto.  Quindi 
entrai  per  tutte  le  stanze  e  per  tutt'  i  luoghi  délia  casa,  et  in 
un  luogbo  particolarmente,  più  spatioso  de  gli  altri,  mi  fù 
mostrato,  quasi  come  in  ischiera  et  in  ordinanza,  tutta  la  gio- 
ventù in  varie  file  su  i  loro  scabelli  dove  sogliono  studiare, 
et  io  accostandorai  bor'  ail'  uno,  bor'  ail'  altro,  andavo  frapo- 
nendo  quei  ragionamenti  cbe  potessero  andargli  sempre  più 
accendendo  a  gli  studii  et  alla  pictà  christiana.  Finalmente 
havendo  io  giudicato  cbe  il  fermarmi  a  cena  con  essi ,  e  cbe 
'I  seder  tra  essi  medcsimi ,  non  potesse  senon  edificargli  gran- 
demente,  e  far  baver  loro  carissimo  quest'  atto  d'Iuirailtà  in 
cbi  rapresentava  loro  dall'  altra  parte  si  vcnerabile  maestà 
com'  è  quella  del  capo  délia  Chiesa  cattolica,  restai  a  far  carità 
con  essi.  Ne  potrei  ben  csprimere  quanta  fosse  la  consolalione 
et  il  giubilo  cbe  di  quest'  attione  essi  presero.  Nel  tempo  della 
cena  vidi  pruove  mirabili  del  loro  ingegno  e  de  gli  essercilii 
eh'  usano  nelle  lettere.  Fù  dato  a  quattro  di  loro  un  argo- 
mento  di  matcria  sacra,  ail'  improvisa,  dal  rettore  del  semi- 


(  225  ) 

nario.  Disputavano  due  per  parte,  posti  gli  uni  contro  gli  altri 
in  due  sili  eminenti  del  refettorio.  Sopra  questo  argomento 
essi  fecero  varie  dispute,  facendo  prima  le  proposte  in  lingua 
greca,  e  poi  in  lingua  latina,  e  con  tanta  franchezza  nell'  una 
e  neir  altra  ch'io  ne  restai  veramente  attonito.  Queste  dispute 
si  fanno  matina  e  sera,  et  oltre  a  gli  altri  essercitii  s'essercita 
in  questo  tempo  ancora  in  ciascuno  di  loro,  quando  gli  tocca, 
mirabilmente  lingegno.  Doppo  la  cena  fù  trattenuta  con  nuova 
musica  di  cose  sacre  con  infinito  raio  gusto.  Ero  già  per  par- 
tire.  Ma  prima  ch'io  partissi ,  essèndo  radunata  lutta  la  gio- 
venlù  nella  medesima  stanza  dove  fù  fatta  la  musica,  feci  loro 
un  ragionamento,  toccando  tutti  quei  punti  che  mi  parvero 
più  oportuni,  cosi  per  accendergli  aile  lettere  come  per  in- 
fiamargli  sempre  più  allô  spirito  délie  cose  sacre  et  al  zelo 
délia  religione,  per  la  quale  hanno  abbandonata  la  patria, 
sono  uscitidal  seno  di  padri  loro,  e  si  sono  privati  di  tutte  le 
loro  sostanze  e  d'ogni  temporale  delitia.  Mostrai  in  fine  che 
lutto  quello  ch'io  haveva  fatto,  e  lofferta  affettuosissima  che 
facevo  loro  dell'  opéra  mia ,  tutto  era  seguito  d'ordine  espresso 
di  Nostro  Signore,  per  il  sommo  zelo,  che  vive  nel  petto  di  Sua 
Santità ,  délie  cose  ch'appartengono  alla  conservatione  et  aug- 
mento  délia  religione  in  Inghilterra,  e  del  ben  publico  e 
privato  di  tutti  i  cattolici  di  quel  regno.  Con  questo  ragiona- 
mento lasciai  gli  alunni  del  seminario. 

È  governato  questo  seminario  da  padri  gesuiti,  e  con  tant' 
ordine  e  tanta  prudenza  che  non  si  puô  desiderar  di  van- 
taggio.  Rettor  del  medesimo  seminario  è  un  padre  di  questi 
paesi,  il  quale  regge  questa  gioventù  con  grandissima  carità, 
destrezza  e  giuditio,  in  modo  che  è  tenuto  da  loro  non  tanto 
persuperiore  quanto  per  padre.  Gli  alunni  passano  il  numéro 
di  cento,  e  co'  i  padri  délia  compagnia  e  con  altre  persone 
domestiche  del  seminario  arriva  il  numéro  di  tutte  le  persone 
a  170.  Questa  gioventù  si  puô  dir  il  fior  de'  cattolici  d'Ingil- 
lerra,  e  vi  si  veggono  molti  nobili,  et  alcuni  ancora  fîglii  di 


(  224  ) 

heretici,  o  al  meno  di  persone  politiche ,  le  quale  nel  exteriore 
seguono  il  tempo  e  vivano  in  quella  fede  che  fa  loro  adorar 
l'intéresse.  Un  giovinetto  ho  veduto  fra  gli  altri,  fîglio  del 
interprète  délie  lingue  appresso  il  re.  11  padre,  se  bene  este- 
riorraente  si  mostra  heretico ,  ha  caro  pero  che  'I  figlio  stia  in 
questo  seminario,  e  sotto  nome  délia  madré,  la  quai'  è  catto- 
lica  ,  soministra  al  figlio  largaraente  quanto  gli  fa  di  bisogno. 
Molto  più  poi  fanno  questo  i  padri  che  sono  veri  cattolici. 
Con  questi  aiuti  che  vengono  d'Ynghilterra  si  sostenta  princi- 
palmente  il  seminario,  che  d'altra  maniera  con  gli  assigna- 
menti  del  re  e  dell'  Arciduca  si  troverebbe  in  mal  termine.  Al 
seminario  si  mostra  molto  inclinata  e  favorevole  questa  città. 
Ponevasi  pero  certa  difficultà  dal  présente  magistrale  sopra  il 
possesso  di  certe  case  acquistate  dal  seminario,  e  eh'  orasi  van 
convertendo  in  uso  sacro  d'un  oratorio  :  ma  io ,  con  la  mia 
venuta,  ho  supcrata  la  difficultà,  e  cessera  da  qui  inanzi  ogn' 
impedimento  nell'  opéra.  Finirô  questa  lettera  col'  raccoman- 
dar  alla  protettione  di  V.  S.  111™%  con  tutto  il  cuore  e  con  tutto 
lo  spirito,  il  seminario  predetto ,  dentro  al  quale,  tutt'  il  tempo 
che  mi  son  trattenuto,  m'è  parso  in  vero  di  vedermi  in  un 
luogo  di  paradiso  fra  gli  angeli,  e  con  tanta  edificatione  e 
compuntione  mia  propria,  che  non  l'ho  provata  mai  taie  ne 
la  proverô  a  raiei  giorni,  poichè  mi  pareva  di  veder  nascer  e 
crescer  tante  plante  nella  Chiesa  cattolica,  per  esser  destinate 
H  persecutioni  e  supplicii  e  martirii ,  quanti  erano  gli  alunni 
ch'io  havevo  inanzi  a  gli  occhi.  E  per  fine  a  Vostra  Signoria 
Illustrissima  bacio  humillissimamente  le  mani. 
Di  Sant'Omero,  li  18  di  ottobre  1609. 

Di  Vostra  Signoria  Illustrissima  e  Reverendissima 
humilissimo  e  dcvotissimo  servitore, 

GuiDO,  AncivEscovo  di  Rhodi. 


(  225  ) 


N"  V. 

Illustrissimo  e  Rcverendissinio  Signore  mio  ,  padrone  colen- 
dissimo , 

Conforme  a  quelle  chc  accennai  a  Vostra  Signoria  Illustris- 
sima  con  le  mie  ultime,  passai  da  Sant'  Omero  a  Ipri,  città  délia 
Fiandra,  non  mollo  grande  di  circuito,  ma  bene  babitata.  Mi 
vi  fermai  un  giorno  solo,  e  fui  alloggiato  dal  vescovo,  prelato 
di  raolta  bontà  c  sufficienza,  e  che  non  manca  di  sollecitudine 
in  quel  che  tocca  la  cura  del  suo  gregge.  Da  gli  altri  ecclesias- 
tici  e  dal  magistrato  hebbi  le  dimoslrazioni  che  havevo  rice- 
vute  ne'  gli  altri  luoghi  da  me  vcduti  prima  ,  e  con  tutti  feci 
gli  officii  ch'istimai  espedienli.  Fù  tenuta  già  la  città  di  Ipri 
alcuni  anni  da  gli  eretici,  ma  hora  è  ridotta  a  buonissimo 
termine,  non  ve  ne  restando,  a  quai  che  ho  potuto  raccogliere, 
se  non  alcuni  pocchi  occulti.  A  ridurre  quella  città  a  tal  segno 
hanno  giovato  mollo  gli  essercilii  spirituali  e  le  diligenze  de 
padri  gesuili,  che  v'hanno  un  colleggio,  e  si  spera  che  quel 
popolo  sia  per  conOrraarsi  tuttavia  più  nella  pietà  chrisliana 
col  buono  esempio  ancora  e  con  le  prediche  de'  padri  capu- 
eini  introdotti  nuovamente  nella  medesima  città  per  opéra 
del  vescovo ,  col  quale  non  lasciai  di  far  oflicio  sopra  le  per- 
sone  sospette  d'heresia  in  Neuporlo  e  sopra  un"  altra  pcrsona 
del  magisti'ato  di  Doncherchen  grandemente  sospetta  ancor 
essa.  Da  Ipri  vuolsi  il  mio  camino  verso  Coltrai,  terra  grossa 
pur  délia  Fiandra,  nel  quai  luogo  visitai  un  capitolo  che  v'è 
d'una  chiesa  collegiala.  Da  questo  luogo  giunsi  a  Tornai,  dove 
mi  parve  bene  di  visitar  nuovamente  la  casa  del  noviziato 
che  v'hanno  i  padri  gesuiti,  délia  quai  casa  diedi  pieno  ragua- 
glio  a  Vostra  Signoria  Illustrissima  nel  viagio  ch'io  feci  l'estate 
passata,  corne  ancora  dello  stato  délia  chiesa  di  Tornai. 

Da  Tornai  essendo  io  entrato  nella  provincin  doH'  Hannonia, 

2""^  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  Va 


(  226  ) 

son  venuto  qui  a  Bins ,  terra  distante  una  Icgha  da  Marimontc, 
dove  tuttavia  si  tratengano  questi  prencipi,  godendo  i  loro 
diporti  della  caccia  cou  una  bellissima  stagione  che  corre  al 
présente.  E  bacio  a  Vostra  Signoria  lllustrissima  per  fine  hu- 
millissimamente  le  raani. 
Di  Bins,  li  29  ottobre  1609. 

Di  Vostra  Signoria  lllustrissima  e  Reverendissinia 
humilissimo  e  devotissimo  servitore, 

GuiDO,  Akcivescovo  di  Rhodi. 


Deux  lettres  inédites  de  Jacques  deMolay  ;  par  M.  le  baron 
Kervyn  de  Leltenhove,  membre  de  l'Académie, 

Jacques  de  Molay,  qui  fut  le  dernier  représentant  des 
ordres  religieux  militaires  dans  toute  leur  puissance  et  qui 
périt  immolé  parle  monarque  que  glorifiaient  les  légistes, 
Jacques  de  Molay  qui  avait  bravé  le  fer  des  infidèles  et  qui 
monta  dans  la  capitale  d'un  royaume  chrétien  sur  le 
bûcher  où  du  moins  des  mains  fidèles  recueillirent  ses 
cendres,  restera,  malgré  tous  les  débats  des  historiens 
sur  un  procès  fameux,  l'une  des  plus  fières  et  des  plus 
grandes  figures  du  moyen  âge. 

Je  rappelais  il  y  a  quelques  années  les  circonstances  qui 
concoururent  à  sa  perte  et  je  signalais  en  même  temps 
l'existence  d'un  mémoire  où  s'épanchait  encore,  la  veille 
du  jour  où  on  allait  l'accuser  de  parjure,  son  pieux  enthou- 
siasme. La  classe  me  permettra  de  placer  de  nouveau  ces 
lignes  sous  ses  yeux: 

«  Clément  V,  hésitant  sans  cesse  entre  sa  conscience 


(  227  ) 

el  ses  lorreiirs  ,  crut  retrouver  la  dignité  et  la  liberté  de 
la  parole  du  chef  de  rÉgiise  en  portant  les  yeux  vers  le 
berceau  du  christianisme  et  en  appelant  dès  son  intronisa- 
tion, selon  l'usage  de  ses  prédécesseurs,  les  princes  et  les 
barons  chrétiens  à  délivrer  Jérusalem.  Des  lettres  émou- 
vantes dictées  par  les  évêques  et  les  abbés  de  Terre  Sainte, 
où  ils  dépeignaient  éloquemment  les  périls  dont  ils  étaient 
entourés,  vinrent  confirmer  l'appel  du  pape,  et  Philippe 
le  Bel ,  croyant  qu'une  croisade  le  réhabiliterait  de  ses 
sacrilèges  attentats  contre  Boniface  YIII ,  feignit  de  s'y 
associer  avec  un  grand  enthousiasme. 

«  Une  voix  plus  sincère  répondit  de  l'Orient  à  cet  appel. 
Ce  fut  celle  du  grand  maître  de  l'ordre  du  Temple,  Jacques 
de  Molay  ,  et  le  mémoire  qu'il  adressa  au  pape  existe 
encore  aux  Archives  impériales  de  Paris.  L'absence  de  noms 
et  de  dates  l'a  fait  passer  inaperçu  jusqu'à  ce  moment, 
mais  rien  n'en  peut  atténuer  la  valeur,  car  c'est  le  seul 
témoignage  émané  de  Jacques  de  Molay  où,  avant  de  monter 
sur  le  bûcher,  il  ait  pu  s'adresser  à  la  postérité  : 

«  Les  périls  de  la  terre  sainte,  dit  Jacques  de  Molay, 
réclament  impérieusement  une  nouvelle  croisade.  Les 
chrétiens  n'y  possèdent  plus  de  forteresses  où  ils  puissent 
trouver  un  asile,  et  il  faut  désormais  réunir  des  forces 
assez  considérables  pour  attaquer  en  rase  campagne  les 
Sarrasins  qui  ne  comptent  pas  moins  de  douze  à  quinze 
mille  cavaliers  et  de  quarante  à  cinquante  mille  sergents 
et  archers. 

»  Il  faut  que  la  croisade  réunisse  les  rois  de  France, 
d'Angleterre,  d'Allemagne,  de  Sicile,  d'Aragon, d'Espagne 
et  tous  les  autres  princes  chrétiens. 

»  Plus  de  petits  navires,  mais  de  grands  vaisseaux  qui 
puissent  porter  les  hommes  ,  les  armes  et  les  chevaux. 


(  228  ) 

»  Souvenez-vous  de  ce  que  disait  autrefois  le  sage  et 
puissant  Bondocdar,  Soudan  de  Babylone  :  qu'il  s'oppose- 
rait avec  son  armée  à  trente  mille  Tarlares,  et  qu'il  livre- 
rait également  bataille  à  quinze  mille  chevaliers  francs, 
mais  que  s'ils  se  présentaient  en  plus  grand  nombre,  il 
leur  abandonnerait  le  terrain.  Nous  avons  entendu  dire  la 
même  chose  de  ceux  qui  accompagnèrent  à  Damiette  le 
roi  saint  Louis.  Il  est  donc  évident  qu'il  faut  réunir 
douze  à  quinze  mille  chevaliers  et  cinq  mille  sergents  à 
pied  ,  et  nous  pouvons  espérer  que  tant  de  combattants  , 
désormais  résolus  à  suivre  de  bons  conseils  (ceci  était  une 
allusion  à  la  témérité  de  Robert  d'Artois  qui  avait  repoussé, 
à  la  journée  de  la  xMassoure,  les  conseils  des  Templiers), 
parviendront  à  reconquérir  toute  la  terre  sainte.  Il  sera 
utile  d'y  joindre  deux  mille  arbalétriers  [balistarii). 

»  C'est  dans  l'île  de  Chypre  qu'il  faudra  descendre  pour 
s'organiser,  mais  il  faudra  cacher  avec  soin  aux  Sarrasins 
le  lieu  où  nous  débarquerons  en  terre  sainte.  Cependant, 
je  pourrai  me  rendre  près  du  roi  de  France  et  le  lui  dire 
secrètement. 

»  Envoyez  dès  cet  hiver  des  vaisseaux  pour  défendre 
l'île  de  Chypre.  Ayez  soin  den  fréter  d'autres  à  Gènes  et  à 
Venise,  et  aûn  d'éviter  toute  discussion  qui  pourrait  amener 
de  la  jalousie  entre  ces  villes  et  les  croisés,  ne  choisissez  le 
chef  de  la  Hotte,  ni  dans  le  clergé,  ni  chez  les  Templiers, 
ni  chez  les  Hospitaliers.  C'est  en  Italie  qu'il  faudra  cher- 
cher votre  amiral ,  par  exemple  Roger  de  Loria. 

j)  De  plus,  que  le  pape  porte  les  peines  les  plus  sévères 
contre  ces  marchands  italiens  qui,  n'écoutant  que  leur 
avarice,  envoient  constamment  aux  infidèles  tout  ce  dont 
ils  ont  besoin. 

»  Je  prie  Dieu  tout-puissant,  disait  en  terminant  Jac- 


(  229  ) 

ques  de  Molay,  qu'il  vous  donne  la  prudence  pour  ordon- 
ner ce  qui  peut  être  le  plus  utile ,  et  la  puissance  qui  est 
nécessaire  pour  l'accomplir,  alin  que  notre  siècle  puisse  se 
glorifier  de  la  délivrance  de  ces  lieux  saints  où  Notre- 
Seigneur  Jésus-Christ  a  daigné  vivre  et  mourir  pour  le 
salut  du  genre  humain.  » 

«  Tel  fut  le  langage  d'un  homme  que  l'on  accusera  plus 
tard  d'être  le  complice  des  infidèles,  et  je  ne  sais,  en  reli- 
sant ce  document,  si  cette  proposition  de  révéler  au  roi 
seul  le  lieu  du  débarquement  des  croisés,  ne  devint  pas  le 
prétexte  de  la  perfide  invitation  adressée  au  grand  maître 
de  l'ordre  du  Temple  pour  qu'il  se  rendît  à  Poitiers  (1).  ». 

Plusieurs  années  se  sont  écoulées  depuis  que  j'appelais 
l'attention  de  l'Académie  sur  ce  document.  Il  me  parait 
mériter  mieux  qu'une  froide  analyse,  et  c'est  ce  qui  m'en- 
gage aujourd'hui  à  le  publier  tout  entier  : 

Hoc  est  c'onsifiuni  magistri  Tenipli ,  super  negolio  Terrœ 
Saiietee. 

Pater  sancle,  quseritis  quid  mihi  videlur  melius  faciendiim, 
sive  grande  passagium,  sive  parvuni.  Ad  quod  respondeo 
quod  parvum  passagium,  secundum  stalum  in  qiio  terra 
consistit  ad  prfesens,  non  esset  proficuum,  sed  danipnosum 
et  vituperosuin  Christianitali,  et  esset  perditio  illorum  om- 
nium, qui  transirent  in  parvo  passagio,  quod  Christian!  hodie 
non  tenent  in  terra  illa,  —  hoc  est  in  regiio  Jerosolymitano , 
comitatu  Tripolilano  et  principatu  Antiochcno,  —  civitntem, 
castrum,  vel  forlilitiam  aliquam  in  qua  se  recolligere  posseut 
vel  guaronlire  si  opus  esset;  et  si  passagium  reperiretur  in 
aliquo  loco  dictarum  parlium,  nec  esset  ita  forte  quod  posset 
praeliari  cum  exercitu  Soldani,  lotaliter  pcrdcretur. 

(I)  Bullelins  df  l'Académie,  2<' série,  t.  XII. 


(  250  } 

Item,  sialiquis  vellet  dicere  quod  parvum  passagium  esset 
utile  ad  eundum  in  Armeniam  ad  custodiam  illiiis  terrœ  et 
pro  faciendo  giierram  Saracenis  per  parles  illas:  respondeo 
quod  hoc  esset  periculosum  et  pcrditio  omnium  qui  reperi- 
rentur  ibidem,  si  dictum  passagium  in  sociclate  Armenoi'uni 
non  esset  tam  forte  quod  posset  prœliari  contra  exereitum  de 
Seeam,hoc  est  de  Jérusalem  et  omnibus  finibus  ejus,  qui 
potest  esse  numéro  duodeeim  vel  qiiindecim  millia  equituni 
aut  circa,  et  de  quadraginta  vel  quinquaginta  millia  servien- 
tium  Archaiorum;  et  posito  quod  possint  resistere  super- 
dictis,  quod  non  credo  pluribus  rationibus  quœ  possent  dici, 
restât  adhuc  exercitus  Soldani  Babilonise,  qui  facile  potest 
illuc  venire  quandocumque  placeret. 

Hem,  si  parvum  passagium  irel  in  Armeniam  ,  licet  Saraceni 
non  facerent  sibi  dampnum  vel  guerrain,  tamen  terra  a  se 
ipsa  ita  infirma  est  et  maia  quod  si  quatuor  millia  equituni 
transirent  illuc,  quantum  quiquc  fortes  et  sani,  mirabile  esset 
si  in  fuie  anni  reperirentur  quingenti. 

llem,  est  aliud  periculum  quod  si  Franci  se  reperirent  in 
bello  cum  equitibus  vel  mililiiius  Arnieniœ,ex  quibus  pauci 
reperiuntur  qui  non  sint  semper  parati  ad  i'ugani  dum  vident 
inimicosad  pugnam  contra  se  venire,  quod  non  relinquerenî 
eos,  et  licec  esset  maxima  confusio  j)robis  viris  se  in  tali  socie- 
tate  sentire,  dum  essent  in  exercitio  armorum,  quod  illi  qui 
novcrunt  et  noscunt  eos,  libenter  évitant  in  talibus  locis  esse 
cum  cis. 

Ilem,  si  Franci  essent  in  Armcnia  et  indigerent  refugio, 
Armeni  non  receptarent  eos  in  aliquo  caslro  vel  fortilitia  sua, 
quod  semper  dubilaveriint  et  dubilant  ne  Franci  auferant  eis 
terram,  et  hoc  divinant  Armeui  continue,  scilicet  ({uod  Franci 
debent  eis  regnum  auferre. 

Item,  in  marchia  Ai-meniœ  suai  tôt  génies  de  Bcrria,  Tur- 
chimani,  Cordoivirri,  Beduini,  quod  cl  si  ali.T  génies  Sarace- 
norum  non  intromilterent  se,  furtitcr  se  defenderent  et  tene- 


(  251  ) 

it-nt  marchiam   illarn  cum  illis  qui  esscnt  in  Armenia ,  quod 
inontana  sunt  magna  et  passus  fortissinii. 

Quare  prœdictis  i-ationibus  et  aliis  luultis  quœ  possent  dici, 
nullo  modo  consulo  par  vu  m  passagium  ficri  debere,  yrao  con- 
tradico  quantum  possum  ac  reproho  omnino  pro  evitando 
vituperio  et  dampno  Christianitatis. 

In  nomine  Domini,  amen. 

De  magno  passagio  generali  faciendo,  omnimo  concordo 
pro  destructione  inimicorum  fidei  christianœ  et  pro  restaura 
tione  Terrœ  Sanetœ  Christi  sanguine  respersse;  et  si  placeret 
Sanctitati  Vestrse  et  dominis  cardinalibus  quod,  ex  nune, 
quam  citiùs  possetis  bono  modo,  de  hujusmodi  passagio  trac- 
taretis  cum  dominis  regibus  Franciœ,  Anglise,  Alamaniœ, 
Siciliae,  Aragonia»,  Yspaniœ  ac  aliis  terrarum  dominis,  majo- 
ribus  et  minoribus,  quorum  corda  Deus  illuminât,  boc  nego- 
tium  tam  laudabile  valde  bonum  et  utile  crederem. 

Item,  quod  ordinaretur  ex  nune  Januœ,  Venetiis  et  in  aliis 
terris  niaritimis  quod  fièrent  naves  et  alia  magna  vasa  ad 
portandum  equos  et  victualia,  et,  quam  citius  fieri  posset,  in- 
ciperet  quilibet  providere  sibi  de  rébus  neccssariis  ad  dictuui 
passagium. 

Item,  non  laudo  galleas  in  facto  passagii,  sed  naves  et  alia 
magna  vasa,  et  boc  ideo  quod  naves  sunt  magis  proficua;  et 
laudabiles  quam  gallese,  nara  una  navis  portabit  plus  quam 
quatuor  galleœ,et  una  gallea  conslabit  plus  quam  très  naves; 
et  non  oportcbit  pneliari  in  maris  passagio  quod  inimici  non 
possent  in  mari  resisterc  cum  habeant  modicum  armaraenti. 

Item,  si  placet  audirc  consilium  de  quantitate  gentium,  res- 
pondeo  quod  Bothendar  olim  soldanus  Babiloniœ,  qui  fuit 
potenlior  et  sapientior  in  factis  armorum  quam  unquam  fuis- 
set  aliquis  in  sccta  sua,  raagis  faraosus,  multotiens  dixit,  quod 
cum  cxercitu  suo  obviaret  triginta  millibus  Tartarorum,  sed  si 
plures  venirent,  relinqueret  eis  campum. 

Item  ,  dixit  quod  si  in  terra  sua  venirent  quindecim  millia 


(  232  ) 

equitum  Francoruni,  obviarct  eis  et  preeliaretur  cuni  eis,  scd 
si  plures  venirent,  recederet  et  dimitteret  eis  carapum. 

Propter  quod,  reducens  ad  meraoriam  dicta  ipsius  et  aiia 
plurinia  quœ  audivi  similiter,  audiendo  ab  eis  qui  fuerunt  in 
Damiata  cum  Saneto  Ludovico,  de  quantitate  militum  et  equi- 
tum ac  pedilum,  quam  habuit  secum,  audcrem  et  audeo 
dicere,  nec  nieHus  audirera,  quam  si  générale  passagium 
habet  a  duodecim  usque  ad  quindecim  milh'a  equitum  arma- 
torum  et  quinque  milHa  pcditum,  cum  auxilio  Dei,  cujus  ser- 
vitio  se  disponent,  spero  in  Domino  quod  tôt  gentes,  volentes 
bono  consilio  ercdere,  totam  Terram  Sanctam  acquirent  et 
recuperabunt  omnino;sed  de  prsedictis  equitibus  consulo 
quodessent  duo  millia  balistariorum. 

De  loco  ubi  passagium  recoUigatur ,  nichil  dico,  quod  hoc 
erit  in  voluntate  dorainorum  regum;  sed  de  applicando  portu 
in  partibus  illis,  modis  omnibus  consulo  pro  meliori  quod 
primo  applicctur  in  regno  Cipri,  et  ibi  refrigeret  et  recreet  se 
passagium  totum. 

Sed  discedendo  a  regno  Cipri  et  cundo  versus  Terram  Sanc- 
tam, nullus  débet  pallam  consulere  de  loco  seu  patria  in  qiia 
sit  portus  arripiendus  vel  passagium  descendere  debeat,  quod 
ex  hoc  oriretur  prœvisio  Sarracenis;  sed  si  placet  vobis  et 
domino  régi  Franciœ,  dicam  secreto  tôt  bonas  et  utiles  cau- 
sas quod  credo  vere  quod  acquiescetis  consilio  meo  quod 
clare  monstrabo  quae  sunt  loca  bona  vel  non  bona  ad  hoc  ita 
quod  vestra  discretio  sancta  bene  cognoscct. 

Item,  Pater  Sancte  ad  hfec,  ut  nullus  possit  dicere,  quod 
non  consulam  libentcr  lieri  bona  ,  si  vobis  placet  mittere  in 
regnum  Cipri  aliquem  succursum  equitum  vel  pcditum,  po- 
testis  facere;  et  hoc  esset  consolatio  in  regno  Cipri  pluribus 
rationibus  quœ  possint  dici. 

Item,  consulo  et  laudo  pro  meliori,  modis  omnibus,  quod 
ordinetis,  quam  citius  potestis,  decem  galleas,  et  appai'cntur 
bac  hycme  ita  quod  in  primo  vere  possint  transire  ad  defen- 


(  255  ) 

sionem  rcgni  Cipri  et  ad  custodiendum  mare,  ne  per  malos 
Christianos  portentur  vetita  Saracenis,  et  quod  dictae  galleae 
teneanlur  continue  usque  ad  passagium  générale;  et  de  pecii- 
nia  percipienda  prœdictis  galleis  tenendis,  si  placebit,  secun- 
dum  quod  raihi  videbitur,  secreto  consulam.  Taraen  consilium 
istud  non  seribo  quod  non  est  ponendum  in  scriptis;  sed  spero 
in  Domino  quod  taliter  lucrabuntur  diclœ  gallese,  quod  satis 
facile  polerunl  teneri. 

Et  consulo  quod  ponalur  in  diclis  galleis  talis  capitaneus 
qui  non  dubilet  pcrdere  temporalia  bona  per  potentiam  civi- 
tatum  maritimarum. 

Credo  quod  Rogeronus,  filius  quondam  doraini  Rogcrii  de 
Loria,  esset  bonus  capilaneus  dictarum  gallearura ,  si  vobis 
placeret. 

Non  consulo  quod  ponatis  homincm  rcligiosum,  praecipue 
Templarium  vel  Hospitalarium,  quod  si  dictae  galleœ  dampni- 
ficarent  Januenses  vel  Venetos,  ipsi  recurrerent  ad  naves  vel 
bona  eorum ,  et  sic  religiones  possint  incurrere  magnum 
darapnum. 

Ileni,  consulo,  Pater  Sancte,  pro  bono  et  bonore  vestro  et 
toliusChristianitatis  quod  placeret  vobis  mandare  Januensibus, 
Venetis  et  Pisanis  et  aliis  portum  babentibus  supra  mare, 
et  expresse  praecipere  quod  non  portent  vel  mittant  bona 
aliqua  Saracenis,  quod  Saraceni  nimis  dilantur  ex  boc;  nam, 
secundum  quod  audivi  domibus  quœ  contrabuntur  cum  eis, 
sive  dando,  sive  recipiendo,  tertiara  partem  largo  modo  reci- 
piunt  a  Cbristianis  pro  dativo  seu  tbclonco,  ita  quod  de  tribus 
navibus  sive  de  ono-e  Irium  navium  bene  recipiunt  seu  tol- 
lunt  unam;  et  multa  dampna  receperunt  ex  hoc  Cbristiani 
propter  lanceas  et  alia  arma  quae  mali  Cbristiani  déferont  et 
portaverunt  eis. 

Unde  credo  quod  esset  bonum  si  ponetis  ad  boefortissimam 
probibitionem  et  strictam  sententiam  et  quod  ita  facile  non 
absolverentur  a  dicta  sententia  in  corum   reversione,  sicut 


(  25  i-  ; 
aliquando  fieri  consuevit  ;  naiii  quoque  deferunt  eis  galleas  ita 
paratas  quod  nichil  restât  nisi  coniponere  et  clavare  ipsas. 
Unde   super   hoc   faciet   Vcstra  Sanclitas   quod  videbit  esse 
bonum. 

Noscat  igitur  Vestra  Sanctitas,  Pater  Sancte,  quod  vobis 
melius  et  clarius  ore  proprio  exponcmus  prœdicta  quam  per 
aliqua  scripta.  Rogo  itaque  Deuni  omnipotentem  ut  vobis 
donet  gratiam  ordinandi  super  hiis  quod  fuerit  melius  et 
potentiam  recuperandi  terapore  vestro  loca  sancta  in  quibus 
Dorainus  Noster  Jbesus-Christus  nasci  et  mori  dignatus  est  pro 
generis  humani  salute. 

Plus  récemment  j'ai  retrouvé  à  Londres  au  Record- 
Office  une  lettre  adressée  au  roi  d'Angleterre,  qu'il  faut 
aussi  attribuer  à  Jacques  de  Molay.  Elle  paraît  avoir  été 
écrite  dans  les  mêmes  circonstances  lorsque  le  grand 
maître  de  l'ordre  du  Temple  venait  de  quitter  TOrient  et 
était  déjà  arrivé  en  Provence  : 

Serenissimo  ac  excellentissimo  et  potentissirao  omni  vene- 

ratione  colendo  domino duci  Yberniae  et  domino  Acqui- 

taniac,  frater  Jacobus  eadem  gratia  pauperis  militiœ  Templi.... 
post  commendationem  sui  ipsius,  prosperos  ad  regia  vota 
successus  et  paratam  ad  mandata  regia  potentiam  et  de  pros- 

peritate  mentis  et  corporis  congaudere ,  quod  de  regia  raa- 

jestate  audire  plenius  desideramus. 

Proplernimiamdomus  nostrœpaupertalem  nos  venire  opor- 
tuit  ad  bas  partes  ut  possemus  aliquid  remedium  adhibere. 
Unde  nos  ad  partes  Provincia?  venieiUes.  cum  proouratorc 
Provincise  et  aliis  probis  viris  domiis  nostrfe  deliberavimus 

et  tractatum  habuimus Ordinatum  i?l  etiam  et  provisum 

ut  noslrum  capitulum  générale  debereuius  celebrare in  quo 

capilulo  pro  religioso  viro  fratre  Guydone  de  Fortescue 

mittimus  ut  debeat  intéresse,  de  cujus  probitale  et  prudentia 


(25S) 

couiidiraus in  iiobis  necessitatibus   oportunum  et   salubre 

consilium. 

[Religioncm]nostram,bona  nostra  et  domos  nostras  cum  fra- 

tribiis  regali  proteclioni  propensius  commendamus nobis 

devoiis  vestris  ut  sumus,  fuimus  et  esse  sempei*  volumus  toto 
tempore  vitœ  nostrœ. 

Vestra  Serenitas....  ubique  terraruni  regalibus  parère  bene- 
placitis. 

Scriptum...  (i). 

Ici  ce  n'est  plus  l'orgueil  proverbial  des  Templiers  qui 
s'étale  :  ce  sont  des  plaintes  qui  s'exhalent  sur  leurs  souf- 
frances et  leurs  besoins.  Il  faut  y  chercher  un  remède,  et 
l'on  invoque  la  protection  du  roi  d'Angleterre  qui  fut  aussi 
l'un  des  défenseurs  des  lieux  saints. 

Ces  tristes  préoccupations,  ce  pressant  appel  à  un  appui 
qui  partout  allait  bientôt  manquer  à  Tordre  du  Temple, 
semblent  avoir  quelque  chose  de  prophétique;  et  ce  n'est 
pas  sans  quelque  émotion  que  je  reconnus  au  milieu  des 
lettres  royales  de  la  chancellerie  anglaise  ce  fragment 
mutilé  et  presque  effacé,  mais  tracé  par  une  main  que  la 
poésie  a  déjà  vengée  et  que  l'histoire  réhabilitera  à  son 
tour. 


(I)  Chancer^,  Eoijal  Lelters,ôo01. 


(  256  ) 


?iotice  sur  l'origine  des  magistrats  communaux  et  sur 
rorganisaiion  de  la  Marke  dans  nos  contrées  au 
moyen  âge;  par  M.  Léon  Vanderkindere,  professeur  à 
rUniversité  de  Bruxelles. 

La  première  question  que  l'on  soulève  d'ordinaire,  lors- 
qu'on étudie  l'origine  de  nos  communes  au  moyen  âge, 
est  celle  de  savoir  si  elles  doivent  leur  constitution  à  l'in- 
surrection ou  si  leur  développement  a  été  tout  pacifique. 
En  réalité  ce  n'est  là  qu'un  problème  secondaire,  qui  con- 
cerne la  forme  et  non  le  fond,  le  dehors  et  non  le  dedans 
des  choses.  Les  conditions  en  effet  variaient  d'une  ville  à 
l'autre,  et  le  progrès  que  celle-ci  réalisait  sans  peine,  une 
autre  n'y  parvenait  que  par  l'émeute  et  le  carnage;  mais 
ici  et  là,  le  but  à  atteindre  était  le  même.  Ce  qui  diffère 
donc,  c'est  le  degré  de  résistance  que  les  vœux  des  bour- 
geois rencontraient  de  la  part  de  ceux  qui  se  trouvaient 
intéressés  à  la  conservation  de  l'ordre  existant  ;  or  c'est  là 
un  fait  tout  à  fait  accidentel,  purement  local,  et  qui  n'al- 
tère en  rien  ni  la  tendance  générale  dont  les  esprits  étaient 
animés,  ni  surtout  les  éléments  sur  lesquels  la  commune 
se  constituait  et  qui  étaient  le  fondement  nécessaire  de 
son  existence.  Les  habitants  de  nos  villes  du  X%  du  XI*" 
siècle  n'étaient  pas  de  simples  unités  qu'aucun  lien  ne 
rattachait  entre  elles,  ils  avaient  une  organisation,  quelle 
qu'elle  fût,  et  si  leurs  efforts  tendent  à  la  conserver  en  la 
développant,  ou  bien  à  la  détruire  pour  la  remplacer  par 
des  combinaisons  nouvelles,  peu  importe  :  c'est  sur  une 


(  237  ) 
base  donnée  qu'ils  bâtissent,  et  cette  base  nous  devons 
chercher  à  la  connaître.  Il  y  a  donc  une  distinction  capi- 
tale à  établir  entre  l'histoire  externe  de  la  commune,  qui 
se  laisse  raconter  et  son  histoire  interne,  qui  se  laisse 
construire. 

Pour  bien  comprendre  cette  dernière,  rien  n'est  plus 
important  que  d'avoir  des  notions  précises  sur  le  carac- 
tère des  principaux  fonctionnaires  communaux;  il  est  rare 
en  effet  que  nos  documents  nous  montrent  la  commune 
elle-même  dans  son  activité  régulière  et  presque  incon- 
sciente; les  magistrats  au  contraire  sont  l'expression  directe 
de  la  vie  sociale,  dont  ils  reflètent  en  eux  tous  les  aspects 
et  dont  ils  personnifient  les  droits  et  les  devoirs,  et  les 
transformations  qu'ils  ont  subies  ont  laissé  dans  nos 
annales  des  traces  parfois  obscures,  mais  toujours  plus  ou 
moins  reconnaissables. 

La  théorie  des  magistratures  communales  est  donc  le 
point  de  départ  d'une  histoire  de  la  commune  elle-même. 
Or,  à  quels  résultats  cette  étude  a-t-elle  conduit  jusqu'ici? 
Trois  systèmes  en  Belgique  ont  trouvé  des  défenseurs  : 

1°  Celui  qui  cherche  dans  nos  communes  les  souvenirs 
d'une  ancienne  organisation  romaine  et  qui  fait  de  nos 
magistrats  les  descendants  des  décurions  et  du  dcfemor 
civitatis. 

2°  Celui  qui  donne  la  rjUde  pour  base  à  la  commune  et 
transforme  les  fonctionnaires  de  la  gilde  en  fonctionnaires 
publics. 

o"  Celui  qui  rattache  la  commune  aux  institutions  ger- 
maniques et  notamment  assimile  les  échevins  aux  scabini 
carolingiens. 

Quelle  est  la  valeur  de  ces  trois  systèmes?  Le  premier 


(  -2Ô8  ) 
ne  comple  plus  guère.  Un  savant  dont  j'honore  les  tra- 
vaux, M.  Wauters,  dit  encore,  il  est  vrai,  dans  son  Mémoire 
sur  Jean  P"  (p.  29o) ,  que  «  les  échevins  ont  hérité  des 
attributions  de  Vancienne  curie  romaine  et  des  tribunaux 
»  échevinaux  des  comtés  francs  (1).  »  M.  Gheldolf,  lui 
aussi,  corrigeant  nialencontreusenient  Warnkônig,  avance 
(t.  IV,  p.  148)  que  les  conseillers  ou  jurés  de  Bruges  sont 
les  successeurs  des  decuriones  et  leur  bourgmestre  celui 
du  defensor  civitalis.  Mais  c'est  là  de  la  fantaisie  pure; 
rien  ne  nous  autorise  à  admettre  que  Bruges  ait  existé 
comme  ville  sous  les  Romains,  moins  encore  que  l'orga- 
sation  romaine  s'y  soit  maintenue  jusqu'au  moyen  âge. 
Les  decuriones  en  elîet  étaient  essentiellement  des  fonc- 
tionnaires revêtus  d'une  autorité  publique,ce  que  n'étaient 
à  l'origine  ni  les  conseillers,  ni  le  bourgmestre,  comme  je 
le  montrerai  plus  tard. 

Au  surplus  la  thèse  de  l'origine  romaine  des  magistrats 
communaux,  défendue  naguère  par  Savigny,  Eichhorn  et 
leurs  disciples,  a  été  si  complètement  réfutée  en  Alle- 
magne qu'elle  est  devenue  insoutenable;  on  a  prouvé  que 
les  communes  lombardes  elles-mêmes  ne  sont  point  éta- 
blies sur  un  principe  romain,  «  Dièse  Ansicht,  dit  Gierke, 
das  deutsche  Genossenschaftsrecht,  1,250,  ist  vôllig  besei- 
tigt.  »  {Voir  aussi  Hegel,  Italien.  Slàdte,  II,  591  et  suiv.; 
von  Marner,  Geschichte  der  Stàdteverfassung ,  I,  156  et 
suiv.).  Il  n'y  a  donc  pas  lieu  de  s'arrêter  à  cette  opinion. 

J'en  dirai  autant  de  celle  qui  rapporte  à  la  gilde  toute 
notre  organisation  municipale.  C'est  là  cependant  une 


(1)  Nous  verrons  plus  loin  qu'il  n'y  a  jamais  eu  de  tribunaux  de  comtes 
francs. 


(  259  ) 

thèse  qui  trouve  de  nombreux  partisans.  On  aime  la  giltle 
en  Belgique  comme  une  inslilution  démocratique  et  l'on 
se  plaît  à  voir  en  elle  la  source  de  toutes  nos  grandeurs 
politiques.  Récemment  encore  M.  Vandenpeercboom,  dans 
son  article  de  la  Palria  belgica,  a  résumé  de  la  façon  la 
plus  complète  les  titres  qu'elle  peut  faire  valoir,  et  il 
conclut  en  affirmant  qu'elle  créa  la  cité,  quelle  devint  le 
berceau  de  la  commune,  que  «  l'organisation  des  communes 
et  celles  de  leurs  corporations  furent,  à  toutes  les  époques, 
appuyées  sur  les  lois  fondamentales  admises  par  nos  gildes 
primitives.  »  Il  semble  enfin  que  la  constitution  de  1830 
elle-même  ne  soit  que  la  dernière  expression  de  l'esprit 
qui  donna  naissance  à  cette  antique  association. 

Tout  cela  est  peut-être  fort  patriotique,  mais  cela  est 
malheureusement  inexact;  et  il  me  paraît  impossible 
d'exagérer  davantage  le  rôle  d'une  institution  qui  a  sa  place 
dans  notre  histoire,  mais  qui  doit  aussi  s'y  tenir.  La  gilde 
dans  son  origine  est  essentiellement  une  association  volon- 
taire; elle  a  un  caractère  exclusivement  privé.  C'est  ce 
qu'ont  fort  bien  établi  von  Maurer  [Stddteverfassunrj ,  I, 
pp.  164-171,  52o,  etc.)  et  Heusier  {Ursprung  der  deiit- 
schen  Stadtvcrfassung ,  p.  11  et  passim).  Loin  de  coïncider 
avec  la  commune  la  gilde,  comme  nous  le  voyons  dans  les 
règlements  les  plus  anciens,  n'est  qu'une  société  commer- 
ciale ou  une  société  de  secours  mutuels,  qui  n'embrasse 
qu'une  portion  restreinte  des  bourgeois  et  à  côté  de 
laquelle  existent  parfaitement  les  magistrats  communaux. 
Tel  est,  par  exemple,  le  caractère  de  la  confrérie  de  Saint- 
Euchère,  que  nous  rencontrons  en  1192,  à  Saint-Trond 
[Carlulaire  de  Saint-Trond,],  pp.  152  et  154).  Quel  est  son 
objet  principal?  C'est  de  fournir  à  ses  m.embres  un  enter- 
rement convenable.  Quant  à  une  activité  politique,  on  l'y 


(il40  ) 
chercherait  vainement.  Il  en  est  de  même  de  la  fameuse 
confrérie  de  la  Charité  à  Valencienues  (1070  environ. 
Cf.Wâulers,  De  l'origine  des  libertés  communales,  Preuves, 
p.  251);  on  a  là  le  règlement  d'une  société  particulière, 
d'où  il  ne  sera  jamais  possible  de  faire  dériver  l'organisa- 
tion publique  d'une  commune.  Rien  de  plus  clair  sous  ce 
rapport  que  le  règlement  de  la  gilde  de  Malines,  de  1276 
{Wauters,/6ïd,p.  254);  c'est  une  association  privilégiée  de 
marchands,  qui  possède  un  monopole,  mais  qui  est  parfai- 
tement distincte  de  la  commune  :  les  statuts  parlent 
expressément  des  bourgeois  qui  ne  sont  pas  membres  de 
la  gilde. 

Sans  doute,  je  n'entends  pas  tomber  dans  Terreur 
opposée  à  celle  que  je  combats;  je  ne  veux  pas  nier  le  rôle 
qu'a  rempli  la  gilde,  mais  ce  rôle  n'apparaît  qu'à  un  cer- 
tain moment  du  développement  communal;  les  bourgeois 
ont  souvent  adopté  la  forme  et  le  principe  de  la  gilde  com- 
merciale pour  affirmer  leur  unité  d'une  façon  conforme 
aux  tendances  de  l'époque;  on  peut  dire  qu'alors  la  gilde 
passe  du  droit  privé  dans  le  domaine  du  droit  public.  La 
loi  deVÀmitié  crAire  (Warnkonig,  III,  2»  n»  CLXIVjest 
fort  intéressante  à  cet  égard. 

Mais  encore  une  fois,  là  n'est  point  l'origine  du  lien 
social  de  la  bourgeoisie,  là  n'est  pas  davantage  l'origine  de 
la  liberté  communale.  Soutenir  le  contraire,  c'est  préten- 
dre que  les  agglomérations  locales  et  les  divisions  adminis- 
tratives n'avaient,  d'après  l'ancien  droit  germanique, 
aucune  organisation,  aucune  indépendance.  Je  ne  crois  pas 
que  quelqu'un  puisse  sérieusement  défendre  une  pareille 
proposition. 

Reste  donc  la  troisième  thèse,  et  celle-ci  se  présente 
dès  l'abord  dans  des  conditions  de  vraisemblance  très- 


(  241  ) 

satisfaisantes;  l'on  n'ignore  pas  en  effet  que  les  droits,  les 
mœurs,  en  un  mot  la  vie  tout  entière  de  nos  communes 
conserva  pendant  tout  le  moyen  âge  son  caractère  pure- 
ment germanique;  en  serait-il  autrement  des  institutions 
communales?  Seulement  il  ne  suffit  pas  de  dire  que  les 
échevinssont  les  descendants  des  scabini,  car  les  scabini 
étaient  des  fonctionnaires  judiciaires,  et  non  des  adminis- 
teurs;  ensuite  quand  on  parle  des  tribunaux  de  comtés 
francs,  on  s'engage  dans  d'inextricables  difficultés;  enfin, 
à  côté  des  échevins,  on  trouve  les  conseillers  et  ceux-ci 
réclament  aussi  leur  place  dans  la  théorie  des  origines. 

Pour  compléter  celle-ci,  il  faut  donc  énoncer  cette  pro- 
position générale  :  la  commune  reconstitue  l'ancienne 
liberté  germanique; cette  liberté  a  une  double  face  :  liberté 
de  la  juridiction,  liberté  de  l'administration  ;  c'est  comme 
telle  qu'elle  existe  au  point  d'arrivée,  c'est  comme  telle 
qu'il  faut  la  retrouver  dès  les  origines;  l'avènement  du 
droit  féodal  et  la  constitution  des  seigneuries  viennent  la 
contrarier  dans  ses  développements,  mais  elle  parvient  à 
triompher  de  ces  obstacles;  il  y  a  dans  la  marche  des 
franchises  communales  un  progrès  souvent  interrompu, 
mais  toujours  repris;  parfois,  il  est  vrai, l'ancien  droit  a  été 
complètement  détruit;  alors  il  faut  que  par  imitation  de 
ce  qui  se  passe  ailleurs,  les  bourgeois  luttent  pour  obtenir 
ce  qui  leur  manque;  mais  généralement,  dans  nos  cités, 
les  plus  anciennes  chartes  ne  font  que  confirmer  d'antiques 
libertés,  et  si  ces  libertés  ont  besoin  de  confirmation,  c'est 
que  d'abord  elles  ne  s'appliquent  plus  précisément  aux 
mêmes  sujets  juridiques  pour  lesquels  elles  avaient  été 
créées;  c'est  ensuite  par  opposition  à  la  situation  des 
campagnes,  où  le  servage,  personnel  ou  réel,  avait  pris  des 
proportions  immenses. 

2"*^  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  i6 


(  242  ) 

La  base  de  la  commune  est  donc  l'ancienne  organisa- 
lion  germanique  judiciaire  et  administrative,  celle-ci  repo- 
sant sur  la  coutume,  celle-là  sur  le  droit  écrit  et  cette  der- 
nière seule  présentant,  comme  je  le  montrerai  plus  loin, 
les  caractères  du  droit  public. 

Il  convient  d'examiner  d'abord  à  quelle  source  la  com- 
mune a  puisé  son  indépendance  juridique. 

Rappelons-nous  que  ce  sont  les  Francs  qui  ont  donné 
à  notre  pays  son  caractère  germanique  ;  j'ai  cberché  à  éta- 
blir ce  fait  au  point  de  vue  de  l'ethnologie  (cf.  Recherches 
sur  l'ethnologie  de  la  Belgique)  ;  il  est  attesté  d'une  façon 
tout  aussi  évidente  par  la  linguistique;  la  langue  flamande 
en  effet  n'est  autre  chose  qu'une  forme  duNiederfrànkisch, 
à  laquelle  sont  venus  se  joindre  dans  la  Flandre  occiden- 
tale quelques  éléments  saxons  (cf.  Winkler,  Allgemeen 
nederlandsch  Idiolicon). 

C'est  donc  dans  la  législation  franque  et  spécialement 
dans  la  loi  salique  et  dans  lesCapitulaires  que  nous  trouve- 
rons le  point  de  départ  de  toute  notre  organisation  sociale. 
Les  provinces  beiges  furent  en  effet  le  berceau  de  la  loi  sali- 
que, et  aucune  autre  contrée  n'a  conservé  plus  longtemps 
des  traces  vivantes  deces  institutions  primitives.  C'est  dans 
cette  région  du  nord-ouest  de  la  France  que  se  sont  con- 
serves les  noms  perdus  ailleurs  de  certains  fonctionnaires; 
tel  est,  par  exemple,  le  sacebaro  [Carlul.  de  S'-Bertin, 
n"  5);  c'est  là  aussi  qu'apparaissent  des  cenleniers  dès 
l'époque  mérovingienne  (cf.  Sohm  ,  Altdeutsche  Reichs- 
und  Gerichtsverfassiing,  §  9,  notes  1,  21  et  186).  On  sait 
que  jusqu'à  la  (in  du  douzième  siècle  on  dressa  dans  plu- 
sieurs de  nos  provinces  des  actes  d'après  la  loi  salique 
(cf.  Britz,  Métn.  sur  rancien  droit  belgique,  I,  p.  15.  Voir 
aussi  Warnkonig  et  Gérard,  II'' des  Carolingiens,  II, 
ch.  iO;  etc.). 


(  243  ) 

Les  Germains,  du  temps  de  Tacite,  étaient  divisés  en 
li'ibus,  Volkerschaflen,  civitates,  et  en  eenlènes,  Hiinderl- 
schaflen,  pagi  (de  Tacite),  celles-là  Ibrmant  l'unité  poli- 
tique, celles-ci  l'unité  judiciaire.  Dans  les  assemblées  des 
tribus  tous  les  hommes  libres  délibéraient  sur  les  matières 
d'intérêt  public  et  procédaient  à  l'élection  des  fonction- 
naires, principes,  chefs  des  centènes,  duces,  chefs  mili- 
taires, peut-être  même  ï^eges.  Dans  les  assemblées  des  cen- 
tènes les  hommes  libres  se  constituaient  en  cour  de  justice 
et  présidés  par  le  centenier,  le  princeps,  ils  jugeaient  les 
crimes  et  les  délits  commis  par  leurs  pairs.  C'est  l'époque 
où  tous  les  membres  de  l'État  sont  égaux  et  oîi  la  puis- 
sance du  prince  et  de  la  noblesse  est  purement  nominale. 
(Cf.  Waitz,  Deutsche  Verfassungsgeschichte ,  Rolh,  Ge- 
schichte  des  Beiteficialwesens,  Sohm,  Altdeiitsche  Reichs- 
und  Gerichtsierfassung.) 

Dans  l'État  mérovingien  la  situation  s'est  profondément 
modifiée;  le  roi  a  augmenté  considérablement  son  autorité; 
la  conquête  a  eu  pour  effet  de  transformer  tous  les  citoyens 
en  ses  sujets  (cf.  Roth,  Feudalitat  und  Unterthanierband)^ 
et  désormais  les  fonctionnaires  ne  peuvent  plus  être  les 
représentants  du  peuple,  mais  ceux  du  souverain.  L'an- 
cienne tribu,  réduite  à  n'être  plus  qu'une  province  du 
royaume,  est  devenue  le  comté,  Grafschaft ,  pagus;  à  sa 
tête  se  trouve  le  comte,  Graf,  cornes,  nommé  par  le  roi  et 
son  représentant.  Quant  à  l'assemblée  politique,  elle  a  dis- 
paru; la  seule  circonstance  dans  laquelle  les  hommes  libres 
puissent  encore,  d'une  façon  plus  ou  moins  directe,  faire 
connaître  leurs  vœux, c'est  l'assemblée  militaire  du  Champ 
de  mars  (plus  tard  du  Champ  de  mai). 

En  dehors  de  celle-ci  il  n'y  a  dans  le  royaume  franc 
qu'une  seule  assemblée,  celle  de  la  centène,et  alors  comme 


(  244  ) 
auparavant  elle  a  un  caractère  exclusivement  judiciaire; 
ce  caractère  elle  seule  le  possède;  il  n'y  a  pas  d'assemblée 
du  (jau  {pagus);  \e  gau  est  la  division  administrative  sou- 
mise au  comte,  il  n'est  pas  le  ressort  judiciaire;  tous  nos 
historiens  ont  cru  le  contraire,  mais  ce  point  a  été  établi 
par  Sohm  d'une  façon  péremptoire  :  ni  dans  la  période 
mérovingienne,  ni  dans  la  période  carolingienne,  il  n'y  a 
d'autre  assemblée  que  l'assemblée  de  la  centène.  «  Die 
Hundertschaflsversammlung  isl  die  einzigeVolksversamm- 
lung  im  frunkisclien  Rekh.  »  (Sohm,  op.  cit.  p.  28o.) 

Quelles  qu'aient  été  donc  les  atteintes  subies  par  l'an- 
cienne liberté,  la  centène,  elle  au  moins,  a  gardé  son 
caractère  et  ses  droits;  c'est  là  que  s'est  réfugiée  en  quelque 
sorte  l'indépendance  germanique,  elle  l'a  conservée,  et  elle 
la  transmettra,  quand  le  calme  aura  reparu,  aux  organes 
qui  sont  appelés  à  prendre  le  premier  rang  dans  la  société 
nouvelle.  Le  royaume  franc  ne  connaît  plus  la  liberté  poli- 
tique, mais  il  a  maintenu  pour  l'homme  libre  le  droit  de 
n'être  jugé  que  par  ses  pairs. 

Toutefois  l'esprit  de  centralisation  doit  faire  sentir  ses 
effets,  même  dans  le  domaine  de  la  justice;  en  effet  les 
centènes  ne  sont  pas  des  républiques,  elles  constituent 
des  subdivisions  du  pagus,  et  comme  le  comte  est  le  chef 
du  pagus ,  il  est  aussi  celui  de  la  centène;  l'ancien  prin- 
ceps  devenu  le  centenier,  centenarius ,  celui  que  la  loi 
salique  nomme  lunginus  (1),  n'est  donc  plus  que  le  subor- 
donné du  comte,  et  c'est  le  comte  qui  est  chargé  de  sa 
nomination.  (Sohm.  op.  c,  p.  241.) 

Je  n'ai  pas  à  exposer  ici  quelles  sont  toutes  lesattribu- 


(1)  Celte  assimilation  a  été  établie  par  Sohm,  §  4.  Oci  sait  qu'aux  yeux 
a\l't  \e  luHijmua  était  le  cliet'  *i\\n  village. 


(  243  ) 

tions  du  conile  franc;  au  point  de  vue  judiciaire,  le  seul 
qui  m'occupe,  il  est  le  président  de  l'assemblée  de  la 
centène,  \c  jurlex,  et  il  la  préside  régulièrement  toutes  les 
six  semaines;  pour  cela  il  doit  parcourir  son  comté,  allant 
d'un  malberg  à  l'autre;  c'est  ce  qu'on  appelle  circumire 
pagiim.  (Il  ne  faut  donc  pas  dire  avec  M.  Piot  [Amiales 
iVYpres,  V,  7)  que  ce  soit  là  une  coutume  saxonne.) 

Quant  an  cenfenarius ,  il  peut  aussi,  dans  certains  cas, 
présider  le  malins,  mais  il  est  avant  tout  l'exécuteur  des 
sentences;  c'est  lui  notamment  qui  perçoit  au  nom  du  roi 
la  part  des  amendes  qui  reviennent  à  l'autorité  ;  à  ce  titre 
il  porte  le  nom  d'exactor,  en  allemand  Schnltfieiss ,  scul- 
fetiis.  F^identité  du  centenier  et  du  scnltetus  est  un  des 
résultats  les  plus  intéressants  acquis  par  les  travaux  récents 
dont  l'ancien  droit  germanique  a  été  l'objet.  (Cf.  Heusler, 
op.  cit.,  p.  83.  —  Sohm.  op.  cit.,  §§  5  et  9.) 

Enfin  le  jury  qui  formule  le  jugement  pendant  la  période 
mérovingienne,  c'est  toujours  l'assistance,  l'ensemble  des 
hommes  libres;  mais  de  bonne  heure  la  coutume  s'est 
introduite  de  choisir  dans  le  sein  de  l'assemblée  quelques 
hommes  particulièrement  compétents  pour  formuler  un 
projet  de  sentence  et  le  présenter  à  l'acceptation  du 
peuple;  ces  hommes  étaient  les  rachimburgi  et  c'est  à 
eux  qu'échut  plus  tard  le  nom  de  scabini.  Charlemagne, 
on  le  sait,  donna  à  ce  nom  une  consécration  officielle  : 
l'obligation  pour  les  hommes  libres  d'assister  aux  plaids 
sous  peine  d'amende,  était  devenue  pour  eux  une  charge 
intolérable;  le  comte  pour  lequel  chaque  absence  se  tra- 
duisait en  un  profit  net,  ne  négligeait  aucune  occasion  de 
multiplier  les  séances;  à  la  rigueur,  nous  l'avons  vu,  il 
devait,  pour  présider  tour  à  tour  cliacune  des  centènes  de 
son  pagiis,  voyager  constamment  de  l'une  à  l'autre;  mais 


(  n^  ) 

roiganisalion  judiciaire  allégeait  de  beaucoup  celte  tâche; 
elle  affirmait  en  effet  la  compétence  de  chaque  centène 
pour  toutes  les  alTaires  évoquées  dans  le  pagus,  et  elle 
permettait  de  la  sorte  au  comte  de  faire  retomber  tout  le 
poids  de  la  besogne  sur  une  seule  centène,  par  exemple 
sur  celle  qui  formait  sa  résidence  habituelle.  (Cf.  Sohm. 
op.  cit.,  p.  574.)  Cet  état  de  choses  réclamait  un  remède. 
Charlemagne,  qui  voyait  avec  regret  les  hommes  libres 
accablés  de  plus  en  plus  par  les  charges  de  toute  espèce 
que  le  service  de  l'État  leur  imposait,  décida  que  désor- 
mais les  scabini  seuls  devraient  nécessairement  prendre 
part  aux  plaids;  c'était  fournir  à  la  commune  juridique  un 
soulagement  considérable,  mais  c'était  en  même  temps  la 
priver  d'une  de  ses  prérogatives  les  plus  précieuses;  désor- 
mais les  scabini  n'étaient  plus  l'émanation  directe  du 
peuple;  bien  que  celui-ci  conservât  une  participation  plus 
ou  moins  grande  à  leur  nomination,  ils  se  trouvaient 
fonctionnaires,  et  en  vertu  de  leur  nouveau  caractère  ils  ne 
se  bornaient  plus  simplement  comme  les  rachimburgi  à 
proposer  la  formule  soumise  à  l'acceptation  de  toute  l'assis- 
tance, mais  ils  étaient  devenus  les  véritables  juges. 

Toutefois  la  législation  carolingienne  maintint  la  tradi- 
tion de  l'ancien  ordre  de  choses  dans  l'institution  des  pla- 
cita  generalia  :  sous  les  Mérovingiens  on  avait  admis  par 
suite  de  la  compétence  concurrente  des  diverses  centènes 
qu'il  suffisait  qu'une  assemblée  eût  lieu  toutes  les  six 
semaines  dans  une  centène  quelconque  du  pagits,  mais 
que  chaque  centène  devait  annuellement  avoir  ses  deux 
assemblées  spéciales.  Charlemagne  porta  à  trois  ces  plaids 
obligatoires,  tria  placila  generalia,  auxquels  tous  les 
hommes  libres  de  la  centène  sont  tenus  de  se  rendre;  ils 
sont  présidés  par  le  comte  lui-même  et  non  par  le  cente- 


(  247  ) 

nier,  et  la  commune  juridique  y  reprend  toutes  ses  préro- 
gatives, c'est-à-dire  qu'ici  les  scabini  cessent  d'être  juges 
et  que  leur  rôle  se  réduit  à  proposer  la  formule  de  sen- 
tence. 

Telles  sont  les  lignes  générales  de  l'organisation  judi- 
ciaire dans  le  royaume  franc  :  la  centène  est  la  seule  unité 
judiciaire;  point  d'assemblée  de  pagus.  Dans  chaque  cen- 
tène trois  placita  generalia  ou  echledinge ,  auxquels  tous 
les  hommes  libres  doivent  assister,  et  un  nombre  plus  ou 
moins  grand  de  plaids  ordinaires,  gebotene  dinge,  obliga- 
toires seulement  pour  les  scabini  et  pour  les  parties  inté- 
ressées. Les  plaids  généraux  ne  peuvent  être  présidés  que 
par  le  comte  en  personne;  aux  plaids  ordinaires  il  lui  est 
loisible  de  se  faire  remplacer  par  son  Sc/ntUheiss. 

Il  est  important  de  bien  tenir  compte  de  ces  principes, 
si  l'on  veut  comprendre  l'organisation  de  la  justice  dans 
nos  contrées  au  moyen  âge.  En  effet  si  l'on  fait  abstrac- 
tion des  modifications  qu'y  a  introduites  la  constitution 
des  seigneuries,  on  reconnaîtra  que  le  système  carolingien 
s'est  conservé  dans  ses  traits  principaux. 

Et  tout  d'abord  :  il  n'y  a  point  de  tribunaux  de  comtés. 
Cette  proposition  est  contraire  à  ce  qu'enseignent  Raep- 
saet,  Warnkônig  et  la  plupart  de  nos  historiens  et  de  nos 
juristes  contemporains;  ils  se  sont  laissé  tromper  par  le 
nom  de  gouding  qui  désigne  fréquemment  l'assemblée  du 
placitum  générale;  mais  le  mot  go  dans  tous  les  pays  germa- 
niques s'applique  parfaitement  à  la  centène  (cf.  Thudichum, 
Gau-und  Markierfassung,  pp.  10,  45,  53,  etc.).  D'un 
autre  côté  il  y  a  des  exceptions  apparentes  au  principe 
que  je  rappelle;  c'est  ainsi  que  les  tria  placita  du  Franc 
de  Bruges  semblent  bien  avoir  le  caractère  d'assemblées 
du  pagus;  mais  il  y  a  une  distinction  à  faire  :  le  pagus  de 


(  us  ) 

Flandre ,  qui  correspond  à  peu  près  au  Franc  de  Bruges 
postérieur,  n'est  qu'un  sous-par/us,  un  pagiis  minor.  Or 
les  pagi  minores,  en  Neuslrie  surtout,  ont  presque  tous 
commencé  par  être  des  centènes  primitives;  Icspagide  la 
Gaule  étaient  très-grands,  ils  avaient  toute  l'étendue  des 
civitates  romaines  ;  leurs  subdivisions,  les  centènes.  for- 
maient donc  des  territoires  considérables,  et  l'on  en  vint  à 
les  considérer  elles-mêmes  comme  des  pagi  secondaires, 
qu'à  leur  tour  on  partagea  en  plusieurs  centènes  (cf.  Sohm. 
op.  cit.,  p.  201-212.  Tbudicbum.  op.  cit.,  pp.  80  etsuiv.).  Il 
est  donc  permis  de  supposer  que  le  Franc  de  Bruges,  à 
travers  toutes  les  modifications  dont  sa  constitution  fut 
l'objet,  conserva  cependant,  au  point  de  vue  judiciaire, 
son  caractère  de  centène,  et  ce  fait  s'explique  peut-être 
par  l'isolement  et  l'oubli  où  vécurent  pendant  les  premiers 
siècles  du  moyen  âge  les  populations  du  littoral  îlamand. 
On  peut  en  dire  autant  du  pays  de  Waes  et  des  Quatre- 
Métiers. 

Mais  partout  ailleurs  la  centène,  en  devenant  pagus 
minor,  perdit  ses  prérogatives  judiciaires  et  les  transmit 
aux  centènes  d'étendue  plus  restreinte;  c'est  dans  chacune 
de  celles-ci  que  se  tinrent  alors  les  placita  generalia.  Nous 
voyons,  par  exemple,  que  le  représentant  du  duc  de  Bra- 
bant  présidait  chaque  année  deux  plaids,  après  Noël  et 
après  Pâques  ,  à  Bruxelles ,  à  Ucclé,  à  Obbrussel,  à  Yssche, 
à  Merchtem,  à  Vilvorde,  à  Tervueren,  à  Duysbourg,  à 
Assche,  à  Bhode-S'''-Genèse,  à  Ruysbroeck,  à  Capelle 
Wautcrs,  Mémoire  sur  Jean  /*"'' ,  p.  506).  Chacune  de  ces 
ocalités  constituait  probablement  dans  l'origine  le  noyau 
d'une  centène. 

Dans  le  pays  d'Alost  il  y  avait  quinze  districts  avec 
autant  de  placita  generalia  (Warnkonig,  fil,  2",  p.  126). 


(  249  ) 

Citons  encore  les  tria  placita  annuels  à  Haelen  (Limbourg) 
(1146,  Cartul.  de  S'-Trond ,  I,  p.  70),  à  Poperinghe 
(M 47,  Warnk.,  III,  \%  p.  556),  à  Bouvines(I2I5,  Gachard, 
Documents  inéd.,  I,  p.  104), à  la  Hulpe  (1250,  Brabantsche 
Yeesten,  I,  p.  652),  à  Incourt,  près  de  Jodoigne  (1226, 
Ibid.,  I,  p.  627),  à  Soignies  (1248-49,  Wauters,  Preiiv., 
p.  170),  à  Saffelaer  (i264-6o,  Ibid.,  p.  217),  etc.  Personne 
ne  songera  à  faire  de  toutes  ces  localités  le  centre  de  pagi 
primitifs.  Nous  avons  d'ailleurs  un  ténnoignage  positif 
pour  la  ville  de  Dinaut;  il  remonte  à  1060  environ  (cf. 
Wauters,  Preuves,  p.  2ol)  :  «  Omnis  villa  communiter 
débet  tria  per  annum  centenarie  complacila.  » 

Ce  qui  montre  bien  en  outre  que  toute  cette  organisa- 
tion des  plaids  généraux  porte  un  cachet  d'identité,  qu'elle 
ne  peut  devoir  qu'à  son  antiquité,  c'est  le  fait  que  les  épo- 
ques de  la  tenue  du  plaid  sont  presque  partout  les  mêmes, 
savoir  après  l'Epiphanie,  après  l'octave  de  Pâques  et  après 
la  Nativité  de  saint  Jean-Baptiste.  Ainsi  l'on  a  : 

A  la  Hulpe  :  1°  Tertia  feria  post  Epiphaniam;  2"  T.  f. 
p.  octav.  Paschae  ;  5"  T.  f.  p.  ?sat.  J.-Bapt. 

A  Incourt  :  1"  Qiiarta ;  2''  Quarta ;  ô"  Quarta 

A   Saint- Vaast   (Arras)  :    1"  Sexta ;  2"  Sexla ; 

5°  Sexta (Warnk,  III,  2%  n"  xlvii). 

A  Roux-Miroir  (Wauters,  BeUi.  anc,  6'  livr.,  p.  llo  : 
[°  Lendemain  du  jour  des  Bois;  2"  Lendemain  del  paque 
close.  —  Le  troisième  terme  :  Lendemain  del  St-Bemy 
(1"  octobre)  ne  coïncide  pas. 

Quant  à  l'obligation  pour  le  comte  de  tenir  lui-même  le 
plaid  général ,  elle  est  nettement  conservée  dans  la  keure 
du  Franc  de  Bruges,  dont  le  §  62  exige  la  présence  du 
comte,  de  la  comtesse  ou  du  châtelain  (représentant  im- 
médiat du  comte).  (Gheldolf,  III,  p.  577  —  [falso  Ail). 


(  250  ) 

Ailleurs  ou  semble  s'être  écarté  de  cette  rigueur;  ainsi  dans 
les  environs  de  Bruxelles  le  plaid  était  tenu  par  Vamman, 
fonctionnaire  inférieur.  De  même  à  Afsne  par  l'écoutète 
{Warnk,III,  2%n''CLVIII). 

Enlin  il  ne  serait  peut-être  pas  trop  hardi  de  supposer 
que  la  participation  directe  de  la  commune  juridique  se 
maintint  pendant  fort  longtemps;  n'en  découvrons-nous 
pas  les  traces  dans  cet  article  de  la  Keure  du  Franc  (§  61) 
ordonnant  qu'après  le  plaid  les  hommes  libres  se  rendent 
devant  les  échevins  et  ibi  coram  scabinis  omnia  suadiiel  la 
et  cetera  facta  enumerabunt?  Cette  disposition  me  semble 
indiquer  que  les  échevins  n'avaient  pas  eux-mêmes  pris  une 
part  active  à  l'assemblée.  C'est  d'ailleurs  ce  que  marque 
aussi  le  §  65  qui  renvoie  aux  échevins  toute  cause  dont  il 
n'est  pas  fait  mention  ici,  c'est-à-dire  dans  le  chapitre 
consacré  au  gouding. 

Si  maintenant  nous  passons  à  l'examen  de  la  juridiction 
ordinaire,  nous  verrons  que  la  distinction  établie  par  le 
droit  franc  entre  les  attributions  du  cornes  et  celles  du 
centenarius  [tribunns ,  vicarius,  scultetus)  se  retrouvent 
dans  l'opposition  de  la  haute  et  de  la  basse  justice.  Celle-ci 
domine  toute  la  matière,  même  à  l'époque  communale. 
Seulement  il  faut  tenir  compte  des  changements  qu'ont 
produits  l'avènement  de  la  féodalité  et  la  constitution  des 
seigneuries. 

Les  seigneurs,  ducs  ou  comtes,  qui  réunissent  sous  leur 
autorité  le  domaine  de  plusieurs  pagi,  ont  usurpé  en 
partie  la  place  du  roi  au  point  de  vue  de  la  souveraineté 
territoriale;  les  anciens  Gaugrafen  sont  devenus  leurs 
subordonnés  ;  on  les  retrouve  comme  tels  sous  le  nom 
de  châtelains  et  de  burgraves.  Le  burgrave  représente  le 
comte  tant  dans  ses  rapports  avec  l'armée  qu'avec  la  jus- 


(  2al    ) 
lice;  à  ce  dernier  titre  il  est  l'otlicier  de  la  haute  justice; 
en  matière  criminelle  il  a  le  blulbann. 

Tel  est  le  rôle  que  nous  lui  voyons  à  Furnes,  par  exemple 
(VVarnk,  II,  2%  p.  55). 

Il  est  donc  permis  d'admettre  avec  Gheldolf  (II,  p.  144) 
que  dans  l'origine  le  territoire  de  la  châtellenie  correspon- 
dait à  celui  du  pagus.  Mais  les  modifications  qu'amenèrent 
la  constitution  des  seigneuries  et  les  collations  d'immunité, 
houleversèrent  toute  l'organisation  territoriale.  Les  grands 
propriétaires  laïques  ou  ecclésiastiques  qui  possédaient  de- 
puis une  époque  fort  reculée  la  juridiction  sur  tous  leurs 
sujets  non  libres,  finirent  par  obtenir  également  que  les 
fonctionnaires  publics  ordinaires  fussent  exclus  de  leurs 
domaines  (I);  ce  fut  dès  lors  un  avoué  {vogt)  particulier 
qui  maintint  les  relations  entre  le  territoire  favorisé  d'im- 
munité et  le  pouvoir  central. 

Dans  les  villes  il  se  passa  un  phénomène  analogue; 
quand  leur  population  se  fut  accrue,  qu'elles  obtinrent  le 
droit  d'établir  des  marchés  et  de  s'entourer  de  murs,  quand 
le  commerce  commença  à  prendre  son  essor,  elles  ne  tar- 
dèrent pas,  elles  aussi,  à  jouir  du  privilège  de  Vimmunité  ; 
par  là  elles  n'étaient  soustraites  en  aucune  façon  à  l'action 
de  l'autorité  publique;  leurs  fonctionnaires  étaient  toujours 
les  officiers  du  seigneur  territorial  (roi,  duc,  comte),  mais 
ces  fonctionnaires  n'étaient  plus  ceux  du  plat  pays, 
c'étaient  des  fonctionnaires  urbains. 

Le  plus  haut  de  ces  fonctionnaires  fut  en  général  le 
bailli.  Au  surplus,  même  dans  les  territoires  ruraux  on 


(1)  La  théorie  de  Vimmunité  a  reçu  un  jour  nouveau  par  suite  des  tra- 
vaux de  von  Maurer,  Heussier,  Sohm;  mais  je  suis  obligé  de  laisser  de  côté 
ici  tout  ce  qui  la  concerne. 


(  2o2  ) 

voit  peu  à  peu  le  châtelain  céder  ses  fonctions  à  un  bailli; 
plus  en  etîet  la  vie  sociale  se  compliquait,  plus  les  fonc- 
tions de  justicier  devenaient  lourdes  pour  le  châtelain,  et 
le  besoin  d'un  otTicier  de  justice  spécial  se  fit  sentir.  C'est 
pourquoi  l'on  rencontre  fréquemment  deux  baillis  qui  rési- 
dent dans  une  même  ville,  le  ressort  de  l'un  étant  la  chà- 
tellenie,  celui  de  l'autre  la  ville  proprement  dite. 

Ce  qui  est  visible,  c'est  que  tous  ces  fonctionnaires, 
malgré  leurs  noms  divers,  châtelains,  burgraves,  avoués, 
baillis,  sont  les  successeurs  de  l'ancien  rjaugraf,  et  comme 
tels  les  officiers  de  justice  de  l'ordre  supérieur.  Au-dessous 
d'eux  on  retrouve  partout  un  magistrat  inférieur,  l'ancien 
cenlenarms  ou  scnlletvs  ;  c'est  celui  que  l'on  désigne  or- 
dinairement sous  le  nom  QÏécoiilète,  schout,  mais  quelque- 
fois aussi  sous  celui  (ïaminan. 

A  Furnes,  dès  l'apparition  du  bailli  communal,  l'autorité 
du  châtelain  est  restreinte  au  territoire  rural.  A  côté  du 
bailli  se  montre  un  crickhouder  (Warnk,  W,  2",  p.  54). 

A  Poperinghe  le  bailli  a  un  ammnn  à  ses  côtés  [ibicL, 
pp.  68  et  76).  De  même  à  Audenarde  [ibid.,  p.  107).  La 
keure  des  Quatre-Métiers  indique  un  mbbalwus  et  plu- 
sieurs ammans,  sans  doute  un  pour  chaque  métier  [ibid., 
p.  186). 

A  Ypres  l'écoutète  était  primitivement  le  subordonné  du 
châtelain;  plus  tard  apparurent  un  bailli  pour  la  chàtel- 
lenie  et  un  autre  bailli  pour  la  ville  {ibid.,  11,  i",  pp.  197 
et  suiv.). 

A  Bruges  un  bailli  et  un  écoutète(/^/f/.,  p.  148). 

A  Gand  l'amman  remplace  l'écoutète  (î6«rf.,  pp.  68  et 
suiv.);  mais  ses  fonctions  sont  toujours  celles  de  l'ancien 
centenier  :  il  a  la  juridiction  civile,  la  juridiction  pénale  en 
matière  de  délits,  le  soin  de  la  prison,  etc. 


(  255  ) 
J  elles  soûl  précisément  les  fonctions  qui  compétent  à 
récoutète  de  Huist  (Warnk,  il ,  2",  p.  142). 

Tout  ceci  prouve  que  les  grandes  lignes  de  l'organisation 
iianque  se  sont  maintenues  en  dépit  des  révolutions  que 
les  siècles  ont  opérées.  Ce  qui  détermine,  en  effet,  la  posi- 
tion essentielle  d'un  magistrat,  ce  n'est  pas  le  caractère 
juridique  des  personnes  soumises  à  son  tribunal,  mais  bien 
le  caractère  des  faits  sur  lesquels  s'étend  sa  compétence. 
La  haute  justice  d'une  part,  la  basse  justice  de  l'autre,  telle 
est  la  distinction  capitale  qui  se  maintient  au  moyen  âge, 
et  à  laquelle  correspondent  deux  classes  d'officiers  pu- 
blics; il  se  peut  que  ces  officiers  se  soient  dédoublés,  par 
suite  des  besoins  croissants,  mais  leur  physionomie  n'en 
est  pas  altérée. 

Ainsi  la  question  de  savoir  si  leur  juridiction  s'applique 
ou  aux  hommes  libres,  ou  aux  non  libres,  ou  à  ces  deux 
classes  à  la  fois,  n'est  qu'une  question  accessoire;  c'est  ce 
que  Warnkônig  n'a  pas  compris,  lorsque  pour  expliquer 
l'origine  de  l'écoutète,  il  prétend  y  voir  l'ancien  juge  des 
hommes  non  libres,  lequel  s'est  trouvé  accolé  au  bailli  le 
jour  où  les  deux  groupes  de  personnes  coexistant  dans 
une  même  cité,  se  sont  fondus  (Warnk,,  î,  §  27).  Les  com- 
munautés serviles  ont  eu  leurs  écoutètes  aussi  bien  que 
leurs  échevins;  quel  que  soit  l'état  des  personnes, l'organi- 
sation est  conçue  sur  le  même  plan.  Que  le  magistrat  soit 
resté  un  fonctionnaire  public  ou  qu'il  soit  devenu  un  fonc- 
tionnaire seigneurial,  peu  importe  :  s'il  a  la  haute  justice, 
il  est  le  représentant  de  l'ancien  GcoMjraf;  s'il  a  la  basse 
justice,  celui  du  centenier. 

Cependant  l'erreur  de  Warnkônig  s'explique  par  ce  fait 
que  c'est  généralement  la  basse  justice  qui  la  première  est 


(  254  ) 

devenue  seigneuriale;  ainsi  l'on  voit  plus  d'une  lois  dans 
une  ville  deux  olïiciers  pour  la  haute  justice  et  un  seul  pour 
la  basse.  Or,  quand  tous  les  bourgeois  indistinctement  ac- 
quièrent la  liberté,  l'un  des  deux  fonctionnaires  disparaît, 
et  il  reste  en  présence  un  bailli,  ancien  juge  des  hommes 
libres,  et  un  écoulète  ,  ancien  juge  mixte. 

Les  considérations  qui  ont  été  présentées  ci-dessus  me 
permettent  de  ne  pas  m'étendre  longuement  sur  la  ques- 
tion des  échevinages.  Les  échevins  sont  les  héritiers  directs 
des  scabini  de  la  centène  franque.  Les  difficultés  qui  arrê- 
taient Gheldolf  (V,  p.  138),  lorsqu'il  rencontrait  des  éche- 
vins à  Ypres, c'est-à-dire  dans  une  ville  «  qui  ne  fut  jamais 
chef-lieu  d'un  pagus  »  ne  peuvent  donc  plus  nous  embar- 
rasser. Le  siège  de  l'échevinage  primitif  fut  d'ordinaire  la 
ville  qui  formait  le  centre  de  la  centène;  elle  le  conserva 
et  plus  tard,  lorsqu'elle  acquit  l'immunité  et  que  le  système 
des  divisions  territoriales  franques  fut  détruit,  elle  le  trans- 
forma en  son  échevinage  propre.  Celui-ci  n'en  demeurait 
pas  moins  une  émanation  de  l'autorité  souveraine,  mais  les 
progrès  de  l'idée  féodale  avaient  amené  des  modifications 
profondes  dans  sa  constitution  ;  en  effet,  les  échevins,  sui- 
vant le  courant  général  de  l'époque ,  avaient  fait  de  leurs 
magistratures  de  véritables  fiefs  qui  demeurèrent  l'apanage 
de  certaines  familles,  les  lignages  échevinaux.  Mais  par  là 
même  l'échevinage  acquit  une  force  considérable, et  lorsque 
plus  tard  la  réaction  contre  les  abus  du  féodalismefit  triom- 
pher le  principe  de  l'échevinage  annuel, celui-ci  n'en  resta 
pas  moins  le  véritable  centre  de  la  vie  communale.  Aussi 
les  bourgeois  le  considéraient-ils  comme  le  palladium  de 
leurs  libertés,  et  l'on  sait  la  résistance  que  rencontrèrent 
les  ducs  de  Bourgogne,  quand  ils  voulurent  subordonner 


(  ^oS  ) 

les  tribunaux  urbains  à  de  grands  conseils  nationaux.  L'in- 
dépendance de  la  juslice  était  un  principe  dans  la  com- 
mune du  moyen  âge  comme  elle  l'avait  été  dans  la  centène 
Iran  que. 

Toutefois  si  l'on  peut  rendre  compte  aisément  de  la 
position  judiciaire  des  échevins,  il  ne  faut  pas  oublier  que 
dans  nos  villes  du  moyen  âge  les  échevins  n'étaient  pas 
seulement  des  juges ,  c'étaient  aussi  des  administrateurs , 
et  d'autre  part  à  côté  d'eux  se  placent  fréquemment  des 
magistrats  spéciaux,  les  conseillers,  dont  l'organisation  de 
la  centène  ne  peut  nous  expliquer  l'existence. 

Le  droit  franc  n'organise  pas  la  commune;  il  soumet 
directement  aux  fonctionnaires  de  la  centène  et  du  pagus 
les  agglomérations  qui  deviendront  les  villages  et  les 
villes;  l'autorité  centrale  ne  connaît  point  les  fonction- 
naires locaux  (cf.  Sohm,  op.  cit.,  I,  pp.  231  et  suiv.). 

Et  cependant  les  habitants  d'une  agglomération  quel- 
conque ont  des  rapports  nécessaires  et  ces  rapports  doi- 
vent être  réglés,  mais  ce  n'est  pas  le  droit  public  qui  les 
règle,  ils  reposent  sur  le  principe  de  la  corporation.  De  là 
la  divergence  qu'ils  présentent  :  chaque  corporation  se 
gouverne  à  sa  guise,  et  nous  trouvons  là  le  véritable  self 
(lovernment  dans  ses  origines.  Toutefois  la  base  est  par- 
tout identique,  car  un  peuple  en  se  développant  ne  fait 
qu'élargir  ses  traditions,  il  les  adapte  aux  conditions  du 
milieu  et  du  temps.  Aussi  l'on  rencontre  dans  toute  la 
zone  germanique  une  étonnante  similitude  dans  les  insti- 
tutions locales;  ce  qui  a  exercé  sur  elles  une  grande 
influence,  c'est  la  possession  commune  de  la  terre. 

On  sait  aujourd'hui  que  les  Germains  primitifs,  comme 
toutes  les  autres  nations  aryennes,  ne  connaissaient  pas 


(  25(5  ) 
la  propriété  immobilière  individuelle  (1);  à  l'époque  de 
César  et  de  Tacite  il  en  était  encore  ainsi  :  chaque  chef 
de  famille  avait  sa  maison  avec  l'enclos  dont  elle  était 
entourée,  mais  les  champs  arables  aussi  bien  que  les  prés, 
les  bois  et  les  bruyères  restaient  la  propriété  collective  de 
tous  les  habitants  d'un  territoire,  ou,  pour  parler  plus  exac- 
tement, d'une  marks;  ceux-ci  constituaient  donc  une  com- 
munauté territoriale,  une  Markgenossenschaft ,  qui  chaque 
année  distribuait  à  ses  membres  de  nouveaux  lots  de  terre 
destinés  à  être  cultivés  en  commun  suivant  les  règles  et  à 
la  date  fixées  par  l'accord  unanime. 

Cet  état  de  choses  se  maintint  pendant  longtemps,  et  la 
loi  salique  en  a  conservé  des  traces  évidentes  :  elle  ne  fait 
mention  nulle  part  du  procès  relatif  à  la  propriété  du  sol , 
elle  ne  connaît  point  la  saisie  immobilière;  l'exécution  ne 
se  fait  jamais  que  sur  les  meubles,  dont  l'ensemble  con- 
stitue Valodis  (cf.  Sohm,  ï,  p.  H8);  si  les  biens  mobiliers 
du  débiteur  sont  insuffisants,  le  créancier  n'a  aucun  recours, 
car  la  terre  est  inaliénable,  elle  appartient  à  la  commu- 
nauté, et  la  seule  ressource  qui  lui  reste  quand  il  s'agit  du 
payement  d'un  weln-gekl  qu'aucun  prétexte  ne  peut  laisser 
inaccompli,  c'est  de  forcer  l'insolvable  à  transmettre  par 
la  formalité  de  la  direnecruda,  ses  droits  indivis  sur  la 
terre  à  son  plus  proche  parent,  que  par  là  il  oblige  à  payer 
à  sa  place. 

Un  autre  fait  bien  caractéristique,  c'est  que  la  femme 
n'hérile  pas  des  droits  à  la  terre  :  de  terra  nulla  in  muliere 
heredilas  est,  parce  qu'elle  n'est  pas  coparlicipante  aux 


(1)  De  Laveleye,  Les  formes  primitives  de  la  propriété,  Revue  dks  delx 
Mondes,  1875. 


(  257  ) 

devoirs  et  aux  droits  de  la  communauté.  A  défaut  de  parents 
mâles  la  part  idéale  du  territoire  retournait  donc  à  l'en- 
semble des  compagnons.  Cette  règle  d'hérédité  ne  cessa 
d'être  appliquée  qu'en  o81  ;  alors  un  édil  du  roi  Chilpéric 
(Pertz.  Leg.  II,  10,  art.  5)  décide  qu'en  l'absence  de  fils 
les  filles  hériteront  de  la  terre. 

On  voit  donc  que  le  principe  de  la  propriété  collective 
s'était  peu  à  peu  effacé,  mais  on  voit  en  même  temps  qu'il 
n'était  pas  complètement  abrogé  à  l'époque  où  les  Francs 
se  fixèrent  dans  nos  contrées. 

On  peut  s'expliquer  aisément  à  quelles  atteintes  il  fut 
de  bonne  heure  exposé;  l'établissement  dans  un  pays  qui 
avait  été  soumis  pendant  des  siècles  à  la  domination 
romaine,  ne  pouvait  manquer  de  faire  sentir  son  influence. 
Nos  provinces  n'étaient  pas  désertes,  les  envahisseurs  y 
avaient  trouvé  des  groupes  assez  considérables  d'habitants. 
Ceux-ci  furent  réduits  à  l'état  de  servage,  soit  personnel, 
soit  réel,  ils  eurent  un  maître,  et  il  est  vraisemblable  que 
des  individus  favorisés  soit  par  les  circonstances,  soit  par 
la  considération  qu'ils  s'étaient  acquise,  se  formèrent,  dès 
l'époque  de  la  conquête,  de  véritables  seigneuries  foncières. 
(Cf.  Gierke.  Genossenschaflsrecht,  I,  §  11.)  C'est  ainsi  que 
dès  le  septième  siècle  nous  trouvons  la  mention  de  patentes 
et  que  nous  voyons  des  hommes  riches  faire  à  l'église  des 
donations  importantes. 

Une  fois  que  le  principe  de  la  propriété  privée  faisait 
son  apparition  ,  il  devait  peu  à  peu  prendre  pied  partout; 
ce  qui  contribua  notablement  à  l'affermir,  ce  fut  l'introduc- 
tion de  systèmes  de  culture  moins  grossiers  et  la  substitu- 
tion de  l'assolement  triennal  à  l'ancien  procédé  de  culture 
tout  à  fait  extensif  des  Germains,  le  Feldgraswirtschaft 
(cf.  Hanssen,  Zur  Geschic/Ue  der  Feldsysteme  in  Deutsch- 

2'"*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  17 


(  258  ) 
land);  l'obligalion  d'améliorer  la  terre,  de  la  fumer,  la 
laissait  nécessairement  dans  les  mains  du  même  cultiva- 
teur pendant  un  cycle  de  plusieurs  années;  peu  à  peu 
riiabilude  du  partage  se  perdit,  et  grâce  à  l'influence  des 
idées  romaines  sur  l'hérédité,  chacun  se  considéra  comme 
le  propriétaire  du  sol  dont  il  n'était  en  réalité  que  le  pos- 
sesseur. 

Toutefois  cette  transformation  ne  porta  d'abord  que  sur 
les  champs  cultivés,  et  en  règle  générale  les  bois,  les 
marais,  les  pâturages  continuèrent  à  former  la  marke  com- 
mune. 

Le  type  du  village  flamand  au  moyen  âge  est  celui-ci  : 
une  longue  rue  bordée  de  maisons ,  chacune  avec  son  petit 
jardin,  et  de  chaque  côté  à  droite  et  à  gauche  les  parcelles 
de  champs  cultivés,  beaucoup  plus  longues  que  larges; 
enfin  à  l'entour  les  terres  communes,  la  marke,  formant  la 
limite  et  la  séparation  d'avec  les  villages  voisins.  Tel  est 
l'aspect  qu'ils  présentent  dans  toutes  les  colonies  flamandes 
des  pays  au  delà  de  l'Elbe,  où  ils  se  distinguent  nettement, 
par  leur  configuration,  de  ceux  des  anciens  habitants. 
(Cf.  Meitzen ,  Leber  Bildung  von  Dôrfern  und  deren  na- 
tionale Bedeutung  dans  les  Verhandlungen  der  Berliner 
Gesellschafl  fur  Anthropologie,  1872,  p.  134.) 

Pareil  système  de  morcellement  était  appliqué  dans 
nos  provinces,  lorsqu'on  fondait  un  établissement  nouveau; 
c'est  ce  qui  résulte  de  la  keure  de  Bornhem,  1257,  copiée 
sur  celle  de  Mariakerke,12î8  (Warnk.  II,  2",  p.  259).  Son 
article  I"  porte  :  «  Ut  habitantes  villam  libcram  mensuras 
quinquaginla  pedum  latitudinis  et  centum  peditm  longi- 
tudinis  habcant.  »  Il  est  visible  qu'il  s'agit  ici  de  ces  lon- 
gues parcelles,  telles  que  nous  les  rencontrons  fréquem- 
ment encore  des  deux  côtés  de  certaines  routes.  Le  point 


(  2d9  ) 

(lu  départ  du  village  nouveau,  c'est  donc  l'égalité  de  chaque 
famille,  souvenir  de  l'ancien  ordre  de  choses.  En  Alle- 
magne le  même  principe  dominait.  (Cf.  Maurer,  Gesch.  der 
Fronhofe,  III,  200  et  suiv.)  :  c  AJlenOtalben  waren  sie  in 
einem  und  dcmselben  Fronhofe  fjanz  rjleich  und  zwar  sa 
(jross,  dass  jedes  Bauernrjul  ziir  Enià/tntng  einer  hôn'gen 
Familie  hinreichte.  » 

Primitivement  l'ensemble  des  terres  appartenant  à  une 
communauté,  c'est-à-dire  le  territoire  de  la  marke,  était 
identique  à  celui  de  la  centène.  (Cf.  Thudichum,  op.  cit., 
pp.  127  et  suiv.)  La  marke  pouvait  alors  comprendre  plu- 
sieurs villages  et  peut-être  toute  une  série  d'habitations 
disséminées.  Nous  voyons  qu'en  Allemagne  une  marke 
embrassait  souvent  une  vallée  entière.  (Cf.  Maurer,  Gesch. 
derMarkenverfassiing,  pp.  6  et  suiv.) 

Je  suis  tenté  d'assimiler  à  l'une  de  ces  marches  anciennes 
le  Tanceland,  dont  nous  possédons  une  charte  de  i\60 
(Gheldolf,  Y,  p.  -466).  Il  constitue  en  effet  une  vraie  corpora- 
tion territoriale,  dont  les  habitants  élisent  librement  leur 
chef,  minislcr,  et  c'est  celui-ci  qui  les  convoque  en  justice 
au  nom  du  comte. 

On  peut  ajouter  encore  que  là  où  la  marke  coïncidait 
avec  la  centène ,  elle  conserva  le  même  nom  honlari,  hont- 
schap  (cf.  Maurer,  Gesch.  dcr  Dorfcerfassiing,  I,  p.  104), 
et  qu'ainsi  s'explique  le  nom  de  hontman,  c'est-à-dire 
hondertman,  cenlenariiis,  que  porte  quelquefois  dans  nos 
chartes  le  fonctionnaire  corporatif  lui-même. 

Mais  en  général  la  marke  se  divisa  en  plusieurs  villages, 
et  c'est  pourquoi  les  unités  communales  ne  correspondent 
plus  aux  unités  de  la  centène,  celte  dernière  embra'^sant 
dans  son  sein  un  nombre  plus  ou  moins  considérable  de 
markes  villageoises. 


(  260  ) 

Dans  chacun  de  ces  villages  le  fait  seul  de  la  possession 
indivise  d'une  certaine  étendue  de  pâturages,  bois,  etc., 
conserve  entre  les  habitants  les  anciens  liens  corporatifs; 
l'usage  commun  exige  en  effet  l'entente  commune;  il  im- 
porte de  régler  quels  sont  les  droits  et  les  devoirs  des 
coparticipants  et  de  veiller  à  ce  qu'aucun  d'eux  ne  dépasse 
la  limite  de  ses  droits  ou  ne  néglige  de  remplir  ses  devoirs. 

Ainsi  se  crée  par  la  force  des  choses  une  véritable  com-. 
munilas;  celle  communUaa  n'est  pas  due  à  une  conjura- 
tion ,  ce  n'est  pas  un  moyen  de  défense  que  les  com- 
pagnons se  donnent  contre  les  attaques  du  dehors,  c'est 
tout  simplement  l'association  du  voisinage,  qui  repose  sur 
les  traditions  les  plus  antiques  de  la  race. 

Toutes  nos  chartes  nous  parlent  de  ces  terres  possédées 
en  commun,  mais  jusqu'à  présent  ce  fait  ne  semble  pas 
avoir  suffisamment  attiré  l'attention  et  l'on  n'a  pas  vu 
l'importance  qu'il  présente  pour  l'histoire  de  l'origine  de 
la  commune. 

En  Allemagne  ces  terres  portent  le  nom  de  Mark, 
Gemein,  Gemeinde ,  Allgenieine,  Almeinde,  Almend ,  et 
aussi  Sliire ,  Eva,  Aue ,  Bant ,  Geraid,  etc.  (Cf.  Maurer, 
Markenverfassung ,  pp.  27  et  suiv.,  Thudichum,  op.  cit. 
pp.  H5  et  suiv.,  Zôpfl,  Deutsche  Rechtsgeschic/ite ,  UV' , 
p.  164.)  Chez  nous  les  documents  les  appellent  en  latin  : 
pascua  communia ,  com mimio ,  ivarescalli ,  en  wallon  :  loa- 
reschaix.  (Cf.  ^Yauters,  Preuves,  p.  199  :  Si  li  homme  de 
le  ville  pescaissent  es  ivareskais  de  le  ville  communs 
(1261-62);  Ibid.,  p.  156  :  warescallos  et  ruellas  qui  inutiles 
existebanl  in  villa  (1257);  en  Hamand  :  heinede ,  opstal, 
icarande  (correspondant  à  l'allemand  u:arschaft,  droit  de 
prendre  part  à  la  marche.  Maurer,  Markverf,  p.  51.)  Quant 
à  la  communauté  elle-même,  elle  se  nomme  communitas. 


(  261  ) 
meentudit.  Dans  les  pays  humides  de  la  Flandre  occiden- 
tale où  l'écoulement  et  la  répartition  des  eaux  était  une 
affaire  d'importance  capitale,  elle  prenait  le  nom  de  wate- 
rinfjhe,  pour  lequel  on  trouve  quelquefois  celui  âlievina, 
vêtus  hevina  [Annales  de  la  Soc.  cVÊmiiL,  t.  III,  pp.  63, 
182  et  suiv.).  M.  Vandenpeereboom  fait  de  cet  hevinii^wne 
gilde,  mais  sans  qu'il  soit  possible  de  découvrir  sur  quoi 
repose  cette  opinion  [Palria  beUjka,  II,  p.  249).  Le  mot 
hevina  est  probablement  en  rapport  étroit  avec  celui  de 
ewa,  eiwa,  qui  signifie  :  loi  (cf.  Ewa  Chamavorum ,  et  qui 
est  pris  quelquefois  dans  le  sens  de  marke  (cf.  Zoepfl,  loc. 
supr.  cit.). 

Tous  ceux  qui  étaient  établis  sur  un  territoire  et  y  pos- 
sédaient une  maison  et  un  champ,  étaient  commarcani, 
compagnons,  genossen,  ganerben.  (MM.  Mortens  etTorfs, 
H"^ d'Anvers  ,  I,  p.  49,  n'ont  pas  du  tout  compris  ce  der- 
nier mot.) 

Comme  maîtres  de  maisons,  fixés  à  demeure,  mansio- 
narii,  massuiers  ,\h  étaient  opposés  aux  simples  beisassen, 
établis  sur  la  terre  d'autrui,  qui  ne  possédaient  qu'une  ca- 
bane, cotarii,  cossati,  koter,  cossaefen.  Ceux-ci  n'étaient  pas 
compagnons  de  la  marke,  et  cela  devait  résulter  de  l'ori- 
gine même  de  l'institution.  On  les  rencontre,  par  exemple, 
dans  la  Keure  des  IV  Métiers  (Warnk.,  H,  2",  pp., 186  et  s.), 
où  on  les  distingue  des  lantmannen.  Les  uns  et  les  autres 
sont  tenus  au  service  militaire  (§  o),  parce  que  c'est  là  une 
obligation  de  droit  public;  mais  les  cossati  ne  participent 
point  à  la  jouissance  régulière  des  terres  communes; 
c'est  ce  qui  résulte  du  §  69  de  la  même  keure,  qui  porte 
que  si  une  inondation  a  rompu  les  digues,  les  cossati 
doivent  coopérer  au  travail  de  réparation,  pendant  trois 
jours,  à  leurs  [u'opres  frais,  et  davantage,  s'il  est  néces- 


(  26-2  ) 

saire,  mais  alors  aux  frais  de  ceux  qui  ont  dus  lerres.  En 
échange  de  cette  obligation,  ils  auront  :  aliquos  commune.^ 
ad  piscanduni  et  /terslrateii  ad  pasluras,  c'est-à-dire  un 
petit  droit  de  pèche  et  le  droit  de  pâture  le  long  des  routes; 
la  keure  ajoute  :  qiiud  lerram  habenlibus  non  iicet;  ceux 
qui  ont  de  la  terre  ne  peuvent  pâturer  sur  les  routes,  ils 
ont  pour  leurs  troupeaux  le  pâturage  commun.  Il  résulte 
clairement  de  cette  disposition  qu'en  thèse  générale  la 
jouissance  des  terres  communes  était  refusée  aux  cossali 
et  que  conséquemment  ils  ne  devaient  pas  non  plus  les 
travaux  en  temps  ordinaire.  La  corrélation  des  droits  et 
des  devoirs  éiait  donc  complète. 

Examinons  rapidement  quels  étaient  ces  droits  et  ces 
devoirs. 

Tout  compagnon  pouvait  envoyer  son  bétail,  ses  oies  sur 
le  pâturage  commun,  ses  porcs  dans  la  forêt.  Cf.  Keure  de 
Caprycke,  1240  (Warnk.,  II,  2"  p.  215,  art.  lo)  :  «  Omnibus 
apud  novum  Eecloo  manentibus  licitum  sit  pascere  ani- 
malia  sua,  scilicet  oves  et  boves,  equos  et  equas  et  cetera 
animalia,  ut  apes,  porcos  et  anseres  et  hujusmodi  in 
iiemore  nostro  de  Aelsclioet.  »  (Le  bois,  on  le  voit,  est 
devenu  seigneurial ,  mais  cela  n'importe.) 

Le  droit  de  pâture  était  cependant  soumis  à  certaines 
conditions.  Il  fallait  que  les  animaux  appartinssent  en  toute 
propriété  au  compagnon,  qu'il  les  eût  nourris  dans  son 
élable,  pendant  l'hiver;  il  ne  pouvait  point,  par  exemple, 
acheter  des  porcs  à  la  saison  des  glands  pour  les  engraisser 
et  les  revendre  immédiatement  après;  car  il  se  serait 
enrichi  de  la  sorte  aux  dépens  de  ses  commarcani. 

Cf.  Loi  d'Onnaing  et  de  Quaroube  {Carlul.  du  Hainaut. 
Monum.  des  prov.  de  Nainiir,  etc.,  1,  p.  551)  :  «  Nus  ne 
puet  avoir  aise  es  près  ne  es  pastures  devant  dites  (il  y  a 


,  (  2C3  ) 

J25  bonniers  de  pâtures),  s'il  n'est  nianans  en  l'avoherie 
(J'Ouneng  et  de  Quaroube,  et  si  puent  prendre  biestes  à 
nourechon,  s'il  les  puent  avoir  elsiles  hiernent,  et  autre- 
ment nient.  » 

De  même  :  Charte  de  1245  [Car tu l.  de  St-Trond,  I, 
p.  211)  :  «  Si  quis  de  commun itate  vel  mansionariis  pre- 
dietis  peeud  aliquod  alienum,  quod  ipse  non  emerit  vel 
iiyemaverit,  ad  prœfata  pascua  deduxerit  vel  emiserit, 
dicte  curie  de  Dune  in  quinque  solidis  tenebitur....  » 

Un  autre  droit  était  celui  de  couper  du  bois  pour  se 
chauffer,  parfois  même  pour  bâtir  sa  maison,  et  dans  les 
pays  de  marécages  d'extraire  librement  de  la  tourbe.  Ainsi 
à  St-Aniand  (charte  de  116i.  Wauters,  Preuves,  p.  27), 
celui  dont  la  maison  aura  été  détruite  pro  foris facto,  ne 
pourra  couper  du  bois  dans  la  forêt  afin  de  la  réparer;  ce 
(jui  montre  évidemment  que  les  autres  le  pouvaient. 

Pour  la  tourbe  cf.  la  keure  de  Bornhem,  1257  et  Maria- 
kerke,  1218  (Warnk.,II,  2",  pp.  239):  il  y  a  vingt  bonniers 
de  marécages,  chacun  peut  y  prendre  de  la  tourbe  pour  son 
usage  (art.  2)  :  «  Si  quis  vero  inventus  fuerit  superflue 
plures  turbas  sibi  atlrahere,  sub  forisfacto  V  solidorum 
llandrensium  erit.  Et  si  cui  vendiderit,  XX  solid.  tene- 
bitur »  (art.  3). 

Le  droit  de  ramasser  le  bois  n'était  pas  sans  importance; 
nous  voyons,  par  exemple,  le  comte  Gui  consentir  à  ce  que 
les  habitants  de  Fleurus,  au  Heu  de  payer  110  livres  love- 
nois,  renoncent  au  droit  de  bois  mort  et  aux  autres  droits 
qu'ils  ont  dans  le  bois  de  Fleurus,  sauf  à  celui  de  pâture. 
(1288.  Cartul.  de  Nanmr.  Monum.  pour  Vhist.  des  proc, 
etc.,  I,  p.  105.) 

Citons  encore  le  droit  de  pêche  et  le  droit  de  chasse 
pour  tous  les  petits  gibiers,  reconnu,  par  exemple,  aux  habi- 


(  264  ) 

tants  de  Louvain  en  1332,  «  ghiiikericijs  dat  si  tote  hare 
fjheplogen  hebben.  »  {Brab.  Yeesten,  TI,459.)  Cf.  Charte  de 
Landrecies,  \'2,00  [Cart.  du  Hainaut.  Monum.  pour  servir, 
etc.,  I,  p.  336)  :  «  Quascumque  aves,  insuper  lotrum  et 
leporem  et  vulpem  ctcœtera  minuta  animalia.  » 

Dans  l'origine  chaque  compagnon  était  libre  de  défricher 
une  certaine  portion  des  terres  incultes  de  la  marke;  c'est 
ce  qu'on  appelait  alors  un  pour  pris,  captio,  occupatio; 
pourpris  de  sart  [Brab.  Yeesten,  I,  p.  679),  en  flamand 
bijvmuj.  (Cf.  Maurer,  Gesch.  der  Dorfverfassiing,  I,  p.  Î93.) 
Plusieurs  villes  du  moyen  âge  nous  montrent  leur  bijvang, 
qui  conserva  longtemps  ce  nom;  tel  est  le  cas  pour  Lierre. 
(Bergmann,  Gesch.  van  Lier.,  p.  67.) 

En  échange  de  ces  droits  les  compagnons  de  la  marke 
étaient  soumis  à  diverses  obligations. 

Ils  devaient  entretenir  les  chemins ,  routes ,  cours  d'eau  . 
digues,  etc.  ;  ces  dernières  obligations  sont  nettement 
énoncées  dans  les  constitutions  des  Wateringhes  (voir,  par 
(exemple,  le  jugement  de  Marguerite  de  Constantinople 
pour  aplanir  lesdiflicultés  survenues  dans  l'administration 
delà  Wateringhe  du  métier  de  Furnes,  1269.  {Ann.de  la 
Soc.  d'Émulation ,  V"  série,  t.  III,  p.  219.) 

De  même  ils  devaient  entretenir  la  haie  qui  entourait  le 
village.  Cf.  la  Keure  de  Caprycke,  1240:  «  ...  Clausura' 
qiicc  fient  circa  dictam  terrant....  et  quicumque  non  perfe- 
ceril  clausuram  suani ,  sicut  débet,  tel  emendaverit,  etc.  » 

La  marke  était  donc  fermée  au  dehors  :  il  était  interdit 
d'en  rien  exporter,  spécialement  ni  bois,  ni  foin ,  ni  fumier; 
car  ces  choses  étaient  la  propriété  commune,  et  celui  qui  les 
aurait  vendues  se  serait  enrichi  aux  dépens  de  ses  compa- 
gnons. (Cf.  Maurer,  Gesch.  der  Dorfrorfassung,  1,  pp.  313 
et  suiv.) 


(  265  ) 

Cependant,  les  habitants  pouvaient  changer  de  séjour, 
quand  ils  avaient  satisfait  à  toutes  leurs  obligations,  et 
dans  les  territoires  seigneuriaux  le  seigneur  devait  alors 
les  accompagner  jusqu'aux  limites  de  la  marke.  Cf.  Charte 
de  Walcourt,  1208  [Monum.  pour  servir,  etc.,  p.  XXVII)  : 
Tous  bourgeois  se  peuvent  partir  de  la  ville,  quand  ilz 
veullent....  et  se  celuy  que  se  part  a  charroy  a  chargier,  il 
doibt  eslre  conduit  par  la  ville  tant  comme  la  poosté 
d'icelle  dure.  » 

Or,  les  maisons  elles-mêmes  continuèrent  pendant  long- 
temps à  être  considérées  comme  biens  mobiliers,  elles 
étaient  construites  en  bois  et  pouvaient  se  transporter 
aisément.  (Cf.  Thudichum.  Altd.  Stnaf,  p.  120.  Maurer., 
Gesch.der  Fronhofe,  III,  125-128,  Gesch.  der  Dorfierfas- 
sung,  I,  513).  Par  dérogation  à  la  défense  générale  d'expor- 
ter les  bois  de  la  marke,  on  permettait  souvent  à  celui  qui 
quittait  le  territoire,  d'emporter  sa  maison. 

Cf.  Charte  de  Montigny,  I2o5  (Waulers,  Preuves, 
p.  185}  :  «  Ordeneil  est  ke  se  li  bouriois  vuet  aler  manoir 
fors  de  le  vile  de  Moutegni,  ke  li  sires  le  doit  conduire 
fors  de  le  banliwe...;  s'il  en  vuet  mener  ses  maisons, 
mener  lesenpuet;  se  vendre  les  vuet,  vendre  les  puet...  » 

Cf.  Keure  de  Saffelaere,  1264  (Warnk.,  lïl,  2% 
n"  CLXVÏ).  Art.  42  :  «  Qui  domum  propriam  extra  villam 
deduxerit,  solvat  domino  II  solidos.  »  Art.  45  :  «  Qui 
domum  emerit  in  villa  de  Saffelaere  et  eam  de  villa  expor- 
tare  fecerit,  solvat...,  etc.   » 

Cf.  Charte  de  Landrecies,  1200  {Momim.  pour  servir  à 
Vhistoire,  etc.,  I,  554):  «  Nulla  domus  vendi  potest,  ita  ul 
extra  villam  ducatur.  » 

Une  autre  restriction  imposée  aux  compagnons  était 
celle  qui  ne  permettait  la  vente  de  leurs  terres  qu'à  cer- 


(  26G  ) 
taines  conditions;  elles  devaient  être  offertes  publiquement 
d'abord  aux  parents  du  vendeur,  ou  môme  à  la  commu- 
nauté, et  chacun  des  membres  de  celle-ci  avait  dans  des 
limites  fixées  un  droit  de  préemption.  (Cf.  Maurer,  Gesch. 
der  Markenverfassung ,  p.  184.  —  Gesc/i.  der  Dorfcerfas- 
sùng,  I,  p.  520.  —  Gesch.  der  Fronhofe ,  III,  p.  74.)  Ceci 
était  en  rapport  avec  le  principe  d'après  lequel  la  famille 
entière  avait  un  certain  droit  à  la  propriété  allodiale.  (Cf. 
Roscher,  Nation.  Œkon.,  II,  §  88).  Jusqu'au  XY"  siècle  on 
lit  peu  de  testaments  dans  la  classe  moyenne;  et  généra- 
lement la  vente  de  fonds  qu'on  possédait  en  pleine  pro- 
priété n'était  valable  qu'avec  le  consentement  de  l'héritier 
le  plus  proche.  Il  devait  en  être  de  même  au  moyen  âge 
pour  tous  les  compagnons  de  la  niarke. 

Nous  retrouvons  des  traces  de  ce  principe  dans  la  Keure 
du  pays  de  Waes  de  1241  (Warnk.,  II,  2°,  p.  182),  dont 
l'art.  51  stipule  que  si  quelqu'un  veut  vendre  son  héritage, 
il  doit  en  donner  connaissance  pendant  trois  dimanches, 
dans  l'église  :  «  Si  autem  propinquus  illius  haereditatem 
illam  emere  voluerit ,  emat  eam  infra  illas  très  dominicas, 
expletis  vero  illis  tribus  dominicis  hœreditatem  illam  po- 
lerit  extraneus  comparare.  » 

Dans  la  Keure  de  Caprycke,  1240  (Warnk.  II,  2°,  p.  213), 
art.  8,  ce  principe  a  disparu  :  celui  qui  veut  vendre  sa 
terre,  peut  le  faire  cuicumqne  vulueril,  nnlla  obstanle pro- 
pinquiiale.  Il  en  est  de  même  à  Gand  (Keure  de  1191, 
art.  19),  (Gheld.,  III,  p.  76). 

La  Charte  de  Landrecies,  1200  [Monnm.  pour  servir  à 
C histoire,  etc.,  I,  555),  nous  apprend  que  le  bourgeois, 
mourant  sans  laisser  d'héritier,  ne  peut  disposer  que  de  la 
moitié  de  ses  biens;  le  reste  retourne  à  la  communauté. 

Mais  le  document  où  s'est  conservé  le  meilleur  souvenir 


(  267  ) 
de  l'ancien  ordre  de  choses,  est  un  règlement  de  partage 
de  biens  communaux  situés  à  Alera  (Cartul.  de  St-Trond, 
J,  So8),  et  dont  la  possession  était  litigieuse  entre  die  ghe- 
ineijn  rjhebuer  tan  Alern  et  le  prévôt  de  cette  localité;  il  y 
est  stipulé  que  si  l'un  des  copartageants  veut  aliéner  son 
lot,  le  prévôt  pourra  exercer  le  retrait,  en  fournissant  le 
prix  convenu  pour  l'acquisition. 

On  voit  que  nos  anciennes  chartes  ont  conservé  d'une 
manière  très-incompjète,  mais  cependant  assez  claire,  les 
traces  de  l'organisation  primitive  de  la  marke. 

Une  obligation  qui  s'est  maintenue  intacte  est  celle  de 
prendre  les  armes  pour  la  défense  du  territoire  de  la  com- 
munauté et  spécialement  pour  celle  de  chacun  des  compa- 
gnons; il  suffit  que  l'un  d'eux  crie  aux  armes,  ivapene!  ou 
encore  commune!  pour  qu'immédiatement  les  autres  soient 
tenus  d'accourir.  C'est  ce  que  stipulent  expressément  même 
plusieurs  chartes  de  villes,  par  exemple  la  Keure  de  Cour- 
Irai,  1524  (Warnk.,  Il,  2"  p.  1 41),  §  5  .  «  Item  nous  appro- 
vons  et  cont'ermons  que  s'il  avenoit  que  aucune  personne, 
qui  ne  fust  bourgeois  de  nostre  dicte  ville  de  Courtray, 
metoit  mal  pour  mal  en  aucun  bourgeois  ou  bourgeoise  de 
Courtray  et  cils  bourgeois  ou  bourgeoise  criassent  :  Com- 
muigne,  tout  !i  bourgeois,  qui  le  verroienl  ou  orroient,  li 
(luivcnl  aidier...   i> 

On  voit  par  là  que  ce  cri  de  commune!  n'a  aucun  carac- 
tère séditieux,  et  qu'il  implique  seulement  l'appel  à  la 
communauté  entière.  Celui  qui  ne  répondait  pas  à  cet  appel 
était  sévèrement  puni.  (Cf.  Loi  de  S'-Amand,  1164,  Wau- 
ters,  Preuves,  p.  27.  —  Chartes  de  Soignies,  1142.  Ibid., 
p.  19.  —  Keure  d'Anvers  du  XIIP  siècle  (Mertens  et  Torfs, 
II,  29).  —  Voir  aussi  Raepsaet ,  Œuvres  complètes,  V,  357, 
Ô77,  r>83). 


(  268  ) 
Une  obligation  non  moins  intéressante  et  qui  résulte 
directement  de  l'ancienne  collectivité  de  la  propriété,  c'est 
la  garantie  mutuelle,  qui  est  inscrite  dans  la  Keure  de 
Furnes  (Warnk.,  II,  2",  p.  7i),  art.  11  :  «  In  quacumque 
villa  combustio  facta  fuerit  occulte,  tota  villa  statim  solvat 
damnum »  Warnkonig  et  Gérard  {Hist.  des  Carolin- 
giens, II ,  p.  456),  se  sont  trompés  en  voyant  dans  ce  pas- 
sage la  preuve  de  la  responsabilité  collective,  le  Gesamml- 
biii'gschaftûupagus.WQÏtz  [DeutscheVerfassHngsgeschic/ite, 
P,  pp.  424-473)  a  prouvé  que  celle-ci  n'existait  ni  pour  le 
pagus,  ni  pour  la  centène,  car  ni  l'un  ni  l'autre  ne  forment 
une  corporation;  mais  les  mots  :  in  quacumque  villa  de  la 
Keure  de  Furnes  désignent  bien  évidemment  un  simple 
village;  c'est  donc  du  village  comme  communauté  territo- 
riale qu'il  s'agit  ici;  il  est  à  remarquer  d'ailleurs  que  le 
mot  villa  dans  la  loi  salique  est  employé  dans  le  sens  de 
marca  (1). 

De  tous  ces  faits  il  résulte,  à  n'en  pas  douter,  que  la 
marke  a  été  constituée  chez  nous  comme  dans  les  autres 
pays  germaniques. 

On  pourrait  dresser  une  liste  interminable  des  villages 
dont  les  pâturages  communaux  se  trouvent  cités  dans  les 
chartes;  mais  en  général  les  anciens  cousagers  n'avaient 
pas  réussi  à  maintenir  leurs  titres  de  propriété  libre  sur 
les  fonds  communs;  c'était  là  le  résultat  du  développement 
de  la  féodalité;  presque  partout  le  seigneur,  laïque  ou 
ecclésiastique  ,  s'était  attribué  le  droit  de  propriété  et  il  ne 


{!)  «  Villa  dans  le  titre  45.  Sal.  a  le  sens  de  marche  ;  migrarc  in  villa  : 
c'est  exactement  s'établir  sur  le  territoire  d'une  marche.  «  (M.  Thcvenin. 
dans  la  Revue  criUque.  1875,  2,  p.  174.  ) 


(  269  ) 

permettait  l'usage  que  moyennant  redevance.  (Cf.  Maurer, 
Gesch.  der  Markenverf,  p.  51.) 

A  Dinant,  lOGO  (Wauters,  Preuves,  p.  249)  les  waris- 
capii  appartenaient  au  comte  de  Namur  (représentant  de 
l'Empereur). 

A  Douai  même,  où  le  comte  de  Flandre  (1241,  Warnk. 
il,  2°,  p.  260)  reconnaît  le  droit  absolu  des  habitants  aux 
terres  communales  et  leur  en  accorde  la  jouissance  gra- 
tuite, ils  doivent  cependant  10  sous  par  an  de  ce  chef. 

A  Halen  (Limbourg)  ils  payent  un  denier  d'or  ou  o  sous 
de  Louvain  (1243.  Cart.  deS'-Trond,  I,  p.  261). 

Ces  prétentions  des  seigneurs  à  posséder  les  terres 
communes  ont  causé  fréquemment  des  désaccords  longs  à 
régler.  Ainsi  à  Frasnes  (Wauters,  Preuves,  p.  lo7),  à 
Sirault  [Ibid.,  p.  142),  «  il  disent  ke  li  bos  estoit  leur,  » 
à  Jeltefaulx  [Ibid.,  p.  183),  à  Nivelles,  1290  {Brab.  Yeest, 
Codex,  I,  p.  673). 

Dans  un  arrangement  conclu  entre  l'abbé  de  S'-Trond 
et  lés  échevins  d'Helchleren  [Cart.  deS^-Trond,  I,  p.  500), 
nous  voyons  que  l'abbé  avait  évidemment  usurpé  sur  les 
bois  de  cette  localité  des  droits  qui  compélaient  primitive- 
ment aux  cousagers. 

Je  citerai  encore  le  diflerend  entre  l'abbé  de  S'-Berlin 
et  les  bourgeois  de  S'-Omer  au  sujet  de  la  pâture  du 
Zwinart  (Malbrancq,  De  Morinis,  III,  p.  724). 

Souvent  ces  litiges  amenèrent  le  partage  des  biens  com- 
munaux; c'est  ce  que  j'ai  rappelé  déjà  pour  Alem  [Cart. 
de  S^-Trond,  I,  o58).  De  même  à  Diesl  (Wauters,  Mém. 
sur  Jean  /«^  p.  293). 

On  a  rencontré  dans  les  énumérations  qui  précèdent  les 
noms  de  plusieurs  villes  ;  en  effet  ce  n'étaient  pas  seulement 
les  villages  qui  possédaient  des  pâturages  communaux. 


(  Tii)  ) 

Anvers  a  son  hcmcde  :  1186  «  Pascua  et  lerrœ  ad  coni- 
rnunem  justitiam  pertinentes....  quœ  vulgo  hcmclhe  vocan- 
tur.  »  (Mert.  elTorfs,  Gesch.  v.  Antwerpen,  I,  31.  Wauters, 
Preuves,  p.  48)  et  son  Opskdle  [Brab.  Yeesfen,  Codex,  I, 
p.  677.  Keure  d'Anvers  du  21  févr.  1291.) 

A  Louvain,  on  fait  en  1523  nne  enquête  au  sujet  des 
prairies  communales,  ghemeene  veeweyde.  {Brab.  Yeesten , 
Codex,  l,  p.  76i.  Voir  aussi  Cliron.  de  J.  de  Klerk,  I,  641, 
en  1234,  et  sur  VOpskdle:  Brab.  Yeesten,  I,  p.  750,  Keure 
du  17  septembre  1506.) 

A  Ypres  il  est  fait  mention  d'un  Upstal  en  1111.  (Gheld., 
V,  p.  520.) 

A  Gand  la  Keure  de  1192  défend  aux  particuliers  de 
disposer  des  terrains  loti  oppido  communia  et  d'y  bâtir. 
(Gbeld.,  III,  p.  226,  §  17,  cf.  Gheld.,  II,  p.  26.) 

A  Malines,  1204,  Wallcr  Berthout  cède  aux  habitants 
une  terre:  «usu  communi  absque  clausura  hereditario  jure 
perpétue  possidendam.  »  (Wauters,  Preuves,  p.  212.) 

Je  pourrais  citer  encore  Soignies,  1142  (Wauters , 
Preuves,  p.  19),Montigny-sur-Sambre,  1255  [Ibid.,  p.  182); 
S'-Trond,  1524  [Cart.  de  S'-Trond,  I,  p.  462),  etc. 

Il  faut  bien  se  garder  de  croire  que  ces  biens  commu- 
naux n'étaient  dans  les  villes  que  les  restes  d'un  état  de 
choses  ancien  ,  auquel  on  n'attachait  plus  guère  d'impor- 
tance. La  Keure  de  Grammont,  1068  (Warnk.,  II,  2"  163) 
nous  apprendra  le  contraire.  Cette  ville,  on  le  sait,  avait 
été  fondée  par  Baudouin  Vî  sur  un  alleu,  qui  avait  appar- 
tenu cà  un  certain  Gérard  ,  mais  ce  terrain  étant  insuffisant, 
le  comte  remit  la  ville  an  seigneur  de  Boulaere  à  titre  de 
fief,  et  celui-ci,  en  échange,  fournit  à  la  cité  nouvelle  les 
pâturages  qui  lui  manquaient  :  «  In  recompensationem 
feudi  prîcnominati,  Balduino  comitis   ad   usus  Geraldi- 


(  271   ) 

montensiiim  Biizemont,  sicut  ipse  possedit,  et  Cortelake 
et  pasliiram...  (énumération  de  tous  les  pâturages)...  ad- 
didit  insuper  quod  quibuscumque  aquis  et  pascuis  Iiomines 
sui  ulerenlur,  liceret  Geraldimontensibus  uti  commu- 
niter.  » 

De  même  à  Douai,  en  1241  (Warnk.,  II,  2",  p.  261),  le 
comte  de  Flandre  reconnaît  aux  bourgeois  le  droit  aux 
pâtures  et  marécages  qui  se  trouvent  autour  de  la  ville;  ils 
ont  le  droit  d'y  prendre  ce  qui  est  nécessaire  à  leur  usage 
personnel ,  sans  rien  payer  :  «  car  ils  n'estoient  tenu 
anchiennement  en  nulle  cose  pour  chou.  »  De  plus,  le 
comte  s'engage  à  ne  jamais  donner  à  personne  une  por- 
tion quelconque  de  ces  pâturages,  sur  lesquels  les  habi- 
tants de  Douai  ont  un  droit  absolu,  ni  de  les  laisser 
enclore. 

Les  villes  ne  mettaient  donc  pas  moins  de  prix  que  les 
villages  à  la  conservation  et  à  la  bonne  administration  de 
leurs  biens  communaux.  Cette  administration,  comment 
se  faisait-elle?  On  conçoit  qu'une  corporation  comme  celle 
de  la  marke  exigeait  des  fonctionnaires.  Il  fallait  une 
autorité  pour  régler  l'usage  des  communia,  pour  assurer 
la  réciprocité  des  droits  et  des  devoirs,  pour  diriger  les 
travaux  communs,  lever  les  impôts,  etc. 

Cette  autorité  dans  le  village  était  celle  du  major,  maire, 
nommé  aussi  prœpositus,  burgermeister,  bauermeister,  vil- 
liens,  quelquefois  amman,prociirator,jiidex  loci  ou  villœ, 
quelquefois  même  cornes  et  grafio  loci,  dorfgreve. 

Ce  maire  était  souvent  seul ,  tel  est  le  cas  dans  les  vil- 
lages de  Moorsele,  Gheverghem ,  ^Yiense  (Warnk,,  II ,  2°, 
p.  242),  mais  il  pouvait  être  entouré  de  conseillers,  juralî, 
raden,  gezworene ,  coralores ,  coremannen. 

Les  rapports  du  chef  de  village  avec  la  possession  de 


(  272  ) 
terres  communales  sont  très-visibles  à  Halen,  par  exemple 
(1248,  Cart.  de  S^-Trond ,  l,  p.  211).  L'abbé  de  S'-Trond 
cèdedesmaraiset  des  prés /jroco»im«u//jascHa;en  échange 
ses  tenanciers  payeront  un  denier  d'or  ou  S  sous  de  Lou- 
vain,  et  ils  établirent  comnmniter  un  mambourd  qui  répon- 
dra de  ce  cens. 

La  Charte  de  Berkin  et  Steenwerk ,  M  60  (Warnk.,  II, 
2",  p.  lo2)  montre  quelle  était  la  position  du  chef  de  vil- 
lage par  rapport  à  la  communauté;  celle-ci  avait  le  droit 
d'élire  un  minisler,  «  qui  eos  manuteneat,cui  respondeant, 
qui  eos  prsesente  dapifero  nostro  vel  nuntio  ad  causam 
convocat  et  eos  salvojure  nostro  ad  justiliam  advchat.  Ils 
ont  le  droit  de  déposer  ce  minister  et  de  le  remplacer  à 
leur  gré.  —  Il  en  est  de  même  à  Landrecies  ,  1200  [Cari, 
du  Ilainaut,  Monum.  pour  servir,  etc.,  I,  p.  536).  «  Est  etiam 
istud  de  jure  burgensium  quod  quemdam  prœrectum  inter 
se  constituere  debent  et  singulis  annis,  prout  justum  et 
utile  eis  visum  fuerit,mutuare  et  alium  substituere.  «  Cette 
disposition  suit  immédiatement  le  paragraphe  de  la  charte 
relatif  aux  «  anliqiias  et  communes  aisias  villae  de  vivario 
et  in  herbis  coUigendis  et  in  cooperlura  domorum  congre- 
2;anda  et  in  lignis...  et  in  pascuis...  etc.  » 

Les  fonctions  du  chef  de  village  s'expliquent  d'ailleurs 
par  son  origine  et  son  caractère;  c'est  lui  qui  veille  à 
l'usage  régulier  des  biens  communaux;  c'est  lui  qui  main- 
tient la  paix  et  la  fait  jurer  aux  compagnons;  à  ce  litre  il 
a  aussi  une  juridiction,  mais  elle  est  purement  corporative, 
elle  n'a  aucun  caractère  public;  c'est  lui  qui  veille  aux 
poids  et  mesures,  par  exemple  à  Rhodes  (Wauters,  Hist. 
des  environs  de  Bruxelles,  III,  p.  691). 

Comme  représentant  des  cousagers  et  ayant  possédé 
anciennement  le  privilège  de  mettre  entre  leurs  mains 


(  273  ) 
la  terre  qu'ils  pouvaient  cultiver,  le  maire  avait  conservé 
jusqu'au  moyen  âge  la  prérogative  d'après  laquelle,  lors 
d'un  transfert,  la  terre  passait  par  sa  main  et  lui  seul 
pouvait  en  investir  le  nouvel  occupant.  Cf.  à  Soignies , 
1248-49  (Wauters,  Preuves,  p.  172)  :  «  toutes  les  terres 
del  commun,....  li  doit-on  reporter  en  se  main,  pour  desi- 
reter  et  aireter.  »  Les  institutions  anciennes  semblent 
s'être  conservées  là  avec  une  grande  pureté.  Nous  voyons 
le  maire,  avec  le  concours  des  verejurali,  donner  à  chacun 
sa  mesure  des  terres  communes  de  S'^-Vincent;  le  cache- 
poul,  sorte  de  messager,  porte  la  ligne,  le  recb  germa- 
nique.C'est  au  maire  qu'il  appartient  d\iboner,  c'est-à-dire 
d'aborner  les  champs  (Wauters,  Preuves,  pp.  19  et  22). 
Nous  y  rencontrons  aussi  d'autres  fonctionnaires  infé- 
rieurs, les  niessiers,  correspondant  aux  messer,  feldmesser, 
landmesser  (Maurer,  Gesch.  cler  Dorfverfassiing,  If,  p.  97) 
qui  étaient  chargés  en  Allemagne  de  mesurer  et  de  déli- 
miter les  champs,  et  qui  sont  devenus  une  espèce  de 
gardes  champêtres.  Ces  mêmes  messiers ,  messarii ,  se 
retrouvent  comme  mesureurs  dans  le  pays  de  Waes,à 
Huist  et  à  Axel  {Cart.  de  Cambron,  p.  466);  d'autres 
agents  subordonnés  au  maire  sont  dans  les  régions  boisées, 
les  forestiers^  si  fréquents  dans  nos  chartes. 

Pour  en  revenir  à  la  charte  de  Soignies ,  il  y  est  fait 
mention  aussi  de  parcheniers,  c'est-à-dire  de  participants 
à  la  terre,  ce  sont  les  véritables  cousagers,  milgenossen, 
commarcani. 

Ces  mêmes  parcheniers  sont  indiqués  dans  un  règle- 
ment de  1248  sur  l'extraction  de  la  houille  à  S'-Ghislain  , 
Dour,  Quaregnon,  Boussu,  etc.  (Gachard,  Docum.  inédits, 
I,  p.  107)  «  Et  en  tous  ces  ovrages  chi  devant  nommés  ne 

2"*  SÉRIE,  TOME  XXXVIM.  18 


(  274  ) 

piiel  on  f'oir  carbon  devens  les  i  ans  deseure  escris,  en 
toute  l'uevre  et  le  justice  S.  Gillain  et  ses  pareeniers, 
ka  XX  puits;  en  le  justice  et  l'uevre  Sainte  Wauldruth  et 
ses  pareeniers,  ka  vi  puits,  etc.  »  On  retrouve  là  la  pro- 
priété collective  du  charbon  qui  s'est  conservé  plus  long- 
temps que  la  communauté  agricole,  parce  que  sans  terre 
il  était  difficile  de  délimiter  des  parts. 

Entre  les  parcheniers  du  Hainaut  et  les  éc/ievins  des 
parchons  de  Gand  n'y  a-t-il  rien  qu'une  simple  coïncidence 
de  noms?  je  ne  le  crois  pas.  Les  conseillers  de  nos  villes 
sont  les  successeurs  des  anciens  jurati  qui  aidaient  le 
maire  dans  ses  fonctions  administratives.  Dans  toutes  les 
villes  anciennes,  dit  Maurer  [Gescli.  der  Stàdleverfassung , 
\ ,  p.  458),  on  trouve  toujours  deux  collèges,  les  fonction- 
naires publics,  chargés  du  maintien  de  la  paix  publique, 
et  les  fonctionnaires  de  la  corporation  territoriale,  les  con- 
seillers, qui  ont  à  soigner  les  affaires  de  la  marks  urbaine 
(Omnia  civitatis  décréta  {Kore)  consules  judicabnnt).  La 
Kore  est  en  rapport  étroit  avec  la  création  d'un  conseil  en 
Allemagne.  (Cf.  Maurer,  Ibid.,  III,  p.  185:  Kùren  ou  Kore 
à  Lubeck  et  à  Hambourg,  Willk'àren  à  Brème,  à  Stendal, 
Seligenstadt,  Kiiren  à  Neuss,  etc.) 

Il  en  est  de  même  dans  nos  contrées.  La  Keure  d'Ar- 
qués, I25I  (Warnk.,  lll,  2",  n°  CLXVl)  fait  une  distinction 
formelle  entre  les  échevins,  scabini,  et  les  fonctionnaires 
de  la  Keure,  C/ioremanni ,  et  les  §§  12  et  15  indiquent 
parfaitement  les  liens  qui  ratlachaient  ces  derniers  à  l'an- 
tique constitution  de  la  marke. 

§  12.  Pastura,  quse  Communitati  villse  concessimus, 
libéra  eis  remaneat  ab  ornni  usuagio  animalium  nostrorum. 

§  15.  De  communi  pastura  disponant  Choremanni  con- 
silio  Prîepositi,  quœ  rationabiliter  fucrinl  disponenda,  et 


(  27d  ) 

qui  contra  disposilionem  factam  porcos  vel  armeuta  mise- 
nt in  pasluram  ,  ipsa  amidat. 

Ces  chorehianni  élaient  annuels,  tandis  que  les  éche- 
vins  restaient  en  fonctions  tant  qu'il  plaisait  à  l'abbé  de 
S'-Bertin.  La  même  différence  existait  dans  plusieurs 
villes  d'Allemagne,  par  exemple  à  Slendal.  (Gierke,  Genos- 
senscliafsrec/it,  II,  p.  GI3.) 

Quant  à  la  con)pétence  relative  des  deux  collèges,  voici 
ce  que  portent  l'art.  I  et  l'art.  2  :  Scabinos  habeant  et 
choremannoa ,  per  qiios  nerjotia  lerminentur  (c'est  la  fonc- 
tion des  échevins  de  terminer  les  différends)  et  communes 
utilitates  disponantur  (c'est  la  fonction  des  choremanni , 
l'administration.)  —  Scabini  judicent  de  Us  qiiœ  pertinent 
ad  scahinanim  (ce  sont  des  fonctionnaires  publics,  car 
l'échevinage  est  l'émanation  de  l'autorité  publique)  •,c/iore- 
manni  de  pace  tractent  et  de  ulilitale  communitalis  villœ 
et  de  forisfactorum  emendalione. 

On  voit  par  ce  dernier  paragraphe  que  le  rôle  des  chore- 
manni était  triple  :  1°  ils  maintenaient  la  paix ,  pour  cela 
ils  devaient  faire  jurer  des  trêves,  conformément  à  l'an- 
cienne coutume  germanique.  Or  c'était  là  le  devoir  des 
fonctionnaires  de  la  marke.  (Cf.  Maurer,  Stddteverf.,  lîl, 
pp.  145  et  suiv.)  Les  choremanni  de  Poperinghe  avaient  les 
mêmes  attributions  (Keure  de  1209,  art.  18,  et  Keure  de 
1255,  art.  20,  Warnk.,  2'^  pp.  112  et  116).  «  Si  inter  juratos 
discordia  ortafuerit,  justiliariuscoram  choremannis  débet 
pacem  exigcre  (1).  »  II  en  était  de  même  à  Gand  où  les 


(1)  W'arnkônig-,  II,  52»,  76,  se  demande  si  cosjurati  de  Poperinsbe  con- 
slituPiU  un  troisième  collège;  mais  il  est  bien  évident  que  ce  sont  tout 
simplement  les  bourgeois  qui  ont  juré  la  keure.  Le  même  terme  figure 
dans  la  Keure  d'Arqués  où  toute  méprise  est  impossible  :  art.  6  :  «  Jurare 


(  276  ) 
fonctions  de  juges  de  paix  étaient  exercées  par  les  con- 
seillers et  plus  tard  par  les  échevins  des  parchons.  (Warnk., 
J,  p.  580),  et  à  Valenciennes,  1275  (Wauters,  Prewres, 
p,  250)  où  \esjurati  font  prendre  et  maintenir  les  trêves. 

2°  Les  choremanni  d'Arqués  veillaient  à  l'utilité  de  le 
communauté,  ils  étaient  de  véritables  administrateurs. 

5°  Ils  avaient  une  certaine  juridiction  criminelle;  ce 
dernier  point  qui  ne  peut  être  examiné  ici  en  détail , 
indique  déjà  une  grande  transformation  dans  la  position 
des  magistrats  de  la  communauté;  ceux-ci  avaient  eu  de 
tout  temps  une  certaine  juridiction  sur  les  cousagers;  mais 
elle  était  purement  corporative,  elle  n'avait  aucun  carac- 
tère public  (cf.  Sohm,  AltcL  Beiclis-  und  Gerichtsverf., 
I,  p.  252);  le  jour  où  leur  tribunal  devient  un  tribunal 
public,  l'organisation  communale  entre  dans  une  pliase 
nouvelle. 

Ce  qui  est  très-apparent,  c'est  que  ces  choremanni 
sont  les  successeurs  directs  des  fonctionnaires  de  la  marke; 


tlebent  choremanni....  se  servaluros....  jura  omnium  bominum  lam  extra- 
iioorum  quam  juralorum  suorum  (lant  les  étrangers  que  les  bourgeois).  " 
L'article  7  oblige  »  omnes  in  villa  manentesjurare  choram  »  et  l'article  11 
porte  :  «  si  quis  de  manenlibus  in  villa  et  juratus  in  cbora.  »  L'article  18 
ordonne  que  si  le  prœco  a  pris  gage  sur  quelqu'un  sans  le  jugement  des 
choremanni ,  il  payera  trois  livres  au  seigneur  et  cinq  sous  jiirato ,  c'est- 
à-dire  au  bourgeois  chez  lequel  il  a  fait  une  saisie  illégale.  Citons  encore 
l'art.  38  :  «  si  quis  de  chora  conjuratum  suum  contumeliis...  alFecerit...;  » 
con juratus,  c'eut  son  confrère  en  serment;  et  l'article  47  d'après  lequel 
dans  certains  cas  l'intervention  d'un  fonctionnaire  inférieur  non  juratus 
ne  vicie  pas  une  procédure,  pourvu  que  deux  choremanni  aient  été  pré- 
sents, parce  que  les  clioremanni  eux-mêmes  sont  jurait. 

Ce  qui  a  pu  faire  naître  un  doute,  c'est  que  dans  la  Keure  de  Pope- 
riiigiie  la  terminologie  est  moins  exacte;  ainsi  aux  art.  5et  18  (K.  de  1253), 
le  motdeyara/i  est  pris  comme  synonyme  de  choremanni. 


(  1277  ) 
ils  en  ont  les  attributions  essentielles;  or  ces  choremannt 
nous  conduisent  tout  droit  aux  jiirati  (la  Keure  de  Pope- 
ringhe  leur  donne  déjà  ce  nom)  et  aux  conseillers.  Entre 
ceux-ci  et  les  échevins  il  y  a  dans  l'origine  cette  différence 
profonde,  que  les  échevins  sont  les  fonctionnaires  judi- 
ciaires et  les  conseillers  les  fonctionnaires  administratifs. 
C'est  ce  que  Raepsaet  {Analyse,  n^SST)  avait  entrevu, 
mais  sans  pouvoir  en  rendre  compte. 

Toutes  nos  villes,  même  les  plus  petites,  ont  eu  jus- 
qu'à une  certaine  époque,  \eurs  jiirati  à  côté  de  leurs 
échevins.  Je  cite  presque  au  hasard  : 

1 1 4-2.  Soignies  :  verejurati  et  scabini.  (Wauters,  Preuves, 
p.  18),  et  1248-1249  :  7  jurés  et  10  échevins  {Ihid., 
p.  172.) 

1147.  Poperinghe  (Gheld,  II,  p.  266). 

1168.  Fumes  {Ibid.). 

1185.  Gand  [Ibid.]. 

H85.  Cambrai  (Wauters,  Preuves,  p.  46). 

1206.  Haelen  (/6zd.,  p.  64). 

1211.  Nederyssche  [Ptrab.  Yeesten,  I,  p.  617:  six  hommes 
élus  par  les  habitants  lèveront  chaque  année  l'impôt). 

1211.  Tournai  (Gachard, i>oc.  inéd.,  I,  p.  95:  ôO  jurât i). 

1215.  Léau  [Brab.  Yeesten,  I,  p.  618.  Ipsi  burgenses  sex 
juratos  eligant  inter  se,  qui  cum  scabinis  excessus  oppidi 
corrigentes,  de  honore  et  utilitate  oppidi  tractent). 

1219.  Courtrai  (Wauters,  Preuves,  p.  74). 

1220.  Trazegnies  {Ibid.,  p.  76). 

1251.  Neuville  et  S'-Amand  {Ibid.,  p.  1 18).  Les  échevins 
seront  en  même  temps  scabini  el  jurati.  Il  en  était  de 
même  à  Furnes). 

1256.  S'-Trond  {Ibid.,  p.  155  et  264). 

1257.  Valenciennes  (/ôîc/.,  pp.  156  et  141). 


(  278  ) 

1240.  Furnes  (Warnk.,  lî,  2",  p.  73  :  qui  scabini  erunt, 
erunl  et  coralores). 

12ol.  Louvaiii  (Wauters,  Preuves,  p.  17G). 

1255.  Montigny  (/6/rf.,  p.  182:  les  7  jurés  doivent  faire 
l'assise). 

1265.  Bruxelles  {îbid.,  p.  210). 

1277.  Cassel,  7  échevius  et  o  jurés  (Ghekl ,  V,  p.  258). 

Ces  jiirati  reçoivent  fréquemment  le  nom  de  conseillers, 
par  exemple  à  Courtrai,  1524  (Warnk.,  IL  2",  p.  140)  : 
7  éclieviiis  24  jurés  ou  consaux. 

De  tout  ceci  il  résulte  que  le  conseil,  raed,  de  nos 
grandes  communes  descend  en  ligne  directe  des  anciens 
administrateurs  corporatifs  de  la  communauté  territoriale. 
Mais  peut-on  affirmer  qu'il  ne  soit  rien  de  plus,  que  les 
fonctions  et  le  caractère  de  l'un  et  de  l'autre  collège  soient 
demeurés  identiques?  Évidemment  non.  Avec  le  dévelop- 
pement de  la  ville  se  sont  opérés  des  changements  impor- 
tants dans  la  vie  et  dans  l'organisme  de  la  commune.  Je 
ne  puis  aborder  ici  l'étude  de  celte  face  de  la  question  qui 
doublerait  au  moins  l'étendue  de  cette  notice  déjà  trop 
longue.  Je  me  borne  donc  à  quelques  considérations  géné- 
rales. 

La  communauté  primitive  est  basée  sur  la  propriété  col- 
lective; elle  ne  résulte  pas  d'une  conjuration,  elle  est  l'ex- 
pression même  d'un  besoin  créé  par  les  rapports  de  voi- 
sinage. L'État  germanique  est  un  Uechtsslaat  (cf.  Zoepfl, 
/).  Rec/itsgesch.,  ^'^  189);  il  veille  avant  tout  à  la  sécurité 
publique  et  il  ignore  complètement  l'administration  locale; 
celle-ci  est  donc  tout  entière  réservée  au  self-government. 
C'est  ainsi  que  se  crée  la  commune.  Ses  seuls  membres 
oplimo  jure  sont  les  cousagers,  ceux  qui  possèdent  un 
héritage  et  qui  comme  tels  peuvent  participer  à  la  jouis- 


(  279  ) 
sance  de  la  marke;  ce  sont  les  bourgeois  hériUibles,  viri 
hereditafi  (1). 

Tous  les  autres  habitants  de  la  commune  ne  sont  pas  les 
véritables  compagnons;  ils  ne  sont  qu'établis  sur  le  terri- 
toire, ingezelenen;  ils  peuvent  être  libres  et  ils  le  sont  du 
jour  où  domine  ce  principe  que  Vair  rend  libre,  mais  ils 
ne  possèdent  pas  tous  les  privilèges  et  surtout  ils  ne  jouis- 
sent pas  des  droits  actifs  de  la  bourgeoisie  optimojure. 

Mais  le  moment  arrive  où  l'ancienne  marke  perd  de  son 
importance,  où  les  villes  en  se  peuplant  finissent  par  cou- 
vrir de  bâtisses  tous  leurs  terrains  vagues;  alors  la  com- 
munauté primitive  menace  de  se  dissoudre,  elle  n'a  plus 
sa  raison  d'être,  les  liens  qui  unissaient  les  compagnons 
se  relâchent;  c'est  alors  que  pour  donner  à  leur  union 
une  consécration  nouvelle,  ils  empruntent  à  un  domaine 
étranger,  celui  du  commerce,  l'idée  de  l'association  volon- 
taire; la  gilde  fait  son  apparition  dans  la  vie  publique,  et 
la  bourgeoisie  patricienne  se  montre  désormais  sous  la 
forme  d'une  gilde  patricienne;  ici,  et  pas  avant,  il  est 
permis  de  parler  de  la  gilde  dans  l'histoire  du  développe- 
ment communal. 

D'autre  part,  concurremment  avec  ce  mouvement  de 
transformation  intérieure,  il  s'opère  un  rapprochement 


(1)  Les  viri  hereditati  éLaieiit  seuls  autorisés  à  vendre  les  terres  coni- 
inunales.  Ainsi  à  Lens,  1225  (Cartul.  de  Cambron,  p.  290),  l'abbaye  de 
Cambron  achète  des  prés  communaux;  le  contrat  se  fait  entre  le  bailli ,  le 
maire,  les  six  échevins  de  Lens  et  tous  les  Kiess  (chefs)  d'hostel  de  la 
ville,  c'est-à-dire  les  propriétaires  de  maisons.  Ils  cèdent  «  une  hirkuyte  (?) 
de  prêts,  pasturage,  aulnoez,  faulchoit,  wareskais,  et  relais,  «  qui  avaient 
été  possédés  parla  communauté  «comme leur  hiretageetcomun  aysement 
seulxet  jiar  yauls,  par  tel  et  si  ancien  temps  qu'il  n'esloit  mémoire  du 
contraire.  » 


(  280  ) 
entre  le  collège  public  et  le  collège  corporatif,  les  échevins 
deviennent  administrateurs;  de  bonne  heure  on  s'était 
accoutumé  à  considérer  le  tribunal  échevinal  comme  le 
centre  de  la  vie  communale.  Les  conseillers  de  leur  côté 
tendent  à  devenir  les  véritables  représentants  publics  de 
la  ville;  en  Allemagne  ils  prennent  cette  position;  dans 
nos  villes  flamandes  ils  se  fondent  généralement  avec 
l'échevinagCy  souvent  ils  disparaissent.  Mais  dans  l'un  cas 
comme  dans  l'autre,  et  quel  que  soit  le  nom  des  collèges 
municipaux,  la  ville  ne  peut  se  dire  une  commune  libre 
que  le  jour  où  elle  a  acquis  pour  son  propre  compte  et  où 
elle  exerce  la  synthèse  des  droits  qui  chez  les  Germains 
primitifs  trouvaient  leur  expression  dans  la  centène  d'une 
part  et  dans  la  marke  de  l'autre. 

Cette  esquisse  rapide  doit  suffire  ici.  Ma  tâche  n'était 
point  d'écrire  une  histoire  du  développement  communal  ; 
j'ai  cherché  seulement  à  établir  que  nos  magistrats  com- 
munaux au  moyen  âge  avaient  une  double  origine  et  un 
double  caractère  :  les  échevins  sont  les  juges  de  la  centène 
franque,  les  conseillers  sont  les  administrateurs  de  la 
Markcjenossenschaft  germani()ue. 


(  28i  ) 


CLASSE   DES  BEAUX- A.RTS. 


Séance  du  2  juillet  1874. 

M.  N.  De  Keyser,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M.  J.  f^iAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin  ,  G.  Geefs,  J.  Geels,  Ferd. 
De  Braekeleer,  C.-A.  Fraiidn,  Éd.  Fétis,  Edm.  De  Bus- 
scher,  Jean  Portaels,  Auguste  Payen,  le  chev.  Léon  de 
Burbure,  J.  Franck,  G.  De  Man,  Adolphe  Siret,  Julien 
Leclercq,  Ernest  Slingeneyer,  Alex.  Robert,  Adolphe 
Samuel,  membres;  F.  Stappaerts,  correspondant. 

M.  Éd.  Mailly,  correspondant  de  la  classe  des  sciences, 
assiste  à  la  séance. 


CORRESPONDANDE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  demande  l'avis  de  la  classe 
sur  le  mérite  artistique  et  la  ressemblance  qu'offre  le  mo- 
dèle du  buste  de  feu  M.  Ad.  Quetelet,  commandé  pour 
l'Académie  à  M.  le  statuaire  Fraikin. 

Ce  modèle  a  été  unanimement  approuvé.  Avis  en  sera 
donné  à  M.  le  Ministre. 


(  28-2  ) 

Par  lettre  du  29  juin,  le  même  haut  fonctionnaire  fait 
une  demande  semblable  au  sujet  du  modèle  du  buste  de 
feu  M.  le  colonel  Dandelin,  que  M.  le  statuaire  Van  Oem- 
berg  a  été  chargé  de  faire  conformément  au  vœu  émis  par 
la  Compagnie. 

M.  le  Ministre  sera  prié  d'inviter  M.  Van  Oemberg  à 
faire  transporter  ce  modèle  au  local  académique,  afin  qu'il 
soit  soumis  à  l'examen  des  membres  de  la  classe  des  beaux- 
arts,  ainsi  que  des  membres  de  la  classe  des  sciences,  à 
laquelle  a  appartenu  M.  Dandelin. 

—  La  classe  renvoie  à  la  section  permanente  des  jurys 
des  grands  concours  de  composition  musicale  une  lettre 
de  M.  le  Ministre  de  l'intérieur,  du  20  juin  dernier,  de- 
mandant s'il  n'y  a  pas  lieu  de  donner  à  M.  Franz  Servais, 
lauréat  du  concours  de  1873,  d'autres  instructions  que 
celles  mentionnées  à  l'article  24  du  règlement  du  6  mars 
1849,  avant  son  départ  pour  l'étranger,  fi^é  au  1"  juillet 
prochain. 

—  Des  reraercîments  sont  votés  à  M.  le  Ministre  pour 
l'envoi  d'un  exemplaire  de  la  l""  livraison  de  la  dixième 
année  du  Trésor  musical,  publié  par  M.  Robert  Van  Mal- 
deghem. 

—  La  Société  d'antiquités,  à  Ulm,  envoie  ses  dernières 
publications. 


(  285  ) 
COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Conformément  à  Tordre  du  jour,  la  classe  procède  à  ia 
discussion  du  projet  d'établissement  à  fonder  à  Rome  pour 
les  lauréats  des  grands  concours. 

Ce  projet  est  admis  à  l'unanimité,  article  par  article, 
puis  dans  son  ensemble  ,  après  deux  observations  aux- 
quelles la  classe  s'est  ralliée. 

Voici  le  projet,  tel  qu'il  sera  communiqué  au  Gouverne- 
ment : 

«  La  classe  des  beaux-arts,  considérant  la  situation 
fâcheuse  dans  laquelle  se  trouvent  les  lauréats  des  grands 
concours  durant  leur  séjour  dans  la  ville  de  Rome,  décide 
que  le  projet  dont  la  teneur  suit  sera  adressé  à  M.  le  Mi- 
nistre de  l'intérieur  comme  l'expression  du  vœu  de  la 
Compagnie  : 

Art.  i'^'.  Le  Gouvernement  belge  se  procurera ,  dans  la 
ville  de  Rome,  une  maison  assez  spacieuse  pour  y  loger  au 
moins  six  pensionnaires,  et  pour  y  établir  quatre  ateliers 
de  peintres  et  deux  de  sculpteurs. 

»  Art.  2.  Les  lauréats  peintres,  sculpteurs,  architectes, 
graveurs  et  musiciens  y  seront  logés  pendant  la  durée  de 
leur  séjour. 

»  Art.  5.  Pourront,  en  outre,  être  admis  dans  l'insti- 
tution, à  des  conditions  à  déterminer,  les  jeunes  artistes 
belges  jouissant  de  pensions  allouées  par  une  autorité  pu- 
blique. 

»  Art.  4.  Tous  les  pensionnaires  sont  libres  dans  leurs 
travaux ,  sauf  les  obligations  que  les  règlements  généraux 
en  vigueur  imposent  aux  lauréats  des  concours  généraux. 


(  284  ) 

»  Il  y  aura  dans  l'établissement  une  salle  de  réunion  où 
les  pensionnaires  pourront  se  livrer  à  des  études  com- 
munes. Ils  pourront  également  y  recevoir  les  artistes  étran- 
gers, ainsi  que  les  Belges  de  passage  à  Rome. 

»  Ces  derniers  pourront  obtenir  l'usage  temporaire  des 
ateliers  qui  ne  seraient  point  occupés. 

»  Art.  5.  Les  ouvrages  que  les  lauréats  sont  tenus 
d'exécuter  durant  leur  séjour  en  Italie  seront  exposés  dans 
la  salle  commune  de  l'établissement,  laquelle  sera  alors 
accessible  au  public. 

Art.  6.  L'institution  est  gérée,  sous  le  rapport  matériel 
et  administratif,  par  un  fonctionnaire  qui  aura  dans  ses 
attributions  le  maintien  de  l'ordre.  La  haute  surveillance 
appartient  au  chef  de  la  légation  belge.  » 

—  M.  Slingeneyer  témoigne  le  désir  de  voir  la  classe 
s'occuper  de  la  question  des  résultats  à  attendre,  par  le 
Gouvernement,  des  études  artistiques  de  ses  pension- 
naires à  Rome. 

L'honorable  membre  est  invité  à  rédiger  sa  motion  par 
écrit,  pour  la  prochaine  réunion,  fixée  au  jeudi  6  août. 


OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 


Commission  royale  (Vhisloire.  —  Monuments  pour  servir  à 
IMiisloire  des  provinces  de  Naniur,  de  Hainaut  et  de  Luxem- 
bourg, tome  III,  édité  par  Léopold  Devillers.  Bruxelles,  1874; 
vol.  in-4°. 

Commission  pour  la  publication  d'une  colleclion  des  œuvres 


(  28o  ) 

des  grands  écrkains  du  pays.  —  Clironiques  de  Froissart. 
tome  XIX'  (Glossaire),  par  M.  Aug.  Scheler;  —  Lettres  et 
négociations  de  Philippe  de  Comraines,  tome  III,  par  M.  le 
baron  Kervyn  de  Lettenhove.  Bruxelles,  1874;  2  vol.  in-8°. 

Juste  (Th.).  —  Les  fondateurs  de  la  monarchie  belge  : 
Alexandre  Gendebien.  Bruxelles,  1874;  vol.  in-8°.  (Envoi  du 
Ministère  de  l'intérieur.) 

Malaise  (C).  —  Exposition  universelle  de  Vienne,  1873. 
Documents  et  rapports  des  jurés  et  délégués  belges.  1  "  groupe  : 
Géologie.  Bruxelles,  1874;  cah.  in-8°. 

Heremans  [J.-F.-J.].  —  0\  er  den  invloed  van  Noord-Neder- 
land  op  de  letterkunde  in  de  zuidelijke  provincien;  —  Be- 
knopte  nederlandsche  metriek,  tweede  druk.  Anvers  et  Gand  , 
1874;  cah.  in-12  et  feuille  in  8". 

Barlel  {Ed.).  —  Les  rues  de  Liège.  Biographies  et  notices. 
Liège,  1874;  vol.  in-12. 

Dubois  {Alphonse). —  Les  lépidoptères  de  l'Europe,  l"^"  série 
(espèces  observées  en  Belgique),  60  à  02™"  livr.  Bruxelles, 
1873-1874;  3  cah.  in -8°.  (Envoi  du  Ministère  de  l'intérieur.) 

Far/en.  —  Photographie  représentant  des  pièces  de  mon- 
naies d'or  de  l'empereur  Maguence  (550  à  553  après  J.-C.), 
trouvées  en  1868,  à  Juslenville;  carton  in-8°. 

Firket  {Ad.).  —  Cartes  statistiques  de  la  production  des 
carrières  et  de  la  production  de  la  circulation  et  de  la  con- 
sommation des  rainerais  en  Belgique,  pendant  l'année  1871. 
Liège;  broch.  in-8°. 

Jacques  {Léon).  —  Etude  sur  la  houille  du  bassin  de  Liège; 
1"  partie:  houille  grasse.  Liège;  vol.  in-8°;  —  Griffes  roses. 
Poésies.  Paris,  1874;  vol.  in- 18. 

Lelièvre  {X.).  —  Institutions  namuroises.  Hôpitaux  et  tables 
des  pauvres  au  comté  de  Namur.  Namur;  broch.  in-8". 

Saporta  {le  comle  C")  eUMarion  {le  docteur  A. -F.).  —  Essai 
sur  l'état  de  la  végétation  à  l'époque  des  marnes  heersiennes 
de  Gelinden.  Bruxelles,  1873;  cah.  in-4°. 


(  286  ) 

Mahleghem  {Ft.-J.  van).  —  Trésor  musical  :  imisique  reli- 
gieuse et  musique  profane,  op.  170, 10"  année,  1874.  Bruxelles; 
'2  cah.  gr.  in-4°. 

Province  de  Brabant.  Distribution  d'eau.  Rapport  de  la 
commission  nommée  par  décision  du  conseil  provincial  du 
42  juillet  1871.  Bruxelles,  1874;  vol.  in-S"  (2  exemplaires);  — 
Cartes  jointes  aux  projets  (1  exemplaire). 

Académie  rotjale  de  médecine  de  Belgique.  —  Bulletin, 
5'  série,  tome  VIII,  n"  6,  année  1874.  Bruxelles,  1874;  cah. 
in-8°. 

Commissions  royales  d'art  et  d'archéologie.  —  Bulletin, 
treizième  année  ,  n"'  5  et  4.  Bruxelles,  1874;  cah.  in-S". 

Commission  royale  des  ancietiîies  lois  et  ordonnances  de  la 
Belgique.  —  Coutumes  du  pays  et  du  duché  de  Brabant, 
quartier  d'Anvers,  tome  IV*".  Coutumes  de  la  ville  d'Anvers, 
par  G.  de  Longé.  Bruxelles,  1 874  ;  vol.  in-4°.  (Deux  exemplaires. 
Envoi  du  Ministère  de  la  justice.) 

Analectes  pour  servira  l'histoire  de  la  Belgique ,  tome  XI, 
■1874,  11°  livraison.  Bruxelles-Louvain;  cah.  in-8°. 

Archives  communales  d'Anvers.  —  Bulletin,  tome  VI%  IP 
livr.  Anvers;  cali.  in -8". 

Société  archéologique  de  Namiir.  —  Annales,  tome  XII*, 
4''  livr.  Namur,  1874;  cah.  in-8". 

Bock  {Fr.)  et  Willemsen  {M.).  —  Antiquités  sacrées  conser- 
vées dans  les  anciennes  collégiales  de  S.  Servais  et  de  Notre- 
Dame  à  Maestricht.  Maestrichl,  1873;  vol.  in-8°.  (Envoi  du 
Ministère  de  l'intérieur.) 

Flora  Batava,  2i'2%  225%  224^  22o'  en  226"  afl.  Leyde, 
1872;  5  cah.  in-4".  (Envoi  du  Ministère  de  l'intérieur.) 

Physiologisch-  laboratorium  der  Utrechtsche  Hoogeschool. 
—  Onderzockingcn,  uitgegeven  door  F.-C.  Dondcrs  en  Th.-W. 
Engelmann,  derde  reeks,  II.  Utrecht,  1873;  in-S". 

Hugo  {le  comte  Léopold).  —  Les  cristalloïdes  à  directrice 
circulaire.  Paris,  1807;  broch.  in-8°. 


(  287  ) 

Moreno  (François).  —  Description  des  cimetières  et  para- 
deros  préliisloriques  de  Patagonie.  Paris,  1874;broch.  in-8°. 

Société  d'Émulation  d'Abbeville.  —  Mémoires,  3*  série, 
1"  vol.  (1869-1872).  Abbeville,  1873^;  vol.  in-8°. 

Revue  des  questions  historiques ,  IX*"  année,  31^  livr., 
r-- juillet  1874.  Paris,  1874;  in-8°. 

Société  des  études  historiques ,  à  Paris.  —  L'Investigateur, 
40""  année,  juin  et  juillet  1874.  Paris;  cah.  in-8°. 

Société  d'anthropologie  de  Paris.  —  Bulletins,  tome  VIII" 
(11"-"  série),  5'  et  6"  fascicules,  juillet  à  décembre  1875.  Paris, 
1874;  2  cah.  in-8°. 

Muséum  d'histoire  naturelle  de  Paris.  —  Nouvelles  archives, 
tome  VIII%  fasc.  I  à  IV;  tome  IX%  fasc.  I  à  IV.  Paris ,  1872- 
1873;  8  cah.  gr.  in-4". 

Société  mathématique  de  France,  à  Paris.  —  Bulletin, 
tome  II,  n°3,  juillet  1874.  Paris;  cah.  in-S". 

Von  Schlagintu-eit-Sakiuiliinski  (Hermann).  —  Mikro- 
structurderKiinliiw  ïVephrileund vcrwandterGesteine.Broch. 
in-8°;  1874. 

K.  P.  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Berlin.  —  Monats- 
Bericht,  April  und  Mai  1874,  Berlin,  1874;  2  cah.  in-8°. 

Gesellschafl  natiirforschender  Freunde  zii  Berlin.  —  Sit- 
zungs-Berichte,  Jahrgang  1873.  Berlin,  1875;  vol.  in-S". 

K.  preuss.  geodàtische  Instituts.  —  Astronomisch-gcodii- 
tische  Arbeilen  in  den  Jahren  1872,  1869  und  1867,  von 
D""  C.  Bruhns  ;  —  Astronomische  Bestiranungen  fiir  die  euro- 
païschc  Gradraessung  ans  den  Jahren  1837-1867,  von  D"" 
J.-J.  Baeyer;  —  General-Berïcht  ûber  die  Europaische  Grad- 
niessung  fiir  das  Jahr  1873.  Leipzig  et  Berlin ,  1873  et  1874; 
5  cah.  in-4''. 

Medicinisch-naturxoissenschaflliche  Gesellschafl  zu  lena. 
—  Jenaische  Zcitschrift,  VIII.  Bd.,  neue  Folge,  I.  Ed.,  2. 
Ileft.  lena,  1874;  cah.  in-8''. 

Universitàt  zu  Kiel.  —  Schriflen  aus  dem  Jahre  1873, 
Bd.  XX.  Kiel,  1874;  vol.  in-4". 


(  288  ) 

Astronomische  Gesellschaft  zu  Leipziy.  —  Vierteljahrs- 
sphrift,  IX.  Jalirgang,  Erstes  Heft.  Leipzig,  1874;  cali.  in-8°. 

Deutsche  Gesellschaft  fur  Natur  iind  Volkerkunde  Ost- 
asien's.  —  Mittheilungen,  4'"  Heft,  Januar  1874.  Jokohama; 
cah.  in-4°. 

Société  royale  des  antiquaires  du  Nord ,  à  Copenhague.  — 
Aarboger  for  nordisk  Oldkyndighed  og  Historié,  II.,  III.,  IV. 
Hefte.  Copenhague  ;  5  cah.  in-8". 

Genocchi  {A.).  —  Interno  ad  alcune  lettere  del  Lagrange. 
Turin  ,  1874;  broch.  in-8". 

R.  Osservatorio  astronomico  di  Brerain  Milano.  —  Publi- 
cazioni,  n°  2.  Milano,  1875;  cah.  gr.  in-4". 

Corrispondenza  scientifica  in  Roma,  vol.  otlavo,  n.  22. 
Rome,  1874;  feuille  in-4°. 

Tommasi  (/)'"  Donato).  —  Action  of  benzyl  chloride  on 
haure  camphor  (laurus  camphora);  —  Action  of  aramonia 
on  phenyl-chloracetamide  and  cresyl-chloracetamide.  Londres, 
1874,  2  broch.  in-S".  (Deux  exemplaires.) 

Asiatic  Society  of  Bengal  at  Calcutta.  —  Bihliotheca  indica, 
new  séries,  n"  297  and  298.  Calcutta,  1874;  cah.  in-8''. 

Philosophical  Society  of  Glasgow .  —  Proceedings,  vol.  IX, 
n"  1,  1875-1874.  Glasgow;  cah.  in-8". 

Sociedad  de  geograpliia  y  estadistica  de  la  Republica  niexi- 
cana,  Mexico.  —  Boletin ,  tercera  epoca,  tomo  I,  n"'  3-7. 
Mexico,  1875;  5  cali.  in-8''. 


(£Î9 1 
BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 

DES 

LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIQUE. 

1874.  —  N°  8. 


CLASSE   DES    SCIENCES. 


Séance  du  l^''  août  181  i. 

M.  E.  Candèze,  directeur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.-S.  Stas,  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van 
Beneden,  H.  rs'ysl,  Melsens,  F.  Duprez,  G.  Dewaique  , 
H.  Maus,  M.  Gloesener,  F.  Doony,  Ch.  Montigny,  Steicheii, 
A.  Brialmont,  Éd.  Morren,  Éd.  Yan  Beneden,  C.  Malaise, 
membres-,  E.  Catalan,  associé;  Éd.  Mailly,  F.  Plateau, 
J.  De  Tilly,  F.  Crépin,  F.-L.  Cornet,  correspondants. 

2*"*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  id 


(  290  ) 
CORRESPONDANCE. 


La  classe  prend  officiellement  notitication  de  la  mort  de 
deux  de  ses  membres  titulaires,  appartenant  à  la  section 
des  sciences  naturelles  :  M.  le  vicomte  Bernard  du  Bus 
de  Gisignies,  décédé  à  Ems  le  6  juillet  dernier,  et 
M.  Charles  Poelman,  décédé  à  Uccle  le  17  du  même  mois. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  donne  lecture  des  lettres  de 
condoléance  qu'il  a  écrites  aux  familles  des  défunts. 

M.  Félix  Plateau  accepte  la  mission  de  retracer,  pour 
le  prochain  Annuaire,  la  vie  et  les  travaux  scientifiques 
de  M.  Poelman. 

M.  de  Selys  Longchamps  sera  prié  de  faire,  pour  le 
même  recueil,  la  notice  biographique  de  M.  le  vicomte 
Bernard  du  Bus. 

Ces  deux  notices  seront  accompagnées  des  portraits  des 
défunts. 

—  Le  comité  pour  l'érection  d'un  monument  à  Sylvain 
Yan  de  Weyer  adresse  une  liste  de  souscription.  La  classe 
fait  un  accueil  favorable  à  cette  liste. 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  écrit  qu'il  a  invité 
M.  Van  Oemberg  à  soumettre  à  l'appréciation  des  mem- 
bres de  l'Académie  le  modèle  du  buste  de  feu  le  colonel 
Dandelin. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  appelle  l'attention  de  ses 
confrères  sur  ce  modèle,  placé  dans  l'une  des  salles  de  la 
bibliothèque  de  la  Compagnie.  Les  membres  donnent  un 
avis  favorable  sur  la  ressemblance  de  ce  buste. 


(  291  ) 

—  M.  le  Ministre  fait  hommage  de  deux  ouvrages  qui 
seront  mentionnés  dans  le  Bulletin  de  la  séance.  —  Remer- 
cîmenls. 

—  MM.  Marion  et  de  Saporla  expriment  leurs  remer- 
cîments  pour  l'accueil  fait  à  leur  mémoire  Sur  Vétat  de  la 
végétation  à  l'époque  des  marnes  heersiennes  de  Gelinden  , 
dont  l'impression  a  eu  lieu  dans  le  tome  XXX Vil  des 
Mémoires  {in-4'')  des  savants  étrangers. 

—  M.  le  professeur  Cavalier,  d'Ostende,  envoie  son 
résumé  météorologique  pour  le  mois  de  juin  1874. 

—  La  Société  des  amis  des  sciences  naturelles  de  Berlin 
et  l'Université  de  Kiel  transmettent  leurs  derniers  tra- 
vaux. 

La  Société  précitée  de  Berlin,  ainsi  que  la  Société  zoo- 
logique de  Londres,  remercient,  parla  même  occasion, 
pour  l'envoi  des  dernières  publications  académiques. 

La  Société  d'Émulation  d'Abbeville  oflVe  le  volume  de 
ses  Mémoires  pour  les  années  1869-1872. 

— •  La  classe  prend  nolilication  d'une  lettre  de  M.  Wat~ 
tier,  négociant  à  Lille,  donnant  connaissance  de  l'exposé 
de  diverses  découvertes  scientifiques  qu'il  a  laites. 

—  Elle  reçoit  ensuite  ,  de  ses  membres,  les  hommages 
suivants  : 

i"  Note  sur  les  surfaces  orthogonales ,  par  M.  E.  Catalan  ; 
in-^"; 

2°  Note  sur  la  découverte  de  l'étage  du  calcaire  de 
Coiivin  ou  des  schistes  et  calcaires  à  calceola  sandalina 
dans  la  vallée  de  VHogneau,  par  M.^L  F.-L.  Cornet  et 
A.  Briart;  in -8"; 


(  292  ) 

M.  Catalan  présente,  au  nom  de  M.  B.  Boncompagni, 
un  exemplaire  des  deux  ouvrages  suivants  de  M.  Mansion  : 

1°  Cours  iVanalyse  de  l'école  polytechnique ,  par  M.  Cli. 
Hermile,  1"^"  partie,  compte  rendu  analytique;  in-8"; 
2"  Les  mathématiques  en  Belgique  en  18T2:;  in-8°; 

M.  Dewalque  offre,  au  nom  de  l'auteur,  M.  A.  von  La- 
saulx,  un  exemplaire  de  l'ouvrage  intitulé  :  Bas  Erdbeben 
von  Herzorjenralh  ani  22.  October  ISlo.  Ein  Beitrag  fur 
exakten  Géologie.  In-8". 

M.  Melsens  fait  hommage,  au  nom  des  auteurs,  des 
deux  ouvrages  suivants  : 

1"  Veber  die  Wirkung  des  Quecksilbers  auf  den  mensch- 
lichen  Organismus,  von  Dr.  Josef  Hermann,  K.  K.  Pri- 
mararzte  in  Wien.  Teschen,  1873;  1  cah.  in-4.°. 

2"  Les  engrais  chimiques  et  les  matières  fertilisantes 
à  V Exposition  universelle deVienne  en  ^873,  par  A.  Peter- 
mann,  docteur  en  sciences,  directeur  de  la  station  agri- 
cole de  Gembloux.  Bruxelles,  1874;  in-8^ 

La  classe  vote  des  remercîments  aux  auteurs  de  ces 
dons. 

—  Une  note  sur  la  polhodie,  par  M.  E.  Catalan,  sera 
insérée  à  la  suite  du  mémoire  présenté  par  ce  savant  dans 
la  dernière  séance. 

—  La  classe  renvoie  à  l'examen  de  commissaires  les 
travaux  manuscrits  suivants  : 

1°  Mémoire  couronné  sur  l'intégration  des  équations  , 
par  jM.  p.  Mansion,  revu  et  corrigé  à  la  demande  de 
la  classe.  —  Commissaires  :  MM.  Catalan ,  Folie  et 
DeTilly; 

2"  Note  historique  sur  J.-B.  Van  Helmonf,  à  propos  de 


(  293  ) 
la  définition  et  de  la  théorie  de  la  flamme,  par  M.  Mel- 
sens.  Rédaction  complétée  à  la  demande  des  commissaires 
chargés  d'en  faire  de  nouveau  l'examen,  MM.  Stas,  de  Ko- 
ninck  et  Donny; 

3"  Un  mot  à  propos  d'une  notice  du  comte  de  Rosse,  sur 
les  observations  de  Jupiter,  faites  en  1873,  par  M.  Terby. 
—  Commissaires  :  MM.  Ern.  Queleletet  Liagre; 

4"  Note  sur  deux  nouveaux  chlorures  d'acides  orga- 
niques,  par  M.  Walthère  Spring.  —  Commissaires  : 
MM.  Stas  et  de  Koninck  ; 

5°  Notice  sur  l'action  du  pentachlornre  de  phosphore 
sur  les  hyposul fîtes  inorganiques ,  par  le  même.  —  Com- 
missaires :  les  mêmes  académiciens; 

6°  Démonstration  d'un  théorème  de  Fermât,  par  M.  P.-A. 
Sinions.  —  Commissaires  :  MM.  Catalan  et  Folie; 

7"  Solution  de  deux  questions  de  permutations ,  par  le 
même.  —  Commissaires  :  les  mêmes  académiciens  ; 

8°  Mémoire  sur  un  moteur  électro-magnétique  à  arma- 
ture sans  fin,  par  M.  A.  Daussin.  —  Commissaires  : 
MM.  Gloesener,  Duprez  et  Montigny. 

—  La  classe  accepte  le  dépôt  d'une  lettre  de  M.  Wal- 
thère Spring  à  M.  Slas,  renfermant  le  paragraphe  suivant 
relatif  à  des  recherches  sur  la  chaleur  spécifique  des  corps: 

«  Bonn,  le  27  juillet  1874. 

»  ...  Je  viens  de  terminer,  la  semaine  dernière,  mes 
recherches  expérimentales  touchant  la  question  de  savoir 
s'il  existe  une  relation  entre  la  chaleur  spécifique  des  corps 
et  leur  augmentation  de  volume  par  la  chaleur.  Je  suis 
arrivé  à  de  très-beaux  résultats,  tant  au  point  de  vue  pra- 


(  "294  ) 

tique  qu'au  point  de  vue  théorique.  Ma  méliiode  de  déter- 
miner le  calorique  spéciliquedes  corps  me  donne  des  résul- 
tats excellents,  comme  vous  pourrez  vous  en  convaincre 
par  les  chiffres  suivants  : 

■>   Caloriciue  spécilique  du  mercure.     .     .  0,0ôô5  (Dulong  el  Pelil). 

—  —               ...  0,05351 2  (Spring). 
»  Calorique  specifuiue  du  gniphile.     .     .  0,-202  (RegiiauU). 

—  —  ...  0,20212  (Spring). 

»  Il  ressort  de  mes  résultats  que  la  chaleur  spécifique 
des  corps  est  une  fonction  de  leur  volume  spécifique,  de 
sorte  que  les  écarts  de  la  loi  de  Dulong  et  de  Petit  concer- 
nant la  chaleur  des  atomes  trouvent  leur  explication.  Le 
produit  que  l'on  obtient,  en  effet,  en  multipliant  le  calo- 
rique spécifique  d'un  corps  simple  par  un  poids  atomique 
ne  i>eut  pas  être  constant,  puisque  le  calorique  spécifique 
est  fonction  d'un  facteur  variable. 

»  Je  suis  occupé  pour  le  moment  à  rédiger  ce  travail; 
j'ai  encore  beaucoup  de  calculs  à  faire ^  mais  j'espère  néan- 
moins pouvoir  présenter  mon  mémoire  à  la  séance  pro- 
chaine de  l'Académie...   » 


RÉSULTATS  DU  CONCOURS  DE  1874. 


La  classe  a  reçu  quatre  mémoires  en  réponse  aux  ques- 
tions du  programme  de  concours  de  cette  année. 
Ces  mémoires  sont  : 

A.  Un  travail  intitulé  :  Classification  des  intégrales 
cubatrices  des  volumes  terminés  par  des  surfaces  algébri- 
ques,  en  réponse  à  la  première  question  :  Perfectionner 


(  295  ) 

en  quelque  point  important ,  soit  clans  ses  principes,  soit 
dans  ses  applications,  la  théorie  des  fonctions  d'une 
variable  imacjinaire. 

Ce  travail,  accompagné  d'un  billet  cacheté  portant  pour 
devise  :  iNe  rien  faire  contre  la  conscience  et  philosopher 
sans  souci  des  sots  ni  des  méchants,  est  renvoyé  à  l'exaraea 
de  MM.  Catalan,  Steichen  et  De  Tilly. 

B.  Un  mémoire  adressé  en  réponse  aux  deuxième  et 
troisième  questions  suivantes  du  concours  : 

2*^.  On  demande  une  discussion  complète  de  la  question 
de  la  température  de  l'espace,  basée  sur  des  expériences , 
des  observations  et  le  calcul,  motivant  le  choix  à  faire 
entre  les  différentes  températures  qu'on  lui  a  attribuées;  et 

5"  On  demande  une  étude  complète,  théorique  et,  au 
besoin,  expérimentale,  de  la  chaleur  spécifique  absolue  des 
corps  simples  et  des  corps  composés. 

Ce  travail,  revêtu  de  la  devise  :  Félix  qui  potuit  rerum 
cognoscere  causas  (Virgile),  sera  examiné  par  MM.  Mel- 
sens,  Folie,  Montigny  et  Stas. 

C.  Un  mémoire  ayant  pour  objet  l'étude  du  polymor- 
phisme (les  champignons,  formant  la  cinquième  question, 
posée  dans  les  termes  suivants  : 

Le  polymorphisme  des  champignons  attire  de  plus  en 
plus  l'attention  des  botanistes  et  des  physiologistes.  [1 
semble  même  devoir  fournir  des  éléments  nouveaux  à  la 
solution  du  problème  de  la  vie  en  général. 

On  demande  :  [°  un  résumé  critique  succinct  des  obser- 
vations connues  relativement  au  polymorphisme  des  Mucé- 
dinées; 


(  296  ) 

2°  La  détermination  exacte  —  ne  s'appliquerait-elle 
qu'à  une  seule  espèce  —  de  la  part  qui  revient,  d'abord,  à 
la  propre  nature  du  végétal  {à  son  énergie  spécifique) , 
ensuite  aux  conditions  extérieures  de  son  développement; 

3"  La  preuve  positive,  ou  la  négation  suffisante,  du  fait 
que  des  champignons  de  /èrmen;  (micrococciis,  zoogloea, 
palmella,leptothrix,  arthrococcus,  mycoderrna,  etc.),  dans 
des  circonstances  quelconques,  peuvent  se  transformer  en 
champignons  supérieurs. 

Ce  travail,  accompagné  de  dix  planches,  est  renvoyé  à 
MM.  Morren,  Bellynck  et  Éd.  Van  Beneden. 

Tl  porte  pour  devise  :  Pour  trouver  la  preuve  qu^in 
organisme  est  un  degré  de  développement  ou  un  produit 
d'un  autre  organisme ,  il  faut  examiner  la  continuité  orga- 
niciue  qui  doit  une  fois,  à  un  temps  donné,  exister  entre 
deux  états  de  développement  d'une  espèce. 

D.  Un  mémoire  en  réponse  à  la  sixième  question,  ainsi 
conçue  :  Faire  connaître,  notamment  au  point  de  vue  de 
leur  composition,  les  roches  pluloniennes  ou  considérées 
comme  telles  de  la  Belgique  et  de  VArdenne  française. 

Ce  travail,  accompagné  d'un  cahier  de  planches  et  de 
deux  photographies,  a  comme  devise  :  Quo  exactius  intro- 
spicies  ipsas  corporum  partes,  cominus  de  origine  dubi- 
tabis  (Leibniz,  Protog.^a  ,  XXV);  il  sera  examiné  par 
MM.  Dewalque,  de  Koninck  et  Malaise. 


(  297  ) 


RAPPORTS. 

Note  sur  les  tremblements  de  terre  en  187  J ,  avec  supplé- 
ment pour  les  années  antérieures ,  de  1843  à  1810  ;  par 
M.  Alexis  Perrey. 

MSriftt'Oi't  rfe  JM.  Bit/tt'e:. 

«  En  continuant  de  recourir  à  l'aide  de  ses  nombreux 
correspondants,  parmi  lesquels  il  cite  :  MM.  Ant.  d'Abbadie, 
de  l'Institut  de  France,  Ch.  Ritter,  ingénieur  français  à 
Constantinople ,  le  Dr.  Savatier,  médecin  principal  de  la 
marine  française  au  Japon ,  Fr.  Tirel ,  administrateur  du 
canal  d'Ochusuma  au  Pérou,  Buiard,  directeur  de  l'Obser- 
vatoire d'Alger,  Roué  et  Jelinek,  de  Vienne,  Dieffenbach, 
de  Darmstadt,  Guiscardi,  de  Naples,  Conti,  de  Cosenza, 
Grassi,  d'Acireale,  le  Dr.  A.  Rojas,  de  Caracas,  Dana,  de 
New-Haven,  W.  Martin,  ministre  du  royaume  hawaïen  à 
Paris,  Andrès  Poey,  de  la  Havane,  et  notamment  Albert 
Lancaster,  de  Bruxelles,  et  mettant  à  contribution  les  mé- 
moires et  les  écrits  périodiques  de  MM.  Richard  Hayes, 
Rossi,  Palmieri,  Serpieri,  Falb,  Suess,  Fuchs,  WoH",  >yild 
et  de  M""'  Caterina  Scarpellini,  M.  Perrey  a  réuni  dans  le 
travail  qu'il  présente  à  l'Académie  les  dates  et  les  lieux  des 
tremblements  de  terre  ressentis,  en  différents  points  du 
globe,  pendant  l'année  1871,  Afin  de  compléter  ses  catalo- 
gues publiés  de  !8io  à  1870,  il  rapporte,  dans  la  première 
partie  de  sa  communication,  les  renseignements  qu'il  a  pu 
se  procurer  an  sujet  de  nouvelles  secousses  relatives  à  ces 


(  298  ) 

années  antérieures  et  qui  n'avaient  point  encore  été  men- 
tionnées. 

Le  travail  de  M:  Perrey  me  paraît  mériter  l'approbation 
et  les  remercîmenls  de  l'Académie,  et  j'ai  l'honneur  d'en 
proposer  l'insertion  dans  le  Recueil  des  Mémoires  in-S".  » 

Rupitot't  tie  .9g.  Êiftt.  ffiteleleS. 

«  Le  Mémoire  sur  les  tremblements  de  terre  que 
M.  Perrey  présente  à  l'Académie  est  le  XXIX^  relevé 
annuel  d'une  série  non  interrompue  depuis  1845.  J'ai 
déjà  précédemment  fait  ressortir  l'intérêt  qui,  selon  moi, 
s'attache  à  une  description  exacte  des  phénomènes  séis- 
miques  et  volcaniques  qui  se  manifestent  à  la  surface  de 
notre  globe.  Je  me  rallie  donc  avec  plaisir  aux  conclusions 
du  rapport  de  notre  savant  confrère  M.  Duprez,  en  propo- 
sant de  voter  des  remercîments  à  l'auteur  et  d'imprimer 
son  intéressant  travail  dans  le  Recueil  des  Mémoires.  » 

Rapport  de  .fi,  Mtailly. 

«  Je  ne  viens  pas  m'opposer  aux  conclusions  de  mes 
honorables  confrères  :  la  classe  a,  d'ailleurs,  décidé  la  der- 
nière fois  qu'il  a  été  question  des  Relevés  de  tremblements 
de  terre  de  M.  Perrey,  qu'elle  continuerait  à  imprimer  ces 
relevés. 

Je  n'ai  jamais  contesté  l'intérêt  des  notes  de  M.  Perrey  : 
je  me  suis  borné  à  critiquer  la  forme  qu'il  leur  donnait;  il 
ne  me  paraissait  pas  difficile  de  les  rendre  plus  courtes  et 
plus  commodes  à  consulter. 

J'aurais  désiré  qu'on  pût  éviter  les  suppléments  trop 
considérables,  et  j'indiquais  à  cet  effet  un  moyen  très- 


(  299  ) 
simple  et  dont  tout  le  monde  se  serait  bien  trouvé,  l'Aca- 
démie, les  savants  et  M.  Perrey  lui-même  :  il  consistait  à 
mettre  un  plus  long  intervalle  entre  la  publication  des 
relevés. 

Comme  jusqu'ici  on  ne  paraît  pas  avoir  fait  usage  des 
renseignements  recueillis  avec  tant  de  soin  et  de  peine  par 
l'honorable  professeur,  il  n'y  aurait  aucun  inconvénient  à 
rendre  les  documents  d'une  année  aussi  complets  que  pos- 
sible avant  de  les  livrer  à  l'impression. 

La  noie  que  M.  Perrey  vient  de  nous  présenter  est  di- 
visée en  deux  parties,  dont  la  première  contient  les  Sup- 
pléments de  I8i5  à  1870,  et  la  secoude,  les  Tremblements 
de  terre  de  1871  ;  or  l'une  de  ces  parties  est  aussi  volumi- 
neuse que  l'autre. 

Je  sais  bien  que  la  longueur  des  suppléments  prouve  en 
faveur  de  l'auteur  et  du  soin  qu'il  apporte  à  ne  laisser 
échapper  aucun  tremblement  de  terre;  mais  elle  rendra 
aussi  la  mise  en  œuvre  des  documents  qu'il  rassemble, 
assez  pénible,  et,  à  propos  de  cette  mise  en  œuvre,  je 
demanderai  à  la  classe  si  elle  ne  croirait  pas  opportun  de 
faire,  de  la  question  des  tremblements  de  terre,  une  ques- 
tion de  concours.  Jusqu'à  présent  les  relevés  de  M.  Perrey 
constituent  un  capital  improductif,  qu'il  serait  temps  de 
faire  valoir.  » 

Conformément  aux  conclusions  favorables  des  rapports 
de  ses  commissaires,  la  classe  vote  l'impression  du  travail 
de  ^1.  Perrey  dans  le  recueil  des  Mémoires  in-8°  et  décide 
d'adresser  des  remercîments  à  l'auteur  pour  son  intéres- 
sante communication. 


(  500  ) 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Nouvelles  recherches  sur  la  fréquence  de  la  scintillalion 
des  étoiles  dans  ses  rapports  avec  la  constitution  de  leur 
lumière,  d'après  V analyse  spectrale;  par  M.  Cli.  Mon- 
tigny ,  membre  de  TAcadémie. 

Dans  un  Iravai!  récent,  j'ai  montré  que  les  étoiles  dont 
les  spectres  sont  caractérisés  par  des  bandes  obscures  et  des 
raies  noires,  scintillent  moins  que  les  étoiles  à  raies  spec- 
trales fines  et  nombreuses,  et  beaucoup  moins  que  celles 
dont  les  spectres  se  distinguent  surtout  par  quelques  raies 
principales  (').  Ces  différences  marquées  ont  été  déduites 
du  rapprochement  que  j'ai  établi  entre  la  fréquence  numé- 
rique de  la  scintillation  de  quarante  et  une  étoiles,  et  la 
constitution  de  la  lumière  spectrale  de  ces  astres,  qui  ap- 
partiennent respectivement  aux  trois  premiers  types  suivant 
lesquels  le  P.  Scccbi  a  classé  un  grand  nombre  d'étoiles, 
d'après  les  caractères  généraux  de  leurs  spectres.  J'ai  expli- 
qué la  raison  des  différences  entre  les  intensités  moyennes 
de  la  scintillalion  relatives  à  ces  trois  types  en  m'appuyant 
sur  ce  (ait  incontestable,  que  les  rayons  stellaires,  dans 


(*)  La  fréquence  des  variations  de  couleurs  des  étoiles  dans  la  scintil- 
lation est  généralement  en  rapport  avec  la  constitution  de  leur  lumière, 
d'après  l'analf/se  spectrale.  {Hv^l^tis  de  l'Académie  royale  de  Belgique, 
2«  série,  t.  XXXVII.  Février  1874.) 


(  501  ) 
leur  dispersion  par  l'air  atmosphérique,  présentent  entre 
eux  des  lacunes  qui  sont  d'autant  plus  nombreuses  et  rela- 
tivement plus  ouvertes,  que  les  étoiles  d'où  ces  rayons 
émanent,  sont  caractérisées,  dans  leurs  spectres,  par  des 
raies  ou  des  zones  obscures,  plus  nombreuses  et  plus 
larges.  La  conséquence  de  ce  fait,  c'est  que  la  privation 
d'un  grand  nombre  de  rayons  lumineux  dans  le  faisceau 
provenant  d'une  étoile,  qui  est  étalé  par  dispersion  dans 
l'atmosphère,  diminue  nécessairement  la  fréquence  de  la 
scintillation  de  cet  astre,  comparativement  à  celle  qui 
caractérise  des  étoiles  plus  riches  en  rayons  de  lumière. 

J'ai  dit,  dans  ce  travail,  que  cette  étude  était  un  premier 
pas  vers  une  solution   plus  complète  de  cette  question 
tout  à  fait  nouvelle,  et  que  pour  la  résoudre  entièrement, 
il  y  aurait  à  considérer,  non-seulement  le  nombre  de  raies 
des  spectres  stellaires ,  mais  leur  largeur  et  surtout  l'obscu- 
rité plus  ou  moins  absolue  des  raies  et  des  zones  ou  bandes 
qui  caractérisent,  d'une  manière  si  remarquable,  plusieurs 
de  ces  spectres.  Faute  de  documents  indispensables,  je  me 
voyais  obligé  de  différer  un  travail  complémentaire  du  pre- 
mier, dans  lequel  ces  comparaisons  particulières  eussent  été 
traitées.  Mais  depuis  la  publication  de  mes  premières  recher- 
ches, le  P.  Secchi  a  eu  l'extrême  obligeance  de  m'envoyer 
ses  mémoires  où  sont  exposés  tout  à  la  fois  ses  procédés 
d'analyse  spectrale  des  corps  célestes  et  les  caractères  par- 
ticuliers des  spectres  d'un  grand  nombre  d'étoiles,  des 
principales  planètes  et  de  plusieurs  nébuleuses.  Grâce  à  ces 
indications,  si  piécieuses  pour  moi  au  point  de  vue  de  mes 
recherches,  je  puis  montrer  actuellement  que  la  connexion 
entre  la  fréquence  de  la  scintillation  des  étoiles  et  les  carac- 
tères de  leurs  spectres  s'accuse  tout  aussi  bien  à  l'égard  de 


(  502  ) 

chaque  étoile  comparée  à  toutes  celles  qui  composent  avec 
celle-ci  un  même  type  spectral,  que  d'après  les  moyennes 
générales  relatives  aux  trois  types,  qui  ont  été  les  bases 
principales  de  mon  premier  travail  comparatif. 

Tel  est  Tobjet  des  nouvelles  recherches  que  j'ai  l'hon- 
neur de  présenter  à  l'Académie. 

Avant  d'exposer  ces  recherches,  je  donnerai  d'abord 
quelques  indications  générales  sur  la  manière  dont  les 
principaux  caractères  des  spectres  des  étoiles  sont  présen- 
tés dans  les  travaux  du  P.  Secchi.  Ces  indications  sont 
d'autant  plus  nécessaires  ici,  que  ces  mémoires  étant  écrits 
en  langue  italienne,  il  convient  de  faire  voir  que  les  carac- 
tères de  chaque  spectre  stellaire  sont  fidèlement  interpré- 
tés sous  une  forme  très-concise,  ahn  de  limiter  l'extension 
du  tableau  oîi  ces  caractères  seront  mis  en  parallèle  avec 
l'intensité  numérique  de  la  scintillation  de  chaque  étoile  (*). 

