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Full text of "Bulletins de l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique"

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COMPARATIVE    ZOÔLOGY, 


AT  HARVARD  COLLEGE,  CAMBRIDGE,  MASS. 


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BULLETINS 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE   DES  SCIENCES, 


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BULLETINS 


DE 


L'ACADÉMIE  ROY.^LE 


DES 


SCIENCES,    DES   LETTRES   ET    DES   ^ËAllX-ARTS 
DE    BELGIQUE. 

QUARANTE-QUATRIÈME  ANNÉE.  -  2»-  SÉR.,  T.  XL. 


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BRUXELLES, 

F.   HAYEZ,  LMPHIMRUH   DE   l'aCADÉMIE    ROYALE   DE   BELGIQUE. 

1875 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 

DES 

LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIQUE. 
187§.  —  No  7. 


CLASSE    «ES    SCIENCES. 


Séance  du  3  juillet  1875. 

M.  Brialmont,  directeur  et  président  de  TAcadémie. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.-S.  Stas,  P.-J.  Yan  Beneden, 
Ed.  de  Selys  Longchamps,  H.  Nyst,  F.  Duprez,  G.  De- 
walque,  E.  Quetelet,  H.  Maus,  M.  Gloesener,  E.  Candèze, 
F.  Donny,  Ch.  Moiitigny,  Sleichen,  Éd.  Morren,  Éd.  Van 
Beneden,  C.  Malaise,  F.  Folie,  Alb.  Briart  et  F.  Plateau, 
membres;  Th.  Schwann,  E.  Catalan  et  Aug.  Bellynck, 
associés;  J.  De  Tilly,  F.  Crépin,  F.-L.  Cornet,  correspon- 
dants. 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  1 


(  2) 
CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  rintérieur  offre,  pour  la  bibliothèque 
de  l'Académie,  un  exemplaire  de  la  deuxième  édition  du 
Traité  théorique  et  pratique  de  la  fabrication  du  fer  et  de 
l'acier,  par  B.  Valerius.  —  Remercîments. 

—  La  Société  géologique  de  Belgique  annonce  qu'elle 
vient  d'ouvrir  une  souscription  pour  élever  un  monument 
à  feu  J.-B.-J.  d'Omalius.  Elle  prie  l'Académie  de  bien  vou- 
loir désigner  un  membre  de  la  classe  des  sciences  pour 
faire  partie  du  comité  d'exécution.  La  classe  nomme 
M.  P.-J.  Van  Beneden. 

—  La  Société  impériale  des  naturalistes  de  Moscou  an- 
nonce qu'elle  se  propose  de  célébrer,  le  15  octobre  pro- 
chain, le  cinquantième  anniversaire  du  doctorat  de  son 
président  actuel,  M.  le  conseiller  privé  chevalier  Alexandre 
Fischer  de  Waldheim . 

Les  félicitations  de  l'Académie  seront  adressées  à  ce 
savant. 

—  Le  bureau  de  l'Association  française  pour  l'avance- 
ment des  sciences  annonce  l'ouverture  de  sa  quatrième 
session  à  Nantes,  le  19  août  prochain. 

—  Le  congrès  international  des  Américanistes  invite 
l'Académie  à  prendre  part  à  sa  première  session  ,  qui 
s'ouvrira  en  juillet  à  Nancy. 

—  M.  Cavalier  transmet  son  résumé  météorologique 
pour  Ostendc  pendant  le  mois  de  juin  1875. 


(5) 

M.  Catalan  fait  hommage,  au  nom  de  M.  Chasios, 
associé  de  la  classe,  de  la  nouvelle  édition  de  son  mémoire 
Sur  les  méthodes  en  géométrie,  mémoire  qui  a  été  cou- 
ronné par  TAcadémie  en  1829  et  qui  vient  d'être  réim- 
primé par  M.  Hayez. 

M.  Schwann  offre  un  exemplaire  de  sa  brochure  inti- 
tulée :  Mein  Gutachten  iiber  die  Versiiche ,  die  an  der 
Stigmatisirten  Louise  Lateau  am  ^6.  Màrz  i869  ange- 
stelt  ivurden.  In-8°. 

M.  P.-J.  Van  Beneden  fait  hommage  d'une  brochure 
intitulée  :  Un  oiseau  fossile  nouveau  des  cavernes  de  la 
Nouvelle-Zélande.  In-8°, 

Des  reraercîments  sont  votés  pour  ces  dons. 

—  Les  établissements  scientifiques  suivants  adressent 
leurs  dernières  publications  :  Les  Sociétés  des  sciences  de 
Batavia  et  de  Bordeaux;  la  Société  des  Antiquaires  de 
France,  celles  d'agriculture  et  de  météorologie  du  même 
pays;  la  Société  des  sciences  naturelles  de  Coire,  le 
bureau  de  statistique  de  Pesth,  la  Société  zoologique  de 
Frankfort  S/M,  l'Université  impériale  de  Kazan,  l'Aca- 
démie impériale  des  sciences  de  Saint-Pétersbourg,  les 
Observatoires  de  Saint-Pétersbourg,  de  Puikowa,  d'Oxford, 
de  Greenwich  et  du  cap  de  Bonne-Espérance;  la  Société 
philosophique  et  littéraire  de  Liverpool,  les  Sociétés  d'as- 
tronomie, de  chimie,  de  géographie,  de  géologie  et  de 
statistique  de  Londres,  la  Société  royale  d'Edimbourg,  les 
Sociétés  géologiques  de  Glasgow  et  de  Dublin;  le  Comité 
géologique  de  l'Inde,  l'Institut  Lombard  de  Milan  et  la 
Société  des  sciences  naturelles  de  la  même  ville;  la  Société 
de  géographie  de  Mexico,  l'Institut  géographique  de  Rio- 
Janeiro. 


(4) 

Les  établissements  scientifiques  et  associés  suivants 
adressent  des  lettres  de  remercîments  pour  le  dernier 
envoi  annuel  de  publications  académiques. 

La  Société  entomologique  italienne  à  Florence;  M.  Par- 
latore,  associé,  à  Florence;  la  Société  de  physique  et 
d'histoire  naturelle  de  Florence;  l'Observatoire  naval  de 
Washington,  la  Smithsonian  institution  de  Washington; 
l'Office  du  Chirurgien  général  des  États-Unis;  l'Académie 
des  sciences  de  Saint-Louis  et  l'Institut  géologique  de 
l'Inde,  à  Calcutta. 

—  La  classe  renvoie  à  l'examen  de  commissaires  les 
communications  suivantes  : 

1"  Sur  le  calcul  numérique  {Fragment  II),  par  J.-C. 
Houzeau.  —  Conmiissaires  :  MM.  Folie ,  Catalan  et  Liagre; 

2°  Sîir  quelques  plantes  fossiles  de  l'étage  du  poudingue 
de  Burnot,  par  M.  A.  Gilkinet.  —  Commissaires  :  MM.  De- 
walque,  de  Koninck  et  Bellynck. 

o°  :  L  —  Détermination,  dans  la  surface  réciproque  d'une 
surface  S  douée  de  points  multiples,  du  degré  de  la  courbe 
double  et  de  celui  de  la  courbe  de  rebroussement  ;  IL  —  Sur 
la  détermination  des  singularités  de  la  courbe  d'intersec- 
tion de  deux  surfaces  qui  ont  en  commun  /7.  points  mul- 
tiples, u.  étant  égale  ou  inférieure  à  L,  par  M.  L.  Saltel. — 
Commissaires  :  MM.  Folie  et  Catalan. 


(  ^) 

RAPPORTS. 

MM.  Catalan  et  Folie  donnent  lecture  de  leurs  rapports 
sur  le  travail  de  M.  Paul  Havrez  concernant  les  transcen- 
dantes 


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et  sur  celles  qui  s'en  déduisent.  —  Communication  de  ces 
rapports  sera  faite  à  Fauteur  avant  de  prendre  une  réso- 
lution à  l'égard  de  son  travail. 

—  MM.  Folie  et  Catalan  font  un  rapport  verbal  sur  les 
communications  suivantes  de  M.  Saltel  : 

1°  Détermination,  dans  la  surface  réciproque  d'une 
surface  S  douée  de  points  multiples ,  du  degré  de  la  courbe 
double  et  de  celui  de  la  courbe  de  rebroussement; 

2°  Sur  la  détermination  des  singularités  de  la  courbe 
d'intersection  de  deux  surfaces  qui  ont  en  commun  i^ points 
multiples ,  f/  étant  égale  ou  inférieure  à  L. 

Conformément  à  Tavis  favorable  des  deux  commissaires, 
ces  notes  prendront  place  dans  le  Bulletin  de  la  séance. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


M.  Emm.  Liais  adresse  une  note  sur  la  parallaxe  du 
soleil.  [I  rappelle  qu'il  a  obtenu,  par  l'opposition  de  Mars 
observée  en  1860  à  Rio  de  Janeiro,  la  valeur  8",760;  il 


(6) 
fait  remarquer  l'accord  qui  existe  entre  ce  résultat,  les 
valeurs  de  l'aberration  obtenues  par  Struve,  Lindenau, 
Peters  et  Lundahl,  et  la  nouvelle  détermination  de  la 
vitesse  de  la  lumière  faite  par  M.  Cornu.  ïl  se  propose  de 
profiter,  pour  de  nouvelles  déterminations  de  la  parallaxe 
solaire,  des  oppositions  de  iMars  qui  auront  lieu  cette 
année  el  en  1877  dans  des  circonstances  favorables.  Il 
croit  cette  méthode  supérieure  à  celle  des  passages  de 
Vénus. 


Note  S2ir  les  procédés  insecticides  du  Drosera  rotundi- 
FOLiA  L.;  par  M.  Edouard  Morren ,  membre  de  l'Aca- 
démie. 

Depuis  la  rédaction  de  ma  note  sur  le  Pinguicula  lougi- 
folia,  j'ai  observé  les  procédés  insecticides  du  Drosera 
rotundifolia,  une  des  plantes  les  mieux  caractérisées 
parmi  celles  qu'on  appelle  carnivores.  On  sait  qu'elle  croît 
en  abondance,  entre  les  Sphaignes,  autour  des  ruisseaux 
tourbeux  de  l'Ardenne  et  de  la  Campine ,  mais  j'ai  pu  m'en 
procurer  sans  aller  les  chercher  aussi  loin,  dans  les  serres 
de  M.  Oscar  Lamarche-de  Rossius,  à  Liège,  qui  emploie 
cette  mousse  pour  l'entretien  de  la  précieuse  collection 
d'orchidées  exotiques  qu'il  a  réunies.  Les  Drosera  mé- 
langes aux  Sphagnum  se  plaisent  en  serre  chaude  :  on 
peut  faire  observera  ce  propos  qu'ils  se  développent  pen- 
dant les  plus  fortes  chaleurs  de  l'année,  en  plein  soleil,  et 
qu'ils  se  plaisent  dans  la  température  élevée  qu'on  entre- 
tient dans  les  serres.  Les  Drosera  sont  jusqu'à  un  certain 
point  des  végétaux  de  la  zone  tempérée  fraîche  qu'on 


(7) 

pourrait  ranger  dans  la  catégorie  de  ceux  que  M.  A.  de 
Candolle  a  nommés  mégathermes. 

Je  fis  choix  d'un  beau  Drosera  rolundlfolia  dont  la  jolie 
rosace  foliaire  s'épanouissait  sur  un  frais  tapis  de  mousse 
verdoyante.  Deux  faibles  moucherons,  des  diptères,  avaient 
déjà  été  saisis,  emprisonnés  et  détruits.  Le  8  juin  ,  vers 
une  heure  après-midi,  je  m'emparai  d'une  petite  mouche, 
un  peu  forte,  longue  de  4  millimètres  environ,  et,  après 
lui  avoir  légèrement  écrasé  le  corselet  pour  la  mettre 
hors  d'état  de  fuir,  je  déposai  cette  innocente  victime  de 
mon  zèle  pour  la  science ,  sur  une  feuille  bien  étalée  du 
Drosera.  On  sait  que  le  disque  de  ces  feuilles  est  arrondi, 
un  peu  creusé  en  bassin,  large  tout  au  plus  d'un  centi- 
mètre quand  il  est  parfaitement  développé  et  tout  hérissé 
sur  les  bords  et  sur  la  face  supérieure  de  prolongements 
minces  et  déliés  qui  se  terminent  par  un  renflement  glan- 
duleux; les  plus  longs  atteignent  bien  trois  millimètres: 
ce  sont  ceux  des  bords  qui,  à  l'état  inactif,  sont  étalés 
comme  des  cils,  tandis  que  les  autres  sont  dressés  sur  la 
feuille.  La  structure  de  ces  petits  organes ,  entrevue  par 
Meyen ,  en  1857  (1),  a  été  mieux  élucidée  ,  en  i85o  ,  par 
M.  J.  Groenland  (2)  et  par  M.  Trécul  (3)  qui  en  a  donné 
de  belles  figures  bien  détaillées.  Elle  est  si  compliquée 
qu'on  ne  saurait  les  considérer  comme  de  simples  poils, 
c'est-à-dire  comme  n'étant  autre  chose  que  des  dépen- 


(1)  F.-J.-F.  Meyen,  Ueber  die  Sécrétion  Organe  der  Pflanzen,  pi.  Vï, 
fig  16. 

(2)  J.  Groenland ,  Note  sur  les  organes  glanduleux  du  genre  Drosera, 
Ann.  des  sciences  nat.,  1853,  III,  297. 

(3)  A.  Trécul,   Organisation  des  glandes  pédicellées  des  feuilles  du 
Drosera  rotundifolia,  dans  les  Ann.  des  sciences  nat.,  1853,  III,  p.  303- 


(8) 
dances  de  l'épiderme  :  ils  sont  en  communication  avec  le 
réseau  vasculaire  du  parenchyme  au  moyen  d'un  faisceau 
de  trachées  qui  les  taversent  de  part  en  part.  Ce  sont  des 
glandes  pédicellées  ou ,  si  l'on  veut ,  des  lobes  des  organes 
foliacés  des  Drosera.  Les  observations  que  nous  avons 
lues  sur  ces  organes  ne  font  pas  suffisamment  ressortir  les 
différences  qui  existent  entre  eux.  On  doit  distinguer  en 
effet  entre  ces  glandes  marginales,  les  glandes  inter- 
médiaires et  les  glandes  centrales. 

Les  glandes  marginales  sont  les  plus  belles  et  les  mieux 
développées  :  leur  pédicelle  s'atténue  en  un  col  mince  et 
délié  (fîg.  i)  :  il  porte  des  stomates  enchâssés  dans  son 
épiderme,  en  grand  nombre  et  à  large  ostiole  (fig.  2),  et, 
de  plus,  de  petits  organes  papilleux,  singuliers,  que 
Meyen  (/.  c,  fig.  16,  litt.  a,  b,  c)  et  M.  Trécul  (/.  c, 
planche  X,  fig.  3,  litt.  d)  semblent  considérer,  mais  avec 
une  certaine  hésitation,  comme  des  poils rudimentaires,  et 
sur  la  nature  desquels  nous  ne  nous  prononçons  pas 
encore  d'une  manière  définitive  :  ils  nous  ont  paru  être 
béants  à  leur  sommet  et,  par  leur  base,  ils  sont  en  com- 
munication indirecte  avec  les  vaisseaux  trachéens  qui 
parcourent  l'axe  du  pédicelle  (fig.  5)  :  celui-ci,  long  de 
trois  millimètres,  s'amincit  en  un  col  flexible  et  délié,  et 
se  termine  en  une  glande  épaisse,  en  forme  de  spatule 
allongée,  plane,  de  couleur  rouge  (fig.  4),  sauf  la  base 
qui  est  verte.  L'épiderme  est  constitué  par  des  cellules 
hexagonales  remplies  d'un  liquide  rouge  et  de  granules 
qui  sont  teints  de  la  même  couleur  :  à  la  base  seulement 
se  trouvent  des  cellules  à  chlorophylle.  A  l'intérieur,  on 
voit  un  massif  de  cellules  beaucoup  plus  grandes,  de 
nature  inenchymateuse,  c'est-à-dire  à  paroi  épaissie  sui- 
vant un  filigramme  élégant  et  varié  (fig.  5),  faiblement 


(9  ) 
coloré  en  rose  :  ces  cellules  isolées  (lig.  6)  font  voir  des 
stries  anastomosées  ou  interrompues,  transversales  et 
claires.  Ces  glandes  sécrètent  une  humeur  hyaline  et  très- 
visqueuse  qui  les  enveloppe  :  nous  avons  constaté  qu'elle 
ne  rougit  pas  ordinairement  le  papier  de  tournesol. 

Les  glandes  intermédiaires  ont  le  pédicelle  plus  court 
et  moins  délié;  la  glande  est  plus  épaisse  et  arrondie  en 
forme  de  disque  (fig.  7).  On  peut  remarquer  qu'elles  sont 
alternes  avec  les  premières  ;  mais  leur  structure  anato- 
mique  est,  en  général,  la  même. 

Enfin,  les  glandes  médianes  sont  plus  courtes  encore 
(fig.  8)  :  elles  n'ont  point  de  trachées,  mais  seulement 
quelques  cellules  fines  et  allongées  et  leur  tête  n'est  plus 
rouge.  L'épiderme  de  la  feuille  est  riche  en  grains  de 
chlorophylle  qui  bleuissent  au  contact  de  l'iode  :  je  n'y  ai 
pas  vu  de  stomates  (l). 

Les  remarquables  organes  des  Drosera  sont  des  dépen- 
dances du  feuillage.  Auguste  de  Saint-Hilaire  et  M.  Naudin 
ont  vu  ,  il  y  a  longtemps  déjà,  en  1840  (2),  les  feuilles  d'un 
Drosera  produire  des  bourgeons  qui  provenaient  peut-être 
d'une  transformation  de  ces  appendices.  Les  glandes  mar- 
ginales peuvent  s'ouvrir  par  la  rupture  de  leur  épiderme  : 
ce  phénomène  serait  exceptionnel  au  dire  de  M.  Groenland 
ou  bien  habituel,  s'il  faut  en  croire  M.  Trécul,  et  nous 
sommes  de  son  avis. 

Quoi  qu'il  en  soit ,  la  distance  morphologique  entre  ces 


(1)  M.  G.  Smith  a  fait  connaîlre  il  y  a  peu  de  temps  la  structure  des 
glandes  du  D.  dichotoma  {Gard.  Chr^  1873,  140-2 ,  c.  le.)  :  elle  est  essen- 
tiellement la  même  que  celle  du  D.  rotundifolia. 

(2)  Naudin,  Noie  sur  des  bourgeons  nés  sur  une  feuille  de  Drosera , 
Ann.  des  sciences  nat.,  1840,  XIV,  p.  14. 


(  10) 
glandes  sétiformes  et  l'urne  glanduleuse  et  pédicellée  des 
Népenthes  n'est  pas  aussi  grande  qu'on  pourrait  le  croire 
à  première  vue  :  au  contraire,  l'homologie  est  frappante  : 
Griffith  (1)  et  M.  J.-D.  Hooker  (2)  ont  établi  depuis  long- 
temps «  que  l'appareil  si  remarquable  qui  termine  certaines 
feuilles,  dans  les  Népenthes,  avait  pour  point  de  départ 
une  simple  glande  située  sur  un  prolongement  de  la  ner- 
vure médiane.  »  Il  nous  suffît  de  constater  l'unité  de  plan 
pour  qu'elle  s'impose  par  la  force  de  l'évidence.  D'ailleurs 
on  aurait  tort  de  se  figurer  l'ensemble  du  genre  Drosera 
par  nos  seules  espèces  indigènes  :  on  en  connaît  mainte- 
nant une  centaine  d'espèces,  disséminées  sur  le  globe,  sur- 
tout dans  l'hémisphère  austral ,  au  Cap,  à  Madagascar  et 
en  Australie,  où  il  en  est  qui  sont  grandes  et  caulescentes. 
Toutes  sont  munies  des  glandes  caractéristiques. 

Les  questions  de  structure  étant  ainsi  élucidées,  reve- 
nons à  notre  mouche  que  le  8  juin  nous  avons  sacrifiée 
sur  l'autel  de  la  science  et  que  nous  avions  posée  délica- 
tement sur  une  feuille  de  Drosera. 

L'excitabilité  des  glandes  ne  se  manifeste  pas  avec  viva- 
cité chez  nos  Drosera  indigènes,  mais  on  a  eu  tort  de  la 
révoquer  en  doute  (5).  Au  bout  d'une  heure  environ,  les 
glandes  marginales  commencèrent  à  se  ployer  doucement 
de  haut  en  bas  :  c'est  dans  le  col  que  se  manifeste  d'abord 


(1)  Griffith,  Journal  of  Nalural  Hislonj,  de  Calcutta^  1843,  p.  231. 

(2)  J.-D.  Hooker,  Note  sur  l" origine  et  le  développement  des  urnes, 
dans  les  Népenthes,  Ann.  des  sciences  nat.,  1859, XII,  p.  222. 

(3)  L'excitabililé  des  feuilles  de  Drosera  a  été  prouvée  par  Roth, 
Beitr.  zur  Bot.,  I,  1782,  p.  60,  et  in  Roemer  et  Usler,  Mag.  fUr  die  Bot. 
il,  2  (1787),  p.  27.  Elle  a  été  plus  récemment  étudiée  par  le  D"-  Tli. 
Nitschke  :  Ueber  die  Beizbarkeit  der  Blaettes  von  Dr.  rotundifolia  L.  in 
Bot.  Z  ci  t.,  1860,  p.  229. 


(  H  ) 

la  courbure  et  elle  se  propage  vers  la  base  où  elle  esl  la 
plus  prononcée  :  les  glandes  intermédiaires  se  mirent  plus 
lard  en  mouvement.  Le  lendemain  matin  toutes  les  glandes 
étaient  couchées  sur  la  mouche  :  les  bords  mêmes  du  limbe 
foliaire  étaient  reployés  :  la  mouche  se  trouvait  empri- 
sonnée sous  un  treillage,  comme  dans  un  garde-manger. 
Aucun  mouvement  ne  se  manifesta  pendant  deux  ou  trois 
jours,  après  lesquels,  la  mouche  étant  d'ailleurs  desséchée, 
les  glandes  se  relevèrent  petit  à  petit.  Dans  l'intervalle,  je 
déposai  de  petits  fragments  de  viande  ou  de  blanc  d'œuf 
sur  d'autres  feuilles;  des  mouvements  se  manifestèrent, 
mais,  pendant  la  nuit ,  des  fourmis  et  des  cloportes  vinrent 
faire  rapine  et  maraude  dans  mon  expérience. 

Je  laissai  les  choses  dans  cet  état  jusqu'au  dimanche 
15  juin:  ce  jour-là,  ayant  un  peu  de  loisir,  je  voulus 
poursuivre  mes  investigations  microscopiques.  J'allais  donc 
soulever  les  débris  de  la  mouche,  quand  je  remarquai  sur 
une  autre  feuille,  un  malheureux  puceron  qui  venait 
d'être  saisi,  à  la  tête,  par  une  glande  marginale  ;  cette 
glande,  comme  une  langue  papilleuse  et  gluante,  s'était 
étroitement  appliquée  sur  Tinsecte,  entre  ses  deux  an- 
tennes :  il  pouvait  être  11  heures  du  matin.  Observée 
sous  le  microscope,  cette  lutte  offrait  un  spectacle  fantas- 
tique et  sans  exemple.  Le  puceron  se  démenait  de  tous 
ses  membres,  mais  le  col  de  la  glande  ployait  sans  se 
rompre  :  on  aurait  dit  les  mouvements  d'une  couleuvre. 
Bientôt  les  glandes  voisines  et  celles  du  deuxième  rang  se 
ployèrent  vers  l'insecte ,  le  touchèrent  de  leur  tête  et  le 
couvrirent  de  leur  bave  qui  semble  devenir  plus  abon- 
dante pendant  cette  période  d'excitation.  Rien  ne  put 
vaincre  leur  étreinte  implacable  :  vers  2  heures,  le 
puceron  demeura  immobile  et  la  victoire  était  restée  à  la 


(  12  ) 
plante.  Outre  les  mouvements  ondulatoires  du  col,  ce  qui 
me  frappa  le  plus  dans  cette  observation,  furent  les  mou- 
vements de  la  glande  elle-même  :  on  dirait  une  langue 
animale  saisissant  une  proie;  elle  se  courbait  et  se  con- 
tournait sur  sa  face  supérieure  avec  une  facilité  prodi- 
gieuse (fig.  12,  15,  14).  Elles  constituent,  à  n'en  pouvoir 
douter,  de  véritables  organes  de  préhension  et  leur  moti- 
lilé  est  la  plus  phénoménale  que  nous  connaissions  dans 
le  règne  végétal. 

Après  avoir  joui  de  ce  spectacle  bien  autrement  inté- 
ressant qu'une  lutte  de  toréador  et  avoir  mentalement 
applaudi  au  triomphe  de  la  plante,  je  revins  à  ma  pauvre 
mouche.  Je  me  pardonnai  à  moi-même  ma  cruauté  envers 
elle,  quand  je  la  comparai  aux  vaines  tortures  sous  les- 
quelles un  chétif  puceron  avait  fini  par  succomber  par  le 
seul  jeu  des  harmonies  de  la  nature.  La  mouche  était 
sèche,  vide;  nulle  humeur  ne  la  retenait  contre  la  feuille. 
Mais  en  raclant  la  surface  contre  laquelle  elle  avait  reposé 
et  en  observant  le  produit  sous  un  objectif  suffisant,  je 
constatai  la  présence  de  tout  un  lacis  mycélien  (fig.  15) 
dont  les  filaments  enchevêtrés  formaient  un  réseau  arach- 
noïde interposé  entre  l'insecte  et  la  plante  (fig.  16). 

Le  résultat  de  cette  observation  est  donc  le  même  que 
celui  auquel  j'ai  été  conduit  par  le  Pinguicula  :  d'une 
part,  un  appareil  insecticide  efficace  et  énergique,  une 
organisation  remarquable  par  ses  glandes,  ses  larges  sto- 
mates, ses  beaux  vaisseaux  et,d'un^utre  côté,  la  décom- 
position la  plus  simple  et  la  plus  naturelle  des  insectes, 
victimes  de  cette  cruauté  qui  paraît  inutile.  En  effet,  rien 
ne  nous  a  fait  voir  ni  digestion ,  ni  absorption  des  produits 
de  la  décomposition.  Ici  un  obstacle  est  même  interposé 
entre  sa  proie  et  son  bourreau.  Il  y  a  là  une  contradiction 


/htl/ei.2',ye7\l.:XL. 


-_J 


'.Mo7-7'e^^  àle.lz:",^. 


^■"'.I^etoUerî-i-xere-    utk^. 


Drosera  rotiiiiclifolia. 


(  13  ) 
sinon  dans  la  nature,  au  moins  dans  ce  que  nous  en  con- 
naissons. 

Je  n'ai  d'ailleurs  conslalc  ici,  non  plus  que  chez  les 
Pinguicula,  nulle  relation  entre  l'abondance  de  la  chasse 
et  le  développement  de  mes  Droscra  :  je  dois  déclarer,  il 
il  est  vrai,  que  ceux-ci  furent  peu  nombreux  et  qu'en 
général  on  trouve  beaucoup  d'insectes  tués  sur  les  feuilles 
de  nos  Drosera  indigènes.  Dans  d'autres  espèces ,  l'excita- 
bilité est  beaucoup  plus  active  et  les  formes  du  feuillage 
sont  des  plus  étranges.  M.  J.-E.  Planchon  a  publié  en 
1848  (I)  une  monographie  des  Droséracées  qui  contient 
les  renseignements  les  plus  intéressants  sur  la  structure 
des  espèces  australes. 


Relation  de  coups  de  foudre;  par  M.  G.  Devvalque, 
membre  de  l'Académie. 

Au  moment  où  la  question  des  paratonnerres  nous 
préoccupe  à  juste  titre,  j'ai  pensé  qu'on  ne  verrait  pas  sans 
intérêt  l'exposé  de  deux  accidents  sur  lesquels  j'ai  pu  me 
procurer  des  informations  détaillées. 

Coup  de  foiuhe  à  Liège. 

Un  violent  orage  éclata  sur  la  ville  de  Liège  et  les  envi- 
rons, pendant  une  averse,  le  18  juin  1875,  vers  cinq  heures 
et  demie  du  soir.  Le  coup  de  foudre  dont  je  viens  faire 
connaître  les  effets,  est  difficile  à  décrire,  dans  l'ignorance 


(1)  J.-E.  Planchon,  Sur  la  famille  des  Droséracées ,  ânn   des  sciences 
NAT.,  1848,  t.  IX,  p.  79  et  spécialement  p.  81. 


(14) 

OÙ  nous  sommes  clé  la  direction  qu'il  a  suivie;  je  me  hâte 
de  dire  que,  si  la  marche  que  je  vais  indiquer  ne  me  paraît 
point  à  l'abri  de  toute  contestation,  bien  qu'elle  repose 
sur  les  témoignages  recueillis  sur  les  lieux,  la  circonstance 
que  le  fluide  électrique  aurait  suivi  une  autre  direction 
n'influe  en  rien  sur  les  réflexions  que  chacun  pourra  faire 
à  l'occasion  des  dégâts  constatés. 

La  foudre  est  donc  tombée  à  l'angle  de  la  rue  des  Guil- 
lemins  et  de  la  place  de  la  Station,  sur  l'hôlel  de  Paris,  à 
environ  4o  mètres  du  bâtiment  de  la  gare,  60  mètres  du 
paratonnerre  de  ce  bâtiment  et  80  mètres  de  celui  qui 
surmonte  la  charpente  métallique  de  la  toiture  de  la  gare. 
Une  horloge  électrique  se  trouve  fixée  à  l'angle  de  la 
maison  susdite;  le  fll  conducteur  est  accroché  à  un  isola- 
teur situé  à  environ  1  mètre  en  contre-bas  du  toil.  Un 
fil  de  terre,  renfermé  vers  le  bas  sur  plus  de  o  mètres  dans 
un  tube  métallique,  mettait  autrefois  cette  horloge  en 
communication  avec  le  sol.  Depuis  plus  d'un  an  ce  fil  a 
été  coupé  à  peu  de  dislance  de  l'horloge  (environ  50  centi- 
mètres); son  extrémité  supérieure  arrive  à  la  hauteur  d'un 
store,  abrité  par  une  petite  toiture  en  zinc.  Une  décharge 
s'est  faite  entre  ce  fil  de  terre  et  l'horloge,  qui  a  été  mise 
hors  de  service;  cette  décharge  est  encore  marquée  aujour- 
d'hui par  une  large  trace  noire,  et  le  plâtras  formant 
l'angle  de  la  maison  a  été  ébréché  par  le  passage  de  l'étin- 
celle. Une  autre  décharge  s'est  effectuée  sur  le  zinc  for- 
mant abri  au  store;  un  fragment  de  cette  toiture,  de  plus 
d'un  mètre  de  long,  a  été  brisé  et  enlevé. 

Comment  la  décharge  s'est-elle  faite?  A  ce  qu'on  dit 
généralement,  la  foudre  se  serait  jetée  sur  le  fd  accroché 
près  du  toit;  une  partie  serait  descendue  sur  l'horloge, 
puis,  par  l'ancien  fil  de  terre,  dans  le  réservoir  commun  ; 


(  is  ) 

une  autre  partie,  sous  la  forme  d'un  globe  de  feu,  dit-on, 
aurait  suivi  le  fd  conducteur  pour  produire  les  dégâts  que 
nous  allons  voir. 

De  l'hôtel  de  Paris,  le  fluide  électrique  suivit  le  fd  con- 
ducteur des  horloges  sur  une  distance  de  7o  mètres, 
jusqu'à  la  maison  n"  89  de  la  rue  des  Guillemins ,  où  ce 
fil  est  accroché  à  un  isolateur  placé  comme  le  précédent  un 
peu  au-dessous  du  toit,  puis  se  détache  pour  traverser  la 
rue  sous  un  angle  de  oO*'  et  continuer  dans  une  autre 
direction.  Une  partie  de  la  décharge  suivit  ce  fd  et  alla 
mettre  hors  de  service  une  horloge  située  à  plus  de 
500  mètres  de  là.  Beaucoup  d'horloges  furent  arrêtées  ou 
endommagées;  je  n'entrerai  dans  aucun  détail  sur  ce  point. 
J'avais  demandé  des  renseignements  à  notre  honorable 
confrère  M.  Gloesener;  il  m'a  fait  savoir  qu'il  comptait  en 
entretenir  l'Académie  aujourd'hui  même. 

En  arrivant  à  la  maison  n"  89,  une  partie  du  fluide  se 
jeta  sur  le  tuyau  de  décharge  des  eaux  pluviales  du  n"  91 , 
tuyau  qui  fut  mis  hors  de  service  sur  1  mètre  de  long, 
environ,  entre  le  toit  et  le  fil  de  l'horloge.  Le  reste,  conti- 
nuant sa  roule,  arriva  à  l'autre  extrémité  de  cette  maison, 
et  se  jeta  tant  sur  le  chenal  métallique  du  toit  que  sur  le 
tuyau  de  décharge.  Le  chenal  fut  fortement  endommagé  et 
beaucoup  de  tuiles  de  la  toiture  furent  brisées;  le  tuyau 
de  décharge  fut  brûlé  en  plusieurs  points  à  la  hauteur  du 
fil,  et  mis  hors  de  service  sur  30  centimètres  environ.  Des- 
cendant le  long  de  ce  tuyau,  la  foudre  arriva  vers  le  bas  du 
premier  étage  de  la  maison  n""  87,  l'hôtel  du  Midi.  A  cette 
hauteur  se  trouvait  un  store  relevé,  enroulé  sur  une  tige 
de  fer  longeant  toute  la  maison,  et  soutenu  à  son  bord 
inférieur  par  une  autre  tige  de  fer  d'un  calibre  moitié 
moindre.  Cette  dernière  se  trouvait  sans  doute  plus  voisine 
'  du  tuyau  :  la  foudre  abandonna  ce  dernier  en  y  produisant 


(  16) 
une  quantité  de  petits  trous  que  l'on  voit  encore,  entourés 
d'une  aréole  noire;  une  petite  partie  se  jeta  sur  la  toitifre 
en  zinc  qui  abrite  le  store,  en  écornant  une  brique  sur  son 
passage;  le  reste  se  porta  sur  la  tige  métallique  dont  nous 
venons  de  parler,  la  suivit  sur  environ  2  mètres,  puis  se 
jeta  sur  l'autre  tige,  en  traversant?  ou  8  doubles  de  toile, 
auxquels  elle  a  fait  des  trous  de  plusieurs  centimètres  de 
diamètre  et  mis  le  feu.  En  même  temps  7  carreaux  de 
vitre  du  rez-de-chaussée  volaient  en  éclats,  au  grand  effroi 
des  personnes  de  l'hôtel. 

Continuant  sa  route  le  long  des  barres  de  fer  du  store, 
la  foudre  arriva  à  l'autre  extrémité  de  la  maison,  où  elle 
trouva  le  tuyau  de  zinc  servant  à  la  décharge  des  eaux 
pluviales  et  recevant  un  petit  tuyau  venant  du  balcon, 
ainsi  qu'un  tuyau  de  fer  amenant  le  gaz  de  l'intérieur  de 
l'hôtel  à  une  lanterne  fermée  par  deux  grandes  glaces 
ovales  et  faisant  saillie  d'un  mètre  à  peu  près  sur  la  rue. 
Elle  quitta  alors  les  tiges  pour  se  jeter,  à  une  dislance  de 
15  à  20  centimètres,  sur  le  tuyau  de  zinc,  dont  elle  emporta 
de  nombreux  fragments.  Descendant  ensuite  environ 
50  centimètres,  une  partie  de  la  décharge  contourna 
l'angle  de  la  maison  en  arrachant  une  bonne  partie  de 
quatre  briques  qui  allongeaient  sa  route  et,  se  jetant  sur 
le  tuyau  à  gaz,  et  de  celui-ci  sur  la  cage  métallique  de  la 
lanterne,  cage  à  laquelle  elle  fit  un  trou  rond,  de  la  gran- 
deur du  doigt,  à  bords  repoussés  en  dedans,  elle  fit  voler 
les  glaces  en  morceaux  (1).  Le  reste  de  la  décharge  des- 
cendit dans  le  sol  par  le  tuyau.  11  est  probable  que  le 


(1)  Les  fragments  de  glace  reslés  en  place  muniraient  de  nombreuses 
fêlures  rayonnantes.  La  lanterne  ,  qui  avait  été  peinte  en  rouge  quelques 
mois  auparavant,  fut  complètement  noircie,  mais  non  cependant  sur  toute 
lepaisseur  de  la  couche  de  couleur  rouge. 


(  i7  ) 
fluide  électrique,  en  se  jetant  sur  la  garniture  métallique 
de  la  lanterne,  a  donné  lieu  à  une  étincelle  qui  a  brisé  les 
glaces  par  suite  de  la  dilatation  de  l'air. 

J'ai  dit  en  commençant  que  la  marche  suivie  par  le 
fluide  électrique  était  très-dilïicile  à  déterminer.  Je  devais 
faire  un  choix  pour  la  clarté  de  ma  relation  :  la  direction 
que  je  fais  suivre  à  la  décharge  est  celle  que  m'ont  indiquée 
plusieurs  personnes  de  la  localité.  Je  ne  prétends  point  la 
garantir,  mais  je  la  crois  la  plus  probable,  bien  que  j'aie 
entendu  dire  que  mon  savant  maître  pensait  autrement. 

En  efl'et,jene  trouve  aucun  argument  pour  attribuer  à  la 
foudre  une  marche  inverse,  c'est-à  dire  la  faire  tomber  sur 
le  toit  du  n°  87,  descendre  par  le  tuyau  de  décharge  jusqu'à 
la  hauteur  du  store,  passer  par  les  barres  de  fer  de  celui-ci 
sur  le  tuyau  de  la  maison  voisine,  remonter  jusqu'au  toit, 
et  se  jeter  en  passant  sur  le  fd  des  horloges,  tout  près  du 
toit,  pour  continuer  de  là,  en  partie  vers  les  horloges  de 
l'intérieur  de  la  ville,  en  partie  vers  celles  de  l'hôtel  de 
Paris  et  de  la  station.  D'une  part,  on  n'a  observé  aucune 
trace  du  passage  de  la  foudre  depuis  le  toit  du  n"  87  jus- 
qu'au niveau  des  barres  du  store;  de  l'autre,  le  trajet  ascen- 
dant de  la  foudre  le  long  du  tuyau  de  la  maison  89  ne  me 
paraît  pas  admissible. 

La  foudre  a  écorné  deux  coins  de  murs,  au  n*^  87  et  à 
l'hôtel  de  Paris,  et  les  dégâts  sont  beaucoup  plus  marqués 
sur  le  premier  point;  mais  je  ne  crois  pas  qu'on  puisse 
rien  en  induire,  relativement  à  la  marche  qu'elle  a  suivie. 

Je  serai  sobre  de  réflexions  :  j'ai  eu  surtout  pour  but  de 
fournir  aux  hommes  compétents  la  relation  d'un  cas  qui 
m'a  paru  présenter  quelque  intérêt  et  que  j'ai,  en  consé- 
quence, observé  avec  soin.  Je  signalerai  seulement  quelques 
points. 

2°"*^  SÉRIE,  TOME  XL.  2 


(18) 

1°  La  décharge  qui  s'est  faite  sur  le  tuyau  à  gaz  n'a 
produit  à  l'intérieur  de  la  maison  aucun  effet  appréciable 
pour  les  habitants  ; 

2°  Le  mince  fil  de  terre  qui  se  trouvait  à  50  centimètres 
de  l'horloge  électrique  de  l'hôtel  de  Paris,  a  suffi  pour 
dériver  vers  le  réservoir  commun  la  partie  de  la  décharge 
qui  a  foudroyé  cette  horloge; 

3°  La  nécessité  de  relier  aux  conducteurs  des  paraton- 
nerres les  masses  métalliques  situées  dans  leur  voisinage 
me  paraît  bien  démontrée  ici  ; 

4°  Le  rôle  des  fils  conducteurs  des  horloges  et  des  télé- 
graphes électriques  mérite  toute  attention. 

Pour  terminer,  je  crois  pouvoir  ajouter  quelques  petits 
faits  curieux,  observés  à  l'occasion  de  ce  coup  de  foudre. 
On  assure  que  des  ouvriers  travaillant  dans  le  jardin  voi- 
sin, ont  eu  leurs  outils  arrachés  des  mains  sans  éprouver 
autre  chose  qu'une  forte  commotion.  Un  monsieur  qui  se 
trouvait  à  la  fenêtre  d'une  maison  voisine,  un  tire-ligne 
métallique  à  la  main  ,  se  l'est  vu  enlever  sans  qu'on  ait  pu 
le  retrouver.  M.  Pérard,  professeur  de  physique  à  l'univer- 
sité de  Liège,  m'a  rapporté  avoir  vu  des  ciseaux  et  autres 
outils  de  tailleurs  de  pierres,  placés  sur  une  pierre  dans 
son  jardin ,  se  soulever  en  l'air  à  la  hauteur  de  50  à  60  cen- 
timètres, comme  attirés  par  un  fort  électro- aimant,  et 
émettre  des  aigrettes  lumineuses. 

Coup  de  foudre  de  Grimonster. 

C'est,  je  crois,  en  i869,  que  la  foudre  frappa  le  château 
de  Grimonster  (Ferrières),  appartenant  à  M.  David-Fisch- 
bach-Malacord,  dans  les  circonstances  que  je  vais  tâcher 
de  décrire. 


(19) 

Le  château  est  muni  d'une  tour  centrale  et  de  deux  tou- 
relles, qui  toutes  les  trois  sont  garnies  de  paratonnerres; 
les  conducteurs,  câbles  en  fil  de  fer  galvanisé,  viennent  se 
réunir  à  l'angle  du  bâtiment,  où  ils  sont  mis  en  communi- 
cation avec  les  chenaux  métalliques  de  la  toiture  et  ils  des- 
cendent de  là  dans  un  puits  profond  de  2  1/2  mètres , 
environ,  ne  servant  à  aucun  autre  usage,  et  renfermant  de 
Teau  chaque  fois  qu'on  Ta  ouvert.  On  a  affirmé  au  proprié- 
taire qu'on  s'était  assuré  qu'il  y  avait  de  l'eau  le  jour  de 
l'accident;  mais,  en  tout  cas,  on  peut  toujours  être  certain 
que  le  conducteur  se  termine  dans  une  terre  fortement 
humide.  Le  paratonnerre  avait  déjà  été  frappé  avant  l'acci- 
dent que  je  vais  rapporter,  et  il  avait  bien  fonctionné. 

Le  point  intéressant  à  noter,  pour  la  disposition  des 
lieux,  est  le  suivant.  En  descendant  du  toit  au  puits,  le 
conducteur  rencontre  à  mi-hauteur  une  plate-forme  de 
zinc.  Le  constructeur,  M.  Jaspar,  de  FJége,  a  coudé  le  con- 
ducteur pour  le  souder  à  la  plate-forme  métallique  sur  une 
longueur  de  5  mètres  environ  ;  un  nouveau  coude  ramène 
le  conducteur  dans  la  verticale.  A  côté  de  cette  plate-forme 
se  trouve  une  toiture  vitrée,  dont  la  charpente  de  fer  est 
en  communication  vers  le  haut  avec  la  plate-forme,  tandis 
que  le  bas,  avec  son  chenal  et  un  tuyau  de  décharge,  est 
appuyé  contre  un  autre  bâtiment,  renfermant  les  cui- 
sines, etc.  Le  tuyau  de  décharge  des  eaux  pluviales 
recueillies  sur  la  plate-forme  et  la  toiture  vitrée  se  trouve 
situé  à  l'angle  de  ce  bâtiment.  A  l'intérieur  de  celui-ci  et 
juste  en  face,  séparé  par  un  mur  de  0",50,  se  trouve  un 
robinet  de  distribution  d'eau ,  terminaison  d'une  conduite 
en  plomb  longue  de  i,100  mètres,  qui  amène  au  château 
l'eau  d'une  source  du  voisinage  et  qui  est  constamment 
remplie  d'eau. 


(20) 

Voici  maintenant  ce  qui  est  arrivé.  La  foudre,  étant  tom- 
bée sur  le  paratonnerre,  alla  se  jeter  sur  le  robinet  de  la 
distribution  d'eau,  pour  se  perdre  en  terre  le  long  de  ce 
tuyau.  Le  trajet  suivi  est  évident  :  la  décharge  électrique, 
arrivée  au  niveau  de  la  plate-forme,  aura,  en  tout  ou  en 
partie,  suivi  cette  voie,  puis  la  charpente  métallique  de  la 
toiture  vitrée  et  le  tuyau  de  décharge  des  eaux,  au  haut 
duquel  un  petit  éclat  de  zinc  fut  arraché  ;  elle  descendit  le 
long  de  ce  tuyau  et,  arrivée  en  face  de  la  distribution  d'eau, 
elle  se  jeta  sur  elle  au  travers  du  mur,  sans  faire  d'ailleurs 
d'autres  dégâts  qu'un  peu  de  ciment  enlevé  entre  les 
pierres. 

Ce  fait  se  passe  de  commentaires. 

J'ajoute  que  le  constructeur,  averti  de  l'accident,  se 
rendit  sur  les  lieux  et  lit  raccorder  par  une  tige  de  cuivre 
d'un  bon  centimètre  de  diamètre,  qui  suit  le  trajet  ci-dessus, 
la  plate-forme,  la  toiture  vitrée  et  la  conduite  d'eau. 


Sur  la  direction  de  r aiguille  aimantée  à  Bruxelles ,  en  i875; 
note  par  M.  Ern.  Quetelct,  membre  de  l'Académie. 

Il  arrive  fréquemment  que  des  renseignements  sont  de- 
mandés sur  la  direction  de  l'aiguille  aimantée  à  Bruxelles. 
Je  crois  donc  qu'il  peut  être  utile  de  communiquer  à  l'Aca- 
démie les  résultats  obtenus  cette  année  dans  le  jardin  de 
l'Observatoire. 

L'inclinaison  absolue  a  été  déterminée  deux  fois;  l'angle 
d'inclinaison  a  été  trouvé  égal  à 

66''o6'6  le  14  avril  entre  10  heures  et  demie  et  midi  et  demi. 
BôooS'S  le  22  mai  entre  H  heures  el  midi. 


(21  )     ■ 

Pendant  les  dix  dernières  années,  cet  angle  a  donc 
diminué  de  22'5  ou,  en  moyenne,  de  2  minutes  et  un 
quart  par  année. 

Trois  déterminations  de  la  déclinaison  magnétique  ont 
conduit  aux  résultats  suivants  : 

17o24'4  le    9  juin  entre  11  heures  et  midi  el  demi. 

IT^SS'l  le  25  juin  entre  10  heures  et  demie  et  11  heures  et  demie. 

IT^Se'S  le  23  juin  entre  2  et  3  heures  (*). 

Le  décroissement  annuel  est  ici  en  moyenne  de  8  mi- 
nutes el  un  quart. 

Il  résulte,  d'ailleurs,  des  données  recueillies  jusqu'ici  que 
la  déclinaison,  dans  le  jardin  de  l'Observatoire,  surpasse 
de  21,7  minutes  celle  que  l'on  obtient  quand  on  observe 
dans  les  campagnes  aux  environs  de  Bruxelles. 


Observations  par  M.  Gloesener,  membre  de  l'Académie. 

J'ai  lu  à  la  page  487  du  Bulletin  du  mois  de  mai  der- 
nier, sous  le  titre  de  communications  et  lectures  ,  une  note 
dont  je  n'ai  aucun  souvenir  qu'il  ait  été  question  à  la 
séance  de  l'Académie,  pas  plus  que  de  la  présentation  à  la 
classe  du  météorographe  de  M.  Van  Rysselberghe.  Il 
est  vrai  qu'ayant  vu  un  appareil  dans  la  grande  salle  et 
m'en  étant  approché,  j'ai  reconnu  cet  instrument  qui  le 
lendemain  ne  s'y  trouvait  déjà  plus. 

Dans  l'intérêt  de  la  vérité  que  je  ne  puis  cependant 
sacrifier  à  celui  que  j'ai  toujours  et  en  toute  occasion 

(*)  Cette  observation  a  été  faite  par  M.  Hooreman. 


(  22  ) 

hautement  et  activement  témoigné  à  l'auteur,  non  plus 
que  dans  celui  de  la  justice  à  rendre  aux  travaux  anté- 
rieurs aux  siens,  je  me  vois  forcé  de  faire  toutes  mes 
réserves  au  sujet  de  la  fin  de  cette  note  dont  je  n'ai  eu 
connaissance  que  par  le  Bulletin ,  lorsqu'elle  était  déjà 
imprimée,  réserves  dont  je  réclame  l'insertion  dans  le 
prochain  numéro  du  Bulletin. 


M.  Gloesener  annonce  pour  la  prochaine  séance  une 
note  sur  certains  effets  produits  par  la  foudre  à  Liège  le 
18  dernier,  note  qu'il  s'était  proposé  de  communiquer  à 
la  séance  de  ce  jour,  si  le  dessin  qu'il  avait  fait  faire  pour 
la  clarté  du  sujet  ne  lui  était  rentré  trop  tard  pour  ter- 
miner à  temps  ce  travail. 


Sur  la  détermination  des  singularités  de  la  courbe  d'inter^ 
section  de  deux  surfaces  qui  ont  en  commun  y.  points 
multiples,  fx  étant  égal  ou  inférieur  à  4  (*);  par 
M.  L.  Saltel. 

En  ayant  égard  aux  trois  théorèmes  suivants  et  aux 
considérations  exposées  dans  le  chapitre  II  de  notre  mé- 
moire Sur  de  nouvelles  lois  générales  régissant  les  surfaces 
à  points  singuliers,  chapitre  qui  traite  de  la  détermination 
des  points  simples  communs  à  trois  surfaces,  on  arrive 
facilement,  comme  on  va  le  voir,  à  un  théorème  général 


(*)  Dans  une  noie  adressée  à  T Académie  des  sciences  de  Paris,  séance 
du  24  mai  187o,  nous  avions  déjà  considéré  un  cas  particulier  du  cas 
général  où  les  deux  surfaces  ont  quatre  points  multiples  communs. 


(23) 

indiquant  le  rang  de  la  courbe  d'inlcrseclion  de  deux 
surfaces  Mi,  M^,  d'ordres  m, ,  m^j,  qui  sont  les  plus  géné- 
rales de  leur  espèce  (*)  et  ayant  :  1"  quatre  points  com- 
muns A,  B,  C,  D  respectivement  multiples  d'ordres  («i ,  a^^ 

(6, ,  b.^,{c^ ,  C2),  ((/|,  d.^',^''  (  points  de  contacts  ordinaires; 
3*'  (3  points  de  contacts  stationnaires. 

Théorème  I.  —  Si  deux  surfaces  d'ordres  mj,  m.2  se 
coupent  suivant  des  courbes  1|,  12,13,  I4...  ,  le  rang  de 
Vune  d'elles,  de  \^  par  exemple ,  est  égal  au  nombre  des 
points  simples  que  cette  courbe  Ij  a  en  commun  avec  une 
surface  1  d'ordre  mi  -+-  m2  —  2,  moins  le  nombre  des 
points  simples  que  cette  même  courbe  Ij  a  en  commun 
avec  les  autres  I2,  I5,  T4 

Théorème  II.  —  Si  les  deux  surfaces  Mi ,  M^  en  question 
ont  en  commun  un  point  A  respectivement  multiple  d'ordres 
a|,  83,  la  surface  ^  a  ce  niême  point  pour  point  multiple 
d'ordre  aj  H-  ag  —  2. 

Théorème  Ilï.  —  Si  les  deux  surfaces  M, ,  M2  ont  sur 
la  courbe  Ii,  t  points  de  contacts  ordinaires,  et  [3  points 
de  contacts  stationnaires,  le  rang  de  cette  courbe  I^  est 
diminué  de  2t  H-  5(3  unités. 

Pour  bien  préciser  le  sens  du  théorème  général  en 
question ,  il  est  besoin  de  rappeler  une  définition  et  une 
convention. 

Définition.  —  Nous  disons  que  deux  points  A,  B  mul- 
tiples d'ordres  a,  6,  appartenant  à  une  surface  d'ordre  m, 


n  On  dit  qu'uue  surface  d'ordre  m  salisfaisant  à  certaines  conditions 
données,  est  la  plus  générale  de  son  espèce,  lorsqu'on  peut  obtenir  son 
équation  en  parlant  de  féqualion  la  plus  générale  d'ordre  m,  et  en  assu- 
jettissant seulement  les  coefficients  de  cette  équation  aux  seules  conditions 
exigées  pour  que  les  conditions  indiquées  soient  remplies. 


(2i) 

forment  une  combinaison  positive  d'ordre   To*,  si  dans 

l'égalité 

a  -^  b  =m  -h  T„é, 

la  quantité  T„ô  est  un  nombre  positif  non  nul;  la  combi- 
naison est  nulle  ou  négative  si  T„i  est  nul  ou  négatif; 

Convention.  —  Les  formules  du  théorème  général  sui- 
vant s'appliqueront  à  tous  les  cas  possibles  de  fx  égal  ou 
inférieur  à  4,  si,  toutefois,  l'on  convient  de  remplacer 
par  zéro  les  valeurs  des  ordres  des  combinaisons  des  couples 
de  points  qui  pour  deux  des  trois  surfaces  M  i,  M2,  sou  pour 
toutes  les  trois,  seraient  négatifs  dans  les  cas  particuliers 
considérés. 

Théorèime  général.  —  U intersection  des  surfaces  Mj,  Mj 
se  compose  : 

r  Des  six  droites  AB,  AC,  AD,  BC,  BD,  CD  que  Von 
obtient  en  joignant  deux  à  deux  les  points  multiples  A,  B , 
C,  D ,  ces  droites  étant  d'ailleurs  pour  les  deux  surfaces 
respectivement  multiples  d'ordres 

(^)        {Toiôp   T„.2{,J,  (Tajcp   Ta^cjî    (Toidj,  In^rf-J)   (*6ic,»    *4jcJ> 

2^  D'une  courbe  I  d'ordre. 

ayant  les  points 

A,B,  C,D 

multiples  d'ordres 

(B)      6,62  —  Tôjnj  •  Tft^a,  —  Ti^e,  •  Ti,c2  —  '^^i'*»  *  '^«•5''*  » 
(D)    c^,f/j  —  Td,oi  •  Td.ai  —  Trfjij  •  Trfj6o  —  Trfjci  •  Trf.^cj  » 


(2S) 

et  dont  le  rang  est  marqué  par  V  express  ion. 

Tijcj  •Tjjc^  *-b,di  '  ^bidi *-cidi  •    '^c^d^) 

(«1  -+-  «2         2)  [((iCli  *-aibi  '  Tojft.^ ^aici  '  '^ajct ^aidi  '  ^aîdt) 

—  (6,  -4-6^-2)  {h  A  -  T,^„^ .  To,a,  —  T,^,^ .  T,,e.  —  T,^a,  •  T,,,,) 

—  («1-+-  «2  —  2)(r/ia2 —  T^rfiai  •  Trf,„j —  irfiti'Trf^j.^  —  irfjd  •  Td^cj) 
~  2  «  —  5(3. 

A^o^a  I.  —  Connaissant  Vordi^e^  le  nombre  de  points 
stationnaires  (3,  et  le  rang  de  la  courbe  I,  toutes  les  autres 
singularités  de  cette  courbe  se  calculeront  immédiatement 
par  les  formules  de  M.  Cayley. 

Nota  II.  —  Si  l'on  suppose  que  les  deux  surfaces  Mi,M2 
soient  uniquement  assujetties  à  avoir  les  points  multiples 
communs  A,  B,  C,  D,  on  a  «  =  o,  (3  =  o;  nous  allons  pré- 
senter dans  cette  hypothèse,  trois  applications  des  for- 
mules précédentes. 

APPLICATIONS. 


i"  Deux  surfaces  du  sixième  ordre  ont  en  commun 
quatre  points  A,  B,  C,  D  multiples  du  quatrième  ordre^  et 
sont  les  plus  générales  de  leur  espèce;  on  demande  le  rang 
de  leur  courbe  d'intersection. 

Dans  ce  cas  particulier  on  a 

mi  =  nii  =  6 , 

t  =  o,  p  =  o, 
donc  la  formule  [y)  donne 

56  —  6x4  =  12; 


(26) 
et  la  formule  (0)  donne 

i2x  10  — G  X4-4  =24. 

2°  Deux  surfaces  du  sixième  ordre  ont  en  commun  deux 
points  A,  B  multiples  du  quatrième  ordre,  et  deux  points 
C,  D  multiples  du  second,  et  sont  les  plus  générales  de  leur 
espèce;  on  demande  le  rang  de  leur  courbe  d'intersection. 

Conformément  à  la  convention,  ici  on  doit  poser 


T___  1^  rp  __^  rp  rp  rp  rp  rp 


bidi 


Icirfi   '^c-idi  0. 


La  formule  [y)  donne 

56  —  4  =  32  ; 

et  la  formule  (0)  donne 

10  X  32  — 2X0  X  12  — 2  X  2X  16  =  112. 

3"  Deux  surfaces  du  sixième  oindre  ont  en  commun  deux 
points  k,  B  multiples  du  quatrième  ordre  et  un  troisième  c 
du  second  ordre,  et  sont  les  plus  générales  de  leur  espèce; 
on  demande  le  rang  de  leur  courbe  d'intersection. 

11  n'y  a  qu'à  supposer  dans  les  formules  relatives  au 

problème  précédent 

r/,  =  rf^  =  0. 

De  la  sorte  la  formule  (y)  donne 

36  —  4  =  52; 

et  la  formule  (0)  donne 

10  X  32  — 6  X  12.2  — 2  X  16=  144. 

Observation.  —  Lorsque  le  mémoire  déjà  cité  Sur  de 
nouvelles  lois  générales  qui  régissent  les  surfaces  à  points 
singuliers  aura  été  publié ,  nous  aborderons  le  cas  de  fx 
supérieur  à  4. 


(27) 

Détermination  dans  la  surface  réciproque  d'une  surface  S 
douée  de  points  multiples ,  du  degré  de  la  courbe  double 
etdeceluide  lacourbe  de  rebroussement ;  par  M.  L.  Saltel. 

MM.  Salmon  et  Cayley  ont  déjà  résolu  cette  question 
dans  le  cas  où  la  surface  S  est  pure  de  points  multiples, 
mais  j'ignore  si  les  deux  illustres  géomètres  anglais  ont 
donné  une  solution  dans  le  cas  où  la  surface  S  possède  des 
points  multiples  d'ordres  quelconques.  La  méthode  sui- 
vante, que  nous  proposons,  repose  :  1°  sur  la  détermina- 
tion des  points  simples  communs  à  trois  surfaces  qui  ont 
déjà  en  commun  un  certain  nombre  de  points  multiples j 
problème  traité  dans  le  chapitre  II  de  notre  mémoire  Sur 
de  nouvelles  lois  générales  régissant  la  surface  à  points 
singuliers  j  2°  sur  les  douze  théorèmes  suivants  : 

1°  La  classe  de  la  surface  S  résulte  de  la  considération 
des  points  simples  qu'elle  a  en  commun  avec  les  deux  pre- 
mières polaires  de  deux  points  arbitraires  de  l'espace. 

2^  Si  la  surface  S  a  un  point  multiple  d'ordre  p,  ce 
même  point  est  multiple  d'ordre  (p  — 1)  pour  la  première 
polaire. 

5°  Le  degré  du  cône  tangent  proprement  dit  ^ ,  qui  a 
pour  sommet  un  point  arbitraire  P  et  pour  base  la  partie 
mobile  avec  le  point  P  de  la  courbe  d'intersection  de  la  sur- 
face S  et  de  la  première  polaire  du  point  P,  est  égal  à  la 
classe  d'une  section  plane  arbitraire  de  la  surface  S. 

4**  La  classe  du  cône  A  est  égale  à  la  classe  de  la  sur- 
face S. 

S''  L'ordre  d'une  section  plane  du  cône  A  est  égal  à 
l'ordre  de  ce  cône. 

6"  La  classe  d'une  section  plane  du  cône  A  est  égal  à  la 
classe  de  ce  cône. 


(  28) 

1°  Chaque  point  multij)le  de  la  surface  S  donne  nais- 
sance à  un  point  multiple  correspondant  dans  la  section 
plane  du  cône  A ,  point  dont  on  trouve  d'ailleurs  facile- 
ment l'ordre  dans  chaque  cas. 

8°  Le  nombre  des  points  de  rebroussement  d'une  section 
plane  dxi  cône  A  est  égal  au  nombre  des  points  simples 
communs  à  la  surface  S,  à  la  première  polaire  du  point  P, 
et  à  la  seconde  polaire  de  ce  même  point. 

9°  Si  un  point  est  multiple  d'ordre  p  pour  la  surface, 
ce  même  point  est  multiple  d'ordre  p  —  2  pour  la  seconde 
polaire. 

10''  Les  nombres  déterminés  par  les  théorèmes  5,  6,  7,  8 
suffisent  au  moyen  des  formules  de  Pliicker  pour  calculer 
toutes  les  autres  singularités  de  la  section  plane  en  question. 

\\°  Le  nombre  des  tangentes  doubles  de  la  section  plane 
du  cône  A  est  égal  au  degré  de  la  courbe  double  de  la  sur- 
face réciproque. 

42''  Le  nombre  des  points  d'inflexion  de  la  section  plane 
du  cône  A  est  égal  au  degré  de  la  courbe  de  rebroussement 
de  la  surface  réciproque. 

APPLICATION. 

«s 

L'ordre  dans  lequel  nous  venons  d'énumérer  les  théo- 
rèmes précédents  indique  suffisamment  les  recherches 
successives  que  l'on  doit  faire  pour  arriver  dans  tous  les 
cas  à  la  détermination  des  deux  nombres  qui  sont  l'objet 
de  cette  note.  Nous  allons  en  présenter  un  exemple. 

Problème.  —  Détermination  des  deux  nombres  en  ques- 
tion dans  le  cas  où  la  surface  S  est  une  surface  d'ordre  5m, 
ayant  quatre  points  A,  B ,  C,  D  multiples  d'ordres  2m. 

1°  La  classe  de  la  surface  S  est  égale  ici  au  nombre  des 


(  29) 
points  simples  communs  à  trois  surfaces  d'ordres  3m, 
om — 1 ,  om  —  1,  ayant  les  points  A,  B,  C,  D  pour  points 
multiples  d'ordres  2m,  2m  —  1 ,  2m —  i.  On  trouve  ainsi 
d'après  les  règles  indiquées  dans  le  mémoire  déjà  cité  (*) 

m'  H-  2m'  -t-  m. 

2**  Le  degré  du  cône  i^ug^xU  proprement  dit  est 

om^  H-  om; 

on  le  voit  immédiatement  en  remarquant  que  les  six  arêtes 
du  tétraèdre  ayant  pour  sommet  A,  B,  C,  D  sont  pour  la 
surface  S  des  droites  multiples  d'ordre  m. 

5°  Les  génératrices  du  cône  tangent  proprement  dit 
qui  passent  par  les  points  A,  B,  C,  D  sont  multiples  d'ordres 

m^  -H  m\ 

on  s'en  rend  compte  facilement. 

4°  Le  nombre  des  points  de  rebroussement  d'une  section 
plane  du  cône  A  est  égal  au  nombre  des  points  communs 
à  trois  surfaces  d'ordres  3m,  3m  —  1 ,  3m  —  2,  ayant  les 
points  A,  B,  C,  D  pour  points  multiples  d'ordres  2m, 
2m  —  1 ,  2m — 2.  On  trouve  ainsi  d'après  les  règles  indi- 
quées dans  le  mémoire  déjà  cité  (**) 

m^  H-  5m^  •+■  2m. 
5''  Sachant  que  la  section  plane  du  cône  A  est  d'ordre 


(*)  Voir  la  note  finale  de  cet  article.  Ici  toutes  les  combinaisons  sont 
positives  et  leurs  ordres  sont  égaux  à  m  pour  la  première  surface  et  à 
m  —  1  pour  les  deux  autres. 

(**)  Voir  la  note  finale  de  cet  article.  Ici  toutes  les  combinaisons  sont 
positives  et  leurs  ordres  sont  égaux  à  m  pour  la  première  surface,  à  m  —  1 
pour  la  seconde  et  à  m  —  2  pour  la  troisième. 


(  50  ) 
5m^  -\-  3m,  que  sà  classe  est  m^  -+-  Sm^  -+-  m,  qu'elle  a 
quatre  points  multiples  d'ordres  m2-i-m,etm^H-5m2H-2m 
points  de  rebroussements;  on  en  déduit  immédiatement 
au  moyen  des  formules  de  Pliicker  : 

i^  Que  le  nombre  des  points  doubles  est 


—  j 


2°  Que  le  nombre  des  points  d'inflexion  est 

V  =  4w  {m-  —  1). 
3°  Que  le  nombre  des  tangentes  doubles  est 

m*  H-  4  m**  -I-  6  m*  —  9  m^  —  4  m^  -4-  8  m 

"=— i 

U  et  V  sont  les  deux  nombres  demandés. 

Nota.  —  Voici  le  théorème  général  auquel  nous  sommes 
arrivé  dans  le  mémoire  déjà  cité,  concernant  le  nombre 
des  points  simples  communs  à  trois  surfaces  qui  ont  déjà 
en  commun  (x  points  multiples  (a  étant  égal  ou  infé- 
rieur à  4)  et  qui  sont  les  plus  générales  de  leur  espèce. 

Théorème  général.  —  Le  nombre  des  points  simples 
cherché  est  égal  au  produit  des  degrés  des  trois  surfaces , 
diminué  de  la  somme  des  produits  des  ordres  de  multipli- 
cité de  chaque  point  singulier,  cette  différence  étant  aug- 
mentée de  la  somme  algébrique  des  produits  des  ordres  des 
combinaisons  formées  par  ces  points  combinés  deux  à  deux, 
pourvu ,  toutefois^  que  Von  convienne  de  remplacer  par 
zéro  tout  terme  de  cette  dernière  somme  qui  serait  le 
résultat  d'un  produit  de  deux  facteurs  négatifs  par  un 
facteur  positif,  ou  bien  le  résultat  de  trois  facteurs 
négatifs. 


(5i  ) 
Par  exemple,  si  les  trois  surfaces  d'ordres  W2j,  m.2,  m^, 
ont  quatre  points  communs  A,  B,  C,  D  respectivement 
multiples  d'ordres 

(«1 5  «2 ,  a^),    {fh ,  6-2  ,  63),    (C,  ,  f  j,  Ts),    (/,  ,  rfa  ,  (/s), 

formant  deux  à  deux  six  combinaisons  dont  les  ordres 
sont  respectivement 

l^a,6i>    *a.6o)   ^  0363)  5    (trt,«i>    laoco^    ^as-^s)'    (  ^  iirfi  ?  To.,^^  ,  T„^rf^)  ,  - 
(AftiCi)    *■  biC2  J    ^  b-cj  i     (Tôtrfp  Té.rf.^,  Tijrf.j,    (Tc^rfj,  Tgjrf^  ,  T^.3rf.), 

le  nombre  des  points  simples  communs  est  marqué  par  la 
formule 

N  =  nii  m^  m^  —  a,  a^  03  —  6,  h^  63  —  Cj  c^  c^  —  d^  d^  d^ 
_i-T        .T        .T        -j-T  T  T 

«1*1  0262  O363    "^       OiCi    •    '■  a.2C~.i  '    *  8363 

où  Ton  convient  de  remplacer  par  zéro  tout  terme  de  la 
forme  Ta.ti  '  Ta.ô^  •  T^^^^  qui  serait  le  résultat  de  deux  ou 
trois  facteurs  négatifs. 

Remarque.  —  Cette  règle  ne  souffre  d'exception  que 
s'il  arrive  qu'il  y  ait  un  ou  plusieurs  groupes  de  deux 
points  singuliers  donnant  pour  deux  des  surfaces  des 
combinaisons  d'ordres  égaux  à  l'unité,  et  pour  la  troisième 
surface  une  combinaison  d'ordre  négatif;  dans  ce  cas  il 
faut  considérer  comme  nul  le  produit  des  ordres  corres- 
puodants. 

Seconde  méthode.  —  Nous  profilons  de  la  révision  des 
épreuves  pour  développer  en  quelques  lignes  une  nouvelle 
méthode  de  détermination  du  degré  de  la  courbe  de 
rebroussement. 


(32) 
Le  problème  peut  évidemment  être  posé  comme  il  suit  : 

Problème.  —  En  supposant  que,  pour  la  surface 
donné  M,  d'ordre  m,  la  courbe  de  contact  du  cône  des  tan- 
gentes issues  d'un  point  arbitraire  P  se  décompose  en  un 
certain  nombre  de  courbes  Ij,  Ig,  I5...,  invariables  avec  le 
point  P,  et  en  une  courbe  I  variable  avec  ce  point,  trouver 
le  nombre  des  points  simples  que  cette  courbe  I  a  en  corn- 
mun  avec  VHessien.  On  sait,  d'ailleurs ,  que  si  un  point  P 
est  multiple  d'ordre  p  pour  la  surface,  il  est  fnultiple 
d'ordre  p — 1  pour  sa  première  polaire,  et  d'ordre  4-  p — 6 
pour  VHessien;  en  outre  le  cône  tangent  en  ce  point  à 
VHessien  se  compose  du  cône  tangent  de  la  surface  et  d'un 
cône  d'ordre  5  p  —  6. 

Nous  allons  effectuer  cette  recherche  seulement  dans 
un  cas  particulier,  celui  où  la  surface  M  possède  quatre 
points  A,  B,  C,  D,  multiples  d'ordres  a,  b,  c,  d,  formant 
six  combinaisons  positives  d'ordres 

rii  fTi  rwi  fTi  fT^  np 

*  a6  5   *  ac  )    A  ad  5    *  bei    *  id  5    -^  ci  5 

cette  surface  étant,  d'ailleurs,  la  plus  générale  de  son 
espèce. 

D'après  le  théorème  général  indiqué  dans  la  précédente 
noteswr  la  détermination  des  singularités ,  etc.,  la  courbe 
I  est  ici  une  courbe  d'ordre 

K=m(m-i)-T„,(T„,-1)~T„JT„,-i)-T„,(T„,-i) 
-  T,,  (T,,  -  1)  -  T,,  (T,,  -  d)  -  T.,  (T,,  -  d), 

ayant  les  points  A,  B,  C,  D  multiples  d'ordres 

(A)a'  =  a(a-d)-T„,(T„,-1)-T,,(T„,-i)-T„,(T„,-l), 

(C)  c'  =  c  (c  -  1  )  -  T,„(T,,- 1  )  -  T,,  (T.,  -  1  )  -  T.,  (T,,  -  1  ), 


(33) 
en  conséquence,  le  nombre  des  points  simples  que  cette 
courbe  a  avec  PHessien  est  égal  à  4  (m  —  2).  K,  ce  nombre 
étant  diminué  des  points  confondus  en  A,  B,  C,  D.  Pour 
obtenir  ce  dernier  nombre,  clierchons,  par  exemple,  le 
nombre  des  points  confondus  au  point  A.  Si  chacune  des 
a'  branches  de  la  courbe  I  n'avait  pas  pour  tangente  une 
gén^ératrice  du  cône  tangent  en  ce  point  à  l'Hessien,  elle 
rencontrerait  seulement  en  ce  point  cette  surface  en 
4  a  —  6  points ,  mais  puisque  cette  circonstance  se  pré- 
sente, ce  nombre  de  points  doit  être  évidemment  aug- 
menté d'une  unité.  Ainsi  le  nombre  des  points  confondus 
en  A  est  a'  x  (4  a  —  5);  on  peut  donc  dire  que  le  nombre 
cherché  est  exprimé  par  la  formule. 

(P)...4(m— 2)  X  K--(4ti—  5)-a'  — (46  — 5).  b' 
—  (4c— 5)c'-(4rf— 5).rf'. 

Note  V\  —  Si  l'on  change  m  en  3m,  et  si  l'on  fait 
a  =  b  =  c  =  d=^m,  cette  formule  donne  4m  (m^  —  j), 
ce  qui  s'accorde  bien  avec  la  première  méthode. 

Note  Il^  —  La  formule  (P)  convient  à  tous  les  cas  pos- 
sibles qui  peuvent  se  présenter  pour  une  surface  ayant 
quatre  points  multiples  ou  un  nombre  inférieur,  si  Ton 
convient  de  remplacer  par  zéro  les  valeurs  des  ordres  des 
combinaisons  qui  peuvent  devenir  négatives  dans  les  cas 
particuliers  considérés. 


SÉRIE,  TOME  XL. 


(34) 


CLASSE   DES    LETTRES. 


Séance  du  o  juillet  1815. 

M.  le  baron  Guillaume,  directeur. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  Ch.  Steur ,  J.  Grandgagnage, 
J.  Roulez,  Gachard,  P.  Devaux.  P.  De  Decker,  M.-N.-J.  Le- 
clercq,  Ch.  Faider,  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove, 
R.  Chalon,  Th.  Juste,  Thonissen,  Alph.  Wauters,  Alph. 
Le  Roy  et  A.Wagener,?7îem6res;  J.NoIet  de  Rrauwere  van 
Steeland,  Alph.  Rivier,  associés;  J.  Heremans,  F.  Loise, 
Stan.  Rormans,  correspondants. 

MM.  Stas  et  Ch.  Montigny,  membres  de  la  classe  des 
sciences,  assistent  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  adresse  une  expédition  de 
l'arrêté  royal  du  24  juin  dernier  qui  approuve  l'élection 
de  M.  Auguste  Wagener,  en  qualité  de  membre  titulaire  de 
la  classe  des  lettres. 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  envoie  une  expédition 


(  ^^  ) 

de  l'arrêté  royal  en  date  du  17  juin  dernier,  qui  décerne, 
sur  la  proposition  du  jury  chargé  de  juger  la  cinquième 
période  quinquennale  du  prix  de  liltératm-e  flamande,  le 
prix  à  l'ouvrage  intitulé  :  Ernest  Slaas,  aclvocaat,  schetsen 
en  beelden  door  Tony,  dii  à  la  plume  de  feu  M.  Bergmann, 
en  son  vivant  avocat  à  Lierre. 

—  M.  le  Ministre  de  la  justice  offre  deux  exemplaires 
du  quatrième  cahier  du  sixième  volume  des  procès-ver- 
baux des  séances  de  la  commission  royale  des  anciennes 
lois  et  ordonnances  de  la  Belgique.  —  Bemercîmenls. 

—  MM.  A.  Tennyson  et  R.  Lepsius  accusent  réception 
de  leur  diplôme  d'associé. 

—  La  Société  de  statistique  de  Londres  et  l'Institut 
royal  pour  la  philologie  et  l'ethnographie  de  l'Inde  néer- 
landaise à  La  Haye,  envoient  leurs  derniers  travaux. 

—  L'université  de  Saint-Louis  (E.-U.)  remercie  pour  le 
dernier  envoi  de  publications. 

—  M.  le  baron  Guillaume,  directeur,  offre. un  exem- 
plaire de  son  discours  Sur  le  mouvement  intellectuel  dans 
Varmée^  prononcé  dans  la  dernière  séance  publique  de  la 
classe. 

M.  Ch.  Faider,  vice-directeur,  offre  un  exemplaire  de 
son  discours  Sur  Montesquieu  et  la  Constitution  belge, 
prononcé  lors  de  la  même  séance. 

M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove  fait  hommage  du 
premier  exemplaire  du  tome  XX  F  des  Œuvres  de  Froissart 
(Chroniques,  table  alphabétique  des  noms  historiques, 


(36) 

CL-IVR),  publiées  par  la  commission  académique  pour  les 
travaux  des  grands  écrivains  du  pays. 

M.  Alphonse  Le  Roy  présente,  au  nom  de  M.  Vincenzo 
di  Giovanni,  divers  ouvrages  de  philosophie  dont  les  titres 
figureront  au  Bulletin. 

M.  J.  Nolet  de  Brauwere  Van  Steeland  présente,  au  nom 
de  M.  le  docteur  Wap,  un  exemplaire  de  son  livre  intitulé  : 
Bilderdijk.  Eene  bijdrage  tôt  zijn  Leven  en  Werken.  In-S". 

Il  offre,  en  son  nom  personnel,  deux  brochures  :  Een 
Muizestaartje  et  Het  Menschdoin  verlost  -h  X^^^i-  In-8°. 

M.  Joseph  de  Leva,  président  de  la  faculté  de  philoso- 
phie et  lettres  de  l'université  de  Padoue,  adresse,  à  titre 
d'hommage,  les  trois  premiers  volumes  de  son  ouvrage 
intitulé  iStoria  documentaladi  Carlo  V  in  correlazione  aW 
Italia.  In-8^ 

La  note  lue  par  M.  Nolet  de  Brauwere  au  sujet  de  l'ou- 
vrage de  M.  Wap  paraîtra  au  Bulletin.  (Voir  communica- 
tion et  lectures.) 


PROGRAMME  DE  CONCOURS  POUR  1877. 

La  classe  complète  son  programme  de  concours  de  celte 
année  par  la  cinquième  question  suivante  : 

Indiquer  les  analogies  et  les  différences  que  présente  la 
poésie  flamande  avec  la  poésie  des  autres  langues  d'ori- 
gine germanique ,  ce  qu'elle  leur  doit  et  V influence  qu'elle 
a  eue  sur  elles. 


(37  ) 
COMMUiNICATlONS  ET  LECTURES. 


BUderdijk.  Eene  bijdrage  tôt  zijn  Leven  en  Werken ,  door 
D"  Wap.  Leiden,  E.-J.  BHll,  1874;  note  par  M.  J.  Nolet 
de  Brauwere  van  Steeland ,  associé  de  l'Académie. 

En  publiant  la  série  complète  des  œuvres  poétiques  de 
Bilderdijk,  M.  Da  Costa  éleva  un  monument  à  la  gloire 
littéraire  d'un  maître,  dont  il  fut  le  disciple  enthousiaste 
et  le  fervent  admirateur.  Mais  Bilderdijk,  trop  profond 
penseur  pour  devenir  écrivain  populaire,  faisait  en  outre 
étalage  de  principes  monarchiques  et  d'un  piétisme  ortho- 
doxe, qui  lui  attirèrent  la  haine  d'implacables  détracteurs. 
Ne  pouvant  s'en  prendre  au  génie  incontestable  du  poète, 
ils  attaquèrent  l'homme  dans  sa  vie  privée.  Son  petit-lils 
par  alliance,  M.  le  pasteur  Ten  Brummelen  Andriesse, 
leur  fournit  ample  matière  à  récrimination  en  livrant  à 
une  publicité  au  moins  intempestive ,  la  correspondance 
particulière  de  son  aïeul.  Ces  lettres,  adressées  par  le  poète 
à  sa  première  femme,  furent  éditées  avec  des  commen- 
taires peu  obligeants  par  le  docteur  Van  VIoten  et  donnè- 
rent prise  à  une  malveillance  qui  devait  atteindre  Bilder- 
dijk dans  son  honorabilité. 

Admis  dans  l'intimité  du  grand  poêle,  à  titre  de  dis- 
ciple, d'ami  et  parfois  de  commensal,  M.  le  docteur  Wap 
fut  pendant  bien  des  années  initié  aux  joies  comme  aux 
douleurs  de  cette  vie  de  famille.  Il  en  connut  ce  qu'on  est 
convenu  d'appeler  les  petites  misères,  et  mieux  que  tout 
autre  sa  plume  parut  appelée  à  démêler  le  vrai  du  faux.  Mais 
tout  en  respectant  le  génie  qui  se  reflète  dans  les  œuvres 


(  38  ) 
du  plus  grand  de  nos  poètes  néerlandais,  M.  Wap  ne 
chercha  point  à  atténuer  certaines  faiblesses,  auxquelles 
l'imagination  exaltée  et  la  nature  trop  ardente  de  Bilder- 
dijk  ne  surent  pas  toujours  résister. 

A  ce  double  point  de  vue  la  publication  de  M.  Wap  a 
une  importance  réelle,  en  tant  qu'elle  est  l'œuvre  d'un 
témoin  oculaire.  C'est  ainsi  qu'un  examen  historique  et 
généalogique  fort  minutieux  conduit  l'auteur  à  la  conclu- 
sion, que  si  une  extrême  fatuité  formait  le  signe  dislinctif 
du  caractère  de  Bilderdijk  et  fut  la  cause  primordiale  de 
ses  tribulations,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  l'allégation, 
d'après  laquelle  le  grand  poète  aurait  succombé  à  des  dé- 
faillances coupables,  n'est  nullement  établie.  Si  donc  les 
découvertes  et  les  nombreuses  communications  récentes, 
touchant  la  vie  intime  de  Bilderdijk,  n'ont  pu  ternir  en 
aucune  façon  le  mérite  hors  ligne  du  savant  et  du  poète, 
M.  Wap  n'en  a  pas  moins  rempli  un  devoir  de  justice  et  de 
gratitude,  en  établissant  clairement  que  Bilderdijk  n'a  pas 
été  séduit,  plus  que  de  raison,  par  les  grâces  de 
M"''  Schweickhardt,  tant  que  son  mariage  avec  Catharina 
Rebecca  van  Woesihoven  —  dont  l'amabilité  laissait  d'ail- 
leurs beaucoup  à  désirer  —  n'avait  été  dissous  par  le  tri- 
bunal d'Amsterdam. 

Tout  ceci  otTre  d'autant  plus  d'intérêt,  que  l'auteur 
apprécie  avec  une  juste  impartialité  des  situations  parfois 
fort  délicates.  Mais  si  l'on  peut  regretter  la  fâcheuse  pu- 
blicité donnée  à  une  correspondance  intime,  cause  pre- 
mière de  débats  irritants,  auxquels  M.  le  docteur  Wap  a 
cru  devoir  prendre  part,  on  doit  savoir  gré  à  ce  dernier 
de  ne  point  s'être  écarté  de  la  règle  «  Amiens  SocrateSy 
amicus  Bilderdijk,  sed  magis  arnica  Veritas,  p 


(39) 


CLASSE  DES   BEAUX-ARTS. 


Séance  du  i""  juillet  4SI 5. 

M.  Alphonse  Balat, directeur. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  ^\l\.  L.  Alvin ,  G.  Geefs,  Jos.  Geefs, 
C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Edm.  De  Busscher,  Aug.  Payen, 
le  chevalier  Léon  de  Burbùre,  J.  Franck,  Gust.  De  Man  , 
Ad.  Siret,  F.-A.  Gevaert,  Adolphe  Samuel,  Ad.  Pauli, 
membres;  Éd.  de  Biefve,  correspondant. 

M.  R.  Chalon ,  membre  de  la  classe  des  lettres  ,  assiste 
à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M"'  Barye  adresse  une  lettre  de  faire  part  de  la  raort 
de  son  époux,  M.  Antoine-Louis  Barye,  associé  de  la 
section  de  sculpture  de  la  classe ,  décédé  à  Paris  le  25  juin 
1875,  à  l'âge  de  79  ans. 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  transmet  une  amplia- 
lion  de  l'arrêté  royal  du  o  juin  dernier  qui  modifie  les 
articles  12  et  15  du  règlement  d'ordre  intérieur  de  la 
classe. 


(40) 

—  M.  Abraham  Basevi,  associé  de  la  section  de  mu- 
sique, à  Florence,  remercie  pour  le  dernier  envoi  annuel 
de  publications  académiques. 


D'après  Tordre  du  jour  de  la  séance ,  la  classe  s'occupe 
des  modifications  demandées  par  le  dernier  jury  des  can- 
tates au  programme  des  conditions  indiquées  aux  concur- 
rents pour  la  composition  des  poëmes  français  et  flamands. 

MM.  Gevaert,  le  chevalier  de  Burbure  et  Ad.  Samuel, 
membres  de  la  section  permanente  des  grands  concours 
de  composition  musicale,  donnent  leur  opinion  au  sujet 
de  ces  changements. 

La  classe  adopte  les  modifications  proposées,  lesquelles 
seront  soumises  à  M.  le  Ministre  de  l'intérieur. 


OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 


Commission  pour  la  publicatioti  d'une  collection  des  grands 
écrivains  du  pays.  —  Chroniques  de  Froissart,  publiées  par 
M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove.  (Tome  XXI.  Table  analytique 
des  noms  historiques,  CL —  IVR.)  Bruxelles,  4875;  vol.  in-8". 

Van  Beneden  (P-J.).  —  Un  oiseau  fossile  nouveau  des 
cavernes  de  la  Nouvelle-Zélande.  Liège,  1875;  feuille  in-8° 
avec  planche. 

Faider  (Ch.).  —  Montesquieu  et  la  Constitution  belge. 
Bruxelles,  1875;  broch.  in-8*'. 

Kervyn  de  LtUenhove  {Le  baron).  —  La  Flandre  pendant 
les  trois  derniers  siècles.  (Ouvrage  qui  sert  de  suite  à  «  l'his- 


{il  ) 

toirede  Flandre  »  en  4  vol.  in-8".  )  Bruges  ,  4875;  vol.  in-8°. 

Guillaume  {Le  baron  G.)  —  Sur  le  mouvement  intellectuel 
dans  l'armée  belge.  Bruxelles,  1875;  br.  in-8''. 

Schwann  (Z)^  Th.).  —  Mein  Gutachtcn  iiber  die  Versuche 
die  an  der  Sligmatisirten  Louise  Lateau ,  am.  26  Marz  1869 
angestellt  wurden.  Cologne-Neuss ,  1875;  in-8''. 

^^olet  de  Braiiwere  Van  Steeland.  —  Een  muizestaartje.  — 
Het  menschdom  verlost  -h  X^*,.  Bruxelles,  mai  et  juin  1875; 
2  broch,  in-8°. 

Bruijlants  (Gustave).  —  Recberches  sur  les  hydrocarbures 
de  la  formule  générale  C,.  H2„_2.  Louvain,  1875;  broch.  in-8". 

Frédéricq  [Léon).  —  Génération  et  structure  du  tissu  mus- 
culaire. (Mémoire  couronné.  Concours  universitaire  de  1875- 
1874.)  Bruxelles,  1875;  vol.  in-S". 

Goebel  [Max).  —  La  crise  commerciale  de  la  houille  1870- 
1874  pour  servir  de  commentaire  à  la  carte  de  la  production, 
circulation  et  consommation  des  charbons  belges  en  1875. 
Liège,  1875;  broch.  in-8''  avec  carte  in-fol. 

Heuschling  (X.).  —  Notice  sur  la  statistique  ancienne  de  la 
Belgique.  Liège,  1875;  br.  in-S". 

Preudhomme  de  Borre  {A.).  —  Note  sur  des  empreintes 
d'insectes  fossiles  découvertes  dans  les  schistes  houillers  des 
environs  de  Mons.  Bruxelles,  1875;  br.  in-8". 

Royaume  de  Belgique.  —  Chambre  des  Représentants  : 
Convention  conclue,  le  20  mai  1875,  entre  la  Belgique  £t 
différents  pays  étrangers,  concernant  la  création  d'un  bureau 
international  des  poids  et  mesures.  Bruxelles,  15  juin  1875; 
2  feuilles  in-4°. 

Commission  royale  pour  la  publication  des  anciennes  lois 
et  ordonnances  de  la  Belgique.  —  Procès-verbaux  des  séances, 
sixième  vol.,  IV  cahier.  Bruxelles  ,  1875;  in-8". 

Commissions  royales  d'art  et  d'archéologie.  -  Bulletin, 
XIV''  année,  1874,  n"'  3  et  4.  Bruxelles,  1875;  in-8". 

Bibliothèque  royale.  —  Acquisitions  faites  pendant  l'année 
1874.  Bruxelles;  feuille  in-4". 


(  42) 

Musée  de  l'industrie  de  Belgique ^  à  Bruxelles.  —  Bulletin  , 
34^  année  1875,  n°'4,  5  et  6.  Bruxelles,  Paris;  5  livr.  gr. 
in-8». 

Société  malacologigue  de  Belgique ,  à  Bruxelles.  —  Pro- 
cès-verbal: séances  de  mars,  d'avril  et  de  juin  1875.  Bruxelles; 
feuilles  in-8°. 

Société  royale  des  sciences  médicales  et  naturelles  de 
Bruxelles.  —  Journal,  60'"^  vol.,  ôô"^"  année,  mars,  avril, 
mai  1875.  Bruxelles  ;  in-8°. 

Société  pour  la  propagation  du  système  de  notation  sim- 
plifiée par  la  classification  numérique  des  octaves  selon  la 
théorie  du  diapason.  —  Projet  de  prospectus,  par  M.  Meerens. 
Bruxelles,  1875;  broch.  in-8''. 

Becueil  des  rapports  dee  secrétaires  de  légation  de  Bel- 
gique ,  tome  II,  10""  livr.,  juin  1875.  Bruxelles;  in-8°. 

Le  Bibliophile  belge,  9'^'  année,  1875,  livr.  11,  12. 
Bruxelles;  feuilles  in-8''. 

Annales  des  travaux  publics  de  Belgique ,  tome  XXXII, 
5'"''  cab.  Bruxelles  ,  1874:  in-8°. 

Moniteur  industriel  belge,  vol.  II,  n"^  38  à  48,  avril-juin 
1875.  Bruxelles;  9  feuilles  in-4''. 

La  Presse  médicale ,  27™^  année  ,1875,  n°'  1 8-50.  Bruxelles; 
15  feuilles  in-4°. 

Anncdes d'oculistique ,  mai-juin  1875.  Bruxelles;  liv.  in-8°. 

Société  de  pharmacie  d'Anvers.  —  Journal,  mars  et  avril 
1875.  Bruxelles;  2  liv.  in-8°. 

Société  de  médecine  d'Anvers.  —  Annales,  mars,  avril,  mai 
et  juin  1875.  Anvers;  2  «ivr.  in-8''. 

Ville  de  Bruges.  —  Inventaire  des  archives  de  la  ville  : 
section  l""*.  Inventaire  des  chartes  par  L.  Gilliodts-van  Se- 
veren.  1'*  série,  XIII''  au  XVP  siècle,  tome  III.  Bruges,  1875; 
vol.  in-4". 

Société  d'Émulation  pour  Vétude  de  Vhistoire  et  des  anti- 
quités de  la  Flandre,  à  Bruges.  —  Annales,  5""^  série, 
lomeX,  n"^  1  et  2.  Bruges,  1875;  liv.  in-8°. 


(  45  ) 

Vlllustraiion  horticole,  5""=  série,  0"''  vol.,  4'"%  5""=  et  C"""  livr., 
avril-juin  187j.  Gand;  5  cali.  gr.  in-8". 

Société  royale  des  sciences  de  Liège.  —  Mémoires ,  2'"*'  série, 
tome  IV.  Bruxelles;  vol.  in-S". 

Société  médico-chirurgicale  de  Liège.  —  Annales,  mars,  avril 
et  mai  1875.  Liège;  2  livr.  in-8". 

Le  Scalpel,  27""^  année,  avril-juin  1875,  n^^  40-o!2.  Liège; 
15  feuilles  in-4**. 

Analectes  pour  servir  d  l'histoire  ecclésiastique  de  la  Bel- 
gique, tome  XII,  1873,  1'"'=  livr.  Louvain,  Bruxelles;  in-S". 

Journal  des  B eaux- A r ts,  XY 11""^  Rnnée,  1875,  n°'  G-12. 
Louvain;  7  feuilles  in-4'*. 

Cercle  littéraire  de  Verviers.  —  Bulletin  :  Manifestation 
publique  faite  le  4  avril  1873  en  l'honneur  de  Th.  Bost.  Ver- 
viers, 1873;  in-8°. 

Donders  [F.-C). —  13''  jaarl.  verslag  betrekkelijk  de  ver- 
pleging  der  ooglijders.  Utrecht,  1874;  in-8°. 

Wap  (D').  —  Bilderdijk.  Eene  bijdrage  tôt  zijn  Leven  en 
Werken.  Leide ,  1874;  vol.  in-8''. 

Institut  royal  grand-ducal  du  Luxembourg.  —  Publica- 
tion de  la  section  historique,  année  1874,  XXIX  (VII).  Luxem- 
bourg, 1873;  vol.  in-4°. 

Ministère  des  Affaires  Étrangères  de  la  République  fran- 
çaise. —  Documents  diplomatiques  de  la  conférence  du  mètre. 
Paris,  1873;  vol.  in-4". 

Chasles.  —  Aperçu  historique  sur  l'origine  et  le  développe- 
ment des  méthodes  en  géométrie,  particulièrement  de  celles 
qui  se  rapportent  à  la  géométrie  moderne,  etc.  (Nouvelle  édi- 
tion.) Paris,  4875  ;vol.  in-4°. 

Hugo  [Le  comte  Lèopold).  —  Le  valhalla  des  sciences  pures 
et  appliquées,  etc.  Paris ,  1875  ;  broch.  in-8°. 

Lorin.  —  Nouveau  mode  de  préparation  de  l'acide  for- 
mique  très-concentré,  au  moyen  de  l'acide  oxalique  déshy- 
draté et  d'un  alcool  polyatomique.  Paris,  mai  1873;  broch. 
in-40. 


(44) 

Le  Progrès  médical,  S-""  année  1875,  n°*  14-18,  20-26. 
Paris;  12  feuilles  in-4°. 

Journal  de  l'agriculture ,  tome  111,  avril-juin  1873  ,  n°'  512- 
319  ,  521-524.  Paris,  12  cah.  in-8°. 

Revue  britannique ,  51'°''  année,  avril-juin,  1875,  n°^  4-6. 
Parisj  5  demi-vol.  in-8°. 

Revue  de  France,  tome  XIV,  n"  42,  V"^  année,  juin  1875. 
Paris  ;  vol.  in-S". 

Revue  des  questions  historiques,  55'"*'  livr.,  l*'"  juillet, 
1875.  Paris;  vol.  in-8«. 

Sociétés  des  études  historiques ,  à  Paris.  —  L'Investiga- 
teur. Journal,  41°"^  année,  mai-juin,  1875.  Paris;  fasc.  in-8°. 

Société  d'anthropologie  de  Paris.  —  Bulletins,  tome  X 
{ 2'"*'  série),  2™'  fasc,  mars-mai  1875.  Paris;  in-8". 

Société  géologique  de  France,  à  Paris.  —  Bulletin,  5"'*  série, 
tome  III ,  1875,  n"  5.  Paris,  juin  1875;  in-8^ 

Société  météorologique  de  France,  à  Paris.  —  Nouvelles 
météorologiques,  VIII™*  année,  juin  1875.  Paris;  feuilles 
in-8^ 

Horand  [le  D*"  M.-A.).  —  Recherches  expérimentales  sur 
l'action  physiologique  de  l'hématosine.  Lyon ,  1875;  broch. 
in-8°,  2""=  édition. 

Bulletin  scientifique,  historique  et  littéraire  du  départe- 
ment du  Nord,  1"""  année,  n"'  5,  4  et  5,  mars,  avril,  mai 
1875.  Lille;  in-8^ 

Société  archéologique  du  midi  de  la  France,  à  Toulouse.  — 
Mémoires,  tome  XI,  1*^*  et  2"*  livr.  Toulouse,  1875;  in-4°. 

Giebel  (D''  C.-Q.).  —  Zeitschrift  fiir  die  Gesammten  Natur- 
wissenschaften.  Neue  Folge,  1874,  Band  IX.  Berlin;  10  livr. 
in-8". 

Naturwissenschaftlicher  Verein  zu  Bremen.  —  Abhnnd- 
lungen ,  4.  Bd.,  2  und  5.  Heft.  —  Beilage  zu  den  Abhand- 
lungen,  n°  4.  Brème,  1874-1875:  2  livr.  in-8<'  et  broch.  in-4». 

Verein l'iïr  Geschichteund  Alterlhum  Schlesiens,zu  Breslau. 
—  Zeitschrift,  Bd.  XII,  1.  und  II.  Hefl.  —  Scriptores  rerum 


(4S) 

Silcsiacarum ,  IX.  Bd.  —  Codex  diplomnliciis  Silesiae,  VII. 
Bd.,  "2.  Thcil.  Breslaii,  1874,  1875;  :2  vol.  in-8°  et  2  vol.  in-4". 
K,  iingar.  geologisclie  Anstalt  zii  Budapest.  —  Mitlhei- 
lungen,  Ili.  Band,  1.  iind  ±  Ileft.  —  A  magyar  kir.  foldtani 
intézot  Evkônyve  :  III.  kôtet,  I.,  II.  fiizct;  IV.  kotet,  I.  fuzet. 
Budapest,  1874-1875;  5  fasc.;  gr.  in-8^ 

Académie  des  sciences  de  Cracovie.  —  Dwa  pierwsze  pu- 
bliczne  Posiedzcnia  Akadeinii,  ete.  —  Rocznik  Zarzadu.  Rok, 
1875.  _  Pamietnik  :  wydzial  filologiczny  ,  lom  I ,  i874  ;  wyd- 
zial  niatematyczno,  tom  I,  1874.  —  Rozprawy  :  wydzial 
histor.  filozofic.,  tom  I,  II,  1875-1874;  wydzial  matematyc, 
tom  I,  1874;  wydzial  filologic.,  tom  I,  1874.  —  Scriptores 
Rerum  Polonicarum,  tomi  I,  II.  —  Starodawne  Prawa  Pols- 
kiego  Pomniki,  tom  III,  1874.  —  Monumenta  Medii  Aevi 
Historica  res  gestas  Poloniae  illustrantia,  tomus  I,  1874. — 
Bibliographia  Polska,  XIX.  Stolecia,  tom  I  a  II,  1875-1874. 
—  Lud  :  serya ,  V,  VI,  Vil,  VIII.  —  Sprawozdanie  komisyi 
fizyjograficznéj ,  tom  ôsmy  a  siôdmy,  1875-1875.  —  Nie- 
miecko-Polski  Slownik  Wyrazôw  prawniczych  i  administra- 
cyjnych,  1874.  —  Dzieje  Bezkrolewia  po  skonie  Jana  III,  tom  I, 
4874.  — A.-Z.Helcla:  Pisma  Pozostale,  tom  I. Cracovie;  8  vol. 
et  broch.  in-4°  et  7  vol.  in-8°. 

Verein  fiir  Erdkmide  zu  Darmstadt.  —  Notizblatt  :  1 .  Folge, 
Nr.  41  -46  ;  II.  Folge ,  Jarbg.  MIL,  Nr.  1  -60 ,  Mai  1 857  bis  Juni 
4861;  III.Folge,l  und  2.  Heft,Nr.  1-24;  5.  Heft,  Nr.  145-156. 
Darmstad;  7  liv.  in-8°. 

Die  Pollichia.  —  Nachtrag  zum  XXVIII.  et  XXIX.  Jahres- 
beriebt.  —  Jahresbericbt  XXX-XXXII.  Diirkheim  a.  d.  H., 
1872-1874;  in-8^ 

Oberlausitzische  Gesellschaft  der  Wissenschaften,  Gôrlitz.— 
Neues  Lausitzische  Magazin  :  Jahrg.  1854,  Bd.  XII.,  heft  I,  II 
und  III  ;  Jahrg.  1854,  Bd.  XXXI.,  Heft  I-IV;  Jahrg.  1865,  Bd., 
XLII.  Gorlitz;  9  fasc.  111-8". 

Badîsche  Universilàts  zu  Heidelberg.  —  Thèses,  lectures 


(  46) 

et  discours  universitaires,  1874  et  1875.  Heidelberg,  1875; 
1 1  broch.  in-8°. 

Medicinisch-natîiriv.  Gesellschaft  zu  Jena.  —  Zeitschrift  fiir 
Naturwissenschaft,  neue  Folge,  Band  IL,  Heft  2.  Jéna  1873; 
br.  in-8°. 

K.  Albei'tîis-Universitàt zu Kômgsberg  in  Pr.  —  Verzeich- 
niss  (Winter-Halbjahre,  1873).  —  Index  Lectionum  (per 
hiemem  1873).  Kônigsberg;  2  br.  in-4*'. 

Archiv  der  Mathematik  und  Physik,L\U.  Teil,  5.  und  4. 
Heft.  Leipzig,  1873  ;  2  cah.  in-8". 

Astronomische  Gesellschaft,  in  Leipzig.  —  Vierteljahr- 
schrift,  X.  Jahrgang,  2.  Heft.  Leipzig,  1873;  in-8^ 

K.  Bayer ische  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Mûnchen. 

—  Ueber  den  religiôsen  Charakter  des  griechischen  Mythos 
von  Dr.  Conrad  Bursian.  —  Monographie  der  Sapindaceen- 
Gattung  Serjania  von  L.  Radlkofer.  Munich,  1875;  br.  et  vol. 
in-4^ 

K.  h.  Akademie  der  Wissenschaften  in  Prag.  —  Sitzungs- 
berichte.  Jahrg.  1 874. — Abhandlungen  vom  Jahre  1 874,  Sechste 
Folge,  Band  VIL  Prague  1874-1875;  voL  in-8°  et  vol.  in-4^ 

K,  K.  Sternwarte  in  Wien.  —  \nna\en ,  iuhr.  1875,  dritter 
Folge,  Band  25.  Vienne  1875;  br.  in-8<'. 

Anthropologische  Gesellschaft  in  Wien.  —  Mittheilungen, 
V.  Ed.,  Nr.  1-3.  Vienne,  1875,  feuilles  in-8°. 

K.  K.  geologische  Reichanstalt  in  Wien.  —  Abhandlungen 
Bd.  VIIL,  Heft  1.  -  Jahrbuch ,  Jahrg.  1875,  XXV.  Bd.,  Nr.  1. 

—  Verhandlungen,  Nr.  1-3.  Vienne  1873;  vol.  gr.  in-i%  et 
5  feuilles  petit  in-4*'. 

K.  Akademie  der  Wissenschaften  in  Wien.  —  Anzeiger 
Jahrg.  1875,  Nr.  I-XVI.  Vienne;  feuilles  in-8^      ^ 

K.  K.  central-Anstalt  fur  Météorologie  und  Erdmagnetis- 
mus.  —  Jahrbiichcr  fiir  1875,  neue  Folge,  Band.  X.  Vienne, 
1873;in-4^ 

Physikal-Medicin.  Gesellschaft  zu  Wiirzburg.  —  Verhand- 


(  ^7  ) 

lungen,  II.  Bnnd,  Nro.  l-u,  14-2^2.—  Neiie  Folge,  VIH  Band,  5. 
und4.  Hcft.  Erlangen  i  851, 1852  iind  VVurtzbourg,  1875;  5  liv. 
111-8°. 

ffistorischer  Verein  fur  Untcrfrankemind  Aschaffcnhurg 
zu  Wiirzburg.  —  Archiv.  Bd.  II,  1854;  III,  1855;  IV,  1857, 
2  und  0.  Heft;  Bd.  V  bis  X,  1858-1850;  Bd.  XXIII,  Heft  I, 
1875.  Wurtzbourg;  22  fasc.  in-8''. 

Mendcleeff  (D.).  —  Recherches  expérimentales  sur  l'ëlasli- 
cité  des  gaz,  1*^'  vol.  S'-Pétersbourg,  1875  ;  in-4°. 

K.  Universiicit  in  Dorpat.  —  Meteorol.-Beobachtungen  im 
Jahre  1874,  II.  Band,  4.  Heft.  Dorpat,  1875;in-8°. 

Société  chimique  de  S'-Pétersbourg.  —  Journal,  tome  VII, 
n"'  5  et  6.  S'-Pétersbourg,  1875;  2  liv.  in-8°.  (En  russe.) 

Motard  (  Victor).  —  La  vie  et  les  œuvres  de  Peter  Christen 
Asbjoernsen,  par  Alfred  Larsen,  suivie  d'un  aperçu  bibliogra- 
phique par  J.  B.  Halvorsen.  Christiania,  1875;  br.  in-4". 

Bureau  géologique  de  la  Suède,  à  Stockholm.  —  Carte  géo- 
logique; liv.  50  à  55,  avec  les  renseignements.  —  Glaciala 
bildningar  i  Sverige ,  I.  {Gumœlius  Otto).  —  Om  Rullstens- 
bildningar  [Hummel,  /).).  Stockholm ,  1874,  1875;  4  cartes 
in-fol.  et  6  br.  in-8''. 

la  Cour  [Paul). —  Note  sur  un  système  télégraphique  «  per- 
mettant la  production  d'un  grand  nombre  de  signaux  simples 
par  un  fil  conducteur  unique.  »  Copenhague,  12  fév.  1875; 
feuillet  in-4°. 

Académie  royale  des  sciences  de  Lisbonne.  —  Journal 
n°  XVIil,  juin  1875.  Lisbonne  ;  fasc.  in-8°. 

Ateneo  propagculor  de  los  ciencias  naturales  de  Madrid.  — 
Reglamento.  Madrid,  1874;  br.  in-8''. 

Millier  [Albert).  —  Ein  Fund  vorgeschichtlicher  Steinge- 
râthe  bei  Base!.  Bâle,  1875;  br.  in-4''  avec  photogr. 

Commission  géologique  fédérale  de  la  Suisse,  à  Berne.  — 
3Iatériaux  pour  la  carte  géologique  de  la  Suisse,  XIIP  liv.  1875: 
carte  géologique  et  profils  du  Sœnlis,  2  feuilles  et  2  planches 
de  profil. 


(48) 

Société  de  géographie  de  Genève.  —  Le  Globe,  journal  géo- 
graphique, t.  XIII,  liv.  5  et  4,  1874-75.  Genève  ;  in-S**. 

Société  d'histoire  de  la  Suisse  romande  à  Lausanne.  — 
Mémoires  et  documents,  tome  XXIX.  (Documents  relatifs  à 
l'histoire  du  Vallais  recueillis  par  l'abbé  J.  Gremaudjt.  I,  300- 
1255).  Lausanne,  1875  ;  vol.  in-8°. 

Gozzadini  (Le  comte  J.).  —  De  quelques  mors  de  cheval 
italiques  et  de  l'épée  de  Ronzano  en  bronze.  Bologne,  1875; 
br.  in-4°. 

Filopanti  (Quiriciis).  —  Indication  de  quelques  nouvelles 
idées  scientifiques  exposées  dans  son  ouvrage  «  L'Universo.  > 
Bologne,  1875;  br.  in-8°. 

Mensini  (Jacopo).  —  La  Spia  Sismica.  Firenze,  1875;  br. 
in-8''. 

Brioschi  (Francesco).  —  Sur  l'équation  du  cinquième  degré. 
Paris  ;  mars  1875;  br.  in-4°.  —  Sopra  un  nuovo  punto  di  corre- 
lazione  fra  le  forme  binarie  del  quarto  grado  e  le  ternarie 
cubiche.  Milan,  février  1875;  br.  ia-4". 

Omhoni  {Giovanni).  —  Di  alcuni  oggetti  preislorici  délie 
caverne  di  Vélo  nel  Veronese.  Milan,  1875  ;  br.  in-8°. 

Fondazione  scientifica  Cagnola.  —  Atti,  vol.  VI,  parte  I, 
1872.  —  Sul  Caelio  Vitellino.  Memorie  del  concordo,  1857. 
(Davide  Nava  e  Gio.  Francesco  Selmi).  Milan  ;  2  fasc.  in-8°. 

R.  Osservatorio  di  Brcra  in  Milano. —  Pubblicazioni,n^  10. 
(Suir  eclissi  solare  totale  del  5  giugno,  1259.)  Pise,  1875; 
fasc.  in-4''. 

Bullettino  del  vulcanismo  ilaliano,  anno  H,  1875,  fasc.  1 
e  2,  IV  eV.  Rome,  187o;in-8". 

Bullettino  nautico  e  geographico  in  Borna  ^  vol.  VI,  1875, 
n°  10.  Rome  ;  feuille  in-4°. 

Corrispondenza  scie?iti/ica  in  Roma ,  vol.  VIII,  1875,  n'  24 
e  25.  Rome;  feuilles  in-4*'. 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 

DES 

LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIQUE. 

187S.  —  No  8. 


CLASSE   DES    SCIENCES. 


Séance  du  7  août  1875. 

M.  A.  BiuALMOxM,  directeur  et  président  de  rAcadémie. 

Sont  présents  :  MM.  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van  Bene- 
den,  H.  Nyst,  Melsens,  F.  Duprez,  G.  Dewalque,  E.  Qiie- 
lelet,  xAL  Gloesener,  E.  Candèze,  F.  Donny,  Cli.  Monligny, 
Sleichen,  Éd.  Dupont,  Éd.  Morren ,  Éd.  Van  Beneden , 
C.  Malaise,  F.  Folie,  Alph.  Briart  et  F.  Plateau,  membres; 
Th.  Sclnvann,  E.  Catalan  et  Aug*  Bellynck,  associés; 
Éd.  Mailly  et  J.  De  Tilly ,  correspondants. 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  A 


(  SO  ) 
CORRESPONDANCE. 


M.  le  directeur  annonce  que  M.  le  secrétaire  perpétuel 
Fa  prié  d*ex primer  à  la  classe  ses  regrets  de  ne  pouvoir 
prendre  place  au  bureau  à  cause  de  son  séjour  à  Paris 
comme  délégué  du  gouvernement  au  Congrès  international 
des  sciences  géographiques. 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  adresse,  pour  la  biblio- 
thèque de  l'Académie  :  l"*  un  exemplaire  des  procès-ver- 
baux de  la  conférence  i  nier  nationale  du  mèlre  ;  2"  un 
exemplaire  du  mémoire  couronné  envoyé  par  M.  Léon 
Frédéricq,  élève  de  l'Université  de  Gand,  au  concours  uni- 
versitaire de  1874-1875,  en  réponse  à  la  question  de  méde- 
cine [matières  générales).  —  Remercîments. 

—  Le  conseil  général  d'administration  des  hospices  et 
secours  de  la  ville  de  Bruxelles  demande  l'appréciation  de 
la  classe  au  sujet  des  meilleurs  moyens  de  mettre  à  l'abri 
des  atteintes  de  la  foudre  les  bâtiments  récemment  cons- 
truits à  l'hôpital  Saint-Pierre,  rue  Haute,  en  la  dite  ville,  et 
notamment  en  ce  qui  concerne  le  nouveau  système  de  para- 
tonnerres dont  M.  le  professeur  Melsens  est  l'auteur.  — 
Renvoi  de  cette  lettre  à  la  Commission  des  paratonnerres. 

—  L'Académie  des  sciences  de  Cracovie  transmet  toutes 
ses  publications  et  demande  l'échange  avec  celles  de  la 
Compagnie.  —  Accordé. 

—  La  Société  géologique  de  France  annonce  qu'elle 
tiendra,  cette  année,  sa  réunion  extraordinaire  à  Genève 
et  à  Chamounix,  à  partir  du  29  août. 


(  SI  ) 

—  iM.  F.  Duprez  présente  le  résumé  de  ses  observations 
météorologiques  faites  à  Gand,  en  1874-.  M.  Cavalier  trans- 
met un  résumé  semblable,  pour  Ostende,  pendant  le  mois 
de  juillet  dernier. 

—  L'Académie  royale  des  Lyncées  de  Rome,  l'Académie 
royale  des  sciences  de  Bavière,  à  Munich,  la  Société  des 
naturalistes  du  plateau  du  Rhin  «  Die  Pollichia  d,  à  Durk- 
heim,  remercient  pour  le  dernier  envoi  annuel  de  publi- 
cations de  la  Compagnie. 

La  section  historique  de  l'Institut  luxembourgeois, 
l'Université  d'Heidelberg,  l'Académie  royale  des  sciences 
de  Bavière, à  Munich, le  bureau  géologique  de  la  Suède, l'In- 
stitut royal  géologique  de  Hongrie,  à  Budapest, et  le  Musée 
public  de  Buenos-Ayres ,  adressent  leurs  derniers  travaux. 

—  M.  Melsens  présente,  au  nom  de  M.  G.  A.  Hirn, 
associé,  un  ouvrage  intitulé  :  Théorie  mécanique  de  la 
chaleur  {V  partie,  tome  I",  Z'  édition).  In-8\ 

M.  Éd.  Morren  fait  hommage  d'une  brochure  de  sa  com- 
position, portant  pour  titre  :  Charles  de  l'Escluse,  sa  vie  et 
ses  œuvres,  4526-^609.  In-8\ 

M.  G.  Dewalque  présente  la  traduction  qu'il  vient  de 
publier  d'un  travail  de  M.  T.  Sterry  Hunt,  intitulé  :  His- 
toire  des  noms  cambrien  et  silurien  en  géologie.  A  cette 
occasion  M.  Dewalque  expose  les  circonstances  qui  l'ont 
engagé  à  entreprendre  cette  traduction,  et  rappelle  quel- 
ques faits  relatifs  à  l'histoire  des  terrains  anciens  de  la 
Belgique  et  à  la  priorité  des  travaux  d'André  Dumont. 
Ayant  exposé,  il  y  a  quelques  jours,  à  la  Société  géologique 
de  Liège  les  mêmes  considérations,  celles-ci  paraîtront 
dans  le  Bulletin  de  cette  Société,  et  il  demande  seulement 
que  mention  en  soit  faite  dans  la  correspondance  de  la 
classe.  —  Accordé. 


(52) 

M.  Dewalque  offre  ensuite,  au  nom  du  D'  von  Lasaulx, 
professeur  de  minéralogie  à  l'Université  de  Breslau,  un 
exemplaire  de  son  livre  intitulé  :  Elemente  der  Pétrogra- 
phie. ïn-8^ 

M.  L.  Saltel  adresse  un  exemplaire  de  sa  note  intitulée: 
Influence  des  points  multiples  sur  le  degré  de  la  courbe 
de  rebroiissemenl  de  la  polaire  réciproque  d'une  surface 
donnée.  In-8°. 

M.  le  D'  Gustave  Hinrichs ,  professeur  à  l'Université  de 
l'État  de  lowa  (Ïowa-City,  lowa,  E.  U.),  offre  le  n^  13, 
pesant  2,665  grammes,  de  sa  collection  de  météorites 
d'Iowa  Counly,  du  lî2  février  1875. 

La  classe  vote  des  remercîments  aux  auteurs  des  dons 
précités.  Elle  exprime  le  désir  que  des  renseignements 
soient  demandés  à  M.  Hinrichs  au  sujet  de  la  chute  de  la 
météorite  qu'il  a  offerte  à  la  Compagnie. 

• —  Les  travaux  manuscrits  suivants  seront  l'objet  d'un 
examen  : 

1°  Note  sur  les  tremblements  de  terre  en  ^872,  avec 
suppléments  pour  les  années  antérieures  de  i843  à  1874 
{XXX'  relevé  annuel);  par  M.  Alexis  Perrey.  — Commis- 
saires :  WM.  Malaise,  Montigny  et  Duprez. 

2°  Sur  les  propriétés  de  la  surface  de  contact  d'un 
solide  et  d'un  liquide.  Rectification  d'un  passage  de  ma 
note  précédente;  par  G.  Van  der  Mensbrugghe.  —  Com- 
missaires :  MM.  J.  Plateau  et  Duprez. 

5°  Diagnoses  de  cucurbitacées  nouvelles  et  observations 
sur  les  espèces  critiques,  1"  fascicule  (nouvelle  rédaction), 
par  M.  Alfred  Cogniaux.  —  Commissaires  :  MM.  Morren, 
Bellynck  et  Crépin. 

4°  Sur  un  aérostat  à  voiles,  par  L.-H.-S.  Codron,  à  Pa- 
ris. —  Commissaire  :  M.  Montigny. 


(  S3) 

5°  Théorie  nouvelle  pour  l'étude  de  la  nature,  par 
M.  Waltier,  à  Lille.  —  Commissaires  :  MM.  Montigny  et 
Ern.  Quetelet. 


CONCOURS  DE  1875. 


La  classe  reçoit,  en  réponse  à  la  cinquième  question 
du  programme  de  concours  de  Tannée  actuelle  :  Faire  la 
description  du  bassin  houiller  de  la  province  de  Liège,  un 
second  mémoire  manuscrit  avec  planches.  Ce  travail ,  ac- 
compagné d'un  billet  cacheté  portant  pour  devise  :  Omnia 
vincit  labor  improbus,  est  également  renvoyé  à  l'examen 
de  MM.  Dewalque,  Briart  et  Cornet. 


RAPPORTS. 


Nouvelles  observations  sur  la  flore  des  psammites  du 
Condroz,  par  M.  F.  Crépin,  correspondant  de  l'Aca- 
démie. 

etappoÊ'l  de  .If.   €i.   Mfetcalfjuc 

«  La  note  dont  je  viens  de  rappeler  le  titre,  a  particu- 
lièrement trait  à  la  controverse  élevée  enlre  M.  Gilkinet  et 
notre  honorable  correspondant  au  sujet  d'une  plante  fos- 
sile que  M,  Crépin  a  décrite  sous  le  nom  de  Psilophyton 
Condrusorum  et  que  M.  Gilkinet  croit  être  une  fougère 
du  genre  Sphenopleris. 

Je  n'ai  rien  à  dire  du  fond,  c'est-à-dire  des  arguments 


(54) 
que  l'auteur  fait  valoir,  sinon  pour  maintenir  sa  première 
opinion,  au  moins  pour  contester  le  classement  de  sa 
plante  parmi  les  Sphenopteris  :  ceci  est  l'affaire  des  spé- 
cialistes; et  l'on  peut  croire  que  ces  arguments  seront,  s'il 
y  a  lieu,  contestés  par  d'autres  et  ramenés  à  leur  juste  va- 
leur. Je  me  bornerai  à  faire  remarquer  que  l'auteur,  créant 
pour  cette  plante  un  genre  nouveau  sous  le  nom  de  Rha- 
cophytum,  a  laissé  échapper  l'occasion  de  le  caracté- 
riser. 

Mais  la  note  de  M.  Crépin  nous  suggère  d'autres  ré- 
flexions. L'article  de  M.  Gilkinet,  dont  la  classe  a  voté 
l'impression  dans  sa  séance  de  mai ,  a  paru  dans  le  Bulle- 
tin vers  la  lin  de  ce  mois,  plusieurs  jours  avant  notre 
séance  du  5  juin  dernier.  L'auteur  n'y  fait  pas  la  moindre 
allusion  :  sa  réponse  s'adresse,  non  au  contradicteur  dont 
il  a  rencontré  la  note  ici,  mais  à  M.  le  professeur  Schim- 
per,  qu'il  a  eu  l'occasion  d'entretenir  de  la  question,  le  7 
ou  le  8  mai.  Je  me  hâte  d'ajouter  que  la  note  de  M.  Crépin 
porte  la  date  du  12  mai. 

Comme  on  l'a  déjà  fait  observer,  on  pourrait  se  deman- 
der s'il  est  bien  convenable  de  donner  place  dans  notre 
Bulletin  à  une  controverse  qui  s'engage  à  propos  d'une 
conversation,  au  sujet  de  laquelle  les  arguments  de  la 
personne  absente  pourraient  avoir  été  mal  compris  ou 
inexactement  rapportés,  mais  je  crois  inutile  d'entrer 
dans  l'examen  de  cette  question.  Je  ne  chercherai  pas 
davantage  à  savoir  si  M.  Schimper  est  satisfait  de  l'exposé 
public  qui  est  fait  d'une  conversation  privée,  ni  si  l'auteur 
n'aurait  pas  attribué  à  cet  interlocuteur  des  arguments 
présentés  par  M.  Gilkinet,  qui  accompagnait  l'éminent 
professeur  de  Strasbourg  dans  sa  visite  à  Bruxelles.  J'ad- 
mets que  l'auteur  a  ses  apaisements  sur  ces  points. 


(53) 

La  seule  observation  qui  me  semble  devoir  être  présen- 
tée à  l'Académie  est  celle-ci  :  rauleur  a  été  incomplet,  ne 
fut-ce  qu'au  point  de  vue  historique.  Un  correspondant  de 
l'Académie  peut  moins  qu'un  autre  laisser  dans  l'oubli  un 
travail  qui  a  paru  dans  nos  publications;  je  suis  persuadé 
que  si  son  attention  avait  été  portée  sur  ce  point  avant 
qu'il  donnât  lecture  d'une  note  rédigée  depuis  trois  se- 
maines, l'auteur  se  serait  lui-même  aperçu  de  la  lacune. 
En  conséquence,  je  crois  qu'il  verra  sans  peine  la  classe 
le  prier  de  compléter  son  article  en  donnant  au  travail 
publié  par  son  contradicteur  la  place  qui  lui  revient  à  tous 
égards,  d 

Rapport  €te  M.  tic  Koninck. 

«  La  notice  de  M.  Crépin  a  pour  but,  d'une  part,  de 
compléter  celle  qu'il  a  présentée  à  l'Académie  au  commen- 
cement de  cette  année  et,  de  l'autre,  de  répondre  à  quel- 
ques observations  qui  lui  ont  été  faites  par  M.  Schimper, 
relativement  à  la  plante  fossile  désignée  par  lui  sous  le 
nom  de  Psilopliyton  Condrusorum. 

]\J.  Crépin,  se  rendant  en  partie  aux  arguments  de 
Péminent  professeur  de  Strasbourg,  admet  que  la  plante 
qu'il  a  décrite  n'est  pas  un  véritable  Psilophyton  et  in- 
dique les  motifs  qui  l'ont  engagé  à  changer  d'opinion.  Il 
n'admet  pas  toutefois  que  ce  soit  une  Sphénopféridée  et  il 
crée  pour  elle  un  nouveau  genre  sous  le  nom  de  Raco- 
phyton. 

Je  n'ai  pas  d'opinion  à  émettre  en  faveur  ni  de  l'un  ni 
de  Pautre  des  champions  en  présence. 

Je  me  borne  à  constater  que  la  controverse  est  faite 
en  termes  convenables  et  courtois.  Je  propose  l'insertion 
de  la  notice  de  M.  Crépin  dans  nos  Bulletins.  » 


(  S6) 


Rnpyoft  de  M.   Ed.   Dupont. 

