HARVARD UNIVERSITY
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MUSEUM OF COMPARATIVE ZOÔLOGY.
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BULLETINS
DE
L'ACADÉMIE ROYALE
DES
SCIENCES , DES LETTRES JJ DES BEAUX-ARTS
HF, BFXGIOIÎE.
40"" A^^ÉE, 2"-SER.. T. XXXVIII.
1874.
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Bruxelles,
F. HAYEZ, IMPRniEUK OE L ACADÉMIE liOVALE DE BELGIQUE.
MDCCCLXXIV.
BULLETINS
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
LETTRES ET DES BEAUX-AUTS DE BELGIQUE.
BULLETINS
DE
L'ACADÉMIE ROYALE
DES
SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS
DE BELGIQUE.
QUARANTE-TROISIÈME ANNÉE. — 2-^ SER., T. XXXVIII.
BRUXELLES,
F. HAYEZ, IMPRIMEl'U DE L ACADEMIE ROYALE DE BELGIQUE.
1874
(/}
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
DES
LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE.
1874. — No 7.
CLASSE DES SCIE]«CES.
Séance du â juillet 187â.
M. E. Candèze, directeur,
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : WSl. L. de Koninck, P.-J. Van Beneden ,
Edm. de Selys Longchamps, H. Xyst, Gluge, Melsens,
F. Duprez, G. Dewalque, H. Maus, M. Gloesener, F. Donn y,
Ch. Montigny, Éd. Dupont, C. Malaise, membres; E. Cata-
lan, associé; Éd. Mailly, Alph. Briart, F. Folie, F. Pla-
teau, J. De Tilly, F. Crépin, correspondants.
2"°' SÉRIE , TOME XXXVIII. i
(2)
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'intérieur avait demandé à la classe
des beaux-arts de déléguer quelques-uns de ses membres
pour juger du mérite artistique et de la ressemblance du
buste de feu Adolphe Quetelet , commandé au statuaire
Fraikin.
La classe des sciences se rallie à l'avis unanime émis par
la classe des beaux-arts, savoir, qu'en présence de l'opinion
favorable exprimée par tous les académiciens à l'égard de
ce buste, exposé dans les salles de la Compagnie, il n'y a
pas lieu de nommer de commissaires.
La classe apprend avec un égal sentiment de satisfac-
tion que M. le iMinistre vient de commander au statuaire
Van Oemberg le buste de feu le colonel Dandelin, l'un de
ses anciens membres titulaires. Selon le désir de M. le
Ministre, le modèle de ce buste fera l'objet d'un examen ,
afin d'avoir un avis sur le mérite et la ressemblance de
l'œuvre.
— Le même haut fonctionnaire offre, pour la biblio-
thèque de l'Académie, un exemplaire du tome YIll des
Annales de la Société malacologiqiie de Belgique. — Remer-
cîments.
— M. Duprez présente le résumé de ses observations
météorologiques faites à Gand pendant l'année 1875.
M. Cavalier transmet un résumé semblable pourOstende,
relatif au mois de juin dernier.
( 5)
— M. C. Malaise fait hommage d'un exemplaire de son
Rapport sur une excursion scientifique en Allemagne et à
l'Exposition universelle de Vienne en 1873; brochure in-S".
Des remerdmenls sont votés à M. Malaise pour ce don,
ainsi qu'à MM. de Saporta et Marion , pour l'exemplaire de
leur ouvrage : Essai sur l'état de la végétation à l'époque
des marnes heersiennes de Gelinden, publié dans le tome
XXXVII des Mémoires couronnés et des Mémoires des
savants étrangers.
M. le directeur Candèze offre au nom de l'auteur,
M. Sinkel, un exemplaire d'un ouvrage intitulé : Ma vie
de marin. — Remercîments.
— L'Académie des lettres, sciences, arts et agriculture
de Metz envoie son programme de concours pour l'année
I87o.
— M. G. Dewalque annonce par écrit, en sa qualité de
secrétaire général de la Société géologique de Belgique,
la fondation de cette institution et propose l'échange de
ses Annales avec les publications académiques. — Un avis
favorable est émis sur celte demande, qui sera commu-
niquée à la commission administrative.
Une proposition semblable, faite par la Société de géo-
graphie de Lyon, de fondation récente, sera renvoyée
aussi à la commission administrative.
— Les établissements scientitiques suivants remercient
pour le dernier envoi annuel de publications académiques,
et adressent leurs récents travaux : la Société entomolo-
gique italienne de Florence, la Société des sciences natu-
relles de Milan , la Société scnckenbergeoise des natura-
listes à Francfort-sur-Mein, l'Observatoire de Prague,
(4)
l'Instilul impérial et royal géologique de Vienne, l'Acadé-
mie royale de Hongrie à Peslli, l'Instilut royal géologique
de Hongrie, de la même ville, le Bureau pour la recherche
géologique de la Suède à Stockholm, l'Université de Hei-
delberg, l'Académie impériale des sciences de S'-Péters-
hourg et la Société des sciences et des arts à Batavia.
— M. le gouverneur du Brabant adresse un exemplaire
du volume contenant , avec les procès-verbaux des séances
et les documents recueillis, le rapport fait au conseil pro-
vincial par la commission nommée pour l'examen des
questions relatives à la distribution d'eau dans l'agglomé-
ration bruxelloise. — Bemercîments.
— Les travaux manuscrits suivants feront l'objet de
rapports :
1" Nouvelles recherches sur la constitution des acides
poh/thioniques, par M. Walthère Spring. — Commissaires :
MM. Stas et de Koninck;
2" Description d'un Spizaète nouveau, par M. Alph.
Dubois, conservateur au Musée royal d'hisloire naturelle
de Bruxelles. — Commissaires: MM. de Selys Longchamps
et Éd. Dupont.
CONCOURS DE 1874.
La classe reçoit pour le concours de l'année actuelle,
dont le terme fatal expire le 1'^'' août prochain , un mémoire
en réponse à la première question : Perfectionner en quel-
que point important^ soit dans ses principes , soit dans ses
applications , la théorie des fonctions d'une variable ima-
( 3 )
(jinaire. Ce mémoire est accompagné d'un billet cacheté,
qui porte pour devise : JN'e rien faire contre la science et
pliilosop/ter sans souci des sots ni des méchants.
Les commissaires chargés de l'examen de ce mémoire
seront désignés dans la prochaine séance.
RAPPORTS.
L'étalon prototype universel des mesures de longueur,
par M. C. Rodenbach.
nappoi't de M. te eolonet Liagfe.
a Ce volumineux mémoire, qui a demandé à son au-
teur de nombreuses lectures et un temps considérable , a
pour objet d'établir que tous les systèmes de mesures qui
ont été employés dans l'antiquité, et même à une époque
plus rapprochée de nous, se rattachent à un type primor-
dial unique, la coudée de O'",o40. Celte longueur repré-
sente exactement, suivant l'auteur, le tiers de la stature
moyenne de l'homme sur le globe; c'est elle qui, avant la
dispersion des races humaines , a servi à dresser les plans
de la tour de Babel; c'est elle enfin que l'on retrouve,
diversement subdivisée, modifiée et altérée, dans les sys-
tèmes métriques de tous les peuples.
L'ouvrage de M. Rodenbach est un traité général de
métrologie, plutôt qu'un mémoire sur un point spécial de
cette science. L'auteur y fait preuve de beaucoup d'éru-
dition ; il met à profit la philologie comparée, l'archéologie
orientale, l'ethnographie et l'histoire. Dans un style clair et
(6 )
correct, bien que parfois un peu recherché, il passe en
revue les systèmes métriques des Chaldéens, des Égyp-
tiens, des Perses et de quelques autres peuples de l'Asie,
des Juifs, des Arabes, des Hindous, des Chinois et des
Japonais, des Grecs et des Romains. Malheureusement
l'esprit se perd au milieu de l'abondance des détails; l'ac-
cessoire noie le principal , et l'impression qui reste après
cette lecture fatigante est celle du vague et du conjectural.
L'idée fondamentale de M. Rodenbach, la seule qui,
dans son volumineux travail, puisse prétendre à l'origina-
lité, est celle qui consiste à rattacher toutes les mesures à
une coudée primitive de 0™,540, dérivant de la stature
humaine. Or, celte idée a déjà été exposée par lui dans nos
Bulletins (année 1870, n" 5); la note qu'il a consacrée à
ce sujet porte exactement le même titre que le mémoire
actuel, et elle a fait, dans le sein de la classe des lettres,
l'objet d'un rapport de la part de MM. le baron De Witte,
Ad. Quetelet et Nève.
A la suite de son mémoire, l'auteur a placé un très-
grand nombre de notes, indiquant les sources auxquelles
il a puisé, ou fournissant des détails complémentaires qui
n'ont pas trouvé de place convenable dans le texte. Ces
notes, qui s'élèvent au nombre de 512, sont propres à faire
juger de l'étendue du travail bibliographique auquel l'au-
teur a dû se livrer depuis longtemps sur la métrologie.
En résumé, le résultat obtenu n'est pas en rapport avec
le travail dépensé; l'ouvrage de M. Rodenbach n'est propre
à intéresser qu'une classe fort restreinte de lecteurs, et il
ne me semble pas de nature à trouver place dans un recueil
académique. A mon avis, la classe doit donc se borner à
adresser des remercîments à l'auteur. Toutefois, si M. Ro-
denbach se décidait à publier son livre, il mériterait d'être
(7)
encouragé, et, dans ce cas, l'Académie ferait acte de jus-
tice en recommandant à la bienveillance du gouvernement
le travail d'un fonctionnaire aussi intelligent que studieux. »
MM. Monligny et Mailly ayant adhéré aux conclusions
du rapport de M. Liagre, la classe les a, en conséquence,
également adoptées.
Aréographie , ou étude comparative des observations faites
sur l'aspect physique de laplanète Mars ; par M. F. Terby ,
docteur en sciences.
Mtappoft tle n. Ei'»». Quetetet.
« Le mémoire de M. Terby est précédé d'une introduc-
tion étendue, dans laquelle l'auteur passe en revue les
travaux des astronomes qui se sont occupés de l'étude des
taches de Mars, depuis Fontana qui a donné la première
représentation de la planète en l'an 1636.
Le mémoire lui-même a pour principal objet de com-
parer les dessins obtenus à diverses époques et par diffé-
rents observateurs. 11 est divisé en six chapitres, qui traitent
chacun d'une région spéciale de la planète.
Chapitre I. Mer de Kaiser et océan de Dawes.
— II. Détroit d'Herschel II.
— III. Océan De la Rue et mers de Dawes et de
Lockyer.
— IV. Mers de Hook et de Maraldi.
— V. Mers de Tycho et de Delambre.
— VI. Mers de Béer et d'Airy.
(8)
L'auteur prend pour base de sa nomenclature la carte
de Mars dressée par M. Proctor.
Après un examen approfondi et comparatif des dessins,
M. Terby est amené à conclure que certaines côtes des
mers Martielles ont des contours exactement relevés,
tandis que d'autres parties offrent des discordances qui ,
aux prochaines oppositions de la planète, doivent attirer
toute l'attention des astronomes qui se livrent à ce genre
de recherches. Comme le principal intérêt du mémoire
réside dans cet appel aux observateurs pour élucider des
points obscurs ou contestés, je crois devoir profiter de la
publication rapide des Bulletins et de leur circulation
étendue pour faire connaître ici les questions qui termi-
nent chacun des chapitres du mémoire.
Chapitre I. — 1° Les mers de Zôllner et de Lambert
sont-elles en communication avec la mer de Phillips? Se
partagent-elles en plusieurs branches?
2° N'existe-t-il pas, entre la mer de Phillips et la
limite méridionale de l'océan de Dawes, une autre mer
parallèle à celle de Phillips?
5° Quelle est l'étendue exacte de la terre de Cassini?
4° La mer de Main est-elle simple ou composée de plu-
sieurs lobes ?
6° Le détroit de Nasmyih est-il ondulé et envoie-t-il
des prolongements dans le continent de Dawes? Se ter-
mine-t-il brusquement à l'E. {!), ou est-il en communication
avec la mer de Tycho ?
6° Quelle est la configuration des côtes de la mer de
Kaiser et de l'océan de Dawes?
(1) Ces indications sont relatives à l'observateur terrestre qui a sous les
yeux le disque de la planète.
( 9)
7° Existe-t-il des solutions de continuité dans cette
grande tache, notamment : a. entre la mer de Kaiser et
l'océan de Dawes; b. entre l'océan de Dawes et le détroit
d'Herschel II; c. entre l'océan de Dawes et la mer de
Hook?
8° Quelles sont les régions plus sombres que l'on ob-
serve dans celte tache de Mars? Ces régions sont-elles
permanentes ?
Chapitre II. — \° Le détroit d'Herschel II présenle-t-il
des solutions de continuité? Confirmer notamment l'exis-
tence de celle qui semble se trouver entre les baies de
Dawes et de Béer.
2" Ce détroit communique-t-il avec l'océan de Dawes?
5° Quelle est la configuration exacte de la région située
immédiatement au sud de ce détroit? L'existence, la forme
et l'étendue des détroits d'Arago , de Newton et des îles
de Phillips et de Jacob ont besoin d'être confirmées.
4° La configuration exacte des baies de Dawes, de Béer
et du détroit de Dawes doit encore être étudiée, ainsi que
leur direction si variable dans les divers dessins.
5° Confirmer l'existence, à l'occident de la baie de
Dawes, d'une sorte de cap ou de presqu'île s'avançanl
dans le détroit d'Herschel.
6° Existe-t-il une baie encore inconnue entre la mer de
Kaiser et la baie fourchue de Dawes?
7° Il faudrait encore examiner soigneusement les diffé-
rences de nuances que montrent ces régions, et y recher-
cher les pénombres que M. Lockyer, M. Kaiser et d'autres
y ont représentées.
Chapitre III. — 1» L'océan De la Rue se termine-t-il du
côté du nord par une limite angulaire ou arrondie?
2° Fixer la limite méridionale de l'océan De la Rue et
( 10 )
ses relations avec la mer polaire de Phillips el avec la mer
de Maraldi.
5" Étudier les relations de l'océan De la Rue avec les
détroits d'Arago , de Newton et d'Herschel If.
4" Rechercher les solutions de continuité qui pour-
raient exister, suivant certains observateurs, dans l'océan
De la Rue.
5" Rechercher la tache neigeuse de Dawes.
6" Étudier les régions plus sombres qui s'offrent dans
l'océan De la Rue.
7" La communication des mers de Dawes et de Lockyer
avec l'océan De la Rue est-elle incontestable ?
8° Quelle est la véritable forme des mers de Dawes et
de Lockyer?
9° Existe-t-il une communication entre la mer de
Dawes et celle de Maraldi?
Chapitre IV. — 1° Quelle est l'extension exacte de la
mer de Hook relativement à celle de Maraldi?
2" Existe-t-il une bande sombre entre les mers de Hook
et de Maraldi et celle de Phillips?
5" Confirmer l'existence de la Terre de Webb (1).
4° Examiner la situation des régions plus sombres qui
existeraient dans les mers de Hook et de Maraldi.
5° Fixer la configuration exacte du bord septentrional
des mers de Maraldi et de Hook, et des baies qu'il pré-
sente, ainsi que des passes de Huggins et de Ressel.
6" Quelle est la configuration exacte de la mer de Huy-
gehs?
(1) L'auteur propose de donner ce nom à une solution de continuité de
la mer de Maraldi, qui ne figure pas sur la carte de M. Proclor.
• ( H )
1° Rechercher la petite tache blanche que MM. Webb
et Gledhill ont vue près de la passe de Huggins.
8" Mieux définir les taches faibles qui se trouvent dans
le continent d'Herschel I , et surtout immédiatement à
l'occident de la mer de Kaiser.
Chapitre V. — 1" Quelle est la forme exacte des mers
de Tycho et de Delambre? Est-elle semblable à celle que
leur attribue M. Proctor , ou à celle que leur attribuent les
observations de 4871 et de 1873? En d'autres termes, la
terre de Rosse est-elle un isthme permanent, ou ce trait
brillant était-il dû, lors des observations de M. Dawes, à
un nuage passager?
2° Quelles sont les relations de cette tache de Mars
avec la mer de Reer et avec le détroit de Nasmyth?
3° Étudier la configuration exacte des deux bandes
sombres qui relient la mer de Tycho et celle de Delambre
aux régions plus occidentales, et examiner si elles ne sont
point en réalité les prolongements de ces deux mers, con-
fondues seulement à l'orient?
4° Quelle est la forme exacte du faible prolongement
qui va de la mer de Tycho vers l'orient, et quelles en sont
les relations avec la mer d'Airy?
5" Vérifier la présence d'une- solution de continuité
entre la mer de Tycho et ce prolongement faible.
6" Vérifier l'existence des mers de Lassell et de Lever-
rier, dont on ne voit de traces certaines que dans les des-
sins de M. Dawes.
7° Étudier la configuration de la mer polaire de Schrœter.
8° Rechercher la blancheur que M. Knobel et M. Green
notamment ont aperçue immédiatement à droite de la mer
de Tycho.
Chapitre VI . — L'auteur, à la fin de ce chapitre, appelle
( 12)
spécialement l'attention des observateurs sur cette partie
très-peu connue de la surface de Mars (passe d'Ouderaans,
passe de Bessel, etc.), afin que les recherches futures
viennent apporter de nouvelles lumières sur sa configu-
ration.
En résumé, le mémoire de M. Terby offre de l'intérêt
et j'ai l'honneur d'en proposer l'impression dans le recueil
des Mémoires. »
Mtappot't de M. Ed. JUailly.
a Le mémoire de M. Terby me paraît digne à tous
égards de l'approbation de l'Académie : il est le fruit de
longues et patientes recherches, poursuivies sans relâche
depuis l'année 4871, et présente l'ensemble des données
fournies par plus de deux siècles d'observations, sur l'état
de la surface de la planète Mars.
M. Terby, dans l'étude qu'il a faite de ces données, a
cru devoir se borner à la configuration des taches sombres.
Le sujet était bien déterminé et suffisamment vaste; c'était
celui, du reste, qui offrait le plus d'utilité et d'à-propos,
puisqu'il s'agissait d'établir les points douteux qui devront
être élucidés par les oppositions de la planète, en 1875
et en 1877.
L'auteur se propose de traiter, dans un mémoire séparé,
d'autres sujets parmi lesquels il cite l'étude des phéno-
mènes polaires, l'examen des faits de coloration observés
sur Mars, celui des recherches spectroscopiques entre-
prises sur la lumière de cet astre, et un nouveau calcul de
la période de rotation.
J'engage M. Terby à continuer ses intéressants travaux
( i3)
et je me joins à mon honorable confrère M. Ern. Quetelet
pour demander l'impression du mémoire qui nous est
soumis, et celle des planches qui l'accompagnent : les M
figures choisies par M. Terby parmi les 1092 dessins de la
planète, qu'il est parvenu à réunir, sont presque toutes
inconnues des astronomes. »
La classe adopte les conclusions des rapports précédents,
auxquels M. Liagre, troisième commissaire, a adhéré. Elle
décide que le travail de M. Terby sera imprimé dans les
Mémoires in-4.°.
Considérations générales sur la détermination , sans calcul^
de l'ordre d'un lieu géométrique; par M. Louis Saltel.
MtappofI de Ht. F. Folie.
« L'objet du mémoire de M. Saltel , dont l'Académie a
déjà favorablement accueilli plusieurs travaux, est de géné-
raliser le beau principe de correspondance dû à M. Chasles,
et d'appliquer cette généralisation à différents problèmes
de géométrie et d'analyse.
L'auteur a fait précéder son travail de quelques consi-
dérations générales sur les avantages respectifs de l'analyse
et de la géométrie pure. A en juger par les deux passages
qui suivent, il serait assez malaisé de dire de quel côté se
portent ses préférences : d'une part il affirme avec M. Pain-
vin « que sous la puissante impulsion des Chasles, Steiner,
Poncelet, etc., la géométrie pure a laissé bien loin derrière
elle l'analyse; et quelques lignes plus bas nous lisons : « on
se gardera bien de contredire un illustre géomètre. Lamé,
( 1^)
proclamant hautement, après avoir débuté par des études
de pure géométrie, la prééminence de l'analyse sur celte
dernière. »
Sans vouloir ici discuter à fond la question de la supé-
riorité de l'une des méthodes sur sa rivale, nous ne pou-
vons nous empêcher d'opposer à l'assertion de M. Painvin
quelques remarques qui nous semblent de nature à la
réfuter:
1" S'il est des théorèmes qui appartiennent plus spécia-
lement au domaine de la géométrie pure, ce sont bien
certainement ceux de Desargues et de Pascal. Or la pre-
mière extension qui ait été donnée au théorème de
Desargues est due à Sturm, qui l'a trouvée par l'analyse ;
celle que nous avons donnée au théorème de Pascal a été
découverte par la même voie. Veut-on un autre exemple,
le problème de la description d'une surface du second degré
déterminée par neuf points, problème qui avait exercé la
sagacité de tous les géomètres depuis 1825, a été résolu
par Hesse, qui a également fondé sa construction sur
Tanalyse. Que d'autres découvertes n'a-t-il pas faites par
la même méthode, etcombien n'en doit-on pas à Riemann,
Plûcker, Kummer, Wierstrass, Joachimstahl , Clebsch,
Cayley, Salmon, pour ne citer que les géomètres analystes
les plus illustres!
2" A part Sleiner, qui éprouvait pour l'analyse une
véritable aversion, il n'est peut-être pas un savant qui n'en
ait usé directement ou indirectement dans ses travaux de
géométrie pure ;
5° Malgré la prétendue supériorité de celte dernière
méthode, l'école de Sleiner n'a fait que languir en Alle-
magne, comparativement à sa rivale, depuis la mort de
son fondateur; en Angleterre également les géomètres se
(IS )
sont lancés avec ardeur dans la voie nouvelle ouverte par
l'analyse; et c'est peut-être en France que, grâce à la
longue et légitime influence des Poncelet et des Chasles , la
géométrie pure est encore le plus cultivée aujourd'hui,
quoique M. Saltel se plaigne, avec M. de Jonquières, de
la voir délaissée.
Abordons maintenant le fond du mémoire, qui consiste
essentiellement dans l'extension donnée par l'auteur au
principe de correspondance de M. Chasles, dont la démon-
stration est, par parenthèse, tout algébrique.
Ce principe, qui avait été énoncé par son illustre auteur
pour deux séries de points correspondants sur une droite,
était naturellement susceptible de deux généralisations.
On pouvait se demander s'il n'avait pas lieu pour deux
séries de points situés sur une courbe : c'est ce qu'a fait
M. Cayley, qui a réussi en efl'et à étendre le principe aux
courbes unicursales (1).
On pouvait se demander en second lieu s'il n'était pas
possible d'étendre le principe à k séries de points corres-
pondants sur une droite : et c'est là le résultat auquel est
arrivé M. Saltel.
En combinant ces deux extensions, il est aisé de voir
qu'on arrivera à donner au principe de correspondance toute
la généralité dont il est susceptible : l'auteur annonce à la
fin de son mémoire qu'il traitera ce point dans un prochain
travail.
L'idée de M. Saltel a pour point de départ la génération
d'un lieu par le déplacement d'un point mobile déterminé
par l'intersection de k lieux de même espèce, ce qui est au
(1) Comptes rendus, t. LXII, p. bSO.
( 16 )
lond, comme on voit, l'idée de Bobillier et de Pliicker
transportée des coordonnées rectilignes aux coordonnées
curvilignes dans le plan ou dans l'espace.
On conçoit que celte généralisation du principe de cor-
respondance doit être excessivement féconde en applica-
tions, et que l'auteur n'ait pas encore eu le loisir d'en
rechercher un grand nombre ; toutefois il en indique déjà
dans son travail quelques-unes qui permettent déjuger de
l'importance de son principe dans la recherche de l'ordre
d'un lieu géométrique ; mais il se réserve surtout d'y reve-
nir plus tard. Signalons une application analytique à la
recherche du nombre des solutions finies communes à un
système d'équations générales d'un degré quelconque,
recherche dont le résultat revêt une forme très-élégante.
Il n'est guère possible de résumer les théorèmes donnés
par l'auteur : il faudrait les énoncer en entier, et tel ne
peut pas être l'objet d'un rapport; mais la brève analyse
que nous venons de faire du travail de M. Saltel montre
assez quelle en est l'importance.
Nous aurions désiré pouvoir louer également le fond et
la forme : l'auteur, qui est un jeune homme non-seulement
fort laborieux, mais très-occupé, n'a pas eu le loisir de
s'attacher à cette dernière; on remarque quelques obscu-
rités dans les énoncés et les démonstrations, et quelques
résultats qui ne sont donnés que comme une induction
probable; enfin, et surtout, une grande négligence dans les
citations , vice considérable dans un travail académique,
et qui obligé les commissaires à de nombreuses recherches.
L'auteur pourra faire disparaître aisément la plupart de ces
défauts en corrigeant les épreuves.
En résumé, j'ai l'honneur de proposer à la classe de
voter l'impression du travail de M. Saltel dans les Mémoires
H7)
de l'Académie, et d'adresser des remercîments à l'auteur
pour son intéressante communication. »
La classe adopte les conclusions du rapport de M. Folie,
auxquelles a adhéré le second commissaire, M. Catalan.
L'électricité statique exerce-t-eUe une influence sur la
tension superficielle des liquides? par M. G. Van der
Mensbrugghe.
Rapport de M. .•/' Flateau.
« L'auteur, qui a déjà publié , dans les Recueils de
l'Académie, plusieurs Notes et deux Mémoires sur la ten-
sion superficielle des liquides, poursuit, dans le Mémoire
actuel, ses recherches relatives à ce sujet. Il commence
par exposer le petit nombre de travaux ayant quelque trait
à la question qu'il s'est proposé de résoudre, question
énoncée dans le titre; puis il fait connaître une suite d'ex-
périences ingénieuses et, selon moi, décisives, qui le con-
duisent à une solution négative du problème, c'est-à-dire
à conclure que l'électricité statique n'exerce absolument
aucune influence sur la tension superficielle des liquides.
Citons deux de ces expériences : 1° J'ai rapporté, dans
le § 172 de ma Statique des liquides soumis aux seules
forces moléculaires, une expérience de mon fils, qui
montre qu'il suffît d'une cause excessivement légère pour
amener une variation dans la tension superficielle d'une
lame liquide : si l'on approche le bout du doigt à une très-
petite dislance du sommet d'une bulle de liquide glycé-
2"^ SÉRIE, TOME XXXVIII. 2
(18)
rique déposée sur un anneau , la minime élévation de la
température de ce sommet diminue la tension au point de
faire changer complètement la teinte de toute la portion
de la bulle qui avoisine le sommet. Or M. Van der Mens-
brugghe approche, au-dessus d'une semblable bulle, un
conducteur électrisé , et voit simplement la bulle s'allonger
fortement vers celui-ci, sans que la teinte du sommet
éprouve la moindre variation.
2" L'auteur suspend, par le procédé de M. Duprez, une
colonne d'eau distillée dans un tube vertical ouvert à son
extrémité inférieure; une tige métallique traverse le bou-
chon qui ferme le haut de ce tube, et descend jusque près
de l'orifice. La plus grande valeur du diamètre intérieur
pour laquelle M. Duprez ait pu réaliser la suspension , était
de 19™",85', le diamètre extérieur du tube employé par
M. Van der Mensbrugghe était de i9"™,14,et, par consé-
quent , un peu moindre que la limite ci-dessus; mais, sans
doute à cause de quelque imperfection de l'appareil, la
stabilité de la colonne était encore extrêmement faible, et
la cause la plus légère suffisait pour faire écouler le liquide.
La pression atmosphérique (voir le Mémoire de M. Duprez)
ne soutient la colonne que si l'équilibre de la surface libre
inférieure est stable au point de vue des forces capillaires,
ou, ce qui revient au même, de la tension superficielle;
une très-minime diminution de cette tension devait donc,
dans les conditions de l'expérience , amener la chute de la
colonne; or l'auteur a électrisé fortement la tige métal-
lique dont j'ai parlé plus haut, et, par suite, la surface
libre inférieure du liquide, et la colonne s'est parfaitement
maintenue.
Après avoir nettement établi, par la série de ses expé-
riences, la nullité de cette influence de l'électricité statique
( i9 )
sur la tension, l'auteur en déduit cette conséquence, qui
doit paraître importante au point de vue des théories de
l'électricité, que la couche électrique qui se porte à la
surface des corps est entièrement extérieure à cette sur-
face, et se trouve simplement appliquée contre elle.
D'après ce qui précède, la classe n'hésitera pas, je
pense, à ordonner l'impression du travail de M. Yan der
Mensbrugghe dans le recueil des Mémoires de l'Aca-
démie. »
La classe adopte les conclusions du rapport de M. J. Pla-
teau, auxquelles a adhéré le second commissaire, M. Duprez.
Remarques sur la variabilité de certaines espèces du genre
Calliste, par M. Alphonse Dubois.
Rapport de M. de Setya M.ongchatnpg .
« En étudiant les différences qui séparent les diverses
espèces d'oiseaux , on a été successivement porté à aug-
menter le nombre des espèces connues ; mais depuis long-
temps déjà, on a constaté que ces formes diverses ne sont
pas toutes également tranchées et que plusieurs d'entre
elles, quoique se reproduisant toujours les mêmes dans
les mêmes localités, sont si rapprochées d'autres formes
habitant des contrées voisines que l'on doit y voir, non de
véritables espèces dans le sens propre du mot, mais bien
plutôt des races locales issues originairement les unes des
autres, et ne se séparant souvent que par des dimensions
plus ou moins fortes ou par des nuances dans l'intensité
•Je la coloration.
(20)
Quelle que soil l'opinion théorique que l'on adopte sur
l'origine primordiale des espèces, il me semble utile, en
considérant l'état actuel de la vie sur notre globe et l'état
présent de la science, de bien constater l'importance rela-
tive des caractères qui différencient les formes spécifiques
connues.
Dès 4844 notre savant confrère le D"" Schlegel (de
Leyde) est entré dans cette voie en publiant sa Revue
critique des oiseaux d'Europe. Après avoir désigné les
espèces en suivant la nomenclature binominale de Linné,
il ajoute pour les races locales un troisième nom ou ad-
jectif. Ainsi la race italienne du moineau est appelée Passer
domesticus cisalpimis; la race à gorge blanche de la Berge-
ronnette jaune Mutacella flava cinereocapilla , celle à tête
noire M. flava melanocephala; le Tétras des saules, race
d'Ecosse, Tetrao saliceti scoticus, etc.
Dans son grand ouvrage non encore terminé (Muséum
d'histoire naturelle des Pays-Bas, Revue de la collection
d'oiseaux, années i 862 et suivantes), il a continuée appli-
quer ce système. Il emploie souvent les termes de conspe-
cies pour désigner les races.
Le travail que M. Dubois nous soumet repose sur les
même principes. Il concerne les espèces du genre d'oiseaux
nommé Calliste par Boie, démembrement des Tanagra de
Linné, et qui est particulier à l'Amérique tropicale. L'au-
leur, ayant eu sous les yeux un bon nombre de types et
d'exemplaires du Musée de Bruxelles, les a étudiés avec
soin , et j'ai tout lieu de croire que ses appréciations sont
justes.
Les animaux de l'Amérique tropicale présentent dans
presque toutes les classes de grandes difficultés lorsqu'on
vent en circonscrire les espèces. Dans ce vaste centre de
(21 )
création il existe des lamilles, des sous-familles, des
grands genres absolument distincts de ceux de l'ancien
continent et de la région circumpolaire de l'hémisphère
boréal; on peut citer parmi les oiseaux les familles fon-
dées sur les grands genres Tanagra, Dendrocaloptes, Gal-
biila, Tï'ochilns, Momotus, Ramphastos, etc., mais lorsqu'on
en arrive à l'élude des espèces on constate l'existence (l'un
grand nombre de formes représentatives excessivement
voisines et à peine distinctes les unes des autres, et qui
sont cantonnées dans les différentes régions de ce conti-
nent : Brésil, Guyane, Haut-Amazone, Pérou, Venezuela,
Amérique centrale, Mexique, Antilles, ou même localisées
dans certaines îles de ce dernier Archipel (1).
Le rang [espèces ou races) à attribuer à ces formes voi-
sines est certainement assez arbitraire, et dépend en partie
de l'équation personnelle de l'observateur; mais malgré
la difficulté de mettre d'accord les naturalistes sur le juge-
ment à porter dans chaque cas spécial , il me semble évi-
dent que la subordination que l'on cherche à établir est
juste en principe.
A ce point de vue, le moment me semble arrivé d'en-
courager les études faites dans cette direction, et je pense
(1) Qu'il me soit permis de faire remarquer, en passant, que si cet élal
de choses est irès-favorabie à la ibéorie d'un tra)isformisme restreint à la
formation des espèces ou races voisines d'un même genre, la séparation
absolue entre les grandes familles américaines que j'ai citées , et leur
absence d'alBniié avec les familles de l'ancien continent me paraissent
difficiles à concilier avec l'hypothèse d'un transformisme général et sans
limites. Par ces considérations je me sens sous ce rapport plus porté à
l'admission du système d'Agassiz : celui des centres de création qui n'ex-
clut pas l'interposition des migrations ultérieures d'un centre de création
à un autre favorisées en particulier par les changements géologiques et
climatériques qui se sont produits.
( 22 )
que l'Académie fera bien d'accueillir avec faveur l'essai
tenté par M. Alph. Dubois, et de décider qu'il sera im-
primé dans ses Bulletins. »
MtappofI de .ff. P.-J. Vat* Beneden.
a Je partage complètement l'avis de notre savant con-
frère, M. de Selys Longchamps, sur la valeur de la notice
de M. Alphonse Dubois, ayant pour objet certaines espèces
d'oiseaux de l'Amérique tropicale, que l'on a séparées des
Tanagra. Quelle que soit l'opinion que l'on professe sur
l'origine de l'espèce , les travaux du genre de celui qui est
soumis à noire examen ont une valeur réelle quand ils sont
faits avec soin, et ils méritent d'être recueillis dans les
Bulletins. »
La classe adopte les conclusions des rapports précé-
dents.
Nouvelles recherches sur la constitution des acides poly-
thioniques, par M. Wallhère Spring.
nappoft de .IV. Slas.
« Le travail présenté par M. W. Spring au jugement
de la classe est la continuation des recherches qu'il
a entreprises pour parvenir à dévoiler la structure des
acides du soufre et notamment la constitution des acides
polythioniques. Le présent travail renferme le résultat de
ses investigations sur l'action de l'iode et du sodium sur
les sulfures monoatomiques, les sulfites et les polythio-
nates. L'action de l'iode sur un mélange de poids molécu-
laires égaux de sulfure et de sulfite de sodium, et de
(25)
sulfite et d'hyposulfile de sodium lui a permis de réaliser
la synthèse des hyposulfîtes et des trithionates. Et inver-
sement l'action du sodium sur les hyposulfîtes et sur les
trithionates et les tétrathionates l'a conduit au dédou-
blement de ces sels en sulfure et sulfites d'une part et en
sulfure et hyposulfite d'autre part. Le sodium et l'iode
exercent donc des effets opposés ; le métal dissocie les
composés que l'iode a unis. M. Spring déduit naturellement
de ces actions que les atomes de soufre dans les acides
polythioniques sont en contact entre eux.
Le nouveau travail de M. Spring est bien conçu et bien
exécuté; il révèle un esprit de sagacité remarquable. J'ai
l'honneur de proposer à la classe d'en ordonner l'impres-
sion dans le Bulletin de la séance et de voter à l'auteur des
remercîments pour sa communication. »
La classe adopte les conclusions de ce rapport, aux-
quelles a adhéré le second commissaire, M. de Koninck.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Note sur l'importance du gisement de phosphate de chaux
des environs de Ciply [province de Hainaut); par
M. Melsens, membre de l'Académie.
OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES.
L'existence du phosphate de chaux dans la province de
Hainaut, notamment à Ciply, a été soupçonnée par feu
Charles Lebardy de Beaulieu, professeur à l'École des
mines de Mons.
(24)
En 1866, MM. Cornet et Briart ont constaté, en effet,
que les galets et les moules de fossiles que l'on rencontre
dans le poudingue de la Malogne sont constitués par une
substance brunâtre, dure, mais rayée par l'acier, et dans
laquelle ils ont reconnu la présence du phosphate de chaux
soupçonnée par M. Lehardy de Beaulieu.
Le poudingue de la Malogne, qui s'étend sur une vaste
surface comprenant une partie des territoires de Cuesmes,
Hyon, Mesvin et Ciply, ne possède qu'une puissance faible
et souvent irrégulière ; cependant on a pu l'exploiter dans
deux endroits situés aux confins des territoires de Cuesmes
et de Ciply, où le poudingue est rempli de poches creusées
dans la craie blanche et la craie grise sous-jacente; il est
donc très-probable que dans ces conditions l'exploitation
ne fournira pas pendant longtemps des quantités notables
de phosphate calcaire à l'industrie et à l'agriculture.
Dans son article Mines et carrières publié dans la Patria
belgica, notre savant confrère M. F.-L. Cornet a attiré
l'attention sur la craie grise de Ciply, produit naturel,
abondant, exploitable avec la plus grande facilité et riche
en phosphate calcaire.
Dans une note de MM. Cornet et Briart que ces savants
m'ont communiquée, ils estiment à 1-4,500,000 mètres
cubes la quantité de craie grise qui recouvre environ
180 hectares au-dessus de la couche aquifère; il serait
facile de l'exploiter dans des excavations à ciel ouvert ou
par des puits de peu de profondeur à l'aide de galeries ; mais
une grande partie passe sous la couche aquifère, et pour
l'exploiter, il faudrait employer des machines à épuise-
ment. D'après l'estimation faite par nos savants confrères,
on sera convaincu qu'il y a dans ce gisement une ressource
énorme pour l'agriculture et l'industrie si importante des
engrais artificiels et des amendements.
( 25 )
§ l^\ — Valeur vénale des phosphates et de Vacide
phosphorique.
On importe aujourd'hui en Angleterre, en France, en
Belgique, du phosphate de chaux provenant de mines
considérables qui se trouvent en Espagne et en Portugal,
sous la forme d'apatite; ces produits contiennent au delà
de 60 pour cent de phosphate de chaux ; on en rencontre
qui ne titrent pas moins de 80 pour cent; ils se prêtent
parfaitement à la fabrication des superphosphates de chaux
dont l'agriculture fait un emploi considérable, car ils ne
renferment que 10 pour cent de carbonate calcaire.
Je pense que l'on reste dans les bornes de la vérité en
disant que la poudre de ces phosphates , riches à 70 pour
cent, rendue dans la plupart des localités belges qui ne sont
pas trop éloignées des chemins de fer, peut être estimée
à 15 francs les 100 kilogrammes (soit environ 21 centimes
par kilogramme de phosphate ordinaire en poudre fine);
par grandes quantités ce prix peut s'abaisser jusque vers
fr. 15 50 c% soit 19 '/j centimes, ce qui donne une valeur
de 50 ou 42 centimes par kilogramme à l'anhydride phos-
phorique P/i^O-^ contenu dans le phosphate calcaire.
En effet, certains guanos, dont les prix s'élèvent jusqu'à
20 francs les 100 kilogrammes, ne contiennent presque
que du phosphate de chaux, c'est-à-dire 80 pour cent; les
phosphates espagnols, qui renferment environ 70 pour cent
de phospate calcaire, reviennent à 11 ou 12 francs au
minimum avant leur pulvérisation. Le noir animal qui a
servi, dont le prix de vente ne s'élevait guère, jadis, qu'à
2 francs les 100 kilogrammes, atteint aujourd'hui par-
( 26 )
fois le prix de 15 francs; les nodules dont la richesse en
phosphate de chaux varie de 30 à 60 pour cent sont vendus
à des prix assez variables après leur pulvérisation, mais
qui ne s'écartent pas beaucoup du prix des phosphorites
espagnols ou mieux du prix auquel on paye la somme de
phosphate dans ce produit, c'est-à-dire eu égard à leur
richesse en phosphate de chaux ordinaire.
Depuis une vingtaine d'années on a commencé à exploiter
les nodules de phosphate de chaux ou pseudo-coprolithes en
France, après que M. de Molon eut signalé l'existence de
ce produit sur différents points de ce pays et notamment
dans le département du Nord et dans les Ardennes. La
richesse de ces nodules provenant de onze localités diffé-
rentes est très-variable ; la moyenne générale de leur
richesse en phosphate tricalcique s'élève à 41,4 pour cent
dans la matière supposée sèche et à 40.4 dans la matière
naturellement humide ; le minimum est de 29.9 pour cent,
le maximum de 65.5 pour cent; mais pour les mêmes
localités les échantillons différents peuvent posséder des
richesses que je vois varier de 42.1 à 65.5 pour cent , bien
qu'en général les différences ne s'élèvent qu'à 2 pour cent
environ. Les nodules pulvérisés se vendent à Paris 5 francs
les 100 kilogrammes, mais le transport en augmente le
prix pour les localités éloignées et peut s'élever jusqu'à
8 francs (voir De Herain, Cours de chimie agricole) ; le phos-
phate reviendrait donc de 12.5 centimes à 20 centimes
par kilogramme et l'acide phosphorique anhydre Ph^ 0^ à
22 ou 43 centimes environ.
Un chimiste très-habile, M. A Peeterman, directeur de
la station agricole de Gembloux, estimait que la poudre de
phosphate provenant de nodules riches à 35.3 pour cent
pouvait valoir environ 5 francs les 100 kilogrammes; en
( 27)
prenant la composition 2(P/iO^)3Ca et en calculant la
valeur de l'acide phosphorique anhydre :
PA205 .... 142 45.81
ôCaO .... 168 54.19
510 100.00
on trouve que 55 kilogrammes de PA^ 0^ 5 CaO contiennent
sensiblement 4 5 kilogrammes PlfiO"^ d'anhydride et produi-
raient 21 kilogrammes VlfiO^^ZlPO d'acide phosphorique
normal,
P/i^O» .... 142 72.43
SH^O .... 54 27.55
196 100.00
Ce qui porte le prix de l'anhydride phosphorique VlfiO^
à 55.5 centimes environ, et celui de l'acide Vh^O^oU^O
ou P/iO-*H^ qui en proviendrait à 25 ^/i centimes.
Ces données, assez différentes entre elles, seraient de
nature à pouvoir faire admettre comme base de calculs et
en nombres ronds les prix suivants :
20 centimes pour le phosphate tricalcique Vh'^O'^oCaO
55 — pour l'anhydride phosphorique P/i^O^.
Ce dernier, en s'adjoignant les éléments de l'eau, aug-
mente de poids sous le rapport del42à 196; il reviendrait
donc à 25 centimes environ.
Nous pouvons nous permettre, je pense, de faire usage
de nombres ronds, car je vois l'acide phosphorique anhydre
et supposé être à l'état insoluble comme dans le phosphate
tricalcique coté à 50 centimes par kilogramme, tandis que
lorsqu'il a été rendu soluble sa valeur s'élève au delà du
(28)
double, mais nous nous contenterons du prix de 1 franc.
Encore un prix aûn de nous guider dans l'évaluation de
la valeur de la craie grise de Ciply.
Les superphosphates renfermant (*) tout l'acide phospho-
rique provenant d'un phosphate contenant un tiers de son
poids de phosphate tribasique, mais dans lequel l'acide
phosphorique est rendu soluble, peut s'estimer à environ
15 francs, et nous aurons en nombres ronds une valeur de
75 centimes par kilogramme pour l'acide rendu soluble;
les frais pour le rendre soluble s'élèvent donc à plus que sa
valeur réelle, car celle-ci se trouve doublée et au delà.
M. De Herain estime l'acide phosphorique soluble de 1 franc
à fr. i 20 c^
§ 2. — Propriétés physiques et analyse mécanique de la
craie grise phosphatée de Ciply.
Telle que je l'ai recueillie avec notre savant confrère
M.Cornet, à diverses reprises depuis le mois de septembre
1873, dans le talus d'un chemin creux près du bois de Ciply,
la craie constitue une masse peu cohérente d'une couleur
d'un gris jaunâtre tirant vers le brun ; mais on reconnaît
à l'œil nu que les blocs ne sont pas homogènes; ils res-
semblent à un mortier sec non cohérent qui serait formé
de chaux et de sable coloré grenu ; on voit en effet des
espèces de stratifications microscopiques de matière plus
brune alternant d'une façon irrégulière avec de la matière
plus grise un peu jaunâtre; la matière brune est constituée
(*) Les superphosphates titrant de 13 à 14 pour cent d'acide phospho-
rique soluble se cotent fr. 1-i 13 c' par 100 Ivilogrammes dans le com-
merce.
( 29 )
par des grains arrondis de diamètres différents, mais dont
les plus gros ne dépassent pas le volume d'une petite tête
d'épingle; la matière grise est absolument pulvérulente
comme la craie ordinaire; les petits blocs se divisent
mécaniquement avec la plus grande facilité; on rencontre
cependant des fragments très-cohérents peu abondants à
l'endroit où j'ai prélevé des échantillons. Ces blocs durs
renferment aussi des phosphates et de petits nodules
bruns encastrés; on pourrait aisément trier ces blocs et les
transformer en chaux riche en phosphate calcaire. Quelques
fragments moins durs que les précédents paraissent résul-
ter de l'agglomération de la matière des premiers.
En délayant la craie phosphatée naturelle dans une
grande masse d'eau pure et en agitant vivement, une poudre
gris-jaunâtre reste longtemps en suspension, tandis que
les petits grains tombent rapidement au fond de l'eau; on
peut donc, par un simple lavage à grande eau, séparer
facilement les grains de la folle farine dans laquelle ils sont
disséminés.
Une série de lavages exécutés sur des blocs différents
m'a prouvé que le rapport moyen entre la folle farine et
les grains ne s'écarte pas beaucoup d'un minimum moyen
formé de :
Grains 73 pour cent.
Folle farine .... 25 —
100
les nombres ont varié entre 70 et 85 pour cent pour les
grains; en adoptant 75 on reste incontestablement dans
des conditions parfaitement réalisables dans l'industrie; j'ai
toujours opéré sur la matière desséchée spontanément à
( 50 )
l'air ou chauffée légèrement. La séparation de deux
matières qui constituent la craie phosphatée de Ciply me
paraît difficilement exécutable au moyen du blutage de la
matière désagrégée et sèche; en effet, il y a des grains
arrondis d'un diamètre si faible qu'ils passent à travers les
mailles des toiles métalliques les plus fines du commerce
et même à travers des tamis de soie à mailles très-fines.
Je pense cependant qu'il ne serait pas bien difficile de
séparer les grains au moyen du vannage et que l'industrie
réaliserait facilement un appareil qui serait spécialement
adapté à la craie de Ciply; car il en existe déjà pour d'au-
tres matières , la craie proprement dite étant très-divisée
et peu dense; elle se dissout dans l'acide chlorhydrique en
ne laissant qu'un très-faible résidu ; cette dissolution acide,
additionnée de sel ammoniac, ne précipite que très-faible-
ment ou pas du tout par l'ammoniaque, preuve que tous
les phosphates se trouvent dans les grains denses, mais je
n'ai pas cru devoir faire une analyse exacte de cette folle
farine, que l'on peut regarder comme essentiellement com-
posée de carbonate de chaux exempt de phosphate.
§ 3. — Action de Veau sur la craie phosphatée.
L'eau n'enlève à la craie phosphatée que des traces
insignifiantes de matières salines solubles; sous ce rapport
elle se comporte comme un produit préalablement lavé
par de l'eau pure froide.
L'eau distillée qui a servi à laver la craie se colore légè-
rement en jaune; lorsqu'on la concentre, elle montre une
très-faible réaction alcaline; évaporée à siccité, elle char-
bonne faiblement; le charbon brûle avec facilité en déga-
geant une odeur particulière difficile à définir, car elle ne
( .>! )
rappelle que d'une façon vague l'odeur des matières végé-
tales ou animales; parfois cependant il m'a paru qu'elle se
rapprochait un peu de l'odeur de pain brûlé ou de l'odeur
empyreumatique de certains acides bruns (ulmiques) azotés,
comme ceux de la tourbe, par exemple ; les gaz sont alca-
lins.
§ 4. — Action de la chaleur sur la craie phosphatée.
La craie phosphatée à l'état naturel , desséchée sponta-
nément, renferme 2 à o pour cent d'eau que la chaleur
chasse facilement; en continuant à la chauffera la lampe
dans des tubes de verre, on voit la matière décrépiter
légèrement et perdre de l'eau; on reconnaît la présence de
l'ammoniaque; la matière noircit un peu et se comporte
comme si elle renfermait des traces de matière susceptible
de se charbonner par l'action de la chaleur; la craie phos-
phatée débarrassée de son carbonate de chaux par un lavage
à grande eau, composée essentiellement des petits grains
denses, se comporte de la même façon, mais paraît ren-
fermer un peu plus de matière d'origine organique, car en
général le produit chauffé dans les tubes ou dans des creu-
sets de platine couverts devient plus noir ; l'eau qu'elle perd
est alcaline par des sapeurs ammoniacales. La folle farine
desséchée spontanément perd de l'eau par la chaleur et
dégage de petites quantités d'ammoniaque.
La présence de coquilles fossiles pouvait du reste faire
prévoir ces résultats , mais nous verrons plus loin que les
grains lavés renferment une matière organique particu-
lière et caractéristique.
En poussant l'action du feu jusqu'à la décomposition com-
plète du carbonate de calcium, les pertes totales accusées
( 3-2 )
varient dans un sens qui corrobore au point de vue indus-
triel ou agricole les données générales de ma note : en
effet, la craie naturelle perd par la calcination de 29 à 51
pour cent, tandis que la matière légère essentiellement
formée de carbonate terreux perd au delà de 42 pour cent
et que les grains denses qui renferment presque tout le
phosphate calcaire du produit naturel ne perdent que 26
à 28 pour cent.
Je crois devoir faire remarquer expressément que les
nombres moyens que je donne, obtenus sur des produits
provenant d'échantillons différents, ne doivent être consi-
dérés industriellement et provisoirement que comme des
approximations suffisantes peut-être; car pour donner une
valeur moyenne de tout le gisement, il aurait été néces-
saire de faire un échantillon moyen en prélevant des frag-
ments à divers endroits et à différentes profondeurs.
Si l'on fait abstraction de 2 pour cent de silice environ ,
de fer, de magnésie, d'alumine, etc., et que l'on con-
sidère le produit comme chimiquement pur, il y aura lieu
de déterminer plus tard par une étude plus attentive la
véritable valeur de la craie phosphatée qui, en nombres
ronds, et se basant sur des expériences isolées, peut se
représenter par les quatres hypothèses suivantes :
70 matière phosphatée et carbonate de chaux.
50 carbonate de chaux enlevé par le lavage.
100
75 matière phosphatée.
:25 carbonate de chaux.
100
( 33)
80 nialière phosphatée.
20 carbonate de chaux.
100
85 matière phosphatée.
15 carbonate de chaux.
100
Or, la matière phosphatée contenant très-sensiblement
le tiers de son poids de phosphate, on aurait pour le phos-
phate tricalcique dans la matière naturelle supposée pure
et sèche, 25, 23, 27 ou 28 pour cent et respectivement
77, 7o, 75 et 72 pour cent de carbonate de chaux ; voici ces
données traduites en formule :
25 P/i^O^ôCaO.
47 CO^CaO . ,
50
100
50 COT-aO. .
100
CflO
CflO
co^
( co^
( CflO
10.6
12.4
26.5
20.7
15. 2
16.8
S 00.0
1
\
25 P/i-^O'ôCflO. .
50 CO^CflO. . . .
25 CO-^CflO. . . .
100
MIE XXXVIII,
( P/(-0\ . .
■ ■ ^ CaO ...
j CO^ . . .
■ ■ ( CaO ...
( co-^ . . .
■ ■ ( CflO ...
11.5
1Ô.5
■=>•)
22.0
28.0
II.O
SÉRIE,
T(
14.0
100
100.0
9m e
5
(34)
27 Ph'O^ÔCaO. .
80
53 GO'CaO.
20 20 CO^CrtO.
P/i»0«. ... 12.4
CflO .... 14.6
f CO* .... 24.4
( C«0 .... 28.6
( CO^ .... 8.8
( CaO . . . . 11.2
100 100 100.0
/ 28 P/t-O^ÔCaO.
83 [
57 CO-CaO, . .
15 13 CO''C«0. . . .
( P/i^05. .
. 12.9
! CaO . .
. 13.1
( CO^ . .
. 25.1
( CaO . .
. .31.9
[ co-^ . . .
. G. 6
( CaO . .
. 8.4
100 100 100.0
Ces nombres prouvent que la malière brute, comme la
matière lavée, mérite l'attention de l'industrie et de l'agri-
culture, car si la richesse en phosphate est un peu faible
comparativement à d'autres coprolithes, au moins l'exploi-
tation en est très-facile; la pulvérisation, peut-être même
inutile, se ferait à très-bas pri.\; le transport pour tous les
points du pays se trouve être dans les conditions les plus
avantageuses, puisque la gare d'Hyon-Ciply est à une
petite distance du gisement.
Les produits calcinés obtenus dans un violent feu de
forge sont assez cohérents; mais soit que l'on opère sur le
produis naturel, la folle farine ou les grains provenant du
lavage, on obtient des chaux qui ne foisonnent pas et
qui ne s'échauffent presque pas au moment où on les
humecte.
Les roches dures, faciles à séparer, peuvent se transfor-
mer en chaux phosphatée par les procédés ordinaires qui,
(53)
tlaiis ce pays hoiiiller, ne reviennent qu'à IV. 7 50 c' par
mèlre cube environ.
Ces petits blocs durs sont de nature assez différente,
comme je raidéjàdit,et livrent par la calcinalion des chaux
qui foisonnent plus ou moins; mais si Ton prend un échan-
tillon moyen en détachant de petites parcelles d'une série
de fragments, on y constate la présence d'une quantité
notable de phosphate calcaire; ils ne sont donc pas à
négliger en vue de l'utilisation de l'ensemble qui constitue
la craie phosphatée grise de Ciply et les nodules empâtés
dans du calcaire résistant.
§ 5. — Action des acides svrle produit lavé. — Propriétés
de la matière organique insoluble dans les acides dilués.
— Présence des fluorures.
L'action de l'acide acétique dilué à o" B' sur le produit
lavéendégagedirectemenlde l'acidecarbonique; maison ne
parvientpasà neutraliser complètement l'acide; en chauffant
et en mettant un excès d'acide, celui-ci passe en partie à
l'état de vapeur; en lavant le produit inattaqué par décan-
tation et en employant de nouveau de l'acide, il arrive
un instant où l'attaque ne se fait presque plus; la dis-
solution acétique précipite parfois légèrement par l'am-
moniaque; en général elle ne renferme que de faibles
traces de phosphate; en traitant le résidu solide [»ar l'acide
chlorhydrique, le dégagement d'acide carbonique reprend
et tout se dissout à l'exception d'un peu de silice; mais il
est convenable de chauffer le liquide; indépendamment de
la silice, il reste une matière brunâtre en suspension; elle
est très-ténue et colle au filtre. Si l'on attaque directement
la matière par de l'acide chlorhydrique du commerce
( 56 )
étendu d'eau et à chaud, presque tout se dissout en
chauffant, et en opérant sur quelques cents grammes du
produit lavé on constate qu'il reste un peu de silice et l'on
peut recueillir la matière organique brune.
Cette matière ressemble aux acides dits ulmiques; elle
est soluble dans les alcalis et dans l'ammoniaque; elle est
précipitée de ces dissolutions par les acides en flocons bru-
nâtres; elle est azotée; si on la distille en la chauffant dans
une petite cornue, elle se décompose en laissant un résidu
charbonneux , donne des huiles empyreumatiques qui rap-
pellent, mais sans qu'elle soit caractéristique, l'odeur qui
se dégage de matières animales azotées, mélangées de pro-
duits non azotés; les vapeurs sont franchement alcalines
par suite de la présence de l'ammoniaque.
Cette observation me paraît importante en ce sens
qu'elle permettra sans doute de mieux comprendre plus
tard l'origine de cet énorme amas de phosphate de chaux
jouissant de propriétés physiques si singulières.
Un autre point me paraît important à noter. L'acide car-
bonique qui se dégage quand on traite par l'acide chlorhy-
drique a une odeur particulière qui rappelle l'odeur des
marais; lorsque tout dégagement d'acide carbonique a
cessé et que l'on chauffe le liquide acide, cette odeur de
marais s'exalte et rappelle assez bien celle de l'odeur des
vases d'étangs.
On sait que les os fossiles renferment du fluor; les phos-
phates espagnols et la plupart des phosphates en renfer-
ment des quantités plus ou moins considérables; il en est
de même de la craie grise de Ciply, dans laquelle sa pré-
sence est très-facile à constater.
D'après un renseignement que je tiens de M. le D'Peter-
mann, les phosphorites d'Espagne contiennent des quan-
( 57 )
tités appréciables d'iode; ce savant, comptant faire une
étude plus détaillée sur le gisement de Ciply, se propose
d'en donner une analyse complète et exacte.
L'acide sulfurique à oô" ou l'acide sulfurique des cham-
bres de plomb attaque la matière lavée et non pulvérisée
et transforme la majeure partie du produit en plâtre et
acide phosphorique soluble ou superphosphate soluble,
mais il faut opérer à chaud; il est convenable d'employer
un excès d'acide sulfurique pour celte transformation. Il
est bien vrai que l'on obtient ainsi un produit dont la des-
siccation est lente ou difficile; or il faut offrir à l'agricul-
ture un produit d'un manienrient commode lorsqu'on le
répand sur le sol.
Il m'a paru qu'un procédé mixte remplirait parfaite-
ment ce but; ainsi, après avoir rendu soluble tout l'acide
phosphorique, on ajouterait à la matière pâteuse une cer-
taine quantité de matière naturelle absorbanteet la dessic-
cation serait obtenue rapidement. I! est vrai que l'on s'ex-
poserait à avoir du phosphate rétrogradé, mais celui-ci,
facilement soluble dans l'acide carbonique, agirait encore
efficacement.
Il y a encore une observation à faire au sujet de l'action
de l'acide acétique; en général, on peut dire qu'il ne dis-
sout qu'environ la moitié du poids de la craie phosphatée
lavée. J'avais pensé qu'en calcinant fortement, de façon à
chasser tout l'acide carbonique, l'action de l'acide acétique
serait plus complète; mais le produit bien calciné se
comporte à peu près comme le produit naturel : environ
la moitié de son poids résiste à l'action de l'acide, le résidu
se dissout dans l'acide chlorhydrique sans effervescence;
l'acide acétique, agissant sur le produit calciné, paraît
dissoudre un peu plus de phosphate que lorsque l'on
emploie la matière naturelle. J'ai vainement essayé en
( 38 )
traitant le produit naturel, le produit lavé, calcinés ou
Don, de dissoudre du carbonate de chaux en respectant les
phosphates par l'acide chlorhydrique Irès-dilué; j'espérais
pouvoir parvenir à enrichir le produit en phosphate, mais
celui-ci se dissout, en même temps que le carbonate, en
quantité trop considérable pour que l'opération puisse se
faire dans de bonnes conditions industrielles, qui permet-
traient de livrer au commerce un produit d'un transport
moins coûteux.
J'ai essayé dans ce même but les résidus encombrants
de la fabrication du chlore, mais, au point de vue du tra-
vail industriel, celte opération ne m'a point paru donner
des résultats réellement pratiques.
Cependant c'est une direction qu'il ne faudrait pas
abandonner; la question industrielle à résoudre consiste à
savoir si la perte que l'on fait en phosphate ne serait pas
compensée et au delà en offrant au commerce un produit
riche pouvant s'exporter loin de Ciply avec avantage, en
livrant à l'industrie une matière première susceptible
d'être transformée sans frais de pulvérisation, etc., etc.,
à la façon des phosphorites riches.
L'acide sulfureux en excès dissout la craie grise de
Ciply en entier après un contact prolongé et en employant
un grand excès d'acide sulfureux.
Il faudra étudier l'action de l'acide carbonique à la pres-
sion ordinaire ou à de fortes pressions.
§ 6. — Composition des grains denses de la craie grise
phosphatée de Ciply.
Nous avons vu l'analyse mécanique du produit naturel
et nous avons constaté qu'il ne cède rien ou presque rien
à l'eau pure, ce qui exclut la présence des sels de potasse
(39)
OU de soude facilement solubles; le produit lavé pour le
débarrasser du carbonate de chaux contient de 51 à 54
pour cent de phosphate tricalcique correspondant à 14.2
ou lo.2 d'anhydride phosphorique; c'est le résultat d'ana-
lyses faites sur des produits de préparations et d'échantil-
lons différents par des méthodes différentes évitant la pré-
cipitation de l'alumine et du fer avec le phosphate de
magnésie.
Si l'on se contente de doser le phosphate calcaire en trai-
tant la dissolution acide par l'ammoniaque, comme cela se
pratique à tort parfois encore pour le commerce des en-
grais, on obtient nécessairement des nombres plus élevés,
le phosphate calcaire étant accompagné d'oxyde de fer et
d'alumine; par ce procédé on trouve environ 58 pour cent
de phosphate. Je ne mentionne ces résultats qu'en vue
d'attirer l'attention sur la portée de l'erreur que l'on com-
met en se contentant de ce procédé pour l'analyse du pro-
duit au point de vue du commerce.
Je crois donc pouvoir conclure que les grains denses de
la craie de Ciply renferment très-sensiblement le tiers de
leur poids de phosphate calcaire, soit 50 à 55 pour cent au
moins.
^ 1. — Valeur du gisement de la craie grise de Ciply ou
craie phosphatée de Ciply.
Comme MM. Cornet et Briart l'ont fait remarquer, l'ex-
ploitation des nodules de coprolilhes dans le poudingue de
la Malogne ne fournira pas longtemps du phosphate cal-
caire à l'industrie et à l'agriculture.
Eu reprenant les nombres de ma note on voit que les
180 hectares de craie renferment 14,500,000 mètres cubes
( ^0 )
de cette substance facilement exploitable; or chaque mètre
cube pèse environ 1,500 kilogrammes; le gisement contient
donc environ 21,750,000,000 de kilogrammes de produit
brut dont les ^/i ou les ^^j sont riches à 50 ou 55 pour cent
de phosphate, soit 16,512,500,000 ou 17,400,000,000 de
kilogrammes de matière renfermant 5,500,000,000 de kilo-
grammes environ de phosphate des os; si Ton admet avec
M. Élie de Beaumont que la moyenne du poids de phos-
phate calcaire contenu dans l'homme vivant, femmes, en-
fants, adultes et vieillards, est de 2 kilogrammes, on voit
que la craie de Ciply contient de quoi pourvoir au système
osseux de plus de deux fois la population humaine du
monde entier, estimée à 1,000,000,000.
On peut présenter ces nombres sous une autre forme et
en comptant en nombres ronds : sur la population de la
Belgique il meurt par an environ 150,000 individus, en
supposant la perle totale en phosphate à 2 kilogrammes par
tète, ce qui n'est pas, on voit que le phosphate de chaux
du gisement de Ciply suffirait pour assurer à la population
belge du phosphate pendant plus de 180 siècles.
Voici les bases du calcul :
5,500,000 habitants.
2,77 pour 100. — Mortalité par an.
2 kii. (le phosphate par individu.
152,.350 décès par an en Belgique.
301,700 kilogrammes de phosphate.
Soit 5,500,000,000: 505,000 = 18000 ans environ.
On voit du reste, par ce calcul , qu'il n'y a pas lieu de
craindre un manque de phosphate dans notre pays.
Si H. Davy a cru pouvoir attribuer à l'exportation de
céréales et, par conséquent, à l'épuisement du sol en acide
phosphorique, la stérilité des pays qui anciennement
(41)
avaient été les greniers d'abondance de Rome, cet é(at de
stérilité n'est pas à craindre en Belgique avec la ressource
du gisement de Ciply.
Ce que je dis à propos du gisement de Ciply peut, je
crois, à juste titre, se dire aussi de tous les gisements que
l'on découvre partout en Europe et qui, à ce point de vue ,
assurent l'avenir de la culture européeime, comme plu-
sieurs savants l'ont déjà fait remarquer. Mais ainsi qu'on
le verra plus loin, l'homme dissipe pendant sa vie au moins
trente fois plus de phosphate qu'il ne s'en enfouit avec sa
dépouille mortelle, et le dépôt de Ciply ne suffirait qu'à la
consommation de six siècles si tout était perdu.
Si l'on peut attacher quelque intérêt à des calculs de ce
genre, il ne faut cependant pas oublier que les phosphates
existent dans presque toutes les terres et parfois en quan-
tités assez considérables; on en trouve dans une foule de
roches, enfin sa dissémination est excessive. L'illustre De
Gasparin d'une part, M. Schloesing de l'autre, en ont con-
staté des quantités considérables; ce dernier pense pou-
voir n'admettre pas moins de six à sept tonnes par hectare
dans les terres qu'il a analysées. Je ne connais pas toutes
les analyses des terres arables de Belgique au point de vue
du dosage des phosphates; je signale seulement celle faite
sur la terre des environs de Bruges par M. le D"" A. Peter-
mann; un hectare sur une profondeur de 0'",1S ne con-
tient que 255 kilogrammes d'acide phosphorique, corres-
pondant à oOO kilogrammes de phosphate tribasique
environ; c'est une provision qui , d'après l'auteur, ne suffit
qu'à couvrir les besoins d'un assolement de quatre années.
Nous avons vu que le prix du phosphate calcaire peut
s'évaluer à environ 20 centimes par kilogramme pulvérisé
et rendu dans la plupart des gares de notre réseau de
(42)
chemin de fer, c'est donc une valeur de 1,100,000,000 de
francs qui sera mise en jeu par l'exploitation totale du
banc situé au-dessus de la couche aquifère; le banc sous-
jaccnt est encore plus puissant.
Je présente maintenant les chiffres sous une autre forme
afin de jeter les premiers jalons capables d'intéresser l'in-
dustrie et l'agriculture et de les engager à étudier la ques-
tion chacune à leur point de vue.
Un mètre cube de craie de Ciply, pesant 1,500 kilo-
grammes, perdra '/i ou Vs ('^ son poids par le lavage ou le
vannage, et il restera un produit pesant de 1100 à 1200
kilogrammes, contenant au minimum 500 kilogrammes de
phosphate à 20cenlimes, soit une valeur de 60 francs.
Voyons les frais par mètre cube (1) :
Redevance au propriétaire. . . . fr. 2,50
Extraction 5,00
Lavage ou vannage 1,00
Pulvérisation 6,00
Dessiccation 1,00
Emballage (sacs) 2,50
Imprévu, environ '/s en plus .... 3,00
Fr. 21,00
Il reste donc une somme de 59 francs pour les frais de
transport et les bénéfices; c'est une large marge et eu
égard aux bases douteuses du compte, je crois que cette
somme est un minimum, les frais étant pris au maximum ;
(1) Je fais remarquer que toutes ces estimations sont trop fortes; je
doute qu'il soit nécessaire de pulvériser le produit; la pulvérisation en est
très-facile, car elle se pulvérise avec la plus grande facilité dans des mor-
tiers de verre ou de porcelaine; son état de ténuité est déjà très-avancé et
n'exigerait, sans doute, qu'une faible dépense dans des meules ordinaires
horizontales; j'ai exagéré les dépenses imprévues.
( 45 )
mais il est à remarquer que le phosphate de chaux con-
tenu dans le noir animal vaut encore aujourd'hui environ
20 l'rancs les 60 kilogrammes, c'est-à-dire 53 centimes
par kilogramme ou une valeur de 99 francs pour les 500
kilogrammes (De Herain).
D'un autre côté les nodules pulvérisés riches à 40 pour
cent de phosphate se vendent 5 francs pris sur place; la
valeur de la craie de Ciply lavée et pulvérisée serait donc
au minimum pris sur place de 500x0, 12o=57 fr. 50,
ce qui laisse encore une marge industrielle Irès-conve-
nable, même en faisant la réduction pour la moins value
57.oX-7i=28.
Ces données contradictoires prouvent surabondamment
que le commerce des engrais est loin d'être régularisé et
que l'agriculteur doit être encore souvent victime de son
ignorance, quand il n'est pas victime des fraudes qui par-
fois atteignent des proportions réellement désastreuses.
§ 8. — De remploi agricole du phosphate de Ciply.
Il est incontestable que, dans l'état actuel de la récolte
des détritus des grandes villes, la quantité de phosphate
qui se perd ou qui n'est pas restitué au sol est énorme; le
sol ne peut donc pas le rendre sous forme de comestibles
d'origine végétale ou animale et il y a une perte constante.
L'homme pendant sa vie est un dissipateur de phosphates
alcalins et alcalino-terreux et la quantité de ces corps
qu'il entraîne dans la tombe ne constitue qu'une fraction
minime de celle qu'il a perdue pendant sa vie. Bien qu'il
soit très-difficile de poser des données positives à cet égard,
on reste dans des termes qui , ce me semble, ne doivent
pas être très-éloignés de la vérité, en admettant qu'un
( U)
homme perd par jour dans ses urines et ses excréments
une quantité de phosphates correspondant au moins à
5 grammes de phosphate tricalcique; la vie moyenne étant
de trente-trois ans (environ 12,000 jours), il aura perdu
60 kilogrammes de phosphate, trente fois phis, par con-
séquent, qu'il ne s'en trouve dans l'homme moyen d'après
l'estimation de M. Élie de Beaumont; quoi qu'il en soit, à
tous égards il faut chercher à profiter de tous les gisements
de phosphates et utiliser les moyens les plus convenables
de les confier au sol (i).
Examinons donc rapidement quelques procédés en vue
de la craie de Ciply.
Fabrication des superphosphates par Vacide sulfurique.
La fabrication du produit auquel le commerce a donné
le nom de superphosphate, est très-facile avec les produits
riches en phosphates calcaires; pour les coprolithes même
à 40 pour cent de phosphate , il faut forcer la dose d'acide
sulfurique et mélanger des os ou des coprolithes très-riches
avec les coprolithes pauvres; les produits obtenus par ce
moyen sont plus riches et d'une dessiccation plus facile,
condition essentielle pour qu'on puisse bien les répandre
sur le sol, après une fabrication qui doit nécessairement
être courante, comme on dit.
Il y aura donc des difficultés à vaincre et des frais d'acide
sulfurique en plus pour transformer la craie de Ciply en
superphosphate ou en acide phosphorique et sulfate de
(1) Je dirai dans un Iravaii sur les cimetières et la crémation, que je
compte publier sous peu , pourquoi j'ai été amené à cherclier à me rendre
compte de ces données sur les pliospliates.
(«)
calcium, comme je l'ai déjà dit § o, en proposant un pro-
cédé mixte qui me paraît capable de fournir un produit
très-convenable pour les usages agricoles.
En effet, en la supposant lavée et pure, la craie phos-
phatée grise de Ciply renferme :
67 CO-, CaO .... 57.S2CrtO
29. 48 CO^
55. 34 Ca 0
Il faudrait employer 100 kilogrammes d'acide sulfu-
rique à 50" B*^ et l'on obtiendrait, en supposant le produit
parfaitement sec :
Ph- 0-^ 15 18 I 19,60 acide pliospliorique
3H*0 4.42) noimal soluble.
SO' 79 00\
CaO 53 54> 170. v sulfate de chaux hydrate.
2 H2 0 35 66 )
189.60
soit environ J90 kilogrammes de produit renfermant
19,60 d'acide phosphorique soluble P/i^O">oir-0 ou 10,30
pour cent correspondant à 8.00 pour cent d'anhydride
phosphorique PA^O-J.
La réaction de l'acide sulfurique sur les 33 de phosphate
se faisant d'après l'équation :
P/i2 03,3Ga0 4-3(S03,H^O) + 6H-0 = P/*20s3H'0-+-3(SO\CaO, 211^0)
équation préférable à celle dans laquelle on suppose qu'il
doive se produire du phosphate acide de chaux :
P/(20=,3CaO-H2(S03,H-^0)+4H20=P/i-O^CaO,2H20-t-2(S05,CaO,H'02).
Dans le premier cas on évite la rétrogradation d'une
( -^-6 )
manière à peu près complète. Ce point est important
puisque nous avons vu que l'on cote de J franc à fr. 1 20 c'
l'acide phosphorique soluble et que dans les coprolithes le
prix du kilogramme de phosphate insoluble renfermant
environ 46 pour cent d'anhydride phosphorique peut des-
cendre jusque 0^^12o. Le phosphate rétrogradé aurait-il
une valeur moyenne? question indécise encore.
Si j'insiste sur ces détails, c'est que dans le commerce
des engrais et des superphosphates, il arrive souvent des
confusions et des contestations et qu'il y a lieu de bien
signaler ces données à l'agriculture; elle devrait toujours
bien stipuler ce que l'on entend par acide phosphorique
soluble, phosphate acide de chaux ou phosphate de chaux
rendu soluble. Voici leurs formules :
Équiralenl.
P/t* 0^ anhydride phosphorique iiû (').
P/i^ 0^ 3 H'' 0 double équivalent de l'acide phospho-
rique normal (PO iH'') 190
l phosphate de chaux ordinaire \
P/rO^, ôCaO I phosphate iribasique. . . . ( 510
' phosphate Iricaicique . .
( superpliosphale ....
P/i-03,CrtO,2H^O ] phosphate acide de calcium.
( phosphate monocalcique .
Ces nombres indiquent qu'en supposant que tous ces
produits soient rendus solubles, leur valeur dans un en-
grais donné sera représentée par des sommes qui sont en
raison inverse des équivalents ou rapports de combinai-
sons; et il y a lieu de bien spécifier ce que l'on achète au
vendeur.
(') Les valeurs admises pour les rapports de combinaisons sont H = l ;
C=12; P/j=3! ; 0 = 16; S = 52; Crt = 40.
( 47 )
La valeur comme engrais réel étant la même respecti-
vement pour 142, 196, 310 et 2ôi kilogrammes du pro-
duit livré, une mauvaise stipulation dans le contrat expo-
serait l'acheteur à payer 234, 310, 196 francs au lieu de
1-42 pour la même quantité de matière active ou environ
23, 40, 31 au lieu de 14 francs.
Fabrication du phosphate de chaux précipité au moyen de
l'acide ch lorhydrique.
Les quelques essais tentés pour voir si le procédé de
MM. E. Pelouze et Dusart serait applicable à la craie grise
phosphatée de Ciply me paraissent mériter l'attention à
cause du bas prix de l'acide chlorhydrique et de l'état dans
lequel le phos[)hate insoluble de chaux, dissous dans les
acides et précipité ensuite devient facilement soluble dans
l'eau chargée d'acide carbonique.
Quand on traite un excès de craie de Ciply débarrassée de
la folle farine par l'acide chlorhydrique soit assez concen-
tré, soit étendu, et que l'on chauffe le produit pendant quel-
ques heures à feu nu, en maintenant constante la quantité
d'eau, ou en faisant passer un courant de vapeur d'eau à la
pression ordinaire, on constate I" que l'acide chlorhydrique
dégage CO'^ de la matière non dissoute; 2" que la dissolu-
tion acide encore filtrée renferme une quantité notable de
phosphate, ce qui se constate en ajoutant du sel ammo-
niac par excès de précaution et en précipitant ensuite par
l'ammoniaque; 5" qu'une partie de la matière insoluble
s'est transformée; en effet, au lieu de grains denses, le
liquide renferme un solide très-ténu, restant longtemps en
suspension et contenant beaucoup de phosphate et peu de
carbonate; une partie de ce produit Irès-divisé se dissout
( 48 )
dans l'acide acétique; il contient en outre du phosphate
de fer insoluble dans ce véhicule.
La dissolution complète de la craie de Ciply dans l'acide
chlorhydrique et la neutralisation du produit dissous par
un lait de chaux donnerait incontestablement un excellent
produit précipité, d'un emploi très-convenable, mais les fd-
trations destinées à enlever le chlorure de calcium ou la
séparation industrielle du produit offrent des difficultés
réelles quand on opère sur de grandes masses.
On obtiendrait un produit meilleur encore en précipi-
tant par l'ammoniaque, mais dans ce cas la matière pré-
cipitée offre aussi des propriétés telles qu'il serait difficile
d'établir une industrie sur cette réaction, bien que l'ammo-
niaque puisse constamment rentrer en fabrication.
Quoi qu'il en soit, il est bon qu'on ait toujours présent à
l'esprit que les phosphates précipités au sein de l'eau sont
dans un état des plus convenables et que l'on exagère peut-
être la valeur vénale qu'il faut attribuer à l'acide phospho-
rique rendu soluble sans l'intervention des sels de soude
et de potasse, cette dernière base ayant une valeur consi-
dérable comme amendement ou engrais.
Quant au procédé indiqué au § o, il serait à étudier in-
dustriellement.
Procédé de M. Jean.
On sait que la calcination des phosphates alcalino-terreux
avec certains sels alcalins en grand excès transforme une
partie de ceux-ci en phosphates solubles; le procédé ne
m'a point paru applicable à la craie phosphatée grise de
Ciply; le procédé de M. Jean qui calcine un équivalent de
phosphate de chaux avec 6 équivalents de sulfate de sodium,
du charbon et de la craie, ne me paraît pas susceptible
(49)
d'une application industrielle directe en vue de produire
un amendement commercial renfermant du phosphate de
sodium soluble; les superphosphates seraient préférés à
juste litre, ce me semble.
Procédé de M. Boblique.
Comme on se trouve à Ciply dans les conditions les plus
favorables pour obtenir le combustible à bas prix , peut-être
le procédé de M. Boblique (décrit dans le t. II, p. 277, de
V Enquête sur les engrais industriels , Paris, imprimerie
impériale, 1866), mériterait-il une étude sérieuse. Ce pro-
cédé a pour but de livrer des phosphates de soude et de
potasse en passant par la fabricatiou du phosphure de fer.
Fabrication de la chaux phosphatée avec la craie de Ciply
et les fragments durs qu'elle contient.
L'agriculture belge emploie énormément de chaux, soit
pour la répandre directement sur le sol, soit pour en faire
des composts, espèce de nitrières artificielles. Bien que peu
cohérente, la craie pourrait être tranformée en chaux
phosphatée et servir dans le même but que les chaux ordi-
naires.
Il est bien vrai que le phosphate s'y trouvera à l'état
insoluble, mais on peut se demander très-sérieusement s'il
est absolument nécessaire à l'agriculture d'avoir des phos-
phates directement solubles?
L'expérience a démontré le mauvais effet des super-
phosphates dans les terrains peu calcaires ou sablonneux ,
leur excellent effet, au contraire, dans les terrains renfer-
mant du carbonate de chaux qui fait rétrograder ou salure
2"* SÉRIE, TOME XXXVIII. 4
(50)
l'excès d'acide phosphorique; c'est par double décomposition
avec les sels à base alcaline ou par sa dissolution dans l'eau
chargée d'acide carbonique que les phosphates de chaux
peuvent alimenter la plante. La craie de Ciply, employée
à l'état naturel ou pulvérisée, paraît donc constituer un
amendement convenable.
On en obtiendrait des effets meilleurs en la mélangeant
directement avec des sels alcalins et ammoniacaux; elle
serait utile dans les fumiers de ferme avec lesquels on la
stralifierait; elle servirait parfaitement comme absorbant
des urines dans les écuries et les rigoles qui conduisent les
liquides au fumier, comme aussi dans les fosses à purin,
voire même dans les urinoirs des stations de chemin de fer
et des grandes villes.
Autant que l'on peut en juger par l'expérience agricole
acquise, elle serait de la plus haute utilité soit à l'état na-
turel, soit après lavage et pulvérisation dans les bruyères
récemment défrichées; en un mot, elle paraît pouvoir agir
exactement comme agit la poudre d'os calcinés; ceux-ci ne
sont que très-difïicilement dissous par les acides faibles et
cependant ils agissent efficacement, mais coûtent bien plus
cher que la craie de Ciply; nous avons vu que le rapport
du prix du phosphate calcaire dans ces deux produits peut
aller de 1 à 3 environ.
L'Académie pourra peut-être trouver que je suis entré
dans trop de détails, mais je la prierai de considérer
l'importance agricole de la question. On ne saurait trop
attirer l'attention de l'agriculture sur l'immense richesse
que la découverte de nos savants confrères MM. Cornet et
Briart met à la disposition de nos campagnes au profit de
la richesse générale. Quand nous voyons l'agriculteur si
souvent trompé, il est bon aussi de lui enseigner à se défier
( 31 )
ot à juger les choses lui-même. Nos stations agricoles, dont
la première est dirigée par un jeune, savant et zélé chi-
miste, M. le D"^ A. Petermann, qui rend tant de services
signalés au commerce des engrais, sauront apprécier et
faire expérimenter les produits pouvant être livrés par
les industriels qui exploiteront honnêtement cette mine si
riche, dont le pays doit la découverte à nos savants con-
frères.
APPEiNDICE.
La note précédente était presque entièrement rédigée
lors de la séance de juin. J'ai depuis fait parvenir une
petite collection de mes échantillons moyens à M. le D' A.
Petermann que je cite dans ma note; le savant directeur
de la station agricole se propose d'en faire une étude com-
plète; dans une lettre qu'il m'a adressée, il me donne le
dosage du phosphate et du carbonate de chaux dans
l'échantillon moyen de craie grise débarrassée de la folle
farine.
61.20 pour cent de carbonate de chaux
31.01 id. de phosphate de chaux Iribasique.
1.8a id. sable, silice insoluble.
La folle farine entraînée par l'eau lui a donnée 94.98 pour
cent de carbonate de chaux.
Un lavage de la craie naturelle lui a donné 78.9 pour
cent de grains denses et 21.1 pour cent de folle farine.
Ces nombres correspondent assez bien à ceux que j'ai
donnés en moyenne; j'admets volontiers qu'ils sont plus
exacts que les miens. Il ajoute que sur huit analyses faites
(52)
antérieurement sur des échantillons de craie grise de Cipl_\
il avait trouvé :
Minimum. . . 20,24 pour cent de phosphate calcaire.
Maximum . . 50,34 ici. id.
A Ja date du 26 juin ce même savant agronome me fai(
parvenir le rapport imprimé récemment, mais dont le
manuscrit avait été adressé depuis longtemps déjà à M. le
jMinistre de l'intérieur, sur les Emjrais et matières ferti-
lisant le sol, II* groupe de l'Exposition universelle de
Vienne, 11 rappelle dans ce travail les divers échantillons
de phosphate exposés à Vienne par le Département de
l'intérieur et recueillis par notre confrère M. Malaise dans
sa collection de terres. On y trouve signalée la découverte
de phosphates par M. Dethier à Baelen,M. Dora Ramelet,
les calcaires phosphatés de la Faille-de-Pnj, le calcaire
à polypiers de M. Bortier de Ghistelles, le phospharite et
le calcaire à polypiers de Ciply, de Maestricht et de Folx-
les-Caves, un échantillon de phosphate récemment trouvé
à Orp-le-Grand par M. Malaise,
Des analyses nombreuses ont été faites par M. Peter-
mann; il a trouvé 22.48 pour cent d'anhydride phospho-
rique dans un échantillon provenant du poudingue de la
Malogne; 16.57 pour cent dans l'échantillon recueilli à
Orp-le-Grand par M. Malaise et 19.02; 25.72; 15.17; 17.82
dans des échantillons de phosphate de Ciply, soit en
moyenne pour ces derniers 19.45 pour cent d'acide phos-
phorique anhydre correspondant à 42.42 de phosphate de
chaux, dans quatre échantillons de phosphate de Ciply qui
lui ont été adressés par M.Laduron. Je vois dans ce rapport
que MM. Laduron et Roland ont pris un brevet à la date
du 8 avril pour la préparation du phosphate granulaire de
Ciply.
(53)
Note sur la consenaiion du virus vaccin; par M. Melsens,
membre de l'Académie.
J'ai prouvé en 1870 que la levure de bière résiste à la
température produite par la pâle d'acide carbonique et
d'éther et que le virus vaccin soumis à ce même froid
conserve son activité spéciale, puisque des enfants vaccinés
par M. le D"" Jacobs ont présenté tous les phénomènes dus
au vaccin naturel non refroidi.
Ma conviction que le virus vaccin, qui présente quelque
analogie avec certains ferments, capables de se reproduire
en dehors de l'économie animale, pourrait être semé dans
des liquides albuminoïdes et se multiplier en dehors de
l'économie comme sur les bras des vaccinés, loin d'être
ébranlée, se confirme; mais les expériences sont délicates
et jusqu'à présent je n'oserais affirmer que les faits que
j'ai observés et qui ont été constatés par M. le D"" Jacobs
permettent cette conclusion d'une manière certaine.
J'y reviendrai plus tard si, comme je l'espère, je suis
secondé dans cette recherche que j'ai entamée depuis long-
temps, par des médecins praticiens et vaccinateurs.
Le but de cette note consiste à rappeler l'attention sur
un mode de conservation que j'ai cru pouvoir préconiser
dès 1871 : il consiste à recueillir le virus vaccin dans des
tubes capillaires, scellés ensuite à la lampe; il me paraît
préférable aux autres moyens employés, qui ne sont pas
toujours certains, bien que l'on connaisse des exemples
de conservation prolongée.
Je crois bien faire, le procédé étant peu connu et très-
peu appliqué, de le décrire de nouveau.
( S4 )
On puise le vaccin à la manière ordinaire; quand une
quantité convenable a été introduite dans le tube capil-
laire, on fait couler le liquide dans le tube en lui donnant
de légères secousses; on laisse ainsi une petite colonne
d'air à l'extrémité du tube par laquelle le vaccin a étéintro-
duit. Cette extrémité est ensuite plongée dans une goutte
d'eau étalée sur une lame de verre; l'eau s'introduit par
suite de l'inclinaison donnée au tube et par capillarité;
mais le vaccin reste séparé de cette colonne d'eau par le
petit cylindre d'air interposé. On arrête l'arrivée de l'eau
lorsque le vaccin se trouve poussé à quelques millinîetres
au plus de l'extrémité opposée qui est restée sècbe; il
faut éviter de lui laisser atteindre cette extrémité. On
ferme celle-ci en l'introduisant dans la flamme d'une petite
lampe à alcool ou dans les bords de la flamme d'une bougie
ordinaire. La fermeture obtenue par la fusion du verre ne
laisse aucun doute sur l'occlusion parfaite et inaltérable;
la faible conductibilité du verre ne permet pas à la cha-
leur de coaguler ou d'altérer le vaccin qui se trouve de
ce côté du tube.
On fait ensuite la même opération à l'extrémité opposée;
l'eau a lavé cette partie du tube et entraîné le vaccin
déposé sur ses parois; à la première application de la
chaleur, une petite explosion due à la vapeur d'eau qui se
forme brusquement achève le nettoyage ; une partie de l'eau
étant chassée, il est facile de sceller cette extrémité par la
fusion du verre; la fermeture est complète sans que l'on ait
à craindre d'avoir pu provoquer la moindre trace de pro-
duits empyreumaliques.
Au commencement du mois de novembre i87i,
M. E. Van Hertsen, inspecteur en chef de l'abattoir de
Bruxelles, m'a remis du vaccin provenant de pustules
- ( 5d )
Irès-belles, bien ombiliquées, d'un diamètre de 20 milli-
mètres environ, aux mamelles et au périnée d'une génisse
vaccinée avec du vaccin récollé sur une autre génisse.
Celle-ci avait été vaccinée avec du vaccin pris de pis à pis
à une autre génisse qui avait été inoculée par du vaccin
que M. le D"^ Janssens avait reçu d'Italie,
Le vaccin qui m'a été remis avait été recueilli le 4 no-
vembre, c'est-à-dire huit jours après l'inoculation; il était
conservé depuis trois jours dans des tubes capillaires
fermés au moyen de la cire à cacheter.
Le 7 novembre suivant, je le transvasai dans d'autres
tubes capillaires que je scellai à la lampe comme il vient
d'être dit; je les ai conservés depuis dans le tiroir d'une
table de mon cabinet d'études, c'est-à-dire sensiblement à
l'abri de la lumière.
M, le D"" L. Buys, chargé par l'administration commu-
nale de Bruxelles de la direction du bureau des vaccina-
tions établi à l'hôtel de ville, a fait usage de ce vaccin et a
obtenu des succès qui ne laissent aucun doute sur l'effet
du vaccin conservé depuis deux ans et sept mois.
M. le D"^ Buys décrira au point de vue médical toutes
ses expériences avec les détails qu'elles comportent; je
me contente de constater plusieurs heureux résultats obte-
nus par l'emploi de ce vaccin: ainsi un enfant vacciné sans
succès le 51 mai avec du vaccin humain récent a été vacciné
avec succès dans le courant de juin avec du vaccin de
génisse conservé; d'un autre côté, je vois l'enfant vacciné
sur l'un de ses bras avec du vaccin humain et sur l'autre
avec le vaccin de génisse conservé, ne présenter de belles
pustules que sur le bras où l'on avait employé le vaccin
conservé.
On a pris ensuite du vaccin aux enfants qui avaient
(36)
donné de belles pustules après la vaccination avecle vaccin
conservé et d'autres enfants vaccinés à leur tour avec
ce nouveau vaccin l'ont été avec succès.
Le 25 novembre 1871 , j'ai reçu de feu M. le D"^ Tallois
du vaccin d'origine jennérienne recueilli depuis quelque
temps déjà par M"'' Thérèse Marcelis, surveillante à l'hos-
pice des enfants trouvés; il était contenu dans quatre petits
tubes capillaires fermés à leurs extrémités par de la cire
à cacheter; il fut transvasé, étendu d'environ dix fois son
volume d'eau et introduit dans cinq tubes neufs qui furent
scellés à la lampe. Deux de ces tubes ont été remis à un
médecin vaccinateur; j'attends les résultats. Le vendredi
27 juin 187-4, le contenu de trois de ces tubes fut recueilli
dans la concavité d'une glace employée aux recherches
microscopiques. Une partie a été utilisée par mademoi-
selle la surveillante pour vacciner un enfant de 7 à 8
mois.
M. le D"^ Ch. Delstanche a eu l'obligeance d'observer cet
enfant et il m'annonce que le succès de mon expérience
lui semble désormais assuré. Cependant sur six piqûres
qui avaient été faites, une seule a donné une pustule
vaccinale parfaitement caractérisée; — il continue les
expériences et en fera l'objet d'une publication particu-
lière (1).
Ce qui restait de ce vaccin a été de nouveau enfermé
dans un tube capillaire, après avoir eu le contact de l'air
(1) J'apprends depuis le dépôt de ma noie que le vaccin pris sur celle
puslule unique a servi à vacciner avec succès un autre enfant. Le doute
n'est donc plus possible; cependant l'éruption variolique semble subir un
léger retard. Un docteur en médecine m'apprend qu'il a observé le même
fait plusieurs fois cette année; les pustules semblent subir un point d'arrêt
dans leur évolution normale.
(37)
pendant 15 à 20 minutes; il servira plus tard à d'autres
expériences.
Je crois devoir faire observer que la grande quantité
d'eau qui a servi à délayer ce vaccin en 1871 a pu inter-
venir et que c'est probablement à cet excès d'eau que l'on
doit qu'une piqûre sur six a seule réussi; l'enfant, en
outre, est très-jeune; on voit du reste des enfants être
vaccinés de bras à bras sansprésenler la pustule vaccinale
très-facile a caractériser.
Je crois que les expériences que je viens de citer suffi-
sent pour confirmer l'hypothèse que j'ai émise en 1871 :
je me demandai, en effet, si le ^vaccin conservé dans les
conditions que j'indique, peut longtemps encore après sa
récolte déterminer la virulence ou Yinfecfion particulière
qui lui est propre? Ne ressemble-t-il pas à ces cadavres
enfermés dans des bières hermétiques et qui, mis à nu
à la suite d'accidents survenus lors du déplacement des
tombes, répandent autour d'eux parmi les vivants exposés
à leurs émanations putrides, l'infection particulière et la
maladie qui avait été la cause de la mort?
Ne puis-je pas aujourd'hui afiSrmer ce que j'exprimais
en 1871 sous forme de doute en disant dans ma note pré-
liminaire :
« Si des expériences exactes constataient la conserva-
» tion parfaite de la virulence du vaccin naturel humide
» pendant un temps assez long dans des tubes fermés à la
» lampe, puis mis à l'abri de la chaleur et de la lumière,
» il paraît incontestable qu'ils rendraient des services
» signalés pendant les épidémies de la variole. »
( 'ÔS )
ISole sur les cliarbons décolorants , leur production artifi-
cielle et la révivification des noirs employés dans Vin-
duslrie; par M. Melsens, membre de rAcadémie.
Dans mon travail sur l'absorption des gaz par le charbon,
j'ai été conduit à faire quelques expériences comparatives
sur l'absorption et la condensation des solides dissous et
entre autres des matières colorantes, principalement en vue
des besoins de l'industrie. Autant que je puis en juger
maintenant par l'expérience acquise et par mes propres
recherches, exécutées avec des chai bons presque chimi-
quement purs, ceux-ci n'agissent pas comme décolorants.
Le charbon d'os ou le charbon animal seul est employé
dans l'industrie, soit comme noir neuf ou comme noir révi-
vifié, ayant chacun des propriétés plus ou moins tranchées
comme absorbants des matières colorantes ou des sels de
chaux et de l'excès de chaux des liquides sucrés dans l'in-
dustrie du sucre pendant la fabrication et le raffinage.
Le prix élevé du charbon animal a engagé beaucoup
d'ingénieurs à chercher les moyens de lui trouver des suc-
cédanés, mais jusqu'à présent les essais tentés n'ont pas
été couronnés de succès industriels; la calcination de
mélanges d'argile , de phosphates fossiles avec des ma-
tières organiques, des goudrons, des brais, du sang, du
fumier, etc ont été essayés; je ne sache pas que ces pro-
duits soient utilisés dans la grande industrie.
Si l'on se demande pourquoi le charbon animal possède
un pouvoir absorbant et décolorant si considérable, en ne
tenant compte que de ses propriétés physiques bien en-
tendu, on doit reconnaître d'abord qu'il présente une sur-
(59)
face énorme et que le carbone proprement dit se trouve
réparti intimement sur des matières minérales dont la
division est extrême, bien que formant une masse com-
pacte.
Au point de vue chimique, nous voyons dominer les
phosphates terreux et leurs carbonates, mais tous les noirs
que l'on rencontre renferment de faibles quantités de sul-
fures, de la silice et des composés de fer.
Au point de vue le plus général, on est tenté d'admettre
que la décoloration est un phénomène physique, et ce n'est
que très-exceptionnellement qu'il peut y avoir en même
temps phénomène chimique. C'est l'opinion exprimée par
]\I. E. Filhol et généralement adoptée.
Le charbon animal enlevant les sels de chaux aux sirops
tandis que le charbon végétal agit tout autrement, on peut
cependant mettre en doute cette opinion; en effet, le sul-
fure de calcium reste-t-il inactif? Les phosphates basi-
ques ne peuvent-ils pas se transformer? Le phosphate de
magnésie, par exemple, au contact des sels de chaux ou de
la chaux ne pourrail-il pas être décomposé, de façon à
laisser de la magnésie insoluble et du phosphate de chaux
insoluble; on expliquerait ainsi le pouvoir bien plus con-
sidérable du noir neuf comme absorbant de la chaux, que
celui du noir régénéré sans l'intervention des sels de ma-
gnésie et l'on comprendrait qu'il serait utile d'ajouter du
phosphate de magnésie ou ses sels décomposables par la
chaleur et la vapeur d'eau au charbon auquel on voudrait
rendre ses propriétés premières en le régénérant.
Lorsqu'on étudie tous les charbons artificiels qui ont été
proposés par MM. Ziegler, E. Rousseau, Hamelle et peut-
être d'autres encore, on s'aperçoit bien vite que des char-
bons fabriqués dans des conditions analogues ne réalisent
(60)
rien de ce que le charbon animal doit être au point de vue
physique ou au point de vue chimique.
Je crois que l'on s'en rapproche davantage par les pro-
cédés dont je dois me contenter d'indiquer le principe, car
ce n'est que dans l'industrie que des procédés pareils peu-
vent être étudiés convenablement. Les expériences entraî-
nent du reste des frais considérables.
La première condition à réaliser me paraît d'abord être
celle qui aurait pour but de disséminer la matière minérale
(jui restera après la calcination dans le sein même de la
matière organique, afin qu'elle se trouve répartie dans celle-
ci comme les phosphates sont répartis dans la matière des
os naturels ou au moins d'une façon qui s'en rapproche.
A cet effet, je dissous des phosphates calcaires dans
l'acide chlorhydrique de manière à obtenir des dissolutions
très-concentrées; ces dissolutions servent à imprégner de
matières organiques des fragments de bois taillés normale-
ment à la tige, de la sciure, du vieux tan épuisé, des tourbes,
des lignites, des bois à peine carbonisés et même des char-
bons ou leur poussière et les noirs de fumée communs.
Quand ces corps sont saturés en les maintenant à chaud
dans ces dissolutions, on les laisse égoutter pour enlever
l'excès de liquide et on les calcine ensuite; l'excès d'acide
est chassé et d'après la nature des coprolithes ou des phos-
phori tes employés on obtient un charbon plus ou moins riche
en phosphate neutre de chaux et en chlorure de calcium;
lecharbonlavéàreau,récalcinéensuite, est décolorant; par-
fois il m'a paru l'emporter sur le noir crivoiredu commerce;
j'ai préparé de cette façon de petits cubes de charbon de
bois qui, à poids égal, avaient un pouvoir décolorant supé-
rieur au noir animal du commerce de première qualité;
mais au point de vue des applications il se présente ici une
( «1 )
diftïcullé industrielle; en effet, le noir animal du commerce
est très-dense; mes charbons, au contraire, même ceux qui
contiennent au delà de 40 pour cent de cendres, sont légers
et exigeraient des filtres d'une capacité très-considérable
comparativement à ceux que l'industrie emploie actuelle-
ment; une partie de ces charbons surnage les dissolutions
plus ou moins étendues de mélasse pendant un temps
assez long et même après l'ébullition des liquides; on peut
cependant en obtenir qui n'offrent pas cette propriété à un
aussi haut degré en s'arrangeant de façon à faire dominer
la matière minérale. A cet effet les petits blocs de bois ou
la sciure passaient plusieurs fois dans la dissolution de
phosphate, on les desséchait jusqu'à commencement de
décomposition du bois, on les lavait pour enlever le chlo-
rure de calcium et l'on recommençait le traitement.
Les eaux acides provenant de la fabrication de la géla-
tine des os peuvent servir et apportent avec elles une cer-
taine quantité de matière organique qui se décompose au
sein des cellules végétales si l'on opère sur des fragments
de bois ou des sciures, par exemple; ces matières orga-
niques fusibles avant leur décomposition par le feu ainsi
que d'autres, telles que des mélasses communes, glucose,
dextrine,que l'on pourrait ajouter aux dissolutions de phos-
phates minéraux donnent des charbons boursouflés et col-
lants et produisent plus de cohésion bien qu'employées en
faible quantité; des goudrons, des résines ou de la houille
interposée ne m'ont en général pas donné de bons résul-
tats.
J'ai parfois mélangé à des sciures imprégnées de phos-
phate des argiles et calciné ce mélange sans observer que
le produit obtenu fût plus décolorant que celui qui était
préparé sans cette addition.
( 6^2 )
J'espérais obtenir un produit meilleur en employant des
dissolutions de sulfate d'alumine que je calcinais plus ou
moins fortement avec les bois ou les charbons, mais les
résultats en général ont été négatifs, c'est-à-dire que des
charbons ou des bois imprégnés de sulfate d'alumine et
calcinés jusqu'à décomposition complète de ce sel ne m'ont
jamais fourni des charbons décolorants de bonne qualité;
la matière minérale active paraît donc bien être le phos-
phate calcaire.
Il ne faudrait cependant pas conclure que certains sels
décomposables à une très-haute température ne puissent
absolument pas donner des charbons décolorants. En effet,
j'ai fait absorber par de petits cubes de bois léger (sapin,
bois blanc, etc.) du sulfate de magnésie en excès; les blocs
desséchés ont été introduits dans un grand creuset; calcinés
pendant longtemps à une haute température, ils ont fourni
un charbon renfermant environ 50 pour cent de cendres ma-
gnésienne; il était plus énergiquement décolorant que plu-
sieurs noirs en grains de première qualité, que ces mêmes
noirs réduits en poudre et que le noir d'ivoire le plus fin.
Un habile et savant ingénieur qui s'occupe spéciale-
ment de la question des sucres, assistait à l'essai de ce
charbon et l'estimait comme étant de beaucoup supérieur
à tous les autres charbons essayés en sa présence.
La même expérience répétée en employant du charbon
de bois ou de la braise au lieu du bois en nature , ne m'a
donné que de mauvais résultats dans plusieurs expé-
riences.
Le chlorure de magnésium, sel si facilement décompo-
sable par la chaleur en présence de vapeur d'eau , donne-
rait sans doute les mêmes résultats et pourrait être utilisé
au même titre; je m'en suis servi en l'ajoutant à la dissolu-
( 63 )
lion de coprolithes, et préparant ainsi du charbon artificiel,
je n'ai pas constaté de grands avantages sur le procédé qui
consiste à employer la dissolution de coprolithe seule; par-
fois même j'ai obtenu des charbons moins décolorants que
par le procédé plus simple.
Il arriveque, tout en suivant très-exactement un procédé
ayant donné d'excellent charbon, on obtient un mauvais
charbon ; je n'ai trouvé d'autre cause de non-réussite que
dans la conduite du feu pendant la calcination; il faut donc
prendre toutes les précautions employées dans l'industrie
de la fabrication et de la révivificalion du noir animal.
Les charbons artificiels en grains sont susceptibles de se
révivifier à la façon du noir animal , mais ils sont beaucoup
plus friables que les grains du commerce; leur révivifica-
tion m'a paru se faire très-facilement en les traitant de nou-
veau par les dissolutions de coprolithes et en les calcinant,
mais comme les dissolutions contenaient en général un peu
de matière organique, j'en ajoutais toujours lors que je vou-
lais révivifier; à part ce petit détail pour la révivificalion,
on observera, du reste, que les circonstances dans les-
quelles je me place sont précisément celles dans lesquelles
se plaçaient MM. Leplay et Cuisinier [Répertoire de chimie
appliquée, t. IV. p. 71, 186!2) qui ont fait agir le biphos-
phate de chaux pour rendre au charbon animal épuisé ses
propriétés décolorantes et absorbantes.
Dans l'industrie du sucre on tient beaucoup à posséder
des charbons absorbant les sels de chaux ou la chaux; on
comprend que des charbons renfermant à volonté du phos-
phate mono-calcique ou bicalcique agisse efficacement dans
ce but; cependant j'ai constaté un fait qui paraît assez
curieux soit au point de vue chimique, soit au point de vue
physique, c'est-à-dire des phénomènes de condensation
(64)
d'une matière en dissolution sur un solide suspendu dans
l'eau,
En effet, les divers phosphates de chaux et de magnésie
obtenus par précipitation et même chauffés ensuite, y com-
pris le phosphate tricalcique préparé par l'acétate ou le
chlorure de calcium ammoniacal et le phosphate de soude,
enlèvent la chaux à l'eau de chaux; l'expérience marche
mieux à chaud qu'à froid, bien entendu qu'il faut dans ce
cas tenir compte de la différence de solubilité de l'hydrate
de calcium, plus soluble à froid qu'à chaud. Le phosphate
tricalcique se comporte comme s'il existait des phosphates
capables de contenir au delà des trois équivalents de cal-
cium qui existent dans le phosphate neutre de calcium et
comme s'il existait des sels basiques renfermant plus de
5Ca0pourP/i2 0''.
CONCLUSION.
Il résulte des quelques expériences, que je décris som-
mairement comme simple essai de laboratoire, qu'il est
possible de fabriquer des charbons décolorants en cher-
chant à se rapprocher de la constitution physique et de la
composition chimique du charbon fabriqué au moyen des
os et que, à poids égal, ces charbons peuvent être aussi
absorbants et aussi décolorants que les noirs d'os de pre-
mière qualité.
C'est à l'industrie qu'il appartient de résoudre le problème
industriel, qui ne laisse pas que d'offrir certaines difficultés;
elles ne me paraissent pas insurmontables.
(6o)
Quelques nouveaux théorèmes sur les cubiques gauches;
par M. F. Folie, correspondant de l'Académie.
Dans le Bulletin du mois de juin dernier nous avons
indiqué, en termes généraux, de quelle manière il serait
possible d'étendre à de certaines courbes gauches les théo-
rèmes pascaliens que nous avons découverts pour les cour-
bes planes jusqu'au cinquième ordre; et nous avons l'ondé
cette extension sur la propriété, dont jouissent les démon-
strations que nous avons données de ces théorèmes , de
ne s'appuyer sur aucune relation métrique.
Tous les théorèmes sur les courbes planes, qui se
démontreront d'une façon analogue, pourront naturelle-
ment s'étendre de même à des courbes gauches.
C'est ainsi, par exemple, que nous allons énoncer, pour
les cubiques gauches, les théorèmes que nous avons démon-
trés pour les cubiques planes, à l'exception de ceux qui
renferment des relations métriques : non que celles-ci
n'existent pas pour ces premières courbes (1); mais elles sor-
tiraient du cercle des applications que nous avons ici en vue.
Les courbes dont nous allons nous occuper seront tou-
jours supposées tracées sur un même hyperboloïde.
Deux coniques tracées sur cette surface ne peuvent évi-
demment se couper en j^lus de deux points; mais il y existe
des coniques particulières qui ne se coupent qu'en un seul
point, et qui sont caractérisées par cette propriété d'être
(1) M. P. Serret leur a étendu, clans sa Géométrie de direction, le théo-
rème de Desargues auquel nous étions également arrivé de notre eôt«; et
nous avons complété cette extension en transportant aux courbes gaucbes
du troisième et du quatrième ordre le théorème de Desargues-Sturm.
2""= SÉRIE, TOME XXXVIII. 5
(66 )
complètement déterminées par deux de leurs points : nous
les appellerons provisoirement, à cause des analogies que
leurs propriétés présentent, sur la surface de l'hyperbo-
loïde, avec celles de la droitesur la surface plane, coniques
du premier ordre; les noms de sécante, ou de transver-
sale, ou de côté, seront pris comme synonymes de ce der-
nier; et par quadrilatère nous entendrons un polygone
curviligne formé de quatre de ces côtés.
Une conique du premier ordre et une cubique gauche
tracées sur un même hyperboloïde se coupent en trois
points, dont deux peuvent être imaginaires.
Ces préliminaires exposés, il nous suffira de transcrire
presque littéralement les théorèmes que nous avons démon-
trés relativement aux cubiques planes (1) pour avoir autant
de théorèmes nouveaux sur les cubiques gauches.
Le théorème fondamental s'énoncera :
Étant données, sur la surface dun hyperboloïde , deux
sécantes qui coupent chacune en trois points une cubique
gauche, si l'on joint les points d' intersection de la première
à ceux de la seconde par trois transversales qui ne partent
pas d'un même point de la cubique, ces transversales cou-
peront celle-ci en trois points qui seront situés sur une
conique du premier ordre.
Il est superflu, pensons-nous, d'énoncer également les
cas particuliers auxquels ce théorème donne lieu.
L'extension que nous avons faite du théorème de Pascal
aux cubiques planes, transportée aux cubiques gauches,
donnera lieu à ce théorème :
(1) Fondements d'une géométrie supérieure cartésienne. (Extrait du
i. XXXIX des Mémoires de l'Académie rottale de Belgique, pp. 20 à 23.)
( 67)
Dans un système de deux quadrilatères conjugués in-
scrits ànne cubique fjauche sur la surface d'un hyperboloïde^
les côtés opposés se coupent en quatre points situés sur une
conique du premier ordre.
Nous nous proposons, dans une prochaine communica-
tion, d'étendre également aux courbes gauches nos théo-
rèmes sur les courbes planes d'un ordre supérieur au
troisième.
Sur la généralisation de la formule de Binety par
M. J. De Tilly, correspondant de l'Académie.
Le Bulletin du mois d'avril 1874 contient (') une récla-
mation de priorité, adressée à l'Académie par M. Genocchi
et ainsi conçue :
« Je ferai remarquer que les séries semblables à celle de
Binet, données par M. Gilbert dans le § IV de son
Mémoire ("), avaient déjà été publiées par moi, dans deux
écrits qui ont paru, en 1855 et 1839, dans les Annales de
M. Tortolini (Intorno ad alcune formole sommatorie. —
Série ordinate per fattoriale inversi), avec quelques autres
résultats qui ne sont pas dépourvus d'intérêt. »
Ayant été l'un des commissaires chargés par l'Académie
d'examiner le Mémoire auquel s'applique la réclamalion de
M. Genocchi, j'ai voulu me rendre compte de la portée
de cette réclamation et je crois avoir reconnu que celle-ci,
C) Tome XXXVII, page 351.
(*') Recherches sur le développement de la fonclion r,t. XLIdes
Mémoires de l'Académie.
(68)
bien que fondée en partie, est conçue en des termes trop
généraux et trop absolus.
En effet, les deux Mémoires du savant professeur de
Turin, d'ailleurs très-intéressants, pleins d'érudition et de
recherches délicates ingénieusement conduites, ne con-
tiennent pas /oî<^es les formules du § IV du Mémoire de
M. Gilbert, comme cela semblerait résulter du texte de la
réclamation. Au contraire, l'une des formules de ce der-
nier Mémoire est plus générale que toutes celles qui sont
données par M. Genocchi, pour le développement de
I. r (y.) ou de cT (y) (*), dans les deux écrits signalés par le
géomètre italien, et les renferme comme cas particuliers.
La formule en question est la suivante (") :
■w= 5
- y —
-k){^-
(3 — x) [- — X jdx
-]/('s-.)(.3.
A)(r
P)
X
r
\P — JC) 1-
x\((x
^ •
l^„ [y. -+- [î -+- A) ((Ci -H (3 -+- A H- ;^) ••• (pi -+- p -4- A- -+- np)
' (3 — x) (p -+- p — x) ... ([3 -+- np — x) (l
fx. -^ k -\- X
OÙ /) est un entier quelconque.
xjdx,
(*) ^(,u)=l.r(A') -il.2r-(,u- 1)1. M
('•) Page 25 du Mémoire de M. Gilbert.
(69 )
Si l'on y faisait : ;> = l , (3 = 0, elle donnerait la série
de Binet, dont il a été question dans les tomes XX et XXI
{V' série); XXXV et XXXVI (2-^ série) des Bulletins. Si l'on
fait y; = i, en laissant (3 indéterminé, elle devient (*) :
'=^C")= — - r {p-x)[--x]dx + \ ,
X /"(S — x)(/3 + l— x)fi-xjrfx^-...
n [u. -t- p) (^ -H S -f- 1) •.. [u. -t- s -+- n — \)
X J^[p - X) (3 + 1 - x) ... (3 + « - 1 - x)fi - x)r/.
-i-5
A=o (/" -H S -t- A;) [u. -4- S -f- A: H- I) ... (a -+- |5 -t- A; -+- n)
/
\S — x) (S -H I — x) ... (5 -+- « _ x) /l
X / -^ — — — -[- — x]dx;
J (j. -\- k ■\- X \2 /
0
et cette dernière formule me paraît être la plus générale
qu'il soit possible de déduire des deux Mémoires insérés
dans les Annales de M. Tortolini, et en particulier des
résultats trouvés aux §§ 2 et i du Mémoire de I8oo et au
§ 4 de celui de 1839, par de simples changements de no-
tations ou développements de calculs indiqués, sans trans-
formations nouvelles.
Ainsi l'une au moins des séries trouvées par M, Gilbert,
et la plus générale, lui appartient en propre et échappe à
la réclamation de priorité, laquelle est fondée en ce qui
{*l Page 26 du mémoire de M. Gilbert.
(70 )
concerne les autres séries du § IV, répondant à l'hypo-
thèse p = i.
J'ajoute que la méthode suivie par M. Gilbert diffère
essentiellement de celle de M. Genocchi, ce qui, du reste,
n'est point contesté.
Sur quelques roches porphyriques de Belgique; par
M. G. Malaise, membre de l'Académie.
Mes recherches sur les terrains anciens de l'Ardenne et
du Brabant m'ayant mis à même de faire quelques obser-
vations sur les roches porphyriques, j'ai l'honneur de les
communiquer à la Classe des sciences.
Les roches porphyriques de Belgique que Ton considère
comme plutoniennes ou métamorphiques se trouvent dans
le massif de Stavelot et dans celui du Brabant et de Sambre-
et-Meuse. Une seule eurite a été observée dans le terrain
dévonien inférieur, à Piroy (Malonne).
L'époque précise de leur apparition et difficile à déter-
miner. On sait seulement qu'elles sont postérieures aux
terrainscambrien et silurien, dont elles traversent plusieurs
assises, et antérieures au terrain dévonien dans lequel
elles ne pénètrent pas, à une seule exception près, l'eurite
de Piroy (Malonne). Elles sont tout au moins antérieures
au poudingue de Burnot pour le Brabant, Dumont ayant
trouvé parmi les cailloux de ce poudingue des fragments
d'eurite et de chlorophyre (1) dont l'identité avec les roches
(1) A. Dumont, Mémoire sur les terrains ardennais et rhénan. (Mé-
moires de l'Académie royale de Belgique,!. XX, 1" partie, 1847, et
t. XXII, "2' partie, 18iS.) 2" partie, p. 517.
( 71 )
en place lui a paru assez bien établie pour en conclure
que ces derniers sont antérieurs au poudingue. On n'a
jusqu'à présent trouvé, à notre connaissance, aucun frag-
ment de roche plutonienne dans le poudingue de Fépin,
à moins toutefois que l'on n'admette que ce poudingue et
les arkoses qui lui sont supérieures et qui ont générale-
ment comme gangue des substances feldspathiques ne soient
des débris de roches plutoniennes injectées dans les terrains
cambrien et silurien ; il est donc à supposer que les masses
éruptives leur sont antérieures. Leur âge d'apparition ne
peut être fixé que d'une manière approximative; et en se
basant sur cette considération que les éruptions des roches
sont en rapport avec les mouvements du sol , on serait
porté à prendre comme date d'apparition de ces roches
éruptives en Ardenne, l'époque de la formation du pou-
dingue de Fépin qui repose en stratification discordante
sur le terrain cambrien. Il n'est pas non plus prouvé que
les roches porphyriques de l'Ardenne, du Brabant et de
Sambre-et-Meuse soient arrivées à la même époque.
Ces roches ont attiré, à différentes reprises, l'attention
des géologues. Dumont a donné de nombreux détails sur
leurs caractères et leurs gisements dans son mémoire sur
les terrains ardennais et rhénan (1), détails basés sur
ses observations et sur celles faites antérieurement par
MM. Cauchy, C. Davreux, d'Omalius d'Halioy, Drapiez,
Galeotti, H. Lambotte, Sauvage et Buvignier, etc., et par
la Société géologique de France.
Depuis le remarquable travail de Dumont (2), quelques
observations ont été faites, au sujet des roches porphyri-
(1) A. Dumont, Mémoire cilé, l'* et 2« parties.
(i) Mémoire cité.
(72)
qoos par MM. Delesse(l), G. Dewalque (2), J. Gosselet (5)
et nous-même (4). Ces diverses roches, qui avaient été dé-
crites par Diimont (5) sous les noms de eurite simple,
quartzeuse, et phylladeuse; albite chlorilifère et phylladi-
fère; hyalophyre; ehlorophyre massif et schistoïde; por-
phyre schisloïde; diorite; hypersthénite, ont été groupées
par M. G. Dewalque (6) en 1. Ecrites, II. Orthophyres,
lll. Oligophyres comprenant l'hypersthénite, le ehloro-
phyre et le diorite. IV. Porphyres schistoïdes renfermant:
!e porphyre schistoïde, le ehlorophyre schistoïde, l'albite
phylladifère et l'eurite phylladeuse. Nous avons suivi la
marche suivante dans notre Manuel de minéralogie pra-
tique (7) : Roches FELDSPATHiQUES SIMPLES, eurite. Roches
FELDSPATHiQUEs COMPOSÉES: hypcrsthénilc, ehlorophyre,
diorite; porphyres schistoïdes Comprenant le porphyre schis-
toïde, le ehlorophyre schistoïde, l'albite phylladifère et
l'eurite phylladeuse. M. J. Gosselet (8) les a désignés sous
les noms de Porphyres présentant deux types, le porphyre
(1) Sur le porphyre de Lessines. Lettre à M. d'Omalius. (Bulletins de
l'Académie royale de Belgique, l. XVI, 1", p. 528.)
(2) Société géologique de France. Réunion extraordinaire à Liège,
en 186Ô.
(5) Mémoire sur les terrains primaires de la Belgique, etc. (Bulletins
de la Société géologique de France, etc.
(4) C. Malaise, Mémoire sur le terrain silurien du centre de la Bel-
gique. (Mé^ioires couronnés, etc., de l'Académie royale de Belgique,
î.XXXVlI,pp. 70et71.)
(o) Mémoire cité.
(6) Prodrome d'une description géologique de la Belgique. Liège,
^868; pp. 295 à ô02.
(7) Mons, 1875; p. 253 et pp. 264 à 268
(8) Esquisse géologique du département du Nord et des contrées voi-
sines, pp. 59 et 60. (Bull, scientif, du départ, du Nord, etc., 3» année.
Lille; 1871.)
(75)
quartzifère de Deville et l'eurile de Gerabloux et les Por-
PHYRiTEs se rapportant à trois types que l'on trouve à
Quenast [chlorophyre ^ Dumont), à Laifour [diorite, Du-
monl) et à Hozémont {hijpersthénite, Dumont).
Les roches dont nous allons nous occuper peuvent se
diviser en deux groupes : i° les eurites d'apparence simple;
2° les roches porphyriques composées que l'on considère
comme ayant apparu à une même époque, mais différentes
par la nature des éléments et le plus ou moins de lenteur
du refroidissement.
Les tranchées de chemin de fer et celles nécessitées
par certaines routes nous ont permis de reconnaître quel-
ques faits nouveaux sous le rapport des gisements. Toute-
fois ceux que l'on a découverts depuis Dumont ne sont pas
nombreux. Citons :
Le diorite près de Stavelot; l'hypersthénite entre Les
Tombes et l'abbaye de Grand-Pré (Mozet); des traces
d'eurite à Ottignies, etc.
Dumont a signalé l'eurite simple, pailletée et quartzeuse
(hyalophyre pailletée, Dumont), dans le massif de Stavelot,
à Spa, au bout de la promenade de Sept-Heures. Elle y
constitue un filon qui se divise en deux branches à la
partie supérieure, dont l'une, injectée dans le joint de
stratification, s'étend vers la surface du sol, et dont l'autre
remplit une fissure et se termine en coin. Ce filon se pro-
longe suivant une direction parallèle à la direction feuil-
letée du phyllade et se retrouve près du cimetière de Spa,
où il consiste principalement en orthophyre quartzifère,
dans la promenade sur la colline au NE. de Spa, entre Spa
et Arbespine (1).
(1) A. Dumont, Mémoire cité, 1" partie, pp. 134 et 133.
(74)
La variété nommée par Dumont liyalophyre peut être
considérée comme un orthophyre quartzifère; elle est
composée d'une pâte euritique contenant des cristaux de
feldspath et de quartz et l'on y trouve fréquemment des
paillettes noirâtres hexagonales (chlorite?) et de petits
points noirâtres (amphibole?).
Les nouvelles promenades tracées aux environs de Spa
nous ont permis de constater les mêmes roches dans
quelques nouveaux points. Nous avons trouvé de Teurite
en deux endroits au NO. de la ville, dans la promenade des
Français, près d'un petit abri. Elle est pailletée et plus ou
moins fissurée ; la plupart de ces joints inclinent N. 20° 0.
Dans le point le plus rapproché de la promenade de Sept-
Heures, elle est plus pailletée, tachetée de points noirs et
renferme de petits cubes de pyrites, en partie transformés
en limonile épigène.
Nous avons rencontré à Spa, dans l'eurite, des frag-
ments de phyllades et des morceaux de quartz provenant
de filons, et qui indiquent que cette eurite est postérieure
à ces phyllades et aux filons quartzeux qu'ils contiennent.
On observe l'eurite aux environs de Nivelles : 1° sur
la rive gauche d'un ruisseau en deux points dans une
prairie entre le moulin de Monslreux et le hameau d'Ar-
denelle, dans celui le plus à l'E. l'eurite est en couches
inclinées au SO. de 80"; 2" au NE. de ce point, près du
chemin de Bornival à Nivelles, où elle est exploitée, les
couches paraissent incliner au SO. de 70"; 5" dans une
prairie située au S. de ce point, on a fait des recherches,
inclinaison au SO. de 75"; A° près des remparts, à l'O. de
Nivelles, où elle est exploitée; 5" en fragments dans le
ruisseau à l'E. de Nivelles.
Cette eurite est la plus belle et la plus pure des diverses
localités où l'on rencontre cette substance; aussi est-ce celle
( 75 )
qui est la plus exploitée et la plus recherchée pour la
fabrication de la porcelaine.
« Ces divers gîtes étant situés à peu près suivant une
ligne droite, on peut croire que celte droite est une ligne
de fracture et que les gîtes font partie d'un même lilon.
La direction de la droite est de l'O. 20" N. à l'E. 20" S.,
et sa position s'écarte peu du prolongement de la ligne des
chlorophyres schistoïdes d'Enghien à Fauquez (1). »
On rencontre dans le chemin, entre Bel-Air et Mon-
streux,une eurite porphyroïde à petits cristaux d'albite
au voisinage de laquelle les roches sont très-altérées et
très-métamorphiques.
Ainsi que l'a indiqué Dumont(2), on observe quelques
fragments d'une espèce d'eurite schistoïde, à quelques
centaines de mètres au N. de la roche porphyroïde de
Fauquez, à l'E. de la Voilée, sur la rive gauche de la
Senne. La même roche forme, près de l'écluse de Yoiri-
chev, deux filons voisins dont on voit la tête dans le
chemin qui conduit au Iluteux; ils n'ont que quelqu.es
décimètres d'épaisseur.
De curieux gîtes d'eurite se trouvent dans la station
d'Ottignies. Elle imprègne en partie des phyllades gri-
sâtres altérées, qui, dans certains cas, offrent une appa-
rence qui les rapproche des mêmes roches dans lesquelles
on rencontre des graptolithes à Grand-Manil.
L'état de la tranchée ne nous a pas permis de juger de
leur position exacte; nous croyons qu'elle forme également
quelques filons couchés parallèles aux couches. (Inclinai-
son au N.)
(1) A. DunioiU, Mémoire cité, 2'" partie, pp. 511 et 312.
(2) Ibid., p. 311.
( 76 )
On trouve des traces d'eurite dans la tranchée, entre
Villers-la-Ville et Strichon, au milieu de couches très-
aï térées.
On ohserve à Grand-Manii, près Gembloux, de l'eurite
quartzeuse, formant plusieurs bancs ou fdons couchés,
présentant pour la plupart des caractères particuliers,
alternant avec des couches de quartzite, le tout paraissant
métamorphique; au N. se trouve de l'eurite porphyroïde,
sans stratification et probablement éruptive.
L'eurite quartzeuse et l'eurite porphyroïde, véritable
porphyre feldspathique (orthophyre), sont intercalées au N.
et au S. entre des phyllades siluriens altérés, contenant
des impressions scalariformes de graptolithes.
Nous avons trouvé sur la rive droite un affleurement
d'eurite quartzeuse qui est dans le prolongement de celle
de la rive gauche. L'une et l'autre occupent la même posi-
tion par rapport au phyllade fossilifère.
Dumont a signalé (1) des fragments d'eurite à 800 mètres
de Grand-Manil , dans le chemin de Corroy-le-Château.
Le même savant a reconnu (2) l'eurite quartzeuse à Som-
breffe, entre Vieille-Maison et la ferme de l'Encombrie, et
à rO. d'Ottiamont, dans le chemin de Sart-Molé à Bruyère.
On ne rencontre plus dans ces deux localités que des
fragments d'eurite altérée. Le prolongement de la ligne qui
joint ces points passe par Grand-Manil.
On observe sur la rive gauche de la Méhaigne, entre
Fallais et Fumai , sous la chapelle du Saint-Sauveur, un
typhon, formé d'albite, à grands cristaux, passant à une
(1) A. Dumont, Mémoire cité 'i" partie, p. 315.
(2) 76«U,p. 286.
( 77 )
eurile compacte grisâtre (1); on rencontre le prolongement
de ce typhon sur la rive droite de la Méliaigne.
Dumont a signalé en outre (2) « un second typhon très-
remarquable par sa texture et par les modifications qu'il
a produites dans le phyllade, sur la rive gauche de la
Méhaigne près de Pitet. Ce typhon a environ 25 mètres
de base sur 50 mètres de hauteur. Les parties septen-
trionales et moyennes consistent en cristaux d'albite de
i à 2 millimètres de longueur, entremêlés de phyllade
gris-bleu subluisant, offrant une texture schisto-lamel-
laire, une couleur d'un gris mêlé et renfermant des frag-
ments de phyllade modifié par la chaleur; vers la partie
méridionale du typhon, l'albite passe à l'eurite compacte
gris-bleuâtre et présente à 2"'80 de sa limite extrême, une
longue fissure parallèle au joint d'injection. »
Le typhon a une direction EO.; les roches plongent d'un
côté au S. et de l'autre au N., ce qui indique qu'il leur est
postérieur et les a redressées, en même temps qu'il leur
faisait subir certaines altérations.
Dumont (5) a signalé un monticule d'eurite quartzeuse
au hameau de Piroy (Malonne); il en figure deux sur la
carte géologique de Belgique. Le premier typhon se trouve
sur la rive gauche du ruisseau de Piroy. On en observe un
second sur la rive droite du même ruisseau , mais celui-ci
se trouve dans le terrain devonien, c'est le seul gîte des
roches plutoniennes ou considérées comme telles, observé
dans ce terrain, en Belgique. Des traces de la même roche
(i) A. Dumont, Mémoire cité, 2« partie, p. 310.
(2) Ibid., p. 510.
(5) Ibid., p. 525.
( 78 )
se rencontrent à la ferme de Halleux , entre Neuville-sur-
Meuse et Ombret.
La grande quantité de quartz que contiennent ces roches
les rend difficilement fusible contrairement aux caractères
des eurites, dont le nom veut dire aisément fusible; nous
sommes porté à croire que ce sont plutôt des quartziles
imprégnés de matières feldspathiques à base de potassium
et plus fréquemment du sodium. Elles ont été nommées
indifféremment eurite ou albite. L'hyalophyre pailleté de
de l'Ardenne et l'albite phylladifère du Brabant se rappro-
chent de ce type. Les diverses couches d'un même gîte pré-
sentent très-souvent des caractères particuliers.
L'eurile perd sa cohérence et devient terreuse par alté-
ration; lorsqu'elle est porphyroïde, le feldspath se trans-
forme en kaolin et la masse devient celluleuse et friable.
La forme que présentent les typhons de chlorophyre ou
porphyrite de Lessines et de Quenast est des plus remar-
quables; c'est celle d'un golfe ou d'un cratère rappelant la
forme de certaines îles d'origine volcanique. Au SE. de
Lessines, il forme sur la rive droite de la Dendre un
demi-cercle qui s'étend de l'extrémité occidentale du bois
de Lessines par Campmillon, jusqu'au N. de la ferme
Bronchenne entre Lessines et Ollignies(l). Il forme au S.
de Quenast, sur la rive droite de la Senne, une masse aussi
considérable qu'à Lessines, dans laquelle on a ouvert un
grand nombre de carrières, situées les unes à côté des
autres dans une zone demi-circulaire (2). Il constitue une
masse homogène sans divisions apparentes; cependant dans
(1) A. Dumont, Mémoire cilé, 2« partie, p. 500.
(2) Ibid., p. 301.
( 79 )
quelques carrières il est divisé par des fissures très-éten-
dues qui sont souvent parallèles entre elles et qu'on pour-
rait prendre alors pour des joints de stratification , mais
qui en diffèrent parce qu'elles n'ont pas une direction con-
stante; d'autres lîssures transversales les subdivisent en
polyèdres, qui rappellent un peu les colonnades de basalte.
Dans la carrière dite des Boules, le porphyre a une ana-
logie de plus avec le basalte, car, par suite de la décom-
position, chaque polyèdre tend à perdre ses arêtes et à
prendre la forme sphéroïdale, comme la coulée de lave
basaltique, où se trouve creusée la célèbre grotte des Fro-
mages, près de Bertrich [i).
« On peut se demander si les masses porphyriques de
Quenast et de Lessines ne représentent pas la matière
éruptive qui a rempli les cratères par où sont sorties les
éruptions porphyriques ou des amas de lave qui ont comblé
d'anciennes \'allées (2). »
Dumont a nommé chloropliijre schistoïde une roche
composée d'une pâte euritique gris-verdàtre, de cristaux
feldspalhiques, clinaxiques ou non, simples ou maclés, de
un à cinq millimètres de grandeur, et de chlorite d'un
vert sombre ou noirâtre, en petites masses finement lamel-
laires; on y trouve accessoirement des grains de quartz
et des lames phylladeuses. ïl est strato-porphyroïde ou
schisto-porphyroïde , d'un gris verdâtre clair tacheté de
blanc et de vert foncé.
Dumont l'a indiqué au Vert-Chasseur, près de Steenkup
(1) J. Gosselel. Esquisse géologique, elc. (Bulletin scientifique du
DÉPARTEMENT DU NoRD , elc, 3^ année, p. 81.)
("2) /6iV/,p. 81.
(80)
(Bierghes); l'exploitation est actuellement inondée. On
l'observe encore près de Rebecq , au N. des fermes de
Grande-Haie et de Petite-Haie et à 100" au N. de la ferme
du Croiseau. On le rencontre aussi à Chenois (inclinaison
E. 20" N.=6o° (Hennuyères) et entre Chenois et le hameau
des Ardennes (Hennuyères).
Cette roche se retrouve à quelques centaines de mètres
au S. du château de Fauquez sur la rive gauche de la Senne
où elle forme de pittoresques escarpements dans l'endroit
nommé Bois des Rocs; elle y présente un très-bel affleu-
rement et y est divisée par de nombreuses lissures obliques,
l'une par rapport à Tautre. La même roche s'observe sur
la rive gauche de la Senne, où l'on a tenté d'en faire des
pavés. Sur la rive droite elle se dirige au NO. Sur l'une et
l'autre rive, les roches siluriennes présentent une inclinai-
son diamétralement opposée au N. et au S. de la roche
porphyriques.
Le diorite constitue à Lembecq une masse granitoïde,
d'un vert clair, pointillé de vert foncé. On a tenté d'y faire
des pavés, mais l'exploitation est actuellement abandonnée.
Le diorite se rencontre à 2 kilomètres à l'E. de Stavelot,
sur la rive droite de l'Amblève, au confluent de cette
rivière et de l'eau rouge à Challes. Il constitue un filon
couché, de cinq mètres de puissance, incliné, ainsi que
les couches voisines, au S. 25° E = 70". 11 présente quel-
ques fissures obliques à cette direction. Nous y avons ren-
contré de la pyrite, de la chalcopyrite, et dans les fissures,
de l'abeste rouillée par des composés ferrugineux. On y
avait établi une carrière de pavés, actuellement aban-
donnée. Nous l'avons également observé sur la rive gauche
de l'Amblève et l'on en trouve des fragments roulés parmi
les cailloux de celte rivière vers Coo.
(81 )
On rencontre de l'hyperslbénite granitoïde entre Hozé-
mont et le château de Lexliy ou Dumont l'avait signalée.
Elle est traversée en tous sens par des fissures qui la
divisent en fragments irréguliers etquelquefois sphériques.
Une très-belle hypersthénite porphyroïde a été exploitée
dans une carrière remblayée depuis, près du château de
Lexhy. Elles ont été utilisées pour pavés, pour moellons et
pour l'empierrement des chemins.
J'ai signalé l'bypersthénite entre LesTombes et l'abbaye
de Grand-Pré (Mozel) (1). Cette roche y constitue une tête
de typhon dont les fragments sont plus ou moins altérés;
les gros fragments montrent à l'intérieur une texture gra-
nitoïde; elle est composée de lamelles d'oligoclase gris-
verdàlre, mélangées de grains vert-noirâtre d'hyperslhène.
Dumont a désigné dans le Brabant, sous le nom
d'arkose et de porphyres schistoïdes, des roches que Ton
rencontre dans le voisinage des roches plutoniennes et qui
parfois ne sont que des quartzites ou des phyllades modi-
fiés par le contact des roches ignées et imprégnés de
matières feldspathiques cristallines, etc. Les premières
sont donc des arkoses cristallines, ou des quartzites méta-
morphiques, et les secondes des phyllades métamorphiques
que Dumont avait proposé de nommer phylladophyres. Les
unes et les antres renferment des cristaux de feldspath de
nature variable, et ont une texture plus ou moins porphy-
roïde. Elles contiennent aussi plusieurs substancesdemême
nature que celles des filons, telles que la chlorite, l'oli-
giste, la chalcopyrite, l'épidote, que Ton rencontre dans le
(1) Mémoire sur te terrain silurien , etc., p. 70.
2""' SÉRIE, TOME XXXVHI.
( 82 )
chlorophyre el le diorite. Elles indiquent des relations entre
leur âge d'injection et les roches précitées.
Les quartzites métamorphiques se rencontrent au voi-
sinage des roches pluloniennes; ils sont devenus tels en
s'imprégnant de matières feldspalhiques; dans d'autres
cas, l'action métamorphique s'est fait sentir à distance,
les quartzites ont été imprégnés de grains ou de lamelles
feldspathiques cristallines provenant d'émanations gey-
seriennes. Ils sont fréquemment chloritifères comme les
quartzites de l'assise deTubize où on les rencontre princi-
palement. On en trouve au NE. de liai, dans le chemin qui
conduit à Buysinghen; alternant avec des quartzites dans
des carrières abandonnées au S. de Hal. On les retrouve
àMalheyde (Lembecq), en bancs presque verticaux, alter-
nant avec des phyllades métamorphiques (inclinaison E. 15°
N.=80"); ils renferment ici des filons quarlzeux avec
chlorite, oligistes et épidole. Les mêmes roches se rencon-
trent au N. de Tubize, dans d'anciennes carrières de
quartzites aimantifères. Elles se trouvent également aux
environs de Clabecq, où elles contiennent beaucoup d'épi-
dote. Elles se rencontrent dans le voisinage ou dans le
prolongement de certaines roches plutoniennes: diorite
de Lembecq, chlorophyre de Quenast; souvent même,
ainsi que l'a fait remarquer M. J. Gosselel, elles ont plutôt
l'aspect d'un porphyre stratifié. On les rencontre encore
au voisinage des roches por[)hyriques de Fauquez. On les
trouve également entre Clabecq et Braine-le-Chàteau et
entre Rebecq et la ferme de Petite-Haie. Elles présentent
quelquefois la texture granitoïde; elles sont alors composées
de grains de quartz hyalin, de cristaux ou grains anguleux
de feldspath, et fréquemment de chlorite.
Les porphyres schistoïdes ou phyllades métamorphiques
( 83)
imprégnés de feldspath ont la texture schisto-porphyroïde;
ils sont formés d'une pâte de pliyllade contenant des
cristaux, des lamelles ou des grains cristallins de feldspath.
Ils proviennent d'imprégnation feldspathique au contact
des roches plutoniennes ou sous l'influence d'émanations
geysériennes.
Cette roche forme des hancs ou des couches que l'on
rencontre au voisinage des roches plutoniennes et notam-
ment aux environs d'Asquempont (Ittre), Fauquez, Lem-
becq, Clabecq, au S. des roches porphyriqucs de Sainte-
Catherine, près de Pitet, etc. La pâte phylladeuse a
généralement augmenté de dureté et peut rayer les phyl-
lades \oisins, non métamorphiques. Les phyllades en-
globés dans les roches plutoniennes sont devenus méta-
morphiques. On se demande si, dans certains cas, elles
ne sont pas contemporaines des roches |)Iutoniennes dont
elles oflt la même composition (chlorophyre) et dont elles
constitueraient les cendres volcaniques; dans d'autres cas,
elles peuvent provenir de l'altération des mêmes roches
plutoniennes. Elles ressemblent également à des roches
analogues interstratifiées, désignées souvent en Angleterre
sous le nom de feldspathic ashe, et considérées habituel-
lement comme le résultat d'éruptions sous-marines.
Les phyllades métamorphiques, plus imprégnés de ma-
tières feldspathiques, constituent ce que Dumont a décrit
sous le nom de porphyre schL^toïde. Dumont a isidiqué
celui-ci entre Marcq et Enghien où il est constitué par une
pâte euritique renfermant des cristaux de fcldspnih ou de
petites cavités qui proviennent de leurdestrucliun; il incline
au N. On le rencontre à la ferme Sainte-Catherine, à une
demi-lieue au SO. de Rebecq ; Dumont l'a observé sur une
longueur d'environ quarante-cinq mètres, dans un chemin
( 84 )
CI eux; l'état du chemin et la décomposition des roches ne
permettent pas de vérifier cette assertion : celte roche est
constituée ici par une pâte renfermant des cristaux de
feldspath ordinairement décomposés et transformés en
kaolin. On peut également observer cette roche dans la
tranchée de la route de Rebecq à la station du chemin de
fer, et sur la rive gauche de la Senne dans la tranchée du
chemin de fer; elle paraît incliner au SE. de 68". Dumont
Ta encore signalée au S. du château de Fauquez. Nous en
avons trouvé des traces à Asquempont.
M. J. Gosselet, dans son remarquable mémoire sur les
terrains primaires de la Belgique, dit, à propos des por-
phyres schistoïdes de la ferme Sainte-Catherine : « Je crois
|)Ouvoir regarder comme certain, dans le cas qui nous
occupe, que toute la roche était primitivement à l'état de
schiste. Sous rinfluence d'émanations venues de l'intérieur
(le la terre, elle s'est chargée de cristaux d'oligoclase, de
quartz et de chlorite; c'est en quelque sorte un schiste
imprégné de porphyre. Il faut remarquer en outre que ces
émanations porphyrogènes étaient sous la dépendance des
éruptions porphyriques de Quenast. Leurs relations étaient
analogues à celles qui unissent aujourd'hui le Vésuve et
I Etna avec les émanations carbonées ou sulfurées du sud
(le l'Italie et de la Sicile (1). »
11 est très.-remarquable de voir des roches aussi profon-
dément transformées à plusieurs kilomètres du centre
d'éruption, tandis qu'à Quenast, au contact du chloro-
phyre, les phyllades ne sont pas modifiés. Notre vénéré
maître M. d'Omalius d'fïalloy avait conclu de l'observation
(1) J. Gosselet , A/f'moire sur les terrains primaires de la Belgique, etc.
Paris, 1860; p. 57.
(8d )
de ce lait (1) : « (jue les éjaculations inlérieures exerçaient
une action métamorphyque moins forte, lorsqu'elles pou-
vaient se faire à l'état liquide, que quand elles agissaient
à l'état gazeux. »
Notre manière de voir, pour ce qui concerne les quart-
zites et les phyllades métamorphiques, trouve donc un
appui dans l'opinion d'un habile observateur et d'un géo-
logue impartial.
Dumont a également appelé l'attention sur les modifi-
cations où le métamorphisme produit sur les roches silu-
riennes par l'action des émanations intérieures : « Ces
injections n'ont pas produit de modifications de contact
très-marquées; mais la partie septentrionale du massif du
Brabant a subi tout entière, probablement par l'influence
de masses plutoniennes sous-jacentes , une action méta-
morphique très-énergique (2). » La zone qui comprend la
métamorphose avait été désignée par Dumont sous le nom
de Zone de métamorphose du Brabant. Il avait reconnu
des zones analogues dans la partie inférieure du devonien
inférieur de l'Ardenne, plus ancienne que le poudingue
de Burnot. Il est étonnant que ces faits aient échappé
à ceux qui se sont occupés du métamorphisme.
Il n'est pas sans intérêt de rappeler que Dumont a fait
remarquer que les masses plutoniennes, formées de roches
semblables, sont généralement disposées dans le même
alignement, et, de plus, que les angles que ces aligne-
ments forment entre eux paraissent être des multiples de
(1) .l.-J.d'Omaliusd'Halloy. Abrégé de géologie., Bruxelles, 1855, p. ÔTi
(2) Dumoul. Mémoire cité , 2' partie, p. â-42.
( 86 )
6" 7-2 (M- Quelques-uns de ces alignements concordent
avec des lignes de fracture ou des directions de roches
bien déterminées.
Dumont a également fait observer que les roches qu'il
nommait chlorophyre et porphyre schistoïdes se montrent
en divers points d'une ligne de fracture dirigée de l'0. 26" 7^
à TE. 26 '/2 S. passant près d'Enghien, de la ferme Sainte-
Catherine, de Rebecq, du Croiseau , de Chenois, de Fau-
quez et de Monstreux (2).
Nous croyons utile de mentionner quelques faits que
nous avons observés dans le massif de Rocroy.
Les diverses roches porphyriques de ce massif ont été
nommées par Dumont hyalophyre, diorile et albite phyl-
ladifère. Elles se rencontrent fréquemment dans le même
(ilon.
L'albile phylladifôre est formée de grains fins plus ou
moins distincts de feldspath et de phyllade réunis. Elle
constitue des filons couchés ou schisto-lamellaire. Cette
albile phylladifère présente des caractères extérieurs qui
la séparent complètement de la roche désignée sous le
même nom par Dumont, dans le Brabant, et des eurites.
Sur les bords de la Meuse on observe à l'E, et près de
Revin un filon d'albite phylladifère de près de 7 mètres de
puissance; il contient de la pyrite, delà pyrrhotine et del'al-
bite en cristaux simples ou maclés (5); inclinaison S.=38".
Nous avons observé la même roche au N. de Revin, où elle
forme un filon de l'",80 environ de puissance, intercalé
(1) Dumont. Mémoire cilé, 2"^ partie, p. ôlG.
(-2) Ibid., p. 504.
(ô) Ibid., 1'^ pariie, pp. 90 et 91.
(87 )
dans le phyllade, direction E. 8° S. à 0.8° N. Nous avons
revu la même roche à l'angle de la Meuse et du moulin de
la Pille, à 100 mètres environ au N. du ravin ; cette roche
incline au S., elle ressemble plutôt à une lentille qu'à un
filon couché. On la rencontre encore entre Mairus et
Laifour, etc.
Nous avons en outre trouvé au S. du moulin de la Pille,
en remontant le ruisseau, sur une longueur d'environ
\ kilomètre, des blocs de diorite; ces blocs volumineux
sont arrondis et polis.
Nous avons également observé au N. de Mairus, dans
la tranchée du chemin de fer, un filon couché de diorite,
de 2 mètres de puissance.
Les diorites du massif de Rocroy sont plus calcareuscs
que celles des autres massifs. L'albite chloritifère de
Dumont qui paraît se rapprocher du diorite en diffère géné-
ralement par l'absence ou la moindre quantité de composés
amphiboliqnes; ces roches passent de l'une à l'autre et se
trouvent presque toujours dans le même filon. Toutes les
albites chlorilifères de Dumont ne sont cependant pas des
diorites et plusieurs doivent se ranger dans les roches qu'il
nommait albite phylladifère.
Toutes ces roches sont encore très peu connues quant à
leur composition. Les diverses opinions émises à leur sujet
montrent combien on est peu d'accord; Dumont lui-même
a désigné sous le même nom des roches d'aspect assez
variables. Nul doute que les procédés actuellement pra-
tiqués en Allemagne, et surtout l'analyse microscopique,
ne réservent plus d'une surprise, et la découverte de
faits des plus curieux à celui qui se livrera à ce genre de
recherches.
( 88)
Quelques réflexions sur le problème de Malfatti; par
M. Simons, répétiteur à l'École militaire.
De toute antiquité, les géomètres ont dû se poser la
question que Malfatti a partiellement résolue; mais il ne
suffit pas de la poser pour la résoudre, et c'est en 1803
que nous voyons, pour la première fois, une réponse
livrée à la publicité {Mémoires de la Société italienne des
sciences).
Les Annales de Gergonne ont repris la question (I, II et
X volume), puis le Journal de Crelle (tomes I, X, XLV et
LXXVI).
Malgré les 70 ans écoulés depuis 1803, et malgré
l'immense publicité que le problème a reçue par suite de
son apparition dans les journaux que je viens de citer,
nous ne voyons jusqu'aujourd'hui paraître aucune solution
bien satisfaisante.
J'en excepte une seule dont je parlerai plus loin.
La solution de Malfatti est la plus simple des solutions
connues; malheureusement elle n'éclaire pas sur les
moyens par lesquels l'auteur l'a obtenue; elle se borne en
effet, comme le dit Gergonne, à former les équations du
problème , et à constater ensuite que les quantités trouvées
satisfont à ces équations.
La solution de Gergonne conduit à une formule très-
compliquée, que son auteur n'a pas su ramener à la for-
mule de Malfatti.
La solution de M. Steiner est un véritable chef-d'œuvre
(89)
relativement au problème plus général qu'il a considéré:
mais en ce qui concerne le problème de Malfatti propre-
ment dit, c'est-à-dire le cas particulier du triangle recti-
ligne, la solution de Sleiner conduit à une construction
trop longue (comparée à celle de Malfatti), et dès lors elle
ne peut plus être considérée comme une solution de ce cas
particulier, mais seulement comme une propriété très-
remarquable de la figure.
La solution très-élégante de M. Schellbach a le défaut
de celle de Malfatti, c'est-à-dire celui d'être donnée
à priori, et vérifiée seulement sur les équations.
Il me semble donc à désirer que l'attention des géo-
mètres soit attirée sur les questions suivantes :
1° Donner une solution analytique complète du pro-
blème, conduisant au résultat le plus simple possible;
2° Donner une solution purement géométrique de la
question, ainsi qu'un exposé méthodique des principales
propriétés de la tigure.
Les réflexions qui suivent ont pour but principal d'épar-
gner une partie du travail à ceux qui voudront s'occuper
de ces questions; et à ce titre je ne les crois pas indignes
d'èfre présentées à l'Académie, attendu que : Necesse est
multi pertranseant, ut augeatur scientia.
§ \. — CONCERNAMT LA SOLUTION ANALYTIQUE DU PROBLÈME.
(J'adopte les notations employées dans les Annales de
Gergonne, t. I, p. 545; seulement pour éviter les accents
je désigne les côtés du triangle par a, b, c.)
Gergonne, après avoir très-habilement ramené la ques-
tion au premier degré, trouve pour valeur du rayon de la
( 90)
première circonférence :
R \hc — {d~d'){d — d")
p b{c—d+d'f-h'2d{c—d-hd'){lj—d-\-d"}-hc{b—d-^d")''
Mais il dit ensuite : « il ne paraît pas facile de ramener
» cette expression à celle de Malfalti, savoir :
r =— (s -+-(/ — d' — d" — R).
» La difficulté tient à ce que parmi le grand nombre des
» relations qui existent entre les données, on n'aperçoit
» pas facilement quelles sont celles qui peuvent le mieux
» opérer la transformation. »
C'est pour avoir vu la difficulté là où elle n'était pas que
Gergonne ne l'a pas surmontée.
En effet, la difficulté provient simplement de ce que
d, d', d", R et s, n'étant pas des quantités indépendantes
les unes des autres, on empêche, en conservant ces sym-
boles particuliers, les réductions de s'effectuer.
On arrive assez naturellement à la transformation dési-
rée, de la manière suivante :
Omettons d'abord le facteur - commun aux deux résul-
tats; il restera le facteur non commun, qui doit évidem-
ment, dans l'un comme dans l'autre, représenter la
distance entre le point de contact du cercle cherché avec
le côté du triangle, et le sommet voisin.
Dans le facteur non commun du premier résultat, on
remplacera d, d', d" et R, par leurs valeurs en fonction de
o, b et c, quantités indépendantes les unes des autres.
Représentons la fraction qu'on obtiendra de cette manière
par ^; et, comme le dénominateur contiendra trois termes,
représentons-les par D', D" et D".
(91 )
On aura donc :
K == 1 6c - (y/'"^'^-"' _ y/î^iiT^l) (y/'iffi:^)
_v/^)f
D._^- ^ //;c(s-a) ^ /ac{s — b)
- //jc(s — o) - /
D-- i!V/'""~"'(c % /'"^'■^''') , \ /°^(^-'')j
6-\/^"^-"'-^V/^
6 (S — c)
Effectuons toutes les opérations indiquées, ce qui est
long, mais n'offre aucune difficulté, et se fait sans aucun
artifice.
Remarquons seulement qu'au lieu de mettre en évidence
le facteur ^, ce qui semble plus naturel au premier
abord, nous ne mettrons que ^ afin de conserver leurs
dénominateurs aux expressions correspondantes à c/, rf', d"
et R.
De cette façon nous obtiendrons :
label , , , 2a6c 2c— s, /-j- — r.
N = \8^~ah—ac—hc-\ 1 V ab{s—a)[s—h]
s \ s s
25 g 9(1 — s .\
-4- Vac{s — a){s — c) \/bc{s — b){s —c)j
( 92 )
D'-+-D"' = ^^^ — 2 s" — 06— ftc — 2 \/bcs{s—a) -+- \/acs{s — b)
s \
-V Vabs (s—c) — 1/ a6 (s — a) (5 — 6) — V^ac (s — a) {s — c)
26c / , y-, « /b c(s — a)
D"= [abhac—hs — cs-^'2Vbcs{s — a)-^a \/ ■'
-(s -a) y (s = «)V
H- [/a b {s — a) {s — b) -^ \/a c {s — a) {s — c )
, ^^/is-a){s-b)(s-c)\
Ajoutant les deux dernières égalités, on aura :
labc I . /bcis — a) - /acis—b) - /ab{s~c)
^ /{s-a)(i-b){s-c))
La suppression du facteur commun ^ donnera :
2 ctbc 2c— "5 ^bs 2ct*5 _.^^_^^^
s^-ab-ac-bc+ + V^ ab{.s-a){s-b + ^^— V ac (s-a)(s-c) - ~- V^ bc (s-b){s-c)
N s s s s
D ^_\/bc{s-a) \/ac js-b) l/ab (s-c) \/{s-a)(s-b)(s-c)
s s s s
On voit par là que la fraction est ramenée à la forme
frf ; 6t parmi les moyens de simplification les plus usités,
il est naturel de se demander si y n'est pas le carré de x.
On élèvera donc au carré la partie du dénominateur repré-
sentée par X. Faisant cette opération on ne trouvera pas
bc{s — u)
( 95)
x^ = y^ mais bien x^- = 2y -h s^; ou y = ^ {x^ — s^)\
donc «2 — y = i- («2 — x^) ; et par conséquent :
D s — X .s — x ' -\V
\ /"^(•^' — ^) % /«^(-s-c) y/(s — (t){s — b){s—c)\
= 1 (.s -i- d — d' — </" — R).
Ce qui est exactement le résultat de Malfatti.
Complétée de cette façon , la marche suivie par Gergonne
lournit une solution analytique qui me paraît provisoire-
ment satisfaisante.
Cependant elle ne me semble pas encore réduite au
dernier degré de simplicité dont elle est susceptible; ce qui
le fait surtout supposer, c'est que l'on obtient, pour les
inconnues auxiliaires, x' et x", des fractions dont les deux
termes sont du o""" degré, tandis qu'elles peuvent très-
simplement être exprimées par des fractions dont les termes
soient du I" degré.
En effet
-Vl^
'2\/r"r' d -+- R — s -+- a
- \/7^ (/'-+- R — .s -f- 6
Cette dernière égalité est justifiée par la remarque que
2V^r"/'=d-hR — s-^a, faite dans l'excellent article écrit
sur la même question parM.Tédenat. (Voir Annales de Ger-
gonne, t. H.)
V' Remarque : (Hg. 1) Soient respectivement m, n p les
( 94)
points (Jeconlacl des trois cercles cherchés; désignons .1 m
Fig. I.
par X, Bp par y et Cn par z. On aura , en vertu du résultat
de Malfatti :
X — z = d -- d" = AO ~ OC.
On a d'ailleurs
X -\- z =b — mn = h — kq.
Ces deux égalités donnent
b — kq — (/ -+- d"
résultat plus simple de Malfatti en ce sens qu'après avoir
obtenu le point n; on obtiendra le point m en portant
mn == kq, et le point/) en portant n'p = k'q'.
Il™* Remarque. — L'égalité a; — z =^ d — d" , donne
encore d — x = à" — z. Or, si nous remplaçons x par sa
valeur trouvée plus haut, nous aurons
d—x=d—{{s^d—d'-d"—Vy]=\{d-^d'-\-d"-^R — s);
( 95 )
et comme celte dernière quantité est tout à fait symétrique
en a, 6 et c, ce sera encore la valeur de d' — y.
L'égalité de ces trois quantités d — x, d' — ?/, d" — z,
nous fournira la solution suivante, un peu moins simple
que celle de Malfatti, mais plus symétrique (fig. i) : du
centre 0 du cercle inscrit ou triangle, et avec le rayon.
Ld ^ cl' -+- d" -h R — s) , on décrit une circonférence qui
coupe respectivement les bissectrices Ao, Bo, Co aux
points f, i, h; puis des points A, B, et C comme centres,
respectivement avec les rayons A^ Bi, C/i, on décrit des
arcs de cercle qui, par leurs rencontres avec les côtés du
triangle, donneront les points de contact des circonférences
cherchées.
Ou bien, si on le préfère, on peut énoncer le théorème
suivant : Les circonférences décrites des sommets du
triangle donné comme centres, et qni coupent respective-
ment à angle droit les circonférences cherchées, passent à
la même distance du centre du cercle inscrit.
Ill^ Remarque. La solution donnée par M. Schellbach
{Journal de Crelle, t. XLV) est on ne peut plus élégante;
seulement elle joint à l'inconvénient de la solution de
Malfatti celui de conduire à une construction géométrique
moins simple. Remarquons cependant que l'on peut facile-
ment, de cette solution, déduire celle de Malfatti. A cet
effet, rappelons que
^ - V s {s — c)
et remplaçons x par
(96)
Développons ensuite ceUc dornière l'oiiiuik', cl remplaçons
dans le développement sin ^ par
;cos— pai'X/
21/ s 2' V 21/,
;siii-par etc.
Le calcul est long, mais n'offre aucune difliculté, et
conduit directement à la formule de Malfatti.
W""^ Remarque {{\g. 2). Déplaçons, par un mouvement
de rotation autour de A, la circonférence dont le centre
est en e, jusqu'à ce que ce centre arrive d'une part en e'
sur le côté AC, et de l'autre en e" sur le côté AB. Amenons
semblablement la circonférence /"en f et en /"', et la cir-
conférence g en g' et g". Les bissectrices OA et OC seront
respectivement tangentes aux circonférences e' et f"; et
Fig. 2.
comme, d'après la remarque II, ces tangentes sosl égales,
( 97)
il s'ensuit que le centre 0 du cercle inscril au triangle ABC
appartient à la ligne des puissances égales des deux circon-
férences e' et f". Cette ligne des puissances égales doit
d'ailleurs être perpendiculaire à AC, donc les trois points
L, H (rencontre des circonférences), et 0 se trouvent sur
une même perpendiculaire à AC. Même raisonnement pour
f Qig" \ puis pour cj' et e" . Or, la corde LH prise dans /"
est égale à la corde KM prise dans f ; donc entin les trois
cordes communes LH, KM et NP sont égales.
Mais ce qui est plus remarquable, c'est que ces cordes
ont précisément la même longueur que celles qu'on obtien-
drait dans le cercle 0 inscrit au triangle ABC (lig. 1) en
élevant des perpendiculaires aux bissectrices, respective-
ment aux points f, i, h.
Pour le démontrer il suffit d'établir qu'en élevant, au
point f, une perpendiculaire égale à la moitié de celte lon-
gueur, et en joignant au centre 0, on aura une ligne égale
au rayon du cercle inscrit.
Or, la moitié de la longueur en question est HQ (lig. 2)
et l'on a, en désignant toujours par x la distance du point
A au point de contact de la circonférence e :
110
/•'^ — e' Q- = y :r2 tang-- — (AQ -— A e'
= \/^'
A / X
■^ tani;^ I s — a
2 ( Al
cos- I
^2 I
-V
A X .x'
x'^ taii"- (.s — ar H- 2 [s — a) .
"2 'a a
cos — (.'Os-
2 2
2'"* SÉRIE, TOME XXXVIII.
(98 )
Si donc nous élevons, au point /(lig. 1), une perpendi-
culaire égale à HQ, nous aurons :
A
= n.n
os' = 0
fs' = x^ tang^ Ty — i^ — "' -* -('^ — ")
A
cos —
1- rf^ — 2 (Ix +■ x' ,
cos^ —
Le i" terme du second membre s'annule avec le 4""' et
le 6'"".
Le 3'"' terme du second membre s'annule avec le 5'"%
donc
os
= \/(P— {s - af =\/ \d — [s — a) | j (/ -+- (s - a) |
moyenne proportionnelle entre la sécante entière menée du
point 0 (au cercle décrit de A comme centre avec [s-a)
comme rayon) et sa partie extérieure; égale, par consé-
quent, à la tangente OQ (fig. 2) à ce cercle C. Q. F. D.
Les défauts reprochés jusqu'ici aux solutions anté-
rieures sont capitaux et consistent donc : 1° en ce qu'elles
donnent une réponse à priori, c'est-à-dire non déduite
régulièrement des équations du problème; 2° en ce qu'elles
ne conduisent pas à la construction géométrique la plus
simple possible.
Il est vrai que la solution donnée par M. Lechmiitz
[Annales de Gergonne, t. X) est exempte de ces deux
défauts marquants, mais il en a un autre, qui, sans être
comparable aux précédents, est encore bien grave.
La longueur excessive des calculs ne permet pas d'y
retrouver un plan d'ensemble; et pour peu qu'on les ait
( 99 )
perdus de vue pendant quelque temps, il devient hien
difficile de les reconstituer.
J'estime donc que M. Catalan a rendu un véritable ser-
vice à la science, en ramenant cette solution à des propor-
tions raisonnables [Nouvelles Atmales, t. V, p. 60).
Il a donné ainsi du problème la première solution
exempte des défauts graves qui entachaient les précé-
dentes.
D'ailleurs il a donné en même temps la démonstration
la plus simple connue, d'une propriété que M. ïédenat a
en vain cherché à établir; comme il résulte de la phrase
suivante [Annales deCergonne, t. H) : on voit combien la
solution de ce problème deviendrait facile, si ron ponçait
parvenir à démontrer à priori qne
2\/r' r"= d -t- R — o
'■2ï/r"r =rf' -4- R — p'
^Vrr" =(/"-+- R— p"
Voilà donc, sous le rapport analytique, deux solutions
très-satisfaisantes; nous considérons cependant comme
très-probable qu'on parviendra encore à les simplifier
davantage.
!^ ± — Concernant les proprïktés géométriques de la
FIGURE.
M. Zornow a donné [Journal de Crelle , t. X) une très-
bonne démonstration de la propriété découverte par
Steiner. Comme ces démonstrations sont très-propres à
faire ressortir les propriétés de la figure, nous en donne-
rons ici une nouvelle.
( 100 )
Lemme : Je mène les bisseclrices des angles du triangle
ABC (tig. 3); je porte sur
Tune d'elles AO, une lon-
gueur AD, telle que BDC
Fis. ô.
jdr
semblable-
R
c sin —
A0=.
ment je fais AEC = 2"'
— -,. Je dis que : sin OCl)
sin OCE = sin^-
En effet : les triangles
ACD et ADB sont sembla-
bles; car ÂBD+ Bl5r=
2^' — ^; et, d'autre part,
ABD+DCA=-4^'^ — A
f^dr A\ cii^ A
Cesdeux égalités donnent
BDA = DCA. Par suite,
les triangles ACD, ADB
ont les angles égaux. On
tire de là AD = 1/^(1).
Ensuite
osin —
9
C
oos -
y)
W
cos
Pienant une moyenne proportionnelle entre ces ûeu\
dernières quantités, on aura :
\n \ / • ^ '% ^ ^ / , \ /(-^'-^ifs^O % /[>i—a)is~h)
AO = \ / o • iinig-la.ig == % / u \ / ; -—^x \/ ^
V
( 101 )
Retranchant (2) de (1) on obtient
^^ ' , %. /^c (s — «)
0D= W fjc — Y —^- ^ (ô).
Le triangle ADC donne :
^ oc
Dans le triangle COD, dont l'angle
A C , B
0=- + - = i"'-
9 »> i
on aura :
ODsInDOC
sinOCD =
CD
V/.s(.s— 6)-l/ {s—a}(s—b} Vs—b \ s — \/s — a
[^a{b-^c — ''2\/s,s — a} Va |/6-+-c— 2l/'.s(.s— «j
mais le second facteur de cette dernière quantité est égal
à l'unité, car les deux ternies de la fraction sont égaux,
comme on s'en assurera facilement en les élevant au carré;
donc enfin
sin OCD
^ a
Changeant 6 en a et a en b, on obtiendra
- /s — a
in OCE = y -^ ;
( m )
donc miiliiplianl ces deux dernières égalités, ou oijliendra :
sinOCDsiiiOCE = \/
(.s — a) [s — /;)
ce qui est la valeur connue de
C
siii - C. Q. r. I).
Corollaire I. J'abaisse OF perpendiculaire à CD, et OG
perpendiculaire à Cli, je tire FC ; je dis que cette droite
FG est tangente au cercle inscrit dans le triangle ABC.
En effet, à cause de la circonférence dont OC est le dia-
mètre, on auia OGF = OCE; on a donc OF = OC sia
OCD, puis la hauteur OH = OF sin OFG = OC sin OCD
sin OCG; d'autre |)arl 01 = OC sin ,^.
Corollaire \\\. Si, du point 0 comme centre, avec OG
comme rayon, on décrit une circonférence qui rencontre
respectivement AC et BCaux points K et I., les angles COK
et COL sont égaux à BCD.
En ctlet, si COK = BCD, les triangles OIE et OCK
seront semblables comme ayant les angles égaux; donc on
aura OF -t- OK = OI + OC; d'autre part le lemme donne
OF + OG = 01 ^ OC; donc enfin OK = OG,etc.
Théorème : Le problème de Malfatti étant résolu pour
le triangle abc\ a. étant le centre du cercle inscrit dans ce
triangle; la tangente commune aux cercles inscrits dans les
ansfles rt et h, est aussi commune aux cercles inscrits dans
les triangles y.ca et ac6 (ibéorème découvert par Sleiner).
Remarquons d'abord que si les points w, n elp (fig. 4),
qui doivent d'ailleurs se trouver sur les bissectrices des
angles du triangle ahc, étaient connus, ce dernier triangle
( 103 )
lui-même pourrait être reconstruit; car il n'y a qu'un
moyen de décrire trois circonférences tangentes deux à
deux extérieurement, et ayant respectivement pour centres
les points m , n et />; et ce moyen consiste à mener les bis-
sectrices des angles du triangle mn/), bissectrices qui se ren-
contrent en 0, à abaisser de ce point des perpendiculaires
sur les côtés, lesquelles déterminent les rayons ne, pe, pf.
Les perpendiculaires elles-mêmes seront les tangentes
communes.
Fig. 4.
Menons deux de ces tangentes communes eg et dh, et
prolongeons-les jusqu'à leur rencontre en g et h, avec le
côté ac du triangle donné; cherchons le centre du cercle
inscrit au triangle ogh. Ce centre est le point i de rencontre
des bissectrices; la première de ces bissectrices s'obtienl
en menant gp; car ge et gh sont tous deux tangents à la
circonférence/); la seconde bissectrice s'obtient de même
en tirant mh ; la troisième noik est en même temps bissec-
( 104 )
irice de l'angle i7inp, comme le prouve l'égalité des
triangles ndo, neo. Je dis ensuite que oj étant la tangente
commune à m et p, ij sera le rayon de la circonférence
inscrite au triangle goh. Pour le prouver, c'est-à-dire pour
établir que ij est perpendiculaire à ac, il suffît de prouver
que les points i et/ sont tous deux également distants de
mr et de pq (perpendiculaires tous deux à ac). Le point i est
à la fois sur ni bissectrice de mnp^ sur pi bissectrice de
epq, et sur mi bissectrice de nmr, c'est donc le centre
d'une circonférence tangente aux quatre lignes vm, mn,
np , pq\ le point i est donc également distant de iiiv et de
pq. Le point j l'est aussi; car les tangentes jq et jr sont
égales à la tangente commune jf. Donc ij est perpendicu-
laire à ac.
Évaluons le rayon ij. Dans le triangle ijp on aura :
ip s'inipj
sin ijp
.Mais à ijp je substituerai ^*; en effet, opm ='i!|i* et mpj
=^^', ajoutant on aura opj =='^ = npi, et retranchant
la partie commune opi, il reste ipj = '^. A l'angle ijp]e
substituerai opi; en effet, l'angle mjp est droit, la circon-
férence décrite sur mp comme diamètre passe donc par /,
son centre s se trouve sur ji prolongé; le triangle sjp est
donc isoscèle et on a : ijp = spj = opi. Donc, enfin, nous
trouvons pour valeur du rayon
ip sin opm
sin opi
Cela posé, je vais démontrer que si du j)oint i j'abaisse
une perpendiculaire sur la bissectrice cp, cette perpendi-
culaire il sera égale à ij; dès lors on démontrerait de
( iOD )
même pour la perpendiculaire abaissée du point / sur la
bisseclrice (un, et par suite la circonlërenee inscrite dans
le triangle ogh sera en même temps inscrite dansie triangle
formé par ac et les deux bissectrices ani et cp. Puis comme
on démontrerait semblablement qu'une même circonfé-
rence est inscrite au triangle formé par bc, fo et do, et en
même temps dans le triangle formé par bc et les bissec-
trices cp et bn, il en résultera que la tangente dh commune
aux circonférences m et w, est aussi tangente commune
aux circonférences inscrites dans les triangles formés res-
pectivement par acet 6c et les bissectrices correspondantes.
Or le triangle ilp donne // = ip sin ipl. Pour évaluer
ipl, nous prendrons la somme des deux intérieurs opposés
pgc -+■ pcg. L'angle prjc = pge= l"""" — opi — ope. Pour
évaluer pcg == '-^'', nous retrancherons de 4'"" les trois
autres angles du quadrilatère cjot; ainsi acb = k^^ [jot -+-
2jop -+- ^otp) = 4."" — (2"^' — mpn — ^omi + lonV).
\ Remarquons que ojp = omi, car ojp est complément de
fpj qui dans la circonférence s a pour mesure la moitié de
l'arc sous-tendu par mj\ et omi = pwj a pour mesure la
moitié de l'arc sous-tendu par jp.\ On aura donc pcg =
i**"" — ope — omi — onî". Ajoutant on aura ipl ^='2'^' —opi
— omi — oui' = S*^"" — l""" — oni' = l""" — oui' = opi'.
La valeur trouvée pour il est donc : il = ip sin opi'.
Enfin cette valeur est égale, en vertu du lemme précé-
dent, à celle que nous avons trouvée plus haut pour ij. Ce
lemme est applicable, car omi et opi étant complémen-
taires, on a :
mlp = 5'''' — mop = ô''"" — niOi — lop = ô*"" — "t — "
p n
__ L = O""^ — - . C. O. F. D.
( 106 )
Théorème : Supposons les trois cercles m, n, p, (fig. o)
inscrits, comme plus haut, dans le triangle abc dont nous
regardons le plan comme horizontal. Considérons en même
temps la circonférence o, inscrite dans le triangle obcf
comme la projection horizontale d'une circonférence égale,
placée à une distance quelconque du plan horizontal; cette
dernière circonférence, avec chacune des précédentes, déter-
minera une surface conique; ces cônes auront évidemment
leurs sommets projetés respectivement en a, b et c, et je
dis que le plan de
ces trois sommets
aura pour trace
horizontale la tra-
ce du plan langent
aux trois sphères
qui alliaient res-
pectivement les
circonféiences m,
il et p pour grands
cercles.
En effet, la trace horizontale de la droite qui joint les
deux sommets projetés en a et b se trouve évidemment sur
ba; puis le plan passant par ces deux sommets et le point
0, coupe le plan horizontal suivant mu, qui rencontre ba
au centre de similitude externe des deux circonférences
m et n, etc.
Théorème : Si par le centre du cercle inscrit à abc, on
mène des parallèles aux côtés du triangle innp, ces paral-
lèles rencontreront respectivement les côtés correspon-
dants du triangle abc, en trois points qui seront en ligne
droite.
( 107 )
En effet, celte ligne droite sera la trace du plan des
trois sommets de cône cités
pins haut , sur le plan de la base
/Q\ commune de ces cônes.
/ \ V- Problème (fig. 6) : Étant
yK ^./"'"T-Sc- donné une circonférence m in-
/[ ^y::^::S:--'"'-'' j\ scrite dans l'angle c d'un Irian-
/|^^K^^J^^y^ gle donné abc, construire une
^'^ ^ circonférence inscrite dans l'an-
gle 6 et tangente à la première.
Solution : Par le centre m, je mène une parallèle à la
bissectrice bo, jusqu'à la rencontre en d avec ^c; je prends
mf= md , je mène bf, et je dis que i/ rencontre la circon-
férence m au point du contact g des deux circonférences,
et que par suite il suffit de tracer mrj, pour obtenir en n le
centre cherché.
En effet, supposant le problème résolu, menons dmf
parallèle à 6o et joignons b(j. Les triangles semblables bn(j
et fnifj donnent : ng : mg = bn : fin.
D'autre part,/; et q étant les points de contact des cir-
conférences m et n, les triangles semblables bnq dmp
donnent nq : mp = bn : dm. Les premiers rapports de ces
proportions sont égaux, donc fm = dm C. Q. F. D.
Sc/iulie : Dans le cas du triangle isoscècle (fig. 7), ce qui
précède permettra de résoudre très-simplement le pro-
blème de Malfalti. En effet, à cause de la symétrie, deux
des circonférences seront égales, et inscrites respective-
ment dans les angles bda et bdc. Pour les obtenir, on por-
tera ce = cd, puis bf= be; le milieu g de fd, sera le point
de contact des deux circonférences cherchées; en élevant
( 108)
donc en ce point ^ une perpendiculaire à fd, et lui donnant
de part et d'autre une longueur
gh = gi = gd, on aura les cen-
tres des deux circonférences
égales. Puis la troisième circon-
férence s'obtiendra par le moyen
indiqué dans la solution précé-
dente. Le problème est ainsi ré-
solu beaucoup plus simplement
que ne l'avait fait Bernoulli
{OEuvres de Bernoulli, t. f,
Genève, 1744.).
Ajoutons pour terminer que
mon travail, tel que je l'avais
conçu d'abord , contenait encore la démonstration de ce
théorème : dans le problème de iMallatti, si l'on compare
deux angles du triangle donné, dans le plus petit angle,
se trouvera la plus grande circonférence.
Noucellcs recherches sur la constitution des acides polij-
Ihioniqnes; par M. Walthère Spring.
Les réactions que j'ai instituées en vue de dévoiler la
constitution de l'acide hyposulfurenx ont démontré, je
crois, que l'on devait admettre dans cet acide l'existence
d'un sulfhydryle à côté d'un oxhydryle, en d'autres termes,
que l'acide dérivait du type conjugué
"^0
H -^ ^
H ^^
*^l non (lu ivpe „
( 109 )
Une partie du problème était résolue; il en restait une
autre plus importante, puisque de sa solution dépendait !e
jugement à prononcer sur l'exactitude des idées que les
chimistes professent aujourd'hui sur la constitution de
tous les acides du soufre; cette autre partie consistait,
comme on se le rappelle, à rechercher si le radical SO- que
renferme ces acides, est symétrique ou non.
Dans la dernière note que j'ai eu l'honneur de présen-
ter à l'Académie [Bulletins, l. XXXVII, n" 1, janvier 1874),
j'avais émis l'opinion que la question serait résolue si l'on
parvenait à démontrer que dans l'acide hyposulfureux les
deux atomes de soufre sont en contact immédiat et non
réunis par l'intermédiaire d'un atome d'oxygène : il suflil
en effet de considérer les formules suivantes, les seules
actuellement possibles d'ailleurs ,
HS . soo . OH
HS.OSO.OH
HS.OOS.OH
pour se convaincre que, si l'on parvient à démontrer que
les deux atomes de soufre sont en contact immédiat, il
faut admettre la première de ces formules comme devant
être la formule rationnelle de l'acide qui nous occupe pour
le moment et de plus que le radical SO- n'est pas symé-
trique.
Il est bien évident que cette argumentation n'a de valeur
que pour autant que l'atome de soufre soit biatomique et
cela d'une façon constante dans une même molécule du
moins. Dans ces derniers temps on a émis plusieurs opi-
nions sur ce point : suivant plusieurs chimistes l'atomicité
serait une fonction de la température. (Michaelis, Ann.
der Cheniie nd P/iarm., p. 1, t. CLXX, 1875.) Cette idée
n'a pas encore été développée avec assez de clarté ni de
( iio)
«Iclaiis poiiiqiie l'on puisse s'y rallier ou la combatlrc; je
continuerai donc à admettre l'atomicité du soufre comme
constante et égale à 2.
Depuis assez longtemps déjà l'action de l'iode sur les
sulfures et sur les mercaptides était enregistrée dans la
science; ce métalloïde jouit en effet de la propriété d'unir
deux molécules d'un monosulfure, de façon à donner
naissance à une molécule de bisulfure avec formation de
deux molécules d'iodure d'après les équations :
2M'S + P = M'^S^-H^M'I
2CM1=SM' -4- F = fCMPy'S' + m'\.
Plus tard MM. Fordos et Gélis, en étudiant l'action de
l'iode sur les hyposulfiles, découvrirent l'acide lélratliio-
nique. Ce corps paraît donc se former d'une manière ana-
logue à la génération des bisulfures. Reprenant l'étude de
ces réactions de l'iode, MM. Kekulé et Linnemann {Ueber
die Einwirknny von Jod auf einige organisc/ie Schwefel-
verbindungen, Ann. d. Chemie und Pharm., B. CXIII, 270),
émirent l'opinion que chaque fois que dans une molécule
il se trouvait le groupe mlfligdryle, l'iode réagissait de façon
à souder deux de ces molécules, avec formation de deux
molécules d'iodure , pour donner naissance à des polysul-
fures. Si celte manière de voir était exacte, les thiacétates
et les sulfocarbonatcs, dans lesquels on admettait déjà
l'existence du groupe SH, devaient se comporter d'une
façon analogue en présence de l'iode. On sait que l'expé-
rience a justifié complètement cette manière de voir et
l'on put considérer depuis lors comme très-probable que
l'iode engendrait chaque fois des polysulfures par suite de
son action sur les corps renfermant du soufre. Cela étant,
on peut avancer que si l'on parvient à opérer au moyen de
( m )
l'iode la synthèse des acides polylliioniques non encore
oblenus par celte voie, il faut considérer ces derniers
également comme des polysulfiires et de plus admettre
dans la molécule des corps sur lesquels on opère l'exis-
tence du groupe siilffiydrijle.
1" Si/nl/ièse des lii/posulfites.
Si à un mélange d'une molécule de sulfure de sodium
et d'une molécule de sulfite neutre de sodium en solution
aqueuse on ajoute une molécule d'iode, celle-ci disparaît
en quelques instants et la liqueur reste claire. Si l'on y
verse ensuite une quantité suffisante d'alcool, le liquide
se divise en deux couches, la supérieure est de l'alcool
étendu renfermant en solution de l'iodure de sodium et
la couche inférieure est une solution concentrée cVhypo-
sulfite de sodium.
En renouvelant l'alcool qui se trouve à la partie supé-
rieure, on détermine la formation de heaux cristaux d'hy-
posulfite de sodium que l'on peut soumettre à l'analyse.
Cette synthèse si simple démontre à l'évidence, je crois,
que l'acide hyposulfureux renferme un sulfhydryle, et de
plus qu'il peut être considéré comme un polysulfure, c'est-
à-dire que les deux atomes de soufre doivent se trouver
en contact immédiat. Il devient donc très-probable que le
radical SO'^ soit constitué ainsi-S-0-0 dans l'acide sulfu-
reux.
2° Synthèse de l'acide fritliiomque (*).
En vue d'obtenirdes trithionates par l'union des sulfites
(*) Je n'ai (m oblenir des dilhionales par l'action de l'iode sur les sul-
liles; en quelques conditions que je me sois placé, j'ai obtenu invariable-
ment des sulfates. Croyant que cette action oxydante que l'iode exerce
sur les sulfites dissous dans l'eau était exaltée par la tendance qu'ont ces
( ii2 )
et des iiyposulliles, j'ai lait réagir comme précédemment
une molécule d'iode sur un mélange d'une molécule d'iiy-
posuHltede potassium et d'une molécule de sulfite de potas-
sium. L'action est plus vive que dans le cas précédent,
l'iode disparaît en peu d'instants.
De l'alcool étendu ajouté à la liqueur a déterminé la
formation d'une poudre blanche qui s'est rapidement
déposée. L'alcool décanté a été refroidi et il s'est produit
une belle cristallisation de Irithionate de potassinni. La
poudre blanche qui s'était déposée lors de l'addition de
l'alcool était un mélange de trithionate de potassium et de
létrathionate ; j'ai pu les séparer avec netteté au moyen
de l'alcool étendu; le tétrathionale de potassium est beau-
coup moins soluble dans ce liquide que le trithionate : j'ai
aussi constaté la présence du sulfate de potassium dans
les produits de cette dernière réaction, mais il m'a été
impossible de constater la présence de la moindre trace
desoufre libre. Ce dernier point est important, car il fait
derniers à se laisser oxyder, j'ai répélé les réactions sur les séléniles , ces
derniers, loin de s'oxyder facilement, étant plutôt eux-mêmes des oxydants.
Les expériences sont restées sans succès, l'iode n'agit pas sur les sélé-
niles si ce n'est toutefois sur le sélénite d'argent qu'il transforme en
séléniate. Il est pourtant peu probable que l'acide dilhionique ail une
autre constilulion que celle que M. Mendelejeff lui a supposée, car tout
récemment M. Bunte {Bericlile d. deutschen chem. Gesellschaft, t. VII,
p. 446) vient de le démontrer par une élégante synthèse. Ce chimiste, en
faisant réagir le bromure d'élhyle sur de l'Iiyposulfile de sodium , a obtenu
un élber mixte de l'acide hyposulfureux qui se décompose sous l'influence
de la chaleur en bisulfure d'élhyle et en dithionate de sodium; ce dernier
se décompose ultérieurement en anhydride sulfureux et en sulfate de
sodium. Il est digne de remarque que M. Bunte soit arrivé, par une voie
toute différente de celle que j'ai suivie, aux mêmes conclusions que celles
que j'ai déduites de mes recherches sur la constitution de l'acide hypo-
sulfureux.
( 113)
voir (jue lo liilliionate Je potassium ainsi obtenu provient
bien de l'action de l'iode sur le sulfite et l'Iiyposulfite et
non de la décomposition du létrathionate également formé
qui peut abandonner du soufre pour se transformer en
trithionale. En résumé l'iode a donc réellement agi sur
le mélange du sulfite et de l'iiyposulfite, tantôt pour former
du tétrathionate, tantôt du sulfate et tantôt du tritliionate
de potassium, selon que son action se faisait sur l'hypo-
sulfite, sur le sulfite ou sur les deux à la fois.
Ces dernières synlbèses démontrent donc que l'action de
l'iode est beaucouj) plus générale qu'on ne l'avait cru jus-
qu'à ce jour et de plus que l'on doit considérer tous les
acides polylhioniques inorrjaniqnes comme des polysul-
fnres. Cette manière de voir trouve du reste une belle con-
firmation dans les analyses suivantes des acides polythio-
niques. Nous allons voir en effet que l'on peut scinder tous
les acides polytbioniques en d'autres plus simples par une
réaction entièrement inverse de celle de l'iode. Ces acides
sont donc décomposés p«r dichotomie, s'il m'est permis
d'employer cette expression, de façon à être ramenés fina-
lement à des composés ne renfermant plus quun seul
atome de soufre.
Le corps permettant de décomposer de celte façon les
acides polytbioniques est le sodium. Toutefois, comme on
ne peut l'employer tel puisqu'on doit le faire agir sur les
sels de ces acides en solution dans l'eau, je l'ai em[»lové à
l'état d'amalgame. Cet amalgame était composé de trois
parties de sodium pour cent parties de mercure.
De prime abord j'ai cru devoir lenoncer à étudier l'ac-
tion du sodium sur les pentatbionates ; ces sels n'ont ja-
mais en effet été obtenus à l'état pur. Les analyses les plus
récentes qui en ont été publiées ont démontré qiie l'on
2""^ SÉRIE, TOME XXXVIII. 8
( 114 )
avait eu chaque lois à faire à un mélange d'un penlathionale
et (l'un télralliionate.
]'' Action (lu sodinin sur le bisulfure de sodium.
Du l)isulfure de sodium obtenu en solution aqueuse par
l'action d'une molécule d'iode sur deux molécules de mono-
sulfure de sodium a été additionné d'une quantité pesée
d"amalgame de sodium représentant exactement une molé-
cule de sodium pour une molécule de bisulfure. Dès que
l'amalgame se trouve dans la solution du bisulfure de so-
dium, le mercure apparaît avec tout son éclat métallique et
au bout de très-peu de temps les morceaux d'amalgame ont
abandonné leur sodium en ne provoquant que le dégage-
?ïient de très-peii* d'hydrogène. Le sodium agit donc dans
ces conditions sur le bisulfure avec une énergie beaucoup
plus grande que sur l'eau et le ramène à l'état de mono-
sulfure; on peut s'en convaincre en versant dans une por-
tion de la liqueur de l'acide snifurique étendu; il va déga-
gement de sullide hydrique sans précipitation de sou fre, il
se produit seulement un faible louche, ce qui ne doit pas
surprendre quand on considère qu'une portion du sodium
a agi sur l'eau de la solution et devait laisser par là une
portion du bisulfure intact. On peut donc dire que le so-
dium s'est glissé entre les deux atomes de soufre pour
engendrer deux molécules de monosulfure d'une molé-
cule de bisulfure, comme l'équation suivante le montre :
NflSSNft -^- NaN« = 2NhS.\«.
Nous verrons plus loin qu'on ne peut pas interpréter
cette réaction en disant (|ue la molécule de sodium a de-
svlfuré une molécule de bisulfure; la démonstration de ce
fait étant plus aisée dans le cas des acides, je ne l'entre-
prendrai pas ici.
( -115 )
iXous allons retrouver chez tous les acides polythioni-
(jiies ce trait caractéristique que nous venons de voir chez
le bisulfure de sodium ; j'ai mentionné ici celle propriété
du bisulfure afin de faire voir qu'elle est complètement
indépendante des atomes d'oxygène que la molécule peut
encore contenir.
2° Action du sodium sur les hyposulfites.
J'ai fait réagir une molécule de sodium sur une molé-
cule d'hyposulfite de sodium en solution concentrée dans
l'eau. La réaction marche d'une manière beaucoup plus
facile que précédemment, le sodium disparaît au fur et à
mesure qu'on projette l'amalgame dans le liquide; si la
liqueur a une température de 40° à 50°, il n'y a pas même
dégagement d'hydrogène; ce n'est qu'à la fin de l'opéra-
tion, lorsque l'hyposulfite de sodium est presque complète-
ment décomposé que ce dégagement se fait.
La liqueur donnait après la fin de l'opération avec nel-
leté les réactions des sulfures. Je l'ai additionnée d'assez
de sulfate de zinc pour précipiter tout le sulfure de so-
dium formé. La liqueur filtrée renfermait du sulfite de
sodium à côté de très-peu d'hyposulfite qui avait échappé
à l'action du sodium.
Ainsi une molécule de sodium agit sur une molécule
d'hyposulfite de sodium de façon à la scinder en deux nou-
velles molécules, l'une de sulfure, l'autre de sulfite.
Pour répondre à toute objection que l'on pourrait faire
contre cette manière de voir, j'avais l'intention de m'as-
surer par des pesées si les quantités de sulfure et de sulfite
de sodium ainsi produites se trouvaient exactement dans
le rapport de leur poids moléculaire; j'ai du abandonner
ce projet parce que je me suis assuré que l'hydrogène qui
se produit toujours pendant la réaction agit sur le sulfite
f 116 )
vléjà formé pour le réduire peut-être à Tétat d'hydrosuKîte.
Comme pendant cette réduction il y a constamment une
certaine quantité de sulfure de sodium produite, fait que
j'ai véritié par une expérience spéciale, les résultats que
m'auraient donnés les pesées ne pouvaient plus avoir une
bien grande valeur et j'ai préféré m'abstenir de les exécuter.
Quoi qu'il en soit, on pourrait encore interpréter la réac-
tion en disant que le sodium a désulfuré rbyposuHUe sans
le scinder. Il n'en est cependant pas ainsi : on peut s'en
assurer avec facilité en faisant réagir une molécule de
sodium sur une molécule d'hyposuUite de potassium; dans
ce cas, s'il y avait réellement désulfuration de l'hyposulfite,
la réaction devrait se passer comme suit :
c'est-à-dire que l'on devrait obtenir un mélange de sulfure
de sodium et de sulfite de potassium; si . au contraire , il y a
scission de la molécule d'hyposuUite, la réaction doit se
passer ainsi :
K2S0' -^ N'(- = NrtKS -f- .\«KSO'
en d'autres termes, au lieu d'obtenir simplement du nullité
de potassium, on doit obtenir du sulfite double de potas-
sium et de sodium. L'analyse démontre qu'il en est réel-
lement ainsi : un dosage du sodium, du potassium, du
soufre et de l'eau de cristallisation que ce sel renferme
m'a donné les résultats suivants :
K....'21 .01 %
Nff . . . . 1 2 . 36 Vo
s.... 17. 48%
-2a.î.... 19.69"/,
nombres (jui conduisent à la formule KNaSO' + "laq.
( M7 )
Il \ a en réalité un petit excès du sodium sur le potassium
21 .51 12.50
= 10: 11
mais il est accidentel et provient de l'action ultérieure du
suHure de sodium sur le sulfite double formé d'après
l'équation :
iNaKS + NaKSO^= Na'-SO- -+- K^S.
Je me suis assuré qu'il en était effectivement ainsi en fai-
sant cristalliser du sulfite de potassium dans une solution
de sulfure de sodium; il y a en effet du sulfite de sodium
produit.
Ces analyses démontrent donc qu'il y a réellement scis-
sion de la molécule d'hyposulfite en deux autres, l'une de
sulfite et l'autre d'hyposulfite.
5° Action du sodium sur les dithionales.
J'ai en premier lieu fait réagir le sodium sur le ditliio-
nate de baryum. Dans ce cas la réaction est très-lente, le
sodium réagit avec plus d'énergie sur l'eau dans laquelle
le sel est dissous que sur le sel lui-même. Au bout de
quelques minutes, les morceaux d'amalgame de sodium
sont couverts d'une pellicule blanche insoluble dans Peau
qui empêche le contact du liquide, et la réaction est
enrayée. Pour cette raison j'ai fait ensuite réagir le
sodium sur le dithionate de sodium pur. La réaction
marche mieux que dans le cas précédent, elle n'est plus
enrayée; cependant elle est incomparablement plus lente
qu'avec les sulfures et surtout les hyposulfiles; il faut près
de vingt-quatre heures pour terminer la réaction du so-
dium sur 50 grammes de dithionate. Comme pendant tout
oe temps le dégagement d'hydrogène est assez intense, une
(118)
portion du sulfite produit se réduit à l'état d'hydrosuHite
avec production de sulfure. La liqueur contient après réac-
tion du sulfite, de l'hydrosulfite et du sulfure de sodium;
ces deux derniers produits étant accidentels (voir plus
haut), on peut donc écrire l'équation :
No''S-0« + N«2 = 2Na^S0^
4-° Action du sodium sur les Irithionates.
Bien plus énergique est l'action du sodium sur les Iri-
thionates. Le trilhionate de sodium étant trop peu stable
en solution aqueuse, j'ai employé le trithionale de potas-
sium. Dans une première expérience j'ai fait réagir une mo-
lécule de sodium sur une molécule de trithionate. L'action
est tellement vive qu'il n'y a aucun dégagement d'hydro-
gène si la solution est concentrée. Une molécule de trithio-
nale est décomposée nettement en deux autres de sulfite ei
d'hyposulfite d'après l'équation :
KO'S'O^K -+- Nrt Na = NaS^O^K -+- NaSO'K.
On peut séparer ces sels avec facilité par le moyen
suivant : on ajoute à la liqueur de l'alcool , le mélange des
deux sels doubles ne se précipite pas, mais se dépose à
l'état sirupeux au fond du vase dans lequel on opère; si à
cette dernière liqueur on ajoute du sulfate de cadmium ,
il se forme un précipité lloconneux de sulfite de cadmium
et l'hyposulfite reste en solution. Les caractères de ces
sels sont si nets qu'il m'a paru superflu de les identifier
par une analyse quantitative.
En second lieu j'ai fait réagir deux molécules de sodium
sur une molécule de trithionate de potassium; dans ce cas
on obtient en résultat final un mélange de sulfure de
( H9 )
sodium et de sulfite double de sodium el de potassium ,
Faction se passe donc en deux phases comme il suit :
(2) KNttS'^O'^ -f- NV(- = K.\«S05 -+- Nn^S.
Ces réactions ont lieu avec une netteté surprenante. Si
l'on emploie exactement le poids d'amalgame de sodium
nécessaire pour la réaction exprimée par l'équation (1), on
ne peut constater que la présence de sulfite et d'hyposul-
fite dans la liqueur; si, au contraire, on n'emploie que quel-
ques centigrammes d'amalgame de trop, ce qui ne corres-
pond qu'à un milligramme environ de sodium, la liqueur
précipite en noir les sels de plomb, ce qui démontre la
présence d'un sulfure, ou, en d'autres termes, que l'excès
de sodium a agi d'après l'équation (2).
4" Action du sodium sur les tétrathionates.
J'ai fait réagir l'amalgame de sodium sur le tétrathionate
de potassium : l'action est un peu moins énergique que
dans le cas précédent, mais elle est tout aussi nette. Une
molécule de sodium décompose exactement une molécule
de téthralhionate de potassium en deux molécules d'hypo-
sulfite double de sodium et de potassium, qui , en présence
d'un excès de sodium, se scinde en sulfure de sodium et
en sultite double de potassium et de sodium.