Dans  son  premier  travail,  le  P.  Secchi,  après  avoir  dé- 
crit ses  appareils  et  sa  méthode  d'observation,  indique  les 
caractères  distinctifs  des  trois  premiers  types  auxquels  il 


(')  Voici  les  litres  des  mémoires  du  P.  Secchi  sur  l'analyse  spectrale  des 
corps  célestes  : 
I.  Memoria  sugli  spetlri  prismatici  délie  slelle  fisso  ;  estratta  dagii  Atti 

délia  Societa  Italiaiia  dei  XL,  série  III.  Tomo  I.  Parte  I. 
H.  Catalogo  délie  stelle  di  cui  si  è  delenninalo  lo  speltro  luminoso  alV 

osservntorio  del  Coltegio  romano  ;  eslratto  dalle  Memorie  délia 

societa  Italiaiia  dei  XL, 3»  série,  vol.  I,  1867. 
IIL  Memoria  seconda  sugli spettri  prismatici  délie  stelle  fisse,  presentata 

alla  Societa  Italiaiia  nel  novembre  del  1868. 
IV.  Memoria  Sugli  spettri  prismatici  de''  corpi  celesti;  eslratto  dagli 

Atti  deir  Accademia  pontificia  de'  nuovi   lincei,  auno  XXV,  ses- 

sione  IV^,  del  24  marzo  1872. 


(  505  ) 
rapporte  les  spectres  slellaires  qu'il  a  analysés;  puis  il 
classe  suivant  chacun  de  ces  types  les  trois  cent  seize 
étoiles  qu'il  a  étudiées  jusque-là.  Le  second  mémoire 
est  un  catalogue  des  mêmes  étoiles  réunies  par  constella- 
tion. Ce  travail  est  sans  contredit  celui  du  savant  italien 
qui  m'a  été  le  plus  utile,  à  cause  des  indications  géné- 
rales qu'il  donne  le  plus  souvent  sur  la  quantité  de  raies 
spectrales  pour  chaque  étoile,  sur  leur  intensité  et  la 
manière  dont  les  plus  larges  sont  limitées  vers  leurs  bords, 
et  enfin  sur  l'étendue  et  la  constitution  des  bandes  obscures 
qui  caractérisent  les  spectres  des  étoiles  du  troisième  type. 

Dans  les  mémoires  II!  et  IV,  le  P.  Secchi  complète  les 
données  du  précédent  à  l'aide  d'observations  plus  récentes, 
qui  précisent  et  perfectionnent  les  premières.  Il  est  arrivé, 
par  exemple,  que  les  dernières  recherches  ayant  eu  lieu 
dans  des  conditions  de  notre  atmosphère  plus  favorables, 
le  P.  Secchi  a  reconnu  que  les  bandes  spectrales  de  cer- 
taines étoiles  du  troisième  type,  qui  semblaient  continues 
lors  des  premières  observations,  sont  en  réalité  résolubles 
en  raies  distinctes.  Dans  un  cas  semblable,  j'ai  surtout  pris 
en  considération  les  indications  contenues  dans  les  deux 
derniers  mémoires,  afin  de  les  présenter  sous  une  forme 
concise  dans  le  tableau  dont  il  sera  question  plus  loin. 

11  n'est  pas  sans  intérêt  de  citer  ici,  comme  un  des 
exemples  remarquables  des  différences  que  deux  séries 
d'observations  ont  pu  présenter,celui  de  l'étoile  Aldébaran, 
car  il  tend  à  nous  montrer  que,  très-probablement,  la  con- 
stitution de  la  lumière  spectrale  de  cette  étoile  éprouve  des 
changements  caractéristiques  à  des  intervalles  de  temps 
assez  rapprochés.  Avant  l'année  1867,  le  spectre  d'Aldé- 
baran  présentait  des  raies  larges,  non  nébuleuses,  mais 


(  304  ) 

nettement  tranchées,  et  qui  ne  se  réunissaient  pas  de  ma- 
nière à  constituer  de  véritables  zones.  A  la  fin  de  cette 
même  année,  le  P.  Secclii  constata  dans  le  spectre  de  celte 
étoile  l'existence  de  zones  qu'il  n'y  avait  point  vues  l'année 
précédente,  et  qui  lui  donnaient  alors  l'apparence  d'un 
spectre  à  cannelures.  D'après  ce  savant,  ces  changements 
d'aspect  du  spectre  d'Aldébaran  seraient  en  rapport  avec 
ses  variations  de  nuance  que  la  teinte  rouge  de  cette  étoile 
éprouverait  (*). 

Je  ferai  remarquer  qu'en  présence  des  faits  dont  il  vient 
d'être  question,  Aldébaran,  qui  sert  de  transition  entre  le 
deuxième  et  le  troisième  type  selon  l'auteur,  doit  conserver 
nécessairement  la  place  que  je  lui  ai  donnée  dans  ce  der- 
nier. 


(')  Voici  en  quels  lermes  le  P.  Secchi  caractérise  ces  changemenls  que 
le  speclre  d'Aldébaran  lui  a  montrés  : 

II.  Mémoire,  p.  50  :  «  *  Toro.  Magnifico  tipo  a  righa  mediocremenle 
«  larglie  perô  non  a  zone.  Le  riglie  sono  larglie,  ma  non  nebulose,  ne  in 
«  fondo  semilucido,  ma  taglienti.  Essa  sla  un  posto  prima  di  Arluro  per 
>'  la  facilita  di  decomposizione;  il  sodio  è  nello  quanto  nel  Sole,  ma  fina  è 
o  la  sua  riga.  Ve  ne  sono  alcune  comuni  col  Sole,  ma  altre  particolari  a 
«>  quesla  Stella  elle  mérita  molto  studio...  » 

III.  Mémoire,  p.  33.  «.  Aldébaran  a.  Toro.  Lo  spettro  di  quesla  slella  fu 
»  dalo  iiella  prima  memoria.  Essa  è  rossa  assai  quest'  anno,  e  impicciolila. 
»  Lo  spellro  moslra  adesso  trace  di  zone  che  non  vidi  Tanno  scorso.  Essa 
»  è  tipo  a  colonnato,  et  Tanno  scorso  non  lo  era.  É  cio  dovuto  alla  varia- 
»  zione  del  certamente  (15  décembre  1867). 

»  Esaminala  di  uuovo  sotto  questo  lispetto  ai  24  marzo  1868,  e  veduto 
»  che  nel  verde  vi  sono  le  righe  caralterisliche  del  terzo  tipo,  e  molto  uello, 
»  è  il  sodio.  Essa  è  rossa  decisa ,  e  certamente  non  è  senza  relazione  col 
»  colore  l'apparenza  non  dublia  die  olonnalo  clie  ora  essa  présenta.  (Vedi 
»  la  I  memoria).  Essa  in  somma  è  corne  Arturo,  cioè  del  tipo  délie  arancie: 
»  Tanno  scorso  non  si  vedevano  le  zone  e  quest'  anno  si.  Quiudi  una  sor- 
»  génie  di  variabilità  nelle  sielle.  » 


(  305  ) 

Le  P.  Secchi  caractérise  nettement  les  différences  que 
présentent  entre  elles  soit  les  raies  ou  lignes,  soit  les  zones 
ou  bandes  spectrales.  Pour  certains  astres,  les  unes  et  les 
autres  sont  vigoureusement  tracées  et  nettement  limitées 
sur  leurs  bords;  chez  d'autres,  au  contraire,  leur  ensemble 
présente  une  apparence  nébuleuse,  ou  bien,  leur  teinte 
ne  s'adoucit  et  ne  s'efface  que  sur  les  bords  de  ces  raies 
et  de  ces  bandes.  11  importe  de  tenir  compte  de  différences 
semblables  au  point  de  vue  de  la  connexion  qui  nous  oc- 
cupe. En  effet,  toute  lacune  correspondant  à  une  raie  ou 
à  une  zone  spectrale  parfaitement  obscure,  qui  sépare, 
dans  notre  atmosphère,  des  rayons  lumineux  originaires 
de  la  même  étoile,  ne  contiendra  aucun  rayon  qui  abou- 
tisse à  l'œil  de  l'observateur.  Mais,  si  la  raie  ou  la  zone 
est  plus  ou  moins  nébuleuse,  et  qu'elle  présente  ainsi  des 
points  d'émanation  de  lumière  plus  ou  moins  faible,  la 
lacune  qui  correspond  ,  entre  les  rayons  arrivant  à  l'obser- 
vateur, à  cette  partie  nébuleuse,  sera  traversée  par  des 
rayons  lumineux.  Or,  d'après  ce  que  j'ai  dit  dans  mon  pre- 
mier travail,  la  scintillation  d'une  étoile  doit  être  d'autant 
plus  fréquente,  toutes  choses  égales  d'ailleurs,  que  les 
lacunes  qui  séparent  ses  rayons  dispersés  par  l'atmosphère, 
sont  non-seulement  plus  étroites  et  moins  nombreuses, 
mais  qu'elles  sont  traversées  par  un  plus  grand  nombre  de 
rayons  lumineux. 

L'auteur  précise,  quand  cela  est  possible,  les  substances 
que  certaines  raies  des  spectres  des  étoiles  caractérisent, 
et  il  en  conclut  leur  présence  dans  ces  astres.  Je  n'ai  point 
jugé  nécessaire  de  citer  ces  indications  spéciales  dans  le 
tableau  suivant,  malgré  leur  importance  à  tout  autre  point 
de  vue. 

2"*  SÉRIE,  TOME  XXXYIII.  20 


(  506  ) 

On  sait  que  dans  le  but  de  simplifier  la  classification 
des  spectres  stellaires,  le  P.  Secchi  les  a  rapportés  à  quatre 
types,  dont  trois  principaux.  Les  caractères  distinctifs  de 
ces  derniers  ont  été  précisés,  dans  mon  premier  travail, 
par  des  indications  que  j'ai  empruntées  à  l'auteur  lui- 
même.  Ils  le  seront  de  nouveau  à  l'aide  des  indications 
suivantes  que  je  crois  utile  de  donner  ici  à  l'égard  des 
spectres  d'à  de  la  Lyre,  de  Pollux  et  d'à  d'Hercule,  les 
trois  étoiles  typiques  que  l'auteur  cite  comme  présentant 
respectivement  les  caractères  spéciaux  de  chacun  des  trois 
groupes  principaux.  Aussi  se  borne-t-il  parfois  à  dire  que 
telle  étoile  se  rapporte  parfaitement  au  type  spectral  d'à  de 
la  Lyre  {Tipo  die  Lira  perfetto,  puro,  précisa ,  ben  netlo...) 
sans  donner  d'autre  indication  sur  son  spectre. 

Wéga  ou  a  de  la  J^yre,  l'exemple  le  plus  remarquable 
du  premier  type  parmi  le  grand  nombre  des  étoiles  qui  le 
composent,  présente  un  spectre  continu  où  l'on  distingue 
d'abord  quatre  grandes  raies  noires,  placées  respectivement 
dans  le  rouge,  le  vert  bleu,  le  violet  et  le  violet  extrême, 
puis  de  nombreuses  raies  fines  particulièrement  dans  le 
vert. 

Pollux  est  l'étoile  qui  caractérise  le  mieux  le  deuxième 
groupe ,  puisque,  selon  le  P.  Secchi,  son  spectre  ressemble 
parfaitement  à  celui  du  Soleil  par  ses  raies  fines  et  nom- 
breuses, dont  les  principales  coïncident  avec  celles  du 
spectre  solaire. 

L'étoile  typique  du  troisième  groupe,  «d'Hercule,  pré- 
sente un  spectre  à  raies  noires  et  à  bandes  obscures  très- 
caractéristiques.  La  succession  de  ces  raies  et  de  ces  bandes, 
que  séparent  d'ailleurs  des  lignes  très-claires,  donne  à  ce 
spectre  l'aspect  d'une  série  de  colonnes  juxtaposées  et 


BulLebn  de  l 'Aca-dàniji 


ToT,u.Jcaym. 


Fàj  I  ^  i"'  Ti/pc .    .^  de  Ul  I.tjii;  ,  Réoidus  ,  elc 


f  D 


Fiq.  2.  _  2'""  Tijpc .  le  Si'/ff/ ,  f'ollii.i .  (a    Clicvrc  ,  etc. 


IllIlllliilillPI 


1  I'  :i'  ■  l'J'iii  iii'i  liJii    llj  ii'i'i  ilb    il  'rXAÀ .lli.i.ti:  'lii" :ll'":liiiillii:.:  I  iiii:ii  ,.ii,i,..  ni-1  i diil 


A        B  {■  D 


EA  F 


Fig  3.^3'""  Type  :  ..'    d  Hercule  ,  Hctelgeus-e  ,  cfc ... 


Luit  y*  ^'vrionaju,  Toovey.B^'ux- 


cTperlrcs    du  J'oted  et  des  Etudes. 


(307  ) 

éclairées  de  côté.  Les  lignes  de  séparation  de  celte  colon- 
nade sont  très-noires,  et  se  détachent  parfaitement  des 
tranches  éclairées,  qui  présentent  d'ailleurs  la  lumière  la 
plus  vive  du  côté  du  rouge. 

Les  spectres  typiques  de  ces  trois  premiers  groupes  sont 
flgurés  dans  la  planche  qui  accompagne  ce  travail. 

Dans  le  tableau  suivant,  jemets  en  parallèle  l'intensitéou 
la  fréquence  de  la  scintillation  des  quarante  et  une  étoiles 
que  j'ai  observées,  et  les  caractères  les  plus  remarquables 
de  leurs  spectres.  Rappelons  ici  que  la  fréquence  de  la  scin- 
tillation de  chaque  étoile  exprime  le  nombre  de  variations 
de  couleurs  qu'elle  éprouve,  en  moyenne,  par  seconde, 
à  60"  de  distance  zénithale,  d'après  un  ensemble  d'obser- 
vations et  une  méthode  de  calcul  que  j'ai  exposés  dans 
mon  premier  travail.  Quant  aux  caractères  du  spectre  de 
chacun  de  ces  astres,  ils  résument  d'une  manière  très- 
concise,  mais  très-précise,  les  indications  contenues  dans 
les  mémoires  du  P.  Secchi. 


(  308  ) 

Tableau  comparatif  de  la  fréquence  de  la  scintUi^,-   \ici  étoiles 


509  ) 


avec  les  caractères  de  leurs  spectres. 


Proinler  type. 

Éioiles  à  spectre  présentant  quatre  raies  principales. 


ktoii.es 


e  de  la  grande  Ourse, 
(fldela  grande  Ourse. 
Procyon.    .    .    . 
a  de  la  Lyi'c  (Wéga; 
a  d'Andromède  . 

Ç  lie  la  Jurande  Ourse. 
T' de  la  grande  Ourse. 


Caractères  du  spectre. 


lU-gulus 


Allair 


a  d'Ophiucus  .    .    . 

Algoiil    .... 
X  du  l'i^iiase    .    .     . 
rdcPégase    .    .     . 

Castor 

(X  delà  Oouniuno.    . 
^  de  la  grande  Ourse. 


Moyenne  . 


411 
40i 
ion 
98 
92 

88 
87 


82 


.''peclre  typique  très-pur. 

Spectre  typique  parfait. 

Spectre  typique,  raies  fines  très-nombreuses 

Spectre  type. 

Raies  fortes  dans  le  bleu  et  le  violet,  raies 
fines  nombreuses  dans  le  vert;  traces  de 
lignes  semblables  dans  lejaune  et  dans  le 
rouge,  qui  est  parfois  peu  apparent. 

Raie  F  assez  forte  dans  le  bleu. 

Raies  larges  et  nébuleuses,  sauf  la  raie  F 
qui  est  bien  nette. 

Raie  F  élargie  en  zone  noire,  lignes  fines 
dans  le  vert;  le  rouge  est  peu  apparent 
dans  le  spectre. 

Raies  principales  bien  accusées  dans  lejaune 
et  le  violet  ;  lignes  fines  nombreuses  parti- 
culièrement dans  le  vert. 

Raie  y  du  violet  large  et  bien  accusée;  raie 
F  nébuleuse  sur  ses  bords;  zones  légères 
dans  le  vert. 

Raies  principales  nettement  accusées  dans 
le  vert ,  le  bleu  ,  le  violet. 

RaiesF  et  V  très  marquées ,  lignes  fines  dans 
d'autres  parties  du  spectre. 

Raie  F  ordinaire;  beaucoup  de  lignes  fines, 
mais  laibles,  qui  rapprochent  ce  spectre  du 
type  solaire. 

Raie  F  élargie  en  zone  à  bords  nébuleux. 
Reauroup  de  raies  fines  dans  le  vert  ; 
manque  de  lumière  à  l'extrémité  du  violet. 

Raie  V  du  violet  encore  distincte. 

La  raie  F  est  diffuse;  d'autres  raies  s'élar- 
gissent aussi  en  zones. 


Étoiles  à  raies  fiju  à  b»"'"^*  ^^'^^''- 


La  Chèvre 


a  du  Bélier  . 
B  du  Taureau 

/3  d'Hercule. 

0  du  Lion    . 

/3  du  Serpent 
X  du  Verseau 

7  d'Orion    .    , 


y  d'Orion  (Rigel). 


X  d'Orion. 


Moyenne 


araclères  du  spectre. 


Troisième  type. 

Étoiles  à  bandes  nébuleuses  et  ii  raies  noires. 


ÉTOILES. 


et  V  perceptibles 
upes  de  raies  fines  dans 
■rtet  dans  d'autres  parties 
ipeclre. 

Spectre  type. 

Raie  F  prononcée,  mais  plus 
étroite  que  dans  le  premier 
type.  Traces  de  zones  dans  le 
violet. 

Raies  fines  nombreuses.  La  raie 
F  est  composée  de  plusieurs 
lignes  semblables.  Le  rouge 
du  spectre  est  étroit. 

Raies  fines  très-nombreuses, 
très-distinctes  et  distribuées 
comme  dans  le  spectre  so- 
laire; mais  elles  sont  moins 
délices  que  celles  de  Pollux. 

Raie  F  étroite,  raies  fines  très- 
nombreuses. 

Ligne  V  distincte  dans  le  vio- 
let; raies  fines  dans  le  vert. 
Le  rouge  du  spectre  est  étroit 
et  le  vert  prédomine. 

ieaucoup  de  raies  fines;  le 
vert  prédomine. 

RaiesF  et  V;  la  première  parait 
nébuleuse. 


Beau  groupe  de  raies  fines  dans 
le  vert  ;  raies  diverses  dans 
lejaune. 

La  raie  F  est  étroite ,  mais  bien 
accusée.  La  raie  nuire  V  est 
perceptible  dans  le  violet. 
Une  multitude  de  raies  fines 
sillonnent  le  spectre,  où  le 
rouge  manque. 

Raie  F  étroite  ,  mais  bien  accu- 
sée. Multitude  de  raies  très- 
iines  et  variées.  Le  vert  du 
spectre  prédomine  et  le  rouge 
est  très-étroit. 

Raies  fines  nombreuses,  teinte 
verte. 


P  de  Persée . 


j3  de  Pégase. 


a  d'Orion  (Bétel- 
geuse.).    .    .    . 


Aldébaran 


Avcturus .    .     . 
(3  d'Andromède  . 


a  de  la  Baleine. 

Antarès  .    .     . 


a  d'Hercule. 
£  de  Pégase . 

ce  du  Serpent 


Moyenne. 


70 


66 


Caractères  du  spectre. 


Spectre  traversé  par  des  zones  ou  bandes 
disposéesen  cannelures , qui  lui  donnent 
l'aspect  d'uneoolonnaderappelant  ainsi, 
mais  en  miniature,  le  spectre  encore 
mieux  caractérise  d'jc  d'Orion.  Les 
zones  sont  résolubles  en  raies  distinctes. 

Les  bandes  du  spectre  lui  donnent  l'appa- 
rence d'une  colonnade  comme  a  d'Her- 
cule; mais  elles  se  résolvent  plus  aisé- 
ment en  raies  fines. 


Spectre  remarquable  par  ses  zones  larges 
et  nombreuses,  aisément  résolubles  en 
raies  noires.  Les  principales  occupent 
les  mêmes  positions  que  dans  le  spectre 
d'j:  d'Hercule.  Les  zones  et  les  raies 
sont  séparées  par  des  bandes  lumineuses 
se  détachant  sur  un  fond  peu  éclairé. 

L'aspect  du  spectre  est  changeant  ;  il  n'a 
présenté  d'abord  que  des  raies  nom- 
breuses et  nettement  tranchées;  mais  il 
montra  ensuite,  en  outre  de  ces  raies, 
des  zones  obscures  ,  qui  lui  donnaient 
l'aspect  d'une  colonnade. 

Raies  nombreuses  très- fortement  accusées, 
■nais  qui  ne  sont  point  réunies  en  zones. 

Spectre  ii  raies  fines  parfaitement  dis- 
tinctes, qui  sont  groupées  parfois  en 
zones  séparées.  La  raie  F  se  trouve  dans 
une  de  ces  parties  obscures. 

Zones  di*posées  en  colonnade;  mais  elles 
sont  résolubles  en  raies  fines. 

Zones  spectrales  larges  et  variées, présen- 
tant des  raies  prononcées. 

Spectre  type. 

Raies  fines  Irc-nomhreuses,  réunies  en 
zones  sur  un  fond  peu  lumineux. 

Zones  à  raies  fines  nombreuses;  lumière 
faible  Zones  foncées  à  leurs  places 
ordinaires. 


(510) 

Voici  les  principales  conséquences  qui  résultent  de  ce 
tableau  : 

i°  Les  deux  étoiles  dont  les  spectres  ont  été  choisis 
comme  types  respectifs  du  premier  et  du  deuxième  groupe, 
et  celles  qui,  dans  chacun,  s'en  rapprochent  le  plus  sous 
le  rapport  de  leurs  spectres,  s'y  distinguent  aussi  par  les 
scintillations  les  plus  fréquentes; 

2°  Dans  la  troisième  subdivision,  l'étoile  y.  d'Hercule, 
qui  en  est  le  type  à  cause  de  son  spectre  à  zones  des  plus 
nombreuses  et  des  plus  larges,  est  une  des  étoiles  dont  la 
scintillation  est  la  plus  faible ,  non-seulement  à  l'égard  de 
ce  groupe,  mais  parmi  toutes  les  étoiles  que  j'ai  observées; 

5°  Les  étoiles  qui  figurent  à  la  fin  du  premier  type  et 
qui  scintillent  beaucoup  moins  que  celles  placées  en  tête 
de  cette  série,  se  distinguent,  en  général ,  de  ces  dernières 
par  des  raies  spectrales  plus  nombreuses.  En  outre,  parmi 
les  étoiles  placées  à  la  fin  du  groupe,  yj  de  la  grande  Ourse 
et  Castor  sont  caractérisées  par  des  lignes  spectrales  qui 
s'élargissent  en  zones  plus  ou  moins  diffuses.  Remarquons 
aussi  que  le  violet  extrême  manque  de  lumière  dans  le 
spectre  de  Castor; 

4"  Si,  dans  le  second  type,  nous  exceptons  les  trois 
étoiles  d'Orion  qui  fopment  une  subdivision  à  part  d'après 
le  P.  Secchi ,  et  pour  lesquelles  le  rouge  manque  presque 
entièrement,  les  raies  spectrales  de  la  seconde  moitié  de 
ce  type  sont  très-nombreuses  et  parfois  réunies  en  groupe, 
comme  a  du  Verseau  nous  le  montre; 

5"  Toutes  les  étoiles  du  troisième  type,  sauf  Arclurus 
dont  les  raies  nombreuses  et  fortement  accusées  ne  se 
réunissent  pas  en  bandes,  sont  remarquables  à  cause  de 
leurs  spectres  à  zones  obscures,  de  largeurs  différentes,  et 
dont  les  lignes  de  séparation  lumineuses  ou  foncées  sont 
très-prononcées. 


(  311  ) 

Après  ces  généralités,  arrêtons-nous  à  quelques  particu- 
larités que  présente  ce  tableau. 

Les  étoiles  a,  [3  et  7  d'Andromède,  appartenant  à  une 
même  constellation,  ont  été  observées  dans  des  conditions 
de  température  de  l'air  peu  différentes.  De  plus,  l'influence 
que  l'éclat  d'une  étoile  pourrait  exercer  parfois  sur  sa 
scintillation  s'écarle  d'el'e-méme  ici,  puisque  ces  astres 
sont  sensiblement  de  même  grandeur,  comme  on  l'a  vu  dans 
mon  premier  travail.  Ces  trois  étoiles  sont  donc  parfaite- 
ment comparables  entre  elles,  sous  le  double  rapport  de 
leurs  spectres  et  de  la  fréquence  de  leur  scintillation.  Dans 
le  premier  groupe,  x  présente  des  raies  fortement  accusées, 
beaucoup  de  lignes  fines  et  peu  de  rouge  dans  son  spectre. 
Dans  le  deuxième,  7  présente  également  des  lignes  Unes, 
une  raie  assez  forte  et  quelques  traces  de  zones  dans  la 
partie  la  plus  réfrangible.  D'après  ces  indications,  il  est 
permis  d'admettre  que  les  lacunes  qui  séparent  des  rayons 
de  ces  deux  étoiles,  s'équivalent  très-probablement  en 
somme,  de  l'une  à  l'autre,  sous  le  rapport  du  nombre,  de 
la  largeur  et  de  l'obscurité  relative  de  ces  lacunes.  Ainsi 
s'expliquerait  comment  la  fréquence  numérique  de  la  scin- 
tillation est  la  même  à  l'égard  de  ces  deux  astres.  Mais 
l'étoile  (3,  dont  les  nombreuses  raies  fines  sont  disposées  en 
zones  parfaitement  distinctes  et  qui  forment  parfois  des  par- 
ties obscures,  scintille  beaucoup  moins  que  les  deux  autres  : 
les  variations  de  couleurs  qu'elle  éprouve  en  une  seconde 
sont  seulement  au  nombre  de  37,  tandis  que  les  mêmes 
cbangements  s'élèvent  à  93  à  l'égard  d'à  et  de  7  {*).  La  lar- 


(*)  Voici  les  indications  que  le  P.  Secchi  donne  à  Tégard  de  )3  d'Andro- 
mède dans  le  Mémoire  II  : 

«  p  AnJromeda  Gialla  oro  :  lipo  a  riglie  fine  disposle  a  zone  perfelta- 


(  312  ) 
geur  et  l'obscurité  relative  des  lacunes  correspondant  aux 
zones  du  spectre  de  l'étoile  (3,  qui  séparent  ses  rayons  dans 
notre  atmosphère,  expliquent  suffisamment  sa  faible  scintil- 
lation comparativement  aux  étoiles  «  et  y,  dont  les  spectres 
sont  plus  riches  en  rayons  de  lumière. 

Dans  le  second  groupe,  la  scintillation  de  la  Chèvre  est 
notablement  moindre  que  celle  de  Pollux,  quoique  les 
spectres  de  ces  étoiles  présentent  chacun  beaucoup  de 
raies  lines,  également  distinctes.  Mais  celles  du  spectre  de 
Pollux  sont  encore  plus  déliées  que  les  raies  spectrales 
de  la  Chèvre,  d'après  le  P.  Secchi  (*);  en  présence  de 
cette  différence,  il  n'est  pas  suprenant  que  la  scintillation 
de  la  première  de  ces  deux  étoiles  soit  sensiblement  plus 
forte  que  celle  de  l'autre  ou  de  la  Chèvre,  puisqu'il  résulte 
de  la  plus  grande  largeur  des  raies  spectrales  de  celle-ci  que 
les  lacunes  qui  séparent  ses  rayons  dans  notre  atmosphère, 
ont  en  somme  plus  d'étendue. 

Les  étoiles  p  de  Persée,  (3  de  Pégase  et  a.  d'Orion,  qui 
figurent  en  tète  du  troisième  type  ou  du  type  à  bandes  nébu- 
leuses, sont  représentées,  à  l'égard  de  la  scintillation,  par 
des  valeurs  numériques  qui  correspondent,  d'une  part,  à 
celles  du  milieu  du  deuxième  type  etde  l'autre,  aux  valeurs 
les  plus  faibles  du  premier. 

Les  rapprochements  qui   précèdent   manifestent   l'in- 


»  mente  misurabili  e  distiiile.  Magnifico  oggelto  :  è  di  5°  grado  dopo  Alde- 
»  baran.  1  vari  grappi  di  rigbe  fine  formano  quasi  zone,  una  délie  quali 
f  nel  prinno  verde  :  al  poslo  délia  Fvi  è  spazio  oscuro ,  ma  poco  prima  vi 
»  è  una  riga  nioUo  lucida.  Magnesio  ben  distinto  É  nolala  corne  lipo  piut- 
»  loslo  di  (X.  Ercole  che  del  Sole  ai  1 9  agosto  e  \  sellembre  ;  ma  ai  26  dicem- 

>  bre  ci  ripete  lipo  a  righe  flne.  Quiudi  non  è  irragiouevole  sospellare  di 

>  variabilità.  » 

(*)  Mémoire  11,  p.  19. 


(  315  ) 

iluence  particulière  de  la  largeur  et  de  l'obscurité  des 
lacunes  entre  les  rayons  stellaires  dans  notre  admosphère 
sur  la  fréquence  de  la  scintillation,  selon  que  ces  lacunes 
correspondent  aux  zones  larges  du  troisième  groupe,  ou 
aux  raies  fines  et  nombreuses  du  deuxième,  ou  bien  aux 
quelques  raies  principales  du  premier. 

Après  ces  déductions,  qui  reposent  exclusivement  sur 
les  recherches  du  P.  Secchi,  je  rappellerai  que  MM.  Hug- 
gins  et  Millers  ont  également  étudié  les  spectres  de  cin- 
quante étoiles  environ,  et  qu'ils  ont  mesuré  la  position  des 
raies  spectrales  d'Aldébaran ,  d'à  d'Orion ,  de  la  Chèvre  et 
de  (3  de  Pégase.  Dans  ces  recherches  délicates,  ces  savants 
observateurs  se  sont  particulièrement  occupés  de  constater 
la  présence  des  raies  caractéristiques  des  éléments  ter- 
restres, tels  que  l'hydrogène,  le  magnésium,  dans  les 
spectres  stellaires.  Ils  ont  donné  aussi  quelques  indications 
particulières  sur' l'aspect  de  ces  spectres,  indications  que 
je  reproduis  ci-dessous,  en  rangeant  les  étoiles  dont  il 
est  question  suivant  les  intensités  décroissantes  de  leur 
scintillation. 

Procton.  Raies  fines  et  nombreuses;  raies  D  du  sodium. 

Wéga.  Raies  fines  nombreuses;  raie  D  double,  raies  C  et  F  intenses  ,  raie 
b  triple. 

PoLLUx.  Spectre  riche  en  raies. 

•y  d'Andromède.  Spectre  très-intéressant. 

Deîceb.  Beaucoup  de  raies  fines. 

La  Chèvre.  Raies  très-nombreuses  ;  vingt  lignes  environ  ont  été  mesurées. 

/3  DE  Pégase.  Spectre  ressemblant  beaucoup  à  celui  d'à  d'Orion ,  les  raies 
étant  réunies  en  groupes  comme  dans  ce  dernier.  Quinze  lignes  ont 
été  mesurées. 

a  d'Orion  (Bételgeuse).  Spectre  compliqué,  très-remarquable.  Raies  for- 
tement accusées  et  réunies  en  groupes  formant  parfois  des  bandes 
obscures.  Quatre-vingts  raies  ont  été  mesurées. 

Arctlrus.  Raies  très-nombreuses,  parmi  lesquelles  la  raie  D.  Trente  raies 
ont  été  mesurées. 


(  514  ) 

Aldébarax.  Raies  très-nombreuses  et  fortement  accusées  paliculièrement 
dans  les  parties  orange,  verte  et  bleue  du  spectre.  Les  positions  de  70 
de  ces  raies  ont  été  déterminées;  mais  d'autres  raies  nombreuses, 
visibles  dans  le  bleu ,  ne  sont  pas  comprises  dans  cetie  mesure. 

On  voit,  par  ces  indications  sur  les  résultats  des  recher- 
ches de  MM.  Huggins  et  Miller,  que  les  étoiles  qui  scintil- 
lent le  moins  sont  aussi  celles  qui  leur  ont  présenté  des 
raies  très-nombreuses,  très-accusées  et  parfois  réunies  en 
zones  obscures. 

Les  conséquences  générales  et  particulières  qui  précè- 
dent démontrent,  avec  toute  certitude,  le  fait  d'une  con- 
nexion intime  entre  la  fréquence  de  la  scintillation  des 
étoiles  et  la  constitution  de  leur  lumière  d'après  l'analyse 
spectrale,  fait  que  la  comparaison  des  moyennes  générales 
relatives  aux  trois  types  avait  déjà  mis  en  évidence  dans 
mon  travail  précédent. 

Il  convient  de  calculer  approximativement  ici  quelle  est 
la  valeur  de  l'écart  qui  sépare,  à  une  distance  donnée  dans 
l'air,  deux  rayons  colorés  linéaires,  situés  dans  le  même 
plan  vertical,  qui  appartiennent  aux  deux  bords  d'une  raie 
ou  d'une  zone  spectrale. 

Supposons  l'observateur  placé  au  point  A,  fig.  4,  de  la 
surface  terrestre,  où  arrive  la  trajectoire  lumineuse  6mA 
appartenant  au  bord  le  plus  réfrangible  de  la  raie.  Repré- 
sentons par  rm'A  la  trajectoire  de  l'autre  rayon,  d'une 
réfrangibilité  un  peu  moindre,  et  qui  correspond  par  con- 
séquent au  second  bord  de  la  raie  ou  de  la  zone.  Les  tan- 
gentes respectives  At  el  \t'  à  ces  deux  trajectoires  au  point 
où  elles  pénètrent  dans  l'œil  de  l'observateur,  comprennent 
entre  elles  un  angle  ^A^'  excessivement  petit,  qui  serait 
tout  a  fait  imperceptible  dans  le  spectre «er/ew  d'une  étoile 
produit  par  un  milieu  aussi  peu  réfringent  que  l'air,  même 


(  5io  ) 

quand  l'astre  est  très-près  de  l'horizon.  Mais  cet  angle  n'en 

a  pas  moins  une  valeur  réelle,  que  nous  désignerons  par  s, 

et  qui  augmente  avec  la  distance  zénithale  apparente  Wt 

ou  Z  de  l'astre. 

J'ai  fait  voir  dans  un  travail  précédent  f),  à  l'aide  de  la 

formule  de  Bradiey,  que,  si  n  et  n'  représentent  les  indices 

de  réfraction  relatifs  à  l'air  des  deux  rayons  dont  il  s'agit, 

et  R,  la  réfraction  astronomique,  exprimée  en  secondes, 

qui  correspond  à  la  distance  zénithale  Z  dans  les  tables  de 

réfraction,  après  correction  des  effets  de  la  température  et 

de  la  pression  de  l'air,  l'on  a  pour  calculer  la  valeur  de  s, 

l'équation  suivante  : 

n^—n"'  R 

'angs=-— — -  X 


2  m'»'-       60",(i(J6 

Quand  on  connail  cette  valeur,  il  est  aisé  de  calculer  la 
ligne  /)//  ou  d  qui  sépare  les  tangentes  A^  et  At'  à  une  dis- 
tance Ap'  ou  X,  car  l'on  a  : 

d  =  X.  tang  s. 

Dans  le  cas  d'une  distance  x  relativement  petite,  nous 
pouvons  considérer  la  valeur  d  comme  étant  sensiblement 
égale  à  celle  de  l'écart  mm'  des  deux  trajectoires  à  la 
même  distance  Am' ^=x.  En  effet,  les  deux  rayons  ne 
diffèrent  en  réfrangibilité  que  d'une  quantité  excessive- 
ment petite,  puisqu'ils  correspondent  aux   deux    bords 


(')  Notice  sur  la  séparation  des  trajectoires  décrites  dans  l'atmosphère 
par  des  rayons  de  77iéme  origine  sidérale ,  mais  de  réfrangibilité  diffé- 
rente, et  sur  les  effets  de  cette  séparation  à  l'égard  de  la  scintillation. 
(Bulletin  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  2^  série,  t.  XXXIX.) 

Voir  aussi  la  notice  Sur  le  pouvoir  dispersif  de  l'air.  (Idem,  2'  série, 
t.  XXIV.) 


(3i6) 

d'une  raie  ou  d'une  zone  spectrale;  conséquemment  leurs 
trajectoires  sont  à  très-peu  près  de  même  courbure.  Si  l'on 
imagine,  par  la  pensée,  que  la  trajectoire  rm'A.  tourne, 
dans  son  plan  vertical,  autour  du  point  A  en  entraînant, 
dans  son  très-petit  mouvement  vers  la  trajectoire  6mA,  la 
tangente  t'A,  celle-ci  coïncidera  avec  la  tangente  tA  au 
moment  où,  par  son  déplacement,  le  point  m'  de  la  pre- 
mière trajectoire  rencontrera  le  point  m  de  la  seconde,  et 
cela,  pourvu  que  la  distance  Am'  ou  xne  dépasse  pas  une 
certaine  limite  de  grandeur,  ce  que  nous  avons  supposé. 
La  différence  des  indices  n  et  n'  étant  excessivement 


n'  —  n 


faible,  le  coefficient  ^-^-7^  de  tang  s  peut  se  mettre  sous  la 


n — n 


^n-hi 


forme  — —.  A  cause  de  la  faible  réfringence  de  l'air,  la 


n 


différence  7i  —  n'  n'est  point  susceptible  d'être  déterminée 
directement  tant  qu'il  s'agit  des  rayons  appartenant  aux 
bords  d'une  raie.  Mais  il  y  a  lieu  de  calculer  cette  différence 
de  la  manière  suivante.  On  sait  que,  d'après  M.  Cauchy,  si 
l'on  désigne  par  «  et  6  deux  coefficients  numériques  qui 
dépendent  ici  de  la  réfraction  et  de  la  dispersion  par  l'air, 
puis  par  l  et  >.'  les  longueurs  d'onde  réduites  au  vide  qui 
correspondent  aux  indices  n  et  n' ,  on  a  les  équations  sui- 
vantes : 


b  h 


11  résulte  de  ces  valeurs, 


n  —  n   =  b  {—: 


et  par  suite  de  ce  qui  précède  : 

6/1        I  \      R 
a  =  X 


n'  \/'       à'V  ti0",666 


(317) 

Rappelons  ici  que  j'ai  déterminé  les  valeurs  numériques 
(les  constantes  a  et  6  de  la  formule  de  M,  Cauchy,  en  m'ap- 
puyant,  d'une  part,  sur  la  détermination  des  indices  de 
réfraction  par  l'air  de  plusieurs  rayons  colorés  que  j'avais 
déduits  précédemment  des  mesures  de  spectres  stellaires 
aériens,  effectuées  jadis  par  Bessel  près  de  l'horizon,  et 
d'autre  part,  sur  les  mesures  des  longueurs  des  ondes  cor- 
respondantes déterminées  par  M.  Mascart  en  millionièmes 
de  millimètre  (*).  La  valeur  numérique  de  b  est  évidemment 
le  second  coefficient  numérique  de  l'équation  suivante  que 
j'ai  déduite  de  ces  données  : 

0,948383 
n  =  1,00029145  -h — . 

).* 

Ajoutons  que  les  indices  de  réfraction  par  l'air  calculés 
à  l'aide  de  celte  formule,  ont  été  en  parfaite  concordance 
avec  les  valeurs  déduites  de  l'observation  elle-même  (**). 

Si  nous  substituons  la  valeur  munérique  de  b  dans 
l'expression  de  d,  et  que  nous  effectuions  les  calculs  en  y 
donnant  à  n  la  valeur  1,00029438  qui  est  l'indice  moyen 
de  l'air,  nous  obtiendrons  l'expression  flnale  : 


d  =xx  0,01561  T— ;:1r. 


Appliquons  cette  formule  à  calculer  quel  est  l'écart  des 
trajectoires  émanant  d'une  étoile  et  appartenant,  l'une  à 
la  raie  la  plus  réfrangible,  l'autre  à  la  raie  la  moins  réfran- 
gible  du  groupe  des  raies  D  du  spectre  solaire,  quand 


(')  Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  i<'  série,  t.  XIII. 
(.**)  Notice  sur  le  pouvoir  dispersifde  l'air.  (Bulletin  de  l'Académie 
ROYALE  DE  BELGIQUE ,  2«  série,  t.  XXIV.) 


(  318  ) 
réloile  qui  présente  aussi  ces  raies  dans  son  spectre,  est 
à  70°  de  distance  zénithale  apparente,  et  cela,  en  un  lieu 
éloigné  de  5000^'  de  l'observateur.  Les  calculs  qui  suivent 
se  rapportent  aux  conditions  de  température  de  l'air  de 
0°  et  de  pression  0^,76.  D'après  M.  Mascart,  les  longueurs 
d'ondes  correspondant  à  ces  deux  raies  sont  exprimées  en 
millionièmes  de  millimètre  par  les  valeurs  )==  588,8  et 
).'  =  589,45.  Tous  les  calculs  étant  effectués,  on  trouve 
pour  la  valeur  de  l'écart  d,  à  5000"  de  l'observateur, 
Qmm  QY  Jq\]q  est  doHC  la  largeur  de  la  lacune  qui  sépare  , 
à  5000"  de  l'observateur  et  quand  l'astre  est  à  20"  au- 
dessus  de  l'horison,  les  rayons  extrêmes  appartenant  au 
groupe  des  raies  D  pour  toute  étoile  qui  révèle  la  présence 
de  ces  raies,  et  par  conséquent  l'existence  du  sodium 
parmi  ses  éléments.  Quand  l'étoile  ne  sera  plus  qu'à  10° 
de  hauteur,  la  largeur  (/  de  la  lacune  sera  le  double  ou 
0'"™,li,  à  la  même  distance  de  l'observateur,  car  à  80°  de 
distance  zénithale  la  valeur  R  de  la  réfraction  est  précisé- 
ment le  double  de  ce  qu'elle  était  à  70". 

Quelle  que  soit  l'étroitesse  relative  de  semblables  la- 
cunes, leur  nombre  est  très-grand  et  par  conséquent  leur 
influence  très-sensible  dans  un  faisceau  provenant  d'une 
étoile  dont  le  spectre  est  sillonné  d'un  grand  nombre  de 
raies. 

Calculons  actuellement  la  valeur  approximative  de 
l'écart  (/  entre  les  rayons  extrêmes  qui  correspondent  aux 
limites  d'une  zone  étendue  dans  le  spectre  d'une  étoile.  Le 
jyème  Mémoire  du  P.  Secchi  est  accompagné  d'une  planche 
où  le  spectre  de  l'étoile  d'Orion  est  présenté  tel  que  ce 
savant  l'observa  en  Mars  ]  872.  Ce  spectre  est  développé  sur 
une  longueur  de  O'",o7.  Parmi  les  bandes  qui  l'obscurcis- 
sent, l'une  d'elles  occupe  à  très-peu  près  la  moitié  de  l'in- 


(  319  ) 

tervalle  compris  entre  les  raies  A  et  B.  M.  Mascart  n'a 
point  mesuré  la  longueur  d'onde  de  la  raie  A.  Mais  M.  Van 
derWilIigen,  dont  toutes  les  mesures  d'ondes,  qui  ont 
soutenu  avec  avantage  la  comparaison  avec  celles  d'autres 
savants,  concordent  très-bien  avec  celles  de  M.  Mascart, 
a  trouvé  760,53  pour  la  longueur  correspondant  à  la 
raie  A.  Quant  à  sa  mesure  pour  B,  elle  est  égale  à  G86,o8. 
Si  nous  donnons  à  "A  cette  dernière  valeur  et  à  )/  celle  de 
la  moyenne  des  longueurs  d'ondes  de  A  et  B  pour  représen- 
ter la  longueur  d'onde  qui  correspond  sensiblement  à 
l'extrémité  de  la  zone  située  au  milieu  de  ces  deux  raies 
dans  le  spectre  d'à  d'Orion,  nous  aurons  /'  =  723,45.  Si 
l'on  applique  ces  valeurs  au  calcul  de  d  avec  les  mêmes 
suppositions  de  Z  =  70"  el  x  =  oGOO",  on  trouve  pour  la 
valeur  de  l'écart  d  à  cette  dernière  distance  2'"",62.  A  10" 
de  hauteur  de  l'étoile  ou  à  80"  de  distance  zénithale,  la 
valeur  de  d  s'élèvera  au  double  ou  à  o°"",24.  Les  lacunes 
entre  les  deux  rayons  correspondant  aux  deux  extrémités 
des  zones  présentent,  comme  on  le  voit,  une  largeur 
notable,  même  à  une  distance  limitée  de  l'observateur, 
pour  une  étoile  qui  n'est  pas  très-élevée  au-dessus  de 
l'horizon. 

Si  l'on  calcule,  comme  je  l'ai  fait  dans  un  travail  cité 
plus  haut,  l'étendue  totale, dans  le  sens  vertical,  du  spectre 
aérien  d'une  étoile  compris  entre  les  rayons  rouge  et  violet 
réfractés  par  l'air,  quand  l'astre  est  à  80°  de  distance  zéni- 
thale ,  on  trouve  5",5.  L'arc  linéaire  qui  correspond  à  cette 
valeur  angulaire,  à  5000"  de  distance,  est  de  153'"'",5,  Le 
rapport  de  la  largeur  5""",24.  de  la  lacune  correspondant  à 
la  zone  dont  il  vient  d'être  question  dans  le  spectre  d'à 
d'Orion,  à  cette  étendue  totale  du  spectre  aérien  est  à  très- 
peu  près  ;^. 

Cette  valeur  relative  nous  permet  d'apprécier  la  diminu- 


(  520  ) 

tion  que  la  fréquence  absolue  de  la  scintillation  de  l'étoile 
a  d'Orion  éprouve  par  l'existence  de  cette  lacune  dans  le 
faisceau  de  rayons  émanés  de  celle-ci,  et  qui  pénètrent 
dans  l'œil  de  l'observateur  après  avoir  été  dispersés  par 
l'atmosphère.  Cette  diminution  est  évidemment  la  plus 
forte  quand  la  zone  spectrale  à  laquelle  cette  lacune  cor- 
respond, est  d'une  obscurité  absolue. 

Le  rapport  numérique  dont  il  vient  d'être  question, 
reste  sensiblement  le  même  à  des  distances  zénithales 
différentes,  attendu  que  la  largeur  de  l'écart  cl  et  celle  du 
faisceau  compris  entre  les  rayons  extrêmes  sont  respecti- 
vement proportionnelles  à  la  réfraction  atmosphérique  qui 
répond  à  chaque  distance  zénithale.  La  proportionnalité 
de  la  largeur  totale  du  faisceau  à  cette  réfraction  explique 
suffisamment  pourquoi  la  fréquence  de  la  scintillation  d'une 
même  étoile  est  proportionnelle  à  la  réfraction  atmosphé- 
rique jusqu'à  certaine  limite,  conformément  à  la  deuxième 
loi  de  M.  Dufour,  ainsi  que  je  l'ai  montré  dans  un  travail 
précédent  ('). 


Note  sur  les  paratonnerres  ;  par  M.  Melsens,  membre  de 
l'Académie. 

Paratonnerres  des  Halles  centrales  de  Bruxelles. 

Le  collège  des  bourgmestre  et  échevins  de  la  ville  de 
Bruxelles  m'a  fait  l'honneur  de  me  charger  de  l'examen  de 
la  question  des  paratonnerres  à  établir  sur  les  Halles  cen- 


(*)  Notice  sur  la  scintillation  des  étoiles.  (Bulletins  de  l'âgadéhig 
RorALE  DE  Belgique,  2«  série,  t.  XXV.) 


(  321  ) 

traies  de  la  ville  de  Bruxelles;  l'étude  de  cette  question 
m'a  conduit  à  quelques  dispositions  particulières  que  je 
vais  décrire  à  grands  traits,  et  à  quelques  considérations 
sur  les  paratonnerres  des  bâtiments  dans  lesquels  le  fer 
joue  un  rôle  prépondérant. 

Les  Halles  sont  formées  de  deux  grandes  nefs  centrales, 
d'une  longueur  totale  de  160  mètres,  supportées  par 
60  colonnes  en  fonte  sur  lesquelles  s'appuie  la  ferme  en 
fer  de  l'ensemble;  les  nefs  latérales  sont  reliées  à  ces 
colonnes  intérieures  par  des  arceaux  en  fer  à  116  colonnes, 
qui  forment  la  paroi  extérieure  dont  les  vides  sont  remplis 
par  de  la  maçonnerie  très-soignée  et  des  pierres  bleues. 

Les  colonnes ,  tant  vers  l'intérieur  que  vers  l'extérieur, 
se  prolongent  dans  le  sous-sol,  constitué  par  deux  souter- 
rains de  2"\50  de  hauteur,  communiquant  entre  eux  et 
garnis  complètement  de  grillages  fixés  aux  colonnes  souter- 
raines, qui  forment  de  véritables  magasins  à  claire-voie. 

Ce  sous-sol  a  une  hauteur  de  2'",50  depuis  le  pavement 
jusqu'aux  poutrelles  des  voûtes.  Chaque  colonne  supporte 
les  poutrelles  de  fer  qui  soutiennent  la  voûte  du  rez-de- 
chaussée;  il  y  a  donc  là  un  immense  réseau  de  poutrelles 
rattaché  métalliquement  avec  tout  l'ensemble  métallique 
du  bâtiment  et  avec  les  grilles  qui  forment  magasin. 

Les  colonnes  reposent  partout  sur  une  forte  dalle  de 
calcaire  dur  des  Écaussines;  cette  dalle,  d'une  épaisseur  de 
0™,5o,  repose  elle-même  sur  un  bâti  de  maçonnerie  d'une 
hauteur  de  ^'"jSO,  de  l'",46  de  côté  pour  les  colonnes  des 
murs  extérieurs  et  de  0"\8o  de  côté  pour  les  colonnes 
intérieures  qui  forment  la  nef;  la  maçonnerie  est  placée 
sur  une  couche  de  béton  d'une  épaisseur  de  O^iSO,  établi 
sur  le  sol  naturel. 

On  a  rempli  l'espace  de  2"\9o  laissé  vide  depuis  la 

2""^  SÉRIE  ,  TOME  XXXVIII.  21 


(  322  ) 
couche  de  béton  jusqu'au  pavement  du  sous-sol  par  de  la 
terre  rapportée. 

Le  pavement  du  sous-sol  est  composé  d'une  couche  de 
béton  de  0°\1 5  d'épaisseur  et  d'une  brique  mise  sur  champ, 
en  tout  une  épaisseur  de  0"\25. 

Au  rez-de-chaussée  comme  dans  le  souterrain,  il  y  a  une 
grande  quantité  de  rigoles  et  de  caniveaux  de  fonte  pour 
l'écoulement  des  eaux. 

De  forts  tubes  de  gaz,  des  conduites  de  la  distribution 
de  l'eau  complètent  cet  énorme  réseau  métallique. 

La  masse  de  fer  et  de  fonte  s'élève  à  environ  2,500,000 
kilogrammes;  tous  les  fragments  isolés  de  cette  masse  sont 
rattachés  par  des  écrous  et  des  boulons  qui  sont  au  nom- 
bre de  plus  de  100,000;  il  y  a  donc  probablement  autant 
de  points  de  contact  de  fer  à  fer  ou  de  fonte  à  fer,  incon- 
testablement une  grande  surface. 

On  peut  admettre  avec  tous  les  physiciens  qu'un  édifice 
serait  à  l'abri  de  la  foudre,  si  le  fer  du  faîte  se  prolon- 
geait sans  solution  de  continuité  jusqu'à  terre. 

Mais  si,  pour  les  Halles  centrales  de  Bruxelles,  tout  cet 
ensemble  était  en  parfaite  communication  métallique,  si  de 
plus  le  sol  sur  lequel  il  repose  est  assez  humide  pour  être 
naturellement  bon  conducteur  de  l'électricité,  on  pourrait 
dire  que  les  Halles  centrales  constituent  en  définitive  un 
paratonnerre  présenaiifâu  plus  haut  degré  et  qu'un  coup 
de  foudre  qui  frapperait  ce  conducteur  d'une  section  inso- 
lite glisserait  en  se  dispersant  par  des  milliers  de  chemins, 
ou  le  traverserait  avec  la  plus  grande  facilité. 

Nous  avons  à  notre  disposition  la  possibilité  de  vérifier 
ce  fait  de  deux  façons  différentes  : 


(  525  ) 

i°  Par  l'éleclricité  dynamique  empruntée  à  la  pile; 
2°  Par  i'électricilé  de  tension  empruntée  aux  machines 
électriques  et  à  la  bobine  de  Rhumkorff. 

Vérification  de  la  conductibilité  des  Halles  pour  le  courant 
de  la  pile. 

Je  dois  à  la  bienveillance  de  M.  Gibbs,  inspecteur,  chef 
du  service  technique  des  télégraphes,  et  au  concours  intel- 
ligent de  M.  Banneux,  ingénieur  au  télégraphe,  d'avoir 
pu  vérifier  la  conductibilité  électrique  des  Halles  centrales. 
Je  suis  heureux  de  pouvoir  les  remercier  de  leur  obli- 
geance. 

Nous  nous  sommes  servi  d'une  pile  de  Daniel  petit 
modèle,  composée  de  treize  éléments.  Nous  avons,  à  cet 
effet,  mis  en  contact  avec  le  fer  en  T,  qui  se  trouve  sur 
le  faîte  du  bâtiment,  à  l'une  de  ses  extrémités  du  côté 
exposé  au  nord,  un  câble  de  cuivre  à  trois  brins  recouvert 
de  gutta-percha;  il  avait  une  cinquantaine  de  mètres  de 
longueur;  il  aboutissait  à  l'un  des  pôles  de  la  pile,  le  cou- 
rant passait  ensuite  à  volonté  dans  un  rhéostat  Siemens 
et  une  boussole  galvanomètre  ou  rhéomètre  différentiel, 
tel  qu'on  l'emploie  pour  les  usages  des  télégraphes.  Le 
second  fd,  assez  long  pour  pouvoir  atteindre  la  dernière 
colonne  et  le  faîte  du  côté  opposé,  aboutissant  à  l'autre 
pôle  de  la  pile,  était  libre  et  permettait  de  fermer  le  circuit 
ou  de  l'ouvrir  en  touchant  chacune  des  parties  qui  com- 
posent l'édifice. 

On  a  d'abord  cherché  à  fermer  le  courant  en  plaçant  ce 
fil  sur  la  couche  d'asphalte,  d'une  épaisseur  de  0'",050,  du 
rez-de-chaussée,  sur  lequel  les  acheteurs  et  les  dames  de 
la  Halle  se  trouveront;  la  déviation  était  absolument  nulle; 


(  324  ) 

il  en  résulte  que  les  visiteurs  et  les  habitués  se  trouveront 
dans  la  Halle  comme  sur  un  tabouret  isolant. 

En  faisant  enlever  l'asphalte  et  en  se  mettant  en  contact 
avec  le  béton  des  voûtes,  la  déviation  s'élevait  de  84°  à 80". 

Les  voûtes  portent  de  nombreux  encadrements  en  fonte 
de  50  centimètres  de  hauteur,  de  grandeur  variable  ayant 
en  moyenne  50  centimètres  de  côté,  destinés  à  donner  du 
jour  aux  souterrains;  les  uns  sont  garnis  d'une  simple 
grille  à  claire-voie,  les  autres  portent  une  forte  lame  de 
glace  brute;  en  mettant  le  fil  en  contact  avec  l'encadre- 
ment métallique  qui  touche  le  béton  et  la  brique  de  la 
voûte  par  une  grande  surface,  la  déviation  s'élevait  à  88"; 
l'expérience  souvent  répétée  donnait  très-sensiblement  la 
même  déviation  partout. 

Le  courant  passe  donc  presque  librement  dans  la  ferme, 
les  colonnes  et  le  mortier  des  voûtes. 

Ferme-t-on  le  courant  en  mettant  le  second  fil  en  con- 
tact avec  les  colonnes  de  la  nef  centrale,  avec  les  colonnes 
extérieures,  le  gaz,  le  fer  des  galeries,  les  caniveaux  en 
fonte,  les  colonnes  qui  séparent  les  deux  ailes,  en  lou- 
chant sans  rien  changer  aux  dispositions  précédentes,  les 
mêmes  places  dans  la  2'  galerie,  colonnes,  carneaux, 
galerie,  ferme,  etc.,  la  déviation  du  galvanomètre  ne 
change  pas;  elle  indique  qu'il  n'y  a  sensiblement  pas  de 
résistance,  car  on  obtient  toujours  90";  l'aiguille  se  met 
en  croix  avec  le  courant. 

On  a  répété  les  expériences  dans  les  souterrains  et  la 
déviation  a  toujours  été  la  même,  90";  fermait-on  le  cou- 
rant en  se  mettant  en  contact  avec  les  caniveaux,  les  grilles, 
le  prolongement  des  colonnes,  les  poutrelles,  les  colonnes 
enterrées  dans  la  maçonnerie,  etc.,  toujours  on  avait  la  dévia- 
tion maximum  de  90".  L'expérience  sur  chaque  point  était 


(  525  ) 

faite  à  deux  reprises,  c'est-à-dire  qu'après  avoir  constaté 
la  déviation  maximitm,  on  introduisait  une  résistance  équi- 
valant environ  à  oOO  kilomètres  de  fil  de  fer  de  4  milli- 
mètres; dans  ce  cas,  la  déviation  tombait  à  63°  dans  toutes 
les  expériences. 

Nous  avons  alors  pris  la  terre  dans  la  rue  au  delà  du 
trottoir  près  des  regards  d'égouts  et  dans  la  vase  qui  rem- 
plit leur  tube  syphon;  nous  avons  encore  obtenu  les  mêmes 
nombres. 

Moyens  proposés  pour  transformer  les  Halles  en  paraton- 
nerre préservatif  et  préventif. 

Je  pense  donc  pouvoir  assurer  que  les  Halles  constituent 
un  excellent  paratonnerre  pmena///; 

Je  me  demande  cependant  s'il  est  prudent  de  se  con- 
tenter de  ce  qui  existe  et  de  laisser  les  choses  dans  l'état 
actuel? 

Je  ne  le  crois  pas.  Aussi  en  attendant  que  les  Académies 
et  les  savants  s'expliquent  sur  l'utilité  ou  les  dispositions  à 
donner  aux  paratonnerres  destinés  à  garantir  des  édifices 
de  ce  genre,  j'ai  proposé  à  l'administration  communale  de 
compléter  le  réseau  conducteur  vers  le  sol  et  de  garnir  le 
faîte  d'une  lile  de  pointes  en  cuivre  rouge,  de  façon  à 
transformer  les  Halles  centrales  en  un  paratonnerre  pré- 
servatif et  préventif 

Pour  compléter  la  conductibilité  vers  le  sol  et  avoir  une 
communication  parfaite  et  indiscutable,  on  creuserait  deux 
puits  tubulaires,  un  au  centre  de  chacune  des  ailes. 

Les  parois  de  ces  puits  seraient  constituées  par  une  très- 
longue  colonne  de  fonte  creuse,  remplie  au  besoin  de 
sable  de  mer  rendu  alcalin  par  un  lait  de  chaux  léger;  le 


(  326  ) 
chapiteau  de  celle  colonne  serait  rattaché  métalliquement 
aux  fontes  et  au  fer  de  rédifice,  aux  conduites  de  Teau 
de  la  distribution  et  aux  gros  tuyaux  de  gaz  au  delà  des 
compteurs  dans  lesquels  il  y  a  souvent  des  tubes  de 
plomb,  offrant  parfois  assez  de  résistance  à  l'écoulement 
de  l'électricité  dans  les  fortes  décharges  pour  être  exposés 
à  être  fondus. 

Vérification  de  la  conductibilité  des  paratonnerres  et  du  sol 
pour  l'électricité  de  tension. 

Avant  de  faire  les  expériences  aux  Halles  centrales  avec 
l'électricité  statique ,  je  les  ai  essayées  d'abord  sur  les  para- 
tonnerres établis  à  mon  insu  ,  il  y  a  quelques  années,  à 
l'École  de  médecine  vétérinaire  (1).  Je  m'étais  d'abord 


(1)  Ces  paratonnerres  sont  formés  de  conducteurs  de  fer  de  fort  calibre; 
celui  du  girand  bâtiment  porte  quatre  liges,  il  a  deux  descentes,  cha- 
cune dans  un  puits;  celui  du  bâtiment  habité  par  M.  le  directeur  porte 
deux  liges,  il  n'a  qu'une  descente.  Les  autres  bâtiments  de  l'École  en  sont 
dépourvus. 

Je  constate  qu'aucun  des  bâtiments  de  l'École  n'a  été  foudroyé  depuis 
mon  entrée  à  cet  établissement,  il  y  à  28  ans;  mais  depuis  le  placement 
des  deux  paratonnerres,  la  foudre  est  tombée  sur  l'angle  du  mur  des  écu- 
ries et  du  manège;  ce  bâtiment  se  trouve  en  dehors  de  la  zone  de  protec- 
tion généralement  admise  d'après  Gay-Lussac  et  les  physiciens;  après  avoir 
fi'appé  une  panne  faîtière,  qu'elle  a  perforée,  la  foudre  a  longé  une  des 
pièces  de  la  ferme  d'un  grenier  rempli  de  foin,  mais  il  n'y  a  pas  eu 
d'incendie.  Je  n'ai  pas  pu  étudier  tous  les  détails  de  ce  coup  de  foudre, 
des  ouvriers  ayant  dérangé  le  foin  et  les  pièces  de  la  charpente  avant 
mon  arrivée  à  l'École. 

On  me  permettra  de  signaler  que  ces  paratonnerres  ont  èlé  établis 
après  ceux  de  l'hôtel  de  ville  de  Bruxelles. 

Je  regrette  que  l'administration  supérieure  n'ait  pas  fait  au  professeur 
de  physique  de  l'École  de  médecine  vétérinaire  l'honneur  de  le  consulter; 
elle  ne  devait  pas  ignorer,  je  pense,  que  j'avais,  après  une  étude  longue 


(  327  ) 

assuré  que  la  conductibilité  de  ces  paratonnerres  entre 
eux,  avec  leurs  puits,  le  5ol,  les  tuyaux  de  conduites  de 
la  distribution  de  l'eau  et  les  tuyaux  du  gaz,  était  bien 
établie;  je  me  suis  servi,  à  cet  effet,  d'un  galvanomètre, 
très-ordinaire,  petit  modèle  de  Breguet,  employé  jadis 
pour  le  service  des  télégraphes.  La  pile  de  Bunsen  de 
huits  petits  éléments  chargés  par  une  très-faible  quantité 
d'acide  nitrique  ordinaire  et  d'acide  sulfurique  dilué  était, 
par  conséquent,  fort  peu  énergique. 

Une  des  poupées  de  la  machine  de  Holtz  (modèle  à 
4  plateaux)  a  été  mise  en  communication  avec  l'un  des 
conducteurs  (n°  1),  descendant  du  toit  du  grand  bâtiment, 
au  moyen  d'un  iil  de  cuivre  de  70  mètres  de  longueur, 
recouvert  de  gutta-percha;  l'autre  a  été  mise  en  commu- 
nication avec  un  second  fil  de  même  longueur  que  le  pre- 
mier, mais  celui-ci  était  terminé  par  une  sphère  de  laiton 
creuse;  cette  dernière  fut  remplie  de  soudure  de  plombier 
dans  laquelle  le  fil  était  noyé  et  soudé. 

Malheureusement  ces  conducteurs  n'étaient  pas  parfai- 
tement isolés,  car  en  les  développant  et  en  les  laissant 
toucher  le  sol  du  laboratoire,  on  voyait,  quand  la  machine 
électrique  de  Holtz   était  activée,  des  aigrettes  ou   de 

et  minutieuse,  fait  établir  un  paratonnerre  d'un  système  autre  que  celui 
qui  est  généralement  adopté  dans  notre  pays,  sur  l'un  des  plus  splendides 
monuments  de  la  Belgique;  ma  responsabilité  était  assez  grande  pour 
admettre  que  j'avais  dû  prendre  toutes  les  précautions  et  m'enlourer  de 
toutes  les  lumières.  J'avais  en  effet  pris  conseil  chez  les  savants  les  plus 
distingués  avant  de  me  décider  à  faire  exécuter  mes  idées  et  mes  projels. 
J'espère  toujours  que  messieurs  les  Ministres  qui  s'occupent  de  l'École 
vétérinaire  voudront  bieu  un  jour  faire  déplacer  le  paratonnerre  établi  à 
mon  insu  sur  le  calMnet  de  piiysique  de  l'École  et  qu'ils  le  feront  rem- 
placer par  un  appareil  qui  me  permettrait  d'étudier  l'électricité  des 
nuages,  de  l'air,  et  du  sol  peut-être. 


(  528  ) 

petites  étincelles  traverser  la  gutta-percha  ;  malgré  ce 
défaut,  qui  exigerait  qu'on  fit  usage  d'un  câble  à  plusieurs 
enveloppes  isolant  parfaitement,  on  put  tirer  des  étincelles 
nourries  donnant  de  très-fortes  secousses  d'un  deuxième 
conducteur  de  paratonnerre  descendant  du  môme  toit  et 
distant  du  premier  de  57  mètres  environ;  on  faisait  jaillir 
des  étincelles  du  sol,  des  pierres  bleues  du  pavement  de 
l'escalier,  des  fenêtres;  elles  étaient  plus  ou  moins  fortes; 
un  anneau  de  fer  placé  au  centre  d'une  dalle  en  pierre 
bleue  servant  d'ouverture  à  la  cave  donnait  une  forte  étin- 
celle, mais  sur  la  pierre  elle-même  l'étincelle  était  plus 
faible.  Les  pierres  du  pavement  extérieur  en  carbonate 
calcaire  blanc-jaunâtre  oiîraienl  une  résistance  plus  grande 
comme  les  briques  du  bâtiment  et  les  grosses  pierres 
blanches  placées  au  bord  des  fenêtres;  c'était  plutôt  une 
aigrette  qu'une  étincelle;  il  en  était  de  même  de  pierres  en 
grès,  mais  cependant  on  observait  des  différences  sensibles. 

On  voyait  autour  du  fil  déroulé  et  traînant  à  terre  des 
aigrettes  sur  l'herbe  du  gazon  vis-à-vis  du  laboratoire,  là 
où  la  gutta-percha  offrait  des  solutions  de  continuité  mi- 
croscopiques,  mais  avec  la  sphère  on  tirait  des  étincelles 
nourries  des  brins  du  gazon,  des  arbustes  et  des  grands 
arbres,  au  tronc  et  aux  feuilles. 

En  laissant  le  fil  descendre  dans  le  puits  correspondant 
au  conducteur  n"  2  jusqu'à  atteindre  la  surface  de  l'eau, 
on  entendait  le  bruit  sec  et  net  de  l'étincelle  au  haut  du 
puits;  sur  les  parois  on  entendait  encore  distinctement  le 
bruit  de  l'étincelle,  mais  il  était  affaibli. 

On  déroula  le  fil  jusqu'à  aller  atteindre  le  bâtiment 
opposé,  habitation  de  monsieur  le  directeur  de  l'École 
vétérinaire  placée  à  40  mètres  du  conducteur  n°  1  et  à 
50  mètres  du  conducteur  n"  2. 


(  329  ) 

On  obtint  encore  des  étincelles  vigoureuses  en  appro- 
chant la  boule  du  conducteur  du  paratonnerre  placé  sur 
ce  bâtiment;  il  en  fut  de  même  sur  un  tuyau  de  gaz  et  sur 
un  tuyau  de  la  conduite  de  l'eau  de  la  ville. 

Bien  que  le  sol  fût  sec  à  la  surface,  il  conduisait  encore 
l'électricité  ;  on  put  tirer  des  étincelles  des  pierres  du  pave- 
ment du  trottoir,  d'un  grattoir  pour  les  pieds,  simple  lame 
de  fer  encastrée  dans  deux  petits  pieux  de  bois  et  d'un 
second  grattoir  métallique  encastré  dans  du  calcaire  dur 
bleu  des  Écaussines. 

Une  chaîne  d'une  quinzaine  d'élèves  fut  établie,  le  premier 
tenait  en  main  le  conducteur  du  paratonnerre,  on  appro- 
chait la  sphère  de  la  main  du  dernier  et  ils  recevaient  tous 
une  secousse. 

Un  puits  ordinaire  garni  d'une  pompe  distant  du  con- 
ducteur n"  1,  de  12  mètres,  donnait  des  étincelles,  mais 
brillantes  surtout  sur  les  parties  métalliques  de  la  pompe; 
on  les  voyait  parfaitement  émerger  du  filet  d'eau  lorsqu'on 
activait  la  pompe. 

L'intensité  des  étincelles  était  amoindrie,  mais  non 
anéantie  en  interposant  un  rhéostat  correspondant  à  une 
résistance  d'environ  120  kilomètres  de  fil  de  fer  de  4  mil- 
limètres de  diamètre. 

Au  lieu  de  laisser  l'un  des  fils  conducteurs  de  l'électricité 
de  la  machine  de  Holtz  en  contact  avec  le  conducteur  du 
paratonnerre  n°  1,  on  lui  fit  toucher  les  conduites  d'eau, 
les  tubes  de  gaz,  une  pompe  établie  dans  le  laboratoire  et 
l'on  pouvait  facilement  tirer  des  étincelles  partout,  rien 
n'était  changé  essentiellement. 

Ce  fil  terminé  par  une  sphère  métallique  d'une  quin- 
zaine de  millimètres  de  diamètre  fut  alors  enterré  dans  le 
jardin  à  20  centimètres  de  profondeur; au  moyen  du  second 


(  350  ) 

on  parvenait  de  même  à  tirer  des  étincelles  à  tous  les 
lieux  indiqués,  aux  arbres,  etc. 

Une  grande  jarre  arrangée  en  bouteille  de  Leyde  fut 
placée  de  l'autre  côté  du  grand  bâtiment  de  l'École  sur  le 
gazon,  à  50  ou  60  mètres  de  distance  de  l'extrémité  en- 
terrée du  fil  aboutissant  à  l'une  des  poupées  de  la  machine 
de  Hoitz;  le  tîl  qui  était  en  contact  avec  l'autre  poupée, 
terminé  par  sa  sphère  métallique,  fut  introduite  l'intérieur 
de  la  bouteille,  puis  on  activa  la  machine  de  HoItz;  bien 
que  le  temps  fût  très-peu  favorable,  la  bouteille  se  char- 
geait et  donnait  de  très-fortes  étincelles  en  mettant  les 
armatures  extérieure  et  intérieure  en  contact  par  l'exci- 
tateur universel  (1). 


(1)  Je  crois  devoir  faire  remarquer  expressément  que  ces  expériences, 
qui,  au  premier  coup  d'œil,  paraissent  assez  curieuses,  parce  queron  em- 
ploie les  deux  fluides  d'une  façon  apparente,  sont  cependant  de  la  plus 
grande  simplicité;  on  pourrait  même  ajouter  qu'elles  étaient  toutes  faciles 
à  prévoir,  eu  égard  à  la  grande  tension  des  machines  de  HoItz  et  à  Yaclion 
du  réservoir  commun  ou  de  la  terre;  dans  ce  cas  spécial  la  terre  agit 
exactement  comme  on  le  prouve  ou  qu'on  le  discute  pour  les  expériences 
classiques,  simples  et  fondamentales  de  la  décharge  des  conducteurs  posi- 
tifs des  machines  électriques  ordinaires  sur  les  corps  qui  conduisent  plus 
ou  moins  bien  l'électricité  ou  sur  les  corps  isolants,  la  charge  des  bou- 
teilles de  Leyde  par  ces  mêmes  machines  ou  par  l'électrophore. 

On  pourrait  même  aller  jusqu'à  dire  que  ces  expériences  ne  sont  pas 
démonstratives,  puisque  l'on  parvient  toujours  à  faire  jaillir  des  étincelles 
ou  à  charger  plus  ou  moins  bien  une  bouteille  de  Leyde  en  mettant  l'une 
de  ses  armatures  en  contact  avec  une  source  quelconque  d'électricité  de 
tension  et  l'autre  avec  le  réservoir  commun;  en  un  mot,  les  bouteilles  de 
Leyde  se  chargent  avec  la  machine  de  Hollz,  même  lorsque  le  fil  conduc- 
teur aboutissant  à  l'une  des  poupées  est  placé  sur  le  tabouret  isolant;  la 
charge  cependant  m'a  paru  se  faire  mieux  quand  le  contact  avec  la  terre 
est  établi;  je  compte  revenir  sur  ces  recherches  en  mesurant  la  valeur  des 
résistances  dans  ces  diilerents  cas. 


(  351  ) 

Une  résistance  équivalente  à  120  kilomètres  de  fil  de  fer 
de  4  millimètres  interposée  à  l'un  ou  à  l'autre  des  fils  n'em- 
pêche pas  les  phénomènes  de  se  présenter  de  la  même 
façon. 

Le  sol  du  bas  de  la  ville  de  Bruxelles  est  donc  un  excel- 
lent conducteur  de  l'électricité  dynamique  et  de  l'électri- 
cité de  tension. 

Voici  donc  des  paratonnerres  en  bon  état  à  partir  de 
leur  base  à  hauteur  d'homme;  je  ne  connais  pas  les  détails 
de  leur  construction,  je  constate  leur  conductibilité  et  j'ad- 
mettrai qu'ils  sont,  classiquement  parlant,  en  bon  état  dans 
leur  partie  souterraine  et  à  1  ou  2  mètres  au-dessus  d'un 
sol  qui  conduit  très-bien  l'électricité  statique  et  l'électricité 
dynamique. 

Voyons  maintenant  ce  qui  arrive  si  l'on  fait  les  mêmes 
expériences  aux  Halles  centrales. 

Conductibilité  des  Halles  centrales  de  Bruxelles  pour  l'élec- 
tricité de  tension.  —  Conclusion. 

La  machine  de  Hoitz  placée  dans  la  nef  centrale  est 
munie  de  ses  deux  fils  isolants  terminés  par  des  sphères 
métalliques;  on  met  la  première  sphère  en  contact  à  peu 
près  comme  dans  l'expérience  faite  avec  l'électricité  dy- 
namique; le  second  fil  est  tenu  à  la  main  et  l'on  présente  la 
sphère  partout  où  il  y  a  du  fer,  au  rez  de-chaussée,  dans  les 
deux  ailes  et  dans  les  souterrains;  partout  l'étincelle  éclate; 
sur  la  grille  en  fer  d'un  modèle  d'échoppe  placé  sur  le 
moellon  l'étincelle  jaillit  plus  vive  que  sur  le  moellon  de 
la  voûte  où  l'on  voit  parfaitement  le  passage  de  l'électricité, 
mais  le  bruit  sec  de  l'étincelle  est  affaibli;  sur  le  pavement 


(  532  ) 
(lu  sous-sol  il  en  est  de  même;  les  individus  qui  se  trou- 
vent sur  le  pavement  du  sous-sol,  sur  la  voûte  non  encore 
recouverte  d'asphalte,  reçoivent  une  secousse  violente; 
sur  l'asphalte  elle  est  plus  faible,  mais  encore  assez  sen- 
sible; il  faut  se  mettre  sur  les  larges  dalles  de  glace  brute 
pour  qu'elle  soit  peu  perceptible;  une  pluie  de  quelques 
instants  étant  survenue  on  peut  tirer  des  étincelles  sur  la 
terre  de  la  rue  qui  entoure  l'édifice;  elles  sont  très-fortes 
comme  sur  les  colonnes  de  l'édifice  en  les  faisant  jaillir  sur 
un  moulin  en  fer  destiné  à  la  fabrication  du  mortier;  ce 
moulin  se  trouve  de  l'autre  côté  de  la  rue  à  25  mètres  du 
bâtiment;  près  du  moulin  se  trouve  un  robinet  de  la  dis- 
tribution; on  tire  des  étincelles  de  tout  le  métal,  on  en  fait 
jaillir  du  filet  d'eau.  —  Un  observateur  qui  se  trouvait  sur 
le  trottoir  humide  qui  entoure  l'édifice  ayant  approché  la 
main  de  la  sphère  de  métal  reçoit  une  secousse  très-vio- 
Jente.  —  Cependant  on  entend  des  craquements  tout  le 
long  du  fil,  preuve  qu'il  se  perd  beaucoup  d'électricité. 

On  met  l'intérieur  de  la  grande  jarre  de  Leyde  isolée 
sur  deux  grandes  lames  très-épaisses  de  glace  brute  en 
contact  métallique  avec  une  des  colonnes  et  l'extérieur 
avec  la  sphère  de  métal  du  deuxième  fil,  la  jarre  se  charge 
et  donne  des  étincelles  bien  nourries;  on  avait  pris  la  pré- 
caution de  soutenir  les  fils  de  façon  à  ne  point  faire  de  trop 
grandes  pertes. 

Le  fil  fixé  au  haut  de  l'édifice  ayant  été  détaché,  deux 
observateurs,  tenant  en  main  l'extrémité  des  fils  isolants 
munis  de  leur  sphère  de  métal,  les  présentent  près  des 
colonnes;  l'étincelle  jaillit  encore  entre  ces  deux  conduc- 
teurs interrompus;  un  des  expérimentateurs, abandonnant 
son  fil  et  le  tenant  loin  du  fer  sur  le  moellon ,  n'empêchait 
pas  l'autre  de  tirer  des  étincelles  des  colonnes,  etc.  En  un 


(  555  ) 

mot  on  constate  une  conductibilité  parfaite  dans  le  paraton- 
nerre aérien  et  dans  le  sol  sur  lequel  il  [les  deux  ailes  des 
Halles  centrales)  est  établi. 

Il  y  aurait  lieu,  si  ces  expériences  étaient  reprises,  d'avoir 
des  conducteurs  isolants  parfaitement  établis  et  de  cher- 
cher à  apprécier  très-exactement  toutes  les  résistances  à 
la  conductibilité;  il  m'est  impossible  de  m'occuper  actuel- 
lement d'une  recherche  pareille. 

J'ignore  si  des  expériences  semblables  ont  été  faites  ou 
tentées  pour  l'établissement  de  paratonnerres  sur  des  édi- 
fices qui  ressemblent  aux  Halles  centrales  de  Bruxelles,  le 
Palais  de  cristal  à  Londres,  le  Palais  de  l'Exposition  de 
Paris  en  1867,  les  Halles  centrales  de  Paris,  etc.,  etc. 

Nous  savons  cependant  que  des  paratonnerres  spéciaux 
ont  été  placés  sur  les  Halles  centrales  de  Paris ,  car  elles  sont 
munies  de  tiges;  d'ailleurs  les  renseignements  exacts  me 
font  défaut. 

Mais  si  les  conditions  de  conductibilité  ressemblaient 
pour  ces  édifices  à  celles  des  Halles  centrales  de  Bruxelles, 
je  me  demande  à  quoi  bon  placer  un  conducteur  archi- 
microscopique  pour  protéger  un  conducteur  immense  avec 
lequel  il  doit  communiquer.  N'y  aurait-il  pas  dans  ce  fait 
une  distraction  scientifique?  Cela  ne  fait-il  pas  l'effet  d'une 
feuille  de  carton  que  l'on  placerait  au-devant  du  blindage 
d'un  navire  cuirassé  pour  amortir  les  effets  des  boulets  de 
gros  calibre. 

Si  réellement  il  en  était  pour  ces  édifices  comme  pour 
les  Halles  centrales  de  Bruxelles,  ne  pourrai l-on  pas  assi- 
miler le  paratonnerre  ordinaire  dont  on  les  munirait  à  une 
petite  porte  que  l'on  placerait  en  avant  de  la  porte  cochère 
des  grandes  maisons  ? 


(  334  ) 


PARATONNERRE  DE  L  HOTEL  DE  MLLE  DE  BRUXELLES. 

J'ai  fail  connaître  les  dispositions  principales  et  essen- 
tielles du  paratonnerre  établi  sur  l'hôtel  de  ville  de 
Bruxelles;  j'ai  eu  l'honneur  de  le  montrer  à  beaucoup  de 
savants,  de  physiciens  et  de  météorologistes;  j'ose  affirmer 
qu'aucun  d'eux  ne  m'a  fait  une  objection  sérieuse;  tous 
sans  exception  ont  trouvé  que  l'édifice  était  mieux  pro- 
tégé qu'il  ne  l'eût  été  en  employant  les  dispositions  ordi- 
naires; beaucoup, sinon  tous,  admettaientractionpréyewf/fe 
des  pointes  nombreuses;  j'en  ai  donné  une  description 
sommaire,  mais  suffisante  pour  bien  le  faire  comprendre, 
à  plusieurs  savants  étrangers;  des  rédacteurs  d'articles 
scientiliques  dans  les  journanx  périodiques  en  ont  rendu 
compte  avec  bienveillance. 

Il  est  vrai  de  dire  qu'une  critique  scientifiquement 
sérieuse  ne  pourra  être  faite  que  lorsque  j'aurai  pu  décrire 
tous  les  détails  des  dispositions  particulières  de  ce  qui  en 
est  achevé  aujourd'hui  et  de  ce  qu'il  sera  utile  ou  néces- 
saire de  faire  plus  tard,  quand  toutes  les  réparations  de 
l'édifice  seront  terminées. 

J'admets  qu'il  est  convenable  de  se  tenir  sur  la  réserve 
avant  d'approuver,  mais  je  pense  qu'il  faudrait  au  moins 
avoir  vu  et  examiné  sans  idée  préconçue  pour  être  à 
même  de  faire  une  critique  sérieuse  et  motivée. 

Ayant  connaissance  de  certaines  appréciations  favora- 
bles, je  dois  me  bornera  remercier  les  auteurs  de  leur 
bienveillance.  Je  ne  connais  pas  de  critique  sérieuse.  Il  y  a 
une  critique  cependant  que  je  me  fais  un  véritable  plaisir 
de  signaler;  elle  est  due  à  l'un  des  zélés  vulgarisateurs  des 


(  55o  ) 

sciences  météorologiques  qui  a  été  chargé  par  M.  Jules 
Simon,  Ministre  de  l'instruction  publique  en  France,  de 
se  rendre  en  187^  en  Angleterre  pour  y  étudier  les  para- 
tonnerres. Dans  un  opuscule,  publié  par  Gliio,  libraire 
éditeur  à  Paris  :  De  Vutililé  des  paratonnerres  et  de  la 
nécessité  de  les  contrôler,  par  W.  DeFonvielle,  la  plume 
élégante  de  l'auteur  a  tracé  les  lignes  suivantes  (page  55)  : 

«  Il  ne  serait  guère  plus  raisonnable  d'imiter  le  luxe  de 
»  conducteurs  employés  pour  protéger  l'hôtel  de  ville  de 
»  Bruxelles,  qui  a  été  garni  dans  tous  les  sens  de  tiges 
i>  conductrices,  afin  que  la  foudre  n'ait  pour  ainsi  dire 
»  pas  un  Irou  où  elle  puisse  passer. 

»  Mais  les  précautions,  quand  elles  dépassent  la  limite 
»  de  ce  qui  est  raisonnable ,  ne  tardent  pas  à  devenir  ridi- 
»  cules,  même  dans  les  cas  où  elles  ne  sauraient  consti- 
»   tuer  aucun  danger.  » 

Constatons  donc  qu'à  l'hôtel  de  ville,  d'après  M.  W.  De 
Fonvielle  : 

1°  La  foudre  ne  trouve  pas  un  trou  pour  passer,  et  que 
2"  cependant  cette  donnée  ne  constitue  pas  un  danger. 

M.  W.  De  Fonvielle  n'a  très-probablement  pas  vu, 
examiné  ou  étudié  le  paratonnerre  de  l'hôtel  de  ville  de 
Bruxelles;  je  crois  même  qu'il  s'en  fait  une  mauvaise 
idée. 

Si  j'étais  chargé  de  faire  la  critique  de  ce  qui  a  été  exé- 
cuté sur  mes  données,  j'aurais  sans  aucun  doute  des  objec- 
tions plus  sérieuses  à  faire  que  celle  de  M.  W.  De  Fon- 
vielle ;  mais  laissons-les  actuellement  et  assurons  à 
M.  W.  De  Fonvielle  que  je  pourrais  lui  montrer  des  trous 
par  lesquels  la  foudre  passerait  bien  plus  facilement  pour 
frapper  l'hôtel  de  ville  que  par  le  carreau  de  vitre  du  toit 
de  la  nef  centrale  de  la  gare  d'Anvers,  munie  de  plusieurs 


(  556  ) 

tiges  et  conducteurs  en  assez  bon  étal  cependant  et  offrant 
à  l'étincelle  une  surface  métallique  énorme  qu'elle  a 
dédaigné  atteindre  pour  passer,  de  bas  en  haut,  il  est  vrai, 
et  contre  son  habitude  sans  doute,  à  travers  un  carreau  de 
vitre  à  quelques  centimètres  du  fer  métalliquement  en 
contact  avec  cette  énorme  surface  métallique  et  une  masse 
plus  considérable  de  fonte  et  de  fer,  garnie  de  trois  tiges 
élevées  à  pointes  de  platine,  le  tout  reposant  sur  un  sol 
parfaitement  conducteur  de  l'électricité  (1). 

Un  dernier  mol  encore  à  l'adresse  de  M.  De  Fonvielle.  Si 
jamais  il  se  trouve  dans  l'obligation  de  prendre  sur  lui  de 
donner  les  plans  d'un  paratonnerre  pour  préserver  un  des 
plus  splendides  monuments  gothiques  de  France,  je  suis 
certain  qu'il  cherchera  à  s'arranger  de  façon  à  ne  pas 
laisser  un  trou  par  où  la  foudre  puisse  passer,  surtout  s'il 
doit,  après  s'être  écarté  des  données  ordinaires,  accepter 
seul  la  responsabilité  de  l'eiïicacilé  de  l'appareil  dont  il 
aura  surveillé  l'exécution  dans  ses  moindres  détails  et  que 
tout  le  travail  aura  été  fait  par  ses  ordres  et  d'après  ses 
plans. 

Quant  à  la  nécessité  de  contrôler  les  paratonnerres,  si 
M.  De  Fonvielle  avait  vu  celui  de  l'hôtel  de  ville  de 
Bruxelles,  il  aurait  appris  qu'il  est  préparé  depuis  1866 
de  façon  à  pouvoir  être  muni  d'un  contrôleur  et  que  la 
vérification  complète  de  l'ensemble  est  de  la  plus  grande 
facilité. 


(1)  Bien  que  l'Académie,  sur  le  rapport  de  ses  commissaires,  ail  depuis 
plusieurs  années  voté  l'impression  de  ce  travail  et  des  planches,  j'en  ai 
retardé  la  publication  espérant  rencontrer  des  faits  analogues  qui  ne  sont 
point  parvenus  à  ma  connaissance.  —  J'attendrai  encore  jusqu'au  moment 
où  je  pourrai  publier  les  détails  des  paratonnerres  que  j'ai  fait  établir  et 
que  je  compte  faire  établir  à  Bruxelles. 


(  337  ) 

Loin  de  m'éraouvoir  de  la  critique  de  M.  De  Fonvielle, 
je  crois  même  devoir  le  remercier  de  ce  qu'il  dit. 

Ceci  mis  de  côté,  je  puis,  abstraction  faite  des  détails, 
décrire  brièvement  l'ensemble  des  dispositions  prises  et 
les  principes  qui  m'ont  guidé  pour  protéger  la  flèche  et 
rhôtel  de  ville  de  Bruxelles. 

Condiicteiirs  aériens. 

La  flèche  de  l'hôtel  de  ville  de  Bruxelles  a  une  hauteur 
totale  au-dessus  du  niveau  de  la  place  de  91  mètres  et 
domine  les  toits  les  plus  élevés  des  bâtiments  d'une  cin- 
quantaine de  mètres;  le  couronnement  de  l'édifice  est  cou- 
vert d'une  grosse  feuille  de  cuivre  rouge;  une  forte  barre 
de  fer  fixée  dans  l'axe  de  la  tour  sert  de  support  à  la  statue 
de  Saint-Michel,  faisant  fonction  de  girouette.  C'est  sur 
cette  barre  que  sont  fixés  les  conducteurs  au  moyen  d'une 
bride  boulonnée;  le  tout  a  été  rattaché  métalliquement  par 
un  bain  de  zinc  fondu. 

Huit  conducteurs  en  fil  de  fer  galvanisé  de  10  milli- 
mètres de  diamètre,  chacun  d'un  seul  brin  sans  solution 
de  continuité,  d'une  longueur  de  plus  de  91  mètres, 
descendent  le  long  de  l'octogone;  à  la  base  de  la  tour  on  les 
a  rapprochés  et  placés  les  uns  à  côté  des  autres;  ils  sont 
conduits  ainsi  jusqu'à  environ  un  mètre  du  sol  dans  la  cour 
intérieure,  où  ils  se  trouvent  juxtaposés  en  ligne;  ils  sont 
fixés  dans  une  caisse  de  fonte. 

Conducteurs  souterrains. 

Le  fond  de  cette  caisse  est  muni  de  trois  ouvertures  à 
travers  chacune  desquelles  passe  une  série  de  dix  fils  de 
fer,  les  mêmes  que  les  conducteurs  aériens  :  la  première 

2™^  SÉRIE,  TOME  XXXVHI.  22 


(  338  ) 

série  est  fixée  métalliquement  avec  le  plus  grand  soin  à  un 
cylindre  de  fonte  de  0"',600  de  diamètre  ayant  une  lon- 
gueur de  2"\720  ;  il  plonge  toujours  dans  l'eau  d'un  puits 
d'au  moins  2  mètres  à  2"\o0;  la  seconde  série  est  fixée, 
avec  les  soins  les  plus  minutieux  et  de  façon  à  ne  laisser 
aucun  doute  sur  le  contact  absolu  par  une  grande  surface 
pendant  un  temps  indéfini,  sur  une  large  conduite  de  l'eau 
de  la  distribution;  la  troisième  série  est  fixée  sur  un  gros 
tube  de  gaz.  Par  surcroît  de  précaution,  le  tout  est  bien 
entouré  d'une  petite  maçonnerie  et  enfoui  dans  du  goudron 
et  du  brai  de  gaz  sur  tout  le  parcours. 

Les  communications  avec  le  sol  sont  donc  établies  d'une 
manière  parfaite  et  multiple  par  une  surface  énorme  et  à 
plus  de  20  millions  de  kilogrammes  de  tubes  en  fonte  de  fer. 

Commimications  des  conducteurs  aériens  avec  les  con- 
ducteurs souterrains. 

Les  extrémités  des  trois  séries  de  conducteurs  souter- 
rains et  des  conducteurs  aériens  bien  galvanisés  et  étamés, 
libres  mais  enclievétrés  dans  la  caisse  de  fonte,  ont  été 
noyés  dans  du  zinc  fondu  dont  on  a  rempli  la  caisse;  tout 
est  donc  parfaitement  en  contact  métallique,  ce  qui,  du 
reste,  a  été  vérifié  avec  la  plus  grande  attention  par  le 
courant  de  la  pile  et  à  l'aide  des  étincelles  de  la  bobine  de 
Ruhmkorff  grand  modèle. 

La  conductibilité  parfaite  prouvée  ainsi,  voyons  les 
détails  essentiels  de  la  flèche  et  de  la  tour. 

Pointes  et  tiges  du  paratonnerre. 

Aux  pieds  de  la  statue  de  Saint-Michel ,  huit  grandes 
pointes  en  fer,  terminées  en  cuivre,  avec  l'extrémité  dorée 


(  539  ) 

au  feu,  correspondent  aux  huit  conducteurs;  elles  sont 
inclinées  à  45";  fixées  à  vis  dans  un  anneau  de  fer  étamé 
qui  a  été  noyé  dans  une  masselotle  de  zinc  fondu ,  elles 
sont  maintenues  par  huit  tringles  de  fer  galvanisé;  à  ces 
tringles  et  sur  chacun  des  conducteurs  au  point  d'entre- 
croisement se  trouve,  soudée  et  fixée  par  une  masselotte  de 
zinc,  une  aigrette  de  cinq  pointes  effilées  en  cuivre  rouge 
de  0'",50  de  long  et  de  6  millimètres  de  diamètre  à  la  base  ;  il 
y  a  donc  dans  cette  partie  huit  grandes  pointes  et  quarante 
petites. 

En  descendant,  à  la  galerie  la  plus  élevée  et  en  dehors 
de  la  flèche,  se  trouvent  seize  ornements  ou  clochetons. 
Deux  fils  de  10  millimètres  sont  fixés  sur  chaque  conduc- 
teur descendant  au  moyen  d'une  masselotte  de  zinc;  ils  se 
rendent  chacun  au  sommet  du  clocheton ,  sur  lequel  ils 
sont  fixés  par  un  chapeau  de  zinc  fort.  On  s'est  contenté  de 
terminer  leur  bout  en  pointe  au  moyen  de  la  lime;  à  leur 
base  sur  le  haut  du  clocheton  une  masselotte  de  zinc  fixe 
cinq  pointes  effilées  en  cuivre  rouge;  chaque  clocheton  est 
donc  garni  d'une  aigrette  de  six  pointes,  la  première  ver- 
ticale en  fer  se  trouve  dans  le  prolongement  de  leur  axe, 
les  cinq  autres  en  éventail  inclinées  au  dehors  sous  l'angle 
de  Ao°.  Cette  galerie  porte  donc  quatre-vingts  pointes  en 
cuivre  et  seize  en  fer. 

A  la  galerie  située  au-dessous,  il  y  a  huit  clochetons;  tout 
y  est  disposé  absolument  comme  je  viens  de  le  décrire; 
plus  bas  il  y  en  a  quatre,  plus  bas  encore  quatre  et  enfin 
les  quatre  derniers  se  trouvent  à  une  distance  d'environ 
40  mètres  du  faîte  de  l'édifice  ou  du  pied  de  la  statue. 
Deux  ceintures  fixées  par  simple  pression  au  moyen  de  vis 
font  communiquer  à  deux  hauteurs  différentes  tous  les  con- 
ducteurs. 


(  UO  ) 
En  récapitulant  nous  voyons  que  l'aigrette  de  la  tour  et 
de  la  flèche  de  rhôlel  de  ville  est  composée  : 

(    8  grandes  pointes. 
Au  sommet  de j  ^^^  p^^jj^^  p^i^^l^g 

(  16  pointes  de  fer. 
A  15  mètres  du  liaut  environ ^  ^^        j^         cuivre. 

(  40        Id.        cuivre. 
A  20  mètres  id j     ^        ^^         ^^^ 

^       .  .j  (20        Id.        cuivre. 

A  2 1  mètres  id.  i     ,        ,  _,  „ 

(     4        Id.        fer. 

(  20        Id.        cuivre. 

A  o5  mètres  id.  \     ,        ,,  „ 

f     4        Id,        fer. 

,  ,_      ,  .  .  (  20        Id.        cuivre. 

A  40  mètres  id.  {     , 

4        Id.        fer. 


Somme. 


.  264  pointes. 


Un  fil  de  fer  galvanisé  de  6  millimètres,  d'un  seul  brin 
d'environ  200  mètres  de  longueur,  parcourt  le  grand  toit 
de  l'édifice,  descend  le  long  des  fenêtres  saillantes  du  côté 
de  la  rue  de  la  Tête  d'or  et  de  l'Amigo  ;  il  est  fixé  au  zinc 
sur  les  neuf  conducteurs  et  forme  avec  ceux-ci  un  circuit 
fermé;  un  second  disposé  de  la  même  façon  fait  le  tour  de  la 
cour  intérieure,  des  fils  dérivés  de  10  millimètres  de  diamètre 
tous  fixés  au  moyen  de  masselottes  de  zinc,  se  rendent  aux 
six  tourelles  et  aux  trois  contre- forts  placés  entre  deux  de  ces 
tourelles;  ils  complètent  le  réseau  préventif  et  préservatif, 
car  tous  ces  fils  sont  munis  d'aigrettes  de  loin  en  loin  ;  il  y  en 
a  une  sur  chaque  tourelle  ancienne;  la  tourelle  de  l'horloge 
donnant  sur  la  place  qui  a  été  réparée  en  1872  porte  une 
aigrette  de  8  pointes  en  cuivre  rouge  de  ©""jTO  de  long  et 


(  341   ) 

de  12  millimètres  de  diamètre  à  la  base;  il  en  sera  placé 
de  pareilles  sur  les  tourelles  à  mesure  qu'on  les  réparera. 

Tout  le  paratonnerre  aérien  des  tourelles  des  toits  et 
des  fenêtres  est  armé  de  164  pointes;  l'ensemble  de  l'édi- 
fice porte  donc  428  pointes. 

La  majeure  partie  de  ces  pointes  est  placée  depuis  186o; 
je  constate  qu'elles  sont  toutes  en  bon  état;  quant  aux 
pointes  de  fer  brut,  leur  extrémité  est  rouillée,  mais  elle 
reste  pointue  encore. 

Vérification  et  contrôle  des  paratonnerres. 

Rien  ne  paraît  plus  simple  que  la  vérification  de  la  con- 
ductibilité d'un  paratonnerre  par  le  courant  et  un  galva- 
nomètre ou  la  machine  de  Ruhmkorff  et  la  machine  de 
Hoitzà  l'aide  des  étincelles  visibles,  de  la  charge  d'une 
bouteille  de  Leyde  et  au  besoin  par  l'emploi  du  ré-électro- 
mètre  de  Marianini. 

J'ai  dû  nécessairement  suivre  la  route  connue  dans  les 
expériences  décrites.  Est-ce  à  dire  qu'il  faut  avoir  une 
confiance  absolue  dans  les  résultats  qui  ne  nous  appren- 
nent en  définitive  qu'une  chose  :  le  passage  plus  ou  moins 
libre,  le  passage  absolu  sans  résistance  de  la  quantité 
d'électricité  qui  parcourt  le  conducteur  du  paratonnerre  et 
la  terre  avec  laquelle  il  est  en  communication  ;  mais  quand 
nous  comparons  nos  courants  les  plus  intenses,  nos  étin- 
celles les  plus  formidables  avec  l'étincelle  foudroyante  des 
nuages  orageux,  ou  la  foudre  en  boule,  on  se  prend  à  douter 
si  réellement  il  est  permis  de  conclure  des  uns  aux  autres. 

Pour  avoir  une  donnée  certaine  de  plus,  et  j'en  ai  vaine- 
ment cherché  l'occasion  depuis  le  coup  de  foudre  sur  la 


(  342  ) 

gare  d'Anvers  en  juillet  1865,  il  faudrait  pouvoir  exami- 
ner par  ces  moyens  un  paratonnerre  venant  d'être  fou- 
droyé et  qui  eût  mal  fonctionné. 

Cette  réserve  mise  de  côté  et  en  tenant  compte  de  ce 
que  je  dis  dans  la  note  page  1  i ,  voyons  comment  on 
vérifie  le  paratonnerre  de  l'hôtel  de  ville  de  Bruxelles. 

On  fond  le  zinc  de  la  caisse  de  fonte  dans  laquelle  se 
rendent  tous  les  conducteurs  aériens  et  les  conducteurs 
souterrains;  on  obtient  ainsi  40  brins  que  l'on  isole  les  uns 
des  autres  et  entre  lesquels  on  interpose  une  pile  et  un 
galvanomètre,  etc.,  etc.  Je  crois  inutile  d'insister  sur 
toutes  les  vérilications  auxquelles  cette  disposition  se 
prête;  bien  entendu  qu'on  enlèvera  les  ceintures;  qu'au 
besoin  on  enlèvera  les  communications  avec  les  conduc- 
teurs qui  vont  aux  petites  tourelles  des  angles  du  bâtiment 
et  ceux  qui  font  le  tour  des  bâtiments. 

A  l'effet  d'avoir  un  contrôle  continu,  partant  des  pointes 
de  l'aigrette  supérieure,  avec  n'importe  quelle  partie  des 
conducteurs  aériens  ou  des  conducteurs  souterrains,  la 
terre,  le  puits,  les  conduites  d'eau  et  les  tubes  du  gaz 
courant,  un  câble  à  triple  enveloppe  isolante  a  été  fixé  du 
côté  nord  à  l'anneau  de  fer  étamé  enfoui  dans  du  zinc 
fondu  qui  est  en  contact  avec  les  48  pointes  et  les  8  con- 
ducteurs; cet  appareil  ne  fonctionnera  que  lorsque  tout  le 
paratonnerre  sera  achevé,  c'est-à-dire,  quand  toutes  les 
réparations  de  l'hôtel  de  ville  seront  terminées.  Ce  câble 
donne  une  preuve  irrécusable  que  j'avais  pensé  dès  1867 
au  contrôle  permanent  du  paratonnerre;  car  pour  en  poser 
un  pareil,  il  faudrait  placer  un  échafaudage  à  la  tour. 


(  343  ) 

Projet  de  paratonnerre  sur  les  bâtiments  du  Conservatoire 
royal  de  musique  de  Bruxelles. 

Tous  les  principes  du  paratonnerre  de  Thôtel  de  ville 
auraient  été  appliqués  à  celui  du  Conservatoire  de  musique 
si  M.  le  Ministre  des  travaux  publics  avait  admis  le  projet 
que  M.  l'architecte  Cluysenaer  avait  soumis  à  son  appro- 
bation. Le  plan  et  les  devis  avaient  été  dressés  par 
M.  Éd.  Sacré,  ingénieur  mécanicien,  qui  a  établi  le  para- 
tonnerre de  l'hôtel  de  ville. 

Le  refus  de  M.  le  Ministre  se  base  sur  ce  fait  que  l'Aca- 
démie n'a  jamais  approuvé  le  système  de  protection  em- 
ployé pour  l'hôtel  de  ville ,  et  je  viens  de  poser  nettement  la 
question  à  la  commission  permanente  des  paratonnerres 
qui,  je  pense,  voudra  bien  se  prononcer  et  motiver  son 
jugement,  qu'il  soit  favorable  ou  non;  je  crois,  du  reste, 
devoir  faire  observer  que  l'Académie  ne  s'est  jamais  pro- 
noncée sur  un  système  particulier. 

Il  me  paraît  superflu  d'entrer  dans  la  description  des 
détails;  on  comprend  que  les  dispositions  sur  un  bâti- 
ment ordinaire  différeront  par  des  détails  particuliers  de 
celles  d'un  édifice  irrégulier,  muni  d'une  tour;  il  faudrait 
avoir  sous  les  yeux  un  plan  complet  et  une  élévation  des 
bâtiments.  On  conçoit  cependant  l'ensemble  en  quelques 
mots. 

Un  premier  conducteur  en  fer  galvanisé  de  iO  millimè- 
tres de  diamètre  fait  le  tour  du  bâtiment,  derrière  les  orne- 
ments qui  doivent  être  placés  sur  les  gouttières;  ce  con- 
ducteur est  garni  de  pointes  effilées  nombreuses.  Un  second 
conducteur,  semblable  au  premier,  fait  le  tour  derrière  un 


(  344  ) 

ornemenl  en  fonte  de  fer  qui  couronne  le  membron  sépa- 
rant la  partie  ardoisée  du  toit  de  la  partie  couverte  en  zinc. 
Un  troisième  conducteur  parcourt  tout  le  faîtage,  il  est 
garni  de  pointes  ou  d'aigrettes  comme  les  deux  autres; 
ces  trois  conducteurs  sont  reliés  entre  eux;  ils  seront  mis 
en  contact  avec  le  zinc  des  toitures  par  des  circuits  fermés. 
Six  conducteurs  descendront  jusqu'au  bas  de  l'édifice  et 
seront  mis  en  communication  avec  l'eau  d'un  puits,  avec  les 
conduites  d'eau  de  la  distribution  et  un  gros  tube  du  gaz 
au  delà  du  compteur,  comme  cela  a  été  fait  à  l'hôtel  de 
ville. 

Je  me  demande  par  où  la  foudre  passera  pour  frapper 
l'édifice  et  l'endommager?  Les  conducteurs  multiples  au 
nombre  de  cinq  ne  valent-ils  pas  un  conducteur  unique?  La 
simple  ligne  droite  du  conducteur  unique  est  remplacée 
par  deux  rectangles  ayant  un  côté  commun;  à  quelques 
mètres  plus  bas  se  trouve  encore  un  rectangle  métallique 
fermé;  la  foudre  trouve  donc  neuf  places  à  atteindre  au 
lieu  d'une. 

Les  pointes  nombreuses,  effilées,  petites,  seront-elles 
moins  efficaces  que  cinq  pointes  de  platine? 

Six  conducteurs  descendants  et  trois  contacts  avec  la 
terre  ne  valent-ils  pas  un  conducteur  descendant  unique 
et  un  contact  unique? 

Ne  voyons-nous  pas  dans  les  œuvres  de  Franklin, 
d'Arago,  de  Kuhn,  etc.,  que  des  décharges  formidables 
peuvent  passer  sans  occasionner  de  dégâts  dans  des  fils 
de  fer  d'une  faible  section,  même  par  de  simples  fils  de 
sonnettes?  Mais  j'aurais  une  foule  d'exemples  à  citer;  c'est 
par  excès  de  prudence  que  j'emploie  des  fils  de  fer  galva- 
nisés d'une  section  assez  considérable,  10  millimètres  de 


(  345  ) 
diamètre  correspondant  à  une  section  de  78,5  millimètres 
carrés,  mais  les  considérations,  que  j'ai  fait  valoir  dans 
ma  note  sur  les  paratonnerres  à  conducteurs  multiples , 
prouvent  que  l'on  pourrait  sans  danger  se  contenter 
de  plusieurs  brins  de  4  à  5  millimètres  de  section  ;  je  m'en 
contenterais  parfaitement  et  je  me  croirais  en  parfaite 
sécurité  si  j'avais  à  protéger  mon  habitation  en  la  suppo- 
sant isolée  au  milieu  d'une  plaine  exposée  aux  orages  les 
plus  violents. 

Que  l'on  se  souvienne  de  la  célèbre  expérience  de 
Romas  et  l'on  sera  convaincu  de  ce  que  j'avance,  par  une 
preuve  expérimentale  irrécusable. 

Prajet  d'un  paratonnerre  s'arrêtant  au  faite  d'un  édifice. 

BOURSE    DE    BRUXELLES. 

Dans  le  bas  de  la  ville  la  distribution  de  l'eau  peut  se 
faire  jusqu'au  dernier  étage  des  maisons  les  plus  élevées; 
à  l'hôtel  de  ville  elle  peut  s'élever  à  un  hauteur  de  2"87 
au-dessus  du  pavement  de  la  troisième  galerie.  Lorsque  je  me 
suis  occupé  de  l'étude  de  la  préservation  de  l'hôtel  de  ville, 
je  me  suis  demandé  s'il  n'était  pas  convenable  de  se  con- 
tenter de  transformer  la  tour  et  la  flèche  en  une  immense 
aigrette,  comme  elle  l'est  du  reste  aujourd'hui,  et  d'arrêter 
le  paratonnerre  à  la  hauteur  de  la  première  galerie  de  la 
tour,  celle  qui  se  trouve  la  plus  rapprochée  du  grand  toit; 
j'aurais  fait  arriver  jusque-là,  par  des  conduits  à  large 
section,  l'eau  de  la  distribution.  On  aurait  fait  aboutir  tous 
les  conducteurs  descendants  de  la  statue  de  S'-Michel  à  ces 
conduits;  ils  y  auraient  été  fixés  avec  soin  et  leurs  extré- 


(  346  ) 

mités  libres  terminées  en  pointes  aiguës  auraient  même 
pu  pénétrer  dans  l'intérieur  des  conduits  remplis  d'eau,  ou 
d'un  bassin  spécial;  on  pouvait  ainsi  aller  jusqu'à  la  galerie 
du  troisième  étage  ;  en  un  mot  le  puits  classique  se  serait 
trouvé  au-dessus  des  toits  à  environ  70"'  au-dessus  du 
niveau  de  la  grande  place.  Je  faisais  déjà  remarquer  à  cette 
époque  que  ce  mode  de  préservation  aurait  pu  être  appliqué 
à  tout  le  bas  de  la  ville. 

J'ai,  dans  ce  but,  visité  la  Bourse  et  rien  ne  me  paraît 
plus  simple  que  d'établir  sur  ce  magnifique  édifice  un 
paratonnerre  préventif  et  préservatif  à  points  multiples 
sans  conducteurs  descendants  et  sans  autre  contact  avec 
le  sol  que  les  quatre  conduites  qui  portent  l'eau  de  la  ville 
jusqu'au  haut  du  toit  de  l'édifice  (I). 

J'aurai  l'honneur  de  soumettre  le  plan  complet  de  cet 
appareil  à  mes  collègues  de  la  commission  des  paraton- 
nerres si  l'administration  communale  se  décide  à  donner 
suite  à  l'intention  que  les  ingénieurs  de  la  ville  ont  mani- 
festée de  voir  cet  édifice  préservé. 

Si  j'en  dis  quelques  mots  dans  cette  notice,  c'est  pour 
appeler  dès  aujourd'hui  l'attention  des  propriétaires  du  bas 
de  la  ville  sur  un  mode  de  préservation  qui  me  paraît  effi- 
cace et  convenable. 

Mes  collègues  auront  eu  le  loisir  de  bien  se  rendre 
compte  par  eux-mêmes  des  propriétés  d'un  paratonnerre 
établi  dans  des  conditions  dont  je  ne  pose  que  le  principe. 


(1)  Il  doit  êlre  bien  entendu  que,  lout  en  admettant  que  l'on  puisse  se 
borner  à  ce  système  des  plus  simples,  on  ne  négligera  pas  de  prendre 
toutes  les  précautions  capables  sinon  de  rendre  plus  efficace  un  paraton- 
nerre, établi  dans  ces  conditions,  au  moins  d'en  exagérer  les  propriétés. 


(  347) 
Je  me  demande  quelle  influence  la  multiplicité  des  para- 
tonnerres à  pointes  eflilées  nombreuses  pourrait  avoir  au 
point  de  vue  météorologique. 

Obse7'vations  sur  quelques  données  relatives  aux  paratonnerres 
placés  sur  les  édifices  dans  ta  construction  desquels  on  em- 
ploie des  masses  considérables  de  fer  et  de  fonte. 

Les  instructions  recommandent  en  général  de  faire  com- 
muniquer métalliquement  toutes  les  masses  de  fer  un  peu 
considérables  avec  les  conducteurs  des  paratonnerres. 

A  titre  d'excès  de  précaution  à  la  suite  d'expériences 
parfois  contradictoires,  j'ai  cru  qu'il  était  bon  de  poser  une 
règle  générale  à  ce  sujet;  je  disais  dans  ma  Note  sur  les 
paratonnerres  (Bulletins  de  l'Académie,  t.  XX,  p.  15, 
juin!  860): 

Toutes  les  pièces  métalliques  un  peu  considérables  doi- 
vent être  mises  en  communication  avec  les  conducteurs  des 
paratonnerres ,  de  façon  à  fortner  des  circuits  métalliciues 
fermés,  c'est-à-dire  par  deux  points  ou  à  deux  conducteurs 
au  moins. 

Mais  on  éprouve  quelquefois  des  difficultés  sérieuses 
lorsque  les  bâtiments  sont  achevés  ou  que  leur  construc- 
tion est  avancée.  Vis-à-vis  de  ces  difficultés  et  eu  égard  à 
la  faible  tension  que  l'électricité  doit  avoir  sur  les  nom- 
breux conducteurs  d'une  section  totale  de  628  millimètres 
carrés,  c'est-à-dire  le  double  du  conducteur  unique  armé 
d'une  seule  pointe  obtuse,  tandis  que  les  miens  correspon- 
dent chacun  au  bas  de  la  tour  à  33  pointes  effilées,  non 
compris  les  16i  sur  les  fils  des  toits  et  des  tourelles  laté- 
rales, j'ai  pris  la  détermination  à  l'hôtel  de  ville  de  Bruxelles 
de  laisser  actuellement  tous  les  métaux  libres  sans  loucher 
aux  conducteurs,  me  réservant  de  faire  achever  ce  travail 


(  348  ) 

pour  les  parties  basses  de  l'édifice ,  les  descentes,  les  gout- 
tières, etc..  quand  toutes  les  réparations  seront  terminées. 

Toutes  les  difficultés  disparaissent,  au  contraire,  quand 
on  prévoit  pour  des  édifices  qui  doivent  en  être  armés, 
la  construction  des  paratonnerres  à  partir  des  fondations. 

Rien  ne  serait  plus  facile  que  de  rattacher  tous  les  fers, 

poutrelles,  colonnes,  longerons,  ancres,  etc au  fur  et  à 

mesure  que  le  bâtiment  s'élève.  On  aurait  ainsi  des  con- 
ducteurs extraordinairement  considérables,  pour  ne  pas 
dire  infinis,  eu  égard  à  l'exiguïté  comparative  des  bâti- 
ments; ils  seraient  enfouis  dans  les  maçonneries  et  par 
conséquent  il  serait  facile  de  les  mettre  à  l'abri  complet  de 
la  rouille;  on  les  rattacherait  sans  difficulté,  au  besoin, 
avec  les  conducteurs  aériens  et  souterrains  au  grand  profit 
de  la  sécurité. 

Si  monsieur  le  Ministre  des  travaux  publics,  au  lieu  de 
s'en  tenir  aux  anciennes  données,  avait  consulté  l'Acadé- 
mie, comme  une  très-ancienne  commission  le  lui  conseil- 
lait, les  paratonnerres  que  l'on  placera  incontestablement 
un  jour  sur  le  nouveau  Palais  de  justice  s'élèveraient  avec 
l'édifice  lui-même  à  peu  de  frais  et  offriraient  à  la  foudre 
des  milliers,  que  dis-je,  des  centaines  de  milliers  de  voies 
pour  s'écouler  facilement  au  réservoir  commun  sans  occa- 
sionner aucun  dégât. 

Autant  que  j'ai  pu  m'en  rendre  compte  dans  un  examen 
rapide  et  superficiel ,  il  ne  me  paraît  pas  encore  trop  tard 
pour  prendre  cette  mesure  qui  sauvegarderait  la  responsa- 
bilité de  l'Administration  de  la  façon  la  plus  complète, 
quand  l'Académie  aurait  donné  un  assentiment  quelconque 
à  un  projet  quelconque  de  paratonnerres. 


(  349  ) 

La  comète  de  Coggîa,  observée  à  Bruxelles;  note  par 
M.  Ernest  Quetelel,  membre  de  l'Académie. 

La  troisième  comète  de  1874,  qui  a  si  vivement  attiré 
l'attention  pendant  la  première  moitié  du  mois  de  juillet,  a 
eu  des  commencements  assez  modestes.  Au  moment  de  sa 
découverte  (17  avril)  elle  était  faible,  mais  les  astronomes 
reconnurent  bientôt  qu'elle  augmenterait  considérable- 
ment d'éclat  et  qu'à  la  fin  du  mois  de  juin  elle  deviendrait 
visible  à  l'œil  nu.  Cette  annonce  s'est  pleinement  vérifiée  et 
la  comète  de  Coggia,  sans  pouvoir  être  rangée  au  nombre  de 
ces  astres  brillants  qui  excitent  l'étonnement,  a  cependant 
été  assez  belle  pour  attirer  les  regards  de  tous. 

Grâce  à  son  éclat  et  à  sa  situation  dans  le  ciel,  la  comète 
a  pu  être  observée  à  Bruxelles  à  son  passage  au  méridien 
inférieur  depuis  le  1"  jusqu'au  14  juillet.  Voici  les  posi- 
tions qui  ont  été  obtenues  : 


1874. 


Juill.  1 
5 
6 


TEMPS    MOYEN 
de  Bruxelles. 


I2h57ni    Qs 

12  45  56 
12  42  59 
12  59  59 
12  36  54 
12  55  45 
12  20  57 
12  17  13 


O:  OBSERVEE. 


19''56"»35»..1 

19  41 

13,54 

19  42 

13,42 

19  43 

8,85 

19  44 

0,19 

19  44  47,62 

19  47 

22,75 

19  47 

55,05 

ETOILES 

de 

comparaison. 


S    OB 


a.c.  g.  l. 
g.h  i.j.l.  q. 
d.f.g.h.i.l.q. 
d.  f.  g. lui.  l. 

j.  q.  r.  t. 
i.  k.  p. 

e.  i.  k.  11. 


+   64«49'43;'9 

Q. 

+  01  55  49,8 

Q. 

+  60  27  57,6 

H. 

+  59  12  47,0 

E. 

+  57  48  15,0 

H. 

+  56  12  55,2 

Q. 

+  47  32  9,3 

H. 

+  44  59  40,5 

E. 

m.  s. 

b.  c.  g. 

y-i- 

c.  f.  g.  0. 

c.  f.  g. 
J.  0. 

h.  k.  p. 
i.  k.  p. 


Les  initiales  Q,  H,  E  désignent  les  observateurs  E.  Quelelet,  C.  Hooreman  et  L.  Estourgies. 


(  ooO  ) 
Les  étoiles  de  comparaison  qui  ont  servi  à  fixer  la  posi- 
tion de  la  comète  dans  le  ciel  ont  été  empruntées  au  cata- 
logue de  Bruxelles.  Le  tableau  suivant  présente  leurs  posi- 
tions moyennes  pour  l'année  1874. 


Position  des  étoiles  de  comparaison  pour  1874  ,  0 


a. 

12  Lyncis 

6'' 53"' 6^,00 

+  39»  35' 

b. 

Groombricige  1228. 

6  47     2  .  . 

+  70  38  25','0 

c. 

Groonibriclge  1266. 

7     0  32,86 

+.  62  27  35,8 

d. 

18  Lyncis.    .     . 

7     4  34,59 

+  39  50  ...  . 

e. 

B.  H.  965.     .     .     . 

7     8  57,26 

+  49  41  ... . 

f- 

19  Lyncis.     .     .     . 

7  12  54,77 

+  53  50  37,3 

9- 

Groonibriclge  1519 

7  20  42,18 

+  62     1    11,8 

h. 

i. 

Groombricige  lôôl. 
Groombricige  1556 

7  27  13,14' 
7  29  12,61 

+  34     7     1,6 
+  34  11     1,7 

i- 

31  Camelopardi. 

7  54  o6,30 

+  63  43  11,0 

k. 

l. 

PiazziVII,  199. 
35  Camelopardi. 

7  41     9.69 
7  30  33,92 

+  34  26  23,8 
+  60  40  ...  . 

m. 

Groombricige  1586 

7  51  15  .. 

+  63  23  39,8 

n. 

27  Lyncis.     .     . 

7  38  38,56 

+31  51  .... 

0. 

Groombricige  1407 

7  59  45  . . 

+  38  56  32.4 

P- 

Lalande  13823  . 

8     1   11,25 

+  32  50  58,9 

g- 

PiazziVII,  509. 

8    5  17,28 

+  56  34  ... . 

r. 

Piazzi  ¥11,511  . 

8     5  46,98 

+  56  49  ... . 

s. 

BradleylieO.    . 
Johnson  2128    . 

8     6  43  . . 
8  15  44,86 

+  72  47  40,2 
+  57  48  ... . 

La  comète  avait  un  noyau  bien  défini  ;  les  deux  derniers 
soirs  le  diamètre  de  celui-ci  avait  notablement  augmenté  et 
son  contour  était  moins  bien  terminé.  La  queue  qui  enve- 
loppait ce  noyau,  à  peu  près  comme  une  parabole  enve- 
loppe son  foyer,  augmenta  de  dimension  jusqu'au  dernier 


(  351  ) 
jour  des  observations;  le  14,  elle  avait  atteint  une  lon- 
gueur de  2S  degrés  environ.  Cette  queue,  sensiblement 
droite  jusqu'au  14,  et  opposée  au  soleil,  paraissait,  les 
derniers  jours  surtout,  un  peu  plus  brillante  sur  les  bords 
que  dans  l'axe. 


La  comète   de  Coggia,   observée  à   Louvain;    note    par 
M.  F.  Terby,  docteur  en  sciences. 

Le  5  juillet,  de  iO  h.  30  m.  à  41  h.  15  m.  La  comète 
est  très-bien  visible  à  l'œil  nu;  son  noyau  atteint  presque 
la  troisième  grandeur. 

Le  6 ,  de  10  h.  30  m.  à  H  h.  L'éclat  de  la  comète  a 
peu  varié  depuis  la  veille  ;  il  en  est  de  même  de  sa  posi- 
tion. On  peut  comparer  la  longueur  de  la  queue  à  l'inter- 
valle apparent  qui  sépare  v  de  /*  de  la  grande  Ourse.  Cette 
longueur  m'a  semblé  être  à  fort  peu  près  les  3/4  de  cette 
distance.  Avec  des  grossissements  de  38,  de  80,  de  120  et 
de  180  fois,  le  noyau  est  enveloppé  d'une  large  chevelure, 
et  la  queue  est  plus  sombre  dans  sa  ligne  médiane  que  sur 
ses  bords. 

Le  8,  de  10  h.  30  m.  à  11  h.  15  m.  L'éclat  du  noyau 
et  la  longueur  de  la  queue  ont  sensiblement  augmenté. 
La  comète  est  intermédiaire  entre  la  deuxième  et  la  troi- 
sième grandeur. 

Le  13,  de  10  h.  10  m.  à  10  h.  35  m.  Le  noyau  atteint 
presque  la  deuxième  grandeur. 

Le  <4,  à  11  h.  30  m.  Avec  les  grossissements  de  38, 
de  80  et  de  120  fois,  le  noyau  est  très-brillant.  Il  atteint 


(  352  ) 
la  deuxième  grandeur.  Immédiatement  autour  du  noyau, 
la  chevelure  est  jaunâtre  et  offre  un  éclat  sensiblement  plus 
grand  que  le  reste  de  la  nébulosité.  La  queue  est  dirigée 
vers  h  de  la  grande  Ourse. 

Le  i5,  entre  ^1  et  12  h.  Le  noyau  de  la  comète  est 
très-bas;  il  semble  néanmoins  surpasser  la  deuxième  gran- 
deur. La  queue,  très-longue,  atteint  presque  h  de  la  grande 
Ourse. 


La  comète  de  Coggia,  observée  à  Matines; 
note  par  M.  G.  Bernaerts. 

Ma  lunette  de  Secretan  de  9  centimètres  d'ouverture 
utile  m'a  permis  d'examiner  la  belle  comète  qui  a  été 
visible  ces  jours  derniers,  et  d'en  suivre  les  transforma- 
tions. 

Les  observations  que  j'ai  faites  pouvant  avoir  quelque 
intérêt,  je  crois  utile  de  vous  les  transmettre. 

C'était  le  5  juillet  vers  11  1/2  h. -du  soir  que  j'ai  pu  exa- 
miner la  comète  pour  la  première  fois.  La  nébulosité  en- 
tourait surtout  la  partie  du  noyau  tournée  vers  le  soleil,  et 
se  projetait  à  droite  et  à  gauche  pour  former  la  queue,  en 
laissant  au  milieu  un  espace  relativement  obscur  qui  se 
prolongeait  jusqu'à  une  certaine  distance.  La  forme  géné- 
rale de  la  nébulosité  était,  par  conséquent,  la  même  que 
celle  des  comètes  de  1858  et  1861 ,  d'après  les  dessins  et 
les  observations  de  MM.  Bond  et  Warren  de  la  Bue. 
Le  8  juillet,  l'aspect  n'avait  pas  changé.  Le  15,  la  comète 
était  devenue  plus  brillante.  Le  14,  la  queue  était  d'un  tiers 
environ  plus  longue  que  le  jour  précédent.  Le  noyau  était 
devenu  de  deuxième  grandeur  et  pouvait  se  comparer  pour 


(  353  ) 

l'éclat  aux  étoiles  a  (3  et  j'  de  la  grande  Ourse.  Le  mouve- 
ment apparent  avait  aussi  considérablement  augmenté. 
Le  mercredi  15,  à  10  li.  du  soir,  la  comète  avait  subi  de 
grandes  transformations.  Le  rayon  qui  se  projetait  du 
côté  0.  était  plus  brillant  que  celui  du  nord.  La  nébulosité 
entourait  complètement  le  noyau  et  l'espace  obscur  qui  le 
suivait  avait  presque  disparu.  Les  grossissements  employés 
étaient  de  52, 112  et  i80  fois.  A  11  heures,  au  moment  oîi 
l'obscurité  était  devenue  plus  complète,  cette  apparence 
était  moins  vive  avec  l'oculaire  grossissant  52  fois,  mais 
on  la  voyait  encore  très-bien  avec  le  grossissement  de  180. 
La  queue  avait  pris  de  grands  développements.  Elle  se 
courbait  vers  l'O,  et  s'étendait  jusqu'à  la  ligne  joignant  D 
et  0  de  la  grande  Ourse.  Le  noyau,  qui  brillait  d'un  vif 
éclat,  s'était  sensiblement  approché  de  l'horizon. 

Le  16  juillet,  au  crépuscule,  la  nébulosité  qui  entourait 
le  noyau  avait  la  même  forme  que  le  jour  précédent,  en 
employant  l'oculaire  grossissant 52  fois.  A 11  heures,  je  crus 
répéter  l'observation,  comme  le  jour  précédent,  mais  le 
noyau  de  la  comète  se  trouvait  caché  derrière  des  bâtiments 
situés  à  une  assez  grande  distance.  La  queue,  toujours 
courbée  vers  l'O,  avait  pris  encore  plus  d'extension,  et 
passait  un  peu  au  nord  de  l'étoile  v  de  la  grande  Ourse. 
Ce  jour  fut  le  dernier  où  la  comète  pût  être  examinée. 
Le  17  juillet,  une  bande  de  cirrho-stratus  empêcha  toute 
observation. 

Le  18  juillet,  vers  10  h.  50  la  queue  était  à  peine  visible 
dans  la  partie  du  ciel  occupée  par  i  y.  et  d  de  la  grande 
Ourse.  Son  éclat  avait  considérablement  diminué. 


2'"'=  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  23 


(  554  ) 


Note  sur  les  orages  du  10  juillet  187 â;  par  M.  Charles 
Hooreman ,  aide  à  l'Observatoire  royal  de  Bruxelles. 

Des  orages  remarquables  par  leur  violence  ont  éclaté 
le  10  juillet  sur  plusieurs  points  du  pays.  A  Bruxelles,  peu 
de  temps  après  minuit,  on  apercevait  déjà  des  éclairs  bril- 
lants dans  l'ouest.  De  2  ^/a  h-  à  3  V2  h.  du  matin  on  signale 
à  Ostende  et  à  Somergem,  près  de  Gand,  un  orage  dans 
le  SE.;  l'orage  n'a  pas  atteint  ces  deux  localités;  il  y  est 
tombé  seulement  un  peu  de  pluie. 

Vers  3  h.  45  m.  du  matin,  l'orage  se  déclare  à  Bruxelles 
par  des  roulements  de  tonnerre  lointain;  à  4  h.,  un  violent 
coup  de  foudre  ébranle  toute  la  ville;  il  est  suivi  immé- 
diatement par  une  forte  averse;  plusieurs  autres  coups  se 
font  encore  entendre ,  mais  ils  sont  moins  violents;  l'orage 
s'éloigne  vers  le  NE.,  et  la  pluie  continue  jusque  vers  6  h. 
50  m.  Plusieurs  arbres  ont  été  frappés  par  la  foudre  à 
Saint-Josse-ten-Noode  et  au  Champ  des  Manœuvres;  la 
tour  de  l'église  d'Etterbeek  a  été  fortement  endommagée. 

A  Malines  et  à  Louvain,  l'orage  s'est  montré  vers  4  h. 
40  m.;  il  venait  du  SO.  A  Malines,  jusque  vers  5  heures, 
l'orage  était  faible ,  mais  la  pluie  assez  forte.  A  5  h.  28  m., 
un  violent  coup  de  foudre  frappe  un  arbre  chaussée  de 
Tervueren  à  peu  de  distance  de  la  ville;  l'orage  continue 
jusque  vers  6  h.  15  m.  et  se  perd  dans  le  NE.  A  Louvain , 
il  est  moins  intense;  à  5  h.,  le  vent  est  assez  fort  et  il  tombe 
des  gouttes  de  pluie;  à  5  h.  7  m.,  averse;  à  5  h.  21  m.  et 
à  5  h.  27  m.,  coup  de  tonnerre;  l'orage  s'éloigne  ensuite 
vers  le  N. 

A  5  h.  du  malin,  à  Liège,  le  ciel  est  encore  très-beau;  à 


(  o5o  ) 
6  h.,  il  se  couvre  et  l'on  commence  a  entendre  le  tonnerre 
dans  le  lointain;  l'orage  se  rapproche  lentement  ponssé 
par  un  vent  de  SSE.  ;  ensuite  des  éclairs  rougeàtres  sil- 
lonnent les  nuages.  Les  éclairs  en  traits  de  Jupiter  étaient 
tous  suivis  par  des  coups  de  tonnerre  qui  commençaient 
par  des  craquements;  à  7  heures,  forte  obscurité  et 
averse;  elle  a  duré  une  demi-heure;  l'orage  a  duré  jusque 
vers  8  '/^  heures. 

Le  soir  un  nouvel  orage  s'est  manifesté,  mais  dans  des 
limites  assez  restreintes;  Bruxelles  et  Louvain  paraissent 
seuls  avoir  été  éprouvés.  A  Bruxelles,  dès  6  h.  du  soir, 
l'horizon  sud  était  bordé  de  nuages  noirs  qui  s'avançaient 
lentement;  à  7  •//<.  h.  on  entend  le  roulement  du  tonnerre 
et  le  ciel  s'obscurcit  fortement;  à  7  '/a  h.  les  nuages  noirs 
sont  au  zénith  et  toute  la  partie  du  ciel  comprise  entre  ce 
point,  l'est,  le  sud  et  l'ouest,  a  une  teinte  jaune-cuivre  et 
est  sillonnée  de  nombreux  éclairs  en  traits  de  Jupiter  dont 
la  plupart  sont  verticaux  et  suivis  de  fortes  détonations; 
l'air  était  calme  et  la  pluie  n'a  commencé  que  vers  7  '^ji  h., 
alors  que  le  gros  de  l'orage  s'étaitéloigné;  elle  a  duré  jusque 
vers  9  '/^  h.  L'orage  a  passé  à  l'est  de  la  ville  et  s'est  perdu 
dans  le  NE.  Plusieurs  points  des  environs  de  Bruxelles 
ont  été  frappés:  une  maison  rue  Keyenveld  a  été  en  partie 
incendiée  et  une  cheminée  a  été  abattue  par  la  foudre 
chaussée  de  Witerloo,  à  Saint-Gilles. 

A  Louvain,  l'orage  n'a  éclaté  que  vers  8  '/'i  heures; 
les  nuages  du  sud  étaient  noirs  et  ceux  de  l'ouest  rosés,  dit 
M.  Terby.  De  puissants  traits  de  Jupiter  les  sillonnent  et 
le  tonnerre  est  très-bruyant.  Les  nuées  orageuses  vont  du 
sud  au  nord;  des  coups  de  vent  se  manifestent  à  8  h.  2o  m. 
La  pluie  a  commencé  vers  8  h.  30  m.  Plusieurs  coups  de 
foudre  se  sont  succédé  vers  8  h.  55  m.  au  milieu  d'une 


(  356  ) 

très-forte  averse.  L'un  de  ces  coups  fut  réellement  épou- 
vantable, suivant  immédiatement  un  brillant  éclair.  A  9  h. 
50  m.,  l'orage  était  fini,  mais  il  pleuvait  encore  à  40  h. 
A  Somergem  et  à  Malines  cet  orage  n'a  été  aperçu  que  par 
des  éclairs,  qui  se  produisaient  dans  le  SE.  entre  7  et  8  h. 
du  soir;  à  Liège  des  éclairs  avaient  lieu  dans  l'ouest  vers 
la  même  heure. 


Description  de  quelques  plantes  fossiles  de  l'étage  des  psam- 
mites  dit  Condroz  {dévonien  supérieur)^  par  M.  François 
Crépin,  correspondant  de  l'Académie. 

La  flore  fossile  de  nos  terrains  dévoniens  est  encore  à 
peu  près  entièrement  inconnue.  En  ce  qui  concerne  l'étage 
des  psammites  du  Condroz,  trois  espèces  y  ont  seules  été 
signalées  :  deux  par  moi  (1),  les  Palaeopteris  hibernica 
et  Chondrides  antiquus ,  Gôpp.,  la  troisième  par  M.  De- 
calque  (2),  le  Chondrides  confertus  Coem.  Dumont  et 
Davreux  avaient  bien  signalé,  en  1852  et  1855,  des  em- 
preintes végétales  dans  cet  étage,  mais  ces  empreintes 
étaient  indéterminables. 

Au  mois  de  juin  de  l'année  dernière,  M.  Mourlon,  mon 
collègue  au  Musée,  m'invitait  à  aller  le  rejoindre  à  Esneux, 
pour  examiner  divers  niveaux  de  plantes  qu'il  avait  décou- 
verts dans  les  psammites  de  la  vallée  de  l'Ourlhe.  Je  me 
rendis  à  l'appel  de  ce  géologue,  et  je  visitai ,  sous  sa  direc- 
tion, la  plupart  des  carrières  ouvertes  dans  l'étage  des 
psammites  depuis  Esneux  jusqu'à  Comblain-la-Tour.  Nous 


(1)  Fatria  belgica,  l.  I",  p.  473. 

(2)  Prodrome ,  p.  519. 


(  5^7  ) 
rencontrâmes  çà  et  là  trois  sortes  d'empreintes  végétales  : 
1°  des  traces  d'axes  assez  volumineux  et  qui  sont  peut- 
être  les  restes  de  liges  de  Bornia  ou  de  Calamités  ;  2°  de 
nombreux  débris  méconnaissables  de  végétaux  pétris  dans 
certains  bancs;  5°  des  traces  d'axes  bifurques  qui,  tout 
d'abord,  me  parurent  constituer  un  Pinnularia,  et  que  je 
déterminai  plus  tard  comme  étant  des  rameaux  de  Psilo- 
phyton  condrusorum. 

Ces  premières  investigations  ne  m'avaient  pas  permis  de 
reconnaître  quel  pouvait  être  le  caractère  de  la  flore  de 
nos  psammites,  mais  je  ne  désespérai  pas  de  découvrir  un 
gîte,  où  cette  flore  eût  conservé  quelques-uns  de  ses  végé- 
taux dans  un  état  qui  permît  de  les  déterminer.  Je  con- 
tinuai mes  recherches  et  dans  une  vieille  carrière  aban- 
donnée, près  de  l'écluse  d'Évieux,  carrière  où  M.  Mourlon 
m'avait  fait  remarquer  en  premier  lieu  des  empreintes 
végétales,  je  découvris  les  bancs  fossilifères  qui  renfer- 
ment les  espèces  décrites  dans  ce  petit  travail. 

Parmi  les  milliers  de  pièces  provenant  de  ce  gîte  que 
possède  le  Musée  royal  d'histoire  naturelle,  je  n'ai  encore 
découvert  que  quatre  espèces:  peut-être  l'exploitation  des 
bancs  fossilifères  que  je  continue  moi-même  et  que  je  fais 
continuer  par  un  ouvrier  viendra-t-elle  enrichir  notre  petite 
flore  psammitique  de  quelques  formes  nouvelles. 

La  flore  d'Évieux  se  compose  actuellement  de  deux 
types  déjà  connus  :  les  Palaeopteris  hibernîca  et  Triphi/l- 
lopleris  elegans ,  et  de  deux  types  inédits  :  les  Psilophyton 
condrusorum  et  Sphenopteris  flaccida. 

Ce  qui  rend  le  gîte  d'Évieux  particulièrement  remar- 
quable, c'est  que  son  extrême  richesse  en  empreintes  de 
Psilophyton  nous  a  fourni  quelques  éléments  nouveaux 
pour  apprécier  plus  complètement  la  nature  d'un  groupe 
générique  resté  assez  obscur. 


(  5o8  ; 


DESCRIPTION    DES    ESPÈCES. 

Psilopliytou  eoiidfUHoruni  IS'ov.  sp. 

PI.  I,  fig.  1-4. 

Racine  ou  souche Tiges  dressées,  roides,  hautes 

de  1-1  '/s  mètre,  très-rameuses,  à  rameaux  constituant 
avec  Taxe  principal  un  petit  buisson  plus  ou  moins  pyra- 
midal. Rameaux  stériles  alternes,  les  inférieurs  et  les 
moyens  très-allongés,  très-rameux,  étalés  dressés  à  angle 
aigu,  à  ramifications  secondaires  constituant  une  fausse 
dichotomie.  Rameaux  supérieurs  ou  dernières  ramifica- 
tions des  rameaux  moyens  et  inférieurs  portant  des  ramus- 
cules  alternes  délicatement  divisés  par  fausse  dichotomie, 
à  articles  terminaux  enroulés  en  crosse.  Rameaux  fructi- 
fères ordinairement  opposés  par  paire  à  l'extrémité  ou 
dans  toute  la  partie  supérieure  de  la  tige,  plus  rarement 
naissant  en  face  d'un  rameau  stérile,  plusieurs  fois  divisés 
en  une  fausse  dichotomie  plus  ou  moins  enroulée  en  crosse, 
à  ramifications  dernières,  chacune  terminée  par  deux  spo- 
ranges subsessiles.  Sporanges  (1  '/.,  millim.  de  long,  sur 
Vs  mill.  de  larg.)  ellipsoïdes,  atténués  aux  deux  bouts, 
acutiuscules  au  sommet. 

M.  Davvson,  qui  est  le  créateur  du  genre  Psilophyton,  a 
publié  des  matériaux  qui  nous  avaient  initiés  d'une  façon 
assez  satisfaisante  à  l'organisation  de  ce  singulier  groupe 
générique.  Les  nombreuses  pièces  que  j"ai  découvertes 
dans  nos  psammites  viennent  ajouter  des  éléments  nou- 
veaux à  nos  connaissances. 


(  359  ) 

Le  genre  Psilopinjton  est  rangé  par  M.  Dawson  dans 
les  Lycopodiacées.  M.  Schimper  n'ose  se  prononcer  sur  la 
place  que  doit  occuper  ce  groupe  ;  il  marque  que  la  verna- 
tion  circinnée  et  le  tissu  vasculaire  scalariforme  rappellent 
les  Fougères,  et  que  le  port  général  et  les  organes  foliaires 
peuvent  faire  penser  à  certaines  Lycopodiacées.  Quoi  qu'il 
en  soit,  les  Psilophyton  constituaient  des  arbustes  plus  ou 
moins  élevés,  à  rameaux  roides,  recouverts  d'écaillés  ou 
nus,  à  fructifications  composées  d'un  très-grand  nombre 
de  petits  sporanges  terminant  les  dernières  divisions  des 
ramuscules  fructifères. 

Selon  M.  Da>vson,  les  tiges  partaient  d'un  rbizome  stig- 
maroïde.  Je  n'ai  pas  encore  découvert  de  traces  de  celui-ci 
dans  le  gîte  d'Évieux. 

Le  P.  condrusorum  est  extrêmement  abondant  dans  un 
banc  de  psammites  verdàtres,  plus  ou  moins  micacés  et 
schistoïdes  ayant  plus  d'un  demi-mètre  d'épaisseur.  Toutes 
les  tiges  sont  couchées  dans  le  même  sens  et  leurs  rameaux 
avec  leurs  ramuscules  plongent  dans  la  roche  de  façon  à 
donner  presque  la  certitude  que  la  plante  a  été  enfouie 
sur  la  place  même  où  elle  a  vécu.  Dans  ce  banc,  il  n'existe 
aucune  autre  espèce  végétale  que  le  Psilophi/ton,  en  com- 
pagnie duquel  j'ai  observé  un  très-petit  mollusque  vrai- 
semblablement d'eau  douce. 

Je  me  bornerai  à  ces  quelques  explications  préliminaires 
sur  ce  curieux  végétal,  me  réservant  d'y  revenir  quand 
j'aborderai  l'étude  d'un  autre  Psilophyton  que  j'ai  observé 
dans  le  poudingue  de  Burnot  (dévonien  inférieur). 

Je  n'ai  pas  cru  devoir  établir  les  différences  qui  existent 
entre  la  nouvelle  espèce  décrite  ci-dessus  et  les  P.  princeps 
Daws.,  P.  robustius  Daws.,  P.  elegans  Daws.  et  P.  Declie-' 
nianum  Carr.  :  la  comparaison  des  (igures  représentant 


(  560  ) 

ces  divers  types  suffit  pour  faire  reconnaître  en  quoi  le 
JP.  condrusormn  diffère  de  ses  congénères.  Dans  celui-ci , 
je  n'ai  découvert  aucune  trace  d'écaillés  qui,  dans  les 
P.  prlnceps  et  rohustius,  recouvrent  la  tige  ouïes  rameaux. 

Sphenopteris  flacclda  Nov.  sp. 
PI.  II,  fig.  4-5. 

Au  lieu  de  tracer  ici  une  diagnose  qui ,  dans  sa  conci- 
sion, ne  permettrait  guère  de  distinguer  cette  nouvelle 
espèce  des  types  voisins,  je  préfère  marquer  en  quoi  elle 
se  distingue  de  ceux-ci.  En  examinant  les  figures  1  et  % 
de  la  planche  II,  on  est  assez  porté  à  voir  dans  le  Sphe- 
nopteris  d'Évieux  le  S.  Schimperiana  Sch.  de  la  grau- 
wacke  supérieure,  mais  la  ressemblance  qu'on  peut  remar- 
quer entre  les  figures  de  ma  planche  II  et  celles  du 
S.  Schimperiana  publiées  par  MM.  Gôppert  et  Schimper 
n'est  qu'apparente.  Le  S.  fîaccida  est  un  type  tout  diffé- 
rent. 

A  en  juger  d'après  les  nombreuses  pièces  que  j'ai  recueil- 
lies, le  S.  fîaccida  a  dû  être  une  fougère  d'assez  haute 
taille,  à  racliis  épais  et  ayant  laissé  des  empreintes  simulant 
des  fragments  de  feuilles  de  Cordaites,  rachis  bifurqué  de 
dislance  en  distance  et  privé  de  pinnules  entre  les  points 
de  bifurcation.  Les  intervalles  laissés  nus  sur  le  rachis  ou 
sur  les  principales  divisions  de  celui-ci  peuvent  atteindre 
et  dépasser  même  10  centimètres.  Aux  points  des  bifur- 
cations (fig.  5,  a  a),  naissent  des  pinnules  plus  ou  moins 
amples  et  divisées  en  segments  plus  ou  moins  nombreux. 
Les  pinnules,  qui  vont  en  se  multipliant  vers  l'extrémité 
des  divisions  du  rachis,  ne  sont  pas,  comme  dans  le 
S.  Schimperiana,  pourvues  de  segments  jusqu'à  la  base 


(  561  ) 
avec  un  segment  basilaire  inférieur  plus  ou  moins  réfracté 
contre  le  rachis,  mais  elles  sont,  au  contraire,  plus  ou 
moins  longuement  nues  à  la  base.  Cette  différence  se 
poursuit  dans  les  divisions  des  pinnules  qui  sont  atténuées 
à  la  base  et  non  pas  élargies. 

La  forme  générale  des  pinnules  de  second  ordre  est 
toute  différente  dans  les  deux  espèces. 

D'après  ce  que  j'ai  pu  voir  sur  de  beaux  échantillons  du 
S.  Schimperiana  que  possède  le  iMusée,  cette  espèce  a  dû 
être  d'une  consistance  assez  coriace,  tandis  que  le  S.  flac- 
cida  doit  avoir  eu  un  tissu  assez  mou. 

Le  S.  flaccida  présente  quelques  traits  de  ressemblance 
avec  le  S.  Hookeri  Baily,  mais  les  différences  sont  telles 
entre  les  deux  espèces  que  je  crois  parfaitement  inutile  de 
les  faire  ressortir. 

Le  S.  flaccida  est  assez  abondant  dans  un  banc  de  psara- 
mites  verdàlres  plus  ou  moins  micacés  et  schistoïdes  un  peu 
supérieur  à  celui  du  Psilophyton.  Cette  espèce  se  trouve 
en  compagnie  du  Palaeopteris  hibernica  et  de  fragments  de 
Psilophyton  condrusorum. 

Palaeopteris  hibernica  Sch.  var.  nilnor. 
PI.  IILflg.l-o. 

Le  Palaeopteris  hibernica  est  trop  bien  connu  pour 
qu'il  soit  besoin  d'en  décrire  les  caractères.  Le  gîte 
d'É vieux  m'a  fourni  de  nombreuses  empreintes  dont 
quelques-unes  sont  fort  belles  et  peuvent  même  rivaliser 
avec  les  magnifiques  empreintes  de  Kiltorkan,  Ce  que  l'on 
trouve  habituellement,  ce  sont  des  frondes  stériles  :  les 
frondes  fertiles  sont  très-rares.  Cette  espèce  existe  dans  le 
même  banc  que  \e  Sphenopteris  flaccida. 


(  362  ) 

Nous  ne  possédons  pas  en  Belgique  la  grande  forme 
d'Irlande  à  amples  pinnules,  mais  une  forme  réduite,  à  pin- 
nules  dont  les  segments  sont  une  fois  plus  petits.  Sur  une 
pièce  magnifique  du  P.  hibernica  d'Irlande  que  possède  le 
Musée,  j'ai  observé,  à  côté  de  la  forme  typique,  une  forme 
semblable  à  celle  d'Évieux  que  je  désigne  sous  le  nom  de 
var.  ininor. 

Selon  moi,  c'est  cette  même  var.  minor  que  M.  Gôppert 
a  décrite  et  ligurée  sous  le  nom  de  Cyclopteris  Roemeriana 
{Veber  die  fossile  Flora  der  silurischen,  der  devonischen 
und  unteren  Kohlenformalionoder  des  sogenannten  Ueber- 
ganrjsgcbirges,  p.  75,  t.  XXXVII,  fig.  8).  Les  pinnules  de  la 
pièce  figurée  ne  paraissent  si  étroites  que  parce  qu'elles  sont 
incurvées  dans  la  roche  ou  qu'une  partie  de  chacune  d'elles 
a  disparu  par  le  clivage.  L'absence  de  pinnules  sur  le  rachis 
n'est  évidemment  qu'accidentelle.  Le  Musée  possède  du 
gîte  d'Évieux  des  échantillons  de  la  variété  minor  iden- 
tiques ou  à  peu  près  identiques  à  celui  figuré  par  M.  Gôp- 
pert. Le  Cyclopteris  Roemeriana  Gopp.  seu  Palaeopteris 
Roemeriana  Sch.  est  une  espèce  qui  doit,  selon  moi,  dispa- 
raître de  la  flore  paléontologique. 

Vripliylloptcrifii  elcganfs  Scb. 
PI.  II.  fig.  (J-8. 

Cette  petite  et  délicate  espèce  est  très-rare  dans  le  gîte 
d'Évieux.  Elle  se  trouve  au  même  niveau  que  les  deux 
fougères  précédentes. 

Les  pièces  que  j'en  ai  recueillies  sont  cependant  nom- 
breuses et  me  permettent  d'approuver  complètement  la 
réduction  en  une  seule  espèce  des  diverses  formes  que 
Unger  avait  cru  devoir  distinguer  sous  les  noms  de  Cyclop- 


(  363  ) 

teris  elerjans,  dissecta  et  Richteri  [Beitrag  ziir  Palaonto- 
logie  des  tliûrincjer  Waldes,  von  Richter  und  F.  Unger, 
pp.  75  et  76,  tab.  Yî).  Peut-être  M.  Schimper  n'a-t-il  pas 
poussé  assez  loin  les  réductions  et  je  serais  tenté  de  rap- 
porter également  au  Trip/itjllopteris  elerjans  le  Sphenop- 
teris  réfracta  Ung,  {loc.  cit.,  t.  YI,  fig.  18),  \e  S.  devonica 
Ung.  (/oc.  cit.,  fig.  21)  et  le  Cyclopleris  thuringiaca  Ung. 
[loc.  cit.,  fig.  4).  Le  Sphenopteris  réfracta  n'est  vraisembla- 
blement que  la  nervation  d'une  pinnule  suborbiculaire  du 
Triphyllopteris  elegans  et  quant  au  Sphenopteris  devonica, 
il  est  peut-être  constitué  par  des  pinnules  très-amples  du 
Triphyllopteris  elegans  fortement  déchiquetées. 

Le  Triphyllopteris  elegans  paraît  avoir  été  une  fougère 
rampante  ou  grimpante,  constituée  par  de  longues  tiges 
portant  alternativement  des  branches  ou  rachis  secondaires 
délicats,  sur  lesquels  naissaient  des  pinnules  alternes,  sub- 
sessiles  ou  brièvement  stipitées. 


IL 


OBSERVATIONS  SUR  l'aGE  PALÉOMOLOGIQUE  DES  ESPÈCES 
PRÉCÉDENTES. 

Dans  ces  quelques  remarques,  je  n'ai  nullement  l'inten- 
tion d'empiéter  sur  la  tâche  du  géologue;  je  me  conten- 
terai de  signaler  les  étages  dans  lesquels  on  a  observé,  à 
l'étranger,  plusieurs  des  espèces  que  je  viens  de  signaler. 

La  position  exacte  des  assises  fossilifères  d'Évieux  sera 
indiquée  plus  tard  par  mon  collègue,  M.  Mourlon,  dans  un 
travail  spécial  qu'il  a  entrepris  sur  les  psammites  du  Con- 
droz. 

Le  Psilophyton  condriisorum  étant  considéré  comme 


(  564  ) 

une  espèce  nouvelle,  il  n'y  a  pas,  à  son  sujet,  à  établir 
de  comparaison  avec  les  pays  étrangers.  Je  dirai  seulement 
que  M.  Dawson  signale  son  P.  princeps  dans  tout  le  sys- 
tème dévonien  à  Gaspé  (Canada)  et  que  des  fragments  de 
cette  espèce  s'observent,  selon  cet  auteur,  dans  le  silurien 
supérieur  de  la  même  localité. 

Le  Palaeopteris  hibernica,  selon  M.  Schimper,  appartien- 
drait à  une  époque  dont  les  formations  seraient  intermé- 
diaires entre  le  terrain  dévonien  et  le  terrain  bouiller, 
époque  que  cet  auteur  désigne  sous  le  nom  de  paléanlhra- 
citique  (1).  L'illustre  savant  divise  les  formations  de  cette 
époque  en  trois  groupes  :  «  le  plus  inférieur  correspond  à 
»  la  grauwacke  supérieure  des  géologues  allemands  et  que 
»  M.  Heer  a  désigné  sous  le  nom  du  Groupe  de  Vile  des 
)>  Ours  (Ursa-Stuffe);  le  second  comprend  le  calcaire  car- 
»  bonifère  (Mountain  Limestone,  Bergkalk),  et  le  troisième 
»  les  schistes  à  Posidonomyes  (Culmiferous  Beds,  Culm). 
»  Tout  cet  ensemble  de  formations  était  réuni  autrefois  au 
»  terrain  dévonien.  » 

Je  n'ai  pas  à  juger  de  la  valeur  de  cette  nouvelle  subdivi- 
sion qui  ne  change  du  reste  rien  à  la  superposition  des  étages 
géologiques,  mais  je  ferai  remarquer  qu'en  ce  qui  con- 
cerne le  gîte  d'Évieux  nous  observons,  au  même  horizon, 
le  Triphyllopteris  elegans  que  M.  Schimper  attribue  à  son 
époque  dévonienne  et  le  Palaeopteris  hibernica  qui  appar- 
tiendrait à  son  époque  paléanthracitique.  Les  schistes  à 
Cypridines,  dans  lesquels  le  Triphyllopteris  elegans  est 
signalé,  constituent,  pour  M.  Schimper,  l'étage  supérieur  du 
dévonien,  tandis  que  le  grès  jaune  verdàtre  argileux,  de 


(1)  Voir  Schimper,  Traite  de  paléontologie  végétale,  vol.  III ,  p.  619. 


(  56o  ) 

Kiltorkan  (Irlande),  caractérisé  par  le  Palaeopteris  hiber- 
nica,  et  les  schistes  à  Spirifer  Verneulii  Murch.  d'Aix-la- 
Chapelle,  caractérisés  par  le  Palaeopteris  Roemeriana 
(P.  hibernica  var.  minor),  feraient  partie  d'une  série  strati- 
graphique  différente. 


EXPLICATION  DES  PLANCHES. 


Planche  I. 

Fig.  1.  Partie  inférieure  de  la  lige  du  Psilophijlon  condrusorum  Crép. 
Moitié  de  grandeur  naturelle. 

—  2.  Jeune  rameau  de  la  même  espèce.  Grandeur  naturelle.  On  re- 

marque que  les  divisions  de  ce  rameau  ont  encore  conservé 
une  légère  incurvation  vers  leur  base  résultant  de  leur  verna- 
tion  circinnée.  Le  cylindre  ligneux  ou  vasculaire  est  très- 
apparent  et  simule  une  épai'se  nervure  sur  l'empreinte  laissée 
par  l'axe  principal. 

—  3.  Extrémité  fructifère  d'une  tige  de  la  même  espèce.  Grandeur 

naturelle. 

—  i.  Groupe  de  sporanges  grossis. 

Pla.nche  II. 

Fig.  1.  Sphenopteris  flaccida  Crép.  Grandeur  naturelle. 

—  2.  Même  espèce.  Grandeur  naturelle. 

—  3.  Même  espèce.  Grandeur  naturelle.  Dans  ce  fragment  de  pinnule, 

le  rachis  et  les  segments  sont  plus  délicats  et  plus  étroits  que 
dans  la  forme  habituelle. 

—  4.  Pinnule  de  dernier  ordre  de  la  même  espèce  grossie. 

—  5.  Fragment  de  rachis  de  la  même  espèce.  Grandeur  naturelle. 

—  6.  Triphyllopteris  elegans  Sch.  Grandeur  naturelle. 

—  7.  Pinnule  de  la  même  espèce,  mais  appartenant  à  une  autre  forme 

que  la  précédente. 

—  8.  La  même  pinnule  grossie. 


(  566  0 


Planche  III. 

Fiq.  1.  Partie  moyenne  supérieure  d'une  îronde  de  Palaeopteris  hiber- 
nica  Sch.  var.  minor  Crép.  Grandeur  naturelle. 

—  2.  Fragment  de  pinnule  avec  quatre  segments  entiers.  Grandeur 

naturelle. 

—  3.  Fragment  de  rachis  de  Palaeopleris  hibernica  var.  minor  por- 

tant une  pinnule  tVuctilere.  Grandeur  naturelle. 

—  4.  Sporanges  grossis. 

—  o.  Fragment  d'une  pinnule  pour  montrer  que  les  segments  peu- 

vent paraître  beaucoup  plus  étroits  et  plus  petits  qu'ils  ne  le 
sont  véritablement  à  cause  de  leur  incurvation  dans  la  roche. 
Grandeur  naturelle. 

—  6.  Partie  d'une  jeune  fronde  de  Palaeopteris  hibernica  var.  minor 

dont  les  pinnules,  rejelées  toutes  d'un  même  côté  du  rachis, 
présentent  leurs  jeunes  pinnules  pressées  et  imbriquées  les 
unes  sur  les  autres.  Grandeur  naturelle. 


BuU.  ,L'  lAmd.Jivi, 


PU. 


WX0 


Cri^in-del. 


ZitTi'.  G-.Severeyns. 


Xvih.  G.Severet/ns. 


Bun.JcTAixui  Âolj. 


PI.  m. 


'^epi7i/ 


del. 


\vth.G-oevere^n 


(  567) 


CLASSE   DES    LETTRES. 


Séance  du  3  août  7574. 

M.  R.  ChaloiN,  direcleur 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

SoHtpmen^s;  MM.  Ch.Steur,J.Grandgagnage,J.  Roulez, 
P.  De  Decker,  M.-N.-J.  Leclercq,  le  baron  J.  de  Witte, 
Ch.  Faider,  J.-J.  Thonissen ,  Th.  Juste,  Félix  Nève, 
Alph.  Wauters,  G.  Nypels,  Alph.  Le  Roy,  membres;  J.  Nolet 
de  Brauwere  van  Steeland,  Aug.  Scheler,  associés;  J.  He- 
remans,  correspondant. 

M.  Ch.  Montigny,  membre  de  la  classe  des  sciences, 
assiste  à  la  séance. 


CORRESPOiNDANCE. 

La  commission  centrale  pour  l'érection  d'un  monument 
à  M.  Sylvain  Van  de  Weyer  adresse  à  l'Académie  la  lettre 
suivante  : 

«  Le  conseil  communal  de  Louvain  a  résolu  d'honorer 
Ja  mémoire  de  M.  Sylvain  Van  de  Weyer  en  élevant  à  ce 
grand  citoyen  un  monument  sur  l'une  des  places  publiques 
de  sa  ville  natale. 

»  Pour  donner  à  celte  résolution  le  caractère  d'une 
manifestation  nationale,  la  commission  centrale  d'exécu- 


(  568  ) 
tion  fait  un  appel  à  tous  les  corps  constitués  du  pays.  Déjà 
elle  a  reçu  de  nombreux  encouragements,  qui  témoignent 
de  la  sympathie  que  son  œuvre  rencontre  partout, 

»  Nous  avons  la  conviction  que  MM.  les  membres  de 
l'Académie  royale  des  sciences,  des  lettres  et  des  beaux- 
arts  revendiqueront  l'honneur  de  s'associer  à  cette  patrio- 
tique entreprise,  destinée  à  perpétuer  le  souvenir  d'un  de 
leurs  collègues  les  plus  distingués.  C'est  dans  cette  pensée 
que  nous  avons  cru  devoir  vous  adresser  une  liste  de  sous- 
cription. » 

En  raison  des  services  exceptionnels  rendus  à  l'Aca- 
démie par  feu  M.  Van  de  Weyer,  la  classe  décide  qu'elle 
accepte  la  présentation  de  cette  liste,  qui  sera  soumise  à 
tous  les  membres  de  la  Compagnie. 

—  MM.  les  Ministres  de  l'intérieur  et  de  la  justice  adres- 
sent, pour  la  bibliothèque  de  l'Académie,  différents  ouvrages 
qui  seront  annoncés  dans  le  Bulletin. 

—  M.  le  professeur  Pietro  EUero,  de  Bologne,  offre  un 
exemplaire  de  son  livre  intitulé  :  La  questione  sociale. 

M.  Ch.  Steur,  membre  de  la  classe,  fait  hommage  du 
tome  troisième  de  son  Ethnographie  des  peuples  de  l'Eu- 
rope. 

La  classe  vote  des  remercîments  pour  ces  dons. 

—  Les  membres  de  la  classe  expriment  un  avis  favo- 
rable sur  la  ressemblance  du  modèle  du  buste  de  feu  M.  le 
colonel  Dandelin ,  leur  ancien  confrère  de  la  classe  des 
sciences.  Ce  modèle  a  été  soumis  au  Gouvernement  par 
M.  le  statuaire  Van  Oemberg. 

—  La  Société  des  antiquaires  de  Londres  accuse  récep- 
tion du  récent  envoi  annuel  de  publications  académiques. 


(  369  ) 

—  M.  Charles  Desmaze,  conseiller  à  la  cour  d'appel  de 
Paris,  accuse  réception  de  son  diplôme  d'associé. 

—  La  classe  renvoie  à  l'examen  de  MM.  Gachard  et 
Th.  Juste  un  travail  manuscrit  de  M.  le  chanoine  De  Smel, 
intitulé  :  Notice  sur  les  premières  années  de  don  Juan 
d'Autriche,  fils  de  Charles-Quint. 

—  Elle  prend  ensuite  notification  de  la  lettre  qui  lui  est 
écrite  par  l'auteur  des  quelques  pages  d'introduction  à  un 
travail  sur  l'histoire  de  la  philologie  thyoise,  envoyées  en 
réponse  à  une  question  du  concours  de  1874,  laquelle  a  été 
remise  au  programme  de  1876. 

—  La  classe  donne  ensuite  son  approbation  définitive 
au  programme  de  concours  pour  1876,  dont  elle  a  arrêté 
les  questions  dans  sa  séance  du  mois  de  juillet  dernier. 

Elle  adopte  également  une  question  d'histoire  nationale, 
à  proposer  pour  la  troisième  période  sexennale  du  concours 
de  Stassart. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


MM.  Alph.  Rivier  et  Alph.  Wauters,  inscrits  à  l'ordre 
du  jour  de  la  séance  pour  une  communication,  s'excusent 
de  ne  pouvoir  en  donner  lecture  et  en  demandent  l'ajour- 
nement à  la  prochaine  séance. 

M.  J.-F.-J.  Heremans  se  fait  inscrire  pour  un  travail  por- 
tant pour  titre  :  Les  restes  de  l'instrumental  en  néerlandais. 


2"""  SÉRIE,  TOME  XXXYIII.  24 


(  370  ) 


CL4SSE  DES  BEAUX- ARTS. 


Séance  du  6  août  1S74. 

M.  N.  De  Keyser,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M.  J.  LiAGP.E,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Al  vin,  G.  Geefs,  Madou ,  A.  Van 
Hasselt,  Jos.  Geefs,  C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Edm.  De 
Busscher,  Alph.  Balat,  Aug.  Payen,  le  chevalier  L.  de 
Burbure,  J.  Franck,  G.  De  Man,  Ad.  Siret,  J.  Leclercq, 
Ernest  Slingeneyer,  Alex.  Robert,  F.-A.  Gevaert,  mem- 
bres;  Ed.  De  Biefve,  L.  Terry,  correspondants. 

M.  Chalon  ,  membre  et  directeur  de  la  classe  des  lettres , 
ainsi  que  MM.  Ch.  Montigny,  membre,  et  Éd.  Mailly,  cor- 
respondant de  la  classe  des  sciences,  assistent  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  secrétaire  perpétuel  donne  lecture  : 
\°  D'une  lettre  de  M.  Gevaert ,  président  de  la  section 
permanente  des  jurys  des  grands  concours  de  composition 
musicale,  en  réponse  à  une  dépêche  de  31.  le  Ministre  de 
l'intérieur,  par  laquelle  ce  haut  fonctionnaire  exprimait  le 
désir  de  savoir  si  la  section  précitée  n'avait  pas  à  donner 
à  M.  Franz  Servais,  lauréat  du  concours  de  1875,  d'autres 


(571  ) 

inslruclions  de  voyage  que  celles  menlionnées  à  l'article  24 
du  règlement  du  6  mars  1849. 

M.  Gevaert  lait  connaître  qu'il  n'a  aucune  instruction 
spéciale  à  donner  à  M.  Servais. 

2"  D'une  lettre  de  M.  le  Ministre  de  l'intérieur,  accom- 
pagnant deux  expéditions  d'arrêtés  royaux  en  date  du  28 
avril  dernier,  portant  à4,000  francs  la  pension  deslauréats 
des  grands  concours  de  composition  musicale  et  des  grands 
concours  de  l'Académie  royale  des  beaux-arts  d'Anvers. 

La  classe  décide  que  l'expression  de  ses  remercîments 
sera  transmise  à  M.  le  Ministre,  pour  cette  nouvelle  mar- 
que de  sa  sollicitude  à  l'égard  des  jeunes  artistes. 

3°  D'une  seconde  dépèche  de  M.  le  Ministre  de  l'inté- 
rieur, faisant  savoir  que  le  statuaire  Van  Oemberg  a  été 
prié  de  déposer  dans  l'une  des  salles  des  locaux  académi- 
ques le  modèle  du  buste  de  feu  le  colonel  Dandelin,  afin  de 
connaître  l'avis  des  membres  de  la  classe  sur  la  ressem- 
blance et  le  mérite  artistique  de  cette  œuvre. 

La  classe  donne  son  assentiment  à  l'exécution  de  ce 
buste  au  sujet  duquel  les  classes  des  sciences  et  des  lettres 
avaient  déjà  exprimé  une  opinion  favorable  quant  à  la  res- 
semblance. 

—  La  classe  accepte  ensuite  la  liste  de  souscription, 
adressée  à  l'Académie  par  la  commission  pour  le  monu- 
ment à  élever  à  Louvain  à  M.  Svivain  Van  de  Wever. 


JUGEMENT  DU  CONCOURS. 


M.  Ad.  Siret  donne  lecture  de  son  rapport,  auquel  a 
adhéré  M.  Joseph  Geefs,  sur  le  mémoire  présenté  en  ré- 
ponse à  la  question  littéraire  suivante  :  Faire  l'histoire  de 


(  372  ) 
la  sculpture  aux  Pays-Bas  pendant  les  XVII' et  XVIIV siè- 


cles. 


La  classe  prendia  une  décision  à  l'égard  de  ce  travail 
lorsque  le  troisième  commissaire,  M.  De  Man,aura  fait  son 
rapport. 


OUVRAGES  PRÉSENTES. 


Commission  royale  d'histoire.  —  Table  générale  chronolo- 
gique et  analytique  des  chartes,  Icllres,  ordonnances,  traités 
et  autres  documents  contenus  dans  les  l",  2*^  et  3^  séries  des 
Bulletins,  par  J.-J.-E.  Proost.  Bruxelles,  1874;  vol.  in-8°. 

Sieur  [Ch.).  —  Ethnographie  des  peuples  de  l'Europe  avant 
Jésus-Christ,  tome  III,  I"  et  2*=  fascicules.  Bruxelles,  1873; 
2  cah.  in-8°. 

Guillaume  [le  lient,  général  baron).  —  L'armée  belge  :  His- 
toire et  état  militaire.  Bruxelles,  1874;  broch.  in-8°. 

Juste  [Th.).  —  Les  fondateurs  de  la  monarchie  belge  :  Louis 
de  Potter.  Bruxelles,  1874;  vol.  in-8".  (Envoi  du  Ministère  de 
l'intérieur.) 

Catalan  {£.).  —  Note  sur  les  surfaces  orthogonales,  Paris, 
1874;  feuille  in-4''. 

Cornet  [F.-L.)  et  Briart  {A.).  —  Note  sur  la  découverte  de 
l'étage  du  calcaire  deCouvin  ou  des  schistes  et  calcaire  à  Cal- 
ceola sandalina  dans  la  vallée  de  IHogneau.  Liège,  d874; 
feuille  in-S". 

H  aurez  {Jules).  —  Chaudières  à  vapeur  accolées  de  M.  Paul 
Havrez.  Liège,  1873;  broch.  in-8°. 

Mansion  {P.).  —  Les  mathématiques  en  Belgique  en  1872; 
—  Compte  rendu  analytique  du  cours  d'analyse  de  l'École  poly- 


(  373  ) 

technique  par  M,  Ch.  Hermite.  Rome,  1875-1874;  12  broch. 
in-S".  (Envoi  de  M.  Boncompagni.) 

Het  Volksbelang.  —  Een  werk  bekroond  door  onze  konink- 
lijke  Akaderaie  (Antoon  Van  Dyck  en  zijne  werken  door  Frans 
De  Pottcr  en  Jan  Broeckaert).  Gand,  1874;  broch.  in-12. 

Conseils  provinciaux  des  neuf  provinces.  —  Exposés,  avec 
annexes,  de  la  situation  administrative  des  neuf  provinces  en 
1874;  15  vol.  et  cah.  in-8". 

Société  royale  de  Botanique  de   Bruxelles.   —   Bulletin, 
tome  XI,  11'  année,  ■1872,  n"'  1  et  2.  Bruxelles;  2  cah.  in-8''. 
De  Vlaamsche  school,   1874,  pp.  1    à   iOO.  Gand,  1874; 
12  feuilles  in-4"  et  1  gravure. 

L'Illustration  horticole,  5"  série,  5*  vol.,  A%  5'  et  G*  livr., 
avril  à  juin  1874.  Gand;  2  cah.  gr.  in-8". 

Messager  des  sciences  historiques,  année  1874,  2'  livr. 
Gand,  1874;  cah.  in-8°. 

Kotiinklijke  Bibliotheek ,  's  Gravenhage.  —  Vcrslag  gedu- 
rendc  het  jaar  1873.  La  Haye,  1874;  broch.  in-8". 

Joly  [N.).  —  Notice  sur  ses  travaux  scientifiques  et  sur  ses 
titres  universitaires  et  académiques;  —  Étude  sur  les  méta- 
morphoses des  Axolotls  du  Mexique  {Siredon  Mexicunus , 
Shaw);  —  Études  sur  les  mœurs,  le  développement  et  les 
métamorphoses  d'un  petit  poisson  chinois  du  genre  Macra- 
pode.  Toulouse,  1874;  broch.  in-4''  et  2  broch.  in-8°. 

Joly  {JV.)  et  Peyrut  {A.).  —  Documents  nouveaux  sur  le 
Pygopage  de  Mazères  et  sur  Millie-Christine.  Toulouse,  1874; 
broch.  in-8". 

Société  linnéenne  du  nord  de  la  France,  Amiens. —  Biû- 
letin,  n"^  25  et  26,  juillet  et  août  1874,  5«  année.  Amiens; 
2  feuilles  in-8^ 

Académie  des  sciences ,  arts  et  belles-lettres  de  Dijon.  — 
Mémoires,  5«  série,  tome  I,  année  1871-1875.  Dijon,  1875; 
vol.  in-8°. 

Société  d'anthropologie  de  Paris.  —  Bulletin,  tome  1X% 


(574) 

11*  série,  1"  lasc,  janvier  et  février  1874.  Paris,  1874;  eali. 
in-8». 

Société  géologique  de  France,  ù  Paris.  —  Bulletin ,  5'  série, 
t.  11%  n"  5,  juillet  1874.  Paris;  cah.  in-8°. 

Matériaux  pour  l'histoire  primifiveet  naturelle  de  Vhonmie, 
^1'  série  :  LV  année,  tome  IV,  1875 ,  10"=  à  12'^  livr.  ;  X'  année, 
tome  V,  1874,  I"  à  4*^  livr.  Toulouse,  1873-1874;  4  cah.  in-8". 

Handelmann  {ffeinrich).  —  Vorgeschichtiiche  Steindenk- 
mJiler  in  Schleswig-Holstein  ,  driltes  Heft.  Kiel,  1874;broch. 
10-4". 

Hermann  {Dr  Joseph).  —  Die  Behandiung  Syphilitischer 
in  den  oITentlielien  Krankenhausern  Wien's;  —  Ueber  die 
Wirkung  des  Quecksilbers  auf  den  menschlichen  Organismus. 
Wien  elTeschen,  1872  et  1875  ;  brocii.  petit  in-4"  et  vol.in-fol. 

LasaulxiA.  von).  —  Das  Erdbebcn  von  Herzogenralli  am  22. 
Oclober  1875.  Bonn,  1874;  vol.  in-8°. 

Verein  fur  Erdkunde  zu  Dresden.  —  Jahresbericht,  X. 
Dresde,  1874;  eab.  in-8". 

Universitat  zu  Ileidelberg.  —  Anzeige  der  Vorlesungen  , 
welche  im  Winter-IIalbjabr  1874-1875.  Heidclberg,  broch. 
in-8». 

K.  bohinische  Gesellschaft  der  Wissenschaftenin  Prag.— 
Sitzungsberichle  :  Jahrgang  1872,  Juli-Dezember;  Jabrgang 
1873;  —  Abhandiungen  ,1873,  sccbstc  Folge,  6.  Bd.  Prague, 
1873-1874;  vol.  in-4'',  vcl.  et  cah.  in-8''. 

Verein  fur  Naturkunde  zu  Zwickau.   —   Jahresbericht, 

1873.  Zwickau  ,  1874;  eah.  in-S". 

Archiv  der  Mathemalik  und  Phijsik,  LVI.Theil,  3.  Helt. 
Leipzig  et  Greifswalde,  1874  ;  cah.  in-8'\ 

IVordiskt  medicinskt  Arkiv ,  sjetle  Baudet,  andra  Haflet, 

1874.  Stockholm;  cah.  in-S". 

lî.  Osservalurio  di  Brera  in  Milano.  —  Publicazioni, 
n°  VII,  parte  3''.  Milan,  1874;  cah.  gr.  in-4". 

H.  Comilato  geologico  dltaliu.  —  Bolletlino,  anno  1874, 
n"  3  e  4.  Rome,  1874;  cah.  in-8". 


(  37S  ) 

BoUettino  del  vulcanismo  italiano,  anno  F,  1874,  fasc  VI 

Vil  c  VIII.  Rome  J  874;  2  cah.  in-8°.  '  ' 

Brilish  Association  for  the  advancement  of  science.  — 

Report  of  the  forty-third  meeting,  held  at  Bradford  in  sep- 

temberI875.  Londres,  1874;  vol.  in-8". 

Chemical  Society  of  London.  —  Journal,  2*^  ser.  :  vol  XI 
december  1875;  vol.  XII,  february  and  april  1874.  Londres  ' 
1874;  4  cah.  in-8°.  ' 

Geological  Society  of  London.  -  The  quarterly  Journal 
vol.  XXX,  pt.  2,  may  1874.  London,  1874;  cah.  in-S». 

Royal  geographical  Society  of  London.  -  Proceedings  ,  vol. 
XVIII,  n»  III;  Londres,  1874;  cah.  in-8». 

Statistical  Society  of  London.   ~  Journal,  vol.  XXXVII, 
part  II ,  june  1 874.  Londres ,  1 874  ;  cah.  in-8''. 

Zoological Society  of  London.  —  Transactions,  vol.  VIII 
Pis.  7  and  8;  -  Proceedings  :  1875,  part  III,  june-december;' 
1874,  part  I,  january  and  february.  Londres;  2  cah.  in-4»  et 
2  cah.  in-8". 

Literary  and  philosopliical  Society  of  Manchester.  -  Me- 
moirs,  third  séries,  vol.  IV;  -  Proceedings,  vol.  VIII  at  XII 
Manchester,  1869  à  1875;  6  vol.  in-8''. 

Radcliffe  Observatory,  Oxford.  -  Results  of  astronomical 
and  meteorological  observations  raade  in  the  vear  1871  vol 
XXXL  Oxford,  1874  ;  vol.  in-8°.  "  ' 

Asiatic  Society  of^Bengal,  at  Calcutta.  -  Proceedings 
n-  II  at  V,  february  at  may  1874  ;  -  Journal  :  vol.  42,  pt  II' 
n»  IV   1873;  vol.  43,  pt.  I.  n»  1 ,  1874;  part  II,  n»  1 ,  1874; 
-  Bibhothcca  Indica,  new  séries,  n»  506.  Calcutta,   1873- 
18/4;  7  cah.  in-8". 

Boston  Society  of  natural  history.  -  Memoirs,  vol  II  • 
part  II,  n"  IV;  part  III,  no^  and  II;  -  Proceedings  :  voL  XV 
pts.  o  and  4;  vol.  XVI,  pts.  1  and  2.  Boston,  1873-1874' 
o  cah.  in-4''  et  4  cah.  in-8°. 

American  Academy  of  arts  and  sciences  at  Boston.  -  Pro- 


(376) 

cecdings,  vol.  VIII,  1868  at  1873.  Boston  et  Cambridge,  1875; 
cah.  in  8";  —  The  complète  works  of  count  Rumford,  vol.  Il 
and  III.  Boston,  1873;  2  vol.  in-8°. 

Réception  ofDr.  Benjamin  A .  Gould  by  his  Fellows-citizens 
of  Boston  and  vicinitxj,  june  22,  1874.  Boston,  1874;  broch. 

in-S". 

County  Ackerbau-Gesellscliaft  von  Ohio,  Columbus.  — 
Bericht,  1872,  zweite  Reihe,  siebenundzwanzigster  Jabresbe- 
richt.  Columbus,  1873;  vol.  in-8''. 

Wiscomin  State  agricultural  Society.  —  Transactions, 
1871-1875,  vol.  X  and  XI.  Madison,  1872-1873;  2  vol.  in-8«. 

Minnesota  Academy  of  natural  sciences ,  3Iinneapolis.  — 
Bulletin  with  tbe  reports  of  the  Président.  Minneapolis,  1874; 

brocb.  in-8". 

Connecticut  Academy  of  arts  and  sciences,  New  Haven.  — 
Transactions ,  vol.  II,  part  2.  New  Haven,  1875;  cah.  in-8''. 

Lyceum  of  natural  history  of  New-York.  —  Annals,  vol.  X, 
nos  8^  9^  -lo-il  ;  —  Proceedings  :  1'  séries,  vol.  I,  feuilles  1C- 
49;  2'^  séries,  january  to  mardi  1873.  New-York,  1872-1873. 
4  cah.  et  4  feuilles  in-8°. 

American  Institute  of  Architects ,  New-YorL—  Procee- 
dings of  the  seventh  annuel  convention.  New -York,  1874; 

cah.  in-4°. 

American  philosophical  Society  for  promoting  use  fui  Know- 
ledge at  Philadelphia.  —  Proceedings,  vol.  XIII,  n°^  90  and 
91,  1873;  —  Transactions,  vol.  XV,  new  séries,  pt.  I.  Phila- 
delphie, 1873;  2  cah.  in-S"  et  cahier  in-4°. 


[2W 

BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 


LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIOLE    '*' 


1874.  —  N°^  9  ET  10. 


CLASSE   DES  BEAUX-ARTS. 


Séance  du  3  septembre  1874. 

M.  N.  De  Keyser,  directeur,  président  de  i'Âcadcniie. 
M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin  ,  Louis  Galiait,  G.  Geel's, 
Madou,  Jos.  Geefs,  Ferdinand  De  Braekeleer,  Éd.  Fétis, 
Edm.  De  Busscher,  Portaels,  Auguste  Payen,  le  chevalier 
Léon  de  Burbure,  J.  Franck,  G.  De  Man,  Adolphe  Siret, 
J.  Leclercq,  Ern.  Slingeneyer,  Alex.  Bobert,  Adolphe 
Samuel ,  membres  ;  L.  Terry,  correspondant. 

M.  Ed.  Mailly,  correspondant  de  la  classe  des  sciences , 
assiste  à  la  séance. 

2"°^  SÉRIE,  TOME  xxxviir.  25 


(  378  ) 
CORRESPONDANDE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieiir  communique  le  programme 
(les  fêtes  de  septembre.  La  classe  lixe  au  samedi  26  de  ce 
mois,  à  une  heure,  sa  séance  publique  annuelle.  Cette 
cérémonie  aura  lieu  au  Palais  Ducal. 


JUGEMENT  DU  CONCOURS  DE  1874. 


CONCOURS  D  ART  APPLIQUÉ. 

Deux  sujets  avaient  été  proposés  pour  le  concours  d'art 
appliqué  de  cette  année,  l'un  concernant  la  peinture, 
l'autre  la  gravure. 

La  classe  demandait,  pour  la  peinture,  le  carton  d'une 
frise  destinée  à  une  salle  d'/iospice,  et  devant  avoir  pour 

sujet  :  DoNNEZ  A  MANGER  A  CEUX  QUI  ONT  FAIM  ET  A  BOIRE  A 

CEUX  Qii  ONT  SOIF.  Dimensions  :  0"'75  de  haut  sur  S^SS  de 
large. 
Treize  carions  ont  été  reçus.  En  voici  les  devises  : 

N"  \.  Audace,  courage  et  travail. 

N"  2.  Paix  et  travail. 

N°  5.  La  charité  chrétienne  ne  connaît  pas  de  natio' 
naiité. 

N°  4.  Accueillez  les  suppliants  sur  terre  pour  que,  sup- 
pliant, l'on  vous  accueille  au  ciel. 


(  579  ) 

N"  o.  Sans  dovise;  signe  distinctif:  Un  trait  ondulé  à 
l'angle  inférienr  de  droite. 

N"    G.  Dlcn  est  la  source  de  toute  charité. 

N°    7.  Cnritas  (angle  inférieur  de  gauche). 

N°    8.  Cliaciin  pour  tous,  tons  pour  chacun. 

N"    9.  Carilas  (angle  inférieur  de  droite). 

.\°  10.  Can'tas  omnium  rirtutum  maxima. 

M"  M.  Philanthropie. 

'S°  12.  La  charité,  ditBossuet,  c'est  tout  le  christianisme. 

]\°  15.  Car  j'ai  eu  faim  et  vous  m'avez  donné  à  manger, 
et  j'ai  eu  soif  et  vous  m'avez  donné  à  boire. 

La  classe,  après  avoir  entendu  le  rapport  de  la  section 
de  peinture  au  sujet  de  ce  concours,  décide  que  le  prix  de 
jnille  francs,  attribué  par  le  programme  à  l'œuvre  cou- 
ronnée, ne  sera  pas  décerné. 

Elle  vote  une  somme  de  oOO  francs,  comme  encourage- 
ment, au  carton  n"  o.  L'auteur  de  cette  pièce  est  prié  de 
faire  connaître  s'il  accepte  la  récompense  attribuée  à  son 
œuvre. 

—  Vn  prix  de  600  francs  devait  être  accordé  à  l'auteur 
de  la  meilleure  gravure  au  burin,  exécutée  en  Belgique 
pendant  la  période  du  1'^'"  janvier  1872  au  I"  janvier  J874, 
d'après  l'œuvre  d'un  maître  ancien  ou  moderne  de  l'école 
llamande. 

Qualre  gravures  ont  été  reçues.  Elles  portent  pour  de- 
vises : 

I"  Ad  valorem. 

2"  et  5°  Conservez  à  chacun  son  propre  caractère. 

4°  Sans  devise. 

Conformément  aux  conclusions  du  rapport  de  la  section 


(  580  ) 
de  gravure ,  à  laquelle  s'était  jointe  la  section  de  peinture, 
la  classe  vote  le  prix  de  six  cents  francs  à  la  gravure  n"  5, 
représentant  Érasme  dans  son  cabinet  de  travail,  d'après 
Leys.  L'ouverture  du  billet  cacheté  fait  connaître  qu'elle 
est  due  à  M.  Joseph  Demannez,  de  Bruxelles. 

Les  œuvres  des  concurrents  resteront  exposées  pendant 
un  mois,  dans  le  grand  vestibule  des  Académies,  au  Musée, 
chaque  jour  (le  dimanche  excepté),  de  10  à  o  heures. 

CONCOURS   LITTÉRAIRE. 

Un  seul  mémoire  a  été  reçu  en  réponse  à  la  première 
question  :  Fait^e  l'histoire  de  la  sculpture  en  Belgique  aux 
XVII'  et  XVIIP  siècles. 

MtMppot'l  de  Jf.  Adolphe  Sii'et. 

fi  L'unique  et  volumineux  mémoire  envoyé  à  l'Acadé- 
mie en  réponse  à  la  question  mise  au  concours,  se  présente 
à  nous  dans  des  conditions  de  faiblesse  et  de  force  qu'il 
convient  d'examiner  avec  le  soin  que  mérite  une  œuvre 
consciencieusement  mais  imparfaitement  élaborée. 

Le  mémoire  se  compose  d'une  introduction,  d'une  série 
de  notices  biographiques  disposées  par  groupes,  puis  d'une 
table  synoptique.  L'ensemble  du  manuscrit  comprend  400 
pages  pro-palria  d'une  écriture  compacte. 

L'introduction,  qui  offrait  à  l'auteur  un  thème  admirable, 
puisque  naturellement  il  avait  à  esquisser  les  premiers 
siècles  de  l'histoire  de  la  sculpture  en  Belgique  jusqu'à 
l'époque  fixée  par  l'Académie,  est  un  travail  incomplet. 
Le  sens  de  l'esthétique  fait  défaut  à  l'auteur,  et,  lorsque 
les  circonstances  exigent  l'entrée  en  matière  d'une  opinion 
raisonnée,  il  cite  tous  les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  le  sujet. 


f  581  } 
Ces  citations  jettent  un  froid  glacial  sur  les  pages  de  cette 
introduction,  composée  du  reste  sans  plan  prémédité  et  sans 
ordre.  Les  quelques  rares  idées  propres  à  l'auteur  ne  s'y 
élèvent  guère  au-dessus  du  niveau  des  vérités  les  plus 
vulgaires.  Entre  autres  preuves  à  l'appui,  nous  prenons 
celle-ci  :  les  XVIP  el  XVIII"  siècles,  dit  l'auteur  du  mé- 
moire, sont  le  commencement  d'une  décadence.  Voilà, 
certes,  une  banalité  admise  et  qu'un  esprit  judicieux  eût 
dû  relever.  L'histoire  des  arts  est  pleine  de  ces  formules 
toutes  faites,  acceptées  bénévolement  et  paresseusement 
par  les  masses.  Déjà  on  a  réagi  contre  ces  poncivités  et 
ces  habitudes  indolentes  de  la  pensée  publique;  l'auteur 
aurait  dû,  à  cette  occasion,  entrer  en  lice  et  comprendre 
la  pensée  secrète  de  la  question  posée.  Est-ce  bien  une 
époque  de  décadence  qui  commence  pour  la  sculpture,  alors 
que  jamais  en  Belgique  ni  ailleurs  celle-ci  n'a  été  plus 
populaire  qu'aux  XVII'  etXVIIl"  siècles?  Est-ce  bien  une 
époque  de  décadence  que  celle  pendant  laquelle  nos  temples 
catholiques  regorgent  de  statues  de  marbre,  nos  églises 
rurales  de  superbes  boiseries,  les  monuments  civils  de 
groupes  allégoriques  dont  les  masses  dépassent  parfois 
celles  des  constructions  et  nos  maisons  particulières  de 
détails  sculpturaux  en  quantités  inouïes  et  dont  aujour- 
d'hui encore  on  admire  l'effet  pompeux  et  théâtral.  Une 
décadence  qui  dure  deux  siècles  et  qui  remplit  le  monde 
de  majestueux  produits,  demande  autre  chose  que  le  rappel 
d'un  apophtegme  séculaire  et  exige  que  la  chose  soit 
creusée.  Dans  cette  renaissance  de  l'art  au  XVIh  siècle,  il  y 
a  une  secousse  qui  part  du  mouvement  social  de  l'époque; 
c'est  ce  qu'il  fallait  examiner  en  laissant  soigneusement  de 
côté  les  opinions  prééditées  et  auxquelles  l'auteur  du  mé- 
moire s'est  trop  commodément  asservi.  Jamais  en  Belgique 


(  582  ) 
l'histoire  de  la  sculpture  pendant  ces  deux  siècles  d'une 
fécondité  inouïe,  n'avait  été  suivie,  notée  et  expliquée;  nous 
le  disons  avec  regret,  le  mémoire  que  nous  avons  sous  les 
yeux  n'est  point  destiné  à  combler  ce  vide  regrettable. 

U Introduction  glisse  légèrement  sur  les  troubles  reli- 
gieux du  XV'l"  siècle  si  funestes  à  l'art  de  la  sculpture 
particulièrement.  On  pouvait  espérer  autre  chose  que  des 
redites  sur  lesquelles  s'appuie  maladroitement  l'auteur, 
car  il  n'a  pas  su  tirer  parti  des  richesses  des  autres.  La 
participation  des  artistes  belges  aux  travaux  de  Versailles 
est  représentée  mollement  ;  celle  des  artistes  belges  à 
l'étranger  n'est  point  mentionnée  avec  le  soin  voulu;  l'au- 
teur, oubliant  ce  qu'il  a  dit  plus  haut,  le  répète  et  nous 
prouve  évidemment  qu'il  ne  s'est  pas  relu  ;  quelques  ajoutes 
récentes  sembleraient  prouver  que  le  manuscrit  est  déjà 
ancien;  bref,  ces  pages  introductives  manquent  d'ana- 
lyse, d'ordre,  d'appréciation  et  de  science;  de  science 
surtout;  c'est  celle  des  autres  que  nous  voyons  apparaître 
avec  une  exubérance  dont  on  aura  une  idée  quand  on 
saura  que  l'auteur,  après  avoir  annoncé  que  la  citation 
qu'il  reproduit  est  la  dernière,  recommence  de  plus  belle 
et  continue  à  recommencer! 

Comprend-on  que  dans  un  travail  de  cette  nature  l'in- 
fluence de  Rubens  sur  la  statuaire  soit  traitée  si  cavaliè- 
rement qu'on  se  demande  même  s'il  en  est  question. 
N'était-ce  pas  le  moment  donné  pour  l'épanouissement  de 
l'œuvre!  Les  côtés  révélateurs  abondent,  ils  sont  tenus 
dans  l'ombre.  Même  légèreté  à  propos  des  (jildes  si  inté- 
ressantes à  étudier,  même  sommairement,  ainsi  qu'à  propos 
des  associations  religieuses  de  toute  nature  qui  forment  à 
elles  seules  un  des  chapitres  les  plus  curieux  de  notre 
histoire  de  l'art  statuaire.  N'était-ce  pas  le  moment  de 


(  583  ) 

pénétrer,  le  tîambeau  à  la  main,  dans  les  ateliers  d'An- 
vers et  de  Malines,  et  de  nons  montrer  cette  armée  d'ar- 
tistes qni  sculptaient  pour  toutes  les  parties  du  monde  des 
milliers  de  statues  en  pierre  et  en  bois  dont  la  plupart 
nous  sont  pour  ainsi  dire  inconnues,  car  jusqu'à  présent  il 
n'est  pas  un  seul  auteur  belge  qui  soit  entré  dans  le  vif  de 
cette  adnn'rable  histoire  de  notre  statuaire?  Allez  à  dix  et 
vingt  lieues  à  la  ronde  d'Anvers  et  de  Malines,  dans  les 
églises  rurales,  et  presque  partout  vous  trouverez,  sortant 
de  ces  ateliers,  notamment  aux  confessionnaux,  des  sta- 
tues presque  grandeur  naturelle,  d'une  large  facture  et 
d'un  sentiment  profond;  ce  sont  de  véritables  merveilles  de 
pensée,  d'expression  et  d'exécution.  Il  en  est  parmi  ces 
statues  qu'on  ne  saurait  regarder  sans  trouble  ni  sans 
émotion.  Pendant  plus  d'un  siècle,  Malines  et  Anvers  ont 
produit,  rien  que  comme  statuaire  religieuse,  sous  l'in- 
fluence artistique  de  Rubens  et  sous  l'influence  politique 
des  Archiducs,  une  succession  innombrable  de  travaux  qui 
ne  méritent  point  l'oubli  systématique  et  absolument 
sans  raison  auquel  nous  les  avons  condamnés.  La  révo- 
lution de  1789  a  renouvelé  en  Belgique  les  scènes  de  1562, 
nous  le  savons  bien,  mais  les  modernes  briseurs  d'images 
n'ont  pas  tout  détruit.  Il  en  reste  assez  pour  prouver  au 
monde  et  à  nous-mêmes  ce  qu'on  semble  ignorer  :  à  savoir 
la  puissance  et  la  force  de  notre  école  de  sculpture  au 
XVll''  et  au  XVIII*  siècle.  Voilà  ce  qu'il  fallait  faire,  voilà 
quel  était  le  parti  nouveau  à  tirer  de  la  réponse  à  notre 
question, 

Nous  n'en  dirons  pas  davantage  à  propos  de  cette  In- 
troduction qui  a  mérité  nos  sévérités  et  nous  arriverons  à 
la  partie  biographique,  le  côté  véritablement  utile  de  ce 
mémoire. 