«  La  paléontologie  végétale  fut  longtemps  négligée  chez 
nous.  Nos  bassins  houillers  appelaient  cependant  d'impor- 
tants travaux  et  semblaient  promettre  une  riche  moisson 
aux  botanistes  qui  en  entreprendraient  l'étude.  Plusieurs 
autres  de  nos  terrains  contiennent  aussi  des  restes  abon- 
dants de  notre  ancienne  végétation.  On  pouvait  prévoir 
qu'on  [rencontrerait  dans  la  série  géologique  belge  de 
nombreux  matériaux  pour  la  reconstitution  des  flores  fos- 
siles, de  môme  qu'elle  a  fourni  de  si  importants  éléments 
pour  la  paléontologie  animale. 

Aussi  l'Académie  a-t-elle  accueilli ,  avec  les  encourage- 
ments les  plus  bienveillants,  les  travaux  que  l'abbé  Coe- 
mans  commença  à  entreprendre  sur  cette  intéressante 
partie  de  notre  géologie. 

Lorsque  cette  science  fut,  à  la  mort  de  notre  regretté 
confrère,  menacée  d'un  nouvel  abandon,  M.  Crépin,  qui 
s'était  signalé  par  d'intéressantes  études  morphologiques 
et  notamment  par  sa  flore  de  la  Belgique,  répondit  à  l'ap- 
pel qui  lui  fut  fait. 

L'abbé  Coemans  avait  légué  au  Musée  royal  d'histoire 
naturelle  la  collection  qu'il  avait  formée  et  qui  comptait 
déjà  une  riche  série  d'empreintes  houillères.  Cette  col- 
lection servit  de  noyau  à  celle  qui  remplit  aujour- 
d'hui l'une  des  galeries  de  cet  établissement.  M.  Crépin 
s'occupait  activement  à  multiplier  par  de  nouvelles  et 
fructueuses  recherches,  à  préparer  et  à  déterminer  ces 
spécimens  d'une  flore  qui  nous  intéresse  à  tant  de  titres, 
quand  son  collègue  au  Musée,  M.  Mourlon,  lui  signala 


(§7) 
d'importants  gîtes  de  végétaux  fossiles  qu'il  venait  de 
découvrir  à  Évieux  sur  TOurthe  dans  l'étage  des  psam- 
mites  du  Condroz,  c'est-à-dire  à  la  partie  supérieure  du 
terrain  devonien.  Ces  gîtes  fournirent  à  notre  savant  con- 
frère d'abondants  matériaux  et  il  crut  devoir  momenta- 
nément interrompre  ses  recherches  sur  notre  flore  houil- 
lère pour  se  livrer  à  l'étude  d'une  florule  qui,  à  l'intérêt 
d'être  entièrement  nouvelle  pour  le  pays,  joignait  celui 
d'avoir  précédé  l'époque  où  nos  bassins  houillers  se  for- 
mèrent. 

La  florule  devonienne  d'Évieux  était  composée,  d'après 
les  premières  recherches  de  notre  confrère  (1),  de  quatre 
types:  trois  fougères  —  Palaeopteris  hibernica  représentée 
non  par  la  forme  type  d'Irlande,  mais  par  une  variété  iné- 
dite à  plus  petites  pinnules;  Triphyllopteris  elegans  déjà 
signalée  en  Thuringe;  Sphenopteris  flaccida,  type  inédit 
—  enfin,  une  forme  étrange  que  l'auteur  rapprocha  du 
genre  Psilop/ujton  de  Dawson  à  cause  de  la  disposition 
des  organes  de  fructification. 

Le  rapprochement  de  cette  dernière  forme  fut  contesté 
par  M.  Schimper  qui  croit  y  reconnaître  un  Sphenopten's, 
fougère  voisine  du  groupe  vivant  des  Trichomanes.  Une 
discussion  eut  lieu  entre  l'illustre  paléontologiste  de  Stras- 
bourg et  notre  savant  confrère.  L'opinion  du  premier  fut 
présentée  récemment  à  l'Académie  par  M.  Gilkinet  dans 
une  note  critique  accompagnée  de  nombreuses  citations 
bibliographiques  et  de  planches  empruntées  en  partie  à 
l'ouvrage  de  Dawson  et  aux  Mémoires  de  l'Académie  de 
Vienne  (2). 

(1)  BuU.  de  rAcalémie  roy.  de  Belgique,  îl^  sér.,  t.  XXXVIII,  p.  556. 

(2)  Jbid..  l.  XXXIX,p.39S. 


(§8) 

Celte  note,  comme  on  pouvait  le  prévoir,  n'apporte  au- 
cun contingent  nouveau  à  cette  florule. 

Dans  le  travail  qu'il  nous  soumet  aujourd'hui,  M.Crépin 
fait  connaître  le  résultat  de  ses  nouvelles  études  sur  les 
importantes  collections  qu'il  a  su  réunir,  et  il  enrichit  la 
florule  d'Évieux  de  deux  nouveaux  types  :  un  Calamités 
qu'il  ne  détermine  pas  spécifiquement  et  une  Lycopodiacée 
qui  paraît  se  rapporter  au  Lepidodendron  nothiim  Ung.  de 
Saaifeld  en  Thuringe. 

Il  y  examine  de  nouveau  le  type  aberrant  qu'il  a  décrit 
l'année  dernière  sous  le  nom  de  Psilophyion  Condnisorum 
et  cet  examen  l'amène  à  rencontrer  les  objections  de 
M.  Schimper.  Il  confirme  que  le  mode  de  fructification 
de  ce  végétal  litigieux  sur  les  liges  duquel  on  no  voit  ni 
feuilles  ni  écailles,  n'a  jamais  été  signalé  dans  le  groupe 
des  Sphoiopferisj  tandis  que  ce  mode  de  fructification  ne 
difl'ère  morphologiquement  de  celle  du  Psilophyion  que 
par  des  sporanges  plus  petits; 

Que  les  ramuscules  y  sont  terminés  en  crochet,  ce  qui 
ne  se  rencontre  jamais  dans  les  Trichomanes  dont  les 
Sphenopteris  doivent  être  rapprochés  et  où  les  extrémités 
des  pinnules  sont  toujours  droites; 

Que  le  premier  groupe  de  ramnles  sur  les  ramifications 
secondaires  y  est  inférieur,  tandis  que  dans  les  Tricho- 
manes la  première  pinnule  est  supérieure; 

Que  le  premier  ramule  y  est  intérieur;  dans  les  Tricho- 
manes, la  première  division  des  pinnules  est  extérieure. 

Ces  faits  éloignent  complètement  celte  forme  des  Sphé- 
noptéridées.  L'auteur  persiste  donc  à  se  refuser  à  y  voir 
les  restes  d'une  fougère,  comme  le  voudrait  M.  Schimper. 

Cependant  la  constitution  de  l'axe  de  la  tige  qui  est  ici 
continu ,  sépare  ce  type  des  Psilophyton  dont  le  mode  de 


(59) 
fructificalion  le  rapproche.  M.  Crépin  se  croit  dès  lors  au- 
torisé, comme  noire  éminent  confrère,  M.  de  Koninck, 
vient  de  le  dire,  à  lui  donner  une  dénomination  générique 
propre ,  celle  de  Rhacophylon,  ce  qu'une  réserve  qu'on  ne 
peut  trop  approuver  dans  les  sciences  descriptives,  l'avait 
empêché  de  faire  dans  sa  première  note  où  il  avait  cru  de- 
voir utiliser  provisoirement  le  genre  Psilophyton  de  Dawson. 

L'auteur  relève  aussi,  à  propos  de  sa  variété  niinor  du 
Palaeopteris  hibernica,  une  aberration  qu'a  produite  une 
lecture  cursive  de  son  premier  travail  et  qu'on  voit  à  re- 
gret ligurer,  quoique  en  partie  rectifiée  déjà,  dans  nos 
Bulletins  au  milieu  de  la  note  critique  prémentionnée. 

Tel  est  en  substance  l'état  de  la  question  que  les  études 
de  M.  Crépin  ont  fait  naître.  Comme  nous  pouvions  nous  y 
attendre,  ces  flores  anciennes  qui  sont  si  différentes  de  la 
nature  actuelle  et  qui  ne  se  présentent  en  outre  qu'à  l'état 
de  débris  fragmentaires,  ne  pouvaient  tarder  à  créer  des 
divergences  d'opinions  et  à  donner  lieu  à  des  discussions 
entres  botanistes. 

La  note  que  notre  savant  confrère  nous  présente  té- 
moigne des  recherches  sérieuses  et  étendues  qu'il  pour- 
suit et  qui  ont  doté  notre  pays  de  la  première  collection 
de  paléontologie  végétale,  digne  de  nos  terrains,  qui  ait 
encore  été  formée  chez  nous.  J'ai  l'honneur  de  proposer 
l'impression  de  cet  intéressant  travail  dans  nos  Bulletins.  » 

La  classe  décide  le  renvoi  de  cette  note  à  l'auteur. 


—  MM.  Dewalque,  Dupont  et  Briart  donnent  lecture  de 
leurs  rapports  sur  la  proposition  de  publier  une  nouvelle 
carte  géologique  du  pays,  soumise  par  M.  Dewalque,  dans 
la  dernière  séance. 


(60) 

La  classe  décide,  à  cause  de  Timportance  du  sujet,  de 
ne  se  prononcer  sur  les  conclusions  des  rapports  que  dans 
sa  prochaine  séance. 


Note  sur  un  nouvel  instrument  astronomique ,  par 
M.  Journeaux-Duhanïel. 

Rapport  de  M,  Et'u.  Qitelelet. 

«  M.  Journeaux-Dnhamel  a  soumis  à  l'appréciation  de 
TAcadémie  un  instrument  construit  par  lui  et  destiné  à 
l'observation  des  taches  du  soleil.  Cet  instrument  consiste 
en  un  miroir  métallique  légèrement  concave,  mobile  au- 
tour d'un  axe  horizontal,  d'environ  5  centimètres  de  dia- 
mètre et  d'un  très-long  foyer  (plus  de  6  mètres).  Quand 
on  reçoit  sur  ce  miroir  un  faisceau  de  rayons  solaires,  il 
se  produit  par  réflexion  une  image  du  soleil;  en  plaçant 
alors  au  foyer  un  écran,  on  peut  aisément  étudier  le  disque 
solaire  et  les  taches  qui  s'y  montrent  fréquemment. 

Ce  petit  appareil  est  assez  élégant  et  peut  être  utile 
dans  certaines  circonstances,  mais  le  principe  de  sa  con- 
struction ne  peut  pas  être  regardé  comme  nouveau.  J'ai, 
en  conséquence,  l'honneur  de  proposer  à  la  classe  de  se 
borner  à  voter  des  remercîments  à  l'auteur  pour  sa  com- 
munication. » 

Mtnppoft  fie  W.  jr.  Linyfe. 

>  a  Je  me  rallie  entièrement  aux  conclusions  de  mon 
honorable  confrère  M.  Ern.  Qiietelet.  La  note  de  i\L  Jour- 
neaux-Duhamel  ne  me  paraît  pas  de  nature  à  être  insérée 
dans  un  recueil  académique.  » 


(61  ) 


Rappot'l  de  9t.    F.   Folie. 

«  La  présentation  de  mon  rapport  sur  le  miroir  solaire 
de  M.  Journeaux-Duhamel  a  été  retardée  par  suite  de  la 
nécessité  où  je  me  suis  trouvé  d'attendre  des  circonstances 
favorables  pour  l'observation  des  taches  solaires  au  moyen 
de  ce  petit  instrument.  Le  ciel  a  malheureusement  été  fort 
souvent  couvert  tandis  qu'il  y  avait  des  taches;  je  suis 
parvenu  cependant  à  en  distinguer  très-nettement  pendant 
une  éclaircie.  Dans  ces  dernières  semaines  le  temps  a  été 
plus  beau,  mais  les  taches  avaient  disparu  de  la  surface 
du  soleil.  Une  compensation  inattendue  s'est  présentée 
grâce  à  la  présence  de  deux  facules  sur  le  bord  occidental 
de  l'astre;  ces  facules  étaient  visibles  sur  l'image,  ce  qui 
prouve  la  grande  netteté  de  celle-ci. 

Ce  petit  miroir  pourra  donc  rendre  de  grands  services 
dans  les  cours  de  cosmographie,  dont  bien  peu  ont  un 
télescope  à  leur  disposition. 

Mais  là  ne  réside  pas  surtout,  d'après  moi,  le  mérite 
de  l'invention  de  M.  Journeaux.  Je  le  trouve  plutôt  dans 
l'idée  même  qu'il  a  eue  de  tâcher  d'obtenir,  au  moyen 
d'un  miroir  unique,  une  image  du  soleil  suffisamment 
grande  et  nette  pour  pouvoir  être  observée  à  l'œil  nu,  et 
dans  la  réalisation  pratique  qu'il  a  su  donner  à  cette 
idée. 

On  sait  les  difficultés  que  présente  la  taille  des  miroirs 
de  télescope,  difficultés  telles  que  Gregory,  Newton,  Hers- 
chell  et  d'autres  astronomes  ou  physiciens  célèbres  ont 
taillé  eux-mêmes  leurs  miroirs;  or  un  miroir  télescopique 
de  15  centimètres  de  diamètre  et  de  2  m.  de  distance  fo- 
cale donnerait  une  image  de  \  V2  cent.,  qui  serait  éblouis- 


(62) 

santé  et  brûlerait  même  un  écran  de  carton;  il  fallait  donc 
agrandir  cette  image  en  donnant  au  miroir  une  courbure 
excessivement  faible,  et  un  très-petit  diamètre  pour  éviter 
les  aberrations  de  sphéricité. 

Telle  a  été  l'idée  de  M.  Journeaux,  et  il  Ta  réalisée  par 
lui-même  avec  beaucoup  d'habileté  manuelle. 

Ses  miroirs  ont  5  cent,  de  diamètre,  et  de  6  à  iO  m.  de 
distance  focale,  ce  qui  fait  varier  la  grandeur  de  l'image  de 
7à9cent.,tout  en  lui  laissant  toujours  une  neltelé parfaite. 

L'inventeur  parviendra  peut-rêtre  à  tirer  parti  de  son 
idée  pour  doter  les  amateurs  d'astronomie  d'un  télescope 
économique,  bon  et  durable;  il  rendrait  ainsi  un  grand 
service  à  la  vulgarisation  de  la  science. 

En  résumé  l'appareil  de  M.  Journeaux  m'a  paru  neuf, 
ingénieux  et  utile;  et  j'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  classe, 
avec  mes  honorables  confrères,  d'adresser  des  remercî- 
ments  à  l'auteur  de  cette  intéressante  invention.  » 

Conformément  aux  conclusions  de  ces  rapports,  des 
reraercîments  ont  été  votés  à  M.  Journeaux-Duhamel. 


Fragments  sur  le  calcul  numérique  (2*^  partie); 
par  M.  J.  C.  Houzeau. 

Rappoi't   de   M,   F.  Folie. 

a  Notre  savant  confrère  M.  Houzeau  s'occupe,  dans  le 
nouveau  fragment  qu'il  vient  d'adresser  à  la  classe,  du 
calcul  numérique  dans  les  opérations  arithmétiques. 

Il  les  distingue,  au  point  de  vue  de  leur  étendue,  en 
cursives,  communes  et  laborieuses;  au  point  de  vue  de 


(63) 

leur  nature,  en  opérations  dont  le  résultat  est  du  même 
ordre  (addition  et  soustraction),  ou  non  (multiplication, 
division,  extraction  de  racines),  que  les  données.  Après 
avoir  insisté  avec  raison  sur  l'importance  qu'il  y  a,  dans 
ces  dernières  surtout,  à  ne  tenir  compte  que  des  chiffres 
utiles  à  l'obtention  du  résultat  final,  il  l'ait  remarquer  que, 
selon  que  l'on  veut  obtenir  les  premiers  ou  les  derniers 
chiffres  avec  exactitude,  on  doit  opérer  suivant  le  mode 
descendant  ou  suivant  le  mode  ascendant. 

Il  donne  ensuite  un  exposé  très-complet  des  différents 
procédés  d'addition  dans  les  deux  modes. 

Dans  la  soustraction,  l'auteur,  après  avoir  indiqué  un 
procédé  peu  avantageux,  selon  nous,  et  qui  consistée 
inscrire  colonne  par  colonne  chaque  reste  positif  ou  né- 
gatif, puis  à  transformer  le  résultat  en  un  nombre  positif, 
ce  qui  constitue  une  double  opération,  mentionne  natu- 
rellement aussi  le  procédé  par  complément;  et,  dans  celui- 
ci,  il  commet  à  nos  yeux  un  grave  oubli  en  ne  posant  pas 
cette  règle  qnhin  complément  doit  être  pris  mentalement^ 
et  jamais  écrit  Ç);  il  est  obligé  ainsi  à  perdre  du  temps  à 
récriture  de  ce  complément. 

Une  remarque  grammaticale  que  nous  communiquerions 
volontiers  à  M.  Houzeau ,  s'il  n'habitait  la  Jamaïque,  est 
celle-ci  :  il  emploie  le  mot  soustrahende,  comme  on  dit 


(*)  Nous  avons  posé  depuis  longtemps  celle  règle  dans  nos  nouvelles 
tables  des  logarithmes  des  nombres  naturels  et  des  lignes  irigonomé- 
triques  et  tables  inverses,  à  4  décimales.  Vqir,  entre  autres  exemples, 
celui  dans  lequel  nous  avons  calculé  les  trois  angles  d'un  triangle  et 
son  aire  en  n'écrivant  qu'une  seule  fois,  en  tout,  les  quatre  logarithmes 
de  p,  p  —  a,  etc. 

{Mémoires  de  la  Société  royale  des  sciences  de  Liège ,  2^  série ,  t.  P"".) 


(64) 

multiplicande,  dividende;  et  soustracteur,  comme  multi- 
plicateur, diviseur;  nous  approuverions  ces  néologismes  si 
leur  sens  était  conformée  l'étymologie;  mais  souslrahende 
signifie  évidemment  qui  doit  être  soustrait,  sens  radica- 
lement contraire  à  celui  que  lui  donne  M.  Houzeau,  et 
soustracteur  signifie  qui  soustrait.  Nous  avons  entendu  un 
mathématicien  de  nos  amis  se  servir  dans  le  même  but 
des  termes  diminuende  et  diminueur,  dont  le  sens  est 
tout  à  fait  d'accord  avec  l'étymologie. 

Notre  savant  confrère  a  cru  bon  d'entrer  dans  les  plus 
grands  détails  relativement  aux  procédés  de  multiplica- 
tion ;  nous  estimons  ces  détails  fort  utiles;  mais  pour  être 
complets,  ils  auraient  dû  renfermer,  dans  les  exemples  de 
multiplication  à  vue,  ceux  par  5,  2o,  etc.,  et  quelques 
autres  moins  utiles,  mais  curieux  ;  et  en  outre  le  procédé 
de  multiplication  abrégée  qui  consiste  à  n'écrire  aucun  des 
produits  partiels,  procédé  usité,  à  notre  connaissance, 
dans  les  maisons  de  banque,  et  indiqué,  du  reste,  dans 
plusieurs  traités. 

L'auteur  fait  quelquefois  usage,  même  en  pratique, du 
procédé  de  Cauchy;  nous  avouons  qu'il  nous  semble  com- 
pliqué, et  l'on  pourra  juger  des  difficultés  qn'il  présente 
par  l'exemple  suivant  :  9x7  =11  x  15  =  145  =  63.  La 
préparation  des  nombres,  et  la  traduction  du  résultat  nous 
semblent  occasionner  une  grande  perte  de  temps. 

L'exposé  des  procédés  de  division  est  également  très- 
complet  ;  et  parmi  ces  procédés  il  en  est  plusieurs,  très- 
ingénieux,  dont  M.  Houzeau  a,  pensons-nous,  le  droit  de 
revendiquer  la  paternité. 

Dans  la  division  simple,  il  ne  pense  pas  qu'on  gagne 
rien  à  effectuer  mentalement  les  soustractions  :  nous  ne 
sommes  pas  du  même  avis. 


(  6S  ) 

Deux  procédés  fort  avantageux  dans  certains  cas  sont 
ceux  que  l'auteur  indique  sous  les  noms  de  division  en  sé- 
rie et  de  division  par  approximations  successives. 

Celui-ci,  comme  M.  Houzeau  le  fait  remarquer,  se  réduit 
au  fond  à  multiplier  le  dividende  par  le  réciproque  du  di- 
viseur. Pour  que  ce  dernier  procédé,  ainsi  que  l'approxi- 
mation qu'il  fournit,  fussent  rapides,  il  faudrait  posséder 
une  table  des  réciproques  des  nombres  d  à  1000.  L'auteur 
en  a  construit  une  qui  s'étend  de  1  à  100  pour  son  usage 
personnel  ;  cette  table  renferme  en  outre  les  produits 
effectués  des  réciproques  par  2,  5. ...9.  Une  table  sem- 
blable qui  s'étendrait  jusqu'à  1000  rendrait  de  grands 
services. 

Un  autre  moyen,  parfois  très-avantageux,  consiste  à 
calculer  le  réciproque  en  prenant  pour  premier  terme  de 
la  série  une  puissance  entière  de  2  ou  de  5,  de  sorte  que 
le  premier  terme  et  son  réciproque  sont  finis;  malheu- 
reusement le  nombre  de  leurs  chiffres  significatifs  est  sou- 
vent trop  considérable.  On  le  voit  par  la  table  de  ces 
puissances  dont  les  valeurs  varient  depuis  i  jusque  9.  II 
aurait  été  utile,  croyons-nous,  de  disposer  cette  table  à 
double  entrée. 

Comme  le  dit  l'auteur,  tous  ces  procédés,  ainsi  que 
celui  de  la  division  qu'il  appelle  mixte,  sont  fort  compli- 
qués; et  c'est  avec  raison,  selon  nous,  qu'il  engage  à  faire 
la  division  laborieuse  en  dressant  une  table  des  multiples 
du  diviseur  par  2.. ..9. 

Ici  encore  nous  croyons  devoir  signaler  une  simplifica- 
tion très-considérable,  et  fort  en  usage  dans  les  observa- 
toires lorsqu'un  même  nombre,  le  log.  cos.  de  la  latitude 
du  lieu,  par  exemple,  doit  être  ajouté  à  d'autres  loga- 
rithmes donnés  par  de  nombreuses  observations  ;  dans  ce 

2™^  SÉRIE,  TOME  XL.  5 


(66) 

cas  on  écrit  le  logarithme  constant  au  bord  inférieur  d'une 
feuille  mobile,  et  on  le  fait  glisser  successivement  au- 
dessus  de  tous  les  autres  nombres.  On  procéderait  d'une 
manière  analogue  pour  les  multiples  de  1  à  9  du  diviseur, 
qui  ne  seraient  ainsi  écrits  qu'une  fois  en  tout  pour  effec- 
tuer complètement  l'opération. 

Le  procédé  donné  par  M.  Houzeau  pour  trouver  le 
reste  d'une  division  par  un  nombre  rationnel  le  conduit  à 
des  résultats  qui  peuvent  naturellement  s'appliquer  à  la 
recherche  des  caractères  de  divisibilité.  Nous  ferons  re- 
marquer à  ce  sujet  que  nous  avons  donné,  pour  arriver  (*) 
à  ces  mêmes  résultats,  un  autre  procédé  d'une  généralité 
très-grande. 

Un  dernier  paragraphe  enfin  du  travail  de  notre  savant 
confrère  est  consacré  à  l'extraction  des  racines  laborieuses  ; 
il  préconise  avec  raison,  nous  semble-t-il,  l'emploi  de  la 
méthode  mixte  qui  consiste  à  trouver  d'abord  les  6  pre- 
miers chiffres  exacts  de  la  racine  par  logarithmes,  puis  les 
6  chiffres  suivants  par  une  division  opérée  également  par 
logarithmes,  et  ainsi  de  suite. 

En  résumé,  on  voit  au  premier  coup  d'œil  que  ce  tra- 
vail est  l'œuvre  d'un  savant  habitué  à  manier  les  chiffres, 
à  discuter  avec  beaucoup  de  pénétration  la  rapidité  et  la 
sûreté  des  méthodes,  et  sachant,  de  plus,  en  imaginer  de 
très-ingénieuses.  Aussi  les  calculateurs  retireront-ils  le 
plus  grand  fruit  de  la  lecture  de  ces  pages.  Cest  même 
pour  cette  raison,  et  pour  contribuer,  dans  la  mesure  de 
nos  moyens,  à  accroître  cette  utilité,  que  nous  nous  som- 
mes permis  d'indiquer  ici  quelques  simplifications  que 
M.  Houzeau  avait  omis  de  signaler. 

{*)  Mémoires  de  la  Société  royale  des  sciences  de  Liège,  2^  série,  t.  I^""- 


(67) 

Nous  proposons  avec  le  plus  grand  plaisir  à  la  classe  de 
voter,  en  nieme  temps  que  des  remcrcîments  à  notre  sa- 
vant confrère,  l'impression  de  son  intéressant  travail  dans 
les  Bulletins.  » 

Mtappoi't  tie  Mt.  E.  Catalan. 

Tout  en  acceptant  les  conclusions  formulées  par  M.  Fo- 
lie, je  crois  pouvoir  présenter  les  remarques  suivantes, 
que  m'a  suggérées  la  lecture  du  nouveau  travail  de  notre 
savant  confrère  M.  Houzeau. 

^P.  Vn.  Addition  algébrique.  L'auteur  désigne  ainsi 
une  addition  dans  laquelle  les  chiffres  des  nombres  donnés 
peuvent  être  négatifs^  ou  du  moins  considérés  comme  tels. 
Exemple  (n°  45)  : 

28  175  940 
2Î  173  255 


47  200  795 


Sauf  le  cas  où  il  s'agit  de  logarithmes  à  caractéristiques 
négatives  et  à  parties  décimales  positives,  on  ne  voit 
guère  comment  l'on  peut  être  (Conduit  à  de  pareilles  ad- 
ditions. 

30.  I.  Soustraction  sans  emprunts.  Il  y  a  quelque  cin- 
quante ans,  les  élèves  des  petites  écoles  ne  manquaient 
pas  de  dire  :  «  J'emprunte  un,  qui  vaut  dix.  »  J'aime  à 
croire  que  cette  pratique,  mauvaise  à  tous  égards,  est  aban- 
donnée. Peut-être  l'honorable  et  savant  auteur  eût-il  bien 
fait  de  n'en  point  parler. 

30.  II.  Soustraction  transformée  {c'est-à-dire,  sous- 
traction avec  compléments).  On  l'a  remarqué  depuis 
longtemps,  l'emploi  des  compléments  a  pour  résultat  de 


(68) 

remplacer,  par  une  soustraction  et  une  addition,  la  sous- 
traction proposée  :  au  lieu  d'une  opération,  on  en  fait 
deux  !  J'ai  exécuté  beaucoup  de  calculs  numériques  ;  et 
l'emploi  des  compléments  m'a  toujours  paru  désavanta- 
geux. 

34.  Multiplication  de  Cauchy.  Comme  l'a  fait  observer 
M.  Folie,  la  simplification  proposée  par  l'illustre  Géomètre 
est,  au  fait,  une  véritable  complication.  Du  reste,  il  n'y  a 
pas  à  s'affliger  de  ce  résultat  :  avant  de  passer  au  cas  géné- 
ral de  la  multiplication,  l'élève  doit  savoir,  par  cœi«r,  la 
table  de  Pythagore;  et  la  détermination  du  produit  de 
deux  nombres  d'un  seul  chiffre  chacun  ne  doit  exiger  au- 
cun travail  intellectuel. 

40.  Division  par  9.  M.  Houzeau  s'appuie  sur  la  re- 
lation 

1  _  1        1       _|_ 

9  ~  ÏÔ  "^ÏÔÔ"*"  1000  "* 

Cette  formule,  étant  un  cas  particulier  de  celle  qui  donne 
la  somme  des  termes  d'une  progression  par  quotient,  ne 
peut  être  démontrée  que  vers  la  fin  du  cours  d'arithmé- 
tique. Heureusement,  elle  est  inutile.  Dès  1840,  je  ne 
manquais  pas  de  faire  remarquera  mes  élèves  que,  pour 
diviser  un  nombre  par  9,  on  peut  commencer  par  chercher 
le  reste  de  la  division,  puis  le  chiffre  des  unités  du  quo- 
tient, puis  le  chiffre  des  dizaines,  etc. 

43.  Notre  confrère,  comme  la  plupart  des  arithméti- 
ciens, préconise  le  procédé  connu  sous  le  nom  de  Crible 
d'Êratosthènes.  Je  pense  que  c'est  à  tort.  J'ai  indiqué,  il  y 
a  bien  longtemps,  une  simplification  notable,  dont  cette 
méthode  est  susceptible. 

46.  Division  en  série.  L'exemple  choisi  par  l'auteur 


(69) 
prouve,  me  semble-t-il,  que  cette  manière  d'opérer  est 
moins  simple  que  la  pratique  habituelle.  En  outre,  à 
cause  des  termes  positifs  ou  négatifs,  les  chances  d'erreurs 
sont  fort  nombreuses. 

47.  Division  par  approximations  successives.  On  peut 
répéter  la  remarque  précédente  :  le  nombre  des  opérations 
auxiliaires  est  si  considérable,  qu'elles  augmentent  peut- 
être  le  travail  total ,  au  lieu  de  le  diminuer. 

4<Ç.  Division  par  la  recherche  du  réciproque.  M.  Hou- 
zeau  s'est  donné  la  peine  de  construire  une  table  renfer- 
mant, avec  les  réciproques  des  100  premiers  nombres 
naturels,  leurs  produits  par  1 ,  2, ....10.  Ces  tables,  si  elles 
étaient  suffisamment  prolongées,  pourraient  servir  aux 
calculateurs,  à  la  condition  d'être  portatives,  peu  coû- 
teuses, etc.  Pourra-t-on  satisfaire  à  ces  diverses  condi- 
tions? Il  est  permis  d'en  douter. 

52!.  Reste  de  la  division.  En  représentant  par 
a-+-iOb-{-  lO^c  +....  le  dividende,  et  par  10  -h  A:  le  divi- 
seur, notre  savant  confrère  trouve  que  le  reste  de  la  division 
est  R=a— A'6-i-  /c^c — Cette  formule,  que  je  ne  con- 
naissais pas,  me  paraît  fort  remarquable.  Mais  la  démon- 
stration employée  par  M.  Houzeau  est  très- compliquée  : 
l'auteur  recourt  à  des  développements  en  séries  j  à  des 
transformations  de  séries,  etc.  On  arrive  tout  de  suite  au 
résultat,  en  observant  que  les  identités 

donnent 

6  (10  +  A;)  -f-  c  (10»  -  fc')  -^  d  (10'  -^k'^)^...  =clll)  (10  -♦-  k) 

ou 

oH-106-4-10'c-+-  lO'd-h...  =cfll>(10-+-A)-+-a  — fc&H-fe^c 


(70) 

De  cette  manière,  la  curieuse  formule   de  M.  Houzeau 
pourra  prendre  place  dans  les  Traités  élémentaires.  » 

La  Classe,  conformément  aux  rapports  précédents,  ainsi 
qu'à  l'opinion  de  M.  J.  Liagre,  troisième  commissaire, 
décide  l'impression  du  travail  de  M.  Houzeau  dans  les 
Bulletins;  elle  a  voté,  en  même  temps,  des  remercîments 
à  l'auteur. 


Sur  quelques  plantes  fossiles  de  V étage  du  Poudingue  de 
Burnot,  par  M.  Alfred  Gilkinet. 

Rapport  de  JU.  de  MionincH. 

a  La  notice  de  M.  Gilkinet  est  relative  à  deux  fragments 
de  plantes  qui  ont  été  découverts  dans  les  schistes  impré- 
gnés de  malachite  des  environs  de  Rouveroy,  appartenant 
à  l'étage  du  poudingue  de  Burnot. 

Déjà  notre  savant  et  bien  regretté  confrère  Coemans 
avait  eu  l'occasion  d'examiner  ces  plantes  et  les  avait 
désignées  l'une  sous  le  nom  de  Filicites  piimatus,  et  l'au- 
tre sous  celui  de  Filicites  lepidorachis,  sans  toutefois  en 
faire  une  description  détaillée,  ni  un  examen  critique. 

En  soumettant  ces  mêmes  échantillons  à  de  nouvelles 
recherches,  monsieur  Gilkinet  a  pu  confirmer  que  l'une 
des  deux  plantes  est  réellement  une  fougère  et  il  est 
d'avis  que  le  nom  de  Filicites  pinnatus,  Coemans,  doit 
lui  être  conservé. 

Quanta  la  seconde,  M.  Gilkinet,  croit  qu'elle  n'a  aucun 
des  caractères  génériques  de  la  première  et  qu'elle  doit 


(  71  ) 
être  classée  parmi  les  Lepidodendron.  Les  raisons  que 
l'auteur  donne  pour  appuyer  son  opinion,  me  paraissent 
suffisamment  fondées  et  je  m'y  rallie  volontiers;  mais  je 
différerai  d'avis  avec  lui  lorsqu'il  s'agira  du  nom  spéci- 
fique à  donner. 

Je  viens  de  rappeler  plus  haut  que  Coemans  avait  dési- 
gné l'espèce  dont  il  est  ici  question  sous  le  nom  de  Fili- 
cites  lepidorachis.  Or  je  ne  vois  aucune  raison  plausible 
pour  changer  ce  nom  par  celui  de  Burnotense;  cette 
manière  de  faire  est  contraire  aux  règles  généralement 
admises  dans  les  sciences  naturelles.  On  peut  (out  aussi 
bien  reconnaître  la  plante  sous  le  nom  de  Lepidodendron 
(Filicites)  lepidorachis,  Coemans, que  sous  celui  de  Lepido- 
dendron Burnotense. 

Je  terminerai  en  faisant  observer  que  si  mes  souvenirs 
sont  exacts,  Toilliez  déjà  avait  recueilli  quelques  frag- 
ments semblables  à  ceux  dont  M.  Gilkinet  s'estservi  et  me 
les  a  montrés  peu  de  temps  avant  sa  mort.  Il  serait  intéres- 
sant de  savoir  ce  que  ces  fragments  sont  devenus.  On  y 
trouverait  peut-être  les  éléments  d'un  nouveau  travail. 

Je  propose  l'insertion  de  la  notice  de  M.  Gilkinet  dans 
nos  Bulletins.  » 

Rapport  de  M.  G.   newatque. 

c(  Lorsque  Coemans,  notre  regretté  confrère,  se  fut 
décidé  à  s'adonner  à  l'étude  des  végétaux  fossiles  de  notre 
pays,  je  m'empressai  de  lui  communiquer  tout  ce  que 
j'avais  recueilli  en  ce  genre,  notamment  les  restes  de  deux 
plantes  rencontrées  dans  les  schistes  imprégnés  de  mala- 
chite qui  ont  donné  lieu  à  des  recherches  assez  étendues 
et  à  une  concession  àRouveroy.  Quelques  années  plus  tard, 


(72) 

lorsque  je  fis  paraître  mon  Prodrome  d'une  description 
géologique  de  la  Belgique,  Coemansme  remit  une  liste  des 
espèces  qu'il  avait  déterminées,  liste' sur  laquelle  mes 
plantes  deRouveroy  figuraient  comme  espèces  nouvelles, 
sous  les  noms  de  Filicites  pimiatus  et  Filicites  lepidora- 
chis  ;  il  me  promettait  en  même  temps  de  les  décrire 
incessamment,  de  sorte  que  je  crus  pouvoir  les  faire 
entrer,  à  l'article  de  l'étage  de  Burnol,  dans  les  listes  de 
fossiles  par  lesquelles  je  terminais  cet  ouvrage.  Malheu- 
reusement notre  ami  nous  fut  enlevé  avant  qu'il  eût  pu 
tenir  sa  promesse. 

Il  y  a  déjà  quelque  temps,  un  de  nos  jeunes  docteurs  en 
sciences  naturelles  dont  l'Académie  a  déjà  couronné  les 
travaux,  M.  A.  Gilkinet,  me  demanda  des  renseignements 
sur  ces  deux  espèces  nominales,  et  je  m'empressai  de  lui 
remettre  les  échantillons  qui  m'étaient  revenus  après  la 
mort  de  Coemans,  avec  des  étiquettes  accompagnées  de 
quelques  mots  de  diagnose.  Je  priai  M.  Gilkinet  de  bien 
vouloir  s'occuper  de  ces  fossiles,  remarquables  par  leur 
ancienneté  autant  que  par  la  stérilité  habituelle  du  dépôt 
qui  les  renferme.  L'étage  du  poudingue  de  Burnot  con- 
stitue, pour  presque  tous  les  géologues,  la  partie  la  plus 
élevée  du  terrain  devonien  inférieur,  ou  système  rhénan; 
et  la  présence  de  deux  fougères  à  cette  époque  mérite 
considération. 

Le  travail  que  M.  Gilkinet  soumet  à  l'Académie  est  con- 
sacré à  l'examen  de  ces  plantes.  La  première  reste  dans  la 
science  sous  le  nom  de  Filicites  pinnatus  que  Coemans  lui 
a  donné;  mais  la  seconde  doit  être  rapportée,  d'après  l'au- 
teur, non  à  une  fougère,  mais  à  une  lépidodendrée ,  à 
laquelle  il  donne  le  nom  de  Lepidodendron  Burnotense, 
pour  rappeler  son  gisement.  L'absence  de  toute  foliole 


(73) 
dans  les  nombreux  débris  dont  les  échanlillons  sont  rem- 
plis, la  dichotomie  des  ramifications,  et  surtout  la  dispo- 
sition spirale  des  coussinets  dont  ces  rameaux  sont  garnis 
ainsi  que  quelques  feuilles  lancéolées,  et  enfin  une  em- 
preinte incontestable  de  tige  de  Lepidodendron  dans  un 
échantillon  rempli  de  ces  rameaux,  nous  paraissent  jus- 
tifier celte  manière  de  voir.  La  présence  d'un  large  anneau 
vasculaire  entourant  une  moelle  centrale,  et  l'absence  de 
toute  trace  de  la  fructification  des  Psilophylon  empêchent 
de  rapporter  notre  plante  à  ce  dernier  genre. 

La  note  de  M.  Gilkinet  est  accompagnée  de  planches 
dessinées  soigneusement  par  fauteur  et  représentant  ces 
intéressants  végétaux.  On  peut  regretter  qu'ils  ne  soient 
pas  mieux  conservés,  mais  il  faut  tenir  compte  de  la  grande 
rareté  des  fossiles  à  ce  niveau.  Aussi  je  crois  que  cette  note 
intéressera  les  paléontologistes  et  j'en  propose  volontiers 
l'insertion  au  Bulletin,  avec  les  planches  qui  l'accompa- 
gnent. » 

Rapport  do  M.  Bellynck. 

a  Je  me  rallie  à  mes  deux  savants  confrères  M.  de 
Koninck  et  M.  Dewalque,  pour  demander  l'impression  du 
travail  de  M.  Gilkinet,  et  la  reproduction  des  planches  qui 
l'accompagnent. 

Je  crois  aussi  que  les  deux  plantes  en  question  appar- 
tiennent, l'une  aux  Fougères,  l'autre  aux  Lycopodiacées 
[Lepidodendron).  Si,  dans  la  ramification  de  cette  dernière, 
la  dichotomie  semble  parfois  faire  défaut,  elle  peut  n'être 
que  dissimulée;  on  trouve  beaucoup  d'exemples  d'un  déve- 
loppement inégal  des  branches  de  la  bifurcation,  ce  qui 
constitue  une  dichotomie  sympodiqiie.  —  Basée  sur  des 


(  74) 
exemplaires  fort  défectueux,  la  détermination  spécifique 
de  ces  plantes  doit  nécessairement  se  réduire  à  des  con- 
jectures. » 

La  classe,  conformément  aux  conclusions  de  ces  trois 
rapports,  vote  des  remercîments  à  M.  Gilkinet  et  décide 
l'impression  de  sa  note  dans  les  Bulletins.  » 


COMMUNICATIOiNS  ET  LECTURES. 

Fragments  sur  le  calcul  numérique j  par  J.-C.  Houzeau, 
membre  de  l'Académie. 

FRAGMENT  IL 

OPÉRATIONS  DE  l' ARITHMÉTIQUE. 

§  G.  —  Remarques  préliminaires. 

25.  On  s'étonnera  peut-être  qu'il  reste  quelque  chose  à 
dire  sur  les  opérations  de  l'arithmétique.  Nous  espérons 
pourtant  que  la  lecture  des  pages  suivantes  ne  sera  pas 
dépourvue  d'intérêt  pour  le  calculateur  numérique. 

Décomposées  dans  leur  travail  élémentaire,  les  opéra- 
tions de  l'arithmétique  se  réduisent  à  des  combinaisons  de 
chiffres  deux  à  deux.  Un  calculateur  peut  effectuer,  en 
moyenne,  mille  de  ces  combinaisons  par  heure,  embrassant 
ainsi  la  considération  de  deux  mille  chiffres  individuels.  Il 
y  a  toutefois  des  opérations  plus  fatigantes  et  moins  ra- 
pides que  d'autres.  La  variété  des  opérations  successives 
allège  la  fatigue  d'esprit. 


(73) 

26.  Considérées  sous  le  rapport  de  leur  étendue,  les 
opérations  numériques  peuvent  se  ranger  en  trois  classes, 
pour  lesquelles  les  procédés  les  plus  avantageux  sont  gé- 
néralement ditïérents.  Ces  trois  classes  sont  : 

•  A].  Les  opérations  à  vue  ou  ctirsives,  que  la  brièveté  et 
Ja  simplicité  des  nombres  proposés  permettent  d'exécuter 
sans  transcrire  les  données,  et  sans  annoter  de  résultats 
partiels  intermédiaires. 

B].  Les  opérations  communes,  qui  embrassent  un 
nombre  modéré  de  chiffres,  et  dans  lesquelles  on  par- 
vient au  résultat  final  après  un  intervalle  de  temps  qui 
peut  s'évaluer  par  minutes.  Tel  est,  par  exemple,  le  calcul 
de  la  moyenne  des  passages  d'un  astre  aux  cinq  ou  aux 
dix  fils  d'une  lunette.  Tel  est  aussi  le  calcul  d'un  côté  de 
triangle  de  nos  cartes  géodésiques.  Ces  opérations  d'étendue 
limitée,  mais  qui  exigent  l'inscription  chiffre  à  chiffre  de 
résultats  partiels,  sont  celles  qui  se  présentent  presque 
constamment  au  calculateur. 

C].  Les  opérations  laborieuses,  dans  lesquelles  on  de- 
mande un  résultat  avec  une  précision  considérable,  exi- 
geant, par  exemple,  un  nombre  de  chiffres  que  les  tables 
logarithmiques  existantes  ne  sont  pas  à  même  de  fournir. 
On  peut  regarder  comme  méritant  le  nom  de  laborieuse 
toute  opération  dans  laquelle  il  y  a  plus  de  dix  rangs  signi- 
ficatifs aux  données,  ou  plus  de  dix  lignes  horizontales  au 
tableau.  Les  opérations  de  cette  étendue  exigent  une  atten- 
tion toute  particulière,  et  du  discernement  dans  le  choix 
des  procédés  à  adopter. 

27.  Considérées  dans  leur  nature,  les  opérations  de 
l'arithmétique  se  partagent  en  deux  genres  distincts.  Dans 
celles  du  premier  genre  le  résultat  est  du  même  ordre  de 
grandeur  que  les  données,  tandis  que  dans  celles  du  second 


(76) 

genre  ce  résultat  et  Tune  au  moins  des  données  sont  d'ordre 
différent. 

Au  premier  genre  appartiennent  l'addition  et  la  sous- 
traction ,  qui  se  réduisent  à  la  rigueur  à  une  seule  opéra- 
tion, l'addition  algébrique,  c'est-à-dire  l'addition  dans  la-  . 
quelle  on  tient  compte  des  signes.  La  multiplication  avec 
l'élévation  aux  puissances,  la  division  et  l'extraction  des 
racines  composent  le  second  genre.  En  effet,  un  produit, 
par  exemple, est  du  second  ordre  par  rapport  à  ses  facteurs. 
C'est  surtout  dans  les  opérations  du  second  genre  que  la 
présence  des  nombres  complexes  introduit  des  difficultés 
immenses. 

Dans  les  opérations  du  premier  genre,  le  dernier  ordre 
des  données  est  aussi  le  dernier  ordre  du  résultat  ;  il  n'y  a 
donc  pas,  dans  celui-ci,  de  chiffres  qui  deviennent  incer- 
tains par  l'effet  des  procédés  de  calcul.  Il  n'en  est  pas  de 
même  dans  les  opérations  du  second  genre.  Dans  ces  opé- 
rations, le  dernier  ordre  change  de  rang;  il  importe,  par 
conséquent,  de  se  rendre  compte  du  mode  de  génération 
des  chiffres-résultats,  et  de  déterminer  dans  quel  rang  du 
résultat  général  l'abréviation  des  données  permet  à  l'erreur 
de  s'étendre. 

Quand  nous  opérons  la  multiplication  de  deux  nombres 
l'un  par  l'autre,  tous  les  produits  partiels  après  le  premier 
laissent  des  places  vides  dans  les  derniers  rangs  verticaux 
à  droite,  et  par  conséquent  l'addition  de  ces  rangs  ne  four- 
nit pas  des  totaux  complets  :  les  dernières  décimales  du 
produit  total  sont  donc  illusoires.  De  même  quand  nous 
effectuons  une  division,  et  que  nous  ajoutons  des  zéros 
dans  les  rangs  inférieurs  du  dividende,  nous  faisons  par  là 
une  hypothèse  purement  gratuite  sur  la  valeur  absolue  de 
ces  rangs.  Nous  aurions  été  tout  aussi  fondés  à  ajouter 


(  77  ) 
des  i ,  ou  des  %  ou  des  5,  etc.;  et  les  quotients  partiels  qui 
dérivent  de  toutes  ces  suppositions  deviennent  également 
illusoires  à  un  certain  nnoment. 

Jl  importe  donc  de  se  tenir  en  garde  contre  cette  admis- 
sion de  chiffres  incertains.  D'un  autre  côté  il  est  désirable 
de  supprimer  la  partie  du  travail  qui  serait  faite  en  pure 
perte,  puisqu'elle  ne  conduirait  qu'à  des  chiffres  entachés 
d'erreur  :  or,  cette  partie  inexacte  formerait  parfois  la 
moitié  ou  près  de  la  moitié  de  l'opération  totale,  telle  qu'on 
la  prescrit  dans  les  traités  élémentaires.  Ce  sont  des  con- 
sidérations de  ce  genre  qui  ont  conduit  entre  autres  à  l'in- 
troduction de  la  multiplication  et  de  la  division  simpli- 
fiées. 

Il  est  vrai  que  Tinvenlion  des  logarithmes,  en  ramenant 
au  premier  genre  les  opérations  du  second,  facilite  d'une 
manière  aussi  heureuse  qu'elle  était  inattendue  la  lâche  du 
calculateur.  Cette  invention  ne  nous  dispense  pas  cepen- 
dant, d'une  manière  absolue,  d'exécuter  des  opérations  du 
second  genre.  Ainsi,  d'une  part,  toute  opération  qui  peut 
se  faire  à  vue  l'emporte  en  rapidité  sur  l'opération  loga- 
rithmique, et  d'autre  part  toute  opération  qui  embrasse  un 
grand  nombre  de  rangs  décimaux  exige  un  recours  aux 
procédés  directs. 

28.  Les  traités  élémentaires,  en  parlant  du  sens  dans 
lequel  ils  prescrivent  d'effectuer  les  opérations,  semblent 
en  faire  une  condition  essentielle.  Mais  les  opérations  de 
l'arithmétique  peuvent  presque  toujours  être  conduites 
dans  deux  sens  différents.  On  peut  traiter  en  premier  lieu 
les  ordres  les  plus  importants,  pour  passer  successivement 
à  des  ordres  moindres  :  c'est  opérer  dans  le  sens  descen- 
dant, ou  de  gauche  à  droite.  Ou  bien  on  commence  le 
calcul  par  les  ordres  moindres,  pour  s'élever  de  là  aux 


(78) 

ordres  supérieurs  :  c'est  opérer  dans  le  sens  montant  ou 
de  droite  à  gauche.  L'usage  est  de  conduire  la  division  et 
l'extraction  des  racines  dans  le  sens  descendant,  l'addition, 
la  soustraction  et  la  multiplication  dans  le  sens  montant. 
Toutefois  on  a  presque  toujours  le  choix  entre  les  deux 
méthodes,  et  dans  ce  cas  ii  convient  de  se  déterminer 
d'après  la  nature  du  résultat  cherché. 

Les  opérations  descendantes  fournissent  les  termes  bu 
chiffres  de  ce  résultat  dans  Tordre  de  leur  importance  re- 
lative, et  permettent,  par  conséquent,  de  s'arrêter  aussitôt 
qu'on  atteint  le  degré  requis  d'approximation.  11  est  donc 
logique  de  calculer  en  descendant  toutes  les  fois  qu'on 
cherche  un  résultat  nouveau  dans  certaines  limites  fixées. 
Toutes  les  opérations  de  l'arithmétique  se  prêtent  à  cette 
marche  sans  difficulté. 

Au  contraire,  s'il  s'agit  d'ohtenir,avec  une  grande  exac- 
titude, les  dernières  décimales  d'un  résultat  dont  les  ordres 
supérieurs  sont  déjà  connus,  il  convient  d'adopter  le  sens 
montant.  On  est  libre  alors  d'abandonner  le  calcul  lorsqu'on 
parvient  aux  rangs  déjà  connus.  Le  cas  que  nous  venons 
d'indiquer  se  présente,  entre  autres,  lorsqu'on  se  propose 
d'étendre  un  résultat  déjà  calculé,  quand  on  veut  exprimer, 
par  exemple,  avec  vingt  décimales  une  quantité  dont  on 
connaît  déjà  les  dix  premiers  chiffres. 

11  suffît  ici  d'appeler  l'attention  sur  ce  point:  nous  re- 
viendrons sur  le  sens  des  calculs  en  traitant  des  opérations 
particulières. 

§  H.  —  Opérations  du  premier  genre. 

29.  Nous  appellerons  toujours  a  tableau  »  l'ensemble 
des  nombres  sur  lesquels  il  s'agit  d'opérer,  écrits  les  uns 
sous  les  autres,  avec  correspondance  des  rangs  verticaux. 


(  79  ) 
Lorsque  ce  tableau  est  étendu,  et  que  l'opération  est,  par 
conséquent,  laborieuse,  l'addition  constitue  le  travail  le 
plus  fatigant  du  calcul  numérique,  et  présente  par  suite  le 
plus  de  chancesd'erreur.  Il  existe  cependant  divers  moyens, 
soit  d'alléger  la  fatigue  mentale  qu'entraîne  cette  opéra- 
tion, soit  d'accélérer  le  travail.  Nous  allons  énumérer  les 
différentes  métbodes  d'addition,  en  présentant  pour  cha- 
cune d'elles  les  remarques  que  nous  croyons  utiles. 

I.  AddUion  commune.  —  C'est  l'addition  mentale  chiffre 
par  chiffre  et  colonne  par  colonne.  Il  faut  se  débarrasser 
toutefois  de  ce  qu'on  a  coutume  d'appeler  le  report,  en 
écrivant  intégralement  le  total  partiel  de  cliaque  colonne. 
On  fait  à  la  tin  la  somme  des  totaux  partiels,  écrits  en  éche- 
lons. On  peut,  par  cette  précaution,  vérifier  toute  colonne 
particulière  indépendamment  des  autres;  on  conduit, lors- 
qu'on le  désire,  l'opération  en  descendant;  enfin  si  l'on 
\ient  à  être  interrompu  on  perd  seulement  la  colonne  sur 
laquelle  on  opérait  dans  cet  instant. 

II.  Addition  des  comptables.  —  Dans  l'exécution  de 
l'addition,  la  fatigue  mentale  résulte  principalement  de 
l'accroissement  continu  de  la  somme  partielle,  à  mesure 
qu'on  suit  la  colonne.  On  soulage  l'attention  en  se  bornant 
à  suivre  le  progrès  des  unités  dans  cette  somme  partielle. 
On  met  un  point  ou  toute  autre  marque  conventionnelle 
sur  le  tableau,  à  chaque  dizaine  obtenue.  Arrivé  au  bas  de 
la  colonne,  on  inscrit  d'abord  les  unités,  et  l'on  compte 
ensuite  les  dizaines  par  le  nombre  des  points  annotés. 
Cette  méthode  est  celle  suivie  dans  la  plupart  des  grands 
établissements  de  banque  de  l'Europe.  On  l'a  trouvée  très- 
supérieure,  comme  sûreté,  à  l'addition  commune. 

III.  Addition  par  les  dix.  —  On  choisit,  dans  une  même 
colonne,  pour  les  réunir  en  groupes,  les  nombres  dont  la 


(80) 

somme  partielle  fait  10  ou  un  multiple  de  10.  On  assemble, 
par  exemple,  un  1  avec  un  9,  un  2  avec  un  8,  un  2  et  un  5 

avec  un  5,  un  4  et  un  7  avec  un  9 On  compte  ainsi  par 

dizaines  entières,  dont  on  retient  aisément  le  nombre;  et 
l'on  pomte  ou  l'on  barre  les  chiffres  à  mesure  qu'on  les 
emploie,  pour  éviter  d'y  revenir  plusieurs  fois.  Enfin  après 
avoir  formé  un  certain  nombre  de  dizaines  complètes,  il 
reste  ordinairement  quelques  chiffres  qui  ne  sont  pas  com- 
plémentaires, et  qui  ne  se  prêtent  pas  à  la  composition  d'un 
ou  de  plusieurs  dix.  On  réunit  ces  chiffres  pour  en  former 
un  appoint  que  l'on  joint  aux  dizaines  déjà  obtenues. 

IV.  Addition  par  espèces.  —  Cette  addition  consiste  à 
compter,  dans  chaque  colonne ,  combien  il  y  a  de  chiffres 
de  chaque  espèce,  c'est-à-dire  combien  de  1,  de  2,  de  3,  etc. 
Le  nombre  des  retours  de  chaque  chiffre  est  inscrit  dans 
un  tableau  particulier.  On  forme  alors,  dans  une  seconde 
table,  les  produits  que  ces  répétitions  indiquent.  On  peut 
entreprendre,  parce  procédé,  de  former  la  somme  immé- 
diate de  plusieurs  centaines  ou  même  de  plusieurs  milliers 
de  nombres.  Mais,  dans  ces  immenses  colonnes,  le  compte 
des  chiffres  n'est  pas  lui-même  sans  diiTiculté  :  l'œil  et 
l'attention  se  fatiguent.  Une  des  meilleures  dispositions 
consiste  à  isoler  entièrement  de  ses  voisins  la  colonne  que 
l'on  considère  actuellement,  en  la  comprenant  entre  deux 
règles,  ou  dans  une  fente  découpée  au  milieu  d'une  feuille 
de  papier 

A  nos  yeux,  l'addition  par  espèces  n'est  vraiment  avan- 
tageuse que  dans  une  seule  circonstance  :  pour  former  le 
total  des  premières  colonnes  à  gauche,  dans  la  recherche 
des  moyennes.  En  effet,  dans  ce  calcul,  on  a  souvent 
à  réunir  des  nombres  dont  les  premiers  ordres  varient 
peu. 


(  81  ) 

V.  Àddilion  par  deux  chiffres.  —  Un  moyen  simple  et 
efficace  (raccélércr  l'addition  a  été  proposé  par  l'Américain 
Hulchings,  qui  est  doué  d'une  aptitude  particulière  pour 
les  calculs  numériques.  Ce  moyen  consiste  à  prendre  les 
chiffres  à  ajouter  non  point  un  par  un,  mais  deux  par  deux. 
Tout  calculateur  fait  aisément  à  vue  la  somme  de  deux 
chiffres,  par  exemple  4  +  5  ou  6  -h  9.  Au  lieu  de  dire 
4  -h  o  =  7,  il  dira  donc  immédiatement  7,  et  au  lieu  de 
passer  par  l'expression  6  -+-  9  il  emploiera  du  premier  coup 
le  total  15  de  ces  deux  chiffres.  Les  quatre  nombres  cités 
4h-3h-6-i-9  se  réduiraient  alors  à  l'addition  7+15=22, 
l'œil  embrassant  chaque  fois  deux  chiffres  donnés. 

VI.  Addition  de  Cauchy.  —  Afin  de  diminuer  l'impor- 
tance croissante  des  totaux  partiels,  on  peut  remplacer, 
suivant  la  proposition  de  Cauchy,  tous  les  chiffres  supé- 
rieurs à  5,  par  leur  complément  arithmétique  surmonté 
d'un  signe  négatif.  On  assemble  les  chiffres  en  tenant 
compte  de  leur  signe,  et  l'on  écrit  au  pied  de  la  colonne 
la  somme  partielle,  positive  ou  négative  (dans  ce  dernier 
cas  surmontée  du  signe  — ).  Cette  méthode,  qui  exige  une 
préparation  des  nombres,  ne  doit  pas  sans  doute  être  re- 
commandée comme  usage  général;  mais  elle  peut  devenir 
utile  dans  les  vérifications. 

Nous  avons  à  peine  besoin  de  dire  qu'en  préparant  les 
nombres  pour  cette  opération,  il  faut  avoir  soin  d'aug- 
menter d'une  unité  tout  chiffre  positif  qui  précède  immé- 
diatement un  chiffre  devenu  négatif  (').  En  convertissant 
dans  le  style  vulgaire  de  numération  le  résultat  final  ex- 
primé par  des  chiffres  les  uns  positifs,  les  autres  négatifs, 

(•)  En  eflfet,  27=33,  vingt-sept  égale  trente  moins  trois,  et  ainsi  des 
autres. 

2°"^  SÉRIE,  TOME  XL.  6 


(82) 
on  prend  le  complément  de  toute  partie  négative,  en  dimi- 
nuant d'une  unité  le  chiffre  qui  la  précède  immédiatement. 
L'usage  de  chiffres  des  deux  signes  n'offre  rien  d'insolite 
aux  calculateurs  habitués  aux  caractéristiques  négatives 
des  logarithmes. 

Les  chiffres  négatifs  sont  parfois  particulièrement  utiles 
dans  les  additions  de  nombres  complexes.  Si  l'on  a,  par 
exemple,  à  ajouter  à  un  grand  nombre  de  quantités  diffé- 
rentes la  quantité  constante  1"58'49",2,  les  reports  se 
présenteront  presque  constamment,  par  suite  de  la  valeur 
élevée  des  minutes  et  des  secondes.  Mais  écrivons  2M' 
ï\'\  2,  et  les  reports  se  trouveront  presque  partout  évités, 
comme  dans  l'exemple  : 

44«  7'  28';4 
-+-     2.  îîî,2 


Somme 46-  6-  17,6 

VH.  Addition  algébrique.  —  C'est  celle  dans  laquelle 
les  termes  sont  de  signe  quelconque.  Au  lieu  de  former 
séparément  la  somme  des  termes  positifs,  puis  celle  des 
termes  négatifs,  il  est  souvent  plus  simple,  surtout  quand 
le  nombre  total  des  termes  n'est  pas  considérable,  de 
disposer  le  tout  dans  un  seul  tableau,  en  superposant  le 
signe  —  à  chacun  des  chiffres  des  termes  à  soustraire.  Ici 
il  n'y  a  rien  à  changer  aux  figures  elles-mêmes.  On  com- 
pose ensuite  les  totaux  partiels,  colonne  par  colonne,  en 
tenant  compte  des  signes  des  chiffres  individuels.  On 
transforme  enfin  le  total  général  dans  un  style  entière- 
ment positif,  d'après  la  règle  de  l'article  précédent. 

Ajoutons  même  qu'il  est  extrêmement  facile  de  trans- 
former le  total  dans  le  style  vulgaire,  à  mesure  des  pro- 
grès de  l'addition  ,  sans  inscrire  à  ce  total  une  seule  figure 
négative.  En  effet,  si  la  somme  d'une  colonne  donne  8, 


(83) 

011  peut  immédiatement  écrire  2,  et  reporter  i  à  la  colonne 
suivante.  C'est  comme  si,  dans  la  soustraction,  on  avait 
pour  chiffre  inférieur  un  8,  qu'il  s'agirait  de  retrancher 
d'un  chiffre  supérieur  0.  Ci-après ,  dans  les  exemples  du 
n°  50,  article  I,  et  des  n°'  54  et  46,  on  a  d'abord  écrit  les 
chiffres  avec  leurs  signes,  puis  transformé  en  second  lieu 
le  résultat.  Mais  dans  ceux  des  n*"'  48  et  49  on  n'a  posé 
que  des  chiffres  positifs;  on  a  donc  opéré  la  conversion  à 
mesure  qu'on  écrivait. 

VFIJ.  Addition  parcellaire.  —  La  principale  cause  d'er- 
reur, dans  l'addition ,  provenant  de  la  longueur  des  opé- 
rations mentales,  le  véritable  secret  pour  obtenir  du 
premier  coup  des  additions  sans  faute ,  est  de  scinder  le 
tableau  ,  et  de  former  la  somme  séparée  de  chaque  groupe 
parcellaire.  On  peut  se  borner,  par  exemple,  à  considérer 
dix  lignes  horizontales  à  la  fois.  Nous  en  nommons  le  total 
somme  décenaire.  Réunissant  ensuite  dix  de  ces  sommes , 
on  forme  une  somme  centenaire ,  contenant  le  total  de 
cent  nombres  du  tableau.  Au  moyen  de  dix  sommes  cen- 
tenaires, on  parvient  à  une  somme  millénaire,  et  ainsi  de 
suite.  L'addition  comprend  ainsi,  d'une  manière  peu  fati- 
gante et  remarquablement  sûre,  autant  de  quantités  qu'on 
le  veut,  et  les  vérifications  sont  aisées.  C'est  incontesta- 
blement une  des  meilleures  pratiques  pour  les  additions 
laborieuses. 

IX.  Addition  au  ruban.  —  Un  autre  procédé ,  qui  tient 
en  partie  des  moyens  mécaniques,  mais  qui  est  d'une 
simplicité  extrême,  consiste  à  poser  devant  soi  une  règle 
divisée  en  parties  égales  depuis  1  jusqu'à  9,  et  à  mesurer 
sur  un  ruban  qui  porte  un  nombre  indéfini  de  divisions 
semblables,  autant  d'unités  à  la  fois  qu'il  s'en  présente 
dans  chaque  chiffre  successif  à  additionner.  On  procède 
ainsi  à  une  sorte  «  d'aunage,  »  qui  absorbe  une  portion 


(84) 

sans  cesse  croissante  du  ruban.  On  n'a  rien  à  tenir  en 
mémoire  ;  la  lecture  de  la  dernière  division  atteinte,  à  la 
lîn  de  «  l'aunage,  »  fournft  d'elle-même  le  total  de  la 
colonne  additionnée. 

Ce  procédé,  employé  dans  différentes  maisons  de 
banque  et  de  commerce,  est  un  des  moins  fatigants,  et 
en  même  temps  l'un  des  plus  sûrs.  L'expérience  a  fait 
connaître  que  la  division  de  la  règle  et  du  ruban  en  centi- 
mètres est  nn  peu  petite  pour  cet  usage  :  le  doigt  passe 
trop  aisément  d'un  centimètre  à  son  voisin.  Mais  le  pouce 
ou  le  double  centimètre  répondent  très-bien  aux  besoins 
de  cette  méthode.  C'est  ce  procédé  que  j'emploie  depuis 
plus  de  dix  ans  dans  les  longues  additions ,  et  je  ne  puis 
que  le  recommander  vivement  aux  calculateurs. 

50.  La  soustraction  est  un  simple  cas  particulier  de 
Faddition  algébrique  dont  il  a  été  parlé  tout  à  l'heure. 
Outre  la  soustraction  commune,  enseignée  dans  les  traités 
élémentaires,  on  peut  noter  : 

L  La  soustraction  sans  emprunts,  ou  si  l'on  préfère 
sans  reports.  —  Ce  n'est  à  proprement  parler  que  l'addi- 
tion algébrique  colonne  par  colonne.  Lorsque  le  chiffre 
soustracteur  est  plus  grand  que  le  chiffre  soustrahende, 
on  écrit  une  différence  négative,  c'est-à-dire  un  chiffre 
surmonté  du  signe  — .  On  convertit  ensuite  le  reste  gé- 
néral dans  le  style  vulgaire. 

Voici  un  exemple  de  la  soustraction  sans  emprunts  : 

Soustrahende 47  200  795 

Soustracteur 28  173  940 


Différence  chiffre  à  chiffre 21  173  255. 

Différence  convertie 19  026  855. 


(8S) 

Ce  qu'il  y  a  de  plus  particulier  dans  celte  opération ,  c'est 
qu'on  peut  aussi  bien  l'exécuter  dans  le  sens  descendant 
que  dans  le  sens  montant. 

II.  La  soustraction  transformée.  —  La  soustraction  se 
transforme  en  addition  si  l'on  remplace  le  soustracteur  par 
son  complément  précédé  d'une  unité  négative  de  l'ordre 
immédiatement  supérieur,  c'est-à-dire  lorsqu'on  met  ï  de- 
vant le  complément  du  soustracteur. 

L'exemple  précédent,  traité  de  cette  manière,  donne  : 

Soustrahende 47  200  795 

Complément  du  soustracteur Î71  82G  060 

Somme 19  026  855. 

La  soustraction  est  la  plus  rapide  et  par  conséquent  la 
plus  sûre  des  opérations  numériques  ,  parce  qu'elle  n'em- 
brasse jamais  que  deux  nombres  et  fournit  sans  intermé- 
diaires le  résultat  final. 

§  ï.  —  Opérations  du  second  genre.  —  Multiplication. 

51.  Dans  la  multiplication,  le  premier  point  est  de  se  ren- 
dre compte  où  l'erreur  commence.  Les  traités  établissent 
que  l'erreur  d'un  produit  est  égale  au  plus  grand  des  deux 
produits  particuliers  obtenus  lorsqu'on  multiplie  les  plus 
hautes  unités  de  l'un  des  facteurs  par  les  plus  basses 
unités  de  l'autre.  On  peut  aisément  en  conclure  que  si 
Ton  appelle  n  le  nombre  des  chiffres  exacts  dans  celui  des 
deux  facteurs  qui  en  renferme  le  moins ,  Terreur  est  sus- 
ceptible de  commencer  dans  le  n"""  rang  du  produit. 
On  retrouve  donc  ici  une  application  du  principe  de  l'éga- 
lité dans  le  nombre  des  chiffres,  déjà  mentionnée  au  n"  10. 


(  86) 
Autant  de  chiffres  exacts  seront  donnés  au  facteur,  autant 
on  pourra  en  avoir  au  produit ,  l'incertitude  ne  commen- 
çant qu'à  la  dernière  figure.  Réciproquement,  si  l'on  de- 
mande de  former  un  produit  dont  l'erreur  affecte  au  plus 
le  if"''  chiffre,  on  prendra  n  chiffres  exacts  à  chacun  des 
facteurs. 

Il  résulte  de  ce  qui  précède  que  dans  le  produit ,  formé 
à  la  manière  ordinaire,  de  deux  quantités  irrationnelles, 
exprimées  avec  un  même  nombre  de  chiffres  exacts ,  la 
moitié  ou  près  de  la  moitié  des  chiffres  sont  incertains. 
N'est-ce  donc  pas  une  perte  manifeste  de  travail  que  d'em- 
brasser laborieusement  les  rangs  incertains ,  dans  une 
opération  qui  peut  être  abrégée  de  près  de  moitié  sans 
toucher  aux  rangs  exacts  du  produit?  C'est  pourtant  par 
ces  rangs  incertains  que  l'on  commence  et  que  l'on  est 
forcé  de  passer,  lorsqu'on  suit  la  voie  ordinaire. 

52.  MuUiplication  simplifiée,  —  Afin  de  faire  l'éco- 
nomie du  travail  consacré  à  former  les  rangs  incertains, 
Oughtred  avait  vu  qu'il  faut  conduire  l'opération  dans  le 
sens  descendant,  c'est-à-dire  calculer  les  produits  partiels 
en  commençant  par  les  chiffres  supérieurs  du  multiplica- 
teur, et  négliger  la  partie  inférieure  de  certains  de  ces 
produits.  A  cet  effet,  il  renverse  le  multiplicateur,  écri- 
vant les  plus  hautes  unités  à  droite  et  les  plus  faibles  à 
gauche,  et  négligeant  à  chaque  produit  partiel  un  chiffre 
de  plus  du  multiplicande. 

On  peut  donner  de  la  multiplication  simplifiée  les  règles 
suivantes,  que  je  me  permets  de  reproduire  ici  parce 
qu'elles  sont  peu  connues,  ou  tout  au  moins  peu  appli- 
quées : 

1«  Ramener  d'abord  les  deux  facteurs  au  nombre  re- 
quis de  chiffres  exacts,  d'après  les  remarques  du  n**  précé- 


(87) 
dent,  en  abrégeant  celui  ou  ceux  qui  en  contiendraient 
davantage.  Ces  deux  facteurs  sont  réduits  ainsi  à  contenir 
un  même  nombre  de  chiffres  significatifs; 

2"*  Copier  le  multiplicande,  et  écrire  au-dessous  le 
multiplicateur  en  y  renversant  l'ordre  des  chiffres,  c'est- 
à-dire  en  commençant  par  le  dernier  caractère  conservé. 
Le  premier  chiffre  de  ce  multiplicateur  renversé  est  placé 
sous  le  premier  chiffre  du  multiplicande,  et  le  dernier 
tombe  par  conséquent  sous  le  chiffre-multiplicande  du, 
dernier  ordre  ; 

3°  Exécuter  alors  la  multiplication,  en  faisant  com- 
mencer chaque  produit  partiel  au  chiffre  du  multiplicande 
qui  est  placé  au-dessus  du  chiffre  multiplicateur  qu'on 
emploie.  On  écrit  non  pas  en  échelons,  mais  dans  une 
même  colonne  verticale  à  droite ,  le  premier  chiffre  obtenu 
dans  chacun  de  ces  produits  partiels; 

Âf""  Faire  la  somme  des  produits  partiels,  et  placer  la 
virgule  d'après  les  principes  connus. 

On  voit  que  dans  cette  multiplication  on  néglige  suc- 
cessivement un  plus  grand  nombre  de  chiffres  à  la  droite 
du  multiplicande,  à  mesure  que  l'opération  avance,  puis- 
qu'on ne  fait  commencer  chaque  multiplication  partielle 
qu'au  chiffre  du  multiplicande  qui  est  écrit  au-dessus  du 
chiffre  multipliant.  Il  est  bon  de  forcer  s'il  y  a  lieu,  par 
la  pensée,  le  dernier  chiffre  conservé  de  chaque  multipli- 
cande abrégé. 

Au  reste  s'il  est  commode  de  renverser  le  multiplica- 
teur, afin  de  déterminer  d'un  coup  d'œil  à  quel  chiffre  du 
multiplicande  il  faut  commencer  chaque  produit  partiel, 
cette  pratique  n'est  pourtant  pas  d'une  nécessité  absolue. 
On  peut  employer  les  facteurs  tels  qu'ils  sont  donnés,  en 
abrégeant  d'un  chiffre  le  multiplicande  à  chaque  inultipli- 


(  88  ) 

cation  partielle.  II  suffît  à  cet  effet  de  marquer  successi- 
vement d'un  point  chaque  chiffre  négligé. 

33.  Multiplication  descendante.  —  Dans  la  multiplica- 
tion d'Oughtred  on  prend  le  multiplicateur  en  descendant, 
mais  le  multiplicande  en  montant.  C'est  que  la  formation 
du  produit  partiel  est  plus  simple  et  que  l'expression  en 
est  plus  aisée  lorsqu'on  emploie  les  chiffres  du  multipli- 
cande de  droite  à  gauche;  car  dans  ce  cas  les  reports  se 
joignent  aux  unités  que  l'on  obtient  pour  l'ordre  suivant, 
et  qui  ne  sont  pas  encore  écrites.  Il  y  a  cependant  quelques 
circonstances  où  l'on  peut  désirer  de  pratiquer  une  multi- 
plication entièrement  descendante,  et  de  prendre  par 
conséquent  le  multiplicande  lui-même  en  descendant.  Les 
reports  se  présentent  alors  après  que  les  unités  auxquelles 
ils  doivent  se  joindre  sont  déjà  inscrites.  Toutefois  on 
pourrait  retenir  ces  unités,  pour  les  joindre  aux  dizaines 
que  va  produire  l'ordre  inférieur,  justement  comme  nous 
retenons  les  dizaines  dans  la  méthode  ordinaire.  Mais  si 
l'on  préfère,  on  écrit  chaque  produit  partiel  sur  deux  lignes 
horizontales  superposées,  Tune  consacrée  aux  dizaines,  et 
l'autre  (où  les  chiffres  avancent  d'un  rang)  affectée  aux 
unités. 

54.  Multiplication  de  Cauchy,  —  Après  ce  que  nous 
avons  dit  de  l'addition  de  Cauchy,  on  se  fera  facilement 
une  idée  de  la  multiplication  pratiquée  dans  un  style  ana- 
logue. On  remplace  d'abord,  dans  les  facteurs,  tous  les 
chiffres  supérieurs  à  5  par  leur  complément  surmonté  d'un 
signe  négatif,  en  ayant  soin  d'augmenter  d'une  unité  le 
chiffre  positif  qui  précède  (n°  29,  article  VI).  On  ne  ren- 
contre plus  alors  de  figure  dont  la  valeur  absolue  est  supé* 
Heure  à  5.  Le  plus  haut  produit  individuel,  au  lieu  d'être 
9  X  9  =  81  se  réduit  à  5  X  5  =  25.  Il  y  a  des  produits 


(89) 
négatifs,  dont  on  surmonte  les  chiffres  de  signes  — .  Après 
avoir  fait  la  somme  des  produits  partiels  en  tenant  compte 
des  signes,  on  convertit  le  produit  général  dans  le  style 
vulgaire  ou  entièrement  positif. 
Voici  un  exemple  de  cette  multiplication  : 

,        ,     (  327,43        ^    ,  ,       .     (     3  3  3,  4  5 

Facteurs  donnes  j  ^^^'^^       Facteurs  prépares  |  j  ^  5  T   2  4 


î*'  produit  partiel  (par  4). 

2™«      «  »  (par  2). 

3™e      «  »  (par  î). 

4«n«      »  «  (par  5). 

5™e      »  ■  (par  2). 

6™«      »  »  (par  1). 


î  3  î  1    7  2 
6  6  6  8    6 
3  H  3  4  3 
16  4  3  15 
6  6  6  8  6 
3  3  3  4  3 


Somme  ou  produit  total 32216  1,  6615 

Produit  total  converti 27804  0,  458  8. 

55.  Multiplication  par  les  tables.  —  On  a  proposé  d'ac- 
célérer la  formation  des  produits  partiels,  et  de  les  rendre 
à  peu  près  indépendants  de  la  fidélité  de  la  mémoire,  en 
recourant  à  des  tables  analogues  à  la  table  vulgaire  dite 
de  Pythagore,  mais  d'une  plus  grande  étendue.  On  con- 
struit, par  exemple ,  une  table  des  produits  deux  à  deux  des 
cent  premiers  nombres,  qui  peut  tenir  dans  une  feuille. 
On  y  prend  les  produits  à  mesure  qu'il  s'agit  de  les  former. 

Crelle  a  donné  une  table  des  produits  deux  à  deux  des 
nombres  de  trois  chiffres  (*).  Chacun  de  ces  produits  s'y 
compose  de  deux  parties,  l'une  dépendant  du  chiffre  des 
centaines  du  multiplicateur,  et  l'autre  commune  à  tous  les 


(*)  Une  nouvelle  édition  de  cette  Table  a  été  publiée  il  y  a  quelques 
années  par  Bremiker. 


(  90  ) 
multiplicateurs  qui  ont  les  deux  mêmes  chiffres  à  leur 
droite. 

Il  y  a  enfin  des  machines  à  calculer  qui  donnent  méca- 
niquement les  produits  de  deux  facteurs  exprimés  avec 
un  plus  ou  moins  grand  nombre  de  chiffres.  Uarithmo- 
mètre  de  Thomas  fournit,  par  exemple,  avec  seize  figures 
exactes,  les  produits  entre  eux  des  nombres  de  huit 
chiffres.  Mais  l'usage  de  ces  machines  n'est  pas  encore 
répandu ,  et  jusqu'ici  il  ne  fait  peut-être  que  changer  la 
nature  du  travail,  sans  en  abréger  la  durée  (*). 

Dans  une  multiplication  par  les  tables,  les  différentes 
parties  d'un  même  produit  partiel  sont  sujettes  à  empiéter 
les  unes  sur  les  autres.  Il  serait  fatigant  de  retenir  de3 
reports  considérables.  Il  est  donc  préférable  d'écrire  sur 
une  seconde  ligne  horizontale  les  chiffres  dont  on  trouve 
les  places  déjà  occupées.  C'est  ce  qu'on  a  déjà  indiqué  au 
n°  33. 

36.  Multiplication  mixte.  —  Le  grand  avantage  d'em- 
ployer les  logarithmes  dans  la  multiplication  a  conduit  à 
ce  procédé,  qui  en  permet  l'application,  bien  qu'avec 
moins  de  simplicité,  dans  le  cas  même  où  les  tables  loga- 
rithmiques sont  insuffisantes  pour  fournir  tout  d'un  coup, 
dans  l'étendue  requise ,  un  résultat  demandé.  Il  reste  en 
effet  la  ressource  de  calculer  ce  résultat  partie  par  partie. 
L'opération  prend  un  caractère  mixte,  tenant  d'un  côté  des 
procédés  logarithmiques,  et  de  l'autre  des  procédés  directs. 


(*)  Parmi  les  moyens  mécaniques  il  faudrait  peut-être  compter  le 
calcul  sur  les  doigts,  quia  été  pratiqué  autrefois  avec  des  développ^^ 
menls  faits  pour  étonner.  Les  amateurs  de  curiosités  scientifiques  pour- 
ront consulter  à  ce  sujet  l'ouvrage  de  Uberti  Thesoro  univcrsale  de 
ahacho;  Vinegia ,  1548,  in-S". 


(9i  ) 

On  forme  les  produits  partiels  par  parties  ou  tranches, 
au  moyen  des  logarithmes,  en  prenant  autant  de  chiffres 
à  la  fois  que  les  tables  permettent  de  le  faire  avec  sûreté. 
Les  tables  logarithmiques  à  sept  décimales  fournissent 
jusqu'à  la  dernière  unité  le  produit  de  deux  nombres  de 
quatre  chiffres  (*).  Ainsi ,  à  l'aide  de  ces  tables,  on  peut 
former  les  produits  partiels  en  prenant  à  la  fois  quatre 
chiffres  au  multiplicande  et  quatre  au  multiplicateur.  Les 
tables  logarithmiques  à  dix  décimales  permettent  de  former 
à  la  fois  les  produits  de  cinq  chiffres  par  cinq  chiffres. 

Remarquons,  en  outre,  que  dans  le  produit  de  la  der- 
nière tranche  à  droite,  on  obtiendrait  de  cette  manière  un 
plus  grand  nombre  de  chiffres  qu'on  n'en  doit  conserver. 
De  là  les  règles  suivantes  : 

On  coupe  le  multiplicande  et  le  multiplicateur  en  tran- 
ches de  n  chiffres ,  la  dernière  tranche  à  droite  pouvant 
contenir  par  exception  jusqu'à  %i  —  1  chiffres;  et  Ton 
abrège  le  multiplicande  de  n  chiffres  à  chaque  nouveau 
produit  partiel. 

La  multiplication  mixte  est  commode,  mais  elle  exige 
beaucoup  d'ordre  dans  la  disposition  des  calculs. 

37.  MuUipUcation  laborieuse.  —  Lorsqu'il  s'agit  d'une 
multiplication  qui  renferme  aux  facteurs  un  grand  nombre 


(*)  Dans  un  produit  de  quatre  chiffres  par  quatre  chiffres  formé  par 
Taddition  de  deux  logarithmes  à  sept  décimales,  il  peut  y  avoir,  dans 
certains  cas,  du  doute  sur  la  dernière  figure.  Mais  ce  doute  est  sans 
aucune  importance,  et  mérite  à  peine  une  mention.  En  effet,  on  le  lève 
immédiatement  en  se  rappelant  que  le  dernier  chiffre  à  droite  d'un  pro- 
duit total  est  le  dernier  chiffre  du  produit  particulier  des  deux  derniers 
chiffres  des  facteurs.  Ainsi  le  produit  de  7  427  par  5  684  doit  nécessaire- 
ment se  terminer  par  un  8,  qui  est  le  dernier  chiffre  de  28  ou  4  x  7.  On 
s'assure  donc  toujours ,  à  vue,  du  chiffre  extrême. 


(92) 
de  chiffres,  le  meilleur  procédé  consiste  à  préparer  d'abord 
une  table  des  produits  du  multiplicande  par  les  neuf  pre- 
miers nombres  naturels.  On  construit  cette  table  de 
proche  en  proche  par  addition  ,  c'est-à-dire  que  l'on  ajoute 
à  chaque  nombre  obtenu  le  multiplicande  lui-même.  Si 
Ton  va  jusqu'au  dixième  résultat,  celui-ci  sert  de  vériflca- 
lion,  car  il  ne  doit  être  autre  chose  que  le  multiplicande, 
dans  lequel  tous  les  chiffres  ont  été  avancés  d'un  rang 
vers  la  gauche.  La  table  ainsi  formée  et  vérifiée,  on  écrit 
en  les  reculant  chaque  fois  d'un  rang  et  en  les  abrégeant 
à  l'endroit  convenable,  les  divers  produits  partiels  de- 
mandés. On  procède  enfln  à  l'addition,  qui  fournit  comme 
à  l'ordinaire  le  produit  total.  11  y  a,  dans  cette  méthode, 
peu  de  calcul  mental,  et  par  conséquent  peu  de  chances 
d'erreur.  Ce  procédé  réunit  de  tels  avantages  qu'on  ferait 
peut-être  bien  de  l'adopter  même  pour  les  multiplications 
communes.  A  coup  sûr  c'est  celui  qu'il  faut  recommander 
en  première  ligne  pour  les  multiplications  laborieuses. 

58.  Multiplication  à  vue.  —  On  trouve  dans  les  traités 
d'arithmétique  des  remarques  sur  la  formation  et  les  ca- 
ractères des  produits  par  les  premiers  nombres  naturels. 
Je  mentionnerai  seulement  ici  que  le  produit  par  9,  re- 
gardé par  les  commençants  comme  le  plus  difficile  à 
former,  s'obtient  sans  effort  en  retranchant  chaque  chiffre 
de  son  voisin  immédiat  du  côté  droit:  en  effet  9  ==10 — i. 
Pour  rendre  l'opération  possible ,  on  suppose  que  le  chiffre 
extrême  à  droite  est  suivi  d'un  zéro.  Le  produit  par  H  ou 
dO  -+- 1  s'exécute  semblablement  en  ajoutant  chaque  chiffre 
au  chiffre  voisin.  Le  produit  par  12  est  le  double  du  pro- 
duit par  6  et  le  triple  du  produit  par  4;  mais  on  pourrait 
aussi  le  former  en  ajoutant  à  chaque  chiffre  le  double  du 
chiffre  qui  le  précède. 


(93) 

Il  n'est  pas  inutile  d'avoir  une  certaine  pratique  de  ces 
simples  opérations. 

59.  Multiplication  sommaire.  —  Aux  multiplications 
cursives  se  rattache  la  méthode  approximative  de  former 
les  produits  des  facteurs  voisins  de  l'unité.  Les  facteurs 
qui  diffèrent  peu  de  1  se  rencontrent  fréquemment  dans 
les  applications  des  sciences  physiques.  Or,  le  produit  de 
ces  facteurs  entre  eux  peut  être  ramené,  dans  certaines 
limites  d'approximation,  à  une  simple  addition. 

Soient  A  =  l  +  a,B  =  lH-6,  €  =  1+  c, des  fac- 
teurs dans  lesquels  a,  6,  c,  sont  de  petits  termes, 

positifs  ou  négatifs;  le  produit  général  P  a  pour  expression 

P=^i  -^-  a  -h  ab  -¥•  abc  ■+■  ...     \ 

-f-  6  -+-  «c...  >   .     ,     .     (58) 

-f-  c  -+-  6c    .  ) 

Mais  un  terme  du  second  ordre  par  rapport  à  «,  6,....  ne 
peut  influer  que  sur  un  certain  rang  décimal  n,  n  étant 
plus  grand  que  la  somme  des  zéros  de  position  situés  à 
droite  de  la  virgule  dans  les  deux  facteurs  considérés.  Les 
termes  du  troisième  ordre  et  des  ordres  qui  suivent  seront 
encore  moins  influents.  Négligeons  tous  ces  termes,  le 
produit  se  réduit  à 

p  =  l-i-aH-6-4-  c..., 
ou ,  en  nommant  k  le  nombre  des  facteurs, 

p  =  A-^B-+-C {k—i).     .     .     .(39) 

D'où  l'on  voit  que  le  produit  de  k  facteurs  qui  diffèrent 
peu  de  l'unité  en  dessous  ou  en  dessus,  est  sensiblement 
égal  à  leur  somme  diminuée  de  k —  1. 

Ce  produit  approché  peut  être  réputé  exact  jusqu'au 


(94) 

if^'  ordre  inclusivement  à  droite  de  la  virgule,  n  étant 
la  somme  des  0  et  des  9  qui  suivent  immédiatement 
cette  virgule ,  dans  les  deux  facteurs  qui  en  renferment  le 
moins. 

Ainsi,  par  ce  procédé,  le  produit  1,001  6  x  0,999  4 
X  1,003  6  serait  exact  jusqu'au  quatrième  rang  inclusive- 
ment à  droite  de  la  virgule,  c'est-à-dire  à  0,000  1  près,  et 
dépendrait  de  la  simple  somme  ci-dessous  : 

1"  facteur 1,001  6 

2'ne      » 0,999  4 

3«»«       » 1,003  6 

Somme  —  2 1,004  6  =  produit  approché. 

Les  astronomes  font  usage  de  la  multiplication  som- 
maire dans  les  réductions  de  la  réfraction  à  la  température 
et  à  la  pression  barométrique  actuelles. 

§  J.  —  Division. 

40.  Les  plus  simples  de  toutes  les  divisions  sont  celles 
par  les  diviseurs  d'un  seul  chiffre.  On  peut  généralement 
les  effectuer  à  vue ,  sans  écrire  le  détail  des  soustractions 
ni  des  restes  successifs.  On  trouve  des  remarques  sur  la 
formation  de  ces  quotients  dans  les  traités  élémentaires. 

Pour  calculer  le  quotient  par  9,  on  peut  recourir  à  un 

procédé  très-simple,  qui  n'exige  presque  pas  d'effort  mental. 

On  sait  que 

1  _  1  1         _J__ 

9~~Ï0  "^'ÏÔÔ'*'  ÎÔÔÔ"*' 
et  par  conséquent ,  N  étant  le  nombre  à  diviser, 

N_  N         N  N 

9  ""TÔ  "^ÏÔÔ"^  1000*" 


(95  ) 
Mais  les  différents  termes  de  ce  second  membre  ne  sont 
que  le  nombre  lui-même  reculé  chaque  fois  d'un  nouveau 
rang  vers  la  droite.  Il  est  donc  facile  de  voir  que  les 
chiirres  significatifs  du  quotient  par  9,  en  allant  en  des- 
cendant, sont  I*'  le  premier  chiffre  du  dividende,  2°  la 
somme  des  deux  premiers  chiffres  de  ce  dividende  ;  o"  la 
somme  des  trois  premiers  chiffres,  et  ainsi  de  suite. 

Ainsi  le  quotient  de  526  742  par  9  se  formerait  par 
addition  successive,  comme  suit  : 


3     .    .    .    . 

5  -♦-  2 

5-4-6 
11-4-7 
18-4-4 
22-4-2 

.    .      5 

5 
11 
18 
22 

2,4 

24-4-0 
24-4-0 
24-4-0 

24 
24 
24 

Somme. 

,   .    .     36  304,666  =  Quotieni 

Semblablement  ^ 

-étant  la 

somme  de  la  série 

1 

— 

4 

400 

1 

10 

1000       ***' 

on  a 

N 

il~" 

N 

N 
100 

N 
i"*"  1000       *"' 

et  le  même  procédé  s'applique,  en  changeant  seulement  le 
signe  des  chiffres  alternatifs. 

41.  On  a  souvent  besoin  de  rechercher  les  diviseurs  ou 
sous-multiples  des  nombres,  afin  de  décomposer  ceux-ci 
dans  leurs  facteurs.  Il  n'existe  pas  à  cet  égard  de  méthode 
directe,  et  l'on  ne  peut  procéder  que  par  essais.  Si  le 
nombre  est  élevé,  l'un  des  moyens  les  plus  expédilifs 
consiste  à  soustraire  successivement  de  son  logarithme 


(96) 
les  logarithmes  des  différents  nombres  premiers,  à  com- 
mencer par  les  plus  simples.  On  examine  chaque  fois  si  le 
reste  correspond,  dans  la  table  logarithmique,  à  un  nombre 
entier. 

La  règle  à  calcul  est  aussi  fort  utile  en  pareille  cir- 
constance. Comme  son  emploi  dans  les  cas  de  ce  genre  est 

P^  ^ jyj         peu  connu  ,  il  n'est  pas  inutile  de  le 

~    Q  rappeler  ici.  On  sait  que  cette  Règle 

^  ^    "*         est  une  double  échelle  logarithmique. 

Au  lieu  de  la  disposer  à  la  manière  ordinaire ,  c'est-à-dire 
avec  les  divisions  des  deux  échelles  courant  dans  le  même 
sens,  retournons  bout  à  bout  Tune  des  réglettes,  et  pla- 
çons les  deux  échelles  MN,  PQ,  de  telle  manière  que 
leurs  divisions  courent  en  sens  contraire.  Le  point  M  dé- 
terminera sur  l'échelle  PQ  la  même  lecture  m  que  le 
point  P  sur  l'échelle  MN  en  />,  puisque  Vm  =  Mp.  Or,  un 
nombre  entier  quelconque  A  étant  considéré  comme  le 
produit  de  deux  facteurs  a,  (3,  on  a 

LA  =  LaH-L|3. 

A  insien  faisant  pM==î??P=  LA,  tous  les  diviseurs  entiers 
de  A,  tels  que  a  et  3,  fourniront  des  coïncidences  entre  les 
traits  des  deux  échelles,  dans  l'intervalle  PM.  Si  A  =  a[3, 
on  a  en  même  temps  A  =  [3a  ;  toute  coïncidence  se  repro- 
duit donc  symétriquement  par  rapport  aux  points  P  et  M. 
La  Règle,  disposée  comme  on  vient  de  le  dire,  fournit 
en  peu  d'instants  tous  les  diviseurs  entiers  d'un  nombre 
donné  A.  Il  suffît  pour  cela  de  tirer  les  échelles  jusqu'à 
l'indication  réciproque  de  LA,  puis  de  parcourir  des  yeux 
l'espace  PM,  ou  seulement  une  de  ses  moitiés,  en  cher- 
chant les  coïncidences  comme  on  les  chercherait  sur  un 
vernier.  On  en    trouvera  autant  qu'il  y  a  de  manières 


(  97  ) 
différentes  de  décomposer  le  nombre  donné  en  facteurs 
couplés;  et  si  A  est  premier,  il  n'y  aura  pas  deux  traits 
qui  se  correspondront  exactement  dans  tout  l'inter- 
valle PM,  sauf  les  traits  extrêmes,  qui  donnent  les  fac- 
teurs 1  et  A. 

Ce  procédé  est  extrêmement  simple  et  expéditif  II  est 
vrai  que  par  suite  de  l'imperfection  qui  s'attache  à  tout' 
procédé  mécanique ,  il  peut  s'élever  des  doutes  dans  cer- 
tains cas.  Il  y  a  parfois  des  appulses,  ou  rapprochements 
de  traits,  qui  pourraient  être  prises  pour  des  coïncidences 
véritables.  Il  sera  toujours  facile  cependant  de  distinguer 
ces  appulses  des  vraies  coïncidences.  11  suffira  de  faire  le 
produit  des  deux  chiffres  extrêmes  à  droite,  dans  les  nom- 
bres qu'on  soupçonne  d'être  diviseurs.  S'il  y  a  appulse 
seulement,  ce  produit  fournira  un  chiffre  des  unités  diffé- 
rent des  unités  de  A  ;  s'il  y  a  coïncidence ,  on  retombera 
au  contraire  sur  le  chiffre  final  à  droite  du  nombre  donné. 

On  remarquera  en  outre  que  ce  procédé  peut  servir  à  la 
vérification  rapide  des  échelles.  Si  l'on  détermine  à  l'avance 
les  sous-multiples  d'un  nombre,  et  que  l'on  tire  la  Règle  à  la 
division  qui  correspond  à  ce  nombre,  dans  la  disposition 
qui  vient  d'être  indiquée,  il  faudra  que  tous  les  sous-mul- 
tiples fournissent  des  coïncidences  exactes  dans  les  traits. 

42.  Il  n'est  peut-être  pas  superflu  de  grouper  ici  quel- 
ques remarques  sur  le  chiffre  final  (ou  chiffre  des  unités), 
dans  un  produit  entier  et  ses  deux  facteurs. 

Le  0  au  produit  exige  un  0  ou  un  o  dans  l'un  des  divi- 
seurs. 

Le  5  au  produit  exige  un  5  au  moins  aux  facteurs. 

Les  chiffres  1,  3, 7  ou  9  au  produit  ne  peuvent  provenir 
que  des  chiffres  1,3,  7  ou  9  comme  unité  des  diviseurs. 

Enfin  les  chiffres  2,  4,  6  et  8  sont  engendrés  par  tous 
les  caractères  sauf  0  et  o. 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  7 


(98) 
Aucun  carré  parfait  ne  se  termine  par 

2,  5,  7,  8. 

Tout  carré  parfait  se  termine  par  un  de  ces  22  nombres 
de  deux  chiffres  : 

00 

01     21      41      61      81 
04     24     44     64     84 
25 
16     36     56     76     96 
09     29     49     69     89 

43.  La  difficulté  de  déterminer  les  diviseurs  d'un 
nombre,  surtout  lorsqu'ils  sont  élevés,  rendait  désirable 
de  reconnaître  et  de  mettre  à  part  les  nombres  premiers, 
qui  n'ont  d'autres  diviseurs  qu'eux-mêmes  et  l'unité,  et 
dans  lesquels  tous  les  essais  à  la  recherche  des  sous-mul- 
tiples seraient  infructueux.  On  n'a  pas  découvert  jusqu'ici 
de  caractère  général  qui  s'applique  aux  nombres  premiers 
et  qui  permette  de  les  reconnaître  directement.  Le  moyen 
le  plus  sûr  de  former  une  table  de  ces  nombres  est  le  pro- 
cédé connu  sous  le  nom  de  crible  {cribrum).  Il  consiste  à 
effacer  successivement  de  la  suite  des  nombres  naturels 
les  multiples  de  2,  puis  ceux  de  o,  puis  ceux  de  4  (qui 
rentrent  dans  ceux  de  2) ,  puis  ceux  de  5 ,  et  ainsi  de  suite. 
Tout  nombre  qui  finalement  n'est  pas  effacé,  c'est-à-dire 
qui  n'est  multiple  d'aucun  autre  nombre,  est  évidemment 
premier. 

Si  l'on  veut  pousser  la  table  jusqu'au  nombre  N,  il  suffit 
manifestement  de  s'arrêter  aux  multiples  de  V^N.  Ainsi 
pour  aller  jusqu'à  1000,  il  suffit  de  marquer  les  multiples 
jusqu'à  ceux  de  51  inclusivement,  ce  nombre  étant  la 
partie  entière  de  l/lOOO.  Pour  pousser  la  table  jusqu'à 
10000,  il  faut  continuer  de  cribler  jusqu'aux  multiples 


(  99) 
de  iOO  inclusivement.  Les  tables  de  Buckhardt,  qui  don- 
nent les  nombres  premiers  ainsi  que  les  diviseurs  de  tous 
les  autres  nombres,  vont  jusqu'à  2  000  000. 

On  voit  par  ces  tables  que  le  nombre  de  nombres  pre- 
miers est 

pour  le  premier  mille 169 

«  2«»«         »  135 

«  û™e  »  126 

»  5™«        »  119 

»  6"«        «  114 

»  7"e         »  j]7 

«  8«>e  „  J07 

»  g^ie        »  JIO 

La  probabilité  de  rencontrer  un  nombre  premier  est 

dans  un  nombre  de  1  chiffre 0,556 

»  »  2  chiffres 0,233 

»  »  3        »      0,159 

»  •  4        »      0,118 

Dans  les  grands  nombres,  il  y  a  donc  une  chance  de 
trouver  un  nombre  premier  sur  9 ,  et  cette  probabilité  va 
en  diminuant  de  plus  en  plus  lentement  à  mesure  que  le 
nombre  croît. 

M.  La  division  entre  nombres  rationnels  peut  se  pour- 
suivre indéfiniment  sans  cesser  de  fournir  des  chiffres 
exacts  au  quotient.  Mais  si  les  nombres  donnés  ne  sont 
qu'approchés,  s'ils  sont  abrégés,  par  exemple,  l'exactitude 
s'arrête  à  un  certain  rang  du  quotient,  comme  elle  s'arrê- 
tait dans  la  multiplication  à  un  certain  rang  du  produit. 
Cette  limite  dépend  évidemment  du  nombre  des  chiffres 
exacts  des  données. 

Il  est  facile  de  conclure  de  ce  qu'on  a  dit  à  la  multipli- 
cation les  règles  suivantes  : 


(  dOO  ) 

Si  Ton  nomme  respectivement  p  et  q  \e  nombre  des 
chiffres  exacts  du  dividende  et  du  diviseur,  l'erreur  du 
quotient  commence  seulement  dans  le  rang  marqué  par 
le  plus  petit  des  deux  nombres  p  on  q. 

Pour  obtenir  dans  un  quotient  n  chiffres  dans  lesquels 
Terreur  porte  seulement  sur  le  dernier  rang,  il  sera  néces- 
saire, mais  suffisant,  d'exprimer  les  deux  termes  de  la 
fraction  avec  n  chiffres  exacts  ;  mais  si  l'on  veut  être  sûr 
de  l'unité  du  dernier  rang  lui-même,  il  faudra  prendre, 
au  dividende  au  moins,  n  -f-  i  chiffres. 

A  part  cette  dernière  restriction,  on  trouve  encore  ici 
une  application  du  précepte  de  l'égalité  dans  le  nombre 
des  chiffres. 

Nous  allons,  dans  tout  ce  qui  va  suivre,  considérer  la 
division  opérée  sur  des  nombres  irrationnels,  et  par  con- 
séquent abrégés. 

45.  Division  simplifiée.  —  Dans  cette  division  ,  au  lieu 
d'abaisser  des  zéros  à  la  manière  ordinaire,  on  abrège 
d'un  chiffre  le  diviseur  à  chaque  opération  partielle.  Ce 
précepte  n'est  d'ailleurs  qu'une  généralisation  de  celui  sur 
lequel  Joseph  Fourier  a  fondé  sa  division  abrégée.  Les 
calculateurs  trouveraient  avantage  à  laisser  entièrement 
de  côté  le  procédé  vulgaire.  La  division  serait  alors  con- 
duite d'après  les  règles  suivantes  : 

V  Ramener  les  deux  termes,  dividende  et  diviseur,  au 
nombre  de  chiffres  exacts  déterminé  en  vertu  du  n*'  pré- 
cédent. 

2"  Exécuter  la  division  dans  le  sens  descendant,  mais 
après  chaque  division  partielle  abréger  d'un  chiffre  le  di- 
viseur, en  forçant  (par  la  pensée)  la  partie  restante,  s'il  y 
a  lieu.  Le  nombre  des  divisions  partielles  est  donné,  dans 
ce  système ,  par  celui  des  chiffres  du  diviseur. 

o°  Assigner  les  rangs  en  vertu  de  ce  principe  :  la  carac- 


(  m  ) 

térisliqno  du  premier  chiffre  significatif  du  quotient  est 
celle  du  rang  du  dividende  sous  lequel  tombe  la  virgule  du 
premier  soustracteur  partiel. 

Comme  pratique  générale,  nous  avons  toujours  trouvé 
préférable  d'écrire  les  divers  soustracteurs.  La  soustraction 
mentale  que  l'on  en  fait  immédiatement  sans  en  poser  les 
chiffres,  est  non-seulement  apte  à  introduire  des  erreurs, 
mais  elle  produit  une  fatigue  d'esprit  que  ne  compense 
point  l'économie  presque  insensible  de  temps  et  de  travail. 

46.  Division  en  série.  —  Les  difficultés  de  la  division 
viennent  moins  de  la  longueur  du  dividende  que  de  l'éten- 
due du  diviseur.  Lorsque  ce  dernier  n'a,  par  exemple, 
qu'un  seul  chiffre,  l'opération  s'exécute  sans  peine.  Or,  il 
est  toujours  possible,  comme  nous  allons  le  faire  voir,  de 
ramener  le  diviseur  à  un  seul  chiffre,  et  de  transformer  les 
opérations  partielles  suivantes  en  simples  multiplications. 

Soient  A  un  dividende,  et  C-he  nn  diviseur,  C  repré- 
sentant le  terme  décimal  le  plus  avancé  vers  la  gauche, 
et  e  le  reste  du  nombre.  On  trouve,  en  effectuant  la  divi- 
sion, 

A     __A        A    £       A/e^^ 
C-+-  e~'c'~  C  '  C  "^C  \C> 


-i(âv...,.., 


Cette  série  est  toujours  convergente.  Le  second  membre 
ne  renferme  que  deux  quotients  différents  ^  et  ^,  dans 
lesquels  le  diviseur  est  formé  d'un  seul  chiffre  significatif; 
le  reste  de  l'opération  se  réduit  à  des  multiplications  suc- 
cessives par  un  facteur  constant. 

On  s'arrête,  dans  tous  ces  produits,  à  l'ordre  décimal 
que  l'on  a  reconnu  d'avance  pour  limite  des  chiffres  exacts 
(plus  un  rang  surnuméraire)  ;  mais  on  calcule  les  termes 
de  la  série  jusqu'à  ce  qu'ils  deviennent  insensibles  dans 
cette  étendue. 


(  102  ) 

Ayant,  par  exemple,  à  diviser  26,96o  478  748  6  par 
87  219,429  067,  nous  poserons 

A  =  26,965  478  748  6,    C  =  80,000,    e  =  7  219,429  067. 

On  en  tire  à  vue 

A  e 

-=  0,000  337  068  484  35.8,    -•  =  0,090  242  863  3.4- 
G  (j 

On  calcule  ensuite  les  ternies  successifs  comme  on  les 
voit  ci-dessous.  Le  chiffre  placé  en  exposant  près  d'un  zéro 
de  position  indique  le  rang  de  ce  zéro  par  rapport  à  la 
virgule. 

1"   terme  ou^ 0,0  003370684843  5. 8 

2me       „       ou  —  0,03  337  068  484  36   x  ^    ....     "oO  4T8  02o  Î6.9 
Sme       „       ou -t- 0,03  030  418  025  17   X  ^       ....     2  745  009  68.8 


4iDe  «  ou  -  0,05  002  745  009  69   X  -^       247  71  7  53.4 

5me  «  ou -f- 0,06  247  717  53  X  ^ 2  2  35  4  7  4.0 

6ine  «  ou  -  0,0«  022  354  74  X  ^ 2  ol  7  3ÏÏ.6 

7ine  „  OU  -1-0,06  002  017  36  X    4 182  05.2 

8">e  „  OU  — 0,09  185  05  X  ^ 16  4  2.8 

gme  „  ou -h  0,0»  016  43  X    ^ 1  4  8.2 

lOme  „  OU  —  0,09  001   48  X    ^ 15.3 

lime  „  OU-+-0,0'2  13  X   f; 1-2 

lâ'ne  »  OU  — o,o»-^oi  X  ^ T 


Somme  algébrique 0,0  0  0  3  0  9  1  7  2  2  6  5  7  2.9 

Somme  convertie 0,0  0  0  3  0  9  1  6  8  25  5  7  1 .1 

L'opération  est  facilitée  par  ce  fait  que  le  multiplica- 
teur est  partout  le  même,  savoir  --  On  prépare  à  l'avance 
une  table  de  ses  produits  par  les  neuf  premiers  nombres 
naturels. 


(  i03) 

La  division  en  série,  réduite  à  ses  deux  premiers  termes, 
sert  avec  avantage  dans  les  interpolations  tabulaires,  pour 
réduire  rapidement  les  fractions  vulgaires  en  fractions  dé- 
cimales. Ainsi 

26  __  26_       26       _I^ 
48T~  500  "^  5ÔÔ^  5ÔÔ'"' 

or  les  quotients  de  ces  nouvelles  divisions  s'obtiennent  à 
vue,  et  l'on  a 

26         26         26         19 

^  ^— X =0,052  H- 0,05  X0,04-. 


481 

500 

500 

500 

=  0,052 

-*-  0,002 

...  = 

=  0,054... 

De 

même 

576 
729 

576 
'  700 

576 
700^ 

29 
700 

..=0,5c 

= 

=  0,557 

—  0.022 

...  = 

=  0,515.. 

Mais  pour  rendre  cette  méthode  plus  expéditive,  on 
simplifiera  d'abord  la  fraction.  Il  sera  inutile  de  chercher, 
dans  ce  but,  le  plus  grand  commun  diviseur;  il  suffit 
d'employer  un  sous-multiple  du  dénominateur.  Ainsi,  dans 
le  dernier  exemple,  le  dénominateur  729  est  divisible  par 
9,  d'où  Ton  conclut 

.576  _  41,78 

729^     81 

Je  me  borne  à  mettre  au  nouveau  numérateur  un  chiffre 
de  plus  qu'il  n'en  existait  à  l'ancien.  Maintenant,  par  la 
division  en  série, 

41,78   41.78   41,78    1  ,   ^^.^ 

-^— =  — ^x =  0,522 -0,52X0,01 5- 

81     80     80    80 

=  0,522  —  0,007..  =0,515  ... 


(  104  ) 

Ici  on  aurait  pu  pousser  plus  loin  encore  la  simplifica- 
tion de  la  fraction  vulgaire,  en  posant  à  vue 

41,78  _  4,642 
81     ~~     9    ' 

d'où  Ton  eût  tiré,  également  à  vue,  la  valeur  0,516. 

47.  Division  par  approximations  successives.  —  Cette 
division  a  de  grands  rapports  avec  la  précédente,  mais  elle 
est  plus  particulièrement  adaptée  à  l'emploi  des  loga- 
rithmes. Supposons  le  diviseur  A  décomposé  en  deux 
tranches  a',  a";  décomposons  semblablement  le  diviseur  B 
en  deux  tranches  6',  6";  et  cherchons  le  quotient^ .  On  a 


A       a' 

a" 
1 

a'  b"        a'  b"^             \ 

b'          b"      '      b"         '"   J 

SI  la  somme  de  la  première  série  est  S',  celle  de  la  seconde 
sera                                        ^„ 

S"  =  S'— , (42) 

en  sorte  que  l'une  résulte  immédiatement  de  l'autre. 

Dans  ces  suites  infinies,  mais  rapidement  convergentes, 
le  premier  de  tous  les  termes  ^- est  seul  très-grand,  et 
d'ordinaire  il  est  le  seul  qui  exige  une  division  directe.  Les 
autres  se  forment  aisément  à  l'aide  des  logarithmes.  La  pre- 
mière série  étant  sommée,  jusqu'aux  derniers  termes  sus- 
ceptibles d'influer  dans  les  limites  fixées,  la  seconde  série 
s'en  déduit  par  les  logarithmes,  d'après  la  formule  (42). 

Appliquons  celte  méthode  aux  nombres  de  l'exemple 
précédent. 

A  =  26,965  478  748  6     B  =  87  219,  429  067 

a'  =:  26,965  b'  =  87  220 

a"=z    0,000  478  748  6  .   6"=   —  0,  570  933. 


(  i03  ) 
J'exécute  une  seule  division  directe,  celle |>,  dans  laquelle 
j'abaisse  les  zéros  à  la  manière  commune,  le  quotient  de- 
mandé étant  celui  de  deux  nombres  exacts.  J'obtiens  ainsi 

-  = 0,000  309  160  742  94.9  =  1"  terme. 

b' 

Les  autres  termes  se  forment  à  l'aide  des  logarithmes  : 

L6"  T,756  585  2  — 
L6'  4,940  616  1 
Différence  6,815  969  1  —  =  L  — 

L^  4,490  184  3 
b'     J 

re  somme       9,306  153  4  — 2,023  73.4  =  2»'  terme. 

2««e  sommeH  14,122  12        -t- 1.3  =  3'"nerme. 

Somme 0,000  309  162  766  69.6  =  S' 

La"    4,680  107  5 
La'      1,430  800  4 


Différence    5,249  307  1  =  L  ^ 
LS'     4,490  187  2  "' 


Somme.   .     9,739  494  3 5  489  01  4  =  S" 

-  ^ 

S'+S".   .    .    .  0,000  309  168  255  71.0  =  -' 

On  rendrait  l'opération  un  peu  plus  simple  en  disposant 
de  a'  de  telle  façon  que ^' soit  rationnel,  en  faisant,  par 
exemple,  dans  la  division  que  nous  venons  d'exécuter, 
^'=  0,000  o09  exactement,  ce  qui,  sans  changer  b',  exi- 
gerait que  l'on  posât  a'  =  26,9o0  98,  et  par  conséquent 
a"  =  0,014  498  748  6.  Les  termes  de  la  première  série, 
qui  sont  parfois  trop  étendus  pour  se  prêter  aux  calculs 
logarithmiques,  se  formeraient  alors  en  peu  d'instants  par 


(*)  Cette  deuxième  somme  logarithmique  est  obtenue  en  ajoutant  à 
la  somme  précédente  le  Ltt* 


(  i06  ) 
multiplication  directe,  n'étant  composés  chacun  que  d'un 
nombre  fini  et  même  restreint  de  produits  partiels. 

48.  Division  par  la  recherche  du  réciproque.  —  La 
division  par  approximations  successives  se  réduit,  au  fond, 
à  la  recherche  du  réciproque  de  B,  par  lequel  on  multiplie 
finalement  A.  Si  Ton  suppose  B  composé  de  deux  parties 
6'  et  b",  son  réciproque  5^  est 


par  conséquent 

i  =  b'-'  —  b"  b'-'  -^-  b'"  b'-'  -  .    .     .     .  (45) 
B 

La  quantité  b'  renfermant  les  ordres  significatifs  supé- 
rieurs, la  rapidité  dans  la  convergence  de  la  série  (43)  dé- 
pendra de  l'importance  de  6". 

Si  Ton  possédait,  par  exemple,  une  table  des  quotients 
de  1  par  les  1000  premiers  nombres  naturels,  c'est-à-dire 
pour  b'  >  1000  et  b"  <  10,  il  est  clair  que  ^serait  tou- 
jours <  0,01 ,  et  même  <  0,00o  lorsqu'on  s'astreint  à 
employer  la  position  tabulaire  la  plus  voisine.  Il  en  résulte 
que  le  terme  en  6"  influerait  au  plus  sur  le  o'^""'  ordre 
significatif,  et  le  terme  en  b"^  sur  le  19'^'"'=- 

Mais  si  la  table  ne  s'étend  qu'aux  100  premiers  nombres 
naturels,  c'est-à-dire  si  l'on  a  6'  >  100  et  b"  <  10,  le 
terme  en  b"  peut  influer  sur  le  2''""'  ordre  significatif,  et 
celui  en  6"*^  influe  encore  sur  le  20'"^'"'. 

La  table  qui  suit  présente  les  réciproques  des  cent  pre- 
miers nombres  naturels,  calculés  avec  vingt  décimales, 

ainsi  que  leurs  multiples  par  1,2,5 9.  La  plupart  de 

ces  expressions  décimales  étant  périodiques  en  tout  ou  en 
partie,  il  est  aisé  de  les  étendre  au  besoin. 


(  107 


1^131 

iSiSi 

iSSSi 

iSfii 

iiP.ii 

6(Î6 
371 
000 
444 
000 

umm 

iSlîSi 

l5iii 

iiSii 

iSiîi 

co  ce  cb  t-  S 

iSiii 

«*  OO  05  -^  O 

vf'?f-r-' VcT 

ÎO  i-'î  so  >*  -* 

o 

o' 

o 

çs  2  C;  2  2 

P. 


O  O  O  O  O 

o  o  ooo 
ooooo 


0--OCCO 

o  r-occo 

OïOOCOO 

0»?^  o  rc  o 
o»*orco 


o  o  o  o  o  o  — '  o  C't  o 

OOOOO  Ot-C=)îCO 

OOOOO  0  50  0COO 

OOOOO  OC050CCO 

CSOOi-OO  OG^r-CCO 

o  «>  o  i-  o  1.-2  vt  co  ce  co 


t-OOSîOO 
01  o  -^  00  o 
t-O  t^Q^ 

■5^  o  o  ;2;  o 
q5  o  G^  ?^  ^ 

r-;o<0  500 
G^  o  :c>  oo  o 

t-  o  t~CMO 

G^  o  0>*  o 

t-  ;.T  rc  -r<  o 

G<1  G^l  G^  G^  •îl 

o" 


1  30  t-  Gl  o 
>CC  CD  vt«  o 

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o  o  o  --^  o 

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io  vt  :d  00  o 


r-  ^-^  O)  o  o 
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co  rc  ->o  o  o 

G^  o  G^  o  o 

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o 


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o  o  p  o  o 

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OOOOO 

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0,0  o  iO  >^ 


ce  «c^  o  G^  o 
ce  — OG^IO 

ce  t-  O'Gi  o 

ce  :e  o  G^i  o 
ce  ce  o  G-1  o 
ce  G^l  o  G^  o 

ce>*oG^  o 
ce  —  o  G-i  o 

ce  t-  o  G'i  o 

cesooG^o 
ce  00  i.e  G<i  o 

CeG^G^G^G^ 


cor-o  t-ce 
— .  o  -*  iO  ce 
00  o  co  00  ce 

—  oceGice 
00  o  i-e  ---^  ce 
-T"  o  -r-  ^  ce 

oo  o  o  t-  ce 

—  o  «*  ie  ce 
GO  o  co  00  ce 


o  «.*  -r-  se  o 

OG^-r-OS  o 

ooo-^ooo 

OCO-:-  t-O 

O  i.e  --  se  o 
oo  — ^o 

o  t---ceo 

o  ^-r"  — >  CD  o 
o  o  -T<  G'»  o 


oocscsceo 
ceoceceo 
G^  cî  t-  ce  o 

se  o  —  ce  o 
Ci  cî'  Gi  ce  o 
o  o  se  ce  o 

oocio  ceo 
ce  o  30  ce  o 

G<i  C5  C--  ce  o 

se  o  o  ce  o 

Ci  Ci  00  00  00 
OOOOO 

o" 


O  o  ce  o  o 

O)  o  ce  o  O' 
O  o  ce  o  o 


ooceoo 

o  oce  oo 
o  o  ce  o  o 
o  oce  o  o 

ooceoo 
ooceoo 
o  o  ce  o  o 

ooceoo 
ooceoo 
o  se  S?  G?  g5 


o  t^  o  -—  o 

005o-r-Ô 
JO-JJ  O-T-  o 
O-T-Ô^  o 
o  t-  O-r-O 

CD  -e  o  -T-  o 

OGOO  —  O 
OG^  O  —  O 

o  GO  o  ^  o 


C5  ce  ce  0)0 
o  ce  G^l  G-l  o 

c;  ce  C5  -*  o 

o  ce  o  -r-  o 
o  ce  r-  t-  o 
oce  oseo 

Cicece  ooo 
o  ce  G-i  rM  o> 

es  ce  Ci  -*  o 

o  ce  o  -r<  o 
Oice  t-  t~  o 
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o  ce  o  ^  '-r 

CiOOl— ï-  C£ 

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o  se  se  'r-  o 
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(  ii4  ) 


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0,105  263  157  895 

403  896  403  896 
402  564  402  5(54 

404  2(55  822  785 
400  000  000  000 

0,098  765  432  099 
097  560  975  640 
096  385  542  1(59 
095  238  095  2:58 
094  117  647  059 

0.093  023  255  814 
094  954  022  î)89 
090  909  090  909 
089  887  640  449 
088  888  888  889 

0,087  912  087  942 
086  956  521  739 
086  021  505  376 
085  406  382  969 
084  210  526  316 

0,083  333  333  333 
082  474  22(5  804 
081  (i32  653  061 
080  808  080  808 

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0,092  105  263  158 
090  909  090  909 
089  743  589  744 
088  607  594  937 
087  500  000  000 

0,086  419  753  086 
085  365  853  659 
084  337  349  398 
083  333  333  333 
082  352  941  176 

0,081  395  348  837 
080  459  770  145 
079  545  454  545 
078  654  685  393 

077  777  777  778 

0,076  923  076  923 
076  086  956  522 
075  268  846  804 
074  4(58  085  406 

073  684  240  526 

0,072  946  (566  667 
072  1(54  948  454 

074  428  574  429 
070  707  070  707 

Produit  du  réciproque 
par  6. 

0,078  947  368  421 
077  922  077  922 
076  923  07(5  923 
075  949  367  089 
075  000  000  000 

0,074  074  074  074 

073  470  734  707 
072  289  456  (Î26 

074  428  574  429 
070  588  235  294 

0,0(59  767  444  860 
(J()8  9(55  547  244 
0(58  484  818  182 
0(57  415  730  337 
06(5  6(56  am  6(57 

0.065  934  0(55  934 
0(55  217  391  304 
0(54  516  129  032 
063  829  787  234 
063  157  894  737 

0,0(52  500  000  000 
061  855  670  103 
061  224  489  796 
060  606  0(50  606 

Produit  du  réciproque 
par  5. 

0,065  789  473  684 
064  935  064  935 
064  402  564  403 
0(53  291  439  244 
062  500  000  000 

0,061  728  395  062 
060  975  609  756 
060  240  963  855 
059  523  809  524 
058  823  529  412 

0,058  139  534  884 
057  471  264  368 
056  818  181  818 
056  179  775  281 
055  555  555  556 

0,054  945  054  945 
054  347  826  087 
053  763  440  860 
053  191  489  362 
052  631  578  947 

0,052  083  333  333 
051  546  391  753 
051  020  408  163 
050  505  050  505 

NOMBRE. 

'^ïz^î^^    xSîSSSô    ^SiSgg    ^V.^.t^ê    'ê^^B 

(  115  ) 

Voici  comment  on  se  servirait  de  cette  table  pour  calcu- 
ler le  réciproque  du  module  M  des  tables  logarithmiques, 
avec  douze  figures  exactes, 

M  =  0,434  294  481  903.3. 

Prenant  pour  6'  les  deux  premières  figures  significatives 
de  M,  ou  b'  =  0,45,  d'où  b"  =  0,004  294  481  903,  je 
tire  de  la  table 

6'-»  =  2,325  581  395  34.9, 

puis  en  multipliant  b"  par  b'~\  à  l'aide  des  produits  pré- 
parés par  i,  2,  5... 9,  j'obtiens  d'abord  ^;"6'-*==  0,009 
987  167  218;  puis  en  multipliant  encore  une  fois  par  6'~* 


—  h"  6'-2.    .  .    .   0,023  2  25  9/  0  2  7.5, 

et  ensuite,  en  multipliant  chaque  terme  successif  par  b"b'~\ 

b"^  6'-3  23  196  1  6  4.8 

—  6"3  6'-*  2  3T6  6  3.9 

&"*  6'-s  2  3  13.7 

—  h""^  6'-6  2  3.Î 
6"6  b'-^  .2 


Somme 2,302  585  092  99.1  =  -. 


Mais  si  Ton  exigeait  un  plus  grand  nombre  de  chiffres 
exacts,  cette  marche  deviendrait  pénible,  à  cause  de  la  len- 
teur de  la  série  (45). 

49.  Division  à  l'aide  des  puissances  de  2  et  de  5.  — 
Il  est  visible  qu'on  abrégerait  considérablement  le  calcul 
du  réciproque,  si  l'on  employait  une  valeur  de  b'  qui  four- 


(  i'i6  ) 
nît  6'"*  avec  un  nombre  fini  de  caractères.  Alors  en  effet, 
non-seulement  6'~'  serait  limité,  mais  l'évaluation  de  6"6'~* 
se  ferait  rapidement.  Or  il  y  a  différents  moyens  d'at- 
teindre ce  but.  L'on  sait,  par  exemple,  que  10"  =  2"5", 
d'où  l'on  voit  que  les  puissances  de  même  rang  du  2  et 
du  5  sont  respectivement  réciproques  les  unes  des  autres. 
Soit  un  nombre  très- voisin  de  2%  où  n  est  entier;  nous 
ferons  6'  =  2",  et  par  suite  on  aura  6'~'==o"10  ",  qui  se 
composera  d'un  nombre  limité  de  chiffres. 

Il  n'est  pas  besoin  d'ailleurs  de  recourir  à  une  puis- 
sance de  2  ou  de  5  qui  soit  voisine  de  B  en  grandeur  ab- 
solue :  cette  condition  serait  souvent  impossible  à  réaliser. 
Il  suffit  que  2"  ou  5"  soit  voisin  de  B  par  les  premiers  chif- 
fres à  gauche.  On  fera  dans  ce  cas 

6'  =  2"  10*,     ou     b'  =  o"  10'  .     .     .     .  (44) 

en  transposant  la  virgule;  et  l'on  aura  pour  réciproque 

6'-*  =  5"  lO-^-S     ou     6'-*  =  2MO-"-*.    .    .(45) 

On  pourrait  par  ce  moyen  rendre  b'  aussi  voisin  de  B  qu'on 
le  voudrait,  en  employant  une  table  qui  contint  un 
nombre  suffisant  de  puissances  correspondantes  de  2  et 
de  5.  Mais  lorsque  le  rang  de  ces  puissances  s'élève,  le 
nombre  des  chiffres  qui  les  composent  augmente,  bien  que 
restant  toujours  fini.  L'avantage  de  la  méthode  se  perd 
donc  bientôt.  Nous  avons  borné  la  table  qu'on  trouve  ci- 
dessous  aux  puissances  de  2  et  de  5  dont  les  réciproques 
sont  exprimés  par  dix  chiffres  significatifs  au  maximum. 
Ces  puissances  ne  sont  pas  rangées  par  ordre  de  grandeur 
absolue,  mais  suivant  la  valeur  de  leurs  premiers  chiffres 
de  gauche. 