Ayant obtenu un hyposulfile double de sodium et de
potassium constitué ainsi iNaSSOOOK, j'ai voulu m'assurer,
en répétant la réaction du sodium sur le tétrathionate de
plomb, s'il ne serait pas possible d'arriver ainsi à un hypo-
suKite double de plomb et de sodium isomère de celui
connu jusqu'à ce jour. On doit en eflet admettre que les
liyposulliles doubles de plomb et de sodium sont constitués
( 120 )
connue siiil :
SSOOO.Na
Pb <
en d'aulrcs termes, que le plomb se trouve à l'état de sul-
fure et non d'oxyde dans ces sels et cela à cause de la
facilité avec laquelle le sulfure de plomb se sépare pour
donner naissance à des tritliionales (voir : Biillelins de
r Académie royale de Belgique^ 2'"'' série, t. XXXVII, n" 1,
1874). J'ai constaté récemment que même la lumière solaire
produit cette précipitation de sulfure de plomb et qu'on
peut la mener très-loin si l'on a soin de tiltrer constam-
ment la liqueur pour enlever le sulfure formé. D'autre part
l'action du sodium sur le tétrathionale de plomb se faisant
comme suit :
^ OOOSS OOOSSNrt.
^ OOOSS ^ OOOSS.Nrt
je devais arriver à un byposullile double isomère des pre-
miers et n'abandonnant probablement plus du sulfure de
plomb.
Dès l'instant où l'on introduit l'amalgame de sodium
dans la solution de tétratbionate de plomb, les morceaux
se couvrent d'une pellicule blancbe qui empècbe le con-
tact du liquide et de l'amalgame et l'action est enrayée,,
mais elle se continue sur le précipité blanc à l'endroit où
celui-ci touche l'amalgame. Ce précipité n'est que l'hyposul-
fite cherché; par l'action subséquente du sodium il se forme
du sulfite de plomb et du sulfure de sodium qui précipite
le plomb à l'état de sulfure. Il me fut donc impossible de
recueillir de grandes quantités de ce sel en vue d'en faire
raualyse.Quoi qu'il en soit, on pourrait peut-être invoquer
( 121 )
le lait (le l'insolubilité de ce sel dans l'eau comme preuve de
son isomérie avec le sel connu, ce dernier étant soluble.
5" Action de VamaUjame de sodium sur les hyposulfiles
coujufjués.
L'action de l'amalgame de sodium sur les hyposulfiles
conjugués ne devait pas manquer d'intérêt; on sait en effet
qu'ils prennent naissance par l'aclion d'un sulfure alcalin
sur le chlorure du radical d'un acide sulfo-conjugué. Pen-
dant celte réaction il y a précipitation de soufre, mais ce
dernier se dissout ensuite et donne naissance à l'iiyposulfite
conjugué. Comme on ne peut admettre que le soufre rentre
dans ce cas à la place qu'il a abandonnée lors de sa préci-
pitation , on reste indécis sur la question de savoir s'il s'est
placé entre les deux atomes d'oxygène restant ou bien s'il
s'est placé entre un atome d'oxygène et le second atome de
soufre comme les formules suivantes le montrent :
C^H^SOSOK (1)
C^H^SSOOK (2)
la seconde de ces formules est la plus probable. Si l'amal-
game de sodium agit sur ce corps comme sur les polylhio-
nates inorganiques, il devait se former du mercaptate de
sodium d'une part et un acide iMK SO- d'autre part. L'expé-
rience a démontré entièrement l'exactitude de ces prévi-
sions.
L'amalgame de sodium que l'on projette dans une solu-
tion d'éthylhyposultite de sodium (*) ne donne lieu à
(*) Jai employé rélliylhyposulfile de sodium el non le loluylhyposulfile
qui esl réellement le sel que M. Blomstrand a découvert, pour vériGer
à cette occasion, dans la série grasse, le fait de la précipitation du soufre
lors de l'action du sulfure alcalin sur le chlorure acide comme cela a lieu
( 122 )
aucun dégagement d'hydrogène et abandonne au bout de
peu de temps son sodium. La liqueur ainsi obtenue a été
divisée endeux parlies;la première additionnée de quelques
gouttes d'acide sulfurique a dégagé une forte odeur de
mercaptan qui suffisait pour s'assurer de sa présence; la
seconde partie possédant des propriétés réductives éner-
giques et renfermant une notable quantité de sulfure de
sodium. Ce dernier m'a empêché d'identifier avec certitude
le corps réducteur que renfermait la liqueur, chaque fois
que j'ai tenté d'opérer la séparation du sulfure de sodium,
les propriétés réductives étaient fortement diminuées et
complètement éteintes après quelques traitements.
Quoi qu'il en soit, on peut pourtant formuler cette réac-
tion comme suit avec quelque probabilité :
( I ) C'H^S^OWa H- Na^ — CnPSNa H- Na^SO^
^2) >VS02 -f- 2Na2 -+- 4H'^0 = Na^S -+- 4NflH0.
le sodium agirait donc sur les hyposuHiles conjugués
comme sur les hyposulfites inorganiques avec cette diffé-
rence qu'au lieu de donner naissance à un sullile à côté
d'un sulfure, il donnerait naissance à un corps de formule
Na^SO- (peut-être un hydrosulfile?) qui subit une action
ultérieure de la part du sodium et qui est réduit à l'état de
sulfure.
Il résulte de l'ensemble de ces faits que le sodium n'agit
pas sur les polylhionates dissous dans l'eau à la façon d'un
•lans la série aromatique (voir les Bulletins de IWcadcmie royale de Bel-
gique, I. XXXVI, 11" 8, 1875). J'ai pu constater que la substitution de
Pélhyle au loluyle ou au phéiiyle n'avait aucune influence sur la précipita-
lion du soufre, et que les phénomènes se passaient avec les acides siilfo-
niquosde la série grasse comme avec ceux de la série aromatique.
( 123 )
corps réducteur; dans aucun cas ces acides ne passent à un
degré d'oxydation moindre; le sodium scinde ces sels en
d'autres plus simples et effectue de point en point la réaction
inverse de l'iode. Ces deux réactions se corroborent donc
et montrent toutes deux que ces acides peuvent être con-
sidérés comme des polysult'ures.
APPENDICE.
D'après ce que l'on vient de voir, l'action de l'iode sur
les corps sulfurés est générale; il devenait donc probable
qu'au moyen de ce réactif on pourrait obtenir les acides
dont Mendelejeff a prévu l'existence en se laissant guider
par des vues théoriques générales; on se rappelle que ces
acides auraient pour formules :
H^S^O^ et H^S'O^.
L'iode devrait donc les engendrer par son action sur un
mélange d'une molécule de monosulfure de sodium et
d'hyposullite de sodium ou d'une molécule de bisulfure de
sodium et d'hyposullite de sodium d'après :
Na^S^O' -+- Na^S -+- 1^ = Na*S'0' H- 2i\al
il m'a été impossible de constater la moindre trace de ces
acides dans les produits de la réaction; il paraît donc que
les forces moléculaires ne permettent pas l'existence de
corps ainsi constitués; l'on n'est donc pas autorisée com-
pléter hypothétiquement les lacunes que présente la série
ihionique.
( J24 )
Remarques sur la variabililé de certaines espèces clu genre
Calliste, par M. Alph. Diihois, conservateur au Musée
royal d'histoire naturelle de Belgique.
Chargé depuis plusieurs années de l'étude des collec-
tions oruithologiques du Musée de l'État, mon attention a
été attirée, dès le début de mes travaux, par les ressem-
blances qui rapprochent, dans un même groupe, certaines
formes que l'on a érigées au rang d'espèces. Aussi ai-je
cherché, il y a quelques années, à rattacher aux types
européens anciennement connus, les variations locales
dont on avait fait des espèces distinctes (1). Aujourd'hui
je crois être arrivé au même résultat pour plusieurs genres
exotiques, grâce aux belles séries d'oiseaux réunies jadis
à Bruxelles par les soins de M. le vicomte B. Du Bus, et
complétées par divers envois récents, dont plusieurs pro-
viennent de localités encore peu explorées.
Parmi les groupes que j'ai été amené à reviser se trouve
le magnifique genre Callisle, dont M. Sclater a publié une
remarquable monographie (2).
Ce genre m'a paru intéressant à un double point de vue :
d'abord il se subdivise en un grand nombre d'espèces net-
tement caractérisées et complètement distinctes les unes
des autres; mais à plusieurs de ces formes contrastantes
(1 ) Voy. mon Couspeclus syst. et geogr avium europœarum , Bruxellis ,
1871, et ma note De la variabilité de certains oiseaux. (Rev. et mac. de
ZOOL., 1875, p 386.)
(2) A Monoyraph of tlie Tanagrine genus Calliste. London, 1837.
( 425 )
correspondent (les formes beaucoup plus rapprochées, qui
n'en diffèrent en réalité que par des caractères très-secon-
daires. Puis, chacune de ces formes types se groupe avec
ses variantes dans une région bien définie, et chacune de
ces variantes ou race est elle-même propre à une partie
distincte de cette région.
Les Callistes sont donc un bon sujet d'étude pour
rechercher les rapports qui peuvent exister entre les varia-
tions des types spécifiques et leur répartition géogra-
phique.
Si l'on admet, comme on le fait encore généralement en
ornithologie, la fixité absolue de l'espèce, il est clair que
toutes ces modifications, qu'elles soient importantes ou
secondaires, prendront aux yeux du naturaliste la valeur
des types spécifiques. On serait naturellement amené, dans
cette manière de voir, à multiplier de plus en plus le nom-
bre des espèces dans la plupart des genres, ce qui, à mon
avis, pourrait être considéré comme un progrès très-con-
testable.
Mais, si l'on considère le type spécifique comme pouvant
subir, dans l'espace, des variations assez étendues, les
faits de la nature de ceux que je viens de signaler s'inter-
prètent difléremment. Au lien de diviser le genre en un
aussi grand nombre d'espèces, les unes offrant des con-
trastes considérables et les autres d'étroites affinités, on
ne distinguera comme types s|)écifiques que les formes
contrastantes, tandis qu'on réunira autour de ces types, à
titre de variétés ou races, les formes moins tranchées qui
leur sont res[)ectivement apparentées. En outre, comme
ces dernières caractérisent des régions plus ou moins voi-
sines de celle habitée par la forme type, elles prendront
l'importance de variétés géographiques, et nous pourront
( 426 )
ainsi formuler l'élendue des écarts morphologiques dans
leurs rapports avec les aires de dispersion.
C'est ce point de vue que j'ai cru devoir adopter pour
la révision du genre Callistc, et j'ai l'honneur de le sou-
mettre à l'Académie.
Genre CALLISTE, Boie, 182G.
Espèces litigieuses :
{. C. coELicoLOR, Sciai. {MoHOcjr. uf the gcn. Callislc, pi. 1, f. 2).
— Ne diffère du type lalao que par uue taille un peu plus forte et
un plumage plus brillant.
2. C. YEM, Lafr. (Sclat., /. c, pi. il). — Se distingue du précédent
par l'absence de jaune sur le croupion.
3. C. GUTTATA, Cab. (Sclat., l. c, pi. IX). — C'est une race locale
du C. punctata, caractérisée par la teinte verte plus vive et les par-
ties inférieures bleuâtres; la disposition des taches est entièrement
comme chez le punctata.
i. C. XANTHOGASTRA, Sclat. (/. C. , pi. X). — Sc distingue du même
type par la prédominance du jaune sur les parties ventrales; la teinte
verte est aussi moins uniforme et passe au jaunâtre sur le croupion
ainsi que sur les flancs.
8, C. ScLATERi, Lafr. (Sclat. , /. c, pi. XIV, f. 2). — Diffère très-
peu du C. aurulcnta; il est même impossible de lui assigner un
caractère qui puisse le faire admettre comme variété, d'autant plus
qu'il habite la même région que ce dernier. C'est du reste ce que
M. Sclater lui-même a reconnu.
6. C, PULCHRA, Tsch. (Sclat.. /. c, pi. XV). — Se distingue au
contraire avec assez de facilité du C. aMr«</en?«, par une taille plus
forte et par le jaune de la gorge et du haut de la poitrine passant au
brun-marron. Mais ces caractères sont-ils suffisants pour le consi-
dérer comme un type spécifique à part? Je ne le pense pas. Une col-
lection de la république de TÉquateur dont M. de Ville, consul de
Belgique à Quito^ vient de gratifier le Musée, contenait trois beaux
exemplaires de cet oiseau; l"un d'eux, qui doit cire une femelle ou un
( 127 )
jeune vu l'éclat atténué des teintes, n'offre pas la moindre trace de
brun à la gorge. Les deux autres sont des mâles adultes, mais la
teinte brunâtre de la gorge y est si peu perceptible qu'elle ne peut
plus servir sérieusement de caractère dislinctif. Quant à la taille, elle
est fort variable chez le C. aurulenta, et par conséquent il serait diffi-
cile qu'elle caractérisât le pulchra (1).
7. C, cYANOL^MA, Bp. (nou figuré). — La ressemblance de cet oiseau
avec le C. cuyana esl tellement sensible, qu'on est généralement
d'accord pour le réunir à ce dernier. Il diffère cependant du type
de la Guyane par une taille moins forte et un plumage plus bril-
lant.
8. C. GVROLoiDEs, Lafr. (Sclat., /. c, pi. XXVI). — Cet oiseau dif-
fère du C. (jrjroUi par la présence de quelques plumes bleues sur le
croupion, par la couleur bleue des parties inférieures qui monte jus-
qu'aux plumes brunes du menton, sans être isolée par du vert;
enfin, par l'absence de jaune aux épaules, qui sont d'un vert très-
jaunâtre.
9. C. Desmaresti, Gray. (Sclat., l. c, pi. XXVIl). — Cette variété
du gyrola se caractérise par l'absence complète de bleu : tout le corps
est d'un vert vif.
\0. C. FLAVivENTRis, ViciU. (Sclat., /. c, pi. XXIX). — Se dis-
tingue principalement du C. bi'asilicnsis par la teinte jaune pâle des
parties ventrales, et par la couleur des épaules qui est bleue.
II. C. ViEiLLOTi, Sclat. (mcxiccaia, Bp.) non figuré. — Cet oiseau
ne diffère que fort peu du fluviventris ; il s'en distingue par les couver-
tures inférieures des ailes qui sont jaunes, tandis qu'elles sont d'un
blanc légèrement jaunâtre chez le fluviventris.
42. C. BoLiviANA, Bp. I Sclat., /. c, pi. XXX). — Se distingue de
ce dernier par les parties inférieures qui sont d'un jaune vif et par le
manque de bleu aux épaules.
13. C. cvANEscENS, Sclat. {l. c, pi. XXXV). — Je ne connais pas
cet oiseau en nature; mais h en juger par la figure donnée par
(1) J'ai sous les yeux neuf individus du C. aurulenta dont la taille varie
entre 10 '/^ et 15 centimètres; celle des trois individus du pulclira varie
entre 1-i et lîi centimètres.
( 128 )
M. Sclatcr, je ne puis le considérer que comme une var. du C. niyri-
iuridis, dont la taille est plus forte et la teinte verte plus ou moins
bleuâtre.
14. C. Fa.nny, Lafr. (Des M., le. orn., pi. LVI, f. 1). — Le Musée
vient de recevoir de Guatemala un envoi dans lequel se trouvaient
plusieurs individus de cet oiseau. Comparé à Texemplaire type du
C. larvata figuré par M. Du Bus, je n'ai rien pu remarquer qui puisse
séparer le C. Fanmj de ce dernier , si ce n'est la taille qui est plus
petite chez les spécimens de Guatemala.
15. C. LUNiGERA, Sclat. [L c, pi. XLII). — Je ne remarque que
fort peu de différence entre cet oiseau et le C. Parzudakii. Le lunigera
se distingue principalement de ce dernier par la couleur jaune d'or
de la tête qui s'arrête à l'occiput, tandis que cette couleur descend
jusqu'à l'origine du dos chez le Parzudakii; il se caractérise en
outre par les rémiges secondaires qui sont marginées de vert sur leur
bord externe.
16. C. VENLSTA, Sclat. (l.c, pi. XLIV, f. 2). — N'est qu'une variété
d'u C. xanthocepliala. La teinte jaune d'or uniforme de la tête et la
taille moins forte àuvctmsfa, ne sont pas des caractères sufiisautspour
en faire une espèce distincte.
En résumé, je propose de rapporter les oiseaux men-
tionnés ci-dessus aux types avec lesquels ils ont d'étroites
aftinités, tout en les distinguant comme races ou variétés.
Nous aurons donc :
c. TATAO, Gr. ex. L Rio-Negro, Giiyanes.
var.: Jc. Cte//co/or, Sciai. . . . .Nouvelle-Grenade.
;3. Ye?ii, Lafr Equateur, Pérou or., tîolivie.
C. l'LNCTATA, Gr. ex. L Cayenne.
var. : a. G'u.'tofa, Cab Guyaneangl, Venezuela, Trinité.
13. Xanthoijastra ,Sc\3il. . Nouv. -Grenade, Equateur,
Pérou or.
C. AiJRVLEMA, Gr. ex.Lafr Nouv.-Grenade, Equateur.
var.: Pu/c/ira, Tsch E(iuateur, Pérou or.
C. CAYANA , Gr. ex. L Guyanes.
\3r.:Cyanolœma,B[> . . . . Rio-Negro.
( 129 )
€. GYROLA, Gr. ex. L Guyanes.
var. : œ. Gyroloides, Lafr. . . Amérique centr., Nouv.-Grenadt-.
Equateur, Pérou or., Bolivie.
!3. Desmaresli, Gr. . . . Trinité, Venezuela.
<;. BRASiLiENSis, Gr. ex. L Brésil mérid.
var.: a. Flavi venths, \ ieiW. . . Brésil sept., Rio-Negro, Guyane.s.
j3. Vieilloti, Sclat. . . . Trinité.
y. Botiviana, bp. . . . Xouv.-Grenade, Equateur, Pérou
or., Bolivie.
<-. MGRiviRiDis, Gr. ex. Lafr Nouv.-Grenade, Equateur.
var. : C(/ant;sce/!.s, Sciai. . . . Venezuela.
G. LARVAT.\, Du Bus Mexiquc luér.
var. : FaHTiy, Lafr Guatemala, Nouv.-Grenade.
G. PARZUDAKii, Gr. ex. Lafr Nouv -Grenade, Equateur.
var. : Lunigera , Scliall. . . . Pérou or., Equateur.
C. XAMHOCEPHALA , Scl. cx. Tsclj . . . Pérou or., Bolivie.
var. : Venwsfa, Sciai Nouv. -Grenade, Equateur.
Description d'un Spiz.iëtus nouveau, par M. Alpli. Dubois,
conservateur au Musée royal d'histoire naturelle de
Belgique.
SPIZAÉTUS DEVILLEI. — Spizaète de de Ville.
Ad. capite, collo et sublùs albus; plumis summi capitis , cervicis,
t'pigastrii lateruni et crurum stria fuscà longitrorsum notatis; cristâ
albà, fusco tfrminalà, sed omnibus plumis cristae minimâ margine
albâ terminatisj dorso et tectricibus majoribus alarum cinereis, albo
marginatis; tectricibus minoribus alarum fuscis, albo marginatis;
remigibus primarils cinereis , fusco Icrrainalis , quinque vel sex fasclis
nigris notatis et albis in marginc interna a base; remigibus secun-
dariis fuscis, albo terminalis, fasciis nigris plus minusve distinclis
notatis, albo marmoralis in margine interna; tectricibus subalaribus
ilbis, fusco striatis aut maculatis; caudà cinereâ, fusco marraoratû et
2™' SÉRIE, T03IE XX.WIH. 9
( 130 )
tribus fasciis nigris ornalâ. Rostro unguibusque nigris; cerâ pedi-
busque flavis?
Ad. Tète, cou et parties inférieures blancs; plumes du dessus de
la tète, de la nuque, des flancs et des jambes marquées d'une strie
longitudinale brune; plumes de la huppe blanches à la base, brunes
à leur extrémité, mais toutes terminées par un petit bord blanc; dos
et grandes tectrices alaires cendrés, toutes les plumes plus ou moins
bordées de blancs; petites tectrices des ailes brunes, bordées de
blanc; rémiges primaires cendrées, brunes à leur extrémité, mais
terminées par un petit bord blanc, traversées par cinq ou six bandes
noires et marginées de blanc à leur bord interne sur les trois quarts
de leur étendue à partir de la base; 5""= rémige la plus longue; rémiges
secondaires brunes, terminées de blanc, à bandes noires plus ou
moins distinctes et à bord interne marbré de blanc; tectrices sub-
alaires blanches, striées ou tachées de brun; queue gris-cendré,
marbrée de brun, terminée de blanc et ornée de trois bandes noires.
Bec et ongles noirs ; cire et pattes probablement jaunes.
Jeune : tête et cou fauves tachés de brun ; gorge blanche, avec
quelques plumes noires sous le bec et entourée d'un demi-collier éga-
lement noir; dos noir; ailes formées dun mélange irrégulier de
plumes noires et brunes, ces dernières souvent bordées de blan-
châtre; rémiges comme chez l'adulte; parties inférieures d'un brun
roussâtre mélangé de blanc , mais toutes les plumes d'un brun foncé
au centre et généralement bordées de blanc; plumes des jambes et
sou5-caudales d'un fauve pâle; queue comme chez l'adulte, mais ter-
minée de fauve; le noir terminal de la rectrice médiane s'ctendant
jusqu'à la seconde bande.
Dimensions :
Longueur totale 66 centimètres chez l'adulte, 70 chez le jeune.
— des ailes M centimètres.
— de la queue 52 centimètres.
— des tarses 1 1 centimètres.
— dudjigt médian 6 centimètres (ongle non compris).
— — interne 4 centimètres.
— de l'ongle du doigt interne o centimètres.
— — pouce 6 centimètres.
Uab. République de 1 Equateur.
! Bull, Je lAcad. 2r Série T.3a,
PLI.
AJ)id)ois, (xd. ivat del â:ljt7v
Imp 0:Severe7^its,£narelles^
SPIZAETUS DEVILLEl, a dubois
Adulte
Bull, de lAcad. i: Série T.:î8.
PLU.
A. D: dois oudjzat aUl S^litlv.
Imp G-.Se.vereyJis.£nc3aelles.
SPIZAETUS DEVILLEl, a dubois
( 131 )
Le 5. Devillei ne présente de ressemblances à signaler,
parmi les espèces américaines, qu'avec le S. omatun, dont
l'aspecl d'ensemble est assez analogue; mais il en diffère
principalement par la coloration des plumes des jambes,
qui sont toujours rayées de noir chez le S. ornatus, tandis
que ces plumes n'offrent qu'une strie très-étroite et longi-
tudinale chez l'adulte du S. Devillei. Une autre différence
réside dans le nombre des bandes noires de la queue : il y
en a six chez le S. ornatus et seulement trois chez le
S. Devillei.
L'espèce avec laquelle ce dernier a le plus de rapports est
peut-être le S. bellicosus d'Afrique ; mais celui-ci a les ailes
beaucoup plus longues et la queue ornée de huit bandes.
Le jeune de notre espèce diffère également de celui des
autres, surtout en ce qu'il présente déjà plusieurs des
caractères les plus saillants de l'adulte, qui résident dans
les dimensions des diverses parties et dans la coloration des
rémiges et des rectrices.
Les deux individus dont la figure est jointe à celte notice
ont été capturés à Baïza (république de l'Equateur) et
envoyés au Musée de Bruxelles par M. E. de Ville, consul
de Belgique à Quito.
En dédiant cette espèce à M. de Ville, j'ai voulu rendre
hommage aux généreux donateur qui a gratifié le musée
de l'État de collections importantes et variées de cette
région, dont l'histoire naturelle est encore peu connue.
( i32 )
CLiUSSE DES LETTRES
Séance du 6 juillet 187 1.
M. ïî. tiiALOA, directeur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. Steur, J. Grandgagnage , J. Roulez,
Gachard, Paul Devaux, P. De Decker, M.-N.-J. Leclercq,
Ch. Faider, le baron Kervyn de Lettenhove, J.-J. Tho-
nissen, Th. Juste, F. Nève, Alphonse Wauters, Em. de
Laveleye, G. rs'vpels, Alp. Le Roy, membres; J. Noietde
Brauwere van Steeland, Aug. Scheler, Alp. Rivier, asso-
ciés ; J. Heremans, Edm. Pouilet, Ferd. Loise, G. Rolin-
Jaequemyns, Stan. Bormans, correspondants.
M. Ch. Monligny, membre de la classe des sciences ,
assiste à la séance.
CORRESPONDANCE.
M'"' Sylvain Yaii de Weyer adresse, par lettre, ses re-
mercîments pour les sentiments qui lui ont été exprimés
par l'Académie au sujet de la mort de son époux.
Conformément à la demande qui lui en a été laite, lors
de la dernière séance, M. Th. Juste écrit qu'il accepte
riionneur de rédiger, pour le prochain annuaire, la notice
( i35 )
académique concenianl M. Van de Weyer. Cette notice
sera accompagnée du portrait du défunt.
— MM. Ch.-Aug. De Ceuleneer et l'abbé Van Weddin-
gen accusent réception de leur médaille de concours , et
remercient, à cette occasion, pour la distinction dont ils
ont été l'objet.
— M. Gachard annonce la publication du tome IIl des
Monuments pour servir à l'histoire des provinces de
Natnur, de Hainaiit et de Luxembourg, faisant partie
des Chroniques de la Commission royale d'histoire.
— La Société des Amis de l'antiquité de la Prusse
thénane, à Bonn , remercie pour les dernières publications
académiques et envoie ses récents travaux.
M. le baron Kervyn de Lettenbove fait hommage, au
nom de la commission académique de publication des
grands écrivains du pays, du Glossaire que M. Aug. Scheler
a rédigé pour les oeuvres de Froissart. Ce volume forme
le tome XIX" des Chroniques.
Le même académicien offre ensuite le tome III des
Lettres et négociations de Philippe de Commines, qu'il
vient de publier dans la collection précitée.
La classe vote des remercîments à MM. Kervyn et
Scheler.
Elle vole également des remercîments à M. Heremans,
pour les ouvrages suivants :
1" Deknople nederlandsche metriek ( Iweede druk),
in-12.
2° Over den inxloed van Noord-Aederland op de letter-
kunde in de zuidelijke provincien, gedurende het tijdperk
1815-1830. In-8°.
( 154 )
M. Alph. Wauters présente le second volume du Car-
tulaire de Vabbaye de Flines, par M. l'abbé Hautcœur. —
Remercîmenls.
M. Alphonse Le Roy fait hommage, au nom de M. Fayen,
de Liège, d'une photographie représentant deux pièces de
monnaie d'or de l'empereur Magnence (5o0 à 335 après
J.-C), trouvées en 1868 à Juslenvilie, près deTheux,
dans la propriété de M. De Thiers.
Il offre ensuite, de la part de M. Léon Jacques, ingé-
nieur à Seraing, les deux volumes suivants de cet auteur :
1° Étude sur la houille du bassin de Liéye, première
partie {houille grasse), in-S";
2° Griffes roses, poésies, pet. in- 12.
La classe remercie M. Léon Jacques et décide que la note
suivante lue par i\l. Le Roy, au sujet de ce dernier volume ,
paraîtra dans les Bulletins.
« Le volume tout coquet, tout élégant dont j'ai mission
de faire hommage à l'Académie, a pour auteur un homme
dont la profession semble peu s'accorder avec le culte des
Muses. Mais l'esprit souille où il veut. M. Léon Jacques,
ingénieur à Seraing, est bien connu dans le monde indus-
triel par son invention d'un nouveau gaz d'éclairage, dont
le succès est aujourd'hui plus qu'européen; en dehors de
la province de Liège, on savait à peine, jusqu'ici, qu'il est
aussi un véritable poète : on le saura maintenant partout,
grâce à la publicité parisienne. M. Jacques a eu l'heureuse
idée de réunir ses essais, qui sont des coups de maître;
ardent patriote, mais surtout cœur jeune, chantre de la
jeunesse et de l'amour, il se rattache essentiellement à la
famille d'Alfred de Musset, et comme ce maître il brille
non-seulement par une franche désinvolture, parfois un
( 155 )
peu trop franche peut-être, mais par une rare distinction
de langage. Son œuvre, toute légère qu'elle peut paraître,
mérite à ces titres un accueil favorable dans cette enceinte;
à n'en considérer que la forme, les connaisseurs m'accor-
deront que bien peu d'écrivains belges se sont montrés
aussi délicatement artistes, aussi habiles ciseleurs que
M. Jacques. »
Le même académicien offre, au nom de M. Ed. Barlet ,
professeur à l'athénée royal de Liège, un exemplaire de
son livre intitulé : Les rues de Liège : biographies et no-
tices.
Les remercîments de la classe seront également expri-
més à cet auteur, ainsi qu'à M. Henri Hardouin, de Douai,
qui envoie un exemplaire de son Essai sur Vaboliiioit de
la contrainte par corps.
PROGHAMME DE CONCOURS POUR 1876.
Conformément à l'article 19 de son règlement intérieur,
la classe entend la lecture des rapports de ses commis-
saires chargés de lui présenter trois sujets de littérature
française, (ï histoire nationale et de jurisprudence \iom'
le choix, dans chacune de ces branches, d'une question
destinée à compléter le programme de concours de 1876,
dont elle s'est déjà occupée dans sa réunion de juin. Elle
a déjà adopté une question de littérature flamande et une
question d'histoire générale.
( 156 )
Après avoir choisi les trois sujets précités, elle arrête
son programme de la manière suivante :
PREMIÈRE QUESTION.
Esquissera grands traits V histoire littéraire du Hainaut.
Les concurrents s'altacheront spécialement aux écri-
vains de premier ordre ; ils apprécieront leur influence sur
le développement de la langue française, et feront ressor-
tir le caractère et le mérite de leurs travaux.
DEUXIÈME QUESTION.
On demande une étude historique sur les institutions de
charité en Belgique depuis V époque carlovingietme jus-
qu'à la publication du concile de Trente.
Faire connaître les sources de leurs revenus , leur ad-
ministration^ leurs rapports avec l'Église et avec le pouvoir
temporel, leur régime intérieur ; apprécier leur influence
sur la condition matérielle et morale des classes pauvres.
TROISIÈME QUESTION.
Faij'e l'histoire du droit de chasse et de la législation
sur la chasse en Belgique et dans le pags de Liège.
Ajouter à cette histoire des notions sommaires sur le
même sujet en France, en Angleterre , en Allemagne, en
Italie et en Hollande.
QUATRIÈME QUESTION.
Faire l'histoire de la philologie thioisc jusqu'à la fin du
AT/'"' siècle.
( 157 )
CINQUIÈME QUESTION.
Faire un exposé des négociations qui aboutirent au
traité de Westphalie (1648). Indiquer le caractère et les
résultats de cet acte célèbre par rapport aux Pays-Bas.
L'Académie désire que les concurrents consultent les
documents inédits.
Le prix de la première, de la deuxième et de la troi-
sième question sera une médaille d'or de la valeur de six
cents francs; ce prix est porté à mille francs pour la qua-
trième et la cinquième question.
Les auteurs des mémoires insérés dans les recueils de
l'Académie ont droit à recevoir cent exemplaires de leur
travail. Ils ont, en outre, la faculté d'en faire tirer un
plus grand nombre, en payant à l'imprimeur une indem-
nité de quatre centimes par feuille.
Les mémoires devront être écrits lisiblement, et pour-
ront être rédigés en français, en flamand ou en latin; ils
devront être adressés, francs de port, avant le l*""" février
1876, à M. J. Liagre, secrétaire perpétuel de l'Académie,
au Musée.
L'Académie exige la plus grande exactitude dans les
citations, et demande, à cet effet, que les auteurs indi-
quent les éditions et les pages des livres qu'ils citeront.
On n'admettra que des plancbes manuscrites.
Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage;
ils y inscriront seulement une devise, qu'ils reproduiront
dans un billet cacheté renfermant leur nom et leur adresse.
Faute par eux de satisfaire à celte formalité, le prix ne
pourra leur être accordé.
Les ouvrages remis après le temps prescrit, ou ceux
( ^58 )
dont les auteurs se feront connaître, de quelque manière
que ce soit, seront exclus du concours.
L'Académie croit devoir rappeler aux concurrents que,
dès que les mémoires ont été soumis à son jugement, ils
sont et restent déposés dans ses archives. Toutefois, les
auteurs pourront en faire prendre des copies à leurs frais,
en s'adressant, à cet effet, au secrétaire perpétuel.
GRAND PRIX DE STASSART.
CONCOURS POUR UNE QUESTION d'HISTOIRE NATIONALE.
Conformément à la volonté du fondateur et à ses géné-
reuses dispositions, la classe offre, pour la troisième pé-
riode sexennale de ce concours, un prix de trois mille
francs au meilleur travail en réponse à la question sui-
vante :
Apprécier l'influence exercée au AT/"'" siècle par les
géographes belges, notamment pur Mercalor et Orlclius.
Donner un exposé des travaux relatifs à la science fjéo-
graphiquc qui ont été publiés aux Pays-Bas, et de ceux
dont ces pags ont été Cobjet depuis l'invention de l'impri-
merie et la découverte de l'Amérique, jusqu'à ravénement
des archiducs Albert el Isabelle. On s'attachera à la fois à
signaler les œuvres, les voyages, les tentatives de toute
espèce par lesquels les Belges ont augmenté la somme de
tios connaissances géographiques , et à rappeler les publi-
( 139 )
calions spéciales , de quelque nalure qu'elles soient, qui
ont fait connaître nos provinces à leurs propres habitants
et à l'étranger.
Les concurrents devront se conformer aux formalités et
;iux règles des concours annuels de l'Académie.
Le terme fatal pour la remise des manuscrits expirera
le 1" février 1877.
RAPPORTS.
Notice sur l'origine des magistrats communaux et sur
l'organisation de la marke dans nos contrées au moyen
àrje; ^iârU. Léon Vanderkindere.
Hnp/nn-l fie .7t. de l.nreleyc
« Le travail de M. Vanderkindere me paraît offrir le
plus grand intérêt et être digne, sous tous les rapports,
d'être imprimé dans le recueil des Bulletins de l'Aca-
démie. »
SSn/ijun't ilf .11. yaideè'.
« J'ai lu ce travail avec beaucoup d'intérêt ; il révèle une
érudition vaste et raisonnée, et je dois dire que le seul
défaut de l'œuvre est sa brièveté. Je pense, comme mon
honorable confrère de Laveleye, qu'il y a lieu à l'impres-
sion, et j'espère que M. Vanderkindere complétera son
œuvre. »
( MO )
Kapitofl de .W . .ilpitonse ll'aulefs.
« Le travail que la classe m'a chargé d'examiner me
paraît de nature à être imprimé dans ses Bulletins; je dois
toutefois déclarer que j'y ai rencontré des faits qui m'ont
paru dénaturés, des opinions que je ne puis accepter en
aucune manière. L'auteur me semble avoir adopté à priori
une thèse qu'il défend par tous les moyens possibles, et à
laquelle il sacrifie de la manière la plus absolue le dévelop-
pement du corps social dans nos contrées.
Cette thèse, la voici telle qu'il la résume dans ses con-
clusions : « Nos magistrats communaux ont une double
» origine et un double caractère : les échevins sont les
» juges de la centène franque,les conseillers sont les admi-
» nistrateurs de la Markgenosseiiscliaft (terme que l'on
» pourrait rendre en français par celui de voisinage) ger-
» manique. »
La première question que l'on soulève d'ordinaire, dil
l'auteur (p. 1), lorsqu'on étudie l'origine de nos communes
au moyen âge, est celle de savoir si elles doivent leur
constitution à l'insurrection ou si leur développement a été
tout pacifique. — J'admets, comme l'auteur, que la discus-
sion à ce sujet est quelque peu oiseuse, mais, pour montrer
combien ses conclusions sont erronées , j'ajouterai : le corps
social dont le mot commune est l'expression énergique, la
bourgeoisie, si l'on veut, existait-elle avant le onzième
siècle sur les mêmes bases que depuis cette époque? En un
mot, y avait-il, dans les premiers temps de l'époque féodale,
une classe de citoyens qui réglaient de commun accord et
librement leurs intérêts.
( f4l )
Jusqu'à présent on a généralement admis qu'à Ja suite
(les ravages des Normands le commerce et l'industrie avaient
lentement repris quelque activité, principalement sur les
bords de la Méditerranée et à proximité de la mer du Nord
cl des fleuves qui s'y jettent, et que ce réveil des travaux
pacifiques, quelquefois secondé par la politique habile des
princes, avait neutralisé le morcellement à l'infini de l'auto-
rité, morcellement qui est le caractère propre de l'époque
léodale. Dans cette période mémorable, l'Élat, tel que nous
le comprenons, c'est-à-dire la réunion des particuliers sous
une seule autorité, reparut, non plus immense comme
il l'était du temps de Cliarlemagne, mais amoindri, sous la
forme de royaumes, de duchés, de comtés; dans chacun
de ces États, les centres de population, les ports, les grands
marchés virent se constituer des populations qui récla-
mèrent des droits et des immunités, qui leur furent
accordés, tantôt à la suite d'une révolte, tantôt d'une ma-
nière bénévole ou à prix d'argent. Cette théorie, simple au
delà de toute expression,se concilie assez bien avec les faits;
elle se démontre surtout à l'aide de la géographie. Partout
où il y eut commerce ou industrie , c'est-à-dire prospérité,
naquit la liberté, et, par un heureux retour, partout où la
liberté fut sagement maintenue, elle perpétua et augmenta
cette même prospérité. Ces vérités, dont nous voyons de
nos jours d'éclatants exemples, illuminent le passé. L'his-
toire du commerce et celle de la liberté ont été inséparables
dans tous les temps. Les pays écartés, les pays montagneux,
au contraire, ne connurent la liberté que très-tard ; elle ne
leur arriva qu'à la suite d'un développement général bien
accentué.
Ces prémisses acceptées, il faut en conclure que c'est
dans les centres commerciaux que la liberté communale
( i.42 )
est née, en Belgique comme ailleurs. Si le duché de Luxem-
bourg, l'ancien Limbourg, le comté de F.ooz ne l'ont
connue que tard, si le Naraurois ne Ta connue qu'excep-
tionnellement, les villes bâties sur les bords de la Meuse et
de l'Escaut, à proximité de la mer et sur la grande artère
commerciale passant par le cœur du Brabant, l'ont, au con-
traire, possédée ou revendiquée de bonne heure. L'odieux
servage, qui régna dans un grand nombre de nos villages
jusqu'à la fin du siècle dernier, a été répudié par elles dès
les premières années du douzième siècle.
Partout, la population des campagnes est en général
restée asservie. Pour elle le mot de liberté n'eut de sens
que rarement. Mais, par cela même qu'elle avait moins que
celle des villes accepté les innovations, c'est chez elle qu'on
devrait retrouver le type primitif de l'organisation germa-
nique. Si, comme le prétend l'auteur du mémoire, l'an-
cienne société d'Oulre-Rhin a connu la séparation de l'au-
torité administrative et de l'autorité judiciaire, c'est dans
les campagnes que nous pourrions trouver, à côté de l'éche-
vinage, souvenir de la centène franque, ce corps de jurés
à qui l'administration, et en particulier la surveillance des
biens communaux, aurait été spécialement attribuée.
Or rien de pnreil n'existe dans les villages, au moins
dans ceux du Brabant, dont j'ai particulièrement étudié
les institutions. Dans la plupart d'entre eux les échevins,
sous la présidence du maire, exercent le double mandat de
juges et d'administrateurs; il est vrai qu'à côté d'eux il
existe des répartiteurs de l'impôt {bedesetters), des maîtres
d'ôgiise, des maîtres de pauvres, mais avec des aftributions
dont l'origine s'explique historiquement. Ce sont les éche-
vinsqui ont la surveillance et la police des biens commu-
naux, et s'ils ne peuvent en disposer sans l'assentiment
( i45 )
delà majorité de la population, c'est que cette dernière a
le plus grand intérêt à en conserver autant que possible la
libre disposition. Ce lien que M. Vanderkindere prétend
établir entre le corps des magistrats de la commune, à
l'exclusion des échevins, et les biens communaux, ne
s'aperçoit nulle part. Seulement, dans les villes où les
échevins furent réduits à ne plus être que des juges, on
attribua aux chefs nouveaux de la commune, comme nous
le verrons plus loin, ce service administratif ainsi que tous
les autres. Mais ce fut une innovation.
Croirait-on que l'auteur du mémoire transforme le maire
en représentant de la commune et en administrateur de
ses biens. « Une corporation comme celle de la marke,
» dit-il (p. 56), exigeait des fonctionnaires; il fallait une
» autorité pour régler l'usage des communia, pour exercer
I) la réciprocité des droits et des devoirs, pour diriger les
» travaux communs, lever les impôts, etc. Cette autorité
» était celle du major, maire, nommé aussi prévôt, bourg-
» meslre, etc., etc., souvent seul, quelquefois entouré de
» conseillers. »
Ici éclate la confusion la plus complète. M. Vanderkin-
dere confond le maire, officier essentiellement féodal, man-
dataire du prince ou du simple seigneur, avec le prévôt ou
le bourgmestre, chef de la population urbaine, de la bour-
geoisie, et, dans les temps anciens, presque toujours
constitué, élu, maintenu par elle, contrairement aux
volontés du pouvoir supérieur. D'autre part, il distingue le
maire du bailli, de l'écoutète, de l'amman. Or, tous ces
noms et celui de maire désignent, suivant les localités, le
même fonctionnaire. Il existe pourtant des nuances; quel-
quefois, à côté du bailli il va un écoulète;mais, enBrabant,
par exemple, l'on me pardonnera de citer de préférence
( \U )
cette contrée, bien savant serait celui qui trouverait un
atome de différence entre les attributions du maire de
Louvain, du maire de Tirlemont,du bailli de Nivelles, de
l'amman de Bruxelles, de l'écoutèle d'Anvers. Les prévôts
du comté de Hainaut, les baillis de Flandre, etc., eurent
les mêmes attributions.
Excepté dans quelques grandes villes (Douai, Amiens,
etc.), où l'élu du peuple, son chef véritable, a porté le
nom de major, excepté dans quelques villages où par une
large concession, qui paraît n'avoir pas été respectée et
qui attribuait aux habitants la nomination du maire (à Ma-
rilles, près de Jodoigne, notamment), le maire, dans notre
pays, en Hollande, en France, en Allemagne, etc., est le
représentant, dans une circonscription plus ou moins
étendue, du seigneur, soit laïque, soit ecclésiastique,
soit prince, soit simple particulier. De même que le duc
de Brabant a un maire pour délégué direct dans sa bonne
ville de Louvain et tout le territoire environnant, cbei
militaire quand il n'y a pas de châtelain, de burggraeve ,
dans la circonscription à laquelle il est préposé (comme à
Tirlemont, par exemple), de même chaque seigneur a un
ou des maires, nommés par lui, révoqués par lui, pour-
suivant les coupables en son nom, faisant exécuter les sen-
tences rendues par les échevins (qui presque toujours sont
aussi nommés par le seigneur), présidant aux exécutions
capitales (quand le seigneur a la haute justice en entier),
rendant compte du produit des amendes. Le plus petit
seigneur a son maire qui joue un rôle analogue sur une
échelle moindre. Ce maire n'est nullement le chef de la
communauté, soit urbaine, soit villageoise. Cette dernière
lui doit le respect, parce qu'il est, vis-à-vis d'elle, le man-
dataire du prince ou du seigneur; et, de son côté, il doit
( 14d)
appui et protection aux habitants de la juridiction. Mais
voilà les seuls liens qui existent entre eux, et, lorsque des
débats éclatent entre la communauté des habitants et le
seigneur, le maire est nécessairement le défenseur des pré-
rogatives de celui-ci. Les échevins, au contraire, peuvent
se prononcer pour le peuple; car, si ce dernier a raison à
leurs yeux, ils ont d'ordinaire la faculté de refuser de
rendre la justice et d'arrêter ainsi l'exécution d'une me-
sure arbitraire. Cette distinction établie entre eux et le
maire ruine par sa base la théorie défendue dans le mé-
moire, où, sous prétexte de parler des magistrats commu-
naux, on s'attache à préciser les attributions des baillis et
des maires.
Après cela, que l'administration de h justice ait été
rendue par les échevins dans les comtés sous la présidence
du comte ou dans les centènes sous celle du centenier,
c'est une question qui me paraît loin d'être décidée, bien
que M. Vanderkindere se prononce de manière à ne pas
admettre le doute et en raillant ceux qui, comme moi, ne
partagent pas son opinion. Voici à ce sujet l'avis d'un
auteur trop peu connu (Lehuëron, Histoire des instilutions
carolingiennes, t. II, p. 588), laquelle à nos yeux est cor-
roborée par des textes d'une importance capitale :
«st Quant à la compétence réelle, elle n'est pas moins
» nettement tracée {sous les Carlovingiens) que celle des
» personnes. Toutes les causes qui touchaient à la pro-
» priété des héritages ou à la liberté des citoyens, toutes
» les affaires criminelles sans distinction, ne pouvaient
» être portées ni devant le centenier, ni devant le viguier
» ou vicomte, mais devant le comte ou les tnissi, qui seuls
» avaient pouvoir d'en connaître. » {Ut ante vicarium et
centenarium de proprictatc aiit libertate judicimn non
2™^ SÉRIE, TOME XSXVIil. 10
( 14.6 )
tcnniiietur ant aâquiratur , nisi semper in praesenlia
missoritm imperialinm (hit in praesenlia coniilum. Capi-
tulaire d'Aix-la-Chapelle , de l'an 810. — Ut mdlus homo
in placito centenarii, neqne ad niorlem, neque ad liber-
tateni suain amitlendani, ant ad res reddendas vel man-
cipia jndicelur, sed ista aut in praeaentia comitis vel
missonun nosirorum judiccntur. Capilulaire de Tau 812).
La juridiclion des centeniers et des plaids qu'ils présidaient
a donc été fort limitée, du moins à certaines époques.
Qu'elle se soit étendue, plus tard, que des cenlènes aient
été qnaliiiées de pagi^ tout cela est possible, mais ne
détruit pas rohjection, le principe.
M. Vanderkin<lere, dont je me plais à louer l'ardeur au
travail et l'esprit d'investigation, bien que je ne puisse
adopter sa manière de voir, a touché à la vérité lorsqu'il
dit (p. 251) que les villes ne tardèrent pas, elles aussi, à
jouir du privilège de l'immunité. C'est ainsi, comme nous
l'avons fait remarquer en parlant des gildes du onzième
siècle, que les marchands de Thiel obtinrent ou préten-
dirent avoir obtenu d'un empereur d'Allemagne le droit de
juger eux-mêmes les différends qui éclataient entre eux.
Nous touchons du doigt la vraie origine des libertés com-
munales. Échappant à la juridiction ordinaire: les échevi-
nages de comté (ou, pour ne pas offusquer l'auteur du
mémoire, de cenlènes), les bourgeoisies, h mesure qu'elles
naquire;ït ou s'organisèrent, voulurent avoir des juges
distincts, des juges choisis dans leur sein. Et comme leurs
origines furent pacifiques et modestes, comme leur ardeur
belliqueuse ne s'éveilla que lorsqu'on voulut les opprimer
ou restreindre leurs droits, il ne fut question d'elles et de
ces derniers que lorsqu'ils existaient déjà. Mais cela ne veut
pas dire que la liberté communale, telle que nous l'enten-
( i'^'7 )
'Ions, n'ait |):is eu son heure. Pour éc!at(>r an grand jour,
pour subsister, il lui fallut un point d'appui; ce point d'appui,
elle le trouva dans ces corporations de marchands, dans ces
vieilles gildes dont j'ai eu l'honneur de vous entretenir.
Aujourd'hui encore, si quelque part la liberté entière, abso-
lue, se manileste avec énergie, c'est, sans citer notre pays,
dans les palais que les marchands de Londres, de New-
York, d'Amsterdam consacrent à leurs réunions, et d'où les
capitaux et les arts s'exileraient avec la liberté le jour où
le despotisme parviendrait à y Taire taire la voix de l'opinion
publique.
Au onzième siècle les centres commerciaux de la Flandre,
les ports de celte contrée nous offrent le même spectacle.
(]itons-en deux exetnples bien remar(piahles :
Dans l'ancien par/us Flandrensis , ce que l'on appela
depuis le Franc de Bruges, il y avait un échevinage spé-
cial ; cet échevinage , dont l'origine germanique est incon-
testable, eut sa législation particulière, sa keure, dont
on a conservé un ancien texte datant de l'époque de
Philippe d'Alsace. C'est au milieu de cette enveloppe
primitive que naît un germe, je ne dirai pas étranger, je
ne dirai pas révolutionnaire, je me bornerai à le qualifier
de nouveau : la commune de Bruges; cette commune com-
mence lorsque cette ville devient un port ou un entrepôt
de commerce. Son territoire, plus tard accru par des acqui-
sitions successives, est d'abord extrêmement restreint, et
la population qui y habite est aussi pacifique que celle du
Franc est turbulente. Lisez, pour vous en convaincre, la
vie de Charles le Bon. Ce ne sont pas des tenanciers du
comte de Flandre, car ces tenanciers sont soumis à une
autre juridiction, celle du prévôt de Saint-Donatien. Les
bourgeois de Bruges forment une corporation tout à fait
( 1^8 )
distincte, une vraie gilde éclose au centre d'un comté et
qui, d'abord simple société, devient un corps politique.
Ces marchands, ces bourgeois, ont des lois différentes de
celle du Franc. Ils ont leurs magistrats particuliers, et
remarquons-le bien, ceux-ci ne sont pas tout d'abord qua-
lifiés d'échevins. Comme dans les communes d'Aire, de
Furnes et encore ailleurs, ce sont des jiidices , des juges.
A Gand la commune se forme de la même manière.
C'est une gilde de marchands qui naît à côté des grandes
abbayes de Saint-Pierre et de Saint-Bavon; elle bataille
contre les châteaux du voisinage qu'en M127 elle était déjà
exercée à démolir. Son territoire est des plus restreints,
car il est limité par les quatre portes de la ville. Il n'y a, ni
là ni à Bruges, possibilité de rattacher l'échevinage com-
munal à une antique centène.
Mais où nous différons plus encore d'opinion, c'est dans
ce qui se rapporte à l'origine et à la formation du corps des
jurés, ou, si l'on veut, du corps administratif de la com-
mune. M. Vanderkindere y voit la continuation de l'insli-
tution qui avait géré la niarke. Nous rejetons d'une manière
absolue, — comme ne s'appliquant en aucune façon à
notre pays, ni à l'époque de la naissance des libertés com-
m maies :
1' L'assertion que la propriété du sol aurait été collec-
tive;
2" L'assimilation de la centène à la marke , territoire
l'orniant d'ordinaire plusieurs villages et qui aurait été pos-
sédé collectivement.
Tout cela peut avoir existé ailleurs, mais, dans notre
pays, il n'y a pas de traces d'une organisation semblable.
Les biens communaux, c'est-à-dire les prairies, les bruyères
et les bois dont la propriété est commune, sont très-étendus
( 149)
et Tétaient encore pins autrefois. Mais pourquoi ? Parce
que les bras manquaient à Tagricurture , parce que le sol
serait resté abandonné si les grands possesseurs n'avaient
par mille moyens permis aux petits d'élever du bétail dans
les prés, d'exploiter les bois pour réparer leurs chaumières
ou se procurer du chauffage, de défricher les bruyères par
parcelles. Ces terrains concédés constituaient en quelque
sorte les déchets du territoire fertile , où la population
gallo-romaine et après elle les conquérants francs avaient
sinon établi, du moins affermi le droit de propriété dans
toute sa rigueur. Il ne suffît pas d'avancer une hypothèse,
il faut la justifier. Dans quelles limites le sol aurait-il été
possédé collectivement, sous quelles charges, voilà ce que
l'auteur du Mémoire n'établit pas assez clairement.
Toutes les coutumes par lesquelles l'esprit de voisinage
et de confraternité était jadis entretenu : le droit de pâture
dans les prairies communales, les obligations des proprié-
taires de biens compris dans les wateringues, la faculté
accordée aux proches parents du vendeur d'une propriété
d'en opérer le retrait, l'obligation d'accourir lorsqu'on pous-
sait les cris de ; aux armes ^ aux armes , ou de commune,
constituent, pour M. Vanderkindere, autant de traces de
l'organisation de l'ancienne marke germanique. Il y a là,
à mes yeux, à la fois confusion entre les contrées et les
époques.
Parmi ceux de ses arguments dont la valeur est contes-
table, je n'en citerai qu'un, parce qu'il établira d'une ma-
nière frappante combien il est facile d'abuser du membre
de phrase le plus simple. Par exemple, l'anleiir du Mémoire
dit (p. SG^): « Dans l'origine chaque compagnon était libre
p de défricher une certaine partie des terres incultes de
» la marke; c'est ce qu'on appelait un pourpris de sart,
( m )
1» en flamand btjcaiifj. Plusieurs villes du moyen âge nous
» montient leurs bijvanfj, qui conservèrent longtemps ce
j> nom , tel est le cas pour Lierre. »
Or, pour asseoir cette association d'idées entre un pour-
pris de sart et une grande juridiction comme la banlieue
de Lierre, que cite-on? un passage d'une charte de Jean V,
où il n'est question en aucune façon d'une emprise sur la
bruyère, mais d'une maison appelée le Manoir de Sart et
son « pourprise » , situé à Wavre, que le duc Jean l" com-
prend parmi les biens dont il cède la propriété à Jean,
seigneur de Wavre (le 7 lévrier 1292). L'éditeur des Bra-
baiitsche Yecsien ( t. 1 , p. 680) a traduit les mots : pou)-
prise de sart, par : ce qu'on enlève, ce qu'on cultive au
champ. Le pontpris est en réalité l'enclos adjacent à la
maison, c'est-à-dire la cour, le jardin, en un mot les dé-
pendances immédiates d'un manoir. Le pourpris wallon
c"est Vlwfstadt tlamand, terme dont nous pouvons trouver
des exemples, tous les jours, dans les affiches de vente. 1!
n'y a pas là de souvenir de la marke.
Avant de terminer, [)ermellez-moi d'alfirmerciue le mou-
vement communal, tel qu'il se produisit à la lin duXI'^ siè-
cle, compléta un ordre de choses tout nouveau et dont
l'organisation, au lieu d'être simple ainsi que l'étaient les
institutions primitives d'un peuple guerrier et à moitié
nomade comme les Germains d'Outre-Rhin, se déploya
avec une variété, une richesse, une complication de détails,
qui dénotent chez ceux qui conduisirent ce mouvement des
connaissances dont on tient trop peu compte. Les noms
de sénateurs, de consuls, de jurés, de maîtres de la com-
mune ou des citoyens furent à la fois empruntés aux sou-
venirs de ranti(|uité et à la situation nouvelle; le partage
de l'autorité entredescheissuprèmes, l'introduction de for-
( i^l )
malités minutieuses dans les élections, l'établissement de
collèges spéciaux et de grands conseils rappellent les com-
binaisons à l'aide desquelles on avait essayé, dans le monde
ancien, de neutraliser les intrigues des personnages in-
fluents ou les entraînements de la multitude. L'influence
germanique subsiste : cela est incontestable et on ne pour-
rait la nier, mais elle se modifie profondément sous l'in-
fluence de besoins nouveaux et d'idées nouvelles.
Quel lien commun pourrail-on trouver entre la simple
administration des biens communaux et ce type de magis-
trature dont Tournai, Yalenciennes et Saint-Omer ofl'rent
des exemples très-anciens, type qui fut accepté à Liège au
XIV'' siècle et à Bruxelles au XV'= et qui peut être consi-
déré comme le véritable modèle d'une commune vigou-
reuse, telle qu'on la comprenait au moyen âge.
La composition de la corporation municipale varie en ce
sens qu'à Tournai elle se compose de tous les chefs d'hôtel,
à Liège des membres des métiers sans exception, appren-
tis aussi bien que maîtres, à Bruxelles des métiers et
des familles patriciennes; mais dans les trois villes le pou-
voir suprême, la direction delà commune est conliée à
deux chefs, véritables duumvirs: deux prévôts à Tournai,
deux maîtres de la commune à Liége,deux bourgmestres à
Bruxelles. Ces bourgmestres président le corps du magis-
trat, l'administration municipale, dont eux-mêmes font
partie. Ils sont à la fois les premiers juges, les premiers
administrateurs, les généraux, les ambassadeurs de la cité.
Ils siègent : à Tournai, avec vingt-huit jurés, à Liège,
également avec des jurés, à Bruxelles, avec dix-neuf autres
personnes : sept échevins, six receveurs et six conseillers.
Des collèges et des conseils nombreux , chargés, les uns de
( io2 )
la gestion de branches spéciales de l'administration, telles
que la levée et l'emploi des impôts, la surveillance des
hospices et des léproseries, celle delà voirie, etc. ; les autres
de représenter les différentes catégories d'habitants et se
recrutant surtout parmi les doyens des métiers, fortifient
ce corps central, qui constitue à la fois un tribunal et un
corps administratif.
Si à Bruxelles les échevins restent associés à l'adminis-
tration, il n'en est pas de même dans les deux autres villes,
où leur compétence est limitée à la justice civile. C'est là
en effet le caractère par lequel les échevins sont distingués
de l'institution des jurés dans la plupart de nos villes,
contrairement à ce que Warnkônig a prétendu. Là où il y
avait un ancien échevinage, les jurés eurent spécialement
dans leurs attrihutions l'application des peines comminées
par les keures, par les lois nouvelles, par les chartes cri-
minelles accordées aux bourgeoisies et qui modifièrent
considérablement l'ancien droit. Comme le dit un texte
cité par M. Vanderkindere lui-même, les échevins d'Arqués,
la loi d'Arqués, jugent de ce qui concerne l'échevinage,
tandis que les choremanni (ou hommes de la keure) main-
tiennent la paix , s'occupent des affaires de la communauté
et de la punition des crimes. Ces choremanni n'ont rien de
commun avecune marke dont nous n'avons jamais entendu
parler; ce sont les magistrats nouveaux institués en même
temps que la commune, tandis que les échevins subsis-
taient de temps immémorial et étaient inféodés plus ou
moins au pouvoir seigneurial, celui de l'abbé de Saint-
Bertin. La même distinction se montre à Soignies, où les
jurés sont déclarés, en H 42, être les juges des habitants
de la ville, de la bourgeoisie, tandis que tout ce qui con-
( 133 )
cerne le dehors reconnaitra l'autorité des échevins (1).
Ainsi qu'on peut le voir, les idées que je viens d'émettre
et dont j'ai fréquemment entretenu le public dans les
conférences que je donne depuis plus de douze ans, sont
tout à fait différentes de celles de M. Vanderkindere. Il me
paraît avoir admis trop facilement des idées qui sont très-
acceptables en Allemagne, où la domination romaine n'a
pas exercé son action comme dans notre pays, pendant
plus de quatre siècles. Je ne puis ni adopter son assimila-
tion de nos échevins urbains aux tribunaux des centènes
carlovingiennes, ni rechercher l'origine de la fraction la
plus caractéristique de nos vieilles municipalités dans de
prétendus administrateurs d'un sol possédé collectivement,
administrateurs et possession collective dont, sauf les
réserves que j'ai signalées, je ne trouve aucune trace dans
notre histoire au commencement du moyen âge.
Devant une pareille divergence d'opinions, au sujet de
questions essentielles, la classe me pardonnera d'être entré
dans des détails que j'aurais pu étendre démesurément si
je n'avais craint d'abuser de l'attention qu'elle veut bien
m'accorder. »
Conformément aux rapports de ses commissaires, la
classe vote l'impression de la notice de M. Vanderkindere
au Bulletin de la séance.
(1} Si quis incolarum in causam ducelur, coram ministro ecclcsie el
villico, verejuratorum judicio decidatur. Si vero de rehus exlrinsecis
agatur, scabinorum judicio decidatur. Wauters, De l'origine des libertés
communales, preuves, p. 18.
( 1^4 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Le cardinal Beiitivor/lio. Sa nonciature à Bruxelles. Par
M. Gachard, membre de l'Académie {i).
Guido Bentivoglio lut appelé à remplir le poste dénonce
à Bruxelles en 1607; à celle occasion , Paul V le lit arche-
vêque de Rhodes; il avait alors vingl-huit ans. La Nun-
ziatura di Fiandra était de créatioïi récente; elle avait
été établie seulement en 1596, quelque temps après la
nomination de l'archiduc Albert au gouvernement des
Pays-Bas (2). Le premier titulaire en l'ut Oltavio Mirto,
évèque de Tricarico et depuis archevêque de Tarenle; il
eut pour successeur Decio Caraffa, que l'archevêque de
Rhodes vint remplacer. Bentivoglio arriva à Bruxelles
au mois d'août; il fit, le 9, son entrée publique dans
cette capitale en grand apparat; il était à cheval, entouré
de toute la cour, qui s'était portée à sa rencontre jusqu'à
un mille de distance de la ville; le marquis de Guadaleste,
ambassadeur d'Espagne, les ducs d'Aumale , d'Ossuna,
d'Arschot, Ambroise Spinola et d'autres personnages de
marque figuraient dans son cortège. Le jour suivant il
eut son audience des archiducs Albert et Isabelle, qui lui
(1) La première partie de ce travail a été lue dans la séance du
«avril 1874.
(i) L'!S Archives du VuLican , p. 52.
'
C lo5 )
firent le plus bienveillant accueil (1). Jamais auparavant
Benlivoglio n'avait vu les Pays-Bas ; mais il les connais-
sait beaucoup par ouï-dire : a Je suis venu ici » — écrit-il
de Bruxelles à son ami l'évèque de Borgo San Sepolcro —
« avec les oreilles si pleines de la Flandre qu'avant d'y
» arriver il me semblait l'avoir habitée par les yeux. J'ai
» eu dans ces guerres quatre frères et deux neveux; je
» trouve encore ici un de ces neveux et un de ces frères :
» de sorte que presque en naissant j"ai entendu parler
» de la Flandre, et, à mesure que j'ai avancé en âge,
» les choses de ce pays me sont devenues si familières
> qu'il ne me restait qu'à y venir en personne pour être
B tout à fait flamand (2). » >i"entrevoit-on pas déjà, dans
ces paroles si sympathiques j)Our notre nation, le futur
historien de la révolution du seizième siècle?
Benlivoglio fut rappelé en 1615; il partit de Bruxelles
pour Bome, selon ses propres expressions, « presque plus
» flamand qu'italien (5). » L'année suivante Paul V lui
conlia la nonciature de France, Tune des {principales de la
(1) Lellrp cli^ Benlivoglio à niitnsiynor di MoiHj^liana , évèque de lîorgo
San Sepolcro , écrite de Bruxelles le 1 1 aoùl 1607. ( Opcre, 1648 , iu-lbl.,
p. 589.)
(2) t .... Ho poi'lale qua l'orecchie si piene di Fiandra, che prima di
giungervi mi par ((uasi d'iiaverla aiichè habitala coii gli occhi. Hohavuli iii
qiiesle guerre qualro l'ralelli e due nipoîi e trnovo hora qui pur tultavia
uno di essi fralelli el un de' nipoli : onde quasi nascendo ho udilo parlar
di Fiandra, e ne! crescer de gli anni mi si sou fatte in modo familiari le
cose di qua, ch'apunio non reslava altro che il venir qua io medesimo
par diventar tiammiugo del lutlo.... » ( Lettre citée à la note précédente.)
(3) " .... Mi son partilo di costa quasi più fiammingo che ilaliano .... »
(Lettre au P. Bivero, confesseur espagnol des archiducs, écriledeRome
le 10 avril 1C16 , dans Opère, etc., p. GÛÔ.)
( 156 J
chrétienté; il l'occupa jusqu'en I6!2I , où ce pontife l'éleva
à la dignité cardinalice.
La correspondance de Bentivoglio avec le cardinal Bor-
ghèse, neveu et secrétaire d'État de Paul V, pendant sa
nonciature en France, a été publiée (1); mais jusqu'au-
jourd'hui on ne connaît rien des dépêches qu'il lui adressa
alors qu'il représentait le sainl-siége à Bruxelles.
Dans le voyage que je lis en Italie à la fin de 1867, ces
dépêches furent l'un des objets de mes recherches. En
plusieurs des villes de la Péninsule je trouvai des copies
de celles que Bentivoglio avait écrites tandis qu'il était à
la cour de France; je ne rencontrai qu'à Rome, et là en
original, les lettres concernant sa nonciature aux Pays-
Bas: non pas toutes, mais du moins la plus grande partie
de celles qui durent former sa correspondance diploma-
tique.
J'en ai déjà ailleurs donné l'indication (2); il convient
néanmoins que je la reproduise ici. Je rappellerai donc
qu'à la Bibliothèque Barberina se conservent six recueils
reliés et une très-grosse liasse de dépêches de Bentivoglio
des années 1610, 1611, 1612, 1615,1614, 1615, et que
d'autres dépêches, de 1609, 1610, 1611, sont contenues
(1) La Nunziatura di Francia del cardinale Guido Bentivoglio. Let-
tere a Scipione Borfjhese, cardinal nipote e secretario di Stato di
Paolo V ; traite dagli originali e pubblicale per cura di LuiGi de Stef-
FAM. Quatre vol. iii-12 , Florence, Le Moniiier , 1863-1870.
Ces lettres ont été publiées d'après les originaux mis à la disposition
de M. de SlefFani par le marquis Xiccolo Bentivoglio , de Ferrare.
En 1832 M. Luciano Scarabelli lit paraître à Turin un recueil des
mêmes lettres: mais celles-ci, selon M. de Steffani, avaient été fabriquées.
(2) Les Archives du Vatican, ])\t. 43 et 103.
( ^^7 )
dans un des registres de la ISunzialura di Fiandra, aux
Archives du Vatican.
Au Vatican, ainsi qu'à la Barberina, la correspondance
de Bentivoglio ne comprend pas les réponses du cardinal
Borghèse. Les originaux de celles-ci reposent dans les
archives de M. le marquis Niccolô Bentivoglio, à Ferrare.
On ignore où s'en conservent les minutes, si toutefois elles
existent encore : des transcriptions en sont contenues,
pour les années 1609 à 1615, dans un des vingt-cinq
registres de Porfirio Feliciani, secrétaire d'État de Paul V,
que possède la Bibliothèque Angelica (1).
Je m'étais proposé de parcourir toutes les dépêches de
Bentivoglio et d'analyser les plus intéressantes; j'accomplis
ce dessein par rapport à celles qui sont au Vatican; à la
Barberina je ne l'exécutai qu'en partie, je vais en dire
la raison. Par une faveur spéciale, dont je saisis cette
occasion d'exprimer publiquement ma gratitude envers
M. le prince Barberini, cette Bibliothèque, où le public
est admis un jour de la semaine seulement, me fut ouverte
deux autres jours encore, et je profitai avec ardeur de la
permission qui m'était accordée. Mais, dans la magnifique
collection d'archives et de manuscrits qui est rassemblée
au palais Barberini, il n'y a pas, en ce qui concerne la
nonciature de Flandre, que les dépêches de Bentivoglio;
on y trouve aussi les lettres des nonces et des internonces
qui se succédèrent à Bruxelles de 1621 à 1645 (2). Je
crus devoir compulser d'abord celles-ci, afln d'examiner
plus à loisir les autres; je supposais qu'il me resterait
(!) Les Archives du Vatican , p. 48.
(2) Les Archives (lu Vatican, p. 44.
( lo8 )
assez de temps pour remplir celte tâche. Malheureusement
je m'étais trompé dans mes calculs, et une partie assez
considérable de la correspondance de Bentivoglio me res-
tait à parcourir lorsqu'il me fallut quitter la ville éternelle.
Le regret que j'en éprouvai s'augmenta de l'impossibilité où
je m'étais vu de faire copier beaucoup de belles dépêches
que j'avais lues avec un plaisir infini : les copistes ne sont
pas communs à Rome; après bien des recherches, j'étais
parvenu à en découvrir un; il ne fut pas agréé de M. l'abbé
Paralisi, conservateur de la Bibliothèque.
Si incomplète que soit mon analyse de la correspon-
dance de Bentivoglio, il m'a semblé qu'elle n'était pas
dénuée d'intérêt au point de vue de notre histoire natio-
nale, et c'est ce qui m'engage à en donner communication
à la Classe. Une autre fois j'aurai l'honneur de lui pré-
senter les résultats de l'examen que j'ai fait des corres-
pondances des nonces et des internonces par lesquels,
dans les années 162Î à 164-3, fut occupé le poste de
Bruxelles.
I.
C'est au mois de mai 1609 que commence le volume
de la correspondance de Bentivoglio conservé aux Archives
du Vatican.
Le roi d'Angleterre Jacques l*""', en réponse à la lettre
fameuse où le cardinal Bellarmin cherchait à détourner les
catholiques de son royaume du serment d'allégeance,
venait de publier son Admonilio ad principes christianos.
Ne doutant pas que ce monarque n'eût l'intention de faire
présenter son livre aux Archiducs, Bentivoglio fit auprès
d'eux des démarches afin qu'ils refusassent de le recevoir :
( 159 )
il n'eut pas (Je jx^inc à Icfs y dclerminer; l'infante surtout,
ainsi qu'il l'écrivait au cardinal Borghèse, montrait une
véritable horreur de l'ouvrage du roi de la Grande-Bre-
tagne et des maxiuies impies qui y étaient contenues (î).
Comme le nonce l'avait prévu, l'ambassadeur de Jac-
ques 1", sir Thomas Edmunds, ht demander audience à
l'Archiduc. Le président Richardot (2) alla le trouver et
lui donna à entendre, comme de lui-même, que si c'était
pour présenter le livre composé par le roi son maître qu'il
sollicitait l'audience, il pouvait s'en épargner la peine,
car l'Archiduc ne recevrait pas ce livre. L'ambassadeur se
montia scandalisé des paroles de Richardot : il lui dit qu'il
était à Bruxelles pour exécuter les ordres de son roi, et
qu'il ne ()0uvait se dispenser d'y donner exécution en ce qui
concernait VAdmonilio ad principes christianos ; il ajouta
qu'il n'aurait jamais cru que l'Archiduc témoignât ce
mépris du roi de la Grande-Bretagne de refuser quelque
chose qui lui serait présenté en son nom. Des mots plus
ou moins aigres s'échangèrent là-dessus entre les deux
interlocuteurs. L'ambassadeur voulut savoir si le langage
qui lui avait été tenu par Richardot l'avait été au nom de
l'Archiduc. Le président lui répondit que les termes dont
il s'était servi étaient ceux mêmes qui étaient sortis de la
bouche du prince, et qu'il était prêt à les lui confirmer par
écrit; que la résolution de l'Archiduc touchant le livre du
roi ne pouvait être autre, ce livre étant contraire à sa
religion, à l'obéissance qu'il devait au pape et que toute la
(1) « .... Non potrei espriinir a V. S. 111™" rabborrimento mosU'ato clalP
Inlanla al libro et a i coiiceUi empii clie si centengon' in eslo.... " (Dé-
pèdifilu n juillet 1609.)
(2) Jean Ricliarclot, elief et piésidoiit Ju conseil privé. Il mourut à
Arras le 5 septembre IG'^O.
( 160 )
maison d'Autriche avait toujours professée. L'ambassadeur,
transporté de colère, répliqua que l'Archiduc se faisait
ainsi l'esclave du pape; que ses procédés n'étaient pas
ceux que le roi devait attendre de lui; qu'il aurait pu
accepter le livre et ne le lire pas; que les grands princes
se devaient des égards qui n'avaient rien de commun avec
les scrupules et les superstitions de moines papistes; que
son roi ne manquerait pas de moyens de se venger d'une
manière d'agir aussi injurieuse. Richardot riposta sur le
même ton : « A quoi pensez-vous aboutir » — dit-il à l'am-
bassadeur— « avec ces livres que vous publiez? On vous
» fera mille réponses, qui feront enrager votre roi et lui
» feront comprendre qu'il eût été plus sage à lui de gou-
j) verner son royaume en roi qu'en docteur sectaire (1). »
Il est presque superflu de dire qu'après une pareille scène,
sir Thomas Edmunds n'insista pas sur l'audience qu'il
avait demandée : quelques semaines après il partit de
Bruxelles; de son côté, l'archiduc Albert rappela le baron
d'Hoboken, qui le représentait en Angleterre. Cet incident
n'entraîna pourtant point une rupture entre les deux
cours : les lettres que les Archiducs et Jacques l" s'écri-
virent à l'occasion du rappel réciproque de leurs ambassa-
deurs ne respirent aucun mécontentement, aucune aigreur;
elles sont conçues dans la forme habituelle (2). A Londres
les ministres anglais avaient tenté de faire accepter, par
l'ambassadeur d'Espagne, don Pedro de Zûniga, le livre
du roi, pour qu'il l'envoyât à Philippe III; il s'en était
excusé malgré toutes leurs instances (3).
(1) Dépêche du 8 aoùl 1609. Voy. l'Appendice n" I.
(2) Archives du royaume : reg. Ncgocialions cV Angleterre.
(5) Dépêche du 2j juillet IGO'J.
1
( i6l )
Le prince d'Orange Philippe-Guillaume, le même qui
fut retenu en Espagne pendant près de trente années, avait
épousé, en 1606, Éléonore, fille d'Henri de Bourbon,
1" du nom, prince de Condé, et de Charlotte-Catherine
de la Trémoille. La princesse vint à Bruxelles en 1609;
elle se flattait d'être reçue et traitée à la cour comme prin-
cesse du sang royal de France; l'ambassadeur d'Henri IV,
au nom de son souverain , appuya avec chaleur cette pré-
tention. Bentivoglio nous apprend qu'Éléonore de Bourbon
fut déçue de son attente, les Archiducs ne voulant voir en
elle que la femme d'un de leurs vassaux. La princesse
partit pour le château de Breda sans avoir rendu visite à
l'infante (1), et jusqu'à sa mort, arrivée en 1619, elle ne
parut point au palais de Bruxelles.
Dans les lettres de ratification qu'il donna de la trêve
de douze ans, Philippe HI exprimait l'espoir que, durant
cette trêve, les états généraux feraient un bon traitement
aux catholiques de leurs provinces : les états évitèrent de
s'expliquer sur ce point, soit par écrit, soit verbalement;
ils firent même quelque difficulté d'accepter la ratification
du roi (2). Les succès qu'ils avaient obtenus, l'appui que
leur prêtait la France, les rendaient fiers. Ils ne voulurent
pas admettre les pouvoirs de commissaires qu'Albert et
Isabelle députèrent en ce temps à la Haye , pour discuter
diff'érentes questions qui intéressaient les deux pays, parce
que les Archiducs y prenaient, comme ils les avaient tou-
jours pris, les titres de comte de Hollande et de Zélande,
et il fallut qu'ils fussent remplacés par d'autres pouvoirs
oîi ces titres étaient omis. Bentivoglio blâme vivement la
(1) Dépêd)edu 11 juillet 1609.
(2) Dépêches des 25 juillet , 8 et 29 août 1609.
2""^ SÉRIE, TOME XXXVIH. 1 1
( ^62 )
condescendance que l'Archiduc montra en cette occasion;
il trouve qu'elle porte une grave atteinte à sa réputation^
et, ce qui est pire encore, qu'elle sera d'un très-grand
préjudice à son autorité : car les états prétendront qu'ayant
renoncé au titre, il avoue par là qu'il n'a aucun droit sur
les deux provinces (1).
II.
L'attention que Bentivoglio donnait aux choses de la
politique ne lui faisait pas ouhlier que les intérêts de
la religion formaient l'objet principal de la mission d'un
ministre du saint-siége : pour le mieux remplir, il prit à
tâche de se mettre en communication directe avec le clergé
des différents pays qui vivaient sous le sceptre des Archi-
ducs, et de se rendre compte par lui-même de letat des
diocèses.
Au mois d'août 1609 il alla à Anvers. Le jour de l'As-
somption il dit la messe dans l'église des Jésuites, qui était
remplie de monde, et particulièrement de catholiques
accourus des Provinces-Unies; il leur avait fait donner
avis de son voyage par les religieux répandus dans ces
provinces. Pour les encourager, il leur administra lui-
même la communion ; tel fut le concours de ceux qui se pré-
sentèrent à la sainte table que la cérémonie ne dura pas
moins d'une heure et demie. « Je ne pourrais vraiment »
— écrivit-il au cardinal Borghèse — « exprimer par des
(I) . È seguilo ciôcon gran vilipendio della riputazionedi S. A.; e
quel ch'è peggio , queslo sarà termine di grandissimo pregiuditio anchè
nelle autorità e giiirisdilione , poicliè prelenderaniio gli slati che S. A.,
havendo deposlo il tilolo sodeUo , è venuta a confessai- di non haver dirilto
di sorte alcuna sopra quelle provincie » (Dépêche du 29 août 1609.)
( l^ô )
1) paroles les signes de dévotion qui se voyaient en ces
» simples et bons catholiques au moment où je leur ad-
» ministrais le très-saint sacrement, et la ferveur avec
» laquelle ils voulaient l'un avant l'autre le recevoir de
» ma main. » Le lendemain il présida à la procession
solennelle qui, chaque année, se faisait ce jour-là en
l'honneur de la Vierge et à laquelle assistaient , avec le
clergé séculier et régulier, tous les corps de métiers et le
magistrat de la ville. La procession avait parcouru à peine
la moitié du tour qu'elle devait faire, lorsqu'elle fut
assaillie par une pluie battante. Quelques-uns conseillaient
à Benlivoglio de se mettre à couvert : mais lui, jugeant que
les hérétiques, qui étaient là en grand nombre pour être
témoins d'une chose si nouvelle, la procession conduite par
un nonce apostolique, en auraient murmuré, et que peut-
être les catholiques eux-mêmes en auraient reçu peu
d'édification, résolut de tenir bon contre l'orage, comme
il le fit jusqu'à ce que la procession fut rentrée. Dans la
matinée du même jour plus de cent cinquante personnes,
venues au palais épiscopal, où il était logé, lui avaient
témoigné le désir d'avoir sa bénédiction : les ayant réunies
dans une salle, il leur adressa, en latin, une allocution
que le neveu de l'évêque, Aubert Le Mire, l'auteur des
Diploniata bclgica et de tant d'autres ouvrages d'érudition,
traduisit en flamand; après quoi il leur donna sa bénédic-
tion et leur distribua des médailles dont il s'était muni.
« J'espère » — mande-t-il au cardinal secrétaire d'État —
« que ce voyage d'Anvers n'aura pas été de peu d'efl'et
» pour maintenir dans leur constance en notre sainte foi
» les catholiques des Provinces-Unies, et même à l'égard
» des hérétiques, parmi lesquels il en est beaucoup qui,
» vivant dans l'hérésie plutôt parce qu'ils ont été trompés
( iU )
» que par un mauvais esprit, pourraient ouvrir les yeux
» et reconnaître Terreur dont ils sont imbus par la fausse
» opinion qu'ils ont de l'Église romaine et des ministres
» et prêtres dépendants du souverain pontife. » Il ne dis-
simule pourtant pas au secrétaire d'État que la liberté du
commerce attire à Anvers un grand nombre de protestants,
lesquels, les jours de fête, vont entendre les prêches au
fort de Lillo, occupé par les Hollandais. Jusqu'ici, dit-il,
on n'a pu y remédier, quoique l'évêque (1) soit d'une vigi-
lance exemplaire (2).
L'automne suivant, les Archiducs étant allés à leur
château deMariemont, Bentivoglio en profita pour faire une
excursion en Flandre et en Artois. Il commença sa tournée
par Gand; je n'ai pas trouvé la lettre contenant la relation
de cette partie de son voyage. A Bruges, où il se rendit
ensuite, il rencontra dans l'évêque (o) un bon et zélé
prélat, et dans les chapitres de la cathédrale et des deux
collégiales une infinité de personnes pieuses et de vie irré-
prochable. Les guerres des dernières années et les troubles
qui les précédèrent avaient causé beaucoup de mal à cette
ville ainsi qu'au pays d'alentour, sous le rapport de la reli-
gion en particulier : Bentivoglio exhorta l'évêque à pour-
voir les villages, ceux surtout qui confinaient au territoire
des Provinces-Unies, de pasteurs ayant les qualités requises
pour remplir avec succès leur charge; ce prélat lui dit que
c'était une de ses principales préoccupations, mais que la
difticulté était grande à cause de la pénurie des sujets.
(1) Jean Le Mire, évèque d'Anvers depuis 1601.
(2) Dépêche du 22 août 1609. Voy. l'Appendice n*» II.
(5) Charles-Philippe de Rodoan.
( 165 )
Bentivoglio visita toutes les églises paroissiales et toutes
les maisons religieuses : il lui parut que la population de
Bruges était plus affectionnée à la religion catholique que
celle de Gand; il lui fut même assuré qu'on n'y comptait
pas un seul hérétique. Il adressa tour à tour aux magistrats
de la ville et du Franc des allocutions où il s'appliqua
à exciter leur zèle pour que la pureté de la foi ne reçut
aucune atteinte dans les lieux soumis respectivement à leur
juridiction : il fut accueilli et écoulé avec beaucoup de
déférence par ces deux collèges (1).
Le 12 octobre il partit de Bruges pour Ostende, où il
passa la nuit. « Je trouvai, » dit-il, « cet endroit très-mal
» fourni d'édifices et d'habitations ordinaires ; presque
» tous ont été détruits au temps du long siège qu'y sou-
» tinrent les ennemis, par Timpièlè desquels une église
» fort spacieuse et d'une très-belle construction a été
» réduite à un état déplorable. On a commencé de réparer
» cette église depuis que la ville est dans les mains des
» nôtres, et je ne manquerai pas d'agir auprès du séré-
» nissime Archiduc afin que la réparation soit complète.
B La paroisse est pourvue d'un bon et diligent curé ; je lui
» ai donné les instructions convenables, l'exhortant à
» continuer, avec toute la vigilance possible, ses soins
» à son troupeau, qui peut être d'environ mille âmes,
» outre une garnison d'un chiffre à peu près égal, entre
» Espagnols, Allemands et Irlandais {!2). ■>■> Le futur his-
(1) Dépèche du 11 octobre 1609. Voy. l'Appendice n° III.
(2) « .. . Trovai quel luogo mollo mal foniilo d'edificii et d'habitationi
ordinarie, le quali sono quasi lutte andate per terra nel lempo del lungo
assedio ciie v'hanuo soslenuto deiitro i iieuiici , dalla cui impietà è stata
ridolta a mal termine una chiesa che v'èmolto ampla e di struttura assai
( 466 )
torieii (les guerres des Pays-Bas examina avec beaucoup
de curiosité ia silualion et la forme de la ville, et recueillit
une foule de particularités du siège qui avait excité en
Europe un si vif intérêt (1).
Dans le trajet d'Ostende à Dunkerque Benlivoglio s'ar-
rêta à l'endroit où avait été donnée la bataille de Nieuport.
Le gouverneur de Meuport, qui à celte bataille avait
rempli la charge de commissaire général de la cavalerie,
était venu à sa rencontre; il lui fit par le menu le récit de
tout ce qui s'y était passé. Il lui dit quelles positions les
deux armées avaient occupées, comment l'action s'était
engagée entre elles, avec quelle valeur on avait de part
et d'autre combattu, quelles avaient été les causes de la
défaite des troupes hispano-belges, enfin de quel noble
sang ces champs avaient été abreuvés. « Ce ne fut pas » —
écrit Bentivoglio — « ce ne fut pas sans une grande dou-
)» leur que j'écoutai ce récit, car il représenta à mes yeux
» non-seulement la mort, mais presque la terre qui avait
» été rougie du sang de deux des miens, l'un mon frère,
» Taulre mon neveu, lesquels, arrivés au camp par la poste
» le jour précédent, restèrent tous les deux sur le champ
» de bataille (2). »
nobile. A questa cliiesa tuUavia si vanno facendo vaiii riparamenti doppo
ch' è in mano de' nostri , et io non lascierô di far offilio col serenissimo
arciduca per ia total sua riparatione. E provista la chiesa di buono e dili-
gente cura, al quai lio dato i rioordi che mi son pars! a proposilo, et
essortalolo a conlinuar con ogni possibil diligenza nella cura del suo
gregge, che puô esser di cirea mille anime, oltre ad un piesidio che vi è
di quasi oltre tante, fra Spagnuoli, Alenianni et Irlandesi.... » { Dépêche
du 18 octobre 1609, datée de Saint-Omer.)
(1) Autre dé[»èche du 18 octobre.
(2) X .... Venue ad incontrarmi il governalore medesimo di Neuporlo,
soldalo vecchio, spagnuolo, e clie nella baliaglia islessa era commissario
( 167 )
Après Dunkerque Benlivoglio visita Saint-Omer, Ypies,
Courlrai et Tournai. Il fait une longue description du
séminaire anglais de Saint-Omer, où il passa toute une
journée, y ayant le matin célébré la messe, donné la com-
munion aux élèves , présidé à une procession revêtu d'une
chappe qui avait appartenu à Henri Mil et que l'on con-
servait précieusement dans la maison; l'après-midi ayant
examiné en détail l'établissement et entendu un concert
vocal et instrumental exécuté par les élèves ; le soir ayant ,
à la grande joie de ceux-ci, soupe au réfectoire pendant que
quatre d'entre eux disputaient, en grec et en latin , sur un
sujet sacré qui leur avait été proposé à l'improviste. Ce
séminaire était gouverné par les pères de la compagnie de
Jésus. Les élèves étaient au nombre de plus de cent : c'était
la fleur des catholiques d'Angleterre; beaucoup appar-
tenaient à des familles nobles; quelques-uns étaient des
lils de prolestants ou du moins de personnes politiques
lesquelles extérieurement, se conformant aux circon-
stances , vivaient dans la foi que Tintérèl leur faisait
adopter. 11 s'y trouvait, entre autres, le fils de l'interprète
des langues du roi Jacques; son père, quoiqu'il fît profes-
sion de la religion anglicane, tenait à ce qu'il fût élevé dans
cette maison. Bentivoglio termine sa lettre en recomman-
generale dclla cavaleria. Da lui seppi distiiuamente quanto passo, corne
furon posli in ordinanzegli esserciti , corne s'incoiitrarono, quanto valoro-
sanienle fù combatlulo, quali furoii le cagioni délia rolta de' nostri, e di
quai sangue fii nobilitata quella campagna. Ne lu senza mio gran senli-
nienlo il raguagiio, poicliè rae rappresenlô inanzi a gli occhi non solo la
morte ma quasi il terreno macchiato del sangue di due de' miei , l'uno
fralello e l'altro nipote, che giunti per le poste al campo il di inanzi , res-
larono ambedue niorli nella baiaglia •> (Deuxième dépêche du 18 oc-
tobre ci-dessus citée. )
( 168 )
danl le séminaire à la protection du cardinal Borghèse :
« Pendant le temps que j'y ai passé» — lui dit-il — « il m'a
» semblé véritablement que j'étais en un paradis au milieu
» des anges (!)• »
De Courtrai et de Tournai Bentivoglio dit peu de chose;
il avait déjà, à la suite d'un voyage fait l'été précédent,
rendu compte au cardinal Borghèse de l'état de l'Église
dans cette dernière ville, A Ypres, où il descendit chez
l'évêque (2), il fut reçu par le clergé et par le magistrat
avec toutes les marques d'honneur qui étaient dues à son
caractère. Comme Bruges et Gand, Ypres, dans les années
qui suivirent la mort du grand commandeur de Castille
D. Luis de Requesens, avait vu les réformés devenir les
maîtres de la ville : mais, après qu'Alexandre Farnèse l'eut
fait rentrer sous l'autorité de Philippe II, la réforme en
avait disparu; tout au plus, à l'époque de la visite de
Bentivoglio, aurait-on pu y trouver quelques personnes
professant le protestantisme en secret. Les jésuites, qui y
avaient fondé un collège, avaient beaucoup contribué à ce
résultat; le nonce se promettait aussi de grands fruits de
l'exemple et des prédications des PP. capucins que l'évêque
venait d'y introduire (5).
En quittant Tournai, Bentivoglio se dirigea vers Binche,
pour aller faire sa cour aux Archiducs, qui étaient encore
au château de Mariemont. Albert et Isabelle se plaisaient
beaucoup en cette résidence, pour les chasses qu'ils y
(J) Troisième dépèciie du 18 octobre 1009. Voy. l'Appendice n» IV.
(2) Charles Maes, l)riixeiloi.s, ancien doyen de la calhédrale d'Anvers.
Il avaitélé sacré le 2i,juin 1607.
(5) Dépèche du 29 octobre 1609. (Appendice n' V.)
( 169 )
avaient eî auxquelles l'Infante surtout prenait un plaisir
singulier (1).
III.
Les Archiducs étaient en ce temps-là préoccupés d'une
affaire qui présageait de graves complications politiques.
Jean-Guillaume, duc de Clèves et de .luliers, était mort
le 25 mai 1609 sans laisser de postérité. De nombreux
compétiteurs prétendaient à sa succession; on comptait,
parmi eux, Jean-Sigismond , électeur de Brandebourg,
Philippe-Louis de Bavière, duc de Neubourg, tous deux
luthériens; Charles d'Autriche, marquis de Burgau, et la
maison de Saxe. Les deux premiers, par un arrangement
fait à Dortmund le 51 mai et auquel les états de Clèves
donnèrent leur assentiment, convinrent de prendre en
commun l'administration des duchés jusqu'à ce que des ar-
bitreseussent prononcésur leurs droits respectifs; ils furent
reçus et reconnus, en qualité de gouverneurs, à Dusseldorf.
L'empereur Rodolphe H cependant, envisageant la con-
vention de Dortmund comme attentatoire à l'autorité im-
périale, la déclara nulle; il évoqua à sa personne et à son
conseil l'affaire de la succession du duc Jean-Guillaume, et
ordonna qu'en attendant un jugement définitif, les terres
contestées fussent mises en séquestre entre les mains de
(1) ., Le caccie, délie quali gusta grandemente in parlicolare la
serenissima infanta... . « ( Dépèche du 3 octobre 1609.)
Au mois de juillet 1611 Bentivoglio alla visiter le Brabant septentrional
et la Gueidre; il alla à Cambrai au mois de septembre suivant. Ses dépè-
ches contiennent sur ces différents voyages bien des détails intéressants.
J'ai beaucoup regretté de n'avoir pu eu faire prendre copie et de n'avoir
pas eu le temps de les extraire.
( ^70 )
l'archiduc Léopold, évoque de Strasbourg, sou cousin (1),
Dès qu'il avait été instruit de la mort du duc Jean-
Guillaume, et même auparavant, pendant la maladie de ce
prince, Henri IV avait agi auprès de l'électeur de Brande-
bourg et du duc de Neubourg alin qu'ils s'accordassent
sur leurs prétentions à la succession de Clèves; il apprit
avec une vive satisfaction l'entente qui s'était établie entre
eux, avec l'adhésion des états du pays. H écrivit à ceux-ci
pour les en féliciter et les exhorter à prêter tout leur appui
à l'électeur et au duc : « Quoy faisant, » — leur disait-il —
« vous recevrez de moy la faveur et assislence que vous
» debvez espérer d'un roy qui affectionne la prospérité
» desdicts princes et de leurs maisons, et la justice en
» toutes choses (2). » Lorsqu'il sut que l'empereur avait
annulé la convention deDortmund, il annonça l'intention
de soutenir par les armes les deux princes protestants : il
ordonna que des troupes fussent levées, pour être dirigées
vers les frontières de son royaume qui conlinaientau pays
de Luxembourg. A la nouvelle de ces ordres, l'archiduc
Albert fut fort ému (5). Autour de lui les opinions sur ce
qu'il en fallait augurer étaient diverses. Le marquis de
Guadaleste supposait des desseins ambitieux au roi de
France; il conseillait, si ses troupes tentaient de traverser
la province de Luxembourg, d'y mettre obstacle par la
force (4). Ambroise Spinola ne croyait pas qu'Henri JV
voulût rallumer la guerre, après avoir tant contribué à la
(1) Dépêches des 1 1 et 18 juillet 1609.
(2) Lettre du 24 juin 1609, conservée en original dans les Archives
royales de Dusseldorf.
(3) V. .... A quest'aviso reslù grandissiniamente turbato... " (Dépèche
du 18 juillet 1609.)
(4) IbvJ.
( ■171 )
conclusion de la trêve de douze ans; il pensait que l'objet
principal de ce monarque, celui qui lui tenait le plus au
cœur, était d'assurer sa succession à son iils; que c'était
dans ce but qu'il avait si vivement insisté pour que l'Es-
pagne et les Provinces-Unies licenciassent leurs armées,
ôtant par là aux mécontents de son royaume, catholiques
et protestants, l'espoir dont ils s'étaient flattés peut-être
de trouver de l'appui auprès de l'une ou de l'autre des
deux puissances (1). Bentivoglio n'était pas aussi optimiste
que Spinola : « La réputation du roi de France » — écrit-il
au cardinal secrétaire d'État — « est très-grande; ses
» forces sont toutes prêtes; les conjonctures lui sont
» favorables : car ici nous manquons de tout; les princes
» prétendants d'Allemagne n'ont ni troupes ni considé-
» ration ni argent ; les Provinces-Unies sont à la discrétion
» du roi, étant tenues en bride par les 4,000 Français
» qu'elles ont chez elles et qui ne les laisseraient pas,
» encore qu'elles le voulussent, entraver l'exécution de
» ses desseins (2). »
Albert chargea son ministre à Paris de demander au roi
des explications sur les armements qu'il faisait (5). A l'am-
bassadeur d'Henri IV, qui vint l'assurer des dispositions
(1) Dépêche du 18 juillet 1009.
(2) « ... Vedesi esser grandissima la riputatione de! re, le sue forze
prontissime, e la congiuiilura mollo favorevole , nientre clie iioi qua siamo
sprovisti di tulle le cose, mentre che i principi preteiidenti d'Alemagua
son disarmali e son senza riputatione e danaro, e mentre le Proviucie
Unité, ancorchè non volessero, sarebbon coslrette a dipendere lutte dal
re, per liaver esse un freno in bocca di 4,000 Francesi, ch'inipedirebbono
ogni distuibo ch'esse pensassero di dar al re per non lasciarlo far questi
uuovi progressi e diventarior prencipe confinante, con troppo loro spa-
venlo e pericolo.... •' {Ibid.)
(5) rbid.
( 172 )
pacifiques et désintéressées de son maître, il déclara net-
tement que, si le roi entendait intervenir pour lui-même
dans la querelle de Clèves, il s'y opposerait de tout son
pouvoir (1). Ce langage énergique lui avait été inspiré par
Spinola (2).
Sur ces entrefaites l'archiduc Léopold arriva à l'impro-
viste à Juliers; il y fut parfaitement accueilli de la popu-
lation, surtout de la noblesse, qui avait refusé de recon-
naître l'électeur de Brandebourg et le duc de Neubourg (5),
Cet événement produisit une grande sensation à Bruxelles,
à Paris et à la Haye. En France et dans les Provinces-
Unies on fut persuadé que l'envoi de Léopold avait été
concerté entre l'empereur, le roi d'Espagne et les Archi-
ducs; on en tira la conséquence que les trois cours avaient
en vue de s'emparer des duchés au profit de la maison
d'Autriche.
Bien n'était pourtant plus éloigné de la vérité : Henri IV
put s'en convaincre par la démarche que fil auprès de lui
le nonce apostolique Ubaldini, en son nom et en celui des
ambassadeurs d'Espagne et des Pays-Bas; ce ministre lui
proposa d'envoyer le président Jeannin ou un autre de ses
conseillers à l'archiduc Léopold , ainsi qu'aux deux princes
prétendants, pour les inviter à sortir des duchés, lesquels
seraient administrés par les états ou par un magistrat que
(1) » .... Perché pareva a Sua Altezza fosse contro ogni verisiniiliiudine
clie Sua M'^ si meUesse tanlo inanzi nelle cose di Cleves, se non havesse
qualche disegiio per se medesimo, si diehiarava iiberamenle l'Altezza Sua
di non esser per soffrir in modo alcuno clie quesli disegni passassero
inanzi, ma ch'avrebbe procurato d'inlerrompergii e dislurbargli con
mue quei modi ch' liavesse potulo ■> (Dépêche du 18 juillet 1609.)
(-2) Dépêche du -25 juillet 1609.
(5) Dépêche du I" août 1609.
( i75 )
ceux-ci éliraient, jusqu'à ce que les parties intéressées se
fussent mises d'accord ou qu'elles se fussent soumises au
jugement de l'autorité légitime (1). Henri parut goûter
cette proposition (2).
L'archiduc Albert, doutant que le Roi lut sincère en
cela, envoya à Paris le président Richardot, par lequel il
fit suggérer au nonce de mettre en avant, au besoin,
une autre combinaison : celle-ci aurait consisté en ce que
Léopoid , l'électeur de Brandebourg et le duc de Neubourg
restassent avec ce qu'ils tenaient respectivement (5) ; mais
le principal objet de la mission de Richardot était de s'as-
surer, auprès du roi lui-même, en lui parlant avec une
entière franchise , des desseins de ce monarque à l'égard
de la succession de Clèves, et s'il voulait conserver ou
rompre la paix avec l'Espagne et les Pays-Bas catho-
liques (4). Henri IV répondit au président du conseil des
Archiducs qu'il n'avait nulle envie de faire des nouveautés
ni de donner lieu à ce que la guerre se rallumât, mais
qu'il ne pouvait ni ne voulait abandonner ses amis (5). Et
il continua ses dispositions militaires ainsi que ses négo-
ciations avec, les princes protestants.
La conduite d'Henri IV dans ces circonstances inspire
à Benlivoglio des réflexions qui me paraissent mériter
d'avoir place ici : « En vérité » — écrit l'archevêque de
(1) Lettre du nonce L'baldini à Benlivoglio, du 4 aoîil 1609.
(2) a .... Sua M'a ha inteso voloutieri questa propositione.... » (Ibid.)
(3) Dépêche du lôaoiit 1609.
(4) a .... Ha risoluto FArciduca di niandar il présidente Ricciardotto in
Fraucia per Irattar co'l re e per saper liberamente da Sua Maeslà quai
animo è il suo e quello che pensi e disegni sopra le cose di Cleves, e se
Sua Maeslà vuol continuar o pur roniper la pace co'l re cattolico e con
Sua Altezza.... » (Dépêche du 8 aoùl 1609.)
(3) Dépêche du ^9 août 1609.
( 174 )
RhoJes — « la ruse et les arlifices du roi de France sont
» si grands qu'on ne sait se faire aucun jugement de ses
» véritables intentions. Dans le même temps il favorise les
B hérétiques et il prête l'oreille aux pratiques qui se font
» contre eux; il proteste qu'il ne veut pas la guerre et il
» lève des troupes; il se déclare médiateur et il se montre
» partie; il négocie d'une manière avec le nonce et il
B traite différemment avec d'autres; il accueille des arran-
» gements conformes à son intérêt et puis il les aban-
» donne; il se transforme enfin de tant de façons et prend
» tant de visages qu'on perd l'esprit à vouloir le péné-
» trer (1). »
Aussitôt après son arrivée à Juliers, l'archiduc Léopold
avait envoyé à Albert un de ses gentilshommes pour l'en
avertir et réclamer son assistance (2). Bentivoglio aurait
voulu qu'il lui fut donné au moins quelque secours d'ar-
gent; il fit dans ce but des démarches auprès de l'Archi-
duc, du marquis Spinola et de l'ambassadeur d'Espagne :
mais Albert se montra fermement résolu à éviter tout ce
qui aurait pu servir de motif, de prétexte même de rup-
ture à la France et aux Provinces-Unies (5); il se borna
(1) « .... Sono si grandi, per dir' il vero, l'astulie e Tarli del re di
Fraucia che qui non si sa far giudilio aiciino siguro de' suoi disegni. In
un niedesimo tempo favorisée gli herelici e dà orecchie a pralicclie contro
di loro; protesta che non vuoi' guerra e fa muover génie; si dichiara
mezzano e si mostra parte ; negotia in un modo co'l nuniio e tratta diver-
samente con altri; inclina a parlili di suo proprio interesse e poi non gli
va secondando, e si trasforma in tante foggie e ligure che si perde il
giudilio in voler rilrovarle.... • ( Dépêche du 15 août 1609. )
(2) Dépèche du 8 août 1609.
(3) « .... Fù vana Topera niia per la ferma risolutione ch'io trovai in
S. A. di fuggir' ogni occasione di rompere co'l re di Francia e con Je
Provincie Unité.... » (Dépêche du 15 août 1609.)
( 173 )
à l'aire parvenir à son cousin des choses dont celui-ci avait
besoin pour son usage personnel, un carrosse , des chevaux
de selle, un service d'argenterie, du linge de table, des
objets d'ameublement : Léopold, étant venu Tort à la hâte,
était dénué de tout (1). En agissant ainsi, Albert faisait
preuve de prévoyance et de sagesse : aider Léopold, c'eût
été fournir à Henri IV l'occasion qu'il épiait d'intervenir
dans la querelle de Clèves. L'ambassadeur français à
Bruxelles, dans une conversation qu'il eut avec Spinola,
ne lui laissa pas ignorer le parti que son maître aurait tiré
d'une pareille imprudence (2).
IV.
Les choses étaient dans cet état lorsqu'un événement
étranger à la politique vint brouiller les cours de Bruxelles
et de Paris.
Fatigué des obsessions dont sa jeune épouse, Marguerite
de Montmorency, était l'objet de la part d'Henri IV, le
prince de Condé, Henri H de Bourbon, prit la détermi-
nation , au mois de novembre 1609, de se retirer avec elle
aux Pays-Bas. Le roi vert-galant en conçut une vive irri-
tation : les Archiducs refusant de lui remettre celle dont il
s'était épris, il était près de leur déclarer la guerre quand
le couteau de Bavaillac trancha ses jours (3).
(1) Dépêche du 8 août 1609.
(i) Dépêche tiu 29 octobre 1609.
{7i) Ce fait hisloiique donna lieu, en 1790, à l'assemblée nationale de
France , à une controverse quMl n'est pas hors de propos de rappeler ici.
C'était à la séance du 16 mai. L'assemblée discutait la question sui-
vante : « La nation doit-elle déléguer au roi l'exercice du droit de
( 176)
Une main illustre, qui manie la plume comme elle a
manié l'épée, a naguère retracé cet épisode de l'histoire
n guerre? >' Charles de Lameth , pour démoiilrer que cette prérogative
devait être réservée au corps législatif, dit entre autres cLoses : « Il
» en coûte à des Français de rappeler des traits nuisibles à la gloire
« d'Henri IV. Quand la France, par un crime horrible, a perdu le meilleur
>i des rois, ce monarque allait embraser l'Europe pour la possession de la
n princesse de Coudé. »
A ces mots l'abbé Maury, se levant, s'écria : « C'est une calomnie. »
Lameth reprit » J'ai avancé qu'Henri IV, au moment où un crime
>' détestable nous a privés d'un bon roi, allait faire une tache à sa gloire
» et sacrifier le bonheur de son peuple à sa passion insensée pour la
.> princesse de Condé. (Nouvelle interruption de l'abbé Maury.) Je le
'^ prouverai par dix monuments historiques, par les Mémoires de son
•> ami Sully : il est impossible qu'ayant toujours aimé la mémoire
» d'Henri IV , il est impossible qu'avec le culte dont je fais profession,
» j'aie inventé ce trait •
Le comte deVirieu,qui parla immédiatement après Lameth, débuta
ainsi : • L'inculpation faite à la mémoire d'Henri IV est injuste. Suivant
•' tous les historiens , il ne devait faire la guerre que pour abaisser la
. maison d'Autriche, et pour parvenir à réaliser une paix perpétuelle
.' qu'Henri IV a la gloire d'avoir le premier tentée »
Le tour de parole de l'abbé Maury ne vint qu'à la séance du 18.
Dans son discours il ne manqua pas de répondre à Lameth : « On nous a
dit qu'Henri IV allait allumer la guerre dans toute l'Europe , à cause
d'une passion insensée pour Chariolle de Montmorency, princesse de
Condé. Permettez-moi, permettez à un représentant de la nation de
réclamer une grande pensée pour la gloire de Henri. Non, il n'allait pas
mettre l'Europe en feu pour une passion insensée; il allait exécuter un
projet médité depuis vingt et un ans, qu'il avait concerté avec la reine
Elisabeth, que pendant longtemps il n'avait pu persuader à son ami
Sully, et que Sully reconnut ensuite pour être facile, juste et glorieux;
il allait former de l'Europe une grande confédération. On voit pour-
quoi Henri IV écrivait , la veille de sa mort : v Si je vis lundi , ma gloire
commence lundi. « Et ce fut le vendredi qu'un monstre rendit les Fran-
çais orphelins et fit verser à la France des larmes que deux siècles n'ont
encore pu tarir. J'ai cru, dans une discussion de cette importance, devoir
celle réparation publique à la mémoire d'Henri IV. Ainsi il n'est pas
( 177 )
des princes de Condé d'après des documents inédits tirés
pour la plupart des archives royales de Bruxelles (1).
Le même sujet a été traité ex professa, et d'une manière
vraiment remarquable, par un officier de notre armée,
M. le capitaine commandant Henrard (2).
On sait que Benlivoglio écrivit une Relation de la fuite
d'Henri H de Bourbon (5), qui fut imprimée de son
vivant. Certes son intimité avec Ambroise Spinola et la
confiance que lui témoignait l'archiduc Albert l'avaient
mis à même de connaître, mieux que personne, toutes les
circonstances de cette affaire; aussi sa Relation ne laisse-
t-elle rien à désirer sous le rapport de l'exactitude des
faits qu'elle contient. Mais on comprend qu'il ne dit pas
là tout ce qui était parvenu à sa connaissance, et que ses
dépêches renfermaient bien des particularités réservées
pour le cardinal secrétaire d'État.
Plusieurs de ces dépêches manquent dans les volumes
du Vatican et de la Barberina. La première en date qu'on
lise dans ces volumes est du 15 mars 1610, et ainsi pos-
térieure au départ de Condé pour l'Italie; Bentivoglio y
marque que, s'il s'était agi de rompre son mariage, ce
>' vrai qu'aucune iiileiition ail pu afTaiblir le inéiile d'un grand projel
■ conçu par Henri IV. » {Moniteur universel.)
On demeurera convaincu, je crois, après avoir lu les dépêches de
Benlivoglio, que Lamelh élail plus près de la vérité que l'abbé Maury et
le comte de Virieu.
(1) Histoire des princes de Condé pendant les seizième et dix-septième
siècles , par M. le duc d'Aumale ; Paris, 1865-1864, l. II , p. 233.
(2) Henri IV et la princesse de Condé , 1609-1610 : Précis historique,
suivi de la correspondance diplomatique de Pecquius et d'autres docu-
ments inédits; par Paul Henrard, capitaine commandant d'artillerie,
l'.ruxelles, 1870. ( Société de l'histoire de Delgique. )
(ô) Belatione délia fuga di Francia iVHenrico II di Borbonc.
2""'' SÉRIE, TOME XXXVm. ^-
C 178 )
prince y aurait consenti volontiers, ayant dit au marquis
(le Spinola que c'eût été pour lui la meilleure nouvelle du
monde, mais qu'il pensait tout différemment sur le point
du divorce, auquel en aucune façon il ne donnerait son
consentement, de crainte qu'on n'en prît occasion de con-
duire sa femme en France et de la livrer aux désirs du
roi (1).
Une dépêche très-longue, datée du 1" mai, concerne
la mission que le sieur de Préaux (2) reçut en apparence
du connétable de Montmorency, père de la princesse de
Condé, et de sa tante, madame d'Angoulême, mais eu
réalité d'Henri IV, de venir à Bruxelles réclamer la prin-
cesse. Avant de la faire connaître, je crois devoir donner la
traduction d'une curieuse lettre que dans le même temps l'in-
fante Isabelle écrivit de sa main à Philippe 111 (3) : « Sire, »
lui disait-elle, « ici on ne s'occupe que de guerre. Le roi
» de France rassemble en grande hâte son armée; il veut
» rompre avec nous, parce qu'on ne lui remet pas cette
» femme, laquelle est bien gagnée par lui, ou perdue pour
» mieux dire. J'en ressens une très-grande peine, car c'est
B la plus jolie personne du monde et la plus agréable
» et de la meilleure nature : mais les mauvais conseils
(1) a M'hadetto il marchese che Coudé a lui disse già ch'il romper
queslo matrimonio sarebbe stata per lui la migiior nuova del moudo.
Diverso pei-5 è il senso di Condé sopra il punto del divorlio : a ciô non
consentira egli in modo alcuno, per dubbio che si pigli quesl' occasione
di tirar la moglie in Francia , e d'esporla aile voglie del re »
(2) Charles de l'Aubespine, abbé de Préaux, conseiller au parlement de
Paris.
(3) Cette lettre, en date du 22 avril 1610, est conservée en original à
la Bibliothèque nationale , à Madrid , MS. I 151 , fol. 700. Elle a été pu-
bliée , en 1863, dans la Coleccion de documenfos inéditos para la liis-
toria de Espafia, t. XLlll , p. 182.
( 179 )
» qu'elle a el qu'elle a eus, les présents et les lettres
» qu'elle reçoit, l'aveuglent au point que je tiens sa perte
» pour certaine. Nous faisons tout ce qui est en notre
» pouvoir pour lui complaire et gagner sa confiance, mais
» c'est du temps perdu, et l'on ne peut l'empêcher de
» parler à ceux qui lui apportent les messages et les
» lettres. Les intermédiaires ne manquent pas. Les prin-
» cipales sont la femme de l'ambassadeur que le roi de
» France a ici (I), quoique son mari soit un homme très-
» honorable, et une vieille qui l'a élevée et par là a beau-
» coup d'empire sur elle. On a ôté celle-ci d'auprès de sa
» personne, mais elle demeure chez la femme de l'ambas-
» sadeur, et tous les jours elle lui mande ce qu'elle doit
» faire et ce qu'elle doit écrire au roi. La princesse a
fi quelque chose de si céleste que, si l'on voulait faire son
9 portrait, on ne pourrait mieux la peindre que sous les
» traits d'un ange; et quand je me rappelle la ligure du
» galant, je ne puis m'empècher de rire, malgré la guerre
j> qu'il veut nous faire. »
C'est qu'en effet Henri IV annonçait hautement l'in-
tention de délivrer la princesse de Condé de la prétendue
prison dans laquelle on la tenait, et de la venger de l'offense
grave qui lui avait été faite par les bruits, attentatoires à
son honneur, qu'on avait répandus après qu'elle avait tenté
de s'enfuir du palais de Bruxelles : choses, disait-il, qui
touchaient son honneur propre , indépendamment de
l'appui qu'il devait à une cause aussi juste que celle du
connétable (2),
(1) Le sieur de Berny.
(2) « 11 re diceva liberameiKe di voler liberar di prigione la prenci-
pessa di Condè, e risenlirsi delP ofTesa d'esser stata ella dishonorata cosi
( i80 )
Je reviens à la dépêche du d" mai. Dans sa Relalione
Bentivoglio rapporte, en substance, la demande que le
sieur de Préaux fil à rArcliiduc et la réponse de ce prince :
le tout est conforme aux termes de la dépêche. Le langage
d'Albert ne satisfit point de Préaux ni l'ambassadeur de
France; ils allèrent se plaindre au nonce du tort qui était
fait à la princesse et de l'injure qui en résultait pour le roi.
L'Archiduc appela Bentivoglio : il lui dit que, s'il pouvait,
en gardant son honneur, restituera princesse, il le ferait
sans hésiter, car elle ne lui causait que de l'embarras et
des désagréments (1). il demanda conseil au nonce. Ben-
tivoglio s'excusa d'intervenir dans une affaire aussi déli-
cate : « Je vois » — écrit-il au cardinal Borghèse — « je vois
» l'Archiduc très-enclin à rendre la princesse, et je pense
» qu'il le ferait, s'il en avait le moindre prétexte. Son
» Altesse abhorre incroyablement la guerre; elle ne se
> dissimule pas qu'elle serait grandement inférieure au
» roi de France, trop bien pourvu de deniers, de gens,
» d'amis et de réputation. Ces ministres français qui sont
» ici font entendre ouvertement des menaces au cas qu'on
» ne restitue point la princesse; et s'ils ne disent pas que
» la guerre se fasse pour elle, ils disent du moins que
» c'est un motif à mettre en ligne de compte avec ceux
» que les Espagnols leur ont donnés déjà de la faire. Ils
noiabilmente per quelle voci clie si sparsero di quella nolle cli'ella haveva
volulo fuggir di Brusseiies : cose lutte clT empegnavano i'honor proprio
di S. IM'% e cir oltre di quesli rispelli non poteva la M'' S. abbandoiiar
una causa si giusta comm' eia quella del conteslabile » (Dépêche du
24 avril 1610.)
(1) • Poichè rhaverla in casa non gli arreca senon desturbo et in-
comnioJo. ... «
( 181 )
!> ajoulcnl, en souriant, que s'il est vrai, comme ils ap-
î prennent qu'on ralïlrme, que le roi est amoureux de
B la princesse et qu'il déclare la guerre pour elle, il fera
» cette guerre d'autant plus joyeusement et avec d'autant
D plus de cœur (1). »
Les ministres espagnols qui étaient à la cour de Bruxelles
s'indignaient de la faiblesse de l'Archiduc {%. Ambroise
Spinola disait que c'étaient des subtilités plus propres à des
docteurs en droit qu'à des princes, que celles auxquelles
l'Archiduc s'arrêtait; que Son Altesse ne pouvait pas ou-
blier la parole donnée par elle à Condé; que c'étaient là
les lois qui devaient être observées par les princes; que,
sous le prétexte d'intenter une action en divorce, on
n'avait d'autre but que de livrer la princesse à la sensualité
du roi de France (5); que tout ce que faisaient le conné-
table et madame d'Angoulême, ils le faisaient violentés
par le roi (4), mais que le fissent-ils sponlanémeiU, en
(1) « Veggo TArciduca incliiiatissimo a resliluir la prencipessa, e
oon ogni leggiero preteslo mi par di veilere clie lo tarebbe. Abbonisce
incrcdibilnienle S. A. la guerra, e si vede in lermino di dover trovarsi
grandemenle inferiore al re di Francia, troppo hen furnito di danari,
d'buomini, d'aniiei e di riputatione E quesli ministri fraiicesl qui minac-
ciano allamenle, quando non si restiluisca la prencipessa; e se ben non
dicono cbe la guerra si iaccia per lei, dicono perôclie con le altre cagioni
c'hanno date gli Spagnuoli di farla , entrera quesla ancora; el aggiungono
sorridendo clie se egli è pur vero fcome enlendono che qui s'aftirma cos-
lantamente) ehe 'I re sia innanioralo di lei, e che por lei niuova l'arnii,
lanto più allegramenle e lanlo piii di cuore S. M. l'ara quesla guerra.... »
(Dépêche du 1" mai 1610.)
(2) « .... Gli Spagnuoli fremono incredibilmenle nel veder che S. A. si
vada disponendo tanto alla reslilution della prencipessa.... « (Ibid.)
(3) » Che d'espor' la prencipessa alla libidine del re di Fran-
cia f 'Jbid.)
(i) « ... . Per violenza del re » {Ibid.)
( 182 )
déshonorant avec tant d'infamie le sang dont ils étaient
issus (1) , Son Altesse ni Sa Majesté Catholique ne le de-
vaient souffrir; qu'un aussi grand prince que l'Archiduc
était tenu de persévérer dans la constance qu'il avait
montrée jusqu'alors; que lui et tous les ministres espagnols
et tous les autres vassaux du roi catholique aux Pays-Bas
étaient résolus de se jeter à ses genoux, pour le supplier de
ne permettre point que la parole qu'il avait donnée à Condé
fût faussée, et de ne se faire ainsi l'instrument de la perte
de sa femme : car ce serait la plus abominable action
qu'aucun prince du monde eut jamais commise (2).
Au nonce le marquis déclara que personne, plus que
lui, ne souhaitait que la guerre ne se rallumât point, et
qu'indépendamment des considérations d'intérêt public,
ce souhait lui était inspiré par l'état de ses affaires privées,
car les dépenses excessives qu'il avait faites et qu'il faisait
encore aux Pays-Bas avaient consumé une grande partie
de ses biens : d'oîi était né en lui le dessein d'aller s'établir
en Espagne avec ses enfants, et d'y chercher quelque
moyen de réparer les pertes de sa maison, mais que, s'il
était ami de la paix, c'était sauf son honneur et celui
de son roi ; que, pour les sauvegarder, il était prêt à rester
à Bruxelles et à sacrifier ce qui lui restait de biens et
sa vie même. Il ajouta que, s'il était vrai que l'Archiduc se
décidât à rendie la princesse, il aimerait mieux mourir
que d'être témoin d'une chose aussi indigne (5).
(1) <■ .... E s'iiiducessero con tanla loro iiidignilà a dishonorar il lor
saugre .... • (Dépécliedu !«•' mai 1610.)
(2) » Perché questa sarebbe la più indigna e la più ahominevol
allione c' havesse mai fatta prencipe al mondo .... «
(â) M'ha detto di più il marcliese que niiino più di lui ha desi-
deralo la quicle e clie non si havesse di nuovoa rompiT la gueira, poichè.
( ^83 )
Albert, ne voulant pas manquer à sa parole et désirant
cependant donner quelque satisfaction au roi de France,
lit offrir à l'ambassadeur d'Henri IV, le sieur de Berny, et
au sieur de Préaux de soumettre à un juge compétent,
c'est-à-dire au pape, la question de savoir si la princesse
devait être remise à sa lamille. Les Français rejetèrent
absolument cette offre, disant qu'elle n'était qu'un moyen
dilatoire; que la même proposition avait déjà été faite par
l'ambassadeur de l'Archiduc en France et repoussée. Ils
ne s'en tinrent pas là, mais ils déclarèrent que leur roi
était assez puissant pour venir se faire remettre par force
la princesse, et même pour aller enlever de Milan le prince
son mari (1).
Il devenait évident qu'Henri IV se préparait à la guerre.
Il avait, le H février, conclu un traité d'alliance avec les
électeurs palatin et de Brandebourg, auxquels s'étaient
joints depuis le duc de Wurtemberg, le prince d'Anhalt et
tilire aile considéra tioiii pubbliche, l'han faUo entrai- in questo desiderio
i siioi bisogni privali , havendo consumata grau parle délia sua robba con
le spese eccessive c"ba faUe e che fa tutlavia qui : dal che nasce ch'egli
sommainente desideri d'andar in Ispagna a quivi fermarsi co' suoi figliuoli,
e trovar qualche rimedio per rislorar i danni della sua casa; baver egli
perô desideralo questo co'l debilo risguardo dell' honor suo e del suo re :
ond'hora, convenendo per questo risguardo niedesimo ferniarsequi, esser
pronlo a consumar quanto gli resta di roblw et aspender la vila niede-
sinia per quesl' effetto; e quando pur fosse vero che l'Arciduca s'inducesse
lion tanla inlamia a r^sliluir la prencipessa , più toslo desiderar egli la
morte slessa che veder' un' attione si indegna » (Dépèche du 1" mai.)
(1) » Non baslo a quest' ambasciator di Francia di ri])uttar sola-
mcnte il predetlo partit© , che soggiunse ancora parole piene di sdegno e
piene, per dir il vero, di troppa temerità, dicendo che ritenesse pur S. A.,
quanio voleva, la prencipessa , che '1 suo re era bastante di venir a levarla
per forza di qua, e di levar ancora per forza il prencipe di Milano »
(Dépèche du 8 mai 1610.)
( 184 )
les frères des deux électeurs. Il ne cessait d'augmenter ses
forces. Il comptait, malgré la trêve, d'entraîner les Hol-
landais, par l'influence du comte Maurice de Nassau,
à renouveler les hostilités (1).
Les Pays-Bas, s'il les attaquait, n'étaient guère en état
de lui résister; les troupes réunies du roi d'Espagne et
des Archiducs dans ces provinces ne s'élevaient pas à
quinze mille hommes. L'archiduc Albert lit à la hâte
quelques levées. Il renforça les garnisons des places fron-
tières. Il assigna Philippeville pour rendez -vous à son
armée. Il devait en prendre lui-même le commandement,
ayant sous ses ordres le marquis Spinola comme mestre
de camp général, D. Luis de Velasco et le comte de Buc-
quoy en qualité de généraux respectivement de la cavalerie
et de l'artillerie (2).
Tout cet appareil de guerre cessa par l'assassinat du roi.
A la nouvelle du crime de Bavaillac, la princesse de
Condé témoigna la plus grande douleur. Elle n'en persista
pas moins à demander la dissolution de son mariage. Les
agents français lui avaient fait accroire que le roi voulait
l'unir au dauphin, alors âgé de neuf ans à peine; elle
s'imaginait qu'il en pouvait être encore ainsi : elle montra
à l'infante Isabelle une lettre que ce jeune prince lui avait
écrite avant sa sortie de France; dans cette lettre il lui
déclarait son amour et l'appelait sa dame (5). De leur
(1) Sismondi, Histoire des Français, t. XV, pp. 236 et 242.
(2) Dépèches tlu 2i avril et du 1" mai 1610.
(3) <■ La preiicipessa tiiltavia inlende di traltar del divortio anzi
délia dissolution del matrimoiiio , per quanto ni'ha detto l'infanta. Ha
moslrato a queslo proposito S. A. di ridersi o piii toslo d'haver compas-
sione délia simplicità délia prencipessa , o delT inganno in che l'han posta
questi Francesi cou haverle dato ad intendeie cli'l re voleva maritarla al
( 183 )
côté, les sieurs de Berny et de Préaux continuaient leurs
instances pour que la princesse pût retourner dans sa
famille; ils le faisaient afin qu'on se persuadât que c'était
l'intérêt du connétable, de madame d'Angoulème et de la
princesse elle-même qui avait été le mobile de leurs pré-
cédentes démarches (1).
Condé arriva de Milan à Bruxelles le 19 juin; il se
rendit chez le marquis Spinola. Bentivoglio alla lui rendre
visite; il dit au nonce que, vu la mort du roi, il ne ferait
plus de difficulté de consentir à ce que la princesse
retournât en France (2). Une quinzaine de jours aupa-
ravant, le connétable avait envoyé son secrétaire aux
Archiducs, pour réclamer sa fdle et pour qu'elle ne fût
pas remise à son mari : Albert et Isabelle avaient répondu
au sieur de Préaux, qui leur avait présenté les lettres de
Montmorency, qu'ils ne remettraient pas la princesse à
son mari, mais qu'ils ne la laisseraient point partir de
Bruxelles sans le consentement du prince (3).
Le 20 juin Condé avec Spinola et le comte d'Aîiover (4.)
se rendit à Mariemont, où étaient les Archiducs. Il remercia
deltino, credendo ella tutavia c"hoia potrebb' esser l'istesso. In confir.
malion délia quale speranza ni'ha delto S. A. c'ha fatlo vedere hora la
prencipessa , doppo la morle del re , uoa leUera scrittaie dal dellino prima
ch'ella uscisse di Francia, iiella quale letlera esso delfino le discopriva il
suo amore e la cliianiava sua dama. Sono stali grandissimi i pianti délia
prencipessa per la morte del re « (Dépêche du 22 mai 1610.)
(1) Ibid.
(2) i. C'iiora , slante la morte del re, egli non farà diflBcoUà nel
prestar il suo consens») per eirella lorni quando vorrà... (Dépêche du
19 juin 1610.)
(3) Dépêche du 3 juin 1610.
(4) D. Rodrigo Lasso, créé comte dWnover par Philippe III l'année
précédente.
( '186 )
Albert et Isabelle de la faveur qu'ils lui avaient faite de
garder si longtemps auprès d'eux la princesse sa femme,
leconnaissant qu'il leur était redevable en grande partie
de l'bonneur et de la vie. Il leur dit ensuite que la princesse
pouvait retourner à Paris à sa volonté ; qu'il n'y faisait
plus d'opposition. L'Arebiduc s'empressa de faire savoir
au connétable qu'il pouvait envoyer cbercber sa (ille quand
et de la manière qu'il le jugerait à propos (I).
Condé ne resta à Mariemont que le temps nécessaire
pour voir les Archiducs; le même jour il était de retour
à Bruxelles, où il trouva le prince d'Orange, son beau-
frère, accouru de Breda pour le recevoir dans son palais.
Ils allèrent ensemble faire un pèlerinage à Notre-Dame de
Montaigu : la princesse d'Orange les attendait à Malines;
ils revinrent tous trois à Bruxelles le 25 juin (2).
Les prétentions de Condé, au moment où il se disposait
à rentrer en France, étaient grandes; il ne voulait rien
moins que la charge de lieutenant général du royaume : il
montra au marquis Spinola quantité de lettres qu'il avait
reçues de Paris et dont les signataires le pressaient de se
rendre sans délai dans celte capitale, l'assurant qu'il aurait
toute l'autorité dont il pouvait désirer d'être revêtu. Il
hésitait toutefois à partir; il aurait souhaité qu'auparavant
sa situation fût fixée : mais Spinola fit cesser ses irréso-
(1) « Andô poi Condé a Marinionle, per ringratiar queste AA. dell'
haver tratlenula lanti mesi appresso di loio sua moglie, et con termini
pieni d'ossequio e d'obbligo, disse di riconoscer daiP AA. loro in gran parte
l'honorée la vita. Dichiarossi poi di eontenlarsi che la moglie tornasse a
suo piacere a Parigi In lanto i'Aiciduca lia falto sapere al conteslahile
che potrà enviar per la figliuoia quando vorrà » CDépèche du 26 juin
1610.)
(2) Ibid.
( 187 )
liJlions (I). Beiilivoglio, en transmettant ces détails au
cardinal Borghèse, les accompagne de réflexions qui ne
laissent pas d'être curieuses : « Sans doute » — dit-il —
« Condé va retourner en France avec une très-grande
»■ réputation : mais saura-t-il la soutenir? Condé est jeune;
» il a l'esprit fin et vif : mais ni son âge ni son naturel
» ne le portent à la prudence. Il aura donc besoin d'un
» bon conseil (2) : or les deux personnes dans lesquelles
» il a le plus de confiance sont le duc de Bouillon, héré-
» tique, et le président de Thou, catholique, mais plus
» impie en ses histoires, que j'ai lues ici, que ne le sont
» beaucoup d'auteurs hérétiques mêmes : toutefois il est
» catholique, et, d'après ce que j'ai appris, il excuse
» l'impiété de sa plume en se fondant sur la liberté de
» l'histoire (3). »
Le nonce eut avec Condé, au sujet du président de
Thou, une longue conversation dont il rapporte la sub-
stance au cardinal secrétaire d'État : « Le prince » — lui
écrit-il — « avoue que le président est son très-grand
» ami, et il aftirnie et jure qu'il est un des meilleurs
» catholiques de toute la France. Quant à son histoire, il
» dit que la malice des temps et la liberté naturelle de la
>> nation lui servant d'excuse; qu'elle a été écrite à une
p époque où Vol voyait en France des armées des papes
{]) Dépêche du 20 Juin 1610.
(H) " ... . Seiiza (iubbio seguirà qucsto suo rilorno con graiidissima
riputaiione. Ma la somma consiste in sapeiia niantenere. Condè è gio-
vanné, acuto e vivace; ma ne per l'età ne per la disposition di natura è
punto prudente. Havrà per ciô bisogno di chi io consigli.... « (Ibkl.)
(5) 1' Callolico, nia più enipio neliesue historié, ch'io ho lelte qui,
che non sonomoKi aulori herelici stessi : pure caltolico, e per quant' ho
inteso, egli scusa l'iinpietà délia penna con la libertà dell' historia »
( 188)
» qui y étaient venues à l'instigation des Espagnols ; que
» le royaume était alors, par ce motif, mal disposé envers
» le siège apostolique, et que la liberté de parler et d'écrire
» des Français est si grande qu'elle ne sait se plier aux
» règles qui seraient nécessaires. Quoi qu'il en soit, il
» affirme constamment que de Thou est un catholique
B très-zélé, et il déclare qu'il attache un grand prix à ses
» conseils, par lesquels il s'est laissé guider jusqu'à pré-
» sent (1). »
Le connétable cependant cherchait à réconcilier sa tille
avec son mari; il envoya dans ce but un gentilhomme à la
princesse à Mariemont. Marguerite de Montmorency se
montra peu disposée d'abord à un raccommodement; elle
répondit qu'elle voulait retourner à Paris avant tout (2).
Le connétable supplia les Archiducs d'user de l'intluence
qu'ils avaient sur elle pour lui faire entendre raison; en
même temps il s'efforça de se justilier de l'écrit qui, au
mois d'avril , leur avait été présenté, en son nom , contre
son gendre. [1 accusa de cet écrit son secrétaire, qui, ayant
(1). « Habbiamo poi parlato, Condé e yo, molio a lungo del prési-
dente Tuaiio. Confessa egii ch'el présidente è siio grandissimo aniico, et
afferma e giura ch'è uno de' migliori cattoliei di tutla Francia. Quant' alT
hisloria , lo scusa no men su la malvagità de' tempi che su la libertà natu-
rale délia natione. Dicechefù scritta in tempo che si vedevano in Francia
gli essercili de' papi ad instigatione degli Spagnuoli , e perciô cL'era ail"
hora mal affello el regno verso la sede apostolica, e che la libertà del
parlare e dello scrivere de' Francesi è tanto grande che non sa ristringersi
aile regole cbe sarian' necessarie. Comunque si sia , aftîrma egli costanta-
menle che 'I Tuano è caltolico zeiantissimo, et si dichiara di dover dav
gran fede a suoi consigii, da' quali dice essersi lasciato indrizzare sin
hora.... " (Dépèche du ."5 juillet 1610. )
(2) » La prencipessa non si voleva lasicar dispoire in modo alcuno
ad accomodarsi qua , ma voleva prima toniar a Parigi.. . » [Ibid.)
( ^89 )
été, disait-il , corrompu par le roi (I), l'avait trompé : car,
comme il ne savait ni lire ni écrire, ce secrétaire lui avait
lu une chose pour une autre, et l'avait aidé à apposer sa
signature au papier qui lui était présenté (2). Les exhor-
tations des Archiducs à la princesse ne furent pas infruc-
tueuses : elle finit par déclarer qu'elle était prête à se
soumettre à la volonté de son père et à reconnaître ses
torts envers son mari (5).
Condé ne se laissa pas loucher par la soumission de sa
femme : ses parents, sa mère surtout et sa sœur la prin-
cesse d'Orange, ainsi que le duc de Bouillon et de Thou,
étaient opposés à une réconciliation. A la vérité, de graves
reproches pouvaient être faits à Marguerite de Montmo-
rency : mais il fallait tenjr compte de sa jeunesse et des
pièges qui avaient été tendus à son innocence : <i Un
» volume » — écrivait Bentivoglio au cardinal Borghèse —
« ne suffirait pas à raconter toutes les maudites inventions
» dont on s'est servi pour la détourner de ses devoirs (4). »
Condé partit, le 6 juillet, avec Spinola et Bentivoglio
pour Mariemont, afin de prendre congé des Archiducs,
à qui il fit de nouveau ses remercîments. De là il se
rendit à Binclie, où l'attendait le sieur de Barrault, chargé
par Louis XIII et Marie de Médicis de lui exprimer le désir
de le voir en France. Bentivoglio, toujours préoccupé de
(I; « Ch'era corrolto dal re.... » (Dépèche du 5 juillet 1010.)
(2) '< Poichè non sapendo esso couteslabile ne leggei'e ne scrivere
il segrelario gli lesse una cosa per uu" allra , el l'aiiilo a sottoscrivere
quello chenon doveva.... » (Ibid.)
(5) « Hora sarebbegià disposta la preucipessa a far quanto vuole il
pa jre et ad humiliarsi al marilc... » {Ibid.)
(4) » Tutte le malvaggie inventioni clie soiio slale usate per cor-
romper l'animo délia prencipessa.... » {Ibid.)
( 190 )
l'influence que le duc de Bouillon et le président de Thou
pouvaient exercer sur les affaires de ce royaume, s'entre-
tint d'eux avec l'envoyé français. Barrault lui dépeignit
le duc comme « un homme dont les vues étaient sus-
» pectes (1); » il dit de de Thou qu'il passait pour un
catholique peu zélé « et chez lequel prévalaient dès long-
» temps les sentiments politiques à l'égard de la religion :
» opinion qui, depuis la mort du roi, lui avait nui beau-
» coup auprès de la reine; aussi, ayant aspiré à la pre-
» mière présidence du parlement, en vertu de la renon-
» ciation qu'aurait faite en sa faveur le premier président
» en exercice, son parent (2), n'avait-il pu l'obtenir à
B cause de son peu d'affection à la religion catholique (5). »
Le 8 juillet Condé quitta Binche, prenant le chemin de
Paris; un grand nombre de gentilshommes français étaient
venus aux Pays-Bas pour lui faire cortège. Avant son
départ, il fit présent à l'Archiduc d'un cimeterre, de travail
turc, enrichi de pierreries, d'une valeur de neuf mille
écus, et au marquis Spinola d'un poignard estimé à trois
mille écus. Le comte d'Anover, le secrétaire d'État Man-
cicido et la camàrera mayor de l'infante reçurent aussi
(1) a Huonio inclinato a disegni torbidi.... » (Dépêche du 10 juil-
let 1610.)
(2) Achille de Harlay , son beau-frère.
(ô) « Del Thuano, che è in opinione di catlolico poco zelante, et
in cui prevagliono di gran lunga i sensi politici al rispetlo délia religione :
concello che gli ha nociuto raolto hora doppo la morte del re appresso alla
regina , poichè havendo egli procurato d'esser fallo primo présidente del
parlamento, in virlù d'una rinuntia di questo carico che gli havrebbe
fatta il primo présidente, il quaîe è congiunto seco di parentela, non ha
esso Thuano , corne poco ben disposlo verso la religion caltolica , potuto
conseguire relFetto.... • (Dépêche du 10 juillet 1610.)
( liH )
(le lui (les objets de prix. L'Archiduc, qui lui avail donné
deux superbes chevaux magnifiquement enharnacbés, fit
difficulté d'abord d'accepter le cimeterre, mais enlin il
céda aux instances du prince. Condé ne voulut point voir
sa femme, quoiqu'elle lui eût écrit pour le prier de la
mener en France. Sa conduite en cette occasion donna
lieu de croire qu'il avait des vues particulières : on parlait
de la duchesse veuve de Monipensier, qui avait une très-
grande dot et qu'il aurait pu épouser si son mariage avec
Marguerite de Montmorency était rompu; on disait aussi
que, dans ce cas, la reine mère serait disposée à lui donner
une de ses filles (I).
A Cambrai il rencontra la comtesse d'Auvergne, fille
du connétable, qui était envoyée pour ramener en France
la princesse sa femme : la comtesse lui parla de réconci-
liation; il répondit qu'il devait consulter sur ce point sa
mère et ses parents. Arrivée à Binche le 15, madame
d'Auvergne se rendit le jour suivant à Mariemont; elle
présenta aux Archiducs des lettres de compliment du roi
et de la reine mère, avec des lettres du connétable pleines
d'expressions de gratitude. Le 16 la princesse partit pour
la France, en témoignant une grande satisfaction de la
manière dont elle avait été traitée à la cour deBruxelles (2).
Les Archiducs lui firent présent d'un joyau qui ne valait
pas moins de huit mille écus.
La réconciliation entre les deux époux, qui paraissait
si difticile, s'opéra à Chantilly dans les premiers jours du
mois suivant (5).
(1) Dépêctie cilée du JO juillet 1610.
(2) « Ha moslrato la prencipessa di partir sodisfalissima de' tralta-
menti ricevuli in questa corip.... >^ (Dépêche du 17 juillet 1610.)
(3) Henrard, p. 167.
( 492
La mort d'Henri IV était venue soudainement changer
la face des affaires. Les périls auxquels les Pays-Bas se
voyaient exposés étaient conjurés : « en descendant dans
» la tombe, » — dit M. Henrard — « le roi Henri y entraî-
» nait avec lui le fantôme sanglant de la guerre qui tant
» d'années avait plané sur ces provinces; pour elles la
» mort du roi était la délivrance (1). » A la réception des
dépêches qui lui apportaient la nouvelle du tragique évé-
nement, l'archiduc Albert manda le marquis Spinola, le
comte d'Anover, le secrétaire d'État Mancicidor et son
confesseur, fray Inigo de Brizuela, pour délibérer sur
le parti qu'il convenait de prendre; c'étaient les ministres
qu'il consultait principalement en de semblables occur-
rences (2) : le président Richardot, en qui il avait une
grande et légitime confiance, était mort depuis quelques
mois (5). Spinola exprima l'avis, auquel tous se rangèrent,
que les troupes qui avaient été envoyées aux frontières
vers la France fussent rappelées et dirigées vers les pays
de Clèves et de Juliers, afin de soutenir, par cette dé-
monstration, l'archiduc Léopold, dont la situation était
critique. Des ordres furent aussitôt expédiés en consé-
quence. Le régiment italien de Lelio Brancaccio occupa
Rhinberg et Stralen, celui de Pompeo Giustiniano Rure-
monde et Gueidre; les Bourguignons a,vec une partie des
(1) Henri IV el la prince!>se de Condé , p. 141.
(2) « Cbe sono i miuistri che più de gli altri sono adoperali da
S. A. in quesle luaterie di Slalo.... » ( Dépêche du 22 mai 1610.)
(3) Voy. p. 159, noie 2.
( 495 )
Wallons entrèrent dans Maestricht; les Espagnols et les
Irlandais furent cantonnés au duché de Limbourg. Quelques
jours auparavant Albert, pour ôter aux Hollandais tout
prétexte de rupture , avait déclaré qu'il ne s'opposerait point
à leurs entreprises contre Juliers ; il avait engagé l'archiduc
Léopold à sortir de cette ville, en y laissant une garnison ,
et l'archiduc était prêt à le faire. On lui dépêcha quelqu'un
en hàle afin qu'il n'abandonnât point la place (1).
Léopold en sortit cependant, mais pour venir à Bru-
xelles (2). Dans une dépèche du 29 mai 1610 Benlivoglio
trace ainsi le portrait de l'archiduc : « C'est un prince qui
» vraiment montre un zèle très-ardent pour le service de
» Dieu, de la religion catholique et de la maison d'Au-
» triche. On ne peut nier que ce zèle ne soit accompagné
» d'un esprit élevé et d'un grand cœur, de beaucoup de
» vigilance et de capacité dans le maniement des affaires
» et d'autres dons signalés de la nature et de Dieu. Ce
» qu'on pourrait désirer en Son Altesse, ce serait que
» plus de maturité secondât les espérances auxquelles la
» chaleur de la jeunesse, le manque d'expérience et peut-
» être les conseils de personnes peu prudentes font qu'elle
» s'abandonne facilement (3). »
(1) Dépèche du 22 mai 1610.
(2) Il y arriva le 23 mai 1610.
(5) « È prencipe veraraente cbe mostra un zelo ardentissimo verso
il servilio di Dio e deila religion cattoiica e délia sua casa , ne si puo
negare che con questo zelo non vada accompagnato un spirilo grande el
un grand' animo, nel Irattar i negotii molla vigilanza e capacità , e npi;li
altri coslunii, e nelP aspetlo parlicolarniente , talenli e doni grandi della
natura e di Dio. Queilo che si potrebbe desiderar in S. A. sarebbe forse
un poco di maggior malurità nell' andar secondando le sue sperauze,
dalle quali il caido délia giovenlii , la poca esperienza e forse i consigli di
persone poco prudenli lo fanno trasporlar facilmenle.... <■
2™" SÉRIE, TOME XXXYIII. «3
( 194 )
Lcopold venait solliciler les Archiducs de l'aider à con-
server Juliers. Alberl se montra disposé à faire pour lui
tout ce qui était en son pouvoir, sans aller jusqu'à risquer
la guerre avec les Hollandais et les princes de la Germanie,
auxquels les Français se joindraient infailliblement (1). Il
lui donna une certaine somme pour le payement de sa
cavalerie, prit à sa solde 400 hommes d'infanterie que
ï.éopold ne savait où loger, promit de favoriser le ravi-
taillement de Juliers, consentit à laisser pendant quelque
temps, aux frontières vers les deux duchés, les troupes
qu'il y avait envoyées (2). Léopold quitta Bruxelles le
5 juin : il avait eu l'intention d'abord de retourner à Juliers,
mais il se décida à prendre le chemin de Prague, où était
l'empereur (5).
Tout le monde était convaincu que la ville de Juliers ne
pourrait pas longtemps résister aux attaques de l'électeur
de Brandebourg et du duc de Neubourg, dont les troupes
allaient être prochainement renforcées par celles qui de-
vaient venir de France et de Hollande. Dans ces circon-
stances, Spinola aurait voulu que l'archiduc Albert prît
l'une ou l'autre de ces deux déterminations :
Ou de faire marcher toute l'armée vers Bhinberg, atin
d'observer de là les mouvements des Hollandais et des
Français, en s'abstenant de tout acte d'hostilité comme
de toute déclaration qui aurait impliqué l'engagement de
soutenir Juliers et pu ainsi conduire à la guerre : il pensait
(1) El en effet Louis XIII et Marie de Médicis faisaient déclarer, le
15 juin 1610, aux états de Clèves qu'ils étaient résolus à leur donner le
même secours et assistance que le feu roi leur avait promis. (Archives
royales de Dusseldorf)
(2) Dépêches des 29 mai et 5 juin 1610.
(5) Dépêche du 12 juin 1610.
( 195)
(jue celle simple démotistralion suffirait pour empêcher
l'inlervenlion des Provinces-Unies et de la France, car
les Français n'oseraient intervenir seuls, et les Hollandais
ne se hasarderaient pas à s'avancer, de crainte, ou que le
passage ne leur fût barré par l'armée du roi catholique et
des Archiducs, ou qu'après les avoir laissés passer, on ne
les prît à revers (1);
Ou bien, lorsque l'armée aurait été rassemblée à Rhin-
berg, de publier que le roi catholique et les Archiducs ne
voulaient faire la guerre à personne ni occuper les États
d'autrui; qu'il convenait que leurs voisins se montrassent
animés du même esprit et que toute violence fût mise de
côté; qu'en conséquence Sa Majesté et Leurs x4Itesses
trouvaient nécessaire un accommodement de l'affaire de
Juliers et, pendant qu'on y travaillerait, la cessation des
hostilités de part et d'autre. Selon Spinola une telle décla-
ration , en écartant les soupçons qu'on aurait pu concevoir
que le roi et les Archiducs eussent des vues sur les pays
du dernier duc de Clèves, serait de nature à produire
l'effet désiré : elle engagerait les Français et les Hollandais
à suspendre leur marche; quant aux deux princes préten-
(1) « L'uno rimedio, che si facesse marchiar subito tuuo l'esser-
cito verso Rinbergh , e che, quivi fana la piazza d'arme, s'osservassero gli
andamenti d'Oilanda e di Francia, ne si facesse dimostrazione alcuna
d'hostililà Ile si venisse ad alcuna allra dichiarazione per la quai s'en-
Irasse in oblige di voler sostenlar Giuliers e romper la guerra. Con questo
semplice niovimento stimerebbe il marchese che ne d'Oilanda ne di
Francia s'ardirebbe d'attaccar Giuliers, poichè i Francesi soli noardireb-
bero, e le genti d'Oilanda non passarebbon piii inanzi, o por limor d'haver
chiusi i passi da quesl' essercito, o per dubbio (quando pur si lasciassero
passare di non restar in pericolo troppo grande con quest' essercito che
rimanesse loro aile spalle.... » (Dépèche du :26 juin 1610.)
( 196 )
dants, ils seraient bien obligés de se soumettre à l'accord
qui se ferait (1),
Mais, d'après les dernières dépêches arrivées d'Espagne,
Philippe III n'entendait se mêler directement ni indirec-
tement de l'affaire de Clèves; il recommandait même à
l'archiduc Albert de ne pas toucher à l'argent qu'il lui
avait envoyé au moment où l'on s'attendait à voir les Pays-
Bas envahis par la France. Spinola n'aurait donc pas trouvé
l'Archiduc disposé à adopter sa manière de voir : aussi se
contenta-t-il de lui demander que les troupes levées avant
la mort du roi Henri fussent tenues sur pied. Albert y
consentit, non sans quelque scrupule (2).
Sur ces entrefaites les nonces du pape à Paris imagi-
nèrent de nouveaux moyens d'accommodement : ils pro-
posèrent que Juliers fût remis entre les mains d'un prince
(1) (. L'allro rimedio porterebbe seco titoli più speciosi e più mani-
festa dichiarazione del disegiio che s'havesse da questa parle. Dovrebb"
esser il disegno, seconde il marchese, di metter pur anchè insieme tutto
l'essercilo ne! modo ch' ho dello di sopra e ridurlo ail' islessa piazza
d'arme e negli allogiamenli medesimi. Fatlo questo, dice il marchese che
si dovrebbe poi publicare che né Sua Maeslà Callolica ne queste Allezze
voglion far guerra ne occupar in modo alcuno gli Stati d'ailri, ma
ch'essendo conveniente ch'i vicini habbiam l'islessa inlenzlone e che si
lasci ogni violenza da parte, stimar perciô necessario Sua Maeslà e queste
Altezze ch'il negoliato di Giuliers ad ogni modo s'accomodi, e in lanlo si
posin l'armi e si pensi a parlili amicabili. Da quesla dichiarazione e da
questo movimento e dal procedere moderato, fuggendo oga' alto d'hos-
tilità et ogn' altro sospetto che si polesse pigiiarne d'haver disegni pro-
prii da questa parle sopra gli Slali del mono duca di Cleves, parebbe al
marchese che si polrebbe sperar qualchè accordo, poichè sicuramente
sospenderebbero ogni progresse i Francesi e gli Ollandesi , e |)er l'islrac-
chezza Brandeburg e Nioburg caderebbono in qualch' accordo.... » (Dé-
pêche du :26,juin 1610.)
("1) Ibid.
[ li)7 )
catholique neutre ; que l'électeur de Brandebourg et le
duc deNeubourg demeurassent possesseurs des lieux qu'ils
tenaient; que le différend touchant la succession de Clèves
fût décidé par une diète générale de l'Empire à convoquer
à bref délai; que, dans l'intervalle, toute hostilité cessât.
Cette proposition fut accueillie favorablement par les mi-
nistres de la reine régente; l'archiduc Albert, qui y trou-
vait une garantie du maintien de la paix, non-seulement
y accéda, mais encore écrivit en termes chaleureux à
l'Empereur, pour qu'il y donnât aussi son adhésion (1).
Le caractère de Rodolphe II ne le portait pas aux réso-
lutions promptes, et, comme le remarque Bentivoglio,
de la cour de Prague les remèdes venaient toujours plus
tard que ne l'exigeaient les maux auxquels ils devaient
être appliqués (2) : aussi il était à craindre que, en atten-
dant la réponse de l'empereur, Juliers ne tombât au pou-
voir des princes protestants. Pour prévenir un événement
aussi fâcheux, Spinola suggéra l'idée d'une suspension
d'armes de deux ou de trois mois pendant laquelle ces
princes, ainsi que l'empereur, auraient à se déclarer sur
l'arrangement proposé en dernier lieu à Paris. S'ils l'ac-
ceptaient, toute hostilité serait suspendue jusqu'à ce que
la diète de l'Empire eût décidé le différend qui lui serait
soumis; si l'une ou l'autre des deux parties le rejetait, les
.\rchiducs, la France et les Provinces-Unies s'obligeraient
réciproquement à ne lui prêter aucune assistance. L'archi-
duc Albert chargea son ambassadeur à Paris, Pecquius, de
communiquer cette idée aux nonces et d'en conférer avec
(1) Dépèches du 26 juin et du 5 juillet 1610.
(2) -. Di la sempre veiiKOii piii tardi i riniodii que non richiedonoi
lîiali... » (Dépèche du ."juillet 1610.)
( 198 )
les minisires français (1). Le chancelier répondit à Pecquius
d'une manière évasive (2). Spinola avait déjà tenté, sans
succès, d'engager l'Archiduc à envoyer quelques régiments
sur les frontières vers le pays de Juliers; il renouvela
cette tentative lorsqu'il sut la réponse que le chancelier de
France avait faite, mais ce fut tout aussi vainement (5).
Albert ne voulait pas courir le plus petit risque de donner
lieu à la guerre (4).
Tandis qu'à Bruxelles on s'abstenait avec soin de toute
mesure, de toute démarche qui aurait pu dénoter des
desseins hostiles aux deux princes protestants, les états
généraux s'apprêtaient à soutenir ceux-ci avec vigueur:
ils avaient formé un corps de troupes qui ne tarda pas à
marcher vers le pays de Juliers sous la conduite du comte
Henri de Nassau, général de la cavalerie de la république;
le comte Maurice se transporta de sa personne à Meurs,
pour en diriger de là les mouvements au besoin (5). Les
Français qui devaient seconder cette expédition mar-
chèrent de leur côté ; ils atteignirent Metz vers le milieu
du mois (le juillet. Dans le même temps les Hollandais
s'avancèrent jusque près de Rhinberg (6).
La cour d'Espagne avait, à plusieurs reprises, manifesté
(1) Dépêche du ô juillet 1610.
(2) Dépèche du 10 juillet 1010.
(5) Dépèches du 5 et du 10 juillet.
(4) . M'aggiunse il marchese ch' egli haveva proposto a Sua Al-
tezza che si mandasse qualchè parle délia gente predetla ad allogiar nellr
frontière verso il paese di Giuliers, ma che l'Arciduca non l'ha voluto, e
che non vuol in somma Sua Altezza correr alcun rischio , per lontano
che sia,d'accender laguerra.... " (Dépêche du 5 juillet.)
(5) Dépêche du 17 juillet 1610.
(6) Dépèche du :2.i juillet 1610.
( 199 )
la volonté de rester étrangère aux différends que pouvait
faire naître la succession deClèves; tout récemment encore
l'archiduc Albert avait reçu de Madrid des dépêches qui
l'invitaient à licencier le plus tôt possible les troupes qu'il
avait levées en dernier lieu (1). Quelques jours après,
cependant, Philippe III donna l'ordre à son ambassadeur
à Paris, don Ifiigo de Cardenas, de témoigner à la reine
mère et aux ministres français l'étonnement avec lequel
il avait appris que la première action du nouveau règne
devait être de secourir les protestants. Don Inigo était
chargé de leur dire que, comme il avait à cœur la paix et
le bien de la chrétienté, il souhaitait trouver en eux la
même inclination; que, s'il n'en était pas ainsi et qu'ils
persistassent dans leur projet, il était résolu, lui, d'aider
les catholiques (2). Un courrier qui arriva à Bruxelles le
22 juillet apporta à l'Archiduc une leltre du roi contenant
les mêmes déclarations (3).
Cardenas étant malade quand l'ordre de son maître
lui parvint, ce fut l'ambassadeur belge qui l'exécuta à sa
place. Pecquius en conféra avec plusieurs des ministres
de la reine régente et en particulier avec le secrétaire d'État
Villeroi. Toute la réponse qu'il obtint fut que le gouver-
ment français s'en tenait à ce qui avait été proposé par les
nonces ; qu'il ferait en sorte que l'électeur de Brandebourg
et le duc de INeubourg y acquiesçassent; qu'il ne pouvait
suspendre le mouvement de marche des troupes destinées
à secourir ces princes, dans l'incertitude où l'on était du
parti que prendrait l'empereur (4).
(1) Dépêche du 17 juillellGlO.
(-2) Dépêche du 21 juillet 1610.
(3) Ibid.
(4) Ibid.
( 200 )
Au milieu de ces pourparlers diplomatiques, une nou-
velle qui ne causa pas moins de surprise à Bruxelles qu'à
Paris, parvint presque en même temps dans les deux capi-
tales : l'empereur venait de donner l'investiture des États
de Clèves et de Juliers (1) à l'électeur de Saxe Christian II.
Cet acte avait une grande importance : d'abord il prouvait
que Rodolphe ne songeait point à se mettre personnelle-
ment ou à mettre quelque prince de sa dynastie en la pos-
session de Juliers ni d'une partie quelconque des États du
feu duc Jean-Guillaume, et ainsi les reproches d'ambition
qu'on faisaità la maison d'Autriche tombaient d'eux-mêmes;
ensuite Christian Ilétait luthérien : les protestants n'avaient
donc plus de motifs de prendre fait et cause, dans l'in-
térêt de leur religion , pour l'électeur de Brandebourg et le
duc de Neubourg. L'archiduc Albert, considérant tout cela,
jugea que ce qu'il y avait de mieux à faire, c'était que les
puissances étrangères laissassent les princes de l'Allemagne
résoudre entre eux la question qui s'était élevée par rapport
à la succession de Clèves, sans s'y immiscer en aucune
façon ; il chargea son ambassadeur à Paris de faire des
ouvertures en ce sens au gouvernement français (2).
Mais ce gouvernement, de même que celui des Pro-
vinces-Unies, avaient pris des engagements envers les
deux princes signataires du compromis de Dortmund, et,
sans égard à la décision de l'empereur, ils ordonnèrent à
leurs troupes de continuer leur marche en avant. Arrivées
(1) Le:27 juin 1610.
(2) « .... Ail' ainhasciarlore di Fiandra scrive Sua Allezza che 'I
meglior ospedienle sarebbe lasciar che Ira i prencipi d' Aleniagna si ter-
minasse la dillerenza e se ne lirassero i'uoii luUi gli altri che si sono falla
comune la causa. Ordina percib Sua Altezza al detto anibasciadore che
Iralti in questa forma.... » (Dépêche du 2i juillet 1610.)
( 201 )
au pays de Jnliers, celles-ci se joignirent à celles de l'élec-
tenr de Brandebourg et du duc de Neubourg pour faire
le siège de la capitale. La garnison de Juliers, qui souffrait
déjà du manque de vivres et de munitions de guerre, ne
pouvait tenir longtemps contre des forces aussi supérieures;
elle capitula dans les derniers jours d'août. On avait craint
à Bruxelles que les Hollandais ne voulussent s'emparer de
la ville pour eux-mêmes ; il n'en fut pas ainsi : ce furent
des détachements des troupes brandebourgeoises et neu-
bourgeoises qui en prirent possession (1).
Par là fut terminé, au moins provisoirement, un débat
qui, durant dix-huit mois, avait été pour les Archiducs un
sujet de beaucoup d'inquiétudes.
Un peu moins de trois années après la querelle se
réveilla, mais cette fois ce fut entre la maison électorale
de Brandebourg et la maison palatine de Neubourg. Wolf-
gang-Guillaume, fils et successeur du duc de Neubourg
Philippe-Louis, ayant embrassé la religion catholique, le
roi d'Espagne et les Archiducs prirent fait et cause pour
lui, tandis que les Provinces-Unies soutinrent l'électeur
de Brandebourg. Je n'ai pas à m'occuper ici de ces événe-
ments, les dépêches de Bentivoglio des années 1614 et
1615 étant restées, par les raisons que j'ai dites plus haut,
en dehors de mes investigations (2).
(1) Dépèches des -iel 11 septembre 1610.
(2) Bentivoglio en a d'ailleurs retracé l'histoire dans son excellente
Relalione de la mossa d'arme che seguï in Fiandra l'anno M. DC. XIV
per occasione d''haver le Procincie Unité occtipata la terra e caslillo di
Ciuliers, etc. {Opère, p. 151.)
( 202 )
VI.
A l'époque où les gazettes n'existaient pas encore, c'est
dans les dépêches des ambassadeurs qu'il faut chercher
des détails sur les faits qui se passaient dans les cours
auprès desquelles ils étaient accrédités : je parle ici des
faits qui n'avaient pas un caractère politique, tels que les
cérémonies publiques, les fêtes, les nominations aux prin-
cipales charges de l'État, le départ ou l'arrivée de person-
nages éminents, la réception d'envoyés des princes, tout ce
en un mot, que le journalisme actuel place sous la rubrique
des faits divers. Comme tous les diplomates de son temps,
Bentivoglio a soin de tenir le cardinal secrétaire d'État au
courant des choses de cette nature. Je vais rapporter,
d'après lui, celles qui m'ont paru offrir le plus d'intérêt.
Sous le règne des Archiducs les défis, les duels n'étaient
pas moins fréquents aux Pays-Bas qu'en France; peut-être
même l'étaient-ils pins encore, surtout dans l'armée (1). Une
dépêche de Bentivoglio nous apprend qu'Albert avait les
duels en horreur (2) : aussi, au mois de septembre 1610,
ayant été informé que des gentilshommes principaux de sa
cour s'étaient défiés et qu'ils allaient sur le terrain , envoya-
t-il des arquebusiers de sa garde pour les prendre et les
conduire prisonniers au château d'Anvers, avec ordre de
(1) Bentivoglio écrit, le 11 septembre IGIO. que dans le régiment
d'infaïUerie italienne de Pom[)eo Giustiniano, composé de 1,400 têtes, la
plupart des soldats s'étaient déliés.
(2) .. Il serenissimo Arciduca abhoirisce inestremo queste mateiie
di duelli.... » (Dépèche du 11 septembre IGlO.)
( 205 )
les tuer sans miséricorde en cas de résistance {\). Quelques
mois auparavant (27 février) il avait fait promulguer contre
les duels et les duellistes un édit rigoureux. Cet édit défen-
dait à tous ses sujets et vassaux de défier ou provoquer
quelqu'un au combat, comme aussi d'accepter un pareil
défi ou provocation , à peine d'être dégradés d'armes
et de noblesse, d'être déclarés infâmes et roturiers, de
perdre leurs états, offices, pensions, s'ils en avaient, avec
la moitié de leurs biens qui seraient appliqués à des œuvres
pies,- au cas qu'ils eussent comparu au lieu assigné, il les
déclarait coupables du crime de lèse-majesté; comme tels
il prescrivait qu'ils fussent punis du dernier supplice et
leurs biens confisqués au profit du fisc. Les témoins encou-
raient de même la confiscation de corps et de biens (2).
Ces dispositions étaient, du reste, empruntées pour la
plupart de lordonnance qu'Henri IV avait rendue au mois
de juin 4609 (3). A l'exemple du roi de France, Albert
déclarait « erronée, fausse et mensongère » l'opinion,
enracinée aux cœurs de la noblesse et des gens de guerre,
qu'on ne pouvait, sans s'exposer au reproche de lâcheté,
rechercher laison d'une injure reçue par une autre voie
que celle du combat singulier; il prenait sur lui et en sa
protection et sauvegarde l'honneur de ceux qui obéiraient
à son édit; pour les outrages d'une nature tout à fait excep-
tionnelle, il ordonnait aux personnes offensées de s'adresser
à lui ou au mestre de camp général de l'armée, lequel avec
deux autres chevaliers formerait un tribunal d'honneur
pour entendre les parties.
(1) « Con ordine d'ammazzar detli cavalieri in caso che non vo-
lessero lassarsi pigliare.... « (Dépêche du 11 septembre 1610.)
(2) Placards de Flandre, liv. II, p. 70-t.
(5) IsAMBERT, Recueil des anciennes lois françaises , l. XV , p. 531.
( 204 )
Dans une dépèche du 15 janvier J61I Bentivoglio
raconte la mort de l'évêque d'Anvers, Jean Le Mire. Ce
prélat assistait, le il, à Bruxelles, à un grand souper
donné à l'occasion du mariage du comte d'Hoogbstraeten
avec M"'' de Berlaymont. A minuit il se retira. Arrivé chez
lui, il fut subitement frappé d'apoplexie, et d'une manière
si violente qu'en moins de deux heures il avait cessé de
vivre. Il était, dit Bentivoglio, très-corpulent, et quoique
ce soir-là il eût été sobre, peut-être que les humeurs qu'il
y avait en lui se ressentirent violemment de ce qu'il avait
été plusieurs heures dans un appartement très-chaud à
cause de la multitude de lumières qui l'éclairait et de la
nombreuse compagnie qui y était rassemblée (1). Le nonce
déplore la perte de Le Mire dont il ne peut assez louer la
bonté, la doctrine et le zèle : « Ce qui nous a été particu-
» lièrement désagréable, » ajoute-t-il « c'est que les héré-
» tiques se prévaudront de cet accident pour calomnier les
» prélats de ces pays, en les taxant d'incontinence (2). »
Depuis que toute crainte de guerre avait disparu,
Ambroise Spinola sollicitait de Philippe lll la permission
d'aller à sa cour; il l'obtint au commencement de 1611
et partit pour l'Espagne le 26 mars (5). « Le pauvre gen-
» tilhomme » — écrit à celle occasion Bentivoglio — « se
(1) 0 Egli era niollo corpuleiito, el sehcii quella sera si IraUeiiesobria-
meiile alla cena, luUavia puo essere clie gli buinori disposti per prima si
risenlissero con violenza daii' esser eeli stalo alquaiile hore iii una slanza
niolto caida per il gran numéro di lumi e per la frequeiiza di molle per-
sone che v' erano.... »
(2) « Questo che parlicolarmeiile è dispiacciuioall" uiio el alT altro
di iioi,èche di questo accidente seguito in laie occasione si valerano gli
luM'elici per calumniar d'incontinenza i prelali di quesle parli.... »
(5) Dépêche du même jour.
( 205 )
» trouve ruiné par les dépenses excessives qu'il a faites. Il
» avait cent mille écus de revenu, outre quatre cent mille
» écus d'argent comptant; aujourd'hui il n'a plus d'argent,
» et son revenu est diminué au point qu'il ne s'élève plus,
» je crois, à quarante mille écus. Il a en Espagne deux
» fjls,menins de la reine, qu'il entretient avec luxe; il a
» une maison à Gènes où habitent sa femme et sa mère
» et qui lui coule beaucoup;à Bruxelles il dépense encore
» davantage : il voudrait, pour rétablir ses affaires, n'avoir
» plus qu'une maison, et en Espagne. Un jour, entre
» autres, qu'il soupirait en pensant à ses Uls, il me dit
» que, s'il n'avait pas eu ce caprice de se faire soldat,
» il serait indubitablement le plus riche gentilhomme
» d'Italie, et il aurait pu accumuler assez de trésors pour
» qu'il lui fût facile d'acquérir un grand État. Certes » —
ajoute Bentivoglio — « c'est un digne gentilhomme, et il
» a rendu au roi des services signalés. Les Espagnols même
» les plus passionnés en conviennent; ceux qui le sont
» moins reconnaissent que le roi lui doit toute espèce de
» faveurs. Et sans aucun doute, s'il était espagnol, cette
» nation s'enorgueillirait d'un tel sujet, d'une activité
» infatigable, d'une rare perspicacité dans les conseils,
» d'une grande pureté de foi et non-seulement recom-
» mandable, mais encore exemplaire par sa vie chré-
» tienne (1). »
(1) « Si truova il povero cavalliere coiisunialo dalle spese ecces-
sive; e di 100,000 scudi d'enlrata c'haveva, oltre a 400,000 scudi di
danari conlanli, hora non si truova plii danaii, et ha per modo sminuita
l'enlrata che da quel ch' io ho potulo laccogiiere da varii suoi ragioiia-
menli passati nieco in gran confidenza, non credo che gii restino 40,000
scudi d'enlrata. Ha duetigiioli in Ispagna, menini délia regina, e perché
( 200 )
Spiiiola revint d'Espagne au mois de juin 161± Phi-
lippe 111 avait jugé sa présence nécessaire aux Pays-Bas; en
récompense de ses services, il lui avait conféré la grandesse.
Les Archiducs se réjouirent de son retour; ils faisaient un
grand cas de lui. La plupart des généraux de l'armée
royale se portèrent à sa rencontre jusqu'à Mons (i).
Quoique les Archiducs fussent des princes très-religieux,
qu'une grande sévérité de mœurs régnât dans leur palais,
les plaisirs n'étaient point exclus de la cour de Bruxelles;
Bentivoglio assure même qu'il n'y en avait pas de plus
gaie, par les tournois, les chasses et les autres divertisse-
ments qui s'y donnaient (2). Dans une dépêche du J9 fé-
vrier i611 il décrit un tournoi qui y avait eu lieu le dernier
jour du carnaval (IS février). Ce tournoi se fit à la quin-
taine devant le palais. Quatre bandes y prirent part, ayant
gli manliene cou splendor grande, et ha un' altra casa in Geuova délia
moglie e délia madré che gli fa sentir niolta spesa, e la sente egli piii che
piii in questa sua di Brusseles : percib egli desidera si ridurre lutte queste
case insieme in Ispagna, e veder di sollevare le cose sue nel miglior modo
che gli sarà possibile. Una volta, tra l'altre, quasi sospirando per la pietà
de' suoi figli, mi disse che s'egli non havesse havuto questo capricio
d'esser soldalo , senza dubbio sarebbe slalo facile di far acquisto d'un
gran Slato. Certo ch' egli è un digno cavalliere e sono grandissimi i suoi
meriti nel servitio del re. Confessanlo gli Spagnuoli anche piii appassion-
nati, eti meno appassionati dicono ch' ogni mercede se gli deve da Sua
Maeslà. E senza dubbio, s'egli fosse spagnuolo, triunferebbe quella na-
tione d'un tal soggello, indefesso nelle faliche, acculissimo ne' consigli,
di somma integrilà nella fede.e ne' coslumi chrisliani non solo commen-
dabile ma essemplare.... » (Dépêche du 18 décembre 1610.)
(1) Dépèches des 5 mars, 9 et 16 juin 1612.
(2) « Non si pu6 veder corte più allegra di questa in lutte le occor-
renze che nascono o di tornei , o di caccie, o d'altre ricrialioni che si
sogiiano goder uelle case reali com' è questa di Fiandra.... » {Relatione
di Fiandra. Cap. I. Délia natura e costumi degli Arciduchi.)
( 207 )
à leur uHe D. Luis de Velasco, général de la cavalerie,
D. Alonso Pimentel, fils du comte de Benavente, le prince
d'Épinoy et le chevalier Melzi, lieutenant général de la
cavalerie. Le comte de Furstemberg, gentilhomme de la
chambre de l'Archiduc, d'une des plus illustres familles
d'Allemagne, s'y présenta seul comme aventurier. Seul
aussi y vint le marquis Alfonso Gonzaga, l'un des menins
de rinlanle, qui ne comptait que treize ans. Les Archiducs
et tous ceux qui étaient là prirent le plus grand plaisir à
le voir, dans un âge aussi tendre, lutter de courage et
d'habileté avec des hommes faits. Au reste, le spectacle
réussit de tout point; les gentilshommes qui y figurèrent
avaient tous revêtu de riches costumes. La même nuit il y
eut au |)alais un bal magnifique (1).
Les Archiducs avaient une grande dévotion à saint
Albert, évêque de Liège et cardinal, assassiné à Reims
en 1192; ils désiraient beaucoup posséder son corps,
(1) « L'ullima noUe di carnovale si passô qui co'l trallenimento
d'un bellissimo torneo alla quinlana che si fece avanli il palazzo de' pren-
cipi serenissinii. Compariiero ca|)i di squadra e con inventioni don Luigi
de Velasco, gênerai délia cavalleria, don Alonso Piraenlello, figliuolo del
conle di Benavente, il jn-encipe di Pinoi, cavalliere de' prinii del paese, et
il cavalliere Melzi, luogoleniente gênerai délia cavalleria. Solo como ven-
turiero eomparuèil conte di Fustenbergh, cavalliere principalissimo ale-
nianno, deila caméra delT arciduca serenissinio; solo parimente, ancorchè
con inventione, coniparuè il niarchese Alfonso Gonzaga, giovanetto di
Iredici anni , che sirve qui di menino la serenissima infanla. Fù gran-
dissinio il gusto ch' hebbero le Allezze Loro, e grande il piacere che
generalmente fii sentilo da ognuno , di vedere in età cosi tenera tanto
spirilo et habilita bastante a poler' entrar nelle atlioni di quesla sorte
eou gli huomini niaturi. Nel reslo lo spettacolo riusci per ogni parte vago
e dilellevole , e lu molto ricco l'adornanienlo di tutti i cavallieri. La mede-
sima nolte si fece anchè in palazzo una bellissima festa con diversi balletti
délie dame e délie menine délia serenissima infanta.... »
( 208 )
qui se conservait en celle dernière ville, pour le déposer
dans l'église du couvenl des Carméliles qu'ils venaient de
fonder (4). Les négociations entamées par eux dans ce but
ayant réussi, le corps d'Albert arriva aux portes de
Bruxelles, accompagné de deux cbanoinesde Reims, dans
les premiers jours de décembre ICI 2. Le 8, après une
procession à laquelle assistaient tous les métiers et tout le
clergé, il fut introduit solennellement dans la ville. La
châsse, couverte d'un drap de brocard d'or, était portée
par quatre abbés mitres; quatre autres l'entouraient; les
archevêques de Malines et de Cambrai et un évèque sutfra-
gant devienne marchaient ensuite. Les Archiducs étaient
allés à l'hôtel d'Egmont, aujourd'hui d'Arenberg, situé à
proximité du monastère des Carmélites, pour voir défiler
la procession. Lorsque le corps du saint arriva devant
l'hôtel , Albert et Isabelle descendirent dans la rue ; l'Archi-
duc voulut le porter lui-même sur ses épaules, aidé de
l'ambassadeur d'Espagne, du marquis de Spinola et du
prince d'Orange; l'Infante, précédée du nonce, accompagna
la procession. Le corps étant entré dans l'église, la cha-
pelle de la cour entonna le Te Deitm; l'archevêque de
Malines dit une oraison ; puis un des chanoines de Reims
prononça un discours en latin sur la consignation l'aile aux
Archiducs de la sainte relique. Le jour suivant, dans la
même église, ces princes entendirent, après la messe,
un très'beau sermon (2) en français de l'abbé Montgail-
lard (o). Le 20 ils y retournèrent, pour faire aux religieuses
la remise en forme du corps de saint Albert. Le nonce ou-
(1) Hisloire de Bruxelles, par MM. Henné et Waulers, t. III, p, 386.
(2) o Bellissinio sermone.... »
(5) Dépêche du 15 décembre 1612.
( 209 )
vrit la châsse en présence des chanoines venus de Reims;
toutes les reliques qu'elle renfermait en furent retirées et
placées dans une autre châsse richement ornée, et celle-ci
avec sa clef fut délivrée à la prieure. Un notaire dressa acte
de ce dépôt. L'Archiduc lit don aux chanoines rémois, afin
qu'ils le rapportassent à leur église, d'un os de la cuisse
du saint contenu dans une magnifique cassette d'ébène
incrustée de figures d'argent. Il garda, pour sa dévotion
particulière, quelques petits morceaux d'os et l'anneau
pontifical d'Albert, qui était un saphir monté en or (1).
On a dit, et Bentivoglio lui-même (2), qu'Albert et Isa-
belle, malgré les grandes qualités dont le ciel les avait
doués , s'étaient fait plutôt respecter qu'aimer des Belges ;
on leur a reproché de n'être point assez communicatifs,
assez affables, d'observer trop cette gravité espagnole
qui était incompatible avec le caractère des peuples des
Pays-Bas, Albert cependant donnait audience, chaque
jour, matin et soir, à tous ceux qui voulaient lui parler,
et il les écoutait avec autant de bienveillance que d'atten-
tion (3); lui et l'Infante se plaisaient à prendre part aux
fêtes populaires, surtout à celles des serments qui étaient
si chères à nos ancêtres. Le 1" mai 1615 ils assistaient
à la réunion des arquebusiers convoqués pour un tir au
papegay. Après que l'Infante et l'Archiduc eurent, les
(1) « Dentro una bellissima casselta d'ebeno, intarsiata di figure
d'argenlo, diede l'Arciduca a i delti canonici l'osso d'una délie coscie del
sanlo, da riportare con loro a Rens, e S. A. volse rilenersi per sua parli-
colar divolione alcuni piccioli pezzi délie ossa e l'anello pontificale, ch'è
un zafBro in semplice ligatura d'oro.... » (Dépêche du 22 décembre 1612.)
(2) Relatione di Fiandra. Cap. I. Délia natura e coslumi deyli Arci-
duchi.
(3) Ibid.
2™* SÉRIE, TOME XXXVIII. 14
( 210 )
premiers suivant la coutume, tiré trois ou quatre coups,
il arriva qu'au moment où l'un des arquebusiers venait de
décharger leur arme, le canon lui en creva dans les mains,
et l'un des éclats de bois alla frapper et blesser l'Infante à
la joue droite. Quoique le sang coulât en abondance de sa J
blessure, Isabelle ne voulut pas quitter le lieu de la fête I
jusqu'à ce que le papegay eut été abattu. On peut juger si ^
cette résolution lui valut les acclamations des membres du
serment. Le coup qu'elle avait reçu n'eut d'ailleurs pas de
suite sérieuse (I).
Je terminerai cette analyse de la correspondance de Ben-
tivoglio en donnant, d'après ses dépêches, une indication
sommaire et chronologique des ambassades envoyées et
reçues par les Archiducs dans les années 1611, 1612 et
1615; ces détails peuvent être utiles aux historiens.
21 juin WiO (2). Envoi du comte de Bucquoy (Charles
de Longueval), général de l'artillerie, à Paris, pour com-
plimenter le nouveau roi et la reine mère de France.
^5 janvier i6U. Nomination du licencié Ferdinand de
Boisschot à l'ambassade d'Angleterre et du conseiller au
grand conseil Le Bailly à l'ambassade de France. L'ambas-
sade d'Angleterre était vacante depuis le rappel du baron
(1) u Tirandosi coii l'archibugio, havevano l'Infanla e l'Arciduca
lirati tre o quatre colpi per una prima di tutti, seconde il solito, quando
avvenne clie nell' atto dello scaricare crepo in mano ad uno di detli
arteggiani la canna dell' archibugio , e fece volar' alcune scheggie délia
canna, una délie quali percosse e feri l'Infanta nella guancia destra, con
effusione di molto sangre. Non volse con tutlo ci5 S. A. partir dal luogo
délia festa sinchè il pappagallo non fù abbatluto. E ritornata poi S. A, in
corte, si vide che la ferita non era di momento, e l'Altezza Sua ne sarà
presto dellutto guarila.... » (Dépêche du 4 mai 1613.)
(2) Les dates que je cite sont celles des dépèches.
2il )
d'Hoboken; celle de France était occupée par Pierre Pec-
quius, qui sollicitait son rappel (1). Bentivoglio dit de
Boisschot qu'il est réputé homme de talent et de beaucoup
d'habileté dans les affaires (2). Sur Le Bailly il n'a pas de
renseignements particuliers; seulement on lui rapporte
que la capacité de ce nouveau diplomate n'est pas grande,
et que dans le maniement des affaires son expérience est
médiocre (3).
'19 mars 4611. Arrivée à Bruxelles, le 17 mars, en
qualité d'ambassadeur ordinaire de France, du sieur de
Préaux, le même qu'Henri I\ y avait envoyé pour réclamer
la princesse de Condé. « Tl est très-jeune, dit Bentivoglio,
» car il n'a guère plus de trente ans ; mais l'esprit qu'il
» montre fait bien augurer de lui. II jouit d'une abbaye
» en France, bien qu'il aille en habit séculier (4). »
n septembre 1611. Envoi du comte de Solre, chevalier
de la Toison d'or, conseiller d'État et grand écuyer de
l'Archiduc, à Vienne, pour assister, en son nom, au ma-
riage de son frère Mathias, roi de Hongrie et de Bohême,
avec Anne d'Autriche, hlle de Ferdinand, comte de Tyrol.
5 octobre 161 1. Envoi du comte de Bucquoy en Espa-
(1) En anuonçanl, dans une (.lépèche du 30 avril , le retour à Bruxelles
de Pecquius, Bentivoglio dit qu'il a rempli sa charge à la très-grande
satisfaction des Archiducs, et qu'il s'y est acquis beaucoup de réputation
par la prudence et le talent dont il y a fait preuve [Ha soslenuto quel
caricho con sodisfation grandissima délie Loro Altezze e con acquisto
di moUa riputazione , per haver' egli data segui di gran prudenza e
valore).
(^) « É giudicalo huomo di buon ingegno o di molta hahililà mi'
negotii.... »
(3) « Et che non sia mollo versato ne' negotii »
(4) Egli è assai giovane d'età, non potendo passar di nioltoi Ireiiia
anni; ma lospiritoch'egli mostra promette di lui buona riuscita. Gode in
Francia una abbadia, aucorchè qui vada in habilo di secolare.... »
( 212 )
giie, pour solliciter du roi ranlicipation du subside destiné
à rentretien de l'armée.
15 octobre J6i I. Envoi de D. Diego Mesia, gentilhomme
de la chambre de l'Archiduc, en Italie, pour présenter au
duc de Mantoue, Vincent P', et au prince son fils les com-
pliments de condoléance d'Albert et d'Isabelle, à l'occasion
de la mort de leur épouse et mère , Éléonore de Médicis.
5 novembre 161 1. Envoi du comte Ottavio Visconti, de
la chambre de l'Archiduc, en Espagne, pour présenter de
pareils compliments à Philippe ïll, à l'occasion de la mort
de Marguerite d'Autriche, sa femme.
5/ mars 4612. Arrivée à Bruxelles du baron de Reck-
heim, envoyé par Ferdinand de Bavière, électeur de
Cologne et évoque de Liège, qui venait récemment de
prendre possession de ces deux principautés. — Arrivée
d'un ambassadeur du duc de Lorraine Henri II, chargé
de complimenter les Archiducs à l'occasion de la mort de
l'empereur Rodolphe IL
23 juin. 1612. Envoi à Vienne du comte Ottavio Visconti,
pour féliciter l'empereur Mathias, au nom des Archiducs,
.sur son élection.
18 août 1612. Envoi en Espagne du comte de Furstem-
berg, gentilhomme de la chambre de l'Archiduc, avec la
mission de complimenter le Roi sur les deux mariages
conclus avec la couronne de France.
•/«'" septembre 1612. Envoi de Pecquius à l'empereur
l\lathias, alin de traiter, au nom de l'Archiduc, du partage
de la succession de l'empereur défunt (I).
(1) Pecquius revint de Vioiine au mois de mars 1613. Entre autres
objets de prix qu'il rapporta à l'archiduc Albert , était une bague en
diamant d'une valeur de cinquante mille florins d'Allemagne. (Dépêche
(lu 6 avril 161ô.)
( 213 )
49 janvier 1615. Nomination du comte de Soire pour
aller complimenter Ferdinand de Bavière, à l'occasion de
l'entrée qu'il devait l'aire à Liège.
9 février 1615. Envoi, par Ferdinand de Bavière, du
grand commandeur de Maestriclit , de l'ordre Teutonique,
chargé de complimenter, en son nom, les Archiducs.
W avril 1615. Envoi à la diète de Ratisbonne du comte
Frédéric de Bergh, chevalier de la Toison d'or.
APPENDICES.
Lettres de Bentivoglio au cardinal Borghèse, secrétaire dl^lat
de Paul V.
iV I.
Illustrissimo et Reverendissimo Signorc, padrone colon-
dissimo,
Il présidente Ricciardotto fù quegli tliandô a trovare Tam-
bassadore d"lnghilterra e gli fece iiitendere, come da se, che
non andasse aitrimenli ail' audienza del soroiiissimo Arcidnca
con animo di présentai' a Sua Altezza il libro del suo ro,
perché Sua Altezza non l'havria ricevulo. Si commosse gran-
dementc a queste parole lambassadore, e rispose al présidente
ch' egli era qui per essequir gli ordini del suo re, e che non
poteva far di nieno di non presentar il libro; soggiunse che
teneva per fermo che l'Arciduca non havria iisato mai ter-
mine taie col suo re , et un disprezzo si grande di ribustar
cosa che gli fosse presentata in nome di Sua Maeslà. Rcplicù
il présidente ail ambassadore ch' egli haviia fatlo bene a de-
( 214 )
porre qiiest' aninio, i; clie poteva dar fede a quanto gli veniva
detto da lui, e chc non dovcva ripularlo pei* delto a caso.
Con questa forma di ragionamento del présidente restô
sospeso l'anibassadore, e non risolse per alF hora d'andar ail'
audienza. Andô poi duc di dopo a Irovar csso présidente, e gli
disse ch'avendo considerato meglio quelle parole, desiderava
in ogni modo sapere se fossero parole uscite d'ordine dell'
Arciduca. Replicô Ricciardotto ail' ambassadore ch' egli poteva
ben ci'edere che non fossero parole uscite a caso. E rinnovando
pur l'instanze l'anibassadore per saper s'eran uscite d'ordine
deir Arcidu(;a , rispose finalmente Ricciardotto cb' crano pa-
role di bocca propria dell' Arciduca, e cb' egli bavria confir-
mato cio per iscritto , se non gli fosse bastato a voce; e
soggiunse di più ch' egli bavria posto ancora per iscritto il
suo parère sopra questa risolutione presa da Sua Altezza in
materia dcl libro, e che jicr la sua parte bavria dicbiarato
liberaniente ad ogn' uno che Sua Altezza non baveva potuto
far meglio di quel ch' aveva fatto in non volere ne pur ve-
dere il libro, non che ricevcrlo , poicbè era contre la sua
religione, contro l'obbedienza dovuta al papa e professata
senipre da tutla la casa d'Austria con termini di tanto rispetlo
verso la Chiesa romana.
A questa risposta di Ricciardotto non si commosse ma
s'infiamô di rabbia l'ambassadore. Et uscendo quasi di se me-
desimo, corne frenetico, rispose impertinenze grandissime che
Iroppo lungo saria il raccontarle. Disse particolarmente che
l'Arciduca se faceva schiavo del papa, c che non usava quai
termini che doveva aspettar il suo re da Sua Altezza , e che
ben havrebbe potuto Sua Altezza ricever il libro e non leg-
gerlo, e che altri crano i termini e le creanze che s'usa vano
' tra i prcncipi grandi , altri gli scrupuli e suj)erstitioni de'
fraticelli papisti, e che non sarian mancati modi al suo re di
risentirsi di tanto disprezzo, con altri impertinenze ch' egli
aggiunse di questa sorte. Aile quali jierô rispose il présidente
( 215 )
con quei terraini risentiti che conveniva , ribattendo l'insolenza
deir arabassadore con dire, tra Taltre cose : « E che vi pensate
» con questi vostri libri? Vi fioccheranno adosse mille risposte,
» che faranno arabbiar il vostro l'e, e che lo faranno ravedere
» quanto meglio havria fatto a governar il suo regno come re
» che come dottore délia sua setta. » Il présidente in somma
si porto in modo che mostrè molto bene quant' egli fosse
zelante e del rispetto délia sua religione e dell' honor del suo
prencipe
Di Bruxelles , H 8 di agosto 1G09.
Di Vostra Signoria Illustrissima e Reverendissima
hurailissimo e devotissimo servitore,
GuiDO, Arcivescovo di Rhooi.
L'ambassadore d'Inghilterra è per modo arrabiato che non
ha mai più voluto andar ail' audienza, e l'Arciduca medesimo
me lo disse hieri.
N° II.
Illustrissimo e Reverendissimo Signore, padrone colendis-
simo,
Giunsi poi il venerdi sera délia settimana passata, per Dio
gratia, a salvamento in Anversa. Il sabbato mattina, che fù il
giorno del Assuntione, lasciai celebrar la messa solenne al
vescovo, per non impedirgli le sue funtioni ordinarie, et io me
ne andai alla chiesa de' padri gesuiti , e quivi dissi la mia
messa privata. Era piena di gente la detla chiesa, e v' eran
particolarmente molti catlolici d'Ollanda e dell' allre Provin-
cie Unité : ond' io, giudicando di potcr dar molto esempio e
raolt' edificatione col comunicar io medesimo quelli che si
( 216 )
trovavano quivi raddunati , per quest' effetto comminciai
queir attione, e la continuai finchè non vi resté persona
che non fosse di mia mano coraraunicata. Durô la santa co-
munione più d'un' hora e mezza. E perché fu cosa nova ne
più veduta da molli anni in qua in Anversa, ne intesa, si puô
dire, da quei cattolici forestieri, clie per tant' anni di guerra
cran vivuti sepolti fra le ténèbre de gli heretici , perciô rai fù
alFermato che il gusto spirituale e la veneratione verso il
nostro santo rito cattolieo fù straordinario in quelli che si
trovarono presenti a cosi fatta attenlione, e che vi furono a
parte. E veramcnte non potrei esprimer con parole li atti di
devotione che si vedevano in quei semplici e buoni cattolici
neir atto di ricever il santissimo sacramento, e nel fervor di
voler l'un prima dell' altro riceverlo di mia mano.
Il doppo desinare dell' istesso sabbato, io risolsi poi di
cantar il vespro che doveva precedere alla solenne messa
délia domenica seguente, ch' era il giorno délia processione
pur solenne che doveva farsi. Cantato il vespro con gran con-
corso, con molto maggiore cantai poi anche la messa, poichè,
com' ho detto, era cosa affato nuova et appena intesa, ch' un
nuntio apostolico célébrasse quella solennità, e conducesse
quella processione che da tanto popolo s'aspettava. Passé la
processione con quest' ordine. Precedevano tutte l'arti délia
città, che sono nummerosissirae, e doppo seguivano molti
inventioni di carri, di navi, di giganti e di molt' altre varie
forme di cose che soglion rappresentar diversi spettacoli
popolari in queste città di Paesi Bassi, et in particolare in
Anversa, come città più ricca e di maggiore splendore dell'
altre. Seguivano poi doppo varii ordini di religiosi , e doppo i
religiosi il clero, e doppo il clero io medesimo, portando una
croce in mano, solto un baldachino (ch' in tal giorno non si
suoi portar il santissimo sacramento), e doppo la mia persona
veniva portata un' imagine délia Madonna, ch' è protettrice
d'Anversa, et in honor délia quale si faceva la processione.
( 247 ) .
Queir imagine fù portata prima da i canonici, e poi dal ina-
gistrato, e poi da altri ordini di persone inferiori, di man in
mano. II giro fù di più d'un' hora di camino, e le strade e le
finestre erano piene di gran quantità di popolo. Il giorno era
nuvoloso. Pure sin' alla meta del giro non cadette la pioggia
che minacciava di cadere, ma dalla meta sin' al fine venue poi
in grandissima copia. Alcuni erano di parère ch'io mi fer-
massi e mi ricovrassi in qualchè casa : ma io , stimando che
gli heretici , i quali per curiosità di veder cose nuove eran'
concorsi in gran numéro , facilmente havrian mormorato, e
forse i cattolici stessi presa poca edifîeatione, risolsi di conti-
nuar la ceremonia, e di mostrarc che quello e maggiore
disaggio si sapeva tollerar facilmente in honor délie cose sacre.
Fini a questo modo la processione.
L'istezza mattina, prima ch' io andassi a cantar la messa so-
lenne nella chiesa maggiore, vennero molti cattolici in casa
del vescovo, per ricever da lui la confirmatione. E perché di
già essi sapevano ch'io era nella medesima casa alloggiato,
desideravano di haver la mia beneditione. Ond' io, valendomi
di cosi fatta opportunità, andai in una sala dov' essi erano
radunati in numéro di più di 150, et havendo prima fatto un
raggionamento publico in latino, con quelle essortationi che
mi parvero necessarie (il quai raggionamento fù interpretato
in fiamengo da un cattolico nipote del vescovo), diedi poi lor
la beneditione, che da molti fù ricevuta con lagrime e con
spirito si vivo di fede, ch'a me medesimo commossero un
affetto interno incredibile. Feci distribuir poi doppo a tutti
buon numéro di medaglie, di quelle perô che mi trovavo
apprcsso, non di quelle ch' aspettavo da lloma, poichè queste,
per diffetto de' corrieri e per mia disgratia, non giunsero se
no martedi prossimo passato , che fù il giorno del mio ritorno
in Brusselles. Son restato perô col vescovo d'Anversa d'inviar-
gliene quantità, perch' egli possa per diverse vie farle passar
in mano di quelli che son rimasti in grandissimo desiderio
d'haverle.
( 218 )
Spcro nella gratia del Signore clie questa mia attione pu-
blica d'Anversa non sarà stata di poco giovamcnto per man-
tener nella costanza della nostra santa fede i cattolici délie
Provincie Unité, e per far frutto ancora appresso gli heretici,
molli de' quali , vivendo hereticamente più per inganno che
per malattia , potrian forse aprir egli occhi e conoscer gli
fraudi in che stanno involti con le false opinioni ch' anno
della Chiesa romana e de' ministri e sacerdoti dipendenti
dal somme pontefice. Certa cosa è che quei cattolici che si
sono trovati in Anversa hanno ricevuto grandissima consola-
tione di veder présente il nuntio apostolico, et in quella forma
solenne in che io mi sono mostralo. Ciô m' è stato affîrmato
da molti. E perch'io havevo procura lo, col mezzo di varii reli-
giosi, che la mia venuta in Anversa giungesse a notitia de
predetti cattolici, e che fosse lor detto che, per ordine di Sua
Santità, io era venuto principalmente per consolation loro,
essi di ciô hanno ricevuto raaraviglioso contenlo, et hanno
ringraziato Dio che da Sua Beatitudine si tenga tanto conto
di loro, et tanto si compatisca aile loro calamilà.
Queste calamità, per quel ch' ho inteso hora in Anversa, par'
che sieno più tosto cresciute che sminuite doppo la conclusion
della tregua. Son seguiti dall' hora in qua alcuni esilii di
sacerdoti et alcuni editti, particolarmente in Frisa, più rigorosi
del solito. Pur tultora si spera che nella présente giunla de
gli slati generali sia per determinarsi qualchè cosa a beneficio
de' cattolici, e gli olTicii del re di Francia (com' ho scritto altre
volte) saranno giovevoli , s'efïicacemente saranno impiegati.
Il vescovo d'Anversa ha confirmato questi giorni, e va tut-
tora sempre confirmando buon numéro di cattolici. Mi disse
particolarmente il priore di San Domenico che, dalla tregua
conclusa in qua, erano entrati piùdi mille cattolici nella com-
pagnia del Rosario del suo convenlo. Ma in questo guadagno
che noi facciamo,con l'occasione del comertio libero corriamo
rischio ancora di qualche perdita.
( 219 )
In Anversa particolarmente son molti infetti, e di questi
molti vanno, i giorni difesta, aile prcdiche heretiche di Lilo,
ch'è un gran forte del inimico, due leghe appresso la mede-
sima città. Ne sin hora s'è potuto por' niano al rimedio,
essendo neeessario di veder prima l'essito délia ratificatione
di Spagna. II vescovo perô è vigilantissirao, et io qui non
mancherô d'accender tuttora maggiorniente il zelo di questi
j)rencipi, sempre acceso pcr se medesimo nel servitio di Dio.
E pcr fine a Vostra Signoria Illustrissima bacio humilissi-
raamcnte le mani.
Di Brusselles, li 22 d'agosto 1609.
Di Vostra Signoria Illustrissima e Reverendissima
hurailissimo e devotissimo servitore,
GuiDO , Arcivescovo di Rhodi.