(  584  ) 
L'auteur  explique,  à  deux  reprises  ( pages  20  et  56), 
la  méthode  qu'il  a  adoptée  pour  la  présentation  de  ses 
notices.  Cette  méthode  est  bonne  ;  c'est  la  seule  ration- 
nelle. Elle  consiste  à  placer  les  notices  en  huit  groupes 
correspondant  aux  provinces  où  les  artistes  ont  travaillé. 
La  division  par  écoles  pour  les  XVH*'  et  XVlll''  siècles 
n'était  pas  possible,  le  souille  de  la  Renaissance  agissait 
partout,  et,  si  l'école  de  Rubens  ne  régnait  pas  dans  les 
ateliers  des  sculpteurs  liégeois,  on  pouvait  du  moins  y 
reconnaître  l'inlluence  italienne  trempée  en  passant  aux 
plantureuses  traditions  flamandes.  N'oublions  pas  du  reste 
que  les  Liégeois,  comme  les  Flamands  et  les  Néerlandais, 
puisèrent  leur  génie  à  ce  double  courant  qui  caractérise  si 
fortement  le  dernier  quart  du  XV!*^  siècle  :  la  liberté  des 
idées  sous  l'empire  des  principes  néo-platoniciens  et  la 
rénovation  catholique  sous  l'empire  et  l'impulsion  des 
papes,  des  cardinaux  et  des  souverains.  La  partie  biogra- 
phique forme  donc  une  espèce  de  guide  dont  les  rensei- 
gnements ne  sont  pas  cependant  toujours  d'une  exactitude 
irréprochable.  C'est  ainsi  qu'on  attribue  à  Nys  la  superbe 
chaire  de  vérité  de  l'église  de  Lokeren  (p.  228),  tandis  que 
cette  œuvre  est  de  Verhaeghen,  ainsi  qu'il  a  déjà  été  dit 
du  reste  (page  89).  Il  y  a  beaucoup  de  négligences  de  ce 
genre  qu'une  révision  attentive  ferait  disparaître.  Qu'est-ce 
que  l'auteur  entend  dire  en  signalant  le  comte  d'Egmont 
comme  une  victime  de  la  pairie  (p.  247);  qu'entend-il 
par  joyau  inférieur  (p.  27)  ?  Eayd'herbe  méritait  mieux 
que  la  nomenclature ,  exacte  toutefois ,  de  ses  travaux, 
Verhaeghen,  qui  a  exercé  une  réelle  influence  sur  la  sculp- 
ture religieuse,  ne  préoccupe  que  très-peu  notre  auteur. 
Il  y  avait  là  un  chapitre  révélateur  à  écrire,  mais,  hélas! 
l'enthousiasme  manque  à  notre  écrivain  !  Il  ne  va  même 


(  585  ) 

pas  voir  les  choses  dont  il  parle,  et,  lorsqu'il  décrit  un  mo- 
nument, il  emprunte  la  description  des  autres,  procédé 
commode,  mais  qui  fait  bien  vite  juger  celui  qui  l'emploie. 
Que  l'on  cite  en  passant  une  description  reconnue  excel- 
lente et  admise  en  quelque  sorte  comme  une  formule 
restée  célèbre,  soit,  mais  ne  faire  d'initiative  aucune  des- 
cription originale,  c'est  ne  point  respecter  le  public  et  ce 
procédé  ne  saurait  être  pardonné  qu'à  celui  que  des  infir- 
mités obligent  à  se  servir  des  yeux  des  autres.  Et  encore 
dans  ce  cas  on  ne  concourt  pas. 

Quoi  qu'il  en  soit,  ce  mémoire  qui  n'a  absolument  rien 
d'académique,  a  le  droit  de  nous  intéresser.  C'est  quelque 
chose  que  de  réunir  une  collection  de  plus  de  cinq  cents 
notices  de  statuaires  flamands,  avec  l'indication  de  leurs 
travaux,  les  lieux  où  ceux-ci  existent  et  les  élèves  que  ces 
statuaires  ont  formés.  Tous  ces  noms  se  retrouvent  dans 
un  volumineux  index  synoptique,  très-utile,  que  l'auteur  a 
eu  la  bonne  idée  de  joindre  à  son  mémoire.  Si  notre  écri- 
vain voulait  réunir  de  même  les  notices  des  statuaires 
antérieurs  au  XVIP  siècle,  il  rendrait  un  immense  service 
aux  arts  en  publiant  son  livre  sous  la  forme  d'un  Dklion- 
naire  biographique. 

Le  travail  ardu  auquel  l'auteur  du  mémoire  s'est  livré 
pour  constituer  l'ensemble  des  notices  dont  nous  venons 
de  parler,  est  méritoire.  Ce  travail  forme  une  œuvre  à  part, 
la  seule  que  nous  puissions  encore  avoir  en  vue.  Elle  est 
digne,  selon  nous,  malgré  des  imperfections  faciles  à  faire 
disparaître,  de  recevoir  une  récompense  et  un  encoura- 
gement. En  conséquence,  nous  estimons  qu'il  y  a  lieu  de 
décerner  à  l'auteur  du  mémoire  qui  fait  l'objet  du  pré- 
sent rapport,  une  médaille  d'argent.  » 


(  586  ) 
M.  Joseph  Geel's,  second  euinmissaire,  déclare  se  rallier 
au  rapport  de  M.  Adolphe  Siret. 

a  Ce  mémoire  Irès-volu milieux  laisse  beaucoup  à  dé- 
sirer quant  à  sa  l'orme;  il  présente  |)resque  à  chaque  page 
des  citations  et  des  passages  empruntés  aux  divers  écri- 
vains qui  ont  traité  de  l'histoire  de  la  sculpture;  par 
contre  on  y  trouve  peu  de  chose  tjui  soit  en  propre  à  son 
auteur. 

La  rédaction  est  généralement  faible  et  souvent  défec- 
tueuse. Quant  au  fond,  notre  honorable  confrère  M,  Siret 
en  a  fait  une  analyse  à  latiuelle  il  ne  me  reste  rien  à 
ajouter. 

La  plus  grande  partie  du  mémoire  est  consacrée  à  des 
notices  biographiques  classées  méthodiquement  d'après  les 
provinces  où  les  nombreux  artistes  sculpteurs  de  ces  deux 
époques  ont  exécuté  ou  placé  leurs  œuvres.  Ce  travail 
colossal  est  la  partie  la  plus  intéressante  et  la  plus  méri- 
tante du  mémoire;  sa  publication  pourrait  être  d'une 
très-grande  utilité  :  malheureusement,  comme  l'ont  déjà 
reconnu  MM.  Geefs  et  Siret,  la  faiblesse  du  mémoire  en 
général  ne  permet  pas  de  lui  attribuer  la  médaille  d'or. 

Je  me  rallie  donc  aux  conclusions  de  ces  deux  honora- 
bles collègues,  qui  proposent  de  décerner  à  l'auteur  du 
mémoire  la  médaille  d'argent.  » 

La  classe  adopte  ces  conclusions. 


(587  ) 


PRÉPARATIFS  DE   LA  SÉANCE  PUBLIQUE, 

La  classe  s'occupe  des  dispositions  à  prendre  pour  sa 
séance  publique  annuelle.  Elle  décide  qu'elle  tiendra  une 
réunion  préparatoire  le  vendredi  25  de  ce  mois,  à  une  heure, 
afin  d'arrêter  déiinitivenient  le  programme  de  cette  solen- 
nité. 


(  588  ) 


CLASSE  DES   BEAUX-ARTS. 


Séance  du  25  septembre  187 i, 

M,  N.  De  Keyser,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M,  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin,  Guillaume  Geefs,  Joseph 
Geefs,  Ferdinand  De  Braekeleer,  C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis, 
Edm.  De  Busscher,  Alpli.  Balat,  Ang.  Payen  ,  le  chevalier 
L.  de  Burbure,  Jos.  Franck,  G.  De  Man ,  Ad.  Siret,  J.  Le- 
clercq,  Ernest  Slingeneyer,  Alex.  Robert,  Ad.  Samuel, 
membres;  F.  Stappaerts,  correspondant. 

M.  R.  Chalon,  directeur  de  la  classe  des  lettres,  assiste 
à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


Sa  Majesté  le  Roi  lait  exprimer  ses  regrets  de  ne  pou- 
voir accepter,  à  cause  de  ses  nombreux  engagements  pen- 
dant les  fêtes  de  septembre,  l'invitation  qui  lui  a  été  faite 
pour  la  séance  publique  de  la  classe.  Elle  se  réserve  d'as- 
sister, dans  le  courant  de  l'année, à  une  autre  séance. 

Son  Altesse  Royale  Monseigneur  le  comte  de  Flandre, 
qui  est  en  voyage,  fait  aussi  exprimer  ses  regrets  de  ne 


(  389  ) 
pouvoir  accepter  l'invilalion  de  la  classe  pour  la  même 
solennité. 

MiM.  le  comte  d'Aspremont-Lynden  et  Beernaert,  Minis- 
tres des  affaires  étrangères  et  des  travaux  publics,  regret- 
tent également  de  ne  pouvoir  assister  à  cette  séance,  à 
cause  de  leurs  occupations. 

—  M.  le  gouverneur  de  la  province  de  Brabant  a  adressé 
une  circulaire  informant  que  des  places  sont  réservées  à 
MM.  les  académiciens  qui  assisteront  au  service  funèbre, 
célébré  le  25  de  ce  mois,  à  1 1  beures  du  matin,  dans  l'église 
des  SS.-Michel  et  Gudule,  en  mémoire  des  citoyens  morts 
pour  la  patrie. 

—  Par  arrêté  du  23  septembre,  M.  le  Ministre  de  l'in- 
térieur, sur  les  propositions  du  jury  chargé  de  juger  le 
grand  concours  de  gravure,  dit  prix  de  Rome,  ouvert  cette 
année  par  le  Gouvernement,  a  décerné  le  premier  prix  à 
M.  François  Lauwers,  d'Anvers.  Une  mention  honorable  a 
été  accordée  à  M.  Joseph  Dirks ,  de  la  même  ville. 

—  M.  Julien  Dillens,  artiste  sculpteur,  à  Ixelles,  annonce 
qu'il  est  l'auteur  du  carton  n"  5  qui  a  obtenu  un  encoura- 
gement de  500  francs  du  concours  d'art  appliqué  de  cette 
année. 

—  La  classe  des  beaux-arts  a  perdu,  le  29  décembre  i 875, 
l'un  de  ses  membres  titulaires  de  la  section  d'architecture, 
M.  Henri-Louis-François  Partoes.  M.  L.  Alvin,  directeur 
de  la  classe  pour  la  même  année,  a  prononcé  le  discours 
académique  lors  des  funérailles  du  défunt. 

M.  L.  Alvin  accepte  de  faire  la  notice  sur  la  vie  et  les 


(  390  ) 

travaux  de  feu  Parloes  pour  le  prochain  Annuaire  acadé- 
mique. Cette  notice  sera  accompagnée  du  portrait  du  dé- 
funt. 

—  La  commission  des  portraits]|des  académiciens  dé- 
cédés se  réunira  avant  la  prochaine  séance  de  la  classe, 
pour  s'occuper  des  portraits  qui  devront  figurer  dans  cet 
Annuaire. 


JUGEMENT  DU  CONCOURS  LITTÉRAIRE. 

La  classe,  appelée  à  se  prononcer  sur  les  conclusions  des 
rapports  relatifs  au  mémoire  présenté  en  réponse  à  la  ques- 
tion :  Faire  Vhistoire  de  la  sculpture  aux  Pays-Bas  pen- 
dant les  XVir  et  XVIir  siècles,  a  ratifié  ces  conclusions. 

En  conséquence  une  médaille  d'argent  a  été  votée  à 
l'auteur,  qui  sera  prié  de  se  faire  connaître. 

Elle  a  décidé  en  même  temps  la  remise  de  la  question 
au  concours. 


PREPARATIFS    DE    LA    SÉANCE    PUBLIQUE. 

D'après  l'article  15  du  Règlement  intérieur  de  la  classe, 
M.  De  Keyser  donne  lecture  du  discours  qu'il  se  propose 
de  prononcer  en  séance  publique. 

Des  applaudissements  accueillent  colle  lecture. 


(  Ô9I  ) 
COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


M.  Ad.  Siret  fait  à  la  classe  une  communication  verbale 
au  sujet  d'un  enfant  de  10  ans  et  1 1  mois,  Frédéric  Van 
de  Kerkhove,  de  Bruges,  mort  récemment  et  qui  a  laissé 
un  œuvre  considérable  composé  d'environ  350  petits  pan- 
neaux peints.  M.  Sirel  présente  aux  membres  de  la  classe 
une  vingtaine  de  ces  panneaux ,  représentant  tous  des  pay- 
sages peints  avec  un  aplomb  et  un  talent  qui  provoquent 
dans  l'assemblée  une  vive  émotion  et  un  enthousiasme 
qu'elle  n'hésite  pas  à  exprimer  en  formulant,  sur  la  propo- 
sition de  MM.  Alvin  et  Fétis,  le  vœu  que  les  œuvres  de  ce 
génie,  si  prématurément  enlevé  aux  arts  et  à  la  patrie, 
soient  exposées  publiquement  à  Bruxelles.  Le  bureau  re- 
mercie M.  Siret  pour  son  intéressante  communication  et 
décide  qu'une  notice  sur  Frédéric  Van  de  Kerkhove  sera 
publiée  dans  les  Bulletins  de  l'Académie. 


(  592  ) 
CLASSE  DES  BEArX-ARTS. 


Séance  publique  du  samedi  26  septembre  '1874. 
(Au  Palais  Ducal.) 

M.  N.  De  Keyser,  directeur  et  président  de  l'Académie. 
M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  G.  Geefs,  A.  Van  Hasselt,  J.  Geefs, 
Ferd.  De  Braekeleer,  C.-A.  Fraikin,  Ed.  Fétis,  Alph.  Balat, 
Aug.  Payen,  le  chev.  L.  de  Burbure,  J.  Franck,  G.  De  Man, 
Ad.  Siret,  J.  Leclercq,  Ern.  Slingeneyer,  Alex.  Robert, 
F.-A.  Gevaert,  Ad.  Samuel,  membres;  F.  Stappaerts, 
L.  Terry  et  Th.  Radoux,  correspondants. 

Assistaient  à  la  séance  : 

Classe  des  sciences  :  MM.  M.  E.  Candèze,  directeur; 
L.  de  Koninck,  H.  Nyst,  Ghige,  Melsens,  F.  Duprez,  M.  Gloe- 
sener,  Ch.  Montigny,  G.  Malaise,  membres;  Ed.  Mailly, 
corresponda7it. 

Classe  des  lettres  :  MM.  Ch.  Steur,  J.  Roulez,  P.  De 
Decker,  M.  N.  J.  Leclercq,  le  baron  J.  de  Wilte,  Ch.  Faider, 
Th.  Juste,  Félix  Nève,  membres;  J.  Nolet  de  Brauwere 
Van  Steeland,  Aug.  Scheler,  associés. 

Sa  Majesté  le  Roi,  ainsi  que  S.  A.  R.  Monseigneur  le 
comte  de  Flandre  avaient  fait  connaître  qu'ils  ne  pourraient 
assister  à  la  séance. 


(  593  ) 

MM.  les  Ministres  des  affaires  étraugères  et  des  travaux 
publics  avaient  exprimé  des  regrets  semblables. 

Dès  midi  une  foule  nombreuse  avait  pris  place  dans  la 
salle  ainsi  que  dans  les  loges.  Celles-ci  renfermaient,  outre 
les  dames  de  divers  hauts  fonctionnaires,  MM.  les  Minis- 
tres de  l'intérieur  et  de  la  justice,  M.  Charles  Rogier, 
M.  Piercot,  bourgmestre  de  Liège,  M.  le  lieutenant  général 
de  Liem,  M.  Bellefroid,  directeur  général  des  beaux-arts 
ainsi  que  plusieurs  membres  de  la  Législature  et  divers 
hauts  fonctionnaires  de  l'État. 

Le  bureau  de  la  classe,  composé  de  MM.  N.  De  Keyser, 
directeur,  Alph.  Balat,  vice-directeur  et  J.  Liagre,  secré- 
taire perpétuel,  ainsi  que  de  M.  Candèze,  directeur  de  la 
classe  des  sciences,  s'est  installé,  à  une  heure,  sur  le  devant 
de  l'estrade  réservée  à  MM.  les  académiciens. 

D'après  le  programme  de  la  solennité,  celle-ci  a  com- 
mencé par  l'ouverture  de  Léonore,  de  C.-L.  von  Beet- 
hoven, exécutée  sous  la  direction  de  M.  Joseph  Dupont, 
professeur  au  Conservatoire  royal  de  Bruxelles. 

L'assemblée  a  vivement  applaudi  cette  exécution. 

M.  le  directeur  de  la  classe  s'est  ensuite  levé  et  a  pro- 
noncé le  discours  suivant  : 

Messieurs, 

De  tout  temps  les  beaux-arts,  dans  leurs  manifestations 
multiples,  ont  offert  à  l'esprit  humain  un  double  et  vaste 
champ  d'observations  :  on  s'est  demandé  quelle  est  l'es- 
sence de  l'art,  quelle  est  l'intïuence  qu'il  exerce  et  qu'il 
subit  au  milieu  des  autres  éléments  de  la  civilisation. 

Dans  le  premier  de  ces  deux  ordres  d'idées  chaque  école 
a  vu  naître  une  formule,  chaque  penseur  a  essayé  sa  défi- 

2™^  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  26 


(  594  ) 
nilion,  et  les  tendances  les  plus  opposées  ont  surgi,  défen- 
dues par  des  apôtres  aussi  convaincus  que  passionnés. 
C'est  une  lutte  incessante  où,  tour  à  tour,  les  traditions 
classiques  sont  battues  en  brèche  et  non  détrônées  par  le 
mouvement  romantique,  où  le  maniérisme  prend  la  place 
du  vrai, où  le  réalisme  s'agite,  vraie  tour  de  Babel  où  l'art 
se  désespère  et  où  le  langage  artistique  lui-même  se  con- 
fond autour  de  cette  bannière  sacrée  qui  porte  l'éternelle 
devise  :  Le  Beau,  le  Bien,  le  Vrai  ! 

Mais  dans  ces  luttes,  si  l'on  n'arrache  pas  au  sphinx  son 
secret  tout  entier,  l'on  entrevoit  du  moins  la  lumière;  le 
doute  parfois  s'éclaircit,  les  théories  hasardées  s'évanouis- 
sent, les  convictions  sans  base  sérieuse  se  trouvent  ébran- 
lées et,  comme  le  fier  Sicambre,  plus  d'un  brûle  les  idoles 
qu'il  avait  adorées.  Ce  genre  de  sacrifice  a  été  souvent 
consommé  pendant  la  longue  période  qui  s'étend  de  l'anti- 
quité classique  jusqu'à  nos  jours,  et,  il  faut  le  dire,  se 
renouvellera  longtemps  encore.  Qui  sait  si  un  jour  l'art 
parfait  ne  jaillira  pas  de  toutes  ces  cendres  accumulées? 

En  attendant  ce  triomphe  toujours  espéré  et  qui  s'éloigne 
à  mesure  que  l'on  croit  en  approcher,  constatons  sim.ple- 
ment  que,  dans  la  lutte  aujourd'hui  plus  ardente  que 
jamais,  les  uns  font  consister  la  perfection  exclusivement 
dans  le  beau  idéal,  les  autres  uniquement  dans  le  vrai; 
d'autres  enfin,  sans  devise,  sans  règles  ni  lois,  dédaignant 
le  passé,  ne  voulant  pour  guide  que  leur  propre  inspira- 
tion s'en  vont  à  la  recherche  d'un  art  nouveau,  sans  parler 
de  ceux  qui  renoncent  à  toute  individualité. 

Dans  ce  spectacle  il  n'est  rien  qui  doive  nous  étonner; 
les  transformations  artistiques  auxquelles  nous  assistons, 
l'histoire  nous  les  montre  à  différentes  époques  et  même  à 
cette  époque  glorieuse  où  l'art  dans  toute  sa  grandeur  et 


(  395  ) 

dans  toute  sa  sérénité  couvrait  de  chefs-d'œuvre  le  sol  de 
la  Grèce.  En  effet,  l'ancien  art  attique  est-il  encore  celui 
de  Phidias,  de  Lysippe,  ou  de  Praxitèle?  Les  écoles  d'Egine, 
d'Athènes,  de  Sycione  ne  portent-elles  pas  un  caractère 
distinctif?  Le  canon  de  Polyclète  a-t-il  été  pour  tous  les 
artistes  grecs  le  régulateur  de  leurs  créations  artistiques? 
Et  s'il  faut  en  croire  les  auteurs  anciens,  ne  vit-on  pas, 
dans  l'art  de  la  peinture,  se  manifester  des  tendances 
diverses  illustrées  par  des  talents  de  premier  ordre? 

Les  chefs  d'œuvre  de  la  Grèce,  par  leur  noble  simpli- 
cité, par  la  puissance  et  la  sincérité  de  leur  accent,  répon- 
dent à  ces  questions  et  nous  prouvent  combien,  à  travers 
toutes  les  transformations,  les  maîtres  ont  su  allier  le  sen- 
timent de  la  nature  à  la  grandeur  du  style,  le  beau  au 
vrai. 

Il  ne  faut  donc  point  déplorer  cette  diversité  d'opinions 
et  de  tendances.  Ce  que  l'on  doit  demander  à  l'artiste,  c'est 
qu'il  soit  sincère,  qu'il  évite  la  convention,  qu'il  se  pénètre 
des  difficultés  de  l'art  pour  apprendre  à  les  surmonter,  et 
enfin  qu'il  n'oublie  pas  que  l'art  est  pour  la  civilisation  un 
puissant  instrument  de  progrès. 

Au  point  de  vue  social,  en  effet,  l'importance  de  son  rôle 
lui  est  indiqué,  par  l'influence  que  l'art  exerce  et  subit 
dans  le  courant  de  la  civilisation  humaine. 

Ses  relations  avec  le  mouvement  intellectuel,  par  les 
lettres  et  les  sciences,  se  font  surtout  sentir.  L'histoire  et 
la  poésie  ont  toujours  éclairé  de  leurs  flambeaux  nos 
grands  devanciers.  N'est-il  pas  juste  de  dire  que  les  sciences, 
les  lettres  et  les  beaux-arts  forment  une  trinité  aussi 
féconde  que  nécessaire?  Ne  sont-ils  pas  les  plus  puissants 
leviers  du  progrès?  Leurs  efforts  s'unissent  naturellement 
et  se  complètent,  et  tendent  à  rendre  pratiques  les  résul- 


(  396  ) 

tais  (les  méditations  et  les  labeurs  du  génie.  S'enrichis- 
sant  à  toutes  les  sources,  s'aidant  de  la  science,  usant  avec 
goût  des  découvertes  de  l'archéologie,  s'inspirant  des 
actes  glorieux  de  la  patrie,  l'art  perpétue  le  souvenir  de  ce 
qui  a  charmé,  ému,  amélioré  l'humanité,  il  entretient 
l'enthousiasme  pour  les  belles  actions,  les  nobles  dévoue- 
ments, il  embellit  de  sa  grâce  souveraine  l'existence  maté- 
rielle, et,  par  son  action  incessante  sur  le  développement 
des  aspirations  morales  et  l'extension  du  bien-être,  il  rend 
au  monde,  à  la  société,  le  centuple  de  ce  qu'il  a  reçu  d'eux. 

Aussi  le  premier  devoir  d'une  âme  artiste  est-il  de 
maintenir  l'art  dans  cette  voie  haute  et  pure  où  il  est  digne 
de  devenir  l'écho  d'un  peuple,  et  digne  d'agir  à  son  tour 
sur  ce  peuple. 

11  n'y  a  pas  de  plus  belle  ambition  pour  l'artiste... 

Dévier  de  cette  voie,  écouter  d'autres  aspirations,  aban- 
donner à  la  dérive  les  saines  traditions  confirmées  par  le 
culte  des  maîtres  de  toutes  les  époques,  ce  serait  réaliser 
ce  qu'un  auteur  a  énergiquement  blâmé  en  disant  que  le 
mauvais  goût  et  le  maniérisme  dans  l'art  équivalent  à  la 
corruption  des  mœurs  dans  la  société. 

Est-ce  à  dire  cependant  que  la  pensée  dans  l'art  ait  seule 
le  privilège  d'intéresser?  non.  Loin  de  nous  l'idée  de  vou- 
loir enrégimenter  toutes  les  intelligences  ou  empêcher  les 
individualités  de  se  produire.  Le  champ  ouvert  à  l'art  est 
assez  vaste  pour  que  chacun  puisse  y  trouver  sa  place  et  se 
créer  sa  voie. 

Mais  il  importe  d'insister  quelquefois  sur  les  principes 
primordiaux  de  tout  grand  art,  et  les  faits  d'expérience 
que  nous  apportent  nos  expositions  publiques  indiquent 
assez  le  danger  qu'il  y  a  de  les  oublier.  A  chaque  ouverture 
de  salon  on  se  récrie  sur  la  diminution  du  nombre  d'œu- 


(  597  ) 

vres  où  régnent  la  pensée  et  les  caractères  de  ce  qu'on 
appelle  le  style  de  la  peinture  d'histoire. 

C'est  une  circonstance  analogue  en  France  qui  fait  dire 
à  un  critique  très-autorisé  :  «  L'école  serait  plus  grande 
»  que  jamais,  si  elle  voulait  moins  de  friperie  et  plus  de 
»  draperie,  moins  de  nudités  et  plus  de  nu,  moins  de  réel 
»  et  plus  d'idéal.  L'idéal  et  le  réel  ne  sont,  après  tout,  qu'un 
»  seul  et  même  fleuve;  mais  au  lieu  de  puiser  à  l'embou- 
»  cliure  dans  une  eau  trouble  qui  a  charrié  ses  rivages,  il 
»  faut  remonter  à  la  source,  si  l'on  veut  trouver  une  eau 
»  plus  légère,  plus  limpide  et  plus  pure.  » 

Le  caractère,  le  style,  le  nu  au  lieu  de  la  nudité,  la  dra- 
perie au  lieu  de  la  friperie,  le  beau  dans  le  vrai!  voilà  bien 
la  règle  suprême  des  créations  artistiques. 

Tous  les  esprits  n'accepteront  pas  ces  idées.  Boileau  déjà 
avait  dit  :  «  Rien  n'est  beau  que  le  vrai  »,  et  ce  principe 
semble  marquer  encore  pour  plusieurs  artistes  le  seul  but 
à  atteindre.  Ils  oublient  que  ceux  qui  ne  se  contentent  pas 
de  cette  définition  ont  néanmoins  recherché  de  tout  temps 
la  vérité;  seulement  si  elle  est  la  base  de  l'art,  elle  n'est 
pas  l'art  tout  entier.  Rien  n'est  plus  vrai  et  plus  exact 
qu'un  procès-verbal,  et  rien  aussi  n'est  moins  poétique. 

La  vérité  servile  n'est  pas  le  but;  à  cette  condition  la 
photographie  serait  le  maître  par  excellence.  Non,  il  existe 
une  vérité  choisie,  qui  frappe  ,  qui  saisit,  qui  émeut  par 
l'expression;  alors  le  vrai  devient  beau.  Les  deux  idées  se 
confondent  ainsi  et  constituent  ces  hautes  qualités  que 
l'art  exige. 

Nous  ne  prolongerons  pas  cette  rapide  excursion  dans 
le  domaine  général  de  l'art.  Notre  conclusion,  c'est  que 
l'éternel  conflit  d'opinions  et  de  tendances  que  nous  avons 
signalé  et  l'importance  du  rôle  social  de  l'art  prouvent  aussi 


(  398  ) 
combien  sont  grandes  et  multiples  les  difficultés  qui  se  pré- 
sentent à  l'artiste,  n'importe  à  quelle  branche  il  appartient. 

Ne  négligeons  donc  aucun  moyen  de  les  vaincre;  forti- 
fions et  développons  les  études  sérieuses  ;  encourageons 
les  jeunes  talents  à  persévérer  dans  ces  études;  secondons 
de  toutes  nos  forces  et  de  toutes  nos  sympathies  la  sollici- 
tude de  notre  Auguste  Souverain  et  des  administrations 
publiques  pour  le  progrès  de  l'enseignement. 

Il  faut  aimer  bien  l'art  pour  ne  pas  se  laisser  gagner  par 
le  doute  ou  le  découragement,  et  il  est  bon  qu'aux  heures 
de  défaillance  on  sente  régner  autour  de  soi  le  courage  et 
l'ardeur  d'autres  esprits  qui  ont  aussi  à  cœur  de  porter  haut 
le  drapeau  de  l'école  belge.  Notre  désir  est  de  voir  se  grou- 
per fraternellement  autour  de  ce  drapeau  tous  nos  artistes, 
ceux  qui  ont  déjà  longtemps  lutté  comme  ceux  qui  com- 
mencent. Nous  ne  serons  jamais  de  trop  pour  nous  serrer 
la  main  et  marcher  de  front  vers  le  progrès. 

Les  applaudissements  unanimes  de  l'assemblée  ont  ac- 
cueilli ce  discours. 

La  parole  a  été  donnée  ensuite  à  M.  J.  Liagre,  secrétaire 
perpétuel  de  l'Académie,  pour  proclamer  les  résultats  sui- 
vants des  concours  de  la  classe  et  du  grand  concours  de 
gravure,  dit  prix  de  Rome,  institué  par  le  Gouvernement. 

CONCOURS    ORDINAIRE    DE    LA   CLASSE. 

La  classe  des  beaux-arts  avait  mis  au  concours  de  cette 
année  deux  questions  littéraires  et  deux  sujets  d'art  ap- 
pliqué. 

En  réponse  au  concours  littéraire,  elle  n'a  reçu  qu'un 
seul  mémoire.  Il  concerne  la  première  question,  deman- 


(  599  ) 
dant  de  Faire  Vliistoive  de  la  sculpture  en  Belgique  aux 
XVIP  et  XVIIV  siècles,  el  porte  pour  devise  :  C'est  dans 
les  édifices  religieux  de  nos  provinces  qu'il  faut  rechercher 
l'histoire  de  la  sculpture  en  Belgique  pendant  les  XVIP  et 
XVI ir  siècles. 

La  classe  n'a  pas  jugé  que  ce  mémoire,  dans  sa  forme 
actuelle,  pût  obtenir  la  médaille  d'or;  mais,  vu  le  mérite 
incontestable  que  présente  une  de  ses  parties,  elle  a  voté 
à  l'auteur  une  médaille  d'argent. 

La  classe  a  décidé,  en  même  temps,  que  la  question  res- 
terait au  concours. 

En  conséquence  de  ces  résolutions,  l'auteur  peut  choisir 
entre  les  deux  partis  suivants  : 

Continuer  à  garder  l'anonyme,  apporter  à  son  œuvre  les 
améliorations  qu'elle  réclame  et  la  présenter,  ainsi  modifiée, 
au  prochain  concours.  Dans  ce  premier  cas,  il  renonce  na- 
turellement à  la  médaille  d'argent. 

Ou  bien  se  faire  connaître ,  en  demandant  l'ouverture 
du  billet  cacheté  qui  était  joint  à  son  mémoire  et  qui  ren- 
ferme son  nom.  Dans  ce  second  cas,  il  recevra  la  médaille 
d'argent,  mais  son  travail,  cessant  d'être  anonyme,  ne 
pourra  plus  être  présenté  pour  le  prochain  concours. 

Le  premier  sujet  d'art  appliqué  avait  pour  but  de  de- 
mander un  carton  d'une  frise  destinée  à  une  salle  d'hos- 
pice; il  devait  avoir  comme  objet  :  Donnez  à  manger  à 
ceux  qui  ont  faim  et  à  boire  à  ceux  qui  ont  soif. 

Treize  cartons  ont  été  reçus  pour  ce  concours. 

La  classe,  après  avoir  entendu  le  rapport  de  la  section 
de  peinture,  a  jugé  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  de  décerner  le 
prix  proposé  de  1,000  francs. 


(  400  ) 

Mais  elle  a  décidé  qu'un  encouragement  de  500  francs 
serait  accordé  à  l'auteur  de  l'œuvre  n"  5,  portant  comme 
signe  distinctif  un  trait  ondulé  dans  l'angle  inférieur  de 
droite. 

M.  JuLFEN  DiLLENs,  artistc  sculpteur,  à  Ixelles,  s'est  fait 
connaître  comme  étant  l'auteur  de  ce  carton. 

La  classe  avait  promis  d'accorder  pour  le  second  sujet 
d'art  appliqué,  un  prix  de  600  francs  à  l'auteur  de  la  meil- 
leure gravure  au  burin ,  exécutée  en  Belgique  pendant  la 
période  du  1''  janvier  187^  au  1"'  janvier  487â,  d'après 
Vœuvre  d'un  maître  ancien  ou  moderne  de  l'école  fla- 
mande. 

Conformément  à  l'avis  de  la  section  de  gravure,  à  la- 
quelle s'est  jointe  la  section  de  peinture,  la  classe  a  voté  le 
prix  à  la  gravure  représentant  Érasme  dans  son  cabinet  de 
travail,  d'après  le  tableau  de  Leys. 

Cette  œuvre,  revêtue  de  la  devise  :  Conservez  à  chacun 
son  propre  caractère,  a  pour  auteur  M.  Joseph  Demannez, 
de  Bruxelles. 

GRAND  concours  DE  GRAVURE  DU  GOUVERNEMENT. 

Par  arrêté  du  23  de  ce  mois,  M.  le  Ministre  de  l'inté- 
rieur, sur  les  propositions  du  jury  chargé  de  juger  le  grand 
concours  de  gravure  dit  prix  de  Rome,  ouvert,  cette  année, 
par  le  gouvernement,  à  l'Académie  royale  des  beaux-arts 
d'Anvers,  a  décerné  le  prix  à  M.  François  Lauwers  ,  d'An- 
vers. 

Une  mention  honorable  a  été  votée  à  M.  Joseph  Dirks, 
de  la  même  ville. 

MM.  Demannez,  Lauwers  et  Dirks  sont  venus  recevoir, 


(  401  ) 
les  deux  premiers  des  mains  de  M.  le  Minisire  de  l'inté- 
rieur, et  le  troisième  des  mains  de  M.  De  Keyser,  la  dis- 
tinction qu'ils  avaient  remportée. 

La  solennité  a  été  terminée  par  l'exéculion  de  l'œuvre 
du  lauréat  qui  a  remporté  le  second  prix  lors  du  grand 
concours  biennal  de  composition  musicale  de  l'année 
1873. 

Cette  œuvre  porte  pour  titre  :  Torquato  Tasso  's  Dood, 
scène  dramatique,  paroles  de  M.  Van  Droogenbroeck,  lau- 
réat du  concours  des  cantates  flamandes  de  1873,  musique 
de  M.  Florimond  Van  Duyse. 

Les  soli  ont  été  chantés  par  M""  Sylvie  Balcaen  et 
M.  Emile  Blauwaert,  tous  les  deux  de  Gand.  Les  chœurs 
ont  été  exécutés  par  les  membres  de  la  Société  royale 
des  Chœurs  de  la  même  ville. 

Les  textes  flamands  et  français  de  cette  cantate  ont  paru 
dans  le  tome  XXXVI  des  Bulletins,  pages  287  à  296. 

Les  vifs  applaudissements  de  l'assemblée  ont  accueilli 
l'exécution  de  cette  œuvre,  dirigée  par  M.  Joseph  Dupont. 

Une  chaleureuse  ovation  a  été  faite  à  M.  Van  Duyse, 
rappelé  par  les  acclamations  de  la  salle  à  la  fin  de  sa  can- 
tate. 

La  séance  a  été  levée  à  2  heures  et  demie. 


(  402  ) 


CLASSE   «ES    SCIENCES. 


Séance  dit  iO  octobre  1874. 

M.  E.  Candèze,  directeur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van  Beneden  , 
Edm.  de  Selys  Longchamps,  H.  Nyst,  Gluge,  Melsens, 
F.  Duprez,G.DewaIque,  H.  Maus,  M.  Gloesener,F.  Donny, 
Ch.Montigny,  Steichen,  Brialmont,  Éd.  Dupont, Éd.  Mor- 
ren,Éd.  Van  Beneden,  G.  Malaise,  membres;  Th.  Schwann, 
E.  Catalan,  Aug.  Bellynck,  associés;  L.  Henry,  Éd.  Mailly, 
Alph.  Briart,  H.  Valérius,  F.  Folie,  J.  De  Tilly,  corres- 
pondants. 

M.  d'Omalius  écrit  qu'il  «  regrette  vivement  que  sa  raa- 
»  ladie  le  retienne  encore  au  lit,  et  l'empêche  d'assister  à 
»  la  séance.  » 


CORBESPONDANCE. 

M.  J.  Elie  de  Beaumont  annonce,  par  écrit,  la  mort  de 
son  oncle,  M.  J.-B.  Léonce  Elie  de  Beaumont,  associé  de  la 
section  des  sciences  naturelles  de  l'Académie,  décédé  à  son 
château  de  Canon  (Calvados) ,  le  21  septembre  dernier. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  s'est  empressé  d'exprimer  les 
regrets  de  l'Académie  à  la  famille  du  défunt. 


(  403  ) 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur,  sollicité  de  prendre  des 
renseignements  auprès  du  Gouvernement  français  sur 
M.  Vène,  ancien  chef  de  bataillon  du  génie,  élu  associé  de 
la  classe  en  1824,  annonce  que  cet  officier  est  décédé  avant 
les  événements  de  1870. 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  transmet  une  nouvelle 
lettre  du  sieur  P.-J'\  Goubet,  de  Beugny  (Pas-de-Calais), 
relative  à  la  quadrature  du  cercle. 

La  classe  passe  à  l'ordre  du  jour  sur  cette  communica- 
tion. 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  offre,  pour  la  biblio- 
tèque,  une  nouvelle  livraison  de  la  Flora  batava.  —  Re- 
mercîments. 

—  MM.  G.  Dewalque,  président, et  Jules  Colbeau,  secré- 
taire de  la  Société  maiacologique  de  Belgique ,  annoncent 
que  cette  société  vient  d'adopter  le  principe  d'une  fédéra- 
tion des  sociétés  scientifiques  de  Belgique.  Ils  demandent 
à  l'Académie  de  vouloir  bien  examiner  la  question,  et  de 
désigner  un  délégué  chargé  de  représenter  la  Compagnie 
à  la  réunion  où  seront  adoptées  les  bases  de  la  fédération 
en  projet. 

La  classe  émet  l'opinion  que  l'Académie,  étant  une  insti- 
tution de  l'État,  dépendante  du  Gouvernement,  il  lui  est 
interdit  à  ce  titre  d'entrer  dans  une  fédération  de  sociétés 
libres.  Les  trois  classes,  au  surplus,  forment  un  tout  indivi- 
sible et  l'une  d'elles  ne  peut  entrer  dans  une  fédération  à 
laquelle  les  deux  autres  n'appartiendraient  pas. 

—  M.  G.  Biddell  Airy,  directeur  de  l'Observatoire  de 
Greenwich,  fait  hommage  d'une  collection  complète  des 


(  404  ) 
publications  de  cet  établissement.  —  La  classe  vote  des 
remercîments  pour  ce  don. 

—  Les  Sociétés  savantes  dont  les  noms  suivent  ont 
adressé  leurs  derniers  travaux  :  Académie  des  sciences  de 
Dijon;  Fondation  de  P.  Teyler  van  der  Hulst,  à  Harlem; 
la  Société  hollandaise  des  sciences,  à  Harlem;  la  Société 
provinciale  des  arts  et  des  sciences,  à  Utrecht;  l'Académie 
royale  des  sciences,  à  Munich;  la  Société  royale  des  sciences 
de  Bohême,  à  Prague;  la  Société  nationale  des  sciences 
naturelles,  à  Stuttgart;  l'Institut  géologique  de  Vienne;  la 
Société  mathématique  de  Bohême,  à  Prague;  l'Université 
d'Upsal;  la  Société  royale  de  géographie  de  Londres;  la 
Société  d'agriculture  de  l'État  de  Wisconsin;  la  Société 
d'histoire  naturelle  de  Boston;  la  Société  des  arts  et 
sciences  de  l'île  Maurice. 

—  L'Académie  a  reçu ,  en  réponse  au  dernier  envoi 
de  ses  publications,  des  lettres  de  remercîments  de  : 
M.  H.  Sainte-Claire  Deville,  à  Paris;  l'Académie  des 
sciences  morales  et  politiques  de  Paris  ;  la  Société 
linnéenne  du  nord  de  la  France,  à  Amiens;  la  Société 
d'Émulation  de  Cambrai  ;  la  Société  d'agriculture  et  la 
Bibliothèque  publique  de  Douai  ;  la  Société  pour  l'encou- 
ragement des  sciences,  des  lettres  et  des  arts,  à  Dun- 
kerque  ;  la  Fondation  de  P.  Teyler  van  der  Hulst,  à 
Harlem;  la  Société  d'agriculture  de  Valenciennes  ;  la 
Société  provinciale  des  arts  et  sciences,  à  Utrecht;  la 
Société  royale  des  sciences  de  Bohême,  à  Prague;  l'Aca- 
démie royale  des  sciences  de  Munich  ;  MM.  J.  D.  Hooker, 
à  Kew,  et  Richard  Owen,  à  Londres;  l'Observatoire 
royal  de  Greenwich  ;  la  Société  philosophique  de  Glasgow; 


(  405  ) 
l'Observatoire  d'Oxford;  la  Société  royale  de  Dublin;  l'Aca- 
démie des  sciences  de  Hongrie,  à  Pesth  ;  l'Académie  des 
arts  et  des  sciences  du  Connecticut,  à  New-Haven  ;  la 
Société  d'histoire  naturelle  de  Boston  ;  le  Lycée  d'his- 
toire naturelle  de  New-York;  l'Académie  Peabody  des 
sciences ,  à  Salem  ;  l'Essex  Institute ,  à  Salem. 

—  Le  R.  P.  Bellynck  présente  ses  observations  sur 
l'effeuillaison  en  1873  et  sur  la  feuillaison  en  1874,  faites 
à  Namur.  M.  Cavalier  envoie  son  résumé  météorologique 
pour  Ostende  pendant  les  mois  de  juillet  et  d'août  1874. 
—  Réservé  pour  le  recueil  des  phénomènes  périodiques. 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  présente  le  premier  exem- 
plaire du  tome  XXXVIII  des  Mémoires  couronnés  et  des 
Mémoires  des  savants  étrangers,  qui  vient  d'être  publié. 

Ce  volume  ne  renferme,  en  ce  qui  concerne  la  classe 
des  sciences ,  que  les  Recherches  sur  l'innervation  du  cœur 
par  le  nerf  vague ,  par  le  docteur  Nuel. 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  seront  l'objet  d'un 
examen  : 

i"  Résumé  de  quelques  observations  astronomiques  et 
météorologiques  faites  dans  la  zone  surtempérée  et  entre  les 
tropiques,  par  M.  J.-C.  Houzeau,  membre  de  la  classe.  — 
Commissaires:  MM.  Liagre  et  E.  Quetelet; 

2°  Sur  la  dilatation,  la  chaleur  spécifique  des  alliages 
fusibles  et  leurs  rapports  avec  la  loi  de  Neumann,  par 
M.  W.  Spring.  —  Commissaires  :  MM.  Gloesener,  Mon- 
tigny  et  Folie  ; 

3°  Démonstration  de  la  propriété  fondamentale  des 
équations  différentielles  linéaires,  par  M.  P.  Mansion ,  pro- 
fesseur à  l'Université  de  Gand.  —  Commissaires  :  MM.  Ca- 
talan et  Folie; 


(  406  ) 

4°  Recherches  sur  la  conservation  du  bois  au  moyen  de 
sels  de  cuivre,  par  M.  Rollier,  répétiteur  de  chimie  à 
l'Université  de  Gand.  —  Commissaires  :  MM.  Donny  et 
Melsens  ; 

5"  Nouvelle  rédaction  du  mémoire  intitulé  :  Considéra- 
tions générales  sur  la  détermination,  sans  calcul,  de 
l'ordre  d'un  lieu  géométrique  quelconque,  par  M.  L.  Saltel. 
—  Commisssaires  :  MM.  Catalan  et  Folie; 

6°  Remarques  sur  l'aspect  de  la  planète  Jupiter  pendant 
son  apparition  en  181  â,  et  sur  le  passage  des  satellites  II 
et  III  et  de  leurs  ombres  pendant  la  soirée  du  25  mars  ; 
par  M.  F.  Terby,  docteur  en  sciences.  —  Commissaires  : 
MM.  E.  Quetelet  et  Liagre; 

7°  Remarques  morphologiques  sur  les  espèces  du  sous- 
genre  Xanthoura,  par  M.  Alph.  Dubois.  —  Commissaire  : 
M.  de  Selys  Longchamps. 


MONUMENT    QUETELET. 

L'Académie,  dans  son  assemblée  générale  des  trois 
classes  du  5  mai  dernier,  avait  décidé,  sur  la  proposition 
de  M.  Charles  Montigny,  membre  de  la  classe  des  sciences, 
qu'elle  prendrait  l'initiative  d'une  souscription  à  ouvrir 
pour  élever  à  Bruxelles  un  monument  à  Adolphe  Quete- 
let ,  son  regretté  secrétaire  perpétuel.  La  commission  admi- 
nistrative fut  chargé  de  mettre  cette  décision  à  exécution. 

Comme  suite  aux  dispositions  prises  par  la  commission, 
M.  le  directeur  présente  à  la  classe  la  première  liste  de 
souscription.  Cette  liste  sera  également  soumise  aux 
classes  des  lettres  et  des  beaux-arts. 


(  407  ) 
RAPPORTS. 

Conformément  aux  conclusions  des  rapports  de  MM.  Stas, 
de  Koninck  et  Donny,  la  classe  vote  l'impression,  dans 
le  recueil  in-S"  des  Mémoires,  du  travail  historique  de 
M.  L.  Melsens  sur  Van  Hehnont,  à  propos  de  la  définition 
et  de  la  théorie  de  la  flamme. 

La  classe  autorise  M.  Terby  a  retirer  sa  note  intitulée  : 
Un  mot  à  propos  d'une  notice  du  comte  de  Rosse  sur  les 
observations  de  Jupiter  faites  en  1815,  qui  avait  été  ren- 
voyée à  l'examen  de  MM.  Quetelet  et  Liagre. 

M.  Terby  a  jugé  cette  note  sans  objet,  après  la  publica- 
tion, dans  les Monthly  notices  de  la  Société  astronomique  de 
Londres,  d'une  lettre  qu'il  avait  adressée  au  comte  de  Rosse. 

Sur  les  considérations  verbales  de  M.  de  Selys  Long- 
champs,  la  classe  vole  l'impression  au  Bulletin  âe  la  note 
de  M.  Alph. Dubois,  intitulée  :  Remarques  morphologiques 
sur  les  espèces  du  sous-genre  Xanthoura. 


Note  sur  deux  nouveaux  chlorures  d'acides  organiques, 
par  M.  Walthère  Spring. 

Rapport  de  M.  Stas, 

«  M.  Spring  a  entrepris  une  étude  comparative  des  pro- 
priétés de  deux  corps  dont  la  formule  est  respectivement 
C^H^S'^O^iVa  et  C^H^S^O^  Na  :  traitant  l'un  et  l'autre 
de  ces  corps  par  le  pentachlorure  de  phosphore,  il  a  ob- 
tenu le  chlorure  du  radical  de  l'acide  éthyl-hyposulfureux 


(  408  ) 
et  du  radical  de  l'acide  hyposulfoneux.  L'auteur  ne  s'est 
pas  appliqué  jusqu'ici  à  faire  une  étude  complète  de  ces 
chlorures;  il  s'est  borné  à  constater  leur  existence,  par 
l'analyse  des  sels  régénérés  à  l'aide  de  l'action  de  l'hydrate 
de  sodium.  En  se  plaçant  au  point  de  vue  de  la  constitu- 
tion des  acides  polythîoniques,  on  conçoit  que  l'existence 
de  chlorures  d'acides  organiques,  ne  renfermant  qu'un 
atome  d'oxygène  à  côté  de  deux  atomes  de  soufre,  présente 
de  l'importance.  Ainsi  que  le  fait  remarquer  M.  Spring,  ces 
chlorures  pourront  être  le  point  de  départ  de  nombreux 
composés  nouveaux,  dont  l'étude  l'occupe  en  ce  moment. 
J'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  classe  de  voter  l'impres- 
sion de  ce  travail  dans  le  Bulletin  de  la  séance  et  d'enga- 
ger l'auteur  à  compléter  ses  recherches.  » 

Rappofl  de  Jn.   Ej.  fie  H.oninch. 

«  Je  me  joins  à  mon  savant  confrère  xM.  Stas  pour  de- 
mander l'impression  de  l'intéressante  notice  de  M.  Spring 
dans  nos  Bulletins  et  pour  engager  l'auteur  à  poursuivre  ses 
recherches.  » 

La  classe  adopte  les  conclusions  de  ces  rapports. 


Notice  sîir  Faction  du  pentachlorure  de  phosphore  sur  les 
hyposul files  inorganiques,  par  M.  Wal Ibère  Spring. 

MtappoB't  de  m.   Sla: 

«  On  se  rappelle  que  M.  Spring  a  conclu  de  ses  recher- 
ches à  l'existence  du  sulfuryle  dans  les  hyposulfiles.  Cette 
conclusion  est  en  opposition  avec  les  travaux  de  M.  Bucha- 
nan,  qui,  s'appuyant  sur  les  études  de  M.  Wiliiamson, 
confirmées  par  celles  de  MM.  Carius  et  Hugo  Schiff,  pré- 
tend que  les  sulfates  n'ont  aucune  relation  avec  les  hypo- 


(  409  ) 
sulfites,  et  que  partant  ceux-ci  ne  peuvent  pas  renfermer 
du  sulfuryle. 

MM.  Michaelis  et  Schifferdecker,  Geuther  et  finale- 
ment M.  Melsens,  ont  démontré  que  le  pentachlorure  de 
phosphore  ne  produit  en  aucun  cas  du  chlorure  de  sulfu- 
ryle par  son  action  sur  les  sulfates  ou  sur  l'acide  sulfiirique. 

M.  Spring  a  soumis  à  un  contrôle  minutieux  toutes  ces 
assertions  contradictoires  et  il  a  confirmé  tous  les  faiis 
énoncés  par  MM.  Michaelis  et  Schifferdecker. 

Avec  la  constatation  de  l'erreur  de  fait  disparaissent  les 
contradictions;  il  en  résulte  que  les  conclusions  déduites 
par  M.  Spring  de  son  travail  restent  debout. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  classe  de  voter  l'impres- 
sion de  la  notice  de  M.  Spring,  dans  le  Bullelin  de  la 
séance.  » 

Conformément  aux  conclusions  de  ce  rapport,  aux- 
quelles a  adhéré  M.  de  Koninck,  second  commissaire,  la 
classe  vote  l'impression  de  la  note  de  M.  Spring  au  Bul- 
letin. 


—  MM.  Catalan  et  Folie  font  connaître  leur  appréciation 
sur  deux  notes  de  M.  Simons,  concernant,  la  première  : 
la  solution  de  deux  questions  de  permutations,  la  seconde  : 
la  démonstration  d'un  théorème  de  Fermât. 

Conformément  aux  conclusions  des  rapports  de  ces 
commissaires,  la  classe  ordonne  le  dépôt  aux  archives  des 
deux  notes  de  M.  Simons.  L'auteur  sera  remercié  pour  ses 
communications. 


2""  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  27 


(  410  ) 


COMMUNICATIONS  ET  LFXTURES. 


Les  Perséides  en  I87i,  observations  faites  à  l'Observatoire 
royal  de  Bruxelles.  Communication  de  M.  E.  Quetelet, 
membre  de  l'Académie. 

L'apparition  des  étoiles  filantes  du  mois  d'août  1874  a 
pu  être  observée  dans  des  conditions  assez  favorables. 
Le  10  la  soirée  a  été  belle  jusqu'à  minuit.  Les  observations 
ont  été  interrompues  à  cette  heure  par  les  nuages.  Le  9  il 
a  malheureusement  été  impossible  d'observer,  mais  le  8 
et  le  11  les  observations,  quoique  interrompues  de  temps 
en  temps  par  la  présence  de  nuages,  ont  permis  de  con- 
stater le  maximum  très-caractérisé  du  10.  Une  circonstance 
assez  remarquable,  c'est  que,  pendant  les  trois  soirées  où 
l'on  a  observé,  il  y  eut  entre  1 1  heures  et  minuit  de  violents 
éclairs  dans  le  nord-ouest. 

Les  observations  de  cette  année  ont  eu  pour  objet  spé- 
cial la  détermination  géométrique  des  trajectoires.  Le  nom- 
bre horaire  des  étoiles  filantes  a  été  aussi  soigneusement 
annoté. 

Les  observateurs  étaient,  le  8  août,  MM.  E.  Quetelet, 
L.  Estourgies,  A.  Lancaster. 

Le  10,  MM.  E.  Quetelet,  C.  Hooreman,  A.  Lancaster. 

Le  11,  MM.  E.  Quetelet,  L.  Estourgies. 

Les  observations  ont  été  faites  sur  la  terrasse,  où, 
comme  on  sait,  on  ne  peut  guère  voir  que  les  deux  tiers 
du  ciel. 


(  411  ) 

Le  8  août  les  observations,  commencées  à  10  heures,  ont 
été  interrompues  de  10  h.  4  m.  à  10  h.  49  m.  Elles  ont  pu 
être  ensuite  continuées  jusqu'à  11  h.  39  m.  En  54  mi- 
nutes on  a  vu  19  étoiles  filantes,  ce  qui  porte  le  nombre 
horaire  à  21. 

Le  10,  les  observations  ont  été  commencées  à  10  h. 
29  m.,  et  terminées  à  11  h.  58  m.  à  cause  des  nuages;  pen- 
dant 1  h.  29  m.  on  a  compté  78  étoiles  filantes,  ce  qui 
donne  So  étoiles  filantes  par  heure.  Enfin,  le  11,  de  10  h. 
17  m.  à  11  h.  17  m.,  il  a  été  vu  28  météores. 

Dans  le  tableau  suivant  on  a  présenté  les  coordonnées 
des  trajectoires  qui  ont  pu  être  déterminées.  Le  point  initial 
et  le  point  terminal  sont  donnés  par  leur  ascension  droite 
et  leur  déclinaison.  Un  petit  diagramme  représente  les  mé- 
téores qui  ont  été  observés  à  l'Observatoire  de  Bruxelles 
pendant  la  soirée  du  10  août. 

Étoiles  filantes  du  8  août  1874  observées  à  l'Observatoire  royal 
de  Bruxelles. 


Point 

nltial. 

Point  terminal. 

N» 

-— — ^-- 



Hr.URE. 

CRASDEtIR. 

Observations. 

d'ordre. 

a 

S 

a 

f? 

1 

10     0 

„ 

304'' 

+  27» 

3 1  i" 

+  23° 

2 

10     3 

« 

306 

+  45 

Til 

+  33 

3 

10  49 

2 

2 

+  45 

340 

+  25 

4 

10  50 

3 

326 

+  58 

309 

+  42 

5 

10  54 

2 

3ô7 

+  28 

327 

+  14 

6 

10  58 

" 

295 

+  Ô'J 

284 

+  26 

7 

11     1 

" 

Ô09 

+  3'S 

308 

+  17 

8 

11     4 

» 

517 

+  19 

ÔIO 

+   16 

(  4i2  ) 

Étoiles  filantes  du  %  août  1874  observées  à  l'Observatoire  royal 
de  Bruxelles  (suite). 


No 

'd'ordn 


Poinl  initial. 


Observations. 


9 
10 
11 
12 
lô 
14 
15 
16 
17 


18 
19 
20 
21 
22 
23 
24 
25 
26 
27 
28 
2'J 
30 
51 
32 


11  8 

11  15 

11  18 

Il  22 

II  2ô 

11  24 

11  25 

11  3H 

11  38 


177° 
225 
338 
265 
350 
287 

2 
532 

4 


+  77° 
+  7ô 
+  9 
+  38 
+  28 
+  44 
+  20 
+  17 
+  19 


198» 
229 
343 
256 
338 
266 
346 
345 
358 


+  59° 
+  58 
+  26 
+  32 
+  8 
+  13 
0 
+  4 
+  11 


Soirée  du  10  aoîit  4874. 


10  30 

.. 

306 

+  13 

503 

+  7 

10  30 

« 

355 

+  55 

526 

+  48 

10  31 

2 

316 

+  36 

308 

+  16 

10  34 

2 

262 

+  12 

257 

+  3 

10  .. 

» 

221 

+  39 

227 

+  24 

10  39 

4 

272 

+  6 

268 

+  5 

10  40 

3 

358 

+  28 

y 

+  26 

10  41 

3 

346 

+  14 

559 

+  11 

10  42 

« 

312 

+  8 

307 

+  5 

10  45 

4 

357 

+  53 

344 

+  40 

10  44 

n 

11 

+  34 

5 

+  28 

10  44 

)) 

259 

+  67 

242 

+  65 

10  45 

1 

268 

+  6 

257 

-  2 

10  .. 

« 

236 

+  70 

221 

+  55 

10  47 

'^ 

345 

+  15 

356 

+  13 

Traînée. 
Traînée. 


Traînée. 


(  ^15  ) 


Étoiles  filantes  du  10  aoi'il  i87i  observées  à  l'Observatoire  royal 
de  Bruxelles  (suite). 


N» 

Point 

nitial. 

Point  terminai. 

BEl-BE. 

CBlSDEin. 

Observations. 

d'ordre. 

a 

r] 

a 

0 

ÔÔ 

10  49 

„ 

505° 

+   24" 

510" 

+   25" 

34 

10  51 

5 

265 

+  5 

208 

+   I 

Ô5 

10  .. 

.' 

517 

+  63 

303 

+  62 

56 

10  .. 

» 

215 

+  75 

207 

+  65 

37 

10  .. 

n 

247 

+  74 

234 

+  55 

58 

10  .. 

» 

218 

+  53 

206 

+  46 

59 

10  .. 

1 

190 

+  67 

204 

+  47 

40 

10  .. 

" 

285 

+  35 

277 

+  53 

Traînée. 

41 

10  58 

3 

15 

+  36 

5 

+  29 

42 

11  0 

5 

10 

+  60 

6 

+  66 

4ô 

11   1 

4 

311 

+  Ai 

307 

+  34 

44 

11  5 

4 

283 

+   32 

275 

+  23 

45 

11  .. 

. 

246 

+  40 

235 

+  44 

46 

11  .. 

» 

216 

+  73 

225 

+  55 

47 

11  .. 

>' 

345 

+  16 

556 

+  10 

48 

11  .. 

n 

227 

+  25 

252 

+  12 

49 

11  .. 

4 

252 

+  10 

249 

+  6 

50 

11  8 

4 

358 

+  54 

546 

+  44 

51 

11  11 

4 

293 

+  7 

291 

+  4 

52 

11  .. 

4 

344 

+  4 

551 

+  3 

53 

11  .. 

■> 

260 

+  67 

262 

+  48 

54 

11  12 

5 

305 

0 

299 

-  2 

55 

11  15 

4 

323 

+  11 

319 

+  4 

56 

11  15 

5 

348 

+  51 

542 

+  44 

57 

11  16 

4 

269 

+  22 

264 

+  13 

58 

11  .. 

0 

205 

•+  66 

212 

+  49 

59 

11  .. 

" 

175 

+  57 

183 

+  54 

(  4U  ) 


Étoiles  filantes  du  10  août  ISTi  observées  à  l'Observatoire  royal 
de  Bruxelles  (suite). 


d'ordre. 


Point  initial. 


Observations. 


60 

61 

6-2 

63 

64 

65 

66 

67 

68 

69 

70 

71 


74 
75 
76 
77 

78 


79 
80 
81 
82 
83 


11  .. 
11  19 
11  .. 
11  .. 
11  .. 
11  24 
11  .. 

11  .. 
11  .. 

11  .  . 

11  .. 

11  .. 

11  .. 

11  49 

11  .. 

11  .. 

11  52 

11 

11 


10  16! 
10  .. 
10  ... 
10  22 
10  24 


5° 

10 

189 

296 

234 

3 
346 
243 
304 
277 
231 
301 
305 
336 
257 

15 

314 

275 

1 


+  00 

+  60 
+  69 
+  8 
+  78 
+  34 


6- 

1 
192 
290 
227 
554 
344 


+  55 

237 

+  55 

290 

+  37 

271 

+  62 

227 

+  78 

266 

+  74 

265 

+  -25 

346 

+  14 

256 

+  25 

14 

+  44 

307 

+  50 

255 

+  25 

555 

+  26» 
+  66 
+  58 
+  4 
+  52 
+  25 
0 
+  35 
+  28 
+  22 
+  58 
+  30 
+  47 
+  31 
+  8 
+  20 
+  33 
+  38 
+  16 


Soirée  du  1 1  août  i  874. 


273 
287 
358 
337 
359 


+  8 
+  16 
+  55 
+  27 

+  26 


237 
279 
346 
340 
551 


+  / 
+  6 
+  25 
+  33 
+  13 


(  445  ) 


Etoiles  filantes  du  il  août  1874  observées  à  l'Observatoire  royal 
de  Bruxelles  (suite). 


d'orJre. 

EEltRE. 

GRANDEUR. 

Point 

initial. 

Point  terminal. 

Observations. 

84 

10  .. 

4 

313» 

+  15° 

500» 

+  3" 

85 

10  29 

3 

308 

-  12 

298 

-  18 

86 

10  30 

2 

350 

+  03 

510 

+  55 

87 

10  32 

4 

346 

+  19 

539 

+  15 

88 

10  55 

4 

355 

+  16 

526 

+  5 

89 

10  37 

4 

356 

+  51 

349 

+  55 

90 

10  38 

4 

332 

+  5 

325 

-  5 

91 

10  59 

4 

11 

+  05 

352 

+  57 

92 

10  41 

2 

267 

+  11 

204 

+  5 

Traînée. 

93 

10  42 

4 

549 

+  46 

335 

+  39 

94 

10  43 

2 

559 

+  30 

349 

+  21 

95 

10  44 

4 

539 

+  45 

554 

+  41 

96 

10  45 

.. 

341 

+  26 

545 

+  36 

97 

10  50 

2 

313 

+  45 

290 

+  29 

98 

10  32 

4 

296 

+  4 

289 

-  3 

99 

10  55 

1 

299 

+  4 

294 

-  5 

Traînée. 

100 

10  58 

3 

37 

+  50 

51 

+  45 

101 

10  58 

n 

334 

+  4 

329 

-  5 

102 

11  5 

4 

321 

+  16 

517 

+  27 

103 

11  6 

3 

314 

+  5 

303 

-  6 

104 

11  7 

2 

290 

+  56 

209 

+  44 

105 

11  8 

3 

11 

+  54 

9 

+  43 

106 

11  11 

» 

315 

+  15 

299 

0 

(  416  ) 


Étoiles  filantes  du  10  août  1874  observées  à  Schaerbeek 
par  M.  L.  Estourgies. 


Point 

nitial. 

Point  terminal. 

N. 

HEIRE. 

CBASDEl'R. 

~^"'      ^ 

^^■^ 

'~      ~" 

Observations. 

d'ordre. 

a 

â 

« 

rj 

1 

10  17 

3 

60» 

+  520 

74» 

+  48» 

2 

10  21 

2 

80 

+  70 

162 

+  64 

Belle  traînée. 

3 

10  25 

3 

56 

+  78 

160 

+  8-2 

Petite  traînée. 

4 

10  29 

3 

115 

+  60 

133 

+  56 

5 

10  37 

4 

65 

+  48 

70 

+  46 

6 

10  38 

4 

47 

+  76 

Polaris. 

7 

10  59 

4 

15 

+3  8 

32 

+  62 

8 

10  42 

4 

53 

+  47 

60 

+  44 

9 

10  45 

3 

87 

+  57 

87 

+  48 

10 

10  46 

3 

42 

+  45 

38 

+  32 

11 

10  48 

3 

PoU 

iris. 

215 

+  84 

1-2 

10  49 

3 

26 

+  52 

23 

+  44 

lô 

10  51 

4 

22 

+  38 

22 

+  30 

14 

10  54 

4 

348 

+  78 

340 

+  70 

15 

10  55 

4 

62 

+  57 

70 

+  62 

16 

10  59 

3 

54 

+  42 

64 

+  39 

Paraît  double. 

17 

11     0 

2 

22 

+  46 

18 

+  54 

Petite  traînée. 

18 

11     1 

3 

60 

+  72 

134 

+  78 

Petite  traînée. 

19 

11     2 

3 

12 

+  55 

0 

+  52 

Petite  traînée. 

20 

11     7 

5 

25 

+  39 

25 

+  3-2 

21 

11    12 

4 

29 

+  38 

31 

+  32 

22 

11    15 

1 

22 

+  62 

0 

+  55 

Très -brillante;    met 
plus  de  deuj  secondes  à 
décrire  sa    trajectoire; 
laisse  une  belle  traînée 
immobile. 

25 

11    15 

3 

72 

+  72 

121 

+  70 

24 

11   16 

3 

Pol: 

iris. 

230 

+  80 

Petite  traînée. 

25 

11   19 

5 

91 

+  70 

119 

+  64 

Petite  traînée. 

(  417  ) 


Etoiles  filantes  du  10  août  1874  observées  à  Schaerbeek 
par  M.  L.  Estourgies. 


Point 

initial. 

Point  terminal. 

N" 

HEURE. 

CRAKDECn. 

'     '"     ' 

^— 

^ 

Observations. 

d'ordre. 

a 

rJ 

a 

S 

26 

II   21 

5 

88° 

+  70° 

125° 

+  67° 

*• 

27 

11   23 

5 

25 

+  65 

25 

+  78 

28 

11   25 

5 

77 

+  54 

96 

+  53 

29 

11   28 

5 

80 

+  49 

94 

+  48 

ÔO 

Il    29 

4 

49 

+  45 

50 

+  38 

31 

Il   30 

5 

98 

+  69 

155 

+  61 

Petite  traînée. 

32 

11  31 

5 

74 

+  44 

79 

+  39 

33 

Il   33 

5 

62 

+  60 

75 

+  65 

34 

11   38 

5 

21 

+  65 

552 

+  74 

35 

11   42 

5 

72 

+  48 

82 

+  52 

36 

11   45 

4 

111 

+  62 

135 

+  67 

37 

11   46 

5 

150 

+  77 

168 

+  55 

( 

58 

M   48 

5 

108 

+  64 

12-5 

+  63 

39 

11   49 

5 

52 

+  50 

63 

+  49 

40 

11  49 

5 

72 

+  59 

82 

+  61 

41 

11   50 

5 

34 

+  42 

36 

+  41 

42 

11   57 

5 

74 

+  49 

76 

+  47 

43 

11  58 

5 

135 

+  76 

150 

+  74 

L'observation,  commencée  à  10  h.  15  m.,  s'est  terminée 
à  minuit;  le  ciel  s'est  complètement  couvert  à  ce  moment. 

Le  centre  d'émanation,  nettement  accusé,  se  trouvait 
dans  l'espace  compris  entre  les  constellations  de  Persée, 
Cassiopée  et  la  Girafe. 

Durant  la  première  heure  d'observation,  les  météores 
étaient  plus  brillants  que  dans  la  deuxième;  le  plus  lumi- 


(418) 
neux  apparut  à  11  h.  15  m.;  à  partir  de  cet  instant,  l'in- 
tensité ainsi  que  la  longueur  des  trajectoires  parcourues 
diminuèrent  progressivement  jusqu'à  la  fin  des  observa- 
tions. 

Des  éclairs  très-vifs,  dont  l'intensité  alla  en  augmentant, 
se  montrèrent  à  l'horizon  nord  pendant  toute  la  durée  de 
l'observation. 


Observations  des  étoiles  filantes  de  la  période  d'aoïit  1874, 
faites  à  Louvain  par  M.  F.  Terby,  docteur  en  sciences. 

Le  9  août,  le  ciel  a  été  si  nuageux  pendant  la  soirée  que 
j'ai  cru  ne  pouvoir  obtenir  de  résultat  utile. 

Le  10,  j'ai  observé  de  10  h.  10  m.  à  12  h.,  par  un  ciel 
tout  à  fait  serein,  d'abord  dans  la  direction  du  NE.,  puis 
dans  celle  du  SO.,  et  j'ai  vu  soixante-dix-sepl  étoiles 
filantes.  Vingt-huit  météores  se  sont  montrés  de  10  h. 
10  m.  à  11  h.,  et  quarante-neuf  de  11  heures  à  minuit. 
Après  la  fin  des  observations,  les  nuages  ont  envahi  tout 
le  ciel. 

Ces  étoiles  filantes  présentaient  presque  toutes  les  ca- 
ractères de  l'époque,  en  divergeant  à  partir  des  constella- 
tions de  Cassiopée  et  de  Persée.  Vingt-huit  météores  étaient 
de  première  grandeur,  et  parmi  eux  j'en  ai  annoté  deux 
dont  l'éclat  pouvait  être  comparé  à  celui  de  Jupiter,  et 
deux  comparables  à  Vénus.  J'ai  vu  dix-sept  étoiles  de 
deuxième  grandeur.  Dix-neuf  astéroïdes  étaient  suivis  de 
traînées  généralement  fort  belles.  J'ai  annoté  deux  météores 
dont  la  trajectoire  était  sinueuse. 

Les  étoiles  observées  le  10  se  dirigeaient  en  grande  ma- 
jorité vers  le  SO.  et  l'O. 


I 


(  419  ) 

Le  11,  j'ai  encore  observé  de  10  h.  42  m.  à  11  h.  12  m., 
par  un  ciel  serein ,  dans  la  direction  du  NE.  et,  pendant 
cette  heure,  je  n'ai  annoté  que  seize  météores,  dont  sept 
de  première  grandeur,  et  cinq  avec  traînée.  Le  phénomène 
semblait  donc  en  décroissance. 

Pendant  toute  la  durée  des  observations  du  10  et  du  H, 
des  éclairs  se  produisaient  dans  le  Nord. 


AURORES  BOREALES. 


ÏSote  sur  un  phénomène  auroral  remarqué  à  Louiain  le 
soir  du  3  octobre  481i,  et  sur  sa  coïncidence  avec  des 
éclairs  observés  da)is  le  Nord,  par  M.  F.  Terby,  docteur 
en  sciences. 

En  examinant  le  Nord ,  le  5  octobre,  à  8  h.  25  m.  du  soir, 
pour  voir  s'il  ne  s'y  produisait  aucun  phénomène  particu- 
lier, je  fus  frappé  d'apercevoir  une  illumination  assez  vive, 
très-restreinte,  très-peu  élevée,  occupant  un  point  de  l'ho- 
rizon situé  sous  la  constellation  des  Lévriers.  Cette  lueur, 
légèrement  jaunâtre,  se  détachant  sur  le  ciel  parfaitement 
noir,  et  immédiatement  appuyée  sur  l'horizon,  semblait 
avoir  une  origine  terrestre  et  être  le  reflet  d'un  incendie 
très-lointain.  Je  regrettais  de  ne  pouvoir  m'expliquer  par- 
faitement cette  apparition,  lorsque  je  vis  l'horizon  nord 
s'illuminer  tout  à  coup  par  un  éclair  dont  le  centre  explo- 
sif se  trouvait  exactement  dans  la  même  région  que  la 
lueur  ou  gerbe  lumineuse.  Cette  circonstance  me  décida  à 
poursuivre  les  observations.  Bientôt  une  lueur  aurorale 
incontestable  se  manifesta  dans  tout  le  NO.  Le  ciel  se  cou- 
vrant peu  à  peu,  ce  phénomène  prit  un  aspect  singulier  : 


(  4-20  ) 

vers  8  h.  35  m.,  la  gerbe  lumineuse  brillait  toujours  à  l'ho- 
rizon, et  au-dessus,  mais  séparé  d'elle  par  un  intervalle 
obscur,  on  voyait  un  nuage  auroral  allongé  horizontale- 
ment, s'étendant  dans  tout  le  NO.  et  jetant  un  éclat  qui, 
par  moments,  revêtait  une  très-légère  teinte  rose.  C'est  à 
peine  si,  en  ce  moment,  quelques  étoiles  perçaient  le  voile 
nuageux  qui  couvrait  le  ciel,  et  des  éclairs  apparaissaient 
de  temps  en  temps,  ayant  toujours  pour  centre  la  gerbe 
lumineuse. 

Quelques  blancheurs  apparurent  encore  dans  des  éclair- 
cies  pendant  le  reste  de  la  soirée;  mais,  à  10  heures,  par 
un  ciel  presque  serein,  on  ne  voyait  plus  aucune  trace  du 
phénomène. 

Je  crois  devoir  rappeler,  à  cette  occasion,  que  plusieurs 
aurores  boréales,  observées  à  Louvain,  ont  coïncidé  avec 
des  éclairs  dans  le  Nord. 

Pendant  toute  la  durée  de  la  belle  aurore  du  2o  oc- 
tobre 1870,  des  éclairs  apparurent  dans  le  N.;  ils  furent 
remarqués  aussi  à  l'Observatoire  royal  de  Bruxelles, 
à  Arendonck,  par  M.  C.  Coomans,  à  Somergem,  par 
M.  P.  Vertriest,et  à  Kain,  près  de  Tournai,  par  M.  FI.  Des- 
rumeaux. 

L'aurore  du  9  novembre  1871  était  accompagnée 
d'éclairs  très-fugitifs  qui  se  produisaient  dans  le  Nord. 

Celle  du  10  novembre  1871  a  présenté  la  même  parti- 
cularité. 

Le  4  février  1874,  de  8  h.  15  m.  à  8  h.  20  m.,  des 
lueurs  fugitives  se  succédaient  rapidement  dans  le  Nord; 
elles  étaient  trop  faibles  et  trop  peu  étendues  pour  être 
assimilées  à  des  éclairs  ordinaires.  Mais,  à  8  h.  40  m.,  un 
brillant  éclair  a  illuminé  l'horizon  N.  magnétique,  comme 
si  la  cause  qui  avait  produit  les  faibles  émanations  précé- 
dentes avait  pris  tout  à  coup  un  redoublement  d'intensité. 


(  42i  ) 

Je  désirerais  que  l'on  pût  réunir  les  faits  relatés  dans 
cette  note  aux  particularités  analogues  signalées  déjà  par 
les  observateurs,  et  les  rapprocher  spécialement  de  ceux 
qui  ont  été  invoqués,  il  y  a  quelques  années,  par  M.  Silber- 
mann,  et  qui  ont  servi  de  base  aux  idées  émises  par  ce  savant 
pour  expliquer  un  phénomène  encore  si  peu  connu.  (Voir 
Comptes  rendus  de  VAcadémie  des  sciences  de  Paris, 
dernières  années.) 


Note  sur  les  perturbations  magnétiques  qui  ont  accompa- 
gné V aurore  boréale  du  3  octobre  1874;  par  M.  E.  Que- 
telet,  membre  de  l'Académie. 

L'aurore  boréale  du  5  octobre  a  été  accompagnée  de 
perturbations  assez  prononcées  des  barreaux  aimantés. 
Le  5,  l'angle  d'oscillation  du  magnélomètre  était  très-con- 
sidérable et  la  force  magnétique  horizontale  avait  aug- 
menté. Le  4,  la  perturbation  était  très-grande  dans  tous 
les  instruments,  mais  le  5  le  phénomène  a  diminué  et  le  6 
les  instruments  étaient  revenus  à  leur  état  normal. 

Aux  phénomènes  électriques  se  sont  joints  de  forts  bou- 
leversements atmosphériques.  La  tempête  du  2  et  du  5 
a  été  suivie,  le  4,  d'une  pluie  violente  et  continue  qui  a 
persisté  pendant  toute  la  journée;  la  hauteur  d'eau  tombée 
a  été  de  plus  de  10  millimètres.  Le  5  le  temps  s'est  à  peu 
près  remis,  mais  le  coucher  du  soleil  a  été  remarquable 
par  une  belle  coloration  d'un  rouge  cuivré,  et  vers 
10  Vçj  heures  du  soir  on  pouvait  encore  distinguer  dans 
rONO.  quelques  faibles  traces  d'aurore  boréale. 


(  422  ) 

Perturbation  magnétique  du  9  octobre  '1874',  note  par 
M.  C.  Hooreman. 

Le  9  octobre  dernier,  à  9  heures  du  soir,  les  barreaux 
aimantés  de  l'Observatoire  ont  été  trouvés  légèrement  en 
perturbation;  la  déclinaison  était  un  peu  plus  faible  et 
les  deux  composantes  de  la  force  un  peu  plus  fortes  que 
les  jours  précédents.  A  ce  moment  le  ciel  était  serein  et 
l'on  ne  voyait  aucune  trace  d'aurore  boréale,  mais  vers 
9  %  heures,  dans  le  NO.,  il  y  avait  deux  bandes  de  nuages 
noirs  et  allongés,  parallèles  à  l'horizon;  entre  ces  deux 
nuages,  distants  l'un  de  l'autre  d'environ  dix  degrés,  on 
apercevait  une  faible  lueur  blanchâtre  qui  a  persisté  jusque 
vers  10  '/2  heures.  Cette  lueur  était  si  faible  qu'on  n'osait 
l'attribuer  à  une  aurore  boréale,  mais  la  lettre  suivante 
reçue  le  lendemain  de  M.  Terby  est  venue  confirmer  le 
phénomène. 

Louvain,  le  10  octobre  1874. 

Mon  cher  Monsieur, 

.j'ai  l'honneur  de  vous  annoncer  à  la  hâte  que  j'ai  re- 
marqué hier  soir,  9  octobre,  des  apparences  d'aurore  bo- 
réale. A  10  h.  25  m.,  un  banc  de  nuages  noirs  occupait 
l'horizon  N.  et  NO.  ;  plus  haut  le  ciel  étaitserein.  Il  se  forma, 
dans  ce  nuage,  au  NO.,  une  zone  étroite,  allongée  hori- 
zontalement, dont  l'éclat  s'accrut  rapidement  et  prit  enfm 
une  teinte  rougeâtre  prononcée.  Ce  phénomène  diminua 
ensuite  beaucoup  d'intensité  sans  disparaître  complète- 
ment. Je  ne  puis  l'expliquer  que  par  une  aurore  boréale 
très-peu  élevée  et  il  serait  intéressant  de  rechercher  s'il 
n'a  pas  coïncidé  avec  une  perturbation  des  aimants. 


1  LI.ETIX    IIK  I.AC.IDK.MIE,  2'S.-ri<-  ,Toni<-  XY.XTUI  . 


LES  PERSÉIDES 

-en  187  4..- 


-^  0 


(  423  ) 


Troisième  note  sur  les  paratonnerres  \  par  M.  Melsens , 
membre  de  l'Académie. 

OBSERVATIONS  PRÉLIMINAIRES. 


La  présente  notice  est  divisée  en  deux  parties  : 
1"  Je  me  propose  de  faire  voir  qu'un  paratonnerre  en 
bon  état,  construit  d'après  les  règles  admises  dans  les  in- 
structions classiques,  n'a  pas  protégé  d'une  manière  com- 
plète l'édifice  qui  en  était  armé;  il  semble  résulter  de 
l'étude  de  ce  coup  de  foudre  que  l'on  peut  conclure  à  l'uti- 
lité des  paratonnerres  à  pointes  et  à  conducteurs  multiples. 
2°  Dans  les  derniers  chapitres  de  la  note  je  reviens,  en 
les  complétant,  sur  des  communications  antérieures,  trai- 
tant des  moyens  pratiques  de  contrôle  et  de  vérification 
des  paratonnerres.  J'appelle  l'attention  sur  une  disposition 
qui  me  paraît  assez  générale  et  importante  pour  l'étude  de 
l'électricité  atmosphérique  par  les  paratonnerres  et  les 
parafoudres  des  postes  télégraphiques. 


Observations  sur  ta  sphère  d'action  des  paratonnerres  et 
l'espace  préservé  par  leurs  tiges. 

Arago,danssa  notice  sur  le  tonnerre,  fait  remarquer  que 
l'Académie  des  sciences  de  Paris  admit,  tnais  sans  dire  sur 
quelles  bases,  qu'un  paratonnerre  protège  autour  de  lui 
un  espace  circulaire  d'un  rayon  égal  au  double  de  sa  hau- 


(  424  ) 

leur.  L'illustre  physicien  donne  quelques  exemples  dans 
lesquels  cette  loi  est  en  défaut,  si  tant  est  qu'il  y  ait  des 
lois  connues  ou  des  règles  certaines  aujourd'hui,  en  fait  de 
coups  de  foudre  et  de  paratonnerres;  Arago  cite  entre  autres 
un  cas  pour  lequel  l'action  préservatrice  de  la  tige  n'avait 
môme  pas  pour  mesure  la  simple  hauteur  de  la  tige;  d'autres 
auteurs  rapportent  des  faits  semblables;  mais  souvent, 
quand  on  examine  des  coups  de  foudre  de  cette  nature,  on 
se  trouve  devant  des  inconnues  difficiles  à  dégager  : 

La  pointe  du  paratonnerre  est-elle  en  bon  état,  bien 
effilée? 

Le  conducteur  du  paratonnerre  est-il  continu  et  parfai- 
tement en  contact  par  une  surface  suffisante  avec  l'eau 
d'un  puits  ou  un  sol  humide,  bon  conducteur? 

N'y  a-t-il  pas  des  masses  de  métaux,  des  ancres,  des 
barres  de  fer,  etc....  près  du  point  frappé? 

Les  toitures  et  les  faîtages  métalliques,  les  tuyaux  de  des- 
cente et  les  chenaux  pour  l'écoulement  des  eaux  ont-ils 
été  sans  action? 

Les  cheminées  saillantes  sont-elles  sans  influence? 

Quelle  est  la  hauteur  [électriquement  parlant)  de  la 
pointe  du  paratonnerre,  par  rapport  au  sol  ou  aux  diffé- 
rents niveaux  que  l'on  peut  considérer  dans  les  bâtiments 
atteints  par  la  foudre? 

Il  est  cependant  un  fait  qui  frappe  quand  on  examine 
les  opinions  qui  ont  été  professées,  à  ce  sujet,  depuis 
Franklin  jusqu'à  Charles.  On  voit  que  la  zone  de  protection 
admise  a  été  constamment  en  diminuant  et,  aujourd'hui , 
on  tend  à  la  restreindre  encore.  En  effet  il  faut  bien  re- 
marquer que  l'instruction  de  Gay-Lussac  avait  déjà  apporté 
quelques  restrictions  à  la  règle  précitée,  en  ce  qui  regarde 
les  paratonnerres  des  clochers;  s'ils  s'élèvent  de  30  mètres 


(  425  ) 

au-dessus  du  faîle  des  toils  des  églises,  le  rayon  du  cercle 
(le  protection  admise,  est  lixé  à  50  mètres,  c'est-à-dire  à 
la  simple  hauteur  de  la  tige  au-dessus  du  faîte. 

Notre  collègue  M.  F.  Duprez  pensait  (en  1862)  que  les 
paratonnerres  des  tours  et  des  clochers,  par  suite  de  leur 
grande  élévation ,  étendent  leur  sphère  d'action  plus  loin 
que  s'ils  étaient  moins  élevés,  mais  qu'il  est  prudent  d'ar- 
mer les  églises  de  paratonnerres, en  admettant  que  ceux  des 
clochers  ne  garantissent  eflicacenient  autour  d'eux  qu'un 
espace  circulaire  d'un  rayon  double  de  la  hauteur  de  chaque 
tige- au-dessus  de  son  point  d'attache. 

11  s'agit  donc  de  bien  définir,  pour  les  constructeurs,  ce 
que  l'on  entend  réellement  par  point  d'attache,  et  il  me 
semble  qu'on  s'est  trop  peu  préoccupé  de  cette  définition 
pour  les  clochers,  qui  peuvent  être  considérés  comme  des 
cônes  très-allongés. 

Je  m'expliquerai  plus  loin  à  ce  sujet. 

Dans  sa  brochure,  M.  De  Fonvielle,  que  j'ai  cité  dans 
mon  précédent  travail,  admet  que  l'action  protectrice  «  est 
»  étroitement  circonscrite  dans  l'intérieur  d'un  cône  circu- 
»  laire  droit  dont  la  tige  du  paratonnerre  est  l'axe  et  dont 
»  le  rayon  de  base  est  double  de  la  hauteur.  Elle  ne  peut 
»  donc  garantir  de  la  foudre  que  les  objets  qu'elle  domine, 
»  et  seulement  dans  le  cas  où  ils  se  trouvent  à  l'intérieur 
»  du  solide  ainsi  défini.  » 

Je  me  demande  quelle  est  la  véritable  hauteur  de  la  tige 
[électriquement  parlant),  quand  il  s'agit  de  la  flèche  d'une 
église  ou  d'une  tour  inachevée,  carrée  et  sans  flèche 
comme  Sainte -Gudule,  à  Bruxelles,  Saint -Rombaut,  à 
Malincs,  etc.;  il  me  semble  que  les  idées  ne  sont  pas  bien 
fixées  à  ce  sujet,  tandis  qu'il  n'existe  aucun  doute  quand  il 
s'agit  de  liges  fixées  sur  le  parcours  horizontal  d'un  con- 
ducteur le  long  des  toitures,  par  exemple. 

2™' SÉRIE,  TOME  xxxvni.  28 


(  426  ) 

Quelques  constructeurs  vont  même  jusqu'à  admettre, 
pour  ce  dernier  cas,  la  restriction  du  rapport  de  Gay- 
Lussac;  ils  ne  prennent  que  la  hauteur  simple  et  circon- 
scrivent la  protection  dans  un  cône  ayant  cette  hauteur 
pour  rayon  de  base. 

Sir  W.  Snow  Harris  (1)  va  plus  loin  encore;  après 
avoir  donné  la  règle  admise  par  Gay-Lussac  et  l'Académie 
des  sciences  de  Paris,  il  ajoute  :  «  Ceci,  bien  que  possible 
»  dans  certains  cas,  n'est  nullement  une  vérité  générale, 
»  Toutes  les  expériences  que  nous  avons  sur  l'action  des 
»  conducteurs  dans  les  décharges  de  la  foudre  tendent  à 
j>  conclure  qu'ils  n'ont  aucune  influence  quelconque  pour 
»  déterminer  la  cause  de  pareilles  décharges,  autres  que 
j)  celles  de  la  propriété  qu'ils  possèdent  de  leur  fournir 
»  une  ligne  de  facile  conductibilité.  Il  résulte  clairement 
»  des  faits  suivants,  qu'ils  ne  protègent  pas  toujours  un 
»  espace  d'une  distance  considérable.  »  (L'auteur  rapporte 
ensuite  une  série  d'exemples.) 

M.  Perrol  (2),  à  la  suite  de  nombreuses  expériences  de 
cabinet,  était  arrivé  à  changer  les  principes  précédents; 
voici  ce  qu'il  dit  en  effet  (5)  : 


(1)  u  Tliis,  altliough  possible  in  cerlain  cases,  is  by  no  nieans  a  gênerai 
trulh.  AU  Ihe  expérience  we  hâve  of  llie  opération  of  conduclors  on  dis- 
charges  of  lightning,  tends  to  the  conclusion,  liiat  they  hâve  no  influence 
whalever  in  delermining  Ihe  course  of  sach  discharges,  further  than 
arises  out  of  Ihe  circumstance  of  Iheir  furnishing  an  easy  line  of  conduc- 
tion. That  liiey  do  not  always  afford  protection  over  any  considérable 
dislance,  is  clear  from  Ihe  foUowing  cases  :  »  (.Sir  W.  Snow  Harris,  On  the 
nature  of  Tliunderstorms  ,  p.  117.) 

(2)  Voir  Comptes  rendus  des  séances  de  rAcalémie  des  sciences  de 
Paris^  lonies  LIV  à  LX,  années  1862  à  1865  inclusivement. 

(5)  Bulletins  de  la  Société  d'encouragement  ^  "2'^  série,  tome  IX,  page 
o07,  année  1862. 


(  427  ) 

«  Les  expériences  suivantes  nionlront  qu'au  lieu  de  pio- 
)>  léger  circulairemenl  autour  d'elle,  la  tige  du  paraton- 
3>  nerre  attire  les  corps  électrisés  sur  toute  sa  longueur  et 
»  provoque  le  coup  foudroyant.  La  pointe  a  seule  une  ac- 
»  tion  protectrice,  mais  uniquement  dans  l'hémisphère 
»  supérieur  au  plan  passant  par  celte  pointe  prise  comme 
»  centre.  » 

Il  compare  l'action  préservatrice  de  la  pointe  à  celle  d'un 
parapluie  recevant  la  pluie  verticalement  ou  obliquement. 

11  me  suffit  de  signaler  l'opinion  de  M.  Perrot,  mais  j'en 
ferai  abstraction  dans  ce  qui  suit,  puisqu'il  s'agit  d'un  para- 
tonnerre muni  de  trois  tiges  seulement  et  destiné  à  protéger 
un  monument  ayant  une  tour  et  couvrant  une  surface  de 
plus  de  60  mètres  de  longueur  sur  20  à  22  mètres  de  largeur. 


Coup  de  foudre  sur  V église  de  Sainte-Croix,  à  Ixelles.  — 
Détermination  de  la  zone  préservée  dans  diverses  hijpo- 
tlièses. 

Dans  ma  notice  précédente  je  disais,  à  propos  de  la  véri- 
fication et  du  contrôle  des  paratonnerres  par  ks  moyens 
actuellement  usités  et  surtout  par  le  courant  de  la  pile  :  il 
faudrait  pouvoir  examiner  par  ces  moyens  un  paraton- 
nerre venant  d'être  foudroyé  et  qui  eût  mal  fonctionné. 

L'église  de  Sainte-Croix,  à  Ixelles  lez-Bruxelles,  a  été 
foudroyée  dans  la  soirée  du  5  juillet  dernier;  mais  le  dégât 
a  été  peu  considérable,  puisqu'il  s'est  borné  à  la  rupture  d'une 
des  branches  de  la  grosse  croix,  en  carbonate  calcaire  gris, 
laquelle  se  trouvevers  Testa  l'extrémité  du  IVontcn  du  tran- 
sept; mais  si  la  foudre  a  frappé  un  point  peu  dangereux, 


(  428 


elle  pourrait  aussi,  dans  d'autres  circonstances,  atteindre 
des  parties  où  elle  occasionnerait  plus  de  ravages  (1). 

Le  croquis,  en  élévation  et  en  plan,  à  réchelle  de  y^, 
représente  les  parties  essentielles  à  considérer  dans  ce  coup 
de  foudre ,  et  chaque  physicien  pourra  se  faire  une  idée 
exacte  de  l'état  des  choses  et  des  diverses  conclusions  aux- 
quelles on  arrive  en  analysant  les  faits  dans  les  hypothèses 
différentes  que  l'on  peut  admettre. 

La  flèche  proprement  dite,  son  couronnement,  la  croix 
et  la  tige  du  paratonnerre  qui  la  traverse,  ont  une  hauteur 
totale  de  23  mètres  jusqu'à  l'extrémité  de  la  pointe  en 
platine.  La  forme  de  cette  pointe  est  celle  qui  a  été  adoptée 
dans  les  instructions  françaises  de  18oo,  époque  à  laquelle 
MM.  Deleuil  père  et  fds  les  avaient  présentées  à  l'Aca- 
démie; elle  forme  un  cône  de  50"  environ. 

A  la  partie  supérieure,  la  tige  passe  dans  un  épais 
manchon  de  zinc,  auquel  elle  est  soudée  et  sur  lequel  se 
trouvent,  autour  d'un  cercle,  deux  bras  horizontaux  qui 
représentent  une  croix;  cet  ensemble  a  environ  3  mètres 
de  hauteur;  au-dessous  vient  le  couronnement  sur  lequel 
tout  est  fixé;  il  a  aussi  à  peu  près  3  mètres.  La  flèche  de  h 
en  i  est  en  bois  et  recouverte  de  zinc  estampé  n"  18  d'en- 


(1)  La  branche  brisée  à  une  section  de  440  cenlimèlres  carrés;  la  croix 
a  une  hauteur  totale  d'un  mètre  environ. 

Le  montant  lui-même  a  été  détérioré,  mais  je  n'ai  [m  l'examiner  que  vu 
de  la  rue  ;  les  détails  m'échappent,  ils  sont  diCficiles  à  bien  apprécier  sur  le 
fragment  tombé;  la  rupture  s'est  faite  en  biais  et  présente  une  section  de 
600  centimètres  carrés  environ. 

Jl  aurait  fallu  placer  des  échafaudages  pour  pouvoir  examiner  attenti- 
vement le  point  frappé  et  les  ancrages  de  fer  qui  se  trouvent  au-dessous  de 
la  croix  sur  le  fronton  du  transept;  ces  ancres  et  la  maçonnerie  qui  les  en- 
toure ne  paraissent  pas  avoir  été  touchées  par  la  foudre. 


(  429  ) 
\iron  r"'",5  d'épaisseur;  tous  les  supports  du  conducteur 
sont  soudés  au  zinc;  ce  conducteur  descend  le  long  de  la 
paroi  de  l'octogone  orientée  sensiblament  vers  le  Sud. 

Le  conducteur  unique,  en  fer  rond,  système  de  M.  E. 
Sacré,  de  iS  millimètres  de  diamètre,  passe  sur  le  toit 
principal  et  descend  vers  g  le  long  des  toits,  en  passant  près 
d'une  pompe  située  derrière  la  sacristie,  où  se  trouve  le 
puits P,  dans  lequel  on  rencontre  l'eau  abondante  h  environ 
7  mètres  de  profondeur;  ce  conducteur  se  termine  dans 
l'eau  par  une  plaque  de  fonte  de  0'",65  sur  0'",50;  le  contact 
total  est  donc  de  0"\650  carré. 

Un  peu  en  avant  du  transept,  à  4  mètres  de  son  axe  et 
à  une  distance  de  29  mètres  de  l'axe  de  la  tour,  il  v  a  une 
tige  supplémentaire  de5"\2o,  figurée  par  une  flèche;  elle 
est  distante  du  point  frappé  de  M  mètres  {c'c);  une  seconde 
tige,  dont  la  hauteur  est  de  9  mètres  au-dessus  du  faîtage 
du  grand  toit,  se  trouve  sur  une  petite  tourelle  située  sur 
le  chevet  de  l'église  vers  g  ;  elle  est  éloignée  du  point  frappé 
de  22  mètres  [cg). 

On  a  indiqué,  sur  l'élévation  et  sur  le  plan,  le  point 
frappé  par  c.  La  ligne  PP'"  a  une  longueur  égale  à  deux 
fois  la  hauteur  de  la  pointe  P  au-dessus  du  pavé  de  l'église, 
c'est-à-dire  106  mètres;  dans  l'hypothèse  du  rayon  doublé 
de  la  hauteur  à  partir  du  sol,  le  cercle  deproteclion  s'éten- 
drait à  46  mètres  au  delà  du  mur  de  clôture  de  la  cour  E; 
la  révolution  du  rectangle  de  PP'"  T'"  T  tournant  autour 
de  PT,  engendrerait  un  cylindre  circonscrivant  beaucoup 
de  maisons  du  voisinage. 

En  admettant  qu'il  faille  tracer  un  cône  ayant  TP  pour 
hauteur  et  TT'"  pour  rayon  de  base,  on  arrive  à  la  même 
conséquence,  la  droite  PT'"  le  démontre.  Prend-on  PP", 
longueur  égale  à  la  hauteur  de  la  tour,  le  point  frappé  se 


(  430  ) 

trouve  encore  dans  l'espace  préservé  si  l'on  admet  un  cylin- 
dre engendré  par  la  rotation  de  P"  T"  autour  de  Taxe  PT; 
mais  il  n'en  est  plus, de  même  si  l'on  considère  le  cône 
engendré  par  le  triangle  PTT"  ayant  PT  pour  axe;  le  point  c 
pouvait  être  frappé. 

Si,  au  lieu  déconsidérer  le  plan  horizontal  au  niveau  du 
dallage  de  l'église,  on  preiid  le  plan  horizontal  au  niveau  du 
faîtage  du  grand  toit,  séparé  du  plan  passant  par  la  pointe 
de  la  tige  par  une  distance  de  50  mètres,  le  point  c  pouvait 
être  frappé,  soit  que  l'on  considère  un  cylindre,  soit  que 
l'on  prenne  un  cône;  en  effet  il  se  trouve  en  dehors  du 
cône  PTT"  et  du  cylindre  ayant  P^  pour  axe  et  PP'  pour 
rayon  ;  tandis  qu'en  prenant  deux  fois  le  rayon  P/  il  ne  pou- 
vait être  atteint  ni  dans  l'une  ni  dans  l'autre  hypothèse, 
tous  les  toits  de  l'église  étant  compris  dans  l'espace  Vil'. 

Examinant  de  la  même  façon  l'effet  des  tiges  placées  à 
29  et  à  48  mètres  de  l'axe  de  la  tour,  on  trouve  que  les 
liges  c'  et  fj  ne  pouvaient  avoir  aucune  action  préserva- 
trice, car  le  point  c  frappé,  en  tenant  compte  de  l'épaisseur 
des  murs,  négligée  sur  le  plan,  se  trouve  à  i\  mètres  de  la 
lige  c',  haute  de  5"\2o  et  à  22  mètres  de  l'axe  de  la  tou- 
relle placée  au  chevet  de  l'église,  la  pointe  qui  termine 
cette  tourelle  ne  dépassant  le  faîte  du  grand  toit  que  de 
9  mètres. 

Il  y  aurait  donc  lieu  de  multiplier  le  nomhre  de  tiges  sur 
le  faîte  et  d'en  placer  de  plus  élevées. 

Vérificalioii  du  para  Ion  iterre  après  le  coup  de  foudre. 

J'ai  |)oursuivi,  autant  que  possihie,  l'examen  de  la  tige  et 
du  conducteur;  ils  m'ont  paru,  bien  que  fortement  rouilles 
à  ce!  (ains  (  iidioils,  être  en  bon  élat  parlout  ;  M.  Sacré,  le 


(  431  ) 
constructeur  n'y  a  (3as  trouvé,  de  son  côté,  de  défaut  appa- 
rent; mais  cet  examen  superficiel  a  été  vérifié  au  moyen  de 
la  petite  boussole  qui  m'a  servi  pour  la  vérification  des 
paratonnerres  de  l'École  de  médecine  vétérinaire. 

Un  câble  de  cuivre  à  trois  brins  recouvert  de  gutta-percha 
a  été  fixé  au  paratonnerre,  non  loin  du  puits;  le  courant 
d'une  pile  de  Bunsen  de  huit  éléments  très-faiblement 
chargés  passait  presque  sans  résistance  aucune  entre  le 
paratonnerre  et  l'eau  du  puits;  la  boussole  indiquait  une 
résistance  assez  considérable,  mais  le  courant  passait 
encore  bien,  en  mettant  l'extrémité  du  fil  retiré  du  puits 
en  contact  avec  les  murs  humides  de  Tune  des  sacristies 
ou  le  pavement  en  carreaux  poreux  près  de  ce  mur,  preuve 
que  la  conductibilité  du  mur  et  du  pavement  à  travers 
lequel  passait  le  conducteur  était  suffisante  pour  laisser 
passer  le  courant  d'une  pile  très-faible. 

A  l'époque  où  j'ai  fait  cette  vérification,  le  terrain  exté- 
rieur était  très-sec;  on  pratiqua  un  trou  de  25 centimètres 
en  dehors  du  mur  d'enceinte  vers  le  point  0  sur  le  plan, 
et  l'on  obtint  une  déviation  aussi  forte  que  sur  le  mur 
humide  près  du  puits;  mais  en  versant  un  litre  d'eau  dans 
cette  petite  excavation  et  bien  que  le  câble  ne  fût  dénudé 
que  sur  4  à  5  centimètres,  la  déviation  fut  très-considérable. 

La  terre  des  environs  de  l'église  conduit  donc  bien 
l'électricité  dynamique,  et  à  plus  forte  raison  sans  doute 
doit-elle  pouvoir  conduire  avec  facilité  l'électricité  statique 
ou  de  tension. 

J'ai  prié  M.  Sacré  de  s'assurer  du  fait  en  répétant  l'ex- 
périence dans  d'autres  conditions. 

Un  fil  de  cuivre,  isolé  et  enveloppé  de  colon,  fut  fixé  au 
conducteur,  au-dessus  du  toit  et  en  dehors  de  la  lucarne 
au  bas  de  la  flèche,  puis  déroulé  jusqu'au  sol  en  avant  de 


(  432  ) 

l'église  et  mis  en  communication  avec  le  pôle  d'une  pile 
composée  d'un  petit  élément  au  sulfate  de  mercure. 

Un  galvanomètre  étant  placé  dans  le  circuit,  l'extrémité 
du  û\  aboutissant  à  l'autre  pôle  de  la  pile  était  armée  d'une 
lige  métallique,  que  l'on  fit  pénétrer  dans  le  sol,  humide 
le  jour  de  celte  deuxième  expérience. 

La  déviation  accusée  élail  de  50%  tandis  que  la  dévia- 
tion directe  sans  interposition  du  fd  de  cuivre  ayant  un 
millimètre  de  diamètre  et  une  longueur  de  150  mètres, 
du  conducteur  du  paratonnerre  qui  a  près  de  100  mètres  et 
de  la  distance  en  terre  des  appareils  aux  puits ,  soit  d'envi- 
ron 70  mètres,  ne  s'élèverait  pas  au-dessus  de  56°. 

Je  ne  me  suis  pas  contenté  de  ces  expériences  et  je  les 
ai  répétées  en  employant  une  pile  faible  composée  de  deux 
éléments  Leclancbé,  le  rhéomèlre  différentiel  et  le  rhéostat 
employés  pour  les  vérifications  des  lignes  télégraphiques. 

Il  me  paraît  inutile  de  donner  tous  les  détails  de  cette 
seconde  vérification,  d'autant  plus  qu'elle  a  été  faite  sur- 
tout par  comparaison  avec  les  paratonnerres  établis  à 
l'École  de  médecine  vétérinaire. 

Je  constate  seulement  que  le  courant  passe  sans  résis- 
tance sensible  entre  les  conducteurs  de  ces  paratonnerres 
à  5  mètres  au-dessus  du  sol  et  leur  puits,  éloigné  de 
quelques  mètres  seulement.  Ferme-t-on  le  courant  par  la 
terre  du  voisinage,  on  observe,  toutes  choses  égales  d'ail- 
leurs, que  la  résistance  augmente  et  que  l'aiguille  du  gal- 
vanomètre dévie  d'autant  moins  que  la  distance  au  puits 
est  plus  grande  et  que  le  rhéophore  enfoncé  dans  le  sol 
offre  moins  de  surface;  mais  de  part  et  d'autre  on  constate, 
et  de  la  même  façon,  la  bonne  conductibilité  et  l'état  satis- 
faisant des  deux  paratonnerres,  qui  sont  de  systèmes  diffé- 
rents; la  déviation  de  l'aiguille  donne  souvent  des  nombres 
identiques  pour  des  conditions  semblables. 


(  453  ) 

En  introduisant  !c  rhéostat  dans  le  courant  on  observe 
très-sensiblement  dans  les  deux  lieux  les  mêmes  diminu- 
tions dans  les  déviations  de  l'aiguille. 

J'ai  dû  me  borner  à  l'École  vétérinaire  à  tixer  l'un  des 
rhéophores  sur  les  conducteurs  près  du  sol,  tandis  qu'à 
l'église  de  Sainte-Croix,  le  câble  isolé  aboutissant  à  l'un  des 
pôles  de  la  pile  était  lixé  sur  le  conducteur  au  point  l,  c'est- 
à-dire  à  35  mètres  environ  an-dessus  du  pavé  de  l'église  où 
se  trouvaient  la  pile  et  les  autres  instruments;  le  deuxième 
câble  destiné  à  fermer  le  courant  et  aboutissant  à  l'autre 
pôle  de  la  pile  était  terminé  par  une  tringle  pointue  de  fer, 
longue  de  1  mètre  et  d'un  diamètre  de  1  centimètre,  que 
l'on  enfonçait  dans  la  terre  ou  dans  l'eau  de  l'étang  d'Ixelles, 
à  20,  oOet  50 mètres  en  avant  du  portail  de  l'église;  ainsi  le 
courant  devait  traverser  le  paratonnerre  presque  complet, 
deux  câbles  d'une  longueur  totale  de  140  mètres  et  la  terre 
ou  l'eau  de  l'étang  distant  de  plus  de  100  mètres  du  puits; 
malgré  ces  différences  en  faveur  des  paratonnerres  de 
l'École  vétérinaire,  les  déviations  de  l'aiguille,  lorsque  le 
rhéostat  complet  correspondant  à  une  résistance  de  500 
kilomètres  de  fil  de  fer  de  4  millimètres  était  interposé, 
étaient  presque  identiques;  à  l'École  la  déviation  était  de 
34°,  à  Sainte-Croix  elle  ne  s'élevait  qu'à  52°,  difTérence 
faible  comme  on  voit  (1). 

Toutes  les  observations  permettent  donc  d'assurer  que  le 
paratonnerre  de  l'église  de  Sainte-Croix  était  en  parfaitétal. 


(1)  Des  circonstances  indépendantes  de  nna  volonté  ne  m'ontpas  permis 
de  mesurer  exactement  toutes  ces  résistances  en  donnant  la  valeur  de 
chacune  d'elles  en  particulier;  j'engagerais  cependant  d'autres  observa- 
teurs qui  n'opéreraient  paint  par  comparaiso7i  entre  deux  paratonnerres 
à  s'en  rendre  compte. 


(  434  ) 

Chaque  physicien  pouira,  d'après  ce  qui  a  été  dit  pré- 
cédemment, se  former  une  opinion  sur  l'étendue  de  l'action 
préservatrice  dans  ce  cas  spécial. 

Qu'il  me  soit  permis  d'ajouter  : 

11  est  probable  que  :  avec  des  pointes  multiples,  avec  des 
conducteurs  multiples  aboutissant  à  toutes  les  saillies,  tou- 
relles, croix,  eic ,    la  foudre  eût  trouvé  une  route 

tracée  et  de  quoi  en  frapper  un  —  les  pointes  muiliples  sur 
toutes  les  saillies  jouissant  en  outre  de  la  propriété  d'empê- 
cher les  coups  foudroyants,  comme  M.  Perrot  l'admet ,  son 
opinion  étant  partagée,  du  reste,  par  MM.  Gavarret,Babinet 
et  autres  physiciens. 

Le  nombre  de  points  à  armer  ne  s'élève  pas  à  moins 
de  14,  non  comptés  deux  conducteurs  supplémentaires, 
fussent-ils  à  faible  section;  ils  pourraient  être  placés  avan- 
tageusement sur  les  petits  toits  des  nefs,  le  faîte  du  tran- 
sept et  les  toits  des  sacristies. 

Je  me  demande  cependant  si,  de  ce  seul  fait,  on  ne 
pourrait  pas  conclure  à  la  supériorité  des  paratonnerres  à 
conducteurs  multiples  et  à  pointes  multiples  pour  les  édi- 
fices du  genre  de  l'église  de  Sainte-Croix. 

Je  signale  en  terminant  que  l'on  a  cru  voir  la  foudre 
venir  par  la  rue  située  du  côté  de  l'Est  et  qu'elle  aurait 
frappé  la  croix  en  remontant  le  long  du  fronton.  Ce  serait 
un  coup  de  foudre  ascendante ? 

Du  contrôle  et  de  la  vérification  du  paratonnerre  ;  de  remploi 
simultané  d'un  galvanomètre  et  d'un  ré-électromètre.  Ad- 
jonction de  ce  dernier  instrument  pour  l'étude  de  l'électri- 
cité atmosphérique  et  des  décharges  sur  les  paratonnerres. 

L'application  de  l'électricité  dynamique  à  la  vérification 
de  la  conductibilité  parfaite  du  paratonnerre  aérien  et  du 


(  455  ) 

paratonnerre  souterrain  ou  de  la  terre  elle-même  qui  en- 
toure la  partie  enfouie,  est  due  à  M.  J.-P.  Wagner,  de 
Francfort  (1);  son  appareil  est  parfaitement  suffisant;  à  ma 
connaissance,  toiit  ce  que  l'on  a  fait  depuis  ne  change  en 
rien  les  principes  sur  lesquels  il  se  base.  Il  me  semble 
qu'on  a  depuis  exagéré  un  peu  les  mérites  d'appareils  spé- 
ciaux basés  sur  l'action  qu'un  courant  exerce  sur  upe 
aiguille  aimantée,  astatique  ou  non.  En  général  même  les 
auteurs  ne  citent  pas  M.  J.-P.  Wagner.  On  comprend  du 
reste  qu'il  est  facile  de  faire  agir  le  courant  d'une  façon 
continue  ou  par  interruption,  de  le  commander, au  besoin, 
par  un  mouvement  d'horlogerie,  avec  ou  sans  emploi  de 
sonneries,  détonations,  enregistreurs,  etc....  (2). 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  anciens  appareils,  les  paratonnerres 
interrompus  et  les  carillons  électriques,  etc.,  ne  pouvaient 
indiquer  que  dans  quelques  cas  si  l'électricité  soutirée  aux 
nuages  passait  dans  le  conducteur;  ils  n'étaient  guère  plus 
certains  que  l'observation  très-rare  des  feux  Saint-Elme. 


(1)  Voir  PocjgendorfJ's  Annakn  (1er  Physik  und  Chemie,  t.  LXIX. 
Année  1846.  Consulter  de  plus:  i°  Anleitung  zlir  Ausfiihrung  und  Visita- 
lion  de7'  Blitzahleiter  von  11'.  Eisenlofir,  Professor  in  Karlsruhe.  1848. 
Publié  par  Walsch  et  Vogel ,  à  Carlsruhe.  2-  Handbitch  des  angewandten 
Eleclricitdlslefire  von  Cari  Kulin,  Professor  und  Akademiker  in  MUn- 
chen.  1866. 

(2)  Voir  pour  les  détails  : 

1"  De  Fonvieille,  De  l' utilité  des  paratonnerres  et  de  lanécessité  de  les 
contrôler.  Paris,  Ghio,  1874. 

2»  P.  Francisque-Michel,  Contrôleur  automatique  de  refficacité  des 
paratonnerres.,  dans  le  journal  Les  Mondes ,  aumévo  du  30  avril  1874. 

3»  Traité  des  Paratonnerres,  par  A.  Calland,  ingénieur-électricien. 
Paris,  Ducher  et  C's  1874.  —  Projet  d' électromètre,  page  162.  Je  me  gar- 
derai bien  de  faire  la  moindre  observation  sur  le  projet  décrit.  Les  physi- 
ciens jugeront! 


(  436  ) 

Les  nouveaux  systèmes  de  vérification  par  le  courant  de  la 
pile,  par  les  étincelles  de  l'électricité  de  tension,  suscep- 
tibles de  soulever  quelques  objections,  comme  je  l'ai  dit 
dans  une  précédente  notice,  ne  doivent  pas  être  abandonnés; 
l'examen  de  l'état  de  conservation  parfaite  du  conducteur 
faite  de  visu  ne  peut  jamais  être  négligée,  et  il  me  paraît 
indispensable  qu'elle  soit  faite  avec  la  plus  grande  attention 
en  même  temps  que  l'examen  électrique. 

Admettons  donc  que  la  vérification  et  le  contrôle,  soit 
temporaires,  soit  permanents,  par  la  pile  peut  être  utile; 
mais  il  sutllit,  ce  me  semble,  de  faire  cet  examen  de  temps 
à  autre,  pourvu  qu'on  ail  de  suite  sous  la  main  tout  ce  qu'il 
faut  pour  le  faire,  comme  je  l'ai  prévu  pour  l'hôtel  de  ville 
de  Bruxelles,  qui  peut  encore  attendre  de  longues  années 
avant  qu'une  vérification  soit  nécessaire. 

Applications  du   ré-èlec(romèlre   aux  paralonnerres   et   aux 
parafoiidres  des  télégraphes. 

Je  crois  devoir  indiquer,  pour  le  contrôle  et  l'enregis- 
trement des  phénomènes  électriques  produits  par  des  étin- 
celles, le  ré-électomètre  de  Marianini  (1).  Je  l'applique  en 
permanence  pour  les  paratonnerres  et  pour  les  parafoudres 
des  télégraphes  électriques,  ou  commutateurs  à  paraton- 
nerres, établis  dans  chaque  bureau  télégraphique. 

La  présente  notice  n'a  d'autre  but  que  de  prendre  date 
pour  cette  application  et  de  montrer,  autant  qu'il  m'est 
permis  de  le  faire,  l'importance  de  la  question,  surtout  au 
point  de  vue  météorologique. 


(1)  Voir  Annales  de  Chimie  et  de  Plii/sique ,  ô'"  série,  t.  X,  X(,  XIII 
elXVI. 


(  ^^57  ) 

Quelques  mois  suffiront  pour  rappeler  cet  appareil  trop 
peu  appliqué,  trop  peu  apprécié  môme  pour  les  cours;  il 
permet  de  faire  à  l'amphithéâtre  des  expériences  très-saisis- 
santes et  très-démonstratives.  Sur  un  tube  de  carton  ou 
sur  un  tube  de  verre  on  enroule  un  (il  de  cuivre  formant 
ainsi  une  héWce  dcxtrorsum  ou  siinstrorsu7n;  on  place  au- 
dessus  de  l'hélice,  soit  en  la  suspendant  à  ditlérentes  hau- 
teurs par  un  cocon  de  soie  sans  torsion ,  une  aiguille 
aimantée  sensible;  je  préfère  la  placer  sur  un  axe  vertical 
quand  il  s'agit  de  se  servir  de  l'appareil  pour  l'usage  des 
paratonnerres  etdesparafoudres  télégraphiques;  dans  l'axe 
de  l'hélice  à  l'intérieur  du  tube  de  verre  ou  de  carton ,  on 
introduit  un  faisceau  de  fd  de  fer,  un  cylindre  de  fer,  ou, 
ce  qui  m'a  paru  préférable,  l'hélice  n'ayant  qu'environ  dix 
centimètres  de  longueur,  la  moitié  d'une  grosse  aiguille  à 
tricoter  en  acier;  ce  barreau  peut  être  recuit  ou  trempé, 
mais  il  doit  être  absolument  privé  de  magnétisme;  on  peut 
préparer  une  hélice  déjà  très-sensible  en  employant  pour 
la  fabriquer  un  ou  deux  mètres  de  fil  de  cuivre  de  O'"""  8  à 
0,5  de  diamètre ,  les  50  ou  100  spires  suffisent. 

L'aiguille  aimantée  se  plaçant  dans  le  plan  du  méridien 
magnétique,  on  dispose  l'appareil  de  telle  façon  que  l'hé- 
lice, au-dessus  de  laquelle  se  trouve  l'aiguille  aimantée, 
lui  soit  exactement  perpendiculaire;  l'une  des  pointes  de 
l'aiguille  dans  cette  position  peut  marquer  sa  déviation 
sur  un  demi-cadran  gradué  en  180"  parties  et  coïncide 
d'abord  avec  le  0°  qui  se  trouve  au  centre  du  cadran. 

Si  une  étincelle  d'une  machine  électrique  ordinaire, 
d'une  bouteille  de  Leyde,  ou  de  la  machine  de  Holtz,  armée 
ou  nom  de  ses  bouteilles  en  cascade,  passe  par  le  iil  de 
l'hélice,  elle  aimante  le  petit  cylindre  intérieur  fixe; 
celui-ci ,  réagissant  par  iniluence  sur  l'aiguille  aimantée 


(  458  ) 
mobile  dans  un  plan  horizonlai,  la  dévie  à  droile  ou  à 
gauche  du  0",  ce  qui  dépend  du  sens  d'enroulement  de 
riiélice  et  du  sens  dans  lequel  l'étincelle  a  marché  du 
pôle  positif  au  pôle  négatif;  les  petits  cylindres  d'acier 
trempé  ou  recuit  dont  je  me  suis  servi  ont  conservé  leur 
magnétisme  pendant  plusieurs  mois  (1). 


(1)  Il  m'est  arrivé  dans  les  expériences  faites  avec  la  niacliiiie  de  Hoilz. 
une  bizarrerie  que  je  décris  parce  qu'elle  pourrait  inirigiier  d'autres  expé- 
rinienlateurs. 

La  machine  de  Hoitz  non  armée  de  ses  bouteilles  donne ,  comme  on  le 
sait,  un  courant  parfaitement  appréciable  au  moyen  d'un  galvanomètre 
quelque  peu  sensible;  mais  en  attachant  les  extrémités  libres  du  fil  de 
l'hélice  aux  poupées  correspondant  aux  pôles  positif  et  négatif  de  la  ma- 
chine, et  en  l'activant,  je  me  suis  aperçu  que  le  barreau  ne  s'aimantait 
pas;  j'ai  fait  les  expériences  avec  divers  appareils  improvisés  et  avec  un 
ré-électrométre  construit  par  M.  Ruhmkorff;  cependant  le  courant  d'une 
faible  pile  transforme  l'aiguille  en  un  barreau  aimanté;  arme- 1 -on  la 
machine  de  Holtz  de  ses  deux  bouteilles  de  Leyde,  ou  d'une  grande  bat- 
terie, mais  sans  provoquer  d'étincelle,  il  arrive  parfois  qu'en  l'activant 
le  cylindre  s'aimante  et  un  ou  deux  tours  de  la  machine  dévient  l'aiguille 
aimantée  qui  se  fixe  sensiblement ,  à  quelques  degrés  prés,  dans  le  plan  de 
rhélice;  rarement  même  le  phénomène  ne  se  produit  pas. 

J'ai  constaté  que  raimanlation  du  cylindre  est  produite,  dans  ces  cas, 
par  de  irès-faibles  étincelles  qui  éclatent  du  côté  des  contacts  dans  la 
batterie  ou  sur  les  conducteurs  de  la  machine  elle-même ,  par  suite  d'un 
mauvais  contact  ou  de  l'action  du  vernis  recouvrant  les  conducteurs; 
en  effet,  parfois  j'ai  observé  que  l'aimantation  se  produisait  alors  que 
la  machine  de  Holtz  n'était  pas  armée  de  ses  bouteilles  de  Leyde;  c'est 
lorsque  l'on  retire  le  fil  de  l'hélice  de  l'une  des  bornes  avant  d'avoir  mis 
les  deux  sphères  des  conducteurs  positif  et  négatif  en  contact;  dans  ce 
cas,  au  moment  de  l'ouverture,  une  petite  étincelle  éclate  entre  le  fil 
et  la  poupée;  elle  sufiit  pour  communiquer  une  aimantation  au  cylindre 
d'acier. 

Il  faut  donc  absolument  qu'il  y  ail  i-tincclle  pour  que  le  barreau 
s'aimante. 

Peut-être  avec  de  très-grandes  machines  de  Hoitz  obtiendrait-on  l'ai- 
mantation par  le  courant  fermé. 


(  m  ) 

Je  n'insiste  pas  pour  le  moment  sur  les  détails  de  l'ap- 
pareil dont  il  faudra  faire  usage  dans  l'application,  c'est 
une  question  d'avenir  et  d'expériences  directes  à  faire.  Le 
nombre  de  spires,  le  diamètre  du  fd  de  cuivre,  la  distance 
du  point  de  suspension  de  l'aiguille  aimantée  sont  autant 
de  circonstances  qui  peuvent  faire  varier  la  sensibilité  de 
l'appareil;  on  est  maître  de  la  rendre  excessive.  "* 

Quant  aux  expériences  que  j'ai  faites  au  moyen  des 
machines  électriques  à  frottement ,  de  l'électropliore,  de 
la  bouteille  de  Leyde,  des  batteries  et  avec  l'excellente 
machine  de  Holtz,  construite  par  M.  Ruhmkorff,  elles  me 
permettent  de  supposer  que  des  conducteurs  destinés  à 
dériver  sur  un  paratonnerre  une  partie  du  courant  ou  de 
l'étincelle  foudroyante,  seront  amplement  suflîsanis  pour 
aimanter  le  petit  barreau  placé  dans  l'hélice  du  ré-élec- 
troniètre.  J'espère  être  à  même  de  faire  sous  peu  des  expé- 
riences directes  sur  un  paratonnerre  établi  d'après  mes 
vues  personnelles  au  cabinet  de  physique  de  l'École  de 
médecine  vétérinaire  de  Bruxelles. 

On  arriverait  à  des  données  sans  doute  plus  nom- 
breuses, plus  exactes  et  pour  tous  les  nuages  en  temps 
orageux,  si  l'on  avait  à  sa  disposition  un  appareil  souti- 
rant constamment  l'électricité  de  l'air.  J'aurai  l'honneur  de 
donner  le  projet  de  cet  appareil  dans  une  prochaine  com- 
munication. 

Cette  réserve  mise  de  côté,  je  nen  ai  aucune  à  faire  en 
ce  qui  regarde  les  parafoudres  des  bureaux  télégraphiques. 

Applications  du  rè-électromètre  aux  parafoudres  des  lélégra- 
phes.  Conséquences  au  point  de  vue  météorologicjuc. 

On  sait  que  les  iils  télégraphiques  sont  constamment 
frappés  par  la  foudre;  les  télégraphistes  ont  ordre  de  se 


(  4^0  ) 
mettre  sur  terre,  comme  on  dit,  pendant  les  orages;  la 
fondre  laisse  des  traces  plus  ou  moins  fortes  de  son  pas- 
sage dans  le  papier  dont  ces  appareils  sont  munis.  Les 
dimensions  plus  ou  moins  considérables  des  perforations 
dans  le  papier  peuvent  donner  des  indications  sur  l'inten- 
sité des  coups. 

Rien  ne  me  paraît  plus  simple  que  d'insérer  le  ré-élec- 
Iromètre  dans  le  parafoudre  ordinaire  ;  on  conserverait  la 
preuve  du  passage  de  la  foudre  et,  de  plus,  l'indication 
nette  de  sa  direction  ou  la  connaissance  des  signes  de  l'élec- 
tricité qui  peuvent  se  trouver  altei'nativement  dans  le  sol 
ou  dans  l'air  et  les  nuages.  Cette  donnée  est  indiscutable 
et  il  est  bien  prouvé  que  l'on  connaît  la  foudre  ascendante 
comme  la  foudre  descendante ,  celle-ci  paraissant  se  pro- 
duire bien  plus  souvent  que  la  première.  Autant  que  j'en 
puis  juger,  la  foudre  ascendante  exerce  des  ravages  et  pro- 
duit des  phénomènes  autres  que  la  foudre  descendante, 
comme  la  foudre  en  boule  que  l'on  voit  souvent  se  mouvoir 
de  bas  en  haut. 

Je  ne  sache  pas  que  les  appareils  dont  on  se  sert  actuel- 
lement dans  les  observatoires  pour  constater  la  direction 
et  l'intensité  des  courants  terrestres,  les  signes  de  l'élec- 
tricité de  l'air,  etc....  aient  donné  des  résultats  bien  nets 
sur  ce  qui  arrive  dans  les  dilTérenls  lieux  parcourus  par  le 
môme  orage,  et  j'ignore  si ,  sous  ce  rapport,  on  a  comparé 
les  observations  simultanées  ou  séparées  par  un  intervalle 
de  temps  déterminé  indiquant  la  rapidité  de  la  marche  des 
orages. 

Aujourd'hui  que  les  réseaux  télégraphiques  s'étendent 
sur  toute  l'Europe  savante,  communiquent  avec  beaucoup 
d'observatoires  et  rayonnent,  on  peut  le  dire,  sur  le  monde 
entier,  il  me  semblerait  qu'un  vaste  système  d'observations 
établi  au  moyen  du  ré-électromètre  de  Marianini  dans  tous 


Uullehn  .  2  .<■  sér  ^,}:i:\l  'Ul 


Pla/t 


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Ia  /lautcut-  totale,  à  la  pot/ite  en  mêim- 

h  haïUeca^  du  faCtn  dit  </rand  toU 

C  hauteur-  du  /Juin/  /'nappé 

l' F.léiiatioii     \    d  haiitair  du  chiruau  du  ij ru > ut  toit 

j    ('  hauteur  des  toits  des  J*  ne/^s 

\   f  haal^'ur  du  rheneau  des   tviCs  des  ue/'s- 


LéyeTide 

dit 
Plan 


S.  S     Sucnsties 
X.kk,  Autels 
D.D..  JJéçagei/ients 
E,   Cour  couverte 
T,T,'T"1""    Itdi/oii.r  des  l>ty-fes' 

des  ci/lifi-djvs  rf  dcr  çciiics- 

reiijidérér 

^    Riit?.   P. 


ZK''_    '/."  S'rirnMU- Toore'j  B'-'-. 


(  441  ) 

les  postes  télégraphiques  serait  de  nature  à  nous  éclairer 
sur  des  points  importants  se  rattachant  à  tous  les  phéno- 
mènes électriques  qui  se  passent  au-dessus  de  nos  têtes 
dans  les  nuages,  dans  nos  édifices  et,  sous  nos  pieds,  dans 
le  sol. 

A  mon  sens  il  sera  nécessaire  de  rechercher  toutes  les 
lois  pour  l'étincelle  de  tension  et  l'étincelle  de  la  foudie. 
L'esprit  de  la  science  positive  se  refuse,  malgré  toutes  les 
bizarreries  que  l'on  observe ,  à  faire  du  fluide  électrique, 
si  fluide  il  y  a,  un  être  erratique  ayant,  en  dehors  de  tout 
ce  que  nous  admettons  à  l'égard  de  l'immuabilité  des  lois 
naturelles,  des  caprices  inexplicables. 

Avouons  humblement  notre  ignorance  actuelle  et  con- 
statons l'importance  qu'il  y  aurait  à  avoir  plus  de  données 
exactes  sur  la  marche  des  étincelles  des  nuages  et  des 
coups  de  foudre. 

Qu'il  me  soit  permis  d'espérer  que  les  diverses  adminis- 
trations des  télégraphes  voudront  bien  venir  en  aide  à  la 
science,  d'autant  plus  qu'il  s'agit  d'une  disposition  simple 
et  peu  coûteuse  qui  n'entrave  absolument  en  rien  le  service 
ordinaire. 

En  effet ,  on  se  borne  à  observer  la  déviation  de  l'ai- 
guille aimantée,  pendant  V arrêt  obligatoire  de  la  transmis- 
sion des  dépêches;  il  suffit,  après  un  coup  de  foudre,  de 
remplacer  le  petit  barreau  d'acier  dans  l'intérieur  de 
l'hélice;  on  peut  le  recuire  pour  le  désaimanter  et  le  faire 
servir  indéfiniment. 

Je  serais  heureux  de  voir  la  Belgique  prendre  sur  le 
continent  l'initiative  de  ces  observations. 


2"^  SÉRIE,  TOME  xxxviir.  29 


(  442  ) 

Rectification  à  la  notice  de  37.  Melsens  sur  la  craie  de 

Ciply. 

A  la  page  52  du  Bulletin  de  la  séance  du  4  juilleH874 
on  a  oublié  de  citer  le  gisement  de  phosphate  de  chaux ,  au- 
dessous  de  la  ville  de  Louvain  ,  découvert  par  M  G.  Lam- 
bert, professeur  à  l'Université  de  cette  ville. 

Les  rapports  de  MM.  de  Koninck  et  d'Omalius,  ainsi  que 
la  note  de  M.  Lambert,  sont  imprimés  dans  le  tome  XXIX, 
pages  165  et  254,  séance  du  5  mars  1870. 


Sur  l'anhydride   hypo-azotique ;   par   M.  Louis   Henry, 
correspondant  de  l'Académie. 

On  a  déjà  signalé  précédemment  des  analogies  entre  le 
soi-disant  anhydride  hypo-azotique  Az^  O4  et  les  corps 
halogènes,  le  brome  notamment. 

La  vapeur  de  l'anhydride  hypo-azotique  ressemble  phy- 
siquement à  celle  du  brome;  sa  molécule,  comme  celle 
des  corps  halogènes,  paraît  être  atomiquement  double  et 
se  conb*'tuer  de  deux  groupements  Az  O2.  Au  point  de  vue 
chimique,  la  ressemblance  est  encore  plus  frappante  ou 
plutôt  plus  exacte  :  comme  les  corps  halogènes ,  l'anhy- 
dride hypo-azotique  est  susceptible  de  s'ajouter  aux  com- 
posés non  saturés;  de  plus,  sa  réaction  sur  les  alcalis 
libres  s'accomplit  dans  le  même  sens  que  celle  du  chlore 
et  du  brome. 

CI    Cl         K  Cl -t- (KO)  CI. 
KKO  H-  = 

AZjO^         K  Az  O2 -t- (K  0)  Az  O2. 


(  44-5  ) 

Les  corps  halogènes  s'expulsent  niutuellemenl  de  leurs 
combinaisons,  suivant  l'ordre  d'énergie  de  leurs  affinités 
respectives;  ceux  dont  le  poids  atomique  est  plus  faible 
chassent,  de  leurs  combinaisons  avec  les  métaux  et  les 
radicaux  positifs  en  général,  ceux  dont  le  poids  atomique 
est  plus  élevé.  On  se  rappelle  que  j'ai  rais  à  profit  l'ex- 
pulsion facile  de  l'iode  par  le  brome,  pour  obtenir  d.^s 
composés  mixtes  chloro-brômés,  en  parlant  de  composés 
chloro-iodés  si  faciles  à  obtenir  à  l'aide  du  chlorure 
d'iode  lo  Cl  (1). 

Il  m'a  paru  intéressant  d'examiner  l'action  de  l'anhy- 
dride hypo-azotique  sur  les  iodures  d'alcools.  Regardant 
cet  anhydride  Az^  O4  comme  constitué  de  deux  groupe- 
ments Az  O2,  je  m'attendais  à  obtenir  par  suite  du  rem- 
placement de  l'iode  par  Az  O2,  soit  des  éthers  nitreux, 
soit  peut-être  des  dérivés  nitrés  du  genre  de  ceux  dont 
M.  V.  Meyer  a  signalé  l'existence  et  entrepris  l'intéres- 
sante étude. 

Mes  prévisions  ne  se  sont  réalisées  qu'en  partie.  Sous 
l'action  de  l'anhydride  hypo-azotique,  l'iode  est  à  la  vérité 
expulsé  des  iodures  d'alcools,  mais  ceux-ci  se  transforment 
en  azotates  correspondants. 

C'est  l'iodure  d'amyle  que  j'ai  mis  d'abord  en  réaction 
et  c'est  ce  composé  qui  m'a  donné  les  résultats  les  plus 
nets.  L'azotite  d'amyle  (Cy  H,i)  Az  0^  bout  à  Oo"  ;  son 
isomère, Je  penlane  mononitré,  bout  vers  loO";  cet  iodure 
me  paraissait,  par  là,  le  plus  apte  à  me  faire  voir  de  suite 
la  nature  du  produit  de  sa  réaction  avec  l'anhydride  hypo- 
azotique. 

Dans  de  l'iodure  d'amyle,  bien  pur  et  convenablement 

(1)  Cumplc.s  rendus,  etc.,  juin  1870. 


(  UA-  ) 
refroidi,  j'ai  introduit  par  portions  successives  de  l'anhy- 
dride hypo-azolique,  en  quantité  beaucoup  plus  considé- 
rable que  la  quantité  théoriquement  nécessaire,  du  moins 
d'après  l'équation 

2  Cs  H„  lo  -f-  Az^  0,  =  I02  -+-  2  C5  Hi,  Az  0, 

équation  d'après  laquelle  la  réaction  me  paraissait  devoir 
se  produire,  La  liqueur  brunit  aussitôt  par  suite  de  la 
mise  en  liberté  de  l'iode;  après  quelques  heures,  la  sépa- 
ration de  celui-ci  est  complète,  et  il  s'en  est  formé  une 
cristallisation  abondante.  La  réaction  est  fort  paisible  et 
lente;  elle  ne  s'accompagne  pas  de  ce  dégagement  de  cha- 
leur intense  qui  caractérise  l'action  du  brome  sur  les 
iodures  d'alcools.  La  liqueur  séparée  de  l'iode  a  été  lavée 
à  la  soude  caustique,  tout  à  la  fois  pour  la  débarrasser  de 
l'iode  dissous  et  de  l'excès  d'anhydride  hypo-azotique  ;  c'est 
de  l'azotate  d'amyle  presque  pur. 

L'azotate  d'amyle  que  j'ai  ainsi  obtenu,  bouillait  sans 
décomposition  à  l^y-loO";  sa  densité,  à  l'état  liquide, 
était  1,059  à  1 1°;  sa  densité  de  vapeur  a  été  trouvée  égale 
à  4,67  (1);  la  densité  calculée  pour  (Cg  Hu)  Az  O3  est 
4,59  et  4,04  pour  (Cg  H,))  Az  O^. 

L'iodure  d'éthyle,  dans  les  mêmes  conditions,  a  été 
transformé  en  azotate  d'éthyle,  bouillant  vers  So^-SS". 

L'action  de  l'anhydride  hypo-azotique  sur  le  chloro- 


(I)  Voici  les  données  numériques  se  rapportant  à  cette  opération 

Substance  employée 0s'',0291 

Pression  barométrique 764  m. 

Mercure  soulevé 667  m. 

Volume  de  la  vapeur 51  ce,  3. 

Température 100°. 


(  445  ) 

iodure  tl'éthylène  Cl  CH.2  - — CFLi  lo  est  beaucoup  moins 
énergique;  néanmoins  l'iode  esi  expulsé. 

Dans  le  cours  de  ces  réactions,  on  constate,  dans  le  sein 
de  la  masse  liquide,  la  production  et  le  dégagement  de  bulles 
gazeuses  qui  sont  sans  doute  de  l'oxyde  azotique  Az  0. 
Ces  bulles,  entraînant  avec  elles  des  vapeurs  d'anhy- 
dride Az2  O4,  lequel  se  décompose,  comme  l'on  sait,  avec 
l'eau  en  donnant  en  même  temps  que  de  l'acide  azotique, 
de  l'oxyde  Az  0,  je  n'ai  pas  jugé  à  propos  de  m  occuper  d'en 
déterminer  la  nature  par  des  expériences  directes. 

Je  ferai  remarquer  encore  que  l'expulsion  de  l'iode  des 
iodures  sous  l'action  de  l'anhydride  hypo-azotique  est  non- 
seulement  lente,  mais  qu'elle  nécessite  pour  se  compléter 
une  quantité  considérable  de  cet  anhydride,  relativement 
à  la  quantité  théoriquement  nécessaire;  j'ai  déjà  signalé 
le  même  fait  à  propos  de  l'expulsion  de  l'iode  des  chloro- 
iodures  par  le  brome  (1);  le  radical  ou  groupement  AzOs, 
moins  fort  que  Br,  a  besoin,  plus  encore  que  celui-ci ,  d'être 
représenté  vis-à-vis  de  l'iode,  par  une  masse  considérable 
qui  compense  son  manque  d'énergie. 

Le  fait  assez  extraordinaire  et  pour  moi  fort  inattendu, 
que  je  viens  de  signaler,  me  paraît  de  nature  à  jeter 
quelque  jour  sur  la  structure  et  la  signification  chimique 
de  l'anhydride  hypo-azotique. 

Il  résulte  des  expériences  de  M.  H.  Sainte-Claire  Deville 
que  le  poids  moléculaire  réel  de  ce  composé,  à  la  tempé- 
rature ordinaire ,  est  celui  que  représente  la  formule 
Az.,  O4.  Il  résulte  également  des  déterminations  de  cet 
émineni  expérimentateur  que,  sous  l'action  de  la  chaleur, 
cette  molécule  se  dissocie;  à  mesure  que  la  température 
s'élève,  la  densité  de  vapeur  de  ce  composé  diminue; 


(1)  Voir  ma  notice  citée  plus  haut. 


(  446  ) 

vers  150",  elle  s'est  abaissée  jusqu'à  n'être  plus  que  1,58, 
ce  qui  correspond  à  un  poids  moléculaire  exprimé  par 
Az  0.2.  Par  le  refroidissement ,  la  molécule  Az2  O4  se 
reconstitue  par  la  recomhinaison  ou,  pour  ne  rien  pré- 
juger quant  à  sa  structure,  par  la  réaction  mutuelle  de 
ses  fragments  ou  produits  de  dissociation  Az  O^  (1). 

Se  basant  sur  ces  faits,  on  a  souvent  admis  que  l'anhy- 
dride azotique  est  formé  de  deux  groupements  nitrijle 
Az  O2,  préexistant  et  tout  formés  dans  sa  molécule  Az^Oi 
que  l'on  écrit  Az  O^  —  Az  O^;  on  a  assimilé  la  dissociation 
de  la  vapeur  de  ce  corps  à  celle  que  subit,  plus  difficile- 
ment à  la  vérité  et  à  une  température  beaucoup  plus 
élevée,  la  vapeur  du  soufre.  Je  ne  partage  pas  aujourd'hui 
cette  manière  de  voir. 

La  formation  des  azotates  par  l'action  de  l'anhydride 
hypo-azotique  sur  les  iodures  d'alcools  nous  oblige  à 
admettre  dans  ce  composé  le  groupement  AzOs,  pré- 
existant,.et  la  molécule  Az2  O4  doit  être  Az  0  (Az  O5) , 
c'est-à-dire  que  l'anhydride  hypo-azotique  est  de  l'azotate 
d'azotyle  (2),  ou  bien  l'anhydride  mixte  azoto-azotique 

A/;o   y 
Az  0,^^ 

ainsi  que  l'indique  du  reste  la  réaction  de  ce  corps  sur  les 
alcalis  caustiques, 

AzO    >0-<- -•<HO=A^O('^0)-+-  AzO,(KO)-f-H,0, 


(1)  D'après  la  densité  de  vapeur  de  l'anliydride  hypoazolique,  ou  voit 
que  ce  corps  est  déjà  dissocié  en  partie  à  la  température  d'ébullilion;  ce 
n'est  qu'à  l'état  solide  qu'existe  la  molécule  Az^O^  complètement  intacte. 

(2)  On  connaît  encore  d'autres  combinaisons  inorganiques  du  radical 
Az  0,  notamment  des  combinaisons  sulfuriques  (Az  0)  H  S  0< ,  (AzO)^ 
Sa  0,,  etc.,  et  un  chlorure  (Az  0)  Cl. 


(  447  ) 

réaction  qui,  dans  son  mécanisme  et  son  résultat,  me 
paraît  identique  à  celle  des  anhydrides  mixtes  orga- 
niques 

C'  h'  0  >  ^  "*-  2KH0  =  C,  H,  0  (KO)  -t-  C,  H^  0  (OK)  -+-  H,  0. 

S'il  en  est  ainsi,  sous  l'action  du  pentachlorure  de  phts- 
phore  Ph  CIg,  l'anhydride  hypo-azotique  doit  donner  simul- 
tanément, à  la  façon  des  anhydrides  mixtes,  les  deux 
chlorures  (Az  0)  Cl  et  (AzO^)  Cl,  en  même  temps  que  de 
l'oxychlorure  de  phosphore;  c'est  ce  que  je  me  propose  de 
véritier  expérimentalement. 

Quant  à  la  structure  intime  des  groupements  AzO  et 
Az  O3,  il  n'est  pas  possible  d'émettre,  aujourd'hui  que  l'on 
est  si  peu  avancé,  sous  le  rapport  de  leur  constitution, 
dans  la  connaissance  des  composés  oxygénés  de  l'azote, 
autre  chose  que  des  conjectures.  La  formule  de  structure 
à  attribuer  à  l'hypo-azotide  Azg  O4  doit  varier  suivant  l'idée 
que  l'on  se  fait  de  l'atomicité  de  l'azote.  L'azote  est  certai- 
nement un  élément  penta-atoniique  au  maximum;  il  est 
non  moins  certain  d'autre  part  que  cet  élément,  dans  plu- 
sieurs de  ses  combinaisons,  est  un  élément  triatomique  ou 
bien  en  joue  le  rôle. 

Il  me  paraît  fort  difficile  d'admettre  que  les  deux  atomes 
d'azote  dans  l'anhydride  (AzO)-(Az03)  sont  penla-ato- 
miques. 

Si  l'on  admet  que  tous  les  deux  sont  triatomiques ,  on 
arrive  à  la  formule  de  structure  suivante  : 

(0"  =  Az"' — )  (0  —  0  —  Az  =  0). 

Si  l'on  admet,  au  contraire,  que  l'un  des  atomes  d'azote 
est  triatomique,  celui  du  groupement  AzO  et  l'autre  penta- 


(  448  ) 
atomique,  celui  du  groupement  Az  O3,  la  formule  suivante 
doit  être  admise 

(0"  =  Az"'-)-0-(-Az<^«). 

L'une  et  l'autre  de  ces  formules  rend  également  bien 
compte  du  dédoublement  de  Ai^  O4  en  Az  O2  sous  l'action 
de  la  chaleur. 


Sur  la  production  des  hydrocarbures  acétyléniques  et  la 
classification  des  hydrocarbures  tétraatomiques  en  gé- 
néral; par  M.  Louis  Henry,  correspondant  de  l'Aca- 
démie. 

A  l'acétylène  C^  H^  peuvent  être  rattachés,  théorique- 
ment du  moins,  deux  groupes  d'hydrocarbures  CnH2„_2i 
tétraatomiques,  parla  substitution  à  l'hydrogène  de  radi- 
caux C„H2n+,  : 

1°  Dans  l'un  de  ces  groupes  se  rangent  des  hydrocar- 
bures de  la  formule  générale 

Cn   H  Jn  +  1 
I 

c 

III 

c 

I 

Cn  H2a4-  1 

dérivant  de  l'acétylène  par  le  remplacement  total  de  l'hy- 
drogène par  des  radicaux  hydrocarbonés  C  H._,„^.i. 

Ces  hydrocarbures  tétravalents  ont  perdu  le  caractère 
acétylénique. 


(  449  ) 

Ce  groupe  peut  lui-même  se  subdiviser  en  deux  séries 
distinctes,  suivant  que  les  radicaux  substituants  CnH^^^., 
sont  identiques  ou  différents;  l'une  de  ces  séries  renferme 
des  hydrocarbures  symétriques  ,  de  la  formule 

I 

III 

c 

I 

Cn    H2n+1 

l'autre  des  hydrocarbures  dissymétriques  de  la  formule 

Cn    Hjn  +  I 
I 

C 

III 

c 

I 

Cn'  H-2n'  +  i 

2°  Dans  un  second  groupe,  mieux  connu,  se  rangent  des 
hydrocarbures  de  la  formule  générale 

Cn  Hjn  +  l 

I 

C 

III 

CH 

dérivant  de  l'acétylène  par  la  substitution  d'un  radical 
CnHjn+i  à  un  atome  d'hydrogène  seulement. 

Ces  hydrocarbures,  ayant  conservé  un  chaînon  ^CH, 
sont  à  la  fois  tétravalents  et  acétyléniques. 

Le  type  de  ces  hydrocarbures  est,  dans  les  combinaisons 
grasses,  l'allylène  C3  H4  ou  méthyl-acétylène 

CH3 

I 
c 

III 

CH 


(  4^0  ) 

et  dans  les  combinaisons  aromatiques  le  phényl-acélylène 
CgHs  — C=CH. 

Je  me  suis  déjà  occupé,  dans  une  précédente  notice  (1) 
de  ces  hydrocarbures  acétyléniques,  au  point  de  vue  de 
leur  production  générale;  j'ai  signalé  les  aldéhydes  de  la 
formule  C„H2„+,  —  CH^  —  CHO,  ou  plus  généralement 
CnHj — CH^ — CHO,  comme  étant  les  composés  les  plus 
propres  à  fournir  ces  hydrocarbures,  tout  au  moins  comme 
devant  les  fournir  à  coup  sûr. 

Le  rapprochement  des  formules  suivantes 

CHO  CH 

I  m 

CH  H^  CH 

Aldéhyde  acétylique         Acétylène 

indique  les  relations  étroites  qui  existent  entre  l'aldéhyde 
acétique  et  l'acétylène.  Les  aldéhydes  de  la  formule  géné- 
rale CnH:, — CH^  —  CHO  qui  sont  les  dérivés  mono-subsli- 
tués  de  l'aldéhyde  acétique,  doivent  donner,  dans  les 
mêmes  conditions  où  celle-ci  donne  l'acétylène  lui-même, 
les  dérivés  mono-substitués  Cn  Hx  —  C^CH  correspon- 
dants à  l'acétylène 

CH  CHO  CHO  CH 

III  I  I  III 

CH  CHH,  CH^  C      "^ 

Acétylène  I  | 

C„Hx  C„Hx 

On  sait  par  quelle  série  de  réactions  on  parvient  à 
éliminer  d'une  aldéhyde  les  éléments  d'une  molécule  d'eau, 
aux  dépens  des  deux  chaînons  voisins  CHO  et  CH2  (2).  Je 
crois  inutile  de  revenir  sur  ce  point. 

(1)  Bulletins  de  V Académie  royale  de  Belgique,  2*=  série,  t.  XXXVII, 
page  512. 

(2)  Voir  ma  notice  indiquée  ci-dessus. 


(  4ai  ) 

J'ai  déjà  fait  connaître  précédemment  la  transforma- 
tion ralisée  par  M.  G.  Bruylants,  de  Valdéhyde-valérique 
C5H10O  ou  isopropijl-acétique 

eu,  CH3 
V 

CH 

I  V 

CH, 
I 
CHO 

en  isopropyl-acétylène 

CHj  CH, 

V   " 

CH 

I 
C 

III 
CH. 

Je  viens  aujourd'hui  faire  connaître  de  nouveaux  cas  d'ap- 
plication de  celte  méthode,  qui  constatent  que  celle-ci  peut 
être  regardée  comme  une  méthode  générale. 

A  ma  demande,  M.  Reboul,  le  professeur  si  distingué  de 
la  Faculté  des  sciences  de  Besançon,  a  bien  voulu  réaliser 
la  transformation  de  l'aldéhyde  propionique  CH5 — CH., — 
CHO  en  alhjlène  CH5 — C=CH.  Il  a  chaufTé  pendant  quel- 
ques heures  en  tube  scellé,  vers  150°,  avec  une  solution 
alcoolique  de  potasse  caustique,  \e  chlorure  de  propylidène 
CH3— CH2  — CHCU,  produit  de  l'action  de  Ph  Cly  sur 
l'aldéhyde  propionique.  Le  chloro-brômure  correspondant 
CH3 — CH.2 — CHCl  Br  s'est  comporté  de  la  même  ma- 
nière. 

En  1867,  M.  E.  Rubien,  élève  de  M.  Limpricht,  à  Greis- 
wald,a  transformé,  par  le  même  procédé,  l'aldéhyde  œnan- 
thylique  CyKi^O  en  un  hydrocarbure  CyHi-i  auquel  il  a 


(  452  ) 
donné  le  nom  assez  impropre,  d'après  moi,  d'œnanthyli- 
dène. 

Les  indications  que  donne  M.  Rubien  sur  cet  hydro- 
carbure sont  fort  succinctes;  j'ai  engagé  M.  G.  Bruylanls  à 
le  refaire  et  à  en  reprendre  l'étude.  Il  résulte  de  ses 
recherches  que  Vœnanthylidène  CyHj^  constitue  aussi  un 
hydrocarbure  acétylénique;  il  donne  avec  les  solutions  cui- 
vreuses et  argentiques,  dans  l'ammoniaque,  les  précipités 
caractéristiques  de  l'allylène  et  des  composés  mono-acéty- 
léniques  en  général. 

D'après  M.  C.  Schorleramer,  l'acide  œnanthylique,  dé- 
rivé de  l'aldéhyde  du  même  nom,  serait  l'acide  heptylique 
normal;  s'il  en  est  ainsi,  l'œnanthylidène  C7H12  constitue 
Vamyl-acétijlène  normal 

CH,  -  CH,  -  CH,  —  CH,  —  CH,  —  c  =  CH. 

Il  résulte  d'une  manière  positive  des  informations  que 
j'ai  prises,  que  le  crotomjlène  C/^Uq  de  M.  Caventou  n'ap- 
partient pas  au  groupe  de  l'acétylène;  M.  Bruylants  s'occupe 
en  ce  moment  de  la  préparation  d'un  crotonylène  acétylé- 
nique CH3  —  CH.^  —  C=  CH  ou  éthyl-acétylène,  à  l'aide  de 
l'aldéhyde  butyrique  normale  CH3 —  CH2  —  CH^  —  CHO. 

Je  terminerai  cette  notice  par  un  essai  succinct  de  clas- 
sification des  hydrocarbures  tétraatomiques  en  général 
C„H,„_2.  Le  nombre  de  ces  hydrocarbures  connus,  assez 
restreint  jusqu'ici,  paraît  devoir  s'accroître  assez  rapide- 
ment; il  me  paraît  désirable  d'établir  de  l'ordre  dans  ce 
groupe  de  composés  théoriquement  si  nombreux  et  si  in- 
téressants au  point  de  vue  de  l'isomérie. 

Remarquons  d'abord  que  quels  que  soient  les  composés 
dont  ils  dérivent  en  réalité,  les  hydrocarbures  tétraatomi- 


(  453  ) 
ques  C„H2„_2  correspondent  aux  hydrocarbures  saturés 
C„H2„+j,  moins  quatre  atomes  ou  deux  molécules  d'hydro- 
gène. Rappelons  ensuite  que  les  hydrocarbures  saturés  en 
général  C^U^^^^  résultent  finalement,  quelle  qu'en  soit  la 
structure,  delà  combinaison  des  radicaux  CHg,  CHg,  CH 
et  C,  restes  ou  fragments  de  la  molécule  du  méthane  CH4. 
Admettons  enfin  que  l'élimination  de  H^—  ou  de  tout 
autre  système  moléculaire  ou  atomique  équivalent  X'2, 
X'Y'  ou  Z"—  ne  peut  se  faire,  en  général,  qu'aux  dépens 
de  deux  chaînons  hydrocarbonés  voisins,  c'est-à-dire,  d'une 
manière  plus  précise,  qu'une  soudure  nouvelle  entre  atomes 
de  carbone,  à  la  suite  d'une  élimination  d'éléments  atomi- 
ques ,  ne  peut  se  faire  ou  ne  se  fait  ordinairement  qu'entre 
atomes  de  carbone  déjà  soudés  antérieurement  (!). 

Partant  de  là,  nous  pouvons  établir  des  groupes  dis- 
tincts dans  les  hycrocarbures  tétravalents  Co  H,„_,.  Consi- 
dérons d'abord  le  nombre  des  chaînons  hydrocarbonés 
entre  lesquels  s'éliminent  les  quatre  atomes  H4  ou  les  deux 
molécules  (HH)^  d'hydrogène.  Cette  élimination  de  (HH)^ 
peut  être  faite ,  dans  la  réalité,  entre  deux,  trois  ou  quatre 
chaînons  hydrocarbonés. 

De  là  trois  grands  groupes  d'hydrocarbures  C„  H^,,^  : 
1°  Premier  GROUPE.  Élimination  de  (HH)2  entre  deux 
chaînons  hydrocarbonés,  déterminant  un  double  anneau 
carboné  à  soudure  triple  — C=C  — . 


(1)  L'action  des  alcalis  caustiques,  en  solution  alcoolique,  sur  Visobu- 
tylène  monobrômé.  Jj^^  >C  =CH  Brest  un  exemple  remarquable  de  ce 
fait.  On  obtient  comme  produit  de  celte  réaction,  non  un  hydrocarbure 
C,H,,  mais  un  dérivé  élhyloxylé  ^[j^  >  c  =  CH  (0  a  H,)  correspondant 
au  composé  brômé.  (Voir  Butlerow ,  Mémoires  de  l'Académie  de  S'-Péters- 
bourg,  VlP  série,  tome  XV,  n»  7).—  Je  ferai  connaître  prochainement  de 
nouvelles  réactions  à  l'appui  de  cette  proposition  générale. 


(  454  ) 

L'acétylène  C^U^  est  le  plus  simple  et  peut  être  regardé 
comme  le  type  de  cette  classe  d'hydrocarbures  létra-ato- 
miques. 


Gif,        /j^N  GH 


GH3    \^y^     GH 

Nous  donnerons  à  ces  hydrocarbures  à  iriple  soudure  le 
nom  d'hydrocarbures  acétyléniques  en  général. 

2"  Deuxième  groupe.  Élimination  de  (HH)^  aux  dépens 
de  t7~ois  chaînons  hydrocarbonés  voisins,  déterminant  une 
chaîne  Iricarbonée 

>C  =  G  =  C< 

à  double  soudure,  renfermant  un  atome  de  carbone  médian, 
dépourvu  d'hydrogène. 

Tel  est  vraisemblablement  le  valérylène  C^  Hg  obtenu  par 
M.Reboul,  en  partant  de  l'amylène  ordinaire. 

CHs  CHs  GH3  GH. 

GH  G 

I  il 

CHj  C 

I  II 

GH3  GHg 

5"  Troisième  groupe.  Élimination  de  (HHja  entre  quatre 
chaînons  hydrocarbonés,  c'est-à-dire  entre  deux  paires  de 
chaînons  hydrocarbonés  distinctes. 

Ces  hydrocarbures  tétra-atomiques  sont  doublement  bia- 
lomiques. 

On  peut  les  répartir  en  deux  sous-groupes,  suivant  la 
position  spéciale,  dans  l'hydrocarbure  primitif,  des  deux 
paires  de  chaînons  hydrocarbonés  aux  dépens  desquelles  a 
été  faite  l'élimination  de  (HHjg  : 

a)  Premier  sous-groupe.  Ces  deux  paires  de  chaînons 
hydrocarbonés  sont  intimement,  c'est-à-dire  immédiate- 


(  455  ) 

ment  unies  l'une  à  l'autre,  sans  intermédiaire,  de  façon 
à  constituer  une  chaîne  tétracarbonée  non  interrompue 

—  c=c— c=c— . 

Tel  serait  un  crotonylène  C4  Hg ,  répondant  à  la  formule  : 

CH, 

II 

CH  V 

I 
CH 

II 
CHg 

b)  Deuxième  sous-groupe.  Les  deux  paires  de  chaînons 
hydrocarbonés  qui  ont  subi  la  déshydrogénation  sont  sépa- 
rées l'une  de  l'autre  par  d'autres  chaînons  hydrocarbonés. 

Tel  est  vraisemblablement  le  diallyle  CgHiQ  ou 

CHj  =  CH  —  CH2  —  CH,  —  CH  =  CH, 

à  moins  que,  lors  de  sa  formation  par  l'action  des  métaux 
sur  l'iodure  d'allyle,  il  ne  se  produise  à  l'intérieur  du  radical 
allyle  (C5H5)  un  mouvement  atomique. 

Ces  hydrocarbures  représentent  en  général  deux  molé- 
cules distinctes  d'hydrocarbures  bi-valenls  CnH^n,  soudées 
l'une  à  l'autre,  par  le  départ  de  H^;  suivant  que  la  soudure 
s'opère  entre  des  chaînons  incomplets  ou  complets,  non 
saturés  ou  saturés,  c'est-à-dire  qui  ont  déjà  subi  ou  qui  n'ont 
pas  subi  au  préalable  une  déshydrogénation,  il  en  résulte 
des  composés  du  premier  ou  du  second  de  ces  sous- 
groupes.  En  voici  des  exemples  : 

Diéthylène  C^H, 

CH„  =  CH,  CH,  =  CH, 

-H,. 

CH,  =  CH  —  CH  =  CH,. 

Diallyle  CgH.o. 

CH,  =  CH  -  CH,Io  CH,Io  —  CH  =  CH, 

-lo,. 

CH,=  CH  — CH, -CH,  — CH  =  CH,. 


(  456  ) 

Les  chaînons  hydrocarbonés  aux  dépens  desquels  s'opère 
inahslracto  la  déshydrogénation,  sont  CH3,CH2  et  CH; 
si  nous  tenons  compte  de  la  nature  spéciale  de  ces  chaî- 
nons divers,  nous  pouvons  établir  dans  chacun  de  ces  trois 
groupes  généraux  des  subdivisions  dont  plusieurs  offrent 
un  véritable  intérêt. 

Premier  groupe.  Hydrocarbures  à  triple  soudure 
—  C^C — .  Trois  sections  distinctes  : 

a)  Élimination  de  (HH)2  aux  dépens  de  deux  groupe- 
ments CH3. 

Un  seul  produit  de  cette  nature  est  possible,  c'est  V acé- 
tylène CH^CH. 

CH,       /ti\  CH 


CH3      VHy2        (iH. 

6)  Élimination  de  (HH)^  aux  dépens  de  deux  groupe- 
ments CH2. 

Exemple  :  l'acétylène   diméthylé  C4  Hg  de  M.  Pfan- 

kuch  (1). 

CHj  -  CHj  —  CH^  -  CHg 

-  (H,         Hj) 
CH,  — C  =  C  — CH^. 


(1)  Un  hydrocarbure  de  cette  nature  résulterait  probablement  de  l'ac- 

CH     N^ 

lion  du  zinc-méthyle  ^^  _>Zn  sur  i'allylène  mono-iodé  CjHjIo, de  M.  Lie- 
bermann. 

2  (CH3  G  =  Cîo)  -f-  Zn  <  ^{{^  =  2(CH3  -  C  =  C  -  CH3)  -4-  Zn  lo,. 

Je  me  réserve  de  vérifier  le  fait  expérimentalement. 

M.  Pfankuch  prétend  avoir  obtenu  un  hydrocarbure  de  la  formule  C4H6, 
dans  la  distillation  d'un  mélange  d'acétate  calcique  et  de  soufre.  Si  le  fait 
est  vrai ,  cet  hydrocarbure  C^jie  doit  être  Vacétijlène  biméthylé. 

CW       cr\r\  CH-  —  C 

CH:~CoS>Ca-i-S  =  CaSO,-t-  ||| 

CH. — G 


(  4S7  } 
c)  Élimination  de  (HH)2  aux  dépens  d'un  groupement 
CH3  et  d'un  groupement  CHg  (1). 

CHj  —  CHj  —  CHj. 

-  (HH), 
CH3  — C  =  CH. 

Les  hydrocarbures  de  ces  deux  dernières  sections  repré- 
sentent les  dérivés  bi  et  mono-substitués  de  l'acétylène 
CH=CH. 

CH  CH  C  — (C„Hx) 

III  III     '  III 

CH  C  —  (CnHx)  C  -  (C„H  J. 

Les  dérivés  hi-substilués  de  la  seconde  section  peuvent 
eux-mêmes  être  de  deux  sortes,  suivant  que  les  radicaux 
substituants  CnH^  sont  identiques  ou  non;  les  premiers 

c  —  CqHx 

III   ^ 

sont  symétriques;  les  seconds 

c  -  (CnHx) 

III 

C  -  (CnHx)' 

sont  dissymétriques, àe  part  et  d'autre  du  noyau  — C^C — . 
Deuxième  groupe.  Hydrocarbures  à  double  soudure  ren- 
fermant le  système  HxC=C=CHx;  l'existence  d'un  chaî- 
non médian  =C=,  non  hydrogéné  constitue  le  caractère 
fondamental  de  ces  produits,  quant  à  leur  structure.  Ce 
chaînon  médian  =  C  =  correspond  à  un  chaînon  hydro- 
carboné  CH^  de  l'hydrocarbure   saturé  primitif;  suivant 


(t)  J'ai  signalé  les  aldéhydes  de  la  formule  générale  CnHx  —  CH,  -  CHO 
comme  étant  les  composés  les  plus  aptes  à  servir  de  point  de  départ  pour 
ces  hydrocarbures  en  général. 

2""=  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  30 


(488  ) 
que  les  chaînons  hydrocarbonés,  soudés  à  ce  chaînon  CH^ 
et  subissant,  de  part  et  d'autre ,  en  même  temps  la  déshy- 
drogénation ,  sont  identiques  ou  différents,  on  obtient  des 
hydrocarbures  tétravaients  symétriques  dans  le  premier 
cas,  dissymétriques  dans  le  second. 

Première  section,  fiydrocarbures  symétriques.  II  peut  en 
exister  de  trois  catégories  distinctes  suivant  que  ces  chaî- 
nons collatéraux  sont  deux  CH-,  deux  CH2  ou  finalement 
deux  CH. 

Voici  des  exemples  : 

a) CH3  -  CH^  -  CHj 

d'où 

CHj  =  C  =  CHj. 
6) CH5  -  CHj  -  CH5,  -  CH^  -  GH3 

d'où 

CH3-CH  =  C  =  CH-CH3. 

d'où 

Remarquons  que  ces  deux  dernières  sortes  d'hydrocar- 
bures ne  sont  au  fond  que  les  dérivés  mono  ou  6/-substi- 
tués  de  l'hydrocarbure  primitif  tricarboné  CH2  =  C=CH2 
le  plus  simple  du  groupe. 


(1)  Je  m'occupe  en  ce  moment  de  la  préparation  d'un  hydrocarbure 
(>,H,.j répondant  à  celte  formule  déstructure.  J'espère  l'obtenir  en  partant 
de  racctone  isobutyrique. 

gîj3>CH-C0-CH<^J^ 


(  459  ) 

Deuxième  section.  Hydrocarbures  dissymétriques.  On 
peut  en  établir  diverses  catégories  suivant  la  nature  spé- 
ciale et  diverse  des  deux  chaînons  Iiydrocarbonés  collaté- 
raux; ceux-ci  peuvent  être,  en  effet,  CH5  et  CH-j,  CH;  et 
CH,  CH2  et  CH. 

Citons  quelques  exemples  :  ^ 

a) CH3  -  CHj  —  en,  —  CHs 

d'où 

CH2  =  C  =  CH  — CHs. 
b) CH3  -  CH,  -  CH  <  ^{J^ 

CH2  =  G  =  C<;  ^[[s  (Valérylène  de  M.  Reboul.) 
c) GH3- CH,  -  CHj- CH<^  ^Js 


d'où 


CH3-CH  =  C  =  C<  f^Jj^ 


Troisième  groupe.  Hydrocarbures  deux  fois  bivalents. 
Nous  avons  rangé  ces  hydrocarbures  en  deux  sous- 
groupes,  suivant  que  les  quatre  chaînons  hydrocarbonés 
aux  dépens  desquels  a  été  éliminé  Phydrogène,  constituent 
un  seul  tout  ou  deux  masses  distinctes  séparées  par  d'au- 
tres atomes  de  carbone. 

On  pourrait  diviser  chacun  de  ces  sous-groupes  en  sec- 
tions nombreuses  suivant  la  nature  spéciale  des  chaînons 
hydrocarbonés  déshydrogénés  CH5,  CH^  ou  CH. 

Je  crois  inutile  de  m'arrèter  à  établir  ces  diverses  sec- 
tions. Ce  qui  me  paraît  plus  important,  c'est  la  distinction 
que  l'on  peut  faire,  dans  ces  hydrocarbures  en  général, 
d'hydrocarbures  symétriques  et  d'hydrocarbures  dissynié- 


(  460  ) 

triques,  suivant  qu'ils  représentent  deux  fragments  d'hy- 
drocarbures bivalents,  identiques  ou  non. 

Voici  quelques  exemples:  a)  Hydrocarbures  sî/mé/nçMes, 

Crotonylène  de  M.  Henninger  (1  ). 

CHj 

II 
CH 

I 
CH 

II 

Diallyle  CgHio  ordinaire. 
(CH,  =  CH  —  CHj)  —  (CH,  —  CH  =  CH^) 

CH,  =  CH  -  rCH,'\  -  CH  =  CH,. 


en  général 


(™')r 

Pinaconèiie  CgHjo  (2). 

GH2-Vc_c^CH. 
CH.//  \  CH3. 

6)  Hydrocarbures  dissymétriques. 

Valérylène  hypotliélique  C^Hg. 

CH,  =  C-CH  =  CHj 

i 

eu, 

Hexoj'Ièue  hypothétique  CgH^g 
CH,  —  CH  =  CH  -  CH,  -  CH  =  CH, 


(1)  Produit  de  la  réduction  totale  de  l'érythrite  par  l'acide  formique. 

(2)  J'appelle  ainsi  l'hydrocarbure  tétra-atomique  CgH,;,,  susceptible 
d'être  dérivé  de  la  pinacone  ordinaire 

(«o)c<cl!:. 

Voir  l'action  de  Ph4ClsSur  ce  composé  par  MM.  Friedel  et  Silva.  {Bulle- 
tins de  la  Socié lé  chimique  de  Paris,  t.  XIX,  p.  98.) 


(  461  ) 

J'arrive  aux  propriétés  de  ces  hydrocarbures,  propriétés 
au  sujet  desquelles  il  y  a  quelques  remarques  importantes 
à  faire,  au  point  de  vue  général. 

Je  rappellerai  d'abord  que  tous  ceux  de  ces  hydrocar- 
bures qui  renferment  un  chaînon  terminal  ^CH  à  triple 
soudure,  présentent  le  caractère  acé;^/é»ï(/î<e;  inutile  de 
s'arrêter  à  définir  cette  expression  dont  la  valeur  est  par- 
faitement connue;  ces  hydrocarbures  sont  l'acétylène  lui- 
même  CH^CH  et  ses  dérivés  mono-substitués  en  général 

Quant  à  leur  valeur  d'action  chimique,  tous  ces  hydro- 
carbures C„H2n_2  sont  au  maximum  télt^a-afomiques,  3i\ns\ 
que  leur  formule  et  leur  mode  de  production  l'indiquent; 
tous  sont  donc  susceptibles  à  ce  titre  de  déterminer  des 
lélrabrômures  (CnH2Q+2)  Br4;  ces  bromures  sont  les  com- 
posés d'addition  qui  se  forment  d'ordinaire  le  plus  aisément 
et  cristallisent  le  plus  facilement. 

La  nature  de  ces  produits  d'addition  ordinairement,  envi- 
sagée quant  à  la  position  spéciale  des  groupements  ou 
radicaux  additionnels  X  dans  les  divers  chaînons  carbonés 
du  composé,  est  en  rapport  avec  la  nature  même  de 
l'hydrocarbure,  ces  radicaux  additionnels  prenant  la  place 
de  l'hydrogène  préalablement  éliminé. 

Voici  quelques  exemples  qui  préciseront  de  suite  ma 
pensée  : 


Acétylène. 

Composé  bi-aldéhydique. 

CH 

CH  CI5, 

1 
CHCI, 

Allyléne. 

Comp 

3sé  acétonique  el  aldéhydique 

CH3 

Clfs 

1 

1 
C 

CBr, 

1 
CHBr- 

(  462  ) 

Pinacolène  Composé  bi -primaire  et  bi-lertiaire. 

CH,  CH,  CH,Ci  CH3 

C  CCI 

I  I 

c  CCI 

CH.CHj  CH.ClCFf, 

Composé  acétonique  et  biterliaire. 
CHjCHj  CHj  CHj 

C  CBr 

Il  I 

C  CBrj 

Il  I 

C  CBr 

/\  /\ 

CH3  CHs  CH3  CHj 

Je  liens  à  faire  remarquer  que  parmi  ces  hydrocarbures 
il  en  est  qui  doivent  être  exclusivement  tétra-alomiques  et 
qui,  en  cette  qualité,  ne  doivent  être  susceptibles  que  de 
déterminer  des  composés  d'addition  parfaitement  saturés 
de  la  formule  générale  (C„H2„_2)  X'4.  Ces  hydrocarbures 
doivent  être  : 

1°  Ceux  du  second  groupe  général,  qui  sont ,  dans  leur 
molécule,  parfaitement  symétriques  de  part  et  d'autre  du 
chaînon  médian  carboné  =  C=. 

C'est  le  cas  pour  C3H4  de  la  formule 

CH, 

Il  ' 
c 

II 

CH, 

et  ses  dérivés  mono  ou  6ï-substitués,  tels  que 

CHj  \  p — p  —  p^  CHj 
CH,  ^^—^  —  ^<^  CH,. 


(  465  ) 
* 
2°  Ceux  du   troisième  groupe  ou   les  hydrocarbures 

doublement  biatomiques  dont  la  molécule  est  aussi  parfai- 
tement symétrique,  et  qui  renferment  deux  systèmes  de 
chaînons  hydrocarbonés  à  double  soudure  — CHx^CHy 
parfaitement  identiques. 
C'est  le  cas  pour  le  diallyle 

C3H5< 

qui  ne  forme  en  effet  qu'un  tétrabrômure  et  non  un  bibrô- 
mure;  ce  sera  certainement  aussi  le  cas  pour  le  pinaconène 

CH,X  \CH3. 

La  raison  de  ce  fait  est  évidente  :  ces  hydrocarbures 
renfermant  en  définitive  deux  systèmes  biatomiques  iden- 
tiques, il  n'y  a  pas* de  raison  pour  qu'un  seul  de  ces  sys- 
tèmes subisse,  à  l'exclusion  de  l'autre,  l'action  d'un  corps 
donné,  susceptible  de  s'y  ajouter. 

A  pan  ces  hydrocarbures,  tous  les  autres  sont  ou  me 
paraissent  de  voir  être  simultanément  bi  et  tétra-atomi- 
qiies,  c'est-à-dire  pouvoir  se  combiner  avec  deux  ou  avec 
quatre  unités  d'action  chimique.  Ce  sont  : 

1"  d'abord  les  hydrocarbures  acétyléniques  renfermant 
le  système  C^C. 

La  détente  entre  ces  deux  atomes  de  carbone  peut  se 
faire  par  une  seule  unité  d'action  chimique,  lors  de  la  fixa- 
tion de  X'2,  soit  par  deux  unités  d'action  par  la  fixation 
de  X'4.  Aussi  connaît-on  pour  ces  produits  deux  ordres  de 
composés  d'addition. 

2"  En  général  les  hydrocarbures  du  second  groupe  dont 
la  molécule  n'est  point  parfaitement  symétrique  de  part  et 


(  464  ) 

d'autre  du  chaînon  médian  =C=  et  ceux  du  troisième 
groupe  dont  la  molécule  ne  renferme  pas  non  plus  deux 
systèmes  bi-atomiques  identiques. 

Tels  seraient,  par  exemple,  les  hydrocarbures  : 


CH3CH, 

CHg 

CH,  CH, 

c 

II 

c 

1 
CH, 

1 

C 

i 

1 
CH 

1 
CH 

II 

II 
G 

II 
CH, 

II 
CH, 

Ces  hydrocarbures  renfermant  en  général  deux  systèmes 
bi-atomiques  non  identiques,  on  comprend  que  l'un  puisse 
être  saturé  sans  l'autre  et  de  préférence  à  celui-ci,  alors 
qu'il  est  plus  riche  en  hydrogène  et  par  conséquent  plus 
positif. 

Je  termine  cette  étude,  déjà  fort  longue  d'architecture 
chimique;  je  n'ai  pas  l'espoir  de  remplir  moi-même  tous  les 
cadres  dont  je  viens  de  tracer  les  contours;  on  n'embrasse 
pas  seul  une  aussi  vaste  tâche;  je  m'efforcerai  cependant 
de  réaliser  quelques-uns  de  ces  types  généraux  d'hydrocar- 
bures tétra-atomiques. 


Sur  la  découverte  du  Dicfyonema  sociale,  Salt.,  de  la  faune 
primordiale ,  dans  le  massif  de  Rocroy;  par  M.  C.  Ma- 
laise, membre  de  l'Académie. 

Jusqu'à  présent,  on  n'a  signalé  nulle  part,  à  ma  con- 
naissance, des  traces  de  fossiles  déterminables  dans  le 
massif  de  Rocroy.  Aussi,  de  même  que  dans  les  autres 
parties  du  «  terrain  ardennais  »  rapporté  actuellement  au 


(  46o  ) 
terrain  silurien  à  faune  primordiale  ou  terrain  cam- 
brien ,  n'a-t-on  pu  établir  que  des  divisions  basées  sur  le 
caractère  minéralogique.  C'est  donc  avec  une  grande 
satisfaction  que  j'ai  rencontré,  entre  Laifour  et  Deville , 
des  traces  de  Dictyonema  sociale,  Salt.,  dans  les  couches 
reviniennes. 

Dans  la  tranchée  au  sud  de  Laifour,  on  trouve  des 
phyllades  noirs  graphiteux,  véritables  ampélites,  conte- 
nant des  cristaux  et  des  filons  de  fer  sulfuré.  Comme  ils 
sont  percés  de  trous  circulaires,  je  les  nomme  phyllades  à 
perforations,  ne  voulantrien  préjuger  quant  à  leur  origine. 

Entre  ce  point  et  Deville,  on  voit  les  remarquables 
roches  porphyriques  de  Mairus.  C'est  au  sud  de  ces  roches, 
dans  des  phyllades  quarlzeux  et  pailletés,  que  j'ai  décou- 
vert le  Dictyonema  sociale. 

Cette  espèce  a  été  observée  dans  différents  points  du 
massif  de  Stavelot,  où  elle  se  rencontre  surtout  dans  le 
salmien  inférieur.  Ici  c'est  dans  le  revinien  et  dans  un 
point  assez  rapproché  du  devillien  de  Deville. 

Yoici  donc  une  même  espèce  qui  existe  dans  les  massifs 
de  Rocroy  et  de  Stavelot,  et  qui  pourra  servir  à  établir  un 
rapprochement  entre  les  couches  de  ces  deux  massifs. 


Quelques  nouveaux  théorèmes  sur  les  courbes  gauches  du 
quatrième  ordre;  par  M.  F.  Folie,  correspondant  de 
l'Académie. 

La  présente  note  fait  suite  à  celle  que  nous  avons 
publiée  dans  le  Bulletin  du  mois  de  juillet  dernier  et 
dans  laquelle  nous  énoncions  des  propriétés  nouvelles 
des  cubiques  gauches.  Le  lecteur  est  prié  de  recourir  à 


(  466  ) 

cette  dernière  pour  l'intelligence  de  notre  terminologie  ; 
il  suffira  que  nous  ajoutions  ici  que  par  polygone  nous 
entendons  toujours  une  figure  formée  de  côtés  qui  sont 
des  coniques  du  premier  ordre  (1). 

Les  courbes  du  quatrième  ordre  dont  il  est  question 
dans  la  présente  note  sont  supposées  tracées  sur  un 
même  lujperboloïde  ;  nous  les  désignerons  ,  pour  abréger, 
par  le  signe  G4. 

Les  G4  coupent  généralement,  comme  on  sait,  toutes 
les  génératrices  de  l'hyperboloïde  en  deux  points.  Ces 
deux  points,  comme  les  autres  couples  de  points  dont  il 
sera  question  par  la  suite,  peuvent  être  réels  ou  imagi- 
naires. 

Les  G4  peuvent  se  partager  en  trois  genres  : 

I.  Celles  du  premier  genre  sont  déterminées  en  général 
par  cinq  points  ;  certaines  d'entre  elles,  formant  un  sous- 
genre,  le  sont  par  quatre. 

Elles  ne  coupent  qu'en  deux  points  une  conique  du 
premier  ordre,  et  n'ont  entre  elles  que  quatre  points 
communs. 

Ces  G4  du  premier  genre  correspondent  donc  complè- 
tement, sur  l'hyperboloïde,  aux  coniques  dans  le  plan. 
Nous  pouvons  ajouter  qu'elles  ont,  comme  ces  dernières, 
deux  asymptotes,  et  que  ces  asymptotes  sont  des  coniques 
du  premier  ordre. 

U.  Les  G4  du  second  genre  sont  déterminées  en  gé- 
néral par  sept  points  ;  certaines  d'entre  elles ,  formant  un 
sous-genre,  le  sont  par  six. 

Elles  coupent  en  trois  points  une  conique  du  premier 
ordre,  en  six  points  les  G4  du  premier  genre,  et  ont 

(1)  Bulletins,  2^  série,  l.  XXXVIII,  pp.  63  et  suiv. 


(467  ) 

entre  elles  en  général  huit  points  communs;  ces  points 
communs  se  réduisent  toutefois  à  six  dans  le  cas  de  deux 
G4  du  sous-genre  indiqué  plus  haut. 

Ces  G4  du  second  genre  correspondent,  sur  l'hyperbo- 
loïde,  aux  courbes  du  troisième  ordre  dans  le  plan. 

m.  Les  G4  du  troisième  genre  sont  déterminées  par 
huit  points;  elles  coupent  en  quatre  points  une  conique 
du  premier  ordre,  et  toutes  les  autres  G4  en  huit  points. 

Elles  correspondent,  sur  l'hyperboloïde,  aux  courbes 
du  quatrième  ordre  dans  le  plan. 

Énoncés  des  théorèmes  pascaliens  relatifs  aux  G4. 

I.  Dans  deux  triangles  conjugués  inscrits  à  une  G4  du 
premier  genre,  les  côtés  opposés  se  coupent  en  trois 
points  situés  sur  une  conique  du  premier  ordre. 

II.  Dans  deux  quadrilatères  conjugués  inscrits  à  une 
G4  du  second  genre,  les  côtés  opposés  se  coupent  en 
quatre  points  situés  sur  une  conique  du  premier  ordre  (1). 

III.  Dans  deux  pentagones  conjugués  inscrits  à  une 
G4  du  troisième  genre,  les  côtés  opposés  se  coupent  en 
cinq  points  situés  sur  une  conique  du  premier  ordre  (2). 

Outre  ces  théorèmes,  qui  sont  l'extension  du  théorème 
de  Pascal  proprement  dit  aux  G4  tracées  sur  un  hyperbo- 
loïde ,  nous  pouvons  appliquer  à  ces  courbes  les  théorèmes 
que  nous  avons  énoncés  dans  nos  Fondements  d'une  géo- 
métrie supérieure  cartésienne ,  p.  57. 

Il  ne  sera  peut-être  pas  inutile,  pour  l'intelligence  des 


(1)  Cf.  Fondements  d'une  géom.  sup.carL,  p.  22.  Bruxelles,  Hayez. 
(Extr.  du  t. XXXIX  des  Mém.  de  l'Académie  royale  de  Belgique.) 

(2)  Ibid.,  p.  26. 


(  468  ) 
énoncés  suivants,  que  nous  reproduisions  ici,  avec  quel- 
ques développements,  la  définition  que  nous  avons  donnée, 
p.  56  du  même  ouvrage,  d'un  système  de  deux  figures 
conjuguées  inscrites  à  une  courbe,  et  que  nous  fassions 
remarquer  de  nouveau  que,  par  sécantes  ou  transversales, 
nous  entendons  ici  des  coniques  du  premier  ordre. 

Une  G4  du  troisième  genre  est  coupée  par  deux  sécantes 
en  deux  systèmes  de  quatre  points  ;  réunissons  ces  points 
deux  à  deux  par  des  transversales  :  chacune  de  ces  quatre 
transversales  recoupera  G4  en  deux  autres  points;  et  les 
huit  nouveaux  points  ainsi  obtenus  seront  eux-mêmes 
situés  en  général  sur  une  G4  du  premier  genre  (i).  Les 
deux  premières  sécantes  et  celte  dernière  courbe  ,  d'une 
part,  les  quatre  transversales,  d'autre  part,  constituent  un 
système  de  figures  conjuguées  inscrites  à  la  G4  considérée. 

Ceci  posé,  les  deux  énoncés  de  la  page  57  de  nos  Fo7i- 
dements  cVune  géométrie  supérieure  deviennent  : 

Théorème.  Si  deux  transversales  sont  communes  à 
deux  systèmes  de  figures  conjuguées  inscrites  à  une  G4 
du  troisième  genre,  ces  deux  systèmes  se  coupent  en  tous 
points  situés  sur  cette  courbe. 

Théorème.  Si  une  seule  transversale  est  commune  à 
deux  systèmes  de  figures  conjuguées  inscrites  à  une  G4 
du  troisième  genre,  les  points  d'intersection  de  ces  figures 
qui  n'appartiennent  pas  à  cette  courbe  seront  situés  sur 
une  conique  du  premier  ordre. 

Il  existe  un  théorème  analogue  au  premier  des  précé- 
dents pour  les  G4  du  second  genre. 


(1)  Cf.  Fondements ,  etc.,  p.  23,  art.  iv,  théorème  fondamental. 


(  469  ) 

Nous  pourrions  appliquer  de  même  aux  G4  tracées  sur 
une  hyperboloïde  les  théorèmes  énoncés  pp.  20  et  suiv,, 
p.  55  et  p.  58  des  Fondements.  Mais  ceci  exigerait  d'autres 
développements  que  nous  réservons  pour  un  travail  plus 
complet  sur  les  courbes  gauches. 


Sur  une  recréation  arithmétique  (2®  Note);  par  M.  J.  Pla- 
teau, membre  de  l'Académie. 

Dans  ma  première  Note  (1),  j'ai  démontré  la  proposition 
suivante  : 

Étant  donné  un  nombre  impair  quelconque,  pourvu 
qu'il  ne  se  termine  point  par  un  5 ,  on  peut  toujours  trou- 
ver un  autre  nombre  entier  tel,  que  le  produit  de  celui-ci 
et  du  nombre  donné  soit  formé  uniquement  de  la  répéti- 
tion d'un  même  chiffre  assigné  d'avance. 

Qu'il  me  soit  permis  de  reproduire  ici  ma  démonstra- 
tion; j'éviterai  ainsi  au  lecteur  la  peine  de  recourir  à  ma 
Note  précédente. 

Soit  N  le  nombre  donné,  astreint,  comme  je  l'ai  dit,  aux 
seules  conditions  d'être  impair  et  non  terminé  par  un  5. 
Si  l'on  convertit  ^  en  fraction  décimale  périodique,  la 
période  commencera,  on  le  sait,  immédiatement  après  la 
virgule,  et  si  on  la  désigne  par  P,  on  aura  : 


d'où 


\ 

P 

N 

999. 

» 

999 

NP 

(1)  Bulletins  de  l'Académie,  f86ô,  2*^  série,  l.  XV[ ,  p.  62. 


(  470  ) 

D'après  cette  relation,  si  le  nombre  N  n'est  pas  divisible 
par  5,  la  période  P  sera  nécessairement  divisible  par  9; 
dans  ce  cas,  nommant  Q  le  quotient  de  P  par  9,  on  déduit 
de  l'égalité  ci-dessus  : 

H1. ...  =  NQ, [a] 

et  l'on  voit  que  Q  est  le  facteur  qu'il  s'agissait  d'obtenir; 
en  le  prenant  soit  seul,  soit  multiplié  par  2  ou  par  5  ou 
par  4  etc.,  on  n'aura  évidemment  pour  chiffres  au  pro- 
duit ,  que  des  1  ou  des  2  ou  des  5  ou  des  4  etc. 

Dans  le  cas  où  N  serait  un  multiple  de  5  ou  de  9,  et  où 
conséquemment  P  pourrait  ne  pas  être  divisible  par  9 ,  il 
est  clair  qu'on  n'aura  qu'à  prendre  la  réunion  de  trois  ou 
de  neuf  périodes,  de  manière  que  l'ensemble  soit  divisible 
par  9. 

L'objet  de  la  Note  actuelle  est  de  faire  connaître  une 
suite  de  conséquences  de  la  proposition  ci-dessus,  consé- 
quences qui  me  paraissent  également  curieuses.  Les  voici  : 

1°  Q  étant  un  nombre  entier,  la  relation  [a]  montre 

que  le  premier  membre  1 H est  divisible  par  N; 

et  comme  on  a  aussi 

222.. ..=N  X  2Q, 
555....=:N  X  oQ, 
etc., 

on  en  déduit  celte  autre  proposition  : 

Si  l'on  prend  pour  dividende  un  nombre  formé  de  la 
répétition,  en  quantité  indéterminée ,  d\in  même  chiffre 
quelconque,  et  pour  diviseur  un  nombre  impair  quelconque 
non  terminé  par  un  5,  la  division  s'achèvera  nécessai- 
rement, et  Von  aura  un  quotient  exact,  avec  un  dividende 
limité. 


(  47i  ) 

Comme  ce  quotient  est  précisément  le  fiicteur  par  le- 
quel il  faut  multiplier  le  nombre  donné  N  pour  avoir  un 
produit  formé  de  la  répétition  d'un  môme  chiffre,  on  voit 
que  la  division  dont  il  s'agit  fournit  ce  facteur  par  un  pro- 
cédé plus  simple  que  celui  des  fractions  périodiques. 

2°  Si  1  on  consent  à  n'être  plus  entièrement  libre  de 
choisir  le  chiffre  dont  on  veut  avoir  la  répétition  au  pro- 
duit, des  nombres  pairs  et  des  nombres  terminés  par  un  5 
satisferont  encore  au  problème;  les  seuls  nombres  qu'il 
faille  exclure,  sont  d'abord  ceux  terminés  par  un  zéro,  puis 
les  autres  nombres  pairs  contenant  plus  de  trois  facteurs  2, 
enfin  ceux  des  nombres  terminés  par  un  5  qui  contiennent 
plus  d'un  facteur  5. 

Supposons,  en  effet,  que  le  nombre  N  soit  pair,  non  ter- 
miné par  un  zéro,  et  ne  contienne  qu'un  seul  facteur  2, 
de  sorte  que  si  l'on  écrit  N  =  2  N',  le  nombre  N'  satisfera 
aux  conditions  de  la  première  proposition;  on  aura  donc  : 

in  ....  =  N'Q, 

d'où 

222  ....  =  2N'Q  =  NQ , 
444  ....  =  4N'Q  =  2N'  X  2Q  =  N  X  2Q, 
666....  =  6N'Q  =  2N'X  ôQ  =  N  X  5Q, 
888....  =  8N'Q  =  2N'  X  4Q  =  N  X  4Q; 

on  pourra  conséquemment,  dans  ce  cas,  choisir  arbitraire- 
ment l'un  quelconque  des  chiffres  pairs.  Si,  par  exemple, 
on  prend  pour  N  le  nombre  42,  la  division  de  la  suite  in- 
déterminée 222 par  ce  nombre  fournira  pour 

quotient  le  second  facteur;  on  sera  conduit  ainsi  au  pro- 
duit 

42  X  8291  =  222222 , 

et  en  doublant,  triplant  et  quadruplant  le  second  facteur, 


(  472  ) 
on  formera  les  produits  composés  de  chiffres  4,  de  chif- 
fres 6  et  de  chiffres  8. 

Si  le  nombre  N  contient  deux  facteurs  2,  on  ne  pourra 
évidemment  opter  qu'entre  les  chiffres  4  et  8,  et  s'il  y  a 
trois  facteurs  %  on  sera  réduit  au  seul  chiffre  8;  enfin,  s'il 
y  a  plus  de  trois  facteurs  2,  on  voit  sans  peine  que  le  pro- 
blème est  impossible. 

Si  le  nombre  N  est  terminé  par  un  5,  il  est  visible  que  le 
chiffre  répété  au  produit  ne  pourra  être  que  5,  et  le  mode 
de  démonstration  qui  précède  montre,  de  plus,  que  si  le 
nombre  N  a  plus  d'un  facteur  5,  il  ne  saurait  satisfaire  au 
problème.  Quant  aux  nombres  terminés  par  un  zéro,  la 
nécessité  de  leur  rejet  n'a  pas  besoin  d'explication. 

5"  Retournons,  pour  un  moment,  à  la  détermination  du 
facteur  Q  par  la  conversion  dCj^en  fraction  périodique. 
Comme  la  période  peut  avoir  autant  de  chiffres  qu'il  y  a 
d'unités  moins  une  dans  le  diviseur,  on  voit  que  si  le 
nombre  donné  N  est  considérable,  s'il  est,  par  exemple, 
de  quatre  chiffres,  la  période  pourrait  se  composer  de  plu- 
sieurs milliers  de  chiffres,  et,  par  suite,  il  en  serait  de 
même  du  nombre  Q,  dont  la  recherche,  à  moins  d'un  ha- 
sard tout  spécial,  deviendrait  impraticable.  Il  semble  donc 
que, si  l'on  veut  s'amuser  de  cette  récréation,  il  faille  se 
borner,  pour  N,  à  des  nombres  de  deux  chiffres  au  plus, 
et  encore  ne  pas  les  choisir  trop  grands;  mais  je  vais  mon- 
trer qu'on  peut  aisément  trouver  une  foule  de  cas  particu- 
liers dans  lesquels  les  deux  facteurs  sont  grands  sans  que 
ni  l'un  ni  l'autre  excède  des  limites  acceptables. 

En  effet,  la  relation  [a]  peut  se  mettre  sous  la  forme  : 


Q 

111....  =  mN  X  —  : 
m 


(  473  ) 
si  donc  le  nombre  Q  correspondant  à  un  nombre  N  d'un 
ou  de  deux  chiffres  est  divisible  par  un  certain  nombre?», 
il  suffira,  pour  avoir  un  premier  facteur  supérieur  au 
nombre  donné,  de  multiplier  ce  dernier  par  m,  et  de 
prendre  pour  second  facteur  le  quotient  ^;  et  si  Q  est 
divisible  à  la  fois  par  plusieurs  nombres,  on  pourra  multi- 
plier successivement  N  par  chacun  de  ces  nombres,  par 
leurs  produits  deux  à  deux,  trois  à  trois,  etc.,  en  divisant 
en  même  temps  Q  par  les  mêmes  quantités,  ce  qui  four- 
nira autant  de  couples  de  facteurs  satisfaisant  au  problème. 

Avant  d'appliquer  cette  méthode  à  des  exemples,  pré- 
sentons ici  une  remarque  au  moyen  de  laquelle  on  trouvera 
sans  tâtonnements,  dans  des  cas  nombreux,  une  partie  au 
moins  des  diviseurs  de  Q.  Supposons  que  nous  détermi- 
nions Q  par  le  procédé  plus  court  que  j'ai  indiqué,  c'est-à- 

direen  divisant  111 par  N,  et  supposons,  de  plus, 

pour  simplifier,  que  N  soit  un  nombre  premier.  Il  est  vi- 
sible d'abord  que  si,  dans  le  dividende  complet,  le  nombre 
des  chiffres  1  est  pair,  ce  dividende  sera  divisible  par  1 1 , 
et  qu'ainsi,  en  vertu  de  la  relation  [a],  le  nombre  Q  lésera 
également. 

On  a,  d'ailleurs,  comme  on  peut  aisément  s'en  assurer  : 

5  X  37  =  1 1 1 , 

41  X271  =  11111, 

15  X  8347  =  111111, 

7  X  15873=  111111; 

d'où  résulte  évidemment  que  si  le  nombre  des  chiffres  1 
du  dividende  complet  est  un  multiple  de  trois,  Q  sera  di- 
visible par  5  et  par  57;  que  si  le  nombre  des  chiffres  1  est 
un  multiple  de  cinq,  Q  sera  divisible  par  41  et  par  271  ; 
enfin  que  si  le  nombre  des  chiffres  1  est  un  multiple  de  six, 

2""*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  31 


(  474  ) 

Q  sera  divisible  par  13  et  par  7.  Il  est  superflu  d'ajouter 
que  si  le  nombre  des  chiiTres  i  est  un  multiple  de  neuf, 
Q  sera  divisible  par  9.; 

Soit  maintenant,  comme  premier  exemple,  N  =  19;on 
trouve  alors  Q  =  5847955216574269,  et  le  dividende 
complet  qui  a  fourni  cette  valeur  est  composé  de  dix-huit 
chiffres  1.  Or  18  est  à  la  fois  multiple  de  2,  de  5,  de  6  et 
de  9;  la  valeur  ci-dessus  de  Q  est  donc  divisible  par  les 
nombres  5,  7,  9,  11,15  et  57;  on  pourra  conséquemment, 
à  l'aide  de  ces  diviseurs,  soit  pris  isolément,  soit  combinés, 
former  une  très-grande  quantité  de  couples  différents  de 
facteurs,  couples  dont  chacun  aura  pour  produit  une  suite 
de  dix-huit  chiffres  1  ;  seulement,  il  ne  faudra  pas  combiner 
les  diviseurs  5  et  9,  le  premier  étant  compris  dans  le  second. 