{  117  ) 


Puissances  de  2  et  de  5. 


PUISSANCES. 

Valeurs. 

RÉCIPROQUES. 

20  =  oO 
210    10-5 

533      10-23 
523     10-16 
515     10-9 

1 

1,024 

1  164  133  218  269  348  144  331  23 

1,192  092  895  507  812  5 

4,220  703  123 

1 

0,976  362  5 
0.808  993  459  2 
0,838  860  8 
0,819  2 

53      10-2 

2  7      dO-  2 
526      10-18 
516      10-11 
5  6      10-  4 

1,23 

i;490  116  119  384  763  625 
1,325  878  906  23 
1,562  5 

0,8 

0,781  25 
0,671  088  64 
0.655  36 
0,64 

2  4      1-1 

214      10-  4 
529      10-20 
519      10-13 
5  9      10-  6 

1,6 

1.638  4 

1.862  643  149  230  937  031  23 

1.907  348  632  812  5 

1,933  123 

0,625 

0,610  351  562  5 

0,536  870  912 

0,324  288 

0,312 

2  1     100 
211    10-  3 

53-2      10-2-2 
522      10-15 
312       10-8 

2 

2,048 

2.328  306  436  538  696  289  062  3 

2:384  183  791  013  625 

2,441  406  25 

0,5 

0,488  281  23 
0.429  496  729  6 
0.419  430  4 
0,409  6 

0  2      10-  1 
2  8      10-  2 
525      10-17 
513      10-10 

2.5 

2,36 

2,980  232  238  769  331  25 

3,031  757  812  5 

0,4 

0.390  623 
0,335  544  32 
0,327  68 

5   5      10-  3 

2  s    10-  1 

52s      10-19 
51s       10-12 

5  s     10  -  5 

3.123 

3.2 

3,723  290  298  461  914  062  5 

3,814  697  265  623 

3,906  23 

0,32 
0,312  5 
0,268  435  456 
0,262  144 
0,236 

2  2    100 

!      2'2      10-3 
351       10-2" 
521      10-14 
31 1       10-7 

4 

4,656  612  873  077  392  378  123 
4,768  371  382  031  25 
4,882  812  3 

0,25 

0,244  140  625 
0,214  748  364  8 
0,209  713  2 
0,204  8 

5  i    10  0 

2  9      10-  2 
524      10-16 
514      10-   9 

!    54    10-2 

3 

3,12 

5.960  464  477  539  062  5 

6.103  515  623 

6,23 

0,2 

0,195  312  5 

0,167  772  16 

0,163  84 

0,16 

(H8) 


Puissances  de  2  et  de  5  (suite). 


PUISSANXES. 

RÉCIPROQUES. 

2  6     40-  « 
5-27     40-is 
517    40-11 
57    40-  ■» 
2  3    40O 

213    40-  3 
530    40-20 
5-20    40-13 
510    40-6 

6,4 

7,430  580  396  923  828  123 

7,629  394  331  23 

7,812  5 

8 

8,192 

9.313  223  746  134  783  136  23 

9,336  743  164  062  3 

9.763  623 

0,156  23 
0.134  217  728 
0,131  072 
0.128 
0,123 

0,122  070  312  3 
0,107  374  182  4 
0,104  837  6 
0,102  4 

Dans  ce  procédé,  on  forme  avant  tout  6"6'~',  et  Ton 
dresse  une  table  de  ses  produits  par  les  neuf  premiers 
nombres  naturels.  Lorsqu'on  arrive  à  des  termes  assez 
courts  pour  les  déduire  du  calcul  logarithmique,  à  l'aide 
des  tables  ordinaires ,  on  cesse  de  former  directement  les 
termes  de  la  série  (43)  ;  et  ô'""^'"'""'  =  x  étant  le  dernier 
de  ces  termes  calculés,  on  somme  tout  d'un  coup  le  reste  R 
delà  progression  géométrique,  en  calculant  par  les  loga- 
rithmes 

X  h"  h'-' 
R  = ; (46 


C'est  ainsi  qu'on  a  formé  ci-dessous  le  réciproque 
de  TT  (rapport  de  la  circonférence  du  cercle  au  diamètre), 
avec  vingt  figures  exactes. 

TT  =  3,141  592  655  589  795  238  46.3 


b' 


Différence. 


0,016  592  653  589  793  238  46.3=6". 


(  H9  ) 
Comme,  par  la  table,  6'  '  =0,52,  on  trouve 

h"   6'-'  .  .  .  .  0.005  309  G49  148  7Ô3  836  30.8. 

Il  vient  alors  successivement  : 

6'-* 0,3  2 

—  6"6'-2  0,0  01  ÔÛÛ  087  727  594  827  ÔT.9 
b"^b'-^  9  021  559  706  447  9  8.5 

—  6"'6'-*  47  90Î  3ÎÛ  8Î5  59.2 
6"*6'-s  2  54  339  186  0  5.3 

—  6"^6'-<5  î  550  451  8  4.3  =  0? 

xb"   6'-» 

■ —    7132553 

l-h6"6'-'. 

Somme.  .  .  .  0,3  18  309  886  183  790  671  5  3.7=-. 

La  table  des  puissances  de  2  et  de  5  rangées  d'après 
leurs  unités  de  gauche,  offre  des  valeurs  beaucoup  plus 
serrées  dans  le  commencement  qu'à  la  fin.  Elle  supplée 
donc,  pour  les  valeurs  faibles,  à  la  table  des  réciproques 
(qui  iie  sont  pas  assez  serrés  dans  le  commencement).  Ces 
deux  tables  se  complètent,  et  l'on  y  aura  recours  selon 
l'occasion. 

Remarquons  ici  que,  quand  le  réciproque  cherché  est 
celui  d'un  nombre  rationnel  N,  il  est  plus  simple,  au  lieu 
de  diviser  l'unité  par  N,  de  prendre  pour  dividende  0,999 
999....,  en  ajoutant  des  9  indéfiniment.  On  arrive  alors 
tôt  ou  tard  à  un  reste  0,  qui  signifie  que  la  période  est  ter- 
minée. Si  l'on  veut  continuer  le  quotient,  il  n'y  a  qu'à  répé- 
ter la  série  de  figures  qu'on  vient  d'obtenir.  Il  n'est  même 
presque  jamais  nécessaire  de  pousser  l'opération  jusqu'à 
ce  qu'il  se  présente  un  reste  0,  ou  si  l'on  prend  l'unité 
pour  dividende  un  reste  1.  Car  dans  la  partie  périodique 
d'un   quotient,   les  chiffres  de  la  seconde  moitié  de  la 


(  120  ) 

période  sont,  dans  presque  tous  les  cas,  complémentaires 
de  ceux  de  la  première.  Ainsi  lorsqu'on  obtient  trois  ou 
quatre  chiffres  successifs  qui  sont  les  compléments  d'au- 
tant de  chiffres  consécutifs,  placés  dans  le  même  ordre, 
obtenus  antérieurement,  on  peut  arrêter  l'opération,  et  se 
contenter  de  prendre  à  vue  les  compléments  des  chiffres 
déjà  trouvés. 

Cette  dernière  remarque,  qui  n'est  pas  sans  importance 
pratique,  s'étend  à  toutes  les  divisions  par  des  diviseurs 
rationnels. 

50.  Division  mixte.  —  Les  logarithmes  peuvent  four- 
nir le  quotient  de  A  par  B  par  tranches  successives,  plus  ou 
moins  étendues  suivant  le  développement  des  tables  dont 
on  fait  usage. 

Soit  x'  la  première  tranche  de  ce  quotient, 

A  —  Bx'  =  a' (47) 

fournira  un  nouveau  dividende,  dont  le  quotient  par  B 
sera  calculé  à  son  tour  par  les  logarithmes.  Soit  x"  ce  nou- 
veau quotient,  limité  au  degré  de  précision  que  les  tables 
logarithmiques  comportent.  On  fera  semblablement  le  pro- 
duit de  x"  par  B,  et 

a'  —  Bx"  =  a" (48) 

fournira  un  nouveau  dividende,  d'oili  l'on  tirera  de  même 
une  troisième  tranche  du  quotient,  et  ainsi  de  suite.  Enfin 
faisant  la  somme  Ix  de  tous  ces  quotients  partiels,  on 
aura 

2x=^ (41)) 

Nous  appelons  cette  opération  du  nom  de  mixte,  parce 


(  121  ) 
qu'on  s'y  sert  à  la  fois  d'opérations  logarithmiques  et  d'opé- 
rations directes. 

11  y  a  plusieurs  remarques  à  faire. 

i°  Les  produits  Bx',  Bx",  etc., doivent  être  formés  direc- 
tement et  s'étendre  jusqu'au  dernier  rang  donné  du  divi- 
dende A.  Il  est  bon  de  dresser  une  table  préparatoire  des 
multiples  de  B  par  les  neuf  premiers  nombres  naturels. 

2"  11  est  nécessaire  de  faire  attention  aux  signes 
des  a',  a",  a'"....,  et  ces  signes  déterminent  respectivement 
ceux  du  X  suivant. 

5"  Il  va  sans  dire  dès  lors  qu'il  faut  tenir  compte  des 
signes  des  x  en  formant  la  somme  algébrique  Ix. 

Nous  croyons  superflu  de  donner  un  exemple. 

51 .  Division  laborieuse,  —  Après  avoir  pratiqué  maintes 
fois,  dans  des  opérations  où  l'on  exigeait  un  grand  nombre 
de  chifïres  exacts,  les  divers  procédés  que  nous  venons  de 
passer  en  revue,  nous  devons  prévenir  que  nous  les  trou- 
vons tous  fatigants,  plus  ou  moins  compliqués,  et  par 
suite  d'une  sûreté  douteuse.  Nous  ne  savons  pourquoi  les 
calculateurs  ne  recourent  pas  d'une  manière  plus  con- 
stante à  une  pratique  analogue  à  celle  qui  est  usitée  dans 
les  multiplications  laborieuses  (n'-'  57).  On  forme  par  addi- 
tion une  table  préalable  des  produits  du  diviseur  par  les 
premiers  nombres  naturels,  l'étendant  jusqu'au  dixième 
produit  qui  sert  de  vérification  à  la  table  entière.  On  prend 
ensuite  dans  cette  table  les  soustracteurs  partiels,  en  abré- 
geant chaque  fois,  dans  le  rang  convenable,  le  soustracteur 
employé. 

Ce  procédé,  remarquable  par  sa  simplicité,  n'exige  que 
fort  peu  de  travail  mental,  et  il  est  extrêmement  facile  de 
conduire  l'opération  avec  ordre.  On  ne  devrait  recourir  à 
d'autres  méthodes  que  dans  des  cas  très-particuliers  ou 


(  i22  ) 

dans  un  but  de  vérification.  Il  y  a  même  avantage  à  con- 
duire ainsi  nos  simples  divisions  ordinaires.  En  un  mot 
cette  méthode  devrait  être  prescrite  dans  les  traités  élé- 
mentaires, et  devenir  la  méthode  commune  pour  la  divi- 
sion. 

$  K.  —  Reste  de  la  division. 

52.  Je  n'ai  pas  l'intention  d'examiner  ici  ce  que  divers 
auteurs  ont  écrit  touchant  la  recherche  directe  du  reste  de 
la  division.  Dans  les  calculs  pratiques  on  n'a  guère  à  faire 
cette  recherche  que  pour  des  diviseurs  très-simples, 
presque  toujours  même  inférieurs  à  20.  Je  vais  me  con- 
tenter d'indiquer  une  formule  générale,  qui  permet  de 
déduire  des  procédés  également  et  facilement  applicables  à 
ces  cas  particuliers. 

Supposons  d'abord  le  dividende  N  partagé  en  tranches 
d'un  seul  chiffre,  que  j'appellerai,  en  les  marquant  d'un 
seul  accent,  a\  b\  c'....;  on  a 

N  =  a'-i-  10  6' -h  10- c'  -4-  ... 

Demandons  le  reste  Rxde ^ .  A  cet  effet  posons  a;==  10  -h  A-, 
ou 

N  N 


"i~"40-+-/c' 

et  nous  trouvons  successivement 

N                N                 N  / 
X             /         k\~  \0\ 

k' 

Par  conséquent 

N       N       AN       A^N 
x~  \0       10'  '     10' 

PN 
10* 

(30) 


(  ^23  ) 

Si  N  est  multiple  de  x,  le  quotient  j  sera  entier.  Dans 
le  cas  contraire,  la  partie  de  ce  quotient  écrite  à  droite  de 
la  virgule  ne  sera  pas  nulle,  et  cette  partie  Iractionnaire, 
multipliée  par  x,  donnera  Rx  cherché. 

Or  la  partie  fractionnaire  F  de  §  est  composée  de  la 
somme  des  parties  fractionnaires  qui  figurent  dans  chacun 
des  termes  du  second  membre  de  (50). 

Dans  le  1*"'  terme      — ,  la  partie  fractionnaire  est       —  , 

*N  k     ,  ,     ^^.,^ 

n         2mc      « n  »  —  («'-+-106'), 

k^  N  A:* 

r,      3uie     „       »  »  —  (a'4-106'-t-10V), 

et  ainsi  de  suite. 

Maintenant,  réunissant  les  termes  qui  renferment  a', 
ceux  qui  renferment  b\  etc.,  on  obtient 

\iO'       I 

et  après  avoir  sommé  les  différentes  progressions  géomé- 
triques renfermées  entre  parenthèses,  en  se  rappelant 
d'ailleurs  que  10  h-  A:  =  x,  il  vient 

a'       kh'       k^c' 
F= ^H , 

XXX 

d'où  Ton  conclut  immédiatement 

R^=a'  — A;6'-+-/c^c' (Si) 

Cette  expression  peut  encore  s'écrire 

R^^a'-k[h'^k(c'...)]     ....  (52) 


(  '124  ) 

On  sait  d'ailleurs  qu'en  formant  Pu  on  peut  rejeter 
toutes  les  valeurs  entières  de  x.  On  peut  donc  aussi  reje- 
ter X  et  tous  ses  multiples,  contenus  dans  les  puissances 
croissantes  k,  k^,  k^.... 

55.  Voici  de  premières  applications  de  la  formule  (51). 

I.  Soit  x  =  \0;  il  en  résulte  k  =  0,  et  par  conséquent 

Rio  =  «'; (53) 

Le  reste  d'une  division  par  10  est  le  chiffre  des  unités  du 
dividende. 

II.  Soit  ^==9;  alors  A;  =  —  1 ,  et 

Rg  =  a'  -V-  5'  -t-  c'  .  . ., (54) 

qui  nous  ramène  à  la  règle  connue  :  le  reste  de  la  divi- 
sion par  9  est  égal  à  la  somme  des  chiffres  du  dividende. 

III.  Soit  a;=  11,  d'oùA'=+  1, 

R„  =  a'~/y -t- c'  — rf' ;.     .     .     .(55) 

le  reste  de  la  division  par  11  est,  comme  on  le  sait  d'ail- 
leurs, la  différence  entre  la  somme  des  chiffres  de  rang 
impair  et  celle  des  chiffres  de  rang  pair.  Pour  faciliter 
l'opération  on  négativera  les  chiffres  de  rang  pair,  en  leur 
superposant  des  signes  — ,  puis  on  fera  la  somme  algé- 
brique des  chiffres  ainsi  préparés. 

IV.  soit  i»  =  8,  d'où  k  =  —  2; 

Ra  =  o'  -V-  26'  -H  4c' (56) 

En  effet,  à  partir  de  k^  tous  les  coefficients  k"^,  k^,  P... 
renferment  8  et  peuvent  par  conséquent  être  rejetés.  Cette 
formule  pourrait  aussi  s'écrire 

R3=a'  H-  2(6'  -h  2c') (57) 


(  i2o  ) 
On  ajouterait  à  chaque  tranche,  en  commençant  seulement 
à  celle  (les  mille  et  comme  si  tout  le  reste  à  gauche  était 
nul,  le  double  de  la  somme  précédente,  jusqu'à  ce  qu'on 
soit  parvenu  aux  unités. 

V.  Soit  X  =  12;  on  a  A;  =  -h  2,  et  en  supprimant  12  et 
ses  multiples  dans  les  coefticients  numériques,  il  vient, 
toujours  par  la  formule  (51), 

R„  =  a'_26'  -♦-  4c' —  8  fr  H- 4e'  ~  8 /' -4- 4  (/' —  8 /i'... 

Les  coefficients  —  8  et  h-  4  forment  une  période.  Rempla- 
çant —  8  par  son  complément  à  12  qui  est  -h  4,  j'écris 

R,2  =  a'  —  26'  -+-  4  (c'  -+-  f/'  -*-  e' . . .) 

OU  encore,  en  employant  S'  pour  symbole  de  la  somme 
absolue  des  chiffres,  et  en  indiquant  par  l'addition  de  la 
lettre  c  (sans  accent)  que  cette  somme  doit  seulement  com- 
mencer à  la  troisième  tranche, 

R„  =  a'  — 26'  -4- 4S'c (58) 

VI.  Soit  X  =  7,  d'où  k  =  —  5,  il  vient  en  supprimant 
tous  les  7, 

R,  =  a'  -f-  56'  +  2c'  -  d'  —  5e'  —  2/'  -4-  ^'  -f-  5/i'  -+-  ^i'.  (59) 

Les  coefficients  1,  5,  2,  1,  5,  2,  composent  une  période. 
Coupons  le  nombre  donné  en  tranches  de  trois  chiffres, 
dont  nous  négativerons  les  tranches  paires.  Puis  formons 
la  somme  algébrique 2'"a'  de  tous  les  chiffres  des  unités, 
celle  2"'6'  de  tous  les  chiffres  des  dizaines,  et  celle  2'V 
de  tous  les  chilfres  des  centaines,  dans  ces  tranches;  nous 
aurons 

R7==  2'"«'  H-  ol"'h'  -+-  22"'c'.     .     .     .  (60) 


(  126  ) 
Soit  demandé  le  reste  par  7  de  90  541  726  95o.  J'écris 
d'abord 

N  préparé  ...90  544   726  955  , 

et  j'ai  alors,  en  rejetant  les  7  s'il  s'en  présente, 

2'"a'  =  —  0-+-i— 6-+-5  =  0, 
l"'b'  =  —  9  -+-  4  -  2  -4-  5  =  4 , 
l"'c' =  5—7-1-9  =  5; 

d'oii  enfin 

R,  =  0— 5  X  4  -+-  2  X  5  =  0  —  12  -^  I0  =  — ^2, 

ou  mieux,  en  prenant  le  complément  à  7,  R7=  5. 

VII.  Soit  x  =  15,  d'où  k=  -hZ;  il  vient  en  suppri- 
mant tous  les  15, 

Rj3  =  Cl  —  56  —  4c'  —  (/'  H-  5e'  -f-  4/"'  -+-  ^'  . . . 

Les  coefficients  numériques  composent  la  période,  1,5,4, 
—  (1,5,  4).  Si  l'on  conserve  la  notation  précédente  on  a 

donc 

R,.  =  v"'tt' _  3  2:'"6'  — 42"V     .     .     .((il) 

L'opération  est  analogue  à  celle  qui  précède. 

VIII.  Soit  X  =  6,  d'où  k  =  —  4, 

Rg  =  a'  -+-  W  ^  4c'  . . .  =  a'  h-  4S'6;     .     .  (62) 

le  reste  de  la  division  par  6  est  égal  au  chiffre  des  unités 
plus  quatre  fois  la  somme  des  autres  chiffres. 

IX.  Soit  jc==  14,  d'où  A;=  H- 4, 

R,^=  a'  —  46'  -+-  2c'  -f-  6(/'  -\-  4e'  —  2/"'  —Gg'. 

La  période  commence  au  second  chiffre  6'.  Partageons  le 
nombre  donné  en  tranches  de  trois  chiffres  ta  partir  de  b\ 


(  127  ) 

négativons  les  tranches  paires,  et  formons  les  sommes 
algébriques  2'"6',2'V,  II" d'  des  chiffres  qui  occupent  des 
rangs  homologues  dans  les  tranches.  Nous  rejetterons  d'ail- 
leurs de  ces  sommes  algébriques  T' tous  les  14,  ou  même 
tous  les  7,  puisque  les  coefficients  renferment  partout  le 
facteur  2.  On  voit  que 

n,^  =  a'  —  1  (2  fh"-  l'"c'  —  3  l'^'d')  .     .  (65) 

Par  exemple  le  nombre  756  780  526  est  d'abord  préparé 
comme  suit  : 

N  préparé  ...  75   678    052  6; 

puis  on  tire  en  peu  d'instants  2"'6'==5, 2'"c'=5,2"V/'=6, 
et  par  conséquent,  en  rejetant  les  7  qui  se  présentent  dans 
les  produits  des  sommes  2"\ 

R„  =  6  — 2(6  — 3-t-4)=i6, 

ou  en  retranchant  le  14  que  cette  somme  contient  encore, 
Ru  =  2. 

X.  Soit  X  =5,  d'où  A-  =  —  5;  il  est  évident  que  tous  les 
termes  de  la  suite  (51)  qui  renferment  k  peuvent  être  re- 
jetés, et  par  conséquent 

Rs  =  a'.     .......  (64) 

XI.  Soit  a;  =  15,  d'où  A:=  -f-  5;on  trouve  en  rejetant 
les  15  contenus  dans  les  coefficients, 

R,jj  =  a'  —  56'  -t-  10c'  —  ^d'  -+-  10e' ...  ; 

et  en  remplaçant  le  coefficient  -i- 10  par  son  complément 

à  15, 

R^,  =  a'  — 5S'6; 

le  reste  de  la  division  par  15  est  égal  au  chiffre  des  unités, 


(  128  ) 
moins  cinq  fois  la  somme  de  tous  les  autres  chiffres.  Il 
est  clair,  d'ailleurs,  qu'on  peut  rejeter  de  cette  somme 
tous  les  multiples  de  3,  en  sorte  qu'on  pourrait  écrire 

S'b 
R,,  =  a'_3R-^,      ....    (65) 

ù 

le  reste  par  lo  est  égal  au  chiffre  des  unités  moins  cinq 
fois  le  reste  que  donne  la  division  de  la  somme  de  tous  les 
autres  chiffres  par  5. 

XII.  Soit  X  =  4,  d'où  k  =  —  6.  Le  coefficient  A:^  con- 
tient 4  exactement,  et  par  conséquent  ce  coefficient  et 
tous  ceux  qui  suivent  sont  divisibles  par  x.  Ainsi 

R,  =  a'  -+-  i>6' , (6G) 

c'est-à-dire  le  chiffre  des  unités  plus  le  double  du  chiffre 
des  dizaines. 

XHl.  Soit  X  =  16,  d'où  k=  h-  6.  Le  coefficient  k\  et 
ceux  qui  suivent  contiennent  x.  La  formule  (ol)  se  réduit 

donc  à 

Rjg=a'  — 66'  -H  4c'  — 8(/', 

qu'on  peut  écrire 

R,e  =  a'  —  2  {ôb'  —  2c'  -t-  \d'),      .     .     .  (67) 

et  Ton  est  autorisé  à  rejeter  de  la  parenthèse  tous  les  8. 
XIV.  Soit  x  =  5,  et  par  conséquent  k  =  —  7; 

R3  =  a'  -♦-  6'  -h  c'  -+-  f/' . . . , 

ou  la  somme  des  chiffres  d'où  l'on  rejette  tous  les  3.  Or 
il  est  plus  aisé  de  rejeter  les  3  des  chiffres  eux-mêmes, 
c'est-à-dire  de  prendre  à  vue  le  reste  R'5  fourni  par  chaque 
chiffre  particulier.  Ces  restes  particuliers  sont  d'ailleurs 


(  129  ) 

0,  1  ou  T.  Leur  somme  algébrique  est  le  reste  cherché. 
Exemple  : 

N 85  C27  377  904, 

r;  .  .  .  .    îT  oïl  on  001; 

Somme  de  ces  R3 1  =  R, 

XV.  Soit  X  =  17,  d'où  A;  =  -h  7  ;  on  trouve 

R„  =  a'  —  Ib'  —  2c'  —  ùd'  -^  4e',  .     .     .  (68) 

expression  dont  la  période  aurait  un  grand  nombre  de 
chiffres  et  serait  d'une  application  incommode.  Nous  ver- 
rons plus  bas  qu'il  est  plus  avantageux  de  chercher  le 
reste  de  la  division  par  certains  multiples  de  17. 

XVI.  Soit  X  =  2,  d'où  k  =  —  8;  cette  valeur  de  k  con- 
tenant X,  il  est  clair  que  le  r^te  se  réduit  à 

R2  =  «' , (69) 

XVII.  Soit  entin  a:  =  18,  d'où  A:  =  -f-  8; 

Rj8=a'  -1-106'  -4-  10c'  -V-  10c/'- .  .  =  a'  -^  10(6'  -+-  c'  -\-  d'...). 

Mais  il  est  visible  qu'on  peut  rejeter  les  9  de  la  somme 
entre  parenthèses.  Il  suffit  donc  de  calculer  le  reste  S'6  de 
cette  somme  de  chiffres  commençant  à  b'.  Ainsi 

R.s=  a'  +  IOS'6, (70) 

ou  le  dernier  chiffre  plus  dix  fois  la  somme  de  tous  les 
autres. 

54.  Jusqu'ici  nous  avons  supposé  x  de  la  forme 
a;  ==10  H-  k.  Mais  on  pourrait  aussi  bien  admettre 
x=100  -h  k,  ou  x  =  1000 H- A;;  en  général  x  =10" -h  A\ 
Si  l'on  suit  alors  le  même  raisonnement  qu'on  a  employé 
au  n°  52,  on  arrive  à  une  formule  tout  à  fait  analogue  à 

2°®  SÉRIE,  TOME  XL.  9 


(  130  ) 

l'expression  (51),  et  qui  en  diffère  seulement  en  ce  que  les 
tranches  sont  formées  de  n  chiffres  pris  à  la  fois.  Nous 
mettons  autant  d'accents  aux  lettres  a,  6,  c...  que  les 
tranches  renferment  de  chiffres. 
Ainsi  avec  x  ==  iOO  -h  k,  on  a 

R,  =  a"  —  kb"  -^k^c" (71) 

où  les  tranches  a\  b'\  c"...  sont  de  deux  chiffres.  Avec 
x=  1000  +  A-,  on  a 

R,  =  a'"  — A6'"  -^k'c'",       ....  (72) 

où  les  tranches  sont  de  trois  chiffres.  Et  ainsi  des  autres. 
Toutes  ces  formules  ne  sont  que  l'extension  des  expres- 
sions (51)  ou  (52)  à  une  forme  plus  générale 

Rj,  =  a  —  kb  -\-  k^  c  .  .  .,  ) 
ou  hien  [ (75) 

R.=  «-A'[6-A:(c...)],  \ 

OÙ  a,  6,  c...  (sans  accents)  représentent  des  tranches  d'un 
nomhre  quelconque  de  chiffres. 

Pour  que  les  formules  (75)  soient  d'une  application  com- 
mode, il  faut  presque  toujours  que  k  soit  petit.  Il  y  a  donc 
avantage  à  substituer  à  x  un  de  ses  multiples  qui  approche 
autant  que  possible  d'une  puissance  de  10.  11  est  vrai  que 
le  reste  R,,;,  ainsi  obtenu  n'est  point  celui  cherché.  Mais 
comme  R„,  se  réduit  à  un  petit  nombre  de  chiffres,  on  peut 
alors  y  appliquer  aisément  la  formule  (51),  qui  se  réduit 
dans  ce  cas  à  un  très-petit  nombre  de  termes. 

Par  exemple,  s'il  s'agit  de  chercher  R17,  nous  remar- 
quons que  102  on  100 -h  2  est  6  X  17.  Nous  posons  donc 
nx  ==  102,  d'où  A"  =  -f-  2,  dans  la  formule  (73).  Ainsi 

R,o2=«"-2i6"-2[c"-2(rf"...)]|  .     .     (74) 


(  131  ) 
On  partage  donc  le  nombre  N  en  tranches  de  deux  chiffres, 
et  l'on  ajoute  à  chacune  d'elles  le  double  du  terme  voisin, 
changé  de  signe.  Si  ce  double  donnait  des  centaines,  on 
appliquerait  à  celles-ci  le  même  procédé,  c'est-à-dire  qu'on 
en  inscrirait  le  double  (avec  son  signe)  au-dessous  du 
double  des  unités  et  des  dizaines. 

5o.  Le  nombre  1001,  qui  diffère  de  10^  d'une  seule 
unité,  renferme  les  facteurs  premiers  7,  11  et  15.  Il  est 
donc  parfaitement  adapté  à  la  recherche  simultanée  des 
restes  des  divisions  par  ces  trois  nombres  premiers. 

Il  est  clair  d'abord  que 

R,ooi  =  a"'  —  b'"  -t-  c'"  .  . ., 

que  l'on  peut  écrire 

Riooi  =  2"'a (75) 

Ayant  coupé  N  en  tranches  de  trois  chiffres,  on  négativera 
les  tranches  paires,  puis  on  fera  la  somme  algébrique  des 
tranches,  comme  si  elles  étaient  écrites  les  unes  sous  les 
autres.  Lorsque  cette  somme  a  plus  de  trois  chiffres,  on  la 
ramène  toujours  à  trois  chiffres  seulement,  en  y  appliquant 
la  même  marche. 

Quand  Riooi  est  caculé,  ses  chiffres  constituants  étant, 
de  droite  à  gauche,  a,  ;3',/,  on  a  par  les  formules  éta- 
blies au  n°  53  : 

R,  =  a'  -4-  3/3'  -t-  2r'  , 

ou  bien,  en  remplaçant  le  coefficient  -+-  5  par  son  complé- 
ment à  7, 

R,==a'  —  4P'  -H  2r'; (76) 

et  d'ailleurs  Rii=  a  —    P'  -t-    r'  > (77) 

R,3=«'  — 51B'  — 4r'     .....  (78) 


(  152) 
Voici  un  exemple  appliqué  au  nombre  182  672  456  210 
829  901  : 

N  préparé  .    .    .     î  8  2  672  43  6  210  8  2  9  9  0[ 
Somme  des  tranches,  4  6  4=336=Riooi' 

De  ce  premier  reste,  obtenu  en  peu  d'instants,  on  tire 
ensuite 

R,  =6— 4x5-t-2x5  =  6  — 42-t-6=0, 
R,j=6  —  3  -+-  3=6, 

R,5  =  6  — 3X3  — 4X3  =  6  — 9  — 1ii==  —  15, 
ou  R]3  =  —  2 ,  aussi  R,3  =  11. 

Nous  donnons  ci-dessous  quelques  diviseurs  x,  dans 
lesquels  k  ne  dépasse  pas  =f5,  et  auxquels  les  formules  (75) 
s'appliquent  avec  succès  : 

97  =  1X97  997=1x997  9  997  =  13x769 

98  =  2x7x7  998=2x499  9  998=2x4999 

99  =  9X11                      999=3x9x37  9  999=9x11X101 
101=1X101  1001=7x11x13  10001=73X137 

102  =  6X17  1  002=   6x167  10  002=  6x1667 

103  =  1x103  1003  =  17x59  10  003=7x1429. 

Prenant  en  particulier  99  =  9  X  H,  on  voit  qu'on 
peut  s'assurer  d'un  seul  coup  si  un  nombre  est  divisible 
par  9  ou  par  11,  en  faisant  la  somme  S" a  de  ses  tranches 
de  deux  chiffres,  puis  en  considérant  si  cette  somme  est 
elle-même  divisible  par  9  ou  par  11. 

Par  exemple  8  951  417  515  donne 

N  préparé.    ...     89  31  41  73  15 
Somme  des  tranches.    ...  249 

qui  par  le  même  procédé  se  réduit  à.    .   .  51  =R99. 

Appliquant  maintenant  les  formules  particulières  (54)  et 


(  ^'^3  ) 

(55),  on  trouve 

Rg  =  5  -f- 1  =(5, 

R,,=  — 5  +  1  =  — 4,ouRh  =  7. 

On  peut  remarquer  que 

299  est  multiple  de  13, 
901  »  17, 

399  »  19. 

Si  donc,  dans  un  nombre  donné  N,  on  appelle  e  les  deux 
chiffres  à  droite  et  C  les  chiffres  à  gauche  de  ceux-ci ,  de 
manière  que  N  ==  100  C  +  e,  on  a  évidemment 

R,3  =  iC-4-e, (79) 

R„  =  _iC-^e, (80) 

Ri9==iC-4-e (81) 

On  exécute  à  vue  les  divisions  de  C  par  3,  9  ou  4,  et  s'il  y 
a  un  reste,  on  le  réunit  à  e  comme  chiffre  extrême  à 
gauche. 

S'agit-il,  par  exemple,  de  trouver  le  reste  de  la  division 
de  572  928  par  17,  j'ai  G  =  3  729,  et  par  suite  R  g=  3. 
J'écris  alors 

e  [précédé  du  reste  de  ■-  j   .    .   .   .      328 
—  |G  (partieentière) —414 

Somme —   86=:Ri7. 

Le  résultat  contient  encore  des  multiples  de  17;  mais  on 
peut  maintenant  les  éliminer  à  vue. 

Dans  les  calculs  relatifs  au  calendrier,  on  a  souvent  à 
former  le  reste  d'une  division  indépendam.ment  du  quo- 
tient. C'est  ainsi  que  le  nombre  d'or  v  d'une  année  m  est 


(  134  ) 

le  reste  de  *"  ^  * .  Appliquons  la  formule  (81)  à  la  re- 
cherche de  y  pour  l'année  m  ==  1582,  qui  fut  celle  de  la 
réforme  du  calendrier.  Ici  N  =  1583,  C  =  15  dont  le 
R4=  —  1,  et  e  =  83.  J'écris  donc,  en  mettant  R4  devant  e 

Î83  ou  plutôt   ....        Î7 

\C  (partie  entière) 4 


Somme —   13  =  Rt9. 

Le  complément  à  19  est  la  valeur  cherchée  v  =  6. 

4, 


On  a  pris  4  et  non  3  pour  partie  entière  du  quotient 


par  la  raison  qu'on  avait  employé  le  reste  négatif  1. 

57.  J'ajoute,  avant  de  quitter  ce  §ujet ,  que  si  le  diviseur 
donné  x  est  le  produit  yz  de  deux  facteurs,  pour  lesquels 
on  a  déterminé  les  restes  respectifs  Ry  et  R^  de  N  divisé 
successivement  par  y  et  par  Zj  on  peut  calculer  R^^,  ou  le 
reste  de  la  division  par  le  produit,  au  moyen  de  R^  et  R^. 
Je  trouve  que  toutes  les  valeurs  de  Ry^  sont  renfermées 
dans  la  suite  des  valeurs  entières  du  second  membre  de 
l'expression 

z  —  y 

où  la  lettre  n  représente  la  suite  des  nombres  naturels. 

Or,  dans  la  plupart  des  applications  usuelles,  n  =  0 
ou  tout  au  plus  n  =\  satisfait  déjà  au  problème.  Si  l'on 
peut  supposer  n  =  0,  on  voit ,  par  exemple ,  que 

le  reste  de  la  division  par  6  est  égal  à  3  fois  le  reste 
de  la  division  par  %  moins  2  fois  le  reste  de  la  division 
par  3; 

le  reste  de  la  division  par  12  est  égal  à  4  fois  le  reste 
de  la  division  par  3,  moins  3  fois  le  reste  de  la  division 
par  4. 


(  155  ) 
C'est  ce  qu'on  écrirait,  dans  la  notation  que  nous  avons 
adoptée, 

Re  =3R2-  2R3, (83) 

Riî  =  4R3  —  DR4 (84) 

§  L.  —  Extraction  des  racines. 

58.  Dans  les  circonstances  ordinaires,  l'extraction  des 
racines  s'opère  à  l'aide  des  logarithmes.  Mais  on  peut 
avoir  besoin  d'une  exactitude  supérieure  à  celle  que  les 
tables  logarithmiques  comportent;  on  peut  demander,  par 
exemple,  la  racine  d'un  nombre  irrationnel,  tel  que  le  rap- 
port 7:  de  la  circonférence  au  diamètre,  ou  la  base  e  des 
logarithmes  naturels,  avec  vingt  ou  trente  figures.  Dans  ce 
cas  il  faut  recourir  à  une  opération  directe,  fort  labo- 
rieuse. 

Il  est  vrai  que  l'on  se  contente  d'appliquer  les  procédés 
d'extraction  proprement  dits  aux  premiers  chiffres  r  de  la 
racine.  On  obtient  ceux  qui  suivent  au  moyen  d'une  simple 
division.  Mais  cette  marche,  tout  avantageuse  qu'elle 
paraisse  d'abord ,  est  loin  d'être  commode  en  pratique.  Si 
l'on  a  déjà  dix  chiffres,  par  exemple,  il  faut  pour  obtenir 
les  dix  chiffres  suivants,  former  le  carré  de  r,  puis  effec- 
tuer la  division  d'un  nombre  de  dix  chiffres  par  un  divi- 
seur de  dix  chiffres  également.  Or  cette  dernière  opération 
est  pénible.  Aussi  croyons-nous  préférable  de  ne  pas  cher- 
cher plus  de  sept  ou  huit  chiffres  à  la  fois,  et  d'exécuter  la 
division  au  moyen  des  tables  logarithmiques.  On  sacrifie 
un  peu  de  l'étendue  des  quotients  partiels,  et  par  suite  on  a 
plus  souvent  des  carrés  à  former;  mais  en  revanche  il  n'y 
a  pas  à  faire  une  seule  division  directe.  Et  si  la  racine 
n'est  pas  demandée  avec  plus  de  trente  chiffres,  il  y  a  un 


(  m  ) 

gain  évident.  En  se  servant,  par  exemple, de  tables  loga- 
rithmiques à  sept  décimales,  et  en  comparant  les  deux 
procédés  jusqu'à  l'obtention  du  14"^  chiffre  de  la  racine, 
on  voit  que  le  recours  aux  logarithmes  permet  de  rem- 
placer par  une  simple  soustraction  la  division  d'un  nombre 
de  sept  chiffres  par  un  autre  nombre  de  sept,  tout  le  reste 
demeurant  égal  de  part  et  d'autre.  On  ne  peut  donc  élever 
de  doutes  sur  l'utilité  d'introduire  les  logarithmes  dans 
l'exécution  des  détails  de  ces  extractions. 

Ajoutons  qu'en  formant  les  puissances  r%  (r  +  r')% 
(r-hr'  -h  r'y...  des  racines  calculées  par  tranches,  il  n'est 
pas  nécessaire,  généralement,  de  continuer  la  multiplica- 
tion dans  les  rangs  extrêmes  à  droite  et  à  gauche.  A  droite, 
on  négligera  les  rangs  qui  tombent  au  delà  du  dernier 
ordre  du  reste  p  que  l'on  cherche  actuellement  (sauf  un 
rang  surnuméraire).  A  gauche,  on  s'arrêtera  aux  rangs 
fournis  par  l'approximation  précédente  (sauf  un  rang  de 
comparaison).  Cette  remarque  s'appliquerait  également  à 
la  méthode  d'extraction  directe  ou  ordinaire.  C'est  une 
économie  de  travail  que  nous  signalons  aux  calculateurs. 
Il  peut  arriver  du  reste,  quand  la  racine  approchée  pèche 
par  excès,  que  le  reste  (ou  différence)  p  soit  négatif.  Il 
faudra  seulement  en  conclure  que  la  nouvelle  correction 
de  la  racine,  qui  en  dépend,  doit  porter  le  signe  moins. 

59.  Les  avantages  de  la  méthode  mixte,  sur  laquelle 
nous  venons  d'appeler  l'attention ,  sont  d'autant  plus 
marqués  que  l'indice  du  radical  est  plus  élevé.  Pour  eii 
donner  une  idée,  j'extrais  ci-dessous  la  racine  cubique  du 
rapport  tt  de  la  circonférence  au  diamètre,  avec  vingt 
chiffres  exacts,  en  employant  des  tables  logarithmiques  à 
sept  décimales.  Dans  cette  opération  ,  je  corrige  simulta- 
nément, par  des  procédés  analogues,  le  carré  et  le  cube  de 


(  137  ) 
la  racine.  La  correction  r'^')  du  carré  est  nécessaire ,  en 
effet,  pour  arriver  à  la  nouvelle  approximation  du  cube. 
J'ai  d'abord 

Lt.    .    .     0,497  149  9 


jLt.   .    .  0,165  716  6  .    .   .     1,464  592  =  n  .   1'*  approximatlou 

L2.    .    .  0,501  030  0 

Somme.  0,466  746  6  =  L2ri 

|L?r.    .    .  0,531  455  2  .    .    .     2,145  029  =  n» 

L3.    .    .  0,477  121  3 


Somme.     0,808  554  5  =  Lôr^» 

Je  forme  par  multiplication  directe  le  carré  puis  le  cube 
de  r,.  Mais  comme  les  sept  premiers  chiffres  de  gauche 
sont  connus,  ces  opérations  seront  limitées  aux  rangs 
compris  à  partir  du  8"%  plus  un  rang  de  comparaison.  C'est 
ainsi  qu'on  opère  ci-dessous  : 


Mulliplicandes  .    . 

.   1,464  592 

2,145  029  726  464 

Multiplicateurs  . 

.    .   1,464  592 

.    .   2.929  184  (10-'2) 

1,464  592 

produits  partiels. 

4  290  059.4(10-13) 

1.81528 

9.3  052  675.7 

2.296  0 

7.2  514  865.0 

8.568 

8.0  118  906.0 

5.52 

0.1  785  587.6 

6.8 

1.1  890  585.6 

2, 

2.9  726  464 

Somme  ou  produit  général  9.726  464  (10-'*)  =  r^^    9.5  377  141 .5  (10-*^)  =r», 
^ 3,141  59  2  655  589.8 

Diflférence  (changée  de  signe) —     0  725  551 .5  (10-'2)  =  Pj. 

Les  puissances  de  10  entre  parenthèses  indiquent  le  rang 
du  dernier  chiffre  écrit,  par  rapport  aux  unités.  Le  point 


(  158) 
sépare  les  chiffres  utiles  de  ceux  surnuméraires  à  droite 
et  à  gauche. 
De  ce  qui  précède  on  tire  facilement 

Lp^  .    .    .     7,859  469  4  — 
LS/'i^  .    .     0,808  554  5 

Différence.    .    .     7,050  9149-.    .    .        —  0,06112  438  5  =  r' 
L2r,.   .    .     0,466  746  6 

Somme.    .    .     7,517  661  5  —  .    .    .        —  0,06329  352  9  =  r'W 

2""^  approximation    r^-^-r' 1,464  591  887  561  5  =  r, 

Tj'h-  r'(2) 2,145  029  397  1 1 1  1  =  r,«. 

Les  secondes  approximations  de  la  racine  et  de  son 
carré  étant  obtenues,  on  répète  une  autre  série  d'opérations 
toutes  semblables  aux  précédentes,  à  l'effet  de  placer  un 
nouveau  groupe  de  sept  chiffres  à  la  racine. 

Multiplicandes.    .    .     1,464  591  8'87  561  5  2,145  029  3^97110  957  458  50 

Multiplicateurs    .    .     1,464  591  8  87  561  5  1,464  591  8  87  561  5 

Produits  partiels 732  295  9.5(10-20)  1.072  514  7.0  (10-«0) 

1.464  5918.9  2.145  029  4.0 

7.875  513  2.8  8.701763  8.2 

2.295  945  8.0  2.514  698  5.5 

2.143  212  9.2  5.205  779  7.7 

7.351004  9.6  2.351768  8  1 

3.510  049  2.0  3.517  688  8  0 

1.887  5615  9  397  110  9.6 

9.880  535  5.739  9861.3 

5.780  75  8  555  478  7.5 

0.246  0  8.445  829  8.4 

3.690  6  657  447  5.4 

4  60  4.382  085  4.0 

1.5  0.957  458  5.0 


Somme  ou  produit  général    0,0^^957  458  5.0  =  i\*  9.645  558  9.7(10-'^oj  =r,5 

Chiffres  correspondants  de  ?r .     9  795  258  4.6 

Différence  (nombre  inférieur  moins  nombre  supérieur)  ■+■        149  699  4.9  (10-20)  =  p. 


(  i39  ) 

Je  n'ai  transcrit  de  t^  que  les  rangs  qui  correspondent 
aux  rangs  exprimés  de  rj^  tous  les  rangs  précédents  se 
trouvant  identiques.  Cest  sur  la  différence  pa  ^ue  j'opère 
maintenant. 

Lpa  T3,175  220  3  -♦- 

LûV        0,808  554  5 


Différence.   .    .    .     1,4366  665  8  -♦-  .    .    .    .  -+-  0,0'«023  263  01  =r". 

On  conclut  enfin,  avec  les  vingt  chiffres  exacts  demandés, 
1^^;;^=  1,464  591   887  561   523  265  0. 


Sur  quelques  plantes  fossiles  de  l'étage  du  Poudingue  de 
Burnot  (dévonien  inférieur);  par  A.  Gilkinet,  docteur 
en  sciences. 

Le  «  Prodrome  d'une  description  géologique  de  la  Bel- 
gique »  de  M.  le  professeur  Dewalque  mentionne  dans  la 
liste  des  fossiles  de  l'étage  de  Burnot  deux  plantes  nom- 
mées Filicites  lepidorachis  et  Filicites  pinnatus  (1).  Dési- 
reux de  connaître  ces  plantes  qui  constituent  à  elles  seules 
tous  les  restes  végétaux  ou  à  peu  près  de  cet  étage  impor- 
tant, et  n'en  découvrant  nulle  part  la  description,  je  me 
suis  adressé  à  M.  Dewalque  qui  m'a  dit  posséder  les  fos- 
siles types,  dont  il  devait  la  détermination  à  feu  E.  Coe- 
mans.  M.  Dewalque  a  bien  voulu  me  communiquer  les 
échantillons  en  question ,  ainsi  que  les  quelques  lignes  de 
diagnose  qui  les  accompagnent;  ces  plantes  n'ont  été  ni 

(1)  Prodromey  p.  315. 


(  i40  ) 

figurées  ni  décrites,  et  comme  elles  sont  renseignées  dans 
un  ouvrage  classique  pour  la  géologie  de  la  Belgique,  il  m'a 
paru  intéressant  de  les  dessiner  soigneusement  et  de  les 
décrire,  d'autant  plus  que  Tune  des  deux  espèces  ne  peut 
conserver,  à  mon  avis,  la  place  que  lui  donnait  Coemans 
dans  la  classification,  et  doit  être  rattachée,  non  pas  aux 
Fougères,  mais  aux  Lycopodiacées. 

I.  —  FiLiciTES  piNNATus  (Coemaus). 

Ce  nom  a  été  donné  par  Coemans  à  l'empreinte  repré- 
sentée par  notre  figure  1.  C'est  une  pinne  de  fougère  mu- 
nie d'un  rachis  large,  au  milieu  duquel  fait  saillie  une  côte 
assez  proéminente  et  assez  nettement  coupée  sur  ses  deux 
côtés;  à  droite  et  à  gauche  du  rachis  naissent  les  pinnules 
qui  paraissent  avoir  été  excessivement  serrées  les  unes 
contre  les  autres,  et  qui  portaient  à  leur  tour  les  folioles, 
ainsi  qu'on  l'entrevoit  dans  la  partie  supérieure  de  la  figure. 
Celte  fronde  n'était  certainement  pas  entièrement  déroulée 
et  l'on  peut  voir  vers  la  droite  du  dessin  des  traces  obscures 
de  la  préfolialion  circinnée  des  pinnules.  Cette  circonstance 
explique  le  rapprochement  exagéré  des  pinnules  qui,  avec 
la  croissance  ultérieure,  se  seraient  plus  ou  moins  écar- 
tées. Elle  explique  aussi  l'aspect  particulier  de  cette  em- 
preinte qui  ressemble,  à  première  vue,  presque  plus  à  une 
Cycadée  qu'à  une  Fougère.  Cette  forme,  quelque  obscure 
qu'elle  soit,  n'en  est  pas  moins  intéressante,  en  ce  qu'elle 
permet  de  constater  dans  nos  couches  dévoniennes  infé- 
rieures la  présence  d'une  Fougère  hautement  organisée. 
La  Fougère  qui  nous  occupe  était  certainement  tri-ou  qua- 
dripennée,  et  devait  posséder  une  taille  d'une  certaine  im- 
portance. 


(  i41  ) 

Cette  plante  a  élé  découverte,  ainsi  que  la  suivante, dans 
les  schistes  cuivreux  de  Rouvroy;  la  roche  et  les  em- 
preintes elles-mêmes  sont  partiellement  transformées  en 
malachite. 

II.  —  Lepidodendron  Buknotense  (Mihi). 
Filiciles  lepidorachis  (Coemans). 

Coemans  désigne  sous  le  nom  de  Filicites  lepidorachis 
l'empreinte  figurée  par  nous,  figures  2, 5  et 4;  c'est,  dit-il  (1), 
«  une  fronde  de  Fougère  dichotome  et  très-rameuse,  à  ra- 
chisécaillcux,  mais  sans  folioles.  » 

Il  m'est  impossible  de  me  rallier  à  cette  manière  de  voir 
du  savant  paléontologue;  pour  moi,  les  empreintes  appar- 
tiennent non  pas  à  une  Fougère,  mais  à  une  plante  du 
groupe  des  Lycopodiacées ,  à  un  Lepidodendron^  dont 
elles  constituent  les  ramifications  secondaires. 

Et  d'abord,  dans  nos  échantillons,  nous  n'avons  rien 
rencontré  qui  ressemblât  à  une  foliole  de  Fougère,  et  ce- 
pendant nous  avons  pu  isoler  des  rameaux  secondaires  sur 
une  longueur  assez  considérable  (fig.  2);  nous  n'avons  pu 
découvrir  la  moindre  trace  d'une  nervation  quelconque  qui 
aurait  survécu  à  la  destruction  de  la  foliole,  et  les  débris 
qui  remplissent  les  échantillons  proviennent  tous  de  ra- 
mules  dichotomiques,  semblables  à  ceux  qui  divergent 
de  notre  rameau  principal.  Enfin,  je  dois  faire  remarquer 
que,  bien  que  la  ramification  dichotomique  ne  soit  pas  in- 
connue chez  les  Fougères,  elle  constitue  cependant  l'ex- 
ception :  de  plus,  les  Fougères  dichotomes  ne  revêtent  pas 

(1)  Noie  manuscrite  de  Coemans  à  M.  Devvalque. 


(  142) 
l'aspect  de  la  plante  ci-dessus;  elles  se  divisent  le  plus 
souvent  en  deux  rameaux  semblables ,  de  grosseur  à  peu 
près  égale,  portant  l'un  et  l'autre  des  folioles  et  qui  réa- 
lisent en  tous  points  la  dichotomie  vraie. 

Voici  maintenant  quelles  sont  les  raisons  qui  m'ont  fait 
rattacher  ces  empreintes  aux  Lépidodendrées. 

L'inspection  de  notre  figure  %  dans  laquelle  le  cylindre 
vasculaire  est  conservé  (1  ),  montre  une  série  de  petits  cous- 
sinets proéminents;  un  examen  attentif  fait  découvrir  que 
ces  coussinets  sont  disposés  en  séries  spiralées;  qu'à  de 
nombreux  endroits  ils  laissent  parfaitement  distinguer  les 
orthostiques  et  les  parastiques,  et  ceci  est  vrai  non-seule- 
ment pour  le  rameau  principal,  mais  encore  pour  les  ra- 
meaux secondaires  qui  présentent  des  séries  punctiformes 
spiralées  (2).  La  spirale  génératrice  paraît  assez  compli- 
quée, comme  c'est  du  reste  le  cas  chez  les  Lépidodendrées. 
Les  coussinets  sont  dus  évidemment  aux  faisceaux  vascu- 
laires  qui  se  rendaient  aux  feuilles  à  travers  la  partie  cor- 
ticale, disparue,  mais  qui  a  laissé  des  deux  côtés  de  l'em- 
preinte une  trauiée  longitudinale  également  marquée  de 
petites  ponctuations.  Enfin,  la  partie  supérieure  de  notre 
échantillon  (ûg.  2)  porte  latéralement  l'empreinte  de  quel- 
ques feuilles  lancéolées,  en  tous  points  semblables  à  celles 
des  Lepidodendron.  Si  l'on  s'étonne  que  les  empreintes 
que  nous  faisons  connaître  ne  soient  pas  parfaitement 


(1)  Dans  tous  nos  autres  échanlillons,  ce  cylindre  est  enlevé  et  ii*a 
laissé  que  la  contre-empreinte. 

(2)  Voici  la  diagnose  donnée  par  Schiniper  des  cicatrices  des  ramules  de 

Lepidodendron  :  FoUorum  cicatrices in  ramuUs  rhomheae,  parvulae ^ 

sqimmae formes,  conliguae  (Schimper  :  Paléontologie  végétale^  t.  II, 
p.  14). 


(  1^5) 
dichotomiques,  nous  ferons  remarquer  que  la  dichotomie 
vraie  n'existe  souvent  que  dans  les  tiges  et  les  rameaux  les 
plus  considérables  des  Lepidodendron  et  des  autres  Lyco- 
podiacées  fossiles  [Lycopodium ,  Ulodendron,  Kiiorria),ei 
que  la  plupart  des  ramules  se  détachent  des  troncs,  et  se 
subdivisent  sympodiquement  (1).  Le  sympode  est  du  reste 
faiblement  exprimé  dans  nos  échantillons,  et  les  ramifica- 
tions de  second  ordre  rétablissent  déjà  la  dichotomie. 

Ma  conviction  au  sujet  de  la  place  de  cette  plante  parmi 
les  Lépidodendrées  était  déjà  fermement  établie,  lorsque 
j'entrepris  l'étude  d'un  fragment  de  tige  rencontré  avec  les 
fossiles  précités  dans  les  schistes  cuivreux  de  Rouvroy; 
cette  tige(fig.  5)  appartient,  à  n'en  pas  douter,  à  un  Lepi- 
dodendron d'une  taille  déjà  assez  considérable ,  car  le  fos- 
sile n'a  pas  même  toute  sa  largeur  sur  notre  dessin;  les 
deux  parties  latérales  sont  enlevées  par  la  cassure  de  la 
roche.  La  partie  corticale  est  disparue  et  ne  laisse  voir  que 
les  cicatrices  intérieures;  les  orthostiques  et  les  parasti- 
ques  paraissent  inclinés  suivant  un  angle  à  peu  près  égal  ; 
il  en  résulte  que  les  cicatrices  affectent  presque  la  forme 
d'un  losange.  Eh  bien,  l'échantillon  dont  nous  parlons  est 
rempli  de  rameaux  semblables  à  ceux  que  représentent  nos 
ligures  2,  3  et  4,  un  peu  plus  petits,  seulement.  La  partie 
postérieure,  surtout,  en  contient  plusieurs  qui  donnent 
naissance  à  des  ramifications,  et  qui  sont  munis  des  mêmes 
ponctuations  spiralées  que  celles  que  nous  signalions  ci- 
dessus.  On  peut  voir,  sur  le  haut  de  notre  figure  5  et  à  sa 
droite,  deux  de  ces  branches  paraissant  sortir  de  la  lige  du 
Lepidodendron.  Je  dois  ajouter  que  la  cassure  a  reporté 

(I)  Voir  Schimper  :  Paléontologie  végétale,  pi.  LVII,  LVIII,  fig.  1  et  2; 
pi.  LIX,  fig.  2  et  S;  pi.  LXIV,  fig.  4;  pi.  LXV,  fig.  8,  etc.,  etc. 


(  144  ) 
cette  dernière  sur  un  plan  un  peu  intérieur  et  qu'il  n'y  a 
pas,  par  conséquent ,  de  communication  directe  entre  elle 
et  les  rameaux;  cependant,  la  disposition  de  ceux-ci,  leur 
grand  nombre  dans  le  voisinage  du  tronc  principal ,  l'ab- 
sence de  toute  autre  empreinte,  et  surtout  les  caractères 
des  Lepidodendron  si  bien  exprimés  dans  les  ramules  suf- 
fisent pour  donner  la  certitude  pour  ainsi  dire  complète  de 
la  connexion  des  différentes  empreintes  entre  elles.  Les 
rameaux  présentent  bien  quelque  ressemblance  avec  les 
rameaux  du  Psilophyton  robustius  de  Dawson,  mais  cette 
ressemblance  n'est  que  superficielle;  on  peut  se  convaincre 
que  notre  plante  possédait,  comme  les  Lepidodendron,  un 
réseau  vasculaire  périphérique  entourant  une  moelle  cen- 
trale; c'est  de  ce  réseau  vasculaire  que  saillissaient  les 
coussinets  des  feuilles.  A  peine  remarque-t-on,  principale- 
ment au-dessous  de  l'insertion  des  ramules,  une  dépression 
étroite  qui  longe  le  groupe  vasculaire  des  deux  côtés;  cette 
bordure,  Irès-réduite,  par  rapport  au  cylindre  vasculaire 
qu'elle  renferme,  est  l'indice  de  l'enveloppe  parenchyma- 
teuse  externe.  Dans  le  Psilophyton,  au  contraire,  le  cy- 
lindre ligneux  occupe  le  miHeu  de  la  tige;  il  proémine  à 
l'extérieur,  et  est  d'une  largeur  peu  considérable  en  com- 
paraison de  la  masse  parenchymateuse  externe  (1);  ce 
cylindre  ne  forme,  par  conséquent,  qu'une  saillie  étroite 
au  milieu  de  la  tige.  Cette  distinction ,  reposant  sur  une 
structure  anatomique  complètement  différente,  est  d'une 


(1)  Voici  les  proportions  des  figures  de  Dawson.  Dans  les  figures  134  et 
14b,  le  cylindre  central  n'occupe  que  le  cinquième  de  la  largeur  totale  de 
a  tige;  dans  la  figure  127,  il  n'en  occupe  que  le  tiers  (Dawson  :  Fossil 
plants  of  the  devonian  and  upper  siluriaii  formations  of  Canada.  Mon- 
tréal,! 871). 


Bull    T  XL.  î("?8  AoùnSTS^ 


litJ'i  .par-   G-.  -Severez/rcs  £TuxêlZ& 


celte  d 
pas,  p: 
et  les  r 
grand  i 
sence  d 
des  Le/ 
fisent  p 
la  conr 
rameau 
rameau 
ressem] 
que  110) 
réseau 
traie;  ( 
coussin 
ment  ai 
étroite 
bordure 
qu'elle 
teuse  e 
lindre  1 
l'extérit 
paraisoi 
cylindn 
au  mili 
structui 


(1)  Voi. 
143,1e  cy 
a  lige;  da 
plants  of 
tréal,487 


ZitJv.'par  &.  Sever-eyrzs  BTuocêUes . 


7 


>. 


 


\ 


(  l^s  ) 

grande  importance.  De  plus,  le  caractère  principal  des 
Psilophyton  consiste  en  ce  que  ces  plantes,  qui  ont  une 
tige  analogue  à  celle  des  Lycopodium,  possèdent  une  fruc- 
tification complètement  différente  de  celle  de  ces  derniers; 
cette  fructification  est  constituée  par  une  espèce  de  sores 
suspendus  à  l'extrémité  de  ramules  dichotomes;  rien  ne 
rappelle  de  loin  ou  de  près  le  cône  des  Lycopodiacées. 

Or,  nos  échantillons  de  Rouvroy  ne  contiennent  que  des 
rameaux;  il  m'a  été  impossible  d'y  découvrir  une  trace 
quelconque  de  fruits,  et  cela  suffisait,  indépendamment 
du  caractère  important  relatif  à  la  structure  de  la  tige  que 
j'ai  cité  plus  haut,  pour  m'obliger  à  rejeter  toute  idée  de 
Psilophyton. 

Le  nom  de  Filîcites  lepidorachis  donné  par  E.  Coemans 
n'est  plus  admissible,  et  je  ne  connais  aucune  forme  de 
Lepidodendron  à  laquelle  on  puisse  rattacher  avec  certi- 
tude la  plante  de  Rouvroy;  aussi,  je  me  crois  suffisamment 
autorisé  par  ce  qui  précède  à  donner  aux  empreintes  figu- 
rées (fig.  2-5),  le  nom  de  Lepidodendron  Burnotcnse.  Peut- 
être  la  découverte  de  nouveaux  fragments  de  la  même 
plante  nous  permettra-t-elle  de  rattacher  un  jour  celle-ci 
à  quelqu'un  des  types  décrits. 


EXPLICATION  DES  FIGURES. 


Fig.  1.  Filicites  pinnalus  Coemzns. 

2-4.  Rameaux  du  Lepidodendron  Burnotense. 

—    5.  Lepidodendron  Burnotense  :  tronc  ou  branche  principale. 


2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  10 


(  146  ) 
CLASSE   DES   LETTRES. 

Séance  du  2  août  1815. 
M.  Ch.  Faider,  vice-directeur,  occupe  le  fauteuil. 

Sont  présents  :  MM.  Steur,  J.  Grandgagnage,  J.  Roulez, 
P.  De  Decker,  M.-N.-J.  Leclercq,  le  baron  Kervyn  de  Let- 
tenhove,  R.  Chalon,  Thonissen,  Th.  Juste,  Félix  Nève, 
Alph.  Wauters,  Alph.  Le  Roy  et  A.  Wagener,  membres; 
Aug.  Scheler,  Alph.  Rivier,  associés;  S.  Bormans,  Ch.Piot, 
correspo7idants. 

M.  Éd.  Mailly,  correspondant  de  la  classe  des  sciences, 
assiste  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  vice-directeur  exprime,  au  nom  de  MM.  le  baron 
Guillaume,  directeur,  et  Liagre,  secrétaire  perpétuel,  leurs 
regrets  de  ne  pouvoir  venir  prendre  place  au  bureau  à 
cause  de  leur  absence  motivée. 

•  —  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  transmet,  pour  la  Biblio- 


thèque  de  l'Académie,  un  exemplaire  de  l'ouvrage  de  M.  le 
baron  Kervyn  de  Leltenhove,  intitulé  :  La  Flandre  pen- 
dant  les  trois  derniers  siècles,  fn-8*'.  —  Remercîments. 


M.  L.  Delisle  accuse  réception  de  son  diplôme  d'as- 


socie. 


—  La  Société  pour  l'histoire  et  les  antiquités  silé- 
siennes  à  Bresiau,  la  Société  historique  pour  la  basse 
Franconie  et  l'Aschaffen bourg  à  Wurzbourg,  le  Bureau 
communal  de  statistique  de  Budapest  envoient  leurs  der- 
nières publications. 

—  M.  Aug.  Scheler,  associé,  présente,  à  titre  dom- 
mage, un  exemplaire  de  son  livre  intitulé  :  Exposé  des 
lois  qui  régissent  la  transformation  française  des  mots 
latins.  1875;  in-12. 

M.  Léopold  Delisle,  également  associé,  adresse  aussi 
comme  hommage  d'auteur,  un  exemplaire  de  sa  Notice 
sur  un  manuscrit  mérovingien  contenant  des  fragments 
d'Eugyppius,  appartenant  à  M.  Jules  Desnoyers,  1875; 
in-4°. 

M.  Alph.  Le  Roy,  membre  de  la  classe,  offre,  au  nom 
des  auteurs,  les  deux  ouvrages  suivants  :  1°  Système  com- 
mercial de  la  Belgique,  par  M.  Ch.  Pety  de  Thozée, 
t.  II  ;  in-8*'  ;  2°  Mémoire  sur  le  texte  primitif  du  7"*  i^écit  de 
la  création  [Genèse,  Ch.  I-II.  â),  suivi  du  texte  du  2^  récit, 
par  M.  Gustave  d'Eichthal.  1875;  in-8^ 

La  classe  vote  des  remercîments  aux  auteurs  de  ces  ou- 
vrages et  décide  le  dépôt  de  ceux-ci  dans  la  bibliothèque 
de  la  Compagnie. 


(  148  ) 
Elle  décide  l'impression  au  Bulletin  d'une  note  lue  par 
M.  Alphonse  Le  Roy,  au  sujet  des  ouvrages  de  philosophie 
qu'il  a  offerts  à  la  classe  dans  la  dernière  séance,  au  nom 
de  leur  auteur,  M.  Vincenzo  di  Giovanni,  de  Palerme. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Sur  les  ouvrages  philosophiques  de  M.  Vincenzo  di  Gio- 
vanni, de  Palerme;  par  M.  Alphonse  Le  Roy,  membre 
de  l'Académie. 

En  présentant  à  la  classe,  dans  notre  dernière  séance, 
au  nom  de  l'auteur,  les  derniers  ouvrages  philosophiques 
de  M.  Vincenzo  di  Giovanni ,  de  Palerme ,  je  n'ai  fait  que 
rapporter  en  Belgique  une  tradition  qui  à  certains  égards 
y  a  pris  naissance,  mais  qui  s'est  développée  et  modifiée  au- 
delà  des  monts  sous  le  coup  des  événements  de  1848,  pour 
y  être  ensuite  aussi  violemment  combattue  qu'elle  avait  été 
chaleureusement  accueillie.  Je  fais  allusion  à  l'illustre  exilé 
Gioberli,  doni  M.  Quetelet  père,  je  me  plais  à  le  rappeler, 
apprécia  le  premier,  à  Bruxelles,  les  hautes  conceptions 
platoniciennes  et  le  patriotisme  généreux.  Au  fort  de  la 
tourmente,  Gioberti  abandonna  tout  d'un  coup  les  régions 
de  la  spéculation  pure  pour  descendre  dans  l'arène  poli- 
tique, pour  tirer  les  conséquences  pratiques  des  prémisses 
qu'il  avait  posées  :  ses  tentatives  échouèrent;  mais  la  nation 


(  i49  ) 
italienne  ne  lui  en  doit  pas  moins  d'avoir  acquis  la  con- 
science claire  des  aspirations  qui  Font  finalement  unifiée, 
et  Ton  peut  dire  qu'il  fut,  à  côté  de  Balbo,  le  véritable  pré- 
curseur de  Cavour.  Son  séjour  parmi  nous  lui  avait  donné 
l'occasion  d'apprécier  le  fonctionnement  régulier  de  nos 
institutions  libres,  et  contribué  sans  doute  à  lui  faire  dé- 
sirer pour  son  pays  un  régime  consacrant  à  la  fois  l'indé- 
pendance du  pouvoir  civil  et  celle  de  l'autorité  religieuse. 
Son  système  de  conciliation  ou  de  transition  se  trouva 
bientôt  dépassé,  dans  des  conditions  qu'il  n'avait  aucune- 
ment pressenties,  mais  sans  pacifier  les  esprits,  bien  au 
contraire.  L'école  théologique  proprement  dite  s'est  élevée 
contre  le  catholicisme  libéral  et  a  décidément  passé  le 
Rubicon .:  non-seulement  toutes  les  libertés  modernes  lui 
sont  devenues  suspectes,  mais  elle  n'admet  la  philosophie 
que  comme  servante  de  la  théologie ,  selon  la  formule  du 
moyen  âge. 

Ce  revirement,  dont  il  est  à  craindre  que  la  société  euro- 
péenne n'apprenne  trop  tôt  à  connaître  la  portée,  n'a  pas 
empêché  quelques  esprits  sincèrement  religieux  de  per- 
sister à  croire  que  l'orthodoxie  la  plus  rigoureuse  n'est  pas 
inconciliable  avec  la  liberté  spéculative.  L'école  de  Gio- 
berti  compte  encore  des  partisans,  du  moins  sur  le  terrain 
de  la  métaphysique.  M.  l'abbé  di  Giovanni,  notamment,  en 
a  relevé  le  drapeau  en  Sicile,  avec  une  modération  et  une 
fermeté  qui  commandent  le  respect,  surtout  si  l'on  consi- 
dère combien  une  telle  attitude  est  difficile  à  garder  en 
présence  du  tumulte  des  passions.  Paisible  théoricien,  M.  di 
Giovanni  n'imite  point  d'ailleurs  celui  que,  sous  toutes  ré- 
serves, il  reconnaît  pour  maître  :  il  ne  s'assigne  nullement 
la  mission  d'un  Savanarole;  il  ne  quitte  pas  un  instant  les 


(  im  ) 

hauteurs  où  il  converse  avec  Platon  et  Malebranche  ;  mais 
sa  philosophie  est  celle  d'un  esprit  libre  quoique  croyant. 
Loin  d'être  passive  et  désarmée,  elle  exclut  le  dogmatisme 
aveugle  comme  l'indifférence  et  le  scepticisme,  et  proclame 
que  le  premier  intérêt  et  la  plus  pressante  obligation  du 
penseur  chrétien,  c'est  de  mettre  la  lumière  sur  le  bois- 
seau, de  quelque  part  qu'elle  vienne. 

Il  y  a  du  reste,  entre  Gioberti  et  M.  di  Giovanni,  plutôt 
accord  de  vues  sur  la  célèbre  formule  idéale  du  premier, 
que  rapport  véritable  de  fdiation.  Cet  accord  s'est  révélé 
surtout  depuis  la  publication  des  œuvres  posthumes  de  Gio- 
berti, où  la  théorie  platonicienne  des  idées  est  interprétée 
dans  un  sens  voisin  du  hégélianisme,  en  sauvegardant  tou- 
tefois le  principe  de  la  création.  Dans  ses  derniers  écrits, 
Gioberti  se  rattache  visiblement  aux  philosophes  de  la  re- 
naissance; c'est  par  là  surtout  qu'il  a  séduit  le  professeur 
palermitain.  On  ne  saurait  oublier  que  M.  di  Giovanni  s'est 
déclaré,  il  y  a  quelques  années,  admirateur  enthousiaste 
de  Miceli,  le  fondateur  de  Vécole  de  Monreale  (fm  du 
XVÏIF  siècle).  Or  Miceli,  dont  il  a  le  premier  analysé  et 
publié  les  œuvres,  est  un  philosophe  de  la  famille  du  car- 
dinal de  Cusa  et  de  Giordano  Bruus,  souvent  plus  voisin 
qu'il  ne  faudrait  de  Plotin  et  de  Proclus  :  on  l'a  aussi  com- 
paré au  bénédictin  Deschamps,  c'est-à-dire  à  un  Hégélien 
antérieur  à  Hegel;  enfin  on  l'a  rapproché,  et  non  sans 
quelque  raison,  de  Schopenhauer.  L'écueil  de  l'émanatisme, 
du  panthéisme  en  un  mot,  est  ici  bien  difficile  à  éviter  :  il 
est  vrai  que  la  personnalité  divine  est  soutenue  énergique- 
ment  par  Miceli;  mais  je  dois  l'avouer,  la  personnalité  hu- 
maine court  de  grands  risques  dans  son  système.  M.  di 
Giovanni  lutte  de  toutes  ses  forces  pour  le  défendre  et 


(  iDl  ) 
pour  repousser  le  panthéisme;  mais  il  ne  fait  pas  que 
Miceli  ne  côtoie  de  bien  près  ce  précipice.  Dans  tous  les 
cas  son  éditeur  n'y  tombe  pas  :  ce  que  je  veux  constater 
seulement,  c'est  qu'il  y  a  une  affinité  secrète  entre  ses 
idées  et  celles  des  métaphysiciens  dont  Miceli  relève  lui- 
même,  et  par  suite  une  grande  complaisance  de  sa  part  à 
faire  bon  accueil  aux  dernières  thèses  de  Gioberti.  C'est 
ici  que,  chrétien  et  catholique  convaincu,  M.  di  Giovanni 
fait  preuve  d'une  grande  indépendance  d'esprit.  C'est  un 
libre  critique  sans  peur  et  sans  reproche,  exempt  de  tout 
préjugé  et  de  tout  parti  pris  quand  il  argumente,  et  ne  se 
faisant  d'aucun  nom  un  épouvanlail.  J'essayerai  de  rendre 
raison  de  ce  détachement  et  de  cette  sérénité  dans  la  polé- 
mique, qualités  si  rares  en  général,  mais  surtout  chez  les 
écrivains  qui  font  une  part  à  la  foi  comme  à  la  raison. 

Aussi  ardent  patriote  que  Gioberti,  M.  di  Giovanni  reven- 
diquerait volontiers  pour  sa  chère  Sicile  ce  Primato  que 
l'homme  d'État  turinois  a  réclamé  pour  l'Italie.  A  ses  yeux, 
la  philosophie  anté-socratique  tire  principalement  ses  ori- 
gines de  la  patrie  d'Empédocle,  et  l'école  dite  italique  au- 
rait fleuri  en  Sicile  bien  longtemps  avant  Pythagore.  Je 
n'ai  pas  à  discuter  ici  le  bien-fondé  de  ces  assertions  :  je 
ferai  seulement  remarquer  que,pour  nos  deux  auteurs, c'est 
de  l'Italie  (ou  de  la  Sicile)  que  sont  sorties  les  idées  philo- 
sophiques fondamentales  sur  le  développement  desquelles 
a  vécu  et  vit  encore  l'Occident.  M.  di  Giovanni  regarde 
l'idéalisme  ontologique,  tel  qu'il  le  conçoit,  comme  la 
grande  philosophie  de  l'humanité,  autour  de  laquelle  tout 
gravite,  et  en  même  temps  comme  la  philosophie  nationale 
italienne,  par  excellence.  De  là,  s'il  examine  les  spécula- 
lions  brillantes  des  Français,  des  Allemands  et  des  Anglais 


(  152  ) 
modernes,  il  u'a  pourtant  pour  elles  ni  engouement,  ni 
antipathie,  ni  dédain  systématiques.  Son  zèle  le  porte,  en 
revanche,  à  exagérer  le  mérite  de  ses  compatriotes  :  on 
s'en  assurera  en  lisant  la  belle  Histoire  de  la  philosophie  en 
Sicile  qu'il  vient  de  vous  offrir  ;  mais  ce  zèle  excessif  le 
porte  précisément  à  rabattre  quelque  chose  de  nos  exalta- 
lions  à  Tendroit  des  philosophes  non  italiens.  L'observatoire 
d'où  il  porte  ses  jugements  est  très-différent  du  nôtre; 
d'autres  perspectives  s'ouvrent  devant  lui;  de  là,  rien  n'est 
plus  instructif  et  souvent  plus  inattendu  que  ses  distinc- 
tions et  ses  conclusions.  Nous  ne  connaissons  pas  assez  la 
philosophie  italienne,  et  pourtant  ceux  qui  la  représentent 
ont  raison  de  dire  que  l'Italie  n'est  pas  encore  la  terre  des 
morts.  Qu'il  me  soit  permis  de  m'en  référer  aux  deux  vo- 
lumes de  M.  Louis  Ferri,  dont  ceux  de  M.  di  Giovanni  sont 
le  complément  naturel  :  les  uns  et  les  autres  nous  appren- 
dront, non-seulement  à  nous  défier  des  mots  sonores  et 
des  stigmates  de  convention,  mais  à  rendre  plus  de  justice 
que  nous  ne  l'avons  fait,  par  exemple,  à  des  penseurs  que 
M.  Cousin  et  ses  disciples,  entre  autres,  n'ont  pas  assez  ap- 
préciés. M.  di  Giovanni,  du  moins,  s'il  est  faible  pour  les 
siens,  fait  comme  Socrate  :  il  ne  se  fâche  pas  et  il  respecte 
tout  le  monde.  Vous  êtes  psychologiste  n'est  pas  dans  sa 
bouche  une  objurgation  comme  :  vous  êtes  ontologiste, 
dans  la  bouche  de  ses  adversaires.  Pour  le  dire  en  passant, 
c'est  là  un  des  grands  avantages  de  la  forme  dialogique ,  si 
chère  aux  véritables  philosophes. 

M.  di  Giovanni  affectionne  cette  forme,  à  l'instar  des 
platoniciens  et  des  philosophes  de  la  renaissance,  et  du 
grand  Leibniz;  de  plus,  comme  ses  compatriotes  en  gé- 
néral, il  sait  quel  est  le  prix  de  la  forme  littéraire  :  ses 


(  ^S5  ) 
ouvrages,  tout  sérieux  qu'ils  sont,  procurent  une  lecture 
agréable.  Les  Serale  cnmpesiri,  en  particulier,  mériteraient 
les  honneurs  d'une  traduction  française.  Ce  livre  a  un  se- 
cond titre  qui  en  exprime  plus  directement  la  pensée  : 
Sofismi  e  buon  senso.  Il  s'ouvre  par  une  discussion  ma- 
gistrale sur  le  panthéisme  et  sur  le  matérialisme  contem- 
porain, entre  lesquels  l'auteur  croit  découvrir  plus  d'un 
point  de  contact  :  alors  se  déroulent  sept  dialogues,  où  les 
représentants  des  systèmes  aujourd'hui  portés  de  part  ou 
d'autre  sur  le  pavois  entrent  résolument  en  lice.  La  logique 
de  Hegel ,  celle  de  John  Stuart  Mill ,  le  positivisme  fran- 
çais, les  doctrines  matérialistes  de  MM.  Buchner  et  Mole- 
schott,  les  théories  critiques  de  MM.  Vacherot,  Renan  et 
Ausonio  Franchi,  les  illusions  des  apôtres  de  la  morale 
indépendante  font  tour  à  tour  l'objet  de  ces  entretiens;  les 
deux  dernières  soirées  sont  consacrées  au  mouvement  phi- 
losophique italien  et  à  l'histoire  fictive  d'un  penseur  qui, 
après  avoir  suivi  les  sophistes  dans  leurs  égarements,  en 
revient  finalement  au  bon  sens,  en  consultant  le  fond  de 
sa  conscience  et  en  apprenant  à  bien  épeler  le  grand  livre 
de  la  nature.  Tout  cela  soutenu  par  un  grand  renfort  d'éru- 
dition, mais  sans  que  l'auteur  s'en  laisse  jamais  écraser:  il 
domine  son  sujet  et  sait  d'autre  part  y  pénétrer  dans 
les  moindres  recoins,  avec  cette  finesse  déliée  qui  est 
un  des  apanages  de  ses  compatriotes.  J'estime  que  son 
petit  volume,  s'il  était  acclimaté  chez  nous,  rendrait  de 
sérieux  services  à  la  jeunesse  lettrée,  en  la  prémunissant 
contre  l'orgueil  scientifique  des  nouveaux  Protagoras. 
Quand  on  fait  de  pareilles  trouvailles,  il  est  bon  de  les 
signaler. 

Non  moins  intéressant  est  le  volume  intitulé  :  Scuola, 


(  io4  ) 
scienza  e  crilîca.  J'y  ai  constaté  avec  plaisir  que  notre  on- 
tologiste  reconnaît  judicieusement  qu'une  saine  anthropo- 
logie est  la  base  véritable  du  système  de  l'éducation.  Le 
reste  de  l'ouvrage  se  compose  de  mélanges  :  j'y  noterai  un 
travail  sur  M^'  d'Acquisto,  qui  prend  place  entre  Miceli  et 
Gioberti;  trois  bonnes  études  sur  Boëce;  d'autres,  très- 
instructives,  sur  l'histoire  de  la  théorie  des  idées  arché- 
types, puis  des  considérations  de  haute  esthétique,  voire 
d'archéologie,  celles-ci  concernant  particulièrement  la  Si- 
cile. J'ai  dit  tantôt  que  M.  di  Giovanni  n'est  pas  seulement 
un  philosophe,  mais  un  chaud  patriote  :  ce  n'est  pas  seu- 
lement de  l'amour,  c'est  de  l'adoration  qu'il  professe  pour 
la  Trinacria.  De  là  ses  travaux  érudits  :  il  se  délasse  volon- 
tiers de  ses  méditations  en  secouant  la  poussière  des  bi- 
bliothèques et  des  archives.  On  lui  doit  les  plus  curieuses 
découvertes  :  je  ne  citerai  que  ses  deux  volumes  Sur  la 
philologie  et  la  littérature  siciliennes.  L'alliance  de  ces 
goûts  est  plus  fréquente  en  Italie  que  chez  nous  :  c'est 
encore  un  trait  qui  rappelle  les  habitudes  d'esprit  des 
hommes  de  la  Renaissance.  Ne  m'occupant  quant  à  présent 
que  des  études  philosophiques  de  M.  di  Giovanni,  je  n'insis- 
terai pas  :  mon  but  sera  pleinement  atteint,  si  je  suis  par- 
venu à  attirer  l'attention  de  la  classe  sur  un  développement 
d'idées  qui  ne  nous  louche  pas  sans  doute  d'une  manière 
directe,  mais  qui  peut  gagner  singulièrement  en  impor- 
tance générale,  en  présence  du  défi  actuellement  jeté  à  la 
libre  spéculation. 


(  ISS  ) 


Fragment  (Vun  poëine  flamand  inédit  imité  de  Li  roumans 
DE  Berte  aus  gra.xs  piés;  par  M.  Ch.  Piot,  correspon- 
dant de  l'Académie. 

L'écriture  du  fragment  inédit  de  poésie  flamande,  re- 
produit à  la  fin  de  cette  notice,  appartient  incontestable- 
ment au  premier  quart  du  X\\^  siècle  (1).  C'est,  à  n'en  pas 
douter,  une  copie  faite  de  main  reposée  :  on  n'y  remarque 
aucune  surcharge  ni  rature,  rien  enfin  qui  indique  un 
manuscrit  original.  Sous  certains  rapports  il  ressemble  au 
fragment  de  l'écrit  intitulé  :  Leven  van  sinte  Lufgarde, 
et  publié  dans  la  Dietsche  Warande  (2). 

A  quelle  époque  appartient  le  texte  original  de  ce  frag- 
ment? Précède-t-il  le  Rouman  de  Berte  ans  grans  piés? 


(1)  En  1872,  M.  Vanderslraeten  annonça,  dans  VEendracht  (n»  26),  la 
découverte  faite  aux  Archives  du  royaume  d'un  fragment  du  poëme  de 
Flore  et  Blancheflor,  écrit  en  flamand.  Ce  fragment  sur  parchemin  servit, 
dit-il ,  de  couverture  à  un  manuscrit  provenant  de  l'abbaye  de  Robermont 
près  de  Liège,  et  renfermait  la  vie  de  saint  Éloy. 

Après  avoir  pris  connaissance  de  ce  parchemin,  nous  y  reconnûmes  cer- 
taines analogies  des  scènes  décrites  dans  le  roman  français  de  Berte  aus 
grans  piés.  A  notre  avis  il  n'avait  rien  de  commun  avec  le  poëme  de  Flore 
et  Blancheflor. 

Au  mois  de  novembre  M.  Vanderslraeten  inséra  dans  VEendracht 
(n»  9),  une  rectification  de  son  premier  article,  et  émit  quelques  idées 
générales  sur  ce  poëme,  promettant  d'y  revenir  plus  tard.  Ses  occupations 
ne  lui  ayant  pas  permis  de  satisfaire  à  cette  promesse  ,  nous  avons  pris 
la  décision  de  publier  le  fragment  de  l'assentiment  de  M.  Vanderstraeten. 

(2)  Tome  III,  p.  135. 


(  156  ) 
Est-ce  une  traduction  de  ce  poëme ,  dont  l'auteur  Adenés 
li  Rois  naquit  en  Brabant  vers  1240  (1)? 

Ces  questions,  nous  allons  les  examiner. 

Première  question  :  A  quelle  époque  appartient  le  texte 
original? 

S'il  fallait  s'en  tenir  à  l'ancienne  opinion  concernant 
l'origine  de  la  poésie  flamande,  notre  fragment  devrait 
avoir  paru  après  les  écrits  de  Van  Maerlant,  appelé  par 
Jean  Boetendale,  le  père  de  la  poésie  thioise.  Il  n'en 
est  rien.  En  1856,  feu  M.  Willems  rejeta  cette  opinion 
dont  il  avait  été  le  défenseur  officiel,  et  après  avoir  appro- 
fondi la  question,  il  démontra  par  le  poëme  de  Reinaert 
de  Vos  que  d'autres  poètes  flamands  avaient  précédé  Van 
Maerlant  (2).  M.  Jonckbloet  consacre  à  la  démonstration 
de  cette  thèse  tout  le  chapitre  YI  de  son  travail  si  remar- 
quable sur  la  poésie  néerlandaise  du  moyen  âge  (3).  Cet 
écrivain  y  fait  voir  d'une  manière  victorieuse,  par  le  texte 
de  Van  Maerlant  lui-même,  qu'il  a  des  prédécesseurs. 

Aujourd'hui  le  doute  n'est  plus  permis  à  ce  sujet.  Par 
les  écrits,  par  la  critique,  par  des  dissertations  approfon- 
dies, il  est  démontré  que  des  poésies  flamandes  remontent 
certainement  au  delà  du  XllP  siècle.  M.  Bormans  va  plus 
loin  encore.  Ce  philologue  distingué  prétend  que  les  poètes 
français  ont  beaucoup  appris  de  nos  Flamands,  opinion 


(1)  Paulin  Paris,  Li  romans  de  Berte  ans  grans  pies,  p.  xlv.  —  Un 
texte  plus  correct  et  revu  avec  critique  a  été  publié  récemment  par 
M.  Scheler. 

(-2)  Reinaerl  de  Vos ,  publié  par  Willems,  préface,  pp.  xvi  et  suiv. 

(3)  Geschiedenis  der  Midennederîandsche  dicfitkunst,  t.  I ,  pp.  174  et 
suiv.  Voir  aussi  Snellaert ,  Verhandelingen  over  de  Nederlandsche  dicht- 
kunst  in  Belgie ,  pp.  42  et  suiv. 


(  1S7) 
dont  M.  Jonckbloet  s'est  fait  Tavocat  dévoué  (1).  Par 
poètes  fiançais,  nous  entendons  les  Belges  qui,  faisant 
usage  de  la  langue  romane,  écrivirent  pendant  le  XI IP  siècle 
des  poëmes  justement  renommés.  Liège,  le  Hainaut,  le 
Brabant,  l'Artois  et  la  Flandre  ont  produit  les  poésies 
les  plus  remarquables  en  langue  romane  de  cette  période. 

En  présence  de  ces  faits,  rien  ne  s'oppose  à  admettre 
l'existence  de  poëmes  flamands  avant  l'apparition  des 
écrits  de  Van  Maerlanl.  Lorsque  cet  auteur  prit  la  plume,  la 
poésie  flamande  s'était  développée  d'une  manière  extraor- 
dinaire. Elle  jeta  un  vif  éclat  pendant  le  XIIP  siècle, 
l'époque  brillante  des  communes  belges,  celle  pendant 
laquelle  le  commerce  et  l'industrie  avaient  créé  dans  nos 
provinces  des  richesses  inconnues  à  d'autres  peuples. 

En  examinant  attentivement  le  style  et  toutes  les  parti- 
cularités de  notre  poëme,  il  faut  admettre  forcément  qu'il 
appartient  à  la  grande  époque  de  Van  Maerlant.  Chez  cet 
écrivain  la  langue  prend,  il  est  vrai,  un  caractère  tout  à 
fait  diff'érent  de  celle  employée  par  l'auteur  de  notre  frag- 
ment :  le  dialecte  de  celui-ci  semble  moins  rude;  les 
formes  de  son  langage  sont  plus  adoucies.  Et  cependant 
le  sujet,  les  expressions  et  les  détails  de  son  poëme  n'ap- 
partiennent pas  moins  à  l'époque  de  Van  Maerlant.  Le  ton 
chevaleresque  de  l'épopée,  l'amour  du  merveilleux,  une 
invention  assez  originale  s'y  manifestent  d'une  manière 
évidente  et  accusent  certainement  cet  âge. 

Deuxième  question  :  Notre  fragment  est-il  antérieur  au 
roman  de  Berthe  ? 

Avant  d'entamer  cette  question,  tâchons  de  déterminer 
l'âge  du  roman  écrit  par  Adenés  li  Bois. 

(1)  Jonckhloel,  ^c,  t.  I,p  288. 


(  4S8  ) 

Ce  ménestrel  suivit,  d'après  les  témoignages  histori- 
ques, Marie  de  Brabant  lorsqu'elle  devint,  en  1275,  l'épouse 
de  Philippe  le  Hardi ,  roi  de  France.  Le  voilà  attaché  à 
une  cour  fastueuse,  brillante,  protectrice  des  lettres  et 
aimant  surtout  la  nouveauté.  A  titre  d'étranger  Adenés 
devait  produire  de  l'effet,  et  il  dut  nécessairement  subir 
par  sa  position  l'influence  de  sa  nouvelle  patrie.  Ses  œuvres 
s'en  ressentirent  également.  Le  poëme  de  Berthe,  éminem- 
ment français  par  la  facture,  les  idées  et  le  style,  s'étend 
avec  complaisance  sur  des  détails  descriptifs.  L'auteur 
aime  à  y  transcrire  des  tirades,  des  discours  très-étendus, 
empruntés  à  l'éloquence  du  courtisan.  Il  se  plaît  à  étaler 
ses  connaissances  de  la  topographie  de  France,  connais- 
sances qu'il  devait  certainement  ignorer  avant  son  séjour 
dans  ce  pays.  Paris  est,  dans  le  roman  de  Berthe,  le  centre 
vers  lequel  tout  converge.  Paris  c'est  la  cour.  Paris  c'est 
tout.  Ce  roman,  dit  M.  Léon  Gautier,  réveille  toutes  les 
qualités,  tous  les  défauts  d'une  civilisation  déjà  avancée  (1). 
Ajoutons,  pour  compléter  l'idée  de  l'auteur,  que  la  civili- 
sation était  en  effet  très-développée  dans  le  Midi,  tandis 
qu'elle  revêtait  encore  à  cette  époque  un  certain  caractère 
de  rudesse  dans  le  Nord.  Tout  semble  donc  démontrer  que 
le  roman  de  Berthe  a  été  composé  par  Adenés  postérieu- 
rement à  son  arrivée  en  France,  c'est-à-dire  après  127o. 

Notre  poëme  flamand  étant  une  imitation  de  URoumans 
de  Berte  ans  grans  pies ,  —  nous  le  ferons  voir  plus  loin  — 
il  est  permis  d'en  conclure  qu'il  appartient  au  dernier  quart 
du  XIII'  siècle. 

Troisième  question  :  Celte  épopée  est-elle  une  traduc- 
tion ou  une  imitation  de  la  Berte  d'Adenés? 


(I)  Épopées  françaises ,  t.  Il,  p.  10. 


(  m)  ) 

Les  poètes  français  ne  dédaignaient  pas,  il  est  vrai,  les 
compositions  flamandes.  Grâce  à  nos  richesses,  grâce  à 
nos  institutions,  l'idiome  national  avait  pris  un  grand 
développement  dans  notre  pays  :  la  poésie  surtout}  avait 
fait  des  progrès  marquants.  Sous  le  rapport  de  la  vogue  le 
flamand  n'avait  pas  les  avantages  de  la  langue  française, 
laquelle  visait  déjà  à  l'universalité.  C'est  ce  qui  a  fait 
dire  par  M.  Jonckbloet  :  lorsque  le  copiste  et  surtout  le 
traducteur  voulaient  remplacer  le  nom  de  l'auteur  par  le 
sien,  qui  pouvait  découvrir  la  supercherie?  qui  aurait 
refusé  de  croire  à  la  priorité  de  l'écrit  rédigé  dans  une 
langue  répandue  partout  ?  Il  ne  serait  pas  impossible  d'ad- 
mettre que  maint  poëme  composé  en  flamand  et  traduit 
ou  imité  très-tôt  en  français,  soit  considéré  comme  une 
production  originale  de  la  France  (1). 

Le  fragment, dont  nous  reproduisons  le  texte,  se  trou ve- 
t-il  dans  le  même  cas  ?  Nous  n'osons  pas  le  croire.  Au 
surplus,  la  priorité  des  versions  différentes  d'un  poëme  est- 
elle  une  question  si  importante  qu'on  le  croit  générale- 
ment ?  Pendant  le  moyen  âge  ,  époque  des  associations,  si 
contraires  à  l'individualisme,  les  traditions  appartenaient 
aux  nations  et  non  aux  écrivains.  En  s'emparant  d'une 
saga,  le  trouvère  la  racontait  selon  les  idées  du  peuple 
auquel  il  destinait  son  récit.  Il  en  faisait  des  épopées  natio- 
nales. C'est  ainsi  que  les  traditions  populaires,  ce  grand 
livre  des  nations,  s'acclimataient  dans  chaque  pays ,  en  y 
prenant  un  caractère  spécial.  L'antique  légende  du  Cheva- 
lier au  Cygne,  n'a-t-elle  pas  subi  des  transformations 
dans  tous  les  pays  où  elle  est  connue  ? 

Le  poëme  français  de  Berle  ans  cjrans  pies  et  le  frag- 


(1)  L.  et.  I,  p.  289. 


(  160  ) 
ment  flamand  que  nous  publions  traitent,  sans  aucun 
doute,  le  même  sujet.  Dans  l'un  et  l'autre  de  ces  écrits 
Berlhe,  fille  de  Flore  et  de  Blancheflor  et  femme  de  Pépin, 
subit  une  disgrâce.  Elle  erre  dans  une  forêt;  puis  elle  est 
retrouvée  par  les  siens. 

Dans  le  poëme  flamand  les  longs  détails ,  les  récils  traî- 
nants sont  soigneusement  évités.  Ils  sont  remplacés  par 
des  descriptions  très-courtes.  Les  harangues  y  sont  encore 
passablement  étendues,  comme  dans  le  poëme  français; 
mais  le  style  déclamatoire  du  courtisan  disparaît  complè- 
tement :  il  fait  place  à  une  grande  simplicité  d'expressions. 
Comme  dans  le  poëme  français,  Berthe  rencontre  au  milieu 
de  la  forêt  Simon  chevauchant  par  monts  et  par  vaux. 
A  la  vue  de  la  belle,  son  cœur  s'enflamme.  Elle  le  repousse 
en  lui  déclarant  qu'elle  est  reine. 

Dans  toute  cette  scène  il  y  a  une  naïveté  qui  fait  com- 
plètement défaut  dans  le  roman  français.  Enfin  l'auteur  a 
écrit  un  poëme,  flamand  par  la  forme,  flamand  par  les 
expressions,  flamand  par  les  idées.  Le  roman  thiois  de 
Berteest  au  roman  français  du  même  nom  ce  que  i?emaer^ 
de  Vos  est  au  renard  français,  ce  que  le  roman  de  Floris 
ende  Blancefloer  est  au  roman  de  Flore  et  Blancheflor.  En 
publiant  le  texte  flamand  de  ce  poëme  M.  Hoffmann  von 
Fallersleben  fait  une  observation  très-juste  et  applicable 
en  partie  à  notre  fragment  :  plus  grande,  dit-il,  est  la 
part  que  nous  devons  attribuer  au  poëte  Thierri  d'Asse- 
nede;  car  en  remaniant  le  roman  original  français,  il  a 
fait  de  Flore  et  Blancheflor  un  poëme  nouveau,  plus  beau 
et  véritablement  néerlandais  (1). 


(1)  fforae  Behjicae,  part  :2,  p.  ix  :  Grôsser  aber  isl  der  Antlieil,  den  wir 
dem  Dichler  selbst,  Diederic  Van  Assenede,  zu  erkennen  mùssen,  demi  er 


(   16i   ) 

Un  fait  nous  a  frappé  en  examinant  le  fragment,  dont 
nous  reproduisons  le  texte.  Nous  n'y  avons  pas  vu  une 
seule  mention  de  localités  françaises;  laFrancey  est  nom- 
mée une  seule  fois;  tandis  que  le  romande  Berteaiis  grans 
pies  est  prodigue  de  noms  topographiques  appartenant  à 
nos  voisins  du  Midi.  Nous  y  avons  reconnu  certaines  idées, 
des  détails  de  style  et  d'orthographe  semblables  à  ceux  du 
roman  de  Floris  ende  Blancefîoer,  édité  par  M.  Hoffmann. 
La  versification  est  facile  et  naturelle  dans  l'un  comme 
dans  l'autre  de  ces  deux  romans. 

Ces  ressemblances  sont  telles,  que  nous  sommes  très- 
tenté  de  l'attribuer  au  même  auteur,  Thierri  d'Assenede, 
poëte  et  clerc  de  Marguerite  de  Constantinople  et  de  Gui 
de  Dampierre  de  1262  à  1285(1). 

Nous  reproduisons  ici  le  fragment ,  tel  qu'il  est  transcrit 
sur  le  parchemin,  dont  l'état  de  conservation  laisse  beau- 
coup à  désirer.  Bon  nombre  de  mots  et  de  lignes  y  sont 
effacés  ou  complètement  rognés. 

Ende  scide  :  willecome ,  vrient , 
Ghi  hebl  iegen  mi  veidiont , 
Dal  ic  u  vrient  wespii  moet. 
Nu  segt  mi  wat  Beerte  doet, 
Hebdi  in  haer  iet  bevonden  ? 
Symoen  ,  die  len  selven  stonden 
Seker  heit ,  meen  ic  niet , 
Mer  claer,  so  welic  d:U  bediet  : 
Dal  seker  es  u  coninginne. 


liât  diirch  seine  Bebandiunge  des  walschen  Originals  aus  Flore  und 
Hlanchiflore,  ein  neues  nocli  sclioneres,  echt  hoilàndisches  Gedicht,  ge- 
schaffen. 

(1)  Voir  à  ce  sujet  C    A.  Serrure,   Geschiedenis  der  Nederlanlsche  en 
Fransche  lelterkunde  in  Vlaenderen,  p.  104. 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  11 


(  162  ) 


Den  coninc  worden  al  sijn  sinne 
Doen  utermaien  al  le  blide. 
Symoene  nam  hi  tien  tide 
Haestelike  biiler  hanl, 
Der  hi  Blencefloer  vant. 
Der  heefti  Symoen  scire  brocht. 
Die  coninc  was  wel  bedocht , 
Ende  sprac:  vriende.     .     .     . 


iel  ende  ons  ellinde 

we  ende  al  ons  zeer 

heden  nenimermeer 

vrouwe  seer  verblijt 

ende  dien  lijt 

Der  es van  hoger  aert 


es  u  vrienl 

heefl  verdie  m 
.     .    waer 


Si werven  wel 

So  ic  weel  in  corler  stont. 
Si  seide  :  vrieiit,  nu  doe  mi  conl 
Hoe  ghi  geraket  an  niijii  kint. 
Symoen  anlwerde  met  geninl  : 
Vrouwe,  giii  SPltH  noch  wel  weten. 
Eens  morgens  wasic  op  gcselen, 
Ende  soude  comen  te  woude  waeit 
Scoone  was  die  dach  verbaert. 
Op  mijn  peerl  qnamic  gereden 
Van  enen  berge  toi  beneden. 
Der  so  vandic ,  op  die  ure , 


(  163 


Ene  de  scoenste  créature, 
Die  ic  nie  met  oeen  sach. 


Nar  minen  reise  gereden ,  quam 
Een  vrouwe ,  dat  ic  der  vernam , 
Die  utermaten  was  alte  scone. 
le  boot  her  mine  minne  te  lone. 
Si  seide  dat  sijs  niet  en  dade. 
Doen  leidicse  buten  pade. 
Met  mi  en  wilde  si  niet  gaen  ; 
Mer  si  dede  mi  der  verstaen 
Dat  si  was  i  coninginne, 
Die  was in  minen  sinue. 

Dat  wonder dat  sekerlike 

Dat  ghi  segt  het  es  u  nichie 

Ghi  mocht  saken  seggen  iichte, 

Die  u  souden  iegen  gaen  ; 

Mer,  her  weert,  doet  mi  verstaen 

Claerlec  wie  die  vrouwe  si , 

Ende  hoe  si  heet,  dat  segt  mi. 

Ghi  moetet  mi  te  wetene  doen. 

Doen  antwerde  weert  Symoen  : 

Is  mi  clair  becant 

Dat  si  Beerte  es  gênant. 

Dies  es  leden  . . .  v  jaer 

Dat  icse ,  dats  seker  waer, 

Int  wout   te  verre  van  hier. 

Ic  ben foreeslier, 

Ende  heb  enigen  lijt  gewesen. 
Carie  Marteel ,  den  coninc  vor  desen 
Die  hadde  mi  lief  in  waere  dinc 
Mer  niet  en  sieic  desen  coninc; 
le  en  sachen  noit  met  ogen; 
Der  ut  weet  den  prinse  vermogen 
Nu  will  horen  ende  verstaen. 
Eens  morgens  vroe,  sonder  waen  , 
Wasic  gpseten  op  niijn  paert, 
Ende  soude  varen  in  Mans  waerl. 


(  164  ) 


Tcleert  vander  sonne  opganc , 
Der  gemoelic,  sonder  wanc, 

Jegen  wil dese  ionc\  rouwe 

Makende  wel  den  meesten  Irouwe 
Die  ic  sach  van  min  en  leven . 
Een  deel  reedic  her  bel  neven. 
Si  dochte  ml  so  overscone, 
Al  werl  om  te  dragen  crone 
Van  algade  Vranckerike. 
Noit  en  sacli  haers  gelike. 
Waer  ic  qiiani  ...  iege  slonden, 
Aldus  was  de  scoene  vonden. 
Want  was  si  van  coudon  doot, 
le  brocht met  haesten  groot. 


Wi goed    .    . 

Doen  si  ifier leven 

Met  vragene  wi d —  cleven 

Hoesi  bi  namen  wert  genaeml? 
Si  seide:  Beerle,  dais  mi  befaemt. 
Doe  wirl  Pippin  alte  blide 
Hi  seide  dus  ten  selven  tide  : 
Waer  bi  heb  dese  niehte  gehelen  ? 
Constant  seide  :  dat  suldi  weten. 

hier  so  nam  .     . 

Vole 

Jagers,  ridders  ende  ioncheren, 
Oft  si  de  mouwe  al  vol  eren 
lewers  hadden  ons  willen  onlleden. 

Aldus loe  dai  wi  d  .  .  . 

Dat  wi  der 

(26  lignes  illisibles.  ) 
In  sachse  noit  fel  gemort , 
Oft  datsi  I.  wort  mcslcde. 
Sies  vol  der  welenlhede, 
Ende  der  toe  so  overscone , 
Al  waert  om  te  spannen  crone 


(  163  ) 

Van  alden  lande  van  erlerike. 
So  en  wislic  hoe  properlike. 


I    baer 


Dis  es  leden  wel  vi  jaer, 
Leltel  meer  ofte  min  , 
Der  houdic  in  minen  sin , 
Dat  hier  liep  i  niemare, 
Hoe  dat  i  vrouw  verloren  ware. 


Dal  hem  God  vergevene  moet  ; 
Mer  ic  die  raaliede  hin  der  moet 
Dat  ic  was  coninginne. 
In  weel  hoet  quam  in  minen  zinne. 
Anders  haddi  mi  vercracht. 
Symoen  die  scier  was  bedacht, 
Seide  :  scoeiie,  eest  dan  niel  waer  ? 
Sides  mi  hier  openbaer  ; 
Wanl  die  ridder  es  van  danne. 
Si  sprac  :  ghetegel  mi  eens.  .  .  . 


Wanl  die  he . . ,  so  ic  verneme , 

En  neml  die  vrouwe  niel 

Vor  den  lijt  dal  hi  u  siel. 

Dal  was  dat  nu  de  coninc  hiet. 

Doe  seide  Florijs  :  die  coninc, 

Dats  een  redelike  dinc 

Vrouw  BlanceÛoer  ghi  seil  der  varen. 

Doet  u  gereiden,  sonder  sparen, 

Sonder  enege  lange  beide. 

Die  vrouwe  niet  der  iegen  seide  ; 

Mer  bereide  si  wat  si  can. 


(  166  ) 


Maximilien-Emmaniiel  de  Bavière,  comte  de  Nanmr;  par 
M.  Stanislas  Bormans,  correspondant  de  l'Académie. 

Après  que  Jean  III  eut  vendu  son  comté  de  Namur  à 
Philippe  le  Bon  par  acte  passé  à  Gand  le  15  janvier  1421 , 
le  Namurois,  administré  par  des  gouverneurs,  partagea  les 
destinées  du  reslede  la  Belgique.  Marie  de  Bourgogne,  fdle 
de  Charles  le  Téméraire,  ayant  épousé  Tarchiduc  Maximi- 
lienle  18  août  1477,  la  province  de  Namur  passa,  avec 
les  vastes  domaines  de  cette  princesse ,  sous  la  domination 
de  la  maison  d'Autriche.  Elle  retourna  ensuite  avec  les 
Pays-Bas  à  Philippe  IV,  roi  d'Espagne,  lorsque  l'infante 
Isabelle,  tante  de  ce  monarque,  mourut  sans  enfant  le 
i"  décembre  1633.  La  souveraineté  des  rois  d'Espagne 
dura  jusqu'à  la  paix  d'Utrecht  (11  avril  1713)  qui  mit 
Charles  VI,  empereur  des  Bomains,  en  possession  des  pro- 
vinces appelées  depuis  lors  les  Pays-Bas  autrichiens. 

Avec  la  dynastie  de  la  maison  de  Dampierre  finit  à  pro- 
prement parler  l'histoire  du  comté  de  Namur;  avec  elle 
aussi,  l'ancienne  capitale,  autrefois  animée  par  la  présence 
d'une  cour,  tomba  subitement  au  rang  de  petite  ville  de 
province.  Ce  fut  son  rôle  pendant  les  quatre  siècles  environ 
qui  précédèrent  la  révolution  française, sauf  un  moment  où 
le  Namurois,  administré  directement  par  son  souverain, 
devint  encore  une  fois  le  siège  d'une  cour  princière.  Cette 
heureuse  situation  ne  dura  guère  que  deux  ans;  c'était 
assez  toutefois  pour  que  les  habitants  de  Namur,  qui  fêtè- 
rent avec  éclat  un  événement  aussi  extraordinaire,  conser- 
vassent longtemps  le  souvenir  de  Maximilien-Emmanuel, 


(  167  ) 
duc  et  électeur  de  Bavière,  comte  de  Namur,  de  fait  depuis 
le  6  avril  1711  jusqu'au  i"  décembre  1714,  et  en  droit 
depuis  le  2  jauvier  1712'jusqu'au  11  avril  1713. 

C'est  le  règne  de  ce  prince  que  je  veux  lâcher  d'esquis- 
ser rapidement.  Mais  il  convient  de  rappeler  d'abord  les 
faits  qui  amenèrent  cette  souveraineté  éphémère. 


Maximilien-Emmanuel  de  Bavière,  né  le  11  juillet  1662, 
était  fils  de  Ferdinand-Marie  duc  de  Bavière,  électeur  du 
S*-Empire,  et  de  Marie-Henriette-Adelaïde,  fille  de  Viclor- 
Amédée  de  Savoie  et  de  Christine,  princesse  royale  de 
France.  Il  n'avait  que  seize  ans  lorsqu'il  succéda  à  son 
père  dans  l'électoral  de  Bavière.  Quelques  années  plus  tard, 
lorsque  Vienne  fut  assiégée  par  les  Turcs,  il  prit  les  armes 
pour  la  défense  de  l'Empire,  et  contribua  puissamment  à 
délivrer  la  capitale  de  l'Autriche;  puis  il  alla  combattre 
avec  gloire  en  Hongrie,  et  emporta  d'assaut  la  ville  de 
Belgrade.  Généreux  et  chevaleresque  à  cette  époque,  il  ne 
se  contenta  pas  de  payer  de  sa  personne  :  il  dépensa  dans 
cette  guerre  près  de  cent  millions,  n'ambitionnant,  pour 
prix  de  ce  sacrifice,  que  la  satisfaction  d'avoir  assuré  le 
salut  de  la  chrétienté. 

Le  15  juillet  1689,  il  épousa  Marie-Antoinette  archi- 
duchesse d'Autriche,  fille  de  l'empereur  Léopold  I"  et 
petite  fille  de  l'empereur  Philippe  FV,  roi  d'Espagne  (1). 
Ce  mariage  pouvait  lui  donner,  à  lui  ou  aux  enfants  qui 


(4)  Dès  cette  époque,  le  roi  d'Espagne  fut  sollicité  de  donner  ce  qui  lui  restait 
des  Pays-Bas  en  dot  à  l'archiduchesse ,  pour  récompenser  l'Électeur  des  services 
qu'il  avait  rendus  dans  l'armée  impériale  contre  les  Turcs. 


(  168  ) 
naîtraient  de  l'archiduchesse,  des  droits  éventuels  à  la 
succession  de  la  monarchie  espagnole;  dès  lors,  en  effet, 
on  prévoyait  que  le  débile  roi  Charles  II  mourrait  sans 
héritier  direct.  L'électeur  de  Bavière  se  livra  tout  entier  à 
l'espérance  que  faisait  naître  en  lui  une  telle  éventualité, 
et  à  partir  de  ce  moment,  il  ne  négligea  aucune  occasion 
de  se  rapprocher  du  but  convoité.  Il  songea  d'abord  à 
s'établir  aux  Pays-Bas,  et  fit  des  démarches  à  Madrid  pour 
obtenir  l'administration  de  ces  provinces  (i).  Les  ministres 
de  Charles  II,  naturellement  hostiles  à  la  candidature  d'un 
prince  étranger,  combattirent  la  demande  de  l'Électeur 
qui,  insinuaient-ils,  \isaii  à  la  domination  absolue  et  ne 
larderait  pas  à  se  rendre  indépendant  du  pouvoir  royal. 
Informé  de  l'opposition  qu'il  rencontrait,  Maximilien  écri- 
vit, le  9  octobre  1691,  au  faible  monarque  une  lettre  des- 
tinée à  en  paralyser  l'effet;  il  y  protestait  hautement  de 
son  abnégation,  affirmait  qu'il  n'avait  en  vue  que  l'intérêt 
de  l'Espagne,  qu'il  voulait  défendre  les  Pays-Bas  contre 
les  convoitises  de  la  France,  suppléerait  au  manque  d'ar- 
gent par  ses  propres  ressources,  et  mettrait  ses  troupes 
bavaroises  au  service  du  roi  (2).  Ému  par  ces  promesses, 
Charles  II  écrivit  le  29  novembre  à  l'Électeur  qu'il  l'in- 
vestissait du  gouvernement  des  Pays-Bas  en  remplacement 
du  marquis  de  Castaîiaga  (5). 

Maximilien  fit  son  entrée  à  Bruxelles  le  26  mars  1692. 
Les  Belges,  fatigués  d'être  gouvernés  par  de  simples  gen- 


(4)  M.  Gachard  a  publié  sur  ces  négociations  de  nombreux  et  intéressants  dé- 
tails dans  les  Bulletins  de  la  Commission  royale  d'histoire,  8^  série,  tome  VI, 
pages  40  et  suiv. 

(2)  Ibidem,  \\i6,  il. 

(3)  Les  patentes  ne  furent  toutefois  délivrées  que  le  13  décembre  1691. 


(  169  ) 
tilslioinmes  espagnols  (l),  étaient  déjà  prévenus  en  faveur 
d'un  prince  dont  la  bravoure  faisait  Tadmiration  de  l'Europe 
entière;  d'ailleurs, outre  qu'il  était  jeune,  bien  faitetadroit, 
ce  qui  plaît  toujours  aux  masses,  il  ne  négligeait,  par  goût 
ou  par  calcul,  rien  de  ce  qui  pouvait  contribuer  à  le  ren- 
dre populaire  :  il  recberchait  le  luxe  et  les  fêtes,  entrete- 
nait une  cour  fastueuse  et  brillante,  aimait  les  sciences  et 
les  arts,  protégeait  Tindustrie  et  le  commerce,  et  se  pro- 
diguait au  peuple  (2). 

Aussitôt  qu'il  eut  pris  en  main  les  rênes  du  gouverne- 
ment, il  s'appliqua  à  tirer  notre  pays  de  Tétat  déplorable 
où  l'avait  plongé  l'incurie  des  gouverneurs  espagnols;  il 
rétablit  les  finances,  réorganisa  la  justice,  réprima  les 
désordres  et  la  licence  des  troupes,  fil  revivre  le  commerce, 
créa  le  système  des  chaussées,  et,  par  tous  ces  travaux, 
conquit  des  titres  réels  à  la  reconnaissance  des  Belges  (5). 

Dès  l'année  même  de  son  avènement,  le  nom  de  Maxi- 
milien-Emmanuel  se  trouve  étroitement  lié  à  divers  faits 
intéressant  l'histoire  de  Namur. 

Entraîné  par  ses  vues  ambitieuses,  Louis  XIV  avait,  en 
1689,  déclaré  la  guerre  à  la  Hollande  et  à  l'Angleterre,  et 
peu  après  à  l'Espagne.  La  province  de  Namur  devint  aussi- 
tôt   le  principal  champ  clos  où  les  belligérants  vinrent 


(i;  Gachard,  Une  visite  aux  archives  et  à  la  bibliothèque  royales  de  Munich, 
dans  les  Bulletins  de  la  Commission  royale  d'histoire,  3c  série,  t.  VI,  p. 60. 

(2)  Le  portrait  lithographie  de  Ft-lecteur  de  Bavière  se  trouve  dans  Y  Histoire 
de  la  ville  de  Bruxelles,  par  Wauters,  tome  II,  page  123.  Il  existe  aussi,  peint 
à  l'huile, en  pied,  grandeur  naturelle,  au  musée  de  la  Société  archéologique  de 
Namur.  C'est  probablement  à  cette  toile  que  fait  allusion  l'extrait  du  compte  du 
domaine  cité  plus  loin,  page  191 ,  note  2. 

(3)  Sur  l'administration  de  Maximilien-Emmanuel  aux  Pays-Bas,  voyez  dans 
les  Bulletins  de  la  Commission  royale  d'histoire,  i"-*  série,  t.  XI.  un  travail 
de  M.  COREMANS  intitulé  :  Miscellanées  de  l'époque  de  Maximilien-Emmanuel, 
1692-1709,  notamment  aux  pages  669-672. 


(  170  ) 
vider  leurs  sanglantes  querelles  (1).  Mons  étant  tombé  le 
9  avril  1691  au  pouvoir  du  roi  de  France,  on  décida  de 
mettre,  dans  la  campagne  suivante,  le  siège  devant  Namur. 
Cette  ville  était  alors  gardée  par  une  garnison  hollandaise, 
car  la  cour  de  Madrid,  épuisée  d'argent,  était  dans  l'im- 
possibilité de  la  défendre  par  elle-même.  Le  26  mai  1692, 
dans  la  matinée,  Louis  XIV  parut  en  personne  devant  la 
place.  Ce  ne  fut  que  dans  les  premiers  jours  du  mois  de 
juin  que  l'électeur  de  Bavière  et  le  prince  d'Orange  purent 
se  mettre  en  marche  pour  la  secourir;  mais  le  maréchal 
de  Luxembourg  les  arrêta  sur  les  bords  de  la  Méhaigne 
avec  une  armée  d'observation,  et  ses  habiles  manœuvres 
permirent  à  Louis  XIV  de  mener  son  entreprise  à  bonne 
fin.  Le  prince  de  Barbanson,  gouverneur  de  la  ville,  capi- 
tula le  30  juin;  ce  fut  alors  que  Boileau  composa  son  ode 
célèbre  sur  la  prise  de  Namur  (2). 

Battus  le  29  juillet  de  l'année  suivante  à  Neerwinden, 
l'électeur  de  Bavière  et  le  prince  d'Orange,  devenu  Guil- 
laume IH,  roi  d'Angleterre,  s'apprêtèrent  à  prendre  une 
brillante  revanche;  durant  l'hiver  1694-1695,  ils  formèrent 
deux  puissants  corps  d'armée  dans  le  dessein  d'enlever 


(1)  Au  mois  de  juin  1689,  la  cavalerie  de  la  garnison  française  de  Dinant  vient 
piller  jusque  sur  les  Trienx  de  Salzhmes,  lez-Namur,  et  y  enlève  des  troupeaux. 
Elle  reprend  ensuite  la  route  de  Philippeville  à  travers  la  Marlagne.  Un  détache- 
ment de  la  garnison  de  Namur  attendait  les  pillards  aux  Brocleaux.  territoire  de 
Malonne;  il  tombe  sur  eux,  en  tue  plusieurs,  disperse  les  autres,  les  poursuit 
jusqu'au  manoir  et  ressaisit  le  butin  enlevé.  [Procédures  de  Malonne.) 

[%  La  garnison  française  laissée  à  Nanmr  fut  employée  à  réparer  et  à  agrandir 
les  travaux  de  fortification;  elle  reçut  de  nouvelles  pièces  d'artillerie  après  la  ba- 
taille de  Neerwinden.  Cette  même  année  1693,  Louis  XIV  vint  à  Namur  avec  le 
cardinal  de  Bouillon,  le  prince  de  Condé  et  toute  sa  cour.  «  On  y  vit  pour  lors,  dit 
Galliot.  Histoire  de  Namur,  t.  V,  p.  98,  la  plus  illustre  compagnie  qui  y  ait 
jamais  paru.  Le  roi  était  logé  au  gouvernement;  il  assista  à  un  Te  Deum  à  Saint- 
Aubain  et  assista  à  un  combat  d'échasseurs.  » 


(  171  ) 
Namur  à  la  France.  Le  2  juillet  1695  ils  campèrent  à 
Corroy-le-Chàteau,  et  le  lendemain  ils  se  présentèrent 
devant  Namur;  mais  leurs  opérations  ne  se  firent  pas  avec 
une  rapidité  telle  que  le  marquis  de  Boufflers  n'eût  le  temps 
de  se  jeter  avec  quelques  troupes  dans  la  place,  une  heure 
avant  son  investissement  complet.  L'électeur,  qui  avait 
sous  ses  ordres  le  général  Cohorn,  occupait  le  quartier 
entre  la  Sambre  et  la  Meuse,  avec  24  bataillons  et  20  esca- 
drons de  troupes  bavaroises  et  espagnoles  ;  jusqu'au 
4  août,  il  logea  à  l'abbaye  de  Malonne,  et  ensuite,  au  désert 
de  Marlagne  où  il  occupa  les  cellules  de  l'hospice.  Après 
deux  mois  d'un  siège  aussi  glorieux  pour  les  vaincus  que 
pour  les  vainqueurs,  et  dans  lequel  le  roi  d'Angleterre  et 
l'Électeur  exposèrent  plusieurs  fois  leur  vie,  la  place  capi- 
tula le  1"  septembre;  la  garnison,  réduite  de  16,000 
hommes  à  5,000,  sortit  par  les  brèches,  le  5  à  7  heures 
du  soir  (\).  Un  Te  Deum  solennel ,  chanté  ce  jour  même  à 
la  cathédrale  de  S*-Aubain,  et  auquel  assista  l'Électeur, 
attira  toute  la  population,  délivrée  de  terribles  et  conti- 
nuelles appréhensions,  et,  en  ce  temps  là, peu  sympathique 
aux  Français.  Le  soir,  des  tonnes  de  poix  enflammée,  sus- 
pendues à  deux  grands  arbres,  vinrent  illuminer  les 
façades  de  S'-Aubain  et  de  l'hôtel  du  comte  de  la  Motterie 
où  logeait  l'Électeur  (2). 


(i)  Voyez  ce  siège  raconté  dans  ses  plus  grands  détails  par  J.  Borgnet, 
Annales  de  la  Société  archéologique  de  Namur,  t.  Il,  pp.  321  et  suivantes, 
tome  V,  pp.  300  et  suiv.  La  ville  capitula  le  4  août.  Le  6,  à  midi,  les  Français,  au 
nombre  de  8,000  environ,  se  retirèrent  dans  le  château.  C'est  alors  que  l'Électeur 
quitta  son  quartier  de  Malonne  pour  s'installer  au  désert  de  Marlagne.  Voyez 
Jos.  Grandgagnage,  Le  désert  de  Marlagne,  dans  les  mêmes  Annales,  t.  I ,  et 
l'épître  dédicaloire,  à  Maximilien-Emmanuel,  du  Solitarius  loquens  sive  confe- 
rentiae  spirituales  habitae  a  religiosis  Carmelitis  discalceatis  in  eremo  S'«  Jo- 
seph in  Marlaniae  sylva  prope  Namurcum  commorantibus.  Liège,  4698,  in-4»' 

(2)  Comptes  de  la  ville  de  Namur,  1695. 


(  172  ) 

Cependant  le  maréchal  de  Villeroi  qui,  pendant  le  siège, 
s'était  en  vain  efforcé  de  porter  secours  à  la  garnison,  était 
allé  bombarder  Bruxelles  du  13  au  lo  août,  et  y  avait 
détruit  4,000  maisons.  L'Électeur  y  courut  aussitôt;  par  le 
courage,  la  prudence  et  le  dévouement  dont  il  lit  preuve 
en  celte  douloureuse  circonstance,  il  excita  l'admiration 
et  la  reconnaissance  des  bourgeois  de  Bruxelles;  et  lorsque 
l'ennemi  se  retira,  laissant  le  sol  jonché  de  ruines,  Maximi- 
lien  ne  se  contenta  pas  de  diriger  lui-même  les  travaux  de 
déblai  et  de  reconstruction  ,  il  mit  encore  à  contribution 
ses  États  de  Bavière  pour  aider  à  réparer  le  désastre  (1). 

La  paix  de  Ryswick,  signée  le  20  septembre  1697  entre 
la  France,  l'Angleterre,  l'Espagne  et  les  États  généraux, 
mettant  fin  aux  hostilités,  rendit  momentanément  le  calme 
à  l'Europe;  elle  restituait  à  l'Espagne  toutes  les  villes  et 
places  dont  Louis  XIV  s'était  emparé  dans  les  Pays-Bas 
depuis  le  traité  de  Nimègue. 