N" m.
lUustrissimo e Reverendissimo Signore mio, padrone colen-
dissimo,
Doppo haver scritto a Vostra Signoria Illustrissima le raie
ultime de' gli 8 di questo mese, me ne venni da Gante à
Bruges. Mi son fermato in questa città parimente due giorni,
che sono stati spesi da me in quel medesimi ofîicii ch'io havea
fatti prima in Gante. Ho trovato questa città di Bruges pro-
vista d'assai buono e zelante vescovo , e i capitoli dclla cathé-
drale e di due altre chiese collegiate ripieni di persone molto
pie e di buona vita , per Tinformatione c'ho procurato d'haver
da più parti. Hanno patito grandemente anco i luoghi sacri di
questa città pcr cagion di moti passali , e molto più in questi
ultimi anni per la gucrra che s'è fatta sotto Ostende, ch'è
terra lontana di qui non più di quattro leghe, in modo taie
( 220 )
che nel conlado particolarmente era molto intermcsso e raf-
freddato il culto divino, che hora, col bcneficio délia trcgiia e
con la diligenza dell' prelato, si piiô sperar che sia ogni di più
per restituirsi. A questa cura et a qiiesto pensiero di rimetter
in pie, di quanto mcglio sia possibile, le cose della religion
nostra nell' contorno di questa ciltà, ho essortato eiïicacemente
il vescovo, con usar ogni maggior vigilanza e col proveder di
buoni e sulïicienti curati i villaggi e le parocchie vicine al
paese heretico. M'ha risposto il vescovo esser questo una délie
principali mire cli' egli habbia, e di trovar in ciô dilTicultà
grande per la penuria che patisce il paese di persone atte
alla cura délie anime, essendo ridotti a pocchissimo nuni-
raero i soggeti habili a tal peso, e non potendo esser solle-
vata la detta penuria con huomini che si chiamino di fuori di
questa provincia propria di Fiandra, per rispetto della lingua
diversa. Mi ha nondimeno soggiunto esso vescovo d'essersi
adoprato e di dover adoprarsi in ciô con ogni sollecitudine e
mezzo possibile.
Doppo haver visitati i religiosi secolari, ho visitate ancora le
chiese e conventi de' regolari, che son qui, si puô dir, d'ogni
religione, et in ogni luogho ho dato quei ricordi e fatti gli
olïicii che raison parsi a proposito, havendo sopra ogni cosa
inculcato il punto della clausura. Ho trovato qui fondato
particolarmente e con molto frutto un buon colleggio di padri
gesuiti.
Nel resto è questa citta di gran lunga meglio affetta, che
non è la citta di Gante, verso la religion cattolica, non havend'
io potuto penetrar che neanchè la tentemente vi sia, si puô dir,
alcun heretico : di che mi son rallegrato con i due magistrati
che sono in questa città, separati l'uno dall' altro, i quali
constituiscono due de' quattro membri della provincia di
Fiandra. A questo doppio magistrato ho fatto, separatamente
a ciascuno, un elTicace raggionamento , essortandoli non solo a
non consentir che si machi in loro quella purità della vera
( 221 )
religione ch'hanno conservata sin qui, ma a procurar ancora
d'arapliarla nel lor dislretto con ogni via possibile. lo da loro
sono stato ricevuto et ascoltato con segni di grandissima rive-
renza et ossequio verso la sede apostolica, et oltre a ciô non
lian' lasciato di presentarmi di vino, secondo il costume.
Domattina, ch' è lunedi, alli 12, partirô verso Ostende, per
veder quella piazza, e per passar poi ad altri luoghi di questa
provincia. In tanto ho voluto scriver hoggi, ch' è domenica,
questa lettera per vantaggiar tempo , acciocchè possa giungcr
sabbato prossimo , prima che parla il corriero dltalia, a Brus-
selles, donde allontanandomi io tuttavia più, non sô s'io potrô
far che Vostra Signoria Illustrissima non resti, da qui inanzi,
mentre io starô fuori, qualch' ordinario senza mie lettere. E le
bacio humilissimamente le mani.
Di Bruges, li H d'ottobre 1609.
Di Vostra Signoria Illustrissima e Reverendissima
humilissimo e devotissimo servitore ,
Glido, Arcivescovo di Rhodi.
N° IV.
lUustrissimo e Reverendissimo Signo*'c, padrone raio colen-
dissimo,
Richiede una lunga lettera a parte la relatione ch'io debbo
dar a Vostra Signoria Illustrissima del seminario inglese di
San Omero. Venni in questa città con grandissimo desiderio
di visitar esso seminario e di far tutto quello ch'avessi potuto
in suo servitio. Ho speso perciô un giorno inticro fra questi
alunni, e l'ho compartito nel modo che Vostra Signoria Illus-
trissima inlenderà. Andai la mattina per tempo al seminario,
( 222 )
e doppo esservi stato ricevulo con la débita forma , célébrai
messa; celebrata la quale ministrai il santissimo sacramento
a tutta la gioventù del seminario cou grandissimo gusto e
conforto spirituale di tutti. Doppo la messa fù fatta una pro-
cessione dentro al circuito délia casa, e precedendo a me
tutti gli alunni , io seguitava poi con un piviale che fù già del
re Henrico ottavo, e che si conserva qui per una ricca e rara
memoria. Portai nella processione un' imagine délia Madonna
fatta del legno dell' arbore dove essa apparse miracolosamente
nel bosco di SIchem ; e finita la processione, mi furono rappre-
sentate varie attioni sacre da detti alunni con segni e di gran
ingegno e di gran pietà. Con questo terminô il tempo délia
mattina. Tornai poi subito doppo desinar a riveder più dis-
tintamenle la casa del seminario. Fui trattenuto per un pezzo
da gli alunni con musica dinstrumenti e di voci , nella quai
virtù essi, per maggior condimento dclle cose sacre, pongono
molto studio e riescon ancora con non minor profitto. Quindi
entrai per tutte le stanze e per tutt' i luoghi délia casa, et in
un luogbo particolarmente, più spatioso de gli altri, mi fù
mostrato, quasi come in ischiera et in ordinanza, tutta la gio-
ventù in varie file su i loro scabelli dove sogliono studiare,
et io accostandorai bor' ail' uno, bor' ail' altro, andavo frapo-
nendo quei ragionamenti cbe potessero andargli sempre più
accendendo a gli studii et alla pictà christiana. Finalmente
havendo io giudicato cbe il fermarmi a cena con essi , e cbe
'I seder tra essi medcsimi , non potesse senon edificargli gran-
demente, e far baver loro carissimo quest' atto d'Iuirailtà in
cbi rapresentava loro dall' altra parte si vcnerabile maestà
com' è quella del capo délia Chiesa cattolica, restai a far carità
con essi. Ne potrei ben csprimere quanta fosse la consolalione
et il giubilo cbe di quest' attione essi presero. Nel tempo della
cena vidi pruove mirabili del loro ingegno e de gli essercilii
eh' usano nelle lettere. Fù dato a quattro di loro un argo-
mento di matcria sacra, ail' improvisa, dal rettore del semi-
( 225 )
nario. Disputavano due per parte, posti gli uni contro gli altri
in due sili eminenti del refettorio. Sopra questo argomento
essi fecero varie dispute, facendo prima le proposte in lingua
greca, e poi in lingua latina, e con tanta franchezza nell' una
e neir altra ch'io ne restai veramente attonito. Queste dispute
si fanno matina e sera, et oltre a gli altri essercitii s'essercita
in questo tempo ancora in ciascuno di loro, quando gli tocca,
mirabilmente lingegno. Doppo la cena fù trattenuta con nuova
musica di cose sacre con infinito raio gusto. Ero già per par-
tire. Ma prima ch'io partissi , essèndo radunata lutta la gio-
venlù nella medesima stanza dove fù fatta la musica, feci loro
un ragionamento, toccando tutti quei punti che mi parvero
più oportuni, cosi per accendergli aile lettere come per in-
fiamargli sempre più allô spirito délie cose sacre et al zelo
délia religione, per la quale hanno abbandonata la patria,
sono uscitidal seno di padri loro, e si sono privati di tutte le
loro sostanze e d'ogni temporale delitia. Mostrai in fine che
lutto quello ch'io haveva fatto, e lofferta affettuosissima che
facevo loro dell' opéra mia , tutto era seguito d'ordine espresso
di Nostro Signore, per il sommo zelo, che vive nel petto di Sua
Santità , délie cose ch'appartengono alla conservatione et aug-
mento délia religione in Inghilterra, e del ben publico e
privato di tutti i cattolici di quel regno. Con questo ragiona-
mento lasciai gli alunni del seminario.
È governato questo seminario da padri gesuiti, e con tant'
ordine e tanta prudenza che non si puô desiderar di van-
taggio. Rettor del medesimo seminario è un padre di questi
paesi, il quale regge questa gioventù con grandissima carità,
destrezza e giuditio, in modo che è tenuto da loro non tanto
persuperiore quanto per padre. Gli alunni passano il numéro
di cento, e co' i padri délia compagnia e con altre persone
domestiche del seminario arriva il numéro di tutte le persone
a 170. Questa gioventù si puô dir il fior de' cattolici d'Ingil-
lerra, e vi si veggono molti nobili, et alcuni ancora fîglii di
( 224 )
heretici, o al meno di persone politiche , le quale nel exteriore
seguono il tempo e vivano in quella fede che fa loro adorar
l'intéresse. Un giovinetto ho veduto fra gli altri, fîglio del
interprète délie lingue appresso il re. 11 padre, se bene este-
riorraente si mostra heretico , ha caro pero che 'I figlio stia in
questo seminario, e sotto nome délia madré, la quai' è catto-
lica , soministra al figlio largaraente quanto gli fa di bisogno.
Molto più poi fanno questo i padri che sono veri cattolici.
Con questi aiuti che vengono d'Ynghilterra si sostenta princi-
palmente il seminario, che d'altra maniera con gli assigna-
menti del re e dell' Arciduca si troverebbe in mal termine. Al
seminario si mostra molto inclinata e favorevole questa città.
Ponevasi pero certa difficultà dal présente magistrale sopra il
possesso di certe case acquistate dal seminario, e eh' orasi van
convertendo in uso sacro d'un oratorio : ma io , con la mia
venuta, ho supcrata la difficultà, e cessera da qui inanzi ogn'
impedimento nell' opéra. Finirô questa lettera col' raccoman-
dar alla protettione di V. S. 111™% con tutto il cuore e con tutto
lo spirito, il seminario predetto , dentro al quale, tutt' il tempo
che mi son trattenuto, m'è parso in vero di vedermi in un
luogo di paradiso fra gli angeli, e con tanta edificatione e
compuntione mia propria, che non l'ho provata mai taie ne
la proverô a raiei giorni, poichè mi pareva di veder nascer e
crescer tante plante nella Chiesa cattolica, per esser destinate
H persecutioni e supplicii e martirii , quanti erano gli alunni
ch'io havevo inanzi a gli occhi. E per fine a Vostra Signoria
Illustrissima bacio humillissimamente le mani.
Di Sant'Omero, li 18 di ottobre 1609.
Di Vostra Signoria Illustrissima e Reverendissima
humilissimo e dcvotissimo servitore,
GuiDO, AncivEscovo di Rhodi.
( 225 )
N" V.
Illustrissimo e Rcverendissinio Signore mio , padrone colen-
dissimo ,
Conforme a quelle chc accennai a Vostra Signoria Illustris-
sima con le mie ultime, passai da Sant' Omero a Ipri, città délia
Fiandra, non mollo grande di circuito, ma bene babitata. Mi
vi fermai un giorno solo, e fui alloggiato dal vescovo, prelato
di raolta bontà c sufficienza, e che non manca di sollecitudine
in quel che tocca la cura del suo gregge. Da gli altri ecclesias-
tici e dal magistrato hebbi le dimoslrazioni che havevo rice-
vute ne' gli altri luoghi da me vcduti prima , e con tutti feci
gli officii ch'istimai espedienli. Fù tenuta già la città di Ipri
alcuni anni da gli eretici, ma hora è ridotta a buonissimo
termine, non ve ne restando, a quai che ho potuto raccogliere,
se non alcuni pocchi occulti. A ridurre quella città a tal segno
hanno giovato mollo gli essercilii spirituali e le diligenze de
padri gesuili, che v'hanno un colleggio, e si spera che quel
popolo sia per conOrraarsi tuttavia più nella pietà chrisliana
col buono esempio ancora e con le prediche de' padri capu-
eini introdotti nuovamente nella medesima città per opéra
del vescovo , col quale non lasciai di far oflicio sopra le per-
sone sospette d'heresia in Neuporlo e sopra un" altra pcrsona
del magisti'ato di Doncherchen grandemente sospetta ancor
essa. Da Ipri vuolsi il mio camino verso Coltrai, terra grossa
pur délia Fiandra, nel quai luogo visitai un capitolo che v'è
d'una chiesa collegiala. Da questo luogo giunsi a Tornai, dove
mi parve bene di visitar nuovamente la casa del noviziato
che v'hanno i padri gesuiti, délia quai casa diedi pieno ragua-
glio a Vostra Signoria Illustrissima nel viagio ch'io feci l'estate
passata, corne ancora dello stato délia chiesa di Tornai.
Da Tornai essendo io entrato nella provincin doH' Hannonia,
2""^ SÉRIE, TOME XXXVIII. Va
( 226 )
son venuto qui a Bins , terra distante una Icgha da Marimontc,
dove tuttavia si tratengano questi prencipi, godendo i loro
diporti della caccia cou una bellissima stagione che corre al
présente. E bacio a Vostra Signoria lllustrissima per fine hu-
millissimamente le raani.
Di Bins, li 29 ottobre 1609.
Di Vostra Signoria lllustrissima e Reverendissinia
humilissimo e devotissimo servitore,
GuiDO, Akcivescovo di Rhodi.
Deux lettres inédites de Jacques deMolay ; par M. le baron
Kervyn de Leltenhove, membre de l'Académie,
Jacques de Molay, qui fut le dernier représentant des
ordres religieux militaires dans toute leur puissance et qui
périt immolé parle monarque que glorifiaient les légistes,
Jacques de Molay qui avait bravé le fer des infidèles et qui
monta dans la capitale d'un royaume chrétien sur le
bûcher où du moins des mains fidèles recueillirent ses
cendres, restera, malgré tous les débats des historiens
sur un procès fameux, l'une des plus fières et des plus
grandes figures du moyen âge.
Je rappelais il y a quelques années les circonstances qui
concoururent à sa perte et je signalais en même temps
l'existence d'un mémoire où s'épanchait encore, la veille
du jour où on allait l'accuser de parjure, son pieux enthou-
siasme. La classe me permettra de placer de nouveau ces
lignes sous ses yeux:
« Clément V, hésitant sans cesse entre sa conscience
( 227 )
el ses lorreiirs , crut retrouver la dignité et la liberté de
la parole du chef de rÉgiise en portant les yeux vers le
berceau du christianisme et en appelant dès son intronisa-
tion, selon l'usage de ses prédécesseurs, les princes et les
barons chrétiens à délivrer Jérusalem. Des lettres émou-
vantes dictées par les évêques et les abbés de Terre Sainte,
où ils dépeignaient éloquemment les périls dont ils étaient
entourés, vinrent confirmer l'appel du pape, et Philippe
le Bel , croyant qu'une croisade le réhabiliterait de ses
sacrilèges attentats contre Boniface YIII , feignit de s'y
associer avec un grand enthousiasme.
« Une voix plus sincère répondit de l'Orient à cet appel.
Ce fut celle du grand maître de l'ordre du Temple, Jacques
de Molay , et le mémoire qu'il adressa au pape existe
encore aux Archives impériales de Paris. L'absence de noms
et de dates l'a fait passer inaperçu jusqu'à ce moment,
mais rien n'en peut atténuer la valeur, car c'est le seul
témoignage émané de Jacques de Molay où, avant de monter
sur le bûcher, il ait pu s'adresser à la postérité :
« Les périls de la terre sainte, dit Jacques de Molay,
réclament impérieusement une nouvelle croisade. Les
chrétiens n'y possèdent plus de forteresses où ils puissent
trouver un asile, et il faut désormais réunir des forces
assez considérables pour attaquer en rase campagne les
Sarrasins qui ne comptent pas moins de douze à quinze
mille cavaliers et de quarante à cinquante mille sergents
et archers.
» Il faut que la croisade réunisse les rois de France,
d'Angleterre, d'Allemagne, de Sicile, d'Aragon, d'Espagne
et tous les autres princes chrétiens.
» Plus de petits navires, mais de grands vaisseaux qui
puissent porter les hommes , les armes et les chevaux.
( 228 )
» Souvenez-vous de ce que disait autrefois le sage et
puissant Bondocdar, Soudan de Babylone : qu'il s'oppose-
rait avec son armée à trente mille Tarlares, et qu'il livre-
rait également bataille à quinze mille chevaliers francs,
mais que s'ils se présentaient en plus grand nombre, il
leur abandonnerait le terrain. Nous avons entendu dire la
même chose de ceux qui accompagnèrent à Damiette le
roi saint Louis. Il est donc évident qu'il faut réunir
douze à quinze mille chevaliers et cinq mille sergents à
pied , et nous pouvons espérer que tant de combattants ,
désormais résolus à suivre de bons conseils (ceci était une
allusion à la témérité de Robert d'Artois qui avait repoussé,
à la journée de la xMassoure, les conseils des Templiers),
parviendront à reconquérir toute la terre sainte. Il sera
utile d'y joindre deux mille arbalétriers [balistarii).
» C'est dans l'île de Chypre qu'il faudra descendre pour
s'organiser, mais il faudra cacher avec soin aux Sarrasins
le lieu où nous débarquerons en terre sainte. Cependant,
je pourrai me rendre près du roi de France et le lui dire
secrètement.
» Envoyez dès cet hiver des vaisseaux pour défendre
l'île de Chypre. Ayez soin den fréter d'autres à Gènes et à
Venise, et aûn d'éviter toute discussion qui pourrait amener
de la jalousie entre ces villes et les croisés, ne choisissez le
chef de la Hotte, ni dans le clergé, ni chez les Templiers,
ni chez les Hospitaliers. C'est en Italie qu'il faudra cher-
cher votre amiral , par exemple Roger de Loria.
j) De plus, que le pape porte les peines les plus sévères
contre ces marchands italiens qui, n'écoutant que leur
avarice, envoient constamment aux infidèles tout ce dont
ils ont besoin.
» Je prie Dieu tout-puissant, disait en terminant Jac-
( 229 )
ques de Molay, qu'il vous donne la prudence pour ordon-
ner ce qui peut être le plus utile , et la puissance qui est
nécessaire pour l'accomplir, alin que notre siècle puisse se
glorifier de la délivrance de ces lieux saints où Notre-
Seigneur Jésus-Christ a daigné vivre et mourir pour le
salut du genre humain. »
« Tel fut le langage d'un homme que l'on accusera plus
tard d'être le complice des infidèles, et je ne sais, en reli-
sant ce document, si cette proposition de révéler au roi
seul le lieu du débarquement des croisés, ne devint pas le
prétexte de la perfide invitation adressée au grand maître
de l'ordre du Temple pour qu'il se rendît à Poitiers (1). ».
Plusieurs années se sont écoulées depuis que j'appelais
l'attention de l'Académie sur ce document. Il me parait
mériter mieux qu'une froide analyse, et c'est ce qui m'en-
gage aujourd'hui à le publier tout entier :
Hoc est c'onsifiuni magistri Tenipli , super negolio Terrœ
Saiietee.
Pater sancle, quseritis quid mihi videlur melius faciendiim,
sive grande passagium, sive parvuni. Ad quod respondeo
quod parvum passagium, secundum stalum in qiio terra
consistit ad prfesens, non esset proficuum, sed danipnosum
et vituperosuin Christianitali, et esset perditio illorum om-
nium, qui transirent in parvo passagio, quod Christian! hodie
non tenent in terra illa, — hoc est in regiio Jerosolymitano ,
comitatu Tripolilano et principatu Antiochcno, — civitntem,
castrum, vel forlilitiam aliquam in qua se recolligere posseut
vel guaronlire si opus esset; et si passagium reperiretur in
aliquo loco dictarum parlium, nec esset ita forte quod posset
praeliari cum exercitu Soldani, lotaliter pcrdcretur.
(I) Bullelins df l'Académie, 2<' série, t. XII.
( 250 }
Item, sialiquis vellet dicere quod parvum passagium esset
utile ad eundum in Armeniam ad custodiam illiiis terrœ et
pro faciendo giierram Saracenis per parles illas: respondeo
quod hoc esset periculosum et pcrditio omnium qui reperi-
rentur ibidem, si dictum passagium in sociclate Armenoi'uni
non esset tam forte quod posset prœliari contra exereitum de
Seeam,hoc est de Jérusalem et omnibus finibus ejus, qui
potest esse numéro duodeeim vel qiiindecim millia equituni
aut circa, et de quadraginta vel quinquaginta millia servien-
tium Archaiorum; et posito quod possint resistere super-
dictis, quod non credo pluribus rationibus quœ possent dici,
restât adhuc exercitus Soldani Babilonise, qui facile potest
illuc venire quandocumque placeret.
Hem, si parvum passagium irel in Armeniam , licet Saraceni
non facerent sibi dampnum vel guerrain, tamen terra a se
ipsa ita infirma est et maia quod si quatuor millia equituni
transirent illuc, quantum quiquc fortes et sani, mirabile esset
si in fuie anni reperirentur quingenti.
llem, est aliud periculum quod si Franci se reperirent in
bello cum equitibus vel mililiiius Arnieniœ,ex quibus pauci
reperiuntur qui non sint semper parati ad i'ugani dum vident
inimicosad pugnam contra se venire, quod non relinquerenî
eos, et licec esset maxima confusio j)robis viris se in tali socie-
tate sentire, dum essent in exercitio armorum, quod illi qui
novcrunt et noscunt eos, libenter évitant in talibus locis esse
cum cis.
Ilem, si Franci essent in Armcnia et indigerent refugio,
Armeni non receptarent eos in aliquo caslro vel fortilitia sua,
quod semper dubilaveriint et dubilant ne Franci auferant eis
terram, et hoc divinant Armeui continue, scilicet ({uod Franci
debent eis regnum auferre.
Item, in marchia Ai-meniœ suai tôt génies de Bcrria, Tur-
chimani, Cordoivirri, Beduini, quod cl si ali.T génies Sarace-
norum non intromilterent se, furtitcr se defenderent et tene-
( 251 )
it-nt marchiam illarn cum illis qui esscnt in Armenia , quod
inontana sunt magna et passus fortissinii.
Quare prœdictis i-ationibus et aliis luultis quœ possent dici,
nullo modo consulo par vu m passagium ficri debere, yrao con-
tradico quantum possum ac reproho omnino pro evitando
vituperio et dampno Christianitatis.
In nomine Domini, amen.
De magno passagio generali faciendo, omnimo concordo
pro destructione inimicorum fidei christianœ et pro restaura
tione Terrœ Sanetœ Christi sanguine respersse; et si placeret
Sanctitati Vestrse et dominis cardinalibus quod, ex nune,
quam citiùs possetis bono modo, de hujusmodi passagio trac-
taretis cum dominis regibus Franciœ, Anglise, Alamaniœ,
Siciliae, Aragonia», Yspaniœ ac aliis terrarum dominis, majo-
ribus et minoribus, quorum corda Deus illuminât, boc nego-
tium tam laudabile valde bonum et utile crederem.
Item, quod ordinaretur ex nune Januœ, Venetiis et in aliis
terris niaritimis quod fièrent naves et alia magna vasa ad
portandum equos et victualia, et, quam citius fieri posset, in-
ciperet quilibet providere sibi de rébus neccssariis ad dictuui
passagium.
Item, non laudo galleas in facto passagii, sed naves et alia
magna vasa, et boc ideo quod naves sunt magis proficua; et
laudabiles quam gallese, nara una navis portabit plus quam
quatuor galleœ,et una gallea conslabit plus quam très naves;
et non oportcbit pneliari in maris passagio quod inimici non
possent in mari resisterc cum habeant modicum armaraenti.
Item, si placet audirc consilium de quantitate gentium, res-
pondeo quod Bothendar olim soldanus Babiloniœ, qui fuit
potenlior et sapientior in factis armorum quam unquam fuis-
set aliquis in sccta sua, raagis faraosus, multotiens dixit, quod
cum cxercitu suo obviaret triginta millibus Tartarorum, sed si
plures venirent, relinqueret eis campum.
Item , dixit quod si in terra sua venirent quindecim millia
( 232 )
equitum Francoruni, obviarct eis et preeliaretur cuni eis, scd
si plures venirent, recederet et dimitteret eis carapum.
Propter quod, reducens ad meraoriam dicta ipsius et aiia
plurinia quœ audivi similiter, audiendo ab eis qui fuerunt in
Damiata cum Saneto Ludovico, de quantitate militum et equi-
tum ac pedilum, quam habuit secum, audcrem et audeo
dicere, nec nieHus audirera, quam si générale passagium
habet a duodecim usque ad quindecim milh'a equitum arma-
torum et quinque milHa pcditum, cum auxilio Dei, cujus ser-
vitio se disponent, spero in Domino quod tôt gentes, volentes
bono consilio ercdere, totam Terram Sanctam acquirent et
recuperabunt omnino;sed de prsedictis equitibus consulo
quodessent duo millia balistariorum.
De loco ubi passagium recoUigatur , nichil dico, quod hoc
erit in voluntate dorainorum regum; sed de applicando portu
in partibus illis, modis omnibus consulo pro meliori quod
primo applicctur in regno Cipri, et ibi refrigeret et recreet se
passagium totum.
Sed discedendo a regno Cipri et cundo versus Terram Sanc-
tam, nullus débet pallam consulere de loco seu patria in qiia
sit portus arripiendus vel passagium descendere debeat, quod
ex hoc oriretur prœvisio Sarracenis; sed si placet vobis et
domino régi Franciœ, dicam secreto tôt bonas et utiles cau-
sas quod credo vere quod acquiescetis consilio meo quod
clare monstrabo quae sunt loca bona vel non bona ad hoc ita
quod vestra discretio sancta bene cognoscct.
Item, Pater Sancte ad hfec, ut nullus possit dicere, quod
non consulam libentcr lieri bona , si vobis placet mittere in
regnum Cipri aliquem succursum equitum vel pcditum, po-
testis facere; et hoc esset consolatio in regno Cipri pluribus
rationibus quœ possint dici.
Item, consulo et laudo pro meliori, modis omnibus, quod
ordinetis, quam citius potestis, decem galleas, et appai'cntur
bac hycme ita quod in primo vere possint transire ad defen-
( 255 )
sionem rcgni Cipri et ad custodiendum mare, ne per malos
Christianos portentur vetita Saracenis, et quod dictae galleae
teneanlur continue usque ad passagium générale; et de pecii-
nia percipienda prœdictis galleis tenendis, si placebit, secun-
dum quod raihi videbitur, secreto consulam. Taraen consilium
istud non seribo quod non est ponendum in scriptis; sed spero
in Domino quod taliter lucrabuntur diclœ gallese, quod satis
facile polerunl teneri.
Et consulo quod ponalur in diclis galleis talis capitaneus
qui non dubilet pcrdere temporalia bona per potentiam civi-
tatum maritimarum.
Credo quod Rogeronus, filius quondam doraini Rogcrii de
Loria, esset bonus capilaneus dictarum gallearura , si vobis
placeret.
Non consulo quod ponatis homincm rcligiosum, praecipue
Templarium vel Hospitalarium, quod si dictae galleœ dampni-
ficarent Januenses vel Venetos, ipsi recurrerent ad naves vel
bona eorum , et sic religiones possint incurrere magnum
darapnum.
Ileni, consulo, Pater Sancte, pro bono et bonore vestro et
toliusChristianitatis quod placeret vobis mandare Januensibus,
Venetis et Pisanis et aliis portum babentibus supra mare,
et expresse praecipere quod non portent vel mittant bona
aliqua Saracenis, quod Saraceni nimis dilantur ex boc; nam,
secundum quod audivi domibus quœ contrabuntur cum eis,
sive dando, sive recipiendo, tertiara partem largo modo reci-
piunt a Cbristianis pro dativo seu tbclonco, ita quod de tribus
navibus sive de ono-e Irium navium bene recipiunt seu tol-
lunt unam; et multa dampna receperunt ex hoc Cbristiani
propter lanceas et alia arma quae mali Cbristiani déferont et
portaverunt eis.
Unde credo quod esset bonum si ponetis ad boefortissimam
probibitionem et strictam sententiam et quod ita facile non
absolverentur a dicta sententia in corum reversione, sicut
( 25 i- ;
aliquando fieri consuevit ; naiii quoque deferunt eis galleas ita
paratas quod nichil restât nisi coniponere et clavare ipsas.
Unde super hoc faciet Vcstra Sanclitas quod videbit esse
bonum.
Noscat igitur Vestra Sanctitas, Pater Sancte, quod vobis
melius et clarius ore proprio exponcmus prœdicta quam per
aliqua scripta. Rogo itaque Deuni omnipotentem ut vobis
donet gratiam ordinandi super hiis quod fuerit melius et
potentiam recuperandi terapore vestro loca sancta in quibus
Dorainus Noster Jbesus-Christus nasci et mori dignatus est pro
generis humani salute.
Plus récemment j'ai retrouvé à Londres au Record-
Office une lettre adressée au roi d'Angleterre, qu'il faut
aussi attribuer à Jacques de Molay. Elle paraît avoir été
écrite dans les mêmes circonstances lorsque le grand
maître de l'ordre du Temple venait de quitter TOrient et
était déjà arrivé en Provence :
Serenissimo ac excellentissimo et potentissirao omni vene-
ratione colendo domino duci Yberniae et domino Acqui-
taniac, frater Jacobus eadem gratia pauperis militiœ Templi....
post commendationem sui ipsius, prosperos ad regia vota
successus et paratam ad mandata regia potentiam et de pros-
peritate mentis et corporis congaudere , quod de regia raa-
jestate audire plenius desideramus.
Proplernimiamdomus nostrœpaupertalem nos venire opor-
tuit ad bas partes ut possemus aliquid remedium adhibere.
Unde nos ad partes Provincia? venieiUes. cum proouratorc
Provincise et aliis probis viris domiis nostrfe deliberavimus
et tractatum habuimus Ordinatum i?l etiam et provisum
ut noslrum capitulum générale debereuius celebrare in quo
capilulo pro religioso viro fratre Guydone de Fortescue
mittimus ut debeat intéresse, de cujus probitale et prudentia
(25S)
couiidiraus in iiobis necessitatibus oportunum et salubre
consilium.
[Religioncm]nostram,bona nostra et domos nostras cum fra-
tribiis regali proteclioni propensius commendamus nobis
devoiis vestris ut sumus, fuimus et esse sempei* volumus toto
tempore vitœ nostrœ.
Vestra Serenitas.... ubique terraruni regalibus parère bene-
placitis.
Scriptum... (i).
Ici ce n'est plus l'orgueil proverbial des Templiers qui
s'étale : ce sont des plaintes qui s'exhalent sur leurs souf-
frances et leurs besoins. Il faut y chercher un remède, et
l'on invoque la protection du roi d'Angleterre qui fut aussi
l'un des défenseurs des lieux saints.
Ces tristes préoccupations, ce pressant appel à un appui
qui partout allait bientôt manquer à Tordre du Temple,
semblent avoir quelque chose de prophétique; et ce n'est
pas sans quelque émotion que je reconnus au milieu des
lettres royales de la chancellerie anglaise ce fragment
mutilé et presque effacé, mais tracé par une main que la
poésie a déjà vengée et que l'histoire réhabilitera à son
tour.
(I) Chancer^, Eoijal Lelters,ôo01.
( 256 )
?iotice sur l'origine des magistrats communaux et sur
rorganisaiion de la Marke dans nos contrées au
moyen âge; par M. Léon Vanderkindere, professeur à
rUniversité de Bruxelles.
La première question que l'on soulève d'ordinaire, lors-
qu'on étudie l'origine de nos communes au moyen âge,
est celle de savoir si elles doivent leur constitution à l'in-
surrection ou si leur développement a été tout pacifique.
En réalité ce n'est là qu'un problème secondaire, qui con-
cerne la forme et non le fond, le dehors et non le dedans
des choses. Les conditions en effet variaient d'une ville à
l'autre, et le progrès que celle-ci réalisait sans peine, une
autre n'y parvenait que par l'émeute et le carnage; mais
ici et là, le but à atteindre était le même. Ce qui diffère
donc, c'est le degré de résistance que les vœux des bour-
geois rencontraient de la part de ceux qui se trouvaient
intéressés à la conservation de l'ordre existant ; or c'est là
un fait tout à fait accidentel, purement local, et qui n'al-
tère en rien ni la tendance générale dont les esprits étaient
animés, ni surtout les éléments sur lesquels la commune
se constituait et qui étaient le fondement nécessaire de
son existence. Les habitants de nos villes du X% du XI*"
siècle n'étaient pas de simples unités qu'aucun lien ne
rattachait entre elles, ils avaient une organisation, quelle
qu'elle fût, et si leurs efforts tendent à la conserver en la
développant, ou bien à la détruire pour la remplacer par
des combinaisons nouvelles, peu importe : c'est sur une
( 237 )
base donnée qu'ils bâtissent, et cette base nous devons
chercher à la connaître. Il y a donc une distinction capi-
tale à établir entre l'histoire externe de la commune, qui
se laisse raconter et son histoire interne, qui se laisse
construire.
Pour bien comprendre cette dernière, rien n'est plus
important que d'avoir des notions précises sur le carac-
tère des principaux fonctionnaires communaux; il est rare
en effet que nos documents nous montrent la commune
elle-même dans son activité régulière et presque incon-
sciente; les magistrats au contraire sont l'expression directe
de la vie sociale, dont ils reflètent en eux tous les aspects
et dont ils personnifient les droits et les devoirs, et les
transformations qu'ils ont subies ont laissé dans nos
annales des traces parfois obscures, mais toujours plus ou
moins reconnaissables.
La théorie des magistratures communales est donc le
point de départ d'une histoire de la commune elle-même.
Or, à quels résultats cette étude a-t-elle conduit jusqu'ici?
Trois systèmes en Belgique ont trouvé des défenseurs :
1° Celui qui cherche dans nos communes les souvenirs
d'une ancienne organisation romaine et qui fait de nos
magistrats les descendants des décurions et du dcfemor
civitatis.
2° Celui qui donne la rjUde pour base à la commune et
transforme les fonctionnaires de la gilde en fonctionnaires
publics.
o" Celui qui rattache la commune aux institutions ger-
maniques et notamment assimile les échevins aux scabini
carolingiens.
Quelle est la valeur de ces trois systèmes? Le premier
( -2Ô8 )
ne comple plus guère. Un savant dont j'honore les tra-
vaux, M. Wauters, dit encore, il est vrai, dans son Mémoire
sur Jean P" (p. 29o) , que « les échevins ont hérité des
attributions de Vancienne curie romaine et des tribunaux
» échevinaux des comtés francs (1). » M. Gheldolf, lui
aussi, corrigeant nialencontreusenient Warnkônig, avance
(t. IV, p. 148) que les conseillers ou jurés de Bruges sont
les successeurs des decuriones et leur bourgmestre celui
du defensor civitalis. Mais c'est là de la fantaisie pure;
rien ne nous autorise à admettre que Bruges ait existé
comme ville sous les Romains, moins encore que l'orga-
sation romaine s'y soit maintenue jusqu'au moyen âge.
Les decuriones en elîet étaient essentiellement des fonc-
tionnaires revêtus d'une autorité publique,ce que n'étaient
à l'origine ni les conseillers, ni le bourgmestre, comme je
le montrerai plus tard.
Au surplus la thèse de l'origine romaine des magistrats
communaux, défendue naguère par Savigny, Eichhorn et
leurs disciples, a été si complètement réfutée en Alle-
magne qu'elle est devenue insoutenable; on a prouvé que
les communes lombardes elles-mêmes ne sont point éta-
blies sur un principe romain, « Dièse Ansicht, dit Gierke,
das deutsche Genossenschaftsrecht, 1,250, ist vôllig besei-
tigt. » {Voir aussi Hegel, Italien. Slàdte, II, 591 et suiv.;
von Marner, Geschichte der Stàdteverfassung , I, 156 et
suiv.). Il n'y a donc pas lieu de s'arrêter à cette opinion.
J'en dirai autant de celle qui rapporte à la gilde toute
notre organisation municipale. C'est là cependant une
(1) Nous verrons plus loin qu'il n'y a jamais eu de tribunaux de comtes
francs.
( 259 )
thèse qui trouve de nombreux partisans. On aime la giltle
en Belgique comme une inslilution démocratique et l'on
se plaît à voir en elle la source de toutes nos grandeurs
politiques. Récemment encore M. Vandenpeercboom, dans
son article de la Palria belgica, a résumé de la façon la
plus complète les titres qu'elle peut faire valoir, et il
conclut en affirmant qu'elle créa la cité, quelle devint le
berceau de la commune, que « l'organisation des communes
et celles de leurs corporations furent, à toutes les époques,
appuyées sur les lois fondamentales admises par nos gildes
primitives. » Il semble enfin que la constitution de 1830
elle-même ne soit que la dernière expression de l'esprit
qui donna naissance à cette antique association.
Tout cela est peut-être fort patriotique, mais cela est
malheureusement inexact; et il me paraît impossible
d'exagérer davantage le rôle d'une institution qui a sa place
dans notre histoire, mais qui doit aussi s'y tenir. La gilde
dans son origine est essentiellement une association volon-
taire; elle a un caractère exclusivement privé. C'est ce
qu'ont fort bien établi von Maurer [Stddteverfassunrj , I,
pp. 164-171, 52o, etc.) et Heusier {Ursprung der deiit-
schen Stadtvcrfassung , p. 11 et passim). Loin de coïncider
avec la commune la gilde, comme nous le voyons dans les
règlements les plus anciens, n'est qu'une société commer-
ciale ou une société de secours mutuels, qui n'embrasse
qu'une portion restreinte des bourgeois et à côté de
laquelle existent parfaitement les magistrats communaux.
Tel est, par exemple, le caractère de la confrérie de Saint-
Euchère, que nous rencontrons en 1192, à Saint-Trond
[Carlulaire de Saint-Trond,], pp. 152 et 154). Quel est son
objet principal? C'est de fournir à ses m.embres un enter-
rement convenable. Quant à une activité politique, on l'y
(il40 )
chercherait vainement. Il en est de même de la fameuse
confrérie de la Charité à Valencienues (1070 environ.
Cf.Wâulers, De l'origine des libertés communales, Preuves,
p. 251); on a là le règlement d'une société particulière,
d'où il ne sera jamais possible de faire dériver l'organisa-
tion publique d'une commune. Rien de plus clair sous ce
rapport que le règlement de la gilde de Malines, de 1276
{Wauters,/6ïd,p. 254); c'est une association privilégiée de
marchands, qui possède un monopole, mais qui est parfai-
tement distincte de la commune : les statuts parlent
expressément des bourgeois qui ne sont pas membres de
la gilde.
Sans doute, je n'entends pas tomber dans Terreur
opposée à celle que je combats; je ne veux pas nier le rôle
qu'a rempli la gilde, mais ce rôle n'apparaît qu'à un cer-
tain moment du développement communal; les bourgeois
ont souvent adopté la forme et le principe de la gilde com-
merciale pour affirmer leur unité d'une façon conforme
aux tendances de l'époque; on peut dire qu'alors la gilde
passe du droit privé dans le domaine du droit public. La
loi deVÀmitié crAire (Warnkonig, III, 2» n» CLXIVjest
fort intéressante à cet égard.
Mais encore une fois, là n'est point l'origine du lien
social de la bourgeoisie, là n'est pas davantage l'origine de
la liberté communale. Soutenir le contraire, c'est préten-
dre que les agglomérations locales et les divisions adminis-
tratives n'avaient, d'après l'ancien droit germanique,
aucune organisation, aucune indépendance. Je ne crois pas
que quelqu'un puisse sérieusement défendre une pareille
proposition.
Reste donc la troisième thèse, et celle-ci se présente
dès l'abord dans des conditions de vraisemblance très-
( 241 )
satisfaisantes; l'on n'ignore pas en effet que les droits, les
mœurs, en un mot la vie tout entière de nos communes
conserva pendant tout le moyen âge son caractère pure-
ment germanique; en serait-il autrement des institutions
communales? Seulement il ne suffit pas de dire que les
échevinssont les descendants des scabini, car les scabini
étaient des fonctionnaires judiciaires, et non des adminis-
teurs; ensuite quand on parle des tribunaux de comtés
francs, on s'engage dans d'inextricables difficultés; enfin,
à côté des échevins, on trouve les conseillers et ceux-ci
réclament aussi leur place dans la théorie des origines.
Pour compléter celle-ci, il faut donc énoncer cette pro-
position générale : la commune reconstitue l'ancienne
liberté germanique; cette liberté a une double face : liberté
de la juridiction, liberté de l'administration ; c'est comme
telle qu'elle existe au point d'arrivée, c'est comme telle
qu'il faut la retrouver dès les origines; l'avènement du
droit féodal et la constitution des seigneuries viennent la
contrarier dans ses développements, mais elle parvient à
triompher de ces obstacles; il y a dans la marche des
franchises communales un progrès souvent interrompu,
mais toujours repris; parfois, il est vrai, l'ancien droit a été
complètement détruit; alors il faut que par imitation de
ce qui se passe ailleurs, les bourgeois luttent pour obtenir
ce qui leur manque; mais généralement, dans nos cités,
les plus anciennes chartes ne font que confirmer d'antiques
libertés, et si ces libertés ont besoin de confirmation, c'est
que d'abord elles ne s'appliquent plus précisément aux
mêmes sujets juridiques pour lesquels elles avaient été
créées; c'est ensuite par opposition à la situation des
campagnes, où le servage, personnel ou réel, avait pris des
proportions immenses.
2"*^ SÉRIE, TOME XXXVIII. i6
( 242 )
La base de la commune est donc l'ancienne organisa-
lion germanique judiciaire et administrative, celle-ci repo-
sant sur la coutume, celle-là sur le droit écrit et cette der-
nière seule présentant, comme je le montrerai plus loin,
les caractères du droit public.
Il convient d'examiner d'abord à quelle source la com-
mune a puisé son indépendance juridique.
Rappelons-nous que ce sont les Francs qui ont donné
à notre pays son caractère germanique ; j'ai cberché à éta-
blir ce fait au point de vue de l'ethnologie (cf. Recherches
sur l'ethnologie de la Belgique) ; il est attesté d'une façon
tout aussi évidente par la linguistique; la langue flamande
en effet n'est autre chose qu'une forme duNiederfrànkisch,
à laquelle sont venus se joindre dans la Flandre occiden-
tale quelques éléments saxons (cf. Winkler, Allgemeen
nederlandsch Idiolicon).
C'est donc dans la législation franque et spécialement
dans la loi salique et dans lesCapitulaires que nous trouve-
rons le point de départ de toute notre organisation sociale.
Les provinces beiges furent en effet le berceau de la loi sali-
que, et aucune autre contrée n'a conservé plus longtemps
des traces vivantes deces institutions primitives. C'est dans
cette région du nord-ouest de la France que se sont con-
serves les noms perdus ailleurs de certains fonctionnaires;
tel est, par exemple, le sacebaro [Carlul. de S'-Bertin,
n" 5); c'est là aussi qu'apparaissent des cenleniers dès
l'époque mérovingienne (cf. Sohm , Altdeutsche Reichs-
und Gerichtsverfassiing, § 9, notes 1, 21 et 186). On sait
que jusqu'à la (in du douzième siècle on dressa dans plu-
sieurs de nos provinces des actes d'après la loi salique
(cf. Britz, Métn. sur rancien droit belgique, I, p. 15. Voir
aussi Warnkonig et Gérard, II'' des Carolingiens, II,
ch. iO; etc.).
( 243 )
Les Germains, du temps de Tacite, étaient divisés en
li'ibus, Volkerschaflen, civitates, et en eenlènes, Hiinderl-
schaflen, pagi (de Tacite), celles-là Ibrmant l'unité poli-
tique, celles-ci l'unité judiciaire. Dans les assemblées des
tribus tous les hommes libres délibéraient sur les matières
d'intérêt public et procédaient à l'élection des fonction-
naires, principes, chefs des centènes, duces, chefs mili-
taires, peut-être même ï^eges. Dans les assemblées des cen-
tènes les hommes libres se constituaient en cour de justice
et présidés par le centenier, le princeps, ils jugeaient les
crimes et les délits commis par leurs pairs. C'est l'époque
où tous les membres de l'État sont égaux et oîi la puis-
sance du prince et de la noblesse est purement nominale.
(Cf. Waitz, Deutsche Verfassungsgeschichte , Rolh, Ge-
schichte des Beiteficialwesens, Sohm, Altdeiitsche Reichs-
und Gerichtsierfassung.)
Dans l'État mérovingien la situation s'est profondément
modifiée; le roi a augmenté considérablement son autorité;
la conquête a eu pour effet de transformer tous les citoyens
en ses sujets (cf. Roth, Feudalitat und Unterthanierband)^
et désormais les fonctionnaires ne peuvent plus être les
représentants du peuple, mais ceux du souverain. L'an-
cienne tribu, réduite à n'être plus qu'une province du
royaume, est devenue le comté, Grafschaft , pagus; à sa
tête se trouve le comte, Graf, cornes, nommé par le roi et
son représentant. Quant à l'assemblée politique, elle a dis-
paru; la seule circonstance dans laquelle les hommes libres
puissent encore, d'une façon plus ou moins directe, faire
connaître leurs vœux, c'est l'assemblée militaire du Champ
de mars (plus tard du Champ de mai).
En dehors de celle-ci il n'y a dans le royaume franc
qu'une seule assemblée, celle de la centène,et alors comme
( 244 )
auparavant elle a un caractère exclusivement judiciaire;
ce caractère elle seule le possède; il n'y a pas d'assemblée
du (jau {pagus); \e gau est la division administrative sou-
mise au comte, il n'est pas le ressort judiciaire; tous nos
historiens ont cru le contraire, mais ce point a été établi
par Sohm d'une façon péremptoire : ni dans la période
mérovingienne, ni dans la période carolingienne, il n'y a
d'autre assemblée que l'assemblée de la centène. « Die
Hundertschaflsversammlung isl die einzigeVolksversamm-
lung im frunkisclien Rekh. » (Sohm, op. cit. p. 28o.)
Quelles qu'aient été donc les atteintes subies par l'an-
cienne liberté, la centène, elle au moins, a gardé son
caractère et ses droits; c'est là que s'est réfugiée en quelque
sorte l'indépendance germanique, elle l'a conservée, et elle
la transmettra, quand le calme aura reparu, aux organes
qui sont appelés à prendre le premier rang dans la société
nouvelle. Le royaume franc ne connaît plus la liberté poli-
tique, mais il a maintenu pour l'homme libre le droit de
n'être jugé que par ses pairs.
Toutefois l'esprit de centralisation doit faire sentir ses
effets, même dans le domaine de la justice; en effet les
centènes ne sont pas des républiques, elles constituent
des subdivisions du pagus, et comme le comte est le chef
du pagus , il est aussi celui de la centène; l'ancien prin-
ceps devenu le centenier, centenarius , celui que la loi
salique nomme lunginus (1), n'est donc plus que le subor-
donné du comte, et c'est le comte qui est chargé de sa
nomination. (Sohm. op. c, p. 241.)
Je n'ai pas à exposer ici quelles sont toutes lesattribu-
(1) Celte assimilation a été établie par Sohm, § 4. Oci sait qu'aux yeux
a\l't \e luHijmua était le cliet' *i\\n village.
( 243 )
tions du conile franc; au point de vue judiciaire, le seul
qui m'occupe, il est le président de l'assemblée de la
centène, \c jurlex, et il la préside régulièrement toutes les
six semaines; pour cela il doit parcourir son comté, allant
d'un malberg à l'autre; c'est ce qu'on appelle circumire
pagiim. (Il ne faut donc pas dire avec M. Piot [Amiales
iVYpres, V, 7) que ce soit là une coutume saxonne.)
Quant an cenfenarius , il peut aussi, dans certains cas,
présider le malins, mais il est avant tout l'exécuteur des
sentences; c'est lui notamment qui perçoit au nom du roi
la part des amendes qui reviennent à l'autorité ; à ce titre
il porte le nom d'exactor, en allemand Schnltfieiss , scul-
fetiis. F^identité du centenier et du scnltetus est un des
résultats les plus intéressants acquis par les travaux récents
dont l'ancien droit germanique a été l'objet. (Cf. Heusler,
op. cit., p. 83. — Sohm. op. cit., §§ 5 et 9.)
Enfin le jury qui formule le jugement pendant la période
mérovingienne, c'est toujours l'assistance, l'ensemble des
hommes libres; mais de bonne heure la coutume s'est
introduite de choisir dans le sein de l'assemblée quelques
hommes particulièrement compétents pour formuler un
projet de sentence et le présenter à l'acceptation du
peuple; ces hommes étaient les rachimburgi et c'est à
eux qu'échut plus tard le nom de scabini. Charlemagne,
on le sait, donna à ce nom une consécration officielle :
l'obligation pour les hommes libres d'assister aux plaids
sous peine d'amende, était devenue pour eux une charge
intolérable; le comte pour lequel chaque absence se tra-
duisait en un profit net, ne négligeait aucune occasion de
multiplier les séances; à la rigueur, nous l'avons vu, il
devait, pour présider tour à tour cliacune des centènes de
son pagiis, voyager constamment de l'une à l'autre; mais
( n^ )
roiganisalion judiciaire allégeait de beaucoup celte tâche;
elle affirmait en effet la compétence de chaque centène
pour toutes les alTaires évoquées dans le pagus, et elle
permettait de la sorte au comte de faire retomber tout le
poids de la besogne sur une seule centène, par exemple
sur celle qui formait sa résidence habituelle. (Cf. Sohm.
op. cit., p. 574.) Cet état de choses réclamait un remède.
Charlemagne, qui voyait avec regret les hommes libres
accablés de plus en plus par les charges de toute espèce
que le service de l'État leur imposait, décida que désor-
mais les scabini seuls devraient nécessairement prendre
part aux plaids; c'était fournir à la commune juridique un
soulagement considérable, mais c'était en même temps la
priver d'une de ses prérogatives les plus précieuses; désor-
mais les scabini n'étaient plus l'émanation directe du
peuple; bien que celui-ci conservât une participation plus
ou moins grande à leur nomination, ils se trouvaient
fonctionnaires, et en vertu de leur nouveau caractère ils ne
se bornaient plus simplement comme les rachimburgi à
proposer la formule soumise à l'acceptation de toute l'assis-
tance, mais ils étaient devenus les véritables juges.
Toutefois la législation carolingienne maintint la tradi-
tion de l'ancien ordre de choses dans l'institution des pla-
cita generalia : sous les Mérovingiens on avait admis par
suite de la compétence concurrente des diverses centènes
qu'il suffisait qu'une assemblée eût lieu toutes les six
semaines dans une centène quelconque du pagits, mais
que chaque centène devait annuellement avoir ses deux
assemblées spéciales. Charlemagne porta à trois ces plaids
obligatoires, tria placila generalia, auxquels tous les
hommes libres de la centène sont tenus de se rendre; ils
sont présidés par le comte lui-même et non par le cente-
( 247 )
nier, et la commune juridique y reprend toutes ses préro-
gatives, c'est-à-dire qu'ici les scabini cessent d'être juges
et que leur rôle se réduit à proposer la formule de sen-
tence.
Telles sont les lignes générales de l'organisation judi-
ciaire dans le royaume franc : la centène est la seule unité
judiciaire; point d'assemblée de pagus. Dans chaque cen-
tène trois placita generalia ou echledinge , auxquels tous
les hommes libres doivent assister, et un nombre plus ou
moins grand de plaids ordinaires, gebotene dinge, obliga-
toires seulement pour les scabini et pour les parties inté-
ressées. Les plaids généraux ne peuvent être présidés que
par le comte en personne; aux plaids ordinaires il lui est
loisible de se faire remplacer par son Sc/ntUheiss.
Il est important de bien tenir compte de ces principes,
si l'on veut comprendre l'organisation de la justice dans
nos contrées au moyen âge. En effet si l'on fait abstrac-
tion des modifications qu'y a introduites la constitution
des seigneuries, on reconnaîtra que le système carolingien
s'est conservé dans ses traits principaux.
Et tout d'abord : il n'y a point de tribunaux de comtés.
Cette proposition est contraire à ce qu'enseignent Raep-
saet, Warnkônig et la plupart de nos historiens et de nos
juristes contemporains; ils se sont laissé tromper par le
nom de gouding qui désigne fréquemment l'assemblée du
placitum générale; mais le mot go dans tous les pays germa-
niques s'applique parfaitement à la centène (cf. Thudichum,
Gau-und Markierfassung, pp. 10, 45, 53, etc.). D'un
autre côté il y a des exceptions apparentes au principe
que je rappelle; c'est ainsi que les tria placita du Franc
de Bruges semblent bien avoir le caractère d'assemblées
du pagus; mais il y a une distinction à faire : le pagus de
( us )
Flandre , qui correspond à peu près au Franc de Bruges
postérieur, n'est qu'un sous-par/us, un pagiis minor. Or
les pagi minores, en Neuslrie surtout, ont presque tous
commencé par être des centènes primitives; Icspagide la
Gaule étaient très-grands, ils avaient toute l'étendue des
civitates romaines ; leurs subdivisions, les centènes. for-
maient donc des territoires considérables, et l'on en vint à
les considérer elles-mêmes comme des pagi secondaires,
qu'à leur tour on partagea en plusieurs centènes (cf. Sohm.
op. cit., p. 201-212. Tbudicbum. op. cit., pp. 80 etsuiv.). Il
est donc permis de supposer que le Franc de Bruges, à
travers toutes les modifications dont sa constitution fut
l'objet, conserva cependant, au point de vue judiciaire,
son caractère de centène, et ce fait s'explique peut-être
par l'isolement et l'oubli où vécurent pendant les premiers
siècles du moyen âge les populations du littoral îlamand.
On peut en dire autant du pays de Waes et des Quatre-
Métiers.
Mais partout ailleurs la centène, en devenant pagus
minor, perdit ses prérogatives judiciaires et les transmit
aux centènes d'étendue plus restreinte; c'est dans chacune
de celles-ci que se tinrent alors les placita generalia. Nous
voyons, par exemple, que le représentant du duc de Bra-
bant présidait chaque année deux plaids, après Noël et
après Pâques , à Bruxelles , à Ucclé, à Obbrussel, à Yssche,
à Merchtem, à Vilvorde, à Tervueren, à Duysbourg, à
Assche, à Bhode-S'''-Genèse, à Ruysbroeck, à Capelle
Wautcrs, Mémoire sur Jean /*"'' , p. 506). Chacune de ces
ocalités constituait probablement dans l'origine le noyau
d'une centène.
Dans le pays d'Alost il y avait quinze districts avec
autant de placita generalia (Warnkonig, fil, 2", p. 126).
( 249 )
Citons encore les tria placita annuels à Haelen (Limbourg)
(1146, Cartul. de S'-Trond , I, p. 70), à Poperinghe
(M 47, Warnk., III, \% p. 556), à Bouvines(I2I5, Gachard,
Documents inéd., I, p. 104), à la Hulpe (1250, Brabantsche
Yeesten, I, p. 652), à Incourt, près de Jodoigne (1226,
Ibid., I, p. 627), à Soignies (1248-49, Wauters, Preiiv.,
p. 170), à Saffelaer (i264-6o, Ibid., p. 217), etc. Personne
ne songera à faire de toutes ces localités le centre de pagi
primitifs. Nous avons d'ailleurs un ténnoignage positif
pour la ville de Dinaut; il remonte à 1060 environ (cf.
Wauters, Preuves, p. 2ol) : « Omnis villa communiter
débet tria per annum centenarie complacila. »
Ce qui montre bien en outre que toute cette organisa-
tion des plaids généraux porte un cachet d'identité, qu'elle
ne peut devoir qu'à son antiquité, c'est le fait que les épo-
ques de la tenue du plaid sont presque partout les mêmes,
savoir après l'Epiphanie, après l'octave de Pâques et après
la Nativité de saint Jean-Baptiste. Ainsi l'on a :
A la Hulpe : 1° Tertia feria post Epiphaniam; 2" T. f.
p. octav. Paschae ; 5" T. f. p. ?sat. J.-Bapt.
A Incourt : 1" Qiiarta ; 2'' Quarta ; ô" Quarta
A Saint- Vaast (Arras) : 1" Sexta ; 2" Sexla ;
5° Sexta (Warnk, III, 2% n" xlvii).
A Roux-Miroir (Wauters, BeUi. anc, 6' livr., p. llo :
[° Lendemain du jour des Bois; 2" Lendemain del paque
close. — Le troisième terme : Lendemain del St-Bemy
(1" octobre) ne coïncide pas.
Quant à l'obligation pour le comte de tenir lui-même le
plaid général , elle est nettement conservée dans la keure
du Franc de Bruges, dont le § 62 exige la présence du
comte, de la comtesse ou du châtelain (représentant im-
médiat du comte). (Gheldolf, III, p. 577 — [falso Ail).
( 250 )
Ailleurs ou semble s'être écarté de cette rigueur; ainsi dans
les environs de Bruxelles le plaid était tenu par Vamman,
fonctionnaire inférieur. De même à Afsne par l'écoutète
{Warnk,III, 2%n''CLVIII).
Enlin il ne serait peut-être pas trop hardi de supposer
que la participation directe de la commune juridique se
maintint pendant fort longtemps; n'en découvrons-nous
pas les traces dans cet article de la Keure du Franc (§ 61)
ordonnant qu'après le plaid les hommes libres se rendent
devant les échevins et ibi coram scabinis omnia suadiiel la
et cetera facta enumerabunt? Cette disposition me semble
indiquer que les échevins n'avaient pas eux-mêmes pris une
part active à l'assemblée. C'est d'ailleurs ce que marque
aussi le § 65 qui renvoie aux échevins toute cause dont il
n'est pas fait mention ici, c'est-à-dire dans le chapitre
consacré au gouding.
Si maintenant nous passons à l'examen de la juridiction
ordinaire, nous verrons que la distinction établie par le
droit franc entre les attributions du cornes et celles du
centenarius [tribunns , vicarius, scultetus) se retrouvent
dans l'opposition de la haute et de la basse justice. Celle-ci
domine toute la matière, même à l'époque communale.
Seulement il faut tenir compte des changements qu'ont
produits l'avènement de la féodalité et la constitution des
seigneuries.
Les seigneurs, ducs ou comtes, qui réunissent sous leur
autorité le domaine de plusieurs pagi, ont usurpé en
partie la place du roi au point de vue de la souveraineté
territoriale; les anciens Gaugrafen sont devenus leurs
subordonnés ; on les retrouve comme tels sous le nom
de châtelains et de burgraves. Le burgrave représente le
comte tant dans ses rapports avec l'armée qu'avec la jus-
( 2al )
lice; à ce dernier titre il est l'otlicier de la haute justice;
en matière criminelle il a le blulbann.
Tel est le rôle que nous lui voyons à Furnes, par exemple
(VVarnk, II, 2% p. 55).
Il est donc permis d'admettre avec Gheldolf (II, p. 144)
que dans l'origine le territoire de la châtellenie correspon-
dait à celui du pagus. Mais les modifications qu'amenèrent
la constitution des seigneuries et les collations d'immunité,
houleversèrent toute l'organisation territoriale. Les grands
propriétaires laïques ou ecclésiastiques qui possédaient de-
puis une époque fort reculée la juridiction sur tous leurs
sujets non libres, finirent par obtenir également que les
fonctionnaires publics ordinaires fussent exclus de leurs
domaines (I); ce fut dès lors un avoué {vogt) particulier
qui maintint les relations entre le territoire favorisé d'im-
munité et le pouvoir central.
Dans les villes il se passa un phénomène analogue;
quand leur population se fut accrue, qu'elles obtinrent le
droit d'établir des marchés et de s'entourer de murs, quand
le commerce commença à prendre son essor, elles ne tar-
dèrent pas, elles aussi, à jouir du privilège de Vimmunité ;
par là elles n'étaient soustraites en aucune façon à l'action
de l'autorité publique; leurs fonctionnaires étaient toujours
les officiers du seigneur territorial (roi, duc, comte), mais
ces fonctionnaires n'étaient plus ceux du plat pays,
c'étaient des fonctionnaires urbains.
Le plus haut de ces fonctionnaires fut en général le
bailli. Au surplus, même dans les territoires ruraux on
(1) La théorie de Vimmunité a reçu un jour nouveau par suite des tra-
vaux de von Maurer, Heussier, Sohm; mais je suis obligé de laisser de côté
ici tout ce qui la concerne.
( 2o2 )
voit peu à peu le châtelain céder ses fonctions à un bailli;
plus en etîet la vie sociale se compliquait, plus les fonc-
tions de justicier devenaient lourdes pour le châtelain, et
le besoin d'un otTicier de justice spécial se fit sentir. C'est
pourquoi l'on rencontre fréquemment deux baillis qui rési-
dent dans une même ville, le ressort de l'un étant la chà-
tellenie, celui de l'autre la ville proprement dite.
Ce qui est visible, c'est que tous ces fonctionnaires,
malgré leurs noms divers, châtelains, burgraves, avoués,
baillis, sont les successeurs de l'ancien rjaugraf, et comme
tels les officiers de justice de l'ordre supérieur. Au-dessous
d'eux on retrouve partout un magistrat inférieur, l'ancien
cenlenarms ou scnlletvs ; c'est celui que l'on désigne or-
dinairement sous le nom QÏécoiilète, schout, mais quelque-
fois aussi sous celui (ïaminan.
A Furnes, dès l'apparition du bailli communal, l'autorité
du châtelain est restreinte au territoire rural. A côté du
bailli se montre un crickhouder (Warnk, W, 2", p. 54).
A Poperinghe le bailli a un ammnn à ses côtés [ibicL,
pp. 68 et 76). De même à Audenarde [ibid., p. 107). La
keure des Quatre-Métiers indique un mbbalwus et plu-
sieurs ammans, sans doute un pour chaque métier [ibid.,
p. 186).
A Ypres l'écoutète était primitivement le subordonné du
châtelain; plus tard apparurent un bailli pour la chàtel-
lenie et un autre bailli pour la ville {ibid., 11, i", pp. 197
et suiv.).
A Bruges un bailli et un écoutète(/^/f/., p. 148).
A Gand l'amman remplace l'écoutète (î6«rf., pp. 68 et
suiv.); mais ses fonctions sont toujours celles de l'ancien
centenier : il a la juridiction civile, la juridiction pénale en
matière de délits, le soin de la prison, etc.
( 255 )
J elles soûl précisément les fonctions qui compétent à
récoutète de Huist (Warnk, il , 2", p. 142).
Tout ceci prouve que les grandes lignes de l'organisation
iianque se sont maintenues en dépit des révolutions que
les siècles ont opérées. Ce qui détermine, en effet, la posi-
tion essentielle d'un magistrat, ce n'est pas le caractère
juridique des personnes soumises à son tribunal, mais bien
le caractère des faits sur lesquels s'étend sa compétence.
La haute justice d'une part, la basse justice de l'autre, telle
est la distinction capitale qui se maintient au moyen âge,
et à laquelle correspondent deux classes d'officiers pu-
blics; il se peut que ces officiers se soient dédoublés, par
suite des besoins croissants, mais leur physionomie n'en
est pas altérée.
Ainsi la question de savoir si leur juridiction s'applique
ou aux hommes libres, ou aux non libres, ou à ces deux
classes à la fois, n'est qu'une question accessoire; c'est ce
que Warnkônig n'a pas compris, lorsque pour expliquer
l'origine de l'écoutète, il prétend y voir l'ancien juge des
hommes non libres, lequel s'est trouvé accolé au bailli le
jour où les deux groupes de personnes coexistant dans
une même cité, se sont fondus (Warnk,, î, § 27). Les com-
munautés serviles ont eu leurs écoutètes aussi bien que
leurs échevins; quel que soit l'état des personnes, l'organi-
sation est conçue sur le même plan. Que le magistrat soit
resté un fonctionnaire public ou qu'il soit devenu un fonc-
tionnaire seigneurial, peu importe : s'il a la haute justice,
il est le représentant de l'ancien GcoMjraf; s'il a la basse
justice, celui du centenier.
Cependant l'erreur de Warnkônig s'explique par ce fait
que c'est généralement la basse justice qui la première est
( 254 )
devenue seigneuriale; ainsi l'on voit plus d'une lois dans
une ville deux olïiciers pour la haute justice et un seul pour
la basse. Or, quand tous les bourgeois indistinctement ac-
quièrent la liberté, l'un des deux fonctionnaires disparaît,
et il reste en présence un bailli, ancien juge des hommes
libres, et un écoulète , ancien juge mixte.
Les considérations qui ont été présentées ci-dessus me
permettent de ne pas m'étendre longuement sur la ques-
tion des échevinages. Les échevins sont les héritiers directs
des scabini de la centène franque. Les difficultés qui arrê-
taient Gheldolf (V, p. 138), lorsqu'il rencontrait des éche-
vins à Ypres, c'est-à-dire dans une ville « qui ne fut jamais
chef-lieu d'un pagus » ne peuvent donc plus nous embar-
rasser. Le siège de l'échevinage primitif fut d'ordinaire la
ville qui formait le centre de la centène; elle le conserva
et plus tard, lorsqu'elle acquit l'immunité et que le système
des divisions territoriales franques fut détruit, elle le trans-
forma en son échevinage propre. Celui-ci n'en demeurait
pas moins une émanation de l'autorité souveraine, mais les
progrès de l'idée féodale avaient amené des modifications
profondes dans sa constitution ; en effet, les échevins, sui-
vant le courant général de l'époque , avaient fait de leurs
magistratures de véritables fiefs qui demeurèrent l'apanage
de certaines familles, les lignages échevinaux. Mais par là
même l'échevinage acquit une force considérable, et lorsque
plus tard la réaction contre les abus du féodalismefit triom-
pher le principe de l'échevinage annuel, celui-ci n'en resta
pas moins le véritable centre de la vie communale. Aussi
les bourgeois le considéraient-ils comme le palladium de
leurs libertés, et l'on sait la résistance que rencontrèrent
les ducs de Bourgogne, quand ils voulurent subordonner
( ^oS )
les tribunaux urbains à de grands conseils nationaux. L'in-
dépendance de la juslice était un principe dans la com-
mune du moyen âge comme elle l'avait été dans la centène
Iran que.
Toutefois si l'on peut rendre compte aisément de la
position judiciaire des échevins, il ne faut pas oublier que
dans nos villes du moyen âge les échevins n'étaient pas
seulement des juges , c'étaient aussi des administrateurs ,
et d'autre part à côté d'eux se placent fréquemment des
magistrats spéciaux, les conseillers, dont l'organisation de
la centène ne peut nous expliquer l'existence.
Le droit franc n'organise pas la commune; il soumet
directement aux fonctionnaires de la centène et du pagus
les agglomérations qui deviendront les villages et les
villes; l'autorité centrale ne connaît point les fonction-
naires locaux (cf. Sohm, op. cit., I, pp. 231 et suiv.).
Et cependant les habitants d'une agglomération quel-
conque ont des rapports nécessaires et ces rapports doi-
vent être réglés, mais ce n'est pas le droit public qui les
règle, ils reposent sur le principe de la corporation. De là
la divergence qu'ils présentent : chaque corporation se
gouverne à sa guise, et nous trouvons là le véritable self
(lovernment dans ses origines. Toutefois la base est par-
tout identique, car un peuple en se développant ne fait
qu'élargir ses traditions, il les adapte aux conditions du
milieu et du temps. Aussi l'on rencontre dans toute la
zone germanique une étonnante similitude dans les insti-
tutions locales; ce qui a exercé sur elles une grande
influence, c'est la possession commune de la terre.
On sait aujourd'hui que les Germains primitifs, comme
toutes les autres nations aryennes, ne connaissaient pas
( 25(5 )
la propriété immobilière individuelle (1); à l'époque de
César et de Tacite il en était encore ainsi : chaque chef
de famille avait sa maison avec l'enclos dont elle était
entourée, mais les champs arables aussi bien que les prés,
les bois et les bruyères restaient la propriété collective de
tous les habitants d'un territoire, ou, pour parler plus exac-
tement, d'une marks; ceux-ci constituaient donc une com-
munauté territoriale, une Markgenossenschaft , qui chaque
année distribuait à ses membres de nouveaux lots de terre
destinés à être cultivés en commun suivant les règles et à
la date fixées par l'accord unanime.
Cet état de choses se maintint pendant longtemps, et la
loi salique en a conservé des traces évidentes : elle ne fait
mention nulle part du procès relatif à la propriété du sol ,
elle ne connaît point la saisie immobilière; l'exécution ne
se fait jamais que sur les meubles, dont l'ensemble con-
stitue Valodis (cf. Sohm, ï, p. H8); si les biens mobiliers
du débiteur sont insuffisants, le créancier n'a aucun recours,
car la terre est inaliénable, elle appartient à la commu-
nauté, et la seule ressource qui lui reste quand il s'agit du
payement d'un weln-gekl qu'aucun prétexte ne peut laisser
inaccompli, c'est de forcer l'insolvable à transmettre par
la formalité de la direnecruda, ses droits indivis sur la
terre à son plus proche parent, que par là il oblige à payer
à sa place.
Un autre fait bien caractéristique, c'est que la femme
n'hérile pas des droits à la terre : de terra nulla in muliere
heredilas est, parce qu'elle n'est pas coparlicipante aux
(1) De Laveleye, Les formes primitives de la propriété, Revue dks delx
Mondes, 1875.
( 257 )
devoirs et aux droits de la communauté. A défaut de parents
mâles la part idéale du territoire retournait donc à l'en-
semble des compagnons. Cette règle d'hérédité ne cessa
d'être appliquée qu'en o81 ; alors un édil du roi Chilpéric
(Pertz. Leg. II, 10, art. 5) décide qu'en l'absence de fils
les filles hériteront de la terre.
On voit donc que le principe de la propriété collective
s'était peu à peu effacé, mais on voit en même temps qu'il
n'était pas complètement abrogé à l'époque où les Francs
se fixèrent dans nos contrées.
On peut s'expliquer aisément à quelles atteintes il fut
de bonne heure exposé; l'établissement dans un pays qui
avait été soumis pendant des siècles à la domination
romaine, ne pouvait manquer de faire sentir son influence.
Nos provinces n'étaient pas désertes, les envahisseurs y
avaient trouvé des groupes assez considérables d'habitants.
Ceux-ci furent réduits à l'état de servage, soit personnel,
soit réel, ils eurent un maître, et il est vraisemblable que
des individus favorisés soit par les circonstances, soit par
la considération qu'ils s'étaient acquise, se formèrent, dès
l'époque de la conquête, de véritables seigneuries foncières.
(Cf. Gierke. Genossenschaflsrecht, I, § 11.) C'est ainsi que
dès le septième siècle nous trouvons la mention de patentes
et que nous voyons des hommes riches faire à l'église des
donations importantes.
Une fois que le principe de la propriété privée faisait
son apparition , il devait peu à peu prendre pied partout;
ce qui contribua notablement à l'affermir, ce fut l'introduc-
tion de systèmes de culture moins grossiers et la substitu-
tion de l'assolement triennal à l'ancien procédé de culture
tout à fait extensif des Germains, le Feldgraswirtschaft
(cf. Hanssen, Zur Geschic/Ue der Feldsysteme in Deutsch-
2'"* SÉRIE, TOME XXXVIII. 17
( 258 )
land); l'obligalion d'améliorer la terre, de la fumer, la
laissait nécessairement dans les mains du même cultiva-
teur pendant un cycle de plusieurs années; peu à peu
riiabilude du partage se perdit, et grâce à l'influence des
idées romaines sur l'hérédité, chacun se considéra comme
le propriétaire du sol dont il n'était en réalité que le pos-
sesseur.
Toutefois cette transformation ne porta d'abord que sur
les champs cultivés, et en règle générale les bois, les
marais, les pâturages continuèrent à former la marke com-
mune.
Le type du village flamand au moyen âge est celui-ci :
une longue rue bordée de maisons , chacune avec son petit
jardin, et de chaque côté à droite et à gauche les parcelles
de champs cultivés, beaucoup plus longues que larges;
enfin à l'entour les terres communes, la marke, formant la
limite et la séparation d'avec les villages voisins. Tel est
l'aspect qu'ils présentent dans toutes les colonies flamandes
des pays au delà de l'Elbe, où ils se distinguent nettement,
par leur configuration, de ceux des anciens habitants.
(Cf. Meitzen , Leber Bildung von Dôrfern und deren na-
tionale Bedeutung dans les Verhandlungen der Berliner
Gesellschafl fur Anthropologie, 1872, p. 134.)
Pareil système de morcellement était appliqué dans
nos provinces, lorsqu'on fondait un établissement nouveau;
c'est ce qui résulte de la keure de Bornhem, 1257, copiée
sur celle de Mariakerke,12î8 (Warnk. II, 2", p. 259). Son
article I" porte : « Ut habitantes villam libcram mensuras
quinquaginla pedum latitudinis et centum peditm longi-
tudinis habcant. » Il est visible qu'il s'agit ici de ces lon-
gues parcelles, telles que nous les rencontrons fréquem-
ment encore des deux côtés de certaines routes. Le point
( 2d9 )
(lu départ du village nouveau, c'est donc l'égalité de chaque
famille, souvenir de l'ancien ordre de choses. En Alle-
magne le même principe dominait. (Cf. Maurer, Gesch. der
Fronhofe, III, 200 et suiv.) : c AJlenOtalben waren sie in
einem und dcmselben Fronhofe fjanz rjleich und zwar sa
(jross, dass jedes Bauernrjul ziir Enià/tntng einer hôn'gen
Familie hinreichte. »
Primitivement l'ensemble des terres appartenant à une
communauté, c'est-à-dire le territoire de la marke, était
identique à celui de la centène. (Cf. Thudichum, op. cit.,
pp. 127 et suiv.) La marke pouvait alors comprendre plu-
sieurs villages et peut-être toute une série d'habitations
disséminées. Nous voyons qu'en Allemagne une marke
embrassait souvent une vallée entière. (Cf. Maurer, Gesch.
derMarkenverfassiing, pp. 6 et suiv.)
Je suis tenté d'assimiler à l'une de ces marches anciennes
le Tanceland, dont nous possédons une charte de i\60
(Gheldolf, Y, p. -466). Il constitue en effet une vraie corpora-
tion territoriale, dont les habitants élisent librement leur
chef, minislcr, et c'est celui-ci qui les convoque en justice
au nom du comte.
On peut ajouter encore que là où la marke coïncidait
avec la centène , elle conserva le même nom honlari, hont-
schap (cf. Maurer, Gesch. dcr Dorfcerfassiing, I, p. 104),
et qu'ainsi s'explique le nom de hontman, c'est-à-dire
hondertman, cenlenariiis, que porte quelquefois dans nos
chartes le fonctionnaire corporatif lui-même.
Mais en général la marke se divisa en plusieurs villages,
et c'est pourquoi les unités communales ne correspondent
plus aux unités de la centène, celte dernière embra'^sant
dans son sein un nombre plus ou moins considérable de
markes villageoises.
( 260 )
Dans chacun de ces villages le fait seul de la possession
indivise d'une certaine étendue de pâturages, bois, etc.,
conserve entre les habitants les anciens liens corporatifs;
l'usage commun exige en effet l'entente commune; il im-
porte de régler quels sont les droits et les devoirs des
coparticipants et de veiller à ce qu'aucun d'eux ne dépasse
la limite de ses droits ou ne néglige de remplir ses devoirs.
Ainsi se crée par la force des choses une véritable com-.
munilas; celle communUaa n'est pas due à une conjura-
tion , ce n'est pas un moyen de défense que les com-
pagnons se donnent contre les attaques du dehors, c'est
tout simplement l'association du voisinage, qui repose sur
les traditions les plus antiques de la race.
Toutes nos chartes nous parlent de ces terres possédées
en commun, mais jusqu'à présent ce fait ne semble pas
avoir suffisamment attiré l'attention et l'on n'a pas vu
l'importance qu'il présente pour l'histoire de l'origine de
la commune.
En Allemagne ces terres portent le nom de Mark,
Gemein, Gemeinde , Allgenieine, Almeinde, Almend , et
aussi Sliire , Eva, Aue , Bant , Geraid, etc. (Cf. Maurer,
Markenverfassung , pp. 27 et suiv., Thudichum, op. cit.
pp. H5 et suiv., Zôpfl, Deutsche Rechtsgeschic/ite , UV' ,
p. 164.) Chez nous les documents les appellent en latin :
pascua communia , com mimio , ivarescalli , en wallon : loa-
reschaix. (Cf. ^Yauters, Preuves, p. 199 : Si li homme de
le ville pescaissent es ivareskais de le ville communs
(1261-62); Ibid., p. 156 : warescallos et ruellas qui inutiles
existebanl in villa (1257); en Hamand : heinede , opstal,
icarande (correspondant à l'allemand u:arschaft, droit de
prendre part à la marche. Maurer, Markverf, p. 51.) Quant
à la communauté elle-même, elle se nomme communitas.
( 261 )
meentudit. Dans les pays humides de la Flandre occiden-
tale où l'écoulement et la répartition des eaux était une
affaire d'importance capitale, elle prenait le nom de wate-
rinfjhe, pour lequel on trouve quelquefois celui âlievina,
vêtus hevina [Annales de la Soc. cVÊmiiL, t. III, pp. 63,
182 et suiv.). M. Vandenpeereboom fait de cet hevinii^wne
gilde, mais sans qu'il soit possible de découvrir sur quoi
repose cette opinion [Palria beUjka, II, p. 249). Le mot
hevina est probablement en rapport étroit avec celui de
ewa, eiwa, qui signifie : loi (cf. Ewa Chamavorum , et qui
est pris quelquefois dans le sens de marke (cf. Zoepfl, loc.
supr. cit.).
Tous ceux qui étaient établis sur un territoire et y pos-
sédaient une maison et un champ, étaient commarcani,
compagnons, genossen, ganerben. (MM. Mortens etTorfs,
H"^ d'Anvers , I, p. 49, n'ont pas du tout compris ce der-
nier mot.)
Comme maîtres de maisons, fixés à demeure, mansio-
narii, massuiers ,\h étaient opposés aux simples beisassen,
établis sur la terre d'autrui, qui ne possédaient qu'une ca-
bane, cotarii, cossati, koter, cossaefen. Ceux-ci n'étaient pas
compagnons de la marke, et cela devait résulter de l'ori-
gine même de l'institution. On les rencontre, par exemple,
dans la Keure des IV Métiers (Warnk., H, 2", pp., 186 et s.),
où on les distingue des lantmannen. Les uns et les autres
sont tenus au service militaire (§ o), parce que c'est là une
obligation de droit public; mais les cossati ne participent
point à la jouissance régulière des terres communes;
c'est ce qui résulte du § 69 de la même keure, qui porte
que si une inondation a rompu les digues, les cossati
doivent coopérer au travail de réparation, pendant trois
jours, à leurs [u'opres frais, et davantage, s'il est néces-
( 26-2 )
saire, mais alors aux frais de ceux qui ont dus lerres. En
échange de cette obligation, ils auront : aliquos commune.^
ad piscanduni et /terslrateii ad pasluras, c'est-à-dire un
petit droit de pèche et le droit de pâture le long des routes;
la keure ajoute : qiiud lerram habenlibus non iicet; ceux
qui ont de la terre ne peuvent pâturer sur les routes, ils
ont pour leurs troupeaux le pâturage commun. Il résulte
clairement de cette disposition qu'en thèse générale la
jouissance des terres communes était refusée aux cossali
et que conséquemment ils ne devaient pas non plus les
travaux en temps ordinaire. La corrélation des droits et
des devoirs éiait donc complète.
Examinons rapidement quels étaient ces droits et ces
devoirs.
Tout compagnon pouvait envoyer son bétail, ses oies sur
le pâturage commun, ses porcs dans la forêt. Cf. Keure de
Caprycke, 1240 (Warnk., II, 2" p. 215, art. lo) : « Omnibus
apud novum Eecloo manentibus licitum sit pascere ani-
malia sua, scilicet oves et boves, equos et equas et cetera
animalia, ut apes, porcos et anseres et hujusmodi in
iiemore nostro de Aelsclioet. » (Le bois, on le voit, est
devenu seigneurial , mais cela n'importe.)
Le droit de pâture était cependant soumis à certaines
conditions. Il fallait que les animaux appartinssent en toute
propriété au compagnon, qu'il les eût nourris dans son
élable, pendant l'hiver; il ne pouvait point, par exemple,
acheter des porcs à la saison des glands pour les engraisser
et les revendre immédiatement après; car il se serait
enrichi de la sorte aux dépens de ses commarcani.
Cf. Loi d'Onnaing et de Quaroube {Carlul. du Hainaut.
Monum. des prov. de Nainiir, etc., 1, p. 551) : « Nus ne
puet avoir aise es près ne es pastures devant dites (il y a
, ( 2C3 )
J25 bonniers de pâtures), s'il n'est nianans en l'avoherie
(J'Ouneng et de Quaroube, et si puent prendre biestes à
nourechon, s'il les puent avoir elsiles hiernent, et autre-
ment nient. »
De même : Charte de 1245 [Car tu l. de St-Trond, I,
p. 211) : « Si quis de commun itate vel mansionariis pre-
dietis peeud aliquod alienum, quod ipse non emerit vel
iiyemaverit, ad prœfata pascua deduxerit vel emiserit,
dicte curie de Dune in quinque solidis tenebitur.... »
Un autre droit était celui de couper du bois pour se
chauffer, parfois même pour bâtir sa maison, et dans les
pays de marécages d'extraire librement de la tourbe. Ainsi
à St-Aniand (charte de 116i. Wauters, Preuves, p. 27),
celui dont la maison aura été détruite pro foris facto, ne
pourra couper du bois dans la forêt afin de la réparer; ce
(jui montre évidemment que les autres le pouvaient.
Pour la tourbe cf. la keure de Bornhem, 1257 et Maria-
kerke, 1218 (Warnk.,II, 2", pp. 239): il y a vingt bonniers
de marécages, chacun peut y prendre de la tourbe pour son
usage (art. 2) : « Si quis vero inventus fuerit superflue
plures turbas sibi atlrahere, sub forisfacto V solidorum
llandrensium erit. Et si cui vendiderit, XX solid. tene-
bitur » (art. 3).
Le droit de ramasser le bois n'était pas sans importance;
nous voyons, par exemple, le comte Gui consentir à ce que
les habitants de Fleurus, au Heu de payer 110 livres love-
nois, renoncent au droit de bois mort et aux autres droits
qu'ils ont dans le bois de Fleurus, sauf à celui de pâture.
(1288. Cartul. de Nanmr. Monum. pour Vhist. des proc,
etc., I, p. 105.)
Citons encore le droit de pêche et le droit de chasse
pour tous les petits gibiers, reconnu, par exemple, aux habi-
( 264 )
tants de Louvain en 1332, « ghiiikericijs dat si tote hare
fjheplogen hebben. » {Brab. Yeesten, TI,459.) Cf. Charte de
Landrecies, \'2,00 [Cart. du Hainaut. Monum. pour servir,
etc., I, p. 336) : « Quascumque aves, insuper lotrum et
leporem et vulpem ctcœtera minuta animalia. »
Dans l'origine chaque compagnon était libre de défricher
une certaine portion des terres incultes de la marke; c'est
ce qu'on appelait alors un pour pris, captio, occupatio;
pourpris de sart [Brab. Yeesten, I, p. 679), en flamand
bijvmuj. (Cf. Maurer, Gesch. der Dorfverfassiing, I, p. Î93.)
Plusieurs villes du moyen âge nous montrent leur bijvang,
qui conserva longtemps ce nom; tel est le cas pour Lierre.
(Bergmann, Gesch. van Lier., p. 67.)
En échange de ces droits les compagnons de la marke
étaient soumis à diverses obligations.
Ils devaient entretenir les chemins , routes , cours d'eau .
digues, etc. ; ces dernières obligations sont nettement
énoncées dans les constitutions des Wateringhes (voir, par
(exemple, le jugement de Marguerite de Constantinople
pour aplanir lesdiflicultés survenues dans l'administration
delà Wateringhe du métier de Furnes, 1269. {Ann.de la
Soc. d'Émulation , V" série, t. III, p. 219.)
De même ils devaient entretenir la haie qui entourait le
village. Cf. la Keure de Caprycke, 1240: « ... Clausura'
qiicc fient circa dictam terrant.... et quicumque non perfe-
ceril clausuram suani , sicut débet, tel emendaverit, etc. »
La marke était donc fermée au dehors : il était interdit
d'en rien exporter, spécialement ni bois, ni foin , ni fumier;
car ces choses étaient la propriété commune, et celui qui les
aurait vendues se serait enrichi aux dépens de ses compa-
gnons. (Cf. Maurer, Gesch. der Dorfrorfassung, 1, pp. 313
et suiv.)
( 265 )
Cependant, les habitants pouvaient changer de séjour,
quand ils avaient satisfait à toutes leurs obligations, et
dans les territoires seigneuriaux le seigneur devait alors
les accompagner jusqu'aux limites de la marke. Cf. Charte
de Walcourt, 1208 [Monum. pour servir, etc., p. XXVII) :
Tous bourgeois se peuvent partir de la ville, quand ilz
veullent.... et se celuy que se part a charroy a chargier, il
doibt eslre conduit par la ville tant comme la poosté
d'icelle dure. »
Or, les maisons elles-mêmes continuèrent pendant long-
temps à être considérées comme biens mobiliers, elles
étaient construites en bois et pouvaient se transporter
aisément. (Cf. Thudichum. Altd. Stnaf, p. 120. Maurer.,
Gesch.der Fronhofe, III, 125-128, Gesch. der Dorfierfas-
sung, I, 513). Par dérogation à la défense générale d'expor-
ter les bois de la marke, on permettait souvent à celui qui
quittait le territoire, d'emporter sa maison.
Cf. Charte de Montigny, I2o5 (Waulers, Preuves,
p. 185} : « Ordeneil est ke se li bouriois vuet aler manoir
fors de le vile de Moutegni, ke li sires le doit conduire
fors de le banliwe...; s'il en vuet mener ses maisons,
mener lesenpuet; se vendre les vuet, vendre les puet... »
Cf. Keure de Saffelaere, 1264 (Warnk., lïl, 2%
n" CLXVÏ). Art. 42 : « Qui domum propriam extra villam
deduxerit, solvat domino II solidos. » Art. 45 : « Qui
domum emerit in villa de Saffelaere et eam de villa expor-
tare fecerit, solvat..., etc. »
Cf. Charte de Landrecies, 1200 {Momim. pour servir à
Vhistoire, etc., I, 554): « Nulla domus vendi potest, ita ul
extra villam ducatur. »
Une autre restriction imposée aux compagnons était
celle qui ne permettait la vente de leurs terres qu'à cer-
( 26G )
taines conditions; elles devaient être offertes publiquement
d'abord aux parents du vendeur, ou môme à la commu-
nauté, et chacun des membres de celle-ci avait dans des
limites fixées un droit de préemption. (Cf. Maurer, Gesch.
der Markenverfassung , p. 184. — Gesc/i. der Dorfcerfas-
sùng, I, p. 520. — Gesch. der Fronhofe , III, p. 74.) Ceci
était en rapport avec le principe d'après lequel la famille
entière avait un certain droit à la propriété allodiale. (Cf.
Roscher, Nation. Œkon., II, § 88). Jusqu'au XY" siècle on
lit peu de testaments dans la classe moyenne; et généra-
lement la vente de fonds qu'on possédait en pleine pro-
priété n'était valable qu'avec le consentement de l'héritier
le plus proche. Il devait en être de même au moyen âge
pour tous les compagnons de la niarke.
Nous retrouvons des traces de ce principe dans la Keure
du pays de Waes de 1241 (Warnk., II, 2°, p. 182), dont
l'art. 51 stipule que si quelqu'un veut vendre son héritage,
il doit en donner connaissance pendant trois dimanches,
dans l'église : « Si autem propinquus illius haereditatem
illam emere voluerit , emat eam infra illas très dominicas,
expletis vero illis tribus dominicis hœreditatem illam po-
lerit extraneus comparare. »
Dans la Keure de Caprycke, 1240 (Warnk. II, 2°, p. 213),
art. 8, ce principe a disparu : celui qui veut vendre sa
terre, peut le faire cuicumqne vulueril, nnlla obstanle pro-
pinquiiale. Il en est de même à Gand (Keure de 1191,
art. 19), (Gheld., III, p. 76).
La Charte de Landrecies, 1200 [Monnm. pour servir à
C histoire, etc., I, 555), nous apprend que le bourgeois,
mourant sans laisser d'héritier, ne peut disposer que de la
moitié de ses biens; le reste retourne à la communauté.
Mais le document où s'est conservé le meilleur souvenir
( 267 )
de l'ancien ordre de choses, est un règlement de partage
de biens communaux situés à Alera (Cartul. de St-Trond,
J, So8), et dont la possession était litigieuse entre die ghe-
ineijn rjhebuer tan Alern et le prévôt de cette localité; il y
est stipulé que si l'un des copartageants veut aliéner son
lot, le prévôt pourra exercer le retrait, en fournissant le
prix convenu pour l'acquisition.
On voit que nos anciennes chartes ont conservé d'une
manière très-incompjète, mais cependant assez claire, les
traces de l'organisation primitive de la marke.
Une obligation qui s'est maintenue intacte est celle de
prendre les armes pour la défense du territoire de la com-
munauté et spécialement pour celle de chacun des compa-
gnons; il suffit que l'un d'eux crie aux armes, ivapene! ou
encore commune! pour qu'immédiatement les autres soient
tenus d'accourir. C'est ce que stipulent expressément même
plusieurs chartes de villes, par exemple la Keure de Cour-
Irai, 1524 (Warnk., Il, 2" p. 1 41), § 5 . « Item nous appro-
vons et cont'ermons que s'il avenoit que aucune personne,
qui ne fust bourgeois de nostre dicte ville de Courtray,
metoit mal pour mal en aucun bourgeois ou bourgeoise de
Courtray et cils bourgeois ou bourgeoise criassent : Com-
muigne, tout !i bourgeois, qui le verroienl ou orroient, li
(luivcnl aidier... i>
On voit par là que ce cri de commune! n'a aucun carac-
tère séditieux, et qu'il implique seulement l'appel à la
communauté entière. Celui qui ne répondait pas à cet appel
était sévèrement puni. (Cf. Loi de S'-Amand, 1164, Wau-
ters, Preuves, p. 27. — Chartes de Soignies, 1142. Ibid.,
p. 19. — Keure d'Anvers du XIIP siècle (Mertens et Torfs,
II, 29). — Voir aussi Raepsaet , Œuvres complètes, V, 357,
Ô77, r>83).
( 268 )
Une obligation non moins intéressante et qui résulte
directement de l'ancienne collectivité de la propriété, c'est
la garantie mutuelle, qui est inscrite dans la Keure de
Furnes (Warnk., II, 2", p. 7i), art. 11 : « In quacumque
villa combustio facta fuerit occulte, tota villa statim solvat
damnum » Warnkonig et Gérard {Hist. des Carolin-
giens, II , p. 456), se sont trompés en voyant dans ce pas-
sage la preuve de la responsabilité collective, le Gesamml-
biii'gschaftûupagus.WQÏtz [DeutscheVerfassHngsgeschic/ite,
P, pp. 424-473) a prouvé que celle-ci n'existait ni pour le
pagus, ni pour la centène, car ni l'un ni l'autre ne forment
une corporation; mais les mots : in quacumque villa de la
Keure de Furnes désignent bien évidemment un simple
village; c'est donc du village comme communauté territo-
riale qu'il s'agit ici; il est à remarquer d'ailleurs que le
mot villa dans la loi salique est employé dans le sens de
marca (1).
De tous ces faits il résulte, à n'en pas douter, que la
marke a été constituée chez nous comme dans les autres
pays germaniques.
On pourrait dresser une liste interminable des villages
dont les pâturages communaux se trouvent cités dans les
chartes; mais en général les anciens cousagers n'avaient
pas réussi à maintenir leurs titres de propriété libre sur
les fonds communs; c'était là le résultat du développement
de la féodalité; presque partout le seigneur, laïque ou
ecclésiastique , s'était attribué le droit de propriété et il ne
{!) « Villa dans le titre 45. Sal. a le sens de marche ; migrarc in villa :
c'est exactement s'établir sur le territoire d'une marche. « (M. Thcvenin.
dans la Revue criUque. 1875, 2, p. 174. )
( 269 )
permettait l'usage que moyennant redevance. (Cf. Maurer,
Gesch. der Markenverf, p. 51.)
A Dinant, lOGO (Wauters, Preuves, p. 249) les waris-
capii appartenaient au comte de Namur (représentant de
l'Empereur).
A Douai même, où le comte de Flandre (1241, Warnk.
il, 2°, p. 260) reconnaît le droit absolu des habitants aux
terres communales et leur en accorde la jouissance gra-
tuite, ils doivent cependant 10 sous par an de ce chef.
A Halen (Limbourg) ils payent un denier d'or ou o sous
de Louvain (1243. Cart. deS'-Trond, I, p. 261).
Ces prétentions des seigneurs à posséder les terres
communes ont causé fréquemment des désaccords longs à
régler. Ainsi à Frasnes (Wauters, Preuves, p. lo7), à
Sirault [Ibid., p. 142), « il disent ke li bos estoit leur, »
à Jeltefaulx [Ibid., p. 183), à Nivelles, 1290 {Brab. Yeest,
Codex, I, p. 673).
Dans un arrangement conclu entre l'abbé de S'-Trond
et lés échevins d'Helchleren [Cart. deS^-Trond, I, p. 500),
nous voyons que l'abbé avait évidemment usurpé sur les
bois de cette localité des droits qui compélaient primitive-
ment aux cousagers.
Je citerai encore le diflerend entre l'abbé de S'-Berlin
et les bourgeois de S'-Omer au sujet de la pâture du
Zwinart (Malbrancq, De Morinis, III, p. 724).
Souvent ces litiges amenèrent le partage des biens com-
munaux; c'est ce que j'ai rappelé déjà pour Alem [Cart.
de S^-Trond, I, o58). De même à Diesl (Wauters, Mém.
sur Jean /«^ p. 293).
On a rencontré dans les énumérations qui précèdent les
noms de plusieurs villes ; en effet ce n'étaient pas seulement
les villages qui possédaient des pâturages communaux.
( Tii) )
Anvers a son hcmcde : 1186 « Pascua et lerrœ ad coni-
rnunem justitiam pertinentes.... quœ vulgo hcmclhe vocan-
tur. » (Mert. elTorfs, Gesch. v. Antwerpen, I, 31. Wauters,
Preuves, p. 48) et son Opskdle [Brab. Yeesfen, Codex, I,
p. 677. Keure d'Anvers du 21 févr. 1291.)
A Louvain, on fait en 1523 nne enquête au sujet des
prairies communales, ghemeene veeweyde. {Brab. Yeesten ,
Codex, l, p. 76i. Voir aussi Cliron. de J. de Klerk, I, 641,
en 1234, et sur VOpskdle: Brab. Yeesten, I, p. 750, Keure
du 17 septembre 1506.)
A Ypres il est fait mention d'un Upstal en 1111. (Gheld.,
V, p. 520.)
A Gand la Keure de 1192 défend aux particuliers de
disposer des terrains loti oppido communia et d'y bâtir.
(Gbeld., III, p. 226, § 17, cf. Gheld., II, p. 26.)
A Malines, 1204, Wallcr Berthout cède aux habitants
une terre: «usu communi absque clausura hereditario jure
perpétue possidendam. » (Wauters, Preuves, p. 212.)
Je pourrais citer encore Soignies, 1142 (Wauters ,
Preuves, p. 19),Montigny-sur-Sambre, 1255 [Ibid., p. 182);
S'-Trond, 1524 [Cart. de S'-Trond, I, p. 462), etc.
Il faut bien se garder de croire que ces biens commu-
naux n'étaient dans les villes que les restes d'un état de
choses ancien , auquel on n'attachait plus guère d'impor-
tance. La Keure de Grammont, 1068 (Warnk., II, 2" 163)
nous apprendra le contraire. Cette ville, on le sait, avait
été fondée par Baudouin Vî sur un alleu, qui avait appar-
tenu cà un certain Gérard , mais ce terrain étant insuffisant,
le comte remit la ville an seigneur de Boulaere à titre de
fief, et celui-ci, en échange, fournit à la cité nouvelle les
pâturages qui lui manquaient : « In recompensationem
feudi prîcnominati, Balduino comitis ad usus Geraldi-
( 271 )
montensiiim Biizemont, sicut ipse possedit, et Cortelake
et pasliiram... (énumération de tous les pâturages)... ad-
didit insuper quod quibuscumque aquis et pascuis Iiomines
sui ulerenlur, liceret Geraldimontensibus uti commu-
niter. »
De même à Douai, en 1241 (Warnk., II, 2", p. 261), le
comte de Flandre reconnaît aux bourgeois le droit aux
pâtures et marécages qui se trouvent autour de la ville; ils
ont le droit d'y prendre ce qui est nécessaire à leur usage
personnel , sans rien payer : « car ils n'estoient tenu
anchiennement en nulle cose pour chou. » De plus, le
comte s'engage à ne jamais donner à personne une por-
tion quelconque de ces pâturages, sur lesquels les habi-
tants de Douai ont un droit absolu, ni de les laisser
enclore.
Les villes ne mettaient donc pas moins de prix que les
villages à la conservation et à la bonne administration de
leurs biens communaux. Cette administration, comment
se faisait-elle? On conçoit qu'une corporation comme celle
de la marke exigeait des fonctionnaires. Il fallait une
autorité pour régler l'usage des communia, pour assurer
la réciprocité des droits et des devoirs, pour diriger les
travaux communs, lever les impôts, etc.
Cette autorité dans le village était celle du major, maire,
nommé aussi prœpositus, burgermeister, bauermeister, vil-
liens, quelquefois amman,prociirator,jiidex loci ou villœ,
quelquefois même cornes et grafio loci, dorfgreve.
Ce maire était souvent seul , tel est le cas dans les vil-
lages de Moorsele, Gheverghem , ^Yiense (Warnk,, II , 2°,
p. 242), mais il pouvait être entouré de conseillers, juralî,
raden, gezworene , coralores , coremannen.
Les rapports du chef de village avec la possession de
( 272 )
terres communales sont très-visibles à Halen, par exemple
(1248, Cart. de S^-Trond , l, p. 211). L'abbé de S'-Trond
cèdedesmaraiset des prés /jroco»im«u//jascHa;en échange
ses tenanciers payeront un denier d'or ou S sous de Lou-
vain, et ils établirent comnmniter un mambourd qui répon-
dra de ce cens.
La Charte de Berkin et Steenwerk , M 60 (Warnk., II,
2", p. lo2) montre quelle était la position du chef de vil-
lage par rapport à la communauté; celle-ci avait le droit
d'élire un minisler, « qui eos manuteneat,cui respondeant,
qui eos prsesente dapifero nostro vel nuntio ad causam
convocat et eos salvojure nostro ad justiliam advchat. Ils
ont le droit de déposer ce minister et de le remplacer à
leur gré. — Il en est de même à Landrecies , 1200 [Cari,
du Ilainaut, Monum. pour servir, etc., I, p. 536). « Est etiam
istud de jure burgensium quod quemdam prœrectum inter
se constituere debent et singulis annis, prout justum et
utile eis visum fuerit,mutuare et alium substituere. « Cette
disposition suit immédiatement le paragraphe de la charte
relatif aux « anliqiias et communes aisias villae de vivario
et in herbis coUigendis et in cooperlura domorum congre-
2;anda et in lignis... et in pascuis... etc. »
Les fonctions du chef de village s'expliquent d'ailleurs
par son origine et son caractère; c'est lui qui veille à
l'usage régulier des biens communaux; c'est lui qui main-
tient la paix et la fait jurer aux compagnons; à ce litre il
a aussi une juridiction, mais elle est purement corporative,
elle n'a aucun caractère public; c'est lui qui veille aux
poids et mesures, par exemple à Rhodes (Wauters, Hist.
des environs de Bruxelles, III, p. 691).
Comme représentant des cousagers et ayant possédé
anciennement le privilège de mettre entre leurs mains
( 273 )
la terre qu'ils pouvaient cultiver, le maire avait conservé
jusqu'au moyen âge la prérogative d'après laquelle, lors
d'un transfert, la terre passait par sa main et lui seul
pouvait en investir le nouvel occupant. Cf. à Soignies ,
1248-49 (Wauters, Preuves, p. 172) : « toutes les terres
del commun,.... li doit-on reporter en se main, pour desi-
reter et aireter. » Les institutions anciennes semblent
s'être conservées là avec une grande pureté. Nous voyons
le maire, avec le concours des verejurali, donner à chacun
sa mesure des terres communes de S'^-Vincent; le cache-
poul, sorte de messager, porte la ligne, le recb germa-
nique.C'est au maire qu'il appartient d\iboner, c'est-à-dire
d'aborner les champs (Wauters, Preuves, pp. 19 et 22).
Nous y rencontrons aussi d'autres fonctionnaires infé-
rieurs, les niessiers, correspondant aux messer, feldmesser,
landmesser (Maurer, Gesch. cler Dorfverfassiing, If, p. 97)
qui étaient chargés en Allemagne de mesurer et de déli-
miter les champs, et qui sont devenus une espèce de
gardes champêtres. Ces mêmes messiers , messarii , se
retrouvent comme mesureurs dans le pays de Waes,à
Huist et à Axel {Cart. de Cambron, p. 466); d'autres
agents subordonnés au maire sont dans les régions boisées,
les forestiers^ si fréquents dans nos chartes.
Pour en revenir à la charte de Soignies , il y est fait
mention aussi de parcheniers, c'est-à-dire de participants
à la terre, ce sont les véritables cousagers, milgenossen,
commarcani.
Ces mêmes parcheniers sont indiqués dans un règle-
ment de 1248 sur l'extraction de la houille à S'-Ghislain ,
Dour, Quaregnon, Boussu, etc. (Gachard, Docum. inédits,
I, p. 107) « Et en tous ces ovrages chi devant nommés ne
2"* SÉRIE, TOME XXXVIM. 18
( 274 )
piiel on f'oir carbon devens les i ans deseure escris, en
toute l'uevre et le justice S. Gillain et ses pareeniers,
ka XX puits; en le justice et l'uevre Sainte Wauldruth et
ses pareeniers, ka vi puits, etc. » On retrouve là la pro-
priété collective du charbon qui s'est conservé plus long-
temps que la communauté agricole, parce que sans terre
il était difficile de délimiter des parts.
Entre les parcheniers du Hainaut et les éc/ievins des
parchons de Gand n'y a-t-il rien qu'une simple coïncidence
de noms? je ne le crois pas. Les conseillers de nos villes
sont les successeurs des anciens jurati qui aidaient le
maire dans ses fonctions administratives. Dans toutes les
villes anciennes, dit Maurer [Gescli. der Stàdleverfassung ,
\ , p. 458), on trouve toujours deux collèges, les fonction-
naires publics, chargés du maintien de la paix publique,
et les fonctionnaires de la corporation territoriale, les con-
seillers, qui ont à soigner les affaires de la marks urbaine
(Omnia civitatis décréta {Kore) consules judicabnnt). La
Kore est en rapport étroit avec la création d'un conseil en
Allemagne. (Cf. Maurer, Ibid., III, p. 185: Kùren ou Kore
à Lubeck et à Hambourg, Willk'àren à Brème, à Stendal,
Seligenstadt, Kiiren à Neuss, etc.)
Il en est de même dans nos contrées. La Keure d'Ar-
qués, I25I (Warnk., lll, 2", n° CLXVl) fait une distinction
formelle entre les échevins, scabini, et les fonctionnaires
de la Keure, C/ioremanni , et les §§ 12 et 15 indiquent
parfaitement les liens qui ratlachaient ces derniers à l'an-
tique constitution de la marke.
§ 12. Pastura, quse Communitati villse concessimus,
libéra eis remaneat ab ornni usuagio animalium nostrorum.
§ 15. De communi pastura disponant Choremanni con-
silio Prîepositi, quœ rationabiliter fucrinl disponenda, et
( 27d )
qui contra disposilionem factam porcos vel armeuta mise-
nt in pasluram , ipsa amidat.
Ces chorehianni élaient annuels, tandis que les éche-
vins restaient en fonctions tant qu'il plaisait à l'abbé de
S'-Bertin. La même différence existait dans plusieurs
villes d'Allemagne, par exemple à Slendal. (Gierke, Genos-
senscliafsrec/it, II, p. GI3.)
Quant à la con)pétence relative des deux collèges, voici
ce que portent l'art. I et l'art. 2 : Scabinos habeant et
choremannoa , per qiios nerjotia lerminentur (c'est la fonc-
tion des échevins de terminer les différends) et communes
utilitates disponantur (c'est la fonction des choremanni ,
l'administration.) — Scabini judicent de Us qiiœ pertinent
ad scahinanim (ce sont des fonctionnaires publics, car
l'échevinage est l'émanation de l'autorité publique) •,c/iore-
manni de pace tractent et de ulilitale communitalis villœ
et de forisfactorum emendalione.
On voit par ce dernier paragraphe que le rôle des chore-
manni était triple : 1° ils maintenaient la paix , pour cela
ils devaient faire jurer des trêves, conformément à l'an-
cienne coutume germanique. Or c'était là le devoir des
fonctionnaires de la marke. (Cf. Maurer, Stddteverf., lîl,
pp. 145 et suiv.) Les choremanni de Poperinghe avaient les
mêmes attributions (Keure de 1209, art. 18, et Keure de
1255, art. 20, Warnk., 2'^ pp. 112 et 116). « Si inter juratos
discordia ortafuerit, justiliariuscoram choremannis débet
pacem exigcre (1). » II en était de même à Gand où les
(1) W'arnkônig-, II, 52», 76, se demande si cosjurati de Poperinsbe con-
slituPiU un troisième collège; mais il est bien évident que ce sont tout
simplement les bourgeois qui ont juré la keure. Le même terme figure
dans la Keure d'Arqués où toute méprise est impossible : art. 6 : « Jurare
( 276 )
fonctions de juges de paix étaient exercées par les con-
seillers et plus tard par les échevins des parchons. (Warnk.,
J, p. 580), et à Valenciennes, 1275 (Wauters, Prewres,
p, 250) où \esjurati font prendre et maintenir les trêves.
2° Les choremanni d'Arqués veillaient à l'utilité de le
communauté, ils étaient de véritables administrateurs.
5° Ils avaient une certaine juridiction criminelle; ce
dernier point qui ne peut être examiné ici en détail ,
indique déjà une grande transformation dans la position
des magistrats de la communauté; ceux-ci avaient eu de
tout temps une certaine juridiction sur les cousagers; mais
elle était purement corporative, elle n'avait aucun carac-
tère public (cf. Sohm, AltcL Beiclis- und Gerichtsverf.,
I, p. 252); le jour où leur tribunal devient un tribunal
public, l'organisation communale entre dans une pliase
nouvelle.
Ce qui est très-apparent, c'est que ces choremanni
sont les successeurs directs des fonctionnaires de la marke;
tlebent choremanni.... se servaluros.... jura omnium bominum lam extra-
iioorum quam juralorum suorum (lant les étrangers que les bourgeois). "
L'article 7 oblige » omnes in villa manentesjurare choram » et l'article 11
porte : « si quis de manenlibus in villa et juratus in cbora. » L'article 18
ordonne que si le prœco a pris gage sur quelqu'un sans le jugement des
choremanni , il payera trois livres au seigneur et cinq sous jiirato , c'est-
à-dire au bourgeois chez lequel il a fait une saisie illégale. Citons encore
l'art. 38 : « si quis de chora conjuratum suum contumeliis... alFecerit...; »
con juratus, c'eut son confrère en serment; et l'article 47 d'après lequel
dans certains cas l'intervention d'un fonctionnaire inférieur non juratus
ne vicie pas une procédure, pourvu que deux choremanni aient été pré-
sents, parce que les clioremanni eux-mêmes sont jurait.
Ce qui a pu faire naître un doute, c'est que dans la Keure de Pope-
riiigiie la terminologie est moins exacte; ainsi aux art. 5et 18 (K. de 1253),
le motdeyara/i est pris comme synonyme de choremanni.
( 1277 )
ils en ont les attributions essentielles; or ces choremannt
nous conduisent tout droit aux jiirati (la Keure de Pope-
ringhe leur donne déjà ce nom) et aux conseillers. Entre
ceux-ci et les échevins il y a dans l'origine cette différence
profonde, que les échevins sont les fonctionnaires judi-
ciaires et les conseillers les fonctionnaires administratifs.
C'est ce que Raepsaet {Analyse, n^SST) avait entrevu,
mais sans pouvoir en rendre compte.
Toutes nos villes, même les plus petites, ont eu jus-
qu'à une certaine époque, \eurs jiirati à côté de leurs
échevins. Je cite presque au hasard :
1 1 4-2. Soignies : verejurati et scabini. (Wauters, Preuves,
p. 18), et 1248-1249 : 7 jurés et 10 échevins {Ihid.,
p. 172.)
1147. Poperinghe (Gheld, II, p. 266).
1168. Fumes {Ibid.).
1185. Gand [Ibid.].
H85. Cambrai (Wauters, Preuves, p. 46).
1206. Haelen (/6zd., p. 64).
1211. Nederyssche [Ptrab. Yeesten, I, p. 617: six hommes
élus par les habitants lèveront chaque année l'impôt).
1211. Tournai (Gachard, i>oc. inéd., I, p. 95: ôO jurât i).
1215. Léau [Brab. Yeesten, I, p. 618. Ipsi burgenses sex
juratos eligant inter se, qui cum scabinis excessus oppidi
corrigentes, de honore et utilitate oppidi tractent).
1219. Courtrai (Wauters, Preuves, p. 74).
1220. Trazegnies {Ibid., p. 76).
1251. Neuville et S'-Amand {Ibid., p. 1 18). Les échevins
seront en même temps scabini el jurati. Il en était de
même à Furnes).
1256. S'-Trond {Ibid., p. 155 et 264).
1257. Valenciennes (/ôîc/., pp. 156 et 141).
( 278 )
1240. Furnes (Warnk., lî, 2", p. 73 : qui scabini erunt,
erunl et coralores).
12ol. Louvaiii (Wauters, Preuves, p. 17G).
1255. Montigny (/6/rf., p. 182: les 7 jurés doivent faire
l'assise).
1265. Bruxelles {îbid., p. 210).
1277. Cassel, 7 échevius et o jurés (Ghekl , V, p. 258).
Ces jiirati reçoivent fréquemment le nom de conseillers,
par exemple à Courtrai, 1524 (Warnk., IL 2", p. 140) :
7 éclieviiis 24 jurés ou consaux.
De tout ceci il résulte que le conseil, raed, de nos
grandes communes descend en ligne directe des anciens
administrateurs corporatifs de la communauté territoriale.
Mais peut-on affirmer qu'il ne soit rien de plus, que les
fonctions et le caractère de l'un et de l'autre collège soient
demeurés identiques? Évidemment non. Avec le dévelop-
pement de la ville se sont opérés des changements impor-
tants dans la vie et dans l'organisme de la commune. Je
ne puis aborder ici l'étude de celte face de la question qui
doublerait au moins l'étendue de cette notice déjà trop
longue. Je me borne donc à quelques considérations géné-
rales.
La communauté primitive est basée sur la propriété col-
lective; elle ne résulte pas d'une conjuration, elle est l'ex-
pression même d'un besoin créé par les rapports de voi-
sinage. L'État germanique est un Uechtsslaat (cf. Zoepfl,
/). Rec/itsgesch., ^'^ 189); il veille avant tout à la sécurité
publique et il ignore complètement l'administration locale;
celle-ci est donc tout entière réservée au self-government.
C'est ainsi que se crée la commune. Ses seuls membres
oplimo jure sont les cousagers, ceux qui possèdent un
héritage et qui comme tels peuvent participer à la jouis-
( 279 )
sance de la marke; ce sont les bourgeois hériUibles, viri
hereditafi (1).
Tous les autres habitants de la commune ne sont pas les
véritables compagnons; ils ne sont qu'établis sur le terri-
toire, ingezelenen; ils peuvent être libres et ils le sont du
jour où domine ce principe que Vair rend libre, mais ils
ne possèdent pas tous les privilèges et surtout ils ne jouis-
sent pas des droits actifs de la bourgeoisie optimojure.
Mais le moment arrive où l'ancienne marke perd de son
importance, où les villes en se peuplant finissent par cou-
vrir de bâtisses tous leurs terrains vagues; alors la com-
munauté primitive menace de se dissoudre, elle n'a plus
sa raison d'être, les liens qui unissaient les compagnons
se relâchent; c'est alors que pour donner à leur union
une consécration nouvelle, ils empruntent à un domaine
étranger, celui du commerce, l'idée de l'association volon-
taire; la gilde fait son apparition dans la vie publique, et
la bourgeoisie patricienne se montre désormais sous la
forme d'une gilde patricienne; ici, et pas avant, il est
permis de parler de la gilde dans l'histoire du développe-
ment communal.
D'autre part, concurremment avec ce mouvement de
transformation intérieure, il s'opère un rapprochement
(1) Les viri hereditati éLaieiit seuls autorisés à vendre les terres coni-
inunales. Ainsi à Lens, 1225 (Cartul. de Cambron, p. 290), l'abbaye de
Cambron achète des prés communaux; le contrat se fait entre le bailli , le
maire, les six échevins de Lens et tous les Kiess (chefs) d'hostel de la
ville, c'est-à-dire les propriétaires de maisons. Ils cèdent « une hirkuyte (?)
de prêts, pasturage, aulnoez, faulchoit, wareskais, et relais, « qui avaient
été possédés parla communauté «comme leur hiretageetcomun aysement
seulxet jiar yauls, par tel et si ancien temps qu'il n'esloit mémoire du
contraire. »
( 280 )
entre le collège public et le collège corporatif, les échevins
deviennent administrateurs; de bonne heure on s'était
accoutumé à considérer le tribunal échevinal comme le
centre de la vie communale. Les conseillers de leur côté
tendent à devenir les véritables représentants publics de
la ville; en Allemagne ils prennent cette position; dans
nos villes flamandes ils se fondent généralement avec
l'échevinagCy souvent ils disparaissent. Mais dans l'un cas
comme dans l'autre, et quel que soit le nom des collèges
municipaux, la ville ne peut se dire une commune libre
que le jour où elle a acquis pour son propre compte et où
elle exerce la synthèse des droits qui chez les Germains
primitifs trouvaient leur expression dans la centène d'une
part et dans la marke de l'autre.
Cette esquisse rapide doit suffire ici. Ma tâche n'était
point d'écrire une histoire du développement communal ;
j'ai cherché seulement à établir que nos magistrats com-
munaux au moyen âge avaient une double origine et un
double caractère : les échevins sont les juges de la centène
franque, les conseillers sont les administrateurs de la
Markcjenossenschaft germani()ue.
( 28i )
CLASSE DES BEAUX- A.RTS.
Séance du 2 juillet 1874.
M. N. De Keyser, directeur, président de l'Académie.
M. J. f^iAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. Alvin , G. Geefs, J. Geels, Ferd.
De Braekeleer, C.-A. Fraiidn, Éd. Fétis, Edm. De Bus-
scher, Jean Portaels, Auguste Payen, le chev. Léon de
Burbure, J. Franck, G. De Man, Adolphe Siret, Julien
Leclercq, Ernest Slingeneyer, Alex. Robert, Adolphe
Samuel, membres; F. Stappaerts, correspondant.
M. Éd. Mailly, correspondant de la classe des sciences,
assiste à la séance.
CORRESPONDANDE.
M. le Ministre de l'intérieur demande l'avis de la classe
sur le mérite artistique et la ressemblance qu'offre le mo-
dèle du buste de feu M. Ad. Quetelet, commandé pour
l'Académie à M. le statuaire Fraikin.
Ce modèle a été unanimement approuvé. Avis en sera
donné à M. le Ministre.
( 28-2 )
Par lettre du 29 juin, le même haut fonctionnaire fait
une demande semblable au sujet du modèle du buste de
feu M. le colonel Dandelin, que M. le statuaire Van Oem-
berg a été chargé de faire conformément au vœu émis par
la Compagnie.
M. le Ministre sera prié d'inviter M. Van Oemberg à
faire transporter ce modèle au local académique, afin qu'il
soit soumis à l'examen des membres de la classe des beaux-
arts, ainsi que des membres de la classe des sciences, à
laquelle a appartenu M. Dandelin.
— La classe renvoie à la section permanente des jurys
des grands concours de composition musicale une lettre
de M. le Ministre de l'intérieur, du 20 juin dernier, de-
mandant s'il n'y a pas lieu de donner à M. Franz Servais,
lauréat du concours de 1873, d'autres instructions que
celles mentionnées à l'article 24 du règlement du 6 mars
1849, avant son départ pour l'étranger, fi^é au 1" juillet
prochain.
— Des reraercîments sont votés à M. le Ministre pour
l'envoi d'un exemplaire de la l"" livraison de la dixième
année du Trésor musical, publié par M. Robert Van Mal-
deghem.
— La Société d'antiquités, à Ulm, envoie ses dernières
publications.
( 285 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Conformément à Tordre du jour, la classe procède à ia
discussion du projet d'établissement à fonder à Rome pour
les lauréats des grands concours.
Ce projet est admis à l'unanimité, article par article,
puis dans son ensemble , après deux observations aux-
quelles la classe s'est ralliée.
Voici le projet, tel qu'il sera communiqué au Gouverne-
ment :
« La classe des beaux-arts, considérant la situation
fâcheuse dans laquelle se trouvent les lauréats des grands
concours durant leur séjour dans la ville de Rome, décide
que le projet dont la teneur suit sera adressé à M. le Mi-
nistre de l'intérieur comme l'expression du vœu de la
Compagnie :
Art. i'^'. Le Gouvernement belge se procurera , dans la
ville de Rome, une maison assez spacieuse pour y loger au
moins six pensionnaires, et pour y établir quatre ateliers
de peintres et deux de sculpteurs.
» Art. 2. Les lauréats peintres, sculpteurs, architectes,
graveurs et musiciens y seront logés pendant la durée de
leur séjour.
» Art. 5. Pourront, en outre, être admis dans l'insti-
tution, à des conditions à déterminer, les jeunes artistes
belges jouissant de pensions allouées par une autorité pu-
blique.
» Art. 4. Tous les pensionnaires sont libres dans leurs
travaux , sauf les obligations que les règlements généraux
en vigueur imposent aux lauréats des concours généraux.
( 284 )
» Il y aura dans l'établissement une salle de réunion où
les pensionnaires pourront se livrer à des études com-
munes. Ils pourront également y recevoir les artistes étran-
gers, ainsi que les Belges de passage à Rome.
» Ces derniers pourront obtenir l'usage temporaire des
ateliers qui ne seraient point occupés.
» Art. 5. Les ouvrages que les lauréats sont tenus
d'exécuter durant leur séjour en Italie seront exposés dans
la salle commune de l'établissement, laquelle sera alors
accessible au public.
Art. 6. L'institution est gérée, sous le rapport matériel
et administratif, par un fonctionnaire qui aura dans ses
attributions le maintien de l'ordre. La haute surveillance
appartient au chef de la légation belge. »
— M. Slingeneyer témoigne le désir de voir la classe
s'occuper de la question des résultats à attendre, par le
Gouvernement, des études artistiques de ses pension-
naires à Rome.
L'honorable membre est invité à rédiger sa motion par
écrit, pour la prochaine réunion, fixée au jeudi 6 août.
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Commission royale (Vhisloire. — Monuments pour servir à
IMiisloire des provinces de Naniur, de Hainaut et de Luxem-
bourg, tome III, édité par Léopold Devillers. Bruxelles, 1874;
vol. in-4°.
Commission pour la publication d'une colleclion des œuvres
( 28o )
des grands écrkains du pays. — Clironiques de Froissart.
tome XIX' (Glossaire), par M. Aug. Scheler; — Lettres et
négociations de Philippe de Comraines, tome III, par M. le
baron Kervyn de Lettenhove. Bruxelles, 1874; 2 vol. in-8°.
Juste (Th.). — Les fondateurs de la monarchie belge :
Alexandre Gendebien. Bruxelles, 1874; vol. in-8°. (Envoi du
Ministère de l'intérieur.)
Malaise (C). — Exposition universelle de Vienne, 1873.
Documents et rapports des jurés et délégués belges. 1 " groupe :
Géologie. Bruxelles, 1874; cah. in-8°.
Heremans [J.-F.-J.]. — 0\ er den invloed van Noord-Neder-
land op de letterkunde in de zuidelijke provincien; — Be-
knopte nederlandsche metriek, tweede druk. Anvers et Gand ,
1874; cah. in-12 et feuille in 8".
Barlel {Ed.). — Les rues de Liège. Biographies et notices.
Liège, 1874; vol. in-12.
Dubois {Alphonse). — Les lépidoptères de l'Europe, l"^" série
(espèces observées en Belgique), 60 à 02™" livr. Bruxelles,
1873-1874; 3 cah. in -8°. (Envoi du Ministère de l'intérieur.)
Far/en. — Photographie représentant des pièces de mon-
naies d'or de l'empereur Maguence (550 à 553 après J.-C.),
trouvées en 1868, à Juslenville; carton in-8°.
Firket {Ad.). — Cartes statistiques de la production des
carrières et de la production de la circulation et de la con-
sommation des rainerais en Belgique, pendant l'année 1871.
Liège; broch. in-8°.
Jacques {Léon). — Etude sur la houille du bassin de Liège;
1" partie: houille grasse. Liège; vol. in-8°; — Griffes roses.
Poésies. Paris, 1874; vol. in- 18.
Lelièvre {X.). — Institutions namuroises. Hôpitaux et tables
des pauvres au comté de Namur. Namur; broch. in-8".
Saporta {le comle C") eUMarion {le docteur A. -F.). — Essai
sur l'état de la végétation à l'époque des marnes heersiennes
de Gelinden. Bruxelles, 1873; cah. in-4°.
( 286 )
Mahleghem {Ft.-J. van). — Trésor musical : imisique reli-
gieuse et musique profane, op. 170, 10" année, 1874. Bruxelles;
'2 cah. gr. in-4°.
Province de Brabant. Distribution d'eau. Rapport de la
commission nommée par décision du conseil provincial du
42 juillet 1871. Bruxelles, 1874; vol. in-S" (2 exemplaires); —
Cartes jointes aux projets (1 exemplaire).
Académie rotjale de médecine de Belgique. — Bulletin,
5' série, tome VIII, n" 6, année 1874. Bruxelles, 1874; cah.
in-8°.
Commissions royales d'art et d'archéologie. — Bulletin,
treizième année , n"' 5 et 4. Bruxelles, 1874; cah. in-S".
Commission royale des ancietiîies lois et ordonnances de la
Belgique. — Coutumes du pays et du duché de Brabant,
quartier d'Anvers, tome IV*". Coutumes de la ville d'Anvers,
par G. de Longé. Bruxelles, 1 874 ; vol. in-4°. (Deux exemplaires.
Envoi du Ministère de la justice.)
Analectes pour servira l'histoire de la Belgique , tome XI,
■1874, 11° livraison. Bruxelles-Louvain; cah. in-8°.
Archives communales d'Anvers. — Bulletin, tome VI% IP
livr. Anvers; cali. in -8".
Société archéologique de Namiir. — Annales, tome XII*,
4'' livr. Namur, 1874; cah. in-8".
Bock {Fr.) et Willemsen {M.). — Antiquités sacrées conser-
vées dans les anciennes collégiales de S. Servais et de Notre-
Dame à Maestricht. Maestrichl, 1873; vol. in-8°. (Envoi du
Ministère de l'intérieur.)
Flora Batava, 2i'2% 225% 224^ 22o' en 226" afl. Leyde,
1872; 5 cah. in-4". (Envoi du Ministère de l'intérieur.)
Physiologisch- laboratorium der Utrechtsche Hoogeschool.
— Onderzockingcn, uitgegeven door F.-C. Dondcrs en Th.-W.
Engelmann, derde reeks, II. Utrecht, 1873; in-S".
Hugo {le comte Léopold). — Les cristalloïdes à directrice
circulaire. Paris, 1807; broch. in-8°.
( 287 )
Moreno (François). — Description des cimetières et para-
deros préliisloriques de Patagonie. Paris, 1874;broch. in-8°.
Société d'Émulation d'Abbeville. — Mémoires, 3* série,
1" vol. (1869-1872). Abbeville, 1873^; vol. in-8°.
Revue des questions historiques , IX*" année, 31^ livr.,
r-- juillet 1874. Paris, 1874; in-8°.
Société des études historiques , à Paris. — L'Investigateur,
40"" année, juin et juillet 1874. Paris; cah. in-8°.
Société d'anthropologie de Paris. — Bulletins, tome VIII"
(11"-" série), 5' et 6" fascicules, juillet à décembre 1875. Paris,
1874; 2 cah. in-8°.
Muséum d'histoire naturelle de Paris. — Nouvelles archives,
tome VIII% fasc. I à IV; tome IX% fasc. I à IV. Paris , 1872-
1873; 8 cah. gr. in-4".
Société mathématique de France, à Paris. — Bulletin,
tome II, n°3, juillet 1874. Paris; cah. in-S".
Von Schlagintu-eit-Sakiuiliinski (Hermann). — Mikro-
structurderKiinliiw ïVephrileund vcrwandterGesteine.Broch.
in-8°; 1874.
K. P. Akademie der Wissenschaften zu Berlin. — Monats-
Bericht, April und Mai 1874, Berlin, 1874; 2 cah. in-8°.
Gesellschafl natiirforschender Freunde zii Berlin. — Sit-
zungs-Berichte, Jahrgang 1873. Berlin, 1875; vol. in-S".
K. preuss. geodàtische Instituts. — Astronomisch-gcodii-
tische Arbeilen in den Jahren 1872, 1869 und 1867, von
D"" C. Bruhns ; — Astronomische Bestiranungen fiir die euro-
païschc Gradraessung ans den Jahren 1837-1867, von D""
J.-J. Baeyer; — General-Berïcht ûber die Europaische Grad-
niessung fiir das Jahr 1873. Leipzig et Berlin , 1873 et 1874;
5 cah. in-4''.
Medicinisch-naturxoissenschaflliche Gesellschafl zu lena.
— Jenaische Zcitschrift, VIII. Bd., neue Folge, I. Ed., 2.
Ileft. lena, 1874; cah. in-8''.
Universitàt zu Kiel. — Schriflen aus dem Jahre 1873,
Bd. XX. Kiel, 1874; vol. in-4".
( 288 )
Astronomische Gesellschaft zu Leipziy. — Vierteljahrs-
sphrift, IX. Jalirgang, Erstes Heft. Leipzig, 1874; cali. in-8°.
Deutsche Gesellschaft fur Natur iind Volkerkunde Ost-
asien's. — Mittheilungen, 4'" Heft, Januar 1874. Jokohama;
cah. in-4°.
Société royale des antiquaires du Nord , à Copenhague. —
Aarboger for nordisk Oldkyndighed og Historié, II., III., IV.
Hefte. Copenhague ; 5 cah. in-8".
Genocchi {A.). — Interno ad alcune lettere del Lagrange.
Turin , 1874; broch. in-8".
R. Osservatorio astronomico di Brerain Milano. — Publi-
cazioni, n° 2. Milano, 1875; cah. gr. in-4".
Corrispondenza scientifica in Roma, vol. otlavo, n. 22.
Rome, 1874; feuille in-4°.
Tommasi (/)'" Donato). — Action of benzyl chloride on
haure camphor (laurus camphora); — Action of aramonia
on phenyl-chloracetamide and cresyl-chloracetamide. Londres,
1874, 2 broch. in-S". (Deux exemplaires.)
Asiatic Society of Bengal at Calcutta. — Bihliotheca indica,
new séries, n" 297 and 298. Calcutta, 1874; cah. in-8''.
Philosophical Society of Glasgow . — Proceedings, vol. IX,
n" 1, 1875-1874. Glasgow; cah. in-8".
Sociedad de geograpliia y estadistica de la Republica niexi-
cana, Mexico. — Boletin , tercera epoca, tomo I, n"' 3-7.
Mexico, 1875; 5 cali. in-8''.
(£Î9 1
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
DES
LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE.
1874. — N° 8.
CLASSE DES SCIENCES.
Séance du l^'' août 181 i.
M. E. Candèze, directeur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J.-S. Stas, L. de Koninck, P.-J. Van
Beneden, H. rs'ysl, Melsens, F. Duprez, G. Dewaique ,
H. Maus, M. Gloesener, F. Doony, Ch. Montigny, Steicheii,
A. Brialmont, Éd. Morren, Éd. Yan Beneden, C. Malaise,
membres-, E. Catalan, associé; Éd. Mailly, F. Plateau,
J. De Tilly, F. Crépin, F.-L. Cornet, correspondants.
2*"* SÉRIE, TOME XXXVIII. id
( 290 )
CORRESPONDANCE.
La classe prend officiellement notitication de la mort de
deux de ses membres titulaires, appartenant à la section
des sciences naturelles : M. le vicomte Bernard du Bus
de Gisignies, décédé à Ems le 6 juillet dernier, et
M. Charles Poelman, décédé à Uccle le 17 du même mois.
M. le secrétaire perpétuel donne lecture des lettres de
condoléance qu'il a écrites aux familles des défunts.
M. Félix Plateau accepte la mission de retracer, pour
le prochain Annuaire, la vie et les travaux scientifiques
de M. Poelman.
M. de Selys Longchamps sera prié de faire, pour le
même recueil, la notice biographique de M. le vicomte
Bernard du Bus.
Ces deux notices seront accompagnées des portraits des
défunts.
— Le comité pour l'érection d'un monument à Sylvain
Yan de Weyer adresse une liste de souscription. La classe
fait un accueil favorable à cette liste.
— M. le Ministre de l'intérieur écrit qu'il a invité
M. Van Oemberg à soumettre à l'appréciation des mem-
bres de l'Académie le modèle du buste de feu le colonel
Dandelin.
M. le secrétaire perpétuel appelle l'attention de ses
confrères sur ce modèle, placé dans l'une des salles de la
bibliothèque de la Compagnie. Les membres donnent un
avis favorable sur la ressemblance de ce buste.
( 291 )
— M. le Ministre fait hommage de deux ouvrages qui
seront mentionnés dans le Bulletin de la séance. — Remer-
cîmenls.
— MM. Marion et de Saporla expriment leurs remer-
cîments pour l'accueil fait à leur mémoire Sur Vétat de la
végétation à l'époque des marnes heersiennes de Gelinden ,
dont l'impression a eu lieu dans le tome XXX Vil des
Mémoires {in-4'') des savants étrangers.
— M. le professeur Cavalier, d'Ostende, envoie son
résumé météorologique pour le mois de juin 1874.
— La Société des amis des sciences naturelles de Berlin
et l'Université de Kiel transmettent leurs derniers tra-
vaux.
La Société précitée de Berlin, ainsi que la Société zoo-
logique de Londres, remercient, parla même occasion,
pour l'envoi des dernières publications académiques.
La Société d'Émulation d'Abbeville oflVe le volume de
ses Mémoires pour les années 1869-1872.
— • La classe prend nolilication d'une lettre de M. Wat~
tier, négociant à Lille, donnant connaissance de l'exposé
de diverses découvertes scientifiques qu'il a laites.
— Elle reçoit ensuite , de ses membres, les hommages
suivants :
i" Note sur les surfaces orthogonales , par M. E. Catalan ;
in-^";
2° Note sur la découverte de l'étage du calcaire de
Coiivin ou des schistes et calcaires à calceola sandalina
dans la vallée de VHogneau, par M.^L F.-L. Cornet et
A. Briart; in -8";
( 292 )
M. Catalan présente, au nom de M. B. Boncompagni,
un exemplaire des deux ouvrages suivants de M. Mansion :
1° Cours iVanalyse de l'école polytechnique , par M. Cli.
Hermile, 1"^" partie, compte rendu analytique; in-8";
2" Les mathématiques en Belgique en 18T2:; in-8°;
M. Dewalque offre, au nom de l'auteur, M. A. von La-
saulx, un exemplaire de l'ouvrage intitulé : Bas Erdbeben
von Herzorjenralh ani 22. October ISlo. Ein Beitrag fur
exakten Géologie. In-8".
M. Melsens fait hommage, au nom des auteurs, des
deux ouvrages suivants :
1" Veber die Wirkung des Quecksilbers auf den mensch-
lichen Organismus, von Dr. Josef Hermann, K. K. Pri-
mararzte in Wien. Teschen, 1873; 1 cah. in-4.°.
2" Les engrais chimiques et les matières fertilisantes
à V Exposition universelle deVienne en ^873, par A. Peter-
mann, docteur en sciences, directeur de la station agri-
cole de Gembloux. Bruxelles, 1874; in-8^
La classe vote des remercîments aux auteurs de ces
dons.
— Une note sur la polhodie, par M. E. Catalan, sera
insérée à la suite du mémoire présenté par ce savant dans
la dernière séance.
— La classe renvoie à l'examen de commissaires les
travaux manuscrits suivants :
1° Mémoire couronné sur l'intégration des équations ,
par jM. p. Mansion, revu et corrigé à la demande de
la classe. — Commissaires : MM. Catalan , Folie et
DeTilly;
2" Note historique sur J.-B. Van Helmonf, à propos de
( 293 )
la définition et de la théorie de la flamme, par M. Mel-
sens. Rédaction complétée à la demande des commissaires
chargés d'en faire de nouveau l'examen, MM. Stas, de Ko-
ninck et Donny;
3" Un mot à propos d'une notice du comte de Rosse, sur
les observations de Jupiter, faites en 1873, par M. Terby.
— Commissaires : MM. Ern. Queleletet Liagre;
4" Note sur deux nouveaux chlorures d'acides orga-
niques, par M. Walthère Spring. — Commissaires :
MM. Stas et de Koninck ;
5° Notice sur l'action du pentachlornre de phosphore
sur les hyposul fîtes inorganiques , par le même. — Com-
missaires : les mêmes académiciens;
6° Démonstration d'un théorème de Fermât, par M. P.-A.
Sinions. — Commissaires : MM. Catalan et Folie;
7" Solution de deux questions de permutations , par le
même. — Commissaires : les mêmes académiciens ;
8° Mémoire sur un moteur électro-magnétique à arma-
ture sans fin, par M. A. Daussin. — Commissaires :
MM. Gloesener, Duprez et Montigny.
— La classe accepte le dépôt d'une lettre de M. Wal-
thère Spring à M. Slas, renfermant le paragraphe suivant
relatif à des recherches sur la chaleur spécifique des corps:
« Bonn, le 27 juillet 1874.
» ... Je viens de terminer, la semaine dernière, mes
recherches expérimentales touchant la question de savoir
s'il existe une relation entre la chaleur spécifique des corps
et leur augmentation de volume par la chaleur. Je suis
arrivé à de très-beaux résultats, tant au point de vue pra-
( "294 )
tique qu'au point de vue théorique. Ma méliiode de déter-
miner le calorique spéciliquedes corps me donne des résul-
tats excellents, comme vous pourrez vous en convaincre
par les chiffres suivants :
■> Caloriciue spécilique du mercure. . . 0,0ôô5 (Dulong el Pelil).
— — ... 0,05351 2 (Spring).
» Calorique specifuiue du gniphile. . . 0,-202 (RegiiauU).
— — ... 0,20212 (Spring).
» Il ressort de mes résultats que la chaleur spécifique
des corps est une fonction de leur volume spécifique, de
sorte que les écarts de la loi de Dulong et de Petit concer-
nant la chaleur des atomes trouvent leur explication. Le
produit que l'on obtient, en effet, en multipliant le calo-
rique spécifique d'un corps simple par un poids atomique
ne i>eut pas être constant, puisque le calorique spécifique
est fonction d'un facteur variable.
» Je suis occupé pour le moment à rédiger ce travail;
j'ai encore beaucoup de calculs à faire ^ mais j'espère néan-
moins pouvoir présenter mon mémoire à la séance pro-
chaine de l'Académie... »
RÉSULTATS DU CONCOURS DE 1874.
La classe a reçu quatre mémoires en réponse aux ques-
tions du programme de concours de cette année.
Ces mémoires sont :
A. Un travail intitulé : Classification des intégrales
cubatrices des volumes terminés par des surfaces algébri-
ques, en réponse à la première question : Perfectionner
( 295 )
en quelque point important , soit clans ses principes, soit
dans ses applications, la théorie des fonctions d'une
variable imacjinaire.
Ce travail, accompagné d'un billet cacheté portant pour
devise : iNe rien faire contre la conscience et philosopher
sans souci des sots ni des méchants, est renvoyé à l'exaraea
de MM. Catalan, Steichen et De Tilly.
B. Un mémoire adressé en réponse aux deuxième et
troisième questions suivantes du concours :
2*^. On demande une discussion complète de la question
de la température de l'espace, basée sur des expériences ,
des observations et le calcul, motivant le choix à faire
entre les différentes températures qu'on lui a attribuées; et
5" On demande une étude complète, théorique et, au
besoin, expérimentale, de la chaleur spécifique absolue des
corps simples et des corps composés.
Ce travail, revêtu de la devise : Félix qui potuit rerum
cognoscere causas (Virgile), sera examiné par MM. Mel-
sens, Folie, Montigny et Stas.
C. Un mémoire ayant pour objet l'étude du polymor-
phisme (les champignons, formant la cinquième question,
posée dans les termes suivants :
Le polymorphisme des champignons attire de plus en
plus l'attention des botanistes et des physiologistes. [1
semble même devoir fournir des éléments nouveaux à la
solution du problème de la vie en général.
On demande : [° un résumé critique succinct des obser-
vations connues relativement au polymorphisme des Mucé-
dinées;
( 296 )
2° La détermination exacte — ne s'appliquerait-elle
qu'à une seule espèce — de la part qui revient, d'abord, à
la propre nature du végétal {à son énergie spécifique) ,
ensuite aux conditions extérieures de son développement;
3" La preuve positive, ou la négation suffisante, du fait
que des champignons de /èrmen; (micrococciis, zoogloea,
palmella,leptothrix, arthrococcus, mycoderrna, etc.), dans
des circonstances quelconques, peuvent se transformer en
champignons supérieurs.
Ce travail, accompagné de dix planches, est renvoyé à
MM. Morren, Bellynck et Éd. Van Beneden.
Tl porte pour devise : Pour trouver la preuve qu^in
organisme est un degré de développement ou un produit
d'un autre organisme , il faut examiner la continuité orga-
niciue qui doit une fois, à un temps donné, exister entre
deux états de développement d'une espèce.
D. Un mémoire en réponse à la sixième question, ainsi
conçue : Faire connaître, notamment au point de vue de
leur composition, les roches pluloniennes ou considérées
comme telles de la Belgique et de VArdenne française.
Ce travail, accompagné d'un cahier de planches et de
deux photographies, a comme devise : Quo exactius intro-
spicies ipsas corporum partes, cominus de origine dubi-
tabis (Leibniz, Protog.^a , XXV); il sera examiné par
MM. Dewalque, de Koninck et Malaise.
( 297 )
RAPPORTS.
Note sur les tremblements de terre en 187 J , avec supplé-
ment pour les années antérieures , de 1843 à 1810 ; par
M. Alexis Perrey.
MSriftt'Oi't rfe JM. Bit/tt'e:.
« En continuant de recourir à l'aide de ses nombreux
correspondants, parmi lesquels il cite : MM. Ant. d'Abbadie,
de l'Institut de France, Ch. Ritter, ingénieur français à
Constantinople , le Dr. Savatier, médecin principal de la
marine française au Japon , Fr. Tirel , administrateur du
canal d'Ochusuma au Pérou, Buiard, directeur de l'Obser-
vatoire d'Alger, Roué et Jelinek, de Vienne, Dieffenbach,
de Darmstadt, Guiscardi, de Naples, Conti, de Cosenza,
Grassi, d'Acireale, le Dr. A. Rojas, de Caracas, Dana, de
New-Haven, W. Martin, ministre du royaume hawaïen à
Paris, Andrès Poey, de la Havane, et notamment Albert
Lancaster, de Bruxelles, et mettant à contribution les mé-
moires et les écrits périodiques de MM. Richard Hayes,
Rossi, Palmieri, Serpieri, Falb, Suess, Fuchs, WoH", >yild
et de M""' Caterina Scarpellini, M. Perrey a réuni dans le
travail qu'il présente à l'Académie les dates et les lieux des
tremblements de terre ressentis, en différents points du
globe, pendant l'année 1871, Afin de compléter ses catalo-
gues publiés de !8io à 1870, il rapporte, dans la première
partie de sa communication, les renseignements qu'il a pu
se procurer an sujet de nouvelles secousses relatives à ces
( 298 )
années antérieures et qui n'avaient point encore été men-
tionnées.
Le travail de M: Perrey me paraît mériter l'approbation
et les remercîmenls de l'Académie, et j'ai l'honneur d'en
proposer l'insertion dans le Recueil des Mémoires in-S". »
Rupitot't tie .9g. Êiftt. ffiteleleS.
« Le Mémoire sur les tremblements de terre que
M. Perrey présente à l'Académie est le XXIX^ relevé
annuel d'une série non interrompue depuis 1845. J'ai
déjà précédemment fait ressortir l'intérêt qui, selon moi,
s'attache à une description exacte des phénomènes séis-
miques et volcaniques qui se manifestent à la surface de
notre globe. Je me rallie donc avec plaisir aux conclusions
du rapport de notre savant confrère M. Duprez, en propo-
sant de voter des remercîments à l'auteur et d'imprimer
son intéressant travail dans le Recueil des Mémoires. »
Rapport de .fi, Mtailly.
« Je ne viens pas m'opposer aux conclusions de mes
honorables confrères : la classe a, d'ailleurs, décidé la der-
nière fois qu'il a été question des Relevés de tremblements
de terre de M. Perrey, qu'elle continuerait à imprimer ces
relevés.
Je n'ai jamais contesté l'intérêt des notes de M. Perrey :
je me suis borné à critiquer la forme qu'il leur donnait; il
ne me paraissait pas difficile de les rendre plus courtes et
plus commodes à consulter.
J'aurais désiré qu'on pût éviter les suppléments trop
considérables, et j'indiquais à cet effet un moyen très-
( 299 )
simple et dont tout le monde se serait bien trouvé, l'Aca-
démie, les savants et M. Perrey lui-même : il consistait à
mettre un plus long intervalle entre la publication des
relevés.
Comme jusqu'ici on ne paraît pas avoir fait usage des
renseignements recueillis avec tant de soin et de peine par
l'honorable professeur, il n'y aurait aucun inconvénient à
rendre les documents d'une année aussi complets que pos-
sible avant de les livrer à l'impression.
La noie que M. Perrey vient de nous présenter est di-
visée en deux parties, dont la première contient les Sup-
pléments de I8i5 à 1870, et la secoude, les Tremblements
de terre de 1871 ; or l'une de ces parties est aussi volumi-
neuse que l'autre.
Je sais bien que la longueur des suppléments prouve en
faveur de l'auteur et du soin qu'il apporte à ne laisser
échapper aucun tremblement de terre; mais elle rendra
aussi la mise en œuvre des documents qu'il rassemble,
assez pénible, et, à propos de cette mise en œuvre, je
demanderai à la classe si elle ne croirait pas opportun de
faire, de la question des tremblements de terre, une ques-
tion de concours. Jusqu'à présent les relevés de M. Perrey
constituent un capital improductif, qu'il serait temps de
faire valoir. »
Conformément aux conclusions favorables des rapports
de ses commissaires, la classe vote l'impression du travail
de ^1. Perrey dans le recueil des Mémoires in-8° et décide
d'adresser des remercîments à l'auteur pour son intéres-
sante communication.
( 500 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Nouvelles recherches sur la fréquence de la scintillalion
des étoiles dans ses rapports avec la constitution de leur
lumière, d'après V analyse spectrale; par M. Cli. Mon-
tigny , membre de TAcadémie.
Dans un Iravai! récent, j'ai montré que les étoiles dont
les spectres sont caractérisés par des bandes obscures et des
raies noires, scintillent moins que les étoiles à raies spec-
trales fines et nombreuses, et beaucoup moins que celles
dont les spectres se distinguent surtout par quelques raies
principales ('). Ces différences marquées ont été déduites
du rapprochement que j'ai établi entre la fréquence numé-
rique de la scintillation de quarante et une étoiles, et la
constitution de la lumière spectrale de ces astres, qui ap-
partiennent respectivement aux trois premiers types suivant
lesquels le P. Scccbi a classé un grand nombre d'étoiles,
d'après les caractères généraux de leurs spectres. J'ai expli-
qué la raison des différences entre les intensités moyennes
de la scintillalion relatives à ces trois types en m'appuyant
sur ce (ait incontestable, que les rayons stellaires, dans
(*) La fréquence des variations de couleurs des étoiles dans la scintil-
lation est généralement en rapport avec la constitution de leur lumière,
d'après l'analf/se spectrale. {Hv^l^tis de l'Académie royale de Belgique,
2« série, t. XXXVII. Février 1874.)
( 501 )
leur dispersion par l'air atmosphérique, présentent entre
eux des lacunes qui sont d'autant plus nombreuses et rela-
tivement plus ouvertes, que les étoiles d'où ces rayons
émanent, sont caractérisées, dans leurs spectres, par des
raies ou des zones obscures, plus nombreuses et plus
larges. La conséquence de ce fait, c'est que la privation
d'un grand nombre de rayons lumineux dans le faisceau
provenant d'une étoile, qui est étalé par dispersion dans
l'atmosphère, diminue nécessairement la fréquence de la
scintillation de cet astre, comparativement à celle qui
caractérise des étoiles plus riches en rayons de lumière.
J'ai dit, dans ce travail, que cette étude était un premier
pas vers une solution plus complète de cette question
tout à fait nouvelle, et que pour la résoudre entièrement,
il y aurait à considérer, non-seulement le nombre de raies
des spectres stellaires , mais leur largeur et surtout l'obscu-
rité plus ou moins absolue des raies et des zones ou bandes
qui caractérisent, d'une manière si remarquable, plusieurs
de ces spectres. Faute de documents indispensables, je me
voyais obligé de différer un travail complémentaire du pre-
mier, dans lequel ces comparaisons particulières eussent été
traitées. Mais depuis la publication de mes premières recher-
ches, le P. Secchi a eu l'extrême obligeance de m'envoyer
ses mémoires où sont exposés tout à la fois ses procédés
d'analyse spectrale des corps célestes et les caractères par-
ticuliers des spectres d'un grand nombre d'étoiles, des
principales planètes et de plusieurs nébuleuses. Grâce à ces
indications, si piécieuses pour moi au point de vue de mes
recherches, je puis montrer actuellement que la connexion
entre la fréquence de la scintillation des étoiles et les carac-
tères de leurs spectres s'accuse tout aussi bien à l'égard de
( 502 )
chaque étoile comparée à toutes celles qui composent avec
celle-ci un même type spectral, que d'après les moyennes
générales relatives aux trois types, qui ont été les bases
principales de mon premier travail comparatif.
Tel est Tobjet des nouvelles recherches que j'ai l'hon-
neur de présenter à l'Académie.
Avant d'exposer ces recherches, je donnerai d'abord
quelques indications générales sur la manière dont les
principaux caractères des spectres des étoiles sont présen-
tés dans les travaux du P. Secchi. Ces indications sont
d'autant plus nécessaires ici, que ces mémoires étant écrits
en langue italienne, il convient de faire voir que les carac-
tères de chaque spectre stellaire sont fidèlement interpré-
tés sous une forme très-concise, ahn de limiter l'extension
du tableau oîi ces caractères seront mis en parallèle avec
l'intensité numérique de la scintillation de chaque étoile (*).
Dans son premier travail, le P. Secchi, après avoir dé-
crit ses appareils et sa méthode d'observation, indique les
caractères distinctifs des trois premiers types auxquels il
(') Voici les litres des mémoires du P. Secchi sur l'analyse spectrale des
corps célestes :
I. Memoria sugli spetlri prismatici délie slelle fisso ; estratta dagii Atti
délia Societa Italiaiia dei XL, série III. Tomo I. Parte I.
H. Catalogo délie stelle di cui si è delenninalo lo speltro luminoso alV
osservntorio del Coltegio romano ; eslratto dalle Memorie délia
societa Italiaiia dei XL, 3» série, vol. I, 1867.
IIL Memoria seconda sugli spettri prismatici délie stelle fisse, presentata
alla Societa Italiaiia nel novembre del 1868.
IV. Memoria Sugli spettri prismatici de'' corpi celesti; eslratto dagli
Atti deir Accademia pontificia de' nuovi lincei, auno XXV, ses-
sione IV^, del 24 marzo 1872.
( 505 )
rapporte les spectres slellaires qu'il a analysés; puis il
classe suivant chacun de ces types les trois cent seize
étoiles qu'il a étudiées jusque-là. Le second mémoire
est un catalogue des mêmes étoiles réunies par constella-
tion. Ce travail est sans contredit celui du savant italien
qui m'a été le plus utile, à cause des indications géné-
rales qu'il donne le plus souvent sur la quantité de raies
spectrales pour chaque étoile, sur leur intensité et la
manière dont les plus larges sont limitées vers leurs bords,
et enfin sur l'étendue et la constitution des bandes obscures
qui caractérisent les spectres des étoiles du troisième type.
Dans les mémoires II! et IV, le P. Secchi complète les
données du précédent à l'aide d'observations plus récentes,
qui précisent et perfectionnent les premières. Il est arrivé,
par exemple, que les dernières recherches ayant eu lieu
dans des conditions de notre atmosphère plus favorables,
le P. Secchi a reconnu que les bandes spectrales de cer-
taines étoiles du troisième type, qui semblaient continues
lors des premières observations, sont en réalité résolubles
en raies distinctes. Dans un cas semblable, j'ai surtout pris
en considération les indications contenues dans les deux
derniers mémoires, afin de les présenter sous une forme
concise dans le tableau dont il sera question plus loin.
11 n'est pas sans intérêt de citer ici, comme un des
exemples remarquables des différences que deux séries
d'observations ont pu présenter,celui de l'étoile Aldébaran,
car il tend à nous montrer que, très-probablement, la con-
stitution de la lumière spectrale de cette étoile éprouve des
changements caractéristiques à des intervalles de temps
assez rapprochés. Avant l'année 1867, le spectre d'Aldé-
baran présentait des raies larges, non nébuleuses, mais
( 304 )
nettement tranchées, et qui ne se réunissaient pas de ma-
nière à constituer de véritables zones. A la fin de cette
même année, le P. Secclii constata dans le spectre de celte
étoile l'existence de zones qu'il n'y avait point vues l'année
précédente, et qui lui donnaient alors l'apparence d'un
spectre à cannelures. D'après ce savant, ces changements
d'aspect du spectre d'Aldébaran seraient en rapport avec
ses variations de nuance que la teinte rouge de cette étoile
éprouverait (*).
Je ferai remarquer qu'en présence des faits dont il vient
d'être question, Aldébaran, qui sert de transition entre le
deuxième et le troisième type selon l'auteur, doit conserver
nécessairement la place que je lui ai donnée dans ce der-
nier.
(') Voici en quels lermes le P. Secchi caractérise ces changemenls que
le speclre d'Aldébaran lui a montrés :
II. Mémoire, p. 50 : « * Toro. Magnifico tipo a righa mediocremenle
« larglie perô non a zone. Le riglie sono larglie, ma non nebulose, ne in
« fondo semilucido, ma taglienti. Essa sla un posto prima di Arluro per
>' la facilita di decomposizione; il sodio è nello quanto nel Sole, ma fina è
o la sua riga. Ve ne sono alcune comuni col Sole, ma altre particolari a
«> quesla Stella elle mérita molto studio... »
III. Mémoire, p. 33. «. Aldébaran a. Toro. Lo spettro di quesla slella fu
» dalo iiella prima memoria. Essa è rossa assai quest' anno, e impicciolila.
» Lo spellro moslra adesso trace di zone che non vidi Tanno scorso. Essa
» è tipo a colonnato, et Tanno scorso non lo era. É cio dovuto alla varia-
» zione del certamente (15 décembre 1867).
» Esaminala di uuovo sotto questo lispetto ai 24 marzo 1868, e veduto
» che nel verde vi sono le righe caralterisliche del terzo tipo, e molto uello,
» è il sodio. Essa è rossa decisa , e certamente non è senza relazione col
» colore l'apparenza non dublia die olonnalo clie ora essa présenta. (Vedi
» la I memoria). Essa in somma è corne Arturo, cioè del tipo délie arancie:
» Tanno scorso non si vedevano le zone e quest' anno si. Quiudi una sor-
» génie di variabilità nelle sielle. »
( 305 )
Le P. Secchi caractérise nettement les différences que
présentent entre elles soit les raies ou lignes, soit les zones
ou bandes spectrales. Pour certains astres, les unes et les
autres sont vigoureusement tracées et nettement limitées
sur leurs bords; chez d'autres, au contraire, leur ensemble
présente une apparence nébuleuse, ou bien, leur teinte
ne s'adoucit et ne s'efface que sur les bords de ces raies
et de ces bandes. 11 importe de tenir compte de différences
semblables au point de vue de la connexion qui nous oc-
cupe. En effet, toute lacune correspondant à une raie ou
à une zone spectrale parfaitement obscure, qui sépare,
dans notre atmosphère, des rayons lumineux originaires
de la même étoile, ne contiendra aucun rayon qui abou-
tisse à l'œil de l'observateur. Mais, si la raie ou la zone
est plus ou moins nébuleuse, et qu'elle présente ainsi des
points d'émanation de lumière plus ou moins faible, la
lacune qui correspond , entre les rayons arrivant à l'obser-
vateur, à cette partie nébuleuse, sera traversée par des
rayons lumineux. Or, d'après ce que j'ai dit dans mon pre-
mier travail, la scintillation d'une étoile doit être d'autant
plus fréquente, toutes choses égales d'ailleurs, que les
lacunes qui séparent ses rayons dispersés par l'atmosphère,
sont non-seulement plus étroites et moins nombreuses,
mais qu'elles sont traversées par un plus grand nombre de
rayons lumineux.
L'auteur précise, quand cela est possible, les substances
que certaines raies des spectres des étoiles caractérisent,
et il en conclut leur présence dans ces astres. Je n'ai point
jugé nécessaire de citer ces indications spéciales dans le
tableau suivant, malgré leur importance à tout autre point
de vue.
2"* SÉRIE, TOME XXXYIII. 20
( 506 )
On sait que dans le but de simplifier la classification
des spectres stellaires, le P. Secchi les a rapportés à quatre
types, dont trois principaux. Les caractères distinctifs de
ces derniers ont été précisés, dans mon premier travail,
par des indications que j'ai empruntées à l'auteur lui-
même. Ils le seront de nouveau à l'aide des indications
suivantes que je crois utile de donner ici à l'égard des
spectres d'à de la Lyre, de Pollux et d'à d'Hercule, les
trois étoiles typiques que l'auteur cite comme présentant
respectivement les caractères spéciaux de chacun des trois
groupes principaux. Aussi se borne-t-il parfois à dire que
telle étoile se rapporte parfaitement au type spectral d'à de
la Lyre {Tipo die Lira perfetto, puro, précisa , ben netlo...)
sans donner d'autre indication sur son spectre.
Wéga ou a de la J^yre, l'exemple le plus remarquable
du premier type parmi le grand nombre des étoiles qui le
composent, présente un spectre continu où l'on distingue
d'abord quatre grandes raies noires, placées respectivement
dans le rouge, le vert bleu, le violet et le violet extrême,
puis de nombreuses raies fines particulièrement dans le
vert.
Pollux est l'étoile qui caractérise le mieux le deuxième
groupe , puisque, selon le P. Secchi, son spectre ressemble
parfaitement à celui du Soleil par ses raies fines et nom-
breuses, dont les principales coïncident avec celles du
spectre solaire.
L'étoile typique du troisième groupe, «d'Hercule, pré-
sente un spectre à raies noires et à bandes obscures très-
caractéristiques. La succession de ces raies et de ces bandes,
que séparent d'ailleurs des lignes très-claires, donne à ce
spectre l'aspect d'une série de colonnes juxtaposées et
BulLebn de l 'Aca-dàniji
ToT,u.Jcaym.
Fàj I ^ i"' Ti/pc . .^ de Ul I.tjii; , Réoidus , elc
f D
Fiq. 2. _ 2'"" Tijpc . le Si'/ff/ , f'ollii.i . (a Clicvrc , etc.
IllIlllliilillPI
1 I' :i' ■ l'J'iii iii'i liJii llj ii'i'i ilb il 'rXAÀ .lli.i.ti: 'lii" :ll'":liiiillii:.: I iiii:ii ,.ii,i,.. ni-1 i diil
A B {■ D
EA F
Fig 3.^3'"" Type : ..' d Hercule , Hctelgeus-e , cfc ...
Luit y* ^'vrionaju, Toovey.B^'ux-
cTperlrcs du J'oted et des Etudes.
(307 )
éclairées de côté. Les lignes de séparation de celte colon-
nade sont très-noires, et se détachent parfaitement des
tranches éclairées, qui présentent d'ailleurs la lumière la
plus vive du côté du rouge.
Les spectres typiques de ces trois premiers groupes sont
flgurés dans la planche qui accompagne ce travail.
Dans le tableau suivant, jemets en parallèle l'intensitéou
la fréquence de la scintillation des quarante et une étoiles
que j'ai observées, et les caractères les plus remarquables
de leurs spectres. Rappelons ici que la fréquence de la scin-
tillation de chaque étoile exprime le nombre de variations
de couleurs qu'elle éprouve, en moyenne, par seconde,
à 60" de distance zénithale, d'après un ensemble d'obser-
vations et une méthode de calcul que j'ai exposés dans
mon premier travail. Quant aux caractères du spectre de
chacun de ces astres, ils résument d'une manière très-
concise, mais très-précise, les indications contenues dans
les mémoires du P. Secchi.
( 308 )
Tableau comparatif de la fréquence de la scintUi^,- \ici étoiles
509 )
avec les caractères de leurs spectres.
Proinler type.
Éioiles à spectre présentant quatre raies principales.
ktoii.es
e de la grande Ourse,
(fldela grande Ourse.
Procyon. . . .
a de la Lyi'c (Wéga;
a d'Andromède .
Ç lie la Jurande Ourse.
T' de la grande Ourse.
Caractères du spectre.
lU-gulus
Allair
a d'Ophiucus . . .
Algoiil ....
X du l'i^iiase . . .
rdcPégase . . .
Castor
(X delà Oouniuno. .
^ de la grande Ourse.
Moyenne .
411
40i
ion
98
92
88
87
82
.''peclre typique très-pur.
Spectre typique parfait.
Spectre typique, raies fines très-nombreuses
Spectre type.
Raies fortes dans le bleu et le violet, raies
fines nombreuses dans le vert; traces de
lignes semblables dans lejaune et dans le
rouge, qui est parfois peu apparent.
Raie F assez forte dans le bleu.
Raies larges et nébuleuses, sauf la raie F
qui est bien nette.
Raie F élargie en zone noire, lignes fines
dans le vert; le rouge est peu apparent
dans le spectre.
Raies principales bien accusées dans lejaune
et le violet ; lignes fines nombreuses parti-
culièrement dans le vert.
Raie y du violet large et bien accusée; raie
F nébuleuse sur ses bords; zones légères
dans le vert.
Raies principales nettement accusées dans
le vert , le bleu , le violet.
RaiesF et V très marquées , lignes fines dans
d'autres parties du spectre.
Raie F ordinaire; beaucoup de lignes fines,
mais laibles, qui rapprochent ce spectre du
type solaire.
Raie F élargie en zone à bords nébuleux.
Reauroup de raies fines dans le vert ;
manque de lumière à l'extrémité du violet.
Raie V du violet encore distincte.
La raie F est diffuse; d'autres raies s'élar-
gissent aussi en zones.
Étoiles à raies fiju à b»"'"^* ^^'^^''-
La Chèvre
a du Bélier .
B du Taureau
/3 d'Hercule.
0 du Lion .
/3 du Serpent
X du Verseau
7 d'Orion . ,
y d'Orion (Rigel).
X d'Orion.
Moyenne
araclères du spectre.
Troisième type.
Étoiles à bandes nébuleuses et ii raies noires.
ÉTOILES.
et V perceptibles
upes de raies fines dans
■rtet dans d'autres parties
ipeclre.
Spectre type.
Raie F prononcée, mais plus
étroite que dans le premier
type. Traces de zones dans le
violet.
Raies fines nombreuses. La raie
F est composée de plusieurs
lignes semblables. Le rouge
du spectre est étroit.
Raies fines très-nombreuses,
très-distinctes et distribuées
comme dans le spectre so-
laire; mais elles sont moins
délices que celles de Pollux.
Raie F étroite, raies fines très-
nombreuses.
Ligne V distincte dans le vio-
let; raies fines dans le vert.
Le rouge du spectre est étroit
et le vert prédomine.
ieaucoup de raies fines; le
vert prédomine.
RaiesF et V; la première parait
nébuleuse.
Beau groupe de raies fines dans
le vert ; raies diverses dans
lejaune.
La raie F est étroite , mais bien
accusée. La raie nuire V est
perceptible dans le violet.
Une multitude de raies fines
sillonnent le spectre, où le
rouge manque.
Raie F étroite , mais bien accu-
sée. Multitude de raies très-
iines et variées. Le vert du
spectre prédomine et le rouge
est très-étroit.
Raies fines nombreuses, teinte
verte.
P de Persée .
j3 de Pégase.
a d'Orion (Bétel-
geuse.). . . .
Aldébaran
Avcturus . . .
(3 d'Andromède .
a de la Baleine.
Antarès . . .
a d'Hercule.
£ de Pégase .
ce du Serpent
Moyenne.
70
66
Caractères du spectre.
Spectre traversé par des zones ou bandes
disposéesen cannelures , qui lui donnent
l'aspect d'uneoolonnaderappelant ainsi,
mais en miniature, le spectre encore
mieux caractérise d'jc d'Orion. Les
zones sont résolubles en raies distinctes.
Les bandes du spectre lui donnent l'appa-
rence d'une colonnade comme a d'Her-
cule; mais elles se résolvent plus aisé-
ment en raies fines.
Spectre remarquable par ses zones larges
et nombreuses, aisément résolubles en
raies noires. Les principales occupent
les mêmes positions que dans le spectre
d'j: d'Hercule. Les zones et les raies
sont séparées par des bandes lumineuses
se détachant sur un fond peu éclairé.
L'aspect du spectre est changeant ; il n'a
présenté d'abord que des raies nom-
breuses et nettement tranchées; mais il
montra ensuite, en outre de ces raies,
des zones obscures , qui lui donnaient
l'aspect d'une colonnade.
Raies nombreuses très- fortement accusées,
■nais qui ne sont point réunies en zones.
Spectre ii raies fines parfaitement dis-
tinctes, qui sont groupées parfois en
zones séparées. La raie F se trouve dans
une de ces parties obscures.
Zones di*posées en colonnade; mais elles
sont résolubles en raies fines.
Zones spectrales larges et variées, présen-
tant des raies prononcées.
Spectre type.
Raies fines Irc-nomhreuses, réunies en
zones sur un fond peu lumineux.
Zones à raies fines nombreuses; lumière
faible Zones foncées à leurs places
ordinaires.
(510)
Voici les principales conséquences qui résultent de ce
tableau :
i° Les deux étoiles dont les spectres ont été choisis
comme types respectifs du premier et du deuxième groupe,
et celles qui, dans chacun, s'en rapprochent le plus sous
le rapport de leurs spectres, s'y distinguent aussi par les
scintillations les plus fréquentes;
2° Dans la troisième subdivision, l'étoile y. d'Hercule,
qui en est le type à cause de son spectre à zones des plus
nombreuses et des plus larges, est une des étoiles dont la
scintillation est la plus faible , non-seulement à l'égard de
ce groupe, mais parmi toutes les étoiles que j'ai observées;
5° Les étoiles qui figurent à la fin du premier type et
qui scintillent beaucoup moins que celles placées en tête
de cette série, se distinguent, en général , de ces dernières
par des raies spectrales plus nombreuses. En outre, parmi
les étoiles placées à la fin du groupe, yj de la grande Ourse
et Castor sont caractérisées par des lignes spectrales qui
s'élargissent en zones plus ou moins diffuses. Remarquons
aussi que le violet extrême manque de lumière dans le
spectre de Castor;
4" Si, dans le second type, nous exceptons les trois
étoiles d'Orion qui fopment une subdivision à part d'après
le P. Secchi , et pour lesquelles le rouge manque presque
entièrement, les raies spectrales de la seconde moitié de
ce type sont très-nombreuses et parfois réunies en groupe,
comme a du Verseau nous le montre;
5" Toutes les étoiles du troisième type, sauf Arclurus
dont les raies nombreuses et fortement accusées ne se
réunissent pas en bandes, sont remarquables à cause de
leurs spectres à zones obscures, de largeurs différentes, et
dont les lignes de séparation lumineuses ou foncées sont
très-prononcées.
( 311 )
Après ces généralités, arrêtons-nous à quelques particu-
larités que présente ce tableau.
Les étoiles a, [3 et 7 d'Andromède, appartenant à une
même constellation, ont été observées dans des conditions
de température de l'air peu différentes. De plus, l'influence
que l'éclat d'une étoile pourrait exercer parfois sur sa
scintillation s'écarle d'el'e-méme ici, puisque ces astres
sont sensiblement de même grandeur, comme on l'a vu dans
mon premier travail. Ces trois étoiles sont donc parfaite-
ment comparables entre elles, sous le double rapport de
leurs spectres et de la fréquence de leur scintillation. Dans
le premier groupe, x présente des raies fortement accusées,
beaucoup de lignes fines et peu de rouge dans son spectre.
Dans le deuxième, 7 présente également des lignes Unes,
une raie assez forte et quelques traces de zones dans la
partie la plus réfrangible. D'après ces indications, il est
permis d'admettre que les lacunes qui séparent des rayons
de ces deux étoiles, s'équivalent très-probablement en
somme, de l'une à l'autre, sous le rapport du nombre, de
la largeur et de l'obscurité relative de ces lacunes. Ainsi
s'expliquerait comment la fréquence numérique de la scin-
tillation est la même à l'égard de ces deux astres. Mais
l'étoile (3, dont les nombreuses raies fines sont disposées en
zones parfaitement distinctes et qui forment parfois des par-
ties obscures, scintille beaucoup moins que les deux autres :
les variations de couleurs qu'elle éprouve en une seconde
sont seulement au nombre de 37, tandis que les mêmes
cbangements s'élèvent à 93 à l'égard d'à et de 7 {*). La lar-
(*) Voici les indications que le P. Secchi donne à Tégard de )3 d'Andro-
mède dans le Mémoire II :
« p AnJromeda Gialla oro : lipo a riglie fine disposle a zone perfelta-
( 312 )
geur et l'obscurité relative des lacunes correspondant aux
zones du spectre de l'étoile (3, qui séparent ses rayons dans
notre atmosphère, expliquent suffisamment sa faible scintil-
lation comparativement aux étoiles « et y, dont les spectres
sont plus riches en rayons de lumière.
Dans le second groupe, la scintillation de la Chèvre est
notablement moindre que celle de Pollux, quoique les
spectres de ces étoiles présentent chacun beaucoup de
raies lines, également distinctes. Mais celles du spectre de
Pollux sont encore plus déliées que les raies spectrales
de la Chèvre, d'après le P. Secchi (*); en présence de
cette différence, il n'est pas suprenant que la scintillation
de la première de ces deux étoiles soit sensiblement plus
forte que celle de l'autre ou de la Chèvre, puisqu'il résulte
de la plus grande largeur des raies spectrales de celle-ci que
les lacunes qui séparent ses rayons dans notre atmosphère,
ont en somme plus d'étendue.
Les étoiles p de Persée, (3 de Pégase et a. d'Orion, qui
figurent en tète du troisième type ou du type à bandes nébu-
leuses, sont représentées, à l'égard de la scintillation, par
des valeurs numériques qui correspondent, d'une part, à
celles du milieu du deuxième type etde l'autre, aux valeurs
les plus faibles du premier.
Les rapprochements qui précèdent manifestent l'in-
» mente misurabili e distiiile. Magnifico oggelto : è di 5° grado dopo Alde-
» baran. 1 vari grappi di rigbe fine formano quasi zone, una délie quali
f nel prinno verde : al poslo délia Fvi è spazio oscuro , ma poco prima vi
» è una riga nioUo lucida. Magnesio ben distinto É nolala corne lipo piut-
» loslo di (X. Ercole che del Sole ai 1 9 agosto e \ sellembre ; ma ai 26 dicem-
> bre ci ripete lipo a righe flne. Quiudi non è irragiouevole sospellare di
> variabilità. »
(*) Mémoire 11, p. 19.
( 315 )
iluence particulière de la largeur et de l'obscurité des
lacunes entre les rayons stellaires dans notre admosphère
sur la fréquence de la scintillation, selon que ces lacunes
correspondent aux zones larges du troisième groupe, ou
aux raies fines et nombreuses du deuxième, ou bien aux
quelques raies principales du premier.
Après ces déductions, qui reposent exclusivement sur
les recherches du P. Secchi, je rappellerai que MM. Hug-
gins et Millers ont également étudié les spectres de cin-
quante étoiles environ, et qu'ils ont mesuré la position des
raies spectrales d'Aldébaran , d'à d'Orion , de la Chèvre et
de (3 de Pégase. Dans ces recherches délicates, ces savants
observateurs se sont particulièrement occupés de constater
la présence des raies caractéristiques des éléments ter-
restres, tels que l'hydrogène, le magnésium, dans les
spectres stellaires. Ils ont donné aussi quelques indications
particulières sur' l'aspect de ces spectres, indications que
je reproduis ci-dessous, en rangeant les étoiles dont il
est question suivant les intensités décroissantes de leur
scintillation.
Procton. Raies fines et nombreuses; raies D du sodium.
Wéga. Raies fines nombreuses; raie D double, raies C et F intenses , raie
b triple.
PoLLUx. Spectre riche en raies.
•y d'Andromède. Spectre très-intéressant.
Deîceb. Beaucoup de raies fines.
La Chèvre. Raies très-nombreuses ; vingt lignes environ ont été mesurées.
/3 DE Pégase. Spectre ressemblant beaucoup à celui d'à d'Orion , les raies
étant réunies en groupes comme dans ce dernier. Quinze lignes ont
été mesurées.
a d'Orion (Bételgeuse). Spectre compliqué, très-remarquable. Raies for-
tement accusées et réunies en groupes formant parfois des bandes
obscures. Quatre-vingts raies ont été mesurées.
Arctlrus. Raies très-nombreuses, parmi lesquelles la raie D. Trente raies
ont été mesurées.
( 514 )
Aldébarax. Raies très-nombreuses et fortement accusées paliculièrement
dans les parties orange, verte et bleue du spectre. Les positions de 70
de ces raies ont été déterminées; mais d'autres raies nombreuses,
visibles dans le bleu , ne sont pas comprises dans cetie mesure.
On voit, par ces indications sur les résultats des recher-
ches de MM. Huggins et Miller, que les étoiles qui scintil-
lent le moins sont aussi celles qui leur ont présenté des
raies très-nombreuses, très-accusées et parfois réunies en
zones obscures.
Les conséquences générales et particulières qui précè-
dent démontrent, avec toute certitude, le fait d'une con-
nexion intime entre la fréquence de la scintillation des
étoiles et la constitution de leur lumière d'après l'analyse
spectrale, fait que la comparaison des moyennes générales
relatives aux trois types avait déjà mis en évidence dans
mon travail précédent.
Il convient de calculer approximativement ici quelle est
la valeur de l'écart qui sépare, à une distance donnée dans
l'air, deux rayons colorés linéaires, situés dans le même
plan vertical, qui appartiennent aux deux bords d'une raie
ou d'une zone spectrale.
Supposons l'observateur placé au point A, fig. 4, de la
surface terrestre, où arrive la trajectoire lumineuse 6mA
appartenant au bord le plus réfrangible de la raie. Repré-
sentons par rm'A la trajectoire de l'autre rayon, d'une
réfrangibilité un peu moindre, et qui correspond par con-
séquent au second bord de la raie ou de la zone. Les tan-
gentes respectives At el \t' à ces deux trajectoires au point
où elles pénètrent dans l'œil de l'observateur, comprennent
entre elles un angle ^A^' excessivement petit, qui serait
tout a fait imperceptible dans le spectre «er/ew d'une étoile
produit par un milieu aussi peu réfringent que l'air, même
( 5io )
quand l'astre est très-près de l'horizon. Mais cet angle n'en
a pas moins une valeur réelle, que nous désignerons par s,
et qui augmente avec la distance zénithale apparente Wt
ou Z de l'astre.
J'ai fait voir dans un travail précédent f), à l'aide de la
formule de Bradiey, que, si n et n' représentent les indices
de réfraction relatifs à l'air des deux rayons dont il s'agit,
et R, la réfraction astronomique, exprimée en secondes,
qui correspond à la distance zénithale Z dans les tables de
réfraction, après correction des effets de la température et
de la pression de l'air, l'on a pour calculer la valeur de s,
l'équation suivante :
n^—n"' R
'angs=-— — - X
2 m'»'- 60",(i(J6
Quand on connail cette valeur, il est aisé de calculer la
ligne /)// ou d qui sépare les tangentes A^ et At' à une dis-
tance Ap' ou X, car l'on a :
d = X. tang s.
Dans le cas d'une distance x relativement petite, nous
pouvons considérer la valeur d comme étant sensiblement
égale à celle de l'écart mm' des deux trajectoires à la
même distance Am' ^=x. En effet, les deux rayons ne
diffèrent en réfrangibilité que d'une quantité excessive-
ment petite, puisqu'ils correspondent aux deux bords
(') Notice sur la séparation des trajectoires décrites dans l'atmosphère
par des rayons de 77iéme origine sidérale , mais de réfrangibilité diffé-
rente, et sur les effets de cette séparation à l'égard de la scintillation.
(Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 2^ série, t. XXXIX.)
Voir aussi la notice Sur le pouvoir dispersif de l'air. (Idem, 2' série,
t. XXIV.)
(3i6)
d'une raie ou d'une zone spectrale; conséquemment leurs
trajectoires sont à très-peu près de même courbure. Si l'on
imagine, par la pensée, que la trajectoire rm'A. tourne,
dans son plan vertical, autour du point A en entraînant,
dans son très-petit mouvement vers la trajectoire 6mA, la
tangente t'A, celle-ci coïncidera avec la tangente tA au
moment où, par son déplacement, le point m' de la pre-
mière trajectoire rencontrera le point m de la seconde, et
cela, pourvu que la distance Am' ou xne dépasse pas une
certaine limite de grandeur, ce que nous avons supposé.
La différence des indices n et n' étant excessivement
n' — n
faible, le coefficient ^-^-7^ de tang s peut se mettre sous la
n — n
^n-hi
forme — —. A cause de la faible réfringence de l'air, la
n
différence 7i — n' n'est point susceptible d'être déterminée
directement tant qu'il s'agit des rayons appartenant aux
bords d'une raie. Mais il y a lieu de calculer cette différence
de la manière suivante. On sait que, d'après M. Cauchy, si
l'on désigne par « et 6 deux coefficients numériques qui
dépendent ici de la réfraction et de la dispersion par l'air,
puis par l et >.' les longueurs d'onde réduites au vide qui
correspondent aux indices n et n' , on a les équations sui-
vantes :
b h
11 résulte de ces valeurs,
n — n = b {—:
et par suite de ce qui précède :
6/1 I \ R
a = X
n' \/' à'V ti0",666
(317)
Rappelons ici que j'ai déterminé les valeurs numériques
(les constantes a et 6 de la formule de M, Cauchy, en m'ap-
puyant, d'une part, sur la détermination des indices de
réfraction par l'air de plusieurs rayons colorés que j'avais
déduits précédemment des mesures de spectres stellaires
aériens, effectuées jadis par Bessel près de l'horizon, et
d'autre part, sur les mesures des longueurs des ondes cor-
respondantes déterminées par M. Mascart en millionièmes
de millimètre (*). La valeur numérique de b est évidemment
le second coefficient numérique de l'équation suivante que
j'ai déduite de ces données :
0,948383
n = 1,00029145 -h — .
).*
Ajoutons que les indices de réfraction par l'air calculés
à l'aide de celte formule, ont été en parfaite concordance
avec les valeurs déduites de l'observation elle-même (**).
Si nous substituons la valeur munérique de b dans
l'expression de d, et que nous effectuions les calculs en y
donnant à n la valeur 1,00029438 qui est l'indice moyen
de l'air, nous obtiendrons l'expression flnale :
d =xx 0,01561 T— ;:1r.
Appliquons cette formule à calculer quel est l'écart des
trajectoires émanant d'une étoile et appartenant, l'une à
la raie la plus réfrangible, l'autre à la raie la moins réfran-
gible du groupe des raies D du spectre solaire, quand
(') Annales de Chimie et de Physique, i<' série, t. XIII.
(.**) Notice sur le pouvoir dispersifde l'air. (Bulletin de l'Académie
ROYALE DE BELGIQUE , 2« série, t. XXIV.)
( 318 )
réloile qui présente aussi ces raies dans son spectre, est
à 70° de distance zénithale apparente, et cela, en un lieu
éloigné de 5000^' de l'observateur. Les calculs qui suivent
se rapportent aux conditions de température de l'air de
0° et de pression 0^,76. D'après M. Mascart, les longueurs
d'ondes correspondant à ces deux raies sont exprimées en
millionièmes de millimètre par les valeurs )== 588,8 et
).' = 589,45. Tous les calculs étant effectués, on trouve
pour la valeur de l'écart d, à 5000" de l'observateur,
Qmm QY Jq\]q est doHC la largeur de la lacune qui sépare ,
à 5000" de l'observateur et quand l'astre est à 20" au-
dessus de l'horison, les rayons extrêmes appartenant au
groupe des raies D pour toute étoile qui révèle la présence
de ces raies, et par conséquent l'existence du sodium
parmi ses éléments. Quand l'étoile ne sera plus qu'à 10°
de hauteur, la largeur (/ de la lacune sera le double ou
0'"™,li, à la même distance de l'observateur, car à 80° de
distance zénithale la valeur R de la réfraction est précisé-
ment le double de ce qu'elle était à 70".
Quelle que soit l'étroitesse relative de semblables la-
cunes, leur nombre est très-grand et par conséquent leur
influence très-sensible dans un faisceau provenant d'une
étoile dont le spectre est sillonné d'un grand nombre de
raies.
Calculons actuellement la valeur approximative de
l'écart (/ entre les rayons extrêmes qui correspondent aux
limites d'une zone étendue dans le spectre d'une étoile. Le
jyème Mémoire du P. Secchi est accompagné d'une planche
où le spectre de l'étoile d'Orion est présenté tel que ce
savant l'observa en Mars ] 872. Ce spectre est développé sur
une longueur de O'",o7. Parmi les bandes qui l'obscurcis-
sent, l'une d'elles occupe à très-peu près la moitié de l'in-
( 319 )
tervalle compris entre les raies A et B. M. Mascart n'a
point mesuré la longueur d'onde de la raie A. Mais M. Van
derWilIigen, dont toutes les mesures d'ondes, qui ont
soutenu avec avantage la comparaison avec celles d'autres
savants, concordent très-bien avec celles de M. Mascart,
a trouvé 760,53 pour la longueur correspondant à la
raie A. Quant à sa mesure pour B, elle est égale à G86,o8.
Si nous donnons à "A cette dernière valeur et à )/ celle de
la moyenne des longueurs d'ondes de A et B pour représen-
ter la longueur d'onde qui correspond sensiblement à
l'extrémité de la zone située au milieu de ces deux raies
dans le spectre d'à d'Orion, nous aurons /' = 723,45. Si
l'on applique ces valeurs au calcul de d avec les mêmes
suppositions de Z = 70" el x = oGOO", on trouve pour la
valeur de l'écart d à cette dernière distance 2'"",62. A 10"
de hauteur de l'étoile ou à 80" de distance zénithale, la
valeur de d s'élèvera au double ou à o°"",24. Les lacunes
entre les deux rayons correspondant aux deux extrémités
des zones présentent, comme on le voit, une largeur
notable, même à une distance limitée de l'observateur,
pour une étoile qui n'est pas très-élevée au-dessus de
l'horizon.
Si l'on calcule, comme je l'ai fait dans un travail cité
plus haut, l'étendue totale, dans le sens vertical, du spectre
aérien d'une étoile compris entre les rayons rouge et violet
réfractés par l'air, quand l'astre est à 80° de distance zéni-
thale , on trouve 5",5. L'arc linéaire qui correspond à cette
valeur angulaire, à 5000" de distance, est de 153'"'",5, Le
rapport de la largeur 5""",24. de la lacune correspondant à
la zone dont il vient d'être question dans le spectre d'à
d'Orion, à cette étendue totale du spectre aérien est à très-
peu près ;^.
Cette valeur relative nous permet d'apprécier la diminu-
( 520 )
tion que la fréquence absolue de la scintillation de l'étoile
a d'Orion éprouve par l'existence de cette lacune dans le
faisceau de rayons émanés de celle-ci, et qui pénètrent
dans l'œil de l'observateur après avoir été dispersés par
l'atmosphère. Cette diminution est évidemment la plus
forte quand la zone spectrale à laquelle cette lacune cor-
respond, est d'une obscurité absolue.
Le rapport numérique dont il vient d'être question,
reste sensiblement le même à des distances zénithales
différentes, attendu que la largeur de l'écart cl et celle du
faisceau compris entre les rayons extrêmes sont respecti-
vement proportionnelles à la réfraction atmosphérique qui
répond à chaque distance zénithale. La proportionnalité
de la largeur totale du faisceau à cette réfraction explique
suffisamment pourquoi la fréquence de la scintillation d'une
même étoile est proportionnelle à la réfraction atmosphé-
rique jusqu'à certaine limite, conformément à la deuxième
loi de M. Dufour, ainsi que je l'ai montré dans un travail
précédent (').
Note sur les paratonnerres ; par M. Melsens, membre de
l'Académie.
Paratonnerres des Halles centrales de Bruxelles.
Le collège des bourgmestre et échevins de la ville de
Bruxelles m'a fait l'honneur de me charger de l'examen de
la question des paratonnerres à établir sur les Halles cen-
(*) Notice sur la scintillation des étoiles. (Bulletins de l'âgadéhig
RorALE DE Belgique, 2« série, t. XXV.)
( 321 )
traies de la ville de Bruxelles; l'étude de cette question
m'a conduit à quelques dispositions particulières que je
vais décrire à grands traits, et à quelques considérations
sur les paratonnerres des bâtiments dans lesquels le fer
joue un rôle prépondérant.
Les Halles sont formées de deux grandes nefs centrales,
d'une longueur totale de 160 mètres, supportées par
60 colonnes en fonte sur lesquelles s'appuie la ferme en
fer de l'ensemble; les nefs latérales sont reliées à ces
colonnes intérieures par des arceaux en fer à 116 colonnes,
qui forment la paroi extérieure dont les vides sont remplis
par de la maçonnerie très-soignée et des pierres bleues.
Les colonnes , tant vers l'intérieur que vers l'extérieur,
se prolongent dans le sous-sol, constitué par deux souter-
rains de 2"\50 de hauteur, communiquant entre eux et
garnis complètement de grillages fixés aux colonnes souter-
raines, qui forment de véritables magasins à claire-voie.
Ce sous-sol a une hauteur de 2'",50 depuis le pavement
jusqu'aux poutrelles des voûtes. Chaque colonne supporte
les poutrelles de fer qui soutiennent la voûte du rez-de-
chaussée; il y a donc là un immense réseau de poutrelles
rattaché métalliquement avec tout l'ensemble métallique
du bâtiment et avec les grilles qui forment magasin.
Les colonnes reposent partout sur une forte dalle de
calcaire dur des Écaussines; cette dalle, d'une épaisseur de
0™,5o, repose elle-même sur un bâti de maçonnerie d'une
hauteur de ^'"jSO, de l'",46 de côté pour les colonnes des
murs extérieurs et de 0"\8o de côté pour les colonnes
intérieures qui forment la nef; la maçonnerie est placée
sur une couche de béton d'une épaisseur de O^iSO, établi
sur le sol naturel.
On a rempli l'espace de 2"\9o laissé vide depuis la
2""^ SÉRIE , TOME XXXVIII. 21
( 322 )
couche de béton jusqu'au pavement du sous-sol par de la
terre rapportée.
Le pavement du sous-sol est composé d'une couche de
béton de 0°\1 5 d'épaisseur et d'une brique mise sur champ,
en tout une épaisseur de 0"\25.
Au rez-de-chaussée comme dans le souterrain, il y a une
grande quantité de rigoles et de caniveaux de fonte pour
l'écoulement des eaux.
De forts tubes de gaz, des conduites de la distribution
de l'eau complètent cet énorme réseau métallique.
La masse de fer et de fonte s'élève à environ 2,500,000
kilogrammes; tous les fragments isolés de cette masse sont
rattachés par des écrous et des boulons qui sont au nom-
bre de plus de 100,000; il y a donc probablement autant
de points de contact de fer à fer ou de fonte à fer, incon-
testablement une grande surface.
On peut admettre avec tous les physiciens qu'un édifice
serait à l'abri de la foudre, si le fer du faîte se prolon-
geait sans solution de continuité jusqu'à terre.
Mais si, pour les Halles centrales de Bruxelles, tout cet
ensemble était en parfaite communication métallique, si de
plus le sol sur lequel il repose est assez humide pour être
naturellement bon conducteur de l'électricité, on pourrait
dire que les Halles centrales constituent en définitive un
paratonnerre présenaiifâu plus haut degré et qu'un coup
de foudre qui frapperait ce conducteur d'une section inso-
lite glisserait en se dispersant par des milliers de chemins,
ou le traverserait avec la plus grande facilité.
Nous avons à notre disposition la possibilité de vérifier
ce fait de deux façons différentes :
( 525 )
i° Par l'éleclricité dynamique empruntée à la pile;
2° Par i'électricilé de tension empruntée aux machines
électriques et à la bobine de Rhumkorff.
Vérification de la conductibilité des Halles pour le courant
de la pile.
Je dois à la bienveillance de M. Gibbs, inspecteur, chef
du service technique des télégraphes, et au concours intel-
ligent de M. Banneux, ingénieur au télégraphe, d'avoir
pu vérifier la conductibilité électrique des Halles centrales.
Je suis heureux de pouvoir les remercier de leur obli-
geance.
Nous nous sommes servi d'une pile de Daniel petit
modèle, composée de treize éléments. Nous avons, à cet
effet, mis en contact avec le fer en T, qui se trouve sur
le faîte du bâtiment, à l'une de ses extrémités du côté
exposé au nord, un câble de cuivre à trois brins recouvert
de gutta-percha; il avait une cinquantaine de mètres de
longueur; il aboutissait à l'un des pôles de la pile, le cou-
rant passait ensuite à volonté dans un rhéostat Siemens
et une boussole galvanomètre ou rhéomètre différentiel,
tel qu'on l'emploie pour les usages des télégraphes. Le
second fd, assez long pour pouvoir atteindre la dernière
colonne et le faîte du côté opposé, aboutissant à l'autre
pôle de la pile, était libre et permettait de fermer le circuit
ou de l'ouvrir en touchant chacune des parties qui com-
posent l'édifice.
On a d'abord cherché à fermer le courant en plaçant ce
fil sur la couche d'asphalte, d'une épaisseur de 0'",050, du
rez-de-chaussée, sur lequel les acheteurs et les dames de
la Halle se trouveront; la déviation était absolument nulle;
( 324 )
il en résulte que les visiteurs et les habitués se trouveront
dans la Halle comme sur un tabouret isolant.
En faisant enlever l'asphalte et en se mettant en contact
avec le béton des voûtes, la déviation s'élevait de 84° à 80".
Les voûtes portent de nombreux encadrements en fonte
de 50 centimètres de hauteur, de grandeur variable ayant
en moyenne 50 centimètres de côté, destinés à donner du
jour aux souterrains; les uns sont garnis d'une simple
grille à claire-voie, les autres portent une forte lame de
glace brute; en mettant le fil en contact avec l'encadre-
ment métallique qui touche le béton et la brique de la
voûte par une grande surface, la déviation s'élevait à 88";
l'expérience souvent répétée donnait très-sensiblement la
même déviation partout.
Le courant passe donc presque librement dans la ferme,
les colonnes et le mortier des voûtes.
Ferme-t-on le courant en mettant le second fil en con-
tact avec les colonnes de la nef centrale, avec les colonnes
extérieures, le gaz, le fer des galeries, les caniveaux en
fonte, les colonnes qui séparent les deux ailes, en lou-
chant sans rien changer aux dispositions précédentes, les
mêmes places dans la 2' galerie, colonnes, carneaux,
galerie, ferme, etc., la déviation du galvanomètre ne
change pas; elle indique qu'il n'y a sensiblement pas de
résistance, car on obtient toujours 90"; l'aiguille se met
en croix avec le courant.
On a répété les expériences dans les souterrains et la
déviation a toujours été la même, 90"; fermait-on le cou-
rant en se mettant en contact avec les caniveaux, les grilles,
le prolongement des colonnes, les poutrelles, les colonnes
enterrées dans la maçonnerie, etc., toujours on avait la dévia-
tion maximum de 90". L'expérience sur chaque point était
( 525 )
faite à deux reprises, c'est-à-dire qu'après avoir constaté
la déviation maximitm, on introduisait une résistance équi-
valant environ à oOO kilomètres de fil de fer de 4 milli-
mètres; dans ce cas, la déviation tombait à 63° dans toutes
les expériences.
Nous avons alors pris la terre dans la rue au delà du
trottoir près des regards d'égouts et dans la vase qui rem-
plit leur tube syphon; nous avons encore obtenu les mêmes
nombres.
Moyens proposés pour transformer les Halles en paraton-
nerre préservatif et préventif.
Je pense donc pouvoir assurer que les Halles constituent
un excellent paratonnerre pmena///;
Je me demande cependant s'il est prudent de se con-
tenter de ce qui existe et de laisser les choses dans l'état
actuel?
Je ne le crois pas. Aussi en attendant que les Académies
et les savants s'expliquent sur l'utilité ou les dispositions à
donner aux paratonnerres destinés à garantir des édifices
de ce genre, j'ai proposé à l'administration communale de
compléter le réseau conducteur vers le sol et de garnir le
faîte d'une lile de pointes en cuivre rouge, de façon à
transformer les Halles centrales en un paratonnerre pré-
servatif et préventif
Pour compléter la conductibilité vers le sol et avoir une
communication parfaite et indiscutable, on creuserait deux
puits tubulaires, un au centre de chacune des ailes.