Ainsi,  en  multipliant  19  par  le  produit  des  diviseurs 
3,  11,  15  et  57,  et  divisant  la  valeur  de  Q  par  ce  même 
produit,  on  obtient  le  couple  : 

501587  et  368421421053; 

et  si  l'on  substitue  le  diviseur  9  au  diviseur  5,  ou,  ce  qui 
revient  au  même,  si  l'on  multiplie  le  premier  nombre  par  5, 
et  qu'on  divise  le  second  par  5  aussi,  on  a  cet  autre 
couple  : 

904761  et  122807140351. 

Je  trouve,  en  outre,  par  un  moyen  qu'il  serait  trop  long 
d'exposer  ici,  que  la  valeur  obtenue  pour  Q  est  divisible 
par  52579;  en  employant  ce  nombre  conjointement  avec  9 
et  15,  on  arrive  au  couple  : 

116883117  et  950617283, 

dont  les  deux  parties  ont  chacune  neuf  chiffres. 


(  475  ) 

Soil,  comme  second  exemple,  N  =  ol ,  on  trouve 
Q  =  3584229590681 ,  et  le  dividende  complet  est  de 
quinze  chiffres  I;  la  valeur  de  Q  est  conséquemment, 
d'après  ce  qu'on  a  vu  plus  haut,  divisible  par  les  nombres 
5,  57,  41  et  271.  L'emploi  simultané  des  diviseurs  57,  41 
et  271  conduit  au  couple  : 

12744517  et  8718483, 

qui  donnera,  comme  tous  les  autres  couples  relatifs  au 
même  nombre  51,  une  suite  de  quinze  chiffres  1. 

Si  l'on  désire  des  couples  formés  de  nombres  moins 
grands  quoique  ayant  toujours  plus  de  deux  chiffres,  on 
pourra  partir  du  nombre  15  ou  du  nombre  7.  Avec  le  pre- 
mier, la  méthode  indiquée  amènera  sans  difficulté  les 
couples  : 

481  et  251 , 

429  et  259; 

et,  avec  le  second,  le  couple  : 

273  et  407. 

Enfin  on  peut  encore  se  procurer  des  couples  de  grands 
nombres,  en  suivant  une  marche  un  peu  différente  :  au 
lieu  de  se  donner  originairement  un  nombre  d'un  ou  de 
deux  chilTres,  on  peut  partir  d'une  suite  de  chiffres  1,  en 
la  limitant  de  manière  qu'on  connaisse  plusieurs  des  divi- 
seurs du  nombre  qu'elle  représente.  Prenons  comme 
exemple  une  suite  de  dix  chiffres  1. 10  étant  multiple  de  2 
et  de  o,  le  nombre  représenté  par  la  suite  en  question  sera, 
d'après  ce  que  nous  avons  exposé,  divisible  par  11,  par  41 
et  par  271  ;en  la  divisant  par  le  produit  271  X  M  =2981, 


(  476  ) 
on  trouve,  pour  quotient,  le  nombre  572751  ;  on  a  donc  le 

couple  : 

2981  et  572751. 

Je  n'ai  pas  besoin  de  rappeler  que,  lorsqu'on  a  obtenu 
un  couple  au  moyen  de  l'une  de  nos  méthodes,  si  l'on  veut 
produire  des  suites  de  chiffres  2,  de  chiffres  5,  etc.,  il  suffît 
de  multiplier  par  2,  par  5,  etc.,  l'un  des  nombres  du  couple. 


Noie  sur  un  procédé  pour  donner  ou  pour  rendre  leur 
couleur  rouge  aux  muscles  conservés  dans  l'alcool j 
par  M.  Félix  Plateau ,   correspondant  de  l'Académie. 

Le  M  octobre  i871 ,  M.  Éd.  Van  Beneden  lut,  à  l'Aca- 
démie et  à  la  Société  entomologique,  une  note  sur  deux 
procédés  nouveaux  qu'il  employait  avec  succès  pour  la 
conservation  des  méduses,  cténophores  et  autres  animaux 
inférieurs  (1).  Cette  communication  de  notre  savant  col- 
lègue fut  accueillie  avec  le  plus  vif  intérêt;  car  tous  ceux 
d'entre  nous  qui  s'occupent  d'histoire  naturelle  doivent, 
à  côté  des  travaux  de  science  pure,  se  préoccuper  con- 
stamment des  mille  petits  moyens  de  nature  à  simplifier 
la  partie  pratique  de  leurs  recherches  ou  à  assurer  la 
conservation  des  animaux  qui  en  sont  l'objet. 

Si  chaque  naturaliste  publiait  les  procédés  qui  lui  sont 
personnels,  les  chercheurs  gagneraient  souvent  beaucoup 


(1)  Note  sur  la  conservation  des  animaux  inférieurs  (Bulletins  de 
l'Acad.  ROY.  DE  Belgique,  2«  série,  t.  XXXII ,  page  179.  1871).  {Annales 
de  ta  Soc.  entomologique  de  Belgique  ,  t.  XV,  1871-1872 ,  page  viii  des 
Comptes  rendus  des  séances.) 


(  ^77  ) 
de  temps,  el  les  colleclions  publiques  seraient  plus  in- 
structives. 

Ces  considérations  m'engagent  à  soumettre  à  l'Académie 
le  résultat  de  mes  efforts  pour  conserver  indéfiniment, 
ou  pour  rendre  aux  préparations  musculaires  plongées 
dans  l'alcool  leur  couleur  rouge  naturelle. 

Dans  un  cours  d'anatomie  comparée ,  on  ne  peut  guère 
démontrer,  sur  des  pièces  fraîches ,  que  l'organisation  des 
animaux  domestiques;  du  moment  où  il  s'agit  de  vertébrés 
rares  ou  étrangers,  il  faut  avoir  recours  à  des  échantil- 
lons conservés  dans  l'alcool,  liquide,  qui  a  l'inconvénient 
grave  de  décolorer  rapidement  le  tissu  musculaire,  de 
rendre,  par  conséquent,  les  préparations  confuses  pour 
les  élèves  et  de  faire  perdre  au  professeur  un  temps  pré- 
cieux en  explications  minutieuses. 

L'eau  phéniquée  ne  conserve  la  couleur  rouge  des 
muscles  que  pendant  quelque  temps,  l'odeur  du  liquide 
est  désagréable  et  les  bocaux  ne  peuvent  être  impunément 
abandonnés  en  hiver  dans  une  salle  non  chauffée. 

Tous  les  histologistes  connaissent  les  heureux  résultats 
auxquels  mène  la  teinture  des  tissus  au  carmin  inventée 
par  Gerlach  (1);  la  facilité  avec  laquelle  cette  matière 
colorante  pénètre  le  tissu  musculaire  m'a  conduit  à  em- 
ployer le  procédé  des  histologisles  en  grand,  mais  en  le 
modifiant  de  manière  à  obtenir  tous  les  tons  naturels  des 
chairs  et  à  fixer  la  couleur  pour  la  rendre  insoluble  dans 
l'alcool  coupé  d'eau  et  permettre  le  maniement  des  pièces 
sans  amener  de  décoloration. 


(1)  Mikroskopische  Studien  aus  dem  Gebiele  der  mcnsclilichen  Mor- 
phologie. Erlangen,  1858.  (H.  Frey ,  Das  Mikroskop  und  die  tmkrosko- 
pische  Technik.  Leipzig,  1838,  page  80). 


(  478  ) 

Voici  donc  le  procédé  que  je  mets  en  usage  ,  dégagé  des 
tâtonnements  inévitables  auxquels  j'ai  dû  me  livrer  et  tel 
qu'il  doit  être  employé  sous  peine  de  réussite  impar- 
faite (1)  :  la  pièce  anatomique  disséquée  d'une  manière 
définitive  est  mise,  pendant  quelques  jours,  dans  de  l'al- 
cool du  commerce  étendu  de  la  moitié  de  son  volume 
d'eau ,  puis  essuyée  en  la  passant  dans  un  linge  (2).  On 
a  préparé  quelques  godets  contenant  respectivement  du 
carmin  en  poudre,  additionné  de  quelques  gouttes  d'am- 
moniaque, du  chromate  de  plomb  en  poudre  (jaune  de 
chrome),  du  noir  de  fumée.  A  l'aide  de  petits  pinceaux 
de  blaireau,  on  applique  sur  les  muscles,  en  ménageant 
les  tendons,  les  nerfs,  etc.  (5),  plusieurs  couches  de  la 
solution  de  carmin  qu'on  étend  plus  ou  moins  d'ammo- 
niaque, ou  à  laquelle  on  ajoute  un  peu  de  jaune  de 
chrome  ou  de  noir  de  fumée,  de  manière  à  obtenir,  dans 
cette  peinture  véritable,  des  teintes  approchant  autant 
que  possible  de  la  teinte  des  muscles  frais.  11  vaut  mieux 
n'employer  que  peu  de  liquide  colorant  à  la  fois  et  mettre 
des  couches  multiples. 

Ceci  fait,  on  plonge  toute  la  préparation,  pendant  dix 
à  quinze  minutes,    dans  une  solution  d'alun  saturée  à 


(1)  Il  en  est,  du  reste,  ainsi  de  tous  les  procédés;  la  réussite  gît  dans 
l'observation  exacte  des  détails.  Il  est  à  ma  connaissance  que  l'on  a  tenté 
un  essai  de  mon  procédé,  sans  précautions,  sur  une  pièce  qui  avait  été 
conservée  dans  la  glycérine  ;  on  n'obtint  qu'un  résultat  au-dessous  du 
médiocre. 

(2)  La  pièce  ne  peut  plus  être  mouillée,  la  teinture  coulant  alors  par- 
tout au  lieu  de  rester  où  on  l'applique. 

(3)  On  protège  les  parties  qu'on  veut  conserver  incolores  par  l'interpo- 
sition de  bandelettes  de  papier  un  peu  épais  ou  de  carton  mince.  Ces 
bandelettes  s'enlèvent  seulement  après  l'action  de  l'alun. 


(  479  ) 
froid;  puis  on  la  lave  rapidement  à  l'eau  pure  pour  la  placer 
ensuite  définitivement  dans  l'alcool. 

L'explication  de  mon  procédé  est  bien  simple  :  dissol- 
vant le  carmin  dans  l'ammoniaque,  on  obtient  une  solu- 
tion ammoniacale  d'acide  carminique  (i)  ;  après  la  peinture 
du  muscle,  l'addition  d'alun  a  pour  effet  de  donner  1"  un 
précipité  gélatineux  incolore  d'alumine  hydratée  entraîné 
par  l'excès  de  liquide;  2"  une  laque  d'un  beau  rouge 
(laque  carminée)  insoluble,  et  qui,  se  formant  jusqu'à 
une  certaine  profondeur  dans  l'épaisseur  même  des  chairs, 
constitue  une  teinture  très-solide. 

J'ai  lu  plusieurs  traités  et  manuels  concernant  les  pré- 
parations de  pièces  anatomiques,  et  je  n'y  ai  trouvé  nulle 
part  l'indication  de  ce  mode  d'opérer  qui  m'a  donné  les 
meilleurs  résultats. 

On  peut  voir,  dans  les  collections  de  l'Université  de 
Gaud ,  une  petite  série  de  pièces  préparées  par  ce 
moyen  (2);  les  plus  anciennes  datent  de  1872,  elles  ont 
déjà  été  maniées  pour  la  démonstration  devant  les  élèves 
et  n'ont  rien  perdu  de  leur  éclat  et  de  leur  netteté.  La 
seule  précaution  à  prendre,  et  qui  est,  du  reste,  observée 
dans  la  généralité  des  musées,  est  de  les  tenir  à  l'abri 
d'une  trop  vive  lumière. 

Il  esta  remarquer,  l'observation  a  sa  valeur,  qu'il  n'est 
nullement  nécessaire  d'agir  sur  une  préparation  fraîche; 
le  séjour  préalable  dans  l'alcool  étant  favorable,  toutes 
les  anciennes  préparations  anatomiques  peuvent  être  sou- 


(1)  Schuizenberger  {Dictionnaire  de  chimie   pure  et  appliquée  de 
Wurtz,  pp.  769  et  suiv.). 

(2)  Muscles  masticateurs,  muscles  du  vol ,  muscles  des  extrémités  pos- 
térieures, etc.,  de  mammifères  et  d'oiseaux. 


(  480  ) 
mises  à  la  teinture,  ce  qui   permettra  de  donner  aux 
rausées  un  aspect  de  nature  qui  y  était  inconnu  jusqu'à 
présent. 

Enfin,  dans  un  but  d'enseignement  facile  à  saisir,  on 
peut,  au  milieu  d'une  préparation  générale,  ne  teindre  en 
rouge  que  certains  muscles  déterminés  sur  lesquels  on 
veut  appeler  l'attention. 

Dans  l'intérêt  des  musées  et  des  cours  d'anatomie,  je 
désire  que  mon  procédé  ne  passe  pas  inaperçu  et  qu'on 
en  fasse  l'essai  ;  j'ose  espérer  qu'il  a  quelque  avenir. 

(Pendant  cette  lecture,  quelques  pièces  anatomiques 
préparées  par  le  procédé  ci-dessus  sont  mises  sous  les 
yeux  de  l'Académie.) 


Note  sur  le  Problème  de  Malfatti ;  par  M.  E.  Catalan, 
associé  de  l'Académie. 

Le  mémoire  de  M.  Simons,  inséré  au  dernier  Bulletin, 
m'a  rappelé  la  solution  du  célèbre  Problème  de  Malfatti, 
que  j'ai  donnée  (d'après  M.  Lechmiitz)  dans  les  Nouvelles 
Annales  de  Mathématiques  (t.  Y,  p.  61).  Cette  solution, 
déjà  bien  simple,  peut  être  notablement  réduite. 

i .  ABC  étant  le  triangle  donné ,  dont  les  angles  sonTA  , 
B,C; 
Soient  ; 
p  =  OA'  =  OB'  =  OC  le  rayon  du  cercle  inscrit; 
2«,  2|3,  2r  les  suppléments  respectifs  de  A ,  B,  C; 
X,  Y,  Z  les  centres  des  cercles  cherchés; 
X,  y,  z  les  rayons  de  ces  cercles. 


(481  ) 
2.  PU  étant  la  tangente  commune  aux  cercles  X,  Y, 
il  est  visible  que  le  triangle  XUY  est  rectangle  en  U;  donc 
PU  =  DU  =  GU  =1/^.  Projetant  AXYB  sur  AB,  on  a 
la  première  des  trois  équations  du  problème  : 

X  tg  a -+- 21/a:?/ -I- y  tg  p  =  p  (tg  « -t- tg  p).     .     .(1) 

Pour  la  simplifier,  résolvons-la  par  rapport  àl/x:   la 
valeur  positive  de  cette  inconnue  est 

—  {/y  COtx-i-  \/«/C0la(C0ta —  tg  p)  -H  p  (  1  -+-  C0tafg[3). 

Ainsi 

V  X  s'm  a  -H  Vy  COS  a 


i 


=  ^  /y  COS  a  COS  (a  -+-  p)  -f-/3sinasin(a-4-  f). 

Vcôrp  V 

Et  comme  a  +  p  -+-  r=  tj-,  cette  formule  devient 
[/x  sin  a  -+■  vycos  a 


—  — _-^-  \  /  p  sin  a  sin  y  —  y  cos  a  cos  y . 


3.  Le  second  membre  est  une  fonction  symétrique  de  a,  y; 
donc 

y/x  sin  a  -4-  \/y  cos  a.  =  [/z  sin  y  -+-  \/y  cos  r  ;  •  •  (3) 
puis,  au  moyen  d'une  permutation  tournante  : 

y/ y  sin  [3  -+-  \/z  cos  (5  =  \/x  sin  a  -+-  \/z  cos  a ,  .  .  (4) 

\/z  sin  y  -+-  ^ac  cos  r  =  V'V  sin  P  +  \/x  cos  p.  .  .  (3) 

Ces  équations  (3),  (4),  (o)  déterminent  les  rapports  de 


(  482  ) 
[^x,[/y,\/z.  En  ajoutant  membre  à  membre  les  deux 
premières,  on  trouve 

\/y  (cos  a.  —  cos  r  -t-  sin  p)  =  \/z  (cos  x.  —  cos  p  +  sin  y); 
ou,  par  une  transformation  simple , 

V/y  cos  i  |3  cos  U  —  -  j  =  \/z  cos  i  r  cos  f -—  -  j  ; 

ou  encore 

1/7(1  +  tgir)=\/T{i  +tgip). 

Nous   pouvons  donc  prendre ,  au  lieu  des  équations 
ci-dessus,  les  proportions 


[i-^igiaf     (1-4-tgiSf     (l+tgirr 


(6) 


4.  l  étant  la  valeur  commune  des  trois  rapports,  soient , 
pour  abréger  : 

tg2a  =  /',  tgip=gf,  tg^y=h. 

L'équation  (1)  devient 

On  tire ,  de  celle-ci , 

^  f-^  9 


(1  ■*-f){^-^9){^-^  f-*-9-f9) 
Mais,  à  cause  de 


(  485  ) 
on  a  la  relation  connue  : 

fg-^gh-^-hf^i, (7) 

OU 

donc 

1= ^ ;.     ....     (8) 

puis,  par  les  relations  (6)  : 


(i-+-9)(i-t-/o 


1  -^  h 
z  =  p -, 9) 

]/^==^V7I=-^,\/-^  =  -^.  .(10) 

5.  Pour  construire  ces  expressions ,  il  suffit  d'observer 
que 

1  cos  I X  cos  i  X  (cos  i  a.  —  sin  ^  a) 

1  -+-  /"      cos  i  a  -^  sini  X  cos  a 

i  ■+-  cos  a —  sin  a  /    1  \ 

=  i =  i  I -I-  i  —  tga     • 

cos  a  \COS  a  ) 

En  effet,  cette  transformation  donne 

-^=  Vyi=  FS  =  i  (AO -*-  OC  —  AC),  ' 

— l_=V/ix'=KT=i(BO-»-OA'  — BA'),  )      (*^] 

—î—  =  \/^=DU  =  i  (CO  -4-  OB'—  CE') 
1  -»-  /i 


(  484  ) 
On  trouve,  de  la  même  manière: 

^      =  1  (AO -+- OC -+- AC) 


p 


^_         HBO-t-OA'-f-BA'),)  .     .     .     (12) 
^  i  (CO  -+-  OB'  -+-  CB' 


\  —h 


6.  Remarque.  Si  l'on  se  rappelle  les  propriétés  des 
cercles  tangents  aux  trois  côtés  d'un  triangle  donné,  on 
arrive  à  cette  interprétation  géométrique  des  formules 
(11),  (12)  : 

A  l'angle  AOC,  inscrivez  les  deux  cercles  tangents  à  C'A  : 
les  distances  du  sommet  0,  aux  points  où  ces  cercles  tou- 
chent le  côté  OC,  représentent  j^2f  ^^  TZTf  La  même  con- 
struction, appliquée  aux  triangles  BOA',  COB',  détermine 

_^,_i ^   rf      P 

l-t-?    1—!?    ^-^Ii-         i-h 

7.  Atitre  remarque.  —  Chacune  des  équations 

\,^x  siii  a  -t-  \/y  cos  a  =  \/z  sin  r-*-  \/y  cos  r,  ■  ■  (5) 
\/y  sin  |3  -+-  \/z  cos  p  =  \/x  sin  a  m-  v/;:  cos  « ,  ,  .  (4) 
V/5:sin  r-+-  l/aî  cos  r=  l/^sinp -4- ^ic  cos  p.  .  .  (o) 

exprime  une  propriété  assez  curieuse,  dont  il  serait  inté- 
ressant de  trouver  une  démonstration  directe.  Considérons, 
par  exemple,  l'équation  (4).  En  l'écrivant  ainsi 

Vxzsin  X  -\-  z  cos  a  =  V^yz  sin  [3  -+-  z  cos  p, 

et  en  observant  que  V^  =  KT,  :3  =  KZ,  etc.,  on  en 
conclut  : 

projection  de  TZ  sur  AO  =  projection  de  SZ  sur  BO. 


(  485  ) 
De  même , 

projection  de  UX  sur  BO  =  projection  de  TX  sicr  CO, 
projection  de  SY  sur  CO  =  projection  de  UY  sur  AO. 

8.  La  valeur  commune  des  binômes 

[/xz  sincc-^-zcosx,  Vyz  sin  |3  -t-  z  cos  [3 
est 

p_ _p 2/;_  _^  ^ Lti lu/! 


La  quantité  entre  parenthèses  égale 

f-^9  f-*-9 

donc 

P^T-^, (13) 

/  -^9 
formule  très-simple. 

9.  On  a 

AU  =  AD  -+-  \/xy  =  xtg  a  -4-  \/xy; 

et,  par  les  formules  (9) ,  (10)  : 

Mais,  à  cause  de  la  relation  (7), 

1  -+-/"-+-  a  —  fq 

f-^9 
donc 

AU  =  p ^^ ;     .     .    .     .  (ii) 

^l+i/)(l-/) 


(  486  ) 
ou,  ce  qui  est  équivalent, 

i 
f      l^i/ 


AU  =  p[^j-i-,- 7-^-1 (14) 


10.  D'après  les  formules  (11),  (12),  (14)  : 

AU=i(AO  — BO  H-  AC -+- BA),  * 

ou 

AU  =  i  (ÂO -+-  AB  —  BO) (15) 

Cette  valeur  à  la  même  forme  que  l'expression  de  DU 
(5);  donc  la  remarque  faite  ci-dessus  (6)  est  applicable ,  et, 
en  conséquence  : 

Le  point  []  est  celui  où  le  côté  AB  louche  la  circonférence 
inscrite  au  triangle  AOB  ('). 

De  même,  les  circonférences  inscrites  aux  triangles 
BOC,  COA  déterminent  les  points  S,  T. 

Ces  points  U,  S,  T  étant  construits,  il  en  résulte  les 
points  D,  G,  F,....  où  les  circonférences  cherchées  touchent 
les  côtés  du  triangle  donné. 

11.  Remarques.  I.  On  a 

AD  =  AU  -  DU  =  i  (AO  -4-  AB  —  BO  —  CO  —  OB'  -t-  CA')  ; 
ou,  si  l'on  désigne  par/)  le  demi-périmètre  du  triangle  ABC: 
AD  =  i  (AO  —  BO  —  CO  -+-  /?  —  p). 
Pour  que  le  second  membre  devienne   une  fonction 


{")  Propriété  connue.  En  outre,  la  droite  PU,  tangente  commune  aux 
cercles  X,  Y,  touche  aussi  les  cercles  inscrits  aux  triangles  BOC,  COA 
(Théorème  de  Steiseu). 


Bul/rt,r,  .2'sàr-  t  .UQ7  7J7 


Pro/>/r//ie     d^     Mai/hf/r 


(  487  ) 

symétrique,  il  suffit  de  le  retrancher  de  AO;  on  trouve 
ainsi 

A0-AD=B0-BF  =  C0-CK  =  i(A0  +  B0-+-C0-;,-+-p)(I6). 

Ce  résultat  simple,  et  la  construction  qui  en  résulte, 
sont  dus  à  M.  Simons. 

II.  D'après  les  relations  (11), 

i(AO  +  BO-4-CO-4-p-;,)  =  pr-J-+^+^_,](17). 

Ll  -+-  /      1  H-  5»      l  -i-  h      y 

III.  Si  l'on  désigne  par  a,  b,  c  les  rayons  des  cercles 
inscrits  aux  triangles  BOC,  COA,  AOB,  on  trouve  : 

a=         g-^^*  ,_  h-\-f  _         /•+  g 

IV.  Enfin,  pi  étant  le  rayon  du  cercle  inscrit  au  triangle 
XYZ: 

pi  =  7 ^-7 7 (19) 


(  488  ) 


Remarques  morphologiques  sur  les  espèces  du  sous-genre 
Xanthoura;  par  M.  Alphonse  Dubois,  conservateur  au 
Musée  royal  d'histoire  naturelle  de  Belgique. 

L'accueil  encourageant  que  l'Académie  a  fait  à  mes  der- 
nières observations  sur  la  variabilité  de  certaines  espèces 
d'oiseaux,  m'a  engagé  à  poursuivre  mes  recherches  mor- 
phologiques. J'ai  choisi  pour  sujet  de  cette  seconde  notice 
le  petit  groupe  Xanthoura  du  genre  si  intéressant  des  Cya- 
nocorax. 

Le  sous-genre  Xanthoura,  créé  par  le  prince  Bonaparte 
en  dSoO,  ne  comprend  que  trois  espèces,  savoir  :  le  Cya- 
iiocorax  yncas ,  le  C.  cyanocapillus  et  le  C.  luxuosus. 

Ces  trois  espèces  sont  assez  caractéristiques,  mais  un 
examen  attentif  prouve  cependant  d'une  manière  évidente 
qu'elles  ont  d'étroites  affinités  entre  elles.  L'observation 
démontre  d'autre  part  que  la  forme  type,  c'est-à-dire  la 
plus  anciennement  connue  (C.  yncas),  varie  de  taille  et  de 
couleur  suivant  la  localité  qu'elle  habite.  En  effet,  les  indi- 
vidus de  cette  espèce  que  l'on  rencontre  dans  la  république 
de  l'Equateur,  sont  notablement  plus  petits  que  ceux  du 
Pérou  ;  si  l'on  franchit  ensuite  les  frontières  méridionales 
de  la  Nouvelle-Grenade,  on  s'aperçoit  bientôt  que  la  cou- 
leur du  plumage  se  modifie  à  son  tour,  et  que  cette  modi- 
fication est  d'autant  plus  sensible  que  l'oiseau  habite  une 
latitude  plus  septentrionale. 

Parmi  les  nombreux  spécimens  de  ce  genre  figurant  au 
Musée  de  Bruxelles,  j'ai  trouvé  deux  formes  nouvelles  et 
non  décrites,  qui  viennent  relier  les  espèces  mentionnées 
ci-dessus.  Le  rapprochement  de  ces  cinq  formes  m'a  con- 


(  489  ) 
duit  à  ne  considérer  comme  type  spécifique  que  le  Cyano- 
corax  yncas,  autour  duquel  se  groupent  quatre  variétés. 

C'est  au  Pérou,  et  peut-être  en  Bolivie  (1),  que  l'espèce 
est  fixe;  mais  à  mesure  que  l'habitat  s'élève  au-dessus  de 
l'équateur,  les  individus  paraissent  devenir  plus  petits  et 
leur  système  de  coloration  se  modifie  de  plus  en  plus. 

Chez  les  Xanlhoura  de  la  Nouvelle-Grenade,  les  parties 
dorsales  sont  d'un  beau  bleu  de  ciel  légèrement  verdâtre 
à  certaines  places,  et  le  blanc  de  la  nuque  est  remplacé  par 
une  teinte  violacée.  Je  désigne  plus  loin  cette  race  locale 
sous  le  nom  de  Cyanodorsaiis. 

Cette  forme  nouvelle  relie  véritablement  le  type  Yncas 
à  la  variété  Cyanocapilla,  autant  par  la  répartition  de  ses 
teintes  que  par  la  position  géographique  qu'elle  occupe. 

Il  est  a  supposer  que  la  Nouvelle-Grenade  remplit,  au 
point  de  vue  de  notre  sujet,  le  rôle  de  territoire  neutre, 
dont  le  centre  est  la  véritable  patrie  du  Cyanodorsaiis.  Au 
Sud  cette  variété  semble  s'unir  à  l'espèce  type  habitant  la 
république  de  l'Equateur,  pour  produire  des  métis  dont  le 
dos  seul  est  plus  ou  moins  coloré  en  bleu;  au  Nord,  cette 
même  variété  peut  s'accoupler  avec  la  race  Cyanocapilla, 
et  dans  ce  cas  c'est  la  tête  seule  qui,  chez  les  métis,  devient 
d'une  couleur  bleue  plus  ou  moins  prononcée. 

La  présence  au  Musée  de  quelques  individus  ayant  l'un 
ou  l'autre  de  ces  plumages  intermédiaires,  rend  cette  hy- 
pothèse très-vraisemblable;  mais  le  fait  a  cependant  besoin 
d'être  confirmé  par  l'examen  d'un  grand  nombre  d'oiseaux 
provenant  des  divers  points  de  la  Nouvelle-Grenade. 


(1)  Suivant  M.  Gray,  le  C.  yncas  habiterait  également  la  Bolivie.  Je  n'ai 
pas  vu  de  spécimens  provenant  de  ce  pays,  qui  ne  doivent  guère  différer 
de  ceux  du  Pérou. 

2""*  SÉRIE,  TOME  xxxvin.  32 


(  ^m  ) 

A  partir  de  la  région  septentrionale  de  celte  même  con- 
trée et  en  Venezuela,  l'espèce  reprend  le  plumage  général 
qu'elle  a  au  Pérou,  mais  une  modification  imp*ortante 
s'opère  dans  la  coloration  de  la  tête.  Dans  toute  l'Amé- 
rique centrale  jusqu'au  Guatemala,  on  ne  rencontre  que 
des  individus  à  tète  bleue,  n'ayant  conservé  qu'un  bandeau 
blanc  très-étroit  (var.  Cyanocapilla)\  chez  les  spécimens  de 
Venezuela ,  le  bandeau  blanc  a  complètement  disparu  et  la 
tête  est  d'un  bleu  violacé  uniforme  (var.  Cœruleocephala). 

La  var.  Luxuosa  réside  au  Mexique  et  au  Texas;  elle 
ne  se  distingue  du  Cyanocapilla  que  par  la  teinte  ver- 
dàtre  de  la  poitrine  et  du  ventre,  qui  est  d'autant  plus  pro- 
noncée que  l'habitat  est  plus  septentrional. 

Ce  qui  démontre  bien  que  le  Cyanocorax  luxuosus  n'est 
qu'une  race  locale,  c'est  que  la  coloration  verte  des  parties 
inférieures  devient  déjà  apparente  chez  la  var.  Cyanoca- 
pilla habitant  le  Guatemala,  tandis  que  chez  les  individus 
de  cette  même  variété  habitant  le  nord  de  la  Nouvelle- 
Grenade,  les  régions  ventrales  sont  d'un  beau  jaune  uni- 
forme (1). 

.l'ai  cherché,  dans  la  petite  carte  ci-dessous,  à  indiquer 
autant  que  possible  les  limites  géographiques  de  chaque 
variété;  mais  il  est  certain  que  ces  limites  ne  sont  pas 
rigoureusement  exactes,  car  il  faut  toujours  tenir  compte 
des  zones  de  compénétration  mutuelle  ou  deux  variétés  se 


(1)  M.  Cabanis  se  demande  si  le  Xanthoura  guatimalensis ,  Bp.  appar- 
tient réellement  à  son  C.  cyanocapilla  [Mus.  Hein.,  1. 1,  p.  223)  ;  mais  il  ne 
peut  y  avoir  de  doute  à  ce  sujet.  Les  spécimens  du  Musée  de  Bruxelles, 
qui  ont  servi  de  type  au  prince  Bonaparte,  se  rapportent  entièrement  à  la 
description  que  M.  Cabanis  donne  du  Cyanocapilla;  ils  offrent  seulement 
sur  les  côtés  de  la  poitrine  et  sur  les  flancs  une  légère  teinte  verdàtre. 


(  491  ) 
rencontrent;  il  est  même  possible  que  deux  variétés  habi- 
tassent la  même  région,  mais  à  des  altitudes  différentes. 
Dans  l'un  comme  dans  l'autre  cas,  il  est  indubitable  que  ces 
variétés  s'unissent  à  l'occasion  pour  produire  des  métis 
dont  le  plumage  tient  le  milieu  entre  celui  des  parents. 


Aire  géographique  des  cya^kocorax  : 
[.   Yiicns;  II.  Cyanodorsalis  ;  III.  CyanocapilUi  ;  IV.  Cœruleocephala  ;  V.  Luxiiosa. 


Il  résulte  de  ce  qui  précède, que  le  sous-genre  Xanlhoura 
ne  comprend  réellement  qu'une  seule  espèce,  mais  très- 


(  492  ) 
variable  suivant  la  position  géographique  qu'occupent  les 
individus  qui  la  composent.  L'espèce  se  divisera  donc  de 
la  manière  suivante  : 

A.  Plumes  du  front  très -allongées. 
CYANOCORAX   YNCAS. 

CoRVis  YNCAS,  Bodd.  Tahï.  Pi.  enl.  p.  625. 

CoRVUS  PERUViANus ,  Gmcl.  Syst.  nat.  t.  I,  p.  373.  —  Levaill.  Ois. 
parad.  pi.  XLVI. 

PiCA  CHLORONOTOS,  Wagl.  Syst.  av.  sp.  12. 

PiCA  LUTEOLA,  Less.  Traité  d'oru.  p.  531. 

Garrl'lus  PERUVIANUS,  d'Orb.  Synops.  av.  t.  II ,  p.  9,  n°  2. 

Cyanocorax  PERUVIANUS  ct  C.  PERUANUS,  Cab.  in  Tsch.  Faun.  per. 
pp.  36,232. 

Cyanocorax  yucas,  Gray,  Gen.  of  Birds ,  t.  Il ,  p.  307,  n"  9. 

Xanthoura  peuuvianus,  Bonap.  Consp.  av.  t.  I,  p.  380. 

Xanthocitta  peruviana,  Cab.  Mus.  Hein.  t.  I,  p.  223. 

Cyanocorax  yncas,  Sclat.  Proceed.  Zool.  Soc.  1854-,  p.  114. 

Xanthoura  yncas,  Gray,  f/and-Iist  of  B.  t.  Il,  p.  b. 

Ilab.  :  Bolivie,  Pérou,  république  de  TÉquateur. 

Var.  ix.  CY/%^'OUOR!^.%L.IS  (var.  iiov.) 

Car.:  Similis  prœccdenti ;  sed  cet-vice  cœndeo-violaceo  et  dorso 
cœriileo. 

Cette  variété  ressemble  à  l'espèce  type,  dont  elle  se  dis- 
tingue par  la  prédominance  du  bleu  dans  toutes  les  par- 
ties vertes.  —  Dessus  de  la  lèle  blanc;  nuque  d'un  bleu 
violacé  passant  au  bleu  de  ciel  sur  le  dos;  ailes,  croupion 
et  tectrices  caudales  d'un  vert  très-bleuâtre. 

Hab.  :  Nouvelle-Grenade  centrale  et  méridionale. 

Le  Musée  de  Bruxelles  possède  deux  exemplaires  de 
cette  variété. 


(  495  ) 


B.  PluiDcs  (lu  front  courtes. 
Var.  ,3.  CVAWOCAPILI.A,  Cal). 

PiCA  CHLORONOTA,  Wagl.  (mus  ad.)  /sis,  1829,  p.  749. 
Cyanocorax  cyanocapillus,  Cab.  in  Tsch.  Faiin.  pcr.  p.  253. 
Xanthoura  giiatimalensis,  Bonap.  Consp.  t.  I ,  p.  380. 
Xanthocitta  cyanocapilla,  Cab.  Mus.  Hein.  t.  I,  p.  223. 
Cyanocorax  ouATEMALEi-ssis,  Moore,  Proc.  Z.  S.  1859,  p.  37. 
Cyanocorax  yncas  {part.)  Schl.  Mus.  P.-B.  (Coraces)  p.  55. 
Xanthoura  cyanocapillijs,  Gray,  Hand-Ust  of  B.  t.  II,  p.  o. 

Car.  :  C.  yncas  similis;  scd  pileo  cyaneo;  vilta  pilei  inter  oculos 
candida. 

Le  plumage  de  cette  variété  est  entièrement  semblable 
à  celui  du  C.  yncas;  elle  se  distingue  seulement  de  ce  der- 
nier par  la  coloration  bleue  uniforme  de  la  tète,  inter- 
rompue derrière  le  front  par  un  bandeau  blanc  assez 
étroit. 

Hab.  :  nord  de  la  Nouvelle-Grenade,  Amérique  centrale 
jusqu'au  Guatemala. 

Var.  y.  c.c:kuleocephai.a  (var.  nov.) 

Car.:  SimiUimus  prœccdenti;  sed  pileo  loto  cyaneo  sine  vilta  alba; 
abdomine  flavissimo. 

Cette  race  locale  ne  diffère  de  la  var.  Cyanocapilla  que 
par  l'absence  totale  du  bandeau  blanc:  le  dessus  de  la  tête 
est  d'un  bleu  uniforme  et  non  interrompu, 

Hab.  :  Venezuela. 

L'individu  type,  du  Musée  de  Bruxelles,  vient  de  Caracas. 


(  494  ) 


Var.  J.  I.UXUOSA  ,  Less. 

PiCA  CHLORONOTA,  Wagl.  {mos  jitn.)  Isis,  1829,  p.  750. 
Garruli's  luxuosl's,  Lcss.  Rcv.  zooI.  1839,  p.  100. 
Cyanocorax  cyanocapillus  (part.)  Cab.  in  Tsch.  faiin.  per.  p.  234. 
Cyanocorax  yucas  {part.)  Gray,  Gen.  of  B.  t.  H,  p.  507. 
Xanthoura  luxuosus,  Bonap.  Consp.  t.  I,  p.  580. 
Cyanocorax  luxuosis,  Du  Bus,  Esq.  oni.  pi.  XVIII.  —  Cass.  ///. 
Birds  of  Cal.  Tcx.  pi.  I. 

Xanthocitta  LLxiosA  ,  Cab.  Mus.  Hein.  t.  I,  p.  224. 

Car.  :  var.  Cyanocapill.î:  siiuilis;  sed  corpovis  parlibus  inferioribus 
riridi-luteis. 

îVe  diffère  de  la  var.   Cyanocapilla  que  par  la  couleur 
vert-jaunàtre  des  parties  inférieures. 
Hab,  :  Mexique,  Te.\as. 


iNo/e  s\ir  deux  nouieaux  chlorures  cVacides  organiques', 
par  M.  Walthère  Spring. 

On  se  rappelle  que  M.  Blomstrand  avait  assigné  aux 
acides  hyposulfoneux  [\),  qu'il  découvrit  en  1870,  la  for- 


(!)  En  remplaçant  l'un  ou  l'autre  des  atonies  d'hydrogène  que  renferme 
la  molécule  d'acide  sulfureux  par  un  radical  alcooli<iue  quelconque  X,  on 
obtient  deu\  composés  isomères  jouissant  de  propriétés  essentiellement 
différentes;  l'un  d'eux,  très-stable,  ne  peut  être  saponifié  qu'avec  la  plus 
grande  difficulté;  l'autre,  au  contraire,  très-facilement;  en  d'autres  termes  , 
le  premier  fonctionne  comme  un  acide  conjugué,  et  le  second  comme  un 
éther.  On  a  appelé  le  premier  de  ces  isomères  acide  éthylsulfureux,  si 
X  =  C^  H»,  et  le  second  acide  élher-sulfureux;  cette  dénomination  ne 


(  49S  ) 
mule  de  constitution 

0 

II 

X  —  s  —  s  H  ; 

II 
0 

si  telle  était  réellement  la  structure  de  ces  composés,  le 
pentachlorure  de  phosphore  devrait,  en  réagissant  sur  ces 
corps,  engendrer  un  chlorure  sulfoneux  avec  formation 
de  sulfochlorure  de  phosphore  d'après  l'équation 

0  0 

Il  li 

X  —  s  -  SH  -V-  P  CP  Cl-^  =  X  —  S  -  Cl  -4-  P  S  Cl^  -+-  H  Cl; 

H  II 

0  0 

présentait  pas  d'inconvénients  tant  que  l'on  ne  connaissait  que  ces  deux 
corps,  mais  il  en  est  autrement  aujourd'hui  et  l'on  éprouve  quelque  diffi- 
culté à  dénommer  d'une  façon  claire  et  rationnelle  les  corps  : 


XOSOOOH 

,  XSOOOH  )  XOOOSH 

acides  conjugues.     •  <  ^„„„„       élhers 
/  XoOUn 


V  XSSOOH  \  XSSOOOH 

Cette  difficulté  disparaîtrait  si  l'on  employait  le  mot  sulfone  et  ses 
dérivés  pour  désigner  le  groupe  —  S  0'  H  et  ses  dérivés  qui  donnent  nais- 
sance aux  acides  sulfo-conjugués,  et  si  l'on  continuait  à  appliquer  la 
nomenclature  ordinaire  aux  élhers  proprement  dits,  comme  cela  se  fait 
généralement  en  AJlemagne,  en  Russie,  etc.  De  cette  façon,  toute  équi- 
voque serait  impossible,  comme  on  peut  s'en  convaincre  par  l'inspection 
du  tableau  suivant  : 


I 


XSOOOH  acide  X  sulfonique 
XSOOCl  chlorure  X  sulfonique 
XSOOH  acide  X  sulfoneux 
XSOCI  chlorure  X  sulfoneux 
XSSOOH  acide  X  hyposulfoneux 
XSSOCI  chlorure  X  hyposulfoneux 
et  ainsi  de  suite. 


XOSOOOH  acide  X  sulfurique 
XOOOSH  acide  X  sulfureux 


XSSOOOH  acide  X  hyposulfureux 
XSSOOCl  chlorureX  hyposulfureux 


Je  me  suis  servi  de  cette  nomenclature  dans  la  présente  note. 


(  496  ) 
si,   au  contraire,   la   constitution    de    ces    corps    était 
XSSOOH ,  la  réaction  devrait  avoir  lieu  suivant  : 

XSSOOH  +  P  CP  Cr2  =  XSSO  ci  -t-  P  O  CP  -+-  HCI, 

c'est-à-dire  qu'à  côté  d'une  molécule  d'oxychlorure  de 
phosphore,  il  se  formerait  le  chlorure  des  acides  hyposulfo- 
neux.  On  possède  donc  dans  l'action  du  pentachlorure  de 
phosphore  un  critérium  certain  pour  découvrir  si  la  molé- 
cule des  hyposuU'onites  renferme  un  sulfhydryle  ou  un 
oxhydryle.  Je  me  proposais  déjà  depuis  longtemps  d'en- 
treprendre ce  travail;  si  je  n'ai  pas  mis  plus  tôt  ce  projet 
à  exécution,  c'est  qu'il  me  semblait  que  la  question  était 
déjà  suffisamment  résolue  par  les  phénomènes  que  pré- 
sente la  génération  de  ces  composés  ainsi  que  par  leurs 
propriétés  générales.  Récemment  M.  H.  Bunte  {Zur  Con- 
stitution der  Lnterschwevlige  Saeiire,  Berichte  d,  deut- 
SCHEN  Chem.  Gesell,  t.  YII,  p.  646),  en  faisant  réagir  une 
molécule  de  bromure  d'éthyle  sur  une  molécule  d'hypo- 
sulûte  de  sodium,  a  obtenu  un  éther  mixte  de  l'acide 
hyposulfureux,  dont  la  constitution  est  représentée  par 
C^H^SSOOOiNa.  Si  l'on  compare  cette  formule  à  celle 
deshyposulfonites,  on  voit  que  ces  derniers  ne  diffèrent 
de  l'éther  découvert  par  M.  Bunte,  que  par  un  atome 
d'oxygène  en  moins;  les  propriétés  de  ces  deux  corps  sont 
cependant  essentiellement  différentes;  ainsi  l'un  d'eux 
joue  le  rôle  d'un  éther,  et  l'autre  le  rôle  d'un  acide  con- 
jugué. 

Il  devenait  donc  intéressant  de  poursuivre  l'étude  com- 
parative des  propriétés  de  ces  deux  corps  et  de  rechercher 
s'ils  peuvent  se  transformer  l'un  dans  l'autre;  guidé  par 
cette  idée,  j'ai  entrepris  l'étude  de  l'action  du  pentachlo- 
rure de  phosphore  sur  ces  composés. 


(  497  ) 

J.    Action  du  penlachlorme  de  phosphore  sur  les 
hyposulfonites. 

J'ai  fait  réagir  une  molécule  de  penlachlorure  de  phos- 
phore sur  une  molécule  d'éUiylhyposulfonite  de  sodium. 
Si  l'on  emploie  les  deux  corps  en  poudre  fine,  l'action  est 
très-vive,  la  masse  s'échauffe  au  point  qu'une  grande 
partie  du  chlorure  organique  formé  se  détruit  entière- 
ment en  donnant  lieu  à  un  grand  dépôt  de  charbon  ;  la 
réaction  se  fait,  au  contraire,  sans  décomposition  du  chlo- 
rure, si  l'on  fait  réagir  les  deux  substances  en  morceaux 
de  la  grosseur  d'un  pois.  En  agitant  vivement  le  vase  dans 
dans  lequel  la  réaction  se  produit,  la  matière  se  liquéfie 
complètement  au  bout  de  peu  de  temps.  Les  produits  de 
la  réaction  ont  été  jetés  dans  de  l'eau  froide.  En  agitant 
le  liquide  et  en  renouvelant  l'eau  quelques  fois,  on  dis- 
sout le  chlorure  de  sodium  formé  et  l'oxychlorure  de 
phosphore  se  décompose;  il  reste  au  fond  de  l'eau  un 
liquide  épais  qui  est  le  chlorure  cherché  et  que  l'on  sépare 
de  l'eau  par  décantation.  On  peut  le  dessécher  en  y  pro- 
jetant quelques  morceaux  de  chlorure  de  calcium. 

Le  produit  ainsi  obtenu  est  soluble  dans  l'éther  et 
dans  l'alcool;  il  ne  se  décompose  que  très-lentement  par 
l'eau.  Son  odeur  est  excessivement  nauséabonde  ;  elle 
rappelle  à  la  fois  l'odeur  caractéristique  des  chlorures 
d'acides  organiques  et  celle  des  sulfures  d'éthyle;  les  va- 
peurs de  ce  chlorure  attaquent  fortement  les  muqueuses 
qu'elles  atteignent,  elles  provoquent  le  larmoiement  et 
occasionnent  une  vive  douleur  quand  on  les  respire. 

Ce  chlorure  est  peu  stable;  au  bout  de  quelque  temps , 
il  abandonne  du  soufre  ;  cette  décomposition  a  lieu  in- 


(  498  ) 
stanlanément  à  chaud.  Il  m'a  été  impossible,  pour  cette  rai- 
son ,  (le  le  débarrasser  des  matières  étrangères  qu'il  aurait 
encore  pu  contenir  en  le  soumettant  à  la  distillation ,  même 
sous  forte  dépression:  la  décomposition  de  ce  chlorure  est 
totale  à  une  température  inférieure  à  120°,  il  se  forme 
un  grand  dépôt  de  soufre  et  la  matière  se  charbonne  com- 
plétenjent.  Pour  ce  motif  je  l'ai  traitée  par  une  lessive  de 
soude  caustique,  afin  de  régénérer  le  sel  qui  lui  avait  donné 
naissance,  et  de  m'assurer,  par  l'analyse  du  produit  ainsi 
obtenu,  que  ce  corps  constituait  bien  le  chlorure  éthyly- 
posulfoneux. 

La  lessive  de  soude  caustique  décompose  lentement  le 
chlorure,  l'application  d'une  douce  chaleur  facilite  la 
décomposition  el  la  conduit  à  bonne  fin.  La  lessive  a  été 
évaporée  à  sec  après  y  avoir  fait  passer  un  courant  d'an- 
hydride carbonique  pour  éliminer  l'excès  de  soude,  puis 
reprise  par  de  l'alcool  absolu.  Le  sel  organique  se  dissout 
dans  l'alcool;  il  a  été  soumis  à  quelques  cristallisations 
jusqu'à  ce  que  ses  propriétés  physiques  dénotassent  un 
degré  de  pureté  satisfaisant.  Ce  sel  jouissait  de  toutes  les 
propriétés  de  Véthylhiiposulfonite  de  sodium;  un  dosage 
du  soufre  et  du  sodium  devait  renseigner  suffisamment 
sur  son  identité;  ce  dosage  m'a  donné  les  résultats  sui- 
vants : 

TROUVÉ.  CALCULÉ  d'apiès  C^H^S'^O-iVa. 

S    =       42,90  o/„  S    =       43,23  o/q. 

Na=       15,36%  Na=       15,54  «/o- 

Il  résulte  de  là  que  le  produit  de  l'action  du  pentachlo- 
rure  de  phosphore  sur  l'éthylhyposulfonite  de  sodium  est 
bien  le  chlorure  du  radical  de  l'acide  éthylhyposulfoneux, 
puisque  les  sels  de  cet  acide  sont  régénérés  par  l'action 


(  499  ) 
de  l'hydrate  de  sodium.  Jl  est  donc  démontré  que  le  pen- 
tachlorin-e  de  phosphore  agit  suivant  l'équation  : 

C-H=S20-Na  -+-  PCl=  =  G^H3S-^0CI  +  PO  CI''  -t-  Na  Cl; 

en  d'autres  termes,  ce  résultat  confirme  ce  que  nous 
savions  déjà  sur  la  nature  des  hyposulfonites;  la  formule 
exprimant  leur  structure  doit  donc  réellement  être 
XSSOOR'  et  non 

0 

II 

X  —  s  —  s  R'; 

II 
0 

il  serait  en  effet  difficile,  dans  ce  dernier  cas,  sinon  impos- 
sible, d'interpréter  l'action  du  pentachlorure  de  phos- 
phore. 

II.  Action  du  penladdorure  de  phosphore  sur  les 
éthylhyposul fîtes. 

L'action  du  pentachlorure  de  phosphore  sur  les  éthyl- 
hyposulfites  a  beaucoup  d'analogie  avec  l'action  du  même 
chlorure  sur  les  hyposulfonites. 

Comme  précédemment  j'ai  fait  réagir  une  molécule  de 
pentachlorure  de  phosphore  sur  une  molécule  d'éthylhy- 
posullite  de  sodium.  La  réaction  a  lieu  spontanément,  la 
masse  se  liquéfie  en  s'échauffanl.  On  peut  débarrasser  le 
chlorure  éthylhyposulfureux  formé  du  chlorure  de  sodium 
et  de  l'oxychlorure  de  phosphore  par  un  lavage  à  l'eau 
froide.  Après  décantation  on  sèche  le  produit  au  moyen 
du  chlorure  de  calcium  ;  on  obtient  ainsi  un  liquide  parfai- 
tement transparent. 

Ce  chlorure  est  comme  le  précédent  soluble  dans  l'éther 
et  dans  l'alcool;  il  est  beaucoup  moins  stable  que  le  chlo- 


(  500  ) 

rure  hyposulfoneux  ;  abandonné  à  lui-même,  il  se  décom- 
pose en  produisant  du  bisulfure  d'éthyle.  Quand  on  essaye 
de  le  distiller,  même  dans  le  vide  le  plus  parfait,  il  se 
décompose. 

La  manière  dont  cette  décomposition  se  fait  ne  manque 
pas  d'intérêt.  A  mesure  que  la  température  augmente ,  il 
se  dégage  de  l'anhydride  sulfureux,  puis  il  distille  du 
chlorure  de  sulfuryle,  et  enfin  du  bisulfure  d'éthyle.  Le 
chlorure  de  sulfuryle  ainsi  obtenu  a  été  distillé  de  nou- 
veau sous  pression  ordinaire  et  a  bouilli  à  la  température 
constante  de  70" — -li";  il  a  engendré  de  l'acide  sulfurique 
par  sa  décomposition  au  moyen  de  l'eau  ;  il  ne  reste  donc 
aucun  doute  sur  son  identité.  C'est  également  en  déter- 
minant le  point  d'ébullition  du  bisulfure  d'éthyle  que  je 
me  suis  assuré  de  l'identité  de  ce  produit.  Il  a  distillé  à  la 
température  de  149". 

Pour  interpréter  ce  résultat  considérons  deux  molécules 
de  chlorure  éthylsulfureux  : 

C^HSSSO^CI 
C-2H»SS0^CI 

et  enlevons  (C2H3)2S2,  on  voit  qu'il  reste  Cl  0^  S— S  0^  CI, 
qui  est  le  chlorure  de  l'acide  dithionique  et  qui  pourrait 
donner  par  sa  décomposition  sous  l'influence  de  la  chaleur 
les  produits  observés  lors  de  la  distillation  du  chlorure 
éthylhyposulfureux  ainsi  : 

Cl  0^  s  —  SO'  Cl  =  C12  so^  +  so^ 

Afin  de  m'assurer  si  celte  manière  de  voir  pouvait  être 
justifiée,  j'ai  fait  réagir  deux  molécules  de  pentachlorure 
de  phosphore  sur  une  molécule  de  dithionate  de  sodium 
à  la  température  de  170°  dans  un  tube  scellé  à  la  lampe, 


(  ^01  ) 
la  réaction  n'ayant  pas  lieu  à  la  température  ordinaire. 
Après  cinq  heures  d'action,  j'ai  ouvert  le  tube,  il  s'est 
dégagé  des-  torrents  d'anhydride  sulfureux  ;  la  masse  qui 
se  trouvait  dans  le  tube  formait  une  pâte  très-épaisse; 
je  l'ai  épuisée  à  l'éther  afin  de  dissoudre  les  chlorures 
d'acides  formés.  J'ai  soumis  le  résidu  de  l'évaporation 
spontanée  de  l'éther  à  la  distillation  fractionnée  ;  une 
première  partie  a  distillé  entre  65°  et  76°,  et  une  seconde 
au  delà  de  100°.  La  première  partie  a  été  reconnue,  après 
rectification,  pour  être  du  chlorure  de  sulfuryle;  la  se- 
conde était  de  l'oxychlorure  de  phosphore.  Ainsi  le  penta- 
chlorure  de  phosphore  ne  donne  point  par  son  action  sur 
les  dithionates  un  chlorure  stable  à  170°,  mais  qui  se 
décompose  en  chlorure  de  sulfuryle  et  en  anhydride  sul- 
fureux. 11  serait  intéressant  de  s'assurer  si  l'on  ne  pour- 
rait former  CI-  S-  0'*  par  synthèse  directe,  en  faisant 
passer  un  courant  d'anhydride  sulfureux  dans  du  chlorure 
de  sulfuryle  convenablemeut  refroidi. 

On  voit  par  ces  expériences  que ,  lors  de  la  distillation, 
le  chlorure  éthylhyposulfureux  se  comporte  comme  un 
mélange  de  chlorure  de  l'acide  dithionique  et  de  bisulfure 
d'éthyle.  M.  H.  Bunte  avait  déjà  constaté  que  les  sels  de 
l'acide  éthylhyposulfureux  se  comportaient  d'une  ma- 
nière tout  analogue  lors  de  leur  décomposition  par  la 
chaleur. 

Ne  pouvant  donc  purifier  ce  chlorure  par  distillation , 
je  l'ai  traité  par  la  soude,  et  j'ai  régénéré  ainsi  l'élhylhy- 
posulfite  de  sodium.  Pendant  cette  réaction  une  grande 
quantité  de  matière  se  décompose,  car  la  soude  saponifie 
l'éthylhyposulfite  de  sodium  déjà  régénéré  et  donne  lieu  à 
un  mélange  de  sulfate  et  d'hyposulfite  de  sodium  avec  pro- 
duction de  sulfures  d'éthyle;  il  n'y  a  que  peu  d'éthylhypo- 


(  o02  ) 
sulfite  qui  échappe  à  la  réaction.  Vu  la  faible  quantité  de 
substance  que  j'ai  pu  ainsi  recueillir,  j'ai  dû  me  borner  à 
déterminer  le  rapport  du  sodium  au  soufre  afin  de  n'avoir 
pas  besoin  de  conduire  la  purification  du  composé  fort  loin. 
Cette  détermination  m'a  donné  le  résultat  suivant  : 

"^^  N'a  :  s  =  0,Cô  :  1,23  donc  comme  I  :  2. 

Il  ne  reste  donc  pas  de  doute  sur  l'existence  du  chlorure 
éthylhyposulfureux. 

J'ai  essayé  d'appliquer  à  ce  chlorure  la  réaction  qui  a 
permis  à  MM.  Robert  Otto  et  H,  Ostrop  (Zcitschrift  f. 
Chemie,  1866,  p.  599),  d'obtenir  les  acides  sulfoneux,  en 
vue  d'opérer  ainsi  la  transformation  des  élhylhyposulfites 
en  éthyhyposulfonites.  J'ai  traité  pour  cela  le  chlorure 
dissous  dans  l'éther  par  l'amalgame  de  sodium;  la  réaction 
devait  se  passer  comme  le  montre  l'équation  suivante  : 

C^  H^S'O^Cl  -f-  Na2  =  C-2  H^  S^  O^Na  -+-Na  Cl. 

cependant  elle  a  lieu  d'une  façon  différente:  le  sodium 
agit  sur  le  chlorure  comme  sur  les  hyposulfites  inorga- 
niques :  il  met  un  mercaptate  en  liberté,  c'est-à-dire  qu'il 
se  glisse  entre  les  deux  atomes  de  soufre.  Quand  on  reprend 
par  l'eau  les  produits  de  la  réaction,  on  n'obtient  que  du 
mercaptan  et  des  produits  inorganiques.  Il  m'a  été  impos- 
sible de  constater  la  présence  d'éthylhyposulfonite  de  so- 
dium. On  voit  que  ce  chlorure  joue  le  rôle  d'un  éther. 

Le  fait  de  l'existence  de  chlorures  d'acides  organiques, 
dont  la  molécule  ne  renferme  qu'un  atome  d'oxygène  à 
côté  de  deux  atomes  de  soufre,  a  de  l'importance;  ces 
corps  pourront  être  le  point  de  départ  de  nombreuses 
classes  de  composés  intéressants.  I/étude  de  ces  composés 
m'occupe  pour  le  moment. 


(  o05  ) 


Notice  sur  Faction  du  pentac/ilorure  de  phosphore  sur  les 
hyposulfites  inorganiques  ;  par  M.  Walthère  Spring. 

En  1870  M.  Buchanan  publia  dans  les  Bulletins  de  la 
Société  chimique  allemande  une  note  sur  Taclion  du  pen- 
tachlorure  de  phosphore  sur  les  hyposulfites;  il  avait 
obtenu,  en  distillant  deux  molécules  de  pentachlorure  de 
phosphore  avec  une  molécule  d'hyposuHîte  de  plomb,  de 
l'acide  chlorhydrique,  de  l'anhydride  sulfureux,  de  l'oxy- 
chlorure  de  phosphore,  du  sulfochlorure  de  phosphore, 
des  traces  de  chlorure  de  thionyle ,  mais  pas  de  chlorure 
de  sulfuryle;  il  crut  donc  pouvoir  terminer  sa  note  par 
cette  conclusion  :  «  il  résulte  de  là  que  Von  ne  peut  pas 
considérer  l'acide  hyposulfureux  comme  de  l'acide  sulfti- 
rique ,  dans  lequel  un  oxhydrile  serait  remplacé  par  un 
sulflirydryle ,  car,  dans  ce  dernier  cas,  on  devrait  obtenir 
nécessairement  du  chlorure  de  sulfuryle  lors  de  l'action 
du  pentachlorure  de  phosphore  sur  les  hyposulfites.  »  Cette 
conclusion  étant  en  contradiction  manifeste  avec  les  résul- 
tais auxquels  je  suis  arrivé  par  les  réactions  que  j'ai  insti- 
tuées pour  découvrir  la  constitution  de  l'acide  hyposulfu- 
fureux,  il  devenait  intéressant  de  rechercher  d'où  elle 
pouvait  provenir. 

Pour  que  l'on  puisse  affirmer  qu'il  soit  nécessaire  que 
le  pentachlorure  de  phosphore  donne  naissance  à  du  chlo- 
rure de  sulfuryle  lors  de  son  action  sur  un  hyposulfite,  si 
ce  dernier  est  réellement  un  sulfate  dans  lequel  un  oxhy- 
dryle  serait  remplacé  par  un  sulfhydryle  ,  il  faudrait  que  le 
pentachlorure  de  phosphore,  en  réagissant  sur  im  sulfate, 
donnât  aussi  du  chlorure  de  sulfuryle.  C'était  ce  que  l'on 


(  504  ) 
croyait  à  l'époque  où  M.  Buchanan  a  fait  ses  expériences, 
d'après  les  travaux  de  Willamson  (1),  de  Hugo  Schiff  (2) 
et  de  Carius  (3);  récemment  MM.  Michaelis  et  Schiffer- 
decher  (4)  et  M.  Geuther  (o)  ont  démontré  que  le  chlorure 
de  sulluryle  ne  pouvait  être  obtenu  dans  aucun  cas  par 
l'act-on  du  pentachlorure  de  phosphore  sur  les  sulfates; 
les  réactions  se  passent  suivant  les  équations  : 

!•  2Pb  SO*  -t-  ôP  C|3  =  S-^  05  CP  -+-  ôPO  Cl'  -+-  2Pb  CI' 

2»  S-2  OS  Cl*  -4-  2P  C|3  =  2S  0^  H-  P  G13  0  -4-  P  CF. 

Plus  récemment  encore,  M.  Melsens,  dans  son  beau 
travail  sur  le  chlorure  de  sulfuryle  (6),  a  démontré  égale- 
ment que  l'on  ne  pouvait  l'obtenir  par  l'action  du  penta- 
chlorure de  phosphore  sur  l'acide  sulfurique. 

J'ai  repris  toutes  ces  expériences  et  les  résultats  aux- 
quels je  suis  arrivé  corroborent  point  pour  point  ceux  de 
ces  chimistes.  Je  crois  inutile  d'entrer  dans  des  détails 
concernant  ces  expériences,  puisqu'elles  ne  sont  en  quel- 
que sorte  que  la  copie  de  celles  qu'ont  faites  MM.  Michaelis 
et  Geuther. 

On  doit  donc  regarder  comme  démontré  que  le  penta- 
chlorure de  phosphore  ne  donne  pas  de  chlorure  de  sulfu- 
ryle  lors  de  son  action  sur   les  sulfates,  mais  bien  de 


(1)  Proceediiiy  of  the  London  royal  Society ,  t.  VII ,  p.  1 1. 

(2)  Ueber  die  Einwirkuug  des  PC\^  auf  einige  anorganische  Saueren. 
Ax>.  D.  Chem.  und  Pharm.,  l.  Cil,  p.  111. 

(5)  Jahresberichle  d.  Chemie,  1858,  p.  93  (en  note). 

(4)  Jenaïsche  Zeitschrift  f.  Med.  u.  Nal.,  t.  VI,  pp.  253  et  292,  et 
Berichte  der  d.  ch.  GeselL,  t.  V,  1872,  p.  924. 

(5)  Berichte  der  d.  ch.  GeselL,  l.  V,  1872,  p  923  (en  note). 

(6)  Tome  XXII  des  Mémoires  couronnés  et  autres  Mémoires,  publiés 
par  l'Acadéuiie  royale  de  Belgique,  1873,  in-S". 


(  505  ) 
l'anhydride  sulfureux  et  des  oxychlorures  de  phosphore  ; 
M.  Buchanan  ayant  obtenu  exactement  les  mêmes  produits 
plus  du  P  S  Cl'^  pendant  ses  expériences ,  il  en  résulte  que 
l'acide  hyposulfureux  se  comporte,  en  présence  du  P  CI-', 
comme  de  l'acide  sulfurique  dans  lequel  un  oxhydryle 
serait  remplacé  par  un  sulfhydryle. 


—  La  classe  se  constitue  en  comité  secret  pour  arrêter 
la  liste  des  candidatures  aux  places  vacantes. 


2'"*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  35 


(  506  ) 


CLASSE   DES   LETTRES. 


Séance  du  '12  octobre  1874. 

M.  R.  Chalon  ,  directeur 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  Ch.  Steur,  J.  Grandgagnage,  J.  Rou- 
lez, Gachard,  P.  De  Decker,  Paul  Devaux,  J.-J.  Haus, 
M.-N.-J.  Leclercq,  Ch.  Faider ,  le  baron  Kervyn  de  Letten- 
hove,  J.-J.  Thonissen,  Th.  Juste,  le  baron  G.  Guillaume, 
F.  Nève,  Alph.  Wauters,  G.  Nypels,  Alph.  Le  Roy, 
membres i  J.  Nolet  de  Brauwere  van  Steeland,  Aug.  Sche- 
1er,  associés;  Edm.  Poullet,  correspondant. 

M.  Éd.  Mailly,  correspondant  de  la  classe  des  sciences, 
assiste  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  Guillaume  Guizot  annonce  la  mort  de  son  père, 
M.  François-Pierre-Guillaume  Guizot,  décédé  au  Val- 
Richer  le  12  septembre  1874.  M.  Guizot  était  l'un  des  plus 
anciens  associés  de  la  classe. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  s'est  empressé  d'exprimer  à  la 
famille  du  défunt  les  sentiments  de  condoléance  de  la 
Compagnie. 


(  ^07  ) 

—  M.  le  Ministre  de  l'inlérieur  fait  parvenir,  pour  la 
bibliothèque  de  l'Académie,  les  ouvrages  suivants  : 

1"  Exposé  de  la  situation  administrative  des  provinces 
pour  187 i;  9  vol.  in-8"; 

2°  Les  fondateurs  de  la  monarchie  belge  :  Louis  de 
Potter,  par  M.  Th.  Juste;  1  vol.  in-S"; 

3"  Gregorii  Barhebrœi  Chronicon  ecclesiasticum ,  to- 
mus  II;  gr.  in -8"  à  2  col.; 

4°  Anthologie  belge,  publiée  par  Amélie  Struman- 
Picard  et  Godefroid  Kurth  ;  in-I2. 

Remercîments. 

—  Il  est  fait  hommage,  par  les  auteurs,  des  ouvrages 
suivants  : 

\°  L'armée  belge.  Histoire  et  état  militaire,  par  M.  le 
lieutenant  général  baron  Guillaume;  in-8°; 

2"  Mélanges  d'histoire  nationale.  Rodolphe  de  Vautra- 
vers  et  le  comte  Charles  de  Cobenzl  d'après  des  documents 
inédits,  par  M.  Alph.  Rivier;  in-8''; 

5°  Un'  epoca  délia  mia  vita,  par  M.  le  comte  Giovanni 
Arrivabene,  associé  de  la  classe;  in-8''; 

A"  Anciens  registres  paroissiaux.  Tables  alphabétiques, 
par  M.  Heuschling;  in-S". 

M.  Edmond  Poullet,  en  offrant  à  la  classe,  au  nom  de 
M.  Eugène  Poswick,  le  tome  P''  de  son  Histoire  généalo- 
gique et  biographique  de  la  noblesse  Umbourgeoise ,  lit  la 
note  suivante  au  sujet  de  ce  volume  : 

«  Cet  ouvrage,  de  sévère  héraldique,  édité  avec  luxe, 
orné  de  nombreuses  gravures  sur  bois  d'un  gracieux  cachet, 
enrichi  d'eaux-fortes  dont  quelques-unes  sont  fort  bien 
réussies,  intéresse  les  historiens  au  moins  autant  que  les 


(  508  ) 
généalogistes.  Il  conlienl  de  précieux  détails  sur  les  terres 
et  les  châteaux  de  l'ancien  duché  et  de  ses  annexes  les 
pays  d'oulre-Meuse,  explique  le  mécanisme  et  l'organisa- 
tion de  leurs  anciennes  institutions;  renferme  des  ren- 
seignements hiographiques  complets  et  en  grande  partie 
no"veaux,  sur  une  partie  de  hauts  fonctionnaires  de  la 
période  autrichienne,  fonctionnaires  pris,  comme  on  sait, 
en  grand  nombre  dans  les  rangs  de  la  noblesse  et  du  patri- 
ciat  limbourgeois ,  parmi  lesquels  je  me  bornerai  à  nommer 
les  Thisquet,  les  Wynants,  les  Limpens,  les  Legro.  Je  crois 
pouvoir  ajouter  qu'il  sert  en  quelque  sorte  de  préface  à  une 
histoire  complète  du  régime  constitutionnel  et  coutumier 
de  la  vieille  province,  une  des  moins  connues  des  anciens 
Pays-Ras  catholiques,  ouvrage  qui  comblera  une  regret- 
table lacune  dans  notre  littérature  historique.  » 

Des  remercîmenls  sont  adressés  aux  auteurs  de  ces  dif- 
férents dons. 

—  Les  institutions  scientifiques  et  littéraires  suivantes 
accusent  réception  du  récent  envoi  de  publications  acadé- 
miques :  l'Institut  national  de  France,  la  Bibliothèque 
communale  de  la  ville  d'Amiens,  les  Archives  générales 
du  département  du  Nord,  la  Société  des  antiquaires  de 
Picardie,  la  Société  philosophique  et  littéraire  de  Liver- 
pool,  la  Société  littéraire  et  philosophique  de  Manchester, 
la  Société  Philomathie  de  Neisse  et  la  Société  théologique 
de  la  fondation  Teyler,  à  Harlem. 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  dépose  sur  le  bureau  le 
premier  exemplaire  du  tome  XXXVHI  des  Mémoires  cou- 
ronnés in-4'',  qui  vient  de  paraître. 


(  o09  ) 

Ce  volume  renferme,  en  ce  qui  concerne  la  classe  des 
lettres,  le  mémoire  intitulé  :  Essai  sur  l'histoire  du  droit 
criminel  dans  Vancienne  principauté  de  Liège,  que  la 
classe  a  couronné  le  18  mai  1871.  Il  a  pour  auteur 
M.  Edmond  Pouliet,  correspondant  de  l'Académie. 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  sont  renvoyés  à  des 
commissaires  : 

X"  Les  écoles  et  Valphabet  des  Taniouls,  par  M.  Ph.Van 
der  Haeghen.  —  Commissaire  :  M.  Nève. 

2"  La  statistique  internationale,  son  origine  et  ses  pro- 
grès,  par  M.  X.  Heuschling.  —  Commissaires  :  MM.  Faider 
et  De  Decker. 


MONUMENT    QUETELET. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  présente  la  liste  de  souscrip- 
tion pour  le  monument  à  élever  à  Bruxelles  à  la  mémoire 
de  M.  Ad.  Quetelet. 


RAPPORTS. 


MM.  Th.  Juste  etGachard  donnent  lecture  de  leurs  rap- 
ports sur  un  mémoire  manuscrit  de  M.  J.-J.  De  Smet, 
intitulé  :  Notice  sur  les  premières  années  de  don  Juan 
d'Autriche,  fils  de  Charles-Quint. 

Conformément  aux  conclusions  de  ces  rapports,  la  classe 
vole  l'impression  du  travail  de  M.  De  Smet  au  Bulletin. 


(  510 


COMMUiMCATIONS  ET  LECTURES. 


M.  Paul  Devaiix  donne  lecture  de  la  première  partie 
d'un  travail  Sttr  les  gneires  médiqiies. 


ISotice  sur  les  premières  années  de  don  Juan  d'Autriche, 
fils  de  Charles-Quint  ;  par  M.  le  chanoine  J.  De  Smet , 
membre  de  l'Académie. 

Le  seizième  siècle,  si  fécond  en  guerres  et  surtout  en 
guerres  civiles,  produites  la  plupart  par  la  prétendue 
réforme,  essentiellement  révolutionaire,  dut  être  fécond 
aussi  en  guerriers,  qui,  combattant  sous  des  étendards 
opposés,  se  distinguèrent  par  leur  valeur  autant  que  par 
leurs  talents  militaires.  Aucun  d'eux  cependant  ne  conquit 
une  renommée  aussi  pure  et  aussi  brillante  que  le  fils  de 
Charles-Quint,  qui  gouverna  quelque  temps  nos  provinces 
et  qui  les  eût  sans  doute  pacifiées  par  son  énergie  et  sa  pru- 
dence, si  une  mort  prématurée  n'avait  arrêté  sa  marche 
victorieuse.  A  une  époque  moins  prodigue  que  la  nôtre  de 
titres  et  de  surnoms  glorieux,  on  lui  a  donné  celui  de 
héros,  et  la  postérité  ne  l'a  point  contesté. 

Quelques  historiens  ou  biographes  ont  fait  naître  don 
Juan  d'Autriche  en  154S;  d'autres,  en  plus  grand  nombre, 
ont  fixé  sa  naissance  à  l'an  1547,  mais  elle  doit  être 
placée  en  1546.  En  effet,  une  médaille  qui  fut  frappée  en 
l'honneur   de  la  journée  fameuse  de  Lépante,  en  1571 , 


(  511  ) 
porte  expressément  que  le  jeune  vainqueur  n'avait  alors 
tque  vingt-quatre  ans;  or  on  sait  que  la  bataille  eut  lieu  le 
7  octobre  1571  (1).  De  plus,  un  acte  authentique  lu  aux 
cortès  de  Tolède,  du  mois  de  février  1560,  fait  foi  que 
don  Juan  n'avait  pas,  à  cette  date,  accompli  sa  quatorzième 
année.  On  ajoute  que  l'événement  eut  lieu  le  24  février, 
mais  cette  assertion  n'est  appuyée  sur  aucun  monument 
historique  et  semble  calquée  sur  l'anniversaire  de  la  nais- 
sance de  Charles-Quinl. 

Dans  les  cours  on  ne  manque  jamais  de  ces  curieux  que 
les  Anglais  ont  stigmatisés  par  le  nom  pittoresque  de 
cavydroppers  et  que  nous  appelons  Liiistervînken.  Cette 
fois  le  profond  secret  qu'on  gardait  aiguisa  leur  pénétra- 
tion et  ils  parvinrent  à  découvrir  qu'il  était  né  à  l'empe- 
reur, veuf  depuis  longtemps  (2),  un  fils  naturel,  dont  la 
mère  n'était  autre  que  Barbe  Blomberg,  jeune  lille  de 
Ratisbonne,  d'une  beauté  extraordinaire,  mais  d'une 
extraction  commune.  Ce  fds,  ajoutaient-ils,  avait  reçu  au 
baptême  le  nom  de  Geronimo. 

Le  profond  mystère  dont  on  enveloppait  cet  événe- 
ment porta  la  plupart  des  contemporains  à  penser  que  le 
nom  donné  à  la  mère  n'était  pas  réel,  mais  qu'il  n'avait 
été  imaginé  que  pour  cacher  une  intrigue  avec  une  per- 
sonne haut  placée  à  la  cour.  Les  Espagnols,  qui  pensaient 
que  tout  ce  qui  se  rapprochait  de  la  personne  de  leur 
monarque  devait  porter  le  cachet  de  la  grandeur,  adop- 
tèrent volontiers  cette  version,  et  les  nombreux  ennemis 
qu'avait  l'empereur  en  Allemagne  exploitèrent  mécham- 

(1)  Lafuente,  ffisloria  gêner,  de  Espana,  l.  XIII,  p.  437.  Note. 
(-2)  Lafuenle,  Revista  de  ambes  Mundosy  n"  5. 


(  512  ) 
ment  cette  faiblesse  et  osèrent  même  parler  bientôt  d'adul- 
tère et  d'inceste. 

A  l'étranger,  le  R.  P.  Strada  et  le  cardinal  Bentivoglio 
eurent  la  faiblesse  d'adhérer,  sans  hésiter,  à  l'opinion  des 
Espagnols. 

L opinion  publique  s'accorde  cependant  aujourd'hui, 
assez  généralement,  pour  reconnaître  en  Barbe  Blomberg 
la  véritable  mère.  Elle  fut  mariée  plus  tard  à  un  Allemand, 
nommé  Jérôme  Kegell,  qui  fut  nommé  commissaire  aux 
revues,  et  la  veille  de  sa  mort  Charles-Quint  assura  à  cette 
femme  un  revenu  de  deux  cents  florins  (1). 

L'empereur  n'apprit  qu'avec  une  vive  indignation  les 
imputations  odieuses  qu'on  s'était  permises  contre  lui  et 
qu'on   lui  avait  cachées  quelque   temps;  il  résolut  d'y 


(1)  Après  la  naissance  de  don  Juan,  celte  femme  avait  été  mariée  à 
Jérôme  Kegell,  qui  mourut  en  1569;  elle  lui  avait  donné  deux  fils,  dont  le 
plus  jeune  se  noya  huit  jours  après  la  mort  de  son  père.  Une  lettre  du  duc 
d'Albe  au  roi  Philippe  II  (datée  du  29  juin  1569)  nous  apprend  que  Barbe 
Blomberg  avait  beaucoup  de  dettes,  et,  comme  il  est  généralement  connu 
qu'elle  est  la  mère  de  don  Juan ,  dit-il,  on  ne  peut  se  dispenser  de  faire 
quelque  chose  pour  elle.  Dans  sa  réponse  (du  26  septembre)  le  roi  dit 
qu'on  doit  l'empêcher  de  se  remarier,  mais  lui  permettre  de  se  tixerdans 
les  Pays-Bas  et  pourvoir  à  son  entretien  :  «  Cette  a^atre,  assure  Philippe, 
cause  beaucoup  de  soucis  à  mon  frère ,  faites  ce  qui  est  convenable  et 
donnez-m'en  avis.  Le  duc  voulut  l'envoyer  à  Mons ,  mais  la  dame  s'y 
opposa  avec  une  grande  violence.  Elle  finit  par  déclarer  qu'elle  s'établirait 
à  Gand,  dont  les  habitants  parlaient  une  langue  qu'elle  comprenait.  Plus 
tard  elle  voulut  à  toute  force  partir  pour  l'Espagne,  et  l'on  eut  grande  peine 
à  la  retenir,  car,  dit  le  duc  d'Albe,  elle  a  une  tête  terrible.  On  se  plaignait 
surtout  de  sa  dissipation  ;  ses  seize  domestiques  coiitaient  au  roi  1,226 
livres,  sa  table  et  celle  de  son  fils  Edmond  4,100  livres,  sans  compter  les 
dépenses  à  faire  pour  son  mobilier, son  chevalet  son  cabriolet  (Compte  du 
secrétaire  Alboriios,  envoyé  à  Madrid  le  24  septembre  1571). 


(  al3) 
mettre  un  terme.  Après  avoir  enlevé  l'enfant  à  sa  mère, 
qui  l'avait  gardé  trois  ans,  on  le  confia  à  un  musicien 
delà  maison  de  l'empereur,  nommé  Massi  et  Flamand  de 
naissance  (I).  Cet  homme  s'établit  avec  son  pupille  au  vil- 
lage de  Leganès,  non  loin  de  Madrid,  et  s'engagea  par 
contrat  (2)  à  nourrir  l'enfant  comme  son  propre  fils, 
moyennant  cent  florins  à  toucher  de  suite  et  plus  tard 
cinquante  florins  par  an.  C'était  là  sans  doute  une  maigre 
dépense  pour  le  fds  de  l'empereur  et  roi,  mais  cela  même 
cachait  mieux  son  origine. 

On  n'avait  pas  songé  à  donner  la  moindre  instruction  à 
l'enfant,  et  il  n'en  reçut  d'autre  en  efl'etque  celle  du  curé 
delà  paroisse  qui, étant  aussi  peu  initié  que  Massi  au  secret 
de  l'empereur,  n'avait  garde  de  s'imaginer  que  parmi  ses 
turbulents  auditeurs  se  trouvait  un  fils  des  Césars;  il  ne 
lui  accordait,  comme  il  était  juste,  aucune  distinction. 
Peut-être  l'empereur  pensait-il,  et  nous  n'oserions  lui 
donner  tort,  que,  les  éléments  de  la  religion  exceptés,  on 
ne  doit  pas  sitôt  commencer  l'instruction  scientifique  des 
enfants.  La  santé  de  Geronimo  profita  certes  beaucoup  de 
cette  méthode  et  déjà  il  surpassait  tous  ses  compagnons 
par  son  courage  naissant  et  se  montrait  à  leur  tête  dans 
tous  leurs  jeux  rustiques,  en  même  temps  qu'il  préludait 
à  ses  exploits  belliqueux,  en  faisant  la  guerre  aux  oiseaux, 
dont  il  faisait  un  grand  carnage  au  moyen  d'une  ballhtilla 
ou  petite  arbalète.  Cet  état  de  choses  ne  pouvait  cepen- 
dant se  prolonger  sans  avoir  des  inconvénients  graves 


(1)  Ce  nom  paraît  être  celui  d'un  Wallon. 

(2)  Une  copie  de  ce  document  se  trouve  dans  les  Papiers  d'État  du 
cardinal  Granvelle,  t.  IV,  pp.  499,  oOO. 


(  514  ) 
pour  l'éducation  d'un  fils  de  roi.  L'empereur  s'en  aperçut 
et,  voyant  son  enfant  parvenu  à  sa  septième  année,  il  jugea 
qu'il  était  temps  de  lui  donner  un  précepteur. 

Don  Louis  Quixada. 

Pctrmi  les  belles  qualités  ou  plutôt  les  grâces  d'état  que 
Charles  avait  reçues  du  ciel,  on  admirait  particulièrement 
son  bonheur  dans  le  choix  de  ses  officiers  et  de  ses  fonc- 
tionnaires. Ce  bonheur,  il  l'eut  encore  d'une  manière  sin- 
gulière dans  le  choix  qu'il  fît  du  gardien  de  son  fils.  Il  obtint 
pour  ces  fonctions,  toutes  de  confiance,  son  fidèle  major- 
dome, don  Louis  de  Quixada,  dévoué  d'esprit  et  de  cœur  à 
la  foi  catholique,  d'une  loyauté  à  toute  épreuve,  et  surtout 
d'une  délicatesse  extrême  sur  l'honneur,  qui  le  rendait  le 
vraitypedechevaliercastillan  dans  ses  formes  les  plus  belles. 
Sa  femme,  dona  Magdalena  de  Ulloa,  sœur  du  marquis  de 
Motas,  excellait  plus  encore  par  ses  vertus  que  par  son  rang 
et  rappelait  en  plusieurs  points  la  femme  forte  de  l'Écri- 
ture. C'était  à  elle  naturellement  que  revenait  la  première 
éducation  du  jeune  homme  et  comme  son  mariage  était 
demeuré  stérile,  elle  n'eut  aucune  peine  à  lui  vouer  une 
véritable  affection  de  mère.  S'il  montra  toujours  un  goût 
parfait  et  une  courtoisie  peu  commune,  c'est  bien  plus  à  la 
dame  qu'au  chevalier  qu'en  appartenait  l'honneur  (1). 

(1)  Après  la  monde  Quixada,  Don  Juan  écrivit  à  sa  veuve:  '•  Chère  mère, 
si  douieureusenient  devenue  veuve  !  je  vous  reste  seul ,  et  j'appartiens  à 
vous  réellement ,  car  c'est  pour  moi  que  Louis  est  mort  et  que  vous  avez 
été  frappée  par  cette  douleur.  Soulagez-la  par  votre  sagesse  ordinaire.  Plût 
à  Dieu  que  je  fusse  là  en  ce  moment  pour  sécher  vos  larmes  ou  pour  mêler 
les  miennes  aux  vôtres  !  Adieu ,  chère  et  vénérée  mère  !  et  priez  Dieu  qu'il 
ramène  votre  lils  de  ces  guerres  en  vos  bras.  » 

Stirling ,  Cloisler  Live  of  Charles  the  Fiflh. 


(  Slo  ) 

Quixada,  qui  accepta  cette  charge  par  pur  dévouement 
et  sans  aucun  titre,  s'établit  avec  sa  famille  dans  sa  mai- 
son de  campagne  de  Viliagarcia,  près  de  Yalladolid,  où 
l'on  respirait  un  air  aussi  pur  qu'à  Leganès.  De  son  côté, 
il  ne  négligeait  rien  pour  répondre  parfaitement  aux  vues 
de.son  souverain  et  donnait  tant  de  preuves  du  vif  intérêt 
qu'il  portait  à  son  élève  que  toute  autre  femme  que  dona 
Magdalena  en  aurait  pu  concevoir  d'étranges  soupçons. 
Car  son  mari,  quoique  sûr  de  la  discrétion  de  sa  femme, 
n'avait  pas  été  autorisé  à  lui  communiquer  le  secret  du 
prince.  Il  lui  avait  simplement  présenté  Geronimo  comme 
le  fils  d'un  homme  puissant  et  son  ami  particulier.  Cepen- 
dant la  confiance  de  Magdalena  fut  mise  à  une  rude 
épreuve.  Le  feu,  avant  pris  au  château,  fit  en  peu  d'heures 
des  progrès  alarmants  :  après  avoir  en  quelques  mots 
donné  à  ses  serviteurs  des  ordres  pour  l'éteindre,  Quixada 
se  hâta  de  prendre  son  fils  adoptif  entre  ses  bras,  et  ne 
revint  pour  rendre  le  même  service  à  sa  compagne  qu'après 
avoir  vu  son  élève  en  sûreté.  Toute  autre  femme  aurait 
sans  doute  conclu  que  celui-ci  était  le  fils  du  majordome; 
mais  elle  en  jugea  tout  autrement  et  crut  que  l'enfant 
devait  appartenir  à  une  famille  beaucoup  plus  haut  placée 
et  plus  digne  de  sacrifices  que  celle  dont  son  mari  lui 
avait  parlé.  Si  les  bruits  calomnieux  de  Ralisbonne  étaient 
parvenus  aux  oreilles  de  la  matrone  et  si  les  traits  de 
l'empereur  lui  eussent  été  plus  familiers,  elle  eût  pu  lire 
dans  les  yeux  mêmes  de  Geronimo  qui  était  le  grand  per- 
sonnage en  question,  mais  elle  crut  qu'il  ne  lui  était  pas 
permis  de  scruter  davantage  ce  qu'on  appelait  un  secret 
de  haute  importance. 

Le  jeune  homme  lui  était  plus  cher  encore  qu'à  son  époux 
et  il  se  montrait  digne  de  la  tendresse  de  sa  mère  adoptive. 


(  516  ) 

Par  le  même  motif  sans  doute  de  cacher  la  présence  de 
l'enfant  à  Villagarcia,  le  bon  chevalier  correspondait  rare- 
ment avec  l'empereur  à  son  sujet,  et  encore  d'une  manière 
à  faire  croire  qu'il  s'agissait  d'un  tout  autre  adolescent. 
Dans  une  de  ces  lettres,  aussi  courtes  que  rares,  il  assure 
son  auguste  correspondant  que  le  jeune  homme  a  une  par- 
faite santé  :  il  l'instruit,  dit-il,  dans  les  langues  latine  et 
française;  pour  la  première,  l'enfant  ne  montrait  que  du 
dégoût;  il  faisait  plus  de  progrès  dans  l'autre  et  pronon- 
çait bien  les  mots  qu'il  en  avait  appris.  Faire  des  armes, 
aller  à  cheval ,  se  livrer  aux  violents  exercices,  c'étaient  là 
ses  goûts  favoris  (1).  Charles  sourit  sans  doute  à  cette 
peinture  qui  lui  retraçait  trait  pour  trait  en  son  esprit  ce 
qu'il  était  lui-même,  lorsqu'il  obéissait  encore  au  seigneur 
de  Chièvres  et  à  Adrien  d'Utrecht. 

Cependant  l'Europe  apprit  comme  un  coup  de  foudre  une 
nouvelle  qui  parut  d'abord  devoir  ébranler  tous  ses  États. 
Le  monarque  si  puissant,  maître  de  tant  de  royaumes, 
qui  pouvait  dire  avec  vérité  que  le  soleil  ne  se  couchait 
jamais  sur  ses  domaines,  Charles-Quint,  encore  dans  la 
vigueur  de  l'âge,  mais  accablé  par  des  travaux  sans  cesse 
renaissants  et  rongé  par  des  infirmités  de  tout  genre, 
venait  de  descendre  du  faîte  des  grandeurs,  pour  s'assurer 
d'un  royaume,  où  l'on  n'a  pas  de  rivaux  à  craindre. 

Il  aurait  voulu  se  dessaisir  de  tous  ses  royaumes  en 
faveur  de  son  Mis,  don  Philippe,  et  avait  fait  même  des 
tentatives  à  cet  effet  auprès  d'un  petit  nombre  d'électeurs, 
qu'il  croyait  favorables  à  ses  vues;  mais  tout  le  corps  élec- 
toral avait  bien  résolu  de  ne  plus  admettre  un  empereur 
aussi  redoutable  pour  ses  libertés  par  d'autres  possessions. 

(1)  Gachard,  Retraite  et  mort  de  Charles-Quint,  t.  I. 


(til7) 

Il  fui  répondu  à  ses  ouvertures  que  le  sceptre  impérial 
appartenait  de  droit  à  son  frère  l'archiduc  Ferdinand,  déjà 
nommé  roi  des  Romains.  Il  chargea  donc  le  prince  Guil- 
laume d'Orange-Nassau  de  porter  à  ce  prince  les  insignes 
de  l'empire. 

Danslacélèbre  assemblée  tenuedans  le  palaisdeBruxelles, 
le  24  novembre  1555,  l'empereur,  ayant  grand'peine  à 
rester  debout,  exposa  d'une  manière  digne  et  noble  ce  qu'il 
avait  fait,  pendant  un  règne  assez  long,  pour  le  bon- 
heur de  ses  sujets  et  recommanda  vivement  la  conserva- 
lion  de  la  foi  catholique  romaine.  Il  finit  par  investir  de 
tous  ses  États,  dans  l'un  et  l'autre  hémisphère,  son  lils 
don  Philippe,  déjà  roi  d'Angleterre  et  seigneur  d'Irlande 
par  son  mariage  avec  Marie  Tudor,  et  roi  de  Naples  par  la 
cession  que  lui  en  avait  faite  l'empereur,  en  faveur  de 
cette  union. 

Il  choisit  pour  sa  retraite,  comme  chacun  sait,  la  riante 
vallée  de  TEstramadure  espagnole,  où  s'élevait  déjà  depuis 
de  longues  années  le  monastère  hiéronymite  de  Yuste,  et 
à  peine  établi  là  d'une  année,  il  fit  inviter  Quixada  à  venir 
avec  son  élève  habiter  le  village  voisin  de  Cuacos  (1558), 
afin  que  doua  Magdalena  pût  de  temps  en  temps,  et  sans 
donner  l'éveil  à  la  curiosité  des  frères,  amener  son  pupille 
au  couvent,  et  que  l'empereur  pût  jouir  ainsi  de  la  pré- 
sence de  son  jeune  fils ,  sans  toutefois  s'en  faire  con- 
naître. 

Le  père  Siguenza,  historien  de  l'ordre  de  S'-Jérôme, 
nous  apprend  en  effet  que  doîia  Magdalena  de  Quixada  y 
conduisit  souvent  le  jeune  homme,  qui  la  nommait  con- 
stamment sa  mère.  La  vue  de  celenfanl  agissait  toujours, 
comme  un  baume  salutaire,  et  calmait  les  souffrances 
de  Charles,  mais  il  savait  se  contraindre  et  ne  parlait  pas 


(318) 
à  Geronimo  avec  plus  d'affection  qu'aux  autres  enfants, 
même  quand  il    le  recevait  dans  ses  appartements  inté- 
rieurs. 

Charles  ne  s'était  pas  retiré  trop  tôt  des  affaires  du 
monde  et  les  jours  qu'il  avait  à  passer  dans  la  solitude 
qu'il  avait  choisie  étaient  rigoureusement  comptés ,  il 
s'endormit  dans  la  paix  du  seigneur  le  21  septembre  1558, 
dans  la  59*=  année  de  son  àge(l).  Il  est  sûr  que  l'enfant  de 
sa  vieillesse  assista  à  ses  funérailles,  célébrées  avec  une 
magnificence  royale  (2).  Beaucoup  de  personnes  le  virent 
comme  un  page  à  côté  de  don  Quixada  et  en  grand  deuil 
comme  lui. 

Prescott  conjecture  que  la  présence  de  l'adolescent  aux 
obsèques  de  l'empereur  suggéra  la  première  pensée  de  son 
origine  et  nous  pensons  qu'il  a  parfaitement  raison.  Parmi 
les  hauts  officiers  et  les  magistrats  qui  virent  cet  adoles- 
cent en  longs  habits  de  deuil ,  comme  Quixada,  bien  qu'il 
ne  lui  appartînt  ni  de  loin,  ni  de  près;  plusieurs  qui  étaient 
venus  de  loin  pour  rendre  les  derniers  devoirs  à  leur  sou- 
verain qu'ils  avaient  suivi  depuis  sa  jeunesse,  ne  purent 
sans  doute  fixer  les  yeux  sur  le  prétendu  Geronimo  sans 
s'écrier:  «Que  ce  jeune  homme  ressemble  étonnamment  à 
»  feu  l'empereur  dans  sa  jeunesse.  N'est-ce  pas  ce  front 
»  large  et  ces  cheveux  jaunissants  de  Charles,  ses  nobles 
»  traits  et  ses  yeux  bleus  clairs,  toute  sa  physionomie 
»  enfin,  excepté  heureusement  cette  laide  lèvre  autri- 
»   chienne  (5). 

(1)  Historiadc  la  Ordén'  de  San  Geronimo,  t.  III,  p.  203. 

(2)  Quelques  jours  avant  son  décès,  Charles-Quint  avait  eu  un  long 
entrelien  avec  Quixada ,  dont  l'avenir  du  jeune  Geronimo  fit  tous  les 
frais. 

(3)  Ou  plutôt  bourguignonne,  par  Marguerite  de  Bourgogne. 


(  ol9  ) 

D'autres  durent  ajouter  sans  doute  :  «  N'est-ce  pas  cet 
s>  enfant  de  Ratisbonne,  dont  la  disparition  fut  si  mysté- 
»  rieuse  et  que  le  majordome  de  l'empereur  cacha  à  Vil- 
»  lagarcia  avec  tant  de  soins  ?  » 

Ces  réflexions  ne  se  firent  pas  tout  haut  sans  doute, 
mais  il  était  impossible,  à  coup  sûr,  qu'elles  ne  vinssent  à 
l'esprit  de  beaucoup  de  courtisans. 

«  Charles-Quint  au  lit  de  la  mort,  dit  l'auteur  de  l'arti- 
»  cle  de  don  Juan ,  dans  la  Biographie  Michaud  (1) ,  parla 
B  pour  la  première  fois  à  Philippe  II  de  cet  intéressant 
»  orphelin  et  le  recommanda  vivement  à  ses  bontés.  »  — 
Nous  ne  savons  où  le  fécond  biographe  a  pu  prendre  une 
anecdote  aussi  évidemment  fausse.  Il  ne  faut  en  effet 
qu'une  connaissance  bien  médiocre  de  l'histoire  de  l'époque, 
pour  savoir  qu'au  décès  de  son  auguste  père,  Philippe  se 
trouvait  en  Flandre,  et  y  organisait,  non  sans  peine,  le 
gouvernement  des  pays  de  par  deçà  (2)  et  qu'il  lui  était 
par  conséquent  entièrement  impossible  de  se  trouver  au 
chevet  d'un  mourant  à  l'extrémité  de  l'Espagne. 

Ce  qui  est  vrai,  c'est  que  parmi  les  papiers  délaissés  par 
Charles-Quint,  on  en  trouve  un  enveloppé  et  scellé  des 
mains  de  l'empereur  et  adressé  à  Philippe,  ou,  en  cas  de 
sa  mort,  à  son  petit-fils,  don  Carlos,  ou  à  quiconque  por- 
terait la  couronne.  Il  était  écrit  de  lo54,  avant  sa  retraite 
au  couvent  de  Yuste.  Charles  y  avouait  sa  liaison  avec  une 
fille  libre  de  Ratisbonne,  qu'il  ne  nommait  pas,  et  la  nais- 
sance d'un  fils  appelé  Geronimo.  Il  indiquait  le  canton  où 
l'on  pourrait  prendre  des  informations   sur   ce  fils   qui 


(1)  V"  Don  Juan  d'Autriche. 

(2)  De  landen  van  herwaertsover ,  c'est  ainsi  qu'on  nommait  les  Pays- 
Bas. 


(  520  ) 
demeurait  encore  chez  le  joueur  de  violon ,  Massi ,  à  Lega- 
nès.  II  exprimait  le  désir  que  l'enfant  fut  élevé  pour  l'état 
monastique,  afin  que,  parvenu  à  l'âge  de  faire  un  choix,  il 
put  entrer  dans  quelque  ordre  de  moines  réformés.  Il  ne 
veut  pas  toutefois  qu'on  use  de  la  moindre  contrainte,  et  si 
l'en^'ant  préfère  rester  dans  le  monde,  on  devra  lui  acheter 
au  royaume  de  Naples  un  domaine  d'au  moins  vingt  à 
trente  mille  ducats  de  revenu.  Quelle  que  soit  la  carrière 
embrassée  par  le  jeune  homme,  l'empereur  veut  qu'on 
l'honore  et  qu'on  ait  pour  lui  la  considération  due  à  son  fils. 
Il  finit  par  dire  que  si  pour  de  graves  raisons  il  n'a  pas 
■  inséré cesslipulations  dans  son  testament,  il  n'en  veut  pas 
moins  qu'elles  aient  la  même  force. 

Philippe  parut  recevoir  cette  communication  avec  plai- 
sir et  se  promit  dès  le  principe  d'exécuter  les  intentions 
de  son  père  ,  mais  il  se  trouvait  retenu  aux  Pays-Bas. 

Le  bruit  qui  concernait  la  haute  origine  de  Geronimo 
était  parvenu  cependant  aux  oreilles  de  l'infante  doua 
Juana,  qui  gouvernait  les  Espagnes  pendant  l'absence  du 
roi,  son  frère  (1).  Elle  fît  donc  écrire  à  Quixada  par  son 
secrétaire  à  quoi  elle  devait  s'en  tenir  à  cet  égard;  mais  il 
n'était  pas  permis  au  fidèle  hidalgo  d'être  aussi  communi- 
catif.  Il  éluda  la  question  en  répondant  que  l'enfant  en 
question  lui  avait  été  confié  depuis  plusieurs  années,  mais 
que  l'empereur  n'ayant  pas  fait  la  moindre  allusion  à  cet 
égard,  dans  son  testament,  on  pouvait  regarder  ce  bruit 
comme  un  conte  inventé  à  plaisir  (2). 

Mais  la  curiosité  féminine  pouvait-elle  se  payer  d'une 
monnaie  de  cet  aloi?  Apprenant  que  le  discret  majordome 


(1)  Elle  était  veuve  sans  enfants  d'un  infant  de  Portugal. 

(2)  Gacliard,  Retraite  et  mort  de  Charles-Quint ,  1. 1,  p.  4-i6. 


(  521  ) 

devait  s'absenter  pendant  quelques  jours,  la  sérénissime 
princesse  gobernadora  résolut  d'en  profiter  pour  amener 
le  prétendu  page  de  don  Louis  Quixada  à  Yalladolid,  oiî 
elle  devait  présider  un  auto-da-fé  (1).  Elle  fit  donc  inviter 
à  cette  triste  solennité  dona  Magdalena  et  son  flls  adoptif, 
et  dona  Quixada  n'osa  pas  essuyer  un  refus. 

Au  jour  donné  (2)  elle  se  rendit  avec  Geronimo  à  la 
lugubre  cérémonie  et  s'assit  sur  la  plate-forme,  couverte 
de  riches  tapis  et  destinée  aux  personnes  de  son  rang. 
Pour  cacher,  autant  qu'il  était  possible,  l'enfant  au  public, 
elle  l'avait  presque  enveloppé  de  son  manteau,  mais  elle 
dut  l'écarter  à  l'arrivée  du  cortège  royal ,  dona  Juana  put 
alors  le  regarder  à  loisir.  Elle  le  fit  avec  une  curiosité  si  vive 
que  Geronimo  en  rougit  jusqu'aux  oreilles,  [-.e  cœur  de 
l'infante  fut  inondé  d'amour  fraternel,  quand  elle  se  con- 
vainquit que  le  même  sang  coulait  dans  ses  veines  et  dans 
celles  de  ce  bel  adolescent.  Elle  1  etreignit  dans  ses  bras 
et  le  couvrit  de  baisers,  en  lui  prodiguant  le  nom  si  doux 
de  frère;  mais  elle  s'efforça  en  vain  de  le  placer  à  ses 
côtés.  Violemment  agité,  le  jeune  homme  se  débattait  avec 
vigueur  et  se  jeta  dans  les  bras  de  dona  Magdalena,  en 
s'écriant  qu'elle  seule  était  sa  mère  et  que  la  dame  incon- 
nue n'était  rien  pour  lui. 

Une  scène  aussi  singulière  devait  attirer  l'attention  des 
nombreux  spectateurs  qui  entouraient  la  plate-forme;  elle 
devint  si  pressante  que  le  drame  se  termina  sans  qu'on 
s'en  aperçût  et  la  multitude  serra  si  près  dona  Magdalena 
et  son  élève,  que  sans  l'intervention  d'un  gentilhomme 
de  la  suite  de  l'infante,  il  leur  eût  été  bien  difficile  de  s'en 


(1)  Le  mot  est  portugais ,  en  espagnol  il  faudrait  atto-dafé. 

(2)  Vanderhammen,  Don  Juan  de  Austria ,  p.  25. 

2""^  SÉRIE,  TOME  XXXVMI,  54 


(  522  ) 

retourner  :  encore  furent-ils  obligés  de  demeurer  près  du 
carrosse  royal,  avant  de  pouvoir  songer  à  reprendre  le 
chemin  de  Villagarcia  (1). 

Cet  événement  devait  avoir  d'autant  plus  d'influence 
sur  le  peuple  qui  en  fut  témoin  qu'on  savait  que  de  toutes 
lec  cours  aucune  n'attachait  une  importance  aussi  grande 
à  l'observation  du  décorum  que  celles  de  Castille  et  d'Ara- 
gon. 

Dona  Magdalena,  qui  avait  tout  vu  et  entendu  de  si 
près,  ne  rechercha  plus  depuis  quel  était  l'homme  puis- 
sant, si  cher  à  son  époux,  dont  elle  avait  élevé  le  fils. 

Heureusement  l'énigme  historique  était  sur  le  point 
d'avoir  une  solution  prompte  et  décisive. 

Le  roi  Philippe  II  avait  reçu  à  Gand  le  billet  cacheté  de 
l'empereur  et  désirait  vivement  d'arriver  en  Espagne  pour 
en  exécuter  les  stipulations.  Parvenu  enfin  à  organiser  le 
gouvernement  à  l'assemblée  de  Gand,  il  s'embarqua  dans 
un  port  de  la  Zélande,  pour  revenir  dans  la  Péninsule 
qu'il  ne  devait  plus  quitter  (1559). 

A  peine  avait-il  mis  pied  à  terre,  qu'il  arrangea  une 
entrevue  avec  Quixada  et  son  jeune  frère  (2)  :  il  désigna 
à  cet  effet  un  sport,  très-étendu ,  près  du  couvent  de  la 
Espina,  presque  aux  portes  de  Valladolid,  où  les  anciens 
rois  de  Castille  se  livraient  aux  plaisirs  de  la  chasse. 

Au  jour  fixé  le  bon  majordome,  richement  vêtu  et 
monté  sur  le  meilleur  cheval  de  ses  écuries,  se  rendit  au- 
devant  du  roi  à  la  tête  de  ses  nombreux  vassaux.  Près  de 
lui  chevauchait  sur  un  palefroi  commun  le  jeune  Ge- 
ronimo,  habillé   simplement.  Ils  n'avaient   marché  que 


(1)  Ibidem. 

(2)  Il  avait  fait  d'abord  un  voyage  à  Tolède. 


(  ^25  ) 
pendant  quelques  milles  quand  le  bruit  des  chevaux  leur 
annonça  la  chasse  royale.  Don  Louis  Quixada  ht  halte  et 
s'avança  respectueusement  vers  Geronimo,  et ,  mettant  un 
genou  en  terre,  il  lui  demanda  en  même  temps  la  per- 
mission de  baiser  sa  main,  et  lui  proposa  de  laisser  sa 
monture  commune  pour  prendre  sa  place  sur  le  noble 
cheval  de  guerre  qu'il  venait  de  quitter.  Geronimo  était 
stupéfait  (1)  et  il  aurait  cru  que  tout  ce  qu'il  voyait  n'était 
qu'un  jeu  de  la  part  de  Quixada,  si  le  caractère  placide  et 
plein  de  dignité  du  seigneur  ne  s'était  pas  opposé  à  cette 
supposition.  Revenu  de  son  étonnement,  il  se  rendit  au 
désir  de  son  gardien;  et  probablement  quelque  vision  de 
sa  grandeur  future  l'avait  frappé,  s'il  est  vrai,  comme  on 
le  raconte,  qu'en  prenant  un  air  de  dignité,  il  lui  dit  :  «  s'il 
en  est  ainsi,  vous  pouvez  bien  me  tenir  l'étrier  (2).  » 

On  eut  bientôt  en  vue  la  royale  cavalcade  et  tous  des- 
cendirent de  cheval;  le  jeune  homme,  suivant  les  instruc- 
tions de  Quixada,  s'avança  près  du  roi  et  lui  demanda  à 
genoux  la  permission  de  baiser  la  main  de  S.  M.  Le  roi  la 
lui  tendit  gracieusement,  et  après  avoir  considéré  attenti- 
vement le  jeune  hidalgo,  il  rompit  un  silence  assez  long 
en  lui  demandant  «  s'il  savait  qui  était  son  père.  »  Décon- 
certé par  une  demande  aussi  délicate  qu'imprévue,  et 
ignorant,  en  effet,  si  les  rapports  sur  son  origine,  qui 
étaient  venus  à  ses  oreilles,  avaient  un  fond  de  vérité, 
l'adolescent  n'osa  lever  les  yeux  et  ne  donna  pas  de  ré- 
ponse. Cet  embarras  ne  déplut  pas  à  Philippe,  satisfait 


(t)  Villafàgii.,  Vida  de  D.  Magdalena  de  Ulloa,  pag.  31. 

'2)  Il  esl  cependant  difficile  de  croire  qu'un  jeune  homme  aussi  intel- 
ligent que  don  Juan  n'eût  rien  compris  par  la  scène  si  émouvahte  de 
Vauto-da-fé. 


(    D2i   ) 

sans  doute  de  lire  dans  le  maintien  intelligent  et  la  noble 
physionomie  de  son  jeune  frère,  qu'il  ferait  honneur  à  sa 
naissance.  Il  descendit  de  cheval  à  son  tour  et  en  embras- 
sant Geronimo  avec  tendresse,  il  s'écria  :  «  Courage,  mon 
»  enfant!  vous  devez  la  naissance  à  un  grand  homme. 
»  L'empereur  Charles-Quint,  qui  règne  aujourd'hui  glo- 
»  rieux  dans  le  ciel,  est  votre  père,  comme  il  est  le 
»  mien  (1).  »  Se  tournant,  après  ces  mois,  vers  les  sei- 
gneurs de  sa  suite,  il  leur  présenta  le  garçon  comme  le 
fils  de  leur  dernier  souverain  et  son  propre  frère.  Avec 
celte  promptitude  qui  est  dans  l'instinct  de  leur  caste,  les 
courtisans  se  hâtèrent  de  rendre  hommage  à  Geronimo. 
Le  roi  termina  cette  scène  en  ceignant  son  frère  d'une 
épée,  et  en  lui  mettant  au  cou  le  brillant  collier  de  la 
Toison  d'or  (2). 

La  nouvelle  de  cet  étrange  événement  s'était  répandue 
en  un  clin  d'œil  dans  tout  le  voisinage,  et  à  son  retour  à 
Valladolid  le  roi  trouva  les  routes  couvertes  d'une  multi- 
tude innombrable  de  peuple  passionnée  pour  jeter  un 
coup  d'œil  sur  cette  perle  de  la  royauté  qu'on  venait  de 
découvrir.  La  vue  de  ce  beau  jeune  homme  fit  éclater  un 
bruyant  enthousiasme  dans  la  population  et  l'air  retentit 
de  ses  tumultueux  vivats^  quand  le  roi  et  sa  suite  traver- 
sèrent les  rues  de  l'antique  ville  de  Valladolid.  Philippe 
exprima  la  satisfaction  que  cette  journée  lui  avait  causée 
en  déclarant  qu'il  n'avait  fait  jamais  une  meilleure  chasse, 
ni  rapporté  un  gibier  aussi  agréable  (3). 

(1)  Stracla,  de  llellu  bely.,  tome  1,  pag.  608. 

(2)  Ainsi,  dit  Vanderhammcii ,  mais  à  tort,  la  Toison  d'or  ne  fut 
donnée  à  don  Juan  qu'en  1566. 

(5)  La  plupart  des  iiistoriens  espagnols  racontent  ces  faits  de  la  même 
manière. 


'      »-'  C\  "      \ 

\  o2d  ) 

Il  se  fit  un  devoir  de  donner  au  frère  qu'il  venait  de 
reconnailre  un  élablissement  digne  de  lui.  Il  lui  assigna 
pour  résidence  un  des  plus  beaux  hôtels  de  Madrid,  avec 
un  nombreux  domestique,  et  voulut  qu'on  y  maintînt  un 
si  grand  étal  que  chez  un  prince  du  sang.  Le  comte  de 
Priego  fut  créé  grand-majordome,  don  Louis  Carillo,  le 
tîls  aine  de  ce  seigneur,  devint  capitaine  des  gardes  et  le 
comte  de  Cordova  grand  écuyer.-En  un  mot,  les  nobles  les 
plus  qualifiés  de  la  Castille  ne  dédaignèrent  pas  d'avoir  un 
emploi  dans  la  maison  du  jeune  campagnard  de  Villa- 
garcia.  Celui-ci  eut  de  plus  lous  les  privilèges  des  infants, 
à  deux  près  :  il  n'eut  pas  comme  eux  un  appartement  au 
palais  du  roi  et  dut  se  contenter  du  titre  (VExcellence  {[) 
au  lieu  de  celui  d'Altesse  qui  leur  était  réservé,  mais  on 
n'observait  pas  bien  scrupuleusement  cette  distinction. 

Un  changement  plus  important  eut  lieu  dans  son  nom  : 
de  Geronhno  il  devint  don  Juan  cVAuhiclie  qui  rappelait 
son  origine  de  la  famille  impériale  des  Habsbourg  et  au- 
quel ses  exploits  ajoutèrent  plus  tard  un  lustre,  qu'aucun 
souverain  n'aurait  pu  lui  conférer.  Il  ne  parait  pas  qu'on 
fît  quelque  tentative  pour  l'engager  dans  l'état  ecclésias- 
tique. 

Quixada  remplit  près  du  prince  le  même  emploi  qu'il 
avait  eu  avant  l'élévation  de  son  pupille.  Il  resta  toujours 
son  aijo  ou  gouverneur,  et  vint  avec  dona  Magdalena 
demeurera  Madrid,  dans  la  résidence  de  don  Juan.  Vivant 
ainsi  dans  son  intimité,  il  jouit  jusqu'à  sa  mort  d'une 
influence  sans  partage. 

En  lisant  les  pages  qui  précèdent,  le  lecteur  s'est  de- 


(1)  Cabrera,  Philippe  II,  liv.  V,  c.  ô. 


(  o26  ) 
mandé  sans  doule,  el  pins  d'une  fois  peut-être,  pourquoi 
tant  de  précautions  si  minutieuses  et  parfois  même  si  bi- 
zarres, pour  cacher  un  lait  malheureusement  si  commun 
dans  les  cours,  que  la  naissance  d'un  fds  illégitime  du 
prince?  et  cela  est  d'autant  plus  étonnant  que  ce  n'était 
pas  la  première  fois  que  Charles  avait  eu  à  pleurer  une 
pareille  faute  et  qu'il  se  conduisit  d'abord  d'une  manière 
tout  opposée.  Chacun  sait  que  jeune  encore,  et  avant  son 
mariage,  il  eut  d'une  jeune  personne  d'Audenarde,  nom- 
mée Marguerite  Van  der  Ghenst,  une  fille  naturelle,  nommée 
Marguerite,  qu'il  reconnut  aussitôt  comme  son  enfant.  Il 
la  lit  élever  publiquement  avec  tous  les  honneurs  dus  à 
un  rejeton  de  la  famille  impériale,  chez  la  gouvernante  des 
Pays-Bas,  qu'elle  devait  remplacer  un  jour. 

Quelle  différence  entre  celle  éducation  et  celle  de  ce 
pauvre  Geronimoî 

L'historien  de  Philippe  IF,  William  Prescolt,  pense  en 
avoir  trouvé  le  motif  dans  l'infériorité  de  la  naissance  de 
Barbe  Blomberg,  en  comparaison  de  celle  de  Marguerite 
Van  der  Ghenst,  issue,  dit-il,  du  sang  le  plus  noble  des 
Pays-Bas  {\  ). 

L'historien  avait  peut-être  consulté  un  de  ces  généalo- 
gistes assez  communs  dans  les  cours  qui  aurait  prouvé, 
pour  une  poignée  de  carolus,  que  la  famille  des  Van  der 
Ghenst  descendait  en  droite  ligne  de  Genseric,  roi  bossu 
des  Vandales  d'Espagne.  Mais  pas  plus  que  Barbe  Blom- 
berg ,  Marguerite  Van  der  Ghenst  n'avait  été  élevée  sur 
les  genoux  des  princesses  et  toutes  deux  appartenaient  à 


(1)  Ulwse  mollier  could  boast  thaï  in  lier  veins  floioed  some  of  the 
best  blood  of  Ihe  Netherlands  W.  Prescolt,  Histonj  of  [lie  reign  of  Phi- 
lippe the  second,  tome  III ,  pag.  lOô. 


(  527  ) 

l'humble  bourgeoisie.  Le  raisonnement  de  Prescott  croule 
donc  par  sa  base. 

Nous  pensons  que  la  solution  de  l'énigme  est  beaucoup 
plus  simple.  Charles-Quint  a  pensé  sans  doute,  et  avec 
quelque  raison,  que  la  faiblesse  d'un  jeune  prince  de  vingt 
ans  pouvait  être  pardonnable,  mais  qu'il  n'en  était  plus  de 
même  pour  un  monarque  puissant,  déjà  père  de  famille, 
veuf  (1),  et  parvenu  à  la  maturité  de  l'âge.  Il  se  crut 
obligé  à  détruire  jusqu'aux  moindres  preuves  de  sa  fai- 
blesse. 

Philippe  II  avait  parfaitement  apprécié  tout  le  mérite 
du  gardien  de  son  jeune  frère  et  Qui.xada  jouit  près 
du  fils  d'une  faveur  aussi  haute  que  près  du  père.  Grand 
écuyer  de  don  Carlos  et  investi  du  poste  élevé  de  prési- 
dent du  conseil  des  Indes,  il  reçut  plusieurs  bénéfices 
dans  l'ordre  militaire  de  Calalrava.  C'étaient  là  de  magni- 
fiques récompenses,  mais  qu'on  jugea  à  peine  proportion- 
nées au  dévouement  qu'il  avait  montré  à  l'empereur  en 
s'exilant  pendant  des  années  pour  élever  son  fils  naturel. 

Dans  une  de  ses  lettres  au  roi,  il  s'explique  sur  l'édu- 
cation actuelle  qu'il  donnait  à  son  pupille  pour  suppléer 
au  défaut  de  ses  premières  instructions,  dirigées  selon  les 
conseils  de  l'empereur  vers  l'état  ecclésiastique  (2);  main- 
tenant elles  sont  en  harmonie,  dit-il,  avec  les  hautes  des- 
tinées, qui  viennent  de  s'ouvrir  pour  don  Juan,  et  le 
prince  s'y  plaît  infiniment  mieux  qu'aux  études  littéraires 
et  religieuses  de  Yillagarcia. 

Philippe  II  se  résolut  cependant  à  donner  à  son  frère 
l'éducation  la  plus  complète  en  l'envoyant  à  l'Université 


(1)  L'impératrice  était  morte  à  Tolède ,  le  1"  mai  1359. 

(2)  Gacliard,  Retraite  et  mort  de  Charles-Quint,  tome  II ,  pag.  4o. 


(  528  ) 
d'Alcala  de  Henarès,  fondée  au  siècle  passé  par  le  grand 
cardinal  Ximenès,  et  déjà  rivale  de  la  vieille  école  de 
Salamanque.  Don  Juan  y  réjoignit  ses  deux  neveux  :  don 
Carlos,  le  fils  infortuné  de  Philippe  II,  et  Alexandre  Far- 
nèse,  fils  de  la  duchesse  de  Parme.  Tous  trois  devaient 
fournir,  quoique  à  des  titres  bien  différents,  des  pages  inté- 
ressantes à  l'histoire.  Ils  étaient  à  peu  près  du  même  âge, 
mais  don  Juan  surpassait  de  beaucoup  ses  deux  concur- 
rents par  sa  bonne  mine,  ou  plutôt  par  sa  mâle  beauté. 
On  admirait  son  urbanité,  son  indulgence  et  sa  probité, 
autant  que  l'aménité  de  ses  mœurs  (1),  son  esprit  et  sa 
modestie  dans  une  si  récente  élévation.  Son  cœur  était 
plus  riche  encore  de  ces  qualités  plus  nobles  qui  promet- 
tent la  grandeur  la  plus  éminente. 

Si  l'on  en  croit  ses  biographes,  il  ne  négligeait  en  rien 
aucune  de  ces  études,  mais  il  avait  une  prédilection  mar- 
quée pour  celles  qui  se  rattachent  au  grand  artde  la  guerre. 
Il  était  parfait  en  tous  les  exercices  chevaleresques  et  ne 
souhaitait  rien  autant  que  de  se  voir  ouvrir  un  champ,  où 
il  pourrait  en  donner  des  preuves.  La  connaissance  de  sa 
•famille  réelle  lui  donnait  une  généreuse  ambition  de  mon- 
trer par  des  actions  héroïques  combien  il  en  était  digne. 

Siège  de  Malle. 

Don  Juan  quitta  les  bancs  de  l'école,  en  I56i,  après  trois 
années  d'études  universitaires  bien  employées.  L'année 
suivante  fut  celle  du  fameux  siège  de  Malte,  où  une  poignée 
de  guerriers  défendirent  leur  île  solitaire  contre  toutes  les 
forces  de   l'empire  ottoman.   Toutes  les  sympathies   de 

(1)  Strada,  de  Bell,  belg.,  tome  I ,  pag.  609. 


C  529  ) 

don  Juan  se  prononçaient  pour  les  chevaliers  chréliens;  il 
résolut  (le  jeter  sa  propre  Ibrtune  dans  la  même  balance 
que  la  leur,  et  de  gagner  ses  premiers  lauriers  sous  l'éten- 
dard de  la  Croix.  11  ne  songea  pas  à  demander  la  permis- 
sion à  son  frère,  car  il  était  sûr  d'essuyer  un  refus.  Mais  il 
quitta  secrètement  la  cour,  avec  une  suite  peu  nombreuse, 
et  prit  la  route  de  Barcelone,  où  se  préparait  un  arme- 
ment qui  devait  sous  peu  de  jours  mettre  à  la  voile  pour 
porter  des  secours  à  l'héroïque  La  Valette.  Partout  il  fut 
accueilli  avec  tout  le  respect  diï  à  son  rang.  A  Saragosse, 
il  était  logé  chez  l'archevêque  quand  il  tomba  malade,  et 
reçut  une  lettre  du  roi,  qui  avait  appris  la  cause  de  son 
départ  et  lui  commandait  de  revenir,  puisqu'il  était  en  tout 
cas  trop  jeune  pour  prendre  part  à  cette  lutte  désespérée. 
Don  Juan  ne  tint  aucun  compte  de  cet  ordre  royal  et 
poussa  jusqu'à  Barcelone,  où  il  fut  singulièrement  mortifié 
en  apprenant  que  déjà  l'expédition  était  en  mer  [i).  Il  réso- 
lut de  passer  les  montagnes  et  de  gagner  Marseille,  où  il 
espérait  trouver  un  bâtiment.  Le  vice-roi  de  Catalogne  ne 
parvenait  pas  à  dissuader  le  jeune  homme  de  sa  folle  entre- 
prise, quand  il  reçut  une  nouvelle  dépêche  de  la  Cour  qui 
ordonnait  d'une  manière  plus  énergique  à  don  Juan  de 
revenir  sans  délai,  sous  peine  de  s'exposer  à  un  sévère 
déplaisir  de  la  part  du  roi.  Une  lettre  de  Quixada  l'avertit 
qu'il  devait  s'attendre  à  une  disgrâce  certaine,  s'il  conti- 
conlinait  à  se  jouer  ainsi  des  ordres  du  roi.  Après  cela  il 
ne  restait  qu'à  obéir. 


(1)  Don  Juan  aurait  sans  doute  applaudi  à  ces  vers  homériques  de 
Racine: 

Patrode  ei  moi,  Seigneur!  7ious  irions  l'assiéger. 


(  530  ) 

Celle  incartade  de  jeunesse  ne  pouvait  manquer  de 
devenir  bienlùt  publique  el  d'environner  d'une  nouvelle 
auréole  de  gloire  le  nom  de  don  Juan.  Chez  une  nalion  qui 
devail  son  existence  même  à  huil  siècles  de  combats  glo- 
rieux, la  religion  se  confondait  avec  le  patriotisme  el  l'in- 
dépendance, et  le  peuple  très-sensible  à  des  faits  d'une 
audace  romanesque,  se  réjouit  de  voir  un  de  ses  princes 
promettre  un  héros  pour  l'avenir  à  sa  patrie.  Les  jeunes 
gentilshommes  que  l'exemple  de  don  Juan  faisait  rougir 
de  leur  inaction  se  promirent  de  le  suivre  à  la  guerre. 
Philippe  lui-même,  qui  sentait  mieux  que  personne  la  né- 
cessité de  punir  l'insubordination  de  son  frère,  prit  plaisir 
à  louer  le  caractère  généreux  qu'il  avait  déployé.  Le  mo- 
narque qui  laissait  une  belle  flotte  demeurer  immobile  dans 
les  eaux  de  Messine  el  à  quelques  lieues  du  boulevard  de 
la  chrétienté,  exposé  à  une  ruine  effroyable,  comment  ne 
comprenait-il  pas  que  l'initiative  de  son  frère  était  une  cen- 
sure sanglante  de  sa  propre  conduite? 

Le  changement  soudain  qui  avait  eu  lieu  dans  la  posi- 
tion de  don  Juan,  qui  avait  tout  à  coup  échangé  ses  ha- 
bits de  villageois  contre  les  vêtements  luxueux  d'un 
prince ,  n'avait  pu  changer  au  milieu  d'une  cour  adula- 
trice le  caractère  noble,  mais  simple  qui  le  distinguait, 
Philippe  l'avait  craint,  mais  il  vit  avec  grand  plaisir  qu'il 
s'était  trompé  entièrement  sur  les  dispositions  de  don 
Juan  heureusement  cultivées  par  les  bons  conseils  de 
Quixada;  mais  ce  qui  atfermit  davantage  la  confiance  de 
Philippe  en  son  jeune  frère,  ce  fut  la  conduite  pleine 
de  sagesse,  de  patience  et  de  mesure,  dont  il  fit  preuve 
envers  le  malheureux  don  Carlos.  Plein  de  déférence  en- 
vers l'héritier  présomptif  de  tant  de  couronnes,  il  ne  laissa 
pas  de  lui  montrer  combien  sa  conduite  envers  son  roi  et 


(  531  ) 

son  père  était  criminelle,  ses  plans  aussi  mal  conçus  que 
coupables.  Personne  à  la  cour  ne  donna  autant  de  preuves 
de  ses  regrets  à  la  triste  fm  de  cette  victime  des  plus 
funestes  passions. 

Au  commencement  du  printemps  de  l'année  1568,  il 
se  présenta  au  roi  Philippe  une  occasion  favorable  pour 
occuper  l'ambitieuse  activité  de  don  Juan  en  lui  contlant 
le  commandement  d'une  flotte  réunie  au  port  de  Cartha- 
gène  pour  attaquer  les  corsaires  qui  alarmaient  le  commerce 
espagnol  par  leurs  pirateries.  Mais  en  lui  donnant  cette 
preuve  de  satisfaction,  le  monarque  eut  soin  de  suppléer 
à  l'inexpérience  de  son  frère,  en  nommant  pour  comman- 
der en  second  don  Louis  de  Zuniga  et  Requesens  (i),  grand 
commandeur  de  l'Ordre  de  Saint  Yago.  En  décernant  le 
titre  de  chef  de  la  flotte  à  son  frère,  il  remplissait  les 
désirs  du  peuple  et  en  lui  donnant  pour  second  un  homme, 
dont  la  gravité  lui  était  connue,  il  assurait  le  succès  de 
l'expédition. 

Le  3  de  juin ,  don  Juan  sortit  du  port  à  la  tête  d'une 
escadre  aussi  belle  qu'aucune  autre,  qui  avait  paru  dans 
la  Méditerranée.  Le  vaisseau  qu'il  montait  lui-même  était 
une  puissante  galère  peinte  avec  magnificence  sans  égale, 
par  des  portraits  et  des  tableaux  dont  les  sujets  étaient, 
pour  la  plupart,  empruntés  à  l'histoire  ancienne  ou  à  la 
mythologie  et  choisis  de  manière  à  donner  des  instructions 
au  jeune  commandant.  La  morale  de  chaque  tableau  était 
expliquée  par  une  courte  maxime  en  latin.  Ainsi  de  quel- 
que côté  que  le  jeune  chef  tournât  les  yeux,  ils  étaient 
sûrs  de  rencontrer  une  leçon;  de  manière,  dit  Prescott, 


(1)  Ce  seigneur  est  plus  connu  sous  le  simple  nom  de  Requesens,  qui 
élail  celui  de  sa  mère. 


(  552  ) 
«  que  la  galère  peut  être  comparée  à  un  volume  rielie- 
»  ment  illustré  afin  d'imprimer  son  contenu  dans  la  mé- 
»  moire  du  lecteur  (1).  » 

Tel  fut  le  début  de  don  Juan  dans  le  métier  des  armes, 
il  laissait  entrevoir  la  renommée  qu'allait  acquérir  le  con- 
quéraut  des  Alpujarres  sur  les  Maures  insurgés  et  le  vain- 
queur des  Musulmans  à  Lépante. 

(1)  Prescolt,  lonie  III,  page  119. 


(  535  ) 


CLASSE   DES    BEAUX-ARTS. 


Séance  du  jeudi  8  octobre  1874. 

M.  N.  De  Keyser,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin,  G.  Geefs,  Jos.  Geefs,  Ferd. 
De  Braekeleer,C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Edm.De  Busscher, 
Alph.  Balat,  Aug.  Payen,  le  chevalier  L.  de  Burbure, 
J.  Franck,  G.  De  Man,  Ad.  Siret,  J.  Leclercq ,  Ernest  Slin- 
geueyer,  Alex.  Robert,  F.-A.  Gevaert,  Adolphe  Samuel, 
membres  ;  F.  Stappaerts  et  L.  Terry,  correspondants. 

MM.  R.  Chalon ,  directeur  de  la  classe  des  lettres,  et 
Éd.  Mailly,  correspondant  de  la  classe  des  sciences,  assis- 
tent à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  Louis  Tinant,  artiste  sculpteur  à  Bruxelles,  fait 
hommage  d'un  exemplaire,  en  bronze,  de  son  médaillon 
représentant  feu  M.  Sylvain  Van  de  Weyer,  membre  de 
l'Académie,  lequel  a  contre-signe  en  qualité  de  Ministre  de 
l'Intérieur,  le  l*""  décembre  1845,  les  arrêtés  royaux  rela- 
tifs à  la  création  et  à  l'organisation  de  la  classe  des  beaux- 
arts. 

La  classe  vote  des  remerciements  à  M.  L.  Tinant  pour 
ce  don,  qui  figurera  dans  son  médaillier. 


(  oU  ) 

—  MM.  Th.  Donaldson  et  le  vicomte  Henri  Delaborde, 
associés  de  la  classe,  expriment  par  écrit  leurs  remercî- 
ments  pour  l'envoi  des  dernières  publications  académiques. 

—  M.  A,  Banet-Rivet,  de  Paris,  soumet  au  jugement  de 
la  clause  une  brochure  portant  pour  titre  :  D'un  prétendu 
inventeur  de  la  transposition  par  les  nombres. 

L'auteur  sera  remercié  pour  l'envoi  de  celte  brochure, 
qui  sera  déposée  dans  la  bibliothèque  de  la  Compagnie. 
Il  sera  informé,  en  même  temps,  que,  en  vertu  de  son  rè- 
glement, l'Académie  ne  fait  pas  de  rapport  sur  les  ouvrages 
déjà  livrés  à  la  publicité. 

—  Conformément  à  la  commande  qui  lui  a  été  faite  par 
M.  le  Ministre  de  l'intérieur,  M.  Charles  Geefs,  artiste 
sculpteur  à  Bruxelles,  a  placé  dans  le  grand  vestibule  des 
Académies  le  buste  en  marbre  de  feu  M.  le  commandeur 
de  Nieuport. 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  appelle  l'attention  de  ses 
confrères  sur  la  publication  du  prochain  Annuaire  de 
l'Académie.  Il  signale,  à  cette  occasion,  les  noms  de  divers 
membres  décèdes  qui  n'ont  pas  encore  de  notice  biogra- 
phique. 

M.  Éd.  Fétis  accepte  de  rédiger  celle  de  feu  M.  Alexis 
Baron,  dont  le  portrait  existe  déjà.  M.  Julien  Leclercq  fera 
la  notice  de  feu  M.  Jouvenel. 

Après  avis  de  la  commission  des  portraits,  la  classe  dé- 
signe les  artistes  graveurs  qui  seront  chargés  des  portraits 
pour  l'Annuaire  précité. 


(  535  } 


PROGRAMME  DE  CONCOURS  POUR  1875. 


La  classe  s'occupe  de  la  formation  de  son  programme 
de  concours  pour  J875. 

Elle  adopte,  en  principe,  la  remise  au  concours  des 
deux  questions  littéraires  du  programme  de  1874. 

Elle  remet  à  la  prochaine  séance  la  rédaction  définitive 
du  programme. 

D'après  le  roulement  établi  par  le  paragraphe  o  de  l'ar- 
ticle 13  du  règlement  intérieur  de  la  classe,  les  sections 
de  sculpture  et  de  gravure  présenteront  un  sujet  d'art 
appliqué  de  sculpture  et  de  gravure  en  médailles  pour  le 
concours  de  1875. 


MONUMENT   QUETELET. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  présente  la  liste  de  souscrip- 
tion pour  le  monument  à  élever  à  Bruxelles  à  la  mémoire 
de  M.  Quetelet. 


(  556  ) 
COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Notice  sur  Frédéric  Van  de  Kerkhove,  paysagiste,  mort  le 
12  août  481  â,  à  l'âge  de  10  ans  et  11  mois  (1);  par 
M.  Ad.  Siret,  membre  de  l'Académie. 

L'histoire  des  arts  graphiques  n'offre  peut-être  pas  dans 
le  monde  entier,  depuis  l'origine  des  sociétés  civilisées, 
un  exemple  de  précocité  géniale  semblable  à  celui  que  la 
Belgique  présente  en  ce  moment  à  l'étonnement,  et, disons- 
le  sans  hésiter,  à  l'admiration  de  tous.  Paul  Potter,  a-t-on 
dit,  fut  un  maître  habile  à  14  ans.  La  vérité  est  qu'il 
ne  le  fut  qu'à  18.  Luc  de  Leyde  fut,  dit-on,  un  miracle 
inouï  de  précocité  puisque,  à  9  ans,  (dit-on  toujours)  il 
grava  son  moine  Sergius,  lequel,  en  réalité,  a  été  gravé 
quand  Luc  avait  14  à  15  ans.  Nulle  part  on  ne  rencontre 
d'enfant  sublime  d'un  talent  aussi  soudain  dans  son  épan- 
chement,  aussi  ému  dans  son  expression  et  d'un  caractère 
aussi  grandement  mélancolique  que  celui  dont  nous  allons 
nous  occuper  un  instant.  Certes,  si  la  Belgique  doit  déplo- 
rer la  mort  d'un  de  ses  fils  disparu  presque  dans  l'ombre, 
c'est  une  consolation  et  un  devoir  pour  elle  de  placer  son 
nom  dans  l'éblouissante  lumière  dont  il  est  digne.  Qu'une 
nouvelle  et  réelle  gloire  soit  du  moins  la  compensation  de 
cette  mort  si  prématurée! 

Frédéric-Jean-Louis  Van  de  Kerkhove  est  né  à  Bruges, 


(1)  Le  Journal  des  Beaux-Arts  du  15  septembre  1874  renferme  une 
étude  sur  Frédéric  Van  de  Kerkhove. 


(  S37  ) 
le  4  septembre  1862.  Il  entra  dans  la  vie  par  la  voie  de  la 
doueur  et  la  conservation  du  peu  de  jours  qu'il  a  vécu 
lut  le  résultat  des  soins  incessants  que  sa  mère  lui  prodi- 
gua. De  bonne  heure  son  intelligence  se  montra  prompte 
mais  raisonneuse;  il  questionnait  beaucoup  et  presque  tou- 
jours sa  curiosité  s'occupait  des  mystères  de  l'ordre  imma- 
tériel. Il  alla  à  l'école  où  il  étonna  ses  professeurs  par  la 
soudaineté  de  ses  questions  et  de  ses  reparties.  A  6  ans  il 
lui  fut  impossible  de  continuer  la  fréquentation  de  l'école 
Son  père,  amateur  peintre  de  genre,  l'établit  à  côté  de  lui 
dans  l'atelier  où  l'enfant  demanda  bientôt  des  couleurs   et 
ou,  immédiatement,  il  se  mit  à  l'œuvre   sans   avoir' la 
moindre  notion  des  principes  du  dessin.  Sa  vie  s'écoula 
ainsi  dans  cet  atelier. 

Les  tableaux  de  genre  de  son  père  le  préoccupaient  peu. 
Il  avait  l'mstinct  de  la  nature  et  ne  rêvait  qu'elle  II  visita 
les  côtes  de  la  mer  à  Ostende,  à  Blankenberghe  et  les  cam- 
pagnes de  Bruges.  En  rentrant  il  jetait  avec  une  espèce  de 
lune  le  souvenir  de  ses  impressions  sur  de  petits  mor- 
ceaux de  bois  qu'il  ramassait  dans  l'atelier.  Le  soir  il  allait 
dans  le  voisinage  vivre  et  jouer  avec  les  pauvres  pour 
lesquels  il  avait  une  prédilection  particulière.  Son  caractère 
était  doux  mais  triste  :  il  sentait  vaguement  au-dessus  de 
lui  frissonner  les  ailesde  la  mort.  Le  12  août  1873  celles-ci 
se  fermèrent  sur  lui  et  l'emportèrent.  Un  épanchement  au 
cerveau  l'enleva  rapidement  à  la  tendre  affection  des  siens 
et  a  l'amitié  de  ces  pauvres  au  milieu  desquels  sa  mémoire 
va  désormais  passer  à  l'état  de  légende.  La  légende  chc  petit 
tritz,  dira-t-on  plus  tard  dans  les  quartiers  de  Bruges 
quand  quelque  tradition  viendra  rappeler  le  cœur  excel- 
lent, la  main  ouverte  et  le  talent  phénoménal  de  cet  enfant 
Sa  biographie  est  donc  courte  comme  sa  vie,  mais  ce  qui 

2"'=  SÉRIE,  TOME   XXXVIH.  3g 


(  558  ) 
est  unique  et  colossal ,  c'est  son  œuvre.  Il  laisse  environ 
600  petits  panneaux  peints,  études  et  esquisses.  A  peu 
près  400  sont  restés  dans  la  famille.  Le  reste  a  été  donné 
par  Frédéric  lui-même  aux  pauvres. 

Sa  première  œuvre  peinte  date  de  1870.  Il  avait  8  ans. 
C'est  une  vue  copiée  d'après  une  gravure  de  Vllhistralion. 
Il  en  imita  très-superficiellemenl  le  dessin  qu'il  continua  à 
sa  façon,  puis  il  peignit.  Un  aplomb  inconcevable  s'y  mani- 
feste déjà  et  on  devine  que  l'enfanta  l'intuition  des  masses, 
de  la  perspective  et  de  la  couleur.  A  9  ans,  c'est  autre 
chose;  il  ébauche  par  centaines  des  couchers  de  soleil,  des 
bruyères,  des  effets  de  pluie  et  de  vent  à  désespérer  des 
artistes  faits.  Une  tristesse  adorable  se  montre  à  peu  près 
partout;  son  âme  mélancolique,  pensive  et  douce  a  posé  là 
une  empreinte  d'une  grandeur  harmonieuse  qu'on  ne  sau- 
rait considérer  sans  émotion.  C'est  ce  qu'ont  éprouvé  tous 
ceux  qui  ont  vu  les  paysages  de  Frédéric,  notamment  quel- 
ques célèbres  artistes  modernes,  qui  n'ont  pas  craint  d'af- 
firmer que  ces  paysages  pourraient  être  signés  des  noms 
les  plus  grands  et  que  ceux-ci  n'en  pourraient  qu'être  ho- 
norés. 

A  10  ans,  Frédéric  se  préoccupe  davantage  de  la  pra- 
tique. 11  oublie,  dirait-on,  de  pleurer.  On  sent  qu'une 
extraordinaire  habileté  de  facture  va  se  manifester  au  pré- 
judice de  cette  pensée  continue  de  mystère  et  d'appréhen- 
sion qui  tourmentait  son  intelligence.  Tout  à  coup  la  mort 
l'arrête;  son  âme  était  entièrement  passée  dans  son  œuvre 
au  moment  même  où  l'on  pouvait  craindre  que  la  main 
ne  se  substituât  à  l'inspiration. 

Nous  n'avons  pas  la  prétention  de  faire  ici  une  étude 
approfondie  des  œuvres  de  cet  étonnant  génie.  L'exposition 
qui  sera  faite  de  ses  i)rodui(s  satisfera  amplement  la  curio- 


(  539  ) 

site  et  l'atlenle  du  public.  Elle  permettra  aussi  de  juger, 
au  point  de  vue  scientifique,  ce  phénomène  éclos  au  sein 
de  la  race  flamande,  si  admirablement  préparée,  du  reste, 
par  la  nature,  pour  les  aptitudes  artistiques.  Ce  que  nous 
avons  voulu,  avant  tout,  c'est  de  consigner  ici  le  souvenir, 
avec  dates  exactes,  d'un  fait  unique  dans  les  fastes  de  l'art. 
Ce  que  nous  avons  voulu,  c'est  d'empêcher  que  ce  fait  ne 
soit,  dans  l'avenir,  altéré  ou  contesté. 

Il  importe,  dans  l'intérêt  de  la  justice  et  de  la  vérité, 
que  l'histoire  contemporaine  fasse  ses  propres  affaires  afin 
qu'elle  ne  soit  pas  un  objet  de  doute  quand  la  postérité 
dressera  le  bilan  de  nos  splendeurs  artistiques  et  qu'elle 
s'occupera  de  cet  enfant  sans  fin;  car  c'est  bien  de  Frédéric 
Van  de  Kerkhove  que  l'on  peut  dire,  avec  Théophile  Dufour: 
V enfant  n'a  pas  de  bornes^  l" enfant  est  infini,  pour  ainsi 
dire,  et  touche  à  Dieu  par  le  sentiment. 


b 


OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 

Chalon  [Renier). —  Discours  prononcé  à  la  séance  du  \  J  jan- 
vier 1874  de  FAcadémie  d'archéologie  dé  Belgique.  Anvers, 
1874;  broch.  in-S". 

Mathieu  {Adolphe).  —  La  vieillesse.  Bruxelles,  1874;  broch. 
in-8°. 

Nère  [Félix). —  Notice  sur  le  docteur  Gilles-François  Godin, 
botaniste  liégeois.  Gand,  1874;  broch.  in-S". 

Malaise  (T.). —  Sur  quelques  roches  porphyriques  de  Bel- 
gique. Bruxelles,  1874;  br.  in-8°. 

Bellrjnch  [A.).  —  Cours  élémentaire  de  botanique.  Namur 
1871-1874;  vol.  in-8. 


(  540  ) 

Rivier  [Alphonse).  —  Rodolplie  de  Vautravcrs  el  le  corale 
Charles  de  Cobenzl,  d'après  les  documents  inédits.  Broch. 
in-S",  s.  1.  n.  d. 

Folie  (F.).  —  Sur  un  nouveau  principe  de  mécanique  relatif 
aux  mouvements  stationnaires,  par  M.  R.  Clausius  (traduction 
extraite  du  Journal  de  mathématiques  pures  et  appliquées); 
brochure  in-4°.  —  Cours  de  calcul  des  probabilités,  fait  à 
l'Université  de  Liège  de  1849  à  1857,  par  A.  Meyer.  Publié  par 
F.  Folie.  Bruxelles,  1874;  vol.  in-8». 

Crépin  [François).  —  Description  de  quelques  plantes  fos- 
siles de  l'étage  des  psammites  du  Condroz  (Devonien  supé- 
rieur). Bruxelles,  1874;  broch.  in-8°. 

Abbeloos  {J.-B.)  et  Lamy  [T.-J.).  —  Gregorii  Barhebrœi 
chronicon  ecclesiaslicum,  tomus  II.  Louvain,  1874;  vol.  in-8°. 
(Envoi  du  Ministère  de  l'intérieur.) 

Darreux.  —  L'anasarquc,  suite  de  rétention  d'urine;  — 
Choléra  et  cimetières.  Paris,  1874;  2  broch.  in-8''. 

Dubois  [Alphonse).  —  Les  lépidoptères  de  l'Europe,  leurs 
chenilles  et  leurs  chrysalides,  1"'^  série  :  Espèces  observées  en 
Belgique,  65"  à  06"  liv.  Bruxelles,  1874;  4  cah.  in-8°.  (Envoi  du 
Ministère  de  l'intérieur). 

Firket  [Ad.).  —  Lithologie  du  fond  des  mers,  parM.Delesse 
(Compte  rendu  analytique);  —  Transformation  sur  place  du 
schiste  houiiler  en  argile  plastique.  i..iége,  1874;  2  broch.  in-S". 

Heiischling  [Xavier).  —  Anciens  registres  paroissiaux.  Ta- 
bles alphabétiques.  Liège,  1874;  broch.  in-8''. 

Poswick  [Eugène).  —  Histoire  Idographique  et  généalo- 
gique de  la  noblesse  limbourgcoise ,  tome  \.  Liège,  1875; 
vol.  in-4". 

Striiinan-Picard  [Amélie)  el  Kurlh  [Go'Jefroid).  ■ —  Antho- 
logie belge.  Bruxelles,  1874;  vol.in-16.  (Envoi  du  Ministère 
de  l'intérieur.) 

Van  der  IJaeçjhen  [Ph.).  —  Maximes  populaires  de  l'Inde 
méridionale.  Bruxelles,  1858;  in-S". 


(S4I   ) 

Graindorge  (.Joseph).  —  Exercices  de  calcul  intégral  à  l'usage 
des  élèves  de  l'École  des  mines.  Liège,  1873;  br.  in-8". 

Torfs  [Loil.)  et  Hansen  [C-J.].  —  Xederlandsche  krijgs-eii 
parlijnanieii.  Bruxelles,  1874;  br.  in-8". 

Verslag  over  het  bestiiiir  en  ilen  loestand  der  zaken  van  de 
stad  Turnlwut.  Turnhout,  1874;  vol.  iii-S". 

Caisse  de  prévoyance  des  ouvriers  mineurs.  Provinces  de 
Hainaut,  Liège  et  Namur.  —  Raj)j)ort  annuel  de  1873;  3  brooli. 
in-4°  et  1  brocli.  in-8°. 

Portefeuille  de  John  Cocker iU,  'z''  vol.,  pi.  97  à  106;  Loco- 
motives à  six  roues  couplées,  fcuil.  1  à  o.  Liège  et  Paris, 
5  feuilles  in-4"  et  10  pi.  in-fol. 

Observatoire  royal  de  Bruxelles.  —  Annales,  tome  XXIIL 
Bruxelles,  1874  ;  vol.  in-4°. 

Recueil  des  rapports  des  secrétaires  de  légation  de  Bel- 
gique. —  Tome  II,  S''  liv.,  octobre  1874.  Bruxelles,  187-i;  cali. 
in-8". 

Académie  royale  de  médecine  de  Belgique,  à  Bruxelles. 
—  Mémoires  couronnés  in-8'',  t.  Il,  5*^  et  4*^  fascicules;  —  Bul- 
letin, 5"  série,  t.  VIII,  n°'7-8  et  9,  1874.  Bruxelles,  1874;4cab. 
in-8''. 

Conseil  provincial  de  la  province  de  Brabant.  —  Session 
ordinaire  de  1874  (Distribution  deau).  Bruxelles,  1874;  br. 
in-S"  (double  exemplaire). 

Ancdectes  pour  servire  d  l'histoire  ecclésiastique  de  la 
Belgique.  —  Tome  IX,  1874,  3"  liv.  Bruxelles  et  Louvain;  cali. 
in-8°. 

Académie  d'archéologie  de  Belgique  ,  à  Anvers.  —  Bulletin, 
t.  I  (2' série  des  Annales),  10''  fascicule.  Anvers,  1874;  cali. 
in-8''. 

Société  royale  de  botanique  de  Belgique.  —  Bulletin,  t.  XIV, 
n"  1.  Bruxelles,  1874;  in-8°. 

Société  royale  de  numismatique  belge.  —  Revue,  d"  série, 
t.  VI,  i'  liv.  Bruxelles,  1874;  cah.  in-8''. 


(  W2  ) 

Commissions  royales  cVarl  et  iV archéologie.  —  Bulletin, 
XIII'  année,  1874,  n"'  o  et  6.  Bruxelles;  oah.  in-8". 

Musée  de  l'industrie  de  Belgique.  —  Bulletin,  35"  année, 
juillet  à  septembre  1874,  tome  06,  n"'  I  à  3.  Bruxelles,  1874  ; 
3  cah.  gr.  in-8''. 

Société  malacologique  de  Belgique.  —  Procès-verbaux  des 
séances  de  mai  à  septembre  1874.  Bruxelles;  feuilles  in-8". 

Société  roijule  de  pharmacie  de  Bruxelles.  —  Bulletin, 
18' année,  n°'  7  à  9,  juillet  à  septembre  1874.  Bruxelles; 
3  cah.  in-S". 

Société  entomologique  de  Belgique.  —  Compte  rendu, 
série  II,  n"'  I,  2,  3.  Bruxelles,  1874;  feuilles  in-8°. 

Société  royale  des  sciences  médicales  et  naturelles  de 
Bruxelles.  —  Journal,  52'  année,  juillet  à  septembre  1874. 
Bruxelles;  5  cah.  in-8". 

Annales  de  l'électricité  médicale  et  Echo  médical  réunis, 
nouvelle  série,  15"  volume,  7"  et  9"  fascicules,  juillet  et  sep- 
tembre 1874.  Bruxelles;  2  cah.  in-8". 

Annales  d'oculislique,  tome  LXXII,  I'"  et  2''  liv.  Bruxelles, 
1874;  cah.  in-8". 

Annales  de  médecine  vétérinaire ,  25''  année,  7"  à  9*  cah., 
juillet  à  septembre  1874.  Bruxelles;  3  cah.  in-8''. 

La  Presse  médicale  belge,  20*  année,  1874,  n"'  27  à  39. 
Bruxelles;  13  feuilles  in-4". 

Moniteur  industriel  belge,  vol.  I,  n°'  10  h  18.  Bruxelles, 
1874;  9  feuilles  in-4". 

Le  Bibliophile  belge,  9"  année,  tome  IX,  7' liv.  Bruxelles, 
1874;  cah.  in-8°. 

L'Abeille,  revue  pédagogique,  20'  année,  7"  liv.,  septembre 
1874.  Bruxelles;  cah.  in-8". 

Société  de  médecine  d'Anvers.  —  .annales,  XXXV*  année, 
août,  1874.  Anvers;  cah.  in-8". 

Société  de  pharmacie  d'Anvers.  —  Journal,  30'"  année,  juin 
à  août  1874.  Bruxelles;  5  cah.  in-8". 


(  543  ) 

Société  d'émulation  pour  l'étude  de  l'histoire  et  des  antiqui- 
tés de  la  Flandre.  —  Annales,  3"  série,  tome  IX,  n"  I  et  "2. 
Bruges,  1874;  eah.  in-8°. 

Revue  de  l'instruction  publique  en  Belgique,  22'  année, 
nouvelle  série,  tome  X VU'" ,  4' et  o'' liv.  Gand,  1874;  2  cah. 
in-S". 

L'Illustration  horticole  ,  5"  série,  b"  vol.,  tome  XXI,  7'  et 
S*"  liv.,  juillet  et  août  1874.  Gand;  2  cah.  in-8°. 

Messager  des  sciences  historiques,  3*  liv.,  année  1874. 
Gand;  cali.  in-8". 

Institut  archéologique  liégeois.  —  Bulletin,  tome  XII,  1" 
liv.  Liégè,  1874;  cah.  in-8". 

Société  niédico-chiriirgiccde  de  Liège.  —  Annales,  15*  année, 
août  et  septembre  1874.  Liège;  2  cah.  in-8°. 

L'Echo  vétérinaire,  4"  année,  juillet  à  septembre  1874. 
Liège;  5  cah.  in-S". 

Le  Scalpel,  27'' année,  n"'  1  à  15,  juillet  à  septembre  1874. 
Liège;  15  fouilles  in-4°. 

Journal  des  Beaux-Arts ,  XVI'  année,  1874,  juillet  à  sep- 
tembre, n"^  15  à  18.  Louvain;  6  feuilles  in-4°. 

Cosijn  (Z)""  P.-J.)  en  Verivijs  {D''  E.).  —  Woordenboek  der 
Nederlandsche  Taal,  derde  reeks,  derde  aflevering  (Gast- 
Gebrek).  La  Haye,  1874;  cah.  in-8°.  (Envoi  du  Ministère  de 
l'intérieur.) 

Von  Baumhauer  (E.-H.).  —  Sur  un  météorographe  univer- 
sel destiné  aux  observatoires  solitaires.  Harlem,  1874;  broch. 
in-8''. 

Société  hollandaise  des  sciences,  à  Harlem.  —  Archives, 
tome  IX,  liv.  1'%  2' et  3';  — Natuurkundige  Verhandelingen, 
ô'  série,  ded  II,  n"'  I  en  2;  —  Programme  pour  l'année  1874. 
Harlem,  1874;  cah.  in-4°  et  5  cah.  in-S". 

Musée  Teyler,  à  Harlem.  —  Archives,  vol.  III,  fascicule  IV*. 
Harlem,  1874;  cah.  gr.  in-S". 

Teyler's  Godgeleerds  Genootschap,  te  Haarlem.  —  Verhan- 


(  544  ) 

deliiigen,  nieuwe  série,  deel  III,  d'^  en  2"  sluk.  Harlem,  1874; 
2  cah.  in-8°. 

K.  Insliluut  voor  de  taal-land-en  volkenkunde  van  JVeder- 
landsch-Indië.  —  Bijdragen,  III.  volgreeks,  IX.  deel,  l^en 
2"  stuk;  —  Babad  Tanah  Djawi.  Met  aanteekeningen  van 
J.-J.  Meinsma.  La  Haye,  1874;  cah.  et  vol.  in-S". 

Zeeuwsch  Genootschap  der  wetenschappen,  le  Middelhurg. 
—  M.  Laurens  Pieter  Van  de  Spiegel  en  zijne  tijdgenoo- 
ten  (1757-1800).  Eerste  deel.  Toegelicht  door  G.  W.  Vreede. 
Middelbourg,  1874;  vol.  in-8°. 

Provinciaal  Utrechtsch  Genootschap  van  kunsten  en  iveten- 
schappen.  —  Aanteekeningen  van  het  verhandelde  in  de  seclie- 
vergaderingen ,  1873;  —  Verslag,  1875;  —  (J.  C.  G.  Boot). 
De  Vita  et  scriptis  Pétri  Wesselingii.  —  Geschiedenis  der 
Noordsche  Compagnie,  door  M.  S.  Muller.  Utrecht,  1875-1874; 
2  cah.  et  2  vol.  in-8''. 

K.  Natuurkundige  vereeniging  in  Nederlandsch  Indië, 
Batavia.  —  Natuurkundig  Tijdschrift ,  zevcnde  série,  deel  II, 
aflevering  1-2,  5-4.  Batavia,  1871-1875;  2  cah.  in-8°. 

Diival  [Jules).  —  Nouveaux  faits  concernant  la  mutabilité 
des  germes  microscopiques.  Paris,  1874;  broch.  in-8''. 

Diez  [Frédéric).  —  Grammaire  des  langues  romanes, 5"  édit., 
tome  II,  1"  fascicule.  Paris,  1874;  in-8°.  (Envoi  du  Ministère 
de  l'instruction  publique  et  des  cultes  de  la  République  fran- 
çaise.) 

Meunier  [Stanislas).  —  Cours  de  géologie  comparée  professé 
au  Muséum  d'histoire  naturelle.  Paris,  1874;  vol.  in-8°. 

Académie  des  sciences  de  Paris.  —  Comptes  rendus  hebdo- 
madaires des  séances,  tome  78,  n"  27;  tome  79,  n"'  1  à  13. 
Paris,  1874;  14  cah.  in-4''. 

Société  de  géographie  de  Paris. —  Bulletin,  mai  et  juin  1874. 
Paris; 2  cah.  in  8°. 

Société  météorologique  de  France,  à  Paris.  — Annuaire, 
tome  XIX%   1871,  Tableaux  météorologiques,  feuilles   1-5; 


(  545  ) 

tome  XX,  1872,  Bulletin  des  séances,  feuilles  C-18;  tome  XXI, 
1875,  Bulletin  des  séances,  feuilles  1-5.  Paris,  1874;  3  cah. 
in-S". 

Société  géologique  de  France,  à  Paris.  —  Bulletin,  3*  série, 
tome  11%  n"  4,  octobre  1874.  Paris;  cah.  in-S". 

Société  mathématique  de  France,  à  Paris.  —  Bulletin, 
tome  II,  n"  4, septembre  1874.  Paris;  cah.  in-S". 

Revue  scientifique,  n"'  i  à  13,  ¥  année,  2"  série.  Paris, 
1874;  13  cah.  in-4''. 

Revue  politique  et  littéraire,  n°'  1  à  15,  4*=  année,  2*=  série. 
Paris,  1874;  13  cah.  in-4°. 

Revue  britannique,  juillet  à  septembre  1874.  Paris;  3  cah. 
in-8°. 

rinstitut,  nouvelle  série,  2"  année,  n"'  78  à  88,  90  et  91. 
Paris,  1874;  13  feuilles  in-4°. 

Revue  des  questions  historiques,  9^  année,  32*=  liv.,  l"  oc- 
tobre 1874.  Paris,  1874;  cah.  in-8°. 

Archives  de  médecine  navale,  tome  XXir,  juillet  et  août 
1874.  Paris,  1874;  2  cah.  in-8''. 

Le  Progrès  médical,  2'  année,  n"'  27  à  39.  Paris,  1874; 
13  feuilles  in-4°. 

Revue  hebdomadaire  de  chimie,  5"  année,  n"'  28  à  39.  Paris, 
1874;  12  feuilles  in-8". 

Journal  de  l'agriculture,  tome  III,  juillet  à  septembre  1874. 
Paris;  13  cah.  in-8°. 

Indicateur  de  l'archéologue,  n"^  19  à  21,  juillet  à  septem- 
bre 1874.  Paris;  3  cah.  in-8°. 

Société  des  Antiquaires  de  Picardie,  à  Amiens.  —  Bulletin, 
année  1874,  n"  2;  —  Mémoires,  2*  série,  t.  IX,  1863;  3«  série, 
t.  III,  1873.  Amiens;  2  vol.  et  1  cah.  in-S". 

Société  linnéenne  du  nord  de  la  France,  à  Amiens.  —  Bul- 
letin mensuel,  3*  année,  1874,  septembre  et  octobre,  n<"  27 
et  28.  Amiens,  1874;  2  feuilles  in-8°. 

Société  d'Emulation  de  Cambrai.  —Mémoires,  tome  XXXII, 


(  546  ) 

2'  et  5'  parties,  1874.  Cambrai,  1874;  vol.  et  cah.  in-8". 
Société  savoisienne  (V histoire  et  trarchéoloçiie,  à  Cliumbéry. 

—  Mémoires  et  documents,  tomes  X  et  XI.  Cliambéry,  18G6  et 
18G7;  2  vol.  in-8. 

Société  des  sciences,  de  ^agriculture  et  des  arts  de  Lille.  — 
Mémoires,  ô"^  série,  années  1805,  1866,  1875  et  1874,  2%  3% 
12*^01  15'  vol.  Lille;  4  vol.  in-8°. 

Comité  flamand  de  France,  à  Lille.  —  Bulletin,  tome  VI, 
n°d.  Lille,  1874;cah.  in-8°. 

Bulletin  scientiflque,  historique  et  littéraire  du  départe- 
ment du  Nord,  d  Lille,  G'  année,  n"'  G,  7  et  8.  Lille,  1874; 
2  cah.  in-8°. 

Académie  de  Stanislas,  à  JVancy.  —  Mémoires,  18G2  (Docu- 
ments pour  servir  à  la  description  scientifique  de  la  Lorraine). 
Nancy,  I8G2;  vol.  in-8». 

Société  d'agriculture,  sciences  et  arts  de  l'arrondissement  de 
Valenciennes.  —  Revue  agricole,  XVI''  année,  '18G4,  tomes  XVII 
et  XVIII;  tome  XXVII,  n"'  3  à  8,  mai-aoùt  1874;  —  Mémoires, 
tome  VI,  I84G.  Valenciennes;  3  vol.  et  3  cab.  in-8". 

Putzeys  [Félix)  et  Fiïrst  Tarchanoff.  —  Ueber  den  Einfluss 
des  Nervensystems  auf  den  Zustand  des  Gefasse.  Berlin,  1874; 
brocb.  in-8''. 

Giehel  [Dr  C.-G.).  —  Zeitscbrift  fiir  die  Gcsammtcn  Naturwis- 
senschaften,  Neue  Folge,  1875,  Bd.  VIL  Berlin,  1875;  12  cah. 
in-8". 

Berliner  Gesellschaft  fur  Anthropologie ,  Ethnologie  imd 
Urgeschichte.  —  Verbandlungen ,  Jabrg.  1874,  janner-marz. 
Berlin,  1874;  3  cab.  gr.  in-8°. 

Deutsche  chemische  Gesellschaft  zu  Berlin.  —  Berichte,  N°'  1 0, 
11, 12,  15,  siebenter  Jahrgang.  Berlin,  1874;  5  cab.  in-8». 

K.  PreussischeAkademie  der  Wissenschaften,  zu  Berlin. — 
Monatsbericbt,  juin,  juillet  et  août  1874.  Berlin;  3  cab.  in-8°. 

Schlesische  Gesellschaft  fur  vaterlandische  Cultur,  Breslau. 

—  Jabres-Bericht,  o1'"",  1875;  —  Abbandlungcn  :  philoso- 


(  o47  ) 

pliiscli-hislori-che    Ablheilung,    1875-1 874.  Breslau,    1874; 
2  cah.  in-8°. 

Jusiiis  Fertiles'  geographische  Anstalt  zu  Gotha.  —  Mit- 
theikuigen,  20.  Ed.,  1874,  VI,  VII,  VIII,  IX.  Gotha,  1874;  4  cah. 
in-8°. 

lyaturhisfoi'iscli-inedicinischer  Verei?i  zu  Heidelberg.  — 
Verliandhingen,  Neue  Folge,  I.  Bd.,  I.  Heftc.  Heidelberg,  1874; 
cah.  111-8°. 

Ferdinandeiim  Gesellscliaft  fur  Tirol  und  Vurarlherg. 
Innsbruck.  —  Zeitschrilt,  III. Folge,  18.Hefte.  Inspruck,  1874; 
cah.  in-8", 

Astronomische  Gesellscliaft,  Leipzig.  —  Publication,  XIII: 
BeobachtLingen  der  Sonncnflecken  zu  Anglam  von  Prof.  D' 
G.  Spôrer;  — Vierteljahrsschrift,  IX.  Jahrg.,  11.  Hefte.  Leipzig, 
1874;  cah.  in-4»  et  cah.  in-8°. 

K.  b.  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Milnchen.  —  Sit- 
ziingsbericlitc  :  philosoph.-philolog.  und  hist.  Classe,  Heft  VI, 
1875;  Hcft  I,  II,  111,  1874;  —  Mathem.-physikal.  Classe, 
Heft  III,  1875;  Heft  I,  II,  1874.  .Munich,  1875-1874;  7  cah. 
in-8°;—  Abhandlungen  der  hist.  Cl.,  Bd.  XII,  2.  Abtheilung;  — 
Kônig  Johann  von  Sachsen  von  J.  von  Dôllinger;  —  D'' Justus 
Freiherrn  von  Licbig,  von  August  Vogel;  D'' Th.-L.-W.  von 
Bischoff;  D"'  Max  von  Pettenkofer;  — Annalen  der  Slernwarte, 
XIII.  Suppl.  Bd.  Munich,  1874;  3  cah.  in-4"  et  1  cah.  in-8". 

Der  Philoinatie  in  ^Veisse.  —  XVIII.  Bericht,  April  1872 
bis  zum  Mai  1874.  Neisse,  1874;  broch.  in- 4°. 

Société  inathéinatique  de  Bohème,  à  Prague.  —  Bulletin, 
tomes  I  etll,  1872  et  1874;  — Journal  de  mathématiques  et  de 
physique,  tomes  I,  II  et  III,  1872  à  1874.  Prague;  25  cah.  in-8". 
(En  tchèque.) 

K.  Akademie  der  Wissenschaften  in  Wien.  —  Sitzung  der 
math.-naturw.  Classe,  Jahrg.  1874,  N°  XV  bis  XX.  Vienne; 
feuilles  in-8". 

Anlhropologische  Gesellscliaft  in  Wien.  —  Mittheilungcn, 
N"  5  bis  6,  IV.  Bd.,  1874.  Vienne,  1874;  4  cah.  in-S". 


(  548  ) 

K.  K.  geologische  Reichsanstalt  in  Wien.  —  Verliand- 
lungen,  n"'  7  à  1 1  ;  —  Abhandlungcn ,  Bd.  VII,  Hcft  Nr.  1 
und  2;  —  Jalirbucli ,  Jahrgang  1874,  XXIV.  Bd.,  n"  2.  Vienne, 
1874;  2  cah.  gr.  in-4°,  1  cah.  et  IG  feuilles  pet.  {0-4°. 

K.  K.  Universitdf  zu  Wien.  —  Offentlichc  Vorlesungen, 
Winfer-Semester  1874-1875.  Vienne,  1874; cah.  in-4"  (2 exem- 
plaires). 

Verein  fiir  vaterldndische  Nalurkunde  in  Wilrtlemberg, 
Stuttgart.  —  Jahreshefte,  I.,  II.  und  III.,  1874.  Stuttgart,  1874; 
2  cah.  in-S". 

PhysikaL-medicin.  Gesellschafl  in  Wiirzburg.  —  Ver- 
handlungen,  Neue  Folgc  :  Bd.  VU;  Bd.  VIII,  1.  und  2.  Heft. 
Wiirzbourg,  1874;  2  cah.  in-8". 

Université  de  Kazan.  —  Bulletin  et  Mémoires,  vol.  XLI, 
4874,  n"^  1  et  2.  Kazan,  1874;  2  cah.  in-8''.  (En  russe.) 

Société  impériale  des  naturalistes  de  Moscou.  —  Bulletin, 
année  1875,  n°  4.  Moscou ,  1874;  cah.  in-8''. 

Société  chimique  de  Saint-Pétershourg. —  Journal,  tome  VI, 
n"'  6  et  7.  Saint-Pétersbourg,  1874;  2  cah.  in-S".  (En  russe.) 

Commission  impériale  archéologique,  à  Saint-Pétersbourg. 
—  Compte  rendu  pour  les  années  1870  et  1871,  avec  allas. 
Saint-Pétersbourg,  1874;  vol.  gr.  iii-4°  avec  atlas  in-fol. 

Académie  royale  de  Copenhague.  —  Bulletin,  n"  3,4875; 
n"!,  1874.  Copenhague;  2  cah.  in-S°. 

Kongl.  Unii-ersilets  i  Upscda.  —  Fôreliisningar  och  ôfningar, 
1875,  1874;  —  Arsskrift,  4875;  —  Index  scholarum,  1875. 
Upsal,  1873-1874;  vol.  in/*"  et  2  cah.  in-8'';  —  Akademisk 
Afhandling.  Upsal  et  Stockholm;  12  cah.  in-S". 

Almén  {August). —  Jemfôrelse  Mellan  naturliga  och  Konst- 
gjorda  helsovalten,  sadana  de  i  handeln  fôrekorama;  —  Till 
vetenskapernas,  vardare,  gynnare  och  vanner.  Upsal,  1874; 
2  cah.  in -4°. 

Société  de  physique  et  d'histoire  naturelle  de  Genève.  — 
Mémoires,  tome  XXIII,  seconde  partie.  Genève,  1875-1874; 
vol.  in-4°. 


(  U9  ) 

St.  Gallische  natunvissenschaflliche  Gesellschaft.  —  Be- 
richt,  1872-1875.  Saint- Gall,  1874;  vol.  in-8°. 

Arrivabene  (Conte  Giovanni).  —  Un'  epoca  délia  mia  vita. 
Mantoue,  1874;  vol.  in-8". 

Fenicia  [Salvatot-e).  —  Canlo  scientifico  morale  sul  congcg- 
nato  deir  atmosfera  della  terra;  — Sonetti.  Bari,  4867;  broch. 
in-12  et  feuille  in-i". 

Reale  Acccidemia  deiLincei,  Romu. —  Atti,  tonaoXXVI,  anno 
XXVI,  sessione  H^del  oGennaio  1875.  Rome,  1874;  cah.  in-4''. 

R.  Comitato  geologico  tVltalia,  Ronia.  —  Bollettino,  n"'  5 
e  6,  Maggio  e  Giugno  1874.  Rome,  1874;  cah.  in-8°. 

R.  Accademia  dclle  science  di  Torino.  —  Atti,  vol.  IX,  Disp. 
1'-5%  Novembre  1875  à  Juin  1874.  Turin;  3  cah.  in-8°. 

Rivista  scientifico  -  industriale ,  anno  VI,  juin-août  1874. 
Florence,  1874;  5  eah.  in-8°. 

Tommasi  [D'  D.).  —  On  a  new  method  of  preparing  toluène. 
Londres;  broch.  in-8°  (en  double). 

Royal  Ohservatory ,  Greenwich.  —  Greenwich  observa- 
tions, from  1856  to  1871.  Londres,  1857-1873;  56  vol.  in-4''; 
—  Lunar  Réductions,  vols.  1,  II,  III  (1750  to  1850  et  1851 
to  1851);  —  Planctary  Réductions,  1  vol.  (1750  to  1850);  — 
Tables  de  la  lune,  par  P. -A.  Hansen;  —  Vérification  and  ex- 
tension of  La  Caiile's  arc  of  meridian,  vol.  I  and  II.  Londres; 
7  vol.  in-4'';  —  Report  on  the  TenerifTe  asii'onoraical  experi- 
ment  of  1836;  —  Bessels  refraction  tables  (appendixto  Green- 
wich observations,  1835)  ;  — Description  of  photographie  self- 
vcgistering  apparatus,  altazimulh,  transit  cirde,  reflcx  zénith 
tube,  chronograph,  great  Equatorial,  water  télescope;  — 
Plan  of  the  Buildings  and  Grounds;  —  Report  on  ihe  total 
éclipse  of  the  sun,  Augusl  17-18,  1868; —  Maguelical  and 
mcleorological  observations,  1847;  —  Lecture  on  the  Green- 
wich System  of  time  signais.  Londres  ;  11  cah.  in-i"  et  une 
brochure  in-8''. 

Philosophical  Society  of  Glasgoic.  —  Procecdings,  vol.  I, 


(  mo  ) 

n"'  \-\0;  vol.  II,  n"'  1-4;  vol.  VI,  n«  5.  Glasgow,  1841-1848, 
186G-1867;  17  fasc.  et  5  cali.  111-8°. 

Royal  geographical  Society  of  London.  —  Journal,  vol. 
LXIII,  1875.  Londres,  1873;  vol.  in -8°. 

London  MatJiematical  Society.  —  Proceedings,  vol.  V,  0"=  Gfi 
à  72.  Londres ,  1874;  4  cah.  in-8''. 

Numisniatic  Society  of  London.  —  Journal,  new  ser.,  N"  LIV, 
pt.  II,  1874.  Londres;  cah.  in-8''. 

Zoological  Society  of  London.  —  Transactions,  vol.  VIII, 
Pt.  9.  —  Proceedings  for  the  year  1874,  pis.  II  and  III.  Lon- 
dres, 1874;  eah.  in-i"  et  2  cah.  in-8''. 

Nature,  ^"'  245  à  2C0,  vol.  X.  Londres,  1874;  18  cah. 
in-4°. 

Meleorologiccd  Reporter  to  the  Government  of  Rengal.  — 
Meleorological  ahstracl  for  the  year  1875.  Calcutta  ,  1874;  cah. 
gr.  in-4''. 

Royal  Observatory ,  Cape  of  Good  Hope.  — Resullsofas- 
tronomical  observations,  18oG,  1857-1858.  Cape  Town,  1871- 
1872;  vol.  in-8°. 

Royal  Society  of  arts  and  sciences,  Mauritius.  —  Transac- 
tions, new  séries,  vol.  VII.  Maurice,  1872;  vol.  in-8''. 

Academy  of  natural  sciences  of  Philadelphia.  —  Procee- 
dings, pts.  I-III,  january  at  december  1875;  —  Journal,  new 
séries,  vol.  VIII,  pt.  I.  Philadelphie,  1873-1874;  cah.  in-4'' et 
5  cah.  in-8°. 

Board  of  public  churities.  —  Fourlh  annual  report  of  the 
Board  of  commissioners;  —  Report  in  answer  lo  the  resolu- 
tion of  the  Ilouse  of  Représentatives  of  january  51,  1874;  — 
In  the  raatter  of  the  insane  in  the  prisons  and  poorhouses  of 
Pensylvania.  Ilarrisburg  et  Philadelphie,  1874;  1  vol.  cl 
2  broch.  in-8°. 

Dali  {W.-H.).  —  E.\traits  des  Proceedings  of  the  California 
Academy  of  sciences,  concernant  la  géologie  et  la  paléontologie. 
Salera  ;  8  broch.  in-8''. 


(  ^ol   ) 

Packard  [A. -S.- Jr.). —  The  ancestry  ofinsects;  —  Cata- 
logue of  the  Pyralidae  of  California ,  with  descriptions  ofnew 
Californian  Pterophoridee;  —  Catalogue  of  the  Phalœnidee  of 
California;  —  Third  annual  report  on  the  injurions  and  bene- 
.  fieial  insects  of  Massachusetts.  Salera,  1873-1874;  4  broch. 
in-8''. 

Peabody  Academy  of  science ,  Salem.  —  Fifth  annual 
report  for  the  year  1872.  Salem,  i875;  cah.  in-8°;  —  The 
American  naturalist  :  vol.  VI,  n"  12,  dccember  1872;  vol.  VII, 
n"  1-12,  january  at  derember  1875;  vol.Vlll,  n'  \,  january 
1874.  Salem,  1872-1874;  14  cah.  in-S". 

Essex  InslUute  of  Salem.  —  Bulletin,  vol.  V,  1873.  Salera, 
1874;  vol.  in-8°. 

California  Academy  ofnatural  sciences,  San  Francisco.  — 
Proceedings,  vol.  I,  1804-1857,2"^  édition;  vol.  V,  pari  II, 
1873.  San  Francisco,  1873-1874;  2  cah.  in-8''. 

Toner  {Dr.  J.-M.).  —  The  natural  hislory  and  distribution 
of  yellowFever  in  ihe  United  States.  Washington,  1873;  broch. 
in-S". 

Smithsonian  Institution  of  Washington.  —  Annual  report 
for  1872.  Washington  ,1873;  vol.  in-8''. 

Woodivorth  [John  M.).  —  Nomenclature  of  diseases  prepared 
for  ihe  use  of  the  médical  officers  of  the  United  States  Marine- 
Hospital  service.  Washington,  1874;  vol.  in-8°. 

U.  S.  yeological  and  geographical  Survey  ofthe  terrilories , 
Washington. —  Miscellaneous  publications,  W^'  4  and  o;  —  Bul- 
letin ,  n"'  1  and  2.  Washington,  1874;  4  cah.  in-8°. 

Sociedad  de  geogra/ia  y  estadistica  de  la  republica  mexi- 
cana,  Mexico.  —  Boletin ,  tercera  epoca,  lomo  I,  n°'  8  y  9; 
t.  II  n°=  10,  11  y  12.  Mexico,  1873;  3  cah.  in-8°. 

Sociedad  mexicana  de  historia  natural  j  Mexico.  —  La 
Naturaleza  :  Entrega  12*-19%  mayo-dicierabre  de  1870;  En- 
trega  20''-30'',  enero-diciembre  de  1871;  Entrega  5r-39\ 
Mexico,  18G9-1S73;  20  cah.  in-4. 


(  552  ) 

The  american  journal  of  sciences  and  arts ,  third  séries, 
vol.  VII,  W'  42,  43  and  44,  june,  july  and  august  4874.  New- 
Haven,  1874;  3  cah.  in-8°. 

The  Penn  Monthly,\o\.  IV,  n"^  45  et  46;  vol.  V,  n"'  49,  50, 
5G  et  57.  Philadelphie,  -1874;  6  cah.  in-8°. 

Inztitulo  historico,  geographico  e  ethnographico  do  Brasil. 
—  Revista  trimensal  :  tomo  XXXVI,  parte  segunda,  III  e  IV 
trimestre  ;  tomo  XXXVII,  parte  primeira,  I  trimestre.  Rio  de 
Janeiro,  1875-1874;  3  cah.  in-S". 

Revista  de  Portugal  e  Brazil,  2^  vol.,  n°'  6  à  11  de  1874. 
Lisbonne;  6  cah.  in-4''. 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 

DES 

LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIQUE. 
1874.  —  N°li. 

CLASSE   DES    SCIENCES. 

Séa7ice  du  7  novembre  1874. 

M.  E.  Candèze,  directeur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van  Beneden  , 
Edm.  de  Selys  Longchamps,  H.  Nyst,  Gluge,  Melsens, 
F.  Duprez,  G.  Dewalque,  E.  Quetelet,  H.  Maus,  M.  Gloe- 
sener,  F.  Donny,  Ch.  Montigny,  Steichen,  A.  Brialmont, 
Éd.  Dupont,  Éd.  Morren,  Éd.  Yan  Beneden,  G.  Malaise, 
membres;  E.  Catalan,  Aug.  Bellynck,  associés;  Éd.  Mailly, 
Alph.  Briart,  H.  Valérius,  F.  Folie,  J.  De  Tilly,  F.  Pla- 
teau ,  Fr.  Crépin  ,  correspondants. 

2""*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  36 


(  554  ) 


CORRESPONDANCE. 


i>i.  le  Ministre  de  riiUérieur  communique  deux  lettres, 
l'une  de  M.  Melsens  et  l'autre  de  M.  le  Ministre  des  tra- 
vaux publics,  relatives  à  une  question  de  paratonnerres. 

La  classe  décide  le  renvoi  de  ces  deux  communications 
à  la  Commission  permanente  des  paratonnerres. 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  envoie,  pour  la  biblio- 
thèque de  l'Académie,  les  livraisons  63  et  64  de  l'ouvrage 
intitulé  :  Les  Lépidoptères  de  la  Belgique,  par  M.  A.  Du- 
bois. —  Remercîmenls. 

—  M.  le  vice-amiral  de  la  Roncière  le  Noury,  président 
de  la  Société  de  géographie  de  Paris,  adresse  les  docu- 
ments imprimés  relatifs  au  Congrès  international  des 
sciences  géographiques  qui  se  réunira  à  Paris  au  prin- 
temps de  1875. 

—  L'Institut  royal  des  sciences,  des  lettres  et  des 
arts  de  Venise  envoie  son  programme  de  concours  pour 
1875. 

—  M.  le  professeur  Bernardin,  du  collège  de  Melle, 
envoie  ses  observations  des  phénomènes  périodiques  du 
règne  végétal,  faites  dans  cette  localité  le  21  octobre  der- 
nier. —  M.  le  professeur  Cavalier,  d'Ostende,  transmet  ses 
résumés  météorologiques  pour  cette  ville  pendant  les  mois 
de  septembre  et  d'octobre  1874.  —  Ces  documents  sont 

éservés  pour  le  recueil  des  phénomènes  périodiques. 


res 


(  5oo  ) 

—  L'École  polytechnique  de  France,  MM.  Paul  Gervais, 
associé,  à  Paris,  et  André  Ramsay,  associé,  à  Londres, 
remercient  pour  l'envoi  qui  leur  a  été  fait  des  dernières 
publications  académiques. 

—  L'Académie  de  Stanislas  à  Nancy,  la  Société  de  phy- 
sique et  d'histoire  naturelle  de  Genève,  l'Académie  royale 
des  sciences  à  Munich,  la  Société  physico-médicale  de 
Wurzbourg,  l'Académie  royale  de  médecine  de  Belgique, 
la  Société  des  sciences  de  Saint-Gall,  la  Société  silé- 
sienne  deBreslau,  l'Université  de  Kazan,  le  Gouverne- 
ment du  Bengale,  l'Académie  royale  des  sciences  de 
Turin,  la  Société  d'Émulation  de  Cambrai  et  la  Société 
des  sciences  de  Lille  font  hommage  de  leurs  derniers 
travaux. 

—  M.  Stanislas  Meunier,  de  Paris,  offre  un  exemplaire 
de  son  livre  intitulé  :  Géologie  comparée,  i  vol.  in-8°.  Il 
demande  en  même  temps  que  la  classe  veuille  bien  faire 
un  rapport  sur  cet  ouvrage. 

La  classe,  tout  en  remerciant  l'auteur  pour  ce  don, 
regrette  de  ne  pouvoir  accéder  à  son  désir,  le  règlement 
prescrivant  qu'il  ne  peut  être  fait  de  rapports  sur  les  tra- 
vaux déjà  livrés  à  la  publicité. 

—  La  classe  accepte  le  dépôt  d'un  billet  cacheté  qui  lui 
est  présenté  par  M.  F.  Folie,  au  nom  de  M.  Walthère 
Spring.  Ce  billet,  renfermant  la  Description  cVun  appareil 
permettant  de  mesurer  la  vitesse  de  propagation  de  la  cha- 
leur rayonnante ,  sera  déposé  dans  les  archives. 

—  M.  E.  Quetelet  présente  le  premier  exemplaire  du 
tome  XXIII  des  Annales  de  V Observatoire  royal  de 
Bruxelles^  qui  vient  d'être  imprimé. 


(  oo6  ) 
Ce  volume  renferme  les  observations  astronomiques  de 
l'année  1868  et  la  météorologie  des  années  1872  et  1873. 
Il  est  précédé  d'une  notice  consacrée  au  fondateur  et  pre- 
mier directeur  de  l'Observatoire ,  feu  M.  Adolphe  Quetelet. 

M.  C.  Malaise  offre  son  travail  imprimé  intitulé  :  Sur 
quelques  roches  porphyriques  de  Belijique,  broch.  in-8". 

Le  R.  P.  Bellynck  fait  hommage  de  son  Cours  élémen- 
taire de  botanique,  1  vol.  in-8°. 

M.  F.  Folie  offre  un  exemplaire  du  Cours  de  calcul  des 
probabilités,  fait  à  l'Université  de  Liège  de  1849à  1857, 
par  A.  Meyer,  ancien  correspondant  de  l'Académie.  M.  Folie 
a  publié  cet  ouvrage  sur  les  manuscrits  de  l'auteur. 

Il  présente  également  la  traduction  du  travail  de 
R.  Clausius,  Sur  un  nouveau  principe  de  mécanique  relatif 
aux  mouvements  stationnaires.  In-4-°.  (Extrait  du  Journal 
de  Liouville.) 

M.  Folie  lit  la  note  suivante  au  sujet  des  deux  ouvrages 
mentionnés  ci-dessus  : 

«  Je  viens  de  publier  sous  les  auspices  de  la  Société 
royale  des  sciences  de  Liège ,  et  avec  le  concours  obligeant 
de  mon  ami  M.  L.  Perard,  un  volume  dont  j'ai  l'honneur 
de  faire  hommage  à  l'Académie,  et  qui  l'intéresse  à  un 
double  titre  :  c'est  le  Cours  de  calcul  des  probabilités  de 
A.  Meyer,  un  de  nos  anciens  correspondants.  Ce  cours  est 
l'un  des  plus  complets  qui  aient  été  publiés  sur  la  matière; 
et  les  problèmes  les  plus  difficiles  de  Laplace,  dont  la  lec- 
ture a  souvent  arrêté  d'assez  bons  analystes,  y  sont  déve- 
loppés avec  clarté,  de  même  que  les  théories  postérieures 
de  Poisson,  de  Gauss  et  de  Bienaymé.  Vu  l'importance  de 
l'ouvrage,  et  l'utilité  qu'il  peut  offrir  pour  l'étude  de  toutes 


(  oo7  ) 

les  questions  d'assurances,  j'ai  cru  devoir  y  ajouter  des 
tables  de  mortalité  plus  récentes  que  celle  dont  Meyer  avait 
fait  usage.  Je  me  suis  adressé  à  notre  regretté  secrétaire 
perpétuel  A.  Quetelet,  qui  m'a  autorisé,  avec  une  bienveil- 
lance dont  je  conserve  le  pieux  souvenir,  à  insérer  dans  le 
traité  de  Meyer  ses  tables  récentes  de  mortalité. 

»  J'espère  que  la  publication  de  cette  œuvre  posthume 
de  Meyer,  l'un  de  nos  analystes  les  plus  distingués,  contri- 
buera à  ranimer  en  Belgique  le  goût  de  la  science  des  pro- 
babilités. 

»  Je  prie  la  classe  d'agréer  en  même  temps  l'hommage 
d'un  exemplaire  de  ma  traduction  d'un  travail  remarquable 
de  Clausius  intitulé  :  Sur  un  nouveau  principe  de  méca- 
nique relatif  aux  mouvements  stationnaires. 

B  Ce  travail  est  un  jalon  placé  par  le  célèbre  professeur 
de  Bonn  dans  la  voie  qu'il  trace  pour  ramener  la  théorie 
mécanique  de  la  chaleur  aux  principes  de  la  mécanique 
rationnelle.  » 

M.  Gloesener  présente,  au  nom  de  M.  Graindorge,  un 
exemplaire  autographié  de  ses  Exercices  de  calcul  intégral. 
à  l'usage  des  élèves  de  l'école  des  mines  de  Liège.  In-8°. 

M.  le  Gouverneur  du  Brabant  adresse  deux  exemplaires 
des  discussions  du  conseil  provincial  pendant  sa  session 
ordinaire  de  1874,  relativement  à  la  distribution  d'eau. 
In-8°. 

La  classe  vote  des  remercîments  aux  auteurs  de  ces  dif- 
férents dons, 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  seront  l'objet  d'un 
examen  : 

1"  Recherches  sur  l'embryogénie  des  poissons  osseux. 


(  So8  ) 

—  I.  Modifications  de  l'œuf  après  la  ponte,  non  fécondé. — 
II.  Premières  phases  du  développement;  avec  5  planches, 
par  M.  Ch.  Van  Bambeke.  —  Commissaires  :  MM.  Éd.  Yan 
Beneden,  Schwann  et  Giuge  ; 

2°  Des  chlorures  alcalins  de  la  formation  houillère,  par 
M.  Renier  Malherbe.  —  Commissaires  :  MM.  de  Koninck 
et  Dewalque  ; 

5"  Calculs  de  Véclipse  de  soleil  du  10  octobre  et  de  l'oc- 
cultation de  Vénus  du  i4  octobre  ^574,  par  M.  L.  Eslour- 
gies.  —  Commissaires  :  MM.  E.  Quetelel  et  J.  Liagre. 

—  Les  auteurs  du  mémoire  de  concours  «  sur  les  roches 
plutoniennes  de  la  Belgique  et  de  l'Ardenne  française,  » 
présenté  le  51  juillet  dernier,  adressent  un  premier  sup- 
plément (avec  deux  planches)  à  leur  travail. 

La  classe  décide  qu'elle  ne  peut  s'écarter,  au  sujet  de  ce 
travail ,  des  règles  habituelles  des  concours,  qui  exigent 
que  les  auteurs  soumettent  des  œuvres  entièrement  ter- 
minées à  la  date  du  terme  fatal  pour  la  réception  de  celles-ci 
par  l'Académie. 

Elle  a,  en  conséquence,  déclaré  que  ce  supplément  se- 
rait considéré  provisoirement  comme  non  avenu,  et  le 
dépôt  en  a  été  ordonné  aux  archives. 


RAPPORTS. 


MM.  J.  Liagre  et  E.  Quetelet  donnent  lecture  de  leurs 
rapports  sur  le  travail  de  M.  J.  C.  Houzeau,  intitulé  : 
Résumé  de  ciuelcpies  observations  astronomiques  et  météo- 


(  55'9  ) 

rologiques  faites  dans  la  zone  sur  tempérée  et  entre  les 
tropiques. 

Conformément  aux  conclusions  de  ces  rapports,  qui, 
d'après  le  règlement,  ne  seront  pas  imprimés,  la  classe 
vote  des  remercîments  à  M.  Houzeau,  et  décide  l'impres- 
sion de  son  travail  dans  le  recueil  in-S"  des  Mémoires. 


Remarques  sur  l'aspect  de  la  planète  Jupiter  pendant  son 
opposition  en  '1874;  par  M.  Terby. 

Mia/tjtofl  de   .Ff.  K.   Qttetelel. 

«  La  note  que  M.  Terby  présente  à  l'Académie  sur 
l'aspect  de  la  planète  Jupiter  pendant  son  opposition 
en  1874,  fait  suite  aux  recherches  que  ce  jeune  astro- 
nome a  déjà  publiées  dans  les  Bulletins  sur  les  caractères 
physiques  des  planètes  principales.  Un  des  faits  les  plus 
remarquables,  observés  cette  année,  a  été  l'affaiblissement 
notable  qu'a  éprouvé  la  bande  voisine  de  la  calotte  polaire 
septentrionale;  en  1872  et  en  1875,  celte  bande  était  re- 
marquable par  sa  netteté  et  sa  teinte  sombre. 

L'auteur  décrit  ensuite  les  deux  bandes  très-distinctes 
situées  dans  le  voisinage  du  centre  de  Jupiter. 

La  note  se  termine  par  quelques  remarques  sur  les 
apparences  qu'offrent  les  satellites  pendant  leurs  passages  ; 
dans  certains  cas,  ils  se  projettent  sur  la  planète  sous  la 
forme  d'une  tache  tout  à  fait  noire. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  l'impression  de  la  notice  de 
M.  Terby  dans  le  recueil  des  Bulletins.  » 


(  560  ) 
La  classe,  après  avoir  entendu  M.  J.  Liagre,  second 
commissaire,  adopte  les  conclusions  du  rapport  deM.Ern. 
Quetelet. 


Recherches  sur  la  conservation  du   bois   au  moyen   des 
sels  de  cuivre;  par  M.  Rottier. 

Kappoft   tle  3Ë.  Stonny. 

a.  On  sait  que  les  bois  employés  dans  la  construction 
des  chemins  de  fer  et  dans  l'établissement  des  lignes  télé- 
graphiques sont  en  général  préparés  chimiquement  afin 
d'en  prolonger  la  durée.  Deux  méthodes  sont  employées 
dans  ce  but,  l'injection  à  la  créosote  et  l'injection  au  sul- 
fate de  cuivre.  Dans  des  travaux  antérieurs,  que  l'Académie 
a  fait  imprimer  dans  ses  Bulletins,  t.  XY,  ^^  série,  p.  424, 
et  t.  XVII,  2'' série,  p.  538,  l'auteur  a  décrit  ses  recher- 
ches sur  l'emploi  de  la  créosote.  Il  soumet  aujourd'hui  à  la 
classe  ses  recherches  sur  l'emploi  du  sulfate  de  cuivre.  Ce 
travail  fait  donc  suite  au  premier  et  en  constitue  le  com- 
plément. 

Le  travail  se  divise  en  deux  chapitres  distincts.  Dans  le 
premier,  après  avoir  reconnu,  comme  on  le  savait  déjà, 
que  le  bois  injecté  au  sulfate  de  cuivre  ne  se  conserve  pas 
indéliniment,  il  cherche  à  se  rendre  compte  des  circon- 
stances qui  entraînent  tôt  ou  tard  la  destruction  des  bois 
même  les  mieux  préparés  ;  il  en  trouve  l'explication  dans 
la  déperdition  progressive  du  cuivre  que  ces  bois  ren- 
ferment. Cette  déperdition  varie  avec  la  nature  du  sol. 
Ainsi  les  terrains  imbibés  de  dissolutions  salines  ou  d'eau 


(  ^61  ) 
chargée  d'acide  carbonique  enlèvent  rapidement  le  cuivre 
au  bois,  et,  comme  on  pouvait  s'y  attendre,  leur  destruc- 
tion progresse  avec  le  départ  de  cet  agent  conservateur. 
Dans  d'autres  terrains,  et  même  dans  l'eau  distillée,  cette 
déperdition  est  très-lente  et  le  bois  se  conserve  long- 
temps. 

Dans  la  seconde  partie  de  son  travail ,  l'auteur  décrit 
quelques  procédés  nouveaux  d'injection,  qui,  employés  en 
grand,  fourniraient  certainement  des  produits  plus  du- 
rables que  ceux  que  l'on  obtient  par  le  procédé  en 
usage. 

II  établit  d'abord  que  la  durée  du  bois  injecté  augmente 
avec  la  quantité  de  cuivre  absorbée  ou  combinée.  11  dé- 
montre ensuite  qu'en  modifiant  les  procédés  actuels,  on 
peut  doubler  et  tripler  la  quantité  de  cuivre  lixée  sur  le 
bois  et  naturellement  ces  derniers  se  conservent  deux  et 
trois  fois  plus  longtemps  que  les  autres. 

On  arrive  à  ces  résultats  de  différentes  manières  : 

1°  En  remplaçant  le  sulfate  de  cuivre  par  l'acétate  de 
cuivre  ou  par  le  sulfate  de  cuivre  ammoniacal; 

2°  En  chauffant  à  100  ou  120°  le  bois  préalablement 
injecté  ; 

o"  En  faisant  intervenir  différentes  matières  organiques 
qui  facilitent  la  fixation  du  cuivre  sur  le  bois  en  agissant 
probablement  à  la  façon  des  mordants  employés  en  tein- 
ture. 

En  somme,  la  note  de  M.  Rottier  renferme  des  faits 
intéressants  et  nouveaux;  elle  est  le  résumé  d'un  travail 
de  plusieurs  années,  et  les  nombreuses  analyses  qu'elle 
donne  ont  été  faites  avec  soin;  le  style  est  clair  et  concis. 

En  conséquence,  j'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  classe 


(  562  ) 
d'ordonner  l'impression  du  travail  dans  les  Bulletins  de 
nos  séances  et  de  voter  des  remercîments  à  l'auteur.  » 

La  classe,  après  avoir  entendu  M.  Melsens,  second  com- 
missaire, adopte  les  conclusions  du  rapport  précédent. 