Charles  II,  voyant  la  tranquillité  rétablie,  institua  par 
testament,  pour  son  héritier  universel  à  tous  les  États  de 
la  monarchie  de  l'Espagne  et  des  Indes,  le  fils  de  Maximi- 
lien-Emmanuel,  le  prince  électoral  Ferdinand-Léopold  de 
Bavière,  né  à  Bruxelles  le  27  octobre  1692.  Cette  mesure 
fut  en  partie  déterminée  par  le  traité  de  partage  conclu  à 
la  Haye,  le  11  octobre  1698,  entre  la  France,  la  Grande- 
Bretagne  et  la  Hollande;  ces  puissances,  grandement  inté- 
ressées à  ce  que  les  divers  Étals  qui  avaient  autrefois  obéi 
à  Charles-Quint  ne  fussent   plus  réunis  sous  un  même 


(1)  Wauters,  Histoire  de  la  ville  de  Bruxelles,  t.  U,  p.  130.  Bulletins  de  la 
Commission  royale  d'histoire,  S^  série,  t.  VI,  p.  73. —  Le  9  juillet  1696,  le  roi 
d'Angleterre,  le  duc  de  Bavière  et  son  frère  Joseph-Clément  de  Bavière,  Électeur 
de  Cologne,  prince-évèque  de  Liège,  arrivèrent  à  Namur  avec  une  suite  nom- 
breuse, visitèrent  tous  les  ouvrages  de  la  ville  et  du  château,  et  retournèrent  le 
même  jour  à  leur  camp  de  Gembloux.  (Galliot,  t.  V.  p.  103.) 


(  173  ) 

sceptre,  se  flattaient, en  en  concertant  à  Tavance  le  démem- 
brement, d'avoir  prévenu  d'ardentes  compétitions  et  affermi 
pour  longtemps  le  repos  des  nations.  Mais  un  événement 
inattendu  vint  confondre  les  prévisions  de  la  prudence  hu- 
maine, en  même  temps  qu'il  brisait  les  espérances  de 
rÉIecteur  :  le  jeune  prince  Ferdinand-Léopold  mourut  à 
Bruxelles,  d'une  mort  assez  mystérieuse,  le  6  février 
1699(1).  Ce  malheur  anéantissait  les  droits  de  la  maison 
de  Bavière  à  la  couronne  d'Espagne,  car,  d'autre  part, 
Tarchiduchesse  Marie-Antoinette  était  morte  le  Î24  dé- 
cembre 1692  des  suites  de  ses  couches.  Profondément 
affecté,  Maximilien-Emmanuel  manifesta  d'abord,  sous 
l'influence  de  ses  premières  impressions,  l'intention  de 
renoncer  au  gouvernement  des  Pays-Bas.  Cette  faiblesse  ne 
dura  toutefois  qu'un  moment  ;  ses  aspirations  ne  firent  que 
changer  de  cours.  Mais,  à  partir  de  cette  époque,  on  con- 
state dans  le  caractère  de  ce  prince  une  transformation 
étrange.  Sa  politique,  jusqu'ici  ferme  et  droite,  devient  in- 
certaine et  changeante.  On  se  demande  d'abord  quels  sont 
les  motifs  qui  le  font  agir,  et  l'on  est  bientôt  obligé  de 
reconnaître  que  l'ambition  a  remplacé  le  désintéresse- 
ment comme  règle  de  sa  conduite.  Entraîné  dans  celte 
voie  trompeuse,  il  mène  pendant  dix  ans  une  vie  d'aven- 
tures, et  se  voit  enfin  déçu  dans  ses  espérances  (2). 

Charles  H,  survivant  à  son  héritier,  changea  ses  dispo- 


(1)  Voyez  dans  la  Revue  nationale  de  Belgique,  t.  XIII,  p.  i!29,  un  article  de 
M.  Théod.  Juste  intitulé  :  Le  gouverneur  général  des  Paijs-Bas  espagnols 
MaxiviilieyiEinmnnuel, électeur  de  Bavière. —  Voy.  aussi  les  Mémoires  du  comte 
de  Mérode-  W ester loo,  t.  I. 

i%)  iM.  COREMANS,  Bulletins  de  la  Commission  royale  d'histoire,  l^e  sér.,  t.  XI, 
p.  o89,  tâche  de  justifier  l'Électeur  d'avoir  abandonné  le  parti  de  l'Autriche  pour 
embrasser  celui  de  la  France. 


(174) 

sitions,  et,  par  leslamenl  du  2  octobre  1700,  désigna 
pour  recueillir  sa  succession ,  Philippe  duc  d'Anjou,  pelit- 
lils  de  Louis  XIV.  A  cette  nouvelle,  le  roi  de  France  refusa 
de  reconnaître  les  conventions  de  partage  auxquelles  il 
avait  pris  part,  et  lorsque  Charles  H  mourut  le  1"  no- 
Yen)bre  suivant,  il  se  fit  le  champion  des  droits  de  son 
petit-fils.  Le  duc  d'Anjou  fut  déclaré  roi  d'Espagne  le 
24  du  même  mois  à  Madrid  sous  le  nom  de  Philippe  V. 
Son  inauguration  comme  comte  de  Namur  eut  lieu  en 
1702. 

L'empereur  Léopold,  qui  avait  à  défendre  les  droits  de 
sa  maison  à  la  succession  espagnole,  ne  pouvait  voir  avec 
indifférence  la  couronne  de  Philippe  II  passer  à  la  maison 
de  Bourbon;  il  appréhendait,  avec  les  autres  États  de 
l'Europe,  que  Louis  XIV  ne  préparât  la  réunion  des  mo- 
narchies de  France  et  d'Espagne.  Les  deux  puissances 
maritimes,  poursuivant  le  but  qu'elles  croyaient  avoir 
atteint  par  le  traité  de  1698,  mais  qui  leur  échappait,  se 
rapprochèrent  de  l'Autriche  et  conclurent  avec  elle,  le 
7  septembre  1701,  le  traité  de  la  grande  alliance,  par 
lequel  elles  attribuaient  l'Espagne  et  les  Pays-Bas  à  l'ar- 
chiduc Charles,  fils  cadet  de  l'empereur.  Ce  fut  le  signal 
d'une  guerre  désastreuse  pour  la  France  qui  allait  essuyer 
de  cruelles  défaites,  et  pour  les  Pays-Bas  destinés  à 
devenir  de  nouveau  le  théâtre  de  la  lutte  formidable  que  la 
succession  d'Espagne  suscita  entre  Louis  XIV  et  Phi- 
lippe V,  d'une  part,  l'empereur  d'Autriche  soutenu  par  la 
Hollande  et  l'Angleterre,  d'autre  part. 

Dans  cet  immense  conflit,  Maximilien -Emmanuel  se 
vit  obligé  de  choisir  entre  le  parti  de  l'Autriche  auquel  il 
était  attaché  par  les  liens  du  sang  et  de  la  reconnaissance, 
et  celui  de  la  France  qui  faisait  miroitera  ses  yeux  l'appât 


(  173  ) 
d'une  couronne.  La  cour  de  Vienne  n'aurait  pas  éprouvé 
grande  difficulté  à  s'assurer  de  lui  si  l'état  délabré  de  ses 
finances  avait  permis  au  trésor  impérial  de  rembourser  à 
l'Électeur  les  sommes  considérables  avancées  par  lui  dans 
la  guerre  contre  les  Turcs;  mais  elle  n'avait  que  les  res- 
sources de  sa  diplomatie,  et  celles-ci  furent  insuffisantes. 
L'Électeur  se  jeta  dans  les  bras  de  la  France  et  fit  fêter 
splendidement  à  Bruxelles  l'avènement  de  Philippe  V 
comme  souverain  des  Pays-Bas  (i). 

Louis  XIV,  dont  les  ordres  devaient  être  exécutés  dans 
notre  pays  comme  s'ils  émanaient  de  la  cour  de  Madrid 
même,  lit  aussitôt  occuper  par  ses  troupes,  à  titre  d'auxi- 
liaires, les  places  où  les  Hollandais  tenaient  garnison. 
Cette  opération  se  fil  par  surprise  dans  la  nuit  du  5  février 
1701 ,  et  le  secret  des  mesures  prises  par  le  marquis  de 
Puységur,  d'accord  avec  l'Électeur,  fut  si  bien  gardé,  qu'à 
Namur,  où  les  Français  entrèrent  dans  le  châleau  par  la 
Marlagne,  on  fut  très-surpris,  le  matin  du  6  février,  de  les 
voir  circuler  dans  les  rues  avant  même  d'avoir  eu  vent  de 
leur  approche.  La  petite  troupe  hollandaise  s'estima  heu- 
reuse de  pouvoir  sortir  de  la  ville  au  lieu  d'être  faite  pri- 
sonnière de  guerre  (2). 


(4;  L'inauguration  de  ce  prince  comme  duc  de  Lothier,  de  Brabant  et  de  Lim- 
bourg  eut  lieu  à  Bruxelles  le  21  février  1702. 

(2j  Depuis  l'avènement  de  l'Électeur  à  la  souveraineté  des  Pays-Bas,  les  troupes 
d'Espagne  étaient  à  la  solde  de  la  France.  {Résolutions  du  conseil  d'État,  etc., 
fol.  58.)  L'évêque  de  Liège,  frère  de  l'Électeur,  ayant  aussi  pris  parti  pour  le  duc 
d'Anjou,  reçut  également,  malgré  l'opposition  du  baron  de  Méan,  grand  doyen  du 
chapitre  de  Saint-Lambert,  des  Français  dans  ses  places,  sous  le  nom  de  troupes 
du  cercle  de  Bourgogne.  (Bouille,  Histoire  de  Liège,  t.  III,  p.  5ii.)  Ne  se 
croyant  plus  en  sûreté  dans  sa  ville  de  Bonn,  ni  même  peut-être  à  Liège,  il  s'était 
retiré  à  Namur  où  il  logeait  dans  le  palais  du  gouverneur  absent,  et  où  il  tâchait 


(  176  ) 

Les  nécessités  de  la  guerre  exigeaient  la  présence  de 
l'électeur  de  Bavière  dans  ses  États  (fAllemagne  qu'il 
n'avait  plus  visités  depuis  neuf  ans.  L'intérêt  de  la  France 
s'accordait  sur  ce  point  avec  celui  de  Maximilien,  et 
Louis  XIV  lui  fit  savoir  de  remettre  le  commandement 
général  des  Pays-Bas  au  marquis  de  Bedmar.  Toutefois, 
avant  de  quitter  la  Belgique,  Maximilien  alla  conclure  à 
Versailles,  le  9  mars  1701  (l),  un  traité  d'alliance  offensive 
et  défensive  par  lequel  il  prenait  envers  la  France  l'enga- 
gement de  combattre  tous  ceux  qui  troubleraient  Phi- 
lippe V  dans  la  possession  de  ses  États.  De  son  côté 
Louis  XIV,  désireux  de  conserver  un  allié  aussi  puissant 
que  l'Électeur,  lui  promit  la  continuation  de  ses  appointe- 
ments de  gouverneur  général  des  Pays-Bas,  et  lui  fit  en- 
tendre qu'il  obtiendrait  l'hérédité  de  ce  gouvernement  dans 
sa  famille. 

Maximilien  partit  de  Bruxelles  le  25  mars  1701.  Le 
17  juin  de  l'année  suivante,  il  recevait  du  roi  de  France  la 
garantie  formelle  que  si,  dans  le  cours  de  la  guerre,  il 
était  dépouillé  de  ses  États  de  Bavière,  Philippe  V  lui  cé- 
derait les  Pays-Bas  pour  en  jouir  en  toute  souveraineté  et 
propriété  jusqu'à  ce  qu'il  eût  intégralement  récupéré  ses 


d'entretenir,  par  des  fêtes,  la  popularité  de  son  frère.  Le  19  décembre  1702,  les 
Namurois  lui  donnent  le  divertissement  d'une  lutte;  les  lutteurs,  représentant  des 
géants,  étaient  montés  sur  des  échasses;  ils  étaient  trente  contre  trente,  les  uns 
habillés  de  rouge,  les  autres  de  blanc.  Chaque  parti  avait  ses  trompettes  et  ses 
tambours.  Son  Altesse  leur  donna  cent  ducatons.  [Bulletins  de  la  Commission 
royale  d'histoire,  Irc  série,  t.  XI,  p.  58o.)  M.  Gachard  [ibidem,  3t"  série,  VI,  98) 
a  publié  une  lettre  curieuse  sur  les  passe-temps  de  l'évèque  de  Liège  pendant  son 
séjour  à  Dinant. 

(l)  Le  13  février  1701 ,  un  traité  semblable  avait  été  conclu,  à  Bruxelles,  entre 
Louis  XIV  et  l'évêquc  de  Liège. 


(  177  ) 
domaines  héréditaires.  Par  des  articles  secrets,  signés  le 
7  novembre  suivant,  Louis  XIV  s'engageait  en  outre  à  ob- 
tenir de  son  petit-fils  la  cession  des  Pays-Bas  en  faveur 
de  l'Électeur,  avec  faculté  pour  celui-ci  de  les  unir  à  ses 
États  de  Bavière  ou  de  les  ériger  en  royaume  indépendant 
pour  son  second  fils  (1). 

Pendant  que  Maximilien  guerroyait  en  Allemagne  pour 
le  compte  des  rois  de  France  et  d'Espagne,  Philippe  V  en- 
voya, au  mois  de  mai  1702,  son  frère,  le  duc  de  Bour- 
gogne, avec  le  titre  de  vicaire  général  aux  Pays-Bas,  muni 
par  conséquent  d'un  pouvoir  supérieur  à  celui  de  l'Électeur. 
Celui-ci  se  plaignit  aussitôt,  et  comme  il  menaçait  de  ne 
pas  signer  l'accord  du  17  juin  1702,  la  patente  de  vicaire 
général  fut  retirée  au  duc  de  Bourgogne  pour  lui  être  con- 
férée le  10  septembre  1702,  le  jour  même  où  il  s'emparait 
de  la  ville  d'Ulm  (2). 

Dans  la  lutte  qui  se  poursuivait  entre  l'Empire  et  la 
France  (3),  cette  dernière  puissance,  à  côté  de  quelques 


(1)  Gachard,  Recueil  des  ordonnances  des  Pays-Bas  autrichiens,  3^  série, 
tome  II,  p.  429.  Bulletins  de  la  Commission  royale  d'histoire,  3^  série,  t.  VI, 
pp.To,  note,  et  94.  —  Maximilien  avait  épousé  en  secondes  noces  une  fille  de  Jean 
Sobieski,  roi  de  Pologne. 

(2)  Le  8  mai  1702,  on  arrêta  à  Namur  quelques  personnes  impliquées  dans  une 
conspiration  qui  avait  pour  but  de  faire  proclamer  dans  cette  ville  l'archiduc 
Charles,  souverain  des  Pays-Bas,  et  d'y  introduire  des  troupes  ennemies.  Leur  chef 
eut  la  tête  tranchée  le  12  août  suivant  sur  la  place  Saint-Remy;  cette  tête  resta 
plantée  au  bout  d'une  pique  sur  un  bastion  du  château  jusqu'au  10  octobre. 
[Bull,  de  la  Comm.roy.  d'hist.,\^^  série,  t.  XI,  p.  579;  Galliot,  t.  V,  p.  106.)  Les 
alliés  paraissaient  toujours  vouloir  s'emparer  de  Namur  par  un  coup  de  main. 
Le  9  et  le  13  avril  1704  furent  pendus,  hors  la  porte  Saint- Nicolas,  un  capitaine  et 
deux  hommes  convaincus  d'avoir  voulu  livrer  la  ville  aux  ennemis  et  incendier  ICvS 
magasins  au  moyen  de  fusées.  [Bull,  cité,  p.  615.. 

(3)  Le  12  septembre  1703,  Charles  VI,  second  fils  de  l'empereur  Léopold,  se  fit 
proclamer  roiJd'Espagne  à  Vienne,  sous  le  nom  de  Charles  III. 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  12 


(  178  ) 
brillantes  victoires  (i),  éprouva  de  cruels  revers  (2).  Le 
13  août  1704,  Mariborough,  les  princes  Eugène  de  Savoie 
et  Louis  de  Bade  mirent  en  déroute  les  troupes  françaises 
et  bavaroises  à  Hochstedt;  à  la  suite  de  ce  désastre,  Maxi- 
milien-Emmanuel,  forcé  d'abandonner  ses  Étals,  mis  au 
ban  de  l'Empire  (5),  vint  reprendre  le  gouvernement  des 


(1)  Le  8  juillet  1703,  on  chanta  un  Te  Deum  et  on  fit  de  grandes  réjouissances 
à  Namur  à  l'occasion  de  la  victoire  remportée  par  l'armée  des  deux  couronnes  sur 
celle  des  Hollandais  à  Eckeren.  Le  6  octobre,  après  la  défaite  des  Impériaux  sur 
le  Danube,  il  y  eut  à  Namur  une  fête  splendide  dont  l'évéque  de  Liège  fit  tous  les 
frais.  On  éleva  quatre  arcs  de  triomphe  en  l'honneur  des  rois  Louis  XIV  et  Phi- 
lippe V  et  des  deux  Électeurs,  et  on  jeta  au  peuple  une  prodigieuse  quantité  de 
médailles  d'argent  représentant  les  traits  de  Maximilien  avec  cette  inscription  : 
Lœsœ  (d'autres  disent  ultimus,  ce  qui  détruit  le  chronogramme)  LIbertatls  ger- 
ManlCœ  Defensor,  et  où  on  lui  donnait  les  titres  de  roi  de  Bohême,  de  Franconie 
et  de  Souabe.  [Bull,  de  la  Comrn.  roy.  d'hist.,  d'e  série,  t.  XI,  p.  607.) 

(2j  Au  mois  de  janvier  1704,  le  bruit  courut  que  les  Alliés  se  disposaient  à 
bombarder  Namur  où  se  trouvaient  les  principaux  magasins  des  deux  couronnes. 
M.  de  Ximenès,  qui  commandait  la  ville,  renforça  sa  garnison  et  déjoua  les  projets 
de  l'ennemi.  Plus  tard,  le  l^r  mai,  l'évéque  de  Liège  y  passa  en  revue  neuf  esca- 
drons, et  assista  le  soir  à  un  banquet  magnifique,  donné  en  plein  air,  au  son  de  la 
musique  et  à  la  lumière  des  flambeaux.  Cette  fête,  célébrée  avec  un  éclat  inouï, 
ne  fut  terminée  qu'à  dix  heures.  {Bull,  cité,  p.  616.)  Pendant  que  les  Alliés  bat- 
taient les  Français  à  Hochstedt,  le  comte  de  Nassau-Ouwerkerke,  général  des 
troupes  hollandaises  dans  les  Pays-Bas,  fit  une  expédition  contre  Namur.  Ximenès 
elle  marquis  de  Bedmar  prirent  leurs  dispositions  pour  soutenir  le  siège.  L'ingé- 
nieur de  Trognée  avait  promis  à  Ouwerkerke  de  réduire  Namur  en  cendres  en 
vingt-quatre  heures.  Il  ouvrit  le  feu  le  26  juillet  à  quatre  heures  du  matin.  Pen- 
dant trois  jours  les  Hollandais  lancèrent  des  bombes  et  des  boulets  rouges  sans 
faire  beaucoup  de  mal.  Enfin,  canonnés  eux-mêmes  par  les  batteries  françaises,  ils 
quittèrent  la  place  le  29  à  la  pointe  du  jour.  «  J'ai  ouï  dire  à  un  officier  hollandais, 
dit  un  contemporain,  que  la  question  n'était  pas  encore  bien  décidée,  à  savoir  si 
les  Hollandais  avaient  bombardé  Namur,  ou  s'ils  avaient  estes  eux-mêmes  bom- 
bardés devant  Namur.  »  {Annales  de  la  Soc.  archéol.  de  Namur,  t.  II,  p.  32o,  et 
t.  V,  p.  461  et  suiv.) 

(3)  Après  la  bataille  de  Schellenberg  (2  juillet  1704) , remportée  par  les  Alliés, 
et  qui  leur  ouvrit  la  Bavière,  le  comte  de  Wratislaw,  au  nom  de  l'empereur, 
avait  entamé  une  négociation  avec  Maximilien  pour  l'engager  à  rompre  son 
alliance  avec  la  France.  L'Électeur  était  sur  le  point  de  souscrire  à  un  arrangement, 
lorsqu'il  apprit  que  30,000  hommes  venaient  à  son  secours.  A  la  suite  de  la  bataille 


l  179  ) 
Pays-Bas.  Il  fit  sa  rentrée  à  Bruxelles  le  i"  octobre  (1). 
Afin  d'empêcher  les  alliés  de  transporter  dans  nos  pro- 
vinces leurs  armes  victorieuses  en  Allemagne,  Louis  XIV 
y  envoya,  en  1705,  le  maréchal  de  Villeroi,  pour  servir 
sous  les  ordres  de  l'Électeur  (2).  Le  23  mai  1706,  jour  de 
Pentecôte,  Mariborough  les  défit  complètement  près  de 
Ramillies,  village  sur  les  l'rontières  de  la  province  de  Na- 
mur,  dans  une  bataille  où  Maximilien  fit  des  prodiges  de 
valeur  et  révéla  un  véritable  talent  stratégique.  Celte  dé- 
faite entraîna  pour  les  deux  couronnes  la  perte  de  presque 
tous  les  Pays-Bas  catholiques;  les  Alliés  s'emparèrent  du 
Brabant  et  des  Flandres,  dont  les  Français  évacuèrent 
toutes  les  places,  et  où  Charles  III  fut  aussitôt  reconnu 
comme  souverain.  Les  seules  provinces  qui  restèrent  au 
pouvoir  de  Philippe  V,  furent  celles  de  Namur  et  de 
Luxembourg. 

de  Hochstedt,  l'Électeur,  obligé  de  quitter  ses  États,  chargea,  le  47  août,  sa  femme 
du  gouvernement,  l'autorisant  à  traiter  avec  ses  ennemis.  L'Électrice  capitula  le 
7  novembre,  remit  à  l'empereur  toutes  ses  places,  avec  artillerie  et  munitions ,  et 
licencia  son  armée.  (Schoell,  Cours  d'histoire  des  États  européens,  l.  XXVIII, 
pp.  348,  353.) 

(1)  Gachard,  Rec.  des  ordoun.  des  Pays-Bas  autrichiens ,  3^  série,  1. 1,  pré- 
face, p.  XLIX.  Ce  même  jour  les  États  de  Namur  envoient  deux  de  leurs  membres 
à  Bruxelles  pour  complimenter  l'Électeur. 

(2)  Le  23  mai  170o,  l'évéque  de  Liège  arriva  à  Namur  entre  sept  et  huit  heures 
du  soir  pour  assister  le  lendemain,  dimanche,  à  la  bénédiction  de  la  chapelle  de 
Notre-Dame  de  Lorette  qu'il  avait  fait  ériger  dans  l'église  des  Croisiers.  Il  fut 
reçu  au  bruit  du  canon  et  complimenté  aux  portes  de  la  ville.  Le  25,  il  alla 
visiter  ses  troupes  campées  près  du  village  de  Wasseige,  revint  le  soir  à  Namur, 
et  partit  le  lendemain  pour  Bruxelles.  Le  28,  son  frère  Maximilien-Emmanuel 
arrive  à  son  tour  à  Namur,  inspecte  les  travaux  du  fort  et  se  rend ,  le  29 ,  au  camp 
près  de  Huy.  (Galliot,  t.  V,  p.  iiO.)  Cette  ville  tomba,  le  10  juin,  au  pouvoir  de 
l'Électeur  et  du  maréchal  de  Villeroi,  qui  s'emparèrent  ensuite  de  Liège.  L'évéque 
Joseph-Clément  vint  une  dernière  fois  à  Namur,  le  18  mai  1706,  arrivant  de  Dinant 
avec  un  brillant  cortège.  11  fit  son  entrée  au  bruit  du  canon,  alla  loger  au  gouver- 
nement, et  assista  le  soir  au  salut  dans  la  chapelle  qu'il  avait  fondée  aux 
Croisiers.  [Ibid.,  p.  1 16.) 


(  180  ) 

Obligé  de  quitter  Bruxelles,  Maximilien  alla  établir  son 
gouvernement  à  Mons,  où  il  arriva  le  19  octobre  et  où  le 
suivirent  les  plaisirs  dont  il  aimait  à  s'entourer.  Pendant 
trois  ans,  la  France  parvint  à  l'y  maintenir,  ce  qui  ne  lais- 
sait pas  que  d'inquiéter  la  cour  de  Bruxelles  :  le  26  novem- 
bre 1708  il  alla  même  bombarder  cette  ville  qu'il  avait 
autrefois  tenté  de  proléger  contre  un  pareil  malheur.  Mais 
le  20  octobre  1709  les  alliés  s'emparèrent  de  Mons,  et 
Maximilien  se  retira  en  France;  à  partir  de  ce  moment  il 
cessait  réellement  d'être  gouverneur  des  Pays-Bas. 

Cependant,  depuis  que  Maximilien-Emmanuel  avait  été 
dépouillé  de  ses  États  de  Bavière  par  les  alliés,  il  ne  ces- 
sait de  réclamer  la  cession  en  sa  faveur  des  Pays-Bas 
comme  cela  lui  avait  été  formellement  promis  par  les  rois 
de  France  et  d'Espagne  (i). 

Appuyé  par  la  cour  de  Versailles,  il  éprouvait  de  la 
résistance  de  la  part  de  celle  de  Madrid  qui  ne  pouvait  se 
décider  à  perdre  une  possession  attachée  depuis  deux  siè- 
cles à  l'Espagne.  Le  26  mai  1711,  l'Électeur  eut  une  con- 
férence intime  avec  Louis  XIV  (2),  et  ce  fut  sans  doute  à  la 
suite  des  promesses  faites  dans  celte  entrevue  que  le 
grand  roi  obtint  enfin  le  consentement  verbal  de  son  petit- 
fds  à  céder  à  Maximilien  la  souveraineté  de  ce  que  l'Es- 


(1)  Le  17  avril  1711 ,  mourut  sans  postérité  l'empereur  Joseph  I"",  successeur 
de  Léopold,  et  Charles  III  succéda  à  son  frère  aîné  sous  le  nom  de  Charles  VI 
Cet  événement,  qui  allait  rétablir  la  réunion  de  l'empire  à  la  monarchie  espa 
gnole,  vint  déranger  les  calculs  de  la  politique.  L'Angleterre  et  la  Hollande  qui 
jusque-là,  avaient  défendu  les  intérêts  de  Charles  111,  brisèrent  l'alliance  de  1701 
et  la  France,  abattue  par  ses  nombreux  revers,  se  rapprocha  de  ces  deux  puis 
sauces.  Bientôt  on  convint  de  conférences  el  un  congrès  général  entre  toutes  les 
parties  belligérantes  fut  convoqué  à  Utrecht  pour  le  1;2  janvier  \H± 

(2)  Mémoires  du  duc  de  Saint-Simun,  édit.  de  I8o7,  t.  VI,  pp.  99,  101. 


(  181  ) 
pagne  possédait  encore  dans  les  Pays-Bas;  il  fut  toutefois 
convenu  que  les  quatre  places  de  Namur,  Luxembourg, 
Charleroi  et  Nieuport  continueraient  à  être  gardées  par  les 
troupes  françaises  sous  l'autorité  de  leurs  chefs  ;  Maximi- 
lien  aurait  seulement  le  droit  de  faire  prêler  serment  aux 
magistrats  des  villes  et  d'y  percevoir  les  revenus  (1). 

C'est  ainsi  que  de  simple  gouverneur  de  la  ville  et  pro- 
vince de  Namur  qu'il  était  auparavant,  Maximilien-Emraa- 
nuel  en  devint  le  véritable  souverain. 


II. 


Le  désir  de  remplir  ses  promesses  ne  fut  pas  le  seul 
motif  qui  détermina  Philippe  V  à  abandonner  une  partie 
de  ses  États.  On  peut  croire  que  la  considération  des 
grands  sacrilices  imposés  à  l'Espagne  pour  défendre  les 
Pays-Bas  contre  la  France,  l'obligation  d'en  faire  de  plus 
grands  encore  pour  arracher  aux  alliés  la  partie  envahie 
de  ces  provinces,  et  enfin  sa  confiance  dans  la  fidélité, 
maintenant  éprouvée,  de  l'Électeur,  influèrent  beaucoup 
sur  sa  détermination. 

Chose  étrange  cependant!  Pas  un  document  écrit  ne 
consacra,  du  moins  immédiatement,  une  cession  aussi 
importante  que  celle  de  la  souveraineté  des  Pays-Bas; 
aucun  acte  solennel  ne  fut  dressé;  point  de  conditions, 
point  de  réserves.  On  ignore  même  comment  l'Électeur 
fut  informé  qu'il  venait  de  recevoir  une  couronne  et  au- 
torisé à  prendre  possession  de  ses  nouveaux  États.  Cette 


(i)  Gachard,  Recueil  des  ordonn.  des  Pays-bas,  3^  série,  t.  II,  p.  36o,  note. 


(  482  ) 

autorisation  fut-elle  verbale?  Émana-t-elle  de  Louis  XIV 
ou  de  Philippe  V?  On  ne  le  sait  (1). 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  bruit  de  la  cession  ne  tarda  pas  à 
parvenir  à  Namur.  Il  y  excita  d'autant  plus  d'intérêt  que, 
par  suite  de  l'invasion  étrangère,  l'Électeur  ne  pouvak 
faire  reconnaître  son  autorité  que  dans  cette  province  et 
dans  celle  de  Luxembourg,  et  que  Maximilien  comptait, 
disait-on,  établir  le  siège  de  son  gouvernement  à  Namur. 

Dès  le  17  juin  1711 ,  les  États,  informés  de  cette  déci- 
sion, se  préoccupent  de  l'installation  du  nouveau  souve- 
rain et  ordonnent  des  changements  et  des  réparations  à 
l'hôtel  du  roi  «  pour  être  terminés  dans  douze  ou  quinze 
jours  (2).  »  Le  2o,  les  députés  des  trois  Ordres  délibèrent 
sur  la  réception  à  faire  à  l'Électeur.  Il  est  probable  que 
l'opportunité  d'une  cérémonie  y  fut  contestée,  car  dans 
une  seconde  séance  qui  eut  lieu  l'après-midi  du  même 
jour,  il  fut  décidé  que  l'on  attendrait,  pour  en  discuter  le 
programme,  une  notification  officielle  de  l'avènement 
de  Maximilien  au  trôiie  des  Pays-Bas;  que,  cependant, 
les  députés  des  deux  premiers  Ordres  écriraient  à  leur 
collègue ,  le   marquis    de   Roisin ,   à   Compiègne ,   pour 


(1)  On  ne  peut  admettre,  en  effet,  que  Maximilien  aurait  pris  possession  des 
Pays-Bas  sur  la  simple  parole  donnée  par  Louis  XIV,  sans  avoir  obtenu  le  con- 
sentement de  la  Gourde  Madrid.  (Voy.  Louville,  Mémoires  secrets,  t.  II,  et 
l'Europ.  Mercurius  de  1711.) 

(2)  «  Démolir  entièrement  un  balcon  regardant  sur  la  cour,  réparer  un  balcon 
deseur  la  terrasse  et,  au-dessus,  une  belle  balustrade  peinturée  à  l'huile  couleur 
de  perles;  faire  une  muraille  d'alignement  à  l'angle  de  la  brasserie  des  religieuses 
jusqu'à  la  tour  du  Gouvernement;  établir  des  potagers  à  gauche  de  la  cheminée; 
item,  4o0  pieds  de  joniiers,  etc.  »  [Comptes  du  domaine,  1711,  fol.  271.)  Pendant 
douze  jours,  une  vingtaine  de  femmes  allemandes,  payées  à  raison  de  10  sois  par 
jour,  et  six  soldats,  recevant  do  sols  par  jour,  sont  employés  à  mettre  l'hôtel  en 
état;  les  soldats  notamment  «  dérodent  les  herbes  du  pavé  de  la  Cour  depuis  l'en- 
trée jusqu'au  donjon.  »  [Ibid.,  fol.  227  v»,  278.) 


(  183) 
le  prier  de  les  informer  si  Son  Altesse  Électorale  vien- 
drait bientôt  à  Nainur  prendre  possession  de  sa  souverai- 
neté «  comme  le  bruit  en  courait  »  (1).  Ce  fut  sans  doute 
pour  répondre  à  celte  lettre,  que  l'Électeur  envoya  une 
dépêche  au  comte  de  Saillant,  lieutenant  général  des 
armées  de  S.  M.  T.  C.  et  commandant  les  troupes  des  deux 
couronnes  à  Namur,  par  laquelle  il  l'informait  que  S.  M.  C. 
lui  avait  fait  cession  des  Pays-Bas,  et  qu'il  arriverait  à 
Namur  le  6  juillet,  vers  les  4  heures  de  l'après-midi;  il 
exprimait  le  désir  de  n'être  l'objet  d'aucune  cérémonie  à 
son  entrée  dans  IVamur  :  l'évêque  et  son  clergé  l'introdui- 
raient dans  la  cathédrale  Saint-Aubain,  oij  il  se  rendrait 
directement;  après  le  Te  Dennij  il  recevrait  à  la  Cour  les 
compliments  des  corps  politiques  et  judiciaires  de  la  ville. 
Une  lettre  à  peu  près  pareille  fut  adresée  à  l'évêque;  les 
autres  autorités  furent  averties  verbalement. 

Cette  prise  de  possession  d'un  État  non  moins  indépen- 
dant qu'un  royaume  était  bien  modeste  pour  un  homme 
aussi  ami  du  faste  et  du  cérémonial  que  l'Électeur.  Se  trou- 
vait-il gêné  de  ne  pas  présenter  ses  lettres  de  souverai- 
neté sans  lesquelles,  suivant  le  droit  constitutionnel,  on 
n'était  pas  obligé  de  le  reconnaître?  Il  pouvait  ignorer,  en 
effet,  dans  quelles  dispositions  on  se  trouvait  à  son  égard  à 
Namur;  d'autre  part,  l'entrée  en  jouissance  sans  acte  de 
fîession  régulière  était  chose  au  moins  singulière.  Sans 
doute  il  restait  là  encore  certains  obstacles  à  vaincre  ou 
certains  scrupules  à  surmonter.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  faut 
avouer  que  l'absence  de  titre  authentique  était  de. nature 
à  rendre  la  position  de  l'Électeur  assez  délicate. 


d]  Registres  des  Èiats,  n»  IX,  fol.  168,  et  n°  XXXV,  fol.  85. 


(  i84  ) 

Cependant  on  faisait  des  préparatifs  à  Namur  pour  le 
recevoir.  Dix  jours  durant,  toute  une  légion  d'ouvriers  fut 
employée  jour  et  nuit  à  mettre  dans  un  état  convenable  les 
appartements  qui  lui  étaient  destinés  à  la  Cour.  Ce  qu'on 
désignait  alors  sous  ce  nom,  demeure  ordinaire  des  gou- 
verneurs de  Namur,  était  un  groupe  de  bâtiments  très- 
considérable,  avec  des  cours  immenses,  plusieurs  magnifir 
ques  jardins  d'agrément  ornés  de  fontaines,  des  potagers 
et  des  dépendances  dont  l'ensemble  formait  une  résidence 
véritablement  royale  (i). 

Le  6  juillet,  jour  fixé  par  Maximilien  pour  faire  son 
entrée,  son  frère  Joseph-Clément  de  Bavière,  électeur  de 
Cologne,  prince-évêque  de  Liège,  arriva  à  Namur  vers 
3  heures,  avec  une  suite  nombreuse  (2).  L'évêque  et  son 
clergé,  la  noblesse,  les  corps  du  conseil  provincial  et  du 
magistrat,  exacts  au  rendez-vous  qui  leur  avait  été  donné, 
se  trouvaient  à  Saint-Aubain  à  4  heures.  Ce  ne  fut  toute- 
fois qu'à  iO  72  heures  que  Maximilien  entra  dans  Namur 
par  la  porte  de  Buley,  au  bruit  de  tous  les  canons  des  rem- 
parts de  la  ville  et  du  château,  mais  au  milieu  d'une  ob- 
scurité profonde,  car  le  magistrat  et  les  habitants,  croyant 
qu'il  arriverait  en  plein  jour,  n'avaient  pas  fait  de  prépara- 
tifs pour  illuminer  les  maisons  sur  son  passage.  L'Électeur 
alla  directement  à  la  cathédrale,  s'agenouillla  quelques 
moments  sur  un  prie-Dieu  disposé  à  la  porte,  et  fut  en- 
suite introduit  par  l'évêque  dans  l'église  pour  assister  au 


(i)  Il  existe  deux  plans  manuscrits  de  l'ancien  hôtel  des  gouverneurs,  avec 
légendes  explicatives,  l'un  aux  archives  de  l'État,  l'autre  au  musée  de  la  Société 
archéologique.  On  conserve  aussi  dans  ce  dernier  dépôt  deux  petites  gravures  re- 
présentant la  vue  des  bâtiments. 

(2)  On  lui  présenta  les  grands  vins  à  son  arrivée,  et  il  prit  son  logement  à  l'hôtel 
du  marquis  d'Aiseau,  habité,  au  temps  de  Galliot.  par  M">e  de  Bioux. 


(  185  ) 
Te  Deum,  qui  fut  chanté  en  présence  d'une  foule  nom- 
breuse que  la  curiosité  avait  tenue  sur  pied. 

Après  la  cérémonie,  et  pendant  que  des  flambeaux  brû- 
laient en  signe  de  réjouissance  devant  les  maisons  des 
corps  exempts  (1),  Maximilien  reçut  dans  ses  appartements 
les  supérieurs  des  ordres  religieux,  la  noblesse,  le  Conseil 
provincial  et  le  Magistrat,  qui  le  félicitèrent  sur  son  heu- 
reuse arrivée  à  Namur  ;  mais  personne  ne  fit  allusion  à  la 
souveraineté  des  Pays-Bas  dont  on  n'avait  été  informé  ni 
par  écrit  ni  d'aucune  manière  officielle.  Ce  silence  frappa 
sans  doute  l'Électeur  qui,  après  avoir  reçu  ces  hommages, 
déclara  aux  personnes  présentes  que  le  roi  d'Espagne  lui 
avait  fait  cession  absolue  des  Pays-Bas.  Les  États,  ayant 
délibéré  le  lendemain  dans  le  lieu  de  leurs  réunions,  se  dé- 
cidèrent à  aller  faire  à  Maximilien  un  second  compliment 
sur  cette  souveraineté;  les  corps  du  Conseil  et  du  Magis- 
trat s'en  abstinrent. 

Deux  jours  après,  8  juillet,  la  ville  présenta  aux  deux 
princes-électeurs,  devenus  souverains  de  deux  États  voi- 
sins, le  spectacle  d'un  combat  d'échasses.  Ce  divertissement 
populaire  et  si  éminemment  namurois,  se  donnait  d'ordi- 
naire sur  la  place  Saint-Remy;  il  eut  lieu  cette  fois  dans 
l'enceinte  même  du  palais  (2).  Le  1 1 ,  jour  anniversaire  de  la 
naissance  de  Maximilien,  le  prince  entendit  la  messe  chan- 
tée par  son  frère  dans  l'église  des  Croisiers,  puis  assista, 
dans  l'après-midi ,  avec  toutes  les  personnes  de  sa  cour  et 
de  celle  du  prince-évèque  de  Liège,  à  une  nouvelle   fête 


(1)  «  Au  lieu  de  tonnes  lerquées  qu'il  était  d'usage  de  brûler  devant  les  mai- 
sons des  corps  exempts  dans  les  réjouissances  publiques.  »  [Recez  du  magistrat 
de  Natnur.) 

(2)  Jules  Borgnet.  Recherches  sur  les  anciennes  fêtes  namuroises,  dans  les 
Mémoires  in-4°  de  l'Académie,  t.  XXVIl. 


(  186  ) 
tjui  lui  fut  offerte  par  le  Magistrat  de  la  ville,  consistant 
en  une  joute  sur  la  Basse-Sambre  (1),  près  du  contluent 
de  cette  rivière  et  de  la  Meuse.  Un  pont  de  bateaux,  garni 
sur  toute  sa  longueur  de  guirlandes  de  fleurs  et  de  mais  de 
verdure,  ayant  son  point  de  départ  à  VAplé  (ancien  marché 
au  poisson)  et  passant  sous  la  seconde  arche  du  pont  de 
Sambre,  conduisit  les  illustres  personnages  à  une  estrade 
élevée  sur  deux  bateaux  amarrés  près  du  grand  moulin; 
une  sorte  de  cabine,  dont  la  charpente  était  dissimulée 
sous  des  branchages,  des  bannières  et  des  fleurs,  reçut 
la  foule  des  seigneurs  et  des  dames  de  distinction  qui 
faisaient  partie  de  leur  suite. 

Après  avoir  assisté  à  ce  jeu  qui,  six  ans  plus  tard,  devait 
intéresser  si  vivement  le  czar  Pierre  le  Grand,  les  deux 
princes  furent  encore  conviés  à  un  autre  spectacle. 
Les  bateaux  qui  avaient  servi  de  pont  ayant  été  enlevés, 
ceux  qui  portaient  Teslrade  descendirent  la  Sambre  et  arri- 
vèrent sur  la  Meuse  en  face  des  Récollets  (aujourd'hui  hos- 
pice d'Harscamp)  où  un  feu  d'artifice  fut  tiré  au  bruit  des 
canons  du  rempart.  A  dix  heures,  les  princes  et  leur  suite 
descendirent  de  bateau  en  Gravière,  où  les  attendaient  les 


(1)  «  Deux  escadres,  composées  chacune  de  six  nacelles  ornées  de  banderolles 
et  portant  des  couleurs  différentes,  se  rangeaient  aux  deux  extrémités  du  bassin 
ou  de  la  basse  Sambre.  Chaque  nacelle  était  montée  par  six  hommes ,  savoir  : 
quatre  rameurs,  un  tambour  et  le  jouteur.  Ce  dernier,  entièrement  vêtu  de  toile 
bleue,  avait  des  nœuds  de  rubans  rouges  aux  genoux,  aux  poignets,  aux  coudes  et 
aux  épaules,  et  portait  un  bonnet  blanc  orné  d'une  cocarde  rouge.  Debout  sur  une 
espèce  de  tillac,  il  avait  pour  armes  défensive  et  offensive,  un  plastron  d'osier  qui 
lui  couvrait  la  poitrine,  et  une  longue  lance  dont  le  fer  était  remplacé  par  un 
bouton  plat.  Au  signal  donné  par  trois  fanfares  de  timbales  et  de  trompettes,  les 
deux  escadres  s'avançaient  l'une  contre  l'autre  de  toute  la  vitesse  des  rames  et, 
au  moment  où  elles  venaient  à  se  choquer,  le  jouteur  de  chaque  nacelle  s'effor- 
çait, à  l'aide  de  sa  lance,  de  culbuter  dans  l'eau  le  champion  qui  lui  était  opposé. 
{Ibidem.)  \  ^ 


(187) 

carrosses  de  la  cour,  et  retournèrenl  au  palais  par  le  mar- 
ché de  Saint-Remy  et  la  rue  de  la  Croix;  sur  leur  passage, 
les  maisons  étaient  illuminées,  sfiivant  l'usage,  par  des 
chandelles  placées  à  toutes  les  fenêtres  et  par  un  grand 
nombre  de  flambeaux  distribués ,  aux  frais  de  la  ville ,  aux 
membres  des  corps  privilégiés. 

Le  lendemain,  12  juillet,  dans  la  matinée,  le  Conseil 
provincial  et  le  Magistrat,  qui  s'étaient  abstenus  de  compli- 
menter l'Électeur  au  sujet  de  son  avènement  au  royaume 
des  Pays-Bas,  reçurent  chacun  une  lettre  par  laquelle 
Maximilien  leur  notifiait  officiellement  que  le  roi  d'Espagne 
lui  avait  cédé  ces  provinces,  et  leur  ordonnait  de  le  recon- 
naître comme  souverain:  le  prince  ajoutait  qu'il  comptait 
sur  leur  fidélité,  leur  zèle  et  leur  attachement  à  sa  per- 
sonne, les  assurant,  en  retour,  de  la  bienveillance  et  de  l'af- 
fection a  auxquelles  ont  droit  tous  bons  sujets.  »  Il  les 
informait  en  outre  qu'il  avait  choisi  Namur  comme  lieu 
de  sa  résidence,  et  qu'il  y  avait  établi  un  conseil  d'État 
auquel  ils  auraient  à  s'adresser  pour  tout  ce  qui  concernait 
son  service  et  le  bien  de  son  peuple.  Aussitôt  après  la  ré- 
ception de  cette  missive,  datée  de  Namur  le  11  juillet  17H, 
les  corps  du  Conseil  et  du  Magistrat  s'empressèrent  de  se 
rendre  à  la  Cour  pour  présenter  leurs  félicitations  à  leur 
nouveau  maître. 

Maximilien-Emmanuel  avait  en  eff'et  créé  un  conseil 
d'État  à  Namur.  Mais  comment?  On  ne  trouve  à  ce  sujet 
aucune  trace  d'une  ordonnance  quelconque;  si  un  décret 
fut  rédigé,  on  doit  croire  qu'il  ne  fut  pas  communiqué  aux 
corps  existants,  qui  n'auraient  pas  manqué  de  le  faire 
inscrire  dans  les  registres  de  leurs  archives.  Selon  toute 
probabilité,  l'Électeur  crut  que  sa  lettre  du  11  juillet  était 
une  communication  suffisante. 


(  188  ) 
Ce  qui  paraît  certain,  c'est  que  le  conseil  d'État  fut 
réuni  pour  la  première  fois  le  10  juillet.  A  cette  séance,  le 
marquis  de  Roisin  prit  possession  de  la  charge  de  conseil- 
ler, et  Gilles  André  Lamblel  de  celle  de  secrétaire;  ils  prê- 
tèrent serment  entre  les  mains  du  baron  de  Zint  «  comme 
le  plus  ancien  conseiller.  »   Le  baron  de  Groesbeek  fut 
installé  le  lendemain  en  qualité  de  conseiller.  Le  registre 
du  Conseil  et  les  comptes  du  domaine  ne  nous  fournissent 
pas  d'autres  noms  de  personnages  ayant  fait  partie  du  con- 
seil d'État,  et  l'on  peut  croire  qu'il  n'y  en  eut  pas  davan- 
tage. Leurs  appointements,  qui  devaient  prendre  cours  à 
partir  du   1"  juillet  1711,  furent  fixés  à  6,000  florins 
pour  les  conseillers,  et  à  2,000  pour  le  secrétaire;  deux 
huissiers,  aux  gages  de  500  florins,  étaient  attachés  à  ce 
corps. 

Le  11  juillet,  le  conseil  d'État  dépêcha  aux  gouverneurs 
et  aux  commandants  des  places  cédées  par  le  roi  d'Espagne, 
aux  corps  politiques  de  Namur  et  de  Luxembourg,  etc., 
quatorze  lettres  semblables  à  celles  qui  parvinrent  au  Con- 
seil provincial  et  au  Magistrat  de  Namur;  puis  il  demanda 
à  ce  dernier  corps  quelles  étaient  les  raisons  sur  lesquelles 
on  s'appuyait  pour  demander  l'abrogation  du  placard  du 
22  avril  précédent,  publié  par  Philippe  V  sur  le  cours  des 
monnaies;  ce  fut  la  première  aff"aire  administrative  sou- 
mise à  l'examen  du  conseil  (1). 

Le  13,  Maximilien  partit  pour  Luxembourg  où  il  fut 
inauguré  solennellement  le  18.  Au  moment  de  partir,  il 


(ij  Le  13,  à  huit  heures  du  matin,  le  Conseil  reçut  le  serment  de  fidélité  du 
comte  de  Varo,  commandant  de  Charleroy,  et  de  N.  de  Zweveghem,  lieutenant-gou- 
verneur des  ville,  château  et  province  de  Namur.  (Registre  aux  résolutions  du 
conseil  d'État  de  l'Électeur  de  Bavière  à  Namur,  10  juillet  1711  au  29  novem- 
bre 1714.  Reg.  de  462  feuillets,  aux  archives  générales  du  royaume,  à  Bruxelles.) 


(  189) 
se  lit  délivrer  à  Namur  une  somme  de  25,000  florins  des- 
tinée à  subvenir  aux  frais  de  son  voyage  et  aux  largesses 
qu'il  comptait  faire  à  Luxembourg  (i). 

Pendant  l'absence  de  Maximilien,  et  cette  fois  sur  ses 
ordres,  pour  donner  satisfaction  à  ses  goûts  de  luxe,  on 
fit  d'importants  travaux  à  son  palais;  on  remarque,  notam- 
ment, qu'il  fit  construire  une  chapelle  vis-à-vis  de  son 
cabinet ,  et  démolir  une  partie  des  anciens  remparts  de  la 
ville  dont  l'emplacement  agrandit  les  jardins  de  l'hôtel  (2). 

A  la  même  époque,  le  Magistrat  recueillit  diverses 
plaintes  l'accusant  de  n'avoir  pas  fait  à  l'Électeur  une 
réception  aussi  brillante  que  celle  dont  le  souverain  avait 
été  l'objet  à  Luxembourg.  ïl  voulut  réparer  cette  négli- 
gence au  retour  du  prince  et  fit  faire  en  conséquence  des 
préparatifs  considérables.  Mais,  tandis  qu'on  y  travaillait, 
le  Magistrat  reçut  une  lettre  par  laquelle  le  conseil  d'État 
l'informait  que  S.  A.  S.  E.  ne  voulait  «  absolument  pas  la 
D  moindre  réception,  la  chose  n'estant  plus  de  saison 
»  puisque  Elle  a  déjà  fait  son  entrée  dans  cette  ville; 
»  S.  A.  S.  E.  ne  voulant  plus  aucune  démonstration  de 
»  joie  et  de  libéralité  à  cette  occasion  de  son  avènement 


(1)  «  s.  A.  S.  E.  à  son  avènement  à  la  souveraineté  de  ces  pays,  passant  par 
cette  ville  pour  aller  en  celle  de  Luxembourg,  trouva  la  caisse  du  compteur 
épuisée  par  les  assignations  du  comte  de  Bergeyck;  et  souhaitant  cependant 
d'avoir  de  l'argent  pour  ledit  voyage  de  Luxembourg  et  autres  fraix,  le  compteur 
nous  at  affirmé  par  serment  d'avoir  alors  fourni  à  S.  A.  la  somme  de  23,000  florins, 
laquelle  il  avait  levé  ici  à  fraix.  »  (Comptes  du  domaine,  1714,  fol.  227  v.) 

(2)  «  Construction  d'une  muraille, depuis  l'angle  du  bâtiment  de  la  Cour  jusqu'à 
celle  du  cabinet  sur  la  rue  ;  démolition  du  vieux  rempart  depuis  le  jardin  du  doyen 
de  Saint-Aubain  jusqu'au  cabinet  qui  est  au  bout  de  celui  du  chanoine  Godinne.  » 
Le  21  juillet,  on  repave  à  neuf  la  place  d'entrée  de  la  Cour,  on  pose  des  bailles 
tout  du  long.  Le  4  août  on  perce  une  porte  spéciale  pour  l'entrée  du  méde';ia  de 
S.-A.,  etc.  [Ibid.,  171 1,  fol.  271  v»  et  suiv.) 


(  190  ) 
»  à  la  souveraineté  des  Pays-Bas,  qu'à  son  temps,  et  lors- 
»  qu'elle  convoquera  les  États  pour  se  faire  prester  les 
»  serments  accoustumez  par  eux,  par  le  Conseil  et  par  le 
»   Magistrat.  » 

Pendant  les  mois  d'août  et  de  septembre  TÉlecteur  n'eut 
pas  de  résidence  fixe  :  il  courait  de  Namur  à  Luxembourg 
et  de  Luxembourg  à  Namur.  Par  ordonnance  du  H  août, 
donnée  dans  cette  dernière  ville,  il  notifla  aux  conseils  de 
justice  de  ses  États  «  rétablissement  du  Conseil  de  ses 
j>  domaines  et  finances,  leur  ordonnant  d'en  donner  con- 
»  naissance,  à  leur  tour,  dans  toutes  les  villes  et  villages 
D  de  leur  juridiction  (1).  »  On  ne  trouve  pas  plus  pour  ce 
Conseil  que  pour  le  conseil  d'État  de  document  officiel 
d'institution.  Les  comptes  du  domaine  ne  nous  font  con- 
naître, comme  membres  de  ce  conseil,  que  Barthélémy 
Thiéry,  qualifié  «  receveur  général  de  Son  Altesse,  » 
Nicolas  Pasquet,  greffier,  et  deux  huissiers. 

Maximilien  ne  revint  définitivement  fixer  sa  résidence 
et  sa  chancellerie  à  Namur  que  le  13  octobre.  On  aura 
une  idée  de  l'énorme  bagage  qu'il  traînait  après  lui  lors- 
qu'on saura  que,  pendant  quatre  jours,  six  «  porteurs  aux 
sacs  i>  furent  employés  à  transporter  des  caisses  du  rez- 
de-chaussée  aux  greniers  du  palais.  La  présence  du  sou- 
verain donna  une  nouvelle  impulsion  aux  travaux  de  res- 
tauration du  palais.  Le  nombre  des  états  fournis  par  les 
peintres,  les  sculpteurs,  les  tailleurs  de  pierre,  les  ma- 
çons, les  vitriers  et  surtout  les  menuisiers,  est  énorme, 
et  la  somme  totale  des  dépenses  s'élève  à  plus  de  45,000 


(i)  Le  conseil  fonctionnait  probablement  depuis  quelque  temps.  Ce  fut  sur  sa 
requête  qu'on  résolut  «  d'écrire  lettres  d'advertence  que  ledit  Conseil  était  établi 
à  Namur.  »  (Résoluiioiis  du  conseil  d'État,  etc.,  p.  25.) 


(  191  ) 

florins  (1).  Parmi  ces  mémoires  on  remarque  des  ouvrages 
de  sculpture  fournis  par  GodelVoid  Simon  et  Meurice 
Lejeune,  et  des  tableaux  livrés  par  le  peintre  Juppin; 
d'autres  toiles  représentant,  pour  la  plupart,  des  portraits, 
lurent  apportées  de  l'étranger  (2). 

Tandis  que  ces  travaux  s'exécutaient,  Maximilien  posait 
dans  ses  nouveaux  domaines  tous  les  actes  attributifs  de 
la  souveraineté  et  faisait,  notamment,  battre  monnaie  à 
son  nom  et  à  ses  armes  (3).  Il  semble  étrange  que  ce  mode 
de  prise  de  possession  n'ait  soulevé  aucune  réclamation  de 
la  part  des  Étals,  car  évidemment  le  procédé  avait  quelque 
chose  d'insolite.  Toutefois  rien  de  semblable  ne  se  pro- 
duisit, et  le  pays  accepta  son  nouveau  maître  avec  la  même 
docilité  que  si  les  choses  s'étaient  passées  de  la  manière  la 
plus  régulière,  et  que  si,  relevés  de  leur  serment  de  fidé- 
lité envers  Philippe  V,  les  Namurois  et  l'Électeur  se  fussent 


(r,  Quatre  femmes  allemandes  travaillent  pendant  cinquante-six  jours  à  coudre 
des  lapissories  et  des  rideaux  dans  la  grande  galerie;  des  soldats  bavarois  cousent 
également  des  tapisseries  et  des  chaises.  D'autres  distribuent  dans  les  jardins 
«  quarante  beignons  de  grève,  de  cendre  de  cuivre,  de  cendres  de  briques.  »  D'au- 
tres encore  arrangent,  avec  de  la  terre  glaise,  l'allée  du  jeu  de  passe,  qu'ils  bar- 
bouillent ensuite,  couvrent  le  jeu  de  courte-maille,  réparent  le  jeu  de  boules.  On 
construit  de  nouvelles  écuries  pour  les  carrosses,  etc.,  etc.  Le  peintre  Juppin 
fournit  des  peintures  pour  76  florins  16  sols.  [Comptes  du  domaine,  1711,  fol.  286, 
287  et  suiv.) 

(2)  «  Pour  voilure  d'une  caisse  avec  des  portraits  pour  la  cour  de  S.- A.  » 
llbidem,  f".  280.)  Dans  cette  caisse  se  trouvait  sans  doute  le  portrait  de  l'Électeur 
auquel  il  est  fait  allusion  dans  ce  compte  :  «  960  florins  payés  au  S»"  Vuvenne  (?), 
peintre  de  S.  A.  S.  E,  à  Paris,  pour  le  portrait  de  S.- A.  [Ibidem,  1712,  fol.  233  yo.) 

(3)  11  fit  frapper  à  Namur  des  escalins  et  des  demi-escalins,  où  il  se  titrait 
duc  de  Bourgogne,  de  Brabant,  de  Luxembourg,  de  Limbourg,  de  Gueldre, 
comte  de  Flandre,  Hainaut  et  Namur.  En  1713  il  fit  forger  des  écus,  des  demi- 
écus  et  des  quarts  d'écus.  Ce  furent  les  dernières  monnaies  frappées  à  Kamur. 
(Chalon,  Les  monnaies  des  comtes  de  Namur  ;  Pinchart  ,  notice  dans  la  Revue 
de  la  numismatique  belge.) 


(  192  ) 

engagés  par  les  liens  légaux  et  réciproques  qui  unissent  un 
peuple  et  son  souverain. 

Au  reste,  Maximilien  ne  donna  pas  à  ses  sujets  le  temps 
de  s'interroger  beaucoup  sur  l'origine  de  son  autorité,  et 
ses  actes  furent  de  nature  à  caresser  toutes  les  espérances. 
Faisant,  d'un  côté,  de  grandes  dépenses,  ce  qui  plaisait 
beaucoup  au  peuple,  il  apportait,  d'autre  part,  daais  l'ad- 
ministration du  pays,  l'activité,  l'esprit  d'ordre  et  de  mé- 
thode qu'il  avait  déployés  comme  gouverneur  des  Pays- 
Bas.  Il  promulgua  plusieurs  ordonnances  et  prit  un  grand 
nombre  de  sages  mesures  relatives,  notamment,  au  cours 
des  monnaies  (l),aux  métiers,  aux  compagnies  militaires, 
à  la  police  (2),  à  la  gestion  des  finances  et  à  la  magistrature 
communale,  où  il  supprima  l'usage  d'engager  les  places 
d'échevins,  contrairement  aux  lois  constitutionnelles  de  la 
ville,  prescrivant  que  ces  fonctions  fussent  annuelles  (3). 


(-1)  Le  registre  aux  Résolutions  du  magistrat  contient  un  grand  nombre  de 
pièces  «  sur  la  prodigieuse  quantité  de  liards  qui  circulent  dans  cette  ville  et  pro- 
vince et  qui  s'augmentent  tous  les  jours  par  la  nouvelle  fabrique  que  les  mon- 
nayeurs  y  establis  y  exercent  clandestinement  et  de  nuit,  et  malgré  les  réitérées 
défenses.  »  Février  1713. 

(2)  Maximilien  défendit  les  privilèges  des  arquebusiers  et  des  escrimeurs  contre 
les  entreprises  du  magistrat.  (Voy  Borgnet,  Hist.  des  compagnies  militaires  de 
Namur,  pp.  50,  b9, 61.)  Quant  à  la  police,  nous  remarquons  notamment  cette  réso- 
lution :  8  novembre  17 13.  «  S.-A.  autorise  le  Magistrat  de  Namur.  sur  l'avis  de  son 
conseil  d'État,  de  faire  saisir  les  étrangers  qui  sont  venus  s'établir  en  ville,  faisant 
profession  de  tenir  chez  eux  des  tilles  de  médiocre  vertu,  au  grand  scandale  de 
leurs  voisins  et  du  public,  et  de  les  faire  chasser  honteusement  de  la  ville  au 
son  du  tambour.  »  [Résoluiinns  du  magistrat,  fol.  131  v».) 

(3)  Par  suite  de  l'acquisition  des  fonctions  échevinales  au  moyen  d'engagères, 
les  échevins  étaient  devenus  inamovibles.  L'Électeur,  décidé  à  supprimer  cet 
abus ,  écrivit  le  29  novembre  au  magistrat  :  u  S.  A.  S.  E.  n'ayant  pas  encore  pris 
résolution  sur  le  renouvellement  ou  continuation  de  la  magistrature  de  la  ville  de 
Namur,  a,  par  avis  et  à  la  délibération  de  son  conseil  d'État,  deffendu  comme  elle 
deffend  par  cette  à  tous  ceux  qui  composent  présentement  ladite  magistrature,  de 
se  rendre  demain,  jour  de  S'- André,  à  la  chapelle  de  N-.-D.  des  Grâces  dans 


(  193) 
(1  laissa  en  charge  les  anciens  ofticiers  et  respecta  les 
institutions  qui  fonctionnaient  à  son  arrivée  :  le  Con- 
seil provincial,  le  Souverain  bailliage,  les  États;  ces 
corps,  en  effet,  continuent  à  siéger  et  l'on  ne  constate 
aucune  interruption  dans  les  registres  de  leurs  archives. 
La  nouvelle  forme  de  gouvernement  que  Maximilien  éta- 
blit pour  l'administration  publique  et  financière  de  la 
partie  des  Pays-Bas  qni  reconnaissait  son  autorité,  se 
borna  donc  à  l'organisation  des  conseils  d'État  et  des 
finances. 

D'un  autre  côté,  Maximilien  ne  négligeait  pas  les  fêtes; 
les  plaisirs,  le  faste,  les  divertissements  de  toute  espèce 
étaient  pour  lui  une  sorte  de  besoin.  Un  de  ses  premiers 
soins  fut  de  faire  jouer  la  comédie  à  Namur.  Les  rhétori- 
ciens  amateurs  de  la  ville,  qui  jusque-là  avaient  eu  seuls 
le  privilège  de  représenter  des  moralités  à  la  grande  joie 
de  leurs  concitoyens,  se  virent  supplantés  par  des  étran- 
gers. Et  comme  il  n'y  avait  pas  alors  à  Namur  de  salle  de 
spectacle,  on  arrangea  à  cette  fin  l'École  dominicale,  non 
sans  observations  de  la  part  des  directeurs  de  cet  établis- 
sement sur  l'inconvenance  qu'il  y  avait  de  faire  servir  à  un 
usage  aussi  profane  une  fondation  pieuse.  L'appropriation 
de  celte  salle  coûta  près  de  6,000  florins;  on  y  travaillait 


l'église  des  PP.  Récollets,  pour  y  faire  les  cérémonies  accoutumées  à  pareil  jour, 
jusques  à  ce  que  S.-A.  S.-E.  en  ayt  disposé  autrement.  Donné  en  nostre  ville  de 
Namur,  le  29  du  mois  de  novembre  1711.  »  {Résolutions  du  magistrat.)  Une 
ordonnance  du  o  mai  1712 ,  rétablit  les  fonctions  échevinales  annuelles  comme 
auparavant.  Cet  édit,  de  même  que  tous  les  autres  rendus  par  Maximilien,  se 
trouve  dans  le  Recueil  des  ordonnances  des  Pays  Bas  autrichiens,  publié  par 
M.  Gachard,  8e  série,  t.  II. 

2""^  SÉRIE,  TOIklE  XL.  \o 


(  194  ) 

encore  en  1712  (1).  Aux  mois  de  janvier  et  de  mars 
1712,  rÉlecteur  ût  donner  aux  comédiens  1,800  livres 
de  France,  puis  7,000  livres  pour  venir  jouer  devant  lui, 
à  Namur,  pendant  le  reste  de  Tannée  théâtrale,  depuis  le 
15  novembre  1711  jusqu'au  carême  1712,  «  plus  encore 
D  2,000  livres  que  S.  A.  leur  a  suppléées  au  défaut  de  ce 
»  que  la  garnison  a  fait  difficulté  de  s'abonner.  »  Mais 
bientôt  il  eut  une  troupe  de  comédiens  attachés  à  sa  per- 
sonne. Par  ordonnance  du  6  juillet  1712,  il  leur  donna  un 
traitement  de  12,000  livres  par  an,  a  à  tirer  hors  des 
»  revenus  de  ce  pays.  »  Ils  furent  en  oulre  logés,  aux 
frais  de  l'État,  dans  une  maison  qui  avait  été  précédem- 
ment mise,  par  les  Jésuites,  à  la  disposition  d'une  femme 
nommée  Marie  Du  Pont,  pour  apprendre  à  lire  aux  en- 
fants (2). 

Les  registres  de  la  commune  font  mention  d'une  fête 
donnée  à  l'Électeur  le  1 7  novembre  171 1 ,  on  ne  sait  à  quelle 
occasion,  et  qui  consistait  en  un  feu  d'artifice  tiré  sur  la 
place  Sainl-Remi.  Il  y  assista  du  balcon  d'une  maison  qui, 
en  1789,  fut  occupée  par  la  Société  patriotique.  On  lui 
offrit  ensuite  un  repas  magnifique  où  il  fut  servi  par  les 
principaux  bourgeois  de  la  ville.  Ces  fêles,  données  et 


(1)  Les  directeurs  de  l'École  dominicale  ajoutaient  que  les  rues,  étant  si  étroites 
qu'un  carosse  pouvait  k  peine  y  passer,  on  ne  pourrait  éviter  des  malheurs.  Le 
19  juillet,  le  conseil  d'État  pensa  un  instant  à  la  halle  au  blé, mais  il  revint  ensuite 
à  son  premier  projet.  L'entrée  des  voitures  fut  ménagée  dans  les  allées  des  mai- 
sons des  avocats  Douchamps  et  Beaujoz,  situées  vis-à-vis  du  collège  des  Jésuites, 
et  qui  par  derrière  touchaient  à  la  salle  de  l'École  dominicale.  (Résolutions  du 
conseil  d'État,  etc.,  fol.  46.)  Cfr.  Vander  Straeten,  Hist.  de  la  musique  aux 
Pays-Bas,  1. 111. 

(2)  «  40  florins  à  Marie  du  Pont  pour  dédommagement  d'avoir  dû  déloger  d'une 
petite  maison  que  les  PP.  Jésuites  lui  avaient  laissé  suivre  pour  enseigner  les 
enfants,  pour  être  occupée  par  les  comédiens.  [Comptes  du  domaine,  1711, 
fol.  240,  242  V».) 


(  193) 

rendues,  ravissaient  les  Namurois  qui  y  trouvaient  à  la 
Ibis  leur  profit,  leur  délassement  et  la  satisfaction  de  leur 
amour-propre  :  c'est  ce  qui  (it  dire  plus  tard  à  l'historien 
Galliot,  que  iMaximilien,  a  grand  et  généreux,  menait  les 
»  plaisirs  dans  tous  les  lieux  où  il  se  trouvait ,  de  sorte 
»  qu'il  fit  de  la  ville  de  Namur  un  des  plus  agréables 
»  séjours  de  l'Europe.  »  Toujours  entouré  de  pompe  et 
de  magnificence,  il  avait,  comme  les  véritables  souverains, 
de  nombreux  officiers  de  cour,  un  héraut  et  roi  d'armes, 
nommé  Constantin  Bouhellier  de  Beaulieu,  et  il  ne  sor- 
tait jamais  sans  être  brillamment  escorté  par  les  officiers 
de  ses  gardes;  il  entretenait  à  grands  frais  auprès  de 
sa  personne  une  compagnie  de  hallebardiers  de  la  garde 
de  S.  A.,  une  autre  d'archers  à  cheval,  gardes  du  corps  de 
S.  A.,  et  un  régiment  de  gardes  à  pied,  bombardiers  et 
maîtres  des  artifices  de  S.  A.  Il  continuait  à  faire  de  la 
dépense  pour  l'entretien  et  l'ornementation  de  sa  rési- 
dence, notamment  pour  les  jardins  où  il  fit  établir  des  jets 
d'eau,  des  pavillons,  des  charmilles,  et  où  il  faisait  cultiver 
des  plantes  rares  achetées  à  l'étranger  (i). 

Depuis  près  de  six  moisMaximilien  exerçait  son  autorité 
souveraine  à  Namur  et  à  Luxembourg  sur  la  simple  noti- 
fication faite  par  lui  aux  États  et  aux  Conseils  de  justice  de 
ces  provinces  qu'il  en  avait  été  investi  par  le  roi  d'Espagne. 


;i)  Réparation  d'un  jet  d'eau  du  jardin  pour  3,610  fl.;  établissement  d'un  pa- 
villon pour  oOO  fl.;  plantation  de  680  pieds  de  charmille  pour  d,o67  fl.;  achat  de 
cent  plantes  de  zifs;  item,  d'oignons  de  tulipes  et  d'autres  fleurs,  chez  Ancillon, 
à  Bruxelles,  pour  291  fl.  [Comptes  du  domaine,  -1712  et  1713,  fol.  260  v»,  262, 
289  v°,  29o  \o.)  Ma.ximilien  se  plaisait  à  encourager  l'horticulture  et,  pendant  qu'il 
était  gouverneur  général  aux  Pays-Bas, il  était  le  chef-prévôt  delà  corporation  des 
fleuristes  de  la  paroisse  de  la  Chapelle,  à  Bruxelles.  En  1706  il  assista  à  la  fête 
des  fleuristes,  qui  se  célébra  le  jour  de  S'<^- Dorothée,  à  Bruxelles.  [Bull,  de  la 
Comm.  roy.  d'hist.,  I«  série,  t.  XI,  pp.  624,  630.) 


(  i9.6  ) 

Le  diplôme  d'investiture  n'existait  pas  encore.  L'intention 
de  Philippe  V  et  de  Louis  XIV,  en  cédant  les  Pays-Bas 
à  l'Électeur,  n'était  pas  d'ériger  ces  provinces  en  royaume 
définitif  et  indépendant;  ils  n'avaient  en  vue  que  de  con- 
stituer à  l'électeur  un  titre  efficace  pour  récupérer  ses 
états  héréditaires  d'Allemagne ,  perdus  à  leur  service.  Telle 
est,  sans  doute,  la  cause  du  retard  apporté  à  la  rédaction 
ou  à  la  publication  de  l'acte  qui  manquait  à  l'Électeur.  En 
effet,  aussitôt  qu'il  fut  question  d'un  accord  entre  les 
puissances  belligérantes  et  que  la  paix  put  être  consi- 
dérée comme  certaine  dans  un  avenir  plus  ou  moins  rap- 
proché, l'acte  de  cession  fut  signé.  Tandis  que  les  pléni- 
potentiaires de  la  France  et  des  alliés  assistaient  au 
congrès  ouvert  à  Utrecht  le  29  janvier  1712,  ceux  du  roi 
Philippe  attendaient  à  Paris  que  la  monarchie  d'Espagne 
eût  été  adjugée  à  leur  maître,  pour  les  rejoindre  et  pro- 
duire un  acte  dont  ils  étaient  porteurs,  daté  du  2  janvier 
1712,  et  en  vertu  duquel  Philippe  V  cédait,  de  la  manière 
la  plus  formelle,  les  Pays-Bas  à  l'électeur  de  Bavière  (1). 
Le  roi  y  déclarait  ne  pas  vouloir  différer  plus  longtemps 
l'accomplissement  de  la  promesse  que  Louis  XIV,  son 
aïeul,  avait  faite,  en  son  nom,  a  au  sérénissime  prince 
Maximilien-Emmanuel,  duc-élecleur  de  Bavière,  son  bon 
frère,  cousin  et  oncle,  vicaire  général  des  Pays-Bas,  par- 
ticulièrement le  7  novembre  1702,  touchant  la  donation 
des  Pays-Bas;  qu'ayant  égard  aux  liens  étroits  du  sang  et 


(4)  «  La  restitution  de  la  Bavière  à  l'Électeur  fut  décidée  dès  la  première  confé- 
rence. Comme  c'était  le  moyen  le  plus  sûr  de  faire  rendre  à  ce  prince  par  voie 
d'échange  les  Étals  dont  il  avait  été  dépouillé,  il  ne  se  contenta  pas  d'en  avoir 
pris  possession  l'année  avant,  il  voulut  encore  s'en  faire  reconnaître  souverain 
avec  les  cérémonies  accoutumées  d^Van  looy,  Histoire  métallique  des  Pays-Bas, 
t.  V, p.  209.) 


(  197  ) 
d'amilié  et  aux  relevés  mérites  et  services  qui  se  rencon- 
trent en  sa  personne,  et  à  la  singulière  affection,  vigilance 
et  prudence  avec  lesquelles  il  les  avait  régis  en  son  nom,» 
il  lui  cédait,  pour  lui  et  ses  successeurs  mâles  et  légitimes, 
irrévocablement  et  à  toujours,  en  pleines  propriété  et  sou- 
veraineté, les  Pays-Bas  tels  qu'il  les  possédait  à  la  même 
date  du  7  novembre  4702,  alin  que  ledit  duc  et  ses  suc- 
cesseurs en  ligne  masculine  les  tinssent  et  possédassent 
en  qualité  de  princes  propriétaires  et  souverains;  il  ajou- 
tait, comme  condition,  que  ces  princes  devaient  vivre  et 
mourir  dans  la  foi  catholique,  et  conserver  aux  provinces, 
villes  et  communautés  des  Pays-Bas,  leurs  privilèges,  insti- 
tutions, offices  et  dignitaires. 

Ce  document  officiel ,  qui  conférait  légalement  et  légi- 
timement la  souveraineté  des  Pays-Bas  à  Maximilien- 
Emmanuel,  ne  lui  donna  pas,  en  fait,  plus  d'autorité  ni 
une  juridiction  plus  étendue  que  précédemment  :  sauf 
celles  de  Namur  et  de  Luxembourg,  les  provinces  des 
Pays-Bas  étaient  toujours  au  pouvoir  des  alliés. 

On  ignore  au  juste  à  quel  moment  l'Électeur  fut  mis  en 
possession  de  ce  titre.  Ce  qui  est  certain ,  c'est  qu'on  en 
connaissait  l'existence  dans  le  public  avant  le  o  mars.  Ce 
jour-là,  en  effet,  les  députés  des  trois  membres  des 
États  de  Namur  prirent  connaissance  d'un  compliment 
composé  par  le  pensionnaire  de  la  ville  pour  être  lu  ou 
envoyé  à  Maximilien.  Dans  une  réunion  du  A  avril ,  ils 
décidèrent  de  ne  pas  faire  graver  de  médailles  à  l'occasion 
de  son  avènement;  mais,  le  A  mai,  ils  revinrent  sur  cette 
décision,  et  résolurent  de  faire  frapper  des  jetons  en  or. 
Le  2S  avril  et  le  2  mai  ils  s'étaient  occupés  des  formalités 
à  observer  au  jour  de  l'inauguration,  du  modèle  d'un  dais 
pour  conduire  S.  A.  depuis  la  Cour  jusqu'à  Saint-Aubain, 


(    198; 
et  d'autres  détails  pour  la  cérémonie.  On  était  absorbé  par 
ces  préparatifs  lorsque  l'Électeur  communiqua  aux  États 
un  extrait  de  l'acte  de  cession ,  accompagné  d'une  lettre  en 
date  du  7  mai,  ainsi  conçue  : 

«  A  révérends  pères  en  Dieu,  vénérables,  chers  et 
»  féaux,  chers  et  bien  amez  les  prélats,  nobles  et  dé- 
»  puttez  des  États  de  nostre  pays  et  comté  de  Namur, 
»  représentant  les  trois  Étals  du  pays. 

»  Sa  Majesté  Catholique  nous  ayant  fait  la  cession  des 
»  Pays-Bas,  nous  vous  faisons  cette  pour  vous  dire  que 
»  nous  avons  fixé  le  jour  de  nostre  inauguration  au  17  de 
»  ce  mois,  pour  faire  et  recevoir  le  serment  que  les  princes 
»  souverains  desdils  Pays-Bas  sont  accouslumez  de  faire 
»  et  recevoir  en  ce  pays  et  comté  de  Namur,  et  que  nous 
»  avons  escrit  en  cette  conformité  à  nostre  cher  et  bien 
>  amé  Pierre  Simon  du  Cellier  de  Wallincourt,  lieutenant- 
»  gouverneur  de  nostre  ville,  château  et  province  de 
»  Namur,  vous  requérant  de  l'ouïr  et  croire  ce  qu'il  vous 
i>  dira  sur  cette  matière,  dans  l'assemblée  que  vous  tien- 
D  drez  à  cet  effect  le  16  de  ce  dit  mois.  Attant,  révérends 
p  pères  en  Dieu ,  vénérables,  nobles,  chers  et  féaux  et 
»  bien  amez ,  Dieu  vous  ayt  en  sa  saincte  garde.  Namur, 
»  le  7  de  may  1712(1).  d 

Dans  leur  séance  du  12  mai,  les  députés  des  États  déli- 
bérèrent sur  le  rang  à  observer  le  jour  de  la  cérémonie; 
à  ce  propos  surgit  un  conflit  de  préséance  entre  les  dé- 
putés et  le  sieur  du  Cellier  qui  prétendait  marcher  en  tète 
des  trois  Ordres  en  sa  qualité  de  lieutenant-gouverneur, 
recevoir  le  serment   du   prince   et   lui  jurer  fidélité  au 


(1)  Rég.  aux  résolutions  des  assemblées  générales  des  États,  VII.  fol.  34  V". 
Annales  de  la  Société  archéol.  de  Namur,  t.  VIII,  fol.  333. 


(  199  ) 
nom  des  États;  ce  droit  lui  était  dénié  par  ces  derniers, 
à  moins  qu'il  ne  fût  délégué  par  eux  à  cet  effet.  Le  conseil 
d'État,  consulté  sur  cet  incident,  repoussa  les  prétentions 
de  du  Cellier,  et  déclara  qu'à  l'avenir  aucun  lieutenant- 
gouverneur  ne  pourrait  plus  émettre  une  pareille  pré- 
tention (1). 

Le  15  mai ,  la  cour  des  échevins  tint  séance  à  son  tour, 
et  décida  de  faire  frapper  des  jetons  d'argent  et  de  cuivre 
pour  consacrer  la  mémoire  de  l'inauguration  de  S.  A. 
comme  comte  de  Namur,  et  de  se  conformer  à  cet  égard 
à  ce  qui  avait  été  réglé,  en  1696,  à  l'avènement  du  comte 
de  Bruay  comme  gouverneur  de  la  province. 

Suivant  Tordre  qu'ils  en  avaient  reçu,  les  États  de  la 
province  se  réunirent,  le  16,  en  assemblée  générale,  à 
l'hôtel  de  ville  de  Namur.  Le  lieutenant-gouverneur,  dé- 
légué par  l'Électeur,  y  présenta,  de  la  part  de  son  maître, 
ses  lettres  de  créance,  donna  lecture  de  l'acte  de  cession 
des  Pays-Bas,  par  lequel  le  roi  d'Espagne  relevait  ses  su- 
jets du  serment  de  fidélité  qu'ils  lui  avaient  prêlé  le  21  février 
1702,  et  annonça  que  Maximilien  avait  fixé  le  17  mai  pour 
être  solennellement  inauguré  comme  souverain  des  Pays- 
Bas  et  comte  de  Namur. 

La  prérogative  de  recevoir,  dans  la  cérémonie  du  len- 
demain ,  le  serment  du  prince,  lit  surgir  un  nouveau  conflit 
entre  le  mayeur  de  Hinslin,  qui  revendiquait  le  droit  de 
nommer  les  députés  à  cet  effet  et  prétendait  pouvoir  se 
déléguer  lui-même,  et  les  trois  Membres,  qui  réclamaient 
ce  privilège.  On  en  référa  d'urgence  et  séance  tenante  au 
Conseil  privé,  qui  se  prononça  en  faveur  des  États. Ceux-ci 


(1)  Reg.  aux  résolutious  du  conseil  d'État,  etc.,  fol.  53. 


(  200  ) 
s'occupèrent  aussitôt  de  choisir  les  députés,  au  nombre 
de  six  (1). 

L'inauguration  de  l'électeur  de  Bavière  eut  lieu  le  jour 
fixé  dans  les  formes  les  plus  solennelles;  la  relation  de  la 
cérémonie  qui  eut  lieu  à  la  cathédrale ,  ainsi  que  la  des- 
cription du  cortège,  ont  été  conservés  par  les  soins  du. 
Magistrat,  qui  en  fit  écrire  la  déduction  dans  ses  registres. 
Nous  ne  pouvons  que  les  résumer. 

A  neuf  heures  du  matin,  les  États  de  la  province  se 
rendirent  en  corps  au  palais  de  S.  A.  S.  E.,  et  vers  dix 
heures,  le  cortège,  s'étant  formé  dans  les  cours,  sortit  dans 
l'ordre  suivant  :  en  tête  marchaient  les  quatre  jurés  de  la 
ville,  puis  le  lieutenant-mayeur,  les  bourgmestres,  éche- 
vins,  greffiers  et  le  mayeur.  Venaient  ensuite  les  États 
nobles,  savoir  :  messieurs  les  barons  de  Spontin  et  le  comte 
de  Groesbeck,  députés,  accompagnés  d'un  grand  nombre 
de  gentilshommes  de  la  province  et  suivis  de  messieurs 
de  l'État  ecclésiastique;  puis  les  deux  hérauts  d'armes, 
éblouissants  de  panaches  et  de  broderies,  le  caducée  à  la 
main. 

L'Électeur,  sous  un  dais  magnifique  de  velours  bleu 
galonnèet  brodé  d'argent,  offert  par  les  États  et  porté  par 
les  six  gentilshommes  les  plus  qualifiés  de  la  province  :  le 
comte  de  Frezin,  le  comte  de  Corswarem-Longchamps, 
le  marquis  deGlimes  deCourcelles,  le  baron  deLiedekerke 
d'Acre ,  le  comte  de  Berlo  de  Sainte-Gertrude  et  le  vicomte 
de  Namur  d'EIzèe. 

Autour  du  dais,  les  archers  nobles  et  les  gardes  du 
corps.  Derrière,  les  grandes  charges  de  la  cour  :  le  comte 


(i)  Reg.  aux  résolutions  du  magistrat  de  Namur,  fol.  98  v». 


(  201  ) 
(le  Terring  et  Zeefeld,  grand  maréchal,  chevalier  de  la 
Toison  d'or,  le  baron  de  Dobbelstein,  maréchal  de  camp  et 
colonel  d'un  régiment  de  cavalerie,  envoyé  spécial  de 
rélecteur  de  Cologne,  suivis  des  ministres  et  des  officiers 
de  Son  Altesse. 

Le  cortège  se  dirigea  lentement  vers  Saint-Aubain,  au 
milieu  d'une  double  haie,  l'une,  de  bourgeois  portant  des 
flambeau  Y  de  cire  blanche  à  la  main,  l'autre,  des  gardes 
à  pied  de  S.  A.,  habillés  de  neuf  pour  la  circonstance,  et 
«  fort  proprement.  »  Les  officiers,  dans  leur  uniforme 
bleu  galonné  d'argent,  paraissent  avoir  été  splendides  et 
avoir  fait  particulièrement  impression  sur  le  peuple. 

A  l'entrée  de  la  cathédrale  attendait,  debout,  Mgr  de 
Berlo,  évêque  de  Namur,  entouré  de  tout  le  clergé  régu- 
lier et  séculier  de  la  ville.  Arrivé  là,  l'Électeur  se  mit  à 
genoux  sur  un  prie-Dieu  et  adora  quelques  instants  une 
parcelle  de  la  vraie  croix  qui  lui  était  présentée  par 
révêque.  On  entra  ensuite  dans  l'église,  toute  tapissée  de 
verdure  et  d'étotïes,  avec  force  chronogrammes,  et  où  se 
trouvaient  déjà  messieurs  du  Conseil  des  finances,  du 
Conseil  provincial  et  du  Souverain  bailliage.  L'Électeur  fut 
conduit  processionnellement  sous  un  dais  de  velours  rouge 
galonné  d'or,  placé  du  côté  de  l'Évangile.  On  introduisit 
les  dames,  on  plaça  les  musiciens  de  la  chambre  de  S.  A. 
avec  les  trompettes  et  les  timbales,  et  l'office  commença, 
célébré  pontificalement  par  l'évêque. 

Après  la  messe,  eut  lieu  l'imposante  cérémonie  de  la 
prestation  du  serment.  Les  abbés  de  Moulin  et  de  Géron- 
sart  pour  le  clergé,  le  baron  de  Spontin  et  le  comte  de 
Groesbeck  pour  la  noblesse,  les  sieurs  de  Glymes-Brabant 
et  de  Kessel  pour  le  tiers  État,  formèrent  le  cercle  autour 


(  202  ) 

du  prince  qui,  la  main  sur  l'Évangile  el  les  saintes  reli- 
ques, prononça  à  voix  haute  a  el  d'une  manière  fort  majes- 
tueuse, »  la  formule  du  serment  dressée  par  le  greffier  du 
Souverain  bailliage. 

Aussitôt  après,  le  conseiller  pensionnaire  lut  la  procu- 
ration qui  autorisait  les  députés  des  États  à  prêter  à  leur 
tour  le  serment;  l'abbé  de  Moulin  le  répéta  au  nom  de  tous 
ses  collègues  levant  les  doigts.  A  peine  eut-il  terminé, 
qu'un  bruit  éclatant  se  fit  entendre  dans  l'église;  toute 
l'assemblée  s'écria  :  «  Vive  l'Électeur,  vive  le  comte  de 
Namur,  notre  souverain!  » 

On  chanta  le  Te  Deum  et,  après  la  bénédiction  du  Saint- 
Sacrement,  le  cortège  se  reforma  pour  rentrer  au  palais, 
au  milieu  des  décharges  d'artillerie  et  des  acclamations 
populaires. 

Pendant  que  les  États  présentaient  à  S.A.  les  jetons 
qu'ils  avaient  fait  frapper  pour  consacrer  le  souvenir  de 
cet  événement,  des  hérauts  d'armes  précédés  d'un  timba- 
lier et  d'un  trompette  richement  vêtus  parcouraient  la  ville, 
jetant  à  pleines  mains,  au  dire  des  historiens  du  temps, 
des  médailles  d'or  et  d'argent  au  peuple,  en  répétant  le  cri: 
<  Vive  le  comle  de  Namur,  notre  souverain!  (1)  » 

A  midi,  l'Électeur  dîna  en  public,  servi  par  les  seigneurs 
de  sa  cour.  Le  soir  il  y  eut  grand  appartement,  suivi  d'un 
souper  à  douze  tables,  servies  par  les  officiers  de  S.  A.,  et 
pendant  lequel  tantôt  les  timbales  et  les  trompettes,  tan- 


ci;  Les  jetons  et  médailles  destinés  à  perpétuer  ces  événements  furent  gravés 
par  G.  de  Backer.  On  en  distribua  encore  le  tendemain  avant  de  tirer  le  feu  d'ar- 
tifice, et  le  27,  lors  de  l'inauguration  de  l'Électeur  à  Luxembourg.  (Voy.  l'article 
cité  de  M,  Pinchart,  et  la  liasse  des  États  de  Namur,  MM,  layette  3.) 


(  203  ) 
tôt  a  une  excellente  musique  »  ne  cessèrent  de  se  Taire  en- 
tendre (1). 

L'inauguration  de  l'Électeur  fut  suivie  de  fêtes  véritable- 
ment pompeuses.  Durant  huit  jours  ce  ne  furent  que  mu- 
sique, banquets,  bals  et  chasses  royales  pour  la  cour,  feux 
de  joie,  illuminations  et  réjouissances  de  toute  espèce  pour 
le  peuple;  le  18  notamment,  on  joua  en  plein  air,  sur  les 
remparts,  la  comédie  «pour  le  divertissement  des  dames  »; 
le  soir  on  tira  un  feu  d'artifice  qui,  d'après  la  description 
qui  nous  en  est  restée,  doit  avoir  été  splendide.  Le  19, 
Maximilien  reçut  les  étudiants  des  Jésuites,  formés  en 
pelotons  armés,  qui  «après  plusieurs  décharges  régulière- 
ment faites,  »  lui  débitèrent  un  fort  beau  compliment  en 
latin.  Le  soir  eut  lieu  une  nouvelle  représentation  théâ- 
trale, après  laquelle  l'Électeur  parcourut  les  rues  de  la 
ville  pour  jouir  de  l'illumination  et  lire  les  nombreux 
chronogrammes  qui  ornaient  les  maisons  et  les  places 
publiques,  et  qui  étaient  fort  à  la  mode  à  cette  époque  (2). 

Le  22  mai,  l'Électeur  sortit  de  la  porte  de  Bordeleau 


(1)  La  relation  de  celte  inauguration  fut  imprimée  en  1712  chez  Charles  Gérard 
Albert,  à  Namur.  Van  Loon  et  le  registre  aux  Résolutions  du  magistrat  la  citent. 
Aujourd'hui  on  n'en  connaît  plus  un  seul  exemplaire  dans  toute  la  Belgique.  On 
peut  donc  la  recommander  à  l'attention  des  bibliophiles.  Elle  avait  heureusement 
été  en  grande  partie  transcrite  dans  les  registres  de  la  ville,  et  c'est  d'après  cette 
copie  que  l'inauguration  de  Maximilien  a  été  publiée  dans  les  Annales  de  la  Soc, 
arcItéoL  de  Namur,  t.  VII,  p.  'àii'S. 

(2)  Les  comptes  des  domaines  contiennent  quelques  détails  intéressants  de 
celte  inauguration.  «  Vaisselle  d'argent  offerte  au  S»"  Latouche  pour  les  soins 
donnés  au  feu  d'artifice,  ornement  et  illumination  de  l'hôtel  de  ville.  Pour  le 
théâtre  (estrade)  dans  l'église  S'-Aubain.  Pour  l'arc  de  triomphe  devant  l'hôtel  de 
ville.  Pour  60  faix  de  pecquet  et  de  houx  pour  garnir  l'hôtel  de  ville.  Pour  poudre 
et  mèches  livrées  aux  compagnies  bourgeoises.  Pour  ceux  qui  ont  sonné  la  grosse 
cloche  du  château  et  ont  carillonné  pendant  les  fêtes.  Pour  60  pots  de  vin  de 
Bourgogne  présenté  à  S.  A.  Pour  la  maison  du  S'  d'Hestroy  évacuée  pour  loger  la 
princesse  de  Bergh,  dame  de  Montigny ,  etc.  » 


(  204  ) 

pour  tirer  Toiseaii  avec  les  confrères  du  Serment  des 
arbalétriers.  Ayant  abattu  l'oiseau ,  comme  il  avait  déjà 
fait  une  fois  à  Bruxelles,  le  1"  mai  1698,  lorsqu'il  était 
gouverneur  des  Pays-Bas,  avec  les  membres  de  la  Société 
de  l'arquebuse,  il  fut  proclamé  roi  du  Serment  et  rentra 
en  ville  à  pied  et  en  triomphe,  portant  en  main  son  paci- 
fique trophée  (1). 

A  l'occasion  de  son  avènement  à  la  souveraineté  des 
Pays-Bas,  les  bourgeois  et  les  commerçants  de  la  ville, 
d'une  part,  en  vertu  d'une  résolution  des  métiers,  et  les 
États,  d'autre  part,  offrirent  à  l'Électeur  un  don  gratuit 
de  64,000  florins,  que  des  députés  lui  portèrent  le  15  juin, 
dans  deux  bourses  distinctes  (2).  Ce  fut  vers  cette  époque 
également,  que  le  Magistrat  décida  la  création  d'une  rue 
qui  devait  être  ménagée  le  long  du  nouvel  hôtel  de 
ville  et  porter,  en  l'honneur  de  Maximilien,  le  nom  de 
Bavière  (3). 

L'Électeur,  mis  légitimement  en  possession  de  ses  États, 
continua  à  s'occuper  activement  de  leur  administration; 
il  édicta  un  grand  nombre  d'ordonnances  relatives  à  la 
valeur  des  monnaies,  au  cours  régulier  de  la  justice,  à  la 


{{]  Gachard,  Rec.  des  ordonn.  des  Pays-Bas,  3^  série,  t.  I,  préface,  p.  III. 
.1.  BORGNET.  Les  compagnies  militaires  à  Nainur. 

("2)  Dans  l'assemblée  générale  de  la  noblesse  des  3  et  4  janvier  1713,  l'Électeur 
demanda  une  aide  de  oO  mille  florins  qui  lui  turent  accordés  non  sans  quelque  oppo- 
sition. Dans  une  autre  assemblée  des  30  et  31  octobre  17 14,  une  nouvelle  demande 
semblable  fut  trouvée  exorbitante  pour  les  forces  d'une  province  ruinée  par  de 
longues  guerres;  on  l'accorda  cependant  «  pour  marquer  l'attachement  que  les 
États  avaient  pour  le  service  de  S.  A.  »  {Reg.  des  Étals,  VII,  fol  58  v",  74.) 

(3)  Le  !20  décembre  ■17i!2,  la  cour  des  échevins  décide  «  de  faire  incessamment 
percer  la  rue  qui,  selon  le  plan  d'une  nouvelle  maison  de  ville,  doit  régner  le  long 
de  la  maison  Jean  Hobeau,  et  de  faire  ériger  les  prisons  conformes  audit  plan,  en 
attendantde  pouvoir  bâtir  ladite  nouvelle  maison  de  ville.  »  {Résolutions  du  magis- 
trat, fol.  H4.)  La  rue  ne  fut  percée  qu'en  1713. 


(  205  ) 
poursuile  des  vagabonds,  à  la  réception  des  chanoinesses 
dans  les  chapitres  nobles  d'Andenne  et  de  Moustier,  à  la 
police  urbaine,  à  certains  droits  des  arquebusiers,  des  arba- 
létriers et  des  escrimeurs,  à  quelques  articles  des  métiers 
des  tailleurs  d'habits  et  des  merciers,  et  au  commerce  des 
grains  (I). 

Dans  la  séance  des  États  qui  précéda  son  inauguration, 
l'Électeur  s'était  borné  à  leur  communiquer  un  extrait  de 
l'acte  de  cession  du  2  janvier  1712.  Le  4  août  de  la  même 
année,  le  comte  de  Bergheyck,  ministre  de  Philippe  V, 
écrivit  au  baron  de  Malknecht,  un  des  ministres  bavarois 
et  conseiller  intime  de  Maximilien,  qu'il  avait  reçu  à  ce 
sujet  des  plaintes  de  plusieurs  officiers  et  fonctionnaires,  et 
lui  fit  observer  «  qu'il  était  extrêmement  contre  l'honneur 
et  la  réputation  du  roi,  que  les  États, Conseils  et  Magistrats 
n'aient  vu  qu'un  extrait  de  celte  cession ,  sans  aucune  con- 
dition pour  le  maintien  de  leurs  droits,  privilèges  et  im- 
munités, ce  qui  fait  juger  tous  les  officiers  que  S.  M.  les 
a  entièrement  abandonnés  par  cette  cession,  ce  qui  dans 
la  suite  pourrait  leur  être  à  tous  d'un  préjudice  irrépa- 
rable, dans  l'incertitude  du  sort  de  ce  pays  par  la  poix.  » 

Cette  lettre  ayant  été  communiquée  à  l'Électeur,  celui-ci 
se  hâta  d'expédier  de  Compiègne ,  le  12  octobre,  une  copie 
entière  deracte,avec  ordre  d'arracherdes  registres  l'extrait 
qu'il  avait  d'abord  cru  devoir  suffire,  pour  le  remplacer 


(1)  En  4713  des  conférences  tenues  à  Namur  réglèrent  les  difficultés  entre  les 
pays  de  Liège  et  de  Namur  au  sujet  de  l'impôt  du  GO*"  sur  les  marchandises  namu- 
roises  passant  par  le  pays  de  Liège.  (Galliot,  V.  12o.)  II  existe  au  Staats-Archiv, 
à  Munich,  plusieurs  liasses  de  papiers  concernant  le  gouvernement  qui  fonctionna 
à  Namur  sous  l'administration  de  Maximilien.  Mais  elles  contiennent  peu  de 
choses  intéressantes.  (Gachard,  Notice  dans  les  Bull,  de  la  Coiivn.  roy.  dhist., 
8c  série,  t.  VI,  p.  96  et  97.) 


(  206  ) 
par  Fade  entier.  Le  14,  les  députés  des  trois  membres 
des  Étals,  ayant  pris  connaissance  de  ce  document,  de- 
mandèrent à  le  confronter  avec  Toriginal.  L'autorisation 
leur  en  fut  accordée,  et  le  20  ils  se  rendirentchez  M.  Lam- 
bJet,  secrétaire  du  conseil  d'État,  oij  l'original  leur  fut  mis 
entre  les  mains. 

Les  événements  se  chargèrent  de  justifier  les  prudentes 
précautions  des  États.  En  effet,  les  négociations  entre  les 
puissances  poursuivaient  leur  cours,  et  chaque  jour  appor- 
tait de  nouvelles  probabilités  que  la  paix  générale  ne  tar- 
derait pas  à  se  faire;  chaque  jour  aussi,  il  devenait  plus 
évident  que  le  règne  de  Maximilien  ne  serait  pas  de  longue 
durée  et  que,  remis  en  possession  de  la  Bavière, il  devrait 
dans  un  bref  délai  abandonner  les  Pays-Bas.  Aussi,  à  par- 
tir de  ce  moment,  prend-il  peu  d'intérêt  à  ce  qui  se  passe 
dans  une  province  qui  lui  deviendra  bientôt  étrangère; 
il  n'habite  plus  guère  Namur  et  ne  rend  plus  que  de  rares 
ordonnances.  Compiègne  devient  sa  résidence  habituelle; 
les  comptes  des  domaines  nous  apprennent  même,  mais 
sans  indiquer  de  date,  que  sa  troupe  de  comédiens  et  ses 
domestiques  le  suivirent  dans  cette  ville  (1).  C'est  de  là 
qu'il  écrit  le  1"  novembre,  à  son  conseil  d'État,  que  le 
roi  d'Espagne  avait  nommé  François  le  Danois,  marquis  de 
Joffreville,  lieutenant  général  de  ses  armées,  pour  com- 
mander ses  troupes  à  Namur  et  dans  l'Entre-Sambre-et- 
Meuse,  en  remplacement  du  comte  de  Saillant;  il  leur  fait 
savoir  en  même  temps  que  lui,  comme  comte  de  Namur, 
a  aussi  confié  à  ce  seigneur  le  commandement  de  la  place, 
et  ordonne  au  Conseil  de  le  recevoir  et  de  le  loger  con- 
formément aux  règlements  militaires. 


{\)  Comptes  du  domaine,  i7i3,  fol.  237. 


(  207  ) 

Les  apparitions  de  iMaximilien  à  Namur  n'ont  plus  lieu 
qu'à  de  rares  intervalles.  On  l'y  trouve  le  11  juillet  1715, 
jour  anniversaire  de  sa  naissance,  célébré  comme  précé- 
demment par  des  réjouissances  populaires.  Le  8  septembre 
suivant,  il  se  rend  avec  une  compagnie  nombreuse  à  la  cha- 
pelle de  Notre-Dame-des-Bois,  dans  la  Marlagne,  pour  as- 
sister à  la  première  messe  d'une  fondation  qu'il  y  avait  laite. 
Après  la  cérémonie,  il  fit  servir  un  banquet  champêtre 
aux  dames  et  aux  gentilshommes  de  sa  cour  qui  l'avaient 
suivi  à  cheval  ou  en  carrosse.  Des  tentes,  des  tables,  des 
bancs,  la  vaisselle,  une  profusion  de  tapis  et  de  plantes 
y  avaient  été  transportés  ;  les  pages  de  l'Électeur  soignaient 
le  service,  et  ses  musiciens  faisaient  retentir  l'immense 
forêt  de  leur  harmonie.  C'est  la  dernière  fête  de  Maximilien 
dont  les  annales  de  Namur  aient  conservé  le  souvenir  (1). 

C'est  de  S*-Cloud  que  sont  datées  la  plupart  des  ordon- 
nances que  l'Électeur  édicta  encore  pour  les  provinces  de 
Namur  et  de  Luxembourg,  dans  le  courant  de  l'année 
1714. 

La  conclusion  générale  et  définitive  de  la  paix  dans  un 
avenir  prochain  était  chose  certaine  ;  l'empereur  Charles  VI, 
après  avoir  refusé  de  signer  le  traité  d'Ulrecht?  conclut 
le  6  mars  1714  celui  de  Rastadt,  qui  stipulait  de  nouveau 
le  rétablissement  de  l'Électeur  dans  la  Bavière;  vint  en- 
suite le  traité  de  Bade,  du  7  septembre,  dont  l'article  15 
garantissait  aux  Électeurs  de  Bavière  et  de  Cologne  la 
réintégration  dans  leurs  États,  et  attribuait  à  l'empereur 
la  souveraineté  des  villes  et  comté  de  Namur,  Beaumont 
et  Chiraay;  il  ne  restait  plus  qu'à  régler  la  question  de  la 
Barrière  entre  la  Hollande  et  la  France. 

(1)  Comptes  du  domaine,  4714,  fol.  244. 


(  208  ) 

Le  résultat  était  si  peu  douteux  que,  par  lettres  patentes 
du  2  novembre,  l'empereur  Charles  \I  chargea  le  comte 
de  Kônigsegg  de  prendre  en  son  nom,  après  Tissue  de  la 
négociation  relative  à  la  Barrière,  possession  des  provinces, 
villes  et  places  des  Pays-Bas;  il  assurait  déjà  du  maintien 
de  leurs  privilèges  et  confirmait  dans  leurs  charges  les 
conseils,  tribunaux,  magistrats  et  oITiciers  royaux. 

Le  traité  de  la  Barrière  fut  signé  le  15  novembre  1714. 
Il  accordait  à  la  Hollande  ce  qu'elle  désirait  depuis  long- 
temps, à  savoir  le  droit  de  tenir  garnison  dans  les  places, 
notamment  celle  de  Namur,  qui  devaient  lui  servir  de 
boulevard  contre  la  France.  L'empereur  fut  forcé  de  subir 
les  conditions  des  États  généraux,  et  tout  en  recevant 
d'eux  les  Pays-Bas,  de  leur  laisser  la  garde  exclusive  de 
ces  places. 

L'Électeur  se  disposa  alors  à  quitter  définitivement  le 
pays.  Le  24  novembre  1714,  les  députés  des  États  prirent 
connaissance  d'un  ordre  qu'il  avait  envoyé  au  marquis  de 
Maffei,  de  faire  charger  ses  meubles  sur  des  chariots  de 
la  province  pour  les  transporter  dans  le  pays  de  Luxem- 
bourg (1).  Toutefois,  le  renouvellement  du  magistrat  se  lit 
encore  le  50  novembre  1714  au  nom  de  l'Électeur;  ce  fut 
le  dernier  acte  de  son  administration. 

Vers  cette  époque,  le  marquis  de  Maffei  reçut  une  lettre 
du  comte  de  Kônigsegg  qui  le  sommait  de  remettre  à 
S.  M.  l.  les  ville  et  province  de  Namur.  Comme  on  n'avait 
reçu  à  cet  égard  aucune  instruction  officielle,  le  conseil 
d'État  de  l'Électeur  envoya  le  receveur  général  de  Namur 
à  S'-Cloud,  pour  apprendre  de  Maximilien  ce  qu'il  y  avait 


(1)  «  Le  29  novembre-  a  été  vaqué  à  faire  la  répartition  de  60  chariots  pour 
mener  le  bagage  de  S.  A.,  et  de  42  chevaux  harnachés.  »  {Résolutions  des  États.) 


(  209  ) 

à  l'aire  (1).  Ce  fut  sans  doute  à  la  suite  de  cette  démarche 
qu'il  adressa,  le  1"  décembre,  au  Magistrat  et  au  Conseil 
de  JNamur,  une  lettre  par  laquelle,  en  exécution  des  traités 
conclus  à  Rastadt  et  à  Bade,  il  les  relevait  du  serment 
de  fidélité  qu'ils  lui  avaient  prêté  lors  de  son  inaugura- 
tion, et  les  remerciait  du  zèle  et  du  dévouement  avec 
lesquels  ils  Pavaient  secondé  dans  sa  courte  adminis- 
tration. Six  jours  après,  le  comte  de  KÔnigsegg  écrivit  de 
nouveau  au  conseil  deNamur,  pour  lui  l'aire  savoir  que 
S.  M.  I.  et  C.  était  entrée  en  possession  des  ville  et  pro- 
vince de  Namur,  et  pour  lui  ordonner  de  ne  reconnaître  à 
l'avenir  d'autre  souverain  que  l'Empereur  et  de  n'obéir  à 
d'autres  ordres  qu'à  ceux  qui  lui  viendraient  par  son  canal. 
«  En  attendant,  vous  ferez  provisionnellement  les  fonc- 
tions ordinaires  de  vos  charges,  jusqu'à  ce  que  S.  M.  I. 
et  C.  en  ait  autrement  ordonné.  »  Cette  lettre  fut  lue  le 
12  décembre  en  séance  des  députés  des  États,  qui  y  firent 
immédiatement  réponse. 

Les  8  et  17  décembre  1714  et  le  4  janvier  1715,  le 
Conseil  provincial  et  les  trois  Ordres  écrivirent  au  comte 
de  Kôuigsegg  et  à  l'Empereur  pour  «  témoigner  leur  joie 
d'être  rentrés  sous  l'auguste  domination  de  la  maison 
d'Autriche  (2).  »  Le  comte  de  Kônigsegg  mande,  le  8  fé- 


(1)  Comptes  du  domaine,  4714,  fol.  226  v<». 

(2)  Résolutions  des  États,  IX,  fol.  194.  Voici  la  lettre  du  Conseil  provincial  au 
comte  de  Kônigsegg  : 

«  Monseigneur,  nous  avons  receu  avec  beaucoup  de  joye  celle  qu'il  a  plu  à 
Votre  Excellence  nous  faire  l'honneur  d'escrire  le  jour  d'hier.  Nous  ne  scaurions 
assé  témoigner  à  Votre  Excellence  la  joye  que  nous  ressentons  d'être  remis  sous 
la  douce  et  ancienne  domination  de  la  très  auguste  maison  d'Austriche,  vous 
asseui^ant,  Monseigneur,  que  nous  exécuterons  toujours  en  très  profond  respet 
et  soumission  les  ordres  qu'il  plaira  à  Sa  Majesté  impériale  et  catholique  vous 
donner,  et  que  nous  nous  attacherons  toujours  à  son  service  avec  tout  le  zèle  et 
2"°^  SÉRIE,  TOME  XL.  14 


(  210  ) 
vrier  1715,  aux  Étals  qu'il  a  nommé  le  comte  de  Lan- 
noy  administrateur  général  de  la  province.  De  son  côté, 
Charles  VI  leur  exprime,  le  16  du  même  mois,  son  con- 
tentement des  sentiments  de  fidélité  qu'ils  expriment  et 
les  assure  de  son  amour  paternel,  promettant  de  faire  tout 
ce  qui  pourrait  contribuer  à  rendre  ses  sujets  heureux  (1). 
Afin  de  ne  plus  avoir  à  s'occuper  des  affaires  de  la  pro- 
vince, Maximilien  écrivit  encore  le  12  mai  171 3  à  son  conseil 
d'État,  qu'il  établissait  le  marquis  de  Maffei,  gentilhomme 
de  sa  chambre  et  lieutenant  général  de  ses  troupes,  en 
qualité  de  gouverneur  et  souverain  bailli  de  la  ville,  du 
château,  de  la  province  et  du  comté  de  Namur.  On  en  re- 


fidélité  possible;  suppliant  Votre  Excellence  de  nous  vouloir  accorder  l'honneur 
de  sa  protection,  et  d'être  persuadé  que  nous  sommes  avec  toute  vénération, 
Monseigneur,  de  Votre  Excellence  les  très-humbles  et  très-obéissants  serviteurs. 
(Signé.)  Les  président  et  gens  du  conseil  provincial  de  Sa  Majesté  impériale  et 
catholique,  à  Namur.  —  Namur,  le  8  décembre  4714.  » 

Superscription  :  A  Son  Excellence  le  comte  de  Kônigseî^g ,  plénipotentiaire  de 
s.  M.  1.  et  C,  à  Anvers.  [Correspondance  du  Conseil  provincial  de  Namur, 
ITld-lTio^fol.  304.) 

(1)  Voici  la  lettre  de  Charles  VI  : 

«  L'Empereur  et  Roy.  Très  chers  et  féaux  les  députiez  de  l'État  ecclesiasticque, 
noble  et  tiers  de  notre  comté  et  province  de  Namur. 

»  C'est  bien  avec  de  la  satisfaction  et  d'aggrement  que  nous  avons  receu  votre 
lettre  du  17  du  mois  de  décembre  de  l'année  passée ,  par  laquelle  vous  vous  anti- 
cipez pour  nous  donner  une  marque  de  votre  fidélité  et  amour  qui  corresponde 
entièrement  à  notre  attente,  vu  la  fermeté  et  zelle  avec  lesquels  vous  avez  tou- 
jours étez  attaché  à  vos  princes  naturels,  nos  prédécesseurs.  En  reconnaissance  de 
quoy,  nous  voulons  bien  vous  en  marquer  par  celle-cy  notre  contentement ,  et 
vous  asseurer  en  mesme  temps  de  l'amour  paternele  et  du  soin  tout  particulier 
dont  nous  vous  regarderons  constament,  et  tâcherons  de  vous  procurer  tout  ce  qui 
puisse  rendre  contents  et  heureux  de  si  bons  et  si  fidels  sujets .  et  qui  vous  puisse 
convaincre  des  efîects  de  notre  clémence  et  protection.  Attant,  très  chers  et 
féaux,  nous  prions  Dieu  qu'il  vous  ayt  en  sa  sainte  garde.  Vienne,  le 
46  février  1745. 

p  Signé  :  CHARLES.  Et  plus  bas  :  Par  l'Empereur  et  Roy  :  A.  F.  KuR.  » 

{Résolutions  du  magistrat  de  Namur,  1708-17:20,  fol.  loOvo.) 


(211  ) 

venait  ainsi  à  Fancien  ordre  de  clioses,  et  Namur  retombait 
sous  le  régime  de  la  représentation  du  pouvoir  souverain, 
comme  avant  l'arrivée  de  Maximilien.  L'inauguration  du 
marquis  de  Maffei  eut  lieu  avec  le  cérémonial  habituel  et 
fut  signalée  par  des  fêtes,  des  illuminations,  la  fabrication 
de  jetons  commémoratifs ,  absolument  comme  sous  la 
domination  des  rois  d'Espagne  et  des  archiducs  (1). 

Le  11  avril  17io  fut  enfin  conclu,  entre  la  France  et  la 
Hollande,  le  traité  d'Utrecht,  aux  termes  duquel  Phi- 
lippe V  renonçait  aux  Pays-Bas  espagnols  en  faveur  de 
la  maison  d'Autriche.  Par  l'article  9  était  révoqué  l'acte 
du  2  janvier  1712  qui  cédait  en  toute  souveraineté  ces 
provinces  à  l'Électeur  de  Bavière.  Toutefois,  ce  prince  en 
conservait  l'administration  civile  et  politique  jusqu'au  mo- 
ment de  sa  réintégration  dans  ses  propres  États.  Le  gou- 
vernement militaire  devait  être  confié  à  une  garnison  hol- 
landaise, chargée  de  garder  la  place  au  nom  de  l'empereur 
jusqu'à  la  conclusion  de  la  paix  générale. 

En  exécution  de  ce  traité,  l'Électeur  remit,  le  29  mai, 
la  ville  et  le  château  au  commandant  de  six  bataillons  de 
troupes  hollandaises  (2). 

Cependant  Maximilien-Emmanuel  était  retourné  en  Alle- 
magne dans  ses  États  héréditaires;  il  y  mourut  le  26  fé- 
vrier 1726,  laissant  la  réputation  d'un  prince  plus  aven- 
tureux que  sage,  mais  intelligent,  brave  et  magnifique. 
Ces  qualités,  qui  excluent  généralement  l'ordre  et  le  bon 


(4)  Résolutions  du  magistrat,  fol.  122  et  122  v<».  « 

(2)  Le  2  juin,  les  échevins  de  Namur  présentent  une  pièce  de  Volnay  à 
MM.  Chambrier  et  de  Keppel,  commandants  des  Hollandais,  et  une  demi-pièce  au 
major  Salis,  pour  les  engager  à  tenir  leurs  troupes  en  bonne  discipline.—  La  ville 
fait  nettoyer  les  greniers  de  la  halle  au  blé  pour  servir  à  faire  les  dévotions  à  la 
garnison  hollandaise.  (Comptes  du  domaine,  1713,  foi.  2o7  v».) 


(  212  ) 

ménage,  lui  avaient  conquis  beaucoup  de  sympathies  à 
Namur,  bien  qu'il  n'y  eût  guère  passé  que  comme  une 
ombre.  Il  y  laissa  des  regrets  trop  fugitifs  pour  résister  à 
l'action  du  temps,  et  peu  de  Namurois  savent  aujourd'hui 
que  Maximilien-Emmanuel  de  Bavière  fut  un  instant  leur 
souverain. 

Son  fils  Charles-Albert,  qui  lui  succéda,  le  6  août  1697, 
dans  l'Électorat  de  Bavière,  fut  élu  empereur  le  24  jan- 
vier 1742;  mais  sa  couronne  impériale  fut  aussi  éphémère 
que  l'avait  été  pour  son  père  le  sceptre  des  Pays-Bas,  et  il 
y  trouva  plus  d'épines  encore. 


(  215  ) 


CLASSE  DES   BEAUX- 4  ATS. 


Séance  du  5  août  i875. 
M.  Alph.  Balat,  directeur. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin,  G.  Geefs,  Jos.  Geefs, 
C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Edra.  De  Busscher,  Aug.  Payen, 
le  chevalier  Léon  de  Burbure,  J.  Franck,  Gust.  De  Man, 
Ad.  Siret,  Ernest  Slingeneyer,  Alex.  Robert,  membres. 

M.  R.  Chalon,  membre  de  la  classe  des  lettres,  assiste  à 
la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  directeur  transmet  à  ses  confrères  les  regrets  qu'ex- 
prime M.  le  secrétaire  perpétuel  de  ne  pouvoir  venir  pren- 
dre sa  place  au  bureau  à  cause  de  la  mission  qu'il  remplit 
en  ce  moment,  au  nom  du  gouvernement,  auprès  du 
Congrès  international  des  sciences  géographiques  de  Paris. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  transmet  une  copie  du 
procès-verbal  des  opérations  du  jury  chargé  de  juger  le 
grand  concours  d'architecture  de  1875. 

11  résulte  de  ce  document  que  M.  J.-B.  De  Coster, 
d'Anvers,  a  été  proclamé  lauréat  du  concours. 


(  214  ) 

Le  deuxième  prix  a  été  décerné,  en  partage,  à  MM.  AI- 
lard,  de  Bruxelles  et  Oct.  Van  Rysselberghe,  de  Minder- 
liout  (Anvers). 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  annonce  que  M.  Dieltjens, 
lauréat  du  grand  concours  d'architecture  de  Tannée  1871, 
vient  d'adresser  au  gouvernement  un  Projet  de  restaura- 
tmij  en  style  corinthien,  du  temple  de  Vesta,  à  Tivoli,  du 
temps  de  la  République.  Cet  envoi  est  fait  en  exécution  des 
prescriptions  de  l'arrêté  organique  du  23  février  1865, 
qui  impose  aux  lauréats  l'exécution  d'une  copie. 

M.  le  Ministre  désire  savoir  si  cette  œuvre  peut  jouir 
du  bénéfice  de  la  législation  nouvelle  des  grands  con- 
cours, en  vertu  de  laquelle  et  sur  l'avis  favorable  de  la 
classe  des  beaux-arts,  une  rémunération  peut  être  accordée 
aux  lauréats  pour  les  copies  qu'ils  exécutent  dans  le  cours 
de  leurs  voyages. 

Les  membres  de  la  section  d'architecture  présents  à  la 
séance  donnent  un  avis  favorable,  lequel  est  adopté  par  la 
classe  et  sera  communiqué  à  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur. 


RAPPORTS. 


M.  L.  Alvin  donne  lecture  du  rapport  qu'il  a  été  chargé 
de  faire,  au  nom  delà  classe,  sur  les  arrêtés  royaux  du 
22  mai  1875,  relatifs  aux  grands  concours  pour  les  prix 
dits  de  Rome;  il  indique  en  quoi  il  est  satisfait,  par  les 
nouvelles  dispositions,  aux  vœux  exprimés  à  diverses  re- 
prises par  la  classe  des  beaux-arts. 


(  213  ) 

La  classe  décide  que  des  remercîments  seront  adressés 
à  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  au  sujet  de  cette  législation 
nouvelle  des  grands  concours. 

Elle  s'occupera,  dans  sa  prochaine  séance,  de  la  nomi- 
nation des  membres  de  la  Commission  qui  sera  chargée  de 
dresser  la  liste  des  objets  d'art  qui  pourraient  être  utilement 
reproduits  par  les  lauréats  pendant  leur  séjour  à  l'étranger. 


PRÉPARATIFS   DE    LA   SÉANCE    PUBLIQUE. 

Aux  termes  de  l'article  11  du  règlement  général  de 
l'Académie,  la  classe  doit  tenir  sa  séance  publique  annuelle 
dans  le  courant  du  mois  de  septembre. 

M.  le  directeur  fait  connaître  que  d'après  les  renseigne- 
ments donnés  officieusement  par  M.  Gevaert,  président  du 
jury  chargé  de  juger  le  grand  concours  de  composition 
musicale,  le  jugement  a  dû  être  forcément  ajourné,  par 
décision  de  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur,  à  cause  de  la  ma- 
ladie d'un  des  concurrents. 

En  présence  de  cet  état  de  choses  qui  ne  permet  plus 
de  former  la  partie  musicale  de  la  prochaine  assemblée 
delà  classe,  celle-ci,  appelée  à  s'occuper  déjà  des  pré- 
paratifs de  sa  séance  publique  annuelle,  décide  qu'elle  la 
tiendra,  comme  les  autres  classes,  dans  la  grande  salle 
des  Académies;  elle  cherchera  dans  son  sein  les  éléments 
littéraires  nécessaires  pour  composer  dorénavant  le  pro- 
gramme de  cette  solennité. 


(  2i6  ) 
CONCOURS  DE  1875. 


D'après  le  programme  des  conditions  pour  le  concours 
de  sujets  d'art  appliqué  de  cette  année,  le  terme  fatal  pour 
la  remise  des  bas-reliefs  pour  le  concours  de  sculpture, 
et  des  médailles  pour  le  concours  de  gravure,  expire  le 
1"  septembre  prochain. 

La  classe  fixe  sa  prochaine  séance  au  jeudi  2  septembre 
pour  le  jugement  des  concours.  La  section  de  sculpture,  à 
laquelle  sera  adjoint  M.  Fétis,  et  la  section  de  gravure  à 
laquelle  seront  adjoints  MM.  L.  Alvin  et  Chalon,  se  réuni- 
ront le  même  jour,  à  M  heures,  pour  juger  les  œuvres 
soumises  aux  concours  précités  d'art  appliqué. 


OUVRAGES  PRESENTES. 


Dewalqiie  {G.).  —  Histoire  des  noms  cambrien  et  silurien 
en  géologie  par  T.  Sterrij  Hunt.  (Traduction.)  iMons,  i875; 
vol.  in-8°. 

Morren  (Éd.).  —  Charles  de  TEscluse.  Sa  vie  et  ses  œuvres, 
1526-1009.  Liège,  1875;  vol.  in-S". 

Scheler  {Aug.).  —  Exposé  des  lois  qui  régissent  la  transfor- 
mation française  des  mots  latins.  Bruxelles,  1875;  vol.  petit 
in-8». 

Devillers  (Léopold).  — Description  analytique  de  Carlulaires 
et  de  Charlriers  accompagnée  du  texte  de  documents  utiles  à 
l'Histoire  du  Hainaut,  tome  VIP.  Mons,  1875;  in-8°. 


(  217  ) 

Docx  [Le  capitaine).  —  Guide  pour  l'enseignement  de  la 
gymnastique  des  filles  et  Guide  pour  l'enseignement  de  la 
gymnastique  des  garçons.  Namur,  1875  ,  2  vol.  in-8°. 

Chaton  {J.).  —  La  graine  des  légumineuses.  1"  Cellules  de  la 
carapace;  2"  Albumen.  Mons,  1875;  br.  in-S". 

Inghels  (Adhèmar).  —  Histoire  des  comtes  de  Flandre  jus- 
qu'à l'avènement  de  la  Maison  de  Bourgogne  (805-1384). 
Bruges,  1875;  vol.  in-8°. 

Pety  de  Thozée  [Ch.).  —  Système  commercial  de  la  Belgique 
et  des  principaux  États  de  l'Europe  et  de  l'Amérique,  tome 
second.  Bruxelles,  1875;  vol.  in-8». 

Spring  (W.).  —  Hypothèses  sur  la  cristallisation.  Liège, 
1875;br.  in-8«. 

Van  Elewyck  (Le  Chevalier),  —  Rapport  officiel  sur  l'état 
actuel  de  la  musique  en  Italie.  Paris,  Bruxelles,  1875;  vol. 
in-8». 

Wareg-Massalskî  [Urbain).  —  Recherches  sur  les  acides 
chloro-bromo-propioniques  glycèriques  Cg  H3  CI  Br  —  COOH. 
(Dissertation,  etc.)  Louvain,  1875;  br.  in-8". 

Société  royale  de  numismatique  de  Bruxelles.  —  Revue 
belge  de  numismatique,  1875,  4*  liv.  Bruxelles;  in-8''. 

De  Vlaamsche  School,  Aflevering  1  a  12,  1875.  Anvers, 
4875;  12  feuilles  in-4». 

Situation  administrative  des  neuf  provinces.  —  Exposés, 
rapports  et  annexes  pour  l'année  1875.  Anvers,  Bruxelles,  etc.; 
12  vol.  et  2  br.  in-8«. 

Société  chorale  et  littéraire  des  Mélophiles  de  Hasselt.  — 
Bulletin  de  la  section  littéraire,  11*  vol.  Hasselt,  1874;  in-8». 

De  Dietsche  Warande  y  nieuwe  reeks,  1'"  deel,  derde  afle- 
vering. Amsterdam,  1875;  in-8°. 

D'Eichthal  (Gustave).  —  Mémoire  sur  le  texte  primitif  du 
1"  r(''cit  de  la  création  (Genèse,  ch.  I-IL  4),  suivi  du  texte  du 
2*  récit.  Paris,  1875;  br.  in-8°. 

Delisle  (Léopold).  —  Notice  sur  un  manuscrit  mérovingien 


(  218  ) 

contenant  des  fragments  d'Eugyppius,  appartenant  à  M.  Jules 
Desnoyers.  Paris,  1875;  gr.  in-4°. 