Les parois de ces puits seraient constituées par une très-
longue colonne de fonte creuse, remplie au besoin de
sable de mer rendu alcalin par un lait de chaux léger; le
( 326 )
chapiteau de celle colonne serait rattaché métalliquement
aux fontes et au fer de rédifice, aux conduites de Teau
de la distribution et aux gros tuyaux de gaz au delà des
compteurs dans lesquels il y a souvent des tubes de
plomb, offrant parfois assez de résistance à l'écoulement
de l'électricité dans les fortes décharges pour être exposés
à être fondus.
Vérification de la conductibilité des paratonnerres et du sol
pour l'électricité de tension.
Avant de faire les expériences aux Halles centrales avec
l'électricité statique , je les ai essayées d'abord sur les para-
tonnerres établis à mon insu , il y a quelques années, à
l'École de médecine vétérinaire (1). Je m'étais d'abord
(1) Ces paratonnerres sont formés de conducteurs de fer de fort calibre;
celui du girand bâtiment porte quatre liges, il a deux descentes, cha-
cune dans un puits; celui du bâtiment habité par M. le directeur porte
deux liges, il n'a qu'une descente. Les autres bâtiments de l'École en sont
dépourvus.
Je constate qu'aucun des bâtiments de l'École n'a été foudroyé depuis
mon entrée à cet établissement, il y à 28 ans; mais depuis le placement
des deux paratonnerres, la foudre est tombée sur l'angle du mur des écu-
ries et du manège; ce bâtiment se trouve en dehors de la zone de protec-
tion généralement admise d'après Gay-Lussac et les physiciens; après avoir
fi'appé une panne faîtière, qu'elle a perforée, la foudre a longé une des
pièces de la ferme d'un grenier rempli de foin, mais il n'y a pas eu
d'incendie. Je n'ai pas pu étudier tous les détails de ce coup de foudre,
des ouvriers ayant dérangé le foin et les pièces de la charpente avant
mon arrivée à l'École.
On me permettra de signaler que ces paratonnerres ont èlé établis
après ceux de l'hôtel de ville de Bruxelles.
Je regrette que l'administration supérieure n'ait pas fait au professeur
de physique de l'École de médecine vétérinaire l'honneur de le consulter;
elle ne devait pas ignorer, je pense, que j'avais, après une étude longue
( 327 )
assuré que la conductibilité de ces paratonnerres entre
eux, avec leurs puits, le 5ol, les tuyaux de conduites de
la distribution de l'eau et les tuyaux du gaz, était bien
établie; je me suis servi, à cet effet, d'un galvanomètre,
très-ordinaire, petit modèle de Breguet, employé jadis
pour le service des télégraphes. La pile de Bunsen de
huits petits éléments chargés par une très-faible quantité
d'acide nitrique ordinaire et d'acide sulfurique dilué était,
par conséquent, fort peu énergique.
Une des poupées de la machine de Holtz (modèle à
4 plateaux) a été mise en communication avec l'un des
conducteurs (n° 1), descendant du toit du grand bâtiment,
au moyen d'un iil de cuivre de 70 mètres de longueur,
recouvert de gutta-percha; l'autre a été mise en commu-
nication avec un second fil de même longueur que le pre-
mier, mais celui-ci était terminé par une sphère de laiton
creuse; cette dernière fut remplie de soudure de plombier
dans laquelle le fil était noyé et soudé.
Malheureusement ces conducteurs n'étaient pas parfai-
tement isolés, car en les développant et en les laissant
toucher le sol du laboratoire, on voyait, quand la machine
électrique de Holtz était activée, des aigrettes ou de
et minutieuse, fait établir un paratonnerre d'un système autre que celui
qui est généralement adopté dans notre pays, sur l'un des plus splendides
monuments de la Belgique; ma responsabilité était assez grande pour
admettre que j'avais dû prendre toutes les précautions et m'enlourer de
toutes les lumières. J'avais en effet pris conseil chez les savants les plus
distingués avant de me décider à faire exécuter mes idées et mes projels.
J'espère toujours que messieurs les Ministres qui s'occupent de l'École
vétérinaire voudront bieu un jour faire déplacer le paratonnerre établi à
mon insu sur le calMnet de piiysique de l'École et qu'ils le feront rem-
placer par un appareil qui me permettrait d'étudier l'électricité des
nuages, de l'air, et du sol peut-être.
( 528 )
petites étincelles traverser la gutta-percha ; malgré ce
défaut, qui exigerait qu'on fit usage d'un câble à plusieurs
enveloppes isolant parfaitement, on put tirer des étincelles
nourries donnant de très-fortes secousses d'un deuxième
conducteur de paratonnerre descendant du môme toit et
distant du premier de 57 mètres environ; on faisait jaillir
des étincelles du sol, des pierres bleues du pavement de
l'escalier, des fenêtres; elles étaient plus ou moins fortes;
un anneau de fer placé au centre d'une dalle en pierre
bleue servant d'ouverture à la cave donnait une forte étin-
celle, mais sur la pierre elle-même l'étincelle était plus
faible. Les pierres du pavement extérieur en carbonate
calcaire blanc-jaunâtre oiîraienl une résistance plus grande
comme les briques du bâtiment et les grosses pierres
blanches placées au bord des fenêtres; c'était plutôt une
aigrette qu'une étincelle; il en était de même de pierres en
grès, mais cependant on observait des différences sensibles.
On voyait autour du fil déroulé et traînant à terre des
aigrettes sur l'herbe du gazon vis-à-vis du laboratoire, là
où la gutta-percha offrait des solutions de continuité mi-
croscopiques, mais avec la sphère on tirait des étincelles
nourries des brins du gazon, des arbustes et des grands
arbres, au tronc et aux feuilles.
En laissant le fil descendre dans le puits correspondant
au conducteur n" 2 jusqu'à atteindre la surface de l'eau,
on entendait le bruit sec et net de l'étincelle au haut du
puits; sur les parois on entendait encore distinctement le
bruit de l'étincelle, mais il était affaibli.
On déroula le fil jusqu'à aller atteindre le bâtiment
opposé, habitation de monsieur le directeur de l'École
vétérinaire placée à 40 mètres du conducteur n° 1 et à
50 mètres du conducteur n" 2.
( 329 )
On obtint encore des étincelles vigoureuses en appro-
chant la boule du conducteur du paratonnerre placé sur
ce bâtiment; il en fut de même sur un tuyau de gaz et sur
un tuyau de la conduite de l'eau de la ville.
Bien que le sol fût sec à la surface, il conduisait encore
l'électricité ; on put tirer des étincelles des pierres du pave-
ment du trottoir, d'un grattoir pour les pieds, simple lame
de fer encastrée dans deux petits pieux de bois et d'un
second grattoir métallique encastré dans du calcaire dur
bleu des Écaussines.
Une chaîne d'une quinzaine d'élèves fut établie, le premier
tenait en main le conducteur du paratonnerre, on appro-
chait la sphère de la main du dernier et ils recevaient tous
une secousse.
Un puits ordinaire garni d'une pompe distant du con-
ducteur n" 1, de 12 mètres, donnait des étincelles, mais
brillantes surtout sur les parties métalliques de la pompe;
on les voyait parfaitement émerger du filet d'eau lorsqu'on
activait la pompe.
L'intensité des étincelles était amoindrie, mais non
anéantie en interposant un rhéostat correspondant à une
résistance d'environ 120 kilomètres de fil de fer de 4 mil-
limètres de diamètre.
Au lieu de laisser l'un des fils conducteurs de l'électricité
de la machine de Holtz en contact avec le conducteur du
paratonnerre n° 1, on lui fit toucher les conduites d'eau,
les tubes de gaz, une pompe établie dans le laboratoire et
l'on pouvait facilement tirer des étincelles partout, rien
n'était changé essentiellement.
Ce fil terminé par une sphère métallique d'une quin-
zaine de millimètres de diamètre fut alors enterré dans le
jardin à 20 centimètres de profondeur; au moyen du second
( 350 )
on parvenait de même à tirer des étincelles à tous les
lieux indiqués, aux arbres, etc.
Une grande jarre arrangée en bouteille de Leyde fut
placée de l'autre côté du grand bâtiment de l'École sur le
gazon, à 50 ou 60 mètres de distance de l'extrémité en-
terrée du fil aboutissant à l'une des poupées de la machine
de Hoitz; le tîl qui était en contact avec l'autre poupée,
terminé par sa sphère métallique, fut introduite l'intérieur
de la bouteille, puis on activa la machine de HoItz; bien
que le temps fût très-peu favorable, la bouteille se char-
geait et donnait de très-fortes étincelles en mettant les
armatures extérieure et intérieure en contact par l'exci-
tateur universel (1).
(1) Je crois devoir faire remarquer expressément que ces expériences,
qui, au premier coup d'œil, paraissent assez curieuses, parce queron em-
ploie les deux fluides d'une façon apparente, sont cependant de la plus
grande simplicité; on pourrait même ajouter qu'elles étaient toutes faciles
à prévoir, eu égard à la grande tension des machines de HoItz et à Yaclion
du réservoir commun ou de la terre; dans ce cas spécial la terre agit
exactement comme on le prouve ou qu'on le discute pour les expériences
classiques, simples et fondamentales de la décharge des conducteurs posi-
tifs des machines électriques ordinaires sur les corps qui conduisent plus
ou moins bien l'électricité ou sur les corps isolants, la charge des bou-
teilles de Leyde par ces mêmes machines ou par l'électrophore.
On pourrait même aller jusqu'à dire que ces expériences ne sont pas
démonstratives, puisque l'on parvient toujours à faire jaillir des étincelles
ou à charger plus ou moins bien une bouteille de Leyde en mettant l'une
de ses armatures en contact avec une source quelconque d'électricité de
tension et l'autre avec le réservoir commun; en un mot, les bouteilles de
Leyde se chargent avec la machine de Hollz, même lorsque le fil conduc-
teur aboutissant à l'une des poupées est placé sur le tabouret isolant; la
charge cependant m'a paru se faire mieux quand le contact avec la terre
est établi; je compte revenir sur ces recherches en mesurant la valeur des
résistances dans ces diilerents cas.
( 351 )
Une résistance équivalente à 120 kilomètres de fil de fer
de 4 millimètres interposée à l'un ou à l'autre des fils n'em-
pêche pas les phénomènes de se présenter de la même
façon.
Le sol du bas de la ville de Bruxelles est donc un excel-
lent conducteur de l'électricité dynamique et de l'électri-
cité de tension.
Voici donc des paratonnerres en bon état à partir de
leur base à hauteur d'homme; je ne connais pas les détails
de leur construction, je constate leur conductibilité et j'ad-
mettrai qu'ils sont, classiquement parlant, en bon état dans
leur partie souterraine et à 1 ou 2 mètres au-dessus d'un
sol qui conduit très-bien l'électricité statique et l'électricité
dynamique.
Voyons maintenant ce qui arrive si l'on fait les mêmes
expériences aux Halles centrales.
Conductibilité des Halles centrales de Bruxelles pour l'élec-
tricité de tension. — Conclusion.
La machine de Hoitz placée dans la nef centrale est
munie de ses deux fils isolants terminés par des sphères
métalliques; on met la première sphère en contact à peu
près comme dans l'expérience faite avec l'électricité dy-
namique; le second fil est tenu à la main et l'on présente la
sphère partout où il y a du fer, au rez de-chaussée, dans les
deux ailes et dans les souterrains; partout l'étincelle éclate;
sur la grille en fer d'un modèle d'échoppe placé sur le
moellon l'étincelle jaillit plus vive que sur le moellon de
la voûte où l'on voit parfaitement le passage de l'électricité,
mais le bruit sec de l'étincelle est affaibli; sur le pavement
( 532 )
(lu sous-sol il en est de même; les individus qui se trou-
vent sur le pavement du sous-sol, sur la voûte non encore
recouverte d'asphalte, reçoivent une secousse violente;
sur l'asphalte elle est plus faible, mais encore assez sen-
sible; il faut se mettre sur les larges dalles de glace brute
pour qu'elle soit peu perceptible; une pluie de quelques
instants étant survenue on peut tirer des étincelles sur la
terre de la rue qui entoure l'édifice; elles sont très-fortes
comme sur les colonnes de l'édifice en les faisant jaillir sur
un moulin en fer destiné à la fabrication du mortier; ce
moulin se trouve de l'autre côté de la rue à 25 mètres du
bâtiment; près du moulin se trouve un robinet de la dis-
tribution; on tire des étincelles de tout le métal, on en fait
jaillir du filet d'eau. — Un observateur qui se trouvait sur
le trottoir humide qui entoure l'édifice ayant approché la
main de la sphère de métal reçoit une secousse très-vio-
Jente. — Cependant on entend des craquements tout le
long du fil, preuve qu'il se perd beaucoup d'électricité.
On met l'intérieur de la grande jarre de Leyde isolée
sur deux grandes lames très-épaisses de glace brute en
contact métallique avec une des colonnes et l'extérieur
avec la sphère de métal du deuxième fil, la jarre se charge
et donne des étincelles bien nourries; on avait pris la pré-
caution de soutenir les fils de façon à ne point faire de trop
grandes pertes.
Le fil fixé au haut de l'édifice ayant été détaché, deux
observateurs, tenant en main l'extrémité des fils isolants
munis de leur sphère de métal, les présentent près des
colonnes; l'étincelle jaillit encore entre ces deux conduc-
teurs interrompus; un des expérimentateurs, abandonnant
son fil et le tenant loin du fer sur le moellon , n'empêchait
pas l'autre de tirer des étincelles des colonnes, etc. En un
( 555 )
mot on constate une conductibilité parfaite dans le paraton-
nerre aérien et dans le sol sur lequel il [les deux ailes des
Halles centrales) est établi.
Il y aurait lieu, si ces expériences étaient reprises, d'avoir
des conducteurs isolants parfaitement établis et de cher-
cher à apprécier très-exactement toutes les résistances à
la conductibilité; il m'est impossible de m'occuper actuel-
lement d'une recherche pareille.
J'ignore si des expériences semblables ont été faites ou
tentées pour l'établissement de paratonnerres sur des édi-
fices qui ressemblent aux Halles centrales de Bruxelles, le
Palais de cristal à Londres, le Palais de l'Exposition de
Paris en 1867, les Halles centrales de Paris, etc., etc.
Nous savons cependant que des paratonnerres spéciaux
ont été placés sur les Halles centrales de Paris , car elles sont
munies de tiges; d'ailleurs les renseignements exacts me
font défaut.
Mais si les conditions de conductibilité ressemblaient
pour ces édifices à celles des Halles centrales de Bruxelles,
je me demande à quoi bon placer un conducteur archi-
microscopique pour protéger un conducteur immense avec
lequel il doit communiquer. N'y aurait-il pas dans ce fait
une distraction scientifique? Cela ne fait-il pas l'effet d'une
feuille de carton que l'on placerait au-devant du blindage
d'un navire cuirassé pour amortir les effets des boulets de
gros calibre.
Si réellement il en était pour ces édifices comme pour
les Halles centrales de Bruxelles, ne pourrai l-on pas assi-
miler le paratonnerre ordinaire dont on les munirait à une
petite porte que l'on placerait en avant de la porte cochère
des grandes maisons ?
( 334 )
PARATONNERRE DE L HOTEL DE MLLE DE BRUXELLES.
J'ai fail connaître les dispositions principales et essen-
tielles du paratonnerre établi sur l'hôtel de ville de
Bruxelles; j'ai eu l'honneur de le montrer à beaucoup de
savants, de physiciens et de météorologistes; j'ose affirmer
qu'aucun d'eux ne m'a fait une objection sérieuse; tous
sans exception ont trouvé que l'édifice était mieux pro-
tégé qu'il ne l'eût été en employant les dispositions ordi-
naires; beaucoup, sinon tous, admettaientractionpréyewf/fe
des pointes nombreuses; j'en ai donné une description
sommaire, mais suffisante pour bien le faire comprendre,
à plusieurs savants étrangers; des rédacteurs d'articles
scientiliques dans les journanx périodiques en ont rendu
compte avec bienveillance.
Il est vrai de dire qu'une critique scientifiquement
sérieuse ne pourra être faite que lorsque j'aurai pu décrire
tous les détails des dispositions particulières de ce qui en
est achevé aujourd'hui et de ce qu'il sera utile ou néces-
saire de faire plus tard, quand toutes les réparations de
l'édifice seront terminées.
J'admets qu'il est convenable de se tenir sur la réserve
avant d'approuver, mais je pense qu'il faudrait au moins
avoir vu et examiné sans idée préconçue pour être à
même de faire une critique sérieuse et motivée.
Ayant connaissance de certaines appréciations favora-
bles, je dois me bornera remercier les auteurs de leur
bienveillance. Je ne connais pas de critique sérieuse. Il y a
une critique cependant que je me fais un véritable plaisir
de signaler; elle est due à l'un des zélés vulgarisateurs des
( 55o )
sciences météorologiques qui a été chargé par M. Jules
Simon, Ministre de l'instruction publique en France, de
se rendre en 187^ en Angleterre pour y étudier les para-
tonnerres. Dans un opuscule, publié par Gliio, libraire
éditeur à Paris : De Vutililé des paratonnerres et de la
nécessité de les contrôler, par W. DeFonvielle, la plume
élégante de l'auteur a tracé les lignes suivantes (page 55) :
« Il ne serait guère plus raisonnable d'imiter le luxe de
» conducteurs employés pour protéger l'hôtel de ville de
» Bruxelles, qui a été garni dans tous les sens de tiges
i> conductrices, afin que la foudre n'ait pour ainsi dire
» pas un Irou où elle puisse passer.
» Mais les précautions, quand elles dépassent la limite
» de ce qui est raisonnable , ne tardent pas à devenir ridi-
» cules, même dans les cas où elles ne sauraient consti-
» tuer aucun danger. »
Constatons donc qu'à l'hôtel de ville, d'après M. W. De
Fonvielle :
1° La foudre ne trouve pas un trou pour passer, et que
2" cependant cette donnée ne constitue pas un danger.
M. W. De Fonvielle n'a très-probablement pas vu,
examiné ou étudié le paratonnerre de l'hôtel de ville de
Bruxelles; je crois même qu'il s'en fait une mauvaise
idée.
Si j'étais chargé de faire la critique de ce qui a été exé-
cuté sur mes données, j'aurais sans aucun doute des objec-
tions plus sérieuses à faire que celle de M. W. De Fon-
vielle ; mais laissons-les actuellement et assurons à
M. W. De Fonvielle que je pourrais lui montrer des trous
par lesquels la foudre passerait bien plus facilement pour
frapper l'hôtel de ville que par le carreau de vitre du toit
de la nef centrale de la gare d'Anvers, munie de plusieurs
( 556 )
tiges et conducteurs en assez bon étal cependant et offrant
à l'étincelle une surface métallique énorme qu'elle a
dédaigné atteindre pour passer, de bas en haut, il est vrai,
et contre son habitude sans doute, à travers un carreau de
vitre à quelques centimètres du fer métalliquement en
contact avec cette énorme surface métallique et une masse
plus considérable de fonte et de fer, garnie de trois tiges
élevées à pointes de platine, le tout reposant sur un sol
parfaitement conducteur de l'électricité (1).
Un dernier mol encore à l'adresse de M. De Fonvielle. Si
jamais il se trouve dans l'obligation de prendre sur lui de
donner les plans d'un paratonnerre pour préserver un des
plus splendides monuments gothiques de France, je suis
certain qu'il cherchera à s'arranger de façon à ne pas
laisser un trou par où la foudre puisse passer, surtout s'il
doit, après s'être écarté des données ordinaires, accepter
seul la responsabilité de l'eiïicacilé de l'appareil dont il
aura surveillé l'exécution dans ses moindres détails et que
tout le travail aura été fait par ses ordres et d'après ses
plans.
Quant à la nécessité de contrôler les paratonnerres, si
M. De Fonvielle avait vu celui de l'hôtel de ville de
Bruxelles, il aurait appris qu'il est préparé depuis 1866
de façon à pouvoir être muni d'un contrôleur et que la
vérification complète de l'ensemble est de la plus grande
facilité.
(1) Bien que l'Académie, sur le rapport de ses commissaires, ail depuis
plusieurs années voté l'impression de ce travail et des planches, j'en ai
retardé la publication espérant rencontrer des faits analogues qui ne sont
point parvenus à ma connaissance. — J'attendrai encore jusqu'au moment
où je pourrai publier les détails des paratonnerres que j'ai fait établir et
que je compte faire établir à Bruxelles.
( 337 )
Loin de m'éraouvoir de la critique de M. De Fonvielle,
je crois même devoir le remercier de ce qu'il dit.
Ceci mis de côté, je puis, abstraction faite des détails,
décrire brièvement l'ensemble des dispositions prises et
les principes qui m'ont guidé pour protéger la flèche et
rhôtel de ville de Bruxelles.
Condiicteiirs aériens.
La flèche de l'hôtel de ville de Bruxelles a une hauteur
totale au-dessus du niveau de la place de 91 mètres et
domine les toits les plus élevés des bâtiments d'une cin-
quantaine de mètres; le couronnement de l'édifice est cou-
vert d'une grosse feuille de cuivre rouge; une forte barre
de fer fixée dans l'axe de la tour sert de support à la statue
de Saint-Michel, faisant fonction de girouette. C'est sur
cette barre que sont fixés les conducteurs au moyen d'une
bride boulonnée; le tout a été rattaché métalliquement par
un bain de zinc fondu.
Huit conducteurs en fil de fer galvanisé de 10 milli-
mètres de diamètre, chacun d'un seul brin sans solution
de continuité, d'une longueur de plus de 91 mètres,
descendent le long de l'octogone; à la base de la tour on les
a rapprochés et placés les uns à côté des autres; ils sont
conduits ainsi jusqu'à environ un mètre du sol dans la cour
intérieure, où ils se trouvent juxtaposés en ligne; ils sont
fixés dans une caisse de fonte.
Conducteurs souterrains.
Le fond de cette caisse est muni de trois ouvertures à
travers chacune desquelles passe une série de dix fils de
fer, les mêmes que les conducteurs aériens : la première
2™^ SÉRIE, TOME XXXVHI. 22
( 338 )
série est fixée métalliquement avec le plus grand soin à un
cylindre de fonte de 0"',600 de diamètre ayant une lon-
gueur de 2"\720 ; il plonge toujours dans l'eau d'un puits
d'au moins 2 mètres à 2"\o0; la seconde série est fixée,
avec les soins les plus minutieux et de façon à ne laisser
aucun doute sur le contact absolu par une grande surface
pendant un temps indéfini, sur une large conduite de l'eau
de la distribution; la troisième série est fixée sur un gros
tube de gaz. Par surcroît de précaution, le tout est bien
entouré d'une petite maçonnerie et enfoui dans du goudron
et du brai de gaz sur tout le parcours.
Les communications avec le sol sont donc établies d'une
manière parfaite et multiple par une surface énorme et à
plus de 20 millions de kilogrammes de tubes en fonte de fer.
Commimications des conducteurs aériens avec les con-
ducteurs souterrains.
Les extrémités des trois séries de conducteurs souter-
rains et des conducteurs aériens bien galvanisés et étamés,
libres mais enclievétrés dans la caisse de fonte, ont été
noyés dans du zinc fondu dont on a rempli la caisse; tout
est donc parfaitement en contact métallique, ce qui, du
reste, a été vérifié avec la plus grande attention par le
courant de la pile et à l'aide des étincelles de la bobine de
Ruhmkorff grand modèle.
La conductibilité parfaite prouvée ainsi, voyons les
détails essentiels de la flèche et de la tour.
Pointes et tiges du paratonnerre.
Aux pieds de la statue de Saint-Michel , huit grandes
pointes en fer, terminées en cuivre, avec l'extrémité dorée
( 539 )
au feu, correspondent aux huit conducteurs; elles sont
inclinées à 45"; fixées à vis dans un anneau de fer étamé
qui a été noyé dans une masselotle de zinc fondu , elles
sont maintenues par huit tringles de fer galvanisé; à ces
tringles et sur chacun des conducteurs au point d'entre-
croisement se trouve, soudée et fixée par une masselotte de
zinc, une aigrette de cinq pointes effilées en cuivre rouge
de 0'",50 de long et de 6 millimètres de diamètre à la base ; il
y a donc dans cette partie huit grandes pointes et quarante
petites.
En descendant, à la galerie la plus élevée et en dehors
de la flèche, se trouvent seize ornements ou clochetons.
Deux fils de 10 millimètres sont fixés sur chaque conduc-
teur descendant au moyen d'une masselotte de zinc; ils se
rendent chacun au sommet du clocheton , sur lequel ils
sont fixés par un chapeau de zinc fort. On s'est contenté de
terminer leur bout en pointe au moyen de la lime; à leur
base sur le haut du clocheton une masselotte de zinc fixe
cinq pointes effilées en cuivre rouge; chaque clocheton est
donc garni d'une aigrette de six pointes, la première ver-
ticale en fer se trouve dans le prolongement de leur axe,
les cinq autres en éventail inclinées au dehors sous l'angle
de Ao°. Cette galerie porte donc quatre-vingts pointes en
cuivre et seize en fer.
A la galerie située au-dessous, il y a huit clochetons; tout
y est disposé absolument comme je viens de le décrire;
plus bas il y en a quatre, plus bas encore quatre et enfin
les quatre derniers se trouvent à une distance d'environ
40 mètres du faîte de l'édifice ou du pied de la statue.
Deux ceintures fixées par simple pression au moyen de vis
font communiquer à deux hauteurs différentes tous les con-
ducteurs.
( UO )
En récapitulant nous voyons que l'aigrette de la tour et
de la flèche de rhôlel de ville est composée :
( 8 grandes pointes.
Au sommet de j ^^^ p^^jj^^ p^i^^l^g
( 16 pointes de fer.
A 15 mètres du liaut environ ^ ^^ j^ cuivre.
( 40 Id. cuivre.
A 20 mètres id j ^ ^^ ^^^
^ . .j (20 Id. cuivre.
A 2 1 mètres id. i , , _, „
( 4 Id. fer.
( 20 Id. cuivre.
A o5 mètres id. \ , ,, „
f 4 Id, fer.
, ,_ , . . ( 20 Id. cuivre.
A 40 mètres id. { ,
4 Id. fer.
Somme.
. 264 pointes.
Un fil de fer galvanisé de 6 millimètres, d'un seul brin
d'environ 200 mètres de longueur, parcourt le grand toit
de l'édifice, descend le long des fenêtres saillantes du côté
de la rue de la Tête d'or et de l'Amigo ; il est fixé au zinc
sur les neuf conducteurs et forme avec ceux-ci un circuit
fermé; un second disposé de la même façon fait le tour de la
cour intérieure, des fils dérivés de 10 millimètres de diamètre
tous fixés au moyen de masselottes de zinc, se rendent aux
six tourelles et aux trois contre- forts placés entre deux de ces
tourelles; ils complètent le réseau préventif et préservatif,
car tous ces fils sont munis d'aigrettes de loin en loin ; il y en
a une sur chaque tourelle ancienne; la tourelle de l'horloge
donnant sur la place qui a été réparée en 1872 porte une
aigrette de 8 pointes en cuivre rouge de ©""jTO de long et
( 341 )
de 12 millimètres de diamètre à la base; il en sera placé
de pareilles sur les tourelles à mesure qu'on les réparera.
Tout le paratonnerre aérien des tourelles des toits et
des fenêtres est armé de 164 pointes; l'ensemble de l'édi-
fice porte donc 428 pointes.
La majeure partie de ces pointes est placée depuis 186o;
je constate qu'elles sont toutes en bon état; quant aux
pointes de fer brut, leur extrémité est rouillée, mais elle
reste pointue encore.
Vérification et contrôle des paratonnerres.
Rien ne paraît plus simple que la vérification de la con-
ductibilité d'un paratonnerre par le courant et un galva-
nomètre ou la machine de Ruhmkorff et la machine de
Hoitzà l'aide des étincelles visibles, de la charge d'une
bouteille de Leyde et au besoin par l'emploi du ré-électro-
mètre de Marianini.
J'ai dû nécessairement suivre la route connue dans les
expériences décrites. Est-ce à dire qu'il faut avoir une
confiance absolue dans les résultats qui ne nous appren-
nent en définitive qu'une chose : le passage plus ou moins
libre, le passage absolu sans résistance de la quantité
d'électricité qui parcourt le conducteur du paratonnerre et
la terre avec laquelle il est en communication ; mais quand
nous comparons nos courants les plus intenses, nos étin-
celles les plus formidables avec l'étincelle foudroyante des
nuages orageux, ou la foudre en boule, on se prend à douter
si réellement il est permis de conclure des uns aux autres.
Pour avoir une donnée certaine de plus, et j'en ai vaine-
ment cherché l'occasion depuis le coup de foudre sur la
( 342 )
gare d'Anvers en juillet 1865, il faudrait pouvoir exami-
ner par ces moyens un paratonnerre venant d'être fou-
droyé et qui eût mal fonctionné.
Cette réserve mise de côté et en tenant compte de ce
que je dis dans la note page 1 i , voyons comment on
vérifie le paratonnerre de l'hôtel de ville de Bruxelles.
On fond le zinc de la caisse de fonte dans laquelle se
rendent tous les conducteurs aériens et les conducteurs
souterrains; on obtient ainsi 40 brins que l'on isole les uns
des autres et entre lesquels on interpose une pile et un
galvanomètre, etc., etc. Je crois inutile d'insister sur
toutes les vérilications auxquelles cette disposition se
prête; bien entendu qu'on enlèvera les ceintures; qu'au
besoin on enlèvera les communications avec les conduc-
teurs qui vont aux petites tourelles des angles du bâtiment
et ceux qui font le tour des bâtiments.
A l'effet d'avoir un contrôle continu, partant des pointes
de l'aigrette supérieure, avec n'importe quelle partie des
conducteurs aériens ou des conducteurs souterrains, la
terre, le puits, les conduites d'eau et les tubes du gaz
courant, un câble à triple enveloppe isolante a été fixé du
côté nord à l'anneau de fer étamé enfoui dans du zinc
fondu qui est en contact avec les 48 pointes et les 8 con-
ducteurs; cet appareil ne fonctionnera que lorsque tout le
paratonnerre sera achevé, c'est-à-dire, quand toutes les
réparations de l'hôtel de ville seront terminées. Ce câble
donne une preuve irrécusable que j'avais pensé dès 1867
au contrôle permanent du paratonnerre; car pour en poser
un pareil, il faudrait placer un échafaudage à la tour.
( 343 )
Projet de paratonnerre sur les bâtiments du Conservatoire
royal de musique de Bruxelles.
Tous les principes du paratonnerre de Thôtel de ville
auraient été appliqués à celui du Conservatoire de musique
si M. le Ministre des travaux publics avait admis le projet
que M. l'architecte Cluysenaer avait soumis à son appro-
bation. Le plan et les devis avaient été dressés par
M. Éd. Sacré, ingénieur mécanicien, qui a établi le para-
tonnerre de l'hôtel de ville.
Le refus de M. le Ministre se base sur ce fait que l'Aca-
démie n'a jamais approuvé le système de protection em-
ployé pour l'hôtel de ville , et je viens de poser nettement la
question à la commission permanente des paratonnerres
qui, je pense, voudra bien se prononcer et motiver son
jugement, qu'il soit favorable ou non; je crois, du reste,
devoir faire observer que l'Académie ne s'est jamais pro-
noncée sur un système particulier.
Il me paraît superflu d'entrer dans la description des
détails; on comprend que les dispositions sur un bâti-
ment ordinaire différeront par des détails particuliers de
celles d'un édifice irrégulier, muni d'une tour; il faudrait
avoir sous les yeux un plan complet et une élévation des
bâtiments. On conçoit cependant l'ensemble en quelques
mots.
Un premier conducteur en fer galvanisé de iO millimè-
tres de diamètre fait le tour du bâtiment, derrière les orne-
ments qui doivent être placés sur les gouttières; ce con-
ducteur est garni de pointes effilées nombreuses. Un second
conducteur, semblable au premier, fait le tour derrière un
( 344 )
ornemenl en fonte de fer qui couronne le membron sépa-
rant la partie ardoisée du toit de la partie couverte en zinc.
Un troisième conducteur parcourt tout le faîtage, il est
garni de pointes ou d'aigrettes comme les deux autres;
ces trois conducteurs sont reliés entre eux; ils seront mis
en contact avec le zinc des toitures par des circuits fermés.
Six conducteurs descendront jusqu'au bas de l'édifice et
seront mis en communication avec l'eau d'un puits, avec les
conduites d'eau de la distribution et un gros tube du gaz
au delà du compteur, comme cela a été fait à l'hôtel de
ville.
Je me demande par où la foudre passera pour frapper
l'édifice et l'endommager? Les conducteurs multiples au
nombre de cinq ne valent-ils pas un conducteur unique? La
simple ligne droite du conducteur unique est remplacée
par deux rectangles ayant un côté commun; à quelques
mètres plus bas se trouve encore un rectangle métallique
fermé; la foudre trouve donc neuf places à atteindre au
lieu d'une.
Les pointes nombreuses, effilées, petites, seront-elles
moins efficaces que cinq pointes de platine?
Six conducteurs descendants et trois contacts avec la
terre ne valent-ils pas un conducteur descendant unique
et un contact unique?
Ne voyons-nous pas dans les œuvres de Franklin,
d'Arago, de Kuhn, etc., que des décharges formidables
peuvent passer sans occasionner de dégâts dans des fils
de fer d'une faible section, même par de simples fils de
sonnettes? Mais j'aurais une foule d'exemples à citer; c'est
par excès de prudence que j'emploie des fils de fer galva-
nisés d'une section assez considérable, 10 millimètres de
( 345 )
diamètre correspondant à une section de 78,5 millimètres
carrés, mais les considérations, que j'ai fait valoir dans
ma note sur les paratonnerres à conducteurs multiples ,
prouvent que l'on pourrait sans danger se contenter
de plusieurs brins de 4 à 5 millimètres de section ; je m'en
contenterais parfaitement et je me croirais en parfaite
sécurité si j'avais à protéger mon habitation en la suppo-
sant isolée au milieu d'une plaine exposée aux orages les
plus violents.
Que l'on se souvienne de la célèbre expérience de
Romas et l'on sera convaincu de ce que j'avance, par une
preuve expérimentale irrécusable.
Prajet d'un paratonnerre s'arrêtant au faite d'un édifice.
BOURSE DE BRUXELLES.
Dans le bas de la ville la distribution de l'eau peut se
faire jusqu'au dernier étage des maisons les plus élevées;
à l'hôtel de ville elle peut s'élever à un hauteur de 2"87
au-dessus du pavement de la troisième galerie. Lorsque je me
suis occupé de l'étude de la préservation de l'hôtel de ville,
je me suis demandé s'il n'était pas convenable de se con-
tenter de transformer la tour et la flèche en une immense
aigrette, comme elle l'est du reste aujourd'hui, et d'arrêter
le paratonnerre à la hauteur de la première galerie de la
tour, celle qui se trouve la plus rapprochée du grand toit;
j'aurais fait arriver jusque-là, par des conduits à large
section, l'eau de la distribution. On aurait fait aboutir tous
les conducteurs descendants de la statue de S'-Michel à ces
conduits; ils y auraient été fixés avec soin et leurs extré-
( 346 )
mités libres terminées en pointes aiguës auraient même
pu pénétrer dans l'intérieur des conduits remplis d'eau, ou
d'un bassin spécial; on pouvait ainsi aller jusqu'à la galerie
du troisième étage ; en un mot le puits classique se serait
trouvé au-dessus des toits à environ 70"' au-dessus du
niveau de la grande place. Je faisais déjà remarquer à cette
époque que ce mode de préservation aurait pu être appliqué
à tout le bas de la ville.
J'ai, dans ce but, visité la Bourse et rien ne me paraît
plus simple que d'établir sur ce magnifique édifice un
paratonnerre préventif et préservatif à points multiples
sans conducteurs descendants et sans autre contact avec
le sol que les quatre conduites qui portent l'eau de la ville
jusqu'au haut du toit de l'édifice (I).
J'aurai l'honneur de soumettre le plan complet de cet
appareil à mes collègues de la commission des paraton-
nerres si l'administration communale se décide à donner
suite à l'intention que les ingénieurs de la ville ont mani-
festée de voir cet édifice préservé.
Si j'en dis quelques mots dans cette notice, c'est pour
appeler dès aujourd'hui l'attention des propriétaires du bas
de la ville sur un mode de préservation qui me paraît effi-
cace et convenable.
Mes collègues auront eu le loisir de bien se rendre
compte par eux-mêmes des propriétés d'un paratonnerre
établi dans des conditions dont je ne pose que le principe.
(1) Il doit êlre bien entendu que, lout en admettant que l'on puisse se
borner à ce système des plus simples, on ne négligera pas de prendre
toutes les précautions capables sinon de rendre plus efficace un paraton-
nerre, établi dans ces conditions, au moins d'en exagérer les propriétés.
( 347)
Je me demande quelle influence la multiplicité des para-
tonnerres à pointes eflilées nombreuses pourrait avoir au
point de vue météorologique.
Obse7'vations sur quelques données relatives aux paratonnerres
placés sur les édifices dans ta construction desquels on em-
ploie des masses considérables de fer et de fonte.
Les instructions recommandent en général de faire com-
muniquer métalliquement toutes les masses de fer un peu
considérables avec les conducteurs des paratonnerres.
A titre d'excès de précaution à la suite d'expériences
parfois contradictoires, j'ai cru qu'il était bon de poser une
règle générale à ce sujet; je disais dans ma Note sur les
paratonnerres (Bulletins de l'Académie, t. XX, p. 15,
juin! 860):
Toutes les pièces métalliques un peu considérables doi-
vent être mises en communication avec les conducteurs des
paratonnerres , de façon à fortner des circuits métalliciues
fermés, c'est-à-dire par deux points ou à deux conducteurs
au moins.
Mais on éprouve quelquefois des difficultés sérieuses
lorsque les bâtiments sont achevés ou que leur construc-
tion est avancée. Vis-à-vis de ces difficultés et eu égard à
la faible tension que l'électricité doit avoir sur les nom-
breux conducteurs d'une section totale de 628 millimètres
carrés, c'est-à-dire le double du conducteur unique armé
d'une seule pointe obtuse, tandis que les miens correspon-
dent chacun au bas de la tour à 33 pointes effilées, non
compris les 16i sur les fils des toits et des tourelles laté-
rales, j'ai pris la détermination à l'hôtel de ville de Bruxelles
de laisser actuellement tous les métaux libres sans loucher
aux conducteurs, me réservant de faire achever ce travail
( 348 )
pour les parties basses de l'édifice , les descentes, les gout-
tières, etc.. quand toutes les réparations seront terminées.
Toutes les difficultés disparaissent, au contraire, quand
on prévoit pour des édifices qui doivent en être armés,
la construction des paratonnerres à partir des fondations.
Rien ne serait plus facile que de rattacher tous les fers,
poutrelles, colonnes, longerons, ancres, etc au fur et à
mesure que le bâtiment s'élève. On aurait ainsi des con-
ducteurs extraordinairement considérables, pour ne pas
dire infinis, eu égard à l'exiguïté comparative des bâti-
ments; ils seraient enfouis dans les maçonneries et par
conséquent il serait facile de les mettre à l'abri complet de
la rouille; on les rattacherait sans difficulté, au besoin,
avec les conducteurs aériens et souterrains au grand profit
de la sécurité.
Si monsieur le Ministre des travaux publics, au lieu de
s'en tenir aux anciennes données, avait consulté l'Acadé-
mie, comme une très-ancienne commission le lui conseil-
lait, les paratonnerres que l'on placera incontestablement
un jour sur le nouveau Palais de justice s'élèveraient avec
l'édifice lui-même à peu de frais et offriraient à la foudre
des milliers, que dis-je, des centaines de milliers de voies
pour s'écouler facilement au réservoir commun sans occa-
sionner aucun dégât.
Autant que j'ai pu m'en rendre compte dans un examen
rapide et superficiel , il ne me paraît pas encore trop tard
pour prendre cette mesure qui sauvegarderait la responsa-
bilité de l'Administration de la façon la plus complète,
quand l'Académie aurait donné un assentiment quelconque
à un projet quelconque de paratonnerres.
( 349 )
La comète de Coggîa, observée à Bruxelles; note par
M. Ernest Quetelel, membre de l'Académie.
La troisième comète de 1874, qui a si vivement attiré
l'attention pendant la première moitié du mois de juillet, a
eu des commencements assez modestes. Au moment de sa
découverte (17 avril) elle était faible, mais les astronomes
reconnurent bientôt qu'elle augmenterait considérable-
ment d'éclat et qu'à la fin du mois de juin elle deviendrait
visible à l'œil nu. Cette annonce s'est pleinement vérifiée et
la comète de Coggia, sans pouvoir être rangée au nombre de
ces astres brillants qui excitent l'étonnement, a cependant
été assez belle pour attirer les regards de tous.
Grâce à son éclat et à sa situation dans le ciel, la comète
a pu être observée à Bruxelles à son passage au méridien
inférieur depuis le 1" jusqu'au 14 juillet. Voici les posi-
tions qui ont été obtenues :
1874.
Juill. 1
5
6
TEMPS MOYEN
de Bruxelles.
I2h57ni Qs
12 45 56
12 42 59
12 59 59
12 36 54
12 55 45
12 20 57
12 17 13
O: OBSERVEE.
19''56"»35»..1
19 41
13,54
19 42
13,42
19 43
8,85
19 44
0,19
19 44 47,62
19 47
22,75
19 47
55,05
ETOILES
de
comparaison.
S OB
a.c. g. l.
g.h i.j.l. q.
d.f.g.h.i.l.q.
d. f. g. lui. l.
j. q. r. t.
i. k. p.
e. i. k. 11.
+ 64«49'43;'9
Q.
+ 01 55 49,8
Q.
+ 60 27 57,6
H.
+ 59 12 47,0
E.
+ 57 48 15,0
H.
+ 56 12 55,2
Q.
+ 47 32 9,3
H.
+ 44 59 40,5
E.
m. s.
b. c. g.
y-i-
c. f. g. 0.
c. f. g.
J. 0.
h. k. p.
i. k. p.
Les initiales Q, H, E désignent les observateurs E. Quelelet, C. Hooreman et L. Estourgies.
( ooO )
Les étoiles de comparaison qui ont servi à fixer la posi-
tion de la comète dans le ciel ont été empruntées au cata-
logue de Bruxelles. Le tableau suivant présente leurs posi-
tions moyennes pour l'année 1874.
Position des étoiles de comparaison pour 1874 , 0
a.
12 Lyncis
6'' 53"' 6^,00
+ 39» 35'
b.
Groombricige 1228.
6 47 2 . .
+ 70 38 25','0
c.
Groonibriclge 1266.
7 0 32,86
+. 62 27 35,8
d.
18 Lyncis. . .
7 4 34,59
+ 39 50 ... .
e.
B. H. 965. . . .
7 8 57,26
+ 49 41 ... .
f-
19 Lyncis. . . .
7 12 54,77
+ 53 50 37,3
9-
Groonibriclge 1519
7 20 42,18
+ 62 1 11,8
h.
i.
Groombricige lôôl.
Groombricige 1556
7 27 13,14'
7 29 12,61
+ 34 7 1,6
+ 34 11 1,7
i-
31 Camelopardi.
7 54 o6,30
+ 63 43 11,0
k.
l.
PiazziVII, 199.
35 Camelopardi.
7 41 9.69
7 30 33,92
+ 34 26 23,8
+ 60 40 ... .
m.
Groombricige 1586
7 51 15 ..
+ 63 23 39,8
n.
27 Lyncis. . .
7 38 38,56
+31 51 ....
0.
Groombricige 1407
7 59 45 . .
+ 38 56 32.4
P-
Lalande 13823 .
8 1 11,25
+ 32 50 58,9
g-
PiazziVII, 509.
8 5 17,28
+ 56 34 ... .
r.
Piazzi ¥11,511 .
8 5 46,98
+ 56 49 ... .
s.
BradleylieO. .
Johnson 2128 .
8 6 43 . .
8 15 44,86
+ 72 47 40,2
+ 57 48 ... .
La comète avait un noyau bien défini ; les deux derniers
soirs le diamètre de celui-ci avait notablement augmenté et
son contour était moins bien terminé. La queue qui enve-
loppait ce noyau, à peu près comme une parabole enve-
loppe son foyer, augmenta de dimension jusqu'au dernier
( 351 )
jour des observations; le 14, elle avait atteint une lon-
gueur de 2S degrés environ. Cette queue, sensiblement
droite jusqu'au 14, et opposée au soleil, paraissait, les
derniers jours surtout, un peu plus brillante sur les bords
que dans l'axe.
La comète de Coggia, observée à Louvain; note par
M. F. Terby, docteur en sciences.
Le 5 juillet, de iO h. 30 m. à 41 h. 15 m. La comète
est très-bien visible à l'œil nu; son noyau atteint presque
la troisième grandeur.
Le 6 , de 10 h. 30 m. à H h. L'éclat de la comète a
peu varié depuis la veille ; il en est de même de sa posi-
tion. On peut comparer la longueur de la queue à l'inter-
valle apparent qui sépare v de /* de la grande Ourse. Cette
longueur m'a semblé être à fort peu près les 3/4 de cette
distance. Avec des grossissements de 38, de 80, de 120 et
de 180 fois, le noyau est enveloppé d'une large chevelure,
et la queue est plus sombre dans sa ligne médiane que sur
ses bords.
Le 8, de 10 h. 30 m. à 11 h. 15 m. L'éclat du noyau
et la longueur de la queue ont sensiblement augmenté.
La comète est intermédiaire entre la deuxième et la troi-
sième grandeur.
Le 13, de 10 h. 10 m. à 10 h. 35 m. Le noyau atteint
presque la deuxième grandeur.
Le <4, à 11 h. 30 m. Avec les grossissements de 38,
de 80 et de 120 fois, le noyau est très-brillant. Il atteint
( 352 )
la deuxième grandeur. Immédiatement autour du noyau,
la chevelure est jaunâtre et offre un éclat sensiblement plus
grand que le reste de la nébulosité. La queue est dirigée
vers h de la grande Ourse.
Le i5, entre ^1 et 12 h. Le noyau de la comète est
très-bas; il semble néanmoins surpasser la deuxième gran-
deur. La queue, très-longue, atteint presque h de la grande
Ourse.
La comète de Coggia, observée à Matines;
note par M. G. Bernaerts.
Ma lunette de Secretan de 9 centimètres d'ouverture
utile m'a permis d'examiner la belle comète qui a été
visible ces jours derniers, et d'en suivre les transforma-
tions.
Les observations que j'ai faites pouvant avoir quelque
intérêt, je crois utile de vous les transmettre.
C'était le 5 juillet vers 11 1/2 h. -du soir que j'ai pu exa-
miner la comète pour la première fois. La nébulosité en-
tourait surtout la partie du noyau tournée vers le soleil, et
se projetait à droite et à gauche pour former la queue, en
laissant au milieu un espace relativement obscur qui se
prolongeait jusqu'à une certaine distance. La forme géné-
rale de la nébulosité était, par conséquent, la même que
celle des comètes de 1858 et 1861 , d'après les dessins et
les observations de MM. Bond et Warren de la Bue.
Le 8 juillet, l'aspect n'avait pas changé. Le 15, la comète
était devenue plus brillante. Le 14, la queue était d'un tiers
environ plus longue que le jour précédent. Le noyau était
devenu de deuxième grandeur et pouvait se comparer pour
( 353 )
l'éclat aux étoiles a (3 et j' de la grande Ourse. Le mouve-
ment apparent avait aussi considérablement augmenté.
Le mercredi 15, à 10 li. du soir, la comète avait subi de
grandes transformations. Le rayon qui se projetait du
côté 0. était plus brillant que celui du nord. La nébulosité
entourait complètement le noyau et l'espace obscur qui le
suivait avait presque disparu. Les grossissements employés
étaient de 52, 112 et i80 fois. A 11 heures, au moment oîi
l'obscurité était devenue plus complète, cette apparence
était moins vive avec l'oculaire grossissant 52 fois, mais
on la voyait encore très-bien avec le grossissement de 180.
La queue avait pris de grands développements. Elle se
courbait vers l'O, et s'étendait jusqu'à la ligne joignant D
et 0 de la grande Ourse. Le noyau, qui brillait d'un vif
éclat, s'était sensiblement approché de l'horizon.
Le 16 juillet, au crépuscule, la nébulosité qui entourait
le noyau avait la même forme que le jour précédent, en
employant l'oculaire grossissant 52 fois. A 11 heures, je crus
répéter l'observation, comme le jour précédent, mais le
noyau de la comète se trouvait caché derrière des bâtiments
situés à une assez grande distance. La queue, toujours
courbée vers l'O, avait pris encore plus d'extension, et
passait un peu au nord de l'étoile v de la grande Ourse.
Ce jour fut le dernier où la comète pût être examinée.
Le 17 juillet, une bande de cirrho-stratus empêcha toute
observation.
Le 18 juillet, vers 10 h. 50 la queue était à peine visible
dans la partie du ciel occupée par i y. et d de la grande
Ourse. Son éclat avait considérablement diminué.
2'"'= SÉRIE, TOME XXXVIII. 23
( 554 )
Note sur les orages du 10 juillet 187 â; par M. Charles
Hooreman , aide à l'Observatoire royal de Bruxelles.
Des orages remarquables par leur violence ont éclaté
le 10 juillet sur plusieurs points du pays. A Bruxelles, peu
de temps après minuit, on apercevait déjà des éclairs bril-
lants dans l'ouest. De 2 ^/a h- à 3 V2 h. du matin on signale
à Ostende et à Somergem, près de Gand, un orage dans
le SE.; l'orage n'a pas atteint ces deux localités; il y est
tombé seulement un peu de pluie.
Vers 3 h. 45 m. du matin, l'orage se déclare à Bruxelles
par des roulements de tonnerre lointain; à 4 h., un violent
coup de foudre ébranle toute la ville; il est suivi immé-
diatement par une forte averse; plusieurs autres coups se
font encore entendre , mais ils sont moins violents; l'orage
s'éloigne vers le NE., et la pluie continue jusque vers 6 h.
50 m. Plusieurs arbres ont été frappés par la foudre à
Saint-Josse-ten-Noode et au Champ des Manœuvres; la
tour de l'église d'Etterbeek a été fortement endommagée.
A Malines et à Louvain, l'orage s'est montré vers 4 h.
40 m.; il venait du SO. A Malines, jusque vers 5 heures,
l'orage était faible , mais la pluie assez forte. A 5 h. 28 m.,
un violent coup de foudre frappe un arbre chaussée de
Tervueren à peu de distance de la ville; l'orage continue
jusque vers 6 h. 15 m. et se perd dans le NE. A Louvain ,
il est moins intense; à 5 h., le vent est assez fort et il tombe
des gouttes de pluie; à 5 h. 7 m., averse; à 5 h. 21 m. et
à 5 h. 27 m., coup de tonnerre; l'orage s'éloigne ensuite
vers le N.
A 5 h. du malin, à Liège, le ciel est encore très-beau; à
( o5o )
6 h., il se couvre et l'on commence a entendre le tonnerre
dans le lointain; l'orage se rapproche lentement ponssé
par un vent de SSE. ; ensuite des éclairs rougeàtres sil-
lonnent les nuages. Les éclairs en traits de Jupiter étaient
tous suivis par des coups de tonnerre qui commençaient
par des craquements; à 7 heures, forte obscurité et
averse; elle a duré une demi-heure; l'orage a duré jusque
vers 8 '/^ heures.
Le soir un nouvel orage s'est manifesté, mais dans des
limites assez restreintes; Bruxelles et Louvain paraissent
seuls avoir été éprouvés. A Bruxelles, dès 6 h. du soir,
l'horizon sud était bordé de nuages noirs qui s'avançaient
lentement; à 7 •//<. h. on entend le roulement du tonnerre
et le ciel s'obscurcit fortement; à 7 '/a h. les nuages noirs
sont au zénith et toute la partie du ciel comprise entre ce
point, l'est, le sud et l'ouest, a une teinte jaune-cuivre et
est sillonnée de nombreux éclairs en traits de Jupiter dont
la plupart sont verticaux et suivis de fortes détonations;
l'air était calme et la pluie n'a commencé que vers 7 '^ji h.,
alors que le gros de l'orage s'étaitéloigné; elle a duré jusque
vers 9 '/^ h. L'orage a passé à l'est de la ville et s'est perdu
dans le NE. Plusieurs points des environs de Bruxelles
ont été frappés: une maison rue Keyenveld a été en partie
incendiée et une cheminée a été abattue par la foudre
chaussée de Witerloo, à Saint-Gilles.
A Louvain, l'orage n'a éclaté que vers 8 '/'i heures;
les nuages du sud étaient noirs et ceux de l'ouest rosés, dit
M. Terby. De puissants traits de Jupiter les sillonnent et
le tonnerre est très-bruyant. Les nuées orageuses vont du
sud au nord; des coups de vent se manifestent à 8 h. 2o m.
La pluie a commencé vers 8 h. 30 m. Plusieurs coups de
foudre se sont succédé vers 8 h. 55 m. au milieu d'une
( 356 )
très-forte averse. L'un de ces coups fut réellement épou-
vantable, suivant immédiatement un brillant éclair. A 9 h.
50 m., l'orage était fini, mais il pleuvait encore à 40 h.
A Somergem et à Malines cet orage n'a été aperçu que par
des éclairs, qui se produisaient dans le SE. entre 7 et 8 h.
du soir; à Liège des éclairs avaient lieu dans l'ouest vers
la même heure.
Description de quelques plantes fossiles de l'étage des psam-
mites dit Condroz {dévonien supérieur)^ par M. François
Crépin, correspondant de l'Académie.
La flore fossile de nos terrains dévoniens est encore à
peu près entièrement inconnue. En ce qui concerne l'étage
des psammites du Condroz, trois espèces y ont seules été
signalées : deux par moi (1), les Palaeopteris hibernica
et Chondrides antiquus , Gôpp., la troisième par M. De-
calque (2), le Chondrides confertus Coem. Dumont et
Davreux avaient bien signalé, en 1852 et 1855, des em-
preintes végétales dans cet étage, mais ces empreintes
étaient indéterminables.
Au mois de juin de l'année dernière, M. Mourlon, mon
collègue au Musée, m'invitait à aller le rejoindre à Esneux,
pour examiner divers niveaux de plantes qu'il avait décou-
verts dans les psammites de la vallée de l'Ourlhe. Je me
rendis à l'appel de ce géologue, et je visitai , sous sa direc-
tion, la plupart des carrières ouvertes dans l'étage des
psammites depuis Esneux jusqu'à Comblain-la-Tour. Nous
(1) Fatria belgica, l. I", p. 473.
(2) Prodrome , p. 519.
( 5^7 )
rencontrâmes çà et là trois sortes d'empreintes végétales :
1° des traces d'axes assez volumineux et qui sont peut-
être les restes de liges de Bornia ou de Calamités ; 2° de
nombreux débris méconnaissables de végétaux pétris dans
certains bancs; 5° des traces d'axes bifurques qui, tout
d'abord, me parurent constituer un Pinnularia, et que je
déterminai plus tard comme étant des rameaux de Psilo-
phyton condrusorum.
Ces premières investigations ne m'avaient pas permis de
reconnaître quel pouvait être le caractère de la flore de
nos psammites, mais je ne désespérai pas de découvrir un
gîte, où cette flore eût conservé quelques-uns de ses végé-
taux dans un état qui permît de les déterminer. Je con-
tinuai mes recherches et dans une vieille carrière aban-
donnée, près de l'écluse d'Évieux, carrière où M. Mourlon
m'avait fait remarquer en premier lieu des empreintes
végétales, je découvris les bancs fossilifères qui renfer-
ment les espèces décrites dans ce petit travail.
Parmi les milliers de pièces provenant de ce gîte que
possède le Musée royal d'histoire naturelle, je n'ai encore
découvert que quatre espèces: peut-être l'exploitation des
bancs fossilifères que je continue moi-même et que je fais
continuer par un ouvrier viendra-t-elle enrichir notre petite
flore psammitique de quelques formes nouvelles.
La flore d'Évieux se compose actuellement de deux
types déjà connus : les Palaeopteris hibernîca et Triphi/l-
lopleris elegans , et de deux types inédits : les Psilophyton
condrusorum et Sphenopteris flaccida.
Ce qui rend le gîte d'Évieux particulièrement remar-
quable, c'est que son extrême richesse en empreintes de
Psilophyton nous a fourni quelques éléments nouveaux
pour apprécier plus complètement la nature d'un groupe
générique resté assez obscur.
( 5o8 ;
DESCRIPTION DES ESPÈCES.
Psilopliytou eoiidfUHoruni IS'ov. sp.
PI. I, fig. 1-4.
Racine ou souche Tiges dressées, roides, hautes
de 1-1 '/s mètre, très-rameuses, à rameaux constituant
avec Taxe principal un petit buisson plus ou moins pyra-
midal. Rameaux stériles alternes, les inférieurs et les
moyens très-allongés, très-rameux, étalés dressés à angle
aigu, à ramifications secondaires constituant une fausse
dichotomie. Rameaux supérieurs ou dernières ramifica-
tions des rameaux moyens et inférieurs portant des ramus-
cules alternes délicatement divisés par fausse dichotomie,
à articles terminaux enroulés en crosse. Rameaux fructi-
fères ordinairement opposés par paire à l'extrémité ou
dans toute la partie supérieure de la tige, plus rarement
naissant en face d'un rameau stérile, plusieurs fois divisés
en une fausse dichotomie plus ou moins enroulée en crosse,
à ramifications dernières, chacune terminée par deux spo-
ranges subsessiles. Sporanges (1 '/., millim. de long, sur
Vs mill. de larg.) ellipsoïdes, atténués aux deux bouts,
acutiuscules au sommet.
M. Davvson, qui est le créateur du genre Psilophyton, a
publié des matériaux qui nous avaient initiés d'une façon
assez satisfaisante à l'organisation de ce singulier groupe
générique. Les nombreuses pièces que j"ai découvertes
dans nos psammites viennent ajouter des éléments nou-
veaux à nos connaissances.
( 359 )
Le genre Psilopinjton est rangé par M. Dawson dans
les Lycopodiacées. M. Schimper n'ose se prononcer sur la
place que doit occuper ce groupe ; il marque que la verna-
tion circinnée et le tissu vasculaire scalariforme rappellent
les Fougères, et que le port général et les organes foliaires
peuvent faire penser à certaines Lycopodiacées. Quoi qu'il
en soit, les Psilophyton constituaient des arbustes plus ou
moins élevés, à rameaux roides, recouverts d'écaillés ou
nus, à fructifications composées d'un très-grand nombre
de petits sporanges terminant les dernières divisions des
ramuscules fructifères.
Selon M. Da>vson, les tiges partaient d'un rbizome stig-
maroïde. Je n'ai pas encore découvert de traces de celui-ci
dans le gîte d'Évieux.
Le P. condrusorum est extrêmement abondant dans un
banc de psammites verdàtres, plus ou moins micacés et
schistoïdes ayant plus d'un demi-mètre d'épaisseur. Toutes
les tiges sont couchées dans le même sens et leurs rameaux
avec leurs ramuscules plongent dans la roche de façon à
donner presque la certitude que la plante a été enfouie
sur la place même où elle a vécu. Dans ce banc, il n'existe
aucune autre espèce végétale que le Psilophi/ton, en com-
pagnie duquel j'ai observé un très-petit mollusque vrai-
semblablement d'eau douce.
Je me bornerai à ces quelques explications préliminaires
sur ce curieux végétal, me réservant d'y revenir quand
j'aborderai l'étude d'un autre Psilophyton que j'ai observé
dans le poudingue de Burnot (dévonien inférieur).
Je n'ai pas cru devoir établir les différences qui existent
entre la nouvelle espèce décrite ci-dessus et les P. princeps
Daws., P. robustius Daws., P. elegans Daws. et P. Declie-'
nianum Carr. : la comparaison des (igures représentant
( 560 )
ces divers types suffit pour faire reconnaître en quoi le
JP. condrusormn diffère de ses congénères. Dans celui-ci ,
je n'ai découvert aucune trace d'écaillés qui, dans les
P. prlnceps et rohustius, recouvrent la tige ouïes rameaux.
Sphenopteris flacclda Nov. sp.
PI. II, fig. 4-5.
Au lieu de tracer ici une diagnose qui , dans sa conci-
sion, ne permettrait guère de distinguer cette nouvelle
espèce des types voisins, je préfère marquer en quoi elle
se distingue de ceux-ci. En examinant les figures 1 et %
de la planche II, on est assez porté à voir dans le Sphe-
nopteris d'Évieux le S. Schimperiana Sch. de la grau-
wacke supérieure, mais la ressemblance qu'on peut remar-
quer entre les figures de ma planche II et celles du
S. Schimperiana publiées par MM. Gôppert et Schimper
n'est qu'apparente. Le S. fîaccida est un type tout diffé-
rent.
A en juger d'après les nombreuses pièces que j'ai recueil-
lies, le S. fîaccida a dû être une fougère d'assez haute
taille, à racliis épais et ayant laissé des empreintes simulant
des fragments de feuilles de Cordaites, rachis bifurqué de
dislance en distance et privé de pinnules entre les points
de bifurcation. Les intervalles laissés nus sur le rachis ou
sur les principales divisions de celui-ci peuvent atteindre
et dépasser même 10 centimètres. Aux points des bifur-
cations (fig. 5, a a), naissent des pinnules plus ou moins
amples et divisées en segments plus ou moins nombreux.
Les pinnules, qui vont en se multipliant vers l'extrémité
des divisions du rachis, ne sont pas, comme dans le
S. Schimperiana, pourvues de segments jusqu'à la base
( 561 )
avec un segment basilaire inférieur plus ou moins réfracté
contre le rachis, mais elles sont, au contraire, plus ou
moins longuement nues à la base. Cette différence se
poursuit dans les divisions des pinnules qui sont atténuées
à la base et non pas élargies.
La forme générale des pinnules de second ordre est
toute différente dans les deux espèces.
D'après ce que j'ai pu voir sur de beaux échantillons du
S. Schimperiana que possède le iMusée, cette espèce a dû
être d'une consistance assez coriace, tandis que le S. flac-
cida doit avoir eu un tissu assez mou.
Le S. flaccida présente quelques traits de ressemblance
avec le S. Hookeri Baily, mais les différences sont telles
entre les deux espèces que je crois parfaitement inutile de
les faire ressortir.
Le S. flaccida est assez abondant dans un banc de psara-
mites verdàlres plus ou moins micacés et schistoïdes un peu
supérieur à celui du Psilophyton. Cette espèce se trouve
en compagnie du Palaeopteris hibernica et de fragments de
Psilophyton condrusorum.
Palaeopteris hibernica Sch. var. nilnor.
PI. IILflg.l-o.
Le Palaeopteris hibernica est trop bien connu pour
qu'il soit besoin d'en décrire les caractères. Le gîte
d'É vieux m'a fourni de nombreuses empreintes dont
quelques-unes sont fort belles et peuvent même rivaliser
avec les magnifiques empreintes de Kiltorkan, Ce que l'on
trouve habituellement, ce sont des frondes stériles : les
frondes fertiles sont très-rares. Cette espèce existe dans le
même banc que \e Sphenopteris flaccida.
( 362 )
Nous ne possédons pas en Belgique la grande forme
d'Irlande à amples pinnules, mais une forme réduite, à pin-
nules dont les segments sont une fois plus petits. Sur une
pièce magnifique du P. hibernica d'Irlande que possède le
Musée, j'ai observé, à côté de la forme typique, une forme
semblable à celle d'Évieux que je désigne sous le nom de
var. ininor.
Selon moi, c'est cette même var. minor que M. Gôppert
a décrite et ligurée sous le nom de Cyclopteris Roemeriana
{Veber die fossile Flora der silurischen, der devonischen
und unteren Kohlenformalionoder des sogenannten Ueber-
ganrjsgcbirges, p. 75, t. XXXVII, fig. 8). Les pinnules de la
pièce figurée ne paraissent si étroites que parce qu'elles sont
incurvées dans la roche ou qu'une partie de chacune d'elles
a disparu par le clivage. L'absence de pinnules sur le rachis
n'est évidemment qu'accidentelle. Le Musée possède du
gîte d'Évieux des échantillons de la variété minor iden-
tiques ou à peu près identiques à celui figuré par M. Gôp-
pert. Le Cyclopteris Roemeriana Gopp. seu Palaeopteris
Roemeriana Sch. est une espèce qui doit, selon moi, dispa-
raître de la flore paléontologique.
Vripliylloptcrifii elcganfs Scb.
PI. II. fig. (J-8.
Cette petite et délicate espèce est très-rare dans le gîte
d'Évieux. Elle se trouve au même niveau que les deux
fougères précédentes.
Les pièces que j'en ai recueillies sont cependant nom-
breuses et me permettent d'approuver complètement la
réduction en une seule espèce des diverses formes que
Unger avait cru devoir distinguer sous les noms de Cyclop-
( 363 )
teris elerjans, dissecta et Richteri [Beitrag ziir Palaonto-
logie des tliûrincjer Waldes, von Richter und F. Unger,
pp. 75 et 76, tab. Yî). Peut-être M. Schimper n'a-t-il pas
poussé assez loin les réductions et je serais tenté de rap-
porter également au Trip/itjllopteris elerjans le Sphenop-
teris réfracta Ung, {loc. cit., t. YI, fig. 18), \e S. devonica
Ung. (/oc. cit., fig. 21) et le Cyclopleris thuringiaca Ung.
[loc. cit., fig. 4). Le Sphenopteris réfracta n'est vraisembla-
blement que la nervation d'une pinnule suborbiculaire du
Triphyllopteris elegans et quant au Sphenopteris devonica,
il est peut-être constitué par des pinnules très-amples du
Triphyllopteris elegans fortement déchiquetées.
Le Triphyllopteris elegans paraît avoir été une fougère
rampante ou grimpante, constituée par de longues tiges
portant alternativement des branches ou rachis secondaires
délicats, sur lesquels naissaient des pinnules alternes, sub-
sessiles ou brièvement stipitées.
IL
OBSERVATIONS SUR l'aGE PALÉOMOLOGIQUE DES ESPÈCES
PRÉCÉDENTES.
Dans ces quelques remarques, je n'ai nullement l'inten-
tion d'empiéter sur la tâche du géologue; je me conten-
terai de signaler les étages dans lesquels on a observé, à
l'étranger, plusieurs des espèces que je viens de signaler.
La position exacte des assises fossilifères d'Évieux sera
indiquée plus tard par mon collègue, M. Mourlon, dans un
travail spécial qu'il a entrepris sur les psammites du Con-
droz.
Le Psilophyton condriisorum étant considéré comme
( 564 )
une espèce nouvelle, il n'y a pas, à son sujet, à établir
de comparaison avec les pays étrangers. Je dirai seulement
que M. Dawson signale son P. princeps dans tout le sys-
tème dévonien à Gaspé (Canada) et que des fragments de
cette espèce s'observent, selon cet auteur, dans le silurien
supérieur de la même localité.
Le Palaeopteris hibernica, selon M. Schimper, appartien-
drait à une époque dont les formations seraient intermé-
diaires entre le terrain dévonien et le terrain bouiller,
époque que cet auteur désigne sous le nom de paléanlhra-
citique (1). L'illustre savant divise les formations de cette
époque en trois groupes : « le plus inférieur correspond à
» la grauwacke supérieure des géologues allemands et que
» M. Heer a désigné sous le nom du Groupe de Vile des
)> Ours (Ursa-Stuffe); le second comprend le calcaire car-
» bonifère (Mountain Limestone, Bergkalk), et le troisième
» les schistes à Posidonomyes (Culmiferous Beds, Culm).
» Tout cet ensemble de formations était réuni autrefois au
» terrain dévonien. »
Je n'ai pas à juger de la valeur de cette nouvelle subdivi-
sion qui ne change du reste rien à la superposition des étages
géologiques, mais je ferai remarquer qu'en ce qui con-
cerne le gîte d'Évieux nous observons, au même horizon,
le Triphyllopteris elegans que M. Schimper attribue à son
époque dévonienne et le Palaeopteris hibernica qui appar-
tiendrait à son époque paléanthracitique. Les schistes à
Cypridines, dans lesquels le Triphyllopteris elegans est
signalé, constituent, pour M. Schimper, l'étage supérieur du
dévonien, tandis que le grès jaune verdàtre argileux, de
(1) Voir Schimper, Traite de paléontologie végétale, vol. III , p. 619.
( 56o )
Kiltorkan (Irlande), caractérisé par le Palaeopteris hiber-
nica, et les schistes à Spirifer Verneulii Murch. d'Aix-la-
Chapelle, caractérisés par le Palaeopteris Roemeriana
(P. hibernica var. minor), feraient partie d'une série strati-
graphique différente.
EXPLICATION DES PLANCHES.
Planche I.
Fig. 1. Partie inférieure de la lige du Psilophijlon condrusorum Crép.
Moitié de grandeur naturelle.
— 2. Jeune rameau de la même espèce. Grandeur naturelle. On re-
marque que les divisions de ce rameau ont encore conservé
une légère incurvation vers leur base résultant de leur verna-
tion circinnée. Le cylindre ligneux ou vasculaire est très-
apparent et simule une épai'se nervure sur l'empreinte laissée
par l'axe principal.
— 3. Extrémité fructifère d'une tige de la même espèce. Grandeur
naturelle.
— i. Groupe de sporanges grossis.
Pla.nche II.
Fig. 1. Sphenopteris flaccida Crép. Grandeur naturelle.
— 2. Même espèce. Grandeur naturelle.
— 3. Même espèce. Grandeur naturelle. Dans ce fragment de pinnule,
le rachis et les segments sont plus délicats et plus étroits que
dans la forme habituelle.
— 4. Pinnule de dernier ordre de la même espèce grossie.
— 5. Fragment de rachis de la même espèce. Grandeur naturelle.
— 6. Triphyllopteris elegans Sch. Grandeur naturelle.
— 7. Pinnule de la même espèce, mais appartenant à une autre forme
que la précédente.
— 8. La même pinnule grossie.
( 566 0
Planche III.
Fiq. 1. Partie moyenne supérieure d'une îronde de Palaeopteris hiber-
nica Sch. var. minor Crép. Grandeur naturelle.
— 2. Fragment de pinnule avec quatre segments entiers. Grandeur
naturelle.
— 3. Fragment de rachis de Palaeopleris hibernica var. minor por-
tant une pinnule tVuctilere. Grandeur naturelle.
— 4. Sporanges grossis.
— o. Fragment d'une pinnule pour montrer que les segments peu-
vent paraître beaucoup plus étroits et plus petits qu'ils ne le
sont véritablement à cause de leur incurvation dans la roche.
Grandeur naturelle.
— 6. Partie d'une jeune fronde de Palaeopteris hibernica var. minor
dont les pinnules, rejelées toutes d'un même côté du rachis,
présentent leurs jeunes pinnules pressées et imbriquées les
unes sur les autres. Grandeur naturelle.
BuU. ,L' lAmd.Jivi,
PU.
WX0
Cri^in-del.
ZitTi'. G-.Severeyns.
Xvih. G.Severet/ns.
Bun.JcTAixui Âolj.
PI. m.
'^epi7i/
del.
\vth.G-oevere^n
( 567)
CLASSE DES LETTRES.
Séance du 3 août 7574.
M. R. ChaloiN, direcleur
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
SoHtpmen^s; MM. Ch.Steur,J.Grandgagnage,J. Roulez,
P. De Decker, M.-N.-J. Leclercq, le baron J. de Witte,
Ch. Faider, J.-J. Thonissen , Th. Juste, Félix Nève,
Alph. Wauters, G. Nypels, Alph. Le Roy, membres; J. Nolet
de Brauwere van Steeland, Aug. Scheler, associés; J. He-
remans, correspondant.
M. Ch. Montigny, membre de la classe des sciences,
assiste à la séance.
CORRESPOiNDANCE.
La commission centrale pour l'érection d'un monument
à M. Sylvain Van de Weyer adresse à l'Académie la lettre
suivante :
« Le conseil communal de Louvain a résolu d'honorer
Ja mémoire de M. Sylvain Van de Weyer en élevant à ce
grand citoyen un monument sur l'une des places publiques
de sa ville natale.
» Pour donner à celte résolution le caractère d'une
manifestation nationale, la commission centrale d'exécu-
( 568 )
tion fait un appel à tous les corps constitués du pays. Déjà
elle a reçu de nombreux encouragements, qui témoignent
de la sympathie que son œuvre rencontre partout,
» Nous avons la conviction que MM. les membres de
l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-
arts revendiqueront l'honneur de s'associer à cette patrio-
tique entreprise, destinée à perpétuer le souvenir d'un de
leurs collègues les plus distingués. C'est dans cette pensée
que nous avons cru devoir vous adresser une liste de sous-
cription. »
En raison des services exceptionnels rendus à l'Aca-
démie par feu M. Van de Weyer, la classe décide qu'elle
accepte la présentation de cette liste, qui sera soumise à
tous les membres de la Compagnie.
— MM. les Ministres de l'intérieur et de la justice adres-
sent, pour la bibliothèque de l'Académie, différents ouvrages
qui seront annoncés dans le Bulletin.
— M. le professeur Pietro EUero, de Bologne, offre un
exemplaire de son livre intitulé : La questione sociale.
M. Ch. Steur, membre de la classe, fait hommage du
tome troisième de son Ethnographie des peuples de l'Eu-
rope.
La classe vote des remercîments pour ces dons.
— Les membres de la classe expriment un avis favo-
rable sur la ressemblance du modèle du buste de feu M. le
colonel Dandelin , leur ancien confrère de la classe des
sciences. Ce modèle a été soumis au Gouvernement par
M. le statuaire Van Oemberg.
— La Société des antiquaires de Londres accuse récep-
tion du récent envoi annuel de publications académiques.
( 369 )
— M. Charles Desmaze, conseiller à la cour d'appel de
Paris, accuse réception de son diplôme d'associé.
— La classe renvoie à l'examen de MM. Gachard et
Th. Juste un travail manuscrit de M. le chanoine De Smel,
intitulé : Notice sur les premières années de don Juan
d'Autriche, fils de Charles-Quint.
— Elle prend ensuite notification de la lettre qui lui est
écrite par l'auteur des quelques pages d'introduction à un
travail sur l'histoire de la philologie thyoise, envoyées en
réponse à une question du concours de 1874, laquelle a été
remise au programme de 1876.
— La classe donne ensuite son approbation définitive
au programme de concours pour 1876, dont elle a arrêté
les questions dans sa séance du mois de juillet dernier.
Elle adopte également une question d'histoire nationale,
à proposer pour la troisième période sexennale du concours
de Stassart.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
MM. Alph. Rivier et Alph. Wauters, inscrits à l'ordre
du jour de la séance pour une communication, s'excusent
de ne pouvoir en donner lecture et en demandent l'ajour-
nement à la prochaine séance.
M. J.-F.-J. Heremans se fait inscrire pour un travail por-
tant pour titre : Les restes de l'instrumental en néerlandais.
2""" SÉRIE, TOME XXXYIII. 24
( 370 )
CL4SSE DES BEAUX- ARTS.
Séance du 6 août 1S74.
M. N. De Keyser, directeur, président de l'Académie.
M. J. LiAGP.E, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. Al vin, G. Geefs, Madou , A. Van
Hasselt, Jos. Geefs, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Edm. De
Busscher, Alph. Balat, Aug. Payen, le chevalier L. de
Burbure, J. Franck, G. De Man, Ad. Siret, J. Leclercq,
Ernest Slingeneyer, Alex. Robert, F.-A. Gevaert, mem-
bres; Ed. De Biefve, L. Terry, correspondants.
M. Chalon , membre et directeur de la classe des lettres ,
ainsi que MM. Ch. Montigny, membre, et Éd. Mailly, cor-
respondant de la classe des sciences, assistent à la séance.
CORRESPONDANCE.
M. le secrétaire perpétuel donne lecture :
\° D'une lettre de M. Gevaert , président de la section
permanente des jurys des grands concours de composition
musicale, en réponse à une dépêche de 31. le Ministre de
l'intérieur, par laquelle ce haut fonctionnaire exprimait le
désir de savoir si la section précitée n'avait pas à donner
à M. Franz Servais, lauréat du concours de 1875, d'autres
(571 )
inslruclions de voyage que celles menlionnées à l'article 24
du règlement du 6 mars 1849.
M. Gevaert lait connaître qu'il n'a aucune instruction
spéciale à donner à M. Servais.
2" D'une lettre de M. le Ministre de l'intérieur, accom-
pagnant deux expéditions d'arrêtés royaux en date du 28
avril dernier, portant à4,000 francs la pension deslauréats
des grands concours de composition musicale et des grands
concours de l'Académie royale des beaux-arts d'Anvers.
La classe décide que l'expression de ses remercîments
sera transmise à M. le Ministre, pour cette nouvelle mar-
que de sa sollicitude à l'égard des jeunes artistes.
3° D'une seconde dépèche de M. le Ministre de l'inté-
rieur, faisant savoir que le statuaire Van Oemberg a été
prié de déposer dans l'une des salles des locaux académi-
ques le modèle du buste de feu le colonel Dandelin, afin de
connaître l'avis des membres de la classe sur la ressem-
blance et le mérite artistique de cette œuvre.
La classe donne son assentiment à l'exécution de ce
buste au sujet duquel les classes des sciences et des lettres
avaient déjà exprimé une opinion favorable quant à la res-
semblance.
— La classe accepte ensuite la liste de souscription,
adressée à l'Académie par la commission pour le monu-
ment à élever à Louvain à M. Svivain Van de Wever.
JUGEMENT DU CONCOURS.
M. Ad. Siret donne lecture de son rapport, auquel a
adhéré M. Joseph Geefs, sur le mémoire présenté en ré-
ponse à la question littéraire suivante : Faire l'histoire de
( 372 )
la sculpture aux Pays-Bas pendant les XVII' et XVIIV siè-
cles.
La classe prendia une décision à l'égard de ce travail
lorsque le troisième commissaire, M. De Man,aura fait son
rapport.
OUVRAGES PRÉSENTES.
Commission royale d'histoire. — Table générale chronolo-
gique et analytique des chartes, Icllres, ordonnances, traités
et autres documents contenus dans les l", 2*^ et 3^ séries des
Bulletins, par J.-J.-E. Proost. Bruxelles, 1874; vol. in-8°.
Sieur [Ch.). — Ethnographie des peuples de l'Europe avant
Jésus-Christ, tome III, I" et 2*= fascicules. Bruxelles, 1873;
2 cah. in-8°.
Guillaume [le lient, général baron). — L'armée belge : His-
toire et état militaire. Bruxelles, 1874; broch. in-8°.
Juste [Th.). — Les fondateurs de la monarchie belge : Louis
de Potter. Bruxelles, 1874; vol. in-8". (Envoi du Ministère de
l'intérieur.)
Catalan {£.). — Note sur les surfaces orthogonales, Paris,
1874; feuille in-4''.
Cornet [F.-L.) et Briart {A.). — Note sur la découverte de
l'étage du calcaire deCouvin ou des schistes et calcaire à Cal-
ceola sandalina dans la vallée de IHogneau. Liège, d874;
feuille in-S".
H aurez {Jules). — Chaudières à vapeur accolées de M. Paul
Havrez. Liège, 1873; broch. in-8°.
Mansion {P.). — Les mathématiques en Belgique en 1872;
— Compte rendu analytique du cours d'analyse de l'École poly-
( 373 )
technique par M, Ch. Hermite. Rome, 1875-1874; 12 broch.
in-S". (Envoi de M. Boncompagni.)
Het Volksbelang. — Een werk bekroond door onze konink-
lijke Akaderaie (Antoon Van Dyck en zijne werken door Frans
De Pottcr en Jan Broeckaert). Gand, 1874; broch. in-12.
Conseils provinciaux des neuf provinces. — Exposés, avec
annexes, de la situation administrative des neuf provinces en
1874; 15 vol. et cah. in-8".
Société royale de Botanique de Bruxelles. — Bulletin,
tome XI, 11' année, ■1872, n"' 1 et 2. Bruxelles; 2 cah. in-8''.
De Vlaamsche school, 1874, pp. 1 à iOO. Gand, 1874;
12 feuilles in-4" et 1 gravure.
L'Illustration horticole, 5" série, 5* vol., A% 5' et G* livr.,
avril à juin 1874. Gand; 2 cah. gr. in-8".
Messager des sciences historiques, année 1874, 2' livr.
Gand, 1874; cah. in-8°.
Kotiinklijke Bibliotheek , 's Gravenhage. — Vcrslag gedu-
rendc het jaar 1873. La Haye, 1874; broch. in-8".
Joly [N.). — Notice sur ses travaux scientifiques et sur ses
titres universitaires et académiques; — Étude sur les méta-
morphoses des Axolotls du Mexique {Siredon Mexicunus ,
Shaw); — Études sur les mœurs, le développement et les
métamorphoses d'un petit poisson chinois du genre Macra-
pode. Toulouse, 1874; broch. in-4'' et 2 broch. in-8°.
Joly {JV.) et Peyrut {A.). — Documents nouveaux sur le
Pygopage de Mazères et sur Millie-Christine. Toulouse, 1874;
broch. in-8".
Société linnéenne du nord de la France, Amiens. — Biû-
letin, n"^ 25 et 26, juillet et août 1874, 5« année. Amiens;
2 feuilles in-8^
Académie des sciences , arts et belles-lettres de Dijon. —
Mémoires, 5« série, tome I, année 1871-1875. Dijon, 1875;
vol. in-8°.
Société d'anthropologie de Paris. — Bulletin, tome 1X%
(574)
11* série, 1" lasc, janvier et février 1874. Paris, 1874; eali.
in-8».
Société géologique de France, ù Paris. — Bulletin , 5' série,
t. 11% n" 5, juillet 1874. Paris; cah. in-8°.
Matériaux pour l'histoire primifiveet naturelle de Vhonmie,
^1' série : LV année, tome IV, 1875 , 10"= à 12'^ livr. ; X' année,
tome V, 1874, I" à 4*^ livr. Toulouse, 1873-1874; 4 cah. in-8".
Handelmann {ffeinrich). — Vorgeschichtiiche Steindenk-
mJiler in Schleswig-Holstein , driltes Heft. Kiel, 1874;broch.
10-4".
Hermann {Dr Joseph). — Die Behandiung Syphilitischer
in den oITentlielien Krankenhausern Wien's; — Ueber die
Wirkung des Quecksilbers auf den menschlichen Organismus.
Wien elTeschen, 1872 et 1875 ; brocii. petit in-4" et vol.in-fol.
LasaulxiA. von). — Das Erdbebcn von Herzogenralli am 22.
Oclober 1875. Bonn, 1874; vol. in-8°.
Verein fur Erdkunde zu Dresden. — Jahresbericht, X.
Dresde, 1874; eab. in-8".
Universitat zu Ileidelberg. — Anzeige der Vorlesungen ,
welche im Winter-IIalbjabr 1874-1875. Heidclberg, broch.
in-8».
K. bohinische Gesellschaft der Wissenschaftenin Prag.—
Sitzungsberichle : Jahrgang 1872, Juli-Dezember; Jabrgang
1873; — Abhandiungen ,1873, sccbstc Folge, 6. Bd. Prague,
1873-1874; vol. in-4'', vcl. et cah. in-8''.
Verein fur Naturkunde zu Zwickau. — Jahresbericht,
1873. Zwickau , 1874; eah. in-S".
Archiv der Mathemalik und Phijsik, LVI.Theil, 3. Helt.
Leipzig et Greifswalde, 1874 ; cah. in-8'\
IVordiskt medicinskt Arkiv , sjetle Baudet, andra Haflet,
1874. Stockholm; cah. in-S".
lî. Osservalurio di Brera in Milano. — Publicazioni,
n° VII, parte 3''. Milan, 1874; cah. gr. in-4".
H. Comilato geologico dltaliu. — Bolletlino, anno 1874,
n" 3 e 4. Rome, 1874; cah. in-8".
( 37S )
BoUettino del vulcanismo italiano, anno F, 1874, fasc VI
Vil c VIII. Rome J 874; 2 cah. in-8°. ' '
Brilish Association for the advancement of science. —
Report of the forty-third meeting, held at Bradford in sep-
temberI875. Londres, 1874; vol. in-8".
Chemical Society of London. — Journal, 2*^ ser. : vol XI
december 1875; vol. XII, february and april 1874. Londres '
1874; 4 cah. in-8°. '
Geological Society of London. - The quarterly Journal
vol. XXX, pt. 2, may 1874. London, 1874; cah. in-S».
Royal geographical Society of London. - Proceedings , vol.
XVIII, n» III; Londres, 1874; cah. in-8».
Statistical Society of London. ~ Journal, vol. XXXVII,
part II , june 1 874. Londres , 1 874 ; cah. in-8''.
Zoological Society of London. — Transactions, vol. VIII
Pis. 7 and 8; - Proceedings : 1875, part III, june-december;'
1874, part I, january and february. Londres; 2 cah. in-4» et
2 cah. in-8".
Literary and philosopliical Society of Manchester. - Me-
moirs, third séries, vol. IV; - Proceedings, vol. VIII at XII
Manchester, 1869 à 1875; 6 vol. in-8''.
Radcliffe Observatory, Oxford. - Results of astronomical
and meteorological observations raade in the vear 1871 vol
XXXL Oxford, 1874 ; vol. in-8°. " '
Asiatic Society of^Bengal, at Calcutta. - Proceedings
n- II at V, february at may 1874 ; - Journal : vol. 42, pt II'
n» IV 1873; vol. 43, pt. I. n» 1 , 1874; part II, n» 1 , 1874;
- Bibhothcca Indica, new séries, n» 506. Calcutta, 1873-
18/4; 7 cah. in-8".
Boston Society of natural history. - Memoirs, vol II •
part II, n" IV; part III, no^ and II; - Proceedings : voL XV
pts. o and 4; vol. XVI, pts. 1 and 2. Boston, 1873-1874'
o cah. in-4'' et 4 cah. in-8°.
American Academy of arts and sciences at Boston. - Pro-
(376)
cecdings, vol. VIII, 1868 at 1873. Boston et Cambridge, 1875;
cah. in 8"; — The complète works of count Rumford, vol. Il
and III. Boston, 1873; 2 vol. in-8°.
Réception ofDr. Benjamin A . Gould by his Fellows-citizens
of Boston and vicinitxj, june 22, 1874. Boston, 1874; broch.
in-S".
County Ackerbau-Gesellscliaft von Ohio, Columbus. —
Bericht, 1872, zweite Reihe, siebenundzwanzigster Jabresbe-
richt. Columbus, 1873; vol. in-8''.
Wiscomin State agricultural Society. — Transactions,
1871-1875, vol. X and XI. Madison, 1872-1873; 2 vol. in-8«.
Minnesota Academy of natural sciences , 3Iinneapolis. —
Bulletin with tbe reports of the Président. Minneapolis, 1874;
brocb. in-8".
Connecticut Academy of arts and sciences, New Haven. —
Transactions , vol. II, part 2. New Haven, 1875; cah. in-8''.
Lyceum of natural history of New-York. — Annals, vol. X,
nos 8^ 9^ -lo-il ; — Proceedings : 1' séries, vol. I, feuilles 1C-
49; 2'^ séries, january to mardi 1873. New-York, 1872-1873.
4 cah. et 4 feuilles in-8°.
American Institute of Architects , New-YorL— Procee-
dings of the seventh annuel convention. New -York, 1874;
cah. in-4°.
American philosophical Society for promoting use fui Know-
ledge at Philadelphia. — Proceedings, vol. XIII, n°^ 90 and
91, 1873; — Transactions, vol. XV, new séries, pt. I. Phila-
delphie, 1873; 2 cah. in-S" et cahier in-4°.
[2W
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIOLE '*'
1874. — N°^ 9 ET 10.
CLASSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du 3 septembre 1874.
M. N. De Keyser, directeur, président de i'Âcadcniie.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. Alvin , Louis Galiait, G. Geel's,
Madou, Jos. Geefs, Ferdinand De Braekeleer, Éd. Fétis,
Edm. De Busscher, Portaels, Auguste Payen, le chevalier
Léon de Burbure, J. Franck, G. De Man, Adolphe Siret,
J. Leclercq, Ern. Slingeneyer, Alex. Bobert, Adolphe
Samuel , membres ; L. Terry, correspondant.
M. Ed. Mailly, correspondant de la classe des sciences ,
assiste à la séance.
2"°^ SÉRIE, TOME xxxviir. 25
( 378 )
CORRESPONDANDE.
M. le Ministre de l'intérieiir communique le programme
(les fêtes de septembre. La classe lixe au samedi 26 de ce
mois, à une heure, sa séance publique annuelle. Cette
cérémonie aura lieu au Palais Ducal.
JUGEMENT DU CONCOURS DE 1874.
CONCOURS D ART APPLIQUÉ.
Deux sujets avaient été proposés pour le concours d'art
appliqué de cette année, l'un concernant la peinture,
l'autre la gravure.
La classe demandait, pour la peinture, le carton d'une
frise destinée à une salle d'/iospice, et devant avoir pour
sujet : DoNNEZ A MANGER A CEUX QUI ONT FAIM ET A BOIRE A
CEUX Qii ONT SOIF. Dimensions : 0"'75 de haut sur S^SS de
large.
Treize carions ont été reçus. En voici les devises :
N" \. Audace, courage et travail.
N" 2. Paix et travail.
N° 5. La charité chrétienne ne connaît pas de natio'
naiité.
N° 4. Accueillez les suppliants sur terre pour que, sup-
pliant, l'on vous accueille au ciel.
( 579 )
N" o. Sans dovise; signe distinctif: Un trait ondulé à
l'angle inférienr de droite.
N" G. Dlcn est la source de toute charité.
N° 7. Cnritas (angle inférieur de gauche).
N° 8. Cliaciin pour tous, tons pour chacun.
N" 9. Carilas (angle inférieur de droite).
.\° 10. Can'tas omnium rirtutum maxima.
M" M. Philanthropie.
'S° 12. La charité, ditBossuet, c'est tout le christianisme.
]\° 15. Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger,
et j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire.
La classe, après avoir entendu le rapport de la section
de peinture au sujet de ce concours, décide que le prix de
jnille francs, attribué par le programme à l'œuvre cou-
ronnée, ne sera pas décerné.
Elle vote une somme de oOO francs, comme encourage-
ment, au carton n" o. L'auteur de cette pièce est prié de
faire connaître s'il accepte la récompense attribuée à son
œuvre.
— Vn prix de 600 francs devait être accordé à l'auteur
de la meilleure gravure au burin, exécutée en Belgique
pendant la période du 1'^'" janvier 1872 au I" janvier J874,
d'après l'œuvre d'un maître ancien ou moderne de l'école
llamande.
Qualre gravures ont été reçues. Elles portent pour de-
vises :
I" Ad valorem.
2" et 5° Conservez à chacun son propre caractère.
4° Sans devise.
Conformément aux conclusions du rapport de la section
( 580 )
de gravure , à laquelle s'était jointe la section de peinture,
la classe vote le prix de six cents francs à la gravure n" 5,
représentant Érasme dans son cabinet de travail, d'après
Leys. L'ouverture du billet cacheté fait connaître qu'elle
est due à M. Joseph Demannez, de Bruxelles.
Les œuvres des concurrents resteront exposées pendant
un mois, dans le grand vestibule des Académies, au Musée,
chaque jour (le dimanche excepté), de 10 à o heures.
CONCOURS LITTÉRAIRE.
Un seul mémoire a été reçu en réponse à la première
question : Fait^e l'histoire de la sculpture en Belgique aux
XVII' et XVIIP siècles.
MtMppot'l de Jf. Adolphe Sii'et.
fi L'unique et volumineux mémoire envoyé à l'Acadé-
mie en réponse à la question mise au concours, se présente
à nous dans des conditions de faiblesse et de force qu'il
convient d'examiner avec le soin que mérite une œuvre
consciencieusement mais imparfaitement élaborée.
Le mémoire se compose d'une introduction, d'une série
de notices biographiques disposées par groupes, puis d'une
table synoptique. L'ensemble du manuscrit comprend 400
pages pro-palria d'une écriture compacte.
L'introduction, qui offrait à l'auteur un thème admirable,
puisque naturellement il avait à esquisser les premiers
siècles de l'histoire de la sculpture en Belgique jusqu'à
l'époque fixée par l'Académie, est un travail incomplet.
Le sens de l'esthétique fait défaut à l'auteur, et, lorsque
les circonstances exigent l'entrée en matière d'une opinion
raisonnée, il cite tous les auteurs qui ont écrit sur le sujet.
f 581 }
Ces citations jettent un froid glacial sur les pages de cette
introduction, composée du reste sans plan prémédité et sans
ordre. Les quelques rares idées propres à l'auteur ne s'y
élèvent guère au-dessus du niveau des vérités les plus
vulgaires. Entre autres preuves à l'appui, nous prenons
celle-ci : les XVIP el XVIII" siècles, dit l'auteur du mé-
moire, sont le commencement d'une décadence. Voilà,
certes, une banalité admise et qu'un esprit judicieux eût
dû relever. L'histoire des arts est pleine de ces formules
toutes faites, acceptées bénévolement et paresseusement
par les masses. Déjà on a réagi contre ces poncivités et
ces habitudes indolentes de la pensée publique; l'auteur
aurait dû, à cette occasion, entrer en lice et comprendre
la pensée secrète de la question posée. Est-ce bien une
époque de décadence qui commence pour la sculpture, alors
que jamais en Belgique ni ailleurs celle-ci n'a été plus
populaire qu'aux XVII' etXVIIl" siècles? Est-ce bien une
époque de décadence que celle pendant laquelle nos temples
catholiques regorgent de statues de marbre, nos églises
rurales de superbes boiseries, les monuments civils de
groupes allégoriques dont les masses dépassent parfois
celles des constructions et nos maisons particulières de
détails sculpturaux en quantités inouïes et dont aujour-
d'hui encore on admire l'effet pompeux et théâtral. Une
décadence qui dure deux siècles et qui remplit le monde
de majestueux produits, demande autre chose que le rappel
d'un apophtegme séculaire et exige que la chose soit
creusée. Dans cette renaissance de l'art au XVIh siècle, il y
a une secousse qui part du mouvement social de l'époque;
c'est ce qu'il fallait examiner en laissant soigneusement de
côté les opinions prééditées et auxquelles l'auteur du mé-
moire s'est trop commodément asservi. Jamais en Belgique
( 582 )
l'histoire de la sculpture pendant ces deux siècles d'une
fécondité inouïe, n'avait été suivie, notée et expliquée; nous
le disons avec regret, le mémoire que nous avons sous les
yeux n'est point destiné à combler ce vide regrettable.
U Introduction glisse légèrement sur les troubles reli-
gieux du XV'l" siècle si funestes à l'art de la sculpture
particulièrement. On pouvait espérer autre chose que des
redites sur lesquelles s'appuie maladroitement l'auteur,
car il n'a pas su tirer parti des richesses des autres. La
participation des artistes belges aux travaux de Versailles
est représentée mollement ; celle des artistes belges à
l'étranger n'est point mentionnée avec le soin voulu; l'au-
teur, oubliant ce qu'il a dit plus haut, le répète et nous
prouve évidemment qu'il ne s'est pas relu ; quelques ajoutes
récentes sembleraient prouver que le manuscrit est déjà
ancien; bref, ces pages introductives manquent d'ana-
lyse, d'ordre, d'appréciation et de science; de science
surtout; c'est celle des autres que nous voyons apparaître
avec une exubérance dont on aura une idée quand on
saura que l'auteur, après avoir annoncé que la citation
qu'il reproduit est la dernière, recommence de plus belle
et continue à recommencer!
Comprend-on que dans un travail de cette nature l'in-
fluence de Rubens sur la statuaire soit traitée si cavaliè-
rement qu'on se demande même s'il en est question.
N'était-ce pas le moment donné pour l'épanouissement de
l'œuvre! Les côtés révélateurs abondent, ils sont tenus
dans l'ombre. Même légèreté à propos des (jildes si inté-
ressantes à étudier, même sommairement, ainsi qu'à propos
des associations religieuses de toute nature qui forment à
elles seules un des chapitres les plus curieux de notre
histoire de l'art statuaire. N'était-ce pas le moment de
( 583 )
pénétrer, le tîambeau à la main, dans les ateliers d'An-
vers et de Malines, et de nons montrer cette armée d'ar-
tistes qni sculptaient pour toutes les parties du monde des
milliers de statues en pierre et en bois dont la plupart
nous sont pour ainsi dire inconnues, car jusqu'à présent il
n'est pas un seul auteur belge qui soit entré dans le vif de
cette adnn'rable histoire de notre statuaire? Allez à dix et
vingt lieues à la ronde d'Anvers et de Malines, dans les
églises rurales, et presque partout vous trouverez, sortant
de ces ateliers, notamment aux confessionnaux, des sta-
tues presque grandeur naturelle, d'une large facture et
d'un sentiment profond; ce sont de véritables merveilles de
pensée, d'expression et d'exécution. Il en est parmi ces
statues qu'on ne saurait regarder sans trouble ni sans
émotion. Pendant plus d'un siècle, Malines et Anvers ont
produit, rien que comme statuaire religieuse, sous l'in-
fluence artistique de Rubens et sous l'influence politique
des Archiducs, une succession innombrable de travaux qui
ne méritent point l'oubli systématique et absolument
sans raison auquel nous les avons condamnés. La révo-
lution de 1789 a renouvelé en Belgique les scènes de 1562,
nous le savons bien, mais les modernes briseurs d'images
n'ont pas tout détruit. Il en reste assez pour prouver au
monde et à nous-mêmes ce qu'on semble ignorer : à savoir
la puissance et la force de notre école de sculpture au
XVll'' et au XVIII* siècle. Voilà ce qu'il fallait faire, voilà
quel était le parti nouveau à tirer de la réponse à notre
question,
Nous n'en dirons pas davantage à propos de cette In-
troduction qui a mérité nos sévérités et nous arriverons à
la partie biographique, le côté véritablement utile de ce
mémoire.
( 584 )
L'auteur explique, à deux reprises ( pages 20 et 56),
la méthode qu'il a adoptée pour la présentation de ses
notices. Cette méthode est bonne ; c'est la seule ration-
nelle. Elle consiste à placer les notices en huit groupes
correspondant aux provinces où les artistes ont travaillé.
La division par écoles pour les XVH*' et XVlll'' siècles
n'était pas possible, le souille de la Renaissance agissait
partout, et, si l'école de Rubens ne régnait pas dans les
ateliers des sculpteurs liégeois, on pouvait du moins y
reconnaître l'inlluence italienne trempée en passant aux
plantureuses traditions flamandes. N'oublions pas du reste
que les Liégeois, comme les Flamands et les Néerlandais,
puisèrent leur génie à ce double courant qui caractérise si
fortement le dernier quart du XV!*^ siècle : la liberté des
idées sous l'empire des principes néo-platoniciens et la
rénovation catholique sous l'empire et l'impulsion des
papes, des cardinaux et des souverains. La partie biogra-
phique forme donc une espèce de guide dont les rensei-
gnements ne sont pas cependant toujours d'une exactitude
irréprochable. C'est ainsi qu'on attribue à Nys la superbe
chaire de vérité de l'église de Lokeren (p. 228), tandis que
cette œuvre est de Verhaeghen, ainsi qu'il a déjà été dit
du reste (page 89). Il y a beaucoup de négligences de ce
genre qu'une révision attentive ferait disparaître. Qu'est-ce
que l'auteur entend dire en signalant le comte d'Egmont
comme une victime de la pairie (p. 247); qu'entend-il
par joyau inférieur (p. 27) ? Eayd'herbe méritait mieux
que la nomenclature , exacte toutefois , de ses travaux,
Verhaeghen, qui a exercé une réelle influence sur la sculp-
ture religieuse, ne préoccupe que très-peu notre auteur.
Il y avait là un chapitre révélateur à écrire, mais, hélas!
l'enthousiasme manque à notre écrivain ! Il ne va même
( 585 )
pas voir les choses dont il parle, et, lorsqu'il décrit un mo-
nument, il emprunte la description des autres, procédé
commode, mais qui fait bien vite juger celui qui l'emploie.
Que l'on cite en passant une description reconnue excel-
lente et admise en quelque sorte comme une formule
restée célèbre, soit, mais ne faire d'initiative aucune des-
cription originale, c'est ne point respecter le public et ce
procédé ne saurait être pardonné qu'à celui que des infir-
mités obligent à se servir des yeux des autres. Et encore
dans ce cas on ne concourt pas.
Quoi qu'il en soit, ce mémoire qui n'a absolument rien
d'académique, a le droit de nous intéresser. C'est quelque
chose que de réunir une collection de plus de cinq cents
notices de statuaires flamands, avec l'indication de leurs
travaux, les lieux où ceux-ci existent et les élèves que ces
statuaires ont formés. Tous ces noms se retrouvent dans
un volumineux index synoptique, très-utile, que l'auteur a
eu la bonne idée de joindre à son mémoire. Si notre écri-
vain voulait réunir de même les notices des statuaires
antérieurs au XVIP siècle, il rendrait un immense service
aux arts en publiant son livre sous la forme d'un Dklion-
naire biographique.
Le travail ardu auquel l'auteur du mémoire s'est livré
pour constituer l'ensemble des notices dont nous venons
de parler, est méritoire. Ce travail forme une œuvre à part,
la seule que nous puissions encore avoir en vue. Elle est
digne, selon nous, malgré des imperfections faciles à faire
disparaître, de recevoir une récompense et un encoura-
gement. En conséquence, nous estimons qu'il y a lieu de
décerner à l'auteur du mémoire qui fait l'objet du pré-
sent rapport, une médaille d'argent. »
( 586 )
M. Joseph Geel's, second euinmissaire, déclare se rallier
au rapport de M. Adolphe Siret.
a Ce mémoire Irès-volu milieux laisse beaucoup à dé-
sirer quant à sa l'orme; il présente |)resque à chaque page
des citations et des passages empruntés aux divers écri-
vains qui ont traité de l'histoire de la sculpture; par
contre on y trouve peu de chose tjui soit en propre à son
auteur.
La rédaction est généralement faible et souvent défec-
tueuse. Quant au fond, notre honorable confrère M, Siret
en a fait une analyse à latiuelle il ne me reste rien à
ajouter.
La plus grande partie du mémoire est consacrée à des
notices biographiques classées méthodiquement d'après les
provinces où les nombreux artistes sculpteurs de ces deux
époques ont exécuté ou placé leurs œuvres. Ce travail
colossal est la partie la plus intéressante et la plus méri-
tante du mémoire; sa publication pourrait être d'une
très-grande utilité : malheureusement, comme l'ont déjà
reconnu MM. Geefs et Siret, la faiblesse du mémoire en
général ne permet pas de lui attribuer la médaille d'or.
Je me rallie donc aux conclusions de ces deux honora-
bles collègues, qui proposent de décerner à l'auteur du
mémoire la médaille d'argent. »
La classe adopte ces conclusions.
(587 )
PRÉPARATIFS DE LA SÉANCE PUBLIQUE,
La classe s'occupe des dispositions à prendre pour sa
séance publique annuelle. Elle décide qu'elle tiendra une
réunion préparatoire le vendredi 25 de ce mois, à une heure,
afin d'arrêter déiinitivenient le programme de cette solen-
nité.
( 588 )
CLASSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du 25 septembre 187 i,
M, N. De Keyser, directeur, président de l'Académie.
M, J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. Alvin, Guillaume Geefs, Joseph
Geefs, Ferdinand De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis,
Edm. De Busscher, Alpli. Balat, Ang. Payen , le chevalier
L. de Burbure, Jos. Franck, G. De Man , Ad. Siret, J. Le-
clercq, Ernest Slingeneyer, Alex. Robert, Ad. Samuel,
membres; F. Stappaerts, correspondant.
M. R. Chalon, directeur de la classe des lettres, assiste
à la séance.
CORRESPONDANCE.
Sa Majesté le Roi lait exprimer ses regrets de ne pou-
voir accepter, à cause de ses nombreux engagements pen-
dant les fêtes de septembre, l'invitation qui lui a été faite
pour la séance publique de la classe. Elle se réserve d'as-
sister, dans le courant de l'année, à une autre séance.
Son Altesse Royale Monseigneur le comte de Flandre,
qui est en voyage, fait aussi exprimer ses regrets de ne
( 389 )
pouvoir accepter l'invilalion de la classe pour la même
solennité.
MiM. le comte d'Aspremont-Lynden et Beernaert, Minis-
tres des affaires étrangères et des travaux publics, regret-
tent également de ne pouvoir assister à cette séance, à
cause de leurs occupations.
— M. le gouverneur de la province de Brabant a adressé
une circulaire informant que des places sont réservées à
MM. les académiciens qui assisteront au service funèbre,
célébré le 25 de ce mois, à 1 1 beures du matin, dans l'église
des SS.-Michel et Gudule, en mémoire des citoyens morts
pour la patrie.
— Par arrêté du 23 septembre, M. le Ministre de l'in-
térieur, sur les propositions du jury chargé de juger le
grand concours de gravure, dit prix de Rome, ouvert cette
année par le Gouvernement, a décerné le premier prix à
M. François Lauwers, d'Anvers. Une mention honorable a
été accordée à M. Joseph Dirks , de la même ville.
— M. Julien Dillens, artiste sculpteur, à Ixelles, annonce
qu'il est l'auteur du carton n" 5 qui a obtenu un encoura-
gement de 500 francs du concours d'art appliqué de cette
année.
— La classe des beaux-arts a perdu, le 29 décembre i 875,
l'un de ses membres titulaires de la section d'architecture,
M. Henri-Louis-François Partoes. M. L. Alvin, directeur
de la classe pour la même année, a prononcé le discours
académique lors des funérailles du défunt.
M. L. Alvin accepte de faire la notice sur la vie et les
( 390 )
travaux de feu Parloes pour le prochain Annuaire acadé-
mique. Cette notice sera accompagnée du portrait du dé-
funt.
— La commission des portraits]|des académiciens dé-
cédés se réunira avant la prochaine séance de la classe,
pour s'occuper des portraits qui devront figurer dans cet
Annuaire.
JUGEMENT DU CONCOURS LITTÉRAIRE.
La classe, appelée à se prononcer sur les conclusions des
rapports relatifs au mémoire présenté en réponse à la ques-
tion : Faire Vhistoire de la sculpture aux Pays-Bas pen-
dant les XVir et XVIir siècles, a ratifié ces conclusions.
En conséquence une médaille d'argent a été votée à
l'auteur, qui sera prié de se faire connaître.
Elle a décidé en même temps la remise de la question
au concours.
PREPARATIFS DE LA SÉANCE PUBLIQUE.
D'après l'article 15 du Règlement intérieur de la classe,
M. De Keyser donne lecture du discours qu'il se propose
de prononcer en séance publique.
Des applaudissements accueillent colle lecture.
( Ô9I )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
M. Ad. Siret fait à la classe une communication verbale
au sujet d'un enfant de 10 ans et 1 1 mois, Frédéric Van
de Kerkhove, de Bruges, mort récemment et qui a laissé
un œuvre considérable composé d'environ 350 petits pan-
neaux peints. M. Sirel présente aux membres de la classe
une vingtaine de ces panneaux , représentant tous des pay-
sages peints avec un aplomb et un talent qui provoquent
dans l'assemblée une vive émotion et un enthousiasme
qu'elle n'hésite pas à exprimer en formulant, sur la propo-
sition de MM. Alvin et Fétis, le vœu que les œuvres de ce
génie, si prématurément enlevé aux arts et à la patrie,
soient exposées publiquement à Bruxelles. Le bureau re-
mercie M. Siret pour son intéressante communication et
décide qu'une notice sur Frédéric Van de Kerkhove sera
publiée dans les Bulletins de l'Académie.
( 592 )
CLASSE DES BEArX-ARTS.
Séance publique du samedi 26 septembre '1874.
(Au Palais Ducal.)
M. N. De Keyser, directeur et président de l'Académie.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. G. Geefs, A. Van Hasselt, J. Geefs,
Ferd. De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Ed. Fétis, Alph. Balat,
Aug. Payen, le chev. L. de Burbure, J. Franck, G. De Man,
Ad. Siret, J. Leclercq, Ern. Slingeneyer, Alex. Robert,
F.-A. Gevaert, Ad. Samuel, membres; F. Stappaerts,
L. Terry et Th. Radoux, correspondants.
Assistaient à la séance :
Classe des sciences : MM. M. E. Candèze, directeur;
L. de Koninck, H. Nyst, Ghige, Melsens, F. Duprez, M. Gloe-
sener, Ch. Montigny, G. Malaise, membres; Ed. Mailly,
corresponda7it.
Classe des lettres : MM. Ch. Steur, J. Roulez, P. De
Decker, M. N. J. Leclercq, le baron J. de Wilte, Ch. Faider,
Th. Juste, Félix Nève, membres; J. Nolet de Brauwere
Van Steeland, Aug. Scheler, associés.
Sa Majesté le Roi, ainsi que S. A. R. Monseigneur le
comte de Flandre avaient fait connaître qu'ils ne pourraient
assister à la séance.
( 593 )
MM. les Ministres des affaires étraugères et des travaux
publics avaient exprimé des regrets semblables.
Dès midi une foule nombreuse avait pris place dans la
salle ainsi que dans les loges. Celles-ci renfermaient, outre
les dames de divers hauts fonctionnaires, MM. les Minis-
tres de l'intérieur et de la justice, M. Charles Rogier,
M. Piercot, bourgmestre de Liège, M. le lieutenant général
de Liem, M. Bellefroid, directeur général des beaux-arts
ainsi que plusieurs membres de la Législature et divers
hauts fonctionnaires de l'État.
Le bureau de la classe, composé de MM. N. De Keyser,
directeur, Alph. Balat, vice-directeur et J. Liagre, secré-
taire perpétuel, ainsi que de M. Candèze, directeur de la
classe des sciences, s'est installé, à une heure, sur le devant
de l'estrade réservée à MM. les académiciens.
D'après le programme de la solennité, celle-ci a com-
mencé par l'ouverture de Léonore, de C.-L. von Beet-
hoven, exécutée sous la direction de M. Joseph Dupont,
professeur au Conservatoire royal de Bruxelles.
L'assemblée a vivement applaudi cette exécution.
M. le directeur de la classe s'est ensuite levé et a pro-
noncé le discours suivant :
Messieurs,
De tout temps les beaux-arts, dans leurs manifestations
multiples, ont offert à l'esprit humain un double et vaste
champ d'observations : on s'est demandé quelle est l'es-
sence de l'art, quelle est l'intïuence qu'il exerce et qu'il
subit au milieu des autres éléments de la civilisation.
Dans le premier de ces deux ordres d'idées chaque école
a vu naître une formule, chaque penseur a essayé sa défi-
2™^ SÉRIE, TOME XXXVIII. 26
( 594 )
nilion, et les tendances les plus opposées ont surgi, défen-
dues par des apôtres aussi convaincus que passionnés.
C'est une lutte incessante où, tour à tour, les traditions
classiques sont battues en brèche et non détrônées par le
mouvement romantique, où le maniérisme prend la place
du vrai, où le réalisme s'agite, vraie tour de Babel où l'art
se désespère et où le langage artistique lui-même se con-
fond autour de cette bannière sacrée qui porte l'éternelle
devise : Le Beau, le Bien, le Vrai !
Mais dans ces luttes, si l'on n'arrache pas au sphinx son
secret tout entier, l'on entrevoit du moins la lumière; le
doute parfois s'éclaircit, les théories hasardées s'évanouis-
sent, les convictions sans base sérieuse se trouvent ébran-
lées et, comme le fier Sicambre, plus d'un brûle les idoles
qu'il avait adorées. Ce genre de sacrifice a été souvent
consommé pendant la longue période qui s'étend de l'anti-
quité classique jusqu'à nos jours, et, il faut le dire, se
renouvellera longtemps encore. Qui sait si un jour l'art
parfait ne jaillira pas de toutes ces cendres accumulées?
En attendant ce triomphe toujours espéré et qui s'éloigne
à mesure que l'on croit en approcher, constatons sim.ple-
ment que, dans la lutte aujourd'hui plus ardente que
jamais, les uns font consister la perfection exclusivement
dans le beau idéal, les autres uniquement dans le vrai;
d'autres enfin, sans devise, sans règles ni lois, dédaignant
le passé, ne voulant pour guide que leur propre inspira-
tion s'en vont à la recherche d'un art nouveau, sans parler
de ceux qui renoncent à toute individualité.
Dans ce spectacle il n'est rien qui doive nous étonner;
les transformations artistiques auxquelles nous assistons,
l'histoire nous les montre à différentes époques et même à
cette époque glorieuse où l'art dans toute sa grandeur et
( 395 )
dans toute sa sérénité couvrait de chefs-d'œuvre le sol de
la Grèce. En effet, l'ancien art attique est-il encore celui
de Phidias, de Lysippe, ou de Praxitèle? Les écoles d'Egine,
d'Athènes, de Sycione ne portent-elles pas un caractère
distinctif? Le canon de Polyclète a-t-il été pour tous les
artistes grecs le régulateur de leurs créations artistiques?
Et s'il faut en croire les auteurs anciens, ne vit-on pas,
dans l'art de la peinture, se manifester des tendances
diverses illustrées par des talents de premier ordre?
Les chefs d'œuvre de la Grèce, par leur noble simpli-
cité, par la puissance et la sincérité de leur accent, répon-
dent à ces questions et nous prouvent combien, à travers
toutes les transformations, les maîtres ont su allier le sen-
timent de la nature à la grandeur du style, le beau au
vrai.
Il ne faut donc point déplorer cette diversité d'opinions
et de tendances. Ce que l'on doit demander à l'artiste, c'est
qu'il soit sincère, qu'il évite la convention, qu'il se pénètre
des difficultés de l'art pour apprendre à les surmonter, et
enfin qu'il n'oublie pas que l'art est pour la civilisation un
puissant instrument de progrès.
Au point de vue social, en effet, l'importance de son rôle
lui est indiqué, par l'influence que l'art exerce et subit
dans le courant de la civilisation humaine.
Ses relations avec le mouvement intellectuel, par les
lettres et les sciences, se font surtout sentir. L'histoire et
la poésie ont toujours éclairé de leurs flambeaux nos
grands devanciers. N'est-il pas juste de dire que les sciences,
les lettres et les beaux-arts forment une trinité aussi
féconde que nécessaire? Ne sont-ils pas les plus puissants
leviers du progrès? Leurs efforts s'unissent naturellement
et se complètent, et tendent à rendre pratiques les résul-
( 396 )
tais (les méditations et les labeurs du génie. S'enrichis-
sant à toutes les sources, s'aidant de la science, usant avec
goût des découvertes de l'archéologie, s'inspirant des
actes glorieux de la patrie, l'art perpétue le souvenir de ce
qui a charmé, ému, amélioré l'humanité, il entretient
l'enthousiasme pour les belles actions, les nobles dévoue-
ments, il embellit de sa grâce souveraine l'existence maté-
rielle, et, par son action incessante sur le développement
des aspirations morales et l'extension du bien-être, il rend
au monde, à la société, le centuple de ce qu'il a reçu d'eux.
Aussi le premier devoir d'une âme artiste est-il de
maintenir l'art dans cette voie haute et pure où il est digne
de devenir l'écho d'un peuple, et digne d'agir à son tour
sur ce peuple.
11 n'y a pas de plus belle ambition pour l'artiste...
Dévier de cette voie, écouter d'autres aspirations, aban-
donner à la dérive les saines traditions confirmées par le
culte des maîtres de toutes les époques, ce serait réaliser
ce qu'un auteur a énergiquement blâmé en disant que le
mauvais goût et le maniérisme dans l'art équivalent à la
corruption des mœurs dans la société.
Est-ce à dire cependant que la pensée dans l'art ait seule
le privilège d'intéresser? non. Loin de nous l'idée de vou-
loir enrégimenter toutes les intelligences ou empêcher les
individualités de se produire. Le champ ouvert à l'art est
assez vaste pour que chacun puisse y trouver sa place et se
créer sa voie.
Mais il importe d'insister quelquefois sur les principes
primordiaux de tout grand art, et les faits d'expérience
que nous apportent nos expositions publiques indiquent
assez le danger qu'il y a de les oublier. A chaque ouverture
de salon on se récrie sur la diminution du nombre d'œu-
( 597 )
vres où régnent la pensée et les caractères de ce qu'on
appelle le style de la peinture d'histoire.
C'est une circonstance analogue en France qui fait dire
à un critique très-autorisé : « L'école serait plus grande
» que jamais, si elle voulait moins de friperie et plus de
» draperie, moins de nudités et plus de nu, moins de réel
» et plus d'idéal. L'idéal et le réel ne sont, après tout, qu'un
» seul et même fleuve; mais au lieu de puiser à l'embou-
» cliure dans une eau trouble qui a charrié ses rivages, il
» faut remonter à la source, si l'on veut trouver une eau
» plus légère, plus limpide et plus pure. »
Le caractère, le style, le nu au lieu de la nudité, la dra-
perie au lieu de la friperie, le beau dans le vrai! voilà bien
la règle suprême des créations artistiques.
Tous les esprits n'accepteront pas ces idées. Boileau déjà
avait dit : « Rien n'est beau que le vrai », et ce principe
semble marquer encore pour plusieurs artistes le seul but
à atteindre. Ils oublient que ceux qui ne se contentent pas
de cette définition ont néanmoins recherché de tout temps
la vérité; seulement si elle est la base de l'art, elle n'est
pas l'art tout entier. Rien n'est plus vrai et plus exact
qu'un procès-verbal, et rien aussi n'est moins poétique.
La vérité servile n'est pas le but; à cette condition la
photographie serait le maître par excellence. Non, il existe
une vérité choisie, qui frappe , qui saisit, qui émeut par
l'expression; alors le vrai devient beau. Les deux idées se
confondent ainsi et constituent ces hautes qualités que
l'art exige.
Nous ne prolongerons pas cette rapide excursion dans
le domaine général de l'art. Notre conclusion, c'est que
l'éternel conflit d'opinions et de tendances que nous avons
signalé et l'importance du rôle social de l'art prouvent aussi
( 398 )
combien sont grandes et multiples les difficultés qui se pré-
sentent à l'artiste, n'importe à quelle branche il appartient.
Ne négligeons donc aucun moyen de les vaincre; forti-
fions et développons les études sérieuses ; encourageons
les jeunes talents à persévérer dans ces études; secondons
de toutes nos forces et de toutes nos sympathies la sollici-
tude de notre Auguste Souverain et des administrations
publiques pour le progrès de l'enseignement.
Il faut aimer bien l'art pour ne pas se laisser gagner par
le doute ou le découragement, et il est bon qu'aux heures
de défaillance on sente régner autour de soi le courage et
l'ardeur d'autres esprits qui ont aussi à cœur de porter haut
le drapeau de l'école belge. Notre désir est de voir se grou-
per fraternellement autour de ce drapeau tous nos artistes,
ceux qui ont déjà longtemps lutté comme ceux qui com-
mencent. Nous ne serons jamais de trop pour nous serrer
la main et marcher de front vers le progrès.
Les applaudissements unanimes de l'assemblée ont ac-
cueilli ce discours.
La parole a été donnée ensuite à M. J. Liagre, secrétaire
perpétuel de l'Académie, pour proclamer les résultats sui-
vants des concours de la classe et du grand concours de
gravure, dit prix de Rome, institué par le Gouvernement.
CONCOURS ORDINAIRE DE LA CLASSE.
La classe des beaux-arts avait mis au concours de cette
année deux questions littéraires et deux sujets d'art ap-
pliqué.
En réponse au concours littéraire, elle n'a reçu qu'un
seul mémoire. Il concerne la première question, deman-
( 599 )
dant de Faire Vliistoive de la sculpture en Belgique aux
XVIP et XVIIV siècles, el porte pour devise : C'est dans
les édifices religieux de nos provinces qu'il faut rechercher
l'histoire de la sculpture en Belgique pendant les XVIP et
XVI ir siècles.
La classe n'a pas jugé que ce mémoire, dans sa forme
actuelle, pût obtenir la médaille d'or; mais, vu le mérite
incontestable que présente une de ses parties, elle a voté
à l'auteur une médaille d'argent.
La classe a décidé, en même temps, que la question res-
terait au concours.
En conséquence de ces résolutions, l'auteur peut choisir
entre les deux partis suivants :
Continuer à garder l'anonyme, apporter à son œuvre les
améliorations qu'elle réclame et la présenter, ainsi modifiée,
au prochain concours. Dans ce premier cas, il renonce na-
turellement à la médaille d'argent.
Ou bien se faire connaître , en demandant l'ouverture
du billet cacheté qui était joint à son mémoire et qui ren-
ferme son nom. Dans ce second cas, il recevra la médaille
d'argent, mais son travail, cessant d'être anonyme, ne
pourra plus être présenté pour le prochain concours.
Le premier sujet d'art appliqué avait pour but de de-
mander un carton d'une frise destinée à une salle d'hos-
pice; il devait avoir comme objet : Donnez à manger à
ceux qui ont faim et à boire à ceux qui ont soif.
Treize cartons ont été reçus pour ce concours.
La classe, après avoir entendu le rapport de la section
de peinture, a jugé qu'il n'y avait pas lieu de décerner le
prix proposé de 1,000 francs.
( 400 )
Mais elle a décidé qu'un encouragement de 500 francs
serait accordé à l'auteur de l'œuvre n" 5, portant comme
signe distinctif un trait ondulé dans l'angle inférieur de
droite.
M. JuLFEN DiLLENs, artistc sculpteur, à Ixelles, s'est fait
connaître comme étant l'auteur de ce carton.
La classe avait promis d'accorder pour le second sujet
d'art appliqué, un prix de 600 francs à l'auteur de la meil-
leure gravure au burin , exécutée en Belgique pendant la
période du 1'' janvier 187^ au 1"' janvier 487â, d'après
Vœuvre d'un maître ancien ou moderne de l'école fla-
mande.
Conformément à l'avis de la section de gravure, à la-
quelle s'est jointe la section de peinture, la classe a voté le
prix à la gravure représentant Érasme dans son cabinet de
travail, d'après le tableau de Leys.
Cette œuvre, revêtue de la devise : Conservez à chacun
son propre caractère, a pour auteur M. Joseph Demannez,
de Bruxelles.
GRAND concours DE GRAVURE DU GOUVERNEMENT.
Par arrêté du 23 de ce mois, M. le Ministre de l'inté-
rieur, sur les propositions du jury chargé de juger le grand
concours de gravure dit prix de Rome, ouvert, cette année,
par le gouvernement, à l'Académie royale des beaux-arts
d'Anvers, a décerné le prix à M. François Lauwers , d'An-
vers.
Une mention honorable a été votée à M. Joseph Dirks,
de la même ville.
MM. Demannez, Lauwers et Dirks sont venus recevoir,
( 401 )
les deux premiers des mains de M. le Minisire de l'inté-
rieur, et le troisième des mains de M. De Keyser, la dis-
tinction qu'ils avaient remportée.
La solennité a été terminée par l'exéculion de l'œuvre
du lauréat qui a remporté le second prix lors du grand
concours biennal de composition musicale de l'année
1873.
Cette œuvre porte pour titre : Torquato Tasso 's Dood,
scène dramatique, paroles de M. Van Droogenbroeck, lau-
réat du concours des cantates flamandes de 1873, musique
de M. Florimond Van Duyse.
Les soli ont été chantés par M"" Sylvie Balcaen et
M. Emile Blauwaert, tous les deux de Gand. Les chœurs
ont été exécutés par les membres de la Société royale
des Chœurs de la même ville.
Les textes flamands et français de cette cantate ont paru
dans le tome XXXVI des Bulletins, pages 287 à 296.
Les vifs applaudissements de l'assemblée ont accueilli
l'exécution de cette œuvre, dirigée par M. Joseph Dupont.
Une chaleureuse ovation a été faite à M. Van Duyse,
rappelé par les acclamations de la salle à la fin de sa can-
tate.
La séance a été levée à 2 heures et demie.
( 402 )
CLASSE «ES SCIENCES.
Séance dit iO octobre 1874.
M. E. Candèze, directeur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. de Koninck, P.-J. Van Beneden ,
Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens,
F. Duprez,G.DewaIque, H. Maus, M. Gloesener,F. Donny,
Ch.Montigny, Steichen, Brialmont, Éd. Dupont, Éd. Mor-
ren,Éd. Van Beneden, G. Malaise, membres; Th. Schwann,
E. Catalan, Aug. Bellynck, associés; L. Henry, Éd. Mailly,
Alph. Briart, H. Valérius, F. Folie, J. De Tilly, corres-
pondants.
M. d'Omalius écrit qu'il « regrette vivement que sa raa-
» ladie le retienne encore au lit, et l'empêche d'assister à
» la séance. »
CORBESPONDANCE.
M. J. Elie de Beaumont annonce, par écrit, la mort de
son oncle, M. J.-B. Léonce Elie de Beaumont, associé de la
section des sciences naturelles de l'Académie, décédé à son
château de Canon (Calvados) , le 21 septembre dernier.
M. le secrétaire perpétuel s'est empressé d'exprimer les
regrets de l'Académie à la famille du défunt.
( 403 )
— M. le Ministre de l'intérieur, sollicité de prendre des
renseignements auprès du Gouvernement français sur
M. Vène, ancien chef de bataillon du génie, élu associé de
la classe en 1824, annonce que cet officier est décédé avant
les événements de 1870.
— Le même haut fonctionnaire transmet une nouvelle
lettre du sieur P.-J'\ Goubet, de Beugny (Pas-de-Calais),
relative à la quadrature du cercle.
La classe passe à l'ordre du jour sur cette communica-
tion.
— M. le Ministre de l'intérieur offre, pour la biblio-
tèque, une nouvelle livraison de la Flora batava. — Re-
mercîments.
— MM. G. Dewalque, président, et Jules Colbeau, secré-
taire de la Société maiacologique de Belgique , annoncent
que cette société vient d'adopter le principe d'une fédéra-
tion des sociétés scientifiques de Belgique. Ils demandent
à l'Académie de vouloir bien examiner la question, et de
désigner un délégué chargé de représenter la Compagnie
à la réunion où seront adoptées les bases de la fédération
en projet.
La classe émet l'opinion que l'Académie, étant une insti-
tution de l'État, dépendante du Gouvernement, il lui est
interdit à ce titre d'entrer dans une fédération de sociétés
libres. Les trois classes, au surplus, forment un tout indivi-
sible et l'une d'elles ne peut entrer dans une fédération à
laquelle les deux autres n'appartiendraient pas.
— M. G. Biddell Airy, directeur de l'Observatoire de
Greenwich, fait hommage d'une collection complète des
( 404 )
publications de cet établissement. — La classe vote des
remercîments pour ce don.
— Les Sociétés savantes dont les noms suivent ont
adressé leurs derniers travaux : Académie des sciences de
Dijon; Fondation de P. Teyler van der Hulst, à Harlem;
la Société hollandaise des sciences, à Harlem; la Société
provinciale des arts et des sciences, à Utrecht; l'Académie
royale des sciences, à Munich; la Société royale des sciences
de Bohême, à Prague; la Société nationale des sciences
naturelles, à Stuttgart; l'Institut géologique de Vienne; la
Société mathématique de Bohême, à Prague; l'Université
d'Upsal; la Société royale de géographie de Londres; la
Société d'agriculture de l'État de Wisconsin; la Société
d'histoire naturelle de Boston; la Société des arts et
sciences de l'île Maurice.
— L'Académie a reçu , en réponse au dernier envoi
de ses publications, des lettres de remercîments de :
M. H. Sainte-Claire Deville, à Paris; l'Académie des
sciences morales et politiques de Paris ; la Société
linnéenne du nord de la France, à Amiens; la Société
d'Émulation de Cambrai ; la Société d'agriculture et la
Bibliothèque publique de Douai ; la Société pour l'encou-
ragement des sciences, des lettres et des arts, à Dun-
kerque ; la Fondation de P. Teyler van der Hulst, à
Harlem; la Société d'agriculture de Valenciennes ; la
Société provinciale des arts et sciences, à Utrecht; la
Société royale des sciences de Bohême, à Prague; l'Aca-
démie royale des sciences de Munich ; MM. J. D. Hooker,
à Kew, et Richard Owen, à Londres; l'Observatoire
royal de Greenwich ; la Société philosophique de Glasgow;
( 405 )
l'Observatoire d'Oxford; la Société royale de Dublin; l'Aca-
démie des sciences de Hongrie, à Pesth ; l'Académie des
arts et des sciences du Connecticut, à New-Haven ; la
Société d'histoire naturelle de Boston ; le Lycée d'his-
toire naturelle de New-York; l'Académie Peabody des
sciences , à Salem ; l'Essex Institute , à Salem.
— Le R. P. Bellynck présente ses observations sur
l'effeuillaison en 1873 et sur la feuillaison en 1874, faites
à Namur. M. Cavalier envoie son résumé météorologique
pour Ostende pendant les mois de juillet et d'août 1874.
— Réservé pour le recueil des phénomènes périodiques.
— M. le secrétaire perpétuel présente le premier exem-
plaire du tome XXXVIII des Mémoires couronnés et des
Mémoires des savants étrangers, qui vient d'être publié.
Ce volume ne renferme, en ce qui concerne la classe
des sciences , que les Recherches sur l'innervation du cœur
par le nerf vague , par le docteur Nuel.
— Les travaux manuscrits suivants seront l'objet d'un
examen :
i" Résumé de quelques observations astronomiques et
météorologiques faites dans la zone surtempérée et entre les
tropiques, par M. J.-C. Houzeau, membre de la classe. —
Commissaires: MM. Liagre et E. Quetelet;
2° Sur la dilatation, la chaleur spécifique des alliages
fusibles et leurs rapports avec la loi de Neumann, par
M. W. Spring. — Commissaires : MM. Gloesener, Mon-
tigny et Folie ;
3° Démonstration de la propriété fondamentale des
équations différentielles linéaires, par M. P. Mansion , pro-
fesseur à l'Université de Gand. — Commissaires : MM. Ca-
talan et Folie;
( 406 )
4° Recherches sur la conservation du bois au moyen de
sels de cuivre, par M. Rollier, répétiteur de chimie à
l'Université de Gand. — Commissaires : MM. Donny et
Melsens ;
5" Nouvelle rédaction du mémoire intitulé : Considéra-
tions générales sur la détermination, sans calcul, de
l'ordre d'un lieu géométrique quelconque, par M. L. Saltel.
— Commisssaires : MM. Catalan et Folie;
6° Remarques sur l'aspect de la planète Jupiter pendant
son apparition en 181 â, et sur le passage des satellites II
et III et de leurs ombres pendant la soirée du 25 mars ;
par M. F. Terby, docteur en sciences. — Commissaires :
MM. E. Quetelet et Liagre;
7° Remarques morphologiques sur les espèces du sous-
genre Xanthoura, par M. Alph. Dubois. — Commissaire :
M. de Selys Longchamps.
MONUMENT QUETELET.
L'Académie, dans son assemblée générale des trois
classes du 5 mai dernier, avait décidé, sur la proposition
de M. Charles Montigny, membre de la classe des sciences,
qu'elle prendrait l'initiative d'une souscription à ouvrir
pour élever à Bruxelles un monument à Adolphe Quete-
let , son regretté secrétaire perpétuel. La commission admi-
nistrative fut chargé de mettre cette décision à exécution.
Comme suite aux dispositions prises par la commission,
M. le directeur présente à la classe la première liste de
souscription. Cette liste sera également soumise aux
classes des lettres et des beaux-arts.
( 407 )
RAPPORTS.
Conformément aux conclusions des rapports de MM. Stas,
de Koninck et Donny, la classe vote l'impression, dans
le recueil in-S" des Mémoires, du travail historique de
M. L. Melsens sur Van Hehnont, à propos de la définition
et de la théorie de la flamme.
La classe autorise M. Terby a retirer sa note intitulée :
Un mot à propos d'une notice du comte de Rosse sur les
observations de Jupiter faites en 1815, qui avait été ren-
voyée à l'examen de MM. Quetelet et Liagre.
M. Terby a jugé cette note sans objet, après la publica-
tion, dans les Monthly notices de la Société astronomique de
Londres, d'une lettre qu'il avait adressée au comte de Rosse.
Sur les considérations verbales de M. de Selys Long-
champs, la classe vole l'impression au Bulletin âe la note
de M. Alph. Dubois, intitulée : Remarques morphologiques
sur les espèces du sous-genre Xanthoura.
Note sur deux nouveaux chlorures d'acides organiques,
par M. Walthère Spring.
Rapport de M. Stas,
« M. Spring a entrepris une étude comparative des pro-
priétés de deux corps dont la formule est respectivement
C^H^S'^O^iVa et C^H^S^O^ Na : traitant l'un et l'autre
de ces corps par le pentachlorure de phosphore, il a ob-
tenu le chlorure du radical de l'acide éthyl-hyposulfureux
( 408 )
et du radical de l'acide hyposulfoneux. L'auteur ne s'est
pas appliqué jusqu'ici à faire une étude complète de ces
chlorures; il s'est borné à constater leur existence, par
l'analyse des sels régénérés à l'aide de l'action de l'hydrate
de sodium. En se plaçant au point de vue de la constitu-
tion des acides polythîoniques, on conçoit que l'existence
de chlorures d'acides organiques, ne renfermant qu'un
atome d'oxygène à côté de deux atomes de soufre, présente
de l'importance. Ainsi que le fait remarquer M. Spring, ces
chlorures pourront être le point de départ de nombreux
composés nouveaux, dont l'étude l'occupe en ce moment.
J'ai l'honneur de proposer à la classe de voter l'impres-
sion de ce travail dans le Bulletin de la séance et d'enga-
ger l'auteur à compléter ses recherches. »
Rappofl de Jn. Ej. fie H.oninch.
« Je me joins à mon savant confrère xM. Stas pour de-
mander l'impression de l'intéressante notice de M. Spring
dans nos Bulletins et pour engager l'auteur à poursuivre ses
recherches. »
La classe adopte les conclusions de ces rapports.
Notice sîir Faction du pentachlorure de phosphore sur les
hyposul files inorganiques, par M. Wal Ibère Spring.
MtappoB't de m. Sla:
« On se rappelle que M. Spring a conclu de ses recher-
ches à l'existence du sulfuryle dans les hyposulfiles. Cette
conclusion est en opposition avec les travaux de M. Bucha-
nan, qui, s'appuyant sur les études de M. Wiliiamson,
confirmées par celles de MM. Carius et Hugo Schiff, pré-
tend que les sulfates n'ont aucune relation avec les hypo-
( 409 )
sulfites, et que partant ceux-ci ne peuvent pas renfermer
du sulfuryle.
MM. Michaelis et Schifferdecker, Geuther et finale-
ment M. Melsens, ont démontré que le pentachlorure de
phosphore ne produit en aucun cas du chlorure de sulfu-
ryle par son action sur les sulfates ou sur l'acide sulfiirique.
M. Spring a soumis à un contrôle minutieux toutes ces
assertions contradictoires et il a confirmé tous les faiis
énoncés par MM. Michaelis et Schifferdecker.
Avec la constatation de l'erreur de fait disparaissent les
contradictions; il en résulte que les conclusions déduites
par M. Spring de son travail restent debout.
J'ai l'honneur de proposer à la classe de voter l'impres-
sion de la notice de M. Spring, dans le Bullelin de la
séance. »
Conformément aux conclusions de ce rapport, aux-
quelles a adhéré M. de Koninck, second commissaire, la
classe vote l'impression de la note de M. Spring au Bul-
letin.
— MM. Catalan et Folie font connaître leur appréciation
sur deux notes de M. Simons, concernant, la première :
la solution de deux questions de permutations, la seconde :
la démonstration d'un théorème de Fermât.
Conformément aux conclusions des rapports de ces
commissaires, la classe ordonne le dépôt aux archives des
deux notes de M. Simons. L'auteur sera remercié pour ses
communications.
2"" SÉRIE, TOME XXXVIII. 27
( 410 )
COMMUNICATIONS ET LFXTURES.
Les Perséides en I87i, observations faites à l'Observatoire
royal de Bruxelles. Communication de M. E. Quetelet,
membre de l'Académie.
L'apparition des étoiles filantes du mois d'août 1874 a
pu être observée dans des conditions assez favorables.
Le 10 la soirée a été belle jusqu'à minuit. Les observations
ont été interrompues à cette heure par les nuages. Le 9 il
a malheureusement été impossible d'observer, mais le 8
et le 11 les observations, quoique interrompues de temps
en temps par la présence de nuages, ont permis de con-
stater le maximum très-caractérisé du 10. Une circonstance
assez remarquable, c'est que, pendant les trois soirées où
l'on a observé, il y eut entre 1 1 heures et minuit de violents
éclairs dans le nord-ouest.
Les observations de cette année ont eu pour objet spé-
cial la détermination géométrique des trajectoires. Le nom-
bre horaire des étoiles filantes a été aussi soigneusement
annoté.
Les observateurs étaient, le 8 août, MM. E. Quetelet,
L. Estourgies, A. Lancaster.
Le 10, MM. E. Quetelet, C. Hooreman, A. Lancaster.
Le 11, MM. E. Quetelet, L. Estourgies.
Les observations ont été faites sur la terrasse, où,
comme on sait, on ne peut guère voir que les deux tiers
du ciel.
( 411 )
Le 8 août les observations, commencées à 10 heures, ont
été interrompues de 10 h. 4 m. à 10 h. 49 m. Elles ont pu
être ensuite continuées jusqu'à 11 h. 39 m. En 54 mi-
nutes on a vu 19 étoiles filantes, ce qui porte le nombre
horaire à 21.
Le 10, les observations ont été commencées à 10 h.
29 m., et terminées à 11 h. 58 m. à cause des nuages; pen-
dant 1 h. 29 m. on a compté 78 étoiles filantes, ce qui
donne So étoiles filantes par heure. Enfin, le 11, de 10 h.
17 m. à 11 h. 17 m., il a été vu 28 météores.
Dans le tableau suivant on a présenté les coordonnées
des trajectoires qui ont pu être déterminées. Le point initial
et le point terminal sont donnés par leur ascension droite
et leur déclinaison. Un petit diagramme représente les mé-
téores qui ont été observés à l'Observatoire de Bruxelles
pendant la soirée du 10 août.
Étoiles filantes du 8 août 1874 observées à l'Observatoire royal
de Bruxelles.
Point
nltial.
Point terminal.
N»
-— — ^--
Hr.URE.
CRASDEtIR.
Observations.
d'ordre.
a
S
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+ 23°
2
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+ 33
3
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2
2
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340
+ 25
4
10 50
3
326
+ 58
309
+ 42
5
10 54
2
3ô7
+ 28
327
+ 14
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7
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+ 17
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»
517
+ 19
ÔIO
+ 16
( 4i2 )
Étoiles filantes du % août 1874 observées à l'Observatoire royal
de Bruxelles (suite).
No
'd'ordn
Poinl initial.
Observations.
9
10
11
12
lô
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
2'J
30
51
32
11 8
11 15
11 18
Il 22
II 2ô
11 24
11 25
11 3H
11 38
177°
225
338
265
350
287
2
532
4
+ 77°
+ 7ô
+ 9
+ 38
+ 28
+ 44
+ 20
+ 17
+ 19
198»
229
343
256
338
266
346
345
358
+ 59°
+ 58
+ 26
+ 32
+ 8
+ 13
0
+ 4
+ 11
Soirée du 10 aoîit 4874.
10 30
..
306
+ 13
503
+ 7
10 30
«
355
+ 55
526
+ 48
10 31
2
316
+ 36
308
+ 16
10 34
2
262
+ 12
257
+ 3
10 ..
»
221
+ 39
227
+ 24
10 39
4
272
+ 6
268
+ 5
10 40
3
358
+ 28
y
+ 26
10 41
3
346
+ 14
559
+ 11
10 42
«
312
+ 8
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+ 5
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4
357
+ 53
344
+ 40
10 44
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11
+ 34
5
+ 28
10 44
))
259
+ 67
242
+ 65
10 45
1
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+ 6
257
- 2
10 ..
«
236
+ 70
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+ 55
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345
+ 15
356
+ 13
Traînée.
Traînée.
Traînée.
( ^15 )
Étoiles filantes du 10 aoi'il i87i observées à l'Observatoire royal
de Bruxelles (suite).
N»
Point
nitial.
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BEl-BE.
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Observations.
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5
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517
+ 63
303
+ 62
56
10 ..
»
215
+ 75
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+ 65
37
10 ..
n
247
+ 74
234
+ 55
58
10 ..
»
218
+ 53
206
+ 46
59
10 ..
1
190
+ 67
204
+ 47
40
10 ..
"
285
+ 35
277
+ 53
Traînée.
41
10 58
3
15
+ 36
5
+ 29
42
11 0
5
10
+ 60
6
+ 66
4ô
11 1
4
311
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307
+ 34
44
11 5
4
283
+ 32
275
+ 23
45
11 ..
.
246
+ 40
235
+ 44
46
11 ..
»
216
+ 73
225
+ 55
47
11 ..
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345
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+ 10
48
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227
+ 25
252
+ 12
49
11 ..
4
252
+ 10
249
+ 6
50
11 8
4
358
+ 54
546
+ 44
51
11 11
4
293
+ 7
291
+ 4
52
11 ..
4
344
+ 4
551
+ 3
53
11 ..
■>
260
+ 67
262
+ 48
54
11 12
5
305
0
299
- 2
55
11 15
4
323
+ 11
319
+ 4
56
11 15
5
348
+ 51
542
+ 44
57
11 16
4
269
+ 22
264
+ 13
58
11 ..
0
205
•+ 66
212
+ 49
59
11 ..
"
175
+ 57
183
+ 54
( 4U )
Étoiles filantes du 10 août ISTi observées à l'Observatoire royal
de Bruxelles (suite).
d'ordre.
Point initial.
Observations.
60
61
6-2
63
64
65
66
67
68
69
70
71
74
75
76
77
78
79
80
81
82
83
11 ..
11 19
11 ..
11 ..
11 ..
11 24
11 ..
11 ..
11 ..
11 . .
11 ..
11 ..
11 ..
11 49
11 ..
11 ..
11 52
11
11
10 16!
10 ..
10 ...
10 22
10 24
5°
10
189
296
234
3
346
243
304
277
231
301
305
336
257
15
314
275
1
+ 00
+ 60
+ 69
+ 8
+ 78
+ 34
6-
1
192
290
227
554
344
+ 55
237
+ 55
290
+ 37
271
+ 62
227
+ 78
266
+ 74
265
+ -25
346
+ 14
256
+ 25
14
+ 44
307
+ 50
255
+ 25
555
+ 26»
+ 66
+ 58
+ 4
+ 52
+ 25
0
+ 35
+ 28
+ 22
+ 58
+ 30
+ 47
+ 31
+ 8
+ 20
+ 33
+ 38
+ 16
Soirée du 1 1 août i 874.
273
287
358
337
359
+ 8
+ 16
+ 55
+ 27
+ 26
237
279
346
340
551
+ /
+ 6
+ 25
+ 33
+ 13
( 445 )
Etoiles filantes du il août 1874 observées à l'Observatoire royal
de Bruxelles (suite).
d'orJre.
EEltRE.
GRANDEUR.
Point
initial.
Point terminal.
Observations.
84
10 ..
4
313»
+ 15°
500»
+ 3"
85
10 29
3
308
- 12
298
- 18
86
10 30
2
350
+ 03
510
+ 55
87
10 32
4
346
+ 19
539
+ 15
88
10 55
4
355
+ 16
526
+ 5
89
10 37
4
356
+ 51
349
+ 55
90
10 38
4
332
+ 5
325
- 5
91
10 59
4
11
+ 05
352
+ 57
92
10 41
2
267
+ 11
204
+ 5
Traînée.
93
10 42
4
549
+ 46
335
+ 39
94
10 43
2
559
+ 30
349
+ 21
95
10 44
4
539
+ 45
554
+ 41
96
10 45
..
341
+ 26
545
+ 36
97
10 50
2
313
+ 45
290
+ 29
98
10 32
4
296
+ 4
289
- 3
99
10 55
1
299
+ 4
294
- 5
Traînée.
100
10 58
3
37
+ 50
51
+ 45
101
10 58
n
334
+ 4
329
- 5
102
11 5
4
321
+ 16
517
+ 27
103
11 6
3
314
+ 5
303
- 6
104
11 7
2
290
+ 56
209
+ 44
105
11 8
3
11
+ 54
9
+ 43
106
11 11
»
315
+ 15
299
0
( 416 )
Étoiles filantes du 10 août 1874 observées à Schaerbeek
par M. L. Estourgies.
Point
nitial.
Point terminal.
N.
HEIRE.
CBASDEl'R.
~^"' ^
^^■^
'~ ~"
Observations.
d'ordre.
a
â
«
rj
1
10 17
3
60»
+ 520
74»
+ 48»
2
10 21
2
80
+ 70
162
+ 64
Belle traînée.
3
10 25
3
56
+ 78
160
+ 8-2
Petite traînée.
4
10 29
3
115
+ 60
133
+ 56
5
10 37
4
65
+ 48
70
+ 46
6
10 38
4
47
+ 76
Polaris.
7
10 59
4
15
+3 8
32
+ 62
8
10 42
4
53
+ 47
60
+ 44
9
10 45
3
87
+ 57
87
+ 48
10
10 46
3
42
+ 45
38
+ 32
11
10 48
3
PoU
iris.
215
+ 84
1-2
10 49
3
26
+ 52
23
+ 44
lô
10 51
4
22
+ 38
22
+ 30
14
10 54
4
348
+ 78
340
+ 70
15
10 55
4
62
+ 57
70
+ 62
16
10 59
3
54
+ 42
64
+ 39
Paraît double.
17
11 0
2
22
+ 46
18
+ 54
Petite traînée.
18
11 1
3
60
+ 72
134
+ 78
Petite traînée.
19
11 2
3
12
+ 55
0
+ 52
Petite traînée.
20
11 7
5
25
+ 39
25
+ 3-2
21
11 12
4
29
+ 38
31
+ 32
22
11 15
1
22
+ 62
0
+ 55
Très -brillante; met
plus de deuj secondes à
décrire sa trajectoire;
laisse une belle traînée
immobile.
25
11 15
3
72
+ 72
121
+ 70
24
11 16
3
Pol:
iris.
230
+ 80
Petite traînée.
25
11 19
5
91
+ 70
119
+ 64
Petite traînée.
( 417 )
Etoiles filantes du 10 août 1874 observées à Schaerbeek
par M. L. Estourgies.
Point
initial.
Point terminal.
N"
HEURE.
CRAKDECn.
' '" '
^—
^
Observations.
d'ordre.
a
rJ
a
S
26
II 21
5
88°
+ 70°
125°
+ 67°
*•
27
11 23
5
25
+ 65
25
+ 78
28
11 25
5
77
+ 54
96
+ 53
29
11 28
5
80
+ 49
94
+ 48
ÔO
Il 29
4
49
+ 45
50
+ 38
31
Il 30
5
98
+ 69
155
+ 61
Petite traînée.
32
11 31
5
74
+ 44
79
+ 39
33
Il 33
5
62
+ 60
75
+ 65
34
11 38
5
21
+ 65
552
+ 74
35
11 42
5
72
+ 48
82
+ 52
36
11 45
4
111
+ 62
135
+ 67
37
11 46
5
150
+ 77
168
+ 55
(
58
M 48
5
108
+ 64
12-5
+ 63
39
11 49
5
52
+ 50
63
+ 49
40
11 49
5
72
+ 59
82
+ 61
41
11 50
5
34
+ 42
36
+ 41
42
11 57
5
74
+ 49
76
+ 47
43
11 58
5
135
+ 76
150
+ 74
L'observation, commencée à 10 h. 15 m., s'est terminée
à minuit; le ciel s'est complètement couvert à ce moment.
Le centre d'émanation, nettement accusé, se trouvait
dans l'espace compris entre les constellations de Persée,
Cassiopée et la Girafe.
Durant la première heure d'observation, les météores
étaient plus brillants que dans la deuxième; le plus lumi-
(418)
neux apparut à 11 h. 15 m.; à partir de cet instant, l'in-
tensité ainsi que la longueur des trajectoires parcourues
diminuèrent progressivement jusqu'à la fin des observa-
tions.
Des éclairs très-vifs, dont l'intensité alla en augmentant,
se montrèrent à l'horizon nord pendant toute la durée de
l'observation.
Observations des étoiles filantes de la période d'aoïit 1874,
faites à Louvain par M. F. Terby, docteur en sciences.
Le 9 août, le ciel a été si nuageux pendant la soirée que
j'ai cru ne pouvoir obtenir de résultat utile.
Le 10, j'ai observé de 10 h. 10 m. à 12 h., par un ciel
tout à fait serein, d'abord dans la direction du NE., puis
dans celle du SO., et j'ai vu soixante-dix-sepl étoiles
filantes. Vingt-huit météores se sont montrés de 10 h.
10 m. à 11 h., et quarante-neuf de 11 heures à minuit.
Après la fin des observations, les nuages ont envahi tout
le ciel.
Ces étoiles filantes présentaient presque toutes les ca-
ractères de l'époque, en divergeant à partir des constella-
tions de Cassiopée et de Persée. Vingt-huit météores étaient
de première grandeur, et parmi eux j'en ai annoté deux
dont l'éclat pouvait être comparé à celui de Jupiter, et
deux comparables à Vénus. J'ai vu dix-sept étoiles de
deuxième grandeur. Dix-neuf astéroïdes étaient suivis de
traînées généralement fort belles. J'ai annoté deux météores
dont la trajectoire était sinueuse.
Les étoiles observées le 10 se dirigeaient en grande ma-
jorité vers le SO. et l'O.
I
( 419 )
Le 11, j'ai encore observé de 10 h. 42 m. à 11 h. 12 m.,
par un ciel serein , dans la direction du NE. et, pendant
cette heure, je n'ai annoté que seize météores, dont sept
de première grandeur, et cinq avec traînée. Le phénomène
semblait donc en décroissance.
Pendant toute la durée des observations du 10 et du H,
des éclairs se produisaient dans le Nord.
AURORES BOREALES.
ÏSote sur un phénomène auroral remarqué à Louiain le
soir du 3 octobre 481i, et sur sa coïncidence avec des
éclairs observés da)is le Nord, par M. F. Terby, docteur
en sciences.
En examinant le Nord , le 5 octobre, à 8 h. 25 m. du soir,
pour voir s'il ne s'y produisait aucun phénomène particu-
lier, je fus frappé d'apercevoir une illumination assez vive,
très-restreinte, très-peu élevée, occupant un point de l'ho-
rizon situé sous la constellation des Lévriers. Cette lueur,
légèrement jaunâtre, se détachant sur le ciel parfaitement
noir, et immédiatement appuyée sur l'horizon, semblait
avoir une origine terrestre et être le reflet d'un incendie
très-lointain. Je regrettais de ne pouvoir m'expliquer par-
faitement cette apparition, lorsque je vis l'horizon nord
s'illuminer tout à coup par un éclair dont le centre explo-
sif se trouvait exactement dans la même région que la
lueur ou gerbe lumineuse. Cette circonstance me décida à
poursuivre les observations. Bientôt une lueur aurorale
incontestable se manifesta dans tout le NO. Le ciel se cou-
vrant peu à peu, ce phénomène prit un aspect singulier :
( 4-20 )
vers 8 h. 35 m., la gerbe lumineuse brillait toujours à l'ho-
rizon, et au-dessus, mais séparé d'elle par un intervalle
obscur, on voyait un nuage auroral allongé horizontale-
ment, s'étendant dans tout le NO. et jetant un éclat qui,
par moments, revêtait une très-légère teinte rose. C'est à
peine si, en ce moment, quelques étoiles perçaient le voile
nuageux qui couvrait le ciel, et des éclairs apparaissaient
de temps en temps, ayant toujours pour centre la gerbe
lumineuse.
Quelques blancheurs apparurent encore dans des éclair-
cies pendant le reste de la soirée; mais, à 10 heures, par
un ciel presque serein, on ne voyait plus aucune trace du
phénomène.
Je crois devoir rappeler, à cette occasion, que plusieurs
aurores boréales, observées à Louvain, ont coïncidé avec
des éclairs dans le Nord.
Pendant toute la durée de la belle aurore du 2o oc-
tobre 1870, des éclairs apparurent dans le N.; ils furent
remarqués aussi à l'Observatoire royal de Bruxelles,
à Arendonck, par M. C. Coomans, à Somergem, par
M. P. Vertriest,et à Kain, près de Tournai, par M. FI. Des-
rumeaux.
L'aurore du 9 novembre 1871 était accompagnée
d'éclairs très-fugitifs qui se produisaient dans le Nord.
Celle du 10 novembre 1871 a présenté la même parti-
cularité.
Le 4 février 1874, de 8 h. 15 m. à 8 h. 20 m., des
lueurs fugitives se succédaient rapidement dans le Nord;
elles étaient trop faibles et trop peu étendues pour être
assimilées à des éclairs ordinaires. Mais, à 8 h. 40 m., un
brillant éclair a illuminé l'horizon N. magnétique, comme
si la cause qui avait produit les faibles émanations précé-
dentes avait pris tout à coup un redoublement d'intensité.
( 42i )
Je désirerais que l'on pût réunir les faits relatés dans
cette note aux particularités analogues signalées déjà par
les observateurs, et les rapprocher spécialement de ceux
qui ont été invoqués, il y a quelques années, par M. Silber-
mann, et qui ont servi de base aux idées émises par ce savant
pour expliquer un phénomène encore si peu connu. (Voir
Comptes rendus de VAcadémie des sciences de Paris,
dernières années.)
Note sur les perturbations magnétiques qui ont accompa-
gné V aurore boréale du 3 octobre 1874; par M. E. Que-
telet, membre de l'Académie.
L'aurore boréale du 5 octobre a été accompagnée de
perturbations assez prononcées des barreaux aimantés.
Le 5, l'angle d'oscillation du magnélomètre était très-con-
sidérable et la force magnétique horizontale avait aug-
menté. Le 4, la perturbation était très-grande dans tous
les instruments, mais le 5 le phénomène a diminué et le 6
les instruments étaient revenus à leur état normal.
Aux phénomènes électriques se sont joints de forts bou-
leversements atmosphériques. La tempête du 2 et du 5
a été suivie, le 4, d'une pluie violente et continue qui a
persisté pendant toute la journée; la hauteur d'eau tombée
a été de plus de 10 millimètres. Le 5 le temps s'est à peu
près remis, mais le coucher du soleil a été remarquable
par une belle coloration d'un rouge cuivré, et vers
10 Vçj heures du soir on pouvait encore distinguer dans
rONO. quelques faibles traces d'aurore boréale.
( 422 )
Perturbation magnétique du 9 octobre '1874', note par
M. C. Hooreman.
Le 9 octobre dernier, à 9 heures du soir, les barreaux
aimantés de l'Observatoire ont été trouvés légèrement en
perturbation; la déclinaison était un peu plus faible et
les deux composantes de la force un peu plus fortes que
les jours précédents. A ce moment le ciel était serein et
l'on ne voyait aucune trace d'aurore boréale, mais vers
9 % heures, dans le NO., il y avait deux bandes de nuages
noirs et allongés, parallèles à l'horizon; entre ces deux
nuages, distants l'un de l'autre d'environ dix degrés, on
apercevait une faible lueur blanchâtre qui a persisté jusque
vers 10 '/2 heures. Cette lueur était si faible qu'on n'osait
l'attribuer à une aurore boréale, mais la lettre suivante
reçue le lendemain de M. Terby est venue confirmer le
phénomène.
Louvain, le 10 octobre 1874.
Mon cher Monsieur,
.j'ai l'honneur de vous annoncer à la hâte que j'ai re-
marqué hier soir, 9 octobre, des apparences d'aurore bo-
réale. A 10 h. 25 m., un banc de nuages noirs occupait
l'horizon N. et NO. ; plus haut le ciel étaitserein. Il se forma,
dans ce nuage, au NO., une zone étroite, allongée hori-
zontalement, dont l'éclat s'accrut rapidement et prit enfm
une teinte rougeâtre prononcée. Ce phénomène diminua
ensuite beaucoup d'intensité sans disparaître complète-
ment. Je ne puis l'expliquer que par une aurore boréale
très-peu élevée et il serait intéressant de rechercher s'il
n'a pas coïncidé avec une perturbation des aimants.
1 LI.ETIX IIK I.AC.IDK.MIE, 2'S.-ri<- ,Toni<- XY.XTUI .
LES PERSÉIDES
-en 187 4..-
-^ 0
( 423 )
Troisième note sur les paratonnerres \ par M. Melsens ,
membre de l'Académie.
OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES.
La présente notice est divisée en deux parties :
1" Je me propose de faire voir qu'un paratonnerre en
bon état, construit d'après les règles admises dans les in-
structions classiques, n'a pas protégé d'une manière com-
plète l'édifice qui en était armé; il semble résulter de
l'étude de ce coup de foudre que l'on peut conclure à l'uti-
lité des paratonnerres à pointes et à conducteurs multiples.
2° Dans les derniers chapitres de la note je reviens, en
les complétant, sur des communications antérieures, trai-
tant des moyens pratiques de contrôle et de vérification
des paratonnerres. J'appelle l'attention sur une disposition
qui me paraît assez générale et importante pour l'étude de
l'électricité atmosphérique par les paratonnerres et les
parafoudres des postes télégraphiques.
Observations sur ta sphère d'action des paratonnerres et
l'espace préservé par leurs tiges.
Arago,danssa notice sur le tonnerre, fait remarquer que
l'Académie des sciences de Paris admit, tnais sans dire sur
quelles bases, qu'un paratonnerre protège autour de lui
un espace circulaire d'un rayon égal au double de sa hau-
( 424 )
leur. L'illustre physicien donne quelques exemples dans
lesquels cette loi est en défaut, si tant est qu'il y ait des
lois connues ou des règles certaines aujourd'hui, en fait de
coups de foudre et de paratonnerres; Arago cite entre autres
un cas pour lequel l'action préservatrice de la tige n'avait
môme pas pour mesure la simple hauteur de la tige; d'autres
auteurs rapportent des faits semblables; mais souvent,
quand on examine des coups de foudre de cette nature, on
se trouve devant des inconnues difficiles à dégager :
La pointe du paratonnerre est-elle en bon état, bien
effilée?
Le conducteur du paratonnerre est-il continu et parfai-
tement en contact par une surface suffisante avec l'eau
d'un puits ou un sol humide, bon conducteur?
N'y a-t-il pas des masses de métaux, des ancres, des
barres de fer, etc.... près du point frappé?
Les toitures et les faîtages métalliques, les tuyaux de des-
cente et les chenaux pour l'écoulement des eaux ont-ils
été sans action?
Les cheminées saillantes sont-elles sans influence?
Quelle est la hauteur [électriquement parlant) de la
pointe du paratonnerre, par rapport au sol ou aux diffé-
rents niveaux que l'on peut considérer dans les bâtiments
atteints par la foudre?
Il est cependant un fait qui frappe quand on examine
les opinions qui ont été professées, à ce sujet, depuis
Franklin jusqu'à Charles. On voit que la zone de protection
admise a été constamment en diminuant et, aujourd'hui ,
on tend à la restreindre encore. En effet il faut bien re-
marquer que l'instruction de Gay-Lussac avait déjà apporté
quelques restrictions à la règle précitée, en ce qui regarde
les paratonnerres des clochers; s'ils s'élèvent de 30 mètres
( 425 )
au-dessus du faîle des toils des églises, le rayon du cercle
(le protection admise, est lixé à 50 mètres, c'est-à-dire à
la simple hauteur de la tige au-dessus du faîte.
Notre collègue M. F. Duprez pensait (en 1862) que les
paratonnerres des tours et des clochers, par suite de leur
grande élévation , étendent leur sphère d'action plus loin
que s'ils étaient moins élevés, mais qu'il est prudent d'ar-
mer les églises de paratonnerres, en admettant que ceux des
clochers ne garantissent eflicacenient autour d'eux qu'un
espace circulaire d'un rayon double de la hauteur de chaque
tige- au-dessus de son point d'attache.
11 s'agit donc de bien définir, pour les constructeurs, ce
que l'on entend réellement par point d'attache, et il me
semble qu'on s'est trop peu préoccupé de cette définition
pour les clochers, qui peuvent être considérés comme des
cônes très-allongés.
Je m'expliquerai plus loin à ce sujet.
Dans sa brochure, M. De Fonvielle, que j'ai cité dans
mon précédent travail, admet que l'action protectrice « est
» étroitement circonscrite dans l'intérieur d'un cône circu-
» laire droit dont la tige du paratonnerre est l'axe et dont
» le rayon de base est double de la hauteur. Elle ne peut
» donc garantir de la foudre que les objets qu'elle domine,
» et seulement dans le cas où ils se trouvent à l'intérieur
» du solide ainsi défini. »
Je me demande quelle est la véritable hauteur de la tige
[électriquement parlant), quand il s'agit de la flèche d'une
église ou d'une tour inachevée, carrée et sans flèche
comme Sainte -Gudule, à Bruxelles, Saint -Rombaut, à
Malincs, etc.; il me semble que les idées ne sont pas bien
fixées à ce sujet, tandis qu'il n'existe aucun doute quand il
s'agit de liges fixées sur le parcours horizontal d'un con-
ducteur le long des toitures, par exemple.
2™' SÉRIE, TOME xxxvni. 28
( 426 )
Quelques constructeurs vont même jusqu'à admettre,
pour ce dernier cas, la restriction du rapport de Gay-
Lussac; ils ne prennent que la hauteur simple et circon-
scrivent la protection dans un cône ayant cette hauteur
pour rayon de base.
Sir W. Snow Harris (1) va plus loin encore; après
avoir donné la règle admise par Gay-Lussac et l'Académie
des sciences de Paris, il ajoute : « Ceci, bien que possible
» dans certains cas, n'est nullement une vérité générale,
» Toutes les expériences que nous avons sur l'action des
» conducteurs dans les décharges de la foudre tendent à
j> conclure qu'ils n'ont aucune influence quelconque pour
» déterminer la cause de pareilles décharges, autres que
j) celles de la propriété qu'ils possèdent de leur fournir
» une ligne de facile conductibilité. Il résulte clairement
» des faits suivants, qu'ils ne protègent pas toujours un
» espace d'une distance considérable. » (L'auteur rapporte
ensuite une série d'exemples.)
M. Perrol (2), à la suite de nombreuses expériences de
cabinet, était arrivé à changer les principes précédents;
voici ce qu'il dit en effet (5) :
(1) u Tliis, altliough possible in cerlain cases, is by no nieans a gênerai
trulh. AU Ihe expérience we hâve of llie opération of conduclors on dis-
charges of lightning, tends to the conclusion, liiat they hâve no influence
whalever in delermining Ihe course of sach discharges, further than
arises out of Ihe circumstance of Iheir furnishing an easy line of conduc-
tion. That liiey do not always afford protection over any considérable
dislance, is clear from Ihe foUowing cases : » (.Sir W. Snow Harris, On the
nature of Tliunderstorms , p. 117.)
(2) Voir Comptes rendus des séances de rAcalémie des sciences de
Paris^ lonies LIV à LX, années 1862 à 1865 inclusivement.
(5) Bulletins de la Société d'encouragement ^ "2'^ série, tome IX, page
o07, année 1862.
( 427 )
« Les expériences suivantes nionlront qu'au lieu de pio-
)> léger circulairemenl autour d'elle, la tige du paraton-
3> nerre attire les corps électrisés sur toute sa longueur et
» provoque le coup foudroyant. La pointe a seule une ac-
» tion protectrice, mais uniquement dans l'hémisphère
» supérieur au plan passant par celte pointe prise comme
» centre. »
Il compare l'action préservatrice de la pointe à celle d'un
parapluie recevant la pluie verticalement ou obliquement.
11 me suffit de signaler l'opinion de M. Perrot, mais j'en
ferai abstraction dans ce qui suit, puisqu'il s'agit d'un para-
tonnerre muni de trois tiges seulement et destiné à protéger
un monument ayant une tour et couvrant une surface de
plus de 60 mètres de longueur sur 20 à 22 mètres de largeur.
Coup de foudre sur V église de Sainte-Croix, à Ixelles. —
Détermination de la zone préservée dans diverses hijpo-
tlièses.
Dans ma notice précédente je disais, à propos de la véri-
fication et du contrôle des paratonnerres par ks moyens
actuellement usités et surtout par le courant de la pile : il
faudrait pouvoir examiner par ces moyens un paraton-
nerre venant d'être foudroyé et qui eût mal fonctionné.
L'église de Sainte-Croix, à Ixelles lez-Bruxelles, a été
foudroyée dans la soirée du 5 juillet dernier; mais le dégât
a été peu considérable, puisqu'il s'est borné à la rupture d'une
des branches de la grosse croix, en carbonate calcaire gris,
laquelle se trouvevers Testa l'extrémité du IVontcn du tran-
sept; mais si la foudre a frappé un point peu dangereux,
( 428
elle pourrait aussi, dans d'autres circonstances, atteindre
des parties où elle occasionnerait plus de ravages (1).
Le croquis, en élévation et en plan, à réchelle de y^,
représente les parties essentielles à considérer dans ce coup
de foudre , et chaque physicien pourra se faire une idée
exacte de l'état des choses et des diverses conclusions aux-
quelles on arrive en analysant les faits dans les hypothèses
différentes que l'on peut admettre.
La flèche proprement dite, son couronnement, la croix
et la tige du paratonnerre qui la traverse, ont une hauteur
totale de 23 mètres jusqu'à l'extrémité de la pointe en
platine. La forme de cette pointe est celle qui a été adoptée
dans les instructions françaises de 18oo, époque à laquelle
MM. Deleuil père et fds les avaient présentées à l'Aca-
démie; elle forme un cône de 50" environ.
A la partie supérieure, la tige passe dans un épais
manchon de zinc, auquel elle est soudée et sur lequel se
trouvent, autour d'un cercle, deux bras horizontaux qui
représentent une croix; cet ensemble a environ 3 mètres
de hauteur; au-dessous vient le couronnement sur lequel
tout est fixé; il a aussi à peu près 3 mètres. La flèche de h
en i est en bois et recouverte de zinc estampé n" 18 d'en-
(1) La branche brisée à une section de 440 cenlimèlres carrés; la croix
a une hauteur totale d'un mètre environ.
Le montant lui-même a été détérioré, mais je n'ai [m l'examiner que vu
de la rue ; les détails m'échappent, ils sont diCficiles à bien apprécier sur le
fragment tombé; la rupture s'est faite en biais et présente une section de
600 centimètres carrés environ.
Jl aurait fallu placer des échafaudages pour pouvoir examiner attenti-
vement le point frappé et les ancrages de fer qui se trouvent au-dessous de
la croix sur le fronton du transept; ces ancres et la maçonnerie qui les en-
toure ne paraissent pas avoir été touchées par la foudre.
( 429 )
\iron r"'",5 d'épaisseur; tous les supports du conducteur
sont soudés au zinc; ce conducteur descend le long de la
paroi de l'octogone orientée sensiblament vers le Sud.
Le conducteur unique, en fer rond, système de M. E.
Sacré, de iS millimètres de diamètre, passe sur le toit
principal et descend vers g le long des toits, en passant près
d'une pompe située derrière la sacristie, où se trouve le
puits P, dans lequel on rencontre l'eau abondante h environ
7 mètres de profondeur; ce conducteur se termine dans
l'eau par une plaque de fonte de 0'",65 sur 0'",50; le contact
total est donc de 0"\650 carré.
Un peu en avant du transept, à 4 mètres de son axe et
à une distance de 29 mètres de l'axe de la tour, il v a une
tige supplémentaire de5"\2o, figurée par une flèche; elle
est distante du point frappé de M mètres {c'c); une seconde
tige, dont la hauteur est de 9 mètres au-dessus du faîtage
du grand toit, se trouve sur une petite tourelle située sur
le chevet de l'église vers g ; elle est éloignée du point frappé
de 22 mètres [cg).
On a indiqué, sur l'élévation et sur le plan, le point
frappé par c. La ligne PP'" a une longueur égale à deux
fois la hauteur de la pointe P au-dessus du pavé de l'église,
c'est-à-dire 106 mètres; dans l'hypothèse du rayon doublé
de la hauteur à partir du sol, le cercle deproteclion s'éten-
drait à 46 mètres au delà du mur de clôture de la cour E;
la révolution du rectangle de PP'" T'" T tournant autour
de PT, engendrerait un cylindre circonscrivant beaucoup
de maisons du voisinage.
En admettant qu'il faille tracer un cône ayant TP pour
hauteur et TT'" pour rayon de base, on arrive à la même
conséquence, la droite PT'" le démontre. Prend-on PP",
longueur égale à la hauteur de la tour, le point frappé se
( 430 )
trouve encore dans l'espace préservé si l'on admet un cylin-
dre engendré par la rotation de P" T" autour de Taxe PT;
mais il n'en est plus, de même si l'on considère le cône
engendré par le triangle PTT" ayant PT pour axe; le point c
pouvait être frappé.
Si, au lieu déconsidérer le plan horizontal au niveau du
dallage de l'église, on preiid le plan horizontal au niveau du
faîtage du grand toit, séparé du plan passant par la pointe
de la tige par une distance de 50 mètres, le point c pouvait
être frappé, soit que l'on considère un cylindre, soit que
l'on prenne un cône; en effet il se trouve en dehors du
cône PTT" et du cylindre ayant P^ pour axe et PP' pour
rayon ; tandis qu'en prenant deux fois le rayon P/ il ne pou-
vait être atteint ni dans l'une ni dans l'autre hypothèse,
tous les toits de l'église étant compris dans l'espace Vil'.
Examinant de la même façon l'effet des tiges placées à
29 et à 48 mètres de l'axe de la tour, on trouve que les
liges c' et fj ne pouvaient avoir aucune action préserva-
trice, car le point c frappé, en tenant compte de l'épaisseur
des murs, négligée sur le plan, se trouve à i\ mètres de la
lige c', haute de 5"\2o et à 22 mètres de l'axe de la tou-
relle placée au chevet de l'église, la pointe qui termine
cette tourelle ne dépassant le faîte du grand toit que de
9 mètres.
Il y aurait donc lieu de multiplier le nomhre de tiges sur
le faîte et d'en placer de plus élevées.
Vérificalioii du para Ion iterre après le coup de foudre.
J'ai |)oursuivi, autant que possihie, l'examen de la tige et
du conducteur; ils m'ont paru, bien que fortement rouilles
à ce! (ains ( iidioils, être en bon élat parlout ; M. Sacré, le
( 431 )
constructeur n'y a (3as trouvé, de son côté, de défaut appa-
rent; mais cet examen superficiel a été vérifié au moyen de
la petite boussole qui m'a servi pour la vérification des
paratonnerres de l'École de médecine vétérinaire.
Un câble de cuivre à trois brins recouvert de gutta-percha
a été fixé au paratonnerre, non loin du puits; le courant
d'une pile de Bunsen de huit éléments très-faiblement
chargés passait presque sans résistance aucune entre le
paratonnerre et l'eau du puits; la boussole indiquait une
résistance assez considérable, mais le courant passait
encore bien, en mettant l'extrémité du fil retiré du puits
en contact avec les murs humides de Tune des sacristies
ou le pavement en carreaux poreux près de ce mur, preuve
que la conductibilité du mur et du pavement à travers
lequel passait le conducteur était suffisante pour laisser
passer le courant d'une pile très-faible.
A l'époque où j'ai fait cette vérification, le terrain exté-
rieur était très-sec; on pratiqua un trou de 25 centimètres
en dehors du mur d'enceinte vers le point 0 sur le plan,
et l'on obtint une déviation aussi forte que sur le mur
humide près du puits; mais en versant un litre d'eau dans
cette petite excavation et bien que le câble ne fût dénudé
que sur 4 à 5 centimètres, la déviation fut très-considérable.
La terre des environs de l'église conduit donc bien
l'électricité dynamique, et à plus forte raison sans doute
doit-elle pouvoir conduire avec facilité l'électricité statique
ou de tension.
J'ai prié M. Sacré de s'assurer du fait en répétant l'ex-
périence dans d'autres conditions.
Un fil de cuivre, isolé et enveloppé de colon, fut fixé au
conducteur, au-dessus du toit et en dehors de la lucarne
au bas de la flèche, puis déroulé jusqu'au sol en avant de
( 432 )
l'église et mis en communication avec le pôle d'une pile
composée d'un petit élément au sulfate de mercure.
Un galvanomètre étant placé dans le circuit, l'extrémité
du û\ aboutissant à l'autre pôle de la pile était armée d'une
lige métallique, que l'on fit pénétrer dans le sol, humide
le jour de celte deuxième expérience.
La déviation accusée élail de 50% tandis que la dévia-
tion directe sans interposition du fd de cuivre ayant un
millimètre de diamètre et une longueur de 150 mètres,
du conducteur du paratonnerre qui a près de 100 mètres et
de la distance en terre des appareils aux puits , soit d'envi-
ron 70 mètres, ne s'élèverait pas au-dessus de 56°.
Je ne me suis pas contenté de ces expériences et je les
ai répétées en employant une pile faible composée de deux
éléments Leclancbé, le rhéomèlre différentiel et le rhéostat
employés pour les vérifications des lignes télégraphiques.
Il me paraît inutile de donner tous les détails de cette
seconde vérification, d'autant plus qu'elle a été faite sur-
tout par comparaison avec les paratonnerres établis à
l'École de médecine vétérinaire.
Je constate seulement que le courant passe sans résis-
tance sensible entre les conducteurs de ces paratonnerres
à 5 mètres au-dessus du sol et leur puits, éloigné de
quelques mètres seulement. Ferme-t-on le courant par la
terre du voisinage, on observe, toutes choses égales d'ail-
leurs, que la résistance augmente et que l'aiguille du gal-
vanomètre dévie d'autant moins que la distance au puits
est plus grande et que le rhéophore enfoncé dans le sol
offre moins de surface; mais de part et d'autre on constate,
et de la même façon, la bonne conductibilité et l'état satis-
faisant des deux paratonnerres, qui sont de systèmes diffé-
rents; la déviation de l'aiguille donne souvent des nombres
identiques pour des conditions semblables.
( 453 )
En introduisant !c rhéostat dans le courant on observe
très-sensiblement dans les deux lieux les mêmes diminu-
tions dans les déviations de l'aiguille.
J'ai dû me borner à l'École vétérinaire à tixer l'un des
rhéophores sur les conducteurs près du sol, tandis qu'à
l'église de Sainte-Croix, le câble isolé aboutissant à l'un des
pôles de la pile était lixé sur le conducteur au point l, c'est-
à-dire à 35 mètres environ an-dessus du pavé de l'église où
se trouvaient la pile et les autres instruments; le deuxième
câble destiné à fermer le courant et aboutissant à l'autre
pôle de la pile était terminé par une tringle pointue de fer,
longue de 1 mètre et d'un diamètre de 1 centimètre, que
l'on enfonçait dans la terre ou dans l'eau de l'étang d'Ixelles,
à 20, oOet 50 mètres en avant du portail de l'église; ainsi le
courant devait traverser le paratonnerre presque complet,
deux câbles d'une longueur totale de 140 mètres et la terre
ou l'eau de l'étang distant de plus de 100 mètres du puits;
malgré ces différences en faveur des paratonnerres de
l'École vétérinaire, les déviations de l'aiguille, lorsque le
rhéostat complet correspondant à une résistance de 500
kilomètres de fil de fer de 4 millimètres était interposé,
étaient presque identiques; à l'École la déviation était de
34°, à Sainte-Croix elle ne s'élevait qu'à 52°, difTérence
faible comme on voit (1).
Toutes les observations permettent donc d'assurer que le
paratonnerre de l'église de Sainte-Croix était en parfaitétal.
(1) Des circonstances indépendantes de nna volonté ne m'ontpas permis
de mesurer exactement toutes ces résistances en donnant la valeur de
chacune d'elles en particulier; j'engagerais cependant d'autres observa-
teurs qui n'opéreraient paint par comparaiso7i entre deux paratonnerres
à s'en rendre compte.
( 434 )
Chaque physicien pouira, d'après ce qui a été dit pré-
cédemment, se former une opinion sur l'étendue de l'action
préservatrice dans ce cas spécial.
Qu'il me soit permis d'ajouter :
11 est probable que : avec des pointes multiples, avec des
conducteurs multiples aboutissant à toutes les saillies, tou-
relles, croix, eic , la foudre eût trouvé une route
tracée et de quoi en frapper un — les pointes muiliples sur
toutes les saillies jouissant en outre de la propriété d'empê-
cher les coups foudroyants, comme M. Perrot l'admet , son
opinion étant partagée, du reste, par MM. Gavarret,Babinet
et autres physiciens.
Le nombre de points à armer ne s'élève pas à moins
de 14, non comptés deux conducteurs supplémentaires,
fussent-ils à faible section; ils pourraient être placés avan-
tageusement sur les petits toits des nefs, le faîte du tran-
sept et les toits des sacristies.
Je me demande cependant si, de ce seul fait, on ne
pourrait pas conclure à la supériorité des paratonnerres à
conducteurs multiples et à pointes multiples pour les édi-
fices du genre de l'église de Sainte-Croix.
Je signale en terminant que l'on a cru voir la foudre
venir par la rue située du côté de l'Est et qu'elle aurait
frappé la croix en remontant le long du fronton. Ce serait
un coup de foudre ascendante ?
Du contrôle et de la vérification du paratonnerre ; de remploi
simultané d'un galvanomètre et d'un ré-électromètre. Ad-
jonction de ce dernier instrument pour l'étude de l'électri-
cité atmosphérique et des décharges sur les paratonnerres.
L'application de l'électricité dynamique à la vérification
de la conductibilité parfaite du paratonnerre aérien et du
( 455 )
paratonnerre souterrain ou de la terre elle-même qui en-
toure la partie enfouie, est due à M. J.-P. Wagner, de
Francfort (1); son appareil est parfaitement suffisant; à ma
connaissance, toiit ce que l'on a fait depuis ne change en
rien les principes sur lesquels il se base. Il me semble
qu'on a depuis exagéré un peu les mérites d'appareils spé-
ciaux basés sur l'action qu'un courant exerce sur upe
aiguille aimantée, astatique ou non. En général même les
auteurs ne citent pas M. J.-P. Wagner. On comprend du
reste qu'il est facile de faire agir le courant d'une façon
continue ou par interruption, de le commander, au besoin,
par un mouvement d'horlogerie, avec ou sans emploi de
sonneries, détonations, enregistreurs, etc.... (2).
Quoi qu'il en soit, les anciens appareils, les paratonnerres
interrompus et les carillons électriques, etc., ne pouvaient
indiquer que dans quelques cas si l'électricité soutirée aux
nuages passait dans le conducteur; ils n'étaient guère plus
certains que l'observation très-rare des feux Saint-Elme.
(1) Voir PocjgendorfJ's Annakn (1er Physik und Chemie, t. LXIX.
Année 1846. Consulter de plus: i° Anleitung zlir Ausfiihrung und Visita-
lion de7' Blitzahleiter von 11'. Eisenlofir, Professor in Karlsruhe. 1848.
Publié par Walsch et Vogel , à Carlsruhe. 2- Handbitch des angewandten
Eleclricitdlslefire von Cari Kulin, Professor und Akademiker in MUn-
chen. 1866.
(2) Voir pour les détails :
1" De Fonvieille, De l' utilité des paratonnerres et de lanécessité de les
contrôler. Paris, Ghio, 1874.
2» P. Francisque-Michel, Contrôleur automatique de refficacité des
paratonnerres., dans le journal Les Mondes , aumévo du 30 avril 1874.
3» Traité des Paratonnerres, par A. Calland, ingénieur-électricien.
Paris, Ducher et C's 1874. — Projet d' électromètre, page 162. Je me gar-
derai bien de faire la moindre observation sur le projet décrit. Les physi-
ciens jugeront!
( 436 )
Les nouveaux systèmes de vérification par le courant de la
pile, par les étincelles de l'électricité de tension, suscep-
tibles de soulever quelques objections, comme je l'ai dit
dans une précédente notice, ne doivent pas être abandonnés;
l'examen de l'état de conservation parfaite du conducteur
faite de visu ne peut jamais être négligée, et il me paraît
indispensable qu'elle soit faite avec la plus grande attention
en même temps que l'examen électrique.
Admettons donc que la vérification et le contrôle, soit
temporaires, soit permanents, par la pile peut être utile;
mais il sutllit, ce me semble, de faire cet examen de temps
à autre, pourvu qu'on ail de suite sous la main tout ce qu'il
faut pour le faire, comme je l'ai prévu pour l'hôtel de ville
de Bruxelles, qui peut encore attendre de longues années
avant qu'une vérification soit nécessaire.
Applications du ré-èlec(romèlre aux paralonnerres et aux
parafoiidres des télégraphes.
Je crois devoir indiquer, pour le contrôle et l'enregis-
trement des phénomènes électriques produits par des étin-
celles, le ré-électomètre de Marianini (1). Je l'applique en
permanence pour les paratonnerres et pour les parafoudres
des télégraphes électriques, ou commutateurs à paraton-
nerres, établis dans chaque bureau télégraphique.
La présente notice n'a d'autre but que de prendre date
pour cette application et de montrer, autant qu'il m'est
permis de le faire, l'importance de la question, surtout au
point de vue météorologique.
(1) Voir Annales de Chimie et de Plii/sique , ô'" série, t. X, X(, XIII
elXVI.
( ^^57 )
Quelques mois suffiront pour rappeler cet appareil trop
peu appliqué, trop peu apprécié môme pour les cours; il
permet de faire à l'amphithéâtre des expériences très-saisis-
santes et très-démonstratives. Sur un tube de carton ou
sur un tube de verre on enroule un (il de cuivre formant
ainsi une héWce dcxtrorsum ou siinstrorsu7n; on place au-
dessus de l'hélice, soit en la suspendant à ditlérentes hau-
teurs par un cocon de soie sans torsion , une aiguille
aimantée sensible; je préfère la placer sur un axe vertical
quand il s'agit de se servir de l'appareil pour l'usage des
paratonnerres etdesparafoudres télégraphiques; dans l'axe
de l'hélice à l'intérieur du tube de verre ou de carton , on
introduit un faisceau de fd de fer, un cylindre de fer, ou,
ce qui m'a paru préférable, l'hélice n'ayant qu'environ dix
centimètres de longueur, la moitié d'une grosse aiguille à
tricoter en acier; ce barreau peut être recuit ou trempé,
mais il doit être absolument privé de magnétisme; on peut
préparer une hélice déjà très-sensible en employant pour
la fabriquer un ou deux mètres de fil de cuivre de O'""" 8 à
0,5 de diamètre , les 50 ou 100 spires suffisent.
L'aiguille aimantée se plaçant dans le plan du méridien
magnétique, on dispose l'appareil de telle façon que l'hé-
lice, au-dessus de laquelle se trouve l'aiguille aimantée,
lui soit exactement perpendiculaire; l'une des pointes de
l'aiguille dans cette position peut marquer sa déviation
sur un demi-cadran gradué en 180" parties et coïncide
d'abord avec le 0° qui se trouve au centre du cadran.
Si une étincelle d'une machine électrique ordinaire,
d'une bouteille de Leyde, ou de la machine de Holtz, armée
ou nom de ses bouteilles en cascade, passe par le iil de
l'hélice, elle aimante le petit cylindre intérieur fixe;
celui-ci , réagissant par iniluence sur l'aiguille aimantée
( 458 )
mobile dans un plan horizonlai, la dévie à droile ou à
gauche du 0", ce qui dépend du sens d'enroulement de
riiélice et du sens dans lequel l'étincelle a marché du
pôle positif au pôle négatif; les petits cylindres d'acier
trempé ou recuit dont je me suis servi ont conservé leur
magnétisme pendant plusieurs mois (1).
(1) Il m'est arrivé dans les expériences faites avec la niacliiiie de Hoilz.
une bizarrerie que je décris parce qu'elle pourrait inirigiier d'autres expé-
rinienlateurs.
La machine de Hoitz non armée de ses bouteilles donne , comme on le
sait, un courant parfaitement appréciable au moyen d'un galvanomètre
quelque peu sensible; mais en attachant les extrémités libres du fil de
l'hélice aux poupées correspondant aux pôles positif et négatif de la ma-
chine, et en l'activant, je me suis aperçu que le barreau ne s'aimantait
pas; j'ai fait les expériences avec divers appareils improvisés et avec un
ré-électrométre construit par M. Ruhmkorff; cependant le courant d'une
faible pile transforme l'aiguille en un barreau aimanté; arme- 1 -on la
machine de Holtz de ses deux bouteilles de Leyde, ou d'une grande bat-
terie, mais sans provoquer d'étincelle, il arrive parfois qu'en l'activant
le cylindre s'aimante et un ou deux tours de la machine dévient l'aiguille
aimantée qui se fixe sensiblement , à quelques degrés prés, dans le plan de
rhélice; rarement même le phénomène ne se produit pas.
J'ai constaté que raimanlation du cylindre est produite, dans ces cas,
par de irès-faibles étincelles qui éclatent du côté des contacts dans la
batterie ou sur les conducteurs de la machine elle-même , par suite d'un
mauvais contact ou de l'action du vernis recouvrant les conducteurs;
en effet, parfois j'ai observé que l'aimantation se produisait alors que
la machine de Holtz n'était pas armée de ses bouteilles de Leyde; c'est
lorsque l'on retire le fil de l'hélice de l'une des bornes avant d'avoir mis
les deux sphères des conducteurs positif et négatif en contact; dans ce
cas, au moment de l'ouverture, une petite étincelle éclate entre le fil
et la poupée; elle sufiit pour communiquer une aimantation au cylindre
d'acier.
Il faut donc absolument qu'il y ail i-tincclle pour que le barreau
s'aimante.
Peut-être avec de très-grandes machines de Hoitz obtiendrait-on l'ai-
mantation par le courant fermé.
( m )
Je n'insiste pas pour le moment sur les détails de l'ap-
pareil dont il faudra faire usage dans l'application, c'est
une question d'avenir et d'expériences directes à faire. Le
nombre de spires, le diamètre du fd de cuivre, la distance
du point de suspension de l'aiguille aimantée sont autant
de circonstances qui peuvent faire varier la sensibilité de
l'appareil; on est maître de la rendre excessive. "*
Quant aux expériences que j'ai faites au moyen des
machines électriques à frottement , de l'électropliore, de
la bouteille de Leyde, des batteries et avec l'excellente
machine de Holtz, construite par M. Ruhmkorff, elles me
permettent de supposer que des conducteurs destinés à
dériver sur un paratonnerre une partie du courant ou de
l'étincelle foudroyante, seront amplement suflîsanis pour
aimanter le petit barreau placé dans l'hélice du ré-élec-
troniètre. J'espère être à même de faire sous peu des expé-
riences directes sur un paratonnerre établi d'après mes
vues personnelles au cabinet de physique de l'École de
médecine vétérinaire de Bruxelles.
On arriverait à des données sans doute plus nom-
breuses, plus exactes et pour tous les nuages en temps
orageux, si l'on avait à sa disposition un appareil souti-
rant constamment l'électricité de l'air. J'aurai l'honneur de
donner le projet de cet appareil dans une prochaine com-
munication.
Cette réserve mise de côté, je nen ai aucune à faire en
ce qui regarde les parafoudres des bureaux télégraphiques.
Applications du rè-électromètre aux parafoudres des lélégra-
phes. Conséquences au point de vue météorologicjuc.
On sait que les iils télégraphiques sont constamment
frappés par la foudre; les télégraphistes ont ordre de se
( 4^0 )
mettre sur terre, comme on dit, pendant les orages; la
fondre laisse des traces plus ou moins fortes de son pas-
sage dans le papier dont ces appareils sont munis. Les
dimensions plus ou moins considérables des perforations
dans le papier peuvent donner des indications sur l'inten-
sité des coups.
Rien ne me paraît plus simple que d'insérer le ré-élec-
Iromètre dans le parafoudre ordinaire ; on conserverait la
preuve du passage de la foudre et, de plus, l'indication
nette de sa direction ou la connaissance des signes de l'élec-
tricité qui peuvent se trouver altei'nativement dans le sol
ou dans l'air et les nuages. Cette donnée est indiscutable
et il est bien prouvé que l'on connaît la foudre ascendante
comme la foudre descendante , celle-ci paraissant se pro-
duire bien plus souvent que la première. Autant que j'en
puis juger, la foudre ascendante exerce des ravages et pro-
duit des phénomènes autres que la foudre descendante,
comme la foudre en boule que l'on voit souvent se mouvoir
de bas en haut.
Je ne sache pas que les appareils dont on se sert actuel-
lement dans les observatoires pour constater la direction
et l'intensité des courants terrestres, les signes de l'élec-
tricité de l'air, etc.... aient donné des résultats bien nets
sur ce qui arrive dans les dilTérenls lieux parcourus par le
môme orage, et j'ignore si , sous ce rapport, on a comparé
les observations simultanées ou séparées par un intervalle
de temps déterminé indiquant la rapidité de la marche des
orages.
Aujourd'hui que les réseaux télégraphiques s'étendent
sur toute l'Europe savante, communiquent avec beaucoup
d'observatoires et rayonnent, on peut le dire, sur le monde
entier, il me semblerait qu'un vaste système d'observations
établi au moyen du ré-électromètre de Marianini dans tous
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l' F.léiiatioii \ d haiitair du chiruau du ij ru > ut toit
j (' hauteur des toits des J* ne/^s
\ f haal^'ur du rheneau des tviCs des ue/'s-
LéyeTide
dit
Plan
S. S Sucnsties
X.kk, Autels
D.D.. JJéçagei/ients
E, Cour couverte
T,T,'T"1"" Itdi/oii.r des l>ty-fes'
des ci/lifi-djvs rf dcr çciiics-
reiijidérér
^ Riit?. P.
ZK''_ '/." S'rirnMU- Toore'j B'-'-.
( 441 )
les postes télégraphiques serait de nature à nous éclairer
sur des points importants se rattachant à tous les phéno-
mènes électriques qui se passent au-dessus de nos têtes
dans les nuages, dans nos édifices et, sous nos pieds, dans
le sol.
A mon sens il sera nécessaire de rechercher toutes les
lois pour l'étincelle de tension et l'étincelle de la foudie.
L'esprit de la science positive se refuse, malgré toutes les
bizarreries que l'on observe , à faire du fluide électrique,
si fluide il y a, un être erratique ayant, en dehors de tout
ce que nous admettons à l'égard de l'immuabilité des lois
naturelles, des caprices inexplicables.