Démonstration  de  la  propriété  caractéristique  des  équations 
différentielles  linéaires  j  par  M.  Paul  Mansion. 

ttappoi'f  de   lîB.    Catalan. 

«  Il  y  a  cinq  ans ,  M.  Mansion  a  présenté  à  l'Académie  une 
^ote  sur  la  première  méthode  de  Brisson.  Dans  ce  travail, 
le  jeune  géomètre  de  Gand  prouve  que  l'équation 

D"t/ -\- A^B"~'ij -h  ■■■  -\- A„y  =  0.     .     .     .  (!) 

peut  être  mise  sous  la  forme  symbolique 

(D-«„)(D-«_,)-(D-«.)!/  =  0,     .     (2)0 

(*)  Pour  développer  ce  produit  symbolique,  on  part  de  l'idenlilé 

(0  — «i>y  =  //'  — «i.V- 

Prenant  la  dérivée  du  second  membre,  multipliant  par  a^i  puis  retran- 
chant ,  on  a 

(D  —  fg  (D  —  a^)yz=ij"—  (a^y)'  -CL,y'-^  a,  a^y. 

De  même, 

(D  -  flj)  (D  — rt^KD  -flJv  =  (/"'  — (a,y)"  — («2»/)'-*-  {a^a^tj)' 

—  a^y"  -i-a^iaiy}'  -^ra^a^y'  —  aiU^a^y  : 
et  ainsi  de  suite. 


p 


(  565  ) 
même  si  les  coefficients  Aj,  Aj,  A„  sonl  fonctions  de  x  : 
Brisson  avait  seulement  considéré  le  cas  où  ces  coefficients 
sont  constants. 

La  Xote  de  M.  Mansion,  ayant  reçu  l'approbation  de  la 
Classe  (') ,  parut  dans  le  recueil  des  Ménioires  couronnés  (*'). 

Aujourd'hui,  l'honorable  auteur  complète  son  premier 
travail,  en  changeant  un  peu  le  point  de  vue  où  il  s'était 
placé  autrefois:  observant  que  l'intégrale  de  l'équation  (1) 
ou  de  l'équation  (2)  a  la  forme 

Î/  =  C,  ?/,  -f-  Cj?/.,  -H  •••   -4-  C„7/„,        .       .       .       (ô) 

et  que,  réciproquement,  cette  intégrale    ramène   à  des 
équations  différentielles  semblables  à  celles  dont  il  s'agit, 
M.  Mansioii  ^[i\)(i\\&  propriété  caractéristique  des  équations 
linéaires,  la  transformation  exprimée  par  l'équation  (2). 
Entrons  dans  quelques  détails 

I.  Après  un  court  préambule,  l'auteur  développe  (§  2) 
une  démonstration  indirecte  du  théorème  qui  fait  l'objet 
principal  de  sa  Note.  A  cet  effet,  il  identifie 

D'_|/ -+- A,  D-y -+- A,  D^ -H  A3?/  =  0,     .     .     .(4) 
avec 

(D'-H  BiD -+- B,)  (D  — 0)^  =  0,    .     .     .     .(5) 

a  étant  une  nouvelle  inconnue  :  il  trouve  ainsi  V équation 
auxiliaire 

a"  -+-  (A,  -+-  ôa)  a  -+-  a^  -i-  A,  «^  -+-  A^  a  -h  A3  =  0,     .  (8'j 
laquelle  n'est  pas  linéaire.   «  An  moyen  d'un  artifice  de 


(*)   Bulletins,  lome  XXIX,  p.  68. 
(**)  Collection  iu-S»,  tome  XXII. 


(  564  ) 
calcul  très-singulier,  »  et  peut-être  un  peu  compliqué,  il 
démontre  que 

a  =  ^ (A)0 

y 

IL  Afin  de  parvenir  à  une  transformée  qui  soit  linéaire, 
M.  Mansion  suppose 

y—a^]j  =  U, (C) 

ai  représentant  la  valeur  de  a  qui  répond  à  une  intégrale 
particulière,  y  =  yu  de  la  proposée.  Il  trouve  ainsi,  au 
lieu  de  l'équation  (4)  : 

u"  -t-  P«'+  Qw  =  0, (12) 

P,  Q  étant  ce  que  deviennent  les  fonctions  Bj,  B2  pour 
a  =  «,,  Cette  équation  (12)  ayant  la  même  forme  que  la 
proposée  (*),  le  théorème  en  question  est  démontré. 

III.  Dans  un  dernier  paragraphe,  l'auteur  applique  la 
théorie  des  déterminants  :  1°  à  la  démonstration  directe  du 


(*)  La  transformalioli  connue  : 

y—pfadx^ (U) 

qui  équivaut  à  la  formule  (A) ,  redonne,  l)ien  entendu ,  l'équation  (8'). 

)/' 
(**)  A  cause  de  a,  ^— ,  1  équation  (C)  esi  la  même  chose  que 

'Ji  y'  -  !J'A        « 


y 

Par  conséquent , 


/u 
—  dx, 
u. 


formule  à  laquelle  on  peut  avantageusement  substituer,  comme  l'on  sait, 
y  =  yj  zdx (D) 


(  mo  ) 

théorème  principal;  2"  à  la  recherche  de  deux  formes 
remarquables  (*)  sous  lesquelles  on  peut  écrire  l'équation 
auxiliaire. 

IV.  En  résumé,  la  Note  du  jeune  lauréat  de  l'Académie, 
étant  le  complément  naturel  d'un  premier  travail,  me 
paraît  digne  d'être  approuvée  par  la  Classe,  et  insérée  aux 
Bulletins.  » 

MtappoÈ't  de  Jft.   F.   Folie. 

«  Je  me  rallie  bien  volontiers  à  la  proposition  de  notre 
savant  confrère  M.  Catalan,  au  rapport  duquel  je  n'ajouterai 
que  quelques  mots. 

\°  La  démonstration  du  théorème  exige  que  les  solu- 
tions particulières  Ui  et  «^  de  l'équation 

n"  -^Pu  -h  Qu  =  0, (42) 

soient  distinctes,  ce  que  M.  Mansion  établit  en  démontrant 
que  le  déterminant 

2°  L'application  des  déterminants  permet  à  l'auteur  de 
mettre  son  équation  auxiliaire  sous  deux  formes  remar- 
quables qui  se  prêtent  à  une  intégration  directe,  sans 
l'emploi  de  l'artifice  signalé  par  M.  Catalan,  et  par  deux 
méthodes  différentes. 


(*)  La  Iransformée  eu  z  serait ,  évidemment , 

y^z"'  -^iij\z"  -^Qy'lz'  -i-4y";  z 
-H  A,  (y,  z" -\-  Zy\  z' -+-  ôyi  z)  ^  ^ 

-+-  A,  (î/i  ='  +  2y',  Z) 
-+-  As  y.  r 


(  S66  ) 

Le  paragraphe  111  montre  quel  fruit  l'analyse  supérieure 
peut  retirer  de  cette  théorie  féconde  des  déterminants, 
dont  trop  peu  de  géomètres  font  usage  en  Belgique.  » 

Conformément  aux  conclusions  des  rapports  qui  précè- 
dent, la  classe  vote  l'impression  du  travail  de  M.  Mansion 
dans  le  recueil  des  Bulletins. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Observation  de  l'éclipsé  de  soleil  du  10  octobre  181  â,  faite 
à  V Observatoire  royal  de  Bruxelles.  Communication  de 
M.  Ern.  Quetelet,  membre  de  l'Académie. 

Dans  la  matinée  du  10  octobre,  le  ciel  était  très-sombre 
et  rien  ne  faisait  prévoir  que  l'on  pût  observer  quelque 
phase  du  phénomène  astronomique  qui  allait  avoir  lieu. 
Toutes  les  mesures  furent  cependant  prises  afin  d'être 
prêt,  si  quelque  chance  favorable  venait  à  se  présenter. 
M.  E.  Quetelet  était  à  l'équatorial  dans  la  tourelle  de 
l'Ouest,  M.  Hooreman  dans  la  tourelle  de  l'Est  avec  la 
lunette  de  Troughton,  et  M.  Estourgies  sur  la  terrasse 
avec  le  télescope  de  Rinks. 

Après  10  heures,  les  nuages  assez  rapides  et  disposés 
en  couches  superposées,  permirent  de  distinguer  par  mo- 
ments le  soleil  qui  était  déjà  fortement  échancré;  mais, 
bientôt  après,  le  ciel  se  recouvrit  complètement  et  tout 
espoir  semblait  perdu,  quand,   un   peu  avant  la  fin  de 


(  ^67  ) 
l'éclipsé,   une  éclaircie  assez  belle,  quoique  voilée,   se 
forma  tout  à  coup  et  le  dernier  moment  du  phénomène 
put  être  assez  bien  déterminé.  Voici,  en  temps  moyen  de 
Bruxelles,  l'heure  de  la  fin  de  l'écIipse  : 

ll''45™8»9  E.  Quetelet. 
11  43  8,7  G.  Hooreman. 
1 1  43  4,9  L.  Estourgies. 


Observation  de  l'occultation  de  Vénus  par  la  lune,  le 
1â  octobre  1874,  faite  à  l'Observatoire  royal  de 
Bruxelles.  Communication  de  M.  Ern.  Quetelet,  mem- 
bre de  l'Académie. 

L'observation  de  l'occultation  de  Vénus  a  été  plus  favo- 
risée par  l'état  du  ciel  que  celle  de  l'éclipsé.  Vénus  était 
très-brillante  et  la  lune  extrêmement  faible,  à  peine  visible. 
Le  bord  éclairé  de  Vénus  fut  d'abord  couvert  par  le  bord 
sombre  de  la  lune.  Ce  premier  instant  paraît  avoir  été 
déterminé  avec  beaucoup  de  précision.  La  lune,  ensuite, 
s'avançant  rapidement  sur  la  planète,  ne  laissa  bientôt  plus 
distinguer  que  l'extrémité  de  la  corne  méridionale.  Celle-ci 
se  réduisit  bientôt  à  un  point  brillant  qui  s'affaiblit  rapide- 
ment et  disparut  ;  mais  au  derniermoment,  ce  point  devenu 
très-faible  avait  pris  une  teinte  rougeàtre  non  équivoque, 
très-différente  de  la  couleur  brillante  de  la  planète.  Le  troi- 
sième moment  noté  est  la  réapparition  du  bord  brillant  de 
Vénus  au  bord  éclairé  de  la  lune. 

MM.  E.  Quetelet  et  Hooreman  observaient,  comme  lors 
de  l'éclipsé,  à  l'équatorial  et  à  la  lunette  de  Troughton 
dans  les  deux  tourelles.  Ce  dernier  observateur  avait  sub- 


(  568  ) 

stilué  le  grossissement  de  100  à  celui  de  7S  employé  pré- 
cédemment, tandis  que  le  grossissement  de  75  a  été 
employé  les  deux  jours  à  l'équatorial. 

Commencement  de  l'occultation.     .     .  S'iSl™  6=7  E.  Quetelet. 
—                 —            ...  6,2  C.  Hooreman. 

""Disparition  totale 3  52  24,1  (*)  E.  Quetelet. 

Réapparition  de  Vénus 5     4  32,1  — 


Fragments  paléontologiques  pour  servir  à  la  Flore  du 
terrain  houiller  de  Belgique;  par  M.  François  Crépin, 
correspondant  de  l'Académie. 

Sous  le  titre  qui  précède,  mon  intention  est  de  publier 
une  série  de  notes  et  de  dessins  qui  pourront  aider  à 
l'élaboration  d'une  Flore  générale  de  noire  terrain  bouiller. 
Les  malériau.x  qui  feront  l'objet  de  ces  notes  seront  prin- 
cipalement ceux  que  possède  le  Musée  royal  d'histoire 
naturelle  de  Belgique  ,  matériaux  qui  se  composent  actuel- 
lement de  la  collection  délaissée  par  feu  l'abbé  Coemans, 
à  laquelle  sont  venues  se  joindre  des  pièces  provenant  de 
diverses  autres  collections  et  surtout  les  très-nombreuses 
pièces  que  j'ai  recueillies  moi-même  dans  nos  charbon- 
nages, ou  que  j'y  ai  fait  recueillir.  Ces  dernières  récoltes 
ont  plus  que  doublé  la  collection  générale  du  Musée  et 
l'ont  enrichie  d'un  nombre  assez  considérable  de  nouveautés 
pour  notre  flore. 

Toutes  les  fois  que  je  décrirai  ou  figurerai  une  em- 


(*)  Il  est  inutile  de  dire  que  cette  observation  n'a  pas  de  signification 
géométrique. 


(  569  ) 
preinte,  j'aurai  soin  d'en  indiquer  la  provenance  en  signa- 
lant, en  outre,  le  nom  qu'elle  aura  reçu  en  entrant  dans 
la  collection  du  Musée.  De  cette  façon ,  on  connaîtra  la 
part  revenant  aux  divers  collecteurs  qui  ont  concouru  à  la 
formation  de  cette  collection. 

Pour  ce  qui  concerne  la  riche  et  splendide  série  d'em- 
preintes que  nous  devons  aux  soins  et  aux  recherches 
persévérantes  de  feu  l'abbé  Coemans,  je  tâcherai  de  mar- 
quer, quand  la  chose  sera  possible,  le  résultat  des  études 
que  celui-ci  avait  faites  sur  ces  empreintes.  Malheureu- 
sement ce  savant  regretté,  se  confiant  à  sa  mémoire  et 
comptant  avoir  le  temps  de  mettre  sa  collection  en  ordre, 
est  mort  en  laissant  sans  étiquettes  et  même  sans  indica- 
tions de  provenance  la  plus  grande  partie  des  pièces  recueil- 
lies dans  nos  charbonnages.  Les  beaux  dessins  qu'il  avait 
fait  exécuter  et  qui  comprenaient  de  nombreuses  figures 
pour  le  groupe  des  Calamariées  sont  restés  pour  la  plupart 
sans  déterminations.  Quant  aux  notes  rédigées  par  lui  et 
que  le  Musée  possède  dans  ses  archives,  elles  ne  consistent 
qu'en  observations  extrêmement  concises  sur  la  nature  de 
certains  organes  en  général  et  n'ayant  pas  rapport  directe- 
ment avec  des  pièces  de  sa  collection,  ou  bien  elles  ont 
pour  objet  des  échantillons  que  ce  savant  avait  étudiés  dans 
les  Musées  de  Paris  et  de  Londres.  Quand  l'occasion  se 
présentera,  je  mettrai  d'ailleurs  un  soin  religieux  à  repro- 
duire ces  notes,  afin  de  sauver  de  l'oubli  les  quelques 
traces  qui  nous  restent  des  études  que  Coemans  avait 
faites  sur  nos  végétaux  houillers. 

Dans  les  planches  jointes  aux  descriptions  ou  aux  obser- 
vations de  ces  Fragments  paléontologiques,  je  me  bornerai 
ordinairement  à  représenter  les  seules  parties  des  em- 
preintes indispensables  à  l'interprétation  du  texte,  réser- 

2"""  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  57 


(  ^70  ) 
vant  les  dessins  complets  de  pièces  entières  pour  une 
publication  définitive  faite  sous  un  grand  format. 

PI!V:VULARIA   SPHEIVOPTERIDIA  Clép. 
Pl.l.fig.  1-6. 

Avant  qu'on  puisse  rattacher  la  racine  figurée  pi.  I  à  la 
plante  qui  l'a  produite,  j'ai,  suivant  l'usage  adopté  en 
paléophytographie,  assigné  un  nom  provisoire  à  ses  em- 
preintes. 

Le  Pinniilaria  sphenoptericlia  n'est  pas,  comme  on 
pourrait  le  croire,  nouveau  pour  la  science,  car  il  me 
paraît  à  peu  près  certain  que  Lindley  et  Hutton  l'ont  décrit 
et  figuré  sous  le  nom  de  Sphenopleris?  bifida  [The  fossil 
Flora  of  Great  Britain,  vol.  I,  p.  147,  pi.  o5).  Ces  auteurs, 
remarquons-le,  avaient  manifesté  des  doutes  sur  l'assimi- 
lation qu'ils  avaient  faite.  En  effet,  ils  disent:  «  So  little 
lias  this  (Splienopteris?  bifida)  tlie  appearance  of  a  Fern , 
tliat  you  would  say  it  had  surely  been  a  root  of  some 
aquatic  plant,  or  at  least  its  submersed  stem,  with  such 
dissecled  leaves,  as  we  now  (ind  floating  inditches,or 
pools, and belonging  to  iMyriophyllum,Utricularia,Ranun- 
culus,  and  the  like.  » 

Peut-être  même  le  Splienopteris  fascicularis  F.- A.  Ro- 
mer  tel  que  le  figure  M.  E.  von  Rôhl  [Fossile  Flora  der 
Steinkohlen-Formation  Westphalens,  tab.  XXIX,  fig.  24) 
a-t-il  aussi  quelque  rapport  avec  le  Pinmdaria  sphenople- 
ridia  ? 

D'après  l'arrangement  qu'avait  adopté  Coemans  pour  les 
Splienopteris  de  sa  collection,  celui-ci  semble  avoir  pris  le 
Pinniilaria  sphenopteridia  pour  un  Splienopteris  voisin 
du  5.  acutiloba  Andrii.  Dans  la  collection  de  ce  savant, 


(d71   ) 

se  trouvenl  10  pièces  du  Pinnularia  sphenoptcrida,  dont 
8  sont  sans  indications  de  noms  et  de  lieux  de  provenance; 
la  9''  porte  l'indication  de  «  Mariemont-S^'-Catherine  »  et 
la  10%  celle  de  Trazegnies. 

J'ai  trouvé  le  Pinnularia  sphenopteridia  en  abondance 
dans  un  bloc  énorme  de  schiste  houiller  extrait  de  la  fosse 
n°  5  de  Trazegnies.  Il  était  mélangé  à  de  nombreuses 
empreintes  de  Sphenophyllum  erosuni  var.  saxifrafjaefo- 
lium.  Je  l'ai  également  recueilli  à  Bascoup  dans  le  terry 
des  fosses  n"'  5  et  4,  et  là  encore  en  compagnie  du  même 
Sphenophyllum. 

Les  diverses  figures  que  j'ai  données  du  Pinnularia 
sphenopteridia  peuvent  me  dispenser  de  toute  description. 
Je  dirai  seulement  que  les  racines  secondaires,  c'est-à-dire 
les  fines  ramifications  de  la  racine  se  bifurquent  par  une 
fausse  dichotomie  et  forment  des  espèces  de  petits  pin- 
ceaux. Ces  dernières  ramifications  paraissent  avoir  été 
d'un  tissu  mou  et  délicat. 

C.%LAMOCI./tDt;S   EQUISETIFOR.UIS  Scil. 

(Fructification.) 

PI.  II ,  fig.  1-3. 

Jusqu'à  présentée  ne  sache  pas  qu'on  ait  décrit  avec  cer- 
titude les  épis  du  Calamodadus  equiseli formis.  M.  Weiss  (1) 
a  rapporté  avec  doute  à  celui-ci  les  Volkamannia  elonyata 
et  sessilis  Presl  et  Y Asterophylliles  longifolia  Binney. 
M.  Schimper  attribue  le  Volkamannia  elongata  au  genre 
Annularia. 


(1)  Fossile  Flora  der  j lingsten  Steinkohlenformalioii  und  des  Rothlu 
(jenden  im  Saar-Iihein-Gebiete,p.  126. 


(  S72  ) 

Quand  on  compare  les  épis  du  Calamocladtis  equiseti- 
forniis  à  la  figure  qu'a  publiée  Presl  de  son  Volkamamiia 
etongata,  on  n'est  pas  surpris  de  l'attribution  faite  par 
M.  Weiss.  En  effet,  comme  on  peut  le  constater  en  rappro- 
chant mes  tigures  i ,  2  et  3,  pi.  II,  de  la  ligure  du  Volka- 
mapnia  elongata  telle  que  l'a  donnée  Presl,  on  trouve 
beaucoup  de  ressemblance  entre  celui-ci  et  les  épis  du 
Calamodadus  equisetiformis  ;  mais  pour  bien  apprécier 
le  degré  de  ressemblance,  il  faudrait  pouvoir  comparer 
des  empreintes  mêmes  de  ces  deux  espèces. 

Les  épis  du  Calamodadus  sont  assez  longuement  pédon- 
cules, à  pédoncules  nus  et  naissant  probablement  à 
l'aisselle  des  feuilles  verticillées  ;  je  dis  probablement, 
parceque  le  point  d'insertion  de  ces  pédoncules  se  confond, 
sur  les  empreintes  que  j'ai  étudiées ,  avec  celui  des  feuilles. 
Les  épis  sont  très-allongés,  mais  je  ne  pourrais  pas  en 
marquer  la  longueur  moyenne,  parce  qu'ils  sont  tous 
fragmentés  dans  les  nombreuses  pièces  recueillies  à  For- 
chies;  toutefois  ils  semblent  généralement  dépasser  dix 
centimètres.  Leurs  bractées  sont  verticillées  et  nombreuses 
dans  chaque  verticille  ;  elles  sont  généralement  incurvées 
à  leur  base.  Les  verticilles  inférieurs  paraissent  ordinaire- 
ment stériles.  Sur  certains  épis,  on  aperçoit  très-distinc- 
tement, à  l'aisselle  des  verticilles,  des  renflements  arrondis 
ou  ovoïdes  qui  doivent,  sans  aucun  doute,  avoir  été 
produits  par  des  sporanges.  On  ne  peut  distinguer  nette- 
ment quelle  a  été  la  forme  de  ceux-ci  et  leur  mode 
d'insertion  ;  toutefois  ils  semblent  se  rapprocher  beaucoup 
(le  la  forme  et  de  la  disposition  de  ceux  que  M.  Weiss 
[loc.cit.,  p.  108)  a  figurés  dans  la  coupe  théorique  des 
épis  des  AsterophyUUes.  Sur  certains  épis  (fig.  3),  la  place 
(les  sporanges  est  très-peu  marquée  et  ceux-ci,  peut-être 


(  o75  ) 
trop  jeunes,  n'ont  laissé  que  peu  ou  point  de  traces  à 
l'aisselle  de  certains  verticilles.  Il  est  des  empreintes  d'épis, 
comme  on  peut  le  voir  par  la  figure  2,  dont  les  verticilles 
de  bractées  sont  faiblement  marqués,  ce  qui  leur  donne  un 
aspect  un  peu  différent  de  ceux  dont  les  verticilles  de 
bractées  sont  bien  apparents,  comme  dans  la  figure  o. 

Les  empreintes  représentées  fig.  1 ,  2  et  5  proviennent 
d'un  très-gros  bloc  de  scbiste  bouiller  que  j'ai  trouvé  sur 
le  terry  de  la  fosse  n"  10  à  Forchies  et  qui  sans  doute  a  été 
extrait  de  la  veine  dite  «.de  r  Espérance.  »  Ce  bloc  était 
pétri  presque  exclusivement  de  rameaux  et  d'épis  de 
Calamocladus  equiseliformis.  II  m'a  fourni  trois  rameaux 
feuilles  pourvus  d'épis  encore  adhérents  aux  axes  ra- 
méaires. 

On  ne  peut  élever  le  moindre  doute  sur  les  adhérences 
des  épis  de  la  pièce  tigurée  et  de  deux  autres  pièces  prove- 
nant du  même  bloc,  pas  plus  que  sur  l'identité  du  Cala- 
mocladus. 

D'après  ce  que  j'ai  pu  voir,  les  épis  du  Calamocladus 
semblent  se  désarticuler  assez  facilement.  La  base  de  leur 
pédoncules  est  un  peu  renflée  à  la  façon  de  la  base  des 
rameaux  du  Calamocladus.  Ces  derniers  ont  probablement 
dû  laisser  sur  les  axes  plus  robustes  qui  leur  ont  donné 
naissance  ces  larges  cicatrices  verticillées  semblables  ou 
peut-être  identiques  avec  celles  qu'on  observe  sur  les  tiges 
de  Macrostachya.  En  compagnie  des  empreintes  d'épis  et 
de  rameaux  du  Calamocladus  décrit  ci-dessus,  j'ai  observé 
un  axe  à  verticilles  courts  et  présentant  des  ceintures  de 
cicatrices  orbiculaires.  Je  ne  puis  rapporter  cet  axe  qu'au 
Macrostachya  infundibidiformis  Sch.  [Equisetum  infun- 
dibuliforme  Bronn).  Cet  axe  ne  serait-il  pas  une  partie 
aérienne  d'une  tige  de  Calamités  ayant  produit  le  Calamo- 


{  574  ) 

chdns  equisetiformis  ?  Je  suis  assez  porté  à  le  croire  el  à 
considérer  le  genre  Macrostachya  comme  n'ayant  pas 
d'existence  légitime  et  n'étant  en  réalité  formé  que  de 
parties  de  Calnmiles  dont  les  jeunes  rameaux  ont  été 
considérés  comme  des  épis. 

Avant  de  terminer  ces  observations  sur  le  Calamocladus 
equisetiformis ,  dont  l'épi  pourrait  provisoirement  recevoir 
le  nom  de  Calamostachj/s  equisetiformis  ,']q  dois  exprimer 
mes  doutes  sur  les  épis  qu'on  attribue  assez  souvent  à 
VAiDiularia  longifolia.  Dans  la  collection  Coemans,  il 
existe  :  1"  une  pièce,  provenant  d'Ilmenau  ,  portant  incon- 
testablement un  épi  de  Calamocladus  equisetiformis  et  éti- 
queté par  lui  comme  appartenant  à  Y Annularia  longifolia; 
2"  une  autre  pièce,  provenant  de  Wettin,  portant  égale- 
ment un  épi  du  même  Calamocladus  rapporté  à  VAnnu- 
laria  longifolia  par  un  paléontologue  de  grand  mérite. 
L'épi  figuré  par  M.  Schimper,  pi.  XXII,  fig.  7  [Traité  de 
paléontologie  végétale,  Atlas)  et  rapporté  à  Y  Annularia 
longifolia,  m'inspire  des  doutes  sur  son  assimilation. 

A  propos  de  V Annularia  longifolia  Brongt.  que  j'ai 
indiqué  en  Belgique  (Pa/rm  Belgica,\,  p.  474)  d'après 
Coemans,  je  dois  faire  remarquer  que  jusqu'ici  je  n'ai 
découvert  aucune  trace  de  cette  espèce  dans  notre  terrain 
houiller.  Le  fragment  d'épi  que  Coemans  avait  cru  pouvoir 
rapportera  ï Annularia  longifolia,  dans  une  notice  sur  les 
Annularia  [Bulletin  de  la  Société  rotjale  de  Botanique  de 
Belgique,  t.  IV,  p.  271),  paraît  appartenir  au  Calamocladus 
equisetiformis.  M.  Gôppert  [Die  fossile  Flora  der  Permis- 
citen  Formation,  p.  59)  signale  V Annularia  longifolia  en 
Belgique,  mais  j'ai  tout  lieu  de  croire  que  ce  savant  n'a 
\u  de  notre  pays  qu'une  variété  à  grandes  feuilles  de  VA. 
radiata,  variété  déterminée  parfois  pour  VA.  longifolia. 


575  ) 


PECOPTERIS   LONGIFOLIA  Piesl. 

PI.  ii,ng.  4-6. 

Le  Pecopteris  longifolia,  tout  à  fait  nouveau  pour  notre 
flore,  a  été  récemment  découvert  par  moi  au  Levant  du 
Flénu  dans  le  terry  du  puits  n°  19.  Le  bloc  de  schiste 
houiller  dans  lequel  je  l'ai  découvert  m'a  fourni  plusieurs 
belles  empreintes.  Mon  aide  dans  les  charbonnages  du 
Couchant  de  Mons,  M.  Persenaire  (1),  en  a  aussi  découvert 
une  empreinte  dont  une  partie  est  représentée  fig.  S,  pi.  IL 

Cette  espèce,  tout  d'abord  découverte  à  Radnitz  par 
Presl,  a  été  décrite  et  figurée  dans  le  grand  ouvrage  de 
Sternberg  [Versuch  einer  (jeognoslisch-botanischen  Dar- 
steliiing  der  Flora  der  Vorwelt,  II,  fasc.  7  et  8,  p.  155, 
tab.  56,  fig.  1).  iM.  C.  von  Ettingshausen  (  Die  Steinkohlen- 
Flora  von  Radnilz  in  B'ôhmen ,  p.  40,  tab.  16,  fig.  2-4)  Ta 
figurée  et  décrite  sous  le  nom  (ÏAsplenites  longifoUus. 
Cet  auteur  la  signale  :  «  In  schisto  lithanthracum  ad 
Wranowitz,  Mosstitz  et  ad  Swina  prope  Radnitz.  »  Enfin 
M.  Geinitz  [DieVcrsteinerungen  der  Steinkohlenformalion 
in  Sac/isen,  p.  29,  tab.  31 ,  fig.  8  et  9)  la  représente  et  la 
décrit  sous  le  nom  d'Alethopteris  longifolia  en  la  signa- 
lant: «  Auf  dem  Planitzer  Flotze  des  Schaufuss-Schachtes 
in  Niedercainsdorf,  auf  dem  Scherbenkohlflôtze  des 
Schachtes  von  Stephan  und  Ehrler   in  Oberhohndorf; 


(1)  M.  Persenaire  est  un  collecteur  intelligent  et  très-zélé  dont  les 
recherches  incessantes  enrichissent  les  collections  du  Musée  d'une  façon 
remarquable.  Je  me  fais  un  devoir  de  rappeler  ici  que  c'est  lui  qui  a, 
pendant  de  nombreuses  années,  puissamment  aidé  Neyrinck  à  former 
la  splendide  collection  de  silex  ouvrés  que  celui-ci  a  léguée  au  Musée. 


(  ^76  ) 
im  alten  Wetterschachte  bei  Zaukerode  im  Plauenschen 
Grunde,  —  Bei  Manebach  und  nach  Presl  bei  Radnitz  in 
Bôhmen.  » 

Comme  on  le  voit  en  comparant  les  figures  4  et  5,  la 
largeur  des  segments  de  la  fronde  peut  varier  beaucoup. 
Dans  les  empreintes  du  Levant  du  Flénu,  la  bifurcation 
des  nervures  se  voit  très-difficilement  et  ce  n'est  qu'avec 
une  extrême  attention  qu'on  parvient  à  saisir  çà  et  là  la 
bifurcation  des  nervures  primaires.  De  même  que  dans  les 
spécimens  figurés  par  MM.  von  Ettingshausen  et  Geinitz, 
le  tissu  des  segments  des  frondes  paraît  avoir  été  fort 
mince.  C'est  probablement  à  cette  délicatesse  qu'est  due  la 
difficulté  que  l'on  éprouve  à  reconnaître  le  véritable  mode 
d'insertion  des  segments  qui,  dans  la  figure  de  Sternberg, 
sont  entièrement  adhérents  par  leur  base  au  rachis,  et  qui, 
dans  les  figures  données  par  MM.  von  Ettingshausen  et 
Geinitz,  sont  ou  tout  à  fait  adhérents  pour  la  plupart  ou 
parfois  plus  ou  moins  arrondis  ou  cordés.  M.  von  Ettings- 
hausen dit  des  segments  :  «  Inferioribus  basi  liberis,  sessi- 
libus,  remolis,  superioribus  decurrenlibus  approximatis.  » 
A  son  tour,  M.  Geinitz  dit  :  «  Die  Fiederchen  sitzen  meis- 
tens  mit  der  ganzen  Basis  an  der  Rhachis  fest,  und  nur 
au  dem  unteren  Theile  der  Fieder  ist  die  Basis  der  Fieder- 
chen frei.  S)  En  examinant  avec  soin  les  pièces  du  Levant 
du  Flénu,  il  me  semble  que  les  segments  du  Pecopteris 
lomjifolia  sont  en  grand  nombre  arrondis  ou  obscurément 
cordés  à  la  base  et  que  peut-être  tous  ont  cette  forme 
même  au  sommet  de  la  fronde  ou  des  pennes.  L'adhérence 
de  leur  base  représentée  par  Sternberg,  MM.  von  Ettings- 
hausen et  Geinitz  n'est  peut-être  qu'apparente  et  produite 
par  le  rapprochement  et  l'application  de  la  base  des  seg- 
ments sur  le  rachis  avec  lequel  elle  s'est  confondue. 


P.ull.de  rAocul.2r  Série  T.38 


•'•pin.'  cUl 


Imp.  G:  S&z>erez/ns,  iruxelùe. . 


r.ull.clerAcacl.  25  Série  T.38. 


PLU. 


é 


'~3ik. 


.,i^ 


Jp:ip  0-.3&verezins,3ricxeZles, 


(  577  ) 

MM.  von  Eltingshauseu  et  Geinitz  décrivent  l'espèce 
comme  ayant  des  frondes  seulement  pennées.  Les  em- 
preintes du  Levant  du  Flénu  qui  montrent  d'assez  longs 
fragments  (^O-Si  cent.)  de  frondes  ou  de  pennes,  ne 
me  permettent  pas  de  reconnaître  si  la  fronde  de  cette 
espèce  est  seulement  pennée  ou  si  elle  peut  être  plus 
composée.  Seulement,  en  considérant  VAspleniles  alethop- 
teroides  {Pecopteris  Sch.)  flguré  par  M.  von  Ettingshausen 
[loc.  cit.,  tab.  19,  fîg.  5)  et  qui  pourrait  bien  n'être  qu'une 
simple  variété  du  Pecopteris  longifolia,  je  suis  assez 
porté  à  penser  que  ce  dernier  offre  une  fronde  plus  que 
pennée. 


EXPLICATION  DES  PLANCHES. 


Planche  I. 

Fig.  I,2et5.  Pinnularia  sphenopteridia  Crép.  provenant  de  Traze- 
gnies,  fosse  n»  5  (ree.  Crépin). 

—  5.  Même  espèce  (coll.  Coemans.  —  Pièce  indéterminée  et  sans 

indication  de  provenance). 

—  4.  Même  espèce  (coll.  Coemans.  —  Pièce  indéterminée  provenant 

de  Trazegnies). 

—  6  et  7.  Parties  grossies  de  la  même  espèce. 

Planche  II. 

Fig.  1.  Calamocladus  eqiiisetiformis  Sch.   avec  épis  provenant  de 
Forchies,  fosse  n»  10  (rec.  Crépin). 

—  2  et  3.  Portions  d'épis  {Calatncstachijs  equisetiformis  Crép.)  delà 

même  espèce  provenant  de  Forchies ,  fosse  n°  10  (rec.  Crépin). 

—  4  et  5.  Pecopteris  longifolia   Presl  provenant  du  Levant  du 

Flénu,  terry  du  puits  n°  19  et  des  fosses  voisines  (rec.  Crépin 
et  Persenaire). 

—  6.  Portion  grossie  d'un  segment  de  la  même  espèce. 


(  578  ) 


Démonstration  de  la  propriété  fondamentale  des  équations 
différentielles  linéaires;  par  M.  P.  Mansion,  professeur 
à  l'Université  de  Gand. 

I 

Préliminaires. 

Soient  y  une  fonction  de  x;  a,  Ai,  A2,....A„  des  con- 
stantes ou  des  fonctions  de  x;  Dy,  D'^y,....  D"y  les  dérivées 
successives  de  y,  par  rapport  à  x.  Convenons  ensuite 
d'écrire 

{D  —  a)y,        (D" -t- A,  D"-' H h  A„)i/, 

au  lieu  de 

^U  —  ^yi        D"?/-+- A, D" "'?/-+-  •••  -t-  A„î/. 

Cela  posé,  toute  équation  différentielle  linéaire,  sans 
second  membre, 

D"y-f-A,D'-î/-t-...-t-A„î/  =  0,     .    .    .    (1) 
ou 

(D"  4-  A,  D"-'  -H  -  +  A„)  y  =  0, 

peut  se  mettre  sous  la  forme 

(D— a,)D  — «,)...  (D  —  a,jy  =  0     ...     (2) 

rt,,  a2,....,a,  étant  des  constantes  ou  des  fonctions  de  x, 
dont  la  valeur  dépend  de  celle  des  coefficients  Ai,  A2,....,A„ 
de  l'équation  primitive. 
On  déduit  cette  propriété  de  ce  théorème  bien  connu 


(  579  ) 
que  l'équation  linéaire  (1)  a  une  intégrale  de  la  forme 

?/=C,?/,-4-C2?/2H hC„?/„,     .     .     .    .(3) 

C|,  Cav-jC,,  étant  des  constantes  arbitraires,  y,,  y^,....,y„ 
des  solutions  particulières,  distinctes,  de  l'équation  (1). 

Les  équations  linéaires  jouissent  des  propriétés  expri- 
mées par  les  équations  (2)  et  (5).  Réciproquement  :  1°  les 
équations  ayant  une  intégrale  de  la  forme  (5)  sont  linéaires 
et  peuvent  prendre  la  forme  (2);  2°  celles  qui  peuvent 
prendre  la  forme  (2)  ont  une  intégrale  de  la  forme  (3)  et 
sont  linéaires.  Les  propriétés  exprimées  par  les  équa- 
tions (2)  et  (5)  sont  donc  équivalentes  et  caractéristiques 
pour  les  équations  linéaires.  En  particulier,  la  propriété  (2), 
qui  montre  la  constitution  intime  du  premier  membre  de 
l'équation  (1),  peut  être  appelée  la  propriété  fondamentale 
des  équations  linéaires. 

Cette  propriété  fondamentale  a  été  découverte  par  Bris- 
soN,  dans  le  cas  où  les  coefficients  A  sont  constants  (*). 
Nous  en  avons  donné  une  démonstration ,  pour  le  cas  où 
ils  sont  variables,  dans  le  tome  XXII  des  Mémoires  cou- 
ronnés et  autres  Mémoires  de  l'Académie  (**).  Dans  la 
présente  note,  nous  nous  proposons  de  rendre  cette  dé- 
monstration plus  précise  et  plus  complète;  ensuite,  de 
faire  connaître  une  seconde  démonstration  de  la  propriété 
en  question,  plus  directe  que  la  première,  mais  exigeant 
aussi  des  calculs  beaucoup  plus  compliqués. 


(*)  Cai'chy,  Sur  r analogie  des  puissances  et  des  différences  (Exer- 
cices de  mathématiques,  t.  II,  pp.  139-209). 

(**)  Note  sur  la  première  méthode  de  Brisson  pour  l'intégration 
des  équations  linéaires  aux  différences  finies  ou  infiniment  petites. 
30  p.  in-S". 


(  580  ) 

II 

Démonstration  indirecte. 

4.  Équation  auxiliaire.  Considérons,  pour  plus  de  sim- 
plicité, une  équation  du  troisième  ordre, 

J)^y-^A,D'y-i-k,J)ij  +  Azy  =0.     .    .    .(4) 

Posons 
D'y^-Â,D^i/-t-Â,Dt/-+-A,2/=(D^+B.D+B,)(D-a)2/,  .  (S) 

Bi,  Ba,  a  étant  des  fonctions  de  x  à  déterminer.  On  devra 

avoir 

B,=  A,-v-a, (o) 

B2  =  A2-+-Bja-H2a', (7) 

0  =  A5  -+-  B^a  -+-  B,a'  -4-  a"    .     .     .     •  (8) 

En  éliminant  Bi  et  B2  entre  ces  trois  équations ,  on 
trouve,  pour  déterminer  a,  l'équation  différentielle  du  se- 
cond ordre  : 

a"  H-a'(A,-f-5a)-+-  a' -4- A.oV  A.a -t-A3=0  .     .  (8') 

L'intégrale  générale  de  cette  équation  auxiliaire  aura 
la  forme 

0=  f{x,  Ci,  Ci),   ' v^) 

c„  C2  étant  des  constantes  arbitraires.  Celte  intégrale  étant 
connue,  on  pourra  déterminer  les  coefficients  Bj  et  B2, 
qui  contiendront,  par  conséquent,  chacun,  deux  con- 
stantes arbitraires. 

2.  Intégration  effective  de  l'équation  auxiliaire.  On  par- 
vient à  trouver  effectivement  l'intégrale  (9),  au  moyen  d'un 
artifice  de  calcul  très-singulier. 


(  ^8i  ) 
Faisons,  dans  l'équation   (4),  y  =  z  -h  \.   Elle  de- 
viendra 

D'î/-f-A,D'z-4- Aj  Dr -4-  A3Z-+-A5  =  0 

ou,  à  cause  de  l'équation  (5), 

(D^-t-B,D  -f-  B2)(D— a)s-4-A3  =  0. 

Posons 

{D—a)z=v; (10) 

nous  aurons 

D^u -+- B,  Du-t- B^v-f- A3  =  0.     .     .     .     (II) 

On  ne  pourra  former  cette  dernière  équation  qu'après 
avoir  déterminé  a  au  moyen  de  l'équation  (8'),  puis  B^ 
et  B2,  au  moyen  de  (6)  et  (7).  A  une  valeur  quelconque  de 
o,  correspondent  une  ou  plusieurs  valeurs  de  Bj  et  de  B^; 
puis,  à  cause  de  (11),  une  ou  plusieurs  valeurs  de  v,  et 
enfin  une  ou  plusieurs  valeurs  de  z  et  de  ?/,  qui  se  dé- 
duisent de  l'équation  (10)  et  de  la  relation  y  =  z  -h  1. 

L'équation  (11),  dont  les  coefficients  B,  et  Bg  con- 
tiennent deux  constantes  arbitraires,  c,  etci,  a  identique- 
ment la  même  forme  que  l'équation  (8),  sauf  que  v  est 
l'inconnue  dans  (H)  et  a  dans  (8).  Celle-ci  étant  vérifiée 
par  la  valeur  (9)  de  a,  on  peut  aussi  écrire,  comme  l'une 
des  solutions  de  (11),  correspondant  à  cette  valeur  de  a, 

V  =  f{x,   Cl ,  C2) 

On  a  ensuite,  à  cause  de  l'équation  (10), 

ou 

Dr  =  (:-+-!)/•; 
ou  encore 

D(c-f-  i)=^(r+  1)/: 


Mais 
donc 
ou 


(  582  ) 

%  =!//'(^:C,,f2), 

I  [X,  Cl,  C^)  ==         . 

y 


On  sait  que  l'intégrale  générale  de  l'équation  (4),  ou  la 
valeur  de  ?/,  a  la  forme 

Cl,  C2,  C3  étant  des  constantes  arbitraires,  et  yi,  y^,  y^ 
des  solutions  particulières  de  l'équation  (4),  Donc 

f{x,  Ci,C^)  = 


Cy,  -+-C2?/2-t-  ^3^/5 


Ainsi  Vintégrale  générale  de  Véquation  auxiliaire  est  le 
quotient  de  la  dérivée  de  Vintégrale  générale  de  l'équation 
donnée  par  cette  intégrale  même. 

o.  Démonstration  de  la  propriété  fondamentale  des  équa- 
tions linéaires.  On  peut  prendre  pour  a  une  valeur  parti- 
culière comprise  dans  la  formule  (9).  Soit,  par  exemple, 

.V'3 
a  =  «3  = 

Posons 

(D  —(13)  y  =  u, 
(D  —  «3)?/i=  ui, 
(D  — a-J)y^  =  U2. 

L'équation  (4)  deviendra 


(  585  ) 
et  aura  pour  solutions  particulières  m,  et  il,.  Il  est  bien 
entendu  que  B,  et  B^,  dans  cette  équation  linéaire  du  se- 
cond ordre,  ont  les  valeurs  déterminées  par  les  rela- 
tions (6)  et  (7),  où  l'on  a  fait  «=  «s. 

^  Les  solutions  u^  et  il,  seront  distinctes,  c'est-à-dire  que 
l'on  aura 


0, 


si  les  solutions  y,,  ij„  y.  sont  distinctes,  ou  satisfont  à  la 
relation 


> 
< 


On  a,  en  effet,  en  remarquant  que  (D  —  a^)  y.  =  0, 


Ui,     j«2 


(D-fOy.,  (D--«3)^.,        (D_«3)^3 

D(D-a^)3/„D(D-a3)y2,  D(D-«3)^3 


Si  l'on  ajoute  la  première  ligne  multipliée  par  a,  à  la 
seconde,  le  dernier  déterminant  devient 


^1  '  ^2 ,  ys 

y;'-D(«3i/,),    y;'_D(a3y,),     ^z,;'  — 0(03  y.) 


Comme 


D  («3  y)  =  «'„  y  +  „.  2,' 


il  suffira  d'ajouter,  à  la  troisième  ligne  du  déterminant 
précédent,  la  première  multipliée  par  «'3  et  la  seconde 


(  584  ) 
multipliée  par  a^,  pour  le  transformer  en 


Î/m 

!/2»     !/3 

!/m 

!/*'    !/3 

3/1' 

2/2'.  2/î 

Donc  enfin  le  déterminant 


n'est  pas  nul,  puisque  le  déterminant  R  ne  l'est  pas. 
L'intégrale  générale  de  l'équation  (12)  est  donc 

fji  et  gçi  étant  des  constantes  arbitraires.  On  peut  raisonner 
sur  l'équation  (12)  comme  sur  l'équation  (4);  et,  par  suite, 
on  peut  mettre  celle-ci  sous  la  forme 

{D  -  a,)  {b  —  a,)  {D  —  a,)tj  =  0. 

Au  point  de  vue  théorique ,  on  peut  donc  toujours  sup- 
poser l'équation  (1)  mise  sous  la  forme  (2).  Mais  il  est  clair 
que  l'on  ne  pourra  trouver,  en  pratique,  que  m  facteurs 
symboliques  (D  —  a),  dans  le  cas  où  l'on  ne  connaîtra  que 
m  solutions  particulières  de  l'équation  donnée. 


III 


Démonstration  directe. 


4.  Formes  remarquables  de  Véquation  auxiliaire.  On 
peut  mettre  l'équation  auxiliaire  sous  deux  formes  remar- 
quables, qui  permettent  d'en  trouver  directement  l'inté- 
grale, sans  artifice  de  calcul. 


(  585) 

Pour  le  montrer,  considérons  une  équation  du  cinquième 
ordre 

Posons  le  premier  membre  de  cette  équation  égal  à 

(D*  -f-  B,  D^  -+-B2  D^  +  B3  D  +  B,)  (D  -^  6)  y 

Bi,  Bo,  B3,  B4  étant  des  fonctions  de  x  inconnues,  et  b 
jouant  le  même  rôle  que  (—a),  dans  le  paragraphe  pré- 
cédent. 

Si  l'on  développe  la  dernière  expression ,  elle  devient 

t/[6"-4-B,.   6"'-^B,.   6'-+-B3.6'-hB,.6] 
-t-  D  y  [46'"  -t-  B, . 36"  -1-  B^ .  2&'  h-  B3 . 6  +  BJ 
-H  mj[6b"  -t-B,.56'  +B,.   b  -4-  B3] 
-+-  D'i/  [46'  -4-  Bj .    6    -f-  Bj 
-^  DV  [  6    -.-  B,] 

La  loi  de  formation  des  termes  multipliés  par  B,,  B^, 
B-,  B4  est  très-simple,  puisque  c'est  celle  du  théorème  de 
Leibniz  donnant  la  dérivée  n'^™*  d'un  produit. 

Égalons  les  coefficients  de  7/\  y",  etc.,  dans  l'équation 
donnée,  à  ceux  des  mêmes  quantités,  dans  l'expression 
précédente;  il  viendra 

Ai=   b    -f-  B, 

A2  =  46'  -f-  Bj .   6    M-  B2 

A3  =  66" -+- B, .  36'  -H  B,.   6    -t- B, 

A4  =  46"'  -+-  B, .  36"  H-  B,  .26'  -+-  B3  6  h-  B^ 

A,=   6"-t-B,.   6'"-+-B,.   6"  +  B3  6' -t- Bi 6. 

En  éliminant  B,,  B„  B5,  B4  entre  ces  équations,  au 
moyen  de  la  théorie  des  déterminants,  on  trouve  pour 

2"°"  SÉRIE,   TOME    XXXVIH.  38 


i  586  ) 


l'équation 

auxiliaire  : 

6    —  A„       1  ,       0  ,     0,     0 

46'   -A,,       6  ,       1   ,     0,     0 

66"  —  A3,     56'  ,       6,1,0 

46'"—  Ai,     56",     26'  ,6,1 

6"  — As,      b",       b",     6',     6 

ou,  en  ajoutant  une  ligne  et  une  colonne, 

1,0            ,      0    ,      0,    0,    0 

A,,      6  -A,,       1    ,      0,    0,    0 

A,,     46'  -A,,       6    ,       1  ,     0,     0 

A,,     66"  —  A3,     56'   ,       6  ,     !,     0 

Ai,     46""—  Ai,     36"'  ,     26',     6,     1 

^ 

ks,      6""  —  As,      6'",       6",     6',     6 

=  0 


=  0 


Enfin ,  ajoutons  la  première  colonne  à  la  seconde  ,  il 
viendra 


1  , 

1     , 

0    , 

0    , 

0, 

0 

Ai, 

6    , 

i    , 

0    , 

0, 

0 

A,, 

46', 

f^    , 

1  , 

0, 

0 

A3, 

G6", 

56'  , 

i' , 

1  , 

.   0 

A„ 

46"' , 

56"  , 

26'  , 

b, 

1 

As, 

6'\ 

6"' , 

b\ 

b\ 

6 

=  0, 


:t5) 


ce  qui  est  la  première  forme  remarquable  de  l'équation 
auxiliaire. 


Posons  maintenant 


6  , 
46', 
66", 
46'", 

6", 


1    , 

/>  , 
36'  , 
56  "  , 

6-, 

b  ,     1 


0, 

0, 

0 

1 

1, 

0, 

0 

h, 

1, 

0 

,^4  = 

'2b' , 

6, 

1 

b', 

b; 

6 

b  , 
06'  , 
56  "  , 

6" , 


1, 

0, 

0 

b. 

U 

0 

26', 

b, 

i 

b", 

6', 

i 

0 


26'  ,     6  ,     1  !  , 
b",     b'  ,     b\ 


h,   ^,=  \. 


(  o87  ) 
de  sorle  que  A„  A,,  A3,  A„  A,  sont  les  mineurs  princi- 
paux  du   déterminant   formant   le   premier  membre  de 
l'equation  auxiliaire  (15). 

Il  est  facile  de  voir  que  l'on  peut  maintenant  écrire 
cette  équation  de  la  manière  suivante,  en  développant  le 
déterminant  dont  nous  venons  de  parler  ; 


—  A,   ^^  -+-    A2  ^3  —  A3 


A,  û,  — As  ^0=0.  .  (14) 


C'est  la  seconde  forme  remarquable  de  l'équation  auxi- 
liaire. 

5.  Intégration  de  l'équation  auxiliaire.  Première  mé- 
thode. Considérons  une  fonction  auxiliaire  de  x,  encore 
indéterminée,  r,  et  désignons,  suivant  l'usage,  ses  dérivées 
successives  par  r',  r",  r'",  r'\  r\  Nous  aurons 


^^r"= 


Ajoutons,  à  la  première  ligne  de  ce  déterminant,  la 
deuxième  multipliée  par  r'",  la  troisième  multipliée  par /•", 
la  quatrième  multipliée  par  r' ,  et  enfin  la  dernière  multi- 
pliée par  r;  puis,  posons 

s  =^  r'  H-  br, 

et  appelons  *•',  s'\  s'",  s'\  les  dérivées  successives  de  s.  Il 
viendra  : 


^.Nr"  = 


In-, 

r" , 

0, 

0  , 

0 

46     , 

à 

1  , 

0, 

0 

66"    , 

56'  , 

b   , 

i  , 

0 

46"  , 

56" , 

26', 

b  , 

I 

6"  , 

6", 

6", 

b'. 

6 

5'^—  r\ 

s'", 

s", 

s', 

s 

46' 

b    , 

1  , 

«  ' 

0 

66" 

36'  , 

b, 

1   , 

0 

46" 

,     •36", 

'2b', 

b  , 

1 

6- 

,       b''', 

b", 

b', 

6 

(  S88  ) 

Déterminons  maintenant  la  fonction  r,  en  posant  s  =  0, 

c'est-à-dire 

r' 

r'  -+-  6r  =  0 ,  ou  —  b  =  —  ■ 
r 

Le  déterminant  Ag  r'^  aura  pour  première  ligne 
—  r\  0,  0,  0,  0. 

Par  conséquent,  on  aura 

Ag  r"  =  —  r'  Aj  ; 

comme  il  est  facile  de  le  voir.  On  peut  écrire  cette  relation, 
ainsi  que  les  égalités  analogues,  pour  A4  et  A3,  A3  et  A^, 
A2  et  A,,  A,  et  Aq,  de  la  manière  suivante  : 

Ak  a.  A-,  Ao  A,  A„ 

r'  r'"  r  r       ^  r  r 

ou  encore  : 

A,r  =  (-i)*r%  A,r  =  (-t)S-",  A,r=(-'lfr"', 
Aj,r=( — \f  r\   Ai7'=  —  r'. 

En  substituant  ces  valeurs  dans  l'équation  auxiliaire 
multipliée  par  r,  elle  devient 

r"  -f-  A,  )•'"  -\-  A2  r"  -4-  A3  r"  -1-  A4  r  -+-  Ag  r  =  0. 

Celle-ci  ayant  la  même  forme  que  l'équation  donnée,  il 
en  résulte  que 

et,  par  suite, 

-b  =  t 

y 

ce  qui  est  le  théorème  du  n"  2.  On  en  déduira  le  théorème 
fondamental,  comme  au  n°  5. 


I 


(  589  ) 

6.  Intégration  des  équations  :  A.^  =  0,  A3  =  0,  A4  =  0, 
A5==0.  L'équation  différentielle 

iij  =  0,  ou  6'  =  6*, 

a  pour  intégrale  ,^ 

^_D(^+/v,x) 
k  ■+-  k[  X 

k  et  kl  étant  des  constantes. 

L'équation  A-  =  0  peut,  d'après  le  n"  5,  se  mettre  sous 
la  forme 

(— I  )',-■'■  =  0, 
ce  qui  donne 

r  =  k-+-  kiX  -+-  koiX- , 
et 

B  {k  -*-  kl  X  -^  ki  x^) 
A:  -+-  A,  X  -+-  A'j  X* 

De  même,  les  équations 

Si  =  o,     ^^  =  0 

conduisent  respectivement  aux  solutions  : 

. D  (A;  -<-  A-,  X  -+-  ki  x^  -+-  /i3  x') 

A;  -1-  A-,  X  -4-  A:2  x*  -+-  A3  x,    ' 
D(A: -4- A,  X-+- A-jX*-!- A-jX^-t-A^x*) 
A-  -4-  A:,  X  +  Ai  x"^  -t-  A3  x^  -i-  A:^  x* 

On  voit  que  chacune  des  équations 

a  une  intégrale  générale  algébrique  très-simple;  de  plus, 
chacune  de  ces  équations  a  pour  solution  particulière  Vin- 


(  590  ) 
tégrale  générale  des  suivantes  et  n'a  pas  de  solution  sin- 
gulière. 

7.  Intégration  de  Véqvalion  auxiliaire.  Seconde  mé- 
thode. Posons 

L  =  ?•"  -+-  A,  r"  H-  A2 r"  -4-  A3  r"  -+-  A^  r'  ■+-  A5  r, 
r  satisfaisant  toujours  à  la  relation 

,s  =z  0  ou   —  h  =  —  . 
r 

Multiplions  la  première  ligne  du  déterminant  qui  forme 
le  premier  membre  de  l'équation  (15)  par  r^  \  ajoutons 
ensuite  à  cette  première  ligne  les  suivantes  multipliées 
respectivement  par  r'^,  r' ",  r  ",  r'  et  r.  L'équation  auxi- 
liaire aura  alors  pour  premier  membre  un  déterminant 
divisé  par  r^,  et  dont  la  première  ligne  sera 

L,  0,  0,  0,  0,  0. 

Par  conséquent,  cette  équation  deviendra 

L.-  =  0 (15) 

r" 

On  satisfait  donc  à  l'équation  (15),  en  posant 

c'est-à-dire,  en  faisant 

r  =  V  5  ou  —  I)  =  — 

y 

On  ne  peut  pas  satisfaire  à  l'équation  (15),  en  posant 
Ag  =  0,  car  nous  savons  que  la  valeur  de  6,  déduite  de 
l'équation  auxiliaire,  doit  être  une  fonction  des  coeffi- 


(  591  ) 

cients  A,  tandis  que  Ay  =  0  conduit  à  une  valeur  de  h 
indépendante  de  ces  coeffîcients.  On  sait  d'ailleurs,  par  le 
n°5,  que  l'équation  (15)  se  réduit  en  réalité  à  ( — i)'^L=0; 
en  outre,  si  Ag  =0,  r^  =  0;  or,  on  ne  peut  pas  multiplier 
par  r"  la  première  ligne  du  déterminant  formant  le  premier 
membre  de  l'équation  (13),  pour  la  transformer  en  l'équa- 
tion (15),  sir'^  =  0. Donc,  enfin,  les  valeurs  de  r,  déduites 
(le  L  =  0,  donnent  toutes  les  solutions  de  l'équation 
auxiliaire. 

1"  octobre  1874. 


Remarques  sur  l'aspect  de  la  planète  Jupiter  pendant  son 
opposition  en  1874,  et  sur  le  passage  des  satellites  II 
et  III  et  de  leurs  ombres  pendant  la  soirée  du  23  mars: 
par  M.  F.  Terby,  docteur  en  sciences,  à  Louvain. 

J'ai  l'honneur  de  présenter  à  l'Académie  les  résultats 
généraux  de  mes  observations  de  Jupiter  pendant  l'année 
actuelle.  N'ayant  pas  été  aussi  satisfait  des  dessins  que  j'ai 
exécutés  pendant  cette  opposition  que  de  ceux  de  1875, 
sous  le  rapport  des  détails,  j'ai  cru  devoir  me  borner  à 
relever  succinctement  quelques  caractères  principaux  four- 
nis par  eux  et  par  leur  comparaison  avec  ceux  des  années 
précédentes.  Ces  caractères  m'ont  paru,  en  eflet,  d'une 
importance  assez  grande. 

Je  n'ai  donc  reproduit  ici  qu'un  seul  des  dessins  que  j'ai 
recueillis  ;  il  servira  à  donner  à  cette  note  la  clarté  néces- 
saire et  il  offrira  un  intérêt  spécial  à  cause  du  passage  des 
satellites  II  et  III  qui  y  est  représenté. 

Le  fait  le  plus  remarquable  qui  résulte  de  la  compa- 


(  592  ) 

raison  de  l'aspect  de  la  planète  pendant  les  mois  de  février, 
mars  et  avril  1874,  avec  celui  qu'elle  offrait  en  1873  et 
en  1872,  est  sans  contredit  le  changement  frappant  qui 
s'est  manifesté  dans  la  bande  désignée  par  a  dans  notre 
dessin,  et  surmontant  la  calotte  polaire  septentrionale. 
Cette  bande,  l'un  des  caractères  les  plus  constants  de  la 
planète  en  1872  et  en  1875,  remarquable  alors  par  sa 
netteté,  par  sa  teinte  très-sombre  et  par  la  démarcation 
très-évidente  qui  la  séparait  de  la  calotte  inférieure  appa- 
rente (1),  est  devenue  très-pâle  en  1874.  Souvent  même  il 
est  impossible  de  la  séparer  de  la  région  grise  qui  entoure 
le  pôle  nord.  Dans  le  dessin  qui  accompagne  cette  note,  la 
bande  en  question  est  séparée  de  la  calotte  boréale,  mais 
elle  est  beaucoup  plus  pâle  qu'en  1872  et  en  1875;  dans 
beaucoup  d'autres  dessins  que  j'ai  recueillis  à  Louvain,  ces 
deux  régions  sombres  sont  totalement  confondues;  dans 
d'autres,  la  séparation  reste  incertaine. 

J'ai  dit,  dans  ma  notice  sur  l'opposition  de  1875  (2)  : 
«  Il  faut  aussi  remarquer  la  constance  de  la  bande  fine  et 
»  très-sombre  qui  se  trouve  immédiatement  au-dessus  de 
»  la  calotte  septentrionale.  »  On  doit  reconnaître  actuelle- 
ment que  cette  zone  sombre  s'est  considérablement  mo- 
difiée dans  l'intervalle  du  mois  d'avril  1875  au  mois  de 
février  1874, 

Un  autre  caractère  saillant,  en  1874,  est  la  présence 
des  deux  bandes  6  et  c,  situées  l'une  au-dessous,  l'autre 


(1)  Voir  Observatio7is  de  Jupiter  faites  à  Louvain  en  1873;  Bullet. 
UE  l'Académie  royale  de  Belgique,  S''  série,  tome  XXXVI,  n»  H  ,  1873. 
—  Voir  aussi  :  Aspect  de  Jupiter  en  4S72;  Bulletins,  2«  série,  t.  XXXIV, 
11°' 9  et  10;  1872. 

(2)  Loc.  cit. 


(  î)95  ) 

au-dessus  du  centre;  la  zone  c,  ou  la  plus  méridionale, 
était  fort  large  el  extrêmement  sombre;  c'était  la  région 
la  plus  foncée  du  disque,  et  elle  devait  appeler  immédia- 
tement l'attention  de  l'observateur  le  moins  exercé. 

Les  deux  zones  6  et  c  ont  quelquefois  été  dédoublées 
longitudinalement  par  un  trait  brillant. 

La  calotte  polaire  méridionale  a  souvent  paru  très-faible 
et  à  peine  perceptible  ;  la  calotte  opposée  était  générale- 
ment bien  marquée. 

Le  dessin  qui  accompagne  celte  note  représente  Jupiter 
le  2o  mars  1874,  de  9  h.  15  m.  à  9  h.  50  m.  L'observation 
a  été  faite  avec  une  lunette  de  9  centimètres  d'ouverture 
utile  et  un  grossissement  de  180  fois.  Elle  offre  d'autant 
plus  d'intérêt  que,  par  une  heureuse  coïncidence  ,  elle  a 
eu  lieu  pendant  que  M.  C.  Flammarion  observait  également 
Jupiter  à  Paris,  et  obtenait  des  résultats  qu'il  a  consi- 
gnés dans  les  Comptes  rendus  de  l'Institut  de  France  (1). 
M.  Knobel,  de  la  Société  royale  astronomique  de  Lon- 
dres, dessinait  aussi  la  planète,  pendant  la  même  soirée  , 
à  Burton-on-Trent ,  et  constatait  des  apparences  sem- 
blables (2). 

Les  satellites  II  et  III  passaient  devant  le  disque,  et  je 
remarquai    immédiatement    leurs  deux   ombres  d  et  e, 

d,  ombre  du  o*"  satellite,  était  très-noire;  l'ombre  du  2% 

e,  était  grise.  J'ai  estimé  le  diamètre  de  e  égal  à  la  moitié 
de  celui  de  d.  En  /",  j'apercevais  un  point  noir,  plus  foncé 
que  e,  mais  notablement  plus  petit  quedete;  on  l'eût 
pris  volontiers  pour  une  petite  ombre.  J'aurais  voulu  suivre 
attentivement  ce  troisième  point  noir  jusqu'au  bord  de  la 


(1)  Comptes  rendus  de  l'Acad.  des  sciences  de  Paris,  1874. 

(2)  Monthly  notices  de  la  Soc.  astron.  de  Londres;  juin  187-4. 


(  594  ) 
planète,  pour  voir  s'il  se  trouvait  dans  l'un  des  satellites; 
mais  les  nuages  sont  venus  couvrir  Jupiter.  A  10  h.  15  m., 
l'observation  est  redevenue  possible.  Les  deux  points  d  ete 
s'étaient  sensiblement  éloignés  l'un  de  l'autre  en  parcou- 
rant le  disque,  e  devançant  d.  Malheureusement  /"n'était 
plus  visible.  Vers  10  h.  25  m.,  les  deux  satellites  apparais- 
saient près  du  bord  (intérieurement),  sous  forme  de  petits 
disques  brillants,  et  à  10  h,  35  m.,  ils  sortaient  suivant 
les  directions  marquées  par  les  deux  flèches  ;  le  Z^  était  le 
plus  bas. 

Grâce  à  des  conditions  atmosphériques  plus  favorables, 
M.  Flammarion  est  arrivé  à  un  résultat  décisif  à  l'égard  du 
point  noir  /",  qu'il  a  jugé  définitivement  appartenir  au 
5*^  satellite.  M.  Knobel  est  tout  aussi  aflirmatif.  De  mon 
côté,  j'ai  pu  conclure  seulement  que  la  distance  apparente 
des  satellites  et  des  ombres,  au  moment  de  la  sortie,  ne 
s'opposait  pas  à  l'opinion  que  le  point  f  se  trouvait  dans 
l'un  de  ces  petits  astres. 

J'ai  cru  utile  et  intéressant  de  confirmer  ici  l'observation 
de  MM.  Flammarion  et  Knobel,  et  de  permettre  la  com- 
paraison de  nos  résultats  à  une  époque  où  l'attention  se 
porte  assez  fréquemment  sur  les  satellites  de  Jupiter. 

Les  dessins  que  j'ai  eu  l'honneur  de  présenter  à  l'Aca- 
démie en  1873  renferment  trois  exemples  dans  lesquels 
on  voit  le  4"  satellite  hii-mème  se  projeter  sur  la  planète 
sous  forme  d'une  tache  tout  à  fait  noire,  et,  quoique  l'at- 
tention des  astronomes  ait  été  attirée  sur  des  faits  de  ce 
genre  depuis  une  époque  déjà  reculée  (1),  il  convient  de 


(1)  Cassini  et  Maraldi  ont  fait  des  observations  analogues,  notamment 

en  1663,  en  1677,  en  1707,  en  1713 Voir  Mém.  de  l'Académie  des 

sciences  de  Paris;  années  1707  et  1714. 


Bull,  de  lArad.  2,?  Série  T..*^». 


^.  T&rby  cbdi.  noct'.  del/. 


\ 


e  *    •  * 

'S 


liih.  G.  Saierei,rrbS,Snhoc£Zl£s. 


(  nm  ) 

noter  encore  soigneusement  l'aspect  qu'offre  le  corps  des 
satellites  pendant  les  passages.  Outre  les  renseignements 
que  l'on  peut  recueillir  ainsi  sur  l'état  de  leur  surface,  on 
réunira  aussi  des  documents  qui,  un  jour,  serviront  peut- 
être  utilement  à  élucider  la  question  encore  douteuse  de 
leur  durée  de  rotation. 


Recherches  sur  la  conservation  du  bois  au  moyen  des  sels 
de  cuivre;  par  M.  Rottier,  ingénieur  industriel,  répéti- 
teur à  l'Université  de  Gand. 


Un  des  principaux  procédés  de  conservation  du  bois 
consiste,  comme  on  le  sait,  à  faire  pénétrer  dans  la  fibre 
ligneuse  une  solution  de  sulfate  cuivrique. 

Le  grand  intérêt  qui  s'attache  à  cette  méthode  de  pré- 
paration du  bois  m'a  engagé  à  entreprendre  sur  ce  sujet 
quelquesexpériencesque  je  prends  la  liberté  de  soumettre 
à  l'appréciation  de  l'Académie.  Ces  expériences  ont  été 
faites  à  l'Université  de  Gand,  dans  le  laboratoire  de  M.  le 
professeur  Donny,  dont  les  conseils  bienveillants  m'ont 
été  d'un  grand  secours. 

Je  me  suis  proposé  l'étude  de  deux  questions  distinctes: 
j'ai  étudié  d'abord  les  causes  qui  provoquent,  au  bout 
d'un  certain  temps,  la  destruction  du  bois  préparé;  et  j'ai 
cherché  ensuite  à  constater  s'il  est  possible  de  prolonger  la 
durée  d'un  semblable  bois  en  employant  des  méthodes 
différentes  de  celle  dont  on  se  sert  actuellement  dans  l'in- 
dustrie. 


(  596  ) 
SI. 

La  matière  ligneuse  imprégnée  de  sulfate  de  cuivre  ne 
se  conserve  pas  indéfiniment  sous  terre;  quelque  soin  que 
l'on  ait  apporté  à  sa  préparation ,  elle  finit  toujours  par 
s'altérer  au  bout  d'un  temps  plus  ou  moins  long. 

Ce  fait  s'explique  aisément. 

Sous  l'influence  de  certaines  causes,  le  bois  préparé 
perd  graduellement  la  petite  quantité  de  cuivre  qui  s'est 
fixée  sur  la  cellulose,  etc.,  et  à  la  présence  de  laquelle  il 
doit  la  propriété  de  se  conserver.  Aussi  longtemps  que  le 
bois  renferme  une  certaine  quantité  de  cuivre,  il  résiste  à 
la  pourriture,  mais  dès  qu'il  n'en  renferme  presque  plus, 
il  se  trouve  à  peu  près  dans  les  mêmes  conditions  que  du 
bois  non  préparé  et,  comme  lui,  se  détruit  rapidement  sous 
terre. 

C'est  ce  qui  me  paraît  ressortir  clairement  de  l'expé- 
rience suivante  : 

Après  avoir  desséché  quelques  copeaux  d'aubier  de  peu- 
plier, je  les  ai  complètement  imprégnés  d'une  solution  de 
sulfate  cuivrique  pur,  renfermant  ls',5  de  sulfate  cristal- 
lisé pour  100  d'eau. 

Pour  obtenir  cette  pénétration  complète  de  liquide  anti- 
septique, je  n'ai  pas  eu  besoin  de  recourir  à  l'emploi  de  la 
pression,  ainsi  qu'on  le  fait  dans  l'industrie  :  les  échantil- 
lons de  bois  sur  lesquels  j'opérais  n'ayant  qu'une  très-faible 
épaisseur,  il  suffisait  d'une  simple  immersion  dans  le 
liquide  pour  les  imprégner  entièrement.  Après  leur  prépa- 
ration, ces  copeaux  ont  été,  à  différentes  reprises,  traités 
par  de  grandes  quantités  d'eau  pure,  puis  desséchés.  On  a 


(  ^97  } 
mis  quelques-uns  de  ces  copeaux  à  part  afin  de  pouvoir 
doser  le  cuivre  qui  s'y  trouvait;  les  autres  ont  été  enfouis 
dans  une  caisse  renfermant  une  certaine  quantité  de  terre 
végétale  ordinaire  que  des  aspersions  périodiques  d'eau  de 
pluie  maintenaient  constamment  humide. 

De  temps  en  temps,  on  retirait  de  terre  quelques-uns 
des  copeaux  préparés,  et  l'on  déterminait  la  quantité  de 
métal  qu'ils  retenaient  encore. 

Le  tableau  suivant  fait  connaître  les  résultats  de  l'ana- 
lyse de  ces  divers  copeaux  : 


Temps 

Cuivre 

1 

pendant 

trouvé  , 

lequel 
les    copeaux 

calculé 
à  l'etal  de 

Observations. 

oDt  séjourné 

sulfate 

1 

gramme  bois  préparé  et  lavé. 

sous  terre. 

cristallisé. 

0  jours. 

0,0041 

1 

-               -             - 

68        - 

0,00:23 

Le  bois  csl  encore  dans 
un  étal  de  parfaite  con- 
servation. 

1 

—               —             — 

117       — 

0.00i>2o 

Les  copeaux  sont  parse- 
més de  taches  noires. 

1 

—               —             — 

179      - 

0.0017 

Le  bois   est  à  peu  près 
complétemenl  détruit. 

Le  résultat  de  cette  expérience  prouve,  d'une  manière 
évidente  et  directe,  ce  que  la  propriété  antiseptique  bien 
connue  des  sels  de  cuivre  permettait  de  prévoir  :  le  bois 
doit  sa  conservation  à  la  présence  du  cuivre,  et,  perdant 
peu  à  peu  le  sel  métallique  dont  il  est  imprégné,  il  se 
détruit  aussitôt  qu'il  n'en  renferme  plus  ou  presque  plus. 

Examinons   maintenant   quelles  sont  les  causes   sous 


(  598  ) 
l'influence  desquelles  le  sel  de  cuivre  est  enlevé  au  bois. 

Ces  causes  sont  au  nombre  de  trois  : 

1"  La  présence  du  fer; 

2"  Celle  de  certaines  solutions  salines,  et 

3°  Celle  de  l'acide  carbonique  (1). 

I.  L'action  que  le  fer  métallique  exerce  sur  le  bois  pré- 
paré au  sulfate  de  cuivre  est  connue  depuis  plusieurs 
années,  et  c'est  à  un  ingénieur  belge,  M.  Van  der  Sweep, 
que  revient  le  mérite  de  l'avoir  signalée  le  premier  (2). 

Après  les  observations  et  les  recherches  faites  par 
MM.  Kuhlmann(5),  PaulThénard(4),  et  Hervé-Mangon  (5), 
et  qui  se  rattachent  à  cette  question,  ce  point  m'a  paru 
trop  bien  étudié  pour  justifier  de  nouvelles  expériences. 

Il  m'a  semblé  toutefois  intéressant  d'examiner  jusqu'à 
quel  point  la  présence  d'un  sel  de  fer  dans  les  solutions 
cuivriques  peut  être  nuisible  à  la  bonne  préparation  du 
bois. 

A  cet  effet,  j'ai  préparé  un  certain  nombre  de  copeaux 
de  bois  de  même  grandeur  avec  des  solutions  de  sulfate  de 
cuivre  renfermant  des  quantités  différentes  de  sulfate  de 
fer,  et  noté  le  temps  pendant  lequel  les  bois  ainsi  prépa- 
rés se  sont  conservés  sous  terre. 


(1)  Dans  un  ouvrage  publié  depuis  quelques  semaines ,  un  ehimisle 
français,  M.  Maxime  Paulet,  expose  d'une  manière  très-iemarquable  les 
résultats  de  quelques  expériences  qu'il  a  entreprises  sur  le  même  sujet  : 
ses  conclusions  sont  analogues  aux  miennes.  (Pages  144  et  suivantes.) 

(2)  Boudin  ,  Cours  de  technologie ,  !■•«  partie ,  2»  édition  ,  p.  231 . 

(5)  Comptes  rendus  de  l'Académie  des  sciences  de  Paris  (n»  7,  août 
18S9). 

(4)  Ibid.  (2-2  août  1839). 

(5)  Ibid.  (août  1839). 


(  599  ) 
Le  tableau  suivant  fait  connaître  les  résultats  obtenus  : 


1 

Nos 

Poids 
des 

Composition 

des   liqueurs  employées  à  la 
des  copeaux. 

préparation 

Les  copeaux 
étaient 

complètement 

d'ordre. 

COPEAUX. 

CUSO40H2O 

FeSo^THjO 

H2O 

délruits  sous  terre 
au  bout  de  : 

1 

gr- 

0.2a 

gr. 

0.00 

l.oO 

100.00 

56    j  ours. 

0 

0,23 

O.oO 

-1,00 

-100,00 

83      - 

3 

0.22 

1.00 

0,oO 

100,00 

97      - 

4 

0.22 

1.20 

0,30 

100,00 

100      — 

o 

0,22 

1,30 

0.20 

100.00 

103      - 

6 

0,19 

1.40 

0,10 

100.00 

103      — 

7 

0.19 

l,4o 

O.Oo 

■100,00 

108      — 

8 

0.18 

1,48 

0,02 

100,00 

109      — 

9 

0.20 

1.49 

0.01 

100,00 

109      — 

10 

0.23 

l,49o 

0,005 

•100,00 

110      - 

■11 

0.20 

l.oO 

0,00 

•100,00 

109      - 

1     12 

0.25 

1.46 

0,04  (*) 

•100,00 

110      - 

13 

0.24 

1,48 

0,02  (*) 

100.00 

110      — 

!   1^ 

0,26 

Copeau  non 

préparé .    . 

34      — 

(•) 

Sulfates  d 

B  cuivre  du  ce 

mnierce. 

Dans  toutes  mes  expériences,  j'ai  admis  que  les  copeau.x 
étaient  totalement  détruits,  lorsqu'il  était  impossible  de 
les  retirer  de  terre  sans  les  briser,  et  qu'ils  cédaient  au 
moindre  effort.  On  comprend  qu'en  faisant  usage  d'un  sem- 
blable procédé  pour  juger  du  degré  d'altération  du  bois, 
on  ne  puisse  pas  obtenir  de  mesures  très-rigoureuses  et 
que  l'on  ne  doive  attacher  que  fort  peu  d'importance  aux 
légères  différences  observées. 

En  examinant  le  tableau  précédent,  on  voit  : 
1°  Que  le  sulfate  ferreux  jouit  d'un   certain  pouvoir 
antiseptique  beaucoup  plus  faible  que  celui  du  sulfate  de 
cuivre; 


(  600  ) 

2"  Que  des  bois  préparés  à  l'aide  de  solutions  renfer- 
mant à  la  fois  du  sulfate  de  fer  et  du  sulfate  de  cuivre  se 
conservent  sous  terre  à  peu  près  pendant  le  même  temps, 
à  moins  que  le  sulfate  de  fer  ne  soit  en  proportion  consi- 
dérable; 

''  5°  Qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  préférer,  pour  la  préparation 
du  bois,  le  sulfate  de  cuivre  chimiquement  pur  au  sulfate 
commercial. 

Dans  un  travail  récent,  M.  Boucherie  (1)  émet  quelques 
observations  qui  sont  en  contradiction  avec  mes  résultats. 
D'après  lui,  le  sulfate  de  cuivre  renfermant  plus  de  5  ou 
6  p.  "/ode  sulfate  de  fer  doit  être  proscrit  et  il  convient  de 
n'employer,  pour  la  préparation  du  bois,  que  du  sulfate 
cuivrique  pur  ou  convenablement  purifié. 

Sans  prétendre  trancher  la  question,  je  rappellerai  à  ce 
sujet  les  expériences  intéressantes  faites  par  Payen  sur  le 
bois  d'une  roue  fort  ancienne,  découverte,  il  y  a  quelques 
années,  dans  les  mines  de  cuivre  de  San-Domingos  (Por-, 
tugal)  (2).  Cette  roue  ,  qui  se  trouve  dans  un  état  de  par- 
faite conservation,  après  une  immersion  de  quatorze  siè- 
cles dans  des  eaux  chargées  de  sulfate  de  cuivre  et  de 
sulfate  de  fer,  renferme  en  quantité  très-notable  dessous- 
sulfates  de  ces  deux  métaux  (3). 

II.  Un  certain  nombre  de  sels  exercent  une  action  nui- 
sible sur  les  bois  imprégnés  de  sulfate  cuivrique. 


(1)  Comptes  rendus  de  l'Académie  des  sciences  de  Par/s, tome LXXVII, 
p.  487. 

(2)  Comptes  rendus  de  l'Académie  des  sciences  de  Paris,  tome  LVIII, 
pp.  899  et  1033. 

(3)  Voir  aussi,  au  sujet  de  Faction  des  sels  de  fer  sur  le  bois,  M.  Paulet, 
Traité  de  la  conser cation  du  bois,  etc.  Paris,  Baudry,  1874.  pp.  132-133. 


(  601  ) 
Lorsqu'on  plonge  du  bois  préparé  et  lavé  au  préalable 
u  moyen  d  eau  d.tillée,  dans  «ne  solution  de  chloru 
de  sod,um,  de  carbonate  de  sodium,  ou  de  carbonate  de 
potassium,  et  qu'on  examine  ces  solutions  au  bout  de 
quelque  temps,  on  remarque  qu'elles  renferment  toujours 
une  assez  notable  quantité  de  cuivre. 

Si  d'autre  part,  on  dose  le  cuivre  contenu  dans  la  fibre 

igneuse,  on  observe  constamment  une  diminution  dans 

Quantité  de  cuivre  qui  se  trouvait  primitivement  dans  le 

Ce  fait  rend  compte  de  l'insuccès  de  toutes  les  tenta- 
tives qui  ont  été  faites  en  vue  de  protéger  les  bois,  à  l'aide 
du  sulfate  de  cuivre,  contre  l'action  de  la  mer  (1) 

A  cause  des  sels  qu'elle  renferme,  l'eau  de  mer  enlève 
aisément  le  sulfate  de  cuivre  au  bois  préparé;  aussi  long- 
emps  que  le  bois  contient  du  cuivre,  il  échappe  aux 
atteintes  des  mollusques  marins;  mais  dès  que  la  plus 
grande  partie  du  sel  cuivrique  a  été  enlevée  par  l'eau  de 
mer,  le  bois  est  rapidement  envahi  ;  on  trouvera  la  preuve 
de  ce  fait  dans  les  résultats  de  l'expérience  suivante  exé- 
cutée sur  une  pièce  de  bois  de  hêtre  préparée  qui  a  été 
soumise  pendant  un  certain  temps  à  l'action  de  la  mer 

Une  partie  de  ce  bois  était  intacte;  l'autre  était  profon- 
dement perforée  par  le  taret  ; 

Sulfate  de  cuivre, 
gr, 

2,S  de  bois  pris  dans  la  partie  intacte  renfermaient .    .      'o,OH40 
'        -  -  attaquée        -  .    .        o,0001S 

C'est  probablement  à  une  action  analogue  que  l'on  doit 

(1)  Annales  des  Travaux  publics  de  Be/gique,tome  XIX  (1860-1861). 
i""  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  5g 


(  602  ) 
attribuer  la  rapide  destruction  qu'éprouvent  les  bois  pré- 
parés lorsqu'ils  sont  enfouis  sous  des  tunnels  ou  dans  cer- 
tains terrains,  et  notamment  dans  les  terrains  calcaires  (1  ); 
il  est  possible,  en  effet,  que  les  eaux  qui  s'infiltrent  dans 
ces  terrains  se  chargent  de  certaines  matières  salines 
^^bicarbonate  de  calcium,  etc.,)  jouissant  comme  le  sel 
marin,  le  carbonate  sodique,  etc.,  de  la  propriété  d'enle- 
ver le  cuivre  au  bois  préparé  (2). 

111.  De  même  que  certains  sels,  les  solutions  d'acide  car- 
bonique enlèvent  au  bois  le  sulfate  de  cuivre  qui  s'y  trouve. 

Trois  grammes  environ  de  copeaux  de  bois  préparés  et 
lavés  avec  soin  ont  été  traités  pendant  sept  jours  par  des 
solutions  d'acide  carbonique  (eau  gazeuse).  Chaque  fois 
qu'on  remplaçait  par  une  autre  la  solution  gazeuze  qui 
avait  servi,  celle-ci  était  filtrée  avec  grand  soin  et  analysée. 
La  quantité  totale  de  cuivre  ainsi  enlevée  a  été  de  O^^OOSS, 
calculée  à  l'état  de  sulfate. 

Dans  les  mêmes  conditions,  l'eau  pure  était  sans  aucune 
action  sur  le  bois  sulfaté. 

M.  Maxime  Paulet ,  dans  son  dernier  ouvrage  (o) ,  décrit 
une  expérience  analogue  :  «  Prenez,  dit-il,  de  la  sciure 
»  d'un  bois  injecté  de  sel  de  cuivre,  lavez  cette  sciure  avec 
»  de  l'eau  jusqu'à  ce  que  le  cyano-ferrure  de  potassium 
»  n'accuse  plus  sensiblement  dans   l'eau  sortie  de  ces 


(1)  Annales  des  Travaux  publics  de  Belgique,  tome  XXVI  {Notice 
sur  le  matériel  des  lignes  télégraphiques  belges,  par  F.  Delarge,  sous-in- 
géuieur  au  service  des  télégraphes). 

(2)  M.  de  Coene,  ingénieur  aux  chemins  de  fer  de  l'Ouest  (  France) , 
m'apprend  que  les  traverses  au  sulfate  de  cuivre  enterrées  sous  les  par- 
ties de  voies  qui  traversent  les  tunnels  sont  rapidement  détruites  et  qu'on 
se  voit  obligé  de  les  remplacer  au  bout  de  6  à  7  ans. 

(5)  Traité  de  la  conservation  du  bois,  etc.  Paris,  1874,  p.  145. 


f  605  ) 

»  lavages  la  présence  du  sel  de  cuivre.  A  ce  moment, 
»  plongez  cette  même  sciure,  qui  parait  épuisée,  dans  de 
»  l'eau  gazeuse  ordinaire,  c'est-à-dire  dans  de  l'eau  char- 
»  gée  d'acide  carbonique.  Après  quelque  temps  de  con- 
B  tact,  cette  eau  est  devenue  cuprique.  Que  s'est-il  passé? 
»  Il  est  permis  de  croire  que  l'oxyde  de  cuivre,  sous  l'in- 
»  fluence  d'un  excès  d'acide  carbonique,  s'est  dissous  et 
»  se  trouve  emporté.  Si  cette  expérience,  qui  a  besoin 
»  d'être  répétée,  venait  à  conûrmer  de  tels  résultats, 
»  l'importance  de  ceux-ci  au  point  de  vue  pratique  n'échap- 
»  perait  à  personne.  » 

IV.  Après  avoir  constaté  l'influence  de  l'acide  carbonique 
et  des  solutions  salines,  j'ai  cherché  à  reconnaître  si  l'eau 
pure  exerce  une  action  dissolvante  sur  les  combinaisons 
cuivriques  contenues  dans  le  bois  préparé. 

Voici  les  deux  expériences  que  j'ai  faites  pour  étudier 
cette  question  : 

A.  Dans  un  vase  ouvert  rempli  d'eau  distillée,  j'ai 
plongé  quelques  copeaux  préparés  et  lavés  avec  grand 
soin;  j'ai  couvert  ce  vase  d'une  vitre  pour  combattre  les 
effets  de  l'évaporation  et  je  l'ai  abandonné  à  lui-même 
pendant  un  temps  fort  long. 

Sulfate  de  cuivre. 

Avant  de  mettre  les  copeaux  clans  l'eau,  j'avais  coupé  un  — 

petit  fragment  (le  ^js  environ  de  la  surface  )  de  chacun 
d'eux;  ces  morceaux  réunis  m'ont  servi  à  déterminer  la 
quantité  moj'enne  de  cuivre  retenue  par  le  bois  au  com- 
mencement de  l'expérience;  cette  quantité  était,  pour  gr. 
un  gramme  de  bois,  de 0,0073 

Au  bout  de  sept  mois,  un  nouveau  fragment  de  chaque 
copeau  a  été  pris  dans  le  même  but;  mes  échantillons 
renfermaient,  alors,  par  gramme  de  bois 0,0Do4 

Treize  mois  après  le  commencement  de  l'expérience,  le 

dosage  du  cuivre  accusait 0,00(30 

Et  enfin,  au  bout  de  dix-neuf  mois  d'immersion  dans  l'eau.  0,0034 


(  60i  ) 

L'action  de  l'eau  est  donc  manifeste;  mais  à  quelle 
cause  doit  elle  être  rapportée  ?  Est-elle  due  réellement  à 
la  présence  de  l'eau?  Ou  bien  doit-elle  être  attribuée  à 
une  cause  accidentelle,  par  exemple,  à  la  présence  de 
l'acide  carbonique  dissous  dans  l'eau?  Quoiqu'il  ne  faille 
pas  attacher  trop  d'importance  à  une  expérience  isolée, 
on  ne  peut  s'empêcher  de  remarquer  que  cette  dernière 
supposition  expliquerait,  d'une  manière  satisfaisante, 
l'égalité  des  trois  derniers  nombres. 

B.  J'ai  mis,  dans  un  ballon  en  verre,  de  l'eau  distillée 
que  j'ai  soumise  à  l'ébullition  pendant  un  certain  temps, 
afin  de  chasser  la  majeure  partie  des  gaz  dissous  dans  le 
liquide;  quelques  copeaux  de  bois  préparés  et  lavés  avec 
le  plus  grand  soin  ont  été  alors  introduits  dans  le  ballon 
dont  le  col  a  été  ensuite  effilé;  après  une  nouvelle  ébulli- 
tion  de  l'eau ,  le  ballon  a  été  scellé  à  la  lampe  et  abandonné 
à  lui-même  pendant  200  jours. 

Au  bout  de  ce  temps,  j'ai  ouvert  le  ballon,  filtré  l'eau 
qui  s'y  trouvait  et  dosé  le  cuivre  que  celle-ci  renfermait  : 
la  quantité  de  métal  dissoute  dans  le  liquide  était  de 
0'^',0002  calculée  à  l'état  de  sulfate  cristallisé. 

Dans  les  conditions  dans  lesquelles  je  me  suis  placé,  une 
petite  quantité  de  cuivre  a  donc  été  enlevée  au  bois  pré- 
paré. 

On  ne  doit,  toutefois,  pas  se  bâter  de  conclure  de  ce 
fait,  que  cette  action  est  due  réellement  à  la  présence  de 
l'eau  :  ici,  comme  dans  l'expérience  précédente,  l'acide 
carbonique  a  pu  intervenir;  on  sait,  en  effet,  que  l'eau, 
même  après  une  ébullition  prolongée,  retient  obstinément 
de  petites  quantités  de  gaz,  et  l'on  conçoit  d'ailleurs,  que 
si  le  bois  n'est  pas  complètement  saturé  de  cuivre,  si  un 
fragment  même  très-minime  de  bois  échappe  à  la  prépa- 


(  60.5  ) 
lation    il  puisse  lui-même  fournir  à  l'eau  une  cerhin^ 
quanlilé  d'acide  carbonique,  ^ 

Quoi  qu'il  en  soil,  je  pense  qu'il  est  permis  de  conclure 
de  mes  expenences  que,  si  l'eau  exerce  une  action  sur 
bo,s  prépare,  cette  action  est  d'une  lenteur  extrême. 

§  II. 

Le  bois  préparé,  étant  sujet  à  s'alléi'er  aussitôt  qu'il  ne 
enferme  plus  que  de  très-minimes  quantités  de  cuivre 
^pa  a,  probable  que  l'on  prolongera  sa  durée  en  aug- 

Ugneuse  '"'"""  "'  "'''"'  ""'  '^  '"'  '"'  '»  ""''> 
Voyons  si  l'expérience  confirme  celte  supposition 
La  méthode  ordinaire  de  préparation  du  bois  ne  permet 
pas  de  résoudre  la  question  :  lorsqu'on  plonge  du  boisdaus 
les  solutions  de  sulfate  cuivrique,  la  proportion  de  métal 
qu.  se  combme  avec  la  fibre  ligneuse  est  loujotns  à  peu 
près  constante  et  totijours  très-petite 

e«*^l"'T,  ''"r  "  ""P'"^''"'  ''"'  P''»"^'''^'  ^P^"»"^  qu'il 
est  possible  d'introduire  dans  la  matière   végétale  des 

quantités  plusgrandes  de  enivre. 
Les  moyens  suivants  m'ont  donné  de  bons  résultats  : 
1"  Emploi  Je  facélale  de  cuivre.  Les  divers  sels  de 
cuivre  ne  jouissent  pas  au  même  degré  de  la  propriété  de 
s    li.xer  sur  le  bois;  parmi  ceux  dont  j'ai  essayé  i'emploi, 
I  acétate  mérite  une  mention  spéciale 

Voici  quelles  sont  les  quantités  de  cuivre  que  j'ai 
trouvées  dans  un  certain  nombre  de  copeaux  préparés  au 
moyen  de  différentes  solutions   d'acétate  cuivrique   Ces 


(  606  ) 
quantités  sont  calculées  à  l'état  de  CUSO4  +  5H2O. 

gr. 

-1  gramme  bois  préparé  renferme O.OlOi 

i        —  —  —  0.012?; 

1        —  —  — 0.0100 

i        —  —  —  0,0170 

i        —  —  —  0.0106 

tandis  que  les  échantillons  préparés  à  l'aide  du  sulfate 
de  cuivre  ne  contiennent  généralement  que  de  O'^OOG 
à  0"^007  de  sulfate  par  gramme  de  bois. 

2"  Cliauffarje  des  bois  préparés.  Lorsque,  après  avoir  re- 
tiré les  copeaux  des  solutions  cuivriques  (sulfate,  acé- 
tate, etc.)  dans  lesquelles  ils  ont  été  plongés,  on  les  expose 
à  l'action  d'une  température  élevée,  le  bois  absorbe  et 
retient,  sous  forme  de  combinaisons  insolubles,  une  quan- 
tité de  cuivre  un  peu  plus  grande  que  celle  que  le  procédé 
ordinaire  de  préparation  permet  d'y  introduire. 

Le  tableau  suivant  donne  les  résultats  de  quelques  do- 
sages de  cuivre  effectués  sur  divers  copeaux  qui  ont  été 
chauffés  après  leur  préparation  : 


Cuivre 

contenu  dans 

i  (îr.  de  bois 

(calculé  a  l'état 

de 

Copeau  préparé  au 

moyen  de  sulfate  de  cuivre  et 

CUS045H2O). 

chauffé  à    .    . 

0,007o 
0,0090 

—               —               —         100»  c. 

- 

-               —               —         i2o»  c. 

0,0114 

-          - 

—       de  l'acétate         —         lOO»  c. 

0,0231 

-          - 

-               -               —         -130"  c. 

0,0240 

—          — 

—       de  la  méthode  ordinaire.    .    . 

0,0073 

(  607  ) 

5°  Emploi  de  substances  organiques.  Quelques  corps 
organiques  agissent  à  l'égard  des  sels  de  cuivre  comme  les 
mordants  relativement  aux  matières  colorantes  :  introduits 
dans  la  fibre  ligneuse,  ils  s'y  fixent  en  lui  permettant  d'ab- 
sorber des  quantités  de  cuivre  parfois  très-considérables. 
Je  me  borne  à  décrire  les  expériences  que  j'ai  faites  au 
moyen  des  deux  substances  organiques  qui  m'ont  donné 
les  résultats  les  plus  remarquables,  l'indigo  et  le  cachou. 

a.  Indigo.  Un  copeau  de  bois  teint  en  bleu  très-pâle  à 
l'aide  de  l'indigo  a  été  ensuite  préparé  au  sulfate  de  cuivre. 
Ce  copeau  renfermait,  par  gramme,  0^'^,009o  de  cuivre 
(calculé  à  l'état  de  CuSO^SH^O),  c'est-à-dire  un  peu  plus 
que  le  bois  préparé  de  la  manière  ordinaire. 

Un  second  essai  a  été  fait  au  moyen  d'un  échantillon  de 
toile  de  coton  d'un  bleu  très-intense  (bleu  de  cuve).  Cet 
échantillon,  après  avoir  été  soumis  l'action  d'une  solution 
de  sulfate  cuivrique,  lavé,  etc.,  renfermait,  par  gramme, 
0^%00409  (CuSOiSH.O),  tandis  que  la  toile  de  coton 
blanche  ne  fixe  guère  plus  de  0°',001  de  sulfate  par 
gramme. 

J'ai  fait  une  dernière  expérience  sur  ce  sujet  en  prépa- 
rant au  moyen  de  sulfate  de  cuivre  un  échantillon  de  toile 
de  coton  imprimée.  Ce  tissu  présentait  un  fond  bleu  d'in- 
digo parsemé  de  pois  blancs.  Après  sa  préparation,  l'échan- 
tillon a  été  découpé  avec  soin,  et  l'on  a  rassemblé  les 
pois  blancs  d'une  part,  et  le  fond  bleu  d'autre  part,  afin 
de  pouvoir  doser  séparément  le  cuivre  contenu  dans  la 
partie  blanche  et  dans  la  partie  bleue  du  tissu. 

Voici  les  résultats  des  dosages  de  cuivre  : 


i  gramme  de  tissu  (partie  blanche)  renfermait 0,000:26 

1  gramme  de  tissu  (partie  bleue j  —         0,01300 


(  608  ) 

b.  Cachou.  Lorsqu'on  mélange  une  décoction  de  cachou 
avec  une  solution  de  sulfate  ou  d'acétate  cuivrique,  on 
obtient,  après  filtration,  une  liqueur  qui  peut  servir  à  la 
préparation  du  bois  et  qui  permet  de  fixer  sur  la  matière 
ligneuse  une  quantité  considérable  de  cuivre. 

Voici  les  résultats  de  quelques  dosages  de  cuivre  effec- 
tués sur  des  copeaux  préparés  au  moyen  du  cachou  : 


gramme  copeaux  préparés  au  moyen  du  cachou  renferme. 


4       — 


Cuivre 
calculé  à  l'état 

de 

CUS04+5H20 


0.0169 
0,0133 
0,0140 
0,0320 
0,0460 
0,0145 


Contrairement  à  ce  qu'on  pourrait  supposer,  l'emploi 
du  cachou  dans  la  préparation  du  bois  ne  présente  guère 
d'importance  pratique  ;  nécessitant  l'intervention  de  l'oxy- 
gène atmosphérique,  l'action  du  cachou  est  limitée  à  la 
surface  du  bois  :  des  copeaux  dont  l'épaisseur  est  faible  et 
la  surface  considérable,  peuvent  absorber  une  grande 
quantité  de  cuivre,  tandis  que  des  pièces  de  bois  d'un 
certain  équarrissage  n'en  fixent  que  des  proportions  rela- 
tivement minimes. 

4°  Emploi  des  sels  de  ciiprammonium.  L'emploi  des 
sels  cuprammoniques  permet  d'introduire  facilement  une 
grande  quantité  de  cuivre  dans  le  bois. 


(  609  ) 

Pour  s'en  assurer,  on  peut  ajouter  à  une  solution 
aqueuse  de  sulfate  de  cuivre  une  quantité  d'ammoniaque 
caustique  ou  de  carbonate  d'ammoniaque  suffisante  pour 
redissoudre  le  précipité  qui  s'est  formé  d'abord  et  doser 
le  métal  contenu  dans  un  copeau  de  bois  qui  a  été  plongé 
pendant  quelque  temps  dans  cette  liqueur. 

Un  grand  nombre  de  dosages  que  j'ai  effectués  sur  des 
échantillons  ainsi  préparés  m'ont  donné  constamment  de 
bons  résultats. 

Voici  quelques-uns  des  nombres  que  j'ai  obtenus  : 


Cuivre 

calculé 
sous  forme  de 

CuSo^.SH^O 


1    gramme  de  bois  préparc  au  moyen  du  sulfate  de  cuivre  ammoniacal  renf.    1         0,0166 


1  - 

1  — 

1  - 

1  — 

I  — 

1  - 

1  — 


0,0250 
0.0330 
0,0230 
0,0423 
0,0500 
0,0580 
0,0730 


Ainsi  qu'on  vient  de  le  voir,  il  est  donc  possible  de 
fixer,  par  divers  moyens,  une  notable  proportion  de  cuivre 
sur  la  fibre  ligneuse. 

Il  reste  à  examiner  quelle  influence  cette  grande  quan- 
tité de  métal  introduite  dans  le  bois  préparé  exerce  sur 
la  durée  de  celui-ci. 


(  610) 

Afin  de  voir  si  le  bois  fortement  imprégné  de  cuivre 
résiste  à  la  pourriture  plus  longtemps  que  le  bois  préparé  par 
les  moyens  ordinaires,  j'enterre  côte  à  côte  l"  Un  copeau 
non  préparé  (A);  2°  un  copeau  au  sulfate  de  cuivre  (B); 
5°  un  autre  à  l'acétate  (C);  4°  un  quatrième  au  cachou  (D)  ; 
5"  un  copeau  préparé  au  sulfate  et  chauffé  (E)  ;  6°  un  copeau 
préparé  à  l'acétate  et  chauffé  (F)  ;  et  enfin  7°  un  dernier 
copeau  préparé  au  moyen  de  l'ammoniaque  (G). 

Le  tableau  suivant  fait  connaître  les  résultats  obtenus  : 


A.  Bois  non  préparé 

B.  Bois  préparé  au  sulfate  cuivrique  (  pré 

paration  ordinaire  )  . 

C.  —  à  l'acétate  de  cuivre.    . 

D.  —  au  moyen  du   sulfate  de 

cuivre  et  du  cachou  . 

E.  —  au    sulfate    de    cuivre    et 

chauffé  après  préparât" 

F.  —  à    l'acétate    de  cuivre  et 

chauffé  après  préparât" 

G.  —  au  moyen  de   sulfate   de 

cuivre  ammoniacal 


1  gr.  de  bois 

renferme  : 

(CuSo^+SHaO) 


0,00002 

0,00730 
0;01000 

0,01300 

0,01000 

0,02300 

0.01660 


Le  bois 

est 

complètement 

détruit 

au  bout  de  : 


30  jours. 

67  — 

9o  - 

120  - 

80  — 

160  - 

130  — 


Les  nombreuses  expériences  que  j'ai  faites  sur  ce  sujet 
ont  toujours  confirmé  les  résultats  indiqués  dans  le  tableau 
ci-dessus.  Quelques-uns  de  ces  essais  ne  sont  pas  terminés 
en  ce  moment  :  des  copeaux  renfermant  O^^OTo  de  sulfate 
et  qui  se  trouvent  sous  terre  depuis  plus  de  200  jours, 
sont  encore  actuellement  dans  un  état  de  parfaite  conser- 
vation qui  me  fait  espérer  une  très-longue  durée. 


(  611  ) 

On  voit  qu'il  résulte  de  mes  expériences  qu'en  augmen- 
tant la  quantité  de  cuivre  flxée  sur  le  bois,  on  prolonge  la 
durée  de  celui-ci. 

Parmi  les  diverses  méthodes  de  préparation  que  je  viens 
de  passer  en  revue,  une  seule  me  paraît  susceptible  d'être 
appliquée  avec  avantage  dans  l'industrie  ;  le  prix  élevé  de 
l'acétate  cuivrique  et  de  l'indigo  doit  faire  rejeter,  sans 
aucun  doute,  l'emploi  de  ces  corps;  le  chauffage  des  bois 
injectés  de  sulfate  de  cuivre  ne  donne  que  des  résultats 
d'une  valeur  contestable  (1)  et  l'emploi  du  cachou  n'est 
possible  que  dans  des  cas  très-limités.  Les  sels  de  cupram- 
monium,  au  contraire,  peuvent  être  employés  dans  la 
généralité  des  cas  et  la  minime  augmentation  de  dépenses 
résultant  de  leur  application  à  la  conservation  du  bois  sera 
largement  compensée  par  la  longue  durée  assurée  à 
celui-ci. 


La  classe  s'est  occupée,  en  comité  secret,  de  la  discus- 
sion des  titres  des  candidats  présentés  à  la  dernière  séance, 
et  a  adopté  quelques  candidatures  nouvelles. 


(1)  L'action  de  la  chaleur  communique  au  bois  imprégné  de  sulfate 
cuivrique  une  coloration  rose  d'autant  plus  intense  que  le  chauffage  s'est 
effectué  à  une  température  plus  élevée.  Cette  circonstance,  jointe  à  la 
destruction  relativement  facile  du  bois  ainsi  traité,  me  porte  à  croire  que 
l'action  de  la  chaleur  fait  éprouver  au  bois  sulfaté  un  commencement 
d'altération ,  soit  à  cause  de  l'acidité  du  sel ,  soit  pour  toute  autre  raison. 


(  612  ) 


CLASSE   DES    LETTRES. 


Séance  du  9  novembre  1874. 

M.  R.  ChaloiN  ,  directeur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.  Grandgagnage,  J.  Roulez,  Ga- 
chard,  P.  Devaux,  P.  De  Decker,  J.-J.  Haus,  M.-N.-J. 
Leclercq,  Ch.  Faider,  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove, 
Thonissen,  Th.  Juste,  le  baron  G.  Guillaume,  F.  Nève, 
Alph.  Wauters,  Ém.  de  Laveleye,  G.  Nypels,  Alph.  Le 
Roy,  Ém.  de  Borchgrave,  membres;  J.  Nolet  de  Brauwere 
van  Steeland,  Aug.  Scheler,  Alph.  Rivier,  associés; 
F.  Loise,  G.Rolin-Jaequemyns,  Stan.  Bormaus,  correspon- 
dants. 

M.  Ed.  Mailly,  correspondant  de  la  classe  des  sciences^ 
assiste  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  demande  à  la  classe  de 
vouloir  bien  lui  soumettre  une  liste  de  quatorze  noms  pour 
le  choix  des  sept  membres  appelés  à  juger  la  cinquième 
période  du  concours  quinquennal  de  littérature  flamande, 
concours  dont  le  terme  fatal  expire  le  51  décembre  pro- 
chain. 


(  613  ) 
Celte  liste,  dont  la  classe  s'est  occupée  en  comité  secret, 
sera  communiquée  à  M.  le  Minisire. 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  adresse,  pour  la  biblio- 
thèque de  l'Académie,  deux  exemplaires  des  Actes  de  la 
Conférence  de  Bruxelles ,  ^874  (in-4''),  et  la  5"  livraison  de 
la  5''  série  (Gast-Gebrek)  du  Woordenboek  der  JSeder- 
landsche  Taal,  publié  par  Cosijn  et  Yerwijs,  gr.-in-S^à  2 
colonnes. 

M.Alphonse  Wauters  fait  hommage  du  premier  exem- 
plaire du  tome  IV  (années  1226-1250)  de  la  Table  chrono- 
logique des  chartes  et  diplômes  imprimés  concernant 
l'histoire  de  la  Belgique,  1  vol.  in-4°,  publiée  comme  suite 
à  la  collection  des  chroniques  de  la  Commission  royale 
d'histoire. 

M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove  présente,  au  nom  de 
M.  Scheler,  le  premier  exemplaire  de  l'ouvrage  :Li  Bou- 
mans  de  Berfe  ans  grans  pies,  par  Adetiés  li  Bois,  publié 
dans  la  collection  académique  des  œuvres  des  grands  écri- 
vains du  pays. 

M.  J.  Nolet  de  Brauvvere  van  Steeland  fait  hommage 
d'un  exemplaire  de  sa  brochure  imprimée,  portant  pour 
titre  :  Nederlandsch  contra  Westvlaamsche  taal-particu- 
laristerij  ;  in-8°. 

M.  B.  Van  Hollebeke  oifre  un  exemplaire  du  recueil 
qu'il  vient  de  publier  sous  le  titre  de  :  Morceaux  choisis 
de  poètes  belges,  1  vol.  in-8°. 

La  classe  vote  des  remercîments  aux  auteurs  de  ces 
différents  dons. 

—  L'École  nationale  des  chartes,  et  M.  Emile  Egger, 
associé,  à  Paris,  la  mairie  de  la  ville  d'Amiens,  la  Société 


(  614  ) 

d'hisloire  et  d'archéologie  de  Châlons-sur-Saône,  M.  Tail- 
liar,  à  Douai,  M.  Farr,  associé  à  Londres,  la  Société  numis- 
matique de  Londres,  remercient  pour  l'envoi  des  dernières 
publications  académiques. 

—  La  commission  impériale  archéologique  de  Saint- 
Pétersbourg,  l'Institut  pour  l'élude  des  Indes  néerlandaises 
à  La  Haye,  et  l'Institut  historique  et  géographique  du 
Brésil  adressent  leurs  derniers  travaux. 


RAPPORTS. 


MM.  Faider  et  De  Decker  expriment  verbalement  leur 
avis  sur  la  notice  présentée  par  M.  X.  Heuschling  lors  de 
la  dernière  séance,  et  portant  pour  titre  :  La  statistique 
internationale,  son  origine  et  ses  'progrès. 

Conformément  à  l'opinion  de  ses  deux  commissaires, 
la  classe  vote  des  remercîments  à  M.  Heuschling  pour  sa 
communication ,  qui  sera  déposée  aux  archives. 


Les  écoles  et   V alphabet  des  Tamouls ,  notice  par  M.  Phi- 
lippe Van  der  Haeghen. 

Mtnppot't  de  n.  Féiiac  1%'ère. 

«  Il  y  a  bientôt  vingt  ans  qu'une  instructive  notice  de 
M.  Philippe  Van  der  Haeghen,  Sur  V  étude  du  Tamoul,  a  été 
insérée  dans  nos  Bulletins  {["'  série,  tome  XXH,  1856). 
Un  peu  plus  tard,  sur  le  rapport  favorable  de  notre  con- 


(  6i5  ) 

frère  feu  G.  A  rend  t  [Bulletins,  ibid.,  tome  XXIII,  1837), 
le  même  écrivain  a  rais  au  jour  le  texte  de  cent  proverbes 
tamouls,  soigneusement  comparés  aux  proverbes  d'une  foule 
de  peuples  [Maximes  populaires  de  l'Inde  méridionale. 
Paris  —  Leipzig,  1858,  40 pages  gr.  in-8"). 

C'est  à  la  même  langue  de  l'Inde  que  se  rapporte  le 
court  essai  que  M.  Philippe  Van  der  Haeghen  vient  de 
nous  présenter  sous  le  titre  :  Les  écoles  et  l'alphabet  des 
Tamouls  (MS.  de  17  pages  in-8"  et  5  pages  de  notes).  Chargé 
par  la  classe  d'examiner  cette  nouvelle  notice,  je  com- 
mence par  signaler  l'intérêt  tout  spécial  qu'elle  renferme. 

L'auteur  débute  par  une  esquisse  de  l'instruction  pri- 
maire donnée  aux  populations  méridionales  de  l'Inde 
dont  le  Tamoul  est  la  langue  maternelle  ;  il  montre  le  rôle 
de  l'instituteur  dans  chaque  village,  l'admission  d'un  grand 
nombre  d'enfants  de  plusieurs  castes,  à  l'exclusion  des 
classes  dégradées,  aux  leçons  de  l'école  ;  il  dit  comment 
l'enseignement  de  l'alphabet  se  fait  à  la  fois  par  un  exer- 
cice vocal  assez  long,  et  par  l'apprentissage  de  l'écriture 
qui  consiste  à  tracer  des  caractères  sur  les  olles  ou  longues 
feuilles  de  palmier.  On  a  dans  cette  introduction  le  résumé 
de  données  assez  généralement  connues. 

De  cette  peinture  de  l'école  populaire,  M.  Yan  der  Hae- 
ghen passe  à  la  description  des  éléments  de  l'alphabet  du 
Tamoul,  qui  est  la  plus  importante  des  langues  du  sud  de 
l'Inde,  appelées  dravidiennes  comme  appartenant  aux 
peuples  nommés  collectivement  Dravidas,  mais  que  la 
science  a  rattachées  naguère  au  groupe  si  étendu  des 
idiomes  touraniens. 

Quelle  que  soit  l'antiquité  du  séjour  de  ces  populations 
dans  le  midi  de  la  Péninsule,  il  paraît  incontestable  qu'elles 
ont  dû  leur  culture  intellectuelle  aux  conquérants  de  race 


(  616  ) 
aryenne,  fondateurs  des  grands  États  du  Nord  et  du  milieu 
de  l'Inde.  Les  monuments  principaux  retrouvés  jusqu'ici 
en  Tamoul  et  dans  les  autres  langues  congénères  con- 
firment cette  donnée  ;  on  ne  placerait  pas  leur  composition 
avant  le  milieu  de  notre  m.oyen  âge  :  c'est  au  IX*  siècle 
que  Tirouvallaver,  «le  divin  Paria  »,  a  produit  ses  œuvres 
fort  vantées  (voir  Lassen  ,  Indisclie  Alterthumskunde , 
tome  IV,  1861,  pp.  237-259  et  pp.  798-799).  Il  demeure 
tout  à  fait  incertain  si  des  monuments  de  ce  genre  nous 
révéleront  quelque  jour  des  traditions  importantes  pour 
l'histoire  primitive  dn  continent  asiatique,  supérieures  en 
âge  à  celles  qui  sont  consignées  dans  les  livres  des  Aryas. 
Jusque-là  on  ne  peut  élever  de  doute  sur  l'infériorité  de 
la  littérature  des  langues  dravidiennes  comparée  à  celle 
des  temps  florissants  de  l'Inde  brahmanique  et  bouddhique. 
Ces  langues  méridionales  ont  droit  à  être  étudiées  de 
nouveau  au  point  de  vue  de  la  grammaire  et  à  celui  de 
l'ethnographie  ;  leur  connaissance  n'est  pas  non  plus  sans 
utilité  politique  et  commerciale  pour  les  nations  qui  ont 
des  comptoirs  sur  la  côte  de  Coromandel  ;  elle  n'a  guère 
là  moins  d'importance  que  celle  de  l'hindoustani  dans  le 
Nord.  Mais,  de  fait,  elles  ne  sont  pas  comprises  dans  le 
cercle  des  études  indiennes  qui  ont  reçu  tant  d'extension 
dans  l'enseignement  public  en  Angleterre  et  surtout  en 
Allemagne. 

Voici  maintenant  le  plan  de  la  nouvelle  étude  de  M.Ph. 
Van  der  Haeghen  sur  l'alphabet  des  Tamouls.  Quand  il  a 
énuméré  tous  les  signes  de  cet  alphabet,  partagé  en 
voyelles  (au  nombre  de  douze)  et  en  consonnes  (au  nombre 
de  dix-huit),  il  n'en  détermine  pas  la  valeur  phonétique; 
ce  n'est  pas  assez  de  distinguer  les  dix-huit  consonnes  en 
fortes,  douces  et  moyennes,  sans  plus  d'explication.  Il 


(617  ) 
n'indique  aucune  transcription  de  chaque  lettre ,  comme  on 
le  fait  généralement  aujourd'hui  pour  mieux  préciser  les  lois 
de  l'euphonie  dans  l'analyse  scientifique  de  la  plupart  des 
langues.  Il  n'est  pas  aisé  de  donner  un  équivalent  à  toutes 
les  articulations  de  l'alphabet  tamoul,  et  l'on  regarderait 
comme  d'un  emploi  difficile  la  transcription  de  textes  éten- 
dus. Au  moins  serait-il  bon  de  pratiquer  une  translitération 
conventionnelle,  comme  l'ont  fait  les  auteurs  de  plu- 
sieurs traités  de  grammaire  tamoule  :  ainsi  l'a  entendu  le 
D""  Ch.  Graul  dans  l'esquisse  grammaticale  qu'il  a  publiée 
en  anglais  au  lome  II  de  sa  Bibliotheca  tanmlica  (Leipzig, 
1855). 

M.  Van  der  Haeghen  aborde  directement  une  compa- 
raison de  l'alphabet  tamoul  avec  l'alphabet  sanscrit,  mais 
sans  avoir  défini,  au  préalable,  la  valeur  de  chaque  lettre 
du  premier.  En  se  servant  constamment  du  caractère 
original  de  chacune  des  deux  langues,  il  procède  à  des 
rapprochements  de  signes  et  de  mots  dont  plusieurs  sont 
dignes  d'attention.  Il  montre  combien  de  fois  une  seule 
consonne  tamoule  est  employée,  dans  l'écriture  des  livres, 
comme  l'équivalent  de  plusieurs  consonnes  sanscrites  ; 
en  manière  d'exemples,  il  met  en  regard  du  mot  tamoul 
le  mot  sanscrit  que  des  écrivains  du  Midi  ont  fait  passer 
dans  leur  langue  nationale.  Cependant  la  démonstration 
ne  nous  semble  pas  explicite  de  tout  point. 

L'essai  de  M.  Van  der  Haeghen  aurait  plus  de  portée, 
s'il  s'était  tenu ,  dans  le  parallèle  des  deux  alphabets,  à  la 
classification  des  lettres  indiennes  qui  a  passé  dans  tous 
les  traités  de  grammaire  comparative.  Sans  parler  du  grand 
ouvrage  de  François  Bopp  qui  est  consulté  comme  un 
chef-d'œuvre  d'analyse  dans  toute  étude  de  haute  philo- 
logie, rappelons  que,  dès  l'année  1828,  Eugène  Burnouf 

2™*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  40 


(618) 
s'esl  appliqué  au  même  sujet  dans  sa  première  lettre  sur 
l'alphabet  tamoul  [Nouveau  Journal  asiatique,  tome  I", 
avril  1828,  pp.  259  à  290).  Comme  l'a  dûment  constaté 
l'indianiste  français,  le  Tamoul  a  des  sons  étrangers  à  la 
langue  des  Brahmanes  :  il  a  un  alphabet  qui  lui  est  propre, 
si  l'on  en  considère  les  divers  éléments  ;  il  a  conservé  des 
signes  particuliers  pour  certaines  voyelles  et  pour  cer- 
taines articulations.  Mais,  dans  l'usage  littéraire,  il  s'est  plié 
à  la  transcription  du  sanscrit  par  des  équivalents,  et  sans 
doute  la  forme  de  ses  lettres  s'est  modifiée  dès  lors  à  l'imi- 
tation du  Dévanagari  ou  d'un  ancien  alphabet  indien  (1). 
Faute  de  signes  particuliers,  le  Tamoul  n'a  pu  représenter 
deux  classes  de  consonnes,  les  douces  et  les  aspirées, 
auxquelles  il  a  d'ordinaire  subtitué  les  fortes:  cette  diffé- 
rence essentielle  par  rapport  à  une  écriture  alphabétique 
plus  perfectionnée  a  déjà  été  notée  par  Eugène  Burnouf 
dans  un  tableau  synoptique  {Ibid. ,  p.  270). 

M.  Van  der  Haeghen  nous  dit  qu'il  a  recueilli  beaucoup 
d'observations  dans  la  lecture  de  manuscrits  tamouls  :  il 
les  mettra  sans  doute  pleinement  à  profit  s'il  reprend  avec 
plus  de  rigueur  la  comparaison  des  deux  alphabets,  et  il 
sera  à  même  de  procéder  plus  sûrement  ensuite  à  la  com- 


(1)  Quant  à  l'emprunt  de  plusieurs  signes  alphabétiques  par  les  Tamouls 
à  des  systèmes  d'écriture  indienne,  on  en  aura  la  claire  démonstration 
dans  le  grand  mémoire  de  M.  François  Lenormant  dont  la  publication  est 
commencée  sous  le  titre  d'Essai  sur  la  propagation  de  l" alphabet  phé- 
nicien dans  V ancien  monde.  L'alphabet  dravidien  y  est  rattaché  ainsi  que 
les  alphabets  de  l'Inde  civilisée,  par  l'intermédiaire  du  Magâdhi,  au 
tronc  indo-homérite.  Des  planches  insérées  dans  le  corps  de  l'ouvrage 
rendront  compte  de  cette  dérivation  qui  n'est  indiquée  jusqu'ici  que  dans 
une  sorte  de  tableau  généalogique  annexé  à  l'introduction  (tome  I*', 
part.  V\  Paris,  Maisonneuve,  1872,  page  112  et  table  VI). 


(  619) 
paraison  des  vocables  pour  distinguer  les  mots  d'origine 
dravidienne  des  mots  empruntés  à  une  autre  famille  de 
langues.  En  attendant  que  l'auteur  juge  bon  de  compléter 
et  de  perfectionner  son  travail,  nous  proposons  à  la  classe 
d'adresser  des  remercîments  à  M.  Van  der  Haeghen  pour 
sa  communication ,  et  de  déposer  son  manuscrit  aux 
archives.  » 

La  classe  adopte  les  conclusions  de  ce  rapport. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Le  Compendium  Instilutionum  de  Nicolas  de  Bruxelles; 
notice  par  M.  Alphonse  Rivier,  associé  de  l'Académie. 


L 


L'an  1513  est  une  date  mémorable  dans  les  annales  de 
l'imprimeur  Thierry  Martens,  dans  celles  de  l'ancienne 
Université  de  Louvain,  et  dans  les  fastes  de  la  science 
belge. 

En  cette  année,  deux  petits  livres  sortirent  de  l'officine 
célèbre  qui  répandait  alors  tant  de  vie  et  de  lumière  sur 
les  Pays-Bas  et  sur  l'Europe. 

L'un  était  VOraison  de  Martin  van  Dorp  in  laudem 
omnium  artium,  où  les  jurisconsultes  de  Rome  sont  com- 
blés de  louanges  enthousiastes  et  où  le  jeune  et  ardent 
humaniste,  invoquant  les  lois  romaines,  s'écrie  :  «  0  lois 


I 


(  620  ) 
vénérables  en  toute  piété,  lois  sacrées,  lois  augustes,  lois 
divines,  qui  versez  sur  nous  de  votre  pleine  corne  d'abon- 
dance tant  de  biens  et  tant  de  richesses,  guides  de  notre 
vie,  gardienne  des  arts  libéraux!  » 

L'autre  petit  livre,  qui  était  muni  d'une  épître  de  l'édi- 
teur et  fut  tiré  à  mille  exemplaires  (1),  s'adressait  direc- 
tement aux  étudiants  en  droit.  Il  contenait  les  leçons 
élémentaires  de  Maître  Nicolas  de  Bruxelles,  professeur 
d'Institiites,  lequel  jouissait  à  Louvain  d'une  haute  estime 
et  d'une  popularité  de  bon  aloi. 

C'était  la  première  fois  que  Martens  prêtait  le  concours 
de  son  art  à  la  science  juridique  (2) ,  et  c'est  là  sans  doute 
ce  qui  a  déterminé  l'excellent  imprimeur  à  prendre  lui- 
même  la  plume  pour  inaugurer  ce  nouveau  champ  d'action 
par  un  manifeste  à  ses  lecteurs.  Le  champ  ne  fut  peut-être 
pas  aussi  fécond  que  Martens  l'avait  espéré,  car  il  n'a 
publié  que  trois  autres  ouvrages  de  droit  proprement  dit, 
savoir  :  en  1515,  les  llluslrationes  ad  Instilutiones  du 
canonisle  Robert  van  de  Poel  [De  Lacu),  qui  était  mort 
en  1483  (3);  en  1516,  les  célèbres  Topiques  d'Everardi; 
enfin,  en  1517,  l'Épitomé  Snwniae  Legimi  d'yËgidius  (4). 
La  même  année,  et  par  les  soins  du  même  Jî^gidius,  Mar- 


(1)  Épître  aux  adolescenls ,  ci -après.  Van  Iseghem  ,  Biographie  de 
Thierry  Martens ,  p.  99. 

(2)  Je  ne  compte  pas  le  traité  De  praecellentia  potestatis  imperalo- 
nae  (1502)  de  Jacques  de  IMiddelbourg,  qui  est  politique,  historique, 
philosophique ,  etc. 

(5)  Van  Iseghem,  258. 

(4)  Le  biographe  de  Pierre  Gillis  ,  M.  Britz,  a  singulièrement  ma!  com- 
pris la  nature  de  cette  publication ,  et  ce  n'est  pas  sa  seule  méprise. 
Messager  des  sciences  et  des  arts,  1864,  pp.  196-198;  Mémoires  cou- 
ronnés de  l'Académie ,  coll.  in-4'',  l.  XX,  p.  60. 


(  621  ) 
tens  publiait  VUtopie,  et  dès  lors  ses  presses  n'ont  plus 
rien  fait  pour  la  jurisprudence  (5). 


II. 


L'exemplaire  que  j'ai  sous  les  yeux,  petit  in-4°  de  cin- 
quante feuillets  non  numérotés  (6),  a  été  parfaitement 
décrit  par  M.  Van  Iseghem  (7).  Le  titre  porte  :  Compcndium 
quatuor  Ubrorum  institutionum  secunduni.  ordinein  rubri- 
carum  cuni  inibi  conlentorum  siimmaria  declaratione  et 
tenninorum  expositione  iiiris  candidatis  iuvenibus  imprimis 
conducibile.  Per  egregium  virum  Magistrum  Nicolaiim  de 
Bruxella  arlium  UberaUum  legumque  doctorem  voce  sola 
dictatum  ad  utilitateiu  nobiUuni  prinuun  :  deinde  celerorum 
juris  stiidiosorum  Locaniensiwn  editmn. 

Cum  gratia  et privilegio  prostat  venaiis  Lovanii  e  regione 
scole  Juris  civilis  in  Edibus  Theodorici  Martini  Alostensis 
qui  typis  tornatissimis  excussit. —  f^a  lin,  avant  la  liste  des 
rubriques  et  l'errata,  est  marquée  par  ces  lignes:  Absolu- 
tum  est  hoc  utilissimum  in  légales  instituliones  compendium 
compositum  a  prestantissinio  artiuin  ac  legum  doctore 
Magistro  Nicolao  Bruxellensi.  El  a  Theoderico  Martino 
Alostensi  castigate  formis  excusum  Lovanii  Anno  a  Natali 


(a)  Je  ne  sais  s'il  faut  rattacher  au  droit  la  Lectura  solemnis  de  Jean 
Thierry  en  l'honneur  du  cardinal  Guillaume  DECi(Ov,de  lo^O,  mentionnée 
par  M.  Van  Iseghem,  p.  514.  Je  n'ai  pu  voir  ce  livre. 

(6)  Je  dois  la  communication  de  ce  précieux  petit  volume  à  la  libéralité 
du  propriétaire,  M.  le  sénateur  '^ergauwen,  et  à  l'obligeante  entremise  de 
M.  Van  der  Haeghen.  Qu'il  me  soit  permis  d'exprimer  ici  ma  reconnaisance 
à  ces  deux  éminenls  bibliophiles. 

(7)  Biographie  de  Thierry  Marlens,  pp.  238-240. 


(  622  ) 
Christiano   decimo  tercio  supra   sesquimillesimum  tercia 
Idus  Octobres.  Deo  gratias. 

Deux  pièces  de  vers  de  Nicolas  Carolus  de  Gand  sont 
insérées,  l'une  tout  de  suite  après  le  litre,  l'autre  après 
l'épître  de  Martens. 

Voici  la  première  : 

Nicolaus  Carolus  Gandavus  cupide  legum  iuvcnliHi. 

Ne  iam  terque  quaterque  lubeata  es 
Tu  legum  cupiile  cohors  iuvente 
Gui  :  quod  vix  :  tamen  iniprobo  labore 
Sudore  :  excubiis  :  parabal  annus 
Quondam  tercius  :  hoc  licebit  uno 
Totum  discere  :  vel  citra  laborem. 
0  industria  magna  Nicolai 
Fecundum  ingenium:  benigna  virtus. 
Parvi  0  pagina  perdiserla  libri. 
Non  est  hic  Jabyiintiius  ille  Baldi. 
Ambagesve  dolenda  Baitholina. 
Totus  lucidus  :  integerque  lotus  : 
Tolus  pumice  perpolitus  equo  : 
Quem  possiiU  quoque  posteri  uepotes 
Inter  cesareas  locare  chartas. 

Voici  la  seconde ,  ilerum  cupide  legum  iuventiiti  : 

Hue  ades  ad  calicem  legum  silibunda  iuventus. 
Siccaque  spumanli  prolue  labra  mero 
Hic  scaturit  Icto  non  pauper  gurgite  rivus 
Hec  bcne  torquentem  comprimet  unda  sitim. 
Nil  facit  equorea  ad  sincerum  limpha  palatuni 
Laula  quidem  salsas  lingua  perhorret  aquas 
Fons  hic  a  magno  sacrarum  interprète  legum 
Limpidus  ingenti  est  tractus  ab  Oceano 
Ergo  âge  plena  hauri  Iam  puro  cibia  fonte 
Tota  hec  dulciculum  nam  sapit  unda  merum. 


(  623  ) 

Un  autre  Gantois,  Jean  Munter  (8),  a  mis  au  revers  du 
titre  six  distiques  suivis  de  quatre  vers  qui  rappellent  au 
lecteur  trois  préceptes  d'une  sagesse  immortelle  : 

Inclila  Cesarei  qui  quaeris  dogmala  iuris 

Hoc  doctum  legito  candide  lector  opus. 

Quicquid  habent  :  legis  hic  :  sinuosa  volumina  Baldi 

Hic  libi  lucidior  Juslinianus  erit. 

En  legum  insignis  Nicolaus  doctor  id  offert  (9) 

Sponte  tibi  :  toto  dignus  in  orbe  cani. 

Huic  (rogo)  die  grales  :  summique  precare  Tonantis 

Plura'tibi  seribens  donel  et  edat  :  ope. 

Quis  sit  honor  legum  :  iuris  veneranda  potestas 

Quanta  sit  haud  nescis  :  commoda  quotve  ferat. 

Lex  tutrix  inopum  :  vicioruni  caula  fugatrix 
Custos  virtutis  :  iusticieque  cornes. 

Quod  quondam  foribus  sacris  vetuslas 
Inscribebal  Apollinis  comosi 
Triplex  eulogium  (fac  boc  Apollo 
Jussit)  nienle  revolve  amice  crebra. 

Nosce  te  ipsuni  Ne  quid  nimis 

Sponsioni  non  desunt  incommoda. 

Voici  enfin  Tépître  de  Martens  [\ 0)  :  Theodoricus Martinus 
Alostensis  iuris  studiosis  adolescentibiis  salutem  D.  P. 

Aristotelis  summi  philosophici  in  lopicis  sentenlia  est  adolescentes 
honestissimi  :  bonum  eo  divinius  meliusque  esse  :  quo  communius  atque 
diffusius.  Hic  (sic)  certe  factum  esse  non  ambigo  :  ut  optimus  pater  vester 
ac  preceptor  doctissimus  et  absolutissimus  Magister  Nicolaus  de  Bruxella 


(8)  Jean  Monter,  du  Collège  du  Porc,  s'est  occupé  aussi  de  la  publica- 
tion des  Topiques  d'EvERARDi ,  dont  il  a  rédigé  l'index. 

(9)  En  et  id  sont  transposés  dans  l'original,  mais  il  y  a  un  erralum  à 
la  fin  du  livre  II. 

(10)  M.  Van  Iseghem  en  donne  une  traduction  ,  pp.  130-151. 


(  624  ) 

liberalium  arlium  sanclissimarumque  legum  doctor  onini  profeclo  laude 
noslra  maior  alque  excellenlior  :  cum  isagogicum  libcllum  iiiiiislilutiones 
Justinianas  quo  ad  eas  primum  et  deiiide  ad  lolius  iuris  prudenliam 
oplimo  duclus  consilio  faciliorem  pararet  adiium  :  paucis  sed  eis  quidem 
nobilibus  honeslisque  adolescenlulis  consociis  veslris  :  voce  lenus:  domi 
docendo  dictassel  :  ardenliusque  ex  eis  nonnulli  lam  diligeuler  quam 
prudenler  ab  ore  legentis  recollegissenl  :  oblatumque  poslinodum  ipse 
preceplor  recognovisset  probassetque  quinetiam  eorum  quosdam  ex  eo 
supra  quam  dici  queat  profecisse  conspicerel  :  non  indignuni  duxit  :  ut 
nosiro  arliticio  ad  omnium  veslium  communem  uUlitalenr.  in  mille  Irans- 
fuudererelur  [sic)  exempla.  Ego  itaqueeodem  animo  duclus  non  fine  (sic) 
veslii  communis  boni  studiorumque  vestrorum  ratione  acceplum  ab 
eodem  preceptore  vestro  exemplar  arlificio  impressorio  muitiplicavi  : 
mulliplicalum  quoque  primum  noslri  iaboris  munusculum  in  vestro  studio 
alque  facullale  vobis  offero.  Quodsi  non  ingralam  nobis  nostram  diligen- 
tiam  ex  lioc  opusculo  probaverimus:  plura  maioraque  eiusdem  in  ipsas 
inslilutiones  non  penitenda  opéra  a  nobis  non  posl  mullos  nienses  perci- 
pietis  :  aulhore  duceque  Deo.  Qui  omni  operi  bono  ut  incboelur  procédai 
finiaturque  laudabililer  author  duxque  existit  in  quo  et  vos  valete 
leiices.  Lovanii  ex  noslra  officina  formularia  :  quinlo  nonas  octobres 
Annoa  salule  Christiana,decimo  tercio  supra  millesimumquingentesimum. 

Une  seconde  édition  du  Compendium  a  été  faite  en 
1552  à  Louvain  par  Servais  Van  Sassen  ;  c'est  probable- 
ment la  dernière.  Je  ne  l'ai  pas  vue. 


III. 


Molanus  (H),  Valère  André  (12),  Paquot  (15),  Britz  (14) 
donnent  quelques  renseignements  sur  les  faits  principaux 
de  la  vie  de  Nicolas  de  Bruxelles. 


(H)  Molanus,  Histon'a  Lovaniensium  ,  1. 1 ,  p.  542. 

(12)  Valère  André,  Fasti  Academici,  édil.  1650,  pp.  180,  184. 

(13)  PAQD0T,t.  VIII,  pp.  311-515. 

(14)  Mémoires  couronnés  de  V Académie ,  coll.  in-4»,  l.  XX,  p.  49. 


(  62d  ) 

Son  nom  de  famille  est  Heems.  Il  est  né  à  Bruxelles  (15), 
dans  la  paroisse  de  la  Chapelle,  si  du  moins  on  doit  inter- 
préter dans  ce  sens  le  nom  de  Nicolaus  de  Capella  qui  lui 
est  donné  quelquefois.  Les  registres  de  la  faculté  des  Arts 
de  Louvain  attestent  qu'il  détermina  aux  écoles  des  Arts 
le  II  décembre  1485  (16)  et  qu'il  devint  bachelier 
en  1487  (17).  Le  29  mars  1488  il  fut  admis  à  la  licence 
lui  quarante-septième  sine  ordine  (I8\  Il  prit  le  bonnet 
le  26  avril  suivant  (19).  Je  le  vois  figurer  en  sa  qualité  de 
maître  es  arts  dans  les  registres  de  la  Faculté  en  1489  (20) 
et  en  1493  (21).  Valère  André  dit  qu'il  fut  reçu  du  conseil 
de  l'Université  pour  la  Faculté  l'an  1302  (22).  Je  n'ai  pas 
pu  vérifier  celte  assertion. 

En  1505,  Nicolas  Heems  fut  créé   docteur  en  droit 


(15)  Britz  le  dit  né  à  Godlvelde,  près  de  Dixmude,  et  cite  à  ce  propos 
Valère  André.  Or,  ce  n'est  pas  Nicolas  Heems,  mais  bien  Erasme  Heems 
(f  loo8)  que  Valère  .\ndré  fait  naître  à  Godlvelde  {Fasti ,  edit.  de  1630, 
p.  168).  D'après  les  Fasti decannles  (Bibliothèque  de  Bruxelles,  fonds  Van 
Hulthem,  22958),  Érasme  Heem,  Castelensis ,  fut  le  neuvième  doyen  du 
Collège  des  Bacheliers.  —  Jean  Heems,  docteur  es  arts  et  en  médecine, 
plusieurs  fois  recteur,  mort  en  lob9  ou  1360,  était  d'.\rmentières  (Mo- 
LANUS.  I.  l  .  p.  598;  Valère  André,  Fasti,  édit.  de  1633,  pp.  35  et  suiv. 
et  149).  C'est  lui  qu'on  appelait  Jean  d'Armemières  (Van  Iseghem,  Biogra- 
phie de  Thierry  Martens ,  p.  147). 

(16)  Registre  de  la  faculté  des  Arts,  aux  Archives  générales  du  royaume 
(V),  fol.  il.  Nicolaus  de  Capella  logicus.  Voyez  cependant  ibid.,  fol.  15, 
revers.  • 

(17)  Ibid.,  M.  46  et  47. 

(18)  Ibid.,  fol.  58. 

(19)  Ibid.,  fol.  68,  revers.  Nicolaus  de  Capella,  alias  de  Bruxella.  — 
Un  Nicolaus  de  Bruxella  a  obtenu  la  birette  en  1499.  Ibid.,  fol.  174  revers. 

(20)  Ibid.,  fol.  74,  revers. 

(21)  Ibid.,{o\.  111,  revers. 

(22)  Pridie  kal.  seplembr.  Valère  André,  Fasli ,  p.  180  (1650). 


(  626  ) 
civil;  en  1506  titulaire  de  la  chaire  d'Institutes  que  Ga- 
briel Van  der  Meere  de  Breda  (f  1529)  avait  occupée 
dès  1493;  en  lo20  titulaire  de  la  chaire  primaire  de 
Pandectes,  en  remplacement  du  pensionnaire  Jean  Sté- 
phani  de  Nivelles,  mort  la  dite  année.  Lui-même  résigna 
en  iooO  et  mourut  le  22  juin  1532,  quelques  semaines 
avant  Nicolas  Everardi.On  l'enterra  dans  l'église  des  Au- 
gustins,  où  l'on  voyait  encore  au  siècle  suivant,  sur  un 
vitrail,  son  portrait  et  ses  armes.  Son  successeur,  aux 
Institutes  d'abord,  puis  aux  Pandectes,  fut  Jean  de  Haes 
de  Tourcoing,  qui  est  mort  en  1548. 

Je  citerai,  parmi  les  élèves  de  Heems,  Viglius,  qui 
commença  sous  lui  de  s'appliquer  à  l'étude  du  droit  (1524), 
et  Damhonder  (1527),  qu'il  avait  pris  chez  lui  et  auquel 
il  donnait  des  leçons  particulières  (23). 

Heems  ne  paraît  pas  avoir  publié  autre  chose  que  le 
Compendhim.  On  pourrait  inférer  cependant  des  paroles 
de  Martens,  qu'il  avait  sur  le  métier  en  1515,  d'autres 
ouvrages  plus  importants.   Yalère    André  lui  attribuait, 


(■âô)  GoETHALS,  Lectures,  t.  IV,  p  57. 

Damhocder,  Subhasiationumcompendiosa  exegesis,  fol.  "25  de  l'édition 
de  1546:  •  Duni  ...  Lovanii  operam  iuri  uavarem ,  ae  eximio  D.  doclori 
Nicolao  Heems  a  Bruxella  lune  in  humanis  ageuli  cohabitareni:  contigit 
quendam  clericum  sex  argentées  Scyphos  deauratos,  quos  necessitate 
consiriclus  foeneratori  Lovaniensi  pignori  dederat,  annodecurso,  sorte 
et  usura  realiter  oblalis,  repetere;  foenerator  negavit  se  debere  huius- 
modi  realeni  oblaliouem  accipere,  et  scyphos  velle  resliluere,  quan- 
doquidem  sui  (ul  aiebal)  facli  essenl,  perannuam  possessioneni,  quo  non 
luisset  pignus.  Tandem  re  in  controversiam  juridicani  delala,  consilio 
eiusdem  D.  docioris  Nicolai  Heems  a  Bruxella  succubuit  foenerator, 
ulique  condemnalus,  et  dictorum  scyphorum  restilutionis  et  expensarum, 
cilra  ullani  etiam  temporis  illius  vel  anni  lapsi  consideralione.  »  — 
Cf.  Pratique  droite,  205,  7;  Refuge  et  garand  des  pupilles,  10,  48. 


(  627  ) 

dans  sa  première  édition,  des  Responsa  sive  consiiia  jiiris 
varia,  et  disait  même  les  posséder,  mais  ce  passage  est 
supprimé  dans  la  seconde  (24). 


IV. 


Comme  le  dit  Martens,  le  Compendinm  est  un  petit 
manuel  introductoire,  libellus  isagogicus.  Le  titre  porte 
qu'avant  de  le  livrer  à  la  publicité,  maître  Nicolas  Ta  dicté 
de  vive  voix  à  des  écoliers  nobles.  Martens  précise  ce 
point.  Le  professeur  recevait  dans  sa  maison  un  petit 
nombre  de  jeunes  nobles,  auxquels  il  faisait  un  cours  élé- 
mentaire particulier.  On  pourrait  conclure  de  l'expression 
voce  sola  qu'il  parlait  d'abondance.  Quelques  élèves  re- 
cueillirent avec  soin  ses  paroles  et  lui  soumirent  leurs 
cahiers  qu'il  revit,  approuva  et  consentit  à  laisser  im- 
primer. 

Ce  cours  paraît  avoir  été  ce  qu'aujourd'hui  l'on  appelle 
en  Allemagne  un  Privatissimutn.  Il  y  avait  d'ancienne 
date,  à  Louvain  et  dans  d'autres  écoles,  un  cours  som- 
maire et  extraordinaire  portant  le  nom  de  Summaria 
Institulionum ,  mais  je  ne  pense  pas  qu'il  en  soit  question 
ici,  puisque  Heems  avait  la  Lecture  ordinaire  (25).  Le 
Privatissimum  des  nobles  était-il  dans  les  usages  de  la 
Faculté  de  Droit,  élait-il  plus  ou  moins  une  nouveauté  ou 


(24)  Ce  que  n'a  pas  vu  M.  Britz  .  Mémoire  couronné,  pp.  49  el  G9.  On 
lit  à  la  page  108  de  l'édition  de  1655  de  Valere  André  :  •  Sunt  pênes 
me,  eodem  auclore.  responsa,  etc.  »  —  Valère  André  confondait-il 
peut-être  ces  prétendus  consiiia  de  Nicolas  Heems  avec  ceux  de  Nicolas 

EVERARDI? 

(23)  Valere  André,  Fasti ,  pp.  154-138;  Verni;l.«us,  Acad.  Lovan., 
pp.  48-30  de  l'édition  de  1667. 


(  628  ) 
une  exception  ?  Je  n'ai  pu  acquérir  de  certitude  sur  ce 
point. 

Carolus  annonce,  comme  un  grand  progrès,  qu'on 
pourra  désormais  apprendre  sans  peine  en  un  an  ce  qu'on 
apprenait  jadis  en  trois  à  force  de  sueurs  et  de  veilles. 
On  sait  en  effet  que  c'était  le  temps  des  longues  études  et 
des  Lectures  infinies.  Le  cours  ordinaire  d'inslitules  durait 
à  Louvain  trois  ans;  ailleurs  on  en  mettait  quatre,  cinq, 
six,  et  le  reste  était  à  l'avenant.  C'est  qu'on  enseignait 
magistraliter  et  more  ilalico,  cum  apparalii,  en  commen- 
tant non-seulement  le  texte,  mais  aussi  et  surtout  la  glose 
et  la  glose  de  la  glose  (26).  Les  théologiens  faisaient 
mieux  encore  :  s'il  faut  en  croire  Énéas  Silvius,  un  cé- 
lèbre docteur  de  Vienne  expliqua  pendant  vingt-deux  ans 
le  premier  chapitre  d'Ésaïe,  sans  réussir  à  le  terminer  (27). 


Si  l'on  cherche  à  comparer  le  manuel  de  Heems  à 
d'autres  ouvrages  sur  les  Institules  écrits  ou  employés  vers 
la  même  époque  et  dans  la  même  contrée,  c'est-à-dire 
dans  la  partie  nord-ouest  de  l'Empire,  il  est  naturel  de 


(26)  Cramer,  Kleine  Schriflen,  pp.  117-1 49:  Muther,  D"  Johannes 
Apell,  pp.  7  et  suiv.;  Stobbe,  Deutsche  Rechlsquellen ,  t.  II,  pp.  24  et 
suiv. 

(27)  Voyez  la  lettre  où  É.néas  Silvics  décrit  de  main  de  maître  la  ville 
et  la  vie  de  Vienne  au  milieu  du  XV^  siècle  ;  "  Est  et  illic  hodie  Thomas 
Haselbach  non  incelebratus  Theologus,  quem  scribere  hislorlas  non 
inutiles  aiunt,  cujus  ego  doclrinam  laudarem,  nisi  duas  et  vigintl  annos 
Esaïae  primuni  capitulum  legisset  neque  adhuc  ad  calcem  venisset.  » 
Page  718  de  Tédition  de  Bâle  des  Œuvres  d'ÉNÉAS  Silvics. 


(  629  ) 

penser,  en  première  ligne,  aux  Enarrationes  de  Nicaise 
Vervoort  ou  van  Yoerden  (28)  et  au  commentaire  d'Henri 
von  dem  Birnbaum  ,  plus  connu  sous  les  noms  de  De  Piro 
ou  Brunonis  (29).  Mais  il  n'y  a  guère  de  ressemblance 
entre  le  Compendium,  qui  est  très-succinct,  et  ces  traités, 
qui  sont  assez  détaillés  et,  par  les  nombreuses  citations 
qu'ils  renferment,  tout  à  fait  de  leur  siècle.  Les  seuls 
points  de  contact  sont,  entre  Heems  et  Vervoort,  la  patrie 
brabançonne;  entre  Heems  et  Birnbaum,  le  professorat 
de  Louvain  et  l'intention  didactique  locale,  car  Birnbaum 
aussi  a  composé  son  commentaire  à  l'Université  de  Louvain 
et  pour  cette  Université. 

Je  ne  vois,  dans  les  limites  indiquées,  qu'un  seul  livre 
qui  paraisse  analogue  au  Compendium.  C'est  le  Siimina- 


(28)  NicAsius  A  VoERDA.  de  Heysl-op-den-Berg,  primus  artiuni  à 
Louvain  en  1459,  mort  à  Cologne  en  1492.  —  Dans  son  bel  ouvrage  sur 
la  Littérature  populaire  du  droit  romain  et  du  droit  canon,  M.  de 
Stimzi.>g,  qui  est  aussi  consciencieux  qu'érudit,  déclare  n'avoir  pas  vu 
les  deux  plus  anciennes  éditions  de  YArbor  de  Vervoort.  La  Bibliothèque 
de  Bruxelles  possède  un  bel  exemplaire  de  l'une  d'elles,  probablement 
de  la  première  :  Cologne,  Herman  Bungart  de  Kelwych,  1499.  En  tête, 
l'épigramme  de  Brant:  au  revers  du  litre,  la  petite  notice  sur  l'auteur  et 
les  vers  de  Lang.  Stehelin  n'est  pas  nommé.  On  lit  à  la  tin:  Explicit  pre- 
sens  opusculum  per  quendam  fratrem  confessorem  ordinis  predica- 
torum  conventus  Coloniensis  pro  Dei  laude  ad  sane  consuleudum  in 
casibus  periculosis... 

(29)  La  vogue  du  commentaire  d'HE?*Ri  de  Piro  a  duré  deux  siècles. 
Écrit  entre  1428  et  1452,  on  le  réimprimait  encore  en  1601.  Je  vois  dans 
un  exemplaire  de  la  Bibliothèque  de  Bruxelles  une  note  à  la  plume  datée 
de  1359  et  ainsi  conçue  :  Pater  meus  olim  hoc  libro  usus  est.  M.  de 
Stixtzing  (Pop.  Lit.,  p.  53)  cite  une  édition  sans  lieu  ni  date  que  Hain 
n'a  pas  connue  et  dont  deux  exemplaires  sont  à  la  Bibliothèque  de 
Bruxelles.  Une  note  manuscrite  de  La  Serna  l'attribue  à  (Jean?)  de  West- 
phalie,  et  la  date  de  «  vers  1480.  » 


(  630  ) 
riim  Institutioniim  anonyme,  que  Jean  KoelhofF  a  im- 
primé en  1482  (50).  Mais  je  ne  connais  pas  personnelle- 
ment ce  livre,  dont  les  dimensions  sont  à  peu  près  les 
mêmes  que  celles  du  Compendium  et  que  Denis  (51), 
Hain  (52)  et  Panzer  (55)  ont  cru  pouvoir  attribuer  à 
Birnbaum.  S'il  doit  être  rattaché  à  l'enseignement  univer- 
sitaire,  il  tire  nécessairement  son  origine,  ou  bien  d'un 
cours  de  Swnmaria  Institutionum,  ou  bien  d'un  cours 
particulier  du  même  genre  que  celui  de  Nicolas  de 
Bruxelles. 


VI. 


Je  ne  pense  pas  qu'on  puisse  contester  au  Compendium 
la  simplicité  et  la  clarté.  Carolus  et  Munter  ont  raison 
d'opposer  ces  qualités  essentielles  d'un  cours  élémentaire 
aux  sinuosités,  aux  circuits,  aux  labyrinthes  des  commen- 
tateurs. Le  langage  de  Heems  est  dépourvu  d'art  et  d'élé- 
gance, il  est  même  loin  d'être  pur.  Cependant  son  style 
est  plus  naturel  et  plus  limpide  que  celui  de  maint  légiste 
contemporain. 

A  cette  époque  où,  selon  l'expression  d'Hotman,  on 
faisait  abus  des  entassements  d'allégations  et  d'autorités 


(30)  Stintzing,  ouv.  cit.,  pp.  ol  et  suiv. 

(31)  M.  Denis,  Supplem.  p.  152,  n"  1118.  «  Autor  Henricus  Brunonis 
alias  de  Piro  prof.  Lovaniensis  ex  conc.  Constant,  notus  :  liquet  id  ex 
Proemio.  «  —  M.  de  Stintzing  ne  voit  rien  dans  i'avant-propos  qui  an- 
nonce que  BiRHBAOM  en  soit  l'auteur.  BiRNBAnia  n'a  pas  non  plus  pris 
part  au  concile  de  Constance.  Voy.  Stintzing,  pp.  S2,  33,  56.  Denis  se 
réfère  aux  Specimina  de  Nyerup. 

(52)  Hain,  Repertorium,  t.  1,  p.  359,  n»  4016. 

(35)  Panzer,  Annales  typoyraphici,  1. 1,  p.  290,  n"  100. 


(  651  ) 
chafourées,  Heems  ne  cite  aucun  nom,  mais  se  borne  à 
indiquer  les  sources  même,  et  si   parfois  il  invoque  la 
glose,  ce  n'est  pas  pour  corroborer  ce  qu'il  dit,  mais  pour 
se  dispenser  d'en  dire  davantage. 

Il  lui  arrive  aussi,  mais  rarement,  de  rapprocher  du  droit 
civil  et  canon  le  statut  ou  la  coutume.  Il  ne  craint  pas  les 
actualités;  ses  exemples  sont  populaires,  modernes,  na- 
turels. Nul  doute  que  son  enseignement  ne  fût  attrayant 
et  propre  à  faire  impression.  Je  ne  vois  pas  pourquoi 
Marlens  serait  suspect  d'exagération  lorsqu'il  parle  du 
grand  profit  qu'en  retiraient  les  élèves. 

J'en  donnerai  quelques  spécimens  qu'il  ne  faut  pas  se 
hâter  de  qualifier  de  puérils  ou  d'insignifiants. 

Dans  rénumération  des  choses  hors  du  commerce,  le 
professeur  cite,  en  fait  de  fleuves,  non-seulement  le  Tibre 
et  le  Pô,  mais  le  Rhin ,  la  Meuse,  la  Dyle,  et  il  mentionne , 
pour  la  repousser,  la  prétention  des  Vénitiens  de  ne  pas 
appartenir  à  l'Empire,  leur  ville  étant  située  en  mer  :  «  et 
maie,  quia  omnia  sunt  principis  id  est  imperatoris  quoad 
imperium  et  jurisdictionem.^  Comme  exemple  d'institu- 
tion d'une  personne  que  le  testateur  ne  connaît  pas,  il  cite 
d'abord  l'institution  du  premier  qui  sera  licencié  à  Lou- 
vain,  mais  il  se  ravise  sur-le-champ  et  donne  l'exemple 
des  Institutes  (54).  Comme  exemple  de  condition,  il  donne  : 
si  l'Empereur  vient  à  Louvain\  comme  exemple  défausse 
cause  qui  ne  vicie  pas  le  legs  :  Je  lègue  dix  à  Gains,  parce 


(34)  Et  potest  fieri  institutio  heredis  de  illo  quem  ignorât  testator  :  ut 
ecce  primum  licentiandum  in  Lovanio  institue  heredeu  :  vel  melius  si 
fîlios  fratris  peregrinantes  ignorans  qui  essent  heredes  instituent,  etc.  — 
Cf.  §  ult.  J.  De  heredibus  inslituendis ,  II,  14. 


(  652  ) 
qu'il  a  été  mon  ami  aux  eco/es  (35)  ;  comme  exemple  de 
vol  d'usage,  un  cheval  prêté  pour  aller  à  Malines  et  que  le 
commodataire  emmène  à  Anvers  (36).  A  propos  de  l'obli- 
gation ex  (lelicto  de  celui  «  e  cuiiis  domo  cel  cenaculo  ali- 
quid  proieclitm  est  vel  effusum  »  il  ajoute  :  «  nisi  precla- 
maverit:  ideo  soient  effandenles  aquam  tel  iirinam  preda- 
mare  et  dicere  garde  leaue  (37).  »  Quant  aux  posila  et 
siispensa,  il  remarque  :  «  non  est  bene  tutuni  habere  viri- 
daria  appendenda  ad  fenestras.  »  Pour  exprimer  la  nature 
personnelle  du  lien  obligatoire,  il  se  sert  d'une  expression 
énergique  qui  était  de  tradition  :  «iOblifjatio  semper  nianct 
apiid  obligatum  nec  potest  avelli  ab  ossibus  suis  :  sed  co- 
heret  illi  siciit  lepra  leproso.  »  L'obligation  est  dite  juris 
vinculum,  a  quia  obligatione  homines  vincuntur  et  ligantur 
ut  baves  funibus...  »  — C'est  une  variante  des  anciens  vers  : 

Comme  les  bœufs  par  les  cornes  on  lie , 
Ainsi  les  gens  par  leurs  mots  font  folie  (38). 


(35)  Similiter  legatum  condicionale  fit  inutile  et  non  debetur  si  non 
extel  condicio  :  quia  non  existentia  condicionis  viciât  legatum  :  secus  est 
de  falsa  causa  aut  falsa  demonstratione  quia  huiusmodi  falsilas  non  viciât 
legatum  :  ut  ecce  per  exemplum  :  lego  Gayo  decem  ([uia  fuit  amicus 
meus  in  scholis,  legatum  debetur  licet  sit  falsa  causa  adiecta. 

(36)  Non  solum  contractans  :  id  est  aufferens  rem  ipsam  sed  etiam 

contractans  rem  ipsam  ad  alium  usum  quara  cuius  gratia  ei  res  concessa 
est  si  intelligat  hoc  invilo  domino  facere ,  furtum  committit.  Ut  ecce  si 
habens  equum  sibi  commodatum  usque  MecLliniam  et  eum  ducit  longius 
forte  usque  ad  Antuerpiam  furtum  facit  et  idem  in  similibus.  Alias  si 
cognoverit  dominum  permissurum  quia  forte  erat  suus  amicus  qui  non 
denegassel  eiequum  duceresive  ad  Mechliniam  sive  Antuerpiam,  non  facit 
furtum..,.. 

(37)  Voyez  Damhooder,  Pratique  es  causes  criminelles ,  ch.  CXLIII. 
(58)  Verba  ligant  homines ,  taurorum  cornua  funes,  cornu  bos  capitur, 

voce  ligatur  homo.  Voyez  Loysel  ,  InstHutes  coutumières,  p.  357. 


(  633  ) 

Voici,  hélas,  une  platitude  aussi  traditionnelle,  que 
j'aimerais  mieux  ne  pas  trouver  ici  :  «  Les  contrais  consen- 
suels n'ont  besoin,  pour  être  efficaces,  que  du  seul  con- 
sentement, comme  d'un  vêtement  unique,  quia  calidiores 
sunt  cetcris  contractibus.  —  Alii  vero  contractus  siint  fri- 
gidi  et  non  adeo  favorabiles...  et  ideo  requirunt  duplkem 
vestetn...,  sicut  juvenes  quia  calidi  non  egent  tantis  vestibus 
siciit  senes.  » 

Il  est  dit,  au  titre  même,  que  le  professeur  suit  l'ordre 
légal.  On  ne  songeait  guère  alors  à  l'abandonner,  et  dans 
maint  pays  on  y  est  encore  assujetti  aujourd'hui  même. 

Chaque  livre  des  Instilutes  forme  un  Compendium  à 
part  et  est  désigné  comme  tel  au  commencement  et  à  la 
fin.  La  série  des  livres  est  parfois  simplifiée;  les  matières 
sont  exposées  librement  dans  les  divers  titres.  Ainsi,  au 
livre  III,  les  six  premiers  titres  sont  réunis;  quelques-uns, 
dénués  de  toute  valeur  pratique,  sont  négligés  (39).  Au 
titre  De  Legatis,  Heems  définit  le  legs  comme  Justinien, 
et  il  explique  la  définition,  en  montrant  en  particulier 
pourquoi  il  dit  défunt  et  non  testateur  (40).  Puis  il  fait  un 
petit  historique  des  legs  et  des  fidéicommis,  et  déclare 
que  toute  la  matière  des  legs  peut  s'expédier  par  trois 
questions  auxquelles  il  répond  d'une  façon  sommaire  :  Qui 


(39)  Première  rubrique  :  De  heredi.  que  ah  intest.  defe.  Cum  V  ti.  se. 
Puis  ;  De  gradibus  cognationum,  De  successione  libertorum,  De  bono- 
num  possessionibus ,  De  acquisilione  per  arrogationem ,  De  eo  cui  liber- 
tatum  causa  bona  adiiciuntur  (sic),  De  obligationibus,  etc.  Les  titres  : 
De  adsignatione  libertorum  et  De  successionibus  sublatis  sont  donc 
omis. 

(40)  Dicitur  a  defuncto  et  non  a  testatore  relicta,  quia  ut  supra 
proxime  dictum  fuit  legatum  etiam  relinqui  potest  ab  intestato  decedeute 
sicut  fideicommissum 

2"'*  SÉRIE,  TOME  XXXVllI.  41 


(  654  ) 
peut  léguer?  Que  peut-on  léguer?  A  qui  peut-on  léguer? 
Cependant  la  matière  n'est  pas  épuisée,  et  le  professeur 
ajoute  quelques  lignes  sur  les  modalités,  la  cause,  la 
démonstration,  l'erreur  dans  le  nom,  les  actions  qui  ser- 
vent à  faire  valoir  le  droit  au  legs.  Tout  le  titre  Des  Legs 
tient  un  peu  plus  de  trois  pages.  —  Au  titre  Des  Dona- 
tions, Heems  énumèreles  diverses  espèces  :  donation  pour 
cause  de  mort,  donations  entre  vifs,  donations  simples, 
donations  pour  cause  de  noces ,  dot,  largesse  de  fiançailles 
(41);  l'acquisition  par  droit  d'accroissement  est  passée 
sous  silence  (42). 


VIL 


On  a  pu  voir  que  si  notre  auteur  se  distingue  avanta- 
geusement de  ses  contemporains  par  la  simplicité  et  la 
brièveté  de  son  œuvre,  il  participe  cependant  à  quelques- 
uns  des  travers  de  son  époque.  Quoique  maître  es  arts 
libéraux,  il  ne  s'inquiète  guère  de  l'histoire  du  droit. 
Selon  lui,  la  loi  Falcidia  «  sic  dicta  est  a  falce  quia  ut  faix 
fenum  :  ita  hec  lex  falcidia  resecat  legata,y>  ou  encore, 
ajoute-t-il,  «  dicitur  falcidia  a  Falcidio  jurisconsulto  qui 
eam  introduxit.  »  Peut-être  la  première  explication  n'est- 
elle  qu'un  jeu  de  mots,  tel  que  les  Romains  les  affection- 
naient, propre  à  graver  dans  la  mémoire  la  chose  et  le 
nom.  Mais  voici  qui  est  plus  sérieux:  il  s'agit  de  l'édit  du 
préteur  :  «  Est  advertendum  quod  pretores  in  urbe  Ro- 
mana  habent  potestatem  condendi  jura  de  negociis  suam 


(41)  Si  sponsus  sponse  de  future  vel  e  contra  donet  aon  respecta  dotis 
jforte  anulum  vel  aliud  pulchrum  clinodium. 

(42)  Cf.  §  ult.  J.  De  donalionibus ,  II ,  7. 


(  655  ) 
iurisdictionem  concernentibus  :  ut  ecce  erant  pretores  edi- 
ticii  qui  gerebant  curam  de  domibus  ruinosis  in  civitate  : 
et  alii  habebant  curam  circa  carnes  emendas  et  vendendas  : 
et  alii  de  carnibus  morbosis.  Ista  iura  dicebantur  edicta 
pretorum....  Ista  edicta  describebantur  in  loco  qiiodam  albo 
et  eminenti  in  pallacio  pretoris  ut  quisque  illa  intueri  pos- 
sit...T>\\  est  vrai  que  VHistoire  d'Aymar  du  Rivail  n'a  paru 
que  deux  ans  après  l'impression  de  ces  hérésies.  Mais  les 
antiquités  romaines  comptaient  déjà  de  fervents  adeptes,  et 
cinq  années  s'étaient  écoulées  depuis  la  publication  des 
Adnotationes  in  Pandectas  de  Budé.  Les  preuves  que 
donne  Heems  de  sa  culture  littéraire  se  réduisent,  en 
somme,  à  fort  peu  de  chose  :  il  ciie  une  fois  un  vers  de 
Lucain  (4.3). 

Il  n'est  pas  non  plus  exempt  d'erreurs  dans  la  matière 
même  du  droit.  J'en  donnerai  pour  exemple  sa  façon  de 
comprendre  les  actions  préjudicielles;  ce  sont,  pour  lui, 
des  actions  dans  lesquelles  «  de  niafjno  prejudlcio  agitur.  » 
«  En  effet,  dit-il,  si  l'homme  libre  est  déclaré  esclave,  il 
en  résulte  un  grand  préjudice  pour  lui;  de  même  pour 
qui  est  déclaré  fds  de  famille,  puisque  le  père  peut  le  con- 
traindre, voire  même  le  vendre...  » 

C'est  une  bévue  sans  doute.  On  peut  nommer  tels  ou- 


(45)  Au  titre  :  De  Rerum  divisione,  II,  1,  au  §  10.  Il  s'agit  des  choses 
saintes,  en  particulier  des  murs  de  ville  :  El  dicitnr  deiinquere  in  muros 
civitatis  qui  transceudit  vel  rumpit  muros  civilatis  :  aut  onus  aliquod 
superimponit.  Itaque  Rhemus  frater  Romuli  occisus  Iraditur  ob  id  quod 
muros  Romane  civitatis  transcendere  voluit  et  conalus  fuit  licethoc  non 
perfecit.  luxla  illud  Lucani  :  fratcrno  primi  madcurunl  sanguine  mûri. 
Nam  affectus  cum  conamine  etiam  sine  efTeclu  principali  punitur  in  atro- 
cioribus  delictis.  —  V.  Pomponius,  L.  fin.  au  Digeste  De  D.  R.  I,  8. 


(  636  ) 
vrages  plus  ou   moins  destinés  aux  étudiants,  plus  ou 
moins  élémentaires,  de  notre  dix-neuvième  siècle,  qui  en 
contiennent  de  non  moins  grosses. 


VIII. 


On  voit  par  ce  qui  précède,  que  je  ne  prétends  point 
classer  Nicolas  de  Bruxelles  parmi  les  Précurseurs  et 
Initiateurs ,  avec  ^Egidius  et  Everardi  (44).  Il  ne  mérite 
cependant  pas  d'être  confondu  avec  les  sectateurs  routiniers 
de  la  vieille  école.  Sa  place  est  intermédiaire.  Moins  ac- 
compli, moins  moderne  que  ses  deux  illustres  contempo- 
rains et  compatriotes,  moins  lettré  que  l'ami  d'Érasme  et 
de  Morus,  moins  puissant  de  pensée  que  le  président  de 
Malines,  il  les  a  devancés  dans  la  publicité  scientifique  (45), 
et  si  son  œuvre  n'est  ni  un  fruit  ni  même  une  fleur  de  la 
science  renouvelée,  elle  est  du  moins  à  peu  près  exempte 
des  vices  principaux  et  du  mauvais  goût  de  la  science  an- 
cienne. Et  d'ailleurs ,  quelle  était  à  ce  moment  la  littéra- 
ture juridique  des  autres  pays?  J'ai  parlé  déjà  de  Guillaume 
Budé  et  d'Aymar  du  Bivail  ;  Alciat  faisait  ses  premiers 
débuts; Chansonnette  était  sur  les  bancs  de  l'école;  Zasius, 
dans  la  force  de  l'âge  et  de  l'activité,  n'avait  point  donné 
de  gages  matériels  et  publics  à  la  jurisprudence  élégante. 
Partout  l'on  rééditait  les  gros  livres  des  Docteurs  du  moyen 


(44)  Voir  mon  Introduction  historique  au  droit  romain,  §  217. 
Hugo  dans  son  Histoire  littéraire,   Keller,  dans  son  petit  programme 

du  com's  d'Encyclopédie,  paraissent  rattacher  Heems  à  l'école  moderne. 

(45)  Ce  qu'^GiDius  avait  publié  jusqu'alors  était  purement  littéraire  : 
Politienen  1510,  Agricola  en  1311.  En  1313,  il  conlribua  à  l'Ésope. 


(637) 

âge  (46),  el  longtemps  encore  on  devait  répéter:  Barlo- 
lista  optimus  jurista.  jNicolas  Heems  était  un  bon  juriste, 
un  professeur  aimé  et  habile;  clans  son  petit  cours  parti- 
culier, il  se  montre  assez  émancipé  de  la  tradition  de  Balde 
et  de  Bariole;  on  peut  ajouter  enfin  qu'il  était  de  Bruxelles, 
où  les  auteurs  de  droit  n'ont  guère  été  nombreux  (47). 
Tout  cela  lui  constitue  une  personnalité.  Sans  exagérer 
son  importance,  nous  devons  conserver  son  souvenir. 


(46)  Le  XVI<"  siècle  et  même  le  XVIP  ont  continué  de  s'en  nourrir.  En 
fait  d'Institutes  (et  j'en  omets  sans  doute),  je  vois  des  éditions  de  Belle- 
PERCiiE  de  151-3  et  de  laôG;  de  Jean  Faber  de  1515  (par  Descocsl),  loôl 
(Jean  des  Degrez),  1546,  1509,  1372,  1375,  1395  (Airebaudolze)  ,  1645; 
de  Balde  de  1315, 1338, 1373;  deSpisELLi,  1318;  de  Jeam  dePlatea,  1307, 
1516, 1339;  de  Christophe  PoRcics,  1348,  1550,  1363,1378,  1380;d'AxGE 
Aretin,  1315, 1557,  1340,  1330,  1337, 1568,  1376,  1580,  1386, 1394, 
1609.  Vervoort  a  été  réédité  en  1342,  el  Birabadm  en  1601. 

(47)  Si  l'on  veut  s'en  tenir  à  ceux  qui  ont  acquis  quelque  notoriété  dans 
la  sc/ence  proprement  dite  du  £/ro(7,  en  écartant  les  écrivains  politiques 
et  économiques,  on  peut  compter  une  quinzaine  d'auteurs  bruxellois  dans 
l'espace  de  quatre  siècles:  Van  Uffele,  Baert,  Lambreghts,  Van  t'Sestich, 
Vander  Perre,  François  Kinschot,  Huygens,  Hony,  Loovens,  les  Christyn, 
les  Wynants,  et  deux  ou  trois  dans  notre  siècle.  Je  ne  parle  que  des 
morts.  Mais  parmi  ceux  que  j'ai  nommés,  il  en  est  de  valeur  bien  médiocre. 


(  638  ) 


CLASSE  DES   BEAUX-ARTS. 


Séance  du  o  novembre  187 â. 

M.  N.  De  Keyser,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin  ,  G.  Geefs,  J.  Geefs,  Fer- 
dinand De  Braekeleer,  C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Alph. 
Balat,  Auguste  Payen,  le  chevalier  Léon  de  Burbure, 
J.  Franck,  G.  De  Man,  Ad.  Siret,  Julien  Leclercq,  Ernest 
Slingeneyer,  Alexandre  Robert,  F.-A.  Gevaert,  Adolphe 
Samuel ,  membres. 

MM.  Chalon,  directeur  de  la  classe  des  lettres,  et  Charles 
Montigny,  membre  de  la  classe  des  sciences,  assistent  à  la 
séance. 


CORRESPONDANCE. 

M.  César  Daly,  associé  de  la  classe,  fait  exprimer  par 
écrit  ses  remercîments  pour  l'envoi  des  dernières  publica- 
tions académiques. 

—  M.  Victor  W.  Bâtes  Van  De  Weyer  fils,  sollicité  de 
faire  des  recherches  dans  les  papiers  de  son  père,  pour 
savoir  s'il  y  existe  des  documents  relatifs  aux  notices  sur 


(  639  ) 
MM.  Van  Meenen  et  Baron ,  dont  M.  Van  De  Weyer  s'était 
chargé  dans  le  temps,  répond  qu'il  s'occ'upera  de  ce  soin 
dès  que  les  circonstances  le  permettront. 


PROGRAMME  DE  CONCOURS  POUR  1875. 


La  classe  adopte  les  trois  questions  suivantes  pour  les 
sujets  littéraires  de  son  programme  de  concours  de  l'an- 
née 1875. 

PREMIÈRE    QUESTION. 

Faire  l'histoire  de  la  sculpture  en  Belgique  aux  XV W'  et 
XVIH"''  siècles. 

DEUXIÈME    QUESTION. 

Faire  Vhistoire  et  la  bibliographie  de  la  typographie 
musicale  dans  les  Paga-Bas,  et  spécialement  dans  les  pro- 
vinces qui  composent  aujourd'hui  la  Belgique. 

TROISIÈME    QUESTION. 

Faire  l'histoire  de  l'école  de  gravure  sous  Rubens. 

On  demande  un  aperçu  historique  sur  les  éditeurs  des 
produits  de  cette  école  et  sur  l'exploitation  commerciale 
contemporaine  qui  fut  faite  de  ces  gravures  dans  tous  les 
pays. 

La  valeur  des  médailles  d'or,  présentées  comme  prix 
pour  chacune  de  ces  questions,  est  de  mille  francs  pour 
la  première,  de  huit  cents  francs  pour  la  seconde  et  de  six 
cents  francs  pour  la  troisième. 


(  640  ) 

Les  mémoires  envoyés  en  réponse  à  ces  questions  doivent 
être  lisiblement  écrits  et  peuvent  être  rédigés  en  français, 
en  flamand  ou  en  lalin.  Ils  devront  être  adressés,  francs 
de  port,  au  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie,  avant  le 
l"juin  1875. 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leur  nom  à  leur  ouvrage; 
ils  n'y  inscriront  qu'une  devise,  qu'ils  reproduiront  dans 
un  billet  cacheté  renfermant  leur  nom  et  leur  adresse. 
Faute  par  eux  de  satisfaire  à  cette  formalité ,  le  prix  ne 
pourra  leur  être  accordé. 

Les  ouvrages  remis  après  le  terme  prescrit  ou  ceux  dont 
les  auteurs  se  feront  connaître,  de  quelque  manière  que  ce 
soit,  seront  exclus  du  concours. 

L'Académie  demande  la  plus  grande  exactitude  dans  les 
citations;  elle  exige,  à  cet  effet,  que  les  concurrents  indi- 
quent les  éditions  et  les  pages  des  ouvrages  qui  seront 
mentionnés  dans  les  travaux  présentés  à  son  jugement. 

Les  planches  manuscrites  seules  seront  admises. 

L'Académie  se  réserve  le  droit  de  publier  les  travaux 
couronnés. 

Les  auteurs  des  mémoires  insérés  dans  les  recueils  ont 
droit  à  recevoir  cent  exemplaires  de  leur  travail.  Ils  ont,  en 
outre,  la  faculté  de  faire  tirer  des  exemplaires  supplémen- 
taires en  payant  à  l'imprimeur  une  indemnité  de  quatre 
centimes  par  feuille. 

L'Académie  croit  devoir  rappeler  aux  concurrents  que 
les  manuscrits  des  mémoires  soumis  à  son  jugement  restent 
déposés  dans  ses  archives  comme  étant  devenus  sa  pro- 
priété. Toutefois,  les  auteurs  peuvent  en  faire  prendre  des 
copies  à  leurs  frais ,  en  s'adressant,  à  cet  effet,  au  secrétaire 
perpétuel. 


(  641  ) 

—  Les  deux  sujets  d'art  appliqué  suivants  formeront 
la  seconde  partie  du  programme  pour  1873. 

SCULPTURE. 

On  demande  im  bas-relief  pour  une  frise  placé  à  S'^OO 
d'élévation  el  ayant  pour  sujet  /'horticulture  person- 
nifiée. 

Les  dimensions  de  l'épreuve  devront  être  de  l'"60  de 
longueur  sur  O^SO  de  hauteur. 

L'Académie  demande  que  les  concurrents  lui  présentent 
un  travail  complètement  achevé. 

Un  prix  de  mille  francs  sera  décerné  à  l'auteur  de  l'œuvre 
couronnée.  Une  reproduction  graphique  de  celle-ci  devra 
rester  à  l'Académie.  Les  sujets  destinés  au  concours  de- 
vront être  remis  au  secrétariat  de  l'Académie  avant  le 
1"  septembre  1875. 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leur  nom  à  leur  ouvrage; 
ils  n'y  inscriront  qu'une  devise,  qu'ils  reproduiront  dans 
un  billet  cacheté  renfermant  leur  nom  et  leur  adresse. 
Faute  par  eux  de  satisfaire  à  celte  formalité,  le  prix  ne 
pourra  leur  être  accordé. 

Les  ouvrages  remis  après  le  temps  prescrit,  ou  ceux  dont 
les  auteurs  se  feront  connaître,  de  quelque  manière  que  ce 
soit,  seront  exclus  du  concours. 

GRAVURE   EM  IIIÉnAILLES. 

Un  prix  de  six  cents  francs  sera  accordé  à  la  meilleure 
médaille  exécutée  par  un  artiste  belge  depuis  le  l"'  jan- 
vier 1872. 


(  642  ) 
—  La  classe  accepte,  pour  le  concours  de  1876,  les  deux 
questions  littéraires  suivantes  : 

PREMIÈRE  QUESTION. 

Rechercher  les  origines  de  l'école  musicale  belge.  Démon- 
trer jusqu'à  quel  point  les  plus  anciens  maîtres  de  cette 
école  se  rattachent  aux  déchanteurs  français  et  anglais  du 
Xir%  du  Xlir  et  du  XIV""'  siècle 

Un  prix  de  mille  francs  sera  attribué  à  la  solution  de 
cette  question. 

DEUXIÈME    QUESTION. 

Faire  l'histoire  de  la  céramique  au  point  de  vue  de  l'art, 
dans  nos  provinces,  depuis  l'époque  romaine  jusqu'au 
XVIII""  siècle. 

Un  prix  de  huit  cents  francs  sera  attribué  à  la  solution 
de  cette  question. 

Le  terme  fatal  pour  la  remise  des  mémoires  expirera 
le  1"  juin  1876. 

—  La  classe  se  constitue  en  comité  secret  pour  s'occuper 
des  présentations  de  candidatures  aux  places  vacantes. 


(  645  ) 


OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 


Commission  royale  d'histoire.  —  Compte  rendu  des  séances, 
4«  série,  tome  2%  IIP  Bulletin.  Bruxelles,  1874;  cah.  in-S"  ; 
—  Table  chronologique  des  chartes  et  diplômes  im[)rimés 
concernantlhistoirede  la  Belgique,  par  Alph.Wauters,  tome  IV, 
(4226-I2oO).  Bruxelles,  1874;  vol.  in-4». 

Commission  pour  la  publication  d'une  collection  des  œuvres 
des  grands  écrivains  du  pays.  —  Li  rouraans  de  Berthe  aus 
grans  pies  par  Adenés  li  Rois,  publié  par  M.  Aug.  Scheler. 
Bruxelles,  1874;  vol.  in-8°. 

IVolet  de  Brauwere  van  Sleeland  (D*"  J.).  —  Nederlandsch 
contra  Westvlaamsche  laal-parlicularisterij.  Anvers,  1874;  br. 
in-8°. 

Crépin  {François).  —  Matériaux  pour  servira  l'histoire  des 
roses,  II"  fascicule.  Gand,  1872;  broch.  in-8". 

Bonnewyn  {H.).  —  Observations  sur  la  digitaline  cristal- 
lisée. Bruxelles,  1874;  broch.  in-S". 

Dierckx  [F.).  —  Recueil  de  pensées  pédagogiques.  Bruxelles, 
4874;  vol.  in -12. 

Van  Hollebeke.  —  Choix  de  poètes  belges.  Bruxelles,  1874; 
vol.  in-8". 

Actes  de  la  Conférence  de  Bruxelles.  Bruxelles,  1874;  vol. 
gr.  in-4''.  (Deux  exemplaires.) 

Commission  royale  des  anciennes  lois  et  ordonnances  de  la 
Belgique.  —  Coutumes  de  Namur  et  coutume  de  Philippe- 
ville,  par  J.  Grandgagnage,  tome  second.  Bruxelles,  1874; 
vol.  in-4».  (Deux  exemplaires.  Envoi  de  M.  le  Ministre  de  la 
justice.) 

Commissions  royales  d'art  et  d'archéologie.  —  Bulletin, 
Xlli""'  année,  1874,  n"'  7  et  8.  Bruxelles  ;  cah.  in-S". 


(  644  ) 

Association  belge  de  photographie,  à  Bruxelles.  —  Bulletin , 
n"'  i,  2  et  3,  première  année,  i874.  Bruxelles;  3  cali.  in-8». 

Fédération  médicale  belge.  —  X™'  anniversaire.  Compte 
rendu  de  l'assemblée  générale  et  annuelle  du  22  septembre 
4874.  Bruxelles,  1874;  broeb.  in-8°.  (Deux  exemplaires.) 

Annules  des  travaux  publics  de  Belgique,  toraeXXXlI, 
premier cabier.  Bruxelles,  1874;  in-8°. 

Archives  communales  d'Anvers.  —  Bulletin,  tome  VI, 
3''  livr.  Anvers;  cah.  in-S". 

Willems-Fonds  te  Gent.  —  Uilgave,  n"  79.  Filips  van 
Marnix  van  Sint  Aldegonde,  door  J.  Van  der  Hâve.  Gand,  1874; 
in-8''. 

Société  géologique  de  Belgique,  à  Liège.  —  Annales,  tome 
premier,  1874:  Bulletin,  pages  1  à  LXVIII;  Mémoires,  pages  1 
à  C8;  Bibliograpbie,  pages  1  à  24.  Liège,  1874;  in-8". 

Société  des  sciences ,  des  arts  et  des  lettres  du  f/ainaut ,  à 
Mons.  —  Mémoires  et  publications,  111*  série,  tome  9^  Mons, 
4874;  vol.  in-8°. 

Institut  royal  grand-ducal  de  Luxembourg.  —  Publications 
de  la  section  bistorique,  année  1873,  vol.  VI.  Luxembourg, 
1874;  vol.  in-4". 

Chantre  [Ernest).  —  Projet  d'une  légende  internationale 
pour  les  cartes  arcbéologiques  préhistoriques;  —  Les  faunes 
mammalogiques  tertiaire  et  quaternaire  du  bassin  du  Rhône. 
Lyon,  1874;  broch.  gr.  in-8°  et  broch.  pet.  in-8''. 

Hugo  {le  C"  Léopold).  —  La  question  de  l'équidomoïde  et 
des  cristalloïdes  géométriques,  Paris,  1875;  broch.  in-8°. 
(Deux  exemplaires.) 

Société  d'anthropologie  de  Paris.  —  Bulletins,  IP  série, 
tome  IX,  2''  fascicule,  février  à  avril  1874.  Paris;  in-8°. 

Société  des  sciences  physiques  et  naturelles  de  Bordeaux.  — 
Extrait  des  procès-verbaux  des  séances;  —  Statuts  et  règle- 
ment intérieur;  —  Catalogue  de  la  Bibliothèque.  Bordeaux, 
1874;  br.  et  feuille  in-8°. 


(  645  ) 

Société  d'agriculture,  sciences  et  arts  de  Douai.  —  Bulletin 
agricole,  année  1875,  n°  \.  Douai;  cah.  in-S". 

Société  linnéemie  de  Lyon. —  Annales,  année  1873,  nouvelle 
série,  t.  XX.  Lyon,  1874;  vol.  in-8°. 

Académie  des  sciences,  belles-lettres  et  arts  de  Lyon.  — 
Mémoires  :  classe  des  sciences,  t.  XX,  1873-1874;  classe  des 
lettres,  t.  XV,  1870-1874.  Lyon  ;  2  vol.  in-8<'. 

Société  d'agriculture,  histoire  tiaturelle  et  arts  utiles  de 
Lyon.  — Annales,  quatrième  série:  t.  IV,  1871;  t.  V,  1872, 
avec  atlas.  Lyon,  1872-1873;  2  vol.  in-8°  et  atlas  in-fol. 

Société  météorologique  de  France,  à  Paris.  —  Nouvelles 
météorologiques,  7'' année ,  1874  (l'"  liv.,  décembre  1873- 
raars  1874).  Paris;  cah.  gr.  in-8°. 

Société  des  études  historiques,  Paris.  —  L'Investigateur, 
40^  année,  liv.  d'août,  septembre  et  octobre  1874.  Paris;  cah. 
in-8°. 

Académie  de  Stanislas,  à  Nancy.  —  Mémoires,  1873, 
CXXIV"  année,  4"=  série ,  tome  VI.  Nancy,  1874;  vol.  in-8». 

Bôhm  (/)'■  Const.  Elder  von).  —  Die  Handschriften  des  k. 
und  k.  Ilaus,  Hof-und  Staats-Archivs,mit  Supplément.  Vienne, 
1873-1874;  2  vol.  in-8''. 

Yereiti  fur  Erdkunde,  zu  Dresden.  —  XI.  Jahresbericht. 
Dresde,  1874;  cah.  in-8°. 

Neue  zoologische  Gesellschaft,  in  Frankfurt  a.jM.  —  Der 
zoologische  Garten,  XV.  Jahrg.,  Januar-Juni  1874,  n"  1  bis  6. 
Francfort  S./M.,  1874;  6  cah.  in-S». 

Universii^t,  Freiburg  im  Breisgaii.  —  Programme  et  Dis- 
sertations. 1  broch.  10-4"  et  14  broch.  in-S". 

Naturforschende  Gesellschaft  zu  Freiburg  in  Breisgau.  — 
Berichte  iiber  die  Verhandiungen  ,  Bd.  VI.,  Heft  II  und  III. 
Fribourg  en  Brisgau,  1873;  2  cah.  in-8''. 

Medicinisch-naturioissenschaftliche  Gesellschaft  zu  Jena. 
—  Jenaische  Zeitschrift  fur  Na  turwissenschaft,  VIII.  Bd.,  3.  Heft. 
lena,  1874;  cah.  in-8''. 


(  646  ) 

K.  Alhertus-Universitdt  zii  Kônigsberg.  —  Verzeichniss  an 
Index  Lectionum,  1874.  Kônigsberg;  "2  broeh.  in-4". 

Entomologischer  Verein  zu  Stettin.  —  Entomologische  Zei- 
tung,  35.Jahrg.,  n"'  7-9,  Juli-September  1874.  Stettin,  1874; 
cah.  in-8°. 

K.  Akademie  der  Wissenschaften  in  Wien.  —  Sitzung  der 
math.-naturw.  Classe,  Jahrg.  1 874,  n°  XXIV  bis  XXVI.  Vienne, 
1874;  feuil.  in-8°. 

Société  impériale  des  naturalistes  de  Moscou.  —  Bulletin, 
année  4874,  n°  I.  Moscou;  cah.  in-8°. 

Société  chimique  de  Saint-Pétersbourg.  —  Journal,  t.  VI, 
n°  8.  Saint-Pétersbourg,  1874;  cah.  in-8°.  (En  russe.) 

Nordiskt  medicinskt  arkiv,  sjctte  Bandet,  tredge  Hâftet. 
Stockholm,  1874;  cah.  in-8°. 

Naturforschende  Gesellschaft  in  Bern.  —  Mittheilungen 
aus  dem  Jahre  1873,  n'  812-827.  Berne,  1874;  vol.  in-8". 

Schweizerische  naturforschende  Gesellschaft  in  Schaff- 
haiisen.  —  Vcrhandlungen,  Jahresbericht  1872-1875.  Schaff- 
house,  1874;  vol.  in-8°. 

Luvini  [Giovanni).  —  Del  Dieteroscopio.  Seconda  communi- 
cazione.  Turin,  1874;  br.  in-8''. 

Accademia  délie  scienze  delV  Istituto  di  Bologna.  —  Me- 
morie,  série  III  :  tonio  III ,  fascicolo  5-4;  tomo  IV,  fasc.  1-4; 
—  Rendiconto,  annoaccademico  1875-1874.  Bologne,  1874; 
5  cah.  in-4"  et  1  cah.  in-8''. 

Regia  accademia  di  scienze  ,  lettere  ed  arti  in  3Iodena.  — 
Meraorie,  tomo  XIV.  Modène ,  1874;  vol.  in-4°;  —  Délia 
istituzione  del  giuri  in  Italia  (Memoria  del  cav.  Andréa  Ga- 
lassi).  Modène,  1875  ;  vol.  in-8°. 

A7ithropological  Instilute  of  Great  Britain  and  Ireland.  — 
Journal,  vol.  III,  n"  III,  january,  1874.  Londres;  cah.  in-8". 

Institution  of  civil  E?igineers  ut  London.  —  Minutes  of 
proceedings,  vol.  XXXVII  and  XXXVIII.  Londres,  1874;  2  vol. 
in-8°. 


(  647  ) 

Royal  Institution  of  Great  Britain,  LomJon.  —  Procee- 
dings ,  vol.  VII,  pts.  III  and  IV,  n°'  GO  and  61.  Londres, 
d874;2cah.  in-S". 

Royal  geographical  Society,  London.  —  Proceedings, 
vol.  XVIII,  n"'  IV  et  V.  Londres,  1874;  2  cah.  in-8". 

British  meteorological  Society,  London.  —  Proceedings, 
vol.  I,  n°'  1  à  4.  Londres,  1 862  ;  4  cah.  in-8°. —  Quarterly  Jour- 
nal, July,  1874.  Londres,  1874;  cah.  in-8°. 

Chemical  Society  of  London.  —  Journal ,  ser.  2 ,  vol.  XII , 
may,  june  and  july  1874.  Londres;  3  cah.  in-8". 

Geological Society  oj London. —  Quarterly  Journal,  vol.  XXX, 
pt.  0,  n"  119,  August ,  1874.  Londres;  cah.  in-S" 

Linnean  Society  of  London.  —  Transactions  :  vol.  XXVIII, 
pt.  IV,  1875;  vol.  XXX,  pt.  I,  1874;—  Journal  :  Zoology, 
voLXI,  n-'So  and  54,1871;  vol. XII,  n"  57, 1874; —  Botany, 
vol.  XIII,  n-  66  and  67,  1872;  vol.  XIV,  n°»75at76,  1875- 
1874;  —  List  of  the  Linnean  Society;  — Additions  to  the 
Library.  Londres;  2  cah.  in-4''  et  11  cah.  in-8°. 

Numismatic  Society  of  London.  —  Journal,  1874,  pt.  III. 
Londres;  cah.  in-8°. 

Society  of  antiquaries  of  London.  —  Proceedings,  second 
séries,  vol.  VI,  n"'  II  and  III.  Londres;  1874,  2  cah.  in-8°. 

Royal  Irish  Academy  of  Dublin.  —  Transactions  :  Anli- 
quities,  vol.  XXIV,  pt. IX;  Science,  vol.  XXV,  pts.  IV  at  IX;  — 
Proceedings,  vol.  I,  série  II,  n"'  \  and  7  at  10.  Dublin,  1873- 
1874;  7  cah.  in-4''  et  5  cah.  in-8°. 

.Royal  geological  Society  of  Ireland,  Dublin.  —  Journal, 
new  séries,  vol.  XIII,  pt.  2,  1871-1872.  Dublin,  1872;  cah. 
in-8°. 

Edinburgh  geological  Society.  —  Transactions,  vol.  II, 
pt.  m.  Edimbourg,  1874;  cah.  in-8°. 

Geological  Society  of  Glasgow.  —  Transactions,  vol.  IV, 
part  III.  Glasgow ,  1 874  ;  cah.  in-8». 


(  648  ) 

Asiatic  Society  of  Bengal  at  Calcutta. —  Journal,  new 
séries,  vol.  XLIli,  n»  189,  pt.  I,  n"  II,  1874.  —  Proceedings, 
n"'  VI  and  VII ,  june  and  july  1 874;  —  Bibliotheca  Indica  ,  new 
séries,  n"^  292,  502-505,  507  and  512.  Calcutta,  1874;  cah. 
in-i"  et  5  cah.  in-S". 

Geological  survey  of  Canada,  at  Montréal.  — Rapport  des 
opérations  pour  1872-1875.  Montréal,  1873;  vol,  in-8". 


n  nn) 

BULLETIN 


OE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 

DES 

LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIQUE. 
1874. —N°  12. 


CLASSE   DES    SCIEUCES. 


Séance  du  5  décembre  1874. 

M.  E.  Candèze,  directeur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van  Beneden, 
Edm.  de  Selys  Longchamps,  H.  Nyst,  Gluge,  Melsens, 
F.  Duprez,  G.  Dewalque,  E,  Quetelet,  H.  Maus,  M.  Gloe- 
sener,  F.  Donny,  Ch.  Montigny,  Steichen,  Éd.  Dupont, 
Éd.  Morren,  Éd.  Van  Beneden,  C.  Malaise,  membres; 
Th.  Schwann,  E.  Catalan,  Auguste  Beilynck,  associés; 
Éd.  Mailly,  H.  Valérius,  F.  Plateau,  Joseph  De  Tilly, 
V.-L.  CovnQi^  correspondants. 

S"*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  42 


(  650  ) 


CORRESPONDANCE. 


M.  J.  d'Omalius  écrit  pour  remercier  ses  confrères  des 
sentiments  de  bienveillance  et  d'intérêt  qui  lui  ont  été  ex- 
primés par  M.  le  secrétaire  perpétuel  au  sujet  de  son  étal 
de  santé.  M.  le  directeur  annonce,  à  cette  occasion,  que 
M.  d'Omalius  est  de  retour  à  Bruxelles  et  pourra,  selon 
toute  probabilité,  assister  aux  prochaines  séances. 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  transmet  une  amplia- 
tion  d'un  arrêté  royal  du  24  novembre  dernier,  nommant 
président  de  l'Académie,  pour  1875,  M.  A.  Brialmont, 
directeur  de  la  classe  des  sciences  pour  la  même  année. 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  communique  une  ex- 
pédition d'un  arrêté  royal  du  même  jour,  qui  décerne  à 
M.  Gloesener  le  prix  quinquennal  des  sciences  mathéma- 
tiques et  physiques  pour  la  période  de  1869-1873. 

—  M.  le  D"^  Burggraeve,  de  Gand,  adresse  une  liste 
provisoire  de  souscription  pour  l'ouvrage  qu'il  se  propose 
de  publier  sous  le  titre  de  :  Monument  à  Jenner. 

—  MM.  les  questeurs  du  Sénat  et  de  la  Chambre  des 
représentants  envoient  des  cartes  de  tribune  réservée  pour 
la  session  législative  1874-1875.  —  Remercîments. 

—  M.  le  professeur  Cavalier  adresse  le  résumé  de  ses 
observations  météorologiques  faites  à  Ostende  pendant  le 
mois  de  novembre  1874. 


(  651  ) 

—  M.  Edouard  Morren  fait  hommage  des  oiivragos  sui- 
vants qu'il  vient  de  publier  : 

Liste  des  jardins,  des  chaires  et  des  musées  botaniques 
du  monde,  2"  édition  ;  in-8°. 

La  Botanique  au  pays  de  Liège;  in-S"; 

?(iote  sur  la  joubarbe  d'Aywaille  {Sempervirum  Funckii 
car.  Aqualiense);  in-8". 

Il  présente,  en  même  temps,  l'année  1875  du  Bulletin 
de  la  fédération  des  Sociétés  d'horticulture  de  Belgique; 
1  vol.  in-8^ 

M.  Ernest  Candèze  offre  les  travaux  suivants  de  sa  com- 
position : 

Révision  de  la  monographie  des  Élatérides,  1"  fasci- 
cule; in-8°; 

Insectes  recueillis  au  Japon  par  M.  G.  Lewis  ,  pendant 
les  années  1869-181 1.  Élatérides.  In-8"; 

Le  Scénographe,  appareil  photographique  de  poche. 
In-8°. 

La  classe  vote  des  remercîmenls  à  MM.  Morren  et  Can- 
dèze pour  ces  dons. 