Marie  {Maximilien).  —  Théorie  des  fonctions  de  variables 
imaginaires,  tome  2^  Paris,  1875;  vol.  in-8^ 

Société  Linnéenne  du  nord  de  la  France,  à  Amiens»  — 
Bulletin  mensuel,  5**  année,  mai,  juin,  juillet  et  août  1873. 
Amiens;  4  feuilles  in- 8°. 

Indicateur  de  l'Archéologue,  n°'  '23-24,  novembre-décembre 
1874. Paris;  in-S". 

Société  de  géographie  de  Paris. —  Bulletin,  avril,  mai  et 
juin  1873.  Paris;  3  fasc.  in-8°. 

École  polytechnique  de  Paris.  —  Journal ,  44^  cahier, 
tome  XXVII.  Paris,  1874;  in-4''. 

Société  mathématique  de  France.  —  Bulletin,  t.  III,  juillet- 
août  1873,  n*»'  5  et  4.  Paris;  in-8". 

Société  d'histoire  naturelle  de  Toulouse.  —  Bulletin, 
IX"  année,  1874-1875,  2^  fasc.  Paris,  juillet  1875;  in-S"'. 

Hirn  {G- A).  —  Exposition  analytique  et  expérimentale  de 
la  théorie  mécanique  de  la  chaleur,  ^^  édition,  tome  V\  Paris 
1875;  vol.  in-8". 

Lasaulx  {D''  A.  von).  —  Elemente  der  Pétrographie.  Bonn, 
1873;  vol.  in-8°. 

Akademie  der  Wissenschaften  zu  Berlin.  —  Monatsbericht, 
April  1875.  Berlin,  187.5;  in-8^ 

Die  Naturforschende  Gesellschaft  in  Danzig.  —  Schriften  , 
Neue  Folge,  3.  Baud,  5.  Heft.  Danzig,  1874;  pet.  in-4°. 

Verein  fur  Erdkunde  zu  Dresden.  —  XI.  und  XII.  Jahres- 
bericht.  Dresde,  1875;  fasc.  in -8". 

Justus  Perihes  'Geographische  Anstall  zu  Gotha. —  Mit- 
theilungen:  1856,  I;  1860,  XI;18G1,VII;  1862,  IX;  1866, 
IX;  1875, 19.  Bd.,  VI;  1875,  21.  Bd.,  VII  und  VIII.  -  Ergan- 
zunsheft,  N^  V.  Gotha;  9  cah.  in-4". 

Astronomische  Gesellschaft  zu  Leipzig.  —  Vierteljahrs- 
schrift,  X.  Jahrg.,  Drittes  Heft.  Leipzig,  1875;  in-8". 


(  219  ) 

K.  h.  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Munchen.  —  Sit- 
zungsbericlite  dcr  philosop.-philolog.  iind  hist.  Classe,  1874, 
Heft  IV.  Munich,  1874;  in-8°. 

K.  K.  Universitàt  zu  Wien.  —  Offentliche  Vorlesungen  im 
Winter-Semcster  1873/70.  Vienne,  1873;  br.  in-4*'  (2  exem- 
plaires). 

Deutsche  Gesellscha/Î  fur  Natur  iind  Vôlkerkimde  Osta- 
siens. —  Miltlieilungen,  7'"  Ilcft,  juin  1873.  Jokohama;  in-4**. 

Société  impériale  des  naturalistes  de  Moscou.  —  Bulletin, 
année  1874,  n°  4.  Moscou,  1873;  in-8". 

Gôteborgs  K.  Vetenskaps-och  Vilterhets-Samhâlles.  — 
Handlingar,  Ny  Tidsfôijd  :  15  och  14  Hôftet.  Gothembourg, 
1874;  2  fasc.  in-8°. 

Nordiskt  Medicinskt  Arkiv.,  Band  VII.,  N^  6.  Stockholm, 
1873;in-8°. 

Academia  de  Jurisprudencia  y  Legislacion,  Madrid.  — 
Revista,  ano  i-nûm.  1°.  —  April  1875.  Madrid;  in-8°. 

Leva{Ginseppe  rfe).  —  Storia  documenlata  di  Carlo  Vincor- 
relazione  ail'  Italia,  vol.  I,  II  e  III.  Padoue  et  Venise,  1865, 
1864  et  1873;  3  vol.  in-8°. 

Di  Giovanni  {Vincenzo).  —  Il  Miceli  ovvero  dell'  Ente  uno 
e  reale.  —  Il  Miceli  ovvero  l'Apologia  del  sistema.  —  Rosario 
Gregorio  e  le  sue  opère  (Discorso).  —  Storia  délia  filosofia  in 
Sicilia  da'  tempi  antichi  al  secolo  XiX,  vol.  I  e  II.  —  Sofismi 
e  Buon  Senso,  Serate  Campestri,  2"  ediz.  —  Scuola  scienza  e 
Critica.  —  Degli  Eruditi  Siciliani  del  Secolo  XV,  etc.  —  Boezio 
e  il  Suo  Libro  de  consolatione  Philosophiae.  Padoue  et  Florence, 
1864  à  1873;  6  vol.  et  2  br.  in-8%  br.  in-4''. 

Società  entomologica  italiuna ,  Firenze.  —  Bullettino, 
anno  7",  trimestre  II.  Florence,  1873;  in-8°. 

Reale  Osservatorio  di  Brera  in  Milano.  —  Pubblicazioni, 
n'  IV,  V,  VIII  et  IX.  Milan,  1873;  4  fasc.,  gr.  in-4°. 

Regia  Accademia  di  scienze,  lettere  ed  arti  in  Modena.  — 
Meraorie,  lomo  XV.  Modène,  1873;  vol.  in-4°. 


(  220  ) 

Accademia  agraria  di  Pesai o.  —  Esercitazioni,  anno  l'-XI**, 
1830-1848.  Pesaro;22  fasc.  in-S". 

Commission  géodésique  suisse.  —  Détermination  télégra- 
phique de  la  difîérence  de  longitude  entre  la  station  astrono- 
mique du  Simplon  et  les  Observatoires  de  Milan  et  de  Neu- 
châtel  {E.  Plantamour  et  A.Hirsch).  Gcnève-Bàle-Lyon,  1875; 
vol.  in-4". 

Institut  Egyptien  à  Alexandrie.—  Bulletin,  année  4874- 
1875,  n"  iô.  Alexandrie;  vol.  in-8". 

Société  Kliédiviale  de  Géographie  à  Alexandrie.  —  Statuts 
de  la  Société.  —  Discours  prononcé  au  Caire  à  la  séance 
d'inauguration  le  2  juin  1875,  par  le  D*"  G.  Schweinfurth. 
Alexandrie,  1875;  2  br.  in-8°. 

Saunders  (/.).  —  List  of  tlie  books,  memoirs,  and  miscel- 
laneous  papers  by  D^  John  Edward  Gray,  F.  R.  S.  Londres, 
1875;br.in-8». 

British  Association  for  the  Advancement  of  Science.  — 
Report  of  the  XLIV"'  meeting,  held  at  Belfast  in  August  1874. 
Londres,  1875;  vol.  in-8°. 

Anthropological  Institute  of  Great  Britain  and  Ireland.  — 
Journal,  vol.  IV,  n°  H,  april  1875.  Londres;  in-8^ 

Royal  geographical  Society  o/'Zo/îrfon.— Journal,vol.  XLIV, 
1874.  —  Proceedings,  vol.  XIX,  n\  V,  1875.  Londres;  vol.  et 
fasc.  in-8°. 

Geological  Society  o f  London. —  Quaierly  Journal,vol.  XXXI, 
part.  2,  n"  122.  Londres,  mai  1875;  in-8°. 

Statistical  Society  of  London.  —  Journal,  vol.  XXXVIIl, 
part  II,  june  1875.  Londres;  in -8°. 

Institution  of  Civil  Engineers  ^  London.  —  Minutes  of  pro- 
ceedings, vol.  XL  and  XLI,  session  1874-75,  parts  II  and  III. 
Londres,  1875,  2  vol.  in-8". 

Zoological  Society  of  London.  —  Transactions,  vol.  IX, 
pts.  1,  2  and 3;  —  Proceedings,  1874,  pt.  4;  1875, pt.  1.  Lon- 
dres 1875  ;  3  fasc.  in-4»  et  2  vol.  in-8'». 


(  221  ) 

Meleorological  Society  of  London.  —  Qunrtcriy  Journal, 
new  séries,  vol.  II,  n"  15  and  14,  january  and  april  1873.  — 
Instructions  for  ihe  observation  of  phrenological  phenomcna. 
Londres,  1875;  5  fasc.  in-S". 

London  niathemalical  Socieff/.  —  Proceedings,  vol.  VI, 
n"  79  and  80.  Londres,  cah.  in -8''. 

Phitosophical  Society  of  Glasgow.  —  Proceedings,  1874-75, 
vol.  IX,  n"  2.  Glasgow,  1875;  in-8". 

Asiatic  Society  of  Bengal  at  Calcutta.  —  Journal  :  part  I, 
No.  IV,  1874;  pt.  1  ,  No.  1,  1875.  —  Proceedings,  No.  10,  de- 
cember  1874;  Nos.  1-5,  january-may,  1875.  —  Bibliotheca 
indica  :  New  séries,  Nos.  315  and  515.  Calcutta,  1874, 1875; 
9  fasc.  in-8°. 

Meleorological  office,  Toronto. —  Reports  on  the  meteoro- 
gical,  magnetic  and  other  observatories  of  the  Dominion  of 
Canada  for  the  calendar  year  ended  51  st  december,  1874. 
Ottawa,  1875;  voL  in-8°. 

Harrtt  {Ch.  Fred.)  and  Rathbun  (Richard),  —  On  the  devo- 
nian  trilobites  and  mollusks  of  Ereré,  province  de  Para,  Bra- 
zil.  New-York,  1875;  br.  in-8«. 

Boston  Society  of  Nalural  History.  —  Memoirs  :  vol.  II, 
pt.  III,  n"'  III-V;  part  IV,  n»  l  —  Proceedings,  vol.  XVI, 
pis.  5  and  4,  1874;  vol.  XVII,  pts.  1  and  2, 1874.  —  Mémorial 
meeting  [Jeffries  Wyman).  Boston,  1874;  4  cah.  in-4°,  4  fasc. 
et  1  br.  in-8^ 

The  Chicago  Journal  of  nervous  and  mental  disease,  vol.  II, 
n"  1  and  ±  Chicago ,  1875;  in-8". 

Chicago  Public  Library,  1''  and  2°"^  Annual  Report.  Chicago, 
1875,  1874;  2  br.  in-S». 

Peobody  Institule  of  the  city  of  Baltimore.  —  Eighth  An- 
nual Report.  Baltimore,  juni  1875;  in-8°. 

Maseo  Piiblico  de  Buenos  Aires.  —  Anales,  lomo  2", 
Entrega  12".  Buenos-Aires,  1874-1875;  in-4°. 

Wisconsin  Academy   of  Sciences,   Arts  and  Letters.  — 


(  222  ) 

Transactions,  vol.  H,  4875-1874.  Madison,  d874;  vol.  in-8°. 

Sociedad  de  Geografia  y  Estadistica  de  la  Republica  Mexi- 
ca?ia. —  Bolctin,  o^ëpoca,  tomo  II,  n"  3  y  4.  Mexico,  1875; 
in-8». 

American  Plnlosophical  Society  held  at  Philadelphia  for 
promoting  use  fui  Knowledge.  —  Proceedings ,  vol.  XIV,  n°  93, 
june  lo  deceraber,  1874.  Philadelphie;  in-8'*. 

Academy  of  Naturul  Sciences  of  Philadelphia.  — Procee- 
dings :  parts  I  at  III,  1874.  Philadelphie,  1874-1875;  5  fasc. 
in-8». 

Essex  Institute  of  Salem.  —  Bulletin,  vol.  VI,  1874.  Salem, 
1875;  vol.  in-8°,  en  feuilles. 

Academy  of  Science  of  S'-Louis. — Transactions,  vol.  III, 
n°  2.  S'-Louis,  1875;  in-8''. 

Missouri  Geological  Survey ,  S'-Lonis,  Mo.  —  Report, 
vol.  1,  1875-1874,  wilh  91  illustrations  and  atlas.  Jefl'erson 
City,  1874;  vol.  in-8°  et  allas,  in-4°. 

U.  S.  Département  of  agriculture. —  Report  of  the  Coramis- 
sioner  of  agriculture  for  ihe  year  1873. —  Monthly  reports  for 
Ihe  year  1874.  Washington,  1874-1875;  2  vol.  in-8". 

Smithsonian  Institution  of  Washington.  —  Annual  report, 
for  the  year  1873.  Washington,  1874;  vol.  in-8°. 

United  States  Naval  Observatory  at  Washington. —  Astro- 
nomical  and  meteorological  observations  made  during  the  year 
1872.  Washington,  1874;  vol.  in-4°. 

United  States  geological  Survey  of  Terrifories  at  Was- 
hington. —  Catalogue  of  the  publications,  1874.  —  iMiscella- 
neous  publications  :  No.  1 .  Lists  of  Elévations  in  that  portion  of 
the  United  States  west  of  the  Mississipi  River,  5*  édit.  1875 
(H.  Gannett);  n°  2,  Birds  of  ihe  Noriwest.  A  hand-book  of  ihe 
ornithology  of  the  région  draincd  by  the  Missouri  river  and 
its  Triburies  {Elliott  Coues).  —  Report,  vol.  VI,  1874.  Contri- 
butions to  the  Fossil  Flora  of  the  Western  Territories.  The 
Cretaccous  Flora  (Léo  Lesquereux).  —   Map  of  the  Lower 


(  223  ) 

Geyser  Bassin.  —  Map  of  Uppcr  Geyser  Basin.  —  Montana 
and  Wyoming  Territories,  einbracing  of  the  counlry  about  the 
sources  of  the  3Iadison,  Gallatin,  and  Yellowstone  Hivers,  in 
contour-lines.  —  Map  of  the  Sources  of  Snake  River  and  its 
Tributaries.  —  PreUminary  niap  of  Central  Colorado,  Showing 
the  région  surveyed  in  i  875.  Washington  ;  vol.  in-i",  vol.  et 
2  br.  in-S";  6  cartes  in-fol. 

Mueller  [Ferdinand  de).  —  Fragmento  phytographiae  Aus- 
tralise,  vol.  VI  et  VII.  Melbourne,  18C7-187I;  2  vol.  in-8°. 

Liste  des  ouvrages  déposés  par  la  Commission  royale 
d'histoire  dans  la  Bibliothèque  de  l'Académie. 

Ministère  de  l'instruction  publique  de  France.  —  Docu- 
ments inédits  de  l'histoire  de  France  :  Inscriptions  de  la 
France  du  V^  au  XVIIP  siècle  recueillies  et  publiées  par  M.  F. 
De  Guilhermy.  Ancien  diocèse  de  Paris  ,  t.  II,  1874;  in-4°.  — 
Correspondance  et  papiers  d'État  du  cardinal  de  Richelieu,  par 
M.  Avenel.  Tome  VII%  1642;  supplément  :  1608  à  1642  ;  in-4°. 
—  Lettres  du  cardinal  Mazarin  publiées  par  M.  A.  Cheruel 
(décembre  1642-juin  1644),  t.  I,  1874;  in-4°.  —  Mandements 
et  actes  divers  de  Charles  V  (1304-1580),  recueillis  par 
M.  L.  Delisle.  Paris,  1874;  in-4*'.  —  Mélanges  historiques  (nou- 
velle série),  t.  I,  1873;  in-4°.  —  Mélanges  historiques  (Table 
chronologique  et  alphabétique  de  la  l'"''  série,  1841-1848). 
Paris,  1874;  in-4°.  —  Rapports  au  Ministre  sur  la  collection 
des  documents  inédits.  Paris,  1874;  in-4''. — Dictionnaires 
topographiques  :  d'Eure-et-Loir  (L.  Merlet);  de  lYonne  (Max. 
Quanlin);  de  la  Meurthe  (H.  Lepage);  du  Morbihan  (Rosenz- 
weig);  des  Basses-Pyrénées  (P.  Raymond);  de  la  Nièvre  (G.  de 
Soultrail);  de  l'Hérault  (E.  Thomas);  du  Haut-Rhin  (G.  Sloffel); 
du  Gard  (Germer-Durand);  de  l'Aisne  (Ang.  Maiton);  de  la 
Meuse  (Félix  Liénard);  delà  Moselle  (De  Bouteillier);  de  l'Aube 
(Th.  Bouliot  et  Emile  Socard).   13  vol.  in -4°.  —  Répertoire 


(  224  ) 

archéologique  :  de  TAube  (D'Arbois  de  Jubainville)  ;  de  l'Oise 
(Emm.  Woillez)  ;  du  Morbihan  (Rosenzweig);  de  la  Seine-Infé- 
rieure (L'abbé  Cochet);  du  Tarn  (H.  Crozes);  de  l'Yonne  (Max. 
Quantin).  6  vol.  in-4''. 

Institut  archéologique  du  Luxembourg.  —  Annales  :  t.  VU, 
atlas;  t.  Vlll,  i"  et  2«  cahiers.  Arlon,  4874;  gr.  u\-H\ 

Cercle  archéologique  du  Pays  de  Waes,  à  S'-Nicolas. — 
Annales,  t.  V%  ^2*^  liv.  décembre  1874;  3*  liv.  juin  1875.  S'-Ni- 
colas; gr.  in-8"'. 

Société  d'agriculture,  sciences  et  arts  de  V arrondissement 
de  Valenciennes.  —  Revue  agricole  :  t.  XXVIl,  1874,  n*"  10, 
M  et  12;t.  XXVllI,  1875,  n"'  1,  2,  5.  Valenciennes;  in-8°. 

Comité  flamand  de  France  à  Lille.  —  Annales  t.  XII,  1875- 
1874;  —  Bulletin,  t.  VI,  n»  11.  Lille,  vol.  et  fasc.  in-8°. 

Société  archéologique  de  la  province  de  Namur.  —  Annales, 
t.  XIII,  1"  liv.  Namur,  1875;  in-8». 

'  Historischer  Verein  fur  Niedersachsen,  Hanover.  —  Zeit- 
schrift,  Jahrg.  1873.  Hanovre,  1874;  vol.  in-8''. 

Grossherzôchliche  General- Landesarchiv  zu  Karlsruhe.  — 
Zeitschrift,  XXVI.  Ed.,  4  Heft;  XX VII.  Ed.,  1.  Heft.  Carisruhe, 
1874-1875;  2  cah.  in-8°. 

Historischer  Verein  zu  Darmstadt.  —  Archiv  fiir  Hessische 
Geschichte  und  Alterlhumskunde,  XIII.  Ed.,  3.  Heft.  Darmstadt, 
1874;  in-8». 

Institut  royal  grand-ducal  de  Luxembourg.  —  Publications 
de  la  section  historique,  année  1873,  XXVIII  (VI).  Luxembourg, 
1874;in-4«. 

Schoetier  (/.).  —  Catalogue  de  la  Eibliothèque  de  Luxem- 
bourg. Luxembourg,  1875  ;  voL  in-8*. 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 


DES 


LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIQUE. 
187S.  —  N««  9  ET  10. 


CLASSE  DES  BEAUX-ARTS. 


Séance  du  2  septembre  4875. 

M.  F.-A.  Gevaert,  vice-directeur,  occupe  le  fauteuil. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin,  L.  Gallait,  G.  Geefs, 
Jos.  Geefs,  C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Edm.  De  Busscher, 
le  chevalier  Léon  de  Burbure,  J.  Franck,  Gust.  De  Man, 
Ad.  Siret,  Julien  Leclercq,  Ernest  Slingeneyer,  Alex. 
Robert,  Ad.  Pauli,  membres. 

M.  R.  Chalon ,  membre  de  la  classe  des  lettres ,  assiste 
à  la  séance. 

2"'  SÉRIE,  TOME  XL.  15 


(  226  ) 


CORRESPONDANCE. 


M.  Balat,  directeur  de  la  classe,  exprime  par  écrit  ses 
regrets  de  ne  pouvoir,  pour  motifs  de  santé,  venir  présider 
la  séance. 

—  M.  le  Ministre  de  Fintérieur  transmet,  en  conformité 
de  Tarlicle  15  de  Tarrété  royal  du  22  mai  187o  : 

i°  Le  XII'  rapport  semestriel  de  M.  E.  Dielliens,  lauréat 
du  grand  concours  d'architecture  de  1871; 

2°  Le  Vl*"  rapport  de  M.  J.  Cuypers,  lauréat  du  grand 
concours  de  sculpture  de  1872. 

Conformément  à  la  demande  de  M.  le  Ministre,  ces 
communications  sont  renvoyées  à  l'examen  de  la  commis- 
sion chargée  de  s'occuper  de  la  liste  des  œuvres  d'art 
à  reproduire  par  les  lauréats  pendant  leur  séjour  à 
l'étranger. 

—  Le  collège  des  bourgmestre  et  échevins  de  la  ville 
d'Anvers  a  invité  l'Académie  a  bien  vouloir  assister  à 
l'inauguration  du  buste  du  baron  GustafWappers  qui  a  eu 
lieu  le  mardi  24  août,  à  10  heures  du  matin ,  dans  la  salle 
du  Musée  des  maîtres  anciens. 

—  L'Institut  royal  des  architectes  anglais  à  Londres ,  et 
l'Académie  agraire  de  Pesaro  remercient  pour  le  dernier 
envoi  annuel  des  publications  académiques. 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  donne  lecture  de  la  lettre 
suivante  qui  lui  a  été  adressée  par  M.  le  professeur  Thomas 


(  227  ) 

L.  Donaldson,  de  Londres,  associé  de  la  section  d'archi- 
tecture de  la  classe  : 

«  Désireux  d'offrir  à  l'Académie  une  preuve  de  mon  res- 
pect et  de  mon  dévouement,  et  de  faire  connaître  en  même 
temps  l'état  de  la  gravure  sur  acier  en  Angleterre,  j'espère 
que  vous  me  ferez  l'honneur  de  présenter  à  mes  confrères 
une  épreuve  avant  la  lettre  de  deux  planches  publiées  dans 
ces  dernières  années  par  V Art-Union  de  Londres,  dont  je 
suis  membre  du  conseil.  J'espère  que  l'Académie  y  recon- 
naîtra le  talent  de  nos  graveurs,  qui  n'ont  que  rarement 
l'occasion  d'en  faire  preuve  depuis  la  découverte  de  la 
photographie. 

»  J'ai  ajouté  à  ces  pfanches  deux  brochures  qui  en  don- 
nent la  description.  Je  désire  à  ce  sujet  appeler  votre  atten- 
tion sur  le  fait  étonnant  que  nous  avons,  cette  année-ci, 
plus  de  18,000  souscripteurs  payant  chacun  une  guinéeî 
ce  qui  fait  une  somme  d'environ  474,000  francs. 

»  Vous  trouverez  à  la  fin  d'une  des  brochures  la  situa- 
tion des  opérations  de  la  Société  depuis  son  commence- 
ment. » 

La  classe  décide  que  l'expression  de  sa  plus  vive  grati- 
tude sera  transmise  à  M.  Donaldson  au  sujet  du  don  des 
deux  gravures  précitées  représentant  :  V  La  rencontre  de 
Wellington  et  de  Blûcher  à  la  ferme  de  la  Belle-Alliance , 
le  i 5  juin  18 io,  d'après  la  fresque  de  Daniel  Maclisedans 
la  galerie  royale  du  Parlement  à  Londres,  gravée  par  Lumb 
Stocks  en  1872;  2"  le  Retour  de  la  pèche  (Eight  coast 
scènes),  tableau  d'A.  Willmore,  gravé  par  E.-W.  Cooke 
en  1872. 

Des  remercîments  sont  également  votés  à  M.  le  cheva- 
lier Xavier  Yan  Elewyck  pour  l'hommage,  fait  en  son  nom 
par  M.  Adolphe  Siret,  de  son  ouvrage  :  De  l'état  actuel  de 


(  228  ) 
la  musique  en  Italie.  Rapport  officiel  adressé  à  M.  le  Mi- 
nistre (le  l'intérieur  du  royaume  de  Belgique.  In-8°. 

—  Le  comité  institué  pour  célébrer  le  4'  centenaire  de 
la  naissance  de  Michel  Ange  envoie  le  programme  des  fêtes 
qui  seront  célébrées  à  ce  sujet  à  Florence  les  12,  15  et 
14  septembre  prochain.  Il  exprime  en  même  temps  le 
désir  que  l'Académie  envoie  des  délégués. 

La  classe  désigne  MM.  Fraikin,  De  Man  et  Slingeneyer. 
Elle  décide  en  même  temps  que  le  gouvernement  sera  prié 
de  lui  prêter  son  concours  dans  cette  circonstance. 


ÉLECTIONS. 

Conformément  à  l'article  17  de  l'arrêté  royal  du  22  mai 
1875,  réglant  l'organisation  des  grands  concours  de  pein- 
ture, de  gravure,  d'architecture  et  de  sculpture,  la  classe 
procède  à  la  nomination  de  la  commission  chargée  de  dresser 
la  liste  des  objets  d'art,  tableaux,  statues,  bas-reliefs,  etc., 
susceptibles  d'être  reproduits  par  les  lauréats  pendant  leur 
séjour  à  l'étranger. 

La  classe  désigne  : 

Pour  la  peinture  :  MM.N.  De  Keyser  et  Gallait; 

Pour  la  sculpture  :  MM.  Joseph  Geefs  et  Fraikin; 

Pour  la  gravure  ;  MM.  Franck  et  Leclercq  ; 

Pour  l'architecture  :  MM.  Balat  et  De  Man. 

MM.  L.  Al  vin  et  Éd.  Fétis,  de  la  section  des  sciences  et 
des  lettres  dans  leurs  rapports  avec  les  beaux-arts,  feront 
également  partie  de  la  commission. 


(  2^29  ) 

Rapport  de  M.  L.  Àlviii  sur  les  arrêtés  royaux  réorganisant 
les  grands  concours  du  gouvernement  pour  la  peinture, 
la  sculpture,  la  gravure  et  VarcJiltecture.  (Séance  du  5 
août.) 

Messieurs  et  honorés  confrères  , 

«  Vous  m'avez  fait  l'honneur  de  me  charger  de  vous 
faire  un  rapport  sur  les  arrêtés  royaux  du  22  mai  dernier 
relatifs  aux  grands  concours  pour  les  prix  dits  de  Rome  et 
de  vous  indiquer  en  quoi  il  est  satisfait  par  les  nouvelles 
dispositions  aux  vœux  exprimés  à  diverses  reprises  par  la 
classe  des  beaux-arts.  Le  préambule  de  ces  arrêtés  dont  il 
vous  a  été  donné  connaissance,  dans  la  séance  du  mois  de 
juin,  vise  deux  délibérations  de  notre  compagnie  et  rap- 
pelle les  rapports  et  les  conclusions  qui  ont  été  présentés 
en  son  nom  au  gouvernement,  sur  l'invitation  du  départe- 
ment de  l'intérieur,  rapports  portant  les  dates  du  5  août 
1871  et  du  11  novembre  1872. 

Après  avoir  relu  ces  rapports,  je  suis  d'avis,  Messieurs 
et  honorés  confrères,  que  la  classe  des  beaux-arts  doit  des 
remercîments  à  M.  le  Ministre  de  l'intérieur.  Les  nouvelles 
dispositions  arrêtées  par  le  gouvernement  font  droit,  dans 
une  large  mesure,  aux  vœux  qu'elle  a  exprimés. 

Vous  avez  désiré  que  les  grands  concours  de  peinture, 
de  sculpture,  d'architecture  et  de  gravure  fussent  réorga- 
nisés en  prenant  pour  base  le  règlement  du  grand  concours 
de  composition  musicale.  Il  vous  avait  paru  que  l'ensemble 
de  tous  ces  concours  constituant  une  institution  nationale, 
ils  devaient  être  tous  régis  par  les  mêmes  principes. 

L'article  1"  de  l'arrêté  royal  du  22  mai  maintient,  il  est 


(  230  ) 

vrai,  la  ville  d'Anvers  comme  le  siège  des  grands  concours 
des  arts  graphiques  et  plastiques;  mais  il  est  à  remarquer 
que  l'Académie  royale  de  cette  ville  est  une  institution  na- 
tionale et  qu'elle  offre  d'ailleurs  des  locaux  parfaitement 
appropriés  aux  travaux  des  concurrents,  ce  qu'il  serait  dif- 
ficile, pour  ne  pas  dire  impossible,  de  rencontrer  dans  la 
capitale. 

L'article  o  fait  droit  aux  demandes  de  la  classe  des 
beaux-arts  en  ce  qui  concerne  le  concours  préparatoire 
des  architectes. 

Quant  à  la  composition  des  jurys,  il  a  également  été 
tenu  compte  de  vos  propositions;  elles  ont  servi  de  base  à 
la  disposition  inscrite  à  l'article  2  d'un  autre  arrêté  de  la 
même  date  qui  forme  le  complément  du  premier. 

Par  l'article  17,  qui  règle  les  obligations  des  lauréats 
durant  leur  séjour  à  l'étranger,  le  gouvernement  a  encore 
donné  sa  sanction  à  vos  propositions. 

Seulement,  comme  ces  arrêtés  ne  s'occupent  que  des 
concours  des  arts  graphiques  et  plastiques ,  les  lauréats 
des  concours  de  musique  n'y  sont  point  compris.  Tous 
vous  rappellerez.  Messieurs  et  honorés  confrères,  que  vous 
aviez  proposé  d'imposer  aux  lauréats  de  cette  catégorie, 
durant  leur  séjour  à  l'étranger,  certains  travaux  analogues 
à  ceux  qui  sont  exigés  des  autres.  Il  y  a  lieu  d'espérer  que 
le  gouvernement,  s'il  juge  à  propos  de  reviser  le  règle- 
ment du  grand  concours  musical,  tiendra  compte  de  vos 
propositions. 

Quelques  articles  m'ont  paru  devoir  donner  lieu  à  des 
observations. 

A  l'article  6,  il  est  dit  que  trois  membres  choisis  par  la 
classe  des  beaux-arts  de  l'Académie  feront  partie  du  jury 
chargé  de  juger  le  concours  préparatoire,  mais  on  a  négligé 


(231  ) 
de  dire  dans  quelle  catégorie  et  suivant  quels  principes 
seront  choisis  les  quatre  autres. 

La  même  observation  peut  s'appliquer  à  l'article  9. 

L'article  10  a  conserve  la  disposition  en  vertu  de  laquelle 
le  montant  d'une  pension  non  appliquée  est  réservé,  durant 
les  quatre  années,  et  peut  être  réparti  en  encouragements 
particuliers  à  déjeunes  artistes  de  mérite. 

On  omet  de  dire  par  qui  et  d'après  quels  principes  cette 
répartition  sera  faite. 

A  l'article  15,  on  oublie  d'indiquer  le  lieu  où  se  réunira 
le  jury  qui  fera  subir  l'épreuve  littéraire  et  scientifique  aux 
lauréats  avant  leur  départ  pour  l'étranger.  On  ne  dit  pas 
non  plus  qui  présidera  ce  jury. 

D'après  l'ancien  règlement  ces  jurys  siégeaient  à  l'Aca- 
démie d'Anvers  et  la  présidence  était  attribuée  à  un  pro- 
fesseur de  cette  institution. 

Enfin,  l'article  lo  désigne  encore  le  directeur  de  l'Aca- 
démie d'Anvers  comme  devant  être  le  correspondant  obligé 
des  lauréats,  pendant  leur  absence  du  pays,  même  lors- 
qu'ils ont  fait  leurs  études  dans  une  autre  école.  Votre  com- 
mission avait  critiqué  cette  disposition  de  l'ancien  règle- 
ment. 

En  résumé  les  arrêtés  du  22  mai  dernier  ont  apporté 
de  sérieuses  améliorations  aux  règlements  antérieurs  et, 
comme  je  l'ai  dit  au  début  de  ce  rapport,  il  y  a  lieu  d'en 
remercier  M.  le  Ministre  de  l'intérieur. 

En  exécution  des  dispositions  nouvelles,  la  classe  des 
beaux-arts  aura  à  intervenir  dans  plusieurs  cas. 

Elle  devra  désigner,  dès  la  iin  de  la  présente  année, 
trois  de  ses  membres-artistes  pour  faire  partie  du  jury 
chargé  de  juger  les  concours  préparatoires  (art.  6). 

Elle  aura  à  dresser  une  liste  des  objets  d'art,  tableaux. 


(  252  ) 
statues,  bas-reliefs,  etc.,  susceptibles  d'être  utilement  re- 
produits par  les  lauréats. 

Il  me  semble  qu'il  n'y  a  point  de  temps  à  perdre  pour 
désigner  la  ou  les  commissions  qui  seront  chargées  de  cette 
besogne.  » 


JUGEMENT  DU  CONCOURS  ANNUEL. 


Sujets  littéraires. 

La  classe  avait  reçu  un  mémoire  portant  pour  devise  : 
La  sculpture  est  l'image  ou  le  miroir  de  l'univers,  en 
réponse  à  la  première  question  de  la  partie  littéraire  du  pro- 
gramme. Cette  question  avait  pour  sujet  :  Faire  l'histoire 
de  la  sculpture  en  Belgique  aux  XVIP  et  XVIIP  siècles. 

Rapport  de  M.  Ad.  Sit-et,  pi'etniet*  contntissait^e. 

«  L'année  dernière  la  classe  des  beaux-arts  reçut  un 
mémoire  volumineux  en  réponse  à  cette  question.  Le  jury 
chargé  de  l'examen  vous  exprima  ses  regrets  de  ce  que 
l'auteur  de  ce  mémoire  eut  si  mal  interprété  le  sens  réel 
de  la  question ,  en  négligeant  le  côté  historique  pour  ne 
s'attacher  qu'à  la  partie  biographique.  Celle-ci, il  est  vrai, 
était  traitée  avec  un  soin  et  une  recherche  de  travail  qui 
rendaient  plus  visible  la  lacune  signalée.  Telle  était,  selon 
nous,  la  valeur  de  cette  partie  du  mémoire,  que  nous  fûmes 
d'avis  de  décerner  à  l'auteur  une  médaille  d'argent. 

Les  considérations  développées  dans  notre  rapport  de 
l'année  dernière,  à  l'effet  de  justifier  la  sévérité  du  juge- 


(  255  ) 
ment  porté  sur  la  partie  historique  de  ce  mémoire,  ont, 
paraît-il,  frappé  Fauteur.  Le  travail  qui  est  soumis  aujour- 
d'hui à  la  classe  est  de  la  même  main  ;  il  est  reconnais- 
sable  à  l'écriture  d'abord,  ensuite  à  la  division  des  matières 
qui  est  restée  la  même.  Mais  quelle  différence  entre  le 
manuscrit  de  1874  et  celui  de  cette  année!  Je  ne  vais 
point.  Messieurs,  établir  de  parallèle  entre  les  deux  œu- 
vres; je  me  bornerai  à  esquisser  en  larges  traits  le  plan  et 
la  marche  du  mémoire  de  cette  année.  En  comparant  le 
rapport  actuel  avec  celui  de  1874,  on  pourra  s'assurer  de 
la  différence  signalée,  différence  radicale  en  effet,  car  plus 
de  la  moitié  du  manuscrit  d'aujourd'hui  doit  être  consi- 
dérée comme  le  résultat  d'une  nouvelle  inspiration. 

L'Introduction  prend  la  chose  ab  ovo.  L  auteur  établit 
d'abord  les  styles  architecturaux,  c'est  le  point  de  départ 
rationnel  de  son  œuvre  considérable  ;  il  énumère,  par  zones, 
toutes  les  œuvres  de  sculpture  proprement  dite  et  de  sculp- 
ture ornementale  éclosessur  notre  sol;  cette énumération, 
pour  être  complète,  devait  être  longue;  elle  l'est,  en  effet, 
sans  qu'on  puisse  lui  reprocher  son  étendue;  l'auteur  dé- 
termine sobrement,  mais  exactement,  les  caractères  que 
le  mouvement  civilisateur  et  social  imprime  à  l'art  plas- 
tique; il  note  les  œuvres  qui  ont  une  valeur  consacrée.  Du 
XIP  siècle  jusqu'à  la  Renaissance,  il  s'attache  soigneuse- 
ment à  préciser  ce  qui  nous  appartient  en  propre,  et  cette 
partie  de  son  mémoire  n'est  pas  la  moins  instructive. 
Arrivé  à  l'extraordinaire  épanouissement  artistique  qui 
caractérise  la  Renaissance,  l'auteur  s'étale  dans  son  sujet 
avec  une  véritable  béatitude.  Les  abbayes,  les  églises,  les 
monuments  civils,  les  tombeaux,  les  retables,  les  orne- 
ments, les  autels,  les  mausolées,  tout  ce  qui  constitue 
enûn  l'œuvre  d'art  par  excellence,  est  passé  en  revue,  et. 


(  234  ) 

à  chaque  objet,  est  attaché  le  nom  de  l'artiste  sans  que 
récrivaîn  paraisse  se  fatiguer  d'un  travail  dont  on  ne  peut 
se  faire  une  idée  qu'en  en  prenant  connaissance.  Il  y  a 
près  d'une  centaine  de  pages  consacrées  à  cette  Inlroduc- 
tion  substantielle.  îl  est  vrai  que,  vers  la  fin,  l'auteur  pé- 
nètre déjà  dans  le  vif  du  sujet  qu'il  va  attaquer  de  front, 
non  sans  avoir  placé  entre  les  deux  parties  essentielles  de 
son  œuvre  une  note  sur  l'institution  des  Gildes  artisti- 
ques dont  les  annales  si  utiles  peuvent  être  considérées, 
en  quelque  sorte  ,  comme  les  livres  d'or  de  notre  histoire. 
L'Introduction  s'appesantit  avec  raison  sur  les  troubles 
religieux  et  politiques  du  XVP  siècle,  si  funestes  à  l'art 
de  la  sculpture  particulièrement.  Jamais  le  chiffre  de  nos 
pertes  d'alors  ne  sera  connu,  mais  on  pourra  s'en  faire  une 
idée  quand  on  saura  que  dans  la  seule  nuit  du  4  novem- 
bre 1576,  nuit  de  la  Furie  espagnole,  Anvers  perdit  pour 
environ  cinquante  millions  de  notre  monnaie,  d'objets 
mobiliers.  Si  une  seule  nuit,  si  quelques  heures  d'orgie 
révolutionnaire  ont  eu  de  si  calamiteuses  conséquences 
dans  une  seule  ville  du  pays,  on  peut  plus  ou  moins  se 
faire  un  tableau  du  désastre  qui  frappa  les  Pays-Bas  en- 
tiers, à  l'exception  du  pays  de  Liège,  lorsque  éclatèrent  les 
furies  iconoclastes.  Pendant  quarante  ans  environ,  nos 
monuments  publics,  civils  et  religieux,  étaient  restés  dans 
l'état  de  dévastation  oii  ils  avaient  été  mis  :  mutilés  et  pro- 
fanés; pendant  quarante  ans  les  beaux-arts  avaient  subi 
une  prostration  inouïe  dans  l'histoire,  lorsque  parut, 
en  1614,  l'édit  des  Archiducs  qui  ordonna  la  restauration 
de  tout  ce  qui  avait  été  détruit,  notamment  l'ameuble- 
ment des  églises.  Le  réveil  fut  instantané  et  d'autant  plus 
radieux  qu'il  eut  pour  aube  et  pour  soleil  cet  astre  nommé 
Rubens.  A  la  chaleur  vivifiante  et  communicative  de  cet 


(  255  ) 
immortel  talent  que  les  Archiducs  eurent  l'adresse  de  fixer 
à  Anvers,  la  sculpture   aussi  reprit  son  essor,  et  c'est  à 
partir  de  ce  moment  qu'elle  irradia  sur  nos  provinces  avec 
une  extrême  surabondance  de  produits. 

Le  style  de  Vlntroduction  est  simple,  concis;  il  marche 
régulièrement,  avec  assurance  et  sincérité.  L'auteur  semble 
avoir  pris  pour  devise  le  mot  de  Quintilien  :  Scribiliir  ad 
narrandum  non  adprobandum.  Ce  système  a  le  défaut  de 
sa  qualité,  c'est-à-dire  que  si  la  prose  de  notre  auteur  a  le 
mérite  de  la  simplicité,  elle  est  veuve  de  tout  lyrisme.  On 
serait  tenté  de  croire  qu'il  s'est  gardé,  comme  d'un  appât 
fatal,  de  l'enthousiasme  qui  pourrait  lui  être  reproché. 
Dans  une  œuvre  de  cette  nature  la  modération  n'est  point 
une  faute.  Je  dirai  plus,  elle  est  ici  élevée  à  la  hauteur 
d'une  qualité. 

Dans  mon  rapport  de  1874  j'ai  reproché  à  l'auteur  de 
manquer  de  sens  esthétique.  Ce  reproche  je  le  maintiens 
ici,  mais  telle  est  la  sérénité  avec  laquelle  nous  apparaît 
l'œuvre  de  l'historien  ,  que  je  ne  regrette  plus  l'absence  du 
philosophe.  Je  suis  convaincu  que  le  mémoire  que  nous 
avons  sous  les  yeux  aurait  manqué  d'homogénéité  si  l'au- 
teur, pour  complaire  absolument  au  vœu  exprimé  en  1874, 
avait  voulu  introduire  dans  sa  manière  des  allures  qui  ne 
sont  point  les  siennes  et  dont,  en  définitive,  les  termes  du 
programme  n'exigeaient  point  la  présence.  Ne  forçons 
point  notre  talent,  c'est  le  cas  de  le  répéter  ici. 

La  seconde  partie  du  mémoire  a  subi  d'importantes 
améliorations.  C'est  encore  le  même  système,  c'est-à-dire 
le  groupement  des  artistes  par  régions  :  chaque  localité 
importante  ou  chaque  groupe  de  plusieurs  villes  réunies 
sous  une  même  influence,  donne  à  connaître  les  artistes 
qui  y  sont  nés  et  les  œuvres  que  ceux-ci  ont  produites.  II 


(  236  ) 

y  a  là  une  grande  richesse  de  matériaux  et  une  succession 
abondante  d'énuinérations  d'un  réel  intérêt.  Trois  cent  cin- 
quante pages  environ  sont  consacrées  à  cette  partie  de 
l'œuvre,  partie  essentiellement  matérielle  et  dans  laquelle 
est  renfermée  toute  l'histoire  de  la  sculpture  au  XVIl^  et 
au  XVKl''  siècle.  Les  pages  qui  concernent  Duquesnoy , 
Fayd'herbe,  Yerhaegen,  Floris,  Jonglielincx,  Quellyn, 
Vervoort,  Bauerscheit,  Verschaffelt,  Delvaux,  Grupello, 
Sauvage,  Cyfflé,  Van  Poucke,  Jean  de  Bologne,  Ledoux, 
Leroy,  Warin,  Cardon  et  cent  autres,  sont  des  pages  soi- 
gnées qui  permettent  d'apprécier  l'étendue  des  recherches 
et  des  travaux  d'initiative  auxquels  a  dû  se  livrer  l'au- 
teur. 

L'influence  de  Rubens  sur  la  statuaire  du  XVIP  siècle, 
la  prédominance  des  ateliers  de  Yerhaegen  ,  de  Fayd'herbe, 
des  Quellyn,  des  Kerricx,  etc.,  la  protection  eflîcace  et  dé- 
cisive des  corporations  religieuses  accordée  pendant  près 
de  deux  siècles  à  la  sculpture  en  général,  le  développe- 
ment inouï  de  cet  art  au  sein  de  nos  provinces,  avec  son 
débordement,  peut-on  dire,  sur  nos  petites  localités,  tout 
cela  est  noté  consciencieusement  dans  le  manuscrit.  De 
loin  en  loin,  et  timidement,  un  sentiment  personnel  se 
fait  jour,  de  même  qu'une  critique  pondérée,  mais,  ainsi 
que  je  l'ai  dit,  sans  enthousiasme.  Question  de  tempéra- 
ment, sans  aucun  doute,  d'autant  plus  que  chez  nous  la 
postérité  ne  s'est  pas  encore  définitivement  prononcée  sur 
le  quantum  ex2LCt  du  talent  de  nos  sculpteurs.  C'est  à  peine 
si  nous  connaissons^  au  juste  degré  d'admiration  qu'elles 
méritent,  certaines  œuvres  splendides  de  Yerhaegen,  telle 
que  la  chaire  de  vérité  de  Lokeren  ;  c'est  à  peine  si  l'on  a 
daigné  remarquer  l'adorable  finesse  de  ciseau  et  le  senti- 
ment toujours  ému  des  Kerricx  qui  ont  rempli  les  églises 


(  237  ) 

(l'Anvers  de  véritables  chefs-d'œuvre.  J'en  passe  et  des 
meilleurs,  mais  je  le  répète,  nous  n'avons  jamais  jusqu'ici 
accordé  qu'une  attention  trop  distraite,  je  n'ose  pas  dire 
indilTérente,  à  cette  robuste  statuaire  flamande  toute 
exubérante  de  vie  et  de  sentiment.  A  coup  sûr  le  livre  que 
j'ai  devant  moi  aidera  nos  yeux  à  s'ouvrir  et  contribuera  à 
faire  disparaître  cette  souveraine  injustice. 

Dans  cet  ensemble  considérable  de  renseignements  de 
toute  nature,  au  milieu  de  ces  descriptions  multipliées  et 
nécessaires,  parmi  ce  monde  historié  et  décrit,  dans  cette 
seconde  partie  enlin,  consacrée  à  un  sujet  qui  exige  fatale- 
ment des  formules  écrites  d'une  variété  d'allures  difficile, 
j'ai  rencontré  de  légères  imperfections  de  style  et  quelques 
inexactitudes  de  peu  d'importance,  que  le  bénéfice  des 
corrections  permises  fera  disparaître.  Si  j'en  parle  ici,  ce 
n'est  point  pour  faire  un  reproche  à  l'auteur,  mais  afin 
d'appeler  son  attention  sur  la  partie  perfectible  de  son 
manuscrit.  Ceux  qui  se  livrent  aux  travaux  biographiques 
et  d'énumération,  savent  que,  dans  cette  matière,  l'indul- 
gence est  acquise  de  droit  à  l'écrivain. 

Avant  d'arriver  à  mes  conclusions,  je  désire,  Messieurs, 
présenter  une  observation  qui  vous  fera  mieux  encore 
comprendre  la  valeur  du  verdict  que  je  vais  avoir  l'hon- 
neur de  vous  soumettre. 

Comprend-on  que  dans  un  pays  comme  le  nôtre  où  les 
arts  sont  en  si  grande  estime,  dans  un  pays  comme  le 
nôtre  où  toutes  les  branches  principales  des  connaissances 
humaines  ont  eu ,  depuis  plus  de  trois  siècles  ,  leurs  histo- 
riens spéciaux,  comprend-on,  dis-je,  que  l'histoire  de  la 
sculpture  n'eût  pour  pivot,  hier  encore  ,  qu'une  mince  et 
sèche  nomenclature  de  quelques  noms  renfermés  dans 
une  légère  plaquette  due  à  Baert  et  publiée  en  i848  par 


(  238  ) 
le  B°"  de  Reiffenberg!  Quel  étrange  et  incompréhensible 
ostracisme  a  donc  frappé,  depuis  quatre  cents  ans  qu'on 
écrit  et  qu'on  imprime  chez  nous,  cet  art  qui  peut  passer 
pour  le  premier  de  tous  et  dont  les  Grecs  ont  fait  l'éter- 
nelle gloire  de  l'antiquité!  La  peinture,  l'architecture,  la 
gravure, la  musique,  ont  leurs  annales  enregistrées  dans 
des  livres  que  l'on  peut  perfectionner  mais  qui  ne  sau- 
raient plus  mourir ,  et  la  sculpture,  elle,  en  était  encore  à 
se  demander  si  réellement  elle  a  jamais  existé  en  Bel- 
gique ! 

Aujourd'hui,  je  n'hésite  pas  à  l'affirmer,  grâce  à  la  pré- 
voyance de  l'Académie,  cette  lacune  n'existe  plus.  Le 
manuscrit  qui  vous  est  soumis  a  comblé  ce  vide  inexpli- 
cable. Je  déclare  en  même  temps  que,  s'il  est  le  travail 
initiatif  de  l'espèce,  je  ne  veux  point  prétendre  qu'il  soit 
le  dernier  mot  de  la  question  :  il  en  est  le  premier,  et, 
comme  tel ,  je  suis  convaincu  que  les  travailleurs  de  l'ave- 
nir y  trouveront  un  guide  sage,  précieux  et  complet.  L'his- 
torien a  accompli  sa  lâche.  Viennent  maintenant  les  com- 
mentateurs et  les  philosophes,  viennent  les  discussions,  le 
procès-verbal  est  fait.  » 

M.  Joseph  Geefs,  second  commissaire,  déclare  se  rallier 
à  ce  rapport. 

Rapport  de  .Vf.  C  J9e  JUan^  tt^oisiètnc  comtnissair-e. 

«  Ce  mémoire  présenté  et  soumis  déjà  l'an  passé  à 
l'examen  de  la  classe  des  beaux-arts,  avait  donné  lieu  à 
diverses  critiques.  L'auteur  en  a  tenu  compte,  aussi  toute 
la  première  partie  de  son  travail ,  d'abord  composé  pres- 
que exclusivement  de  citations  et  d'emprunts  faits  aux 


(  -259  ) 
écrivains  qui  ont  traité  de  la  sculpture  aux  XVJI"  et  XVIiJ'' 
siècles,  a  été  complètement  modifiée;  L'auteur  s'est  iden- 
tifié avec  son  sujet;  c'est  lui  qui  parle,  c'est  lui  qui  raconte 
et  qui  nous  initie  à  tous  les  faits  qu'il  a  recueillis  :  son  style 
est  simple,  clair  et  correct. 

La  seconde  partie  du  mémoire  a  été  maintenue  intégra- 
lement :  elle  présente  un  grand  intérêt  et  les  rapports 
précédents  en  ont  déjà  rendu  compte  d'une  façon  très- 
élogieuse;  aussi  je  crois  inutile  d'y  revenir. 

Jugeant  donc  de  l'ensemble  de  ce  travail  colossal,  j'es- 
time qu'il  répond  convenablement  à  la  question,  jusqu'à 
présent  négligée,  de  la  sculpture  aux  XVII"  et  XYIII*^ 
siècles. 

En  conséquence  je  me  rallie  à  la  proposition  d'accorder 
à  son  auteur  la  médaille  d'or.  j> 

La  classe,  conformément  aux  conclusions  favorables  de 
ses  commissaires,  vote,  en  conséquence,  sa  médaille  d'or  à 
l'auteur  du  mémoire  précité;  l'ouverture  du  billet  cacheté 
fait  connaître  comme  étant  l'auteur  de  ce  travail,  M.  Ed- 
mond Marghal,  secrétaire  adjoint  de  l'Académie. 


Sujets  d'art  appliqué. 

La  classe  avait  inscrit  à  son  programme  de  concours  de 
cette  année  quun  prix  de  six  cents  francs  serait  accordé 
à  la  meilleure  médaille  exécutée  par  un  artiste  belge  depuis 
le  i^^  janvier  i 87 2.  Les  concurrents  devaient  soumettre 
un  exemplaire  de  leur  œuvre  avant  le  1'"  septembre  1875. 
Cinq  médailles  ont  été  envoyées  pour  ce  concours  : 
1"  Les  victoires  de  l'Allemagne  en  1870-1871  ; 


(  UO  ) 

2°  La  visite  du  Izar  Alexandre  à  Londres  en  1874; 

5°  L'alliance  des  républiques  américaines  du  Sud  pour 
la  défense  de  Lima. 

Ces  trois  pièces  sont  l'œuvre  de  M.  Charles  Wiener. 

4°  Le  Roi  est  mort!  Vive  le  Roi!  par  M.  Éd.  Geerts; 

o°  L'inauguration  du  monument  de  Cliarlemagne ,  par 
M.  Constantin  Jehotte. 

Le  jury,  après  mûre  délibération,  propose,  à  l'unani- 
mité, que  le  prix  de  six  cents  francs  soit  décerné  à  l'au- 
teur des  médailles  indiquées  sous  les  n°'  2"  et  5°. 

Le  jury  signale  particulièrement  la  face  de  la  médaille 
du  tzar  et  le  revers  de  l'alliance  des  républiques  de  l'Amé- 
rique du  Sud. 

La  classe  a  approuvé  ces  résolutions.  ,. 

—  La  classe  avait  donné  le  sujet  suivant  pour  le  con- 
cours de  sculpture  de  cette  année  : 

On  demande  un  bas-relief  pour  une  frise  placée  à  3  mè- 
tres d'élévation  et  ayant  pour  sujet  l'Horticulture  per- 
sonnifiée. 

Trois  bas-reliefs  ont  été  présentés  à  ce  concours. 

Le  n''  1  avait  pour  devise  un  triangle; 

Le  n"  2  les  mots  :  Horticulture,  —  Pomone  et  son 
cortège  ; 

Et  le  n°  5  un  trophée  d'instruments  horticoles. 

Après  avoir  examiné  les  trois  œuvres,  le  jury  a  été  d'avis 
que  le  n"  2,  s'il  ne  réunit  pas  les  conditions  nécessaires 
pour  mériter  le  prix,  offre  cependant  assez  de  qualités 
pour  qu'il  y  ait  lieu  d'accorder  à  l'auteur  un  prix  d'encou- 
ragement consistant  en  une  somme  de  500  francs. 

La  classe  a  ratifié  ce  jugement. 


(  241  ) 
L'auteur  de  ce  bas-relief  a  fait  connaître  depuis  qu'il 
acceptait  cette  récompense.  C'est  M.  Julien  Dillens,  qui 
a  remporté  un  prix  d'encouragement  de  la  même  somme 
l'année  dernière  pour  le  carton  qu'il  avait  présenté  au  con- 
cours de  peinture. 


CAISSE    CENTRALE    DES   ARTISTES. 

Sur  la  proposition  du  bureau  du  comité  directeur,  la 
classe  accorde  la  pension  ordinaire  ainsi  qu'un  secours 
temporaire  à  la  veuve  de  M.  Ch.  V...,  artiste  peintre,  qui 
faisait  partie  de  l'association  et  que  celle-ci  a  perdu  récem- 
ment. 


SÉANCE   PUBLIQUE   ANNUELLE. 

La  classe  s'occupe  des  préparatifs  de  la  séance  publique 
annuelle,  laquelle,  d'après  l'article  11  du  règlement  gé- 
néral de  l'Académie,  doit  avoir  lieu  dans  le  mois  de 
septembre. 

Elle  fixe  cette  solennité  au  jeudi  30  de  ce  mois,  à  une 
heure,  dans  la  Grand'salle  des  Académies  au  Musée. 

Elle  tiendra  la  veille,  à  la  même  heure,  dans  la  salle 
ordinaire  des  séances,  une  réunion  préparatoire  pour  la 
lecture  des  pièces  qui  figureront  au  programme  de  la 
cérémonie. 


2"*  SÉRIE ,  TOME  XL.  16 


(  242  ) 


CLASSE  DES  BEAUX-ARTS. 


Séance  du  29  septembre  1815. 

M.  F.-A.  Gevaert,  vice-directeur,  occupe  le  fauteuil. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin,  L.  Gallait,  G.  Geefs, 
J.  Geefs,  C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  De  Busscher,  Aug. 
Payen,  le  chevalier  Léon  de  Burbure,  J.  Franck,  Gust.  De 
Man,  Ad.  Siret,  Julien  Leclercq,  Ernest  Slingeneyer,  Alex. 
Robert  et  A.  Pauli,  membres. 


CORRESPONDANCE. 


M.  Balat  écrit  que  «  Tétat  de  sa  santé  le  retenant  éloi- 
gné de  Bruxelles,  il  ne  pourra  avoir  l'honneur  de  présider 
la  séance  publique  de  la  classe,  comme  c'eût  été  son  de- 
voir. Tout  en  offrant  ses  regrets  et  ses  excuses  à  ses  con- 
frères, il  adresse  le  discours  que,  suivant  l'usage,  il  avait 
préparé  pour  cette  circonstance,  afin  qu'il  puisse  en  être 
donné  lecture  si  la  classe  l'approuve.  » 

—  M.  Jules  Devaux ,  chef  du  cabinet  du  Roi,  exprime, 
par  écrit,  de  la  part  de  Leurs  Majestés,  leurs  regrets  de 


(  243  ) 

ne  pouvoir  se  rendre  à  l'invitation  qui  leur  a  été  faite  d'as- 
sister à  la  séance  publique. 

M.  le  général  Burnell,  aide  de  camp  de  S.  A.  R.  Mgr  le 
Comte  de  Flandre,  exprime  des  regrets  semblables  au 
nom  de  LL.  AA.  le  Comte  et  la  Comtesse. 

LL.  Exe.  le  baron  Gerycjie  d'Herwynen,  Ministre  pléni- 
potentiaire des  Pays-Bas;  sir  John  Savile  Lumley,  Minis- 
tre plénipotentiaire  d'Angleterre,  et  MM.  le  comte 
d'Aspremont-Lynden,  Ministre  des  affaires  étrangères; 
Beernaert,  Ministre  des  travaux  publics;  le  baron  Lam- 
bermont ,  secrétaire  général  du  Ministère  des  affaires 
étrangères;  le  baron  Snoy,  questeur  de  la  Chambre  des 
représentants,  remercient  pour  leur  invitation  à  la  séance 
précitée. 

—  MM.  Edmond  Marchai ,  secrétaire  adjoint  de  l'Aca- 
démie, et  Charles  Wiener,  artiste  graveur,  écrivent  pour 
remercier  la  classe  de  la  distinction  qui  leur  a  été  ac- 
cordée. 

—  M.  Julien  Dillens  se  déclare  l'auteur  du  bas- 
relief  n°  2,  portant  pour  devise  :  V Horticulture^  Pomone 
et  son  cortège,  auquel  la  classe  a  accordé,  à  titre  d'encou- 
ragement, une  somme  de  cinq  cents  francs. 

—  M.  V.  Stiénon ,  secrétaire  de  la  commission  direc- 
trice des  musées  royaux  de  peinture  et  de  sculpture, 
adresse,  conformément  aux  instructions  de  M.  le  Ministre 
de  l'intérieur,  le  projet  de  restauration  du  temple  de 
\esta,  à  Tivoli,  que  M.  Dieltjens,  lauréat  du  grand 
concours  d'architecture  de  1871,  a  fait  parvenir  au  gou- 
vernement à  titre  d'envoi-copie  prescrit  par  le  règlement 
des  grands  concours. 


(  244  ) 

—  M.  Banner,  architecte  à  Paris,  demande  divers  ren- 
seignements au  sujet  du  mémoire  couronné  de  M.  Pin- 
chart  relatif  à  VHistoire  de  la  tapisserie  de  haute  lisse  aux 
Pays-Bas.  — Renvoi  à  M.  Éd.  Fétis,  qui  a  été  premier 
commissaire  pour  ce  mémoire. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


M.  L.  Alvin  rend  compte  de  la  mission  académique 
qu'il  a  remplie  avec  ses  collègues  MM.  Fraikin  et  Slinge- 
neyer  aux  fêtes  du  4-^  centenaire  de  la  naissance  de 
Michel-Ange,  qui  ont  eu  lieu  à  Florence  les  12,  15  et 
14  septembre. 

Les  applaudissement  de  l'assemblée  accueillent  cette 
relation. 

La  classe  s'occupe  ensuite  des  préparatifs  de  sa  séance 
publique  annuelle,  qu'elle  a  fixée  au  jeudi  30  septembre, 
à  1  heure,  dans  la  Grand'Salle  des  Académies  au  Musée. 

Indépendamment  du  discours  de  M.  Balat,  qui  sera  pro- 
noncé, en  l'absence  de  l'honorable  directeur,  par  M.  Ge- 
vaert,  vice-directeur,  le  programme  se  composera  des 
lectures  suivantes  :  Souvenir  des  fêtes  du  4^  centenaire  de 
la  naissance  de  Michel-Ange,  à  Florence,  par  M.  L.  Alvin; 
rapport  de  M.  Ad.  Siret  sur  le  mémoire  couronné  concer- 
nant VHistoire  de  la  sculpture  aux  Pays-Bas  pendant  les 
XVIP  et  XVIIP  siècles  ;  proclamation  par  M.  le  secrétaire 
perpétuel  des  résultats  des  concours. 


(  24S  ) 
CLASSE  DES   BEAUX- A  RTS. 


Séance  publique  du  jeudi  30  septembre  1875. 

(Dans  la  Grand'Salle  des  Académies  au  Musée.) 

M.  F.-A.  Gevaert,  vice-directeur,  occupe  le  fauteuil. 
M.  LiAGRE ,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin,  G.  Geefs,  Jos.  Geefs, 
C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Edm.  De  Busscher,  Payen,  le 
chevalier  Léon  de  Burbure,  J.  Franck,  Gust.  De  Man , 
Ad.  Siret,  J.  Leclercq,  Ern.  Slingeneyer  et  Alex.  Robert, 
membres;  De  Biefve  et  Stappaerts,  correspondants. 

Assistaient  à  la  séance  : 

Classe  des  sciences  :  MM.  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van 
Beneden,  Nyst,  Gluge,  Melsens,  F.  Duprez,  G.  Dewalque, 
Gloesener,  Ch.  Montigny  et  C.  Malaise,  membres;  Eug. 
Catalan,  associé. 

Classe  des  lettres  :  MM.  J.  Roulez ,  P.  De  Decker,  de 
Witte,  Faider,  R.  Chalon,  Juste,  le  baron  Guillaume  et 
Alph.  Wauters,  membres;  J.  Nolet  de  Brauwere  van  Slee- 
land  et  Aug.  Scheler,  associés. 

Le  bureau  de  la  classe,  composé  de  M.  Gevaert,  vice- 
directeur,  remplaçant  M.  Balat,  absent  pour  motifs  de 
santé,  de  M.  Liagre,  secrétaire  perpétuel,  ainsi  que  de 
MM.  le  baron  Guillaume,  directeur,  et  Ch.  Faider,  vice- 


(  '^4'^  ) 

directeur  de  la  classe  des  lettres,  s'est  installé  sur  l'estrade 
présidentielle,  à  1  heure. 

M.  Gevaert,  après  avoir  déclaré  la  séance  ouverte , 
annonce  que  M.  Balat  ne  pourra  venir  présider  la  solen- 
nité. 

M.  le  vice-directeur  a  bien  voulu  se  charger  de  donner 
lecture  du  discours  de  M.  Balat  conçu,  en  ces  termes  : 

«  Messieurs, 

»  A  l'une  de  nos  séances  publiques  précédentes,  celle 
de  1871,  le  directeur  de  la  classe  des  beaux-arts,  qui  était 
alors  l'honorable  M.  Gallait,  se  trouva  forcé  de  formuler 
nn  regret  sur  la  situation  des  beaux-arts  dans  notre  pays. 

»  Il  se  plaignait  qu'au  moment  même  où  l'on  érigeait , 
à  Bruxelles  et  à  Anvers,  de  véritables  palais  aux  spécula- 
tions commerciales  et  industrielles,  les  artistes  n'avaient 
pas  même  un  local  convenable  pour  les  expositions  pério- 
diques de  leurs  œuvres. 

»  La  lacune  en  effet  était  fâcheuse.  Sans  aborder  ici  le 
grand  thème  de  l'influence  morale  et  sociale  de  l'art,  on 
peut  dire  qu'il  ne  compte  pas  moins  que  l'industrie  dans 
nos  revenus,  et  qu'il  compte  peut-être  pour  plus  dans  notre 
gloire. 

»  En  remplaçant  aujourd'hui  notre  éminent  confrère, 
je  suis  heureux  d'avoir  à  constater  que  la  situation  regret- 
table qu'il  signalait  va  cesser  d'exister.  Les  plaintes  peuvent 
même  faire  place  à  des  remercîments. 

»  Non-seulement  la  réclamation  de  l'Académie  a  été 
écoutée,  mais  elle  n'a  rencontré  partout  que  l'accueil  le 
plus  sympathique. 


(  247  ) 

»  Appuyée  tout  d'abord  par  un  Souverain  que  les  arts 
se  sont  habitués  à  considérer  comme  leur  protecteur 
naturel,  TAcadémica  pu  s'occuper  des  moyens  de  réparer 
elle-même  le  mal  qu'elle  avait  signalé.  Son  projet  a  reçu 
l'approbation  immédiate  du  gouvernement  et  a  été  voté 
par  les  Chambres.  L'Académie  avait,  du  reste,  rencontré 
tout  d'abord  l'adhésion  unanime  du  public,  et  elle  avait 
trouvé  sa  première  récompense  dans  les  remercîments 
empressés  et  enthousiastes  qu'une  députation  d'artistes 
était  venue  apporter  à  M.  Gallait. 

»  En  cette  occasion,  l'Académie  eut  un  autre  mérite: 
ce  fut  de  porter  la  lumière  dans  une  sorte  de  problème 
resté  jusque-là  insoluble,  et  de  rendre  pratique  une  idée 
que  beaucoup  d'esprits  commençaient  à  reléguer  parmi  les 
chimères  :  l'érection  à  Bruxelles  d'un  palais  des  beaux- 
arts. 

»  Ce  projet,  en  effet,  pendant  trop  longtemps  n'avait 
guère  été  qu'une  utopie.  On  demandait  au  futur  palais 
des  beaux-arts  de  réunir  et  de  satisfaire  des  services  si 
multiples  et  si  divers  qu'ils  en  étaient  presque  contradic- 
toires. Tout  ce  qui  se  rattachait  d'une  façon  quelconque 
aux  différents  arts  devait  y  trouver  place  et,  en  poursui- 
vant l'idée  de  ce  palais  imaginaire,  en  la  développant  et 
en  la  compliquant  outre  mesure,  on  ne  s'apercevait  pas 
que  ce  qui  manquait  surtout  aux  arts  dans  la  capitale, 
c'était,  d'abord  et  fondamentalement,  des  locaux  spacieux 
pour  les  expositions  triennales.  Il  n'était  pas  moins  urgent 
d'en  avoir  pour  les  solennités  publiques.  Tels  étaient  les 
deux  termes  fort  simples  du  résultat  à  réaliser. 

»  C'était  à  cette  idée  qu'il  fallait  ramener  l'opinion. 
L'Académie  a  formulé  son  programme  en  conséquence. 
Elle  a  voulu  qu'un  seul  édifice  pût  satisfaire  à  cette  double 


(  !248  ) 

destination.  C'était  évidemment  le  seul  moyen  de  rendre 
exécutable  le  palais  projeté  et  de  justifler  les  frais  consi- 
dérables de  cette  construction  destinée  à  nos  expositions 
triennales  :  il  fallait  que,  dans  cet  intervalle  de  trois  ans 
qui  s'écoule  d'une  exposition  à  l'autre ,  le  palais  des  beaux- 
arts  pût  rendre  encore  d'autres  services. 

»  L'édifice  qui  va  être  érigé  rue  de  la  Régence  donnera 
toute  satisfaction  à  ces  légitimes  exigences. 

»  Une  condition  essentielle  pour  le  succès  des  exposi- 
tions qu'il  attend,  c'est  son  emplacement.  L'Académie  a 
été  assez  heureuse  pour  rencontrer,  pour  ainsi  dire  provi- 
dentiellement, un  terrain  disponible  appartenant  à  l'État, 
et  tel  précisément  qu'on  pouvait  le  souhaiter  comme  situa- 
tion, étendue,  voisinage,  réunissant  en  un  mot  toutes  les 
conditions  consacrées  par  l'expérience. 

»  Le  local  définitif  de  nos  expositions  dépassera  nota- 
blement en  contenance  tous  les  locaux  provisoires  qui  l'ont 
précédé.  On  peut  donc  dire  qu'il  est  en  mesure  de  faire 
face  à  tous  les  développements  que  peut  prendre  encore 
notre  production  artistique,  surtout  si  l'on  se  fait  un  scru- 
pule de  n'y  admettre  que  des  œuvres  d'un  mérite  réel. 

»  Dans  l'intervalle  de  nos  expositions  triennales,  il 
pourra  recevoir  d'autres  destinations  auxquelles  il  est 
approprié  d'avance.  Une  transformation  prévue  et  facile, 
dans  les  dispositions  intérieures,  permettra  de  le  faire  ser- 
vir aux  solennités  publiques,  aux  distributions  des  récom- 
penses et  même  à  des  concerts  réunissant  un  nombreux 
public. 

»  Enhn,  et  sans  contrarier  aucun  de  ces  services  divers, 
une  partie  de  l'édifice  pourra  être  constamment  réservée  à 
des  expositions  spéciales  pour  lesquelles  les  locaux  man- 
quent encore,   exposition   d'archéologie,   exposition  de 


(  249  ) 
tableaux  anciens  tirés  de  galeries  particulières,  exposition 
de  cartons,  exposition  des  aquarellistes,  etc.,  etc. 

D  On  arrivera  ainsi  à  réaliser  une  innovation  qui  semble 
amenée  par  la  force  des  choses,  que  beaucoup  de  voix 
réclament  et  dont  bien  des  esprits  attendent  les  meilleurs 
résultats:  une  exposition  permanente. 

»  L'artiste  n'a  qu'un  jour  tous  les  trois  ans  pour  se 
montrer,  et  ce  jour-là  il  faut  qu'il  se  montre  dans  la  cohue 
de  1,200  concurrents.  La  production  littéraire,  il  faut 
l'avouer,  se  fait  dans  des  conditions  plus  favorables.  Le 
livre  n'attend  pas  une  exposition  pour  paraître;  2,000  vo- 
lumes ne  font  pas  irruption  en  même  temps  chez  le  libraire; 
ils  paraissent  un  à  un,  se  lisent  séparément  et  ne  se  com- 
battent pas  l'un  l'autre.  Pourquoi  n'en  serait-il  pas  de 
même  de  la  production  artistique? 

»  Dans  une  exposition  permanente  les  tableaux  seraient 
naturellement  moins  nombreux,  mieux  vus  et  mieux  jugés. 
Les  artistes  produiraient  alors  à  leur  heure,  selon  leur 
tempérament,  et  n'en  feraient  que  de  meilleurs  ouvrages. 

7>  Ajoutons  que  la  faculté  de  se  produire  à  l'exposition 
permanente  permettrait  d'être  exigeant  pour  les  admis- 
sions aux  expositions  triennales,  et  que  celles-ci,  dès  lors, 
deviendraient  véritablement  un  choix,  première  condition 
pour  qu'elles  soient  une  fête  et  un  enseignement. 

B  Cette  exposition  permanente,  je  pense,  Messieurs, 
qu'elle  ne  trouvera  nulle  part  un  emplacement  plus  con- 
venable et  plus  digne  que  le  futur  palais  des  beaux-arts, 
où  on  la  visitera  d'autant  plus  volontiers  qu'elle  y  sera 
placée  en  dehors  de  toute  spéculation  et  indépendante  de 
tout  parti  pris. 

»  Le  jour  où  une  exposition  de  cette  nature  sera  ou- 
verte, où  la  coutume  sera   de  la  visiter,  ce  jour-là,  l'art 


(  2S0  ) 
deviendra   l'aliment  quotidien,  comme    le    livre   ou   le 
théâtre. 

»  Voilà  évidemment  le  plus  grand  progrès  que  nous 
puissions  aspirer  à  réaliser,  car  l'art  ne  sera  un  besoin 
qu'à  condition  d'être  d'abord  une  habitude.  » 

—  M.  L.  Alvin  a  fait  ensuite  la  lecture  suivante  : 

G  Messieurs,  le  public  bruxellois,  accoutumé  à  trouver 
chaque  année,  à  la  suite  du  discours  ofliciel  du  président 
de  celte  solennité,  les  attrayantes  émotions  de  la  musique, 
doublées  encore  par  l'intérêt  qu'inspire  l'exécution  de  la 
cantate  des  lauréats  du  grand  concours  de  composition 
musicale,  ce  public  que  nous  avons  un  peu  gâté,  pourrait 
n'être  guère  disposé  à  accepter,  comme  compensation  du 
régal  qui  lui  était  annuellement  offert,  de  simples  lectures 
sur  des  questions  d'art.  Nous  avons  d'autant  plus  besoin 
de  son  indulgence  ,  nous  qui  ne  pouvons  l'entretenir  que 
des  fêtes  auxquelles  nous  venons  de  prendre  part  en  qua- 
lité de  délégué  de  la  Compagnie.  Le  IV'  centenaire  de 
Michelange  a  été  célébré  à  Florence  avec  un  éclat  qui 
défie  toute  description;  mais  nous  espérons  que  vous  vou- 
drez bien  écouter  sans  trop  d'ennui  l'expression  des  sen- 
timents que  nous  y  avons  éprouvés  et  dont  nous  avons 
rapporté  la  vive  impression. 

Souvenir  du  IV^  centenaire  de  Michelange. 

«  Honneur  aux  nations  qui ,  comprenant  la  valeur  de 
l'héritage  de  gloire  que  leur  ont  laissé  leurs  ancêtres, 
savent  le  conserver  avec  un  soin  et  un  respect  religieux! 
Celles-là  seules  sont  dignes  d'un  avenir  pareil  à  leur  passé. 


(  25i  ) 
»  Lorsqu'une  ville  a  vu  naître  dans  ses  murs  deux  gé- 
nies tels  que  Dante  et  Michelange  —  sans  compter  tant 
d'autres  illustrations,  —  ses  magistrats  ont  de  grands  de- 
voirs à  remplir.  Pour  les  peuples ,  comme  pour  les  familles, 
noblesse  oblige.  La  municipalité  de  Florence  se  montre 
pénétrée  de  cette  vérité,  d'abord  par  la  sollicitude  dont 
elle  fait  preuve  pour  la  conservation  des  monuments  de 
sa  splendeur  artistique,  exposés  pendant  des  siècles  aux 
ravages  du  temps,  et  ensuite  par  la  manière  dont  elle 
bonore  la  mémoire  de  ses  grands  liommes.  Je  n'en  veux 
d'autre  témoignage  que  les  fêtes  splendides  du  IV^  cente- 
naire du  génie  prodigieux  qui,  dans  le  dialecte  toscan, 
si  sonore  et  si  doux,  a  nom  Michelangiolo  Buonarroti  (1), 
fêtes  à  la  fois  somptueuses  et  populaires,  nationales  et  uni- 
verselles, auxquelles  avaient  été  conviés  tous  les  corps 
artistiques,  littéraires  et  scientifiques  du  monde  entier. 

»  L'Académie  royale  des  sciences,  des  lettres  et  des 
beaux-arts  de  Belgique  ne  pouvait,  sans  renier  le  passé  de 
la  patrie,  se  dispenser  de  répondre  à  cet  honorable  appel. 
Elle  a  délégué,  pour  la  représenter  au  centenaire  de  l'homme 
qui  a  été  également  éminent  dans  les  arts  de  l'architecture, 
de  la  peinture  et  de  la  sculpture,  trois  de  ses  membres  : 
un  architecte,  M.  G.  De  Man,  un  peintre,  M.  E.  Slingeneyer, 
et  un  sculpteur,  M.  A.  Fraikin.  Des  motifs  de  santé  ayant 
empêché  le  premier  de  remplir  sa  mission,  j'ai  été  désigné 
pour  le  remplacer.  Je  reconnais  humblement  que  je  n'avais 
qualité  pour  représenter  aucune  des  branches  de  l'art 


(1)  Les  invita  lions  ofticielles  portent  toutes  Michelangiolo.  Dans  le 
recueil  des  lettres  du  grand  artiste,  celui-ci  signe  Michelagniolo^  troisième 
forme  du  nom. 


(  252  ) 
dans  lesquelles  Michelange  a  excellé;  je  n'en  ai  pas  moins 
accepté,  entraîné  que  j'étais  par  la  séduction  qu'exerce 
la  ville  de  Florence  sur  ceux  qui  ont  eu  le  bonheur  de  la 
visiter  une  fois. 

»  L'accueil  que  nous  avons  reçu  a  été  aussi  cordial  que 
distingué,  et  nous  risquerions  d'être  taxés  d'ingratitude  si 
nous  ne  saisissions  la  première  occasion  qui  se  présente  de 
témoigner  publiquement  notre  reconnaissance  pour  une 
aussi  magnifique  hospitalité. 


IL 


»  Michelange  avait  depuis  longtemps,  dans  l'église  de 
Santa-Croce,  son  mausolée  de  marbre ,  auquel  avaient  tra- 
vaillé concurremment  les  trois  sculpteurs  Lorenzi,  Cioli  et 
Gio  deirOpera.  Quel  nouveau  monument  lui  élèvera-t-on, 
à  l'occasion  du  IV^  centenaire  de  sa  naissance?  Cette  ques- 
tion a  dû  préoccuper  l'édilité  florentine;  celle-ci  Ta  résolue 
de  la  façon  la  plus  heureuse. 

»  Dominée  par  un  sentiment  de  modestie,  sans  doute 
exagéré,  mais  assurément  respectable,  elle  n'a  voulu  con- 
fier à  aucun  contemporain  l'exécution  des  statues  qui  de- 
vaient décorer  la  place  nouvelle  consacrée  à  perpétuer  le 
souvenir  des  vertus  civiques  de  l'immortel  artiste.  Et  pour- 
tant elle  eût  pu  trouver  chez  elle  un  sculpteur  digne  de 
cette  mission.  Sur  l'emplacement  même  d'une  citadelle 
que  le  génie  de  Michelange  avait  fortifiée  et  défendue 
contre  les  ennemis  de  sa  patrie,  sur  la  colline  de  San 
Miniato,  dominant  la  cité  et  toute  la  vallée  de  l'Arno, 
s'étend  aujourd'hui  une  place  qui  portera  à  l'avenir  le 


(  253  ) 

nom  du  grand  homme.  Au  milieu,  se  dresse  le  David, 
œuvre  de  la  jeunesse  du  maître  {voir  la  note  A),  dont  le 
temps  commençait  à  altérer  le  marbre.  Coulée  en  bronze, 
celte  statue  bravera  les  siècles.  Couchées  sur  le  piédestal, 
les  quatre  figures  magistrales  qui  décorent  les  tombeaux 
des  Médicis  (également  coulées  en  bronze  pour  cette  desti- 
nation) complètent  le  monument. 

ï>  C'est  ainsi  qu'a  été  réalisée  la  pensée  de  l'éminent 
syndic,  le  commandeur  Ubaldino  Perruzzi  : 

«  Michelange  est  seul  digne  de  faire  un  monument  à 
Michelange.  » 

»  La  maison  où  l'artiste  a  passé  une  grande  partie  de  sa 
vie,  où  le  citoyen  a  veillé  au  salut  de  la  patrie,  où  l'austère 
penseur  a  mûri  ses  subligaes  conceptions,  a  été  transfor- 
mée en  un  sanctuaire.  Elle  n'abritera  plus  désormais  que 
le  souvenir  de  cette  puissante  intelligence.  Là  sont  re- 
tracés par  le  pinceau  les  épisodes  principaux  de  cette  exis- 
tence si  digne,  si  sévère,  si  laborieuse;  là  se  conserveront, 
ce  qu'on  pourrait  appeler  les  reliques  de  l'âme  :  ses  écrits, 
ses  correspondances,  les  croquis  jetés  par  lui  sur  le  papier, 
aux  moments  de  l'inspiration,  et  les  autographes  de  ces 
sonnets  que  lui  dictait  la  Muse  et  qui  lui  ont  mérité  le  nom 
de  poète,  afln  que  rien  ne  manquât  à  sa  gloire.  Cet  asile 
toutefois,  qui  a  pu  abriter  l'artiste,  serait  trop  étroit  pour 
contenir  son  œuvre.  C'est  dans  les  galeries  de  l'Académie 
des  beaux-arts  qu'a  été  réuni  tout  ce  qu'il  a  été  possible  de 
rassembler  des  ouvrages  du  maître,  soit  en  originaux,  soit 
en  copies,  soit  en  reproductions.  On  avait  fait  appel  à  tous 
les  heureux  possesseurs  de  ces  trésors,  et  l'appel  a  été 


(  254  ) 
entendu.  Ce  musée  constitue  un  ensemble  inappréciable  ou 
les  générations  futures  pourront  juger  de  la  puissance  de 
création  que  Dieu  avait  départie  à  un  seul  homme. 

»  Le  comité  organisateur  des  fêtes  n'a  pas  même  oublié 
les  absents.  A  ceux  qui  n'ont  pu  et  qui  ne  pourront  accom- 
plir ce  pieux  pèlerinage,  il  offre  trois  publications  qui  jet- 
tent un  jour  nouveau  sur  la  vie  du  grand  homme.  C'est 
d'abord  : 

»  Un  Album  des  dessins  originaux  de  Michelange  repro- 
duits par  la  photolilhographie.  (Voir  la  note  B.) 

»  En  second  lieu,  la  bibliographie  de  Michelange  com- 
prenant, avec  la  liste  des  ouvrages  publiés  sur  le  grand 
artiste  ou  à  propos  de  ses  ouvrages,  le  catalogue  des  gra- 
veurs qui  ont  reproduit  ses  compositions.  [Voir  la  note  C.) 

»  En  troisième  lieu,  —  et  ce  livre  est  lui-même  un  mo- 
nument, —  les  lettres  de  Michelange  Buonarroti,  publiées 
avec  les  notes  et  contrats  artistiques  du  maître,  par  les 
soins  de  Gaetano  Milanesi,  édition  magnifique,  petit  in- 
folio, de  plus  de  700  pages  [voir  la  note  D),  ordonnée  par 
les  organisateurs  des  fêtes  du  quatrième  centenaire  de  la 
naissance  de  leur  immortel  concitoyen.  On  trouve  dans  ce 
livre  non-seulement  ce  qui  avait  déjà  été  publié,  mais  en- 
core un  nombre  considérable  de  lettres  et  autres  docu- 
ments absolument  inédits,  découverts  tout  récemment  dans 
la  maison  même  des  Buonarroti. 

))  Il  faut  encore  joindre  à  ces  publications  les  Soicvenirs 
de  Michelange  Buonarroti^  adressés  au  peuple  italien  par 
M.G.-C.  Sansoni,  brochure  de  plus  de  200  pages,  écrite 
au  moyen  des  documents  nouvellement  exhumés.  [Voir  la 
note  E.) 


(  255  ) 
»  Enfin,  une  médaille  reproduisant  les  traits  de  Michel- 
ange  a  été  frappée  et  distribuée,  comme  les  publications 
qui  viennent  d'être  citées,  à  tous  les  représentants  étran- 
gers qui  assistaient  au  centenaire.  La  médaille  porte  cette 
courte  mais  significative  inscription  : 

Michel  puj  che  mortal  Angel  divino. 

ni. 

»  Ce  qui  frappe  surtout  dans  la  ville  de  Florence,  c'est 
le  grand  caractère  de  ses  monuments,  la  teinte  sévère  et 
profondément  religieuse  qu'y  revêtent  tous  les  arts.  L'ar- 
chitecture y  a  conservé  la  tradition  étrusque;  celle-ci  se 
fait  sentir  jusque  dans  les  constructions  de  nos  jours.  Les 
palais  étaient  autrefois  des  forteresses;  exposés  à  soutenir 
des  sièges  dans  les  luttes  intestines  de  cette  turbulente 
république ,  ils  se  distinguent  par  leur  majestueuse  am- 
pleur, leur  solidité,  leur  élévation.  L'appareil  en  est  presque 
brutal,  à  peine  équarri  et  rappelant  les  murs  cyclopéens. 
Les  blocs  de  granit  entassés  les  uns  sur  les  autres  pour 
former  le  soubassement  du  Palais  Pitti,  ne  diffèrent  point 
de  ce  mur  étrusque  récemment  mis  à  découvert  sur  l'em- 
placement occupé  jadis  par  le  berceau  de  Florence,  l'an- 
tique cité  de  Fiesole.  Ce  qui,  partout  ailleurs,  paraîtrait 
lourd  et  grossier,  est  ici  élégant  et  harmonieux,  grâce  à  la 
magie  des  proportions.  Ce  caractère  de  grandeur  s'est  com- 
muniqué de  l'architecture  à  la  sculpture  et  à  la  peinture, 
deux  arts  qui,  en  acceptant  la  subordination,  ont  trouvé  îe 
moyen  d'arriver  aux  effets  les  plus  puissants.  Les  peintres 
et  les  sculpteurs  ont  su  porter  leur  pensée  à  un  niveau  très- 
élevé  en  la  proportionnant  à  l'espace  qu'ils  avaient  à  rem- 
plir. 


(  256  ) 
»  De  l'étude  de  ces  monuments ,  il  ressortait  pour  nous , 
avec  une  entière  évidence,  que  Florence  a  été  véritablement 
le  plus  vaste  et  le  plus  intense  foyer  de  lumière  de  cette 
époque  à  jamais  mémorable  où  la  civilisation,  servie  par 
Tart,  s'est  dégagée  des  langes  du  moyen  âge,  en  dépouil- 
lant la  raideur  byzantine. 

»  C'est  là  que  l'art  moderne  a  pris  naissance,  qu'il  s'est 
librement  développé,  s'aidant,  il  est  vrai,  des  travaux  de  la 
période  grecque ,  nouvellement  remis  au  jour,  mais  ne  s'y 
laissant  point  absorber;  cherchant  avant  tout  ses  modèles 
dans  la  nature,  cette  source  inépuisable  que  l'artiste  a  tou- 
jours à  sa  portée,  quand  il  le  veut;  source  q^ui  ne  tarit 
jamais;  car,  à  la  différence  des  œuvres  humaines,  l'œuvre 
de  Dieu,  la  nature,  ne  vieillit  point;  les  siècles,  au  con- 
traire, en  s'accumulant,  la  rajeunissent. 


IV. 


»  Quant  à  nous,  que  l'Académie  avait  délégués  pour 
prendre  part  à  ces  fêtes ,  nous  nous  sommes  efforcés  d'y 
tenir  haut  et  ferme  la  bannière  artistique  de  la  patrie 
belge.  En  effet,  nous  ne  pouvions  nous  soustraire  à  une 
émotion  mêlée  de  fierté  nationale  en  retrouvant,  sur  ce 
sol  semé  de  tant  de  merveilles,  la  trace  du  passage  des 
plus  illustres  de  nos  artistes. 

»  Nous  rencontrions  à  chaque  pas  les  beaux  ouvrages 
de  ce  Jean  de  Boulogne,  que  l'Italie  a  adopté  pour  un  des 
siens,  qu'elle  a  rebaptisé  du  nom  de  Bologna;  les  pan- 
neaux de  nos  Van  Eyck;  les  triptyques  de  Roger  Van  der 
Weyden ,  de  Jean  de  Mabuse  et  de  ce  Hugo  Van  der  Goes , 


(  257  ) 

si  peu  connu  dans  sa  patrie  et  dont  Florence  possède  le 
chef-d'œuvre  {voir  la  note  F).  Avec  quel  plaisir  nous  retrou- 
vions les  pages  magistrales  de  Rubens  et  de  Van  Dyck  sou- 
tenant, au  palais  Pitti,  le  voisinage  des  plus  belles  œuvres 
de  Raphaël,  de  Fra  Bartolomeo ,  d'Andréa  Del  Sarto  et  du 
Titien.  [Voir  la  note  G.) 

»  Jamais  nous  n'avions  mieux  saisi  les  rapports  si  con- 
tinus qui,  depuis  les  premiers  temps  de  la  Renaissance,  ont 
rapproché  les  Pays-Pas  des  belles  contrées  de  l'ïtalie  et 
particulièrement  de  Florence,  cette  riante  cité  qui,  sui- 
vant l'heureuse  expression  d'un  illustre  représentant  de 
rinstitut  de  France,  «  est  non-seulement  la  ville  des  plus 
belles  fleurs  de  la  nature,  mais  aussi  la  ville  des  plus  belles 
fleurs  de  l'esprit  humain.  » 

»  N'étions-nous  pas  témoins  de  l'admiration  qu'excitent 
les  œuvres  de  nos  vieux  maîtres,  même  lorsqu'elles  se 
trouvent  rapprochées  des  merveilles  de  cet  art  italien  dont 
ils  ont  été  les  émules  et  non  les  copistes? 

»  Jamais  nous  n'avions  mieux  compris  de  quel  secours 
les  deux  écoles  ont  été  l'une  pour  l'autre,  aux  époques  de 
leur  commune  splendeur,  lorsqu'elles  échangeaient  frater- 
nellement leurs  idées  et  leurs  enseignements. 

D  C'est,  dominés  par  ces  impressions,  que  nous  nous 
sommes  mêlés  au  groupe  qui  entourait  S.  A.  R.  le  prince 
de  Carignan  et  les  autorités  florentines,  sur  les  degrés  du 
monument  élevé  à  la  gloire  de  Michelange;  et,  lorsque  est 
venu  notre  tour  de  prendre  la  parole,  nous  étions  heureux 
et  fiers  de  pouvoir  aflîrmer  nos  sentiments  devant  un  au- 
ditoire sympathique  et  enthousiaste.  » 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  17 


{  2§8  ) 
Nous  nous  sommes  exprimés  en  ces  termes  : 

«  Monseigneur,  Messieurs, 

»  Tous  les  peuples  accessibles  aux  délicates  ou  aux  su- 
blimes impressions  de  l'art  ont  applaudi  à  réclatanle  ma- 
nifestation préparée,  avec  tant  de  munificence  et  de  solli- 
citude, par  l'illustre  municipalité  de  la  ville  de  Florence. 

»  Notre  pays,  —  si  étroit  que  soit  l'espace  qu'il  occupe 
sur  la  carte  de  l'Europe ,  —  ne  pouvait  demeurer  sourd  à 
votre  appel  :  si  nous  avions  négligé  d'y  répondre,  on  eût 
été  en  droit  de  nous  le  faire  sévèrement  expier  en  nous 
remettant  en  mémoire  que  le  petit  coin  de  terre  d'où  nous 
venons  a  donné  naissance  à  une  célèbre  école  de  peinture, 
et  que  le  monde  entier,  d'un  consentement  unanime,  re- 
connaît, dans  les  productions  de  cette  école,  l'expression 
la  mieux  caractérisée  de  l'une  des  deux  tendances  princi- 
pales de  l'art. 

»  L'école  flamande  salue  en  ce  jour  sa  noble  sœur, 
l'école  italienne! 

»  L'Académie  royale  de  Belgique,  qui  réunit  dans  son 
sein  des  représentants  des  sciences,  des  lettres  et  des 
beaux-arts,  nous  a  chargés  de  vous  apporter  son  tribut 
d'admiration  pour  le  génie  gigantesque  dont  vous  fêtez  si 
dignement  le  quatrième  centenaire;  et  le  gouvernement 
de  notre  Roi,  si  sympathique  à  tout  ce  qui  peut  aider  au 
progrès  de  la  civilisation ,  s'est  associé  avec  empressement 
aux  sentiments  de  l'Académie,  en  assurant  aux  délégués 
de  la  classe  des  beaux -arts  l'accomplissement  de  leur 
pieuse  mission. 


(  259  ) 
7>  En  présence  de  l'inimensiléde  Tœuvre  de  Michelange, 
embrassant  le  triple  domaine  des  sciences,  des  lettres  et 
des  arts,  Timagination  demeure  confondue.  Il  y  aurait 
témérité  à  hasarder  une  appréciation  qui  serait  toujours 
incomplète,  —  dût-on  y  consacrer  des  volumes.  —  On  est 
contraint  de  se  renfermer  dans  un  respectueux  silence,  de 
se  borner  à  l'expression  des  sentiments  les  plus  sympathi- 
ques envers  la  nation  qui  a  produit  de  tels  hommes. 

»  La  Belgique  artistique,  scientifique  et  littéraire  se 
contentera  donc  de  vous  apporter,  par  notre  bouche,  le 
salut  fraternel  de  l'école  flamande  à  sa  noble  sœur  l'école 
italienne. 

»  Nous  ne  pouvons  nous  rappeler  sans  émotion  l'échange 
fécond  d'idées  et  d'enseignements  qui  n'a  point  cessé  entre 
elles  depuis  plus  de  quatre  siècles. 

»  Ces  deux  sœurs,  —  bien  distinctes  de  physionomie, 
—  se  ressemblent  pourtant,  comme  il  convient  à  des 
sœurs  (1),  par  quelques  beaux  et  grands  côtés  :  elles  pro- 
fessent Tune  et  l'autre  le  culte  de  la  nature,  où  le  beau 
idéal  jaillit  de  l'élude  du  réel. 

»  Les  deux  écoles,  malgré  tant  de  rapports  intimes,  ont 
marché  constamment  dans  deux  voies  parallèles  sans  se 
confondre  jamais.  Émules  et  non  rivales,  elles  ont  voué 
réciproquement  une  sincère  admiration  aux  chefs-d'œuvre 
de  l'art,  qu'ils  eussent  pour  berceau  le  Nord  ou  le  Midi. 


(1)  ^> Faciès  non  omnibus  una 

i>  Nec  diversa  lamen.  Qualem  decet  esse  sororum. 


(P.  OviDii  ^ASosiSf  Metamophoseon.  Lib.  II,  v.  15-14.) 


(  260  ) 
»  Si  nos  musées  réservent  une  place  d'honneur  aux 
toiles  et  aux  marbres  de  vos  artistes  immortels,  nos  pein- 
tres et  nos  sculpteurs  ont  laissé  dans  l'Italie  d'impérissa- 
bles souvenirs,  et  l'illustre  cité  qui  nous  honore  en  ce  jour 
d'un  si  splendide  accueil  est  particulièrement  riche  en  té- 
moignages de  ces  glorieux  échanges. 

»  Aujourd'hui,  comme  autrefois,  les  jeunes  artistes 
belges,  suivant  une  tradition  quatre  fois  séculaire,  vien- 
nent tremper  leur  talent  aux  sources  vivifiantes  ouvertes 
en  si  grand  nombre  dans  vos  riches  contrées.  Nous  nous 
rappelons,  non  sans  quelque  fierté,  que  si  l'Italie  a  souvent 
trouvé  des  émules  et  des  imitateurs  parmi  les  nôtres,  elle 
a  aussi  quelquefois  rencontré  chez  nous  des  modèles  aux- 
quels elle  n'a  point  marchandé  ses  hommages. 

»  Salut  donc,  salut  fraternel,  à  l'Italie  artistique,  scien- 
tifique et  littéraire,  et  daigne  la  Providence  lui  réserver, 
dans  l'avenir,  de  nouvelles  gloires  dignes  de  son  passé!  » 


NOTES. 


(A)  L'exécution  du  David  est  un  véritable  tour  de  force.  Cette  statue 
fut  commandée  à  l'artiste  en  1501  dans  les  conditions  suivantes.  Depuis 
près  de  quarante  ans,  gisait,  dans  la  cour  des  ateliers  de  Sancta  Maria 
de'  Fiori,  un  bloc  de  marbre  de  Carrare  qu'on  nommait  le  Géant.  Un 
sculpteur  maladroit  l'avait  gâté  en  voulant  en  faire  une  statue.  C'est  cette 
masse  mal  ébauchée  que  Michelange  fut  chargé  de  mettre  en  œuvre, 
besogne  à  laquelle  tous  les  autres  sculpteurs  avaient  dû  renoncer.  Le 
jeune  artiste,  l'ayant  examinée,  jugea  qu'il  en  pourrait  tirer  une  flgure 
de  David  s'apprêtant  à  lancer  avec  la  fronde  la  pierre  qui  devait 
abattre  Goliath.  Il  fit  d'abord  un  petit  modèle  en  cire,  qui  se  conserve  à  la 


(  261  } 

maison  l>uoiiarroli ,   puis  il  allaqua  résolùmeiU  le   l)loc,  et  son  ciseau 
créateur  en  fil  sortir  l'une  des  plus  belles  œuvres  de  l'art  moderne. 

Le  David  fut  placé  en  1504  au  lieu  même  qu'avait  occupé  la  Judith  de 
Donatello,  devant  le  Palazzo  Vecchio.  Il  vient  d'être  transporté,  après 
avoir  été  reproduit  en  bronze,  dans  une  cour  de  l'Académie  des  beaux- 
arts,  où  un  vitrage  le  protège  désormais  contre  les  intempéries  des  saisons. 

(R)  Album  Michclangioksco  clei  discgni  on'ginali  riprodotti  in  fotoU- 
tografia;  1873.  Stab.  FotoUtografico  cl  calcografico ,  P.  Smorti  e  O'^, 
Firenze.  Folio  oblong. 

Trente  feuilles  de  dessins  à  la  plume,  au  crayon  noir  et  au  crayon  rouge. 
Ce  sont  des  études  anatomiques,  des  croquis  de  quelques-unes  des 
figures,  exécutées  à  la  chapelle  Sixtine,  soit  pour  le  jugement  dernier 
soit  pour  la  frise.  Enfin  quelques  idées  architecturales  pour  l'ensemble  du 
tombeau  de  Jules  II,  pour  ceux  des  Médicis  et  pour  la  coupole  de  Saint- 
Pierre  à  Rome. 

(C)  La  Bibliografia  di  Michelangelo  Buonarroii  e  gli  ijisisori 
délie  sue  opère ,  Firenze  coi  tipi  di  M,  Cellini  e.  c.  alla  Galileiana. 
MDCCCLXXV. 

Ce  volume  de  350  pages,  grand  in-S"^  contient,  outre  la  préface  signée 
Luigi  Passerini,  un  catalogue  alphabétique  des  livres  et  autres  écrits  dans 
lesquels  il  est  traité  de  la  vie  et  des  ouvrages  de  Michelange.  Il  occupe 
environ  la  moitié  du  volume.  L'autre  partie  est  la  liste  également  alpha- 
bétique des  graveurs  qui  ont  reproduit  des  œuvres  du  grand  artiste, 
accompagnée  de  la  description  de  chaque  gravure. 

(D)  Le  lettere  di  Michelangelo  Buonarroii  pubblicate  coi  ricordi  ed 
conlratti  arlislici ,  per  cura  di  Gaelano  Milanesi.  In  Firenze^  coi  tipi 
dei  successori.  Le  Monnier  MDCCCLXXV. 

Cette  publication,  de  721  pages,  est  divisée  en  trois  parties  :  les  let- 
tres, les  notes  ou  souvenirs  (Ricordi)  et  les  Contrats  artistiques. 

Les  lettres  sont  au  nombre  de  495,  dont  341  adressées  à  des  membres 
de  la  famille  de  l'artiste,  à  savoir  :  45  à  son  père,  depuis  l'année  1497 
jusqu'en  15^23;  quatre-vingt-dix  à  ses  trois  frères  :  Buonarroto,  Giovan 
Simone  et  Gismondo;  elles  vont  jusqu'à  l'année  1546;  et  à  son  neveu 
Lionardo,  de  1540  à  1565,  au  nombre  de 206.  Le  reste,  154  lettres,  sont 
adressées  à  divers  personnages  parmi  lesquels  on  distingue  les  papes  Clé- 
ment VJI  et  Paul  III;  les  ducs  de  Florence,  Laurent  et  Côme  de  Médicis; 
le  roi  de  France,  François  I";  les  cardinaux  Jules  de  Médicis,  Bernard 
Dovisi,  Rodoifo  Pio  di  Carpi;  les  sculpteurs  Donato  Benti ,  et  Benvenuto 


(  26^2  ) 

Cellini;  les  peintres  Sebasliano  ciel  Piombo  el  Georgio  Vasari;  Pielro 
Arelino,  Tarchilecte  Guliano  de  San  Gallo  et  enfin  Vittoria  Colonna. 
Cette  correspondance  occupe  560  pages.  Les  éditeurs  en  ont  emprunté 
les  éléments  d'abord  aux  publications  antérieures.  Ils  ont  recherché  le 
reste  dans  les  collections  publiques  ou  privées  qui  en  conservent  les 
originaux.  Les  archives  de  la  famille  Buonarroli  ont  fourni  293  lettres. 
Le  Musée  britannique  165.  Les  autres  ont  été  puisées  à  la  Bibliothèque 
nationale  de  Florence,  aux  Archives  de  rÉiai  et  de  la  cathédrale  de 
Santa  Maria  de'  Fiori  de  la  même  ville.  Le  Musée  de  Berlin  a  donné  une 
lettre  importante  et  élendue  adressée  à  Sébastien  del  Piombo.  Les  collec- 
tions parliculières  d'Ashburnham  d'Oltley,  de  Piuo  et  du  chevalier  Palagi 
ont  aussi  été  mises  à  contribution. 

On  est  surpris  de  ne  rencontrer  dans  ce  recueil  aucune  pièce  empruntée 
aux  diverses  collections  et  archives  de  la  France.  Il  doit  cependant  y  avoir 
dans  ce  pays  plus  d'un  autographe  de  Michelange.  Il  existe ,  entre  autres, 
au  Musée  de  Lille ,  collection  Wicar,  un  recueil  de  dessins  accompagnés 
de  notes  manuscrites  attribués  par  le  premier  possesseur  à  Michelange. 
Cette  attribution,  consignée  dans  le  catalogue  imprimé  en  1856,  a  été 
contestée  et  définitivement  reconnue  inexacte  à  la  suite  des  savantes  et 
patientes  recherches  dont  M.  Benvignat,  membre  de  la  Société  des 
sciences, de  l'agriculture  et  des  beaux-arts  de  Lille,  a  discuté  les  résul- 
tats dans  un  rapport  inséré  dans  les  Mémoires  de  ladite  Compagnie  ; 
nmis,  indépendamment  de  cette  collection,  les  autographes  de  l'immortel 
artiste  florentin  ne  peuvent  manquer  absolument  dans  un  pays  qui 
compte  tant  de  beaux  musées,  tant  de  riches  bibliothèques  et  tant  d'ama- 
teurs éclairés. 

Les  notes  et  souvenirs  [Vi.\covà\)  embrassent  les  années  150o  à  1563;  ils 
sont  rangés  par  ordre  chronologique.  Comme  pour  les  lettres,  la  majeure 
partie  provient  des  archives  de  la  famille  Buonarroti;  un  assez  bon  nombre 
est  emprunté  au  Musée  britannique,  quelques  pièces  seulement  aux  Ar- 
chives de  l'État  à  Florence.  Ce  n'est  donc  point  précisément  un  registre 
tenu  par  Michelange;  le  classement  appartient  à  l'éditeur  qui,  comme  on 
le  voit,  a  recueilli  les  notes  partout  où  il  a  pu  les  trouver. 

Enfin  les  Contrats  artistiques^  au  nombre  de  66,  concernent  des 
commandes  faites  à  l'artiste  ainsi  que  les  conditions  d'exécution  de 
l'œuvre  et  le  prix  qui  lui  sera  compté.  Le  premier  en  date  est  du 
27  août  1498.  Le  cardinal  de  San  Dionisio  fait  à  Michelange  la  commande 
de  la  Pieta  qui  se  voit  à  Saint-Pierre  du  Vatican,  à  Bome:  «  Un  groupe 
en  marbre,  de  grandeur  naturelle,  représentant  la  Vierge  Marie  velue, 
tenant  sur  ses  genoux  le  corps  de  Jésus  mort,  »  lit-on  dans  l'acte.  Le  prix 


(  263  ) 


est  fixé  à  450  ducats  d'or,  et  l'ouvrage  doit  être  exécuté  en  un  an.  Grand 
nombre  de  ces  contrats  ont  pour  objet  l'acquisilion  des  marbres  dont 
l'artiste  avait  besoin  pour  ses  travaux.  Ils  sont  empruntés  aux  Archives  du 
Vatican,  de  l'État  à  Florence,  de  plusieurs  églises  de  la  même  ville,  de 
la  commune  de  Carrare,  et  de  celles  de  Massa  et  de  Sienne.  Le  Musée 
britannique  a  encore  fourni  sa  part  à  cette  division. 

(E)  MiCHEL.VNGIOLO    BuOXARROTl  RICORDO    AL    POPOLO    ITALIAXO.    Ai  Vap- 

presentanti  che  intervengono  aile  [este  centeinarie  del  grande  artista 
offre  il  Comitato.  —  Ix  Firejize,  GC.  Saxsoni,  editore  1875. 

Cette  publication,  destinée  à  raviver  et  à  perpétuer  chez  le  peuple 
italien  le  souvenir  du  grand  homme,  se  compose  de  divers  opuscules 
dus  à  la  plume  de  plusieurs  auteurs.  Après  l'avertissement  de  l'éditeur 
Sansoni,  vient  l'épigraphe  dédicatoire  signée  Cesare  Guasti,  puis  une 
notice  de  G.  Milanesi  sur  les  portraits  de  Michelange;  la  Vie  de  l'artiste 
par  Luigi  Venturi;  deux  appréciations  du  sculpteur,  l'une  par  G.-E.  Sal- 
tini,  qui  s'occupe  exclusivement  du  David  et  du  Moïse,  et  l'autre  de 
G.  Dupre,  qui  analyse  les  tombeaux  des  Médicis  à  San  Lorenzo.  Le  peintre 
est  jugé  par  G.  Mongeri  qui  traite  spécialement  de  la  chapelle  Sixtine, 
Les  œuvres  d'architecture  du  maître  sont  aussi  examinées  par  des 
hommes  compétents  :  l'architecte  civil  S.-G.-E.  traite  successivement 
de  la  bibliothèque  des  Médicis,  de  la  sacristie  de  San  Lorenzo,  de  la  place 
et  du  palais  du  Capitole  et  de  la  basilique  de  Saint-Pierre.  L'architecte 
militaire,  le  capitaine  R.-P.,  étudie  les  fortifications  de  Florence  à  L'époque 
du  siège  de  la  Cité.  Michelange  poëte  est  l'objet  d'une  étude  de  L.  Venturi. 
Enfin  G.  J.  Gavallucci  donne  un  guide  pour  visiter  les  œuvres  de  Mi- 
chelange dans  la  ville  de  Florence.  Le  volume  est  clos  par  quelques 
octaves  de  E.  Frullani  :  Michelange  au  lit  de  mort  de  Vitloria  Colonna. 
Enfin  les  dernières  pages  sont  consacrées  à  reproduire  les  inscriptions 
du  monument  de  la  nouvelle  place. 

(F)  Le  tableau  principal  du  triptyque  de  Hugo  Van  der  Gocs  repré- 
sente l'Adoration  des  bergers;  sur  les  deux  volets  sont  les  portraits  de 
la  famille  de  Portinari  pour  laquelle  cette  peinture  a  été  exécutée.  Jus- 
qu'à ces  derniers  temps,  elle  était  restée  dans  le  chœur  de  la  chapelle  de 
l'hôpital  de  Santa-Maria-Nova  ;  elle  vient  d'être  transportée,  après  avoir 
été  restaurée,  dans  un  petit  musée  installé  en  face  de  l'hôpital. 

(G)  Je  dois  signaler  à  l'attention  des  Belges  qui  visitent  Florence  un 
grand  tableau  de  Sustermans,  représentant  le  sénat  de  Florence  qui  prête 


(  264  ) 

le  serment  de  fidélité  à  Ferdinand  II.  Comme  celte  toile  se  trouve  relé- 
guée, au  Musée  des  Offices,  dans  la  salle  des  Niobides,  et  qu'elle  n'est 
pas  fort  bien  éclairée,  elle  peut  facilement  échapper  aux  regards  des 
visiteurs. 


—  M.  Ad.  Siret,  inscrit  au  programme  de  la  séance  pour 
la  lecture  de  son  rapport  sur  le  mémoire  de  concours  en 
réponse  à  la  question  :  Faire  l'histoire  de  la  sculpture  aux 
Pays-Bas  pendant  les  XVII^  et  XVI 11^  siècles,  a  pris 
place  à  son  tour  sur  l'estrade,  pour  faire  cette  lecture 
(voir  Bulletin,  page  232). 

—  La  parole  a  ensuite  été  donnée  à  M.  le  secrétaire 
perpétuel  pour  proclamer  les  résultats  des  concours  sui- 
vants . 

CONCOURS   ANNUEL    DE    LA    CLASSE. 

Sujets  littéraires. 

La  classe  avait  reçu  un  mémoire  portant  pour  devise  : 
La  sculpture  est  l'image  ou  le  miroir  de  l'univers,  en 
réponse  à  la  première  question  de  la  partie  littéraire  du 
programme.  Cette  question  avait  pour  sujet  :  Faire  l'his- 
toire de  la  sculpture  en  Belgique  au  XVIF  et  au  XVIIF 
siècle. 

Conformément  aux  conclusions  favorables  des  rapports 
des  trois  commissaires  chargés  d'examiner  ce  mémoire, 
la  classe  a  décidé  de  lui  décerner  la  médaille  d'or  de  la 
valeur  de  mille  francs. 

L'ouverture  du  billet  cacheté  a  fait  connaître  comme 
étant  l'auteur  de  ce  travail  M.  Edmond  Marchal,  secré- 
taire adjoint  de  l'Académie. 


(  265  ) 
M.   Edmond  Marchai,  présent  à  la  séance,  est  venu 
recevoir  sa  médaille  aux  applaudissements  de  l'assemblée. 

Sujets  d'art  appliqué. 

La  classe  avait  inscrit  à  son  programme  de  concours  de 
cette  année  qu^un  prix  de  six  cents  francs  serait  accordé 
à  la  meilleure  médaille  exécutée  par  un  artiste  belge  depuis 
le  7^**  janvier  1872. 

Cinq  métailles  ont  été  envoyées  pour  ce  concours  : 

1°  Les  victoires  de  l'Allemagne  en  1870-1871  ; 

2°  La  visite  du  czar  Alexandre  à  Londres  en  1874; 

5^  L'alliance  des  républiques  américaines  du  Sud  pour 
la  défense  de  Lima.  —  Ces  trois  pièces  sont  l'œuvre  de 
M.  Charles  Wiener; 

4°  Le  Roi  est  mort!  vive  le  Roi!  par  M.  Ed.  Geerts; 

5°  L'inauguration  du  monument  de  Charlemagne,  par 
M.  Constantin  Jehotte. 

La  classe,  conformément  à  l'avis  unanime  du  jury  chargé 
de  juger  ce  concours,  a  voté  le  prix  aux  deux  médailles  de 
M.  Charles  Wiener  :  la  visite  du  czar  Alexandre  à  Lon- 
dres en  1874  et  Valliance  des  républiques  américaines  du 
Sud  pour  la  défense  de  Lima. 

—  Le  sujet  suivant  avait  été  donné  pour  le  concours 
de  sculpture  de  cette  année  : 

«  On  demande  un  bas  -  relief  pour  une  frise  placée  à 
»  3  mètres  d'élévation  et  ayant  pour  sujet  V Horticulture 
D  personnifiée.  » 

Trois  bas-reliefs  ont  été  présentés  à  ce  concours  : 
Le  n"  1  avait  pour  devise  un  triangle; 


(  266  ) 
Le  n°  2,  les  mots  :  Horticulture.  —  Pomone  et  son  cor- 
tège. 

Et  le  n°  5,  un  trophée  d'instruments  horticoles. 

Le  jury,  après  avoir  examiné  ces  œuvres,  a  été  d'avis 
que  le  n*"  2,  s'il  ne  réunit  pas  les  conditions  nécessaires 
pour  mériter  le  prix  de  1,000  francs  inscrit  au  programme, 
offre  cependant  assez  de  qualités  pour  qu'il  y  ait  lieu  d'ac- 
corder à  l'auteur  un  prix  d'encouragement  consistant  en 
une  somme  de  500  francs. 

Ce  jugement  a  été  ratifié  par  la  classe.  L'auteur  du  bas- 
relief,  M.  Julien  Dillens,  s'est  fait  connaître  depuis  et  a 
accepté  cette  récompense. 

GRAND  CONCOURS  d'aRCHITECTURE  DU  GOUVERNEMENT. 

Conformément  aux  résolutions  du  jury  chargé,  au  nom 
du  gouvernement,  de  juger  le  grand  concours  d'architec- 
ture de  cette  année,  M.  J.-B.  De  Coster,  d'Anvers,  a  été 
proclamé  lauréat. 

Le  2^  prix  a  été  décerné,  en  partage,  à  MM.  Ernest 
Allard,  de  Bruxelles,  et  Octave  Van  Rysselrerghe  ,  de 
Minderhout  (Anvers). 

Le  sujet  du  concours,  auquel  trois  concurrents  ont  pris 
part,  demandait  les  plans,  coupe  et  élévation  d'un  conser- 
vatoire royal  de  musique  et  de  déclamation  pour  les  deux 
sexes  (environ  500  élèves)  en  style  classique  ou  dérivé  du 
classique. 

MM.  De  Coster  et  Allard  sont  venus  au  bureau  recevoir 
la  récompense  qu'ils  ont  remportée. 


(  267  ) 


CLASSE  DES  SCIENCES. 


Séance  du  9  octobre  1875. 

M.  A.  Brialmont,  directeur  et  président  de  rAcadémie. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  B.-C.  Du  Mortier,  L.  de  Koninck, 
P.-J.  Yan  Beneden,  Edm.  de  Selys  Longchamps, 
H.  Nysl,  H.  Gluge,  Melsens,F.  Duprez,  G.  Dewalque, 
Ern.  Quetelet,  H.  Maus,  M.  Gloesener,  E.  Candèze, 
Cil.  Montigny,  Steichen ,  Éd.  Dupont,  Éd.  Morren , 
Éd.  Van  Beneden,  G.  Malaise,  F.  Folie,  Alb.  Briart  et 
F.  Plateau ,  membres  ;  E.  Catalan  et  Aug.  Bellynck , 
associés  ;  J.  De  Tilly,  F.  Crépin,  P.-L.  Cornet  et  Ch.  Van 
Bambeke ,  correspondants. 


CORRESPONDANCE. 


La  classe  apprend  avec  un  bien  vif  sentiment  de  regrets 
la  perte  qu'elle  a  faite  en  la  personne  de  l'un  des  plus 
anciens  associés  de  la  section  des  sciences  mathématiques 
et  physiques,  M.  Richard  Van  Rees,  ancien  professeur  à 
l'Université  d'Utrecht,  décédé  dans  cette  ville  le  25  août 
dernier. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  s'est  empressé  d'exprimer  à 


(  268  ) 
la  famille  du  défunt  les  sentiments  de  condoléance  de  la 
compagnie. 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  adresse,  pour  la  biblio- 
thèque de  l'Académie,  différents  ouvrages  qui  seront  men- 
tionnés dans  le  Bulletin  de  la  séance.  —  Remercîments. 

—  M.  le  D'  Jules  Morel,  de  Gand,  avait  invité  la  com- 
pagnie, au  nom  du  comité  d'organisation,  à  se  faire 
représenter  par  des  délégués  à  la  fête  qui  a  eu  lieu  à  Delft, 
le  8  septembre  187o,  pour  célébrer  le  200'  anniversaire 
de  la  découverte  des  infusoires  par  Leeuwenhoek.  Plusieurs 
membres  se  sont  rendus  à  cette  invitation. 

—  M.  le  général-major  Lemaire,  directeur  du  dépôt  de 
la  guerre,  écrit  que  l'intérêt  que  l'Académie  a  toujours 
porté  aux  travaux  scientifiques  du  dépôt  de  la  guerre 
l'engage  à  lui  communiquer  un  résumé  des  déterminations 
acquises,  tel  qu'il  a  été  adressé  à  la  commission  perma- 
nente de  l'Association  géodésique  internationale.  «  J'ai 
donc  l'honneur,  ajoute-t-il,  de  vous  transmettre  le  rap- 
port fait  dans  la  séance  du  22  septembre,  à  Paris,  et  je 
l'accompagne  du  procédé  que  nous  mettons  en  pratique 
pour  la  compensation  du  réseau  par  la  méthode  de  Bessel 
et  Baeyer,  avec  prière  de  bien  vouloir  le  présenter  à  la 
classe  des  sciences  dont  l'opinion  pourrait  nous  encou- 
rager dans  la  rude  tâche  entreprise  par  l'établissement 
sous  ma  direction. 

La  classe  désigne  MM.  Liagre,  Ern.  Quetelet  et  F.  Folie 
pour  l'examen  de  ce  travail. 

—  La  Société  hollandaise  des  sciences  à  Harlem  com- 
munique un  exemplaire  de  son  programme  de  concours 
pour  1875. 


(  269  ) 

—  Les  nouvelles  Sociétés  de  zoologie  de  Rotlerdam  et 
des  sciences  naturelles  de  Pise  envoient  les  premiers  fas- 
cicules de  leurs  publications  et  demandent  l'échange. 

Renvoi  à  la  commission  administrative. 

—  Les  établissements  scientifiques  suivants  adressent 
leurs  récents  travaux  : 

La  Société  des  sciences  de  Harlem,  l'Université  de  Leyde, 
l'Institut  philologique  et  ethnographique  des  Indes  néer- 
landaises, à  La  Haye,  la  Société  des  arts  et  des  sciences 
d'Utrecht,  l'Académie  de  Stanislas,  à  Nancy,  la  Société 
d'Émulation  de  Cambrai,  l'Institut  royal  géodésique  de 
Berlin,  la  Société  de  géographie  de  Dresde,  celles  des 
sciences  de  Hambourg,  des  sciences  d'Iéna,  l'Observatoire 
de  Prague,  l'Institut  géologique  et  la  Société  anthropolo- 
gique de  Vienne,  l'Académie  des  sciences  de  St-Péters- 
bourg  et  la  Société  de  géographie,  les  Sociétés  des  sciences 
de  Dorpat  et  de  Moscou,  l'Académie  des  sciences  de 
Copenhague,  l'Université  d'Upsal,  la  Société  des  sciences 
naturelles  de  Boston,  l'Office  géologique  et  l'Observatoire 
naval  de  Washington,  l'Académie  des  sciences  de  Madison, 
l'Office  météorologique  du  Canada  et  la  Société  des  sciences 
naturelles  de  Mexico. 

La  Société  des  sciences  de  Middelbourg,  l'Université  de 
Kiel,  celles  des  sciences  de  Danzig  et  de  géographie  de 
Stuttgart  accusent  en  même  temps  réception  du  dernier 
envoi  des  publications  académiques. 

—  Le  congrès  scientifique  de  France  annonce  que 
l'ouverture  de  sa  XLP  session  aura  lieu  à  Périgueux  en 
novembre  1875. 

—  M.  Van  Rysselberghe  adresse  à  la  classe  plusieurs 


(  270  ) 

exemplaires  d'un  diagramme  obtenu  à  Ostende  à  Taide  de 
son  météorographe  enregistreur. 

—  M.  C.  Rodenbach,  à  Gand,  demande  à  pouvoir  ren- 
trer en  possession  du  manuscrit  de  son  mémoire  :  VÉtalon 
prototype  universel  des  mesures  de  longueur  de  Vantiquité, 
dont  le  dépôt  a  été.  ordonné  aux  archives  sur  les  conclu- 
sions des  rapports  des  commissaires. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  a  répondu  que  ce  manuscrit 
est  devenu  la  propriété  de  l'Académie,  mais  que  l'auteur 
peut  en  faire  prendre  copie  à  ses  frais. 

—  M.  J.  Cavalier  envoie  son  résumé  météorologique 
pour  Ostende,  pendant  le  mois  d'août  1875. 

—  La  classe  reçoit  les  hommages  suivants,  au  sujet 
desquels  elle  vote  des  remercîments  : 

Opuscules  de  botanique^  par  M.  B.-C.  Du  Mortier,  vol. 
in-8";  Hepaticœ  Europœ,  par  le  même,  vol.  in-8°;  Sur  la 
grande  Balénoptère  du  Nord  [Balaenoptera  Sibbaldiï),  par 
M.  P.-J.  Van  Beneden,  br.  in-8%  Sur  les  asymptotes  des 
courbes  algébriques,  par  M.  E.  Catalan,  br.  in-S";  Note 
sur  les  nombres  de  Bernoullij  par  le  même,  br.  in-4°;  Swr 
la  constante  d'Euler  et  la  fonction  de  Binet^  id.,  br.  in-4°; 
Considérations  sur  la  production  et  V emploi  de  l'air  com- 
primé dans  les  travaux  d'exploitation  des  mines,  par 
M.  F.-L.  Cornet,  br.  in-8°;  Théorie  analytique  élémentaire 
du  planimètre  Amsler,  par  M.  G. -A.  Hirn,  br.  gr.  in-8". 
'  M.  le  capitaine  d'état-major  Hennequin  fait  hommage 
d'une  Carte  géologique  de  l'Europe  à  l'échelle  du  8,000,000% 
carte  établie  pour  faciliter  l'étude  de  la  géologie  en  général, 
et  accompagnée  d'une  note  explicative.  Des  remercîments 
sont  votés  à  l'auteur. 


(  271  ) 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  sont  renvoyés  à 
l'examen  de  commissaires  : 

i°  Sur  le  calcul  numérique  [Fragment  III),  par 
M.  J.-C.  Houzeau.  —  Commissaires  :  MM.  Folie,  Catalan 
et  Liagre; 

2"  Recherches  sur  les  phénomènes  de  la  digestion  et  sur 
la  structure  de  l'appareil  digestif  chez  les  Myriapodes 
de  Belgique j  par  M.  F.  Plateau.  —  Commissaires  : 
MM.  Sclnvann  et  Éd.  Van  Beneden; 

5°  :  a,  Études  sur  la  planète  Mars  (8^  notice);  b,  Sur 
r aspect  de  l'ombre  du  21^  satellite  de  Jupiter,  le  25  mars 
i874,  par  M.  F.  Terby.  —  Commissaires  :  MM.  Quetelet 
et  Liagre  ; 

4°  Recherches  sur  la  structure  de  Vépiderme  des  cyclo- 
stomes  ,  par  Alexandre  Fœttinger.  —  Commissaires  : 
MM.  Van  Bambeke  et  Schwann; 

5°  Sur  l'étage  dévonien  des  Psa^nmites  du  Condroz 
dans  le  bassin  de  Theux,  dans  le  bassin  Septentrional  et 
dans  le  Boulonnais,  par  M.  Michel  Mourlon.  —  Commis- 
saires :  MM.  Dewalque,  de  Koninck  et  Dupont; 

6*^  Orages  du  15  septembre  ^874  au  15  septembre  4875 , 
qui  ont  éclaté  à  Liège  et  sur  la  province ,  par  M.  D.  Leclercq. 
—  Commissaires  :  MM.  Quetelet,  Montigny  et  Duprez. 