Avouons humblement notre ignorance actuelle et con-
statons l'importance qu'il y aurait à avoir plus de données
exactes sur la marche des étincelles des nuages et des
coups de foudre.
Qu'il me soit permis d'espérer que les diverses adminis-
trations des télégraphes voudront bien venir en aide à la
science, d'autant plus qu'il s'agit d'une disposition simple
et peu coûteuse qui n'entrave absolument en rien le service
ordinaire.
En effet , on se borne à observer la déviation de l'ai-
guille aimantée, pendant V arrêt obligatoire de la transmis-
sion des dépêches; il suffit, après un coup de foudre, de
remplacer le petit barreau d'acier dans l'intérieur de
l'hélice; on peut le recuire pour le désaimanter et le faire
servir indéfiniment.
Je serais heureux de voir la Belgique prendre sur le
continent l'initiative de ces observations.
2"^ SÉRIE, TOME xxxviir. 29
( 442 )
Rectification à la notice de 37. Melsens sur la craie de
Ciply.
A la page 52 du Bulletin de la séance du 4 juilleH874
on a oublié de citer le gisement de phosphate de chaux , au-
dessous de la ville de Louvain , découvert par M G. Lam-
bert, professeur à l'Université de cette ville.
Les rapports de MM. de Koninck et d'Omalius, ainsi que
la note de M. Lambert, sont imprimés dans le tome XXIX,
pages 165 et 254, séance du 5 mars 1870.
Sur l'anhydride hypo-azotique ; par M. Louis Henry,
correspondant de l'Académie.
On a déjà signalé précédemment des analogies entre le
soi-disant anhydride hypo-azotique Az^ O4 et les corps
halogènes, le brome notamment.
La vapeur de l'anhydride hypo-azotique ressemble phy-
siquement à celle du brome; sa molécule, comme celle
des corps halogènes, paraît être atomiquement double et
se conb*'tuer de deux groupements Az O2. Au point de vue
chimique, la ressemblance est encore plus frappante ou
plutôt plus exacte : comme les corps halogènes , l'anhy-
dride hypo-azotique est susceptible de s'ajouter aux com-
posés non saturés; de plus, sa réaction sur les alcalis
libres s'accomplit dans le même sens que celle du chlore
et du brome.
CI Cl K Cl -t- (KO) CI.
KKO H- =
AZjO^ K Az O2 -t- (K 0) Az O2.
( 44-5 )
Les corps halogènes s'expulsent niutuellemenl de leurs
combinaisons, suivant l'ordre d'énergie de leurs affinités
respectives; ceux dont le poids atomique est plus faible
chassent, de leurs combinaisons avec les métaux et les
radicaux positifs en général, ceux dont le poids atomique
est plus élevé. On se rappelle que j'ai rais à profit l'ex-
pulsion facile de l'iode par le brome, pour obtenir d.^s
composés mixtes chloro-brômés, en parlant de composés
chloro-iodés si faciles à obtenir à l'aide du chlorure
d'iode lo Cl (1).
Il m'a paru intéressant d'examiner l'action de l'anhy-
dride hypo-azotique sur les iodures d'alcools. Regardant
cet anhydride Az^ O4 comme constitué de deux groupe-
ments Az O2, je m'attendais à obtenir par suite du rem-
placement de l'iode par Az O2, soit des éthers nitreux,
soit peut-être des dérivés nitrés du genre de ceux dont
M. V. Meyer a signalé l'existence et entrepris l'intéres-
sante étude.
Mes prévisions ne se sont réalisées qu'en partie. Sous
l'action de l'anhydride hypo-azotique, l'iode est à la vérité
expulsé des iodures d'alcools, mais ceux-ci se transforment
en azotates correspondants.
C'est l'iodure d'amyle que j'ai mis d'abord en réaction
et c'est ce composé qui m'a donné les résultats les plus
nets. L'azotite d'amyle (Cy H,i) Az 0^ bout à Oo" ; son
isomère, Je penlane mononitré, bout vers loO"; cet iodure
me paraissait, par là, le plus apte à me faire voir de suite
la nature du produit de sa réaction avec l'anhydride hypo-
azotique.
Dans de l'iodure d'amyle, bien pur et convenablement
(1) Cumplc.s rendus, etc., juin 1870.
( UA- )
refroidi, j'ai introduit par portions successives de l'anhy-
dride hypo-azolique, en quantité beaucoup plus considé-
rable que la quantité théoriquement nécessaire, du moins
d'après l'équation
2 Cs H„ lo -f- Az^ 0, = I02 -+- 2 C5 Hi, Az 0,
équation d'après laquelle la réaction me paraissait devoir
se produire, La liqueur brunit aussitôt par suite de la
mise en liberté de l'iode; après quelques heures, la sépa-
ration de celui-ci est complète, et il s'en est formé une
cristallisation abondante. La réaction est fort paisible et
lente; elle ne s'accompagne pas de ce dégagement de cha-
leur intense qui caractérise l'action du brome sur les
iodures d'alcools. La liqueur séparée de l'iode a été lavée
à la soude caustique, tout à la fois pour la débarrasser de
l'iode dissous et de l'excès d'anhydride hypo-azotique ; c'est
de l'azotate d'amyle presque pur.
L'azotate d'amyle que j'ai ainsi obtenu, bouillait sans
décomposition à l^y-loO"; sa densité, à l'état liquide,
était 1,059 à 1 1°; sa densité de vapeur a été trouvée égale
à 4,67 (1); la densité calculée pour (Cg Hu) Az O3 est
4,59 et 4,04 pour (Cg H,)) Az O^.
L'iodure d'éthyle, dans les mêmes conditions, a été
transformé en azotate d'éthyle, bouillant vers So^-SS".
L'action de l'anhydride hypo-azotique sur le chloro-
(I) Voici les données numériques se rapportant à cette opération
Substance employée 0s'',0291
Pression barométrique 764 m.
Mercure soulevé 667 m.
Volume de la vapeur 51 ce, 3.
Température 100°.
( 445 )
iodure tl'éthylène Cl CH.2 - — CFLi lo est beaucoup moins
énergique; néanmoins l'iode esi expulsé.
Dans le cours de ces réactions, on constate, dans le sein
de la masse liquide, la production et le dégagement de bulles
gazeuses qui sont sans doute de l'oxyde azotique Az 0.
Ces bulles, entraînant avec elles des vapeurs d'anhy-
dride Az2 O4, lequel se décompose, comme l'on sait, avec
l'eau en donnant en même temps que de l'acide azotique,
de l'oxyde Az 0, je n'ai pas jugé à propos de m occuper d'en
déterminer la nature par des expériences directes.
Je ferai remarquer encore que l'expulsion de l'iode des
iodures sous l'action de l'anhydride hypo-azotique est non-
seulement lente, mais qu'elle nécessite pour se compléter
une quantité considérable de cet anhydride, relativement
à la quantité théoriquement nécessaire; j'ai déjà signalé
le même fait à propos de l'expulsion de l'iode des chloro-
iodures par le brome (1); le radical ou groupement AzOs,
moins fort que Br, a besoin, plus encore que celui-ci , d'être
représenté vis-à-vis de l'iode, par une masse considérable
qui compense son manque d'énergie.
Le fait assez extraordinaire et pour moi fort inattendu,
que je viens de signaler, me paraît de nature à jeter
quelque jour sur la structure et la signification chimique
de l'anhydride hypo-azotique.
Il résulte des expériences de M. H. Sainte-Claire Deville
que le poids moléculaire réel de ce composé, à la tempé-
rature ordinaire , est celui que représente la formule
Az., O4. Il résulte également des déterminations de cet
émineni expérimentateur que, sous l'action de la chaleur,
cette molécule se dissocie; à mesure que la température
s'élève, la densité de vapeur de ce composé diminue;
(1) Voir ma notice citée plus haut.
( 446 )
vers 150", elle s'est abaissée jusqu'à n'être plus que 1,58,
ce qui correspond à un poids moléculaire exprimé par
Az 0.2. Par le refroidissement , la molécule Az2 O4 se
reconstitue par la recomhinaison ou, pour ne rien pré-
juger quant à sa structure, par la réaction mutuelle de
ses fragments ou produits de dissociation Az O^ (1).
Se basant sur ces faits, on a souvent admis que l'anhy-
dride azotique est formé de deux groupements nitrijle
Az O2, préexistant et tout formés dans sa molécule Az^Oi
que l'on écrit Az O^ — Az O^; on a assimilé la dissociation
de la vapeur de ce corps à celle que subit, plus difficile-
ment à la vérité et à une température beaucoup plus
élevée, la vapeur du soufre. Je ne partage pas aujourd'hui
cette manière de voir.
La formation des azotates par l'action de l'anhydride
hypo-azotique sur les iodures d'alcools nous oblige à
admettre dans ce composé le groupement AzOs, pré-
existant,.et la molécule Az2 O4 doit être Az 0 (Az O5) ,
c'est-à-dire que l'anhydride hypo-azotique est de l'azotate
d'azotyle (2), ou bien l'anhydride mixte azoto-azotique
A/;o y
Az 0,^^
ainsi que l'indique du reste la réaction de ce corps sur les
alcalis caustiques,
AzO >0-<- -•<HO=A^O('^0)-+- AzO,(KO)-f-H,0,
(1) D'après la densité de vapeur de l'anliydride hypoazolique, ou voit
que ce corps est déjà dissocié en partie à la température d'ébullilion; ce
n'est qu'à l'état solide qu'existe la molécule Az^O^ complètement intacte.
(2) On connaît encore d'autres combinaisons inorganiques du radical
Az 0, notamment des combinaisons sulfuriques (Az 0) H S 0< , (AzO)^
Sa 0,, etc., et un chlorure (Az 0) Cl.
( 447 )
réaction qui, dans son mécanisme et son résultat, me
paraît identique à celle des anhydrides mixtes orga-
niques
C' h' 0 > ^ "*- 2KH0 = C, H, 0 (KO) -t- C, H^ 0 (OK) -+- H, 0.
S'il en est ainsi, sous l'action du pentachlorure de phts-
phore Ph CIg, l'anhydride hypo-azotique doit donner simul-
tanément, à la façon des anhydrides mixtes, les deux
chlorures (Az 0) Cl et (AzO^) Cl, en même temps que de
l'oxychlorure de phosphore; c'est ce que je me propose de
véritier expérimentalement.
Quant à la structure intime des groupements AzO et
Az O3, il n'est pas possible d'émettre, aujourd'hui que l'on
est si peu avancé, sous le rapport de leur constitution,
dans la connaissance des composés oxygénés de l'azote,
autre chose que des conjectures. La formule de structure
à attribuer à l'hypo-azotide Azg O4 doit varier suivant l'idée
que l'on se fait de l'atomicité de l'azote. L'azote est certai-
nement un élément penta-atoniique au maximum; il est
non moins certain d'autre part que cet élément, dans plu-
sieurs de ses combinaisons, est un élément triatomique ou
bien en joue le rôle.
Il me paraît fort difficile d'admettre que les deux atomes
d'azote dans l'anhydride (AzO)-(Az03) sont penla-ato-
miques.
Si l'on admet que tous les deux sont triatomiques , on
arrive à la formule de structure suivante :
(0" = Az"' — ) (0 — 0 — Az = 0).
Si l'on admet, au contraire, que l'un des atomes d'azote
est triatomique, celui du groupement AzO et l'autre penta-
( 448 )
atomique, celui du groupement Az O3, la formule suivante
doit être admise
(0" = Az"'-)-0-(-Az<^«).
L'une et l'autre de ces formules rend également bien
compte du dédoublement de Ai^ O4 en Az O2 sous l'action
de la chaleur.
Sur la production des hydrocarbures acétyléniques et la
classification des hydrocarbures tétraatomiques en gé-
néral; par M. Louis Henry, correspondant de l'Aca-
démie.
A l'acétylène C^ H^ peuvent être rattachés, théorique-
ment du moins, deux groupes d'hydrocarbures CnH2„_2i
tétraatomiques, parla substitution à l'hydrogène de radi-
caux C„H2n+, :
1° Dans l'un de ces groupes se rangent des hydrocar-
bures de la formule générale
Cn H Jn + 1
I
c
III
c
I
Cn H2a4- 1
dérivant de l'acétylène par le remplacement total de l'hy-
drogène par des radicaux hydrocarbonés C H._,„^.i.
Ces hydrocarbures tétravalents ont perdu le caractère
acétylénique.
( 449 )
Ce groupe peut lui-même se subdiviser en deux séries
distinctes, suivant que les radicaux substituants CnH^^^.,
sont identiques ou différents; l'une de ces séries renferme
des hydrocarbures symétriques , de la formule
I
III
c
I
Cn H2n+1
l'autre des hydrocarbures dissymétriques de la formule
Cn Hjn + I
I
C
III
c
I
Cn' H-2n' + i
2° Dans un second groupe, mieux connu, se rangent des
hydrocarbures de la formule générale
Cn Hjn + l
I
C
III
CH
dérivant de l'acétylène par la substitution d'un radical
CnHjn+i à un atome d'hydrogène seulement.
Ces hydrocarbures, ayant conservé un chaînon ^CH,
sont à la fois tétravalents et acétyléniques.
Le type de ces hydrocarbures est, dans les combinaisons
grasses, l'allylène C3 H4 ou méthyl-acétylène
CH3
I
c
III
CH
( 4^0 )
et dans les combinaisons aromatiques le phényl-acélylène
CgHs — C=CH.
Je me suis déjà occupé, dans une précédente notice (1)
de ces hydrocarbures acétyléniques, au point de vue de
leur production générale; j'ai signalé les aldéhydes de la
formule C„H2„+, — CH^ — CHO, ou plus généralement
CnHj — CH^ — CHO, comme étant les composés les plus
propres à fournir ces hydrocarbures, tout au moins comme
devant les fournir à coup sûr.
Le rapprochement des formules suivantes
CHO CH
I m
CH H^ CH
Aldéhyde acétylique Acétylène
indique les relations étroites qui existent entre l'aldéhyde
acétique et l'acétylène. Les aldéhydes de la formule géné-
rale CnH:, — CH^ — CHO qui sont les dérivés mono-subsli-
tués de l'aldéhyde acétique, doivent donner, dans les
mêmes conditions où celle-ci donne l'acétylène lui-même,
les dérivés mono-substitués Cn Hx — C^CH correspon-
dants à l'acétylène
CH CHO CHO CH
III I I III
CH CHH, CH^ C "^
Acétylène I |
C„Hx C„Hx
On sait par quelle série de réactions on parvient à
éliminer d'une aldéhyde les éléments d'une molécule d'eau,
aux dépens des deux chaînons voisins CHO et CH2 (2). Je
crois inutile de revenir sur ce point.
(1) Bulletins de V Académie royale de Belgique, 2*= série, t. XXXVII,
page 512.
(2) Voir ma notice indiquée ci-dessus.
( 4ai )
J'ai déjà fait connaître précédemment la transforma-
tion ralisée par M. G. Bruylants, de Valdéhyde-valérique
C5H10O ou isopropijl-acétique
eu, CH3
V
CH
I V
CH,
I
CHO
en isopropyl-acétylène
CHj CH,
V "
CH
I
C
III
CH.
Je viens aujourd'hui faire connaître de nouveaux cas d'ap-
plication de celte méthode, qui constatent que celle-ci peut
être regardée comme une méthode générale.
A ma demande, M. Reboul, le professeur si distingué de
la Faculté des sciences de Besançon, a bien voulu réaliser
la transformation de l'aldéhyde propionique CH5 — CH., —
CHO en alhjlène CH5 — C=CH. Il a chaufTé pendant quel-
ques heures en tube scellé, vers 150°, avec une solution
alcoolique de potasse caustique, \e chlorure de propylidène
CH3— CH2 — CHCU, produit de l'action de Ph Cly sur
l'aldéhyde propionique. Le chloro-brômure correspondant
CH3 — CH.2 — CHCl Br s'est comporté de la même ma-
nière.
En 1867, M. E. Rubien, élève de M. Limpricht, à Greis-
wald,a transformé, par le même procédé, l'aldéhyde œnan-
thylique CyKi^O en un hydrocarbure CyHi-i auquel il a
( 452 )
donné le nom assez impropre, d'après moi, d'œnanthyli-
dène.
Les indications que donne M. Rubien sur cet hydro-
carbure sont fort succinctes; j'ai engagé M. G. Bruylanls à
le refaire et à en reprendre l'étude. Il résulte de ses
recherches que Vœnanthylidène CyHj^ constitue aussi un
hydrocarbure acétylénique; il donne avec les solutions cui-
vreuses et argentiques, dans l'ammoniaque, les précipités
caractéristiques de l'allylène et des composés mono-acéty-
léniques en général.
D'après M. C. Schorleramer, l'acide œnanthylique, dé-
rivé de l'aldéhyde du même nom, serait l'acide heptylique
normal; s'il en est ainsi, l'œnanthylidène C7H12 constitue
Vamyl-acétijlène normal
CH, - CH, - CH, — CH, — CH, — c = CH.
Il résulte d'une manière positive des informations que
j'ai prises, que le crotomjlène C/^Uq de M. Caventou n'ap-
partient pas au groupe de l'acétylène; M. Bruylants s'occupe
en ce moment de la préparation d'un crotonylène acétylé-
nique CH3 — CH.^ — C= CH ou éthyl-acétylène, à l'aide de
l'aldéhyde butyrique normale CH3 — CH2 — CH^ — CHO.
Je terminerai cette notice par un essai succinct de clas-
sification des hydrocarbures tétraatomiques en général
C„H,„_2. Le nombre de ces hydrocarbures connus, assez
restreint jusqu'ici, paraît devoir s'accroître assez rapide-
ment; il me paraît désirable d'établir de l'ordre dans ce
groupe de composés théoriquement si nombreux et si in-
téressants au point de vue de l'isomérie.
Remarquons d'abord que quels que soient les composés
dont ils dérivent en réalité, les hydrocarbures tétraatomi-
( 453 )
ques C„H2„_2 correspondent aux hydrocarbures saturés
C„H2„+j, moins quatre atomes ou deux molécules d'hydro-
gène. Rappelons ensuite que les hydrocarbures saturés en
général C^U^^^^ résultent finalement, quelle qu'en soit la
structure, delà combinaison des radicaux CHg, CHg, CH
et C, restes ou fragments de la molécule du méthane CH4.
Admettons enfin que l'élimination de H^— ou de tout
autre système moléculaire ou atomique équivalent X'2,
X'Y' ou Z"— ne peut se faire, en général, qu'aux dépens
de deux chaînons hydrocarbonés voisins, c'est-à-dire, d'une
manière plus précise, qu'une soudure nouvelle entre atomes
de carbone, à la suite d'une élimination d'éléments atomi-
ques , ne peut se faire ou ne se fait ordinairement qu'entre
atomes de carbone déjà soudés antérieurement (!).
Partant de là, nous pouvons établir des groupes dis-
tincts dans les hycrocarbures tétravalents Co H,„_,. Consi-
dérons d'abord le nombre des chaînons hydrocarbonés
entre lesquels s'éliminent les quatre atomes H4 ou les deux
molécules (HH)^ d'hydrogène. Cette élimination de (HH)^
peut être faite , dans la réalité, entre deux, trois ou quatre
chaînons hydrocarbonés.
De là trois grands groupes d'hydrocarbures C„ H^,,^ :
1° Premier GROUPE. Élimination de (HH)2 entre deux
chaînons hydrocarbonés, déterminant un double anneau
carboné à soudure triple — C=C — .
(1) L'action des alcalis caustiques, en solution alcoolique, sur Visobu-
tylène monobrômé. Jj^^ >C =CH Brest un exemple remarquable de ce
fait. On obtient comme produit de celte réaction, non un hydrocarbure
C,H,, mais un dérivé élhyloxylé ^[j^ > c = CH (0 a H,) correspondant
au composé brômé. (Voir Butlerow , Mémoires de l'Académie de S'-Péters-
bourg, VlP série, tome XV, n» 7).— Je ferai connaître prochainement de
nouvelles réactions à l'appui de cette proposition générale.
( 454 )
L'acétylène C^U^ est le plus simple et peut être regardé
comme le type de cette classe d'hydrocarbures létra-ato-
miques.
Gif, /j^N GH
GH3 \^y^ GH
Nous donnerons à ces hydrocarbures à iriple soudure le
nom d'hydrocarbures acétyléniques en général.
2" Deuxième groupe. Élimination de (HH)^ aux dépens
de t7~ois chaînons hydrocarbonés voisins, déterminant une
chaîne Iricarbonée
>C = G = C<
à double soudure, renfermant un atome de carbone médian,
dépourvu d'hydrogène.
Tel est vraisemblablement le valérylène C^ Hg obtenu par
M.Reboul, en partant de l'amylène ordinaire.
CHs CHs GH3 GH.
GH G
I il
CHj C
I II
GH3 GHg
5" Troisième groupe. Élimination de (HHja entre quatre
chaînons hydrocarbonés, c'est-à-dire entre deux paires de
chaînons hydrocarbonés distinctes.
Ces hydrocarbures tétra-atomiques sont doublement bia-
lomiques.
On peut les répartir en deux sous-groupes, suivant la
position spéciale, dans l'hydrocarbure primitif, des deux
paires de chaînons hydrocarbonés aux dépens desquelles a
été faite l'élimination de (HHjg :
a) Premier sous-groupe. Ces deux paires de chaînons
hydrocarbonés sont intimement, c'est-à-dire immédiate-
( 455 )
ment unies l'une à l'autre, sans intermédiaire, de façon
à constituer une chaîne tétracarbonée non interrompue
— c=c— c=c— .
Tel serait un crotonylène C4 Hg , répondant à la formule :
CH,
II
CH V
I
CH
II
CHg
b) Deuxième sous-groupe. Les deux paires de chaînons
hydrocarbonés qui ont subi la déshydrogénation sont sépa-
rées l'une de l'autre par d'autres chaînons hydrocarbonés.
Tel est vraisemblablement le diallyle CgHiQ ou
CHj = CH — CH2 — CH, — CH = CH,
à moins que, lors de sa formation par l'action des métaux
sur l'iodure d'allyle, il ne se produise à l'intérieur du radical
allyle (C5H5) un mouvement atomique.
Ces hydrocarbures représentent en général deux molé-
cules distinctes d'hydrocarbures bi-valenls CnH^n, soudées
l'une à l'autre, par le départ de H^; suivant que la soudure
s'opère entre des chaînons incomplets ou complets, non
saturés ou saturés, c'est-à-dire qui ont déjà subi ou qui n'ont
pas subi au préalable une déshydrogénation, il en résulte
des composés du premier ou du second de ces sous-
groupes. En voici des exemples :
Diéthylène C^H,
CH„ = CH, CH, = CH,
-H,.
CH, = CH — CH = CH,.
Diallyle CgH.o.
CH, = CH - CH,Io CH,Io — CH = CH,
-lo,.
CH,= CH — CH, -CH, — CH = CH,.
( 456 )
Les chaînons hydrocarbonés aux dépens desquels s'opère
inahslracto la déshydrogénation, sont CH3,CH2 et CH;
si nous tenons compte de la nature spéciale de ces chaî-
nons divers, nous pouvons établir dans chacun de ces trois
groupes généraux des subdivisions dont plusieurs offrent
un véritable intérêt.
Premier groupe. Hydrocarbures à triple soudure
— C^C — . Trois sections distinctes :
a) Élimination de (HH)2 aux dépens de deux groupe-
ments CH3.
Un seul produit de cette nature est possible, c'est V acé-
tylène CH^CH.
CH, /ti\ CH
CH3 VHy2 (iH.
6) Élimination de (HH)^ aux dépens de deux groupe-
ments CH2.
Exemple : l'acétylène diméthylé C4 Hg de M. Pfan-
kuch (1).
CHj - CHj — CH^ - CHg
- (H, Hj)
CH, — C = C — CH^.
(1) Un hydrocarbure de cette nature résulterait probablement de l'ac-
CH N^
lion du zinc-méthyle ^^ _>Zn sur i'allylène mono-iodé CjHjIo, de M. Lie-
bermann.
2 (CH3 G = Cîo) -f- Zn < ^{{^ = 2(CH3 - C = C - CH3) -4- Zn lo,.
Je me réserve de vérifier le fait expérimentalement.
M. Pfankuch prétend avoir obtenu un hydrocarbure de la formule C4H6,
dans la distillation d'un mélange d'acétate calcique et de soufre. Si le fait
est vrai , cet hydrocarbure C^jie doit être Vacétijlène biméthylé.
CW cr\r\ CH- — C
CH:~CoS>Ca-i-S = CaSO,-t- |||
CH. — G
( 4S7 }
c) Élimination de (HH)2 aux dépens d'un groupement
CH3 et d'un groupement CHg (1).
CHj — CHj — CHj.
- (HH),
CH3 — C = CH.
Les hydrocarbures de ces deux dernières sections repré-
sentent les dérivés bi et mono-substitués de l'acétylène
CH=CH.
CH CH C — (C„Hx)
III III ' III
CH C — (CnHx) C - (C„H J.
Les dérivés hi-substilués de la seconde section peuvent
eux-mêmes être de deux sortes, suivant que les radicaux
substituants CnH^ sont identiques ou non; les premiers
c — CqHx
III ^
sont symétriques; les seconds
c - (CnHx)
III
C - (CnHx)'
sont dissymétriques, àe part et d'autre du noyau — C^C — .
Deuxième groupe. Hydrocarbures à double soudure ren-
fermant le système HxC=C=CHx; l'existence d'un chaî-
non médian =C=, non hydrogéné constitue le caractère
fondamental de ces produits, quant à leur structure. Ce
chaînon médian = C = correspond à un chaînon hydro-
carboné CH^ de l'hydrocarbure saturé primitif; suivant
(t) J'ai signalé les aldéhydes de la formule générale CnHx — CH, - CHO
comme étant les composés les plus aptes à servir de point de départ pour
ces hydrocarbures en général.
2""= SÉRIE, TOME XXXVIII. 30
(488 )
que les chaînons hydrocarbonés, soudés à ce chaînon CH^
et subissant, de part et d'autre , en même temps la déshy-
drogénation , sont identiques ou différents, on obtient des
hydrocarbures tétravaients symétriques dans le premier
cas, dissymétriques dans le second.
Première section, fiydrocarbures symétriques. II peut en
exister de trois catégories distinctes suivant que ces chaî-
nons collatéraux sont deux CH-, deux CH2 ou finalement
deux CH.
Voici des exemples :
a) CH3 - CH^ - CHj
d'où
CHj = C = CHj.
6) CH5 - CHj - CH5, - CH^ - GH3
d'où
CH3-CH = C = CH-CH3.
d'où
Remarquons que ces deux dernières sortes d'hydrocar-
bures ne sont au fond que les dérivés mono ou 6/-substi-
tués de l'hydrocarbure primitif tricarboné CH2 = C=CH2
le plus simple du groupe.
(1) Je m'occupe en ce moment de la préparation d'un hydrocarbure
(>,H,.j répondant à celte formule déstructure. J'espère l'obtenir en partant
de racctone isobutyrique.
gîj3>CH-C0-CH<^J^
( 459 )
Deuxième section. Hydrocarbures dissymétriques. On
peut en établir diverses catégories suivant la nature spé-
ciale et diverse des deux chaînons Iiydrocarbonés collaté-
raux; ceux-ci peuvent être, en effet, CH5 et CH-j, CH; et
CH, CH2 et CH.
Citons quelques exemples : ^
a) CH3 - CHj — en, — CHs
d'où
CH2 = C = CH — CHs.
b) CH3 - CH, - CH < ^{J^
CH2 = G = C<; ^[[s (Valérylène de M. Reboul.)
c) GH3- CH, - CHj- CH<^ ^Js
d'où
CH3-CH = C = C< f^Jj^
Troisième groupe. Hydrocarbures deux fois bivalents.
Nous avons rangé ces hydrocarbures en deux sous-
groupes, suivant que les quatre chaînons hydrocarbonés
aux dépens desquels a été éliminé Phydrogène, constituent
un seul tout ou deux masses distinctes séparées par d'au-
tres atomes de carbone.
On pourrait diviser chacun de ces sous-groupes en sec-
tions nombreuses suivant la nature spéciale des chaînons
hydrocarbonés déshydrogénés CH5, CH^ ou CH.
Je crois inutile de m'arrèter à établir ces diverses sec-
tions. Ce qui me paraît plus important, c'est la distinction
que l'on peut faire, dans ces hydrocarbures en général,
d'hydrocarbures symétriques et d'hydrocarbures dissynié-
( 460 )
triques, suivant qu'ils représentent deux fragments d'hy-
drocarbures bivalents, identiques ou non.
Voici quelques exemples: a) Hydrocarbures sî/mé/nçMes,
Crotonylène de M. Henninger (1 ).
CHj
II
CH
I
CH
II
Diallyle CgHio ordinaire.
(CH, = CH — CHj) — (CH, — CH = CH^)
CH, = CH - rCH,'\ - CH = CH,.
en général
(™')r
Pinaconèiie CgHjo (2).
GH2-Vc_c^CH.
CH.// \ CH3.
6) Hydrocarbures dissymétriques.
Valérylène hypotliélique C^Hg.
CH, = C-CH = CHj
i
eu,
Hexoj'Ièue hypothétique CgH^g
CH, — CH = CH - CH, - CH = CH,
(1) Produit de la réduction totale de l'érythrite par l'acide formique.
(2) J'appelle ainsi l'hydrocarbure tétra-atomique CgH,;,, susceptible
d'être dérivé de la pinacone ordinaire
(«o)c<cl!:.
Voir l'action de Ph4ClsSur ce composé par MM. Friedel et Silva. {Bulle-
tins de la Socié lé chimique de Paris, t. XIX, p. 98.)
( 461 )
J'arrive aux propriétés de ces hydrocarbures, propriétés
au sujet desquelles il y a quelques remarques importantes
à faire, au point de vue général.
Je rappellerai d'abord que tous ceux de ces hydrocar-
bures qui renferment un chaînon terminal ^CH à triple
soudure, présentent le caractère acé;^/é»ï(/î<e; inutile de
s'arrêter à définir cette expression dont la valeur est par-
faitement connue; ces hydrocarbures sont l'acétylène lui-
même CH^CH et ses dérivés mono-substitués en général
Quant à leur valeur d'action chimique, tous ces hydro-
carbures C„H2n_2 sont au maximum télt^a-afomiques, 3i\ns\
que leur formule et leur mode de production l'indiquent;
tous sont donc susceptibles à ce titre de déterminer des
lélrabrômures (CnH2Q+2) Br4; ces bromures sont les com-
posés d'addition qui se forment d'ordinaire le plus aisément
et cristallisent le plus facilement.
La nature de ces produits d'addition ordinairement, envi-
sagée quant à la position spéciale des groupements ou
radicaux additionnels X dans les divers chaînons carbonés
du composé, est en rapport avec la nature même de
l'hydrocarbure, ces radicaux additionnels prenant la place
de l'hydrogène préalablement éliminé.
Voici quelques exemples qui préciseront de suite ma
pensée :
Acétylène.
Composé bi-aldéhydique.
CH
CH CI5,
1
CHCI,
Allyléne.
Comp
3sé acétonique el aldéhydique
CH3
Clfs
1
1
C
CBr,
1
CHBr-
( 462 )
Pinacolène Composé bi -primaire et bi-lertiaire.
CH, CH, CH,Ci CH3
C CCI
I I
c CCI
CH.CHj CH.ClCFf,
Composé acétonique et biterliaire.
CHjCHj CHj CHj
C CBr
Il I
C CBrj
Il I
C CBr
/\ /\
CH3 CHs CH3 CHj
Je liens à faire remarquer que parmi ces hydrocarbures
il en est qui doivent être exclusivement tétra-alomiques et
qui, en cette qualité, ne doivent être susceptibles que de
déterminer des composés d'addition parfaitement saturés
de la formule générale (C„H2„_2) X'4. Ces hydrocarbures
doivent être :
1° Ceux du second groupe général, qui sont , dans leur
molécule, parfaitement symétriques de part et d'autre du
chaînon médian carboné = C=.
C'est le cas pour C3H4 de la formule
CH,
Il '
c
II
CH,
et ses dérivés mono ou 6ï-substitués, tels que
CHj \ p — p — p^ CHj
CH, ^^—^ — ^<^ CH,.
( 465 )
*
2° Ceux du troisième groupe ou les hydrocarbures
doublement biatomiques dont la molécule est aussi parfai-
tement symétrique, et qui renferment deux systèmes de
chaînons hydrocarbonés à double soudure — CHx^CHy
parfaitement identiques.
C'est le cas pour le diallyle
C3H5<
qui ne forme en effet qu'un tétrabrômure et non un bibrô-
mure; ce sera certainement aussi le cas pour le pinaconène
CH,X \CH3.
La raison de ce fait est évidente : ces hydrocarbures
renfermant en définitive deux systèmes biatomiques iden-
tiques, il n'y a pas* de raison pour qu'un seul de ces sys-
tèmes subisse, à l'exclusion de l'autre, l'action d'un corps
donné, susceptible de s'y ajouter.
A pan ces hydrocarbures, tous les autres sont ou me
paraissent de voir être simultanément bi et tétra-atomi-
qiies, c'est-à-dire pouvoir se combiner avec deux ou avec
quatre unités d'action chimique. Ce sont :
1" d'abord les hydrocarbures acétyléniques renfermant
le système C^C.
La détente entre ces deux atomes de carbone peut se
faire par une seule unité d'action chimique, lors de la fixa-
tion de X'2, soit par deux unités d'action par la fixation
de X'4. Aussi connaît-on pour ces produits deux ordres de
composés d'addition.
2" En général les hydrocarbures du second groupe dont
la molécule n'est point parfaitement symétrique de part et
( 464 )
d'autre du chaînon médian =C= et ceux du troisième
groupe dont la molécule ne renferme pas non plus deux
systèmes bi-atomiques identiques.
Tels seraient, par exemple, les hydrocarbures :
CH3CH,
CHg
CH, CH,
c
II
c
1
CH,
1
C
i
1
CH
1
CH
II
II
G
II
CH,
II
CH,
Ces hydrocarbures renfermant en général deux systèmes
bi-atomiques non identiques, on comprend que l'un puisse
être saturé sans l'autre et de préférence à celui-ci, alors
qu'il est plus riche en hydrogène et par conséquent plus
positif.
Je termine cette étude, déjà fort longue d'architecture
chimique; je n'ai pas l'espoir de remplir moi-même tous les
cadres dont je viens de tracer les contours; on n'embrasse
pas seul une aussi vaste tâche; je m'efforcerai cependant
de réaliser quelques-uns de ces types généraux d'hydrocar-
bures tétra-atomiques.
Sur la découverte du Dicfyonema sociale, Salt., de la faune
primordiale , dans le massif de Rocroy; par M. C. Ma-
laise, membre de l'Académie.
Jusqu'à présent, on n'a signalé nulle part, à ma con-
naissance, des traces de fossiles déterminables dans le
massif de Rocroy. Aussi, de même que dans les autres
parties du « terrain ardennais » rapporté actuellement au
( 46o )
terrain silurien à faune primordiale ou terrain cam-
brien , n'a-t-on pu établir que des divisions basées sur le
caractère minéralogique. C'est donc avec une grande
satisfaction que j'ai rencontré, entre Laifour et Deville ,
des traces de Dictyonema sociale, Salt., dans les couches
reviniennes.
Dans la tranchée au sud de Laifour, on trouve des
phyllades noirs graphiteux, véritables ampélites, conte-
nant des cristaux et des filons de fer sulfuré. Comme ils
sont percés de trous circulaires, je les nomme phyllades à
perforations, ne voulantrien préjuger quant à leur origine.
Entre ce point et Deville, on voit les remarquables
roches porphyriques de Mairus. C'est au sud de ces roches,
dans des phyllades quarlzeux et pailletés, que j'ai décou-
vert le Dictyonema sociale.
Cette espèce a été observée dans différents points du
massif de Stavelot, où elle se rencontre surtout dans le
salmien inférieur. Ici c'est dans le revinien et dans un
point assez rapproché du devillien de Deville.
Yoici donc une même espèce qui existe dans les massifs
de Rocroy et de Stavelot, et qui pourra servir à établir un
rapprochement entre les couches de ces deux massifs.
Quelques nouveaux théorèmes sur les courbes gauches du
quatrième ordre; par M. F. Folie, correspondant de
l'Académie.
La présente note fait suite à celle que nous avons
publiée dans le Bulletin du mois de juillet dernier et
dans laquelle nous énoncions des propriétés nouvelles
des cubiques gauches. Le lecteur est prié de recourir à
( 466 )
cette dernière pour l'intelligence de notre terminologie ;
il suffira que nous ajoutions ici que par polygone nous
entendons toujours une figure formée de côtés qui sont
des coniques du premier ordre (1).
Les courbes du quatrième ordre dont il est question
dans la présente note sont supposées tracées sur un
même lujperboloïde ; nous les désignerons , pour abréger,
par le signe G4.
Les G4 coupent généralement, comme on sait, toutes
les génératrices de l'hyperboloïde en deux points. Ces
deux points, comme les autres couples de points dont il
sera question par la suite, peuvent être réels ou imagi-
naires.
Les G4 peuvent se partager en trois genres :
I. Celles du premier genre sont déterminées en général
par cinq points ; certaines d'entre elles, formant un sous-
genre, le sont par quatre.
Elles ne coupent qu'en deux points une conique du
premier ordre, et n'ont entre elles que quatre points
communs.
Ces G4 du premier genre correspondent donc complè-
tement, sur l'hyperboloïde, aux coniques dans le plan.
Nous pouvons ajouter qu'elles ont, comme ces dernières,
deux asymptotes, et que ces asymptotes sont des coniques
du premier ordre.
U. Les G4 du second genre sont déterminées en gé-
néral par sept points ; certaines d'entre elles , formant un
sous-genre, le sont par six.
Elles coupent en trois points une conique du premier
ordre, en six points les G4 du premier genre, et ont
(1) Bulletins, 2^ série, l. XXXVIII, pp. 63 et suiv.
(467 )
entre elles en général huit points communs; ces points
communs se réduisent toutefois à six dans le cas de deux
G4 du sous-genre indiqué plus haut.
Ces G4 du second genre correspondent, sur l'hyperbo-
loïde, aux courbes du troisième ordre dans le plan.
m. Les G4 du troisième genre sont déterminées par
huit points; elles coupent en quatre points une conique
du premier ordre, et toutes les autres G4 en huit points.
Elles correspondent, sur l'hyperboloïde, aux courbes
du quatrième ordre dans le plan.
Énoncés des théorèmes pascaliens relatifs aux G4.
I. Dans deux triangles conjugués inscrits à une G4 du
premier genre, les côtés opposés se coupent en trois
points situés sur une conique du premier ordre.
II. Dans deux quadrilatères conjugués inscrits à une
G4 du second genre, les côtés opposés se coupent en
quatre points situés sur une conique du premier ordre (1).
III. Dans deux pentagones conjugués inscrits à une
G4 du troisième genre, les côtés opposés se coupent en
cinq points situés sur une conique du premier ordre (2).
Outre ces théorèmes, qui sont l'extension du théorème
de Pascal proprement dit aux G4 tracées sur un hyperbo-
loïde , nous pouvons appliquer à ces courbes les théorèmes
que nous avons énoncés dans nos Fondements d'une géo-
métrie supérieure cartésienne , p. 57.
Il ne sera peut-être pas inutile, pour l'intelligence des
(1) Cf. Fondements d'une géom. sup.carL, p. 22. Bruxelles, Hayez.
(Extr. du t. XXXIX des Mém. de l'Académie royale de Belgique.)
(2) Ibid., p. 26.
( 468 )
énoncés suivants, que nous reproduisions ici, avec quel-
ques développements, la définition que nous avons donnée,
p. 56 du même ouvrage, d'un système de deux figures
conjuguées inscrites à une courbe, et que nous fassions
remarquer de nouveau que, par sécantes ou transversales,
nous entendons ici des coniques du premier ordre.
Une G4 du troisième genre est coupée par deux sécantes
en deux systèmes de quatre points ; réunissons ces points
deux à deux par des transversales : chacune de ces quatre
transversales recoupera G4 en deux autres points; et les
huit nouveaux points ainsi obtenus seront eux-mêmes
situés en général sur une G4 du premier genre (i). Les
deux premières sécantes et celte dernière courbe , d'une
part, les quatre transversales, d'autre part, constituent un
système de figures conjuguées inscrites à la G4 considérée.
Ceci posé, les deux énoncés de la page 57 de nos Fo7i-
dements cVune géométrie supérieure deviennent :
Théorème. Si deux transversales sont communes à
deux systèmes de figures conjuguées inscrites à une G4
du troisième genre, ces deux systèmes se coupent en tous
points situés sur cette courbe.
Théorème. Si une seule transversale est commune à
deux systèmes de figures conjuguées inscrites à une G4
du troisième genre, les points d'intersection de ces figures
qui n'appartiennent pas à cette courbe seront situés sur
une conique du premier ordre.
Il existe un théorème analogue au premier des précé-
dents pour les G4 du second genre.
(1) Cf. Fondements , etc., p. 23, art. iv, théorème fondamental.
( 469 )
Nous pourrions appliquer de même aux G4 tracées sur
une hyperboloïde les théorèmes énoncés pp. 20 et suiv,,
p. 55 et p. 58 des Fondements. Mais ceci exigerait d'autres
développements que nous réservons pour un travail plus
complet sur les courbes gauches.
Sur une recréation arithmétique (2® Note); par M. J. Pla-
teau, membre de l'Académie.
Dans ma première Note (1), j'ai démontré la proposition
suivante :
Étant donné un nombre impair quelconque, pourvu
qu'il ne se termine point par un 5 , on peut toujours trou-
ver un autre nombre entier tel, que le produit de celui-ci
et du nombre donné soit formé uniquement de la répéti-
tion d'un même chiffre assigné d'avance.
Qu'il me soit permis de reproduire ici ma démonstra-
tion; j'éviterai ainsi au lecteur la peine de recourir à ma
Note précédente.
Soit N le nombre donné, astreint, comme je l'ai dit, aux
seules conditions d'être impair et non terminé par un 5.
Si l'on convertit ^ en fraction décimale périodique, la
période commencera, on le sait, immédiatement après la
virgule, et si on la désigne par P, on aura :
d'où
\
P
N
999.
»
999
NP
(1) Bulletins de l'Académie, f86ô, 2*^ série, l. XV[ , p. 62.
( 470 )
D'après cette relation, si le nombre N n'est pas divisible
par 5, la période P sera nécessairement divisible par 9;
dans ce cas, nommant Q le quotient de P par 9, on déduit
de l'égalité ci-dessus :
H1. ... = NQ, [a]
et l'on voit que Q est le facteur qu'il s'agissait d'obtenir;
en le prenant soit seul, soit multiplié par 2 ou par 5 ou
par 4 etc., on n'aura évidemment pour chiffres au pro-
duit , que des 1 ou des 2 ou des 5 ou des 4 etc.
Dans le cas où N serait un multiple de 5 ou de 9, et où
conséquemment P pourrait ne pas être divisible par 9 , il
est clair qu'on n'aura qu'à prendre la réunion de trois ou
de neuf périodes, de manière que l'ensemble soit divisible
par 9.
L'objet de la Note actuelle est de faire connaître une
suite de conséquences de la proposition ci-dessus, consé-
quences qui me paraissent également curieuses. Les voici :
1° Q étant un nombre entier, la relation [a] montre
que le premier membre 1 H est divisible par N;
et comme on a aussi
222.. ..=N X 2Q,
555....=:N X oQ,
etc.,
on en déduit celte autre proposition :
Si l'on prend pour dividende un nombre formé de la
répétition, en quantité indéterminée , d\in même chiffre
quelconque, et pour diviseur un nombre impair quelconque
non terminé par un 5, la division s'achèvera nécessai-
rement, et Von aura un quotient exact, avec un dividende
limité.
( 47i )
Comme ce quotient est précisément le fiicteur par le-
quel il faut multiplier le nombre donné N pour avoir un
produit formé de la répétition d'un môme chiffre, on voit
que la division dont il s'agit fournit ce facteur par un pro-
cédé plus simple que celui des fractions périodiques.
2° Si 1 on consent à n'être plus entièrement libre de
choisir le chiffre dont on veut avoir la répétition au pro-
duit, des nombres pairs et des nombres terminés par un 5
satisferont encore au problème; les seuls nombres qu'il
faille exclure, sont d'abord ceux terminés par un zéro, puis
les autres nombres pairs contenant plus de trois facteurs 2,
enfin ceux des nombres terminés par un 5 qui contiennent
plus d'un facteur 5.
Supposons, en effet, que le nombre N soit pair, non ter-
miné par un zéro, et ne contienne qu'un seul facteur 2,
de sorte que si l'on écrit N = 2 N', le nombre N' satisfera
aux conditions de la première proposition; on aura donc :
in .... = N'Q,
d'où
222 .... = 2N'Q = NQ ,
444 .... = 4N'Q = 2N' X 2Q = N X 2Q,
666.... = 6N'Q = 2N'X ôQ = N X 5Q,
888.... = 8N'Q = 2N' X 4Q = N X 4Q;
on pourra conséquemment, dans ce cas, choisir arbitraire-
ment l'un quelconque des chiffres pairs. Si, par exemple,
on prend pour N le nombre 42, la division de la suite in-
déterminée 222 par ce nombre fournira pour
quotient le second facteur; on sera conduit ainsi au pro-
duit
42 X 8291 = 222222 ,
et en doublant, triplant et quadruplant le second facteur,
( 472 )
on formera les produits composés de chiffres 4, de chif-
fres 6 et de chiffres 8.
Si le nombre N contient deux facteurs 2, on ne pourra
évidemment opter qu'entre les chiffres 4 et 8, et s'il y a
trois facteurs % on sera réduit au seul chiffre 8; enfin, s'il
y a plus de trois facteurs 2, on voit sans peine que le pro-
blème est impossible.
Si le nombre N est terminé par un 5, il est visible que le
chiffre répété au produit ne pourra être que 5, et le mode
de démonstration qui précède montre, de plus, que si le
nombre N a plus d'un facteur 5, il ne saurait satisfaire au
problème. Quant aux nombres terminés par un zéro, la
nécessité de leur rejet n'a pas besoin d'explication.
5" Retournons, pour un moment, à la détermination du
facteur Q par la conversion dCj^en fraction périodique.
Comme la période peut avoir autant de chiffres qu'il y a
d'unités moins une dans le diviseur, on voit que si le
nombre donné N est considérable, s'il est, par exemple,
de quatre chiffres, la période pourrait se composer de plu-
sieurs milliers de chiffres, et, par suite, il en serait de
même du nombre Q, dont la recherche, à moins d'un ha-
sard tout spécial, deviendrait impraticable. Il semble donc
que, si l'on veut s'amuser de cette récréation, il faille se
borner, pour N, à des nombres de deux chiffres au plus,
et encore ne pas les choisir trop grands; mais je vais mon-
trer qu'on peut aisément trouver une foule de cas particu-
liers dans lesquels les deux facteurs sont grands sans que
ni l'un ni l'autre excède des limites acceptables.
En effet, la relation [a] peut se mettre sous la forme :
Q
111.... = mN X — :
m
( 473 )
si donc le nombre Q correspondant à un nombre N d'un
ou de deux chiffres est divisible par un certain nombre?»,
il suffira, pour avoir un premier facteur supérieur au
nombre donné, de multiplier ce dernier par m, et de
prendre pour second facteur le quotient ^; et si Q est
divisible à la fois par plusieurs nombres, on pourra multi-
plier successivement N par chacun de ces nombres, par
leurs produits deux à deux, trois à trois, etc., en divisant
en même temps Q par les mêmes quantités, ce qui four-
nira autant de couples de facteurs satisfaisant au problème.
Avant d'appliquer cette méthode à des exemples, pré-
sentons ici une remarque au moyen de laquelle on trouvera
sans tâtonnements, dans des cas nombreux, une partie au
moins des diviseurs de Q. Supposons que nous détermi-
nions Q par le procédé plus court que j'ai indiqué, c'est-à-
direen divisant 111 par N, et supposons, de plus,
pour simplifier, que N soit un nombre premier. Il est vi-
sible d'abord que si, dans le dividende complet, le nombre
des chiffres 1 est pair, ce dividende sera divisible par 1 1 ,
et qu'ainsi, en vertu de la relation [a], le nombre Q lésera
également.
On a, d'ailleurs, comme on peut aisément s'en assurer :
5 X 37 = 1 1 1 ,
41 X271 = 11111,
15 X 8347 = 111111,
7 X 15873= 111111;
d'où résulte évidemment que si le nombre des chiffres 1
du dividende complet est un multiple de trois, Q sera di-
visible par 5 et par 57; que si le nombre des chiffres 1 est
un multiple de cinq, Q sera divisible par 41 et par 271 ;
enfin que si le nombre des chiffres 1 est un multiple de six,
2""* SÉRIE, TOME XXXVIII. 31
( 474 )
Q sera divisible par 13 et par 7. Il est superflu d'ajouter
que si le nombre des chiiTres i est un multiple de neuf,
Q sera divisible par 9.;
Soit maintenant, comme premier exemple, N = 19;on
trouve alors Q = 5847955216574269, et le dividende
complet qui a fourni cette valeur est composé de dix-huit
chiffres 1. Or 18 est à la fois multiple de 2, de 5, de 6 et
de 9; la valeur ci-dessus de Q est donc divisible par les
nombres 5, 7, 9, 11,15 et 57; on pourra conséquemment,
à l'aide de ces diviseurs, soit pris isolément, soit combinés,
former une très-grande quantité de couples différents de
facteurs, couples dont chacun aura pour produit une suite
de dix-huit chiffres 1 ; seulement, il ne faudra pas combiner
les diviseurs 5 et 9, le premier étant compris dans le second.
Ainsi, en multipliant 19 par le produit des diviseurs
3, 11, 15 et 57, et divisant la valeur de Q par ce même
produit, on obtient le couple :
501587 et 368421421053;
et si l'on substitue le diviseur 9 au diviseur 5, ou, ce qui
revient au même, si l'on multiplie le premier nombre par 5,
et qu'on divise le second par 5 aussi, on a cet autre
couple :
904761 et 122807140351.
Je trouve, en outre, par un moyen qu'il serait trop long
d'exposer ici, que la valeur obtenue pour Q est divisible
par 52579; en employant ce nombre conjointement avec 9
et 15, on arrive au couple :
116883117 et 950617283,
dont les deux parties ont chacune neuf chiffres.
( 475 )
Soil, comme second exemple, N = ol , on trouve
Q = 3584229590681 , et le dividende complet est de
quinze chiffres I; la valeur de Q est conséquemment,
d'après ce qu'on a vu plus haut, divisible par les nombres
5, 57, 41 et 271. L'emploi simultané des diviseurs 57, 41
et 271 conduit au couple :
12744517 et 8718483,
qui donnera, comme tous les autres couples relatifs au
même nombre 51, une suite de quinze chiffres 1.
Si l'on désire des couples formés de nombres moins
grands quoique ayant toujours plus de deux chiffres, on
pourra partir du nombre 15 ou du nombre 7. Avec le pre-
mier, la méthode indiquée amènera sans difficulté les
couples :
481 et 251 ,
429 et 259;
et, avec le second, le couple :
273 et 407.
Enfin on peut encore se procurer des couples de grands
nombres, en suivant une marche un peu différente : au
lieu de se donner originairement un nombre d'un ou de
deux chilTres, on peut partir d'une suite de chiffres 1, en
la limitant de manière qu'on connaisse plusieurs des divi-
seurs du nombre qu'elle représente. Prenons comme
exemple une suite de dix chiffres 1. 10 étant multiple de 2
et de o, le nombre représenté par la suite en question sera,
d'après ce que nous avons exposé, divisible par 11, par 41
et par 271 ;en la divisant par le produit 271 X M =2981,
( 476 )
on trouve, pour quotient, le nombre 572751 ; on a donc le
couple :
2981 et 572751.
Je n'ai pas besoin de rappeler que, lorsqu'on a obtenu
un couple au moyen de l'une de nos méthodes, si l'on veut
produire des suites de chiffres 2, de chiffres 5, etc., il suffît
de multiplier par 2, par 5, etc., l'un des nombres du couple.
Noie sur un procédé pour donner ou pour rendre leur
couleur rouge aux muscles conservés dans l'alcool j
par M. Félix Plateau , correspondant de l'Académie.
Le M octobre i871 , M. Éd. Van Beneden lut, à l'Aca-
démie et à la Société entomologique, une note sur deux
procédés nouveaux qu'il employait avec succès pour la
conservation des méduses, cténophores et autres animaux
inférieurs (1). Cette communication de notre savant col-
lègue fut accueillie avec le plus vif intérêt; car tous ceux
d'entre nous qui s'occupent d'histoire naturelle doivent,
à côté des travaux de science pure, se préoccuper con-
stamment des mille petits moyens de nature à simplifier
la partie pratique de leurs recherches ou à assurer la
conservation des animaux qui en sont l'objet.
Si chaque naturaliste publiait les procédés qui lui sont
personnels, les chercheurs gagneraient souvent beaucoup
(1) Note sur la conservation des animaux inférieurs (Bulletins de
l'Acad. ROY. DE Belgique, 2« série, t. XXXII , page 179. 1871). {Annales
de ta Soc. entomologique de Belgique , t. XV, 1871-1872 , page viii des
Comptes rendus des séances.)
( ^77 )
de temps, el les colleclions publiques seraient plus in-
structives.
Ces considérations m'engagent à soumettre à l'Académie
le résultat de mes efforts pour conserver indéfiniment,
ou pour rendre aux préparations musculaires plongées
dans l'alcool leur couleur rouge naturelle.
Dans un cours d'anatomie comparée , on ne peut guère
démontrer, sur des pièces fraîches , que l'organisation des
animaux domestiques; du moment où il s'agit de vertébrés
rares ou étrangers, il faut avoir recours à des échantil-
lons conservés dans l'alcool, liquide, qui a l'inconvénient
grave de décolorer rapidement le tissu musculaire, de
rendre, par conséquent, les préparations confuses pour
les élèves et de faire perdre au professeur un temps pré-
cieux en explications minutieuses.
L'eau phéniquée ne conserve la couleur rouge des
muscles que pendant quelque temps, l'odeur du liquide
est désagréable et les bocaux ne peuvent être impunément
abandonnés en hiver dans une salle non chauffée.
Tous les histologistes connaissent les heureux résultats
auxquels mène la teinture des tissus au carmin inventée
par Gerlach (1); la facilité avec laquelle cette matière
colorante pénètre le tissu musculaire m'a conduit à em-
ployer le procédé des histologisles en grand, mais en le
modifiant de manière à obtenir tous les tons naturels des
chairs et à fixer la couleur pour la rendre insoluble dans
l'alcool coupé d'eau et permettre le maniement des pièces
sans amener de décoloration.
(1) Mikroskopische Studien aus dem Gebiele der mcnsclilichen Mor-
phologie. Erlangen, 1858. (H. Frey , Das Mikroskop und die tmkrosko-
pische Technik. Leipzig, 1838, page 80).
( 478 )
Voici donc le procédé que je mets en usage , dégagé des
tâtonnements inévitables auxquels j'ai dû me livrer et tel
qu'il doit être employé sous peine de réussite impar-
faite (1) : la pièce anatomique disséquée d'une manière
définitive est mise, pendant quelques jours, dans de l'al-
cool du commerce étendu de la moitié de son volume
d'eau , puis essuyée en la passant dans un linge (2). On
a préparé quelques godets contenant respectivement du
carmin en poudre, additionné de quelques gouttes d'am-
moniaque, du chromate de plomb en poudre (jaune de
chrome), du noir de fumée. A l'aide de petits pinceaux
de blaireau, on applique sur les muscles, en ménageant
les tendons, les nerfs, etc. (5), plusieurs couches de la
solution de carmin qu'on étend plus ou moins d'ammo-
niaque, ou à laquelle on ajoute un peu de jaune de
chrome ou de noir de fumée, de manière à obtenir, dans
cette peinture véritable, des teintes approchant autant
que possible de la teinte des muscles frais. 11 vaut mieux
n'employer que peu de liquide colorant à la fois et mettre
des couches multiples.
Ceci fait, on plonge toute la préparation, pendant dix
à quinze minutes, dans une solution d'alun saturée à
(1) Il en est, du reste, ainsi de tous les procédés; la réussite gît dans
l'observation exacte des détails. Il est à ma connaissance que l'on a tenté
un essai de mon procédé, sans précautions, sur une pièce qui avait été
conservée dans la glycérine ; on n'obtint qu'un résultat au-dessous du
médiocre.
(2) La pièce ne peut plus être mouillée, la teinture coulant alors par-
tout au lieu de rester où on l'applique.
(3) On protège les parties qu'on veut conserver incolores par l'interpo-
sition de bandelettes de papier un peu épais ou de carton mince. Ces
bandelettes s'enlèvent seulement après l'action de l'alun.
( 479 )
froid; puis on la lave rapidement à l'eau pure pour la placer
ensuite définitivement dans l'alcool.
L'explication de mon procédé est bien simple : dissol-
vant le carmin dans l'ammoniaque, on obtient une solu-
tion ammoniacale d'acide carminique (i) ; après la peinture
du muscle, l'addition d'alun a pour effet de donner 1" un
précipité gélatineux incolore d'alumine hydratée entraîné
par l'excès de liquide; 2" une laque d'un beau rouge
(laque carminée) insoluble, et qui, se formant jusqu'à
une certaine profondeur dans l'épaisseur même des chairs,
constitue une teinture très-solide.
J'ai lu plusieurs traités et manuels concernant les pré-
parations de pièces anatomiques, et je n'y ai trouvé nulle
part l'indication de ce mode d'opérer qui m'a donné les
meilleurs résultats.
On peut voir, dans les collections de l'Université de
Gaud , une petite série de pièces préparées par ce
moyen (2); les plus anciennes datent de 1872, elles ont
déjà été maniées pour la démonstration devant les élèves
et n'ont rien perdu de leur éclat et de leur netteté. La
seule précaution à prendre, et qui est, du reste, observée
dans la généralité des musées, est de les tenir à l'abri
d'une trop vive lumière.
Il esta remarquer, l'observation a sa valeur, qu'il n'est
nullement nécessaire d'agir sur une préparation fraîche;
le séjour préalable dans l'alcool étant favorable, toutes
les anciennes préparations anatomiques peuvent être sou-
(1) Schuizenberger {Dictionnaire de chimie pure et appliquée de
Wurtz, pp. 769 et suiv.).
(2) Muscles masticateurs, muscles du vol , muscles des extrémités pos-
térieures, etc., de mammifères et d'oiseaux.
( 480 )
mises à la teinture, ce qui permettra de donner aux
rausées un aspect de nature qui y était inconnu jusqu'à
présent.
Enfin, dans un but d'enseignement facile à saisir, on
peut, au milieu d'une préparation générale, ne teindre en
rouge que certains muscles déterminés sur lesquels on
veut appeler l'attention.
Dans l'intérêt des musées et des cours d'anatomie, je
désire que mon procédé ne passe pas inaperçu et qu'on
en fasse l'essai ; j'ose espérer qu'il a quelque avenir.
(Pendant cette lecture, quelques pièces anatomiques
préparées par le procédé ci-dessus sont mises sous les
yeux de l'Académie.)
Note sur le Problème de Malfatti ; par M. E. Catalan,
associé de l'Académie.
Le mémoire de M. Simons, inséré au dernier Bulletin,
m'a rappelé la solution du célèbre Problème de Malfatti,
que j'ai donnée (d'après M. Lechmiitz) dans les Nouvelles
Annales de Mathématiques (t. Y, p. 61). Cette solution,
déjà bien simple, peut être notablement réduite.
i . ABC étant le triangle donné , dont les angles sonTA ,
B,C;
Soient ;
p = OA' = OB' = OC le rayon du cercle inscrit;
2«, 2|3, 2r les suppléments respectifs de A , B, C;
X, Y, Z les centres des cercles cherchés;
X, y, z les rayons de ces cercles.
(481 )
2. PU étant la tangente commune aux cercles X, Y,
il est visible que le triangle XUY est rectangle en U; donc
PU = DU = GU =1/^. Projetant AXYB sur AB, on a
la première des trois équations du problème :
X tg a -+- 21/a:?/ -I- y tg p = p (tg « -t- tg p). . .(1)
Pour la simplifier, résolvons-la par rapport àl/x: la
valeur positive de cette inconnue est
— {/y COtx-i- \/«/C0la(C0ta — tg p) -H p ( 1 -+- C0tafg[3).
Ainsi
V X s'm a -H Vy COS a
i
= ^ /y COS a COS (a -+- p) -f-/3sinasin(a-4- f).
Vcôrp V
Et comme a + p -+- r= tj-, cette formule devient
[/x sin a -+■ vycos a
— — _-^- \ / p sin a sin y — y cos a cos y .
3. Le second membre est une fonction symétrique de a, y;
donc
y/x sin a -4- \/y cos a. = [/z sin y -+- \/y cos r ; • • (3)
puis, au moyen d'une permutation tournante :
y/ y sin [3 -+- \/z cos (5 = \/x sin a -+- \/z cos a , . . (4)
\/z sin y -+- ^ac cos r = V'V sin P + \/x cos p. . . (3)
Ces équations (3), (4), (o) déterminent les rapports de
( 482 )
[^x,[/y,\/z. En ajoutant membre à membre les deux
premières, on trouve
\/y (cos a. — cos r -t- sin p) = \/z (cos x. — cos p + sin y);
ou, par une transformation simple ,
V/y cos i |3 cos U — - j = \/z cos i r cos f -— - j ;
ou encore
1/7(1 + tgir)=\/T{i +tgip).
Nous pouvons donc prendre , au lieu des équations
ci-dessus, les proportions
[i-^igiaf (1-4-tgiSf (l+tgirr
(6)
4. l étant la valeur commune des trois rapports, soient ,
pour abréger :
tg2a = /', tgip=gf, tg^y=h.
L'équation (1) devient
On tire , de celle-ci ,
^ f-^ 9
(1 ■*-f){^-^9){^-^ f-*-9-f9)
Mais, à cause de
( 485 )
on a la relation connue :
fg-^gh-^-hf^i, (7)
OU
donc
1= ^ ;. .... (8)
puis, par les relations (6) :
(i-+-9)(i-t-/o
1 -^ h
z = p -, 9)
]/^==^V7I=-^,\/-^ = -^. .(10)
5. Pour construire ces expressions , il suffit d'observer
que
1 cos I X cos i X (cos i a. — sin ^ a)
1 -+- /" cos i a -^ sini X cos a
i ■+- cos a — sin a / 1 \
= i = i I -I- i — tga •
cos a \COS a )
En effet, cette transformation donne
-^= Vyi= FS = i (AO -*- OC — AC), '
— l_=V/ix'=KT=i(BO-»-OA' — BA'), ) (*^]
—î— = \/^=DU = i (CO -4- OB'— CE')
1 -»- /i
( 484 )
On trouve, de la même manière:
^ = 1 (AO -+- OC -+- AC)
p
^_ HBO-t-OA'-f-BA'),) . . . (12)
^ i (CO -+- OB' -+- CB'
\ —h
6. Remarque. Si l'on se rappelle les propriétés des
cercles tangents aux trois côtés d'un triangle donné, on
arrive à cette interprétation géométrique des formules
(11), (12) :
A l'angle AOC, inscrivez les deux cercles tangents à C'A :
les distances du sommet 0, aux points où ces cercles tou-
chent le côté OC, représentent j^2f ^^ TZTf La même con-
struction, appliquée aux triangles BOA', COB', détermine
_^,_i ^ rf P
l-t-? 1—!? ^-^Ii- i-h
7. Atitre remarque. — Chacune des équations
\,^x siii a -t- \/y cos a = \/z sin r-*- \/y cos r, ■ ■ (5)
\/y sin |3 -+- \/z cos p = \/x sin a m- v/;: cos « , , . (4)
V/5:sin r-+- l/aî cos r= l/^sinp -4- ^ic cos p. . . (o)
exprime une propriété assez curieuse, dont il serait inté-
ressant de trouver une démonstration directe. Considérons,
par exemple, l'équation (4). En l'écrivant ainsi
Vxzsin X -\- z cos a = V^yz sin [3 -+- z cos p,
et en observant que V^ = KT, :3 = KZ, etc., on en
conclut :
projection de TZ sur AO = projection de SZ sur BO.
( 485 )
De même ,
projection de UX sur BO = projection de TX sicr CO,
projection de SY sur CO = projection de UY sur AO.
8. La valeur commune des binômes
[/xz sincc-^-zcosx, Vyz sin |3 -t- z cos [3
est
p_ _p 2/;_ _^ ^ Lti lu/!
La quantité entre parenthèses égale
f-^9 f-*-9
donc
P^T-^, (13)
/ -^9
formule très-simple.
9. On a
AU = AD -+- \/xy = xtg a -4- \/xy;
et, par les formules (9) , (10) :
Mais, à cause de la relation (7),
1 -+-/"-+- a — fq
f-^9
donc
AU = p ^^ ; . . . . (ii)
^l+i/)(l-/)
( 486 )
ou, ce qui est équivalent,
i
f l^i/
AU = p[^j-i-,- 7-^-1 (14)
10. D'après les formules (11), (12), (14) :
AU=i(AO — BO H- AC -+- BA), *
ou
AU = i (ÂO -+- AB — BO) (15)
Cette valeur à la même forme que l'expression de DU
(5); donc la remarque faite ci-dessus (6) est applicable , et,
en conséquence :
Le point [] est celui où le côté AB louche la circonférence
inscrite au triangle AOB (').
De même, les circonférences inscrites aux triangles
BOC, COA déterminent les points S, T.
Ces points U, S, T étant construits, il en résulte les
points D, G, F,.... où les circonférences cherchées touchent
les côtés du triangle donné.
11. Remarques. I. On a
AD = AU - DU = i (AO -4- AB — BO — CO — OB' -t- CA') ;
ou, si l'on désigne par/) le demi-périmètre du triangle ABC:
AD = i (AO — BO — CO -+- /? — p).
Pour que le second membre devienne une fonction
{") Propriété connue. En outre, la droite PU, tangente commune aux
cercles X, Y, touche aussi les cercles inscrits aux triangles BOC, COA
(Théorème de Steiseu).
Bul/rt,r, .2'sàr- t .UQ7 7J7
Pro/>/r//ie d^ Mai/hf/r
( 487 )
symétrique, il suffit de le retrancher de AO; on trouve
ainsi
A0-AD=B0-BF = C0-CK = i(A0 + B0-+-C0-;,-+-p)(I6).
Ce résultat simple, et la construction qui en résulte,
sont dus à M. Simons.
II. D'après les relations (11),
i(AO + BO-4-CO-4-p-;,) = pr-J-+^+^_,](17).
Ll -+- / 1 H- 5» l -i- h y
III. Si l'on désigne par a, b, c les rayons des cercles
inscrits aux triangles BOC, COA, AOB, on trouve :
a= g-^^* ,_ h-\-f _ /•+ g
IV. Enfin, pi étant le rayon du cercle inscrit au triangle
XYZ:
pi = 7 ^-7 7 (19)
( 488 )
Remarques morphologiques sur les espèces du sous-genre
Xanthoura; par M. Alphonse Dubois, conservateur au
Musée royal d'histoire naturelle de Belgique.
L'accueil encourageant que l'Académie a fait à mes der-
nières observations sur la variabilité de certaines espèces
d'oiseaux, m'a engagé à poursuivre mes recherches mor-
phologiques. J'ai choisi pour sujet de cette seconde notice
le petit groupe Xanthoura du genre si intéressant des Cya-
nocorax.
Le sous-genre Xanthoura, créé par le prince Bonaparte
en dSoO, ne comprend que trois espèces, savoir : le Cya-
iiocorax yncas , le C. cyanocapillus et le C. luxuosus.
Ces trois espèces sont assez caractéristiques, mais un
examen attentif prouve cependant d'une manière évidente
qu'elles ont d'étroites affinités entre elles. L'observation
démontre d'autre part que la forme type, c'est-à-dire la
plus anciennement connue (C. yncas), varie de taille et de
couleur suivant la localité qu'elle habite. En effet, les indi-
vidus de cette espèce que l'on rencontre dans la république
de l'Equateur, sont notablement plus petits que ceux du
Pérou ; si l'on franchit ensuite les frontières méridionales
de la Nouvelle-Grenade, on s'aperçoit bientôt que la cou-
leur du plumage se modifie à son tour, et que cette modi-
fication est d'autant plus sensible que l'oiseau habite une
latitude plus septentrionale.
Parmi les nombreux spécimens de ce genre figurant au
Musée de Bruxelles, j'ai trouvé deux formes nouvelles et
non décrites, qui viennent relier les espèces mentionnées
ci-dessus. Le rapprochement de ces cinq formes m'a con-
( 489 )
duit à ne considérer comme type spécifique que le Cyano-
corax yncas, autour duquel se groupent quatre variétés.
C'est au Pérou, et peut-être en Bolivie (1), que l'espèce
est fixe; mais à mesure que l'habitat s'élève au-dessus de
l'équateur, les individus paraissent devenir plus petits et
leur système de coloration se modifie de plus en plus.
Chez les Xanlhoura de la Nouvelle-Grenade, les parties
dorsales sont d'un beau bleu de ciel légèrement verdâtre
à certaines places, et le blanc de la nuque est remplacé par
une teinte violacée. Je désigne plus loin cette race locale
sous le nom de Cyanodorsaiis.
Cette forme nouvelle relie véritablement le type Yncas
à la variété Cyanocapilla, autant par la répartition de ses
teintes que par la position géographique qu'elle occupe.
Il est a supposer que la Nouvelle-Grenade remplit, au
point de vue de notre sujet, le rôle de territoire neutre,
dont le centre est la véritable patrie du Cyanodorsaiis. Au
Sud cette variété semble s'unir à l'espèce type habitant la
république de l'Equateur, pour produire des métis dont le
dos seul est plus ou moins coloré en bleu; au Nord, cette
même variété peut s'accoupler avec la race Cyanocapilla,
et dans ce cas c'est la tête seule qui, chez les métis, devient
d'une couleur bleue plus ou moins prononcée.
La présence au Musée de quelques individus ayant l'un
ou l'autre de ces plumages intermédiaires, rend cette hy-
pothèse très-vraisemblable; mais le fait a cependant besoin
d'être confirmé par l'examen d'un grand nombre d'oiseaux
provenant des divers points de la Nouvelle-Grenade.
(1) Suivant M. Gray, le C. yncas habiterait également la Bolivie. Je n'ai
pas vu de spécimens provenant de ce pays, qui ne doivent guère différer
de ceux du Pérou.
2""* SÉRIE, TOME xxxvin. 32
( ^m )
A partir de la région septentrionale de celte même con-
trée et en Venezuela, l'espèce reprend le plumage général
qu'elle a au Pérou, mais une modification imp*ortante
s'opère dans la coloration de la tête. Dans toute l'Amé-
rique centrale jusqu'au Guatemala, on ne rencontre que
des individus à tète bleue, n'ayant conservé qu'un bandeau
blanc très-étroit (var. Cyanocapilla)\ chez les spécimens de
Venezuela , le bandeau blanc a complètement disparu et la
tête est d'un bleu violacé uniforme (var. Cœruleocephala).
La var. Luxuosa réside au Mexique et au Texas; elle
ne se distingue du Cyanocapilla que par la teinte ver-
dàtre de la poitrine et du ventre, qui est d'autant plus pro-
noncée que l'habitat est plus septentrional.
Ce qui démontre bien que le Cyanocorax luxuosus n'est
qu'une race locale, c'est que la coloration verte des parties
inférieures devient déjà apparente chez la var. Cyanoca-
pilla habitant le Guatemala, tandis que chez les individus
de cette même variété habitant le nord de la Nouvelle-
Grenade, les régions ventrales sont d'un beau jaune uni-
forme (1).
.l'ai cherché, dans la petite carte ci-dessous, à indiquer
autant que possible les limites géographiques de chaque
variété; mais il est certain que ces limites ne sont pas
rigoureusement exactes, car il faut toujours tenir compte
des zones de compénétration mutuelle ou deux variétés se
(1) M. Cabanis se demande si le Xanthoura guatimalensis , Bp. appar-
tient réellement à son C. cyanocapilla [Mus. Hein., 1. 1, p. 223) ; mais il ne
peut y avoir de doute à ce sujet. Les spécimens du Musée de Bruxelles,
qui ont servi de type au prince Bonaparte, se rapportent entièrement à la
description que M. Cabanis donne du Cyanocapilla; ils offrent seulement
sur les côtés de la poitrine et sur les flancs une légère teinte verdàtre.
( 491 )
rencontrent; il est même possible que deux variétés habi-
tassent la même région, mais à des altitudes différentes.
Dans l'un comme dans l'autre cas, il est indubitable que ces
variétés s'unissent à l'occasion pour produire des métis
dont le plumage tient le milieu entre celui des parents.
Aire géographique des cya^kocorax :
[. Yiicns; II. Cyanodorsalis ; III. CyanocapilUi ; IV. Cœruleocephala ; V. Luxiiosa.
Il résulte de ce qui précède, que le sous-genre Xanlhoura
ne comprend réellement qu'une seule espèce, mais très-
( 492 )
variable suivant la position géographique qu'occupent les
individus qui la composent. L'espèce se divisera donc de
la manière suivante :
A. Plumes du front très -allongées.
CYANOCORAX YNCAS.
CoRVis YNCAS, Bodd. Tahï. Pi. enl. p. 625.
CoRVUS PERUViANus , Gmcl. Syst. nat. t. I, p. 373. — Levaill. Ois.
parad. pi. XLVI.
PiCA CHLORONOTOS, Wagl. Syst. av. sp. 12.
PiCA LUTEOLA, Less. Traité d'oru. p. 531.
Garrl'lus PERUVIANUS, d'Orb. Synops. av. t. II , p. 9, n° 2.
Cyanocorax PERUVIANUS ct C. PERUANUS, Cab. in Tsch. Faun. per.
pp. 36,232.
Cyanocorax yucas, Gray, Gen. of Birds , t. Il , p. 307, n" 9.
Xanthoura peuuvianus, Bonap. Consp. av. t. I, p. 380.
Xanthocitta peruviana, Cab. Mus. Hein. t. I, p. 223.
Cyanocorax yncas, Sclat. Proceed. Zool. Soc. 1854-, p. 114.
Xanthoura yncas, Gray, f/and-Iist of B. t. Il, p. b.
Ilab. : Bolivie, Pérou, république de TÉquateur.
Var. ix. CY/%^'OUOR!^.%L.IS (var. iiov.)
Car.: Similis prœccdenti ; sed cet-vice cœndeo-violaceo et dorso
cœriileo.
Cette variété ressemble à l'espèce type, dont elle se dis-
tingue par la prédominance du bleu dans toutes les par-
ties vertes. — Dessus de la lèle blanc; nuque d'un bleu
violacé passant au bleu de ciel sur le dos; ailes, croupion
et tectrices caudales d'un vert très-bleuâtre.
Hab. : Nouvelle-Grenade centrale et méridionale.
Le Musée de Bruxelles possède deux exemplaires de
cette variété.
( 495 )
B. PluiDcs (lu front courtes.
Var. ,3. CVAWOCAPILI.A, Cal).
PiCA CHLORONOTA, Wagl. (mus ad.) /sis, 1829, p. 749.
Cyanocorax cyanocapillus, Cab. in Tsch. Faiin. pcr. p. 253.
Xanthoura giiatimalensis, Bonap. Consp. t. I , p. 380.
Xanthocitta cyanocapilla, Cab. Mus. Hein. t. I, p. 223.
Cyanocorax ouATEMALEi-ssis, Moore, Proc. Z. S. 1859, p. 37.
Cyanocorax yncas {part.) Schl. Mus. P.-B. (Coraces) p. 55.
Xanthoura cyanocapillijs, Gray, Hand-Ust of B. t. II, p. o.
Car. : C. yncas similis; scd pileo cyaneo; vilta pilei inter oculos
candida.
Le plumage de cette variété est entièrement semblable
à celui du C. yncas; elle se distingue seulement de ce der-
nier par la coloration bleue uniforme de la tète, inter-
rompue derrière le front par un bandeau blanc assez
étroit.
Hab. : nord de la Nouvelle-Grenade, Amérique centrale
jusqu'au Guatemala.
Var. y. c.c:kuleocephai.a (var. nov.)
Car.: SimiUimus prœccdenti; sed pileo loto cyaneo sine vilta alba;
abdomine flavissimo.
Cette race locale ne diffère de la var. Cyanocapilla que
par l'absence totale du bandeau blanc: le dessus de la tête
est d'un bleu uniforme et non interrompu,
Hab. : Venezuela.
L'individu type, du Musée de Bruxelles, vient de Caracas.
( 494 )
Var. J. I.UXUOSA , Less.
PiCA CHLORONOTA, Wagl. {mos jitn.) Isis, 1829, p. 750.
Garruli's luxuosl's, Lcss. Rcv. zooI. 1839, p. 100.
Cyanocorax cyanocapillus (part.) Cab. in Tsch. faiin. per. p. 234.
Cyanocorax yucas {part.) Gray, Gen. of B. t. H, p. 507.
Xanthoura luxuosus, Bonap. Consp. t. I, p. 580.
Cyanocorax luxuosis, Du Bus, Esq. oni. pi. XVIII. — Cass. ///.
Birds of Cal. Tcx. pi. I.
Xanthocitta LLxiosA , Cab. Mus. Hein. t. I, p. 224.
Car. : var. Cyanocapill.î: siiuilis; sed corpovis parlibus inferioribus
riridi-luteis.
îVe diffère de la var. Cyanocapilla que par la couleur
vert-jaunàtre des parties inférieures.
Hab, : Mexique, Te.\as.
iNo/e s\ir deux nouieaux chlorures cVacides organiques',
par M. Walthère Spring.
On se rappelle que M. Blomstrand avait assigné aux
acides hyposulfoneux [\), qu'il découvrit en 1870, la for-
(!) En remplaçant l'un ou l'autre des atonies d'hydrogène que renferme
la molécule d'acide sulfureux par un radical alcooli<iue quelconque X, on
obtient deu\ composés isomères jouissant de propriétés essentiellement
différentes; l'un d'eux, très-stable, ne peut être saponifié qu'avec la plus
grande difficulté; l'autre, au contraire, très-facilement; en d'autres termes ,
le premier fonctionne comme un acide conjugué, et le second comme un
éther. On a appelé le premier de ces isomères acide éthylsulfureux, si
X = C^ H», et le second acide élher-sulfureux; cette dénomination ne
( 49S )
mule de constitution
0
II
X — s — s H ;
II
0
si telle était réellement la structure de ces composés, le
pentachlorure de phosphore devrait, en réagissant sur ces
corps, engendrer un chlorure sulfoneux avec formation
de sulfochlorure de phosphore d'après l'équation
0 0
Il li
X — s - SH -V- P CP Cl-^ = X — S - Cl -4- P S Cl^ -+- H Cl;
H II
0 0
présentait pas d'inconvénients tant que l'on ne connaissait que ces deux
corps, mais il en est autrement aujourd'hui et l'on éprouve quelque diffi-
culté à dénommer d'une façon claire et rationnelle les corps :
XOSOOOH
, XSOOOH ) XOOOSH
acides conjugues. • < ^„„„„ élhers
/ XoOUn
V XSSOOH \ XSSOOOH
Cette difficulté disparaîtrait si l'on employait le mot sulfone et ses
dérivés pour désigner le groupe — S 0' H et ses dérivés qui donnent nais-
sance aux acides sulfo-conjugués, et si l'on continuait à appliquer la
nomenclature ordinaire aux élhers proprement dits, comme cela se fait
généralement en AJlemagne, en Russie, etc. De cette façon, toute équi-
voque serait impossible, comme on peut s'en convaincre par l'inspection
du tableau suivant :
I
XSOOOH acide X sulfonique
XSOOCl chlorure X sulfonique
XSOOH acide X sulfoneux
XSOCI chlorure X sulfoneux
XSSOOH acide X hyposulfoneux
XSSOCI chlorure X hyposulfoneux
et ainsi de suite.
XOSOOOH acide X sulfurique
XOOOSH acide X sulfureux
XSSOOOH acide X hyposulfureux
XSSOOCl chlorureX hyposulfureux
Je me suis servi de cette nomenclature dans la présente note.
( 496 )
si, au contraire, la constitution de ces corps était
XSSOOH , la réaction devrait avoir lieu suivant :
XSSOOH + P CP Cr2 = XSSO ci -t- P O CP -+- HCI,
c'est-à-dire qu'à côté d'une molécule d'oxychlorure de
phosphore, il se formerait le chlorure des acides hyposulfo-
neux. On possède donc dans l'action du pentachlorure de
phosphore un critérium certain pour découvrir si la molé-
cule des hyposuU'onites renferme un sulfhydryle ou un
oxhydryle. Je me proposais déjà depuis longtemps d'en-
treprendre ce travail; si je n'ai pas mis plus tôt ce projet
à exécution, c'est qu'il me semblait que la question était
déjà suffisamment résolue par les phénomènes que pré-
sente la génération de ces composés ainsi que par leurs
propriétés générales. Récemment M. H. Bunte {Zur Con-
stitution der Lnterschwevlige Saeiire, Berichte d, deut-
SCHEN Chem. Gesell, t. YII, p. 646), en faisant réagir une
molécule de bromure d'éthyle sur une molécule d'hypo-
sulûte de sodium, a obtenu un éther mixte de l'acide
hyposulfureux, dont la constitution est représentée par
C^H^SSOOOiNa. Si l'on compare cette formule à celle
deshyposulfonites, on voit que ces derniers ne diffèrent
de l'éther découvert par M. Bunte, que par un atome
d'oxygène en moins; les propriétés de ces deux corps sont
cependant essentiellement différentes; ainsi l'un d'eux
joue le rôle d'un éther, et l'autre le rôle d'un acide con-
jugué.
Il devenait donc intéressant de poursuivre l'étude com-
parative des propriétés de ces deux corps et de rechercher
s'ils peuvent se transformer l'un dans l'autre; guidé par
cette idée, j'ai entrepris l'étude de l'action du pentachlo-
rure de phosphore sur ces composés.
( 497 )
J. Action du penlachlorme de phosphore sur les
hyposulfonites.
J'ai fait réagir une molécule de penlachlorure de phos-
phore sur une molécule d'éUiylhyposulfonite de sodium.
Si l'on emploie les deux corps en poudre fine, l'action est
très-vive, la masse s'échauffe au point qu'une grande
partie du chlorure organique formé se détruit entière-
ment en donnant lieu à un grand dépôt de charbon ; la
réaction se fait, au contraire, sans décomposition du chlo-
rure, si l'on fait réagir les deux substances en morceaux
de la grosseur d'un pois. En agitant vivement le vase dans
dans lequel la réaction se produit, la matière se liquéfie
complètement au bout de peu de temps. Les produits de
la réaction ont été jetés dans de l'eau froide. En agitant
le liquide et en renouvelant l'eau quelques fois, on dis-
sout le chlorure de sodium formé et l'oxychlorure de
phosphore se décompose; il reste au fond de l'eau un
liquide épais qui est le chlorure cherché et que l'on sépare
de l'eau par décantation. On peut le dessécher en y pro-
jetant quelques morceaux de chlorure de calcium.
Le produit ainsi obtenu est soluble dans l'éther et
dans l'alcool; il ne se décompose que très-lentement par
l'eau. Son odeur est excessivement nauséabonde ; elle
rappelle à la fois l'odeur caractéristique des chlorures
d'acides organiques et celle des sulfures d'éthyle; les va-
peurs de ce chlorure attaquent fortement les muqueuses
qu'elles atteignent, elles provoquent le larmoiement et
occasionnent une vive douleur quand on les respire.
Ce chlorure est peu stable; au bout de quelque temps ,
il abandonne du soufre ; cette décomposition a lieu in-
( 498 )
stanlanément à chaud. Il m'a été impossible, pour cette rai-
son , (le le débarrasser des matières étrangères qu'il aurait
encore pu contenir en le soumettant à la distillation , même
sous forte dépression: la décomposition de ce chlorure est
totale à une température inférieure à 120°, il se forme
un grand dépôt de soufre et la matière se charbonne com-
plétenjent. Pour ce motif je l'ai traitée par une lessive de
soude caustique, afin de régénérer le sel qui lui avait donné
naissance, et de m'assurer, par l'analyse du produit ainsi
obtenu, que ce corps constituait bien le chlorure éthyly-
posulfoneux.
La lessive de soude caustique décompose lentement le
chlorure, l'application d'une douce chaleur facilite la
décomposition el la conduit à bonne fin. La lessive a été
évaporée à sec après y avoir fait passer un courant d'an-
hydride carbonique pour éliminer l'excès de soude, puis
reprise par de l'alcool absolu. Le sel organique se dissout
dans l'alcool; il a été soumis à quelques cristallisations
jusqu'à ce que ses propriétés physiques dénotassent un
degré de pureté satisfaisant. Ce sel jouissait de toutes les
propriétés de Véthylhiiposulfonite de sodium; un dosage
du soufre et du sodium devait renseigner suffisamment
sur son identité; ce dosage m'a donné les résultats sui-
vants :
TROUVÉ. CALCULÉ d'apiès C^H^S'^O-iVa.
S = 42,90 o/„ S = 43,23 o/q.
Na= 15,36% Na= 15,54 «/o-
Il résulte de là que le produit de l'action du pentachlo-
rure de phosphore sur l'éthylhyposulfonite de sodium est
bien le chlorure du radical de l'acide éthylhyposulfoneux,
puisque les sels de cet acide sont régénérés par l'action
( 499 )
de l'hydrate de sodium. Jl est donc démontré que le pen-
tachlorin-e de phosphore agit suivant l'équation :
C-H=S20-Na -+- PCl= = G^H3S-^0CI + PO CI'' -t- Na Cl;
en d'autres termes, ce résultat confirme ce que nous
savions déjà sur la nature des hyposulfonites; la formule
exprimant leur structure doit donc réellement être
XSSOOR' et non
0
II
X — s — s R';
II
0
il serait en effet difficile, dans ce dernier cas, sinon impos-
sible, d'interpréter l'action du pentachlorure de phos-
phore.
II. Action du penladdorure de phosphore sur les
éthylhyposul fîtes.
L'action du pentachlorure de phosphore sur les éthyl-
hyposulfites a beaucoup d'analogie avec l'action du même
chlorure sur les hyposulfonites.
Comme précédemment j'ai fait réagir une molécule de
pentachlorure de phosphore sur une molécule d'éthylhy-
posullite de sodium. La réaction a lieu spontanément, la
masse se liquéfie en s'échauffanl. On peut débarrasser le
chlorure éthylhyposulfureux formé du chlorure de sodium
et de l'oxychlorure de phosphore par un lavage à l'eau
froide. Après décantation on sèche le produit au moyen
du chlorure de calcium ; on obtient ainsi un liquide parfai-
tement transparent.
Ce chlorure est comme le précédent soluble dans l'éther
et dans l'alcool; il est beaucoup moins stable que le chlo-
( 500 )
rure hyposulfoneux ; abandonné à lui-même, il se décom-
pose en produisant du bisulfure d'éthyle. Quand on essaye
de le distiller, même dans le vide le plus parfait, il se
décompose.
La manière dont cette décomposition se fait ne manque
pas d'intérêt. A mesure que la température augmente , il
se dégage de l'anhydride sulfureux, puis il distille du
chlorure de sulfuryle, et enfin du bisulfure d'éthyle. Le
chlorure de sulfuryle ainsi obtenu a été distillé de nou-
veau sous pression ordinaire et a bouilli à la température
constante de 70" — -li"; il a engendré de l'acide sulfurique
par sa décomposition au moyen de l'eau ; il ne reste donc
aucun doute sur son identité. C'est également en déter-
minant le point d'ébullition du bisulfure d'éthyle que je
me suis assuré de l'identité de ce produit. Il a distillé à la
température de 149".
Pour interpréter ce résultat considérons deux molécules
de chlorure éthylsulfureux :
C^HSSSO^CI
C-2H»SS0^CI
et enlevons (C2H3)2S2, on voit qu'il reste Cl 0^ S— S 0^ CI,
qui est le chlorure de l'acide dithionique et qui pourrait
donner par sa décomposition sous l'influence de la chaleur
les produits observés lors de la distillation du chlorure
éthylhyposulfureux ainsi :
Cl 0^ s — SO' Cl = C12 so^ + so^
Afin de m'assurer si celte manière de voir pouvait être
justifiée, j'ai fait réagir deux molécules de pentachlorure
de phosphore sur une molécule de dithionate de sodium
à la température de 170° dans un tube scellé à la lampe,
( ^01 )
la réaction n'ayant pas lieu à la température ordinaire.
Après cinq heures d'action, j'ai ouvert le tube, il s'est
dégagé des- torrents d'anhydride sulfureux ; la masse qui
se trouvait dans le tube formait une pâte très-épaisse;
je l'ai épuisée à l'éther afin de dissoudre les chlorures
d'acides formés. J'ai soumis le résidu de l'évaporation
spontanée de l'éther à la distillation fractionnée ; une
première partie a distillé entre 65° et 76°, et une seconde
au delà de 100°. La première partie a été reconnue, après
rectification, pour être du chlorure de sulfuryle; la se-
conde était de l'oxychlorure de phosphore. Ainsi le penta-
chlorure de phosphore ne donne point par son action sur
les dithionates un chlorure stable à 170°, mais qui se
décompose en chlorure de sulfuryle et en anhydride sul-
fureux. 11 serait intéressant de s'assurer si l'on ne pour-
rait former CI- S- 0'* par synthèse directe, en faisant
passer un courant d'anhydride sulfureux dans du chlorure
de sulfuryle convenablemeut refroidi.
On voit par ces expériences que , lors de la distillation,
le chlorure éthylhyposulfureux se comporte comme un
mélange de chlorure de l'acide dithionique et de bisulfure
d'éthyle. M. H. Bunte avait déjà constaté que les sels de
l'acide éthylhyposulfureux se comportaient d'une ma-
nière tout analogue lors de leur décomposition par la
chaleur.
Ne pouvant donc purifier ce chlorure par distillation ,
je l'ai traité par la soude, et j'ai régénéré ainsi l'élhylhy-
posulfite de sodium. Pendant cette réaction une grande
quantité de matière se décompose, car la soude saponifie
l'éthylhyposulfite de sodium déjà régénéré et donne lieu à
un mélange de sulfate et d'hyposulfite de sodium avec pro-
duction de sulfures d'éthyle; il n'y a que peu d'éthylhypo-
( o02 )
sulfite qui échappe à la réaction. Vu la faible quantité de
substance que j'ai pu ainsi recueillir, j'ai dû me borner à
déterminer le rapport du sodium au soufre afin de n'avoir
pas besoin de conduire la purification du composé fort loin.
Cette détermination m'a donné le résultat suivant :
"^^ N'a : s = 0,Cô : 1,23 donc comme I : 2.
Il ne reste donc pas de doute sur l'existence du chlorure
éthylhyposulfureux.
J'ai essayé d'appliquer à ce chlorure la réaction qui a
permis à MM. Robert Otto et H, Ostrop (Zcitschrift f.
Chemie, 1866, p. 599), d'obtenir les acides sulfoneux, en
vue d'opérer ainsi la transformation des élhylhyposulfites
en éthyhyposulfonites. J'ai traité pour cela le chlorure
dissous dans l'éther par l'amalgame de sodium; la réaction
devait se passer comme le montre l'équation suivante :
C^ H^S'O^Cl -f- Na2 = C-2 H^ S^ O^Na -+-Na Cl.
cependant elle a lieu d'une façon différente: le sodium
agit sur le chlorure comme sur les hyposulfites inorga-
niques : il met un mercaptate en liberté, c'est-à-dire qu'il
se glisse entre les deux atomes de soufre. Quand on reprend
par l'eau les produits de la réaction, on n'obtient que du
mercaptan et des produits inorganiques. Il m'a été impos-
sible de constater la présence d'éthylhyposulfonite de so-
dium. On voit que ce chlorure joue le rôle d'un éther.
Le fait de l'existence de chlorures d'acides organiques,
dont la molécule ne renferme qu'un atome d'oxygène à
côté de deux atomes de soufre, a de l'importance; ces
corps pourront être le point de départ de nombreuses
classes de composés intéressants. I/étude de ces composés
m'occupe pour le moment.
( o05 )
Notice sur Faction du pentac/ilorure de phosphore sur les
hyposulfites inorganiques ; par M. Walthère Spring.
En 1870 M. Buchanan publia dans les Bulletins de la
Société chimique allemande une note sur Taclion du pen-
tachlorure de phosphore sur les hyposulfites; il avait
obtenu, en distillant deux molécules de pentachlorure de
phosphore avec une molécule d'hyposuHîte de plomb, de
l'acide chlorhydrique, de l'anhydride sulfureux, de l'oxy-
chlorure de phosphore, du sulfochlorure de phosphore,
des traces de chlorure de thionyle , mais pas de chlorure
de sulfuryle; il crut donc pouvoir terminer sa note par
cette conclusion : « il résulte de là que Von ne peut pas
considérer l'acide hyposulfureux comme de l'acide sulfti-
rique , dans lequel un oxhydrile serait remplacé par un
sulflirydryle , car, dans ce dernier cas, on devrait obtenir
nécessairement du chlorure de sulfuryle lors de l'action
du pentachlorure de phosphore sur les hyposulfites. » Cette
conclusion étant en contradiction manifeste avec les résul-
tais auxquels je suis arrivé par les réactions que j'ai insti-
tuées pour découvrir la constitution de l'acide hyposulfu-
fureux, il devenait intéressant de rechercher d'où elle
pouvait provenir.
Pour que l'on puisse affirmer qu'il soit nécessaire que
le pentachlorure de phosphore donne naissance à du chlo-
rure de sulfuryle lors de son action sur un hyposulfite, si
ce dernier est réellement un sulfate dans lequel un oxhy-
dryle serait remplacé par un sulfhydryle , il faudrait que le
pentachlorure de phosphore, en réagissant sur im sulfate,
donnât aussi du chlorure de sulfuryle. C'était ce que l'on
( 504 )
croyait à l'époque où M. Buchanan a fait ses expériences,
d'après les travaux de Willamson (1), de Hugo Schiff (2)
et de Carius (3); récemment MM. Michaelis et Schiffer-
decher (4) et M. Geuther (o) ont démontré que le chlorure
de sulluryle ne pouvait être obtenu dans aucun cas par
l'act-on du pentachlorure de phosphore sur les sulfates;
les réactions se passent suivant les équations :
!• 2Pb SO* -t- ôP C|3 = S-^ 05 CP -+- ôPO Cl' -+- 2Pb CI'
2» S-2 OS Cl* -4- 2P C|3 = 2S 0^ H- P G13 0 -4- P CF.
Plus récemment encore, M. Melsens, dans son beau
travail sur le chlorure de sulfuryle (6), a démontré égale-
ment que l'on ne pouvait l'obtenir par l'action du penta-
chlorure de phosphore sur l'acide sulfurique.
J'ai repris toutes ces expériences et les résultats aux-
quels je suis arrivé corroborent point pour point ceux de
ces chimistes. Je crois inutile d'entrer dans des détails
concernant ces expériences, puisqu'elles ne sont en quel-
que sorte que la copie de celles qu'ont faites MM. Michaelis
et Geuther.
On doit donc regarder comme démontré que le penta-
chlorure de phosphore ne donne pas de chlorure de sulfu-
ryle lors de son action sur les sulfates, mais bien de
(1) Proceediiiy of the London royal Society , t. VII , p. 1 1.
(2) Ueber die Einwirkuug des PC\^ auf einige anorganische Saueren.
Ax>. D. Chem. und Pharm., l. Cil, p. 111.
(5) Jahresberichle d. Chemie, 1858, p. 93 (en note).
(4) Jenaïsche Zeitschrift f. Med. u. Nal., t. VI, pp. 253 et 292, et
Berichte der d. ch. GeselL, t. V, 1872, p. 924.
(5) Berichte der d. ch. GeselL, l. V, 1872, p 923 (en note).
(6) Tome XXII des Mémoires couronnés et autres Mémoires, publiés
par l'Acadéuiie royale de Belgique, 1873, in-S".
( 505 )
l'anhydride sulfureux et des oxychlorures de phosphore ;
M. Buchanan ayant obtenu exactement les mêmes produits
plus du P S Cl'^ pendant ses expériences , il en résulte que
l'acide hyposulfureux se comporte, en présence du P CI-',
comme de l'acide sulfurique dans lequel un oxhydryle
serait remplacé par un sulfhydryle.
— La classe se constitue en comité secret pour arrêter
la liste des candidatures aux places vacantes.
2'"* SÉRIE, TOME XXXVIII. 35
( 506 )
CLASSE DES LETTRES.
Séance du '12 octobre 1874.
M. R. Chalon , directeur
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. Ch. Steur, J. Grandgagnage, J. Rou-
lez, Gachard, P. De Decker, Paul Devaux, J.-J. Haus,
M.-N.-J. Leclercq, Ch. Faider , le baron Kervyn de Letten-
hove, J.-J. Thonissen, Th. Juste, le baron G. Guillaume,
F. Nève, Alph. Wauters, G. Nypels, Alph. Le Roy,
membres i J. Nolet de Brauwere van Steeland, Aug. Sche-
1er, associés; Edm. Poullet, correspondant.
M. Éd. Mailly, correspondant de la classe des sciences,
assiste à la séance.
CORRESPONDANCE.
M. Guillaume Guizot annonce la mort de son père,
M. François-Pierre-Guillaume Guizot, décédé au Val-
Richer le 12 septembre 1874. M. Guizot était l'un des plus
anciens associés de la classe.
M. le secrétaire perpétuel s'est empressé d'exprimer à la
famille du défunt les sentiments de condoléance de la
Compagnie.
( ^07 )
— M. le Ministre de l'inlérieur fait parvenir, pour la
bibliothèque de l'Académie, les ouvrages suivants :
1" Exposé de la situation administrative des provinces
pour 187 i; 9 vol. in-8";
2° Les fondateurs de la monarchie belge : Louis de
Potter, par M. Th. Juste; 1 vol. in-S";
3" Gregorii Barhebrœi Chronicon ecclesiasticum , to-
mus II; gr. in -8" à 2 col.;
4° Anthologie belge, publiée par Amélie Struman-
Picard et Godefroid Kurth ; in-I2.
Remercîments.
— Il est fait hommage, par les auteurs, des ouvrages
suivants :
\° L'armée belge. Histoire et état militaire, par M. le
lieutenant général baron Guillaume; in-8°;
2" Mélanges d'histoire nationale. Rodolphe de Vautra-
vers et le comte Charles de Cobenzl d'après des documents
inédits, par M. Alph. Rivier; in-8'';
5° Un' epoca délia mia vita, par M. le comte Giovanni
Arrivabene, associé de la classe; in-8'';
A" Anciens registres paroissiaux. Tables alphabétiques,
par M. Heuschling; in-S".
M. Edmond Poullet, en offrant à la classe, au nom de
M. Eugène Poswick, le tome P'' de son Histoire généalo-
gique et biographique de la noblesse Umbourgeoise , lit la
note suivante au sujet de ce volume :
« Cet ouvrage, de sévère héraldique, édité avec luxe,
orné de nombreuses gravures sur bois d'un gracieux cachet,
enrichi d'eaux-fortes dont quelques-unes sont fort bien
réussies, intéresse les historiens au moins autant que les
( 508 )
généalogistes. Il conlienl de précieux détails sur les terres
et les châteaux de l'ancien duché et de ses annexes les
pays d'oulre-Meuse, explique le mécanisme et l'organisa-
tion de leurs anciennes institutions; renferme des ren-
seignements hiographiques complets et en grande partie
no"veaux, sur une partie de hauts fonctionnaires de la
période autrichienne, fonctionnaires pris, comme on sait,
en grand nombre dans les rangs de la noblesse et du patri-
ciat limbourgeois , parmi lesquels je me bornerai à nommer
les Thisquet, les Wynants, les Limpens, les Legro. Je crois
pouvoir ajouter qu'il sert en quelque sorte de préface à une
histoire complète du régime constitutionnel et coutumier
de la vieille province, une des moins connues des anciens
Pays-Ras catholiques, ouvrage qui comblera une regret-
table lacune dans notre littérature historique. »
Des remercîmenls sont adressés aux auteurs de ces dif-
férents dons.
— Les institutions scientifiques et littéraires suivantes
accusent réception du récent envoi de publications acadé-
miques : l'Institut national de France, la Bibliothèque
communale de la ville d'Amiens, les Archives générales
du département du Nord, la Société des antiquaires de
Picardie, la Société philosophique et littéraire de Liver-
pool, la Société littéraire et philosophique de Manchester,
la Société Philomathie de Neisse et la Société théologique
de la fondation Teyler, à Harlem.
— M. le secrétaire perpétuel dépose sur le bureau le
premier exemplaire du tome XXXVHI des Mémoires cou-
ronnés in-4'', qui vient de paraître.
( o09 )
Ce volume renferme, en ce qui concerne la classe des
lettres, le mémoire intitulé : Essai sur l'histoire du droit
criminel dans Vancienne principauté de Liège, que la
classe a couronné le 18 mai 1871. Il a pour auteur
M. Edmond Pouliet, correspondant de l'Académie.
— Les travaux manuscrits suivants sont renvoyés à des
commissaires :
X" Les écoles et Valphabet des Taniouls, par M. Ph.Van
der Haeghen. — Commissaire : M. Nève.
2" La statistique internationale, son origine et ses pro-
grès, par M. X. Heuschling. — Commissaires : MM. Faider
et De Decker.
MONUMENT QUETELET.
M. le secrétaire perpétuel présente la liste de souscrip-
tion pour le monument à élever à Bruxelles à la mémoire
de M. Ad. Quetelet.
RAPPORTS.
MM. Th. Juste etGachard donnent lecture de leurs rap-
ports sur un mémoire manuscrit de M. J.-J. De Smet,
intitulé : Notice sur les premières années de don Juan
d'Autriche, fils de Charles-Quint.
Conformément aux conclusions de ces rapports, la classe
vole l'impression du travail de M. De Smet au Bulletin.
( 510
COMMUiMCATIONS ET LECTURES.
M. Paul Devaiix donne lecture de la première partie
d'un travail Sttr les gneires médiqiies.
ISotice sur les premières années de don Juan d'Autriche,
fils de Charles-Quint ; par M. le chanoine J. De Smet ,
membre de l'Académie.
Le seizième siècle, si fécond en guerres et surtout en
guerres civiles, produites la plupart par la prétendue
réforme, essentiellement révolutionaire, dut être fécond
aussi en guerriers, qui, combattant sous des étendards
opposés, se distinguèrent par leur valeur autant que par
leurs talents militaires. Aucun d'eux cependant ne conquit
une renommée aussi pure et aussi brillante que le fils de
Charles-Quint, qui gouverna quelque temps nos provinces
et qui les eût sans doute pacifiées par son énergie et sa pru-
dence, si une mort prématurée n'avait arrêté sa marche
victorieuse. A une époque moins prodigue que la nôtre de
titres et de surnoms glorieux, on lui a donné celui de
héros, et la postérité ne l'a point contesté.
Quelques historiens ou biographes ont fait naître don
Juan d'Autriche en 154S; d'autres, en plus grand nombre,
ont fixé sa naissance à l'an 1547, mais elle doit être
placée en 1546. En effet, une médaille qui fut frappée en
l'honneur de la journée fameuse de Lépante, en 1571 ,
( 511 )
porte expressément que le jeune vainqueur n'avait alors
tque vingt-quatre ans; or on sait que la bataille eut lieu le
7 octobre 1571 (1). De plus, un acte authentique lu aux
cortès de Tolède, du mois de février 1560, fait foi que
don Juan n'avait pas, à cette date, accompli sa quatorzième
année. On ajoute que l'événement eut lieu le 24 février,
mais cette assertion n'est appuyée sur aucun monument
historique et semble calquée sur l'anniversaire de la nais-
sance de Charles-Quinl.
Dans les cours on ne manque jamais de ces curieux que
les Anglais ont stigmatisés par le nom pittoresque de
cavydroppers et que nous appelons Liiistervînken. Cette
fois le profond secret qu'on gardait aiguisa leur pénétra-
tion et ils parvinrent à découvrir qu'il était né à l'empe-
reur, veuf depuis longtemps (2), un fils naturel, dont la
mère n'était autre que Barbe Blomberg, jeune lille de
Ratisbonne, d'une beauté extraordinaire, mais d'une
extraction commune. Ce fds, ajoutaient-ils, avait reçu au
baptême le nom de Geronimo.
Le profond mystère dont on enveloppait cet événe-
ment porta la plupart des contemporains à penser que le
nom donné à la mère n'était pas réel, mais qu'il n'avait
été imaginé que pour cacher une intrigue avec une per-
sonne haut placée à la cour. Les Espagnols, qui pensaient
que tout ce qui se rapprochait de la personne de leur
monarque devait porter le cachet de la grandeur, adop-
tèrent volontiers cette version, et les nombreux ennemis
qu'avait l'empereur en Allemagne exploitèrent mécham-
(1) Lafuente, ffisloria gêner, de Espana, l. XIII, p. 437. Note.
(-2) Lafuenle, Revista de ambes Mundosy n" 5.
( 512 )
ment cette faiblesse et osèrent même parler bientôt d'adul-
tère et d'inceste.
A l'étranger, le R. P. Strada et le cardinal Bentivoglio
eurent la faiblesse d'adhérer, sans hésiter, à l'opinion des
Espagnols.
L opinion publique s'accorde cependant aujourd'hui,
assez généralement, pour reconnaître en Barbe Blomberg
la véritable mère. Elle fut mariée plus tard à un Allemand,
nommé Jérôme Kegell, qui fut nommé commissaire aux
revues, et la veille de sa mort Charles-Quint assura à cette
femme un revenu de deux cents florins (1).
L'empereur n'apprit qu'avec une vive indignation les
imputations odieuses qu'on s'était permises contre lui et
qu'on lui avait cachées quelque temps; il résolut d'y
(1) Après la naissance de don Juan, celte femme avait été mariée à
Jérôme Kegell, qui mourut en 1569; elle lui avait donné deux fils, dont le
plus jeune se noya huit jours après la mort de son père. Une lettre du duc
d'Albe au roi Philippe II (datée du 29 juin 1569) nous apprend que Barbe
Blomberg avait beaucoup de dettes, et, comme il est généralement connu
qu'elle est la mère de don Juan , dit-il, on ne peut se dispenser de faire
quelque chose pour elle. Dans sa réponse (du 26 septembre) le roi dit
qu'on doit l'empêcher de se remarier, mais lui permettre de se tixerdans
les Pays-Bas et pourvoir à son entretien : « Cette a^atre, assure Philippe,
cause beaucoup de soucis à mon frère , faites ce qui est convenable et
donnez-m'en avis. Le duc voulut l'envoyer à Mons , mais la dame s'y
opposa avec une grande violence. Elle finit par déclarer qu'elle s'établirait
à Gand, dont les habitants parlaient une langue qu'elle comprenait. Plus
tard elle voulut à toute force partir pour l'Espagne, et l'on eut grande peine
à la retenir, car, dit le duc d'Albe, elle a une tête terrible. On se plaignait
surtout de sa dissipation ; ses seize domestiques coiitaient au roi 1,226
livres, sa table et celle de son fils Edmond 4,100 livres, sans compter les
dépenses à faire pour son mobilier, son chevalet son cabriolet (Compte du
secrétaire Alboriios, envoyé à Madrid le 24 septembre 1571).
( al3)
mettre un terme. Après avoir enlevé l'enfant à sa mère,
qui l'avait gardé trois ans, on le confia à un musicien
delà maison de l'empereur, nommé Massi et Flamand de
naissance (I). Cet homme s'établit avec son pupille au vil-
lage de Leganès, non loin de Madrid, et s'engagea par
contrat (2) à nourrir l'enfant comme son propre fils,
moyennant cent florins à toucher de suite et plus tard
cinquante florins par an. C'était là sans doute une maigre
dépense pour le fds de l'empereur et roi, mais cela même
cachait mieux son origine.
On n'avait pas songé à donner la moindre instruction à
l'enfant, et il n'en reçut d'autre en efl'etque celle du curé
delà paroisse qui, étant aussi peu initié que Massi au secret
de l'empereur, n'avait garde de s'imaginer que parmi ses
turbulents auditeurs se trouvait un fils des Césars; il ne
lui accordait, comme il était juste, aucune distinction.
Peut-être l'empereur pensait-il, et nous n'oserions lui
donner tort, que, les éléments de la religion exceptés, on
ne doit pas sitôt commencer l'instruction scientifique des
enfants. La santé de Geronimo profita certes beaucoup de
cette méthode et déjà il surpassait tous ses compagnons
par son courage naissant et se montrait à leur tête dans
tous leurs jeux rustiques, en même temps qu'il préludait
à ses exploits belliqueux, en faisant la guerre aux oiseaux,
dont il faisait un grand carnage au moyen d'une ballhtilla
ou petite arbalète. Cet état de choses ne pouvait cepen-
dant se prolonger sans avoir des inconvénients graves
(1) Ce nom paraît être celui d'un Wallon.
(2) Une copie de ce document se trouve dans les Papiers d'État du
cardinal Granvelle, t. IV, pp. 499, oOO.
( 514 )
pour l'éducation d'un fils de roi. L'empereur s'en aperçut
et, voyant son enfant parvenu à sa septième année, il jugea
qu'il était temps de lui donner un précepteur.
Don Louis Quixada.
Pctrmi les belles qualités ou plutôt les grâces d'état que
Charles avait reçues du ciel, on admirait particulièrement
son bonheur dans le choix de ses officiers et de ses fonc-
tionnaires. Ce bonheur, il l'eut encore d'une manière sin-
gulière dans le choix qu'il fît du gardien de son fils. Il obtint
pour ces fonctions, toutes de confiance, son fidèle major-
dome, don Louis de Quixada, dévoué d'esprit et de cœur à
la foi catholique, d'une loyauté à toute épreuve, et surtout
d'une délicatesse extrême sur l'honneur, qui le rendait le
vraitypedechevaliercastillan dans ses formes les plus belles.
Sa femme, dona Magdalena de Ulloa, sœur du marquis de
Motas, excellait plus encore par ses vertus que par son rang
et rappelait en plusieurs points la femme forte de l'Écri-
ture. C'était à elle naturellement que revenait la première
éducation du jeune homme et comme son mariage était
demeuré stérile, elle n'eut aucune peine à lui vouer une
véritable affection de mère. S'il montra toujours un goût
parfait et une courtoisie peu commune, c'est bien plus à la
dame qu'au chevalier qu'en appartenait l'honneur (1).
(1) Après la monde Quixada, Don Juan écrivit à sa veuve: '• Chère mère,
si douieureusenient devenue veuve ! je vous reste seul , et j'appartiens à
vous réellement , car c'est pour moi que Louis est mort et que vous avez
été frappée par cette douleur. Soulagez-la par votre sagesse ordinaire. Plût
à Dieu que je fusse là en ce moment pour sécher vos larmes ou pour mêler
les miennes aux vôtres ! Adieu , chère et vénérée mère ! et priez Dieu qu'il
ramène votre lils de ces guerres en vos bras. »
Stirling , Cloisler Live of Charles the Fiflh.
( Slo )
Quixada, qui accepta cette charge par pur dévouement
et sans aucun titre, s'établit avec sa famille dans sa mai-
son de campagne de Viliagarcia, près de Yalladolid, où
l'on respirait un air aussi pur qu'à Leganès. De son côté,
il ne négligeait rien pour répondre parfaitement aux vues
de.son souverain et donnait tant de preuves du vif intérêt
qu'il portait à son élève que toute autre femme que dona
Magdalena en aurait pu concevoir d'étranges soupçons.
Car son mari, quoique sûr de la discrétion de sa femme,
n'avait pas été autorisé à lui communiquer le secret du
prince. Il lui avait simplement présenté Geronimo comme
le fils d'un homme puissant et son ami particulier. Cepen-
dant la confiance de Magdalena fut mise à une rude
épreuve. Le feu, avant pris au château, fit en peu d'heures
des progrès alarmants : après avoir en quelques mots
donné à ses serviteurs des ordres pour l'éteindre, Quixada
se hâta de prendre son fils adoptif entre ses bras, et ne
revint pour rendre le même service à sa compagne qu'après
avoir vu son élève en sûreté. Toute autre femme aurait
sans doute conclu que celui-ci était le fils du majordome;
mais elle en jugea tout autrement et crut que l'enfant
devait appartenir à une famille beaucoup plus haut placée
et plus digne de sacrifices que celle dont son mari lui
avait parlé. Si les bruits calomnieux de Ralisbonne étaient
parvenus aux oreilles de la matrone et si les traits de
l'empereur lui eussent été plus familiers, elle eût pu lire
dans les yeux mêmes de Geronimo qui était le grand per-
sonnage en question, mais elle crut qu'il ne lui était pas
permis de scruter davantage ce qu'on appelait un secret
de haute importance.
Le jeune homme lui était plus cher encore qu'à son époux
et il se montrait digne de la tendresse de sa mère adoptive.
( 516 )
Par le même motif sans doute de cacher la présence de
l'enfant à Villagarcia, le bon chevalier correspondait rare-
ment avec l'empereur à son sujet, et encore d'une manière
à faire croire qu'il s'agissait d'un tout autre adolescent.
Dans une de ces lettres, aussi courtes que rares, il assure
son auguste correspondant que le jeune homme a une par-
faite santé : il l'instruit, dit-il, dans les langues latine et
française; pour la première, l'enfant ne montrait que du
dégoût; il faisait plus de progrès dans l'autre et pronon-
çait bien les mots qu'il en avait appris. Faire des armes,
aller à cheval , se livrer aux violents exercices, c'étaient là
ses goûts favoris (1). Charles sourit sans doute à cette
peinture qui lui retraçait trait pour trait en son esprit ce
qu'il était lui-même, lorsqu'il obéissait encore au seigneur
de Chièvres et à Adrien d'Utrecht.
Cependant l'Europe apprit comme un coup de foudre une
nouvelle qui parut d'abord devoir ébranler tous ses États.
Le monarque si puissant, maître de tant de royaumes,
qui pouvait dire avec vérité que le soleil ne se couchait
jamais sur ses domaines, Charles-Quint, encore dans la
vigueur de l'âge, mais accablé par des travaux sans cesse
renaissants et rongé par des infirmités de tout genre,
venait de descendre du faîte des grandeurs, pour s'assurer
d'un royaume, où l'on n'a pas de rivaux à craindre.
Il aurait voulu se dessaisir de tous ses royaumes en
faveur de son Mis, don Philippe, et avait fait même des
tentatives à cet effet auprès d'un petit nombre d'électeurs,
qu'il croyait favorables à ses vues; mais tout le corps élec-
toral avait bien résolu de ne plus admettre un empereur
aussi redoutable pour ses libertés par d'autres possessions.
(1) Gachard, Retraite et mort de Charles-Quint, t. I.
(til7)
Il fui répondu à ses ouvertures que le sceptre impérial
appartenait de droit à son frère l'archiduc Ferdinand, déjà
nommé roi des Romains. Il chargea donc le prince Guil-
laume d'Orange-Nassau de porter à ce prince les insignes
de l'empire.
Danslacélèbre assemblée tenuedans le palaisdeBruxelles,
le 24 novembre 1555, l'empereur, ayant grand'peine à
rester debout, exposa d'une manière digne et noble ce qu'il
avait fait, pendant un règne assez long, pour le bon-
heur de ses sujets et recommanda vivement la conserva-
lion de la foi catholique romaine. Il finit par investir de
tous ses États, dans l'un et l'autre hémisphère, son lils
don Philippe, déjà roi d'Angleterre et seigneur d'Irlande
par son mariage avec Marie Tudor, et roi de Naples par la
cession que lui en avait faite l'empereur, en faveur de
cette union.
Il choisit pour sa retraite, comme chacun sait, la riante
vallée de TEstramadure espagnole, où s'élevait déjà depuis
de longues années le monastère hiéronymite de Yuste, et
à peine établi là d'une année, il fit inviter Quixada à venir
avec son élève habiter le village voisin de Cuacos (1558),
afin que doua Magdalena pût de temps en temps, et sans
donner l'éveil à la curiosité des frères, amener son pupille
au couvent, et que l'empereur pût jouir ainsi de la pré-
sence de son jeune fils , sans toutefois s'en faire con-
naître.
Le père Siguenza, historien de l'ordre de S'-Jérôme,
nous apprend en effet que doîia Magdalena de Quixada y
conduisit souvent le jeune homme, qui la nommait con-
stamment sa mère. La vue de celenfanl agissait toujours,
comme un baume salutaire, et calmait les souffrances
de Charles, mais il savait se contraindre et ne parlait pas
(318)
à Geronimo avec plus d'affection qu'aux autres enfants,
même quand il le recevait dans ses appartements inté-
rieurs.
Charles ne s'était pas retiré trop tôt des affaires du
monde et les jours qu'il avait à passer dans la solitude
qu'il avait choisie étaient rigoureusement comptés , il
s'endormit dans la paix du seigneur le 21 septembre 1558,
dans la 59*= année de son àge(l). Il est sûr que l'enfant de
sa vieillesse assista à ses funérailles, célébrées avec une
magnificence royale (2). Beaucoup de personnes le virent
comme un page à côté de don Quixada et en grand deuil
comme lui.
Prescott conjecture que la présence de l'adolescent aux
obsèques de l'empereur suggéra la première pensée de son
origine et nous pensons qu'il a parfaitement raison. Parmi
les hauts officiers et les magistrats qui virent cet adoles-
cent en longs habits de deuil , comme Quixada, bien qu'il
ne lui appartînt ni de loin, ni de près; plusieurs qui étaient
venus de loin pour rendre les derniers devoirs à leur sou-
verain qu'ils avaient suivi depuis sa jeunesse, ne purent
sans doute fixer les yeux sur le prétendu Geronimo sans
s'écrier: «Que ce jeune homme ressemble étonnamment à
» feu l'empereur dans sa jeunesse. N'est-ce pas ce front
» large et ces cheveux jaunissants de Charles, ses nobles
» traits et ses yeux bleus clairs, toute sa physionomie
» enfin, excepté heureusement cette laide lèvre autri-
» chienne (5).
(1) Historiadc la Ordén' de San Geronimo, t. III, p. 203.
(2) Quelques jours avant son décès, Charles-Quint avait eu un long
entrelien avec Quixada , dont l'avenir du jeune Geronimo fit tous les
frais.
(3) Ou plutôt bourguignonne, par Marguerite de Bourgogne.
( ol9 )
D'autres durent ajouter sans doute : « N'est-ce pas cet
s> enfant de Ratisbonne, dont la disparition fut si mysté-
» rieuse et que le majordome de l'empereur cacha à Vil-
» lagarcia avec tant de soins ? »
Ces réflexions ne se firent pas tout haut sans doute,
mais il était impossible, à coup sûr, qu'elles ne vinssent à
l'esprit de beaucoup de courtisans.
« Charles-Quint au lit de la mort, dit l'auteur de l'arti-
» cle de don Juan , dans la Biographie Michaud (1) , parla
B pour la première fois à Philippe II de cet intéressant
» orphelin et le recommanda vivement à ses bontés. » —
Nous ne savons où le fécond biographe a pu prendre une
anecdote aussi évidemment fausse. Il ne faut en effet
qu'une connaissance bien médiocre de l'histoire de l'époque,
pour savoir qu'au décès de son auguste père, Philippe se
trouvait en Flandre, et y organisait, non sans peine, le
gouvernement des pays de par deçà (2) et qu'il lui était
par conséquent entièrement impossible de se trouver au
chevet d'un mourant à l'extrémité de l'Espagne.
Ce qui est vrai, c'est que parmi les papiers délaissés par
Charles-Quint, on en trouve un enveloppé et scellé des
mains de l'empereur et adressé à Philippe, ou, en cas de
sa mort, à son petit-fils, don Carlos, ou à quiconque por-
terait la couronne. Il était écrit de lo54, avant sa retraite
au couvent de Yuste. Charles y avouait sa liaison avec une
fille libre de Ratisbonne, qu'il ne nommait pas, et la nais-
sance d'un fils appelé Geronimo. Il indiquait le canton où
l'on pourrait prendre des informations sur ce fils qui
(1) V" Don Juan d'Autriche.
(2) De landen van herwaertsover , c'est ainsi qu'on nommait les Pays-
Bas.
( 520 )
demeurait encore chez le joueur de violon , Massi , à Lega-
nès. II exprimait le désir que l'enfant fut élevé pour l'état
monastique, afin que, parvenu à l'âge de faire un choix, il
put entrer dans quelque ordre de moines réformés. Il ne
veut pas toutefois qu'on use de la moindre contrainte, et si
l'en^'ant préfère rester dans le monde, on devra lui acheter
au royaume de Naples un domaine d'au moins vingt à
trente mille ducats de revenu. Quelle que soit la carrière
embrassée par le jeune homme, l'empereur veut qu'on
l'honore et qu'on ait pour lui la considération due à son fils.
Il finit par dire que si pour de graves raisons il n'a pas
■ inséré cesslipulations dans son testament, il n'en veut pas
moins qu'elles aient la même force.
Philippe parut recevoir cette communication avec plai-
sir et se promit dès le principe d'exécuter les intentions
de son père , mais il se trouvait retenu aux Pays-Bas.
Le bruit qui concernait la haute origine de Geronimo
était parvenu cependant aux oreilles de l'infante doua
Juana, qui gouvernait les Espagnes pendant l'absence du
roi, son frère (1). Elle fît donc écrire à Quixada par son
secrétaire à quoi elle devait s'en tenir à cet égard; mais il
n'était pas permis au fidèle hidalgo d'être aussi communi-
catif. Il éluda la question en répondant que l'enfant en
question lui avait été confié depuis plusieurs années, mais
que l'empereur n'ayant pas fait la moindre allusion à cet
égard, dans son testament, on pouvait regarder ce bruit
comme un conte inventé à plaisir (2).
Mais la curiosité féminine pouvait-elle se payer d'une
monnaie de cet aloi? Apprenant que le discret majordome
(1) Elle était veuve sans enfants d'un infant de Portugal.
(2) Gacliard, Retraite et mort de Charles-Quint , 1. 1, p. 4-i6.
( 521 )
devait s'absenter pendant quelques jours, la sérénissime
princesse gobernadora résolut d'en profiter pour amener
le prétendu page de don Louis Quixada à Yalladolid, oiî
elle devait présider un auto-da-fé (1). Elle fit donc inviter
à cette triste solennité dona Magdalena et son flls adoptif,
et dona Quixada n'osa pas essuyer un refus.
Au jour donné (2) elle se rendit avec Geronimo à la
lugubre cérémonie et s'assit sur la plate-forme, couverte
de riches tapis et destinée aux personnes de son rang.
Pour cacher, autant qu'il était possible, l'enfant au public,
elle l'avait presque enveloppé de son manteau, mais elle
dut l'écarter à l'arrivée du cortège royal , dona Juana put
alors le regarder à loisir. Elle le fit avec une curiosité si vive
que Geronimo en rougit jusqu'aux oreilles, [-.e cœur de
l'infante fut inondé d'amour fraternel, quand elle se con-
vainquit que le même sang coulait dans ses veines et dans
celles de ce bel adolescent. Elle 1 etreignit dans ses bras
et le couvrit de baisers, en lui prodiguant le nom si doux
de frère; mais elle s'efforça en vain de le placer à ses
côtés. Violemment agité, le jeune homme se débattait avec
vigueur et se jeta dans les bras de dona Magdalena, en
s'écriant qu'elle seule était sa mère et que la dame incon-
nue n'était rien pour lui.
Une scène aussi singulière devait attirer l'attention des
nombreux spectateurs qui entouraient la plate-forme; elle
devint si pressante que le drame se termina sans qu'on
s'en aperçût et la multitude serra si près dona Magdalena
et son élève, que sans l'intervention d'un gentilhomme
de la suite de l'infante, il leur eût été bien difficile de s'en
(1) Le mot est portugais , en espagnol il faudrait atto-dafé.
(2) Vanderhammen, Don Juan de Austria , p. 25.
2""^ SÉRIE, TOME XXXVMI, 54
( 522 )
retourner : encore furent-ils obligés de demeurer près du
carrosse royal, avant de pouvoir songer à reprendre le
chemin de Villagarcia (1).
Cet événement devait avoir d'autant plus d'influence
sur le peuple qui en fut témoin qu'on savait que de toutes
lec cours aucune n'attachait une importance aussi grande
à l'observation du décorum que celles de Castille et d'Ara-
gon.
Dona Magdalena, qui avait tout vu et entendu de si
près, ne rechercha plus depuis quel était l'homme puis-
sant, si cher à son époux, dont elle avait élevé le fils.
Heureusement l'énigme historique était sur le point
d'avoir une solution prompte et décisive.
Le roi Philippe II avait reçu à Gand le billet cacheté de
l'empereur et désirait vivement d'arriver en Espagne pour
en exécuter les stipulations. Parvenu enfin à organiser le
gouvernement à l'assemblée de Gand, il s'embarqua dans
un port de la Zélande, pour revenir dans la Péninsule
qu'il ne devait plus quitter (1559).
A peine avait-il mis pied à terre, qu'il arrangea une
entrevue avec Quixada et son jeune frère (2) : il désigna
à cet effet un sport, très-étendu , près du couvent de la
Espina, presque aux portes de Valladolid, où les anciens
rois de Castille se livraient aux plaisirs de la chasse.
Au jour fixé le bon majordome, richement vêtu et
monté sur le meilleur cheval de ses écuries, se rendit au-
devant du roi à la tête de ses nombreux vassaux. Près de
lui chevauchait sur un palefroi commun le jeune Ge-
ronimo, habillé simplement. Ils n'avaient marché que
(1) Ibidem.
(2) Il avait fait d'abord un voyage à Tolède.
( ^25 )
pendant quelques milles quand le bruit des chevaux leur
annonça la chasse royale. Don Louis Quixada ht halte et
s'avança respectueusement vers Geronimo, et , mettant un
genou en terre, il lui demanda en même temps la per-
mission de baiser sa main, et lui proposa de laisser sa
monture commune pour prendre sa place sur le noble
cheval de guerre qu'il venait de quitter. Geronimo était
stupéfait (1) et il aurait cru que tout ce qu'il voyait n'était
qu'un jeu de la part de Quixada, si le caractère placide et
plein de dignité du seigneur ne s'était pas opposé à cette
supposition. Revenu de son étonnement, il se rendit au
désir de son gardien; et probablement quelque vision de
sa grandeur future l'avait frappé, s'il est vrai, comme on
le raconte, qu'en prenant un air de dignité, il lui dit : « s'il
en est ainsi, vous pouvez bien me tenir l'étrier (2). »
On eut bientôt en vue la royale cavalcade et tous des-
cendirent de cheval; le jeune homme, suivant les instruc-
tions de Quixada, s'avança près du roi et lui demanda à
genoux la permission de baiser la main de S. M. Le roi la
lui tendit gracieusement, et après avoir considéré attenti-
vement le jeune hidalgo, il rompit un silence assez long
en lui demandant « s'il savait qui était son père. » Décon-
certé par une demande aussi délicate qu'imprévue, et
ignorant, en effet, si les rapports sur son origine, qui
étaient venus à ses oreilles, avaient un fond de vérité,
l'adolescent n'osa lever les yeux et ne donna pas de ré-
ponse. Cet embarras ne déplut pas à Philippe, satisfait
(t) Villafàgii., Vida de D. Magdalena de Ulloa, pag. 31.
'2) Il esl cependant difficile de croire qu'un jeune homme aussi intel-
ligent que don Juan n'eût rien compris par la scène si émouvahte de
Vauto-da-fé.
( D2i )
sans doute de lire dans le maintien intelligent et la noble
physionomie de son jeune frère, qu'il ferait honneur à sa
naissance. Il descendit de cheval à son tour et en embras-
sant Geronimo avec tendresse, il s'écria : « Courage, mon
» enfant! vous devez la naissance à un grand homme.
» L'empereur Charles-Quint, qui règne aujourd'hui glo-
» rieux dans le ciel, est votre père, comme il est le
» mien (1). » Se tournant, après ces mois, vers les sei-
gneurs de sa suite, il leur présenta le garçon comme le
fils de leur dernier souverain et son propre frère. Avec
celte promptitude qui est dans l'instinct de leur caste, les
courtisans se hâtèrent de rendre hommage à Geronimo.
Le roi termina cette scène en ceignant son frère d'une
épée, et en lui mettant au cou le brillant collier de la
Toison d'or (2).
La nouvelle de cet étrange événement s'était répandue
en un clin d'œil dans tout le voisinage, et à son retour à
Valladolid le roi trouva les routes couvertes d'une multi-
tude innombrable de peuple passionnée pour jeter un
coup d'œil sur cette perle de la royauté qu'on venait de
découvrir. La vue de ce beau jeune homme fit éclater un
bruyant enthousiasme dans la population et l'air retentit
de ses tumultueux vivats^ quand le roi et sa suite traver-
sèrent les rues de l'antique ville de Valladolid. Philippe
exprima la satisfaction que cette journée lui avait causée
en déclarant qu'il n'avait fait jamais une meilleure chasse,
ni rapporté un gibier aussi agréable (3).
(1) Stracla, de llellu bely., tome 1, pag. 608.
(2) Ainsi, dit Vanderhammcii , mais à tort, la Toison d'or ne fut
donnée à don Juan qu'en 1566.
(5) La plupart des iiistoriens espagnols racontent ces faits de la même
manière.
' »-' C\ " \
\ o2d )
Il se fit un devoir de donner au frère qu'il venait de
reconnailre un élablissement digne de lui. Il lui assigna
pour résidence un des plus beaux hôtels de Madrid, avec
un nombreux domestique, et voulut qu'on y maintînt un
si grand étal que chez un prince du sang. Le comte de
Priego fut créé grand-majordome, don Louis Carillo, le
tîls aine de ce seigneur, devint capitaine des gardes et le
comte de Cordova grand écuyer.-En un mot, les nobles les
plus qualifiés de la Castille ne dédaignèrent pas d'avoir un
emploi dans la maison du jeune campagnard de Villa-
garcia. Celui-ci eut de plus lous les privilèges des infants,
à deux près : il n'eut pas comme eux un appartement au
palais du roi et dut se contenter du titre (VExcellence {[)
au lieu de celui d'Altesse qui leur était réservé, mais on
n'observait pas bien scrupuleusement cette distinction.
Un changement plus important eut lieu dans son nom :
de Geronhno il devint don Juan cVAuhiclie qui rappelait
son origine de la famille impériale des Habsbourg et au-
quel ses exploits ajoutèrent plus tard un lustre, qu'aucun
souverain n'aurait pu lui conférer. Il ne parait pas qu'on
fît quelque tentative pour l'engager dans l'état ecclésias-
tique.
Quixada remplit près du prince le même emploi qu'il
avait eu avant l'élévation de son pupille. Il resta toujours
son aijo ou gouverneur, et vint avec dona Magdalena
demeurera Madrid, dans la résidence de don Juan. Vivant
ainsi dans son intimité, il jouit jusqu'à sa mort d'une
influence sans partage.
En lisant les pages qui précèdent, le lecteur s'est de-
(1) Cabrera, Philippe II, liv. V, c. ô.
( o26 )
mandé sans doule, el pins d'une fois peut-être, pourquoi
tant de précautions si minutieuses et parfois même si bi-
zarres, pour cacher un lait malheureusement si commun
dans les cours, que la naissance d'un fds illégitime du
prince? et cela est d'autant plus étonnant que ce n'était
pas la première fois que Charles avait eu à pleurer une
pareille faute et qu'il se conduisit d'abord d'une manière
tout opposée. Chacun sait que jeune encore, et avant son
mariage, il eut d'une jeune personne d'Audenarde, nom-
mée Marguerite Van der Ghenst, une fille naturelle, nommée
Marguerite, qu'il reconnut aussitôt comme son enfant. Il
la lit élever publiquement avec tous les honneurs dus à
un rejeton de la famille impériale, chez la gouvernante des
Pays-Bas, qu'elle devait remplacer un jour.
Quelle différence entre celle éducation et celle de ce
pauvre Geronimoî
L'historien de Philippe IF, William Prescolt, pense en
avoir trouvé le motif dans l'infériorité de la naissance de
Barbe Blomberg, en comparaison de celle de Marguerite
Van der Ghenst, issue, dit-il, du sang le plus noble des
Pays-Bas {\ ).
L'historien avait peut-être consulté un de ces généalo-
gistes assez communs dans les cours qui aurait prouvé,
pour une poignée de carolus, que la famille des Van der
Ghenst descendait en droite ligne de Genseric, roi bossu
des Vandales d'Espagne. Mais pas plus que Barbe Blom-
berg , Marguerite Van der Ghenst n'avait été élevée sur
les genoux des princesses et toutes deux appartenaient à
(1) Ulwse mollier could boast thaï in lier veins floioed some of the
best blood of Ihe Netherlands W. Prescolt, Histonj of [lie reign of Phi-
lippe the second, tome III , pag. lOô.
( 527 )
l'humble bourgeoisie. Le raisonnement de Prescott croule
donc par sa base.
Nous pensons que la solution de l'énigme est beaucoup
plus simple. Charles-Quint a pensé sans doute, et avec
quelque raison, que la faiblesse d'un jeune prince de vingt
ans pouvait être pardonnable, mais qu'il n'en était plus de
même pour un monarque puissant, déjà père de famille,
veuf (1), et parvenu à la maturité de l'âge. Il se crut
obligé à détruire jusqu'aux moindres preuves de sa fai-
blesse.
Philippe II avait parfaitement apprécié tout le mérite
du gardien de son jeune frère et Qui.xada jouit près
du fils d'une faveur aussi haute que près du père. Grand
écuyer de don Carlos et investi du poste élevé de prési-
dent du conseil des Indes, il reçut plusieurs bénéfices
dans l'ordre militaire de Calalrava. C'étaient là de magni-
fiques récompenses, mais qu'on jugea à peine proportion-
nées au dévouement qu'il avait montré à l'empereur en
s'exilant pendant des années pour élever son fils naturel.
Dans une de ses lettres au roi, il s'explique sur l'édu-
cation actuelle qu'il donnait à son pupille pour suppléer
au défaut de ses premières instructions, dirigées selon les
conseils de l'empereur vers l'état ecclésiastique (2); main-
tenant elles sont en harmonie, dit-il, avec les hautes des-
tinées, qui viennent de s'ouvrir pour don Juan, et le
prince s'y plaît infiniment mieux qu'aux études littéraires
et religieuses de Yillagarcia.
Philippe II se résolut cependant à donner à son frère
l'éducation la plus complète en l'envoyant à l'Université
(1) L'impératrice était morte à Tolède , le 1" mai 1359.
(2) Gacliard, Retraite et mort de Charles-Quint, tome II , pag. 4o.
( 528 )
d'Alcala de Henarès, fondée au siècle passé par le grand
cardinal Ximenès, et déjà rivale de la vieille école de
Salamanque. Don Juan y réjoignit ses deux neveux : don
Carlos, le fils infortuné de Philippe II, et Alexandre Far-
nèse, fils de la duchesse de Parme. Tous trois devaient
fournir, quoique à des titres bien différents, des pages inté-
ressantes à l'histoire. Ils étaient à peu près du même âge,
mais don Juan surpassait de beaucoup ses deux concur-
rents par sa bonne mine, ou plutôt par sa mâle beauté.
On admirait son urbanité, son indulgence et sa probité,
autant que l'aménité de ses mœurs (1), son esprit et sa
modestie dans une si récente élévation. Son cœur était
plus riche encore de ces qualités plus nobles qui promet-
tent la grandeur la plus éminente.
Si l'on en croit ses biographes, il ne négligeait en rien
aucune de ces études, mais il avait une prédilection mar-
quée pour celles qui se rattachent au grand artde la guerre.
Il était parfait en tous les exercices chevaleresques et ne
souhaitait rien autant que de se voir ouvrir un champ, où
il pourrait en donner des preuves. La connaissance de sa
•famille réelle lui donnait une généreuse ambition de mon-
trer par des actions héroïques combien il en était digne.
Siège de Malle.
Don Juan quitta les bancs de l'école, en I56i, après trois
années d'études universitaires bien employées. L'année
suivante fut celle du fameux siège de Malte, où une poignée
de guerriers défendirent leur île solitaire contre toutes les
forces de l'empire ottoman. Toutes les sympathies de
(1) Strada, de Bell, belg., tome I , pag. 609.
C 529 )
don Juan se prononçaient pour les chevaliers chréliens; il
résolut (le jeter sa propre Ibrtune dans la même balance
que la leur, et de gagner ses premiers lauriers sous l'éten-
dard de la Croix. 11 ne songea pas à demander la permis-
sion à son frère, car il était sûr d'essuyer un refus. Mais il
quitta secrètement la cour, avec une suite peu nombreuse,
et prit la route de Barcelone, où se préparait un arme-
ment qui devait sous peu de jours mettre à la voile pour
porter des secours à l'héroïque La Valette. Partout il fut
accueilli avec tout le respect diï à son rang. A Saragosse,
il était logé chez l'archevêque quand il tomba malade, et
reçut une lettre du roi, qui avait appris la cause de son
départ et lui commandait de revenir, puisqu'il était en tout
cas trop jeune pour prendre part à cette lutte désespérée.
Don Juan ne tint aucun compte de cet ordre royal et
poussa jusqu'à Barcelone, où il fut singulièrement mortifié
en apprenant que déjà l'expédition était en mer [i). Il réso-
lut de passer les montagnes et de gagner Marseille, où il
espérait trouver un bâtiment. Le vice-roi de Catalogne ne
parvenait pas à dissuader le jeune homme de sa folle entre-
prise, quand il reçut une nouvelle dépêche de la Cour qui
ordonnait d'une manière plus énergique à don Juan de
revenir sans délai, sous peine de s'exposer à un sévère
déplaisir de la part du roi. Une lettre de Quixada l'avertit
qu'il devait s'attendre à une disgrâce certaine, s'il conti-
conlinait à se jouer ainsi des ordres du roi. Après cela il
ne restait qu'à obéir.
(1) Don Juan aurait sans doute applaudi à ces vers homériques de
Racine:
Patrode ei moi, Seigneur! 7ious irions l'assiéger.
( 530 )
Celle incartade de jeunesse ne pouvait manquer de
devenir bienlùt publique el d'environner d'une nouvelle
auréole de gloire le nom de don Juan. Chez une nalion qui
devail son existence même à huil siècles de combats glo-
rieux, la religion se confondait avec le patriotisme el l'in-
dépendance, et le peuple très-sensible à des faits d'une
audace romanesque, se réjouit de voir un de ses princes
promettre un héros pour l'avenir à sa patrie. Les jeunes
gentilshommes que l'exemple de don Juan faisait rougir
de leur inaction se promirent de le suivre à la guerre.
Philippe lui-même, qui sentait mieux que personne la né-
cessité de punir l'insubordination de son frère, prit plaisir
à louer le caractère généreux qu'il avait déployé. Le mo-
narque qui laissait une belle flotte demeurer immobile dans
les eaux de Messine el à quelques lieues du boulevard de
la chrétienté, exposé à une ruine effroyable, comment ne
comprenait-il pas que l'initiative de son frère était une cen-
sure sanglante de sa propre conduite?
Le changement soudain qui avait eu lieu dans la posi-
tion de don Juan, qui avait tout à coup échangé ses ha-
bits de villageois contre les vêtements luxueux d'un
prince , n'avait pu changer au milieu d'une cour adula-
trice le caractère noble, mais simple qui le distinguait,
Philippe l'avait craint, mais il vit avec grand plaisir qu'il
s'était trompé entièrement sur les dispositions de don
Juan heureusement cultivées par les bons conseils de
Quixada; mais ce qui atfermit davantage la confiance de
Philippe en son jeune frère, ce fut la conduite pleine
de sagesse, de patience et de mesure, dont il fit preuve
envers le malheureux don Carlos. Plein de déférence en-
vers l'héritier présomptif de tant de couronnes, il ne laissa
pas de lui montrer combien sa conduite envers son roi et
( 531 )
son père était criminelle, ses plans aussi mal conçus que
coupables. Personne à la cour ne donna autant de preuves
de ses regrets à la triste fm de cette victime des plus
funestes passions.
Au commencement du printemps de l'année 1568, il
se présenta au roi Philippe une occasion favorable pour
occuper l'ambitieuse activité de don Juan en lui contlant
le commandement d'une flotte réunie au port de Cartha-
gène pour attaquer les corsaires qui alarmaient le commerce
espagnol par leurs pirateries. Mais en lui donnant cette
preuve de satisfaction, le monarque eut soin de suppléer
à l'inexpérience de son frère, en nommant pour comman-
der en second don Louis de Zuniga et Requesens (i), grand
commandeur de l'Ordre de Saint Yago. En décernant le
titre de chef de la flotte à son frère, il remplissait les
désirs du peuple et en lui donnant pour second un homme,
dont la gravité lui était connue, il assurait le succès de
l'expédition.
Le 3 de juin , don Juan sortit du port à la tête d'une
escadre aussi belle qu'aucune autre, qui avait paru dans
la Méditerranée. Le vaisseau qu'il montait lui-même était
une puissante galère peinte avec magnificence sans égale,
par des portraits et des tableaux dont les sujets étaient,
pour la plupart, empruntés à l'histoire ancienne ou à la
mythologie et choisis de manière à donner des instructions
au jeune commandant. La morale de chaque tableau était
expliquée par une courte maxime en latin. Ainsi de quel-
que côté que le jeune chef tournât les yeux, ils étaient
sûrs de rencontrer une leçon; de manière, dit Prescott,
(1) Ce seigneur est plus connu sous le simple nom de Requesens, qui
élail celui de sa mère.
( 552 )
« que la galère peut être comparée à un volume rielie-
» ment illustré afin d'imprimer son contenu dans la mé-
» moire du lecteur (1). »
Tel fut le début de don Juan dans le métier des armes,
il laissait entrevoir la renommée qu'allait acquérir le con-
quéraut des Alpujarres sur les Maures insurgés et le vain-
queur des Musulmans à Lépante.
(1) Prescolt, lonie III, page 119.
( 535 )
CLASSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du jeudi 8 octobre 1874.
M. N. De Keyser, directeur, président de l'Académie.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. Alvin, G. Geefs, Jos. Geefs, Ferd.
De Braekeleer,C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Edm.De Busscher,
Alph. Balat, Aug. Payen, le chevalier L. de Burbure,
J. Franck, G. De Man, Ad. Siret, J. Leclercq , Ernest Slin-
geueyer, Alex. Robert, F.-A. Gevaert, Adolphe Samuel,
membres ; F. Stappaerts et L. Terry, correspondants.
MM. R. Chalon , directeur de la classe des lettres, et
Éd. Mailly, correspondant de la classe des sciences, assis-
tent à la séance.
CORRESPONDANCE.
M. Louis Tinant, artiste sculpteur à Bruxelles, fait
hommage d'un exemplaire, en bronze, de son médaillon
représentant feu M. Sylvain Van de Weyer, membre de
l'Académie, lequel a contre-signe en qualité de Ministre de
l'Intérieur, le l*"" décembre 1845, les arrêtés royaux rela-
tifs à la création et à l'organisation de la classe des beaux-
arts.
La classe vote des remerciements à M. L. Tinant pour
ce don, qui figurera dans son médaillier.
( oU )
— MM. Th. Donaldson et le vicomte Henri Delaborde,
associés de la classe, expriment par écrit leurs remercî-
ments pour l'envoi des dernières publications académiques.
— M. A, Banet-Rivet, de Paris, soumet au jugement de
la clause une brochure portant pour titre : D'un prétendu
inventeur de la transposition par les nombres.
L'auteur sera remercié pour l'envoi de celte brochure,
qui sera déposée dans la bibliothèque de la Compagnie.
Il sera informé, en même temps, que, en vertu de son rè-
glement, l'Académie ne fait pas de rapport sur les ouvrages
déjà livrés à la publicité.
— Conformément à la commande qui lui a été faite par
M. le Ministre de l'intérieur, M. Charles Geefs, artiste
sculpteur à Bruxelles, a placé dans le grand vestibule des
Académies le buste en marbre de feu M. le commandeur
de Nieuport.
— M. le secrétaire perpétuel appelle l'attention de ses
confrères sur la publication du prochain Annuaire de
l'Académie. Il signale, à cette occasion, les noms de divers
membres décèdes qui n'ont pas encore de notice biogra-
phique.
M. Éd. Fétis accepte de rédiger celle de feu M. Alexis
Baron, dont le portrait existe déjà. M. Julien Leclercq fera
la notice de feu M. Jouvenel.
Après avis de la commission des portraits, la classe dé-
signe les artistes graveurs qui seront chargés des portraits
pour l'Annuaire précité.
( 535 }
PROGRAMME DE CONCOURS POUR 1875.
La classe s'occupe de la formation de son programme
de concours pour J875.
Elle adopte, en principe, la remise au concours des
deux questions littéraires du programme de 1874.
Elle remet à la prochaine séance la rédaction définitive
du programme.
D'après le roulement établi par le paragraphe o de l'ar-
ticle 13 du règlement intérieur de la classe, les sections
de sculpture et de gravure présenteront un sujet d'art
appliqué de sculpture et de gravure en médailles pour le
concours de 1875.
MONUMENT QUETELET.
M. le secrétaire perpétuel présente la liste de souscrip-
tion pour le monument à élever à Bruxelles à la mémoire
de M. Quetelet.
( 556 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Notice sur Frédéric Van de Kerkhove, paysagiste, mort le
12 août 481 â, à l'âge de 10 ans et 11 mois (1); par
M. Ad. Siret, membre de l'Académie.
L'histoire des arts graphiques n'offre peut-être pas dans
le monde entier, depuis l'origine des sociétés civilisées,
un exemple de précocité géniale semblable à celui que la
Belgique présente en ce moment à l'étonnement, et, disons-
le sans hésiter, à l'admiration de tous. Paul Potter, a-t-on
dit, fut un maître habile à 14 ans. La vérité est qu'il
ne le fut qu'à 18. Luc de Leyde fut, dit-on, un miracle
inouï de précocité puisque, à 9 ans, (dit-on toujours) il
grava son moine Sergius, lequel, en réalité, a été gravé
quand Luc avait 14 à 15 ans. Nulle part on ne rencontre
d'enfant sublime d'un talent aussi soudain dans son épan-
chement, aussi ému dans son expression et d'un caractère
aussi grandement mélancolique que celui dont nous allons
nous occuper un instant. Certes, si la Belgique doit déplo-
rer la mort d'un de ses fils disparu presque dans l'ombre,
c'est une consolation et un devoir pour elle de placer son
nom dans l'éblouissante lumière dont il est digne. Qu'une
nouvelle et réelle gloire soit du moins la compensation de
cette mort si prématurée!
Frédéric-Jean-Louis Van de Kerkhove est né à Bruges,
(1) Le Journal des Beaux-Arts du 15 septembre 1874 renferme une
étude sur Frédéric Van de Kerkhove.
( S37 )
le 4 septembre 1862. Il entra dans la vie par la voie de la
doueur et la conservation du peu de jours qu'il a vécu
lut le résultat des soins incessants que sa mère lui prodi-
gua. De bonne heure son intelligence se montra prompte
mais raisonneuse; il questionnait beaucoup et presque tou-
jours sa curiosité s'occupait des mystères de l'ordre imma-
tériel. Il alla à l'école où il étonna ses professeurs par la
soudaineté de ses questions et de ses reparties. A 6 ans il
lui fut impossible de continuer la fréquentation de l'école
Son père, amateur peintre de genre, l'établit à côté de lui
dans l'atelier où l'enfant demanda bientôt des couleurs et
ou, immédiatement, il se mit à l'œuvre sans avoir' la
moindre notion des principes du dessin. Sa vie s'écoula
ainsi dans cet atelier.
Les tableaux de genre de son père le préoccupaient peu.
Il avait l'mstinct de la nature et ne rêvait qu'elle II visita
les côtes de la mer à Ostende, à Blankenberghe et les cam-
pagnes de Bruges. En rentrant il jetait avec une espèce de
lune le souvenir de ses impressions sur de petits mor-
ceaux de bois qu'il ramassait dans l'atelier. Le soir il allait
dans le voisinage vivre et jouer avec les pauvres pour
lesquels il avait une prédilection particulière. Son caractère
était doux mais triste : il sentait vaguement au-dessus de
lui frissonner les ailesde la mort. Le 12 août 1873 celles-ci
se fermèrent sur lui et l'emportèrent. Un épanchement au
cerveau l'enleva rapidement à la tendre affection des siens
et a l'amitié de ces pauvres au milieu desquels sa mémoire
va désormais passer à l'état de légende. La légende chc petit
tritz, dira-t-on plus tard dans les quartiers de Bruges
quand quelque tradition viendra rappeler le cœur excel-
lent, la main ouverte et le talent phénoménal de cet enfant
Sa biographie est donc courte comme sa vie, mais ce qui
2"'= SÉRIE, TOME XXXVIH. 3g
( 558 )
est unique et colossal , c'est son œuvre. Il laisse environ
600 petits panneaux peints, études et esquisses. A peu
près 400 sont restés dans la famille. Le reste a été donné
par Frédéric lui-même aux pauvres.
Sa première œuvre peinte date de 1870. Il avait 8 ans.
C'est une vue copiée d'après une gravure de Vllhistralion.
Il en imita très-superficiellemenl le dessin qu'il continua à
sa façon, puis il peignit. Un aplomb inconcevable s'y mani-
feste déjà et on devine que l'enfanta l'intuition des masses,
de la perspective et de la couleur. A 9 ans, c'est autre
chose; il ébauche par centaines des couchers de soleil, des
bruyères, des effets de pluie et de vent à désespérer des
artistes faits. Une tristesse adorable se montre à peu près
partout; son âme mélancolique, pensive et douce a posé là
une empreinte d'une grandeur harmonieuse qu'on ne sau-
rait considérer sans émotion. C'est ce qu'ont éprouvé tous
ceux qui ont vu les paysages de Frédéric, notamment quel-
ques célèbres artistes modernes, qui n'ont pas craint d'af-
firmer que ces paysages pourraient être signés des noms
les plus grands et que ceux-ci n'en pourraient qu'être ho-
norés.
A 10 ans, Frédéric se préoccupe davantage de la pra-
tique. 11 oublie, dirait-on, de pleurer. On sent qu'une
extraordinaire habileté de facture va se manifester au pré-
judice de cette pensée continue de mystère et d'appréhen-
sion qui tourmentait son intelligence. Tout à coup la mort
l'arrête; son âme était entièrement passée dans son œuvre
au moment même où l'on pouvait craindre que la main
ne se substituât à l'inspiration.
Nous n'avons pas la prétention de faire ici une étude
approfondie des œuvres de cet étonnant génie. L'exposition
qui sera faite de ses i)rodui(s satisfera amplement la curio-
( 539 )
site et l'atlenle du public. Elle permettra aussi de juger,
au point de vue scientifique, ce phénomène éclos au sein
de la race flamande, si admirablement préparée, du reste,
par la nature, pour les aptitudes artistiques. Ce que nous
avons voulu, avant tout, c'est de consigner ici le souvenir,
avec dates exactes, d'un fait unique dans les fastes de l'art.
Ce que nous avons voulu, c'est d'empêcher que ce fait ne
soit, dans l'avenir, altéré ou contesté.
Il importe, dans l'intérêt de la justice et de la vérité,
que l'histoire contemporaine fasse ses propres affaires afin
qu'elle ne soit pas un objet de doute quand la postérité
dressera le bilan de nos splendeurs artistiques et qu'elle
s'occupera de cet enfant sans fin; car c'est bien de Frédéric
Van de Kerkhove que l'on peut dire, avec Théophile Dufour:
V enfant n'a pas de bornes^ l" enfant est infini, pour ainsi
dire, et touche à Dieu par le sentiment.
b
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Chalon [Renier). — Discours prononcé à la séance du \ J jan-
vier 1874 de FAcadémie d'archéologie dé Belgique. Anvers,
1874; broch. in-S".
Mathieu {Adolphe). — La vieillesse. Bruxelles, 1874; broch.
in-8°.
Nère [Félix). — Notice sur le docteur Gilles-François Godin,
botaniste liégeois. Gand, 1874; broch. in-S".
Malaise (T.). — Sur quelques roches porphyriques de Bel-
gique. Bruxelles, 1874; br. in-8°.
Bellrjnch [A.). — Cours élémentaire de botanique. Namur
1871-1874; vol. in-8.
( 540 )
Rivier [Alphonse). — Rodolplie de Vautravcrs el le corale
Charles de Cobenzl, d'après les documents inédits. Broch.
in-S", s. 1. n. d.
Folie (F.). — Sur un nouveau principe de mécanique relatif
aux mouvements stationnaires, par M. R. Clausius (traduction
extraite du Journal de mathématiques pures et appliquées);
brochure in-4°. — Cours de calcul des probabilités, fait à
l'Université de Liège de 1849 à 1857, par A. Meyer. Publié par
F. Folie. Bruxelles, 1874; vol. in-8».
Crépin [François). — Description de quelques plantes fos-
siles de l'étage des psammites du Condroz (Devonien supé-
rieur). Bruxelles, 1874; broch. in-8°.
Abbeloos {J.-B.) et Lamy [T.-J.). — Gregorii Barhebrœi
chronicon ecclesiaslicum, tomus II. Louvain, 1874; vol. in-8°.
(Envoi du Ministère de l'intérieur.)
Darreux. — L'anasarquc, suite de rétention d'urine; —
Choléra et cimetières. Paris, 1874; 2 broch. in-8''.
Dubois [Alphonse). — Les lépidoptères de l'Europe, leurs
chenilles et leurs chrysalides, 1"'^ série : Espèces observées en
Belgique, 65" à 06" liv. Bruxelles, 1874; 4 cah. in-8°. (Envoi du
Ministère de l'intérieur).
Firket [Ad.). — Lithologie du fond des mers, parM.Delesse
(Compte rendu analytique); — Transformation sur place du
schiste houiiler en argile plastique. i..iége, 1874; 2 broch. in-S".
Heiischling [Xavier). — Anciens registres paroissiaux. Ta-
bles alphabétiques. Liège, 1874; broch. in-8''.
Poswick [Eugène). — Histoire Idographique et généalo-
gique de la noblesse limbourgcoise , tome \. Liège, 1875;
vol. in-4".
Striiinan-Picard [Amélie) el Kurlh [Go'Jefroid). ■ — Antho-
logie belge. Bruxelles, 1874; vol.in-16. (Envoi du Ministère
de l'intérieur.)
Van der IJaeçjhen [Ph.). — Maximes populaires de l'Inde
méridionale. Bruxelles, 1858; in-S".
(S4I )
Graindorge (.Joseph). — Exercices de calcul intégral à l'usage
des élèves de l'École des mines. Liège, 1873; br. in-8".
Torfs [Loil.) et Hansen [C-J.]. — Xederlandsche krijgs-eii
parlijnanieii. Bruxelles, 1874; br. in-8".
Verslag over het bestiiiir en ilen loestand der zaken van de
stad Turnlwut. Turnhout, 1874; vol. iii-S".
Caisse de prévoyance des ouvriers mineurs. Provinces de
Hainaut, Liège et Namur. — Raj)j)ort annuel de 1873; 3 brooli.
in-4° et 1 brocli. in-8°.
Portefeuille de John Cocker iU, 'z'' vol., pi. 97 à 106; Loco-
motives à six roues couplées, fcuil. 1 à o. Liège et Paris,
5 feuilles in-4" et 10 pi. in-fol.
Observatoire royal de Bruxelles. — Annales, tome XXIIL
Bruxelles, 1874 ; vol. in-4°.
Recueil des rapports des secrétaires de légation de Bel-
gique. — Tome II, S'' liv., octobre 1874. Bruxelles, 187-i; cali.
in-8".
Académie royale de médecine de Belgique, à Bruxelles.
— Mémoires couronnés in-8'', t. Il, 5*^ et 4*^ fascicules; — Bul-
letin, 5" série, t. VIII, n°'7-8 et 9, 1874. Bruxelles, 1874;4cab.
in-8''.
Conseil provincial de la province de Brabant. — Session
ordinaire de 1874 (Distribution deau). Bruxelles, 1874; br.
in-S" (double exemplaire).
Ancdectes pour servire d l'histoire ecclésiastique de la
Belgique. — Tome IX, 1874, 3" liv. Bruxelles et Louvain; cali.
in-8°.
Académie d'archéologie de Belgique , à Anvers. — Bulletin,
t. I (2' série des Annales), 10'' fascicule. Anvers, 1874; cali.
in-8''.
Société royale de botanique de Belgique. — Bulletin, t. XIV,
n" 1. Bruxelles, 1874; in-8°.
Société royale de numismatique belge. — Revue, d" série,
t. VI, i' liv. Bruxelles, 1874; cah. in-8''.
( W2 )
Commissions royales cVarl et iV archéologie. — Bulletin,
XIII' année, 1874, n"' o et 6. Bruxelles; oah. in-8".
Musée de l'industrie de Belgique. — Bulletin, 35" année,
juillet à septembre 1874, tome 06, n"' I à 3. Bruxelles, 1874 ;
3 cah. gr. in-8''.
Société malacologique de Belgique. — Procès-verbaux des
séances de mai à septembre 1874. Bruxelles; feuilles in-8".
Société roijule de pharmacie de Bruxelles. — Bulletin,
18' année, n°' 7 à 9, juillet à septembre 1874. Bruxelles;
3 cah. in-S".
Société entomologique de Belgique. — Compte rendu,
série II, n"' I, 2, 3. Bruxelles, 1874; feuilles in-8°.
Société royale des sciences médicales et naturelles de
Bruxelles. — Journal, 52' année, juillet à septembre 1874.
Bruxelles; 5 cah. in-8".
Annales de l'électricité médicale et Echo médical réunis,
nouvelle série, 15" volume, 7" et 9" fascicules, juillet et sep-
tembre 1874. Bruxelles; 2 cah. in-8".
Annales d'oculislique, tome LXXII, I'" et 2'' liv. Bruxelles,
1874; cah. in-8".
Annales de médecine vétérinaire , 25'' année, 7" à 9* cah.,
juillet à septembre 1874. Bruxelles; 3 cah. in-8''.
La Presse médicale belge, 20* année, 1874, n"' 27 à 39.
Bruxelles; 13 feuilles in-4".
Moniteur industriel belge, vol. I, n°' 10 h 18. Bruxelles,
1874; 9 feuilles in-4".
Le Bibliophile belge, 9" année, tome IX, 7' liv. Bruxelles,
1874; cah. in-8°.
L'Abeille, revue pédagogique, 20' année, 7" liv., septembre
1874. Bruxelles; cah. in-8".
Société de médecine d'Anvers. — .annales, XXXV* année,
août, 1874. Anvers; cah. in-8".
Société de pharmacie d'Anvers. — Journal, 30'" année, juin
à août 1874. Bruxelles; 5 cah. in-8".
( 543 )
Société d'émulation pour l'étude de l'histoire et des antiqui-
tés de la Flandre. — Annales, 3" série, tome IX, n" I et "2.
Bruges, 1874; eah. in-8°.
Revue de l'instruction publique en Belgique, 22' année,
nouvelle série, tome X VU'" , 4' et o'' liv. Gand, 1874; 2 cah.
in-S".
L'Illustration horticole , 5" série, b" vol., tome XXI, 7' et
S*" liv., juillet et août 1874. Gand; 2 cah. in-8°.
Messager des sciences historiques, 3* liv., année 1874.
Gand; cali. in-8".
Institut archéologique liégeois. — Bulletin, tome XII, 1"
liv. Liégè, 1874; cah. in-8".
Société niédico-chiriirgiccde de Liège. — Annales, 15* année,
août et septembre 1874. Liège; 2 cah. in-8°.
L'Echo vétérinaire, 4" année, juillet à septembre 1874.
Liège; 5 cah. in-S".
Le Scalpel, 27'' année, n"' 1 à 15, juillet à septembre 1874.
Liège; 15 fouilles in-4°.
Journal des Beaux-Arts , XVI' année, 1874, juillet à sep-
tembre, n"^ 15 à 18. Louvain; 6 feuilles in-4°.
Cosijn (Z)"" P.-J.) en Verivijs {D'' E.). — Woordenboek der
Nederlandsche Taal, derde reeks, derde aflevering (Gast-
Gebrek). La Haye, 1874; cah. in-8°. (Envoi du Ministère de
l'intérieur.)
Von Baumhauer (E.-H.). — Sur un météorographe univer-
sel destiné aux observatoires solitaires. Harlem, 1874; broch.
in-8''.
Société hollandaise des sciences, à Harlem. — Archives,
tome IX, liv. 1'% 2' et 3'; — Natuurkundige Verhandelingen,
ô' série, ded II, n"' I en 2; — Programme pour l'année 1874.
Harlem, 1874; cah. in-4° et 5 cah. in-S".
Musée Teyler, à Harlem. — Archives, vol. III, fascicule IV*.
Harlem, 1874; cah. gr. in-S".
Teyler's Godgeleerds Genootschap, te Haarlem. — Verhan-
( 544 )
deliiigen, nieuwe série, deel III, d'^ en 2" sluk. Harlem, 1874;
2 cah. in-8°.
K. Insliluut voor de taal-land-en volkenkunde van JVeder-
landsch-Indië. — Bijdragen, III. volgreeks, IX. deel, l^en
2" stuk; — Babad Tanah Djawi. Met aanteekeningen van
J.-J. Meinsma. La Haye, 1874; cah. et vol. in-S".
Zeeuwsch Genootschap der wetenschappen, le Middelhurg.
— M. Laurens Pieter Van de Spiegel en zijne tijdgenoo-
ten (1757-1800). Eerste deel. Toegelicht door G. W. Vreede.
Middelbourg, 1874; vol. in-8°.
Provinciaal Utrechtsch Genootschap van kunsten en iveten-
schappen. — Aanteekeningen van het verhandelde in de seclie-
vergaderingen , 1873; — Verslag, 1875; — (J. C. G. Boot).
De Vita et scriptis Pétri Wesselingii. — Geschiedenis der
Noordsche Compagnie, door M. S. Muller. Utrecht, 1875-1874;
2 cah. et 2 vol. in-8''.
K. Natuurkundige vereeniging in Nederlandsch Indië,
Batavia. — Natuurkundig Tijdschrift , zevcnde série, deel II,
aflevering 1-2, 5-4. Batavia, 1871-1875; 2 cah. in-8°.
Diival [Jules). — Nouveaux faits concernant la mutabilité
des germes microscopiques. Paris, 1874; broch. in-8''.
Diez [Frédéric). — Grammaire des langues romanes, 5" édit.,
tome II, 1" fascicule. Paris, 1874; in-8°. (Envoi du Ministère
de l'instruction publique et des cultes de la République fran-
çaise.)
Meunier [Stanislas). — Cours de géologie comparée professé
au Muséum d'histoire naturelle. Paris, 1874; vol. in-8°.
Académie des sciences de Paris. — Comptes rendus hebdo-
madaires des séances, tome 78, n" 27; tome 79, n"' 1 à 13.
Paris, 1874; 14 cah. in-4''.
Société de géographie de Paris. — Bulletin, mai et juin 1874.
Paris; 2 cah. in 8°.
Société météorologique de France, à Paris. — Annuaire,
tome XIX% 1871, Tableaux météorologiques, feuilles 1-5;
( 545 )
tome XX, 1872, Bulletin des séances, feuilles C-18; tome XXI,
1875, Bulletin des séances, feuilles 1-5. Paris, 1874; 3 cah.
in-S".
Société géologique de France, à Paris. — Bulletin, 3* série,
tome 11% n" 4, octobre 1874. Paris; cah. in-S".
Société mathématique de France, à Paris. — Bulletin,
tome II, n" 4, septembre 1874. Paris; cah. in-S".
Revue scientifique, n"' i à 13, ¥ année, 2" série. Paris,
1874; 13 cah. in-4''.
Revue politique et littéraire, n°' 1 à 15, 4*= année, 2*= série.
Paris, 1874; 13 cah. in-4°.
Revue britannique, juillet à septembre 1874. Paris; 3 cah.
in-8°.
rinstitut, nouvelle série, 2" année, n"' 78 à 88, 90 et 91.
Paris, 1874; 13 feuilles in-4°.
Revue des questions historiques, 9^ année, 32*= liv., l" oc-
tobre 1874. Paris, 1874; cah. in-8°.
Archives de médecine navale, tome XXir, juillet et août
1874. Paris, 1874; 2 cah. in-8''.
Le Progrès médical, 2' année, n"' 27 à 39. Paris, 1874;
13 feuilles in-4°.
Revue hebdomadaire de chimie, 5" année, n"' 28 à 39. Paris,
1874; 12 feuilles in-8".
Journal de l'agriculture, tome III, juillet à septembre 1874.
Paris; 13 cah. in-8°.
Indicateur de l'archéologue, n"^ 19 à 21, juillet à septem-
bre 1874. Paris; 3 cah. in-8°.
Société des Antiquaires de Picardie, à Amiens. — Bulletin,
année 1874, n" 2; — Mémoires, 2* série, t. IX, 1863; 3« série,
t. III, 1873. Amiens; 2 vol. et 1 cah. in-S".
Société linnéenne du nord de la France, à Amiens. — Bul-
letin mensuel, 3* année, 1874, septembre et octobre, n<" 27
et 28. Amiens, 1874; 2 feuilles in-8°.
Société d'Emulation de Cambrai. —Mémoires, tome XXXII,
( 546 )
2' et 5' parties, 1874. Cambrai, 1874; vol. et cah. in-8".
Société savoisienne (V histoire et trarchéoloçiie, à Cliumbéry.
— Mémoires et documents, tomes X et XI. Cliambéry, 18G6 et
18G7; 2 vol. in-8.
Société des sciences, de ^agriculture et des arts de Lille. —
Mémoires, ô"^ série, années 1805, 1866, 1875 et 1874, 2% 3%
12*^01 15' vol. Lille; 4 vol. in-8°.
Comité flamand de France, à Lille. — Bulletin, tome VI,
n°d. Lille, 1874;cah. in-8°.
Bulletin scientiflque, historique et littéraire du départe-
ment du Nord, d Lille, G' année, n"' G, 7 et 8. Lille, 1874;
2 cah. in-8°.
Académie de Stanislas, à JVancy. — Mémoires, 18G2 (Docu-
ments pour servir à la description scientifique de la Lorraine).
Nancy, I8G2; vol. in-8».
Société d'agriculture, sciences et arts de l'arrondissement de
Valenciennes. — Revue agricole, XVI'' année, '18G4, tomes XVII
et XVIII; tome XXVII, n"' 3 à 8, mai-aoùt 1874; — Mémoires,
tome VI, I84G. Valenciennes; 3 vol. et 3 cab. in-8".
Putzeys [Félix) et Fiïrst Tarchanoff. — Ueber den Einfluss
des Nervensystems auf den Zustand des Gefasse. Berlin, 1874;
brocb. in-8''.
Giehel [Dr C.-G.). — Zeitscbrift fiir die Gcsammtcn Naturwis-
senschaften, Neue Folge, 1875, Bd. VIL Berlin, 1875; 12 cah.
in-8".
Berliner Gesellschaft fur Anthropologie , Ethnologie imd
Urgeschichte. — Verbandlungen , Jabrg. 1874, janner-marz.
Berlin, 1874; 3 cab. gr. in-8°.
Deutsche chemische Gesellschaft zu Berlin. — Berichte, N°' 1 0,
11, 12, 15, siebenter Jahrgang. Berlin, 1874; 5 cab. in-8».
K. PreussischeAkademie der Wissenschaften, zu Berlin. —
Monatsbericbt, juin, juillet et août 1874. Berlin; 3 cab. in-8°.
Schlesische Gesellschaft fur vaterlandische Cultur, Breslau.
— Jabres-Bericht, o1'"", 1875; — Abbandlungcn : philoso-
( o47 )
pliiscli-hislori-che Ablheilung, 1875-1 874. Breslau, 1874;
2 cah. in-8°.
Jusiiis Fertiles' geographische Anstalt zu Gotha. — Mit-
theikuigen, 20. Ed., 1874, VI, VII, VIII, IX. Gotha, 1874; 4 cah.
in-8°.
lyaturhisfoi'iscli-inedicinischer Verei?i zu Heidelberg. —
Verliandhingen, Neue Folge, I. Bd., I. Heftc. Heidelberg, 1874;
cah. 111-8°.
Ferdinandeiim Gesellscliaft fur Tirol und Vurarlherg.
Innsbruck. — Zeitschrilt, III. Folge, 18.Hefte. Inspruck, 1874;
cah. in-8",
Astronomische Gesellscliaft, Leipzig. — Publication, XIII:
BeobachtLingen der Sonncnflecken zu Anglam von Prof. D'
G. Spôrer; — Vierteljahrsschrift, IX. Jahrg., 11. Hefte. Leipzig,
1874; cah. in-4» et cah. in-8°.
K. b. Akademie der Wissenschaften zu Milnchen. — Sit-
ziingsbericlitc : philosoph.-philolog. und hist. Classe, Heft VI,
1875; Hcft I, II, 111, 1874; — Mathem.-physikal. Classe,
Heft III, 1875; Heft I, II, 1874. .Munich, 1875-1874; 7 cah.
in-8°;— Abhandlungen der hist. Cl., Bd. XII, 2. Abtheilung; —
Kônig Johann von Sachsen von J. von Dôllinger; — D'' Justus
Freiherrn von Licbig, von August Vogel; D'' Th.-L.-W. von
Bischoff; D"' Max von Pettenkofer; — Annalen der Slernwarte,
XIII. Suppl. Bd. Munich, 1874; 3 cah. in-4" et 1 cah. in-8".
Der Philoinatie in ^Veisse. — XVIII. Bericht, April 1872
bis zum Mai 1874. Neisse, 1874; broch. in- 4°.
Société inathéinatique de Bohème, à Prague. — Bulletin,
tomes I etll, 1872 et 1874; — Journal de mathématiques et de
physique, tomes I, II et III, 1872 à 1874. Prague; 25 cah. in-8".
(En tchèque.)
K. Akademie der Wissenschaften in Wien. — Sitzung der
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feuilles in-8".
Anlhropologische Gesellscliaft in Wien. — Mittheilungcn,
N" 5 bis 6, IV. Bd., 1874. Vienne, 1874; 4 cah. in-S".
( 548 )
K. K. geologische Reichsanstalt in Wien. — Verliand-
lungen, n"' 7 à 1 1 ; — Abhandlungcn , Bd. VII, Hcft Nr. 1
und 2; — Jalirbucli , Jahrgang 1874, XXIV. Bd., n" 2. Vienne,
1874; 2 cah. gr. in-4°, 1 cah. et IG feuilles pet. {0-4°.
K. K. Universitdf zu Wien. — Offentlichc Vorlesungen,
Winfer-Semester 1874-1875. Vienne, 1874; cah. in-4" (2 exem-
plaires).
Verein fiir vaterldndische Nalurkunde in Wilrtlemberg,
Stuttgart. — Jahreshefte, I., II. und III., 1874. Stuttgart, 1874;
2 cah. in-S".
PhysikaL-medicin. Gesellschafl in Wiirzburg. — Ver-
handlungen, Neue Folgc : Bd. VU; Bd. VIII, 1. und 2. Heft.
Wiirzbourg, 1874; 2 cah. in-8".
Université de Kazan. — Bulletin et Mémoires, vol. XLI,
4874, n"^ 1 et 2. Kazan, 1874; 2 cah. in-8''. (En russe.)
Société impériale des naturalistes de Moscou. — Bulletin,
année 1875, n° 4. Moscou , 1874; cah. in-8''.
Société chimique de Saint-Pétershourg. — Journal, tome VI,
n"' 6 et 7. Saint-Pétersbourg, 1874; 2 cah. in-S". (En russe.)
Commission impériale archéologique, à Saint-Pétersbourg.
— Compte rendu pour les années 1870 et 1871, avec allas.
Saint-Pétersbourg, 1874; vol. gr. iii-4° avec atlas in-fol.
Académie royale de Copenhague. — Bulletin, n" 3,4875;
n"!, 1874. Copenhague; 2 cah. in-S°.
Kongl. Unii-ersilets i Upscda. — Fôreliisningar och ôfningar,
1875, 1874; — Arsskrift, 4875; — Index scholarum, 1875.
Upsal, 1873-1874; vol. in/*" et 2 cah. in-8''; — Akademisk
Afhandling. Upsal et Stockholm; 12 cah. in-S".
Almén {August). — Jemfôrelse Mellan naturliga och Konst-
gjorda helsovalten, sadana de i handeln fôrekorama; — Till
vetenskapernas, vardare, gynnare och vanner. Upsal, 1874;
2 cah. in -4°.
Société de physique et d'histoire naturelle de Genève. —
Mémoires, tome XXIII, seconde partie. Genève, 1875-1874;
vol. in-4°.
( U9 )
St. Gallische natunvissenschaflliche Gesellschaft. — Be-
richt, 1872-1875. Saint- Gall, 1874; vol. in-8°.
Arrivabene (Conte Giovanni). — Un' epoca délia mia vita.
Mantoue, 1874; vol. in-8".
Fenicia [Salvatot-e). — Canlo scientifico morale sul congcg-
nato deir atmosfera della terra; — Sonetti. Bari, 4867; broch.
in-12 et feuille in-i".
Reale Acccidemia deiLincei, Romu. — Atti, tonaoXXVI, anno
XXVI, sessione H^del oGennaio 1875. Rome, 1874; cah. in-4''.
R. Comitato geologico tVltalia, Ronia. — Bollettino, n"' 5
e 6, Maggio e Giugno 1874. Rome, 1874; cah. in-8°.
R. Accademia dclle science di Torino. — Atti, vol. IX, Disp.
1'-5% Novembre 1875 à Juin 1874. Turin; 3 cah. in-8°.
Rivista scientifico - industriale , anno VI, juin-août 1874.
Florence, 1874; 5 eah. in-8°.
Tommasi [D' D.). — On a new method of preparing toluène.
Londres; broch. in-8° (en double).
Royal Ohservatory , Greenwich. — Greenwich observa-
tions, from 1856 to 1871. Londres, 1857-1873; 56 vol. in-4'';
— Lunar Réductions, vols. 1, II, III (1750 to 1850 et 1851
to 1851); — Planctary Réductions, 1 vol. (1750 to 1850); —
Tables de la lune, par P. -A. Hansen; — Vérification and ex-
tension of La Caiile's arc of meridian, vol. I and II. Londres;
7 vol. in-4''; — Report on the TenerifTe asii'onoraical experi-
ment of 1836; — Bessels refraction tables (appendixto Green-
wich observations, 1835) ; — Description of photographie self-
vcgistering apparatus, altazimulh, transit cirde, reflcx zénith
tube, chronograph, great Equatorial, water télescope; —
Plan of the Buildings and Grounds; — Report on ihe total
éclipse of the sun, Augusl 17-18, 1868; — Maguelical and
mcleorological observations, 1847; — Lecture on the Green-
wich System of time signais. Londres ; 11 cah. in-i" et une
brochure in-8''.
Philosophical Society of Glasgoic. — Procecdings, vol. I,
( mo )
n"' \-\0; vol. II, n"' 1-4; vol. VI, n« 5. Glasgow, 1841-1848,
186G-1867; 17 fasc. et 5 cali. 111-8°.
Royal geographical Society of London. — Journal, vol.
LXIII, 1875. Londres, 1873; vol. in -8°.
London MatJiematical Society. — Proceedings, vol. V, 0"= Gfi
à 72. Londres , 1874; 4 cah. in-8''.
Numisniatic Society of London. — Journal, new ser., N" LIV,
pt. II, 1874. Londres; cah. in-8''.
Zoological Society of London. — Transactions, vol. VIII,
Pt. 9. — Proceedings for the year 1874, pis. II and III. Lon-
dres, 1874; eah. in-i" et 2 cah. in-8''.
Nature, ^"' 245 à 2C0, vol. X. Londres, 1874; 18 cah.
in-4°.
Meleorologiccd Reporter to the Government of Rengal. —
Meleorological ahstracl for the year 1875. Calcutta , 1874; cah.
gr. in-4''.
Royal Observatory , Cape of Good Hope. — Resullsofas-
tronomical observations, 18oG, 1857-1858. Cape Town, 1871-
1872; vol. in-8°.
Royal Society of arts and sciences, Mauritius. — Transac-
tions, new séries, vol. VII. Maurice, 1872; vol. in-8''.
Academy of natural sciences of Philadelphia. — Procee-
dings, pts. I-III, january at december 1875; — Journal, new
séries, vol. VIII, pt. I. Philadelphie, 1873-1874; cah. in-4'' et
5 cah. in-8°.
Board of public churities. — Fourlh annual report of the
Board of commissioners; — Report in answer lo the resolu-
tion of the Ilouse of Représentatives of january 51, 1874; —
In the raatter of the insane in the prisons and poorhouses of
Pensylvania. Ilarrisburg et Philadelphie, 1874; 1 vol. cl
2 broch. in-8°.
Dali {W.-H.). — E.\traits des Proceedings of the California
Academy of sciences, concernant la géologie et la paléontologie.
Salera ; 8 broch. in-8''.
( ^ol )
Packard [A. -S.- Jr.). — The ancestry ofinsects; — Cata-
logue of the Pyralidae of California , with descriptions ofnew
Californian Pterophoridee; — Catalogue of the Phalœnidee of
California; — Third annual report on the injurions and bene-
. fieial insects of Massachusetts. Salera, 1873-1874; 4 broch.
in-8''.
Peabody Academy of science , Salem. — Fifth annual
report for the year 1872. Salem, i875; cah. in-8°; — The
American naturalist : vol. VI, n" 12, dccember 1872; vol. VII,
n" 1-12, january at derember 1875; vol.Vlll, n' \, january
1874. Salem, 1872-1874; 14 cah. in-S".
Essex InslUute of Salem. — Bulletin, vol. V, 1873. Salera,
1874; vol. in-8°.
California Academy ofnatural sciences, San Francisco. —
Proceedings, vol. I, 1804-1857,2"^ édition; vol. V, pari II,
1873. San Francisco, 1873-1874; 2 cah. in-8''.
Toner {Dr. J.-M.). — The natural hislory and distribution
of yellowFever in ihe United States. Washington, 1873; broch.
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Smithsonian Institution of Washington. — Annual report
for 1872. Washington ,1873; vol. in-8''.
Woodivorth [John M.). — Nomenclature of diseases prepared
for ihe use of the médical officers of the United States Marine-
Hospital service. Washington, 1874; vol. in-8°.
U. S. yeological and geographical Survey ofthe terrilories ,
Washington. — Miscellaneous publications, W^' 4 and o; — Bul-
letin , n"' 1 and 2. Washington, 1874; 4 cah. in-8°.
Sociedad de geogra/ia y estadistica de la republica mexi-
cana, Mexico. — Boletin , tercera epoca, lomo I, n°' 8 y 9;
t. II n°= 10, 11 y 12. Mexico, 1873; 3 cah. in-8°.
Sociedad mexicana de historia natural j Mexico. — La
Naturaleza : Entrega 12*-19% mayo-dicierabre de 1870; En-
trega 20''-30'', enero-diciembre de 1871; Entrega 5r-39\
Mexico, 18G9-1S73; 20 cah. in-4.
( 552 )
The american journal of sciences and arts , third séries,
vol. VII, W' 42, 43 and 44, june, july and august 4874. New-
Haven, 1874; 3 cah. in-8°.
The Penn Monthly,\o\. IV, n"^ 45 et 46; vol. V, n"' 49, 50,
5G et 57. Philadelphie, -1874; 6 cah. in-8°.
Inztitulo historico, geographico e ethnographico do Brasil.
— Revista trimensal : tomo XXXVI, parte segunda, III e IV
trimestre ; tomo XXXVII, parte primeira, I trimestre. Rio de
Janeiro, 1875-1874; 3 cah. in-S".
Revista de Portugal e Brazil, 2^ vol., n°' 6 à 11 de 1874.
Lisbonne; 6 cah. in-4''.
BULLETIN
DE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
DES
LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE.
1874. — N°li.
CLASSE DES SCIENCES.
Séa7ice du 7 novembre 1874.
M. E. Candèze, directeur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. de Koninck, P.-J. Van Beneden ,
Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens,
F. Duprez, G. Dewalque, E. Quetelet, H. Maus, M. Gloe-
sener, F. Donny, Ch. Montigny, Steichen, A. Brialmont,
Éd. Dupont, Éd. Morren, Éd. Yan Beneden, G. Malaise,
membres; E. Catalan, Aug. Bellynck, associés; Éd. Mailly,
Alph. Briart, H. Valérius, F. Folie, J. De Tilly, F. Pla-
teau , Fr. Crépin , correspondants.
2""* SÉRIE, TOME XXXVIII. 36
( 554 )
CORRESPONDANCE.
i>i. le Ministre de riiUérieur communique deux lettres,
l'une de M. Melsens et l'autre de M. le Ministre des tra-
vaux publics, relatives à une question de paratonnerres.
La classe décide le renvoi de ces deux communications
à la Commission permanente des paratonnerres.
— Le même haut fonctionnaire envoie, pour la biblio-
thèque de l'Académie, les livraisons 63 et 64 de l'ouvrage
intitulé : Les Lépidoptères de la Belgique, par M. A. Du-
bois. — Remercîmenls.
— M. le vice-amiral de la Roncière le Noury, président
de la Société de géographie de Paris, adresse les docu-
ments imprimés relatifs au Congrès international des
sciences géographiques qui se réunira à Paris au prin-
temps de 1875.
— L'Institut royal des sciences, des lettres et des
arts de Venise envoie son programme de concours pour
1875.
— M. le professeur Bernardin, du collège de Melle,
envoie ses observations des phénomènes périodiques du
règne végétal, faites dans cette localité le 21 octobre der-
nier. — M. le professeur Cavalier, d'Ostende, transmet ses
résumés météorologiques pour cette ville pendant les mois
de septembre et d'octobre 1874. — Ces documents sont
éservés pour le recueil des phénomènes périodiques.
res
( 5oo )
— L'École polytechnique de France, MM. Paul Gervais,
associé, à Paris, et André Ramsay, associé, à Londres,
remercient pour l'envoi qui leur a été fait des dernières
publications académiques.
— L'Académie de Stanislas à Nancy, la Société de phy-
sique et d'histoire naturelle de Genève, l'Académie royale
des sciences à Munich, la Société physico-médicale de
Wurzbourg, l'Académie royale de médecine de Belgique,
la Société des sciences de Saint-Gall, la Société silé-
sienne deBreslau, l'Université de Kazan, le Gouverne-
ment du Bengale, l'Académie royale des sciences de
Turin, la Société d'Émulation de Cambrai et la Société
des sciences de Lille font hommage de leurs derniers
travaux.
— M. Stanislas Meunier, de Paris, offre un exemplaire
de son livre intitulé : Géologie comparée, i vol. in-8°. Il
demande en même temps que la classe veuille bien faire
un rapport sur cet ouvrage.
La classe, tout en remerciant l'auteur pour ce don,
regrette de ne pouvoir accéder à son désir, le règlement
prescrivant qu'il ne peut être fait de rapports sur les tra-
vaux déjà livrés à la publicité.
— La classe accepte le dépôt d'un billet cacheté qui lui
est présenté par M. F. Folie, au nom de M. Walthère
Spring. Ce billet, renfermant la Description cVun appareil
permettant de mesurer la vitesse de propagation de la cha-
leur rayonnante , sera déposé dans les archives.
— M. E. Quetelet présente le premier exemplaire du
tome XXIII des Annales de V Observatoire royal de
Bruxelles^ qui vient d'être imprimé.
( oo6 )
Ce volume renferme les observations astronomiques de
l'année 1868 et la météorologie des années 1872 et 1873.
Il est précédé d'une notice consacrée au fondateur et pre-
mier directeur de l'Observatoire , feu M. Adolphe Quetelet.
M. C. Malaise offre son travail imprimé intitulé : Sur
quelques roches porphyriques de Belijique, broch. in-8".
Le R. P. Bellynck fait hommage de son Cours élémen-
taire de botanique, 1 vol. in-8°.
M. F. Folie offre un exemplaire du Cours de calcul des
probabilités, fait à l'Université de Liège de 1849à 1857,
par A. Meyer, ancien correspondant de l'Académie. M. Folie
a publié cet ouvrage sur les manuscrits de l'auteur.
Il présente également la traduction du travail de
R. Clausius, Sur un nouveau principe de mécanique relatif
aux mouvements stationnaires. In-4-°. (Extrait du Journal
de Liouville.)
M. Folie lit la note suivante au sujet des deux ouvrages
mentionnés ci-dessus :
« Je viens de publier sous les auspices de la Société
royale des sciences de Liège , et avec le concours obligeant
de mon ami M. L. Perard, un volume dont j'ai l'honneur
de faire hommage à l'Académie, et qui l'intéresse à un
double titre : c'est le Cours de calcul des probabilités de
A. Meyer, un de nos anciens correspondants. Ce cours est
l'un des plus complets qui aient été publiés sur la matière;
et les problèmes les plus difficiles de Laplace, dont la lec-
ture a souvent arrêté d'assez bons analystes, y sont déve-
loppés avec clarté, de même que les théories postérieures
de Poisson, de Gauss et de Bienaymé. Vu l'importance de
l'ouvrage, et l'utilité qu'il peut offrir pour l'étude de toutes
( oo7 )
les questions d'assurances, j'ai cru devoir y ajouter des
tables de mortalité plus récentes que celle dont Meyer avait
fait usage. Je me suis adressé à notre regretté secrétaire
perpétuel A. Quetelet, qui m'a autorisé, avec une bienveil-
lance dont je conserve le pieux souvenir, à insérer dans le
traité de Meyer ses tables récentes de mortalité.
» J'espère que la publication de cette œuvre posthume
de Meyer, l'un de nos analystes les plus distingués, contri-
buera à ranimer en Belgique le goût de la science des pro-
babilités.
» Je prie la classe d'agréer en même temps l'hommage
d'un exemplaire de ma traduction d'un travail remarquable
de Clausius intitulé : Sur un nouveau principe de méca-
nique relatif aux mouvements stationnaires.
B Ce travail est un jalon placé par le célèbre professeur
de Bonn dans la voie qu'il trace pour ramener la théorie
mécanique de la chaleur aux principes de la mécanique
rationnelle. »
M. Gloesener présente, au nom de M. Graindorge, un
exemplaire autographié de ses Exercices de calcul intégral.
à l'usage des élèves de l'école des mines de Liège. In-8°.
M. le Gouverneur du Brabant adresse deux exemplaires
des discussions du conseil provincial pendant sa session
ordinaire de 1874, relativement à la distribution d'eau.
In-8°.
La classe vote des remercîments aux auteurs de ces dif-
férents dons,
— Les travaux manuscrits suivants seront l'objet d'un
examen :
1" Recherches sur l'embryogénie des poissons osseux.
( So8 )
— I. Modifications de l'œuf après la ponte, non fécondé. —
II. Premières phases du développement; avec 5 planches,
par M. Ch. Van Bambeke. — Commissaires : MM. Éd. Yan
Beneden, Schwann et Giuge ;
2° Des chlorures alcalins de la formation houillère, par
M. Renier Malherbe. — Commissaires : MM. de Koninck
et Dewalque ;
5" Calculs de Véclipse de soleil du 10 octobre et de l'oc-
cultation de Vénus du i4 octobre ^574, par M. L. Eslour-
gies. — Commissaires : MM. E. Quetelel et J. Liagre.
— Les auteurs du mémoire de concours « sur les roches
plutoniennes de la Belgique et de l'Ardenne française, »
présenté le 51 juillet dernier, adressent un premier sup-
plément (avec deux planches) à leur travail.
La classe décide qu'elle ne peut s'écarter, au sujet de ce
travail , des règles habituelles des concours, qui exigent
que les auteurs soumettent des œuvres entièrement ter-
minées à la date du terme fatal pour la réception de celles-ci
par l'Académie.
Elle a, en conséquence, déclaré que ce supplément se-
rait considéré provisoirement comme non avenu, et le
dépôt en a été ordonné aux archives.
RAPPORTS.
MM. J. Liagre et E. Quetelet donnent lecture de leurs
rapports sur le travail de M. J. C. Houzeau, intitulé :
Résumé de ciuelcpies observations astronomiques et météo-
( 55'9 )
rologiques faites dans la zone sur tempérée et entre les
tropiques.
Conformément aux conclusions de ces rapports, qui,
d'après le règlement, ne seront pas imprimés, la classe
vote des remercîments à M. Houzeau, et décide l'impres-
sion de son travail dans le recueil in-S" des Mémoires.
Remarques sur l'aspect de la planète Jupiter pendant son
opposition en '1874; par M. Terby.
Mia/tjtofl de .Ff. K. Qttetelel.
« La note que M. Terby présente à l'Académie sur
l'aspect de la planète Jupiter pendant son opposition
en 1874, fait suite aux recherches que ce jeune astro-
nome a déjà publiées dans les Bulletins sur les caractères
physiques des planètes principales. Un des faits les plus
remarquables, observés cette année, a été l'affaiblissement
notable qu'a éprouvé la bande voisine de la calotte polaire
septentrionale; en 1872 et en 1875, celte bande était re-
marquable par sa netteté et sa teinte sombre.
L'auteur décrit ensuite les deux bandes très-distinctes
situées dans le voisinage du centre de Jupiter.
La note se termine par quelques remarques sur les
apparences qu'offrent les satellites pendant leurs passages ;
dans certains cas, ils se projettent sur la planète sous la
forme d'une tache tout à fait noire.
J'ai l'honneur de proposer l'impression de la notice de
M. Terby dans le recueil des Bulletins. »
( 560 )
La classe, après avoir entendu M. J. Liagre, second
commissaire, adopte les conclusions du rapport deM.Ern.
Quetelet.
Recherches sur la conservation du bois au moyen des
sels de cuivre; par M. Rottier.
Kappoft tle 3Ë. Stonny.
a. On sait que les bois employés dans la construction
des chemins de fer et dans l'établissement des lignes télé-
graphiques sont en général préparés chimiquement afin
d'en prolonger la durée. Deux méthodes sont employées
dans ce but, l'injection à la créosote et l'injection au sul-
fate de cuivre. Dans des travaux antérieurs, que l'Académie
a fait imprimer dans ses Bulletins, t. XY, ^^ série, p. 424,
et t. XVII, 2'' série, p. 538, l'auteur a décrit ses recher-
ches sur l'emploi de la créosote. Il soumet aujourd'hui à la
classe ses recherches sur l'emploi du sulfate de cuivre. Ce
travail fait donc suite au premier et en constitue le com-
plément.