—  M.  G. -A.  iîirn,  associé,  au  Logelbach  (Alsace),  la 
Société  des  sciences  physiques  et  naturelles  de  Bordeaux , 
l'Université  de  Bonn,  la  Société  helvétique  des  sciences 
naturelles  à  Berne,  la  Société  linnéenne  et  l'Institut  an- 
thropologique de  la  Grande-Bretagne  et  de  l'Irlande,  à 
Londres,  remercient  pour  le  dernier  envoi  de  publica- 
tions académiques. 

—  La  classe  a  reçu,  depuis  sa  dernière  séance,  les  publi- 
cations de  la  Société  géologique  de  Belgique;  de  la  Société 
d'agriculture  de  Lyon;  de  l'Académie  des  sciences  et  belles- 


(  652  ) 
lettres  et  la  Société  linnéenne  de  la  même  ville;  de  la 
Société  d'Émulation  du  Doubs,  à  Besançon;  de  l'Académie 
de  Stanislas  à  Nancy  ;  de  l'Académie  impériale  des  sciences 
de  Vienne;  de  l'Université  de  Fribourg  en  Brisgau  et  de  la 
Société  des  sciences  naturelles  de  la  même  ville;  de  la 
Société  de  géographie  de  Dresde  ;  de  la  Société  de  méde- 
cine d'Iéna;  de  la  Société  zoologique  de  Francfort  s/M;  de 
la  Société  entomologique  de  Stettin;  de  la  Société  helvé- 
tique des  sciences  nouvelles  de  Berne;  de  l'Académie  des 
sciences  de  l'Institut  de  Bologne  et  de  celle  de  Modène; 
de  l'Institut  anthropologique  de  la  Grande-Bretagne;  de 
l'Institution  royale  et  de  celle  des  ingénieurs  civils  de 
Londres;  des  Sociétés  géologiques  de  Londres,  Dublin, 
Glasgow  et  d'Edimbourg;  des  Sociétés  de  géographie,  de 
chimie  et  de  météorologie  de  Londres;  de  l'Académie  royale 
d'Irlande  à  Dublin;  de  la  Société  asiatique  du  Bengale  et 
de  la  Société  impériale  des  naturalistes  de  Moscou. 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  sont  renvoyés  à 
l'examen  de  commissaires  : 

\°  De  la  constitution  physique  des  cotnètes,  par  M.  J.  Vi- 
vier. —  Commissaires  :  MM.  E.  Quetelet  et  J.  Liagre; 

2°  Note  sur  les  gisements  de  phosphates  en  Belgique  et 
particulièrement  sur  celui  de  Ciply  ;  par  M.  A.  Petermann, 
directeur  de  la  station  agricole  de  Gembloux.  —  Commis- 
saires :  MM.  Melsens,  Donny  et  Briart; 

5"  Recherches  sur  la  composition  de  l'acide  humique 
naturel,  son  intervention  dans  la  nutrition  des  plantes  et 
sa  combinaison  avec  les  matières  minérales,  par  M.  E.  Si- 
mon,  à  Gembloux.  —  Commissaires  :  MM.  Melsens,  de 
Koninck  et  Donny  ; 

4°  Recherches  sur  la  structure  de  la  corde  dorsale  de 


(  653  ) 

VAmphioxus,  avec  une  planche,  par  M.  Camille  Moreau, 
élève  au  doctorat  en  sciences  naturelles  à  l'université  de 
Liège,  —  Commissaires  :  MM.  Edouard  Van  Beneden  et 
Schwann. 


ÉLECTIONS. 

La  classe  procède  au  renouvellement  de  sa  commission 
spéciale  des  finances  pour  l'année  1875.  Elle  porte  ses 
suffrages  sur  MM.  GInge,  Nyst  et  P.-J.  Van  Beneden, 
membres  sortants,  et  sur  MM.  Monligny  et  Maus,  élus  en 
remplacement  de  M.  le  vicomte  Du  Bus,  décédé,  et  de 
M.  Liagre,  nommé  secrétaire  perpétuel. 


BAPPORTS. 


MM.  Éd.  Morren  ,  Â.Bellynck  et  Éd.  Van  Beneden  don- 
nent lecture  de  leurs  rapports  sur  le  mémoire  de  concours 
portant  comme  devise  :  Pour  trouver  la  preuve  qu'un  or- 
ganisme est  un  degré  de  développement  ou  un  produit  du 
développement  d'un  autre  organisme,  etc.,  envoyé  en  ré- 
ponse à  la  question  du  polymorphisme  des  champignons. 

La  classe  prendra  une  décision  sur  les  conclusions  de 
ces  rapports  dans  sa  prochaine  réunion,  spécialement  des- 
tinée au  jugement  des  concours. 


f  654  ) 
COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Sur  la  température  de  combustion  des  combustibles  ordi- 
naires, brûlés  à  l'air  libre;  par  M.  H.  Valérius,  corres- 
pondant de  l'Académie. 

On  a  cru,  pendant  longtemps,  que  lorsqu'on  mettait  un 
combustible  en  contact  avec  le  volume  d'oxygène  néces- 
saire à  une  combustion  complète,  ces  corps  se  combi- 
naient, dans  les  conditions  voulues,  en  une  fois  et  en 
totalité.  On  pouvait  alors  facilement  déterminer,  par  le 
calcul,  la  température  développée.  Il  suffisait,  à  cet  effet, 
de  diviser  la  puissance  calorifique  du  combustible  par  le 
nombre  de  calories  qu'exigent  les  produits  de  la  combus- 
tion, pour  éprouver  une  élévation  de  température  d'un 
degré.  Mais  on  arrivait  ainsi  à  des  températures  de  beau- 
coup supérieures  à  celles  qu'on  produit  en  réalité.  C'est 
ainsi,  par  exemple,  que,  pour  le  carbone,  brûlé  avec  le 
volume  d'air  strictement  nécessaire  à  la  combustion,  on 
obtenait  une  température  de  combustion  de  ^TâO^C. 

La  cause  de  la  différence  entre  les  résultats  de  la  théorie 
et  ceux  de  la  pratique  est  restée  inconnue  jusqu'au  mo- 
ment de  la  découverte,  par  M.  H.  Sainte-Claire-Deville, 
du  phénomène  de  la  dissociation  des  corps  composés 
portés  à  de  hautes  températures  (*).  En  ayant  égard  à  ce 


(*)  Voy.  Saiiile-Claire-Deville,  Leçons  de  la  Société  chimique,  Paris, 
Hachelte,  18G6,  el  Compte  rendu  des  séances  de  r Académie  des  sciences 
de  Paris,  i 4  janvier  1867,  p.  66. 


(  655  ) 

phénomène,  on  voit,  en  effet ,  que,  par  la  combustion,  il 
n'est  possible  d'élever  la  température  qu'aussi  longtemps 
qu'une  partie  du  combustible  peut  encore  se  combiner  avec 
l'oxygène  et  dégager  de  la  chaleur. 

Mais  il  restait  à  déterminer  expérimentalement  les  tem- 
pératures produites  en  réalité  par  la  combustion  et  le 
coefficient  de  combinaison  qui  correspond  à  chacune 
d'elles.  Ce  problème  important  a  été  résolu,  dans  des  con- 
ditions spéciales  de  combustion ,  pour  l'oxyde  de  carbone 
et  l'hydrogène,  par  M.  Bunsen,  qui  a  fait  connaître  sa 
méthode,  en  1867,  dans  les  Annales  de  Poggendorf^ 
t.  CXXXI,  p.  161  et  suivantes. 

Le  procédé  de  M.  Bunsen  consiste  essentiellement  à 
introduire  le  gaz  combustible  avec  de  l'oxygène  ou  de 
l'air  dans  un  eudiomètre  à  soupape,  à  déterminer  la  com- 
bustion de  ce  gaz  instantanément,  à  l'aide  d'une  longue 
étincelle  de  la  bobine  de  Ruhmkorff,  et  à  mesurer  la  ten- 
sion P',  des  produits  de  la  combustion.  Cette  tension  con- 
nue, ainsi  que  la  capacité  V  de  l'eudiomètre,  M.  Bunsen 
calcule,  à  la  fois,  le  coefficient  de  combinaison  x  du  gaz 
combustible  et  la  température  ^  des  gaz  au  moment  de  la 
combustion.  Cette  double  détermination  se  fait  au  moyen 
des  trois  formules  suivantes  ,  que  nous  supposerons  éta- 
blies pour  un  mélange  d'hydrogène  et  d'air,  dans  les  pro- 
portions voulues  pour  la  combustion  complète. 

Soit  /t,  le  poids  de  l'hydrogène;  o,  celui  de  l'oxygène  et 
11,  celui  de  l'azote.  Désignons,  en  outre,  par  c',,  c'^,  c'„  et 
c'„,  respectivement  les  caloriques  spécifiques  sous  volume 
constant  de  la  vapeur  d'eau,  de  l'hydrogène,  de  l'oxygène 
et  de  l'azote.  Enfin,  soit  r,  la  puissance  calorifique  de 
l'hydrogène.  Si  l'on  brûle  l'hydrogène  sans  que  les  produits 
de  la  combustion  puissent  se  dilater,  ainsi  que  cela  a  lieu 


(  656  ) 
dans  l'eudiomètre  de  M.  Bunsen,  on  aura  pour  ?i,  l'équation 

suivante  : 

vhx 


9  hxc,-^h{i  —  x) c;  -+-  (0  —  8/? x)  c'o  -+-  n c„ 


(i; 


D'un  autre  côté,  le  volume  V  des  produits  de  la  com- 
bustion à  0°  et  sous  la  pression  ordinaire  P  de  l'atmo- 
sphère, sera 

dhx       h(l  —  x)       (0  —  Shx)        n 
V=- -^— ^-»-^^ -  +  -,.     .     (2) 

Se,  S/,,  «c  et  s„,  représentant  respectivement  les  poids  spéci- 
fiques de  la  vapeur  d'eau,  de  l'hydrogène,  de  l'oxygène  et 
de  l'azote. 

En  appelant,  en  outre,  a  le  coefficient  de  dilatation  des 
gaz,  on  a  : 

V'P' 


VP=- 


(1  -f-  ati) 


Mais  cette  méthode  ne  donne  pas,  comme  tout  le  monde 
paraît  l'admettre,  la  température  de  combustion  à  l'air 
libre.  J'avais  d'abord  pensé  que  pour  déduire  cette  der- 
nière des  résultats  de  M.  Bunsen,  il  fallait  évaluer  le  tra- 
vail effectué  par  les  gaz  lorsqu'ils  se  dilatent  jusqu'à  ce 
que  leur  pression  soit  devenue  égale  à  celle  de  l'air  atmo- 
sphérique, et  calculer,  au  moyen  de  ce  travail,  l'abaisse- 
ment de  température  produit.  La  différence  entre  les  tem- 
pératures indiquées  par  M.  Bunsen  et  le  nombre  de  degrés 
perdus  par  les  gaz,  par  suite  de  leur  dilatation,  aurait  alors 
donné  la  température  de  combustion  à  l'air  libre.  J'ai  re- 
connu depuis  qu'il  y  avait  un  moyen  bien  plus  simple 
d'obtenir  cette  dernière  température.  Ce  moyen  consiste  à 


(  657  ) 

introduire  dans  la  formule  (I)  ci-dessus  l'une  des  valeurs  que 
M.  Bunsen  assigne  à  x  pour  les  différentes  températures 
et  à  y  remplacer  les  caloriques  spécifiques  sous  volume 
constant  par  les  caloriques  spécifiques  sous  volume  varia- 
ble. On  calcule  ensuite  la  valeur  de  r,.  Si  la  valeur  obtenue 
correspond  au  coefficient  x  indiqué  pour  cette  température 
ou  pour  des  températures  peu  différentes,  elle  représente 
la  température  de  combustion  cherchée.  Si,  au  contraire, 
X  est  trop  grand  pour  la  température  ^i  trouvée,  on  refait 
le  calcul  avec  une  autre  valeur  du  même  coefficient.  A  la 
vérité,  X  paraît  diminuer  lorsque  la  pression  devient 
moindre,  mais  il  y  a  lieu  de  penser  que  ces  variations  sont 
peu  considérables  et  peuvent  être  négligées.  C'est,  du 
reste,  un  sujet  qui  mérite  d'être  étudié. 

J'ai  appliqué  cette  méthode  à  l'hydrogène,  à  l'oxyde  de 
carbone  et  au  carbone  lui-même.  Comme  on  le  verra,  je 
suis  arrivé  à  des  températures  de  combustion  beaucoup 
moins  élevées  que  celles  qu'on  admet  généralement  et  les 
chiffres  que  j'indique  trouvent  leur  confirmation  ,  à  la  fois, 
dans  les  fourneaux  alimentés  de  combustibles  solides  et 
dans  les  fourneaux  à  gaz,  dont  les  plus  précieuses  qualités 
reposent  sur  le  chauffage  préalable  des  gaz  combustibles 
et  de  l'air  destiné  à  les  brûler.  J'indique,  en  outre,  une 
méthode  très-simple  pour  déterminer,  au  moins  d'une 
manière  approchée,  la  température  de  combustion  d'un 
combustible  composé.  Enfin,  je  rectifie  quelques  résultats 
indiqués  dans  le  temps  par  Ebelmen,  sur  la  distribution  de 
la  chaleur  dans  une  couche  épaisse  de  combustii)le  que  l'on 
brûle  au  moyen  de  l'air  atmosphérique. 

Température  de  combustion  de  l'oxyde  de  carbone  brûlé 
au  moyen  de  l'oxygène  pur,  sous  la  pression  atmosphérique. 


(  058  ) 

—  En  prenant  a;  =  73,  on  trouve  T  =  2231''C.  M.  Bun- 
sen a  trouvé  5035"C  (*). 

Combustion  de  l'oxyde  de  carbone  à  l'air  libre.  —  Pour 
x>  =  »/2,    on    trouve    T  =  14oO°C.    M.    Bunsen    donne 

Hydrogène  el  oxygène  pur. —  Pourjc  =  V3,  T=1789°C.' 
Comme  M.  Bunsen  a  trouvé  ^,  =  2844°C  et  x  =  y~^, 
tandis  qu'il  donne  pour  des  températures  comprises  entre 
1146  et  2471"C,  x  =  ^l^,  on  peut  faire  le  calcul  delà 
température  de  combustion  de  l'hydrogène  au  moyen  de 
cette  dernière  valeur.  On  obtient  alors  T  =  5067°.  On  voit 
que  X  doit  être  <  0,  5,  et,  par  conséquent,  que  la  tem- 
pérature de  combustion  de  l'hydrogène  ne  peut  être  supé- 
rieure à  1800°C.  environ;  mais  comme  la  valeur  de  x  ne 
tombe  de  'A2  à  '/^  qu'au  delà  de  5000°,  il  s'ensuit  que  pour 
produire  avec  l'hydrogène  des  températures  supérieures  à 
1789°,  il  suffît  de  chauffer  l'hydrogène  et  l'oxygène  employé 
à  la  combustion. 

MM.  Debray  et  Deville  évaluent  la  température  de  com- 
bustion de  l'hydrogène  avec  l'oxygène  pur  sous  la  pression 


(*)  Les  valeurs  des  caloriques  spécifiques  qui  ont  été  employées  dans 
le  calcul  des  températures  de  combustion  sont  les  suivantes  : 

Oxygène 0,2173 

Azote 0,244 

Hydrogène 3,409 

Oxyde  de  carbone .  0,245 

Acide  carbonique 0,2169 

Vapeur  d'eau 0,4805 

Air  atmosphérique 0,2575 

.l'ai  pris  pour  la  puissance  calorifique  de  l'hydrogène  29000%  pour  celle 
du  carbone  8000«  et  pour  celle  de  l'oxyde  de  carbone  2403<=. 


(  659  ) 

atmosphérique  à  2300°  et  M.  Edm.  Becquerel  seulement 
à  2100°.  S'il  est  vrai  que  le  coefficient  x  varie  par  sauts 
brusques,  comme  l'indique  M.  Bunsen,  ces  évaluations 
doivent  être  considérées  comme  trop  élevées. 

Combustion  de  l'hydrogène  à  l'air  libre.  —  1  kil.  d'hv- 
drogène  exige,  pour  sa  combustion  complète,  36  kil.  d'air. 

a-  =  -ct  T  =  12o4°C. 

M.  Bunsen  a  trouvé  2024"C. 

En  chauffant  préalablement  l'air  et  l'hydrogène,  on  peut 
réaliser  des  températures  plus  élevées. 

Combustion  du  carbone  à  l'air.  —  Lorsque  le  carbone 
brûle  à  l'air,  on  peut  admettre,  d'après  les  résultats  de 
M.  Bunsen  sur  la  combustion  de  l'oxyde  de  carbone,  que, 
sur  \  kilo  de  carbone,  O^S  se  transforment  en  CO.2,  et 
l'autre  demi-kilo,  en  CO.  Le  poids  d'air  nécessaire  à  la  com- 
bustion est  de  12  k. 

D'après  cela,  la  température  de  combustion  du  carbone 
se  calculera  à  l'aide  de  l'équation  (*)  : 

8000  :  2  -+-  2,475  :  2 

1,85.0,2109  H-  1,166.0,243  H- 2,55.0,244  H- 4,66.0,244^-5. 0,2573 
CO2  CO  az  pour  CO       az  pour  CO^     air  libre. 

4000-4-  1256,3 
0,4  -+-  0,3  -+-  0,57  -+-  1,14  -H  0,71  "" 

3256,0 


5,12 


=  1678°C. 


(*)  1  k.  de  carbone  exige  pour  se  transformer  en  acide  carbonique 
12  k.  d'air  et  donne  3  k.  2/3  d'acide  carbonique.  1  k.  de  carbone  qui  se 
transforme  en  oxyde  de  carbone  produit  2  k.  ■  '3  de  ce  corps. 


(  600  ) 

Mais  à  mesure  que  les  gaz  cheminent  à  travers  l'appa- 
reil de  chauffage  et  se  refroidissent,  l'oxyde  de  carbone 
brûle  et  la  température  se  maintient  à  1678",  jusqu'à  ce 
que  tout  l'oxyde  soit  brûlé. 

Température  de  combustion  des  carbures  d'hydrogène 
brûlés  à  l'air  libre.  —  Elles  peuvent  se  déduire  de  la  com- 
position de  ces  corps  et  des  températures  de  combus- 
tion de  l'hydrogène  et  du  carbone.  Ainsi,  le  bicarbure 
d'hydrogène  C4H4  ou  gaz  oléfiant,  est  formé  de  ^l-j  C  et 
V7  hydrogène.  Sa  température  de  combustion  sera  donc  : 


6  1254-       10068 

-.1678+- = hl79"=l458-H  ITOo^ieiT^C. 

7  7  7 


Cette  méthode  n'est  qu'approchée,  car,  ainsi  que 
M.  Bunsen  le  fait  observer,  on  ne  connaît  pas  la  manière 
dont  l'oxygène  se  comporte  lorsqu'il  est  en  présence  de 
deux  corps  avec  lesquels  il  peut  se  combiner. 

De  la  combustion  dans  les  fourneaux  alimentés  de  com- 
bustibles solides.  —  On  pourrait  objecter  contre  les  tem- 
pératures de  combustion  ci-dessus  que,  si  elles  étaient 
exactes,  on  ne  pourrait  pas  développer,  dans  les  fourneaux 
à  réverbère  ordinaires,  le  degré  de  chaleur  qu'exige  le 
traitement  des  métaux,  par  exemple,  le  puddiage  de  la 
fonte  et  le  réchauffage  du  fer.  Mais  cette  objection  est 
facile  à  réfuter.  En  effet,  on  sait  que,  pour  pouvoir  fonc- 
tionner, ces  fourneaux  doivent  être  chauffés  préalable- 
ment à  une  haute  température  et  leurs  foyers  chargés 
d'une  grande  quantité  de  combustible.  L'air  qui  pénètre 
ensuite  dans  le  foyer  y  trouve  un  combustible  porté  à  une 
haute  température  et,  par  suite  ,  doit  développer  une  tem- 
pérature de  combustion  plus  élevée  que  celle  que  nous 


(  661  ) 

avons  calculée  en  supposant  l'air  et  le  combustible  à  zéro 
degré. 

Malgré  cette  circonstance  ,  la  température  produite  dans 
le  four  est  encore  insuffisante  pour  la  soudure  du  fer,  c'est- 
à-dire  moindre  que  45  à  ICOO^C.  J'en  trouve  la  preuve 
dans  le  passage  suivant,  p.  291  ,  du  Traité  de  la  fabrica- 
tion du  fer  et  de  l'acier  de  feu  mon  frère,  Traité  que  je 
suis  occupé  en  ce  moment  à  publier  : 

«  On  sait  qu'une  haute  température  n'est  pas  nécessaire 
»  durant  la  période  pendant  laquelle  le  fer  prend  nature, 
»  mais  que  la  température  ordinaire  du  four  à  puddler  est 
»  insuffisante  pour  souder  ensemble  toutes  les  particules 
»  de  fer  dont  sont  formées  les  balles,  et  qu'il  est  néces- 
»  saire,  aussitôt  que  le  fer  a  pris  nature,  d'élever  consi- 
»  dérablement  la  température  du  four  et  des  balles.  A  ce 
»  moment  il  se  fait  une  combustion  violente  des  balles 
»  elles-mêmes,  ce  qui  explique  le  déchet  élevé  que  l'on 
»  subit.  Cette  combustion  peut  être  plus  ou  moins  forte, 
»  suivant  que  l'on  prend  plus  ou  moins  de  soins  d'éviter 
»  la  présence  de  l'oxygène  libre  dans  la  flamme.  Mais ,  il 
»  n'est  pas  démontré  que,  dans  les  fours  à  puddler  ordi- 
»  naires,  on  doive  s'opposer  tout  à  fait  à  la  combustion 
»  des  balles,  attendu  que,  dans  ces  fours,  ce  n'est  que 
»  grâce  à  la  combustion  d'une  certaine  quantité  de  fer 
»  que  l'on  obtient  rapidement  la  température  nécessaire 
»  au  soudage  des  balles.  » 

Il  est  donc  certain  que  la  combustion  du  charbon  n'est 
pas  capable  de  développer,  dans  le  four  à  réverbère  ordi- 
naire, la  température  dont  on  a  besoin  pour  souder  le  fer. 
Il  n'en  serait  pas  ainsi  si  la  combustion  de  l'oxyde  de  car- 
bone développait  la  température  de  1997°C  et  celle  de 
l'hydrogène  la  température  de  2024°  qu'indiqueM. Bunsen. 


(  662  ) 
Nécessité  du  chauffage  préalable  des  gaz  combustibles 
et  de  l'air  dans  les  foyers  à  gaz.  —  Dans  ces  foyers,  on 
ne  possède  pas  le  réservoir  de  chaleur  représenté  dans  les 
fourneaux  alimentés  de  combustibles  solides,  par  la  couche 
de  combustible  incandescent  placée  sur  la  grille.  Si  donc 
nos  calculs  sont  exacts,  pour  développer  les  hautes  tem- 
pératures dont  on  a  besoin  dans  l'industrie,  il  faut,  dans 
les  fourneaux  à  gaz,  avoir  recours  au  chauffage  préalable 
des  gaz  combustibles  et  de  l'air  destiné  à  les  brûler.  C'est 
ce  que  l'expérience  a  démontré  dès  l'origine  de  l'emploi 
des  fours  à  gaz.  Depuis  les  perfectionnements  que  Siemens 
a  apportés  aux  fourneaux  à  gaz,  il  ne  saurait  plus  rester 
de  doute  sur  la  nécessité  de  ce  chauffage  préalable.  Dans 
les  fours  de  Ponsard  et  de  Bicheroux,  on  se  borne  au 
chauffage  préalable  de  l'air.  Aussi  ces  appareils  dévelop- 
pent-ils une  température  moins  élevée  que  les  fours 
Siemens. 

Expériences  d'Ebelmen.  —  D'après  Ebelmen,  lorsque 
l'air  traverse  une  épaisseur  un  peu  considérable  de  char- 
bon, celui-ci  brûle  de  deux  manières  différentes.  L'oxy- 
gène de  l'air,  en  s'introduisant  dans  le  fourneau,  forme 
d'abord  de  l'acide  carbonique,  et  ce  gaz,  en  traversant  une 
nouvelle  couche  de  combustible  incandescent,  se  trans- 
forme en  oxyde  de  carbone  en  doublant  de  volume  {*). 

Ces  résultats  ont  déjà  été  contestés  par  M.  Cailletez  (""). 
D'après  ce  dernier  savant,  il  se  forme  de  l'oxyde  de  car- 
bone en  même  temps  que  de  l'acide  carbonique  et  il  reste 
de  l'oxygène  libre.  Cette  manière  de  voir  est  confirmée  par 


(*)  V.,  pour  plus  de  détails,  mon  ouvrage  sur  les  Applications  fie  la 
chaleur,  p.  37,  §  42. 

(**)  Les  Mondes,  de  M.  l'abbé  Moigno,p.  676,  186G. 


(  663  } 

les  expériences  de  M.  Bunsen  sur  la  combustion  de  l'oxyde 
de  carbone  dans  l'eudiomèlre  à  soupape.  Il  est  probable 
qu'il  se  forme  d'abord  de  l'acide  carbonique  et  de  l'oxyde 
de  carbone  et  que  le  quart  de  l'oxygène  reste  libre.  A  me- 
sure que  les  gaz  cèdent  de  la  chaleur  aux  corps  avec  les- 
quels ils  viennent  en  contact,  l'oxygène  libre  transforme 
l'oxyde  de  carbone  en  acide  carbonique.  La  totalité  de 
cet  acide  est  ensuite  ramenée  à  l'état  d'oxyde  de  carbone 
par  le  carbone  incandescent  qu'elle  rencontre,  si  toutefois 
la  couche  de  combustible  est  suffisamment  épaisse. 

M.  Ebelmen  évaluait  la  température  produite  par  la  for- 
mation de  l'acide  carbonique  à  2729°  et  celle  produite  par 
l'oxyde  de  carbone  à  1485°C.  D'après  cela,  le  passage  de 
l'acide  carbonique,  premier  produit  de  la  combustion, 
selon  Ebelmen ,  à  l'état  d'oxyde  de  carbone,  devait  donner 
lieu  à  un  abaissement  de  température  de  2729  — 1485  = 
J244''C.  Ces  chiffres  doivent  être  rectifiés.  La  température 
produite  au  bas  de  la  couche  de  combustible  n'est,  théo- 
riquement, que  de  1700"C  environ,  et  celle  produite  par 
le  passage  de  l'acide  carbonique  à  l'état  d'oxyde  est  infé- 
rieure à  1485",  parce  que,  au  moment  où  ce  passage  a 
lieu ,  l'acide  carbonique  a  déjà  perdu  une  partie  de  sa  cha- 
leur. 


(  664  ) 
CLASSE   DES    LETTRES, 


Séance  du  7  décembre  ^874. 

M.  R.  Chalon,  direcleur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.  Grandgagnage,  J.  Roulez,  Ga- 
chard,  P.  Devaux,  P.  De  Decker,  M.-N.-J.  Leclercq, 
Th.  Juste,  le  baron  G.  Guillaume,  Alph.  Wauters,  Ém.  de 
Laveleye,  Alph.  Le  Roy,  Ém.  de  Borchgrave,  membres; 
J.  Nolet  de  Brauwere  van  Sleeland,  Aug.  Scheler,  Alph. 
Rivier,  associés;  J.  Heremans,  Edm.  Poullet,  F.  Loise, 
correspondants. 

M.  Ch.  Montigny,  membre  de  la  classe  des  sciences, 
assiste  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  transmet  une  ampliation 
d'un  arrêté  royal  du  24  novembre  dernier,  nommant  pré- 
sident de  l'Académie,  pour  1875,  M.  A.  Brialmont,  direc- 
teur de  la  classe  des  sciences  pour  la  même  année. 

—  MM.  les  questeurs  du  Sénat  et  de  la  Chambre  des  re- 
présentants adressent  des  cartes  de  tribune  réservée  pour 
la  session  législative  de  1874-1875.  —  Remercîments. 


(  66S  ) 

—  M.  le  Ministre  de  la  justice  offre, pour  la  bibliothèque 
de  la  Compagnie,  deux  exemplaires  du  tome  second  du 
Recueil  des  coutumes  de  Namur  et  de  Philippeville,  publié 
par  la  commission  royale  des  anciennes  lois  et  ordonnances 
du  pays.  —  Remercîments. 

—  M.  John  Edwards,  secrétaire  du  Public  Record  Office 
de  Londres,  répondant  à  une  demande  de  renseignement 
qui  lui  avait  été  adressée  par  M.  le  secrétaire  perpétuel,  fait 
savoir  que  M.  Charles  Purton  Cooper,  élu  associé  de  la 
classe  des  lettres,  le  5  avril  1834,  est  mort  le  26  mars  1875, 
dans  sa  80"  année. 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  annonce  à  ses  confrères 
que  la  classe  des  beaux-arts  vient  d'éprouver  une  perte  qui 
sera  profondément  ressentie  par  toute  l'Académie.  M.  le 
baron  Gustaf  Wappers ,  membre  titulaire  de  la  section  de 
peinture,  est  décédé  à  Paris  le  6  de  ce  mois. 

—  M.  le  D""  Burggraeve,  de  Gand,  soumet  une  liste  de 
souscription  pour  le  livre  qu'il  se  propose  de  publier  sous 
le  titre  de  :  Monument  à  Jenner. 

—  La  Société  d'Émulation  du  Doubs  à  Besançon,  la 
direction  de  la  Bibliothèque  nationale  à  Paris,  la  Société 
statistique  de  l'Angleterre  à  Londres ,  l'Université  deWiirz- 
bourg,  M.  de  Sybel,  associé  à  Bonn,  remercient  pour  le 
dernier  envoi  de  publications  académiques. 

Des  remercîments  semblables  sont  exprimés  par  l'Aca- 
démie royale  d'histoire  de  Madrid  pour  le  précédent  envoi 
de  publications. 

L'institut  royal  grand-ducal  de  Luxembourg  fait  parve- 
nir le  dernier  volume  de  ses  publications  de  la  section  his- 
torique. 

2"°*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  45 


(  666  ) 

—  M.  E.  Caslan ,  secrétaire  de  la  Société  d'Émulation 
du  Doubs,  à  Besançon,  fait  hommage  de  deux  brochures 
imprimées  de  sa  composition  :  1°  Étude  sur  le  théâtre 
romain  de  Besançon  et  Notice  sur  la  vierge  des  Carondelet. 
In-8^ 

M.  Paul  Devaux  fait  hommage  du  livre  qu'il  vient  de  pu- 
blier sous  le  titre  de  :  Études  politiques  sur  l'histoire 
ancienne  et  moderne  et  sur  Vinfluence  de  l'état  de  guerre 
et  de  l'état  de  paix.  \  yoI.  in-S". 

M.  Aug.  Scheler  fait  hommage  d'un  nouveau  volume 
qu'il  vient  de  publier  dans  la  collection  des  œuvres  des 
grands  écrivains  du  pays  qui  ont  écrit  en  langue  française. 
Ce  volume,  consacré  à  Bueves  de  Commarchis,  par  Adenés 
li  Bois,  termine  la  série  des  poètes  brabançons. 

M.  J.  Nolet  de  Brauvvere  van  Steeland  offre  un  exem- 
plaire de  sa  brochure  imprimée  portant  pour  titre  :  Epistel 
aan  den  heer  L.-L.  de  Bo.  In-12. 

M.  J.-F.-J.  Heremans  offre  un  exemplaire  de  sa  brochure 
intitulée  :  Hoffmann  van  Fallersleben  en  de  Nederlandsche 
Letterkunde.  Jn-S". 

M.  Alph.  Le  Roy  présente,  au  nom  de  M.  V.  Thiry,  rec- 
teur actuel  de  l'Université  de  Liège ,  le  discours  inaugural 
et  le  rapport  lus  lors  de  la  réouverture  solennelle  des  cours 
pour  l'année  1874-1875.  In-8°. 

11  offre  ensuite  le  tome  IV  des  Œuvres  complètes  d'Au- 
guste Hoek,  poëte  contemporain  liégeois,  i  vol.  in-12. 

11  présente  à  la  classe,  de  la  part  de  M.  le  marquis  de 
Queux  de  Saint-Hilaire,  à  Paris,  un  exemplaire  des  deux 
publications  récentes  de  cet  auteur  :  l'une,  avec  supplé- 
ment, porte  pour  titre  :  Le  livre  des  cent  ballades  {]  vol. 
et  I  cah.  in-8°),  et  l'autre  :  Le  traicté  de  Getta  et  d'Amphi- 
tryon (in-d2). 


(  667  ) 
La  classe,  après  avoir  voté  des  remerdments  aux  auteurs 
de  ces  dons,  décide  l'impression  de  la  note  suivante  lue  par 
M.  Le  Roy,  au  sujet  des  ouvrages  de  M.  le  marquis  de 
Queux  de  Saint-Hilaire. 

«  J'ai  l'honneur  d'offrir  à  la  classe ,  de  la  part  de  M.  le 
marquis  de  Queux  de  Saint-Hilaire,  de  Paris,  un  exem- 
plaire de  deux  publications  récentes,  assurément  dignes 
l'une  et  l'autre  de  l'attention  des  connaisseurs  :  le  Litre  des 
cent  ballades  (avec  supplément)  et  le  Traicté  de  Getta  et 
d'Amphitryon,  deux  éditions  princeps  de  poèmes  du 
moyen  âge,  aussi  intéressants  par  leur  mérite  intrinsèque 
de  fond  et  de  forme ,  que  remarquables  au  point  de  vue  de 
la  filiation  des  idées  littéraires. 

»  Notre  savant  et  honoré  confrère,  M.  le  baron  Kervyn  de 
Lettenhove,  s'était  déjà  occupé  du  Livre  des  cent  ballades, 
dont  la  Bibliothèque  de  Bourgogne  possède  un  précieux 
manuscrit,  datant  du  premier  tiers  du  X^''  siècle  et  por- 
tant le  n°  11,218.  Pour  le  dire  en  passant,  c'est  sur  ce 
manuscrit  et  sur  le  n"  2,560  de  Paris,  selon  toute  appa- 
rence un  peu  plus  ancien,  que  M.  de  Queux  a  principale- 
ment établi  son  texte. 

»  Discutant  l'opinion  qui  attribuait  au  bâtard  d'Auxi  la 
plupart  des  Cent  ballades ,  M.  Kervyn  avait  donné  d'excel- 
lentes raisons  pour  la  faire  repousser.  Il  en  était  venu  à 
considérer  ce  poème  comme  l'œuvre  collective  de  quatre 
collaborateurs  et  principalement  de  Jean  de  Bordes,  fils  de 
Guillaume  de  Bordes,  sénéchal  d'Eu  et  compagnon  de 
Bouciquaut  en  Terre  Sainte.  D'autres  voulurent  que  ce 
dernier  personnage  lui-même  fût  l'auteur  d'un  livre  com- 
posé tout  entier  à  sa  louange  ;  c'était  peu  probable.  Ce  qui 
demeurait  acquis,  c'est  que  le  poète  portait  le  titre  (le 


(  668  ) 
sénéchal  et  le  surnom  de  Htititi  (hardi  batailleur).  M.  Pau- 
lin Paris  mit  en  avant  le  nom  de  Jehan  de  Werchin, 
sénéchal  de  Hainaut;  mais  ses  éléments  d'induction 
parurent  assez  vagues.  Bref,  la  question  était  encore  pen- 
dante, lorsque  M.  Léopold  Pannier,  attaché  à  la  Biblio- 
thèque nationale  de  Paris,  découvrit  fort  heureusement 
deux  nouveaux  manuscrits  des  Ce7it  ballades. 

»  Toutes  les  copies  connues  jusque-là  étaient  incom- 
plètes; il  y  manquait  les  derniers  vers  de  la  ballade  de  Bucy 
et  la  ballade  du  Bâtard  de  Coucy  tout  entière.  11  fut  donné  à 
M.  Pannier  de  publier  ce  complément  dans  un  très-curieux 
article  de  la  Romania,  du  mois  de  juillet  1873.  M.  de 
Queux  ne  pouvait  manquer  de  solliciter  l'autorisation  de 
les  reproduire  et  de  compléter  ainsi  son  livre;  il  l'obtint 
aisément,  et  ce  sont  ces  pièces ,  ainsi  qu'une  dernière  bal- 
lade étrangère  à  l'ouvrage  et  inscrite  à  la  suite  de  l'un  des 
nouveaux  manuscrits  en  manière  d'appendice,  qui  consti- 
tuent le  texte  du  supplément  que  j'ai  mission  de  placer 
sous  les  yeux  de  l'Académie.  Mais  M.  de  Queux  n'a  pas 
voulu  s'en  tenir  là  ;  il  s'agissait  toujours  de  découvrir  le 
nom  du  sénéchal.  Avec  un  rare  talent  de  critique,  aidé 
d'ailleurs  de  divers  renseignements  importants  fournis  par 
M.  le  comte  de  Circourt,  il  croit  enfin  y  être  parvenu,  et 
je  dois  dire  qu'à  mon  sens  son  argumentation  est  armée 
de  toutes  pièces. 

»  L'auteur  du  Livre  des  cent  ballades,  selon  M.  de  Queux, 
n'est  autre  que  Jehan,  sénéchal  d'Eu,  l'un  des  compa- 
gnons de  Bouciquaut  (circonstance  relevée  par  M.  Kervyn). 
Je  laisse  à  mes  honorables  confrères  le  soin  d'apprécier  la 
légitimité  de  cette  conclusion. 

»  Je  viens  de  dire  que  le  Liv7'e  des  cent  ballades  n'est  pas 
une  de  ces  œuvres  médiocres  qu'on  exhume  uniquement 


(  6G9  ) 
comme  monuments  du  vieux  langage;  c'est  un  véritable 
monument  littéraire.  M.  de  Queux,  en  l'éditant,  s'est 
adressé  aux  gens  du  monde  aussi  bien  qu'aux  érudits,  et 
son  attente  n'a  pas  été  trompée.  Le  sujet  du  poëme  est 
bien  simple,  bien  banal  en  apparence  :  la  fidélité  en  amour; 
mais  pour  nos  voisins  d'aujourd'hui  comme  pour  leurs 
ancêtres,  ce  thème  est  inépuisable  :  on  en  fait  encore  abus 
tous  les  jours,  au  théâtre,  dans  les  romans  et  jusque  dans 
les  romances.  Ici  c'est  un  jeune  bachelier  amoureux,  qui 
ne  sait  encore  quelle  voie  tenir.  Un  vieux  chevalier, 
d'aventure  son  compagnon  de  voyage,  lui  explique  chemin 
faisant  les  règles  de  loyauté  et  d'amour  «  qui  seront,  dit 
très-bien  M.  de  Queux,  l'éternel  honneur  de  la  chevalerie 
française  du  moyen  âge,  car  elles  lui  ont  donné  ce  pres- 
tige qui  dure  encore  :  »  la  moitié  du  poëme  y  est  consa- 
crée. Le  jeune  homme  promet  de  n'y  jamais  faillir;  mais 
bientôt  une  jeune  et  joyeuse  dame,  qu'un  autre  hasard 
met  en  sa  présence,  lui  donne  des  conseils  qu'il  ne  de- 
mande pas,  conseils  d'amour  léger,  d'amour  volage  :  le 
chevalier  ne  s'est  montré  austère,  dit-elle,  que  parce  qu'il 
est  vieux;  soumettons  la  question  à  des  preux  renommés 
en  amour  et  en  guerre.  Treize  princes  ou  seigneurs  répon- 
dent tour  à  tour  au  défi;  disons  tout  de  suite,  pour  la 
moralité  du  poëme,  que  trois  seulement  donnent  raison  à 
la  dame;  ajoutons  que  la  plupart  de  leurs  ballades  sont 
charmantes.  Mais  l'éditeur,  esprit  vraiment  littéraire, 
pousse  plus  loin  l'analyse  :  il  retrouve  dans  ce  gracieux 
débat  l'antagonisme  de  l'esprit  germanique,  dominé  par  le 
respect  de  la  femme,  et  de  l'esprit  gaulois,  qui  fait  volon- 
tiers de  la  compagne  de  l'homme  un  être  capricieux,  fan- 
tasque et  inconstant,  et  se  hâte  de  rire  de  ses  trahisons 
«  pour  n'en  pas  pleurer.  »  Nos  ancêtres,  c'est  M.  de  Queux 


(  670  ) 
qui  parle,  ont  eu  trop  tôt  trop  d'esprit.  —  Ce  qu'il  y  a  de 
plus  piquant  ici,  c'est  que  le  plaidoyer  contre  les  femmes  est 
soutenu  par  une  femme,  et  que  c'est  un  homme,  au  con- 
traire, qui  se  fait  leur  champion. 

»  A  un  tout  autre  point  de  vue,  le  Traiclé  de  Getta 
et  (ÏAmphitrijon  n'est  pas  moins  intéressant.  Cesl  la  tra- 
duction amplifiée  d'un  poëme  latin  de  Vital  de  Blois,  qui 
renouvela  au  XII'  siècle  VAmphitrijon  de  Plante  pour  le 
transformer  en  satire  contre  les  subtilités  de  la  scolastique, 
ou  plutôt  de  la  dialectique  «  travaillant  un  esprit  vulgaire 
auquel  elle  ôte  le  sens  commun.  »  Amphitryon  n'est  plus 
le  héros  thébain  de  la  légende;  c'est  un  étudiant  qui  re- 
vient des  écoles  d'Athènes  (lisez  de  Paris)  avec  son  valet 
Geta  (Sosie) ,  qui  a  profité  à  sa  manière  des  leçons  des 
docteurs.  Plusieurs  scènes  sont  d'un  haut  comique,  mais 
d'un  comique  tout  différent  de  celui  de  l'antiquité.  J'ap- 
|)elle  l'attention  de  l'Académie  sur  l'introduction  du 
volume,  où  l'éditeur  résume  à  grands  traits  l'histoire  du 
sujet  d'Amphitryon,  depuis  la  plus  haute  antiquité,  et  sur 
le  poëme  lui-même,  dont  le  texte  a  été  revu  avec  un  soin 
particulier,  comme  tous  ceux  dont  s'est  occupé  M.  de 
Queux  de  Saint-IIilaire.  » 

—  M.  Em.  de  Borchgrave  fait  connaître  que  M.  d'Antas, 
ministre  plénipotentiaire  de  Portugal  à  Bruxelles,  qui  a  été 
nommé,  il  y  a  deux  ans,  associé  de  l'Académie,  vient  d'être 
appelé  par  son  gouvernement  au  poste  de  Madrid.  M.  d'An- 
tas aurait  vivement  désiré  venir  en  personne  prendre  congé 
de  ses  confrères,  mais  comme  les  ordres  de  son  gouverne- 
ment lui  enjoignaient  d'être  à  iMadrid  avant  l'époque  delà 
réunion  actuelle  de  la  classe,  il  a  prié  M.  de  Borchgrave 
d'être  l'interprète  de  ses  sentiments. 


(  (^71  ) 

—  M.  L.  Galesloot,  chef  de  section  aux  Archives  du 
royaume  à  Bruxelles,  soumet  à  l'examen  de  la  classe  un 
travail  manuscrit  intitulé  :  Fouilles  et  découvertes  d'anti- 
quités romaines  à  Assche.  Détails  inédits  sur  le  trésor  de 
Mespelaer. 

La  classe  renvoie  cette  communication  à  l'appréciation 
de  deux  de  ses  membres,  MM.  Alph.  Wauters  et  Ém.  de 
Borchgrave. 

—  Elle  décide  ensuite  l'insertion,  au  Bulletin,  de  la 
note  suivante  lue  par  M.  le  baron  G.  Guillaume  : 

«  Des  journaux  ayant  avancé  que  M.  André  Van  Hasselt 
a  donné  sa  démission  de  membre  de  la  commission  de  la 
Biographie  nationale  pour  protester  contre  l'esprit  étroit 
et  rétrograde  qui  préside  à  cette  publication  académique, 
le  général  Guillaume,  président  de  cette  commission,  fait 
remarquer  que  la  démission  de  M.  Yan  Hasselt  est  anté- 
rieure de  plusieurs  mois  aux  premières  publications  de  la 
Biographie  nationale,  et  que,  d'un  autre  côté,  M.  Yan  Has- 
selt n'a  j'amais  cessé  d'être  un  des  collaborateurs  de  cette 
œuvre,  ainsi  que  le  prouvent  les  nombreux  articles  rédigés 
par  lui  qu'on  trouve  dans  chacun  des  quatre  volumes  pu- 
bliés jusqu'à  ce  jour.  » 


ELECTIONS. 


La  classe,  appelée  à  élire  sa  commission  spéciale  des 
finances  pour  l'année  187.o,  renouvelle  le  mandat  des  mem- 
bres sortants,  MM.  Chalon,  Conscience,  De  Decker,  Faider 
et  Gachard. 


(  672 


COMiMUNICATIONS  ET  LFXTURES. 


Henri  III,  duc  de  Brabanl;  par  M.  Alphonse  Wauters, 
membre  de  l'Académie. 


I. 


Nous  n'avons  pas  l'intention  de  reconstituer  en  son  en- 
tier la  biographie  du  duc  de  Brabant  Henri  III,  biogra- 
phie qui  a  déjà  été  écrite,  il  y  a  plus  de  deux  siècles,  par 
Christophe  Butkens,  dans  ses  Trophées  de  Brabant  {[). 
L'œuvre  du  savant  Cistercien,  basée  sur  les  récits  des  an- 
ciens chroniqueurs  et  l'étude  des  documents  authentiques^ 
ne  laisse  rien  à  désirer  sous  le  rapport  de  l'exactitude.  Ce 
serait  entreprendre  un  travail  à  la  fois  fastidieux  et  inutile 
que  de  vouloir  le  rectifier  ou  le  compléter.  Dans  les  pages 
qui  suivent  je  ne  poursuis  d'autre  but  que  celui  de  faire 
connaître  quelques  détails  qui  ont  échappé  à  notre  vieil 
historien  et  d'apprécier  le  caractère  du  duc  et  les  événe- 
ments de  son  règne  à  un  point  de  vue  différent  de  celui 
auquel  Butkens  s'est  placé. 

J'ai  déjà  insisté  ailleurs  (2)  sur  le  peu  de  renseignements, 
puisés  à  des  sources  comtemporaines,  que  l'on  trouve 
pour  l'histoire  du  milieu  du  XIIP  siècle.  J'entends  parler 


(1)  T.  I,  pp.  252  à  278. 

(2)  Table  chronologique  des  chartes  et  diplômes  imprimés,  t.  IV,  In- 
IroJuctioii. 


(  675  ) 
(les  chroniques ,  car  les  actes  mêmes  ne  cessent  de  se  mul- 
tiplier à  mesure  qu'on  approche  des  temps  modernes.  C'est 
ainsi  que  notre  duc  Henri  IH,  qui  joua  constamment  un 
rôle  très-actif,  reste  dans  une  espèce  de  pénombre  d'où  il 
est  difficile  de  le  faire  sortir.  Les  écrivains  étrangers  parlent 
fort  peu  de  lui,  les  Brabançons  se  bornent  à  exalter  la 
noblesse  de  son  extraction  et  son  extrême  douceur.  Sous  ce 
rapport,  ils  lui  accordent  d'unanimes  louanges  :  «  U  ne 
»  tolérait,  dit  Louis  Van  Velthem,  aucune  discorde  dans 
»  ses  États  et  il  y  maintenait  la  paix  avec  fermeté  (l).  » 
Plus  loin  (2)  le  même  poète  lui  donne  à  la  fois  les  épi- 
thètes  de  courageux  et  d'aimable,  de  doux  et  de  juste 
{coency  hovesch,  milde  ende  iveerf,].  Au  moins  l'auteur  du 
Spiegel  historiael  ajoute  à  cet  éloge  quelques  détails  sur 
l'intervention  du  duc  Henri  dans  le  gouvernement  du 
comté  de  Hollande,  après  la  mort  du  régent  Florent, 
frère  du  roi  Guillaume;  il  parle  encore  de  grêles,  d'oura- 
gans, de  pluies  torrentielles  qui  ravagèrent  certains  can- 
tons du  Brabant,  et  de  la  cherté  excessive,  suivie  d'une 
grande  mortalité,  qui  désola  ce  duché.  Mais  les  autres 
chroniqueurs,  et  parmi  eux  Van  Boendale  (3),  De  Dyn- 
ler  (4),  A-Thymo,  sont,  en  ce  qui  concerne  Henri  \\\,  d'une 
concision  désespérante.  «  Modeste  comme  une  vierge,  dit 


(1)  Heynric  die  derde  dat  verstaet, 
En  wilde  niet  dat  enich  baraet 
Gedreven  werde  onder  heme; 
Syn  lant  hilt  hi,  als  ic  'l  verneme 
Vromelyc  ende  in  payse  vel. 

Spiegel  historiael ,  liv.  I,  c.  35. 

(2)  Ibidem,  chap.  40. 

(3)  Brabanlsche  Yeestea ,  t.  I,  p.  591. 

(4)  De  Ram,  Dynteri  chronica  Brnbanliae ,  t.  II ,  pp.  "201. 


(  674  ) 
»  ce  dernier,  il  était  tellement  doux  qu'on  ne  l'appela  que 
i»  le  bon  duc  (1).  » 

On  est  si  habitué  à  associer  à  l'idée  de  douceur  celle 
de  faiblesse  qu'en  écoutant  les  éloges  donnés  au  duc 
Henri  III  on  songe  involontairement  à  Louis  le  Débon- 
naire, au  roi  Robert  et  à  d'autres  princes  qui  ont  eu  cruel- 
lement à  se  repentir  d'avoir  manqué  d'énergie  à  certaines 
heures.  On  s'égarerait  de  la  manière  la  plus  étrange.  Notre 
duc  mérite  un  éloge  complet  et  s'il  ne  devint  pas  plus 
célèbre,  la  cause  en  doit  être  cherchée  dans  la  brièveté  de 


(t)  Voici  le  chapiiie,  aussi  bref  que  peu  explicite,  oii  A-Thymo  esquisse, 
à  sa  façon,  le  règne  de  Henri  III  : 

Heinricus  hujus  nomiuis  tercius,  filius  primogenilus  Heiiirici  secundi, 
in  ducalu  Lotiiaringie  et  Brabancieatque  marchioualu  Sacri  Imperii,  palri 
sue  defunclo  successil  anno  Domini  millesimo  ducentesimo  quadragesimo 
septinio  et  presedit  annis  tredecim.  Hic  inter  principes  sibi  contenipora- 
neos  sanguinis  nolniitale  preclaruil  et  sue  nobililatis  lineam  moribus  siniul 
alque  viitutibus  clariorem  effecit.  Fuit  enini  verecundus  ut  virgo  et  adeo 
mansuelus  ut  vulgo  dux  pius  cognominaretur.  Alevdem  quoque  tiiiam 
Hugonis,  ducis  Burgundie,  siniiliier  ex  impérial!  et  regali  prosapia  orlam 
et  bonis  moribus  perornatam  sibi  conjugem  sociavit.  Ex  qua  genuil  très 
filios  et  unam  filiam,  scilicet  Henricum,  Johanneni,  Gocefridum  et  Ma- 
riani.  Sane  liuic  Heinrico  pio  duci  posl  mortem  Guilliehni  rtgis  Romano- 
runi  ac  comitis  Hollandiae  sui  consobrini  sceptruni  impériale  oblatumest, 
(|uod  ipse  suscipere  recusavit.  Anno  Domini  millesimo  ducentesimo  sexa- 
gesimo  Heinricus  iste  pius  dux,  ad  subsidium  Terre  Sancte  cruce 
signatus  et  antequam  proficisceretur  morte  preventusin  juvertute  florida 
et  sub  bona  confessione  Lovanii  obiit  et  ibi  apud  Praires  predicatores ,  in 
clioro  ecclesie,  quem  ipse  construxerat,  honorifice  sepelitur. 

Historia  Brahanliae  diplomalica  ,  t.  II,  fol.  65,  aux 
Archives  de  la  ville  de  Bruxelles. 

Les  lignes  qui  précèdent  offrent  la  pius  frappante  ressemblance  avec  un 
passage  d'une  chronique  dont  la  fin  manque  et  qui  a  été  publiée  par  la 
Société  historiciued'Utrecht  {Codex  diplomalicus  neerlandicus ,  'â'^  série, 
t.  ni.  1"  partie,  p.  63). 


(  675  ) 

son  règne  et  sa  mort  prématurée.  Il  n'occupa  le  trône 
ducal  que  13  ans,  du  1"  février  1248  au  28  février  1261  ; 
on  ignore  la  date  précise  de  sa  naissance ,  mais,  comme  son 
père  n'avait  que  40  ans  lorsqu'il  expira,  Henri  III  ne  pou- 
vait avoir  que  17  ans  environ  lors  de  son  avènement  et 
30  ans  à  peine  lors  de  son  décès  (1). 

A  un  âge  peu  avancé  il  avait  déjà  déployé  de  grandes 
qualités.  S'il  prit  rarement  les  armes,  s'il  sut,  pendant  une 
époque  très-agitée,  préserver  ses  domaines  des  ravages  de 
la  guerre,  on  le  vit,  très-souvent,  jouer  avec  dignité  le  rôle 
de  médiateur.  Dans  une  sphère  moins  vaste,  il  remplit  une 
mission  analogue  à  celle  que  remplissait,  avec  tant  d'éclat 
et  sur  un  plus  grand  théâtre,  le  roi  de  France  Louis  IX  ou 
saint  Louis.  Il  ne  négligea  ni  la  protection  du  commerce, 
ni  le  développement  des  institutions  communales,  ni  l'amé- 
lioration du  sort  des  campagnards,  et  il  donna  une  preuve 
éclatante  de  sa  sollicitude  pour  le  sort  des  pauvres  en 
confirmant,  par  une  complète  abolition  d'exactions  et  autres 
taxes  arbitraires,  l'acte  mémorable,  acte  auquel,  au  surplus, 
il  avait  été  associé,  et  par  lequel  son  père  avait  radicale- 
ment aboli  la  servitude  dans  ses  domaines.  Le  testament  de 
Henri  III  est  digne  de  servir  de  pendant  à  celui  de  Henri  IL 
Ces  deux  documents  ouvrent  la  série  des  belles  chartes  qui 
donnent  à  l'histoire  du  Brabant  un  si  noble  caractère;  ils 
assignent  aux  princesqui  y  attachèrent  leurs  noms  un  rang 
éminent  parmi  les  bienfaiteurs  du  peuple  et  justifieraient 
l'érection  de  leurs  statues  au  seuil  du  palais  de  la  Nation, 


(1)  Bandouin  de  Xinove,  dont  la  chronique  se  termine  en  1294..  dit  en 
effet  que  Henri  n'avait  pas  atteint  sa  trentième  année  lorsqu'il  mourut , 
necdum  habens  triginta  arvws.  De  Smet,  Corpus  clironicorum  Flan- 
driae,  l.  II,  p.  727. 


(676  ) 

Quoique  le  duc  Henri  soit  dépeint  comme  un  homme 
très-religieux  et  que  cette  qualification  soit  justifiée  par  la 
faveur  toute  spéciale  dont  il  entoura  l'ordre  des  Domini- 
cains et  l'appui  constant  qu'il  donna  à  la  politique  de  la 
cour  de  Rome,  il  n'était  ennemi,  ni  de  la  gaieté,  ni  de  la 
poésie  (1).  L'enjouement  de  son  caractère  se  révèle  dans 
les  quatre  pièces  qui  nous  sont  restées  de  lui  (2),  et  surtout 
dans  la  pastorale  où  il  chante  sa  rencontre  d'une  jeune  fille 
qu'il  essaye  de  séduire  par  ses  promesses  et  l'accueil  peu 
flatteur  qu'il  reçoit  d'abord  : 

«  Damoiselle,  car  créez 
«  Mon  conseil ,  je  vous  créant. 
»  James  povre  ne  serez. 
»  Ains  auraiz  à  vo  talent 
»  Cote  traînant 
»  Et  corroie 
<>  Ouvrée  de  soie 
»  Cloée  d'argent.  » 
Bonement 
S'en  défent 
N'a  valu 
Quoique  j'ai  dit,  an  festu, 

Le  poète  insiste  et  célèbre  son  triomphe  dans  le  sixième 
et  dernier  couplet,  qui  ne  manque  pas  de  grâce  : 

«  Damoiselle,  car  prenez 
«   La  cainture  maintenant 

(1)  Butkens,  /.  c,  p.  172,  attribue  à  Henri  III  un  fils  naturel  nommé 
Gilles,  qui  se  trouva  au  siège  de  Thiel  en  1286  et  à  la  bataille  de  Woe- 
ringen;  mais,  dans  mon  exemplaire  de  cet  ouvrage,  se  trouve  en  cet 
endroit  une  noie  marginale  ainsi  conçue,  qui  est,  je  crois,  de  l'écriture 
de  l'auleur  même  :  «  Il  était  (ils  du  duc  Henry  II.  >>  Butkens  aurait-il 
trouvé,  après  coup,  des  renseignements  plus  précis  sur  ce  bâtard  de  Bra- 
bant? 

(2)  Elles  sont  toutes  imprimées  dans  Dinaux,  Les  trouvères  braban- 
çons,  haynuyers,   liégeois  et  namurois^pp.  lOOetseqq. 


(677) 

«  Et  le  matin  si  raurez 
»  Trestout  l'autre  convenant  « 
Lors  va  sorriant 
Et  j'ou  joie 
Tant  fis  qu'ele  otroie 
Mon  gré  maintenant 
Le  don  prent 
Maintenant  : 
J'ai  sentu 
De  quele  manière  ele  fu. 

Henri  III  paraît  avoir  vécu,  pendant  plusieurs  années, 
dans  un  cercle  d'amis  voués  au  culte  des  lettres.  Il  semble 
avoir  été  très-lié  avec  Guillaume  de  Dampierre,  le  fils  aîné 
de  Marguerite  de  Constantinople  et  de  son  second  mari, 
lequel  épousa  sa  sœur  Béatrix  et  fut  aussi  un  grand  pro- 
tecteur des  trouvères.  L'union  des  deux  princes,  peu  de 
temps  après  la  conclusion  du  mariage  de  Guillaume,  en 
septembre  1247,  fut  cimentée  par  un  traité  d'alliance  où 
ils  se  promirent  mutuellement  aide  et  assistance  contre 
leurs  ennemis  (1).  Elle  fut  par  malheur  de  très-courte 
durée,  car  Guillaume  périt  jeune  encore  au  célèbre  tournoi 
de  Trazegnies ,  le  6  juin  1 251 ,  et,  pendant  les  deux  années 
précédentes,  il  avait  accompagné  saint  Louis  en  Egypte 
et  pris  une  large  part  à  toutes  les  vicissitudes  de  cette 
fatale  campagne.  Dans  une  chanson  où  il  chante  les  plai- 
sirs de  l'amour,  Henri  III  termine  par  ce  couplet: 

Cuens  jolis 
De  Flandres,  amis 
Gui  j'ai  chier, 
Me  sauriez-vous  conseillier 
De  li 
Gui  j'aim  si 
Que  j'en  ai  et  cuer  et  cors  joli. 

(1)  Voyez  plus  loin,  p.  683. 


(  678  ) 

Ce  ciiens  joli  de  Flandre,  cet  ami  si  cher,  c'est  probable- 
ment l'infortuné  Guillaume,  auquel  Henri  était  lié  par  des 
liens  de  parenté,  par  un  traité  d'alliance,  et  plus  encore, 
par  une  conformité  de  goûts  dont  l'histoire  littéraire  a 
conservé  des  preuves  nombreuses.  Le  frère  et  le  succes- 
seur de  Guillaume,  Guy  de  Dampierre,  n'apparaît  jamais 
comme  un  intime  ami  du  duc  de  Brabant. 

Si  Guillaume  n'a  pas  laissé,  comme  Henri,  des  composi- 
tions poétiques,  l'un  comme  l'autre  a  protégé  les  enfants 
de  la  Muse.  Leur  mémoire  a  été  conservée  par  les  poêles 
qu'ils  couvrirent  de  leur  protection.  Adenez,  le  plus  fécond 
et  l'un  des  meilleurs  versificateurs  du  treizièuje  siècle, 
l'auteur  de  Cléomadès,  de  Berthe  aux  fjrands  pieds,  des 
Enfances  d'Oger  le  Danois,  n'a  garde  d'oublier  l'excellent 
prince  qui  servit  de  père  à  sa  jeunesse  et  lui  fit  donner  l'édu- 
cation qui  lui  permit  de  développer  ses  talents.  «  Menes- 
trés,  »  dit-il, 

«  Menestrés  au  bon  duc  Henri, 

»  Fui,  cil  m'aleva  et  norri 

»  Et  me  fist  mon  mestier  apprendre  (1  ).  » 

Ces  éloges  qu'Adenez  donne  au  souverain  du  Brabant, 
Gautier  de  Belle-Perche,  dans  son  roman  de  Judas  Ma- 
chabée,  et  cette  mystérieuse  Marie  de  France  (2),  dont  la 
biographie  reste  encore  obscure  ,  les  prodiguent  au  vaincu 


(1)  Dinaux,  /.  c. 

(2)  Elle  portait  aussi  le  nom  de  Marie  de  Gonipiègne ,  probablement 
parce  qu'elle  était  née  dans  cette  ville.  Voyez  Jubinal ,  Jongleurs  et  Trou- 
vères, pp.  2C-33,  dans  de  Reiffenberg,  Chronique  rimée  de  Philippe 
Mouskes ,  t.  II ,  p.  742. 


(  679  ) 

du  tournoi  de  Trazegnies.  De  Belle-Perche  place  Guillaume 
au  premier  rang  des  barons  chrétiens  : 

«  Monsieur  Guillaume,  dit-il, 
»  Qui  de  l'empire  et  du  royaume 
»  Porte  le  pris  de  chevalier 
»  Et  de  prud'homme  droiturier 
»  En  Flandre  doit  avoir  son  ieslre;  » 

la  seconde  écrivit  pour  lui  la  Manière  et  facture  des 
monstres  des  hommes  qui  sont  en  Orient  et  plus  en  Inde, 
et  traduisit  de  l'anglais  les  Bons  proverbes  d'Isopet  ou 
Fables  d'Ésope,  qu'avant  elle  un  roi  d'Angleterre,  du  nom 
de  Henri,  avait  également  traduites,  non  dans  la  langue 
de  ses  barons,  le  roman  ou  français,  mais  dans  l'idiome 
de  son  peuple  (1).  Les  plaintes  d'Adenez  sur  la  mort  de 
Henri  m  sont  touchantes,  mais  combien  plus  profond  est 
le  deuil  de  Marie.  Toute  son  àme  passe  dans  ses  vers  quand 
elle  raconte  en  son  livre  du  Couronnement  du  Renard  le 
triste  sort  de  Guillaume.  Alors  sa  lyre  change  de  note. 
C'est  l'heure  de  la  satire  et  du  sarcasme  contre  le  vice 
triomphant;  le  moment  n'est  plus  où  l'on  chantait  molle- 
ment, dans  cette  douce  langue  d'oil  que  nos  ancêtres  ont 
tant  contribué  à  perfectionner  : 

ft  Marie  ai  nom,  si  suis  de  France 


»  Pur  amour  li  comte  Guillaume 

1  Le  plus  vaillant  de  cest  royaume 

»  M'entremis  de  cest  livre  faire 

»  Et  de  l'angteis  en  roman  treire. 


Qui  sait  si  le  secret  révélé  par  ces  lignes  n'en  cachait 


(1)  De  Reiflfenberg,  /.  c,  p.  cxcv. 


(  680  ) 
pas  un  autre  plus  cher  au  cœur  de  Marie  de  France  et  si 
les  liens  les  plus  tendres  n'unissaient  pas  le  fils  infortuné 
de  Marguerite  de  Constantinople  à  l'humble  femme  qui 
écrivait  sous  ces  auspices? 

Nous  retrouvons  autour  de  Henri  III  et  des  Dampierre 
lout  un  monde  de  seigneurs  et  de  courtisans  amis  des 
lettres:  le  comte  de  Bar,  qui  avait  épousé  une  Dampierre, 
Érard  de  Saint-Valéry,  Gilbert  de  Berneville.  C'est  avec  ce 
dernier,  qu'il  appelle  Gélibert,  que  le  duc  engage  ce  jeu 
mi-parti  où  il  lui  demande  si  l'on  doit  abandonner  une 
dame  qui  a  donné  l'exemple  de  l'infidélité.  Gilbert  prêche  la 
négative,  mais  Henri  est  pour  le  changement:  a  Hé,  dit-il, 

»  Hé,  Gélibert,  où  avez-vos  trovée 

«  C'esle  raison?  Trop  vos  voi  non  sachant. 

n  L'on  tient  plus  chier  la  chose  désirée 

»  Que  ce  qu'on  a  abandonnéement. 

))  Ne  m'alez  du  de  ce  aprendaut 

»  Tant  est  amors  servie  et  honorée 

»  Corn  la  dame  se  garde  saumement.  » 

On  voit  que,  dans  les  poésies  de  notre  prince,  un  peu  de 
matérialisme,  disons  de  réalisme  pour  nous  placer  dans  le 
courant  du  jour,  se  joint  à  une  naïveté  qui  arrive  aisé- 
ment à  être  charmante. 

Ce  Gilbert,  dont  on  a  un  grand  nombre  de  chansons 
remarquables,  dit  notre  regretté  confrère  Van  Hasselt, 
dans  son  Mémoire  sur  la  poésie  française  en  Belgiqiie  (1), 
par  la  fraîcheur  des  pensées  et  la  variété  dans  la  coupe  du 
vers,  ce  Gilbert,  dis-je,  semble  avoir  été  attaché  à  la  mai- 


Ci)  Page  82. 


I 


(681  ) 

son  de  Guillaume  de  Dampierre.  Lorsqu'il  nous  dit,  à 
propos  d'une  de  ses  œuvres: 

('  Chanson,  va-l'en  à  Courtrai  droitement, 
V  Car  là  dois-lu  premièrement  aller.... 
»  Ma  dame  di,  de  par  son  chantéor 
w  Se  il  li  plaist,  que  te  face  chanter. 

»  Quand  l'aura  ouye 

»  Va,  sans  arrester, 

»  Erar  saluer 

»  Qui  Valeri  crie  (1),  » 

ne  fait-il  pas  allusion  aux  obligations  qu'il  avait  à  la 
dame  de  Courtrai,  Béatrix,  femme  de  Guillaume,  et  dont  le 
douaire  était  assigné  sur  cette  ville  et  sa  châtellenie? 

Mais  bientôt  le  signal  des  combats  retentit  de  nouveau 
dans  les  campagnes  du  Hainaut  et  de  la  Flandre.  La  san- 
glante bataille  de  West-Cappelle,  livrée  le  4  juillet  d2oo, 
et  la  cession  temporaire  du  Hainaut  au  comte  d'Anjou 
viennent  ajouter  à  la  haine  que  commencent  à  se  porter  les 
peuples  des  deux  provinces.  Le  malheur  semble  frapper  à 
plaisir  ce  faisceau  de  poètes  qui  s'étaient  groupés  autour  de 
Henri  HI  et  de  Guillaume  de  Dampierre.  C'est  peu  de  la 
mort  malheureuse  de  ce  dernier.  Le  comte  de  Bar,  dont  on  a 
conservé  l'énergique  élégie  sur  son  sort  cruel ,  est  blessé 
à  l'œil  à  West-Cappelle,  fait  prisonnier  par  les  Hollandais, 
n'obtient  sa  délivrance  que  moyennant  une  forte  rançon 
que  lui  procure  surtout  l'intervention  de  Henri  HI,  et  se 
retire  en  Lorraine  où  le  retiennent  d'autres  querelles;  Re- 
naud de  Saint-Valéry,  également  pris  dans  la  même  ba- 
taille, de  même  que  Guy  et  Jean  de  Dampierre,  gémit 


(1)  De  Reiffenberg,  l.  c,  p.  clxxxiv. 
2"*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII. 


(  682  ) 
aussi  dans  la  captivité.  Marie  de  France  s'éteint  dans  l'ou- 
bli. Enfin,  quelques  années  après,  le  duc  Henri  meurt  à  la 
fleur  de  l'âge,  et  Adenez  reste  seul ,  pour  conserver  la  mé- 
moire du  plus  aimable  et  du  plus  généreux  des  souverains 
du  Brabant.  Sur  la  tombe  de  ce  prince  si  peu  connu  et  si 
digne  de  l'être,  la  poésie  aussi  dépose  une  fleur;  sa  mo- 
deste off'rande  éternise  celui  dont  la  mémoire  n'est  pas 
restée  vivante  chez  le  peuple  pour  lequel  il  montra  tant 
de  sollicitude. 

II. 

Cet  avant-propos  n'est  pas  absolument  un  hors-d'œuvre. 
Jl  était  nécessaire  pour  mettre  en  lumière  l'intérêt  réel 
que  présente  l'histoire  du  règne  de  Henri  llï.  Essayons  de 
le  parcourir  en  ne  nous  arrêtant  qu'aux  faits  présentant 
un  intérêt  véritable. 

Quand  le  père  du  duc  mourut,  le  pays  entre  le  Rhin  et  la 
Meuse  était  livré  aux  horreurs  de  la  guerre  civile.  L'em- 
pire d'Allemagne  voyait  les  partisans  du  jeune  comte 
Guillaume  de  Hollande,  qui  venait  d'être  proclamé  roi,  à 
Woeringen ,  par  les  instigations  du  pape  Innocent  IV  et 
grâce  surtout  à  l'appui  du  duc  de  Brabant,  combattre  avec 
ardeur  les  défenseurs  de  la  cause  chancelante  de  Fré- 
déric II.  Guillaume,  appuyé  par  l'archevêque  de  Cologne, 
par  l'élu  de  Liège,  Henri  de  Gueldre,  parle  frère  de  celui- 
ci  ,  Othon,  comte  de  Gueldre ,  et  par  la  plupart  des  princes 
et  des  seigneurs  des  Pays-Bas,  servi  avec  ardeur  par  des 
populations  que  l'on  avait  soulevées  au  nom  de  l'Église, 
remporta  de  nombreux  succès  sur  ses  ennemis.  Ceux-ci 
néanmoins  ne  faiblirent  pas.  Les  villes  rhénanes  s'hono- 
rèrent presque  toutes  par  leur  dévouement  à  Frédéric  II 


(  685  ) 
et  Aix-la-Chapelle  n'ouvrit  ses  portes  qu'après  un  très- 
long  siège.  Maigre  la  chute  de  la  résidence  impériale,  plu- 
sieurs princes  et,  entre  autres,  les  comtes  de  Luxembourg 
et  de  Bar,  continuèrent  à  rester  fidèles  à  Frédéric,  de 
même  que  les  villes  épiscopales  de  la  Lorraine. 

Guillaume  avait  voulu  profiter  de  son  élévation  pour 
accabler  la  comtesse  de  Flandre  et  de  Hainaut,  Margue- 
rite, qu'il  baissait  d'autant  plus  qu'il  était  intimement  lié 
avec  Jean  d'Avesnes;  mais,  après  avoir  provoqué  un  juge- 
ment de  quelques  princes  de  l'Empire  qui  dépouillait  du 
comté  de  Namur  l'empereur  de  Constantinople  Bau- 
douin II,  parce  que  ce  prince  avait,  sans  son  assentiment, 
engagé  le  comté  au  roi  de  France;  après  avoir  donné  le 
Namurois  à  Jean  et  gratifié  celui-ci,  à  l'occasion  de  son 
mariage  avec  sa  sœur  Aleyde,  du  fief  que  les  comtes  de 
Hollande  relevaient  des  rois  d'Ecosse  (27  avril  1248), 
Guillaume  vit  une  attaque  dirigée  contre  la  Flandre  par  son 
frère  Florent  et  son  beau-frère  échouer  de  la  manière  la 
plus  complète  et  consentit  à  un  arrangement  qui  mit  fin 
pour  le  moment  aux  hostilités  (septembre  1248). 

Tout  en  prêtant  son  concours  au  roi  Guillaume,  le  duc 
de  Brabanl  ne  voulut  pas  rompre  avec  la  Flandre  et,  ce 
qui  le  prouve,  c'est  le  traité  d'alliance  que,  cette  année 
même,  il  conclut  avec  Guillaume  de  Dampierre  (I).  D'autre 
part,  le  pacte  par  lequel  lui,  les  comtes  de  Gucidrc  et  de 
Looz  et  l'élu  de  Liège  se  promirent  mutuellement  amitié  et 
secours  contre  tous,  le  17  novembre  (2),  témoigne  que  ces 


il)  Ce  trailé  a  été  publié  clans  le  I.  IV  de  la  Table  clironologiquc  des 
chartes  et  (liplômrs  imprimés  eoncevnanl  l'Iiistoirede  la  Belgique  ,  Iiiti'o- 
duction,  p.  XXX. 

(2)  Butkeiis,  Trophées  'le  Brahaitl,  1.  I,  preuves,  p.  91. 


(  684  ) 

princes  voulaient  surtout  assurer  la  paix  de  leurs  domaines 
et  perpétuer  la  tranquillité  qui  y  régnait  sans  qu'elle  pût 
être  troublée  par  des  querelles  étrangères.  De  légers  débats 
s'élevèrent,  en  1249,  entre  Henri  et  l'élu  de  Liège,  mais 
ils  furent  promptement  assoupis  par  la  médiation  d'ar- 
bitres (1). 

A  la  faveurde  la  politique  adoptée  parHenri  III,  le  Brabant 
continua  à  jouir  d'une  paix  profonde,  et,  en  même  temps, 
grâce  à  sa  position  au  centre  des  provinces  belges,  reçut 
souvent  la  visite  du  nouveau  roi  des  Romains  et  des  princes 
de  l'Empire.  Ainsi  Guillaume  vint  à  Bruxelles  le  14  mai 
1249,  au  mois  de  mai  12o0,  en  juillet  1254;  il  séjourna 
à  plusieurs  reprises  à  Anvers,  en  1252.  Sa  présence  à  ' 
Bruxelles,  en  1250,  fut  marquée  par  un  véritable  congrès, 
où  l'on  mit  fin ,  au  moins  pour  quelques  années ,  aux  causes 
de  guerre  qui  existaient  entre  la  comtesse  Marguerite  et  le 
roi.  Celui-ci  reconnut  qu'il  tenait  en  fief  de  Marguerite 
toutes  ses  possessions  de  la  Zélande,  depuis  l'Escaut  jusqu'à 
la  Hédinzée ,  et  promit  que  le  délai  que  la  comtesse  lui  avait 
accordé  pour  en  opérer  le  relief  ne  porterait  aucun  préju- 
dice aux  droits  de  sa  suzeraine.  Le  roi  consentit  encore  à 
admettre  le  fils  de  la  comtesse,  Guy  de  Dampierre,  à  dé- 
faut de  Guillaume,  qui  était  alors  prisonnier  des  Mame- 
luks, en  Egypte,  à  faire  hommage  pour  les  domaines  que 
Marguerite  tenait  de  l'Empire,  et  promit  d'engager  ses 
parents,  l'élu  tie  Liège,  le  duc  de  Brabant,  les  comtes  de 
Gueldre  et  de  Clèves,  à  se  déclarer  contre  lui  si  lui  ou  les 
siens  n'exécutaient  pas  cet  accord,  et,  en  effet,  le  duc  se 
lia  solennellement  par  une  promesse  de  ce  genre  (17  et 
19  mai). 

(1)  Ibidem,  1.  c. 


(  685  ) 

Tout  un  monde  de  prélats  et  de  barons  entouraient  les 
princes  qui  souscrivirent  à  ces  conventions.  On  voyait,  à 
côté  du  légat  du  saint-siége,  Pierre,  évèque  d'Albano, 
les  évéques  Nicolas  de  Cambrai  et  Pierre  de  Chàlons,  les 
abbés  de  Saint-Trond  et  d'Egmond ,  et,  à  ce  propos,  re- 
marquons que  l'abbé  de  Saint-Trond  Guillaume,  qui  était 
aussi  pléban  de  la  populeuse  ville  d'Aix-la-Chapelle,  jouis- 
sait de  toute  la  confiance  du  roi,  dont  il  était  le  chapelain. 
Autour  de  Guillaume,  du  duc,  de  Marguerite  et  de  ses 
fils  on  remarquait  à  la  fois  des  nobles  brabançons,  tels 
qu'Arnoul  de  Diest;  des  nobles  hollandais,  comme  Gil- 
bert d'Amstel ,  Henri  Buffel ,  Hugues  de  Crelinghen  ,  Henri 
de  Striene,  Simon  de  Zubburg;  les  chevaliers  flamands 
Rase  de  Gavre,  Arnoul  de  Cisoing,  Arnoul  de  Mortagne, 
Jean  de  Ghistelles,  Guillaume  de  Maldeghem,  Thierri  de 
Beveren,  Gérard  et  Eustache  de  Rhodes, Henri  de  HoulFa- 
lise  ,  ce  vieil  ami  des  d'Avesnes,  venu  du  Luxembourg ,  et 
deux  Baudouin,  Hennuyers  d'origine,  Baudouin  de  Roisin 
et  Baudouin  de  Belœil  (1). 

Ratifiée  sans  délai  par  le  légat  et,  bientôt  après  (le 
a  juillet),  par  le  souverain  pontife,  la  paix  semblait 
assurée.  Le  roi  Guillaume,  avec  le  duc  de  Brabant,  le  comte 
de  Gueldre  et  l'élu  de  Liège,  allèrent  même  en  Hainaut, 
où  ils  se  trouvèrent  les  27  et  50  novembre  de  la  même 
année.  Contrairement  à  ce  que  disent  certains  annalistes, 
la  réconciliation  la  plus  complète  parut  s'être  opérée  entre 
Marguerite  et  ses  enfants  des  deux  lits.  Guillaume  de 
Dampierre,  revenu  de  la  croisade,  participa  de  nouveau 
au  gouvernement  de  la  Flandre;  Jean  d'Avesnes,  reconnu 


(1)  Voyez  le  comte  tieSainl-Genoh,  Monumeiils  essenllelleminl  utili'S, 

t.    I,  p.  CCCCCLXXll. 


(  686  ) 
pour  héritier  du  Hainaul,  concourut,  sans  contestation,  à 
l'administration  de  cette  province. 

Le  tournoi  de  Trazegnies,  du  6  juin  1251 ,  et  sa  funeste 
issue  n'eurent  pas  pour  effet  de  modifier  immédiatement 
cette  situation.  En  Flandre,  Guy  de  Dampierre  succéda  à 
son  frère  Guillaume  et  se  fit  recevoir  comme  comte  ;  il 
signala  son  avènement  par  des  mesures  importantes  et, 
notamment,  par  la  substitution  du  droit  de  meilleur  catel 
à  l'odieuse  mortemain ,  de  plus  en  plus  réprouvée  (avril 
1252),  et  par  l'octroi  de  larges  immunités  aux  marchands 
étrangers  (mai  1252).  Jean  d'Avesnes,  de  son  côté,  se 
trouvait  encore  en  Hainaut  en  juin  1252.  Rien,  dans  les 
transactions  officielles,  ne  trahit  l'irritation  extrême  que  la 
mort  de  son  fils  Guillaume  avait  provoquée  chez  la  com- 
tesse Marguerite.  Rien  ne  vient  révéler  l'existence  de  cette 
célèbre  Société  des  ronds,  dont  Jacques  de  Giiyse  parle 
d'après  un  poème  resté  jusqu'à  présent  introuvable  et  dont 
on  a  accepté  le  thème  comme  s'il  reposait  sur  un  fonde- 
ment historique.  Mais  de  vagues  indices  signalent  l'ap- 
proche d'une  tempête  :  on  essaye  de  prévenir  une  rupture. 
Le  pape  confirme  de  nouveau  le  traité  de  paix  conclu  entre 
Guillaume  et  Marguerite  (12  juin  1251  ),  et  presque  en 
même  temps  le  légat  Hugues,  cardinal  de  Sainte-Sabine, 
rappelle  (le  4  juin  1252)  que  le  roi  a  promis  d'admettre  Guy 
de  Dampierre  à  lui  faire  hommage  des  fiefs  impériaux. 
D'autre  part,  le  souverain  pontife,  après  une  longue  en- 
quête, avait  proclamé  la  légitimité  des  d'Avesnes  (17  avril 
1251);  défense  est  faite  de  les  molester,  de  leur  nuire 
(avril  1252).  Ces  précautions  ne  sont  pas  superflues,  car 
le  bruit  public  les  accuse  de  la  mort  de  leur  frère;  les 
germes  de  haine,  couvés  depuis  tant  d'années,  éclatent 
enfin  avec  violence. 


(687) 

Les  d'Avesnes  poussèreiit-ils  leur  protecteur  à  un  éclat; 
Marguerile  fut-elle,  par  ses  colères  et  ses  récriminations, 
la  cause  de  la  rupture?  Graves  questions  qu'il  est  incipos- 
sible  de  résoudre,  en  l'absence  de  témoins  impartiaux. 
Il  est  certain  que  l'on  ouvrit  des  négociations  restées 
infructueuses.  Le  séjour  du  roi  Guillaume  à  Anvers,  les  5, 
14  et  42  juin  1252,  n'eut  probablement  pas  d'autre  cause. 
Mais  bientôt  ce  monarque  s'éloigne  et  son  mécontente- 
ment se  trahit  dans  une  assemblée  qui  se  tint  le  Ll  juillet, 
devant  les  murs  de  Francfort.  La  comtesse  !\larguerite  est 
accusée  devant  les  grands  de  l'Empire  de  n'avoir  pas  prêté 
serment  de  féauté  au  roi;  un  jugement  solennel  déclare 
qu'elle  a  forfait  ses  fiefs  :  d'une  part^  le  comté  de  Namur, 
d'autre  part,  la  Flandre  impériale.  Guillaume  en  reprend 
possession  et  en  investit  aussitôt  Jean  d'Avesnes.  Le  duc 
de  Brabant  se  trouvait  auprès  du  roi.  Quoique  ami  des 
Dampierre,  il  ne  pouvait  ni  s'opposer  à  la  sentence,  ni  refu- 
ser d'y  adhérer,  car  les  motifs  sur  lesquels  elle  se  basait 
étaient  fondés.  Le  pape  Innocent  IV,  qui  ne  s'était  jamais 
montré  hostile  à  Marguerite  et  qui  venait  d'accueillir  une 
demande  des  Dampierre,  réclamant  l'ouverture  d'une  troi- 
sième enquête  sur  la  naissance  des  d'Avesnes  (21  août), 
ne  put  qu'approuver  la  sentence  de  Francfort  et  son  appli- 
cation aux  tiefs  de  la  comtesse  Marguerite  (2-5  décem- 
bre 1252). 

A  cette  époque  se  place  une  maladie  dont  notre  duc  fut 
atteint,  pendant  qu'il  se  trouvait  à  Compiègne.  Il  eut  besoin 
des  services  de  son  notaire,  nommé  Guillaume,  mais  celui- 
ci  était  sous  le  coup  d'une  sentence  d'excommunication 
qui  avait  été  portée  contre  lui  par  ordre  du  pape.  A  la 
prière  du  comte  de  Gueldre,  des  comtesses  de  Flandre  et 
d'Artois,  l'archevêque  de  Reims  ordonna  à  son  olficial  de 


(  688 


lever  l'interdit  qui  pesait  sur  Guillaume  (1).  Ce  fut  vers  ce 
temps  (au  mois  de  février  1253)  que  Henri  III  se  porta  cau- 
tion pour  le  comte  de  Gueldre  d'une  somme  qu'il  devait  à 
Aubert  de  Hangesl  (2);  ce  fut  alors  aussi  qu'il  garantit  à 
sire  Ami  ou  Ameil  de  Rameru,  bourgeois  de  Compiègne,  le 
payement  de  220  livres  parisis  qui  lui  étaient  dues  par  le 
comte  de  Soissons  (3). 

(1)  H.,Deogratia  Remensis  archiepiscopus,dileclisfiliisofBcialibus  nos- 
tris  Remensibus  salutem  in  Domino.  Mandamus  vobis  quatinus  sententias 
excommunicationis  latas  ad  mandalum  vestium,  auctoritateapostolica,  in 
Willeimum  clericum  et  notarium  karissimi  noslri  viri  nobilis  duels  Bra- 
banlie  et  in  onines  participantes  eidem  et  quoscumque  alios  occasione 
ipsius,  ad  inslanciam  Walteri,cantoris  Masolini,relaxelis,usque  ad  inslans 
fpstum  beati  Andrée  apostoli,  salvo  tanien  jure  partis  adverse,  nos  autem 
ad  preces  comitis  Geldrensis  et  Flandrie  et  Alrebalensis  comitissarum, 
maxime  quia  dictus  domiuus  dux  egrotans  apud  Peronam  ad  presens  ser- 
vitio  dicti  Willelmi  indiget,  eidem  W.  super  premissis  gratiam  facimus 
specialem.  Si  vero  dictus  clericus  infra  tempus  predictum  litteras  super 
sua  liberatione  a  vobis  non  reportaverit,  ipsos  Willeimum  et  sibi  partici- 
pantes in  predictas  excommunicationis  sentencias  retrudatis. 

Datum  anno  Domini  M  CC.LII ,  die  Veneris  post  festum  beati  Remigii. 
Reddite  litteras. 

(Cartulaire  de  Brabant  B,  f°  107  \°.) 

(2)  Bulkens. 

(5)  Jean  de  Nesie,  chevalier,  donne  quittance  à  Ami  de  Rameru,  bour- 
geois de  (Compiègne,  d'une  somme  de  220  livres  tournois  que  le  duc  de 
Brabant  lui  devait. 

17  juillet  12o3. 

Je  Jehans  de  NesIe ,  chevaliers ,  sires  de  Faleui,  fais  à  savoir  a  tous 
ciaus  ki  ces  lettres  verront  ke  sire  Amis  de  Rameru,  bourgois  de  Com- 
piengnc,  m'a  payé  onze  vins  livres  de  Tournois  en  deniers  conlens  pour  le 
duc  de  Brebant ,  ki  les  me  devoil  pour  le  conte  de  Soissons,  dont  je  me 
lieng  a  payié  et  s'en  cleim  quite  et  le  duc  et  le  conte  devant  dit.  Et  en 
tiesmoignage  de  ceste  chose  j'ai  mis  mon  seel  à  ces  présentes  lettres  et  les 
ai  baillées  au  devant  dit  bourgois. 

Che  fut  fait  en  l'an  del  Incarnation  mil  deus  cens  et  chincquante  et 
trois  le  semcdi  devant  la  Magdelaine. 

{Cartulaire  des  ducs  de  Brabant  cité,  f.  49.) 


(  689  ) 

Cette  année  12o3  marque  dans  l'existence  de  notre 
prince.  C'est  l'année  où  il  fui  fait  chevalier  (1);  c'est  aussi 
l'époque  de  son  mariage  avec  Aleyde,  fille  du  duc  Hugues 
de  Bourgogne  (2).  Pour  l'engager  à  seconder  avec  énergie  le 
roi  Guillaume,  le  pape  lui  permit,  à  lui  et  a  quelques-uns 
de  ses  principaux  vassaux  (5) ,  de  prélever  à  son  profit  les 
dîmes  novales,  c'est-à-dire  les  dîmes  provenant  de  terres 
nouvellement  mises  en  culture  (11  mars),  concession  qui 
excita  de  vives  réclamations  parmi  les  membres  du  clergé. 
Henri  HI  ne  prit  toutefois  aucune  part  à  la  lutte  qui  en- 
sanglanta alors  la  Zélande.  Les  Flamands,  ayant  débarqué 
dans  l'île  de  Walcheren  sous  le  commandement  des  Dam- 
pierre,  furent  complètement  défaits  à  West-Kappel  par  les 
troupes  de  Florent  de  Hollande,  frère  du  roi  Guillaume,  et 
du  seigneur  de  Voorne  (4  juillet).  Ici,  comme  en  d'autres 
occasions,  Henri  ÎIl  ne  se  mêla  de  la  querelle  que  pour  en 
adoucir  les  désastreuses  conséquences.  Ce  fut  lui  qui  se 
porta  caution  de  la  rançon  du  comte  de  Bar,  l'un  des 
prisonniers  de  West-Cappelle,  rançon  qui  fut  fixée  à 
8,000  marcs  et  dont  le  remboursement  lui  fut  garanti  par 
d'autres  princes  belges,  le2o  mars  1254. 

Marguerite  ne  fléchit  pas  sous  le  coup  terrible  qui  était 
venu  la  frapper.  Elle  pouvait  compter  sur  le  dévouement 
des  communes  flamandes,  et  en  particulier  des  Gantois, 
qu'elle  autorisa  à  accroître  l'étendue  de  leur  ville,  principal 
boulevard  de  la  Flandre  vers  le  nord  et  vers  l'est  (29  juin 
12o4).  Pour  s'assurer  un  puissant  défenseur,  elle  aban- 


(1)  Chronicon  Parcense,  dans  Pertz,  Monumenta  Germaniae  histo- 
rica,  Scriptores,  l.  XVI,  pp.  398  et  suivantes. 

(2)  Ibidem. 

(3)  Entres  autres  le  parent  du  duc,  Godefroid,  seigneur  de  Perwez. 


(  690  ) 
donna  la  possession  du  Hainaut  à  Charles  d'Anjou,  frère 
du  roi  Saint-Louis,  qui,  mis  en  liberté  par  les  Sarrasins, 
n'était  pas  encore  revenu  de  la  croisade,  et  n'aurait  pas 
toléré,  sans  doute,  une  pareille  atteinte  à  ses  décisions 
antérieures  et  aux  droits  de  l'Empire  d'Allemagne.  Elle 
pouvait  compter  sur  l'appui  de  Marie  de  Brienne  ,  impéra- 
trice de  Constantinople,  qui  gouvernait  le  comté  de  Namur 
au  nom  de  son  mari,  l'empereur  Baudouin  II,  et  se  main- 
tenait imperturbablement  dans  Namur;  elle  comptait  dans 
la  bourgeoisie  de  Liège  des  partisans  qui  manifestèrent 
leurs  sympathies  pour  elle  lorsque  l'élu  Henri  appela  ses 
sujets  aux  armes  pour  la  défense  de  l'Église  de  Liège  contre 
la  princesse  qui  détenait  le  comté  de  Hainaut,  fief  de  l'évê- 
ché,  et  dont  le  chef,  Henri  de  Dinant,  chercha  dans  la  suite 
un  reluge  à  sa  cour.  Elle  ouvrit  des  négociations  avec  le 
puissant  et  belliqueux  Conrad,  archevêque  de  Cologne, 
qui,  après  avoir  soutenu  le  roi  Guillaume,  venait  de  rompre 
avec  lui,  et  ces  négociations  aboutirent  à  la  conclusion 
d'une  ligue  offensive  et  défensive  entre  elle,  le  comte  d'Anjou 
et  Conrad  (août  1254).  L'interdit  avaitété  jeté  sur  la  Flan- 
dre, à  cause  de  sa  désobéissance  aux  ordres  du  légat; 
Marguerite  en  appela  au  saint-siége  et  réussit  à  le  faire 
lever  (14  mars  1254).  Ainsi  secondée  et  encouragée,  Mar- 
guerite pouvait  opposer  une  sérieuse  résistance  au  roi 
Guillaume,  dont  l'autorité  n'était  reconnue  que  dans  une 
faible  partie  de  l'Allemagne. 

Ses  ennemis  opposaient  à  ses  efforts  des  efforts  non 
moins  énergiques.  Jean  d'Avesnes  avait  inféodé  le  comté 
de  Namur  à  Henri ,  comte  de  Luxembourg;  le  roi  Guil- 
laume donna  son  approbation  à  celte  mesure,  à  laquelle, 
lui  en  qualité  de  souverain  de  l'Empire,  et  l'élu  de  Liège  , 
comme  suzerain  du  Hainaut,  duquel  relevait  le  comté  de 


(  691  ) 
iXamur,  donnèrent  une  éclatante  sanction,  dans  une  as- 
semblée qui  se  tint  à  Malines,  le  12  février  12o4.  Pour 
vaincre  l'opposition  des  bonrgeois  de  Liège,  laquelle  gran- 
dissait de  jour  en  jour,  le  roi  condamna  leurs  usurpations 
sur  la  juridiction  attribuée  par  d'anciens  diplômes  impé- 
riaux au  clergé  de  cette  ville,  et  les  déclara  astreints  à 
prendre  les  armes  pour  la  défense  des  possessions  de 
l'église  de  Saint-Lambert  contre  Charles  d'Anjou  (8  janvier 
1234).  Eniin,  au  moyen  de  nouvelles  faveurs,  Guillaume 
s'assura,  dans  la  lutte  qui  se  préparait,  l'assistance  du 
comte  de  Gueldre  (I"  juin  1254).  Avant  de  tourner  ses 
armes  contre  son  redoutable  adversaire ,  Guillaume  se  bâta 
d'envahir  la  West-Frise,  dont  les  habitants  avaient  pris  les 
armes  contre  lui,  y  livra  une  combat  où  ses  ennemis  perdi- 
rent environ  1,500  hommes,  et  ravagea  leur  pays,  puis  il 
entreprit  cette  expédition  du  Hainaut  dont  on  ne  trouve 
un  récit  détaillé  que  dans  Jacques  de  Guyse,  où  les  faits 
sont  entremêlés  de  maintes  erreurs,  qui  seront  étudiées 
dans  un  travail  ultérieur. 


Orerblijfsels  van  den  instrumenlaal  in  het  ISederlaiidsch  ; 
door  M.  J.-F.-J.  Heremans  ,  briefwisselend  lid  der  Aca- 
démie. 

Men  weet,  dat  het  Oudindisch  acht  naamvallen  bezit  : 
nominatief,  vocatief,  accusatief,  genitief,  dalief,  ablatief, 
locatiefen  instrvmenlanl.  Het  Latijn  heeft  er  zes,  en  het 
Grieksch,  evenals  het  Nieuwhoogduilsch  en  Nieuwneder- 
landsch,  slechls  i)îy/'behouden.  Er  was  nochtans  een  tijd, 
dat  de  verschillendeEuropeesche  talen,  zoowel  als  het  Oud- 
indisch, acht  naamvallen  telden  ;  doch  reeds  zeer  vroeg 


(  692  ) 
zljn  in  het  Nederlandsch  de  vormen  van  den  ablatief  en  den 
locatief  verloren  gegaan.  Wat  bij  onze  voorouderen  bij 
middel  van  den  ablatief  en  den  locatief  vverd  uitgedrukl, 
geschiedde  later  bij  middel  van  eenen  anderen  naamval  » 
die  langer  bewaard  was  gebleven,  of  bij  middel  van  een 
voorzetsel  gevolgd  van  een  zelfstandig  naamwoord  of  een 
voornaamwoord.  De  instrumentaal  is  het  laatst  uit  onze 
taal  verdwenen. 

In  het  Oudindisch  heeft  men  eenen  bijzonderen  vorm 
voor  den  instrumentaal,  zoowei  in  het  enkel-  als  in  het 
meervoud  :  in  het  tweevoud  is  hij  echter  van  den  datief 
en  den  ablatief  reeds  niet  meer  te  onderscheiden.  Bij  en- 
kele  woorden  gaat  hij  in  het  Grieksch  van  Homerus  op 
-fi{v)  uit;  doch  meest  altijd  wordt  hij  in  die  taal  door 
den  datief  en  eene  enkele  maal  door  den  genitief  vervan- 
gen.  In  het  Latijn  treedt  de  ablatief,  en  voor  de  woorden, 
die  geenen  bijzonderen  vorm  voor  den  ablatief  bezitten,  de 
datief  in  de  plaats  van  den  instrumentaal.  Het  Gothisch 
heeft  slechfs  voor  eenige  voornaamwoorden  eenen  bijzon- 
deren vorm  voor  den  instrumental  bewaard.  In  het  Oud- 
hoogduitsch,  Angelsaksisch  en  Oudsaksisch  komt  hij  veel 
meer  voor,  terwiji  hij  in  het  Nederlandsch  eenige  sporen 
heeft  achtergeiaten. 

Het  grondbegrip  van  den  instrumentaal  is  samen  zijn, 
gemeenschap  (1). 

In  het  Oudindisch  is  de  instrumentaal  tweeëriei.  Men 
onderscheidt  in  die  taal  den  sociatieven  inslrumentaal  en 
den  instrumentaal  des  tiiiddels. 

De  socialieve  inslrumentaal  duidt  aan  : 


(1)  Vgl.  Dr.  B  DELBRiicK.  Ablatif,  localis,  instrumenlalis.  Berlin,  1867. 


(  693  ) 

1°  Verscheidene  personen  of  zelfstandig  gedacbte  we- 
zeDs,die  met  eenen  hoofdpersoon  verbonden  zijn;  aïs  : 
Agnir  devébfiir  a  gamat,  Agni  kome  met  de  goden  aan 
(Rigveda,5,10,4). 

2°  De  orastandigheden,  die  met  eene  werking  gepaaid 
gaan,  of  de  eigenschappen,  die  tôt  een  ding  behooren; 
aïs  :  Indram  a  viça  brihala  râvena,  ga  met  groot  ge- 
schrei  naar  Indra  (Rigveda,  9,97,  o6),ût  sunjo  jyôtisfid 
devâ  eti,  de  goddelijke  zon  stijgt  op  met  licht  (Rigveda , 
4,13,1). 

3"  Die  deelen  van  de  ruimte  of  den  tijd,  waarover  zich 
eene  werking  onafgebroken  uitstrekt  ;  aïs  :  préhi,  préhi 
pathibhih  pûrvyébhih,  ga  heen ,  ga  heen,  langs  de  oude 
paden  (Rigveda,  10,  \A,l);pûrvî'bhir  hi  dadàçimà  ça- 
râdbhir  maruto  vayàm,  de  vroegere  jaren  door  hebben 
wij,  0  Maruts,  u  gediend  (Rigveda,  1 ,  86,  6). 

4°  Vereeniging;  aïs  :  Vischnuna  sacânàh,  te  zamen  met 
Vischnu  (Rigveda ,  6 ,  20 , 2} ,  en 

5"  Vergelijking  ;  aïs  :  tena  tuluah,  hem  gelijk  (Manus 
welboek,  4,  86). 

De  instrumentaal  des  middels  duidt,  gelijk  zijn  naam 
het  te  kennen  geeft,  het  middel ,  het  werktuig  aan,  waar- 
mede  eene  werking  wordt  verrichl;  als  :  catâm  càkshdno 
akshàbhih,  met  honderd  oogen  ziende  (Rigveda,  1, 128, 3). 

Sociatieve  inslrumentaal. 

Wat  hebben  wij  van  den  sociatieven  instrumentaal  in 
het  Nederlandsch  overgehouden? 

Wij  zagen,  dat  de  instrumentaal  wordt  gebruikt  om 
eene  vergelijking  aan  te  duiden.  ïn  de  zoogenoemde 
«  Freekenhorster  Heberolle  »    (Moritz   Heine,   kleinere 


(  69i  ) 
Altniederdeutsche  Denkmâler,  blz.  66)  lezen  wij  :   Wîk- 
mund  an  ihemo  selmn  thorpa  ende  Dagerâd  eiide  Azeku 
(dligiliko  imo.  Àlli  in  alligiliko  zal  wel  een  instrumen- 
taal  wezen. 

Bij  onze  Middelnederlandsche  schrijvere  treffen  wij 
mede  het  woord  gelijk  enkele  nialen  mel  den  inslrumen- 
taal  aan  : 

Dus  quam  die  vard  in  Vranivrike , 
In  Ingheianl ,  in  Vlaendien  die  gelike. 

V*,N  Velthem  ,  Spiegh.  hist  ,  135. 

Van  den  lande  van  Vrancrike 
Ende  van  andren  lande  die  gelike. 
Id.,  ibid,  loi. 

Hère,  soe  seggict  u  dan, 
le  ben  ridder  ende  vri  man, 
Ende  dese  andren  die  gelike. 

Claes  Verbbechten,  Belg.  Mus.,  VI! ,  1M8. 

Ende  sprac  loi  hem  dese  gelike. 

Der  Yslorien  Bloeme,  21. 

Ende  des  ooc  noyl  en  hadde  machl, 
Coninge  van  Vrancrijcke , 
Noch  ooc  Scollen  die  gelike. 

i.  V.  BoENDALE,  Belg.  Mus.,  IV,  308. 

Later  ging  de  insti  umenlaal  die  in  die  gelike  in  den  ge- 
nilief  des  over  en  sclireef  men  desgelijks. 

Ook  in  de  voornaamvvoorden  n^elk  en  zulk  (Middelnedei- 
landsch  welc  en  sek)  is  dergelijk  een  instrurnentaal  voor- 
handen.  Welk  an  zulk  luiden  in  het  Gothisch  hveleiks , 
/tvileiks,  en  svaleiks,  in  het  Oudfriesch  Itvelik  en  selik,  in 
liet  Oudsaksisch  hivilik,  sidîk,  in  het  Oudnederlandsch 
huilik ,  huelik,  uuelik,  iiuilik,  en  suiik;  in  ai  deze  vvoorden 
is  de  instrurnentaal  gevolgd  van  leiks,  lik,  nog  zeer  wel 
le  erkennen. 


(  695  ) 

Jnstrumentaal  des  middels. 

Wij  vinden  den  instrumentaal  des  middels  nog  menig- 
vuldig  in  het  enkelvoud  zonder  voorzetsei  gebruikt  in  het 
Oudhoogdiiitsch,  bel  Oudnoordsch,  het  Angelsaksisch  en 
het  Oudsaksisch.  Wanneer  men  later  de  kracht  van  den 
instrumentaal  had  vergeten,  zette  men  het  voorzetsei  mith, 
mid,  mit,  met,  vôdr  het  substantief  of  het  voornaamwoord, 
die  echter  nog  eenen  tijd  lang  den  eigenaardigen  uitgang 
van  dezen  naamval  behielden,  totdat  eindeiijkdeze  uitgang 
door  dien  van  den  datiefgeheel  werd  vervangen.  HetNeder- 
landsch  heeft  den  instrumentaal  des  middels  slechts  behou- 
den  in  de  oude  bijwoorden  wi,  wie,  wied[e)wijs  en  de 
bijwoorden  hoe  en  zoo  (Middelnederlandsch  so,  soe),  en  de 
als  bijwoorden  gebruikte  ie  en  de,  di, die. 

Wi,  wiE,  met  de  beteekenis  van  op  welke  wijze  is  de 
instrumentaal  van  het  vragend  voornaamwoord  ivie,  Go- 
thisch  hvas,  Angelsaksisch  hva,  Oudfriesch  hva,  Oud- 
saksisch hwe  eu  Oudnederlandsch  hue  of  unie,  dat  ook  wel 
eens  in  eenen  relatieven  zin  werd  gebezigd  : 

Ooc  segghen  die  propheten, 

Dat  Golder  werell  heefl  verheten, 

Menich  jaer  hier  te  voren, 

Dat  eeu  man  soude  sijn  gheboren, 

Met  miraclen  ende  ic  weel  wi. 

i.  V.  Mabrlànt,  Alexander ,  il ,  ^08. 

Wi  seggict  hem ,  ic  segge  mi  commer. 
Ferguut,  46. 

Die  eersle,  segghic  di  wel  icie 
Men  die  ziele  versiaet  dare. 

J.  V.  BoENDALE  ,  Die  X  plaghen  ;uitgeg.  door 
Snellaerl),  385. 


(  696  ) 

Wi  qualec  dat  hi  heeft  geleeft 

Broeder  Ghehiert,  S"Christina,  XXI ,  verso. 

Wie  langhe  seldi  rai  van  minen  Hère 

Ende  van  sinen  aiiscine  verren? 

Wi  langhe  seldi  mi  hier  doen  merren  ? 

Id.,  ibid.,  XLII ,  verso  ,  en  XLIII ,  recto. 

Wie  supliji  dat  haer  heileghe  lichame  was. 
Id.,  t6«d.,  XniJ,  reclo. 

Hierna  voighet  ivie  dal  si  doet  was. 

Id.,  ibid.,  V,  verso. 

Nevens  dit  wi,  wie,  staat  dikwijis,  in  tautologisch  ver- 
band,  het  gelijkbeteekenende  hoe  (Gothisch  hve,  Ange!- 
saksisch  hu),  evenals  wi,  wie,  instrumentaal  van  hue  of 
unie  : 

Maer  hine  wiste  toie  oft  hoe 
Hire  wel  mochte  comen  toe. 

Lancelol  ,1,  123. 

Dan  saldi  pensen  ^vie  ende  hoe 
Gi  gaen  niochl  inder  slralen, 
Daer  gi  die  scone  in  hebt  gelaten. 

H.  V.  Akbn,  Die /iose  (uilgeg.  d.E.  Verwijs),  5S. 

De  inslrumenlaal  ivi,  wie,  komt  mede  voor  in  de  sa- 
luenslelling  iviedewijs,  wiedwijs,  die  men  zoo  vaak  in  de 
S'^  Christina  van  Broeder  Gheraert  aantreft  :  Wat  si  ghe- 
doegfit  hadde  ende  wiedwijs  datd  ware  (Vf.  verso);  wied- 
wijs, dat  si  ind  waler  giiic  ende  ter  ander  ziden  overquam 
(X.  recto);  wiedwijs  dat  si  ivas  gepijnd  in  den  viere  (XI. 
recto)  ;  wiedwijs  dat  si  langhe  lach  ind  water  (XII.  recto); 
wiedewijs  dat  haer  scène  was  gebroken  (XV.  recto)  ;  wied- 
wijs  dat  olie  vloijde  van  haren  borsten  (XVll  reclo),  enz. 

Wi,  wie,  wied[e)wijs  zijn  sedert  eeuwen  uit  onze  taal 
verdwenen . 


(697) 

Het  bijwoord  zoo,  Oudnedeiiandsch  sô,  Middelneder- 
landsch  so,  soe,  stemt  overoen  met  den  Golhischen  instru- 
mentaal  sve,  sva,  welke  beiden,  evenals  bij  ons  zoo,  nog 
alleen  als  bijwoorden  werden  gebruikt.  Die  instrumen- 
taal  is,  gelijk  wij  reeds  hooger  zegden,  in  het  Gothische 
svaleiks,  Oudnederlandsche  suHk,  Middelnederlandsch  selc 
versmolten.  Wij  vinden  hem  ook  nog  in  het  Gothische 
svalauds  (zoo  groot,  zoo  veel). 

Je,  je,  ye,  instrumentaal  van  het  pronomen  demonstra- 
(ivum  i  (Golhisch  is),  dat  in  het  iMiddehiederlandsch  nog 
slechts  als  encliticum  achter  de  werkwoorden  voorkomt 
{fjeefli,  geeftEM,  (jeeftEi^),  wordt  als  het  Latijnsche  eo  vddr 
eenen  comparatief  gebruikt  : 

Ende  daeit  je  lanc  so  mère. 

J.  V.  Maerlant  ,  Wap.  MartiJ7i  (uilgeg.  door 
E.  Verwijs) ,  4. 

So  maken  die  heren  een  gespan 
Om  dogel,  ie  lanc  so  mère. 

Id.,  Verkeerde  fVapen  Martijn  ,  90. 

Ende  claghdeu  ie  lanc  zo  mère. 

J.  V.  BoENDALE,  Dev  Leheïi  Spiegh.,  I,  131. 

Die  men  daer  hoort,  ye  lanc  zo  mee. 

Id.,  ibid.,  I,  SI. 

So  daelde  Romen  ye  lanc  zo  mère. 

Id.,  ibid.,  1 ,  134. 

In  ie  lanc  so  mère  is  lanc  geen  stellende,  maar  een  ver- 
gelijkende  trap,  waarvan  de  kenmerkende  comparatief- 
uitgang,  evenals  bij  min  en  de  onde  comparatieven  ivers 
(erger),  bat  en  6e^(beter),  is  weggevallen.De  comparatieve 
beteekenis  ging  echter  niet  verioren. 

In  het  Middebîederlandsch  bestaat  nog  een  ander  ie, 
dat  niets  gemeens  heeft  met  den  vdor  den  comparatief  ge- 

2""^  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  45 


(  698  ) 
bruiklen  instrumentaal  van  den  demonstratiefstam  i.  Het 
bijwoord  van  tijd  ie,  in  helGothisch  a^y(van  hetzelfstandig 
naamvvoord  aivs)  beteekent  oo«7,  immer. 

Ook  de  instrumentaal  de,  di,  die  (van  den  slam  thia), 
bâter  tôt  te  verbasterd,  staat  vôôr  eenen  comparatief. 

In  àan  Hêliand  {i) ,  waar  die  instrumentaaU/tm  luidt, 
lezen  wij  : 

TrùôduH  sie  sidhor  thiu  mêr  an  is  mund-burd  (biz.  49). 

Tfiat  sie  gitrûôdin  thiu  bel  gilàbdin  an  is  lêrâ  (blz.  56). 

Gilàbho  thiu  betara  an  thena  hélagon  Krist  (blz.  56). 

Zoo  ook  in  het  Middelnederiandsch  : 

Ende  singhet  de  naernsleliker  bel. 

J.  V.  Maerlant,  JVaiMCen  B/oe»ie  (uilgeg.  door 
Bormans) ,  407. 

Die  de  levere  van  der  gheet 
Elet,  siet  des  avonls  vêle  de  bel. 

Id.,  ihid.,  85. 

Hem  soude  de  bel  sijn  taire  stonde, 
Aise  die  quade  gheesl  hem  bezate. 

Id.,  fiîjwiftijôe/,  I,  406. 

Scuwe  altoos  die  sondaren 
Du  sait  ailoos  de  bel  varen. 

Id.,  ibid.,  II,  119. 

Ende  de  meer  le  drinkene  mint. 

Id.,  Dispulacie  van  onser  Vroutven  ende  van 
den  Cruce,  211. 

Dikwijis  vvordt  die  met  meer  tôt  één  woord  samenge- 
trokken  : 

Diemeer  hire  negheen  en  sach. 

Parlhonopeus  van  Bloys   (uitgeg.  door  Bor- 
mans), 27. 


(1)  W^/ia?td  herausgegeben  von  Morilz  Heine.  Paderborn,  1866. 


(  699  ) 


Diemeer  was  hi  grau  ende  ont. 
Ibid.,  52. 

Dimer  \\\\A\  nerenstelike, 

le  sal  u  wel  behendelike 

Dien  raet  doen,  dal  soe  u  gorde. 

Ihid.,  132. 

Diemeer  verghevict  u  nlet  das, 
Dal  gijs  noch  suit  trecken  achler. 
Ibid.,  251. 

In  de  varianlen  van  den  Parthonopeiis  ontmoeten  wij 
twee  maal  het  woord  dember  : 

Dember  was  si  vêle  onvroet  das, 
Wat  hi  meende  ende  wie  hi  was. 

195 

En 

Die  vrouwe  heeft  sijn  weddegenomen, 
Dember  en  heeft  si  niet  vernonien, 
Door  welke  sake  hij  hare  gaf. 

196. 

Dit  dember  heeft  denzelfden  zin  als  diemeer.  Het  is  sa- 
mengesleld  uit  den  instrumentaal  de,  di  of  die,  met  em- 
ber,  hetwelk  voortkomt  van  ie-meer,  emmer,  ember  (het 
latere  immer),  met  verandering  van  m  in  b  achler  eene  m, 
geiijk  dit  meermaais  geschiedt.  le  in  iemer  is  hier  niet  te 
verwarren  met  den  instrumentaal ,  welken  wij  in  ie  laii/j 
so  meer  hebben  onlmoet  :  ie  in  iemeer  koml  overeini  met 
het  Golhisch  aiv,  het  Oudhoogduitsche  èo,  het  Oudneder- 
landsche  io ,  in  den  zin  van  allijd,  steeds. 

Toen  men  in  de  bel,  de  meer,  ie  lanrj  en  dergeiijke  uit- 
drukkingen  de  kracht  van  den  instrumentaal  niet  meer 
gevoelde,  maakte  men  van  de  le  en  van  ie  hoe ,  en  later 
voegde  men  nog  ter  versierking  van  te  erden  genilief  r/^.v 
voor  :  niet  te  min,  des  niet  te  min;  te  bêler,  des  te  belcr; 
te  meer,  des  te  meer. 


(  700  ) 

Voorzetsels  met  den  instrumentaal. 

De  voorzetsels,  die  den  instrumentaal  beheerschlen , 
heteekenden  oorspronkelijk  samen  zijn. 

(n  hel  Oudindisclî  wilden  de  voorzetsels  sa-,  sahâ,  sâkâm, 
sniàt,  sàcà,  welke  den  zin  van  met  hebben,  den  instrumen- 
taal. 

Het  voorzetsel  mid,  mit,  met  (dat  methet  Oudindische 
smât  verwant  is)  regeert  zeer  vaak  in  het  Oudhoogduitsch 
en  Angelsaksiscli  den  instrumentaal.  In  den  Hèliand  vin- 
den  wij  : 

Al  bifieng  mid  ônu  wordu  (blz.  4). 

Enig  word  sprekan,  giinahiian  mid  is  mûdhu  (blz.  7). 

Tfiat  siu  simbla  thana  bed-skepi  buggean  skolda,  fri  mid 
ira  ferhu  (blz.  10). 

Unard  tliiu  wirdhid  therô  giimonô  liugi  aivekid  mid 
wînu  (blz.  49.) 

Biwand  ina  mid  wâdiu  (blz.  H). 

It  al  mid  ànviWm  obharsèu  (blz.  61), 

Wid/iardsiandau  mid  strîdu  (blz.  55). 

In  het  Middelnederlandsch  zijn  nog  enkele  voorbeelden 
overgebleven  van  den  instrumentaal  voorafgegaen  van  het 
voorzetsel  tnet  : 

Ende  nam  dat  rike  al  7net  aJlc. 

J.  V.  MiERLANT,  Rijmbijbel,  I,  102. 

Een  uinl  quam  van  westen  7net  aile. 
Id.,  ihid.,  1,  178. 

Ondoe  den  visch ,  ende  al  met  allé 
Hoiit  herte ,  levi'e  ende  galle.     . 
\n.,ibid.,  H,  123. 

Nein  van  deu  vissclie  die  galle 
Ende  beslreker  mede  aile  met  aile. 

\D.,ihid.,\\,  132. 


(  701  ) 


Es  hi  oec  siec  van  der  galle 
So  bespaers  sijn  aes  met  aile 
Met  pulvere  van  wiilghe  blonien. 

Id.,  Naturen  Bloeme  (uilgeg.  door  Borman*). 
319. 

le  dancte  u  oec,  minne,  haddijs  verdient 
Met  aile  aise  een  uwer  armer  vrieut. 

Zuster  Hadewuch  ,  I.  143. 

Noch  en  wach  in  ongbevalle 

Deseonwille  al  met  aile, 

Grave  Willem  niel  s^vaer  genoecli. 

Melis  Stoke  ,  II  ,  21. 

Ende  slac  her  Lambrecht  met  gewout 

Die  van  den  geslechtevvale 

Geboren  was  van  Wesemale 

Dat  hi  dool  met  aile 

Voor  sijn  voele  quam  gevallen. 

Grimb.  Oorlocj,  I,  163. 

Hetschijnt  mij,  dat  in  vers  41  van  Jacob  van  Maerlants 
Van  den  Lande  van  Overzee  : 

In  weeklen  zilslu  hier  versmoert, 
Zo  dat  met  di  is  onghehoert 

Gods  lachter  ende  zine  scande. 

di  alseen  instrumentaal  voorafgegaan  van  met  moel  wor- 
den  beschouwd.  Met  di  zal  hier  vvel  de  beteekenis  hebben 
van  daarmede,  daaroin,  om  die  reden. 

In  niet  met  aile,  toi  niemendal{le)  verbasterd,  koml 
insgelijks  de  instrumentaal  aile  met  het  voorzetsel  met. 
voor. 

Ook  het  oude  voorzetsel  bet,  dal  lot  met  staat  als  het 
Grieksche  izé^a.  tôt  per^,  wilde  den  instrumentaal.  In  bed- 
eene[n)  voor  met  eene{n)  wordt  dit  voorzetsel  nog  in  som- 
niige  gewesten  van  Nederland  gehoord.  In  de  Oudneder- 


(  702  ) 

landsche  Psalmen  van  den  tijd  van  Karel  den  Grootekomt 
het  niede  voor  :  daar  Iiiidt  hel  Oit;  doch  de  twee  vrouwe- 
lijke  zelfslandige  naamwoorden  hebben  in  de  taal  van  die 
Psalmen  geenen  bijzonderen  vonn  voor  den  inslrumentaal, 
die  met  den  datief  is  samengesmolten  :  Mendiât  him  mit 
bevungon,  exullate  ei  cum  tiemore  (Ps.  2,  \\)\  bit  stim- 
mon  mînere  te  Gode  riep  ik,  voce  mea  ad  Deuni  clamavi 
(Ps.  3,  4). 

Het  Middelnederlandsclî  hceft  den  instrumentaal  met 
het  voorzetsel  bet  behonden;  doch  siechts  met  het  voor- 
naamwoord  aile  : 

Maer  des  en  doewi  niel  al  bed  aile. 

Parthonofjeus  vati  liloys  ,  260. 

Die  bisschop  en  was  niet  gewone, 
Van  liem  le  welene  al  bed  aile. 

Der  Yslorien  Bloeme,:ifi. 

Waiil  hi  ons  allen  heeft  gemaecl 
Ende  weder  verlosl  van  den  vaile, 
Dieu  \vi  vielen  aile  bed  aile. 

Ibid.,  97. 

Ende  en  wiste  albedalle  niel  wat  dit  bediede  (Bijbel  van 
1477,  1,  Sam.  XX,  59).  —  Mer  Anna  sprac  in  haer  herte 
ende  aliène  ruerden  haer  lippen  ende  men  hoerde  haer 
stemme  albedalle  niel  {Ibid.,  I,  1o). 

Ende  si  en  belen  albedalle  niot  in  Israhel,  daller  lijf- 
tochle  toebehoorde  {Ibid.,  Richl.,YI,  4). 

Soe  en  verloren  wi  niel  aile  bedalle  {Ibid.,  Sam.  XXV, 
15). 

Ende  niemant  al  bedalle  en  slac  jegen  hem  (Richt. 
XV1II,7). 

Nog  andere  voorzelsels  wordcn  met  den  instrumentaal 
aangelroffen. 


(  703  ) 

In  het  Gothisch  vindt  men  dien  naamvaî  met  bi  en  du , 
doch  alleenlijk  in  de  als  bijwoorden  gebruikte  bihve,  bithe, 
diihve,  dut  fie. 

In  het  Oudsaksisch  hoeft  men,  behalve  mid,  de  volgende 
voorzetsels  raetden  instruraentaal  :  aftar,  an,  bi[be),  fora, 
te,  undar,  ividh  en  widhar.  Evenals  de  Gothische  bi  en  du 
liomen  deze  voorzetsels  éditer  slechts  met  thiu  en  hwi 
voor. 
Aftar. 

That  wardh  thuo  al  mid  wordon  godes  fasto  bifangan 
endi  gifriimid  aftar  thiu  (Hèliand,4). 

Hie  gisah  thâr  aftar  thiu  ênna  engil  godes  [Ibid.,  o). 

Thô  Avardh  sàn  aftar  thiu  mahl  godes  gikûdhid  {Ibid.,1). 

Bêd  aftar  thiu  that  wîf  wurdhi-giskapu  (/6/f/.,  7). 
An. 

Lâte  im  ginôgî  an  thiu  [Ibid.,  37). 

Ati  thiu  mag  he  thiod-godes  willeon  giwirkean  {Ibid., 
76). 

An  thiu  Ihe  ik  hebhan-rîki  gehalôn  môli  {Ibid.,  77). 
Bi,  be. 

Be  thiu  skiilun  mîdhan  filu  erlôs  èdh-wordô  {Ibid.,  57). 

Bi  thiu  sksil  ik  iu  nu  te  wârun  wordun  gibeodan  {Ibid., 
37). 

Be  thiu  ni  gornôt  gi  umbi  inwa  gegarnwi  {Ibid.,  40). 

Be  hwi  ni  hètis  thu  than  werdhan,  ef  thu  giwald  habes, 
allarô  barnô  belst,  brôdaflhesun  stênun?  {Ibid., '2,6.) 

Be  hwi  lèdis  thu  mi  thèse  liudî  tô?  {Ibid.,  114.) 
Fora. 

Fora  thiu  gi  wardôn  skulun  {Ibid.,  103). 
Te. 

Thô  ni  was  lang  te  thiu  {Ibid.,  10). 

Sô  is  môd  te  thiu  giflihid  widhar  is  fîunde  {Ibid.,  35). 


(  704  ) 
Nis  nu  lang  te  thiu,  ihat  sia  slrômôs  skulun  stiirun 

werdhan  {Ibid.^  54). 
Te  hivi  gi  thus  an  ganga  kumad,  gifaran  an  fâdhie? 

(/6ï(/.,15). 
Te  whî  habhas  thu  Ihes  êniga  meda  fon  gode,  efdha  lôn 

an  themu  is  liohte  {Ibid.,  37). 
Te  ivhi  wêt  Ihi  thés  vvaldand  thank,  thés  thu  thîn  sô 

bifilhis  endi  antfàhis  eft  Ihan  thu  wili?  {Ibid.,  37). 
Undar. 

Undar  thiu  wirdhid   therô  gumonô  hugi  awekid  mid 

wînu  [Ibid.,  49). 
That  folk  slillo  bêd,  sat  gisîdhi  mikil,  undar  thiu  he... 

thena  meta  wîhida  {Ibid.,  68). 

WlDH. 

Ni  làtan  usa  fera  widh  thiu  wihtes  wirdhig  [Ibid.,  95). 
Thaï  he  gàbi  is  drohlin  widh  thiu  [Ibid.,  106). 

WlDHAR. 

Wesat  iu  sô  vvara  widhar  thiu,  widh  irô  féknon  thar 

[Ibid.,  45). 
He  ist  garu  simbla  widhar  thiu  le  gebhavene.  [Ibid., 

45). 
Sô  skal  allorô  erlô  gihwes  werk  gelhîhan  widhar  thiu 

Ihe   hi  Ihius  mîn  word  frumid ,  haldid  héiag  gebod 

[Ibid.,  44). 

In  het  Oudnederlandsch  heeft  bi  den  inslrumenlaal  ; 
Bethiu  ne  up  standanl  ungenelhege  in  urdeile  (Ps.  I, 
V.  5). 

Bethiu  halta  sia  overmuodi  (Ps.  72,  v.  6). 
Bethiu  bekeret  werlhe  foie  min  hiera  (Ps.  72, 10). 
Be  tvie  wânit  gi  bergà  giquahlit?  (Ps.  67, 17). 
Be  wie,  gol  beuuirpistu  an  ende  (Ps.  73,  1). 


(  70o  ) 

Van  Ihiu  that  ik  èrist  sundia  werkian  bigonstn  vindcii 
wij  in  eene  biecht  der  negende  eeuw,  voortkomende  uit 
het  vrouwenkloosler  te  Essen,  en  le  thiu  in  de  verlaling 
van  eene  homélie  van  Beda  (1). 

Behalve  de  hooger  reeds  opgegeven  voorzetsels  met  en 
bel  ontmoelen  wij  in  hel  Middelnederlandsch  bi  of  be  en 
te  insgelijks  met  den  instrumentaal;  doch  wat  bi  oï  be  be- 
treft,  met  de,  di  ofdie,  en  voor  te  met  m,  wie,  als  bijwoor- 
delijke  samenstellingen. 

BeDI,  BIDI,  BEDE,   BEDIE  ,  BEDY. 

Bedi  mesdoel  bi  ende  lieghet. 

J.  V.  Mabrliht,  lUjmbijbel,  I,   14. 

Bedi  bleefl  van  der  lovien  droghe. 
1d.,  ibid.,  I,  23. 

Maken  wi  hem  oec  bedi 
Helpe  die  hem  ghelijk  si. 

Id.,  ibid.,  1 ,  25. 

Nichodemus  sprac  nu  hoort  : 
Is  die  rechter  sijii  jonghere ,  bidi 
Dal  hine  gherne  hilde  vri. 

J.v.  BoENDiLE,  Leken  Spiegh,  II,  184. 

En  bede  dal  dusdaen  wonder 
Sonder  redene  niet  es  besonder 

MelisStoke,  1,401. 

Bedie  hij  eens  deels  is  onsint. 

J.  V.  BoENDALB,  Leken  Spiegh ,  1,  83. 

Dal  was  bedie  dal  si  vrucble. 

Id.,  ibid.,  35. 

Dat  es  bedie  dal  soe  dies  gheert. 

Id.,  ibid.,  53. 


(1)  Kleinere  AUniederdeutsche  Denkmaler,  herausgegeben  von  Moritz 
Heine.  Paderborn,  1867. 


(  706  ) 

Bedif  so  sijn  sij  aile  gheest. 

Id.,  ibid.,  I,  SI. 

Bedij  haer  werke  die  sijn  ries. 

lD.,t6îd.,  I,  213. 

Later  regeerde  bi,  be  den  datief,  welke  ook  in  de  andere 
govallen  de  plaats  van  den  instrumentaal  innam  ,  en  begon 
men  bedien  te  spellen.  De  afschrijvers  onzer  oude  gedich- 
ten  corrigeerden ,  volgens  zij  Avaanden ,  getrouw  de  oor- 
spronkelijke  tekslen  en  veranderden  bedi ,  bedie  in  bedien. 
Te  wi,  twi. 

Evenals  du  in  het  Gothisch  met  den  instrumentaal  hve 
voorkomt,  zoo  vinden  wij  in  onze  taal  te  met  ivi  verbon- 
den.  Gewoonlijk  smeit  het  voorzetsel  met  tvi  tôt  twi  samen  : 

Ay  mi ,  wel  sondich  man ,  te  wi, 
Ay  mi,  twi  wordic  je  geboren? 

Theophilus  (1858),  2G. 

Twi  tormenl  hine  met  slagiien. 

J.  v.MiEBLiNT,  Wapen  Marlijn  ,  10. 

En  ghi,  cursout,  twi  ne  sprecli  niet? 

Parlhonopeus  van  Bloys,  251. 

En  zoo  op  duizend  andere  plaatsen,  bij  al  onze  Middel- 
nederlandsche  schrijvers. 

Het  voorzetsel  tote,  tôt ,  schijnt  ons  samengetrokken  uit 
lo  the,\n  het  Gothisch  duthe.  Oorspronkelijk  eene  bijwoor- 
delijke  sanienstelling ,  moet  bel  later  als  voorzetsel  zijn 
gebruikt,  en  eindelijk  de  e  hebben  verloren ,  en  tôt  zijn 
gespeld. 

De  instrumentaal  in  de  plaats  van  den  locatief. 

Zoomin  in  het  Gothisch,  het  Oudhoogduitsch,  het  An- 
gclsaksisch,  het  Oudnoordsch,  als  in  het  Oudsaksisch  vindt 
men  eenen  bijzonderen  vorm  voor  den  locatief.  Reeds  zeer 


(  707  ) 

vroeg  inoet  die  iiaamval  in  deii  instrumenlaal  zijn  opge- 
gaan,  die  op  zijne  beurl  met  den  datief  versmolt. 

In  het  Oudindisch  onderscheidt  men  den  locatief  van 
plaals,den  locatief  van  tijd,  den  absoluten  locatief  en  den 
locatief  des  doels.  In  het  bijwoord  hede{n)heh\ien  vvij  eenen 
instrumenlaal,  die  de  plaats  bekieedt  van  eenen  locatief 
van  tijd.  Hiu  dagu,  letterlijk  het  Latijnsche  hodie,  op  dezen 
dag,  Averd  tôt  hiu  du,  later  hude[n),  liede{n),  samengetrok- 
ken.  Het  Oudfriesch  heeft  hiudega  nevens  hiude.  De  n  op 
het  einde  van  heden  is  eene  adverbiale  «,  die  in  het  Mid- 
delnederlandsch  hede{n)  en  het  bijwoord  hedemeer  niet 
altijd  werd  geschreven  : 

So  wildic  wesen  sonder  waen 
An  den  cruce  met  di  verdaen, 
Ende  oec  met  di  hedemeer 
Moeste  deilen  al  mijn  seer. 

Van  den  leveiie  0ns  Heren  ,  HZ. 

Men  speell  hier  hedemeer  om  sinen  wille. 

Drie  daghe  hère,  Horie  Belg.,  VI  ,  105. 

Waarschijnlijk  is  het,  dat  de  voorzetsels  an,  aftar,  bi, 
fora,  te,  undar,  widh,  widhar,  die  in  den  Hêliand  met  de 
instrumentalen  thiu,  hivî  worden  gevonden,  in  onde  tijden 
den  locatief  wilden.  Wij  hebben  vroeger  gezien  ,  dat  bi  en 
te,  in  het  Oud-  en  Middelnederlandsch  met  den  instru- 
mentaal  worden  aangelroffen  :  de  overige  zes  voorzetsels, 
die  waarschijnlijk  oorspronkelijkden  locatief  beheerschten, 
komen  steeds  in  onze  taal  met  den  datief  voor. 


(  708  ) 


CLA.SSE  DES   BEAUX-ARTS. 


Séance  du  5  décembre  1874. 

M.  N.  De  Keyser,  directeur,  président  de  l'Académie. 
M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin ,  L.  Gallait,  Jos.  Geefs, 
C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Édm.  De  Busscher,  Alph.  Balat, 
Auguste  Payen,  le  chevalier  Léon  de  Burbure,  J.  Franck, 
G.  De  Man,  Ad.  Siret,  Julien  Leclercq,  Ern.  Slingeneyer  , 
Alexandre  Robert,  F.-A.  Gevaert,  Ad.  Samuel ,  membres; 
Éd.  de  Biefve,  correspondant. 

M.  l\.Cha\on,  directeur  de  la  classe  des  lettres,  M.  Mon- 
iigny,  membre,  et  M.  Éd.  Ma'iWy,  correspondant  de  la  classe 
des  sciences,  assistent  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


La  classe  reçoit  communication  de  la  lettre  de  faire  part 
annonçant  la  mort  de  l'un  des  membres  titulaires  de  la 
section  des  sciences  et  des  lettres  dans  leurs  rapports  avec 
les  beaux-arts,  M.  André  Van  Hasselt,  décédé  le  l"  dé- 
cembre. 


(  709  ) 

M.  le  directeur  rend  compte  des  dispositions  qui  ont  été 
prises  pour  représenter  l'Académie  aux  funérailles  du 
défunt,  lesquelles  ont  eu  lieu  le  jour  même  de  la  séance 
actuelle. 

Il  annonce,  en  même  temps,  qu'il  s'est  fait  l'organe  et 
l'interprète  des  sentiments  de  la  classe  en  prononçant,  en 
son  nom,  les  derniers  adieux  au  confrère  émineut  qu'elle 
vient  de  perdre. 

Tous  les  membres  de  la  classe  des  beaux-arts  et  un 
grand  nombre  de  membres  des  deux  autres  classes  ont  pris 
part  aux  obsèques. 

La  classe,  après  avoir  exprimé  à  M.  De  Keyser  ses  remer- 
cîments  pour  le  tribut  de  regrets  qu'il  a  payé  en  son  nom 
à  la  mémoire  de  M.  Van  Hasselt,  décide  qu'une  lettre  de 
condoléance  sera  adressée  à  M""'  Van  Hasselt,  pour  lui 
exprimer  combien  le  vide  irréparable  qui  vient  de  se  faire 
dans  les  rangs  académiques  a  été  douloureusement  res- 
senti. 

—  La  classe  apprend  avec  regret  que  l'état  de  santé  de 
l'un  de  ses  membres  les  plus  éminents,  M.  le  baron  Wap- 
pers,  est  désespéré  (1). 

—  MM.  les  questeurs  du  Sénat  et  de  la  Chambre  des 
représentants  adressent  des  cartes  de  tribune  réservée  pour 
la  session  législative  de  1874-1875.  —  Remercîments. 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  transmet  une  ampliation 
d'un  arrêté  royal  du  24  novembre  dernier,  nommant  pré- 
sident de  l'Académie,  pour  l'année  1875,  M.  Alexis  Brial- 


(1)  L'Académie  a  appris,  depuis,  que  M.  le  l)aron  Wappers  est  mort  le 
6  décembre,  à  Paris. 


(710  ) 
mont,  directeur  de  la  classe  des  sciences  pour  la  même 
année. 

—  M.  le  docteur  Burggraeve ,  de  Gand ,  adresse  une  liste 
de  souscription  pour  l'ouvrage  qu'il  va  publier  sous  le  titre 
de  :  Monument  scientifique  à  Jenner. 

—  L'Académie  des  beaux-arts  de  Saint-Ferdinand,  à 
Madrid,  exprime  ses  remercîmenls  pour  l'envoi  des  publi- 
cations académiques  des  années  1871  et  1872. 

La  Société  des  architectes  de  Lille  remercie  pour  l'envoi 
des  mêmes  publications  pour  l'année  1874. 

—  M.  Edouard  Félis  fait  hommage  du  tome  IV,  qui  vient 
de  paraître,  de  V Histoire  générale  de  la  musique  depuis  les 
temps  les  plus  anciens  jusqu'à  nos  jours,  par  F.-J.  Fétis; 
1  vol.  in-8". 

Il  offre  ensuite,  de  la  part  de  l'auteur,  M.  le  baron 
A.Limnander,  membre  de  la  classe,  un  exemplaire  de  sa 
partition  intitulée  :  Maximilien  à  Francfort,  opéra  en 
3  actes. 

Remercîmenls. 


ELECTIONS. 


La  classe  vote,  par  acclamation,  le  renouvellement  du 
mandat  de  MM.  De  Man,  Fraikin,  Franck,  G.  Geefs  et 
Slingeneyer, comme  membres  de  la  Commission  des  finances 
pour  l'année  1875. 


(711  ) 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


M.  Éd.  Fétis  donne  lecture,  en  sa  qualité  de  secrétaire 
du  comité  directeur  de  la  Caisse  centrale  des  artistes  belges, 
du  compte  rendu  des  opérations  de  la  caisse  pendant 
l'année  1875. 

La  classe ,  après  avoir  voté  des  remercîments  au  comité 
pour  les  soins  incessants  apportés  à  gérer  l'institution,  ainsi 
qu'aux  généreux  donateurs  de  l'œuvre,  décide  l'impression 
dans  \  Amiuaire  du  rapport  précité  de  M.  Éd.  Fétis. 


—  La  classe  s'est  occupée,  en  comité  secret,  des  candi- 
datures supplémentaires  aux  places  vacantes. 


(  712  ) 


CLASSE  DES  SCIENCES. 


Séance  du  45  décembre  4814. 

M.  E.  Candèze  ,  directeur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van  Beneden, 
Edm.  de  Selys  Loiigchamps,  H.  Nyst,  Gluge,  Melsens, 
F.  Duprez,  G.  Dewalque,  Ernest  Quetelet,  H.  Maus, 
M.  Gloesener,  F.  Donny,  Ch.  Montigny,  Steichen,  Brial- 
mont,  Éd.  Dupont,  Éd.  Morren,  Edouard  Van  Beneden, 
C.  Malaise,  membres;  E.  Catalan,  A.  Bellynck,  associés; 
Éd.  Mailly,  H.  Valérius,  F.  Folie  et  J.  De  Tilly,  corres- 
pondants. 


COBBESPONDANCE. 


Une  lettre  du  Palais  exprime,  au  nom  du  Boi  et  de  la 
Beine,  les  regrets  qu'éprouvent  Leurs  Majestés  de  ne 
pouvoir  assister  à  la  séance  publique  de  la  classe. 

S.  A.  B.  Monseigneur  le  Comte  de  Flandre  fait  expri- 
mer des  regrets  semblables. 

MM.  les  Ministres  de  l'intérieur  ,  des  affaires  étrangères 
et  de  la  guerre  témoignent  également  leurs  regrets  de  ne 
pouvoir  se  rendre  à  l'invitation  qui  leur  a  été  faite  relati- 
vement à  la  même  solennité. 


(715) 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  adresse ,  pour  être  ré- 
partis entre  MM.  les  membres  de  la  classe  des  sciences,  cin- 
quante exemplaires  du  rapport  du  jury  qui  a  jugé  le  dernier 
concours  quinquennal  des  sciences  physiques  et  mathéma- 
tiques. 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  fait  savoir  qu'il  a  invité 
M.  Van  Oemberg  à  placer  dans  la  grand'salle  des  Acadé- 
mies, le  buste  de  feu  M.  le  colonel  Dandelin,  que  cet  ar- 
tiste vient  de  terminer,  et  qui  lui  avait  été  commandé  par 
le  gouvernement. 

—  La  Société  belge  de  microscopie  annonce  qu'elle  vient 
de  se  fonder  à  Bruxelles  et  transmet  un  exemplaire  de  ses 
statuts.  «  Elle  espère,  dit-elle,  pouvoir  remplir  un  rôle  utile 
dans  le  concert  des  Sociétés  scientifiques  et  obtenir,  à  son 
début,  l'approbation  et  l'appui  moral  de  ses  sœurs  aînées.  » 

—  M.  Helmholtz,  associé  à  Berlin,  la  Société  hollan- 
daise des  sciences,  à  Harlem,  l'Université  de  Konigsberg, 
la  Société  astronomique  de  Leipzig,  l'Observatoire  royal 
de  Munich,  la  Société  entomologique  de  Stettin  et  l'Office 
météorologique  de  Calcutta  remercient  pour  l'envoi  des 
dernières  publications  académiques. 

L'Observatoire  impérial  de  Vienne,  en  transmettant 
également  l'expression  de  sa  gratitude  pour  cet  envoi ,  an- 
nonce qu'il  offrira  à  l'Académie  toutes  les  publications  dont 
il  pourra  encore  disposer. 

—  M.  Alexis  Perrey,  professeur  honoraire  à  la  Faculté 
des  sciences  de  Dijon ,  offre  un  exemplaire  de  ses  deux 
ouvrages  suivants  : 

1°  Sur  les  volcans  de  l'île  de  Java  et  leurs  rapports 
avec  le  réseau  pentagonal.  In-4°; 

2""*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  46 


(  714  ) 

2°  Étude  du  réseau  pentagonal  dans  focean  Pacifique. 
In-4°. 

La  Société  de  physique  de  Francfort  S. /M.  adresse  le 
dernier  volume  de  ses  travaux. 
Remercîments. 


JUGEMENT  DU  CONCOURS. 


La  classe  avait  inscrit  six  questions  à  son  programme  de 
concours  pour  1874. 

Elle  a  reçu  des  réponses  à  quatre  de  ces  questions:  les 
première;  deuxième  et  troisième  réunies;  cinquième;  et 
sixième. 

PREMIÈRE    QUESTION. 

Perfectionner,  en  quelque  point  important,  soit  dans  ses 
principes ,  soit  dans  ses  applications ,  la  théorie  des  fonc- 
tions d'une  variable  imaginaire. 

Le  Mémoire  reçu  en  réponse  à  cette  question  porte 
comme  devise  :  Ne  rien  faire  contre  la  conscience  et  phi- 
losopher sans  souci  des  sots  ni  des  méchants.  Il  a  été 
soumis  à  l'examen  de  MM.  Catalan,  De  Tilly  et  Steichen, 

Mtappot'l  dtf  WM.  Catalan. 

«  Nous  avons  eu  beaucoup  de  peine, M. De  Tilly  et  moi, 
à  tomber  d'accord  relativement  aux  propositions  que  nous 
devions  soumettre  à  la  Classe,  touchant  le  Mémoire  dont 
elle  nous  a  confié  l'examen. Tl  y  a  plus:  à  l'heure  qu'il  est, 


(71S) 
nous  sommes  divisés  sur  certains  principes  d'Algèbre  et  de 
Géométrie  analytique.  Si  un  tiers  n'était  en  cause,  j'indi- 
querais ici  en  quoi  consistent  ces  divergences  d'opinions. 
Mais,  comme  le  dit  fort  bien  mon  savant  confrère  : 
a  l'auteur  aurait  le  droit  de  se  plaindre  si  l'on  divulguait, 
»  sous  prétexte  de  Rapport,  une  bonne  partie  du  contenu 
)>  de  son  Mémoire.  »  Renvoyant  donc,  à  une  Annexe, 
l'exposé  de  mes  principales  objections,  je  résume  ainsi  les 
réflexions  que  m'a  suggérées  la  lecture  du  Mémoire  : 

i"  L'auteur  paraît  être  un  profond  Géomètre; 

2°  Il  n'a  pas  démontré,  ou  il  a  démontré  incomplète- 
ment, les  propositions  au  moyen  desquelles  il  prétend 
établir  le  très-beau  théorème  énoncé  vers  la  fin  de  son  tra- 
vail; 

5°  Le  Mémoire,  qui  semble  avoir  été  écrit  avec  précipi- 
tation, est  fort  mal  rédigé; 

4"  Néanmoins,  l'auteur  mérite  un  encouragement. 

En  conséquence,  j'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe  : 

1°  Qu'elle  accorde  une  mention  honorable  au  Mémoire 
ayant  pour  devise  :  Ne  rien  faire  contre  la  conscience  et 
philosopher  sans  souci  des  sots  ni  des  méchants  j 

2"  Que  la  question  suivante  soit  inscrite  au  programme 
du  concours  de  1876  : 

«  Perfectionner  en  quelque  point  important,  soit  dans 
»  ses  principes,  soit  dans  ses  applications,  la  théorie  des 
»   fonctions  de  variables  imaginaires. 

5"  Que,  eu  égard  à  l'importance  et  à  la  difficulté  de  la 
question,  le  prix  décerné  (s'il  y  a  lieu)  ait  une  valeur  de 
huit  coïts  francs. 


(716) 

Mtapitot't  rfe   .n.  De    Tilly. 

«  Conformément  au  Règlement  de  l'Académie,  j'avais 
fait  une  analyse  sommaire  du  Mémoire  portant  pour  devise  : 
ISe  rien  faire  contre  la  conscience  et  philosopher  sans 
souci  des  sots  ni  des  méchants.  J'avais  conclu  provisoi- 
rement à  l'approbation  du  Mémoire,  mais  en  la  subordon- 
nant toutefois  à  la  solution  de  quelques  points  douteux 
que  je  signalais  et  que  j'espérais  voir  éclaircir  avant 
l'époque  du  jugement  du  concours,  soit  par  moi,  soit  par 
mes  savants  confrères,  les  deux  autres  commissaires.  Cet 
espoir  ne  s'est  pas  réalisé  et  les  doutes  que  j'avais  éprouvés 
à  la  première  lecture  subsistent  encore,  si  même  ils  ne 
sont  pas  devenus  plus  sérieux. 

Dans  cette  situation,  je  dois  me  borner  à  déclarer  que  l'au- 
teur du  travail  soumis  à  la  Classe  a  fait  preuve  d'un  mérite 
incontestable,  et  à  proposer  de  lui  accorder  une  mention 
honorable,  tout  en  maintenant  la  question  au  concours. 

A  cause  de  cette  dernière  proposition,  j'ai  supprimé 
l'analyse  que  j'avais  faite  du  travail  présenté,  car  l'auteur 
aurait  le  droit  de  se  plaindre  si  l'on  divulguait,  sous  pré- 
texte de  Rapport,  une  bonne  partie  du  contenu  de  son 
Mémoire.  Toutefois,  les  objections  faites  doivent  être  con- 
nues de  l'Académie.  Elles  sont  indiquées  dans  l'Annexe 
ci-jointe,  dont  je  demande  le  dépôt  aux  Archives.  Il  serait 
aussi  très-désirable  que  ces  objections  fussent  connues  de 
l'auteur.  C'est  à  lui  de  trouver  un  moyen  d'obtenir  la 
communication  de  l'Annexe  sans  se  faire  connaître,  si 
toutefois  il  désire  continuer  à  prendre  part  au  concours, 
comme  je  l'espère.  Dans  tous  les  cas,  les  objections  faites 
peuvent  se  résumer  en  quelques  lignes  : 

L'auteur,   plein   de    son    sujet,   admet,  soit  comme 


(717  ) 

évidenles,  soil  comme  démontrées,  un  certain  nombre 
de  propriétés  qui,  pour  moi,  ne  le  sont  pas.  Je  m'em- 
presse d'ajouter  que  je  ne  suis  pas  en  mesure  d'en 
contester  formellement  une  seule.  Au  contraire,  j'incline 
à  penser  qu'elles  sont  toutes  exactes,  mais  on  ne  peut 
exiger  de  moi,  ni  que  je  les  admette  de  confiance,  ni  que 
je  recommence  le  travail  pour  le  compléter  et  pour  en 
justifier  toutes  les  parties.  L'auteur  renvoie,  il  est  vrai,  à 
un  Mémoire  inséré  dans  les  Comptes  rendus  de  l'Académie 
des  sciences  de  Paris,  mais  ce  Mémoire  lui-même,  saut'  en 
un  point  signalé  dans  l'Annexe,  me  parait  un  tissu  d'asser- 
tions sans  preuves  (1). 

En  proposant  de  maintenir  la  question  au  concours, 
j'émets  le  vœu  que  l'auteur  complète  son  œuvre  et 
démontre  rigoureusement,  soit  dans  le  texte,  soit  dans 
une  Introduction,  toutes  les  propositions  qu'il  invoque; 
ou,  tout  au  moins,  qu'il  renvoie  les  lecteurs  et  les  com- 
missaires à  des  démonstrations  connues  et  rigoureuses.  Si, 
en  même  temps,  il  améliorait  son  travail  sous  le  rapport 
de  la  forme,  un  peu  négligée  en  certains  endroits,  ce  tra- 
vail deviendrait  bien  certainement  digue  du  prix.  J'estime 
qu'il  ne  faudrait  pas  longtemps  à  l'auteur  pour  faire  les 
modifications  que  je  demande  et,  si  je  ne  consultais  que 
cette  considération,  c'est  pour  le  concours  de  187o  que  je 
voudrais  voir  reproduire  la  question;  mais  cela  est  impos- 
sible :  une  question  remise  au  concours  doit  l'être  pour 
tout  le  monde  et  non  uniquement  pour  le  concurrent  actuel. 


(1)  L'auteur  dit  que  l'étude  de  ce  Mémoire  préliminaire  suflîl  pour 
suivre  la  lecture  du  travail  qu'il  présente.  Je  l'ai  étudié,  aiusi  que  plusieurs 
autres,  relatifs  à  la  même  question,  sans  parvenir  à  dissiper  tous  mes 
doutes. 


(718  ) 

Je  propose  donc  d'inscrire  cette  même  question  au  pro- 
gramme du  concours  de  1876,  mais,  en  même  temps, 
d'augmenter  le  prix  qui  est  affecté  à  sa  solution.  » 

Conformément  aux  conclusions  de  ces  rapports,  aux- 
quelles a  souscrit  M.  Steichen ,  troisième  commissaire,  la 
classe  a  voté  une  mention  honorable  à  l'auteur  du  mémoire 
et  elle  a  décidé,  en  même  temps,  que  la  question  serait 
remise  au  concours  pour  1876. 


DEUXIEME    QUESTION. 

On  demande  une  discussion  complète  de  la  question  de 
la  température  de  V espace,  basée  sur  des  expériences,  des 
observ avions  et  le  calcul,  motivant  le  choix  à  faire  entre  les 
différentes  températures  qu'on  lui  a  attribuées. 

TROISIÈME    QUESTION. 

On  demande  une  étude  complète  théorique,  et  au  besoin 
expérimentale ,  de  la  chaleur  spécifique  absolue  des  corps 
simples  et  des  corps  composés. 

Un  mémoire,  ayant  pour  but  de  répondre  à  ces  deux 
questions,  a  été  reçu  par  la  classe.  Il  a  pour  devise:  Félix 
qui  potuit  rerum  cognoscere  causas  ;  il  a  été  examiné  par 
MM.  Melsens,  Montigny,  Folie  et  Stas. 

La  classe,  après  avoir  entendu  la  lecture  des  rapports 
de  ses  commissaires,  a  décidé  que  ce  mémoire,  sans  valeur 
aucune,  serait  déposé  aux  archives. 

Conformément  à  la  demande  de  MM.  les  commissaires, 
leurs  rapports  ne  seront  pas  publiés,  mais  resteront  an- 
nexés au  mémoire. 


(  719) 

CINQUIÈME  QUESTION. 

Le  polymorphisme  des  Champignons  altire  de  plus  en 
plus  l'attention  des  botanistes  et  des  physiologistes  ;  il 
semble  même  devoir  fournir  des  éléments  nouveaux  à  la 
solution  du  problème  de  la  vie  en  général. 

On  demande:  7°  Vn  résumé  critique  succinct  des  obser- 
vations connues  relativement  au  polymorphisme  des  Mucé- 
dinées  ; 

2°  La  détermination  exacte ,  ne  s' appliquerait-elle  qu'à 
une  seule  espèce,  de  la  part  qui  revient  d'abord  à  la  propre 
nature  du  végétal  (à  son  énergie  spécifique),  ensuite  aux 
conditions  extérieures  de  son  développement  ; 

.5"  La  preuve  positive  ou  la  négation  suffisante  du  fait 
que  les  Champignons  de  ferment  (Micrococcus,  Zooglaea, 
Palmella,  Leptothrix,  Arthrococcus,  Mycoderma ,  etc.), 
dans  des  circonstances  quelconques,  peuvent  se  transformer 
en  Champignons  supérieurs. 

Un  mémoire  a  été  reçu.  Il  porte  pour  devise  : 

Pour  trouver  la  preuve  qu'un  organisme  est  un  degré 
de  développement  ou  un  produit  du  développement  d'un 
autre  organisme,  il  faut  examiner  la  continuité  organique 
qui  doit,  une  fois,  à  un  temps  donné,  exister  entre  deux 
états  de  développement  d'une  espèce. 

Les  commissaires  qui  l'ont  examiné  sont  :  MM.  Éd.  Mor- 
ren,  A.  Bellynck  et  Éd.  Van  Beneden. 

Mtappot'î  de  .?#.  JÉrf.  .lÊOi'ren. 

«Ce  fui  Antoine  Spring  qui  proposa  à  l'Académie  d'in- 
scrire au  programme  des  concours  une  question  relative 
au  polymorphisme  des  Champignons.  Notre  regretté  con- 


(  720  ) 

frère  avait  été  témoin  de  quelques  faits  dont  il  a  entretenu 
la  Compagnie  et  qui  pouvaient  faire  croire  à  une  singulière 
instabilité  morphologique  dans  cette  classe  extraordinaire 
d'organismes  inférieurs.  Les  circonstances  ont  d'ailleurs 
ajouté  un  piquant  intérêt  à  l'examen  de  ces  phénomènes. 

Quelques  observations  furent  présentées  au  sein  de  la 
classe  des  sciences,  sur  les  termes  de  l'énoncé,  qui  était 
entaché  de  quelques  inexactitudes  de  fait  et  qui  était 
rédigé  dans  un  sens  favorable  à  l'hypothèse  du  polymor- 
phisme. 

L'auteur  de  la  réponse  qui  est  parvenue  à  l'Académie 
commence  précisément  par  se  débattre  avec  la  question 
elle-même  et  par  faire  voir  que  le  rédacteur  devait  être 
enclin  à  admettre  le  polymorphisme  des  Champignons. 

Après  cette  observation  préalable,  il  se  conforme  ponc- 
tuellement à  l'ordre  imposé  par  les  trois  termes  de  la 
question. 

Mais  dès  les  premiers  mots,  il  repousse  avec  énergie 
Vhypothèse  du  polymorphisme.  Cette  expression  nous  est 
personnelle  et  nous  la  choisissons  à  dessein  parce  que 
l'opinion  favorable  au  polymorphisme  des  Champignons 
ne  s'est  jamais  élevée  à  la  hauteur  d'une  théorie  scientifi- 
que :  jamais  elle  ne  s'est  appuyée  sur  des  faits  bien  consta- 
tés. Une  théorie  scientifique  suppose  des  observations 
vraies  et  elle  a  pour  but  de  leur  donner  une  interprétation 
satisfaisante,  en  harmonie  avec  l'ensemble  des  connais- 
sances. La  base  de  toute  théorie,  c'est-à-dire  un  fait  bien 
établi,  les  polymorphistes  ne  l'ont  jamais  eue  en  leur  pou- 
voir. 

L'auteur  expose  lui-même  le  plan  de  son  travaillai] 
nous  a  paru,  dit-il,  que  pour  respecter  autant  que  possible 
la  division  indiquée  dans  la  question,  en  la  conciliant  avec 


(  721  ) 

les  exigences  d'une  réponse  précise,  nous  pouvions  ordon- 
ner ainsi  notre  travail  : 

»  Dans  la  première  partie,  résumer  la  littérature,  sans 
nous  appesantir  sur  la  réfutation  de  certains  ouvrages,  tels 
que  ceux  de  Hallier,  Pouchet,  etc.;  une  réfutation  collec- 
tive, telle  qu'elle  sera  faite  à  la  fin  de  cette  première  partie 
est  plus  que  suffisante  pour  des  ouvrages  que  la  science  a 
refusé  d'admettre  dans  son  domaine  et  qui  n'ont  pas  quitté 
celui  de  la  fantaisie. 

»  La  seconde  partie  ne  renferme,  au  point  de  vue  qui 
nous  occupe,  que  des  arguments  négatifs  :  incapacité  com- 
plète pour  ces  Champignons  de  se  transformer  en  tel  ou 
tel  autre  ;  incapacité  de  se  transformer  en  levure  ;  incapa- 
cité pour  la  plupart  de  produire  la  moindre  fermentation; 
elle  emprunte  cependant  un  intérêt  scientifique  à  la  récence 
des  documents  employés  pour  la  rédiger  et  dont  une  par- 
tie date  de  cette  année,  1874  même. 

»  Dans  la  5'' partie, enfin,  nous  traiterons  des  Champi- 
gnons de  ferment  en  général,  et  jetant  un  regard  rétros- 
pectif sur  les  Mucorinées  qui  peuvent,  dans  des  limites 
restreintes,  agir  comme  eux,  nous  comparerons  ces  diffé- 
rents organismes,  nous  montrerons  les  caractères  distinctifs 
nombreux  qui  les  séparent  et  indiquerons  la  source  de  la 
confusion  qui  a  longtemps  existé  dans  leur  histoire.  Cette 
3''  partie  ne  mérite  guère  d'être  distinguée  de  la  1"  dont 
elle  pourrait  composer  un  chapitre  ;  pour  l'individualiser 
quelque  peu,  nous  avons  cru  bien  faire  de  nous  occuper 
des  fermentations  d'une  façon  plus  complète  que  ne  l'exi- 
geait le  polymorphisme  lui-même;  nous  espérons  que  l'on 
ne  nous  reprochera  pas  de  nous  être  un  peu  appesanti  sur 
cette  question  qui  commence,  grâce  aux  travaux  de  Reess, 


(  722  ) 
Brefeld,  Cohn,  Cienkowski,  etc.,  à  sortir  des  ténèbres  dans 
lesquelles  elle  est  restée  longtemps  plongée.  » 

L'histoire  des  transformations  attribuées  aux  Champi- 
gnons est  liée  à  celle  de  la  génération  spontanée  :  on  peut, 
pour  ne  pas  trop  s'embourber,  la  commencer  avec  Turpin 
et  puis  raconter  tout  ce  qui  a  été  avancé  à  ce  sujet  par 
Bail,  par  Rallier  de  Jéna,  par  Hoffmann  de  Giessen  et  par 
d'autres.  L'auteur  a  fait  preuve  de  patience  en  exposant  les 
erreurs  fantastiques  de  Hallier,  mais  le  travail  auquel  il  a 
bien  voulu  s'assujettir  ne  sera  pas  inutile  :  il  est  bon,  il  est 
nécessaire  même  de  faire  une  bonne  fois  justice  de  toutes 
ces  prétendues  théories  qui  ressemblent  à  des  construc- 
tions foraines  élevées  à  la  hâte,  sans  fondement,  avec  de 
mauvais  matériaux  et  qui  sont  fort  bruyantes,  tant  qu'elles 
tiennent  debout,  jusqu'à  ce  qu'elles  disparaissent  subite- 
ment en  ne  laissant  d'autres  traces  que  du  gâchis. 

A  la  fin  de  son  récit  historique,  l'auteur  rencontre 
M.  Carnoy,  l'étoile  du  soir  de  la  métenipsychose  mycolo- 
gique  et  il  n'a  point  de  peine  à  déchirer  ce  tissu  d'erreurs 
auquel  on  a  cru,  un  moment,  pouvoir  attacher  un  grand 
prix.  jMM.  Van  Tieghem  et  Lemonnier  ont  déjà  exprimé 
une  appréciation  tout  aussi  sévère  de  l'histoire  du  Mucor 
romanus  à  laquelle  nous  faisons  allusion. 

M.  le  professeur  de  Bary  a  commencé,  en  1866,  la  réfu- 
tation de  ces  doctrines  subversives  et  antiscientifiques, 
puisqu'elles  sont  erronées  et  hypothétiques.  Les  travaux  de 
Max  Reess,  un  des  élèves  de  de  Bary,  et  plus  récemment 
les  minutieuses  expériences  de  notre  ami  le  D""  Oscar  Bre- 
feld ont  ruiné  tout  cet  échafaudage.  Nous  avons  été 
témoin,  au  laboratoire  du  D' J.  Sachs,  à  Wurzbourg,  de 
quelques-uns  des  résultats  obtenus  par  le  D"^  Brefeld,  dont 


(  723  ) 

la  méthode  expérimentale  est  aussi  parfaite  qu'on  peut  le 
désirer  pour  d'aussi  délicates  observations  (1). 

Dans  la  deuxième  partie,  l'auteur  expose,  en  résumé, 
l'histoire  des  moisissures  suivantes:  iWi^cor  Miicedo,  Mu- 
cor  racemosus,  C/iaetocladium  Jonessii,  Thamnidium  ele- 
gans,  Eurotium  Asperyillus  glaucus  et  Penicilium  glaiicum, 
en  s'appuyant  sur  les  travaux  de  de  Bary,  Woronin,  Zim- 
mermann,  Van  Tieghem,  Lemonnier  et  surtout  Oscar 
Brefeld. 

L'évolution  de  ces  créatures  infimes  et  admirables  que 
les  transformistes  prétendaient  condamner  à  la  promiscuité 
des  monades  et  des  ferments,  est  maintenant  bien  éluci- 
dée et  elle  est  en  définitive  la  même  que  celle  de  tous  les 
végétaux,  même  des  végétaux  supérieurs,  qui  revêtent  aussi 
des  apparences  différentes,  selon  qu'ils  passent  par  les 
phases  de  la  nutrition,  de  la  multiplication  agame,  du 
repos  végétatif  et  de  la  reproduction  sexuelle.  Nous  ne 
saurions  dire  en  quoi  les  Mucédinées  diffèrent,  sous  ce 
rapport,  de  la  Betterave  ou  du  Lis  blanc.  Cette  partie  du 
mémoire  est  comme  un  petit  traité  des  Champignons  infé- 
rieurs et,  à  ce  litre,  elle  instruira  beaucoup  de  personnes. 

La  troisième  partie  est  particulièrement  consacrée  aux 
ferments  et  aux  fermentations.  L'histoire  des  théories  de 
la  fermentation  est  intéressante  et  suffisamment  étendue. 
L'auteur  rend  hommage,  à  cette  occasion,  aux  découvertes 
fondamentales  du  D"^  Schwann.  Dès  1857,  notre  cher  con- 
frère faisait  connaître  la  véritable  nature  des  ferments, 
spécialement  du  ferment  alcoolique  sur  lequel  on  ne  pos- 


(1}  Methoden  zur  Untersuchung  der  Pilze  von  D^  Oscar  Brefeld. 
Separat-Abdruck  aus  (Jeu  Yerhandlungen  der  phys -med.  Gesellschaft, 
S.  F.,Vni.  Bd.;187.i. 


(  724  ) 

sédait  jusqu'alors  que  des  idées  fausses.  Schwann  a  décrit 
la  levure  de  bière  et  il  l'a  rangée  parmi  les  Champignons 
en  lui  donnant  le  nom  de  Zuckerpilz  (Champignon  du 
sucre),  dont  on  a  fait  Saccharomyces.  Des  expériences  célè- 
bres de  Pasteur  ont  confirmé  les  résultats  que  Schwann 
avait  déjà  obtenus  en  1837.  L'histoire  des  ferments  se 
trouve  dans  un  travail  célèbre  de  Max  Reess,  publié  en 
1870,  et  quant  à  la  théorie  de  la  fermentation,  elle  n'est 
pas  encore  achevée,  mais  elle  est  poursuivie  par  les  inves- 
tigations d'Oscar  Brefeld  (1). 

Un  appendice  est  consacré  aux  Bactéries  et  aux  Schi- 
zomycètes  en  général  que  l'auteur  range,  selon  les  vues  de 
Cohn,  dans  la  classe  des  Algues:  il  n'a  pas  de  peine  à 
montrer  que  ces  puissants  et  infimes  organismes  sur 
lesquels  on  commence  enfin  à  pouvoir  diriger  l'observation, 
ont  une  évolution  parfaitement  autonome,  comme  l'ont 
démontré  les  belles  recherches  de  Cohn  et  même  celles  de 
Hoffmann. 

Le  Mémoire  est  accompagné  de  24  figures  bien  dessinées, 
qui  tiennent  sur  un  petit  nombre  de  planches.  Nous  expri- 
mons le  désir  que  l'auteur  ajoute  encore  quelques  figures 
qui  aideront  à  la  clarté  de  ses  enseignements  sur  les  fer- 
ments et  sur  les  Bactéries. 

Le  Mémoire  a  mon  approbation  la  plus  absolue  et  il 
exprime  exactement  les  opinions  que  je  me  suis  formées 
sur  une  question  qui  a  passionné  naguère  quelques  per- 
sonnes, qui  a  été  discutable  pendant  un  certain  temps, 
mais  qui  maintenant,  depuis  les  travaux  de  de  Bary,  Reess 


(I)  Oscar  Brefeld,  Untersuchungen  ilber  Alkoholgahrung.  Sep.-Abdr. 
ausdeii  Verh.der  Wurzburger  phys.-med.  GeseUschaft,N.  F.,  VIII.  Bd.; 
juin  1874. 


(  725  ) 
et  surtout  Brefeld,  est  tellement  claire  qu'elle  ne  saurait 
être  douteuse,  même  pour  un  mathématicien.  Ce  sera  un 
honneur  pour  l'Académie  d'avoir  fait  justice  d'une  croyance 
qui  remontait  au  paganisme  scientifique.  Nous  avons  lu 
le  Mémoire  d'un  bout  à  l'autre  et  ce  devoir  nous  était  rendu 
agréable  par  l'intérêt  du  sujet  et  par  la  manière  dont  il  est 
traité.  La  verve  et  un  peu  de  raillerie  percent  entre  les  mots, 
dans  certains  passages  où  la  conscience  du  savant  se  ré- 
volte contre  les  vaines  apparences  auxquelles  des  observa- 
teurs ont  eu  le  malheur  de  se  fier. 

On  hésitait  sur  l'opinion  qu'il  faut  avoir  relativement  au 
polymorphisme  attribué  aux  Champignons.  L'Académie  a 
demandé  un  Mémoire  qui  fît  disparaître  ces  hésitations  et 
qui  fît  justice  de  l'une  ou  de  l'autre  doctrine.  Le  Mémoire 
qui  lui  est  envoyé  répond  à  la  question  d'une  manière  pé- 
remptoire.  Si  le  Mémoire  est  très-didactique ,  c'est  que  la 
question  et  le  sujet  le  voulaient  ainsi. 

L'histoire  de  la  question  ,  les  controverses  auxquelles 
elle  donne  lieu,  les  arguties  des  polymorphistes  et  les 
arguments  des  autonomistes,  tout  cela  est  parfaitement 
exposé  dans  le  Mémoire  et  en  excellents  termes:  je  ne 
trouve  rien  à  y  reprendre  et  il  me  reste  à  exprimer  le  vœu 
que  ce  travail  paraisse  sans  retard. 

Je  propose  à  l'Académie  de  lui  décerner  la  médaille  d'or  et 
de  décider  la  prompte  impression  dans  un  de  ses  recueils.  » 

Rapport  de  Si.  A.  Bellynck. 

«  Avant  d'aborder  le  mémoire  que  l'Académie  a  bien 
voulu  soumettre  à  notre  appréciation ,  nous  devons  déclarer 
que  nous  n'apportons  à  cet  examen  aucune  idée  pré- 
conçue ;  nous  n'avons  pas  l'habitude  de  nous  passionner 


(  726  ) 
pour  des  opinions,  et  la  vérité  seule  a  toujours  été  Je  but 
de  nos  recherches.  —  Si,  dans  le  rapport  que  nous  avons 
été  chargé  de  faire,  à  l'occasion  du  prix  quinquennal, 
nous  nous  sommes  prononcé  en  faveur  d'un  mémoire  qui 
est  le  contre-pied  de  celui  que  nous  examinons  en  ce  mo- 
ment, nous  n'avons  eu  en  vue  que  de  récompenser  un 
ifravail  sérieux,  fait  dans  le  but  d'élucider  une  question 
importante,  et  nous  donnerons  toujours  notre  assentiment 
à  tout  travail  de  ce  genre,  quelle  que  soit  la  thèse  qu'il 
défende,  persuadé  que,  dans  la  science  ,  c'est  du  choc  des 
opinions  que  doit  jaillir  la  lumière;  et  afin  qu'on  ne  se 
méprenne  pas  sur  notre  manière  d'agir,  nous  rappellerons 
ici  les  quelques  lignes  qui  terminaient  notre  rapport  ; 
«  Les  connaissances  de  l'auteur,  disions-nous,  son  habileté 
»  consommée  dans  le  maniement  du  microscope,  le  temps 
»  et  les  soins  qu'il  a  prodigués  à  son  œuvre,  sont  un  sur 

»  garant  de  la  portée  scientifique  de  son  travail Sans 

»  doute,  la  science  n'a  pas  dit  son  dernier  mot  sur  celte 
j>  question;  mais  la  manière  claire  et  méthodique  dont  Je 
»  sujet  est  traité  en  rend  le  contrôle  facile  à  quiconque 
»  aura  le  temps  et  la  patience  de  répéter  les  expériences 
»  de  l'auteur.  »  —  Comme  on  le  voit,  nous  n'avons  pris 
aucune  responsabilité  des  conclusions  que  l'auteur  a  cru 
devoir  déduire  de  ses  observations,  d'ailleurs  bien  faites,  et 
nous  arrivons  franchement  à  l'étude  du  mémoire  qui  nous 
est  soumis. 

Nous  remarquons  d'abord  que  l'auteur  a  omis  un  point 
important,  qui,  selon  nous,  est  un  préliminaire  indispen- 
sable, à  savoir  l'exposé  de  l'état  de  la  question.  Que  faut-il 
entendre  par  polymorp/iisme  ou  pléomorphisme  dans  le 
règne  végétal?  Les  auteurs  en  général  comprennent  sous  ce 
nom  la  faculté  que  possède  une  plante  de  produire  plusieurs 


(  727  ) 
sortes  de  fructifications,  et,  par  conséquent,  de  se  présenter 
sous  différentes  formes  qu'on  a  parfois  considérées  comme 
des  espèces  distinctes,  — •  II  est  donc  évident  que  le  poly- 
morphisme n'a  rien  de  commun  avec  la  génération  spon- 
tanée, qui  fait  produire  de  toutes  pièces  des  animaux  et  des 
plantes,  sans  intervention  aucune  de  parents,  mais  par 
l'agrégation  spontanée  de  la  matière  inerte.  —  Le  poly- 
morphisme n'a  pas  non  plus  de  rapport  avec  le  darwinisme 
ou  transformisme,  lequel  demande  des  milliers  de  siècles, 
et  fait  passer  insensiblement  l'individu  d'une  forme  à  une 
autre,  pour  ne  plus  revenir  à  la  première. 

Dans  la  question  qui  nous  occupe,  on  suppose  un  cycle 
de  métamorphoses  qui  ont  leur  point  de  départ  auquel  elles 
retournent  après  un  certain  nombre  d'évolutions,  souvent 
déterminées  par  le  milieu  dans  lequel  se  fait  le  dévelop- 
pement. —  Nous  voyons  quelque  chose  d'analogue  dans  le 
règne  animal  :  ainsi  les  insectes  présentent  successivement 
les  formes  de  larve,  de  nymphe  et  d'insecte  parfait;  chez 
les  vers  intestinaux,  le  développement  ultérieur  exige  un 
changement  de  milieu,  et  l'animal  a  besoin  de  passer  dans 
un  nouvel  hôte  pour  parfaire  le  cycle  de  ses  transforma- 
tions; une  même  espèce  animale  peut  présenter  les  géné- 
rations scissipare,  gemmipare  et  ovipare,  etc.  —  Chez  les 
champignons,  des  changements  de  forme  sont  reconnus  par 
tous  les  botanistes  au  courant  de  la  science.  Tout  le  monde 
admet  les  formes  transitoires  du  Claviceps  purpurea,  qu'on 
a  considérées,  jusqu'à  ces  derniers  temps,  comme  des 
espèces  distinctes,  nommées  Sphacelia,  Sderolium,  Cla- 
viceps. Les  genres  JEcidium,  Uredo  eiPiiccinia,  autrefois 
regardés  comme  autonomes,  ne  sont  plus,  pour  les  mo- 
dernes, que  les  formes  d'un  genre  unique,  qui  se  pro- 
duisent en  changeant  de  milieu;  il  en  est  de  même  du 


(  728  ) 

Rœstelia  cancellata  qui  attaque  les  feuilles  du  poirier,  et 
qu'on  fait  dériver  du  Podisoma  Juniperi.  C'est  ainsi  encore 
que  MM.  Yan  Tieghem  et  Le  Monnier  portaient  à  huit  les 
formes  reproductives  du  Mucor;  plus  tard,  M.  Brefeld 
a  restreint  à  trois  le  nombre  de  ses  fructifications,  retran- 
chant les  formes  Chœtodadium,  Thamnidiiim,  Helico- 
stylum,  etc.,  qui  ne  se  trouvaient  là  qu'à  titre  de  parasites. 
—  Comme  on  vient  de  le  voir,  ceux  qui  se  posent  en 
adversaires  acharnés  du  polymorphisme  sont  polymor- 
phistes  eux-mêmes.  La  question,  ici,  n'est  donc  que  du 
plus  au  moins,  et  toutes  les  recherches  doivent  aboutir  à 
fixer  les  limites  du  polymorphisme. 

Après  ce  préambule,  nous  arrivons  au  texte  du  mé- 
moire. 

D'abord  l'auteur  anonyme  trouve  les  questions  du  con- 
cours mal  posées,  et  nous  sommes  de  son  avis;  nous  n'y 
avons  pris  aucune  part,  et  nous  n'en  avons  eu  connais- 
sance que  lorsqu'elles  étaient  déjà  imprimées. 

Pour  s'écarter  le  moins  possible  de  la  marche  prescrite, 
l'auteur  divise  son  mémoire  en  trois  parties  :  dans  la  pre- 
mière il  fait  l'historique  de  la  question;  dans  la  deuxième 
il  étudie  quelques  espèces  de  champignons  et  conclut  à 
leur  incapacité  de  se  transformer;  enfin  dans  la  troisième 
partie,  qui  rentre  dans  la  deuxième,  il  traite  des  ferments 
en  général,  et  termine  par  la  même  conclusion. 


I. 


Dans  la  première  partie,  l'auteur  passe  en  revue  les 
partisans  du  polymorphisme:  KOtzing,  Turpin,Tulasne, 
DE  Bary,  Spring,  Robin,  Bail,  Speerschneider,  Ber- 
keley, John  Lowe  ,  Zabel  ,  Hoffmann  ,  Griffith  et  Hen- 


(  729  3 
•FREY,  PoucHET,  Salisbury  (ciî  Amérique).  Il  s'étend  sur- 
tout longuement,  beaucoup  trop  longuement  sur  Hallier 
avec  lequel  il  a  beau  jeu ,  car  on  sait  que  les  expériences 
de  ce  dernier  sont  loin  de  présenter  toutes  les  garanties 
requises.  —  L'auteur  arrive  ensuite  à  la  réunion  de  la 
section  botanique  de  la  Société  des  naturalistes  allemands 
à  Francfort  (19-25  septembre  1867) ,  qui,  dit-il,  fut  con- 
sacrée presque  exclusivement  à  la  glorification  du  poly- 
morphisme; DE  Bary,  qui  était  revenu  de  plusieurs  de  ses 
opinions  précédentes,  y  lutta  vainement  contre  Bail, 
Hoffmann,  Thomé,  etc.  Hoffmams,  ajoute  l'auteur,  a  répété 
une  partie  de  se^  erreurs  anciennes  dans  un  ouvrage  cou- 
ronné en  1869,  et  qui  a  été  traduit  la  même  année  dans 
les  Annales  des  sciences  naturelles.  —  L'auteur  du  mémoire 
a  de  nouveau  une  prise  de  corps  avec  Hallier  dont  il  ne 
sait  pas  se  dessaisir. —  Vers  cette  époque,  plusieurs  noms 
célèbres  sont  venus  corroborer  le  polymorphisme ,  entre 
autres  Luders,  H.  Schurtz,  Hartig,  Trécul. 

L'auteur  dit  qu'il  aurait  volontiers  passé  sous  silence  le 
travail  de  M.  Carnoy,  si  le  grand  prix  ne  lui  avait  pas  été 
accordé.  Sans  doute  l'auteur  de  ce  travail  pousse  plus  loin 
que  tous  les  autres  les  transformations  des  champignons; 
mais,  encore  une  fois,  il  y  a  autre  chose  dans  ce  mémoire 
que  le  polymorphisme  auquel  on  fait  la  guerre.  MM.  Van 
Tieghem  et  Le  Monnier,  qui  se  sont  constitués  les  adver- 
saires de  M.  Carnoy,  lui  avaient  cherché  querelle  au  sujet 
du  nom  qu'il  a  donné  à  la  plante  qu'il  étudie;  ils  ont  pré- 
tendu que  cette  plante  n'est  pas  une  espèce  nouvelle,  mais 
qu'elle  est  identique  au  Phycomyces  nitens  de  Kunze; 
notre  auteur  anonyme  répète  le  même  reproche ,  comme 
si  ce  point  avait  la  moindre  importance.  L'auteur,  en  effet, 
n'a  pas  eu  en  vue  de  créer  une  espèce  nouvelle,  mais  de 
2""*  série,  tome  xxxviii.  47 


(  730  ) 
suivre  le  développement  d'une  espèce  prise  au  hasard. 
Toutefois,  M.  Van  Tieghem  ne  méconnaît  pas  le  mérite  du 
mémoire  incriminé;  voici  ses  paroles  {Ànn.  des  se.  nat., 
t.  VII,  S' série,  p.  268)  :  «  Il  est  regrettable  que  M.Carnoy 
»  n'ait  pas  su  reconnaître  la  plante  si  caractéristique  qu'il 
B  étudiait,  et  que  ce  qu'il  peut  y  avoir  d'exact  et  de  nou- 
»  veau  dans  les  longs  et  minutieux  détails  d'anatomie 
»  auxquels  est  consacrée  la  première  partie  de  son  travail , 
»  ait  ainsi  perdu  tout  son  prix.  »  Et  plus  loin  (p.  285)  : 
<i  C'est  donc  au  Phijcomyces  nitens  qu'il  faut  attribuer 
»  tout  ce  qu'il  y  a  d'exact  dans  les  longs  développements 
»  analomiques  et  physiologiques  où  l'aujeur  est  entré  au 
B  sujet  de  cette  prétendue  espèce  nouvelle.  Ceci  une  fois 
B  bien  connu,  cette  partie  du  travail  de  M.  Carnoy  repren- 
»  dra  sa  valeur,  en  faisant  mieux  connaître  l'histoire 
»  d'une  plante  assez  rare  dont  on  connaissait  bien  les 
B  caractères  principaux,  mais  dont  on  avait  peu  suivi  le 
»  développement.  Mais  on  conçoit  que  nous  n'ayons  pu 
»  faire  cette  identification  qu'après  avoir  nous-méme  lon- 
»  guement  cultivé  cette  plante,  et  avoir,  de  notre  côté, 
»  retrouvé  un  à  un  les  faits  exacts  mentionnés  par 
B   M.  Carnoy.  b 

Ajoutons  que  le  D'  Brefeld,  l'oracle  des  antipolymor- 
phistes,  écrivait  à  Carnoy  à  propos  de  sa  découverte  rela- 
tive à  la  formation  de  la  columelle,  qu'il  avait,  contre 
toute  attente,  tranché  le  nœud  gordien  des  Mucorinées; 
qu'on  sentait,  en  lisant  les  pages  112  et  M5,  que  c'était 
bien  la  vérité.  I 

Enfin  le  mémoire  de  Carnoy  avait  été  l'objet  de  rap-  1 
ports  très-élogieux  de  notre  regretté  confrère  Spring  et  de  ■ 
M.  le  professeur  Martens. 

Une  autre  attaque,  également  mal  fondée,  porte  sur  la 


(  731  ) 
continuité  organique  que  l'auteur  anonyme  requiert  pour 
arriver  à  une  démonstration  sans  réplique,  et  qu'il  a 
inscrite  comme  devise  en  tête  de  son  mémoire.  Eh  bien, 
M.  Van  Tiegliem  reproche  à  Carnoy  (p.  269)  d'avoir  voulu 
suivre  celle  prétendue  continuité  qui,  selon  lui,  est  impra- 
ticable dans  les  conditions  où  il  a  opéré.  L'auteur  ano- 
nyme, au  contraire,  déprécie  le  travail  de  Carnoy,  qui  n'a 
pas  eu ,  dit-il ,  pour  base  celte  méthode  :  nous  laisserons 
ces  messieurs  s'entendre  entre  eux,  et  nous  nous  conten- 
terons de  dire  qu'il  faut  n'avoir  pas  lu  le  mémoire  de 
Carnoy  pour  ne  pas  voir  que  cette  devise  a  été  la  règle  de 
toutes  ses  recherches;  il  le  dit  dans  sa  préface,  et  il  le 
répète  à  satiété  dans  le  cours  de  son  travail;  c'est  même 
précisément  pour  cela  que  ce  travail  ne  doit  pas  être  con- 
fondu avec  celui  des  autres  polymorphistes  qui,  pour  la 
plupart,  ont  négligé  cette  précaution;  Carnoy  assure  qu'il 
a  vu  et  revu  de  ses  yeux  la  continuité  organique,  qu'il  a 
tourné  et  retourné  les  filaments  sous  le  microscope,  pour 
éviter  toute  illusion.  —  Carnoy  n'exclut  nullement  les 
ihèques  de  la  définition  des  Ascomycètes,  comme  on  le 
prétend,  puisqu'elles  sont  incluses  dans  le  mot  même  dont 
il  se  sert.  —  Quant  aux  autres  reproches,  ils  sont  communs 
aux  polymorphistes  en  général,  et  l'auteur  les  exposera 
plus  loin,  après  qu'il  aura  réglé  le  compte  de  M.  Klein, 
qui,  lui  aussi,  s'est  permis  une  excursion  dans  le  champ 
du  polymorphisme. 

Les  deux  causes  principales,  auxquelles  l'auleur  ano- 
nyme rapporte  toutes  les  erreurs  des  polymorphistes, 
sont  :  1°  la  substitution  d'une  plante  à  une  autre  :  on  sème 
un  champignon  dont  les  spores  meurent,  parce  que  le 
milieu  ne  leur  convient  pas,  et  d'autres  spores  intruses 
lèvent  à  leur  place.  —  La  deuxième  cause  est  due  au  para- 


(  732  ) 
sifisme  :  pendant  qu'un  mycélium  se  développe,  les  spores 
d'une  autre  espèce  s'y  instalent  et  croissent  en  parasites. 

Ces  deux  sources  d'erreur  résultent  d'une  méthode 

fautive  :  on  n'a  pas  observé  la  continuité  organique.  — 
Nous  ferons  remarquer  en  passant  que  les  deux  causes 
signalées  étaient  connues,  et  que  plusieurs  de  ceux  qui 
ont  observé  prétendent  les  avoir  écartées  dans  leurs 
recherches. 

Cette  revue  des  auteurs  polymorphistes  nous  paraît  bien 
longue.  Sans  doute  il  a  fallu  à  l'auteur  une  bonne  dose 
de  patience  pour  réunir  et  analyser  tant  de  travaux  épars; 
tous  ces  détails,  qui  pourraient  n'être  pas  de  trop  dans 
un  livre,  rendent  le  mémoire  diffus,  et  sa  lecture  quelque 
neu  fastidieuse. 


Dans  la  deuxième  partie,  l'auteur  décrit  plusieurs  es- 
pèces qui  ont  joué  les  principaux  rôles  dans  le  polymor- 
phisme; d'abord  le  Mucor  Miaerlo,  auquel  il  n'attribue 
qu'un  polymorphisme  fort  restreint;  de  même  le  Mucor 
racemosus  ;  puis  le  Chœtocladium  Joncssii  que  M.  Brefeld 
considère  comme  parasite  du  Mucor  Mucedo,  et  le  Tham- 
nidium  elegans  qui  présente  deux  syslèmes  de  sporanges. 
L'Eurotium  Aspergillus  (jlaucus,  qui  a  longtemps  constitué 
pour  les  mycologues  deux  genres  différents  [Eurotium 
herbariorum  ci  Aspergillus  glaucus) ,  est,  d'après  M.  de 
Bary,  la  forme  double  d'un  même  champignon.  Enfin  il 
décrit  le  Pénicillium  glaucum,  la  plus  commune  des  moi- 
sissures. 

L'auteur  refuse  à  toutes  ces  espèces  le  polymorphisme 
('tondu  qu'on  leur  avait  attribué. 


(  735  ) 

III. 

La  troisième  partie  du  mémoire  est  consacrée  aux 
champignons  de  ferment  ou  levures.  Ici  l'auteur  rend- 
hommage  aux  travaux  de  notre  sa  vaut  confrère  M.Schwann, 
qui,  le  premier,  a  établi  scientifiquement  la  nature  myco- 
logique  du  ferment.  —  Il  traite  fort  longuement  la  ques- 
tion, et  insiste  particulièrement  sur  les  expériences  ré- 
centes de  Reess,  qui  n'a  jamais  vu  de  filaments  mycéliens 
formés  par  la  levure. —  Il  expose  ensuite  une  foule  d'opi- 
nions contradictoires  sur  les  conditions  nécessaires  au 
développement  et  à  l'action  des  ferments;  toutes  ces  opi- 
nions sont  basées  sur  des  expériences  accompagnées  de 
précautions  ininutieiises;  enfin  il  teimine  en  déclarant  (|ue 
le  dernier  mot  n'est  pas  dit  sur  ces  productions. 

Avant  de  clore  son  mémoire,  l'auteur  s'occupe  encore 
de  quelques  petites  Algues  (Schyzomycètes,  Bactéries), 
ainsi  que  de  plusieurs  autres  organismes  {Leptotfin'x, 
Micrococcus ,  Zooglœa,  Monas,  Pahnella) ,  qui  ont  été 
considérés  comme  des  formes  inférieures  des  levures,  etc., 
et,  comme  telles,  réunies  aux  champignons. 

L'auteur  se  flatte,  en  terminant,  d'avoir  levé  tous  les 
cloutes  qui  pouvaient  exister  an  sujet  du  polymorphisme 
des  champignons.  —  Nous  voudrions  qu'il  eût  dit  vrai,  et, 
si  la  vérité  pouvait  se  plier  à  nos  désirs,  nous  verrions 
volontiers  tomber  le  polymorphisme,  car  il  nous  en  coû- 
terait de  renoncer  à  des  idées  avec  lesquelles  nous  sommes 
i'amiliarisé  depuis  près  de  trente  ans.  Mais  la  vérité  est 
inflexible,  et  il  n'y  a  pas  de  sacrifice  qu'on  ne  lui  doive. 

Nous  avons  vu  deux  opinions  en  présence;  la  première 
défend  le  polymorphisme  et  se  base  sur  des  recherches 


(754  ) 

longues  et  minutieuses;  plusieurs  de  ses  partisans  pré- 
tendent avoir  pris  pour  critérium  la  devise  invoquée  par 
leur  adversaire;  ils  assurent  avoir  suivi  la  continuité 
organique  par  des  observations  faites  d'heure  en  heure, 
et  répétées  des  centaines  de  fois.  —  L'autre  opinion  combat 
le  polymorphisme,  tout  en  y  adhérant  dans  certaines 
limites;  ses  défenseurs  n'apportent  que  des  preuves  néga- 
tives :  ils  n'ont  pas  vu,  disent-ils,  cette  continuité,  et 
ils  croient  pouvoir  expliquer  les  conclusions  qu'on  leur 
oppose  par  des  intrusions  ou  par  le  parasitisme,  et,  parmi 
ces  antipolymorphistes,  ceux  qui  font  le  plus  de  bruit 
n'ont  fait  aucune  observation  personnelle. —  Les  polymor- 
phistes  sérieux ,  qui  connaissent  les  raisons  de  ceux  qui 
les  combattent,  ne  se  tiennent  pas  pour  battus,  et  ils  sont 
prêts  à  recommencer  la  lutte. 

Nous  verrions  volontiers  les  partisans  des  deux  opinions 
entrer  directement  en  relations,  et  se  communiquer  mu- 
tuellement leurs  dilficultés  et  leurs  expériences;  des  labo- 
ratoires publics  viendraient  à  propos  pour  le  contrôle  de 
ces  sortes  de  recherches.  Un  argument  très-fort  contre 
une  théorie  serait  celui  d'un  auteur  qui  reconnaîtrait  qu'il 
s'est  trompé,  et  qu'il  a  découvert  la  cause  de  son  erreur. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  l'avenir,  nous  avons  trouvé  dans 
le  mémoire  que  nous  venons  d'examiner,  et  qui  a  dû 
coûter  beaucoup  de  travail ,  un  grand  nombre  de  bonnes 
observations,  dont  plusieurs  sont  propres  à  l'auteur.  En 
conséquence,  nous  n'hésitons  pas  à  demander  pour  lui  la 
récompense  académique,  ainsi  que  la  publication  de  son 
mémoire  avec  les  planches  qui  l'accompagnent.   » 


(  73d  ) 


Kaftpoi't  fie   .fi.    Midonai'U    t'ait    BeHetifft». 

«  La  question  du  polymorphisme  des  champignons  n'est 
point  de  celles  qui  sont  de  la  compétence  exclusive  des 
spécialistes.  Elle  intéresse  au  plus  haut  degré  tous  ceux 
qui  se  préoccupent  des  grands  problèmes  de  la  mor|)ho- 
logie  et  de  la  physiologie  générales;  sa  solution  réside  tout 
entière  dans  une  question  de  méthode;  à  ce  titre  elle  se 
place  à  côté  de  la  doctrine  des  générations  spontanées. 

D'un  autre  côté,  tous  ceux  qui  se  sont  occupés  des  êtres 
rangés  au  bas  de  l'échelle  animale  ont  dû  comprendre  les 
champignons,  tout  au  moins  les  inférieurs,  dans  le  cycle 
de  leurs  recherches;  et  si  une  foule  d'organismes  tels  que 
les  Myxomycètes,  les  Schizomycètes ,  les  Flagellés  sont 
revendiqués  par  les  botanistes,  il  est  impossible  de  leur 
dénier  une  foule  de  caractères  qui  les  rapprochent  des 
animaux. 

En  ce  qui  me  concerne,  j'ai  suivi  avec  un  vif  intérêt  les 
débats  qui  se  sont  élevés  entre  les  partisans  et  les  adver- 
saires du  polymorphisme,  aussi  bien  que  les  discussions 
sans  cesse  renaissantes  sur  l'origine,  le  rôle  et  la  nature 
des  ferments.  Pour  ces  différentes  raisons  j'ai  cru,  sans  être 
botaniste,  pouvoir  accepter  la  mission  de  faire  connaître 
à  l'Académie,  après  mes  savants  confrères  MM.  Morren  et 
Bellynck,  mon  opinion  sur  la  valeur  du  mémoire  soumis  à 
son  appréciation. 

Si  mes  deux  honorables  confrères  étaient  parfaitement 
d'accord  dans  leur  manière  d'apprécier  le  mémoire,  j'au- 
rais pu  me  borner,  en  ma  qualité  de  troisième  commissaire, 


(  736  ) 
à  adhérer  purement  et  simplement  aux  conclusions  qu'ils 
ont  exprimées;  mais  il  est  loin  d'en  être  ainsi.  M.  Morren 
donne  au  travail  soumis  au  jugement  de  la  classe  son  ap- 
probation la  plus  absolue;  il  ne  trouve  rien  à  y  reprendre  ; 
il  juge  la  question  du  polymorphisme  comme  définitive- 
ment tranchée;  tandis  que  le  R.  P.  Bellynck,  tout  en  vou- 
lant bien  consentira  ce  que  le  mémoire  soit  couronné, 
adresse  à  l'auteur  une  série  de  critiques;  il  signale  dans 
son  travail  plusieurs  lacunes;  il  se  plaint  de  ce  que  l'au- 
teur anonyme  s'appuie  exclusivement,  pour  combattre  le 
polymorphisme,  sur  des  arguments  négatifs;  il  conclut  en 
disant  qu'à  son  avis  le  polymorphisme  reste  debout,  qu'à 
ses  yeux  les  polymorphistes  ont  même  sur  leurs  adver- 
saires l'avantage  de  s'appuyer  sur  «  des  observations  du 
reste  bien  faites.  » 

Dans  ces  conditions  il  était  de  mon  devoir  de  développer 
mon  opinion  relative  à  la  valeur  du  mémoire,  de  faire  con- 
naître les  motifs  qui  me  font  adhérer  complètement  aux 
conclusions  du  rapport  du  premier  commissaire  et  d'ap- 
précier les  objections  et  les  réserves  du  R.  P.  Bellynck. 

L'auteur  fait  d'abord  la  critique  de  la  question  posée;  il 
.la  discute  judicieusement  et  il  fait  connaître  le  terrain  sur 
lequel  il  veut  se  tenir,  l'ordre  qu'il  entend  suivre  dans 
sa  réponse.  Puis  il  aborde  la  première  partie  de  son  tra- 
vail. 

Fallail-il  que  l'auteur  anonyme  définît  le  mot  polymor- 
phisme? Il  n'est  pas  un  botaniste,  je  pense,  qui  ignore  ce 
que  signifient  ces  mots  «  polymorphisme  des  champignons;  » 
et  le  sens  que  lui  accorde  l'Académie  me  paraît  suffisam- 
ment indiqué  par  les  termes  mêmes  de  la  question  : 

«  Déterminer  la  part  qui  revient  d'abord  à  la  propre 


[  737  ) 

nature  du  végétal  (à  son  énergie  spécifique);  ensuite  aux 
conditions  extérieures  de  son  développement  ;  »  puis  :  «  la 
preuve  positive  ou  la  négation  sutïlsante  du  fait  que  les 
champignons  de  ferment  peuvent,  dans  des  circonstances 
quelconques,  se  transformer  en  champignons  supérieurs.  » 
—  Les  noms  cités  entre  parenthèses  «  Micrococcus,  Ar- 

thrococcus »  ont  été  pour  la  plupart  inventés  par  Hal- 

lier  pour  représenter  des  productions  soi-disant  décou- 
vertes par  lui.  —  Le  doute  n'est  donc  pas  possible  :  le 
polymorphisme  tel  que  l'entend  l'Académie  est  bien  le 
polymorphisme  soutenu  par  Hallier  et  après  lui  par  M.  l'abbé 
Carnoy,  le  successeur  de  ses  idées  et  de  sa  terminologie. 
Il  suffira,  du  reste,  pour  lever  tout  doute  sur  ce  point,  de 
rappeler  les  circonstances  qui  décidèrent  notre  regretté 
confrère  Spring  à  poser  la  question. 