—  M.  P.-J.  Van  Beneden  annonce  qu'il  s'est  rendu  à 
Delft,  où  il  a  rencontré  M.  Félix  Plateau,  pour  assister 
aux  fêtes  du  200^  anniversaire  de  la  découverte  des  infu- 
soires  par  Leeuwenhoek.  Une  réception  des  plus  flatteuses 
a  été  faite  aux  délégués.  M.  Harting  a  prononcé  un  dis- 
cours sur  Leeuwenhoek,  discours  dont  la  substance  a  été 
en  grande  partie  puisée  dans  les  nombreuses  lettres  de  ce 
savant  à  la  Société  royale  de  Londres. 


(  272  ) 


RAPPORTS. 


Sur  les  propriétés  de  la  surface  de  contact  d\in  solide  et 
d'un  liquide.  —  Rectification  d'un  passage  de  ma  Note 
précédente;  par  M.  G.  Van  der  Mensbrugghe. 

Mtappot't  de  M.  «F.  Flateaw» 

G  Dans  sa  Note  précédente,  l'auteur  avait  considéré 
ceux  des  coefficients  constants  de  la  formule  qu'il  discutait 
qui  se  rapportent  à  la  surface  commune  d'un  solide  et 
d'un  liquide,  comme  représentant  toujours  une  force  con- 
tractile ou  tension;  or  un  examen  plus  attentif  l'a  conduit 
aujourd'hui  à  reconnaître  que  cela  n'est  pas  exact  d'une 
manière  générale  :  dans  la  Note  actuelle,  il  déduit  d'une 
formule  de  Gauss  la  conclusion  que  la  force  dont  il  s'agit 
est,  suivant  les  relations  entre  les  actions  moléculaires, 
tantôt  contractile  et  tantôt  extensive;  dans  ce  dernier  cas, 
elle  tend  à  étaler  le  liquide  sur  la  portion  libre  de  la  sur- 
face du  solide. 

La  classe  n'hésitera  pas,  je  pense,  à  ordonner  l'inser- 
tion de  cette  Note  additionnelle  dans  le  Bulletin.  » 

Conformément  à  ces  conclusions  auxquelles  a  souscrit 
M.  F.  Duprez,  second  commissaire,  la  classe  a  décidé  l'im- 
pression au  Bulletin  de  la  note  précitée. 


(  273  ) 

Diagnoscs  de  Cucurbitacées  nouvelles  et  observations  sur 
les  espèces  critiques;  par  M.  Alfred  Cogniaux. 

M9euac4èu»e  rapport  de  MM,  Éldottat*d  Morren. 

«  A  la  suite  de  mon  rapport  du  5  juin,  dont  l'Académie 
a  bien  voulu  adopter  les  conclusions,  M.  Alfred  Cogniaux 
a  demandé  l'autorisation  de  reprendre  son  mémoire,  auto- 
risation qui  lui  a  été  accordée  dans  la  séance  du  3  juillet. 
L'auteur  l'a  représenté  à  l'Académie  qui,  dans  la  séance 
du  7  août,  l'a  de  nouveau  soumis  à  mon  examen. 

M.  Cogniaux  a  remplacé  quatre  pages  de  son  premier 
manuscrit  par  douze  pages  nouvelles  :  profitant  des  obser- 
vations que  j'avais  faites  il  a  remanié  et  complété  son  tra- 
vail ;  il  a  caractérisé  les  genres  qu'il  propose  en  termes  expli- 
cites et  sous  la  forme  scientifique  que  j'avais  demandée  ; 
il  les  a  comparés  entre  eux  et  il  a  discuté  leur  valeur  ;  il  a 
élagué  quelques  passages  inutiles,  en  un  mot,  il  a  donné 
à  son  travail  tout  ce  qui,  à  mes  yeux,  lui  manquait  d'abord. 

J'aurais  donc  bien  mauvaise  grâce  de  ne  point  louer  le 
nouveau  travail  de  M.  Cogniaux  et  je  le  ferais  sans  réserve, 
s'il  ne  s'y  trouvait  pas  un  passage  de  deux  lignes  dont  je 
prie  l'Académie  d'exiger  la  suppression  (page  45),  et  sous 
cette  condition  je  n'hésite  pas  à  proposer  l'impression 
dans  les  Mémoires  in-8°.  » 

Mteuaciènte  fappo»*t  de  Jfi.  A.  Beïtynch. 

«  Nous  avons  examiné  les  modifications  apportées  par 
M.  Cogniaux  à  ses  Diagnoses  de  Cucurbitacées  nouvelles,... 
et  nous  croyons  qu'elles  sont  de  nature  à  satisfaire  toutes 
les  exigences.  Nous  nous  empressons  donc  de  voter  de 
nouveau  l'impression  du  susdit  travail.  » 

â""^  SÉRIE,  TOME  XL.  18 


(  274  ) 

Deuaciètne  t'appoft  fie  .W.  JFf.  Cè'épin. 

«  Nous  partageons  entièrement  l'opinion  de  notre  sa- 
vant confrère  M.  Bellynck  sur  le  travail  deM.Cogniaux  et, 
comme  lui,  nous  nous  empressons  de  voter  de  nouveau 
l'impression  de  ce  travail.  » 

La  classe  vote,  conformément  aux  conclusions  de  ces 
rapports,  l'impression  de  ce  travail  dans  le  recueil  des  Mé- 
moires in-8^ 


—  MM.  Ch.  Montigny  et  Ern.  Quetelet,  chargés  d'exa- 
miner une  note  de  M.  Waltier,  intitulée  :  Théorie  nouvelle 
pour  l'étude  de  la  nature,  en  proposent  le  dépôt  aux 
archives.  —  Adopté. 

—  Une  décision  semblable  est  prise  à  l'égard  d'une 
note  de  M.  Codron,  relative  à  un  nouveau  système  aérosta- 
tique. M.  Ch.  Montigny  avait  été  chargé  d'examiner  cette 
communication. 


Projet  de  publication  d^une  nouvelle  carte  géologique  de  la 
Belgique,  proposition  faite  par  M.  Dewalque  dans  la 
séance  du  5  juin  1875. 

Rapport  de  Mt.  WfettaMqwe» 

<r  Le  51  mai  1836,  un  arrêté  royal  ordonnait  l'exécution 
d'une  carte  géologique  de  la  Belgique,  aux  frais  du  gou- 
vernement et  sous  les  auspices  de  l'Académie.  On  sait 
avec  quel  succès  notre  maître  éminent,  A.  Dumont,  s'est 
acquitté  de  ce  grand  travail.  Le  succès  de  sa  carte  a  été 


(  275  ) 
tel  qu'elle  est  épuisée  depuis  bien  des  années,  et  que  les 
rares  exemplaires  que   Pon  rencontre  dans  les  ventes, 
atteignent  des  prix  fort  élevés.  Aussi  le  besoin  d'une  nou- 
velle carte  géologique  se  fait-il  vivement  sentir. 

D'ailleurs  un  quart  de  siècle  s'est  écoulé  depuis  l'appa- 
rition de  l'œuvre  de  Dumont,  et  depuis  cette  époque  nos 
connaissances  sur  la  géologie  de  notre  pays  se  sont  nota- 
blement accrues,  au  point  qu'il  est  désirable  de  voir  les 
modifications  figurées  sur  une  carte.  Pour  ces  motifs,  et 
pour  d'autres  encore  qui  ressortiront  de  ce  qui  va  suivre, 
j'ai  cru  que  le  moment  est  venu  où  il  faut  s'occuper  de  la 
publication  d'une  nouvelle  carte  géologique  de  notre  pays, 
et  j'ai  appelé  l'attention  du  gouvernement  sur  ce  point. 
Comme  la  première  carte  a  été  exécutée  sous  les  auspices 
et  le  contrôle  de  l'Académie,  le  gouvernement  conservera 
sans  doute  à  celle-ci  cette  haute  prérogative  :  à  ce  seul 
titre  je  me  serais  fait  un  devoir  d'appeler  votre  attention 
sur  les  nécessités  actuelles,  mais  j'ai  à  peine  besoin  de 
dire  qu'en  portant  la  question  devant  vous,  j'ai  eu  en  vue 
de  provoquer  une  étude  sérieuse  de  la  question,  afin  que,  si 
vous  vous  jugez  suffisamment  éclairés,  la  haute  approbation 
de  l'Académie  puisse  recommander  à  la  sollicitude  du  gou- 
vernement telle  mesure  qu'il  conviendra. 

Permettez-moi  d'ajouter  que  cette  question  me  préoc- 
cupe depuis  nombre  d'années.  Si  j'arrive  aujourd'hui  avec 
un  système  défini,  je  puis  dire  que  c'est  à  la  suite  de 
longues  réflexions  et  d'entretiens  répétés  avec  les  hommes 
les  plus  compétents  du  pays  et  de  l'étranger. 

La  première  solution  qui  se  présente  à  l'esprit  est  une 
nouvelle  édition  de  la  carte  de  Dumont,  édition  revisée, 
bien  entendu,  et  mise  au  courant  de  l'état  de  la  science.  A 
première  vue  cette  solution  présente  divers  avantages,  la 
célérité  et  l'économie. 


(  276  ) 

Pour  ce  qui  concerne  ce  dernier  point,  une  nouvelle 
édition  de  la  carte  de  Dumont  ne  peut  se  faire  à  bon  mar- 
ché qu'à  la  condition  qu'on  puisse  utiliser  les  pierres  qui 
ont  servi  à  la  première;  dans  le  cas  contraire,  ce  serait 
peut-être  le  procédé  le  plus  dispendieux.  Pour  le  moment 
je  ne  puis  dire  en  quel  état  sont  ces  pierres,  bien  que  j'aie 
certaines  raisons  de  les  croire  hors  de  service. 

Admettant  toutefois  qu'elles  peuvent  servir  de  nouveau, 
je  n'hésite  pas  à  dire  que  cette  édition  revisée  ne  peut  à 
aucun  point  de  vue  mériter  l'appui  de  l'Académie  et  du 
gouvernement. 

En  eiîet,  sur  cette  carte  le  relief  du  terrain  est  exprimé 
par  des  hachures.  Ce  système  de  représentation,  appliqué 
à  la  carte  géologique  de  formations  dont  les  deux  tiers  sont 
sensiblement  horizontales,  ne  peut  soutenir  la  comparaison 
avec  celui  oii  le  relief  est  exprimé  par  des  courbes  de  ni- 
veau équidislantes,  soit  qu'on  se  place  au  point  de  vue 
scientifique,  soit  qu'on  s'attache  particulièrement  aux  ap- 
plications. Grâce  à  la  sollicitude  du  gouvernement  et  au 
zèle  éclairé  de  la  brigade  topographique  du  dépôt  de  la 
guerre,  nous  possédons  aujourd'hui  des  cartes  topographi- 
ques à  diverses  échelles,  avec  courbes  de  niveau,  termi- 
nées ou  sur  le  point  de  l'être  :  dans  ces  conditions,  aucun 
géologue,  aucun  ingénieur  ne  conseillera  de  renoncer  vo- 
lontairement aux  précieux  avantages  qu'offre  le  système 
de  courbes  de  niveau. 

D'autres  objections  tout  aussi  puissantes  se  rencontrent. 
En  revisant  la  carte  de  Dumont  pour  la  mettre  au  courant 
des  idées  du  jour,  on  doit  nécessairement  faire  disparaître 
son  caractère  distinctif ,  qui  est  sa  légende.  Le  terrain 
ardennais  va  changer  de  nom,  le  silurien  va  être  introduit, 
le  rhénan  disparaît  comme  terrain  et  il  est  autrement 
limité  comme  système,  l'anthraxifère  est  supprimé  et  le 


(  ^277  ) 

carbonifère  vient  prendre  une  partie  de  sa  place,  l'autre 
partie  rentrant  dans  un  terrain  nouveau,  le  devonien.  Des 
modifications  presque  aussi  profondes  seront  introduites 
dans  les  divisions  de  deuxième  et  de  troisième  ordre.  Voilà 
ce  qui  va  arriver  de  nos  trois  terrains  paléozoïques.  Les 
modifications  de  la  légende  des  autres  terrains  ne  porte- 
ront que  sur  les  subdivisions  ;  mais  il  est  probable  qu'il  ne 
restera  qu'une  très-minime  partie  des  dénominations  créées 
par  Dumont,  dénominations  utiles,  il  y  a  trente  ans,  mais 
généralement  considérées  aujourd'hui  comme  devant  céder 
la  place  à  d'autres.  Ainsi,  en  conservant  presque  toute  la 
partie  graphique  de  la  carte  géologique,  on  lui  donne  une 
légende  qui  n'a  plus  rien  de  commun  avec  l'œuvre  primi- 
tive; et  c'est  là  ce  qu'on  publierait  comme  Tœuvre  de  Du- 
mont, seconde  édition  !  Le  respect  qui  entoure  la  mémoire 
de  ce  grand  géologue  empêchera ,  je  l'espère,  une  pareille 
publication. 

Je  vais  montrer  maintenant  que,  par  suite  de  la  marche 
naturelle  des  choses,  l'échelle  de  la  carte  de  Dumont  a  pu 
être  convenablement  choisie,  il  y  a  trente  ans,  mais  qu'elle 
est  aujourd'hui  totalement  insuffisante,  au  point  de  vue 
pratique  comme  au  point  de  vue  scientifique. 

Nous  avons  été  bien  distancés  par  nos  voisins  depuis 
l'époque  où  la  publication  de  la  carte  géologique  de  la 
Belgique  au  ^/i6o,ooo  mettait  notre  pays  au  premier  rang. 
L'expérience  acquise,  ici  et  ailleurs,  a  bientôt  montré  que 
cette  échelle  est  tout  à  fait  insuffisante  pour  permettre 
d'obtenir  d'une  carte  géologique  tous  les  services  qu'elle 
peut  rendre.  Sans  doute,  une  carte  à  échelle  réduite  a 
toujours  son  utilité  propre,  soit  pour  les  vues  d'ensemble, 
soit  pour  l'enseignement;  mais  pour  tout  ce  qui  concerne 
la  représentation  exacte  des  détails,  il  est  clair  qu'une 


(  ^278  ) 
grande  échelle  peut  seule  permettre  de  l'obtenir.  Nous  en 
sommes  venus  là  :  les  nombreuses  subdivisions  qui  ont  été 
introduites  ou  qui  le  seront  sous  peu,  correspondent  souvent 
à  des  bandes  de  terrain  tellement  étroites  qu'elles  exigent 
absolument  une  échelle  développée.  Il  en  est  de  même,  au 
point  de  vue  des  applications,  pour  les  gîtes  métallifères, 
les  affleurements  de  couches  de  houille ,  etc. 

L'Académie  a  vu  directement  deux  exemples  de  ces  exi- 
gences de  la  géologie  actuelle.  La  manière  de  comprendre 
le  terrain  anthraxifère,  avec  ses  alternances  variées  de 
roches  quartzo-schisteuses  et  calcaires,  dans  lesquelles  ont 
été  introduites  diverses  subdivisions  dont  la  plupart  ne 
paraissent  pas  avoir  appelé  l'attention  de  Dumont,  rend 
indispensable  un  nouveau  relevé  géologique  de  ce  terrain, 
dont  je  m'occupe  depuis  longtemps.  En  attendant,  M.  Gos- 
selet  nous  a  présenté  la  carte  de  la  bande  méridionale  des 
calcaires  et  des  schistes  devoniens,  depuis  le  département 
du  Nord  jusqu'à  la  Meuse.  De  son  côté,  notre  honorable 
confrère,  M.  Éd.  Dupont,  a  été  amené  à  donner  la  carte  des 
environs  de  Dinant,  pour  représenter  la  manière  dont  il 
conçoit  la  structure  géologique  de  ce  district.  Tous  les 
deux  ont  trouvé  l'échelle  de  la  carte  de  Dumont  insufli- 
sante.  M.Gosselet  a  pris  l'échelle  de  '/80,ooo,  la  seule  dont  il 
pût  disposer;  M.  Dupont  a  choisi  la  même,  qui  répondait  à 
son  but. 

Je  pourrais  ajouter  que,  pour  mes  études  de  certaines 
régions, j'ai  dû  demandera  la  photographie  l'agrandisse- 
ment au  '/io,ooo  des  cartes  dont  je  me  servais;  mais  j'ai  à 
citer  un  autre  fait  beaucoup  plus  ancien  et  plus  caracté- 
ristique. Les  environs  de  Thenx  présentent  une  constitu- 
tion géologique  assez  compliquée,  en  même  temps  que  de 
riches  gîtes  métallifères  qui  n'ont  pu  être  figurés  sur  la 


(  279  ) 

carte  géologique,  pas  plus  que  les  affleurements  des  roches 
phitoniennes  de  Spa.  Dumont  a  senli  le  besoin  de  montrer 
par  un  exemple  rulilité  des  cartes  à  grande  échelle,  et  il 
nous  a  donné  la  carte  géologique  de  Pépinster  à  Spa ,  au 
*/2o,ooo,  c'est-à-dire  à  une  échelle  huit  fois  aussi  grande 
que  celle  de  la  carte  géologique  de  la  Belgique. 

J'ai  dit  tout  à  l'heure  que  nous  avions  été  bien  distancés 
par  les  autres  nations  :  en  voici  quelques  preuves. 

La  France,  dont  la  carte  géologique,  une  des  plus  an- 
ciennes, est  à  l'échelle  de  i/uOO,ooo,  a  entrepris  la  publication 
d'une  carte  détaillée  à  l'échelle  du  V80,ooo,  la  plus  grande 
dont  elle  pût  disposer. 

L'Institut  impérial  et  royal  géologique  d'Autriche  a 
entrepris  la  carte  de  l'empire  à  l'échelle  de  Vu4,ooo,  qui 
était  celle  de  sa  carte  topographique  la  plus  détaillée.  Cet 
immense  travail  est  à  peine  terminé  que  l'on  sent  le  besoin 
d'une  carte  à  plus  grande  échelle,  tant  pour  la  topographie 
que  pour  la  géologie  :  l'état-major  a  commencé  la  publica- 
tion d'une  carte  au  */73,ooo  qui  va  être  utilisée  immédiate- 
ment pour  la  publication  d'un  nouveau  relevé  géologique. 

La  Suisse  s'est  empressée  d'utiliser  la  belle  carte  topo- 
graphique du  général  Dufour  pour  la  publication  de  sa 
carte  géologique.  Cette  carte  est  au  7100,000,  mais  diverses 
parties  ont  dû  être  publiées  au  7^0,000  et  même  au  723,000. 

En  Allemagne,  le  Wurtemberg,  Bade,  Hesse-Darm- 
stadt,etc,  ont  fait  choix  du  7^0,000.  M.  von  Dechen,  qui  a  pu- 
blié, à  partir  de  1856,1a  carte  géologique  de  la  province  rhé- 
nane et  de  la  Westphalie,en  35  feuilles  à  l'échelle  de  780,000, 
m'écrit  que  cette  carte  —  dont  je  puis  dire  que  la  valeur 
est  partout  hautement  appréciée  —  a  servi  de  preuve  que 
cette  échelle  n'est  même  pas  suffisante  pour  la  représen- 
tation des  accidents  géologiques,  des  subdivisions,  etc. 


(  280  ) 

Aussi  la  Prusse  a-l-elle  commencé  depuis  quelques  années 
la  publication  d'une  carie  géologique  au  723,000, avec  courbes 
de  niveau. 

L'exemple  de  l'Angleterre  n'est  pas  moins  instructif. 
Les  premières  caries  du  pays  de  Galles  ont  été  publiées  à 
l'échelle  de  7^  de  pouce  par  mille,  mesures  anglaises,  soit 
7253,440,  mais  on  a  bientôt  senti  le  besoin  d'une  carte  plus 
détaillée  et  l'on  a  recommencé  la  publication  à  l'échelle 
quadruple  d'un  pouce  par  mille  (703, ôco).  Le  gouvernement 
anglais  n'a  pas  tardé  à  se  convaincre  que  cette  échelle  est 
trop  petite,  tant  pour  la  topographie  que  pour  la  géologie; 
en  conséquence,  la  commission  topographique  a  publié, à 
l'échelle  de  6  pouces  par  mille  (7io,56o),  toute  la  moitié 
septentrionale  de  l'Angleterre,  l'Ecosse  et  l'Irlande.  Les 
officiers  de  la  commission  géologique  [Geological  Siirvey) 
relèvent  sur  le  terrain  la  constitution  géologique  à  l'aide 
des  cartes  à  cette  grande  échelle;  ce  travail  est  ensuite 
publié  sous  ces  dimensions  pour  les  districts  miniers  ;  pour 
les  autres  districts,  qui  ne  présentent  pas  cette  importance 
économique,  le  travail  est  réduit  à  l'échelle  d'un  pouce 
par  mille.  Les  autres  cartes  à  très-grande  échelle  sont 
également  publiées  à  cette  échelle  réduite. 

Depuis  lors,  il  est  arrivé  que  le  manque  de  cartes  à  très- 
grande  échelle  a  été  si  vivement  ressenti  dans  le  sud  de 
l'Angleterre  que  le  directeur  de  la  commission  lopogra- 
phique  a  reçu  l'ordre  de  lever  à  nouveau  toute  cette  région, 
et  que  le  directeur  général  de  la  commission  géologique 
a  été  invité  à  recommencer  le  relevé  géologique  de  tous 
les  bassins  houillers  aussitôt  que  le  travail  topographique 
le  permettra. 

Je  tiens  ces  renseignements  du  directeur  général  du 
Geological  Survey,  M.  Ramsay,  qui  a  bien  voulu  en  même 


(  281   ) 

temps  m'envoyer  diverses  feuilles  aux  trois  échelles  ci- 
dessus,  pour  permettre  de  juger  de  l'impossibilité  de 
représenter,  même  ù  l'échelle  d'un  pouce  par  mille,  tous 
les  détails  qui  intéressent  l'industrie  ou  la  science.  Je  lui 
exprime  volontiers  ici  ma  vive  gratitude. 

Les  considérations  qui  précèdent,  me  paraissent  plus 
que  suffisantes  pour  établir  d'une  façon  pércmptoire  qu'il 
ne  peut  plus  être  question  aujourd'hui  d'une  carte  à  petite 
échelle  :  l'exemple  des  autres  nations,  les  avis  des  hommes 
les  plus  compétents  nous  engagent  à  adopter  une  échelle 
très-détaillée. 

Avant  d'aller  plus  loin,  je  dois  faire  remarquer  qu'une 
telle  entreprise  sera  singulièrement  facilitée  chez  nous 
par  cette  circonstance  que  les  études  géologiques  qui  ont 
été  faites  dans  notre  pays,  ont  été  exécutées  depuis  long- 
temps à  l'aide  de  cartes  topographiques  à  très-grande 
échelle.  Dumont  s'est  d'abord  servi  de  la  carte  de  Capi- 
taine et  Chanlaire,  au  V^o^ooo,  puis  il  a  fait  reporter  ses 
observations  sur  la  carte  au  1/20,000,  en  250  feuilles,  que 
nous  devons  à  notre  zélé  confrère,  feu  Ph.  Van  der  Maelen. 
Il  s'est  exclusivement  servi  de  cette  dernière  carte  à  par- 
tir de  sa  publication;  toutes  les  limites  de  ses  subdivisions 
sont  indiquées  sur  l'exemplaire  dont  il  se  servait  et  qui  est 
conservé  à  l'université  de  Liège.  J'ajoute  que  l'établisse- 
ment géographique  de  Van  der  Maelen  possède  un  exem- 
plaire de  la  carte  au  720,000  colorié  géologiqueraent  d'après 
les  feuilles  qui  ont  servi  à  Dumont. 

J'ai  suivi  la  même  voie  et,  depuis  dix-huit  ans,  j'ai  re- 
cueilli une  foule  de  données  sur  cette  carte.  D'autres,  sans 
doute,  en  ont  fait  autant.  Enfin,  nous  avons  maintenant 
les  planchettes  au  ^20,000  et  les  belles  cartes  gravées ,  au 
7^0,000,  que  l'on  doit  au  dépôt  de  la  guerre.  La  publication 


(  282  ) 

d'une  carte  à  l'une  de  ces  deux  échelles  n'est  donc  pas  une 
entreprise  aussi  considérable  qu'elle  le  paraît  au  premier 
abord,  vu  les  nombreux  documents  réunis  à  l'échelle  du 
720,000  par  Dumont  et  par  ses  successeurs. 

La  question  se  réduit  donc  à  savoir  si  la  nouvelle  publi- 
cation doit  avoir  lieu  au  720,000  ou  au"  7^0,000. 

Ne  me  fiant  pas  à  ma  seule  appréciation,  j'ai  consulté 
les  savants  les  plus  compétents,  mais  la  question  princi- 
pale qui  nous  a  occupés  a  été  celle  d'une  grande  ou  petite 
échelle.  L'année  dernière,  je  suis  allé  à  Paris  étudier  l'or- 
ganisation du  service  de  la  carte  géologique  détaillée  de  la 
France,  et  je  puis  dire  que  tous  les  savants  que  j'ai  vus 
dans  cette  capitale,  ont  été  unanimes  pour  me  recomman- 
der une  carte  à  très-grande  échelle.  Dans  ces  derniers 
temps,  j'ai  demandé  des  avis  en  Allemagne  et  en  Angle- 
terre, mais  en  appelant  encore  l'attention  spécialement 
sur  le  choix  entre  une  édition  nouvelle  de  Dumont  et  une 
carte  au  7^0,000.  Voici  quelques  passages  concluants  des 
réponses  que  j'ai  reçues  et  que  j'annexe  in  extenso  à  mon 
rapport. 

Le  directeur  général  de  l'Institut  impérial  et  royal  géo- 
logiqued'Autriche,M. le  chevalier  Fr.  von  Hauer,  me  répond 
que  la  science  comme  la  pratique  réclame  la  grande  échelle, 
qui  rend  seule  possibles  les  indications  des  diverses  subdi- 
visions nécessitées  par  l'état  actuel  de  la  géologie  et  des 
gisements  importants  pour  l'industrie. 

M.  von  Dechen  est  d'avis  «  qu'une  édition  re visée  de  la 
carte  de  Dumont  n'aurait  qu'une  importance  fort  secon- 
daire et  ne  répondrait  aucunement  aux  exigences  scienti- 
fiques qui  se  sont  élevées  depuis  que  Dumont  a  exécuté 

son  grand  travail,  il  y  a  trente  ans L'exposition  de 

Vienne  a  démontré  que  les  géologues  ont  pris  parti  pour 


(285  ) 

la  grande  échelle —  L'échelle  de  7^0)Ooo  est  certainement 
la  plus  petite  qui  puisse  suffire  pour  la  Belgique,  dont  la 
géologie  est  assez  compliquée.  Tous  les  géologues  alle- 
mands seraient  du  même  avis.  » 

M.  Ramsay  «  n'hésite  pas  à  dire  que  l'échelle  de  la  carte 
de  Dumont  est  aujourd'hui  trop  petite  pour  la  science 
comme  pour  l'industrie.  »  Après  avoir  exposé  ce  que  j'ai 
rapporté  plus  haut  au  sujet  des  échelles  de  plus  en  plus 
grandes  que  son  administration  a  successivement  adoptées, 
il  ajoute  :  a  mon  opinion  personnelle  est  que  beaucoup 
des  détails  nécessaires  pourraient  être  rendus  sur  une 
carte  à  l'échelle  de  5  pouces  par  mille,  qui  est  à  peu  près 
celle  de  votre  carte  au  1/20,000  (qui  équivaut  à  5p,168  par 
mille).  L'échelle  de  Y^o,ooo  serait  insuffisante  pour  notre 
manière  de  procéder.  » 

L'avis  des  savants  étrangers  serait  donc  plutôt  en  faveur 
de  la  carte  au  720,000.  Néanmoins,  tout  considéré,  je  crois 
que  l'on  peut  pour  le  moment  se  borner  au  7^^0,000.  En 
voici  les  raisons  : 

Il  y  a  d'abord,  je  l'avoue,  la  question  d'argent.  Les  di- 
mensions superMcielles  des  planchettes  au  1/20,000  étant  la 
moitié  de  celles  des  feuilles  au  7^0,000,  elles  demanderont 
environ  six  fois  plus  de  feuilles. 

En  second  lieu ,  je  pense  qu'on  s'accorderait  à  recon- 
naître qu'une  bonne  partie  du  pays,  l'Ardenne,  la  Campine, 
les  Flandres,  ainsi  qu'une  partie  notable  des  autres  pro- 
vinces, peut  être  représentée  d'une  façon  très-convenable 
à  l'échelle  que  je  propose.  Restent  maintenant  le  Condroz 
avec  le  pays  de  Hervé,  l'Enlre-Sambre-et-Meuse  et  nos 
bassins  houillers,  pour  lesquels  une  carte  au  720,000  présen- 
terait sans  doute  de  notables  avantages.  Toutefois  j'estime 
que,  vu  la  perfection  de  ces  cartes  au  7^0.000,  surtout  au 


(  284  ) 
point  de   vue  de  leur  similitude  géométrique  avec   les 
cartes  au  1/20,000?  la  plupart  des  détails  pourront  y  être 
rendus. 

Si  Fexpérience  se  prononce  en  sens  contraire,  il  n'y 
aura  ni  inconvénient,  ni  difficulté  à  revenir  àTéclielle  la 
plus  grande,  puisque  tous  les  levés  auront  été  faits  à  l'aide 
de  celle-ci. 

Au  cas  de  la  publication  de  certaines  feuilles  au  1/20,000, 
je  crois  qu'il  y  aurait  encore  utilité  à  donner  en  outre, 
comme  on  le  fait  en  Angleterre,  une  édition  réduite  à 
l'échelle  des  autres  feuilles. 

En  résumé,  mon  opinion,  résultat  de  longues  recherches 
sur  le  terrain  et  de  réflexions  mûries  par  le  temps,  est 
donc  qu'il  est  devenu  nécessaire  de  publier  une  carte  géo- 
logique détaillée  de  notre  pays,  à  l'échelle  de  1/40,000.  Reli- 
sant l'arrêté  royal  de  1856,  je  lui  emprunte ,  en  y  ajoutant 
le  seul  mot  :  détaillée^  ses  deux  considérants,  qui  n'ont  rien 
perdu  de  leur  exactitude,  et  j'en  fais  le  préambule  de 
la  proposition  suivante  que  j'ai  l'honneur  de  soumettre  à 
l'Académie  : 

<i  Considérant  que  l'utilité  des  cartes  géologiques  dé- 
taillées, tant  pour  l'avancement  de  la  science  que  pour  la 
prospérité  de  l'industrie,  ne  peut  plus  aujourd'hui  être 
révoquée  en  doute; 

Considérant  qu'il  convient  que  la  carte  géologique  dé- 
taillée de  la  Belgique  soit  exécutée  dans  le  plus  bref  délai 
possible,  avec  les  mêmes  soins  et  dans  le  même  esprit  que 
les  meilleurs  ouvrages  du  même  genre  publiés  dans  les 
contrées  voisines; 

La  classe  des  sciences  de  l'Académie  émet  l'avis  qu'il  y 
a  lieu  de  procéder  immédiatement,  aux  frais  du  gouverne- 
ment, à  l'exécution  d'une  carte  géologique  détaillée  de  la 


(  28o  ) 
Belgique,  levée  au  720,000,  au  moins,  et  réduite  au  7^000 
d'après  les  cartes  gravées,  avec  courbes  de  niveau,  du  dé- 
pôt de  la  guerre. 

Cette  proposition  sera  transmise  au  gouvernement  sui- 
vant les  formes  académiques,  accompagnée  des  rapports 
des  trois  commissaires,  y 

Nous  croyons  inutile  d'ajouter  en  ce  moment  aucune 
proposition  relative  aux  moyens  d'exécution. 


Annexes  au  rapport  de  M.  Dewalque. 

Àvis  DE  M.  Ramsay. 

London ,  Jermyn  Slreel,  2  juin  1875. 

Je  regrette  que  des  occupations  officielles  urgentes  m'aient 
empêché  jusqu'aujourd'hui  de  répondre  à  votre  lettre. 

J'éprouve  une  grande  admiration  pour  la  carte  de  Dumont, 
fondement  admirable  du  relevé  géologique  de  votre  pays; 
mais,  lorsqu'une  grande  région  doit  être  examinée  de  nouveau 
et  qu'on  doit  exprimer  tous  les  détails  requis  par  la  géologie 
moderne,  je  n'hésite  pas  à  dire  que  l'échelle  de  cette  carte  est 
trop  petite.  L'échelle  de  7i60,ooo  correspond  à  0,396  pouce  par 
mille,  mesures  anglaises,  c'est-à-dire  moins  d'un  demi-pouce 
par  mille.  A  une  telle  échelle,  H  nous  serait  impossible  d'ex- 
primer tous  les  détails  que  demandent  les  applications  écono- 
miques, affleurements  des  diverses  couches  de  houille, 
failles,  etc.;  et  même,  pour  beaucoup  de  questions  d'intérêt 
purement  scientifique,  il  serait  impossible,  dans  beaucoup  de 
cas,  de  relever  d'après  notre  méthode  les  limites  de  chaque 


(  286  ) 

sous-forination  (dans  le  terrain  jurassique,  par  exemple),  et  il 
serait  encore  moins  possible  de  relever  et  de  rendre  avec  le 
soin  nécessaire,  toutes  ces  variations  du  caractère  lithologique, 
tous  les  affleurements  de  roches  ignées,  etc.  de  la  manière  que 
nous  considérons  comme  nécessaire  à  la  représentation  com- 
plète de  la  géologie  des  îles  Britanniques. 

Je  vous  adresse  avec  cette  lettre  6  feuilles,  marquées  1  à  6, 
de  la  carte  du  pays  de  Galles,  à  l'échelle  de  */^  de  pouce  par 
mille.  La  région  représentée  n'a  pas  été  relevée  à  cette  échelle, 
mais  bien  à  l'échelle  quatre  fois  plus  grande  de  i  pouce  par 
mille,  qui  était  alors  l'échelle  des  cartes  publiées  par  notre 
Bureau  topographique  {Ordnance  Survey),  et  le  relevé  a  été 
ensuite  réduit  au  quart.  Beaucoup  de  détails  rendus  sur  la 
grande  carte  ont  dû  nécessairement  être  omis  sur  la  petite , 
comme  vous  pourrez  le  voir  en  comparant  avec  ces  feuilles 
les  feuilles  numérotées  7  à  11  qui  représentent  une  partie  du 
même  district.  Il  eût  été  impossible,  par  exemple,  de  repré- 
senter à  la  petite  échelle  tous  les  affleurements  des  couches  de 
houille,  qui  sont  si  importants  dans  notre  pays  comme  dans  le 
vôtre. 

L'échelle  agrandie  dont  vous  vous  êtes  servi  dans  certains 
cas,  le  ^/io,ooo,  correspond  à  6,556  pouces  par  mille  anglais. 
Notre  gouvernement  s'est  convaincu  que  l'échelle  de  i  pouce 
par  mille  est  trop  petite ,  tant  pour  la  topographie  que  pour  la 
géologie,  et  en  conséquence,  toute  la  moitié  nord  de  l'Angle- 
terre, à  partir  des  limites  méridionales  du  Lancashire  et  de 
l'Yorkshire,  de  même  que  TÉcosse  et  l'Irlande,  ont  été  publiées 
par  notre  Bureau  topographique  [Topographical  Survey)  (ou 
sont  en  voie  de  publication)  à  l'échelle  de  6  pouces  par  mille, 
qui  est  seulement  un  peu  plus  petite  que  le  Vio,ooo.  Les  officiers 
du  Geological  Survey  relèvent  sur  le  terrain  les  limites  géolo- 
giques à  l'aide  des  cartes  à  cette  grande  échelle.  Ce  travail  est 
ensuite  publié  à  cette  échelle  pour  les  districts  miniers;  pour 
les  autres  districts,  qui  ne  présentent  pas  cette  importance 


(  287  ) 

économique,  le  travail  est  réduit  à  l'échelle  de  i  pouce  par 
mille.  Les  cartes  à  très-grande  échelle  sont  également  publiées 
à  cette  échelle  réduite. 

Les  feuilles  n""  14  à  IG  sont  des  exemples  de  noire  carte  à 
l'échelle  de  0  pouces  par  mille.  Le  manque  de  caries  à  cette 
échelle  pour  la  moitié  méridionale  de  l'Angleterre  a  été  si 
vivement  ressenti  que  le  directeur  du  Topographical  Survey 
a  reçu  l'ordre  de  lever  de  nouveau  cette  région  à  cette  échelle 
développée,  et  j'ai  reçu  l'ordre  de  recommencer  le  relevé 
géologique  de  tous  les  bassins  houillcrs  du  pays  de  Galles,  du 
Staffordshire  méridional,  etc.,  aussitôt  que  le  travail  topogra- 
phique sera  accompli. 

Mon  opinion  personnelle  est  que  beaucoup  des  détails  néces- 
saires pourraient  être  rendus  sur  une  carte  à  échelle  moitié 
moindre,  soit  5  pouces  par  mille,  qui  est  à  peu  près  celle  de 
votre  carte  au  ^l^20,ooo  (qui  équivaut  à  5,168  pouces  par  mille). 
L'échelle  de  ^/iOjOOO  ou  4,584  pouce  par  mille,  serait,  à  mon 
avis,  insuffisante  pour  notre  manière  de  procéder,  particulière- 
ment pour  la  formation  houillère. 

Je  vous  envoie  aussi  cinq  feuilles  de  coupes.  Quatre  d'entre 
elles  sont  des  coupes  longitudinales  à  l'échelle  de  6  pouces  par 
mille,  tant  pour  les  hauteurs  que  pour  les  longueurs,  le  relief 
du  sol  ayant  d'ailleurs  été  nivelé  avec  soin.  L'une  d'elles  tra- 
verse le  bassin  houiller  de  la  Galle  du  Sud,  dont  je  vous 
envoie  la  carte,  sur  laquelle  sa  trace  est  marquée.  Une  autre 
traverse  le  bassin  de  l'Yorkshire,  dont  une  partie  est  repré- 
sentée sur  les  cartes  que  je  vous  envoie. 

Les  coupes  verticales  de  la  dernière  feuille  sont  à  l'échelle 
de  i  pouce  pour  40  pieds,  soit  '/^so. 

Je  vous  envoie  enfin  une  légende  des  couleurs ,  qui  vous 
montrera  le  grand  nombre  de  subdivisions  représentées  sur 
notre  carte. 

Je  puis  ajouter  que,  pour  l'exécution  de  notre  relevé  géolo- 
gique, nous  n'avons  utilisé  les  cartes  géologiques  parues  anté- 


(  288  ) 

rieurement  (par  exemple,  celle  de  Greenough)  que  d'une 
manière  très-générale,  pour  la  classification  des  roches,  etc., 
nous  y  avons  ajouté  et  nous  les  avons  modifiées  dans  beau- 
coup de  cas.  Pour  un  travail  soigné,  de  nature  à  satisfaire  la 
nation,  chaque  ligne  a  dû  être  relevée  à  nouveau  et  tous  les 
affleurements  de  couches  de  houille  ou  de  gîtes  métallifères, 
toutes  les  failles  et  beaucoup  d'autres  détails  ont  été  repré- 
sentés. Des  mémoires  explicatifs  des  cartes  sont  aussi  publiés 
par  le  gouvernement. 
Je  reste, 

Monsieur, 

Votre  très-obéissant  serviteur, 

Andr.  C.  Ramsay, 
directeur  général  du  relevé  géologique  du  Royaume-Uni. 

P.  S.  Je  vous  envoie  aussi  deux  feuilles  à  l'échelle  de 
1  pouce  par  mille,  pour  vous  montrer  le  résultat  de  notre 
travail  dans  les  formations  jurassiques,  crétacées  et  tertiaires, 
et  deux  feuilles  de  légende  générale,  pour  les  échelles  de 
1  pouce  et  de  6  pouces  par  mille. 

A.  C.  R. 


Avis  de  M.  von  Hauer, 

Vienne,  le  9  juin  1875. 

La  question  de  savoir  s'il  serait  plus  avantageux  de  faire 
une  nouvelle  carte  géologique  de  la  Belgique  au  7^0,000  ou  de 
publier  une  nouvelle  édition  de  la  carte  de  Dumont  au  7i60,ooo. 
me  paraît  devoir  être  résolue  de  la  même  manière,  que  l'on  se 
place  au  point  de  vue  scientifique  ou  que  Ton  se  place  au 


(  289  ) 

point  de  vue  des  applications  pratiques.  Certainement  la 
grande  échelle  mérite  la  préférence,  car  celle-ci  rend  seule 
possibles  les  indications  des  subdivisions  nécessitées  par  l'état 
actuel  de  la  géologie,  et  tous  les  gisements  importants  pour 
l'industrie  pourront  y  être  indiqués  et  délimités  convenable- 
ment. 

Des  cartes  géologiques  générales,  à  petite  échelle,  ont  aussi 
leur  valeur  scientifique,  pour  l'obtention  de  vues  générales  et 
aussi  pour  l'enseignement.  Pour  la  pratique,  au  contraire,  pour 
les  exploitations  minières,  pour  l'agriculture,  comme  pour  la 
construction  des  routes  et  des  chemins  de  fer,  en  un  mot, 
pour  les  différentes  branches  de  l'industrie,  une  carte  géolo- 
gique est  certainement  d'autant  plus  utile  qu'elle  renferme 
plus  de  détails  et  qu'elle  est  à  plus  grande  échelle. 

La  nouvelle  carte  géologique  de  l'Allemagne  sera  publiée 
à  l'échelle  de  723,000,  quoique  des  cartes  d'une  grande  partie  de 
l'empire  aient  déjà  été  publiées  au  7so,ooo. 

Si  nous  avons  jusqu'à  présent  publié  nos  cartes  autri- 
chiennes à  l'échelle  de  7^44,000,  c'est  uniquement  parce  que 
nous  n'avions  pas  de  carte  géographique  plus  détaillée  et  aussi 
parce  que  les  données  n'avaient  pu  être  relevées  avec  assez 
d'exactitude  pour  une  carte  à  grande  échelle.  Mais  maintenant 
l'état-major  a  commencé  la  publication  d'une  carte  de  tout 
l'empire  à  l'échelle  de  77S,ooo,  et  nous  allons  l'utiliser  immé- 
diatement pour  la  publication  de  nos  relevés  géologiques. 

A  côté  d'une  carte  détaillée,  il  serait  certes  toujours  très- 
utile  d'avoir  une  carte  d'ensemble ,  mais  pour  celle-ci,  je 
choisirais  une  échelle  notablement  plus  petite,  par  exemple, 
7250,000. 

L'échelle  de  la  carte  Dumont  avait  été  fort  bien  choisie  pour 

l'époque  où  cette  carte  parut  :  elle  répondait  aux  connaissances 

que  l'on  avait  alors  de  la  constitution  géologique  du  pays. 

Aujourd'hui,  elle  me  paraît  tout  à  fait  inapplicable  (icnprak- 

2™^  SÉRIE,  TOME  XL.  19 


(  290  ) 

tisch);  elle  est  trop  grande  pour  une  carte  d'ensemble,  trop 
petite  pour  une  carte  détaillée. 

J'espère,  dans  l'intérêt  de  la  science  que  nous  cultivons,  et 
j'ai  toute  confiance  qu'il  vous  sera  donné  d'amener  votre 
souvernement  éclairé  à  choisir  cette  solution,  que  je  consi- 
dèrc  sans  aucun  doute  comme  une  exigence  de  la  science 

actuelle. 

Fr.  von  Hauer, 

directeur  général  de  l'mstitut  I.  et  R.  géologique  d'Autriche. 


Avis  DE  M.  VON  Dechen. 

Boon,  le  23  mai  1875. 
Mon  cher  et  très-honoré  ami , 

En  réponse  à  votre  aimable  lettre  du  20  de  ce  mois,  je  ne 
peux  qu'exprimer  tout  mon  assentiment  à  la  proposition  que 
vous  avez  faite  à  votre  gouvernement  pour  l'exécution  d'une 
nouvelle  carte  géologique  de  votre  pays.  Je  suis  d'avis  qu'une 
édition  revisée  de  la  carte  de  Dumont  n'aurait  qu'une  impor- 
tance très-secondaire;  elle  ne  répondrait  aucunement  aux 
exigences  scientifiques  qui  se  sont  élevées  depuis  que  Dumont 
a  exécuté  son  grand  ouvrage,  il  y  a  trente  ans.  L'échelle  de 
cette  carte,  7i60,ooo,  est  trop  petite  pour  qu'on  puisse  y  bien 
représenter  les  subdivisions  que  lui-même  et  les  autres  géolo- 
gues belges  ont  introduites.  La  carte  de  la  province  rhénane 
et  de  laWestphalie,  dont  la  publication  a  commencé  en  1856, 
est  à  une  échelle  double,  78O5OOO  :  elle  a  servi  de  preuve  que 
cette  échelle  n'est  même  pas  suffisante  pour  la  représentation 
des  accidents  géologiques,  des  subdivisions,  etc.  On  a  choisi 
l'échelle  de  7^^0,000  pour  le  Wurtemberg,  Bade,  Hesse-Darm- 


(  291  ) 

stadt;  et  vous  savez  qu'en  Prusse  on  s'est  décidé  récemment 
pour  l'échelle  de  ^l-2^,ooo  et  que  la  nouvelle  carte  géographique 
se  publie  maintenant  à  cette  échelle ,  avec  courbes  de  niveau. 
L'Exposition  internationale  de  Vienne,  dont  vous  connaissez 
les  rapports,  a  démontré  que  tous  les  géologues  ont  pris  parti 
pour  cette  grande  échelle.  Il  n'y  a  pas  de  doute  qu'elle  n'ait 
remporté  le  premier  prix. 

L'échelle  de  7*0,000  est  certainement  la  plus  petite  qui  puisse 
suffire  pour  la  Belgique,  dont  la  géologie  est  assez  compliquée. 
Tous  les  géologues  allemands  seraient  du  même  avis. 

Le  vôtre, 
Dechen. 


Mtappot'i  de  .f#.  JDttpoitt. 

Dans  notre  séance  du  5  juin  dernier,  M.  Dewalque  a 
déposé  une  proposition  tendant  à  l'examen  de  la  question 
suivante  :  les  cartes  géologiques  levées  et  publiées  par 
Dumoiit  étant  épuisées,  y  a-t-il  lieu  d'en  publier  de  nou- 
velles éditions  revisées  ou  bien  est-il  préférable  de  recom- 
mencer un  levé  géologique  plus  détaillé  du  royaume. 

Nulle  question,  intéressant  la  science  de  notre  pays, 
n'est  plus  opportune,  même  plus  urgente.  Elle  a  déjà  fait, 
depuis  trois  ans,  l'objet  d'un  examen  sérieux  en  d'autres 
lieux  et  le  gouvernement  y  a  donné  récemment  un  com- 
mencement de  solution.  C'est  en  effet  depuis  plusieurs 
années  déjà  que  nos  cartes  géologiques  sont  complètement 
épuisées;  il  devient  presque  impossible,  même  acciden- 
tellement, de  s'en  procurer  un  exemplaire. 

Dans  ces  conditions,  l'étude  de  la  géologie  belge  se 


(  292  ) 
trouve  dépourvue  de  sa  base  naturelle  d'opération  et  les 
immenses  avantages  que  le  pays  devait  retirer  de  la  grande 
œuvre  que  Dumont  sut  mener  à  bonne  fm,  sont  paralysés, 
on  pourrait  dire  annulés.  C'est  à  cette  situation  qu'il  faut 
chercher  remède. 

Pour  bien  juger  cette  situation,  il  est  nécessaire,  je 
crois,  de  se  rendre  compte  du  plan  que  Dumont  avait 
conçu,  de  la  manière  dont  il  l'a  exécuté,  des  parties  qu'il 
a  laissées  incomplètes,  de  la  valeur  que  ses  cartes  ont  con- 
servée et  des  services  qu'elles  pourraient  rendre  encore. 

En  1856,  un  arrêté  royal  décréta  l'exécution  de  la  carte 
géologique  de  la  Belgique  sous  les  auspices  de  l'Académie. 
Dumont  en  était  chargé  pour  les  provinces  méridionales  ; 
sa  mission  fut,  l'année  suivante,  étendue  à  l'ensemble  du 
royaume. 

Treize  ans  après,  en  1849,  Dumont  annonça  que  sa 
carte  était  terminée.  Mais  il  lui  restait  à  la  commenter  et 
à  l'expliquer  par  une  série  de  travaux  complémentaires 
qui  allaient  donner  à  son  œuvre  un  véritable  caractère  de 
grandeur. 

Voici  comment  il  l'avait  comprise  : 
La  carte,  en  neuf  feuilles  et  à  l'échelle  du  7i60,ooo, 
connue  sous  le  nom  de  carte  du  sol,  en  était  la  partie  fon- 
damentale. C'est  la  véritable  carte  géologique  de  la  Bel- 
gique, celle  qui  répond  à  la  pensée  de  l'arrêté  royal  de 
1836.  Elle  figure,  comme  vous  le  savez,  le  sol  superûciel 
du  pays.  L'ensemble  des  couches  affleurantes  y  est  divisé 
en  53  groupes,  en  y  comprenant  les  gîtes  métallifères,  les 
filons  lithoïdes,  la  tourbe,  les  dépôts  calcareux  et  ferrugi- 
neux modernes  qui  sont  distingués  par  des  lettres  et  non 
par  des  couleurs  spéciales. 
Cette  carte  demandait  avant  tout  à  être  expliquée  et 


(  293  ) 
interprétée.   L'illustre  géologue    ne  crut  pas  devoir  se 
borner  à  y  adjoindre  un  simple  texte  descriptif. 

La  Canipine  et  les  Flandres  sont  recouvertes  d'un  dépôt 
de  sable;  la  moyenne  Belgique  l'est  à  son  tour  d'un  dépôt 
de  limon.  Ces  terrains  superficiels  laissent,  de  loin  en  loin 
seulement,  percer  quelques  lambeaux  des  terrains  ter- 
tiaires et  crétacés  qui  constituent  le  sous-sol  de  ces  ré- 
gions. Or,  ces  terrains  tertiaires  et  crétacés  sont  à  la  fois 
importants  en  étendue,  variés  d'âge  et  de  composition  et 
agencés  d'une  manière  compliquée.  Ils  réclamaient  donc 
une  étude  particulière. 

Dumont  distinguait  14-  étages  dans  le  terrain  tertiaire 
et  6  étages  dans  le  terrain  crétacé  ; 

Ces  terrains  s'étendent  sur  les  deux  tiers  environ  du 
royaume; 

Enfin  le  sol  superficiel  n'en  laisse  pas  deviner  les  rela- 
tions de  juxtaposition,  parce  qu'ils  offrent  trop  peu  d'affleu- 
rements à  travers  les  dépôts  quaternaires. 

Ces  circonstances  ont  amené  Dumont  à  exécuter  la 
carte  ordinairement  appelée  carie  du  sous-sol.  11  y  a  tracé 
les  contours  des  terrains  comme  si  le  pays  était  dépouillé 
des  deux  nappes  juxtaposées  de  sable  campinien  et  de 
limon  hesbayen. 

Cette  carte  fut  établie  sur  les  pierres  de  la  carte  du 
sol.  Elle  est  donc  également  en  neuf  feuilles  et  à  l'échelle 

du  1/160,000. 

Malheureusement  les  procédés  précis  qu'il  employa  pour 
déterminer  les  contours  souterrains  de  ces  dépôts  ne  sont 
pas  connus.  A-t-il  procédé  par  sondages  ou  a-t-il  appliqué 
des  règles  spéciales?  S'il  a  fait  connaître  verbalement  sa 
méthode  ou  si  elle  se  trouve  contenue  dans  ses  notes,  elle 
n'a  pas  été  publiée. 


(  294  ) 

Cette  seconde  carte  était  donc  une  première  partie  de 
l'explication  de  sa  carte  géologique  proprement  dite. 

Cependant  l'éminent  explorateur,  voulant  éviter  d'in- 
troduire dans  son  œuvre  capitale  —  la  carte  du  sol  —  des 
éléments  hypothétiques  et  mal  assurés ,  adopta  une  me- 
sure que  nécessitait  l'état  de  la  science  et  qui  fut  d'abord 
aussi  étrangement  que  violemment  critiquée  :  il  employa 
une  nomenclature  locale  pour  la  plupart  des  étages.  Les 
groupes  dont  l'équivalent  étranger  n'était  pas  évident, 
reçurent  le  nom  des  localités  belges  où  ils  sont  le  mieux 
développés. 

Sa  légende  réclamait  donc  aussi  des  explications.  Au 
lieu  de  se  borner  à  exposer  dans  des  mémoires  son  opinion 
sur  le  synchronisme  de  nos  terrains  avec  les  régions  voi- 
sines, comme  il  le  fit  toutefois  pour  le  bassin  de  Londres, 
il  exécuta  sa  carte  de  la  Belgique  et  des  contrées  voisines 
en  une  feuille  et  à  l'échelle  du  7800,000.  Elle  comprend  la 
moitié  de  la  partie  orientale  du  bassin  de  Paris  et  toute  là 
région  rhénane  jusqu'à  Strasbourg. 

Cette  carte  atteignait  un  triple  but. 

Premièrement,  elle  remplissait,  vu  la  petitesse  de 
l'échelle,  le  rôle  de  carte  d'assemblage; 

Deuxièmement,  par  l'adjonction  d'une  partie  du  nord 
de  la  France  et  des  régions  rhénanes,  elle  lui  permettait 
d'exposer  sa  manière  de  voir  sur  les  raccordements  de  nos 
terrains  avec  ceux  de  ces  pays  et  notamment  d'établir  les 
rapports  d'équivalence  entre  nos  terrains  tertiaires  et  les 
terrains  classiques  du  bassin  de  Paris,  c'est-à-dire  d'expli- 
quer sa  légende; 

Troisièmement,  cette  extension  géographique  le  mettait 
en  mesure  de  montrer  les  rapports  de  répartition  entre 
nos  terrains  et  ceux  des  régions  adjacentes,  de  manière  à 


(  295  ) 
indiquer  la  disposition  générale  de  notre  sol  et  son  rôle 
dans  cette  partie  du  continent. 

Ces  données  explicatives,  exposées  au  moyen  de  cartes, 
ne  parurent  pas  encore  suffisantes  à  Dumont.  11  se  de- 
manda quelles  étaient  les  relations  de  disposition  entre  les 
terrains  belges  et  ceux  de  l'ensemble  du  continent.  Réu- 
nissant et  compulsant  tous  les  documents  publiés  sur  la 
géologie  européenne,  obtenant  de  plusieurs  géologues  des 
renseignements  inédits,  suppléant  à  ceux  qui  manquaient 
en  allant  les  recueillir  lui-même  jusqu'à  Constantinople, 
en  Sicile  et  en  Espagne,  il  fit  paraître  en  1855  à  l'Exposi- 
tion universelle  de  Paris,  la  carte  de  l'Europe  qui  eut  tant 
de  retentissement  dans  la  science. 

Il  restait  à  ajouter  à  cette  grandiose  illustration  géolo- 
gique de  notre  pays  un  texte  descriptif. 

Dumont  en  avait  commencé  la  publication  en  1848- 
18i9  par  ses  deux  volumineux  mémoires  sur  les  terrains 
ardennais  et  rhénan  avec  leurs  roches  éruptives.  Ils  ont 
paru  dans  nos  mémoires  in-4*'. 

Cette  description  fut  interrompue  parles  soins  qu'il  dut 
donner  à  la  publication  de  ses  quatre  cartes.  Il  ne  put 
résister  à  cette  partie  de  sa  tâche.  A  peine  l'impression  des 
cartes  fut-elle  terminée,  avant  qu'il  eût  pu  reprendre  la 
publication  des  mémoires  explicatifs  qu'elles  exigeaient, 
l'illustre  savant  mourait  en  1857,  à  Tàge  de  48  ans. 

Son  œuvre  restait  donc  inachevée  :  la  carte  décrétée 
par  Tarrêté  royal  de  1856  n'était  pas  complétée  par  sa 
description.  Hélas!  tout  ce  grand  ouvrage,  l'une  des  plus 
belles  œuvres  que  la  géologie  ait  produites,  s'arrêta  à  ce 
point!  Le  monde  savant  admira,  et  notre  pays  se  montra 
fier  par  d'éclatants  témoignages  de  la  reconnaissance  pu- 
blique. Il  ne  fut  rien  fait  de  plus.  Non-seulement  la  des- 


(  296  ) 
cription  géologique  qu'on  attendait  ne  parut  pas,  mais 
Dumont  avait  laissé  des  notes  nombreuses;  aucune  ne  fut 
publiée.  11  avait  laissé  notamment  —  je  le  sais  de  source 
certaine  —  un  mémoire  presque  achevé  contenant  la 
description  de  nos  terrains  tertiaires;  ce  mémoire  est 
resté  inconnu.  Loin  de  voir  reprendre  la  suite  de  cette 
œuvre,  loin  de  voir  ce  que  Thonneur  du  pays  et  l'intérêt 
de  la  science  exigeaient  impérieusement,  l'exhumation  des 
riches  et  importants  documents  que  Dumont  abandonnait, 
nous  l'avons  vu  oublier  et  oublier  au  point  que  ses  cartes 
se  sont  successivement  épuisées  sans  qu'il  fût  même 
pourvu  à  de  nouveaux  tirages.  C'est  seulement  depuis  quel- 
ques mois,  18  ans  après  la  mort  de  Dumont,  qu'à  la  suite 
•  de  réclamations,  la  question  devient  urgente  et  qu'elle  se 
pose  enfin  devant  l'Académie. 

Je  n'ai  pas  à  rechercher  ici  sur  qui  retombe  cette  res- 
ponsabilité, non  plus  qu'à  m'assurer  si  cette  situation 
découle  d'un  point  de  vue  systématique  ou  de  l'ordre 
même  des  choses.  Ce  qu'il  importe  avant  tout,  c'est  de 
prendre  sans  retard  des  mesures  pour  mettre  fin  à  pareille 
situation. 

Trois  solutions  se  présentent.  Les  voici  : 

i°  Nouveaux  tirages  des  cartes  afin  de  les  remettre  à 
la  disposition  des  géologues  et  de  l'enseignement.  La  pierre 
de  la  carte  au  78oo,ooo  semble  être  seule  en  état  de  servir 
encore  à  cet  usage  et  M.  le  capitaine  d'état-major  Henne- 
quin,  professeur  à  l'École  de  guerre,  vient  d'être  autorisé 
par  le  gouvernement  à  en  faire  un  nouveau  tirage.  Nous 
pouvons  être  assurés  que  cet  officier  distingué  saura  rem- 
plir cette  mission  à  la  satisfaction  de  tous. 

Mais  comme  la  science  a  progressé  depuis  que  Dumont 
a  fait  paraître  ses  cartes  et  qu'il  est  indispensable  de  leur 


(  297  ) 
faire  subir,  pour  les  replacer  au  niveau  des  connaissances 
actuelles,  quelques  changements  sur  lesquels  je  reviendrai, 
cette  mesure,  destinée  à  rendre  de  grands  services  immé- 
diats, n'a  évidemment  qu'un  caractère  transitoire. 

On  est  ainsi  amené  à  examiner  d'autres  combinaisons. 

2°  Publication  de  nouvelles  éditions  des  cartes  de 
Dumont  en  y  introduisant  les  modifications  qui  sont  re- 
connues nécessaires  et  en  y  adjoignant  une  description 
complète  de  nos  terrains,  de  manière  à  rendre  à  cette 
grande  œuvre  son  opportunité  et  à  lui  donner  le  complé- 
ment indispensable  qu'elle  attend  depuis  18  ans. 

o**  Exécution,  à  l'exemple  de  plusieurs  autres  nations, 
d'un  nouveau  levé  de  notre  sol  à  grande  échelle ,  en  y 
faisant  entrer  tous  les  éléments  qu'une  étude  détaillée  et 
approfondie  de  chaque  localité  ferait  reconnaître. 

Celle  carte  détaillée  serait  incontestablement  des  plus 
importantes  tant  pour  la  science  que  pour  ses  applications. 
Déjà  en  1872,  à  la  demande  de  notre  éminent  président, 
M.  le  général  Brialmont,  j'avais  remis  à  M.  le  général  Le 
Maire,  directeur  du  Dépôt  de  la  guerre,  une  note  exposant 
les  services  qu'une  telle  entreprise  pourrait  rendre  et 
les  moyens  pratiques  de  l'exécuter. 

M.  Dewalque  vient  de  reprendre  cette  proposition  et  la 
soumet  aujourd'hui  à  l'Académie. 

Mais  c'est  seulement  sur  l'utilité  de  l'entreprise  qu'il  y 
a  conformité  d'appréciation. 

En  1872,  le  Département  de  l'intérieur  poursuivait  le 
but  de  publier  de  nouvelles  éditions  des  cartes  de  Dumont 
et  de  les  compléter  par  leur  texte  descriptif.  Dans  ces 
conditions,  le  levé  à  grande  échelle,  marchant  parallèle- 
ment avec  ces  travaux,  était  de  nature  à  satisfaire  à  tous 
les  besoins. 


(  298  ) 

Mais  dès  que  l'honorable  M.  Dewalque  pose  en  principe 
que  les  cartes  de  Dumont  doivent  être  supprimées  et  qu'il 
y  a  lieu  de  substituer,  non  pas  seulement  à  leur  continua- 
tion, mais  même  à  de  nouvelles  éditions,  ce  levé  à  grande 
échelle,  je  ne  saurais  trop  protester  contre  une  telle  propo- 
sition dont  il  importe  d'examiner  les  conséquences. 

Le  levé  d'une  carte  à  grande  échelle  exigera  un  temps 
très-long.  Malgré  la  rapidité  exceptionnelle  de  l'exécution 
à  laquelle  l'honorable  M.  Dewalque  vient  de  rendre  hom- 
mage, Dumont  a  mis  15  ans  à  exécuter  sa  carte  et  21  ans 
pour  la  partie  de  l'ensemble  de  son  œuvre  qu'il  a  menée  à 
bonne  tin.  Or,  dès  qu'il  s'agit  d'entrer  dans  les  détails 
d'un  levé  géologique,  de  subdiviser  un  terrain  autant  que 
le  comporte  la  variété  de  ses  couches,  de  noter  ses  acci- 
dents stratigraphiques  et  autres  faits  qui  sont  de  l'essence 
d'une  carte  détaillée,  on  peut  tenir  pour  certain  que  bien 
peu  d'entre  nous  en  verront  l'achèvement,  même  en  sup- 
posant qu'un  grand  nombre  de  géologues  y  collaborent  et 
qu'un  véritable  Geological  Survey  soit  constitué. 

Deux  exemples  suffiront  pour  faire  apprécier  cette 
durée. 

Lorsque  le  gouvernement  eut  connaissance  en  1861 
des  riches  découvertes  qu'on  faisait  à  Anvers  dans  les 
travaux  de  la  nouvelle  enceinte  et  des  forts,  il  désigna, 
sur  l'avis  de  l'Académie,  notre  honorable  confrère  pour 
dresser  la  carte  géologique  des  environs  d'Anvers.  Qua- 
torze années  se  sont  écoulées  depuis  lors;  le  savant  géo- 
logue a  joui  d'avantages  exceptionnels,  puisque  des  coupes 
de  plusieurs  kilomètres  furent  mises  au  jour  et  cependant 
il  n'a  pas  encore  publié  cette  carte  qui  comprenait  une 
surface  de  quelques  lieues. 

De  mon  côté,  dans  le  but  de  mettre  hors  de  doute  la 


(  299  ) 

constitution  compliquée  du  calcaire  carbonifère  dans  les 
environs  de  Dinant,  j'ai  levé  une  carie  détaillée  sur  une 
superficie  d'environ  ooO  kilomètres  carrés  et  ce  travail  que 
TAcadémie  a  bien  voulu  accueillir  dans  ses  Bulletins,  a  ré- 
clamé trois  ans  pour  son  exécution. 

Nous  pouvons  par  ces  données  juger  approximative- 
ment du  nombre  d'années  à  employer  pour  les  50,000 
kilomètres  carrés  environ  qui  forment  la  superficie  du 
royaume. 

Depuis  une  période  qu'on  peut  évaluera  iO  ans,  les 
cartes  de  Dumont  sont  épuisées  et  nous  ne  pouvons  éva- 
luer la  durée  du  levé  détaillé  à  moins  de  20  à  30  ans  — 
toujours  en  supposant  que  le  gouvernement  proportion- 
nera largement  les  moyens  à  la  grandeur  de  l'entreprise. 

En  adoptant  la  proposition  de  M,  Dewalque  nous  reste- 
rions donc  50  à  40  ans  sans  carte  géologique,  quand 
nous  avons  entre  les  mains  les  œuvres  de  Dumont  que 
bien  des  pays  peuvent  nous  envier!  Pendant  qu'on  procé- 
derait, même  laborieusement  et  activement,  à  l'exécution 
d'une  carte  qui  compte  au  ^/m.ooo  72  feuilles  et  au  V2o,ooo 
456  feuilles,  les  géologues  qui  n'y  seraient  pas  attachés  et 
l'enseignement  scientifique  auraient  à  attendre  une  nou- 
velle génération  pour  profiter  des  travaux  géologiques 
exécutés  sur  le  sol  belge.  C'est  une  conséquence  que 
l'Académie  ni  le  gouvernement,  nous  l'espérons  bien, 
n'accepteront  pas,  d'autant  plus  qu'il  semble  bien  incon- 
testable, contrairement  à  l'avis  que  vient  d'émettre  l'ho- 
norable M.  Dewalque,  que  les  cartes  de  Dumont  sont  loin 
d'être  surannées  et  hors  d'état  de  fournir  une  série  d'édi- 
tions qui  feront  honneur  à  notre  pays. 

C'est  le  point  que  je  vais  avoir  l'honneur  de  traiter. 

Premièrement,  la  légende  de  la  carte  du  sol  se  décom- 


(  500  ) 

pose  en  53  terrains.  Quand  on  se  rappelle,  d'une  part,  que 
notre  pays  n'a  qu'une  superficie  de  moins  de  trois  millions 
d'hectares  ;  que,  d'autre  part,  il  ne  présente  ni  les  terrains 
granitiques,  ni  les  terrains  cristallophylliens,  ni  les  étages 
jurassiques  supérieurs  à  la  base  du  bathonien,  ni  le  terrain 
crétacé  inférieur,  ni  l'éocène  supérieur,  que  les  roches 
éruptives  proprement  dites  y  sont  réduites  au  terrain  por- 
phyrique,  que  les  terrains  volcaniques  et  les  dépôts  gla- 
ciaires n'y  sont  pas  représentés,  on  est  en  droit  de  se 
demander  si  une  carte  qui  signale  55  terrains  dans  ces 
circonstances,  ressemble  aux  ébauches  que  les  autres  pays 
ont  dû  supprimer  pour  leur  substituer  des  cartes  détaillées 
et  s'il  est  si  urgent  d'agir  de  même  avec  les  œuvres  de 
Dumont.  Comparons  notamment  notre  carte  au  Vi6o,ooo  à 
celle  au  V8o,ooo  qu'a  publiée  M.  von  Dechen  dont  M.  De- 
walque  a  demandé  l'avis  dans  la  présente  occurrence,  et 
nous  verrons  que  le  savant  allemand  n'a  figuré  sur  sa 
carte  à  grande  échelle  que  10  étages  pour  les  terrains 
ardennais  et  devoniens  dans  les  régions  où  Dumont  a  an- 
térieurement figuré  11   étages.  Si  la  Belgique   ne  peut 
craindre  que  de  semblables  infériorités,  tout  le  monde 
sera  sans  doute  d'accord  qu'elle  peut  les  accepter  sans  hé- 
sitation. La  conclusion  qui  ressort  de  cet  exposé,  est  que 
notre  carte  géologique  est  en  état  de  rendre  les  services 
qu'on  en  attendait  sous  le  rapport  du  nombre  des  divisions 
renseignées. 

Deuxièmement,  sous  le  rapport  de  la  précision  des  con- 
tours, tous  les  géologues  ont  été  unanimes  à  reconnaître 
qu'elle  dépasse  ce  qu'on  pouvait  en  attendre  à  priori.  On 
peut  même  dire  qu'il  n'y  sera  pas  apporté  de  moditications 
sensibles. 

Troisièmement,  sous  le  rapport  des  modifications  ap- 


(  501  ) 

portées  par  les  travaux  postérieurs  dans  les  relations  stra- 
tigrapliiques  des  terrains,  j'ai  la  conviction  qu'on  peut 
très-facilement  les  introduire  sans  que  le  caractère  de 
l'œuvre  de  Duniont  soit  dénaturé.  Que  l'Académie,  pour 
mieux  en  juger,  me  permette  d'énumérer  ces  principales 
modifications. 

l*'  Le  terrain  ardoisier  du  Brabant  et  du  Condroz  est, 
non  pas  du  terrain  dévonien  inférieur,  mais  du  terrain 
silurien  qui  constitue  un  nouveau  terme  dans  notre  série 
géologique.  Il  y  aura  donc  lieu  de  donner  une  nouvelle 
teinte  à  cette  partie. 

2"  Les  couches  à  poudingues,  adossées  au  terrain  silu- 
rien du  Condroz  et  que  Dumont  a  considérées  comme  se 
rapportant  à  son  étage  E',  devront  probablement  se  ré- 
partir dans  les  divers  étages  du  terrain  dévonien  de  l'Ar- 
denne,  d'après  les  observations  de  M.  Gosselet  vérifiées 
récemment  par  M.  Mourlon  pour  la  formation  de  la  col- 
lection lithologique  dn  Musée  royal  d'histoire  naturelle. 

o°  Les  petites  bandes  et  îlots  calcareux ,  désignés  par 
d'Omalius  sous  le  nom  de  calcaire  de  Couvin  et  de  calcaire 
de  Frasnes ,  doivent  être  séparés  du  calcaire  à  Stringocé- 
phales  et  être  réunis  les  uns  aux  schistes  à  calcéoles,  les 
autres  aux  schistes  de  Famenne. 

4''  Les  couches  schisteuses,  intercalées  dans  le  calcaire 
dévonien  de  la  bande  de  Rhisnes,  doivent  être  réunies  à 
ce  calcaire. 

Ces  quatre  résultats  sont  dus  à  M.  Gosselet. 

5°  A  la  suite  de  la  découverte  de  débris  de  conifères 
dans  le  terrain  crétacé  inférieur  du  Hainaut  par  MM.  Briart 
et  Cornet,  l'abbé  Coemans  a  prouvé  que  ce  terrain  qui  y 
montre  un  petit  affleurement,  est  d'âge  bien  distinct  de 
celui  d'Aix-la-Chapelle. 


(  502  ) 

6°  La  meule  de  Braquegnies  et  le  calcaire  grossier  de 
Mons,  découverts  par  les  mêmes  géologues,  devront  figurer 
comme  nouveaux  termes  dans  notre  série. 

7°  L'étage  panisélien  semble  constituer  dans  le  Hainaut 
deux  dépôts  distincts. 

8°  M.  Nyst  a  découvert  des  fossiles  scaldisiens  dans  les 
environs  de  Turnhout,  ce  qui  augmente  l'étendue  de  ce 
dépôt. 

9°  ïl  y  a  lieu  d'indiquer  dans  le  Condroz  et  l'Ardenne 
les  dépôts  de  cailloux  roulés  et  de  limon  quaternaires, 
comme  Dumont  l'a  fait  dans  la  moyenne  et  dans  la  basse 
Belgique. 

Il  suffirait  d'introduire  ces  modifications  dans  la  carte 
de  Dumont  —  et  elles  peuvent  l'être  sans  difficultés  — 
pour  rendre  à  cette  œuvre  toute  son  opportunité. 

Quatrièmement,  l'examen  de  la  légende  adoptée  par 
Dumont  nous  conduit  à  la  même  conclusion. 

A  l'époque  où  l'illustre  géologue  leva  sa  carte,  la  série 
générale  des  terrains  était  loin  d'être  établie  avec  la  pré- 
cision actuelle.  11  crut  donc  devoir  adopter  une  classifica- 
tion et  une  nomenclature  locales  pour  les  terrains  dont 
les  équivalents  étrangers  n'étaient  pas  évidents.  La  carte 
au  7800^000  devait  suppléer  à  cet  inconvénient,  en  mon- 
trant les  raccordements  qu'il  admettait  entre  les  terrains 
belges,  le  bassin  de  Paris  et  les  régions  rhénanes,  rac- 
cordements qui  du  reste  ne  peuvent  être  tous  maintenus. 

Aujourd'hui  la  concordance  de  notre  échelle  stratigra- 
phique  avec  la  série  générale  a  fait  des  progrès;  on  peut 
donner  à  la  plupart  des  étages  de  Dumont  leurs  synonymes 
étrangers  avec  assez  d'exactitude  et  suivre  la  classification 
généralement  admise. 

Ces  circonstances  peuvent-elles  être  envisagées  comme 


(  503  ) 
le  fait  l'honorable  M.  Dewalque  qui  s'exprime  de  la  ma- 
nière  suivante  dans   le   rapport  que  vous  venez   d'en- 
tendre : 

«  Ainsi  en  conservant  presque  toute  la  partie  graphique 
»  de  la  carte  géologique,  on  lui  donne  une  légende  qui 
»  n'a  plus  rien  de  commun  avec  l'œuvre  primitive  ;  et 
»  c'est  là  ce  qu'on  publierait  comme  l'œuvre  de  Dumont, 
i>  seconde  édition  !  Le  respect  qui  entoure  la  mémoire  du 
j>  grand  géologue  empêchera,  je  l'espère,  une  pareille  pu- 
»  blication.  » 

Il  n'y  a  en  réalité  dans  ces  modifications  à  apporter  à 
la  légende  qu'un  changement  ou  mieux  une  addition  de 
mots,  un  allongement  ou  une  diminution  d'accolades. 
Placer  a  côté  l'une  de  l'autre  la  légende  de  Dumont  qui 
exprime  les  relations  précises  des  terrains  belges  et  leur 
localité  typique,  et  une  légende  indiquant  le  raccordement 
de  ces  terrains  à  la  série  classique,  me  paraît  au  contraire 
un  complément  très-avantageux  qui  ne  dénature  en  rien 
l'œuvre  du  grand  géologue  et  ne  fait  que  lui  rendre  son 
opportunité.  Ce  serait  bien  étrangement  comprendre  le 
respect  dû  à  ces  admirables  travaux  que  de  les  supprimer 
par  crainte  de  leur  donner  le  complément  qu'ils  devaient, 
par  leur  nature  même,  inévitablement  recevoir. 

Voici  donc  quels  ont  été  les  effets  de  25  ans  sur  la  carte 
de  Dumont  : 

Elle  reste  l'une  des  cartes  les  plus  détaillées  de  l'Eu- 
rope; 

Les  contours  des  terrains  y  sont  reconnus  extrêmement 
précis  ; 

Quelques  changements,  faciles  à  introduire,  doivent  être 
apportés  dans  les  relations  stratigraphiques  des  terrains; 

La  légende  peut  être  en  partie  complétée  par  l'adjonc- 


(  304  ) 

tion  (les  synonymes  étrangers  aux  noms  locaux  des 
étages. 

Est-il  beaucoup  de  travaux  d'une  pareille  étendue  et 
d'une  si  grande  complexité,  qui  puissent,  après  25  ans, 
espérer  pareille  sanction  ?  Et  ces  constatations  n'augmen- 
tent-elles pas  encore  notre  admiration  pour  cette  grande 
œuvre  qu'il  s'agirait  de  faire  disparaître  ? 

Que  manque-t-il  de  réellement  important  à  cette 
carte?  C'est  son  texte  descriptif  commencé  par  Dumont, 
pour  la  confection  duquel  il  a  réuni  de  grandes  collections 
et  laissé  de  nombreuses  notes. 

Le  traité  de  géologie  de  la  Belgique  de  M.  d'Omalius, 
qui  eut  en  15  ans  trois  éditions,  le  Prodrome  d'une  des- 
cription géologique  de  la  Belgique  de  M.  Dewalque,  l'ar- 
ticle étendu  publié  par  M.  Mourlon  dans  Patria  belgica, 
n'ont  pu,  malgré  leur  mérite,  y  suppléer.  Des  provinces 
entières,  les  deux  Flandres  notamment,  n'ont  pas  encore 
été  décrites.  Plusieurs  étages  importants  nous  sont  encore 
presque  inconnus. 

Les  travaux  de  M.  Gosselet  que  je  viens  d'avoir  l'hon- 
neur de  vous  rappeler,  donnent  à  cet  auteur  une  autorité 
particulière  pour  juger  l'œuvre  de  Dumont.  Voici  la  con- 
clusion d'une  communication  qu'il  flt  à  la  Société  géolo- 
gique de  France  en  1860,  en  lui  présentant  son  mémoire 
sur  les  terrains,  primaires  de  la  Belgique  (Bull,  de  cette 
Société,  2^  sér.  t.  XVIIl,  p.  54)  :  «  La  carte  de  Dumont, 
»  on  ne  saurait  trop  le  dire,  est  vraiment  admirable  par 
D  ses  détails  et  sa  précision,  mais  il  est  à  désirer  que  le 
»  gouvernement  belge  la  fasse  compléter  par  un  texte 
»  explicatif  avec  coupes,  etc.,  pour  qu'elle  devienne  par- 
))  faitement  intelligible  et  qu'elle  acquière  tout  le  prix 
j>  qu'elle  mérite.  » 


(  305  ) 

Combien  ne  devons-nous  pas  déplorer  que  ce  texte  des- 
criptif ne  soit  pas  encore  exécuté,  quand  tout  semblait 
réuni  pour  en  dicter  impérieusement  le  devoir  et  pour  en 
faciliter  l'achèvement. 

Si  nous  abordons  Texamen  de  l'échelle  de  la  carte  de 
Dumont,  nous  remarquerons  qu'elle  a  son  utilité  incon- 
testable, et  que  si  l'on  supprimait  cette  carte,  soit  à  cause 
de  cette  échelle,  soit  pour  les  motifs  que  l'honorable 
M.  Défalque  vient  de  faire  valoir,  il  faudrait  en  exécuter 
une  autre  sur  une  échelle  analogue.  En  effet  les  cartes  du 
Dépôt  de  la  guerre  au  7^0,000  et  au  720,000  ont  respective- 
ment 72  et  456  feuilles  et  s'étalent  sur  une  surface  telle 
qu'on  ne  pourrait  par  leur  moyen,  sauf  le  cas  d'une  con- 
struction spéciale,  envisager  dans  son  ensemble  la  géologie 
du  pays.  Cette  circonstance  exige  la  confection  d'une  carte 
dont  l'échelle  permet  l'étalage  sur  les  murs  des  apparte- 
ments ordinaires.  Pourquoi  dès  lors  supprimer  la  carte 
de  Dumont  qui,  par  son  échelle  seule,  sera  toujours  né- 
cessaire ? 

Au  surplus,  quelle  est  la  signification  réelle  des  avis 
donnés  par  les  géologues  éminents  que  M.  Dewalque  a 
consultés. 

Elle  consiste  en  ceci  : 

Si  le  gouvernement  belge  fait  procéder  à  un  nouveau 
levé  géologique  de  notre  pays,  il  est  indispensable  de 
faire  choix  d'une  très-grande  échelle,  afin  d'y  indiquer  les 
nombreuses  divisions  et  les  accidents  stratigraphiques  qu'on 
ne  peut  renseigner  sur  l'échelle  du  7i6o,ooo. 

Cet  avis  me  paraît  d'une  justesse  évidente  et  incontes- 
table. Si  une  nouvelle  carte  géologique  était  exécutée,  elle 
devrait  l'être  à  l'échelle  du  ^20,000,  mais  le  plus  simple 
raisonnement  nous  dit  que  nous  ne  pouvons  en  reste 

2"'  SÉRIE  ,  TOME  XL.  20 


(  506  ) 

dépourvus  jusqu'à  rachèvement  d'une  aussi  grande  entre- 
prise. 

On  pourrait  faire  l'objection  que  si  la  carte  au  7ico,ooo 
qui,  dans  l'esprit  de  l'arrêté  de  1856,  est  destinée  autant  à 
favoriser  l'industrie  que  la  science,  a  été  et  est  encore  très- 
utile  pour  les  recherches  industrielles,  elle  est  absolument 
insuffisante  pour  guider  l'exploitation,  que  la  géologie  ap- 
pliquée réclame  des  caries  à  grande  échelle  et  qu'elle  ne 
doit  pas  être  sacrifiée  à  la  géologie  théorique.  L'objection 
serait  fondée  et  le  gouvernement  l'a  compris  dès  18o2, 
alors  qu'il  décrétait  l'exécution  de  la  Carte  générale  des 
mines.  Le  Département  des  travaux  publics  fait  relever,  de 
100  mètres  en  100  mètres,  dans  toute  l'étendue  de  notre 
terrain  houiller,des  coupes  verticales  qui,  raccordées  entre 
elles  sur  un  plan  à  156  mètres  au-dessous  du  niveau  de  la 
mer,  donneront  une  carte  houillère  d'une  exactitude  aussi 
grande  que  les  exploitants  peuvent  la  désirer. 

L'échelle  de  la  Carte  générale  des  mines  est  non  pas  le 
V'iojooo  ni  le  7^0,000,  mais  le  7^,000;  c'est-à-dire  le  double 
de  celle  dont  M.  Ramsay  se  sert  pour  les  districts  miniers 
du  pays  de  Galles. 

M.  l'inspecteur  général  Jochams  a  eu  l'obligeance  de 
me  remettre  les  renseignements  suivants  sur  le  degré 
d'avancement  de  cette  énorme  entreprise  que  dirige 
M.  l'ingénieur  en  chef  Van  Scherpenzeel-Thim. 

Le  levé  du  bassin  de  Liège  est  à  peu  près  terminé  ;  on 
en  attend  la  carte  manuscrite  en  1876.  Le  levé  des  coupes 
de  100  mètres  en  100  mètres  est  en  cours  d'exécution 
dans  les  bassins  du  Borinage  et  de  Charleroi.Dansle  bassin 
du  Centre,  on  a  levé  les  plans  de  surface,  mais  les  coupes 
verticales  ne  le  sont  pas  encore.  Le  bassin  de  Namur  n'est 
pas  commencé. 


(  507  ) 

Le  titre  de  ce  grand  travail  indique  assez  que  ces  levés 
doivent  s'étendre  à  nos  gîtes  métallifères. 

Sur  ce  point,  le  gouvernement  a  donc  pourvu  à  ce  qui 
était  nécessaire. 

En  résumé,  je  suis  depuis  longtemps  convaincu,  de 
même  que  l'honorable  M.  Devvalque,  qu'il  serait  à  désirer 
qu'une  carte  géologique  à  grande  échelle  fût  exécutée. 
Mais  les  cartes  de  Dumont  étant  entièrement  épuisées 
depuis  plusieurs  années,  ses  notes  n'étant  pas  publiées  et 
la  description  complète  de  notre  sol  n'existant  pas,  je  ne 
puis  me  rallier  à  une  proposition  qui  consiste  à  supprimer 
complètement  les  cartes  de  Dumont  comme  surannées  et 
à  commencer  le  levé  d'une  carte  détaillée  à  l'échelle  du 
7*0,000  ou  du  720,000.  La  première  partie  de  cette  propo- 
sition repose,  comme  je  viens  de  le  démontrer,  sur  une 
appréciation  inexacte,  le  monument  élevé  à  la  science  par 
Dumont  ayant  conservé  toute  son  éminente  valeur.  La 
seconde  partie  causerait  un  détriment  considérable  à  la 
géologie  belge,  si  les  cartes  de  Dumont  n'étaient  pas  re- 
mises au  préalable  et  le  plus  tôt  possible  entre  les  mains 
des  géologues,  car  à  en  juger  d'après  toutes  les  analogies 
que  nous  possédons,  l'achèvement  de  cette  carte  détaillée 
réclamera  au  minimum  20  à  oO  ans. 

Dans  ces  conditions,  je  me  demande  si  le  devoir  de 
l'Académie  n'est  pas  d'insister  auprès  de  M.  le  Ministre  de 
l'intérieur  pour  qu'il  soit  pourvu  avant  tout  à  l'exécution 
de  nouvelles  éditions  des  cartes  de  Dumont  et  à  la  publi- 
cation du  texte  descriptif  qui  devait,  dans  l'esprit  de  leur 
illustre  auteur  et  suivant  le  vœu  de  tous  les  géologues, 
couronner  cette  grande  œuvre  scientifique. 


(  508  ) 


Kappoft  de  MM.   Bt'iat't. 

La  question  qui  nous  est  soumise  est  d'une  importance 
majeure,  que  mes  deux  honorables  collègues  ont  parfaite- 
ment comprise  et  qu'ils  ont  fait  ressortir  dans  les  deux 
rapports  dont  vous  avez  entendu  la  lecture.  Il  faut  néces- 
sairement une  carte  géologique  à  la  Belgique,  une  carte 
que  chacun  puisse  se  procurer  quand  il  le  désire  et  sans 
devoir  attendre  que  le  hasard  lui  en  fournisse  l'occasion. 

Depuis  quelques  années  les  cartes  de  Dumont  ne  se 
trouvent  plus  dans  le  commerce,  et  ce  fait,  peut-être 
unique  en  son  genre,  pourrait  porter  un  très-grave  pré- 
judice à  la  géologie  belge. 

Les  cartes  de  Dumont,  lorsqu'elles  parurent  en  1853, 
ont  placé  notre  pays  à  la  tête  du  progrès.  L'éclatant  succès 
qu'elles  obtinrent  àl'Exposition  de  18oo,  fut  un  stimulant 
pour  les  autres  nations,  qui  se  sont  empressées  d'activer 
la  construction  de  cartes  semblables  pour  elles-mêmes. 
Chez  nous,  au  contraire,  tout  est  resté  dans  le  même  état, 
comme  si,  de  prime  abord,  on  avait  atteint  la  perfection. 
C'est  la  suite  ordinaire  des  grands  succès. 

Nous  nous  trouvons  actuellement  devancés  par  nos  voi- 
sins. Rien  ne  se  fait  ici  ou  presque  rien,  tandis  que  dans  la 
plupart  des  autres  contrées  de  l'Europe  une  espèce  d'agi- 
tation se  manifeste,  des  commissions  sont  nommées,  des 
levés  géologiques  se  font  avec  la  plus  grande  activité,  et 
bientôt  seront  complétées  des  cartes  en  rapport  avec  les 
progrès  de  la  science,  et,  généralement,  beaucoup  plus 
détaillées  que  ne  l'étaient  celles  de  Dumont. 

Mes  deux  honorables  collègues  de  la  commission  recon- 
naissent l'impérieuse  nécessité  de  faire  cesser,  pour  la  Bel- 


(  309  ) 
gique,  un  élat  Je  choses  aussi  préjudiciable  aux  intérêts  de 
la  science  géologique;  mais  quant  aux  moyens  à  employer 
pour  atteindre  le  but,  ils  arrivent  à  des  conclusions  diffé- 
rentes, en  se  basant  sur  des  arguments  que  je  vais  essayer 
de  rencontrer. 

M.  Dewalque  s'étend  longuement  sur  la  nécessité  de 
dresser  une  carte  géologique  de  notre  pays,  nouvelle  et  en 
rapport  avec  les  progrès  que  la  science  a  faits  depuis  la 
mort  de  Dumont.  Il  demande  de  plus  que  cette  carte  soit 
faite  à  une  échelle  beaucoup  plus  grande,  qui  permette  de 
la  détailler  davantage  et  d'atteindre  à  un  plus  haut  degré 
de  précision. 

Il  ne  me  paraît  pas  nécessaire  de  revenir  ici  sur  les  ar- 
guments présentés  par  notre  honorable  collègue.  Ces  argu- 
ments reposent  principalement  sur  l'exemple  des  pays 
étrangers  qui  tous  font  dresser  leurs  cartes  géologiques  à 
des  échelles  beaucoup  plus  grandes  que  l'échelle  de  Du- 
mont, et  sur  des  exemples  tirés  de  notre  pays  même,  où 
différents  auteurs  n'ont  pu  donner  des  détails  assez  cir- 
stanciés  sur  la  géologie  de  certains  points  intéressants 
qu'en  adoptant  une  plus  grande  échelle.  Il  s'appuie  égale- 
ment sur  l'avis  des  savants  géologues  chargés  de  dresser 
les  cartes  géologiques  de  l'empire  d'Autriche,  des  îles  Bri- 
tanniques, de  l'Allemagne,  etc.,  qui  tous  s'accordent  à  re- 
connaître que  la  carte  de  Dumont  a  été  dressée  à  une 
échelle  trop  restreinte,  et  conseillent  vivement,  dans  le 
cas  d'une  nouvelle  carte,  d'adopter  le  '/^o.ooo  ou  même 

le   */20,000. 

M.  Dupont,  de  son  côté,  tout  en  admettant  en  principe  la 
grande  utilité  d'une  carte  à  grande  échelle,  n'en  reconnaît 
pas  la  nécessité  immédiate.  Il  reconnaît  à  la  carte  de 
Dumont  autant  de  précision  et  d'exactitude  que  les  besoins 


(  510  ) 
tJu  moment  peuvent  le  l'aire  désirer,  et  il  conclut  en  en 
demandant  une  nouvelle  édition,  revue,  corrigée  et  aug- 
mentée, mise,  en  un  mot,  à  la  hauteur  des  progrès  que  la 
science  à  réalisés  depuis  son  apparition  en  1835. 

Je  désirerais,  Messieurs,  remplir  ici  un  rôle  de  concilia- 
tion, rôle  que  l'Académie  attend  peut-être  du  troisième 
commissaire  qu'elle  a  nommé  pour  examiner  cette  impor- 
tante question,  entre  deux  opinions  qui  paraissent  si  op- 
posées, mais  qui ,  je  pense,  sont  plus  près  d'être  d'accord 
qu'on  ne  le  pourrait  croire  à  première  vue. 

Il  y  a  peut-être  un  peu  de  présomption  de  ma  part  à 
émettre  un  tel  avis,  surtout  à  espérer  d'arriver  à  un  moyen 
terme  qui  rallie  toutes  les  opinions;  mais  il  m'a  paru  que 
la  chose  était  loin  d'être  impossible  ,  que  surtout  elle  était 
on  ne  peut  |)lus  désirable,  et  que  le  moyen  le  plus  simple 
et  en  même  temps  le  plus  sûr  pour  y  arriver,  était  de 
rejeter  du  débat  tout  ce  qui  y  est  étranger,  tout  ce  qui 
n'aurait  pas  du  y  entrer.  Je  veux  parler  ici  de  la  question  du 
texte  descriptif  de  la  carte  de  Dumont,  que  notre  savant 
confrère,  M.  Dupont,  regrette  beaucoup  de  ne  pas  avoir  vu 
publier. 

Je  regrette  beaucoup,  de  mon  côté,  que  cette  question 
ait  été  soulevée,  et  je  ne  m'y  arrêterai  que  pour  émettre 
l'avis  suivant  :  si  cette  publication  avait  eu  lieu,  si  ce  texte 
descriptif  avait  paru,  de  deux  choses  l'une,  ou  il  eût  été 
le  reflet  exact,  la  description  fidèle  de  la  carte  de  Dumont, 
et  dans  ce  cas  il  n'aurait  tenu  aucun  compte  des  progrès 
que  la  géologie  de  la  Belgique  a  réalisés  depuis  la  mort  de 
cet  illustre  géologue,  ou  bien  il  eût  tenu  compte  de  ces 
progrès,  et  il  serait  l'argument  le  plus  péremptoire  en 
faveur  de  la  réforme  de  là  carte  de  Dumont,  ou  plutôt  de  la 
confection  d'une  nouvelle  carte  géologique. 


(  3H  ) 

Pas  plus  que  mes  deux  savants  confrères,  je  ne  veux 
amoindrir  en  rien  Toeuvre  monumentale  de  notre  grand 
géologue,  mais  je  ne  puis  non  plus  admettre  que  ce  soit 
manquer  de  respect  à  cette  œuvre,  ni  vouloir  Ja  supprimer, 
que  de  proposer  la  confection  d'une  nouvelle  carte,  plus 
grande,  plus  détaillée,  et  avec  les  modifications  que  la 
force  même  des  choses  est  venue  imposer.  La  géologie 
est  une  science  naturelle,  par  conséquent  éminemment 
perfectible.  Les  naturalistes  les  plus  éminents  ont  laissé 
des  œuvres  que  le  temps  a  modifiées,  et  j'ai  souvent 
entendu  déplorer  le  trop  de  respect  que  l'on  portait  à  ces 
œuvres,  respect  qui,  par  son  exagération  même,  finissait 
par  entraver  les  progrès  ultérieurs  de  la  science. 

Il  y  a  lieu  de  se  demander  ici  en  quoi  consiste  Tœuvre 
deDumont.  Je  ne  veux  pas  revenir  sur  le  plan  conçu  par 
lui,  plan  qu'a  très-bien  développé,  du  reste,  l'honorable 
M.  Dupont;  mais  je  dois  me  demander  si  l'œuvre  de  Du- 
mont  consiste  dans  le  format  de  ses  cartes,  si  cette  œuvre 
serait  atteinte  davantage^sijjg)^  Bîtes' à  une  plus  grande 


(  512  ) 

de  présenter  celte  œuvre  comme  l'œuvre  de  Dumont;  on 
ne  peut  pas  dire  que  celte  œuvre  n'est  pas  dénaturée,  et 
s'il  y  a  suppression,  il  y  a  suppression  dans  un  cas  comme 
dans  l'autre. 

Du  reste,  cette  expression  de  supprimer  l'œuvre  de 
Dumont  est  tout  à  fait  impropre;  l'œuvre  de  Dumont  ne 
peut  pas  se  supprimer.  A-t-on  supprimé  l'œuvre  des  Linnée, 
des  Jussieux,  des  Cuvier,  parce  que  des  naturalistes  venus 
après  eux,  profitant  des  progrès  de  la  science  auxquels  ils 
avaient  eux-mêmes  contribué,  ont  modifié  les  systèmes  de 
ces  illustres  auteurs,  changé  leurs  nomenclatures  et  leurs 
classifications  et  établi  de  nouvelles  subdivisions?  Je  ne  le 
pense  pas  et  personne  ne  pourrait  le  prétendre.  Quel  que 
soit  donc  le  projet  auquel  on  s'arrête ,  l'œuvre  de  notre 
grand  géologue  restera  ce  qu'elle  est,  ce  qu'elle  a  toujours 
été,  un  monument  impérissable,  un  sujet  d'étonnement  et 
d'admiration  pour  tous  ceux  qui  s'occupent  de  semblables 
travaux;  en  un  mot,  l'entreprise  géologique  la  plus  colos- 
sale qu'il  art  été  aon..^  v  --»-.  j^oaune^eul  de  tenter. 

Il  y  a  donc  lieu,  selon  moi,  délaisser  ae  c6t4  toutes  ces 
considérations  et  de  rechercher  les  moyens  de  pourvoir  aux 
nécessités  du  moment. 

Deux  propositions  sont  en  présence  : 

L'une  consistant  à  demander  la  confection  d'une  nou- 
velle carte  à  une  grande  échelle  (740,000)  en  y  introduisant 
les  modifications  réclamées  par  les  progrès  que  la  science 
a  faits  depuis  la  mort  de  Dumont;  l'autre  à  conserver  le 
format  de  la  carte  de  Dumont,  mais  en  y  introduisant  les 
mêmes  modifications,  probablement  en  faisant  subir  aux 
pierres  qui  ont  servi  à  l'impression  des  premières  caries, 
les  changements  demandés. 

Il  semblerait  résulter  de  cette  dernière  proposition,  si 


(  515  ) 
toutefois  j'en  ai  bien  saisi  le  sens,  que  ces  pierres  peuvent 
encore  servir  et  qu'elles  ne  sont  pas  aussi  fatiguées  qu'on 
le  croit.  Nous  y  reviendrons  plus  loin. 

L'objection  principale,  et  selon  moi  la  plus  sérieuse  qui 
soit  fiiite  à  la  proposition  de  iM.  Dewalque,  est  celle-ci  :  le 
levé  d'une  carte  à  grande  échelle  exigera  un  temps  très- 
long,  que  M.  Dupont  estime  au  minimum  à  20  ou  30  ans. 

11  me  semble  que  notre  honorable  collègue  exagère 
beaucoup  ce  qui  reste  à  faire.  11  faut  remarquer  en  effet 
que  tout  ici  n'est  pas  à  recommencer, et  qu'une  très-grande 
partie  du  travail  est  faite.  Dumont  lui-même  s'est  servi, 
pour  les  études  nécessaires  à  ses  tracés  géologiques,  des 
cartes  à  grande  échelle.  On  possède  même  une  carte  au 
720,000  coloriée  géologiquement  d'après  ces  études.  D'au- 
tres géologues  venus  après  lui  ont  suivi  la  même  voie ,  et 
l'on  peut  dire  que,  dans  la  plupart  des  cas,  il  suffirait  d'un 
travail  de  révision ,  de  complément,  de  modifications  de 
détails,  et  que  dans  peu  de  temps  on  pourrait  mettre  la 
main  à  l'œuvre  et  commencer  l'impression. 

Mais  enfin  ce  travail  demandera  du  temps,  et  bien  que 
la  carte  au  7*0,000  du  dépôt  de  la  guerre,  dont  on  propose 
de  se  servir,  soit  fort  avancée,  carte  tout  à  fait  convenable 
pour  un  semblable  travail,  on  doit  reconnaître  qu'il  s'écou- 
lera encore  quelques  années  avant  de  voir  paraître  les  pre- 
mières feuilles,  et  pendant  ce  temps  la  Belgique  resterait 
sans  carte  géologique,  ce  qu'il  faut  éviter  à  tout  prix. 

L'honorable  M.  Dupont  croit  trouver  la  solution  de  la 
question  dans  une  nouvelle  édition  des  anciennes  cartes 
de  Dumont  auxquelles  on  ferait  subir  les  modifications 
nécessaires.  Cela  pourrait  se  faire,  dit-il,  très-facilement. 

L'énumération  qu'il  fait  des  principales  modifications, 
énumération  très- longue,  comme  on  l'a  pu  voir,  prouve 
déjà,  selon  moi,  que  la  chose  ne  sera  pas  aussi  facile  ni 


(  314  ) 

aussi  simple  qu'ifle  pense,  el  qu'elle  exigera,  de  son  côté, 
un  temps  plus  ou  moins  long.  Quant  à  la  prétention  d'opé- 
rer tous  ces  changements  et  de  modifier  entièrement  la 
légende  sans  dénaturer  l'œuvre  primitive,  c'est,  je  le  ré- 
pète, une  illusion  que  nous  devons  laisser  de  côté. 

On  se  servirait,  comme  je  le  pense,  pour  la  réalisation 
du  projet  de  M.  Dupont,  des  pierres  qui  ont  servi  à  la  pre- 
mière édition  des  cartes.  Je  ne  suis  pas  assez  compétent 
pour  juger  si  ces  nombreux  changements  n'auront  pas 
pour  résultat  de  les  détériorer  plus  qu'elles  ne  le  sont  déjà; 
mais  il  me  semble  que  la  chose  a  assez  d'importance  par 
elle-même  pour  n'élre  tentée  qu'après  un  sérieux  examen. 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  paraîtrait  que  ces  pierres  ne  sont 
pas  tout  à  fait  hors  d'usage.  C'est  ce  que  je  tiens  à  con- 
stater et  c'est  ce  qui  fait  la  base  d'une  proposition  que  j'ai 
l'honneur  de  soumettre  à  l'Académie. 

Je  demanderai  à  ce  qu'il  soit  fait,  non  une  nouvelle  édi- 
tion des  cartes  de  Dumont,  revue  et  corrigée,  mais  un  nou- 
veau tirage,  pur  et  simple ,  qui  respecte  le  tracé  graphique 
aussi  bien  que  la  légende.  Nous  aurons  de  cette  manière, 
il  est  vrai,  les  cartes  telles  que  nous  les  a  laissées  notre 
illustre  compatriote,  sans  les  modifications  réclamées  par 
les  progrès  que  la  science  a  faits  depuis  sa  mort,  mais  cet 
inconvénient  me  semble  peu  grave  en  présence  de  l'avan- 
tage incontestable  de  les  avoir  immédiatement.  Il  est,  du 
reste,  peu  de  personnes,  parmi  celles  qui  s'occupent  sérieu- 
sement de  la  géologie  de  notre  pays,  qui  ne  soient  au  cou- 
rant de  la  plupart  des  modifications  réclamées,  au  moins 
de  celles  que  le  monde  savant  admet  généralement  et  qui 
ne  sont  plus  contestées.  Ces  personnes  pourront  facilement 
suppléer  à  ce  que  la  carte  ne  leur  dira  pas,  en  attendant 
mieux,  c'est-à-dire,  en  attendant  des  cartes  nouvelles. 

Quelque  chose  a  déjà  été  fait  dans  ce  sens,  ainsi  que 


(515  ) 
nous  l'apprend  M.  Dupont.  L'autorisation  a  été  donnée  de 
procédera  un  nouveau  tirage  de  la  petite  carte  au  7«oo,ooo 
de  la  Belgique  et  des  contrées  voisines.  C'est  déjà  un  grand 
pas  de  fait,  mais  l'Académie  jugera,  sans  doute,  que  ce 
n'est  pas  suffisant,  et  qu'un  nouveau  tirage  des  grandes 
cartes  ne  serait  pas  de  trop,  surtout  en  présence  du  peu 
de  frais  que  la  mesure  entraînerait. 

Malheureusement,  il  peut  se  faire,  contrairement  aux 
espérances  que  l'on  nous  donne,  que  les  pierres  ne  puis- 
sent plus  servir.  On  se  trouverait, dans  ce  cas,  en  présence 
de  la  nécessité  d'une  nouvelle  gravure,  et  la  question  de 
l'échelle  à  adopter  se  poserait  de  nouveau  devant  nous. 

La  mesure  que  je  viens  de  proposer  n'est,  du  reste, 
qu'une  mesure  purement  transitoire;  elle  na  qu'un  but, 
celui  de  combler  une  lacune.  Dans  ce  cas  comme  dans 
l'autre,  que  la  tentative  réussisse  ou  ne  réussisse  pas,  je 
n'hésite  pas  à  recommander  l'étude  et  l'exécution  de  nou- 
velles cartes  à  l'échelle  du  ^/4o,ooo,  échelle  qui  réunit,  selon 
moi,  toutes  les  conditions  désirables  pour  arriver  à  un  ex- 
cellent résultat  et  satisfaire  à  tous  les  besoins. 

Je  suis  heureux  de  me  trouver  d'accord  en  ce  point,  au 
moins  quant  à  la  question  de  principe ,  avec  mes  deux  ho- 
norables collègues.  L'adoption  de  la  grande  échelle  fait  le 
fond  de  la  proposition  de  M.  Dewalque. 

Quant  à  M.  Dupont,  bien  qu'arrivant  à  des  conclusions 
différentes, il  est  loin  de  révoquer  en  doute  ce  qu'une  carte 
détaillée  aurait  d'avantageux  pour  notre  pays. 

«  Je  suis  depuis  longtemps  convaincu,  dit-il,  de  même 
»  que  M.  Dewalque,  qu'il  serait  à  désirer  qu'une  carte  géo- 
»  logique  à  grande  échelle  fût  exécutée.  » 

Tl  dit  encore  plus  haut  :  «  Cette  carte  détaillée  serait 
))  incontestablement  des  plus  importantes,  tant  pour  la 
»  science  que  pour  ses  applications.  » 


(  316  ) 

Dès  le  commencement  de  son  rapport  il  émet  une  asser- 
tion dont  la  gravité  n'échappera  à  personne:  «  Cette  ques- 
»  tion  a  déjà  fait,  depuis  deux  ans,  dit-il ,  l'objet  d'un 
»  examen  sérieux  en  d'autres  lieux ,  et  le  gouvernement 
»  y  a  donné  récemment  un  commencement  de  solution.  » 

J'ignore  si  notre  savant  confrère  entend  ici  faire  allu- 
sion au  nouveau  tirage  auquel  il  vient  d'être  procédé,  de 
la  carte  au  7800,000  de  la  Belgique  et  des  contrées  voisines, 
ou  bien  s'il  s'agit  d'une  carte  détaillée  dont  la  proposition 
a  été  faite  dès  1872;  mais,  dans  tous  les  cas,  il  semble- 
rait en  résulter  que,  si  la  première  carte  de  Dumont  a  été 
exécutée  sous  les  auspices  et  sous  le  contrôle  de  l'Aca- 
démie, le  gouvernement  n'en^nd  plus,  contrairement  au 
vœu  exprimé  par  M.  Dewalque, conserver  à  ce  corps  savant 
cette  haute  prérogative.  Je  désire  ardemment  me  tromper, 
et  je  ne  doute  nullement  que  des  explications  ultérieures 
ne  viennent  éclaircir  la  situation. 

Je  conclus,  Messieurs,  en  proposant  à  l'Académie  de 
prier  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  : 

1"  De  faire  procéder,  dans  le  plus  bref  délai  possible,  à 
un  nouveau  tirage  des  deux  cartes  géologiques  de  la  Bel- 
gique dressées  par  Dumont  et  connues  sous  le  nom  de  : 
Carte  du  sol  et  Carte  du  sous-sol; 

S''  De  faire  commencer  immédiatement  l'étude  d'une 
nouvelle  carte  géologique  à  l'échelle  de  7^0,000. 

La  classe  remet  à  la  séance  prochaine  la  décision  à 
prendre  au  sujet  des  trois  rapports  précédents. 


(517) 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Observations  présentées  par  M.  Liagre,  membre  de 
l'Académie. 

En  rendant  compte,  dans  le  Bulletin  du  mois  de  mai 
dernier, de  la  présentation  faite  par  M.  le  professeur  Van 
Rysselberghe  de  son  appareil  enregistreur  universel,  je 
signalais  particulièrement  les  résultats  fournis  par  le  ma- 
réegraphe  installé  à  Ostende,  et  je  terminais  ma  commu- 
nication par  ces  mots  : 

«  La  possibilité  d'enregistrer  à  distance  est  donc  un 
»  fait  acquis,  et  c'est  à  M.  Van  Rysselberghe  que  revient 
»  le  mérite  d'avoir  le  premier  résolu  pratiquement  cet 
ï>  important  problème.  » 

Notre  savant  confrère,  M.  Glœsener,  a  présenté  une 
réclamation  à  ce  sujet  dans  le  Bulletin  du  mois  de  juillet. 
«  Dans  l'intérêt  de  la  vérité,  comme  dans  celui  de  la  justice 
»  à  rendre  aux  travaux  antérieurs  à  ceux  de  M.  Van  Ryssel- 
»  berghe,  il  se  voit  forcé,  dit-il,  de  faire  toutes  ses  réserves 
»  au  sujet  de  la  fin  de  ma  communication,  et  il  réclame  l'in- 
»  sertion  de  ces  réserves  dans  le  Bulletin  de  nos  séances.  » 

Malgré  le  vague  de  l'expression ,  cette  phrase  ne  peut 
avoir  qu'un  seul  sens  :  celui  de  contester  à  M.  Van  Ryssel- 
berghe le  mérite  que  je  lui  attribuais  d'avoir  le  premier 
résolu  pratiquement  le  problème  de  V enregistrement  des 
observations  à  distance.  Je  suis  donc  fondé  à  demander  à 
notre  confrère,  dont  l'autorité  en  cette  matière  est  si 
grande,  qu'il  veuille  bien  sortir  d'une  réserve  dont  la 


(  318  ) 

jalousie  pourrait  s'armer  pour  chercher  à  amoindrir  le 
mérite  du  jeune  professeur  d'Ostende,  peut-être  même 
pour  l'accuser  de  plagiat.  Il  consentira,  je  l'espère,  à  citer 
les  noms  des  savants  qui,  antérieurement  à  M.  Van  Rys- 
selberghe,  avaient  résolu  pratiquement  le  problème  de 
V enregistrement  à  distance;  il  indiquera  les  appareils  qu'ils 
ont  employés  à  cet  effet;  il  signalera  enfin  les  résultats 
qu'ils  ont  obtenus. 

Tout  cela  doit  être  d'autant  plus  facile  à  notre  savant 
confrère,  que  les  travaux  antérieurs  dont  il  parle  ne  peu- 
vent être  que  fort  récents.  En  effet,  dans  le  rapport  très- 
favorable  qu'il  a  lu  à  l'Académie  dans  la  séance  du  2  août 
J875,  il  mentionne  «  le  moyen  proposé  par  M.  Van  Rys- 
»  selberghe  pour  enregistrer  les  indications  fournies  par 
»  des  instruments  placés  à  une  grande  distance  de 
»  l'enregistreur.  »  C'était  alors  le  moment  de  faire  toutes 
ses  réserves ,  s'il  y  avait  lieu;  M.  Glœsener  n'en  a  formulé 
aucune.  Son  opinion  a  donc  subi  un  changement  depuis 
cette  époque;  et  l'Académie  qui  avait,  conformément  aux 
conclusions  de  son  rapporteur,  encouragé  par  ses  suffrages 
le  travail  de  M.  Van  Rysselberghe,  a  le  droit  de  connaître 
aujourd'hui  le  motif  de  ce  changement. 

On  s'étonnera  sans  doute,  après  avoir  lu  la  réclamation 
de  M.  Glœsener,  qu'aucun  des  savants  qui,  d'après  lui, 
auraient  déjà  résolu  pratiquement  le  problème  de  l'enre- 
gistrement à  distance,  n'ait  jugé  à  propos  d'exposer  son 
appareil  et  d'en  envoyer  les  résultats  au  congrès  interna- 
tional des  sciences  géographiques,  tenu  dernièrement  à 
Paris.  Les  météorologistes  de  tous  les  pays  y  ont  examiné, 
avec  lieaucoup  de  curiosité  et  d'intérêt,  Tenregistreur 
universel  de  M.  Van  Rysselberghe,  et  aucun  d'entre  eux 
n'a  soulevé  la  moindre  question  de  priorité.  Aussi  le  jury 


(  319  ) 
des  récompenses  a-t-il  accordé,  à  runanimité,  à  M.  Van 
Rysselberghe  la  plus  haute  distinction  dont  ii  pouvait  dis- 
poser: il  lui  a  décerné  la  lettre  de  distinction,  qu'il  avait 
réservée  aux  institutions  officielles,  ou  aux  collectivités 
ayant  exposé  des  travaux  hors  ligne;  et  parmi  tous  les 
exposants,  M.  de  Quatrefages  est  la  seule  individualité  qui 
ait  partagé  cet  honneur  avec  M.  Van  Rysselberghe. 

En  présence  d'un  pareil  résultat,  il  faut  autre  chose  que 
de  vagues  réserves,  pour  enlever  à  notre  compatriote  le 
mérite  de  son  invention. 


Étoiles  filantes.  —  Les  perséides  en  1875.  Observations 
faites  à  rObservatoire  royal  de  Bruxelles;  communi- 
quées par  M.  Ern.  Quetelet,  membre  de  l'Académie. 

L'apparition  périodique  des  étoiles  filantes  du  mois 
d'août  1875  a  pu  être  observée  à  Bruxelles  dans  des  con- 
ditions assez  favorables. 

L'observation  de  ce  phénomène  a  été  faite  pendant  les 
soirées  du  9,  du  10  et  du  11  août  sur  la  terrasse  de  l'Ob- 
servatoire. 

Les  observateurs  étaient  le  9  août  :  MM.  Ern.  Quetelet, 
L.  Estourgieset  A.  Lancaster;  le  10,  MM.  Ern.  Quetelet, 
C.  Hooreman  et  L.  Eslourgies;  le  M,  MM.  C.  Hooreman 
et  A.  Lancaster. 

Le  9  août,  le  ciel  étant  en  partie  couvert  de  cirrhus  et 
de  cirro-cumulus,  l'observation  n'a  duré  qu'une  heure  (de 
lO*"  50"'  à  IT'  30"")  pendant  laquelle  16  météores  ont  été 
aperçus  répartis  comme  suit  :  o  de  la  1'^  grandeur  dont 
2  avec  traînée,  5  de  la  deuxième  grandeur,  7  de  la  troi- 
sième et  1  de  la  quatrième. 


(  320  ) 

Leurs  directions  dans  le  ciel  se  classent  ainsi  :  5  vers 
le  SW.,  2  vers  le  Sud ,  2  vers  l'Est,  2  vers  le  NNW., 
i  vers  le  SSW.,  1  vers  le  SSE.,  1  vers  le  NW.,  1  vers  le 
SE.  et  1  vers  le  Nord. 

Le  10  août,  le  ciel ,  assez  incertain  au  commencement 
de  la  soirée,  s'est  mis  au  beau  et  a  permis  de  suivre  le 
phénomène  à  son  maximum  caractéristique  dans  de  bonnes 
conditions. 

L'observation,  commencée  à  9^  So'",  a  été  continuée  jus- 
qu'à 10'^  55°^;  elle  a  été  reprise  ensuite  de  11^  45°^  jus- 
qu'à minuit  45  minutes;  pendant  la  l'"^  heure  on  a  compté 
51  étoiles  filantes;  pendant  la  seconde  59;  en  tout  90  mé- 
téores ont  été  aperçus  parmi  lesquels  13  de  première 
grandeur,  17  de  deuxième,  34  de  troisième,  15  de  qua- 
trième et  8  de  cinquième;  leurs  directions  se  répartissent 
comme  suit  :  36  vers  le  SW.,  9  vers  le  Sud ,  8  vers  l'Ouest, 
8  vers  le  SE.,  6  vers  le  SSW.,  5  vers  le  WSW.,  3  vers  le 
SSE.,  2  vers  le  NNW.,  2  vers  le  Nord,  2  vers  l'Est, 
2  vers  le  NE.,  2  vers  le  NW.,  1  vers  le  WNW,  et  1  vers 
PESE. 

L'étoile  la  plus  brillante  de  cette  série  a  paru  vers  H*^  1  S"" 
dans  l'Aigle;  elle  avait  un  éclat  comparable  à  celui  de 
Jupiter  et  laissait  une  magnifique  traînée  qui  a  persisté 
pendant  20  secondes. 

Onze  autres  météores  ont  laissé  des  traînées  plus  ou 
moins  persistantes  qui  n'ont  pas  donné  d'indices  de  cou- 
rants supérieurs  atmosphériques. 

Le  11  août,  l'éclat  du  ciel  n'a  permis  de  suivre  le  phéno- 
mène que  pendant  une  heure  (de  9'»  50"^  à  10^  50"^)  ;  34  mé- 
téores ont  été  observés  dont  2  de  première  grandeur ,  6  de 
deuxième,  10  de  troisième,  8  de  quatrième,  7  de  cin- 
quième et  1  de  sixième  se  dirigeant  comme  suit  :  21  vers 


(  321  ) 

leSW.,  4  vers  le  SSW.,  5  vers  le  Sud,  2  vers  le  SE., 
1  vers  le  SSE.,  1  vers  l'Est  et  1  vers  l'ESE. 

Le  relevé  général  de  ces  trois  séries  d'observations 
donne  comme  résultat  : 

51  météores  de  la  troisième  grandeur. 

28  —  deuxième       — 

24  —  quatrième       — 

18  —  première        — 

15  —  cinquième      — 

1  —  sixième  — 

Leurs  directions  suivies  se  répartissent  de  la  manière 
suivante  : 

63  vers  le  Sud-Ouest. 
14  vers  le  Sud. 
1 1  vers  le  Sud-Est. 
11  vers  le  Sud  Sud- West. 

8  vers  l'Ouest. 

5  vers  l'Est. 

5  vers  le  Sud-Sud-Est. 

o  vers  rOuest-Sud-Ouest. 

4  vers  le  Nord-Nord -West. 

3  vers  le  Nord. 

3  vers  le  Nord-Ouest. 

2  vers  PEst-Sùd-Est. 
2  vers  le  Nord-Est. 

et  1  vers  l'Ouest-Nord-Ouest, 

Le  phénomène  du  mois  d'août,  signalé  il  y  a  quarante 
ans  par  mon  père,  a  donc  été  assez  brillant  cette  année, 
mais  on  ne  peut  cependant  pas  dire  que  ce  soit  une  année 
exceptionnelle.  D'après  les  renseignements  reçus,  l'appa- 
rition a  été  plus  remarquable  dans  le  Sud.  En  France  et 
en  Italie  on  a  compté  un  grand  nombre  de  météores. 

2"*'  SÉRIE,  TOME  XL.  21 


(  322  ) 

M.  Terby,  écrit  de  son  côté  qu'à  Louvain  le  10  août  un 
observateur,  regardant  le  NE  de  10''  à  minuit,  a  compté 
soixante-treize  météores.  Ce  résultat  concorde  avec  ceux 
qui  ont  été  obtenus  à  l'Observatoire. 


U éclipse  de  soleil  du  29  septembre  i875;  communication 
de  M.  Ern.  Quetelet,  membre  de  l'Académie. 

Cette  éclipse  a  pu  être  observée  à  Bruxelles,  quoique 
les  circonstances  atmosphériques  fussent  assez  défavora- 
bles. Toute  la  journée  du  28,  il  avait  plu  abondamment 
et  le  jour  du  phénomène  astronomique ,  l'air  était  très- 
ondulant,  et  des  nuages  floconneux  rapides  passaient 
fréquemment  devant  le  disque  du  soleil.  Une  autre  cir- 
constance qui  rend  les  nombres  obtenus  moins  sûrs,  c'est 
que  la  phase  de  l'éclipsé  était  très-petite  à  Bruxelles,  de 
sorte  que  le  mouvement  apparent  de  la  lune  était  extrê- 
mement oblique.  Quoiqu'il  en  soit,  voici  les  heures  qui  ont 
été  annotées  pour  le  commencement  et  la  fin  de  l'éclipsé. 

Commencement,    .     Ilh58°»29»8  EQ.  t.  m.  Bruxelles. 

Fin 12  19,2  H. 

— 12  19,4  E. 

M.  Ern.  Quetelet  observait  à  l'équalorial,  M.  Hooreman 
à  la  lunette  de  Troughton  dans  les  deux  tourelles  et  M.  Es- 
tourgies  avait  sur  la  terrasse  la  lunette  de  Dollond. 


(  323  ) 


Les   Pachyacanthus   du   Musée   de    Vienne;   notice   pai' 
M.  P.-J.  Van  Beneden ,  membre  de  l'Académie. 

Avant  de  publier  la  description  des  ossements  fossiles 
des  mammifères  marins,  que  les  travaux,  exécutés  autour 
d'Anvers,  ont  mis  au  jour,  nous  avons  voulu  étudier  ceux 
que  Ton  a  recueillis  en  Italie,  en  Autriche  et  dans  quelques 
localités  en  Allemagne,  pour  voir  les  rapports,  qui  peu- 
vent exister,  entre  les  Thalassothériens  du  sud  et  du  nord 
de  l'Europe,  à  l'époque  miocène  et  pliocène. 

A  cet  effet  nous  avons  visité,  l'année  dernière,  les 
musées  de  Turin,  de  Milan,  de  Bologne,  de  Vienne,  de 
Linz,  de  Munich  et  de  Stuttgart,  qui  renferment  tous  des 
restes  de  Phoques,  de  Siréniens  et  de  Cétacés  souf- 
fleurs. 

Nous  nous  proposons  de  communiquer  successivement 
à  la  classe  le  résultat  de  nos  observations,  et  nous  com- 
mençons cette  série  de  communications  par  une  étude 
critique  du  genre  nouveau,  désigné  sous  le  nom  de  Pa- 
chyacanthus par  M.  J.-F.  Brandt,  de  l'Académie  de  Saint- 
Pétersbourg  (1). 

Toute  l'importance  des  recherches  paléontologiques 
repose  sur  la  détermination  plus  ou  moins  rigoureuse  des 


(1)  J.-F.  Brandt,  Untersuchiingen  iiber  die  Fossilen  und  SubfossUen 
Cetaceen  Europa's  —  Mém.  Acad.  imp.  des  Se.  de  Saim-Pétersbourg, 
vile  sér.,  l  XX,  n"  1, 1875.  —  Ergdnzungen  zii  den  Fossilen  Cetaceen 
Europa's,  ibidem  ,  t.  XXI,  n*>  6,  1874. 


(  324  ) 
espèces,  et,  comme  le  savant  académicien  russe  s'est  spé- 
cialement occupé  de  ces  animaux,  nous  ne  croyons  pas 
pouvoir  différer  plus  longtemps  de  faire  connaître  notre 
appréciation  sur  ce  nouveau  genre. 

Cette  étude  offre  d'autant  plus  d'intérêt ,  que  les  céto- 
logues  ne  savent  à  quoi  s'en  tenir  sur  la  valeur  systéma- 
tique des  Pachyacanthes;  cependant  leur  détermination 
rigoureuse  est  nécessaire,  pour  apprécier  la  topographie, 
ou  mieux  l'hydrographie,  de  l'Europe  à  l'époque  tertiaire 
moyenne. 

Le  genre  Pachyacant/ms  est-il  établi  sur  des  caractères 
d'une  valeur  véritable  et  les  animaux  désignés  sous  ce  nom 
appartiennent-ils  aux  Balénides,  aux  Cétodontes  ou  aux 
Siréniens?  Telles  sont  les  questions  que  nous  allons  exa- 
miner. La  détermination  précise  des  os  démontrera  si  nous 
avons  sous  la  main  des  restes  d'animaux  pélagiques  et  de 
haute  mer,  ou  des  animaux  qui  ne  hantent  que  les  côtes 
ou  l'embouchure  des  fleuves. 

Qu'il  nous  soit  permis  d'exprimer  ici  toute  notre 
gratitude  pour  l'obligeance  et  les  attentions  délicates 
que  MM.  Czermak,  directeur  de  l'Hof-Mineralien-Cabinet 
de  Vienne,  et  Fuchs,  conservateur  de  ce  riche  musée, 
nous  ont  témoignées  pendant  l'étude  de  ces  ossements. 
Non-seulement  ces  savants  ont  mis  tout  ce  qu'ils  possé- 
daient à  notre  disposition ,  mais  ils  ont  bien  voulu  nous 
envoyer  en  Belgique  les  pièces  originales  et  uniques,  pour 
les  comparer  avec  les  ossements  d'Anvers.  Un  jeune  natu- 
raliste de  Vienne,  M.  Letocha,  a  bien  voulu  également  nous 
envoyer  les  principales  pièces  de  Pachyacanthes  qu'il  s'était 
procurées  pour  son  musée  particulier.  L'Institut  géologique 
el  le  Musée  d'histoire  naturelle,  si  savamment  dirigés  par 


(  û25  ) 
MM.  von  Helmersen  et  von  Peizelln,  n'ont  pas  mis  moins 
d'empressement  à  nous  envoyer,  en  communication,  les 
objets  qui  nous  intéressaient  pour  ces  études. 