Le travail se divise en deux chapitres distincts. Dans le
premier, après avoir reconnu, comme on le savait déjà,
que le bois injecté au sulfate de cuivre ne se conserve pas
indéliniment, il cherche à se rendre compte des circon-
stances qui entraînent tôt ou tard la destruction des bois
même les mieux préparés ; il en trouve l'explication dans
la déperdition progressive du cuivre que ces bois ren-
ferment. Cette déperdition varie avec la nature du sol.
Ainsi les terrains imbibés de dissolutions salines ou d'eau
( ^61 )
chargée d'acide carbonique enlèvent rapidement le cuivre
au bois, et, comme on pouvait s'y attendre, leur destruc-
tion progresse avec le départ de cet agent conservateur.
Dans d'autres terrains, et même dans l'eau distillée, cette
déperdition est très-lente et le bois se conserve long-
temps.
Dans la seconde partie de son travail , l'auteur décrit
quelques procédés nouveaux d'injection, qui, employés en
grand, fourniraient certainement des produits plus du-
rables que ceux que l'on obtient par le procédé en
usage.
II établit d'abord que la durée du bois injecté augmente
avec la quantité de cuivre absorbée ou combinée. 11 dé-
montre ensuite qu'en modifiant les procédés actuels, on
peut doubler et tripler la quantité de cuivre lixée sur le
bois et naturellement ces derniers se conservent deux et
trois fois plus longtemps que les autres.
On arrive à ces résultats de différentes manières :
1° En remplaçant le sulfate de cuivre par l'acétate de
cuivre ou par le sulfate de cuivre ammoniacal;
2° En chauffant à 100 ou 120° le bois préalablement
injecté ;
o" En faisant intervenir différentes matières organiques
qui facilitent la fixation du cuivre sur le bois en agissant
probablement à la façon des mordants employés en tein-
ture.
En somme, la note de M. Rottier renferme des faits
intéressants et nouveaux; elle est le résumé d'un travail
de plusieurs années, et les nombreuses analyses qu'elle
donne ont été faites avec soin; le style est clair et concis.
En conséquence, j'ai l'honneur de proposer à la classe
( 562 )
d'ordonner l'impression du travail dans les Bulletins de
nos séances et de voter des remercîments à l'auteur. »
La classe, après avoir entendu M. Melsens, second com-
missaire, adopte les conclusions du rapport précédent.
Démonstration de la propriété caractéristique des équations
différentielles linéaires j par M. Paul Mansion.
ttappoi'f de lîB. Catalan.
« Il y a cinq ans , M. Mansion a présenté à l'Académie une
^ote sur la première méthode de Brisson. Dans ce travail,
le jeune géomètre de Gand prouve que l'équation
D"t/ -\- A^B"~'ij -h ■■■ -\- A„y = 0. . . . (!)
peut être mise sous la forme symbolique
(D-«„)(D-«_,)-(D-«.)!/ = 0, . (2)0
(*) Pour développer ce produit symbolique, on part de l'idenlilé
(0 — «i>y = //' — «i.V-
Prenant la dérivée du second membre, multipliant par a^i puis retran-
chant , on a
(D — fg (D — a^)yz=ij"— (a^y)' -CL,y'-^ a, a^y.
De même,
(D - flj) (D — rt^KD -flJv = (/"' — (a,y)" — («2»/)'-*- {a^a^tj)'
— a^y" -i-a^iaiy}' -^ra^a^y' — aiU^a^y :
et ainsi de suite.
p
( 565 )
même si les coefficients Aj, Aj, A„ sonl fonctions de x :
Brisson avait seulement considéré le cas où ces coefficients
sont constants.
La Xote de M. Mansion, ayant reçu l'approbation de la
Classe (') , parut dans le recueil des Ménioires couronnés (*').
Aujourd'hui, l'honorable auteur complète son premier
travail, en changeant un peu le point de vue où il s'était
placé autrefois: observant que l'intégrale de l'équation (1)
ou de l'équation (2) a la forme
Î/ = C, ?/, -f- Cj?/., -H ••• -4- C„7/„, . . . (ô)
et que, réciproquement, cette intégrale ramène à des
équations différentielles semblables à celles dont il s'agit,
M. Mansioii ^[i\)(i\\& propriété caractéristique des équations
linéaires, la transformation exprimée par l'équation (2).
Entrons dans quelques détails
I. Après un court préambule, l'auteur développe (§ 2)
une démonstration indirecte du théorème qui fait l'objet
principal de sa Note. A cet effet, il identifie
D'_|/ -+- A, D-y -+- A, D^ -H A3?/ = 0, . . .(4)
avec
(D'-H BiD -+- B,) (D — 0)^ = 0, . . . .(5)
a étant une nouvelle inconnue : il trouve ainsi V équation
auxiliaire
a" -+- (A, -+- ôa) a -+- a^ -i- A, «^ -+- A^ a -h A3 = 0, . (8'j
laquelle n'est pas linéaire. « An moyen d'un artifice de
(*) Bulletins, lome XXIX, p. 68.
(**) Collection iu-S», tome XXII.
( 564 )
calcul très-singulier, » et peut-être un peu compliqué, il
démontre que
a = ^ (A)0
y
IL Afin de parvenir à une transformée qui soit linéaire,
M. Mansion suppose
y—a^]j = U, (C)
ai représentant la valeur de a qui répond à une intégrale
particulière, y = yu de la proposée. Il trouve ainsi, au
lieu de l'équation (4) :
u" -t- P«'+ Qw = 0, (12)
P, Q étant ce que deviennent les fonctions Bj, B2 pour
a = «,, Cette équation (12) ayant la même forme que la
proposée (*), le théorème en question est démontré.
III. Dans un dernier paragraphe, l'auteur applique la
théorie des déterminants : 1° à la démonstration directe du
(*) La transformalioli connue :
y—pfadx^ (U)
qui équivaut à la formule (A) , redonne, l)ien entendu , l'équation (8').
)/'
(**) A cause de a, ^— , 1 équation (C) esi la même chose que
'Ji y' - !J'A «
y
Par conséquent ,
/u
— dx,
u.
formule à laquelle on peut avantageusement substituer, comme l'on sait,
y = yj zdx (D)
( mo )
théorème principal; 2" à la recherche de deux formes
remarquables (*) sous lesquelles on peut écrire l'équation
auxiliaire.
IV. En résumé, la Note du jeune lauréat de l'Académie,
étant le complément naturel d'un premier travail, me
paraît digne d'être approuvée par la Classe, et insérée aux
Bulletins. »
MtappoÈ't de Jft. F. Folie.
« Je me rallie bien volontiers à la proposition de notre
savant confrère M. Catalan, au rapport duquel je n'ajouterai
que quelques mots.
\° La démonstration du théorème exige que les solu-
tions particulières Ui et «^ de l'équation
n" -^Pu -h Qu = 0, (42)
soient distinctes, ce que M. Mansion établit en démontrant
que le déterminant
2° L'application des déterminants permet à l'auteur de
mettre son équation auxiliaire sous deux formes remar-
quables qui se prêtent à une intégration directe, sans
l'emploi de l'artifice signalé par M. Catalan, et par deux
méthodes différentes.
(*) La Iransformée eu z serait , évidemment ,
y^z"' -^iij\z" -^Qy'lz' -i-4y"; z
-H A, (y, z" -\- Zy\ z' -+- ôyi z) ^ ^
-+- A, (î/i =' + 2y', Z)
-+- As y. r
( S66 )
Le paragraphe 111 montre quel fruit l'analyse supérieure
peut retirer de cette théorie féconde des déterminants,
dont trop peu de géomètres font usage en Belgique. »
Conformément aux conclusions des rapports qui précè-
dent, la classe vote l'impression du travail de M. Mansion
dans le recueil des Bulletins.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Observation de l'éclipsé de soleil du 10 octobre 181 â, faite
à V Observatoire royal de Bruxelles. Communication de
M. Ern. Quetelet, membre de l'Académie.
Dans la matinée du 10 octobre, le ciel était très-sombre
et rien ne faisait prévoir que l'on pût observer quelque
phase du phénomène astronomique qui allait avoir lieu.
Toutes les mesures furent cependant prises afin d'être
prêt, si quelque chance favorable venait à se présenter.
M. E. Quetelet était à l'équatorial dans la tourelle de
l'Ouest, M. Hooreman dans la tourelle de l'Est avec la
lunette de Troughton, et M. Estourgies sur la terrasse
avec le télescope de Rinks.
Après 10 heures, les nuages assez rapides et disposés
en couches superposées, permirent de distinguer par mo-
ments le soleil qui était déjà fortement échancré; mais,
bientôt après, le ciel se recouvrit complètement et tout
espoir semblait perdu, quand, un peu avant la fin de
( ^67 )
l'éclipsé, une éclaircie assez belle, quoique voilée, se
forma tout à coup et le dernier moment du phénomène
put être assez bien déterminé. Voici, en temps moyen de
Bruxelles, l'heure de la fin de l'écIipse :
ll''45™8»9 E. Quetelet.
11 43 8,7 G. Hooreman.
1 1 43 4,9 L. Estourgies.
Observation de l'occultation de Vénus par la lune, le
1â octobre 1874, faite à l'Observatoire royal de
Bruxelles. Communication de M. Ern. Quetelet, mem-
bre de l'Académie.
L'observation de l'occultation de Vénus a été plus favo-
risée par l'état du ciel que celle de l'éclipsé. Vénus était
très-brillante et la lune extrêmement faible, à peine visible.
Le bord éclairé de Vénus fut d'abord couvert par le bord
sombre de la lune. Ce premier instant paraît avoir été
déterminé avec beaucoup de précision. La lune, ensuite,
s'avançant rapidement sur la planète, ne laissa bientôt plus
distinguer que l'extrémité de la corne méridionale. Celle-ci
se réduisit bientôt à un point brillant qui s'affaiblit rapide-
ment et disparut ; mais au derniermoment, ce point devenu
très-faible avait pris une teinte rougeàtre non équivoque,
très-différente de la couleur brillante de la planète. Le troi-
sième moment noté est la réapparition du bord brillant de
Vénus au bord éclairé de la lune.
MM. E. Quetelet et Hooreman observaient, comme lors
de l'éclipsé, à l'équatorial et à la lunette de Troughton
dans les deux tourelles. Ce dernier observateur avait sub-
( 568 )
stilué le grossissement de 100 à celui de 7S employé pré-
cédemment, tandis que le grossissement de 75 a été
employé les deux jours à l'équatorial.
Commencement de l'occultation. . . S'iSl™ 6=7 E. Quetelet.
— — ... 6,2 C. Hooreman.
""Disparition totale 3 52 24,1 (*) E. Quetelet.
Réapparition de Vénus 5 4 32,1 —
Fragments paléontologiques pour servir à la Flore du
terrain houiller de Belgique; par M. François Crépin,
correspondant de l'Académie.
Sous le titre qui précède, mon intention est de publier
une série de notes et de dessins qui pourront aider à
l'élaboration d'une Flore générale de noire terrain bouiller.
Les malériau.x qui feront l'objet de ces notes seront prin-
cipalement ceux que possède le Musée royal d'histoire
naturelle de Belgique , matériaux qui se composent actuel-
lement de la collection délaissée par feu l'abbé Coemans,
à laquelle sont venues se joindre des pièces provenant de
diverses autres collections et surtout les très-nombreuses
pièces que j'ai recueillies moi-même dans nos charbon-
nages, ou que j'y ai fait recueillir. Ces dernières récoltes
ont plus que doublé la collection générale du Musée et
l'ont enrichie d'un nombre assez considérable de nouveautés
pour notre flore.
Toutes les fois que je décrirai ou figurerai une em-
(*) Il est inutile de dire que cette observation n'a pas de signification
géométrique.
( 569 )
preinte, j'aurai soin d'en indiquer la provenance en signa-
lant, en outre, le nom qu'elle aura reçu en entrant dans
la collection du Musée. De cette façon , on connaîtra la
part revenant aux divers collecteurs qui ont concouru à la
formation de cette collection.
Pour ce qui concerne la riche et splendide série d'em-
preintes que nous devons aux soins et aux recherches
persévérantes de feu l'abbé Coemans, je tâcherai de mar-
quer, quand la chose sera possible, le résultat des études
que celui-ci avait faites sur ces empreintes. Malheureu-
sement ce savant regretté, se confiant à sa mémoire et
comptant avoir le temps de mettre sa collection en ordre,
est mort en laissant sans étiquettes et même sans indica-
tions de provenance la plus grande partie des pièces recueil-
lies dans nos charbonnages. Les beaux dessins qu'il avait
fait exécuter et qui comprenaient de nombreuses figures
pour le groupe des Calamariées sont restés pour la plupart
sans déterminations. Quant aux notes rédigées par lui et
que le Musée possède dans ses archives, elles ne consistent
qu'en observations extrêmement concises sur la nature de
certains organes en général et n'ayant pas rapport directe-
ment avec des pièces de sa collection, ou bien elles ont
pour objet des échantillons que ce savant avait étudiés dans
les Musées de Paris et de Londres. Quand l'occasion se
présentera, je mettrai d'ailleurs un soin religieux à repro-
duire ces notes, afin de sauver de l'oubli les quelques
traces qui nous restent des études que Coemans avait
faites sur nos végétaux houillers.
Dans les planches jointes aux descriptions ou aux obser-
vations de ces Fragments paléontologiques, je me bornerai
ordinairement à représenter les seules parties des em-
preintes indispensables à l'interprétation du texte, réser-
2""" SÉRIE, TOME XXXVIII. 57
( ^70 )
vant les dessins complets de pièces entières pour une
publication définitive faite sous un grand format.
PI!V:VULARIA SPHEIVOPTERIDIA Clép.
Pl.l.fig. 1-6.
Avant qu'on puisse rattacher la racine figurée pi. I à la
plante qui l'a produite, j'ai, suivant l'usage adopté en
paléophytographie, assigné un nom provisoire à ses em-
preintes.
Le Pinniilaria sphenoptericlia n'est pas, comme on
pourrait le croire, nouveau pour la science, car il me
paraît à peu près certain que Lindley et Hutton l'ont décrit
et figuré sous le nom de Sphenopleris? bifida [The fossil
Flora of Great Britain, vol. I, p. 147, pi. o5). Ces auteurs,
remarquons-le, avaient manifesté des doutes sur l'assimi-
lation qu'ils avaient faite. En effet, ils disent: « So little
lias this (Splienopteris? bifida) tlie appearance of a Fern ,
tliat you would say it had surely been a root of some
aquatic plant, or at least its submersed stem, with such
dissecled leaves, as we now (ind floating inditches,or
pools, and belonging to iMyriophyllum,Utricularia,Ranun-
culus, and the like. »
Peut-être même le Splienopteris fascicularis F.- A. Ro-
mer tel que le figure M. E. von Rôhl [Fossile Flora der
Steinkohlen-Formation Westphalens, tab. XXIX, fig. 24)
a-t-il aussi quelque rapport avec le Pinmdaria sphenople-
ridia ?
D'après l'arrangement qu'avait adopté Coemans pour les
Splienopteris de sa collection, celui-ci semble avoir pris le
Pinniilaria sphenopteridia pour un Splienopteris voisin
du 5. acutiloba Andrii. Dans la collection de ce savant,
(d71 )
se trouvenl 10 pièces du Pinnularia sphenoptcrida, dont
8 sont sans indications de noms et de lieux de provenance;
la 9'' porte l'indication de « Mariemont-S^'-Catherine » et
la 10% celle de Trazegnies.
J'ai trouvé le Pinnularia sphenopteridia en abondance
dans un bloc énorme de schiste houiller extrait de la fosse
n° 5 de Trazegnies. Il était mélangé à de nombreuses
empreintes de Sphenophyllum erosuni var. saxifrafjaefo-
lium. Je l'ai également recueilli à Bascoup dans le terry
des fosses n"' 5 et 4, et là encore en compagnie du même
Sphenophyllum.
Les diverses figures que j'ai données du Pinnularia
sphenopteridia peuvent me dispenser de toute description.
Je dirai seulement que les racines secondaires, c'est-à-dire
les fines ramifications de la racine se bifurquent par une
fausse dichotomie et forment des espèces de petits pin-
ceaux. Ces dernières ramifications paraissent avoir été
d'un tissu mou et délicat.
C.%LAMOCI./tDt;S EQUISETIFOR.UIS Scil.
(Fructification.)
PI. II , fig. 1-3.
Jusqu'à présentée ne sache pas qu'on ait décrit avec cer-
titude les épis du Calamodadus equiseli formis. M. Weiss (1)
a rapporté avec doute à celui-ci les Volkamannia elonyata
et sessilis Presl et Y Asterophylliles longifolia Binney.
M. Schimper attribue le Volkamannia elongata au genre
Annularia.
(1) Fossile Flora der j lingsten Steinkohlenformalioii und des Rothlu
(jenden im Saar-Iihein-Gebiete,p. 126.
( S72 )
Quand on compare les épis du Calamocladtis equiseti-
forniis à la figure qu'a publiée Presl de son Volkamamiia
etongata, on n'est pas surpris de l'attribution faite par
M. Weiss. En effet, comme on peut le constater en rappro-
chant mes tigures i , 2 et 3, pi. II, de la ligure du Volka-
mapnia elongata telle que l'a donnée Presl, on trouve
beaucoup de ressemblance entre celui-ci et les épis du
Calamodadus equisetiformis ; mais pour bien apprécier
le degré de ressemblance, il faudrait pouvoir comparer
des empreintes mêmes de ces deux espèces.
Les épis du Calamodadus sont assez longuement pédon-
cules, à pédoncules nus et naissant probablement à
l'aisselle des feuilles verticillées ; je dis probablement,
parceque le point d'insertion de ces pédoncules se confond,
sur les empreintes que j'ai étudiées , avec celui des feuilles.
Les épis sont très-allongés, mais je ne pourrais pas en
marquer la longueur moyenne, parce qu'ils sont tous
fragmentés dans les nombreuses pièces recueillies à For-
chies; toutefois ils semblent généralement dépasser dix
centimètres. Leurs bractées sont verticillées et nombreuses
dans chaque verticille ; elles sont généralement incurvées
à leur base. Les verticilles inférieurs paraissent ordinaire-
ment stériles. Sur certains épis, on aperçoit très-distinc-
tement, à l'aisselle des verticilles, des renflements arrondis
ou ovoïdes qui doivent, sans aucun doute, avoir été
produits par des sporanges. On ne peut distinguer nette-
ment quelle a été la forme de ceux-ci et leur mode
d'insertion ; toutefois ils semblent se rapprocher beaucoup
(le la forme et de la disposition de ceux que M. Weiss
[loc.cit., p. 108) a figurés dans la coupe théorique des
épis des AsterophyUUes. Sur certains épis (fig. 3), la place
(les sporanges est très-peu marquée et ceux-ci, peut-être
( o75 )
trop jeunes, n'ont laissé que peu ou point de traces à
l'aisselle de certains verticilles. Il est des empreintes d'épis,
comme on peut le voir par la figure 2, dont les verticilles
de bractées sont faiblement marqués, ce qui leur donne un
aspect un peu différent de ceux dont les verticilles de
bractées sont bien apparents, comme dans la figure o.
Les empreintes représentées fig. 1 , 2 et 5 proviennent
d'un très-gros bloc de scbiste bouiller que j'ai trouvé sur
le terry de la fosse n" 10 à Forchies et qui sans doute a été
extrait de la veine dite «.de r Espérance. » Ce bloc était
pétri presque exclusivement de rameaux et d'épis de
Calamocladus equiseliformis. II m'a fourni trois rameaux
feuilles pourvus d'épis encore adhérents aux axes ra-
méaires.
On ne peut élever le moindre doute sur les adhérences
des épis de la pièce tigurée et de deux autres pièces prove-
nant du même bloc, pas plus que sur l'identité du Cala-
mocladus.
D'après ce que j'ai pu voir, les épis du Calamocladus
semblent se désarticuler assez facilement. La base de leur
pédoncules est un peu renflée à la façon de la base des
rameaux du Calamocladus. Ces derniers ont probablement
dû laisser sur les axes plus robustes qui leur ont donné
naissance ces larges cicatrices verticillées semblables ou
peut-être identiques avec celles qu'on observe sur les tiges
de Macrostachya. En compagnie des empreintes d'épis et
de rameaux du Calamocladus décrit ci-dessus, j'ai observé
un axe à verticilles courts et présentant des ceintures de
cicatrices orbiculaires. Je ne puis rapporter cet axe qu'au
Macrostachya infundibidiformis Sch. [Equisetum infun-
dibuliforme Bronn). Cet axe ne serait-il pas une partie
aérienne d'une tige de Calamités ayant produit le Calamo-
{ 574 )
chdns equisetiformis ? Je suis assez porté à le croire el à
considérer le genre Macrostachya comme n'ayant pas
d'existence légitime et n'étant en réalité formé que de
parties de Calnmiles dont les jeunes rameaux ont été
considérés comme des épis.
Avant de terminer ces observations sur le Calamocladus
equisetiformis , dont l'épi pourrait provisoirement recevoir
le nom de Calamostachj/s equisetiformis ,']q dois exprimer
mes doutes sur les épis qu'on attribue assez souvent à
VAiDiularia longifolia. Dans la collection Coemans, il
existe : 1" une pièce, provenant d'Ilmenau , portant incon-
testablement un épi de Calamocladus equisetiformis et éti-
queté par lui comme appartenant à Y Annularia longifolia;
2" une autre pièce, provenant de Wettin, portant égale-
ment un épi du même Calamocladus rapporté à VAnnu-
laria longifolia par un paléontologue de grand mérite.
L'épi figuré par M. Schimper, pi. XXII, fig. 7 [Traité de
paléontologie végétale, Atlas) et rapporté à Y Annularia
longifolia, m'inspire des doutes sur son assimilation.
A propos de V Annularia longifolia Brongt. que j'ai
indiqué en Belgique (Pa/rm Belgica,\, p. 474) d'après
Coemans, je dois faire remarquer que jusqu'ici je n'ai
découvert aucune trace de cette espèce dans notre terrain
houiller. Le fragment d'épi que Coemans avait cru pouvoir
rapportera ï Annularia longifolia, dans une notice sur les
Annularia [Bulletin de la Société rotjale de Botanique de
Belgique, t. IV, p. 271), paraît appartenir au Calamocladus
equisetiformis. M. Gôppert [Die fossile Flora der Permis-
citen Formation, p. 59) signale V Annularia longifolia en
Belgique, mais j'ai tout lieu de croire que ce savant n'a
\u de notre pays qu'une variété à grandes feuilles de VA.
radiata, variété déterminée parfois pour VA. longifolia.
575 )
PECOPTERIS LONGIFOLIA Piesl.
PI. ii,ng. 4-6.
Le Pecopteris longifolia, tout à fait nouveau pour notre
flore, a été récemment découvert par moi au Levant du
Flénu dans le terry du puits n° 19. Le bloc de schiste
houiller dans lequel je l'ai découvert m'a fourni plusieurs
belles empreintes. Mon aide dans les charbonnages du
Couchant de Mons, M. Persenaire (1), en a aussi découvert
une empreinte dont une partie est représentée fig. S, pi. IL
Cette espèce, tout d'abord découverte à Radnitz par
Presl, a été décrite et figurée dans le grand ouvrage de
Sternberg [Versuch einer (jeognoslisch-botanischen Dar-
steliiing der Flora der Vorwelt, II, fasc. 7 et 8, p. 155,
tab. 56, fig. 1). iM. C. von Ettingshausen ( Die Steinkohlen-
Flora von Radnilz in B'ôhmen , p. 40, tab. 16, fig. 2-4) Ta
figurée et décrite sous le nom (ÏAsplenites longifoUus.
Cet auteur la signale : « In schisto lithanthracum ad
Wranowitz, Mosstitz et ad Swina prope Radnitz. » Enfin
M. Geinitz [DieVcrsteinerungen der Steinkohlenformalion
in Sac/isen, p. 29, tab. 31 , fig. 8 et 9) la représente et la
décrit sous le nom d'Alethopteris longifolia en la signa-
lant: « Auf dem Planitzer Flotze des Schaufuss-Schachtes
in Niedercainsdorf, auf dem Scherbenkohlflôtze des
Schachtes von Stephan und Ehrler in Oberhohndorf;
(1) M. Persenaire est un collecteur intelligent et très-zélé dont les
recherches incessantes enrichissent les collections du Musée d'une façon
remarquable. Je me fais un devoir de rappeler ici que c'est lui qui a,
pendant de nombreuses années, puissamment aidé Neyrinck à former
la splendide collection de silex ouvrés que celui-ci a léguée au Musée.
( ^76 )
im alten Wetterschachte bei Zaukerode im Plauenschen
Grunde, — Bei Manebach und nach Presl bei Radnitz in
Bôhmen. »
Comme on le voit en comparant les figures 4 et 5, la
largeur des segments de la fronde peut varier beaucoup.
Dans les empreintes du Levant du Flénu, la bifurcation
des nervures se voit très-difficilement et ce n'est qu'avec
une extrême attention qu'on parvient à saisir çà et là la
bifurcation des nervures primaires. De même que dans les
spécimens figurés par MM. von Ettingshausen et Geinitz,
le tissu des segments des frondes paraît avoir été fort
mince. C'est probablement à cette délicatesse qu'est due la
difficulté que l'on éprouve à reconnaître le véritable mode
d'insertion des segments qui, dans la figure de Sternberg,
sont entièrement adhérents par leur base au rachis, et qui,
dans les figures données par MM. von Ettingshausen et
Geinitz, sont ou tout à fait adhérents pour la plupart ou
parfois plus ou moins arrondis ou cordés. M. von Ettings-
hausen dit des segments : « Inferioribus basi liberis, sessi-
libus, remolis, superioribus decurrenlibus approximatis. »
A son tour, M. Geinitz dit : « Die Fiederchen sitzen meis-
tens mit der ganzen Basis an der Rhachis fest, und nur
au dem unteren Theile der Fieder ist die Basis der Fieder-
chen frei. S) En examinant avec soin les pièces du Levant
du Flénu, il me semble que les segments du Pecopteris
lomjifolia sont en grand nombre arrondis ou obscurément
cordés à la base et que peut-être tous ont cette forme
même au sommet de la fronde ou des pennes. L'adhérence
de leur base représentée par Sternberg, MM. von Ettings-
hausen et Geinitz n'est peut-être qu'apparente et produite
par le rapprochement et l'application de la base des seg-
ments sur le rachis avec lequel elle s'est confondue.
P.ull.de rAocul.2r Série T.38
•'•pin.' cUl
Imp. G: S&z>erez/ns, iruxelùe. .
r.ull.clerAcacl. 25 Série T.38.
PLU.
é
'~3ik.
.,i^
Jp:ip 0-.3&verezins,3ricxeZles,
( 577 )
MM. von Eltingshauseu et Geinitz décrivent l'espèce
comme ayant des frondes seulement pennées. Les em-
preintes du Levant du Flénu qui montrent d'assez longs
fragments (^O-Si cent.) de frondes ou de pennes, ne
me permettent pas de reconnaître si la fronde de cette
espèce est seulement pennée ou si elle peut être plus
composée. Seulement, en considérant VAspleniles alethop-
teroides {Pecopteris Sch.) flguré par M. von Ettingshausen
[loc. cit., tab. 19, fîg. 5) et qui pourrait bien n'être qu'une
simple variété du Pecopteris longifolia, je suis assez
porté à penser que ce dernier offre une fronde plus que
pennée.
EXPLICATION DES PLANCHES.
Planche I.
Fig. I,2et5. Pinnularia sphenopteridia Crép. provenant de Traze-
gnies, fosse n» 5 (ree. Crépin).
— 5. Même espèce (coll. Coemans. — Pièce indéterminée et sans
indication de provenance).
— 4. Même espèce (coll. Coemans. — Pièce indéterminée provenant
de Trazegnies).
— 6 et 7. Parties grossies de la même espèce.
Planche II.
Fig. 1. Calamocladus eqiiisetiformis Sch. avec épis provenant de
Forchies, fosse n» 10 (rec. Crépin).
— 2 et 3. Portions d'épis {Calatncstachijs equisetiformis Crép.) delà
même espèce provenant de Forchies , fosse n° 10 (rec. Crépin).
— 4 et 5. Pecopteris longifolia Presl provenant du Levant du
Flénu, terry du puits n° 19 et des fosses voisines (rec. Crépin
et Persenaire).
— 6. Portion grossie d'un segment de la même espèce.
( 578 )
Démonstration de la propriété fondamentale des équations
différentielles linéaires; par M. P. Mansion, professeur
à l'Université de Gand.
I
Préliminaires.
Soient y une fonction de x; a, Ai, A2,....A„ des con-
stantes ou des fonctions de x; Dy, D'^y,.... D"y les dérivées
successives de y, par rapport à x. Convenons ensuite
d'écrire
{D — a)y, (D" -t- A, D"-' H h A„)i/,
au lieu de
^U — ^yi D"?/-+- A, D" "'?/-+- ••• -t- A„î/.
Cela posé, toute équation différentielle linéaire, sans
second membre,
D"y-f-A,D'-î/-t-...-t-A„î/ = 0, . . . (1)
ou
(D" 4- A, D"-' -H - + A„) y = 0,
peut se mettre sous la forme
(D— a,)D — «,)... (D — a,jy = 0 ... (2)
rt,, a2,....,a, étant des constantes ou des fonctions de x,
dont la valeur dépend de celle des coefficients Ai, A2,....,A„
de l'équation primitive.
On déduit cette propriété de ce théorème bien connu
( 579 )
que l'équation linéaire (1) a une intégrale de la forme
?/=C,?/,-4-C2?/2H hC„?/„, . . . .(3)
C|, Cav-jC,, étant des constantes arbitraires, y,, y^,....,y„
des solutions particulières, distinctes, de l'équation (1).
Les équations linéaires jouissent des propriétés expri-
mées par les équations (2) et (5). Réciproquement : 1° les
équations ayant une intégrale de la forme (5) sont linéaires
et peuvent prendre la forme (2); 2° celles qui peuvent
prendre la forme (2) ont une intégrale de la forme (3) et
sont linéaires. Les propriétés exprimées par les équa-
tions (2) et (5) sont donc équivalentes et caractéristiques
pour les équations linéaires. En particulier, la propriété (2),
qui montre la constitution intime du premier membre de
l'équation (1), peut être appelée la propriété fondamentale
des équations linéaires.
Cette propriété fondamentale a été découverte par Bris-
soN, dans le cas où les coefficients A sont constants (*).
Nous en avons donné une démonstration , pour le cas où
ils sont variables, dans le tome XXII des Mémoires cou-
ronnés et autres Mémoires de l'Académie (**). Dans la
présente note, nous nous proposons de rendre cette dé-
monstration plus précise et plus complète; ensuite, de
faire connaître une seconde démonstration de la propriété
en question, plus directe que la première, mais exigeant
aussi des calculs beaucoup plus compliqués.
(*) Cai'chy, Sur r analogie des puissances et des différences (Exer-
cices de mathématiques, t. II, pp. 139-209).
(**) Note sur la première méthode de Brisson pour l'intégration
des équations linéaires aux différences finies ou infiniment petites.
30 p. in-S".
( 580 )
II
Démonstration indirecte.
4. Équation auxiliaire. Considérons, pour plus de sim-
plicité, une équation du troisième ordre,
J)^y-^A,D'y-i-k,J)ij + Azy =0. . . .(4)
Posons
D'y^-Â,D^i/-t-Â,Dt/-+-A,2/=(D^+B.D+B,)(D-a)2/, . (S)
Bi, Ba, a étant des fonctions de x à déterminer. On devra
avoir
B,= A,-v-a, (o)
B2 = A2-+-Bja-H2a', (7)
0 = A5 -+- B^a -+- B,a' -4- a" . . . • (8)
En éliminant Bi et B2 entre ces trois équations , on
trouve, pour déterminer a, l'équation différentielle du se-
cond ordre :
a" H-a'(A,-f-5a)-+- a' -4- A.oV A.a -t-A3=0 . . (8')
L'intégrale générale de cette équation auxiliaire aura
la forme
0= f{x, Ci, Ci), ' v^)
c„ C2 étant des constantes arbitraires. Celte intégrale étant
connue, on pourra déterminer les coefficients Bj et B2,
qui contiendront, par conséquent, chacun, deux con-
stantes arbitraires.
2. Intégration effective de l'équation auxiliaire. On par-
vient à trouver effectivement l'intégrale (9), au moyen d'un
artifice de calcul très-singulier.
( ^8i )
Faisons, dans l'équation (4), y = z -h \. Elle de-
viendra
D'î/-f-A,D'z-4- Aj Dr -4- A3Z-+-A5 = 0
ou, à cause de l'équation (5),
(D^-t-B,D -f- B2)(D— a)s-4-A3 = 0.
Posons
{D—a)z=v; (10)
nous aurons
D^u -+- B, Du-t- B^v-f- A3 = 0. . . . (II)
On ne pourra former cette dernière équation qu'après
avoir déterminé a au moyen de l'équation (8'), puis B^
et B2, au moyen de (6) et (7). A une valeur quelconque de
o, correspondent une ou plusieurs valeurs de Bj et de B^;
puis, à cause de (11), une ou plusieurs valeurs de v, et
enfin une ou plusieurs valeurs de z et de ?/, qui se dé-
duisent de l'équation (10) et de la relation y = z -h 1.
L'équation (11), dont les coefficients B, et Bg con-
tiennent deux constantes arbitraires, c, etci, a identique-
ment la même forme que l'équation (8), sauf que v est
l'inconnue dans (H) et a dans (8). Celle-ci étant vérifiée
par la valeur (9) de a, on peut aussi écrire, comme l'une
des solutions de (11), correspondant à cette valeur de a,
V = f{x, Cl , C2)
On a ensuite, à cause de l'équation (10),
ou
Dr = (:-+-!)/•;
ou encore
D(c-f- i)=^(r+ 1)/:
Mais
donc
ou
( 582 )
% =!//'(^:C,,f2),
I [X, Cl, C^) == .
y
On sait que l'intégrale générale de l'équation (4), ou la
valeur de ?/, a la forme
Cl, C2, C3 étant des constantes arbitraires, et yi, y^, y^
des solutions particulières de l'équation (4), Donc
f{x, Ci,C^) =
Cy, -+-C2?/2-t- ^3^/5
Ainsi Vintégrale générale de Véquation auxiliaire est le
quotient de la dérivée de Vintégrale générale de l'équation
donnée par cette intégrale même.
o. Démonstration de la propriété fondamentale des équa-
tions linéaires. On peut prendre pour a une valeur parti-
culière comprise dans la formule (9). Soit, par exemple,
.V'3
a = «3 =
Posons
(D —(13) y = u,
(D — «3)?/i= ui,
(D — a-J)y^ = U2.
L'équation (4) deviendra
( 585 )
et aura pour solutions particulières m, et il,. Il est bien
entendu que B, et B^, dans cette équation linéaire du se-
cond ordre, ont les valeurs déterminées par les rela-
tions (6) et (7), où l'on a fait «= «s.
^ Les solutions u^ et il, seront distinctes, c'est-à-dire que
l'on aura
0,
si les solutions y,, ij„ y. sont distinctes, ou satisfont à la
relation
>
<
On a, en effet, en remarquant que (D — a^) y. = 0,
Ui, j«2
(D-fOy., (D--«3)^., (D_«3)^3
D(D-a^)3/„D(D-a3)y2, D(D-«3)^3
Si l'on ajoute la première ligne multipliée par a, à la
seconde, le dernier déterminant devient
^1 ' ^2 , ys
y;'-D(«3i/,), y;'_D(a3y,), ^z,;' — 0(03 y.)
Comme
D («3 y) = «'„ y + „. 2,'
il suffira d'ajouter, à la troisième ligne du déterminant
précédent, la première multipliée par «'3 et la seconde
( 584 )
multipliée par a^, pour le transformer en
Î/m
!/2» !/3
!/m
!/*' !/3
3/1'
2/2'. 2/î
Donc enfin le déterminant
n'est pas nul, puisque le déterminant R ne l'est pas.
L'intégrale générale de l'équation (12) est donc
fji et gçi étant des constantes arbitraires. On peut raisonner
sur l'équation (12) comme sur l'équation (4); et, par suite,
on peut mettre celle-ci sous la forme
{D - a,) {b — a,) {D — a,)tj = 0.
Au point de vue théorique , on peut donc toujours sup-
poser l'équation (1) mise sous la forme (2). Mais il est clair
que l'on ne pourra trouver, en pratique, que m facteurs
symboliques (D — a), dans le cas où l'on ne connaîtra que
m solutions particulières de l'équation donnée.
III
Démonstration directe.
4. Formes remarquables de Véquation auxiliaire. On
peut mettre l'équation auxiliaire sous deux formes remar-
quables, qui permettent d'en trouver directement l'inté-
grale, sans artifice de calcul.
( 585)
Pour le montrer, considérons une équation du cinquième
ordre
Posons le premier membre de cette équation égal à
(D* -f- B, D^ -+-B2 D^ + B3 D + B,) (D -^ 6) y
Bi, Bo, B3, B4 étant des fonctions de x inconnues, et b
jouant le même rôle que (—a), dans le paragraphe pré-
cédent.
Si l'on développe la dernière expression , elle devient
t/[6"-4-B,. 6"'-^B,. 6'-+-B3.6'-hB,.6]
-t- D y [46'" -t- B, . 36" -1- B^ . 2&' h- B3 . 6 + BJ
-H mj[6b" -t-B,.56' +B,. b -4- B3]
-+- D'i/ [46' -4- Bj . 6 -f- Bj
-^ DV [ 6 -.- B,]
La loi de formation des termes multipliés par B,, B^,
B-, B4 est très-simple, puisque c'est celle du théorème de
Leibniz donnant la dérivée n'^™* d'un produit.
Égalons les coefficients de 7/\ y", etc., dans l'équation
donnée, à ceux des mêmes quantités, dans l'expression
précédente; il viendra
Ai= b -f- B,
A2 = 46' -f- Bj . 6 M- B2
A3 = 66" -+- B, . 36' -H B,. 6 -t- B,
A4 = 46"' -+- B, . 36" H- B, .26' -+- B3 6 h- B^
A,= 6"-t-B,. 6'"-+-B,. 6" + B3 6' -t- Bi 6.
En éliminant B,, B„ B5, B4 entre ces équations, au
moyen de la théorie des déterminants, on trouve pour
2"°" SÉRIE, TOME XXXVIH. 38
i 586 )
l'équation
auxiliaire :
6 — A„ 1 , 0 , 0, 0
46' -A,, 6 , 1 , 0, 0
66" — A3, 56' , 6,1,0
46'"— Ai, 56", 26' ,6,1
6" — As, b", b", 6', 6
ou, en ajoutant une ligne et une colonne,
1,0 , 0 , 0, 0, 0
A,, 6 -A,, 1 , 0, 0, 0
A,, 46' -A,, 6 , 1 , 0, 0
A,, 66" — A3, 56' , 6 , !, 0
Ai, 46""— Ai, 36"' , 26', 6, 1
^
ks, 6"" — As, 6'", 6", 6', 6
= 0
= 0
Enfin , ajoutons la première colonne à la seconde , il
viendra
1 ,
1 ,
0 ,
0 ,
0,
0
Ai,
6 ,
i ,
0 ,
0,
0
A,,
46',
f^ ,
1 ,
0,
0
A3,
G6",
56' ,
i' ,
1 ,
. 0
A„
46"' ,
56" ,
26' ,
b,
1
As,
6'\
6"' ,
b\
b\
6
= 0,
:t5)
ce qui est la première forme remarquable de l'équation
auxiliaire.
Posons maintenant
6 ,
46',
66",
46'",
6",
1 ,
/> ,
36' ,
56 " ,
6-,
b , 1
0,
0,
0
1
1,
0,
0
h,
1,
0
,^4 =
'2b' ,
6,
1
b',
b;
6
b ,
06' ,
56 " ,
6" ,
1,
0,
0
b.
U
0
26',
b,
i
b",
6',
i
0
26' , 6 , 1 ! ,
b", b' , b\
h, ^,= \.
( o87 )
de sorle que A„ A,, A3, A„ A, sont les mineurs princi-
paux du déterminant formant le premier membre de
l'equation auxiliaire (15).
Il est facile de voir que l'on peut maintenant écrire
cette équation de la manière suivante, en développant le
déterminant dont nous venons de parler ;
— A, ^^ -+- A2 ^3 — A3
A, û, — As ^0=0. . (14)
C'est la seconde forme remarquable de l'équation auxi-
liaire.
5. Intégration de l'équation auxiliaire. Première mé-
thode. Considérons une fonction auxiliaire de x, encore
indéterminée, r, et désignons, suivant l'usage, ses dérivées
successives par r', r", r'", r'\ r\ Nous aurons
^^r"=
Ajoutons, à la première ligne de ce déterminant, la
deuxième multipliée par r'", la troisième multipliée par /•",
la quatrième multipliée par r' , et enfin la dernière multi-
pliée par r; puis, posons
s =^ r' H- br,
et appelons *•', s'\ s'", s'\ les dérivées successives de s. Il
viendra :
^.Nr" =
In-,
r" ,
0,
0 ,
0
46 ,
à
1 ,
0,
0
66" ,
56' ,
b ,
i ,
0
46" ,
56" ,
26',
b ,
I
6" ,
6",
6",
b'.
6
5'^— r\
s'",
s",
s',
s
46'
b ,
1 ,
« '
0
66"
36' ,
b,
1 ,
0
46"
, •36",
'2b',
b ,
1
6-
, b''',
b",
b',
6
( S88 )
Déterminons maintenant la fonction r, en posant s = 0,
c'est-à-dire
r'
r' -+- 6r = 0 , ou — b = — ■
r
Le déterminant Ag r'^ aura pour première ligne
— r\ 0, 0, 0, 0.
Par conséquent, on aura
Ag r" = — r' Aj ;
comme il est facile de le voir. On peut écrire cette relation,
ainsi que les égalités analogues, pour A4 et A3, A3 et A^,
A2 et A,, A, et Aq, de la manière suivante :
Ak a. A-, Ao A, A„
r' r'" r r ^ r r
ou encore :
A,r = (-i)*r% A,r = (-t)S-", A,r=(-'lfr"',
Aj,r=( — \f r\ Ai7'= — r'.
En substituant ces valeurs dans l'équation auxiliaire
multipliée par r, elle devient
r" -f- A, )•'" -\- A2 r" -4- A3 r" -1- A4 r -+- Ag r = 0.
Celle-ci ayant la même forme que l'équation donnée, il
en résulte que
et, par suite,
-b = t
y
ce qui est le théorème du n" 2. On en déduira le théorème
fondamental, comme au n° 5.
I
( 589 )
6. Intégration des équations : A.^ = 0, A3 = 0, A4 = 0,
A5==0. L'équation différentielle
iij = 0, ou 6' = 6*,
a pour intégrale ,^
^_D(^+/v,x)
k ■+- k[ X
k et kl étant des constantes.
L'équation A- = 0 peut, d'après le n" 5, se mettre sous
la forme
(— I )',-■'■ = 0,
ce qui donne
r = k-+- kiX -+- koiX- ,
et
B {k -*- kl X -^ ki x^)
A: -+- A, X -+- A'j X*
De même, les équations
Si = o, ^^ = 0
conduisent respectivement aux solutions :
. D (A; -<- A-, X -+- ki x^ -+- /i3 x')
A; -1- A-, X -4- A:2 x* -+- A3 x, '
D(A: -4- A, X-+- A-jX*-!- A-jX^-t-A^x*)
A- -4- A:, X + Ai x"^ -t- A3 x^ -i- A:^ x*
On voit que chacune des équations
a une intégrale générale algébrique très-simple; de plus,
chacune de ces équations a pour solution particulière Vin-
( 590 )
tégrale générale des suivantes et n'a pas de solution sin-
gulière.
7. Intégration de Véqvalion auxiliaire. Seconde mé-
thode. Posons
L = ?•" -+- A, r" H- A2 r" -4- A3 r" -+- A^ r' ■+- A5 r,
r satisfaisant toujours à la relation
,s =z 0 ou — h = — .
r
Multiplions la première ligne du déterminant qui forme
le premier membre de l'équation (15) par r^ \ ajoutons
ensuite à cette première ligne les suivantes multipliées
respectivement par r'^, r' ", r ", r' et r. L'équation auxi-
liaire aura alors pour premier membre un déterminant
divisé par r^, et dont la première ligne sera
L, 0, 0, 0, 0, 0.
Par conséquent, cette équation deviendra
L.- = 0 (15)
r"
On satisfait donc à l'équation (15), en posant
c'est-à-dire, en faisant
r = V 5 ou — I) = —
y
On ne peut pas satisfaire à l'équation (15), en posant
Ag = 0, car nous savons que la valeur de 6, déduite de
l'équation auxiliaire, doit être une fonction des coeffi-
( 591 )
cients A, tandis que Ay = 0 conduit à une valeur de h
indépendante de ces coeffîcients. On sait d'ailleurs, par le
n°5, que l'équation (15) se réduit en réalité à ( — i)'^L=0;
en outre, si Ag =0, r^ = 0; or, on ne peut pas multiplier
par r" la première ligne du déterminant formant le premier
membre de l'équation (13), pour la transformer en l'équa-
tion (15), sir'^ = 0. Donc, enfin, les valeurs de r, déduites
(le L = 0, donnent toutes les solutions de l'équation
auxiliaire.
1" octobre 1874.
Remarques sur l'aspect de la planète Jupiter pendant son
opposition en 1874, et sur le passage des satellites II
et III et de leurs ombres pendant la soirée du 23 mars:
par M. F. Terby, docteur en sciences, à Louvain.
J'ai l'honneur de présenter à l'Académie les résultats
généraux de mes observations de Jupiter pendant l'année
actuelle. N'ayant pas été aussi satisfait des dessins que j'ai
exécutés pendant cette opposition que de ceux de 1875,
sous le rapport des détails, j'ai cru devoir me borner à
relever succinctement quelques caractères principaux four-
nis par eux et par leur comparaison avec ceux des années
précédentes. Ces caractères m'ont paru, en eflet, d'une
importance assez grande.
Je n'ai donc reproduit ici qu'un seul des dessins que j'ai
recueillis ; il servira à donner à cette note la clarté néces-
saire et il offrira un intérêt spécial à cause du passage des
satellites II et III qui y est représenté.
Le fait le plus remarquable qui résulte de la compa-
( 592 )
raison de l'aspect de la planète pendant les mois de février,
mars et avril 1874, avec celui qu'elle offrait en 1873 et
en 1872, est sans contredit le changement frappant qui
s'est manifesté dans la bande désignée par a dans notre
dessin, et surmontant la calotte polaire septentrionale.
Cette bande, l'un des caractères les plus constants de la
planète en 1872 et en 1875, remarquable alors par sa
netteté, par sa teinte très-sombre et par la démarcation
très-évidente qui la séparait de la calotte inférieure appa-
rente (1), est devenue très-pâle en 1874. Souvent même il
est impossible de la séparer de la région grise qui entoure
le pôle nord. Dans le dessin qui accompagne cette note, la
bande en question est séparée de la calotte boréale, mais
elle est beaucoup plus pâle qu'en 1872 et en 1875; dans
beaucoup d'autres dessins que j'ai recueillis à Louvain, ces
deux régions sombres sont totalement confondues; dans
d'autres, la séparation reste incertaine.
J'ai dit, dans ma notice sur l'opposition de 1875 (2) :
« Il faut aussi remarquer la constance de la bande fine et
» très-sombre qui se trouve immédiatement au-dessus de
» la calotte septentrionale. » On doit reconnaître actuelle-
ment que cette zone sombre s'est considérablement mo-
difiée dans l'intervalle du mois d'avril 1875 au mois de
février 1874,
Un autre caractère saillant, en 1874, est la présence
des deux bandes 6 et c, situées l'une au-dessous, l'autre
(1) Voir Observatio7is de Jupiter faites à Louvain en 1873; Bullet.
UE l'Académie royale de Belgique, S'' série, tome XXXVI, n» H , 1873.
— Voir aussi : Aspect de Jupiter en 4S72; Bulletins, 2« série, t. XXXIV,
11°' 9 et 10; 1872.
(2) Loc. cit.
( î)95 )
au-dessus du centre; la zone c, ou la plus méridionale,
était fort large el extrêmement sombre; c'était la région
la plus foncée du disque, et elle devait appeler immédia-
tement l'attention de l'observateur le moins exercé.
Les deux zones 6 et c ont quelquefois été dédoublées
longitudinalement par un trait brillant.
La calotte polaire méridionale a souvent paru très-faible
et à peine perceptible ; la calotte opposée était générale-
ment bien marquée.
Le dessin qui accompagne celte note représente Jupiter
le 2o mars 1874, de 9 h. 15 m. à 9 h. 50 m. L'observation
a été faite avec une lunette de 9 centimètres d'ouverture
utile et un grossissement de 180 fois. Elle offre d'autant
plus d'intérêt que, par une heureuse coïncidence , elle a
eu lieu pendant que M. C. Flammarion observait également
Jupiter à Paris, et obtenait des résultats qu'il a consi-
gnés dans les Comptes rendus de l'Institut de France (1).
M. Knobel, de la Société royale astronomique de Lon-
dres, dessinait aussi la planète, pendant la même soirée ,
à Burton-on-Trent , et constatait des apparences sem-
blables (2).
Les satellites II et III passaient devant le disque, et je
remarquai immédiatement leurs deux ombres d et e,
d, ombre du o*" satellite, était très-noire; l'ombre du 2%
e, était grise. J'ai estimé le diamètre de e égal à la moitié
de celui de d. En /", j'apercevais un point noir, plus foncé
que e, mais notablement plus petit quedete; on l'eût
pris volontiers pour une petite ombre. J'aurais voulu suivre
attentivement ce troisième point noir jusqu'au bord de la
(1) Comptes rendus de l'Acad. des sciences de Paris, 1874.
(2) Monthly notices de la Soc. astron. de Londres; juin 187-4.
( 594 )
planète, pour voir s'il se trouvait dans l'un des satellites;
mais les nuages sont venus couvrir Jupiter. A 10 h. 15 m.,
l'observation est redevenue possible. Les deux points d ete
s'étaient sensiblement éloignés l'un de l'autre en parcou-
rant le disque, e devançant d. Malheureusement /"n'était
plus visible. Vers 10 h. 25 m., les deux satellites apparais-
saient près du bord (intérieurement), sous forme de petits
disques brillants, et à 10 h, 35 m., ils sortaient suivant
les directions marquées par les deux flèches ; le Z^ était le
plus bas.
Grâce à des conditions atmosphériques plus favorables,
M. Flammarion est arrivé à un résultat décisif à l'égard du
point noir /", qu'il a jugé définitivement appartenir au
5*^ satellite. M. Knobel est tout aussi aflirmatif. De mon
côté, j'ai pu conclure seulement que la distance apparente
des satellites et des ombres, au moment de la sortie, ne
s'opposait pas à l'opinion que le point f se trouvait dans
l'un de ces petits astres.
J'ai cru utile et intéressant de confirmer ici l'observation
de MM. Flammarion et Knobel, et de permettre la com-
paraison de nos résultats à une époque où l'attention se
porte assez fréquemment sur les satellites de Jupiter.
Les dessins que j'ai eu l'honneur de présenter à l'Aca-
démie en 1873 renferment trois exemples dans lesquels
on voit le 4" satellite hii-mème se projeter sur la planète
sous forme d'une tache tout à fait noire, et, quoique l'at-
tention des astronomes ait été attirée sur des faits de ce
genre depuis une époque déjà reculée (1), il convient de
(1) Cassini et Maraldi ont fait des observations analogues, notamment
en 1663, en 1677, en 1707, en 1713 Voir Mém. de l'Académie des
sciences de Paris; années 1707 et 1714.
Bull, de lArad. 2,? Série T..*^».
^. T&rby cbdi. noct'. del/.
\
e * • *
'S
liih. G. Saierei,rrbS,Snhoc£Zl£s.
( nm )
noter encore soigneusement l'aspect qu'offre le corps des
satellites pendant les passages. Outre les renseignements
que l'on peut recueillir ainsi sur l'état de leur surface, on
réunira aussi des documents qui, un jour, serviront peut-
être utilement à élucider la question encore douteuse de
leur durée de rotation.
Recherches sur la conservation du bois au moyen des sels
de cuivre; par M. Rottier, ingénieur industriel, répéti-
teur à l'Université de Gand.
Un des principaux procédés de conservation du bois
consiste, comme on le sait, à faire pénétrer dans la fibre
ligneuse une solution de sulfate cuivrique.
Le grand intérêt qui s'attache à cette méthode de pré-
paration du bois m'a engagé à entreprendre sur ce sujet
quelquesexpériencesque je prends la liberté de soumettre
à l'appréciation de l'Académie. Ces expériences ont été
faites à l'Université de Gand, dans le laboratoire de M. le
professeur Donny, dont les conseils bienveillants m'ont
été d'un grand secours.
Je me suis proposé l'étude de deux questions distinctes:
j'ai étudié d'abord les causes qui provoquent, au bout
d'un certain temps, la destruction du bois préparé; et j'ai
cherché ensuite à constater s'il est possible de prolonger la
durée d'un semblable bois en employant des méthodes
différentes de celle dont on se sert actuellement dans l'in-
dustrie.
( 596 )
SI.
La matière ligneuse imprégnée de sulfate de cuivre ne
se conserve pas indéfiniment sous terre; quelque soin que
l'on ait apporté à sa préparation , elle finit toujours par
s'altérer au bout d'un temps plus ou moins long.
Ce fait s'explique aisément.
Sous l'influence de certaines causes, le bois préparé
perd graduellement la petite quantité de cuivre qui s'est
fixée sur la cellulose, etc., et à la présence de laquelle il
doit la propriété de se conserver. Aussi longtemps que le
bois renferme une certaine quantité de cuivre, il résiste à
la pourriture, mais dès qu'il n'en renferme presque plus,
il se trouve à peu près dans les mêmes conditions que du
bois non préparé et, comme lui, se détruit rapidement sous
terre.
C'est ce qui me paraît ressortir clairement de l'expé-
rience suivante :
Après avoir desséché quelques copeaux d'aubier de peu-
plier, je les ai complètement imprégnés d'une solution de
sulfate cuivrique pur, renfermant ls',5 de sulfate cristal-
lisé pour 100 d'eau.
Pour obtenir cette pénétration complète de liquide anti-
septique, je n'ai pas eu besoin de recourir à l'emploi de la
pression, ainsi qu'on le fait dans l'industrie : les échantil-
lons de bois sur lesquels j'opérais n'ayant qu'une très-faible
épaisseur, il suffisait d'une simple immersion dans le
liquide pour les imprégner entièrement. Après leur prépa-
ration, ces copeaux ont été, à différentes reprises, traités
par de grandes quantités d'eau pure, puis desséchés. On a
( ^97 }
mis quelques-uns de ces copeaux à part afin de pouvoir
doser le cuivre qui s'y trouvait; les autres ont été enfouis
dans une caisse renfermant une certaine quantité de terre
végétale ordinaire que des aspersions périodiques d'eau de
pluie maintenaient constamment humide.
De temps en temps, on retirait de terre quelques-uns
des copeaux préparés, et l'on déterminait la quantité de
métal qu'ils retenaient encore.
Le tableau suivant fait connaître les résultats de l'ana-
lyse de ces divers copeaux :
Temps
Cuivre
1
pendant
trouvé ,
lequel
les copeaux
calculé
à l'etal de
Observations.
oDt séjourné
sulfate
1
gramme bois préparé et lavé.
sous terre.
cristallisé.
0 jours.
0,0041
1
- - -
68 -
0,00:23
Le bois csl encore dans
un étal de parfaite con-
servation.
1
— — —
117 —
0.00i>2o
Les copeaux sont parse-
més de taches noires.
1
— — —
179 -
0.0017
Le bois est à peu près
complétemenl détruit.
Le résultat de cette expérience prouve, d'une manière
évidente et directe, ce que la propriété antiseptique bien
connue des sels de cuivre permettait de prévoir : le bois
doit sa conservation à la présence du cuivre, et, perdant
peu à peu le sel métallique dont il est imprégné, il se
détruit aussitôt qu'il n'en renferme plus ou presque plus.
Examinons maintenant quelles sont les causes sous
( 598 )
l'influence desquelles le sel de cuivre est enlevé au bois.
Ces causes sont au nombre de trois :
1" La présence du fer;
2" Celle de certaines solutions salines, et
3° Celle de l'acide carbonique (1).
I. L'action que le fer métallique exerce sur le bois pré-
paré au sulfate de cuivre est connue depuis plusieurs
années, et c'est à un ingénieur belge, M. Van der Sweep,
que revient le mérite de l'avoir signalée le premier (2).
Après les observations et les recherches faites par
MM. Kuhlmann(5), PaulThénard(4), et Hervé-Mangon (5),
et qui se rattachent à cette question, ce point m'a paru
trop bien étudié pour justifier de nouvelles expériences.
Il m'a semblé toutefois intéressant d'examiner jusqu'à
quel point la présence d'un sel de fer dans les solutions
cuivriques peut être nuisible à la bonne préparation du
bois.
A cet effet, j'ai préparé un certain nombre de copeaux
de bois de même grandeur avec des solutions de sulfate de
cuivre renfermant des quantités différentes de sulfate de
fer, et noté le temps pendant lequel les bois ainsi prépa-
rés se sont conservés sous terre.
(1) Dans un ouvrage publié depuis quelques semaines , un ehimisle
français, M. Maxime Paulet, expose d'une manière très-iemarquable les
résultats de quelques expériences qu'il a entreprises sur le même sujet :
ses conclusions sont analogues aux miennes. (Pages 144 et suivantes.)
(2) Boudin , Cours de technologie , !■•« partie , 2» édition , p. 231 .
(5) Comptes rendus de l'Académie des sciences de Paris (n» 7, août
18S9).
(4) Ibid. (2-2 août 1839).
(5) Ibid. (août 1839).
( 599 )
Le tableau suivant fait connaître les résultats obtenus :
1
Nos
Poids
des
Composition
des liqueurs employées à la
des copeaux.
préparation
Les copeaux
étaient
complètement
d'ordre.
COPEAUX.
CUSO40H2O
FeSo^THjO
H2O
délruits sous terre
au bout de :
1
gr-
0.2a
gr.
0.00
l.oO
100.00
56 j ours.
0
0,23
O.oO
-1,00
-100,00
83 -
3
0.22
1.00
0,oO
100,00
97 -
4
0.22
1.20
0,30
100,00
100 —
o
0,22
1,30
0.20
100.00
103 -
6
0,19
1.40
0,10
100.00
103 —
7
0.19
l,4o
O.Oo
■100,00
108 —
8
0.18
1,48
0,02
100,00
109 —
9
0.20
1.49
0.01
100,00
109 —
10
0.23
l,49o
0,005
•100,00
110 -
■11
0.20
l.oO
0,00
•100,00
109 -
1 12
0.25
1.46
0,04 (*)
•100,00
110 -
13
0.24
1,48
0,02 (*)
100.00
110 —
! 1^
0,26
Copeau non
préparé . .
34 —
(•)
Sulfates d
B cuivre du ce
mnierce.
Dans toutes mes expériences, j'ai admis que les copeau.x
étaient totalement détruits, lorsqu'il était impossible de
les retirer de terre sans les briser, et qu'ils cédaient au
moindre effort. On comprend qu'en faisant usage d'un sem-
blable procédé pour juger du degré d'altération du bois,
on ne puisse pas obtenir de mesures très-rigoureuses et
que l'on ne doive attacher que fort peu d'importance aux
légères différences observées.
En examinant le tableau précédent, on voit :
1° Que le sulfate ferreux jouit d'un certain pouvoir
antiseptique beaucoup plus faible que celui du sulfate de
cuivre;
( 600 )
2" Que des bois préparés à l'aide de solutions renfer-
mant à la fois du sulfate de fer et du sulfate de cuivre se
conservent sous terre à peu près pendant le même temps,
à moins que le sulfate de fer ne soit en proportion consi-
dérable;
'' 5° Qu'il n'y a pas lieu de préférer, pour la préparation
du bois, le sulfate de cuivre chimiquement pur au sulfate
commercial.
Dans un travail récent, M. Boucherie (1) émet quelques
observations qui sont en contradiction avec mes résultats.
D'après lui, le sulfate de cuivre renfermant plus de 5 ou
6 p. "/ode sulfate de fer doit être proscrit et il convient de
n'employer, pour la préparation du bois, que du sulfate
cuivrique pur ou convenablement purifié.
Sans prétendre trancher la question, je rappellerai à ce
sujet les expériences intéressantes faites par Payen sur le
bois d'une roue fort ancienne, découverte, il y a quelques
années, dans les mines de cuivre de San-Domingos (Por-,
tugal) (2). Cette roue , qui se trouve dans un état de par-
faite conservation, après une immersion de quatorze siè-
cles dans des eaux chargées de sulfate de cuivre et de
sulfate de fer, renferme en quantité très-notable dessous-
sulfates de ces deux métaux (3).
II. Un certain nombre de sels exercent une action nui-
sible sur les bois imprégnés de sulfate cuivrique.
(1) Comptes rendus de l'Académie des sciences de Par/s, tome LXXVII,
p. 487.
(2) Comptes rendus de l'Académie des sciences de Paris, tome LVIII,
pp. 899 et 1033.
(3) Voir aussi, au sujet de Faction des sels de fer sur le bois, M. Paulet,
Traité de la conser cation du bois, etc. Paris, Baudry, 1874. pp. 132-133.
( 601 )
Lorsqu'on plonge du bois préparé et lavé au préalable
u moyen d eau d.tillée, dans «ne solution de chloru
de sod,um, de carbonate de sodium, ou de carbonate de
potassium, et qu'on examine ces solutions au bout de
quelque temps, on remarque qu'elles renferment toujours
une assez notable quantité de cuivre.
Si d'autre part, on dose le cuivre contenu dans la fibre
igneuse, on observe constamment une diminution dans
Quantité de cuivre qui se trouvait primitivement dans le
Ce fait rend compte de l'insuccès de toutes les tenta-
tives qui ont été faites en vue de protéger les bois, à l'aide
du sulfate de cuivre, contre l'action de la mer (1)
A cause des sels qu'elle renferme, l'eau de mer enlève
aisément le sulfate de cuivre au bois préparé; aussi long-
emps que le bois contient du cuivre, il échappe aux
atteintes des mollusques marins; mais dès que la plus
grande partie du sel cuivrique a été enlevée par l'eau de
mer, le bois est rapidement envahi ; on trouvera la preuve
de ce fait dans les résultats de l'expérience suivante exé-
cutée sur une pièce de bois de hêtre préparée qui a été
soumise pendant un certain temps à l'action de la mer
Une partie de ce bois était intacte; l'autre était profon-
dement perforée par le taret ;
Sulfate de cuivre,
gr,
2,S de bois pris dans la partie intacte renfermaient . . 'o,OH40
' - - attaquée - . . o,0001S
C'est probablement à une action analogue que l'on doit
(1) Annales des Travaux publics de Be/gique,tome XIX (1860-1861).
i"" SÉRIE, TOME XXXVIII. 5g
( 602 )
attribuer la rapide destruction qu'éprouvent les bois pré-
parés lorsqu'ils sont enfouis sous des tunnels ou dans cer-
tains terrains, et notamment dans les terrains calcaires (1 );
il est possible, en effet, que les eaux qui s'infiltrent dans
ces terrains se chargent de certaines matières salines
^^bicarbonate de calcium, etc.,) jouissant comme le sel
marin, le carbonate sodique, etc., de la propriété d'enle-
ver le cuivre au bois préparé (2).
111. De même que certains sels, les solutions d'acide car-
bonique enlèvent au bois le sulfate de cuivre qui s'y trouve.
Trois grammes environ de copeaux de bois préparés et
lavés avec soin ont été traités pendant sept jours par des
solutions d'acide carbonique (eau gazeuse). Chaque fois
qu'on remplaçait par une autre la solution gazeuze qui
avait servi, celle-ci était filtrée avec grand soin et analysée.
La quantité totale de cuivre ainsi enlevée a été de O^^OOSS,
calculée à l'état de sulfate.
Dans les mêmes conditions, l'eau pure était sans aucune
action sur le bois sulfaté.
M. Maxime Paulet , dans son dernier ouvrage (o) , décrit
une expérience analogue : « Prenez, dit-il, de la sciure
» d'un bois injecté de sel de cuivre, lavez cette sciure avec
» de l'eau jusqu'à ce que le cyano-ferrure de potassium
» n'accuse plus sensiblement dans l'eau sortie de ces
(1) Annales des Travaux publics de Belgique, tome XXVI {Notice
sur le matériel des lignes télégraphiques belges, par F. Delarge, sous-in-
géuieur au service des télégraphes).
(2) M. de Coene, ingénieur aux chemins de fer de l'Ouest ( France) ,
m'apprend que les traverses au sulfate de cuivre enterrées sous les par-
ties de voies qui traversent les tunnels sont rapidement détruites et qu'on
se voit obligé de les remplacer au bout de 6 à 7 ans.
(5) Traité de la conservation du bois, etc. Paris, 1874, p. 145.
f 605 )
» lavages la présence du sel de cuivre. A ce moment,
» plongez cette même sciure, qui parait épuisée, dans de
» l'eau gazeuse ordinaire, c'est-à-dire dans de l'eau char-
» gée d'acide carbonique. Après quelque temps de con-
B tact, cette eau est devenue cuprique. Que s'est-il passé?
» Il est permis de croire que l'oxyde de cuivre, sous l'in-
» fluence d'un excès d'acide carbonique, s'est dissous et
» se trouve emporté. Si cette expérience, qui a besoin
» d'être répétée, venait à conûrmer de tels résultats,
» l'importance de ceux-ci au point de vue pratique n'échap-
» perait à personne. »
IV. Après avoir constaté l'influence de l'acide carbonique
et des solutions salines, j'ai cherché à reconnaître si l'eau
pure exerce une action dissolvante sur les combinaisons
cuivriques contenues dans le bois préparé.
Voici les deux expériences que j'ai faites pour étudier
cette question :
A. Dans un vase ouvert rempli d'eau distillée, j'ai
plongé quelques copeaux préparés et lavés avec grand
soin; j'ai couvert ce vase d'une vitre pour combattre les
effets de l'évaporation et je l'ai abandonné à lui-même
pendant un temps fort long.
Sulfate de cuivre.
Avant de mettre les copeaux clans l'eau, j'avais coupé un —
petit fragment (le ^js environ de la surface ) de chacun
d'eux; ces morceaux réunis m'ont servi à déterminer la
quantité moj'enne de cuivre retenue par le bois au com-
mencement de l'expérience; cette quantité était, pour gr.
un gramme de bois, de 0,0073
Au bout de sept mois, un nouveau fragment de chaque
copeau a été pris dans le même but; mes échantillons
renfermaient, alors, par gramme de bois 0,0Do4
Treize mois après le commencement de l'expérience, le
dosage du cuivre accusait 0,00(30
Et enfin, au bout de dix-neuf mois d'immersion dans l'eau. 0,0034
( 60i )
L'action de l'eau est donc manifeste; mais à quelle
cause doit elle être rapportée ? Est-elle due réellement à
la présence de l'eau? Ou bien doit-elle être attribuée à
une cause accidentelle, par exemple, à la présence de
l'acide carbonique dissous dans l'eau? Quoiqu'il ne faille
pas attacher trop d'importance à une expérience isolée,
on ne peut s'empêcher de remarquer que cette dernière
supposition expliquerait, d'une manière satisfaisante,
l'égalité des trois derniers nombres.
B. J'ai mis, dans un ballon en verre, de l'eau distillée
que j'ai soumise à l'ébullition pendant un certain temps,
afin de chasser la majeure partie des gaz dissous dans le
liquide; quelques copeaux de bois préparés et lavés avec
le plus grand soin ont été alors introduits dans le ballon
dont le col a été ensuite effilé; après une nouvelle ébulli-
tion de l'eau , le ballon a été scellé à la lampe et abandonné
à lui-même pendant 200 jours.
Au bout de ce temps, j'ai ouvert le ballon, filtré l'eau
qui s'y trouvait et dosé le cuivre que celle-ci renfermait :
la quantité de métal dissoute dans le liquide était de
0'^',0002 calculée à l'état de sulfate cristallisé.
Dans les conditions dans lesquelles je me suis placé, une
petite quantité de cuivre a donc été enlevée au bois pré-
paré.
On ne doit, toutefois, pas se bâter de conclure de ce
fait, que cette action est due réellement à la présence de
l'eau : ici, comme dans l'expérience précédente, l'acide
carbonique a pu intervenir; on sait, en effet, que l'eau,
même après une ébullition prolongée, retient obstinément
de petites quantités de gaz, et l'on conçoit d'ailleurs, que
si le bois n'est pas complètement saturé de cuivre, si un
fragment même très-minime de bois échappe à la prépa-
( 60.5 )
lation il puisse lui-même fournir à l'eau une cerhin^
quanlilé d'acide carbonique, ^
Quoi qu'il en soil, je pense qu'il est permis de conclure
de mes expenences que, si l'eau exerce une action sur
bo,s prépare, cette action est d'une lenteur extrême.
§ II.
Le bois préparé, étant sujet à s'alléi'er aussitôt qu'il ne
enferme plus que de très-minimes quantités de cuivre
^pa a, probable que l'on prolongera sa durée en aug-
Ugneuse '"'""" "' "'''"' ""' '^ '"' '"' '» ""''>
Voyons si l'expérience confirme celte supposition
La méthode ordinaire de préparation du bois ne permet
pas de résoudre la question : lorsqu'on plonge du boisdaus
les solutions de sulfate cuivrique, la proportion de métal
qu. se combme avec la fibre ligneuse est loujotns à peu
près constante et totijours très-petite
e«*^l"'T, ''"r " ""P'"^''"' ''"' P''»"^'''^' ^P^"»"^ qu'il
est possible d'introduire dans la matière végétale des
quantités plusgrandes de enivre.
Les moyens suivants m'ont donné de bons résultats :
1" Emploi Je facélale de cuivre. Les divers sels de
cuivre ne jouissent pas au même degré de la propriété de
s li.xer sur le bois; parmi ceux dont j'ai essayé i'emploi,
I acétate mérite une mention spéciale
Voici quelles sont les quantités de cuivre que j'ai
trouvées dans un certain nombre de copeaux préparés au
moyen de différentes solutions d'acétate cuivrique Ces
( 606 )
quantités sont calculées à l'état de CUSO4 + 5H2O.
gr.
-1 gramme bois préparé renferme O.OlOi
i — — — 0.012?;
1 — — — 0.0100
i — — — 0,0170
i — — — 0.0106
tandis que les échantillons préparés à l'aide du sulfate
de cuivre ne contiennent généralement que de O'^OOG
à 0"^007 de sulfate par gramme de bois.
2" Cliauffarje des bois préparés. Lorsque, après avoir re-
tiré les copeaux des solutions cuivriques (sulfate, acé-
tate, etc.) dans lesquelles ils ont été plongés, on les expose
à l'action d'une température élevée, le bois absorbe et
retient, sous forme de combinaisons insolubles, une quan-
tité de cuivre un peu plus grande que celle que le procédé
ordinaire de préparation permet d'y introduire.
Le tableau suivant donne les résultats de quelques do-
sages de cuivre effectués sur divers copeaux qui ont été
chauffés après leur préparation :
Cuivre
contenu dans
i (îr. de bois
(calculé a l'état
de
Copeau préparé au
moyen de sulfate de cuivre et
CUS045H2O).
chauffé à . .
0,007o
0,0090
— — — 100» c.
-
- — — i2o» c.
0,0114
- -
— de l'acétate — lOO» c.
0,0231
- -
- - — -130" c.
0,0240
— —
— de la méthode ordinaire. . .
0,0073
( 607 )
5° Emploi de substances organiques. Quelques corps
organiques agissent à l'égard des sels de cuivre comme les
mordants relativement aux matières colorantes : introduits
dans la fibre ligneuse, ils s'y fixent en lui permettant d'ab-
sorber des quantités de cuivre parfois très-considérables.
Je me borne à décrire les expériences que j'ai faites au
moyen des deux substances organiques qui m'ont donné
les résultats les plus remarquables, l'indigo et le cachou.
a. Indigo. Un copeau de bois teint en bleu très-pâle à
l'aide de l'indigo a été ensuite préparé au sulfate de cuivre.
Ce copeau renfermait, par gramme, 0^'^,009o de cuivre
(calculé à l'état de CuSO^SH^O), c'est-à-dire un peu plus
que le bois préparé de la manière ordinaire.
Un second essai a été fait au moyen d'un échantillon de
toile de coton d'un bleu très-intense (bleu de cuve). Cet
échantillon, après avoir été soumis l'action d'une solution
de sulfate cuivrique, lavé, etc., renfermait, par gramme,
0^%00409 (CuSOiSH.O), tandis que la toile de coton
blanche ne fixe guère plus de 0°',001 de sulfate par
gramme.
J'ai fait une dernière expérience sur ce sujet en prépa-
rant au moyen de sulfate de cuivre un échantillon de toile
de coton imprimée. Ce tissu présentait un fond bleu d'in-
digo parsemé de pois blancs. Après sa préparation, l'échan-
tillon a été découpé avec soin, et l'on a rassemblé les
pois blancs d'une part, et le fond bleu d'autre part, afin
de pouvoir doser séparément le cuivre contenu dans la
partie blanche et dans la partie bleue du tissu.
Voici les résultats des dosages de cuivre :
i gramme de tissu (partie blanche) renfermait 0,000:26
1 gramme de tissu (partie bleue j — 0,01300
( 608 )
b. Cachou. Lorsqu'on mélange une décoction de cachou
avec une solution de sulfate ou d'acétate cuivrique, on
obtient, après filtration, une liqueur qui peut servir à la
préparation du bois et qui permet de fixer sur la matière
ligneuse une quantité considérable de cuivre.
Voici les résultats de quelques dosages de cuivre effec-
tués sur des copeaux préparés au moyen du cachou :
gramme copeaux préparés au moyen du cachou renferme.
4 —
Cuivre
calculé à l'état
de
CUS04+5H20
0.0169
0,0133
0,0140
0,0320
0,0460
0,0145
Contrairement à ce qu'on pourrait supposer, l'emploi
du cachou dans la préparation du bois ne présente guère
d'importance pratique ; nécessitant l'intervention de l'oxy-
gène atmosphérique, l'action du cachou est limitée à la
surface du bois : des copeaux dont l'épaisseur est faible et
la surface considérable, peuvent absorber une grande
quantité de cuivre, tandis que des pièces de bois d'un
certain équarrissage n'en fixent que des proportions rela-
tivement minimes.
4° Emploi des sels de ciiprammonium. L'emploi des
sels cuprammoniques permet d'introduire facilement une
grande quantité de cuivre dans le bois.
( 609 )
Pour s'en assurer, on peut ajouter à une solution
aqueuse de sulfate de cuivre une quantité d'ammoniaque
caustique ou de carbonate d'ammoniaque suffisante pour
redissoudre le précipité qui s'est formé d'abord et doser
le métal contenu dans un copeau de bois qui a été plongé
pendant quelque temps dans cette liqueur.
Un grand nombre de dosages que j'ai effectués sur des
échantillons ainsi préparés m'ont donné constamment de
bons résultats.
Voici quelques-uns des nombres que j'ai obtenus :
Cuivre
calculé
sous forme de
CuSo^.SH^O
1 gramme de bois préparc au moyen du sulfate de cuivre ammoniacal renf. 1 0,0166
1 -
1 —
1 -
1 —
I —
1 -
1 —
0,0250
0.0330
0,0230
0,0423
0,0500
0,0580
0,0730
Ainsi qu'on vient de le voir, il est donc possible de
fixer, par divers moyens, une notable proportion de cuivre
sur la fibre ligneuse.
Il reste à examiner quelle influence cette grande quan-
tité de métal introduite dans le bois préparé exerce sur
la durée de celui-ci.
( 610)
Afin de voir si le bois fortement imprégné de cuivre
résiste à la pourriture plus longtemps que le bois préparé par
les moyens ordinaires, j'enterre côte à côte l" Un copeau
non préparé (A); 2° un copeau au sulfate de cuivre (B);
5° un autre à l'acétate (C); 4° un quatrième au cachou (D) ;
5" un copeau préparé au sulfate et chauffé (E) ; 6° un copeau
préparé à l'acétate et chauffé (F) ; et enfin 7° un dernier
copeau préparé au moyen de l'ammoniaque (G).
Le tableau suivant fait connaître les résultats obtenus :
A. Bois non préparé
B. Bois préparé au sulfate cuivrique ( pré
paration ordinaire ) .
C. — à l'acétate de cuivre. .
D. — au moyen du sulfate de
cuivre et du cachou .
E. — au sulfate de cuivre et
chauffé après préparât"
F. — à l'acétate de cuivre et
chauffé après préparât"
G. — au moyen de sulfate de
cuivre ammoniacal
1 gr. de bois
renferme :
(CuSo^+SHaO)
0,00002
0,00730
0;01000
0,01300
0,01000
0,02300
0.01660
Le bois
est
complètement
détruit
au bout de :
30 jours.
67 —
9o -
120 -
80 —
160 -
130 —
Les nombreuses expériences que j'ai faites sur ce sujet
ont toujours confirmé les résultats indiqués dans le tableau
ci-dessus. Quelques-uns de ces essais ne sont pas terminés
en ce moment : des copeaux renfermant O^^OTo de sulfate
et qui se trouvent sous terre depuis plus de 200 jours,
sont encore actuellement dans un état de parfaite conser-
vation qui me fait espérer une très-longue durée.
( 611 )
On voit qu'il résulte de mes expériences qu'en augmen-
tant la quantité de cuivre flxée sur le bois, on prolonge la
durée de celui-ci.
Parmi les diverses méthodes de préparation que je viens
de passer en revue, une seule me paraît susceptible d'être
appliquée avec avantage dans l'industrie ; le prix élevé de
l'acétate cuivrique et de l'indigo doit faire rejeter, sans
aucun doute, l'emploi de ces corps; le chauffage des bois
injectés de sulfate de cuivre ne donne que des résultats
d'une valeur contestable (1) et l'emploi du cachou n'est
possible que dans des cas très-limités. Les sels de cupram-
monium, au contraire, peuvent être employés dans la
généralité des cas et la minime augmentation de dépenses
résultant de leur application à la conservation du bois sera
largement compensée par la longue durée assurée à
celui-ci.
La classe s'est occupée, en comité secret, de la discus-
sion des titres des candidats présentés à la dernière séance,
et a adopté quelques candidatures nouvelles.
(1) L'action de la chaleur communique au bois imprégné de sulfate
cuivrique une coloration rose d'autant plus intense que le chauffage s'est
effectué à une température plus élevée. Cette circonstance, jointe à la
destruction relativement facile du bois ainsi traité, me porte à croire que
l'action de la chaleur fait éprouver au bois sulfaté un commencement
d'altération , soit à cause de l'acidité du sel , soit pour toute autre raison.
( 612 )
CLASSE DES LETTRES.
Séance du 9 novembre 1874.
M. R. ChaloiN , directeur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J. Grandgagnage, J. Roulez, Ga-
chard, P. Devaux, P. De Decker, J.-J. Haus, M.-N.-J.
Leclercq, Ch. Faider, le baron Kervyn de Lettenhove,
Thonissen, Th. Juste, le baron G. Guillaume, F. Nève,
Alph. Wauters, Ém. de Laveleye, G. Nypels, Alph. Le
Roy, Ém. de Borchgrave, membres; J. Nolet de Brauwere
van Steeland, Aug. Scheler, Alph. Rivier, associés;
F. Loise, G.Rolin-Jaequemyns, Stan. Bormaus, correspon-
dants.
M. Ed. Mailly, correspondant de la classe des sciences^
assiste à la séance.
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'intérieur demande à la classe de
vouloir bien lui soumettre une liste de quatorze noms pour
le choix des sept membres appelés à juger la cinquième
période du concours quinquennal de littérature flamande,
concours dont le terme fatal expire le 51 décembre pro-
chain.
( 613 )
Celte liste, dont la classe s'est occupée en comité secret,
sera communiquée à M. le Minisire.
— Le même haut fonctionnaire adresse, pour la biblio-
thèque de l'Académie, deux exemplaires des Actes de la
Conférence de Bruxelles , ^874 (in-4''), et la 5" livraison de
la 5'' série (Gast-Gebrek) du Woordenboek der JSeder-
landsche Taal, publié par Cosijn et Yerwijs, gr.-in-S^à 2
colonnes.
M.Alphonse Wauters fait hommage du premier exem-
plaire du tome IV (années 1226-1250) de la Table chrono-
logique des chartes et diplômes imprimés concernant
l'histoire de la Belgique, 1 vol. in-4°, publiée comme suite
à la collection des chroniques de la Commission royale
d'histoire.
M. le baron Kervyn de Lettenhove présente, au nom de
M. Scheler, le premier exemplaire de l'ouvrage :Li Bou-
mans de Berfe ans grans pies, par Adetiés li Bois, publié
dans la collection académique des œuvres des grands écri-
vains du pays.
M. J. Nolet de Brauvvere van Steeland fait hommage
d'un exemplaire de sa brochure imprimée, portant pour
titre : Nederlandsch contra Westvlaamsche taal-particu-
laristerij ; in-8°.
M. B. Van Hollebeke oifre un exemplaire du recueil
qu'il vient de publier sous le titre de : Morceaux choisis
de poètes belges, 1 vol. in-8°.
La classe vote des remercîments aux auteurs de ces
différents dons.
— L'École nationale des chartes, et M. Emile Egger,
associé, à Paris, la mairie de la ville d'Amiens, la Société
( 614 )
d'hisloire et d'archéologie de Châlons-sur-Saône, M. Tail-
liar, à Douai, M. Farr, associé à Londres, la Société numis-
matique de Londres, remercient pour l'envoi des dernières
publications académiques.
— La commission impériale archéologique de Saint-
Pétersbourg, l'Institut pour l'élude des Indes néerlandaises
à La Haye, et l'Institut historique et géographique du
Brésil adressent leurs derniers travaux.
RAPPORTS.
MM. Faider et De Decker expriment verbalement leur
avis sur la notice présentée par M. X. Heuschling lors de
la dernière séance, et portant pour titre : La statistique
internationale, son origine et ses 'progrès.
Conformément à l'opinion de ses deux commissaires,
la classe vote des remercîments à M. Heuschling pour sa
communication , qui sera déposée aux archives.
Les écoles et V alphabet des Tamouls , notice par M. Phi-
lippe Van der Haeghen.
Mtnppot't de n. Féiiac 1%'ère.
« Il y a bientôt vingt ans qu'une instructive notice de
M. Philippe Van der Haeghen, Sur V étude du Tamoul, a été
insérée dans nos Bulletins {["' série, tome XXH, 1856).
Un peu plus tard, sur le rapport favorable de notre con-
( 6i5 )
frère feu G. A rend t [Bulletins, ibid., tome XXIII, 1837),
le même écrivain a rais au jour le texte de cent proverbes
tamouls, soigneusement comparés aux proverbes d'une foule
de peuples [Maximes populaires de l'Inde méridionale.
Paris — Leipzig, 1858, 40 pages gr. in-8").
C'est à la même langue de l'Inde que se rapporte le
court essai que M. Philippe Van der Haeghen vient de
nous présenter sous le titre : Les écoles et l'alphabet des
Tamouls (MS. de 17 pages in-8" et 5 pages de notes). Chargé
par la classe d'examiner cette nouvelle notice, je com-
mence par signaler l'intérêt tout spécial qu'elle renferme.
L'auteur débute par une esquisse de l'instruction pri-
maire donnée aux populations méridionales de l'Inde
dont le Tamoul est la langue maternelle ; il montre le rôle
de l'instituteur dans chaque village, l'admission d'un grand
nombre d'enfants de plusieurs castes, à l'exclusion des
classes dégradées, aux leçons de l'école ; il dit comment
l'enseignement de l'alphabet se fait à la fois par un exer-
cice vocal assez long, et par l'apprentissage de l'écriture
qui consiste à tracer des caractères sur les olles ou longues
feuilles de palmier. On a dans cette introduction le résumé
de données assez généralement connues.
De cette peinture de l'école populaire, M. Yan der Hae-
ghen passe à la description des éléments de l'alphabet du
Tamoul, qui est la plus importante des langues du sud de
l'Inde, appelées dravidiennes comme appartenant aux
peuples nommés collectivement Dravidas, mais que la
science a rattachées naguère au groupe si étendu des
idiomes touraniens.
Quelle que soit l'antiquité du séjour de ces populations
dans le midi de la Péninsule, il paraît incontestable qu'elles
ont dû leur culture intellectuelle aux conquérants de race
( 616 )
aryenne, fondateurs des grands États du Nord et du milieu
de l'Inde. Les monuments principaux retrouvés jusqu'ici
en Tamoul et dans les autres langues congénères con-
firment cette donnée ; on ne placerait pas leur composition
avant le milieu de notre m.oyen âge : c'est au IX* siècle
que Tirouvallaver, «le divin Paria », a produit ses œuvres
fort vantées (voir Lassen , Indisclie Alterthumskunde ,
tome IV, 1861, pp. 237-259 et pp. 798-799). Il demeure
tout à fait incertain si des monuments de ce genre nous
révéleront quelque jour des traditions importantes pour
l'histoire primitive dn continent asiatique, supérieures en
âge à celles qui sont consignées dans les livres des Aryas.
Jusque-là on ne peut élever de doute sur l'infériorité de
la littérature des langues dravidiennes comparée à celle
des temps florissants de l'Inde brahmanique et bouddhique.
Ces langues méridionales ont droit à être étudiées de
nouveau au point de vue de la grammaire et à celui de
l'ethnographie ; leur connaissance n'est pas non plus sans
utilité politique et commerciale pour les nations qui ont
des comptoirs sur la côte de Coromandel ; elle n'a guère
là moins d'importance que celle de l'hindoustani dans le
Nord. Mais, de fait, elles ne sont pas comprises dans le
cercle des études indiennes qui ont reçu tant d'extension
dans l'enseignement public en Angleterre et surtout en
Allemagne.
Voici maintenant le plan de la nouvelle étude de M.Ph.
Van der Haeghen sur l'alphabet des Tamouls. Quand il a
énuméré tous les signes de cet alphabet, partagé en
voyelles (au nombre de douze) et en consonnes (au nombre
de dix-huit), il n'en détermine pas la valeur phonétique;
ce n'est pas assez de distinguer les dix-huit consonnes en
fortes, douces et moyennes, sans plus d'explication. Il
(617 )
n'indique aucune transcription de chaque lettre , comme on
le fait généralement aujourd'hui pour mieux préciser les lois
de l'euphonie dans l'analyse scientifique de la plupart des
langues. Il n'est pas aisé de donner un équivalent à toutes
les articulations de l'alphabet tamoul, et l'on regarderait
comme d'un emploi difficile la transcription de textes éten-
dus. Au moins serait-il bon de pratiquer une translitération
conventionnelle, comme l'ont fait les auteurs de plu-
sieurs traités de grammaire tamoule : ainsi l'a entendu le
D"" Ch. Graul dans l'esquisse grammaticale qu'il a publiée
en anglais au lome II de sa Bibliotheca tanmlica (Leipzig,
1855).
M. Van der Haeghen aborde directement une compa-
raison de l'alphabet tamoul avec l'alphabet sanscrit, mais
sans avoir défini, au préalable, la valeur de chaque lettre
du premier. En se servant constamment du caractère
original de chacune des deux langues, il procède à des
rapprochements de signes et de mots dont plusieurs sont
dignes d'attention. Il montre combien de fois une seule
consonne tamoule est employée, dans l'écriture des livres,
comme l'équivalent de plusieurs consonnes sanscrites ;
en manière d'exemples, il met en regard du mot tamoul
le mot sanscrit que des écrivains du Midi ont fait passer
dans leur langue nationale. Cependant la démonstration
ne nous semble pas explicite de tout point.
L'essai de M. Van der Haeghen aurait plus de portée,
s'il s'était tenu , dans le parallèle des deux alphabets, à la
classification des lettres indiennes qui a passé dans tous
les traités de grammaire comparative. Sans parler du grand
ouvrage de François Bopp qui est consulté comme un
chef-d'œuvre d'analyse dans toute étude de haute philo-
logie, rappelons que, dès l'année 1828, Eugène Burnouf
2™* SÉRIE, TOME XXXVIII. 40
(618)
s'esl appliqué au même sujet dans sa première lettre sur
l'alphabet tamoul [Nouveau Journal asiatique, tome I",
avril 1828, pp. 259 à 290). Comme l'a dûment constaté
l'indianiste français, le Tamoul a des sons étrangers à la
langue des Brahmanes : il a un alphabet qui lui est propre,
si l'on en considère les divers éléments ; il a conservé des
signes particuliers pour certaines voyelles et pour cer-
taines articulations. Mais, dans l'usage littéraire, il s'est plié
à la transcription du sanscrit par des équivalents, et sans
doute la forme de ses lettres s'est modifiée dès lors à l'imi-
tation du Dévanagari ou d'un ancien alphabet indien (1).
Faute de signes particuliers, le Tamoul n'a pu représenter
deux classes de consonnes, les douces et les aspirées,
auxquelles il a d'ordinaire subtitué les fortes: cette diffé-
rence essentielle par rapport à une écriture alphabétique
plus perfectionnée a déjà été notée par Eugène Burnouf
dans un tableau synoptique {Ibid. , p. 270).
M. Van der Haeghen nous dit qu'il a recueilli beaucoup
d'observations dans la lecture de manuscrits tamouls : il
les mettra sans doute pleinement à profit s'il reprend avec
plus de rigueur la comparaison des deux alphabets, et il
sera à même de procéder plus sûrement ensuite à la com-
(1) Quant à l'emprunt de plusieurs signes alphabétiques par les Tamouls
à des systèmes d'écriture indienne, on en aura la claire démonstration
dans le grand mémoire de M. François Lenormant dont la publication est
commencée sous le titre d'Essai sur la propagation de l" alphabet phé-
nicien dans V ancien monde. L'alphabet dravidien y est rattaché ainsi que
les alphabets de l'Inde civilisée, par l'intermédiaire du Magâdhi, au
tronc indo-homérite. Des planches insérées dans le corps de l'ouvrage
rendront compte de cette dérivation qui n'est indiquée jusqu'ici que dans
une sorte de tableau généalogique annexé à l'introduction (tome I*',
part. V\ Paris, Maisonneuve, 1872, page 112 et table VI).
( 619)
paraison des vocables pour distinguer les mots d'origine
dravidienne des mots empruntés à une autre famille de
langues. En attendant que l'auteur juge bon de compléter
et de perfectionner son travail, nous proposons à la classe
d'adresser des remercîments à M. Van der Haeghen pour
sa communication , et de déposer son manuscrit aux
archives. »
La classe adopte les conclusions de ce rapport.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Le Compendium Instilutionum de Nicolas de Bruxelles;
notice par M. Alphonse Rivier, associé de l'Académie.
L
L'an 1513 est une date mémorable dans les annales de
l'imprimeur Thierry Martens, dans celles de l'ancienne
Université de Louvain, et dans les fastes de la science
belge.
En cette année, deux petits livres sortirent de l'officine
célèbre qui répandait alors tant de vie et de lumière sur
les Pays-Bas et sur l'Europe.
L'un était VOraison de Martin van Dorp in laudem
omnium artium, où les jurisconsultes de Rome sont com-
blés de louanges enthousiastes et où le jeune et ardent
humaniste, invoquant les lois romaines, s'écrie : « 0 lois
I
( 620 )
vénérables en toute piété, lois sacrées, lois augustes, lois
divines, qui versez sur nous de votre pleine corne d'abon-
dance tant de biens et tant de richesses, guides de notre
vie, gardienne des arts libéraux! »
L'autre petit livre, qui était muni d'une épître de l'édi-
teur et fut tiré à mille exemplaires (1), s'adressait direc-
tement aux étudiants en droit. Il contenait les leçons
élémentaires de Maître Nicolas de Bruxelles, professeur
d'Institiites, lequel jouissait à Louvain d'une haute estime
et d'une popularité de bon aloi.
C'était la première fois que Martens prêtait le concours
de son art à la science juridique (2) , et c'est là sans doute
ce qui a déterminé l'excellent imprimeur à prendre lui-
même la plume pour inaugurer ce nouveau champ d'action
par un manifeste à ses lecteurs. Le champ ne fut peut-être
pas aussi fécond que Martens l'avait espéré, car il n'a
publié que trois autres ouvrages de droit proprement dit,
savoir : en 1515, les llluslrationes ad Instilutiones du
canonisle Robert van de Poel [De Lacu), qui était mort
en 1483 (3); en 1516, les célèbres Topiques d'Everardi;
enfin, en 1517, l'Épitomé Snwniae Legimi d'yËgidius (4).
La même année, et par les soins du même Jî^gidius, Mar-
(1) Épître aux adolescenls , ci -après. Van Iseghem , Biographie de
Thierry Martens , p. 99.
(2) Je ne compte pas le traité De praecellentia potestatis imperalo-
nae (1502) de Jacques de IMiddelbourg, qui est politique, historique,
philosophique , etc.
(5) Van Iseghem, 258.
(4) Le biographe de Pierre Gillis , M. Britz, a singulièrement ma! com-
pris la nature de cette publication , et ce n'est pas sa seule méprise.
Messager des sciences et des arts, 1864, pp. 196-198; Mémoires cou-
ronnés de l'Académie , coll. in-4'', l. XX, p. 60.
( 621 )
tens publiait VUtopie, et dès lors ses presses n'ont plus
rien fait pour la jurisprudence (5).
II.
L'exemplaire que j'ai sous les yeux, petit in-4° de cin-
quante feuillets non numérotés (6), a été parfaitement
décrit par M. Van Iseghem (7). Le titre porte : Compcndium
quatuor Ubrorum institutionum secunduni. ordinein rubri-
carum cuni inibi conlentorum siimmaria declaratione et
tenninorum expositione iiiris candidatis iuvenibus imprimis
conducibile. Per egregium virum Magistrum Nicolaiim de
Bruxella arlium UberaUum legumque doctorem voce sola
dictatum ad utilitateiu nobiUuni prinuun : deinde celerorum
juris stiidiosorum Locaniensiwn editmn.
Cum gratia et privilegio prostat venaiis Lovanii e regione
scole Juris civilis in Edibus Theodorici Martini Alostensis
qui typis tornatissimis excussit. — f^a lin, avant la liste des
rubriques et l'errata, est marquée par ces lignes: Absolu-
tum est hoc utilissimum in légales instituliones compendium
compositum a prestantissinio artiuin ac legum doctore
Magistro Nicolao Bruxellensi. El a Theoderico Martino
Alostensi castigate formis excusum Lovanii Anno a Natali
(a) Je ne sais s'il faut rattacher au droit la Lectura solemnis de Jean
Thierry en l'honneur du cardinal Guillaume DECi(Ov,de lo^O, mentionnée
par M. Van Iseghem, p. 514. Je n'ai pu voir ce livre.
(6) Je dois la communication de ce précieux petit volume à la libéralité
du propriétaire, M. le sénateur '^ergauwen, et à l'obligeante entremise de
M. Van der Haeghen. Qu'il me soit permis d'exprimer ici ma reconnaisance
à ces deux éminenls bibliophiles.
(7) Biographie de Thierry Marlens, pp. 238-240.
( 622 )
Christiano decimo tercio supra sesquimillesimum tercia
Idus Octobres. Deo gratias.
Deux pièces de vers de Nicolas Carolus de Gand sont
insérées, l'une tout de suite après le litre, l'autre après
l'épître de Martens.
Voici la première :
Nicolaus Carolus Gandavus cupide legum iuvcnliHi.
Ne iam terque quaterque lubeata es
Tu legum cupiile cohors iuvente
Gui : quod vix : tamen iniprobo labore
Sudore : excubiis : parabal annus
Quondam tercius : hoc licebit uno
Totum discere : vel citra laborem.
0 industria magna Nicolai
Fecundum ingenium: benigna virtus.
Parvi 0 pagina perdiserla libri.
Non est hic Jabyiintiius ille Baldi.
Ambagesve dolenda Baitholina.
Totus lucidus : integerque lotus :
Tolus pumice perpolitus equo :
Quem possiiU quoque posteri uepotes
Inter cesareas locare chartas.
Voici la seconde , ilerum cupide legum iuventiiti :
Hue ades ad calicem legum silibunda iuventus.
Siccaque spumanli prolue labra mero
Hic scaturit Icto non pauper gurgite rivus
Hec bcne torquentem comprimet unda sitim.
Nil facit equorea ad sincerum limpha palatuni
Laula quidem salsas lingua perhorret aquas
Fons hic a magno sacrarum interprète legum
Limpidus ingenti est tractus ab Oceano
Ergo âge plena hauri Iam puro cibia fonte
Tota hec dulciculum nam sapit unda merum.
( 623 )
Un autre Gantois, Jean Munter (8), a mis au revers du
titre six distiques suivis de quatre vers qui rappellent au
lecteur trois préceptes d'une sagesse immortelle :
Inclila Cesarei qui quaeris dogmala iuris
Hoc doctum legito candide lector opus.
Quicquid habent : legis hic : sinuosa volumina Baldi
Hic libi lucidior Juslinianus erit.
En legum insignis Nicolaus doctor id offert (9)
Sponte tibi : toto dignus in orbe cani.
Huic (rogo) die grales : summique precare Tonantis
Plura'tibi seribens donel et edat : ope.
Quis sit honor legum : iuris veneranda potestas
Quanta sit haud nescis : commoda quotve ferat.
Lex tutrix inopum : vicioruni caula fugatrix
Custos virtutis : iusticieque cornes.
Quod quondam foribus sacris vetuslas
Inscribebal Apollinis comosi
Triplex eulogium (fac boc Apollo
Jussit) nienle revolve amice crebra.
Nosce te ipsuni Ne quid nimis
Sponsioni non desunt incommoda.
Voici enfin Tépître de Martens [\ 0) : Theodoricus Martinus
Alostensis iuris studiosis adolescentibiis salutem D. P.
Aristotelis summi philosophici in lopicis sentenlia est adolescentes
honestissimi : bonum eo divinius meliusque esse : quo communius atque
diffusius. Hic (sic) certe factum esse non ambigo : ut optimus pater vester
ac preceptor doctissimus et absolutissimus Magister Nicolaus de Bruxella
(8) Jean Monter, du Collège du Porc, s'est occupé aussi de la publica-
tion des Topiques d'EvERARDi , dont il a rédigé l'index.
(9) En et id sont transposés dans l'original, mais il y a un erralum à
la fin du livre II.
(10) M. Van Iseghem en donne une traduction , pp. 130-151.
( 624 )
liberalium arlium sanclissimarumque legum doctor onini profeclo laude
noslra maior alque excellenlior : cum isagogicum libcllum iiiiiislilutiones
Justinianas quo ad eas primum et deiiide ad lolius iuris prudenliam
oplimo duclus consilio faciliorem pararet adiium : paucis sed eis quidem
nobilibus honeslisque adolescenlulis consociis veslris : voce lenus: domi
docendo dictassel : ardenliusque ex eis nonnulli lam diligeuler quam
prudenler ab ore legentis recollegissenl : oblatumque poslinodum ipse
preceplor recognovisset probassetque quinetiam eorum quosdam ex eo
supra quam dici queat profecisse conspicerel : non indignuni duxit : ut
nosiro arliticio ad omnium veslium communem uUlitalenr. in mille Irans-
fuudererelur [sic) exempla. Ego itaqueeodem animo duclus non fine (sic)
veslii communis boni studiorumque vestrorum ratione acceplum ab
eodem preceptore vestro exemplar arlificio impressorio muitiplicavi :
mulliplicalum quoque primum noslri iaboris munusculum in vestro studio
alque facullale vobis offero. Quodsi non ingralam nobis nostram diligen-
tiam ex lioc opusculo probaverimus: plura maioraque eiusdem in ipsas
inslilutiones non penitenda opéra a nobis non posl mullos nienses perci-
pietis : aulhore duceque Deo. Qui omni operi bono ut incboelur procédai
finiaturque laudabililer author duxque existit in quo et vos valete
leiices. Lovanii ex noslra officina formularia : quinlo nonas octobres
Annoa salule Christiana,decimo tercio supra millesimumquingentesimum.
Une seconde édition du Compendium a été faite en
1552 à Louvain par Servais Van Sassen ; c'est probable-
ment la dernière. Je ne l'ai pas vue.
III.
Molanus (H), Valère André (12), Paquot (15), Britz (14)
donnent quelques renseignements sur les faits principaux
de la vie de Nicolas de Bruxelles.
(H) Molanus, Histon'a Lovaniensium , 1. 1 , p. 542.
(12) Valère André, Fasti Academici, édil. 1650, pp. 180, 184.
(13) PAQD0T,t. VIII, pp. 311-515.
(14) Mémoires couronnés de V Académie , coll. in-4», l. XX, p. 49.
( 62d )
Son nom de famille est Heems. Il est né à Bruxelles (15),
dans la paroisse de la Chapelle, si du moins on doit inter-
préter dans ce sens le nom de Nicolaus de Capella qui lui
est donné quelquefois. Les registres de la faculté des Arts
de Louvain attestent qu'il détermina aux écoles des Arts
le II décembre 1485 (16) et qu'il devint bachelier
en 1487 (17). Le 29 mars 1488 il fut admis à la licence
lui quarante-septième sine ordine (I8\ Il prit le bonnet
le 26 avril suivant (19). Je le vois figurer en sa qualité de
maître es arts dans les registres de la Faculté en 1489 (20)
et en 1493 (21). Valère André dit qu'il fut reçu du conseil
de l'Université pour la Faculté l'an 1302 (22). Je n'ai pas
pu vérifier celte assertion.
En 1505, Nicolas Heems fut créé docteur en droit
(15) Britz le dit né à Godlvelde, près de Dixmude, et cite à ce propos
Valère André. Or, ce n'est pas Nicolas Heems, mais bien Erasme Heems
(f loo8) que Valère .\ndré fait naître à Godlvelde {Fasti , edit. de 1630,
p. 168). D'après les Fasti decannles (Bibliothèque de Bruxelles, fonds Van
Hulthem, 22958), Érasme Heem, Castelensis , fut le neuvième doyen du
Collège des Bacheliers. — Jean Heems, docteur es arts et en médecine,
plusieurs fois recteur, mort en lob9 ou 1360, était d'.\rmentières (Mo-
LANUS. I. l . p. 598; Valère André, Fasti, édit. de 1633, pp. 35 et suiv.
et 149). C'est lui qu'on appelait Jean d'Armemières (Van Iseghem, Biogra-
phie de Thierry Martens , p. 147).
(16) Registre de la faculté des Arts, aux Archives générales du royaume
(V), fol. il. Nicolaus de Capella logicus. Voyez cependant ibid., fol. 15,
revers. •
(17) Ibid., M. 46 et 47.
(18) Ibid., fol. 58.
(19) Ibid., fol. 68, revers. Nicolaus de Capella, alias de Bruxella. —
Un Nicolaus de Bruxella a obtenu la birette en 1499. Ibid., fol. 174 revers.
(20) Ibid., fol. 74, revers.
(21) Ibid.,{o\. 111, revers.
(22) Pridie kal. seplembr. Valère André, Fasli , p. 180 (1650).
( 626 )
civil; en 1506 titulaire de la chaire d'Institutes que Ga-
briel Van der Meere de Breda (f 1529) avait occupée
dès 1493; en lo20 titulaire de la chaire primaire de
Pandectes, en remplacement du pensionnaire Jean Sté-
phani de Nivelles, mort la dite année. Lui-même résigna
en iooO et mourut le 22 juin 1532, quelques semaines
avant Nicolas Everardi.On l'enterra dans l'église des Au-
gustins, où l'on voyait encore au siècle suivant, sur un
vitrail, son portrait et ses armes. Son successeur, aux
Institutes d'abord, puis aux Pandectes, fut Jean de Haes
de Tourcoing, qui est mort en 1548.
Je citerai, parmi les élèves de Heems, Viglius, qui
commença sous lui de s'appliquer à l'étude du droit (1524),
et Damhonder (1527), qu'il avait pris chez lui et auquel
il donnait des leçons particulières (23).
Heems ne paraît pas avoir publié autre chose que le
Compendhim. On pourrait inférer cependant des paroles
de Martens, qu'il avait sur le métier en 1515, d'autres
ouvrages plus importants. Yalère André lui attribuait,
(■âô) GoETHALS, Lectures, t. IV, p 57.
Damhocder, Subhasiationumcompendiosa exegesis, fol. "25 de l'édition
de 1546: • Duni ... Lovanii operam iuri uavarem , ae eximio D. doclori
Nicolao Heems a Bruxella lune in humanis ageuli cohabitareni: contigit
quendam clericum sex argentées Scyphos deauratos, quos necessitate
consiriclus foeneratori Lovaniensi pignori dederat, annodecurso, sorte
et usura realiter oblalis, repetere; foenerator negavit se debere huius-
modi realeni oblaliouem accipere, et scyphos velle resliluere, quan-
doquidem sui (ul aiebal) facli essenl, perannuam possessioneni, quo non
luisset pignus. Tandem re in controversiam juridicani delala, consilio
eiusdem D. docioris Nicolai Heems a Bruxella succubuit foenerator,
ulique condemnalus, et dictorum scyphorum restilutionis et expensarum,
cilra ullani etiam temporis illius vel anni lapsi consideralione. » —
Cf. Pratique droite, 205, 7; Refuge et garand des pupilles, 10, 48.
( 627 )
dans sa première édition, des Responsa sive consiiia jiiris
varia, et disait même les posséder, mais ce passage est
supprimé dans la seconde (24).
IV.
Comme le dit Martens, le Compendinm est un petit
manuel introductoire, libellus isagogicus. Le titre porte
qu'avant de le livrer à la publicité, maître Nicolas Ta dicté
de vive voix à des écoliers nobles. Martens précise ce
point. Le professeur recevait dans sa maison un petit
nombre de jeunes nobles, auxquels il faisait un cours élé-
mentaire particulier. On pourrait conclure de l'expression
voce sola qu'il parlait d'abondance. Quelques élèves re-
cueillirent avec soin ses paroles et lui soumirent leurs
cahiers qu'il revit, approuva et consentit à laisser im-
primer.
Ce cours paraît avoir été ce qu'aujourd'hui l'on appelle
en Allemagne un Privatissimutn. Il y avait d'ancienne
date, à Louvain et dans d'autres écoles, un cours som-
maire et extraordinaire portant le nom de Summaria
Institulionum , mais je ne pense pas qu'il en soit question
ici, puisque Heems avait la Lecture ordinaire (25). Le
Privatissimum des nobles était-il dans les usages de la
Faculté de Droit, élait-il plus ou moins une nouveauté ou
(24) Ce que n'a pas vu M. Britz . Mémoire couronné, pp. 49 el G9. On
lit à la page 108 de l'édition de 1655 de Valere André : • Sunt pênes
me, eodem auclore. responsa, etc. » — Valère André confondait-il
peut-être ces prétendus consiiia de Nicolas Heems avec ceux de Nicolas
EVERARDI?
(23) Valere André, Fasti , pp. 154-138; Verni;l.«us, Acad. Lovan.,
pp. 48-30 de l'édition de 1667.
( 628 )
une exception ? Je n'ai pu acquérir de certitude sur ce
point.
Carolus annonce, comme un grand progrès, qu'on
pourra désormais apprendre sans peine en un an ce qu'on
apprenait jadis en trois à force de sueurs et de veilles.
On sait en effet que c'était le temps des longues études et
des Lectures infinies. Le cours ordinaire d'inslitules durait
à Louvain trois ans; ailleurs on en mettait quatre, cinq,
six, et le reste était à l'avenant. C'est qu'on enseignait
magistraliter et more ilalico, cum apparalii, en commen-
tant non-seulement le texte, mais aussi et surtout la glose
et la glose de la glose (26). Les théologiens faisaient
mieux encore : s'il faut en croire Énéas Silvius, un cé-
lèbre docteur de Vienne expliqua pendant vingt-deux ans
le premier chapitre d'Ésaïe, sans réussir à le terminer (27).
Si l'on cherche à comparer le manuel de Heems à
d'autres ouvrages sur les Institules écrits ou employés vers
la même époque et dans la même contrée, c'est-à-dire
dans la partie nord-ouest de l'Empire, il est naturel de
(26) Cramer, Kleine Schriflen, pp. 117-1 49: Muther, D" Johannes
Apell, pp. 7 et suiv.; Stobbe, Deutsche Rechlsquellen , t. II, pp. 24 et
suiv.
(27) Voyez la lettre où É.néas Silvics décrit de main de maître la ville
et la vie de Vienne au milieu du XV^ siècle ; " Est et illic hodie Thomas
Haselbach non incelebratus Theologus, quem scribere hislorlas non
inutiles aiunt, cujus ego doclrinam laudarem, nisi duas et vigintl annos
Esaïae primuni capitulum legisset neque adhuc ad calcem venisset. »
Page 718 de Tédition de Bâle des Œuvres d'ÉNÉAS Silvics.
( 629 )
penser, en première ligne, aux Enarrationes de Nicaise
Vervoort ou van Yoerden (28) et au commentaire d'Henri
von dem Birnbaum , plus connu sous les noms de De Piro
ou Brunonis (29). Mais il n'y a guère de ressemblance
entre le Compendium, qui est très-succinct, et ces traités,
qui sont assez détaillés et, par les nombreuses citations
qu'ils renferment, tout à fait de leur siècle. Les seuls
points de contact sont, entre Heems et Vervoort, la patrie
brabançonne; entre Heems et Birnbaum, le professorat
de Louvain et l'intention didactique locale, car Birnbaum
aussi a composé son commentaire à l'Université de Louvain
et pour cette Université.
Je ne vois, dans les limites indiquées, qu'un seul livre
qui paraisse analogue au Compendium. C'est le Siimina-
(28) NicAsius A VoERDA. de Heysl-op-den-Berg, primus artiuni à
Louvain en 1459, mort à Cologne en 1492. — Dans son bel ouvrage sur
la Littérature populaire du droit romain et du droit canon, M. de
Stimzi.>g, qui est aussi consciencieux qu'érudit, déclare n'avoir pas vu
les deux plus anciennes éditions de YArbor de Vervoort. La Bibliothèque
de Bruxelles possède un bel exemplaire de l'une d'elles, probablement
de la première : Cologne, Herman Bungart de Kelwych, 1499. En tête,
l'épigramme de Brant: au revers du litre, la petite notice sur l'auteur et
les vers de Lang. Stehelin n'est pas nommé. On lit à la tin: Explicit pre-
sens opusculum per quendam fratrem confessorem ordinis predica-
torum conventus Coloniensis pro Dei laude ad sane consuleudum in
casibus periculosis...
(29) La vogue du commentaire d'HE?*Ri de Piro a duré deux siècles.
Écrit entre 1428 et 1452, on le réimprimait encore en 1601. Je vois dans
un exemplaire de la Bibliothèque de Bruxelles une note à la plume datée
de 1359 et ainsi conçue : Pater meus olim hoc libro usus est. M. de
Stixtzing (Pop. Lit., p. 53) cite une édition sans lieu ni date que Hain
n'a pas connue et dont deux exemplaires sont à la Bibliothèque de
Bruxelles. Une note manuscrite de La Serna l'attribue à (Jean?) de West-
phalie, et la date de « vers 1480. »
( 630 )
riim Institutioniim anonyme, que Jean KoelhofF a im-
primé en 1482 (50). Mais je ne connais pas personnelle-
ment ce livre, dont les dimensions sont à peu près les
mêmes que celles du Compendium et que Denis (51),
Hain (52) et Panzer (55) ont cru pouvoir attribuer à
Birnbaum. S'il doit être rattaché à l'enseignement univer-
sitaire, il tire nécessairement son origine, ou bien d'un
cours de Swnmaria Institutionum, ou bien d'un cours
particulier du même genre que celui de Nicolas de
Bruxelles.
VI.
Je ne pense pas qu'on puisse contester au Compendium
la simplicité et la clarté. Carolus et Munter ont raison
d'opposer ces qualités essentielles d'un cours élémentaire
aux sinuosités, aux circuits, aux labyrinthes des commen-
tateurs. Le langage de Heems est dépourvu d'art et d'élé-
gance, il est même loin d'être pur. Cependant son style
est plus naturel et plus limpide que celui de maint légiste
contemporain.
A cette époque où, selon l'expression d'Hotman, on
faisait abus des entassements d'allégations et d'autorités
(30) Stintzing, ouv. cit., pp. ol et suiv.
(31) M. Denis, Supplem. p. 152, n" 1118. « Autor Henricus Brunonis
alias de Piro prof. Lovaniensis ex conc. Constant, notus : liquet id ex
Proemio. « — M. de Stintzing ne voit rien dans i'avant-propos qui an-
nonce que BiRHBAOM en soit l'auteur. BiRNBAnia n'a pas non plus pris
part au concile de Constance. Voy. Stintzing, pp. S2, 33, 56. Denis se
réfère aux Specimina de Nyerup.
(52) Hain, Repertorium, t. 1, p. 359, n» 4016.
(35) Panzer, Annales typoyraphici, 1. 1, p. 290, n" 100.
( 651 )
chafourées, Heems ne cite aucun nom, mais se borne à
indiquer les sources même, et si parfois il invoque la
glose, ce n'est pas pour corroborer ce qu'il dit, mais pour
se dispenser d'en dire davantage.
Il lui arrive aussi, mais rarement, de rapprocher du droit
civil et canon le statut ou la coutume. Il ne craint pas les
actualités; ses exemples sont populaires, modernes, na-
turels. Nul doute que son enseignement ne fût attrayant
et propre à faire impression. Je ne vois pas pourquoi
Marlens serait suspect d'exagération lorsqu'il parle du
grand profit qu'en retiraient les élèves.
J'en donnerai quelques spécimens qu'il ne faut pas se
hâter de qualifier de puérils ou d'insignifiants.
Dans rénumération des choses hors du commerce, le
professeur cite, en fait de fleuves, non-seulement le Tibre
et le Pô, mais le Rhin , la Meuse, la Dyle, et il mentionne ,
pour la repousser, la prétention des Vénitiens de ne pas
appartenir à l'Empire, leur ville étant située en mer : « et
maie, quia omnia sunt principis id est imperatoris quoad
imperium et jurisdictionem.^ Comme exemple d'institu-
tion d'une personne que le testateur ne connaît pas, il cite
d'abord l'institution du premier qui sera licencié à Lou-
vain, mais il se ravise sur-le-champ et donne l'exemple
des Institutes (54). Comme exemple de condition, il donne :
si l'Empereur vient à Louvain\ comme exemple défausse
cause qui ne vicie pas le legs : Je lègue dix à Gains, parce
(34) Et potest fieri institutio heredis de illo quem ignorât testator : ut
ecce primum licentiandum in Lovanio institue heredeu : vel melius si
fîlios fratris peregrinantes ignorans qui essent heredes instituent, etc. —
Cf. § ult. J. De heredibus inslituendis , II, 14.
( 652 )
qu'il a été mon ami aux eco/es (35) ; comme exemple de
vol d'usage, un cheval prêté pour aller à Malines et que le
commodataire emmène à Anvers (36). A propos de l'obli-
gation ex (lelicto de celui « e cuiiis domo cel cenaculo ali-
quid proieclitm est vel effusum » il ajoute : « nisi precla-
maverit: ideo soient effandenles aquam tel iirinam preda-
mare et dicere garde leaue (37). » Quant aux posila et
siispensa, il remarque : « non est bene tutuni habere viri-
daria appendenda ad fenestras. » Pour exprimer la nature
personnelle du lien obligatoire, il se sert d'une expression
énergique qui était de tradition : «iOblifjatio semper nianct
apiid obligatum nec potest avelli ab ossibus suis : sed co-
heret illi siciit lepra leproso. » L'obligation est dite juris
vinculum, a quia obligatione homines vincuntur et ligantur
ut baves funibus... » — C'est une variante des anciens vers :
Comme les bœufs par les cornes on lie ,
Ainsi les gens par leurs mots font folie (38).
(35) Similiter legatum condicionale fit inutile et non debetur si non
extel condicio : quia non existentia condicionis viciât legatum : secus est
de falsa causa aut falsa demonstratione quia huiusmodi falsilas non viciât
legatum : ut ecce per exemplum : lego Gayo decem ([uia fuit amicus
meus in scholis, legatum debetur licet sit falsa causa adiecta.
(36) Non solum contractans : id est aufferens rem ipsam sed etiam
contractans rem ipsam ad alium usum quara cuius gratia ei res concessa
est si intelligat hoc invilo domino facere , furtum committit. Ut ecce si
habens equum sibi commodatum usque MecLliniam et eum ducit longius
forte usque ad Antuerpiam furtum facit et idem in similibus. Alias si
cognoverit dominum permissurum quia forte erat suus amicus qui non
denegassel eiequum duceresive ad Mechliniam sive Antuerpiam, non facit
furtum..,..
(37) Voyez Damhooder, Pratique es causes criminelles , ch. CXLIII.
(58) Verba ligant homines , taurorum cornua funes, cornu bos capitur,
voce ligatur homo. Voyez Loysel , InstHutes coutumières, p. 357.
( 633 )
Voici, hélas, une platitude aussi traditionnelle, que
j'aimerais mieux ne pas trouver ici : « Les contrais consen-
suels n'ont besoin, pour être efficaces, que du seul con-
sentement, comme d'un vêtement unique, quia calidiores
sunt cetcris contractibus. — Alii vero contractus siint fri-
gidi et non adeo favorabiles... et ideo requirunt duplkem
vestetn..., sicut juvenes quia calidi non egent tantis vestibus
siciit senes. »
Il est dit, au titre même, que le professeur suit l'ordre
légal. On ne songeait guère alors à l'abandonner, et dans
maint pays on y est encore assujetti aujourd'hui même.
Chaque livre des Instilutes forme un Compendium à
part et est désigné comme tel au commencement et à la
fin. La série des livres est parfois simplifiée; les matières
sont exposées librement dans les divers titres. Ainsi, au
livre III, les six premiers titres sont réunis; quelques-uns,
dénués de toute valeur pratique, sont négligés (39). Au
titre De Legatis, Heems définit le legs comme Justinien,
et il explique la définition, en montrant en particulier
pourquoi il dit défunt et non testateur (40). Puis il fait un
petit historique des legs et des fidéicommis, et déclare
que toute la matière des legs peut s'expédier par trois
questions auxquelles il répond d'une façon sommaire : Qui
(39) Première rubrique : De heredi. que ah intest. defe. Cum V ti. se.
Puis ; De gradibus cognationum, De successione libertorum, De bono-
num possessionibus , De acquisilione per arrogationem , De eo cui liber-
tatum causa bona adiiciuntur (sic), De obligationibus, etc. Les titres :
De adsignatione libertorum et De successionibus sublatis sont donc
omis.
(40) Dicitur a defuncto et non a testatore relicta, quia ut supra
proxime dictum fuit legatum etiam relinqui potest ab intestato decedeute
sicut fideicommissum
2"'* SÉRIE, TOME XXXVllI. 41
( 654 )
peut léguer? Que peut-on léguer? A qui peut-on léguer?
Cependant la matière n'est pas épuisée, et le professeur
ajoute quelques lignes sur les modalités, la cause, la
démonstration, l'erreur dans le nom, les actions qui ser-
vent à faire valoir le droit au legs. Tout le titre Des Legs
tient un peu plus de trois pages. — Au titre Des Dona-
tions, Heems énumèreles diverses espèces : donation pour
cause de mort, donations entre vifs, donations simples,
donations pour cause de noces , dot, largesse de fiançailles
(41); l'acquisition par droit d'accroissement est passée
sous silence (42).
VIL
On a pu voir que si notre auteur se distingue avanta-
geusement de ses contemporains par la simplicité et la
brièveté de son œuvre, il participe cependant à quelques-
uns des travers de son époque. Quoique maître es arts
libéraux, il ne s'inquiète guère de l'histoire du droit.
Selon lui, la loi Falcidia « sic dicta est a falce quia ut faix
fenum : ita hec lex falcidia resecat legata,y> ou encore,
ajoute-t-il, « dicitur falcidia a Falcidio jurisconsulto qui
eam introduxit. » Peut-être la première explication n'est-
elle qu'un jeu de mots, tel que les Romains les affection-
naient, propre à graver dans la mémoire la chose et le
nom. Mais voici qui est plus sérieux: il s'agit de l'édit du
préteur : « Est advertendum quod pretores in urbe Ro-
mana habent potestatem condendi jura de negociis suam
(41) Si sponsus sponse de future vel e contra donet aon respecta dotis
jforte anulum vel aliud pulchrum clinodium.
(42) Cf. § ult. J. De donalionibus , II , 7.
( 655 )
iurisdictionem concernentibus : ut ecce erant pretores edi-
ticii qui gerebant curam de domibus ruinosis in civitate :
et alii habebant curam circa carnes emendas et vendendas :
et alii de carnibus morbosis. Ista iura dicebantur edicta
pretorum.... Ista edicta describebantur in loco qiiodam albo
et eminenti in pallacio pretoris ut quisque illa intueri pos-
sit...T>\\ est vrai que VHistoire d'Aymar du Rivail n'a paru
que deux ans après l'impression de ces hérésies. Mais les
antiquités romaines comptaient déjà de fervents adeptes, et
cinq années s'étaient écoulées depuis la publication des
Adnotationes in Pandectas de Budé. Les preuves que
donne Heems de sa culture littéraire se réduisent, en
somme, à fort peu de chose : il ciie une fois un vers de
Lucain (4.3).
Il n'est pas non plus exempt d'erreurs dans la matière
même du droit. J'en donnerai pour exemple sa façon de
comprendre les actions préjudicielles; ce sont, pour lui,
des actions dans lesquelles « de niafjno prejudlcio agitur. »
« En effet, dit-il, si l'homme libre est déclaré esclave, il
en résulte un grand préjudice pour lui; de même pour
qui est déclaré fds de famille, puisque le père peut le con-
traindre, voire même le vendre... »
C'est une bévue sans doute. On peut nommer tels ou-
(45) Au titre : De Rerum divisione, II, 1, au § 10. Il s'agit des choses
saintes, en particulier des murs de ville : El dicitnr deiinquere in muros
civitatis qui transceudit vel rumpit muros civilatis : aut onus aliquod
superimponit. Itaque Rhemus frater Romuli occisus Iraditur ob id quod
muros Romane civitatis transcendere voluit et conalus fuit licethoc non
perfecit. luxla illud Lucani : fratcrno primi madcurunl sanguine mûri.
Nam affectus cum conamine etiam sine efTeclu principali punitur in atro-
cioribus delictis. — V. Pomponius, L. fin. au Digeste De D. R. I, 8.
( 636 )
vrages plus ou moins destinés aux étudiants, plus ou
moins élémentaires, de notre dix-neuvième siècle, qui en
contiennent de non moins grosses.
VIII.
On voit par ce qui précède, que je ne prétends point
classer Nicolas de Bruxelles parmi les Précurseurs et
Initiateurs , avec ^Egidius et Everardi (44). Il ne mérite
cependant pas d'être confondu avec les sectateurs routiniers
de la vieille école. Sa place est intermédiaire. Moins ac-
compli, moins moderne que ses deux illustres contempo-
rains et compatriotes, moins lettré que l'ami d'Érasme et
de Morus, moins puissant de pensée que le président de
Malines, il les a devancés dans la publicité scientifique (45),
et si son œuvre n'est ni un fruit ni même une fleur de la
science renouvelée, elle est du moins à peu près exempte
des vices principaux et du mauvais goût de la science an-
cienne. Et d'ailleurs , quelle était à ce moment la littéra-
ture juridique des autres pays? J'ai parlé déjà de Guillaume
Budé et d'Aymar du Bivail ; Alciat faisait ses premiers
débuts; Chansonnette était sur les bancs de l'école; Zasius,
dans la force de l'âge et de l'activité, n'avait point donné
de gages matériels et publics à la jurisprudence élégante.
Partout l'on rééditait les gros livres des Docteurs du moyen
(44) Voir mon Introduction historique au droit romain, § 217.
Hugo dans son Histoire littéraire, Keller, dans son petit programme
du com's d'Encyclopédie, paraissent rattacher Heems à l'école moderne.
(45) Ce qu'^GiDius avait publié jusqu'alors était purement littéraire :
Politienen 1510, Agricola en 1311. En 1313, il conlribua à l'Ésope.
(637)
âge (46), el longtemps encore on devait répéter: Barlo-
lista optimus jurista. jNicolas Heems était un bon juriste,
un professeur aimé et habile; clans son petit cours parti-
culier, il se montre assez émancipé de la tradition de Balde
et de Bariole; on peut ajouter enfin qu'il était de Bruxelles,
où les auteurs de droit n'ont guère été nombreux (47).
Tout cela lui constitue une personnalité. Sans exagérer
son importance, nous devons conserver son souvenir.
(46) Le XVI<" siècle et même le XVIP ont continué de s'en nourrir. En
fait d'Institutes (et j'en omets sans doute), je vois des éditions de Belle-
PERCiiE de 151-3 et de laôG; de Jean Faber de 1515 (par Descocsl), loôl
(Jean des Degrez), 1546, 1509, 1372, 1375, 1395 (Airebaudolze) , 1645;
de Balde de 1315, 1338, 1373; deSpisELLi, 1318; de Jeam dePlatea, 1307,
1516, 1339; de Christophe PoRcics, 1348, 1550, 1363,1378, 1380;d'AxGE
Aretin, 1315, 1557, 1340, 1330, 1337, 1568, 1376, 1580, 1386, 1394,
1609. Vervoort a été réédité en 1342, el Birabadm en 1601.
(47) Si l'on veut s'en tenir à ceux qui ont acquis quelque notoriété dans
la sc/ence proprement dite du £/ro(7, en écartant les écrivains politiques
et économiques, on peut compter une quinzaine d'auteurs bruxellois dans
l'espace de quatre siècles: Van Uffele, Baert, Lambreghts, Van t'Sestich,
Vander Perre, François Kinschot, Huygens, Hony, Loovens, les Christyn,
les Wynants, et deux ou trois dans notre siècle. Je ne parle que des
morts. Mais parmi ceux que j'ai nommés, il en est de valeur bien médiocre.
( 638 )
CLASSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du o novembre 187 â.
M. N. De Keyser, directeur, président de l'Académie.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. Alvin , G. Geefs, J. Geefs, Fer-
dinand De Braekeleer, C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Alph.
Balat, Auguste Payen, le chevalier Léon de Burbure,
J. Franck, G. De Man, Ad. Siret, Julien Leclercq, Ernest
Slingeneyer, Alexandre Robert, F.-A. Gevaert, Adolphe
Samuel , membres.
MM. Chalon, directeur de la classe des lettres, et Charles
Montigny, membre de la classe des sciences, assistent à la
séance.
CORRESPONDANCE.
M. César Daly, associé de la classe, fait exprimer par
écrit ses remercîments pour l'envoi des dernières publica-
tions académiques.
— M. Victor W. Bâtes Van De Weyer fils, sollicité de
faire des recherches dans les papiers de son père, pour
savoir s'il y existe des documents relatifs aux notices sur
( 639 )
MM. Van Meenen et Baron , dont M. Van De Weyer s'était
chargé dans le temps, répond qu'il s'occ'upera de ce soin
dès que les circonstances le permettront.
PROGRAMME DE CONCOURS POUR 1875.
La classe adopte les trois questions suivantes pour les
sujets littéraires de son programme de concours de l'an-
née 1875.
PREMIÈRE QUESTION.
Faire l'histoire de la sculpture en Belgique aux XV W' et
XVIH"'' siècles.
DEUXIÈME QUESTION.
Faire Vhistoire et la bibliographie de la typographie
musicale dans les Paga-Bas, et spécialement dans les pro-
vinces qui composent aujourd'hui la Belgique.
TROISIÈME QUESTION.
Faire l'histoire de l'école de gravure sous Rubens.
On demande un aperçu historique sur les éditeurs des
produits de cette école et sur l'exploitation commerciale
contemporaine qui fut faite de ces gravures dans tous les
pays.
La valeur des médailles d'or, présentées comme prix
pour chacune de ces questions, est de mille francs pour
la première, de huit cents francs pour la seconde et de six
cents francs pour la troisième.
( 640 )
Les mémoires envoyés en réponse à ces questions doivent
être lisiblement écrits et peuvent être rédigés en français,
en flamand ou en lalin. Ils devront être adressés, francs
de port, au secrétaire perpétuel de l'Académie, avant le
l"juin 1875.
Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage;
ils n'y inscriront qu'une devise, qu'ils reproduiront dans
un billet cacheté renfermant leur nom et leur adresse.
Faute par eux de satisfaire à cette formalité , le prix ne
pourra leur être accordé.
Les ouvrages remis après le terme prescrit ou ceux dont
les auteurs se feront connaître, de quelque manière que ce
soit, seront exclus du concours.
L'Académie demande la plus grande exactitude dans les
citations; elle exige, à cet effet, que les concurrents indi-
quent les éditions et les pages des ouvrages qui seront
mentionnés dans les travaux présentés à son jugement.
Les planches manuscrites seules seront admises.
L'Académie se réserve le droit de publier les travaux
couronnés.
Les auteurs des mémoires insérés dans les recueils ont
droit à recevoir cent exemplaires de leur travail. Ils ont, en
outre, la faculté de faire tirer des exemplaires supplémen-
taires en payant à l'imprimeur une indemnité de quatre
centimes par feuille.
L'Académie croit devoir rappeler aux concurrents que
les manuscrits des mémoires soumis à son jugement restent
déposés dans ses archives comme étant devenus sa pro-
priété. Toutefois, les auteurs peuvent en faire prendre des
copies à leurs frais , en s'adressant, à cet effet, au secrétaire
perpétuel.
( 641 )
— Les deux sujets d'art appliqué suivants formeront
la seconde partie du programme pour 1873.
SCULPTURE.
On demande im bas-relief pour une frise placé à S'^OO
d'élévation el ayant pour sujet /'horticulture person-
nifiée.
Les dimensions de l'épreuve devront être de l'"60 de
longueur sur O^SO de hauteur.
L'Académie demande que les concurrents lui présentent
un travail complètement achevé.
Un prix de mille francs sera décerné à l'auteur de l'œuvre
couronnée. Une reproduction graphique de celle-ci devra
rester à l'Académie. Les sujets destinés au concours de-
vront être remis au secrétariat de l'Académie avant le
1" septembre 1875.
Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage;
ils n'y inscriront qu'une devise, qu'ils reproduiront dans
un billet cacheté renfermant leur nom et leur adresse.
Faute par eux de satisfaire à celte formalité, le prix ne
pourra leur être accordé.
Les ouvrages remis après le temps prescrit, ou ceux dont
les auteurs se feront connaître, de quelque manière que ce
soit, seront exclus du concours.
GRAVURE EM IIIÉnAILLES.
Un prix de six cents francs sera accordé à la meilleure
médaille exécutée par un artiste belge depuis le l"' jan-
vier 1872.
( 642 )
— La classe accepte, pour le concours de 1876, les deux
questions littéraires suivantes :
PREMIÈRE QUESTION.
Rechercher les origines de l'école musicale belge. Démon-
trer jusqu'à quel point les plus anciens maîtres de cette
école se rattachent aux déchanteurs français et anglais du
Xir% du Xlir et du XIV""' siècle
Un prix de mille francs sera attribué à la solution de
cette question.
DEUXIÈME QUESTION.
Faire l'histoire de la céramique au point de vue de l'art,
dans nos provinces, depuis l'époque romaine jusqu'au
XVIII"" siècle.
Un prix de huit cents francs sera attribué à la solution
de cette question.
Le terme fatal pour la remise des mémoires expirera
le 1" juin 1876.
— La classe se constitue en comité secret pour s'occuper
des présentations de candidatures aux places vacantes.
( 645 )
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Commission royale d'histoire. — Compte rendu des séances,
4« série, tome 2% IIP Bulletin. Bruxelles, 1874; cah. in-S" ;
— Table chronologique des chartes et diplômes im[)rimés
concernantlhistoirede la Belgique, par Alph.Wauters, tome IV,
(4226-I2oO). Bruxelles, 1874; vol. in-4».
Commission pour la publication d'une collection des œuvres
des grands écrivains du pays. — Li rouraans de Berthe aus
grans pies par Adenés li Rois, publié par M. Aug. Scheler.
Bruxelles, 1874; vol. in-8°.
IVolet de Brauwere van Sleeland (D*" J.). — Nederlandsch
contra Westvlaamsche laal-parlicularisterij. Anvers, 1874; br.
in-8°.
Crépin {François). — Matériaux pour servira l'histoire des
roses, II" fascicule. Gand, 1872; broch. in-8".
Bonnewyn {H.). — Observations sur la digitaline cristal-
lisée. Bruxelles, 1874; broch. in-S".
Dierckx [F.). — Recueil de pensées pédagogiques. Bruxelles,
4874; vol. in -12.
Van Hollebeke. — Choix de poètes belges. Bruxelles, 1874;
vol. in-8".
Actes de la Conférence de Bruxelles. Bruxelles, 1874; vol.
gr. in-4''. (Deux exemplaires.)
Commission royale des anciennes lois et ordonnances de la
Belgique. — Coutumes de Namur et coutume de Philippe-
ville, par J. Grandgagnage, tome second. Bruxelles, 1874;
vol. in-4». (Deux exemplaires. Envoi de M. le Ministre de la
justice.)
Commissions royales d'art et d'archéologie. — Bulletin,
Xlli""' année, 1874, n"' 7 et 8. Bruxelles ; cah. in-S".
( 644 )
Association belge de photographie, à Bruxelles. — Bulletin ,
n"' i, 2 et 3, première année, i874. Bruxelles; 3 cali. in-8».
Fédération médicale belge. — X™' anniversaire. Compte
rendu de l'assemblée générale et annuelle du 22 septembre
4874. Bruxelles, 1874; broeb. in-8°. (Deux exemplaires.)
Annules des travaux publics de Belgique, toraeXXXlI,
premier cabier. Bruxelles, 1874; in-8°.
Archives communales d'Anvers. — Bulletin, tome VI,
3'' livr. Anvers; cah. in-S".
Willems-Fonds te Gent. — Uilgave, n" 79. Filips van
Marnix van Sint Aldegonde, door J. Van der Hâve. Gand, 1874;
in-8''.
Société géologique de Belgique, à Liège. — Annales, tome
premier, 1874: Bulletin, pages 1 à LXVIII; Mémoires, pages 1
à C8; Bibliograpbie, pages 1 à 24. Liège, 1874; in-8".
Société des sciences , des arts et des lettres du f/ainaut , à
Mons. — Mémoires et publications, 111* série, tome 9^ Mons,
4874; vol. in-8°.
Institut royal grand-ducal de Luxembourg. — Publications
de la section bistorique, année 1873, vol. VI. Luxembourg,
1874; vol. in-4".
Chantre [Ernest). — Projet d'une légende internationale
pour les cartes arcbéologiques préhistoriques; — Les faunes
mammalogiques tertiaire et quaternaire du bassin du Rhône.
Lyon, 1874; broch. gr. in-8° et broch. pet. in-8''.
Hugo {le C" Léopold). — La question de l'équidomoïde et
des cristalloïdes géométriques, Paris, 1875; broch. in-8°.
(Deux exemplaires.)
Société d'anthropologie de Paris. — Bulletins, IP série,
tome IX, 2'' fascicule, février à avril 1874. Paris; in-8°.
Société des sciences physiques et naturelles de Bordeaux. —
Extrait des procès-verbaux des séances; — Statuts et règle-
ment intérieur; — Catalogue de la Bibliothèque. Bordeaux,
1874; br. et feuille in-8°.
( 645 )
Société d'agriculture, sciences et arts de Douai. — Bulletin
agricole, année 1875, n° \. Douai; cah. in-S".
Société linnéemie de Lyon. — Annales, année 1873, nouvelle
série, t. XX. Lyon, 1874; vol. in-8°.
Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon. —
Mémoires : classe des sciences, t. XX, 1873-1874; classe des
lettres, t. XV, 1870-1874. Lyon ; 2 vol. in-8<'.
Société d'agriculture, histoire tiaturelle et arts utiles de
Lyon. — Annales, quatrième série: t. IV, 1871; t. V, 1872,
avec atlas. Lyon, 1872-1873; 2 vol. in-8° et atlas in-fol.
Société météorologique de France, à Paris. — Nouvelles
météorologiques, 7'' année , 1874 (l'" liv., décembre 1873-
raars 1874). Paris; cah. gr. in-8°.
Société des études historiques, Paris. — L'Investigateur,
40^ année, liv. d'août, septembre et octobre 1874. Paris; cah.
in-8°.
Académie de Stanislas, à Nancy. — Mémoires, 1873,
CXXIV" année, 4"= série , tome VI. Nancy, 1874; vol. in-8».
Bôhm (/)'■ Const. Elder von). — Die Handschriften des k.
und k. Ilaus, Hof-und Staats-Archivs,mit Supplément. Vienne,
1873-1874; 2 vol. in-8''.
Yereiti fur Erdkunde, zu Dresden. — XI. Jahresbericht.
Dresde, 1874; cah. in-8°.
Neue zoologische Gesellschaft, in Frankfurt a.jM. — Der
zoologische Garten, XV. Jahrg., Januar-Juni 1874, n" 1 bis 6.
Francfort S./M., 1874; 6 cah. in-S».
Universii^t, Freiburg im Breisgaii. — Programme et Dis-
sertations. 1 broch. 10-4" et 14 broch. in-S".
Naturforschende Gesellschaft zu Freiburg in Breisgau. —
Berichte iiber die Verhandiungen , Bd. VI., Heft II und III.
Fribourg en Brisgau, 1873; 2 cah. in-8''.
Medicinisch-naturioissenschaftliche Gesellschaft zu Jena.
— Jenaische Zeitschrift fur Na turwissenschaft, VIII. Bd., 3. Heft.
lena, 1874; cah. in-8''.
( 646 )
K. Alhertus-Universitdt zii Kônigsberg. — Verzeichniss an
Index Lectionum, 1874. Kônigsberg; "2 broeh. in-4".
Entomologischer Verein zu Stettin. — Entomologische Zei-
tung, 35.Jahrg., n"' 7-9, Juli-September 1874. Stettin, 1874;
cah. in-8°.
K. Akademie der Wissenschaften in Wien. — Sitzung der
math.-naturw. Classe, Jahrg. 1 874, n° XXIV bis XXVI. Vienne,
1874; feuil. in-8°.
Société impériale des naturalistes de Moscou. — Bulletin,
année 4874, n° I. Moscou; cah. in-8°.
Société chimique de Saint-Pétersbourg. — Journal, t. VI,
n° 8. Saint-Pétersbourg, 1874; cah. in-8°. (En russe.)
Nordiskt medicinskt arkiv, sjctte Bandet, tredge Hâftet.
Stockholm, 1874; cah. in-8°.
Naturforschende Gesellschaft in Bern. — Mittheilungen
aus dem Jahre 1873, n' 812-827. Berne, 1874; vol. in-8".
Schweizerische naturforschende Gesellschaft in Schaff-
haiisen. — Vcrhandlungen, Jahresbericht 1872-1875. Schaff-
house, 1874; vol. in-8°.
Luvini [Giovanni). — Del Dieteroscopio. Seconda communi-
cazione. Turin, 1874; br. in-8''.
Accademia délie scienze delV Istituto di Bologna. — Me-
morie, série III : tonio III , fascicolo 5-4; tomo IV, fasc. 1-4;
— Rendiconto, annoaccademico 1875-1874. Bologne, 1874;
5 cah. in-4" et 1 cah. in-8''.
Regia accademia di scienze , lettere ed arti in 3Iodena. —
Meraorie, tomo XIV. Modène , 1874; vol. in-4°; — Délia
istituzione del giuri in Italia (Memoria del cav. Andréa Ga-
lassi). Modène, 1875 ; vol. in-8°.
A7ithropological Instilute of Great Britain and Ireland. —
Journal, vol. III, n" III, january, 1874. Londres; cah. in-8".
Institution of civil E?igineers ut London. — Minutes of
proceedings, vol. XXXVII and XXXVIII. Londres, 1874; 2 vol.
in-8°.
( 647 )
Royal Institution of Great Britain, LomJon. — Procee-
dings , vol. VII, pts. III and IV, n°' GO and 61. Londres,
d874;2cah. in-S".
Royal geographical Society, London. — Proceedings,
vol. XVIII, n"' IV et V. Londres, 1874; 2 cah. in-8".
British meteorological Society, London. — Proceedings,
vol. I, n°' 1 à 4. Londres, 1 862 ; 4 cah. in-8°. — Quarterly Jour-
nal, July, 1874. Londres, 1874; cah. in-8°.
Chemical Society of London. — Journal , ser. 2 , vol. XII ,
may, june and july 1874. Londres; 3 cah. in-8".
Geological Society oj London. — Quarterly Journal, vol. XXX,
pt. 0, n" 119, August , 1874. Londres; cah. in-S"
Linnean Society of London. — Transactions : vol. XXVIII,
pt. IV, 1875; vol. XXX, pt. I, 1874;— Journal : Zoology,
voLXI, n-'So and 54,1871; vol. XII, n" 57, 1874; — Botany,
vol. XIII, n- 66 and 67, 1872; vol. XIV, n°»75at76, 1875-
1874; — List of the Linnean Society; — Additions to the
Library. Londres; 2 cah. in-4'' et 11 cah. in-8°.
Numismatic Society of London. — Journal, 1874, pt. III.
Londres; cah. in-8°.
Society of antiquaries of London. — Proceedings, second
séries, vol. VI, n"' II and III. Londres; 1874, 2 cah. in-8°.
Royal Irish Academy of Dublin. — Transactions : Anli-
quities, vol. XXIV, pt. IX; Science, vol. XXV, pts. IV at IX; —
Proceedings, vol. I, série II, n"' \ and 7 at 10. Dublin, 1873-
1874; 7 cah. in-4'' et 5 cah. in-8°.
.Royal geological Society of Ireland, Dublin. — Journal,
new séries, vol. XIII, pt. 2, 1871-1872. Dublin, 1872; cah.
in-8°.
Edinburgh geological Society. — Transactions, vol. II,
pt. m. Edimbourg, 1874; cah. in-8°.
Geological Society of Glasgow. — Transactions, vol. IV,
part III. Glasgow , 1 874 ; cah. in-8».
( 648 )
Asiatic Society of Bengal at Calcutta. — Journal, new
séries, vol. XLIli, n» 189, pt. I, n" II, 1874. — Proceedings,
n"' VI and VII , june and july 1 874; — Bibliotheca Indica , new
séries, n"^ 292, 502-505, 507 and 512. Calcutta, 1874; cah.
in-i" et 5 cah. in-S".
Geological survey of Canada, at Montréal. — Rapport des
opérations pour 1872-1875. Montréal, 1873; vol, in-8".
n nn)
BULLETIN
OE
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
DES
LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE.
1874. —N° 12.
CLASSE DES SCIEUCES.
Séance du 5 décembre 1874.
M. E. Candèze, directeur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. de Koninck, P.-J. Van Beneden,
Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens,
F. Duprez, G. Dewalque, E, Quetelet, H. Maus, M. Gloe-
sener, F. Donny, Ch. Montigny, Steichen, Éd. Dupont,
Éd. Morren, Éd. Van Beneden, C. Malaise, membres;
Th. Schwann, E. Catalan, Auguste Beilynck, associés;
Éd. Mailly, H. Valérius, F. Plateau, Joseph De Tilly,
V.-L. CovnQi^ correspondants.
S"* SÉRIE, TOME XXXVIII. 42
( 650 )
CORRESPONDANCE.
M. J. d'Omalius écrit pour remercier ses confrères des
sentiments de bienveillance et d'intérêt qui lui ont été ex-
primés par M. le secrétaire perpétuel au sujet de son étal
de santé. M. le directeur annonce, à cette occasion, que
M. d'Omalius est de retour à Bruxelles et pourra, selon
toute probabilité, assister aux prochaines séances.
— M. le Ministre de l'intérieur transmet une amplia-
tion d'un arrêté royal du 24 novembre dernier, nommant
président de l'Académie, pour 1875, M. A. Brialmont,
directeur de la classe des sciences pour la même année.
— Le même haut fonctionnaire communique une ex-
pédition d'un arrêté royal du même jour, qui décerne à
M. Gloesener le prix quinquennal des sciences mathéma-
tiques et physiques pour la période de 1869-1873.
— M. le D"^ Burggraeve, de Gand, adresse une liste
provisoire de souscription pour l'ouvrage qu'il se propose
de publier sous le titre de : Monument à Jenner.
— MM. les questeurs du Sénat et de la Chambre des
représentants envoient des cartes de tribune réservée pour
la session législative 1874-1875. — Remercîments.
— M. le professeur Cavalier adresse le résumé de ses
observations météorologiques faites à Ostende pendant le
mois de novembre 1874.
( 651 )
— M. Edouard Morren fait hommage des oiivragos sui-
vants qu'il vient de publier :
Liste des jardins, des chaires et des musées botaniques
du monde, 2" édition ; in-8°.
La Botanique au pays de Liège; in-S";
?(iote sur la joubarbe d'Aywaille {Sempervirum Funckii
car. Aqualiense); in-8".
Il présente, en même temps, l'année 1875 du Bulletin
de la fédération des Sociétés d'horticulture de Belgique;
1 vol. in-8^
M. Ernest Candèze offre les travaux suivants de sa com-
position :
Révision de la monographie des Élatérides, 1" fasci-
cule; in-8°;
Insectes recueillis au Japon par M. G. Lewis , pendant
les années 1869-181 1. Élatérides. In-8";
Le Scénographe, appareil photographique de poche.
In-8°.
La classe vote des remercîmenls à MM. Morren et Can-
dèze pour ces dons.
— M. G. -A. iîirn, associé, au Logelbach (Alsace), la
Société des sciences physiques et naturelles de Bordeaux ,
l'Université de Bonn, la Société helvétique des sciences
naturelles à Berne, la Société linnéenne et l'Institut an-
thropologique de la Grande-Bretagne et de l'Irlande, à
Londres, remercient pour le dernier envoi de publica-
tions académiques.
— La classe a reçu, depuis sa dernière séance, les publi-
cations de la Société géologique de Belgique; de la Société
d'agriculture de Lyon; de l'Académie des sciences et belles-
( 652 )
lettres et la Société linnéenne de la même ville; de la
Société d'Émulation du Doubs, à Besançon; de l'Académie
de Stanislas à Nancy ; de l'Académie impériale des sciences
de Vienne; de l'Université de Fribourg en Brisgau et de la
Société des sciences naturelles de la même ville; de la
Société de géographie de Dresde ; de la Société de méde-
cine d'Iéna; de la Société zoologique de Francfort s/M; de
la Société entomologique de Stettin; de la Société helvé-
tique des sciences nouvelles de Berne; de l'Académie des
sciences de l'Institut de Bologne et de celle de Modène;
de l'Institut anthropologique de la Grande-Bretagne; de
l'Institution royale et de celle des ingénieurs civils de
Londres; des Sociétés géologiques de Londres, Dublin,
Glasgow et d'Edimbourg; des Sociétés de géographie, de
chimie et de météorologie de Londres; de l'Académie royale
d'Irlande à Dublin; de la Société asiatique du Bengale et
de la Société impériale des naturalistes de Moscou.
— Les travaux manuscrits suivants sont renvoyés à
l'examen de commissaires :
\° De la constitution physique des cotnètes, par M. J. Vi-
vier. — Commissaires : MM. E. Quetelet et J. Liagre;
2° Note sur les gisements de phosphates en Belgique et
particulièrement sur celui de Ciply ; par M. A. Petermann,
directeur de la station agricole de Gembloux. — Commis-
saires : MM. Melsens, Donny et Briart;
5" Recherches sur la composition de l'acide humique
naturel, son intervention dans la nutrition des plantes et
sa combinaison avec les matières minérales, par M. E. Si-
mon, à Gembloux. — Commissaires : MM. Melsens, de
Koninck et Donny ;
4° Recherches sur la structure de la corde dorsale de
( 653 )
VAmphioxus, avec une planche, par M. Camille Moreau,
élève au doctorat en sciences naturelles à l'université de
Liège, — Commissaires : MM. Edouard Van Beneden et
Schwann.
ÉLECTIONS.
La classe procède au renouvellement de sa commission
spéciale des finances pour l'année 1875. Elle porte ses
suffrages sur MM. GInge, Nyst et P.-J. Van Beneden,
membres sortants, et sur MM. Monligny et Maus, élus en
remplacement de M. le vicomte Du Bus, décédé, et de
M. Liagre, nommé secrétaire perpétuel.
BAPPORTS.
MM. Éd. Morren , Â.Bellynck et Éd. Van Beneden don-
nent lecture de leurs rapports sur le mémoire de concours
portant comme devise : Pour trouver la preuve qu'un or-
ganisme est un degré de développement ou un produit du
développement d'un autre organisme, etc., envoyé en ré-
ponse à la question du polymorphisme des champignons.
La classe prendra une décision sur les conclusions de
ces rapports dans sa prochaine réunion, spécialement des-
tinée au jugement des concours.
f 654 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Sur la température de combustion des combustibles ordi-
naires, brûlés à l'air libre; par M. H. Valérius, corres-
pondant de l'Académie.
On a cru, pendant longtemps, que lorsqu'on mettait un
combustible en contact avec le volume d'oxygène néces-
saire à une combustion complète, ces corps se combi-
naient, dans les conditions voulues, en une fois et en
totalité. On pouvait alors facilement déterminer, par le
calcul, la température développée. Il suffisait, à cet effet,
de diviser la puissance calorifique du combustible par le
nombre de calories qu'exigent les produits de la combus-
tion, pour éprouver une élévation de température d'un
degré. Mais on arrivait ainsi à des températures de beau-
coup supérieures à celles qu'on produit en réalité. C'est
ainsi, par exemple, que, pour le carbone, brûlé avec le
volume d'air strictement nécessaire à la combustion, on
obtenait une température de combustion de ^TâO^C.
La cause de la différence entre les résultats de la théorie
et ceux de la pratique est restée inconnue jusqu'au mo-
ment de la découverte, par M. H. Sainte-Claire-Deville,
du phénomène de la dissociation des corps composés
portés à de hautes températures (*). En ayant égard à ce
(*) Voy. Saiiile-Claire-Deville, Leçons de la Société chimique, Paris,
Hachelte, 18G6, el Compte rendu des séances de r Académie des sciences
de Paris, i 4 janvier 1867, p. 66.
( 655 )
phénomène, on voit, en effet , que, par la combustion, il
n'est possible d'élever la température qu'aussi longtemps
qu'une partie du combustible peut encore se combiner avec
l'oxygène et dégager de la chaleur.
Mais il restait à déterminer expérimentalement les tem-
pératures produites en réalité par la combustion et le
coefficient de combinaison qui correspond à chacune
d'elles. Ce problème important a été résolu, dans des con-
ditions spéciales de combustion , pour l'oxyde de carbone
et l'hydrogène, par M. Bunsen, qui a fait connaître sa
méthode, en 1867, dans les Annales de Poggendorf^
t. CXXXI, p. 161 et suivantes.
Le procédé de M. Bunsen consiste essentiellement à
introduire le gaz combustible avec de l'oxygène ou de
l'air dans un eudiomètre à soupape, à déterminer la com-
bustion de ce gaz instantanément, à l'aide d'une longue
étincelle de la bobine de Ruhmkorff, et à mesurer la ten-
sion P', des produits de la combustion. Cette tension con-
nue, ainsi que la capacité V de l'eudiomètre, M. Bunsen
calcule, à la fois, le coefficient de combinaison x du gaz
combustible et la température ^ des gaz au moment de la
combustion. Cette double détermination se fait au moyen
des trois formules suivantes , que nous supposerons éta-
blies pour un mélange d'hydrogène et d'air, dans les pro-
portions voulues pour la combustion complète.
Soit /t, le poids de l'hydrogène; o, celui de l'oxygène et
11, celui de l'azote. Désignons, en outre, par c',, c'^, c'„ et
c'„, respectivement les caloriques spécifiques sous volume
constant de la vapeur d'eau, de l'hydrogène, de l'oxygène
et de l'azote. Enfin, soit r, la puissance calorifique de
l'hydrogène. Si l'on brûle l'hydrogène sans que les produits
de la combustion puissent se dilater, ainsi que cela a lieu
( 656 )
dans l'eudiomètre de M. Bunsen, on aura pour ?i, l'équation
suivante :
vhx
9 hxc,-^h{i — x) c; -+- (0 — 8/? x) c'o -+- n c„
(i;
D'un autre côté, le volume V des produits de la com-
bustion à 0° et sous la pression ordinaire P de l'atmo-
sphère, sera
dhx h(l — x) (0 — Shx) n
V=- -^— ^-»-^^ - + -,. . (2)
Se, S/,, «c et s„, représentant respectivement les poids spéci-
fiques de la vapeur d'eau, de l'hydrogène, de l'oxygène et
de l'azote.
En appelant, en outre, a le coefficient de dilatation des
gaz, on a :
V'P'
VP=-
(1 -f- ati)
Mais cette méthode ne donne pas, comme tout le monde
paraît l'admettre, la température de combustion à l'air
libre. J'avais d'abord pensé que pour déduire cette der-
nière des résultats de M. Bunsen, il fallait évaluer le tra-
vail effectué par les gaz lorsqu'ils se dilatent jusqu'à ce
que leur pression soit devenue égale à celle de l'air atmo-
sphérique, et calculer, au moyen de ce travail, l'abaisse-
ment de température produit. La différence entre les tem-
pératures indiquées par M. Bunsen et le nombre de degrés
perdus par les gaz, par suite de leur dilatation, aurait alors
donné la température de combustion à l'air libre. J'ai re-
connu depuis qu'il y avait un moyen bien plus simple
d'obtenir cette dernière température. Ce moyen consiste à
( 657 )
introduire dans la formule (I) ci-dessus l'une des valeurs que
M. Bunsen assigne à x pour les différentes températures
et à y remplacer les caloriques spécifiques sous volume
constant par les caloriques spécifiques sous volume varia-
ble. On calcule ensuite la valeur de r,. Si la valeur obtenue
correspond au coefficient x indiqué pour cette température
ou pour des températures peu différentes, elle représente
la température de combustion cherchée. Si, au contraire,
X est trop grand pour la température ^i trouvée, on refait
le calcul avec une autre valeur du même coefficient. A la
vérité, X paraît diminuer lorsque la pression devient
moindre, mais il y a lieu de penser que ces variations sont
peu considérables et peuvent être négligées. C'est, du
reste, un sujet qui mérite d'être étudié.
J'ai appliqué cette méthode à l'hydrogène, à l'oxyde de
carbone et au carbone lui-même. Comme on le verra, je
suis arrivé à des températures de combustion beaucoup
moins élevées que celles qu'on admet généralement et les
chiffres que j'indique trouvent leur confirmation , à la fois,
dans les fourneaux alimentés de combustibles solides et
dans les fourneaux à gaz, dont les plus précieuses qualités
reposent sur le chauffage préalable des gaz combustibles
et de l'air destiné à les brûler. J'indique, en outre, une
méthode très-simple pour déterminer, au moins d'une
manière approchée, la température de combustion d'un
combustible composé. Enfin, je rectifie quelques résultats
indiqués dans le temps par Ebelmen, sur la distribution de
la chaleur dans une couche épaisse de combustii)le que l'on
brûle au moyen de l'air atmosphérique.
Température de combustion de l'oxyde de carbone brûlé
au moyen de l'oxygène pur, sous la pression atmosphérique.
( 058 )
— En prenant a; = 73, on trouve T = 2231''C. M. Bun-
sen a trouvé 5035"C (*).
Combustion de l'oxyde de carbone à l'air libre. — Pour
x> = »/2, on trouve T = 14oO°C. M. Bunsen donne
Hydrogène el oxygène pur. — Pourjc = V3, T=1789°C.'
Comme M. Bunsen a trouvé ^, = 2844°C et x = y~^,
tandis qu'il donne pour des températures comprises entre
1146 et 2471"C, x = ^l^, on peut faire le calcul delà
température de combustion de l'hydrogène au moyen de
cette dernière valeur. On obtient alors T = 5067°. On voit
que X doit être < 0, 5, et, par conséquent, que la tem-
pérature de combustion de l'hydrogène ne peut être supé-
rieure à 1800°C. environ; mais comme la valeur de x ne
tombe de 'A2 à '/^ qu'au delà de 5000°, il s'ensuit que pour
produire avec l'hydrogène des températures supérieures à
1789°, il suffît de chauffer l'hydrogène et l'oxygène employé
à la combustion.
MM. Debray et Deville évaluent la température de com-
bustion de l'hydrogène avec l'oxygène pur sous la pression
(*) Les valeurs des caloriques spécifiques qui ont été employées dans
le calcul des températures de combustion sont les suivantes :
Oxygène 0,2173
Azote 0,244
Hydrogène 3,409
Oxyde de carbone . 0,245
Acide carbonique 0,2169
Vapeur d'eau 0,4805
Air atmosphérique 0,2575
.l'ai pris pour la puissance calorifique de l'hydrogène 29000% pour celle
du carbone 8000« et pour celle de l'oxyde de carbone 2403<=.
( 659 )
atmosphérique à 2300° et M. Edm. Becquerel seulement
à 2100°. S'il est vrai que le coefficient x varie par sauts
brusques, comme l'indique M. Bunsen, ces évaluations
doivent être considérées comme trop élevées.
Combustion de l'hydrogène à l'air libre. — 1 kil. d'hv-
drogène exige, pour sa combustion complète, 36 kil. d'air.
a- = -ct T = 12o4°C.
M. Bunsen a trouvé 2024"C.
En chauffant préalablement l'air et l'hydrogène, on peut
réaliser des températures plus élevées.
Combustion du carbone à l'air. — Lorsque le carbone
brûle à l'air, on peut admettre, d'après les résultats de
M. Bunsen sur la combustion de l'oxyde de carbone, que,
sur \ kilo de carbone, O^S se transforment en CO.2, et
l'autre demi-kilo, en CO. Le poids d'air nécessaire à la com-
bustion est de 12 k.
D'après cela, la température de combustion du carbone
se calculera à l'aide de l'équation (*) :
8000 : 2 -+- 2,475 : 2
1,85.0,2109 H- 1,166.0,243 H- 2,55.0,244 H- 4,66.0,244^-5. 0,2573
CO2 CO az pour CO az pour CO^ air libre.
4000-4- 1256,3
0,4 -+- 0,3 -+- 0,57 -+- 1,14 -H 0,71 ""
3256,0
5,12
= 1678°C.
(*) 1 k. de carbone exige pour se transformer en acide carbonique
12 k. d'air et donne 3 k. 2/3 d'acide carbonique. 1 k. de carbone qui se
transforme en oxyde de carbone produit 2 k. ■ '3 de ce corps.
( 600 )
Mais à mesure que les gaz cheminent à travers l'appa-
reil de chauffage et se refroidissent, l'oxyde de carbone
brûle et la température se maintient à 1678", jusqu'à ce
que tout l'oxyde soit brûlé.
Température de combustion des carbures d'hydrogène
brûlés à l'air libre. — Elles peuvent se déduire de la com-
position de ces corps et des températures de combus-
tion de l'hydrogène et du carbone. Ainsi, le bicarbure
d'hydrogène C4H4 ou gaz oléfiant, est formé de ^l-j C et
V7 hydrogène. Sa température de combustion sera donc :
6 1254- 10068
-.1678+- = hl79"=l458-H ITOo^ieiT^C.
7 7 7
Cette méthode n'est qu'approchée, car, ainsi que
M. Bunsen le fait observer, on ne connaît pas la manière
dont l'oxygène se comporte lorsqu'il est en présence de
deux corps avec lesquels il peut se combiner.
De la combustion dans les fourneaux alimentés de com-
bustibles solides. — On pourrait objecter contre les tem-
pératures de combustion ci-dessus que, si elles étaient
exactes, on ne pourrait pas développer, dans les fourneaux
à réverbère ordinaires, le degré de chaleur qu'exige le
traitement des métaux, par exemple, le puddiage de la
fonte et le réchauffage du fer. Mais cette objection est
facile à réfuter. En effet, on sait que, pour pouvoir fonc-
tionner, ces fourneaux doivent être chauffés préalable-
ment à une haute température et leurs foyers chargés
d'une grande quantité de combustible. L'air qui pénètre
ensuite dans le foyer y trouve un combustible porté à une
haute température et, par suite , doit développer une tem-
pérature de combustion plus élevée que celle que nous
( 661 )
avons calculée en supposant l'air et le combustible à zéro
degré.
Malgré cette circonstance , la température produite dans
le four est encore insuffisante pour la soudure du fer, c'est-
à-dire moindre que 45 à ICOO^C. J'en trouve la preuve
dans le passage suivant, p. 291 , du Traité de la fabrica-
tion du fer et de l'acier de feu mon frère, Traité que je
suis occupé en ce moment à publier :
« On sait qu'une haute température n'est pas nécessaire
» durant la période pendant laquelle le fer prend nature,
» mais que la température ordinaire du four à puddler est
» insuffisante pour souder ensemble toutes les particules
» de fer dont sont formées les balles, et qu'il est néces-
» saire, aussitôt que le fer a pris nature, d'élever consi-
» dérablement la température du four et des balles. A ce
» moment il se fait une combustion violente des balles
» elles-mêmes, ce qui explique le déchet élevé que l'on
» subit. Cette combustion peut être plus ou moins forte,
» suivant que l'on prend plus ou moins de soins d'éviter
» la présence de l'oxygène libre dans la flamme. Mais , il
» n'est pas démontré que, dans les fours à puddler ordi-
» naires, on doive s'opposer tout à fait à la combustion
» des balles, attendu que, dans ces fours, ce n'est que
» grâce à la combustion d'une certaine quantité de fer
» que l'on obtient rapidement la température nécessaire
» au soudage des balles. »
Il est donc certain que la combustion du charbon n'est
pas capable de développer, dans le four à réverbère ordi-
naire, la température dont on a besoin pour souder le fer.
Il n'en serait pas ainsi si la combustion de l'oxyde de car-
bone développait la température de 1997°C et celle de
l'hydrogène la température de 2024° qu'indiqueM. Bunsen.
( 662 )
Nécessité du chauffage préalable des gaz combustibles
et de l'air dans les foyers à gaz. — Dans ces foyers, on
ne possède pas le réservoir de chaleur représenté dans les
fourneaux alimentés de combustibles solides, par la couche
de combustible incandescent placée sur la grille. Si donc
nos calculs sont exacts, pour développer les hautes tem-
pératures dont on a besoin dans l'industrie, il faut, dans
les fourneaux à gaz, avoir recours au chauffage préalable
des gaz combustibles et de l'air destiné à les brûler. C'est
ce que l'expérience a démontré dès l'origine de l'emploi
des fours à gaz. Depuis les perfectionnements que Siemens
a apportés aux fourneaux à gaz, il ne saurait plus rester
de doute sur la nécessité de ce chauffage préalable. Dans
les fours de Ponsard et de Bicheroux, on se borne au
chauffage préalable de l'air. Aussi ces appareils dévelop-
pent-ils une température moins élevée que les fours
Siemens.
Expériences d'Ebelmen. — D'après Ebelmen, lorsque
l'air traverse une épaisseur un peu considérable de char-
bon, celui-ci brûle de deux manières différentes. L'oxy-
gène de l'air, en s'introduisant dans le fourneau, forme
d'abord de l'acide carbonique, et ce gaz, en traversant une
nouvelle couche de combustible incandescent, se trans-
forme en oxyde de carbone en doublant de volume {*).
Ces résultats ont déjà été contestés par M. Cailletez ("").
D'après ce dernier savant, il se forme de l'oxyde de car-
bone en même temps que de l'acide carbonique et il reste
de l'oxygène libre. Cette manière de voir est confirmée par
(*) V., pour plus de détails, mon ouvrage sur les Applications fie la
chaleur, p. 37, § 42.
(**) Les Mondes, de M. l'abbé Moigno,p. 676, 186G.
( 663 }
les expériences de M. Bunsen sur la combustion de l'oxyde
de carbone dans l'eudiomèlre à soupape. Il est probable
qu'il se forme d'abord de l'acide carbonique et de l'oxyde
de carbone et que le quart de l'oxygène reste libre. A me-
sure que les gaz cèdent de la chaleur aux corps avec les-
quels ils viennent en contact, l'oxygène libre transforme
l'oxyde de carbone en acide carbonique. La totalité de
cet acide est ensuite ramenée à l'état d'oxyde de carbone
par le carbone incandescent qu'elle rencontre, si toutefois
la couche de combustible est suffisamment épaisse.
M. Ebelmen évaluait la température produite par la for-
mation de l'acide carbonique à 2729° et celle produite par
l'oxyde de carbone à 1485°C. D'après cela, le passage de
l'acide carbonique, premier produit de la combustion,
selon Ebelmen , à l'état d'oxyde de carbone, devait donner
lieu à un abaissement de température de 2729 — 1485 =
J244''C. Ces chiffres doivent être rectifiés. La température
produite au bas de la couche de combustible n'est, théo-
riquement, que de 1700"C environ, et celle produite par
le passage de l'acide carbonique à l'état d'oxyde est infé-
rieure à 1485", parce que, au moment où ce passage a
lieu , l'acide carbonique a déjà perdu une partie de sa cha-
leur.
( 664 )
CLASSE DES LETTRES,
Séance du 7 décembre ^874.
M. R. Chalon, direcleur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J. Grandgagnage, J. Roulez, Ga-
chard, P. Devaux, P. De Decker, M.-N.-J. Leclercq,
Th. Juste, le baron G. Guillaume, Alph. Wauters, Ém. de
Laveleye, Alph. Le Roy, Ém. de Borchgrave, membres;
J. Nolet de Brauwere van Sleeland, Aug. Scheler, Alph.
Rivier, associés; J. Heremans, Edm. Poullet, F. Loise,
correspondants.
M. Ch. Montigny, membre de la classe des sciences,
assiste à la séance.
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'intérieur transmet une ampliation
d'un arrêté royal du 24 novembre dernier, nommant pré-
sident de l'Académie, pour 1875, M. A. Brialmont, direc-
teur de la classe des sciences pour la même année.
— MM. les questeurs du Sénat et de la Chambre des re-
présentants adressent des cartes de tribune réservée pour
la session législative de 1874-1875. — Remercîments.
( 66S )
— M. le Ministre de la justice offre, pour la bibliothèque
de la Compagnie, deux exemplaires du tome second du
Recueil des coutumes de Namur et de Philippeville, publié
par la commission royale des anciennes lois et ordonnances
du pays. — Remercîments.
— M. John Edwards, secrétaire du Public Record Office
de Londres, répondant à une demande de renseignement
qui lui avait été adressée par M. le secrétaire perpétuel, fait
savoir que M. Charles Purton Cooper, élu associé de la
classe des lettres, le 5 avril 1834, est mort le 26 mars 1875,
dans sa 80" année.
— M. le secrétaire perpétuel annonce à ses confrères
que la classe des beaux-arts vient d'éprouver une perte qui
sera profondément ressentie par toute l'Académie. M. le
baron Gustaf Wappers , membre titulaire de la section de
peinture, est décédé à Paris le 6 de ce mois.
— M. le D"" Burggraeve, de Gand, soumet une liste de
souscription pour le livre qu'il se propose de publier sous
le titre de : Monument à Jenner.
— La Société d'Émulation du Doubs à Besançon, la
direction de la Bibliothèque nationale à Paris, la Société
statistique de l'Angleterre à Londres , l'Université deWiirz-
bourg, M. de Sybel, associé à Bonn, remercient pour le
dernier envoi de publications académiques.
Des remercîments semblables sont exprimés par l'Aca-
démie royale d'histoire de Madrid pour le précédent envoi
de publications.
L'institut royal grand-ducal de Luxembourg fait parve-
nir le dernier volume de ses publications de la section his-
torique.
2"°* SÉRIE, TOME XXXVIII. 45
( 666 )
— M. E. Caslan , secrétaire de la Société d'Émulation
du Doubs, à Besançon, fait hommage de deux brochures
imprimées de sa composition : 1° Étude sur le théâtre
romain de Besançon et Notice sur la vierge des Carondelet.
In-8^
M. Paul Devaux fait hommage du livre qu'il vient de pu-
blier sous le titre de : Études politiques sur l'histoire
ancienne et moderne et sur Vinfluence de l'état de guerre
et de l'état de paix. \ yoI. in-S".
M. Aug. Scheler fait hommage d'un nouveau volume
qu'il vient de publier dans la collection des œuvres des
grands écrivains du pays qui ont écrit en langue française.
Ce volume, consacré à Bueves de Commarchis, par Adenés
li Bois, termine la série des poètes brabançons.
M. J. Nolet de Brauvvere van Steeland offre un exem-
plaire de sa brochure imprimée portant pour titre : Epistel
aan den heer L.-L. de Bo. In-12.
M. J.-F.-J. Heremans offre un exemplaire de sa brochure
intitulée : Hoffmann van Fallersleben en de Nederlandsche
Letterkunde. Jn-S".
M. Alph. Le Roy présente, au nom de M. V. Thiry, rec-
teur actuel de l'Université de Liège , le discours inaugural
et le rapport lus lors de la réouverture solennelle des cours
pour l'année 1874-1875. In-8°.
11 offre ensuite le tome IV des Œuvres complètes d'Au-
guste Hoek, poëte contemporain liégeois, i vol. in-12.
11 présente à la classe, de la part de M. le marquis de
Queux de Saint-Hilaire, à Paris, un exemplaire des deux
publications récentes de cet auteur : l'une, avec supplé-
ment, porte pour titre : Le livre des cent ballades {] vol.
et I cah. in-8°), et l'autre : Le traicté de Getta et d'Amphi-
tryon (in-d2).
( 667 )
La classe, après avoir voté des remerdments aux auteurs
de ces dons, décide l'impression de la note suivante lue par
M. Le Roy, au sujet des ouvrages de M. le marquis de
Queux de Saint-Hilaire.
« J'ai l'honneur d'offrir à la classe , de la part de M. le
marquis de Queux de Saint-Hilaire, de Paris, un exem-
plaire de deux publications récentes, assurément dignes
l'une et l'autre de l'attention des connaisseurs : le Litre des
cent ballades (avec supplément) et le Traicté de Getta et
d'Amphitryon, deux éditions princeps de poèmes du
moyen âge, aussi intéressants par leur mérite intrinsèque
de fond et de forme , que remarquables au point de vue de
la filiation des idées littéraires.
» Notre savant et honoré confrère, M. le baron Kervyn de
Lettenhove, s'était déjà occupé du Livre des cent ballades,
dont la Bibliothèque de Bourgogne possède un précieux
manuscrit, datant du premier tiers du X^'' siècle et por-
tant le n° 11,218. Pour le dire en passant, c'est sur ce
manuscrit et sur le n" 2,560 de Paris, selon toute appa-
rence un peu plus ancien, que M. de Queux a principale-
ment établi son texte.
» Discutant l'opinion qui attribuait au bâtard d'Auxi la
plupart des Cent ballades , M. Kervyn avait donné d'excel-
lentes raisons pour la faire repousser. Il en était venu à
considérer ce poème comme l'œuvre collective de quatre
collaborateurs et principalement de Jean de Bordes, fils de
Guillaume de Bordes, sénéchal d'Eu et compagnon de
Bouciquaut en Terre Sainte. D'autres voulurent que ce
dernier personnage lui-même fût l'auteur d'un livre com-
posé tout entier à sa louange ; c'était peu probable. Ce qui
demeurait acquis, c'est que le poète portait le titre (le
( 668 )
sénéchal et le surnom de Htititi (hardi batailleur). M. Pau-
lin Paris mit en avant le nom de Jehan de Werchin,
sénéchal de Hainaut; mais ses éléments d'induction
parurent assez vagues. Bref, la question était encore pen-
dante, lorsque M. Léopold Pannier, attaché à la Biblio-
thèque nationale de Paris, découvrit fort heureusement
deux nouveaux manuscrits des Ce7it ballades.
» Toutes les copies connues jusque-là étaient incom-
plètes; il y manquait les derniers vers de la ballade de Bucy
et la ballade du Bâtard de Coucy tout entière. 11 fut donné à
M. Pannier de publier ce complément dans un très-curieux
article de la Romania, du mois de juillet 1873. M. de
Queux ne pouvait manquer de solliciter l'autorisation de
les reproduire et de compléter ainsi son livre; il l'obtint
aisément, et ce sont ces pièces , ainsi qu'une dernière bal-
lade étrangère à l'ouvrage et inscrite à la suite de l'un des
nouveaux manuscrits en manière d'appendice, qui consti-
tuent le texte du supplément que j'ai mission de placer
sous les yeux de l'Académie. Mais M. de Queux n'a pas
voulu s'en tenir là ; il s'agissait toujours de découvrir le
nom du sénéchal. Avec un rare talent de critique, aidé
d'ailleurs de divers renseignements importants fournis par
M. le comte de Circourt, il croit enfin y être parvenu, et
je dois dire qu'à mon sens son argumentation est armée
de toutes pièces.
» L'auteur du Livre des cent ballades, selon M. de Queux,
n'est autre que Jehan, sénéchal d'Eu, l'un des compa-
gnons de Bouciquaut (circonstance relevée par M. Kervyn).
Je laisse à mes honorables confrères le soin d'apprécier la
légitimité de cette conclusion.
» Je viens de dire que le Liv7'e des cent ballades n'est pas
une de ces œuvres médiocres qu'on exhume uniquement
( 6G9 )
comme monuments du vieux langage; c'est un véritable
monument littéraire. M. de Queux, en l'éditant, s'est
adressé aux gens du monde aussi bien qu'aux érudits, et
son attente n'a pas été trompée. Le sujet du poëme est
bien simple, bien banal en apparence : la fidélité en amour;
mais pour nos voisins d'aujourd'hui comme pour leurs
ancêtres, ce thème est inépuisable : on en fait encore abus
tous les jours, au théâtre, dans les romans et jusque dans
les romances. Ici c'est un jeune bachelier amoureux, qui
ne sait encore quelle voie tenir. Un vieux chevalier,
d'aventure son compagnon de voyage, lui explique chemin
faisant les règles de loyauté et d'amour « qui seront, dit
très-bien M. de Queux, l'éternel honneur de la chevalerie
française du moyen âge, car elles lui ont donné ce pres-
tige qui dure encore : » la moitié du poëme y est consa-
crée. Le jeune homme promet de n'y jamais faillir; mais
bientôt une jeune et joyeuse dame, qu'un autre hasard
met en sa présence, lui donne des conseils qu'il ne de-
mande pas, conseils d'amour léger, d'amour volage : le
chevalier ne s'est montré austère, dit-elle, que parce qu'il
est vieux; soumettons la question à des preux renommés
en amour et en guerre. Treize princes ou seigneurs répon-
dent tour à tour au défi; disons tout de suite, pour la
moralité du poëme, que trois seulement donnent raison à
la dame; ajoutons que la plupart de leurs ballades sont
charmantes. Mais l'éditeur, esprit vraiment littéraire,
pousse plus loin l'analyse : il retrouve dans ce gracieux
débat l'antagonisme de l'esprit germanique, dominé par le
respect de la femme, et de l'esprit gaulois, qui fait volon-
tiers de la compagne de l'homme un être capricieux, fan-
tasque et inconstant, et se hâte de rire de ses trahisons
« pour n'en pas pleurer. » Nos ancêtres, c'est M. de Queux
( 670 )
qui parle, ont eu trop tôt trop d'esprit. — Ce qu'il y a de
plus piquant ici, c'est que le plaidoyer contre les femmes est
soutenu par une femme, et que c'est un homme, au con-
traire, qui se fait leur champion.
» A un tout autre point de vue, le Traiclé de Getta
et (ÏAmphitrijon n'est pas moins intéressant. Cesl la tra-
duction amplifiée d'un poëme latin de Vital de Blois, qui
renouvela au XII' siècle VAmphitrijon de Plante pour le
transformer en satire contre les subtilités de la scolastique,
ou plutôt de la dialectique « travaillant un esprit vulgaire
auquel elle ôte le sens commun. » Amphitryon n'est plus
le héros thébain de la légende; c'est un étudiant qui re-
vient des écoles d'Athènes (lisez de Paris) avec son valet
Geta (Sosie) , qui a profité à sa manière des leçons des
docteurs. Plusieurs scènes sont d'un haut comique, mais
d'un comique tout différent de celui de l'antiquité. J'ap-
|)elle l'attention de l'Académie sur l'introduction du
volume, où l'éditeur résume à grands traits l'histoire du
sujet d'Amphitryon, depuis la plus haute antiquité, et sur
le poëme lui-même, dont le texte a été revu avec un soin
particulier, comme tous ceux dont s'est occupé M. de
Queux de Saint-IIilaire. »
— M. Em. de Borchgrave fait connaître que M. d'Antas,
ministre plénipotentiaire de Portugal à Bruxelles, qui a été
nommé, il y a deux ans, associé de l'Académie, vient d'être
appelé par son gouvernement au poste de Madrid. M. d'An-
tas aurait vivement désiré venir en personne prendre congé
de ses confrères, mais comme les ordres de son gouverne-
ment lui enjoignaient d'être à iMadrid avant l'époque delà
réunion actuelle de la classe, il a prié M. de Borchgrave
d'être l'interprète de ses sentiments.
( (^71 )
— M. L. Galesloot, chef de section aux Archives du
royaume à Bruxelles, soumet à l'examen de la classe un
travail manuscrit intitulé : Fouilles et découvertes d'anti-
quités romaines à Assche. Détails inédits sur le trésor de
Mespelaer.
La classe renvoie cette communication à l'appréciation
de deux de ses membres, MM. Alph. Wauters et Ém. de
Borchgrave.
— Elle décide ensuite l'insertion, au Bulletin, de la
note suivante lue par M. le baron G. Guillaume :
« Des journaux ayant avancé que M. André Van Hasselt
a donné sa démission de membre de la commission de la
Biographie nationale pour protester contre l'esprit étroit
et rétrograde qui préside à cette publication académique,
le général Guillaume, président de cette commission, fait
remarquer que la démission de M. Yan Hasselt est anté-
rieure de plusieurs mois aux premières publications de la
Biographie nationale, et que, d'un autre côté, M. Yan Has-
selt n'a j'amais cessé d'être un des collaborateurs de cette
œuvre, ainsi que le prouvent les nombreux articles rédigés
par lui qu'on trouve dans chacun des quatre volumes pu-
bliés jusqu'à ce jour. »
ELECTIONS.
La classe, appelée à élire sa commission spéciale des
finances pour l'année 187.o, renouvelle le mandat des mem-
bres sortants, MM. Chalon, Conscience, De Decker, Faider
et Gachard.
( 672
COMiMUNICATIONS ET LFXTURES.
Henri III, duc de Brabanl; par M. Alphonse Wauters,
membre de l'Académie.
I.
Nous n'avons pas l'intention de reconstituer en son en-
tier la biographie du duc de Brabant Henri III, biogra-
phie qui a déjà été écrite, il y a plus de deux siècles, par
Christophe Butkens, dans ses Trophées de Brabant {[).
L'œuvre du savant Cistercien, basée sur les récits des an-
ciens chroniqueurs et l'étude des documents authentiques^
ne laisse rien à désirer sous le rapport de l'exactitude. Ce
serait entreprendre un travail à la fois fastidieux et inutile
que de vouloir le rectifier ou le compléter. Dans les pages
qui suivent je ne poursuis d'autre but que celui de faire
connaître quelques détails qui ont échappé à notre vieil
historien et d'apprécier le caractère du duc et les événe-
ments de son règne à un point de vue différent de celui
auquel Butkens s'est placé.
J'ai déjà insisté ailleurs (2) sur le peu de renseignements,
puisés à des sources comtemporaines, que l'on trouve
pour l'histoire du milieu du XIIP siècle. J'entends parler
(1) T. I, pp. 252 à 278.
(2) Table chronologique des chartes et diplômes imprimés, t. IV, In-
IroJuctioii.
( 675 )
(les chroniques , car les actes mêmes ne cessent de se mul-
tiplier à mesure qu'on approche des temps modernes. C'est
ainsi que notre duc Henri IH, qui joua constamment un
rôle très-actif, reste dans une espèce de pénombre d'où il
est difficile de le faire sortir. Les écrivains étrangers parlent
fort peu de lui, les Brabançons se bornent à exalter la
noblesse de son extraction et son extrême douceur. Sous ce
rapport, ils lui accordent d'unanimes louanges : « U ne
» tolérait, dit Louis Van Velthem, aucune discorde dans
» ses États et il y maintenait la paix avec fermeté (l). »
Plus loin (2) le même poète lui donne à la fois les épi-
thètes de courageux et d'aimable, de doux et de juste
{coency hovesch, milde ende iveerf,]. Au moins l'auteur du
Spiegel historiael ajoute à cet éloge quelques détails sur
l'intervention du duc Henri dans le gouvernement du
comté de Hollande, après la mort du régent Florent,
frère du roi Guillaume; il parle encore de grêles, d'oura-
gans, de pluies torrentielles qui ravagèrent certains can-
tons du Brabant, et de la cherté excessive, suivie d'une
grande mortalité, qui désola ce duché. Mais les autres
chroniqueurs, et parmi eux Van Boendale (3), De Dyn-
ler (4), A-Thymo, sont, en ce qui concerne Henri \\\, d'une
concision désespérante. « Modeste comme une vierge, dit
(1) Heynric die derde dat verstaet,
En wilde niet dat enich baraet
Gedreven werde onder heme;
Syn lant hilt hi, als ic 'l verneme
Vromelyc ende in payse vel.
Spiegel historiael , liv. I, c. 35.
(2) Ibidem, chap. 40.
(3) Brabanlsche Yeestea , t. I, p. 591.
(4) De Ram, Dynteri chronica Brnbanliae , t. II , pp. "201.
( 674 )
» ce dernier, il était tellement doux qu'on ne l'appela que
i» le bon duc (1). »
On est si habitué à associer à l'idée de douceur celle
de faiblesse qu'en écoutant les éloges donnés au duc
Henri III on songe involontairement à Louis le Débon-
naire, au roi Robert et à d'autres princes qui ont eu cruel-
lement à se repentir d'avoir manqué d'énergie à certaines
heures. On s'égarerait de la manière la plus étrange. Notre
duc mérite un éloge complet et s'il ne devint pas plus
célèbre, la cause en doit être cherchée dans la brièveté de
(t) Voici le chapiiie, aussi bref que peu explicite, oii A-Thymo esquisse,
à sa façon, le règne de Henri III :
Heinricus hujus nomiuis tercius, filius primogenilus Heiiirici secundi,
in ducalu Lotiiaringie et Brabancieatque marchioualu Sacri Imperii, palri
sue defunclo successil anno Domini millesimo ducentesimo quadragesimo
septinio et presedit annis tredecim. Hic inter principes sibi contenipora-
neos sanguinis nolniitale preclaruil et sue nobililatis lineam moribus siniul
alque viitutibus clariorem effecit. Fuit enini verecundus ut virgo et adeo
mansuelus ut vulgo dux pius cognominaretur. Alevdem quoque tiiiam
Hugonis, ducis Burgundie, siniiliier ex impérial! et regali prosapia orlam
et bonis moribus perornatam sibi conjugem sociavit. Ex qua genuil très
filios et unam filiam, scilicet Henricum, Johanneni, Gocefridum et Ma-
riani. Sane liuic Heinrico pio duci posl mortem Guilliehni rtgis Romano-
runi ac comitis Hollandiae sui consobrini sceptruni impériale oblatumest,
(|uod ipse suscipere recusavit. Anno Domini millesimo ducentesimo sexa-
gesimo Heinricus iste pius dux, ad subsidium Terre Sancte cruce
signatus et antequam proficisceretur morte preventusin juvertute florida
et sub bona confessione Lovanii obiit et ibi apud Praires predicatores , in
clioro ecclesie, quem ipse construxerat, honorifice sepelitur.
Historia Brahanliae diplomalica , t. II, fol. 65, aux
Archives de la ville de Bruxelles.
Les lignes qui précèdent offrent la pius frappante ressemblance avec un
passage d'une chronique dont la fin manque et qui a été publiée par la
Société historiciued'Utrecht {Codex diplomalicus neerlandicus , 'â'^ série,
t. ni. 1" partie, p. 63).
( 675 )
son règne et sa mort prématurée. Il n'occupa le trône
ducal que 13 ans, du 1" février 1248 au 28 février 1261 ;
on ignore la date précise de sa naissance , mais, comme son
père n'avait que 40 ans lorsqu'il expira, Henri III ne pou-
vait avoir que 17 ans environ lors de son avènement et
30 ans à peine lors de son décès (1).
A un âge peu avancé il avait déjà déployé de grandes
qualités. S'il prit rarement les armes, s'il sut, pendant une
époque très-agitée, préserver ses domaines des ravages de
la guerre, on le vit, très-souvent, jouer avec dignité le rôle
de médiateur. Dans une sphère moins vaste, il remplit une
mission analogue à celle que remplissait, avec tant d'éclat
et sur un plus grand théâtre, le roi de France Louis IX ou
saint Louis. Il ne négligea ni la protection du commerce,
ni le développement des institutions communales, ni l'amé-
lioration du sort des campagnards, et il donna une preuve
éclatante de sa sollicitude pour le sort des pauvres en
confirmant, par une complète abolition d'exactions et autres
taxes arbitraires, l'acte mémorable, acte auquel, au surplus,
il avait été associé, et par lequel son père avait radicale-
ment aboli la servitude dans ses domaines. Le testament de
Henri III est digne de servir de pendant à celui de Henri IL
Ces deux documents ouvrent la série des belles chartes qui
donnent à l'histoire du Brabant un si noble caractère; ils
assignent aux princesqui y attachèrent leurs noms un rang
éminent parmi les bienfaiteurs du peuple et justifieraient
l'érection de leurs statues au seuil du palais de la Nation,
(1) Bandouin de Xinove, dont la chronique se termine en 1294.. dit en
effet que Henri n'avait pas atteint sa trentième année lorsqu'il mourut ,
necdum habens triginta arvws. De Smet, Corpus clironicorum Flan-
driae, l. II, p. 727.
(676 )
Quoique le duc Henri soit dépeint comme un homme
très-religieux et que cette qualification soit justifiée par la
faveur toute spéciale dont il entoura l'ordre des Domini-
cains et l'appui constant qu'il donna à la politique de la
cour de Rome, il n'était ennemi, ni de la gaieté, ni de la
poésie (1). L'enjouement de son caractère se révèle dans
les quatre pièces qui nous sont restées de lui (2), et surtout
dans la pastorale où il chante sa rencontre d'une jeune fille
qu'il essaye de séduire par ses promesses et l'accueil peu
flatteur qu'il reçoit d'abord :
« Damoiselle, car créez
« Mon conseil , je vous créant.
» James povre ne serez.
» Ains auraiz à vo talent
» Cote traînant
» Et corroie
<> Ouvrée de soie
» Cloée d'argent. »
Bonement
S'en défent
N'a valu
Quoique j'ai dit, an festu,
Le poète insiste et célèbre son triomphe dans le sixième
et dernier couplet, qui ne manque pas de grâce :
« Damoiselle, car prenez
« La cainture maintenant
(1) Butkens, /. c, p. 172, attribue à Henri III un fils naturel nommé
Gilles, qui se trouva au siège de Thiel en 1286 et à la bataille de Woe-
ringen; mais, dans mon exemplaire de cet ouvrage, se trouve en cet
endroit une noie marginale ainsi conçue, qui est, je crois, de l'écriture
de l'auleur même : « Il était (ils du duc Henry II. >> Butkens aurait-il
trouvé, après coup, des renseignements plus précis sur ce bâtard de Bra-
bant?
(2) Elles sont toutes imprimées dans Dinaux, Les trouvères braban-
çons, haynuyers, liégeois et namurois^pp. lOOetseqq.
(677)
« Et le matin si raurez
» Trestout l'autre convenant «
Lors va sorriant
Et j'ou joie
Tant fis qu'ele otroie
Mon gré maintenant
Le don prent
Maintenant :
J'ai sentu
De quele manière ele fu.
Henri III paraît avoir vécu, pendant plusieurs années,
dans un cercle d'amis voués au culte des lettres. Il semble
avoir été très-lié avec Guillaume de Dampierre, le fils aîné
de Marguerite de Constantinople et de son second mari,
lequel épousa sa sœur Béatrix et fut aussi un grand pro-
tecteur des trouvères. L'union des deux princes, peu de
temps après la conclusion du mariage de Guillaume, en
septembre 1247, fut cimentée par un traité d'alliance où
ils se promirent mutuellement aide et assistance contre
leurs ennemis (1). Elle fut par malheur de très-courte
durée, car Guillaume périt jeune encore au célèbre tournoi
de Trazegnies , le 6 juin 1 251 , et, pendant les deux années
précédentes, il avait accompagné saint Louis en Egypte
et pris une large part à toutes les vicissitudes de cette
fatale campagne. Dans une chanson où il chante les plai-
sirs de l'amour, Henri III termine par ce couplet:
Cuens jolis
De Flandres, amis
Gui j'ai chier,
Me sauriez-vous conseillier
De li
Gui j'aim si
Que j'en ai et cuer et cors joli.
(1) Voyez plus loin, p. 683.
( 678 )
Ce ciiens joli de Flandre, cet ami si cher, c'est probable-
ment l'infortuné Guillaume, auquel Henri était lié par des
liens de parenté, par un traité d'alliance, et plus encore,
par une conformité de goûts dont l'histoire littéraire a
conservé des preuves nombreuses. Le frère et le succes-
seur de Guillaume, Guy de Dampierre, n'apparaît jamais
comme un intime ami du duc de Brabant.
Si Guillaume n'a pas laissé, comme Henri, des composi-
tions poétiques, l'un comme l'autre a protégé les enfants
de la Muse. Leur mémoire a été conservée par les poêles
qu'ils couvrirent de leur protection. Adenez, le plus fécond
et l'un des meilleurs versificateurs du treizièuje siècle,
l'auteur de Cléomadès, de Berthe aux fjrands pieds, des
Enfances d'Oger le Danois, n'a garde d'oublier l'excellent
prince qui servit de père à sa jeunesse et lui fit donner l'édu-
cation qui lui permit de développer ses talents. « Menes-
trés, » dit-il,
« Menestrés au bon duc Henri,
» Fui, cil m'aleva et norri
» Et me fist mon mestier apprendre (1 ). »
Ces éloges qu'Adenez donne au souverain du Brabant,
Gautier de Belle-Perche, dans son roman de Judas Ma-
chabée, et cette mystérieuse Marie de France (2), dont la
biographie reste encore obscure , les prodiguent au vaincu
(1) Dinaux, /. c.
(2) Elle portait aussi le nom de Marie de Gonipiègne , probablement
parce qu'elle était née dans cette ville. Voyez Jubinal , Jongleurs et Trou-
vères, pp. 2C-33, dans de Reiffenberg, Chronique rimée de Philippe
Mouskes , t. II , p. 742.