Le  travail  de  M.  l'abbé  Carnoy  venait  de  paraître;  la 
prétendue  découverte  du  polymorphisme  lui  était  gratui- 
tement attribuée,  et  quelques  personnes  la  considéraient 
comme  la  plus  grande  découverte  du  siècle!!!  Spring  pro- 
testa formellement  contre  le  mot  découverte;  le  polymor- 
phisme des  champignons,  depuis  longtemps  inventé  et 
défendu,  était  tombé  en  Allemagne  en  plein  discrédit, 
quand  parut  l'œuvre  de  M.  Carnoy.  Spring  considérait  si 
peu  la  question  du  polymorphisme  comme  tranchée  par 
cette  publication,  qu'il  se  décida  à  la  mettre  au  concours  : 
l'année  suivante  elle  fut  posée  par  l'Académie. 

Le  R.  P.  rapporteur,  pour  suppléer  sans  doute  à  la  lacune 
qu'il  signale  dans  le  mémoire  de  l'auteur  anonyme,  délinit 
le  polymorphisme  :  «  La  faculté  que  possède  une  plante  de 
produire  plusieurs  sortes  de  fructifications  et  par  consé- 
quent de  se  présenter  sous  différentes  formes  parfois  con- 
sidérées comme  espèces  distinctes.  »  Je  suis  fort  au  regret 


(  738  ) 
(Je  devoir  m'élever  contre  cette  définition,  qui  tend  à  con- 
fondre sous  une  seule  et  même  dénomination  deux  idées 
absolument  distinctes. 

Si  tel  était  le  sens  qu'il  faut  attacher  à  ce  mot,  tous  les 
naturalistes  sans  distinction  seraient  polymorphistes  :  tous 
savent,  en  effet,  que  beaucoup  d'animaux  et  de  végétaux, 
champignons  et  autres,  possèdent  cette  faculté  de  produire 
plusieurs  sortes  de  fructifications.  Et  pour  ne  parler  que 
des  champignons,  je  me  bornerai  à  rappeler  que  depuis 
vingt  ans  Tulasne  et  de  Bary  ont  démontré  l'existence  de 
cette  faculté  chez  diverses  espèces  de  champignons;  je  ne 
sache  pas  que  ces  observations  aient  jamais  été  contestées 
par  personne;  au  contraire,  une  foule  d'autres  observa- 
teurs sont  venus  confirmer  les  faits  avancés  par  ces  deux 
illustres  botanistes. 

Poser  la  question  du  polymorphisme  des  champignons, 
publier  des  volumes  pour  en  démontrer  l'existence,  est 
alors  un  non-sens  :  si  l'on  est  polymorphiste  parce  que  l'on 
croit  que  V insecte  parfait  a  passé  par  les  formes  de  larve 
et  de  nymphe  (I);  si  l'on  est  polymorphiste  parce  que  l'on  a 
constaté  que  chez  une  même  espèce  se  présentent  successi- 
vement des  générations  scissipares,  gemmipares  et  ovipares, 
alors  certes  tous  les  naturalistes  sont  des  polymorphistes  : 
à  côté  de  Carnoy  se  placent,  parmi  les  plus  illustres  poly- 
morphistes, de  Bary,  Brefeld,  Bées,  Cohn,  Van  Tieghem  et 
Lemonnier.  Notre  confrère  a  raison  de  dire  que  ceux  qui 
se  posent  en  adversaires  acharnés  du  polymorphisme  sont 
polymorphistes  eux-mêmes  :   le  B.  P.  le  veut  ainsi  et  de 


(1)  Los  iihrasos  imprimées  en  italiques  sont  tirées  du  rapport  du  révé- 
rend Père. 


(  739  ) 
Barv  et  Brefeld  et  Rees  ne  savent  ce  qu'ils  disent  quand 
ils  combattent  le  polymorphisme. 

A  notre  avis  autre  chose  est  la  pluralité  des  organes  de 
/Vuctification  et  le  polymorphisme  des  espèces,  autre  chose 
l'évolution  des  espèces  et  leur  polymorphisme. 

Certains  auteurs,  partant  de  l'idée  que  1°  les  conditions 
extérieures  seules  modifient  les  champignons,  et  2°,  que 
tous  les  semis  de  spores  quelconques  doivent  se  déve- 
lopper dans  tous  les  milieux,  quitte  à  eux  de  se  transformer 
si  le  milieu  n'est  pas  favorable  à  la  reproduction  de  la 
forme  primitive,  certains  auteurs,  disons-nous,  ont  ren- 
fermé dans  un  même  cycle  toutes  les  espèces  croissant  sur 
différents  substratum  ensemencés  par  eux  des  mêmes 
spores.  Hallier  réunissait  ainsi  toutes  les  moisissures  et 
les  ferments ,  même  les  Urédinées;  M.  Carnoy,  allant  consi- 
dérablement au  delà  de  ce  qu'avait  dit  Hallier,  assignait 
comme  limites  à  son  cycle  de  formes,  les  limites  de  la 
classe  des  champignons  tout  entière.  N'a-t-il  pas  écrit  : 
«  Nous  avons  assez  de  données  dans  nos  notes  pour  affirmer, 
de  la  manière  lapins  catégorique,  que  tous  les  champignons 
cultivés  dans  certaines  conditions  se  transforment  en  Péni- 
cillium GLAUCUM  à  peu  près  identique  partout;  »  et  plus 
loin  :  «  c'est  précisément  à  cause  de  cela  que  ce  Pemcillium 
GLAUCUM  se  retrouve  partout  et  dans  tous  les  pays  [\  ).  »  Pour 
M.  l'abbé  Carnoy  la  classe  des  champignons  ne  se  compose 
que  d'une  espèce;  notre  Agaric,  nos  Oronges,  nos  Bolets, 
nos  moississures,  nos  ferments  ne  sont  que  des  formes 


(1)  Recherches  anatomiques  et  physiologiques  sur  les  champignons, 
par  J.  B.  Carnoy,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  royale  de  Botamque, 
I.  IX,n°2,  p.  293. 


(740) 
revêtues  par  le  Pénicillium  et  qui  peuvent  toutes  retourner 
à  ce  dernier.  —  Voilà  un  polymorphiste! 

Et  c'est  ce  polymorphisme,  ce  sont  ces  polymorphistes 
que  le  R.  P.  Bellynck,  pour  avoir  donné  du  mot  une  défi- 
nition erronée,  rapproche  des  découvertes  à  jamais  célè- 
bres de  Tulasne  et  de  de  Bary;  c'est  à  côté  de  ces  polymor- 
phistes que,  grâce  à  sa  définition  et  à  la  confusion  qui  en 
résulte,  il  vient  placer  de  Bary  et  Brefeld,  les  adversaires 
nés  des  idées  qu'on  leur  prête. 

Plus  loin,  notre  confrère  dit  qu'au  congrès  de  Francfort, 
de  Bary,  revenu  de  plusieurs  de  ses  opinions  précédentes, 
lutta  vainement  contre  Bail ,  Hoffman  et  Thomé.  Consta- 
tons d'abord  que  de  Bary  n'assistait  pas  à  ce  congrès;  mais 
bien  Woronin,  l'un  de  ses  élèves.  C'est  celui-ci  qui  prenait 
part  à  la  discussion  et  exposait  les  idées  de  de  Bary.  De 
plus  de  Bary  n'était  revenu  d'aucune  de  ses  opinions  pré- 
cédentes et  l'honorable  rapporteur  serait,  sans  doute,  bien 
embarrassé  de  citer  un  seul  mot  de  de  Bary  qui  eût  l'air 
d'une  rétractation.  A  cette  époque,  comme  auparavant, 
comme  après,  il  continuait  l'opposition  qu'il  avait  toujours 
faite  aux  idées  polymorphistes. 

Il  n'y  a  donc  pas  moyen  de  donner  le  change  à  ce  sujet; 
jamais  de  Bary,  pas  plus  que  Tulasne,  n'a  partagé  les 
idées  que  ce  dernier  appelait  les  divagations  de  Turpin 
[Deliramenta]  (1).  Si  quelqu'un  s'avisait  d'affirmer  que  tous 
les  vers  se  transforment  les  uns  dans  les  autres,  selon  les 
conditions  extérieures,  qu'un  œuf  de  distome  peut  produire 
inditTéremment  un  distome,  un  nématode,  un  cestoide  ou 
un  échinorhynque,  pourrait-il  prétendre  que  mon  père  est 


(J)  Tulasne,  Selecta  fungorum  Carpoloyia ,  t.  I  ,  p.  185. 


(  741  ) 
(Je  son  avis,  parce  qu'il  a  découvert  l'évolution  des  Cestoïdes 
et  celle  des  Polypes? 

Il  importait,  je  pense,  de  faire  ces  observations,  afin  que 
la  confusion  ne  puisse  s'établir  et  que  l'on  ne  tente  pas  de 
cacher,  sous  le  manteau  protecteur  de  Tulasne  et  de  de 
Bary,  les  excursions  fantaisistes  des  Hallier  et  des  Carnoy 
en  dehors  des  limites  de  la  science. 

Le  polymorphisme  n'a-t-il  rien  de  commun  avec  la  gé- 
nération spontanée?  Certes  le  polymorphisme  tel  que  l'en- 
tend le  R.  P.  est  tout  autre  chose  que  l'Hétérogénie.  Mais 
le  polymorphisme  tel  que  l'entendaient  les  Hallier,  les  Pou- 
chet,  les  Turpin  et  les  Carnoy  est  intimement  lié  à  la  doc- 
trine des  spontéparisles.  Turpin,  le  premier  des  inventeurs 
du  polymorphisme,  disait  (1)  «  que  les  petits  grains  de 
fécule  du  périsperme  de  l'orge  sont  de  véritables  bulbilles 
intestinales  et  microscopiques,  qui,  sous  certaines  in- 
fluences favorables  à  leur  développement,  peuvent  germer 
et  reproduire  la  plante-mère,  ou,  étant  isolées  et  plongées 
dans  un  liquide  sucré,  faire  l'office  de  levure  en  germant 
on  en  végétant  sous  la  forme  très-amoindrie  d'une  Mucé- 
dinée  filamenteuse.  »  On  le  voit, ici  la  génération  spontanée 
et  le  polymorphisme  sont  étroitement  unis;  le  second  est 
le  corollaire  de  la  première.  Turpin,  en  faisant  naître  les 
ferments  et  les  Mucédinéesde  la  substance  de  l'orge,  n'est-il 
pas  spontépariste  aussi  bien  que  polyniorphiste,et  les  deux 
doctrines  ne  se  confondent-elles  pas?  DansPouchet  ne  re- 
trouvons-nous pas  de  nouvea'i  l'association  des  deux  théo- 
ries? [Comptes  re7ichis  de  l'Académie  des  sciences,  t.  LU, 


(1  )  JijRpis, Mémoire  sur  la  cause  et  les  e/f'els  de  la  fermentation  alcoo- 
lique el  acéteuse,  Mémoikes  de  l'Institut  de  Fba>ce,  t.  XVII,  p.  100. 


(  742  ) 

1861,  p.  284).  Et  Joly  el  Musset  [ibid.,  t.  LUI,  18GI, 
p.  370)  ne  fonl-ils  pas  naître  spontanément  la  levure  de 
bière,  qui  ultérieurement  se  transforme  en  un  Pénicillium? 
Les  deux  théories  marchent  ensemble  et  se  soutiennent 
mutuellement.  Du  reste,  quoi  d'étonnant?  Les  procédés  de 
raisonnement  sont  les  mêmes:  le  spontépariste,  qui  voit 
apparaître  des  infusoires  là  où  il  n'en  existait  pas  aupara- 
vant, les  fait  naître  de  toutes  pièces  et  il  affirme  qu'ils 
n'ont  pas  eu  de  parents  semblables  à  eux.  Ne  conclut-il 
pas  alors,  comme  le  font  tous  les  polymorpbistes  qui,  se- 
mant la  levure  et  recueillant  des  Mucorinées,  des  Pénicil- 
lium, voire  même  des  Ascomycètes,  soutiennent  que  les 
mêmes  spores  peuvent  donner  naissance  à  n'importe  quel 
champignon?  Les  uns  et  les  autres  admettent  comme 
axiome  que,  dans  un  liquide  ou  sur  une  surface,  ne  se 
trouvent  et  ne  peuvent  arriver,  en  fait  de  germes,  que  ceux 
qu'ils  y  ont  eux-mêmes  déposés. 

Quand  j'ai  lu  et  étudié  cette  critiques!  instructive,  faite 
avec  tant  de  lucidité,  de  finesse  et  de  savoir,  par  l'auteur 
anonyme  du  mémoire  ,  de  toute  cette  longue  série  de  pu- 
blications polymorphistes,  je  n'ai  pas  trouvé  que  cette  ana- 
lyse fût  trop  longue.  Je  n'y  trouve  rien  de  diifus,  sa  lec- 
ture ne  m'a  nullement  paru  fastidieuse;  et  je  ne  sais  ce 
que  l'honorable  rapporteur  entend  par  un  livre,  quand  il 
dit  :  «  tous  ces  détails,  qui  ne  seraient  pas  de  trop  clans  un 
livre ,  rendent  le  mémoire  diffus.  » 

Il  était  nécessaire  tout  d'abord,  pour  répondre  à  la  ques- 
tion posée,  de  passer  en  revue  tous  ces  défenseurs  du  poly- 
morphisme; et  si  l'auteur  l'avait  fait  d'une  manière  incom- 
plète, on  eût  pu  lui  en  faire  un  grief. 

L'auteur  discute  les  expériences  et  il  n'a  pas  de  peine  à 


(  745  ) 

montrer  qu'elles  sont  entachées  d'une  foule  de  causes  d'er- 
reur; il  signale  l'insuffisance  des  précautions  prises  pour 
empêcher  des  germes  étrangers  de  se  mêler  aux  semis;  il 
dévoile  les  vices  des  méthodes  employées,  le  peu  de  lo- 
gique des  raisonnements  et  des  conclusions  qu'on  en  tire. 
Pas  un  polymorphiste  n'a  pris  la  peine  de  faire  des  cul- 
tures sur  porte-ohjet.  La  seule  démonstration  vraiment 
scientifique  des  transformations,  la  continuité  organique, 
n'a  jamais  été  établie.  Il  est  vrai,  le  R.  P.  Bellynck  cri- 
tique l'auteur  anonyme  parceque  celui-ci  considère  comme 
seule  preuve  convaincante,  et  comme  seul  moyen  de  dé- 
monstration scientifique,  la  continuité  organique.  «  M.  Van 
Tieghem  reproche  à  Carnoy,  dit  le  R.  P.,  cVavoir  voulu 
suivre  cette  prétendue  continuité  qui ,  selon  lui,  est  imprati- 
cable (1).  B  Certes,  voilà  entre  deux  anti-polymorphistes 
une  contradiction  bien  singulière.  L'auteur  du  mémoire 
réclame  la  continuité  organique;  M.  Van  Tieghem  la  dé- 
clare impraticable.  Nous  avons  voulu  contrôler  le  passage 
sus-mentionné  du  mémoire  de  M.  Van  Tieghem.  Nous 
n'avons  pas  été  peu  étonné  de  voir  qu'on  lui  fait  dire  exac- 
tement l'opposé  de  ce  qu'il  a  pensé  et  écrit  en  réalité. 
Voici,  en  effet,  ce  que  nous  avons  lu  :  «  Toutes  ces 
métamorphoses  (les  métamorphoses  du  Mucor  deM.  l'abbé 
Carnoy)  nous  paraissent  absolument  illusoires;  elles  ont 
paru  se  produire  dans  de  grandes  cultures  où,  comme  ou 
sait,  toutes  les  causes  d'erreur  viennent  s'accimiuler,  et 
pour  toute  démonstration,  M.  Carnoy  en  fait  reposer  la 
réalité  sur  une  prétendue  continuité  de  tissu,  impossible  à 
vérifier  dans  ces  conditions  et  sur  des  semis  évidemment 


(1)  Cette  phrase  est  tirée  lexluellernenl  du  rapport  du  R.  P.  Bellynck. 


(  744  ) 
impurs.  Un  exemple  pris  au  hasard  suffira  pour  démontrer 
avec  quelle  légèreté  ce  travail  a  été  accompli...  etc.  »  On 
voit  donc  que  la  prétendue  contradiction  que  le  rapporteur 
signale  n'existe  pas. 

M.  Van  Tieghem  expose,  du  reste,  ses  procédés  d'expéri- 
mentation, quand  il  nous  dit  (p.  262)  :  «  Qu'il  faut  semer 
une  spore  et  suivre  sans  interruption  aucune  et  en  écartant 
avec  soin  tout  être  étranger,  l'évolution  végétative  et  re- 
productrice de  la  plante  qui  en  procède;  »  et  plus  loin 
(p.  264),  après  avoir  fait  connaître  son  procédé  de  cul- 
ture cellulaire,  il  ajoute  :  «  Ce  procédé  permet,  on  le  con- 
çoit, de  suivre  avec  la  plus  grande  facilité  et  sans  inter- 
ruption aucune,  heure  par  heure,  si  cela  est  nécessaire, 
tous  les  détails  de  la  germination  de  la  spore.  »  M.  Van  Tie- 
ghem fait  donc  aussi  de  la  continuité  organique  une  con- 
dition sine  qiiâ  non.  —  Et  c'est  à  lui  que  l'on  fait  dire  : 
qu'à  ses  yeux  la  continuité  organique  exigée  par  l'auteur 
anonyme  est  impraticable. 

Dans  la  seconde  et  la  troisième  partie  de  son  travail , 
l'auteur  fait  connaître  les  observations  exactes  des  bota- 
nistes qui  comme  Brefeld,  Rees,  Cohn  et  d'autres  se  sont 
entourés  de  toutes  les  précautions  nécessaires,  n'admet- 
tant l'identité  spécifique  des  formes  différentes  qu'après 
avoir  constaté  de  la  façon  la  plus  positive  la  continuité 
organique,  le  plus  souvent  en  faisant  des  cultures  sur 
porte-objet  et  en  suivant  le  développement  d'une  seule  et 
même  spore. 

L'auteur  anonyme  du  mémoire  a  pu  par  lui-même  con- 
firmer pour  un  certain  nombre  d'espèces  les  résultats  ob- 
tenus par  ses  prédécesseurs  ,  et  les  figures  jointes  à  son 
mémoire  témoignent  de  l'exactitude  de  ses  observations. 


(  745  ) 
Parmi  les  espèces  dont  le  développement  est  traité  avec  le 
plus  de  détails  se  trouve  le  Pénicillium  glaucum.  Il  ne  sera 
peut-être  pas  inutile  de  dire  que  pour  faire  l'histoire  com- 
plète de  ce  champignon,  Brefeld  a  dû  consacrer  à  son  étude 
deux  années  entières  de  travail;  les  résultats  de  ces  lon- 
gues recherches  viennent  seulement  d'être  publiés. 

Les  arguments  que  l'auteur  apporte  pour  combattre  le 
polymorphisme  sont  tous  arguments  négatifs.  Mais  en  sem- 
blable matière  il  est  impossible  d'en  fournir  d'autres.  Les 
adversaires  du  polymorphisme  pouvaient-ils  faire  autre 
chose  que  de  dévoiler  les  causes  d'erreur  de  toutes  les 
recherches  des  polymorphistes  et  de  faire  connaître  les 
résultats  négatifs  de  leurs  propres  expériences?  Une  affir- 
mation portant  sur  l'existence  d'un  objet, ou  sur  la  produc- 
tion d'un  phénomène,  ne  peut  être  combattue  que  par  une 
négation  ou  des  preuves  négatives,  si  le  contradicteur  ne 
constate  pas  l'existence  de  l'objet  et  ne  voit  pas  se  pro- 
duire le  phénomène.  Comment  voudrait-on  qu'on  établît 
que  quelque  chose  n'existe  pas,  ou  ne  se  produit  pas? 
Pasteur  a-t-il  procédé  autrement  pour  démolir  les  Hété- 
rogénistes? 

Au  reste ,  il  y  a  lieu  de  faire  à  ce  sujet  une  distinction 
importante.  Certes  en  règle  générale  une  observation  posi- 
tive a  plus  de  valeur  qu'une  négation.  Mais  avant  de  se 
prononcer  sur  la  valeur  relative  d'une  affirmation  et  d'une 
négation,  il  y  a  lieu  de  se  demander  d'où  part  l'affirmation 
et  quel  est  celui  qui  nie.  Et  si  le  résultat  négatif  est  obtenu 
par  un  observateur  qui  a  fait  ses  preuves,  qui  a  un  nom 
dans  la  science,  et  dont  les  travaux  ont  été  universellement 
acceptés  et  généralement  confirmés,  elles  valent  bien  à  mes 
yeux  les  données  positives  et  toutes  les  affirmations  de 

2""*  SÉRIE,  TOME   XXXVIII.  48 


(  746  ) 
savants  qui  n'ont  jamais  rien  nié,  ni  rien  affirmé  aupara- 
vant. 

Le  R.  P.  Bellynck  dit,  à  la  fin  de  son  rapport,  qu'il  n'est 
pas  convaincu  par  les  arguments  que  l'on  fait  valoir  contre 
le  polymorphisme  ;  il  déclare  cependant  qu'un  argumen  t  très- 
lorl  contre  une  théorie  serait  celui  d'un  auteur  qi]i  recon- 
naîtrait qu'il  s'est  trompé  et  qu'il  a  découvert  la  cause  de 
son  erreur.  Nous  pouvons  donner  au  R.  P.  plus  qu'il  ne 
demande,  et,  au  lieu  d'un  auteur,  lui  en  présenter  deux. 
En  effet,  MM.  Van  Tieghem  et  Lemonnier  déclarent  loya- 
lement (pages  275,  274,  503,  504, 505);  avoir  admis  à  tort 
un  lien  de  filiation  enlre  le  Mucor  Mucedo,  le  Circinella, 
le  Chsetocladium,  le  Thamnidium.  Ils  font  la  même  décla- 
ration (p.  516)  au  sujet  de  l'Hélicostylum  dont  ils  avaient 
identifié  le  grand  sporange  avec  celui  du  Mucor  Mucedo. 
Quant  aux  causes  de  leur  erreur,  ils  les  ont  trouvées  dans 
l'impureté  de  leurs  cultures  primitives  et  cependant  celles-ci 
étaient  faites  sur  porte-objet.  Nous  voilà  bien  éloignés  des 
cultures  sur  oronges  et  sur  fèces  de  Carnoy.  Les  mômes 
auteurs  terminent  par  cette  déclaration  (p.  275)  :  «  On 
puisera  peut-être  quelques  réflexions  instructives  dans  ce 
changement  apporté  à  leurs  vues  premières  par  deux  ob- 
servateurs indépendants.  »  Voilà  donc  le  R.  P.  d'après  sa 
propre  déclaration  mis  en  demeure  de  se  convertir. 

Enfin,  le  R.  P.  termine  en  déclarant  que  les  polymor- 
phistes  sérieux  ne  se  tiennent  pas  pour  battus  et  qu'ils 
sont  prêts  à  recommencer  la  lutte.  Nous  ne  savons  jusqu'à 
quel  point  notre  honorable  confrère  est  autorisé  à  se  porter 
garant  pour  les  polymorphistes  sérieux!  Ce  qui  est  certain, 
c'est  que  depuis  cinq  à  six  années  l'échafaudage  boiteux 
de  leurs  théories  s'est  écroulé  sous  les  coups  redoublés  des 
de  Bary,  Rees,  Brefeld ,  Cohn,  etc.,  sans  qu'ils  aient  fait  le 


(  747  ) 

plus  petit  effort  pour  le  souteuir.  Si  réellement  ils  étaient 
prêts  à  recommencer  la  lutte,  la  question  posée  par  l'Aca- 
démie  leur  offrait  une  occasion  superbe  qu'ils  se  sont  em- 
pressés, il  faut  l'avouer,  de  ne  pas  saisir.  Que  penser  de 
cette  abstention?  Faut-il  en  conclure  que  les  polymor- 
pliistes  ne  se  tiennent  pas  pour  battus  et  qu'ils  sont  prêts 
à  recommencer  la  lutte  ? 

Quant  à  moi ,  je  le  déclare  sans  hésiter,  je  considère  la 
question  du  polymorphisme  comme  tranchée  dans  le  même 
sens  et  de  la  même  manière  que  la  doctrine  spontépariste 
des  Pouchet  etdebien  d'autres;  l'auteur  anonymedu  mé- 
moire le  démontre  d'une  manière  péremptoire. 

Son  travail  répond  complètement  et  de  la  façon  la  plus 
brillante  à  la  question  posée  et  je  propose,  d'accord  avec 
mes  honorables  confrères,  de  lui  accorder  la  médaille  d'or 
en  même  temps  que  les  félicitations  de  l'Académie.  s> 

La  classe  adopte  les  conclusions  des  rapports  de  ses 
comniissaires.  Elle  vote,  en  conséquence,  la  médaille  d'or 
de  six  cents  francs  au  mémoire  présenté.  L'ouverture  du 
billet  cacheté  qui  y  était  joint  fait  connaître  que  l'auteur 
est  M.  Alfred  GILKI^ET,  docteur  en  sciences  naturelles,  à 
Liège. 


Sixième  question. 

Faire  connaître,  notamment  au  point  de  vue  de  leur 
composition,  les  roches  plutoniennes,  ou  considérées  comme 
telles,  de  la  Belgique  et  de  VArdenne  française. 


(748) 
Le  mémoire  reçu  en  réponse  à  cette  question  a  pour 
devise  : 

Quo  exactius  introspicies  ipsas  corporum,  partes,  eo 
minus  de  origine  dubitabis  (Leibniz,  Protogâa,  XXV). 

MM.  de  Koninck,  Devvalqiie  et  Malaise  ont  été  chargés 
de  faire  l'examen  de  ce  travail. 

na/tpot't  de  M.  de  Koninck. 

«  L'Académie  se  souviendra  probablement  qu'une  ré- 
ponse à  cette  question  avait  été  reçue  par  elle  l'année 
dernière,  mais  que,  malgré  certaines  qualités  incontes- 
tables, ce  travail  n'a  pas  été  jugé  digne  du  prix,  à  cause 
des  lacunes  importantes  qui  pouvaient  lui  être  reprochées. 
Néanmoins  l'Académie  maintint  la  question  à  son  pro- 
gramme et  elle  n'a  qu'à  se  féliciter  de  sa  résolution.  En 
effet,  le  mémoire  qui  lui  est  parvenu  cette  année  est  de 
beaucoup  supérieur  à  celui  que  j'ai  eu  l'occasion  d'exa- 
miner au  précédent  concours  et  je  n'hésite  pas  à  déclarer 
qu'il  est  beaucoup  plus  complet  que  ce  dernier,  quoique 
dans  une  note  les  auteurs  déclarent  que  le  défaut  de  temps 
ne  leur  a  pas  permis  de  terminer  avant  la  date  fixée  par 
r Académie  l'ensemble  des  recherches  qu'ils  avaient  entre- 
prise sur  les  roches  cristallines  de  la  Belgique  et  de  l'Ar- 
denne  française. 

Il  suffit  de  parcourir  ce  nouveau  travail,  dont  je  lais- 
serai faire  l'analyse  à  mes  savants  confrères,  pour  être 
persuadé  qu'il  émane  de  personnes  qui ,  non-seulement 
connaissent  à  fond  la  constitution  géologique  de  notre 
pays,  mais  qui,  en  outre,   possèdent  le  maniement  du 


(  749  ) 
microscope  et  savent  en  l'aire  un  usage  judicieux  et  pra- 
tique. Les  nombreuses  planches  dont  le  mémoire  est  ac- 
compagné et  dont  l'exécution  ne  laisse  rien  à  désirer, 
fournissent  au  reste  une  preuve  directe  de  ce  que  j'avance. 
Les  auteurs  ont  donc  largement  rempli  les  lacunes  dont 
on  pouvait,  à  juste  titre,  reprocher  l'existence  dans  le 
mémoire  précédent.  Ils  se  sont  servis  des  recherches 
faites  par  MM,  Delesse,  Sorby,  Zirkel,  Vogelsang,  von 
Ralh  et  d'autres  pour  compléter  leurs  propres  observa- 
tions et  ils  en  ont  tiré  un  excellent  parti.  Le  seul  repro- 
che qui  puisse  leur  être  adressé  concerne  les  analyses 
chimiques  que  j'aurais  désiré  trouver  en  plus  grand  nombre 
dans  leur  travail.  C'est  probablement  à  ce  défaut,  car  c'en 
est  un,  à  mes  yeux,  que  les  auteurs  font  allusion,  quand 
ils  déclarent  que  leur  mémoire  n'est  pas  aussi  complet 
qu'ils  auraient  pu  le  désirer. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  travail  tel  qu'il  est  constitue  une 
des  plus  belles  Monographies  des  roches  ignées  que  je 
connaisse,  et  je  n'hésite  pas  à  demander  que  l'Académie 
lui  décerne  le  prix.  Ce  prix  d'ailleurs  ne  constituera  qu'un 
faible  dédommagement  des  frais  considérables  que  cette 
Monographie  a  occasionnés  à  ses  auteurs  et  des  peines  qu'ils 
se  sont  données  pour  la  mener  à  bonne  fin. 

Je  demande,  en  outre,  que  les  auteurs  soient  priés 
d'adresser  à  l'Académie  dans  un  mémoire  supplémentaire 
les  recherches  que,  de  leur  propre  aven,  ils  n'ont  pas  eu 
le  temps  de  terminer  avant  la  date  fixée  pour  l'envoi  de 
leur  réponse.  » 


750  ) 


Rn/ifiOfi  tic   .VB.    a,    lft'tcalti**e. 


a  La  question  des  roches  plutoniennes  de  la  Belgique 
et  de  l'Ardenne  française  avait  déjà  amené  une  réponse  au 
concours  clôturé  il  y  a  deux  ans.  La  classe  des  sciences 
se  rappellera  sans  doute  que,  sur  la  proposition  des  trois 
commissaires,  le  prix  ne  fut  pas  décerné  à  cause  des  ira- 
perfections  de  cette  réponse,  d'ailleurs  estimable.  Non- 
seulement  l'étude  chimique  de  ces  roches  était  incomplète, 
mais  encore  aucune  d'elles  n'avait  été  étudiée  au  micros- 
cope :  cette  lacune,  bien  qu'elle  n'eût  pas  lieu  de  nous  sur- 
prendre dans  l'état  actuel  de  la  science  dans  notre  pays, 
était  trop  importante  pour  ne  pas  être  signalée  d'une  ma- 
nière toute  particulière  par  les  rapporteurs.  En  conservant 
la  question  au  programme  de  ses  concours,  la  classe  a  par- 
tagé notre  espoir  de  voir  compléter  nos  connaissances  sur 
ce  point,  et  cet  espoir  n'a  pas  été  trompé. 

Le  travail  dont  nous  avons  l'honneur  de  rendre  compte 
aujourd'hui,  se  distingue,  en  effet,  par  le  soin  avec  lequel 
a  été  fait  l'examen  microscopique  des  roches  dont  il  s'agit, 
comme  par  les  résultats  importants  auquel  cette  étude  a 
conduit.  L'auteur,  on  plutôt,  les  auteurs  ont  parfaitement 
caractérisé  l'esprit  de  leur  œuvre  par  cette  phrase  de  la 
Protogée  de  Leibnitz,  qu'ils  ont  prise  pour  épigraphe  : 
Quo  exactius  inlrospicies  ipsas  corporum  parles,  eo  minus 
de  origine  dnbilabis.  Le  nombre  des  plaques  minces  qu'ils 
ont  fait  polir  pour  les  étudier  au  microscope,  dépasse  cent- 
cinquante;  de  nombreux  dessins,  coloriés  avec  un  soin 
remarquable,  et,  nous  voulons  le  croire,  une  exactitude 
parfaite,  permettent  au   lecteur  de  suivre  la  description 


(7S1  ) 

comme  sur  l'objet  même,  et  jusqu'à  un  certain  point,  d'ap- 
précier l'exactitude  des  conclusions.  Ajoutons  en  passant 
que,  comme  la  littérature  française  ne  possède  encore  au- 
cun traité  consacré  à  l'étude  microscopique  des  roches,  les 
auteurs  ont  cru  devoir  tenir  compte  de  cette  circonstance 
et  sont  entrés  dans  des  détails  et  des  explications  qui 
pourraient  paraître  superflus  en  Allemagne  :  nous  pensons 
que  les  lecteurs  français  leur  en  sauront  beaucoup  de  gré. 

Dans  leur  introduction,  les  auteurs  insistent  d'abord  sur 
les  difficultés  de  la  question.  La  distinction  entre  les  dé- 
pôts marins  les  plus  anciens,  fortement  modifiés,  et  les 
éruptions  plutoniennes  correspondantes  est  d'autant  plus 
difficile  à  établir  que  les  matériaux  de  comparaison  sont 
plus  rares  et  que  la  composition  est  plus  incertaine.  D'une 
part  les  études  microscopiques  des  roches,  qui,  depuis  dix 
ans,  ont  fait  faire  tant  de  progrès  à  la  connaissance  des  ter- 
rains plutoniens,  surtout  en  Allemagne,  ont  porté  beau- 
coup plus  sur  les  roches  récentes,  volcaniques  ou  pyroïdes, 
que  sur  les  roches  anciennes  ou  plutoniques.  D'autre  part, 
la  composition  microscopique  des  roches  à  étudier  est  la 
plupart  du  temps  fort  obscure,  ici  par  suite  d'altérations, 
là  par  la  complication  extrême  d'éléments  de  diverses  pro- 
venances, plus  ou  moins  métamorphiques.  Il  n'est  pas 
jusqu'aux  rapports  de  position  de  nos  roches  plutoniennes 
et  des  terrains  encaissants,  qui  ne  soient  ordinairement 
très-obscurs  ou  inconnus.  Ajoutons  néanmoins  que  les  au- 
teurs sont  arrivés  à  cette  conclusion  importante  qu'un  cer- 
tain nombre  de  ces  roches,  considérées  ordinairement 
jusqu'ici  comme  éruptives,  parfois  comme  métamorphi- 
ques, sont  purement  élastiques,  c'est-à-dire  foraiées  des 
détritus  des  roches  préexistantes. 


(  752  ) 

Vient  ensuite  un  exposé  succinct  de  l'état  de  la  question, 
à  partir  des  premiers  mémoires  de  notre  vénéré  doyen, 
M.  d'Omalius  d'Halloy,  dont  la  présence  nous  eût  été  si 
précieuse.  Ajoutons,  pour  ne  plus  y  revenir,  que  les  auteurs 
se  sont  montrés  parfaitement  au  courant  de  notre  littéra- 
ture scientifique. 

Ils  passent  ensuite  à  la  description  de  nos  diverses  roches 
piuloniennes. 

1.  Diorite  quartzeiise  de  Quenast  et  de  Lessines. 

Le  porphyre  de  Quenast  surgit  dans  le  terrain  silurien 
du  Brabant  sans  que  le  contact  puisse  être  observé.  11 
forme  un  typhon  qui  paraît  plus  étendu  que  Dumont  ne 
l'a  figuré  sur  sa  carte  géologique  de  la  Belgique.  La  sur- 
face de  ce  massif  présente  un  aspect  fort  remarquable  ;  elle 
est  formée  de  grosses  boules,  tantôt  libres,  tantôt  sou- 
dées à  la  masse  sous-jacente,  soit  au  jour,  soit  sous  le 
limon  quaternaire  ou  les  sables  éocènes.  Ces  sphéroïdes, 
plus  ou  moins  décomposés,  sont  ordinairement  formés  de 
couches  concentriques,  parfois  séparables,  entourant  un 
noyau  Irès-cohérenl  ;  quelques-uns,  au  contraire,  sont  assez 
peu  altérés  pour  fournir  des  pavés  :  ce  sont  ceux  qui  ont 
été  protégés  par  au  moins  cinq  à  six  mètres  de  sable  et 
d'argile.  Chose  curieuse,  cette  altération  ne  se  montre  pas 
sur  les  globes  qui  étaient  à  nu  au  commencement  de  l'épo- 
que tertiaire. 

Plus  bas,  la  roche  est  massive  et  partagée  en  polyèdres 
irréguliers  par  divers  systèmes  de  fissures  qui  simulent 
souvent  une  stratification;  mais,  comme  le  dit  Dumont, 
ce  n'est  qu'une  apparence.  Cependant  les  auteurs  ont  noté 
un  système  de  joints  courbés  sur  un  arc  de  plus  de  iOO  de- 


(  753) 
grés;  or  on  sait  qu'une  disposition  analogue  a  été  ob- 
servée dans   certaines  roches  volcaniques ,  où  elle  a  été 
produite  par  retrait. 

Dumont  a  nommé  cette  roche  chlorophyre  massif,  et  il 
en  a  donné  une  description  que  les  auteurs  reproduisent. 
Dans  l'état  actuel  des  carrières,  cette  description  serait 
erronée  sur  un  point  et  incomplète.  La  chlorite  est  sou- 
vent rare  ou  même  absente.  D'autre  part,  l'amphibole  y 
existe  régulièrement,  comme  l'avait  dit^M.  d'Omalius;  elle 
s'y  trouve  en  petits  prismes  ou  en  petites  masses  libro- 
lamellaires,  dont  l'importance  a  été  méconnue  par  Dumont. 
D'autres  prismes,  souvent  plus  visibles,  paraissent  être  du 
type  pyroxénique.  Le  feldspath  de  cette  roche  est  quelque- 
fois de  l'orthose,  caractérisé  parla  macledile  de  Carisbad; 
mais  ordinairement  c'est  de  l'oligoclase,  comme  l'avait  re- 
connu M.  Delesse,  qui  l'a  analysé.  Le  quartz  est  assez  abon- 
dant partout,  quelquefois  en  dihexaèdre.  L'épidote  y  est 
également  habituelle,  en  petits  nids  ou  en  veines,  ordinai- 
rement associée  au  feldspath  dont  elle  semble  souvent 
n'être  qu'un  produit  de  décomposition.  D'autres  minéraux 
du  groupe  des  phylliles,  par  exemple  le  mica,  semblent  être 
dans  le  môme  cas.  La  pâte  euritique  renferme  en  outre  des 
grains  de  magnétite. 

Cette  roche  a  reçu  diverses  dénominations.  Récemment 
M.  Zijkel  l'a  rangée  parmi  les  diorites  quartzeuses  et  les 
auteurs  adoptent  ce  nom,  qui  répond  assez  bien  à  la  com- 
position que  nous  venons  de  résumer.  L'analyse  de  M.  De- 
lesse et  une  autre  que  donnent  les  auteurs,  confirment  ce 
classement. 

Cette  diorite  renferme  des  parties  empâtées,  de  volume 
très-variable,  plus  ou  moins  arrondies,  quelquefois  angu- 
leuses, à  texture  porphyrique  grano-cristalline,  ou  com- 


(  754  ) 
pacte.  Quelques-unes  passent  à  la  diorite  environnante, 
mais  le  plus  souvent  la  limite  est  tranchée.  Elles  sont  or- 
dinairement noir-bleuâlre  ou  gris-verdàtre,  difficilement 
fusibles;  d'autres,  blanches  ou  roses,  fondent  assez  facile- 
ment au  chalumeau.  Ce  seraient,  d'après  les  auteurs,  de 
simples  accidents  de  cristallisation.  D'autres  variétés,  d'un 
blanc  rosàtre  moucheté  de  vert  tendre,  doivent  leur  cou- 
leur à  l'absence  de  l'amphibole,  et  sans  doute,  des  oxydes 
de  fer.  Un  nodule  noirâtre  montre  la  même  pâte  que  la 
roche  environnante,  avec  plus  de  quartz,  de  hornblende 
et  de  biotite.  Un  autre  a  montré  beaucoup  de  magnétite 
à  la  place  de  biotite.  Dans  aucun  on  n'a  observé  trace  d'élé- 
ments élastiques.  Un  noyau  avec  veine  d'eurite  rosâtre 
montre  que  la  teinte  foncée  est  dfie  à  la  hornblende  et  à  la 
magnétite. 

Malgré  sa  ténacité  exceptionnelle  et  la  profondeur  des 
carrières,  cette  roche  est  toujours  plus  ou  moins  altérée. 
Une  altération  notable,  pénétrant  si  profondément,  est-elle 
le  résultat  des  conditions  locales  de  la  cristallisation  primi- 
tive, ou  d'émanations  hydro-thermales  postérieures?  La 
présence  de  sulfures,  de  poches  à  cristaux  avec  quartz,  etc., 
porterait  à  choisir  la  seconde  hypothèse. 

Les  minéraux  accidentels,  qui  sont  très-nombreux,  se 
trouvent  principalement  dans  les  géodes  des  bancs  pâles, 
à  texture  peu  porphyrique,  et  dans  les  zones  d'altération. 
Ce  sont  particulièrement  :  le  quartz  et  l'épidote;  la  chlo- 
rite  et  la  calcite;  puis  la  pyrite,  la  marcassite  et  la  chalco- 
pyrite,  rarement  la  galène,  la  bornite  (phillipsite),  l'asbeste, 
l'amphibole,  l'axinite;  très-rarement  la  tourmaline,  le 
sphène  et  l'épidote  rouge.  C'est  la  première  fois,  croyons- 
nous,  que  ces  trois  dernières  espèces  sont  signalées  dans 
nos  roches  éruptives.  La  tourmaline  se  trouve  ici  en  aiguil- 


(  755  ) 
les  prismatiques,  noires,  opaques,  atteignant  un  centimètre 
de  long  et  0,2  millimètre  de  large,  sur  lesquelles  M.  vom 
Rath  a  reconnu  l'angle  de  l'espèce,  et  dont  les  auteurs  ont 
constaté  la  pyro-électricité.  Le  sphène  est  en  petits  cristaux 
orangés,  offrant  des  sections  rhombiques  allongées. 

L'ordre  de  formation  de  ces  minéiaux  est  variable.  En 
général,  le  quartz  a  cristallisé  un  des  derniers. 

L'épidole,  qui  est  parfois  en  très-beaux  écbantillons,  a 
été  analysée  par  les  auteurs,  qui  en  ont  aussi  indiqué  les 
formes  cristallines. 

Le  zoïsite,  qui  a  été  signalé  à  Quenast,  paraît  n'être 
qu'une  variété  d'épidote. 

A  Lessines,  la  surface  du  massif  porpbyrique  dépasse 
davantage  les  limites  que  Dumont  avait  pu  lui  assigner. 
Les  auteurs  l'ont  reconnu  sur  la  rive  gauche  de  la  Dendre; 
on  l'a  indiqué  entre  les  deux  Dendres  et  près  de  la  Grande- 
Place  de  Lessines.  La  roche  est  la  même  qu'à  Quenast, 
sauf  les  particularités  suivantes. 

La  division  en  bancs  est  très-marquée.  La  direction  de 
ces  bancs  est  comprise  entre  116"  et  118°,  avec  une  incli- 
naison de  20°  à  4-0"  au  SSO.  D'autres  fissures  presque  per- 
pendiculaires partagent  la  roche  en  gros  prismes  à  4,  S  ou 
6  pans.  Cette  division  fait  rarement  défaut;  elle  rappelle 
celle  des  basaltes  par  la  fréquence  des  lignes  brisées  qui 
résultent  de  la  succession  des  prismes.  Les  joints  (cisages) 
principaux,  perpendiculaires  aux  prismes,  indiquent  les 
surfaces  d'égal  refroidissement.  Ils  ont  été  redressés.  On  ne 
saurait  dire  s'ils  sont  en  concordance,  ou  non,  avec  le  ter- 
rain silurien  qui  entoure  le  massif,  c'est-à-dire,  s'ils  lui  sont 
contemporains  ou  postérieurs. 

L'épidote  est  généralement  plus  rare  ici  qu'à  Quenast;  la 


(  7S6  ) 

chalcopyrite,  au  contraire,  est  plus  commune.  Le  minéral 
prismatique  du  type  du  pyroxène  n'a  pas  été  retrouvé  ici; 
la  calcite  est  plus  commune;  les  parties  euritiques,  plus 
abondantes;  les  feldspaths,  plus  ternes;  la  décomposition, 
plus  avancée.  Cela  indique  moins  d'uniformité  dans  les 
conditions  physico-chimiques  de  la  formation. 

D'après  M.  Delesse,  la  pâte  feldspathique  serait  un  ré- 
sidu de  cristallisation,  de  composition  non  définie  ;  sem- 
blable opinion  est  admise  par  beaucoup  d'auteurs  pour  les 
porphyres.  Cependant  le  microscope  montre  celte  pâte 
formée  de  grains  cristallins  de  quartz  et  de  feldspath,  sans 
interposition  de  substance  amorphe. 

Cette  roche  renferme,  outre  l'oligoclase,  reconnu  et  ana- 
lysé par  M.  Delesse,  de  l'orthose,  plus  rare  qu'a  Quenast, 
souvent  difficile  à  caractériser,  à  cause  de  son  altération, 
mais  reconnaissable  à  la  macle  de  Carisbad  et  aux  couleurs 
complémentaires  qui  en  sont  les  conséquences  à  la  lumière 
polarisée.  L'oligoclase  y  forme  des  cristaux  polysynthé- 
tiques,  manifestement  altérés.  La  hornblende  s'y  trouve 
en  fines  aiguilles  accumulées  en  cristaux  de  structure  plus 
ou  moins  confuse,  ordinairement  zonaires  par  suite  de 
l'altération. 

Les  minéraux  accidentels  sont,  outre  l'épidote,  la  cal- 
cite et  le  quartz,  l'apatite,  la  biotite,  la  magnétite  et 
l'ilménite.  Les  cristaux  d'apatite  et  d'ilménite,  que  nous 
reverrons  ailleurs,  sont  indiqués  pour  la  première  fois 
dans  notre  pays. 

La  forme  dihexaèdre  du  quartz  est  celle  qu'il  affecte 
dans  les  porphyres  quartzifères,  qui  sont  très-voisins  des 
diorites.  Ce  minéral  renferme,  comme  à  Quenast,  des 
enclaves  liquides;  les  plus  petites  sont  sphériques;  les 
autres,  ordinairement  allongées;  toutes  sont  extrêmement 


.  (  757  ) 

petites.  Beaucoup  d'entre  elles  renferment, outre  une  bulle 
gazeuse  mobile,  de  petits  cristaux  cubiques,  dont  la  sur- 
face striée  en  damier  indique  un  clivage  cubique.  Un 
échauffement  de  200"  n'y  amène  aucun  changement. 
Liquide,  bulle  et  cristal  ont  donc  été  enclavés  lors  de  la 
cristallisation  du  quartz.  La  seule  présence  de  la  bulle 
gazeuse  empêcherait  d'admettre  une  infiltration  de  liquide 
dans  des  pores,  que  d'ailleurs  on  n'aperçoit  jamais.  L'inva- 
riabilité de  la  bulle,  malgré  réchauffement,  montre  que  le 
liquide  n'est  pas  de  l'anhydride  carbonique,  comme  Yogel- 
sang  l'a  observé  dans  des  circonstances  analogues.  Les 
cristaux  cubiques  indiquent  une  solution  saturée  de  chlo- 
rure alcalin,  comme  M.  Sorby  en  a  trouvé  ailleurs.  A  l'aide 
de  l'analyse  spectrale,  les  auteurs  sont  parvenus  à  carac- 
tériser nettement  le  sodium  ;  et  ils  ont  reconnu  le  chlore 
à  l'opalescence  que  le  nitrate  d'argent  détermine  dans 
l'eau  distillée  oiî  l'on  a  mélangé  du  quartz  pulvérisé.  La 
présence  de  chlorure  sodique  dans  une  roche  plutonique 
ne  doit  point  nous  étonner,  si  nous  nous  rappelons  que 
les  roches  volcaniques  contiennent  souvent  une  proportion 
notable  de  ce  sel,  et  si  nous  songeons  aux  analogies  exis- 
tant entre  ces  roches  et  les  roches  plutoniques. 

Il  résulterait  de  ce  qui  précède  une  conséquence  impor- 
tante :  c'est  que  l'eau  de  la  mer  est  intervenue  dans  la 
formation  de  la  diorite  de  Quenast  et  de  Lessines. 

En  s'appuyant  sur  la  solubilité  connue  du  chlorure  de 
sodium,  qu'ils  admettent  comme  suivant  la  même  loi  jus- 
qu'à une  température  élevée,  et  en  tenant  compte  des 
dimensions  de  la  cavité,  de  la  bulle  et  du  cristal  à  diverses 
températures,  les  auteurs  calculent  que  la  solidification  se 
serait  faite  à  la  température  de  507",  soit  sous  une  pres- 
sion de  87  atmosphères. 


(  758  ) 
Indépendamment  des  enclaves  solides,  micro-cristallines 
comme  la  pâle,  que  renferme  la  diorite  de  Lessines,  cette 
roche  renferme  aussi  des  aiguilles  microscopiques(apatite?), 
et  des  prismes  basés  d'apatite,  atteignant  0,5  millimètre, 
qui  ont  cristallisé  en  premier  lieu.  La  biotile,  qui  est  fort 
secondaire,  dérive  peut-être  de  la  hornblende.  L'ilménite 
et  la  magnélite  se  trouvent  en  grains  cristallins  au  voisi- 
nage du  mica,  dont  ils  proviennent  sans  doute  quelquefois; 
mais  le  plus  souvent  la  magnélite  semble  dériver  de  la 
hornblehde.  Le  fer  tilané  est  recouvert,  comme  partout 
en  Belgique,  d'une  substance  blanchâtre  presque  opaque. 
Quelques  lamelles  verdàires  paraissent  être  de  l'amphibole 
altérée  plutôt  que  de  la  chlorite;  cette  dernière  espèce 
paraît  cependant  exister  aussi  dans  la  roche.  L'épidote  est 
généralement  associée  à  la  calcile,  occupant  la  place  d'un 
cristal  d'oligoclase  décomposé.  Le  sphène  n'a  pas  été  re- 
trouvé ici. 

2.  Gabbro  de  Hozémont. 
(Hypersthénite  de  IJumonl.) 

La  seule  excavation  qui  existe  actuellement  est  très- 
dégradée,  elle  n'atteint  pas  les  limites  du  culot,  et  l'on 
n'observe  même  pas  le  terrain  silurien  au  voisinage  immé- 
diat. La  roche  présente  de  nombreux  joints,  les  uns  plans, 
les  autres  courbes,  produisant  dans  certains  endroits  une 
structure  globuliforme.  Par  suite  de  l'altération  superli- 
cielle,  il  s'est  produit  des  boules  à  couches  concentriques. 

Les  auteurs  reproduisent  la  description  de  Dumonl, 
qu'ils  confirment  en  général.  Seulement,  ils  ne  reconnais- 
sent ni  pâte  eurilique,  ni  hypersthène. 

Le  feldspath,  plagioelase ,  parait  être  du  labrador.  La 
quantité  de  silice  que  les  auteurs  y  ont  trouvée  est  un  peu 


(  759  ) 

faible  (46  %);  mais  ils  attribuent  la  différence  à  l'altération 
du  minéral.  11  est  pourtant  moins  altéré  que  dans  nos 
autres  roches.  L'altération  commence  souvent  par  le  centre. 
Les  cristaux,  macles  polysynihétiques,  sont  quelquefois 
brisés,  à  fragments  un  peu  courbés,  comme  s'ils  avaient 
été  entraînés  lorsque  la  substance  était  encore  un  peu 
plastique.  L'examen  microscopique  montre  un  agrégat 
granitoïde  de  ce  feldspath  et  de  diallage  :  la  roche  est  doue 
un  gabbro,  comme  je  l'avais  présumé,  il  y  a  longtemps. 

La  diallage  se  présente  en  cristaux  fendillés,  à  contours 
peu  nets,  offrant  quelques  sections  rhombiques,  brun-ver- 
dâtre,  non  dichroscopiques.  Sa  belle  polarisation  chroma- 
tique rivalise  avec  celle  du  quartz.  Elle  est  associée  à  la 
hornblende  fibreuse  ou  asbesle,  à  polarisation  chromatique 
assez  vive,  dichroscopique. 

Entre  les  cristaux  précédents  se  rencontre  cependant 
une  substance  verdàtre  qui  a  pu  être  prise  pour  une  pâte 
euritique.  Elle  paraît  en  grande  partie  isotrope,  et  formée  de 
fibres  parallèles  légèrement  ondulées.  Les  auteurs  la  consi- 
dèrent comme  une  matière  serpeutineuse,  et  produit  de 
décomposition;  cependant  on  n'y  a  pas  observé  de  péridot. 
Cette  matière  serpentineuse  est  très-commune  dans  les 
gabbros  (euphotides  ophiteuses  de  Brongniart). 

Cette  matière  empâte  des  microlithes  prismatiques  indé- 
terminables, et  des  prismes  plus  grands  qui  i)araissent 
être  de  l'actinole;  puis,  de  l'apatite  en  prismes  de  0,2  mil- 
limètre de  long,  souvent  divisés  en  nombreux  tronçons; 
de  l'ilménite,  entouré  d'un  produit  de  décomposition  que 
nous  avons  déjà  signalé  ;  rarement  de  la  pyrite  et  du  quartz. 
La  calcite  s'y  rencontre  aussi  comme  produit  secondaire. 

Les  auteurs  font  connaître  ensuite  la  première  atralyse 
du  gabbro  de  Hozémont.  Le  quotient  d'oxygène  est  ^4;  la 
siJice  y  entre  pour  46  7o- 


(  760  ) 


3.  Porphyroïdes  de  Fauquez,  de  Rebecq-Rognon 
et  de  Pilet. 

(Chlorophyre  et  porphyre  schistoïdes  et  albite  phylladifère  de  Dumont.) 

Nous  arrivons  à  des  roches  schisto-porphyroïdes  qui 
paraissent  régulièrement  intercalées  dans  les  couches 
siluriennes  du  Brabant.  Dumont  les  considérait  comme  des 
fdons  couchés.  M.  d'Omalius  et  moi-même  avons  été 
tentés  d'en  considérer  le  plus  grand  nombre  comme  méta- 
morphiques; plus  tard  je  me  suis  demandé  s'ils  n'étaient 
pas  les  équivalents  des  cendres  feldspathiques  interstrali- 
fiées  dans  le  terrain  silurien  du  pays  de  Galles.  Les  auteurs 
leur  appliquent  le  nom  de  phorphyroïdes.  Ils  s'occupent 
d'abord  de  celles  que  l'on  rencontre  dans  la  vallée  de  la 
Méhaigne  (albite  phylladifère  de  Pitet)  et  dans  le  Brabant, 
entre  Enghien  et  Monstreux,  près  de  Nivelles,  le  long  d'une 
ligne  qui,  d'après  Dumont,  est  orientée  1 16  Va"- 

Ces  dernières  roches  n'apparaissent,  le  long  de  cette 
ligne,  qu'en  des  points  généralement  éloignés  et  sur  des 
espaces  fort  resserrés.  Les  intervalles  sont  occupés  par  des 
sables  tertiaires  et  du  limon  quaternaire  qui  cachent  les 
roches  sous-jacentes;  de  sorte  que  les  auteurs  considèrent 
ces  gîtes  plutôt  comme  réunis  que  comme  des  culots  isolés, 
ainsi  que  l'admettait  Dumont.  La  comparaison  avec  les 
cendres  volcaniques  conduit  à  la  même  idée. 

Ces  porphyroïdes  se  voient  le  mieux  près  du  hameau  de 
Fauquez ,  au  S.  de  Virginal.  On  y  trouve  le  chlorophyre 
schistoïde,  qui  passe  au  porphyre  schistoïde  par  diminution 
de  ciilorite  et  augmentation  de  phyllade.  Le  porphyre 
schistoïde  passe  enfin  à  l'albite  phylladifère.  Les  auteurs 
reproduisent  les  descriptions  que  Dumont  a  données  de 


(  761  ) 
ces  roches, et  en  confirment  l'exactitude;  mais  ils  ajoutent 
beaucoup  de  détails.  Dans  le  vallon  de  Fauquez,  elles 
forment  une  zone  de  80  à  100  mètres  de  large,  dont  la 
direction  varie  de  105  à  130°,  avec  une  inclinaison  au  NE. 
de  35"  à  80°.  La  partie  inférieure  est  surtout  formée 
d'albite  phylladifère,  la  partie  moyenne  et  supérieure,  de 
porphyre  schistoïde  passant  çà  et  là  au  chlorophyre  schis- 
toïde.  On  trouve  dans  ces  roches,  non-seulement  des  par- 
ticules, mais  même  des  fragments  de  phyllade  couchés  à 
plat,  dont  l'origine  paraît  différer  de  celle  des  enduits 
phylladeux  :  ils  sont  d'origine  antérieure,  tandis  que  les 
enduits  ont  été  formés  sur  place.  Ces  fragments  paraissent 
être  du  phyllade  ou  de  la  séricite. 

Ces  roches  de  Fauquez  n'ont  jamais  la  structure  mas- 
sive. Assez  souvent  elles  deviennent  celluleuses  par  dispa- 
rition du  feldspath ,  puis  la  calcile  se  développe  dans  les 
cavités  comme  produit  secondaire.  Il  en  est  de  même  pour 
le  quartz. 

Leurs  limites  supérieure  et  inférieure  ne  sont  pas 
visibles  dans  le  vallon  de  Fauquez;  mais,  à  900  mètres  de 
là,  dans  un  chemin  au  NE.  de  l'écluse  n"  40,  il  y  a  une 
exploitation  abandonnée  des  derniers  bancs  supérieurs.  On 
y  voit  :  1"  une  porphyroïde  schisto-compacte,  dir.  140°, 
incl.  NE.  =  35°  à  40°;  elle  renferme  des  cristaux  arrondis 
de  feldspath  et  des  fragments  de  phyllade;  2°  une  eurite 
quartzeuse  schisto-compacte,  avec  fragments  de  quartzite 
et  de  schiste;  elle  est  séparée  de  la  porphyroïde  par  une 
ligne  très-nette  et  ondulée;  3°  une  eurite  plus  ou  moins 
quartzeuse,  compacte,  avec  lits  schistoïdes ;  elle  ren- 
ferme des  fragments  assez  gros  ou  des  noyaux  de  porphy- 
roïde à  grands  cristaux  de  feldspath.  Ces  derniers  bancs 
sont. incontestablement  d'origine  sédimentaire  :  ces  frag- 

2""  SÉRIE,  TOME  XXXVIIl.  49 


(  762  ) 

ments  sont  des  débris  des  roches  porphyriques  sous- 
jaceutes,  disséminés  avec  le  sable  et  les  boues  feldspa- 
thiques.  La  netteté  de  leurs  contours  ne  permet  pas  de  les 
considérer  comme  métamorphiques.  Les  porphyroïdes  de 
Fauquez  ne  sont  donc  ni  un  porphyre  d'intrusion,  ni  un 
produit  du  métamorphisme:  ce  sont  des  roches  conglo- 
mérées contemporaines.  Mais  il  ne  faut  pas  perdre  de  vue 
qu'elles  ont  été  grandement  modifiées  depuis  le  premier 
rassemblement  de  leurs  éléments ,  de  même  que  les  sables 
voisins  sont  devenus  des  quartzites,  et  les  argiles,  des 
phyllades.  Les  enduits  phylladeux  et  sériciteux  sont  des 
produits  postérieurs. 

Les  bancs  supérieurs  passent  à  des  phyllades  verdâtres 
que  l'on  voit  un  peu  au  nord;  ceux-ci  sont  suivis,  à 
250  mètres  plus  loin,  par  de  nouvelles  porphyroïdes  que 
Dumont  n'a  pas  mentionnées.  Ces  roches  forment  donc 
plus  d'une  bande. 

Les  autres  aflleurements  de  ce  canton  sont  très-impar- 
faitement visibles  et  fort  altérés;  il  est  aisé  néanmoins  d'y 
reconnaître  la  même  composition  minéralogique. 

Sur  la  Méhaigne,  à  Pitet,  Dumont  a  signalé  en  1830 
deux  gîtes  de  porphyroïdes  semblables.  Le  premier  se 
trouve  au  monticule  que  surmonte  l'église  en  ruines  du 
Saint-Sauveur;  le  second  est  situé  à  500  mètres  plus  au 
sud,  à  la  rive  gauche  de  la  rivière.  Ils  paraissent  se  pro- 
longer sur  la  rive  droite. 

D'après  Dumont,  la  roche  de  Pitet  serait  une  albite 
phylladifère,  passant  à  l'eurite.  Après  avoir  reproduit  sa 
description,  les  auteurs  ajoutent  que  le  phyllade  est  inti- 
mement uni  à  une  pâte  euritique  feuilletée  qui  paraît 
dominer  là  où  le  grain  s'atténue  ;  son  éclat  nacré  rappelle 


(  765  ) 
singulièrement  les  séricites  du  Taunus.  Les  grains  de 
feldspath  sont  plagioclases,  plus  ou  moins  arrondis,  enve- 
loppés des  enduits  phylladeux  et  euritiques  et  donnant 
lieu  ainsi  à  une  texture  entrelacée,  gneissique.  Cette 
texture  est  encore  un  caractère  des  Sericitschiefer  du 
Nassau. 

Le  gîte  de  S^-Sauveur  est  ouvert  sur  80  à  100  mètres, 
perpendiculairement  à  la  direction.  Les  bancs  se  succè- 
dent régulièrement  et  paraissent  concorder  avec  le  terrain 
silurien  du  voisinage.  Ceux  du  nord,  probablement  les 
plus  anciens,  renferment  des  fragments  schisteux.  En 
général,  le  grain  diminue  en  allant  vers  le  sud,  où  do- 
mine une  eurite  quartzeuse  plus  ou  moins  schistoïde,  avec 
bancs  renfermant  des  paquets  cristallins  d'albite  phylladî- 
fère,  en  noyaux,  fragments  ou  petites  couches,  qui  sont 
probablement  des  fragments  de  quelque  couche  anté- 
rieure. On  n'aurait  donc  pas  affaire  à  un  typhon,  mais  à 
une  suite  de  bancs  contemporains  du  terrain  environ- 
nant :  celte  conclusion  est  confirmée  par  l'analogie  avec 
les  porphyroïdes  de  Fauquez. 

Le  gîte  méridional  se  montre  sur  une  vingtaine  de 
mètres  de  long  et  12  à  lo  mètres  de  haut,  mais  une  por- 
tion notable  est  recouverte  de  débris.  C'est  un  diminutif 
du  précédent.  Au  sud,  on  peut  voir  le  contact  avec  le 
terrain  silurien  ,  formé  de  phyllades  compactes  que  Du- 
mont  et  M.  Malaise  considèrent  comme  échauffés,  mais 
qui  ont  été  probablement  métamorphosés  sans  l'influence 
d'une  chaleur  notable.  Les  bancs  montrent  une  disposi- 
tion anliclinale  qui  pourrait  faire  croire  que  le  typhon  les 
a  redressés;  mais,  au  nord,  on  ne  voit  pas  de  couches 
siluriennes;  de  sorte  que  c'est  la  roche  soulevante  qui 
formerait  le  A ,  ce  qui  est  inconciliable  avec  le  rôle  qu'on 


(  764  ) 

lui  aiuibue.  Un  plissement  ou  une  faille,  choses  difficiles 
à  constater  dans  l'état  présent  des  lieux,  expliquerait  cette 
disposition. 

En  résumé,  ces  roches  de  Fauquez  et  de  Pitet  parais- 
sent des  roches  sédimentaires  métamorphiques,  comme  le 
reste  du  terrain  silurien;  elles  impliquent  donc  l'antério- 
rité, dans  la  mer  silurienne,  de  roches  cristallines  d'ori- 
gine tout  autre,  filons  (Lembecq)  ou  nappes  (Quenast  et 
Lessines),  qui  leur  ont  fourni  une  grande  partie  de  leurs 
matériaux. 

L'examen  microscopique  conduit  aux  mêmes  conclu- 
sions. 

Ici  pourtant  la  distinction  des  divers  minéraux  qui 
constituent  nos  porphyroïdes ,  est  très-difficile.  Il  est  or- 
dinairement impossible  de  distinguer  les  diverses  espèces 
de  talcs,  de  chlorites,  de  sérielles  et  même  de  micas.  En 
outre  les  signes  caractéristiques  d'un  transport  font  ha- 
bituellement défaut.  Néanmoins ,  grâce  à  la  structure 
schisto-porphyroïde,  les  conclusions  peuvent  généralement 
être  considérées  comme  certaines. 

Voyons  d'abord  le  massif  septentrional  de  Pitet.  La  pâte, 
micro-cristalline,  montre  des  plages  renfermant  du  quartz 
et  du  feldspath  altéré,  quelquefois  en  grains  de  plusieurs 
millimètres,  cimentés  par  un  élément  pbylladeux  jaunâtre, 
vert-pàle  ou  incolore,  qui  produit  la  schistosité  et  res- 
semble tout  à  fait  à  la  séricite  du  Taunus.  On  y  observe  en 
outre  une  substance  verdâtre,  écailleuse,  qui  s'éteint  en 
partie  sous  les  prismes  de  Nicol  croisés.  Tous  les  feldspaths 
sont  brisés  et  dentelés  aux  extrémités,  crevassés,  émoussés 
sur  les  angles, montrant  ainsi  la  trace  d'un  transport  mé- 
canique. Presque  tous  sont  plagioclases;  en  général,  ils 


(  765  ) 

sont  plus  ou  moins  altérés,  suivant  le  développemtMit  de 
la  phyllite,  qui  paraît  donc  provenir  de  leur  décomposi- 
tion, ils  sont  criblés  de  pores  vides  ou  pleins  d'air.  C'est 
probablement  de  l'ai  bile. 

Les  grains  de  quartz  sont  irréguliers,  quelquefois  formés 
par  une  agglomération  de  grains  plus  gros  que  ceux  de  la 
pâte;  ils  renferment  des  enclaves  liquides.  Quelques  grains 
peuvent  cependant  avoir  cristallisé  sur  place. 

L'élément  phylladeux  est  la  séricile,  presque  incolore, 
non  dichroscopique,  plutôt  fibreuse  que  lamellaire,  à  fibres 
entrelacées,  ce  qui  la  distingue  des  micas.  Elle  est  beau- 
coup plus  abondante  près  des  feldspaths  que  près  du 
quartz.  Quelques  plages  vertes,  fibreuses  ou  écailleuses, 
isotropes,  sont  restées  indéterminées  :  les  auteurs  les 
désigneront  provisoirement  sous  le  nom  de  viridile. 

A  la  chapelle  du  S'-Sauveur,  les  éléments  sont  ana- 
logues, avec  très-peu  de  séricite.  La  viridite  est  sensible- 
ment dichroscopique. 

Les  paquets  cristallins  disséminés  dans  l'eurite  porphy- 
rique  qui  paraît  surmonter  les  autres  couches,  n'ont  point 
montré  de  pâte  micro-cristalline  :  elle  est  remplacée  par 
une  substance  écailleuse  d'un  vert  pâle.  Les  plagioclases 
sont  plus  grands,  mais  toujours  fragmentés.  Le  quartz  a 
cristallisé  sur  place,  enclavant  de  la  viridite  ,  etc. 

En  résumé  les  roches  de  Pitet  sont  formées  d'une  pâte 
micro-cristalline  de  quartz  et  de  feldspath,  d'un  grain 
ordinairement  assez  fin,  entremêlée  de  viridite,  prenant 
une  structure  schisteuse  par  l'interposition  de  séricite,  et 
une  texture  porphyroïde  par  suite  de  fragments  de  quartz 
et  de  feldspath.  En  admettant  que  ce  dernier  est  l'albite, 
tous  ces  caractères  concordent  avec  ceux  des  porphi/ro?les 
du  Taunus  et  des  bords  de  la  Lenne. 


(766) 

Les  roches  de  Fauquez  ressemblent  beaucoup  aux  pré- 
cédentes, mais  elles  sont  plus  métamorphiques  et  plus 
altérées.  Dans  la  masse  centrale,  on  voit  au  microscope 
une  pâte  micro-cristalline  de  feldspath  et  de  quartz,  ren- 
fermant de  grands  cristaux  de  feldspath,  presque  tous 
plagioclases,  disloqués  ,  échancrés, fissurés,  mais  pourtant 
dans  lesquels  la  décomposition  a  plus  fait,  pour  ces  muti- 
lations, que  le  transport.  Le  quartz,  tantôt  détritique, 
tantôt  cristallisé  sur  place,  est  moins  abondant  qu'à  Pitet. 
La  viridite  s'éteint  entre  les  prismes  de  Nicol  croisés  et 
ne  montre  aucune  trace  de  dichroscopisme. 

Vers  le  milieu  de  la  bande,  la  roche  montre  de  même 
beaucoup  de  plagioclases  avec  quelques  grains  d'orthose, 
du  quartz,  en  partie  formé  sur  place,  de  la  séricite  et  de 
la  viridite.  Il  en  est  de  même  pour  le  dernier  banc  visible 
au  NE.,  sauf  que  les  parties  constituantes  sont  plus  pe- 
tites, et  qu'il  y  a  moins  de  quartz  et  peu  de  séricite. 

La  roche  du  Chenois  est  analogue  aux  précédentes.  Les 
plagioclases  ont  l'aspect  aussi  fragmentaire  qu'à  Pitet.  Le 
fer  titane  s'y  montre  çà  et  là. 

Porphyroïde  de  Steenkuyp  (chlorophyre  schistoïde  du 
Vert-Chasseur,  Dumonl).  Un  îlot  de  porphyroïde,  occu- 
pant moins  de  100  mètres  carrés,  se  rencontre  à  500  mè- 
tres du  coude  que  fait  la  route  de  Bruxelles  à  Enghien,  à 
l'est  du  hameau  de  Steenkuyp.  Cette  roche  se  trouve  en 
bancs  stratoïdes,  qui  inclinent  au  NE.  de  50  à  40".  On  y 
voit  des  grains  de  plagioclase  et  des  lamelles  d'aspect  chlo- 
riteux,  unies  à  la  pâte,  feuilletées-ondulées,  donnant  à  la 
roche  une  texture  inconnue  dans  les  roches  éruptives. 
Quelques  grains  paraissent  être  de  l'épidote.  Les  cristaux 
d'apatite  y  sont  communs   et  plus  grands  que   partout 


(  767  ) 

ailleurs;  ils  atteignent  parfois  près  d'un  millimètre  de 
diamètre.  Cette  roche  est  un  porphyre  en  nappe  ou  plutôt 
une  porphyroïde. 

Les  fragments,  très- altérés,  qui  proviennent  de  la 
Grande-Haye  et  du  Croiseau,  ont  la  plus  grande  analogie 
avec  la  roche  précédente. 

Contrairement  à  ce  qu'avait  pensé  Dumont,  le  micros- 
cope n'a  point  montré  d'analogie  entre  ces  chlorophyres 
schistoïdes  et  le  chlorophyre  massif  de  Quenast  et  de 
Lessines.  Les  premiers  seraient  plutôt  un  porphyre  quart- 
zifère.  La  pâte  est  la  même  qu'à  Quenast;  le  feldspath  est 
de  l'orlhose,  rarement  un  plagioclase;  il  est  entouré  et 
traversé  par  une  substance  verdàtre.  Le  quartz  paraît 
avoir  cristallisé  sur  place.  Une  substance  verdàtre,  que 
l'acide  chlorhydrique  décolore,  paraît  être  de  la  chlorite  ; 
sa  polarisation  chromatique  la  distingue  de  la  viridite.  On 
voit  que  l'absence  d'amphibole  sépare  nettement  ce  por- 
phyre de  la  diorite  de  Quenast. 

4.  Arkoses. 

Les  arkoses  du  Brabant,  très-bien  décrites  par  Dumont, 
se  rencontrent  partifeulièrement  vers  Hal ,  Lembecq,  Tu- 
bize  et  Clabecq.  Dumont  les  considérait  comme  des  grès 
argileux,  devenus  feldspalhiques  et  chioritifères  sous  l'in- 
fluence du  métamorphisme  produit  par  les  masses  plu- 
toniennes  sous-jacentes,  dont  les  typhons  connus  peuvent 
faire  admettre  la  présence.  Les  auteurs  ont  jugé  utile  d'en 
faire  l'étude  microscopique;  et  cet  examen  leur  a  montré 
que  le  feldspath  et  une  grande  partie  du  quartz  provien- 
nent du  transport. 


(768) 

D'ailleurs,  on  voit  à  l'œil  nu,  dans  les  arkoses  pisaires 
de  Lembecq  et  de  Clabeeq,  des  cristaux  de  feldspath  de 
plusieurs  millimètres,  réduits  à  des  grains  arrondis.  En 
outre,  elles  renferment  parfois  des  fragments  irréguliers 
de  schiste  ou  phyllade  non  feldspathisé.  Les  phyllades  qui 
séparent  ces  bancs  ne  diffèrent  pas  des  phyllades  étran- 
gers à  la  zone  de  métamorphisme  supposé. 

Au  microscope  ces  arkoses  de  Clabeeq  et  de  Lembecq, 
qui  quelquefois  ont  été  prises  pour  des  porphyres,  accu- 
sent le  caractère  le  plus  élastique.  Une  partie  des  lamelles 
verdâtresque  Dumont  a  considérées  comme  de  la  chlorite, 
proviennent  de  la  décomposition  de  l'amphibole?  La  grande 
majorité  des  grains  de  feldspath  sont  plagiociases. 

L'arkose  de  Tubize  montre  une  pâte  peu  abondante , 
micro-cristalline.  Les  grains  de  quartz  et  de  feldspath  sont 
cimentés  par  une  matière  verte,  biréfringente,  fortement 
dichroscopique,  qui  paraît  être  de  l'amphibole  décomposée. 
Le  quartz  est  de  beaucoup  le  minéral  le  plus  abondant.  Les 
feldspaths  sont  polysynthétiques,  plagiociases.  Le  mica  se 
trouve  en  lamelles  parallèles,  généralement  courbées. 
Quelques  sections  rhombiques,  noires  et  opaques,  accusent 
la  présence  du  fer  titane. 

A  Clabeeq,  la  pâte  est  analogue  a  la  précédente,  riche 
en  micas  et  en  grains  métalliques  opaques.  Dans  la  partie 
altérée  qui  joint  le  phyllade,  la  composition  est  très-voi- 
sine: on  y  a  observé  en  outre  de  la  hornblende. 

L'arkose  du  chemin  au  sud  est  fort  altérée  et  diHicile  à 
polir.  Elle  montre  la  même  pâte,  avec  plus  de  fer  titane 
et  moins  de  mica.  La  viridite  ne  montre  aucun  caractère 
qui  permette  de  la  rattacher  à  l'amphibole. 


(  769  ) 

5.  Porphyre  quart-ifère  de  Spa. 
(Eurite  et  hyalophyre  pailletés,  Dumont). 

On  trouve  au  cimetière  de  Spa  des  débris  d'une  roche 
que  Duniont  a  décrite  sous  le  nom  d'hyaiophyre  :  c'est, 
suivant  les  auteurs,  un  porphyre  quartzifère  gris-jaunàtre; 
les  cristaux  de  feldspath  ne  dépassent  pas  trois  millimètres 
et  sont  presque  toujours  beaucoup  plus  petits;  ils  se  rap- 
portent à  l'orthose.  Le  quartz  s'y  présente  en  nombreux 
dihexaèdres  de  même  grandeur.  Quelques  lamelles  noirâ- 
tres, dont  l'examen  optique  n'a  pu  être  fait,  semblent  se 
rapporter  à  une  chlorite.  Celte  roche,  dont  les  minéraux 
ont  cristallisé  sur  place,  semble  éruptive;  c'est  le  meil- 
leur type  de  porphyre  quartzifère  de  notre  pays. 

A  la  Promenade  des  Français  on  trouve  une  eurite 
quartzeuse  avec  de  très-petits  cristaux  de  feldspath  et  de 
petits  prismes  aciculaires  restés  indéterminés.  Elle  paraît 
être  éruptive  et  former  un  filon  transversal,  ce  que  con- 
hrme  sa  texture  fluidale  que  révèle  le  microscope. 

Vu  au  microscope ,  le  porphyre  du  cimetière  montre 
une  pâte  micro-cristalline  de  feldspath  et  de  quartz,  ren- 
fermant de  nombreux  cristaux  d'orthose  à  contours  très- 
nets,  de  0,5  à  1  millimètre,  et  montrant  de  nombreux 
points  noirs  indéterminés.  Les  cristaux  de  quartz  sont 
criblés  d'enclaves  liquides.  Un  minéral  vert-jaunâtre  (horn- 
blende décomposée?)  forme  comme  un  réseau  danslapàte. 

La  roche  de  la  Promenade  des  Français  montre  une 
structure  analogue,  avec  une  disposition  fluidale  de  la 
pâte.  Les  grands  cristaux  de  feldspath  sont  de  l'orthose  ; 
un  seul  a  été  trouvé  plagioclase.  Il  y  a  quelques  lamelles 


[  770  ) 

de  mica  et  le  minéral  vert  est  plus  abondant  et  fibreux. 

L'eurite  de  la  Promenade  de  Sept-Heures  est  très-allé- 
rée.  Elle  montre  une  microstruclure  analogue,  le  feldspath 
étant  moins  individualisé.  Les  auteurs  croient  que  l'on  peut 
la  maintenir  sous  ce  nom. 

Jusqu'à  plus  ample  examen  je  serais  porté  à  considé- 
rer les  deux  roches  qui  précèdent  comme  des  eurites 
porphyroïdes  plutôt  que  comme  des  porphyres. 

6.  Diorite  quarlzifère  du  Champ  S'-Véron,  à  Lembecq. 

On  n'aperçoit  plus  rien  à  l'endroit  où  Dumonta  figuré 
sur  sa  carte  l'emplacement  de  sa  diorite  chlorilifère  de 
Lembecq.  Au  Champ  S'-Véron ,  gîte  découvert  en  1861, 
on  trouve  une  masse  rocheuse  cristalline,  dont  la  surface 
estglobuleuse comme  à  Lessines,àQuenast  et  à  Hozémont. 
Elle  forme  des  bancs  épais,  dir.  lOo",  fortement  inclinés, 
coupés  par  des  fissures  presque  horizontales  où  ont  cris- 
tallisé du  quartz,  de  l'épidote,  de  la  chlorite  et  un  mica 
biaxique.  Lors  de  l'exploitation,  on  trouva,  au  nord, 
d'autres  fissures  quartzeuses,  avec  galène,  chalcopyrile, 
malachite,  etc.  Au  nord  et  au  sud  la  roche  devient  schis- 
loïde  et  passe  à  l'amphibolite  schistoïde,  alternant  avec  du 
quartzite  et  fortement  altérée.  A  l'œil  nu,  c'est  un  agrégat 
graniloïde,  formé  1"  de  hornblende  noire  ou  verte,  en 
prismes  ou  en  lamelles,  qui  alteigîienl  quelquefois  un  cen- 
timètre, possèdent  un  éclat  très-vif  et  offrent  la  forme  mg' 
avec  les  clivages  caractéristiques;  2"  de  feldspath  très-iné- 
galement réparti,  de  sorte  que  certains  échantillons  ne 
sont  guère  qu'amphibolite,  tandis  que  d'autres  passent  à 
l'eurite;  les  cristaux  gris  sont  plagioclases;  les  autres, roses, 
paraissent  être  de  l'orthose.  On  y  trouve  accessoirement 


(  771  ) 
du  quartz  en  petits  grains,  plus  ou  moins  abondants, 
surtout  sur  les  échantillons  pâles,  passant  à  l'eurite.  Vient 
ensuite  l'épidote,  en  petites  masses  grenues,  vert-tendre, 
ou  tapissant  les  feldspaths.  Comme  à  Quenast,  elle  se  déve- 
loppe particulièrement  dans  les  parties  euritiques,  ainsi 
que  dans  les  tissures.  Enfin  un  minéral  vert-poireau,  fibreux 
ou  écailleux,  paraît  avoir  été  pris  pour  chlorite  par  Dumont 
et  n'est  probablement  qu'une  viridite.  La  chlorite  s'y 
trouve  aussi,  mais  il  y  a  des  raisons  de  la  considérer 
comme  secondaire  ;  de  sorte  que  la  roche  devrait  être 
nommée  dioritequartzifère,  plutôt  que  diorite  chloritifère. 

Au  microscope  des  échantillons  de  diorite  recueillis  par 
Dumont  n'ont  point  montré  de  pâte  euritique.  La  horn- 
blende y  abonde,  mieux  caractérisée  que  dans  toutes  nos 
autres  roches  par  son  dichroscopisme  et  ses  clivages.  La 
viridite  l'enveloppe  quelquefois  et  résulterait  alors  de  sa 
décomposition.  Le  quartz,  qui  parait  être  au  deuxième 
rang  par  son  abondance,  est  criblé  d'enclaves  liquides.  Le 
feldspath  est  très-altéré;  il  semble  se  rapportera  l'or- 
those. 

Les  échantillons  du  champ  S'-Véron  sont  fort  analogues. 
r.e  feldspath  est  peu  abondant,  plagioclase;  de  fines  aiguil- 
les verdâtres  sont  associées  à  l'amphibole.  Accidentelle- 
ment on  y  trouve  de  l'apatite,  de  l'épidote  et  du  fer  titane. 

7.  Roches  des  Ardennes  françaises. 

Décrites  par  Dumont  avec  la  précision  qui  le  distingue  , 
ces  roches  se  montrent  partout  en  concordance  avec  les 
couches  neptuniennes  ;  Dumont  les  a  néanmoins  considé- 
rées comme  des  filons  couchés  éruptifs.  Deux  faits,  observés 
sur  plusieurs   points,   sont  en   contradiction    avec  cette 


(  772  ) 
manière  de  voir  :  d'une  part,  on  trouve  des  cailloux  roulés 
de  feldspath  el  de  quartz  dans  quelques  uns  de  ces  gîtes;  de 
l'autre,  leur  structure  fjneissique  les  rapproche  des  schistes 
cristallins,  des  porphyroïdes,  etc.,  qui  sont  des  roches 
stratifiées,  tandis  qu'elle  ne  se  rencontre  presque  jamais 
dans  les  roches  d'intrusion.  On  retrouve  cette  structure,  à 
l'aide  du  microscope,  dans  les  bancs  centraux,  où  elle  a 
disparu  à  l'œil  nu.  Enfin,  cette  structure  entrelacée  se 
reconnaît  aussi  dans  les  roches  sédimentaires  rencais- 
santes. 

On  peut  souvent  constater  des  relations  intimes  entre 
les  porphyroïdes  (hyalophyres),  les  amphibolitesschistoïdes 
plus  ou  moins  feldspathiques  (albites  chloritifères  et  al- 
bites  phylladifères),  et  les  roches  granitoïdes  appelées 
jusqu'ici  diorites,  mais  dont  plusieurs  devront  être  nommées 
amphibolites  granitoïdes. 

Les  hyalophyres  renferment  fréquemment  de  l'amphi- 
bole et  passent  à  des  phyllades  feldspathiques  plus  ou 
moins  calcareux,  oiî  le  microscope  montre  de  nombreux 
prismes  de  hornblende.  De  leur  côté  les  amphibolites 
passent  à  des  bancs  schistoïdes,  difficiles  à  distinguer  de 
ceux  qui  renferment  les  hyalophyres. 

L'amphibolile  grenue  de  Laifour  (diorite  des  Forges  de 
la  Commune,  Dumont)  offre  une  structure  granitoïde 
sans  alignement  des  éléments.  11  n'y  a  point  de  pâte;  la 
hornblende  est  en  voie  de  décomposition  et  enchâssée 
dans  le  quartz  comme  les  autres  minéraux,  viridite,  feld- 
spath; on  y  observe  accidentellement  du  fer  titane,  de 
l'épidote,  de  l'asbeste,  de  l'apatite  et  de  la  calcite. 

Une  diorite  de  Riraogne,  recueillie  par  Dumont,  est 
granitoïde,  formée  de  hornblende  et  de  feldspath  plagio- 
clase,  avec  quartz  en  quantité  assez  notable,  renfermant 


(  773  ) 
des  microlithes  en  nombre  prodigieux  (apatite,  etc.)  et  des 
enclaves  liquides.  On  y  trouve  accidentellement  de  l'épi- 
dote  et  du  fer  titane. 

L'étude  de  quelques  hyalophyres  semble  les  faire  rap- 
porter aux  porphyres  quartzifères.  L'hyalophyre  massif  de 
Mairu,  près  Deville,  présente  évidemment  la  structure 
gneissique.  On  y  trouve  la  biolite  en  lamelles  courbes  pa- 
rallèles; mais  les  gros  cristaux  d'orthose,  d'oligoclase  et 
de  quartz  ont  un  caractère  élastique  qui  les  sépare  du 
gneiss.  La  pâte  est  un  agrégat  de  lamelles  de  mica  et  de 
grains  de  feldspath  et  de  quartz  ;  elle  renferme  de  la 
hornblende,  qui  s'aligne  comme  le  mica.  Le  quartz  est 
remarquablement  riche  en  enclaves  liquides. 

Les  auteurs  ajoutent  l'analyse  de  cet  hyalophyre  de 
Mairu  et  celle  de  l'amphibolile  grenue  de  Laifour.  Le  quo- 
tient d'oxygène  du  premier  est  0,19  ;  celui  de  la  seconde, 
0,70.  Ce  dernier  me  paraîtrait  indiquer  plutôt  une  diorite 
qu'une  amphibolite. 

Ici  se  termine  l'analyse  du  remarquable  travail  dont 
j'avais  à  rendre  compte  à  la  classe.  J'ai  maintenant  quelques 
observations  à  présenter. 

Bien  que  l'analyse  chimique  de  ces  roches  nous  éclaire 
beaucoup  moins  sur  leur  constitution  que  l'examen  micros- 
copique, je  crois  néanmoins  qu'elle  est  indispensable  pour 
compléter  nos  connaissances  à  cet  égard.  Les  auteurs  n'en 
ont  pas  méconnu  l'importance.  Ils  nous  en  donnent  quatre, 
mais  je  crois  qu'on  pourrait  en  désirer  davantage.  Je  re- 
marque aussi  que  le  fer  du  gabbro  de  Hozémont,  de  l'am- 
phibolile de  Laifour,  de  l'hyalophyre  de  Mairu  est  dosé  à 
l'état  ferreux ,  sans  autre  explication  ;  la  première  de  ces 
roches  renferme  probablement  du  manganèse,  la  deuxième,. 


i  774  ] 

des  alcalis,  qui  ne  sont  pas  indiqués.  Enfin,  l'acide  phos- 
phorique,  dont  le  microscope  a  indiqué  la  présence  à  l'état 
d'apalile,  mériterait  dans  certains  cas  un  essai  de  dosage 
spécial. 

Il  y  aurait  aussi  quelque  avantage  à  figurer  le  gisement 
de  quelques-unes  de  ces  roches.  Des  figures  sur  bois  entre- 
raient dans  le  texte  sans  grands  frais. 

La  partie  principale  de  ce  travail  concerne  l'élude  mi- 
croscopique de  nos  roches  pluloniennes  ou  considérées 
comme  telles:  sous  ce  rapport,  on  ne  pourrait  rencontrer 
mieux.  Étant  personnellement  peu  familier  avec  l'emploi 
du  microscope  dans  ce  genre  de  recherches,  j'hésiterais  à 
dire  tout  le  bien  que  j'en  pense  si,  d'un  côté,  les  excel- 
lentes figures  que  les  auteurs  ont  dessinées,  ne  présentaient 
certaines  garanties  d'exactitude,  et  si,  d'autre  part,  l'as- 
sentimeni  donné  à  plusieurs  de  leurs  interprétations  des 
cas  embarrassants  par  les  premiers  micrographes  de  notre 
temps,  MM.  vom  Rath,  Sorby  et  Zirkel,  ne  me  rassurait  à 
cet  égard.  Je  crois  donc  pouvoir  dire  que,  non-seulement 
il  n'existe  en  français  aucune  monographie  comparable  à 
celle  qui  nous  est  soumise,  mais  encore  que  celle-ci  peut 
rivaliser  avec  ce  qui  s'est  fait  de  mieux  à  l'étranger. 

Ma  lâche  serait  donc  bien  simple  si  les  auteurs  avaient 
traité  de  loules  les  roches  indiquées  par  le  programme 
du  concours  ;  mais,  comme  ils  le  disent,  le  temps  leur  a  fait 
défaut  pour  plusieurs  d'entre  elles,  notamment  les  euriles 
de  Grand-Manil  et  de  Nivelles  ;  j'ajouterai  môme  que  le 
chapitre  consacré  aux  roches  de  l'Ardenne  fiançaise  est 
tout  à  fait  insuffisant.  En  présence  d'un  travail  incomplet, 
l'usage  n'est  pas  de  décerner  la  médaille  d'or;  toutefois, 
comme  les  divers  chapitres  concernant  nos  différentes 
roches  éruptives  sont  complètement  indépendants  les  uns 


(  775  ) 
des  autres;  comme  ceux  qui  nous  sont  soumis,  sont  traités 
d'une  façon  tout  à  fait  remarquable  ;  comme ,  enfin,  les  au- 
teurs —  qui  n'ont  pas  de  concurrents  —  nous  ont  déjà 
envoyé  une  première  suite  à  leur  mémoire  et  qu'on  a  tout 
lieu  d'espérer  que  le  travail  sera  achevé  avec  le  même  soin 
et  le  même  succès,  je  n'hésite  pas  à  proposer  d'accorder 
aux  auteurs  la  médaille  d'or  et  d'imprimer  leur  mémoire 
dans  le  recueil  des  Mémoires  couronnés,  avec  les  planches 
qui  l'accompagnent.  » 

Rapport  de  .V.   C  Matai» ff. 

«  Dans  le  but  de  montrer  à  la  classe  ce  que  les  auteurs 
ont  fait  et  ce  qui  reste  à  faire,  je  crois  indispensable  d'in- 
diquer d'abord,  d'une  façon  un  peu  aride,  il  est  vrai,  les 
gisements  actuellement  connus  des  roches  cristallines  de 
la  Belgique  et  de  l'Ardenne  française.  Je  suivrai  l'ordre 
alphabétique  et  j'emploierai  les  noms  donnés  par  A.  Dû- 
ment. Tout  étant  à  refaire  ou  à  vériOer  pour  ce  qui  con- 
cerne la  composition  de  ces  roches,  je  préjugerai  moins 
de  celte  façon  quant  à  ce  qui  sera  indiqué  par  des  recher- 
ches ultérieures.  On  sait  que  dans  les  observations  faites 
jusqu'à  présent  on  avait  plutôt  fait  attention  aux  carac- 
tères macroscopiques,  c'est-à-dire  à  l'examen  en  grand  des 
roches;  les  auteurs  se  sont  attachés  à  l'examen  microsco- 
pique. Les  indications  de  gisements  qui  suivent  sont  résu- 
mées d'après  les  travaux  de  Dumont  et  de  ceux  qui,  après 
lui,  ont  traité  du  point  qui  nous  occupe.  J'ai  joint  aussi 
quelques  observations  personnelles. 

VaWile  chloritifère  a  été  signalée  dans  plusieurs  points 
du  massif  de  Rocroy  :  1°  au  S.  de  l'aftleurement  d'ardoise 


(  776  ) 
de  Pierreca  à  '/i  de  lieue  au  N.  du  Châtelet  ;  2°  unie  à  la 
diorite  chloritifère  à  l'ancienne  Grande-Fosse;  5°  en  blocs 
mélangés  à  ceux  de  diorite  au  NNE.  de  Rimogne;  4°  en 
blocs  à  quelques  centaines  de  mètres  au  N.  de  la  Neuve- 
Forge  (Filons  de  Faux  ,  Dumont);  5°  à  200  mètres  au  S. 
du  moulin  de  Mairus  ;  6"  entre  les  Forges  de  la  commune 
et  Laifour  (rive  droite  de  la  Meuse)  ;  7°  sur  la  même  rive 
en  descendant  la  Meuse  au  SO.  de  Laifour;  8°  des  traces 
entre  Laifour  et  Revin  à  ^/i  de  lieue  au  S.  d'Anchamps  et 
entre  Anchamps  et  Revin  ;  9°  vis-à-vis  du  moulin  situé  sur 
le  ruisseau  de  Faux  à  800  à  900  mètres  du  fourneau  de 
Revin. 

Ualbite  phylladifère  se  rencontre  en  différents  points 
des  bords  de  la  Méhaigne,  dans  le  massif  du  Brabant,  à 
Pitet  (Fallais);  et  à  Monstreux  et  Fauquez  (Ittre). 

Ualbite  phylladifère  a  été  observée  dans  le  massif  de 
Rocroy  :  1°  au  S.  de  l'affleurement  du  massif  d'ardoise  de 
Pierreca,  à  V^  de  lieue  au  N.  du  Châtelet;  2°  à  l'est  et 
près  de  Revin  ;  5°  au  N.  de  Revin  ;  4°  à  l'angle  de  la  Meuse 
et  du  Moulin  de  la  Pille,  à  100  mètres  environ  au  N.  du 
ravin. 

Les  arkoses  que  l'on  trouve  dans  le  massif  du  Brabant 
ont  été  considérées  par  quelques  auteurs  comme  ayant 
une  origine  plulonienne.  On  a  signalé  des  arkoses  chlori- 
tifères  au  NE.  de  Hal ,  dans  le  chemin  de  Buysinghen, 
dans  les  carrières  abandonnées  au  S.  de  Haï,  à  Malheyde 
(Lembecq),  au  N.  de  Tubize  et  aux  environs  de  Cla- 
becq,  etc. 

Le  chlorophyre  massif  a  été  rencontré  à  Quenast, 
à  Rebecq-Rognon  et  à  Lessines  (massif  du  Brabant). 

Le  chlorophyre  schistoïde  a  été  indiqué  dans  le  même 
massif  du  Brabant  :  au  Vert-Chasseur,  près  de  Steenkuyp 


(  777  ) 

(Bierghes),  près  de  Rebecq,  au  N.  des  fermes  de  Grande- 
Haie  et  de  Petite-Haie,  à  100  mètres  au  N.  de  la  ferme 
du  Croiseau;  à  Chenois  et  entre  le  Chenois  et  le  hameau 
des  Ârdennes  (Hennuyères);  et  enfin  à  quelques  centaines 
de  mètres  au  S.  du  château  de  Fauquez,  elle  apparaît  sur 
les  deux  rives  de  la  Senne. 

La  diorite  se  rencontre  aux  environs  de  Lembecq 
(massif  du  Brabant)  et  de  Slavelot  (massif  de  Stavelot). 

La  diorite  chlorilifère  a  été  indiquée  dans  différents 
points  du  massif  de  Rocroy  :  1°  à  l'ancienne  Grande- 
Forge,  au  N.  du  massif  d'ardoise  de  la  Forge-au-Bois, 
à  50  mètres  au  SE.  de  l'extrémité  NO.  de  l'étang  de  Ri- 
mogne  ;  2°  en  blocs ,  à  une  demi-lieue  au  NNE.  de  Rimogne 
(Filons  de  la  Richolle,  Dumont)  ;  o"  au  N.  des  Forges  de 
la  Commune;  4°  au  S.  du  moulin  de  la  Pille;  5"  au  N.  de 
Mairus,  dans  la  tranchée  du  chemin  de  fer. 

Veiin'te  a  été  observée  entre  Rocroy  et  Maubert-Fon- 
taine  (massif  de  Rocroy)  ;  dans  divers  points  des  environs 
de  Spa  (massif  de  Stavelot);  de  Grand-Manil,  de  Sora- 
breffe,  de  Nivelles,  d'Ittre  et  près  d'Otlignies,  de  Yillers- 
la-Ville  et  de  Pitet  (Fallais)  (massif  du  Brabant);  et  enfin 
près  de  Piroy  (Beuzet)  et  entre  Neuville-sur-Meuse  et 
Ombret  (massif  de  Sambre-et-Meuse). 

Vhyalophyre  massif  a  été  indiqué  dans  le  massif  de 
Rocroy  :  i"  dans  la  vallée  de  la  Richolle  vers  l'extrémité 
NO.  de  l'étang  de  Rimogne;  2"  en  blocs,  entre  la  Vieille- 
Forge  et  la  Nouvelle-Forge  (vallée  du  Faux);  5°  à  deux 
cents  mètres  au  S.  du  moulin  de  Mairus;  4°  dans  le  ravin 
qui  aboutit  au  moulin  de  Mairus;  5°  on  en  retrouve  des 
traces  vers  le  moulin  de  la  Pilette  sur  la  rive  droite  du 
ruisseau  dans  le  chemin  des  Forges  de  la  Commune;  et 
en  divers  points  de  la  vallée  des  Forges  de  la  Commune 
2""  sÉiîiE,  TOME  xxxvm.  50 


(  778  ) 
et  au  N.  de  celles-ci  (rive  droite  de  la  Meuse);  6°  sur  la 
rive  gauche  de  la  Meuse,  vis-à-vis  des  Forges  de  la  Com- 
mune. 

Vhyalophyre  pailleté  a  été  signalé  à  Spa. 

Vhyalophyre  schistoïde  s'observe  dans  le  massif  de 
Rocroy  :  1°  en  fragments,  dans  la  vallée  du  Faux  à  la 
Nouvelle-Forge;  2°  aux  Forges  de  la  Commune;  5°  entre 
les  Forges  de  la  Commune  et  Laifour,  sur  la  rive  droite  de 
la  Meuse;  4°  sur  la  même  rive  de  la  Meuse,  au  SO.  de 
Laifour;  5"  à  100  mètres  au  N.  d'une  petite  cascade  dans 
les  rochers  de  Notre-Dame-de-Meuse  ;  6"  à  quelques  cen- 
taines de  mètres  plus  bas  dans  un  ravin. 

Vhijperstfiénite  a  été  signalé  en  deux  points  dans  le 
massif  du  Brabant,  entre  le  château  de  Lexhy  et  Hozé- 
mont;  et  entre  Les  Tombes  et  l'Abbaye  de  Grand-Pré 
(Mozel)  dans  le  massif  de  Sambre-et-Meuse. 

Le  porphyre  schistoïde  se  rencontre  dans  le  massif  du 
Brabant,  au  voisinage  du  chlorophyre  schistoïde  auquel  il 
passe  souvent;  entre  Marcq  et  Enghien ,  en  différents 
points  à  la  ferme  Sainte-Catherine,  près  de  Rebecq;  au  S. 
de  Fauquez  et  près  d'Asquempont  (litre). 

Voici  donc  quels  sont  les  divers  gisements  des  roches 
cristallines  qui  doivent  faire  l'objet  du  mémoire.  Le  travail 
qui  nous  est  soumis  nous  les  montre  sous  un  jour  entiè- 
rement nouveau.  Les  auteurs  ont  abandonné  l'idée  d'ori- 
gine ignée,  qui  avait  malheureusement  été  presque  toujours 
prise  comme  point  de  départ  des  diverses  explications 
données.  v^ 

Le  mémoire  commence  par  une  longue  étude  de  la 
diorite  quarlzeiise,  qui  constitue  les  importants  massifs  de 
Quenast,de  Rebecq-Rognon  et  de  Lessines.  La  roche  qui  les 


(  779  ) 
constitue  a  été  nommée  chlorophyre,  Dumont;  porphyre 
à  oligoclase,  Roth,  porphyre  quartzeux,  Delesse;  diabase 
porphyrique,  Naumann;  porphyrite,  Zirkel,  et  plus  tard 
diorite  quarlzeuse  par  le  même  auteur,  nom  adopté  dans 
le  travail  présenté. 

La  description  qu'en  donne  Dumont  est  erronée  sur 
un  point  et  incomplète  dans  l'état  actuel  des  carrières.Du- 
mont  considérait  la  roche  comme  formée  d'une  pâte  d'eu- 
rite  renfermant  de  nombreux  cristaux  d'albite  (1)  ou 
d'orthose ,  de  la  chlorite  et  presque  toujours  du  quartz. 
La  chlorite  n'y  est  pas  un  des  éléments  essentiels.  On  y 
constate,  au  contraire,  la  présence  à  peu  près  constante 
(le  minéraux  prismatiques  appartenant  au  groupe  amphi- 
bolo-pyroxénique.  M.  d'Omalius  avait  parfaitement  bien 
saisi  ce  caractère  puisqu'il  avait  considéré  le  feldspath  et 
l'amphibole  comme  parties  constituantes.  Ces  prismes  ap- 
partiennent à  deux  catégories  différentes.  Les  uns,  noir- 
verdàtre  ou  brunâtre,  sont  de  la  hornblende,  ainsi  que  les 
petites  masses  lamellaires  de  même  teinte.  L'autre  sub- 
stance de  nuance  moins  sombre,  vert-poireau,  en  prismes 
octogonaux,  en  petites  masses  lamello-lîbreuses  et  en  pris- 
mes aciculaires,  se  rapproche  du  diallage  et  de  l'hyper- 
sthène.  La  roche  est  définie  «  une  pâte  euritique  plus  ou 
moins  foncée,  enveloppant  beaucoup  de  cristaux  d'oligo- 
clase,  moins  de  cristaux  d'orthose,  beaucoup  de  quartz, 
d'amphibole  et  certain  minéral  du  type  pyroxénique.  » 

La  diorite  étant  une  roche  à  éléments  cristallins  com- 
posés principalement  d'un  feldspath  clinaxique  ou  plagio- 
clase  et  de  hornblende,  la  roche  du  massif  qui  nous  occupe 
ayant  la  même  composition,  plus  du  quartz,  doit  donc  être 
rapportée  à  la  diorite  quartzeuse. 


(1)  Reconnus  plus  lard  comme  oligoclase  par  M.  Delesse. 


(  780  ) 

Dumont  avait  considéré  !a  roche  cristalline  d'Hozémont 
comme  composée  d'eurite  compacte,  d'albite  en  cristaux 
simples  ou  maclés,  d'hypersthène  et  de  chlorite.  A  part  les 
désignations  d'albite  et  d'hypersthène  qui  sont  fautives,  ce 
sont  bien  là  les  caractères  macroscopiques  ou  en  gros  de 
cette  roche.  Son  feldspath  appartient  au  labrador;  l'exa- 
men microscopique  fait  reconnaître  dans  la  roche  d'Hozé-  ' 
mont  :  «  un  agrégat  granitoïde  de  feldspath  plagioclase 
et  de  diallage.  »   C'est  donc  un  gabbro. 

Les  porphijroïdes  sont  des  roches  possédant,  avec  une 
pâte  plus  ou  moins  analogue  à  celle  des  porphyres,  une 
texture  feuilletée  ondulée,  due  à  la  présence  de  l'un  ou 
l'autre  minéral  du  groupe  des  phyllites  et  offrant  en  outre 
cet  aspect  porphyrique  qui  résulte  chez  elles  des  grains 
cristallins  plus  gros  de  feldspath  et  de  quartz  qui  y  sont 
disséminés.  Les  chlorophyre  et  porphyre  schisloïdes  de 
Fauqnez,Rebecq-Rognon,  et  l'albite  phylladifère  de  Pitel, 
de  Dumont,  sont  rapportés  à  cette  espèce. 

Ces  porphyroïdes  sont  des  roches  élastiques  d'origine 
sédimen taire  où  l'action  métamorphique  s'est  exercée  de 
la  même  manière  que  dans  les  strates  siluriennes  du  voi- 
sinage. Ces  porphyroïdes  impliquent  l'antériorité,  dans  la 
mer  silurienne  où  ils  se  déposèrent,  de  masses  cristallines 
ayan!  une  tout  autre  origine  que  la  leur. 

A  Pitet ,  l'examen  microscopique  montre  une  pâte  mi- 
cro-cristalline formée  de  quartz  et  de  feldspath  altéré, 
cimenté  par  un  élément  phylladeux  qui  ressemble  à  la 
séricite  (1),  et  entremêlé  d'une  matière  verdâtre  non  en- 
core bien  déterminée,  la  viridite. 


(1)  A  Marcq,  près  d'Enghien,  on  trouve  des  phyllades  d'aspect  nacré 
qui  rappellent  la  séricite.  11  en  est  de  même  de  quelques  albites  pliylla- 
diféres  de  TArdenne  française.  Il  me  paraît  également  intéressant  de 


(  781  ) 

A  Fauquez,  on  a  une  composition  analogue,  et  dans  l'un 
et  l'autre  gîte  les  cristaux  de  feldspath,  plus  ou  moins 
altérés,  attestent  transport  et  décomposition.  Il  en  est  de 
même  au  fond,  quant  à  la  microstrueture,  du  porphijroïde 
de  Chenois. 

Le  chlorophyre  schistoïde  du  Vert-Chasseur  de  Dumont 
devient  le  porphyroïde  de  Steenknyp  et  constitue  un  por- 
phyre en  nappe  ou  plutôt  un  porphyroïde.  Une  pâte  feuil- 
letée ondulée  contient  des  grains  de  plagioclase  et  des 
lamelles  d'aspect  chloriteux.  Les  chlorophyres  schistoïdes 
de  Grande-Haie  et  du  Croiseau  doivent  être  rapportés  au 
même  type. 

Les  arkoses  du  Brabant,  dont  quelques-unes  avaient  été 
considérées  comme  éruptives  ou  métamorphiques ,  ont  été 
également  étudiées  dans  le  mémoire  dont  nous  nous  occu- 
pons. Les  cristaux  arrondis  et  déformés  qu'on  y  rencontre 
indiquent  que  ce  sont  des  roches  charriées,  et  leur  gise- 
ment s'explique  bien  mieux  en  admettant  cette  maniçre  de 
voir,  a  Nous  considérons  donc  ces  arkoses  comme  des 
couches  sédimentaires  contemporaines  du  terrain  silurien, 
lesquelles  dérivent  probablement  de  roches  éruptives  du 
type  dioritique  déjà  émises  à  la  même  époque.  »  On  le 
voit,  c'est  un  mode  de  formation  identique  à  celui  des 
porphyroïdes,  et  nul  doute  que  l'examen  de  ces  deux 
catégories  de  roches  n'ait  mis  sur  la  voie  de  leur  véritable 
origine. 

L'eurite  et  l'hyalophyre  pailletés  de  Dumont  montrent 
à  Spa  le  meilleur  type  de  porphyre  quartzifère  qu'offre  la 
Belgique.  Il  est  éruptif. 


mentionner  ici  l'analogie  que  présentent  ces  roches  avec  celles  oii  l'on  a 
rencontré  des  grenats  à  Salm-Chàleau ,  et  avec  un  phyllade  à  grandes 
paillettes  d'ollrélite  observé  entre  Lierneux  et  Verleumont. 


(  782  ) 

La  diorite  quartzifère  du  Champ-Saint-Véron  est  con- 
sidérée comme  représentant  le  même  gisement  de  roche 
signalé  à  Lembecq  par  Dûment,  mais  en  un  autre  endroit. 
C'est  un  agrégat  graniloïde  où  domine  la  hornblende.  Le 
second  élément  est  le  feldspath  qui  est  très-inégalement 
répandu. 

Les  roches  de  l'Ardenne  française  viennent  ensuite. 

La  diorite  des  Forges  de  la  Commune  de  Dumont  de- 
vient Vamphibolite  grenue  de  Laifour.  Elle  a  la  texture 
granitoide.  Le  quartz  paraît  être  l'élément  dans  lequel  les 
autres  sont  enchâssés,  et  la  hornblende  noire  y  est  en  voie 
de  décomposition.  Beaucoup  de  roches  voisines  sont  des 
schistes  amphiboliques.  Dans  la  bande  porphyroïde  voisine 
du  tunnel  de  Laifour,  les  bancs  d'hyalophyre  schistoïde  de 
Dumont  semblent  être  un  porphyre  quarlzifère.  L'albile 
chluritifère  ou  chloralhile  de  Dumont  est  une  amphibo- 
lite  schisteuse. 

La  diorite  de  Rimogne  de  Dumont  doit  être  conservée 
sous  ce  nom.  C'est  une  roche  à  texture  granitoide,  formée 
de  feldspath  plagiolase  et  de  hornblende. 

La  microslruclure  de  la  pâte  range  l'hyalophyre  de 
Mairus  dans  les  gneiss,  mais  il  en  diffère  par  le  caractère 
élastique  des  gros  cristaux  d'orthose,  d'oligoclase  et  de 
quartz  qui  donne  à  la  roche  l'aspect  porphyrique.  La  pâte 
est  un  agrégat  de  lamelles  de  mica  brunâtre  ou  incolore, 
de  petits  grains  de  quartz  ei  de  feldspath  avec  des  lamelles 
de  hornblende  s'alignant  comme  le  mica. 

Le  microscope  a  aussi  fait  reconnaître  la  présence  de 
plusieurs  substances  minérales  nouvelles  pour  la  Belgique, 
mais  existant  pour  la  plupart  à  l'état  de  cristaux  infini- 
ment petits  ou  microlilhcs.  Les  unes,  telles  que  l'apatite, 
l'ilménite  ou   fer  titane,  sont  répandues  plus  ou  moins 


(  783  ) 
abondamment  dans  la  plupart  des  roches  qui  viennent 
d'être  signalées.  D'autres,  au  contraire,  sont  plus  rares  et 
comme  localisées  dans  certains  gisements,  telles  sont  la 
tourmaline,  le  sphène  et  la  piémontite  ou  épidote  rouge 
rencontrés  à  Quenast,  la  grammatite?  à  Hozémont,  et  à 
Quenast  et  à  Lessines  surtout,  de  nombreuses  enclaves 
liquides  dans  le  quartz  contenant  un  petit  cube  de  sel 
marin.  Constatons,  d'autre  part,  que  la  zoizite  ne  paraît 
pas  exister  à  Quenast  et  que  l'existence  de  l'hypersthène 
en  Belgique  devient  très-problématique. 

Il  résulte  de  cet  aperçu  que  le  mémoire,  quoique  ne 
répondant  pas  d'une  façon  complète  à  la  question  posée, 
lui  a  néanmoins  fait  faire  un  grand  progrès.  La  plupart  de 
nos  roches  cristallines  ont  été  étudiées  avec  soin  et  les 
auteurs  se  sont  occupés  des  roches  considérées  comme  les 
plus  compliquées.  L'interprétation  donnée  aux  masses 
schisto-cristallines  conduit  à  des  vues  plus  ou  moins  nou- 
velles sur  les  conditions  de  la  sédimentation  dans  les  ter- 
rains anciens  et  sur  la  part  qui  peut  y  revenir  au  méta- 
morphisme. Cela  touche  en  un  mot  aux  plus  importantes 
doctrines  géologiques.  L'analyse  microscopique  a  été  faite 
d'une  manière  à  laisser  bien  en  arrière  les  diverses  études 
minéralogiques  faites  dans  ces  derniers  temps.  11  est  à 
espérer  que  la  publication  de  ce  travail  appellera  l'attention 
sur  un  genre  d'études  entièrement  neuf  pour  notre  pays. 

Quelques  parties  du  travail  sont  incomplètes,  mais  les 
auteurs  étant  les  premiers  à  parler  de  ces  lacunes,  il  y 
aurait  indélicatesse  à  les  signaler  ici,  d'autant  plus  que  cela 
paraît  dépendre  surtout  du  manque  de  temps  et  de  la 
manière  large  dont  le  sujet  a  été  traité. 

Nous  désirerions  voir  figurer  les  coupes  des  gisements 


(  784  ) 
les  plus  importants,  et  compléter  les  études  des  roches  de 
TArdenne  française. 

Il  est  à  espérer  que  les  auteurs ,  continuant  la  voie  dans 
laquelle  ils  se  sont  engagés,  poursuivront  l'étude  des 
roches  cristallines  de  la  Belgique  et  de  l'Ardenne  française. 
Le  travail  dont  il  est  ici  question  nous  démontre  que  tout 
doit  être  scruté  et  que  l'on  ne  peut  tirer  aucune  déduction 
à  priori.  Les  progrès  que  le  microscope  a  fait  faire  à  la 
lithologie,  nous  font  espérer  que  l'anatomie  minérale 
pourra  bientôt  rivaliser  avec  l'anatomie  animale  et  végé- 
tale. 

Je  me  joins  à  mes  savants  confrères  pour  prier  la  classe 
de  décerner  aux  auteurs  la  médaille  d'or  et  pour  voter  l'im- 
pression du  mémoire  et  des  planches  qui  l'accompagnent 
dans  les  Mémoires  couronnés.  » 

Les  conclusions  des  rapports  qui  précèdent  sont  adoptées 
par  la  classe.  En  conséquence,  elle  décerne  la  médaille 
d'or  de  huit  cents  francs  am  mémoire  présenté,  lequel  a  pour 
auteurs,  ainsi  que  l'a  fait  connaître  l'ouverture  du  billet 
cacheté,  M.  de  la  Vallée -Poussin,  professeur  à  l'Uni- 
versité de  Louvain,  et  M.  Renard,  professeur  au  Collège  de 
la  Compagnie  de  Jésus,  également  à  Louvain. 


—  La  proclamation  des  résultats  du  concours  aura  lieu 
en  séance  publique  du  16  décembre. 


(78S) 


ÉLECTIONS. 


La  classe  procède  à  l'élection  de  trois  membres  titu- 
laires, de  huit  associés  et  d'un  correspondant.  Les  noms 
des  élus  seront  mentionnés  au  compte  rendu  de  la  séance 
publique. 


PRÉPARATIFS    DE    LA    SÉANCE    PUBLIQUE. 

MM.  Candèze  et  Mailly,  conformément  à  l'article  17  du 
règlement  d'ordre  intérieur,  donnent  lecture  des  commu- 
nications qu'ils  se  proposent  de  faire  en  séance  publique- 


(  786  ) 
CLASSE  DES  SCIENCES. 

Séance  publique  du   W  décembre   1874. 
(Grand'salle  des  Académies,  au  Musée.  ) 

M.  E.  Candèze,  directeur. 

M.  J.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van  Beneden, 
Edm.  deSelys  Longchamps,  H.  Nyst ,  Melsens  ,  F.  Duprez, 
G.  Dewalque,  M.  Gloesener,  F.  Donny ,  Ch.  Montigny, 
Steichen  ,  A.  Brialmont,  E.  Dupont,  Éd.  Morren,  Éd.  Van 
Beneden,  G.  Malaise,  membres;  E.  Catalan,  A.  Bellynck, 
associés;  Éd  Mailly  ,  H.  Valérius  ,  F.  Plateau,  J.  De  Tilly  , 
Ch.  Van  Bambeke,  correspondants. 

Assistaient  à  la  séance  : 

Classe  des  lettres  :  M.  B.  Chalon  ,  directeur;  le  baron 
G.Guillaume,  vice-directeur;  MM.  J.  Boule/,  Gachard, 
M.-N.-J.  Leclercq,  Ch.  Faider,  Thonissen,  Th.  Juste, 
Alph.  Wauters,  membres;  J.  Nolet  de  Brauwere  Van 
Steeland,  Alph.  Bivier,  associes;  G.  Bolin-Jaequemyns, 
correspotidant. 

Classe  des  beaux -arts  :  MM.  L.  Alvin,  G.  Geefs, 
J.  Geefs,  Éd.  Fétis,  Edm.  De  Busscher,  Aug.  Payen, 
le  chev.  L.  de  Burbure,  J.  Franck,  Ad.  Siret,  Julien 
Leclercq,  Ernest  Slingeneyer,  Alex.  Bobert,  membres; 
Éd.  de  Biefve,  Louis  Jehotte,  correspondants. 

A   une  heure,   le  bureau  de  la  classe,   composé   de 


(  787  ) 

MM.  E.Candèze,  directeur,  J.  Liagre,  secrétaire  perpétuel , 
et  A.  Brialmont,  vice-directeur,  ainsi  que  M.  R.  Chalon, 
directeur  de  la  classe  des  lettres,  viennent  prendre  place 
sur  l'estrade. 

xM.  N.  De  Keyser,  président  de  l'Académie,  avait  écrit 
pour  témoigner  ses  regrets  de  ne  pouvoir  assister  à  la 
solennité. 

Un  auditoire  nombreux,  parmi  lequel  on  remarque 
plusieurs  dames  et  divers  hauts  fonctionnaires,  assiste  à 
la  réunion. 

Le  programme  de  la  séance  se  composait  des  lectures 
suivantes  : 

1°  Les  nioijens  d'attaque  et  de  défense  chez  les  insectes, 
discours  par  M.  Ernest  Candèze  ,  directeur  de  le  classe; 

2"  Lecture  d'une  notice  sur  Adolphe  Qiietelet  ;  par 
M.  Edouard  Mailly,  correspondant  de  la  classe  ; 

3"  Rapport  du  jury  chargé  de  juger  le  dernier  concours 
quinquennal  des  sciences  physiques  et  mathématiques  ;  lec- 
ture faite  par  M.  H.  Valérius,  correspondant  de  la  classe  et 
rapporteur  du  jury; 

4°  Proclamation,  par  M.  J.  Liagre,  secrétaire  perpé- 
tuel, du  résultat  des  concours  et  des  élections. 

M.  le  D'  E.  Candèze,  directeur  de  la  classe,  déclare  la 
séance  ouverte;  il  prononce  ensuite  le  discours  suivant . 

Les  moyens  d'attaque  et  de  défense  chez  les  insectes. 

11  est  une  opinion  généralement  répandue  parmi  les 
gens  du  monde,  ceux  au  moins  que  leurs  préoccupations 
habituelles  rendent  étrangers  aux  sciences,  aux  sciences 
naturelles  surtout,  c'est  que  celles-ci  n'ont  d'utilité,  ne 
sont  dignes  d'occuper  l'esprit  des  gens  sérieux,  que  pour 


(  788  ) 
autant  que  leurs  applications  contribuent  à  augmenter 
notre  bien-être  matériel. 

Dans  ce  siècle  éminemment  utilitaire,  la  plupart  n'ac- 
cordent qu'une  faible  considération,  mêlée  de  quelque 
élonnement,  à  ceux  qui,  délaissant  les  plaisirs  superficiels, 
les  vains  délassements,  les  tumultueuses  distractions  pour 
les  jouissances  plus  nobles,  plus  saines  et  plus  tranquilles 
de  l'esprit,  consacrent  paisiblement  leurs  loisirs  à  s'initier 
aux  mystères  si  curieux  et  si  variés  de  la  nature. 

L'Entomologie,  et  avec  elle  les  sciences  qui  s'appli- 
quent à  agrandir  le  cercle  de  nos  connaissances  dans  le 
monde  des  infinimeuts  petits,  l'Entomologie  est  particu- 
lièrement victime  de  l'espèce  de  défaveur  qu'encourt  ce 
genre  d'étude  de  la  part  du  public,  et  même  de  beaucoup 
de  gens  instruits. 

Depuis  quelques  années,  il  est  vrai,  des  écrivains  de 
talent  se  sont  donné  pour  mission  de  vulgariser  plusieurs 
sciences  qui ,  jusque-là,  étaient  restées  inconnues  du  plus 
grand  nombre.  On  a  écrit  des  livres  dans  un  style  aussi 
dépouillé  que  possible  de  ces  termes  techniques,  de  ces 
mots  étranges  dont  le  langage  scientifique  n'est  malheu- 
reusement que  trop  hérissé,  et  l'Entomologie,  comme 
d'autres  branches  de  nos  connaissances,  a  obtenu  ses  let- 
tres de  naturalisation  auprès  d'un  public  qui  en  ignorait 
même  le  nom. 

L'étude  des  insectes  a  cependant,  en  dehors  de  l'attrait 
tout  particulier  qu'elle  présente,  un  côté  utile  que  per- 
sonne ne  contestera.  Les  Américains,  gens  pratiques  par 
exellence,  ont  institué,  sous  le  nom  d'Entomologistes 
d'État,  de  véritables  fonctionnaires  dont  la  mission  est 
de  résoudre  toutes  les  questions  où  les  insectes  sont  en 
cause,  quand  leurs  déprédations  mettent  l'agriculture  en 
péril  dans  quelqu'une  de  ses  branches. 


(  789  ) 

Lorsque  l'industrie  de  la  soie  était  gravement  compro- 
mise par  la  maladie  épidémique  du  bombyx  du  mûrier,  ce 
fut  aux  entomologistes  qu'on  demanda  les  moyens  de  sau- 
ver cette  importante  source  de  la  richesse  publique,  et, 
grâce  à  leur  intervention,  de  nouvelles  races  de  vers  à 
soie  furent  introduites  en  Europe.  Aujourd'hui  que  le 
Phylloxéra,  ce  fléau  désastreux,  vient  menacer  la  France 
dans  ses  œuvres  vives,  c'est  encore  aux  entomologistes 
que  le  gouvernement  du  pays  demande  le  salut  de  ses 
vignobles  en  danger. 

Cette  utilité  de  l'étude  des  insectes,  je  ne  me  propose 
pas  de  la  défendre  ici;  elle  a  été  suflisamment  démontrée 
par  de  plus  autorisés  que  moi  et  avec  un  talent  auquel  je 
n'oserais  prétendre. 

Je  veux  seulement  prendre  au  hasard  une  page  de  l'his- 
toire de  ces  petits  animaux  et  montrer  que  celle-ci  ne  le  cède 
en  rien,  en  intérêt,  à  celle  des  êtres  d'un  ordre  plus  élevé. 

On  considérait  autrefois  les  animaux  comme  formant, 
aussi  bien  sous  le  rapport  des  facultés  mentales  que  sous 
celui  de  la  perfection  des  organes,  une  série  continue  et 
décroissante  commençant  à  l'homme  et  se  perdant,  d'une 
manière  vague,  dans  les  polypes  et  les  éponges  dont  la 
nature  animale  était  même  assez  contestée. 

Il  n'en  est  plus  ainsi  aujourd'hui.  On  a  fractionné  la 
série  animale,  et  ses  différentes  portions,  au  lieu  d'être 
placées  bout  à  bout,  ont  été  établies  en  séries  multiples  et 
plus  ou  moins  divergentes.  On  a  reconnu  que  chacune  de 
ces  fractions  a  ses  intelligences,  ses  organisations  supé- 
rieures et  ses  infimités,  et  que  ces  différentes  hiérar- 
chies peuvent  très-bien  se  comparer  entre  elles;  en  d'autres 
termes,  que  certains  insectes  l'emportent  de  beaucoup  sur 
un  grand  nombre  de  vertébrés,  par  l'intelligence ,  de  même 
que  par  la  multiplicité  et  la  perfection  des  organes. 


(  790  ) 

Considéré  dans  son  ensemble  et  sous  le  rapport  des  ha- 
bitudes, on  aperçoit,  dans  le  règne  animal,  deux  catégories 
assez  bien  dessinées. 

La  première  se  compose  des  animaux  qui  vivent  de 
proies  vivantes.  La  seconde  renferme  naturellement  tous 
les  autres,  qui  servent  de  nourriture  aux  premiers. 

Je  me  hâte  d'ajouter  que  ce  partage  est  plus  spécieux 
que  réel  (1),  mais  admettons-le  un  moment  pour  les  be- 
soins du  sujet  que  je  me  proj)ose  d'exposer.  Il  s'applique  à 
tous  indistinctement,  grands  et  petits,  depuis  l'homme 
jusqu'au  dernier  des  insectes. 

Il  en  résuite  qu'une  double  préoccupation  chez  tout 
être  vivant,  c'est,  d'une  part,  de  manger  et,  de  l'autre, 
d'éviter  d'être  mangé. 

Si  cette  préoccupation  légitime  est  peu  apparente  chez 
l'homme  civilisé,  nous  la  voyons,  par  contre,  diriger  en 
grande  partie  les  actions  de  l'homme  sauvage  vivant  au 
sein  des  forêts,  en  lutte  continuelle  pour  satisfaire  sa  pro- 
pre faim  et  se  soustraire  à  celle  des  autres. 

Ce  combat  pour  l'existence  a  développé  le  génie  de 
l'homme;  il  a  contribué  pour  une  bonne  part  à  faire  sortir 
quelques-unes  de  ses  races  de  l'état  sauvage  et  à  les  amener 
au  degré  de  civilisation  qu'elles  ont  atteint  aujourd'hui. 
Qui  n'a  admiré,  dans  ce  roman  si  populaire  et  d'une  si 
haute  portée  philosophique  de  Daniel  de  Foé,  l'ingéniosité 
de  son  héros.  L'esprit  inventif  qui  a  conduit  Robinson 
Crusoé  du  plus  extrême  déniiment  à  une  sorte  de  bien- 
être,  est  né,  en  délinilive,  d'un  tiraillement  d'estomac.  Chez 
les  grands  animaux,  les  exigences  de  cet  organe  ont  créé 
des  habitudes  dont  l'histoire  est  des  plus  curieuses.  Les 


(1)  Beaucoup  d'animaux  de  proie  étant  eux-mêmes  les  victimes  de  cai- 
nassiers  plus  forts  ou  plus  rusés  qu'eux. 


(791  ) 
ruses  du  renard  pour  arriver  à  s'emparer  de  sa  proie,  la 
façon  parfois  ingénieuse  dont  celle-ci  défend  sa  vie  en  péril, 
ont  de  tout  temps  attiré  l'attention  des  hommes  qui  y  ont 
puisé  d'utiles  enseignements  pour  leur  propre  compte. 

Chasseurs  et  chassés  font  usage,  dans  ce  double  but, 
de  tous  leurs  moyens.  Les  forts  et  les  agiles,  parmi  les  pre- 
miers, vont  hardiment  de  l'avant;  les  moins  bien  doués 
ont  recourt  à  la  ruse.  Parmi  les  seconds,  nous  voyons  les 
mêmes  moyens  employés  en  sens  inverse.  L'antilope  agile 
recours  à  la  fuite,  le  lapin  se  terre,  le  hérisson  se  roule 
en  boule,  la  tortue  se  retire  dans  sa  carapace,  la  moufette 
s'entoure  d'une  atmosphère  infecte,  la  seiche  disparaît 
dans  un  nuage  opaque,  chacun  a  sa  manière  propre  de 
défendre  son  existence. 

Ce  qui  est  moins  généralement  connu,  c'est  cette  même 
histoire  chez  les  petits  animaux,  chez  les  insectes,  par 
exemple.  Nous  allons  l'esquisser  rapidement.  Nous  y  trou- 
verons les  même  moyens  d'attaque  et  de  défense  que  chez 
les  grands  et,  en  outre,  bien  d'autres  procédés  qui  leur  sont 
propres  et  qui  prouvent  que  leur  intelligence  ne  le  cède  en 
rien  à  celle  des  animaux  que  nous  appelons  supérieurs, 
parce  qu'ils  ont  une  taille  plus  grande  et  une  organisation 
physique  plus  rapprochée  de  la  nôtre. 

I. 

Parmi  les  grands  animaux  vivant  de  proie,  il  en  est  qui, 
confiants  dans  la  puissance  de  leurs  moyens,  chassent  en 
plein  jour,  à  la  lumière  du  soleil  :  l'aigle,  le  faucon,  l'éper- 
vier  sont  dans  ce  cas,  mais  c'est  le  petit  nombre.  La  plu- 
part attendent  les  ombres  du  soir;  presque  tous  jugent 
qu'un  peu  de  ruse  ne  nuit  pas  à  la  violence. 

Les  insectes  ont  aussi  leurs  aigles  et  leurs  faucons; 


(  792  ) 
telles  sont  les  grandes  libellules  ou  demoiselles,  que  tout 
le  monde  connaît,  qui,  tantôt  planant  sur  place,  tantôt  par- 
courant les  sentiers  couverts  d'un  vol  rapide  et  toujours 
en  allant  et  en  revenant  dans  un  espace  déterminé,  rap- 
pellent tout  à  fait  les  allures  des  oiseaux  rapaces. 

Les  libellules  ne  sont  pas  les  seuls  brigands  de  l'air. 
Il  est  d'autres  insectes  ailés  qui  vivent  aussi  de  rapine  :  ce 
sont  les  guêpes. 

Si  les  premières  sont  les  faucons  du  monde  des  insectes, 
les  secondes  en  sont  les  vautours.  Les  guêpes,  en  effet,  ne 
se  bornent  pas  à  chasser  seulement  la  proie  vivante,  elles 
ne  dédaignent  pas  la  chair  inanimée  et  d'autres  substances 
dont  nous-mêmes  faisons  notre  nourriture.  Elles  ont,  par 
exemple,  une  prédilection  marquée  pour  les  plus  belles 
pêches  et  les  plus  beaux  raisins  de  nos  jardins.  Elles  ont 
même  l'effronterie  de  pénétrer  dans  nos  appartements  pen- 
dant le  repas  et  avec  une  impudence  que  leur  donne  la 
crainte  qu'elles  inspirent,  elles  viennent  prélever  leur  part 
du  festin  auquel  on  ne  les  a  pas  conviées. 

Tous  ceux  qui  possèdent  des  chats,  et  qui  les  observent, 
connaissent  le  goût  tout  particulier  qu'ils  ont  pour  le  foie 
des  animaux.  Les  guêpes  montrent  une  préférence  sem- 
blable. Dans  les  boucheries,  c'est  ce  qu'elles  recherchent 
surtout.  Réaumur,  qui  n'est  certes  pas  un  conteur  fantai- 
siste, raconte  avoir  vu  des  bouchers  leur  abandonner,  à 
l'époque  où  elles  sont  nombreuses,  un  foie  de  bœuf  ou  de 
mouton.  Cette  mesure  visait  à  un  double  résultat  écono- 
mique :  les  satisfaire  à  bon  marché  et  puis  tenir  à  distance 
les  grossesmouches  bleues,  beaucoup  plus  nuisibles  qu'elles. 

Les  guêpes  chassent  aussi  la  proie  vivante  et  c'est  à 
ce  titre  que  j'en  parle  ici.  Elles  le  font  à  la  manière  des 
oiseaux  rapaces,  en  plein  jour,  sans  ruser,  en  fondant 
violemment  sur  leur  victime. 


(  793  ) 

Ce  sont  les  mouches  ordinaires  qui  sont  leur  proie  habi- 
tuelle, mais  les  guêpes  sont  courageuses  et  ne  craignent 
nullement  de  s'attaquer  aux  abeilles  malgré  l'arme  défen- 
sive puissante  que  portent  celles-ci.  On  voit  souvent  une 
guêpe  se  saisir  d'une  abeille,  la  couper  par  le  milieu  d'un 
coup  de  mandibules,  abandonner  le  corselet  qui  ne  contient 
que  des  muscles  coriaces,  pour  se  repaître  des  intestins. 
Et  voyez  la  malice  de  ces  petites  bêtes  :  ce  ne  sont  pas  les 
abeilles  sortant  de  la  ruche  qu'elles  attaquent  de  préfé- 
rence, mais  bien  celles  qui  y  rentrent.  Elles  savent  que 
celles  ci,  arrivant  gorgées  de  miel,  leur  promettent  un  plus 
succulent  régal  que  les  autres. 

Les  ichneumons,  de  la  même  famille  que  les  guêpes, 
font  une  guerre  acharnée  aux  autres  insectes.  Ce  n'est  pas 
pour  les  dévorer  toutefois  qu'ils  les  poursuivent,  mais  pour 
déposer  des  œufs  dans  leur  corps. 

Chaque  espèce  a  son  gibier  particulier.  Il  y  en  a  qui 
recherchent  de  préférence  les  chenilles.  L'histoire  d'une 
de  ces  espèces  les  résumera  toutes. 

L'ichneumon  femelle  passe  son  existence  à  faire  la 
chasse  aux  chenilles.  Dès  qu'elle  en  a  découvert  une  à  sa 
convenance,  elle  tombe  sur  elle,  lui  enfonce  dans  le  dos  le 
stylet  qui  termine  son  corps  et  du  même  coup  lui  inocule 
un  œuf.  Avant  qu'elle  ait  vu  le  danger,  l'opération  est  faite 
et  dès  ce  moment  la  pauvre  chenille  est  perdue;  jamais 
elle  n'arrivera  à  sa  transformation  dernière.  De  l'œuf  dé- 
posé dans  son  corps  sortira  bientôt  une  larve  qui  rongera 
ses  tissus  en  respectant  toutefois  soigneusement  les  or- 
ganes vitaux.  La  chenille  grandit  avec  son  ver  rongeur, 
puis  se  transforme  en  chrysalide.  La  larve  d'ichneumon, 
qui  alors  n'a  plus  rien  à  ménager,  achève  de  la  dévorer 

2""*  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  51 


(794) 

et  profite,  pour  opérer  sa  propre  métamorphose  à  l'abri  de 
tout  danger,  de  la  coque  solide  que  sa  victime  avait  con- 
fectionnée pour  elle-même;  puis,  au  temps  voulu,  elle  en 
sort  armée  de  toutes  pièces  pour  se  livrer,  sur  une  autre 
génération  de  chenilles,  aux  mêmes  méfaits  que  ses  pa- 
rents. Ceci  fait  partie  de  ce  qu'on  appelle  les  harmonies 
de  la  nature. 

Pendant  l'été  on  rencontre,  courant  vivement  dans  les 
chemins  et  chassant  en  plein  soleil,  un  joli  coléoplère  de 
couleur  verte ,  émaillé  de  blanc.  Sa  tête  est  armée  de  puis- 
santes mandibules  et  il  a  à  son  service  six  longues  pattes 
dont  il  se  sert  à  merveille.  C'est  l'agile  cicindèle,  le  plus 
carnassier  des  insectes.  Sa  férocité  est  égale  à  celle  du 
tigre;  malheur  à  qui  lui  tombe  sous  la  dent  ! 

Le  domaine  des  eaux  est  aussi  parcouru  par  de  sangui- 
naires pirates.  Les  loutres,  les  requins,  les  brochets  sont 
l'effroi  de  ses  habitants.  Le  monde  des  insectes  possède 
également  ses  requins  :  le  dytisque,  sous  sa  forme  de  larve, 
a  les  instincts  féroces  poussés  à  un  degré  extrême.  Il  ose 
s'attaquera  des  animaux  beaucoup  plus  grands  que  lui  et 
ses  attaques  ont  quelque  chose  de  furieux  qui  dénote,  chez 
ce  petit  insecte,  autant  de  vaillance  que  de  cruauté,  en 
même  temps  qu'une  voracité  insatiable. 

Les  chasseurs  nocturnes  sont  bien  plus  nombreux  que 
îes  diurnes,  surtout  parmi  les  insectes  rôdeurs. 

Quand,  à  la  fin  d'une  belle  journée  d'été,  nous  voyons 
fombre  envahir  peu  à  peu  la  campagne  et  les  bois,  sous 
l'influence  de  la  fraîcheur  naissante,  des  senteurs  exquises 
qui  se  répandent  dans  l'air,  du  calme  qui  semble  régner 
partout,  autour  de  nouSj  notre  âme  s'ouvre  aux  sentiments 
les  plus  doux  :  c'est  l'heure  de  la  poésie  tendre. 

Orphée  accorde  sa  lyre  et,  de  sa  voix  la  plus  suave,  il 


(  79o  ) 
chante  un  hymne  en  harmonie  avec  l'étal,  de  son  âme  : 

Déjà  l'ombre  s'étend,  o  frais  el  doux  bocages 

Laissez-moi  m'arréter  sous  vos  jeunes  ombrages; 

Et  que  j'entende  encor  pour  la  dernière  fois 

Le  bruit  de  la  cascade  et  les  doux  chants  des  bois...  etc. 

Pure  illusion  !  erreur  profonde  !  C'est  l'heure  du  carnage 
universel  qui  va  sonner;  les  chants  qui  vont  retentir  sont 
des  hurlements  de  guerre  el  l'ombre  du  bocage  ne  ser- 
vira qu'à  mieux,  dissimuler  les  embûches  de  ses  hôtes,  à 
faciliter  leurs  guets-apens! 

Le  soleil  n'est  pas  plutôt  descendu  sous  l'horizon  qu'une 
multitude  de  rôdeurs,  animés  des  plus  mauvaises  inten- 
tions, sortent  de  leurs  ténébreuses  retraites  pour  se  mettre 
en  quête  de  leur  proie. 

Dans  les  pays  équatoriaux,  il  n'y  a  pas  à  s'y  méprendre 
au  bruit  soudain,  terrible,  indéhnissable  qui  éclate  tout 
à  coup  dans  la  profondeur  des  forêts.  Sous  notre  ciel  plus 
tempéré  la  bataille  est  moins  bruyante,  car  elle  a  pour 
acteurs  des  êtres  plus  petits;  elle  a  lieu,  pourtant,  sans 
qu'il  y  paraisse;  chaque  feuille,  chaque  brin  d'herbe  vont 
être  le  théâtre  de  scènes  meurtrières  qui,  pour  se  passer 
dans  un  monde  minuscule,  n'en  sont  pas  moins  des  drames 
pour  ceux  qui  y  assistent  ou  qui  y  jouent  un  rôle. 

L'espace  aérien  n'offre  pas  plus  de  sécurité  que  la  terre 
et  les  eaux.  En  même  temps  que  les  hiboux  ,  les  chouettes 
et  les  chauves-souris,  les  cousins  et  les  moustiques  dé- 
ploient leurs  ailes  et  sonnent  la  charge. 

A  côté  des  chasseurs  qui  entrent  hardiment  et  ouverte- 
ment en  guerre,  s'agite  la  multitude  de  ceux  qui,  doués 
d'un  appétit  non  moins  légitime,  ne  possèdent  pas,  pour  \c, 
satisfaire,  les  facultés  qui  leur  permettent  de  courir  sus  ù 


(  796) 
leur  proie,  et  qui  doivenl  user  de  slralagèmes  pour  s'en 
emparer. 

A  propos  des  chasseurs  diurnes,  j'ai  dit  un  mot  tout  à 
l'heure  de  la  cicindèle.  Ce  joli  coléoptère,  si  bien  taillé  pour 
la  course,  n'a  pas  toujours  eu  au  service  de  son  estomac 
ces  six  longues  pattes  dont  il  se  sert  avec  tant  d'avan- 
tage. Dans  la  première  période  de  sa  vie,  c'est-à-dire  à 
l'état  de  larve,  ses  instincts  carnassiers  sont  tout  aussi  ar- 
dents; la  cicindèle  possède  bien  une  paire  de  robustes 
mandibules,  mais  à  cela  s'est  bornée  la  libéralité  delà  nature 
à  son  égard;  son  corps  grêle  et  mou,  la  brièveté  de  ses 
pattes,  ne  correspondent  nullement  avec  la  vivacité  de  son 
appétit  non  plus  qu'avec  ses  formidables  mâchoires.  Que 
fait-elle?  après  avoir  reconnu  un  sentier  de  fourmis,  car  les 
fourmis  ont  aussi  leurs  sentiers,  elle  y  creuse  un  trou  ver- 
tical et  profond,  au  sommet  duquel  elle  s'établit  et  se 
maintient  en  courbant  son  corps  en  S.  sa  tête  plate  et 
ronde,  immobile  au  niveau  du  sol,  ferme  exactement  l'ori- 
lice  de  celte  espèce  de  puits.  Dans  cette  position  elle  attend. 
Une  fourmi  arrive,  passe  distraitement  sur  cette  tête  qui 
s'enfonce  aussitôt.  La  trappe  n'est  pas,  comme  vous  voyez, 
d'invention  humaine. 

Le  fourmilion  s'y  prend  autrement,  et  la  façon  dont  il 
précipite  les  fourmis,  en  les  mitraillant,  dans  l'entonnoir 
qu'il  s'est  creusé  dans  le  sable,  est  des  plus  merveilleuses. 
Mais  son  histoire,  à  laquelle  Réaumura  consacré  tout  un 
long  chapitre  dans  son  immortel  ouvrage,  est  trop  connue 
pour  que  je  m'y  arrête  davantage.  Parlons  plutôt  des 
araignées. 

Bien  que  les  arachnides  soient  classées  par  les  zoolo- 
gistes en  dehors  des  insectes  proprement  dits,  dont  elles 
dilïèrent  par  quelques  détails  d'organisation, elles  font  j)ar- 


(  797  ) 

tie  de  la  grande  famille  enlomologique  :  pour  toul  le  monde 
ce  sont  des  insectes....  et  puis  leurs  habitudes  sont  si  cu- 
rieuses que  je  ne  puis  me  dispenser  de  m'y  arrêter  un 
moment. 

Une  industrie  remarquable,  des  instincts  rusés,  une  fé- 
rocité sans  égale,  et  jusqu'à  la  manière  indigne  dont  l'arai- 
gnée femelle  traite  son  époux,  ont,  dès  l'antiquité,  attiré 
l'attention  sur  elles. Ce  n'est  pas  tant  l'art  qu'elles  mettent 
à  tisser  les  toiles  destinées  à  retenir  leur  proie,  que  l'in- 
telligence qu'elles  montrent  pour  arriver  à  leurs  fins,  qui 
les  a  rendues  célèbres.  Aucun  animal  d'ordre  supérieur  ne 
peut  leur  être  comparé  sous  ce  rapport.  Il  faut,  pour  trou- 
ver quelque  chose  d'analogue,  remonter  jusqu'à  l'homme 
capturant  les  petits  oiseaux  au  moyen  de  lacets  et  de 
gluaux.  Chaque  espèce  d'araignée  a  sa  manière  propre  de 
confectionner  sa  toile.  Les  unes,  comme  VÉpcire  diadème, 
établissent  des  fdets  immenses  comparativement  à  leur 
taille,  à  mailles  si  admirablement  régulières  qu'on  peut 
dire,  en  toute  vérité,  qu'elles  ont  le  conjpas  dans  l'œil.  Ce 
sont  les  artistes  de  la  famille. 

D'autres  y  mettent  moins  de  façon.  Il  en  est  qui ,  au  lieu 
de  filets,  fabriquent  de  véritables  toiles  d'un  tissu  serré 
auxquelles  elles  donnent  la  forme  d'un  hamac;  quelques- 
unes  se  bornent  à  tendre  des  fils  gluants  en  différents  sens 
et  sans  ordre  apparent. 

Dès  qu'un  insecte  est  venu  s'empêtrer  dans  ses  gluaux  , 
l'araignée  fond  sur  lui  S'il  est  faible,  il  est  à  l'instant 
saisi,  garotté,  enlacé  dans  une  multitude  de  fils  qui  para- 
lysent ses  mouvements;  s'il  est  fort  et  surtout  bien  armé, 
l'araignée  s'arrête,  tourne  autour  de  lui,  attend  qu'il 
s'épuise  en  vains  efforts  pour  se  dégager,  bondit  en  avant, 
se  retire,  cherche  à  le  prendre  par  derrière,  de  façon  à  éviter 


(  798  ) 

ses   atteiiUes,   el   linil   ordinairement   par   s'en    rendre 
maître. 

Quand  la  résistance  est  trop  vigoureuse  ,  elle  change  de 
lactique.  Au  lieu  de  s'obstiner  dans  un  combat  inutile  et 
dangereux,  elle  vient  elle-même  en  aide  à  son  adversaire 
en  coupant  les  tils  qui  le  retiennent.  Elle  ne  voit  plus  en 
lui  qu'un  malencontreux  intrus  qui  endommage  sa  toile,  et 
un  épouvantail  pour  les  mouches. 

Voilà  pour  le  système  des  gluaux. 

Parmi  les  engins  employés ,  remarquez  que  je  ne  dis  pas 
imaginés  par  l'homme,  il  y  a  encore  le  traquenard.  Nous 
allons  le  trouver  également  chez  les  insectes. 

Il  existe  dans  les  pays  chauds,  et  même  dans  le  midi  de 
l'Europe,  de  grands  insectes,  dont  les  ailes  foliacées  et  de 
couleur  verte  se  confondent  facilement  avec  le  feuillage 
des  plantes  et  des  arbustes  sur  lesquels  ils  aiment  à  se 
poser. 

Les  mantes,  c'est  leur  nom,  se  tiennent  immobiles,  les 
pattes  de  devant,  qu'elles  ont  très-longues,  redressées  et 
étendues,  attitude  bizarre  qui  les  a  fait  comparer  à  des 
personnes  en  prière  et  a  valu  à  l'espèce  du  IMidi  le  nom 
de  Mante  i^eligieuse.  Si  la  mante  attend  quelque  chose  du 
ciel,  c'est  simplement  qu'il  lui  tombe  un  insecte  entre  les 
bras.  Quand  cela  arrive,  ceux-ci  se  referment  brusquement 
et  la  proie  se  trouve  prise  entre  les  dents  aiguës  dont  ils 
sont  armés. 

L'air,  la  terre  et  les  eaux  sont  sans  cesse  parcourus  par 
des  brigands  et  des  pirates  de  toute  taille.  Le  sein  de  la 
terre  lui-même  n'olfre  pas  de  retraite  assurée  à  ses  habi- 
tants. 

La  taupe  et  la  courtilière  chassent  sous  le  sol.  Il  est 
étonnant  de  voir  la  ressemblance  que  des  habitudes  sem- 


(  799  ) 
blables  ont  donnée  à  un  quadrupède  et  à  un  insecte, 
animaux  d'organisations  si  différentes  d'autre  part.  Celte 
ressemblance  a  même  valu  au  second  le  nom  de  taupe- 
grillon.  La  courtilière,  comme  la  taupe,  creuse  la  terre,  y 
pratique  de  longues  galeries  pour  atteindre  les  larves  sou- 
terraines dont  elle  se  nourrit. 

Certaines  peuplades  font  usage ,  soit  à  la  guerre ,  soit  à 
la  chasse,  d'armes  empoisonnées.  Les  poisons  qu'elles 
confectionnent  dans  ce  but  sont  de  diverses  sortes;  les  uns 
tuent  rapidement,  les  autres  paralysent.  Il  existe  quelque 
chose  du  même  genre  chez  les  insectes.  Si  l'on  peut  éta- 
blir un  rapprochement  entre  le  dard  venimeux  du  frelon 
et  le  kriss  enduit  d'upas  du  Malais,  il  est  permis,  de  même, 
d'assimiler  à  l'action  du  curare  les  effets  produits  par  le 
venin  du  sphex. 

On  sait  que  le  poison  du  Para  agit  sur  les  nerfs  moteurs 
de  telle  sorte  que  l'excitabilité  musculaire  est  anéantie,  et 
que  l'animal,  dans  les  veines  duquel  cette  substance  a  été 
introduite,  tombe  frappé  de  paralysie  pour  un  temps  plus 
ou  moins  long,  sans  que  la  mort  en  soit  nécessairement  la 
conséquence,  si  la  dose  de  poison  inoculé  n  a  pas  été  trop 
forte. 

Le  venin  du  sphex,  insecte  de  la  famille  des  hyménop- 
tères comme  les  guêpes  et  les  abeilles,  agit  de  la  même 
manière.  La  femelle  seule  est  pourvue  d'un  aiguillon  ve- 
nimeux; toutefois  elle  n'en  fait  usage  que  dans  l'intérêt  de 
sa  progéniture,  car  ses  habitudes  à  elle  sont  paisibles  :  le 
suc  des  fleurs  lui  suffit.  x\Iais  les  larves  auxquelles  elles 
donnent  le  jour  ont  des  exigences  plus  carnassières,  et 
voici  comment  la  femelle  du  sphex  s'y  prend  pour  assurer 
leur  avenir.  Au  moment  de  la  ponte  elle  se  met  en  quête 
de  chenilles,  de  sauterelles  ou  d'araignées.  Lorsqu'elle  en 


(  800  ) 

a  trouvé  à  sa  convenance,  elle  les  pique  de  son  aiguillon , 
leur  inocule  son  venin  qui  les  paralyse  sans  les  tuer,  puis 
les  porte  en  cet  état  dans  une  excavation  qu'elle  a  préala- 
blement creusée  dans  le  sol.  Cela  fait,  elle  pond  un  œuf, 
bouche  le  trou  dans  lequel  le  tout  est  déposé  et  s'en  va 
procéder  à  une  autre  opération  du  même  genre.  Les  victi- 
mes du  sphex,  quoique  vivantes,  mais  paralysées  par  le 
venin,  ne  peuvent  s'échapper  pendant  le  temps  qui  s'écoule 
entre  la  ponte  de  l'œuf  et  l'éclosion  de  la  larve,  et  celle-ci, 
en  naissant,  trouve  à  sa  portée  des  vivres  frais  que  lui  a 
ménagés  la  prévoyance  maternelle. 


II. 


Si  les  insectes  se  montrent  ingénieux  dans  leurs  pro- 
cédés d'attaque,  ils  offrent  à  notre  curiosité  des  moyens 
de  défense  encore  plus  variés.  C'est  iciquenous  allons  les 
voir  déployer  un  art  bien  supérieur  à  celui  des  grands 
animaux.  Tout  ce  que  l'homme  a  inventé  ou  plutôt  cru 
inventer  dans  ce  genre  n'est,  au  fond,  qu'une  imitation 
perfectionnée  de  ce  qu'il  a  été  à  même  d'observer  chez 
eux.  L'homme  a  certes  poussé  plus  loin  l'art  de  faire  du 
mal  à  ses  ennemis  et  de  se  préserver  de  leurs  atteintes  — 
on  n'est  pas  pour  rien  l'être  le  plus  intelligent  de  la  créa- 
lion —  mais  l'idée  première,  il  a  pu  la  puiser  dans  la  simple 
observation  du  monde  microscopique  au  milieu  duquel  il 
passe  son  existence. 

Dans  les  circonstances  hostiles  ou  tout  être  vivant 
s'agite,  il  est  trois  moyens  de  défense  qu'il  emploie  d'une 
façon  constante  ou  fortuite  suivant  sa  faiblesse  ou  sa  force. 
Le  premier  consiste  à  éviter  l'ennemi,  le  second  à  lui 


(801  ) 

échapper  par  la  ruse,  le  troisième  à  lui  résister  par  la  force. 

Il  est  indubilahle  qu'une  multitude  immense  d'êtres 
vivants  ne  naissent  que  pour  être  mangés,  et  il  en  doit 
être  ainsi  puisque,  sans  eux,  un  nombre  non  moins  consi- 
dérable d'autres  êtres  seraient  dès  leur  naissance  con- 
damnés à  mourir  de  faim.  Heureusement  pour  tous  que  les 
premiers  ont  une  puissance  de  multiplication  rassurante 
pour  la  permanence  de  leur  race.  I^es  espèces  phytophages 
se  reproduisent  bien  plus  largement  que  les  espèces  car- 
nassières, et  c'est  grâce  à  cette  harmonie  naturelle  que  les 
diverses  races  animales  qui  peuplent  le  monde  continuent 
à  exister,  et  se  perpétuent  en  dépit  de  la  guerre  d'exter- 
mination que  les  unes  font  aux  autres. 

Beaucoup  d'insectes  cherchent  dans  l'obscurité  d'une 
existence  paisible  et  retirée  une  sécurité  que  des  mœurs 
plus  remuantes  ne  leur  donneraient  pas.  Les  uns  se 
creusent  dans  le  sol,  dans  le  bois  des  arbres,  même  dans 
l'épaisseur  des  feuilles,  des  réduits  secrets  où  ils  parcou- 
reraient  en  paix  toutes  les  phases  de  leur  existence  si, 
quelque  jour,  un  instinct  plus  puissant  que  celui  de  leur 
conservation  ne  les  forçait  à  sortir  de  leur  retraite.  Ce 
n'est  pas  seulement  chez  les  hommes  que  nous  voyons 
l'amour  et  ses  conséquences  venir  troubler  le  cours  de  la 
vie.  Il  n'est  pas  de  si  chétif  insecte  qui  ne  doive  quitter, 
a  un  moment  donné,  le  paisible  réduit  où  il  s'engraissait 
dans  une  égoïste  solitude  pour  se  lancer  dans  des  aven- 
tures périlleuses. 

Bien  périlleuses  en  effet  sont  les  aventures  du  mâle  de 
la  tégénaire  lorsque  l'âge  des  amours  arrivé ,  il  abandonne 
ses  gluaux  et  ses  filets  pour  obéir  à  un  entraînement  irré- 
sistible, La  nature  a  voulu  que  cet  être  infortuné  rencontrât, 
dans  sa  propre  compagne,  la  créature  la  plus  revêche  et 


(  802  ) 

la  plus  insociable,  el  bien  souvent  il  payerait  cher  les 
courts  instants  de  faveurs  qu'elle  lui  a  accordés,  s'il  ne  se 
hâtait  de  se  dérober  à  ses  atteintes  par  une  fuite  précipitée. 

Mais  tous  les  insectes  n'ont  pas  des  dangers  du  même 
genre  à  courir,  et  s'ils  doivent  user  de  ruse  ou  lutter  pour 
sauver  leur  existence  en  péril,  c'est,  la  plupart  du  temps, 
contre  d'autres  espèces  que  la  leur. 

Par  une  conséquence  naturelle  de  leur  genre  de  vie,  les 
insectes  chasseurs,  toujours  par  voies  et  par  chemins  en 
quête  de  gibier,  sont  plus  exposés  que  les  autres  à  faire 
des  rencontres  fâcheuses. 

Certaine  espèce  d'araignée,  la  mygalodonte  du  midi  de 
l'Europe,  habite  un  antre  souterrain  qu'elle  a,  par  surcroît 
de  précaution,  muni  d'une  porte.  En  embuscade  derrière 
cette  porte  entre-bâillée,  elle  guette  les  passants.  Si  quel- 
que insecte,  inconscient  du  danger,  passe  à  courte  distance, 
elle  se  précipite  sur  lui.  Mais  il  arrive  parfois  que  l'assailli 
déploie  tout  à  coup  des  armes  formidables  devant  lesquel- 
les elle  doit  battre  prestement  en  retraite.  Tel  le  bandit 
fondant  sur  un  voyageur  d'aspect  débonnaire  et  qui  s'aper- 
çoit, au  moment  de  l'aborder,  qu'il  a  affaire  à  un  quidam 
plus  fort  et  mieux  armé  que  lui,  s'empresse  de  tourner 
les  talons,  telle  notre  araignée,  poursuivie  de  près,  se  hâte 
de  regagner  son  antre  el  aussitôt  qu'elle  s'y  est  réfugiée, 
d'en  fermer  lestement  la  porte  et  de  s'y  cramponner  pour 
empêcher  son  ennemi  de  la  suivre. 

Mais  des  retraites  aussi  bien  fortifiées  ne  sont  que  le 
lot  du  petit  nombre,  et  la  plupart  de  ces  coureurs  de 
grands  chemins  en  sont  réduits,  en  cas  d'insuccès  de  ce 
genre,  à  faire  usage,  pour  leur  défense,  des  armes  que  la 
nature  leur  a  fournies.  Le  carabe,  serré  de  près,  lance  sur 
son  adversaire  un  liquide  brûlant  et  d'une  extrême  fétidité. 


(  805  ) 
Le  bombardier  leur  tire  des  coups  de  feu.  Son  arme,  il  est 
vrai,  n'est  chargée  qu'à  poudre,  mais,  telle  quelle,  il  s'en 
est  contenté  jusqu'à  présent,  et  qui  pourrait  dire  que  dans 
la  suite  des  temps,  si  le  perfectionnement  indéfini  n'est 
pas  une  vaine  hypothèse,  le  bombardier  ne  perfectionnera 
pas  son  artillerie? 

Les  anciens  chevaliers  avaient  coutume,  lorsqu'ils 
allaient  au  combat,  de  se  barder  de  fer.  Affublés  de  la 
sorte,  ils  ne  ressemblaient  pas  mal  à  ces  larves  qui,  pour 
protéger  leur  corps  mou  et  débile  contre  les  chocs  exté- 
rieurs et  en  même  temps  tromper  la  défiance  de  leur 
victime,  se  revêlent  d'une  véritable  armure  d'où  se  déga- 
gent seulement  la  tête  et  les  pattes.  Au  fond,  l'idée  est  la 
même,  il  n'y  a  de  différence  que  dans  la  nature  des  maté- 
riaux employés  et  l'art  avec  lequel  il  sont  mis  en  œuvre. 
Les  insectes  ne  pouvant  faire  usage  des  métaux,  utilisent 
ce  qu'ils  ont  à  leur  portée. 

Lorsqu'on  examine,  en  été,  le  bord  des  eaux,  on  voit  se 
mouvoir  çà  et  là  de  petits  corps  allongés  et  brunâtres  qu'au 
premier  abord  on  prendrait  pour  des  fragments  de  bû- 
chettes. En  y  regardant  de  plus  près,  on  s'aperçoit  que  ce 
sont  des  larves  habillées  d'un  fourreau  de  soie  renforcé  au 
moyen  de  petites  pierres  agglutinées,  de  sable  et  d'autres 
substances.  C'est  sous  cette  forme  que  la  phrygane  se 
présente  pendant  la  première  phase  de  sa  vie. 

Les  larves  de  criocères  et  de  cassides,  dont  la  vie  se 
passe  à  découvert  sur  les  feuilles  des  végétaux,  seraient 
fort  exposées  à  la  voracité  des  oiseaux  si  elles  ne  sous- 
trayaient aux  regards  de  ces  derniers  leurs  petits  corps 
blancs,  dodus,  appétissants,  sous  une  pulpe  verdàlrequ'elles 
se  procurent  aisément  et  qu'elles  accumulent  ingénieuse- 
ment sur  leur  dos  au  lieu  de  la  rejeter  loin  d'elles,  comme 


(  804  ) 

font  les  autres  animaux.  Ce  système  de  défense  est  de 
mauvais  goût,  j'en  conviens,  mais  en  cherchant  bien 
quelque  part,  au  sud  de  l'Afrique,  ne  découvrirait-on  pas 
des  animaux  d'un  ordre  Irès-supérieur,  pour  qui  sem- 
blable vêtement  remplace  économiquement  le  velours  et  la 
soie?  Des  larves  de  diptères  y  mettent  encore  moins  de 
façon.  Elle  se  bornent  à  se  rouler  dans  la  fange,  et  celle-ci, 
en  séchant,  leur  sert  de  vêtement  ou  plutôt  de  revêtement, 
en  quoi  elles  sont  imitées  par  certaines  peuplades  du  Brésil 
central  qui  n'ont  rien  imaginé  de  mieux  pour  préserver 
leur  peau  de  la  piqûre  des  moustiques. 

Mais  il   est  temps  que  je    m'arrête   dans  cette   voie. 
L'intérêt  que  je  m'efforce  d'appeler  sur  les  habitudes  de 
nos  petits  insectes  recevrait  une  rude  atteinte  si  je  déve- 
loppais d'avantage  les  moyens  de  défense  qu'ils  mettent 
en  pratique  dans  cet  ordre  de  faits.  Abordons  en  un  autre. 
Quelques  coléoptères  ont  recours,  pour  échapper  au 
danger,  à  une  singulière  supercherie.  Aussitôt  qu'on  les 
touche,  et  même  quand  ils  s'aperçoivent  qu'on  les  regarde, 
ils  contractent  leurs  pattes,  se  laissent  tomber  et  font  le 
mort.  A  quelle  idée  obéissent-ils  en  agissant  de  la  sorte? 
L'instinct   pur  et  simple  devrait  les  porter  à  fuir  ou  à 
résister.  Non,  ils  se  laissent  choir  sur  le  flanc  et  ne  bou- 
gent plus.  Est-ce  la   frayeur  qui  les  paralyse?  Est-ce  la 
conscience  intime  que,  paraissant  morts  et  desséchés,  ils 
offriront  à  leurs  ennemis  un  repas  de  mince  valeur,  que 
ceux-ci  dédaigneront?  Ou  bien,  n'est-ce  pas  plutôt  que, 
par  l'immobilité,  ils  espèrent  échapper  aux  regards  en  se 
confondant  avec  les  objets  inanimés  qui  les  entourent? 
Quoi  qu'il  en  soit,  ce  procédé  jouit  d'une  certaine  vogue, 
car  nous  le  voyons  employé  par  un  grand  nombre  d'espèces. 
Les  Siaphylins  font  tout  le  contraire;  leur  procédé  con- 


(  805  ) 
siste  clans  rinliniidation.  Lorsqu'un  chat  est  surpris  par  uu 
gros  chien,  on  le  voit  se  dresser  brusquement  sur  les  pattes, 
arrondir  le  dos,  hérisser  le  poil  et  donner  à  sa  physionomie 
l'aspect  le  plus  formidable  qu'il  peut.  Il  est  évident  que  ce 
chat  connaît  la  puissance  de  l'attitude  vis-à-vis  de  l'en- 
nemi. Les  Slaphylins  font  comme  les  chats.  Dès  qu'on  les 
touche,  ils  se  redressent,  relèvent  leur  queue  et  prennent 
des  manières  de  scorpions,  alors  qu'ils  sont  tout  à  fait 
inoffensifs. 

Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  cette  audace  leur  sauve  par- 
fois la  vie;  j'ai  vu  des  enfants  s'arrêter  au  moment  de  saisir 
un  staphylin  et,  le  croyant  armé  d'un  aiguillon,  reculer 
devant  son  air  menaçant. 

Est-ce  aussi  une  sorte  de  supercherie  ou  un  moyen  effi- 
cace de  défense  qu'emploient  quelques  espèces  de  chenilles 
dans  les  mêmes  circonstances.  Lorsqu'on  les  irrite,  une 
corne  charnue,  rouge,  éreclile  qu'elles  tiennent  cachée 
sous  la  peau  en  arrière  de  la  tète,  se  dresse  et  émet  une 
forte  odeur  de  fenouil. 

Les  larves  de  la  chrysomèle  du  peuplier  portent,  sur  le 
dos,  une  double  série  de  tubercules  munis  de  tubes  com- 
muniquant avec  de  petites  vésicules  sous-cutanées.  Au 
moindre  attouchement,  de  chacun  de  ces  tubes  sort  une 
gouttelette  d'un  liquide  laiteux,  doué  d'une  insupportable 
odeur  d'acide  prussique.  H  ne  s'agit  pas  ici  d'une  simple 
démonstration,  mais  d'une  belle  et  bonne  défense  avec 
laquelle  il  ne  faut  pas  plaisanter;  aussi  ces  larves  vivent  à 
découvert  sur  les  feuilles,  sans  crainte  des  oiseaux,  qu'elles 
bravent  ouvertement.  Elles  sont  très-ménagères  de  leur 
sécrétion  venimeuse,  car,  le  danger  passé,  elles  la  retirent 
dans  leur  corps  jusqu'à  ce  que  se  présente  une  nouvelle 
occasion  d'en  faire  usage. 


(  806  ) 

La  structure  et  la  couleur  du  corps  sont  aussi  mises  à 
prolit  par  une  foule  de  petits  animaux  pour  échapper  aux 
regards  de  leurs  ennemis.  Certaines  chenilles,  ressemblant 
à  s'y  méprendre  à  de  petits  fragments  de  bois,  se  posent 
volontiers  sur  les  rameaux  desquels  il  est  difficile  de  les 
distinguer.  Il  y  a  des  insectes  qui  se  tiennent  d'habitude 
sur  les  troncs  d'arbres  et  dont  la  robe  a  les  rugosités  et  la 
couleur  grisâtre  de  l'écorce.  Wallace  rapporte,  dans  le  récit 
de  ses  chasses  en  Malaisie,  qu'il  voyait  fréquemment  une 
espèce  de  papillon  voltiger  autour  de  certains  arbustes, 
dans  l'intérieur  desquels  ils  disparaissaient  tout  à  coup, 
sans  qu'il  lui  lut  possible  de  les  apercevoir  au  repos.  11 
parvint  enfin  à  découvrir  que  ces  papillons,  en  se  posant 
sur  les  branches  mêmes  de  l'arbuste,  repliaient  leurs  ailes 
de  telle  façon  qu'ils  prenaient  tout  à  fait  l'apparence  des 
feuilles  et  se  confondaient  avec  elles. 

Les  êtres  qui  ne  sont  pas  agressifs  par  tempérament 
et  dont  la  vie  s'écoule  paisiblement  sur  les  plantes  qui  les 
nourrissent,  n'ont  guère,  en  ce  qui  concerne  le  soin  de 
leur  sécurité,  que  les  préoccupations  communes  à  tous  les 
faibles.  Mais  il  en  est  que  la  nature  a  dotés  d'un  goût  bien 
dangereux;  de  ce  nombre  est  la  chenille  de  la  gallerie,  ou 
teigne  des  ruches.  Cette  imprudente  bestiole,  à  laquelle  la 
cire  des  abeilles  sert  de  nourriture,  passe  toute  sa  vie  au 
milieu  des  plus  grands  périls,  vivant  aux  dépens  d'ui» 
peuple  peu  hospitalier  et  surtout  qui  n'a  pas  la  réputation 
d'être  taillable  et  corvéable  à  merci.  Aussi  s'entoure-t-elle 
des  plus  minutieuses  précautions  pour  s'introduire  dans 
l'habitation  de  ces  hyménoptères  et  rapiner  leur  cire  à 
leur  insu.  Voici  comment  elle  s'y  prend  :  au  sortir  de 
l'œuf,  elle  se  fabrique  sans  tarder,  avec  la  substance  même 
de  la  cire,  un  luyau  cylindrique  qu'elle  tapisse  à  l'intérieur 


(807  ) 

d'une  soie  solidement  feutrée.  Ce  tuyau,  fixé  sur  une 
alvéole  ou  contre  les  parois  de  la  ruche,  n'est  d'abord  pas 
plus  gros  qu'un  fil.  A  mesure  que  la  chenille  grandit,  il 
s'allonge  et  s'élargit  de  manière  à  permettre  à  celle-ci  de 
s'y  mouvoir  aisément  sans  jamais  se  montrer  au  dehors. 

Celte  teigne  n'est  pas  au  reste  le  seul  commensal  des 
ruches.  Les  cités  d'abeilles,  de  même  que  celles  des 
guêpes,  des  fourmis  et  des  termites,  ont  des  hôtes  nom- 
breux que  ces  farouches  insectes  tolèrent  au  milieu  d'eux. 
Quelques-uns  se  contentent,  pour  vivre,  des  restes  de 
cuisine  de  la  communauté;  d'autres  se  rendent  utiles  en 
la  débarrassant  des  immondices  résultant  nécessairement 
d'une  grande  agglomération  d'individus  ;  d'autres  encore  y 
sont  entretenus  à  titre  d'animaux  domestiques.  Il  en  est 
toutefois  qui  osent  s'attaquer  aux  habitants  eux-mêmes. 
Ceux-là  ont  sans  doute  recours  à  des  ruses  ou  à  des  moyens 
que  nous  ignorons,  mais  ce  que  l'on  peut  affirmer  à  coup 
sûr,  c'est  qu'ils  ne  coulent  pas  leurs  jours  dans  une  douce 
quiétude. 

Plus  facile  est  la  vie  du  calosôme.  La  larve  de  ce  bril- 
lant coléoptère,  solidement  cuirassée  et  armée  de  puis- 
santes mandibules,  n'a  qu'à  se  laisser  vivre,  commodément 
établie  qu'elle  est  au  milieu  des  nids  de  la  chenille  proces- 
sionnaire qui  lui  sert  de  nourriture.  Jouissant  d'un  confort 
sans  égal,  jamais  ce  sybarite  ne  connaît  la  faim;  il  n'a 
d'autre  souci  que  de  bien  digérer  les  aliments  dont  il  fait 
choix  à  son  gré,  et  qu'il  se  procure  sans  effort  et  sans 
fatigue. 

On  voit  que  dans  le  monde  des  insectes,  comme  chez 
les  hommes,  les  conditions  dans  lesquelles  s'écoule  l'exis- 
tence sont  très-diverses.  Les  uns  vivent  sans  peine  et  sans 
travail  au  sein  de  l'abondance,  grâce  à  la  prévoyante  solli- 


(  808  ) 
citude  de  leurs  parents,  les  autres,  malheureux  déshérités, 
ne  connaissent  de  la  vie  que  ses  amertumes  et  ses  luttes, 
et  pour  eux  chaque  jour  se  passe  dans  la   misère  du 
moment  et  l'incertitude  du  lendemain  ! 


III. 


Je  viens  de  passer  rapidement  en  revue  quelques-uns 
des  principaux  procédés  d'attaque  et  de  défense  des 
insectes.  On  a  vu  qu'à  cet  égard  ils  se  montraient  égaux, 
sinon  supérieurs,  aux  animaux  d'une  organisation  plus 
élevée.  Mais  il  ne  s'est  agi  jusqu'ici  que  de  laits  dus  à  leur 
activité  individuelle.  Il  me  reste  à  dire  un  mot  de  leurs 
sociétés,  des  associations  dans  lesquelles  certaines  espèces 
puisent  une  force  comparable  à  celle  des  êtres  les  plus 
redoutables.  L'homme,  qui  ne  craint  pas  d'affronter  le  tigre 
et  le  lion,  est  parfois  tenu  en  échec  par  les  insectes;  il  s'est 
déjà  vu  obligé  d'employer,  pour  les  combattre,  les  moyens 
les  plus  puissants  dont  il  peut  disposer,  et  la  victoire  n'a 
pas  toujours  été  de  son  côté. 

Les  sociétés  d'insectes  sont  nombreuses,  mais  toutes 
ne  sont  pas  constituées  de  la  môme  manière.  Les  unes 
consistent  en  de  simples  agglomérations  d'individus  n'ayant 
qu'un  caractère  temporaire.  On  y  reconnaît  bien  l'existence 
d'un  instinct  de  sociabilité,  mais  celle-ci  paraît  renfermée 
dans  des  limites  très-étroites.  L'association  n'a  d'autre  but 
que  la  construction  d'un  abri  commun  en  vue  de  l'hiver- 
nage. 

Tout  autre  est  l'association  de  certaines  espèces  chez 
lesquelles  on  aperçoit  une  entente  véritablement  intelli- 
gente, qui  se  manifeste  dans  tous  les  actes  sociaux  et  parti- 


(  809  ) 

culièrement  dans  celui  où  elle  est  le  plus  efficace,  dans  la 
guerre. 

On  est  frappé  d'étonnement  lorsqu'on  lit  ce  qui  a  été 
publié  sur  les  mœurs  des  termites,  des  fourmis  et  des 
abeilles.  Si  l'on  n'avait  toute  conflance  dans  les  récits  des 
naturalistes  éminents  qui  en  ont  tracé  l'histoire,  et  qui  ont 
donné,  d'autre  part,  des  preuves  incontestables  de  bonne 
observation  et  de  sincérité,  on  serait  tenté  de  les  consi- 
dérer comme  d'audacieuses  fantaisies,  des  fables  absurdes. 

Je  ne  puis,  dans  ce  court  aperçu  ,  que  glisser  très-rapi- 
dement sur  les  faits  extraordinaires  que  révèle  l'histoire 
des  insectes  sociaux.  Je  me  bornerai  donc  à  en  citer 
quelques-uns  qui  dénotent  une  intelligence  qu'on  ne 
s'attendrait  pas  à  rencontrer  dans  des  êtres  de  taille  si 
infime. 

Parmi  les  choses  merveilleuses  qui  excitent  l'admiration 
des  voyageurs  dans  les  pays  chauds,  surtout  en  Afrique,  il 
faut  placer  au  premier  rang  les  habitations  des  termites. 

Ces  insectes,  auxquels  on  donne  généralement  le  nom 
de  fourmis  6/a»jc/ies,  s'associent  en  nombre  immense  pour 
élever  des  édifices  auprès  desquels,  si  l'on  tient  compte  de 
la  taille  des  architectes,  les  plus  grandes  et  les  plus  solides 
constructions  humaines  ne  sont  rien. 

Leur  organisation  sociale,  leur  manière  de  vivre,  sont 
des  plus  étonnantes,  mais  ce  serait  sortir  de  mon  sujet 
que  d'en  parler  ici.  Je  dirai  seulement  que  les  habitants  de 
ces  cités  se  répartissent  en  plusieurs  classes  dont  les 
attributions  sont  parfaitement  tranchées.  Il  en  est  une, 
entre  autres,  à  laquelle  est  dévolu  le  soin  de  garantir  la 
sécurité  publique.  En  d'autre  terme  chaque  cité  a  son 
armée  régulière,  ou,  pour  me  servir  d'une  expression  plus 
juste,  sa  garde  civique. 

S*""  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  S2 


(  8d0  ) 

Les  individus  qui  composent  cette  classe  de  citoyens  se 
distinguent  par  une  tête  plus  forte,  des  mandibules  plus 
longues  et  plus  robustes  et,  chose  à  noter,  par  l'absence 
de  sexe,  ce  qui  les  condamne  à  un  célibat  forcé.  Oublions 
un  moment  que  nous  n'avons  affaire  qu'à  des  insectes  :  ne 
dirait-on  pas  que  la  nature,  en  les  affranchissant  de  toute 
préoccupation  de  famille,  a  voulu  qu'ils  se  dévouent 
avec  une  entière  liberté  d'esprit  aux  intérêts  de  la  chose 
publique. 

Lorsque  la  termitière  est  attaquée,  les  défenseurs  se 
hâtent  d'accourir  et  en  même  temps ,  au  moyen  d'un  signal 
particulier,  avertissent  les  citoyens  paisibles  que  la  ville 
est  en  danger.  Ensuite  ils  fondent  tous  ensemble  sur 
l'ennemi,  quelque  redoutable  qu'il  soit.  Leur  attaque  est 
furieuse  et  ils  font  preuve,  dans  le  combat,  d'un  courage 
aveugle  et  d'un  dévouement  absolu. 

Il  parait  que,  quand  la  défense  commune  ne  les  appelle 
pas  au  dehors,  ces  braves  guerriers  veillent  au  maintien 
de  l'ordre  intérieur,  et  notamment  qu'ils  obligent  les  ou- 
vriers à  travailler;  —  disons  en  passant  qu'à  l'époque  où 
Smeathmann  les  observait  on  ne  parlait  pas  encore  de 
grèves.  —  Au  reste,  les  termites  ne  sont  pas  un  peuple 
batailleur,  leurs  troupes  sont  simplement  des  milices 
citoyennes  préposées  à  la  défense  du  territoire  et  à  la 
police;  elles  ne  font  pas  la  guerre  par  esprit  de  domination 
et  de  conquête  ,  mais  seulement  lorsqu'elles  y  sont  forcées 
par  la  nécessité. 

Il  n'en  est  pas  de  même  des  véritables  fourmis. 

Tout  le  monde  connaît  les  fourmis.  Qui  n'a  pas  rencon- 
tré, dans  les  bois,  ces  vastes  monticules  de  bûchettes 
autour  desquels  s'agite,  d'un  air  affairé,  une  multitude  de 
ces  insectes.  Ce  sont  les  cités  d'une  de  nos  espèces.  On 


(  811  ) 
les  évite  d'iiabitude,  on  se  détourne  de  leur  chemin,  car 
ce  peuple  n'est  pas  d'humeur  débonnaire;  il  n'aime  pas 
les  indiscrets  et  il  leur  manifeste  volontiers  sa  colère  dans 
la  mesure  de  ses  moyens.  Il  s'est  trouvé  cependant  que 
des  gens  curieux  ont  voulu  se  rendre  compte  de  leurs 
mœurs  et  se  sont  mis  à  les  observer  de  près,  comme  le 
font  les  explorateurs  à  l'égard  des  peuplades  sauvages  au 
milieu  desquelles  les  transporte  le  hasard  de  leurs  péré- 
grinations et  voici,  entre  autres  choses  étonnantes,  ce 
qu'ils  ont  remarqué  : 

Les  fourmis  sont  essentiellement  guerrières,  et  quand 
elles  ne  sont  pas  en  querelle  avec  l'extérieur,  il  n'est  pas 
rare  de  les  voir  en  proie  à  quelque  dissenlion  intestine.  Un 
naturaliste  genevois,  Pierre  Hubert,  l'un  des  principaux  et 
des  plus  véridiques  historiographes  des  fourmis,  fait  à  peu 
près  en  ces  termes  le  récit  d'une  de  leurs  batailles  :  Les 
deux  armées  s'étaient  rencontrées  à  mi-chemin  de  leurs 
habitations  respectives  ;  le  combat  se  livrait  sur  un  espace 
de  quelques  pieds  carrés,  et  il  s'en  exhalait  une  odeur 
acide  pénétrante.  A  l'approche  de  la  nuit  et  après  s'être 
bien  battue,  chaque  armée  rentrait  graduellement  dans 
ses  quartiers,  mais  elle  retournait  au  combat  avant  l'au- 
rore et  le  carnage  recommençait  avec  plus  de  fureur.  Par- 
fois un  parti  faiblissait  et  réclamait  du  renfort.  Celui-ci  ne 
se  faisait  pas  attendre.  Il  y  avait  des  réserves,  des  retraites 
momentanées,  des  retours  offensifs,  des  embuscades;  on 
emmenait  des  prisonniers;  enfin,  la  bataille  finie,  chaque 
parti  emportait  ses  morts.  Ne  dirait-on  pas  qu'il  s'agit 
d'une  bataille  entre  les  hommes? 

Si,  de  l'Europe,  nous  nous  transportons  en  Amérique, 
nous  assisterons  à  des  scènes  du  même  genre,  mais 
accomplies  dans  de  plus  grandes  proportions. 


(  812  ) 

Dans  les  forêts  de  la  Guyane  et  du  Brésil ,  ce  ne  sont  plus 
quelques  pieds  carrés  que  mesurent  les  champs  de  bataille. 
Là,  tout  s'y  passe  dans  des  proportions  grandioses.  C'est  par 
milliards  que  se  chiffre  l'effectif  des  migrations  de  fourmis. 
On  en  a  vu  qui,  sur  un  front  d'une  centaine  de  mètres, 
défilaient  pendant  des  journées  entières.  Cela  fait  penser 
à  ces  invasions  de  barbares  dont  l'Europe  fut  autrefois  le 
théâtre.  Leur  arrivée  s'annonce  longtemps  d'avance  par  un 
bruissement  particulier,  et  mieux  encore  par  un  monde 
d'animaux  de  toutes  sortes  qui  les  précède  en  fuyant.  Il  va 
de  soi  que  les  colons,  dont  les  habitations  se  trouvent  sur 
leur  passage,  s'empressent  de  déguerpir  au  plus  vite,  et 
de  leur  céder  momentanément  les  lieux. 

Il  y  a  des  cités  de  fourmis  hautes  de  plusieurs  mètres 
et  larges  en  proportion  ;  qu'on  juge  du  nombre  d'habitants 
(jue  comptent  de  telles  agglomérations. 

Fort  souvent  les  colons  ont  dû  leur  abandonner  cer- 
tains cantons,  à  moins  qu'ils  ne  fussent  en  force  pour 
faire  le  siège  en  règle  de  leurs  forteresses  et  les  anéantir. 
Lorsque  les  Français  s'établirent  à  la  Guyane,  un  déta- 
chement de  troupes  rencontra,  par  hasard ,  sur  son  chemin, 
une  de  ces  places  fortes.  Pour  passer,  il  fallait  la  détruire. 
Le  commandant  fit  creuser,  autour  de  la  fourmilière,  un 
fossé  circulaire.  On  le  remplit  de  bois  sec  et  l'on  y  mille 
feu  de  tous  les  côtés  à  la  fois.  Cela  fait,  la  place  fut  abattue 
à  coups  de  canon. 

Le  canon  contre  des  insectes! 

N'avais-je  pas  raison  de  dire,  tout  à  l'heure,  que 
l'homme  doit  en  venir,  dans  certaines  circonstances,  à 
user  des  moyens  les  plus  puissants  dont  il  peut  disposer 
pour  lutter  contre  de  chétifs  animalcules,  tant  il  est  vrai 
qu'il  n'est  pas  de  si  petites  forces  qui  ne  deviennent  irré- 


(  815  ) 
sistibles  en  s'accumulant.  J'en  citerai  encore  nn  exemple, 
tiré  (lu  récit  de  l'expédition  du  docteur  Schwenfurt  dans 
l'Afrique  centrale.  Voici  l'aventure  qui  lui  arriva  : 

C'était  en  remontant  le  Bahr-el-Abiad,  l'une  des  bran- 
ches du  Haut-iNil.  Le  vent  était  contraire  et  son  bateau,  ne 
pouvant  avancer  à  la  voile,  quelques-uns  de  ses  hommes 
étaient  descendus  à  terre  et  le  balaient  au  moyen  d'une 
longue  corde.  Celle-ci,  en  trainantsur  le  sol,  vint  à  ren- 
contrer une  colonie  d'abeilles  et  y  jeta  le  trouble.  La  ven- 
geance de  ces  farouches  insectes  ne  se  fit  pas  longtemps 
attendre.  Un  essaim  tout  entier  s'abattit  sur  les  haleurs 
qui  n'eurent  que  le  temps  de  se  jeter  à  l'eau  et  de  rega- 
gner le  bord  à  la  nage. 

Mais  les  abeilles  n'étaient  pas  apaisées.  Elles  poursui- 
virent les  fuyards  jusqu'à  l'embarcation,  et,  dans  leur 
fureur  aveugle,  attaquèrent  tout  l'équipage,  y  compris 
notre  botaniste  qui  était  tranquillement  occupé  dans  sa 
cabine  à  arranger  des  plantes.  Ce  fut  un  sauve  qui  peut 
général.  Le  docteur,  affolé,  fit  un  plongeon  dans  le  fleuve 
et  ne  fut  sauvé  d'un  nouveau  danger  que  grâce  à  ses  gens. 
Peu  à  peu,  cependant,  les  abeilles  se  retirèrent  et  le  calme 
se  rétablit.  Mais  en  faisant,  après  la  bataille,  le  relevé  des 
pertes  il  se  trouva  que  du  côté  des  hommes  il  y  eut  deux 
morts  et  autant  de  blessés  que  de  combattants. 

Schvveinfurt  ajoute  que  les  seize  bateaux  qui  compo- 
saient sa  flottile,  et  qui  passèrent  après  lui,  furent  assail- 
lis de  la  même  façon  par  ces  vindicatives  petites  bétes. 

A  propos  des  abeilles,  saviez-vous  qu'elles  avaient  pris 
part  à  la  bataille  de  Sadovva?  Non?  Eh  bien,  lisez  V His- 
toire de  la  campagne  de  /6'6'6\  par  le  général  de  Moltke, 
et  vous  verrez  qu'en  cette  journée  mémorable  ,  près  du  vil- 


(  814  ) 
lage  de  Nedelist,  vers  trois  heures  de  l'après-midi,  alors 
que  la  bataille  était  dans  toute  sa  violence,  deux  bataillons 
de  la  brigade  Hanenfeld,  établis  derrière  les  mnrs  d'une 
ferme,  répondaient  aux  feux  croisés  de  deux  batteries 
autrichiennes.  Un  obus  s'en  vint  éclater  au  milieu  de 
ruches  qui  se  trouvaient  en  nombre  en  cet  endroit.  Les 
abeilles,  indignées  à  juste  titre  de  cet  aggression  sans 
motifs  dans  une  querelle  qui  ne  les  regardait  pas  ,  se 
ruèrent  sur  les  hommes,  et  ceux-ci  eurent  grande  peine 
à  se  défendre  de  leurs  piqûres.  Dans  cette  épouvantable 
tourmente  humaine,  l'attaque  des  abeilles  fut,  comme 
vous  voyez,  assez  sérieuse  pour  qu'un  rapport  officiel  en 
fît  mention.  Désormais  la  charge  des  abeilles  de  Nedelist 
appartient  à  l'histoire! 

Je  pourrais  reproduire  bien  d'autres  récits  du  même 
genre,  mais  à  quoi  bon!  Ce  n'est  pas  un  traité  sur  cette 
matière  que  j'ai  entrepris.  J'ai  voulu  exposer,  seulement 
en  quelques  pages,  les  traits  les  plus  saillants  des  divers 
systèmes  d'attaque  et  de  défense,  mis  en  usage  par  les 
insectes,  et  faire  voir  que  la  cause  de  l'ignorance  dans 
laquelle  on  est  généralement  à  l'égard  de  ces  faits  tient, 
non  pas  an  défaut  d'intérêt  qu'ils  présentent,  mais  à  la 
petite  taille  des  acteurs.  Les  faits  et  gestes  des  grands  ani- 
maux s'imposent  en  quelque  sorte  à  notre  attention  :  nous 
les  observons  sans  y  prendre  garde,  leurs  mœurs  nous 
intéressent,  nous  y  prenons  goût  et  nous  les  étudions. 
C>'est  l'inverse  pour  les  insectes.  11  faut  d'abord  les  étudier, 
l'intérêt  ne  vient  qu'après  et  comme  conséquence  de  cette 
étude. 

De  tout  ceci  quelle  conclusion  tirer?  J'en  vois  plusieurs, 
mais  leur  exposition  m'obligerait  à  les  développer,  à   les 


(  815  ) 
discuter,  ce  qui  m'entraînerait  trop  loin.  II  en  est  une 
cependant  que  je  ne  puis  m'empêcher  de  faire  ressortir, 
car  elle  me  frappe  entre  toutes. 

Au  milieu  de  ce  carnage  universel  qui  dure  depuis  qu'il 
y  a  des  êtres  vivanis  et  qui  durera  tant  qu'il  y  en  aura  ,  on 
entrevoit  une  extrême  sollicitude  de  la  nature  pour  assurer 
la  sécurité  de  l'espèce,  la  permanence  et  la  transmission 
de  la  vie  sur  le  globe.  Mais,  d'autre  part,  quelle  insou- 
ciance, que  l'on  me  passe  le  mot,  à  l'égard  des  individus! 
si  chaque  être  a  été  doué,  dès  sa  naissance,  d'un  puissant 
instinct  de  conservation,  n'est-ce  pas  parce  que  son  déve- 
loppement jusqu'à  l'âge  adulte  est  indispensable  à  la  trans- 
mission de  la  vie?  Cet  acte  important  consommé,  la  pro- 
tection occulte  qui  l'entourait  l'abandonne  bientôt.  Il  peut 
et  même  il  doit  disparaître.  S'il  continue  à  exister  encore 
quelque  temps,  c'est  par  suite  de  l'harmonie  générale  qui 
persiste  dans  le  fonctionnement  de  ses  organes.  Il  est 
comme  une  machine  que  l'on  aurait  chauffée  en  vue  d'un 
travail  à  accomplir  et  dans  laquelle,  ce  travail  accompli , 
il  resterait  un  peu  de  charbon  et  d'eau  qui  ferait  marcher 
ses  rouages  pendant  quelque  temps  encore  après  le  départ 
du  mécanicien! 

Un  regard  jeté  sur  l'ensemble  du  monde  des  insectes  le 
démontre  clairement.  On  est  frappé  des  soins  prévoyants 
qui,  entourent  l'œuf  d'abord,  puis  la  larve  (|ui  représente 
l'enfance  et  la  jeunesse  de  l'insecte.  Quant  à  celui-ci,  ar- 
rivé à  son  dernier  développement  et  le  devoir  de  la  repro- 
duction rempli,  son  rôle  est  terminé.  On  en  connaît  même 
qui,  après  leur  évolution  définitive,  quand,  après  s'être  dé- 
pouillés de  leur  enveloppe  de  nymphe,  ils  déploient  leurs 
ailes  et  s'élancent  dans  les  airs  pleins  de  vie  et  en  état  de 
la  transmettre,  ont  perdu  d'autre  part,  par  l'absence  de 


(816  ) 
bouche,  la  possibilité  d'entretenir  leur  propre  existence,  et 
sont  dès  lors  condamnés  à  périr  rapidement. 

Le  rôle  des  individualités  ne  consisterait  donc  qu'à  faire 
la  chaîne  :  recevoir  la  vie  et  la  passer  à  d'autres! 

Les  applaudissements  de  l'assemblée  ont  accueilli  cette 
lecture. 

—  M.  Éd.  Mailly,  correspondant  de  la  classe,  inscrit 
en  second  lieu  au  programme  dé  la  solennité,  est  venu 
au  bureau  lire  la  notice  suivante  sur  Adolphe  Quetelet. 

Lambert-Adolphe-Jacques  Quetelet,  secrétaire  perpé- 
tuel de  l'Académie  royale  des  sciences,  des  lettres  et  des 
beaux-arts  de  Belgique;  directeur  de  l'Observatoire  de 
Bruxelles;  président  de  la  Commission  centrale  de  statis- 
tique; de  la  Société  royale  de  Londres;  des  Académies 
des  sciences  de  Berlin  et  de  Saint-Pétersbourg;  l'un  des 
huit  associés  étrangers  de  l'Académie  des  sciences  morales 
et  politiques  de  l'Institut  de  France;  ancien  professeur  au 
collège  de  Gand,  à  l'Athénée,  au  Musée  et  à  l'École  mili- 
taire de  Bruxelles;  grand  officier  de  l'Ordre  de  Léo- 
pold,  etc.,  etc.,  naquit  à  Gand,  le  22  février  1796,  de 
François-Augustin-Jacques-Henri  Quetelet,  officier  muni- 
cipal ,  et  d'Anne-Françoise  Yandevelde. 

Son  père,  natif  de  Hara  ,  petite  ville  de  la  Picardie,  était 
passé  fort  jeune  en  Angleterre.  Il  avait  ensuite  voyagé  sur 
le  continent  avec  un  noble  Écossais  à  qui  il  servait  de 
secrétaire.  Celui-ci  étant  mort  pendant  qu'ils  séjournaient 
en  Italie,  Henri  Quetelet  alla  s'établir  à  Gand  et  y  fut  admis 
dans  le  Corps  des  Merciers,  après  avoir  fait  ses  années 
d'apprentissage.  Devenu  plus  tard  officier  municipal,  il 


(817  ) 

rendit  des  services  signalés,  que  les  administrateurs  de  la 
ville  se  plurent  longtemps  à  reconnaître.  Il  mourut  en 
1805. 

Resté  orphelin  à  l'âge  de  sept  ans,  Adolphe  Quetelet  lit 
de  brillantes  études  au  Lycée  de  Gand.  Son  inclination 
particulière  le  portait  aux  lettres  et  aux  arts.  En  1812,  il 
exposait  au  Salon  de  Gand  un  dessin  qui  fut  remarqué,  et 
quatre  ans  après,  il  faisait  représenter  sur  le  théâtre  de  la 
même  ville  un  opéra  dont  il  avait  écrit  les  paroles  avec 
son  ami  Dandelin.  Il  était  déjà,  à  cette  époque,  professeur 
de  mathématiques  au  collège  qui  avait  remplacé  le  Lycée 
impérial;  mais  les  mathématiques  n'occupaient  encore 
qu'une  place  secondaire  dans  son  esprit;  il  les  envisageait 
surtout  au  point  de  vue  de  l'argent  qu'il  y  gagnait,  en 
donnant  des  leçons  et  des  répétitions.  Son  rêve  était  de 
briller  comme  poète,  comme  artiste;  il  travaillait  dans 
l'atelier  d'un  peintre  :  ce  fut  Garnier  qui  lui  inspira  le  goût 
des  sciences. 

Garnier  avait  été  appelé  de  France  pour  occuper  la 
chaire  de  mathématiques  et  d'astronomie  à  l'Université 
que  le  roi  Guillaume  venait  de  fonder  à  Gand.  Géomètre 
assez  ordinaire  et  professeur  diffus,  il  avait  beaucoup 
d'érudition  ,  savait  indiquer  les  bonnes  sources  où  il  conve- 
nait de  puiser,  et  possédait  le  grand  art  de  stimuler  l'ar- 
deur de  ses  élèves.  C'était ,  en  outre,  un  lettré  d'un  esprit 
vif  et  original,  dont  la  conversation  était  à  la  fois  instruc- 
li\e  et  amusante.  Son  enseignement ,  dit  Quetelet,  ne  com- 
mençait réellement  que  quand  il  était  hors  de  la  chaire  et 
qu'il  avait  perdu  de  vue  le  tableau. 