Il  y  a,  dans  les  environs  de  Vienne,  deux  localités  où 
l'on  extrait  une  argile  qui  n'est  pas  sans  ressemblance  avec 
notre  argile  rupelienne  et  qui  renferme,  entre  autres  fos- 
siles, des  ossements  de  Cétacés  fort  intéressants  :  ces 
localités  sont  Nussdorf  et  Hernals  (1). 

Ces  ossements  se  rapportent  pour  la  plupart  à  des 
Cétacés  à  dents,  pour  ne  pas  dire  à  des  Delphinides;  mais 
il  en  est  aussi  parmi  eux  qui  possèdent  des  caractères  par- 
ticuliers fort  remarquables  et  qui  indiquent  un  groupe  tout 
différent;  le  professeur  Brandt  en  a  fait  une  étude  sur  les 
lieux,  mais  il  a  hésité  sur  la  question  de  savoir  s'il  fallait 
faire  des  animaux  auxquels  ces  restes  ont  appartenu,  des 
Baleines  ou  des  Dauphins.  Il  a  fini  par  leur  donner  le  nom 
de  PachyacaîUhus,  à  cause  de  l'épaisseur  "des  apophyses 
épineuses  de  leurs  vertèbres,  et  il  leur  a  assigné  le  rang 
de  Myslicète.  C'est  la  forme  la  plus  éloignée  des  vraies 
Baleines  parmi  les  Mysticètes,  dit  le  savant  académicien 
{Die  Gattiing  Balaena  einerseils,  und  Pachyacanthus  an- 
dererseits  sind  die  extremslen  imd  anomalsten  Gattungs- 
typen). 

Nous  ne  saurions  partager  cet  avis.  Le  grand  épaississe- 
ment  des  apophyses  épineuses  est  pour  nous  une  disposi- 


(1)  La  couche  qui  renferme  ces  ossements  est  considérée  par  M.  Fuchs 
comme  étendue  jusqu'en  Perse  et  porte  le  nom  de  Sarmatique  [Untersar- 
malische  Tegel)  Elle  renferme ,  avec  les  Cétacés  et  les  Phoques,  des 
Trionyx,  des  Caranx,  des  Scorpenoptera  et  des  Gobius.  —  Ces  poissons 
ont  été  décrits  par  M.  Sleindachner  dans  les  Siizungsb.  de  Vienne,  1859. 


(  526  ) 

tion  individuelle,  disposition  qui  est  assez  propre  au 
groupe  auquel  nous  attribuons  ces  os.  Les  vertèbres  et  les 
côtes  proviennent,  d'après  nous,  de  Siréniens ,  c'est-à-dire 
d'animaux  voisins  des  Dugongs,  des  Lamantins  et  des 
Stellères  parmi  les  vivants. 

En  second  lieu,  les  divers  os  que  le  professeur  Braadl 
rapporte  aux  Pachyacanthes,  proviennent,  selon  nous, 
d'animaux  d'ordres  différents  qu'il  représente  :  le  sternum 
(pi.  XVII,  ûg.  10)  n'est  ni  de  Sirénien,  ni  de  Balénide, 
mais  d'un  vrai  Cétodonte;  il  en  est  de  même  de  la  nageoire 
pectorale  (même  planche,  fig.  12-14),  tandis  que  les  ver- 
tèbres (même  planche,  fig.  1-9)  et  les  côtes  (pi.  XVI, 
fig.  4-20)  appartiennent  à  un  Sirénien. 

En  troisième  lieu,  le  Pachyacantfms ,  désigné  sous  le 
nom  spécifique  de  Trachyspondylus  (pi.  XVIIl,  fig.  1-4), 
ne  repose,  à  notre  avis,  que  sur  des  vertèbres  malades, 
comme  on  en  trouve  assez  souvent  chez  les  Cétacés  vivants 
et  fossiles. 

Enfin  ce  sont  des  vertèbres  normales,  à  apophyses  non 
épaissies  (pi.  XIV,  fig.  1-5) ,  qui  ont  servi,  si  nous  ne  nous 
trompons,  à  l'établissement  du  Cetotherium  ambiguum. 

Les  figures  6  et  7  de  la  pi.  XIV  représentent,  non  pas 
un  maxillaire  de  Pachyacanthus,  mais  un  maxillaire  de 
mammifère  terrestre  provenant  du  diluvium. 

Nous  proposons  de  conserver  le  nom  de  Pachyacanthe 
pour  désigner  le  Sirénien  auquel  se  rapportent  les  vertèbres 
et  les  côtes  du  Pachyacanthe  de  Brandt.Nous  verrons  plus 
lard  à  quel  genre  de  Cétodonte  il  faudra  rapporter  le  ster- 
num et  le  membre. 


Nous  allons  passer  successivement  ces  os  en  revue 
pour  mettre  en  évidence  leurs  caractères  propres. 


(  327  ) 

A  l'exception  de  la  tèlc,  nous  avons  pu  éludier  toutes 
les  pièces  du  squelette  alliibuéesau  g^emc  Pnc/ujacanihiis  ; 
il  existe  en  effet  des  vertèbres  de  toutes  les  régions, 
des  côtes  nombreuses,  un  sternum  et  des  membres  à  peu 
près  complets. 

11  est  fort  remarquable  que  parmi  tant  de  débris  re- 
cueillis, et  recueillis  même  avec  soin,  il  n'y  ait  aucune 
pièce  distincte  de  la  tête,  pas  même  des  restes  de  dents 
ou  de  maxillaires.  Nous  avons  trouvé  seulement  dans  une 
boîte  une  caisse  tympanique  qui  lui  est  attribuée. 

11  est  vrai,  iM.  Brandt  signale  un  maxillaire  inférieur 
qu'il  rapporte  à  ce  genre,  mais  il  suffit  de  jeter  les  yeux 
sur  le  dessin  qu'il  en  donne  (1)  pour  s'apercevoir  que  cet  os 
n'appartient  ni  à  un  Cétacé  ni  à  un  Sirénide.  N'est-ce  pas 
le  bout  antérieur  d'un  maxillaire  de  bœuf? 

En  passant  en  revue  les  recherches  du  savant  naturaliste 
de  S^-Pétersbourg  sur  l'animal  de  Linz,  auquel  nous  avons 
donné  le  nom  d'Aulocète,  nous  avons  remarqué  qu'il  a  eu 
l'idée  de  rattacher  cette  tête  au  Pachyacanlhe  de  Vienne. 
Comme  nous  le  verrons  bientôt,  nous  nous  sommes  as- 
suré, après  une  étude  nouvelle  de  ces  ossements,  que  le 
genre  Aulocète  est  réellement  un  type  de  Cétacé  à  fanons, 
mais  que  M.  Brandt  a  eu  grand  tort  de  le  rattacher  aux 
Pachy acanthes.  VAulocète  ou  le  Stenodon  est  positive- 
ment un  Balénide  voisin  des  Balénoptérides  d'Italie. 

Les  deux  os  les  plus  importants  de  tous  ceux  qui  ont  été 
recueillis  sont  les  deux  premières  cervicales,  l'atlas  et  l'axis, 
que  nous  avons  pu  étudier  et  comparer  avec  soin. 

Nous  avons  même  eu  plus  d'un  allas  sous  les  yeux,  et 
nous  avons  pu  facilement  nous  assurer  que  cet  os  n'a  au- 

(1)  Planche  XIV,  figures  6  et  7. 


(  328  ) 
cun  des  caractères  ni  de  Balénide  ni  de  Delphinide,  mais 
qu'il  présente,  au  contraire,  tous  les  traits  distinctifs  des 
Dugongs  et  des  Lamantins. 

L'arc  inférieur  de  la  vertèbre  est  comparativement 
mince  et  délicate  et  se  distingue  surtout  par  une  facette 
articulaire  assez  large,  qui  loge  l'apophyse  odontoïde.  Le 
bord  postérieur,  en  dessous  de  cette  surface  articulaire,  se 
prolonge  en  dessous  de  l'apophyse  de  l'axis,  en  une  espèce 
de  bec  et  protège  puissamment  la  seconde  cervicale  dans 
tous  ses  mouvements. 

Dans  le  Dugong  vivant  celte  surface  articulaire  est 
plane  et  correspond  à  la  base  de  l'apophyse,  tandis  qu'ici 
la  facette  est  creusée  de  manière  à  loger  la  tête  même. 

A  la  face  postérieure  de  l'atlas,  on  voit  les  deux  surfaces, 
correspondant  aux  condyles,  nettement  séparées  l'une  de 
l'autre  parla  facette  articulaire  dont  nous  venons  de  parler. 

L'apophyse  transverse  supérieure  est  plus  forte  que  l'in- 
férieure et  se  recourbe  en  arrière;  l'inférieure  est  à  peine 
distincte,  et  ne  consiste  que  dans  un  tubercule.  La  partie 
supérieure  de  l'arc  manque,  non  pas  qu'elle  fasse  défaut 
dans  la  vertèbre  complète ,  mais  elle  a  été  brisée  comme 
cela  arrive  pour  la  plupart  des  vertèbres. 

L'échancrure  au  devant  de  l'arc  supérieur  est  large  et 
profonde  pour  loger  l'artère  vertébrale. 

En  comparant  cet  atlas  avec  celui  d'un  Sirénide,  il  n'y 
a  pas  moyen  de  ne  pas  reconnaître,  à  l'instant,  qu'il  appar- 
tient à  un  animal  de  cette  famille  :  il  en  a  l'épaisseur,  les 
apophyses,  les  surfaces  articulaires  et  surtout  la  facette 
articulaire  si  bien  marquée,  qui  loge  et  sert  de  point  d'ap- 
pui à  l'apophyse  odontoïde. 

Nous  avons  trouvé  des  atlas  brisés,  mais  assez  complets, 
dans  l'Hof-Mineralien-Cabinet  de  Vienne  et  dans  la  collée- 


(  529  ) 

lion  particulière  de  M.  Letocha.  Dans  cette  dernière  col- 
lection il  y  a  un  atlas  et  un  axis  du  même  animal,  dont 
les  principales  parties  sont  parfaitement  conservées  et  qui 
offrent  exactement  les  mêmes  caractères. 

L'axis  ne  se  distingue  pas  moins  bien  de  Taxis  de  tous 
les  Cétacés  véritables,  par  le  corps,  qui  est  beaucoup  plus 
épais  que  dans  les  autres  cervicales  et  par  le  grand  déve- 
loppement de  l'apophyse  odontoïde.  Cette  apophyse  est 
très-large  à  la  base,  de  forme  conique,  et  présente  sur 
toute  sa  partie  inférieure  une  surface  articulaire,  corres- 
pondant à  la  facette  articulaire  de  Tare  inférieur  de  l'atlas, 
dont  nous  avons  parlé  plus  haut. 

A  la  face  inférieure  on  voit,  sur  la  ligne  médiane,  un 
bourrelet,  qui  s'épaissit  d'arrière  en  avant  et  qui  fait  saillie, 
en  regardant  la  vertèbre  de  face  par  derrière.  Les  apo- 
physes transverses  sont  fortes  et  simples;  elles  occupent 
la  même  hauteur  que  les  apophyses  transverses  inférieures 
de  l'atlas. 

La  surface  articulaire  antérieure  est,  pour  ainsi  dire, 
continue  des  deux  côtés,  et  ne  présente  qu'à  peine  une 
ligne  de  démarcation  en  dessous  et  sur  le  côté  de  l'apo- 
physe odontoïde.  Toute  la  face  inférieure  de  cette  apophyse 
est  transformée  en  surface  articulaire. 

Nous  avons  trouvé  dans  l'Hof-Mineralien-Cabinet  de 
Vienne  un  axis  dépourvu  de  l'arc  supérieur  (1),  avec  lequel 
il  se  trouve  une  troisième  cervicale. 

La  collection  de  M.  Letocha  renferme  également  un 


(1)  Cet  arc  manque  presque  toujours  dans  toutes  les  vertèbres  de 
Cétacés  fossiles  et  nous  ne  pourrions  partager  Tavis  du  professeur  Brandi, 
en  attachant  de  Timportance  à  son  absence,  comme  il  le  fait  pour  le  genre 
Cetollierium. 


(  350  ) 

autre  atlas,  d'un  plus  jeune  animal,  avec  Taxis  correspon- 
dant; l'apophyse  transverse  inférieure  est  aussi  très-forte, 
mais  brisée  dès  sa  base. 

Cette  apophyse  est  beaucoup  plus  développée  que  dans 
le  Dugong. 

Ces  deux  premières  cervicales,  sous  le  rapport  de  leur 
union  par  l'apophyse  odontoïde,  ne  sont  pas  sans  analogie 
avec  l'atlas  et  l'axis  des  Primates;  elles  sont  toutefois  plus 
massives,  l'atlas  dans  sa  partie  latérale  et  supérieure,  l'axis 
dans  sa  partie  inférieure;  ces  vertèbres  sont  même  plus 
solides  que  dans  les  Siréniens  vivants  et  elles  indiquent  une 
mobilité  de  la  tête  sur  le  cou,  que  l'on  ne  rencontre  dans 
aucun  Cétacé  souffleur. 

M.  Brandi  a  figuré  ces  deux  premières  vertèbres  du  cou, 
pi.  XIV,  fig.  8  et  10 ,  pi.  XV,  fig.  i  et  1  A ,  a,  b. 

D'après  ce  que  nous  venons  de  dire,  ces  os  ne  provien- 
nent ni  d'un  Cétacé  à  fanons  ni  d'un  Cétacé  à  dents  ,  mais 
ils  présentent,  au  contraire,  tous  les  caractères  des  Dugong 
et  des  Lamantins  vivants. 

Indépendamment  des  deux  premières  cervicales,  on  a 
recueilli  heureusement  les  quatre  vertèbres  suivantes,  et 
il  y  a  tout  lieu  de  croire  qu'avec  ces  six  vertèbres  cervi- 
cales la  région  du  cou  est  complète. 

Elles  sont  toutes  séparées  comme  dans  les  Siréniens; 
le  corps  est  mince  et  l'on  remarque  fort  peu  de  différences 
entre  elles,  si  ce  n'est  que  le  corps  est  plus  épais  en  dessus 
chez  les  uns,  plus  épais  en  dessous  chez  les  autres. 

Dans  le  Dugong  vivant,  les  quatre  dernières  cervicales 
vont  en  diminuant  d'épaisseur  d'avant  en  arrière,  et  l'épais- 
seur de  deux  d'entre  elles  égale  l'épaisseur  du  corps  de 
l'axis. 

Les  apophyses  transverses  occupent  toute  la  hauteur  du 


(  531  ) 
corps  des  vertèbres,  ce  qui  provient  de  la  fusion  à  la  base 
des  apophyses  Iransverses  supérieures  et  inférieures. 

Elles  ont  été  figurées  par  M.  Brandt,  pi.  XV,  fig.  i  a-f, 
et  fig.  1  A.  Les  figures  8,  9,  10,  11  et  12,  pi.  XIV,  repré- 
sentent également  les  prenfiières  cervicales. 

Cette  région  cervicale  est-elle  complète  avec  ces  six  ver- 
tèbres? Nous  avons  tout  lieu  de  le  croire  et  il  est  sans 
doute  inutile  de  faire  remarquer  que  c'est  encore  une  rai- 
son de  plus  de  séparer  les  Pachyacanthes  des  Cétacés  véri- 
tables, puisque  les  Sirénides  sont  les  seuls  mammifères  qui 
s'éloignent, sous  ce  rapport,  de  la  disposition  générale.  C'est 
à  tort,  croyons-nous,  que  M.  Brandt  a  figuré  la  vertèbre 
fig.  1  a,  pi.  XV  comme  une  septième  cervicale. 

Les  vertèbres  dorsales,  lombaires  et  caudales  présentent 
toutes  des  caractères  propres  des  Dugongs  et  des  Lamantins, 
aussi  bien  par  la  forme  du  corps  que  par  les  apophyses 
transverses  et  épineuses.  Ces  vertèbres  sont  plus  trapues 
et  les  arcs  comme  les  apophyses  plus  massifs  que  dans  les 
Cétacés  ordinaires. 

Le  corps  des  vertèbres  dorsales  est  assez  long  d'avant 
en  arrière  et  les  apophyses  transverses,  tant  celles  des  arcs 
neuraux  que  du  corps  des  vertèbres,  sont  très-peu  déve- 
loppées. Ces  vertèbres  sont  légèrement  carénées  à  leur 
face  inférieure,  surtout  les  dernières.  Elles  portent  toutes 
et  assez  profondément,  comme  les  Cétacés  herbivores,  une 
forte  dépression  correspondant  à  la  tête  des  côtes. 

L'arc  et  l'apophyse  épineuse  sont  brisés  dans  les  diverses 
vertèbres  dorsales. 

Dans  les  premières  lombaires  le  corps  est  un  peu  moins 
épais  que  celui  de  l'axis.  Il  est  un  peu  plus  large  que  haut 
et  présente  une  légère  carène  en  dessous. L'apophyse  trans- 
verse  naît  autant  de  l'arc  que  du  corps  de  la  vertèbre,  et, 
après  s'être  portée  directement  de  dedans  en  dehors,  elle 


•   (  532  ) 
s'abaisse  jusqu'au-dessous  du  corps  des  vertèbres.  Il  n'y  a 
pas  de  surface  articulaire  à  voir  sur  le  corps  de  l'os. 

Nous  avons  trouvé  une  vertèbre  de  cette  région  dans 
l'Hof-Mineralien-Cabinet  et  une  toute  pareille  dans  la  col- 
lection de  M.  Letocha. 

Une  lombaire  suivante  a  le  corps  une  demi-fois  plus 
épais  que  celui  de  la  précédente;  les  apophyses  transverses, 
excessivement  larges,  s'élèvent  de  bas  en  haut  et  de  de- 
dans en  dehors,  présentant  au  haut  de  la  face  inférieure 
une  large  surface  articulaire  correspondant  sans  doute  à 
l'os  du  bassin.  Le  canal  vertébral  est  large,  son  plancher 
n'est  pas  creusé. 

Parmi  les  os  que  M.  Letocha  a  eu  l'obligeance  de  nous 
communiquer,  se  trouve  une  vertèbre  caudale  antérieure 
fort  intéressante  :  elle  se  fait  remarquer  d'abord  par  son 
apophyse  épineuse  supérieure,  qui  présente,  d'avant  en  ar- 
rière, une  largeur  presque  aussi  grande  que  le  corps  même 
de  la  vertèbre.  Cette  apophyse  est  en  même  temps  fort 
épaisse,  dans  son  milieu  surtout;  et  elle  est  si  peu  élevée 
au-dessus  du  canal  rachidien,  que  celui-ci  en  est  presque 
obstrué.  On  dirait  que  l'apophyse  épineuse  s'est  étendue 
dans  tous  les  sens,  mais  non  pas  dans  le  sens  de  la  lon- 
gueur. 

Cette  oblitération  du  canal  rachidien  est  telle,  que  la 
moelle  épinière  n'a  pu  se  loger  dans  sa  gouttière  sans 
éprouver  fortement  la  compression  de  la  voûte  de  l'arc 
osseux  (1). 


(1)  Pour  preuve  que  les  apophyses  des  Pachy^caiithes  sont  anormales, 
c'est  que  la  moelle  épinière  serait  écrasée  par  Parc  osseux  qui  la  recouvre. 
On  ne  saurait  passer  une  lame  de  couteau  dans  le  canal  rachidien.  Du 
reste  M.  Letocha  a  reçu  un  exemplaire  presque  complet  avec  des  apophyses 
épineuses  non  gonflées. 


(  333  ) 

.  Il  ne  faut  pas,  pensons-nous,  invoquer  d'autres  dispo- 
sitions, pour  démontrer  que  cet  épaississement  des  apo- 
physes épineuses  n'est  pas  une  disposition  qu'on  puisse 
qualifier  de  normale. 

Cette  vertèbre  lombaire  est  encore  remarquable  par  la 
longueur  du  corps,  la  largeur  des  apophyses  transverses 
et  la  longueur  exceptionnelle  des  mélapophyses,  qui  em- 
brassent la  vertèbre  suivante  pour  donner  à  l'échiné  plus 
de  solidité. 

Ces  mélapophyses  si  fortement  développées ,  sont-elles 
dirigées  en  avant  ou  en  arrière  ?  Dans  le  Dugong  vivant  ce 
sont  les  mélapophyses  antérieures  qui  sont  les  plus  impor- 
tantes, tandis  que  dans  le  genre  qui  nous  occupe,  ce  sont 
les  postérieures.  Au  milieu  de  la  région  caudale ,  les  posté- 
rieures ont  disparu  chez  le  Dugong,  tandis  qu'ici  les  mêmes 
vertèbres  n'ont  plus  déjà  des  mélapophyses  antérieures, 
mais  des  postérieures  très-fortes. 

Ce  n'est  pas  sans  élonnement  que  nous  voyons  les  ver- 
tèbres dePachyacanthus,flgurées  par  M.  Brandi,  avec  leurs 
mélapophyses  en  avant,  ce  qui  fait  que  les  apophyses  trans- 
verses sont  également  dirigées  en  avant  au  lieu  de  l'être 
en  arrière.  Toutes  ces  vertèbres,  même  celles  qui  sont 
en  place,  ne  doivent-elles  pas  être  retournées? 

La  vertèbre,  pi.  XIV,  flg.  14,  est  figurée  en  place  et 
montre  ses  mélapophyses  en  arrière  comme  elles  doivent 
être. 

Ce  sont  ces  apophyses  épineuses,  épaissies  extraordinai- 
rement  dans  la  région  lombaire  surtout,  qui  ont  déterminé 
M.  Brandi  à  créer  le  genre  nouveau ,  auquel  il  a  donné  le 
nom  de  Pachyacanthus.  Il  suffît  de  faire  remarquer  que 
cette  disposition  ne  se  trouve  pas  dans  tous  les  individus, 
pour  montrer  que  cette  nouvelle  coupe  générique  doit  être 


(  554  ) 
établie  sur  d'autres  caractères.  M.  Letocha  a  reçu  un  sque- 
lette assez  complet  avec  des  vertèbres  normalement  déve- 
loppées et  qui,  d'après  le  savant  académicien,  devrait 
prendre  place  dans  les  Cetotherium  ambiguum. 

Une  des  moyennes  caudales  avec  ses  surfaces  articu- 
laires pour  les  os  en  V,  a  le  corps  plus  épais  mais  moins 
long,  les  apophyses  transverses  de  forme  conique  dirigées 
directement  d'avant  en  arrière  et  un  peu  de  dedans  en 
dehors,  les  métapophyses  encore  très-fortes  et  l'apophyse 
épineuse  également  large  d'avant  en  arrière,  très-épaisse 
et  oblitérant  presque  complètement  le  canal  rachidien. 

Les  vertèbres,  même  les  cervicales,  ont  toutes  leurs  épi- 
physes  des  deux  côtés  soudées  au  corps  des  vertèbres. 
Dans  les  Siréniens  vivants  on  sait  que  ces  épiphyses  font 
généralement  défaut,  mais  les  Siréniens  fossiles  de  nos 
terrains  miocènes  ont  tous  leurs  vertèbres  à  épiphyses 
comme  celles  des  Pachyacanthes. 

Le  sternum,  attribué  par  M.  Brandt  au  genre  Pachya- 
canthe,  et  dont  nous  connaissons  deux  exemplaires,  est 
formé  de  deux  pièces;  l'antérieure  est  large  en  avant  et 
fournit  une  surface  articulaire  pour  la  première  paire  de 
côtes. 

La  seconde  pièce  est  fort  étroite  et  porte  une  seconde 
paire  de  côtes  en  avant  et  une  troisième  en  arrière. 

Les  deux  appendices  qui  terminent  le  sternum  sont  fort 
courts. 

La  surface  externe  est  toute  couverte  de  granulations. 

M.  Brandt  a  figuré  ce  sternum,  pi.  XVII,  fig.  10  et  11. 

Nous  ne  comprenons  pas  comment  le  professeur  Brandt 
a  pu  figurer  un  sternum  formé  de  deux  pièces,  et  ne  pas 
s'apercevoir  qu'un  sternum  pareil  ne  peut  provenir  d'un 
animal  à  fanons.  11  n'appartient  pas  davantage  à  un  Siré- 


(  335  ) 

nien.  Les  Dugongs  et  les  Lamantins  ont  bien  deux  pièces 
dans  leur  sternum,  mais  seulement  pendant  le  jeune  âge, 
et  les  surfaces  articulaires,  s'il  y  en  a,  sont  réunies  vers  le 
milieu  de  Tos.  Il  n'y  a  que  le  sternum  de  Delphinide  qui 
offre  ce  caractère. 

Aussi  est-il  de  toute  évidence  pour  nous  que  cet  os  est 
propre  à  un  Cétacé  à  dents,  et  il  appartient  sans  doute  au 
même  animal  que  les  membres,  que  M.  Brandt  a  gratuite- 
ment attribués  au  Pachyacanthus. 

Il  est  assez  remarquable  qu'une  ancienne  étiquette,  qui 
accompagne  encore  ce  sternum  au  cabinet  de  minéralogie , 
indique  la  nature  de  Delphinide.  Cette  étiquette  date  de 
1859.  Notre  savant  confrère  doit  l'avoir  eue  sous  les  yeux. 

Les  côtes  sont  singulièrement  grosses  et  épaisses,  dit 
Cuvier,  en  parlant  des  os  de  Dugong,  leurs  deux  bords 
sont  arrondis,  et  elles  sont  aussi  convexes  en  dedans  qu'en 
dehors.  Je  ne  connais  aucun  autre  animal  qui  ait  des  côtes 
de  cette  forme,  ajoute-t-il. 

On  ne  peut  se  tromper  sur  la  nature  de  ces  os,  les  côtes 
des  Pachyacanthus  de  M.  Brandt  ont  toutes  ce  caractère  in- 
diqué par  Cuvier.  La  tête  et  le  col  de  la  tête  sont  fort  peu 
distincts;  il  en  est  de  même  des  bords  antérieurs  et  posté- 
rieurs ainsi  que  de  la  gouttière  qui  doit  loger  les  vaisseaux 
et  les  nerfs  intercostaux;  ces  côtes  sont  toutes  fort  peu 
courbées,  très-renflées  vers  le  milieu  de  leur  longueur  et 
perdent  toutes  leur  état  spongieux.  A  voir  un  fragment  on 
croirait  avoir  un  éclat  de  silex  sous  les  yeux.  Les  côtes  sont 
les  os  les  plus  disposés  à  la  Pachyostose. 

Nous  pouvons  dire  que  les  côtes  sont  régulièrement 
courbées,  mais,  au  lieu  d'avoir  une  surface  aplatie  et  une 
autre  surface  bombée,  elles  sont  complètement  arrondies 


(  356  ) 
et  d'une  épaisseur  excessfve,  surtout  vers  leur  extrémité 
libre.  Il  n'est  pas  un  cétologue  qui,  en  brisant  un  de  ces 
os,  ne  reconnaîtra  immédiatement  qu'ils  proviennent  d'un 
Sirénien. 

Le  membre  antérieur  est  figuré  par  Brandt,  pi.  XVIÏ, 
fig.  12  à  14.  Tous  les  os  qui  le  constituent  accusent  un 
vrai  Cétacé  souffleur  et  il  est  probable  qu'il  appartient  au 
même  animal  que  le  sternum. 

L'omoplate  est  fort  remarquable;  cet  os  a  bien  sa  forme 
ordinaire,  mais  l'apophyse  acromion  ,  qui  fait  quelquefois 
défaut  dans  les  Balénides,  a  pris  ici  un  développement 
comme  nous  ne  l'avons  vu  dans  aucun  autre  genre  vivant 
ou  fossile  ;  cette  apophyse  s'étend  comme  une  trompe  en 
avant,  se  recourbant  légèrement  et  se  relevant  vers  son 
extrémité  libre. 

Les  deux  faces  sont  assez  semblables  et  l'extérieure  ne 
nous  présente  ni  épine  ni  apophyse  coracoïde. 

Cet  os  mesure  d'un  angle  à  l'autre,  c'est-à-dire  entre 
les  angles  supérieurs,  en  ligne  droite  11  Ya  centimètres. 

C'est  une  même  omoplate,  qui  porte  au  Musée  de  Vienne 
sur  une  étiquette  écrite,  le  nom  de  Cetotherhim  priscum; 
une  autre  omoplate  figure  ensuite  sous  le  nom  de  Del- 
phimis  karreri  et  porte  sur  l'étiquette,  C.  5.  Une  troi- 
sième omoplate  est,  en  tout,  semblable  aux  deux  précé- 
dentes, rapportée  au  Pachyacanthiis. 

Pour  nous  c'est  la  même  omoplate  qui  est  rapportée  au 
Cetotherhim  priscum,  au  Delphinus  karreri  et  au  Pachya- 
canthus  suessii. 

Les  os  du  membre  antérieur  viennent  tous  de  Nussdorf 
et  portent  au  Musée  les  n"' 6,  108  (humérus)  6,  109  (cubi- 
tus) 6,  110  (radius)  6,  111  (omoplate). 


(  337  ) 

L'humérus  a  la  forme  ordinaire  d'un  humérus  de  Céto- 
donle.  Il  est  court  et  robuste  et  plutôt  comprimé  qu'ar- 
rondi. L'extrémité  supérieure  de  l'os  n'est  pas  formée 
par  la  tête,  mais  pas  le  grand  tubercule  qui  dépasse  la 
hauteur  du  col.  La  surface  articulaire  inférieure  forme 
un  angle  fort  aigu  et  l'on  ne  voit  pas  la  surface,  corres- 
pondant au  cubitus,  remonter  en  arrière  pour  s'unir  à 
J'apophyse  olécranienne.  Cette  seconde  surface  articulaire 
est  bien  plus  large  que  celle  qui  correspond  à  la  surface 
du  radius. 

Le  cubitus  a  la  même  largeur  dans  toute  sa  longueur. 
L'olécrane  manque  complètement.  Au  milieu  de  sa  face 
interne  le  cubitus  offre  une  échancrure  régulière. 

Ces  deux  os  présentent  deux  surfaces  articulaires  par 
lesquelles  ils  s'unissent  plus  étroitement  et  entre  lesquelles 
on  voit  une  échancrure  formée  surtout  par  le  radius. 

Le  radius  se  distingue  surtout  par  sa  grande  surface 
articulaire  du  côté  du  carpe. 

La  conformation  du  membre  indique  un  Cétodonte, 
différent  de  tout  ceux  que  nous  connaissons,  et  il  est  pro- 
bable que  nous  avons  ici  un  type  propre  au  bassin  de  la 
mer  Noire. 


Cet  animal  est  remarquable,  dit  le  professeur  Brandt, 
par  l'épaississement  des  apophyses  épineuses  des  dernières 
dorsales,  et  particulièrement  des  lombaires  et  des  pre- 
mières caudales,  l'absence  de  l'olécrane,  ses  larges  côtes,  etc. 
[Merkwûrdige  Anschwellung  der  obern  Dornfortsdtze  der 
hintern  Rucken,  ganz  besonders  aberder  Lenden  und  vor- 

2""^  SÉRIE,  TOME  XL.  22 


(  558  ) 
dern  Schwanzwirbel,  den  Mangel  eines  Olecranums,  sehr 
hreite  Rippen..,.,  etc.). 

II  se  rapproche  le  plus,  dit-il,  des  Cetotherium,  mais  il 
lient  également  des  Delphinoïdes...  {neigt  aber  unverkenn- 
bar  auch  etwas  zu  den  Delphinoiden  hin  (1). 

Nous  avons  tout  lieu  de  croire  que  les  os  que  M.  Brandt 
a  rapportés  à  l'animal,  pour  lequel  il  a  créé  le  genre  Pachya- 
canthus,  que  ces  os  proviennent  de  deux  animaux  bien 
différents  :  les  vertèbres,  aussi  bien  les  cervicales  que  les 
lombaires  et  dorsales,  sont,  à  notre  avis,  de  Sirénien  ;  les 
membres  au  contraire  et  une  caisse  tympanique ,  que  nous 
avons  trouvée  à  côté,  et  portant  la  même  lettre,  ainsi  que 
le  sternum ,  sont  de  Cétacé  véritable  et  sans  aucun  doute 
de  Cétodonte.  Nous  trouvons  là,  comme  à  Anvers,  des 
ossements  de  Cétacés  pélagiques  mêlés  avec  des  ossements 
de  Thalassothériens  côtiers. 

La  première  erreur  semble  avoir  été  commise  par  un 
fragment  de  maxillaire, que  Tonne  retrouve  plus  à  Vienne, 
mais  qui  n'appartient  évidemment  pas  à  un  maxillaire  de 
Cétacé  et  encore  moins  à  un  maxillaire  de  Balénide. 

La  seconde  erreur  est  le  résultat  d'une  fausse  interpré- 
tation de  l'épaisseur  des  apophyses  épineuses.  Nous  ferons 
remarquer  que  celte  hypertrophie  de  certains  os  est  propre 
à  tous  les  Siréniens.  Dans  presque  tous  les  individus 
adultes,  si  pas  dans  tous,  les  côtes  non-seulement  s'épais- 
sissent extraordinairemenl,  mais  elles  prennent  une  con- 
sistance toute  particulière,  au  point  de  n'avoir  plus,  dans 
leurs  fractures,  l'aspect  d'un  tissu  osseux.  On  dirait  un 


(1)  Sitzb.  der  K.  Akad.  der  Wissensch.  1  Âbth.  April  Heft.  Jabr.  1872. 


(  539  ) 
silex  pour  certains  fragments  de  cotes  par  Taspect  comme 
par  le  poids. 

Ces  os  épaissis  constituent-ils  un  animal  à  part,  ou 
bien,  ne  sont-ils  pas  des  os  modifiés  par  une  espèce 
d'hypertrophie  osseuse?  Ce  n'est  pas  précisément  une  ma- 
ladie des  os,  ce  sont  certaines  pièces  du  squelette  qui,  dans 
la  plupart  des  individus  d'une  même  espèce,  ont  cette  ten- 
dance anormale.  N'en  voyons-nous  pas  des  exemples  dans 
les  côtes  des  Siréniens  vivants  et  parfois  même  dans  le 
crâne,  comme  nous  en  avons  signalé  dernièrement  dans 
l'animal  auquel  nous  avons  donné  le  nom  de  Crassilherium. 
Nous  avons  trouvé,  en  effet,  depuis  la  publication  de  notre 
notice  sur  ce  Crassilherium,  dans  les  mêmes  terrains,  un 
animal  jeune  qui  ne  nous  offre  qu'un  épaississement  du 
crâne  fort  ordinaire. 

M.  Brandt  a  fait  une  seconde  espèce  de  Pachyacanthusj 
avons-nous  dit  plus  haut,  sous  le  nom  de  Trachyspondylus, 
Ici  nous  sommes  encore  tout  aussi  éloigné  de  son  avis.  Le 
Pachyacanthus  trachyspondylus  est  basé  uniquement  sur 
une  série  de  vertèbres  malades  et  dont  la  surface  du  corps 
est  plus  ou  moins  défigurée.  11  n'est  pas  rare  de  trouver 
cet  état  pathologique  dans  les  ossements  fossiles.  Nous  en 
avons  plusieurs  exemples  à  Anvers  (Musée  de  Bruxelles 
et  Musée  de  Louvain)  ;  nous  en  avons  trouvé  également 
au  musée  de  Turin  qui  viennent  d'Asti  ;  ce  sont  quatre  ver- 
tèbres dorsales  de  Balénide  plus  ou  moins  soudées  entre 
elles.  A  Milan  nous  avons  vu  également  des  vertèbres  fos- 
siles de  vraie  Baleine  soudées  les  unes  aux  autres  par  des 
excroissances  osseuses. 

Cette  hypertrophie  de  certains  os,  qui  a  fait  proposer  le 
nom  de  Pachyacanthus ,  se  retrouve  également  dans  quel- 


(  340  ) 
ques  os  de  poisson  comme  disposition  normale  à  l'âge 
adulte.  Un  des  exemples  les  plus  remarquables  est  l'hu- 
mérus des  Gadus  œrjlcfîmis  à  l'état  adulte  et  les  apophyses 
épineuses  des  vertèbres  d'un  poisson  ,  connu  sous  le  nom 
de  Ephippus  géant.  M.  Steindachner  en  a  signalé  divers 
exemples  dans  des  poissons  fossiles  des  environs  de 
Vienne. 


En  résumé,  le  genre  Pachyacanîhus  de  M.  Brandt  est 
formé  de  deux  animaux  distincts  et  ni  l'un  ni  l'autre  n'ap- 
partiennent, comme  il  le  suppose,  à  un  Balénide. 

La  colonne  vertébrale  et  les  côtes  sont  d'un  Sirénien, 
le  sternum  et  les  membres  d'un  Cétodonte. 

Le  Pachyacanîhus  trachyspondylus  repose  sur  un  état 
maladif  du  corps  des  vertèbres. 

Le  Celotherium  ambiguum  du  même  auteur  est  établi 
sur  des  vertèbres  normales. 

A  notre  avis  il  y  a  donc  lieu  de  supprimer  le  Pachya- 
canîhus suessxi,  le  Pachyacanîhus  trachyspondylus  et  le 
Celotherium  ambiguum,  d'assigner  une  place  au  Sirénien 
désigné  sous  le  nom  de  Pachyacanîhus  et  d'établir  les 
affinités  du  Cétodonte  dont  proviennent  le  sternum  et  le 
membre. 

Le  nom  de  Pachyacanîhus  peut  rester  à  l'animal  dont 
proviennent  les  vertèbres  et  les  côtes. 


(  34i  ) 

Sur  les  propriétés  de  la  surface  de  contact  d'un  solide  et 
d'un  liquide.  —  Rectification  d'un  passage  de  ma  Note 
précédente j  par  M.  G.  Van  dcr  Mensbrugghe. 

Dans  une  Note  récente  (*),  j'ai  démontré,  on  se  le  rap- 
pelle, que  la  théorie  de  Gauss  conduit  à  admettre  Texis- 
tence  d'une  tension  à  la  surface  libre  d'un  liquide ,  ainsi 
qu'à  la  surface  commune  à  deux  liquides  qui  ne  se  mêlent 
point,  et  consacre,  delà  manière  la  plus  complète,  l'expli- 
cation des  phénomènes  d'étalement  d'un  liquide  sur  un 
autre,  fondée  sur  le  principe  de  la  tension  superficielle. 

Après  avoir  établi  l'accord  de  l'analyse  et  de  l'observa- 
tion à  cet  égard,  j'ai  conclu,  par  analogie,  que,  dans  tous 
les  cas,  il  existait  également  une  tension  à  la  surface  de 
contact  d'un  solide  et  d'un  liquide  ;  à  celte  occasion  ,  j'ai 
rappelé  un  fait  qui,  selon  moi,  confirmait  pleinement  cette 
assertion.  Depuis  lors,  j'ai  reconnu  que,  d'après  la  théorie 
de  Gauss  elle-même,  ma  conclusion  n'est  vraie  que  dans 
certains  cas  particuliers,  et  que  d'ailleurs  mon  interpréta- 
lion  du  fait  en  question  manque  à  la  fois  de  netteté  et  de 
rigueur.  La  Note  actuelle  sert  de  rectification  et  de  com- 
plément à  cette  partie  de  mon  dernier  travail. 

Soit  un  liquide  dont  F  est  la  force  de  réunion,  ii  la  sur- 
face libre,  Hasurface  de  contact  avec  une  paroi  solide,  et 
i  l'angle  de  raccordement  ;  la  théorie  de  Gauss  fournit 
l'expression 

gfzdm  -+-  ¥ît  —  ¥t  cos  i, 


{')  Sur  la  théorie  capillaire  de  Gauss  et  l'extension  dhm  liquide  sur 
un  autre  (Bull,  de  I'Acad.  roy,  de  Belgique,  2^  série, t.  XXXIX,  p.oTo). 


(  342  ) 
qui  doit  être  un  minimum  pour  que  l'équilibre  ait  lieu. 
Pour  simplifier  les  déductions,  admettons  que  la  masse 
liquide  sur  laquelle  on  opère  soit  assez  petite  pour  qu'on 
puisse  négliger  l'effet  de  la  pesanteur,  c'est-à-dire  le  terme 
gCzâm.  Pour  plus  de  généralité,  remplaçons  F  cos  2  par 
sa  valeurs  F'  —  F  donnée  aussi  par  la  théorie  de  Gauss; 
F'  désigne  l'attraction  du  solide  pour  le  liquide.  Dès  lors 
nous  n'avons  qu'à  discuter  le  binôme 

Fm  —  (2F'  —  F)  l. 

Or  si  la  surface  xi  existe  seule ,  ce  qui  a  lieu  lorsque  la 
masse  est  abandonnée  à  elle-même,  le  minimum  du  terme 
F?«  exige  que  la  surlace  libre  soit  aussi  petite  que  possible; 
c'est  le  cas  bien  connu  d'une  gouttelette  de  pluie  qui  a  une 
forme  sensiblement  sphérique,  malgré  l'action  de  la  pesan- 
teur. Ainsi  que  je  l'ai  déjà  montré ,  la  tension  de  la  sur- 
face libre  vaut  précisément  F  par  unité  de  longueur. 

Mais  quelle  est  la  force  qui  règne  à  la  surface  de  con- 
tact Û  Pour  le  savoir,  remarquons  que,  abstraction  faite 
de  la  surface  libre  w,  le  minimum  du  terme  —  (2  F' —  F)  i 
donnera  lieu  à  des  conditions  différentes  suivant  le  signe 
de  2  F'  — F.  En  premier  lieu,  soit2F'>  F;  le  terme  — 
(2  F'  —  F)  ^  sera  un  minimum  pourvu  que  la  surface  de 
contact  soit  aussi  grande  que  possible;  les  choses  se  passe- 
ront donc  comme  si  cette  surface  de  contact  était  sollicitée, 
non  plus  par  une  force  de  tension,  mais  bien  par  une  force 
A' extension ,  en  vertu  de  laquelle  le  liquide  tend  à  occuper 
sur  le  solide  une  portion  de  plus  en  plus  étendue,  si  au- 
cune autre  force  n'y  met  obstacle.  En  effet,  d'après  ma  Note 
précédente,  nous  pouvons  regarder  —  (2  F'  —  F)  t  comme 
exprimant  l'énergie  potentielle  de  la  surface  de  contact; 


(  345  ) 

or  imaginons  une  plaque  solide  dont  la  surface  est  mouillée 
par  un  liquide  sauf  sur  une  portion  circulaire  de  rayon  r, 
et  supposons  que  sur  chaque  unité  de  longueur  de  la  cir- 
conférence se  trouve  appliquée  une  force  E  capable  d'em- 
pêcher l'extension  ultérieure  du  liquide.  Si  nous  donnons 
à  r  un  accroissement  dr,  il  y  aura  évidemment  un  gain 
(2  F'  —  F)  2nrclr  d'énergie  potentielle  de  la  surface 
mouillée;  mais  il  aura  fallu  produire-  un  travail  ^n  rEdr, 
toujours  abstraction  faite  de  l'énergie  de  la  surface  libre; 
on  conclut  de  là  que  2  F'  —  F  =  E,  c'est-à-dire  que,  numé- 
riquement, l'énergie  potentielle  de  Tunité  de  surface  de 
contact  est  égale  à  la  force  d'extension  de  cette  surface  par 
unité  de  longueur. 

En  second  lieu,  soit  2  F'  =  F  ;  alors  l'énergie  poten- 
tielle de  la  surface  de  contact  est  nulle ,  et  cette  surface  ne 
tend  ni  à  augmenter,  ni  à  diminuer. 

Enfin  si  2  F'  <  F,  le  terme  —  (2  F'— F)  t  devient  posi- 
tif et  n'est  minimum  que  si  t  est  aussi  petit  que  possible; 
dans  ce  cas,  la  surface  commune  au  solide  et  au  liquide 
possède  une  véritable  force  de  tension,  absolument  comme 
la  surface  liquide  libre;  seulement  cette  force  équivaut  à 
F  —  2  F'  par  unité  de  longueur. 

Il  suit  de  cette  discussion  que  la  surface  de  contact  d'un 
solide  et  d'un  liquide  peut  être  soumise  à  l'action  d'une 
force  de  tension  ou  bien  d'une  force  d'extension  suivant 
la  nature  des  corps  mis  en  présence. 

Actuellement  il  est  très-facile  de  prévoir  les  phénomènes 
qu'on  observera  dans  les  différents  cas  qui  peuvent  se  pré- 
senter. 

I.  Cas  où  la  surface  t  possède  une  tension.  —  Si 
2  F'  <  F,  nous  venons  de  voir  que  la  surface  t  tend  à  dimi- 
nuer autant  que  possible,  si  rien  ne  l'en  empêche.  C'est 


(  344  ) 

le  cas  d'un  liquide  qui  ne  mouille  pas  le  solide.  Pour  le 
faire  voir,  on  prend  un  tube  capillaire  en  verre  dont  une 
des  extrémités  est  recourbée  à  angle  droit;  on  le  remplit 
de  mercure,  puis  on  plonge  Tune  des  branches  dans  un 
vase  contenant  du  mercure,  de  telle  sorte  que  l'autre 
branche  du  tube  soit  horizontale  et  très-rapprochée  du 
niveau  dans  le  vase;  à  l'instant  même  où  l'on  abandonne 
le  mercure  de  l'extrémité  plongée  à  lui-même,  le  tube  se 
vide  rapidement;  c'est  que  les  filets  liquides  voisins  de  la 
paroi  sont  tirés  par  la  force  de  contraction  de  la  surface 
de  contact,  et  que,  en  outre,  les  autres  filets  sont  sollicités 
par  les  pressions  provenant  de  la  tension  du  ménisque  con- 
vexe libre. 

D'autres  faits  encore,  tels  que  l'équilibre  d'une  masse 
de  mercure  sur  une  paroi  de  verre,  rendent  manifeste  la 
tension  de  la  surface  de  contact  du  liquide  avec  le  solide; 
je  n'y  insiste  pas,  attendu  qu'on  lésa  déjà  souvent  inter- 
prétés comme  je  devrais  le  faire  moi-même. 

II.  Cas  où  la  surface  de  contact  est  soumise  à  une  force 
d'extension.  —  i*'  Supposons  d'abord  que  F'  soit  plus  grand 
que  F,  c'est-à-dire  que  l'attraction  mutuelle  du  solide  et 
du  liquide  soit  supérieure  à  l'attraction  du  liquide  pour 
lui-même  ;  alors  le  binôme  2  F'  —  F  sera  plus  grand  que 
F,  ou,  en  d'autres  termes,  la  force  d'extension  2  F'  —  F 
sera  plus  grande  que  la  tension  superficielle  du  liquide 
libre;  conséquemment,  si  nous  déposons  une  gouttelette 
d'un  liquide  convenable  sur  une  paroi  solide  horizontale, 
la  force  2  F'  —  F  qui  tend  à  produire  l'extension  ne  pourra 
pas  être  contre-balancée  par  la  tension  F  de  la  surface  libre 
du  liquide;  la  gouttelette  s'étalera  donc  indéfiniment.  C'est 
ce  qui  a  lieu  quand  on  brise  un  morceau  de  verre  et  que 
sur  l'une  des  surfaces  mises  fraîchement  à  nu ,  on  dépose 


(  345  ) 
une  goutte  d'eau  distillée;  celle-ci  s'étend  toujours  et  re- 
couvre bientôt  en  couche  très-mince  la  surface  tout  entière. 
Il  suit  encore  de  là  que  si  Ton  plonge  dans  l'eau  distillée 
un  morceau  de  verre  présentant  une  cassure  fraîche,  on  ne 
peut  le  retirer  du  liquide  qu'avec  une  couche  mouillante 
qui  occupe  uniformément  cette  cassure. 

2''  Soit  F'  égal  à  F;  alors  le  binôme  2  F'  —  F  est  en- 
core positif,  et  équivaut  à  F;  la  force  d'extension  d'un 
liquide  sur  une  couche  du  même  liquide  attachée  à  une 
paroi  solide  est  donc  égale  à  la  tension  de  la  surface  libre; 
c'est  ce  qui  explique  l'étalement  de  l'eau  distillée  sur  une 
couche  du  même  liquide  recouvrant,  par  exemple,  une 
plaque  solide  horizontale  ;  c'est  ce  qui  fait  comprendre  éga- 
lement pourquoi  un  liquide  s'élève  dans  un  tube  capillaire 
dont  la  paroi  intérieure  est  déjà  couverte  d'une  couche  du 
même  liquide.  Dans  ce  cas,  la  force  d'extension  coïncide 
avec  ce  que  Dupré  nomme  force  de  réunion  du  liquide. 

3°  Enfin  soit  F'  <  F  et  >  |;  alors  le  binôme  2  F'  —  F 
sera  toujours  positif,  mais  inférieur  à  F;  cela  veut  dire 
que  la  surface  de  contact  possédera  une  force  d'extension 
2  F'  —  F,  mais  moindre  que  la  tension  F  du  liquide  ;  con- 
séquemment  une  gouttelette  liquide  déposée  sur  une  lame 
solide  horizontale  remplissant  les  conditions  ci-dessus, 
prendra  une  forme  lenticulaire  telle  que,  en  chaque  point 
de  son  contour,  la  composante  F  cos  /  de  la  tension  de  la 
surface  libre  sera  égale  et  opposée  à  la  force  d'extension; 
nous  retrouvons  ici  bien  simplement  la  formule  de  l'angle 
de  raccordement  obtenue  dans  la  théorie  de  Gauss  par 
l'application  du  principe  des  vitesses  virtuelles. 

Les  conditions  actuelles  se  réalisent  quand  on  dépose 
une  gouttelette  d'eau  distillée  sur  une  surface  horizontale 
de  verre  ordinaire.  On  voit  très-bien  maintenant  que  cette 


(  546  ) 

expérience,  citée  à  la  fin  de  ma  dernière  Note,  ne  prouve 
nullement,  comme  je  le  croyais  d'abord,  l'existence  d'une 
force  contractile  à  la  surface  de  contact  d'un  solide  et  d'un 
liquide,  et  doit  être  interprétée  ainsi  que  je  viens  de  l'in- 
diquer (*). 

Si  une  lame  de  verre  était  en  partie  plongée  verticale- 
ment dans  l'eau  distillée,  celle-ci  s'élèverait  le  long  de  la 
lame  en  vertu  de  la  force  d'extension  2  F'  —  F,  et  il  se 
formerait  un  relèvement  capillaire  concave  qui  se  raccor- 
derait avec  la  paroi  sous  l'angle  donné  plus  haut;  or  les 
tensions  qui  régnent  aux  différents  points  de  cette  surface 
concave  donnent  lieu  à  une  traction  dirigée  de  bas  en  haut, 
et  cette  traction  agit  jusqu'à  ce  qu'elle  fasse  équilibre  au 
poids  des  filets  liquides  soulevés  au-dessus  du  niveau. 

Il  suit  de  là  que  si  l'on  pouvait  empêcher  l'action  de  la 
pesanteur  de  contre-balancer  l'effet  de  cette  force  de  trac- 
tion, le  liquide  s'étalerait  indéfiniment  sur  la  paroi  solide. 
Pour  réaliser  la  condition  dont  il  s'agit,  on  prend  le  tube 
capillaire  à  deux  branches,  décrit  plus  haut;  l'une  d'elles 
plonge  dans  l'eau  d'un  vase;  et  l'autre  est  disposée  hori- 
zontalement et  très-près  du  niveau  du  liquide  dans  le  vase; 
l'eau  s'engage  rapidement  dans  la  branche  horizontale,  et 
le  ménisque  concave  qui  termine  la  colonne ,  atteint  bien- 
tôt l'extrémité  ouverte  du  tube. 

Rappelons  ici,  à  l'appui  delà  théorie  précédente,  les 


(')  Au  mois  d'août  1874  ,  j'ai  avancé,  devaut  la  Section  de  physique  du 
congrès  de  Lille  (voir  le  comple  rendu  de  ce  congrès,  p.  237) ,  que  la  sur- 
face de  contact  d'un  solide  et  d'un  liquide  est  toujours  douée  d'une  ten- 
sion; la  Note  actuelle  fait  connaître  le  cas  oîi  cette  assertion  n'est  pas 
exacte,  et,  de  plus,  montre  nettement  le  rôle  respectif  des  forces  qui 
caractérisent  la  surface  libre  d'une  part,  et  la  surface  de  séparation  d'un 
solide  et  d'un  liquide,  d'autre  part. 


(  347  ) 

curieuses  expériences  par  lesquelles  M.  Plateau  a  montré 
que,  si  Ton  neutralise  complètement  Faction  de  la  pesan- 
teur, un  liquide  monte  indéfiniment  dans  un  tube  d'un 
diamètre  quelconque  (*). 

Dans  un  prochain  travail,  j'aurai  l'occasion  de  montrer 
combien  la  considération  de  la  force  d'extension  est  utile 
dans  les  questions  capillaires,  et  jusqu'à  quel  point  elle 
permet  de  résoudre  simplement  des  problèmes  en  appa- 
rence bien  compliqués. 


—  La  classe  s'est  ensuite  constituée  en  comité  secret 
pour  entendre  la  lecture  des  listes  des  candidatures  aux 
places  vacantes  arrêtées  par  les  sections  des  sciences  ma- 
thématiques et  physiques  et  des  sciences  naturelles,  dans 
leur  séance  du  matin. 


(*)  Statique  expérimentale  et  théorique  des  liquides  soumis  aux  seules 
forces  moléculaires,  t.  T.  §§  22  à  29. 


(348) 


CLASSE   DES    LETTRES. 


Séance  du  H  octobre  4815. 

M.  le  baron  Guillaume,  directeur. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.  Grandgagnage,  J.  Roulez,  Paul 
Devaux,  P.  De  Decker,  J.-J.  Haus,  M.-N.-J.  Leclercq,  le 
baron  J.  de  Witte,  Ch.  Faider,  le  baron  Kervyn  de  Lelten- 
hove,  R.  Chalon,  Thonissen,  Th.  Juste,  Félix  Nève,  Alph. 
Wauters,  Érn.  de  Borchgrave,  A.  Wagener,  membres; 
J.  Nolet  de  Brauwere  van  Steeland ,  Aug,  Scheler,  asso- 
ciés; Edm.  Poullet,  Stan.  Bormans,  Piot,  correspondants. 

M.  Al  vin,  membre  de  la  classe  des  beaux-arts,  et 
M.  Ch.  Monligny,  membre  de  la  classe  des  sciences ,  assis- 
lent  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 

M.  le  Ministre  de  l'intérieur  écrit  que  la  6^  période  pour 
le  prix  quinquennal  d'histoire  nationale ,  et  la  5^  période 
pour  le  prix  quinquennal  des  sciences  morales  et  politi- 
ques seront  closes  le  31  décembre  prochain.  Il  demande 
que  la  classe  veuille  bien  lui  adresser  la  liste  double  pour 
la  formation  des  jurys  chargés  de  juger  ces  concours. 

La  classe  s'occupera  de  ce  choix  lors  de  la  prochaine 
séance. 


(  3i9  ) 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  envoie,  pour  la  bibliothèque 
de  r Académie,  un  exemplaire  :  1°  de  V Histoire  des  comtes 
de  Flandre  jusqu'à  Vavcnement  delà  maison  de  Bourgogne, 
par  Adhémar  Ingcls,  865-1384,  in-S";  2"  du  11'  \olume 
du  Bulletin  de  la  section  littéraire  de  la  Société  des  Mélo- 
manes de  Hasselt,  in-8°;  3°  du  tome  VII  de  la  Description 
analytique  des  cartulaires  et  des  chartriers  du  Hainaut, 
par  L.  Devillers,  in-8°;  4''  du  Nederduitsch  letterkundig 
jaarboekje  voor  1875,  42'"  jaargang,  in-12;  S''  de  la 
livraison  (Gebrek-Geducht)  du  Woordenboek  der  Neder- 
landsch  taal,  3'  reeks,  4'  aflev.,  door  P.-J.  Cosyn  en 
E.  Verwys,  in-8°. 

M.  le  Ministre  de  la  justice  envoie  également  pour  la 
Bibliothèque  deux  exemplaires  :  1°  du  4^  cahier  du  VP  vo- 
lume des  procès-verbaux  des  séances  de  la  commission 
royale  des  anciennes  lois  et  ordonnances  de  la  Belgique; 
2°  le  tome  5«  des  coutumes  du  quartier  d'Anvers  et  le 
tome  ^^  des  coutumes  de  Bruges,  publiés  par  la  même 
commission. 

—  M.  Gachard  écrit  que  la  Commission  royale  d'histoire 
vient  de  publier,  sous  le  titre  :  le  Livre  des  fiefs  du  comté 
de  Looz  sous  Jean  d'Arckel,  un  petit  volume  in-8''  qui 
forme  annexe  aux  Bulletins  et  qui,  par  conséquent,  doit 
être  envoyé  aux  établissements  et  aux  personnes  qui  re- 
çoivent ce  recueil.  —  Cet  envoi  a  été  fait. 

—  L'Académie  de  Stanislas,  à  Nancy,  adresse  le  volume 
de  1873-1874  de  ses  Mémoires. 

—  L'Université  de  Tienne  remercie  pour  le  dernier 
envoi  annuel  de  publications  académiques. 


(  3^0  ) 

—  La  direction  générale  du  Willems-Fonds,  à  Gand, 
adresse  le  programme  du  concours,  en  flamand,  pour  une 
histoire  de  la  Pacification  de  Gand. 

—  La  Société  libre  d'émulation  de  Liège  envoie  le  pro- 
gramme des  questions  arrêtées  par  le  conseil  administratif 
pour  le  prochain  concours,  à  clôturer  le  1"  juin  1878. 

—  La  Société  littéraire  le  Parnasse,  à  Athènes,  transmet 
ses  premiers  travaux  et  demande  l'échange  avec  les  publi- 
cations de  l'Académie. 

—  Les  Sociétés  d'histoire  de  Gratz  et  d'Utrecht ,  la  So- 
ciété royale  des  antiquaires  du  Nord,  à  Copenhague,  la 
Société  d'art  et  d'antiquités,  à  Ulm,  la  Société  de  littéra- 
ture néerlandaise ,  à  Leide ,  envoient  leurs  derniers  tra- 
vaux. 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  seront  examinés 
par  des  commissaires  : 

1°  Antiquités  de  V époque  romaine  découvertes  à  Assche, 
notice  par  L.  Galesloot,  chef  de  section  aux  Archives  du 
royaume.  —  Commissaires  :  MM.  Wauters  et  Piot; 

2°  Notes  biographiques  concernant  Corneille  Duplicius 
Scepperusj  par  P.  Génard,  archiviste  de  la  ville  d'Anvers. 
—  Commissaires  :  MM.  Gachard,  le  baron  Kervyn  de  Let- 
tenhove  et  Wauters. 

—  M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove  fait  hommage  du 
tome  XXIP  des  Œuvres  de  Froissart,  in-8".  Ce  volume 
comprend  les  lettres  J-Q  de  la  Table  analytique  des  noms 
historiques  cités  dans  les  Chroniques. 

M.  Th.  Juste  fait  hommage  d'un  exemplaire  de  l'ouvrage 


(351  ) 

qu'il  vient  de  publier  sous  le  titre  de  :  Précis  de  Vhistoire 
contemporaine  (\%\^'\%1\),  i  vol.  in-i2. 

La  classe  vote  des  remercîmenls  aux  auteurs  de  ces 
dons. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Suite  à  ma  notice  sur  le  duc  Henri  III  de  Brabant  :  Les 
doctrines  des  hérétiques  du  XI 11^  siècle,  le  duc  Henri  IV, 
les  premières  années  de  Jean  P^j  par  M.  Alphonse  Wau- 
ters,  membre  de  TAcadémie. 


L 


Dans  le  travail  que  nous  avons  consacré  au  duc  de  Bra- 
bant Henri  III,  nous  avons  dit  quelques  mots  des  dogmes 
hétérodoxes  qui,  à  cette  époque,  avaient  fait  des  prosé- 
lytes dans  nos  contrées  et,  en  particulier,  à  Cambrai  et  à 
Anvers.  Ce  que  Ton  en  savait  se  réduisait  à  peu  de  chose; 
en  effet,  ce  n'est  que  comme  en  passant  que  les  auteurs 
du  temps,  entre  autres  Thomas  de  Cantimpré,  en  parlent. 
Il  y  a  quelques  mois,  nous  avons  eu  l'occasion  de  con- 
sulter, à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris,  un  document 
qui  permet  de  combler  une  lacune  dans  l'histoire  des  héré- 
sies en  Belgique.  C'est  un  fragment  perdu  dans  un  recueil 
de  sermons ,  recueil  formé  au  XIII''  siècle.  Il  est  intitulé  : 
<L  Voici  les  hérésies  qui  furent  condamnées  chez  quelques- 
»  uns  d'Anvers  [Hec  sunt  hereses  que  fuerant  dampnate 
contra  quosdam  de  Antwerpia.)  »  Ces  sectaires  ne  sont  pas 
des  disciples  de  Tanchelin;  ce  ne  sont  pas  non  plus  des 


(  552  ) 

admirateurs  de  la  Bruxelloise  Bloemardine;  ce  sont, 
comme  l'exposé  de  leurs  doctrines  le  prouve,  les  héréti- 
ques Anversois  dont  nous  avons  déjà  parlé  (1).  En  effet, 
d'après  notre  manuscrit,  que  l'on  peut  considérer  comme 
contemporain,  ils  disaient  : 

«  Les  indulgences  accordées  par  les  prélats  ne  profi- 
lent pas  aux  âmes. 

))  Il  n'y  aura  plus  d'enfer  après  le  jour  du  jugement. 

D  Personne  ne  peut  considérer  comme  une  aumône  ce 
qu'il  donne  de  son  superQu. 

»  Aucun  riche  ne  peut  être  sauvé  et  tout  riche  est 
avare. 

»  Aucun  pauvre  ne  peut  être  damné,  mais  tous  les 
pauvres  seront  sauvés. 

»  La  fornication  simple,  pour  une  personne  vivant  dans 
la  pauvreté,  ne  constitue  pas  un  péché. 

»  Personne  ne  peut  ni  être  excommunié,  ni  excommu- 
nier. 

»  Celui  qui  possède  deux  vêtements  de  la  même  espèce 
ne  peut  être  sauvé. 

»  Un  prêtre  ayant  commis  un  péché  mortel  ne  peut  ni 
confesser  ni  absoudre,  ni  lier  (c'est-à-dire  imposer  une  pé- 
nitence). 

»  Il  n'y  a  que  trois  péchés  mortels  :  l'envie,  l'avarice 
et  la  prodigalité  indiscrète,  et  le  fait  d'avoir  des  relations 
avec  sa  femme  quand  elle  est  enceinte. 

»  Il  est  licite  d'enlever  aux  riches  pour  donner  aux 
pauvres. 

»  Celui  qui  invite  un  riche  à  un  repas  commet  un  péché 
mortel,  de  même  que  celui  qui  reçoit  l'invitation. 

(1)  Bulletins  de  r Académie,  2e  série,  t.  XXXIX ,  n»  2. 


(  5o3  ) 

»  L'inobéissance  à  un  prélat  ne  constitue  pas  un  péché 
si  ce  prélat  n'en  sait  rien. 

D  Nul  ne  peut  enlever  à  un  prêtre  le  pouvoir  d'absoudre. 

»  Ce  que  Ton  appelle  le  péché  contre  nature  ne  constitue 
pas  un  péché. 

»  Le  mari  ne  peut  avoir  des  relations  charnelles  avec  sa 
femme,  si  ce  n'est  trois  fois  par  semaine. 

»  La  vérité  dans  l'Écriture  sainte  n'est  pas  toujours 
apparente  et  toute  vérité  n'est  pas  bonne  à  prêcher. 

»  ]l  vaut  mieux  recevoir  le  corps  du  Christ  une  fois  par 
an,  fût-on  en  état  de  péché  mortel,  que  de  ne  pas  le  rece- 
voir du  tout. 

»  Plus  on  est  élevé  en  dignité  dans  un  ordre  religieux, 
plus  on  doit  être  pauvre. 

»  C'est  licitement  et  sans  pécher  qu'une  femme  peut 
prêter  son  corps,  si  elle  est  indigente,  pauvre  (1).  » 

Il  ne  saurait  entrer  dans  nos  intentions  d'ouvrir  ici  une 
discussion  théologique  et  morale,  de  défendre  ou  de  com- 
battre ces  doctrines.  Qu'il  nous  soit  permis  seulement  d'en 
signaler  les  caractères  principaux.  Il  s'y  révèle  d'abord 
une  hostilité  évidente  contre  la  richesse.  On  est  exclu  du 
royaume  des  cieux  par  cela  seul  qu'on  est  riche,  on  y  entre 
de  droit  quand  on  est  pauvre.  A  l'indigent  tout  est  permis, 
même  le  vol,  même  la  prostitution ,  même  la  fornication. 
Inviter  à  dîner  son  prochain,  lui  donner  de  son  superflu  ne 
constituent  pas,  pour  le  riche,  des  œuvres  méritoires.  Sous 
ce  rapport,  les  sectaires  sont  implacables.  Rien  ne  vaut 
que  la  pauvreté,  et  plus  on  s'élève  en  dignité  dans  les 
ordres,  plus  on  doit  afficher  le  renoncement. 

Sur  d'autres  points,  on  prétend  à  la  fois  réduire  le 

(1)  Voir  Annexe  I. 

2"*  SÉRIE,  TOME  XL.  23 


(  354  ) 
nombre  des  genres  de  péchés  et  restreindre  le  pouvoir  des 
chefs  de  l'Église.  On  enlève  aux  éveques  le  droit  d'accor- 
der des  indulgences,  celui  de  priver  le  prêtre  du  droit  de 
confesser;  on  condamne  en  masse  les  excommunications; 
on  permet  aux  ecclésiastiques  de  désobéir  à  leur  évéque,  si 
le  fait  de  leur  désobéissance  peut  lui  être  caché ,  et  on  les 
autorise  à  absoudre,  comme  lui,  toute  espèce  de  péché. 
Pour  ce  qui  est  de  ce  dernier,  on  affiche  des  opinions  dont 
l'étrangeté  n'a  pas  besoin  d'être  démontrée  et  dont  il  est 
inutile  de  reparler. 

On  sait  comment  l'Église  se  défendit  :  elle  fut  sans  pitié 
pour  ses  ennemis,  sans  parvenir  à  les  empêcher  de  re- 
naître. Ce  qui  disparut  surtout,  ce  fut  la  connaissance 
exacte  de  leurs  véritables  principes,  l'exposé  complet  et 
méthodique  de  leurs  doctrines.  ïl  ne  faut  pas  se  le  dissi- 
muler :  les  données  que  l'on  possède  sur  les  différentes 
sectes  hétérodoxes  du  moyen  âge  ne  brillent  pas  toujours 
par  leur  fidélité  et,  si  on  peut  les  accepter,  ce  n'est,  pour 
nous  servir  d'une  expression  consacrée,  que  sous  bénéfice 
d'inventaire. 

A  ce  propos,  on  peut  faire  la  remarque  que  nous 
sommes  loin  de  posséder  le  texte  de  toutes  les  œuvres  théo- 
logiques et  dogmatiques  du  XUV  siècle.  Plus  d'un  travail 
datant  de  cette  époque  est  resté  à  l'état  de  manuscrit, 
perdu  dans  d'immenses  bibliothèques  d'où  l'indifférence 
moderne  ne  va  plus  le  retirer;  plus  d'un  nous  fournirait  cer- 
tainement des  indications  exactes  sur  les  idées,  vraies  ou 
fausses,  qui  passionnaient  les  esprits  dans  cette  Belgique 
si  florissante  du  XITP  siècle. 

Il  est  bon  de  ne  pas  l'oublier,  de  ne  pas  le  méconnaître , 
nos  ancêtres  ont  pris  une  large  part  à  ces  luttes,  aujour- 
d'hui oubliées,  où  le  clergé  séculier,  représentée  par  l'uni- 


/        "»  V.»  V        V 

(  ooo  ) 
vcrsilé  (le  Paris,  et  les  ordres  mendiants  et,  en  particulier, 
les  frères  mineurs  et  les  dominicains,  se  disputaient  la 
direction  spirituelle.  L'historien,  appelé  à  apprécier  les 
actes  des  princes  de  cette  époque,  doit  tenir  compte  de 
cette  circonstance,  surtout  lorsqu'il  compare  l'influence 
considérable,  on  peut  dire  toute-puissante,  dont  les  deux 
ordres  jouissaient  à  la  cour  du  duc  Henri  III ,  à  l'afTaiblis- 
sement  de  cette  influence  du  temps  du  petit-fils  de  ce 
prince.  En  elTet,  dès  le  commencement  de  son  règne,  au 
mois  de  janvier  1295-1296,  Jean  ÏI,  par  un  privilège  for- 
mel et  spécial,  déclara  qu'il  ne  pourrait  plus  s'établir  de 
couvent  à  Bruxelles  sans  le  triple  consentement  de  lui  ou 
de  ses  successeurs,  des  échevins  et  du  chapitre  de  Sainte- 
Gudule  (1).  C'était  évidemment  un  triomphe  pour  le  clergé 
séculier,  une  garantie  contre  les  empiétements  des  ordres 
religieux. 

A  l'un  et  à  l'autre  des  deux  camps  la  Belgique  a  fourni 
des  hommes  remarquables.  Si  les  frères  mineurs  ne  peu- 
vent revendiquer  que  Guibert  de  Tournai,  mort  en  1270; 
les  Dominicains,  plus  voués  au  culte  des  lettres,  citent 
avec  orgueil,  non-seulement  Thomas  de  Cantimpré,  mais 
encore  Guillaume  Rubruquis  ou  de  Rubruk  ou  Ruysbroeck, 
mort  en  1260,  qui  nous  a  laissé  une  bonne  relation  d'un 
voyage  entrepris  en  Tartarie  par  ordre  du  roi  Louis  IX; 
Gérard  de  Liège,  surnommé  le  Devin,  mort  vers  1270,  de 
qui  la  Bibliothèque  nationale  possède  plusieurs  œuvres  : 
des  Sermons  (MS.  n°  16,485)  et  la  Doctrine  du  Cœur 
(MS.  n"  16,496);  Henri  Kosbein  ou  de  Brabant,  l'un  des 
traducteurs  d'Aristote;  Guillaume  de  Moerbeke,  dit  aussi 
Guillaume  le  Flamand,  créé  archevêque  de  Corinthe  en 


(1)  Cet  acte  a  élé  publié  par  Willems ,  Brahantschc  Yccslen,  1. 1,  p.  687. 


(  3o6  ) 
1277,  et  qui  traduisit  divers  auteurs  grecs  :  Hippocrate, 
Galien,  Proclus,  etc. 

Les  adversaires  des  frères  mendiants  comptaient  parmi 
eux  des  hommes  non  moins  laborieux.  Plaçons  au  pre- 
mier rang  le  célèbre  Henri  de  Gand,  le  docteur  solennel, 
dont  la  généalogie,  difficile  à  rétablir  par  suite  du  long 
oubli  dans  lequel  sa  mémoire  avait  été  laissée,  a  été  altérée 
au  XVII'  siècle  par  les  panégyristes  de  Tordre  des  Ser- 
vîtes, et,  au  X1X%  par  la  publication  d'un  prétendu  bref 
d'Innocent  IV,  où  la  maladresse  des  falsificateurs  de  gé- 
néalogies, cette  lèpre  de  l'histoire  des  familles,  se  manifeste 
par  les  erreurs  les  plus  évidentes  (1).  Henri  de  Gand,  après 
avoir  étudié  avec  Albert  le  Grand ,  puis  professé  avec  éclat 
à  Paris  vers  les  années  1278  et  1282,  devint  archidiacre  de 
Tournai;  ennemi  de  toute  exagération,  il  sut  se  concilier 
les  esprits  par  une  modération  qui  semble  empruntée  à 
l'un  des  traits  distinctifs  du  caractère  national,  g  Esprit 
»  d'une  rare  pénétration,  dit  Viguier  (2),  attaché  à  l'école 


(1)  CeUe  bulle,  datée  du  3  des  ides  de  mars,  au  IV  du  pontificat  d'Inno- 
cent, ou  13  mars  1247,  qualifie  Henri  de  Gand  de  «  Henri  Goethals,  né  à 
»  Gand  dans  le  diocèse  de  Tournai ,  prêtre ,  maître  es  arts  à  l'Université 
»  de  Paris,  fils  du  chevalier  (é-guîV/s!)  Gerelme  (ou  Jérôme)  Goethals, 
»>  comarque  (!  c'est-à-dire  seigneur)  de  la  terre  de  Mude  et  de  Nyeulandt 
»  près  de  Gand,  et  de  dame  Marguerite  de  Masmines,  arrière-petit-fils  de 
V  la  nièce  du  vénérable  Balderic,  évéque  de  Tournai.  »  Le  souverain 
pontife  ajoute  qu'il  a  nommé  Henri  protonolaire  à  cause  de  son  éminente 
doctrine,  qui  lui  a  valu,  lorsqu'il  a  été  promu  docteur  en  théologie,  le 
litre  de  docteur  solennel,  et  cela  non-seulement  pour  Paris,  mais  poiu* 
tous  les  diocèses  de  la  Gaule  et  aussi  celui  de  Tournai  (Voyez  Huel, 
Recherches  sur  Henri  de  Gand,  p.  9).  Ce  dernier  trait  complète  le  tableau 
et  permet  de  classer  avec  certitude  le  bref  en  question  parmi  les  nom- 
breux faux  dont  est  agrémentée  T histoire  des  fabuleux  Bonicolli. 

(2)  Manuel  de  l'histoire  de  la  philosophie  (publié  sous  le  nom  de 
Cousin),  t.  II,  p.  289  (Bruxelles,  édit.  de  1857). 


(  357  ) 
D  réaliste,  il  associa  aux  formes  aristotéliques  les  idées 
»  de  Platon,  auxquelles  il  ailribua  une  existence  réelle, 
D  indépendante  de  rintclligence  divine.  » 

A  la  même  école  que  Henri  appartenaient  :  Odon  ou 
Eudes,  de  Douai,  l'un  des  amis  de  Guillaume  de  Saint- 
Amour  et  des  fondateurs  de  la  Sorbonne;  Siger  de  Cour- 
trai,  doyen  du  chapitre  de  l'église  Notre-Dame,  dans  la 
ville  de  ce  nom,  de  qui  la  Bibliothèque  nationale  de  France 
possède  encore  les  Fallacia  et  la  Summa  modorum  signi- 
ficandi  (MS.  n°  J 6,222);  Siger  de  Brabant,  que  le  Dante 
a  chanté  et  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  l'homonyme 
dont  nous  venons  de  parler  (i),  Siger  de  Brabant,  l'auteur 
des  bnpossibilia  (MS.  n**  16,297),  des  Questiones  de  anima 
intellecliva  (MS.  n°  16,153),  etc.,  orateur  fougueux,  que 
ses  adversaires  s'empressèrent  de  classer  parmi  les  infi- 
dèles convertis  (2);  son  ami  Berner  de  Nivelles,  comme 
lui  chanoine  du  chapitre  de  Saint-Martin,  de  Liège,  comme 
lui,  à  son  heure,  signalé  à  l'Inquisition;  Godefroid  de  Fon- 
taines, le  docteur  vénérable,  chanoine  de  Liège,  de  Colo- 
gne, de  Paris;  Michel  de  Brabant,  plus  obscur  (3),  etc. 

Si  l'on  veut  se  faire  une  idée  des  forces  vives  qui  se 
groupaient  sous  la  bannière  de  l'Université  de  Paris  et  qui, 
de  ce  centre  d'activité  philosophique,  agissaient  puissam- 
ment sur  les  pays  voisins  et  principalement  sur  la  Bel- 
gique, il  suffît  de  consulter  le  travail  que  l'un  des  hommes 
les  plus  savants  et  les  plus  laborieux  de  notre  temps. 


(1)  Comme  Tonl  fait  plusieurs  auteurs  et,  dans  le  nombre,  M.  Leclerc 
{Hisloire  littéraire  de  France,  t.  XXi). 

(2)  Voyez  V Histoire  littéraire  de  France,  t.  XXI,  pp.  96  et  suiv. 

(3)  Auteur  d'une  Summa  modorum  signi ficandi  que  Ton  trouve  dans 
le  MS.  n°  16,222  de  la  Bibliothèque  nationale. 


.(  558  } 
M.  Léopold  Delisle,  que  la  classe  des  lettres  vient  de  s'as- 
socier, a  consacré  au  dépôt  actuellement  confié  à  ses 
soins  (1).  En  traitant  spécialement  des  trésors  que  la 
grande  Bibliothèque  de  Paris  a  recueillis  dans  l'héritage 
de  la  Sorbonne,  M.  Delisle  énumère  les  généreux  bien- 
faiteurs qui  ont  légué  des  livres  à  cette  dernière.  Là  se 
rencontrent,  pour  le  XIIP  siècle  seulement,  bien  des  noms 
mêlés  à  notre  histoire  politique  et  littéraire  : 

Maître  Berner  de  Nivelles,  qui  ne  donna  pas  moins  de 
2d  volumes  en  1277,  et  de  qiri  proviennent  les  manuscrits 
delà  Bibliothèque  nationale  portant  les  numéros  15,347, 
15,348,  15,400,  15,411,  15,531,  15,540,  15,604,  15,611, 
15,665,  15,813,  15,905,  16,417. 

Maître  Gualter  ou  Walter  de  Douai,  doyen  de  Tournai , 
donateur  du  MS.  nM5,430. 

Maître  Henri  de  Ecclesia  ou  de  l'Église,  doyen  de  Notre- 
Dame,  de  Courtrai,  professeur  en  théologie,  donateur  du 
MS.  n^  16,612,  où  il  est  qualifié  de  «  Fleur  des  Flamands  » 
(Flos  fuit.  Flamingorum). 

Sire  Joseph  de  Bruges,  chanoine  de  Tournai,  donateur 
duMS.  nM  5,629. 

Maître  Mathieu  Castelet,  d'Arras,  qui  légua  à  la  Sor- 
bonne, en  l'an  1306,  les  manuscrits  15,228,  16,270, 
16,300  et  16,383. 

Maître  Michel  Herlekin,  donateur  du  MS.  n«  15,707. 

Maître  Michel  de  Warenghien,  évéque  de  Tournai, 
mort  en  1291,  après  avoir  légué  20  livres  pour  la  fonda- 
tion de  deux  bourses  destinées  à  de  jeunes  étudiants  de 


(1)  Nous  voulons  |)arler  de  la  publication  inlilulée  :  Le  cabinet  des  ma- 
nuscrits de  la  Bibliothèque  impériale.  Le  passage  auquel  nous  emprun- 
tons les  délails  qui  suivent  est  au  lome  II,  pp.  142-178. 


(  559  ) 

théologie,  originaires  de  la  partie  wallonne  (ou  française) 
de  son  diocèse. 

Maître  Nicaise  de  la  Planque  (ou  Vandcr  Plancken),  de 
Menin,  clerc,  donateur  des  MSS.  n°^  16,088  et  IG,672. 

Maître  Nicolas,  archidiacre  de  Tournai,  donateur  de 
quatre  volumes,  dont  il  ne  reste  actuellement  que  le 
MS.  n°  15,704,  et  qui  fonda,  en  octobre  i266,  des 
bourses  destinées  à  des  élèves  flamands  du  diocèse  de 
Tournai. 

Maître  Pierre  de  Saint-Omer,  maître  en  théologie, 
nommé  chancelier  de  Paris  en  1296  et  archidiacre  de 
Brie  en  1502,  donateur  des  MSS.  n«^  15,764,  15,774  et 
15,792. 

Maître  Philippe,  chanoine  d'Arras,  donateur  du  MS. 
n«  15,500. 

Maître  Robert  de  Douai,  mort  en  1262,  l'un  des  fonda- 
teurs de  la  Sorbonne,  à  laquelle  il  donna  1,500  livres  et 
légua  tous  ses  livres  de  théologie,  bibles,  gloses  et  œuvres 
des  pères  (notamment  le  n°  15,220). 

Maître  Siger  de  Courtrai,  doyen  de  l'église  de  Courtrai, 
donateur  d'une  collection  des  œuvres  de  Saint-Thomas 
d'Aquin  en  huit  volumes,  dont  il  reste  les  manuscrits 
n«' 15,552,  15,787  et  15,790. 

Maître  Simon  de  Furnes,  donateur  des  MSS.  n*"  15,761 
et  15,772. 

Maître  Simon  Widelin,  chantre  d'Arras,  qui  donna,  en 
Tan  1285,  le  n°  15,750. 

Comme  on  le  voit  par  celte  liste,  la  Belgique  comptait 
beaucoup  d'amis  des  lettres  et  des  sciences  à  la  même 
époque  où  tant  de  trouvères  célébraient  dans  leurs  chants 
les  hauts  faits  des  anciens  héros  et  l'amour  des  dames  et 
des  tournois  ou   ridiculisaient  dans  leurs  chansons  les 


(  360  ) 

vices  et  les  travers  de  leurs  contemporains,  à  Tépoque  où 
écrivait  Van  Maerlant,  où  naissaient  Hocsem,  Van  Heelu , 
Van  Velthem,  Boendale  ;  à  l'époque  où  le  premier  en 
dignité  des  princes  belges,  la  fleur  de  la  chevalerie,  le 
vainqueur  de  Woeringen,  se  plaisait  à  imiter  l'exemple  de 
son  père  et,  de  même  que  celui-ci,  prenait  place  parmi 
les  poètes.  Nous  traversions  alors  une  de  ces  belles  jour- 
nées que  les  nations  rencontrent  dans  leur  existence  et 
pendant  lesquelles  éclosent,  à  l'ombre  de  la  paix,  comme 
sans  peine  et  sans  se  compter,  ces  fleurs  de  l'intelligence 
que  le  destin  refuse  à  des  temps  plus  agités  et  plus 
sombres. 

Tï. 

Les  écrivains  belges,  et  Ton  peut  dire  que  c'est  chez  eux 
un  système  presque  général,  rattachent  au  règne  du  duc 
Jean  I"  les  années  qui  suivirent  immédiatement  la  mort 
de  son  père,  époque  de  la  régence  de  sa  mère  Aleyde.  Cette 
opinion  ne  constitue  pas,  à  proprement  parler,  une  erreur, 
car  la  duchesse  resta  la  tutrice  de  ses  enfants  et,  sauf 
certaines  restrictions,  gouverna  le  pays;  toutefois  on  se 
tromperait  si  l'on  croyait  que  Henri,  l'aîné  des  fils  de 
Henri  III,  ne  porta  pas  le  titre  de  duc  :  il  est  formellement 
décoré  de  cette  qualification  dans  un  acte  de  son  frère 
Jean  I",  daté  du  28  avril  1272;  celui-ci  y  approuve  le  con- 
sentement que  sa  mère  et  son  frère  Henri,  yac/Zs  duc  de 
Brabanty  avaient  donné  à  la  cession  de  l'abbaye  de  la 
Ramée  près  de  Jodoigne,  d'un  fief  situé  à  Wamont  (1). 


(1)  Voyez  AiNNEXES ,  n"  II. 


(  361  ) 

L'histoire  de  la  tutelle  de  la  régente  Aleyde  est  encore 
entourée  de  quelque  obscurité.  Toutefois,  les  détails  que 
Ton  a  fait  connaître  et  qui  sont  résumés  et  groupés  dans 
notre  Mémoire  sur  le  duc  Jean  /"■,  couronné  par  l'Aca- 
démie en  1859,  ont  éclairci  plus  d'un  point  qui  était  resté 
dans  les  ténèbres.  Ainsi  l'on  sait  actuellement  que  la  ma- 
nière dont  les  chroniqueurs  brabançons  rapportent  les  ten- 
tatives des  princes  de  la  maison  ducale  pour  enlever  à  la 
duchesse  la  régence,  n'est  pas  d'une  exactitude  absolue. 
Henri  deGueklre,  évêque  de  Liège,  et  son  frère,  le  comte 
Othon ,  prirent  une  part  assez  active  à  l'administration  du 
duché, de  1261  à  1265  (1).L'évêque,qui  jouait  alors  un  rôle 
très-important  en  Belgique  (2),  venait  fréquemment  en 
Brabant.  C'est  ainsi  qu'il  se  trouva  à  Ylierbeek  près  de 
Louvain  le  22  octobre  1261,  lorsqu'il  y  confirma  à  l'abbaye 
du  Parc-les-Dames  le  don  d'une  petite  dîme  et,  à  Louvain 
même,  le  28  du  même  mois,  quand  il  autorisa  la  commu- 
nauté de  ce  monastère  à  faire  célébrer  la  messe  dans  ses 
granges  ou  fermes,  chaque  fois  que  l'abbesse,  des  chape- 
lains, des  frères  ou  des  sœurs  du  Parc-les-Dames  s'y  ren- 
draient (o).  Il  y  revint  encore  le  jour  de  la  Sainte-Agnès 
1265,  21  janvier  1266,  et  y  ratifia  la  cession  à  l'abbaye  de 
Sainte-Gertrude,  de  Louvain,  du  patronat  des  églises  de 
Weerde  et  de  Langdorp,  près  d'Aerschot  (4).  On  pourrait 
encore  multiplier  ces  exemples. 

L'union  étroite  que  les  communes  du  Brabant  contrac- 
tèrent dans  différentes  assemblées  qui  eurent  lieu  à  Cor- 


(1)  Voir  mon  Mémoire  ,  p.  31, 

(2)  Ibidem ,  p.  32. 

(3)  Voyez  Annexes  ,  n»  III. 

(4)  Ibidem,  n«  IV. 


(  562  ) 
tenberg,  à  mi-chemin  entre  Bruxelles  et  Louvain,  en  1261 
et  1262;  Tenipressement  avec  lequel  les  Louvanistes  de- 
mandèrent au  pape  Urbain  lY  des  confirmations  solen- 
nelles de  leurs  privilèges,  le  premier  et  pour  ainsi  dire  le 
seul  exemple  d'un  pareil  recours  qui  se  soit  produit  en  Bra- 
bant;  l'acte  énergique  par  lequel  les  bourgeois  de  Léau 
comminèrent,  en  1265,  des  peines  sévères  contre  ceux 
d'entre  eux  qui  refuseraient  de  marcher  contre  les  ennemis 
de  la  commune;  le  soulèvement  des  bourgeois  de  Nivelles 
contre  l'autorité  de  l'abbesse  de  cette  ville  et  la  résistance 
qu'ils  opposèrent,  pendant  plus  de  deux  années,  à  la  pres- 
sion dont  usaient  à  la  fois  sur  eux  cette  abbesse  et  son 
chapitre  et  Tévêque  de  Liège;  tous  ces  épisodes  témoi- 
gnent d'une  sorte  de  réaction  contre  la  grande  autorité 
exercée  par  Henri  III.  Sous  la  faible  direction  d'une  étran- 
gère, en  face  de  vassaux  turbulents  et  divisés,  les  bourgeois 
essayèrent,  dans  la  mesure  du  possible,  de  s'entendre  pour 
le  maintien  de  leurs  droits  et  de  les  défendre  contre  toute 
atteinte. 

L'intervention  de  Henri  de  Gueldre  dans  les  troubles 
de  Nivelles  ne  fut  peut-être  pas  étrangère  à  la  rupture  qui 
ne  tarda  pas  à  éclater  entre  ce  prélat  et  le  Brabant.  A  la 
même  époque  une  autre  cause  de  désunion  aigrissait  les 
rapports  existants  entre  les  Liégeois  et  les  Brabançons. 
L'un  des  principaux  barons  parmi  ceux-ci,  sire  Arnoul  de 
Wesemale,  était  avoué  du  chapitre  de  Saint-Barthélémy,  de 
Liège,  à  Lincent.  De  concert  avec  son  frère,  sire  Gérard, 
seigneur  de  Wesemael,  il  ne  cherchait  qu'à  empiéter  sur 
les  droits  de  l'église.  Tantôt  ils  enlevaient  de  vive  force 
les  produits  de  ce  domaine,  tantôt,  par  l'intermédiaire  de 
Quarteloltus,  leur  officier,  ils  y  défendaient  au  maire  et  aux 
échevins  de  rendre  la  justice  et  aux  habitants  de  cultiver 


(  -"îeô  ) 

OU  de  moissouner  les  champs,  de  sorte  que  les  actes  de 
Iransmission  de  biens  ne  se  passaient  plus  et  que  les  ré- 
coltes pourrissaient  sur  place.  Ému  par  les  plaintes  du  cha- 
pitre de  Saint-Barlhélemy,  qui  perdait  de  ce  chef  plus  de 
580  muids  d'épeautre,  le  chapitre  de  Saint-Lambert  en- 
joignit au  doyen  du  concile  de  Jodoigne,  à  l'investi  ou 
curé  de  Tirlemont  et  à  Tinvesli  de  Houtain-l'Évéque  d'ou- 
vrir à  ce  sujet  une  enquête,  de  mettre  à  néant  les  ordres 
donnés  par  les  chevaliers  de  Wesemale,  et  de  faire  con- 
naître à  ceux-ci  la  mission  dont  ils  étaient  chargés,  soit  à 
Lincent,  soit  à  Louvain,  où  ces  chevaliers  avaient  alors  leur 
domicile  (18  mars  1265-1266).  Le  10  avril  suivant,  les 
curés  de  Houtain  et  de  Tirlemont  exécutèrent  en  effet  les 
ordres  dont  ils  étaient  porteurs;  ils  constatèrent  que  les 
exigences  des  Wesemale  s'étaient  manifestées  à  Lincent 
depuis  plus  de  sept  années;  mais,  n'osant  se  rendre  à  Lou- 
vain, à  cause  de  l'influence  dont  ces  seigneurs  y  jouissaient, 
ils  remirent  un  double  de  leur  enquête  au  serviteur  de 
Gérard  de  Wesemale  et  à  Quartelottus  précité.  Peu  de  temps 
après,  le  pape  Clément  IV  intervint;  il  ordonna  à  l'écolâtre 
de  l'église  Notre-Dame,  de  Maestricht,  de  sévir  contre 
les  frères  de  Wesemale  (bref,  daté  du  16  juin  1267)  (1). 
Peu  de  temps  après  fut  signé,  le  5  août  1267,  un  accord 
par  lequel  sire  Guillaume  de  Rotselaer,  chanoine  de  Lou- 
vain, Amelez  ou  Ameil,  chanoine  de  Saint-Denis,  et  le  che- 
valier Robert  de  Limont  furent  chargés  de  terminer  ce 
débat;  100  marcs  furent  déposés  par  les  parties  entre  les 
mains  du  doyen  de  Liège  et  Gérard  s'engagea  à  faire  lever 
les  défenses  qu'il  avait  portées.  Après  quatre  années  d'un 
régime  tout  à  fait  arbitraire,  régime  qui  avait  privé  le  cha- 

(1)  Voyez  Annexes,  n^V. 


(  36i  ) 
pitre  de  Saint-Barihélemy  de  700  muids  de  blé  et  de  100 
marcs  de  Liège,  une  sentence  arbitrale  fut  prononcée  en 
faveur  de  ce  corps  :  les  usurpations  de  Gérard  furent  con- 
damnées, mais  on  laissa  aux  parties  le  soin  de  s'accorder 
au  sujet  des  torts  que  Tune  d'elles  pourrait  avoir  subis 
(21  janvier  1267-1268). 

Des  détails  dont  il  vient  d'être  donné  connaissance,  il 
résulte  que  les  Wesemael  avaient  établi  leur  domicile  à 
Louvain  en  mars  1266  et  qu'ilsy  jouissaient  d'une  grande 
influence.  C'est  vers  ce  temps  aussi  que  la  guerre  éclate 
entre  la  duchesse  Aleyde  et  l'évêque  de  Liège.  Tandis  que 
celui-ci  s'allie  aux  bourgeois  de  Cologne,  au  comte  de  Ju- 
liers,  aux  évéques  de  Minden  et  d'Osnabruk,  celle-là  se 
confédéré  avec  l'archevêque  de  Cologne  et  le  comte  de 
Clèves.  Le  traité  d'alliance  d'Aleyde  et  de  l'archevêque  de 
Cologne  a  été  publié;  celui  par  lequel  la  duchesse  promet 
son  appui  au  comte  est  daté  du  même  jour  et  renferme  des 
stipulations  analogues.  L'un  et  l'autre  sont  confirmés,  au 
nom  de  la  duchesse,  par  son  beau-frère,  le  landgrave  de 
Thuringe,  les  seigneurs  d'Enghien,  de  Malines,  de  Rotse- 
laer,  de  Wesemael,  de  Walhain  et  de  Bautersem,  et  par  les 
chevaliers  Henri  Berthout ,  frère  du  seigneur  de  Malines ,  et 
Henri  d'Assche  (J  ).  Les  espérances  d'Aleyde  furent  détruites 
par  la  funeste  bataille  de  Marienholtz,  où  l'archevêque  En- 
gelbert  et  le  comte  de  Clèves  furent  faits  prisonniers  par 
les  bourgeois  de  Cologne  et  leurs  alliés ,  le  1 8  octobre  1 267. 
Elle-même  avait  été  attaquée  par  l'évêque  de  Liège  et,  bien 
que  celui-ci  n'eût  pas  complètement  réussi  dans  son  entre- 
prise sur  Malines,  il  avait  cependant  remporté  sur  les  Bra- 
bançons des  avantages  que  l'on  ne  peut  dissimuler. 


(1)  Voyez  Annexes,  n"  VI. 


(  365  ) 

Il  faut  placer  dans  les  premiers  mois  de  Tannée  1267  la 
rébellion  du  sire  de  Wesemael  contre  la  régente  Aleyde, 
qui  avait  conçu  le  projet  de  remplacer  par  son  deuxième 
fils,  Jean,  son  fils  aîné,  Henri,  dont  Tintelligence  et  la  force 
corporelle  ne  répondaient  pas  aux  nécessités  de  la  dignité 
ducale.  Les  particularités  nouvelles  manquent  sur  ce  qui 
se  passa  alors,  sur  la  courte  lutte  qui  se  livra  entre  les 
Louvanistes  et  les  vassaux  de  Walter  Berthout,sur  les 
conditions  de  la  réconciliation  des  premiers  avec  Aleyde. 
Un  seul  fait  dont  il  a  rarement  été  fait  mention  s'établit 
avec  certitude  :  c'est  que  le  seigneur  de  Wesemael,  Arnoul, 
soit  zèle  religieux,  soit  dépit  d'avoir  échoué  dans  ses  des- 
seins, quitta  le  monde  et  entra,  de  1267  à  1270,  dans 
Tordre  du  Temple  (1). 


(1)  Godefroid,  frère  d' Arnoul,  était  déjà  seigneur  de  Wesemael  et  ma- 
réchal de  Brabant  en  1270.  En  cette  année,  le  1"  août  ijour  de  S^-Pierre 
es  liens),  il  donna  à  l'abbaye  du  Parc-les-Dames,  pour  la  posséder  à  per- 
pétuité moyennant  un  cens  annuel  de  6  muids  de  seigle  et  de  2  deniers  de 
Louvain ,  son  moulin  de  Beverslus,  à  Wesemael.  Le  6  décembre  suivant , 
pendant  la  nuit  de  la  Saint-Nicolas,  il  approuva  toutes  les  acquisitions 
faites  par  ce  monastère  du  temps  du  chevalier  Arnoul  de  W^esemale,  qui 
était  alors  seigneur  de  Wesemael  (qui  tune  erat  dominus  de  Wesemalé)  ; 
ces  cessions  furent  certifiées  par  les  sept  échevins  de  ce  dernier  village, 
qui  vinrent  à  cet  effet  porter  témoignage  devant  les  échevins  de  Louvain, 
et  les  notables  {boni  homines)  de  Wesemael  reconnurent  en  même  temps 
n'avoir  aucun  droit  sur  les  biens  cédés.  Mais  dès  la  Toussaint  de  1275, 
Godefroid  était  mort  et  ce  furent  alors  sa  veuve ,  Gertrude,  et  son  fils  Ar- 
noul ([ui  reconnurent  devoir  à  Tabbaye  deTongerloo  150  livres  de  Louvain, 
jadis  prêtées  à  frère  Arnoul,  chevalier  du  Temple,  ex-seigneur  de  Wese- 
mael {Arnoldus,  miles  milicie  Templi,  quoadam  dominus  de  Wesemalé). 
Gertrude  et  Arnoul  promirent  de  rembourser  par  annuités  de  20  livres 
cette  somme,  qui  était  hypothéquée  sur  la  dîme  d'Oelen.  Arnoul  le  jeune 
n'ayant  pas  encore  de  sceau,  ce  fut  sa  mère  qui  munit  cet  acte  du  sien. 

Voyez,  au  surplus,  ce  que  nous  avons  dit  des  troubles  de  Louvain  et  des 
Wesemael  dans  mon  Mémoire  déjà  cité,  pp.  44  et  suiv. 


566  ) 

UT. 

Les  premières  années  du  règne  du  duc  Jean  I"  passent 
presque  inaperçues  dans  l'histoire  et  il  ne  s'y  trouve  que 
deux  événements  sur  lesquels  on  possède  réellement  quel- 
ques détails  :  l'un  appartient  aux  annales  de  la  race  ducale 
même:  c'est  l'épisode  du  mariage  de  Marie  de  Brabant,sœur 
du  duc,  avec  le  roi  de  France  Philippe  lil  et  la  condam- 
nation de  l'ennemi  de  Marie,  Pierre  de  La  Brosse;  l'autre 
est  plus  intimement  lié  avec  les  fastes  du  duché  :  c'est  la 
lutte  qui  a  pris  le  nom  de  la  Guerre  de  la  Vache. 

Sans  entrer  dans  l'examen  minutieux  de  l'un  ou  de 
l'autre  de  ces  événements,  qui  ont  occupé  maint  historien, 
nous  nous  bornerons  à  éclaircir  quelques  faits  au  sujet  des- 
quels nous  avons  recueilli  des  détails  inédits.  Tel  est, 
d'abord,  le  premier  mariage  du  duc. 

L'union  négociée,  dès  l'an  1257,  entre  Marguerite,  l'une 
des  filles  du  roi  Louis  IX,  et  Henri,  l'héritier  du  Brabant, 
n'avait  pu  se  conclure  par  suite  de  la  renonciation  de  ce 
dernier  prince  au  trône  ducal  et  de  son  entrée  dans  un 
monastère;  mais,  dès  l'avènement  de  Jean  F",  ce  projet  fut 
repris  à  son  profit,  et  son  mariage  avec  Marguerite  célébré 
au  mois  de  janvier  1270-1271. 

Quoique  cette  alliance  matrimoniale  n'ait  duré  que  peu 
de  temps ,  la  jeune  épouse  étant  morte  en  couches  au  mois 
de  septembre  de  l'année  suivante,  il  ne  sera  pas  sans 
intérêt  d'analyser  et  de  reproduire  ici  plusieurs  actes  im- 
portants, tous  restés  inédits  jusqu'à  présent  et  par  les- 
quels les  liens  d'amitié,  qui  existaient  déjà  entre  la 
France  et  le  Brabant,  furent  encore  resserrés.  Nous  les 


(  -ïC?  ) 
avons  copiés  à  Paris,  aux  Archives  nationales,  où  les  ori- 
ginaux existent  dans  un  état  parfait  de  conservation. 

Le  premier  est  du  mois  de  février  12G9-1270.  A  cette 
date  le  mariage  fut  décidé.  Jean  I",  se  trouvant  à  Paris, 
promit  alors  à  son  futur  beau-père,  à  ses  enfants  et  à  ses 
frères  une  affection  toute  particulière.  Il  s'engagea  à  les 
protéger  et  défendre  au  besoin ,  à  ne  pas  permettre  que  ses 
sujets  leur  causent  du  préjudice,  à  ne  jamais  s'allier  avec 
leurs  ennemis.  Il  ne  fit  de  réserve  que  pour  ce  qui  con- 
cernait la  fidélité  et  l'hommage  qu'il  devait  à  ceux  de  qui 
il  tenait  en  fief  son  patrimoine.  C'était  déclarer  qu'il  en- 
tendait ne  pas  méconnaître  ses  devoirs  de  vassal  et  de 
prince  de  l'empire  d'Allemagne  (i). 

Le  roi  Louis  avait  donné  en  dot  à  sa  fille  10,000  livres 
tournois,  somme  égale,  remarquons-le,  à  celle  que  le  duc 
Henri  III,  dans  le  codicille  que  nous  avons  fait  connaître, 
avait  légué  aux  mêmes  fins  à  sa  fille  Marie,  qui  devint  reine 
de  France.  La  moitié  seulement  de  cette  somme  avait  été 
remise  au  duc  Henri  HI,  l'autre  moitié  fut  payée  à  Jean  ['% 
qui  s'obligea  à  la  restituer,  dans  le  cas  où  sa  future  femme 
mourrait  sans  avoir  d'enfants.  II  n'y  avait  pas  lieu  à 
restitution ,  si  Marguerite  mourait  après  avoir  eu  un 
enfant,  celui-ci  fut-il  mort  avant  elle.  Le  duc  Jean,  de  son 
côté,  assigna  à  sa  fiancée,  pour  son  douaire,  un  revenu 
annuel  de  6,000  livres  de  Louvain,  dont  elle  devait  jouir 
dès  l'instant  de  son  mariage  et  pendant  toute  sa  vie,  con- 
damnée à  être  si  courte  (2).  Ce  douaire  devait  être  déter- 


(1)  Voyez  Annexes,  n»  VII. 

(2)  Charte  datée  du  mois  de  février  1^69-i'27 0 {Actum Parisius ,  anno 
Domini  millesimo  ducentesimo  sexagesimo  nono^  mense  fehruario). 
Trésor  des  chartes  à  Paris ,  carton  n»  323,  n"  3. 


(  368  ) 

miné  par  les  soins  de  Jean  de  Nesle,  comte  de  Ponthieu, 
de  Montreuil  et  d'Aumale,  mandataire  du  roi  de  France,  et 
parWalter  Berthout,  seigneur  de  xMaiines,  mandataire  du 
duc;  en  cas  de  doute,  Simon,  seigneur  de  Nesle,  était 
chargé  de  terminer  la  contestation.  Les  principaux  barons 
du  Brabant  :  la  dame  de  Gaesbeek  [domina  de  Gazebeke), 
sire  Henri  de  Louvain,  son  fils;  Walter  Berthout,  seigneur 
de  Malines;  Henri,  seigneur  de  Bautersem;  Henri  Berthout, 
et  Walter,  seigneur  d'Enghien,  s'engagèrent  à  faire  ob- 
server ces  conventions  et  promirent,  au  besoin,  de  venir 
se  constituer  prisonniers  à  Saint-Quentin  :  le  dernier  en 
se  faisan!  remplacer  par  un  chevalier,  les  autres  en  per- 
sonne, jusqu'à  ce  que  leur  prince  eût  satisfait  à  ces  obliga- 
tions (1).  Les  formalités  prescrites  ne  tardèrent  pas  à  être 
remplies.  Jean  de  Nesle  et  Walter  Berthout  vinrent  en 
Brabant  et  désignèrent  les  biens  dont  le  douaire  de  la  du- 
chesse se  composerait,  après  en  avoir  fait  expertiser  la 
valeur,  en  se  basant  sur  les  chiffres  suivants  : 

Le  muid  de  blé ,  mesure  de  Louvain,  valait  12  sous  de 
Louvain. 

Le  muid  d'avoine  5  sous. 

Le  chapon  6  deniers. 

La  coupe  d'un  bonnier  de  bois  20  sous. 

Le  produit  d'un  bonnier  d'étang  50  sous. 

La  duchesse  Marguerite  acquit  le  droit  d'exercer  ou  faire 
exercer  la  juridiction  dans  toute  l'étendue  de  ses  nouveaux 
.domaines ,  d'user  à  son  profil  des  bois  qui  lui  étaient  aban- 
donnés, de  recevoir  les  reliefs  des  fiefs  compris  dans  son 


(1)  Acte  daté  comme  le  précédent  :  Datum  Parisiis,  etc.  Ibidem.  — 
L'acte  émané  des  seigneurs  existe  également  à  Paris  ,  avec  la  souscrip- 
tion :  Actum  Parisius^  anno  Domini  millesimo  ducentesimo  sexagesimo 
110710,  mense  februario. 


(  569  ) 
douaire,  à  charge,  d'autre  part,  d'entretenir  les  châteaux 
et  habitations  qui  s'y  trouvaient.  D'après  le  contrat,  ex- 
trêmement détaillé ,  dont  nous  donnons  ici  la  teneur,  les 
biens  assignés  à  Marguerite  de  France  embrassaient  les 
villages  situés  dans  les  bailliages  de  Bruxelles  et  d'Over- 
Yssche  (l)  et  une  partie  de  celui  de  Louvain,  ou,  pour  nous 
faire  comprendre  plus  facilement,  dans  le  pays  s'élendant 
depuis  la  Flandre  jusqu'à  la  Dyle,  à  l'exception  toutefois 
des  franchises  des  villes  de  Bruxelles  et  de  Louvain  et  des 
terres  où  des  seigneurs  particuliers  avaient  la  justice.  Ainsi 
Corbeek-sur-Dyle,  Neer-Yssche,  Winxel ,  Velthem,  Thil- 
donck,  Hérent,  quoique  ressortissant  à  la  mairie  de  Lou- 
vain, y  étaient  englobés.  La  Hulpe,  qui  forma  depuis  une 
dépendance  du  bailliage  du  Brabant- Wallon ,  y  fut  aussi 
compris.  Les  produits  de  toute  espèce  que  le  douaire  reti- 
rait des  villages  précités  s'élevaient  à  5,500  livres.  Pour 
compléter  la  somme  promise  on  sépara  de  la  forêt  de  Soi- 
gnes 2,700  bonniers  de  bois,  dont  250  compris  dans  le 
parc  du  château  de  Tervueren  (2)  et  qui  furent  soigneuse- 
ment bornés,  et  2,450  contigus  aux  précédents  et  déli- 
mités, d'autre  part,  par  le  chemin  conduisant  de  Bruxelles 
à  Hoeylaert  (5). 

(1)  Le  bailliage  d'Over-Yssche  cessa  plus  tard  d'exister  et  fut  réuni  à 
d'autres  circonscriptions  administratives.  Le  ressort  de  la  recette  doma- 
niale de  Ter-Vueren,Over-Yssche  et  La-Hulpe,qui  fut  ensuite  annexée  à 
celle  de  Vilvorde,  en  représentait  sans  doute  retendue  primitive.  Dans  les 
derniers  siècles  Ter-Vueren  et  Over-Ysscbe  dépendaient  de  la  mairie  de 
Vilvorde,  subdivision  de  Tammanie  de  Bruxelles,  et  La  Hulpe  était  le 
chef-lieu  d'une  mairie  du  bailliage  du  Brabant  wallon. 

(2)  Pour  le  parc  qui  existait  à  cette  époque  consultez  VHisloire  des  en- 
virons de  Bruxelles ,  t.  III,  p.  384.  —  Voir  Annexes,  n"  VIII. 

(3)  Ce  chemin  est  celui  qui  passe  à  la  chapelle  de  Notre-Dame  de 
Willerieken  et  de  là  se  dirige  sur  Boitsfort. 

2""'  SÉRIE,  TOME  XL.  24 


(  370  )■ 

Les  Archives  nationales  de  France  possèdent  l'acte  par 
lequel  les  deux  seigneurs  ratifièrent  cette  assignation  la 
veille  du  jour  où  le  duc  en  scella  la  confirmation  ou  appro- 
bation (1);  on  y  trouve  également  l'assignation  même,  où 
l'on  énumère  longuement  les  biens  compris  dans  le 
douaire  (2).  Voici  quelques  détails  sur  les  localités  que 
l'on  y  mentionne  et  le  produit  que  l'on  en  retirait  : 

Ophemjuxta  Vuram.  C'est  le  hameau  d'Ophem  annexé 
actuellement  à  la  commune  de  Wesenbeek. 

Cortbeke  et  Nederische  (Corbeek-sur-Dyle  et  Neer- 
Yssche). 

Berghe  et  Hockensele  (  Bergh  et  Neer-Ockerzeel  ). 

Bullincshem  et  Berghe  (Bullesom,  hameau  sous  Bergh 
et  ce  dernier  village,  de  nouveau). 

Binneberghe ,  où  le  domaine  levait  9  muids  d'avoine. 
C'est  un  champ  qui  se  trouve  entre  Steen-Ockerzeel  etErps. 

Woelewe  Sancti  Bumoldi;  on  appelait  Woluwe-Saint- 
Rombaud  une  partie  de  Woluwe-Saint-Élienne. 

Bimelenghem;  Bymelghem ,  dans  ce  dernier  village, 
où  il  y  avait  un  grand  moulin  à  eau  qui  produisait  un  re- 
venu de  40  muids  de  seigle  (3). 

Bouts  fort  ou  Boitsfort,  dont  le  moulin  rapportait,  par 
an,  21  muids  de  seigle  (4). 


(1)  La  souscription  de  cet  acte  porte  :  «  Faite  et  donée  à  Le  Vure,  en 
»  l'an  del  incarnation  Nostre  Segnor  milCC.  sissantedis,  le  venredi  de- 
»  vant  la  Nativitet  Notre  Dame,  el  mois  de  sietembre.  »  Le  sceau  de  Jean 
de  Nesie  y  est  encore  appendu.  L.  c,  no  o'''^ 

(2)  L.  c.y  n»  5'".  Cette  pièce  est  intitulée  :  Isti  sunt  rcdditus  deputati  et 
assignati  ad  dotem  domine  Margarete ,  filie  excellentissimi  Ludovici 
Dei  gratia  régis  Francis.  Elle  est  sans  date,  mais  également  scellée  par  les 
deux  seigneurs  précités. 

(3)  Apud  Rimelenghem  de  molendino  siliginis  XL  modios 

(4)  Apud  Boulsfort  de  molendino  siliginis  XXI  modios. 


(  374  ) 

Ouderenghem  ou  Auderghcm  ,  dont  le  moulin  rappor- 
tait 18  muids  de  seigle  (1). 

Yetterbeke  et  Elsele  (Etterbcck  et  Ixelles). 

Scarenbeke  et  Ten-iYoîtrfe  (  Schaerbeek  et  Ten-Noode). 
Ces  deux  villages,  qui  sont  transformés  en  une  ville  im- 
mense, figuraient  alors  dans  les  registres  du  domaine  ducal 
pour  un  modeste  cens  de  50  sous  et  de  40  muids  d'avoine; 
on  y  exploitait  des  tourbières,  pour  lesquelles  on  donnait 
30  autres  sous,  et  nos  ducs  y  avaient,  déjà  à  cette  époque, 
un  moulin  à  eau  (l'usine  qui  fut  depuis  convertie  en  une 
machine  hydraulique),  dont  le  produit  était  considérable, 
sans  doute  à  cause  de  sa  proximité  de  Bruxelles ,  et  s'éle- 
vait à  60  muids  de  seigle  (2). 

Ucle  ou  Uccle,  où  l'on  payait  9  muids  de  seigle  pour 
un  champ  appelé  la  Culture  des  enfants  de  Zeecrabbe  (5). 
Ce  nom,  qui  s'est  conservé  jusqu'à  nos  jours  dans  celui 
à'hof  te  Zeecrabbe ,  donné  à  la  propriété  de  la  famille  de 
Tbysebaert,  près  de  Bootendael,  n'est  pas  indigne  d'at- 
tirer notre  attention.  Il  provient  évidemment  des  débris 
de  mollusques  et,  en  particulier,  de  crabes  (crabes  marins 
ou  zeecrabbe),  que  le  sol  y  recèle.  Récemment,  lorsqu'on 
a  construit  à  proximité  de  cet  endroit  une  grande  tran- 
chée pour  le  passage  du  chemin  de  fer  de  Bruxelles  à 
Luttre,  la  pioche  en  a  mis  au  jour  en  grande  abondance. 

Nederdoi^nepe  et  Usenghem  (Neerdorp  et  Huysinghen). 

E/ce/o  (Essele  ,  à  Tourneppe). 


(1)  Apud  Ouderenghem  de  molendino  siliginis  XVIII  modios. 

(2)  Apud  Scarenbeke  et  Ten  Noude,  de  censu  XXXII  solidos,  avene 
XL  modios.  Ibidem  de  turbonibus  XXX  sol.  Ibidem  de  molendino  siliginis. 
LX  modios. 

(3)  Uole.  De  cullura  filiorum  Zeecrabbe 


(  372  ) 

Mergihen.  Dans  le  bourg  de  Merchten,  que  le  duc 
Henri  II  avait  érigé  en  franchise ,  le  domaine  possédait 
des  constructions,  un  verger  et  des  étangs  produisant 
20  livres,  une  halle  aux  draps  produisant  10  sous,  des 
moulins  à  vent  et  à  eau  dont  le  rapport  s'élevait  à  42  muids 
de  seigle.  En  outre  l'abbé  d'Afflighem  payait  2  antres  muids 
et  la  maceria,  c'est-à-dire  la  taxe  sur  la  fabrication  de  la 
drêche,  prélevée  tant  à  Assche  qu'à  Merchten,  valait,  par 
an,  4  livres  et  10  sous  (1). 

Ascha.  Une  halle  à  Assche  rapportait  9  sous  et  les 
wastines,  c'est-à-dire  les  bruyères  récemment  mises  en 
culture ,  produisaient  65  muids  de  seigle  (2). 

Capella  Sancti  Nycholai  (  Capelle-au-Bois)  payait  un 
cens  de  oO  sous  4  deniers,  24  chapons  et  1  poule  blanche. 

Le  droit  de  congé  qui  se  prélevait  dans  la  mairie  de 
Bruxelles  produisait  15  livres  (3). 

Une  taxe  sur  les  charrues  est  indiquée  comme  valant 
25  muids  de  seigle  et  autant  d'avoine  (4). 

Une  étendue  d'étangs,  comprenant  72  bonniers  situées 
dans  les  mairies  de  Bruxelles  et  d'Yssche,  rapportait  108  li- 
vres; le  produit  des  droits  de  reliefs  des  fiefs  15  livres, 
celui  des  forfaits  ,  c'est-à-dire  des  amendes,  550  livres;  le 
cens  de  Wambeke  et  Lombeke  (Wambeek  et  Lombeek- 
Sainte-Catherine)  40  livres,  les  bois  d'Assche  (le  bois  dit 


(1)  De  caminagiis,  pomerio  et  vivariis  XX  libras ,  de  domo  pannali 
X  sol.,  de  moleiidinis  venti  et  aque  XLII  mod.  siliginis,  de  abbale  de 
Haffligheu  II  mod.  sil.,  de  maceria  in  Merhten  et  Ascha  IV  lib.  et  X  sol. 

(2)  Apud  Ascha  de  quadam  halla  IX  sol.  Ibidem  de  wastinis  LXVmod. 
sil. 

(5)  La  villicatu  de  Bruxella  de  venditionibus  terrarum  XV^  lib. 
(i)  De  blado  aratrorum  XXV  mod.  siliginis,  avene  XXV  mod. 


(  375  ) 
de  Crevai,  dont  Jean  III  donna  nne  partie  à  l'abbaye  de 
Forêt)    100  livres.  La  plupart  des  étangs   qui  ornaient 
jadis  nos  environs  ayant  disparu,  ce  n'est  pas  sans  intérêt 
qu'on  en  lira  la  nomenclature.  La  voici  : 

Les  étangs  voisins  de  la  Maison  de  Ter-Yueren  com- 
prenaient 8  bonniers. 

L'étang  situé  plus  en  aval  (en  suivant  la  rivière  la  Voer, 
près  du  moulin  de  Vossem) ,  mesurait  9  bonniers. 

L'étang  â'Horensele  (?),  2  bonniers. 

Deux  autres  étangs  contigus,  V2  bonnier. 

L'étang  d'Hertsweghe  (à  Duysbourg)  1  1/2  bonnier. 

Quatre  étangs  adjacents,  5  journaux. 

Dans  la  vallée  d'Yssche,  5  journaux. 

L'étang  près  la  Bouverie  (?),  i  1/2  journal. 

L'étang  près  de  Satenberghe  (?),  1  bonnier. 

L'étang  près  de  Groenendael   (c'est   la   plus   ancienne 
mention  de  cette  localité  depuis  si  célèbre),  4  bonniers. 

L'étang  à  Vlossee  (de  F losse  vy vers,  enire  Xuderghem 
et  Tervueren),  1  bonnier. 

L'étang  de  Stockel ,  2  bonniers. 

L'étang  de  Val-Duchesse  (à  Auderghem),  11  bonniers. 

L'étang  de  la  Maison  des  Veneurs  (à  Boitsfort),  5  bon- 
niers. 

Les  trois  autres  bonniers  adjacents,  2 bonniers. 

L'étang  de  Ten-Noode,  près  de  Bruxelles ,  10  bonniers. 

Celui  de  Gempe  (à  Winghe-Saint-George,  entre  Lou- 
vain  et  Diest),  12  bonniers  (1). 


(1)  L'étang  de  Gempe  est  la  seule  propriété  dominiale  comprise  dans  le 
douaire  de  Marguerite  de  France  qui  fut  placée  en  dehors  des  limites 
dont  nous  avons  parlé,  c'est-à-dire  à  TE.  de  la  Dyle. 


i  574  ) 
Celui  d'Obbrussel  ou  Saint-Gilles,  1  bonnier. 
Celui  d'Humbeek,  1  V^  bonnier  (1). 
Tous  ces  détails  géographiques  donnent  une  certaine 
importance   aux  actes   qui  accompagnèrent   le   premier 
mariage   de   Jean  I".  C'est  ce  qui  nous  a  déterminé  à 
les  analyser  et  à  les  publier.  Il  n'existe,  sur  le  Brabant, 
aucun  document  du  même  genre  qui  soit  aussi  ancien  : 
les  comptes  des  officiers  de  justice ,  soit  en  rouleaux,  soit 
en  registres  ou   cahiers,  les  comptes  du  domaine,  les 
comptes  des  reliefs   de  fiefs  et  les  rôles  de  fiefs  ne  com- 
mencent que  plus  tard.  A  part  leur  signification  historique, 
ces  actes  ont  donc  une  grande  valeur  à  cause  des  données 
géographiques  qu'ils  renferment,  données  dont  l'exacti- 
tude ne  pourrait  être  contestée. 

La  mort  de  saint  Louis,  qui   expira  devant  Tunis  le 


(1)  Vivaria  juxla  domum  de  Vura  continent  octo  bonuaria. 

Vivarium  inferius,  juxla  molendinum,... 

Vivarium  juxla  Horenselele... 

Ibidem  duo  vivaria... 

Unum  juxta  Herlsweghe... 

Ibidem  quatuor  vivaria... 

In  vallede  Ische... 

Vivarium  juxta  Beverye... 

Vivarium  juxta  Salenberghe... 

Vivarium  juxta  Grunendale... 

Vivarium  juxta  Vlossee. .. 

Vivarium  juxta  Stokele... 

Vivarium  juxla  Abbatiam  ducisse... 

Vivarium  juxla  domum  Venalorum... 

Ibidem  tria  vivaria... 

Vivarium  juxta  den  Noede,  juxta  Bruxellam... 

Vivarium  de  Ghenpe... 

Vivarium  de  Obbruxella... 

Vivarium  de  Honebeke... 


(575) 

25  août  1270,  et  celle  de  la  jeune  Marguerite  ne  portèrent 
aucune  atteinte  à  l'amitié  des  familles  de  France  et  de 
Louvain.  En  l'année  1274  fut  signé  :  le  21  août,  au  châ- 
teau de  Vincennes,  le  mariage  de  Marie  de  Brabant  et  de 
Philippe  dit  le  Hardi ,  fils  et  successeur  de  Louis  IX,  et, 
le  8  septembre,  à  Paris  même,  un  diplôme  dans  lequel 
Jean  1"  s'engageait  à  accompagner  son  futur  beau-frère  à 
la  Terre-Sainte,  en  déclarant  toutefois  que  si  le  roi  était 
empêché  de  partir,  il  se  considérait  de  son  côté  comme 
délié  de  toute  obligation  (1).  On  n'ignore  pas  que  les  bonnes 
relations  entre  la  France  et  le  Brabant  se  perpétuèrent 
pendant  tout  le  règne  de  Jean  I". 

La  politique  qui  présida  au  gouvernement  de  ce  prince, 
du  moins  pendant  les  premières  années,  fut  surtout  une 
politique  d'apaisement  et  de  modération.  A  l'intérieur, 
Jean  1"  s'efforça  de  rétablir  la  tranquillité,  à  l'extérieur  il 
ouvrit  des  négociations  qui,  aidées  par  des  démonstrations 
militaires  pleines  de  vigueur,  contribuèrent  à  rétablir  dans 
nos  provinces  une  paix  à  peu  près  complète.  Résumons 
cette  situation  aussi  brièvement  que  possible  : 

La  peirsonnalité  d'ArnouI  de  Wesemael  n'avait  été 
étrangère  à  presque  aucune  des  causes  de  troubles  qui 
s'étaient  manifestées  en  Brabant  :  les  privilèges  de  Lou- 
vain ayant  été  confirmés  et  étendus  par  le  duc^  cette  ville 
rentra  dans  le  calme;  à  Ternath,  où  un  conflit  s'était  élevé 
entre  le  chapitre  de  Nivelles  et  Arnoul,  à  propos  du  par- 
tage du  produit  des  bruyères  récemment  défrichées,  un 
accord  fut  conclu,  au  mois  d'octobre  1268,  entre  le  duc, 
Arnoul  et  le  chapitre,  qui  se  partagèrent  ce  produit  par 


(1)  Voir  Annexes,  n»  IX. 