( 679 )
du tournoi de Trazegnies. De Belle-Perche place Guillaume
au premier rang des barons chrétiens :
« Monsieur Guillaume, dit-il,
» Qui de l'empire et du royaume
» Porte le pris de chevalier
» Et de prud'homme droiturier
» En Flandre doit avoir son ieslre; »
la seconde écrivit pour lui la Manière et facture des
monstres des hommes qui sont en Orient et plus en Inde,
et traduisit de l'anglais les Bons proverbes d'Isopet ou
Fables d'Ésope, qu'avant elle un roi d'Angleterre, du nom
de Henri, avait également traduites, non dans la langue
de ses barons, le roman ou français, mais dans l'idiome
de son peuple (1). Les plaintes d'Adenez sur la mort de
Henri m sont touchantes, mais combien plus profond est
le deuil de Marie. Toute son àme passe dans ses vers quand
elle raconte en son livre du Couronnement du Renard le
triste sort de Guillaume. Alors sa lyre change de note.
C'est l'heure de la satire et du sarcasme contre le vice
triomphant; le moment n'est plus où l'on chantait molle-
ment, dans cette douce langue d'oil que nos ancêtres ont
tant contribué à perfectionner :
ft Marie ai nom, si suis de France
» Pur amour li comte Guillaume
1 Le plus vaillant de cest royaume
» M'entremis de cest livre faire
» Et de l'angteis en roman treire.
Qui sait si le secret révélé par ces lignes n'en cachait
(1) De Reiflfenberg, /. c, p. cxcv.
( 680 )
pas un autre plus cher au cœur de Marie de France et si
les liens les plus tendres n'unissaient pas le fils infortuné
de Marguerite de Constantinople à l'humble femme qui
écrivait sous ces auspices?
Nous retrouvons autour de Henri III et des Dampierre
lout un monde de seigneurs et de courtisans amis des
lettres: le comte de Bar, qui avait épousé une Dampierre,
Érard de Saint-Valéry, Gilbert de Berneville. C'est avec ce
dernier, qu'il appelle Gélibert, que le duc engage ce jeu
mi-parti où il lui demande si l'on doit abandonner une
dame qui a donné l'exemple de l'infidélité. Gilbert prêche la
négative, mais Henri est pour le changement: a Hé, dit-il,
» Hé, Gélibert, où avez-vos trovée
« C'esle raison? Trop vos voi non sachant.
n L'on tient plus chier la chose désirée
» Que ce qu'on a abandonnéement.
)) Ne m'alez du de ce aprendaut
» Tant est amors servie et honorée
» Corn la dame se garde saumement. »
On voit que, dans les poésies de notre prince, un peu de
matérialisme, disons de réalisme pour nous placer dans le
courant du jour, se joint à une naïveté qui arrive aisé-
ment à être charmante.
Ce Gilbert, dont on a un grand nombre de chansons
remarquables, dit notre regretté confrère Van Hasselt,
dans son Mémoire sur la poésie française en Belgiqiie (1),
par la fraîcheur des pensées et la variété dans la coupe du
vers, ce Gilbert, dis-je, semble avoir été attaché à la mai-
Ci) Page 82.
I
(681 )
son de Guillaume de Dampierre. Lorsqu'il nous dit, à
propos d'une de ses œuvres:
(' Chanson, va-l'en à Courtrai droitement,
V Car là dois-lu premièrement aller....
» Ma dame di, de par son chantéor
w Se il li plaist, que te face chanter.
» Quand l'aura ouye
» Va, sans arrester,
» Erar saluer
» Qui Valeri crie (1), »
ne fait-il pas allusion aux obligations qu'il avait à la
dame de Courtrai, Béatrix, femme de Guillaume, et dont le
douaire était assigné sur cette ville et sa châtellenie?
Mais bientôt le signal des combats retentit de nouveau
dans les campagnes du Hainaut et de la Flandre. La san-
glante bataille de West-Cappelle, livrée le 4 juillet d2oo,
et la cession temporaire du Hainaut au comte d'Anjou
viennent ajouter à la haine que commencent à se porter les
peuples des deux provinces. Le malheur semble frapper à
plaisir ce faisceau de poètes qui s'étaient groupés autour de
Henri HI et de Guillaume de Dampierre. C'est peu de la
mort malheureuse de ce dernier. Le comte de Bar, dont on a
conservé l'énergique élégie sur son sort cruel , est blessé
à l'œil à West-Cappelle, fait prisonnier par les Hollandais,
n'obtient sa délivrance que moyennant une forte rançon
que lui procure surtout l'intervention de Henri HI, et se
retire en Lorraine où le retiennent d'autres querelles; Re-
naud de Saint-Valéry, également pris dans la même ba-
taille, de même que Guy et Jean de Dampierre, gémit
(1) De Reiffenberg, l. c, p. clxxxiv.
2"* SÉRIE, TOME XXXVIII.
( 682 )
aussi dans la captivité. Marie de France s'éteint dans l'ou-
bli. Enfin, quelques années après, le duc Henri meurt à la
fleur de l'âge, et Adenez reste seul , pour conserver la mé-
moire du plus aimable et du plus généreux des souverains
du Brabant. Sur la tombe de ce prince si peu connu et si
digne de l'être, la poésie aussi dépose une fleur; sa mo-
deste off'rande éternise celui dont la mémoire n'est pas
restée vivante chez le peuple pour lequel il montra tant
de sollicitude.
II.
Cet avant-propos n'est pas absolument un hors-d'œuvre.
Jl était nécessaire pour mettre en lumière l'intérêt réel
que présente l'histoire du règne de Henri llï. Essayons de
le parcourir en ne nous arrêtant qu'aux faits présentant
un intérêt véritable.
Quand le père du duc mourut, le pays entre le Rhin et la
Meuse était livré aux horreurs de la guerre civile. L'em-
pire d'Allemagne voyait les partisans du jeune comte
Guillaume de Hollande, qui venait d'être proclamé roi, à
Woeringen , par les instigations du pape Innocent IV et
grâce surtout à l'appui du duc de Brabant, combattre avec
ardeur les défenseurs de la cause chancelante de Fré-
déric II. Guillaume, appuyé par l'archevêque de Cologne,
par l'élu de Liège, Henri de Gueldre, parle frère de celui-
ci , Othon, comte de Gueldre , et par la plupart des princes
et des seigneurs des Pays-Bas, servi avec ardeur par des
populations que l'on avait soulevées au nom de l'Église,
remporta de nombreux succès sur ses ennemis. Ceux-ci
néanmoins ne faiblirent pas. Les villes rhénanes s'hono-
rèrent presque toutes par leur dévouement à Frédéric II
( 685 )
et Aix-la-Chapelle n'ouvrit ses portes qu'après un très-
long siège. Maigre la chute de la résidence impériale, plu-
sieurs princes et, entre autres, les comtes de Luxembourg
et de Bar, continuèrent à rester fidèles à Frédéric, de
même que les villes épiscopales de la Lorraine.
Guillaume avait voulu profiter de son élévation pour
accabler la comtesse de Flandre et de Hainaut, Margue-
rite, qu'il baissait d'autant plus qu'il était intimement lié
avec Jean d'Avesnes; mais, après avoir provoqué un juge-
ment de quelques princes de l'Empire qui dépouillait du
comté de Namur l'empereur de Constantinople Bau-
douin II, parce que ce prince avait, sans son assentiment,
engagé le comté au roi de France; après avoir donné le
Namurois à Jean et gratifié celui-ci, à l'occasion de son
mariage avec sa sœur Aleyde, du fief que les comtes de
Hollande relevaient des rois d'Ecosse (27 avril 1248),
Guillaume vit une attaque dirigée contre la Flandre par son
frère Florent et son beau-frère échouer de la manière la
plus complète et consentit à un arrangement qui mit fin
pour le moment aux hostilités (septembre 1248).
Tout en prêtant son concours au roi Guillaume, le duc
de Brabanl ne voulut pas rompre avec la Flandre et, ce
qui le prouve, c'est le traité d'alliance que, cette année
même, il conclut avec Guillaume de Dampierre (I). D'autre
part, le pacte par lequel lui, les comtes de Gucidrc et de
Looz et l'élu de Liège se promirent mutuellement amitié et
secours contre tous, le 17 novembre (2), témoigne que ces
il) Ce trailé a été publié clans le I. IV de la Table clironologiquc des
chartes et (liplômrs imprimés eoncevnanl l'Iiistoirede la Belgique , Iiiti'o-
duction, p. XXX.
(2) Butkeiis, Trophées 'le Brahaitl, 1. I, preuves, p. 91.
( 684 )
princes voulaient surtout assurer la paix de leurs domaines
et perpétuer la tranquillité qui y régnait sans qu'elle pût
être troublée par des querelles étrangères. De légers débats
s'élevèrent, en 1249, entre Henri et l'élu de Liège, mais
ils furent promptement assoupis par la médiation d'ar-
bitres (1).
A la faveurde la politique adoptée parHenri III, le Brabant
continua à jouir d'une paix profonde, et, en même temps,
grâce à sa position au centre des provinces belges, reçut
souvent la visite du nouveau roi des Romains et des princes
de l'Empire. Ainsi Guillaume vint à Bruxelles le 14 mai
1249, au mois de mai 12o0, en juillet 1254; il séjourna
à plusieurs reprises à Anvers, en 1252. Sa présence à '
Bruxelles, en 1250, fut marquée par un véritable congrès,
où l'on mit fin , au moins pour quelques années , aux causes
de guerre qui existaient entre la comtesse Marguerite et le
roi. Celui-ci reconnut qu'il tenait en fief de Marguerite
toutes ses possessions de la Zélande, depuis l'Escaut jusqu'à
la Hédinzée , et promit que le délai que la comtesse lui avait
accordé pour en opérer le relief ne porterait aucun préju-
dice aux droits de sa suzeraine. Le roi consentit encore à
admettre le fils de la comtesse, Guy de Dampierre, à dé-
faut de Guillaume, qui était alors prisonnier des Mame-
luks, en Egypte, à faire hommage pour les domaines que
Marguerite tenait de l'Empire, et promit d'engager ses
parents, l'élu tie Liège, le duc de Brabant, les comtes de
Gueldre et de Clèves, à se déclarer contre lui si lui ou les
siens n'exécutaient pas cet accord, et, en effet, le duc se
lia solennellement par une promesse de ce genre (17 et
19 mai).
(1) Ibidem, 1. c.
( 685 )
Tout un monde de prélats et de barons entouraient les
princes qui souscrivirent à ces conventions. On voyait, à
côté du légat du saint-siége, Pierre, évèque d'Albano,
les évéques Nicolas de Cambrai et Pierre de Chàlons, les
abbés de Saint-Trond et d'Egmond , et, à ce propos, re-
marquons que l'abbé de Saint-Trond Guillaume, qui était
aussi pléban de la populeuse ville d'Aix-la-Chapelle, jouis-
sait de toute la confiance du roi, dont il était le chapelain.
Autour de Guillaume, du duc, de Marguerite et de ses
fils on remarquait à la fois des nobles brabançons, tels
qu'Arnoul de Diest; des nobles hollandais, comme Gil-
bert d'Amstel , Henri Buffel , Hugues de Crelinghen , Henri
de Striene, Simon de Zubburg; les chevaliers flamands
Rase de Gavre, Arnoul de Cisoing, Arnoul de Mortagne,
Jean de Ghistelles, Guillaume de Maldeghem, Thierri de
Beveren, Gérard et Eustache de Rhodes, Henri de HoulFa-
lise , ce vieil ami des d'Avesnes, venu du Luxembourg , et
deux Baudouin, Hennuyers d'origine, Baudouin de Roisin
et Baudouin de Belœil (1).
Ratifiée sans délai par le légat et, bientôt après (le
a juillet), par le souverain pontife, la paix semblait
assurée. Le roi Guillaume, avec le duc de Brabant, le comte
de Gueldre et l'élu de Liège, allèrent même en Hainaut,
où ils se trouvèrent les 27 et 50 novembre de la même
année. Contrairement à ce que disent certains annalistes,
la réconciliation la plus complète parut s'être opérée entre
Marguerite et ses enfants des deux lits. Guillaume de
Dampierre, revenu de la croisade, participa de nouveau
au gouvernement de la Flandre; Jean d'Avesnes, reconnu
(1) Voyez le comte tieSainl-Genoh, Monumeiils essenllelleminl utili'S,
t. I, p. CCCCCLXXll.
( 686 )
pour héritier du Hainaul, concourut, sans contestation, à
l'administration de cette province.
Le tournoi de Trazegnies, du 6 juin 1251 , et sa funeste
issue n'eurent pas pour effet de modifier immédiatement
cette situation. En Flandre, Guy de Dampierre succéda à
son frère Guillaume et se fit recevoir comme comte ; il
signala son avènement par des mesures importantes et,
notamment, par la substitution du droit de meilleur catel
à l'odieuse mortemain , de plus en plus réprouvée (avril
1252), et par l'octroi de larges immunités aux marchands
étrangers (mai 1252). Jean d'Avesnes, de son côté, se
trouvait encore en Hainaut en juin 1252. Rien, dans les
transactions officielles, ne trahit l'irritation extrême que la
mort de son fils Guillaume avait provoquée chez la com-
tesse Marguerite. Rien ne vient révéler l'existence de cette
célèbre Société des ronds, dont Jacques de Giiyse parle
d'après un poème resté jusqu'à présent introuvable et dont
on a accepté le thème comme s'il reposait sur un fonde-
ment historique. Mais de vagues indices signalent l'ap-
proche d'une tempête : on essaye de prévenir une rupture.
Le pape confirme de nouveau le traité de paix conclu entre
Guillaume et Marguerite (12 juin 1251 ), et presque en
même temps le légat Hugues, cardinal de Sainte-Sabine,
rappelle (le 4 juin 1252) que le roi a promis d'admettre Guy
de Dampierre à lui faire hommage des fiefs impériaux.
D'autre part, le souverain pontife, après une longue en-
quête, avait proclamé la légitimité des d'Avesnes (17 avril
1251); défense est faite de les molester, de leur nuire
(avril 1252). Ces précautions ne sont pas superflues, car
le bruit public les accuse de la mort de leur frère; les
germes de haine, couvés depuis tant d'années, éclatent
enfin avec violence.
(687)
Les d'Avesnes poussèreiit-ils leur protecteur à un éclat;
Marguerile fut-elle, par ses colères et ses récriminations,
la cause de la rupture? Graves questions qu'il est incipos-
sible de résoudre, en l'absence de témoins impartiaux.
Il est certain que l'on ouvrit des négociations restées
infructueuses. Le séjour du roi Guillaume à Anvers, les 5,
14 et 42 juin 1252, n'eut probablement pas d'autre cause.
Mais bientôt ce monarque s'éloigne et son mécontente-
ment se trahit dans une assemblée qui se tint le Ll juillet,
devant les murs de Francfort. La comtesse !\larguerite est
accusée devant les grands de l'Empire de n'avoir pas prêté
serment de féauté au roi; un jugement solennel déclare
qu'elle a forfait ses fiefs : d'une part^ le comté de Namur,
d'autre part, la Flandre impériale. Guillaume en reprend
possession et en investit aussitôt Jean d'Avesnes. Le duc
de Brabant se trouvait auprès du roi. Quoique ami des
Dampierre, il ne pouvait ni s'opposer à la sentence, ni refu-
ser d'y adhérer, car les motifs sur lesquels elle se basait
étaient fondés. Le pape Innocent IV, qui ne s'était jamais
montré hostile à Marguerite et qui venait d'accueillir une
demande des Dampierre, réclamant l'ouverture d'une troi-
sième enquête sur la naissance des d'Avesnes (21 août),
ne put qu'approuver la sentence de Francfort et son appli-
cation aux tiefs de la comtesse Marguerite (2-5 décem-
bre 1252).
A cette époque se place une maladie dont notre duc fut
atteint, pendant qu'il se trouvait à Compiègne. Il eut besoin
des services de son notaire, nommé Guillaume, mais celui-
ci était sous le coup d'une sentence d'excommunication
qui avait été portée contre lui par ordre du pape. A la
prière du comte de Gueldre, des comtesses de Flandre et
d'Artois, l'archevêque de Reims ordonna à son olficial de
( 688
lever l'interdit qui pesait sur Guillaume (1). Ce fut vers ce
temps (au mois de février 1253) que Henri III se porta cau-
tion pour le comte de Gueldre d'une somme qu'il devait à
Aubert de Hangesl (2); ce fut alors aussi qu'il garantit à
sire Ami ou Ameil de Rameru, bourgeois de Compiègne, le
payement de 220 livres parisis qui lui étaient dues par le
comte de Soissons (3).
(1) H.,Deogratia Remensis archiepiscopus,dileclisfiliisofBcialibus nos-
tris Remensibus salutem in Domino. Mandamus vobis quatinus sententias
excommunicationis latas ad mandalum vestium, auctoritateapostolica, in
Willeimum clericum et notarium karissimi noslri viri nobilis duels Bra-
banlie et in onines participantes eidem et quoscumque alios occasione
ipsius, ad inslanciam Walteri,cantoris Masolini,relaxelis,usque ad inslans
fpstum beati Andrée apostoli, salvo tanien jure partis adverse, nos autem
ad preces comitis Geldrensis et Flandrie et Alrebalensis comitissarum,
maxime quia dictus domiuus dux egrotans apud Peronam ad presens ser-
vitio dicti Willelmi indiget, eidem W. super premissis gratiam facimus
specialem. Si vero dictus clericus infra tempus predictum litteras super
sua liberatione a vobis non reportaverit, ipsos Willeimum et sibi partici-
pantes in predictas excommunicationis sentencias retrudatis.
Datum anno Domini M CC.LII , die Veneris post festum beati Remigii.
Reddite litteras.
(Cartulaire de Brabant B, f° 107 \°.)
(2) Bulkens.
(5) Jean de Nesie, chevalier, donne quittance à Ami de Rameru, bour-
geois de (Compiègne, d'une somme de 220 livres tournois que le duc de
Brabant lui devait.
17 juillet 12o3.
Je Jehans de NesIe , chevaliers , sires de Faleui, fais à savoir a tous
ciaus ki ces lettres verront ke sire Amis de Rameru, bourgois de Com-
piengnc, m'a payé onze vins livres de Tournois en deniers conlens pour le
duc de Brebant , ki les me devoil pour le conte de Soissons, dont je me
lieng a payié et s'en cleim quite et le duc et le conte devant dit. Et en
tiesmoignage de ceste chose j'ai mis mon seel à ces présentes lettres et les
ai baillées au devant dit bourgois.
Che fut fait en l'an del Incarnation mil deus cens et chincquante et
trois le semcdi devant la Magdelaine.
{Cartulaire des ducs de Brabant cité, f. 49.)
( 689 )
Cette année 12o3 marque dans l'existence de notre
prince. C'est l'année où il fui fait chevalier (1); c'est aussi
l'époque de son mariage avec Aleyde, fille du duc Hugues
de Bourgogne (2). Pour l'engager à seconder avec énergie le
roi Guillaume, le pape lui permit, à lui et a quelques-uns
de ses principaux vassaux (5) , de prélever à son profit les
dîmes novales, c'est-à-dire les dîmes provenant de terres
nouvellement mises en culture (11 mars), concession qui
excita de vives réclamations parmi les membres du clergé.
Henri HI ne prit toutefois aucune part à la lutte qui en-
sanglanta alors la Zélande. Les Flamands, ayant débarqué
dans l'île de Walcheren sous le commandement des Dam-
pierre, furent complètement défaits à West-Kappel par les
troupes de Florent de Hollande, frère du roi Guillaume, et
du seigneur de Voorne (4 juillet). Ici, comme en d'autres
occasions, Henri ÎIl ne se mêla de la querelle que pour en
adoucir les désastreuses conséquences. Ce fut lui qui se
porta caution de la rançon du comte de Bar, l'un des
prisonniers de West-Cappelle, rançon qui fut fixée à
8,000 marcs et dont le remboursement lui fut garanti par
d'autres princes belges, le2o mars 1254.
Marguerite ne fléchit pas sous le coup terrible qui était
venu la frapper. Elle pouvait compter sur le dévouement
des communes flamandes, et en particulier des Gantois,
qu'elle autorisa à accroître l'étendue de leur ville, principal
boulevard de la Flandre vers le nord et vers l'est (29 juin
12o4). Pour s'assurer un puissant défenseur, elle aban-
(1) Chronicon Parcense, dans Pertz, Monumenta Germaniae histo-
rica, Scriptores, l. XVI, pp. 398 et suivantes.
(2) Ibidem.
(3) Entres autres le parent du duc, Godefroid, seigneur de Perwez.
( 690 )
donna la possession du Hainaut à Charles d'Anjou, frère
du roi Saint-Louis, qui, mis en liberté par les Sarrasins,
n'était pas encore revenu de la croisade, et n'aurait pas
toléré, sans doute, une pareille atteinte à ses décisions
antérieures et aux droits de l'Empire d'Allemagne. Elle
pouvait compter sur l'appui de Marie de Brienne , impéra-
trice de Constantinople, qui gouvernait le comté de Namur
au nom de son mari, l'empereur Baudouin II, et se main-
tenait imperturbablement dans Namur; elle comptait dans
la bourgeoisie de Liège des partisans qui manifestèrent
leurs sympathies pour elle lorsque l'élu Henri appela ses
sujets aux armes pour la défense de l'Église de Liège contre
la princesse qui détenait le comté de Hainaut, fief de l'évê-
ché, et dont le chef, Henri de Dinant, chercha dans la suite
un reluge à sa cour. Elle ouvrit des négociations avec le
puissant et belliqueux Conrad, archevêque de Cologne,
qui, après avoir soutenu le roi Guillaume, venait de rompre
avec lui, et ces négociations aboutirent à la conclusion
d'une ligue offensive et défensive entre elle, le comte d'Anjou
et Conrad (août 1254). L'interdit avaitété jeté sur la Flan-
dre, à cause de sa désobéissance aux ordres du légat;
Marguerite en appela au saint-siége et réussit à le faire
lever (14 mars 1254). Ainsi secondée et encouragée, Mar-
guerite pouvait opposer une sérieuse résistance au roi
Guillaume, dont l'autorité n'était reconnue que dans une
faible partie de l'Allemagne.
Ses ennemis opposaient à ses efforts des efforts non
moins énergiques. Jean d'Avesnes avait inféodé le comté
de Namur à Henri , comte de Luxembourg; le roi Guil-
laume donna son approbation à celte mesure, à laquelle,
lui en qualité de souverain de l'Empire, et l'élu de Liège ,
comme suzerain du Hainaut, duquel relevait le comté de
( 691 )
iXamur, donnèrent une éclatante sanction, dans une as-
semblée qui se tint à Malines, le 12 février 12o4. Pour
vaincre l'opposition des bonrgeois de Liège, laquelle gran-
dissait de jour en jour, le roi condamna leurs usurpations
sur la juridiction attribuée par d'anciens diplômes impé-
riaux au clergé de cette ville, et les déclara astreints à
prendre les armes pour la défense des possessions de
l'église de Saint-Lambert contre Charles d'Anjou (8 janvier
1234). Eniin, au moyen de nouvelles faveurs, Guillaume
s'assura, dans la lutte qui se préparait, l'assistance du
comte de Gueldre (I" juin 1254). Avant de tourner ses
armes contre son redoutable adversaire , Guillaume se bâta
d'envahir la West-Frise, dont les habitants avaient pris les
armes contre lui, y livra une combat où ses ennemis perdi-
rent environ 1,500 hommes, et ravagea leur pays, puis il
entreprit cette expédition du Hainaut dont on ne trouve
un récit détaillé que dans Jacques de Guyse, où les faits
sont entremêlés de maintes erreurs, qui seront étudiées
dans un travail ultérieur.
Orerblijfsels van den instrumenlaal in het ISederlaiidsch ;
door M. J.-F.-J. Heremans , briefwisselend lid der Aca-
démie.
Men weet, dat het Oudindisch acht naamvallen bezit :
nominatief, vocatief, accusatief, genitief, dalief, ablatief,
locatiefen instrvmenlanl. Het Latijn heeft er zes, en het
Grieksch, evenals het Nieuwhoogduilsch en Nieuwneder-
landsch, slechls i)îy/'behouden. Er was nochtans een tijd,
dat de verschillendeEuropeesche talen, zoowel als het Oud-
indisch, acht naamvallen telden ; doch reeds zeer vroeg
( 692 )
zljn in het Nederlandsch de vormen van den ablatief en den
locatief verloren gegaan. Wat bij onze voorouderen bij
middel van den ablatief en den locatief vverd uitgedrukl,
geschiedde later bij middel van eenen anderen naamval »
die langer bewaard was gebleven, of bij middel van een
voorzetsel gevolgd van een zelfstandig naamwoord of een
voornaamwoord. De instrumentaal is het laatst uit onze
taal verdwenen.
In het Oudindisch heeft men eenen bijzonderen vorm
voor den instrumentaal, zoowei in het enkel- als in het
meervoud : in het tweevoud is hij echter van den datief
en den ablatief reeds niet meer te onderscheiden. Bij en-
kele woorden gaat hij in het Grieksch van Homerus op
-fi{v) uit; doch meest altijd wordt hij in die taal door
den datief en eene enkele maal door den genitief vervan-
gen. In het Latijn treedt de ablatief, en voor de woorden,
die geenen bijzonderen vorm voor den ablatief bezitten, de
datief in de plaats van den instrumentaal. Het Gothisch
heeft slechfs voor eenige voornaamwoorden eenen bijzon-
deren vorm voor den instrumental bewaard. In het Oud-
hoogduitsch, Angelsaksisch en Oudsaksisch komt hij veel
meer voor, terwiji hij in het Nederlandsch eenige sporen
heeft achtergeiaten.
Het grondbegrip van den instrumentaal is samen zijn,
gemeenschap (1).
In het Oudindisch is de instrumentaal tweeëriei. Men
onderscheidt in die taal den sociatieven inslrumentaal en
den instrumentaal des tiiiddels.
De socialieve inslrumentaal duidt aan :
(1) Vgl. Dr. B DELBRiicK. Ablatif, localis, instrumenlalis. Berlin, 1867.
( 693 )
1° Verscheidene personen of zelfstandig gedacbte we-
zeDs,die met eenen hoofdpersoon verbonden zijn; aïs :
Agnir devébfiir a gamat, Agni kome met de goden aan
(Rigveda,5,10,4).
2° De orastandigheden, die met eene werking gepaaid
gaan, of de eigenschappen, die tôt een ding behooren;
aïs : Indram a viça brihala râvena, ga met groot ge-
schrei naar Indra (Rigveda, 9,97, o6),ût sunjo jyôtisfid
devâ eti, de goddelijke zon stijgt op met licht (Rigveda ,
4,13,1).
3" Die deelen van de ruimte of den tijd, waarover zich
eene werking onafgebroken uitstrekt ; aïs : préhi, préhi
pathibhih pûrvyébhih, ga heen , ga heen, langs de oude
paden (Rigveda, 10, \A,l);pûrvî'bhir hi dadàçimà ça-
râdbhir maruto vayàm, de vroegere jaren door hebben
wij, 0 Maruts, u gediend (Rigveda, 1 , 86, 6).
4° Vereeniging; aïs : Vischnuna sacânàh, te zamen met
Vischnu (Rigveda , 6 , 20 , 2} , en
5" Vergelijking ; aïs : tena tuluah, hem gelijk (Manus
welboek, 4, 86).
De instrumentaal des middels duidt, gelijk zijn naam
het te kennen geeft, het middel , het werktuig aan, waar-
mede eene werking wordt verrichl; als : catâm càkshdno
akshàbhih, met honderd oogen ziende (Rigveda, 1, 128, 3).
Sociatieve inslrumentaal.
Wat hebben wij van den sociatieven instrumentaal in
het Nederlandsch overgehouden?
Wij zagen, dat de instrumentaal wordt gebruikt om
eene vergelijking aan te duiden. ïn de zoogenoemde
« Freekenhorster Heberolle » (Moritz Heine, kleinere
( 69i )
Altniederdeutsche Denkmâler, blz. 66) lezen wij : Wîk-
mund an ihemo selmn thorpa ende Dagerâd eiide Azeku
(dligiliko imo. Àlli in alligiliko zal wel een instrumen-
taal wezen.
Bij onze Middelnederlandsche schrijvere treffen wij
mede het woord gelijk enkele nialen mel den inslrumen-
taal aan :
Dus quam die vard in Vranivrike ,
In Ingheianl , in Vlaendien die gelike.
V*,N Velthem , Spiegh. hist , 135.
Van den lande van Vrancrike
Ende van andren lande die gelike.
Id., ibid, loi.
Hère, soe seggict u dan,
le ben ridder ende vri man,
Ende dese andren die gelike.
Claes Verbbechten, Belg. Mus., VI! , 1M8.
Ende sprac loi hem dese gelike.
Der Yslorien Bloeme, 21.
Ende des ooc noyl en hadde machl,
Coninge van Vrancrijcke ,
Noch ooc Scollen die gelike.
i. V. BoENDALE, Belg. Mus., IV, 308.
Later ging de insti umenlaal die in die gelike in den ge-
nilief des over en sclireef men desgelijks.
Ook in de voornaamvvoorden n^elk en zulk (Middelnedei-
landsch welc en sek) is dergelijk een instrurnentaal voor-
handen. Welk an zulk luiden in het Gothisch hveleiks ,
/tvileiks, en svaleiks, in het Oudfriesch Itvelik en selik, in
liet Oudsaksisch hivilik, sidîk, in het Oudnederlandsch
huilik , huelik, uuelik, iiuilik, en suiik; in ai deze vvoorden
is de instrurnentaal gevolgd van leiks, lik, nog zeer wel
le erkennen.
( 695 )
Jnstrumentaal des middels.
Wij vinden den instrumentaal des middels nog menig-
vuldig in het enkelvoud zonder voorzetsei gebruikt in het
Oudhoogdiiitsch, bel Oudnoordsch, het Angelsaksisch en
het Oudsaksisch. Wanneer men later de kracht van den
instrumentaal had vergeten, zette men het voorzetsei mith,
mid, mit, met, vôdr het substantief of het voornaamwoord,
die echter nog eenen tijd lang den eigenaardigen uitgang
van dezen naamval behielden, totdat eindeiijkdeze uitgang
door dien van den datiefgeheel werd vervangen. HetNeder-
landsch heeft den instrumentaal des middels slechts behou-
den in de oude bijwoorden wi, wie, wied[e)wijs en de
bijwoorden hoe en zoo (Middelnederlandsch so, soe), en de
als bijwoorden gebruikte ie en de, di, die.
Wi, wiE, met de beteekenis van op welke wijze is de
instrumentaal van het vragend voornaamwoord ivie, Go-
thisch hvas, Angelsaksisch hva, Oudfriesch hva, Oud-
saksisch hwe eu Oudnederlandsch hue of unie, dat ook wel
eens in eenen relatieven zin werd gebezigd :
Ooc segghen die propheten,
Dat Golder werell heefl verheten,
Menich jaer hier te voren,
Dat eeu man soude sijn gheboren,
Met miraclen ende ic weel wi.
i. V. Mabrlànt, Alexander , il , ^08.
Wi seggict hem , ic segge mi commer.
Ferguut, 46.
Die eersle, segghic di wel icie
Men die ziele versiaet dare.
J. V. BoENDALE , Die X plaghen ;uitgeg. door
Snellaerl), 385.
( 696 )
Wi qualec dat hi heeft geleeft
Broeder Ghehiert, S"Christina, XXI , verso.
Wie langhe seldi rai van minen Hère
Ende van sinen aiiscine verren?
Wi langhe seldi mi hier doen merren ?
Id., ibid., XLII , verso , en XLIII , recto.
Wie supliji dat haer heileghe lichame was.
Id., t6«d., XniJ, reclo.
Hierna voighet ivie dal si doet was.
Id., ibid., V, verso.
Nevens dit wi, wie, staat dikwijis, in tautologisch ver-
band, het gelijkbeteekenende hoe (Gothisch hve, Ange!-
saksisch hu), evenals wi, wie, instrumentaal van hue of
unie :
Maer hine wiste toie oft hoe
Hire wel mochte comen toe.
Lancelol ,1, 123.
Dan saldi pensen ^vie ende hoe
Gi gaen niochl inder slralen,
Daer gi die scone in hebt gelaten.
H. V. Akbn, Die /iose (uilgeg. d.E. Verwijs), 5S.
De inslrumenlaal ivi, wie, komt mede voor in de sa-
luenslelling iviedewijs, wiedwijs, die men zoo vaak in de
S'^ Christina van Broeder Gheraert aantreft : Wat si ghe-
doegfit hadde ende wiedwijs datd ware (Vf. verso); wied-
wijs, dat si ind waler giiic ende ter ander ziden overquam
(X. recto); wiedwijs dat si ivas gepijnd in den viere (XI.
recto) ; wiedwijs dat si langhe lach ind water (XII. recto);
wiedewijs dat haer scène was gebroken (XV. recto) ; wied-
wijs dat olie vloijde van haren borsten (XVll reclo), enz.
Wi, wie, wied[e)wijs zijn sedert eeuwen uit onze taal
verdwenen .
(697)
Het bijwoord zoo, Oudnedeiiandsch sô, Middelneder-
landsch so, soe, stemt overoen met den Golhischen instru-
mentaal sve, sva, welke beiden, evenals bij ons zoo, nog
alleen als bijwoorden werden gebruikt. Die instrumen-
taal is, gelijk wij reeds hooger zegden, in het Gothische
svaleiks, Oudnederlandsche suHk, Middelnederlandsch selc
versmolten. Wij vinden hem ook nog in het Gothische
svalauds (zoo groot, zoo veel).
Je, je, ye, instrumentaal van het pronomen demonstra-
(ivum i (Golhisch is), dat in het iMiddehiederlandsch nog
slechts als encliticum achter de werkwoorden voorkomt
{fjeefli, geeftEM, (jeeftEi^), wordt als het Latijnsche eo vddr
eenen comparatief gebruikt :
Ende daeit je lanc so mère.
J. V. Maerlant , Wap. MartiJ7i (uilgeg. door
E. Verwijs) , 4.
So maken die heren een gespan
Om dogel, ie lanc so mère.
Id., Verkeerde fVapen Martijn , 90.
Ende claghdeu ie lanc zo mère.
J. V. BoENDALE, Dev Leheïi Spiegh., I, 131.
Die men daer hoort, ye lanc zo mee.
Id., ibid., I, SI.
So daelde Romen ye lanc zo mère.
Id., ibid., 1 , 134.
In ie lanc so mère is lanc geen stellende, maar een ver-
gelijkende trap, waarvan de kenmerkende comparatief-
uitgang, evenals bij min en de onde comparatieven ivers
(erger), bat en 6e^(beter), is weggevallen.De comparatieve
beteekenis ging echter niet verioren.
In het Middebîederlandsch bestaat nog een ander ie,
dat niets gemeens heeft met den vdor den comparatief ge-
2""^ SÉRIE, TOME XXXVIII. 45
( 698 )
bruiklen instrumentaal van den demonstratiefstam i. Het
bijwoord van tijd ie, in helGothisch a^y(van hetzelfstandig
naamvvoord aivs) beteekent oo«7, immer.
Ook de instrumentaal de, di, die (van den slam thia),
bâter tôt te verbasterd, staat vôôr eenen comparatief.
In àan Hêliand {i) , waar die instrumentaaU/tm luidt,
lezen wij :
TrùôduH sie sidhor thiu mêr an is mund-burd (biz. 49).
Tfiat sie gitrûôdin thiu bel gilàbdin an is lêrâ (blz. 56).
Gilàbho thiu betara an thena hélagon Krist (blz. 56).
Zoo ook in het Middelnederiandsch :
Ende singhet de naernsleliker bel.
J. V. Maerlant, JVaiMCen B/oe»ie (uilgeg. door
Bormans) , 407.
Die de levere van der gheet
Elet, siet des avonls vêle de bel.
Id., ihid., 85.
Hem soude de bel sijn taire stonde,
Aise die quade gheesl hem bezate.
Id., fiîjwiftijôe/, I, 406.
Scuwe altoos die sondaren
Du sait ailoos de bel varen.
Id., ibid., II, 119.
Ende de meer le drinkene mint.
Id., Dispulacie van onser Vroutven ende van
den Cruce, 211.
Dikwijis vvordt die met meer tôt één woord samenge-
trokken :
Diemeer hire negheen en sach.
Parlhonopeus van Bloys (uitgeg. door Bor-
mans), 27.
(1) W^/ia?td herausgegeben von Morilz Heine. Paderborn, 1866.
( 699 )
Diemeer was hi grau ende ont.
Ibid., 52.
Dimer \\\\A\ nerenstelike,
le sal u wel behendelike
Dien raet doen, dal soe u gorde.
Ihid., 132.
Diemeer verghevict u nlet das,
Dal gijs noch suit trecken achler.
Ibid., 251.
In de varianlen van den Parthonopeiis ontmoeten wij
twee maal het woord dember :
Dember was si vêle onvroet das,
Wat hi meende ende wie hi was.
195
En
Die vrouwe heeft sijn weddegenomen,
Dember en heeft si niet vernonien,
Door welke sake hij hare gaf.
196.
Dit dember heeft denzelfden zin als diemeer. Het is sa-
mengesleld uit den instrumentaal de, di of die, met em-
ber, hetwelk voortkomt van ie-meer, emmer, ember (het
latere immer), met verandering van m in b achler eene m,
geiijk dit meermaais geschiedt. le in iemer is hier niet te
verwarren met den instrumentaal , welken wij in ie laii/j
so meer hebben onlmoet : ie in iemeer koml overeini met
het Golhisch aiv, het Oudhoogduitsche èo, het Oudneder-
landsche io , in den zin van allijd, steeds.
Toen men in de bel, de meer, ie lanrj en dergeiijke uit-
drukkingen de kracht van den instrumentaal niet meer
gevoelde, maakte men van de le en van ie hoe , en later
voegde men nog ter versierking van te erden genilief r/^.v
voor : niet te min, des niet te min; te bêler, des te belcr;
te meer, des te meer.
( 700 )
Voorzetsels met den instrumentaal.
De voorzetsels, die den instrumentaal beheerschlen ,
heteekenden oorspronkelijk samen zijn.
(n hel Oudindisclî wilden de voorzetsels sa-, sahâ, sâkâm,
sniàt, sàcà, welke den zin van met hebben, den instrumen-
taal.
Het voorzetsel mid, mit, met (dat methet Oudindische
smât verwant is) regeert zeer vaak in het Oudhoogduitsch
en Angelsaksiscli den instrumentaal. In den Hèliand vin-
den wij :
Al bifieng mid ônu wordu (blz. 4).
Enig word sprekan, giinahiian mid is mûdhu (blz. 7).
Tfiat siu simbla thana bed-skepi buggean skolda, fri mid
ira ferhu (blz. 10).
Unard tliiu wirdhid therô giimonô liugi aivekid mid
wînu (blz. 49.)
Biwand ina mid wâdiu (blz. H).
It al mid ànviWm obharsèu (blz. 61),
Wid/iardsiandau mid strîdu (blz. 55).
In het Middelnederlandsch zijn nog enkele voorbeelden
overgebleven van den instrumentaal voorafgegaen van het
voorzetsel tnet :
Ende nam dat rike al 7net aJlc.
J. V. MiERLANT, Rijmbijbel, I, 102.
Een uinl quam van westen 7net aile.
Id., ihid., 1, 178.
Ondoe den visch , ende al met allé
Hoiit herte , levi'e ende galle. .
\n.,ibid., H, 123.
Nein van deu vissclie die galle
Ende beslreker mede aile met aile.
\D.,ihid.,\\, 132.
( 701 )
Es hi oec siec van der galle
So bespaers sijn aes met aile
Met pulvere van wiilghe blonien.
Id., Naturen Bloeme (uilgeg. door Borman*).
319.
le dancte u oec, minne, haddijs verdient
Met aile aise een uwer armer vrieut.
Zuster Hadewuch , I. 143.
Noch en wach in ongbevalle
Deseonwille al met aile,
Grave Willem niel s^vaer genoecli.
Melis Stoke , II , 21.
Ende slac her Lambrecht met gewout
Die van den geslechtevvale
Geboren was van Wesemale
Dat hi dool met aile
Voor sijn voele quam gevallen.
Grimb. Oorlocj, I, 163.
Hetschijnt mij, dat in vers 41 van Jacob van Maerlants
Van den Lande van Overzee :
In weeklen zilslu hier versmoert,
Zo dat met di is onghehoert
Gods lachter ende zine scande.
di alseen instrumentaal voorafgegaan van met moel wor-
den beschouwd. Met di zal hier vvel de beteekenis hebben
van daarmede, daaroin, om die reden.
In niet met aile, toi niemendal{le) verbasterd, koml
insgelijks de instrumentaal aile met het voorzetsel met.
voor.
Ook het oude voorzetsel bet, dal lot met staat als het
Grieksche izé^a. tôt per^, wilde den instrumentaal. In bed-
eene[n) voor met eene{n) wordt dit voorzetsel nog in som-
niige gewesten van Nederland gehoord. In de Oudneder-
( 702 )
landsche Psalmen van den tijd van Karel den Grootekomt
het niede voor : daar Iiiidt hel Oit; doch de twee vrouwe-
lijke zelfslandige naamwoorden hebben in de taal van die
Psalmen geenen bijzonderen vonn voor den inslrumentaal,
die met den datief is samengesmolten : Mendiât him mit
bevungon, exullate ei cum tiemore (Ps. 2, \\)\ bit stim-
mon mînere te Gode riep ik, voce mea ad Deuni clamavi
(Ps. 3, 4).
Het Middelnederlandsclî hceft den instrumentaal met
het voorzetsel bet behonden; doch siechts met het voor-
naamwoord aile :
Maer des en doewi niel al bed aile.
Parthonofjeus vati liloys , 260.
Die bisschop en was niet gewone,
Van liem le welene al bed aile.
Der Yslorien Bloeme,:ifi.
Waiil hi ons allen heeft gemaecl
Ende weder verlosl van den vaile,
Dieu \vi vielen aile bed aile.
Ibid., 97.
Ende en wiste albedalle niel wat dit bediede (Bijbel van
1477, 1, Sam. XX, 59). — Mer Anna sprac in haer herte
ende aliène ruerden haer lippen ende men hoerde haer
stemme albedalle niel {Ibid., I, 1o).
Ende si en belen albedalle niot in Israhel, daller lijf-
tochle toebehoorde {Ibid., Richl.,YI, 4).
Soe en verloren wi niel aile bedalle {Ibid., Sam. XXV,
15).
Ende niemant al bedalle en slac jegen hem (Richt.
XV1II,7).
Nog andere voorzelsels wordcn met den instrumentaal
aangelroffen.
( 703 )
In het Gothisch vindt men dien naamvaî met bi en du ,
doch alleenlijk in de als bijwoorden gebruikte bihve, bithe,
diihve, dut fie.
In het Oudsaksisch hoeft men, behalve mid, de volgende
voorzetsels raetden instruraentaal : aftar, an, bi[be), fora,
te, undar, ividh en widhar. Evenals de Gothische bi en du
liomen deze voorzetsels éditer slechts met thiu en hwi
voor.
Aftar.
That wardh thuo al mid wordon godes fasto bifangan
endi gifriimid aftar thiu (Hèliand,4).
Hie gisah thâr aftar thiu ênna engil godes [Ibid., o).
Thô Avardh sàn aftar thiu mahl godes gikûdhid {Ibid.,1).
Bêd aftar thiu that wîf wurdhi-giskapu (/6/f/., 7).
An.
Lâte im ginôgî an thiu [Ibid., 37).
Ati thiu mag he thiod-godes willeon giwirkean {Ibid.,
76).
An thiu Ihe ik hebhan-rîki gehalôn môli {Ibid., 77).
Bi, be.
Be thiu skiilun mîdhan filu erlôs èdh-wordô {Ibid., 57).
Bi thiu sksil ik iu nu te wârun wordun gibeodan {Ibid.,
37).
Be thiu ni gornôt gi umbi inwa gegarnwi {Ibid., 40).
Be hwi ni hètis thu than werdhan, ef thu giwald habes,
allarô barnô belst, brôdaflhesun stênun? {Ibid., '2,6.)
Be hwi lèdis thu mi thèse liudî tô? {Ibid., 114.)
Fora.
Fora thiu gi wardôn skulun {Ibid., 103).
Te.
Thô ni was lang te thiu {Ibid., 10).
Sô is môd te thiu giflihid widhar is fîunde {Ibid., 35).
( 704 )
Nis nu lang te thiu, ihat sia slrômôs skulun stiirun
werdhan {Ibid.^ 54).
Te hivi gi thus an ganga kumad, gifaran an fâdhie?
(/6ï(/.,15).
Te whî habhas thu Ihes êniga meda fon gode, efdha lôn
an themu is liohte {Ibid., 37).
Te ivhi wêt Ihi thés vvaldand thank, thés thu thîn sô
bifilhis endi antfàhis eft Ihan thu wili? {Ibid., 37).
Undar.
Undar thiu wirdhid therô gumonô hugi awekid mid
wînu [Ibid., 49).
That folk slillo bêd, sat gisîdhi mikil, undar thiu he...
thena meta wîhida {Ibid., 68).
WlDH.
Ni làtan usa fera widh thiu wihtes wirdhig [Ibid., 95).
Thaï he gàbi is drohlin widh thiu [Ibid., 106).
WlDHAR.
Wesat iu sô vvara widhar thiu, widh irô féknon thar
[Ibid., 45).
He ist garu simbla widhar thiu le gebhavene. [Ibid.,
45).
Sô skal allorô erlô gihwes werk gelhîhan widhar thiu
Ihe hi Ihius mîn word frumid , haldid héiag gebod
[Ibid., 44).
In het Oudnederlandsch heeft bi den inslrumenlaal ;
Bethiu ne up standanl ungenelhege in urdeile (Ps. I,
V. 5).
Bethiu halta sia overmuodi (Ps. 72, v. 6).
Bethiu bekeret werlhe foie min hiera (Ps. 72, 10).
Be tvie wânit gi bergà giquahlit? (Ps. 67, 17).
Be wie, gol beuuirpistu an ende (Ps. 73, 1).
( 70o )
Van Ihiu that ik èrist sundia werkian bigonstn vindcii
wij in eene biecht der negende eeuw, voortkomende uit
het vrouwenkloosler te Essen, en le thiu in de verlaling
van eene homélie van Beda (1).
Behalve de hooger reeds opgegeven voorzetsels met en
bel ontmoelen wij in hel Middelnederlandsch bi of be en
te insgelijks met den instrumentaal; doch wat bi oï be be-
treft, met de, di ofdie, en voor te met m, wie, als bijwoor-
delijke samenstellingen.
BeDI, BIDI, BEDE, BEDIE , BEDY.
Bedi mesdoel bi ende lieghet.
J. V. Mabrliht, lUjmbijbel, I, 14.
Bedi bleefl van der lovien droghe.
1d., ibid., I, 23.
Maken wi hem oec bedi
Helpe die hem ghelijk si.
Id., ibid., 1 , 25.
Nichodemus sprac nu hoort :
Is die rechter sijii jonghere , bidi
Dal hine gherne hilde vri.
J.v. BoENDiLE, Leken Spiegh, II, 184.
En bede dal dusdaen wonder
Sonder redene niet es besonder
MelisStoke, 1,401.
Bedie hij eens deels is onsint.
J. V. BoENDALB, Leken Spiegh , 1, 83.
Dal was bedie dal si vrucble.
Id., ibid., 35.
Dat es bedie dal soe dies gheert.
Id., ibid., 53.
(1) Kleinere AUniederdeutsche Denkmaler, herausgegeben von Moritz
Heine. Paderborn, 1867.
( 706 )
Bedif so sijn sij aile gheest.
Id., ibid., I, SI.
Bedij haer werke die sijn ries.
lD.,t6îd., I, 213.
Later regeerde bi, be den datief, welke ook in de andere
govallen de plaats van den instrumentaal innam , en begon
men bedien te spellen. De afschrijvers onzer oude gedich-
ten corrigeerden , volgens zij Avaanden , getrouw de oor-
spronkelijke tekslen en veranderden bedi , bedie in bedien.
Te wi, twi.
Evenals du in het Gothisch met den instrumentaal hve
voorkomt, zoo vinden wij in onze taal te met ivi verbon-
den. Gewoonlijk smeit het voorzetsel met tvi tôt twi samen :
Ay mi , wel sondich man , te wi,
Ay mi, twi wordic je geboren?
Theophilus (1858), 2G.
Twi tormenl hine met slagiien.
J. v.MiEBLiNT, Wapen Marlijn , 10.
En ghi, cursout, twi ne sprecli niet?
Parlhonopeus van Bloys, 251.
En zoo op duizend andere plaatsen, bij al onze Middel-
nederlandsche schrijvers.
Het voorzetsel tote, tôt , schijnt ons samengetrokken uit
lo the,\n het Gothisch duthe. Oorspronkelijk eene bijwoor-
delijke sanienstelling , moet bel later als voorzetsel zijn
gebruikt, en eindelijk de e hebben verloren , en tôt zijn
gespeld.
De instrumentaal in de plaats van den locatief.
Zoomin in het Gothisch, het Oudhoogduitsch, het An-
gclsaksisch, het Oudnoordsch, als in het Oudsaksisch vindt
men eenen bijzonderen vorm voor den locatief. Reeds zeer
( 707 )
vroeg inoet die iiaamval in deii instrumenlaal zijn opge-
gaan, die op zijne beurl met den datief versmolt.
In het Oudindisch onderscheidt men den locatief van
plaals,den locatief van tijd, den absoluten locatief en den
locatief des doels. In het bijwoord hede{n)heh\ien vvij eenen
instrumenlaal, die de plaats bekieedt van eenen locatief
van tijd. Hiu dagu, letterlijk het Latijnsche hodie, op dezen
dag, Averd tôt hiu du, later hude[n), liede{n), samengetrok-
ken. Het Oudfriesch heeft hiudega nevens hiude. De n op
het einde van heden is eene adverbiale «, die in het Mid-
delnederlandsch hede{n) en het bijwoord hedemeer niet
altijd werd geschreven :
So wildic wesen sonder waen
An den cruce met di verdaen,
Ende oec met di hedemeer
Moeste deilen al mijn seer.
Van den leveiie 0ns Heren , HZ.
Men speell hier hedemeer om sinen wille.
Drie daghe hère, Horie Belg., VI , 105.
Waarschijnlijk is het, dat de voorzetsels an, aftar, bi,
fora, te, undar, widh, widhar, die in den Hêliand met de
instrumentalen thiu, hivî worden gevonden, in onde tijden
den locatief wilden. Wij hebben vroeger gezien , dat bi en
te, in het Oud- en Middelnederlandsch met den instru-
mentaal worden aangelroffen : de overige zes voorzetsels,
die waarschijnlijk oorspronkelijkden locatief beheerschten,
komen steeds in onze taal met den datief voor.
( 708 )
CLA.SSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du 5 décembre 1874.
M. N. De Keyser, directeur, président de l'Académie.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. Alvin , L. Gallait, Jos. Geefs,
C.-A. Fraikin, Éd. Fétis, Édm. De Busscher, Alph. Balat,
Auguste Payen, le chevalier Léon de Burbure, J. Franck,
G. De Man, Ad. Siret, Julien Leclercq, Ern. Slingeneyer ,
Alexandre Robert, F.-A. Gevaert, Ad. Samuel , membres;
Éd. de Biefve, correspondant.
M. l\.Cha\on, directeur de la classe des lettres, M. Mon-
iigny, membre, et M. Éd. Ma'iWy, correspondant de la classe
des sciences, assistent à la séance.
CORRESPONDANCE.
La classe reçoit communication de la lettre de faire part
annonçant la mort de l'un des membres titulaires de la
section des sciences et des lettres dans leurs rapports avec
les beaux-arts, M. André Van Hasselt, décédé le l" dé-
cembre.
( 709 )
M. le directeur rend compte des dispositions qui ont été
prises pour représenter l'Académie aux funérailles du
défunt, lesquelles ont eu lieu le jour même de la séance
actuelle.
Il annonce, en même temps, qu'il s'est fait l'organe et
l'interprète des sentiments de la classe en prononçant, en
son nom, les derniers adieux au confrère émineut qu'elle
vient de perdre.
Tous les membres de la classe des beaux-arts et un
grand nombre de membres des deux autres classes ont pris
part aux obsèques.
La classe, après avoir exprimé à M. De Keyser ses remer-
cîments pour le tribut de regrets qu'il a payé en son nom
à la mémoire de M. Van Hasselt, décide qu'une lettre de
condoléance sera adressée à M""' Van Hasselt, pour lui
exprimer combien le vide irréparable qui vient de se faire
dans les rangs académiques a été douloureusement res-
senti.
— La classe apprend avec regret que l'état de santé de
l'un de ses membres les plus éminents, M. le baron Wap-
pers, est désespéré (1).
— MM. les questeurs du Sénat et de la Chambre des
représentants adressent des cartes de tribune réservée pour
la session législative de 1874-1875. — Remercîments.
— M. le Ministre de l'intérieur transmet une ampliation
d'un arrêté royal du 24 novembre dernier, nommant pré-
sident de l'Académie, pour l'année 1875, M. Alexis Brial-
(1) L'Académie a appris, depuis, que M. le l)aron Wappers est mort le
6 décembre, à Paris.
(710 )
mont, directeur de la classe des sciences pour la même
année.
— M. le docteur Burggraeve , de Gand , adresse une liste
de souscription pour l'ouvrage qu'il va publier sous le titre
de : Monument scientifique à Jenner.
— L'Académie des beaux-arts de Saint-Ferdinand, à
Madrid, exprime ses remercîmenls pour l'envoi des publi-
cations académiques des années 1871 et 1872.
La Société des architectes de Lille remercie pour l'envoi
des mêmes publications pour l'année 1874.
— M. Edouard Félis fait hommage du tome IV, qui vient
de paraître, de V Histoire générale de la musique depuis les
temps les plus anciens jusqu'à nos jours, par F.-J. Fétis;
1 vol. in-8".
Il offre ensuite, de la part de l'auteur, M. le baron
A.Limnander, membre de la classe, un exemplaire de sa
partition intitulée : Maximilien à Francfort, opéra en
3 actes.
Remercîmenls.
ELECTIONS.
La classe vote, par acclamation, le renouvellement du
mandat de MM. De Man, Fraikin, Franck, G. Geefs et
Slingeneyer, comme membres de la Commission des finances
pour l'année 1875.
(711 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
M. Éd. Fétis donne lecture, en sa qualité de secrétaire
du comité directeur de la Caisse centrale des artistes belges,
du compte rendu des opérations de la caisse pendant
l'année 1875.
La classe , après avoir voté des remercîments au comité
pour les soins incessants apportés à gérer l'institution, ainsi
qu'aux généreux donateurs de l'œuvre, décide l'impression
dans \ Amiuaire du rapport précité de M. Éd. Fétis.
— La classe s'est occupée, en comité secret, des candi-
datures supplémentaires aux places vacantes.
( 712 )
CLASSE DES SCIENCES.
Séance du 45 décembre 4814.
M. E. Candèze , directeur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. de Koninck, P.-J. Van Beneden,
Edm. de Selys Loiigchamps, H. Nyst, Gluge, Melsens,
F. Duprez, G. Dewalque, Ernest Quetelet, H. Maus,
M. Gloesener, F. Donny, Ch. Montigny, Steichen, Brial-
mont, Éd. Dupont, Éd. Morren, Edouard Van Beneden,
C. Malaise, membres; E. Catalan, A. Bellynck, associés;
Éd. Mailly, H. Valérius, F. Folie et J. De Tilly, corres-
pondants.
COBBESPONDANCE.
Une lettre du Palais exprime, au nom du Boi et de la
Beine, les regrets qu'éprouvent Leurs Majestés de ne
pouvoir assister à la séance publique de la classe.
S. A. B. Monseigneur le Comte de Flandre fait expri-
mer des regrets semblables.
MM. les Ministres de l'intérieur , des affaires étrangères
et de la guerre témoignent également leurs regrets de ne
pouvoir se rendre à l'invitation qui leur a été faite relati-
vement à la même solennité.
(715)
— M. le Ministre de l'intérieur adresse , pour être ré-
partis entre MM. les membres de la classe des sciences, cin-
quante exemplaires du rapport du jury qui a jugé le dernier
concours quinquennal des sciences physiques et mathéma-
tiques.
— Le même haut fonctionnaire fait savoir qu'il a invité
M. Van Oemberg à placer dans la grand'salle des Acadé-
mies, le buste de feu M. le colonel Dandelin, que cet ar-
tiste vient de terminer, et qui lui avait été commandé par
le gouvernement.
— La Société belge de microscopie annonce qu'elle vient
de se fonder à Bruxelles et transmet un exemplaire de ses
statuts. « Elle espère, dit-elle, pouvoir remplir un rôle utile
dans le concert des Sociétés scientifiques et obtenir, à son
début, l'approbation et l'appui moral de ses sœurs aînées. »
— M. Helmholtz, associé à Berlin, la Société hollan-
daise des sciences, à Harlem, l'Université de Konigsberg,
la Société astronomique de Leipzig, l'Observatoire royal
de Munich, la Société entomologique de Stettin et l'Office
météorologique de Calcutta remercient pour l'envoi des
dernières publications académiques.
L'Observatoire impérial de Vienne, en transmettant
également l'expression de sa gratitude pour cet envoi , an-
nonce qu'il offrira à l'Académie toutes les publications dont
il pourra encore disposer.
— M. Alexis Perrey, professeur honoraire à la Faculté
des sciences de Dijon , offre un exemplaire de ses deux
ouvrages suivants :
1° Sur les volcans de l'île de Java et leurs rapports
avec le réseau pentagonal. In-4°;
2""* SÉRIE, TOME XXXVIII. 46
( 714 )
2° Étude du réseau pentagonal dans focean Pacifique.
In-4°.
La Société de physique de Francfort S. /M. adresse le
dernier volume de ses travaux.
Remercîments.
JUGEMENT DU CONCOURS.
La classe avait inscrit six questions à son programme de
concours pour 1874.
Elle a reçu des réponses à quatre de ces questions: les
première; deuxième et troisième réunies; cinquième; et
sixième.
PREMIÈRE QUESTION.
Perfectionner, en quelque point important, soit dans ses
principes , soit dans ses applications , la théorie des fonc-
tions d'une variable imaginaire.
Le Mémoire reçu en réponse à cette question porte
comme devise : Ne rien faire contre la conscience et phi-
losopher sans souci des sots ni des méchants. Il a été
soumis à l'examen de MM. Catalan, De Tilly et Steichen,
Mtappot'l dtf WM. Catalan.
« Nous avons eu beaucoup de peine, M. De Tilly et moi,
à tomber d'accord relativement aux propositions que nous
devions soumettre à la Classe, touchant le Mémoire dont
elle nous a confié l'examen. Tl y a plus: à l'heure qu'il est,
(71S)
nous sommes divisés sur certains principes d'Algèbre et de
Géométrie analytique. Si un tiers n'était en cause, j'indi-
querais ici en quoi consistent ces divergences d'opinions.
Mais, comme le dit fort bien mon savant confrère :
a l'auteur aurait le droit de se plaindre si l'on divulguait,
» sous prétexte de Rapport, une bonne partie du contenu
)> de son Mémoire. » Renvoyant donc, à une Annexe,
l'exposé de mes principales objections, je résume ainsi les
réflexions que m'a suggérées la lecture du Mémoire :
i" L'auteur paraît être un profond Géomètre;
2° Il n'a pas démontré, ou il a démontré incomplète-
ment, les propositions au moyen desquelles il prétend
établir le très-beau théorème énoncé vers la fin de son tra-
vail;
5° Le Mémoire, qui semble avoir été écrit avec précipi-
tation, est fort mal rédigé;
4" Néanmoins, l'auteur mérite un encouragement.
En conséquence, j'ai l'honneur de proposer à la Classe :
1° Qu'elle accorde une mention honorable au Mémoire
ayant pour devise : Ne rien faire contre la conscience et
philosopher sans souci des sots ni des méchants j
2" Que la question suivante soit inscrite au programme
du concours de 1876 :
« Perfectionner en quelque point important, soit dans
» ses principes, soit dans ses applications, la théorie des
» fonctions de variables imaginaires.
5" Que, eu égard à l'importance et à la difficulté de la
question, le prix décerné (s'il y a lieu) ait une valeur de
huit coïts francs.
(716)
Mtapitot't rfe .n. De Tilly.
« Conformément au Règlement de l'Académie, j'avais
fait une analyse sommaire du Mémoire portant pour devise :
ISe rien faire contre la conscience et philosopher sans
souci des sots ni des méchants. J'avais conclu provisoi-
rement à l'approbation du Mémoire, mais en la subordon-
nant toutefois à la solution de quelques points douteux
que je signalais et que j'espérais voir éclaircir avant
l'époque du jugement du concours, soit par moi, soit par
mes savants confrères, les deux autres commissaires. Cet
espoir ne s'est pas réalisé et les doutes que j'avais éprouvés
à la première lecture subsistent encore, si même ils ne
sont pas devenus plus sérieux.
Dans cette situation, je dois me borner à déclarer que l'au-
teur du travail soumis à la Classe a fait preuve d'un mérite
incontestable, et à proposer de lui accorder une mention
honorable, tout en maintenant la question au concours.
A cause de cette dernière proposition, j'ai supprimé
l'analyse que j'avais faite du travail présenté, car l'auteur
aurait le droit de se plaindre si l'on divulguait, sous pré-
texte de Rapport, une bonne partie du contenu de son
Mémoire. Toutefois, les objections faites doivent être con-
nues de l'Académie. Elles sont indiquées dans l'Annexe
ci-jointe, dont je demande le dépôt aux Archives. Il serait
aussi très-désirable que ces objections fussent connues de
l'auteur. C'est à lui de trouver un moyen d'obtenir la
communication de l'Annexe sans se faire connaître, si
toutefois il désire continuer à prendre part au concours,
comme je l'espère. Dans tous les cas, les objections faites
peuvent se résumer en quelques lignes :
L'auteur, plein de son sujet, admet, soit comme
(717 )
évidenles, soil comme démontrées, un certain nombre
de propriétés qui, pour moi, ne le sont pas. Je m'em-
presse d'ajouter que je ne suis pas en mesure d'en
contester formellement une seule. Au contraire, j'incline
à penser qu'elles sont toutes exactes, mais on ne peut
exiger de moi, ni que je les admette de confiance, ni que
je recommence le travail pour le compléter et pour en
justifier toutes les parties. L'auteur renvoie, il est vrai, à
un Mémoire inséré dans les Comptes rendus de l'Académie
des sciences de Paris, mais ce Mémoire lui-même, saut' en
un point signalé dans l'Annexe, me parait un tissu d'asser-
tions sans preuves (1).
En proposant de maintenir la question au concours,
j'émets le vœu que l'auteur complète son œuvre et
démontre rigoureusement, soit dans le texte, soit dans
une Introduction, toutes les propositions qu'il invoque;
ou, tout au moins, qu'il renvoie les lecteurs et les com-
missaires à des démonstrations connues et rigoureuses. Si,
en même temps, il améliorait son travail sous le rapport
de la forme, un peu négligée en certains endroits, ce tra-
vail deviendrait bien certainement digue du prix. J'estime
qu'il ne faudrait pas longtemps à l'auteur pour faire les
modifications que je demande et, si je ne consultais que
cette considération, c'est pour le concours de 187o que je
voudrais voir reproduire la question; mais cela est impos-
sible : une question remise au concours doit l'être pour
tout le monde et non uniquement pour le concurrent actuel.
(1) L'auteur dit que l'étude de ce Mémoire préliminaire suflîl pour
suivre la lecture du travail qu'il présente. Je l'ai étudié, aiusi que plusieurs
autres, relatifs à la même question, sans parvenir à dissiper tous mes
doutes.
(718 )
Je propose donc d'inscrire cette même question au pro-
gramme du concours de 1876, mais, en même temps,
d'augmenter le prix qui est affecté à sa solution. »
Conformément aux conclusions de ces rapports, aux-
quelles a souscrit M. Steichen , troisième commissaire, la
classe a voté une mention honorable à l'auteur du mémoire
et elle a décidé, en même temps, que la question serait
remise au concours pour 1876.
DEUXIEME QUESTION.
On demande une discussion complète de la question de
la température de V espace, basée sur des expériences, des
observ avions et le calcul, motivant le choix à faire entre les
différentes températures qu'on lui a attribuées.
TROISIÈME QUESTION.
On demande une étude complète théorique, et au besoin
expérimentale , de la chaleur spécifique absolue des corps
simples et des corps composés.
Un mémoire, ayant pour but de répondre à ces deux
questions, a été reçu par la classe. Il a pour devise: Félix
qui potuit rerum cognoscere causas ; il a été examiné par
MM. Melsens, Montigny, Folie et Stas.
La classe, après avoir entendu la lecture des rapports
de ses commissaires, a décidé que ce mémoire, sans valeur
aucune, serait déposé aux archives.
Conformément à la demande de MM. les commissaires,
leurs rapports ne seront pas publiés, mais resteront an-
nexés au mémoire.
( 719)
CINQUIÈME QUESTION.
Le polymorphisme des Champignons altire de plus en
plus l'attention des botanistes et des physiologistes ; il
semble même devoir fournir des éléments nouveaux à la
solution du problème de la vie en général.
On demande: 7° Vn résumé critique succinct des obser-
vations connues relativement au polymorphisme des Mucé-
dinées ;
2° La détermination exacte , ne s' appliquerait-elle qu'à
une seule espèce, de la part qui revient d'abord à la propre
nature du végétal (à son énergie spécifique), ensuite aux
conditions extérieures de son développement ;
.5" La preuve positive ou la négation suffisante du fait
que les Champignons de ferment (Micrococcus, Zooglaea,
Palmella, Leptothrix, Arthrococcus, Mycoderma , etc.),
dans des circonstances quelconques, peuvent se transformer
en Champignons supérieurs.
Un mémoire a été reçu. Il porte pour devise :
Pour trouver la preuve qu'un organisme est un degré
de développement ou un produit du développement d'un
autre organisme, il faut examiner la continuité organique
qui doit, une fois, à un temps donné, exister entre deux
états de développement d'une espèce.
Les commissaires qui l'ont examiné sont : MM. Éd. Mor-
ren, A. Bellynck et Éd. Van Beneden.
Mtappot'î de .?#. JÉrf. .lÊOi'ren.
«Ce fui Antoine Spring qui proposa à l'Académie d'in-
scrire au programme des concours une question relative
au polymorphisme des Champignons. Notre regretté con-
( 720 )
frère avait été témoin de quelques faits dont il a entretenu
la Compagnie et qui pouvaient faire croire à une singulière
instabilité morphologique dans cette classe extraordinaire
d'organismes inférieurs. Les circonstances ont d'ailleurs
ajouté un piquant intérêt à l'examen de ces phénomènes.
Quelques observations furent présentées au sein de la
classe des sciences, sur les termes de l'énoncé, qui était
entaché de quelques inexactitudes de fait et qui était
rédigé dans un sens favorable à l'hypothèse du polymor-
phisme.
L'auteur de la réponse qui est parvenue à l'Académie
commence précisément par se débattre avec la question
elle-même et par faire voir que le rédacteur devait être
enclin à admettre le polymorphisme des Champignons.
Après cette observation préalable, il se conforme ponc-
tuellement à l'ordre imposé par les trois termes de la
question.
Mais dès les premiers mots, il repousse avec énergie
Vhypothèse du polymorphisme. Cette expression nous est
personnelle et nous la choisissons à dessein parce que
l'opinion favorable au polymorphisme des Champignons
ne s'est jamais élevée à la hauteur d'une théorie scientifi-
que : jamais elle ne s'est appuyée sur des faits bien consta-
tés. Une théorie scientifique suppose des observations
vraies et elle a pour but de leur donner une interprétation
satisfaisante, en harmonie avec l'ensemble des connais-
sances. La base de toute théorie, c'est-à-dire un fait bien
établi, les polymorphistes ne l'ont jamais eue en leur pou-
voir.
L'auteur expose lui-même le plan de son travaillai]
nous a paru, dit-il, que pour respecter autant que possible
la division indiquée dans la question, en la conciliant avec
( 721 )
les exigences d'une réponse précise, nous pouvions ordon-
ner ainsi notre travail :
» Dans la première partie, résumer la littérature, sans
nous appesantir sur la réfutation de certains ouvrages, tels
que ceux de Hallier, Pouchet, etc.; une réfutation collec-
tive, telle qu'elle sera faite à la fin de cette première partie
est plus que suffisante pour des ouvrages que la science a
refusé d'admettre dans son domaine et qui n'ont pas quitté
celui de la fantaisie.
» La seconde partie ne renferme, au point de vue qui
nous occupe, que des arguments négatifs : incapacité com-
plète pour ces Champignons de se transformer en tel ou
tel autre ; incapacité de se transformer en levure ; incapa-
cité pour la plupart de produire la moindre fermentation;
elle emprunte cependant un intérêt scientifique à la récence
des documents employés pour la rédiger et dont une par-
tie date de cette année, 1874 même.
» Dans la 5'' partie, enfin, nous traiterons des Champi-
gnons de ferment en général, et jetant un regard rétros-
pectif sur les Mucorinées qui peuvent, dans des limites
restreintes, agir comme eux, nous comparerons ces diffé-
rents organismes, nous montrerons les caractères distinctifs
nombreux qui les séparent et indiquerons la source de la
confusion qui a longtemps existé dans leur histoire. Cette
3'' partie ne mérite guère d'être distinguée de la 1" dont
elle pourrait composer un chapitre ; pour l'individualiser
quelque peu, nous avons cru bien faire de nous occuper
des fermentations d'une façon plus complète que ne l'exi-
geait le polymorphisme lui-même; nous espérons que l'on
ne nous reprochera pas de nous être un peu appesanti sur
cette question qui commence, grâce aux travaux de Reess,
( 722 )
Brefeld, Cohn, Cienkowski, etc., à sortir des ténèbres dans
lesquelles elle est restée longtemps plongée. »
L'histoire des transformations attribuées aux Champi-
gnons est liée à celle de la génération spontanée : on peut,
pour ne pas trop s'embourber, la commencer avec Turpin
et puis raconter tout ce qui a été avancé à ce sujet par
Bail, par Rallier de Jéna, par Hoffmann de Giessen et par
d'autres. L'auteur a fait preuve de patience en exposant les
erreurs fantastiques de Hallier, mais le travail auquel il a
bien voulu s'assujettir ne sera pas inutile : il est bon, il est
nécessaire même de faire une bonne fois justice de toutes
ces prétendues théories qui ressemblent à des construc-
tions foraines élevées à la hâte, sans fondement, avec de
mauvais matériaux et qui sont fort bruyantes, tant qu'elles
tiennent debout, jusqu'à ce qu'elles disparaissent subite-
ment en ne laissant d'autres traces que du gâchis.
A la fin de son récit historique, l'auteur rencontre
M. Carnoy, l'étoile du soir de la métenipsychose mycolo-
gique et il n'a point de peine à déchirer ce tissu d'erreurs
auquel on a cru, un moment, pouvoir attacher un grand
prix. jMM. Van Tieghem et Lemonnier ont déjà exprimé
une appréciation tout aussi sévère de l'histoire du Mucor
romanus à laquelle nous faisons allusion.
M. le professeur de Bary a commencé, en 1866, la réfu-
tation de ces doctrines subversives et antiscientifiques,
puisqu'elles sont erronées et hypothétiques. Les travaux de
Max Reess, un des élèves de de Bary, et plus récemment
les minutieuses expériences de notre ami le D"" Oscar Bre-
feld ont ruiné tout cet échafaudage. Nous avons été
témoin, au laboratoire du D' J. Sachs, à Wurzbourg, de
quelques-uns des résultats obtenus par le D"^ Brefeld, dont
( 723 )
la méthode expérimentale est aussi parfaite qu'on peut le
désirer pour d'aussi délicates observations (1).
Dans la deuxième partie, l'auteur expose, en résumé,
l'histoire des moisissures suivantes: iWi^cor Miicedo, Mu-
cor racemosus, C/iaetocladium Jonessii, Thamnidium ele-
gans, Eurotium Asperyillus glaucus et Penicilium glaiicum,
en s'appuyant sur les travaux de de Bary, Woronin, Zim-
mermann, Van Tieghem, Lemonnier et surtout Oscar
Brefeld.
L'évolution de ces créatures infimes et admirables que
les transformistes prétendaient condamner à la promiscuité
des monades et des ferments, est maintenant bien éluci-
dée et elle est en définitive la même que celle de tous les
végétaux, même des végétaux supérieurs, qui revêtent aussi
des apparences différentes, selon qu'ils passent par les
phases de la nutrition, de la multiplication agame, du
repos végétatif et de la reproduction sexuelle. Nous ne
saurions dire en quoi les Mucédinées diffèrent, sous ce
rapport, de la Betterave ou du Lis blanc. Cette partie du
mémoire est comme un petit traité des Champignons infé-
rieurs et, à ce litre, elle instruira beaucoup de personnes.
La troisième partie est particulièrement consacrée aux
ferments et aux fermentations. L'histoire des théories de
la fermentation est intéressante et suffisamment étendue.
L'auteur rend hommage, à cette occasion, aux découvertes
fondamentales du D"^ Schwann. Dès 1857, notre cher con-
frère faisait connaître la véritable nature des ferments,
spécialement du ferment alcoolique sur lequel on ne pos-
(1} Methoden zur Untersuchung der Pilze von D^ Oscar Brefeld.
Separat-Abdruck aus (Jeu Yerhandlungen der phys -med. Gesellschaft,
S. F.,Vni. Bd.;187.i.
( 724 )
sédait jusqu'alors que des idées fausses. Schwann a décrit
la levure de bière et il l'a rangée parmi les Champignons
en lui donnant le nom de Zuckerpilz (Champignon du
sucre), dont on a fait Saccharomyces. Des expériences célè-
bres de Pasteur ont confirmé les résultats que Schwann
avait déjà obtenus en 1837. L'histoire des ferments se
trouve dans un travail célèbre de Max Reess, publié en
1870, et quant à la théorie de la fermentation, elle n'est
pas encore achevée, mais elle est poursuivie par les inves-
tigations d'Oscar Brefeld (1).
Un appendice est consacré aux Bactéries et aux Schi-
zomycètes en général que l'auteur range, selon les vues de
Cohn, dans la classe des Algues: il n'a pas de peine à
montrer que ces puissants et infimes organismes sur
lesquels on commence enfin à pouvoir diriger l'observation,
ont une évolution parfaitement autonome, comme l'ont
démontré les belles recherches de Cohn et même celles de
Hoffmann.
Le Mémoire est accompagné de 24 figures bien dessinées,
qui tiennent sur un petit nombre de planches. Nous expri-
mons le désir que l'auteur ajoute encore quelques figures
qui aideront à la clarté de ses enseignements sur les fer-
ments et sur les Bactéries.
Le Mémoire a mon approbation la plus absolue et il
exprime exactement les opinions que je me suis formées
sur une question qui a passionné naguère quelques per-
sonnes, qui a été discutable pendant un certain temps,
mais qui maintenant, depuis les travaux de de Bary, Reess
(I) Oscar Brefeld, Untersuchungen ilber Alkoholgahrung. Sep.-Abdr.
ausdeii Verh.der Wurzburger phys.-med. GeseUschaft,N. F., VIII. Bd.;
juin 1874.
( 725 )
et surtout Brefeld, est tellement claire qu'elle ne saurait
être douteuse, même pour un mathématicien. Ce sera un
honneur pour l'Académie d'avoir fait justice d'une croyance
qui remontait au paganisme scientifique. Nous avons lu
le Mémoire d'un bout à l'autre et ce devoir nous était rendu
agréable par l'intérêt du sujet et par la manière dont il est
traité. La verve et un peu de raillerie percent entre les mots,
dans certains passages où la conscience du savant se ré-
volte contre les vaines apparences auxquelles des observa-
teurs ont eu le malheur de se fier.
On hésitait sur l'opinion qu'il faut avoir relativement au
polymorphisme attribué aux Champignons. L'Académie a
demandé un Mémoire qui fît disparaître ces hésitations et
qui fît justice de l'une ou de l'autre doctrine. Le Mémoire
qui lui est envoyé répond à la question d'une manière pé-
remptoire. Si le Mémoire est très-didactique , c'est que la
question et le sujet le voulaient ainsi.
L'histoire de la question , les controverses auxquelles
elle donne lieu, les arguties des polymorphistes et les
arguments des autonomistes, tout cela est parfaitement
exposé dans le Mémoire et en excellents termes: je ne
trouve rien à y reprendre et il me reste à exprimer le vœu
que ce travail paraisse sans retard.
Je propose à l'Académie de lui décerner la médaille d'or et
de décider la prompte impression dans un de ses recueils. »
Rapport de Si. A. Bellynck.
« Avant d'aborder le mémoire que l'Académie a bien
voulu soumettre à notre appréciation , nous devons déclarer
que nous n'apportons à cet examen aucune idée pré-
conçue ; nous n'avons pas l'habitude de nous passionner
( 726 )
pour des opinions, et la vérité seule a toujours été Je but
de nos recherches. — Si, dans le rapport que nous avons
été chargé de faire, à l'occasion du prix quinquennal,
nous nous sommes prononcé en faveur d'un mémoire qui
est le contre-pied de celui que nous examinons en ce mo-
ment, nous n'avons eu en vue que de récompenser un
ifravail sérieux, fait dans le but d'élucider une question
importante, et nous donnerons toujours notre assentiment
à tout travail de ce genre, quelle que soit la thèse qu'il
défende, persuadé que, dans la science , c'est du choc des
opinions que doit jaillir la lumière; et afin qu'on ne se
méprenne pas sur notre manière d'agir, nous rappellerons
ici les quelques lignes qui terminaient notre rapport ;
« Les connaissances de l'auteur, disions-nous, son habileté
» consommée dans le maniement du microscope, le temps
» et les soins qu'il a prodigués à son œuvre, sont un sur
» garant de la portée scientifique de son travail Sans
» doute, la science n'a pas dit son dernier mot sur celte
j> question; mais la manière claire et méthodique dont Je
» sujet est traité en rend le contrôle facile à quiconque
» aura le temps et la patience de répéter les expériences
» de l'auteur. » — Comme on le voit, nous n'avons pris
aucune responsabilité des conclusions que l'auteur a cru
devoir déduire de ses observations, d'ailleurs bien faites, et
nous arrivons franchement à l'étude du mémoire qui nous
est soumis.
Nous remarquons d'abord que l'auteur a omis un point
important, qui, selon nous, est un préliminaire indispen-
sable, à savoir l'exposé de l'état de la question. Que faut-il
entendre par polymorp/iisme ou pléomorphisme dans le
règne végétal? Les auteurs en général comprennent sous ce
nom la faculté que possède une plante de produire plusieurs
( 727 )
sortes de fructifications, et, par conséquent, de se présenter
sous différentes formes qu'on a parfois considérées comme
des espèces distinctes, — • II est donc évident que le poly-
morphisme n'a rien de commun avec la génération spon-
tanée, qui fait produire de toutes pièces des animaux et des
plantes, sans intervention aucune de parents, mais par
l'agrégation spontanée de la matière inerte. — Le poly-
morphisme n'a pas non plus de rapport avec le darwinisme
ou transformisme, lequel demande des milliers de siècles,
et fait passer insensiblement l'individu d'une forme à une
autre, pour ne plus revenir à la première.
Dans la question qui nous occupe, on suppose un cycle
de métamorphoses qui ont leur point de départ auquel elles
retournent après un certain nombre d'évolutions, souvent
déterminées par le milieu dans lequel se fait le dévelop-
pement. — Nous voyons quelque chose d'analogue dans le
règne animal : ainsi les insectes présentent successivement
les formes de larve, de nymphe et d'insecte parfait; chez
les vers intestinaux, le développement ultérieur exige un
changement de milieu, et l'animal a besoin de passer dans
un nouvel hôte pour parfaire le cycle de ses transforma-
tions; une même espèce animale peut présenter les géné-
rations scissipare, gemmipare et ovipare, etc. — Chez les
champignons, des changements de forme sont reconnus par
tous les botanistes au courant de la science. Tout le monde
admet les formes transitoires du Claviceps purpurea, qu'on
a considérées, jusqu'à ces derniers temps, comme des
espèces distinctes, nommées Sphacelia, Sderolium, Cla-
viceps. Les genres JEcidium, Uredo eiPiiccinia, autrefois
regardés comme autonomes, ne sont plus, pour les mo-
dernes, que les formes d'un genre unique, qui se pro-
duisent en changeant de milieu; il en est de même du
( 728 )
Rœstelia cancellata qui attaque les feuilles du poirier, et
qu'on fait dériver du Podisoma Juniperi. C'est ainsi encore
que MM. Yan Tieghem et Le Monnier portaient à huit les
formes reproductives du Mucor; plus tard, M. Brefeld
a restreint à trois le nombre de ses fructifications, retran-
chant les formes Chœtodadium, Thamnidiiim, Helico-
stylum, etc., qui ne se trouvaient là qu'à titre de parasites.
— Comme on vient de le voir, ceux qui se posent en
adversaires acharnés du polymorphisme sont polymor-
phistes eux-mêmes. La question, ici, n'est donc que du
plus au moins, et toutes les recherches doivent aboutir à
fixer les limites du polymorphisme.
Après ce préambule, nous arrivons au texte du mé-
moire.
D'abord l'auteur anonyme trouve les questions du con-
cours mal posées, et nous sommes de son avis; nous n'y
avons pris aucune part, et nous n'en avons eu connais-
sance que lorsqu'elles étaient déjà imprimées.
Pour s'écarter le moins possible de la marche prescrite,
l'auteur divise son mémoire en trois parties : dans la pre-
mière il fait l'historique de la question; dans la deuxième
il étudie quelques espèces de champignons et conclut à
leur incapacité de se transformer; enfin dans la troisième
partie, qui rentre dans la deuxième, il traite des ferments
en général, et termine par la même conclusion.
I.
Dans la première partie, l'auteur passe en revue les
partisans du polymorphisme: KOtzing, Turpin,Tulasne,
DE Bary, Spring, Robin, Bail, Speerschneider, Ber-
keley, John Lowe , Zabel , Hoffmann , Griffith et Hen-
( 729 3
•FREY, PoucHET, Salisbury (ciî Amérique). Il s'étend sur-
tout longuement, beaucoup trop longuement sur Hallier
avec lequel il a beau jeu , car on sait que les expériences
de ce dernier sont loin de présenter toutes les garanties
requises. — L'auteur arrive ensuite à la réunion de la
section botanique de la Société des naturalistes allemands
à Francfort (19-25 septembre 1867) , qui, dit-il, fut con-
sacrée presque exclusivement à la glorification du poly-
morphisme; DE Bary, qui était revenu de plusieurs de ses
opinions précédentes, y lutta vainement contre Bail,
Hoffmann, Thomé, etc. Hoffmams, ajoute l'auteur, a répété
une partie de se^ erreurs anciennes dans un ouvrage cou-
ronné en 1869, et qui a été traduit la même année dans
les Annales des sciences naturelles. — L'auteur du mémoire
a de nouveau une prise de corps avec Hallier dont il ne
sait pas se dessaisir. — Vers cette époque, plusieurs noms
célèbres sont venus corroborer le polymorphisme , entre
autres Luders, H. Schurtz, Hartig, Trécul.
L'auteur dit qu'il aurait volontiers passé sous silence le
travail de M. Carnoy, si le grand prix ne lui avait pas été
accordé. Sans doute l'auteur de ce travail pousse plus loin
que tous les autres les transformations des champignons;
mais, encore une fois, il y a autre chose dans ce mémoire
que le polymorphisme auquel on fait la guerre. MM. Van
Tieghem et Le Monnier, qui se sont constitués les adver-
saires de M. Carnoy, lui avaient cherché querelle au sujet
du nom qu'il a donné à la plante qu'il étudie; ils ont pré-
tendu que cette plante n'est pas une espèce nouvelle, mais
qu'elle est identique au Phycomyces nitens de Kunze;
notre auteur anonyme répète le même reproche , comme
si ce point avait la moindre importance. L'auteur, en effet,
n'a pas eu en vue de créer une espèce nouvelle, mais de
2""* série, tome xxxviii. 47
( 730 )
suivre le développement d'une espèce prise au hasard.
Toutefois, M. Van Tieghem ne méconnaît pas le mérite du
mémoire incriminé; voici ses paroles {Ànn. des se. nat.,
t. VII, S' série, p. 268) : « Il est regrettable que M.Carnoy
» n'ait pas su reconnaître la plante si caractéristique qu'il
B étudiait, et que ce qu'il peut y avoir d'exact et de nou-
» veau dans les longs et minutieux détails d'anatomie
» auxquels est consacrée la première partie de son travail ,
» ait ainsi perdu tout son prix. » Et plus loin (p. 285) :
<i C'est donc au Phijcomyces nitens qu'il faut attribuer
» tout ce qu'il y a d'exact dans les longs développements
» analomiques et physiologiques où l'aujeur est entré au
B sujet de cette prétendue espèce nouvelle. Ceci une fois
B bien connu, cette partie du travail de M. Carnoy repren-
» dra sa valeur, en faisant mieux connaître l'histoire
» d'une plante assez rare dont on connaissait bien les
B caractères principaux, mais dont on avait peu suivi le
» développement. Mais on conçoit que nous n'ayons pu
» faire cette identification qu'après avoir nous-méme lon-
» guement cultivé cette plante, et avoir, de notre côté,
» retrouvé un à un les faits exacts mentionnés par
B M. Carnoy. b
Ajoutons que le D' Brefeld, l'oracle des antipolymor-
phistes, écrivait à Carnoy à propos de sa découverte rela-
tive à la formation de la columelle, qu'il avait, contre
toute attente, tranché le nœud gordien des Mucorinées;
qu'on sentait, en lisant les pages 112 et M5, que c'était
bien la vérité. I
Enfin le mémoire de Carnoy avait été l'objet de rap- 1
ports très-élogieux de notre regretté confrère Spring et de ■
M. le professeur Martens.
Une autre attaque, également mal fondée, porte sur la
( 731 )
continuité organique que l'auteur anonyme requiert pour
arriver à une démonstration sans réplique, et qu'il a
inscrite comme devise en tête de son mémoire. Eh bien,
M. Van Tiegliem reproche à Carnoy (p. 269) d'avoir voulu
suivre celle prétendue continuité qui, selon lui, est impra-
ticable dans les conditions où il a opéré. L'auteur ano-
nyme, au contraire, déprécie le travail de Carnoy, qui n'a
pas eu , dit-il , pour base celte méthode : nous laisserons
ces messieurs s'entendre entre eux, et nous nous conten-
terons de dire qu'il faut n'avoir pas lu le mémoire de
Carnoy pour ne pas voir que cette devise a été la règle de
toutes ses recherches; il le dit dans sa préface, et il le
répète à satiété dans le cours de son travail; c'est même
précisément pour cela que ce travail ne doit pas être con-
fondu avec celui des autres polymorphistes qui, pour la
plupart, ont négligé cette précaution; Carnoy assure qu'il
a vu et revu de ses yeux la continuité organique, qu'il a
tourné et retourné les filaments sous le microscope, pour
éviter toute illusion. — Carnoy n'exclut nullement les
ihèques de la définition des Ascomycètes, comme on le
prétend, puisqu'elles sont incluses dans le mot même dont
il se sert. — Quant aux autres reproches, ils sont communs
aux polymorphistes en général, et l'auteur les exposera
plus loin, après qu'il aura réglé le compte de M. Klein,
qui, lui aussi, s'est permis une excursion dans le champ
du polymorphisme.
Les deux causes principales, auxquelles l'auleur ano-
nyme rapporte toutes les erreurs des polymorphistes,
sont : 1° la substitution d'une plante à une autre : on sème
un champignon dont les spores meurent, parce que le
milieu ne leur convient pas, et d'autres spores intruses
lèvent à leur place. — La deuxième cause est due au para-
( 732 )
sifisme : pendant qu'un mycélium se développe, les spores
d'une autre espèce s'y instalent et croissent en parasites.
Ces deux sources d'erreur résultent d'une méthode
fautive : on n'a pas observé la continuité organique. —
Nous ferons remarquer en passant que les deux causes
signalées étaient connues, et que plusieurs de ceux qui
ont observé prétendent les avoir écartées dans leurs
recherches.
Cette revue des auteurs polymorphistes nous paraît bien
longue. Sans doute il a fallu à l'auteur une bonne dose
de patience pour réunir et analyser tant de travaux épars;
tous ces détails, qui pourraient n'être pas de trop dans
un livre, rendent le mémoire diffus, et sa lecture quelque
neu fastidieuse.
Dans la deuxième partie, l'auteur décrit plusieurs es-
pèces qui ont joué les principaux rôles dans le polymor-
phisme; d'abord le Mucor Miaerlo, auquel il n'attribue
qu'un polymorphisme fort restreint; de même le Mucor
racemosus ; puis le Chœtocladium Joncssii que M. Brefeld
considère comme parasite du Mucor Mucedo, et le Tham-
nidium elegans qui présente deux syslèmes de sporanges.
L'Eurotium Aspergillus (jlaucus, qui a longtemps constitué
pour les mycologues deux genres différents [Eurotium
herbariorum ci Aspergillus glaucus) , est, d'après M. de
Bary, la forme double d'un même champignon. Enfin il
décrit le Pénicillium glaucum, la plus commune des moi-
sissures.
L'auteur refuse à toutes ces espèces le polymorphisme
('tondu qu'on leur avait attribué.
( 735 )
III.
La troisième partie du mémoire est consacrée aux
champignons de ferment ou levures. Ici l'auteur rend-
hommage aux travaux de notre sa vaut confrère M.Schwann,
qui, le premier, a établi scientifiquement la nature myco-
logique du ferment. — Il traite fort longuement la ques-
tion, et insiste particulièrement sur les expériences ré-
centes de Reess, qui n'a jamais vu de filaments mycéliens
formés par la levure. — Il expose ensuite une foule d'opi-
nions contradictoires sur les conditions nécessaires au
développement et à l'action des ferments; toutes ces opi-
nions sont basées sur des expériences accompagnées de
précautions ininutieiises; enfin il teimine en déclarant (|ue
le dernier mot n'est pas dit sur ces productions.
Avant de clore son mémoire, l'auteur s'occupe encore
de quelques petites Algues (Schyzomycètes, Bactéries),
ainsi que de plusieurs autres organismes {Leptotfin'x,
Micrococcus , Zooglœa, Monas, Pahnella) , qui ont été
considérés comme des formes inférieures des levures, etc.,
et, comme telles, réunies aux champignons.
L'auteur se flatte, en terminant, d'avoir levé tous les
cloutes qui pouvaient exister an sujet du polymorphisme
des champignons. — Nous voudrions qu'il eût dit vrai, et,
si la vérité pouvait se plier à nos désirs, nous verrions
volontiers tomber le polymorphisme, car il nous en coû-
terait de renoncer à des idées avec lesquelles nous sommes
i'amiliarisé depuis près de trente ans. Mais la vérité est
inflexible, et il n'y a pas de sacrifice qu'on ne lui doive.
Nous avons vu deux opinions en présence; la première
défend le polymorphisme et se base sur des recherches
(754 )
longues et minutieuses; plusieurs de ses partisans pré-
tendent avoir pris pour critérium la devise invoquée par
leur adversaire; ils assurent avoir suivi la continuité
organique par des observations faites d'heure en heure,
et répétées des centaines de fois. — L'autre opinion combat
le polymorphisme, tout en y adhérant dans certaines
limites; ses défenseurs n'apportent que des preuves néga-
tives : ils n'ont pas vu, disent-ils, cette continuité, et
ils croient pouvoir expliquer les conclusions qu'on leur
oppose par des intrusions ou par le parasitisme, et, parmi
ces antipolymorphistes, ceux qui font le plus de bruit
n'ont fait aucune observation personnelle. — Les polymor-
phistes sérieux , qui connaissent les raisons de ceux qui
les combattent, ne se tiennent pas pour battus, et ils sont
prêts à recommencer la lutte.
Nous verrions volontiers les partisans des deux opinions
entrer directement en relations, et se communiquer mu-
tuellement leurs dilficultés et leurs expériences; des labo-
ratoires publics viendraient à propos pour le contrôle de
ces sortes de recherches. Un argument très-fort contre
une théorie serait celui d'un auteur qui reconnaîtrait qu'il
s'est trompé, et qu'il a découvert la cause de son erreur.
Quoi qu'il en soit de l'avenir, nous avons trouvé dans
le mémoire que nous venons d'examiner, et qui a dû
coûter beaucoup de travail , un grand nombre de bonnes
observations, dont plusieurs sont propres à l'auteur. En
conséquence, nous n'hésitons pas à demander pour lui la
récompense académique, ainsi que la publication de son
mémoire avec les planches qui l'accompagnent. »
( 73d )
Kaftpoi't fie .fi. Midonai'U t'ait BeHetifft».
« La question du polymorphisme des champignons n'est
point de celles qui sont de la compétence exclusive des
spécialistes. Elle intéresse au plus haut degré tous ceux
qui se préoccupent des grands problèmes de la mor|)ho-
logie et de la physiologie générales; sa solution réside tout
entière dans une question de méthode; à ce titre elle se
place à côté de la doctrine des générations spontanées.
D'un autre côté, tous ceux qui se sont occupés des êtres
rangés au bas de l'échelle animale ont dû comprendre les
champignons, tout au moins les inférieurs, dans le cycle
de leurs recherches; et si une foule d'organismes tels que
les Myxomycètes, les Schizomycètes , les Flagellés sont
revendiqués par les botanistes, il est impossible de leur
dénier une foule de caractères qui les rapprochent des
animaux.
En ce qui me concerne, j'ai suivi avec un vif intérêt les
débats qui se sont élevés entre les partisans et les adver-
saires du polymorphisme, aussi bien que les discussions
sans cesse renaissantes sur l'origine, le rôle et la nature
des ferments. Pour ces différentes raisons j'ai cru, sans être
botaniste, pouvoir accepter la mission de faire connaître
à l'Académie, après mes savants confrères MM. Morren et
Bellynck, mon opinion sur la valeur du mémoire soumis à
son appréciation.
Si mes deux honorables confrères étaient parfaitement
d'accord dans leur manière d'apprécier le mémoire, j'au-
rais pu me borner, en ma qualité de troisième commissaire,
( 736 )
à adhérer purement et simplement aux conclusions qu'ils
ont exprimées; mais il est loin d'en être ainsi. M. Morren
donne au travail soumis au jugement de la classe son ap-
probation la plus absolue; il ne trouve rien à y reprendre ;
il juge la question du polymorphisme comme définitive-
ment tranchée; tandis que le R. P. Bellynck, tout en vou-
lant bien consentira ce que le mémoire soit couronné,
adresse à l'auteur une série de critiques; il signale dans
son travail plusieurs lacunes; il se plaint de ce que l'au-
teur anonyme s'appuie exclusivement, pour combattre le
polymorphisme, sur des arguments négatifs; il conclut en
disant qu'à son avis le polymorphisme reste debout, qu'à
ses yeux les polymorphistes ont même sur leurs adver-
saires l'avantage de s'appuyer sur « des observations du
reste bien faites. »
Dans ces conditions il était de mon devoir de développer
mon opinion relative à la valeur du mémoire, de faire con-
naître les motifs qui me font adhérer complètement aux
conclusions du rapport du premier commissaire et d'ap-
précier les objections et les réserves du R. P. Bellynck.
L'auteur fait d'abord la critique de la question posée; il
.la discute judicieusement et il fait connaître le terrain sur
lequel il veut se tenir, l'ordre qu'il entend suivre dans
sa réponse. Puis il aborde la première partie de son tra-
vail.
Fallail-il que l'auteur anonyme définît le mot polymor-
phisme? Il n'est pas un botaniste, je pense, qui ignore ce
que signifient ces mots « polymorphisme des champignons; »
et le sens que lui accorde l'Académie me paraît suffisam-
ment indiqué par les termes mêmes de la question :
« Déterminer la part qui revient d'abord à la propre
[ 737 )
nature du végétal (à son énergie spécifique); ensuite aux
conditions extérieures de son développement ; » puis : « la
preuve positive ou la négation sutïlsante du fait que les
champignons de ferment peuvent, dans des circonstances
quelconques, se transformer en champignons supérieurs. »
— Les noms cités entre parenthèses « Micrococcus, Ar-
thrococcus » ont été pour la plupart inventés par Hal-
lier pour représenter des productions soi-disant décou-
vertes par lui. — Le doute n'est donc pas possible : le
polymorphisme tel que l'entend l'Académie est bien le
polymorphisme soutenu par Hallier et après lui par M. l'abbé
Carnoy, le successeur de ses idées et de sa terminologie.
Il suffira, du reste, pour lever tout doute sur ce point, de
rappeler les circonstances qui décidèrent notre regretté
confrère Spring à poser la question.
Le travail de M. l'abbé Carnoy venait de paraître; la
prétendue découverte du polymorphisme lui était gratui-
tement attribuée, et quelques personnes la considéraient
comme la plus grande découverte du siècle!!! Spring pro-
testa formellement contre le mot découverte; le polymor-
phisme des champignons, depuis longtemps inventé et
défendu, était tombé en Allemagne en plein discrédit,
quand parut l'œuvre de M. Carnoy. Spring considérait si
peu la question du polymorphisme comme tranchée par
cette publication, qu'il se décida à la mettre au concours :
l'année suivante elle fut posée par l'Académie.
Le R. P. rapporteur, pour suppléer sans doute à la lacune
qu'il signale dans le mémoire de l'auteur anonyme, délinit
le polymorphisme : « La faculté que possède une plante de
produire plusieurs sortes de fructifications et par consé-
quent de se présenter sous différentes formes parfois con-
sidérées comme espèces distinctes. » Je suis fort au regret
( 738 )
(Je devoir m'élever contre cette définition, qui tend à con-
fondre sous une seule et même dénomination deux idées
absolument distinctes.
Si tel était le sens qu'il faut attacher à ce mot, tous les
naturalistes sans distinction seraient polymorphistes : tous
savent, en effet, que beaucoup d'animaux et de végétaux,
champignons et autres, possèdent cette faculté de produire
plusieurs sortes de fructifications. Et pour ne parler que
des champignons, je me bornerai à rappeler que depuis
vingt ans Tulasne et de Bary ont démontré l'existence de
cette faculté chez diverses espèces de champignons; je ne
sache pas que ces observations aient jamais été contestées
par personne; au contraire, une foule d'autres observa-
teurs sont venus confirmer les faits avancés par ces deux
illustres botanistes.
Poser la question du polymorphisme des champignons,
publier des volumes pour en démontrer l'existence, est
alors un non-sens : si l'on est polymorphiste parce que l'on
croit que V insecte parfait a passé par les formes de larve
et de nymphe (I); si l'on est polymorphiste parce que l'on a
constaté que chez une même espèce se présentent successi-
vement des générations scissipares, gemmipares et ovipares,
alors certes tous les naturalistes sont des polymorphistes :
à côté de Carnoy se placent, parmi les plus illustres poly-
morphistes, de Bary, Brefeld, Bées, Cohn, Van Tieghem et
Lemonnier. Notre confrère a raison de dire que ceux qui
se posent en adversaires acharnés du polymorphisme sont
polymorphistes eux-mêmes : le B. P. le veut ainsi et de
(1) Los iihrasos imprimées en italiques sont tirées du rapport du révé-
rend Père.
( 739 )
Barv et Brefeld et Rees ne savent ce qu'ils disent quand
ils combattent le polymorphisme.
A notre avis autre chose est la pluralité des organes de
/Vuctification et le polymorphisme des espèces, autre chose
l'évolution des espèces et leur polymorphisme.
Certains auteurs, partant de l'idée que 1° les conditions
extérieures seules modifient les champignons, et 2°, que
tous les semis de spores quelconques doivent se déve-
lopper dans tous les milieux, quitte à eux de se transformer
si le milieu n'est pas favorable à la reproduction de la
forme primitive, certains auteurs, disons-nous, ont ren-
fermé dans un même cycle toutes les espèces croissant sur
différents substratum ensemencés par eux des mêmes
spores. Hallier réunissait ainsi toutes les moisissures et
les ferments , même les Urédinées; M. Carnoy, allant consi-
dérablement au delà de ce qu'avait dit Hallier, assignait
comme limites à son cycle de formes, les limites de la
classe des champignons tout entière. N'a-t-il pas écrit :
« Nous avons assez de données dans nos notes pour affirmer,
de la manière lapins catégorique, que tous les champignons
cultivés dans certaines conditions se transforment en Péni-
cillium GLAUCUM à peu près identique partout; » et plus
loin : « c'est précisément à cause de cela que ce Pemcillium
GLAUCUM se retrouve partout et dans tous les pays [\ ). » Pour
M. l'abbé Carnoy la classe des champignons ne se compose
que d'une espèce; notre Agaric, nos Oronges, nos Bolets,
nos moississures, nos ferments ne sont que des formes
(1) Recherches anatomiques et physiologiques sur les champignons,
par J. B. Carnoy, dans le Bulletin de la Société royale de Botamque,
I. IX,n°2, p. 293.
(740)
revêtues par le Pénicillium et qui peuvent toutes retourner
à ce dernier. — Voilà un polymorphiste!
Et c'est ce polymorphisme, ce sont ces polymorphistes
que le R. P. Bellynck, pour avoir donné du mot une défi-
nition erronée, rapproche des découvertes à jamais célè-
bres de Tulasne et de de Bary; c'est à côté de ces polymor-
phistes que, grâce à sa définition et à la confusion qui en
résulte, il vient placer de Bary et Brefeld, les adversaires
nés des idées qu'on leur prête.
Plus loin, notre confrère dit qu'au congrès de Francfort,
de Bary, revenu de plusieurs de ses opinions précédentes,
lutta vainement contre Bail , Hoffman et Thomé. Consta-
tons d'abord que de Bary n'assistait pas à ce congrès; mais
bien Woronin, l'un de ses élèves. C'est celui-ci qui prenait
part à la discussion et exposait les idées de de Bary. De
plus de Bary n'était revenu d'aucune de ses opinions pré-
cédentes et l'honorable rapporteur serait, sans doute, bien
embarrassé de citer un seul mot de de Bary qui eût l'air
d'une rétractation. A cette époque, comme auparavant,
comme après, il continuait l'opposition qu'il avait toujours
faite aux idées polymorphistes.
Il n'y a donc pas moyen de donner le change à ce sujet;
jamais de Bary, pas plus que Tulasne, n'a partagé les
idées que ce dernier appelait les divagations de Turpin
[Deliramenta] (1). Si quelqu'un s'avisait d'affirmer que tous
les vers se transforment les uns dans les autres, selon les
conditions extérieures, qu'un œuf de distome peut produire
inditTéremment un distome, un nématode, un cestoide ou
un échinorhynque, pourrait-il prétendre que mon père est
(J) Tulasne, Selecta fungorum Carpoloyia , t. I , p. 185.
( 741 )
(Je son avis, parce qu'il a découvert l'évolution des Cestoïdes
et celle des Polypes?
Il importait, je pense, de faire ces observations, afin que
la confusion ne puisse s'établir et que l'on ne tente pas de
cacher, sous le manteau protecteur de Tulasne et de de
Bary, les excursions fantaisistes des Hallier et des Carnoy
en dehors des limites de la science.
Le polymorphisme n'a-t-il rien de commun avec la gé-
nération spontanée? Certes le polymorphisme tel que l'en-
tend le R. P. est tout autre chose que l'Hétérogénie. Mais
le polymorphisme tel que l'entendaient les Hallier, les Pou-
chet, les Turpin et les Carnoy est intimement lié à la doc-
trine des spontéparisles. Turpin, le premier des inventeurs
du polymorphisme, disait (1) « que les petits grains de
fécule du périsperme de l'orge sont de véritables bulbilles
intestinales et microscopiques, qui, sous certaines in-
fluences favorables à leur développement, peuvent germer
et reproduire la plante-mère, ou, étant isolées et plongées
dans un liquide sucré, faire l'office de levure en germant
on en végétant sous la forme très-amoindrie d'une Mucé-
dinée filamenteuse. » On le voit, ici la génération spontanée
et le polymorphisme sont étroitement unis; le second est
le corollaire de la première. Turpin, en faisant naître les
ferments et les Mucédinéesde la substance de l'orge, n'est-il
pas spontépariste aussi bien que polyniorphiste,et les deux
doctrines ne se confondent-elles pas? DansPouchet ne re-
trouvons-nous pas de nouvea'i l'association des deux théo-
ries? [Comptes re7ichis de l'Académie des sciences, t. LU,
(1 ) JijRpis, Mémoire sur la cause et les e/f'els de la fermentation alcoo-
lique el acéteuse, Mémoikes de l'Institut de Fba>ce, t. XVII, p. 100.
( 742 )
1861, p. 284). Et Joly el Musset [ibid., t. LUI, 18GI,
p. 370) ne fonl-ils pas naître spontanément la levure de
bière, qui ultérieurement se transforme en un Pénicillium?
Les deux théories marchent ensemble et se soutiennent
mutuellement. Du reste, quoi d'étonnant? Les procédés de
raisonnement sont les mêmes: le spontépariste, qui voit
apparaître des infusoires là où il n'en existait pas aupara-
vant, les fait naître de toutes pièces et il affirme qu'ils
n'ont pas eu de parents semblables à eux. Ne conclut-il
pas alors, comme le font tous les polymorpbistes qui, se-
mant la levure et recueillant des Mucorinées, des Pénicil-
lium, voire même des Ascomycètes, soutiennent que les
mêmes spores peuvent donner naissance à n'importe quel
champignon? Les uns et les autres admettent comme
axiome que, dans un liquide ou sur une surface, ne se
trouvent et ne peuvent arriver, en fait de germes, que ceux
qu'ils y ont eux-mêmes déposés.
Quand j'ai lu et étudié cette critiques! instructive, faite
avec tant de lucidité, de finesse et de savoir, par l'auteur
anonyme du mémoire , de toute cette longue série de pu-
blications polymorphistes, je n'ai pas trouvé que cette ana-
lyse fût trop longue. Je n'y trouve rien de diifus, sa lec-
ture ne m'a nullement paru fastidieuse; et je ne sais ce
que l'honorable rapporteur entend par un livre, quand il
dit : « tous ces détails, qui ne seraient pas de trop clans un
livre , rendent le mémoire diffus. »
Il était nécessaire tout d'abord, pour répondre à la ques-
tion posée, de passer en revue tous ces défenseurs du poly-
morphisme; et si l'auteur l'avait fait d'une manière incom-
plète, on eût pu lui en faire un grief.
L'auteur discute les expériences et il n'a pas de peine à
( 745 )
montrer qu'elles sont entachées d'une foule de causes d'er-
reur; il signale l'insuffisance des précautions prises pour
empêcher des germes étrangers de se mêler aux semis; il
dévoile les vices des méthodes employées, le peu de lo-
gique des raisonnements et des conclusions qu'on en tire.
Pas un polymorphiste n'a pris la peine de faire des cul-
tures sur porte-ohjet. La seule démonstration vraiment
scientifique des transformations, la continuité organique,
n'a jamais été établie. Il est vrai, le R. P. Bellynck cri-
tique l'auteur anonyme parceque celui-ci considère comme
seule preuve convaincante, et comme seul moyen de dé-
monstration scientifique, la continuité organique. « M. Van
Tieghem reproche à Carnoy, dit le R. P., cVavoir voulu
suivre cette prétendue continuité qui , selon lui, est imprati-
cable (1). B Certes, voilà entre deux anti-polymorphistes
une contradiction bien singulière. L'auteur du mémoire
réclame la continuité organique; M. Van Tieghem la dé-
clare impraticable. Nous avons voulu contrôler le passage
sus-mentionné du mémoire de M. Van Tieghem. Nous
n'avons pas été peu étonné de voir qu'on lui fait dire exac-
tement l'opposé de ce qu'il a pensé et écrit en réalité.
Voici, en effet, ce que nous avons lu : « Toutes ces
métamorphoses (les métamorphoses du Mucor deM. l'abbé
Carnoy) nous paraissent absolument illusoires; elles ont
paru se produire dans de grandes cultures où, comme ou
sait, toutes les causes d'erreur viennent s'accimiuler, et
pour toute démonstration, M. Carnoy en fait reposer la
réalité sur une prétendue continuité de tissu, impossible à
vérifier dans ces conditions et sur des semis évidemment
(1) Cette phrase est tirée lexluellernenl du rapport du R. P. Bellynck.
( 744 )
impurs. Un exemple pris au hasard suffira pour démontrer
avec quelle légèreté ce travail a été accompli... etc. » On
voit donc que la prétendue contradiction que le rapporteur
signale n'existe pas.
M. Van Tieghem expose, du reste, ses procédés d'expéri-
mentation, quand il nous dit (p. 262) : « Qu'il faut semer
une spore et suivre sans interruption aucune et en écartant
avec soin tout être étranger, l'évolution végétative et re-
productrice de la plante qui en procède; » et plus loin
(p. 264), après avoir fait connaître son procédé de cul-
ture cellulaire, il ajoute : « Ce procédé permet, on le con-
çoit, de suivre avec la plus grande facilité et sans inter-
ruption aucune, heure par heure, si cela est nécessaire,
tous les détails de la germination de la spore. » M. Van Tie-
ghem fait donc aussi de la continuité organique une con-
dition sine qiiâ non. — Et c'est à lui que l'on fait dire :
qu'à ses yeux la continuité organique exigée par l'auteur
anonyme est impraticable.
Dans la seconde et la troisième partie de son travail ,
l'auteur fait connaître les observations exactes des bota-
nistes qui comme Brefeld, Rees, Cohn et d'autres se sont
entourés de toutes les précautions nécessaires, n'admet-
tant l'identité spécifique des formes différentes qu'après
avoir constaté de la façon la plus positive la continuité
organique, le plus souvent en faisant des cultures sur
porte-objet et en suivant le développement d'une seule et
même spore.
L'auteur anonyme du mémoire a pu par lui-même con-
firmer pour un certain nombre d'espèces les résultats ob-
tenus par ses prédécesseurs , et les figures jointes à son
mémoire témoignent de l'exactitude de ses observations.
( 745 )
Parmi les espèces dont le développement est traité avec le
plus de détails se trouve le Pénicillium glaucum. Il ne sera
peut-être pas inutile de dire que pour faire l'histoire com-
plète de ce champignon, Brefeld a dû consacrer à son étude
deux années entières de travail; les résultats de ces lon-
gues recherches viennent seulement d'être publiés.
Les arguments que l'auteur apporte pour combattre le
polymorphisme sont tous arguments négatifs. Mais en sem-
blable matière il est impossible d'en fournir d'autres. Les
adversaires du polymorphisme pouvaient-ils faire autre
chose que de dévoiler les causes d'erreur de toutes les
recherches des polymorphistes et de faire connaître les
résultats négatifs de leurs propres expériences? Une affir-
mation portant sur l'existence d'un objet, ou sur la produc-
tion d'un phénomène, ne peut être combattue que par une
négation ou des preuves négatives, si le contradicteur ne
constate pas l'existence de l'objet et ne voit pas se pro-
duire le phénomène. Comment voudrait-on qu'on établît
que quelque chose n'existe pas, ou ne se produit pas?
Pasteur a-t-il procédé autrement pour démolir les Hété-
rogénistes?
Au reste , il y a lieu de faire à ce sujet une distinction
importante. Certes en règle générale une observation posi-
tive a plus de valeur qu'une négation. Mais avant de se
prononcer sur la valeur relative d'une affirmation et d'une
négation, il y a lieu de se demander d'où part l'affirmation
et quel est celui qui nie. Et si le résultat négatif est obtenu
par un observateur qui a fait ses preuves, qui a un nom
dans la science, et dont les travaux ont été universellement
acceptés et généralement confirmés, elles valent bien à mes
yeux les données positives et toutes les affirmations de
2""* SÉRIE, TOME XXXVIII. 48
( 746 )
savants qui n'ont jamais rien nié, ni rien affirmé aupara-
vant.
Le R. P. Bellynck dit, à la fin de son rapport, qu'il n'est
pas convaincu par les arguments que l'on fait valoir contre
le polymorphisme ; il déclare cependant qu'un argumen t très-
lorl contre une théorie serait celui d'un auteur qi]i recon-
naîtrait qu'il s'est trompé et qu'il a découvert la cause de
son erreur. Nous pouvons donner au R. P. plus qu'il ne
demande, et, au lieu d'un auteur, lui en présenter deux.
En effet, MM. Van Tieghem et Lemonnier déclarent loya-
lement (pages 275, 274, 503, 504, 505); avoir admis à tort
un lien de filiation enlre le Mucor Mucedo, le Circinella,
le Chsetocladium, le Thamnidium. Ils font la même décla-
ration (p. 516) au sujet de l'Hélicostylum dont ils avaient
identifié le grand sporange avec celui du Mucor Mucedo.
Quant aux causes de leur erreur, ils les ont trouvées dans
l'impureté de leurs cultures primitives et cependant celles-ci
étaient faites sur porte-objet. Nous voilà bien éloignés des
cultures sur oronges et sur fèces de Carnoy. Les mômes
auteurs terminent par cette déclaration (p. 275) : « On
puisera peut-être quelques réflexions instructives dans ce
changement apporté à leurs vues premières par deux ob-
servateurs indépendants. » Voilà donc le R. P. d'après sa
propre déclaration mis en demeure de se convertir.
Enfin, le R. P. termine en déclarant que les polymor-
phistes sérieux ne se tiennent pas pour battus et qu'ils
sont prêts à recommencer la lutte. Nous ne savons jusqu'à
quel point notre honorable confrère est autorisé à se porter
garant pour les polymorphistes sérieux! Ce qui est certain,
c'est que depuis cinq à six années l'échafaudage boiteux
de leurs théories s'est écroulé sous les coups redoublés des
de Bary, Rees, Brefeld , Cohn, etc., sans qu'ils aient fait le
( 747 )
plus petit effort pour le souteuir. Si réellement ils étaient
prêts à recommencer la lutte, la question posée par l'Aca-
démie leur offrait une occasion superbe qu'ils se sont em-
pressés, il faut l'avouer, de ne pas saisir. Que penser de
cette abstention? Faut-il en conclure que les polymor-
pliistes ne se tiennent pas pour battus et qu'ils sont prêts
à recommencer la lutte ?
Quant à moi , je le déclare sans hésiter, je considère la
question du polymorphisme comme tranchée dans le même
sens et de la même manière que la doctrine spontépariste
des Pouchet etdebien d'autres; l'auteur anonymedu mé-
moire le démontre d'une manière péremptoire.
Son travail répond complètement et de la façon la plus
brillante à la question posée et je propose, d'accord avec
mes honorables confrères, de lui accorder la médaille d'or
en même temps que les félicitations de l'Académie. s>
La classe adopte les conclusions des rapports de ses
comniissaires. Elle vote, en conséquence, la médaille d'or
de six cents francs au mémoire présenté. L'ouverture du
billet cacheté qui y était joint fait connaître que l'auteur
est M. Alfred GILKI^ET, docteur en sciences naturelles, à
Liège.
Sixième question.
Faire connaître, notamment au point de vue de leur
composition, les roches plutoniennes, ou considérées comme
telles, de la Belgique et de VArdenne française.
(748)
Le mémoire reçu en réponse à cette question a pour
devise :
Quo exactius introspicies ipsas corporum, partes, eo
minus de origine dubitabis (Leibniz, Protogâa, XXV).
MM. de Koninck, Devvalqiie et Malaise ont été chargés
de faire l'examen de ce travail.
na/tpot't de M. de Koninck.
« L'Académie se souviendra probablement qu'une ré-
ponse à cette question avait été reçue par elle l'année
dernière, mais que, malgré certaines qualités incontes-
tables, ce travail n'a pas été jugé digne du prix, à cause
des lacunes importantes qui pouvaient lui être reprochées.
Néanmoins l'Académie maintint la question à son pro-
gramme et elle n'a qu'à se féliciter de sa résolution. En
effet, le mémoire qui lui est parvenu cette année est de
beaucoup supérieur à celui que j'ai eu l'occasion d'exa-
miner au précédent concours et je n'hésite pas à déclarer
qu'il est beaucoup plus complet que ce dernier, quoique
dans une note les auteurs déclarent que le défaut de temps
ne leur a pas permis de terminer avant la date fixée par
r Académie l'ensemble des recherches qu'ils avaient entre-
prise sur les roches cristallines de la Belgique et de l'Ar-
denne française.
Il suffit de parcourir ce nouveau travail, dont je lais-
serai faire l'analyse à mes savants confrères, pour être
persuadé qu'il émane de personnes qui , non-seulement
connaissent à fond la constitution géologique de notre
pays, mais qui, en outre, possèdent le maniement du
( 749 )
microscope et savent en l'aire un usage judicieux et pra-
tique. Les nombreuses planches dont le mémoire est ac-
compagné et dont l'exécution ne laisse rien à désirer,
fournissent au reste une preuve directe de ce que j'avance.
Les auteurs ont donc largement rempli les lacunes dont
on pouvait, à juste titre, reprocher l'existence dans le
mémoire précédent. Ils se sont servis des recherches
faites par MM, Delesse, Sorby, Zirkel, Vogelsang, von
Ralh et d'autres pour compléter leurs propres observa-
tions et ils en ont tiré un excellent parti. Le seul repro-
che qui puisse leur être adressé concerne les analyses
chimiques que j'aurais désiré trouver en plus grand nombre
dans leur travail. C'est probablement à ce défaut, car c'en
est un, à mes yeux, que les auteurs font allusion, quand
ils déclarent que leur mémoire n'est pas aussi complet
qu'ils auraient pu le désirer.
Quoi qu'il en soit, le travail tel qu'il est constitue une
des plus belles Monographies des roches ignées que je
connaisse, et je n'hésite pas à demander que l'Académie
lui décerne le prix. Ce prix d'ailleurs ne constituera qu'un
faible dédommagement des frais considérables que cette
Monographie a occasionnés à ses auteurs et des peines qu'ils
se sont données pour la mener à bonne fin.
Je demande, en outre, que les auteurs soient priés
d'adresser à l'Académie dans un mémoire supplémentaire
les recherches que, de leur propre aven, ils n'ont pas eu
le temps de terminer avant la date fixée pour l'envoi de
leur réponse. »
750 )
Rn/ifiOfi tic .VB. a, lft'tcalti**e.
a La question des roches plutoniennes de la Belgique
et de l'Ardenne française avait déjà amené une réponse au
concours clôturé il y a deux ans. La classe des sciences
se rappellera sans doute que, sur la proposition des trois
commissaires, le prix ne fut pas décerné à cause des ira-
perfections de cette réponse, d'ailleurs estimable. Non-
seulement l'étude chimique de ces roches était incomplète,
mais encore aucune d'elles n'avait été étudiée au micros-
cope : cette lacune, bien qu'elle n'eût pas lieu de nous sur-
prendre dans l'état actuel de la science dans notre pays,
était trop importante pour ne pas être signalée d'une ma-
nière toute particulière par les rapporteurs. En conservant
la question au programme de ses concours, la classe a par-
tagé notre espoir de voir compléter nos connaissances sur
ce point, et cet espoir n'a pas été trompé.
Le travail dont nous avons l'honneur de rendre compte
aujourd'hui, se distingue, en effet, par le soin avec lequel
a été fait l'examen microscopique des roches dont il s'agit,
comme par les résultats importants auquel cette étude a
conduit. L'auteur, on plutôt, les auteurs ont parfaitement
caractérisé l'esprit de leur œuvre par cette phrase de la
Protogée de Leibnitz, qu'ils ont prise pour épigraphe :
Quo exactius inlrospicies ipsas corporum parles, eo minus
de origine dnbilabis. Le nombre des plaques minces qu'ils
ont fait polir pour les étudier au microscope, dépasse cent-
cinquante; de nombreux dessins, coloriés avec un soin
remarquable, et, nous voulons le croire, une exactitude
parfaite, permettent au lecteur de suivre la description
(7S1 )
comme sur l'objet même, et jusqu'à un certain point, d'ap-
précier l'exactitude des conclusions. Ajoutons en passant
que, comme la littérature française ne possède encore au-
cun traité consacré à l'étude microscopique des roches, les
auteurs ont cru devoir tenir compte de cette circonstance
et sont entrés dans des détails et des explications qui
pourraient paraître superflus en Allemagne : nous pensons
que les lecteurs français leur en sauront beaucoup de gré.
Dans leur introduction, les auteurs insistent d'abord sur
les difficultés de la question. La distinction entre les dé-
pôts marins les plus anciens, fortement modifiés, et les
éruptions plutoniennes correspondantes est d'autant plus
difficile à établir que les matériaux de comparaison sont
plus rares et que la composition est plus incertaine. D'une
part les études microscopiques des roches, qui, depuis dix
ans, ont fait faire tant de progrès à la connaissance des ter-
rains plutoniens, surtout en Allemagne, ont porté beau-
coup plus sur les roches récentes, volcaniques ou pyroïdes,
que sur les roches anciennes ou plutoniques. D'autre part,
la composition microscopique des roches à étudier est la
plupart du temps fort obscure, ici par suite d'altérations,
là par la complication extrême d'éléments de diverses pro-
venances, plus ou moins métamorphiques. Il n'est pas
jusqu'aux rapports de position de nos roches plutoniennes
et des terrains encaissants, qui ne soient ordinairement
très-obscurs ou inconnus. Ajoutons néanmoins que les au-
teurs sont arrivés à cette conclusion importante qu'un cer-
tain nombre de ces roches, considérées ordinairement
jusqu'ici comme éruptives, parfois comme métamorphi-
ques, sont purement élastiques, c'est-à-dire foraiées des
détritus des roches préexistantes.
( 752 )
Vient ensuite un exposé succinct de l'état de la question,
à partir des premiers mémoires de notre vénéré doyen,
M. d'Omalius d'Halloy, dont la présence nous eût été si
précieuse. Ajoutons, pour ne plus y revenir, que les auteurs
se sont montrés parfaitement au courant de notre littéra-
ture scientifique.
Ils passent ensuite à la description de nos diverses roches
piuloniennes.
1. Diorite quartzeiise de Quenast et de Lessines.
Le porphyre de Quenast surgit dans le terrain silurien
du Brabant sans que le contact puisse être observé. 11
forme un typhon qui paraît plus étendu que Dumont ne
l'a figuré sur sa carte géologique de la Belgique. La sur-
face de ce massif présente un aspect fort remarquable ; elle
est formée de grosses boules, tantôt libres, tantôt sou-
dées à la masse sous-jacente, soit au jour, soit sous le
limon quaternaire ou les sables éocènes. Ces sphéroïdes,
plus ou moins décomposés, sont ordinairement formés de
couches concentriques, parfois séparables, entourant un
noyau Irès-cohérenl ; quelques-uns, au contraire, sont assez
peu altérés pour fournir des pavés : ce sont ceux qui ont
été protégés par au moins cinq à six mètres de sable et
d'argile. Chose curieuse, cette altération ne se montre pas
sur les globes qui étaient à nu au commencement de l'épo-
que tertiaire.
Plus bas, la roche est massive et partagée en polyèdres
irréguliers par divers systèmes de fissures qui simulent
souvent une stratification; mais, comme le dit Dumont,
ce n'est qu'une apparence. Cependant les auteurs ont noté
un système de joints courbés sur un arc de plus de iOO de-
( 753)
grés; or on sait qu'une disposition analogue a été ob-
servée dans certaines roches volcaniques , où elle a été
produite par retrait.
Dumont a nommé cette roche chlorophyre massif, et il
en a donné une description que les auteurs reproduisent.
Dans l'état actuel des carrières, cette description serait
erronée sur un point et incomplète. La chlorite est sou-
vent rare ou même absente. D'autre part, l'amphibole y
existe régulièrement, comme l'avait dit^M. d'Omalius; elle
s'y trouve en petits prismes ou en petites masses libro-
lamellaires, dont l'importance a été méconnue par Dumont.
D'autres prismes, souvent plus visibles, paraissent être du
type pyroxénique. Le feldspath de cette roche est quelque-
fois de l'orthose, caractérisé parla macledile de Carisbad;
mais ordinairement c'est de l'oligoclase, comme l'avait re-
connu M. Delesse, qui l'a analysé. Le quartz est assez abon-
dant partout, quelquefois en dihexaèdre. L'épidote y est
également habituelle, en petits nids ou en veines, ordinai-
rement associée au feldspath dont elle semble souvent
n'être qu'un produit de décomposition. D'autres minéraux
du groupe des phylliles, par exemple le mica, semblent être
dans le môme cas. La pâte euritique renferme en outre des
grains de magnétite.
Cette roche a reçu diverses dénominations. Récemment
M. Zijkel l'a rangée parmi les diorites quartzeuses et les
auteurs adoptent ce nom, qui répond assez bien à la com-
position que nous venons de résumer. L'analyse de M. De-
lesse et une autre que donnent les auteurs, confirment ce
classement.
Cette diorite renferme des parties empâtées, de volume
très-variable, plus ou moins arrondies, quelquefois angu-
leuses, à texture porphyrique grano-cristalline, ou com-
( 754 )
pacte. Quelques-unes passent à la diorite environnante,
mais le plus souvent la limite est tranchée. Elles sont or-
dinairement noir-bleuâlre ou gris-verdàtre, difficilement
fusibles; d'autres, blanches ou roses, fondent assez facile-
ment au chalumeau. Ce seraient, d'après les auteurs, de
simples accidents de cristallisation. D'autres variétés, d'un
blanc rosàtre moucheté de vert tendre, doivent leur cou-
leur à l'absence de l'amphibole, et sans doute, des oxydes
de fer. Un nodule noirâtre montre la même pâte que la
roche environnante, avec plus de quartz, de hornblende
et de biotite. Un autre a montré beaucoup de magnétite
à la place de biotite. Dans aucun on n'a observé trace d'élé-
ments élastiques. Un noyau avec veine d'eurite rosâtre
montre que la teinte foncée est dfie à la hornblende et à la
magnétite.
Malgré sa ténacité exceptionnelle et la profondeur des
carrières, cette roche est toujours plus ou moins altérée.
Une altération notable, pénétrant si profondément, est-elle
le résultat des conditions locales de la cristallisation primi-
tive, ou d'émanations hydro-thermales postérieures? La
présence de sulfures, de poches à cristaux avec quartz, etc.,
porterait à choisir la seconde hypothèse.
Les minéraux accidentels, qui sont très-nombreux, se
trouvent principalement dans les géodes des bancs pâles,
à texture peu porphyrique, et dans les zones d'altération.
Ce sont particulièrement : le quartz et l'épidote; la chlo-
rite et la calcite; puis la pyrite, la marcassite et la chalco-
pyrite, rarement la galène, la bornite (phillipsite), l'asbeste,
l'amphibole, l'axinite; très-rarement la tourmaline, le
sphène et l'épidote rouge. C'est la première fois, croyons-
nous, que ces trois dernières espèces sont signalées dans
nos roches éruptives. La tourmaline se trouve ici en aiguil-
( 755 )
les prismatiques, noires, opaques, atteignant un centimètre
de long et 0,2 millimètre de large, sur lesquelles M. vom
Rath a reconnu l'angle de l'espèce, et dont les auteurs ont
constaté la pyro-électricité. Le sphène est en petits cristaux
orangés, offrant des sections rhombiques allongées.
L'ordre de formation de ces minéiaux est variable. En
général, le quartz a cristallisé un des derniers.
L'épidole, qui est parfois en très-beaux écbantillons, a
été analysée par les auteurs, qui en ont aussi indiqué les
formes cristallines.
Le zoïsite, qui a été signalé à Quenast, paraît n'être
qu'une variété d'épidote.
A Lessines, la surface du massif porpbyrique dépasse
davantage les limites que Dumont avait pu lui assigner.
Les auteurs l'ont reconnu sur la rive gauche de la Dendre;
on l'a indiqué entre les deux Dendres et près de la Grande-
Place de Lessines. La roche est la même qu'à Quenast,
sauf les particularités suivantes.
La division en bancs est très-marquée. La direction de
ces bancs est comprise entre 116" et 118°, avec une incli-
naison de 20° à 4-0" au SSO. D'autres fissures presque per-
pendiculaires partagent la roche en gros prismes à 4, S ou
6 pans. Cette division fait rarement défaut; elle rappelle
celle des basaltes par la fréquence des lignes brisées qui
résultent de la succession des prismes. Les joints (cisages)
principaux, perpendiculaires aux prismes, indiquent les
surfaces d'égal refroidissement. Ils ont été redressés. On ne
saurait dire s'ils sont en concordance, ou non, avec le ter-
rain silurien qui entoure le massif, c'est-à-dire, s'ils lui sont
contemporains ou postérieurs.
L'épidote est généralement plus rare ici qu'à Quenast; la
( 7S6 )
chalcopyrite, au contraire, est plus commune. Le minéral
prismatique du type du pyroxène n'a pas été retrouvé ici;
la calcite est plus commune; les parties euritiques, plus
abondantes; les feldspaths, plus ternes; la décomposition,
plus avancée. Cela indique moins d'uniformité dans les
conditions physico-chimiques de la formation.
D'après M. Delesse, la pâte feldspathique serait un ré-
sidu de cristallisation, de composition non définie ; sem-
blable opinion est admise par beaucoup d'auteurs pour les
porphyres. Cependant le microscope montre celte pâte
formée de grains cristallins de quartz et de feldspath, sans
interposition de substance amorphe.
Cette roche renferme, outre l'oligoclase, reconnu et ana-
lysé par M. Delesse, de l'orthose, plus rare qu'a Quenast,
souvent difficile à caractériser, à cause de son altération,
mais reconnaissable à la macle de Carisbad et aux couleurs
complémentaires qui en sont les conséquences à la lumière
polarisée. L'oligoclase y forme des cristaux polysynthé-
tiques, manifestement altérés. La hornblende s'y trouve
en fines aiguilles accumulées en cristaux de structure plus
ou moins confuse, ordinairement zonaires par suite de
l'altération.
Les minéraux accidentels sont, outre l'épidote, la cal-
cite et le quartz, l'apatite, la biotite, la magnétite et
l'ilménite. Les cristaux d'apatite et d'ilménite, que nous
reverrons ailleurs, sont indiqués pour la première fois
dans notre pays.
La forme dihexaèdre du quartz est celle qu'il affecte
dans les porphyres quartzifères, qui sont très-voisins des
diorites. Ce minéral renferme, comme à Quenast, des
enclaves liquides; les plus petites sont sphériques; les
autres, ordinairement allongées; toutes sont extrêmement
. ( 757 )
petites. Beaucoup d'entre elles renferment, outre une bulle
gazeuse mobile, de petits cristaux cubiques, dont la sur-
face striée en damier indique un clivage cubique. Un
échauffement de 200" n'y amène aucun changement.
Liquide, bulle et cristal ont donc été enclavés lors de la
cristallisation du quartz. La seule présence de la bulle
gazeuse empêcherait d'admettre une infiltration de liquide
dans des pores, que d'ailleurs on n'aperçoit jamais. L'inva-
riabilité de la bulle, malgré réchauffement, montre que le
liquide n'est pas de l'anhydride carbonique, comme Yogel-
sang l'a observé dans des circonstances analogues. Les
cristaux cubiques indiquent une solution saturée de chlo-
rure alcalin, comme M. Sorby en a trouvé ailleurs. A l'aide
de l'analyse spectrale, les auteurs sont parvenus à carac-
tériser nettement le sodium ; et ils ont reconnu le chlore
à l'opalescence que le nitrate d'argent détermine dans
l'eau distillée oiî l'on a mélangé du quartz pulvérisé. La
présence de chlorure sodique dans une roche plutonique
ne doit point nous étonner, si nous nous rappelons que
les roches volcaniques contiennent souvent une proportion
notable de ce sel, et si nous songeons aux analogies exis-
tant entre ces roches et les roches plutoniques.
Il résulterait de ce qui précède une conséquence impor-
tante : c'est que l'eau de la mer est intervenue dans la
formation de la diorite de Quenast et de Lessines.
En s'appuyant sur la solubilité connue du chlorure de
sodium, qu'ils admettent comme suivant la même loi jus-
qu'à une température élevée, et en tenant compte des
dimensions de la cavité, de la bulle et du cristal à diverses
températures, les auteurs calculent que la solidification se
serait faite à la température de 507", soit sous une pres-
sion de 87 atmosphères.
( 758 )
Indépendamment des enclaves solides, micro-cristallines
comme la pâle, que renferme la diorite de Lessines, cette
roche renferme aussi des aiguilles microscopiques(apatite?),
et des prismes basés d'apatite, atteignant 0,5 millimètre,
qui ont cristallisé en premier lieu. La biotile, qui est fort
secondaire, dérive peut-être de la hornblende. L'ilménite
et la magnélite se trouvent en grains cristallins au voisi-
nage du mica, dont ils proviennent sans doute quelquefois;
mais le plus souvent la magnélite semble dériver de la
hornblehde. Le fer tilané est recouvert, comme partout
en Belgique, d'une substance blanchâtre presque opaque.
Quelques lamelles verdàires paraissent être de l'amphibole
altérée plutôt que de la chlorite; cette dernière espèce
paraît cependant exister aussi dans la roche. L'épidote est
généralement associée à la calcile, occupant la place d'un
cristal d'oligoclase décomposé. Le sphène n'a pas été re-
trouvé ici.
2. Gabbro de Hozémont.
(Hypersthénite de IJumonl.)
La seule excavation qui existe actuellement est très-
dégradée, elle n'atteint pas les limites du culot, et l'on
n'observe même pas le terrain silurien au voisinage immé-
diat. La roche présente de nombreux joints, les uns plans,
les autres courbes, produisant dans certains endroits une
structure globuliforme. Par suite de l'altération superli-
cielle, il s'est produit des boules à couches concentriques.
Les auteurs reproduisent la description de Dumonl,
qu'ils confirment en général. Seulement, ils ne reconnais-
sent ni pâte eurilique, ni hypersthène.
Le feldspath, plagioelase , parait être du labrador. La
quantité de silice que les auteurs y ont trouvée est un peu
( 759 )
faible (46 %); mais ils attribuent la différence à l'altération
du minéral. 11 est pourtant moins altéré que dans nos
autres roches. L'altération commence souvent par le centre.
Les cristaux, macles polysynihétiques, sont quelquefois
brisés, à fragments un peu courbés, comme s'ils avaient
été entraînés lorsque la substance était encore un peu
plastique. L'examen microscopique montre un agrégat
granitoïde de ce feldspath et de diallage : la roche est doue
un gabbro, comme je l'avais présumé, il y a longtemps.
La diallage se présente en cristaux fendillés, à contours
peu nets, offrant quelques sections rhombiques, brun-ver-
dâtre, non dichroscopiques. Sa belle polarisation chroma-
tique rivalise avec celle du quartz. Elle est associée à la
hornblende fibreuse ou asbesle, à polarisation chromatique
assez vive, dichroscopique.
Entre les cristaux précédents se rencontre cependant
une substance verdàtre qui a pu être prise pour une pâte
euritique. Elle paraît en grande partie isotrope, et formée de
fibres parallèles légèrement ondulées. Les auteurs la consi-
dèrent comme une matière serpeutineuse, et produit de
décomposition; cependant on n'y a pas observé de péridot.
Cette matière serpentineuse est très-commune dans les
gabbros (euphotides ophiteuses de Brongniart).
Cette matière empâte des microlithes prismatiques indé-
terminables, et des prismes plus grands qui i)araissent
être de l'actinole; puis, de l'apatite en prismes de 0,2 mil-
limètre de long, souvent divisés en nombreux tronçons;
de l'ilménite, entouré d'un produit de décomposition que
nous avons déjà signalé ; rarement de la pyrite et du quartz.
La calcite s'y rencontre aussi comme produit secondaire.
Les auteurs font connaître ensuite la première atralyse
du gabbro de Hozémont. Le quotient d'oxygène est ^4; la
siJice y entre pour 46 7o-
( 760 )
3. Porphyroïdes de Fauquez, de Rebecq-Rognon
et de Pilet.
(Chlorophyre et porphyre schistoïdes et albite phylladifère de Dumont.)
Nous arrivons à des roches schisto-porphyroïdes qui
paraissent régulièrement intercalées dans les couches
siluriennes du Brabant. Dumont les considérait comme des
fdons couchés. M. d'Omalius et moi-même avons été
tentés d'en considérer le plus grand nombre comme méta-
morphiques; plus tard je me suis demandé s'ils n'étaient
pas les équivalents des cendres feldspathiques interstrali-
fiées dans le terrain silurien du pays de Galles. Les auteurs
leur appliquent le nom de phorphyroïdes. Ils s'occupent
d'abord de celles que l'on rencontre dans la vallée de la
Méhaigne (albite phylladifère de Pitet) et dans le Brabant,
entre Enghien et Monstreux, près de Nivelles, le long d'une
ligne qui, d'après Dumont, est orientée 1 16 Va"-
Ces dernières roches n'apparaissent, le long de cette
ligne, qu'en des points généralement éloignés et sur des
espaces fort resserrés. Les intervalles sont occupés par des
sables tertiaires et du limon quaternaire qui cachent les
roches sous-jacentes; de sorte que les auteurs considèrent
ces gîtes plutôt comme réunis que comme des culots isolés,
ainsi que l'admettait Dumont. La comparaison avec les
cendres volcaniques conduit à la même idée.
Ces porphyroïdes se voient le mieux près du hameau de
Fauquez , au S. de Virginal. On y trouve le chlorophyre
schistoïde, qui passe au porphyre schistoïde par diminution
de ciilorite et augmentation de phyllade. Le porphyre
schistoïde passe enfin à l'albite phylladifère. Les auteurs
reproduisent les descriptions que Dumont a données de
( 761 )
ces roches, et en confirment l'exactitude; mais ils ajoutent
beaucoup de détails. Dans le vallon de Fauquez, elles
forment une zone de 80 à 100 mètres de large, dont la
direction varie de 105 à 130°, avec une inclinaison au NE.
de 35" à 80°. La partie inférieure est surtout formée
d'albite phylladifère, la partie moyenne et supérieure, de
porphyre schistoïde passant çà et là au chlorophyre schis-
toïde. On trouve dans ces roches, non-seulement des par-
ticules, mais même des fragments de phyllade couchés à
plat, dont l'origine paraît différer de celle des enduits
phylladeux : ils sont d'origine antérieure, tandis que les
enduits ont été formés sur place. Ces fragments paraissent
être du phyllade ou de la séricite.
Ces roches de Fauquez n'ont jamais la structure mas-
sive. Assez souvent elles deviennent celluleuses par dispa-
rition du feldspath , puis la calcile se développe dans les
cavités comme produit secondaire. Il en est de même pour
le quartz.
Leurs limites supérieure et inférieure ne sont pas
visibles dans le vallon de Fauquez; mais, à 900 mètres de
là, dans un chemin au NE. de l'écluse n" 40, il y a une
exploitation abandonnée des derniers bancs supérieurs. On
y voit : 1" une porphyroïde schisto-compacte, dir. 140°,
incl. NE. = 35° à 40°; elle renferme des cristaux arrondis
de feldspath et des fragments de phyllade; 2° une eurite
quartzeuse schisto-compacte, avec fragments de quartzite
et de schiste; elle est séparée de la porphyroïde par une
ligne très-nette et ondulée; 3° une eurite plus ou moins
quartzeuse, compacte, avec lits schistoïdes ; elle ren-
ferme des fragments assez gros ou des noyaux de porphy-
roïde à grands cristaux de feldspath. Ces derniers bancs
sont. incontestablement d'origine sédimentaire : ces frag-
2"" SÉRIE, TOME XXXVIIl. 49
( 762 )
ments sont des débris des roches porphyriques sous-
jaceutes, disséminés avec le sable et les boues feldspa-
thiques. La netteté de leurs contours ne permet pas de les
considérer comme métamorphiques. Les porphyroïdes de
Fauquez ne sont donc ni un porphyre d'intrusion, ni un
produit du métamorphisme: ce sont des roches conglo-
mérées contemporaines. Mais il ne faut pas perdre de vue
qu'elles ont été grandement modifiées depuis le premier
rassemblement de leurs éléments , de même que les sables
voisins sont devenus des quartzites, et les argiles, des
phyllades. Les enduits phylladeux et sériciteux sont des
produits postérieurs.
Les bancs supérieurs passent à des phyllades verdâtres
que l'on voit un peu au nord; ceux-ci sont suivis, à
250 mètres plus loin, par de nouvelles porphyroïdes que
Dumont n'a pas mentionnées. Ces roches forment donc
plus d'une bande.
Les autres aflleurements de ce canton sont très-impar-
faitement visibles et fort altérés; il est aisé néanmoins d'y
reconnaître la même composition minéralogique.
Sur la Méhaigne, à Pitet, Dumont a signalé en 1830
deux gîtes de porphyroïdes semblables. Le premier se
trouve au monticule que surmonte l'église en ruines du
Saint-Sauveur; le second est situé à 500 mètres plus au
sud, à la rive gauche de la rivière. Ils paraissent se pro-
longer sur la rive droite.
D'après Dumont, la roche de Pitet serait une albite
phylladifère, passant à l'eurite. Après avoir reproduit sa
description, les auteurs ajoutent que le phyllade est inti-
mement uni à une pâte euritique feuilletée qui paraît
dominer là où le grain s'atténue ; son éclat nacré rappelle
( 765 )
singulièrement les séricites du Taunus. Les grains de
feldspath sont plagioclases, plus ou moins arrondis, enve-
loppés des enduits phylladeux et euritiques et donnant
lieu ainsi à une texture entrelacée, gneissique. Cette
texture est encore un caractère des Sericitschiefer du
Nassau.
Le gîte de S^-Sauveur est ouvert sur 80 à 100 mètres,
perpendiculairement à la direction. Les bancs se succè-
dent régulièrement et paraissent concorder avec le terrain
silurien du voisinage. Ceux du nord, probablement les
plus anciens, renferment des fragments schisteux. En
général, le grain diminue en allant vers le sud, où do-
mine une eurite quartzeuse plus ou moins schistoïde, avec
bancs renfermant des paquets cristallins d'albite phylladî-
fère, en noyaux, fragments ou petites couches, qui sont
probablement des fragments de quelque couche anté-
rieure. On n'aurait donc pas affaire à un typhon, mais à
une suite de bancs contemporains du terrain environ-
nant : celte conclusion est confirmée par l'analogie avec
les porphyroïdes de Fauquez.
Le gîte méridional se montre sur une vingtaine de
mètres de long et 12 à lo mètres de haut, mais une por-
tion notable est recouverte de débris. C'est un diminutif
du précédent. Au sud, on peut voir le contact avec le
terrain silurien , formé de phyllades compactes que Du-
mont et M. Malaise considèrent comme échauffés, mais
qui ont été probablement métamorphosés sans l'influence
d'une chaleur notable. Les bancs montrent une disposi-
tion anliclinale qui pourrait faire croire que le typhon les
a redressés; mais, au nord, on ne voit pas de couches
siluriennes; de sorte que c'est la roche soulevante qui
formerait le A , ce qui est inconciliable avec le rôle qu'on
( 764 )
lui aiuibue. Un plissement ou une faille, choses difficiles
à constater dans l'état présent des lieux, expliquerait cette
disposition.
En résumé, ces roches de Fauquez et de Pitet parais-
sent des roches sédimentaires métamorphiques, comme le
reste du terrain silurien; elles impliquent donc l'antério-
rité, dans la mer silurienne, de roches cristallines d'ori-
gine tout autre, filons (Lembecq) ou nappes (Quenast et
Lessines), qui leur ont fourni une grande partie de leurs
matériaux.
L'examen microscopique conduit aux mêmes conclu-
sions.
Ici pourtant la distinction des divers minéraux qui
constituent nos porphyroïdes , est très-difficile. Il est or-
dinairement impossible de distinguer les diverses espèces
de talcs, de chlorites, de sérielles et même de micas. En
outre les signes caractéristiques d'un transport font ha-
bituellement défaut. Néanmoins , grâce à la structure
schisto-porphyroïde, les conclusions peuvent généralement
être considérées comme certaines.
Voyons d'abord le massif septentrional de Pitet. La pâte,
micro-cristalline, montre des plages renfermant du quartz
et du feldspath altéré, quelquefois en grains de plusieurs
millimètres, cimentés par un élément pbylladeux jaunâtre,
vert-pàle ou incolore, qui produit la schistosité et res-
semble tout à fait à la séricite du Taunus. On y observe en
outre une substance verdâtre, écailleuse, qui s'éteint en
partie sous les prismes de Nicol croisés. Tous les feldspaths
sont brisés et dentelés aux extrémités, crevassés, émoussés
sur les angles, montrant ainsi la trace d'un transport mé-
canique. Presque tous sont plagioclases; en général, ils
( 765 )
sont plus ou moins altérés, suivant le développemtMit de
la phyllite, qui paraît donc provenir de leur décomposi-
tion, ils sont criblés de pores vides ou pleins d'air. C'est
probablement de l'ai bile.
Les grains de quartz sont irréguliers, quelquefois formés
par une agglomération de grains plus gros que ceux de la
pâte; ils renferment des enclaves liquides. Quelques grains
peuvent cependant avoir cristallisé sur place.
L'élément phylladeux est la séricile, presque incolore,
non dichroscopique, plutôt fibreuse que lamellaire, à fibres
entrelacées, ce qui la distingue des micas. Elle est beau-
coup plus abondante près des feldspaths que près du
quartz. Quelques plages vertes, fibreuses ou écailleuses,
isotropes, sont restées indéterminées : les auteurs les
désigneront provisoirement sous le nom de viridile.
A la chapelle du S'-Sauveur, les éléments sont ana-
logues, avec très-peu de séricite. La viridite est sensible-
ment dichroscopique.
Les paquets cristallins disséminés dans l'eurite porphy-
rique qui paraît surmonter les autres couches, n'ont point
montré de pâte micro-cristalline : elle est remplacée par
une substance écailleuse d'un vert pâle. Les plagioclases
sont plus grands, mais toujours fragmentés. Le quartz a
cristallisé sur place, enclavant de la viridite , etc.
En résumé les roches de Pitet sont formées d'une pâte
micro-cristalline de quartz et de feldspath, d'un grain
ordinairement assez fin, entremêlée de viridite, prenant
une structure schisteuse par l'interposition de séricite, et
une texture porphyroïde par suite de fragments de quartz
et de feldspath. En admettant que ce dernier est l'albite,
tous ces caractères concordent avec ceux des porphi/ro?les
du Taunus et des bords de la Lenne.
(766)
Les roches de Fauquez ressemblent beaucoup aux pré-
cédentes, mais elles sont plus métamorphiques et plus
altérées. Dans la masse centrale, on voit au microscope
une pâte micro-cristalline de feldspath et de quartz, ren-
fermant de grands cristaux de feldspath, presque tous
plagioclases, disloqués , échancrés, fissurés, mais pourtant
dans lesquels la décomposition a plus fait, pour ces muti-
lations, que le transport. Le quartz, tantôt détritique,
tantôt cristallisé sur place, est moins abondant qu'à Pitet.
La viridite s'éteint entre les prismes de Nicol croisés et
ne montre aucune trace de dichroscopisme.
Vers le milieu de la bande, la roche montre de même
beaucoup de plagioclases avec quelques grains d'orthose,
du quartz, en partie formé sur place, de la séricite et de
la viridite. Il en est de même pour le dernier banc visible
au NE., sauf que les parties constituantes sont plus pe-
tites, et qu'il y a moins de quartz et peu de séricite.
La roche du Chenois est analogue aux précédentes. Les
plagioclases ont l'aspect aussi fragmentaire qu'à Pitet. Le
fer titane s'y montre çà et là.
Porphyroïde de Steenkuyp (chlorophyre schistoïde du
Vert-Chasseur, Dumonl). Un îlot de porphyroïde, occu-
pant moins de 100 mètres carrés, se rencontre à 500 mè-
tres du coude que fait la route de Bruxelles à Enghien, à
l'est du hameau de Steenkuyp. Cette roche se trouve en
bancs stratoïdes, qui inclinent au NE. de 50 à 40". On y
voit des grains de plagioclase et des lamelles d'aspect chlo-
riteux, unies à la pâte, feuilletées-ondulées, donnant à la
roche une texture inconnue dans les roches éruptives.
Quelques grains paraissent être de l'épidote. Les cristaux
d'apatite y sont communs et plus grands que partout
( 767 )
ailleurs; ils atteignent parfois près d'un millimètre de
diamètre. Cette roche est un porphyre en nappe ou plutôt
une porphyroïde.
Les fragments, très- altérés, qui proviennent de la
Grande-Haye et du Croiseau, ont la plus grande analogie
avec la roche précédente.
Contrairement à ce qu'avait pensé Dumont, le micros-
cope n'a point montré d'analogie entre ces chlorophyres
schistoïdes et le chlorophyre massif de Quenast et de
Lessines. Les premiers seraient plutôt un porphyre quart-
zifère. La pâte est la même qu'à Quenast; le feldspath est
de l'orlhose, rarement un plagioclase; il est entouré et
traversé par une substance verdàtre. Le quartz paraît
avoir cristallisé sur place. Une substance verdàtre, que
l'acide chlorhydrique décolore, paraît être de la chlorite ;
sa polarisation chromatique la distingue de la viridite. On
voit que l'absence d'amphibole sépare nettement ce por-
phyre de la diorite de Quenast.
4. Arkoses.
Les arkoses du Brabant, très-bien décrites par Dumont,
se rencontrent partifeulièrement vers Hal , Lembecq, Tu-
bize et Clabecq. Dumont les considérait comme des grès
argileux, devenus feldspalhiques et chioritifères sous l'in-
fluence du métamorphisme produit par les masses plu-
toniennes sous-jacentes, dont les typhons connus peuvent
faire admettre la présence. Les auteurs ont jugé utile d'en
faire l'étude microscopique; et cet examen leur a montré
que le feldspath et une grande partie du quartz provien-
nent du transport.
(768)
D'ailleurs, on voit à l'œil nu, dans les arkoses pisaires
de Lembecq et de Clabeeq, des cristaux de feldspath de
plusieurs millimètres, réduits à des grains arrondis. En
outre, elles renferment parfois des fragments irréguliers
de schiste ou phyllade non feldspathisé. Les phyllades qui
séparent ces bancs ne diffèrent pas des phyllades étran-
gers à la zone de métamorphisme supposé.
Au microscope ces arkoses de Clabeeq et de Lembecq,
qui quelquefois ont été prises pour des porphyres, accu-
sent le caractère le plus élastique. Une partie des lamelles
verdâtresque Dumont a considérées comme de la chlorite,
proviennent de la décomposition de l'amphibole? La grande
majorité des grains de feldspath sont plagiociases.
L'arkose de Tubize montre une pâte peu abondante ,
micro-cristalline. Les grains de quartz et de feldspath sont
cimentés par une matière verte, biréfringente, fortement
dichroscopique, qui paraît être de l'amphibole décomposée.
Le quartz est de beaucoup le minéral le plus abondant. Les
feldspaths sont polysynthétiques, plagiociases. Le mica se
trouve en lamelles parallèles, généralement courbées.
Quelques sections rhombiques, noires et opaques, accusent
la présence du fer titane.
A Clabeeq, la pâte est analogue a la précédente, riche
en micas et en grains métalliques opaques. Dans la partie
altérée qui joint le phyllade, la composition est très-voi-
sine: on y a observé en outre de la hornblende.
L'arkose du chemin au sud est fort altérée et diHicile à
polir. Elle montre la même pâte, avec plus de fer titane
et moins de mica. La viridite ne montre aucun caractère
qui permette de la rattacher à l'amphibole.
( 769 )
5. Porphyre quart-ifère de Spa.
(Eurite et hyalophyre pailletés, Dumont).
On trouve au cimetière de Spa des débris d'une roche
que Duniont a décrite sous le nom d'hyaiophyre : c'est,
suivant les auteurs, un porphyre quartzifère gris-jaunàtre;
les cristaux de feldspath ne dépassent pas trois millimètres
et sont presque toujours beaucoup plus petits; ils se rap-
portent à l'orthose. Le quartz s'y présente en nombreux
dihexaèdres de même grandeur. Quelques lamelles noirâ-
tres, dont l'examen optique n'a pu être fait, semblent se
rapporter à une chlorite. Celte roche, dont les minéraux
ont cristallisé sur place, semble éruptive; c'est le meil-
leur type de porphyre quartzifère de notre pays.
A la Promenade des Français on trouve une eurite
quartzeuse avec de très-petits cristaux de feldspath et de
petits prismes aciculaires restés indéterminés. Elle paraît
être éruptive et former un filon transversal, ce que con-
hrme sa texture fluidale que révèle le microscope.
Vu au microscope , le porphyre du cimetière montre
une pâte micro-cristalline de feldspath et de quartz, ren-
fermant de nombreux cristaux d'orthose à contours très-
nets, de 0,5 à 1 millimètre, et montrant de nombreux
points noirs indéterminés. Les cristaux de quartz sont
criblés d'enclaves liquides. Un minéral vert-jaunâtre (horn-
blende décomposée?) forme comme un réseau danslapàte.
La roche de la Promenade des Français montre une
structure analogue, avec une disposition fluidale de la
pâte. Les grands cristaux de feldspath sont de l'orthose ;
un seul a été trouvé plagioclase. Il y a quelques lamelles
[ 770 )
de mica et le minéral vert est plus abondant et fibreux.
L'eurite de la Promenade de Sept-Heures est très-allé-
rée. Elle montre une microstruclure analogue, le feldspath
étant moins individualisé. Les auteurs croient que l'on peut
la maintenir sous ce nom.
Jusqu'à plus ample examen je serais porté à considé-
rer les deux roches qui précèdent comme des eurites
porphyroïdes plutôt que comme des porphyres.
6. Diorite quarlzifère du Champ S'-Véron, à Lembecq.
On n'aperçoit plus rien à l'endroit où Dumonta figuré
sur sa carte l'emplacement de sa diorite chlorilifère de
Lembecq. Au Champ S'-Véron , gîte découvert en 1861,
on trouve une masse rocheuse cristalline, dont la surface
estglobuleuse comme à Lessines,àQuenast et à Hozémont.
Elle forme des bancs épais, dir. lOo", fortement inclinés,
coupés par des fissures presque horizontales où ont cris-
tallisé du quartz, de l'épidote, de la chlorite et un mica
biaxique. Lors de l'exploitation, on trouva, au nord,
d'autres fissures quartzeuses, avec galène, chalcopyrile,
malachite, etc. Au nord et au sud la roche devient schis-
loïde et passe à l'amphibolite schistoïde, alternant avec du
quartzite et fortement altérée. A l'œil nu, c'est un agrégat
graniloïde, formé 1" de hornblende noire ou verte, en
prismes ou en lamelles, qui alteigîienl quelquefois un cen-
timètre, possèdent un éclat très-vif et offrent la forme mg'
avec les clivages caractéristiques; 2" de feldspath très-iné-
galement réparti, de sorte que certains échantillons ne
sont guère qu'amphibolite, tandis que d'autres passent à
l'eurite; les cristaux gris sont plagioclases; les autres, roses,
paraissent être de l'orthose. On y trouve accessoirement
( 771 )
du quartz en petits grains, plus ou moins abondants,
surtout sur les échantillons pâles, passant à l'eurite. Vient
ensuite l'épidote, en petites masses grenues, vert-tendre,
ou tapissant les feldspaths. Comme à Quenast, elle se déve-
loppe particulièrement dans les parties euritiques, ainsi
que dans les tissures. Enfin un minéral vert-poireau, fibreux
ou écailleux, paraît avoir été pris pour chlorite par Dumont
et n'est probablement qu'une viridite. La chlorite s'y
trouve aussi, mais il y a des raisons de la considérer
comme secondaire ; de sorte que la roche devrait être
nommée dioritequartzifère, plutôt que diorite chloritifère.
Au microscope des échantillons de diorite recueillis par
Dumont n'ont point montré de pâte euritique. La horn-
blende y abonde, mieux caractérisée que dans toutes nos
autres roches par son dichroscopisme et ses clivages. La
viridite l'enveloppe quelquefois et résulterait alors de sa
décomposition. Le quartz, qui parait être au deuxième
rang par son abondance, est criblé d'enclaves liquides. Le
feldspath est très-altéré; il semble se rapportera l'or-
those.
Les échantillons du champ S'-Véron sont fort analogues.
r.e feldspath est peu abondant, plagioclase; de fines aiguil-
les verdâtres sont associées à l'amphibole. Accidentelle-
ment on y trouve de l'apatite, de l'épidote et du fer titane.
7. Roches des Ardennes françaises.
Décrites par Dumont avec la précision qui le distingue ,
ces roches se montrent partout en concordance avec les
couches neptuniennes ; Dumont les a néanmoins considé-
rées comme des filons couchés éruptifs. Deux faits, observés
sur plusieurs points, sont en contradiction avec cette
( 772 )
manière de voir : d'une part, on trouve des cailloux roulés
de feldspath el de quartz dans quelques uns de ces gîtes; de
l'autre, leur structure fjneissique les rapproche des schistes
cristallins, des porphyroïdes, etc., qui sont des roches
stratifiées, tandis qu'elle ne se rencontre presque jamais
dans les roches d'intrusion. On retrouve cette structure, à
l'aide du microscope, dans les bancs centraux, où elle a
disparu à l'œil nu. Enfin, cette structure entrelacée se
reconnaît aussi dans les roches sédimentaires rencais-
santes.
On peut souvent constater des relations intimes entre
les porphyroïdes (hyalophyres), les amphibolitesschistoïdes
plus ou moins feldspathiques (albites chloritifères et al-
bites phylladifères), et les roches granitoïdes appelées
jusqu'ici diorites, mais dont plusieurs devront être nommées
amphibolites granitoïdes.
Les hyalophyres renferment fréquemment de l'amphi-
bole et passent à des phyllades feldspathiques plus ou
moins calcareux, oiî le microscope montre de nombreux
prismes de hornblende. De leur côté les amphibolites
passent à des bancs schistoïdes, difficiles à distinguer de
ceux qui renferment les hyalophyres.
L'amphibolile grenue de Laifour (diorite des Forges de
la Commune, Dumont) offre une structure granitoïde
sans alignement des éléments. 11 n'y a point de pâte; la
hornblende est en voie de décomposition et enchâssée
dans le quartz comme les autres minéraux, viridite, feld-
spath; on y observe accidentellement du fer titane, de
l'épidote, de l'asbeste, de l'apatite et de la calcite.
Une diorite de Riraogne, recueillie par Dumont, est
granitoïde, formée de hornblende et de feldspath plagio-
clase, avec quartz en quantité assez notable, renfermant
( 773 )
des microlithes en nombre prodigieux (apatite, etc.) et des
enclaves liquides. On y trouve accidentellement de l'épi-
dote et du fer titane.
L'étude de quelques hyalophyres semble les faire rap-
porter aux porphyres quartzifères. L'hyalophyre massif de
Mairu, près Deville, présente évidemment la structure
gneissique. On y trouve la biolite en lamelles courbes pa-
rallèles; mais les gros cristaux d'orthose, d'oligoclase et
de quartz ont un caractère élastique qui les sépare du
gneiss. La pâte est un agrégat de lamelles de mica et de
grains de feldspath et de quartz ; elle renferme de la
hornblende, qui s'aligne comme le mica. Le quartz est
remarquablement riche en enclaves liquides.
Les auteurs ajoutent l'analyse de cet hyalophyre de
Mairu et celle de l'amphibolile grenue de Laifour. Le quo-
tient d'oxygène du premier est 0,19 ; celui de la seconde,
0,70. Ce dernier me paraîtrait indiquer plutôt une diorite
qu'une amphibolite.
Ici se termine l'analyse du remarquable travail dont
j'avais à rendre compte à la classe. J'ai maintenant quelques
observations à présenter.
Bien que l'analyse chimique de ces roches nous éclaire
beaucoup moins sur leur constitution que l'examen micros-
copique, je crois néanmoins qu'elle est indispensable pour
compléter nos connaissances à cet égard. Les auteurs n'en
ont pas méconnu l'importance. Ils nous en donnent quatre,
mais je crois qu'on pourrait en désirer davantage. Je re-
marque aussi que le fer du gabbro de Hozémont, de l'am-
phibolile de Laifour, de l'hyalophyre de Mairu est dosé à
l'état ferreux , sans autre explication ; la première de ces
roches renferme probablement du manganèse, la deuxième,.
i 774 ]
des alcalis, qui ne sont pas indiqués. Enfin, l'acide phos-
phorique, dont le microscope a indiqué la présence à l'état
d'apalile, mériterait dans certains cas un essai de dosage
spécial.
Il y aurait aussi quelque avantage à figurer le gisement
de quelques-unes de ces roches. Des figures sur bois entre-
raient dans le texte sans grands frais.
La partie principale de ce travail concerne l'élude mi-
croscopique de nos roches pluloniennes ou considérées
comme telles: sous ce rapport, on ne pourrait rencontrer
mieux. Étant personnellement peu familier avec l'emploi
du microscope dans ce genre de recherches, j'hésiterais à
dire tout le bien que j'en pense si, d'un côté, les excel-
lentes figures que les auteurs ont dessinées, ne présentaient
certaines garanties d'exactitude, et si, d'autre part, l'as-
sentimeni donné à plusieurs de leurs interprétations des
cas embarrassants par les premiers micrographes de notre
temps, MM. vom Rath, Sorby et Zirkel, ne me rassurait à
cet égard. Je crois donc pouvoir dire que, non-seulement
il n'existe en français aucune monographie comparable à
celle qui nous est soumise, mais encore que celle-ci peut
rivaliser avec ce qui s'est fait de mieux à l'étranger.
Ma lâche serait donc bien simple si les auteurs avaient
traité de loules les roches indiquées par le programme
du concours ; mais, comme ils le disent, le temps leur a fait
défaut pour plusieurs d'entre elles, notamment les euriles
de Grand-Manil et de Nivelles ; j'ajouterai môme que le
chapitre consacré aux roches de l'Ardenne fiançaise est
tout à fait insuffisant. En présence d'un travail incomplet,
l'usage n'est pas de décerner la médaille d'or; toutefois,
comme les divers chapitres concernant nos différentes
roches éruptives sont complètement indépendants les uns
( 775 )
des autres; comme ceux qui nous sont soumis, sont traités
d'une façon tout à fait remarquable ; comme , enfin, les au-
teurs — qui n'ont pas de concurrents — nous ont déjà
envoyé une première suite à leur mémoire et qu'on a tout
lieu d'espérer que le travail sera achevé avec le même soin
et le même succès, je n'hésite pas à proposer d'accorder
aux auteurs la médaille d'or et d'imprimer leur mémoire
dans le recueil des Mémoires couronnés, avec les planches
qui l'accompagnent. »
Rapport de .V. C Matai» ff.
« Dans le but de montrer à la classe ce que les auteurs
ont fait et ce qui reste à faire, je crois indispensable d'in-
diquer d'abord, d'une façon un peu aride, il est vrai, les
gisements actuellement connus des roches cristallines de
la Belgique et de l'Ardenne française. Je suivrai l'ordre
alphabétique et j'emploierai les noms donnés par A. Dû-
ment. Tout étant à refaire ou à vériOer pour ce qui con-
cerne la composition de ces roches, je préjugerai moins
de celte façon quant à ce qui sera indiqué par des recher-
ches ultérieures. On sait que dans les observations faites
jusqu'à présent on avait plutôt fait attention aux carac-
tères macroscopiques, c'est-à-dire à l'examen en grand des
roches; les auteurs se sont attachés à l'examen microsco-
pique. Les indications de gisements qui suivent sont résu-
mées d'après les travaux de Dumont et de ceux qui, après
lui, ont traité du point qui nous occupe. J'ai joint aussi
quelques observations personnelles.
VaWile chloritifère a été signalée dans plusieurs points
du massif de Rocroy : 1° au S. de l'aftleurement d'ardoise
( 776 )
de Pierreca à '/i de lieue au N. du Châtelet ; 2° unie à la
diorite chloritifère à l'ancienne Grande-Fosse; 5° en blocs
mélangés à ceux de diorite au NNE. de Rimogne; 4° en
blocs à quelques centaines de mètres au N. de la Neuve-
Forge (Filons de Faux , Dumont); 5° à 200 mètres au S.
du moulin de Mairus ; 6" entre les Forges de la commune
et Laifour (rive droite de la Meuse) ; 7° sur la même rive
en descendant la Meuse au SO. de Laifour; 8° des traces
entre Laifour et Revin à ^/i de lieue au S. d'Anchamps et
entre Anchamps et Revin ; 9° vis-à-vis du moulin situé sur
le ruisseau de Faux à 800 à 900 mètres du fourneau de
Revin.
Ualbite phylladifère se rencontre en différents points
des bords de la Méhaigne, dans le massif du Brabant, à
Pitet (Fallais); et à Monstreux et Fauquez (Ittre).
Ualbite phylladifère a été observée dans le massif de
Rocroy : 1° au S. de l'affleurement du massif d'ardoise de
Pierreca, à V^ de lieue au N. du Châtelet; 2° à l'est et
près de Revin ; 5° au N. de Revin ; 4° à l'angle de la Meuse
et du Moulin de la Pille, à 100 mètres environ au N. du
ravin.
Les arkoses que l'on trouve dans le massif du Brabant
ont été considérées par quelques auteurs comme ayant
une origine plulonienne. On a signalé des arkoses chlori-
tifères au NE. de Hal , dans le chemin de Buysinghen,
dans les carrières abandonnées au S. de Haï, à Malheyde
(Lembecq), au N. de Tubize et aux environs de Cla-
becq, etc.
Le chlorophyre massif a été rencontré à Quenast,
à Rebecq-Rognon et à Lessines (massif du Brabant).
Le chlorophyre schistoïde a été indiqué dans le même
massif du Brabant : au Vert-Chasseur, près de Steenkuyp
( 777 )
(Bierghes), près de Rebecq, au N. des fermes de Grande-
Haie et de Petite-Haie, à 100 mètres au N. de la ferme
du Croiseau; à Chenois et entre le Chenois et le hameau
des Ârdennes (Hennuyères); et enfin à quelques centaines
de mètres au S. du château de Fauquez, elle apparaît sur
les deux rives de la Senne.
La diorite se rencontre aux environs de Lembecq
(massif du Brabant) et de Slavelot (massif de Stavelot).
La diorite chlorilifère a été indiquée dans différents
points du massif de Rocroy : 1° à l'ancienne Grande-
Forge, au N. du massif d'ardoise de la Forge-au-Bois,
à 50 mètres au SE. de l'extrémité NO. de l'étang de Ri-
mogne ; 2° en blocs , à une demi-lieue au NNE. de Rimogne
(Filons de la Richolle, Dumont) ; o" au N. des Forges de
la Commune; 4° au S. du moulin de la Pille; 5" au N. de
Mairus, dans la tranchée du chemin de fer.
Veiin'te a été observée entre Rocroy et Maubert-Fon-
taine (massif de Rocroy) ; dans divers points des environs
de Spa (massif de Stavelot); de Grand-Manil, de Sora-
breffe, de Nivelles, d'Ittre et près d'Otlignies, de Yillers-
la-Ville et de Pitet (Fallais) (massif du Brabant); et enfin
près de Piroy (Beuzet) et entre Neuville-sur-Meuse et
Ombret (massif de Sambre-et-Meuse).
Vhyalophyre massif a été indiqué dans le massif de
Rocroy : i" dans la vallée de la Richolle vers l'extrémité
NO. de l'étang de Rimogne; 2" en blocs, entre la Vieille-
Forge et la Nouvelle-Forge (vallée du Faux); 5° à deux
cents mètres au S. du moulin de Mairus; 4° dans le ravin
qui aboutit au moulin de Mairus; 5° on en retrouve des
traces vers le moulin de la Pilette sur la rive droite du
ruisseau dans le chemin des Forges de la Commune; et
en divers points de la vallée des Forges de la Commune
2"" sÉiîiE, TOME xxxvm. 50
( 778 )
et au N. de celles-ci (rive droite de la Meuse); 6° sur la
rive gauche de la Meuse, vis-à-vis des Forges de la Com-
mune.
Vhyalophyre pailleté a été signalé à Spa.
Vhyalophyre schistoïde s'observe dans le massif de
Rocroy : 1° en fragments, dans la vallée du Faux à la
Nouvelle-Forge; 2° aux Forges de la Commune; 5° entre
les Forges de la Commune et Laifour, sur la rive droite de
la Meuse; 4° sur la même rive de la Meuse, au SO. de
Laifour; 5" à 100 mètres au N. d'une petite cascade dans
les rochers de Notre-Dame-de-Meuse ; 6" à quelques cen-
taines de mètres plus bas dans un ravin.
Vhijperstfiénite a été signalé en deux points dans le
massif du Brabant, entre le château de Lexhy et Hozé-
mont; et entre Les Tombes et l'Abbaye de Grand-Pré
(Mozel) dans le massif de Sambre-et-Meuse.
Le porphyre schistoïde se rencontre dans le massif du
Brabant, au voisinage du chlorophyre schistoïde auquel il
passe souvent; entre Marcq et Enghien , en différents
points à la ferme Sainte-Catherine, près de Rebecq; au S.
de Fauquez et près d'Asquempont (litre).
Voici donc quels sont les divers gisements des roches
cristallines qui doivent faire l'objet du mémoire. Le travail
qui nous est soumis nous les montre sous un jour entiè-
rement nouveau. Les auteurs ont abandonné l'idée d'ori-
gine ignée, qui avait malheureusement été presque toujours
prise comme point de départ des diverses explications
données. v^
Le mémoire commence par une longue étude de la
diorite quarlzeiise, qui constitue les importants massifs de
Quenast,de Rebecq-Rognon et de Lessines. La roche qui les
( 779 )
constitue a été nommée chlorophyre, Dumont; porphyre
à oligoclase, Roth, porphyre quartzeux, Delesse; diabase
porphyrique, Naumann; porphyrite, Zirkel, et plus tard
diorite quarlzeuse par le même auteur, nom adopté dans
le travail présenté.
La description qu'en donne Dumont est erronée sur
un point et incomplète dans l'état actuel des carrières.Du-
mont considérait la roche comme formée d'une pâte d'eu-
rite renfermant de nombreux cristaux d'albite (1) ou
d'orthose , de la chlorite et presque toujours du quartz.
La chlorite n'y est pas un des éléments essentiels. On y
constate, au contraire, la présence à peu près constante
(le minéraux prismatiques appartenant au groupe amphi-
bolo-pyroxénique. M. d'Omalius avait parfaitement bien
saisi ce caractère puisqu'il avait considéré le feldspath et
l'amphibole comme parties constituantes. Ces prismes ap-
partiennent à deux catégories différentes. Les uns, noir-
verdàtre ou brunâtre, sont de la hornblende, ainsi que les
petites masses lamellaires de même teinte. L'autre sub-
stance de nuance moins sombre, vert-poireau, en prismes
octogonaux, en petites masses lamello-lîbreuses et en pris-
mes aciculaires, se rapproche du diallage et de l'hyper-
sthène. La roche est définie « une pâte euritique plus ou
moins foncée, enveloppant beaucoup de cristaux d'oligo-
clase, moins de cristaux d'orthose, beaucoup de quartz,
d'amphibole et certain minéral du type pyroxénique. »
La diorite étant une roche à éléments cristallins com-
posés principalement d'un feldspath clinaxique ou plagio-
clase et de hornblende, la roche du massif qui nous occupe
ayant la même composition, plus du quartz, doit donc être
rapportée à la diorite quartzeuse.
(1) Reconnus plus lard comme oligoclase par M. Delesse.
( 780 )
Dumont avait considéré !a roche cristalline d'Hozémont
comme composée d'eurite compacte, d'albite en cristaux
simples ou maclés, d'hypersthène et de chlorite. A part les
désignations d'albite et d'hypersthène qui sont fautives, ce
sont bien là les caractères macroscopiques ou en gros de
cette roche. Son feldspath appartient au labrador; l'exa-
men microscopique fait reconnaître dans la roche d'Hozé- '
mont : « un agrégat granitoïde de feldspath plagioclase
et de diallage. » C'est donc un gabbro.
Les porphijroïdes sont des roches possédant, avec une
pâte plus ou moins analogue à celle des porphyres, une
texture feuilletée ondulée, due à la présence de l'un ou
l'autre minéral du groupe des phyllites et offrant en outre
cet aspect porphyrique qui résulte chez elles des grains
cristallins plus gros de feldspath et de quartz qui y sont
disséminés. Les chlorophyre et porphyre schisloïdes de
Fauqnez,Rebecq-Rognon, et l'albite phylladifère de Pitel,
de Dumont, sont rapportés à cette espèce.
Ces porphyroïdes sont des roches élastiques d'origine
sédimen taire où l'action métamorphique s'est exercée de
la même manière que dans les strates siluriennes du voi-
sinage. Ces porphyroïdes impliquent l'antériorité, dans la
mer silurienne où ils se déposèrent, de masses cristallines
ayan! une tout autre origine que la leur.
A Pitet , l'examen microscopique montre une pâte mi-
cro-cristalline formée de quartz et de feldspath altéré,
cimenté par un élément phylladeux qui ressemble à la
séricite (1), et entremêlé d'une matière verdâtre non en-
core bien déterminée, la viridite.
(1) A Marcq, près d'Enghien, on trouve des phyllades d'aspect nacré
qui rappellent la séricite. 11 en est de même de quelques albites pliylla-
diféres de TArdenne française. Il me paraît également intéressant de
( 781 )
A Fauquez, on a une composition analogue, et dans l'un
et l'autre gîte les cristaux de feldspath, plus ou moins
altérés, attestent transport et décomposition. Il en est de
même au fond, quant à la microstrueture, du porphijroïde
de Chenois.
Le chlorophyre schistoïde du Vert-Chasseur de Dumont
devient le porphyroïde de Steenknyp et constitue un por-
phyre en nappe ou plutôt un porphyroïde. Une pâte feuil-
letée ondulée contient des grains de plagioclase et des
lamelles d'aspect chloriteux. Les chlorophyres schistoïdes
de Grande-Haie et du Croiseau doivent être rapportés au
même type.
Les arkoses du Brabant, dont quelques-unes avaient été
considérées comme éruptives ou métamorphiques , ont été
également étudiées dans le mémoire dont nous nous occu-
pons. Les cristaux arrondis et déformés qu'on y rencontre
indiquent que ce sont des roches charriées, et leur gise-
ment s'explique bien mieux en admettant cette maniçre de
voir, a Nous considérons donc ces arkoses comme des
couches sédimentaires contemporaines du terrain silurien,
lesquelles dérivent probablement de roches éruptives du
type dioritique déjà émises à la même époque. » On le
voit, c'est un mode de formation identique à celui des
porphyroïdes, et nul doute que l'examen de ces deux
catégories de roches n'ait mis sur la voie de leur véritable
origine.
L'eurite et l'hyalophyre pailletés de Dumont montrent
à Spa le meilleur type de porphyre quartzifère qu'offre la
Belgique. Il est éruptif.
mentionner ici l'analogie que présentent ces roches avec celles oii l'on a
rencontré des grenats à Salm-Chàleau , et avec un phyllade à grandes
paillettes d'ollrélite observé entre Lierneux et Verleumont.
( 782 )
La diorite quartzifère du Champ-Saint-Véron est con-
sidérée comme représentant le même gisement de roche
signalé à Lembecq par Dûment, mais en un autre endroit.
C'est un agrégat graniloïde où domine la hornblende. Le
second élément est le feldspath qui est très-inégalement
répandu.
Les roches de l'Ardenne française viennent ensuite.
La diorite des Forges de la Commune de Dumont de-
vient Vamphibolite grenue de Laifour. Elle a la texture
granitoide. Le quartz paraît être l'élément dans lequel les
autres sont enchâssés, et la hornblende noire y est en voie
de décomposition. Beaucoup de roches voisines sont des
schistes amphiboliques. Dans la bande porphyroïde voisine
du tunnel de Laifour, les bancs d'hyalophyre schistoïde de
Dumont semblent être un porphyre quarlzifère. L'albile
chluritifère ou chloralhile de Dumont est une amphibo-
lite schisteuse.
La diorite de Rimogne de Dumont doit être conservée
sous ce nom. C'est une roche à texture granitoide, formée
de feldspath plagiolase et de hornblende.
La microslruclure de la pâte range l'hyalophyre de
Mairus dans les gneiss, mais il en diffère par le caractère
élastique des gros cristaux d'orthose, d'oligoclase et de
quartz qui donne à la roche l'aspect porphyrique. La pâte
est un agrégat de lamelles de mica brunâtre ou incolore,
de petits grains de quartz ei de feldspath avec des lamelles
de hornblende s'alignant comme le mica.
Le microscope a aussi fait reconnaître la présence de
plusieurs substances minérales nouvelles pour la Belgique,
mais existant pour la plupart à l'état de cristaux infini-
ment petits ou microlilhcs. Les unes, telles que l'apatite,
l'ilménite ou fer titane, sont répandues plus ou moins
( 783 )
abondamment dans la plupart des roches qui viennent
d'être signalées. D'autres, au contraire, sont plus rares et
comme localisées dans certains gisements, telles sont la
tourmaline, le sphène et la piémontite ou épidote rouge
rencontrés à Quenast, la grammatite? à Hozémont, et à
Quenast et à Lessines surtout, de nombreuses enclaves
liquides dans le quartz contenant un petit cube de sel
marin. Constatons, d'autre part, que la zoizite ne paraît
pas exister à Quenast et que l'existence de l'hypersthène
en Belgique devient très-problématique.
Il résulte de cet aperçu que le mémoire, quoique ne
répondant pas d'une façon complète à la question posée,
lui a néanmoins fait faire un grand progrès. La plupart de
nos roches cristallines ont été étudiées avec soin et les
auteurs se sont occupés des roches considérées comme les
plus compliquées. L'interprétation donnée aux masses
schisto-cristallines conduit à des vues plus ou moins nou-
velles sur les conditions de la sédimentation dans les ter-
rains anciens et sur la part qui peut y revenir au méta-
morphisme. Cela touche en un mot aux plus importantes
doctrines géologiques. L'analyse microscopique a été faite
d'une manière à laisser bien en arrière les diverses études
minéralogiques faites dans ces derniers temps. 11 est à
espérer que la publication de ce travail appellera l'attention
sur un genre d'études entièrement neuf pour notre pays.
Quelques parties du travail sont incomplètes, mais les
auteurs étant les premiers à parler de ces lacunes, il y
aurait indélicatesse à les signaler ici, d'autant plus que cela
paraît dépendre surtout du manque de temps et de la
manière large dont le sujet a été traité.
Nous désirerions voir figurer les coupes des gisements
( 784 )
les plus importants, et compléter les études des roches de
TArdenne française.
Il est à espérer que les auteurs , continuant la voie dans
laquelle ils se sont engagés, poursuivront l'étude des
roches cristallines de la Belgique et de l'Ardenne française.
Le travail dont il est ici question nous démontre que tout
doit être scruté et que l'on ne peut tirer aucune déduction
à priori. Les progrès que le microscope a fait faire à la
lithologie, nous font espérer que l'anatomie minérale
pourra bientôt rivaliser avec l'anatomie animale et végé-
tale.
Je me joins à mes savants confrères pour prier la classe
de décerner aux auteurs la médaille d'or et pour voter l'im-
pression du mémoire et des planches qui l'accompagnent
dans les Mémoires couronnés. »
Les conclusions des rapports qui précèdent sont adoptées
par la classe. En conséquence, elle décerne la médaille
d'or de huit cents francs am mémoire présenté, lequel a pour
auteurs, ainsi que l'a fait connaître l'ouverture du billet
cacheté, M. de la Vallée -Poussin, professeur à l'Uni-
versité de Louvain, et M. Renard, professeur au Collège de
la Compagnie de Jésus, également à Louvain.
— La proclamation des résultats du concours aura lieu
en séance publique du 16 décembre.
(78S)
ÉLECTIONS.
La classe procède à l'élection de trois membres titu-
laires, de huit associés et d'un correspondant. Les noms
des élus seront mentionnés au compte rendu de la séance
publique.
PRÉPARATIFS DE LA SÉANCE PUBLIQUE.
MM. Candèze et Mailly, conformément à l'article 17 du
règlement d'ordre intérieur, donnent lecture des commu-
nications qu'ils se proposent de faire en séance publique-
( 786 )
CLASSE DES SCIENCES.
Séance publique du W décembre 1874.
(Grand'salle des Académies, au Musée. )
M. E. Candèze, directeur.
M. J. LiAGRE, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. de Koninck, P.-J. Van Beneden,
Edm. deSelys Longchamps, H. Nyst , Melsens , F. Duprez,
G. Dewalque, M. Gloesener, F. Donny , Ch. Montigny,
Steichen , A. Brialmont, E. Dupont, Éd. Morren, Éd. Van
Beneden, G. Malaise, membres; E. Catalan, A. Bellynck,
associés; Éd Mailly , H. Valérius , F. Plateau, J. De Tilly ,
Ch. Van Bambeke, correspondants.
Assistaient à la séance :
Classe des lettres : M. B. Chalon , directeur; le baron
G.Guillaume, vice-directeur; MM. J. Boule/, Gachard,
M.-N.-J. Leclercq, Ch. Faider, Thonissen, Th. Juste,
Alph. Wauters, membres; J. Nolet de Brauwere Van
Steeland, Alph. Bivier, associes; G. Bolin-Jaequemyns,
correspotidant.
Classe des beaux -arts : MM. L. Alvin, G. Geefs,
J. Geefs, Éd. Fétis, Edm. De Busscher, Aug. Payen,
le chev. L. de Burbure, J. Franck, Ad. Siret, Julien
Leclercq, Ernest Slingeneyer, Alex. Bobert, membres;
Éd. de Biefve, Louis Jehotte, correspondants.
A une heure, le bureau de la classe, composé de
( 787 )
MM. E.Candèze, directeur, J. Liagre, secrétaire perpétuel ,
et A. Brialmont, vice-directeur, ainsi que M. R. Chalon,
directeur de la classe des lettres, viennent prendre place
sur l'estrade.
xM. N. De Keyser, président de l'Académie, avait écrit
pour témoigner ses regrets de ne pouvoir assister à la
solennité.
Un auditoire nombreux, parmi lequel on remarque
plusieurs dames et divers hauts fonctionnaires, assiste à
la réunion.
Le programme de la séance se composait des lectures
suivantes :
1° Les nioijens d'attaque et de défense chez les insectes,
discours par M. Ernest Candèze , directeur de le classe;
2" Lecture d'une notice sur Adolphe Qiietelet ; par
M. Edouard Mailly, correspondant de la classe ;
3" Rapport du jury chargé de juger le dernier concours
quinquennal des sciences physiques et mathématiques ; lec-
ture faite par M. H. Valérius, correspondant de la classe et
rapporteur du jury;
4° Proclamation, par M. J. Liagre, secrétaire perpé-
tuel, du résultat des concours et des élections.
M. le D' E. Candèze, directeur de la classe, déclare la
séance ouverte; il prononce ensuite le discours suivant .
Les moyens d'attaque et de défense chez les insectes.
11 est une opinion généralement répandue parmi les
gens du monde, ceux au moins que leurs préoccupations
habituelles rendent étrangers aux sciences, aux sciences
naturelles surtout, c'est que celles-ci n'ont d'utilité, ne
sont dignes d'occuper l'esprit des gens sérieux, que pour
( 788 )
autant que leurs applications contribuent à augmenter
notre bien-être matériel.
Dans ce siècle éminemment utilitaire, la plupart n'ac-
cordent qu'une faible considération, mêlée de quelque
élonnement, à ceux qui, délaissant les plaisirs superficiels,
les vains délassements, les tumultueuses distractions pour
les jouissances plus nobles, plus saines et plus tranquilles
de l'esprit, consacrent paisiblement leurs loisirs à s'initier
aux mystères si curieux et si variés de la nature.
L'Entomologie, et avec elle les sciences qui s'appli-
quent à agrandir le cercle de nos connaissances dans le
monde des infinimeuts petits, l'Entomologie est particu-
lièrement victime de l'espèce de défaveur qu'encourt ce
genre d'étude de la part du public, et même de beaucoup
de gens instruits.
Depuis quelques années, il est vrai, des écrivains de
talent se sont donné pour mission de vulgariser plusieurs
sciences qui , jusque-là, étaient restées inconnues du plus
grand nombre. On a écrit des livres dans un style aussi
dépouillé que possible de ces termes techniques, de ces
mots étranges dont le langage scientifique n'est malheu-
reusement que trop hérissé, et l'Entomologie, comme
d'autres branches de nos connaissances, a obtenu ses let-
tres de naturalisation auprès d'un public qui en ignorait
même le nom.
L'étude des insectes a cependant, en dehors de l'attrait
tout particulier qu'elle présente, un côté utile que per-
sonne ne contestera. Les Américains, gens pratiques par
exellence, ont institué, sous le nom d'Entomologistes
d'État, de véritables fonctionnaires dont la mission est
de résoudre toutes les questions où les insectes sont en
cause, quand leurs déprédations mettent l'agriculture en
péril dans quelqu'une de ses branches.
( 789 )
Lorsque l'industrie de la soie était gravement compro-
mise par la maladie épidémique du bombyx du mûrier, ce
fut aux entomologistes qu'on demanda les moyens de sau-
ver cette importante source de la richesse publique, et,
grâce à leur intervention, de nouvelles races de vers à
soie furent introduites en Europe. Aujourd'hui que le
Phylloxéra, ce fléau désastreux, vient menacer la France
dans ses œuvres vives, c'est encore aux entomologistes
que le gouvernement du pays demande le salut de ses
vignobles en danger.
Cette utilité de l'étude des insectes, je ne me propose
pas de la défendre ici; elle a été suflisamment démontrée
par de plus autorisés que moi et avec un talent auquel je
n'oserais prétendre.
Je veux seulement prendre au hasard une page de l'his-
toire de ces petits animaux et montrer que celle-ci ne le cède
en rien, en intérêt, à celle des êtres d'un ordre plus élevé.
On considérait autrefois les animaux comme formant,
aussi bien sous le rapport des facultés mentales que sous
celui de la perfection des organes, une série continue et
décroissante commençant à l'homme et se perdant, d'une
manière vague, dans les polypes et les éponges dont la
nature animale était même assez contestée.
Il n'en est plus ainsi aujourd'hui. On a fractionné la
série animale, et ses différentes portions, au lieu d'être
placées bout à bout, ont été établies en séries multiples et
plus ou moins divergentes. On a reconnu que chacune de
ces fractions a ses intelligences, ses organisations supé-
rieures et ses infimités, et que ces différentes hiérar-
chies peuvent très-bien se comparer entre elles; en d'autres
termes, que certains insectes l'emportent de beaucoup sur
un grand nombre de vertébrés, par l'intelligence , de même
que par la multiplicité et la perfection des organes.
( 790 )
Considéré dans son ensemble et sous le rapport des ha-
bitudes, on aperçoit, dans le règne animal, deux catégories
assez bien dessinées.
La première se compose des animaux qui vivent de
proies vivantes. La seconde renferme naturellement tous
les autres, qui servent de nourriture aux premiers.
Je me hâte d'ajouter que ce partage est plus spécieux
que réel (1), mais admettons-le un moment pour les be-
soins du sujet que je me proj)ose d'exposer. Il s'applique à
tous indistinctement, grands et petits, depuis l'homme
jusqu'au dernier des insectes.
Il en résuite qu'une double préoccupation chez tout
être vivant, c'est, d'une part, de manger et, de l'autre,
d'éviter d'être mangé.
Si cette préoccupation légitime est peu apparente chez
l'homme civilisé, nous la voyons, par contre, diriger en
grande partie les actions de l'homme sauvage vivant au
sein des forêts, en lutte continuelle pour satisfaire sa pro-
pre faim et se soustraire à celle des autres.
Ce combat pour l'existence a développé le génie de
l'homme; il a contribué pour une bonne part à faire sortir
quelques-unes de ses races de l'état sauvage et à les amener
au degré de civilisation qu'elles ont atteint aujourd'hui.
Qui n'a admiré, dans ce roman si populaire et d'une si
haute portée philosophique de Daniel de Foé, l'ingéniosité
de son héros. L'esprit inventif qui a conduit Robinson
Crusoé du plus extrême déniiment à une sorte de bien-
être, est né, en délinilive, d'un tiraillement d'estomac. Chez
les grands animaux, les exigences de cet organe ont créé
des habitudes dont l'histoire est des plus curieuses. Les
(1) Beaucoup d'animaux de proie étant eux-mêmes les victimes de cai-
nassiers plus forts ou plus rusés qu'eux.
(791 )
ruses du renard pour arriver à s'emparer de sa proie, la
façon parfois ingénieuse dont celle-ci défend sa vie en péril,
ont de tout temps attiré l'attention des hommes qui y ont
puisé d'utiles enseignements pour leur propre compte.
Chasseurs et chassés font usage, dans ce double but,
de tous leurs moyens. Les forts et les agiles, parmi les pre-
miers, vont hardiment de l'avant; les moins bien doués
ont recourt à la ruse. Parmi les seconds, nous voyons les
mêmes moyens employés en sens inverse. L'antilope agile
recours à la fuite, le lapin se terre, le hérisson se roule
en boule, la tortue se retire dans sa carapace, la moufette
s'entoure d'une atmosphère infecte, la seiche disparaît
dans un nuage opaque, chacun a sa manière propre de
défendre son existence.
Ce qui est moins généralement connu, c'est cette même
histoire chez les petits animaux, chez les insectes, par
exemple. Nous allons l'esquisser rapidement. Nous y trou-
verons les même moyens d'attaque et de défense que chez
les grands et, en outre, bien d'autres procédés qui leur sont
propres et qui prouvent que leur intelligence ne le cède en
rien à celle des animaux que nous appelons supérieurs,
parce qu'ils ont une taille plus grande et une organisation
physique plus rapprochée de la nôtre.
I.
Parmi les grands animaux vivant de proie, il en est qui,
confiants dans la puissance de leurs moyens, chassent en
plein jour, à la lumière du soleil : l'aigle, le faucon, l'éper-
vier sont dans ce cas, mais c'est le petit nombre. La plu-
part attendent les ombres du soir; presque tous jugent
qu'un peu de ruse ne nuit pas à la violence.
Les insectes ont aussi leurs aigles et leurs faucons;
( 792 )
telles sont les grandes libellules ou demoiselles, que tout
le monde connaît, qui, tantôt planant sur place, tantôt par-
courant les sentiers couverts d'un vol rapide et toujours
en allant et en revenant dans un espace déterminé, rap-
pellent tout à fait les allures des oiseaux rapaces.
Les libellules ne sont pas les seuls brigands de l'air.
Il est d'autres insectes ailés qui vivent aussi de rapine : ce
sont les guêpes.