Quetelet  fut  le  premier  docteur  en  sciences  de  la  nou- 
velle Université  :  sa  promotion  date  du  24  juillet  1819.  Il 
fit  paraître,  à  cette  occasion,  une  dissertation  qui  le  plaça 


(  8i8  ) 
incontinent  parmi  les  inventeurs  en  mathématiques.  «  Un 
géomètre,  »  disait  Fontenelle,  «  ne  doit  pas  être  moins 
glorieux  d'avoir  donné  son  nom  à  une  courbe,  qu'un  prince 
d'avoir  donné  le  sien  à  une  ville.  »  La  découverte  de  la 
Focale  allait  procurer  cette  bonne  fortune  à  Quetelet;  elle 
dut  réjouir  ses  professeurs  au  moins  autant  que  lui-même, 
à  cause  de  l'éclat  qu'elle  jetait  sur  leur  Université  :  ils  la 
célébrèrent  comme  un  triomphe  et  comprirent  la  nécessité 
de  procurer  à  son  auteur  une  position  mieux  en  rapport 
avec  son  mérite.  iM.  Falck ,  ministre  de  l'instruction  pu- 
blique, étant  venu,  au  mois  d'août,  poser  la  première 
pierre  des  bâtiments  de  l'Université,  se  vit  recommander 
le  jeune  docteur  et  lui  accorda  sa  protection.  Il  y  avait 
justement  à  l'Athénée  de  Bruxelles  un  vieux  professeur 
disposé  à  prendre  sa  retraite.  Quetelet  fut  nommé  à  sa 
place, en  octobre;  il  retrouva  à  l'Athénée  Ph.  Lesbroussart 
qui  avait  été  son  professeur  de  rhétorique  au  Lycée  impé- 
rial du  département  de  l'Escaut,  et  s'y  lia  d'amitié  avec 
le  régent  de  troisième ,  de  Reiffenberg,  dont  la  nomination 
avait  précédé  la  sienne  de  quelques  mois. 

Quetelet  n'avait  pas  renoncé  aux  lettres  et  à  la  poésie. 
Il  se  fit  recevoir  à  la  Société  de  littérature,  pour  laquelle  il 
écrivit  quelques  pièces  de  vers,  et  fut  nommé  du  Comité 
de  lecture  des  théâtres  royaux,  ce  qui  lui  procura  ses  en- 
trées au  théâtre  de  la  Monnaie,  oîi  Talma  et  M"^  Mars 
venaient,  chaque  année,  donner  des  représentations. 
Bruxelles  renfermait  alors  un  grand  nombre  de  réfugiés 
que  la  seconde  Restauration  avait  bannis  de  France. 
C'étaient,  pour  la  plupart,  des  hommes  distingués  et  d'un 
commerce  agréable.  Quetelet  rechercha  leur  société  et  se 
fit  bien  voir  d'eux.  Il  fréquenta  aussi  les  artistes,  dont  le 
peintre  David  était  le  coryphée. 


(8)9) 

Toutefois  la  géométrie  formait  sa  principale  occupation. 
Aussi  sa  première  visite,  en  arrivant  dans  la  capitale, 
avait-elle  été  pour  le  commandeur  de  Nieupnrt.  Le  com- 
mandeur, comme  on  l'appelait  par  abréviation,  se  connais- 
sait beaucoup  aux  mathématiques,  qu'il  avait  longtemps 
représentées  seul  en  Belgique  :  il  fît  bon  accueil  à  Quetelet 
et  lui  donna  d'utiles  conseils.  Quelques  mois  après,  il  con- 
tribua avec  Garnier  à  le  faire  élire  membre  de  l'Académie 
des  sciences  et  belles-lettres  de  Bruxelles.  Le  nouvel  aca- 
démicien ne  tarda  pas  à  prouver  qu'il  y  avait  eu  plus  que 
du  bonheur  dans  sa  découverte  de  la  Focale,  et  qu'il  pos- 
sédait jusqu'à  un  certain  point  cette  force  d'imagination 
dont  il  parle  à  propos  de  Dandelin,  «  force,  »  dit-il,  «  qui 
saisit  les  corps  dans  l'espace,  rapproche  leurs  différentes 
parties  cl  fait  jaillir  de  leur  comparaison  une  foule  de  vé- 
rités nouvelles.  » 

Je  ne  pourrais  dire  comment  Quetelet  fut  porté  à  la 
statistique,  ni  comment  elle  le  détourna  de  la  géométrie 
à  laquelle  il  devait  ses  premiers  succès.  La  citation  qu'il  fait 
quelque  part  d'un  passage  d'une  lettre  de  Pascal  à  Fermât, 
nous  expliquera  peut-être  ce  changement  :  «  Pour  vous 
parler  franchement  de  la  géométrie,  »  écrivait  Pascal ,  «  je 
la  trouve  le  plus  haut  exercice  de  l'esprit;  mais  en  même 
temps  je  la  connais  pour  si  inutile,  que  je  fais  peu  de  dif- 
férence entre  un  homme  qui  n'est  que  géomètre  et  un 
habile  artisan.  Aussi  je  l'appelle  le  plus  beau  métier  du 
monde;  mais  enfin  ce  n'est  qu'un  métier; et  j'ai  dit  souvent 
qu'elle  est  bonne  pour  faire  l'essai,  mais  non  pas  l'emploi 
de  notre  force  :  de  sorte  que  je  ne  ferais  pas  deux  pas 
pour  la  géométrie,  et  je  m'assure  que  vous  êtes  fort  de 
mon  humeur.  » 

La  fondation  de  l'Observatoire  de  Bruxelles  comptera 


(  820  ) 

parmi  les  grands  services  rendus  par  Quetelet  à  la  science. 
L'ancienne  Académie  avait  souvent  exprimé  le  regret  que 
la  Belgique  n'eût  aucun  établissement  de  ce  genre  :  à  dif- 
férentes reprises  elle  avait  signalé  la  nécessité  de  combler 
cette  lacune.  Avant  elle,  l'astronome  Jean  Bernoulli, 
visitant  les  Pays-Bas  autrichiens,  s'était  plaint  que  per- 
sonne n'y  sentît  les  attraits  de  l'astronomie.  Trente  ans 
après  lui,  sous  la  domination  française,  le  célèbre  Lalande 
ne  trouvait  à  citer  que  l'Anglais  Pigott,  qui  avait  fait  chez 
nous,  dans  l'intervalle,  des  observations  pour  fixer  la  po- 
sition de  quelques  points  du  pays.  Mais  il  ne  fallait  pas 
seulement  faire  renaître  l'astronomie  qui  avait  compté 
jadis  en  Belgique  de  glorieux  adeptes  :  la  météorologie  et 
la  physique  du  globe  y  étaient  pour  ainsi  dire  à  créer. 

Quetelet  ne  recula  pas  devant  cette  entreprise  ardue  : 
il  fut  soutenu  par  un  minisire  éclairé,  le  même  auquel  il 
devait  sa  nomination  à  l'Athénée  de  Bruxelles.  M.  Falck 
l'envoya  à  Paris  pour  y  prendre  les  renseignements  néces- 
saires à  la  construction  d'un  Observatoire  et  s'exercer  à 
l'emploi  des  grands  instruments.  A  son  retour,  au  com- 
mencement de  l'année  1824,  il  présenta  son  projet  au  Roi 
par  l'intermédiaire  du  prince  de  Gavre,  président  de  l'Aca- 
démie, qui  avait  promis  de  l'appuyer.  Après  que  le  Roi  eut 
donné  son  assentiment,  des  ouvertures  furent  faites  au 
bourgmestre  de  Bruxelles,  M.  de  Wellens;  on  le  pres- 
sentit sur  la  part  pour  laquelle  la  ville  serait  disposée  à 
contribuer  à  la  dépense,  afin  de  voir  élever  l'Observatoire 
dans  ses  murs.  Comme  la  négociation  traînait  en  longueur, 
M.  Walter,  inspecteur  général  de  l'instruction  publique, 
qui  en  était  chargé,  s'adressa  à  la  Régence  de  la  ville  de 
Liège;  et  quand  M.  de  Wellens  fut  prévenu  que  celle-ci 
allait  faire  des  offres,  il  n'hésita  plus  :  sur  sa  proposition, 


(  821  ) 

le  Conseil  de  régence  vota,  le  9  février  1826,  une  somme 
de  dix  mille  florins  pour  payer  la  moitié  des  frais  de  con- 
struction, évalués  à  vingt  mille  florins.  Par  un  arrêté  du 
8  juin,  le  Roi  décida  qu'un  Observatoire  serait  érigé  à 
Bruxelles,  et  que  l'autre  moitié  des  frais  serait  supportée 
par  le  trésor  public. 

Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de  raconter  les  traverses  qu'essuya 
la  nouvelle  institution.  Le  plan  de  l'éditice  n'avait  pas  été 
suffisamment  élaboré;  on  eut  le  tort  de  mettre  la  main  à 
l'œuvre  avant  que  tous  les  détails  en  eussent  été  discutés 
et  approfondis;  on  eut  aussi  le  tort  de  chercher  à  dissi- 
muler le  chiffre  de  la  dépense  qui,  de  vingt  mille  florins, 
monta  jusqu'à  soixante  mille.  Les  événements  de  la  révo- 
lution de  1850  suscitèrent  de  nouvelles  entraves.  Com- 
mencées au  mois  de  mai  1827,  les  constructions  n'étaient 
pas  encore  terminées  dix  ans  après.  Cependant  Quetelet 
avait  pu  prendre  possession  de  son  logement  dans  le  cou- 
rant de  l'année  1832;  les  observations  météorologiques 
commencèrent  avec  l'année  1833,  mais  les  instruments 
méridiens  ne  furent  placés  qu'au  mois  de  juillet  183o,  et 
l'équatorial  ne  put  être  monté  qu'un  an  plus  tard. 

Quetelet  avait  été  nommé  astronome  près  l'Observa- 
toire, par  un  arrêté  royal  du  9  janvier  1828.  Il  avait  quitté 
l'Athénée,  mais  il  continua  jusqu'en  1854  à  donner  des 
leçons  publiques  de  physique  et  d'astronomie  au  Musée 
des  sciences  et  des  lettres,  établi  en  1826,  et  dont  la  fon- 
dation lui  était  due  en  grande  partie.  Lorsque  ce  Musée 
fut  absorbé  par  l'Université  libre,  il  sortit  momentané- 
ment de  l'enseignement,  dans  lequel  il  comptait  déjà  vingt 
années  de  services  :  il  ne  tarda  pas  à  y  rentrer,  ayant  été 
nommé  professeur  d'astronomie  et  de  géodésie  à  l'École 
militaire,  par  un  arrêté  royal  du  6  janvier  1856. 


(  822  ) 

Je  me  borne  ici  à  retracer  à  grands  traits  la  vie  de  Que- 
telet  :  je  parlerai  plus  loin  de  ses  travaux.  Il  avait  été  élu 
membre  de  l'Académie  des  sciences  et  belles-lettres  de 
Bruxelles,  le  1"  février  1820,  et  dans  le  diplôme  qui  lui 
fut  expédié  le  24,  on  lit  ce  qui  suit  :  «  L'Académie...,  pré- 
voyant qu'en  s'allachanl  un  jeune  savant  de  ce  mérite  et 
d'une  grande  espérance,  elle  facilitera  la  communication 
des  lumières  et  le  progrès  des  sciences...,  l'a  nommé  et  le 
nomme  académicien  ordinaire  regnicole...  »  Jamais  peut- 
être  il  n'était  arrivé  à  l'Académie  de  lire  aussi  bien  dans 
l'avenir;  encore  ne  prévoyait-elle  pas  qu'une  grande  partie 
de  sa  renommée  lui  viendrait  un  jour  de  ce  jeune  homme 
de  vingt-quatre  ans,  dont  une  heureuse  trouvaille  et  quel- 
ques poésies  constituaient  alors  tout  le  bagage  scientifique 
et  littéraire. 

Les  séances  de  l'Académie  n'étaient  guère  suivies  à  cette 
époque  que  par  une  demi-douzaine  de  membres  :  elles  se 
passaient  en  conversations  plutôt  qu'en  lectures.  Le  com- 
mandeur de  Nieuport  remplissait  les  fonctions  de  direc- 
teur; il  avait  appartenu  à  l'Académie  de  Marie-Thérèse,  et 
n'avait  pas  moins  de  haine  pour  les  idées  libérales  que 
d'amour  pour  la  géométrie.  Pendant  la  révolution  braban- 
çonne, il  avait  gravement  compromis  l'Académie  en  lui 
faisant  voter  un  don  patriotique  de  quatre  canons;  en  1812, 
il  proposait  avec  le  plus  grand  sérieux  d'accorder  la  liberté 
de  la  presse  en  latin  seulement. 

Nieuport  était  en  lutte  constante  avec  le  secrétaire  per- 
pétuel Van  riulthem,  à  qui  il  reprochait,  non  ses  idées 
politiques,  car  le  brave  homme  n'en  avait  point,  mais  sa 
négligence  à  remplir  ses  fonctions  :  il  finit  même  par 
mettre  à  sa  place  l'historien  Dewez,  dont  il  ne  connais- 
sait sans  doute  pas  les  étranges  discours  prononcés,  sous 


(  823  ) 

le  Directoire  exécutif,  au  Temple  de  la  loi,   à  Nivelles. 

Quelelet  avait  conquis  les  bonnes  grâces  du  comman- 
deur et  il  ne  tarda  pas  à  partager  son  influence.  Il  profita  de 
son  ascendant  sur  ses  confrères  pour  faire  élire  Dandelin 
et  de  Reiffenberg,  non  parce  qu'ils  étaient  ses  amis,  mais 
parce  que  l'Académie  gagn'ait  dans  l'un  un  brillant  géo- 
mètre, le  meilleur  peut-être  que  la  Belgique  moderne  ait 
produit,  et  dans  l'autre  un  homme  de  lettres  plein  d'ar- 
deur et  de  zèle. 

Après  la  mort  du  commandeur,  l'influence  de  Quetelet 
devint  prépondérante:  il  en  usa  toujours  pour  le  plus  grand 
bien  de  la  Compagnie,  faisant  tourner  à  son  profit  les  re- 
lations que  ses  voyages  en  France,  en  Angleterre,  en  Alle- 
magne, en  Italie,  lui  permirent  de  nouer  avec  les  savants 
les  plus  distingués  de  ces  divers  pays.  Lors  de  la  révolution 
de  1830,  il  aida  à  sauver  l'Académie  de  deux  dangers  :  la 
fièvre  de  changements  inhérente  aux  perturbations  politi- 
ques, et  l'intrusion  des  médiocrités  toujours  prêtes  à  ex- 
ploiter ces  changements. 

Le  22  novembre  1834,  il  fut  appelé,  d'une  voix  una- 
nime, à  remplacer  M.  Dewez  qui  venait  de  mourir.  Il  était 
le  sixième  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie ,  et  le  troi- 
sième qui  fût  redevable  de  sa  nomination  aux  suffrages  de 
ses  confrères.  L'ancienne  Académie  avait  eu  pour  secré- 
taires :  Gérard,  Des  Roches  et  Mann;  la  nouvelle  :  Yan  Hul- 
them  et  Dewez.  Gérard,  Des  Roches  et  Van  Hulthem 
avaient  été  institués  par  le  gouvernement  :  le  premier, 
homme  d'un  caractère  difficile,  s'était  vu  retirer  ses  fonc- 
tions à  l'Académie  au  profit  de  Des  Roches,  beaucoup  plus 
souple  et  fort  supérieur,  il  faut  le  dire,  en  activité  et  en 
mérite.  Parti  de  très  bas.  Des  Roches  avait  fini  par  arriver 
à  une  brillante  position  quand  il  mourut,  jeune  encore.  Si 


(  824  ) 

des  besoins  incessants  d'argent  ne  lui  avaient  fait  entre- 
prendre trop  de  choses  à  la  fois,  il  aurait  pu  laisser  une 
grande  trace  dans  l'histoire  des  lettres.  Son  successeur  au 
secrétariat  de  l'Académie,  l'abbé  Mann,  était  une  de  ces 
rares  intelligences  qui  embrassent  l'ensemble  des  connais- 
sances humaines;  il  avait  toutes  les  qualités  voulues  pour 
bien  occuper  le  poste  dans  lequel  l'avait  placé  le  vote  una- 
nime de  ses  confrères.  Cultivant  les  sciences  et  les  lettres, 
possédant  les  langues  anciennes  et  modernes,  doué  d'un 
grand  esprit  d'ordre  et  de  méthode,  au-dessus  d'une  mes- 
quine envie  et  dans  une  position  d'indépendance  complète, 
bienveillant  et  désintéressé,  connu  à  l'étranger  et  en  rela- 
tion avec  les  principales  Sociétés  savantes,  il  aurait  certai- 
nement donné  du  lustre  à  l'Académie,  sans  les  troubles 
politiques  qui  vinrent  enrayer  son  zèle.  J'ai  déjà  parlé  de  la 
négligence  de  Van  Ilulthem  ;  avec  des  connaissances  variées, 
il  avait  une  extrême  répugnance  à  écrire  et  ne  se  plaisait 
qu'à  amasser  des  livres:  on  dit  même  qu'ils  furent  sa  seule 
passion.  Dewez  a  pu  être  un  historien  patient  et  laborieux, 
je  ne  veux  pas  contester  les  services  qu'il  a  rendus  sous  ce 
rapport.  Je  reconnaîtrai  volontiers  que  dans  ses  fonctions 
de  secrétaire  perpétuel ,  il  fut  exact  et  méthodique;  mais  il 
n'avait  aucune  autorité,  et  son  ignorance  presque  complète 
des  langues  vivantes  l'aurait  rendu  incapable  d'entretenir 
des  relations  avec  les  pays  étrangers,  quand  même  son  nom 
y  eût  pénétré.  Quetelet,  avec  le  respect  qu'il  porta  toujours 
à  l'âge,  avait  pour  lui  les  plus  grands  égards;  il  s'efforçait, 
sans  trop  y  réussir,  de  faire  quelque  chose  des  Bulletins 
décharnés  que  Dewez  lui  soumettait  avant  de  les  envoyer  à 
l'imprimeur;  il  lui  montra  jusqu'au  bout  une  grande  défé- 
rence et  aurait  été  désolé  de  lui  causer  la  moindre  peine. 
Il  est  très  possible  que  dans  certaines  sphères  on  ait  songé, 


(  825  ) 

après  1850,  à  priver  Dcwez  de  sa  place  de  secrétaire 
de  l'Académie  :  une  pareille  mesure  aurait  rencontré  dans 
Quetelet  un  ennemi  déclaré.  Lorsque  Garnier,  au  mépris 
de  grands  services  rendus  à  l'enseignement  en  Belgique, 
eut  été  expulsé  de  l'Université  de  Gand ,  son  ancien  élève, 
devenu  son  confrère,  ne  laissa  échapper  aucune  occasion 
de  protester  contre  cet  acte  injustifiable,  et  sa  voix  géné- 
reuse s'éleva  également  en  faveur  d'un  autre  professeur, 
M.  Raoul,  à  qui  il  n'avait  d'autre  obligation  personnelle 
que  d'en  avoir  reçu  bon  accueil,  quand  il  était  pauvre  et 
inconnu. 

Ce  n'est  pas  dans  cette  enceinte  que  j'ai  besoin  de  rap- 
peler ce  que  l'Académie  doit  à  Quetelet  :  on  peut  dire  que 
c'est  lui  qui  l'a  faite.  Toujours  il  sut  défendre  ses  préroga- 
tives et  sa  dignité;  il  l'aurait  même  voulue  plus  indépen- 
dante que  ne  le  permettent  nos  règlements  d'administra- 
tion publique. 

Jl  nous  reste,  avant  d'aborder  l'exposé  des  travaux  de 
Quetelet,  à  dire  un  mot  de  la  Commission  centrale  de  sta- 
tistique, qu'il  présida  pendant  plus  de  trente  ans,  et  dont 
le  fondateur,  M.  Liedts,  avait  été  son  élève  à  Audenaerde  , 
lorsqu'il  y  donnait  des  leçons,  en  1813  ,  dans  une  institu- 
tion privée,  dirigée  par  M.  Maquaire,  de  Gand. 

La  première  idée  d'une  organisation  officielle  de  la  sta- 
tistique remontait  au  gouvernement  des  Pays-Bas.  Un 
arrêté  royal  du  5  juillet  1826  avait  créé  près  le  départe- 
ment de  l'intérieur  un  Bureau  de  statistique.  Les  opéra- 
tions de  ce  Bureau  devaient  être  dirigées  par  une  Commis- 
sion présidée  par  le  ministre  et  dont  faisaient  partie  les 
administrateurs  de  l'intérieur,  de  l'instruction  publique  et 
de  l'industrie  nationale,  assistés  d'un  secrétaire.  Ces  admi- 
nistrateurs entraient  dans  la  Commission  en  vertu  de  leurs 

2""=  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  53 


(  826  ) 

lonclions  :  leurs  attiibulions  et  leurs  connaissances  étaient 
loin  d'embrasser  toutes  les  branches  de  la  statistique.  Le 
ministre,  qui  aurait  du  donner  l'impulsion,  était  absorbé 
par  les  travaux  de  son  département  et  les  soucis  de  la 
politique.  Il  y  avait  des  Commissions  provinciales,  mais 
aucun  lien  ne  les  rattachait  à  la  Commission  centrale:  elles 
étaient  nommées  par  les  gouverneurs  qui  pouvaient  les 
dissoudre.  Dans  l'organisation  conçue  par  M.  Liedts,  en 
1841 ,  chaque  département  ministériel  était  représenté 
à  la  Commission  centrale  par  un  ou  plusieurs  délégués, 
ayant  lait  une  étude  spéciale  et  approfondie  des  branches 
de  la  statistique  ressortissant  à  ce  département,  et  la 
Commission  devait  être  présidée  «  par  un  homme  de 
science ,  versé  dans  l'économie  sociale  et  habitué  à  résumer 
les  travaux  de  la  statistique.  »  Le  président  que  M.  Liedts 
avait  en  vue  était  Quetelet,  dont  les  recherches  et  les 
ouvrages  avaient  depuis  longtemps  établi  la  réputation  en 
Belgique  et  plus  encore  à  l'étranger.  Il  avait  été  l'un  des 
premiers  correspondants  élus  par  l'Académie  des  sciences 
morales  et  politiques  de  l'Institut  de  France,  après  sa 
restauration.  Lors  de  la  réunion  de  l'Association  Britan- 
nique pour  l'avancement  des  sciences,  tenue  à  Cambridge, 
en  1835,  il  avait  provoqué  la  création  d'une  section  de 
statistique, dont  firent  partie  Malthus,  Babbage, Jones,  etc. 
A  son  retour  à  Londres,  il  avait  été  appelé  devant  une  Com- 
mission d'enquête  instituée  par  le  Parlement,  pour  fournir 
des  indications  sur  la  tenue  des  registres  de  l'état  civil 
en  Belgique  et  sur  le  recensement  du  l"""  janvier  1850. 
Ce  recensement,  le  premier  qui  avait  été  opéré  chez 
nous  sur  des  bases  rationnelles,  aurait  dû  être  renouvelé 
en  1840,  aux  termes  d'un  arrêté  royal  du  29  sep- 
tembre 1828,  mais  les  préoccupations  politiques  du  temps 


(  827  ) 

avaient  empêché  qu'on  n'y  pensât.  Malgré  les  instances 
de  la  Commission  centrale,  le  nouveau  recensement  lut 
retardé  jusqu'au  15  octobre  1846.  Entre-temps,  l'organi- 
sation de  la  statistique  avait  été  complétée  par  l'institution 
des  Commissions  provinciales,  dont  les  membres  étaieni 
nommés  par  le  ministre  de  l'intérieur,  sur  la  proposition 
de  la  Commission  centrale,  ce  qui  permettait  de  mainte- 
nir l'unité  dans  les  recherches. 

Après  avoir  établi  l'unité  dans  les  travaux  statistiques 
de  la  Belgique,  il  s'agissait  de  l'introduire  dans  ceux 
des  autres  pays.  On  y  arriva  par  l'organisation  des  Con- 
grès internationaux.  Le  premier  de  ces  Congrès  se  tint  à 
Bruxelles  en  1855.  Quetelet,  qui  en  avait  été  le  principal 
promoteur,  fut  appelé  par  le  vote  unanime  des  délégués 
des  nations  à  le  présider.  Le  second  Congrès  de  statistique 
eut  lieu  à  Paris  en  1855,  mais  Quelelel  ne  put  pas  y 
assister  :  son  absence  motivée  par  un  douloureux  événe- 
ment auquel  nous  reviendrons  plus  tard,  fut  vivement 
regrettée  et  donna  lieu  à  une  manifestation  des  plus  hono- 
rables pour  lui;  il  se  rendit  à  tous  les  autres  Congrès,  qui 
siégèrent  successivement  à  Londres,  à  Vienne,  à  Berlin, à 
Florence,  à  La  îîave  et  à  Saint-Pétersbourg. 

L' .Académie,  l'Observatoire  et  la  Commi.^sion  centrale 
de  statistique  ont  été  les  centres  où  convergèrent  pendant 
de  longues  années  les  travaux  de  Quetelet,  pour  rayonner 
ensuiie  dans  le  monde  savant.  Mais  les  Annales  de  ces 
institutions  ne  suffirent  pas  à  l'aire  connaître  toutes  les 
productions  de  son  esprit  :  elles  auraient,  du  reste,  été 
fermées  à  certaines  compositions  ne  rentrant  pas  dans 
leur  cadre,  soit  par  leur  genre,  soit  par  leur  étendue. 

Quetelet  avait  du  goût  et  du  talent  pour  la  poésie.  La 
veillée  dos  bardes  et  Les  adieux  du  poêle  à  sa  lampe  fureii! 


(  828  ) 

ses  débuis.  Publiées  au  coininencemeiit  de  l'année  1818, 
ces  deux  pièces  attirèrent  sur  lui  l'attention  des  hommes 
qui  s'occupaient  alors  de  littérature  en  Belgique;  la  Veillée 
fut  trouvée  un  peu  lugubre,  mais  les  Adieux  obtinrent  un 
succès  mérité.  La  veillée  des  dames  ou  Le  f 9  janvier,  qui 
parut  en  1819,  n'avait  rien  de  la  couleur  sombre  des 
Bardes  :  c'est  un  petit  chet-d'ceuvre,  plein  de  détails  char- 
mants. Il  se  rapporte  à  une  légende  bruxelloise  dont  la 
tradition  s'est  perpétuée  depuis  le  temps  de  Godefroid  de 
Bouillon. 

Les  Ëpitres  à  Tollens ,  à  Odei:aere,  à  de  Reiffenberg  ; 
VOde  à  Orion,  d'après  Nievvland;  des  traductions  ou  imi- 
tations de  Sophocle,  de  Byron,  du  Camoëns,  de  Tollens, 
de  Schiller;  des  élégies,  des  fabliaux,  des  romances,  etc., 
témoignent  du  talent  facile  de  Quetelet;  ses  vers,  bien  que 
corrects,  ne  sont  pas  géométriques;  ils  ont  de  l'harmonie 
et  de  la  grâce.  L'auteur,  quand  il  compose,  semble  tou- 
jours préoccupé  de  cette  idée  qu'il  a  consignée  dans  son 
Essai  sur  la  Romance  :  «  Il  ne  suffit  plus  aujourd'hui  de 
parler  à  l'imagination  seule,  il  faut  encore  contenter  l'esprit 
et  lui  faire  de  grands  sacrifices.  »  N'a-t-il  pas  poussé  trop 
loin  les  sacrifices  dont  il  parle?  On  en  jugera  si  jamais  on 
réimprime  ses  pièces  de  vers,  éparses  dans  divers  recueils. 

UEssai  sur  la  Romance,  publié  en  1825,  est  un  beau 
morceau  de  littérature  :  il  avait  demandé  de  longues  re- 
cherches et  il  montre  combien  les  langues  vivantes  étaient 
familières  à  Quetelet.  On  y  trouve  aussi  la  preuve  qu'il 
n'avait  aucun  préjugé  classique.  «  La  littérature  des  an- 
ciens, »  disait-il  avec  M"'*'  de  Staël,  a  est  chez  les  modernes 
une  littérature  transplantée  :  la  littérature  romantique  ou 
chevaleresque  est  chez  nous  indigène,  et  c'est  notre  reli- 
gion et  nos  institutions  qui  l'ont  fait  naître.  » 


(  829  ) 

Je  suis  obligé,  pour  mettre  un  peu  d'ordre  dans  cette 
analyse  rapide,  de  partager  Quetelet,  de  le  décomposer.  Je 
reviens  maintenant  au  géomètre  dont  j'ai  déjà  dit  un  mot 
à  propos  de  la  découverte  de  la  Focale,  qui  est  le  lieu  des 
foyers  de  toutes  les  sections  coniques  déterminées  par  un 
plan  transversal  tournant  autour  d'un  point  pris  sur  la 
surface  du  cône  droit.  La  Focale  attira  l'attention  de 
Dandelin;  il  en  fit  connaître  des  propriétés  très  remar- 
quables, et  réleva  au  rang  des  plus  belles  courbes  connues; 
mais  le  sujet  était  loin  d'être  épuisé  :  il  fut  repris  par 
MM.  Yan  Rees,  Chasies  et  d'autres.  M.  Plateau,  encore  sur 
les  bancs  de  l'Université,  trouva  le  moyen  de  faire  voir  la 
Focale  se  dessiner  dans  l'air,  en  faisant  tourner  deux 
droites  avec  des  vitesses  doubles  l'une  de  l'autre. 

Parmi  les  mémoires  présentés  par  Quetelet  à  l'Aca- 
démie, celui  qui  a  pour  titre  :  ?iourelle  théorie  des  sections 
coniques  considérées  dans  le  solide,  mérite  une  attention 
particulière.  «  Les  géomètres  anciens,  »  dit  Garnier  en 
parlant  de  ce  mémoire,  «  et  ceux  qui,  à  leur  exemple,  ont 
considéré  les  sections  coniques  comme  des  coupes  faites 
sur  le  cône  par  un  plan ,  ont  ensuite  isolé  ces  sections  pour 
en  rechercber  les  propriétés  sans  aucun  égard  au  cône  et 
au  plan  générateur.  ]\I.  Quetelet  a  en  l'beureuse  idée  de  ne 
pas  séparer  le  cône  de  la  section  et  de  reprendre,  sous  ce 
point  de  vue,  les  propriétés  principales  des  trois  courbes 
dont  il  a  donné  des  énonciations  qui  nous  ont  paru  nou- 
velles. »  L'auteur  considère  un  cône  de  révolution  coupé 
par  un  plan,  et  le  sommet  du  cône  devient  un  point  ana- 
logue à  celui  qu'on  nomme /b//e/- dans  les  sections  coniques. 
Les  rayons  vecteurs  sont  menés  du  sommet  du  cône,  et 
l'on  rentre  dans  la  théorie  ordinaire,  quand  le  sommet 
vient  se  placer  dans  le  plan  de  la  section. 


(  850  ) 

Mentionnons  encore  un  mémoire  Sur  différents  sujeL-^ 
(h'  (jéomélrie  à  trois  dimensions,  un  autre  mémoire  i.St«r 
quelques  constructions  çjraphiques  des  orbites  planétaires , 
qui  renferment  tous  deux  des  projjositions  de  géométrie, 
curieuses  et  nouvelles,  et  passons  aux  importantes  recher- 
ches de  Quetelel  sur  les  caustiques,  auxquelles  il  a  consacré 
trois  mémoires  dans  le  recueil  de  l'Académie  et  de  nom- 
breux articles  dans  sa  Correspondance  mal/iématique. 

Les  catistiques  sont  des  courbes  formées  par  le  concours 
des  rayons  de  lumière  qu'une  autre  courbe  a  réfléchis  ou 
réfractés.  Elles  furent  découvertes  en  1682  par  le  médecin 
allemand  Tschirnhausen.  Après  avoir  été  pendant  long- 
temps l'objet  des  recherches  de  Jacques  Bernoulli,  du  mar- 
quis de  l'Hôpital  et  de  la  Hire,  elles  étaient  tombées  dans 
une  espèce  d'oubli,  lorsque,  en  1810,  Malus  reprit  la  ma- 
tière et  entraîna  à  sa  suite  MM.  Petit,  Hachette,  Dupin, 
Gergonne;  mais  les  mémoires  de  ces  géomètres  distingués 
étaient  tous  d'une  analyse  très  compliquée.  Cependant, 
dès  l'année  181 5,  Gergonne  avait  été  conduit  à  soupçonner 
que,  le  plus  souvent,  des  caustiques  fort  compliquées 
pourraient  très  bien  n'être  que  les  développées  d'autres 
courbes  beaucoup  plus  simples.  Ce  n'était  qu'une  pre- 
mière idée  :  Quetelet  la  creusa  et  en  fit  sortir  un  théo- 
rème, qui,  au  dire  de  Gergonne,  amenait  la  catoptrique 
et  la  dioplrique  au  point  d'être  racontées  à  un  passant 
dans  la  rue. 

Voici  le  théorème  de  Quetelet;  il  doit  être  rangé,  pour 
son  importance,  à  côté  et  mênie  au-dessus  de  la  découverte 
de  la  Focale  :  «  La  caustique  par  réflexion  ou  par  réfrac- 
tion pour  une  courbe  quelconque,  éclairée  par  un  point 
rayonnant,  est  la  développée  d'une  autre  courbe,  laquelle 
a  la  propriété  d'être  l'enveloppe  de  tous  les  cercles  qui  ont 


(  831  ) 
leurs  centres  sur  la  courbe  réfléchissante  ou  dirimante, 
et  dont  les  rayons  sont  égauv  aux  distances  des  centres 
au  point  rayonnant  dans  le  premier  cas,  et  proportionnels 
à  ces  mêmes  distances  dans  le  second  cas,  le  rapport 
constant  étant  celui  du  sinus  d'incidence  au  sinus  de  ré- 
l'raclion.  » 

Quetelet  appelle  caustiques  secondaires  les  courbes 
enveloppes  des  cercles  qui  ont  leurs  centres  sur  la  courbe 
réfléchissante  ou  dirimante.  En  s'aidant  des  projections 
stéréographiques,  il  établit  de  nombreux  rapports  entre  les 
sections  coniques  et  leurs  caustiques  secondaires,  entre 
les  caustiques  secondaires  des  courbes  et  leurs  polaires.  Il 
donne  aussi  des  propriétés  curieuses  des  lignes  aplané- 
tiques,  qui  jouiss(^nt  de  la  propriété  d'avoir  deux  foyers 
conjugués  tels  que  les  rayons  émanés  de  l'un  de  ces  foyers 
sont  réfléchis  ou  réfractés  vers  le  second.  Les  problèmes 
des  points  brillants  et  des  courbes  d'égale  teinte  l'occupent 
également,  et  il  en  présente  des  solutions  très  simples. 

Je  ne  saurais  mieux  louer  les  mémoires  de  géométrie  de 
Quetelet  qu'en  rappelant  ce  qu'une  Revue  très  appréciée 
de  l'époque  disait  de  l'un  d'eux:  «Outre  l'intérêt  du  sujet 
traité  dans  ce  mémoire,  la  généralité  des  vues,  la  variété 
des  applications  et  le  mérite  de  quelques  vérités  nouvelles, 
on  y  remarque  la  clarté,  l'ordre  et  la  précision  qui  donnent 
encore  plus  de  prix  aîix  bons  ouvrages.  L'auteur  ne  dit 
rien  de  trop  et  n'omet  rien.  » 

Quetelet  publia  h  Paris,  en  1833,  son  Essai  de  physique 
sociale.  C'était  le  résumé  de  tous  ses  travaux  antérieurs 
sur  la  statistique,  et  l'esquisse,  disait-il,  d'un  vaste  tableau 
dont  le  cadre  ne  pouvait  être  rempli  que  par  des  soins 
infinis  et  par  d'iuîmenses  recherches.  Les  Lettres  sur  fa 
théorie  des  probabilités  appliquée  aux  sciences  morales  et 


(  832  ) 

politiques  parurent  en  1845;  l'ouvrage  intitulé  :  Du  sys- 
tème social  et  des  lois  qui  le  régissent,  au  commencement 
deiSAS,elVÀntlu-opométrie,  en  1871. 

Dans  l'impossibilité  où  nous  sommes  de  présenter  une 
analyse  détaillée  de  chacun  de  ces  ouvrages,  nous  lâche- 
rons de  donner  une  idée  de  leur  ensemble,  et  cela  nous 
sera  d'autant  plus  permis  qu'ils  convergent  tous  les  quatre 
vers  ce  but  bien  marqué  :  Rechercher  et  apprécier  le 
développement  des  qualités  physiques,  intellectuelles  et 
morales  de  l'homme. 

L'homme  naît,  se  développe  et  meurt  d'après  des  lois 
fixes  et  invariables.  Non-seulement  on  est  parvenu  à 
mesurer  ses  qualités  physiques  et  à  représenter  leur  déve- 
loppement par  des  courbes,  mais  ses  facultés  morales  et 
intellectuelles  n'ont  pas  résisté  à  la  méthode  fondée  sur 
l'observation  et  sur  le  calcul,  qui  nous  avait  dévoilé  le  sys- 
tème du  monde.  Et  de  même  que  les  découvertes  des 
astronomes  avaient  rendu  si  petite  la  place  que  nous  occu- 
pons dans  l'univers,  les  travaux  de  Quetelet  et  des  statisti- 
ciens de  son  école  ont  resserré  dans  d'étroites  limites  le 
libre  arbitre  dont  nous  étions  si  orgueilleux.  Il  s'est  trouvé 
que  les  phénomènes  moraux,  quand  on  considère  les 
masses,  rentrent  en  quelque  sorte  dans  l'ordre  des  phéno- 
mènes physiques,  et  l'on  a  pu  admettre  comme  principe 
fondamental  que  plus  le  nombre  des  individus  que  l'on 
observe  est  grand,  plus  les  particularités  individuelles,  soit 
physiques,  soit  morales,  s'effacent  et  laissent  prédominer 
la  série  des  faits  généraux  en  vertu  desquels  la  société 
existe  et  se  conserve.  Ce  principe  entraînait  nécessaire- 
ment la  considération  de  Vliomme  moyen  et  sa  détermina- 
tion chez  les  différents  peuples  et  aux  différentes  époques. 

L'homme  moyen  résume  en  lui  les  qualités  d'une  nation  : 


(  835  ) 

quand  on  sera  parvenu  à  le  connaître,  on  aura  le  type  de 
cette  nation;  et  si  l'on  étend  ensuite  ces  recherches  aux 
autres  pays,  on  pourra  déterminer  le  type  humain  dans 
toute  sa  généralité.  Quetelet  est  disposé  à  croire  que  les 
grands  linéaments  de  notre  espèce  varient  fort  peu  :  les 
proportions  pour  nos  climats  coïncident  avec  celles  que 
l'on  tire  des  statues  antiques  les  plus  régulières. 

L'homme  moyen  est-il  le  type  de  la  beauté?  Et  d'abord, 
y  a-t-il  un  beau  absolu?  Quetelet  ne  le  pense  pas;  d'après 
lui,  nous  n'arrivons  au  sentiment  du  beau  que  par  l'obser- 
vation, et  d'ordinaire  nous  ne  regardons  comme  belles  que 
les  formes  auxquelles  nous  sommes  habitués  ou  vers  les- 
quelles notre  goût  particulier  nous  entraîne.  Si  nous  pre- 
nons pour  guide  l'observation,  elle  nous  apprend  que  nos 
qualités  physiques  et  même  nos  facultés  intellectuelles 
oscillent  autour  d'un  état  moyen,  les  fluctuations  étant 
réglées  par  une  loi  dont  nous  parlerons  tout  à  l'heure.  Cet 
état  moyen  constitue  le  type  théorique  du  beau,  mais  les 
écarts  sont  des  anomalies  dont  l'artiste  doit  tenir  compte 
et  faire  usage;  il  est  inutile  d'ajouter  qu'il  ne  pourra  non 
plus  se  passer  de  l'expression  de  la  physionomie,  ni  de  la 
puissance  de  la  pensée  et  des  passions.  Le  célèbre  artiste 
anglais  Reynolds  a  été  beaucoup  trop  loin,  en  posant 
comme  principe  fondamental  de  l'art  de  la  peinture,  que 
la  beauté  des  formes  et  des  traits  consiste  dans  leur  rap- 
prochement étroit  avec  la  conformation  moyenne  du  mo- 
dèle humain;  ce  qui  faisait  dire  à  sir  John  Herschel  :  «  Si 
c'était  là  le  cas,  la  laideur  devrait  être  excessivement  rare, 
tandis  que  les  plus  hauts  degrés  de  la  beauté  constitue- 
raient les  cas  les  plus  communs:  conclusion  absolument 
contraire  à  l'expérience.  » 

Pour  faire  bien  comprendre  cette  remarque  d'Iierschel , 


(  834  ) 
nous  rappellerons  la  loi  à  laquelle  nous  avons  fait  allu- 
sion ci-dessus,  loi  sinon  découverte  par  Quetelet,  du 
moins  mise  par  lui  dans  son  plein  jour,  et  qui  semble  em- 
brasser tous  les  corps  vivants,  non-seulement  ceux  de 
l'espèce  bumaine,  mais  les  corps  similaires  du  règne  animal 
et  même  du  règne  végétal.  Mesurons,  par  exemple,  la 
taille  des  hommes  d'un  même  âge  :  les  différentes  mesures 
se  rangeront  autour  de  la  moyenne  de  la  manière  la  plus 
régulière ,  et  de  telle  sorte  que  le  nombre  des  petits  écarts 
l'emportera  de  beaucoup  sur  celui  des  grands.  Par  une 
construction  graphique,  on  obtient  une  courbe  nommée 
par  Quetelet  courbe  binomiale.  Or  cette  courbe  est  l'une 
de  celles  que  l'on  emploie  dans  le  calcul  des  probabilités 
pour  rendre  plus  sensible  la  répartition  des  événements  : 
d'où  il  résulte  que  l'on  peut  considérer  les  différences  entre 
l'homme  de  taille  moyenne  et  les  autres,  comme  des 
erreurs  accidentelles  se  répartissant  suivant  la  loi  ordi- 
naires des  probabilités.  —  Lorsque,  au  lieu  de  mesurer 
les  hommes  d'un  même  âge,  on  les  prend  aux  différents 
âges  de  la  vie,  on  trouve  que  la  loi  de  croissance,  du 
moins  à  partir  de  la  naissance  jusque  vers  treize  à  quatorze 
ans,  est  représentée  par  une  hyperbole.  Vingt  ans  après 
que  Quetelet  eut  donné  cette  loi ,  MM.  Bravais  et  Martins 
arrivèrent  également  à  une  hyperbole  pour  la  courbe  d'ac- 
croissement diamétral  du  pin  sylvestre  :  c'était  là,  tout 
au  moins,  une  coïncidence  remarquable. 

Les  recherches  de  Quetelet  sur  la  taille  et  sur  le  poids 
de  l'homme  étaient  toutes  neuves  à  l'époque  où  elles  pa- 
rurent; il  les  étendit  bientôt  aux  autres  qualités  phy- 
siques, telles  que  la  force,  les  inspirations  et  pulsations, 
la  vitesse,  l'agilité,  etc.  —  Ce  qui  tenait  à  la  reproduction 
et  à   la   mortalité  avait  fait  depuis  près  de  deux  siècles 


(  835  ) 

l'objet  des  études  constantes  de  plusieurs  savants  distin- 
gués. La  pins  ancienne  table  de  mortalité  était  due  à 
l'illustre  Halley  :  Quetelet  en  donna  une,  en  1825,  pour  la 
ville  de  Bruxelles;  plus  tard,  il  calcula  une  table  provi- 
soire pour  les  provinces  méridionales  du  royaume  des 
Pays-Bas.  Le  recensement  du  1"  janvier  1830  et  ceux  qui 
l'ont  suivi,  lui  ont  permis  de  revenir  sur  un  sujet  dont 
l'importance  a  été  de  plus  en  plus  appréciée.  Tout  ce  qui 
touche  à  la  population  d'nn>pays  et  à  ses  éléments  consti- 
tutifs, présente  un  intérêt  capital.  C'est  le  premier  fait 
social  que  la  statistique  doit  s'attacher  à  constater.  Les 
autres  données  n'ont  véritablement  de  prix  qu'autant 
qu'on  les  rapporte  au  chiffre  de  la  population.  «  Un  recen- 
sement bien  fait,  »  dit  Quetelet,  «  résume  en  quelque 
sorte  les  solutions  des  problèmes  les  plus  importants...  » 

La  statistique  est  la  base  de  la  science  sociale  ou  démolo- 
gie;  elle  recueille  les  faits,  et  celle-ci  les  discute.  Ici,  pas 
plus  qu'en  astronomie,  l'observation  ne  saurait  sans  danger 
être  séparée  de  la  théorie.  Le  démologue  doit  être  un  pen- 
seur doublé  d'un  mathématicien;  il  appartient  à  lui  seul 
d'indiquer  à  l'administration  publique  les  données  qu'elle 
devra  s'attacher  à  obtenir  sur  l'état  matériel  et  moral  de  la 
nation.  Savoir  se  borner  est  une  de  ses  premières  qualités  : 
ne  rien  demander  qu'on  ne  soit  certain  d'obtenir  sans 
réticence  et  sans  fraude  ne  suffit  même  pas;  il  faut  de- 
mander peu,  et  savoir,  au  besoin,  faire  la  part  des  pré- 
jugés. 

Quetelet  a  présenté  sur  l'art  de  recueillir  les  faits  so- 
ciaux d'excellents  conseils  qu'on  ne  saurait  trop  méditer; 
il  a,  d'une  autre  part,  fourni  de  précieux  modèles  en  ce 
qui  regarde  la  discussion  des  faits  recueillis.  Nous  ne  pou- 
vons qu'effleurer  ici  ses  travaux  relatifs  à  l'homme.  Il  les 


(  836  ) 
fit  marcher,  pendant  de  longues  années,  parallèlement 
avec  ses  travaux  de  météorologie  et  d'astronomie.  Et  cela 
n'a  rien  qui  doive  nous  étonner  :  jadis  on  l'aurait  même 
trouvé  tout  naturel.  L'homme  se  considérait  alors  comme 
le  centre  de  l'univers;  tous  les  astres  avaient  été  créés 
pour  lui,  et  il  en  ressentait  l'influence.  Aujourd'hui  on  ne 
croit  plus  à  l'action  des  étoiles  et  des  planètes  :  seul, 
notre  satellite  conserve  son  prestige,  et  constitue  le  der- 
nier débris  de  l'astrologie.  Mais  si  l'action  de  la  lune 
échappe  à  nos  moyens  d'investigation,  personne  ne  songe 
à  contester  celle  du  soleil  et  de  notre  atmosphère  qui  lui 
est  soumis;  et  si  les  phénomènes  périodiques  naturels 
sont  en  général  indépendants  des  phénomènes  sociaux,  il 
n'en  est  pas  de  même  de  ceux-ci  à  l'égard  des  premiers. 

Lorsque  Quetelet  organisa  son  beau  système  d'observa- 
tions des  phénomènes  périodiques,  il  y  avait  huit  ans  déjà 
qu'il  s'appliquait  à  réunir  les  éléments  constitutifs  du  Cli- 
mat de  la  Belgique,  c'est-à-dire  la  température,  la  pres- 
sion atmosphérique,  le  degré  d'humidité,  la  quantité  de 
pluie  ou  de  neige,  le  nombre  de  jours  où  l'eau  tombe  sous 
l'une  ou  l'autre  de  ces  formes,  la  direction  des  vents  qui 
souillent,  leur  durée  et  leur  intensité.  —  Il  apporta  à  la 
discussion  des  observations  le  même  soin  et  le  même  esprit 
de  critique,  éclairé  et  raisonné,  dont  il  avait  déjà  donné 
tant  de  preuves  dans  la  discussion  des  documents  statisti- 
ques. 

Les  phénomènes  météorologiques  sur  lesquels  repose  la 
connaissance  du  climat  d'un  pays,  se  passent  dans  la  par- 
tie inférieure  et  toujours  agitée  de  notre  atmosphère  ;  ceux 
qui  se  manifestent  dans  la  partie  supérieure  ou  bien  à  la 
surface  du  sol  et  à  une  petite  profondeur,  appartiennent  à 
la  Physique  du  globe.  Les  températures  de  la  terre,  l'élec- 


(  837  ) 

tricilé  de  l'air,  le  magnétisme  terrestre,  les  phénomènes 
périodiques  des  plantes  et  des  animaux ,  sont  des  branches 
importantes  de  cette  science  toute  moderne  :  elles  forment 
autant  de  chapitres  de  l'ouvrage  que  Qiietelet  lui  a  con- 
sacré et  dans  lequel  il  discute  les  observations  poursuivies 
à  l'Observatoire  de  Bruxelles  avec  tant  de  zèle  et  de  per- 
sévérance. Il  rattacha  aussi  à  la  physique  du  globe  la  ques- 
tion des  étoiles  filantes,  dont  l'origine  cosmique  n'est  plus 
contestée  aujourd'hui,  bien  qu'elle  ait  laissé  des  doutes 
dans  son  esprit. 

On  sait  que  les  étoiles  filantes  étaient  un  des  sujets 
favoris  de  Quetelet  :  il  a  contribué  beaucoup  à  en  étendre 
l'observation ,  et  son  nom  restera  attaché  à  la  période  du 
10  au  H  août.  Ses  recherches  sur  les  températures  de  la 
terre,  sur  l'électricité  de  l'air,  sur  le  magnétisme,  ont  mé- 
rité l'approbation  des  premiers  physiciens  de  l'Europe. 
L'observation  des  phénomènes  périodiques  des  plantes 
l'avait  conduit  à  apprécier  l'influence  de  la  chaleur  sur  ces 
phénomènes,  non  par  la  somme  des  températures  moyen- 
nes journalières ,  comme  le  faisait  Réaumur,  mais  par  la 
somme  de  leurs  carrés. 

Par  son  travail  sur  les  ondes  atmosphériques,  il  entra 
dans  une  voie  nouvelle.  Jusqu'à  une  époque  qui  n'est  pas 
encore  très  éloignée  de  nous,  on  s'était  borné  à  observer 
les  phénomènes  de  la  météorologie  dajts  le  temps  :  pour 
arriver  à  déterminer  les  lois  générales  dont  ils  sont  les 
résultats,  il  fallait  aussi  les  observer  dans  l'espace.  «  Les 
phénomènes,  t>  dit  avec  raison  M.  Léon  Dufour,  «  se  suc- 
cèdent avec  une  confusion  extrême  en  apparence;  ils  dé- 
pendent, en  chaque  point,  de  ce  qui  se  passe  dans  des 
points  voisins  ou  même  fort  éloignés.  Il  y  a  probablement 
des  lois  qui  embrassent  ces  variations,  lois  très  compli- 


(  858  ) 

quées ,  sans  doute ,  mais  cependanl  précises...  Les  change- 
ments dans  la  pression  de  l'air  donnent  lieu  aux  rappro- 
chements les  plus  curieux  lorsqu'on  compare  les  valeurs 
observées  avec  le  baromètre.  Comme  ces  variations  dans  la 
pression  atmosphérique  accompagnent  volontiers  les  chan- 
gements de  temps ,  cela  acquiert  un  intérêt  plus  vif  encore. 
M.  Quetelet  a  présenté  sur  ce  sujet  des  résultats  inattendus; 
il  a  montré  comment  les  variations  du  baromètre  corres- 
pondent à  des  ondes  atmosphériques  qui  avancent,  sem- 
blables à  des  vagues  sur  une  surface  d'eau...  » 

Le  promoteur  de  ces  observations  avait  été  sir  John 
Herschel.  Quetelet  ne  se  contenta  pas  d'y  contribuer 
personnellement;  il  organisa  cinq  stations  en  Belgique,  et 
subséquemment  les  stations  dont  les  observations  étaient 
discutées  à  l'Observatoire  de  Bruxelles,  furent  portées  par 
ses  soins  au  nombre  de  soixante-dix,  répandues  sur  tous 
les  points  de  l'Europe.  11  mil  la  même  ardeur  à  poursuivre 
les  observations  magnétiques  simultanées  qui  avaient  été 
sollicitées  par  la  Société  royale  de  Londres. 

Nous  avons  rappelé  que  les  instruments  méridiens  de 
l'Observatoire  de  Bruxelles  n'avaient  été  mis  en  place  que 
vers  le  milieu  de  l'année  1855.  Le  premier  soin  de  Que- 
telet fut  de  les  faire  servir  à  déterminer  la  position  de  l'Ob- 
servatoire sur  le  globe  terrestre.  ÏI  obtint  immédiatement 
une  valeur  très  satisfaisante  de  la  laîitude,  mais  la  lon- 
gitude était  beaucoup  plus  difficile  à  trouver  :  elle  n'a  été 
connue  d'une  manière  exacte  que  depuis  que  la  méthode 
des  signaux  galvaniques  a  permis  de  relier  l'Observatoire 
de  Bruxelles  à  ceux  de  Greenvvich  et  de  Berlin.  La  troi- 
sième coordonnée  ou  la  hauteur  du  rez  de  chaussée  de 
l'Observatoire  au-dessus  de  l'unité  de  hauteur  de  la  mer  du 
nord ,  fut  déterminée  sans  peine. 


(  859  ) 

Lorsque  Quelelet  avait  proposé  de  loiider  un  Observa- 
toire à  Bruxelles,  il  avait  passé  en  revue  les  avantages  que 
le  pays  et  la  science  retireraient  de  cet  établissement. 
L'Observatoire  devait  devenir  le  centre  des  opérations  des- 
tinées à  couvrir  la  Belgique  d'un  réseau  géodésique,  et  con. 
tribuer  ainsi  à  faire  disparaître  une  lacune  fâcheuse  dans  le 
grand  réseau  européen.  La  détermination  exacte  de  sa  po- 
sition constituait  un  excellent  point  de  départ  pour  attein- 
dre ce  but.  Un  autre  côté  utile  de  la  nouvelle  institution 
était  qu'elle  aiderait  à  relever  l'horlogerie,  si  négligée 
parmi  nous,  en  fournissant  les  moyens  de  déterminer 
l'heure  avec  précision.  A  partir  de  1832,  les  horloges  pu- 
bliques de  Bruxelles  furent  réglées  d'après  la  pendule  de 
l'Observatoire;  quelques  années  après,  de  petites  lunettes 
furent  montées  à  Gand,  Bruges,  Ostende,  Anvers  et  Liège  ; 
des  méridiennes  furent  tracées  dans  les  principales  églises. 
Aujourd'hui  que  la  Belgique  entière  reçoit  l'heure  de  l'Ob- 
servatoire de  Bruxelles  par  le  télégraphe,  on  ne  fait  plus 
guère  usage  de  ces  lunettes,  ni  de  ces  méridiennes;  les 
horlogers  et  les  particuliers  règlent  leurs  montres  d'après 
les  cadrans  électriques  placés  aux  coins  des  rues  ou  d'après 
les  horloges  des  stations  du  chemin  de  fer;  mais  à  l'époque 
où  elles  furent  établies,  elles  constituaient  un  grand  pro- 
grès, les  cadrans  solaires  dont  on  avait  fait  usage  jusque-là 
étant  généralement  défectueux  et  sujets  à  se  déranger. 

Les  observations  astronomiques  régulières  n'ont  com- 
mencé à  l'Observatoire  de  Bruxelles  qu'en  1848  :  elles 
avaient  dû  céder  le  pas  à  des  besoins  plus  pressants.  Que- 
telet  prit  pour  sujet  les  étoiles  doubles  et  celles  à  mouve- 
ments propres.  Depuis  1857,  M.  Ernest  Quetelet  s"est 
spécialement  occupé  de  ces  dernières  étoiles,  d'après  les 
conseils  de  son  illustre  père.  La  belle  série  d'observations 


(  840  ) 
qu'il  a  publiées  jusqu'ici  a  été  justement  appréciée  à 
l'étranger  :  déjà  les  astronomes  les  plus  distingués  viennent 
y  puiser,  comme  précédemment  les  physiciens  ont  puisé 
dans  la  série  des  observations  de  la  météorologie  et  de  la 
physique  du  globe  d'Adolphe  Quelelet.  Pour  donner  une 
idée  de  l'importance  des  observations  dont  nous  parlons, 
nous  ne  pouvons  mieux  faire  que  de  citer  un  passage  d'un 
rapport  lu  à  l'Académie,  le  4  juillet  1865,  par  notre  secré- 
taire perpétuel  actuel,  M.  Liagre,  que  l'Observatoire  de 
Bruxelles  a  eu  l'honneur  de  compter  parmi  ses  aides  :  «  Il 
est  reconnu  aujourd'hui,  »  disait  M.  Liagre,  «  que  les 
étoiles ,  longtemps  regardées  comme  douées  d'une  immo- 
bilité absolue,  sont  toutes  animées  d'un  mouvement  plus 
ou  moins  rapide.  Déterminer  la  direction,  la  grandeur,  la 
loi  de  ces  mouvements,  dont  la  plupart  ne  s'élèvent  peut- 
être  qu'à  quelques  secondes  par  siècle,  est  un  travail  im- 
mense devant  lequel  l'imagination  la  plus  hardie  est  tentée 
de  reculer...  Mais  si  l'entreprise  est  vaste,  les  résultats 
cosraologiques  auxquels  elle  pourra  conduire  nos  descen- 
dants sont  incalculables...  » 

L'influence  de  Quelelet  dans  la  régénération  intellec- 
tuelle de  la  Belgique  a  été  considérable.  Par  son  exemple, 
par  ses  leçons ,  il  stimula  ses  compatriotes  qui  avaient 
perdu  le  goût  des  sciences;  il  sut  exciter  l'amour  des  re- 
cherches chez  les  jeunes  gens ,  en  leur  montrant  des  voies 
nouvelles  et  encore  inexplorées.  L'un  des  premiers,  il 
attacha  un  grand  prix  aux  qualités  de  style,  trop  long- 
temps négligées  parmi  nous.  Les  livres  élémentaires  qu'il 
composa  sur  l'astronomie,  sur  la  physique,  sur  le  calcul 
des  probabilités  se  distinguent  tous  par  un  style  toujours 
clair  et  non  dépourvu  d'élégance.  Dans  sa  Physique  sociale 
et  dans  son  ouvrage  Sur  le  système  social ,  il  s'élève  quel- 


(  su  ) 

quefois  à  une  véritable  éloquence.  Ses  Éloges  académiques, 
auxquels  il  a  donné  le  nom  modeste  de  Notices,  sont  très 
agréables  à  lire  :  on  y  trouve  des  anecdotes  piquantes, 
des  portraits  fort  ressemblants  et  une  bonhomie  dénuée 
de  tout  apprêt.  Les  rapports  destinés  à  nos  séances  pu- 
bliques offraient  d'assez  grandes  difficultés;  presque  tou- 
jours il  les  surmonte  avec  bonheur;  il  sait  parler  de 
l'Académie  et  des  services  qu'elle  rend  avec  dignité  et 
convenance;  les  généralités  auxquelles  il  doit  se  borner 
ne  sont  jamais  banales,  et  bien  qu'ancien  poète,  il  ne  rem- 
place pas  les  idées  par  des  mots  et  ne  fait  pas  de  phrases; 
il  apprécie  les  travaux  de  ses  confrères  d'une  manière 
juste,  quoique  superficielle. 

Ce  qu'il  était  comme  écrivain,  il  le  fut  comme  profes- 
seur. Il  apportait  une  extrême  clarté  dans  ses  leçons  de 
mathématiques;  il  aurait  voulu  bannir  des  éléments  tout 
cet  attirail  suranné  que  répudiaient  Euler  et  Clairaut, 
mais  que  la  routine  a  maintenu  dans  nos  écoles.  Il  recher- 
chait partout  la  simplicité;  peu  d'instruments,  des  ba- 
lances, une  machine  électrique,  une  pile  voltaïque  et 
quelques  autres  appareils  lui  suffisaient  pour  l'enseigne- 
ment de  la  physique;  il  n'aimait  pas  les  expériences  faites 
avec  des  instruments  compliqués  :  «  Souvent,  »  disait-il, 
«  ils  occupent  plus  l'attention  que  le  résultat  qu'on  veut 
mettre  en  évidence.  »  Les  cours  de  physique  et  d'astro- 
nomie qu'il  donnait  au  Musée  étaient  suivis  par  de  nom- 
breux auditeurs,  pris  dans  toutes  les  classes  de  la  société. 

Quelelet  était  de  taille  moyenne;  de  beaux  yeux  sur- 
montés d'épais  sourcils  et  une  abondante  chevelure  noire 
imprimaient  à  sa  tète  un  grand  caractère;  il  était  marqué 
de  petite  vérole,  mais  sa  physionomie  n'en  souffrait  pas. 
Quand  il  marchait,  il  se  tenait  légèrement  incliné,  la  tête 
2"^  SÉRIE,  TOME  xxxvni.  54 


(  842  ) 
en  avant ,  comme  si  son  esprit  eût  été  plus  pressé  d'arriver 
que  son  corps.  Nous  ne  saurions  mieux  peindre  l'homme 
privé  qu'en  lui  appliquant  ce  passage  de  son  Éloge  de  l'as- 
tronome Schumacher  :  «  Ceux  qui  l'ont  visité  savent  qu'il 
exerçait  l'hospitalité  de  la  manière  la  plus  grande  et  la 
plus  affectueuse.  Son  commerce  était  très  agréable  ;  avec 
une  instruction  fort  étendue,  il  causait  d'une  manière 
attrayante  sur  les  sujets  les  plus  divers  :  sciences,  lettres, 
arts,  les  objets  même  futiles  en  apparence,  rien  ne  lui  était 
étranger.  Sa  conversation  était  gaie,  spirituelle,  relevée 
quelquefois  par  un  léger  grain  de  causticité  qui  jamais  ne 
blessait  personne,  mais  qui  tendait  à  mettre  en  relief  le 
côté  plaisant  des  choses.  » 

Malgré  un  travail  excessif,  il  s'était  toujours  bien  porté, 
lorsque,  dans  l'été  de  1855,  il  eut  une  légère  attaque 
d'apoplexie.  Cette  attaque,  qui  ne  laissa  aucune  trace  ex- 
térieure, frappa  les  facultés  intellectuelles  et  surtout  la 
mémoire  :  elle  marqua  chez  Quetelet  le  commencement  de 
la  décadence;  le  cercle  de  ses  idées  se  rétrécit  de  plus  en 
plus,  et  son  style  perdit  sa  précision  et  sa  netteté.  La  mort 
de  sa  femme,  de  sa  fille  et  de  plusieurs  de  ses  petits-en- 
fants vint  encore  aggraver  le  mal.  On  n'eut  peut-être  pas 
toujours  pour  lui,  en  tous  lieux,  les  égards  que  méritaient 
son  âge  et  les  services  qu'il  avait  rendus.  Il  avait,  je  crois, 
la  conscience  de  son  état,  et ,  par  une  conséquence  néces- 
saire ,  il  était  devenu  très  susceptible  :  je  l'ai  vu  quelquefois 
affligé  outre  mesure,  quand  on  n'avait  pas  ménagé  cette 
susceptibilité  comme  elle  aurait  dû  l'être,  et  comme  lui- 
même  avait  su  respecter  celle  des  Nieuport,  des  Dewez, 
des  Garnier,  etc. 

De  douces  compensations  lui  arrivaient  de  l'étranger, 
où  sa  réputation  ne  faisait  que  grandir.  L'Académie  des 


(  843  ) 

sciences  morales  et  politiques  de  l'Institut  de  France  l'ap- 
pelait à  l'une  des  huit  places  d'associés  étrangers  dont  elle 
dispose  pour  le  monde  entier.  De  vives  instances  étaient 
faites  auprès  de  lui  de  la  part  du  grand-duc  Constantin  de 
Russie,  alin  de  le  décider  à  se  rendre  au  Congrès  de  sta- 
tistique de  Saint-Pétersbourg;  l'Académie  des  sciences  de 
Berlin  le  proclamait  le  créateur  d'une  science  nouvelle. 
On  aurait  voulu  qu'il  se  chargeât  de  convoquer  et  de  pré- 
sider un  Congrès  de  météorologistes,  destiné  à  donner  un 
caractère  d'unité  aux  observations  et  à  les  faire  concourir 
à  la  détermination  des  lois  qui  régissent  les  phénomènes  de 
notre  atmosphère;  mais  il  déclina  cet  honneur,  sentant 
que  son  âge  ne  lui  permettait  pas  d'en  assumer  les  charges. 
Quand  la  réunion  des  météorologistes  eut  lieu  à  Vienne  au 
mois  de  septembre  1875,  il  s'y  fit  remplacer  par  son  fils. 

Rien  cependant,  à  cette  époque,  ne  pouvait  faire  pres- 
sentir une  fin  prochaine.  L'accueil  qu'il  avait  reçu,  l'année 
précédente,  dans  la  capitale  de  la  Russie,  avait  exercé  une 
heureuse  influence  sur  son  moral;  il  paraissait  rajeuni  et 
continuait  à  travailler  avec  une  ardeur  infatigable.  Dans 
le  courant  de  janvier  1874,  il  fut  atteint  d'une  maladie 
des  bronches  à  laquelle  il  n'attacha  pas  d'abord  une  grande 
importance  :  le  lundi  2  février,  il  assistait  encore  à  la 
séance  de  la  classe  des  lettres;  le  jeudi  matin,  il  descendit 
pour  la  dernière  fois  dans  son  cabinet,  et  l'on  eut  beau- 
coup de  peine  à  l'empêcher  de  se  rendre  à  la  séance  de  la 
classe  des  beaux-arts  Son  état  ayant  empiré,  on  perdit 
bientôt  l'espoir  de  le  sauver.  Lorsqu'il  tomba  dans  le  délire, 
l'Académie  et  l'Observatoire  revinrent  souvent  sur  ses 
lèvres.  Il  expira  le  17  février. 

Il  avait  épousé  en  1823  la  fille  de  .M.  Ciirlct,  médecin 
français  établi  à  Rruxelles  depuis  la  lin  du  siècle  derniei-  et 


(  844  ) 

beau-frère  du  chimiste  Van  Mons  :  il  en  eut  deux  enfants  , 
un  fils,  aujourd'hui  notre  confrère,  et  une  fille  qui  mourut 
jeune  encore ,  après  avoir  été  mariée  à  notre  peintre  de 
marine  Clays. 

La  perte  de  Quetelet  a  été  vivement  ressentie.  Ses  tra- 
vaux l'avaient  mis  eh  relation  avec  les  savants  du  monde 
entier;  sa  correspondance  était  immense.  Il  était  connu 
personnellement  de  la  plupart  des  hommes  qui  se  sont 
fait  un  nom  dans  les  sciences,  les  lettres  et  les  arts,  soit 
qu'il  les  eût  rencontrés  dans  ses  voyages  en  Angleterre 
ou  sur  le  continent  européen,  soit  qu'il  eût  reçu  leur  visite 
à  l'Observatoire.  N'importe  où  l'on  allât,  quand  on  se  pré- 
sentait de  sa  part,  on  était  certain  d'être  bien  accueilli  : 
jamais,  de  son  côté,  il  ne  laissa  protester  une  lettre  de 
recommandation.  La  Belgique  peut  être  fière  d'un  pareil 
homme;  il  y  a  poussé  plus  que  tout  autre  à  la  culture  in- 
tellectuelle, et  a  beaucoup  contribué  à  la  relever  aux 
yeux  du  monde.  Sa  place  est  marquée  dans  l'histoire  des 
sciences. 

Cette  notice  a  été  vivement  applaudie. 

—  M.  H.  Valérius  a  été  invité  ensuite  à  venir  faire  la 
lecture  de  son  rapport  sur  le  dernier  concours  quinquennal 
des  sciences  physiques  et  mathématiques  (1). 

—  M.  J.  Liagre,  secrétaire  perpétuel,  a  pris  en  dernier 
lieu  la  parole,  pour  faire  la  proclamation  suivante  des  ré- 
sultats des  concours  et  des  élections  : 


(i  )  Ce  rapport  a  paru  déjà  dans  le  Moniteur  belge,  w  550  de  l'année  1 784 
(2(3  novembre). 


845 


RÉSULTATS  DU  CONCOURS  DE  LA  CLASSE  POUR   1874. 

Quatre  mémoires  avaient  été  reçus,  en  réponse  à  quatre 
questions  du  programme. 

Le  premier,  portant  pour  devise  :  Ne  rien  faire  contre 
la  conscience  et  pliilosopher  sans  souci  des  sots  ni  des  mé- 
chants,  avait  été  envoyé  en  réponse  à  la  première  question, 
demandant  de  Perfectionner  la  théorie  des  fondions  d'une 
variable  imaginaire. 

Conformément  aux  conclusions  de  ses  rapporteurs,  la 
classe  s'est  bornée  à  voter  une  mention  honorable  à  l'au- 
teur de  ce  mémoire.  Elle  a  décidé,  en  outre,  que  la  ques- 
tion serait  remise  au  concours. 

Le  second  mémoire  reçu  portait  pour  devise  :  Félix  qui 
potiiit  rerum  cognoscere  causas  (Virgile).  Il  avait  pour  but 
de  répondre  en  même  temps  aux  deuxième  et  troisième 
questions  du  programme,  demandant  une  discussion  com- 
plète de  la  température  de  l'espace,  ainsi  qu'une  élude, 
également  complète,  de  la  chaleur  spécifique  des  corps. 

La  classe,  d'après  l'opinion  de  ses  commissaires,  a  jugé 
qu'il  n'y  avait  pas  lieu  de  décerner  de  récompense  à  ce 
travail. 

Le  troisième  mémoire  de  concours  portait  comme  de- 
vise :  Pour  trouver  la  preuve  qu'un  organisme  est  un  degré 
de  développement  ou  un  produit  d'an  autre  organisme,  il 
faut  examiner  la  continuité  organique  qui  doit  une  fois,  à 
un  temps  donné.,  exister  entre  deux  états  de  développement 
d'une  espèce. 


(  846  ) 
Ce  mémoire  avait  été  envoyé  en  réponse  à  la  cinquième 
question ,  relative  au  polymorphisme  des  champignons. 

La  classe,  conformément  aux  conclusions  de  ses  rap- 
porteurs, a  décerné  une  médaille  d'or  de  la  valeur  de  six 
cents  francs  à  l'auteur  de  ce  mémoire.  L'ouverture  du  bil- 
let cacheté  a  fait  connaître  qu'il  est  dû  à  M.  Alfred  Gil- 
KiNET,  docteur  en  sciences  naturelles,  à  Liège. 

Le  quatrième  mémoire  reçu  portait  comme  devise  :  Quo 
exactius  introspicies  ipsas  corporuni  partes,  eo  minns  de 
origine  dubilahis  (Leibniz,  Protogàa,  x\\).  Il  avait  pour 
but  de  répondre  à  la  sixième  question,  demandant  de  faire 
connaître,  nolamment  au  point  de  vue  de  leur  composition, 
les  roches  plntoniennes ,  ou  considérées  co)nnie  telles,  de  la 
Belgique  et  de  FArdenne  française. 

La  classe,  conformément  aux  conclusions  de  ses  rappor- 
teurs, a  décerné  à  ce  travail  une  médaille  d'or  de  la  valeur 
de  huit  cents  francs.  L'ouverture  du  billet  cacheté  qui 
y  était  joint  a  fait  connaître ,  comme  en  étant  les  auteurs  : 
M.  Ch.  de  la  Vallke -Poussin,  professeur  à  l'Université 
de  Louvaiii,  et  M.  A.  Renard,  professeur  au  Collège  de  la 
Compagnie  de  Jésus,  à  Louvain. 

Aucun  des  lauréats  n'est  venu  recevoir  la  récompense 
qu'il  avait  méritée. 


PRIX    QUINQUENNAL    DES    SCIENCES    MATHÉMATIQUES 
ET  PHYSIQUES. 

Par  arrêté  royal  du  24  novembre  de  cette  année.  Sa  Ma- 
jesté, sur  la  proposition  de  M.  le  Ministre  de  l'intérieur, 
conformément  au  rapport  du  jury  chargé  de  juger  le  con- 
cours quinquennal  des  sciences  physiques  et  mathémati- 


(  847  ) 
ques  pour  la  période  de  1869-1873,  a  décerné  le  prix  à 
M.  Michel  Gloesener,  membre  de  l'Académie  et  profes- 
seur émérite  à  rUniversilé  de  Liège. 


PROCLAiMATlON  DES  ÉLECTIONS. 

La  classe  a  eu  le  regret  de  perdre,  pendant  le  courant 
de  cette  année,  trois  de  ses  membres  titulaires. 

M.  Ad.  Quetelet,  appartenant  à  la  section  des  sciences 
mathématiques  et  physiques,  et  MM.  le  vicomte  Du  Bus  et 
Poelman,  appartenant  à  la  section  des  sciences  natu- 
relles. 

Elle  a  porté  ses  suffrages  sur  M.  François  Folie,  en 
remplacement  de  M.  Quetelet. 

MM.  Alphonse  Brfart  et  Félix  Plateau  ont  été  élus  en 
remplacement  de  MM.  le  vicomte  Du  Bus  et  Poelman. 

Ces  trois  élections  seront  soumises  à  la  sanction  royale. 

La  classe  a  élu  associés  de  la  section  des  sciences  ma- 
thématiques et  physiques:  MM.  le  C"'  Louis-Frédéric 
Menabrea,  Jules-Bobert  Mayer,  Urbain-Jean-Joseph  Le 
Verrier,  Otto  Struve  et  le  B.  P.  Angelo  Secchi,  en 
remplacement  de  MM.  Vène  et  de  la  Bive,  décédés;  Gilbert, 
démissionnaire,  de  Jacobi  et  Hansen,  décédés. 

Elle  a  élu  également  associés  de  la  section  des  sciences 
naturelles:  MM. Thomas-Henri  Huxley,  NathanielPrings- 
heim  et  SvEN  NiLssoN,  en  remplacement  de  MM.  de  Macedo, 
L.  Agassiz  et  Elie  de  Beaumont,  décèdes. 

Enlin,ellea  appelé  M.  Charles  Van  Bambeke,  professeur 
à  l'Université  de  Gand,  à  figurer  parmi  les  correspondants 
de  la  section  des  sciences  naturelles. 


(  848  ) 
OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 


Commission  pour  la  publication  d'une  collection  des  œuvres 
des  grands  écrivains  du  pays.  —  Buevcs  de  Coinmarchis  par 
Adenés  li  Rois.  Chanson  de  geste  publiée  pour  la  première  fois 
et  annotée  par  M.  Aug.  Scheler.  Bruxelles,  1874;  vol.  in-8". 

Candèze  (Ern.).  —  Le  scénographe.  Appareil  photogra- 
phique de  poche  ;  —  Élalérides  (Insectes  recueillis  au  Japon  par 
M.  G.  Lewis  pendant  les  années  18C9-1871  );  —  Révision  de  la 
monographie  des  Élatérides,  1"  fascicule.  Paris  et  Bruxelles, 
i874;  5  br.  in-8«. 

Morren  (Edouard). —  La  botanique  au  pays  de  Liège;  — 
Note  sur  la  joubarbe  {sempervirum  Funckii  var.  Aqualiense); 
—  Liste  des  jardins,  des  chaires  et  des  musées  botaniques  du 
monde,  S'' édition.  Liège  et  Bruxelles,  1873-1874;  3  br.  in-8". 

MaiUij  (£'f/.).  —  Essai  sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  L.-A.-J.Que- 
telet.  Bruxelles,  1875;  vol.  in-12. 

Devaux  [Paul).  —  Études  politiques  sur  l'histoire  ancienne 
et  moderne  et  sur  l'influence  de  l'état  de  guerre  et  de  l'état  de 
paix.  Bruxelles,  1875;  vol.  in-8". 

De  Borclujrave  [Emile).  —  Les  précurseurs  de  la  nationalité 
belge.  Bruxelles  ,  1874;  br.  in-8".  (Deux  exemplaires.) 

Nolet  de  Brauivere  van  Steelund  {le  D'^J.).—  Epistel  aan 
den  heerL.-L.  De  Bo.  Bruxelles,  1874;  br.  in-12. 

Heremans  [D"  J.-F.-J.).  —  Hoffman  van  Fallcrsleben  en  de 
nederlandsche  lettcrkunde.  Gand,  1874;  br,  in-8". 

Félis  {F.-J.).  —  Histoire  générale  de  la  musique  depuis  les 
temps  les  plus  anciens  jusqu'à  nos  jours,  t.  IV.  Bruxelles,  1874; 
vol.  in  8". 

Limnander  de  Nieuwenhove  {Le  baron  Arm.).  —  Maximi- 
lien  à  Francfort  (1493).  Opéra  en  3  actes.  Paris;  vol.  gr.  in-8«. 

Carnoy  (Joseph).  —  Cours  de  géométrie  analytique.  Géomé- 
trie de  l'espace.  Louvain,  1874;  vol.  in-8". 


(  849  ) 

De  Koninck  (Lodeivijk).  —  Het  mcnschdom  verlost,  iweede 
vernieerderde  uifgave;  —  Anlwoordaan  «  onze  waclitcr  »  op 
zyne  beoordeling  van  «  Het  menschdom  verlost.  »  Anvers  , 
1874;  vol.  et  feuille  in-8"  (3  exernplaii-e^). 

Buys-Ballol  [le  D''). —  Les  eouraiits  de  la  mer  et  de  l'atmo- 
sphère; traduction  du  néerlandais  par  L.  Estourgics.  Bruges, 
4874;  br.  in-8°. 

Firkel  [Adolphe).  —  Notice  sur  la  carte  de  la  production  par 
commune  des  carrières  de  la  Belgique,  pendant  l'année  1871. 
Bruxelles,  1874;  br.  in-8". 

Gaulhy[E.). — Documents  et  rapports  concernant  le  4*groupe 
de  l'Exposition  universelle  de  Vienne  (substances  alimentaires 
et  de  consommation).  Bruxelles,  1874;  br.  in-8°. 

ffeuschliiig  (X).  —  Actes  de  l'État  civil.  —  I.  Causes  de 
décès.  —  II.  Enfants  mort-nés.  Liège,  1874;  br.  in-8". 

Hock  {Auguste). —  OEuvres  complètes,  tome  IV.  La  famille 
Matbot,  mœurs  bourgeoises  du  pays  de  Liège.  Liège,  1874; 
vol.  in- 12. 

Leijder  [J.)  et  Pyro  [J.).  —  La  viande  de  bœuf  et  la  viande 
de  cheval;  recherches  sur  leur  composition,  leur  valeur  nutri- 
tive et  leur  prix  conimercial.  Bruxelles,  1874;  br.  in-8".  (Deux 
exemplaires.) 

Preudhomme  de  Barre  (A.).  —  Note  sur  les  gèotrupides  qui 
se  rencontrent  en  Belgique.  Bruxelles,  1874;  br.  in-8". 

Thïelens  {Armand).  —  Voyage  en  Italie,  mai -juin  1874. 
(Description  de  la  collection  de  la  marquise  Paulucci,  à  Novoli 
près  Florence).  Tirlemont,  1874  ;  br.  in-8". 

Varetibergh{Éinile). —  Les  traditions  légendaires.  Bruxelles, 
1874;  br.  in-S";  —  L'élection  de  Cbarles-Quint  et  de  Frédéric 
de  Saxe.  Gand,  1874;  br.  in-8°. 

Observatoire  royal  de  Bruxelles.  —  Notice  sur  Lambcrt- 
Adolphe-Jacqties  Quetclet,  directeur  et  fondateur  de  l'Obser- 
vatoire; —  Annuaire,  42'' année,  1875.  Bruxelles,  1874;  br.  in- 
4°  et  vol.  in-I2. 

Académie  royale  de  médecine  de  Belgique.  —  Bulletin, 


(  850  ) 

année  1874,  o""  série,  tome  VIII,  n'MO  à  12;  —  Mémoires 
couronnés,  in  8°,  t.  III,  premier  fasc.  Bruxelles,  1874;  4  cah. 
in-S". 

Société  royale  des  sciences  médicales  et  naturelles  de  Bruxel- 
les. —  Journal,  59*  vol.,  32^  année,  octobre  à  décembre  1874. 
Bruxelles,  1874;  5  cab.  in-8°. 

Société  royale  (h  ■pharmacie  de  Bruxelles. —  Bullelin,  18'' an- 
née, n'"  10  à  12,  octobre  à  décembre  1874.  Bruxelles;  3  cah. 
in-8». 

Annales  de  médecine  vétérinaire ,  23"  année,  octobre  à  dé- 
cembre 1874,  10"  à  12"  cah.  Bruxelles;  in-8''. 

Annales  de  Vélectricité  médicale  et  Écho  médical  réunis, 
nouvelle  série,  15"  vol ,  10"  à  12"  fasc,  octobre  à  décembre 
4874.  Bruxelles;  3  cab.  in-S". 

Annales  (rocnlistique ,  37"  année,  72"  vol.,  5"  et  4",  5"  et 
6"  livr.,  septembre  à  décembre  1874.  Bruxelles;  2  cab.  in-8''. 

La  Presse  médicale  belge,  26"  année,  n'"40à  52.  Bruxelles, 
1874;  13  feuilles  in-i°. 

Société  maldcoloqique  de  Belgique.  —  Procès-verbaux  des 
séances  (le  novcmbri;  à  décembre  1874.  Bruxelles;  feuilles  in-S". 

Société  enlomologique  de  Belgique.  —  Compte  rendu,  sér.  II, 
n'H,  5,  (iet  7,  octob.  à  décembre  lS7i.  Bruxelles;  feuilles  in-8°. 

Fédération  des  Sociétés  d'horticulture  de  Belgique.  —  Bul- 
letin, 1873.  Liège,  1874;  vol.  111-8". 

Société  royale  de  botanique  de  Belgique. —  Bulletin,  t.  XllI, 
n''2.  Bruxelles,  1874;  in-8°. 

Association  belge  de  photographie,  à  Bruxelles. —  Bulletin, 
première  année,  1874,  n"'  4  et  5.  Bruxelles,  1874;  2  cab.  in-8". 

Musée  de  l  industrie  de  Belgique.  —  Bulleliu,  53"  année, 
octobre  à  décembre  1874.  Bruxelles;  3  cah.  in -8". 

Le  Moniteur  industriel  belge,  vol.  I,  n»' 20  à  27,  octobre  à 
décembre  1874.  Bruxelles;  8  feuilles  in-4''. 

Académie  d'archéologie  de  Belgique,  à  Anvers.  —  Séance 
publicpie  (lu  24  juin  1874; —  Annales,  2"  série,  t.  X,  2"  et 
3"  livr.  Bruxelks,  1874;  br.  et  cah.  in-8''. 


(  851  ) 

Société  (h  médecine  d'Anvers. —  Annales,  XXXV"  année, 
septembre  et  octobre  1874.  Anvers;  cah.  in-S". 

Société  de  pharmacie  d'Anvers.  —  Journal,  50"  année,  sep- 
tembre à  novembre  1874.  Bruxelles,  1874;  ô  cah.  in-8°. 

Revue  de  Vinstrvctinn  publique  en  Belgique.,  XXII*  année, 
1874,  nouvelle  sér.,  t.  XVII,  G"  livr.  Gand;  cah.  in-8°. 

L'Illustration  horticoU»,  t.  XXI,  9'  et  10*^  livr.,  septembre  et 
octobre   1874.  Gand  ;  cah.  in-8°. 

Université  de  Liège.  —  Discours  inaugural  et  rapport  du 
recteur,  .M.  V.  Tliirv  (année  1874-1875).  Liège,  1874;  br.  in-8». 

Société  médico-chirurgicale  de  Liège.  —  Annales,  t.  XIII, 
octobre  et  novembre  1874.  Liège,  1874;  2  cah.  in-8". 

Le  Scalpel,  "21^  année,  n"'  14  à  20,  octobre  à  décembre  1874. 
Liège;  15  feuilles  in-4°. 

L'Écho  vétérinaire ,  4*  année,  n"  10,  décembre  1874.  Liège; 
cah.  iii-8". 

Journal  des  Beaux- Arts,  XYl''  année,  n"'  19  à  24,  octobre  à 
décembre  1874.  Louvain;6  feuilles  in-4°. 

L'Abeille,  XX^  année,  octobre  à  décembre  1874.  Bruxelles; 
5  cah.  in-S". 

Castan  {Auguste).  —  La  vierge  des  Carondelet.  Besançon, 
1874;  br.  in-8°. 

Castan  (Auguste)  et  Ducal  {Alfred).— Le  théâtre  de  Vesontio 
et  le  square  archéologique  de  Besançon.  Besançon,  1875;  br. 
in-8\ 

De  Caix  de  Saint-Ajjmour  (Aniédée). —  Note  sur  un  temple 
romain  découvert  dans  la  forêt  d'Halalte  (département  de  l'Oise). 
Paris,  1874;  br.  in -16. 

De  Queux  de  Saint- Hilaire  {Le  marquis).  —  Le  Hvre  des 
cent  Ballades,  avec  complèmeni  :  —  Le  traictéde  Getta  et  d'Am- 
phifrioM  (poème  dialogué).  Paris;  2  vol.  in-8''  et  1  vol.  in-16. 

Gréard. —  La  législation  de  l'instruction  primaire  en  France 
depuis  1789  jusqu'à  nos  jours.  Paris,  1874;  5  vol.  in-8°. 

Hardouin  {Henri)  —  Essai  sur  l'abolition  de  la  contrainte 
par  corps.  Paris,  1874;  10-8°. 


(  .852  ) 

Marie  {Maximilien).  —  Théorie  des  fonctions  des  variables 
imaginaires,  t.  l"  (nouvelle  géométrie  analytique).  Paris,  1874  ; 
vol.  in-S". 

Perrey  [Alexis). —  Étude  du  réseau  pentagonal  dans  l'océan 
Pacifique;  —  Sur  les  volcans  de  l'île  de  Java  et  leurs  rapports 
avec  le  réseau  pentagonal.  Paris,  1874;  2  bi-.  in-4°. 

Société  mélèorologique  de  France,  à  Paris.  —  Annuaire, 
tomeXVIll,  1870.  Tableaux  météorologiques,  feuilles  7-12; 
—  Nouvelles  météorologiques  :  4"  année,  1871, 1"  liv.,  feuilles 
1-4;  b"" année,  1872,  l'^'liv.,  feuilles  l-o;  G* année,  1875,  Impar- 
tie, 1"  liv.,  décembre  1872;  2"  partie,  1"  liv.,  feuilles  l-O. 
Paris,  1874;  o  cah.  in-8°. 

Société  géologique  de  France,  à  Paris.  —  Bulletin,  3*  sér., 
t.  11%  n"  5,  novembre  1874.  Paris;  cah.  in-8°. 

Société  de  géographie  de  Paris.  —  Bulletin,  août  à  décembre 
1874.  Paris,  1874;  5  cah.  in-8''. 

Société  centrale  d'agriculture  de  France,  à  Paris.  —  Bul- 
letin des  séances,  III'' série,  t.  9%  n°  10,  août  1874.  Paris ;in-8". 

Société  des  études  historiques,  à  Paris.  —  L'Investigateur, 
40'  année,  1874,  novembre  et  décembre.  Paris;  2  cah.  in-8'. 

Académie  des  sciences  de  Paris.  —  Comptes  rendus  hebdo- 
madaires des  séances,  tome  7î),  n°'  14  à  26.  Paris,  1874; 
13  cah.  in-4°. 

Revue  scientifique,  n"'  14  à  2G,  4^  année,  2*  série.  Paris, 
1874;  13  cah.  in-4". 

Revue  politique  et  littéraire,  n"'  14  à  20,  4*'  année,  2'"  série. 
Paris,  1874;  13  cah,  in-4°. 

Revue  Britannique,  octobre  à  décembre  1874.  Paris;  3  vol. 
in-8". 

Vinslitut,  nouvelle  sér.,  n°'  92  à  104,  octobre  à  décembre 
1874.  Paris;  13  feuilles  in -4°. 

Archives  de  médecine  navale,  tome  XXII%  octobre  à  dé- 
cembre 1874.  Paris,  1874;  cah.  in-8°. 

Le  Progrès  médical,  2*  année,  n"'  40  à  52,  octobre  à  dé- 
cembre 1 874.  Paris  ;  1 3  feuilles  in-4''. 


(  853  ) 

Journal  de  l'Agriculture ,  tome  IV,  octobre  à  décembre 
1 874 ,  n°^  286,  288  à  290, 292  à  298.  Paris,  1 874 ;  1 1  cah.  in-8°. 

Société  linnéenne  du  nord  de  la  France,  à  Amie?is.  —  Bul- 
letin mensuel,  n°^  29  et  ôO,  novembre  et  décembre,  3*  année, 
1874.  Amiens;  2  feuilles  in-8°. 

Société  des  Antiquaires  de  Picardie ,  à  Amiens.  —  Bulletin, 
année  1874,  n°  3.  Amiens,  1874;  in-8°. 

Société  d' Emulation  du  Doubs ,  à  Besançon.  —  Mémoires, 
4'=  série,  o'  vol.,  I8G9.  Besançon,  1870;  vol.  in-8°. 

Bulletin  scientifique ,  historique  et  littéraire  du  déparle- 
ment du  Nord,  6^  année,  n"'  9  et  10,  septembre-octobre  1874. 
Lille;  cab.  in-S". 

Société  des  Antiquaires  de  la  Morinie,  à  Saint-Omer.  — 
Mémoires,  tomes  XI  et  XII,  1861-1868;  —  Bulletin  historique  : 
XllP  année,  1864,  49'  et  50^  liv.;  XIV^  année,  1863,  33"  et 
54'"  liv.  Saint-Omer;  2  vol.  et  2  cab.  in-8°. 

Société  d'agriculture ,  sciences  et  arts  de  l'arrondissement 
de  Valenciennes.  —  Bévue  agricole,  26''  année,  1874,  t.  XXVII, 
n"' 9,  10  et  11.  Valenciennes;  2  cab.  in-8''. 

Deutsche  cliemische  Gesellschaft  zu  Berlin.  —  Bericbte: 
111.  Jabrg.N"!  5;  V.  Jabrg.,  N°  H  und  1 5 ;  Vil.  Jabrg.,N'' 14bis  18. 
Berlin,  1874;  8  cab.  in-8°. 

K.  preussische  Akademie  der  Wissenschaflen  zu  Berlin.  — 
Monatsbericbt,  September  undOctober  1874.  Berlin;  cab. in-8''. 

Budapester  Hundels-und  Gewerbekammer.  —  Beilrage  zur 
Gescbicbte  der  Preise  ungarischer  Landesproducte  im  neun- 
zebnten  Jabrbundert  nacb  den  Notirungen  des  Pester  Marktes. 
Budapest,  1875;  vol.  in-fol.  avec  atlas. 

Physikalisch-medicinische  Socieldl  zu  Erlangen.  —  Sit- 
zungsbericbte,  6.  Hcft,  Novcmbcr  1873  bis  August  1874. 
Erlangen;  cah.  in-S". 

Justus  Fertiles'  geograpfiisclie  Anstalt  zu  Gotha.  —  Mit- 
theilungcn,  20.  Ed.,  1874,  X,  XI;  —  Erganzungsbeft,  N'  38. 
Gotha,  1874;  3  cah.  in-4. 

Wetterauische  Gesellschaft  filr  die  gesammte  Naturkunde 


(  854  ) 

zu  ffanau.  —Jahresbericht,  1855-1837  ;  Bcricht,  1.  Januar 
1868  bisôl.  Decembcr  1875.  Hanaii  ,1838,  1874;  2  cah.  ia-S". 

MedUinisch-naluncissenschaftliche Gesellschaft  zu  Jena. — 
Zeitschrifi,  neue  Folge,  1.  Band,  4.  Heft.  Jena,  1874;  cah.  in-H°. 

Archiv  der  Malhemalik  und  Physik,  LVl.  Theil,  4.  Heft. 
Leipzig,  1874;  caii.  in-S". 

Universilàl  zu  Marhurg.  —  Programmes  et  dissertations. 
Marbourg,  1874;  8  br.  in-4''  et  50  br.  in-8°. 

A'.  Slernivarle  bei  Mûnchen.  —  Anualen,  VI.  Band. Munich, 
1853;  vol.  in-8^ 

Genuanisclies  Xalionulmuseuiu ,  lYûrnherg.  —  Jahres- 
Bericht,  X.  Bcricnl,  18G4;  —  Anzeiger,  ntuc  Folge  :  1.  Btl.,  1853 
und  4  854;  Vill.  Jabrg.,  18GI,  N"  7  und  1);  XII.  Jabrg.,  1865, 
n°  2.  Nuremberg;  vol.  et  feuil.  in-4". 

K.  K.  Sternwarle  zu  Praçj.  —  Magnctisclie  und  meteorolo- 
gische  Beobachtungen  im  Jahre  1875,  54.  Jabrg.  Prague,  1874; 
vol.  in-4". 

Enloinulogischer  Verein  zu  Steltin.  —  Entoniologisehe  Zei- 
tung,  35.  Jabrg.,  N'  10-12.  Stetlin,  1874;  cali.  in-8". 

K.  K.  ycoloyinclie  Reichsamtutt,  Wien.  —  Jabrbuch,  Jabrg. 
1874,  XXIV.  Bd.,  X"  5,  Juli,  August,  September;  —  Verband- 
lungen,  X»  hiund  15,  1874.  Vienne;  :2  cah.  in-8°. 

K.  K.  Central- A  nsUdl  fur  Météorologie  und  Erdmagnetis- 
mus,  Wien.  —  Jabrbiiclier,neue  Folge,  IX.  Bd.,  Jabrgang  1872. 
Vienne,  1874;  vol.  in-'^^ 

Anlliropologisclie  Gesellsclia/Ï  in  IVieii.  —  ÎMittbeilungen , 
IV.  Bd.,X'''7,  8  und  9.  Vienne,  1874;  5  caii.  in-8" 

K.  Akadeinie  der  Wissenscliaflen  in  Wien.  —  Sitzungsbe- 
ricble:  philos.-bislor. Classe, Jabrg.  1875,  LXXV.Bd.,Hefl  l-IIl; 
Jabrg.  1874,  LXXVl.  Bd.,  Heftl-Il  und  111;  —  Malh.-nalurw. 
Classe,  1873,  1.  Abtb.,  N»^8  bis  10;  II.  Abtii.,  N"'  8,  9  und  10; 
III.  Ablh.,  N°'  6  bis  8,  9  und  10;  1874,  1.  Abtb.,  N"^  1,-2  und 
5;  II.  Abtb.,  X"*  1,  2,  3;  —  Archiv  fiir  oslcrreicbi.scbe  Ge- 
schichle,  LI.  Bd.,  2.  Heft;  Register  zu  den  Banden  l-L;  — 
Denkschriften,  XXXIII.  Bd.;  —  Almanaeh,  1874;  —  Monu- 


(  855  ) 

menta  conciliorum  generalium  scculi  decinii  quinti,  tomus 
secundus;  —  Vcrzeichniss  beobachtetcr  polarliclitcr,  zusam- 
mengestt'llt  von  Hermann  Frilz.  Vienne,  1875-1874;  3  vol. 
in-4°  el  iO  cali.  in-S"- 

Plnjsikalisch-medicinische  Gesellschaft,  Wûrzburg.  —  Die 
Pennatiilide  Umbellula  und  zwei  neue  Typen  der  Alcyonarien 
von  Albert  Kollikcr.  Wurzbourg,  1875;  br.  in-4°. 

Deulsdie  Gesellschaft  fur  Natvr  und  Vôlkerkunde  Osta- 
siens.  —  iMitlheilungen ,  5'"  Heft,  Juli  1874.  Yokohama, 
1874;  cah.  in-4''. 

Société  des  sciences  de  Finlande  ,  à  Helsingfors.  —  Ofver- 
sigt,  1871  à  1874,  vol.  XIV,  XV  el  XVI;  —  Bidrag,  1871, 
1875,  1874,  vol.  XVIll,  XIX,  XXI ,  XXII  et  XXUI  ;  —  Obser- 
vations faites  à  l'Observatoire  magnétique  et  météorologique 
de  Helsingfors,  vol.  V,  1875.  Helsingfors  ;  8  vol.  in-8"  et  vol. 
in-4°. 

Société  de  chimie  de  Saint-Pétersbourg.  —  ioixrn^],  tome  VI, 
n"  9.  Saint-Pétersbourg,  1874;  cah.  in-8".  (En  russe.) 

De  la  Rive{A.).  —  Notice  sur  Michel  Faraday,  sa  vie  et  ses 
travaux.  Genève,  18C7  ;  broch.  in-8". 

Plantuniotir  {£.).  —  Résumé  météorologique  de  l'année 
1875  pour  Genève  et  le  Grand-Saint-Bernard.  Genève,  1874; 
in-8». 

Société  des  scietices  naturelles  de  Neuchâtel.  —  Mémoires, 
tome  IV,  seconde  partie.  Neuchâlcl,  1874;  vol.  in-4". 

Cara  [Gaetano).  —  Elenco  dcgli  uccelli  che  trovansi  nell" 
Isola  di  Sardegna  od  ornitologia  Sarda.  Turin,  1842;  vol. 
in-8°. 

Michelotti  [Giovanni).  —  Saggio  storico  dei  rizopodi  carat- 
teristici  dei  terreni  sopracretacei.  Modène,  1841;  cah.  {11-4°. 

Sismonda  [Eugenio).  —  Monografia  degli  cchinidi  fossili  dcl 
Piemonte;  —  Appendice  alla  monografia  degli  echinidi  fossili 
dei  Piemonte;  —  Osservazioni  geologiche  sui  terreni  délie 
formazioni  terziaria  e  cretacea  in  Piemonte.  Turin,  1841- 
1842;  3  broch.  in-4''. 


(  856  ) 

Socielà  ilaliana  di  scienze  natnrali,  Milano  —  Alti,  vol.  XVI, 
fasc.  III  c  IV.  Milan,  1874;  cah.  in-8». 

Accademia  fisico-medico-stalistica  di  Milano.  —  Atti,  anno 
accademico  1874.  Milan,  1874;  vol.  in -8". 

/?.  comitato  geologico  d'Italia.  —  BoUettino,  anno  1874, 
n"'  7  e  8.  Rome,  1874;  cah.  in-8». 

BuUellino  dd  xiulcanismo  italiano ,  anno  I,  fasc.  IX^  e  X, 
XI  e  XII,  1874.  Rome;  2  cah.  in-8°. 

Accademia  d'agricoltura,  arli  e  commercio  di  Verona.  — 
Meraorie  :  série  II,  vol.  L,  fasc.  I  e  II;  vol.  LI,  fasc.  I  e  II. 
Vérone,  1873-1874;  4  vol.  in-8». 

Slalistical  Society  of  London.  —  Journal,  vol.  XXXVII, 
pt.  III,  September,  1874;  —  General  index  to  vol.  XXVI- 
XXXV  (1863-1872).  Londres;  2  cah.  in-8". 

Asiatic  Society  of  Betigal  at  Ccdcutta. —  Bibliotheca  indica, 
New  Séries,  n"*  508  and  309.  Calcutta,  1874;  cah.  in-8". 

A  inericati  journal  of  science  and  arts ,  third  séries, vol.  VIII, 
n°'  43,  46,  47  ;  september,  october  and  noveraber.  New-Haven  , 
1874;  3  cah.  in-8°. 

The  Penn  Monlhly ,  vol.  V,  n»*  58  at  60,  october  al  de- 
cember  1874.  Philadelphie,  1874;  3  cah.  in-8°. 

Liste  d'ouvrages  déposés  pah  la  commission  novALE  d'histoire 

DANS  LA   BIBLIOTHÈQUE   DE  l'aCADÉMIE. 

Borgnet  [Jules).  —  Cartulaire  de  la  commune  de  Fosses. 
Namur,  1867;  vol.  in-8''. 

Société  pour  la  conservation  des  monuments  historiques  et 
des  œuvres  d'art  de  la  province  de  Luxembourg.  —  Annales, 
IV*  cah.,  1861.  Arlon;  in-8». 

Cercle  archéologique  de  Mons.  —  Annales,  tome  XI.  Mons  , 
1873;  vol.  in-8". 

Société  archéologique  de  Namur.  —  Annales,  tome  IX", 
4"  liv.;  tome  X%  l-^'  liv.;  tome  XII',  3'  liv.  Namur,  1867, 
1868,1873;3cah.in-8°. 

Cercle  archéologique  du  pays  de  Waes,  à  Saint-JVicolas.  — 


(  857  ) 

Annales  :  tome  III,  I"  liv.,  décembre  I8G7;  tome  IV,  4*  liv., 
juin  1873;  —  Publications  extraordinaires,  n"  5,  1868:  opus- 
cule inédit  de  Gérard  Mereator,  par  le  D"'  Van  Raemdonck. 
Saint-Nicolas;  5  cah.  in-8°. 

Institut  archéologique  du  Luxembourg.  —  Annales,  tome  V, 
1"  cali.,  1867.  Arlon;  cah.  in-8°. 

Institut  royal  grand-ducal  de  Lîixembourg.  —  Publications 
de  la  section  historique,  année  1872,  XXVII  (V).  Luxera- 
bourg,  1874;  vol.  in-4". 

Nijhoff  [Is.  An.).  —  Gedenkwaardigheden  uit  de  geschie- 
denis  van  Gelderlaiid  ,  VI""  deel,  2'*''  stuk  (Karel  van  Egmond , 
hertog  van  Gelre,  graff  van  Zutphen  (1514-1  528).  Arnheim, 
1862;  vol.  in-4°. 

Habels  (Jos.).  —  Het  vrijdorp  Neeritter  als  eigendom  der 
domkerk  van  Luik ,  gevolgd  door  aanteekeningen  op  Molen- 
beersel,  Heel,  Poil  en  Panheel.  3Iaestricht,  1867;  vol.  in-8". 
Brassart  (Félix).  —  Etablissement  de  la  collégiale  de  Saint- 
Anié  dans  la  ville  de  Douai; —  Le  Pas  du  Perron  fée,  tenu  à 
Bruges  en  1465  par  le  chevalier  Philippe  de  Lalaing.  Douai, 
1872,  1874;  2  vol.  in-8°. 

Tailliar.  — Chroniques  de  Douai  recueillies  et  mises  en 
ordre.  Douai,  1870;  vol.  in-8°. 

Société  d'agriculture,  sciences  et  arts,  à  Douai.  —  Mémoires  : 
1"-  série,  tome  I  à  XIII,  1826-1841);  2'=  série,  tome  I  à  XI, 
1849-1875.  Douai;  26  vol.  in-8'';  ~  Recueil  d'actes  des  XIP  et 
XIIP  siècles  en  langue  romane  wallonne  du  nord  de  la  France. 
Douai,  1849;  vol.  in-8°. 

Comité  flamand  de  France,  à  Lille.  —  Bulletin,  lome  IV. 
n"  7,  8  et  9,  1867-1868;  tome  VI,  n°^  7 ,  8  et  9,  1875-1874. 
Lille,  5  cah.in-8°. 

Revue    des    questions  historiques ,    avril    1870;    janvier, 

avril,  juillet  et  octobre  1875;  janvier  1874.  Paris;  6  vol.  in- 8°. 

Société  d'agriculture ,  sciences  et  arts  de  l'arrondissement 

de  Valenciennes.  —  Mémoires,  tomes  VI  à  IX,  1846-1853;  — 

Mémoires  historiques  de  l'arrondissement   de   Valenciennes, 

2"^  SÉRIE,  TOME  XXXVIII.  o5 


(  858  ) 

tomes  1  à  III,  1865-1875;  —  llevue  agricole,  industrielle,  litté- 
raire et  artistique:  tomes  V  à  XXVI,  1853-1875;  tome  XXVIII, 
liv.  I  à  6,  et  9.  Valenciennes;  29  vol.  et  6  cah.  in-8". 

Wagner  {G.-W.-J.).  —  Die  vormalingen  geistlicheii  Stiste 
im  Grossherzogtliura  Ilcsscn,  I'""  Bd.  Darmstadt,  1875;  vol. 
in-8°. 

Hislorisclier  Verein  fur  das  Grossherzogthum  Hessen  zu 
Darmstadt.  —  Archiv  fiir  Hessische  Geschichte,  Bd.  XI,  3. 
Heft;  Bd.  XIII,  2.  Heft.  Darmstadt,  I867-I875;  2  cah.  in-8°; 
—  Register  zu  den  zwolf  ersten  Banden  des  Archivs,  bear- 
beitet  von  Fr.  Ritsert.  Darmstadt,  1875;  vol.  in-8''. 

Hislorischer  Verein  fur  Niedersachsen,  Hannover.  — 
Zeitscbrift,  Jahrgiinge  1858  bis  1865,  I87I  ,  1872.  Hanovre; 
9  vol.  in-8°. 

Landesarchive  zu  Karlsruhe.  —  Zeitscbrift  fur  die  Ge- 
schichte des  Oberrheins,  XX.  Bd.,  1866;  XXV.  Bd.,  1875; 
XXVI.  Bd.,  1.,  2.  und  5.  Heft.,  1874.  Carlsruhe;  11  cah.  in-8». 

Université  de  Leipzig.  —  Program^me  des  cours,  1871  à 
1874  (8  br.  in-8'');—  Thèses  et  discours,  années  1871,  1872 
et  1875  (9  br.  in-4°);  —  Thèses  soutenues  pendant  les  années 
1869  à  1875.  Ensemble  155  br.  in-8». 

Verein  fiir  Geschichte  nnd  Allherlhûmer  zu  Stade.  —  Ar- 
chiv, 3,  1869.  Stade,  1869;  cah.  in-S". 

Hislorischer  Verein  von  Unterfranken  und  Aschaffenburg , 
Wiirzburg.  —  Archiv:  Bd.  XIX.,  5.  Heft;  Bd.  XXII.,  2.  und 
3.  Heft.  Wurzbourg,  1868,  1874;  2  cah.  in-8". 

Young  (Edivard).  —  Rapport  spécial  sur  l'immigration, 
accompagné  de  renseignements  pour  les  immigrants.  Wash- 
ington, 1872;  vol.  in-8°. 

Smithsonian  Institution  of  Washington.  —  Annual  Re- 
port of  Ihe  board  of  régents,  1869,  1870,  1871,  1872;  — 
Second  annual  Report  of  Indian  coramissioners,  1870.  Wash- 
ington ;  5  vol.  in-8°. 

Fin  du  Tome  XXXVIII  de  la  2"'^  série. 


BULLETliNS  DE  L  ACADÉMIE  ROYALE  DE  BELGIQUE. 


?6^ 


TABLES  ALPHABÉTIQUES 

DU   TOME  TRENTE-HUITIÈME    DE   LA    DEUXIÈME   SÉRIE. 

1874. 
TABLE  DES  AUTEURS. 


Airy  (G.  Biddell).  —  Hommage  d'ouvrages,  403. 

Alvin  (L).  —  Accepte  de  rédiger  la  notice  académique  de  feu  M.  Partoes, 
389;  propose  d'exposer  publiquement  à  Bruxelles  les  œuvres  de  Frédé- 
ric Van  de  Kerkhove,  de  Bruges ,  591. 

Antas  (le  chevalier  d').  —  Prend  congé  de  ses  confrères  de  la  classe  des 
lettres,  670. 

Arrivabcne  (le  comte  Giouanm).  —  Hommage  d'ouvrage,  507. 

K. 

Banet-liivet  (A.).  —  Hommage  d'ouvrage,  534. 

BarU't  {Ed.).  —  Hommage  d'ouvrage,  155. 

hellijnck  (Aiig.).  —  Commissaire  pour  le  mémoire  de  concours  en  réi)onse 

à   la  question  concernant  le  polymoi'pliisme  des  champignons,  296; 

lecture  de  son  rapport  sur  ce  travail,  655;  impression,  723;  présente 

ses  observations  faites  à  Namur  sur  l'effeuillaison  en   1875  et  sur  la 

feuillaison  en  1874,  405;  hommage  d'ouvrages,  550. 
Bernaerls{G.).  —  La  comète  de  Coggia,  ol)servée  à  Malines,  352. 
Bernardin.  —  Envoie  ses  observations  des  phénomènes  périodiques  du 

règne  végétal,  faites  à  Melle  le  21  octobre  1874,  554. 


8(;0  TABLE    DES    AUTEUllS. 

Honcompacjni  (le  prince  B).  —  Hommage  d'ouvrage,  292. 

Borchgrave  {Ém.  de).  —  Annonce  le  départ  de  M.  le  chevalier  d'Anlas, 
670. 

Brialmont  (A.).  —  Nommé  présidenl  de  l'Académie  pour  1873,  650,  661, 
709. 

Briart  (Alph.).  —  Hommage  d'ouvrage,  291;  commissaire  pour  une  note 
de  M.  A.  Peiermann  sur  les  gisemenls  de  phosphates  en  Delgique,  652; 
élu  membre  titulaire,  847. 

Burggraeve  {le  docteur).  —  Adresse  une  liste  de  souscription  pour  l'ou- 
vrage intitulé  :  Monument  à  Jenner,  C50,66S,  710. 


Candéze  (E.).  —  Hommage  d'ouvrages,  651  ;  les  moyens  d'attaque  et  de 
défense  chez  les  insectes  :  discours,  787. 

Castan  (E.).  —  Hommage  d'ouvrages,  666. 

Catalan  (Eiig.).  —  Adhère  au  rapport  de  M.  Folie  sur  le  mémoire  de 
M.  Sallel  concernant  la  détermination  ,  sans  calcul,  de  l'ordre  d'un  lieu 
géométrique,  17;  commisî-aire  pour  la  nouvelle  rédaclion  de  ce  travail, 
406;  hommage  d'ouvrage,  291;  présente  une  note  sur  la  polhodie, 
292;  commissaire  pour  la  nouvelle  rédaction  du  mémoire  de  M.  Man- 
sion  sur  l'intégration  des  équations,  «6/f/.;  commissaire  pour  les  notes 
(le  M.  P.-A.  Simons  concernant  un  théorème  de  Fermât  et  la  solution 
de  deux  questions  de  permutations,  293;  rapport  verbal  sur  ces  travaux, 
409;  commissaire  pour  le  mémoire  de  concours  en  réponse  à  la  ques- 
tion concernant  la  théorie  des  fonctions  d'une  variable  imaginaire,  295; 
rapport  sur  ce  travail,  714;  commissaire  pour  une  note  de  M.  P.  Man- 
sion  concernant  les  équations  différentielles  linéaires,  40o;  rapport  sur 
ce  travail ,  562;  note  sur  le  problème  de  Malfalti,  480. 

Cavalier  (/.).  —  Adresse  le  résumé  de  ses  observations  météorologiques 
faites  à  Ostende  pendant  les  mois  de  juin  à  novembre  1874,  2,  291, 554. 
650. 

Chalon  (fi.).  — Réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances  pour 
1875,671. 

Colbeau  (Jules).  —  Demande  que  l'Académie  adhère  au  principe  d'une 
fédération  des  sociétés  scientifiques  de  Belgique,  403. 

Commission  centrale  pour  Vérection  d'un  monument  à  Stjlvain  Van  De 
^'eyer.  —Adresse  une  liste  de  souscription  à  l'Académie,  292, 367, 371. 

Conscience  {H.).  —  Réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances 
pour  1875,  671. 


TABLE    DES    AUTEI  K>.  8()1 

Cooper  (Clicnies-Purton).  —  Annonce  de  sa  nioi  1 .  063. 

Cornet  (F.-L).  —  Hommage  d'ouvrage,  291. 

Crépin  [François).  —  Description  de  quelques  plantes  fossili's  de  l'étage 
des  psammites  du  Condroz  (dévoniea  supéiieur),  556;  fragments  pa- 
léonlologiques  pour  servir  à  la  Flore  du  lerrain  houiller  de  Belgique. 
368. 

D. 

Daussin  {A.).  —  Présente  une  note  sur  un  moteur  électro-magnétique  à 
armature  sans  fin,  295. 

De  Ceuleneer  (Ch.-Aiig.).  —  Remercie  pour  sa  médaille  de  concours, 
155. 

De  Decker  {Pierre).  —  Commissaire  pour  une  notice  de  M.  Hcuscliling, 
sur  la  statistique  internationale.  309;  rapport  verbal  sur  ce  travail, 
614;  réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances  pour  1875. 
671. 

De  h'eyser  (A").  —  Lecture  de  son  discours  prononcé  en  séance  publique 
de  la  classe  des  beaux-arts,  590;  impression,  595. 

De  Koninck  (L.).  —  Commissaire  pour  trois  notes  de  M.  W.  Spring  con- 
cernant la  chimie,  -i,  29ô;  adhère  aux  rapports  de  M.  Stas  sur  ces 
travaux,  25,  40H,  409;  commissaire  pour  une  nouvelle  rédaction  de 
la  notice  de  M  Melsens  sur  J.-l].  Van  Helmont ,  295;  lecture  de  son  rap- 
port sur  ce  travail,  407  ;  commissaire  pour  le  mémoire  de  concours  en 
réponse  à  la  (juestion  concernant  les  roches  plutoniennes  de  la  Belgique 
et  de  l'Ardenne  française ,  296;  rajjporl  sur  ce  travail,  748;  commis- 
saire pour  une  note  de  .M.  Renier  Malhei'be  sur  les  chlorures  alcalins 
de  la  formation  houillère,  538;  commissaire  pour  une  noie  de  M.  E.  Si- 
mon sur  la  composition  de  l'acide  humique  naturel,  etc.,  652. 

De  Man  (G.).  —  Rapport  sur  le  mémoire  de  con.^ours  en  réponse  à  la 
question  concernant  l'histoire  de  la  sculpture  aux  Pays-Bas,  pendant 
les  XYII"^  et  XVIIl''  siècles,  586;  reelu  membre  de  la  commission  spé- 
ciale des  finances  pour  1X73,  710. 

Demnnnez  (Joseph).  —  Lauréat  du  concours  d'art  appliqué  de  1874 
(gravure) ,  380 ,  400. 

Desmazes  (Charles^.  —  Accuse  réception  de  son  diplôme  d'associé,  569. 

De  Smet  (J.-J.).  —  Présente  une  notice  sur  les  preniières  années  de  don 
Juan  d'Autriche,  fils  de  Charles-Quint,  5G9;  lecture  des  rapports  de 
MM.  Juste  et  Gachard  sur  ce  travail,  .509  ;  impression,  310. 

Bevaux  [Paul).  —  Lecture  de  la  première  partie  de  son  travail  sur  les 
guerres  médiques,  310;  hommage  d'ouvrage,  066. 


86;2  TABLE    DES    AL'TEURS. 

Dewalque  (G.).  —  Annonce  la  fondation  de  la  Société  géologique  de  Bel- 
gique et  demande  l'échange  de  publications,  3;  commissaire  pour  le 
mémoire  de  concours  en  réponse  à  la  question  concernant  les  roches 
pluloniennes  de  la  Belgique  et  de  l'Ardenne  française,  296;  rapport  sur 
ce  travail,  750;  demande  que  l'Académie  adhère  au  principe  d'une 
fédération  des  sociétés  scientifiques  de  Belgique,  405;  commissaire 
pour  une  note  de  M.  Malherbe  sur  les  chloruies  alcalins  de  la  forma- 
tion houillère,  358. 

Dillens  {Julien).  —  Lauréat  du  concours  d'art  appliqué  de  1874  (pein- 
ture) ,  589 ,  400. 

Dirks  (Joseph).  —  Lauréat  (mention  honorable)  du  grand  concours  de 
gravure,  dit  prix  de  Rome  .  589,  400. 

Donny  (F.).  -  Commissaire  pour  une  nouvelle  rédaction  de  la  notice  histo- 
rique de  M.  Melsens  sur  J.-B.  Van  Helmont,  295;  lecture  de  son  rap- 
port sur  ce  travail ,  407  ;  commissaire  pour  une  note  de  M.  Bottier  sur 
la  conservation  du  bois  au  moyen  des  sels  de  cuivre,  406;  rapport  sur 
ce  travail,  560;  commissaire  pour  une  note  de  M.  A.  Petermann  sur  les 
gisements  de  phosphates  en  Belgique,  632;  commissaire  pour  une  note 
(le  M.  E.  Simon  sur  la  composition  de  l'acide  humique  naturel ,  ibid. 

Dubois  {AI p.).  — Présente  un  travail  concernant  un  Spizaëte  nouveau, 
4;  impression,  129;  rapports  de  MM.  de  Selys  Longchamps  et  P.-J.  Van 
Beneden  sur  sa  notice  concernant  la  variabilité  de  certaines  espèces  du 
genre  Calliste,  19,  22,  impression  de  celte  notice,  124;  présente  une 
note  intitulée  :  Remarques  morphologiques  sur  les  espèces  du  sous- 
genre  Xanthoura,  406  ;  rapport  verbal  de  M.  de  Sclys  Longchamps  sur 
ce  travail ,  407  ;  impression  ,  488. 

Du  Bus  de  Gisignies  {le  vicomte  Bernard}.  —  Annonce  de  sa  mort,  290. 

Dupont  {Éd.).  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M  Alp.  Dubois  concer- 
nant un  spizaëte  nouveau ,  4. 

Duprcz  (F.).  —  Présente  le  résumé  de  ses  observations  météorologiques 
faites  à  Gand  en  1873,  2;  adhère  au  rapport  de  M.  J.  Plateau  sur  le 
mémoire  de  M.  G.  Van  der  Mensbrugghe  intitulé  :  L'électricité  statique 
exerce-t-elle  une  influence  sur  la  tension  superficielle  des  liquides? 
19;  commissaire  pour  un  mémoire  de  M.  A.  Daussin  sur  un  moteur 
éiectro-magnéti(iue  à  armature  sans  lin,  295  ;  rapport  sur  la  note  de 
M.  A.  Perrey  concernant  les  tremblements  de  terre  en  1871.  297. 


Edwards  {John}.  —  Annonce  la  mort  de  M  Gh.  Purlon  Cooper,  663. 
Elle  de  Beaumont  {J.-B.  Léonce).  —  Annonce  de  sa  mort,  402. 


TABLE    DES    AUTEL'RS.  863 

Ellero[Pietro).  —  Hommage  d'ouvrage,  568. 

Estourgies  (L.).  —  Présente  une  note  intitulée  :  Calculs  de  l'éclipsé  de 

soleil  du  10  octobre  et  de  l'occultation  de  Vénus  du  14  octobre  1874, 

558. 

F. 

Faider  (Ch.).  —  Rapport  sur  la  notice  de  M.  Léon  Vanderkindere  concer- 
nant l'origine  des  magistrats  communaux,  159:  commissaire  pour  une 
notice  de  M.  Heuschling  sur  la  statistique  internationale,  309;  rapport 
verbal  sur  ce  travail,  614;  réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des 
finances  pour  1 873,  671 . 

Fayeii.  —  Hommage  d'une  photograpliie,  154. 

Félis  {Ed.).  —  Propose  d'exposer  publiquement  à  Bruxelles  les  œuvres 
de  Frédéric  Van  de  Kerkhove,  de  Bruges,  591;  accepte  de  rédiger  la 
notice  académique  de  feu  Ale.xis  Baron,  354;  hommage  d'ouvrage,  710  ; 
rend  compte  des  opérations  de  la  caisse  centrale  des  artistes  belges, 
pendant  l'année  1875,  71 1. 

Flandre  (S.  A.  B.  le  comle  de).  —  Fait  e.xprimerses  regrets  de  ne  pouvoir 
assister  à  la  séance  publique  de  la  classe  des  beaux-arts,  588  ;  mêmes 
regrets  au  sujet  de  la  séance  publique  de  la  classe  des  sciences,  712. 

Folie  (F.).  —  Rapport  sur  le  mémoire  de  .M.  L.  Sallel  concernant  la  déter- 
mination, sans  calcul,  de  l'ordre  d'un  lieu  géométrique,  15  ;  commissaire 
pour  la  nouvelle  rédaction  de  ce  travail,  406;  quelques  nouveaux  théo- 
rèmes sur  les  cubiques  gauches,  65;  commissaire  pour  une  nouvelle 
rédaction  du  mémoire  couronné  de  M.  Mansionsur  l'intégration  des  équa- 
tions, 292  ;  commissaire  pour  les  notes  de  M.  P.-A.  Simons  concernant 
un  théorème  de  Fermât  et  la  solution  de  deux  questions  de  permuta- 
tions, 295;  rapport  verbal  sur  ces  travaux,  409;  commissaire  pour  le 
mémoire  de  concours  en  réponse  aux  questions  concernant  la  tempéra- 
ture de  l'espace  et  la  chaleur  spécifique  absolue  des  corps,  293  ;  lecture 
de  sou  rapport  sur  ce  travail,  718;  commissaire  pour  une  note  de  M.  W. 
Spring  sur  la  dilatation,  la  chaleur  spécifique  des  alliages  fusibles,  etc., 
405;  commissaire  pour  une  note  de  M,  P.  Mansion  sur  les  équations  dif- 
férenlielles  linéaires,  ibid..  rapport  sur  ce  travail,  363;  quelques  nou- 
veaux théorèmes  sur  les  courbes  gauches  «lu  4™''  ordre ,  463  ;  hommage 
d'ouvrages,  avec  noie  bibliographique,  336:  élu  membre  titulaire,  847. 

Fraikin  (C.-A.).  —  Réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances 
pour  1873,  710. 

Franck  (/.).  —  Réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances 
pour  1875,710. 


86i  TABLE    DES    AUTEURS. 


Gachard  {L.}.  —  Le  cardinal  Bentivogiio.  Sa  noncialure  à  Bruxelles 
(suite),  154;  commissaire  pour  une  notice  de  M.  J.-J.  De  Smet  sur 
don  Juan  d'Autriche,  369;  lecture  de  son  rapport  sur  ce  travail,  309; 
réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances  pour  1873,  671. 
Galeslool  (L.).  —  Présente  un  travail  intitulé  :  Fouilles  et  découvertes 
d'antiquités  romaines  à  Assche.  Détails  inédits  sur  le  trésor  de  Mespe- 
laer,  671. 

Geefs  (G.).  —  Réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances  pour 
1873,710. 

Geefs  (Joseph).  —  Adhère  au  rapport  de  M.  Siret  sur  le  mémoire  de  con- 
cours en  réponse  à  la  question  concernant  l'histoire  de  la  sculpture  aux 
Pays-Bas  pendant  les  XYIP  et  XVIII<=  siècles,  371,  580. 

Gevaert  (Aug.).  —  Fait  connaître  qu'il  n'a  aucune  instruction  spéciale  à 
donner  à  M.  F.  Servais ,  lauréat  du  grand  concours  de  composition  mu- 
sicale de  1873,  370. 

GUkinel  (Alfred).  —  Lauréat  du  concours  de  la  classe  des  sciences, 
747,  846. 

Gloesener  (M.).  —  Commissaire  pour  une  note  de  M.  A.  Daussin  sur  un 
moteur  électro-magnétique  à  armature  sans  fin,  293;  commissaire 
pour  une  note  de  M.  W.  Spring  sur  la  dilatation,  la  chaleur  spécifique 
des  alliages  fusibles,  etc.,  403;  lauréat  du  concours  quinquennal  des 
sciences  mathématiques  et  physiques  pour  la  période  de  1869-1873, 
630,  847. 

Gluge  (Théophile).  —  Commissaire  pour  un  mémoire  de  M.  Van  Bambeke 
sur  l'embryogénie  des  poissons  osseux,  338;  nommé  membre  de  la  com- 
mission spéciale  des  finances  pour  1873,  633. 

Gouverneur  du  Brabanl  (M.  le).  —  Hommage  d'ouvrages,  4,  337. 

Graindorge.  —  Hommage  d'ouvrage,  557. 

Guillaume  (le  lieutenant  général  baron).  —  Hommage  d'ouvrages,  507; 
note  au  sujet  de  M.  Van  Hasselt,  membre  de  la  commission  de  la  Bio- 
graphie nationale,  671. 

Guizot  (F.-P.-G.).  —  Annonce  de  sa  mort ,  306. 

IJ. 


Hardouin  (Henri).  —  Hommage  d'ouvrage,  133. 
Hautcoeur.  —  Hommage  d'ouvrage,  134. 
Henry  (L).  —  Sur  l'anhydride  hypoazotique,  442. 


TABLE    DUS    ALTEURS.  865 

Heremans  (/.).  —  Hommage  d'ouvrages,  155,  666  ;  Overblijfsels  van  deii 
instrumentaal  in  het  Xederlandsch.  369.  691. 

Hermann  (Dr.Josef).  —  Hommage  d'ouvrage,  292. 

Heuschling  (X.).  —  Hommage  d'ouvrage,  307  ;  présente  une  notice  sur 
la  statistique  iuternationale,  509  ;  rapports  verbaux  de  MM.  Faider  et  De 
Decker  sur  ce  travail,  614. 

Bock  (Augusle).  —  Hommage  d'ouvrage,  666. 

Hooreman  (Charles).  —  .Note  sur  les  orages  du  10  juillet  1874.  ôo4  : 
perturbation  magnétique  du  9  octobre  1874,  4-22. 

Houzeau  (C.-J.).  —  Présente  le  résumé  de  quelques  observations  astro- 
nomiques et  niéléorologi(iues  faites  dans  la  zone  surtempérée  et  entre 
les  tropiques,  403;  lecture  des  rapports  de  MM.  Liagre  et  E.  Quetelet 
sur  ce  travail,  338. 

Huxley  (Thomas).  —  Élu  associé  de  la  classe  des  sciences.  847. 


[nstiltit  roijal  des  sciences,  des  lettres  et  des  arts  de  Vfnise.  —  Envoie  son 
programme  de  concours  pour  1 875,  534. 


Jacques  (Léon).  —  Hommage  d'ouvrages,  134. 

Juste  (Th.).  —  Accepte  de  rédiger  la  notice  académique  de  feu  M.  Van  De 
Weyer,  152  :  commissaire  pour  une  notice  de  M  J.-J.  De  Smet  sur  don 
Juan  d'Autriche,  569  ;  lecture  de  son  rapport  sur  ce  travail.  309. 

K. 

Kervyn  de  Lettenhove  (Le  baron).  —  Hommage  d'ouvrage.  133:  deux 
lettres  inédites  de  Jacques  de  Molay,  226. 


Lasaulx  (A.  von).  —  Hommage  d'ouvrage,  292. 

Lauivers  (François).  —  Lauréat  (premier  prix)  du  grand  concours  de 
gravure,  dit  prix  de  Rome,  589,  400. 

Laveleyc(E.  de).  —  Rapport  sur  la  notice  de  M.  Léon  Vanderkindere  con- 
cernant l'origine  des  magistrats  communaux,  etc.,  139. 


8(;r»  TABLE    DES    AUTEt'HS. 

Leclercq  {Julien).  —  Accepte  de  rédiger  la  notice  académique  de  feu 
M.  Jouvenel,  534. 

Le  Roy  (^Ip.)  —  Notes  bibliographiques  concernant:  1"  un  ouvrage  de 
M.  Léon  Jacques,  134;  2"  différentes  publications  de  M  le  marquis  de 
Queux  de  Saint-Hilaire,  666. 

Le  Verrier  {Urbain).  —  Élu  associé  de  la  classe  des  sciences  ,  847. 

Liagre  {J.).  —  Rapport  sur  le  mémoire  de  M  C.  Rodenbach  concernant 
l'étalon  prototype  universel  des  mesures  de  longueur,  5  ;  adhère  aux 
rapports  de  MM  Ern.  Quetelet  et  Mailly  sur  le  mémoire  de  M.  Fr.  Terby 
concernanl  l'aspect  physique  delà  planète  Mars,  13  ;  commissaire  pour 
une  note  du  même ,  intitulée  ;  Un  mot  à  propos  d'une  notice  du  comte  de 
Rosse  sur  les  observations  de  Jupiter, faites  eu  1873,  293  ;  proclamation 
des  résultats  du  concours  de  la  classe  drs  beaux-arls  et  du  grand  con- 
cours de  gravure,  ô98  ;  commissaire  pour  un  mémoire  de  M.  Houzeau 
sur  quelques  observations  astronomiques  et  météorologiques,  etc.,  405; 
lecture  de  son  rapport  sur  ce  travail,  558  ;  commissaire  pour  une  note 
de  M.  Terby  sur  l'aspect  de  la  planète  Jupiter  pendant  son  opposition 
en  1874,  etc.,  406  ;  rapport  sur  ce  travail,  560  ;  commissaire  pour  une 
note  de  M.  L.  Estourgies  intitulée  :  Calculs  de  l'éclipsé  de  soleil  du 
10  octobre  et  de  l'occullation  de  Vénus  du  14  octobre  1874,  558; 
commissaire  pour  une  note  de  M.  J.  Vivier  sur  la  constitution  physique 
des  comètes,  652;  proclamation  des  résultats  du  concours  de  la  classe 
des  sciences,  844. 
Limnandcr  {Le  baron  A.).  —  Hommage  d'ouvrage,  710. 


M. 


Mailly  {Éd.).  —  Adhère  au  rapi)ort  de  M.  Liagre  sur  le  mémoire  de 
M.  C.  Rodenbach  concernant  l'étalon  prototype  universel  des  mesures 
de  longueur,  7  ;  rapport  sur  le  mémoire  de  M.  F.  Terby  concernant 
l'aspect  physique  de  la  planète  Mars,  12  ;  rapport  sur  la  noie  de  M.  A. 
Perrey  concernant  les  tremblements  de  terre  en  1871 ,  298;  notice  sur 
Adolphe  Quetelet ,  816. 

Malaise  (C.)  —  Hommage  d'ouvrages,  3,556  ;  sur  quelques  roches  por- 
phyriques  de  Relgique,  70  ;  commissaire  pour  le  mémoire  de  concours 
en  réponse  à  la  question  concernant  les  roches  plutoniennes  de  la  Bel- 
gique et  de  l'Ardenne  française,  296  ;  rapport  sur  ce  travail,  775  ;  sur 
la  découverte  du  Diclyonema  sociale,  S'a//.,  de  la  faune  primordiale, 
dans  le  massif  de  Rocroy,  464. 


TADLE    DES    AUTEURS.  807 

Malherbe  (Renier).  —  Présente  une  note  concernant  les  chlorures  alcalins 
de  la  formation  houillère ,  558. 

Mansion(P.).  —  Présente  une  nouvelle  rédaction  de  son  mémoire  couronné 
sur  l'intégration  des  équations,  :29"2  :  présente  une  note  sur  la  propi-iété 
caractéristique  des  équations  différentielles  linéaires,  405  ;  rapports  de 
MM.  Catalan  et  Folie  sur  ce  travail,  o6'2  ,  5G5  ;  impression,  578. 

Marion  {Le  D""  A.-F.}.  —  Offre  un  exemplaire  de  son  mémoire  concer- 
nant les  marnes  heersiennes  de  Geliaden,  3  ;  remercie  pour  l'impression 
de  ce  travail,  291. 

Maus  (H.).  —  Nommé  membre  de  la  commission  spéciale  des  Onances 
pour  1875,  655. 

Mayer  (J.-R.).  —  Élu  associé  de  la  classe  des  sciences,  847. 

Melsens{L.).  —  Sur  i'impoitance  des  gisement-^  de  phosphate  de  chaux  des 
environs  de  C?ply  (province  de  Hainaut),  25  ;  rectiûcation  à  cette  notice, 
442  ;  sur  la  conservation  du  virus  vaccin,  53  ;  sur  les  charbons  décolo- 
rants, leur  production  artificielle  et  la  révivilication  des  noirs  employés 
dans  rindustrie,  58  ;  présente  une  nouvelle  rédaction  de  sa  notice  histo- 
rique sur  J.-B.  Van  Helmont,  292  ;  lecture  des  rapports  de  MM.  Stas, 
de  Koninck  et  Donny  sur  ce  travail,  407  ;  commissaire  pour  le  mémoire 
de  concours  en  réponse  aux  questions  concernant  la  température  de 
l'espace  et  la  chaleur  spécifique  absolue  des  corps  simples  et  des  corps 
com|)osés  ,  295  ;  lecture  de  son  rapport  sur  ce  travail,  718  ;  notes  sur 
les  paratonnerres ,  320,  423  ;  commissaire  pour  une  note  de  M.  Rottier 
sur  la  conservation  du  bois  au  moyen  des  sels  de  cuivre,  406  ;  rapport 
sur  ce  travail,  562;  commissaire  pour  une  note  de  M  A.  Pelermann 
sur  les  gisements  de  phosphates  en  Belgique ,  652  ;  commissaire  pour 
une  note  de  M.  E.  Simon  sur  la  composition  de  l'acide  humique  na- 
turel, etc.,  652. 

Menabrea  {Le  comte  L.).  —  Élu  associé  de  la  classe  des  sciences,  847. 

Meunier  (Stanislas).  —  Hommage  d'ouvrage,  555. 

Ministre  de  la  justice  (M.  le).  —  Hommage  d'ouvrage,  368,  665. 

Ministre  de  rintérieur  (M.  le).  —  Envois  d'ouvrages,  2,  282,  291 ,  568,  403, 
507,  554,  615,  715;  lettres  relatives  aux  bustes  de  .MM.  Quetelet 
et  Dandelin,2,  281,  282,  290,  371  ,  715;  arrêtés  royaux  portant  à 
4,000  francs  la  pension  des  lauréats  des  grands  concours ,  371;  pro- 
gramme des  fêtes  de  septembre,  378;  lauréats  du  grand  concours  de 
gravure  de  1874,  389,  400  ;  annonce  le  décès  de  M.  A.  Vène,  403;  lettre 
de  M.  P.-J.  Goubet  concernant  la  quadrature  du  cercle,  403;  lettres 
relatives  à  une  question  de  paratonnerres  ,  554;  demande  une  liste  de 
fiuatorze  noms  pour  former  le  jury  de  la  5<-  période  du  concours  quin- 


8G8  TABLE    DES    AUTEURS. 

queuual  de  littérature  flamande,  612  ;  transmet  l'arrêté  royal  nommant 
M.  A.  Brialmont  président  de  l'Académie  pour  1875,  650,  664,  709; 
arrêté  royal  décernant  à  M.  Gloesener  le  i)rix  quinquennal  des  sciences 
mathématiques  et  physiques  pour  la  période  de  1869-1873,  030;  ex- 
prime ses  regrets  de  ne  pouvoir  assister  a  la  séance  publique  de  la 
classe  des  sciences,  71:2. 

Montignij  (Ch.).  —  Adhère  au  rapport  de  M.  Liagre  sur  le  mémoire  de 
M.  G.  Rodenbach  concernant  l'étalon  prototype  universel  des  mesures 
de  longueur,  7;  commissaire  pour  un  mémoire  de  M.  A.  Daussin  sur  un 
moteur  électro-magnétique  à  armature  sans  fin ,  "2dô  ;  commissaire  pour 
un  mémoire  de  concours  en  réponse  aux  ([ueslions  concernant  la  tem- 
pérature de  l'espace  et  la  chaleur  spécifique  absolue  des  corps  simples 
et  des  corps  composés,  295;  lecture  de  son  rapport  sur  ce  travail,  718; 
sur  la  fréquence  de  la  scintillation  des  étoiles  dans  ses  rapports  avec 
la  constitution  de  leur  lumière,  d'après  l'analyse  spectrale,  300;  com- 
missaire pour  une  noie  de  M.  W.  Spring,  sur  la  dilatation  et  la  cha- 
leur spécifique  des  alliages  fusibles,  etc.,  405;  nommé  membre  delà 
commission  spéciale  des  finances  pour  1873,  653. 

Morcau  (Camille).  —  Présente  une  note  sur  la  structure  de  la  corde  dor- 
sale de  l'Amphioxus, 653. 

Morren  {Éd.).  —  Commissaire  pour  le  mémoire  de  concours  en  réponse 
à  la  question  concernant  le  polymorphisme  des  champignons,  296; 
lecture  de  son  rapport  sur  ce  travail ,  653;  impression,  719  ;  hommage 
d'ouvrages,  651. 

N. 

Nève  (F.).  —  Commissaire  pour  une  notice  de  M.  Ph  Van  der  Haeghen 

sur  les  écoles  et  l'alphabet  des  Tamouls,  509;  rapport  sur  ce  travail , 

614. 
Nils.so7i  (St^eii).  —  Élu  associé  de  la  classe  des  sciences,  847. 
Nolet  de  Brauwere   van  Steeland  (J.).  —  Hommage  d'ouvrage.  615  , 

666. 
Nyst  (H.).  —  Réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances  pour 

1875,653. 

O. 

Omalius  d'Halloy  {J.  d').  —  Remercie  ses  confrères  pour  les  senti- 
ments de  bienveillance  qui  lui  ont  été  exprimés  au  sujet  de  son  état  de 
santé,  650. 


TABLE    DES    ALTEIRS.  869 


P. 


Partoes  {H.-L.-F.).  —  Annonce  de  sa  mort,  389. 

Perrey  (Alexis).  -  Rapports  de  MM.  Duprez,  Ern.  Quetelet  et  Mailly  sur 
sa  note  concernant  les  tremblements  de  terre  en  1871,  297,  298;  hom- 
mage d'ouvrages,  713. 

Petermann  (A.).  —  Hommage  d'ouvrage,  292;  présente  une  note  sur  les 
gisements  de  phosphates  en  Belgique  et  parliculièrement  sur  celui  de 
Ciply,  6o2. 

Plateau  (F.).  —  Accepte  de  faire  la  notice  académique  de  feu  M.  Poelman, 
290;  note  sur  un  procédé  pour  donner  ou  pour  rendre  leur  couleur 
rouge  aux  muscles  conservés  dans  l'alcool,  476;  élu  membre  titu- 
laire, 8-i7. 

Plateau  (/.).  —  Rapport  sur  le  mémoire  de  M.  G.  Van  der  Mensbrugghe 
intitulé  :  L'électricité  statique  exerce-t-elle  une  influence  sur  la  tension 
superficielle  des  liquides?  17;  sur  une  récréation  arithmétique  fS"-  note), 
469. 

Poelman  (Charles).  —  Annonce  de  sa  mort,  290. 

Poswick  (Eugène).  —  Hommage  d'ouvrage,  307. 

Poullet  (Edmond).  —  Note  bibliographique  au  sujet  d'un  ouvrage  de 
M.  Poswick,  307. 

Pringsheim  (Le  docteur  JS'athaniel).  —  Élu  associé  de  la  classe  des 
sciences,  847. 

Q 

Quetelet  (E.)  —  Rapport  sur  le  mémoire  de  M.  F.  Terby  concernant  l'as- 
pect physique  de  la  planète  Mars,  7  ;  commissaire  pour  une  note  du 
même,  intitulée  :  Un  mot  à  propos  d'une  notice  du  comte  de  Rosse  sur 
les  observations  de  Jupiter  faites  en  1873,  293;  rapport  sur  la  note  de 
M.  Perrey  concernant  les  tremblements  de  terre  en  1871,  298;  la  co- 
mète de  Coggia.  observée  à  Bruxelles,  349;  commissaire  pour  un  mé- 
moire de  M.  J.-C.  Houzeau  concernant  quelques  observations  astrono- 
miques et  météorologiques,  etc.,  405;  lecture  de  son  rapport  sur  ce 
travail,  558;  commissaire  pour  une  note  de  M.  Terby  sur  l'aspect  de 
Jupiter  pendant  son  opposition  en  1874,  etc.,  406;  rapport  sur  ce  tra- 
vail, 359;  les  Perséides  en  1874,  410;  note  sur  les  perturbations  ma- 
gnétiques qui  ont  accompagné  l'aurore  boréale  du  3  octobre  1874.  421  ; 


870  TABLE    DES    ALTEUBS. 

hommage  d'ouvrage,  354;  commissaire  pour  une  note  de  M.  L.  Eslour- 
gies,  intitulée  :  Calculs  de  l'éclipsé  de  soleil  du  10  octobre  1874  et  de 
l'occultation  de  Vénus  par  la  lune,  le  14  octobre  1874,  o58;  obser- 
vation de  ces  deux  phénomènes,  faite  à  l'Observatoire  royal  de 
Bruxelles,  566,  567;  commissaire  pour  une  note  de  M.  J.  Vivier  sur  la 
constitution  physique  des  comètes,  652. 
Queux  de  Saint-H ilaire  (Le  marquis  de).  —  Hommage  d'ouvrages,  666. 

R. 

Renard  (A.).  —  Lauréat  du  concours  de  la  classe  des  sciences ,  784,  846. 

Rivier  (Alph.).  —  Hommage  d'ouvrage,  507;  le  Compendium  Institutio- 
num  de  Nicolas  de  Bruxelles,  619. 

Rodenhach  {€.).  —  Rapports  de  MM.  Liagre,  Montigny  et  Mailly  sur  son 
mémoire  concernant  l'étalon  prototype  universel  des  mesures  de  lon- 
gueur, 5,  7. 

Roi  des  Belges  (S.  M.  le).  —  Fait  exprimer  ses  regrets  de  ne  pouvoir 
assister  à  la  séance  publique  de  la  classe  des  beaux-arts,  588;  mêmes 
regrets  au  sujet  de  la  séance  publique  de  la  classe  des  sciences,  712. 

Roncière  le  Nourij  {Le  vice-amiral  de  la).  —  Adresse  les  documents  con- 
cernant le  2' congrès  international  des  sciences  géographitiues,  554. 

Rottier.  —  Présente  une  note  sur  la  conservation  du  bois  au  moyen  des 
sels  de  cuivre,  406;  rapports  de  MM.  Donny  et  Melsens  sur  ce  travail, 
560,  562  ;  impression,  595. 


S. 


Sallel  (Louis).  —  Ra|)ports  de  MM.  Folie  et  Catalan  sur  son  mémoire 
concernant  la  détermination ,  sans  calcul ,  de  l'ordre  d'un  lieu  géomé- 
trique, 13.  17;  présente  une  nouvelle  rédaction  de  ce  travail,  406. 

Saporla  (Le  comte  G.  de).  —  Offre  un  exemplaire  de  son  mémoire  con- 
cernant les  marnes  heersiennes  de  Gelinilen,3;  remercie  pour  l'im- 
pression de  ce  travail ,  291. 

Scheler  (Aug.).  —  Hommage  d'ouvrages,  13ô,  Glô,  666. 

Schwann  (Th.).  —  Commissaire  pour  un  mémoire  de  M.  Van  Bambeke 
concernant  l'embryogénie  des  poissons  osseux,  538;  commissaire  pour 
une  note  de  M.  Camille  Moreau  sur  la  structure  de  la  corde  dorsale  de 
l'Amphioxus  655 


TABLE    DES    AL'TEUBS.  871 

Secchi  {le  R.  P.)  —  Élu  associé  de  la  classe  des  sciences,  817. 

Selys  Longchamps  {Edin.  de).  —  Commissaire  pour  un  travail  de 
M.  Alp.  Dubois  concernant  un  Spizaëte  nouveau,  4;  rapport  sur  une 
notice  du  même  concernant  la  variabilité  de  certaines  espèces  du  genre 
CalUste,  19;  commissaire  pour  une  note  du  même  concernant  les 
espèces  du  sous-genre  Xanthoura,  406;  rapport  verbal  sur  ce  tra- 
vail, 407. 

Simon  {E.).  —  Présente  une  note  sur  la  composition  de  l'acide  lui- 
mique,  etc.,  652. 

Simons  {P.-A).  —  Quelques  réflexions  sur  le  problème  de  Mairatti,88; 
présente  deux  noies,  intitulées  :  1°  Dcmonslralion  d'un  théorème  de 
Fermât,  et  2"  Solution  de  deux  questions  de  permutations,  293;  rap- 
ports verl)aux  de  MM.  Catalan  et  Folie  sur  ces  travaux,  409. 

Sinkel.  —  Hommage  d'ouvrage,  5. 

Siret  {Ad.).  —  Lecture  de  son  rapport  sur  le  mémoii-e  de  concours  en  ré- 
ponse à  la  question  concernant  l'bistoire  de  la  sculpture  aux  Pays-Bas 
pendant  les  XVl|e  et  XVIII®  siècles,  371  ;  impression,  586;  communica- 
tion verbale  au  sujet  de  Fi'édéric  Van  de  Kerkhove,  de  Bruges,  paysa- 
giste, mort  le  12  août  1874,  à  l'âge  de  10  ans  et  1 1  mois,  391  ;  notice  sur 
le  même,  536. 

Slingenerjer  (Ern).  — •  Motion  relative  aux  études  artistiques  des  lau- 
réats des  grands  concours,  pensionnaires  du  Gouvernement,  à  Rome, 
284;  réélu  membre  de  la  commission  spéciale  des  finances  pour  1875, 
710. 

Société  belge  de  microscopie.  —  Annonce  sa  fondation,  713. 

Sociéléde  géographie  de  Lyon.  —  Demande  d'échange  de  publications,  5. 

Société  géologique  de  Belgique.  —  M.  Dewalque  annonce  la  fondation  de 
cette  institution  et  demande  l'échange  de  publications  ,  3. 

Société  malacologiquc  de  Belgique.  —  Demande  que  l'Académie  adhère 
au  principe  d'une  fédération  des  sociétés  scientifiques  de  Belgique, 
405. 

Spring  {Wallhère).  —  Présente  les  notes  suivantes:  i"  Sur  la  constitu- 
tion des  acides  polythioniques,  4;  impression,  108;  2»  Sur  deux  nou- 
veaux chlorures  d'acides  organiques,  295;  impression,  494;  3»  Sur 
l'action  du  pentachlorure  de  phosphore  sur  les  hyposulfites  inorgani- 
ques, 295;  impression  ,  505  ;  rapports  de  MM.  Stas  et  de  Koninck  sur 
ces  trois  notes,  22,  25,  407,  408,  409;  lettre  à  M.  Stas  sur  la  chaleur 
spécifique  des  corps,  295;  présente  une  note  sur  la  dilatation,  la  cha- 
leur spécifique  des  alliages  fusibles  et  leurs  rapports  avec  la  loi  de 
Neumann  ,  405  ;  dépose  un  billet  cacheté,  535. 


87^2  TABLE  DES  AUTEURS. 

Stas  (J.).  —  Commissaire  pour  trois  notes  de  M.  W.  Spriug  concernant 
la  chimie,  4,  293;  rapports  sur  ces  travaux,  22,  407,  408;  dépose  une 
lettre  du  même  concernant  la  chaleur  spécilique  des  corps,  293;  com- 
missaire pour  une  nouvelle  rédaction  de  la  notice  historique  de  M.  Mel- 
sens  sur  J.-B.  Van  Helmont,  293;  lecture  de  son  rapport  sur  ce  tra- 
vail, 407  ;  commissaire  pour  le  mémoire  de  concours  en  réponse  aux 
questions  concernant  la  température  de  l'espace  el  la  chaleur  spécifique 
absolue  des  corps  simples  et  des  corps'composés ,  295;  lecture  de  sou 
rapport  sur  ce  travail,  718. 

Steichen  (M.).  —  Commissaire  pour  le  mémoire  de  concours  en  réponse 
à  la  question  conceruant  la  théorie  des  fonctions  d'une  variable  imagi- 
naire, 295  ;  adhère  aux  rapports  de  MM.  Catalan  et  De  Tilly  sur  ce  tra- 
vail, 718. 

Steiir  {Cil.}.  —  Hommage  d'ouvrage.  568. 

Struve  {Otlo).  —  Ëlu  associé  de  la  classe  des  sciences,  847. 


Terby  (F.).  —  Rapports  de  MM.  Ern.  Quelelel,  Mailly  et  Liagre  sur  son 
mémoire  relatif  à  l'aspect  physique  de  la  planète  Mars,  7,  12,  13;  pré- 
sente une  note  intitulée  :  Un  mot  à  propos  d'une  notice  du  comte  de 
Rosse  sur  les  observations  de  Jupiter  faites  en  1873,  293  ;  est  autorisé 
à  retirer  cette  note,  407;  la  comète  de  Coggia  ,  observée  à  Louvain, 
331  ;  présente  une  note  sur  l'aspect  de  la  planète  Jupiter  pendant  son 
opposition  en  1874,  el  sur  le  passage  des  satellites  II  et  111  et  de  leurs 
ombres  pendant  la  soirée  du  2o  mars,  406;  rapports  de  M.M.  Ern.  Que- 
telet  et  Liagre  sur  ce  travail,  359,  560  ;  impression,  591  ;  observations 
des  étoiles  filantes  de  la  période  d'août  1874,  faites  à  Louvain,  418; 
note  sur  un  phénomène  auroral  remarqué  à  Louvain  le  soir  du  3  oc- 
tobre 1874,  et  sur  sa  coïncidence  avec  des  éclairs  observés  dans  le 
Nord,  419. 

Thiry  (V.).  —  Hommage  d'ouviage,  666. 

Tilly  (J.-M.  De).  —  Sur  la  généralisation  de  la  formule  de  Uinet.  67; 
commissaire  pour  la  nouvelle  rédaction  du  mémoire  de  M.  .Mausion  con- 
cernant l'intégration  des  équations ,  292  ;  commissaire  pour  le  mémoire 
de  concours  en  réponse  à  la  question  concernant  la  théorie  des  fonc- 
tions d'une  variable  imaginaire,  293;  rapport  sur  ce  travail,  716. 

Tinanl  [Louis).  —  Hommage  d'un  médaillon  représentant  feu  Sylvain 
Van  De  Weyer,  333. 


TABLE    DES    AUTEURS.  87Ô 


Valérius  {H.).  -  Sur  la  température  de  combustion  des  combustibles  or- 
dinaires, brûlés  à  l'air  libre,  654;  lecture  de  son  rapport  sur  le  cin- 
quième concours  quinquennal  des  sciences  physiques  et  mathéma- 
tiques, 844. 

Vallée  Poussin  {Ch.  de  la).  -  Lauréat  du  concours  de  la  classe  des 
sciences,  784,  846. 

Van  Bambeke  (Ch.).  —  Pré.seule  un  mémoire  sur  l'embryogénie  des 
poissons  osseux ,  ooB;  élu  correspondant  de  la  classe  des  sciences 
847. 

Van  Beneden  (Éd.).  —  Commissaire  pour  le  mémoire  de  concours  en  ré- 
ponse à  la  question  concernant  le  polymorphisme  des  champignons,  296  : 
lecture  de  son  rapport  sur  ce  travail,  6o3;  impression,  733;  commissaire 
pour  un  mémoire  de  M.  Ch.  Van  Bambeke  sur  l'embryogénie  des  pois- 
sons osseux,  537;  commissaire  pour  une  note  de  M.  Camille  Moreau  sur 
la  structure  de  la  corde  dorsale  de  l'Amphioxus,  655. 

Van  Beneden  (P.-J.).  —  Rapport  sur  une  notice  de  M.  Alp,  Dubois  con- 
cernant la  variabilité  de  certaines  espèces  du  geave Calli.ste,^^;  nommé 
membre  de  la  commission  spéciale  des  finances  pour  1873,633. 

Van  der  Haeghen  (Ph.).  —  Présente  une  notice  sur  les  écoles  et  l'alphabel 
des  Tamouls,  509;  rapport  de  M.  \ève  sur  ce  travail,  614. 

Vanderkindere  {Léon).  —  Rapports  de  MM.  de  Laveleye,  Faider  et  Wau- 
ters  sur  sa  notice  concernant  l'origine  des  magistrats  communaux  et, 
l'organisation  de  la  marke  dans  nos  contrées,  au  moyen  âge,  139,  140; 
impression  de  ce  travail,  236. 

Van  der  Mensbnigyhe  (G.).  —  Rapports  de  iM.M.  J.  Plateau  et  F.  Dupre/- 
sur  son  mémoire  intitulé  :  L'électricité  statique  exerce-l-elle  une  in- 
lluence  sur  la  tension  superficielle  des  li(|uides?  17,  19. 

Van  De  Wejjer  (fils).  —  Écrit  qu'il  reclierchera  les  documents  relatifs  aux 
notices  Van  Meenen  et  Raron,  promises  par  son  père,  638. 

Van  De  IVei/er  {M'"'  Sylvain).  —  Remercie  pour  les  sentiments  exprimes 
pai'  l'Académie  lors  du  décès  de  son  époux,  132. 

Van  Hassell  (André).  —  Annonce  de  sa  mort  ,  708. 

Van  Hollebeke  (B  ).  —  Hommage  d'ouvrage,  613. 

Van  Weddingen  (l'abbé).  —  Remercie  pour  sa  médaille  de  concours,  lô.". 

Vène  (A  ).  —  Annonce  de  sa  mort,  403. 

Vivier(J.). —  Présente  une  note  sur  la  constiliitioi]  ph.vsiciue  des  conit'tts. 
632. 

2™''  SLRIE,  TOME   .XXXVIll.  50 


874  TAltLi;    Dl-S    AiriEUUS. 


w. 


VVappers  [le  baron  Gi(staf).  —  Annonce  de  sa  niorl,  665,  709. 

Wattier.  —  Donne  connaissance  de  diverses  découvertes  scienlllit|ues 
qu'il  a  faites,  291. 

Waulers  (Alphonse).  —  Rapport  sur  la  notice  de  M.  Léon  Vanderkindere 
concernant  l'origine  des  magistrats  communaux,  etc.,  140:  hommage 
d'ouvrage  ,613:  Henri  III ,  duc  de  Brabant  (1"  partie) ,  672. 


8^r 


'1 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Arclieoloyie.  —  M.  L.  Galeslool  présenle  iiiie  nolice  intitulée  ;  Fouilles  ei 
découvertes  crantiquités  romaines  à  Assciie,  671. 

Aslronomie.  —  Rapports  de  MM.  E.  Quetelet,  .Mailiy  et  Liagre  sur  le 
mémoire  de  M.  F.  Terby  concernanl  l'aspect  physique  de  la  planète  Mars, 
7.  12,  13;  M.  Terby  présente  une  note  relative  à  un  travail  du  comte  de 
Rosse  sur  des  observations  de  .lupiter ,  faites  eu  1873, 293;  M.  Terby  est 
autorisé  à  retirer  cette  note,  407;  nouvelles  reclierches  sur  la  fréquence 
de  la  scintillation  des  étoiles  dans  ses  rapports  avec  la  constitution  de 
leur  lumière,  d'après  l'analyse  spectrale,  par  M.  Ch.  Montigny,  500:  la 
comète  de  Coggia,  observée  à  Bruxelles,  à  Louvain  et  à  Malines;  notes 
de  MM.  E.  Quetelet,  Terby  et  Rernaeris,  319,  351,  352;  M.  Houzeau 
présente  un  mémoire  intitulé;  Résumé  de  quelques  observations  astro- 
nomiques et  météorologiques  faites  dans  la  zone  surlempérée  et  entre 
les  tropiques,  40o;  lecture  des  rapports  de  MM.  Liagre  et  E.  Quetelet 
sur  ce  travail,  5o8;  M.  Terby  présente  une  note  sur  l'aspect  de  la  pla- 
nète Jupiter  pendant  son  opposition  en  1874,  et  sur  le  passage  des  satel- 
lites II  et  III  et  de  leurs  ombres  pendant  la  soirée  du  25  mars,  406; 
rapports  de  MM.  E  Quetelet  et  Liagre  sur  celte  note,  559,  560;  im- 
|)ression.591  ;  les  Perséides  en  1874, communication  de  M.  E.  Quetelet, 
410;  observations  des  étoiles  lilanles  de  la  période  d'août  1874.  faites  à 
Louvain  par  M.  Terby,  418;  .M.  Estourgies  présente  une  note  intitulée  : 
Calculs  de  l'éclipsé  de  soleil  du  10  octobre  et  de-i'occullation  de  Vénus 
du  14  octobre  1874,  338;  oliservation  de  l'écIipse  de  soleil  du  10  octobre 
1874,  faite  à  l'Observatoire  royaV  de  Bruxelles;  communication  de 
.M.  E.  Quetelet,  506;  observal^on  de  l'occultation  de  Vénus  par  la  lune, 
le  14  octobre  1874,  l'aile  à'f'Observaloire  royal  de  Bruxelles;  comnm- 
nication  du  même, ^T:  M.  Vivier  présente  un  travail  sur  la  constitu- 
lion  physique  d^ comètes,  652. 


87()  TABLE    DES    MATIÈRES. 


B. 

Bibliographie.  —  iNole  de  M.  A.  Le  Roy  sur  un  ouvrage  de  M.  Léon 
Jacques,  inlilulé  :  Griffes  roses,  134;  noie  de  M.  Poullel  sur  un  ouvrage 
de  M.  Posvvick,  inlilulé  :  Histoire  généalogique  et  biographique  de  la 
noblesse  limboargeoise ,  307;  note  de  M.  Folie  an  sujet  de  l'ouvrage 
deMeyei'Swr  le  calcul  des  probabilités,  et  sur  un  travail  de  M.  Clau- 
sius,oo();  note  de  M.  Le  Roy  sur  deux  ouvrages  de  M.  le  marquis  de 
Queux  de  S'-Hilaire,  inlilulés  :  Le  livre  des  cent  Ballades  el  le  Traicté  de 
Gelta  et  d'Amphitryon,  667. 

Billets  cachetés.  —  Dépôt  d'un  billet  cacheté  par  M.  W.  Spring,  555. 

Biographie  —  M.  Melsens  présente  une  nouvelle  rédaction  de  son 
mémoire  historique  sur  Van  Helmont,  "292;  lecture  des  rapports  de 
MM.  Stas,  de  Koninck  et  Doniiy  sur  ce  travail, 407;  notice  sur  Frédéric 
Van  de  Kerkhove,  jeune  paysagiste,  mort  à  l'âge  de  10  ans  et  1 1  mois, 
par  M.  Ad.  Siret,  591,  536;  notice  sur  L.-A.-J.  Quelelet,  par  M.  Éd. 
Mailly,  810.  ~  Voir  Histoire. 

Biographie  nationale  (Commission  de  la).  —  Motion  de  M.  le  général 
Guillaume,  président  de  la  Commission,  au  sujet  de  M.  Van  Hassell,  671. 

Botanique.  —  Rapports  de  MM.  Morren,  Rellynck  et  Éd.  Van  Reneden  sur 
le  mémoire  de  concours  concernant  le  polymorphisme  des  champignons, 
655,  719,  725,  755.  —  Voir  Paléontologie. 

Bustes  des  académiciens  décédés.  —  Lettres  de  M.  le  Ministre  de  l'inté- 
rieur relatives  aux  bustes  de  MM.  Ad.  Quetelet  el  Dandelin ,  2, 281 ,  282, 
290,  571,  713:  dépôt  du  buste  de  M.  le  conmiandeur  de  Nieupori,  554. 


Caisse  centrale  des  ariisles  belges.  —  M.  Ed.  Fétis  donne  lecture  du 
compte-rendu  des  opérations  de  la  cai.sse  pendant  l'année  1875,711. 

Chimie.  -  M.W.  Spring  présente  une  notice  intitulée:  Nouvelles  recherches 
sur  la  constitution  des  acides  polythioniques,  4;  rapports  de  MM.  Stas 
et  de  Koninck  sur  cette  notice,  22,  2-5;  impression,  108;  note  sur 
l'importance  du  gisement  de  phosphate  de  chaux  des  environs  de  Ciply 
(province  de  Hainaut),  par  M.  Melsens,  25;  rectitication  à  celte  notice, 
442;  note  sur  la  conservation  du  virus  vaccin,  par  le  même  ,  55;  note 
sur  les  charbons  décolorants, leur  production  artificielle  et  la  révivifica- 
lion  des  noirs  employés  dans  l'industrie,  par  le  même,  58;  M.  W.SprIng 
présente  un  travail  inlilulé:  Note  sur  deux  nouveaux  chlorures  d'acides 


TABLE    DES    MATIÈRES.  877 

organiques,  293;  rapports  de  MM.  Slas  et  de  Koninck  sur  celle  note, 

407,  408;  impression,  494;  M.  W.  Spring  présente  un  travail  intitulé  : 
Notice  sur  l'action  du  pentachlorure  de  phosphore  sur  les  hjposuIGles 
inorganiques ,  293;  rapports  de  MM.  Slas  et  de  Koninck  sur  celte  notice , 

408,  409;  impression,  503;  M.  Rottier  présente  une  note  intitulée: 
Recherches  sur  la  conservation  du  bois  au  moyen  des  sels  de  cuivre, 
406  ;  rapports  de  MM.  Donny  et  Melsens  sur  cette  note,  560,  562  ;  impres- 
sion, 595  ;  sur  l'anhydride  hypo-azotique,  par  M.  L.  Henry,  442;  sur  la 
production  des  hydrocarbures  acétyléniques  et  la  classilicalion  des 
hydrocarbures  tétraalomiques  en  général ,  par  le  même,  448:  note  sur 
un  procédé  pour  donner  ou  pour  rendre  leur  couleur  rouge  aux  muscles 
conservés  dans  l'alcool,  par  M.  Félix  Plateau ,  476  ;  M.  Petermann  pré" 
sente  une  note  sur  les  gisements  de  phosphates  en  Relgique.  652; 
M.  Simon  présente  une  note  sur  la  composition  de  l'acide  humique 
naturel,  ibid. 

Concours  de  composition  musicale  (grand).  —  Lettre  de  M.  le  Ministre 
lie  l'inlérieur  relative  aux  instructions  de  voyage  à  donner  à  M.  Franz 
Servais,  lauréat  du  concours  de  1873,282:  réponse  de  M.  Gevaert  à 
cette  lettre,  370. 

Concours  de  gravure  (grand).  —  Lauréats  du  concours  de  1874,  389. 

Concours  de  la  classe  des  beaux-arls.  —  Rapports  de  MM.  Siret,  J.  Geefs 
et  DeMau  sur  le  mémoire  de  concours  concernant  l'histoire  de  la  sculp- 
ture aux  Pays-Bas  pendant  les  XVIl^'  et  XVIII>-  siècles,  371,  380,  386; 
ralitication  des  conclusions  de  ces  rapports  par  la  classe  des  beaux-arts, 
390:  jugement  du  concours  d'art  appliqué,  378,  379;  MM.  Demannez 
et  Dillens  lauréats,  380,  389;  proclamation  des  résultats  des  concours, 
598;  programme  pour  1875,  555,  639. 

Concours  de  la  classe  des  lettres.  —  Programme  pour  1876,  135;  lettre 
de  l'auteur  du  travail  sur  l'histoire  de  la  philologie  thyoise,  envoyé  en 
réponse  à  une  question  du  programme  pour  1874,  369. 

Concours  de  la  classe  des  .sciences.  —  Mémoires  reçus  en  réponse  aux 
questions  du  programme  pour  1874  et  nomination  de  commissaires,  4, 
294,  558  ;  rapports  de  MM.  Morren,  lîellynck  et  Ed.  Van  Beneden  sur  le 
mémoire  concernant  le  polymorphisme  des  champignons,  653,  719.  725, 
735;  M.  A.  Gilkiuet  lauréat,  747;  rapports  de  MM.  Catalan,  De  ïilly  et 
Sleichen  sur  le  mémoire  concernant  la  théorie  des  fonctions  d'une 
variable  imaginaire, 7 14, 71 6, 71 8; lecture  des  rapports  de  MM.  Melsens, 
Montigny,  Folie  et  Stas  sur  le  mémoire  concernant  la  température  de 
l'espace  et  la  chaleur  spécifique  absolue  des  corps  simples  et  des  corps 


mS  TABLE    DES    MATIÈRES. 

composés,  718;  rapports  de  MM.  de  Koniiick,  Dewalque  et  Malaise  sur 
le  mémoire  concernant  les  roches  piutoniennes  de  la  Belgique,  748,  750, 
773;  MM.  de  la  Vallée  Poussin  et  Renard  lauréats,  784  ;  proclamation  des 
résultats  du  concours  de  1874,  84S. 

Concours  de  Rome  {grands).  —  Projet  concernant  un  établissement  à 
fonder  à  Rome  pour  les  lauréats  des  grands  concours,  283;  proposition 
de  M.  Slingeneyer  au  sujet  des  études  artistiques  des  pensionnaires  du 
gouvernement  à  Rome,  284  ;  lettre  de  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  annon- 
çant que  la  pension  des  lauréats  a  été  fixée,  par  arrêté  royal,  à  4,000 
francs  ,371. 

Concours  de  Stassarl  (grand).  —  Question  pour  la  troisième  période  de 
ce  concours,  138. 

Concours  quinquennal  de  littéralure  flamande.  —  Formation  de  la  liste 
des  membres  du  jury  chargé  de  juger  la  cinquième  période  de  ce  con- 
cours, 612. 

Concours  quinquennal  des  sciences  phijsiques  et  mathématiques.  —  Le 
prix  de  la  ^^  période  de  ce  concours  est  décerné  à  M.  Gloesener,  6o0, 
846;  lecture,  par  M.  H.  Valérius ,  du  rapport  du  jury  qui  a  jugé  ce  con- 
cours, 844. 


D. 


Dons.  —  Dons  d'ouvrages  :  par  M.  le  Ministre  de  l'intérieur,  2,  282,  291, 
568,  405,  S07,  534,  613,  713;  par  M.  Malaise,  3,  336;  par  MM.  Marion, 
de  Saporta  et  Sinkel,  3;  par  M.  le  Gouverneur  du  Brabant,  4,  537;  par 
M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove,  133,  613;  par  M.  Heremans,  133, 
666;  par  MM.  Hautcœur,  Fayen,  Jacques,  Barlet  et  Hardouin,  134  et 
133;  par  MM.  Catalan,  Cornet  et  Briart,  291  ;  par  MM.  Mansion.von 
Lasaulx,  J.  Hermann  et  A.  Petermann,  292;  par  M.  le  Ministre  de  la 
justice,  368,  663;  par  MM.  Ellero  et  Sieur,  568;  par  M.  G.  B.  Airy,  403  ; 
par  MM.  Guillaume  ,  Rivier ,  Arrivabene  ,  Heuschling  et  Poswick,  307  ; 
don  d'un  médaillon,  par  M.  L.  Tinant,  333;  don  d'ouvrages:  par  M.  Banal" 
Rivet,  554  ;  par  MM.  St.  Meunier  et  E.  Quetelet,  333;  par  MM.  Bellynck 
et  Folie,  356;  par  M.  Graindorge,  337;  par  MM.  Wauters  et  Van  Holle- 
beke,  613;  par  M.  Noiet  de  Brauwere,  615,  666  ;  par  MM.  Morren  et 
Candèze,  631  ;  par  MM.  Castan,  P.  Devaux,  Scheler,  Thiry ,  Hock  et 
le  marquis  de  Queux  de  Saint-Hilaire,  666;  par  MM.  Éd.  Fétis  et  le 
baron  Limnander,  710;  par  M.  A.  Perrey,  713. 


TABLE    DES    MATIÈRES.  S79 


E. 


Élections  et  noniinalions.  —  Formai  ion  de  la  liste  des  membres  du  jury 
chargé  de  juger  la  cinquième  période  du  concours  quinquennal  de  lit- 
térature flamande,  612;  M.  Brialmont  nommé  président  de  l'Académie 
pour  1875,  630,  664,  709;  élection  des  commissions  spéciales  des 
finances  des  trois  classes,  633,  671  ,  710;  MM.  Briart  et  Plateau  élus 
membres  titulaires  de  la  classe  des  sciences,  MM.  Menabrea,  Mayer,  Le 
V'errier,  Struve,  Secchi.  Huxley,  Pringsheim  et  .Niisson  élus  associés. 
M.  Van  Bambekeélu  correspondant,  847. 

Esthétique.  —  Le  beau  dans  l'art,  discours  par  M.  De  Keyser,  595. 

G. 

Géographie.  —  .\nnonce  de  Tépoque  fixée  pour  la  réunion,  à  Paris ,  du 
Congrès  international  de  géographie,  oo4. 

Géologie.  —  Sur  quelques  roches  porphyriques  de  Belgique,  par  M.  C.  Ma- 
laise, 70;  M.  R.  Malherbe  présente  une  note  intitulée  :  Des  chlorures 
alcalins  de  la  formation  houillère,  338;  rapports  de  MM.  de  Koninck, 
Dewalque  et  Malaise  sur  le  mémoire  de  concours  concernant  les  roches 
plutoniennes  de  la  Belgique,  748,  750,  773.  —  Voir  Chimie. 

Gravure.  —  Jugement  du  concours  de  gravure  ouvert  par  la  classe  des 
beaux-arls,  579;  M.  J.  Demannez  lauréat,  ô80;  lauréats  du  grand  con- 
cours de  gravure  de  1874,  589,  401. 

H. 

Histoire.  —  Notice  sur  l'origine  des  magistrats  coamiunaux  et  sur  l'or- 
ganisation de  la  Marke  dans  nos  contrées  au  moyen  âge,  par  M.  L.  Van- 
derkindere,  256  ;  rapport  de  M.M.  de  Laveleye,  Faider  et  Wauters  sur 
cette  notice,  159,  140;  le  cardinal  Bentivoglio;  sa  nonciature  à 
Bruxelles,  par  M.  Gachard,  134;  deux  lettres  inédites  de  Jacques  de 
Molay,  par  M.  le  baron  Kervyn  de  Leltenhove,226;  M.  J.-J.  De  Smel 
présente  une  notice  sur  les  premières  années  de  don  Juan  d'Autriche, 
lils  de  Charles-Quint,  569;  lecture  des  rapports  de  MM.  Juste  et  Ga- 
chard sur  ce  travail,  309;  impression,  310;  M.  Paul  Devaux  donne  lec- 
ture d'un  mémoire  sur  les  guerres  médiques,  //;/(/.;  Henri  III ,  duc  de 
Brabant,  par  M.  A.  Wauters,  67:?. 


880  TABLE    DES    MATIÈRES. 


Jurisprudence.  —  Le  Compendium  InstiUitionum  de  Nicolas  de  Bruxelles; 
notice  par  M.  A.  Rivier,  619. 

M. 

Mathématiques  pures  et  appliquées.  —  Rapports  de  MM.  Folie  et  Catalan 
sur  la  note  de  M.  Saitel  concernant  la  détermination,  sans  calcul,  de 
l'ordre  d'un  Heu  géométrique,  13,  17;  M.  Saitel  présente  une  nouvelle 
rédaction  de  ce  travail,  406;  quelques  nouveaux   théorèmes  sur  les 
cubiques  gauches,  par  M.  F.  Folie,  65;  sur  la  généralisation  de  la  for- 
mule de  Binel,  par  M.  De  Tilly,  67;  quelques  réflexions  sur  le  problème 
de  Malfatti,par  M.  Simons,  88;  M.  Catalan  présente  une  note  sur  la 
polhodie,  292;  M.  Mansion  présente  une  nouvelle  rédaction  de  son  mé- 
moire couronné  relatif  à  l'intégration  des  équations,  292;  M.  Simons 
présente  une  note  concernant  une  nouvelle  démonstration  d'un  théo- 
rème de  Fermai,  et  une  note  concernant  la  solution  de  deux  questions 
de  permutations,  295;  rapports  verbaux  de  MM.  Catalan  et  Folie  sur 
ces  notes,  409;  lettre  de  M.  Goubel  relative  à  la  quadrature  du  cercle, 
405;  M.  Mansion  présente  une  note  intitulée:  Démonstration  de  la  pro- 
priété fondamentale  des  équations  dilTérentielles  linéaires,  405;  rap- 
ports de  MM.  Catalan  et  Folie  sur  cette  note,  562,  565;  impression,  578; 
quekiues  nouveaux  théorèmes  sur  les  courbes  gauches  du  quatrième 
ordre,  par  M.  Folie,  465;  sur  une  récréation  arithmétique  (2«  note),  par 
M.  J.  Plateau,  469;  note  sur  le  problème  de  Malfatti,  par  M.  E.  Catalan, 
480;  rapports  de  MM.  Catalan,  De  Tilly  et  Steichen  sur  le  mémoire  de 
concours  concernant  la  théorie   des  fonctions   d'une  variable  imagi- 
naire, 714,  716,  718. 
Météorologie  et  physique  du  ç/lobe.  —  Rapports  de  MM.  Duprez,  E.  Que- 
telet  et  Mailly  sur  la  note  de  M.  Perrey  concernant  les  tremblements  de 
terre  ressentis  en  1871,  297,  298;  note  sur  les  orages  du  10  juillet  1874. 
par  M.  Ch.  Hooreman,  354  ;  M.  Houzeau  présente  un  mémoire  intitulé  : 
Résumé  de  (juelques  observations  astronomiques  et   météorologiques 
faites  dans  la  zone  surtempérée  et  entre  les  tropiques,  405;  lecture  des 
rapports  de  MxM.  Liagre  et  E.  Quetelet  sur  ce  travail,  558;  note  sur  un 
phénomène  auroral  remarqué  à  Louvain  le  soir  du  5  octobre  1874,  et  sur 
sa  coïncidence  avec  des  éclairs  observés  dans  le  Nord,  par  M.  Terby,  419; 
note  sur  les  perturbations  magnétiques  qui  ont  accompagné  l'aurore 


TABLh    DES    MATIÈHES.  881 

l)0ieale  du  5  octobre  1874,  par  M.  E.  Quelelel,  421  ;  perlurbalion  iiia- 
gnélique  du  9  octobre  1874,  noie  par  M.  Ch.  Hooreman,  422. 
Métrologie.  -   Rapports  de  MM.  Liagre,  Montigiiy  et  Maillysur  le  mé- 
moire de  M.  C.  Rodenbacli  concernant  l'étalon  prototype  universel  des 
mesures  de  longueur,  5.  7. 

N. 

Nécrologie.  —  Annonce  de  la  mort  de  MM.  le  vicomte  B.  Du  Bus  et  Ch. 

Poelman  ,  290;  de  M.  Partoes,  589;  de  M.  Élie  de  Beaumont,  402;  de 

M.  Vène,  405;  de  M.  Guizol,  506;  de  M.  C.-P.  Cooper,  065;  de  M.  le 

baron  G.  Wappers,f6/cZ.;  de  M.  Van  Hasselt,  708. 
Notices  biographiques  pour  l'Anmuiire.  —  M.  Th.   Juste  accepte  de 

rédiger  la  notice  biographique  de  M.  Van  DeWeyer,  152;  M.  F.  Plateau 

celle  de  M.  Ch.   Poelman,  290  ;  M.  Alvin  celle  de   M.  Partoes,  589; 

M.  Fetis  celle  de  M.  Baron .  554;  M.  .1.  Lcclercq  celle  de  M.  Jouvenel, 

ibid. 

O. 

Ouvrages  présentes.  —  En  juillet,  284:  en  août,  572;  en  septembre  et 
octobre,  559;  en  novembre.  645;  en  décembre  ,  848. 


ralénutcjlogie.  —  Description  de  quelques  |)lanles  fossiles  de  l'étage  des 
psammites  du  Condroz  (dévonien  supérieui'),  par  M.  Fr.  Crépin,556; 
sur  la  découverte  du  Diclyoncma  sociale ,  Suit.,  de  la  faune  i)riniordiale, 
dans  le  massif  de  Rocroy,  par  M.  C.  Malaise,  464;  fragments  paléonto- 
logiques  pour  servir  à  la  Flore  du  terrain  houiller  de  Belgi(iue,  par 
M.  F  Crépi n,  568. 

Peinture.  —  Jugement  du  concours  de  peinture  ouvert  par  la  classe  des 
beaux-arts.  ô78;  M.  J.  Dillens  lauréat,  589.  -  Voir  Hiographie. 

Phénomènes  périodiques.  —  Documents  présentés,  pour  le  recueil  des 
phénomènes  périodiques,  par  M.  Duprez,  2;  par  M.  Cavaliei',  2,  291, 
405,  554,  650;  par  M.  Bellynck,  405;  par  M   Bernardin  ,  534. 

Philologie.  -  M.  Van  der  Haegen  j.résente  une  note  intitulée  :  Les  écoles 
et  l'alphabet  des  Tamouls ,  509  ;  rapport  de  M.  Nève  sur  celte  note, 614; 
Overblijfsels  van  den  instrumenlaal  in  het  Nederlandsch,  doorM.  Here- 
mans,  091. 

Physique.  —  Rapports  de  MM.  J.  Plateau  et  Duprez  sur  la  note  de  M  Van 


882  TABLE    DES    MATIÈRES. 

der  Meiisbrugghe ,  intitulée  :  L'électricité  statique  exerce-l-elle  une 
influence  sur  la  tension  superficielle  des  liquides?  17, 19;  M.  A  Daussin 
présente  un  mémoire  sur  un  moteur  électro-magnétique  à  armature 
sans  fin,  293;  extrait  d'une  lettre  de  M.  W.  Spring  relatif  à  des 
recherches  sur  la  chaleur  spécifique  des  corps,  ibid.;  notes  sur  les 
paratonnerres,  par  M.  Melsens,  520,  1-25;  M.  W  Spring  présente  un 
mémoire  concernant  la  dilatation,  la  chaleur  spécifique  des  alliages 
fusibles  el  leurs  rapports  avec  la  loi  de  Neumann,  405;  lettres  ministé- 
rielles relatives  à  une  question  de  paratonnerres,  354;  sur  la  tempéra- 
ture de  combustion  des  combustibles  ordinaires,  brûlés  à  l'air  libre, 
par  M.  H.  Valérius,  634;  lecture  des  rapjiorts  de  MM.  Melsens,  Mon- 
tigny.  Folie  et  Stas  sur  le  mémoire  de  concours  concernant  la  tempéra- 
ture de  l'espace  el  la  chaleur  spécifique  absolue  des  corps  simples  et 
des  corps  composés  ,718. 
Publications  académiques.  —  Demande  d'échange,  3;  M.  le  Secrétaire 
perpétuel  présente  le  tome  XXXVIIl  des  Mémoires  couronnés  in-4",  405. 
508. 

R. 

Rapports.  —  Rapports  de  MM.  Liagre,  Montigny  el  Mailly  sur  le  mémoire 
de  M.  C.  Rodenbach  concernant  l'étalon  prototype  universel  des  mesures 
de  longueur,  5,  7;  de  MM.  E.  Quetelel,  Mailly  et  Liagre  sur  le  mémoire 
de  M  F.  Terby  concernant  l'aspect  physique  de  la  planète  Mars,  7, 12, 
15:  de  MM.  Folie  et  Catalan  sur  la  m.ie  de  M.  Sallol  concernant  la  déter- 
mination, sans  calcul,  de  l'ordre  d'un  lieu  géométrique ,  13,  17;  de 
MM.  J.  Plateau  el  Duprez  sur  la  noie  de  M.  Van  der  Mensbrugghe, 
intitulée  :  L'électricité  statique  exerce-t-elle  une  influence  sur  la  ten- 
sion superficielle  des  liquides?  17,  19;  de  MM.  de  Selys  Longchamps  el 
P.-J.  Van  Beneden  sur  la  note  de  M.  A.  Dubois  concernanl  la  variabilité 
de  certaines  espèces  du  sous-genre  Cahiste ,  1 9, 22  ;  rapports  de  MM.  Stas 
elde  Koninck  sur  la  note  de  M.  W.  Spring  conceinanl  la  consliiution 
des  acides  polythioniques,  22,  25;  rapports  de  MM.de  Laveleye,  Faider 
el  Wauters  sur  la  notice  de  M.  L.  Vauderkindere  concernant  l'origine 
des  magistrats  communaux,  etc.,  139,  140;  de  MM.  Duprez,  E.  Quetelet 
el  Mailly  sur  la  noie  de  M.  Perrey  concernant  les  Iremblements  de  terre 
ressentis  en  1871 ,  297  ,  298  ;  rapports  sur  les  concours  de  peinture  elde 
gravure  ouverts  par  la  classe  des  beaux-arts,  578,  579;  rapports  de 
MM.  Siret,  J.  Geefs  el  De  Man  sur  le  mémoire  de  concours  concernant 
l'histoire  de  la  sculpture  en  Belgique  aux  XVJI'  el  XV!!!*"  siècles.  580, 


TABLE    DES    MATIÈRES.  885 

586;  lecture  des  rapports  de  MM  Stas,  de  Koninek  et  Donny  sur  le 
mémoire  historique  de  M.  Meisens  relatif  à  Van  Helmont,  407  ;  rapport 
verbal  de  M.  de  Selys  Longchamps  sur  une  note  de  M.  A.Dubois  relative 
aux  espèces  du  sous-genre  Xanllwura,  407  ;  rapports  de  MM.  Stas  et 
de  Koninek  sur  la  note  de  M.  W.  Spring  concernant  deux  nouveaux 
chlorures  d'acides  organiques,  et  sur  sa  note  concernant  l'action  du 
penlachlorure  de  phosphore  sur  les  hyposulfites  inorganiques,  407, 
408 ,  409;  rapports  verbaux  de  MM.  Catalan  et  Folie  sur  deux  noies  de 
M.  Simons,  concernant  la  solution  de  deux  questions  de  permutations 
et  la  démonstration  d'un  théorème  de  Fermai,  409;  lecture  des  rapports 
de  MM.  Juste  et  Gachard  sur  la  notice  de  M.  De  Smet  relative  à  don 
Juan  d'Autriche,  309;  lecture  des  rapports  de  MM.  Liagre  et  E.  Quelelet 
sur  le  mémoire  de  M.  Houzeau  concernant  des  observations  astrono- 
miques et  météorologiques  faites  dans  la  zone  surtempérée  et  entre  les 
tropiques,  358  ;  rapports  de  MM.  E.  Quetelet  et  Liagre  sur  la  note  de 
M.  Terby  concernant  l'aspect  de  la  planète  Jupiter  pendant  son  opposi- 
tion en  1874,  etc.,  359,  560;  de  MM.  Donny  et  Meisens  sur  la  note  de 
M.  Rottier  relative  à  la  conservation  du  bois  au  moyen  des  sels  de 
cuivre,  360,  562;  de  MM.  Catalan  et  Folie  sur  la  note  de  M.  Mansion 
concernant  les  équations  différentielles  linéaires,  562,  565;  rapports 
verbaux  de  MM.  Faider  et  De  Decker  sur  la  note  de  M.  Heuschling  rela- 
tive à  l'origine  et  aux  progrès  de  la  statistique  internationale,  614; 
rappoit  de  M  Nève  sur  la  notice  de  M.  Van  der  Ifaeghen  concernant  les 
écoles  et  l'alphabet  des  Tamouls,  614;  rapports  de  MM.  Morren,  Bel- 
l\nck  et  Éd.  Van  Beneden  sur  le  mémoire  de  concours  concernant  le 
polymorphisme  des  champignons,  633,  719,  725,  733;  de  MM.  Catalan, 
De  Tilly  et  Steichen  sur  le  mémoire  de  concours  concernant  la  théorie 
des  fonctions  d'une  variable  imaginaire,  714,  716,  718;  lecture  des 
rapports  de  MM.  Meisens,  Montigny,  Folie  et  Stas  sur  le  mémoire  de 
concours  concernant  la  température  de  l'espace  et  la  chaleur  spécifique 
absolue  des  corps  simples  et  des  corps  composés,  718;  rapports  de 
MM.  de  Koninek,  Dewalque  et  Malaise  sur  le  mémoire  de  concours 
concernant  les  roches  plutoniennes  de  la  Belgique,  748,  730,  773. 


S. 


Sciences  morales  et  politiques.  —  M.  X.  Heuschling  présente  une  note 
intitulée:  La  statistique  internationale,  son  origine  et  ses  progrès,  309; 
rapports  verbaux  de  MM.  Faider  et  De  Decker  sur  celle  note,  614. 

Sculpture.  —  Rapports  de  MM.  Siret ,  G.  Geefs  et  De  Man  sur  le  mémoire 


y84  TABLE    DES    MATIÈRIiS. 

de  concours  conceruanl  riiistoiro  de  la  sculplure  en  Belgique  aux  XVII< 
et  XVIII"  siècles,  371 ,  380,  386. 
Souscriptions.  —  Le  comité  pour  l'érection  d'un  monument  à  Sylvain 
Van  De  Weyer  adresse  une  liste  de  souscription  aux  trois  classes  de 
l'Académie,  290,  367,  371  ;  présentation  de  listes  de  souscription  pour 
le  monument  à  élever  à  Ad.  Quetelet,  406,  S09,  535;  M.  le  D^  Burg- 
graeve  adresse  une  liste  de  souscription  pour  son  ouvrage  intitulé  : 
Monument  à  Jeûner,  630,  663,  710. 


Zoologie.  —  M.  A.  Duljois  présente  une  note  intitulée  :  Decription  d'un 
Spizaëtus  nouveau,  4;  impression  de  cette  note,  129;  remarques  sur 
la  variabilité  de  certaines  espèces  du  genre  Calliste,  par  M.  A.  Dubois, 
124  ;  rapports  de  MM.  de  Selys  Longchanips  et  P.-J.  Van  Beneden  sur 
ce  travail,  19,  22  ;  M.  A.  Dubois  présente  une  note  intitulée:  Remarques 
morphologiques  sur  les  espèces  du  sous-genre  Xanlhoiira,  406;  rapport 
verbal  de  M.  de  Selys  Longchanips  sur  cette  note,  407;  impression, 
488;  M.  Van  Bambeke  présente  un  mémoire  sur  l'embryogénie  des  pois- 
sons osseux,  537;  M.  Moreau  présente  un  travail  sur  la  structure  de  la 
corde  dorsale  de  l'Amphioxus,  632;  les  moyens  d'attaque  et  de  défense 
chez  les  insectes,  discours  par  M.  Candéze,  787. 


PUBLICATIONS  DE  L'ACADÉMIR  ROYALE  DE  BELGIQUE. 

.\onvcaiix  Mémoires,  lomes  I-XIX  (1820-1 84o);  in-4'\  —  Mémoires. 
lomes  XX-XL  (1840-1875)  ;  in-4".  —  Prix  :  8  fr.  par  vol.  à  partir  du  tome  X. 

Mémoires  couronnés,  tomes  1-XV  (1817-1842);  111-4».  —  Mémoires 
couronnés  et  Mémoires  des  savants  étrangers,  tomes  XVI-XXXN  11 
(  18451874)  -.in-i".  —  Prix  :  8  fr.  par  vol.  à  partir  du  tome  XI] . 

Mémoires  couronnés  ,  in-8",  tomes  I-XXIII.  —  Prix  :  4  fr.  par  vol. 

Taities  dos  Mémoires  (1816-1857).  In-18. 

.annuaire,  1"-  à  il"^''  année,  1853-1875;  in-18.  Fr.  1,50. 

Bulletins,  l^e  série,  tomes  I-XXill  ;  —  "i:'"''  série,  tomes  I-XXXVIII; 
iii-S  ,  -  Annexes  aux  Bulletins  de  1854,  in-8".  -  Prix  :  4  fr.  par  vol. 

Tailles  sénéraiesdes  Bulletins  .tomes  I-XXlil,  l^  série  (1852-1850). 
ISoS,  in-S".  —  2"^"  série,  lomes  I-XX  (18.57-1866).  1867;  in-8". 

ISiltliograpliie  académique.  1854;  1  vol.  in-lS. 

(-aialoe«ic  de  la  bibliothèque  de  l'Académie.  1850;  in-S". 

Catalogue  de  la  bibliothèque  de  M.  le  baron  de  Sla.ssart.  1863  ;  ia-8". 

Oiriènie  anniversaire  de  fondation  {M'i-X^IT).  1872;2vol.  gr.  in-8. 

Commission  pour  la  publication  des  monuments  de  la  lillérature 
flamande. 
«ll'Uivres  de  Van  .Maerlaut  :  Der  natuiien  «loeme  ,  tome  1'''' ,  publié  pai' 
M.  Ilormans,  1857;  1  vol.  in-8";  —  Hv.mrvuei,.  avec  Glossaire,  publié  par 
M.  .1.  David,  1858-1800;  4  vol.  in-8";—  Ai.k.vwder  Geesten,  publie  par 
M.  Siicllaerl,  1860-180::^;  2  .vol.  in-8\  —  !\ederlnijdsclie  gedicliten,  elc, 
publiées  par  M.  Snellaert,  1869;  1  vol.  in-8".  —  Parîlionopeus  van  nioys. 
publie  par  M.  Bormans,  1871  ;  I  vol.  in-8\  —  JSpegUel  der  'ivysheil.  door 
.lan  IMaet,  publié  par  M.  iiormans  1872;  1  vol.  in-8". 

(U)mmission  pour  la  publication  d'une  collection  des  œuvres  des 
grands  écrivains  du  pai/s. 
OKuvres  de  t'Iiastcllain,  publiées  par  i\i.  Kervyn  de  Lettenhovi-, 
1805-1865,  8  vol.  in-8". —  I>e  k"  livre  des  4'hroniques  de  Frol.««.sart. 
publie  par  le  mémo.  1865,  2  vol.  in-8«.  —  Clironiques  de  Jehan  le  Bel . 
piihliees  par  M.  Polain.  1865.  2  vol.  in-8".—  lA  Koumans  de  «Jcomadès. 
piiliiie  par  M.  Van  llassell.  1866,2  vol.  in-8".  —  Bits  et  contes  de  .lean  et 
Baudituin  de  Condé,  publiés  par  M.  Auguste  Scheler.  1866,  5  vol.  in-8». 

—  IJ  arsd'amnur,  etc.,  publié  par  M.  .1.  Petit.  1866-1872,  2  vol.  in--8".  -- 
wicnvres  de  Froissart  :  Chroniques ,  publiées  par  M.  Kervyn  de  Lelten- 
hove.  1867-1875,  20  vol.  in-8";  -  Poésies,  publiées  par.M.  Scheler.  1870-1872, 
5  vol.  iii-8";  —  Glossaire  ,  publié  par  le  même.  1874,  un  vol.  in-8''. —  Lettres 
di-  «'omniiiies,  publiées  par  M   Kervyn  de  Lellenhove.  1867;  5  vol.  in-8'. 

—  »ils  de  ^Vatriquet  de  Couvin  ,  publiés  par  M.  .\.  Scheler.  1868,  1  vol. 
in-8".  —  l^es  Enfances  Ogier.  iMibliées  par  le  même.  1874,  1  vol.  in-8. — 
Bucves  de  Commarcliis,  par  Vdi'nès  11  Rois,  publié  par  le  même:  1874, 
1  vol.  iii-8".  —  MA  Koumans  de  Berte  ans  grans  pies,  publié  par  li' 
ménii;.  lS7i,  1  vol.  in-8". 

Commission  roi/ale  d'histoire. 
Collection  de  €lironic|ues  lielges  inédites,  publiées  par  ordre  du 
(Jouvcriicnient;  41  volumes  in-4". 

i'onipte  rendu  des  séances,  l''''  série,  avec  (able  (1837-1849),  17  vol.  in-8". 

—  2""'  série,  avec  table  (1830-1859),  15  vol.  in-8".  —  ôm<-  ^érw  (1860-1872), 
14  vol.  iii-8".  —  4""=  série,  lomes  1  et  11  (187.3-1874). 

Annexes  aux  Bulletins,  13  volumes  iu-8". 

Commission  pour  la  publication  d'une  Hinç/raphie  nationale. 
Biographie  nationale,!.  I  à  IV.  Bruxell.'s,  1 866-1873  ;  8  cah.  gr.  in-8". 

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