Si les premières sont les faucons du monde des insectes,
les secondes en sont les vautours. Les guêpes, en effet, ne
se bornent pas à chasser seulement la proie vivante, elles
ne dédaignent pas la chair inanimée et d'autres substances
dont nous-mêmes faisons notre nourriture. Elles ont, par
exemple, une prédilection marquée pour les plus belles
pêches et les plus beaux raisins de nos jardins. Elles ont
même l'effronterie de pénétrer dans nos appartements pen-
dant le repas et avec une impudence que leur donne la
crainte qu'elles inspirent, elles viennent prélever leur part
du festin auquel on ne les a pas conviées.
Tous ceux qui possèdent des chats, et qui les observent,
connaissent le goût tout particulier qu'ils ont pour le foie
des animaux. Les guêpes montrent une préférence sem-
blable. Dans les boucheries, c'est ce qu'elles recherchent
surtout. Réaumur, qui n'est certes pas un conteur fantai-
siste, raconte avoir vu des bouchers leur abandonner, à
l'époque où elles sont nombreuses, un foie de bœuf ou de
mouton. Cette mesure visait à un double résultat écono-
mique : les satisfaire à bon marché et puis tenir à distance
les grossesmouches bleues, beaucoup plus nuisibles qu'elles.
Les guêpes chassent aussi la proie vivante et c'est à
ce titre que j'en parle ici. Elles le font à la manière des
oiseaux rapaces, en plein jour, sans ruser, en fondant
violemment sur leur victime.
( 793 )
Ce sont les mouches ordinaires qui sont leur proie habi-
tuelle, mais les guêpes sont courageuses et ne craignent
nullement de s'attaquer aux abeilles malgré l'arme défen-
sive puissante que portent celles-ci. On voit souvent une
guêpe se saisir d'une abeille, la couper par le milieu d'un
coup de mandibules, abandonner le corselet qui ne contient
que des muscles coriaces, pour se repaître des intestins.
Et voyez la malice de ces petites bêtes : ce ne sont pas les
abeilles sortant de la ruche qu'elles attaquent de préfé-
rence, mais bien celles qui y rentrent. Elles savent que
celles ci, arrivant gorgées de miel, leur promettent un plus
succulent régal que les autres.
Les ichneumons, de la même famille que les guêpes,
font une guerre acharnée aux autres insectes. Ce n'est pas
pour les dévorer toutefois qu'ils les poursuivent, mais pour
déposer des œufs dans leur corps.
Chaque espèce a son gibier particulier. Il y en a qui
recherchent de préférence les chenilles. L'histoire d'une
de ces espèces les résumera toutes.
L'ichneumon femelle passe son existence à faire la
chasse aux chenilles. Dès qu'elle en a découvert une à sa
convenance, elle tombe sur elle, lui enfonce dans le dos le
stylet qui termine son corps et du même coup lui inocule
un œuf. Avant qu'elle ait vu le danger, l'opération est faite
et dès ce moment la pauvre chenille est perdue; jamais
elle n'arrivera à sa transformation dernière. De l'œuf dé-
posé dans son corps sortira bientôt une larve qui rongera
ses tissus en respectant toutefois soigneusement les or-
ganes vitaux. La chenille grandit avec son ver rongeur,
puis se transforme en chrysalide. La larve d'ichneumon,
qui alors n'a plus rien à ménager, achève de la dévorer
2""* SÉRIE, TOME XXXVIII. 51
(794)
et profite, pour opérer sa propre métamorphose à l'abri de
tout danger, de la coque solide que sa victime avait con-
fectionnée pour elle-même; puis, au temps voulu, elle en
sort armée de toutes pièces pour se livrer, sur une autre
génération de chenilles, aux mêmes méfaits que ses pa-
rents. Ceci fait partie de ce qu'on appelle les harmonies
de la nature.
Pendant l'été on rencontre, courant vivement dans les
chemins et chassant en plein soleil, un joli coléoplère de
couleur verte , émaillé de blanc. Sa tête est armée de puis-
santes mandibules et il a à son service six longues pattes
dont il se sert à merveille. C'est l'agile cicindèle, le plus
carnassier des insectes. Sa férocité est égale à celle du
tigre; malheur à qui lui tombe sous la dent !
Le domaine des eaux est aussi parcouru par de sangui-
naires pirates. Les loutres, les requins, les brochets sont
l'effroi de ses habitants. Le monde des insectes possède
également ses requins : le dytisque, sous sa forme de larve,
a les instincts féroces poussés à un degré extrême. Il ose
s'attaquera des animaux beaucoup plus grands que lui et
ses attaques ont quelque chose de furieux qui dénote, chez
ce petit insecte, autant de vaillance que de cruauté, en
même temps qu'une voracité insatiable.
Les chasseurs nocturnes sont bien plus nombreux que
îes diurnes, surtout parmi les insectes rôdeurs.
Quand, à la fin d'une belle journée d'été, nous voyons
fombre envahir peu à peu la campagne et les bois, sous
l'influence de la fraîcheur naissante, des senteurs exquises
qui se répandent dans l'air, du calme qui semble régner
partout, autour de nouSj notre âme s'ouvre aux sentiments
les plus doux : c'est l'heure de la poésie tendre.
Orphée accorde sa lyre et, de sa voix la plus suave, il
( 79o )
chante un hymne en harmonie avec l'étal, de son âme :
Déjà l'ombre s'étend, o frais el doux bocages
Laissez-moi m'arréter sous vos jeunes ombrages;
Et que j'entende encor pour la dernière fois
Le bruit de la cascade et les doux chants des bois... etc.
Pure illusion ! erreur profonde ! C'est l'heure du carnage
universel qui va sonner; les chants qui vont retentir sont
des hurlements de guerre el l'ombre du bocage ne ser-
vira qu'à mieux, dissimuler les embûches de ses hôtes, à
faciliter leurs guets-apens!
Le soleil n'est pas plutôt descendu sous l'horizon qu'une
multitude de rôdeurs, animés des plus mauvaises inten-
tions, sortent de leurs ténébreuses retraites pour se mettre
en quête de leur proie.
Dans les pays équatoriaux, il n'y a pas à s'y méprendre
au bruit soudain, terrible, indéhnissable qui éclate tout
à coup dans la profondeur des forêts. Sous notre ciel plus
tempéré la bataille est moins bruyante, car elle a pour
acteurs des êtres plus petits; elle a lieu, pourtant, sans
qu'il y paraisse; chaque feuille, chaque brin d'herbe vont
être le théâtre de scènes meurtrières qui, pour se passer
dans un monde minuscule, n'en sont pas moins des drames
pour ceux qui y assistent ou qui y jouent un rôle.
L'espace aérien n'offre pas plus de sécurité que la terre
et les eaux. En même temps que les hiboux , les chouettes
et les chauves-souris, les cousins et les moustiques dé-
ploient leurs ailes et sonnent la charge.
A côté des chasseurs qui entrent hardiment et ouverte-
ment en guerre, s'agite la multitude de ceux qui, doués
d'un appétit non moins légitime, ne possèdent pas, pour \c,
satisfaire, les facultés qui leur permettent de courir sus ù
( 796)
leur proie, et qui doivenl user de slralagèmes pour s'en
emparer.
A propos des chasseurs diurnes, j'ai dit un mot tout à
l'heure de la cicindèle. Ce joli coléoptère, si bien taillé pour
la course, n'a pas toujours eu au service de son estomac
ces six longues pattes dont il se sert avec tant d'avan-
tage. Dans la première période de sa vie, c'est-à-dire à
l'état de larve, ses instincts carnassiers sont tout aussi ar-
dents; la cicindèle possède bien une paire de robustes
mandibules, mais à cela s'est bornée la libéralité delà nature
à son égard; son corps grêle et mou, la brièveté de ses
pattes, ne correspondent nullement avec la vivacité de son
appétit non plus qu'avec ses formidables mâchoires. Que
fait-elle? après avoir reconnu un sentier de fourmis, car les
fourmis ont aussi leurs sentiers, elle y creuse un trou ver-
tical et profond, au sommet duquel elle s'établit et se
maintient en courbant son corps en S. sa tête plate et
ronde, immobile au niveau du sol, ferme exactement l'ori-
lice de celte espèce de puits. Dans cette position elle attend.
Une fourmi arrive, passe distraitement sur cette tête qui
s'enfonce aussitôt. La trappe n'est pas, comme vous voyez,
d'invention humaine.
Le fourmilion s'y prend autrement, et la façon dont il
précipite les fourmis, en les mitraillant, dans l'entonnoir
qu'il s'est creusé dans le sable, est des plus merveilleuses.
Mais son histoire, à laquelle Réaumura consacré tout un
long chapitre dans son immortel ouvrage, est trop connue
pour que je m'y arrête davantage. Parlons plutôt des
araignées.
Bien que les arachnides soient classées par les zoolo-
gistes en dehors des insectes proprement dits, dont elles
dilïèrent par quelques détails d'organisation, elles font j)ar-
( 797 )
tie de la grande famille enlomologique : pour toul le monde
ce sont des insectes.... et puis leurs habitudes sont si cu-
rieuses que je ne puis me dispenser de m'y arrêter un
moment.
Une industrie remarquable, des instincts rusés, une fé-
rocité sans égale, et jusqu'à la manière indigne dont l'arai-
gnée femelle traite son époux, ont, dès l'antiquité, attiré
l'attention sur elles. Ce n'est pas tant l'art qu'elles mettent
à tisser les toiles destinées à retenir leur proie, que l'in-
telligence qu'elles montrent pour arriver à leurs fins, qui
les a rendues célèbres. Aucun animal d'ordre supérieur ne
peut leur être comparé sous ce rapport. Il faut, pour trou-
ver quelque chose d'analogue, remonter jusqu'à l'homme
capturant les petits oiseaux au moyen de lacets et de
gluaux. Chaque espèce d'araignée a sa manière propre de
confectionner sa toile. Les unes, comme VÉpcire diadème,
établissent des fdets immenses comparativement à leur
taille, à mailles si admirablement régulières qu'on peut
dire, en toute vérité, qu'elles ont le conjpas dans l'œil. Ce
sont les artistes de la famille.
D'autres y mettent moins de façon. Il en est qui , au lieu
de filets, fabriquent de véritables toiles d'un tissu serré
auxquelles elles donnent la forme d'un hamac; quelques-
unes se bornent à tendre des fils gluants en différents sens
et sans ordre apparent.
Dès qu'un insecte est venu s'empêtrer dans ses gluaux ,
l'araignée fond sur lui S'il est faible, il est à l'instant
saisi, garotté, enlacé dans une multitude de fils qui para-
lysent ses mouvements; s'il est fort et surtout bien armé,
l'araignée s'arrête, tourne autour de lui, attend qu'il
s'épuise en vains efforts pour se dégager, bondit en avant,
se retire, cherche à le prendre par derrière, de façon à éviter
( 798 )
ses atteiiUes, el linil ordinairement par s'en rendre
maître.
Quand la résistance est trop vigoureuse , elle change de
lactique. Au lieu de s'obstiner dans un combat inutile et
dangereux, elle vient elle-même en aide à son adversaire
en coupant les tils qui le retiennent. Elle ne voit plus en
lui qu'un malencontreux intrus qui endommage sa toile, et
un épouvantail pour les mouches.
Voilà pour le système des gluaux.
Parmi les engins employés , remarquez que je ne dis pas
imaginés par l'homme, il y a encore le traquenard. Nous
allons le trouver également chez les insectes.
Il existe dans les pays chauds, et même dans le midi de
l'Europe, de grands insectes, dont les ailes foliacées et de
couleur verte se confondent facilement avec le feuillage
des plantes et des arbustes sur lesquels ils aiment à se
poser.
Les mantes, c'est leur nom, se tiennent immobiles, les
pattes de devant, qu'elles ont très-longues, redressées et
étendues, attitude bizarre qui les a fait comparer à des
personnes en prière et a valu à l'espèce du IMidi le nom
de Mante i^eligieuse. Si la mante attend quelque chose du
ciel, c'est simplement qu'il lui tombe un insecte entre les
bras. Quand cela arrive, ceux-ci se referment brusquement
et la proie se trouve prise entre les dents aiguës dont ils
sont armés.
L'air, la terre et les eaux sont sans cesse parcourus par
des brigands et des pirates de toute taille. Le sein de la
terre lui-même n'olfre pas de retraite assurée à ses habi-
tants.
La taupe et la courtilière chassent sous le sol. Il est
étonnant de voir la ressemblance que des habitudes sem-
( 799 )
blables ont donnée à un quadrupède et à un insecte,
animaux d'organisations si différentes d'autre part. Celte
ressemblance a même valu au second le nom de taupe-
grillon. La courtilière, comme la taupe, creuse la terre, y
pratique de longues galeries pour atteindre les larves sou-
terraines dont elle se nourrit.
Certaines peuplades font usage , soit à la guerre , soit à
la chasse, d'armes empoisonnées. Les poisons qu'elles
confectionnent dans ce but sont de diverses sortes; les uns
tuent rapidement, les autres paralysent. Il existe quelque
chose du même genre chez les insectes. Si l'on peut éta-
blir un rapprochement entre le dard venimeux du frelon
et le kriss enduit d'upas du Malais, il est permis, de même,
d'assimiler à l'action du curare les effets produits par le
venin du sphex.
On sait que le poison du Para agit sur les nerfs moteurs
de telle sorte que l'excitabilité musculaire est anéantie, et
que l'animal, dans les veines duquel cette substance a été
introduite, tombe frappé de paralysie pour un temps plus
ou moins long, sans que la mort en soit nécessairement la
conséquence, si la dose de poison inoculé n a pas été trop
forte.
Le venin du sphex, insecte de la famille des hyménop-
tères comme les guêpes et les abeilles, agit de la même
manière. La femelle seule est pourvue d'un aiguillon ve-
nimeux; toutefois elle n'en fait usage que dans l'intérêt de
sa progéniture, car ses habitudes à elle sont paisibles : le
suc des fleurs lui suffit. x\Iais les larves auxquelles elles
donnent le jour ont des exigences plus carnassières, et
voici comment la femelle du sphex s'y prend pour assurer
leur avenir. Au moment de la ponte elle se met en quête
de chenilles, de sauterelles ou d'araignées. Lorsqu'elle en
( 800 )
a trouvé à sa convenance, elle les pique de son aiguillon ,
leur inocule son venin qui les paralyse sans les tuer, puis
les porte en cet état dans une excavation qu'elle a préala-
blement creusée dans le sol. Cela fait, elle pond un œuf,
bouche le trou dans lequel le tout est déposé et s'en va
procéder à une autre opération du même genre. Les victi-
mes du sphex, quoique vivantes, mais paralysées par le
venin, ne peuvent s'échapper pendant le temps qui s'écoule
entre la ponte de l'œuf et l'éclosion de la larve, et celle-ci,
en naissant, trouve à sa portée des vivres frais que lui a
ménagés la prévoyance maternelle.
II.
Si les insectes se montrent ingénieux dans leurs pro-
cédés d'attaque, ils offrent à notre curiosité des moyens
de défense encore plus variés. C'est iciquenous allons les
voir déployer un art bien supérieur à celui des grands
animaux. Tout ce que l'homme a inventé ou plutôt cru
inventer dans ce genre n'est, au fond, qu'une imitation
perfectionnée de ce qu'il a été à même d'observer chez
eux. L'homme a certes poussé plus loin l'art de faire du
mal à ses ennemis et de se préserver de leurs atteintes —
on n'est pas pour rien l'être le plus intelligent de la créa-
lion — mais l'idée première, il a pu la puiser dans la simple
observation du monde microscopique au milieu duquel il
passe son existence.
Dans les circonstances hostiles ou tout être vivant
s'agite, il est trois moyens de défense qu'il emploie d'une
façon constante ou fortuite suivant sa faiblesse ou sa force.
Le premier consiste à éviter l'ennemi, le second à lui
(801 )
échapper par la ruse, le troisième à lui résister par la force.
Il est indubilahle qu'une multitude immense d'êtres
vivants ne naissent que pour être mangés, et il en doit
être ainsi puisque, sans eux, un nombre non moins consi-
dérable d'autres êtres seraient dès leur naissance con-
damnés à mourir de faim. Heureusement pour tous que les
premiers ont une puissance de multiplication rassurante
pour la permanence de leur race. I^es espèces phytophages
se reproduisent bien plus largement que les espèces car-
nassières, et c'est grâce à cette harmonie naturelle que les
diverses races animales qui peuplent le monde continuent
à exister, et se perpétuent en dépit de la guerre d'exter-
mination que les unes font aux autres.
Beaucoup d'insectes cherchent dans l'obscurité d'une
existence paisible et retirée une sécurité que des mœurs
plus remuantes ne leur donneraient pas. Les uns se
creusent dans le sol, dans le bois des arbres, même dans
l'épaisseur des feuilles, des réduits secrets où ils parcou-
reraient en paix toutes les phases de leur existence si,
quelque jour, un instinct plus puissant que celui de leur
conservation ne les forçait à sortir de leur retraite. Ce
n'est pas seulement chez les hommes que nous voyons
l'amour et ses conséquences venir troubler le cours de la
vie. Il n'est pas de si chétif insecte qui ne doive quitter,
a un moment donné, le paisible réduit où il s'engraissait
dans une égoïste solitude pour se lancer dans des aven-
tures périlleuses.
Bien périlleuses en effet sont les aventures du mâle de
la tégénaire lorsque l'âge des amours arrivé , il abandonne
ses gluaux et ses filets pour obéir à un entraînement irré-
sistible, La nature a voulu que cet être infortuné rencontrât,
dans sa propre compagne, la créature la plus revêche et
( 802 )
la plus insociable, el bien souvent il payerait cher les
courts instants de faveurs qu'elle lui a accordés, s'il ne se
hâtait de se dérober à ses atteintes par une fuite précipitée.
Mais tous les insectes n'ont pas des dangers du même
genre à courir, et s'ils doivent user de ruse ou lutter pour
sauver leur existence en péril, c'est, la plupart du temps,
contre d'autres espèces que la leur.
Par une conséquence naturelle de leur genre de vie, les
insectes chasseurs, toujours par voies et par chemins en
quête de gibier, sont plus exposés que les autres à faire
des rencontres fâcheuses.
Certaine espèce d'araignée, la mygalodonte du midi de
l'Europe, habite un antre souterrain qu'elle a, par surcroît
de précaution, muni d'une porte. En embuscade derrière
cette porte entre-bâillée, elle guette les passants. Si quel-
que insecte, inconscient du danger, passe à courte distance,
elle se précipite sur lui. Mais il arrive parfois que l'assailli
déploie tout à coup des armes formidables devant lesquel-
les elle doit battre prestement en retraite. Tel le bandit
fondant sur un voyageur d'aspect débonnaire et qui s'aper-
çoit, au moment de l'aborder, qu'il a affaire à un quidam
plus fort et mieux armé que lui, s'empresse de tourner
les talons, telle notre araignée, poursuivie de près, se hâte
de regagner son antre el aussitôt qu'elle s'y est réfugiée,
d'en fermer lestement la porte et de s'y cramponner pour
empêcher son ennemi de la suivre.
Mais des retraites aussi bien fortifiées ne sont que le
lot du petit nombre, et la plupart de ces coureurs de
grands chemins en sont réduits, en cas d'insuccès de ce
genre, à faire usage, pour leur défense, des armes que la
nature leur a fournies. Le carabe, serré de près, lance sur
son adversaire un liquide brûlant et d'une extrême fétidité.
( 805 )
Le bombardier leur tire des coups de feu. Son arme, il est
vrai, n'est chargée qu'à poudre, mais, telle quelle, il s'en
est contenté jusqu'à présent, et qui pourrait dire que dans
la suite des temps, si le perfectionnement indéfini n'est
pas une vaine hypothèse, le bombardier ne perfectionnera
pas son artillerie?
Les anciens chevaliers avaient coutume, lorsqu'ils
allaient au combat, de se barder de fer. Affublés de la
sorte, ils ne ressemblaient pas mal à ces larves qui, pour
protéger leur corps mou et débile contre les chocs exté-
rieurs et en même temps tromper la défiance de leur
victime, se revêlent d'une véritable armure d'où se déga-
gent seulement la tête et les pattes. Au fond, l'idée est la
même, il n'y a de différence que dans la nature des maté-
riaux employés et l'art avec lequel il sont mis en œuvre.
Les insectes ne pouvant faire usage des métaux, utilisent
ce qu'ils ont à leur portée.
Lorsqu'on examine, en été, le bord des eaux, on voit se
mouvoir çà et là de petits corps allongés et brunâtres qu'au
premier abord on prendrait pour des fragments de bû-
chettes. En y regardant de plus près, on s'aperçoit que ce
sont des larves habillées d'un fourreau de soie renforcé au
moyen de petites pierres agglutinées, de sable et d'autres
substances. C'est sous cette forme que la phrygane se
présente pendant la première phase de sa vie.
Les larves de criocères et de cassides, dont la vie se
passe à découvert sur les feuilles des végétaux, seraient
fort exposées à la voracité des oiseaux si elles ne sous-
trayaient aux regards de ces derniers leurs petits corps
blancs, dodus, appétissants, sous une pulpe verdàlrequ'elles
se procurent aisément et qu'elles accumulent ingénieuse-
ment sur leur dos au lieu de la rejeter loin d'elles, comme
( 804 )
font les autres animaux. Ce système de défense est de
mauvais goût, j'en conviens, mais en cherchant bien
quelque part, au sud de l'Afrique, ne découvrirait-on pas
des animaux d'un ordre Irès-supérieur, pour qui sem-
blable vêtement remplace économiquement le velours et la
soie? Des larves de diptères y mettent encore moins de
façon. Elle se bornent à se rouler dans la fange, et celle-ci,
en séchant, leur sert de vêtement ou plutôt de revêtement,
en quoi elles sont imitées par certaines peuplades du Brésil
central qui n'ont rien imaginé de mieux pour préserver
leur peau de la piqûre des moustiques.
Mais il est temps que je m'arrête dans cette voie.
L'intérêt que je m'efforce d'appeler sur les habitudes de
nos petits insectes recevrait une rude atteinte si je déve-
loppais d'avantage les moyens de défense qu'ils mettent
en pratique dans cet ordre de faits. Abordons en un autre.
Quelques coléoptères ont recours, pour échapper au
danger, à une singulière supercherie. Aussitôt qu'on les
touche, et même quand ils s'aperçoivent qu'on les regarde,
ils contractent leurs pattes, se laissent tomber et font le
mort. A quelle idée obéissent-ils en agissant de la sorte?
L'instinct pur et simple devrait les porter à fuir ou à
résister. Non, ils se laissent choir sur le flanc et ne bou-
gent plus. Est-ce la frayeur qui les paralyse? Est-ce la
conscience intime que, paraissant morts et desséchés, ils
offriront à leurs ennemis un repas de mince valeur, que
ceux-ci dédaigneront? Ou bien, n'est-ce pas plutôt que,
par l'immobilité, ils espèrent échapper aux regards en se
confondant avec les objets inanimés qui les entourent?
Quoi qu'il en soit, ce procédé jouit d'une certaine vogue,
car nous le voyons employé par un grand nombre d'espèces.
Les Siaphylins font tout le contraire; leur procédé con-
( 805 )
siste clans rinliniidation. Lorsqu'un chat est surpris par uu
gros chien, on le voit se dresser brusquement sur les pattes,
arrondir le dos, hérisser le poil et donner à sa physionomie
l'aspect le plus formidable qu'il peut. Il est évident que ce
chat connaît la puissance de l'attitude vis-à-vis de l'en-
nemi. Les Slaphylins font comme les chats. Dès qu'on les
touche, ils se redressent, relèvent leur queue et prennent
des manières de scorpions, alors qu'ils sont tout à fait
inoffensifs.
Il n'en est pas moins vrai que cette audace leur sauve par-
fois la vie; j'ai vu des enfants s'arrêter au moment de saisir
un staphylin et, le croyant armé d'un aiguillon, reculer
devant son air menaçant.
Est-ce aussi une sorte de supercherie ou un moyen effi-
cace de défense qu'emploient quelques espèces de chenilles
dans les mêmes circonstances. Lorsqu'on les irrite, une
corne charnue, rouge, éreclile qu'elles tiennent cachée
sous la peau en arrière de la tète, se dresse et émet une
forte odeur de fenouil.
Les larves de la chrysomèle du peuplier portent, sur le
dos, une double série de tubercules munis de tubes com-
muniquant avec de petites vésicules sous-cutanées. Au
moindre attouchement, de chacun de ces tubes sort une
gouttelette d'un liquide laiteux, doué d'une insupportable
odeur d'acide prussique. H ne s'agit pas ici d'une simple
démonstration, mais d'une belle et bonne défense avec
laquelle il ne faut pas plaisanter; aussi ces larves vivent à
découvert sur les feuilles, sans crainte des oiseaux, qu'elles
bravent ouvertement. Elles sont très-ménagères de leur
sécrétion venimeuse, car, le danger passé, elles la retirent
dans leur corps jusqu'à ce que se présente une nouvelle
occasion d'en faire usage.
( 806 )
La structure et la couleur du corps sont aussi mises à
prolit par une foule de petits animaux pour échapper aux
regards de leurs ennemis. Certaines chenilles, ressemblant
à s'y méprendre à de petits fragments de bois, se posent
volontiers sur les rameaux desquels il est difficile de les
distinguer. Il y a des insectes qui se tiennent d'habitude
sur les troncs d'arbres et dont la robe a les rugosités et la
couleur grisâtre de l'écorce. Wallace rapporte, dans le récit
de ses chasses en Malaisie, qu'il voyait fréquemment une
espèce de papillon voltiger autour de certains arbustes,
dans l'intérieur desquels ils disparaissaient tout à coup,
sans qu'il lui lut possible de les apercevoir au repos. 11
parvint enfin à découvrir que ces papillons, en se posant
sur les branches mêmes de l'arbuste, repliaient leurs ailes
de telle façon qu'ils prenaient tout à fait l'apparence des
feuilles et se confondaient avec elles.
Les êtres qui ne sont pas agressifs par tempérament
et dont la vie s'écoule paisiblement sur les plantes qui les
nourrissent, n'ont guère, en ce qui concerne le soin de
leur sécurité, que les préoccupations communes à tous les
faibles. Mais il en est que la nature a dotés d'un goût bien
dangereux; de ce nombre est la chenille de la gallerie, ou
teigne des ruches. Cette imprudente bestiole, à laquelle la
cire des abeilles sert de nourriture, passe toute sa vie au
milieu des plus grands périls, vivant aux dépens d'ui»
peuple peu hospitalier et surtout qui n'a pas la réputation
d'être taillable et corvéable à merci. Aussi s'entoure-t-elle
des plus minutieuses précautions pour s'introduire dans
l'habitation de ces hyménoptères et rapiner leur cire à
leur insu. Voici comment elle s'y prend : au sortir de
l'œuf, elle se fabrique sans tarder, avec la substance même
de la cire, un luyau cylindrique qu'elle tapisse à l'intérieur
(807 )
d'une soie solidement feutrée. Ce tuyau, fixé sur une
alvéole ou contre les parois de la ruche, n'est d'abord pas
plus gros qu'un fil. A mesure que la chenille grandit, il
s'allonge et s'élargit de manière à permettre à celle-ci de
s'y mouvoir aisément sans jamais se montrer au dehors.
Celte teigne n'est pas au reste le seul commensal des
ruches. Les cités d'abeilles, de même que celles des
guêpes, des fourmis et des termites, ont des hôtes nom-
breux que ces farouches insectes tolèrent au milieu d'eux.
Quelques-uns se contentent, pour vivre, des restes de
cuisine de la communauté; d'autres se rendent utiles en
la débarrassant des immondices résultant nécessairement
d'une grande agglomération d'individus ; d'autres encore y
sont entretenus à titre d'animaux domestiques. Il en est
toutefois qui osent s'attaquer aux habitants eux-mêmes.
Ceux-là ont sans doute recours à des ruses ou à des moyens
que nous ignorons, mais ce que l'on peut affirmer à coup
sûr, c'est qu'ils ne coulent pas leurs jours dans une douce
quiétude.
Plus facile est la vie du calosôme. La larve de ce bril-
lant coléoptère, solidement cuirassée et armée de puis-
santes mandibules, n'a qu'à se laisser vivre, commodément
établie qu'elle est au milieu des nids de la chenille proces-
sionnaire qui lui sert de nourriture. Jouissant d'un confort
sans égal, jamais ce sybarite ne connaît la faim; il n'a
d'autre souci que de bien digérer les aliments dont il fait
choix à son gré, et qu'il se procure sans effort et sans
fatigue.
On voit que dans le monde des insectes, comme chez
les hommes, les conditions dans lesquelles s'écoule l'exis-
tence sont très-diverses. Les uns vivent sans peine et sans
travail au sein de l'abondance, grâce à la prévoyante solli-
( 808 )
citude de leurs parents, les autres, malheureux déshérités,
ne connaissent de la vie que ses amertumes et ses luttes,
et pour eux chaque jour se passe dans la misère du
moment et l'incertitude du lendemain !
III.
Je viens de passer rapidement en revue quelques-uns
des principaux procédés d'attaque et de défense des
insectes. On a vu qu'à cet égard ils se montraient égaux,
sinon supérieurs, aux animaux d'une organisation plus
élevée. Mais il ne s'est agi jusqu'ici que de laits dus à leur
activité individuelle. Il me reste à dire un mot de leurs
sociétés, des associations dans lesquelles certaines espèces
puisent une force comparable à celle des êtres les plus
redoutables. L'homme, qui ne craint pas d'affronter le tigre
et le lion, est parfois tenu en échec par les insectes; il s'est
déjà vu obligé d'employer, pour les combattre, les moyens
les plus puissants dont il peut disposer, et la victoire n'a
pas toujours été de son côté.
Les sociétés d'insectes sont nombreuses, mais toutes
ne sont pas constituées de la môme manière. Les unes
consistent en de simples agglomérations d'individus n'ayant
qu'un caractère temporaire. On y reconnaît bien l'existence
d'un instinct de sociabilité, mais celle-ci paraît renfermée
dans des limites très-étroites. L'association n'a d'autre but
que la construction d'un abri commun en vue de l'hiver-
nage.
Tout autre est l'association de certaines espèces chez
lesquelles on aperçoit une entente véritablement intelli-
gente, qui se manifeste dans tous les actes sociaux et parti-
( 809 )
culièrement dans celui où elle est le plus efficace, dans la
guerre.
On est frappé d'étonnement lorsqu'on lit ce qui a été
publié sur les mœurs des termites, des fourmis et des
abeilles. Si l'on n'avait toute conflance dans les récits des
naturalistes éminents qui en ont tracé l'histoire, et qui ont
donné, d'autre part, des preuves incontestables de bonne
observation et de sincérité, on serait tenté de les consi-
dérer comme d'audacieuses fantaisies, des fables absurdes.
Je ne puis, dans ce court aperçu , que glisser très-rapi-
dement sur les faits extraordinaires que révèle l'histoire
des insectes sociaux. Je me bornerai donc à en citer
quelques-uns qui dénotent une intelligence qu'on ne
s'attendrait pas à rencontrer dans des êtres de taille si
infime.
Parmi les choses merveilleuses qui excitent l'admiration
des voyageurs dans les pays chauds, surtout en Afrique, il
faut placer au premier rang les habitations des termites.
Ces insectes, auxquels on donne généralement le nom
de fourmis 6/a»jc/ies, s'associent en nombre immense pour
élever des édifices auprès desquels, si l'on tient compte de
la taille des architectes, les plus grandes et les plus solides
constructions humaines ne sont rien.
Leur organisation sociale, leur manière de vivre, sont
des plus étonnantes, mais ce serait sortir de mon sujet
que d'en parler ici. Je dirai seulement que les habitants de
ces cités se répartissent en plusieurs classes dont les
attributions sont parfaitement tranchées. Il en est une,
entre autres, à laquelle est dévolu le soin de garantir la
sécurité publique. En d'autre terme chaque cité a son
armée régulière, ou, pour me servir d'une expression plus
juste, sa garde civique.
S*"" SÉRIE, TOME XXXVIII. S2
( 8d0 )
Les individus qui composent cette classe de citoyens se
distinguent par une tête plus forte, des mandibules plus
longues et plus robustes et, chose à noter, par l'absence
de sexe, ce qui les condamne à un célibat forcé. Oublions
un moment que nous n'avons affaire qu'à des insectes : ne
dirait-on pas que la nature, en les affranchissant de toute
préoccupation de famille, a voulu qu'ils se dévouent
avec une entière liberté d'esprit aux intérêts de la chose
publique.
Lorsque la termitière est attaquée, les défenseurs se
hâtent d'accourir et en même temps , au moyen d'un signal
particulier, avertissent les citoyens paisibles que la ville
est en danger. Ensuite ils fondent tous ensemble sur
l'ennemi, quelque redoutable qu'il soit. Leur attaque est
furieuse et ils font preuve, dans le combat, d'un courage
aveugle et d'un dévouement absolu.
Il parait que, quand la défense commune ne les appelle
pas au dehors, ces braves guerriers veillent au maintien
de l'ordre intérieur, et notamment qu'ils obligent les ou-
vriers à travailler; — disons en passant qu'à l'époque où
Smeathmann les observait on ne parlait pas encore de
grèves. — Au reste, les termites ne sont pas un peuple
batailleur, leurs troupes sont simplement des milices
citoyennes préposées à la défense du territoire et à la
police; elles ne font pas la guerre par esprit de domination
et de conquête , mais seulement lorsqu'elles y sont forcées
par la nécessité.
Il n'en est pas de même des véritables fourmis.
Tout le monde connaît les fourmis. Qui n'a pas rencon-
tré, dans les bois, ces vastes monticules de bûchettes
autour desquels s'agite, d'un air affairé, une multitude de
ces insectes. Ce sont les cités d'une de nos espèces. On
( 811 )
les évite d'iiabitude, on se détourne de leur chemin, car
ce peuple n'est pas d'humeur débonnaire; il n'aime pas
les indiscrets et il leur manifeste volontiers sa colère dans
la mesure de ses moyens. Il s'est trouvé cependant que
des gens curieux ont voulu se rendre compte de leurs
mœurs et se sont mis à les observer de près, comme le
font les explorateurs à l'égard des peuplades sauvages au
milieu desquelles les transporte le hasard de leurs péré-
grinations et voici, entre autres choses étonnantes, ce
qu'ils ont remarqué :
Les fourmis sont essentiellement guerrières, et quand
elles ne sont pas en querelle avec l'extérieur, il n'est pas
rare de les voir en proie à quelque dissenlion intestine. Un
naturaliste genevois, Pierre Hubert, l'un des principaux et
des plus véridiques historiographes des fourmis, fait à peu
près en ces termes le récit d'une de leurs batailles : Les
deux armées s'étaient rencontrées à mi-chemin de leurs
habitations respectives ; le combat se livrait sur un espace
de quelques pieds carrés, et il s'en exhalait une odeur
acide pénétrante. A l'approche de la nuit et après s'être
bien battue, chaque armée rentrait graduellement dans
ses quartiers, mais elle retournait au combat avant l'au-
rore et le carnage recommençait avec plus de fureur. Par-
fois un parti faiblissait et réclamait du renfort. Celui-ci ne
se faisait pas attendre. Il y avait des réserves, des retraites
momentanées, des retours offensifs, des embuscades; on
emmenait des prisonniers; enfin, la bataille finie, chaque
parti emportait ses morts. Ne dirait-on pas qu'il s'agit
d'une bataille entre les hommes?
Si, de l'Europe, nous nous transportons en Amérique,
nous assisterons à des scènes du même genre, mais
accomplies dans de plus grandes proportions.
( 812 )
Dans les forêts de la Guyane et du Brésil , ce ne sont plus
quelques pieds carrés que mesurent les champs de bataille.
Là, tout s'y passe dans des proportions grandioses. C'est par
milliards que se chiffre l'effectif des migrations de fourmis.
On en a vu qui, sur un front d'une centaine de mètres,
défilaient pendant des journées entières. Cela fait penser
à ces invasions de barbares dont l'Europe fut autrefois le
théâtre. Leur arrivée s'annonce longtemps d'avance par un
bruissement particulier, et mieux encore par un monde
d'animaux de toutes sortes qui les précède en fuyant. Il va
de soi que les colons, dont les habitations se trouvent sur
leur passage, s'empressent de déguerpir au plus vite, et
de leur céder momentanément les lieux.
Il y a des cités de fourmis hautes de plusieurs mètres
et larges en proportion ; qu'on juge du nombre d'habitants
(jue comptent de telles agglomérations.
Fort souvent les colons ont dû leur abandonner cer-
tains cantons, à moins qu'ils ne fussent en force pour
faire le siège en règle de leurs forteresses et les anéantir.
Lorsque les Français s'établirent à la Guyane, un déta-
chement de troupes rencontra, par hasard , sur son chemin,
une de ces places fortes. Pour passer, il fallait la détruire.
Le commandant fit creuser, autour de la fourmilière, un
fossé circulaire. On le remplit de bois sec et l'on y mille
feu de tous les côtés à la fois. Cela fait, la place fut abattue
à coups de canon.
Le canon contre des insectes!
N'avais-je pas raison de dire, tout à l'heure, que
l'homme doit en venir, dans certaines circonstances, à
user des moyens les plus puissants dont il peut disposer
pour lutter contre de chétifs animalcules, tant il est vrai
qu'il n'est pas de si petites forces qui ne deviennent irré-
( 815 )
sistibles en s'accumulant. J'en citerai encore nn exemple,
tiré (lu récit de l'expédition du docteur Schwenfurt dans
l'Afrique centrale. Voici l'aventure qui lui arriva :
C'était en remontant le Bahr-el-Abiad, l'une des bran-
ches du Haut-iNil. Le vent était contraire et son bateau, ne
pouvant avancer à la voile, quelques-uns de ses hommes
étaient descendus à terre et le balaient au moyen d'une
longue corde. Celle-ci, en trainantsur le sol, vint à ren-
contrer une colonie d'abeilles et y jeta le trouble. La ven-
geance de ces farouches insectes ne se fit pas longtemps
attendre. Un essaim tout entier s'abattit sur les haleurs
qui n'eurent que le temps de se jeter à l'eau et de rega-
gner le bord à la nage.
Mais les abeilles n'étaient pas apaisées. Elles poursui-
virent les fuyards jusqu'à l'embarcation, et, dans leur
fureur aveugle, attaquèrent tout l'équipage, y compris
notre botaniste qui était tranquillement occupé dans sa
cabine à arranger des plantes. Ce fut un sauve qui peut
général. Le docteur, affolé, fit un plongeon dans le fleuve
et ne fut sauvé d'un nouveau danger que grâce à ses gens.
Peu à peu, cependant, les abeilles se retirèrent et le calme
se rétablit. Mais en faisant, après la bataille, le relevé des
pertes il se trouva que du côté des hommes il y eut deux
morts et autant de blessés que de combattants.
Schvveinfurt ajoute que les seize bateaux qui compo-
saient sa flottile, et qui passèrent après lui, furent assail-
lis de la même façon par ces vindicatives petites bétes.
A propos des abeilles, saviez-vous qu'elles avaient pris
part à la bataille de Sadovva? Non? Eh bien, lisez V His-
toire de la campagne de /6'6'6\ par le général de Moltke,
et vous verrez qu'en cette journée mémorable , près du vil-
( 814 )
lage de Nedelist, vers trois heures de l'après-midi, alors
que la bataille était dans toute sa violence, deux bataillons
de la brigade Hanenfeld, établis derrière les mnrs d'une
ferme, répondaient aux feux croisés de deux batteries
autrichiennes. Un obus s'en vint éclater au milieu de
ruches qui se trouvaient en nombre en cet endroit. Les
abeilles, indignées à juste titre de cet aggression sans
motifs dans une querelle qui ne les regardait pas , se
ruèrent sur les hommes, et ceux-ci eurent grande peine
à se défendre de leurs piqûres. Dans cette épouvantable
tourmente humaine, l'attaque des abeilles fut, comme
vous voyez, assez sérieuse pour qu'un rapport officiel en
fît mention. Désormais la charge des abeilles de Nedelist
appartient à l'histoire!
Je pourrais reproduire bien d'autres récits du même
genre, mais à quoi bon! Ce n'est pas un traité sur cette
matière que j'ai entrepris. J'ai voulu exposer, seulement
en quelques pages, les traits les plus saillants des divers
systèmes d'attaque et de défense, mis en usage par les
insectes, et faire voir que la cause de l'ignorance dans
laquelle on est généralement à l'égard de ces faits tient,
non pas an défaut d'intérêt qu'ils présentent, mais à la
petite taille des acteurs. Les faits et gestes des grands ani-
maux s'imposent en quelque sorte à notre attention : nous
les observons sans y prendre garde, leurs mœurs nous
intéressent, nous y prenons goût et nous les étudions.
C>'est l'inverse pour les insectes. 11 faut d'abord les étudier,
l'intérêt ne vient qu'après et comme conséquence de cette
étude.
De tout ceci quelle conclusion tirer? J'en vois plusieurs,
mais leur exposition m'obligerait à les développer, à les
( 815 )
discuter, ce qui m'entraînerait trop loin. II en est une
cependant que je ne puis m'empêcher de faire ressortir,
car elle me frappe entre toutes.
Au milieu de ce carnage universel qui dure depuis qu'il
y a des êtres vivanis et qui durera tant qu'il y en aura , on
entrevoit une extrême sollicitude de la nature pour assurer
la sécurité de l'espèce, la permanence et la transmission
de la vie sur le globe. Mais, d'autre part, quelle insou-
ciance, que l'on me passe le mot, à l'égard des individus!
si chaque être a été doué, dès sa naissance, d'un puissant
instinct de conservation, n'est-ce pas parce que son déve-
loppement jusqu'à l'âge adulte est indispensable à la trans-
mission de la vie? Cet acte important consommé, la pro-
tection occulte qui l'entourait l'abandonne bientôt. Il peut
et même il doit disparaître. S'il continue à exister encore
quelque temps, c'est par suite de l'harmonie générale qui
persiste dans le fonctionnement de ses organes. Il est
comme une machine que l'on aurait chauffée en vue d'un
travail à accomplir et dans laquelle, ce travail accompli ,
il resterait un peu de charbon et d'eau qui ferait marcher
ses rouages pendant quelque temps encore après le départ
du mécanicien!
Un regard jeté sur l'ensemble du monde des insectes le
démontre clairement. On est frappé des soins prévoyants
qui, entourent l'œuf d'abord, puis la larve (|ui représente
l'enfance et la jeunesse de l'insecte. Quant à celui-ci, ar-
rivé à son dernier développement et le devoir de la repro-
duction rempli, son rôle est terminé. On en connaît même
qui, après leur évolution définitive, quand, après s'être dé-
pouillés de leur enveloppe de nymphe, ils déploient leurs
ailes et s'élancent dans les airs pleins de vie et en état de
la transmettre, ont perdu d'autre part, par l'absence de
(816 )
bouche, la possibilité d'entretenir leur propre existence, et
sont dès lors condamnés à périr rapidement.
Le rôle des individualités ne consisterait donc qu'à faire
la chaîne : recevoir la vie et la passer à d'autres!
Les applaudissements de l'assemblée ont accueilli cette
lecture.
— M. Éd. Mailly, correspondant de la classe, inscrit
en second lieu au programme dé la solennité, est venu
au bureau lire la notice suivante sur Adolphe Quetelet.
Lambert-Adolphe-Jacques Quetelet, secrétaire perpé-
tuel de l'Académie royale des sciences, des lettres et des
beaux-arts de Belgique; directeur de l'Observatoire de
Bruxelles; président de la Commission centrale de statis-
tique; de la Société royale de Londres; des Académies
des sciences de Berlin et de Saint-Pétersbourg; l'un des
huit associés étrangers de l'Académie des sciences morales
et politiques de l'Institut de France; ancien professeur au
collège de Gand, à l'Athénée, au Musée et à l'École mili-
taire de Bruxelles; grand officier de l'Ordre de Léo-
pold, etc., etc., naquit à Gand, le 22 février 1796, de
François-Augustin-Jacques-Henri Quetelet, officier muni-
cipal , et d'Anne-Françoise Yandevelde.
Son père, natif de Hara , petite ville de la Picardie, était
passé fort jeune en Angleterre. Il avait ensuite voyagé sur
le continent avec un noble Écossais à qui il servait de
secrétaire. Celui-ci étant mort pendant qu'ils séjournaient
en Italie, Henri Quetelet alla s'établir à Gand et y fut admis
dans le Corps des Merciers, après avoir fait ses années
d'apprentissage. Devenu plus tard officier municipal, il
(817 )
rendit des services signalés, que les administrateurs de la
ville se plurent longtemps à reconnaître. Il mourut en
1805.
Resté orphelin à l'âge de sept ans, Adolphe Quetelet lit
de brillantes études au Lycée de Gand. Son inclination
particulière le portait aux lettres et aux arts. En 1812, il
exposait au Salon de Gand un dessin qui fut remarqué, et
quatre ans après, il faisait représenter sur le théâtre de la
même ville un opéra dont il avait écrit les paroles avec
son ami Dandelin. Il était déjà, à cette époque, professeur
de mathématiques au collège qui avait remplacé le Lycée
impérial; mais les mathématiques n'occupaient encore
qu'une place secondaire dans son esprit; il les envisageait
surtout au point de vue de l'argent qu'il y gagnait, en
donnant des leçons et des répétitions. Son rêve était de
briller comme poète, comme artiste; il travaillait dans
l'atelier d'un peintre : ce fut Garnier qui lui inspira le goût
des sciences.
Garnier avait été appelé de France pour occuper la
chaire de mathématiques et d'astronomie à l'Université
que le roi Guillaume venait de fonder à Gand. Géomètre
assez ordinaire et professeur diffus, il avait beaucoup
d'érudition , savait indiquer les bonnes sources où il conve-
nait de puiser, et possédait le grand art de stimuler l'ar-
deur de ses élèves. C'était , en outre, un lettré d'un esprit
vif et original, dont la conversation était à la fois instruc-
li\e et amusante. Son enseignement , dit Quetelet, ne com-
mençait réellement que quand il était hors de la chaire et
qu'il avait perdu de vue le tableau.
Quetelet fut le premier docteur en sciences de la nou-
velle Université : sa promotion date du 24 juillet 1819. Il
fit paraître, à cette occasion, une dissertation qui le plaça
( 8i8 )
incontinent parmi les inventeurs en mathématiques. « Un
géomètre, » disait Fontenelle, « ne doit pas être moins
glorieux d'avoir donné son nom à une courbe, qu'un prince
d'avoir donné le sien à une ville. » La découverte de la
Focale allait procurer cette bonne fortune à Quetelet; elle
dut réjouir ses professeurs au moins autant que lui-même,
à cause de l'éclat qu'elle jetait sur leur Université : ils la
célébrèrent comme un triomphe et comprirent la nécessité
de procurer à son auteur une position mieux en rapport
avec son mérite. iM. Falck , ministre de l'instruction pu-
blique, étant venu, au mois d'août, poser la première
pierre des bâtiments de l'Université, se vit recommander
le jeune docteur et lui accorda sa protection. Il y avait
justement à l'Athénée de Bruxelles un vieux professeur
disposé à prendre sa retraite. Quetelet fut nommé à sa
place, en octobre; il retrouva à l'Athénée Ph. Lesbroussart
qui avait été son professeur de rhétorique au Lycée impé-
rial du département de l'Escaut, et s'y lia d'amitié avec
le régent de troisième , de Reiffenberg, dont la nomination
avait précédé la sienne de quelques mois.
Quetelet n'avait pas renoncé aux lettres et à la poésie.
Il se fit recevoir à la Société de littérature, pour laquelle il
écrivit quelques pièces de vers, et fut nommé du Comité
de lecture des théâtres royaux, ce qui lui procura ses en-
trées au théâtre de la Monnaie, oîi Talma et M"^ Mars
venaient, chaque année, donner des représentations.
Bruxelles renfermait alors un grand nombre de réfugiés
que la seconde Restauration avait bannis de France.
C'étaient, pour la plupart, des hommes distingués et d'un
commerce agréable. Quetelet rechercha leur société et se
fit bien voir d'eux. Il fréquenta aussi les artistes, dont le
peintre David était le coryphée.
(8)9)
Toutefois la géométrie formait sa principale occupation.
Aussi sa première visite, en arrivant dans la capitale,
avait-elle été pour le commandeur de Nieupnrt. Le com-
mandeur, comme on l'appelait par abréviation, se connais-
sait beaucoup aux mathématiques, qu'il avait longtemps
représentées seul en Belgique : il fît bon accueil à Quetelet
et lui donna d'utiles conseils. Quelques mois après, il con-
tribua avec Garnier à le faire élire membre de l'Académie
des sciences et belles-lettres de Bruxelles. Le nouvel aca-
démicien ne tarda pas à prouver qu'il y avait eu plus que
du bonheur dans sa découverte de la Focale, et qu'il pos-
sédait jusqu'à un certain point cette force d'imagination
dont il parle à propos de Dandelin, « force, » dit-il, « qui
saisit les corps dans l'espace, rapproche leurs différentes
parties cl fait jaillir de leur comparaison une foule de vé-
rités nouvelles. »
Je ne pourrais dire comment Quetelet fut porté à la
statistique, ni comment elle le détourna de la géométrie
à laquelle il devait ses premiers succès. La citation qu'il fait
quelque part d'un passage d'une lettre de Pascal à Fermât,
nous expliquera peut-être ce changement : « Pour vous
parler franchement de la géométrie, » écrivait Pascal , « je
la trouve le plus haut exercice de l'esprit; mais en même
temps je la connais pour si inutile, que je fais peu de dif-
férence entre un homme qui n'est que géomètre et un
habile artisan. Aussi je l'appelle le plus beau métier du
monde; mais enfin ce n'est qu'un métier; et j'ai dit souvent
qu'elle est bonne pour faire l'essai, mais non pas l'emploi
de notre force : de sorte que je ne ferais pas deux pas
pour la géométrie, et je m'assure que vous êtes fort de
mon humeur. »
La fondation de l'Observatoire de Bruxelles comptera
( 820 )
parmi les grands services rendus par Quetelet à la science.
L'ancienne Académie avait souvent exprimé le regret que
la Belgique n'eût aucun établissement de ce genre : à dif-
férentes reprises elle avait signalé la nécessité de combler
cette lacune. Avant elle, l'astronome Jean Bernoulli,
visitant les Pays-Bas autrichiens, s'était plaint que per-
sonne n'y sentît les attraits de l'astronomie. Trente ans
après lui, sous la domination française, le célèbre Lalande
ne trouvait à citer que l'Anglais Pigott, qui avait fait chez
nous, dans l'intervalle, des observations pour fixer la po-
sition de quelques points du pays. Mais il ne fallait pas
seulement faire renaître l'astronomie qui avait compté
jadis en Belgique de glorieux adeptes : la météorologie et
la physique du globe y étaient pour ainsi dire à créer.
Quetelet ne recula pas devant cette entreprise ardue :
il fut soutenu par un minisire éclairé, le même auquel il
devait sa nomination à l'Athénée de Bruxelles. M. Falck
l'envoya à Paris pour y prendre les renseignements néces-
saires à la construction d'un Observatoire et s'exercer à
l'emploi des grands instruments. A son retour, au com-
mencement de l'année 1824, il présenta son projet au Roi
par l'intermédiaire du prince de Gavre, président de l'Aca-
démie, qui avait promis de l'appuyer. Après que le Roi eut
donné son assentiment, des ouvertures furent faites au
bourgmestre de Bruxelles, M. de Wellens; on le pres-
sentit sur la part pour laquelle la ville serait disposée à
contribuer à la dépense, afin de voir élever l'Observatoire
dans ses murs. Comme la négociation traînait en longueur,
M. Walter, inspecteur général de l'instruction publique,
qui en était chargé, s'adressa à la Régence de la ville de
Liège; et quand M. de Wellens fut prévenu que celle-ci
allait faire des offres, il n'hésita plus : sur sa proposition,
( 821 )
le Conseil de régence vota, le 9 février 1826, une somme
de dix mille florins pour payer la moitié des frais de con-
struction, évalués à vingt mille florins. Par un arrêté du
8 juin, le Roi décida qu'un Observatoire serait érigé à
Bruxelles, et que l'autre moitié des frais serait supportée
par le trésor public.
Ce n'est pas ici le lieu de raconter les traverses qu'essuya
la nouvelle institution. Le plan de l'éditice n'avait pas été
suffisamment élaboré; on eut le tort de mettre la main à
l'œuvre avant que tous les détails en eussent été discutés
et approfondis; on eut aussi le tort de chercher à dissi-
muler le chiffre de la dépense qui, de vingt mille florins,
monta jusqu'à soixante mille. Les événements de la révo-
lution de 1850 suscitèrent de nouvelles entraves. Com-
mencées au mois de mai 1827, les constructions n'étaient
pas encore terminées dix ans après. Cependant Quetelet
avait pu prendre possession de son logement dans le cou-
rant de l'année 1832; les observations météorologiques
commencèrent avec l'année 1833, mais les instruments
méridiens ne furent placés qu'au mois de juillet 183o, et
l'équatorial ne put être monté qu'un an plus tard.
Quetelet avait été nommé astronome près l'Observa-
toire, par un arrêté royal du 9 janvier 1828. Il avait quitté
l'Athénée, mais il continua jusqu'en 1854 à donner des
leçons publiques de physique et d'astronomie au Musée
des sciences et des lettres, établi en 1826, et dont la fon-
dation lui était due en grande partie. Lorsque ce Musée
fut absorbé par l'Université libre, il sortit momentané-
ment de l'enseignement, dans lequel il comptait déjà vingt
années de services : il ne tarda pas à y rentrer, ayant été
nommé professeur d'astronomie et de géodésie à l'École
militaire, par un arrêté royal du 6 janvier 1856.
( 822 )
Je me borne ici à retracer à grands traits la vie de Que-
telet : je parlerai plus loin de ses travaux. Il avait été élu
membre de l'Académie des sciences et belles-lettres de
Bruxelles, le 1" février 1820, et dans le diplôme qui lui
fut expédié le 24, on lit ce qui suit : « L'Académie..., pré-
voyant qu'en s'allachanl un jeune savant de ce mérite et
d'une grande espérance, elle facilitera la communication
des lumières et le progrès des sciences..., l'a nommé et le
nomme académicien ordinaire regnicole... » Jamais peut-
être il n'était arrivé à l'Académie de lire aussi bien dans
l'avenir; encore ne prévoyait-elle pas qu'une grande partie
de sa renommée lui viendrait un jour de ce jeune homme
de vingt-quatre ans, dont une heureuse trouvaille et quel-
ques poésies constituaient alors tout le bagage scientifique
et littéraire.
Les séances de l'Académie n'étaient guère suivies à cette
époque que par une demi-douzaine de membres : elles se
passaient en conversations plutôt qu'en lectures. Le com-
mandeur de Nieuport remplissait les fonctions de direc-
teur; il avait appartenu à l'Académie de Marie-Thérèse, et
n'avait pas moins de haine pour les idées libérales que
d'amour pour la géométrie. Pendant la révolution braban-
çonne, il avait gravement compromis l'Académie en lui
faisant voter un don patriotique de quatre canons; en 1812,
il proposait avec le plus grand sérieux d'accorder la liberté
de la presse en latin seulement.
Nieuport était en lutte constante avec le secrétaire per-
pétuel Van riulthem, à qui il reprochait, non ses idées
politiques, car le brave homme n'en avait point, mais sa
négligence à remplir ses fonctions : il finit même par
mettre à sa place l'historien Dewez, dont il ne connais-
sait sans doute pas les étranges discours prononcés, sous
( 823 )
le Directoire exécutif, au Temple de la loi, à Nivelles.
Quelelet avait conquis les bonnes grâces du comman-
deur et il ne tarda pas à partager son influence. Il profita de
son ascendant sur ses confrères pour faire élire Dandelin
et de Reiffenberg, non parce qu'ils étaient ses amis, mais
parce que l'Académie gagn'ait dans l'un un brillant géo-
mètre, le meilleur peut-être que la Belgique moderne ait
produit, et dans l'autre un homme de lettres plein d'ar-
deur et de zèle.
Après la mort du commandeur, l'influence de Quetelet
devint prépondérante: il en usa toujours pour le plus grand
bien de la Compagnie, faisant tourner à son profit les re-
lations que ses voyages en France, en Angleterre, en Alle-
magne, en Italie, lui permirent de nouer avec les savants
les plus distingués de ces divers pays. Lors de la révolution
de 1830, il aida à sauver l'Académie de deux dangers : la
fièvre de changements inhérente aux perturbations politi-
ques, et l'intrusion des médiocrités toujours prêtes à ex-
ploiter ces changements.
Le 22 novembre 1834, il fut appelé, d'une voix una-
nime, à remplacer M. Dewez qui venait de mourir. Il était
le sixième secrétaire perpétuel de l'Académie , et le troi-
sième qui fût redevable de sa nomination aux suffrages de
ses confrères. L'ancienne Académie avait eu pour secré-
taires : Gérard, Des Roches et Mann; la nouvelle : Yan Hul-
them et Dewez. Gérard, Des Roches et Van Hulthem
avaient été institués par le gouvernement : le premier,
homme d'un caractère difficile, s'était vu retirer ses fonc-
tions à l'Académie au profit de Des Roches, beaucoup plus
souple et fort supérieur, il faut le dire, en activité et en
mérite. Parti de très bas. Des Roches avait fini par arriver
à une brillante position quand il mourut, jeune encore. Si
( 824 )
des besoins incessants d'argent ne lui avaient fait entre-
prendre trop de choses à la fois, il aurait pu laisser une
grande trace dans l'histoire des lettres. Son successeur au
secrétariat de l'Académie, l'abbé Mann, était une de ces
rares intelligences qui embrassent l'ensemble des connais-
sances humaines; il avait toutes les qualités voulues pour
bien occuper le poste dans lequel l'avait placé le vote una-
nime de ses confrères. Cultivant les sciences et les lettres,
possédant les langues anciennes et modernes, doué d'un
grand esprit d'ordre et de méthode, au-dessus d'une mes-
quine envie et dans une position d'indépendance complète,
bienveillant et désintéressé, connu à l'étranger et en rela-
tion avec les principales Sociétés savantes, il aurait certai-
nement donné du lustre à l'Académie, sans les troubles
politiques qui vinrent enrayer son zèle. J'ai déjà parlé de la
négligence de Van Ilulthem ; avec des connaissances variées,
il avait une extrême répugnance à écrire et ne se plaisait
qu'à amasser des livres: on dit même qu'ils furent sa seule
passion. Dewez a pu être un historien patient et laborieux,
je ne veux pas contester les services qu'il a rendus sous ce
rapport. Je reconnaîtrai volontiers que dans ses fonctions
de secrétaire perpétuel , il fut exact et méthodique; mais il
n'avait aucune autorité, et son ignorance presque complète
des langues vivantes l'aurait rendu incapable d'entretenir
des relations avec les pays étrangers, quand même son nom
y eût pénétré. Quetelet, avec le respect qu'il porta toujours
à l'âge, avait pour lui les plus grands égards; il s'efforçait,
sans trop y réussir, de faire quelque chose des Bulletins
décharnés que Dewez lui soumettait avant de les envoyer à
l'imprimeur; il lui montra jusqu'au bout une grande défé-
rence et aurait été désolé de lui causer la moindre peine.
Il est très possible que dans certaines sphères on ait songé,
( 825 )
après 1850, à priver Dcwez de sa place de secrétaire
de l'Académie : une pareille mesure aurait rencontré dans
Quetelet un ennemi déclaré. Lorsque Garnier, au mépris
de grands services rendus à l'enseignement en Belgique,
eut été expulsé de l'Université de Gand , son ancien élève,
devenu son confrère, ne laissa échapper aucune occasion
de protester contre cet acte injustifiable, et sa voix géné-
reuse s'éleva également en faveur d'un autre professeur,
M. Raoul, à qui il n'avait d'autre obligation personnelle
que d'en avoir reçu bon accueil, quand il était pauvre et
inconnu.
Ce n'est pas dans cette enceinte que j'ai besoin de rap-
peler ce que l'Académie doit à Quetelet : on peut dire que
c'est lui qui l'a faite. Toujours il sut défendre ses préroga-
tives et sa dignité; il l'aurait même voulue plus indépen-
dante que ne le permettent nos règlements d'administra-
tion publique.
Jl nous reste, avant d'aborder l'exposé des travaux de
Quetelet, à dire un mot de la Commission centrale de sta-
tistique, qu'il présida pendant plus de trente ans, et dont
le fondateur, M. Liedts, avait été son élève à Audenaerde ,
lorsqu'il y donnait des leçons, en 1813 , dans une institu-
tion privée, dirigée par M. Maquaire, de Gand.
La première idée d'une organisation officielle de la sta-
tistique remontait au gouvernement des Pays-Bas. Un
arrêté royal du 5 juillet 1826 avait créé près le départe-
ment de l'intérieur un Bureau de statistique. Les opéra-
tions de ce Bureau devaient être dirigées par une Commis-
sion présidée par le ministre et dont faisaient partie les
administrateurs de l'intérieur, de l'instruction publique et
de l'industrie nationale, assistés d'un secrétaire. Ces admi-
nistrateurs entraient dans la Commission en vertu de leurs
2""= SÉRIE, TOME XXXVIII. 53
( 826 )
lonclions : leurs attiibulions et leurs connaissances étaient
loin d'embrasser toutes les branches de la statistique. Le
ministre, qui aurait du donner l'impulsion, était absorbé
par les travaux de son département et les soucis de la
politique. Il y avait des Commissions provinciales, mais
aucun lien ne les rattachait à la Commission centrale: elles
étaient nommées par les gouverneurs qui pouvaient les
dissoudre. Dans l'organisation conçue par M. Liedts, en
1841 , chaque département ministériel était représenté
à la Commission centrale par un ou plusieurs délégués,
ayant lait une étude spéciale et approfondie des branches
de la statistique ressortissant à ce département, et la
Commission devait être présidée « par un homme de
science , versé dans l'économie sociale et habitué à résumer
les travaux de la statistique. » Le président que M. Liedts
avait en vue était Quetelet, dont les recherches et les
ouvrages avaient depuis longtemps établi la réputation en
Belgique et plus encore à l'étranger. Il avait été l'un des
premiers correspondants élus par l'Académie des sciences
morales et politiques de l'Institut de France, après sa
restauration. Lors de la réunion de l'Association Britan-
nique pour l'avancement des sciences, tenue à Cambridge,
en 1835, il avait provoqué la création d'une section de
statistique, dont firent partie Malthus, Babbage, Jones, etc.
A son retour à Londres, il avait été appelé devant une Com-
mission d'enquête instituée par le Parlement, pour fournir
des indications sur la tenue des registres de l'état civil
en Belgique et sur le recensement du l""" janvier 1850.
Ce recensement, le premier qui avait été opéré chez
nous sur des bases rationnelles, aurait dû être renouvelé
en 1840, aux termes d'un arrêté royal du 29 sep-
tembre 1828, mais les préoccupations politiques du temps
( 827 )
avaient empêché qu'on n'y pensât. Malgré les instances
de la Commission centrale, le nouveau recensement lut
retardé jusqu'au 15 octobre 1846. Entre-temps, l'organi-
sation de la statistique avait été complétée par l'institution
des Commissions provinciales, dont les membres étaieni
nommés par le ministre de l'intérieur, sur la proposition
de la Commission centrale, ce qui permettait de mainte-
nir l'unité dans les recherches.
Après avoir établi l'unité dans les travaux statistiques
de la Belgique, il s'agissait de l'introduire dans ceux
des autres pays. On y arriva par l'organisation des Con-
grès internationaux. Le premier de ces Congrès se tint à
Bruxelles en 1855. Quetelet, qui en avait été le principal
promoteur, fut appelé par le vote unanime des délégués
des nations à le présider. Le second Congrès de statistique
eut lieu à Paris en 1855, mais Quelelel ne put pas y
assister : son absence motivée par un douloureux événe-
ment auquel nous reviendrons plus tard, fut vivement
regrettée et donna lieu à une manifestation des plus hono-
rables pour lui; il se rendit à tous les autres Congrès, qui
siégèrent successivement à Londres, à Vienne, à Berlin, à
Florence, à La îîave et à Saint-Pétersbourg.
L' .Académie, l'Observatoire et la Commi.^sion centrale
de statistique ont été les centres où convergèrent pendant
de longues années les travaux de Quetelet, pour rayonner
ensuiie dans le monde savant. Mais les Annales de ces
institutions ne suffirent pas à l'aire connaître toutes les
productions de son esprit : elles auraient, du reste, été
fermées à certaines compositions ne rentrant pas dans
leur cadre, soit par leur genre, soit par leur étendue.
Quetelet avait du goût et du talent pour la poésie. La
veillée dos bardes et Les adieux du poêle à sa lampe fureii!
( 828 )
ses débuis. Publiées au coininencemeiit de l'année 1818,
ces deux pièces attirèrent sur lui l'attention des hommes
qui s'occupaient alors de littérature en Belgique; la Veillée
fut trouvée un peu lugubre, mais les Adieux obtinrent un
succès mérité. La veillée des dames ou Le f 9 janvier, qui
parut en 1819, n'avait rien de la couleur sombre des
Bardes : c'est un petit chet-d'ceuvre, plein de détails char-
mants. Il se rapporte à une légende bruxelloise dont la
tradition s'est perpétuée depuis le temps de Godefroid de
Bouillon.
Les Ëpitres à Tollens , à Odei:aere, à de Reiffenberg ;
VOde à Orion, d'après Nievvland; des traductions ou imi-
tations de Sophocle, de Byron, du Camoëns, de Tollens,
de Schiller; des élégies, des fabliaux, des romances, etc.,
témoignent du talent facile de Quetelet; ses vers, bien que
corrects, ne sont pas géométriques; ils ont de l'harmonie
et de la grâce. L'auteur, quand il compose, semble tou-
jours préoccupé de cette idée qu'il a consignée dans son
Essai sur la Romance : « Il ne suffit plus aujourd'hui de
parler à l'imagination seule, il faut encore contenter l'esprit
et lui faire de grands sacrifices. » N'a-t-il pas poussé trop
loin les sacrifices dont il parle? On en jugera si jamais on
réimprime ses pièces de vers, éparses dans divers recueils.
UEssai sur la Romance, publié en 1825, est un beau
morceau de littérature : il avait demandé de longues re-
cherches et il montre combien les langues vivantes étaient
familières à Quetelet. On y trouve aussi la preuve qu'il
n'avait aucun préjugé classique. « La littérature des an-
ciens, » disait-il avec M"'*' de Staël, a est chez les modernes
une littérature transplantée : la littérature romantique ou
chevaleresque est chez nous indigène, et c'est notre reli-
gion et nos institutions qui l'ont fait naître. »
( 829 )
Je suis obligé, pour mettre un peu d'ordre dans cette
analyse rapide, de partager Quetelet, de le décomposer. Je
reviens maintenant au géomètre dont j'ai déjà dit un mot
à propos de la découverte de la Focale, qui est le lieu des
foyers de toutes les sections coniques déterminées par un
plan transversal tournant autour d'un point pris sur la
surface du cône droit. La Focale attira l'attention de
Dandelin; il en fit connaître des propriétés très remar-
quables, et réleva au rang des plus belles courbes connues;
mais le sujet était loin d'être épuisé : il fut repris par
MM. Yan Rees, Chasies et d'autres. M. Plateau, encore sur
les bancs de l'Université, trouva le moyen de faire voir la
Focale se dessiner dans l'air, en faisant tourner deux
droites avec des vitesses doubles l'une de l'autre.
Parmi les mémoires présentés par Quetelet à l'Aca-
démie, celui qui a pour titre : ?iourelle théorie des sections
coniques considérées dans le solide, mérite une attention
particulière. « Les géomètres anciens, » dit Garnier en
parlant de ce mémoire, « et ceux qui, à leur exemple, ont
considéré les sections coniques comme des coupes faites
sur le cône par un plan , ont ensuite isolé ces sections pour
en rechercber les propriétés sans aucun égard au cône et
au plan générateur. ]\I. Quetelet a en l'beureuse idée de ne
pas séparer le cône de la section et de reprendre, sous ce
point de vue, les propriétés principales des trois courbes
dont il a donné des énonciations qui nous ont paru nou-
velles. » L'auteur considère un cône de révolution coupé
par un plan, et le sommet du cône devient un point ana-
logue à celui qu'on nomme /b//e/- dans les sections coniques.
Les rayons vecteurs sont menés du sommet du cône, et
l'on rentre dans la théorie ordinaire, quand le sommet
vient se placer dans le plan de la section.
( 850 )
Mentionnons encore un mémoire Sur différents sujeL-^
(h' (jéomélrie à trois dimensions, un autre mémoire i.St«r
quelques constructions çjraphiques des orbites planétaires ,
qui renferment tous deux des projjositions de géométrie,
curieuses et nouvelles, et passons aux importantes recher-
ches de Quetelel sur les caustiques, auxquelles il a consacré
trois mémoires dans le recueil de l'Académie et de nom-
breux articles dans sa Correspondance mal/iématique.
Les catistiques sont des courbes formées par le concours
des rayons de lumière qu'une autre courbe a réfléchis ou
réfractés. Elles furent découvertes en 1682 par le médecin
allemand Tschirnhausen. Après avoir été pendant long-
temps l'objet des recherches de Jacques Bernoulli, du mar-
quis de l'Hôpital et de la Hire, elles étaient tombées dans
une espèce d'oubli, lorsque, en 1810, Malus reprit la ma-
tière et entraîna à sa suite MM. Petit, Hachette, Dupin,
Gergonne; mais les mémoires de ces géomètres distingués
étaient tous d'une analyse très compliquée. Cependant,
dès l'année 181 5, Gergonne avait été conduit à soupçonner
que, le plus souvent, des caustiques fort compliquées
pourraient très bien n'être que les développées d'autres
courbes beaucoup plus simples. Ce n'était qu'une pre-
mière idée : Quetelet la creusa et en fit sortir un théo-
rème, qui, au dire de Gergonne, amenait la catoptrique
et la dioplrique au point d'être racontées à un passant
dans la rue.
Voici le théorème de Quetelet; il doit être rangé, pour
son importance, à côté et mênie au-dessus de la découverte
de la Focale : « La caustique par réflexion ou par réfrac-
tion pour une courbe quelconque, éclairée par un point
rayonnant, est la développée d'une autre courbe, laquelle
a la propriété d'être l'enveloppe de tous les cercles qui ont
( 831 )
leurs centres sur la courbe réfléchissante ou dirimante,
et dont les rayons sont égauv aux distances des centres
au point rayonnant dans le premier cas, et proportionnels
à ces mêmes distances dans le second cas, le rapport
constant étant celui du sinus d'incidence au sinus de ré-
l'raclion. »
Quetelet appelle caustiques secondaires les courbes
enveloppes des cercles qui ont leurs centres sur la courbe
réfléchissante ou dirimante. En s'aidant des projections
stéréographiques, il établit de nombreux rapports entre les
sections coniques et leurs caustiques secondaires, entre
les caustiques secondaires des courbes et leurs polaires. Il
donne aussi des propriétés curieuses des lignes aplané-
tiques, qui jouiss(^nt de la propriété d'avoir deux foyers
conjugués tels que les rayons émanés de l'un de ces foyers
sont réfléchis ou réfractés vers le second. Les problèmes
des points brillants et des courbes d'égale teinte l'occupent
également, et il en présente des solutions très simples.
Je ne saurais mieux louer les mémoires de géométrie de
Quetelet qu'en rappelant ce qu'une Revue très appréciée
de l'époque disait de l'un d'eux: «Outre l'intérêt du sujet
traité dans ce mémoire, la généralité des vues, la variété
des applications et le mérite de quelques vérités nouvelles,
on y remarque la clarté, l'ordre et la précision qui donnent
encore plus de prix aîix bons ouvrages. L'auteur ne dit
rien de trop et n'omet rien. »
Quetelet publia h Paris, en 1833, son Essai de physique
sociale. C'était le résumé de tous ses travaux antérieurs
sur la statistique, et l'esquisse, disait-il, d'un vaste tableau
dont le cadre ne pouvait être rempli que par des soins
infinis et par d'iuîmenses recherches. Les Lettres sur fa
théorie des probabilités appliquée aux sciences morales et
( 832 )
politiques parurent en 1845; l'ouvrage intitulé : Du sys-
tème social et des lois qui le régissent, au commencement
deiSAS,elVÀntlu-opométrie, en 1871.
Dans l'impossibilité où nous sommes de présenter une
analyse détaillée de chacun de ces ouvrages, nous lâche-
rons de donner une idée de leur ensemble, et cela nous
sera d'autant plus permis qu'ils convergent tous les quatre
vers ce but bien marqué : Rechercher et apprécier le
développement des qualités physiques, intellectuelles et
morales de l'homme.
L'homme naît, se développe et meurt d'après des lois
fixes et invariables. Non-seulement on est parvenu à
mesurer ses qualités physiques et à représenter leur déve-
loppement par des courbes, mais ses facultés morales et
intellectuelles n'ont pas résisté à la méthode fondée sur
l'observation et sur le calcul, qui nous avait dévoilé le sys-
tème du monde. Et de même que les découvertes des
astronomes avaient rendu si petite la place que nous occu-
pons dans l'univers, les travaux de Quetelet et des statisti-
ciens de son école ont resserré dans d'étroites limites le
libre arbitre dont nous étions si orgueilleux. Il s'est trouvé
que les phénomènes moraux, quand on considère les
masses, rentrent en quelque sorte dans l'ordre des phéno-
mènes physiques, et l'on a pu admettre comme principe
fondamental que plus le nombre des individus que l'on
observe est grand, plus les particularités individuelles, soit
physiques, soit morales, s'effacent et laissent prédominer
la série des faits généraux en vertu desquels la société
existe et se conserve. Ce principe entraînait nécessaire-
ment la considération de Vliomme moyen et sa détermina-
tion chez les différents peuples et aux différentes époques.
L'homme moyen résume en lui les qualités d'une nation :
( 835 )
quand on sera parvenu à le connaître, on aura le type de
cette nation; et si l'on étend ensuite ces recherches aux
autres pays, on pourra déterminer le type humain dans
toute sa généralité. Quetelet est disposé à croire que les
grands linéaments de notre espèce varient fort peu : les
proportions pour nos climats coïncident avec celles que
l'on tire des statues antiques les plus régulières.
L'homme moyen est-il le type de la beauté? Et d'abord,
y a-t-il un beau absolu? Quetelet ne le pense pas; d'après
lui, nous n'arrivons au sentiment du beau que par l'obser-
vation, et d'ordinaire nous ne regardons comme belles que
les formes auxquelles nous sommes habitués ou vers les-
quelles notre goût particulier nous entraîne. Si nous pre-
nons pour guide l'observation, elle nous apprend que nos
qualités physiques et même nos facultés intellectuelles
oscillent autour d'un état moyen, les fluctuations étant
réglées par une loi dont nous parlerons tout à l'heure. Cet
état moyen constitue le type théorique du beau, mais les
écarts sont des anomalies dont l'artiste doit tenir compte
et faire usage; il est inutile d'ajouter qu'il ne pourra non
plus se passer de l'expression de la physionomie, ni de la
puissance de la pensée et des passions. Le célèbre artiste
anglais Reynolds a été beaucoup trop loin, en posant
comme principe fondamental de l'art de la peinture, que
la beauté des formes et des traits consiste dans leur rap-
prochement étroit avec la conformation moyenne du mo-
dèle humain; ce qui faisait dire à sir John Herschel : « Si
c'était là le cas, la laideur devrait être excessivement rare,
tandis que les plus hauts degrés de la beauté constitue-
raient les cas les plus communs: conclusion absolument
contraire à l'expérience. »
Pour faire bien comprendre cette remarque d'Iierschel ,
( 834 )
nous rappellerons la loi à laquelle nous avons fait allu-
sion ci-dessus, loi sinon découverte par Quetelet, du
moins mise par lui dans son plein jour, et qui semble em-
brasser tous les corps vivants, non-seulement ceux de
l'espèce bumaine, mais les corps similaires du règne animal
et même du règne végétal. Mesurons, par exemple, la
taille des hommes d'un même âge : les différentes mesures
se rangeront autour de la moyenne de la manière la plus
régulière , et de telle sorte que le nombre des petits écarts
l'emportera de beaucoup sur celui des grands. Par une
construction graphique, on obtient une courbe nommée
par Quetelet courbe binomiale. Or cette courbe est l'une
de celles que l'on emploie dans le calcul des probabilités
pour rendre plus sensible la répartition des événements :
d'où il résulte que l'on peut considérer les différences entre
l'homme de taille moyenne et les autres, comme des
erreurs accidentelles se répartissant suivant la loi ordi-
naires des probabilités. — Lorsque, au lieu de mesurer
les hommes d'un même âge, on les prend aux différents
âges de la vie, on trouve que la loi de croissance, du
moins à partir de la naissance jusque vers treize à quatorze
ans, est représentée par une hyperbole. Vingt ans après
que Quetelet eut donné cette loi , MM. Bravais et Martins
arrivèrent également à une hyperbole pour la courbe d'ac-
croissement diamétral du pin sylvestre : c'était là, tout
au moins, une coïncidence remarquable.
Les recherches de Quetelet sur la taille et sur le poids
de l'homme étaient toutes neuves à l'époque où elles pa-
rurent; il les étendit bientôt aux autres qualités phy-
siques, telles que la force, les inspirations et pulsations,
la vitesse, l'agilité, etc. — Ce qui tenait à la reproduction
et à la mortalité avait fait depuis près de deux siècles
( 835 )
l'objet des études constantes de plusieurs savants distin-
gués. La pins ancienne table de mortalité était due à
l'illustre Halley : Quetelet en donna une, en 1825, pour la
ville de Bruxelles; plus tard, il calcula une table provi-
soire pour les provinces méridionales du royaume des
Pays-Bas. Le recensement du 1" janvier 1830 et ceux qui
l'ont suivi, lui ont permis de revenir sur un sujet dont
l'importance a été de plus en plus appréciée. Tout ce qui
touche à la population d'nn>pays et à ses éléments consti-
tutifs, présente un intérêt capital. C'est le premier fait
social que la statistique doit s'attacher à constater. Les
autres données n'ont véritablement de prix qu'autant
qu'on les rapporte au chiffre de la population. « Un recen-
sement bien fait, » dit Quetelet, « résume en quelque
sorte les solutions des problèmes les plus importants... »
La statistique est la base de la science sociale ou démolo-
gie; elle recueille les faits, et celle-ci les discute. Ici, pas
plus qu'en astronomie, l'observation ne saurait sans danger
être séparée de la théorie. Le démologue doit être un pen-
seur doublé d'un mathématicien; il appartient à lui seul
d'indiquer à l'administration publique les données qu'elle
devra s'attacher à obtenir sur l'état matériel et moral de la
nation. Savoir se borner est une de ses premières qualités :
ne rien demander qu'on ne soit certain d'obtenir sans
réticence et sans fraude ne suffit même pas; il faut de-
mander peu, et savoir, au besoin, faire la part des pré-
jugés.
Quetelet a présenté sur l'art de recueillir les faits so-
ciaux d'excellents conseils qu'on ne saurait trop méditer;
il a, d'une autre part, fourni de précieux modèles en ce
qui regarde la discussion des faits recueillis. Nous ne pou-
vons qu'effleurer ici ses travaux relatifs à l'homme. Il les
( 836 )
fit marcher, pendant de longues années, parallèlement
avec ses travaux de météorologie et d'astronomie. Et cela
n'a rien qui doive nous étonner : jadis on l'aurait même
trouvé tout naturel. L'homme se considérait alors comme
le centre de l'univers; tous les astres avaient été créés
pour lui, et il en ressentait l'influence. Aujourd'hui on ne
croit plus à l'action des étoiles et des planètes : seul,
notre satellite conserve son prestige, et constitue le der-
nier débris de l'astrologie. Mais si l'action de la lune
échappe à nos moyens d'investigation, personne ne songe
à contester celle du soleil et de notre atmosphère qui lui
est soumis; et si les phénomènes périodiques naturels
sont en général indépendants des phénomènes sociaux, il
n'en est pas de même de ceux-ci à l'égard des premiers.
Lorsque Quetelet organisa son beau système d'observa-
tions des phénomènes périodiques, il y avait huit ans déjà
qu'il s'appliquait à réunir les éléments constitutifs du Cli-
mat de la Belgique, c'est-à-dire la température, la pres-
sion atmosphérique, le degré d'humidité, la quantité de
pluie ou de neige, le nombre de jours où l'eau tombe sous
l'une ou l'autre de ces formes, la direction des vents qui
souillent, leur durée et leur intensité. — Il apporta à la
discussion des observations le même soin et le même esprit
de critique, éclairé et raisonné, dont il avait déjà donné
tant de preuves dans la discussion des documents statisti-
ques.
Les phénomènes météorologiques sur lesquels repose la
connaissance du climat d'un pays, se passent dans la par-
tie inférieure et toujours agitée de notre atmosphère ; ceux
qui se manifestent dans la partie supérieure ou bien à la
surface du sol et à une petite profondeur, appartiennent à
la Physique du globe. Les températures de la terre, l'élec-
( 837 )
tricilé de l'air, le magnétisme terrestre, les phénomènes
périodiques des plantes et des animaux , sont des branches
importantes de cette science toute moderne : elles forment
autant de chapitres de l'ouvrage que Qiietelet lui a con-
sacré et dans lequel il discute les observations poursuivies
à l'Observatoire de Bruxelles avec tant de zèle et de per-
sévérance. Il rattacha aussi à la physique du globe la ques-
tion des étoiles filantes, dont l'origine cosmique n'est plus
contestée aujourd'hui, bien qu'elle ait laissé des doutes
dans son esprit.
On sait que les étoiles filantes étaient un des sujets
favoris de Quetelet : il a contribué beaucoup à en étendre
l'observation , et son nom restera attaché à la période du
10 au H août. Ses recherches sur les températures de la
terre, sur l'électricité de l'air, sur le magnétisme, ont mé-
rité l'approbation des premiers physiciens de l'Europe.
L'observation des phénomènes périodiques des plantes
l'avait conduit à apprécier l'influence de la chaleur sur ces
phénomènes, non par la somme des températures moyen-
nes journalières , comme le faisait Réaumur, mais par la
somme de leurs carrés.
Par son travail sur les ondes atmosphériques, il entra
dans une voie nouvelle. Jusqu'à une époque qui n'est pas
encore très éloignée de nous, on s'était borné à observer
les phénomènes de la météorologie dajts le temps : pour
arriver à déterminer les lois générales dont ils sont les
résultats, il fallait aussi les observer dans l'espace. « Les
phénomènes, t> dit avec raison M. Léon Dufour, « se suc-
cèdent avec une confusion extrême en apparence; ils dé-
pendent, en chaque point, de ce qui se passe dans des
points voisins ou même fort éloignés. Il y a probablement
des lois qui embrassent ces variations, lois très compli-
( 858 )
quées , sans doute , mais cependanl précises... Les change-
ments dans la pression de l'air donnent lieu aux rappro-
chements les plus curieux lorsqu'on compare les valeurs
observées avec le baromètre. Comme ces variations dans la
pression atmosphérique accompagnent volontiers les chan-
gements de temps , cela acquiert un intérêt plus vif encore.
M. Quetelet a présenté sur ce sujet des résultats inattendus;
il a montré comment les variations du baromètre corres-
pondent à des ondes atmosphériques qui avancent, sem-
blables à des vagues sur une surface d'eau... »
Le promoteur de ces observations avait été sir John
Herschel. Quetelet ne se contenta pas d'y contribuer
personnellement; il organisa cinq stations en Belgique, et
subséquemment les stations dont les observations étaient
discutées à l'Observatoire de Bruxelles, furent portées par
ses soins au nombre de soixante-dix, répandues sur tous
les points de l'Europe. 11 mil la même ardeur à poursuivre
les observations magnétiques simultanées qui avaient été
sollicitées par la Société royale de Londres.
Nous avons rappelé que les instruments méridiens de
l'Observatoire de Bruxelles n'avaient été mis en place que
vers le milieu de l'année 1855. Le premier soin de Que-
telet fut de les faire servir à déterminer la position de l'Ob-
servatoire sur le globe terrestre. ÏI obtint immédiatement
une valeur très satisfaisante de la laîitude, mais la lon-
gitude était beaucoup plus difficile à trouver : elle n'a été
connue d'une manière exacte que depuis que la méthode
des signaux galvaniques a permis de relier l'Observatoire
de Bruxelles à ceux de Greenvvich et de Berlin. La troi-
sième coordonnée ou la hauteur du rez de chaussée de
l'Observatoire au-dessus de l'unité de hauteur de la mer du
nord , fut déterminée sans peine.
( 859 )
Lorsque Quelelet avait proposé de loiider un Observa-
toire à Bruxelles, il avait passé en revue les avantages que
le pays et la science retireraient de cet établissement.
L'Observatoire devait devenir le centre des opérations des-
tinées à couvrir la Belgique d'un réseau géodésique, et con.
tribuer ainsi à faire disparaître une lacune fâcheuse dans le
grand réseau européen. La détermination exacte de sa po-
sition constituait un excellent point de départ pour attein-
dre ce but. Un autre côté utile de la nouvelle institution
était qu'elle aiderait à relever l'horlogerie, si négligée
parmi nous, en fournissant les moyens de déterminer
l'heure avec précision. A partir de 1832, les horloges pu-
bliques de Bruxelles furent réglées d'après la pendule de
l'Observatoire; quelques années après, de petites lunettes
furent montées à Gand, Bruges, Ostende, Anvers et Liège ;
des méridiennes furent tracées dans les principales églises.
Aujourd'hui que la Belgique entière reçoit l'heure de l'Ob-
servatoire de Bruxelles par le télégraphe, on ne fait plus
guère usage de ces lunettes, ni de ces méridiennes; les
horlogers et les particuliers règlent leurs montres d'après
les cadrans électriques placés aux coins des rues ou d'après
les horloges des stations du chemin de fer; mais à l'époque
où elles furent établies, elles constituaient un grand pro-
grès, les cadrans solaires dont on avait fait usage jusque-là
étant généralement défectueux et sujets à se déranger.
Les observations astronomiques régulières n'ont com-
mencé à l'Observatoire de Bruxelles qu'en 1848 : elles
avaient dû céder le pas à des besoins plus pressants. Que-
telet prit pour sujet les étoiles doubles et celles à mouve-
ments propres. Depuis 1857, M. Ernest Quetelet s"est
spécialement occupé de ces dernières étoiles, d'après les
conseils de son illustre père. La belle série d'observations
( 840 )
qu'il a publiées jusqu'ici a été justement appréciée à
l'étranger : déjà les astronomes les plus distingués viennent
y puiser, comme précédemment les physiciens ont puisé
dans la série des observations de la météorologie et de la
physique du globe d'Adolphe Quelelet. Pour donner une
idée de l'importance des observations dont nous parlons,
nous ne pouvons mieux faire que de citer un passage d'un
rapport lu à l'Académie, le 4 juillet 1865, par notre secré-
taire perpétuel actuel, M. Liagre, que l'Observatoire de
Bruxelles a eu l'honneur de compter parmi ses aides : « Il
est reconnu aujourd'hui, » disait M. Liagre, « que les
étoiles , longtemps regardées comme douées d'une immo-
bilité absolue, sont toutes animées d'un mouvement plus
ou moins rapide. Déterminer la direction, la grandeur, la
loi de ces mouvements, dont la plupart ne s'élèvent peut-
être qu'à quelques secondes par siècle, est un travail im-
mense devant lequel l'imagination la plus hardie est tentée
de reculer... Mais si l'entreprise est vaste, les résultats
cosraologiques auxquels elle pourra conduire nos descen-
dants sont incalculables... »
L'influence de Quelelet dans la régénération intellec-
tuelle de la Belgique a été considérable. Par son exemple,
par ses leçons , il stimula ses compatriotes qui avaient
perdu le goût des sciences; il sut exciter l'amour des re-
cherches chez les jeunes gens , en leur montrant des voies
nouvelles et encore inexplorées. L'un des premiers, il
attacha un grand prix aux qualités de style, trop long-
temps négligées parmi nous. Les livres élémentaires qu'il
composa sur l'astronomie, sur la physique, sur le calcul
des probabilités se distinguent tous par un style toujours
clair et non dépourvu d'élégance. Dans sa Physique sociale
et dans son ouvrage Sur le système social , il s'élève quel-
( su )
quefois à une véritable éloquence. Ses Éloges académiques,
auxquels il a donné le nom modeste de Notices, sont très
agréables à lire : on y trouve des anecdotes piquantes,
des portraits fort ressemblants et une bonhomie dénuée
de tout apprêt. Les rapports destinés à nos séances pu-
bliques offraient d'assez grandes difficultés; presque tou-
jours il les surmonte avec bonheur; il sait parler de
l'Académie et des services qu'elle rend avec dignité et
convenance; les généralités auxquelles il doit se borner
ne sont jamais banales, et bien qu'ancien poète, il ne rem-
place pas les idées par des mots et ne fait pas de phrases;
il apprécie les travaux de ses confrères d'une manière
juste, quoique superficielle.
Ce qu'il était comme écrivain, il le fut comme profes-
seur. Il apportait une extrême clarté dans ses leçons de
mathématiques; il aurait voulu bannir des éléments tout
cet attirail suranné que répudiaient Euler et Clairaut,
mais que la routine a maintenu dans nos écoles. Il recher-
chait partout la simplicité; peu d'instruments, des ba-
lances, une machine électrique, une pile voltaïque et
quelques autres appareils lui suffisaient pour l'enseigne-
ment de la physique; il n'aimait pas les expériences faites
avec des instruments compliqués : « Souvent, » disait-il,
« ils occupent plus l'attention que le résultat qu'on veut
mettre en évidence. » Les cours de physique et d'astro-
nomie qu'il donnait au Musée étaient suivis par de nom-
breux auditeurs, pris dans toutes les classes de la société.
Quelelet était de taille moyenne; de beaux yeux sur-
montés d'épais sourcils et une abondante chevelure noire
imprimaient à sa tète un grand caractère; il était marqué
de petite vérole, mais sa physionomie n'en souffrait pas.
Quand il marchait, il se tenait légèrement incliné, la tête
2"^ SÉRIE, TOME xxxvni. 54
( 842 )
en avant , comme si son esprit eût été plus pressé d'arriver
que son corps. Nous ne saurions mieux peindre l'homme
privé qu'en lui appliquant ce passage de son Éloge de l'as-
tronome Schumacher : « Ceux qui l'ont visité savent qu'il
exerçait l'hospitalité de la manière la plus grande et la
plus affectueuse. Son commerce était très agréable ; avec
une instruction fort étendue, il causait d'une manière
attrayante sur les sujets les plus divers : sciences, lettres,
arts, les objets même futiles en apparence, rien ne lui était
étranger. Sa conversation était gaie, spirituelle, relevée
quelquefois par un léger grain de causticité qui jamais ne
blessait personne, mais qui tendait à mettre en relief le
côté plaisant des choses. »
Malgré un travail excessif, il s'était toujours bien porté,
lorsque, dans l'été de 1855, il eut une légère attaque
d'apoplexie. Cette attaque, qui ne laissa aucune trace ex-
térieure, frappa les facultés intellectuelles et surtout la
mémoire : elle marqua chez Quetelet le commencement de
la décadence; le cercle de ses idées se rétrécit de plus en
plus, et son style perdit sa précision et sa netteté. La mort
de sa femme, de sa fille et de plusieurs de ses petits-en-
fants vint encore aggraver le mal. On n'eut peut-être pas
toujours pour lui, en tous lieux, les égards que méritaient
son âge et les services qu'il avait rendus. Il avait, je crois,
la conscience de son état, et , par une conséquence néces-
saire , il était devenu très susceptible : je l'ai vu quelquefois
affligé outre mesure, quand on n'avait pas ménagé cette
susceptibilité comme elle aurait dû l'être, et comme lui-
même avait su respecter celle des Nieuport, des Dewez,
des Garnier, etc.
De douces compensations lui arrivaient de l'étranger,
où sa réputation ne faisait que grandir. L'Académie des
( 843 )
sciences morales et politiques de l'Institut de France l'ap-
pelait à l'une des huit places d'associés étrangers dont elle
dispose pour le monde entier. De vives instances étaient
faites auprès de lui de la part du grand-duc Constantin de
Russie, alin de le décider à se rendre au Congrès de sta-
tistique de Saint-Pétersbourg; l'Académie des sciences de
Berlin le proclamait le créateur d'une science nouvelle.
On aurait voulu qu'il se chargeât de convoquer et de pré-
sider un Congrès de météorologistes, destiné à donner un
caractère d'unité aux observations et à les faire concourir
à la détermination des lois qui régissent les phénomènes de
notre atmosphère; mais il déclina cet honneur, sentant
que son âge ne lui permettait pas d'en assumer les charges.
Quand la réunion des météorologistes eut lieu à Vienne au
mois de septembre 1875, il s'y fit remplacer par son fils.
Rien cependant, à cette époque, ne pouvait faire pres-
sentir une fin prochaine. L'accueil qu'il avait reçu, l'année
précédente, dans la capitale de la Russie, avait exercé une
heureuse influence sur son moral; il paraissait rajeuni et
continuait à travailler avec une ardeur infatigable. Dans
le courant de janvier 1874, il fut atteint d'une maladie
des bronches à laquelle il n'attacha pas d'abord une grande
importance : le lundi 2 février, il assistait encore à la
séance de la classe des lettres; le jeudi matin, il descendit
pour la dernière fois dans son cabinet, et l'on eut beau-
coup de peine à l'empêcher de se rendre à la séance de la
classe des beaux-arts Son état ayant empiré, on perdit
bientôt l'espoir de le sauver. Lorsqu'il tomba dans le délire,
l'Académie et l'Observatoire revinrent souvent sur ses
lèvres. Il expira le 17 février.
Il avait épousé en 1823 la fille de .M. Ciirlct, médecin
français établi à Rruxelles depuis la lin du siècle derniei- et
( 844 )
beau-frère du chimiste Van Mons : il en eut deux enfants ,
un fils, aujourd'hui notre confrère, et une fille qui mourut
jeune encore , après avoir été mariée à notre peintre de
marine Clays.
La perte de Quetelet a été vivement ressentie. Ses tra-
vaux l'avaient mis eh relation avec les savants du monde
entier; sa correspondance était immense. Il était connu
personnellement de la plupart des hommes qui se sont
fait un nom dans les sciences, les lettres et les arts, soit
qu'il les eût rencontrés dans ses voyages en Angleterre
ou sur le continent européen, soit qu'il eût reçu leur visite
à l'Observatoire. N'importe où l'on allât, quand on se pré-
sentait de sa part, on était certain d'être bien accueilli :
jamais, de son côté, il ne laissa protester une lettre de
recommandation. La Belgique peut être fière d'un pareil
homme; il y a poussé plus que tout autre à la culture in-
tellectuelle, et a beaucoup contribué à la relever aux
yeux du monde. Sa place est marquée dans l'histoire des
sciences.
Cette notice a été vivement applaudie.
— M. H. Valérius a été invité ensuite à venir faire la
lecture de son rapport sur le dernier concours quinquennal
des sciences physiques et mathématiques (1).
— M. J. Liagre, secrétaire perpétuel, a pris en dernier
lieu la parole, pour faire la proclamation suivante des ré-
sultats des concours et des élections :
(i ) Ce rapport a paru déjà dans le Moniteur belge, w 550 de l'année 1 784
(2(3 novembre).
845
RÉSULTATS DU CONCOURS DE LA CLASSE POUR 1874.
Quatre mémoires avaient été reçus, en réponse à quatre
questions du programme.
Le premier, portant pour devise : Ne rien faire contre
la conscience et pliilosopher sans souci des sots ni des mé-
chants, avait été envoyé en réponse à la première question,
demandant de Perfectionner la théorie des fondions d'une
variable imaginaire.
Conformément aux conclusions de ses rapporteurs, la
classe s'est bornée à voter une mention honorable à l'au-
teur de ce mémoire. Elle a décidé, en outre, que la ques-
tion serait remise au concours.
Le second mémoire reçu portait pour devise : Félix qui
potiiit rerum cognoscere causas (Virgile). Il avait pour but
de répondre en même temps aux deuxième et troisième
questions du programme, demandant une discussion com-
plète de la température de l'espace, ainsi qu'une élude,
également complète, de la chaleur spécifique des corps.
La classe, d'après l'opinion de ses commissaires, a jugé
qu'il n'y avait pas lieu de décerner de récompense à ce
travail.
Le troisième mémoire de concours portait comme de-
vise : Pour trouver la preuve qu'un organisme est un degré
de développement ou un produit d'an autre organisme, il
faut examiner la continuité organique qui doit une fois, à
un temps donné., exister entre deux états de développement
d'une espèce.
( 846 )
Ce mémoire avait été envoyé en réponse à la cinquième
question , relative au polymorphisme des champignons.
La classe, conformément aux conclusions de ses rap-
porteurs, a décerné une médaille d'or de la valeur de six
cents francs à l'auteur de ce mémoire. L'ouverture du bil-
let cacheté a fait connaître qu'il est dû à M. Alfred Gil-
KiNET, docteur en sciences naturelles, à Liège.
Le quatrième mémoire reçu portait comme devise : Quo
exactius introspicies ipsas corporuni partes, eo minns de
origine dubilahis (Leibniz, Protogàa, x\\). Il avait pour
but de répondre à la sixième question, demandant de faire
connaître, nolamment au point de vue de leur composition,
les roches plntoniennes , ou considérées co)nnie telles, de la
Belgique et de FArdenne française.
La classe, conformément aux conclusions de ses rappor-
teurs, a décerné à ce travail une médaille d'or de la valeur
de huit cents francs. L'ouverture du billet cacheté qui
y était joint a fait connaître , comme en étant les auteurs :
M. Ch. de la Vallke -Poussin, professeur à l'Université
de Louvaiii, et M. A. Renard, professeur au Collège de la
Compagnie de Jésus, à Louvain.
Aucun des lauréats n'est venu recevoir la récompense
qu'il avait méritée.
PRIX QUINQUENNAL DES SCIENCES MATHÉMATIQUES
ET PHYSIQUES.
Par arrêté royal du 24 novembre de cette année. Sa Ma-
jesté, sur la proposition de M. le Ministre de l'intérieur,
conformément au rapport du jury chargé de juger le con-
cours quinquennal des sciences physiques et mathémati-
( 847 )
ques pour la période de 1869-1873, a décerné le prix à
M. Michel Gloesener, membre de l'Académie et profes-
seur émérite à rUniversilé de Liège.
PROCLAiMATlON DES ÉLECTIONS.
La classe a eu le regret de perdre, pendant le courant
de cette année, trois de ses membres titulaires.
M. Ad. Quetelet, appartenant à la section des sciences
mathématiques et physiques, et MM. le vicomte Du Bus et
Poelman, appartenant à la section des sciences natu-
relles.
Elle a porté ses suffrages sur M. François Folie, en
remplacement de M. Quetelet.
MM. Alphonse Brfart et Félix Plateau ont été élus en
remplacement de MM. le vicomte Du Bus et Poelman.
Ces trois élections seront soumises à la sanction royale.
La classe a élu associés de la section des sciences ma-
thématiques et physiques: MM. le C"' Louis-Frédéric
Menabrea, Jules-Bobert Mayer, Urbain-Jean-Joseph Le
Verrier, Otto Struve et le B. P. Angelo Secchi, en
remplacement de MM. Vène et de la Bive, décédés; Gilbert,
démissionnaire, de Jacobi et Hansen, décédés.
Elle a élu également associés de la section des sciences
naturelles: MM. Thomas-Henri Huxley, NathanielPrings-
heim et SvEN NiLssoN, en remplacement de MM. de Macedo,
L. Agassiz et Elie de Beaumont, décèdes.
Enlin,ellea appelé M. Charles Van Bambeke, professeur
à l'Université de Gand, à figurer parmi les correspondants
de la section des sciences naturelles.
( 848 )
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Commission pour la publication d'une collection des œuvres
des grands écrivains du pays. — Buevcs de Coinmarchis par
Adenés li Rois. Chanson de geste publiée pour la première fois
et annotée par M. Aug. Scheler. Bruxelles, 1874; vol. in-8".
Candèze (Ern.). — Le scénographe. Appareil photogra-
phique de poche ; — Élalérides (Insectes recueillis au Japon par
M. G. Lewis pendant les années 18C9-1871 ); — Révision de la
monographie des Élatérides, 1" fascicule. Paris et Bruxelles,
i874; 5 br. in-8«.
Morren (Edouard). — La botanique au pays de Liège; —
Note sur la joubarbe {sempervirum Funckii var. Aqualiense);
— Liste des jardins, des chaires et des musées botaniques du
monde, S'' édition. Liège et Bruxelles, 1873-1874; 3 br. in-8".
MaiUij (£'f/.). — Essai sur la vie et les ouvrages de L.-A.-J.Que-
telet. Bruxelles, 1875; vol. in-12.
Devaux [Paul). — Études politiques sur l'histoire ancienne
et moderne et sur l'influence de l'état de guerre et de l'état de
paix. Bruxelles, 1875; vol. in-8".
De Borclujrave [Emile). — Les précurseurs de la nationalité
belge. Bruxelles , 1874; br. in-8". (Deux exemplaires.)
Nolet de Brauivere van Steelund {le D'^J.).— Epistel aan
den heerL.-L. De Bo. Bruxelles, 1874; br. in-12.
Heremans [D" J.-F.-J.). — Hoffman van Fallcrsleben en de
nederlandsche lettcrkunde. Gand, 1874; br, in-8".
Félis {F.-J.). — Histoire générale de la musique depuis les
temps les plus anciens jusqu'à nos jours, t. IV. Bruxelles, 1874;
vol. in 8".
Limnander de Nieuwenhove {Le baron Arm.). — Maximi-
lien à Francfort (1493). Opéra en 3 actes. Paris; vol. gr. in-8«.
Carnoy (Joseph). — Cours de géométrie analytique. Géomé-
trie de l'espace. Louvain, 1874; vol. in-8".
( 849 )
De Koninck (Lodeivijk). — Het mcnschdom verlost, iweede
vernieerderde uifgave; — Anlwoordaan « onze waclitcr » op
zyne beoordeling van « Het menschdom verlost. » Anvers ,
1874; vol. et feuille in-8" (3 exernplaii-e^).
Buys-Ballol [le D''). — Les eouraiits de la mer et de l'atmo-
sphère; traduction du néerlandais par L. Estourgics. Bruges,
4874; br. in-8°.
Firkel [Adolphe). — Notice sur la carte de la production par
commune des carrières de la Belgique, pendant l'année 1871.
Bruxelles, 1874; br. in-8".
Gaulhy[E.). — Documents et rapports concernant le 4*groupe
de l'Exposition universelle de Vienne (substances alimentaires
et de consommation). Bruxelles, 1874; br. in-8°.
ffeuschliiig (X). — Actes de l'État civil. — I. Causes de
décès. — II. Enfants mort-nés. Liège, 1874; br. in-8".
Hock {Auguste). — OEuvres complètes, tome IV. La famille
Matbot, mœurs bourgeoises du pays de Liège. Liège, 1874;
vol. in- 12.
Leijder [J.) et Pyro [J.). — La viande de bœuf et la viande
de cheval; recherches sur leur composition, leur valeur nutri-
tive et leur prix conimercial. Bruxelles, 1874; br. in-8". (Deux
exemplaires.)
Preudhomme de Barre (A.). — Note sur les gèotrupides qui
se rencontrent en Belgique. Bruxelles, 1874; br. in-8".
Thïelens {Armand). — Voyage en Italie, mai -juin 1874.
(Description de la collection de la marquise Paulucci, à Novoli
près Florence). Tirlemont, 1874 ; br. in-8".
Varetibergh{Éinile). — Les traditions légendaires. Bruxelles,
1874; br. in-S"; — L'élection de Cbarles-Quint et de Frédéric
de Saxe. Gand, 1874; br. in-8°.
Observatoire royal de Bruxelles. — Notice sur Lambcrt-
Adolphe-Jacqties Quetclet, directeur et fondateur de l'Obser-
vatoire; — Annuaire, 42'' année, 1875. Bruxelles, 1874; br. in-
4° et vol. in-I2.
Académie royale de médecine de Belgique. — Bulletin,
( 850 )
année 1874, o"" série, tome VIII, n'MO à 12; — Mémoires
couronnés, in 8°, t. III, premier fasc. Bruxelles, 1874; 4 cah.
in-S".
Société royale des sciences médicales et naturelles de Bruxel-
les. — Journal, 59* vol., 32^ année, octobre à décembre 1874.
Bruxelles, 1874; 5 cab. in-8°.
Société royale (h ■pharmacie de Bruxelles. — Bullelin, 18'' an-
née, n'" 10 à 12, octobre à décembre 1874. Bruxelles; 3 cah.
in-8».
Annales de médecine vétérinaire , 23" année, octobre à dé-
cembre 1874, 10" à 12" cah. Bruxelles; in-8''.
Annales de Vélectricité médicale et Écho médical réunis,
nouvelle série, 15" vol , 10" à 12" fasc, octobre à décembre
4874. Bruxelles; 3 cab. in-S".
Annales (rocnlistique , 37" année, 72" vol., 5" et 4", 5" et
6" livr., septembre à décembre 1874. Bruxelles; 2 cab. in-8''.
La Presse médicale belge, 26" année, n'"40à 52. Bruxelles,
1874; 13 feuilles in-i°.
Société maldcoloqique de Belgique. — Procès-verbaux des
séances (le novcmbri; à décembre 1874. Bruxelles; feuilles in-S".
Société enlomologique de Belgique. — Compte rendu, sér. II,
n'H, 5, (iet 7, octob. à décembre lS7i. Bruxelles; feuilles in-8°.
Fédération des Sociétés d'horticulture de Belgique. — Bul-
letin, 1873. Liège, 1874; vol. 111-8".
Société royale de botanique de Belgique. — Bulletin, t. XllI,
n''2. Bruxelles, 1874; in-8°.
Association belge de photographie, à Bruxelles. — Bulletin,
première année, 1874, n"' 4 et 5. Bruxelles, 1874; 2 cab. in-8".
Musée de l industrie de Belgique. — Bulleliu, 53" année,
octobre à décembre 1874. Bruxelles; 3 cah. in -8".
Le Moniteur industriel belge, vol. I, n»' 20 à 27, octobre à
décembre 1874. Bruxelles; 8 feuilles in-4''.
Académie d'archéologie de Belgique, à Anvers. — Séance
publicpie (lu 24 juin 1874; — Annales, 2" série, t. X, 2" et
3" livr. Bruxelks, 1874; br. et cah. in-8''.
( 851 )
Société (h médecine d'Anvers. — Annales, XXXV" année,
septembre et octobre 1874. Anvers; cah. in-S".
Société de pharmacie d'Anvers. — Journal, 50" année, sep-
tembre à novembre 1874. Bruxelles, 1874; ô cah. in-8°.
Revue de Vinstrvctinn publique en Belgique., XXII* année,
1874, nouvelle sér., t. XVII, G" livr. Gand; cah. in-8°.
L'Illustration horticoU», t. XXI, 9' et 10*^ livr., septembre et
octobre 1874. Gand ; cah. in-8°.
Université de Liège. — Discours inaugural et rapport du
recteur, .M. V. Tliirv (année 1874-1875). Liège, 1874; br. in-8».
Société médico-chirurgicale de Liège. — Annales, t. XIII,
octobre et novembre 1874. Liège, 1874; 2 cah. in-8".
Le Scalpel, "21^ année, n"' 14 à 20, octobre à décembre 1874.
Liège; 15 feuilles in-4°.
L'Écho vétérinaire , 4* année, n" 10, décembre 1874. Liège;
cah. iii-8".
Journal des Beaux- Arts, XYl'' année, n"' 19 à 24, octobre à
décembre 1874. Louvain;6 feuilles in-4°.
L'Abeille, XX^ année, octobre à décembre 1874. Bruxelles;
5 cah. in-S".
Castan {Auguste). — La vierge des Carondelet. Besançon,
1874; br. in-8°.
Castan (Auguste) et Ducal {Alfred).— Le théâtre de Vesontio
et le square archéologique de Besançon. Besançon, 1875; br.
in-8\
De Caix de Saint-Ajjmour (Aniédée). — Note sur un temple
romain découvert dans la forêt d'Halalte (département de l'Oise).
Paris, 1874; br. in -16.
De Queux de Saint- Hilaire {Le marquis). — Le Hvre des
cent Ballades, avec complèmeni : — Le traictéde Getta et d'Am-
phifrioM (poème dialogué). Paris; 2 vol. in-8'' et 1 vol. in-16.
Gréard. — La législation de l'instruction primaire en France
depuis 1789 jusqu'à nos jours. Paris, 1874; 5 vol. in-8°.
Hardouin {Henri) — Essai sur l'abolition de la contrainte
par corps. Paris, 1874; 10-8°.
( .852 )
Marie {Maximilien). — Théorie des fonctions des variables
imaginaires, t. l" (nouvelle géométrie analytique). Paris, 1874 ;
vol. in-S".
Perrey [Alexis). — Étude du réseau pentagonal dans l'océan
Pacifique; — Sur les volcans de l'île de Java et leurs rapports
avec le réseau pentagonal. Paris, 1874; 2 bi-. in-4°.
Société mélèorologique de France, à Paris. — Annuaire,
tomeXVIll, 1870. Tableaux météorologiques, feuilles 7-12;
— Nouvelles météorologiques : 4" année, 1871, 1" liv., feuilles
1-4; b"" année, 1872, l'^'liv., feuilles l-o; G* année, 1875, Impar-
tie, 1" liv., décembre 1872; 2" partie, 1" liv., feuilles l-O.
Paris, 1874; o cah. in-8°.
Société géologique de France, à Paris. — Bulletin, 3* sér.,
t. 11% n" 5, novembre 1874. Paris; cah. in-8°.
Société de géographie de Paris. — Bulletin, août à décembre
1874. Paris, 1874; 5 cah. in-8''.
Société centrale d'agriculture de France, à Paris. — Bul-
letin des séances, III'' série, t. 9% n° 10, août 1874. Paris ;in-8".
Société des études historiques, à Paris. — L'Investigateur,
40' année, 1874, novembre et décembre. Paris; 2 cah. in-8'.
Académie des sciences de Paris. — Comptes rendus hebdo-
madaires des séances, tome 7î), n°' 14 à 26. Paris, 1874;
13 cah. in-4°.
Revue scientifique, n"' 14 à 2G, 4^ année, 2* série. Paris,
1874; 13 cah. in-4".
Revue politique et littéraire, n"' 14 à 20, 4*' année, 2'" série.
Paris, 1874; 13 cah, in-4°.
Revue Britannique, octobre à décembre 1874. Paris; 3 vol.
in-8".
Vinslitut, nouvelle sér., n°' 92 à 104, octobre à décembre
1874. Paris; 13 feuilles in -4°.
Archives de médecine navale, tome XXII% octobre à dé-
cembre 1874. Paris, 1874; cah. in-8°.
Le Progrès médical, 2* année, n"' 40 à 52, octobre à dé-
cembre 1 874. Paris ; 1 3 feuilles in-4''.
( 853 )
Journal de l'Agriculture , tome IV, octobre à décembre
1 874 , n°^ 286, 288 à 290, 292 à 298. Paris, 1 874 ; 1 1 cah. in-8°.
Société linnéenne du nord de la France, à Amie?is. — Bul-
letin mensuel, n°^ 29 et ôO, novembre et décembre, 3* année,
1874. Amiens; 2 feuilles in-8°.
Société des Antiquaires de Picardie , à Amiens. — Bulletin,
année 1874, n° 3. Amiens, 1874; in-8°.
Société d' Emulation du Doubs , à Besançon. — Mémoires,
4'= série, o' vol., I8G9. Besançon, 1870; vol. in-8°.
Bulletin scientifique , historique et littéraire du déparle-
ment du Nord, 6^ année, n"' 9 et 10, septembre-octobre 1874.
Lille; cab. in-S".
Société des Antiquaires de la Morinie, à Saint-Omer. —
Mémoires, tomes XI et XII, 1861-1868; — Bulletin historique :
XllP année, 1864, 49' et 50^ liv.; XIV^ année, 1863, 33" et
54'" liv. Saint-Omer; 2 vol. et 2 cab. in-8°.
Société d'agriculture , sciences et arts de l'arrondissement
de Valenciennes. — Bévue agricole, 26'' année, 1874, t. XXVII,
n"' 9, 10 et 11. Valenciennes; 2 cab. in-8''.
Deutsche cliemische Gesellschaft zu Berlin. — Bericbte:
111. Jabrg.N"! 5; V. Jabrg., N° H und 1 5 ; Vil. Jabrg.,N'' 14bis 18.
Berlin, 1874; 8 cab. in-8°.
K. preussische Akademie der Wissenschaflen zu Berlin. —
Monatsbericbt, September undOctober 1874. Berlin; cab. in-8''.
Budapester Hundels-und Gewerbekammer. — Beilrage zur
Gescbicbte der Preise ungarischer Landesproducte im neun-
zebnten Jabrbundert nacb den Notirungen des Pester Marktes.
Budapest, 1875; vol. in-fol. avec atlas.
Physikalisch-medicinische Socieldl zu Erlangen. — Sit-
zungsbericbte, 6. Hcft, Novcmbcr 1873 bis August 1874.
Erlangen; cah. in-S".
Justus Fertiles' geograpfiisclie Anstalt zu Gotha. — Mit-
theilungcn, 20. Ed., 1874, X, XI; — Erganzungsbeft, N' 38.
Gotha, 1874; 3 cah. in-4.
Wetterauische Gesellschaft filr die gesammte Naturkunde
( 854 )
zu ffanau. —Jahresbericht, 1855-1837 ; Bcricht, 1. Januar
1868 bisôl. Decembcr 1875. Hanaii ,1838, 1874; 2 cah. ia-S".
MedUinisch-naluncissenschaftliche Gesellschaft zu Jena. —
Zeitschrifi, neue Folge, 1. Band, 4. Heft. Jena, 1874; cah. in-H°.
Archiv der Malhemalik und Physik, LVl. Theil, 4. Heft.
Leipzig, 1874; caii. in-S".
Universilàl zu Marhurg. — Programmes et dissertations.
Marbourg, 1874; 8 br. in-4'' et 50 br. in-8°.
A'. Slernivarle bei Mûnchen. — Anualen, VI. Band. Munich,
1853; vol. in-8^
Genuanisclies Xalionulmuseuiu , lYûrnherg. — Jahres-
Bericht, X. Bcricnl, 18G4; — Anzeiger, ntuc Folge : 1. Btl., 1853
und 4 854; Vill. Jabrg., 18GI, N" 7 und 1); XII. Jabrg., 1865,
n° 2. Nuremberg; vol. et feuil. in-4".
K. K. Sternwarle zu Praçj. — Magnctisclie und meteorolo-
gische Beobachtungen im Jahre 1875, 54. Jabrg. Prague, 1874;
vol. in-4".
Enloinulogischer Verein zu Steltin. — Entoniologisehe Zei-
tung, 35. Jabrg., N' 10-12. Stetlin, 1874; cali. in-8".
K. K. ycoloyinclie Reichsamtutt, Wien. — Jabrbuch, Jabrg.
1874, XXIV. Bd., X" 5, Juli, August, September; — Verband-
lungen, X» hiund 15, 1874. Vienne; :2 cah. in-8°.
K. K. Central- A nsUdl fur Météorologie und Erdmagnetis-
mus, Wien. — Jabrbiiclier,neue Folge, IX. Bd., Jabrgang 1872.
Vienne, 1874; vol. in-'^^
Anlliropologisclie Gesellsclia/Ï in IVieii. — ÎMittbeilungen ,
IV. Bd.,X'''7, 8 und 9. Vienne, 1874; 5 caii. in-8"
K. Akadeinie der Wissenscliaflen in Wien. — Sitzungsbe-
ricble: philos.-bislor. Classe, Jabrg. 1875, LXXV.Bd.,Hefl l-IIl;
Jabrg. 1874, LXXVl. Bd., Heftl-Il und 111; — Malh.-nalurw.
Classe, 1873, 1. Abtb., N»^8 bis 10; II. Abtii., N"' 8, 9 und 10;
III. Ablh., N°' 6 bis 8, 9 und 10; 1874, 1. Abtb., N"^ 1,-2 und
5; II. Abtb., X"* 1, 2, 3; — Archiv fiir oslcrreicbi.scbe Ge-
schichle, LI. Bd., 2. Heft; Register zu den Banden l-L; —
Denkschriften, XXXIII. Bd.; — Almanaeh, 1874; — Monu-
( 855 )
menta conciliorum generalium scculi decinii quinti, tomus
secundus; — Vcrzeichniss beobachtetcr polarliclitcr, zusam-
mengestt'llt von Hermann Frilz. Vienne, 1875-1874; 3 vol.
in-4° el iO cali. in-S"-
Plnjsikalisch-medicinische Gesellschaft, Wûrzburg. — Die
Pennatiilide Umbellula und zwei neue Typen der Alcyonarien
von Albert Kollikcr. Wurzbourg, 1875; br. in-4°.
Deulsdie Gesellschaft fur Natvr und Vôlkerkunde Osta-
siens. — iMitlheilungen , 5'" Heft, Juli 1874. Yokohama,
1874; cah. in-4''.
Société des sciences de Finlande , à Helsingfors. — Ofver-
sigt, 1871 à 1874, vol. XIV, XV el XVI; — Bidrag, 1871,
1875, 1874, vol. XVIll, XIX, XXI , XXII et XXUI ; — Obser-
vations faites à l'Observatoire magnétique et météorologique
de Helsingfors, vol. V, 1875. Helsingfors ; 8 vol. in-8" et vol.
in-4°.
Société de chimie de Saint-Pétersbourg. — ioixrn^], tome VI,
n" 9. Saint-Pétersbourg, 1874; cah. in-8". (En russe.)
De la Rive{A.). — Notice sur Michel Faraday, sa vie et ses
travaux. Genève, 18C7 ; broch. in-8".
Plantuniotir {£.). — Résumé météorologique de l'année
1875 pour Genève et le Grand-Saint-Bernard. Genève, 1874;
in-8».
Société des scietices naturelles de Neuchâtel. — Mémoires,
tome IV, seconde partie. Neuchâlcl, 1874; vol. in-4".
Cara [Gaetano). — Elenco dcgli uccelli che trovansi nell"
Isola di Sardegna od ornitologia Sarda. Turin, 1842; vol.
in-8°.
Michelotti [Giovanni). — Saggio storico dei rizopodi carat-
teristici dei terreni sopracretacei. Modène, 1841; cah. {11-4°.
Sismonda [Eugenio). — Monografia degli cchinidi fossili dcl
Piemonte; — Appendice alla monografia degli echinidi fossili
dei Piemonte; — Osservazioni geologiche sui terreni délie
formazioni terziaria e cretacea in Piemonte. Turin, 1841-
1842; 3 broch. in-4''.
( 856 )
Socielà ilaliana di scienze natnrali, Milano — Alti, vol. XVI,
fasc. III c IV. Milan, 1874; cah. in-8».
Accademia fisico-medico-stalistica di Milano. — Atti, anno
accademico 1874. Milan, 1874; vol. in -8".
/?. comitato geologico d'Italia. — BoUettino, anno 1874,
n"' 7 e 8. Rome, 1874; cah. in-8».
BuUellino dd xiulcanismo italiano , anno I, fasc. IX^ e X,
XI e XII, 1874. Rome; 2 cah. in-8°.
Accademia d'agricoltura, arli e commercio di Verona. —
Meraorie : série II, vol. L, fasc. I e II; vol. LI, fasc. I e II.
Vérone, 1873-1874; 4 vol. in-8».
Slalistical Society of London. — Journal, vol. XXXVII,
pt. III, September, 1874; — General index to vol. XXVI-
XXXV (1863-1872). Londres; 2 cah. in-8".
Asiatic Society of Betigal at Ccdcutta. — Bibliotheca indica,
New Séries, n"* 508 and 309. Calcutta, 1874; cah. in-8".
A inericati journal of science and arts , third séries, vol. VIII,
n°' 43, 46, 47 ; september, october and noveraber. New-Haven ,
1874; 3 cah. in-8°.
The Penn Monlhly , vol. V, n»* 58 at 60, october al de-
cember 1874. Philadelphie, 1874; 3 cah. in-8°.
Liste d'ouvrages déposés pah la commission novALE d'histoire
DANS LA BIBLIOTHÈQUE DE l'aCADÉMIE.
Borgnet [Jules). — Cartulaire de la commune de Fosses.
Namur, 1867; vol. in-8''.
Société pour la conservation des monuments historiques et
des œuvres d'art de la province de Luxembourg. — Annales,
IV* cah., 1861. Arlon; in-8».
Cercle archéologique de Mons. — Annales, tome XI. Mons ,
1873; vol. in-8".
Société archéologique de Namur. — Annales, tome IX",
4" liv.; tome X% l-^' liv.; tome XII', 3' liv. Namur, 1867,
1868,1873;3cah.in-8°.
Cercle archéologique du pays de Waes, à Saint-JVicolas. —
( 857 )
Annales : tome III, I" liv., décembre I8G7; tome IV, 4* liv.,
juin 1873; — Publications extraordinaires, n" 5, 1868: opus-
cule inédit de Gérard Mereator, par le D"' Van Raemdonck.
Saint-Nicolas; 5 cah. in-8°.
Institut archéologique du Luxembourg. — Annales, tome V,
1" cali., 1867. Arlon; cah. in-8°.
Institut royal grand-ducal de Lîixembourg. — Publications
de la section historique, année 1872, XXVII (V). Luxera-
bourg, 1874; vol. in-4".
Nijhoff [Is. An.). — Gedenkwaardigheden uit de geschie-
denis van Gelderlaiid , VI"" deel, 2'*'' stuk (Karel van Egmond ,
hertog van Gelre, graff van Zutphen (1514-1 528). Arnheim,
1862; vol. in-4°.
Habels (Jos.). — Het vrijdorp Neeritter als eigendom der
domkerk van Luik , gevolgd door aanteekeningen op Molen-
beersel, Heel, Poil en Panheel. 3Iaestricht, 1867; vol. in-8".
Brassart (Félix). — Etablissement de la collégiale de Saint-
Anié dans la ville de Douai; — Le Pas du Perron fée, tenu à
Bruges en 1465 par le chevalier Philippe de Lalaing. Douai,
1872, 1874; 2 vol. in-8°.
Tailliar. — Chroniques de Douai recueillies et mises en
ordre. Douai, 1870; vol. in-8°.
Société d'agriculture, sciences et arts, à Douai. — Mémoires :
1"- série, tome I à XIII, 1826-1841); 2'= série, tome I à XI,
1849-1875. Douai; 26 vol. in-8''; ~ Recueil d'actes des XIP et
XIIP siècles en langue romane wallonne du nord de la France.
Douai, 1849; vol. in-8°.
Comité flamand de France, à Lille. — Bulletin, lome IV.
n" 7, 8 et 9, 1867-1868; tome VI, n°^ 7 , 8 et 9, 1875-1874.
Lille, 5 cah.in-8°.
Revue des questions historiques , avril 1870; janvier,
avril, juillet et octobre 1875; janvier 1874. Paris; 6 vol. in- 8°.
Société d'agriculture , sciences et arts de l'arrondissement
de Valenciennes. — Mémoires, tomes VI à IX, 1846-1853; —
Mémoires historiques de l'arrondissement de Valenciennes,
2"^ SÉRIE, TOME XXXVIII. o5
( 858 )
tomes 1 à III, 1865-1875; — llevue agricole, industrielle, litté-
raire et artistique: tomes V à XXVI, 1853-1875; tome XXVIII,
liv. I à 6, et 9. Valenciennes; 29 vol. et 6 cah. in-8".
Wagner {G.-W.-J.). — Die vormalingen geistlicheii Stiste
im Grossherzogtliura Ilcsscn, I'"" Bd. Darmstadt, 1875; vol.
in-8°.
Hislorisclier Verein fur das Grossherzogthum Hessen zu
Darmstadt. — Archiv fiir Hessische Geschichte, Bd. XI, 3.
Heft; Bd. XIII, 2. Heft. Darmstadt, I867-I875; 2 cah. in-8°;
— Register zu den zwolf ersten Banden des Archivs, bear-
beitet von Fr. Ritsert. Darmstadt, 1875; vol. in-8''.
Hislorischer Verein fur Niedersachsen, Hannover. —
Zeitscbrift, Jahrgiinge 1858 bis 1865, I87I , 1872. Hanovre;
9 vol. in-8°.
Landesarchive zu Karlsruhe. — Zeitscbrift fur die Ge-
schichte des Oberrheins, XX. Bd., 1866; XXV. Bd., 1875;
XXVI. Bd., 1., 2. und 5. Heft., 1874. Carlsruhe; 11 cah. in-8».
Université de Leipzig. — Program^me des cours, 1871 à
1874 (8 br. in-8'');— Thèses et discours, années 1871, 1872
et 1875 (9 br. in-4°); — Thèses soutenues pendant les années
1869 à 1875. Ensemble 155 br. in-8».
Verein fiir Geschichte nnd Allherlhûmer zu Stade. — Ar-
chiv, 3, 1869. Stade, 1869; cah. in-S".
Hislorischer Verein von Unterfranken und Aschaffenburg ,
Wiirzburg. — Archiv: Bd. XIX., 5. Heft; Bd. XXII., 2. und
3. Heft. Wurzbourg, 1868, 1874; 2 cah. in-8".
Young (Edivard). — Rapport spécial sur l'immigration,
accompagné de renseignements pour les immigrants. Wash-
ington, 1872; vol. in-8°.
Smithsonian Institution of Washington. — Annual Re-
port of Ihe board of régents, 1869, 1870, 1871, 1872; —
Second annual Report of Indian coramissioners, 1870. Wash-
ington ; 5 vol. in-8°.
Fin du Tome XXXVIII de la 2"'^ série.
BULLETliNS DE L ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE.
?6^
TABLES ALPHABÉTIQUES
DU TOME TRENTE-HUITIÈME DE LA DEUXIÈME SÉRIE.
1874.
TABLE DES AUTEURS.
Airy (G. Biddell). — Hommage d'ouvrages, 403.
Alvin (L). — Accepte de rédiger la notice académique de feu M. Partoes,
389; propose d'exposer publiquement à Bruxelles les œuvres de Frédé-
ric Van de Kerkhove, de Bruges , 591.
Antas (le chevalier d'). — Prend congé de ses confrères de la classe des
lettres, 670.
Arrivabcne (le comte Giouanm). — Hommage d'ouvrage, 507.
K.
Banet-liivet (A.). — Hommage d'ouvrage, 534.
BarU't {Ed.). — Hommage d'ouvrage, 155.
hellijnck (Aiig.). — Commissaire pour le mémoire de concours en réi)onse
à la question concernant le polymoi'pliisme des champignons, 296;
lecture de son rapport sur ce travail, 655; impression, 723; présente
ses observations faites à Namur sur l'effeuillaison en 1875 et sur la
feuillaison en 1874, 405; hommage d'ouvrages, 550.
Bernaerls{G.). — La comète de Coggia, ol)servée à Malines, 352.
Bernardin. — Envoie ses observations des phénomènes périodiques du
règne végétal, faites à Melle le 21 octobre 1874, 554.
8(;0 TABLE DES AUTEUllS.
Honcompacjni (le prince B). — Hommage d'ouvrage, 292.
Borchgrave {Ém. de). — Annonce le départ de M. le chevalier d'Anlas,
670.
Brialmont (A.). — Nommé présidenl de l'Académie pour 1873, 650, 661,
709.
Briart (Alph.). — Hommage d'ouvrage, 291; commissaire pour une note
de M. A. Peiermann sur les gisemenls de phosphates en Delgique, 652;
élu membre titulaire, 847.
Burggraeve {le docteur). — Adresse une liste de souscription pour l'ou-
vrage intitulé : Monument à Jenner, C50,66S, 710.
Candéze (E.). — Hommage d'ouvrages, 651 ; les moyens d'attaque et de
défense chez les insectes : discours, 787.
Castan (E.). — Hommage d'ouvrages, 666.
Catalan (Eiig.). — Adhère au rapport de M. Folie sur le mémoire de
M. Sallel concernant la détermination , sans calcul, de l'ordre d'un lieu
géométrique, 17; commisî-aire pour la nouvelle rédaclion de ce travail,
406; hommage d'ouvrage, 291; présente une note sur la polhodie,
292; commissaire pour la nouvelle rédaction du mémoire de M. Man-
sion sur l'intégration des équations, «6/f/.; commissaire pour les notes
(le M. P.-A. Simons concernant un théorème de Fermât et la solution
de deux questions de permutations, 293; rapport verbal sur ces travaux,
409; commissaire pour le mémoire de concours en réponse à la ques-
tion concernant la théorie des fonctions d'une variable imaginaire, 295;
rapport sur ce travail, 714; commissaire pour une note de M. P. Man-
sion concernant les équations différentielles linéaires, 40o; rapport sur
ce travail , 562; note sur le problème de Malfalti, 480.
Cavalier (/.). — Adresse le résumé de ses observations météorologiques
faites à Ostende pendant les mois de juin à novembre 1874, 2, 291, 554.
650.
Chalon (fi.). — Réélu membre de la commission spéciale des finances pour
1875,671.
Colbeau (Jules). — Demande que l'Académie adhère au principe d'une
fédération des sociétés scientifiques de Belgique, 403.
Commission centrale pour Vérection d'un monument à Stjlvain Van De
^'eyer. —Adresse une liste de souscription à l'Académie, 292, 367, 371.
Conscience {H.). — Réélu membre de la commission spéciale des finances
pour 1875, 671.
TABLE DES AUTEI K>. 8()1
Cooper (Clicnies-Purton). — Annonce de sa nioi 1 . 063.
Cornet (F.-L). — Hommage d'ouvrage, 291.
Crépin [François). — Description de quelques plantes fossili's de l'étage
des psammites du Condroz (dévoniea supéiieur), 556; fragments pa-
léonlologiques pour servir à la Flore du lerrain houiller de Belgique.
368.
D.
Daussin {A.). — Présente une note sur un moteur électro-magnétique à
armature sans fin, 295.
De Ceuleneer (Ch.-Aiig.). — Remercie pour sa médaille de concours,
155.
De Decker {Pierre). — Commissaire pour une notice de M. Hcuscliling,
sur la statistique internationale. 309; rapport verbal sur ce travail,
614; réélu membre de la commission spéciale des finances pour 1875.
671.
De h'eyser (A"). — Lecture de son discours prononcé en séance publique
de la classe des beaux-arts, 590; impression, 595.
De Koninck (L.). — Commissaire pour trois notes de M. W. Spring con-
cernant la chimie, -i, 29ô; adhère aux rapports de M. Stas sur ces
travaux, 25, 40H, 409; commissaire pour une nouvelle rédaction de
la notice de M Melsens sur J.-l]. Van Helmont , 295; lecture de son rap-
port sur ce travail, 407 ; commissaire pour le mémoire de concours en
réponse à la (juestion concernant les roches plutoniennes de la Belgique
et de l'Ardenne française , 296; rajjporl sur ce travail, 748; commis-
saire pour une note de .M. Renier Malhei'be sur les chlorures alcalins
de la formation houillère, 538; commissaire pour une noie de M. E. Si-
mon sur la composition de l'acide humique naturel, etc., 652.
De Man (G.). — Rapport sur le mémoire de con.^ours en réponse à la
question concernant l'histoire de la sculpture aux Pays-Bas, pendant
les XYII"^ et XVIIl'' siècles, 586; reelu membre de la commission spé-
ciale des finances pour 1X73, 710.
Demnnnez (Joseph). — Lauréat du concours d'art appliqué de 1874
(gravure) , 380 , 400.
Desmazes (Charles^. — Accuse réception de son diplôme d'associé, 569.
De Smet (J.-J.). — Présente une notice sur les preniières années de don
Juan d'Autriche, fils de Charles-Quint, 5G9; lecture des rapports de
MM. Juste et Gachard sur ce travail, .509 ; impression, 310.
Bevaux [Paul). — Lecture de la première partie de son travail sur les
guerres médiques, 310; hommage d'ouvrage, 066.
86;2 TABLE DES AL'TEURS.
Dewalque (G.). — Annonce la fondation de la Société géologique de Bel-
gique et demande l'échange de publications, 3; commissaire pour le
mémoire de concours en réponse à la question concernant les roches
pluloniennes de la Belgique et de l'Ardenne française, 296; rapport sur
ce travail, 750; demande que l'Académie adhère au principe d'une
fédération des sociétés scientifiques de Belgique, 405; commissaire
pour une note de M. Malherbe sur les chloruies alcalins de la forma-
tion houillère, 358.
Dillens {Julien). — Lauréat du concours d'art appliqué de 1874 (pein-
ture) , 589 , 400.
Dirks (Joseph). — Lauréat (mention honorable) du grand concours de
gravure, dit prix de Rome . 589, 400.
Donny (F.). - Commissaire pour une nouvelle rédaction de la notice histo-
rique de M. Melsens sur J.-B. Van Helmont, 295; lecture de son rap-
port sur ce travail , 407 ; commissaire pour une note de M. Bottier sur
la conservation du bois au moyen des sels de cuivre, 406; rapport sur
ce travail, 560; commissaire pour une note de M. A. Petermann sur les
gisements de phosphates en Belgique, 632; commissaire pour une note
(le M. E. Simon sur la composition de l'acide humique naturel , ibid.
Dubois {AI p.). — Présente un travail concernant un Spizaëte nouveau,
4; impression, 129; rapports de MM. de Selys Longchamps et P.-J. Van
Beneden sur sa notice concernant la variabilité de certaines espèces du
genre Calliste, 19, 22, impression de celte notice, 124; présente une
note intitulée : Remarques morphologiques sur les espèces du sous-
genre Xanthoura, 406 ; rapport verbal de M. de Sclys Longchamps sur
ce travail , 407 ; impression , 488.
Du Bus de Gisignies {le vicomte Bernard}. — Annonce de sa mort, 290.
Dupont {Éd.). — Commissaire pour un travail de M Alp. Dubois concer-
nant un spizaëte nouveau , 4.
Duprcz (F.). — Présente le résumé de ses observations météorologiques
faites à Gand en 1873, 2; adhère au rapport de M. J. Plateau sur le
mémoire de M. G. Van der Mensbrugghe intitulé : L'électricité statique
exerce-t-elle une influence sur la tension superficielle des liquides?
19; commissaire pour un mémoire de M. A. Daussin sur un moteur
éiectro-magnéti(iue à armature sans lin, 295 ; rapport sur la note de
M. A. Perrey concernant les tremblements de terre en 1871. 297.
Edwards {John}. — Annonce la mort de M Gh. Purlon Cooper, 663.
Elle de Beaumont {J.-B. Léonce). — Annonce de sa mort, 402.
TABLE DES AUTEL'RS. 863
Ellero[Pietro). — Hommage d'ouvrage, 568.
Estourgies (L.). — Présente une note intitulée : Calculs de l'éclipsé de
soleil du 10 octobre et de l'occultation de Vénus du 14 octobre 1874,
558.
F.
Faider (Ch.). — Rapport sur la notice de M. Léon Vanderkindere concer-
nant l'origine des magistrats communaux, 159: commissaire pour une
notice de M. Heuschling sur la statistique internationale, 309; rapport
verbal sur ce travail, 614; réélu membre de la commission spéciale des
finances pour 1 873, 671 .
Fayeii. — Hommage d'une photograpliie, 154.
Félis {Ed.). — Propose d'exposer publiquement à Bruxelles les œuvres
de Frédéric Van de Kerkhove, de Bruges, 591; accepte de rédiger la
notice académique de feu Ale.xis Baron, 354; hommage d'ouvrage, 710 ;
rend compte des opérations de la caisse centrale des artistes belges,
pendant l'année 1875, 71 1.
Flandre (S. A. B. le comle de). — Fait e.xprimerses regrets de ne pouvoir
assister à la séance publique de la classe des beaux-arts, 588 ; mêmes
regrets au sujet de la séance publique de la classe des sciences, 712.
Folie (F.). — Rapport sur le mémoire de .M. L. Sallel concernant la déter-
mination, sans calcul, de l'ordre d'un lieu géométrique, 15 ; commissaire
pour la nouvelle rédaction de ce travail, 406; quelques nouveaux théo-
rèmes sur les cubiques gauches, 65; commissaire pour une nouvelle
rédaction du mémoire couronné de M. Mansionsur l'intégration des équa-
tions, 292 ; commissaire pour les notes de M. P.-A. Simons concernant
un théorème de Fermât et la solution de deux questions de permuta-
tions, 295; rapport verbal sur ces travaux, 409; commissaire pour le
mémoire de concours en réponse aux questions concernant la tempéra-
ture de l'espace et la chaleur spécifique absolue des corps, 293 ; lecture
de sou rapport sur ce travail, 718; commissaire pour une note de M. W.
Spring sur la dilatation, la chaleur spécifique des alliages fusibles, etc.,
405; commissaire pour une note de M, P. Mansion sur les équations dif-
férenlielles linéaires, ibid.. rapport sur ce travail, 363; quelques nou-
veaux théorèmes sur les courbes gauches «lu 4™'' ordre , 463 ; hommage
d'ouvrages, avec noie bibliographique, 336: élu membre titulaire, 847.
Fraikin (C.-A.). — Réélu membre de la commission spéciale des finances
pour 1873, 710.
Franck (/.). — Réélu membre de la commission spéciale des finances
pour 1875,710.
86i TABLE DES AUTEURS.
Gachard {L.}. — Le cardinal Bentivogiio. Sa noncialure à Bruxelles
(suite), 154; commissaire pour une notice de M. J.-J. De Smet sur
don Juan d'Autriche, 369; lecture de son rapport sur ce travail, 309;
réélu membre de la commission spéciale des finances pour 1873, 671.
Galeslool (L.). — Présente un travail intitulé : Fouilles et découvertes
d'antiquités romaines à Assche. Détails inédits sur le trésor de Mespe-
laer, 671.
Geefs (G.). — Réélu membre de la commission spéciale des finances pour
1873,710.
Geefs (Joseph). — Adhère au rapport de M. Siret sur le mémoire de con-
cours en réponse à la question concernant l'histoire de la sculpture aux
Pays-Bas pendant les XYIP et XVIII<= siècles, 371, 580.
Gevaert (Aug.). — Fait connaître qu'il n'a aucune instruction spéciale à
donner à M. F. Servais , lauréat du grand concours de composition mu-
sicale de 1873, 370.
GUkinel (Alfred). — Lauréat du concours de la classe des sciences,
747, 846.
Gloesener (M.). — Commissaire pour une note de M. A. Daussin sur un
moteur électro-magnétique à armature sans fin, 293; commissaire
pour une note de M. W. Spring sur la dilatation, la chaleur spécifique
des alliages fusibles, etc., 403; lauréat du concours quinquennal des
sciences mathématiques et physiques pour la période de 1869-1873,
630, 847.
Gluge (Théophile). — Commissaire pour un mémoire de M. Van Bambeke
sur l'embryogénie des poissons osseux, 338; nommé membre de la com-
mission spéciale des finances pour 1873, 633.
Gouverneur du Brabanl (M. le). — Hommage d'ouvrages, 4, 337.
Graindorge. — Hommage d'ouvrage, 557.
Guillaume (le lieutenant général baron). — Hommage d'ouvrages, 507;
note au sujet de M. Van Hasselt, membre de la commission de la Bio-
graphie nationale, 671.
Guizot (F.-P.-G.). — Annonce de sa mort , 306.
IJ.
Hardouin (Henri). — Hommage d'ouvrage, 133.
Hautcoeur. — Hommage d'ouvrage, 134.
Henry (L). — Sur l'anhydride hypoazotique, 442.
TABLE DUS ALTEURS. 865
Heremans (/.). — Hommage d'ouvrages, 155, 666 ; Overblijfsels van deii
instrumentaal in het Xederlandsch. 369. 691.
Hermann (Dr.Josef). — Hommage d'ouvrage, 292.
Heuschling (X.). — Hommage d'ouvrage, 307 ; présente une notice sur
la statistique iuternationale, 509 ; rapports verbaux de MM. Faider et De
Decker sur ce travail, 614.
Bock (Augusle). — Hommage d'ouvrage, 666.
Hooreman (Charles). — .Note sur les orages du 10 juillet 1874. ôo4 :
perturbation magnétique du 9 octobre 1874, 4-22.
Houzeau (C.-J.). — Présente le résumé de quelques observations astro-
nomiques et niéléorologi(iues faites dans la zone surtempérée et entre
les tropiques, 403; lecture des rapports de MM. Liagre et E. Quetelet
sur ce travail, 338.
Huxley (Thomas). — Élu associé de la classe des sciences. 847.
[nstiltit roijal des sciences, des lettres et des arts de Vfnise. — Envoie son
programme de concours pour 1 875, 534.
Jacques (Léon). — Hommage d'ouvrages, 134.
Juste (Th.). — Accepte de rédiger la notice académique de feu M. Van De
Weyer, 152 : commissaire pour une notice de M J.-J. De Smet sur don
Juan d'Autriche, 569 ; lecture de son rapport sur ce travail. 309.
K.
Kervyn de Lettenhove (Le baron). — Hommage d'ouvrage. 133: deux
lettres inédites de Jacques de Molay, 226.
Lasaulx (A. von). — Hommage d'ouvrage, 292.
Lauivers (François). — Lauréat (premier prix) du grand concours de
gravure, dit prix de Rome, 589, 400.
Laveleyc(E. de). — Rapport sur la notice de M. Léon Vanderkindere con-
cernant l'origine des magistrats communaux, etc., 139.
8(;r» TABLE DES AUTEt'HS.
Leclercq {Julien). — Accepte de rédiger la notice académique de feu
M. Jouvenel, 534.
Le Roy (^Ip.) — Notes bibliographiques concernant: 1" un ouvrage de
M. Léon Jacques, 134; 2" différentes publications de M le marquis de
Queux de Saint-Hilaire, 666.
Le Verrier {Urbain). — Élu associé de la classe des sciences , 847.
Liagre {J.). — Rapport sur le mémoire de M C. Rodenbach concernant
l'étalon prototype universel des mesures de longueur, 5 ; adhère aux
rapports de MM Ern. Quetelet et Mailly sur le mémoire de M. Fr. Terby
concernanl l'aspect physique delà planète Mars, 13 ; commissaire pour
une note du même , intitulée ; Un mot à propos d'une notice du comte de
Rosse sur les observations de Jupiter, faites eu 1873, 293 ; proclamation
des résultats du concours de la classe drs beaux-arls et du grand con-
cours de gravure, ô98 ; commissaire pour un mémoire de M. Houzeau
sur quelques observations astronomiques et météorologiques, etc., 405;
lecture de son rapport sur ce travail, 558 ; commissaire pour une note
de M. Terby sur l'aspect de la planète Jupiter pendant son opposition
en 1874, etc., 406 ; rapport sur ce travail, 560 ; commissaire pour une
note de M. L. Estourgies intitulée : Calculs de l'éclipsé de soleil du
10 octobre et de l'occullation de Vénus du 14 octobre 1874, 558;
commissaire pour une note de M. J. Vivier sur la constitution physique
des comètes, 652; proclamation des résultats du concours de la classe
des sciences, 844.
Limnandcr {Le baron A.). — Hommage d'ouvrage, 710.
M.
Mailly {Éd.). — Adhère au rapi)ort de M. Liagre sur le mémoire de
M. C. Rodenbach concernant l'étalon prototype universel des mesures
de longueur, 7 ; rapport sur le mémoire de M. F. Terby concernant
l'aspect physique de la planète Mars, 12 ; rapport sur la noie de M. A.
Perrey concernant les tremblements de terre en 1871 , 298; notice sur
Adolphe Quetelet , 816.
Malaise (C.) — Hommage d'ouvrages, 3,556 ; sur quelques roches por-
phyriques de Relgique, 70 ; commissaire pour le mémoire de concours
en réponse à la question concernant les roches plutoniennes de la Bel-
gique et de l'Ardenne française, 296 ; rapport sur ce travail, 775 ; sur
la découverte du Diclyonema sociale, S'a//., de la faune primordiale,
dans le massif de Rocroy, 464.
TADLE DES AUTEURS. 807
Malherbe (Renier). — Présente une note concernant les chlorures alcalins
de la formation houillère , 558.
Mansion(P.). — Présente une nouvelle rédaction de son mémoire couronné
sur l'intégration des équations, :29"2 : présente une note sur la propi-iété
caractéristique des équations différentielles linéaires, 405 ; rapports de
MM. Catalan et Folie sur ce travail, o6'2 , 5G5 ; impression, 578.
Marion {Le D"" A.-F.}. — Offre un exemplaire de son mémoire concer-
nant les marnes heersiennes de Geliaden, 3 ; remercie pour l'impression
de ce travail, 291.
Maus (H.). — Nommé membre de la commission spéciale des Onances
pour 1875, 655.
Mayer (J.-R.). — Élu associé de la classe des sciences, 847.
Melsens{L.). — Sur i'impoitance des gisement-^ de phosphate de chaux des
environs de C?ply (province de Hainaut), 25 ; rectiûcation à cette notice,
442 ; sur la conservation du virus vaccin, 53 ; sur les charbons décolo-
rants, leur production artificielle et la révivilication des noirs employés
dans rindustrie, 58 ; présente une nouvelle rédaction de sa notice histo-
rique sur J.-B. Van Helmont, 292 ; lecture des rapports de MM. Stas,
de Koninck et Donny sur ce travail, 407 ; commissaire pour le mémoire
de concours en réponse aux questions concernant la température de
l'espace et la chaleur spécifique absolue des corps simples et des corps
com|)osés , 295 ; lecture de son rapport sur ce travail, 718 ; notes sur
les paratonnerres , 320, 423 ; commissaire pour une note de M. Rottier
sur la conservation du bois au moyen des sels de cuivre, 406 ; rapport
sur ce travail, 562; commissaire pour une note de M A. Pelermann
sur les gisements de phosphates en Belgique , 652 ; commissaire pour
une note de M. E. Simon sur la composition de l'acide humique na-
turel, etc., 652.
Menabrea {Le comte L.). — Élu associé de la classe des sciences, 847.
Meunier (Stanislas). — Hommage d'ouvrage, 555.
Ministre de la justice (M. le). — Hommage d'ouvrage, 368, 665.
Ministre de rintérieur (M. le). — Envois d'ouvrages, 2, 282, 291 , 568, 403,
507, 554, 615, 715; lettres relatives aux bustes de .MM. Quetelet
et Dandelin,2, 281, 282, 290, 371 , 715; arrêtés royaux portant à
4,000 francs la pension des lauréats des grands concours , 371; pro-
gramme des fêtes de septembre, 378; lauréats du grand concours de
gravure de 1874, 389, 400 ; annonce le décès de M. A. Vène, 403; lettre
de M. P.-J. Goubet concernant la quadrature du cercle, 403; lettres
relatives à une question de paratonnerres , 554; demande une liste de
fiuatorze noms pour former le jury de la 5<- période du concours quin-
8G8 TABLE DES AUTEURS.
queuual de littérature flamande, 612 ; transmet l'arrêté royal nommant
M. A. Brialmont président de l'Académie pour 1875, 650, 664, 709;
arrêté royal décernant à M. Gloesener le i)rix quinquennal des sciences
mathématiques et physiques pour la période de 1869-1873, 030; ex-
prime ses regrets de ne pouvoir assister a la séance publique de la
classe des sciences, 71:2.
Montignij (Ch.). — Adhère au rapport de M. Liagre sur le mémoire de
M. G. Rodenbach concernant l'étalon prototype universel des mesures
de longueur, 7; commissaire pour un mémoire de M. A. Daussin sur un
moteur électro-magnétique à armature sans fin , "2dô ; commissaire pour
un mémoire de concours en réponse aux ([ueslions concernant la tem-
pérature de l'espace et la chaleur spécifique absolue des corps simples
et des corps composés, 295; lecture de son rapport sur ce travail, 718;
sur la fréquence de la scintillation des étoiles dans ses rapports avec
la constitution de leur lumière, d'après l'analyse spectrale, 300; com-
missaire pour une noie de M. W. Spring, sur la dilatation et la cha-
leur spécifique des alliages fusibles, etc., 405; nommé membre delà
commission spéciale des finances pour 1873, 653.
Morcau (Camille). — Présente une note sur la structure de la corde dor-
sale de l'Amphioxus, 653.
Morren {Éd.). — Commissaire pour le mémoire de concours en réponse
à la question concernant le polymorphisme des champignons, 296;
lecture de son rapport sur ce travail , 653; impression, 719 ; hommage
d'ouvrages, 651.
N.
Nève (F.). — Commissaire pour une notice de M. Ph Van der Haeghen
sur les écoles et l'alphabet des Tamouls, 509; rapport sur ce travail ,
614.
Nils.so7i (St^eii). — Élu associé de la classe des sciences, 847.
Nolet de Brauwere van Steeland (J.). — Hommage d'ouvrage. 615 ,
666.
Nyst (H.). — Réélu membre de la commission spéciale des finances pour
1875,653.
O.
Omalius d'Halloy {J. d'). — Remercie ses confrères pour les senti-
ments de bienveillance qui lui ont été exprimés au sujet de son état de
santé, 650.
TABLE DES ALTEIRS. 869
P.
Partoes {H.-L.-F.). — Annonce de sa mort, 389.
Perrey (Alexis). - Rapports de MM. Duprez, Ern. Quetelet et Mailly sur
sa note concernant les tremblements de terre en 1871, 297, 298; hom-
mage d'ouvrages, 713.
Petermann (A.). — Hommage d'ouvrage, 292; présente une note sur les
gisements de phosphates en Belgique et parliculièrement sur celui de
Ciply, 6o2.
Plateau (F.). — Accepte de faire la notice académique de feu M. Poelman,
290; note sur un procédé pour donner ou pour rendre leur couleur
rouge aux muscles conservés dans l'alcool, 476; élu membre titu-
laire, 8-i7.
Plateau (/.). — Rapport sur le mémoire de M. G. Van der Mensbrugghe
intitulé : L'électricité statique exerce-t-elle une influence sur la tension
superficielle des liquides? 17; sur une récréation arithmétique fS"- note),
469.
Poelman (Charles). — Annonce de sa mort, 290.
Poswick (Eugène). — Hommage d'ouvrage, 307.
Poullet (Edmond). — Note bibliographique au sujet d'un ouvrage de
M. Poswick, 307.
Pringsheim (Le docteur JS'athaniel). — Élu associé de la classe des
sciences, 847.
Q
Quetelet (E.) — Rapport sur le mémoire de M. F. Terby concernant l'as-
pect physique de la planète Mars, 7 ; commissaire pour une note du
même, intitulée : Un mot à propos d'une notice du comte de Rosse sur
les observations de Jupiter faites en 1873, 293; rapport sur la note de
M. Perrey concernant les tremblements de terre en 1871, 298; la co-
mète de Coggia. observée à Bruxelles, 349; commissaire pour un mé-
moire de M. J.-C. Houzeau concernant quelques observations astrono-
miques et météorologiques, etc., 405; lecture de son rapport sur ce
travail, 558; commissaire pour une note de M. Terby sur l'aspect de
Jupiter pendant son opposition en 1874, etc., 406; rapport sur ce tra-
vail, 359; les Perséides en 1874, 410; note sur les perturbations ma-
gnétiques qui ont accompagné l'aurore boréale du 3 octobre 1874. 421 ;
870 TABLE DES ALTEUBS.
hommage d'ouvrage, 354; commissaire pour une note de M. L. Eslour-
gies, intitulée : Calculs de l'éclipsé de soleil du 10 octobre 1874 et de
l'occultation de Vénus par la lune, le 14 octobre 1874, o58; obser-
vation de ces deux phénomènes, faite à l'Observatoire royal de
Bruxelles, 566, 567; commissaire pour une note de M. J. Vivier sur la
constitution physique des comètes, 652.
Queux de Saint-H ilaire (Le marquis de). — Hommage d'ouvrages, 666.
R.
Renard (A.). — Lauréat du concours de la classe des sciences , 784, 846.
Rivier (Alph.). — Hommage d'ouvrage, 507; le Compendium Institutio-
num de Nicolas de Bruxelles, 619.
Rodenhach {€.). — Rapports de MM. Liagre, Montigny et Mailly sur son
mémoire concernant l'étalon prototype universel des mesures de lon-
gueur, 5, 7.
Roi des Belges (S. M. le). — Fait exprimer ses regrets de ne pouvoir
assister à la séance publique de la classe des beaux-arts, 588; mêmes
regrets au sujet de la séance publique de la classe des sciences, 712.
Roncière le Nourij {Le vice-amiral de la). — Adresse les documents con-
cernant le 2' congrès international des sciences géographitiues, 554.
Rottier. — Présente une note sur la conservation du bois au moyen des
sels de cuivre, 406; rapports de MM. Donny et Melsens sur ce travail,
560, 562 ; impression, 595.
S.
Sallel (Louis). — Ra|)ports de MM. Folie et Catalan sur son mémoire
concernant la détermination , sans calcul , de l'ordre d'un lieu géomé-
trique, 13. 17; présente une nouvelle rédaction de ce travail, 406.
Saporla (Le comte G. de). — Offre un exemplaire de son mémoire con-
cernant les marnes heersiennes de Gelinilen,3; remercie pour l'im-
pression de ce travail , 291.
Scheler (Aug.). — Hommage d'ouvrages, 13ô, Glô, 666.
Schwann (Th.). — Commissaire pour un mémoire de M. Van Bambeke
concernant l'embryogénie des poissons osseux, 538; commissaire pour
une note de M. Camille Moreau sur la structure de la corde dorsale de
l'Amphioxus 655
TABLE DES AL'TEUBS. 871
Secchi {le R. P.) — Élu associé de la classe des sciences, 817.
Selys Longchamps {Edin. de). — Commissaire pour un travail de
M. Alp. Dubois concernant un Spizaëte nouveau, 4; rapport sur une
notice du même concernant la variabilité de certaines espèces du genre
CalUste, 19; commissaire pour une note du même concernant les
espèces du sous-genre Xanthoura, 406; rapport verbal sur ce tra-
vail, 407.
Simon {E.). — Présente une note sur la composition de l'acide lui-
mique, etc., 652.
Simons {P.-A). — Quelques réflexions sur le problème de Mairatti,88;
présente deux noies, intitulées : 1° Dcmonslralion d'un théorème de
Fermât, et 2" Solution de deux questions de permutations, 293; rap-
ports verl)aux de MM. Catalan et Folie sur ces travaux, 409.
Sinkel. — Hommage d'ouvrage, 5.
Siret {Ad.). — Lecture de son rapport sur le mémoii-e de concours en ré-
ponse à la question concernant l'bistoire de la sculpture aux Pays-Bas
pendant les XVl|e et XVIII® siècles, 371 ; impression, 586; communica-
tion verbale au sujet de Fi'édéric Van de Kerkhove, de Bruges, paysa-
giste, mort le 12 août 1874, à l'âge de 10 ans et 1 1 mois, 391 ; notice sur
le même, 536.
Slingenerjer (Ern). — • Motion relative aux études artistiques des lau-
réats des grands concours, pensionnaires du Gouvernement, à Rome,
284; réélu membre de la commission spéciale des finances pour 1875,
710.
Société belge de microscopie. — Annonce sa fondation, 713.
Sociéléde géographie de Lyon. — Demande d'échange de publications, 5.
Société géologique de Belgique. — M. Dewalque annonce la fondation de
cette institution et demande l'échange de publications , 3.
Société malacologiquc de Belgique. — Demande que l'Académie adhère
au principe d'une fédération des sociétés scientifiques de Belgique,
405.
Spring {Wallhère). — Présente les notes suivantes: i" Sur la constitu-
tion des acides polythioniques, 4; impression, 108; 2» Sur deux nou-
veaux chlorures d'acides organiques, 295; impression, 494; 3» Sur
l'action du pentachlorure de phosphore sur les hyposulfites inorgani-
ques, 295; impression , 505 ; rapports de MM. Stas et de Koninck sur
ces trois notes, 22, 25, 407, 408, 409; lettre à M. Stas sur la chaleur
spécifique des corps, 295; présente une note sur la dilatation, la cha-
leur spécifique des alliages fusibles et leurs rapports avec la loi de
Neumann , 405 ; dépose un billet cacheté, 535.
87^2 TABLE DES AUTEURS.
Stas (J.). — Commissaire pour trois notes de M. W. Spriug concernant
la chimie, 4, 293; rapports sur ces travaux, 22, 407, 408; dépose une
lettre du même concernant la chaleur spécilique des corps, 293; com-
missaire pour une nouvelle rédaction de la notice historique de M. Mel-
sens sur J.-B. Van Helmont, 293; lecture de son rapport sur ce tra-
vail, 407 ; commissaire pour le mémoire de concours en réponse aux
questions concernant la température de l'espace el la chaleur spécifique
absolue des corps simples et des corps'composés , 295; lecture de sou
rapport sur ce travail, 718.
Steichen (M.). — Commissaire pour le mémoire de concours en réponse
à la question conceruant la théorie des fonctions d'une variable imagi-
naire, 295 ; adhère aux rapports de MM. Catalan et De Tilly sur ce tra-
vail, 718.
Steiir {Cil.}. — Hommage d'ouvrage. 568.
Struve {Otlo). — Ëlu associé de la classe des sciences, 847.
Terby (F.). — Rapports de MM. Ern. Quelelel, Mailly et Liagre sur son
mémoire relatif à l'aspect physique de la planète Mars, 7, 12, 13; pré-
sente une note intitulée : Un mot à propos d'une notice du comte de
Rosse sur les observations de Jupiter faites en 1873, 293 ; est autorisé
à retirer cette note, 407; la comète de Coggia , observée à Louvain,
331 ; présente une note sur l'aspect de la planète Jupiter pendant son
opposition en 1874, el sur le passage des satellites II et 111 et de leurs
ombres pendant la soirée du 2o mars, 406; rapports de M.M. Ern. Que-
telet et Liagre sur ce travail, 359, 560 ; impression, 591 ; observations
des étoiles filantes de la période d'août 1874, faites à Louvain, 418;
note sur un phénomène auroral remarqué à Louvain le soir du 3 oc-
tobre 1874, et sur sa coïncidence avec des éclairs observés dans le
Nord, 419.
Thiry (V.). — Hommage d'ouviage, 666.
Tilly (J.-M. De). — Sur la généralisation de la formule de Uinet. 67;
commissaire pour la nouvelle rédaction du mémoire de M. .Mausion con-
cernant l'intégration des équations , 292 ; commissaire pour le mémoire
de concours en réponse à la question concernant la théorie des fonc-
tions d'une variable imaginaire, 293; rapport sur ce travail, 716.
Tinanl [Louis). — Hommage d'un médaillon représentant feu Sylvain
Van De Weyer, 333.
TABLE DES AUTEURS. 87Ô
Valérius {H.). - Sur la température de combustion des combustibles or-
dinaires, brûlés à l'air libre, 654; lecture de son rapport sur le cin-
quième concours quinquennal des sciences physiques et mathéma-
tiques, 844.
Vallée Poussin {Ch. de la). - Lauréat du concours de la classe des
sciences, 784, 846.
Van Bambeke (Ch.). — Pré.seule un mémoire sur l'embryogénie des
poissons osseux , ooB; élu correspondant de la classe des sciences
847.
Van Beneden (Éd.). — Commissaire pour le mémoire de concours en ré-
ponse à la question concernant le polymorphisme des champignons, 296 :
lecture de son rapport sur ce travail, 6o3; impression, 733; commissaire
pour un mémoire de M. Ch. Van Bambeke sur l'embryogénie des pois-
sons osseux, 537; commissaire pour une note de M. Camille Moreau sur
la structure de la corde dorsale de l'Amphioxus, 655.
Van Beneden (P.-J.). — Rapport sur une notice de M. Alp, Dubois con-
cernant la variabilité de certaines espèces du geave Calli.ste,^^; nommé
membre de la commission spéciale des finances pour 1873,633.
Van der Haeghen (Ph.). — Présente une notice sur les écoles et l'alphabel
des Tamouls, 509; rapport de M. \ève sur ce travail, 614.
Vanderkindere {Léon). — Rapports de MM. de Laveleye, Faider et Wau-
ters sur sa notice concernant l'origine des magistrats communaux et,
l'organisation de la marke dans nos contrées, au moyen âge, 139, 140;
impression de ce travail, 236.
Van der Mensbnigyhe (G.). — Rapports de iM.M. J. Plateau et F. Dupre/-
sur son mémoire intitulé : L'électricité statique exerce-l-elle une in-
lluence sur la tension superficielle des li(|uides? 17, 19.
Van De Wejjer (fils). — Écrit qu'il reclierchera les documents relatifs aux
notices Van Meenen et Raron, promises par son père, 638.
Van De IVei/er {M'"' Sylvain). — Remercie pour les sentiments exprimes
pai' l'Académie lors du décès de son époux, 132.
Van Hassell (André). — Annonce de sa mort , 708.
Van Hollebeke (B ). — Hommage d'ouvrage, 613.
Van Weddingen (l'abbé). — Remercie pour sa médaille de concours, lô.".
Vène (A ). — Annonce de sa mort, 403.
Vivier(J.). — Présente une note sur la constiliitioi] ph.vsiciue des conit'tts.
632.
2™'' SLRIE, TOME .XXXVIll. 50
874 TAltLi; Dl-S AiriEUUS.
w.
VVappers [le baron Gi(staf). — Annonce de sa niorl, 665, 709.
Wattier. — Donne connaissance de diverses découvertes scienlllit|ues
qu'il a faites, 291.
Waulers (Alphonse). — Rapport sur la notice de M. Léon Vanderkindere
concernant l'origine des magistrats communaux, etc., 140: hommage
d'ouvrage ,613: Henri III , duc de Brabant (1" partie) , 672.
8^r
'1
TABLE DES MATIÈRES.
Arclieoloyie. — M. L. Galeslool présenle iiiie nolice intitulée ; Fouilles ei
découvertes crantiquités romaines à Assciie, 671.
Aslronomie. — Rapports de MM. E. Quetelet, .Mailiy et Liagre sur le
mémoire de M. F. Terby concernanl l'aspect physique de la planète Mars,
7. 12, 13; M. Terby présente une note relative à un travail du comte de
Rosse sur des observations de .lupiter , faites eu 1873, 293; M. Terby est
autorisé à retirer cette note, 407; nouvelles reclierches sur la fréquence
de la scintillation des étoiles dans ses rapports avec la constitution de
leur lumière, d'après l'analyse spectrale, par M. Ch. Montigny, 500: la
comète de Coggia, observée à Bruxelles, à Louvain et à Malines; notes
de MM. E. Quetelet, Terby et Rernaeris, 319, 351, 352; M. Houzeau
présente un mémoire intitulé; Résumé de quelques observations astro-
nomiques et météorologiques faites dans la zone surlempérée et entre
les tropiques, 40o; lecture des rapports de MM. Liagre et E. Quetelet
sur ce travail, 5o8; M. Terby présente une note sur l'aspect de la pla-
nète Jupiter pendant son opposition en 1874, et sur le passage des satel-
lites II et III et de leurs ombres pendant la soirée du 25 mars, 406;
rapports de MM. E Quetelet et Liagre sur celte note, 559, 560; im-
|)ression.591 ; les Perséides en 1874, communication de M. E. Quetelet,
410; observations des étoiles lilanles de la période d'août 1874. faites à
Louvain par M. Terby, 418; .M. Estourgies présente une note intitulée :
Calculs de l'éclipsé de soleil du 10 octobre et de-i'occullation de Vénus
du 14 octobre 1874, 338; oliservation de l'écIipse de soleil du 10 octobre
1874, faite à l'Observatoire royaV de Bruxelles; communication de
.M. E. Quetelet, 506; observal^on de l'occultation de Vénus par la lune,
le 14 octobre 1874, l'aile à'f'Observaloire royal de Bruxelles; comnm-
nication du même, ^T: M. Vivier présente un travail sur la constitu-
lion physique d^ comètes, 652.
87() TABLE DES MATIÈRES.
B.
Bibliographie. — iNole de M. A. Le Roy sur un ouvrage de M. Léon
Jacques, inlilulé : Griffes roses, 134; noie de M. Poullel sur un ouvrage
de M. Posvvick, inlilulé : Histoire généalogique et biographique de la
noblesse limboargeoise , 307; note de M. Folie an sujet de l'ouvrage
deMeyei'Swr le calcul des probabilités, et sur un travail de M. Clau-
sius,oo(); note de M. Le Roy sur deux ouvrages de M. le marquis de
Queux de S'-Hilaire, inlilulés : Le livre des cent Ballades el le Traicté de
Gelta et d'Amphitryon, 667.
Billets cachetés. — Dépôt d'un billet cacheté par M. W. Spring, 555.
Biographie — M. Melsens présente une nouvelle rédaction de son
mémoire historique sur Van Helmont, "292; lecture des rapports de
MM. Stas, de Koninck et Doniiy sur ce travail, 407; notice sur Frédéric
Van de Kerkhove, jeune paysagiste, mort à l'âge de 10 ans et 1 1 mois,
par M. Ad. Siret, 591, 536; notice sur L.-A.-J. Quelelet, par M. Éd.
Mailly, 810. ~ Voir Histoire.
Biographie nationale (Commission de la). — Motion de M. le général
Guillaume, président de la Commission, au sujet de M. Van Hassell, 671.
Botanique. — Rapports de MM. Morren, Rellynck et Éd. Van Reneden sur
le mémoire de concours concernant le polymorphisme des champignons,
655, 719, 725, 755. — Voir Paléontologie.
Bustes des académiciens décédés. — Lettres de M. le Ministre de l'inté-
rieur relatives aux bustes de MM. Ad. Quetelet el Dandelin , 2, 281 , 282,
290, 571, 713: dépôt du buste de M. le conmiandeur de Nieupori, 554.
Caisse centrale des ariisles belges. — M. Ed. Fétis donne lecture du
compte-rendu des opérations de la cai.sse pendant l'année 1875,711.
Chimie. - M.W. Spring présente une notice intitulée: Nouvelles recherches
sur la constitution des acides polythioniques, 4; rapports de MM. Stas
et de Koninck sur cette notice, 22, 2-5; impression, 108; note sur
l'importance du gisement de phosphate de chaux des environs de Ciply
(province de Hainaut), par M. Melsens, 25; rectitication à celte notice,
442; note sur la conservation du virus vaccin, par le même , 55; note
sur les charbons décolorants, leur production artificielle et la révivifica-
lion des noirs employés dans l'industrie, par le même, 58; M. W.SprIng
présente un travail inlilulé: Note sur deux nouveaux chlorures d'acides
TABLE DES MATIÈRES. 877
organiques, 293; rapports de MM. Slas et de Koninck sur celle note,
407, 408; impression, 494; M. W. Spring présente un travail intitulé :
Notice sur l'action du pentachlorure de phosphore sur les hjposuIGles
inorganiques , 293; rapports de MM. Slas et de Koninck sur celte notice ,
408, 409; impression, 503; M. Rottier présente une note intitulée:
Recherches sur la conservation du bois au moyen des sels de cuivre,
406 ; rapports de MM. Donny et Melsens sur cette note, 560, 562 ; impres-
sion, 595 ; sur l'anhydride hypo-azotique, par M. L. Henry, 442; sur la
production des hydrocarbures acétyléniques et la classilicalion des
hydrocarbures tétraalomiques en général , par le même, 448: note sur
un procédé pour donner ou pour rendre leur couleur rouge aux muscles
conservés dans l'alcool, par M. Félix Plateau , 476 ; M. Petermann pré"
sente une note sur les gisements de phosphates en Relgique. 652;
M. Simon présente une note sur la composition de l'acide humique
naturel, ibid.
Concours de composition musicale (grand). — Lettre de M. le Ministre
lie l'inlérieur relative aux instructions de voyage à donner à M. Franz
Servais, lauréat du concours de 1873,282: réponse de M. Gevaert à
cette lettre, 370.
Concours de gravure (grand). — Lauréats du concours de 1874, 389.
Concours de la classe des beaux-arls. — Rapports de MM. Siret, J. Geefs
et DeMau sur le mémoire de concours concernant l'histoire de la sculp-
ture aux Pays-Bas pendant les XVIl^' et XVIII>- siècles, 371, 380, 386;
ralitication des conclusions de ces rapports par la classe des beaux-arts,
390: jugement du concours d'art appliqué, 378, 379; MM. Demannez
et Dillens lauréats, 380, 389; proclamation des résultats des concours,
598; programme pour 1875, 555, 639.
Concours de la classe des lettres. — Programme pour 1876, 135; lettre
de l'auteur du travail sur l'histoire de la philologie thyoise, envoyé en
réponse à une question du programme pour 1874, 369.
Concours de la classe des .sciences. — Mémoires reçus en réponse aux
questions du programme pour 1874 et nomination de commissaires, 4,
294, 558 ; rapports de MM. Morren, lîellynck et Ed. Van Beneden sur le
mémoire concernant le polymorphisme des champignons, 653, 719. 725,
735; M. A. Gilkiuet lauréat, 747; rapports de MM. Catalan, De ïilly et
Sleichen sur le mémoire concernant la théorie des fonctions d'une
variable imaginaire, 7 14, 71 6, 71 8; lecture des rapports de MM. Melsens,
Montigny, Folie et Stas sur le mémoire concernant la température de
l'espace et la chaleur spécifique absolue des corps simples et des corps
mS TABLE DES MATIÈRES.
composés, 718; rapports de MM. de Koniiick, Dewalque et Malaise sur
le mémoire concernant les roches piutoniennes de la Belgique, 748, 750,
773; MM. de la Vallée Poussin et Renard lauréats, 784 ; proclamation des
résultats du concours de 1874, 84S.
Concours de Rome {grands). — Projet concernant un établissement à
fonder à Rome pour les lauréats des grands concours, 283; proposition
de M. Slingeneyer au sujet des études artistiques des pensionnaires du
gouvernement à Rome, 284 ; lettre de M. le Ministre de l'intérieur annon-
çant que la pension des lauréats a été fixée, par arrêté royal, à 4,000
francs ,371.
Concours de Stassarl (grand). — Question pour la troisième période de
ce concours, 138.
Concours quinquennal de littéralure flamande. — Formation de la liste
des membres du jury chargé de juger la cinquième période de ce con-
cours, 612.
Concours quinquennal des sciences phijsiques et mathématiques. — Le
prix de la ^^ période de ce concours est décerné à M. Gloesener, 6o0,
846; lecture, par M. H. Valérius , du rapport du jury qui a jugé ce con-
cours, 844.
D.
Dons. — Dons d'ouvrages : par M. le Ministre de l'intérieur, 2, 282, 291,
568, 405, S07, 534, 613, 713; par M. Malaise, 3, 336; par MM. Marion,
de Saporta et Sinkel, 3; par M. le Gouverneur du Brabant, 4, 537; par
M. le baron Kervyn de Lettenhove, 133, 613; par M. Heremans, 133,
666; par MM. Hautcœur, Fayen, Jacques, Barlet et Hardouin, 134 et
133; par MM. Catalan, Cornet et Briart, 291 ; par MM. Mansion.von
Lasaulx, J. Hermann et A. Petermann, 292; par M. le Ministre de la
justice, 368, 663; par MM. Ellero et Sieur, 568; par M. G. B. Airy, 403 ;
par MM. Guillaume , Rivier , Arrivabene , Heuschling et Poswick, 307 ;
don d'un médaillon, par M. L. Tinant, 333; don d'ouvrages: par M. Banal"
Rivet, 554 ; par MM. St. Meunier et E. Quetelet, 333; par MM. Bellynck
et Folie, 356; par M. Graindorge, 337; par MM. Wauters et Van Holle-
beke, 613; par M. Noiet de Brauwere, 615, 666 ; par MM. Morren et
Candèze, 631 ; par MM. Castan, P. Devaux, Scheler, Thiry , Hock et
le marquis de Queux de Saint-Hilaire, 666; par MM. Éd. Fétis et le
baron Limnander, 710; par M. A. Perrey, 713.
TABLE DES MATIÈRES. S79
E.
Élections et noniinalions. — Formai ion de la liste des membres du jury
chargé de juger la cinquième période du concours quinquennal de lit-
térature flamande, 612; M. Brialmont nommé président de l'Académie
pour 1875, 630, 664, 709; élection des commissions spéciales des
finances des trois classes, 633, 671 , 710; MM. Briart et Plateau élus
membres titulaires de la classe des sciences, MM. Menabrea, Mayer, Le
V'errier, Struve, Secchi. Huxley, Pringsheim et .Niisson élus associés.
M. Van Bambekeélu correspondant, 847.
Esthétique. — Le beau dans l'art, discours par M. De Keyser, 595.
G.
Géographie. — .\nnonce de Tépoque fixée pour la réunion, à Paris , du
Congrès international de géographie, oo4.
Géologie. — Sur quelques roches porphyriques de Belgique, par M. C. Ma-
laise, 70; M. R. Malherbe présente une note intitulée : Des chlorures
alcalins de la formation houillère, 338; rapports de MM. de Koninck,
Dewalque et Malaise sur le mémoire de concours concernant les roches
plutoniennes de la Belgique, 748, 750, 773. — Voir Chimie.
Gravure. — Jugement du concours de gravure ouvert par la classe des
beaux-arls, 579; M. J. Demannez lauréat, ô80; lauréats du grand con-
cours de gravure de 1874, 589, 401.
H.
Histoire. — Notice sur l'origine des magistrats coamiunaux et sur l'or-
ganisation de la Marke dans nos contrées au moyen âge, par M. L. Van-
derkindere, 256 ; rapport de M.M. de Laveleye, Faider et Wauters sur
cette notice, 159, 140; le cardinal Bentivoglio; sa nonciature à
Bruxelles, par M. Gachard, 134; deux lettres inédites de Jacques de
Molay, par M. le baron Kervyn de Leltenhove,226; M. J.-J. De Smel
présente une notice sur les premières années de don Juan d'Autriche,
lils de Charles-Quint, 569; lecture des rapports de MM. Juste et Ga-
chard sur ce travail, 309; impression, 310; M. Paul Devaux donne lec-
ture d'un mémoire sur les guerres médiques, //;/(/.; Henri III , duc de
Brabant, par M. A. Wauters, 67:?.
880 TABLE DES MATIÈRES.
Jurisprudence. — Le Compendium InstiUitionum de Nicolas de Bruxelles;
notice par M. A. Rivier, 619.
M.
Mathématiques pures et appliquées. — Rapports de MM. Folie et Catalan
sur la note de M. Saitel concernant la détermination, sans calcul, de
l'ordre d'un Heu géométrique, 13, 17; M. Saitel présente une nouvelle
rédaction de ce travail, 406; quelques nouveaux théorèmes sur les
cubiques gauches, par M. F. Folie, 65; sur la généralisation de la for-
mule de Binel, par M. De Tilly, 67; quelques réflexions sur le problème
de Malfatti,par M. Simons, 88; M. Catalan présente une note sur la
polhodie, 292; M. Mansion présente une nouvelle rédaction de son mé-
moire couronné relatif à l'intégration des équations, 292; M. Simons
présente une note concernant une nouvelle démonstration d'un théo-
rème de Fermai, et une note concernant la solution de deux questions
de permutations, 295; rapports verbaux de MM. Catalan et Folie sur
ces notes, 409; lettre de M. Goubel relative à la quadrature du cercle,
405; M. Mansion présente une note intitulée: Démonstration de la pro-
priété fondamentale des équations dilTérentielles linéaires, 405; rap-
ports de MM. Catalan et Folie sur cette note, 562, 565; impression, 578;
quekiues nouveaux théorèmes sur les courbes gauches du quatrième
ordre, par M. Folie, 465; sur une récréation arithmétique (2« note), par
M. J. Plateau, 469; note sur le problème de Malfatti, par M. E. Catalan,
480; rapports de MM. Catalan, De Tilly et Steichen sur le mémoire de
concours concernant la théorie des fonctions d'une variable imagi-
naire, 714, 716, 718.
Météorologie et physique du ç/lobe. — Rapports de MM. Duprez, E. Que-
telet et Mailly sur la note de M. Perrey concernant les tremblements de
terre ressentis en 1871, 297, 298; note sur les orages du 10 juillet 1874.
par M. Ch. Hooreman, 354 ; M. Houzeau présente un mémoire intitulé :
Résumé de (juelques observations astronomiques et météorologiques
faites dans la zone surtempérée et entre les tropiques, 405; lecture des
rapports de MxM. Liagre et E. Quetelet sur ce travail, 558; note sur un
phénomène auroral remarqué à Louvain le soir du 5 octobre 1874, et sur
sa coïncidence avec des éclairs observés dans le Nord, par M. Terby, 419;
note sur les perturbations magnétiques qui ont accompagné l'aurore
TABLh DES MATIÈHES. 881
l)0ieale du 5 octobre 1874, par M. E. Quelelel, 421 ; perlurbalion iiia-
gnélique du 9 octobre 1874, noie par M. Ch. Hooreman, 422.
Métrologie. - Rapports de MM. Liagre, Montigiiy et Maillysur le mé-
moire de M. C. Rodenbacli concernant l'étalon prototype universel des
mesures de longueur, 5. 7.
N.
Nécrologie. — Annonce de la mort de MM. le vicomte B. Du Bus et Ch.
Poelman , 290; de M. Partoes, 589; de M. Élie de Beaumont, 402; de
M. Vène, 405; de M. Guizol, 506; de M. C.-P. Cooper, 065; de M. le
baron G. Wappers,f6/cZ.; de M. Van Hasselt, 708.
Notices biographiques pour l'Anmuiire. — M. Th. Juste accepte de
rédiger la notice biographique de M. Van DeWeyer, 152; M. F. Plateau
celle de M. Ch. Poelman, 290 ; M. Alvin celle de M. Partoes, 589;
M. Fetis celle de M. Baron . 554; M. .1. Lcclercq celle de M. Jouvenel,
ibid.
O.
Ouvrages présentes. — En juillet, 284: en août, 572; en septembre et
octobre, 559; en novembre. 645; en décembre , 848.
ralénutcjlogie. — Description de quelques |)lanles fossiles de l'étage des
psammites du Condroz (dévonien supérieui'), par M. Fr. Crépin,556;
sur la découverte du Diclyoncma sociale , Suit., de la faune i)riniordiale,
dans le massif de Rocroy, par M. C. Malaise, 464; fragments paléonto-
logiques pour servir à la Flore du terrain houiller de Belgi(iue, par
M. F Crépi n, 568.
Peinture. — Jugement du concours de peinture ouvert par la classe des
beaux-arts. ô78; M. J. Dillens lauréat, 589. - Voir Hiographie.
Phénomènes périodiques. — Documents présentés, pour le recueil des
phénomènes périodiques, par M. Duprez, 2; par M. Cavaliei', 2, 291,
405, 554, 650; par M. Bellynck, 405; par M Bernardin , 534.
Philologie. - M. Van der Haegen j.résente une note intitulée : Les écoles
et l'alphabet des Tamouls , 509 ; rapport de M. Nève sur celte note, 614;
Overblijfsels van den instrumenlaal in het Nederlandsch, doorM. Here-
mans, 091.
Physique. — Rapports de MM. J. Plateau et Duprez sur la note de M Van
882 TABLE DES MATIÈRES.
der Meiisbrugghe , intitulée : L'électricité statique exerce-l-elle une
influence sur la tension superficielle des liquides? 17, 19; M. A Daussin
présente un mémoire sur un moteur électro-magnétique à armature
sans fin, 293; extrait d'une lettre de M. W. Spring relatif à des
recherches sur la chaleur spécifique des corps, ibid.; notes sur les
paratonnerres, par M. Melsens, 520, 1-25; M. W Spring présente un
mémoire concernant la dilatation, la chaleur spécifique des alliages
fusibles el leurs rapports avec la loi de Neumann, 405; lettres ministé-
rielles relatives à une question de paratonnerres, 354; sur la tempéra-
ture de combustion des combustibles ordinaires, brûlés à l'air libre,
par M. H. Valérius, 634; lecture des rapjiorts de MM. Melsens, Mon-
tigny. Folie et Stas sur le mémoire de concours concernant la tempéra-
ture de l'espace el la chaleur spécifique absolue des corps simples et
des corps composés ,718.
Publications académiques. — Demande d'échange, 3; M. le Secrétaire
perpétuel présente le tome XXXVIIl des Mémoires couronnés in-4", 405.
508.
R.
Rapports. — Rapports de MM. Liagre, Montigny el Mailly sur le mémoire
de M. C. Rodenbach concernant l'étalon prototype universel des mesures
de longueur, 5, 7; de MM. E. Quetelel, Mailly et Liagre sur le mémoire
de M F. Terby concernant l'aspect physique de la planète Mars, 7, 12,
15: de MM. Folie et Catalan sur la m.ie de M. Sallol concernant la déter-
mination, sans calcul, de l'ordre d'un lieu géométrique , 13, 17; de
MM. J. Plateau el Duprez sur la noie de M. Van der Mensbrugghe,
intitulée : L'électricité statique exerce-t-elle une influence sur la ten-
sion superficielle des liquides? 17, 19; de MM. de Selys Longchamps el
P.-J. Van Beneden sur la note de M. A. Dubois concernanl la variabilité
de certaines espèces du sous-genre Cahiste , 1 9, 22 ; rapports de MM. Stas
elde Koninck sur la note de M. W. Spring conceinanl la consliiution
des acides polythioniques, 22, 25; rapports de MM.de Laveleye, Faider
el Wauters sur la notice de M. L. Vauderkindere concernant l'origine
des magistrats communaux, etc., 139, 140; de MM. Duprez, E. Quetelet
el Mailly sur la noie de M. Perrey concernant les Iremblements de terre
ressentis en 1871 , 297 , 298 ; rapports sur les concours de peinture elde
gravure ouverts par la classe des beaux-arts, 578, 579; rapports de
MM. Siret, J. Geefs el De Man sur le mémoire de concours concernant
l'histoire de la sculpture en Belgique aux XVJI' el XV!!!*" siècles. 580,
TABLE DES MATIÈRES. 885
586; lecture des rapports de MM Stas, de Koninek et Donny sur le
mémoire historique de M. Meisens relatif à Van Helmont, 407 ; rapport
verbal de M. de Selys Longchamps sur une note de M. A.Dubois relative
aux espèces du sous-genre Xanllwura, 407 ; rapports de MM. Stas et
de Koninek sur la note de M. W. Spring concernant deux nouveaux
chlorures d'acides organiques, et sur sa note concernant l'action du
penlachlorure de phosphore sur les hyposulfites inorganiques, 407,
408 , 409; rapports verbaux de MM. Catalan et Folie sur deux noies de
M. Simons, concernant la solution de deux questions de permutations
et la démonstration d'un théorème de Fermai, 409; lecture des rapports
de MM. Juste et Gachard sur la notice de M. De Smet relative à don
Juan d'Autriche, 309; lecture des rapports de MM. Liagre et E. Quelelet
sur le mémoire de M. Houzeau concernant des observations astrono-
miques et météorologiques faites dans la zone surtempérée et entre les
tropiques, 358 ; rapports de MM. E. Quetelet et Liagre sur la note de
M. Terby concernant l'aspect de la planète Jupiter pendant son opposi-
tion en 1874, etc., 359, 560; de MM. Donny et Meisens sur la note de
M. Rottier relative à la conservation du bois au moyen des sels de
cuivre, 360, 562; de MM. Catalan et Folie sur la note de M. Mansion
concernant les équations différentielles linéaires, 562, 565; rapports
verbaux de MM. Faider et De Decker sur la note de M. Heuschling rela-
tive à l'origine et aux progrès de la statistique internationale, 614;
rappoit de M Nève sur la notice de M. Van der Ifaeghen concernant les
écoles et l'alphabet des Tamouls, 614; rapports de MM. Morren, Bel-
l\nck et Éd. Van Beneden sur le mémoire de concours concernant le
polymorphisme des champignons, 633, 719, 725, 733; de MM. Catalan,
De Tilly et Steichen sur le mémoire de concours concernant la théorie
des fonctions d'une variable imaginaire, 714, 716, 718; lecture des
rapports de MM. Meisens, Montigny, Folie et Stas sur le mémoire de
concours concernant la température de l'espace et la chaleur spécifique
absolue des corps simples et des corps composés, 718; rapports de
MM. de Koninek, Dewalque et Malaise sur le mémoire de concours
concernant les roches plutoniennes de la Belgique, 748, 730, 773.
S.
Sciences morales et politiques. — M. X. Heuschling présente une note
intitulée: La statistique internationale, son origine et ses progrès, 309;
rapports verbaux de MM. Faider et De Decker sur celle note, 614.
Sculpture. — Rapports de MM. Siret , G. Geefs et De Man sur le mémoire
y84 TABLE DES MATIÈRIiS.
de concours conceruanl riiistoiro de la sculplure en Belgique aux XVII<
et XVIII" siècles, 371 , 380, 386.
Souscriptions. — Le comité pour l'érection d'un monument à Sylvain
Van De Weyer adresse une liste de souscription aux trois classes de
l'Académie, 290, 367, 371 ; présentation de listes de souscription pour
le monument à élever à Ad. Quetelet, 406, S09, 535; M. le D^ Burg-
graeve adresse une liste de souscription pour son ouvrage intitulé :
Monument à Jeûner, 630, 663, 710.
Zoologie. — M. A. Duljois présente une note intitulée : Decription d'un
Spizaëtus nouveau, 4; impression de cette note, 129; remarques sur
la variabilité de certaines espèces du genre Calliste, par M. A. Dubois,
124 ; rapports de MM. de Selys Longchanips et P.-J. Van Beneden sur
ce travail, 19, 22 ; M. A. Dubois présente une note intitulée: Remarques
morphologiques sur les espèces du sous-genre Xanlhoiira, 406; rapport
verbal de M. de Selys Longchanips sur cette note, 407; impression,
488; M. Van Bambeke présente un mémoire sur l'embryogénie des pois-
sons osseux, 537; M. Moreau présente un travail sur la structure de la
corde dorsale de l'Amphioxus, 632; les moyens d'attaque et de défense
chez les insectes, discours par M. Candéze, 787.
PUBLICATIONS DE L'ACADÉMIR ROYALE DE BELGIQUE.
.\onvcaiix Mémoires, lomes I-XIX (1820-1 84o); in-4'\ — Mémoires.
lomes XX-XL (1840-1875) ; in-4". — Prix : 8 fr. par vol. à partir du tome X.
Mémoires couronnés, tomes 1-XV (1817-1842); 111-4». — Mémoires
couronnés et Mémoires des savants étrangers, tomes XVI-XXXN 11
( 18451874) -.in-i". — Prix : 8 fr. par vol. à partir du tome XI] .
Mémoires couronnés , in-8", tomes I-XXIII. — Prix : 4 fr. par vol.
Taities dos Mémoires (1816-1857). In-18.
.annuaire, 1"- à il"^'' année, 1853-1875; in-18. Fr. 1,50.
Bulletins, l^e série, tomes I-XXill ; — "i:'"'' série, tomes I-XXXVIII;
iii-S , - Annexes aux Bulletins de 1854, in-8". - Prix : 4 fr. par vol.
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ISoS, in-S". — 2"^" série, lomes I-XX (18.57-1866). 1867; in-8".
ISiltliograpliie académique. 1854; 1 vol. in-lS.
(-aialoe«ic de la bibliothèque de l'Académie. 1850; in-S".
Catalogue de la bibliothèque de M. le baron de Sla.ssart. 1863 ; ia-8".
Oiriènie anniversaire de fondation {M'i-X^IT). 1872;2vol. gr. in-8.
Commission pour la publication des monuments de la lillérature
flamande.
«ll'Uivres de Van .Maerlaut : Der natuiien «loeme , tome 1'''' , publié pai'
M. Ilormans, 1857; 1 vol. in-8"; — Hv.mrvuei,. avec Glossaire, publié par
M. .1. David, 1858-1800; 4 vol. in-8";— Ai.k.vwder Geesten, publie par
M. Siicllaerl, 1860-180::^; 2 .vol. in-8\ — !\ederlnijdsclie gedicliten, elc,
publiées par M. Snellaert, 1869; 1 vol. in-8". — Parîlionopeus van nioys.
publie par M. Bormans, 1871 ; I vol. in-8\ — JSpegUel der 'ivysheil. door
.lan IMaet, publié par M. iiormans 1872; 1 vol. in-8".
(U)mmission pour la publication d'une collection des œuvres des
grands écrivains du pai/s.
OKuvres de t'Iiastcllain, publiées par i\i. Kervyn de Lettenhovi-,
1805-1865, 8 vol. in-8". — I>e k" livre des 4'hroniques de Frol.««.sart.
publie par le mémo. 1865, 2 vol. in-8«. — Clironiques de Jehan le Bel .
piihliees par M. Polain. 1865. 2 vol. in-8".— lA Koumans de «Jcomadès.
piiliiie par M. Van llassell. 1866,2 vol. in-8". — Bits et contes de .lean et
Baudituin de Condé, publiés par M. Auguste Scheler. 1866, 5 vol. in-8».
— IJ arsd'amnur, etc., publié par M. .1. Petit. 1866-1872, 2 vol. in--8". --
wicnvres de Froissart : Chroniques , publiées par M. Kervyn de Lelten-
hove. 1867-1875, 20 vol. in-8"; - Poésies, publiées par.M. Scheler. 1870-1872,
5 vol. iii-8"; — Glossaire , publié par le même. 1874, un vol. in-8''. — Lettres
di- «'omniiiies, publiées par M Kervyn de Lellenhove. 1867; 5 vol. in-8'.
— »ils de ^Vatriquet de Couvin , publiés par M. .\. Scheler. 1868, 1 vol.
in-8". — l^es Enfances Ogier. iMibliées par le même. 1874, 1 vol. in-8. —
Bucves de Commarcliis, par Vdi'nès 11 Rois, publié par le même: 1874,
1 vol. iii-8". — MA Koumans de Berte ans grans pies, publié par li'
ménii;. lS7i, 1 vol. in-8".
Commission roi/ale d'histoire.
Collection de €lironic|ues lielges inédites, publiées par ordre du
(Jouvcriicnient; 41 volumes in-4".
i'onipte rendu des séances, l'''' série, avec (able (1837-1849), 17 vol. in-8".
— 2""' série, avec table (1830-1859), 15 vol. in-8". — ôm<- ^érw (1860-1872),
14 vol. iii-8". — 4""= série, lomes 1 et 11 (187.3-1874).
Annexes aux Bulletins, 13 volumes iu-8".
Commission pour la publication d'une Hinç/raphie nationale.
Biographie nationale,!. I à IV. Bruxell.'s, 1 866-1873 ; 8 cah. gr. in-8".
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3 2044 093 256 865