(376) 
tiers,  en  se  garantissant  la  perception  des  cens  dus  par 
ceux  qui  viendraient  habiter  et  exploiter  ces  bruyères  (i). 
L'entrée  d'Arnoul  dans  l'ordre  du  Temple,  entrée  qui 
eut  lieu  vers  ce  temps,  ne  fut  pas  une  disgrâce,  car  il  resta 
en  relations  étroites  avec  la  famille  ducale  (2).  Il  eut  pour 
successeur  son  frère  Godefroid,  seigneur  de  Perck.  Quant 
à  son  second  frère,  Gérard,  il  s'était  déjà  réconcilié  avec  le 
chapitre  de  Saint-Barthélémy,  de  Liège,  au  sujet  des  actes 
de  violence  commis  par  lui  à  Lincent  (5). 

Nivelles,  la  seule  ville  où  une  véritable  agitation  s'était 
manifestée  pendant  la  régence  d'Aleyde,  regagna  insen- 
siblement ses  franchises,  grâce  à  Fappui  que  Jean  I"  lui 
accorda,  à  l'exemple  de  ses  prédécesseurs.  La  nouvelle 
abbesse,  Isabelle  de  Bierbais,  vécut  peu  en  harmonie  avec 
ses  chanoinesses,  dont  l'humeur  procédurière  ne  fut  jamais 
aussi  ardente  qu'à  cette  époque;  elle  semble  s'être  mieux 
entendue  avec  la  bourgeoisie,  à  laquelle  elle  donna  quit- 
tance, en  septembre  1275,  de  soixante  des  100  livres  qui 
lui  étaient  dues  pour  la  fondation  d'une  chapellenie,  en 
vertu  d'une  clause  de  la  convention  imposée  à  la  ville  huit 
années  auparavant  (4). 

Marguerite  de  Constantinople  entretint  pendant  toute  sa 
vie  d'étroites  relations  avec  les  ducs  de  Brabant.  Son  bien- 
aimé  lils  Guillaume  de  Dampierre  avait  été  le  beau-frère 
et  l'ami  de  Henri  III  ;  lorsque  Jean  I"  devint  veuf,  ce  fut 
à  la  postérité  de  Guy,  autre  fils  de  Marguerite,  qu'il  de- 
manda une  seconde  femme.  Elle  s'appelait  Marguerite 


(1)  Voyez  V Histoire  des  environs  de  Bruxelles,  t.  ï,  p.  401. 

(2)  Voyez  mon  Mémoire  sur  le  duc  Jean  I",  pp.  S7,  39  et  84. 

(3)  Voyez  plus  haut,  §  H. 

(4)  AMNEXES,n''X. 


(  -"î??  ) 

comme  son  aïeule.  Elle  et  Jean  vécurent  ensemble  douze 
années,  du  mois  d'août  1275  au  o  juillet  1285,  date  de  la 
mort  de  la  duchesse,  qui  paraît  avoir  joui  du  douaire  pré- 
cédemment assigné  à  Marguerite  de  France.  On  liquida  à 
cette  occasion  les  arriérés  du  douaire  de  Béatrix,  veuve  de 
Guillaume  de  Dampierre,  arriérés  qui  s'élevaient  à  5,512 
livres  en  1268(1). 

Deux  grands  événements  qui  se  produisirent  l'année 
même  du  second  mariage  de  Jean  I"  :  la  mort  de  sa  mère 
Aleyde  et  l'élévation  au  trône  impérial  de  Rodolphe  de 
Habsbourg,  apportèrent  de  notables  changements  dans  la 
position  de  notre  duc.  La  duchesse  Aleyde  avait  exercé  de 
fait  une  autorité  qui  vint  alors  à  cesser  et,  d'autre  part,  on 
vil  se  renouer,  bien  affaiblis  il  est  vrai,  les  liens  qui  ratta- 
chaient le  Brabant  à  l'empire. 

A  partir  de  ce  moment,  les  efforts  pour  une  pacification 
générale  se  multiplient  et  se  développent.  Jean  1"  fortifie 
la  petite  ville  de  Thiel,  au  nord  de  la  Meuse,  mais  il  termine 
ses  différends  avec  la  Gueldre ,  qui  sont  soumis  au  juge- 
ment de  six  arbitres  choisis  de  commun  accord  (2).  L'en- 
tente avec  la  Hollande  est  affermie  par  une  déclaration  du 
bailli  Nicolas  de  Subburch,  qui  déclare  recevoir  sous  son 
sauf-conduit  les  Brabançons  venus  en  Hollande  (o).  L'ar- 
chevêque de  Cologne,  Sifroi,  alors  ami  du  Brabant  comme 
l'avait  été  Engelbert  de  Fauquemont,  son  prédécesseur, 
demande  à  Jean  1"  d'interposer  sa  médiation  entre  lui  et 
le  comte  de  Juliers,  et  de  plus,  sollicite  les  villes  du  duché, 
et  principalement  Louvain  et  Bruxelles,  d'appuyer  ses 


(1)  Annexes,  n"  XI. 

(2)  En  1274.  Voyez  Annexes,  n«  XII. 

(3)  En  1275.  Voyez  Ibidem,  n°  XIII. 


(  578  ) 
efforts  dans  ce  but  (1).  Partout  les  villes  échangent  entre 
elles  des  promesses  d'appui  contre  le  soulèvement  des 
gens  du  métier  et  surtout  des  tisserands  et  des  foulons; 
sur  tous  les  points  du  cours  de  la  Meuse  et  du  Rhin  les 
grandes  cités  renouent  les  rapports  étroits  qui  entrete- 
naient l'amitié  entre  elles  avant  le  fatal  interrègne  dont 
on  venait  de  sortir. 

Un  seul  peuple,  le  peuple  liégeois,  reste  livré  à  la  fois 
aux  discordes  intérieures  et  à  la  guerre  étrangère.  Après 
une  réconciliation  de  peu  de  durée  entre  Jean  I"  et  son 
parent,  l'évêque  de  Liège  Henri  de  Gueldre  (2),  le  bon 
accord  cessa,  et  le  duc,  profitant  du  soulèvement  des 
villes  du  pays  de  Liège  contre  le  prélat,  se  fit  recon- 
naître avoué  de  la  ville  de  Saint-Lambert,  le  26  no- 
vembre 1270.  Les  deux  princes  reprirent  les  armes  l'un 
contre  l'autre,  en  1273,  pour  les  déposer  bientôt,  à  la 
nouvelle  de  la  mort  de  la  duchesse  Aleyde.  Enfin,  après 
que  Henri  eut  été  déposé  par  le  pape  Grégoire  X,  à  cause 
de  sa  conduite  désordonnée,  éclata  la  sanglante  guerre 
de  la  Vache  qui  fit  tant  de  victimes  et  à  laquelle  le  Bra- 
bant  ne  prit,  à  ce  qu'il  paraît,  qu'une  part  médiocre. 

Nous  nous  arrêterons  ici  dans  cette  esquisse  des  pre- 
mières années  du  règne  du  duc  Jean  P%  de  ce  règne  que 
la  victoire  de  Woeringen  a  immortalisé  et  pendant  lequel 
le  Brabant,  à  l'exception  de  quelques  localités  situées  aux 
limites  du  pays,  ne  connut  ni  les  misères  des  discordes 
intestines,  ni  le  fléau  de  la  guerre  étrangère. 

(1)  Enl277. /6/dm,no  XIV. 

(2)  En  1268.  Voyez  mon  Mémoire  déjà  cité,  p.  37.  —  Ce  fut  pour  se  for- 
tifier contre  l'hostilité  des  Liégeois  que  Jean  le»"  détermina,  d'une  manière 
plus  précise,  la  nature  du  fief  que  le  seigneur  de  Heinsberg  tenait  de  lui. 
A?iNEXEs,  n"  XV.) 


(379) 


ANNEXES. 


I. 

Hec  sunt  hereses  que  fuerant  dampnate  contra  quosdam 

DE  AnTVERPIA. 

Dicebant  quod  indulgencie  prelatorum  non  prosunt  ani- 
raabus. 

Item  quod  infernura  non  erit  post  diem  judicii. 

Item  quod  nullus  polesl  dare  elemosinam  de  superfluo. 

Item  quod  nullus  dives  potest  salvari  et  quod  omnis  dives 
est  avarus. 

Item  quod  nullus  pauper  potest  dampnari,  sed  omnes  sal- 
vabuntur. 

Item  quod  siraplex  fornicatio  non  est  peccatum,  viventi 
in  paupertate. 

Item  quod  nullus  potest  excommunicari  vel  excoramu- 
nicare. 

Item  quod  nullus  potest  salvari  cum  duplici  veste  ejusdem 
generis. 

Item  quod  sacerdos  existens  in  mortali  non  potest  conficere, 
nec  absolvere  aut  ligare. 

Item  quod  non  sunt  nisi  tria  peccata  mortalia  :  invidia, 
avaricia  et  prodigalitas  indiscreta  et  cognoseere  uxorem  suam 
irapregnatam. 

Item  quod  licitum  est  auferre  divitibus  et  dare  pauperibus. 

Item  quod  invitans  divitem  ad  convivium  peccat  mortaliter 
et  invita  tus. 

Item  quod  inobedientia  non  est  peccatum,  dum  tamen 
nesciat  prelatus. 


(  380  ) 

Item  quod  quilibet  sacerdos  potest  absolvere  de  quolibet 
peccato,  sicut  episcopus. 

Item  quod  nullus  potest  sacerdoti  auferre  potestatem  ab- 
solvendi. 

Item  quod  nullum  sit  peccatum  quod  dicitur  peccatum 
contra  naturam. 

Item  quod  nullus  vir  non  potest  cognoscere  uxorem ,  nisi 
ter  in  ebdomada. 

Item  quod  omnimodo  veritas  sacre  scripture  non  est  aperta 
et  quod  omniraoda  veritas  non  predicatur. 

Item  quod  melius  est  accipere  corpus  Christi  semel  in  anno, 
etiam  in  mortali,  quod  non  accipere. 

Item  quod  quanto  aliquis  est  in  altiori  gradu  ordinis,  tanto 
plus  débet  esse  pauper. 

Item  quod  bene  et  sine  peccato  potest  mulier  se  prestare . 
si  sit  indigens  et  pauper. 

MS.  de  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris, 
n»  13,954.  f«263  v. 


II. 


Jean,  duc  de  Brahant ,  approuve  l'acte  par  lequel  sa  mère  et 
Henri,  son  frère,  jadis  duc,  avaient  consenti  à  la  cession 
d'un  fief  à  l'abbaye  de  la  Ramée. 

28  avril  1272. 

Nos  Johannes,  Dei  gratia  Lotharingie  dux,  n(otum  facimus) 
universis  quod  nos  factum  karissime  domine  nostre  et  matris 
ac  d(omini)  fratris  nostri  Henrici,  quondam  clucis  Brabantie, 
in  eo  scilicet  quod  hoc  suum  adhibuerint  consensum  et  assen- 
sum  ut  Regaldus  et  Fredebors  de  Hanut,  uxor  ejus,  septem 


(  581  ) 

bonuaria  feodi  jacentia  apud  Wa(mont  conlulerint)  in  elemo- 
sinam  domui  de  Ramcia  jiixta  omncra  formam  I(ittcrarum 
karissime)  domine  nostre  et  matris  sigillo  sigiliaUirum,  quas 

vidimus  et  dictae  litterarum  laudamus,  approbamus, 

ratara  tenemus  et  confirmamus  presentium  (teslimo)nio  litte- 
rarum, recognoscentes  etiam  quod  defuncto  Abraham,  qui  de 
diciis  bonis  homo  fuit  feudalis,  Henricus  de  Merbeke,  dudum 
ballivus  Geldoniensis,  dicta  bona  de  nobis  nomine  dicte  domus 
et  mandato  requisivit  et  jure  feudali  roboravit. 

Datum  anno  Domini  M.  CC.  LXX  secundo,  dominica  ante 
Ascensionem. 

Original ,  fort  endommagé  et  présentant  des  lacunes  ,  dans 
le  charlrier  de  la  Ramée,  aux  Archives  du  royaume. 


III. 

(CONFIRMACIO  DOMINI  HeNRICI  LeODIENSIS  EPISCOPI  SUPER  DECIMA  DE 

RoTSLAER.)  Confirmation,  par  l'évêquede  Liège,  Henri,  du 
don  fait  à  l'abbaye  du  Parc-les-Dames  de  la  dime  de  Rot- 
selaer. 

22  octobre  1261. 

Henricus  Dei  gracia  episcopus  Leodiensis  universis  pré- 
sentes lilteras  inspecturis  salutem  in  Domino.  Cum  vir  nobilis 
Arnoldus,  dominus  de  Rotslar,  dictus  dapifer  Brabantie,  divine 
pietatis  intuitu,  ob  remedium  anime  sue  suorumque  prede- 
cessorum,  decimam  majorera  et  minutam,  quam  in  territo- 
rio  et  parrochia  de  Rotslaer  cum  aliis  bonis  suis  a  duce  Bra- 
bantie in  feodum  possidebat  et  habebat,de  voluntate  nobilis 
mulieris  Beatricis,  uxoris  sue,  consensu,  et  rectorum  loci 
interveniente,  monasterio  Dominarum  de  Parcho,  Cister- 
ciensis  ordinis,  donatione  inter  vivos  in  elemosinam  contulit 


(  582  ) 

et  dictara  decimam  in  manus  iliustris  matrone,  domine  Alei- 
dis  duxisse  Brabantie,  tutricis  légitime  terre  predicle,  et 
suorum  liberorum,  reportavit  ad  opus  monasterii  supradieti, 
ducissaque  jamdicta,  ob  remedium  anime  iliustris  viri  domini 
Henrici  magne  memorie  ducis  Brabantie ,  sui  mariti ,  dona- 
tioni  predicte  suum  consensum  adhibens  et  assensum,  dictam 
decimam  monasterio  predicto  in  elemosinan  contulit,  nomine 
suo  et  suorum  liberorum  et  eam  in  manus  abbatisse  dicti  loci 
reportavit,  ab  ipsa  abbatissa  et  ejus  conventu  in  perpetuum 
ut  eorum  allodium  possidendam,  prout  in  litteris  desuper  hoc 
confeetis  vidimus  plenius  contineri.  Nos  tam  pium  dictorum 
nobilium  propositum  atque  factum  laudantes,  ratificantes  et 
approbantes,  decimam  predictam  monasterio  supradicto  de 
Parcho  dominarum  approbamus  et  confirmamus  ac  perpetuo 
incorporamus.  In  cujus  rei  lestimonium  et  evidenciam  pré- 
sentes litteras  sigillo  nostro  duximus  roborandas. 

Datumin  monasterio  Fliderbacensi  juxta  Lovanium,  ordinis 
sancti  Benedicti,  feria  tercia  ante  festum  beatorum  Symonis  et 
Jude  apostolorum ,  anno  Domini  M.CC.  sexagesimo  primo. 

Cartulaire  de  Pabhaije  du  Parc-les-Dames ,  fol.  21. 

Il  existe  une  autre  charte  de  l'évêque  Henri  en  faveur  du 
Parc-les-Dames,  du  même  jour,  mais  datée  de  Louvain.  En 
voici  la  teneur  : 

(QUOD    POSSUMUS    IN    CURIAS   SEU    GRANGIAS     DIVINA    FACERE     CELE- 

BRARi.)  L'évêque  de  Liège  autorise  la  communauté  du  Parc- 
les-Dames  à  faire  célébrer  l'office  divin  dans  celles  de  ses 
fermes  où  Tun  de  ses  membres  se  trouvera. 

28  octobre  1261. 

Henricus  Dci  gratia  Leodiensis  episcopus  personis  religio- 
sis  suis  dilectis  in  Christo  abbatisse  et  conventui  monasterii  de 
Parco,  Cisterciensis  ordinis,  salutem  in  Domino.  Monasterium 


(  585  ) 

vestrum  dileclione  speciali  amplectentes  ac  vobis  gratiam 
facere  intcndentes  vobis  indulgemus  et  concedimus  ut  quan- 
docunque  abbatissam  vestram  seu  ah'quos  de  capellanis  vel 
fratribus  vel  sororibiis  veslris  vcl  aliquas  personas  vestri  or- 
dinis  ad  curias  seu  grangias  vestras  dulci  (i)  contigerit,  pos- 
sitis  ibidem  divina  facere  celebrari. 

Datum  Lovanii,  in  die  beatorum  Siraonis  et  Jude  apostolo- 
rum,  anno  Domini  M.CC.  sexagesimo  primo. 

Ibidem,  fol.  16  v". 


IV. 


Henri,  évêqiie  de  Liège,  confirme  au  couvent  de  Sainte-Ger- 
trude,  de  Louvain,  le  'patronat  des  églises  de  Weerde  et  de 
Langdorp,  près  d'Aerschot. 

21  janvier  1266. 

Henricus,  Dei  gratia  episcopus  Leodiensis,  universis  ad 
quos  presens  seriptum  pervenerit  salutem  in  Domino.  Prepo- 
sito  Sancte  Gertrudis  in  Lovanio  et  canonicis  intelleximus , 
referentibus  quod  jus  patronatus  de  Werde  et  de  Langhedorp 
longo  tempore  de  consuetudine  pertinebat  ad  Renerum 
militem  dictum  Cluet  et  ad  dominum  Willelmum  militem  de 
Ponte  et  Jobannem  dictum  de  Pulchra  curia  et  ad  alios  laicos 
pro  portionibus  contingentibus  eosdem.  Dicti  vero  prepositus 
etcanonici,  veri  religiosi  et  persone  ecclesiastice,  obtinuerunt 
jus  patronatus  a  predictis  laicis  b'beraliter  eisdem  donando, 
sed  cum  dicta  donatio  valere  non  debeat  nisi  consensu  nostro 
accedente,  a  nobis  humiliter  supplicaverunt  ut  consensum 

(1)  Ily  a  :  dulcL 


(  384  ) 

noslrum  eidem  donationi  adhibercmus.  Nos  attendentes  peti- 
tionern  eorum  esse  legitimam  et  honestam,  precibus  eorum 
inclinati,  donationi  tali  adhibemiis  assensum. 

Datum  anno  Domini  M.CC  sexagesimo  quinto,  in  die  béate 
Agnetis,  apud  Lovanium. 

Char  trier  de  l'abbaye  de  Samte-Gertrude, 
de  Louvain. 


(Copia  bulle  Clemeistis  pape   quarti   qui   siandat  sententiam 

EXCOMMUNICATIONIS    LATAM    PER    CAPITULUM    LeODIENSEM    CONTRA 
-    DOMINOS   ArNOLDUM  ET  GeRARDUM  DE  WeSEMALE  INVIOLABILITER 

OBSERVAHi.)  Le  pape  Clément  IV,  sur  les  plaintes  du  cha- 
pitre de  Saint-Barthélémy,  de  Liège,  ordonne  à  Vècolàtre 
de  Notre-Dame,  d'Utrecht,  de  faire  observer  strictement  la 
sentence  d'excommunication  portée  contre  sire  Arnoul  et 
sire  Gérard  de  Wesemale. 

16  juin  1267. 

Clemens  episcopus,  servus  servorum  Dei,  dilecto  filio  sco- 
laslico  ecclesie  Béate  Marie  Trajectensis,  Leodiensis  diocesis, 
salutem  et  apostolicam  benedictionem.  Dilecti  filii,  decanus  et 
capitulum  ecclesie  Sancti  Bartbolomei  Leodiensis  nobis  humi- 
liter  supplicarunt  ut  excommunicationis  sententiam  quara 
decanus  et  capitulum  ecclesie  Leodiensis,  prout  ad  eos  de  an- 
tiqua  et  approbata  et  hactenus  pacifiée  observata  consuetudine 
perlinet,  in  Arnoldum  et  Gerardum,  fratres  de  Wesemale, 
Leodiensis  diocesis,  pro  eo  quod  ipsi  predictos  decanum  et 
capitulum  Sancti  Bartbolomei  quibusdam  decimis,  redditibus 
et  rébus  aliis  contra  justiciam  spoliarunt,  et  ab  eis  moniti 
diligenter  décimas,  redditus  et  res  hujusmodi  dilectis  decano 
et  capitulo  Sancti  Barlholomei  restituere  contumaciter  dene- 
garent,  cum  hoc  csset  ita  notorium  quod  nuUa  posset  tergi- 


(  58S  ) 

versatione  celari,  quo  circa  discrétion!  Luc  pcr  apostolica 
scripta  mandanius,  qualenus  scntcntiam  ipsam,sicut  rationa- 
biliter  est  prolata,  facias  auctoritatc  nostra  usque  ad  satis- 
factionem  condignam,  appellationc  reinota,  inviolabiliter 
observari. 

Datum  Viterbii,  XVÏ  kalcnd.  julii,  pontificatus  nostri  anno 
tercio. 

Registres  iioirs  de  la  Chambre  des  comptes, 
t.  III,  fol  24,  aux  Archives  du  royaume.  — 
Tous  les  actes  relatifs  à  la  conlestalion  au 
sujet  du  village  de  Lincent  sont  en  copie 
dans  ce  registre. 


VI. 


(CONFEDERATIO    INTER  AlEYDEM,    DUCISSAM  BrABANTIE,  ET  COMITEM 

Clevensem.)  Traité  d'alliance  conclu  entre  Aleyde,  duchesse 
de  Brabant,  et  la  comtesse  de  Clèves. 

18  novembre  1266. 

Nos  Aleidis,  ducissa  Lotharingie  et  Brabancie,  notum  faci- 
mus  universis  présentes  litteras  visuris,  quod  nos  ab  bac  die 
in  antea  usqiie  ad  Pascha  proximum  venturum  et  ab  eodem 
Pascba  per  quatuor  annos  immédiate  continue  subséquentes 
promittimus  data  fide  quod  nos  nobili  viro  Theoderico,  comiti 
Clivensi,  contra  quoscunque,  Romano  imperio  excepto,  assis- 
temus  et  eumdem  potenter  juvabimur  et  patenter,  nos  ad  hoc 
tenore  presentium  oWigantes,  tali  apposita  conditione  quod 
si  qui  hominum  terras  ipsius  comitis  hostiliter  intrare  volue- 
rint  et  idem  cornes  nos  per  suas  litteras  requisierit  ut  eosdem, 
ne  terras  suas  hostiliter  seu  violenter  intrent,  impediamus,  nos 
bona  fide  pro  posse  nostro  hujusmodi  suos  adversarios  stude- 
2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  25 


(  386  ) 

bimusimpedire,  terras  eorum,si  necesse  fuerit,  hosliliter  inva- 
dendo.  Et  si  prêter  ipso  ipse  cornes  pro  defensione  terrarum 
suarum  vel  alias  ad  nocendum  suis  adversariis,  ipsum  vel  terras 
suas  impugnare  volentibus,  nos  duxerit  requirendum  ut  homi- 
nes  nostros  in  suura  miltamus  auxilium,  nos  infra  très  septi- 
manas  post  raonitionem  suara  transmittemus  eidem  in  nostris 
expensis  centura  équités  cum  arrais,  tara  milites  qiiam  filios 
militum,  sibi  quamdiu  necesse  habuerit  auxilium  prestituros, 
hoc  adjecto  quod  si  iidera  homines  nostri  in  aliqiio  conflictu 
vel  alias  in  suo  auxilio  constituti,  dampnum  aliquod  sustinue- 
rint  vel  captivati  fuerint,  ipse  comes  non  tenebitur  dampnum 
aliquod  nobis  aut  ipsis  nostris  horainibus  restaurare  vel  ipsos 
ab  hujusraodi  captivitate  liberare.  Si  vero  dicli  homines  nos- 
tri aliquem  vel  aliquos  de  adversariis  ipsius  comitis  caplivave- 
rint,  solis  capitaneis  exceplis,  de  illis  captivis  nostram  facient 
voluntatem,  hoc  eliara  adjecto  quod  si  diclus  comes  homines 
nostros  ultra  Renum  fluvium  duxerit  transducendos,  extunc 
eis  in  victualibus  providebit.  Promittimus  etiam  data  fide  quod 
si  aliquod  castrum  seu  munitio  ipsius  comitis  ab  adversariis 
suis  circumdata  fuerit  vel  obsessa,  nos  ad  obsessionem  hujus- 
raodi propulsandara  et  defendendara,  eidera  pro  posse  nostro 
potenter  et  patenter  consilium  et  auxilium  impendemus.  Pro- 
mittimus etiam  quod  si  qui  fidèles  ipsius  comitis  occasione 
quod  eidem  contra  nostros  astiterint  adversarios,  iniraicias 
incurrerent  vel  offensas  aliquorura,  nos  eisdera  ad  defensio- 
nera  suara  efficacitcr  assisteraus.  Promittimus  etiam  quod  sine 
ipso  comité  et  fidelibus  suis  predictis,  nobis  cum  eo  auxilium 
prestantibus,  nullam  cum  adversariis  ipsorum  pacem  seu  con- 
eordiam  inibimus  aut  faciemus,  ad  hoc  fide  data  nos  simi- 
liter  obligaïUcs.  Et  ut  predictam  confederationem  seu  prorais- 
sionera  firmius  observemus,  rogavinius  dilectum  fratrem 
nostrum  Henricura,  lantgravium  Thuringie  et  dominum  Has- 
sie,  et  viros  nobiles,  fidèles  nostros,  Walterum,  dominum  de 
Aicnghom  ;    Walterum    Bertolt,    dominum    Machliniensem; 


(  387  ) 

Henricuiîi,  fratrem  ejus;  Henricuni  de  Asca,  milites;  Arnol- 
diim,  dominum  de  Rodchelaer;  Arnoldum,  dominum  de  Wese- 
inale;  Arnoldum,  dominum  de  Walehayn,  et  Ilenricum,  domi- 
num de  Bautershem,  ut  se  per  fidei  dationcm  ad  hoc  obligent 
ut  ad  observationem  omnium  premissorum  idem  frater  noster 
nobis  assistât,  et  predicti  horaines  et  fidèles  nostri  monilioni- 
bus,  exhortationibus  etconsiliis  nos  inducant,  et  nos  Henricus, 
Jantgravius  predictus,  pro  dicta  domina  nostra  ducissa  ac  ejus 
liberis,  fidedata  promittimus  eidem  domine  nostre  ducisse  ad 
observationem  predictorum  assistere  et  eam  efficaciter  adju- 
vare.  Et  nos  quoque  Walterus,  dominus  de  Aiengbem,  Walte- 
rus  Bertolt,  Henricus  frater  ejus,  Henricus  de  Asca,  Arnoldus 
de  Rodchelaer,  Arnoldus  de  Wesemale,  Arnoldus  de  Walchem 
atque  Henricus,  dominus  de  Bautershem,  predicti,  rogati  a 
domina  nostra  ducissa  predicta,  fide  data  promittimus  et  ad 
hoc  nos  obligamus  quod  prediclam  dominam  nostram  ducis- 
sam  ad  observationem  omnium  premissorum  pro  posse  nostro 
monitionibus,  exhortationibus  et  conciliis  nostris  inducemus. 
In  cujus  rei  testimonium  nos  Aleidis,  ducissa  predicta;  Henri- 
cus, lantgravius  Thuringie;  Walterus  ,  dominus  de  Aienghem; 
Walterus  Bertolt,  Henricus  frater  ejus,  Henricus  de  Asca, 
Arnoldus,  dominus  de  Rodchelaer;  Arnoldus  de  Wesemale, 
Arnoldus,  dominus  de  Walehem,  atque  Henricus,  dominus 
de  Bautershem,  predicti,  sigilla  nostra  presentibus  litteris  duxi- 
mus  apponenda. 

Dalum   anno   Domini   millesimo  ducentesimo   sexagesimo 
sexto,  in  octavis  beati  Martini  hyemalis. 

Cariulaire  de  Brabant  B,  fol  47. 


(  588  ) 


VII. 


(LiTTERE  JOHANNIS,  DUClS  LOTHARINGIE  ET  BrABANTIE,  DE  CONFEDE- 
RATIONIBUS    CUM    DOMINO    REGE    LuDOVlCO    RATIONE    MATRIMONII.) 

JeaUj  duc  de  Brabanl ,  ù  l'occasion  de  son  mariage  avec 
Marguerite  de  France,  promet  amitié  et  appui  au  roi  de 
France  et  à  sa  famille. 

Février  1269-1270. 

Universis  présentes  litteras  inspecturis  Johannes,  dux  Lotha- 
ringie et  Brebancie,  saliitem.  Cum  nos  indicat  affectio  quam 
liabemus  erga  excellenlem  dorainuni  Ludovicum,  regem  Fran- 
cie  illustrem,  per  contractum  matrimonium  initum  inter  nos 
et  Margaretam ,  filiam  régis  ejusdem,  ut  ipsiim  regem,  here- 
dem  suum  regem  Francie ,  filios  et  fratres  ipsius  favore  et 
amore  specialissimo  amplectiamur,  concedimus,  promittimus 
et  ad  hoc  nos  specialiter  obligamus  quod  si  eis  opus  fuerit,  in 
nobis  et  nostris  et  terra  nostra  favorem  invenient  et  araorem 
et  quod  cis  non  inferemus  nec  inferri  sustinebimus  per  nos 
vel  homines  nostros  morantes  in  terra  nostra  violenciara,  rao- 
lestiam  vel  gravamen  aliquod  quoquomodo,  salva  tamen  fide- 
litate  illorum,  quibus  fidelitatem  vel  homagium,  racione  hcre- 
ditatis  nostre,  tenemur  de  jure  facere  et  debemus,  nec  cum 
inimicis  eorum  contra  eos  confederationem  aliquam  faciemus. 
In  cujus  rei  tcstimonium  nostrum  sigillum  presentibus  litteris 
duximus  apponendum. 

Actum  Parisius.anno  Domini  millesimoCC.LX'"''  nono,  raense 
februario. 

Trésor  des  chartes,  aux  Archives  nationales 
de  Paris,  carlon  coté  J.  323,  n»  4. 


(  389  ) 
VIII. 

(LiTTERE  DUCIS  BhABANTlE  DE  DOTE  MaUGARETE  FILIE  REGIS    LuDO- 

vici.)  Le  duc  Jean  I'"'  ratifie  l'assignation  de  6,000  livrées 
de  terres  qui  avait  été  faite  à  sa  fiancée,  .Marguerite  de 
France,  pour  lui  servir  de  douaire. 

6  septembre  1270. 

Nos  Jehans,  par  le  gratie  de  Deu,  dus  de  Braibant  et  de  Lo- 
iherike,  faisons  savoir  à  tos  cels  ki  sunt  et  ki  à  venir  sunt  ki 
cesle  présente  chartre  verront  et  orront  que  nos,  par  les  co- 
venances  del  mariage  fait  entre  nos  et  haute  dame  noble,  Mar- 
gerite,  fille  au  très  haut  roi  de  France,  avons  doné,  otroié  et 
assené  à  la  devant  dite  Margerile,  en  non  de  doaire,  sis  mil 
livrées  de  terre  par  an  au  tornois,  assises  en  Braibant.  C'est  à 
savoir  en  le  Wre  et  à  Yske  et  es  appartenances  et  as  plus  pro- 
chains de  ces  deux  viles,  fors  mises  les  franchises  de  Brosele  et 
de  Lovaing,  lesqueles  sis  mil  livrées  de  terre  par  an  furent 
prisiés  et  esgardés  et  assises  par  nobles  homes  Jehan  de  Neele, 
conte  de  Pontiu,  de  Monsteruel  et  d'Aubemarle,  esleut  de  par 
le  roi  de  France  por  Margerite,  se  fille  devant  nomée,  et  VVa- 
tier  Berthaut,  segnor  de  Maslines,  por  nos,  liquel  firent  lor 
prisie  et  lor  assise  del  doaire  devant  dit  en  tel  manière  : 

Premièrement  il  prisièrent  et  assisent  par  loïal  pris  de  terre 
et  par  loïal  esgart  à  Margerite,  notre  feme  devant  nomée,  por 
son  doaire,  le  Vure  et  les  apartenances,  Yske  et  les  aparte- 
nances,  le  baillie  de  Brosele,  hors  mise  le  francise  de  Brosele 
et  de  Lovaing,  et  li  ont  assise  le  baillie  d'Yske  et  partie  de  le 
baillie  de  Lovaing,  desqueles  bailliez  devant  dites  les  viles  sunt 
nomées  en  après.  Li  non  des  viles  sunt  tel  :  Duzeborch  (i), 

(1)  Duysbourg  près  de  Ter-Vueren. 


(  390  ) 

Moersloe  (1),  Zaventhines  (2),  Starbeke  (5),  Ophein  (4),  Cort- 
beke  (5),  Basse-Yske  (6),  la  Helpe  (7),  Holeir  (8),  Voshem  (9), 
Levedale  ( \ 0),  Cortenberghe,  Erpse,  Campenhout,  Berghen  (H  ) , 
Ockensele  (12),  Bulchen  (15),  Berghen  (14),  Winckensele  (15), 
Veltliem,  Herenlh,  Thieldonch,  Benswiec  (1 6),  Nossenghem  (  1 7), 
Rennemberghe,  Welewe  (18),  Didenghem  (19),  Haren  (20), 
Machle   (21),  Haert  (22j,  Rimelghem  (25),  Welewe  (24), 


(1)  Moorseloo,  hameau  sous  Ter-Vueren  et  Leefdael. 

(2)  Saveulhem. 

(3)  Sleriebeek. 

(4)  Ophem,  hameau  à  W'esembeek. 

(5)  Corbeek-Djle. 

(6)  Neer-Yssche. 

(7)  La  Hulpe. 

(8)  Hoeylaerl. 

(9)  Vossem. 

(10)  Leefdael. 

(11)  Bergh  près  de  Campenhout. 

(1:2)  Neder-Ockerzeel.  Sleen-Ockerzeel  était  alors  un  domaine  du  cha- 
pitre de  SaiDt-Rombaud,de  Malines,  et  des  Berlhout. 

(13)  Bullesom,  hameau  sous  Bergh. 

(14)  C'est  probablement  une  répétition  du  nom  déjà  cité. 
(lo)  Winxel  près  de  Louvain. 

(16)  Binswyck,  localité  voisine  de  la  même  ville  et  qui  dépendait  de  la 
paroisse  de  Wilseie. 

(17)  Nosseghem  près  de  Saventhem. 

(18)  Woluwe.  A  en  juger  par  les  lieux  qui  précèdent  et  qui  suivent,  ce 
doit  être  Woluwe-Saint-Étienne. 

(19)  Dieghem. 

(20)  Haeren. 

(21)  Machelen-Sainle-Gerlrude. 

(22)  Peut-être  Ham,  sous  Steen-Ockerzeel. 

(23)  Le  nom  de  Rymelghem  était  porté  par  un  grand  moulin  situé  à 
Woluwe-SaintÉtienne;  il  fut  longtemps  possédé  par  les  habitants  d'Erps, 
qui  le  tenaient  à  cens  du  domaine. 

(24)  Ce  Woluwe  est  sans  doute  Woluwe-Saint-Pierre. 


(  391  ) 

Stocle  (1),  Watremale  (2),  Bochcfort  (3),  Oderghem  (4), 
Ophem  (5),  Yetterbeke  (G),  Elchere  (7),  Scaircnbeke  (8), 
Noude  (9),  Opbrosele  (10),  Uccle,  Nederdorncpc  (H),  Eise- 
ghem  (12),  Essele  (15),  Lake  (14),  Anderlecht,  Ganshoren, 
Ossenhem  (l5),Carnevelt  (16^  Wammele  (17),  Mcrchsten  (18), 
Slrombeke,  labié  de  Hafllengbem  (19),  Aske  (20),  Liesele,  Stie- 
nufle(21),  Maire  (22),  la  Chapele  S.-Nicbolai  (23),Wolverthem, 


(1)  Stockel,  hameau  à  Wolume-Saint-Plerre. 

(2)  Watermael. 

(3)  Boitsfort,  qui  forme  aujourd'hui  une  seule  commune  avec  Water- 
mael. 

(A)  Auderghem. 

(5)  Encore  un  Ophem.  Serait-ce  le  hameau  de  ce  nom  qui  se  trouvait 
entre  Saint-Josse-Teu-Noode  et  Schaerbeek?  Voyez  V Histoire  des  envi- 
rons de  Bruxelles,  t.  III,  p.  32.  Est-ce  une  simple  répétition  de  VOphem 
sous  Wesembeek ,  déjà  cité. 

(6)  Etterbeek. 

(7)  Il  faut  évidemment  lire  Elsene,  Ixelles. 

(8)  Schaerbeek. 

(9)  Saint-Josse-Ten-Noode. 

(10)  Op-Brussel  ou  Saint-Gilles. 

(11)  Neerdorp,  hameau  à  Tourneppe. 

(12)  Eysinghen,  partie  delà  commune  de  Biiysinghen. 

(13)  Essele,  à  Tourneppe. 
(.14)  Laeken. 

(15)  Osseghem,  hameau  à  Laeken. 

(16)  Careveli,  ferme  à  Molenbeek-Saint-Jean. 

(17)  Wemmel. 

(18)  Merchten. 

(19)  La  grande  abbaye  d'AfiQIghem ,  à  la  limite  de  la  Flandre. 

(20)  Assche. 

(21)  Steenhufifel. 

(22)  Malderen. 

(25)  Capelle-au-Bois,  dont  Péglise  est  dédiée  à  saint  Nicolas. 


(  592  ) 

Ophem  (1),  Copenghem  (^),  Bettenghem  (3),  Rekensele  (4), 
Zemse  {^),  Wierde  (6)  et  Sordonch  (7). 

C'est  à  savoir  que  les  viles  devant  nomées  valent  de  rentes 
en  deniers,  en  menus  bos,  en  vignes  (8),  en  aiguës  (9),  en 
prés,  en  forfais  (10),  en  reliés  (M), en  vendages  de  terres  (12), 
en  chapons,  en  blés,  en  avaines,  chascun  an  trois  mil  livrées 
et  trois  cens  livrées  de  tornois.  Après  il  ont  prisié  et  assis  à  le 
devant  dite  Margerite,  pour  deus  mil  et  siet  cens  livrées  de 
terre  par  an  au  tournois  deus  mile  et  siet  cens  boniers  de  bos 
en  notre  forest  de  Soigne,  au  plus  près  de  le  Vure,en  quanque 
nos  avons  de  bos  entre  Duseborch  et  le  voie  ki  va  de  Holers  à 
Brosele,  hors  dou  parc,  liquels  bos  vaut  en  surame,  par  loïal 
mesure,  deus  mile  quatre  cens  et  cincquante  boniers  de  bos, 
etpor  parfaire  le  summe  de  son  doaire,  il  li  ont  assis  dedens 
le  parc,  au  plus  près  de  le  Vure,  deus  cens   et  cincquante 


(1)  Ophem  près  de  Brusseghem. 

(2)  Cobbeghem. 

(3)  Beiteghem,  grande  ferme  à  Cobbeghem,  qui  appartenait  à  Tabbaye 
deSaint-Bavon,  de  Gand. 

(4)  Beckerzeel, 

(5)  Sempst. 

(6)  Weerde  près  de  Sempst. 

(7)  Sordonck,  ferme  située  à  Hombeek  près  de  Malines  et  dont  nous 
avons  eu  occasion  de  parler  dans  notre  travail  sur  le  duc  Henri  III. 

(8)  Nouvelle  preuve  qu'aux  environs  de  Bruxelles  il  y  avait  alors  d'im- 
portants vignobles. 

(9)  C'est-à-dire  eaux  :  étangs,  pêcheries. 

(10)  Forfais  ou  amendes  de  justice. 

(11)  Reliefs,  droit  de  mutation  perçu  sur  les  6efs. 

(12)  11  se  prélevait,  au  moyen  âge,  sous  le  nom  de  droit  de  congé,  un 
véritable  droit  de  mutation  consistant  en  un  dixième  ou  un  vingtième  de 
la  valeur  du  bien  vendu  ou  hypothéqué;  ce  droit  se  percevait  au  profit 
du  seigneur  de  l'endroit. 


(  393  ) 

boniersdebos,  mesurés  et  bonnes  (1)  en  tel  manière:  li  uns  des 
bonnes  (2)  est  assis  à  Putdalc,  devers  le  Vure,  li  antres  est  assis 
sor  le  voie  dou  Moulin,  li  tiers  est  assis  à  Chabolfontninne,  li 
quars  est  assis  à  le  kiewe  dou  vivier,  li  cincimes  est  assis  en  le 
voie  ki  soloit  aler  d'iske  à  Brosele,  li  sissimes  est  assis  h  le  taille 
del  Goulich,  li  sietimes  est  assis  en  celé  taille  meismes  h  quatre 
boniers  près,  li  wilimes  fu  assis  dencosle  le  palich,  sor  le  vies 
foss^t  del  Parc.  Les  bonnes  devant  dites  firent  li  devant  dit 
priseur  asseoir  devant  els  en  lor  présence  et  par  devant  bonc 
gent.  Là  furent  présent  mesire  Henris  de  Ricxentsart  (3),  me- 
sire  Willaumes  de  Liere,  chevalier;  mesire  Pieres  de  Loher- 
raine,  chapelains  le  conte  devant  nommet;  Nicholes  de  la 
Pierre,  maistres  Jehans  de  l'Arche,  adonc  venderes  de  nos 
bos;  Jehans  de  Beudenghen,  Jehans  Pipeken  ,  eschevins  de  le 
Vure;  Jehans  de  Welewe,  Henris  d'Yske  li  clers,  Nicholes 
d'Ouden,  Ernols  de  Lakeborne,  Schavars,  Jehans  Dantonnai, 
mesureur;  Amelric  la  Purpre,  Gilles,  ses  frères;  Jehans  de 
Toulete,  canonies  d'Abeville,  et  Jehans,  clers  monsegneur 
Pierron. 

Et  est  asavoir  que  li  priseur  devant  dit  ont  prisiet  en  lor 
assise  et  lor  prissie  del  doaire  devant  dit,  chascun  mui  de  blé 
XII  s(ous)  de  Lovegnois,  au  mui  de  Lovaing;  chascun  mui 
d'avainne,  au  mui  de  Lovaing,  cinq  s.  de  Lovegnois;  chascun 
chapon  sis  deniers  Lovegnois,  chascun  bonier  de  bos  de  le 
forest  de  Sogne  vint  s.  de  Tornois,  chascun  boniers  des  viviers 
trente  s.  de  Lovegnois.  Après  li  devant  dit  priseur  ont  dit  en 
lor  prissie  et  le  volons  ensi  et  ottroions  que  la  devant  dite 


(1)  C'est-à-dire  abornés. 

(2)  Ou  bornes. 

(3)  Henri  de  Rixensart,  chevalier,  fut  l'un  des  plus  fidèles  vassaux  de 
Jean  l*»-,  à  la  suite  de  qui  il  mourut,  en  1283,  pendant  une  campagne 
tentée  par  le  roi  de  France  dans  le  royaume  d'Aragon. 


(  394  ) 

Margcrite,  notre  fcme,  aura  en  toutes  les  viles,  en  tos  les  bos  et 
en  tos  les  lius  devant  nomée  totes  justices  hautes  et  basses  et 
totes  segnories,  autretans  que  nos  aviens  au  jor  que  nos  Tes- 
pousaraes.  Et  porra  faire  la  devant  dite  Margerite,  par  le  dit 
et  par  l'assise  des  présentes,  et  par  notre  assentement,  quite- 
raent  et  en  pais,  tolc  se  vie,  son  porfit  et  se  volentet  de  tos  les 
bos  en  la  forest  de  Sogne  et  dehors,  si  cum  il  sunt  devant  nomé 
et  de  totela  terre  qu'il  li  ont  assise  pour  son  doaire,  s'il  ave- 
noit  que  li  doaires  li  escheist.  Et  doit  la  devant  dite  Margerite, 
par  le  dit  et  par  l'esgart  des  priseurs  devant  només,  retenir  et 
sostenir  le  chastiel  de  le  Vure  et  les  maisons  de  son  doaire,  as 
us  et  as  costumes  du  pais.  Et  doit  avoir  tos  les  homages  dont 
li  fief  et  les  tenances  sont  asis  dedens  son  doaire,  par  tos  les 
lius,  les  viles  et  les  baillies  devant  dites,  ne  ne  puet  le  devant 
dite  Margerite  bos  essarter,  ne  faire  paistre  bestes  en  bos  de- 
saagie.  Toutes  ces  choses  si  comme  eles  sunt  desus  escriles,  nos 
les  avons  en  covent  à  tenir  fermement  à  le  devant  dite  Marge- 
rite  et  à  garantir  tote  sa  vie  et  nos  obligons  à  ce  tôt  plainne- 
ment  et  nos  oirs  ausi,ki  après  nos  venront.  Et  por  ce  que  totes 
ces  choses  demorent  fermes  et  estables  et  que  nous  ci  après  ne 
puissiesmes  encontre  aler,  par  nos  ne  par  autrui,  ne  autres 
après  nos,  si  avons  nos  ceste  présente  chartre  saielée  de  no 
propre  saiel,  ki  fu  faite  et  donëe  à  le  Vure,  en  Tan  del  incar- 
nation Nostre  Scgnor  mil  CC  et  sissante  dis,  le  semedi  devant 
le  Nalivitet  Notre  Dame ,  el  mois  de  septembre. 

Original,  muni  du  sceau  du  duc,  où  Jean  I" 
est  vêtu  en  damoisel.  Ibidem ,  1.  c.  n"  S*. 


(  395  ) 


IX. 


QUALITER    DUX    BrABANTIE  PROMISIT    IRE    IN   TeRRAM    SANCTAM   CUW 

(rege  Philippo.)  Le  duc  Jean  P'' s'engage,  envers  le  roi  de 
France,  à  l'accompagner  à  la  Terre  Sainte. 

8  septembre  1274. 

NousJehans,  dus  de  Brabant  et  de  Loherreine,  fesons  à 
savoir  à  tous  ceus  qui  sont  et  qui  seront,  que  nous  nous  obli- 
gons  et  prometons,  par  le  foi  de  notre  cors,  que  nous  avons 
bailliée  sur  ce,  que  nous  irons  avec  notre  très-haut  seigneur, 
Phelippe,  par  la  grâce  de  Dieu  noble  roi  de  France,  en  sa  com- 
paignie,  es  parties  de  la  Sainte  Terre  d'Outremer,  se  il  avient 
que  il  i  aille,  en  tele  manière  que  se  il  avient  par  aucun  em- 
peechement que  il  ni  puisse  aler,  ou  que  il  ni  voist  pas,  nous 
ne  voulons  estre  tenuz  ne  obligiez  en  aucune  manière  par 
ceste  promesse  d'aler  es  parties  desus  dites,  se  nous  ne  le  vou- 
lons fere  de  notre  propre  volenté.  En  tesmoing  de  la  quele 
chose  nous  avons  fet  mettre  notre  seel  à  ces  présentes 
letres. 

Données  à  Paris  en  l'an  de  Nostre  Seigneur  mil  deuz  cenz 
soixante  et  quatorze,  le  feste  de  la  Nativité  Notre-Dame. 

Original,  scellé  du  sceau  du  duc.  Ibidem,  I.  c,  n»  6. 


(  596  ) 


(Lettres  de  quittanchez  al  ville  de  Nivelle  d'une  somme  d'ar- 
gent.) Isabelle,  abbesse  de  Nivelles,  donne  quittance  à  la 
ville  de  ce  nom  de  soixante  livres  qui  lui  étaient  dues  pour 
la  fondation  d'une  chapellenie. 

Septembre  1273. 

Nous  Ysabiaul,  par  la  grasse  de  Dieu,  abbesse  de  Nivelle, 
et  le  capilles  mimes  liu ,  à  tous  chiaus  ki  cest  lettre  veront  et 
oront  salus  et  cognoistre  veriteit.  Nos  faisons  savoir  à  tos  que 
nous  avons  recbuit  à  le  ville  de  Nivelle  LX  libres  de  Lovignois, 
de  cent  libres  que  li  ville  de  Nivelle  devant  ditte  devoiet,  por 
faire  une  cappellerie  en  l'église  de  Nivelle,  ke  li  ville  eut  en 
couvent  à  payer  quant  om  fist  pais  de  débat  qui  fut  entre  me 
damme  Odain,  jadis  abbesse  de  Nivelle,  et  les  bourgois  de 
Nivelle  de  le  commugne.  Et  nos  avons  en  couvent  que  se  nuls 
de  bourgois  de  Nivelle  avoet  paene  ou  damage  por  le  paement 
des  LX  libres  devant  dittes,  ki  a  nos  est  fais,  nos  les  en  deli- 
vercriens  en  quitte  pais,  et  ke  nos  les  renderons  por  acbateir 
rente  aous  le  cappellerie  devant  dilte.  En  tesmonage  de  laqueil 
chose,  nos  en  avons  donées  nos  letres  saeellées  de  nos  saias,  à 
le  ville  devant  dilte. 

Che  fut  fait  en  l'an  del  incarnation  Jhesu-Crist  M.CC.  et 
LXXIII,  ou  moes  de  septembre. 

Cartulaire  du  chapitre  de  Nivelles ,  f»  266. 


(  397  ) 


XI. 


Jean,  duc  de  Brabant,  s'engage  à  payer,  à  quatre  termes 
qu'il  détermine,  la  somme  de  3,512  livres  de  Flandre,  qui 
étaient  encore  dues  à  Marguerite ,  comtesse  de  Flandre  et 
de  Hainaut,  comme  arrérages  de  la  dot  de  Béatrix ,  dame 
de  Cour tr ai. 

20  novembre  4268. 

Joo  Jehans,  dus  de  Brebant,  fais  à  savoir  à  tous  ke  comme 
le  convenance  du  mariage  ki  fu  fais  entre  noble  homme  Guil- 
laume, jadis  conte  de  Flandres,  et  ma  chiere  anle  madame  Béa- 
trix, dame  de  Courtray,  remaignent  encore  à  paier  à  noble 
dame,  madame  Margheriete ,  contesse  de  Flandres  et  de  Hay- 
naut,  en  tout  trois  mil  et  chine  cens  et  douze  libres  de  le 
monnoie  de  Flandres  a  boen  conte  à  venir,  li  queil  denier  de 
ce  mariage  estoient  deviseit  et  assenei  à  payer  à  li  contesse 
devant  dite  de  ces  trois  mil  et  chine  cens  et  douze  livres,  ai 
en  couvent  et  promis  et  promet  à  rendre  et  à  paier  à  le  de- 
vant dite  contesse  ou  à  son  certain  commant,  comme  ma 
propre  dette,  à  Gant  ou  à  Alost,  as  termines  ci-après  nommés. 
Ce  est  à  savoir  la  première  quarte  partie  de  la  devant  dite 
somme  à  che  prochain  Noeil,  la  seconde  à  la  Nativiteit  Saint- 
Jehan-Bapliste  prochainement  suiwant  après,  la  tierche  à 
Noeil  suiwant  après  et  la  daraine  quarte  partie  à  la  Nativiteit 
Sain-Jehan-Bapliste  suiwant,  ki  sera  en  l'an  del  Incarnation 
mil  deus  cens  sissante  et  dys,  et  se  il  avenoit  que  je  fuisse  en 
defTaute  de  payer  aucun  de  ces  paiemens  à  termines  ki  num- 
meit  sunt  et  le  contesse  devant  dite  en  a  voit  cous ,  ne  damage, 
ne  fcist  empruns  ou  despens  pour  chose  dou  jours  de  paiement 
seroit  passées,  je  li  ai  en  couvent  et  promet  ke  je  li  renderai 
tout  entièrement  à  son  plaint  dit,  sans  à  autre  provanche  et 


(  398  ) 

sans  li  somme  dou  paiement  ou  des  paiemens  dont  je  seroie 
defaillans  a  amenri.  Et  de  che  tenir,  si  comme  dit  est,  met  je 
tous  mes  biens  meubles  et  non  meubles,  ke  jou  ai  et  aurai  en 
son  abandon,  ke  elle  les  puist  prendre  et  faire  prendre  et 
saisier  et  vendre  et  despendre  en  mon  boen  conduit  sens 
meffaire,  tant  ke  ele  soit  plainement  payé  de  la  devant  dite 
somme  à  boen  conte  à  venir  et  de  cous,  de  damages  et  de 
despens,  se  il  istoient  si  avant  ke  deviseit  est. 

En  tesmoignage  de  che  lettres  ki  furent  faites  et  douées 
en  l'an  del  incarnation  Nostre  Signeur  mil  et  deus  cens  et 
sissante  et  wyt ,  le  lundi  après  les  octaves  Saint-Martyn 
hyeraale. 

Cartulaire  du  Brabant  ci  lé,  fol.  85  v. 


XII. 


Renaud j  comte  de  Gueldre,  promet  de  faire  exécuter  la  sen- 
tence qui  sera  rendue  entre  le  duc  de  Brabant  et  les  per- 
sonnes accusées  de  la  mort  du  chevalier  René  de  Hese. 

1d  avril  1274. 

Nos  Raynaldus,  cornes  Gelrie,  notum  facimus  universis 
présentes  litteras  inspecturis,  quod  nos  illustri  principi  Jo- 
hanni,  Dei  gratia  duci  Lotharingie  et  Brabantie  et  consan- 
guineo  nostro  karissimo,  promittimus  per  présentes  quod  si 
nobilis  vir  Arnoldus  de  Wilre,  miles,  et  sui  consanguinei  et  in 
terra  nostra  commorantes  recusaverint  comparare  in  festo 
beati  Jacobi  apostoli  nunc  instante  apud  Rode  Sancte  Ode  (1), 


(1)  Sinl-Odenrode ,  près  de  Bois-le-Duc. 


(  399  ) 

ubi  ad  dictuni  dicm  dictus  dominus  dux  prefixit  eisdcm  diem, 
qiiod  de  quercla  niortis  Rciieri  de  IIcsc,  militis  ,  proponant 
quod  voluerint,  ubi  ctiam  dictus  dominus  dux  pcr  se  vcl  per 
alium  ad  proposita  respondcrit,  et  si  volucrit  acquiescere  sen- 
tenciali  pronunciationi  ,  quani  aliquis  nobilium  Iiominuin 
dicli  domini  ducis,  cui  pronuncialionem  liujusniodi  super  pro- 
positis  et  responsis  sub  debilo  prestite  fidelitatis  comnïiserit 
faciendam,  vel  si  forte  magis  elegerit  stare  dictis  aut  ordina- 
tionibus  Walteri  Bertaulb,  domini  Mechliniensis;  Henrici, 
domini  de  Bautersheim  ;  domini  Roberti  de  Hoesden ,  Wil- 
lelmi,  domini  de  Bronehorst;  Gerardi,  domini  de  Batenborch, 
et  Willelmi,  domini  de  Hernen(l),  qui  inter  dictum  dominum 
ducem  et  nos  super  causis  et  querelis  quibuslibet  sunt  ordi- 
natores  et  modéra  tores  statuti,  et  eorura  ordinacioni,  quam 
sccundum  jus  inter  predictos  dominum  ducem  et  Albertum 
et  suos  consanguineos  declarabunt  parère  noiuerint  {sic)  y  nos 
extunc  dominum  Albertum,  Jacobum  consanguineum  suum  et 
Theodericum  de  Lente,  complices  ipsius  Alberti,  diffîdaviraus 
eteos  extra  terram  nostram  et  nostrum  dominium  repellemus, 
bonis  eorum  eos  privabimus  et  eadem  bona  ipso  domino  nostro 
duci  vel  ei,  cui  ipse  mandaverit,  assignabimus  et  in  posses- 
sione  ipsorum  honorum  eum  tamquam  dominus  tuebimur  et 
defendemus.  In  eujus  rei  testimonium  présentes  litteras  eidem 
domino  nostro  duci  dedimus  sigillo  nostro  munimine  robo- 
ratas. 

Datum  anno  Domini  millesimo  ducentesimo  septuagesimo 
quarto,  in  dominica  qua  cantatur  Misericordia  Domini,  apud 
Buscum  ducis. 

Cartuîaire  de  Brabant  cité,  fol.  83  v». 


(1)  Herpen? 


(  400  ) 


XIII. 


Nicolas  de  Suhburch,  halli  de  la  Ziiyd-Holland  de  concert 
avec  le  chevalier  Nicolas  de  Cats ,  accorde  \in  sanf'-conduit 
aux  Brabançons  pour  venir  en  Holland. 

5  décembre  1275. 

Universis  presentia  visuris  Nicholaus  de  Subburch,  ballivus 
Zuethollandie,  salutem  cum  noticiam  verilalis.NoUim  facimus 
universis  présentes  litleras  visuris  quod  nos  de  pannitione 
et  discordia  habita  hue  usque  inter  bomines  domini  ducis 
Branbantic(l),  ex  una  parte,  et  liomines  domini  nostri  comitis 
HoUandie,  ex  altéra,  scilicet  de  hominibus  de  HoUandia,  de 
consilio  hominorum  dicti  domini  nostri  comitis  et  precipue 
domini  Nycbolai  de  Catse,  militis,  ae  mandati,  cum  nobili  viro 
domino  Egidio  dicto  Bertoldo,  de  aliis  hominibus  domini 
ducis  talem  de  dictis  discordiis  et  panniciis  fecimus  ordina- 
tionem,  scilicet  quod  nos  recipimus  ex  parte  domini  ducis 
comitis  et  nostra  in  noslro  conductu  omnes  homines  terre 
Brabantie  in  terram  Hollandie  venientes  ac  commorantes,  re- 
deuntes  et  excientes  pro  sue  libito  voluntatis,  usque  ad  festum 
beati  Johannis  Baptiste  proximo  venturum,  et  nos  predictos 
homines  Brabantie  de  nobis  et  hominibus  domini  nostri  comi- 
tis usque  ad  diem  predictum,  de  omnibus  pandiciis  assecura- 
vimus  et  nos  Nycholaus  miles  dictus  de  Catse  predictum  con- 
ductum  ratificamus  et  sicut  est  suprascriptum  observari  facie- 
mus.  In  cujus  rei  teslimonium  nos  Nycholaus  de  Catse  predictus 
miles  et  nos  Nycholaus  de  Subburgh  predictus  présentes  litte- 


(i)  Pour  Brabantie. 


(  401  ) 

ras  sigillonostroduximus  roborandas.Supcrscriplura  Brabantis 
approbamus. 

Datum  anno  Domini  millcsimo  ducentcsimo  septuagcsimo 
(juinlo,  in  vigilia  beati  Nycholai. 

Cartulaire  de  Brabant  cité,  fo!.  86. 


XIV. 


Sifridj  archevêque  de  Cologne,  prie  les  juges,  les  échevins, 
les  consuls  [oit  jurés)  et  tous  les  bourgeois  de  Louvain,  de 
Bruxelles  et  des  autres  villes  du  Brabant,  d'insister  auprès 
du  duc  Jean  pour  la  conclusion  de  la  paix  avec  le  comte  de 
Juliers. 

23  février  1277? 

Sifridus,  Dei  gratia  Coloniensis  ecclesie  archiepiscopus,  Sacri 
Imperii  per  Ytaliara  archicancellarius,  judicibus,  scabinis,  con- 
sulis  et  universis  burgensibus  Lovaniensis,  Bruxellensis  ac 
aliorum  oppidorum  Brabantie  salutem  et  sincerum  affectum. 
Inter  alias  soUicitudines  nostras  quibus  fréquenter  premimiir, 
illa  specialiter  insidet  cordi  nostro  et  augit  mentein  nostram 
qualiter  vobis  aliisque  mercaloribus  tranquillitatem  procure- 
mus  et  pacem,statumqiie  patrie  qui  nimis  heu  inequalisfuitet 
lurbidus,  facientibus  hoc  lalruncuhs  et  predonibus  in  villis 
latenlibuset  in  castris,adequaHtatemdebitamdeducamus. Sed 
conlra  hoc  insurgit  nobilis  vir  cornes  Juliacensis,  hujusmodi 
predonum  et  latronura  publicus  defensator,  nos  et  ecclesiam 
nostram  Coloniensem  incendiis  devastans  et  rapinis,  in  hoc 
non  parceris(l)ordini,  sexuiveletati,  et  quod  abomnihumana 

(1)  Lisez  :  parciens. 

2*"*  SÉRIE,  TOME  XL.  26 


(  402  ) 

ratione  prorsus  est  alienum,  munasterium  ordinisCysterciensis 
hostilileraggreditur,  viclu  quamquam  tenui  spoliât  et  permit- 
tit  depredari.  Porro  nos  ad  counnicendam(l)ejus  maliciam  ex- 
hibuimus  quod  magnifico  viro,  domino  Brabantie,  committere 
velleraiis  causam  nostram,  qui  quidem  dux,  tamquam  preci- 
puus  inter  alios  terre  principes  magnalos,  boni  status  zelator  et 
pacis,  nuncios  suos  sollertos,  fratrem  Wulfardum  et  nobilem 
virum,  dominum  de  Baltersbem,  propter  hoc  ad  partes  nostras 
deslinavit,  ut  eis  mediantibus  aliqua  posset  intervenire  pax  in- 
ter nos  etcomitera  rnemoratum.  Et  licet  super  hoc  prudenter 
laborarentur,  quamquem  a  nobis  haberent  potestatera  omnia 
prout  ipsis  visum  fuissent  expediens  complanandi,  dictus  co- 
rnes adaliquam  pacem  se  flectere  curavit.  Universilatem  igitur 
vestram  rogamus  quatinus  ipsi  domini  duci  grates  ex  parte 
nostra,  iramo  et  nostro,  referre  velitispro  eo  quod  jam  sincère 
interponere  noluit  (2)  partes  suos,  cujus  adhuc  beneplacitis 
et  ordinalioni  parati  sumus  stare,  scire  vos  yolentes  quod  ad 
nostra  (3)  commoda  et  protectiones  semper  volumus  esse 
prompti. 

Datum  Legonich,  VIP  kalend.  marcii. 

Cartulaire  de  Brahant  cité,  folio  58. 


(1)  Pour  conviDcendam. 

(2)  11  faut  évidemment  voluit. 
(5)  Veslra  ? 


(  403  ) 


XV. 

(Heynsberch.)  Thierri ,  seigneur  de  Heinsberg,  devient  le 
vassal  de  Jean,  duc  de  Brabant ,  pour  une  rente  annuelle 
de  tOO  livres  de  Louvain,  que  le  duc  lui  assigne  sur  le 
produit  de  la  halle  aux  draps  de  cette  ville. 

22  juin  1267. 

NosTheodericus,  dominus  de  Heynsberghe,  notum  facimus 
universis  présentes  litteras  inspecturis,  quod  illiistris  prin- 
ceps  Johannes,  dux  Lotharingie  et  Brabantie  et  raarehio  Im- 
perii,  nobis  redditus  centum  librarum  Lovaniensium  con- 
tulit  in  feodiim  et  de  dictis  redditibus  nos  et  nostros  heredes, 
dominos  de  Heynsberch ,  infeudavit,  nosque  ratione  feudi 
hujusmodi,  nos  et  nostros  heredes,  dominos  de  Heynsberch, 
predicto  Johanni  et  ejus  heredibus,  ducibus  Brabantie,  ad 
homagium  astrinximus,  servicium  et  fidelitatem  ,  et  cisdem 
assistere  et  servire  tenemur  et  eosdem  juvare,  qiiemadmo- 
dum  homo  fidelis  dominum  sunm  juvare  et  eidem  assistere 
alque  servire  tenetur.  Assignavit  autem  dictus  Johannes  nobis 
redditus  predictos  annuatim  percipiendos  apud  Lovanium  de 
redditibus  domus  pannorum  de  ponttol  ibidem  et  clawiren, 
tribus  in  anno  terminis  :  tertiam  videlicet  partem  in  festo 
Omnium  sanctorum  et  aliam  etiam  partem  ad  Pascha,  reli- 
quam  vero  terciam  partem  in  festo  beatorum  Pétri  et  PauH 
apostolorum.  Incipiet  autem  tempus  et  terminus  receptionis 
in  festo  Omnium  sanctorum  proximo  futuro.  Poterunt  autem 
prediclus  Johannes  et  ejus  Hber,  dominus  Brabantie,  diclos 
redditus  redimere  et  liberare  pro  mille  hbras  Lovanienses, 
queUbct  quinquagenta  hbre  videhcet  pro  quingentis  liberis  (I) 

(I)  Lisez  :  libris. 


(  404  ) 

nionete  predicte,  ita  videlicet  quod  quandocunque  quingente 
libre  Lovanienses  nobis  vel  nostris  heredibus  fuerint  perso- 
lute,  extunc  alie  quinquaginla  predictariini  centum  librarum 
ad  ipsum  Johannem  vel  ejus  heredes  libère  revertentur  et 
absolute,  et  sic  fiet  de  reliquis  quinquaginla  libris.  Cum 
autem  dicta  pccunia  mille  librarum  vel  quinquagintarum 
librarum  nobis  vel  nostris  heredibus  ab  ipso  Johanni  vel  suis 
heredibus  fuerit  pcrsoluta,  deponetur  eadem  pecunia  apu4 
monasterium  Vallis  Dei  ,  Cistercicnsis  ordinis ,  Leodiensis 
dyocesis,  donec  de  ipsa  pecunia  bona  aliqua  ad  valorem  red- 
dituum  prediclorum  emere  poterimus  vel  comparare,  vel  de 
allodio  nostro  redditus  ad  valorem  predictam  assignare.  Et 
bona  sic  empta  vel  assignata  nos  vel  nostri  heredes  in  manus 
Johannis  ducis  predicti  vel  qui  pro  tempore  dux  fuerit  Bra- 
bantie,  reportabimus  et  ab  ipsis  ea  in  feodum  recipiemus. 
Debebit  autem  feodum  hujusmodi  integrum  semper  pênes 
dominum  de  Heynsberch  permanere,  nec  ab  eo  dividi,  vendi 
vel  aliquatenus  alio  modo  poterit  alienari,  absque  volun- 
tatem  ducis  Brabantie  et  expresse  consensum.  In  cujus  rei 
testimonium  présentes  Htteras  sigillo  nostro  duximus  robo- 
randum. 

Datum  anno  Domini  millesimo  CC.  LXVIl,  feria  quarta  ante 
festum  beati  Johannis  Baptiste. 

Carluïaire  de  Brabant  cité,  fol.  24. 


—  M.  Charles  Piot  a  donné  ensuite  lecture  de  la  pre- 
mière partie  d'une  notice  intitulée  :  La  diplomatie  concer- 
nant les  affaires  maritimes  des  Pays-Bas  vers  le  milieu  du 
XVr  siècle  jusquà  la  trêve  de  Vaucelles. 

Il  continuera  cette  lecture  lors  de  la  prochaine  séance, 
tixée  au  lundi  8  novembre. 


(  405  ) 
CLASSE  DES  BEATX-ARTS. 

Séance  du  H  octobre  1815. 

M.  Alph.  Balat,  directeur. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MiM.  L.  Alvin,  L.  Gallait,  G.  Geefs, 
J.  Geefs,  C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Ed.  De  Busscher,  Aug. 
Payeo,  le  chevalier  LéoQ  de  Burbure,  J.  Franck,  Gust. 
De  Mail,  Ad.  Sirel,  Julien  Leclercq,  Ernest  Slingeneyer, 
Alex.  Bobert,  F.-A.  Gevaert,  Ad.  Samuel  et  A.  Pauli, 
membres;  F.  Slappaerts,  correspondant. 

M.  B.  Chalon ,  membre  de  la  classe  des  lettres ,  et  M.  Ch. 
Piot,  correspondant  de  la  même  classe ,  assistent  à  la 
séance. 


COBBESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  communique  un  projet 
d'arrêté  par  lequel  le  conseil  d'administration  de  l'Acadé- 
mie des  beaux-arts  d'Anvers  propose  de  remplacer  l'ar- 
rêté royal  du  28  février  1865  concernant  les  copies  à 
fournir  par  les  lauréats  des  grands  concours,  arrêté  qui 
se  trouve  virtuellement  abrogé  par  le  règlement  du  24  mai 
dernier  portant  réorganisation  générale  des  dits  concours. 

La  classe  renvoie  ces  pièces  à  la  commission  chargée 


(  406  ) 
de  dresser  la  liste  des  œuvres  d'art  à  reproduire  par  les 
lauréats  pendant  leur  séjour  à  l'étranger. 

—  La  classe  désigne  ensuite  MM.  Balat,  De  Man,  Payen 
et  Pauli  pour  examiner  s'il  y  a  lieu  d'appliquer  au  projet 
de  restauration  du  temple  de  Vesta  à  Tivoli,  par  M.  Diel- 
tiens  ,  l'article  17  du  nouveau  règlement  des  grands  con- 
cours. 

—  M.  Chalon,  membre  de  la  classe  des  lettres,  fait 
hommage  d'un  exemplaire  du  discours  d'ouverture  qu'il  a 
prononcé  comme  président,  le  4  juillet  dernier,  à  l'assem- 
blée générale  annuelle  de  la  Société  royale  de  numisma- 
tique. 11  offre  ensuite,  au  nom  de  M.  le  baron  Bernard  de 
Koehne,  associé  de  l'Académie  et  directeur  du  Musée  de 
l'Ermitage  à  Saint-Pétersbourg,  une  notice  intitulée  :  Le 
monete  ossidionali  cli  Brescia,  brochure  in-8^ 

La  classe  vote  des  remercîments  aux  auteurs  de  ces 
dons. 


PROGRAMME  DE  CONCOURS  POUR  1876. 

La  classe  s'occupe  de  la  formation  de  son  programme 
de  concours  de  1876  pour  lequel  les  deux  questions  sui- 
vantes ont  déjà  été  adoptées  l'année  dernière  pour  la  partie 
littéraire  : 

PREMIÈRE    QUESTION. 

Rechercher  tes  origines  de  Vécole  musicale  belge.  Dé- 
montrer jusqu'à  quel  point  les  plus  anciens  maîtres  de 
cette  école  se  rattachent  aux  déchanteurs  français  et  an- 
glais du  XII%  du  XIIP  et  du  XIV'  siècle. 


(  407  ) 

DEUXIÈME    QUESTION. 

Faire  l'histoire  de  la  céramique  au  point  de  vue  de 
l'art,  dans  nos  provinces,  depuis  l'époque  romaine  jus- 
qu'au XVIII'  siècle. 

La  valeur  de  la  médaille  dV,  attribuée  comme  prix  à 
chacune  de  ces  questions,  sera  de  mille  francs  pour  la 
première  et  de  huit  cents  francs  pour  la  seconde. 

La  troisième  question  du  programme  de  1875  :  Faire 
l'histoire  de  l'école  de  gravure  sous  Rubens,  n'ayant  pas 
donné  lieu  à  une  réponse,  formera  la  troisième  question 
du  programme  de  1876.  Un  prix  de  huit  cents  francs 
lui  sera  également  attribué. 

Conformément  à  l'article  13  du  règlement  intérieur, 
une  commission  composée  de  MM.  Balat ,  Payen ,  De  Man , 
Pauli  et  Alvin  ,  s'occupera  du  choix  d'une  quatrième  ques- 
tion qui  concernera  l'architecture. 

D'après  le  roulement  établi  pour  les  sujets  d'art  appli- 
qué, la  commission  s'occupera  aussi  du  soin  de  choisir  un 
sujet  d'architecture  pour  cette  partie  du  concours. 

MM.  Gevaert,  le  chevalier  de  Burbure  et  Samuel  pro- 
posent comme  sujet  musical  :  «  une  messe  solennelle  à 
quatre  voix  mixtes,  pour  le  jour  de  Pâques,  avec  la  prose 
Victimœ  Paschali  et  l'offertoire  du  jour.  Le  compositeur 
tâchera  de  ne  pas  dépasser  la  durée  normale  du  service 
religieux. 

d  La  messe  devra  être  entièrement  inédite.  » 

Toutes  les  dispositions  complémentaires  et  réglemen- 
taires concernant  ce  programme  seront  prises  dans  la 
prochaine  séance. 


(  408  ) 


RAPPORTS. 


M.  Éd.  Félis,  chargé  d'examiner  une  lettre  par  laquelle 
M.  T.  Baner,  architecte  à  Paris,  demande  divers  renseigne- 
ments relatifs  au  mémoire  couronné  de  M.  Alexandre 
Pinchart,  sur  la  tapisserie  de  haute  lisse  aux  Pays-Bas, 
propose  Tordre  du  jour  sur  cette  communication.  — 
Adopté. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Quelques  lettres  de  la  correspondance  de  Grétry  avec 
Vitzihumb;  notice  par  M.  Ch.  Piot,  correspondant  de 
l'Académie. 

Les  correspondances  des  hommes  d'élite  les  font  con- 
naître, dit-on,  dans  leur  intimité.  Celle  de  Grétry  avec 
Ignace  Vilzthumb  a  en  outre  l'avantage  de  révéler  diffé- 
rentes particularités  concernant  les  œuvres  du  célèbre  com- 
positeur liégeois  et  le  théâtre  de  Bruxelles. 

Vitzthumb,  chef  d'orchestre  de  ce  théâtre,  musicien  dis- 
tingué et  compositeur,  avait  pris  la  direction  de  la  scène 
de  Bruxelles,  de  concert  avec  Compain.  Les  octrois,  qui 
leur  en  donnaient  le  privilège  exclusif,  datent  des  30  juin 
1766  et  14  août  1771. 

Depuis  la  concession  de  ces  actes,  la  cour  et  le  public 


(  i09  ) 
étaient  devenus  très-exigeanls.  La  tragédie  et  la  comédie 
ne  les  satisfaisaient  plus.  Il  fallait  un  plus  grand  nombre 
de  représentations  consacrées  à  dos  pièces  mêlées  de  mu- 
sique et  à  Topera  bouffe  surtout.  On  est  ici,  disait  Vitz- 
thumb,  dans  une  lettre  adressée  à  Moreau,  beaucoup  plus 
amateur  du  comique  que  du  sérieux,  et  de  la  musique  que 
delà  déclamation.  Pour  attirer  les  spectateurs,  il  fallait  de 
la  musique.  Celle  de  Grétry  obtenait  dans  ce  moment  toutes 
les  faveurs  des  Bruxellois. 

Pareilles  exigences  amenaient  nécessairement  un  sur- 
croît de  frais,  auxquels  les  directeurs  ne  pouvaient  plus 
faire  face.  Par  exemple,  pendant  les  deux  premiers  mois 
de  Tannée  théâtrale  de  1777  à  1778,  les  comptes  consta- 
tent une  dépense  de  1?  18,182-0-1  Vô  et  une  recette 
de  17,910-17-4;  par  conséquent,  un  déficit  de  fl^  271- 
2-9  V3. 

Pendant  une  autre  année  le  compte  accuse  une  recette 
de  fl^  00,552-5-11  et  une  dépense  de  55,782-10-2,  donc 
encore  un  déficit  de  251-6-10.  Durant  Tannée  théâtrale  de 
1772  à  1775  les  dépenses  s'étaient  élevées  à  un  chiffre 
bien  plus  considérable  encore.  Elles  étaient  réparties 
comme  suit  : 

ActPurs  et  actrices 38,030-  0-3 

Opéra  et  ballet 27,563-  4-7 

Pensionnaires  et  gagistes        ....  6,533-10-9 

Personnes  sans  emploi  désigné    .    .     .  4,228-16-3 

Orchestre 11,719-  3-9 

Total.     .     .  û^     88,109-13-9 

On  le  voit  les  dépenses  augmentaient  toujours  (1).  Enfin 

(1>  Nous  donnons  ici  en  note  les  emplois  des  acteurs  et  des  actrices  à 


(  410  ) 
elles  surpassaient  les  ressources  des  directeurs,  artistes  sans 
fortune,  qui  avaient  été  obligés  d'emprunter  de  l'argent 


celle  époque,  avec  indication  de  leurs  appointements  en  livres,  au  théâtre 
de  Bruxelles  : 

Emplois  de  la  comédie. 

Livres. 

Premier  rôle  tragique  et  comique,  S'-Fal 6,000 

Fort  premier,  rois,  raisonneurs,  elc.,Bursai 4,000 

Père  noble,  rois,  etc,Vanhove  ou  N 4,000 

Jeune  premier,  N 3,000 

Premier  comique,  Baltos 7,000 

Manteau,  financiers,  etc..  Pin 5,000 

Crispin,  marquis  ridicules  et  Poisson,  N 5s600 

Troisième  rôle  et  à  récits,  N 2,000 

54,600 
Mesdames  : 

Premier  rôle  tragique  et  comique,  M^  Bursai 4,000 

Premier  rôle  en  partage  et  grande  coquette,  Goault     ....  6,600 

Reine,  mère  noble,  eic,  N 4,000 

Première  soubrelle,  N 5,600 

Premier  caractère  et  deuxième  duègne,  N 3,600 

Deuxième  soubrette,  N 1,500 

Seconds  caractères,  N 1,500 

20,800 
Opéra. 

Première  haute-contre,  N :    •     •  6,000 

Seconde  haute-contre  et  Colins,  N 3,000 

Première  bas.se-tail le,  Chenaud 4,000 

Première  en  partage,  Mees 4,000 

Premier  Laruelte,  Bultos « 

Second  Laruette,  Berger 2,000 

Mesdames  : 

Première  chanteuse,  Rogier 5,000 

Première  en  double,  Schitiiens 2,400 

Rôle  de  Beaupré  et  Dugazon.  Mees 3,000 

Première  duègne,  Goault "^ 


Total.     .    .     .    84,800 


(  411  ) 
pour  faire  face  aux  premiers  frais.  Ils  demandaient  en  con- 
séquence à  l'État  de  pouvoir  se  retirer  de  la  direction, 
moyennant  une  indemnité  raisonnable  à  leur  payer  par  les 
futurs  entrepreneurs.  Une  bonne  partie  de  ces  dépenses 
ayant  été  employée  à  l'embellissement  de  la  salle  du 
théâtre,  ils  croyaient  leur  demande  très-bien  justifiée.  Ils 
sollicitaient,  disaient-ils,  cette  somme  pour  la  faire  servir  à 
éteindre  leurs  dettes.  Dans  les  requêtes  qu'ils  adressè- 
rent à  ce  sujet  au  gouvernement,  ils  firent  connaître,  en 
termes  assez  vagues,  la  triste  position  de  l'entreprise,  en 
se  servant  de  mois  peu  convenables  et  de  phrases  ressem- 
blant singulièrement  à  des  récriminations.  La  cour  du 
prince  Charles  de  Lorraine,  gouverneur  des  Pays-Bas  au- 
trichiens, s'en  irrita.  De  Neny,  président  du  conseil  privé, 
chargé  de  diriger  toutes  les  affaires  grandes  et  petites,  s'en 
montrait  très-piqué.  Loin  d'accorder  aux  pétitionnaires 
leur  demande,  le  gouvernement  exigea  la  mise  à  exécu- 
tion très-rigoureuse  du  contrat.  Ils  furent  obligés  de  faire 
agréer  par  la  cour  les  acteurs  et  actrices  engagés,  tandis 
qu'ils  voulaient  jouir,  sous  ce  rapport,  de  la  liberté  la  plus 
grande,  pour  ménager  les  dépenses.  L'orchestre  devait  être 
mieux  soigné  et  avoir,  aux  représentations  ordinaires, 
l'importance  de  l'opéra,  afin  de  pouvoir  exécuter,  pendant 
les  repos,  des  symphonies  bien  choisies.  Burney  fait  en 
effet,  dans  son  livre  intitulé  :  The  présent  state  of  music, 
le  plus  grand  éloge  de  ces  symphonies  et  de  Vitzthumb, 
qui  les  dirigeait.  Le  gouvernement  fit  observer  aussi  que, 
contrairement  à  leurs  obligations,  les  directeurs  accor- 
daient souvent  des  congés  aux  artistes,  ou  bien  ils  dispen- 
saient les  principaux  acteurs  de  remplir  les  rôles  pour  les 
remplacer  par  des  sujets  peu  capables.  C'était  les  résul- 
tats des  pérégrinations  que  les  directeurs  faisaient  en  pro- 


(  412  ) 
vince  avec  la  troupe,  et  la  suite  nécessaire  des  permissions 
qu'ils  donnaient  aux  musiciens  de  l'orchestre  d'assister 
aux  représentations  théâtrales  données  dans  les  rési- 
dences des  grands  seigneurs  de  cette  époque  (1).  La 
durée  du  spectacle  prescrite  par  le  règlement  n'était 
pas  même  observée.  Parfois  il  finissait  avant  huit  heures, 
parfois  il  durait  jusqu'après  dix  heures  sonnées.  A  cette 
époque  le  spectacle  devait  commencer,  selon  les  disposi- 
tions en  vigueur,  au  plus  tard  à  6  heures  et  Vi  et  ne  pouvait 
finir  avant  8  heures  ^/^,  ni  durer  au  delà  de  9  heures  et  *k. 


(1)  Les  meilleurs  musiciens  du  théâtre  avaient  été  appelés  à  embellir  une 
fête  chez  le  duc  d'Areiiberg,  à  Héveilé.  Vilzihumb  avait  beau  écrire  pour 
les  faire  revenir, le  duc  ne  voulut  pas  le  leur  permettre,  et  les  représenta- 
lions  restaient  en  souffrance  à  Bruxelles.  Voici  au  sujet  de  celte  fêle  une 
lettre  du  comte  de  Figuerola,  adressée  à  Vilzihumb  : 


J'ai  reçu  votre  lettre,  Monsieur,  je  Tay  communiquée  à  M.  le  duc;  mais 
j'avois  prévu  sa  réponse.  Il  ne  m'a  pas  été  possible  d'obtenir  le  retour  de 
vos  messieurs.  Il  veut  absolument  les  garder  icy  pendant  le  lems  que  sa 
compagnie  y  restera. 

Pour  moy,  je  pense,  qu'en  retardant  encore  de  quelques  jours  votre 
représentation  d'Ernelinde,  ce  relard  ne  pourra  que  vous  être  favorable, 
d'autant  plus  que  je  crois  que  les  Anglais  qui  sont  icy,  s'arrêteront  à 
Fîruxelles  Je  suis  fâché  de  n'avoir  pu  dans  ce  moment-cy  vous  donner  des 
preuves  de  l'envie  que  j'ay  de  vous  faire  plaisir. 

Je  suis  parfaitement,  Monsieur,  votre  très-humble  serviteur. 

Le  comte  DE  FIGUEROLA, 

Si  le  comle  de  Figuerola  était  le  très-humble  serviteur  de  Vitzihumb, 
que  devaitêtre celui-ci  vis-à-vis  du  duc  d'Arenberg?  En  mai  1  TTôl'orchestre 
du  théâtre  de  Bruxelles  était  à  Héverlé  chez  le  duc  d'Arenberg  pour  y 
assister  aux  représentations  données  par  le  duc  dans  son  château.  Ce  qui 
empêchait  Vilzihumb  de  donner  au  théâtre  de  Bruxelles  l'opéra  demandé 
par  le  prince  Charles  de  Lorraine.  (Lettre  de  Vilzihumb  du  22  mai  1773.) 


(  un  ) 

Au  lieu  de  faire  connaître  à  la  cour  le  répertoire  des  pièces 
à  représenter  pendant  chaque  semaine,  ils  les  choisissaient 
à  leur  guise.  Puis  ils  annonçaient  subitement  une  repré- 
sentation nouvelle  par  abonnement  suspendu.  Bref  le  gou- 
vernement démontra  à  l'évidence  la  non -exécution  des 
engagements  qu'ils  avaient  pris,  et  les  jugea  par  conséquent 
peu  dignes  d'une  faveur  quelconque.  Cependant  Charles 
de  Lorraine  voulut  bien  faire,  plus  tard,  quelques  con- 
cessions. Il  se  montrait  assez  disposé  à  introduire  des  mo- 
difications au  contrat  en  ce  qui  concerne  le  ballet,  dont 
les  dépenses  étaient  élevées.  Si  le  chiffre  de  ces  frais  était 
réduit,  il  fallait  engager  des  danseurs  d'un  ordre  inférieur. 
Ainsi  posée,  la  question  prenait  une  tournure  telle  que  la 
cour  n'osa  trancher  la  difficulté  de  sa  propre  autorité.  Le 
conseil  privé,  chargé  d'après  l'acte  d'institution  «  de  traiter 
»  les  matières  de  la  suprême  hauteur  et  souveraine  auto- 
»  rite  de  S.  M.  et  choses  procédant  de  grâces  tant  au  civil 
»  qu'au  criminel,  »  fut  consulté  sur  l'opportunité  du  main- 
tien ou  de  la  suppression  des  danses  et  du  ballet.  Après 
avoir  pesé  gravement  le  pour  et  le  contre  de  la  question, 
le  conseil  déclara  que  mieux  valait  ne  pas  avoir  des  dan- 
seurs que  d'en  avoir  des  mauvais.  C'était  un  argument  sans 
réplique.  Le  gouverneur  général  partagea  cet  avis  et  in- 
scrivit sur  l'extrait  du  protocole  la  formule  ordinaire  :  Je 
me  conforme,  en  y  ajoutant  la  date  :  io  avril  1773.  Les 
ballets  et  les  frais  en  résultant  furent  supprimés. 

Dans  la  prévision  d'une  ruine  complète,  Compain  renou- 
vela sa  demande.  Il  l'obtint,  lorsque  mieux  informé  de  la 
vraie  situation  du  théâtre,  le  gouvernement  s'aperçut  de  la 
vérité  des  faits  allégués  parles  directeurs.  Tous  les  droits 
au  privilège  de  l'exploitation  du  théâtre  furent  résignés 
par  Compain  en  faveur  de  Yitzthumb  (19  janvier  1775). 


(  MA  ) 

Celui-ci  resta  seul  à  la  direction,  sous  la  condition  expresse 
de  se  choisir  un  associé,  agréé  par  la  cour.  Cette  clause  ne 
fut  pas  mise  à  exécution  ;  le  gouvernement  semble  y  avoir 
renoncé  tacitement.  Il  n'en  parla  plus,  sans  doute  à  cause 
du  caractère  honorable  de  Vitzthumb,dont  un  acteur  fran- 
çais disait  ingénument  dans  une  de  ses  lettres  :  «  J'ai 
»  trouvé  en  vous  une  droiture,  qui  se  rencontre  rarement 
»  dans  des  personnes  de  notre  état  (1).  »  Aveu  bien  naïf 
dans  la  bouche  d'un  comédien. 

A  l'époque  vers  laquelle  Compain  résignait  ses  droits, 
commence  la  correspondance  de  Grétry  avec  Vitzthumb. 
Croyant  pouvoir  sauver  la  situation  au  moyen  de  l'opéra, 
le  nouveau  directeur  eut  avec  Grétry  un  échange  actif  de 
lettres,  dont  nous  publions  le  texte. 

Les  lettres  des  deux  artistes  ont  trait  à  la  partie  finan- 
cière de  l'administration  du  théâtre  et  à  la  partie  artistique. 
La  première  concerne  le  contrat  entre  Grétry,  d'une  part, 
et  Compain ,  d'autre  part ,  et  les  modifications  que  Vitz- 
thumb voulait  y  introduire  (2).  Ces  difficultés  furent  apla- 


(1)  Lettre  adressée  à  Vitzthumb  par  Callais,  et  datée  du  faubourg  de 
St-Germain  à  Paris. 

(2)  Voici  ce  qu'on  lit  au  sujet  de  cet  arraugement  avec  Compain  dans 
une  lettre  qu'il  écrivit  à  Franck  ,  secrétaire  du  Ministre  plénipotentiaire 
d'Autriche  à  Bruxelles  : 

Paris,  24  février  1774. 

J'ai  vu  M.  Grétry  ce  soir  aux  Italiens.  Nous  n'étions  pas  placés  commo- 
dément pour  parler  de  nos  affaires.  Cependant  je  lui  en  ai  dit  deux  mots. 
Et  voici  sa  réponse  :  qu'il  serait  d'autant  plus  aise  de  satisfaire  nos  désires 
à  l'avenir ,  en  nous  procurant  tous  les  opéras  manuscrits,  qu'il  ne  vouloit 
plus  les  faire  graver.  Les  répétitions  qu'il  fait  demain  et  après  d'une  pièce 
nouvelle  et  auxquelles  je  lui  ai  demandé  la  permission  d'assister,  m'em- 


(  41S  ) 
nies.  Les  propositions  de  Grétry  devinrent  définitivement 

pécheront  de  le  voir  .  mais  je  ne  manquerai  pas  d'aller  chez  lui  dimanche 
matin. 

Paris,  12  mars  1771. 

M.  Grétry,  qui  a  reçu  mon  billet  ce  malin,  n'étoit  pas  levé ,  vient  de  me 
faire  l'honneur  de  me  venir  voir.  Voici  l'arrangement  qu'il  me  propose  : 
nous  lui  donnerons  26  louis  d'or  pour  nous  procurer  ses  œuvres  manu- 
scrites à  fur  et  à  mesure  qu'elles  paraîtront  à  Paris,  et  nous  les  enverra  le 
lendemain  de  la  première  représentation,  à  commencer  par  la  Rosière, 
que  j'emporterai  avec  moi.  J'attendrai  que  vous  m'ayez  répondu  pour 
donner  à  M.  Grétry  une  parole  certaine  et  sur  laquelle  nous  puissions 
compter.  J'attendrai  que  vous  m'ayez  répondu  pour  le  prier  de  faire 
copier  la  Rosière.  Il  est  d'autant  plus  avantageux  pour  nous  de  prendre 
cet  arrangement  avec  M.  Grétry,  qu'il  ne  veut  plus  rien  faire  graver,  et 
que  d'un  autre  côté,  nous  sommes  à  même  d'avoir  les  pièces  en  même 
temps  que  Paris.  Pour  Céphale  et  Procris,  il  persiste  de  ne  pas  le  donner 
que  lorsqu'il  le  mettra  à  Paris.  M.  Grétry  s'engage  à  faire  partir  pour 
Bruxelles  toutes  ses  pièces  indistinctement  le  lendemain  qu'elles  auront 
été  jouées  à  Paris ,  moyennant  600  livres. 

Réponse  de  Franck. 

Bruxelles,  15  mars  1774. 
Pour  ce  qui  regarde  les  propositions  de  M.  Grétry ,  Vitzthumb  croit 
que  ce  n'est  pas  un  bien  grand  marché  que  de  lui  payer  600  livres  par 
pièce  manuscrite  indistinctement,  comme  il  le  demande.  11  s'agira  de  faire 
avec  lui  un  arrangement  par  écrit,  autant  pour  sa  siirelé  que  pour  la 
nôtre;  et  comme  on  prendrait  toutes  les  pièces  quelconques  grandes  et 
petites  et  que  cet  arrangement  se  ferait  pour  la  durée  de  notre  entreprise, 
il  semble  que  M.  Grétry  pourroit  se  contenter  d'un  prix  inférieur,  tel  que 
400  à  500  livres ,  payés  au  comptant.  D'ailleurs  M.  Grétry  se  proposant  de 
venir  voir  ,  on  pourrait  convenir  avec  lui. 

CoMPAiN  A  Franck. 
^  Pans,  27  mars  1774. 

J'ay  payé  ce  malin  25  louis  d'or  à  M.  Grétry  pour  la  partition  manu- 
scrite de  la  Rosière,  ainsi  que  la  pièce  copiée  à  la  main...  J'ai  été  voir 
M.  Grétry  pour  l'engager  à  se  relâcher  de  ses  prétentions,  mais  il  m'a 
paru  choqué  que  M.  Vilzlhumb  et  moi  nous  les  trouvassions  trop  fortes. 
Je  n'ai  pas  insisté. 


(  416  ) 
loi  entre  les  parties.  Le  compositeur  liégeois  devait  tou- 
cher 25  louis  par  partition  demandée,  peu  importe  son 
étendue.  Malgré  l'assurance  donnée  à  Compain ,  de  ne 
plus  faire  graver  sa  partition,  Grétry  voulait  conserver, 
contrairement  aux  propositions  de  Vitzlhumb,  sa  liberté 
la  plus  entière.  L'abbé  Niccoli  à  Paris  devait  faire  les 
payements.  Il  y  eut  à  ce  sujet  un  malentendu,  qui  froissa 
singulièrement  l'amour-propre  de  G  ré  iry,  toujours  pas- 
sionné lorsqu'il  s'agissait  de  sa  personne  ou  de  ses  œuvres. 
Au  lieu  de  solder  cette  somme  à  l'artiste,  l'abbé  voulait  la 
lui  avancer  à  titre  de  prêt,  faute  d'instructions  suffisantes. 
Irrité  d'une  pareille  proposition,  Grétry  écrivit  à  Vitz- 
lhumb une  lettre  bien  dure.  Mais  cet  incident  si  désa- 
gréable disparut  bientôt,  par  suite  des  explications  données 
par  le  directeur  du  théâtre  de  Bruxelles. 

La  partie  la  plus  intéressante  de  la  correspondance  est, 
sans  conteste,  celle  concernant  les  opéras  de  Grétry. 

Par  sa  lettre  du  i9  janvier  1775  adressée  à  Compain, 
précisément  au  moment  où  celui-ci  abandonna  la  direc- 
tion, Grétry  lui  annonça  la  prochaine  représentation  de  la 
Fausse  Magie  ,  dont  il  avait  fait  la  musique.  Cette  comédie, 
composée  par  Marmontel  en  deux  actes  et  en  vers  mêlés 
d'ariettes,  fut  en  effet  représentée  la  première  fois,  le 
i"  février  1778,  aux  Italiens  à  Paris  (1).  Malgré  le  nom  de 
Marmontel,  le  libretto  de  cet  opéra  ne  réussit  pas.  Ce  fut 
un  des  phis  mauvais  auxquels  Grétry  travailla.  Au  moment 
de  la  première  représentation  de  la  pièce,  le  compositeur 
ne  voulait  pas  encore  souscrire  au  verdict  prononcé  par 
les  Parisiens  sur  cette  production  littéraire.  Il  la  jugeait 


(1)  Grétry,  Mémoires,  1. 1,  p,  259. 


(  4.17  ) 
avec  beaucoup  plus  d'indulgence  que  dans  la  suite  :  «  Je 
»   ne  vous  le  cache  pas,  disait-il  à  Vitzlliumb,  les  paroles 
»   ont  été  fort  crilitpiées.  On  juge  racadérnicicn  dans  un 

>  0|)éra  houllon,  et  l'on  est  bien  injuste  sur  le  compte  de 

>  M.  Marmontel  (I).  »  Dans  ses  ménnoires  Grétry  rcîcon- 
naissait  néanmoins  les  graves  défauts  du  librctto  écrit  par 
son  ami  (2). 

Quant  à  la  musique  de  celte  pièce,  il  la  choyait,  a  F^e 
»  premier  acte;  de  la  Fausse  Magie  ,  dit-il ,  est  pent-ètre  ce 
»  qu'il  y  a  de  plus  essentiel  dans  nies  ouvrages  :  en  n'écou- 
»  tant  que  le  chant  de  cet  acte,  on  est  tenté  de  le  mettre 
»  au  rang  des  compositions  faciles;  mais  le  travail  des 
»  accompagnements,  les  routes  harmoniques  qu'ils  par- 
»  courent,  arrêtent  le  jugement  trop  précipité;  et  l'on 
»  stnt  enfin  que  le  caractère  distinctif  de  celte  production 
»  vient  d'un  certain  é(|uilibre  entre  la  mélodie  et  l'har- 
»  monie  (3).  »  J.-J.  Rousseau  partageait,  paraît-il ,  cet 
avis  (4).  La  musique  de  Grélry  sauva  la  pièce;  le  duo  : 
Quoi  y  cest  vous  qu'elle  préfère ,  eut  un  succès  éclatant. 

On  le  voit  par  sa  correspondance  avec  Vitzthumb,  Grétry 
avait  un  grand  faible  pour  cette  partition,  qui,  à  notre 
avis,  est  loin  d'avoir  les  belles  qualités  de  plusieurs  de 
ses  autres  œuvres.  Il  n'en  disait  pas  autant  de  Cép/iale  et 
Procris,  partition  d'un  mérite  incontestable. 

A  Paris,  disait-il,  les  accessoires  de  la  Fausse  Magie 
sont,  à  tort,  très-négligés.  Il  attendait  mieux  du  théâtre 
de  Bruxelles.    Ensuite  il   raconte    à   son   correspondant 


(1)  Lettre  du  21  février  1775. 

(2)  Memoh'es,  l   I,  p.  261. 
(5)  /6(/.,p  260. 

(4)  Ibd,21i.  . 

2"°*=  SÉRIE,  TOME   XL.  27 


(  418  ) 
comment  une  personne  avait  proposé  de  faire  exécuter 
après  le  chœur  :  0  grand  Albert,  une  pantomime  d'om- 
bres derrière  un  transparent,  représentant  des  cérémonies 
de  magie  pratiquées  sur  un  second  personnage  nommé 
Dalin ,  qui  figure  sur  l'avant-scène.  Personne  à  Paris 
n'osait  risquer  ce  coup  de  théâtre,  qui  aurait  peut-être 
réussi  s'il  avait  été  dirigé  d'une  manière  convenable.  Il 
fallait  produire  un  effet  de  nuit  après  le  chœur,  et  faire 
renaître  le  jour  après  le  morceau  :  A^e  troublons  pas  le  mys- 
tère. Toutes  ces  opérations  parurent  très-embarrassantes 
à  Paris.  «  Au  lieu  de  faire  apporter  la  glace  par  M.  Dalin, 
»  continue-t-il ,  ce  sont  les  Bohémiens  eux-mêmes  qui 
»  apportent  un  miroir  magique  en  cérémonie  sur  la 
»  marche;  et  au  lieu  de  dire  :  Ayez-moi  seulement  une 
»  glace,  la  Bohémienne  dit  :  Avec  ce  miroir  ayez-moi 
»  seulement  un  ruban ,  etc.  »  Grétry  finit  par  prier  son 
correspondant  de  l'informer  du  succès  de  la  pièce  à 
Bruxelles  lorsqu'elle  y  sera  représentée  (1).  Vitzthumb 
promit  de  faire  exécuter  la  pantomime  décrite  par  Grétry, 
de  manière  à  en  faire  espérer  la  réussite.  Il  aura  soin  de 
lui  faire  connaître  le  résultat  de  la  première  représenta- 
tion, qu'il  comptait  donner  dans  la  première  quinzaine  de 
l'ouverture  du  théâtre.  A  cette  époque  les  dernières  repré- 
sentations de  l'année  théâtrale  devaient  finir  la  veille  du 
premier  dimanche  de  carême.  Le  théâtre  restait  fermé 
jusqu'après  Pâques,  lorsque  la  nouvelle  année  théâtrale 
commençait.  Vitzthumb  finissait  sa  lettre  en  invitant 
Grétry  à  venir  voir  ses  pièces  (2). 

Les  Pâques  étaient  passées  depuis  longtemps,  et  la 


(1)  Lettre  du  21  février  1773. 

(2)  Lettre  du  23  février  1773. 


(  419  ) 

Famse  Marjie  n'avait  pas  encore  paru  sur  la  scène  de 
Bruxelles.  Impatient  de  recevoir  des  nouvelles  de  sa  pièce, 
Grélry  en  écrivit  à  Yitzthunil)  (21  avril  1775).  Celui-ci  lui 
fit  savoir  que  la  première  représentation  était  fixée  au 
10  mai,  et  qu'il  avait  été  dans  l'impossibilité  de  la  donner 
plutôt  «  étant  dépourvu  d'accessoires,  dit-il,  et  n'osant 
»  pas  risquer.  » 

Enfin  la  Fausse  Magic  fut  exécutée.  La  pièce  obtint 
beaucoup  de  succès.  Grétry  en  était  ravi.  Le  3  juillet  1776 
il  écrivit  à  Vitzthumb  pour  lui  annoncer  son  prochain 
passage  à  Bruxelles  en  se  rendant  à  Liège.  «  J'aurai  bien 
»  du  plaisir,  Monsieur,  à  vous  entendre,  dit-il,  et  vous 
»  admirer  dans  mes  ouvrages  mêmes,  que  vous  savez 
»  faire  exécuter,  à  ce  que  dit  l'Europe  entière,  dans  la 
»  plus  grande  perfection.  Je  serai  surtout  content  de  voir 
»  la  Fausse  Magie,  que  vous  donnez,  dit-on,  mieux  qu'à 
»  Paris  (1).  »  Il  introduisit  à  la  partition  quelques  chan- 
gements,-dont  il  fit  l'envoi  à  Vitzthumb  (15  juillet  1776). 

Dans  la  lettre  du  21  août  1775  il  annonça,  pour  le 
2  mai,  la  première  représentation  de  Céphale  et  Procris, 
tragédie  en  trois  actes  et  en  vers,  par  Marmontel.  La 
pièce  telle  qu'elle  fut  représentée  à  Versailles,  en  1773, 
à  l'occasion  du  mariage  du  comte  d'Artois,  obtint  un 
succès  médiocre.  Tout  le  monde  ne  voulait  pas  souscrire 
à  ce  jugement.  Le  secrétaire  Franck,  correspondant  de 
Compain ,  pendant  le  séjour  de  celui-ci  à  Paris  ,  lui  écrivit 
de  Bruxelles  (6  mars  1774):  «  Je  vous  conseille  d'in- 
»  sistersur  l'acquisition  de  Céphale  et  Procris,  et  je  crois 
»   qu'en  promettant  à  M.  Grétry  de  ne  donner  cette  pièce 


(1)  Lettre  du  3  juillet  1776. 


(  420  ) 

»  que  15  jours  après  qu'elle  aura  été  donnée  à  Paris,  il 
»  pourra  aisément  vous  céder  une  partition  manuscrite.  » 
Six  jours  plus  tard  (12  mars  1774)  Compain  répondit  : 
d  Céphale  et  Procris  seront  joués  immédiatement  après 
1»  l'opéra  de  M.  Gluck  (1),  et  M.  Grétry  vient  de  s'engager 
»  à  aller  à  Bruxelles  lorsqu'on  le  donnera,  et  sera  présent 
>  aux  répétitions.  »  Tous  ces  projets  furent  abandonnés 
lorsque  Paris  confirma  (2  mai  1775)  le  verdict  de  Ver- 
sailles (2).  Le  succès  l'ut  médiocre.  Pourquoi?  Parce  que 
sorti  de  l'ornière  ordinaire,  Grétry  avait  fait  de  la  musique 
dramatique,  celle  qui  parle  au  cœur,  et  à  laquelle  le  pu- 
blic et  les  acteurs  de  celle  époque  ne  comprenaient  rien. 
Les  chanteurs  ne  voulaient  pas  même  observer  la  me- 
sure (5);  les  habitiiés  du  théâtre  préféraient  l'opéra  bouffon. 
Parfaitement  au  courant  des  goûts  des  Bruxellois,  Vitz- 
thumb  le  comprit  lorsqu'il  refusa  la  partition  sous  prétexte 
que  ce  genre  de  musique  n'était  pas  goûté  à  Bruxelles  (4). 
Mieux  que  personne,  cet  artiste  était  en  état  de  jtiger  avec 
tact  les  productions  musicales  recherchées  par  son  auditoire. 
Compositeur  lui-même,  il  avait  fait  des  opéras,  des  sym- 
phonies, des  messes,  etc.  Il  avait  montré  par  une  de  ses 
ariettes  ajoutées  à  Annette  et  Lubin  sur  les  paroles  :  Non, 
non,  je  ne  crains  personne,  qu'il  cultivait  la  musique 
gracieuse  avec  succès  (5).  Ce  morceau  obtint  une  grande 


(1)  Cel  opéra  était  :  Iphigénie  en  Aulide,  représenté  le  19  avril  1774. 

(2)  Voir  au  sujet  des  mérites  de  la  musique  de  Céphale  et  Procris  un 
compte  rendu  dans  V Esprit  des  Journaux  de  juin  1775,  p.  286. 

(3)  Grétry,  Mémoires  y  1. 1 ,  pp.  27  et  suiv. 

(4)  Lettre  du  3  août  1775. 

(5)  Annette  et  Lubin,  musique  de  Delaborde,  fut  représenté  à  Paris  la 
première  fois  le  18  février  176:i,  Poisol,  Hisi.  de  la  musique  en  France ^ 
p.  537. 


(  i21  ) 
vogue  à  Cadix.  Bonncville,  régisseur  du  lliéâlre  de  la  cité 
espagnole,  écrivit  (^25  janvier  1774-)  qu'il  «  avait  obtenu 
»  les  applaudissements  réiléi'és  et  les  acclamations  des 
»  parfaits  connaisseurs.  »  Il  ajouta  encore  :  a  il  a  été 
»  chanté  par  une  de  nos  basses-tailles.  Ce  qui  (ait  désirer 
»  à  l'autre  (basse-taille),  qui  a  plus  belle  voix,  de  par- 
»  tager  les  agréments  de  celte  ariette.  Mais  le  premier, 
»  jaloux  d'un  bien  si  précieux,  veut  en  jouir  tout  seul  et 
»  priver,  par  ce  moyen,  le  public  de  l'entendre  aussi 
y>  souvent  qu'il  le  désire.  En  conséquence,  pour  éviter 
»  les  coiUestalious  particulières  etsatisfaire  au  goût  épuré, 
»  j'ose  me  charger  de  vous  la  demander  telle  que  vous 
»  l'avez  composée,  ses  accompagnements  et  dans  le  vrai 
»  ton.  » 

Les  Mariages  Samniles,  drame  en  trois  actes  par  De 
Rozoi,  musique  de  Gréiry ,  avaient  été  représentés  la  pre- 
mière lois  chez  les  Italiens  à  Paris,  le  22  juin  1776.  Cette 
œuvre  ne  réussit  pas  mieux  que  Céphale  et  Procrù.  Sdon 
Grétry  le  préjugé  contribua  à  la  chute.  Les  spectateurs  ne 
voulurent  pas  s'habituera  voir,  sous  le  casque,  les  acteurs 
qu'ils  voyaient  chaque  jour  dans  des  rôles  conn'ques  (I); 
Grétry  annonça  l'envoi  de  cet  opéra  à  Vilzihumb  (13  juillet 
1776).  «  Je  vous  envoie,  dit-il,  un  changement  que  nous 
»  avons  jugé  nécessaire  pour  précipiter  l'action.  A  la  place 
»  de  l'air  :  Dans  les  airs,  acte  3,  p.  47,  nous  avons  mis 
»  le  dialogue  que  je  vous  envoyé.  Si  vous  avez  une  bonne 
»  basse-taille  ,  et  si  vous  ne  craignez  pas  les  longueurs , 
»  comme  nous,  je  vous  enverrai  l'air  qu'on  a  trouvé  très- 
B  nécessaire  de  retrancher.  »  Le  changt^ment  envoyé  par 
Grétry  étant  imprimé  dans  la  seconde  édition  des  Mariages 

(l)  Mémoire,  1. 1 ,  p.  288. 


(  AT2  ) 

Somnites,  il  est  inutile  d'en  parler.  Grétry  termina  sa 
lettre  par  annoncer  à  Vitztliumb  son  départ  pour  Liège 
vers  le  15  août,  et  son  arrivée  probable  à  Bruxelles 
le  17  du  même  mois.  <r  Si  vous  êtes  en  train  de  répé- 
i>  ter  les  Samnites,  continue-t-il,  et  que  je  puisse  vous 
»  être  utile,  j'en  serai  bien  enchanté.  »  Son  séjour  à 
Bruxelles  ne  devait  pas  être  long.  Obligé  de  reconduire 
dans  son  pays  sa  sœur  la  chanoinesse ,  il  se  proposait  de 
passer  quelques  moments  en  cette  ville;  mais  il  comptait 
y  faire,  en  retournant  à  Paris,  un  séjour  plus  long  pour 
voir  les  Mariages  Samnites  et  la  Fausse  Magie.  Ce  projet 
ne  se  réalisa  pas;  nous  en  ferons  connaître  les  motifs 
plus  loin. 

Le  départ  de  Grétry  pour  Bruxelles  était  à  Paris  un  évé- 
nement auquel  ses  amis  et  ses  connaissances  s'intéressaient 
beaucoup.  Un  Liégeois  nommé  G.  Moreau ,  qui  s'intitule  : 
ordinaire  de  l'Académie  royale  de  musique  à  Paris,  se 
préoccupait  singulièrement  de  celte  excursion.  Il  en  écrivit 
à  Vitzlhumb  une  lettre,  dont  nous  avons  observé  rigou- 
reusement  l'orthographe,  très-peu  académique  : 

«  Monsieur  , 

»  Vous  serez  peut-être  très-étonner  qu'après  plusieurs 
»  années ,  je  pense  à  vous  écrire.  Soyez  persuadés  que  vous 
0  n'avez  pas  été  hord  de  mon  souvenir.  La  sirconstance  est 
»  qu'ayant  appris  de  M.  Grétry  qu'il  passeroit  par  Bruxelle  en 
»  allant  à  Liège  et  quil  auroit  le  plaisir  de  voir  représenter  la 
»  nouvelle  pièce  intitule  les  Mariage  Samnite,  j'ai  commu- 
»  niquer  à  ce  sujet  à  M.  Dcrozoir  (De  Rozoi),  auteur  des 
»  paroles  de  ce  drame.  H  m'a  parut  brûler  du  désir  de  voir 
»  votre  spectacle.  Je  lui  ai  consciler  de  vous  faire  le  sacrifice 
»   de  son  Richard  trois,  tragédie  qui  eut  déjà  été  donné  ici  si 


(  ^^23  ) 

»  nos  comédiens  néloicnt  pas  aussi  lent  à  lire  les  ouvrages 
»  que  paresseux  à  les  aprendre.  Cette  tragédie  jouit  ici  de  la 
»  plus  haute  réputation,  vu  que  lorsque  son  auteur  fit  un 
j»  voyage  à  Toulouse,  il  y  fit  représenter  sa  pièce.  Le  corps 
»  de  ville,  le  magistrat,  l'université  lui  donnèrent  une  cou- 
»   ronne  de  lauriers  en  plein  théâtre. 

»  Enfin  j'ajoutai  de  moi-même  que  vous  étiés  assé  mon 
»  ami  pour  que  vous  vous  intéressiez  pour  cela,  et  qu'il  en 
o  fit  hommage  au  prince  Charle,  que  je  croyoit  assurément 
»  assez  généreux  pour  le  dédommager  de  son  voyage.  11  m'a 
»  aussi  prié  de  vous  offrirc,  ci  il  étoit  nécessaire  à  quelque 
»  chose  pour  contrihuer  à  la  splendeur  d'un  spectacle  si  cé- 
»  lèhre  en  Europe  comme  le  sont  les  Mariage  Samnite.  Il 
»  profiterois  du  même  temps  pour  faire  entendre  son  Richard 
»  trois.  Enfin,  mon  cher  ami,  sil  m'est  encore  permit  de  me 
»  servire  de  ces  termes,  je  vous  prie  de  faire  pour  cela  tous 
»  ce  qu'il  dépendra  de  vous.  Vous  ohligcrez  infiniment  cclu' 
»   qui  a  l'honneur  d'être  avec  respect.   » 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur 

» 

G.  MOREAU, 

ordinaire  de  l'Académie  royale  de  musique, 
rue  du  Sepulchre. 

A  Paris ,  ce  30  juillet  i  776. 

Vitzthumb  lui  écrivit  quelques  jours  plus  tard  (3  août 
1776).  D'après  sa  réponse  :  il  serait  enchanté  de  voir  De 
Rozoi  réussir  dans  son  projet;  mais  il  n'osait  pas  lui  pro- 
nnettre  du  succès  pour  deux  motifs.  Le  prince  Charles  de 
Lorraine  passe  ordinairement  l'été  à  la  campagne  ;  le  pu- 
blic aime  mieux  le  comique  et  la  musique.  Il  conseilla 
donc  à  De  Rozoi  de  ne  pas  risquer  sa  tragédie  dans  un 
pays  où  ce  genre  de  spectacle  n'est  pas  goûté.  Si  tôt  ou 


(  424  ) 

lard  la  pièce  venait  à  enrichir  le  répertoire  de  Bruxelles, 
il  n'épargnera  ni  temps,  ni  dépenses  pour  la  l'aire  repré- 
senter avec  toute  la  pomj)e  et  l'appareil  nécessaires. 

Moreau  adinetiait  ces  raisons.  Mais  ayant  ap|)ris  de  De 
Rozoi  (|u*il  élail  décidé  à  rejoindre  Grélry  à  Bruxelles, 
au  moment  de  la  représentation  des  Mariages  Samnites, 
il  proposa  à  Vilzthuml)  une  idée.  Grélry  était,  d'après 
Moreau,  occupé  à  composer  une  œuvre  musicale, que  nous 
n'avons  trouvée  nulle  part  mentionnée,  pas  même  dans  ses 
Mémoires.  (Tétait  PhjmaUon,  dont  le  libretto  était  dû  à 
la  plume  de  De  Rozoi.  Grétry  semble  y  avoir  renoncé. 
Le  16  décembre  1780,  cette  pièce  est  représentée  à  Paris 
sous  le  nom  de  De  Rozoi,  mus'que  de  Bonesi  (I).  Voici  com- 
ment Moreau  s'exprime  dans  une  lettre  rédigée  par  un  tiers 
el  signée  par  lui,  au  sujet  de  la  musique  à  laquelle  travail- 
lait le  compositeur  liégeois  : 

«  Monsieur, 

»  Grclry  est  occupé  ,  dit-il,  de  mettre  en  musique  Le  Pig- 
»  malion  de  M.  de  Kozoi,  acte  aunoncé  ici  comme  un  tableau 
»  délicieux.  Le  costume  blanc  des  Mariages  Samnites  sufïîroit 
»  pour  les  habits;  et  il  n'y  a,  dit-ou  ,  qu'un  seul  acteur. 
»  M.  Grétry,  qui  e4  mon  compatriote,  m'a  dit  que  cet  ou- 
»  vragc  ro;'cupoit  beaucoup;  (piil  en  porloit  la  musique  à 
»  Liège,  pour  ne  pas  le  perdre  de  vue  pendant  son  séjour  en 
»    celte  ville. 

»  H  m'a  paru,  Monsieur,  que  ce  seroit  pour  vous  un  coup 
»  de  parti  décisif,  si  tenant  les  deux  auteurs,  vous  profiliez 
-»   de  ce  moment  pour  donner,  à  la  ville  de  Bruxelles,  les  pré- 


(1)  ViÀsoi,  Histoire  de  la  musique  en  France,  p.  341. 


(  425  ) 

»  miccs  d'un  acte,  qui  doit  èlrc  un  clief-d'œiivre,  vu  le  sujet 
»    et  In  niusi(iuc,  que  M.  Grélry  est  capable  d'y  adapter. 

»  Le  souvenir  de  votre  ancienne  amitié  pour  moi,  mérite 
»  bien  que  dès  que  mon  cœur  diète  une  idée,  qui  me  |)aroîl 
»  heureuse,  je  la  saisisse  aussitôt.  Si  M.  Grétry  est  parti 
»  pour  Liège  avant  que  vous  recevez  ma  lettre,  écrivez  lui. 
»  Ce  sera  le  moyen  qu'il  se  liàle  de  rassembler  ou  de  finir  ces 
»  morceaux.  Lui-même  ou  vous,  iMonsieur,  écrivez  à  M.  de 
»  Rozoi  d'envoyer  toujour-;  le  poëme,  ce  serait  un  accord 
»   charmant.  Kt  je  serai  enchanté  que  mon  cher  compatriote 

»   doive  un  nouveau  triomphe  à  mon  zèle  pour  lui er  ce 

»  qu'on  en  dit  ici.  Je  vous  réponds  d'un  succès  aussi  brillant 
»    qu'avantageux.  » 

»   J'ai  Lhonneur,  etc. 

G.    MOREAU. 

Paris,  ce  16  août  1776. 

Grétry  arriva,  en  effet,  quelques  joura  plus  lard  à 
Bruxelles.  Il  fut  comblé  de  prévenances  par  Vitzlhiunb,  et 
assista,  paraît-il,  à  une  représentation  théâtrale,  pendant 
laquelle  on  exécuta  une  de  ses  œuvres.  Tout  à  coup,  au 
milieu  de  l'exécution,  il  entendit  des  sons  étranges,  des 
phrases  musicales  à  lui  inconnues,  des  corrections  enfin. 
Jamais  coup  de  foudre  n'avait  retenti  d'une  manière  plus 
sinistre  à  ses  oreilles.  Une  main  téméraire,  ime  plume 
sacriLége  avaient  introduit  des  changements  à  la  partition. 

Vivement  irritédeceprocédé,Grétry écrivit  de  Bruxelles, 
(21  août  1776)  une  lettre  qui  respire  le  dépit  le  plus  cruel, 
un  froissement  excessif  de  l'amour-propre.  Après  avoir 
chaleureusement  remercié  son  hôte,Giétry  ajoute  :  a  Que 
»  ne  puis-je  vous  dire  autant  de  ma  musique,  Mon- 
»  sieur.  Mais  elle  est  loin  d'être  aussi  satisfaite  de  vos 
;>   prétendues  corrections....  Ne  comptez  plus  sur  mon 


(  426  ) 
»  retour  à  Bruxelles,  Monsieur...  Vous  m'avez  banni  à 
»  jamais  du  théâtre  de  Bruxelles.  » 

Tel  fut  Tanathème  prononcé  par  Grétry  contre  son  cor- 
recteur et  le  théâtre  de  Bruxelles.  Désormais  leur  souvenir 
sera  condamné.  Jamais  leurs  noms  ne  seront  prononcés 
dans  ses  Mémoires. 

Ce  fut  la  dernière  lettre  écrite  par  Grétry  à  Vitzthumb. 

Bientôt  celui-ci  subit  le  sort  de  Compain.  Moins  heureux 
encore  que  son  ancien  associé,  il  voulait  réparer  sa  for- 
tune en  donnant  un  grand  nombre  de  nouveautés  sur  son 
théâtre;  il  fit  avec  sa  troupe  des  pérégrinations  coûteuses 
en  province ,  organisa  l'opéra  flamand  à  Bruxelles  et 
ailleurs,  déploya  une  grande  activité,  qui  finit  par  une 
déconfiture  complète.  En  1777  il  se  retira  de  la  direction 
du  théâtre  de  Bruxelles  et  obtint,  comme  on  disait  en 
termes  de  barreau  à  cette  époque,  un  permis  de  faire  ces- 
sion misérable  de  ses  biens.  Durant  l'année  1784  il  signe 
encore  en  tête  des  musiciens  du  théâtre  de  la  Monnaie 
une  pétition  tendant  à  engager  les  gouverneurs  généraux 
à  les  maintenir  dans  leur  ancienne  position.  Plus  tard 
(27  décembre  1786)  il  fut  nommé  maître  de  la  chapelle 
royale  à  Bruxelles  ,  et  ne  rentra  plus  jamais  au  théâtre. 

A  M.  Compain. 

Dans  quinze  jours  au  plus  lard,  Monsieur,  je  donne  aux 
Italiens  une  pièce  en  deux  actes  intitulée  la  Fausse  Magie.  Les 
paroles  sont  de  M.  Marmontel.  Faites-moi  l'amitié  de  me  dire 
si  vous  vous  êtes  assez  bien  trouvé  de  la  Rosière  pour  conti- 
nuer notre  marché.  Si  vous  voulez  bien  m'écrire  d'abord  à  la 
réception  de  ma  lettre,  je  pourrai  vous  expédier  mon  envoi  au 
plus  tôt.  Mandez-moi  encore  une  fois  à  qui  il  faut  remettre  le 


(  427  ) 

paquet.  Recevez,  Monsieur,  les  assurances  de  mon  amitié  et 
de  ma  parfaite  considération  ,  avec  laquelle  je  suis  votre  très- 
humble  serviteur. 

Grétry. 

Paris,  ce  i9  janvier  1775. 


Monsieur  , 


A  M.  Grétry. 

Du  24  janvier  1775. 


La  société  qu'il  y  avait  entre  M.  Compain  et  moi  étant  dis- 
soute et  restant  seul  directeur,  j'ai  l'honneur  de  répondre 
moi-même  à  la  lettre  que  vous  lui  avez  fait  l'honneur  de  lui 
écrire  le  19  du  courant. 

Je  désirerois  beaucoup  pouvoir  m'arranger  avec  vous  pour 
les  opéras  nouveaux  et  notamment  pour  la  Fausse  Magie;  mais 
ce  seroit  à  condition  que  vous  ne  feriez  graver  qu'après  une 
année  les  opéras  dont  j'aurois  fait  l'acquisition.  Ce  qui  n'a  pas 
été  observé  pour  la  Rosière;  auquel  cas  je  vous  prierois, 
Monsieur,  de  fixer  une  fois  pour  toutes  tel  prix  pour  les  opéras 
en  un  acte,  tel  pour  ceux  en  2  actes,  tel  pour  ceux  en  trois 
actes,  etc.,  outre  la  copie  de  la  partition  et  du  poëme,  que  je 
paierois  séparément. 

Si  (comme  je  n'en  doute  point)  vos  prétentions  sont  assez 
raisonnables,  pour  s'accorder  avec  mes  intérêts,  vous  aurez 
la  bonté  de  remettre  chez  M.  l'abbé  Niccoli ,  secrétaire  de  léga- 
tion du  duc  de  Toscane  au  Petit  Luxembourg,  faubourg 
Saint-Germain,  tous  les  envois  que  je  vous  prierois  de  me 
faire,  et  la  même  personne  vous  feroit  pareillement  toucher  le 
prix  de  vos  honoraires. 

Espérant  un  mot  de  réponse ,  qui  m'informe  de  vos  inten- 
tions à  ce  sujet,  je  vous  prie  de  me  croire  avec  la  considération 
la  plus  distinguée.  Monsieur,  votre,  etc. 

ViTZTHUMB. 


(  428  ) 

A  M.  Vitzlhumb. 

Je  reçois  la  lettre,  Monsieur,  que  vous  me  faites  l'honneur 
de  m  "écrire.  Quant  aux  différenls  prix  que  vous  voulez  assi- 
gner scion  le  nombre  des  actes,  je  crois,  Monsieur,  que  vous 
demandez  une  chose  qui  vous  nuiioit  à  l'avenir.  J'aurois  pu 
vous  proposer,  je  suppose,  de  me  donner  1:2  louis  pour  un 
acte,  ï>5  pour  deux  et  50  pour  trois  ou  quatre;  mais  nous 
avons  pris  le  milieu  de  cette  somme,  et  j'élois  convenu  avec 
M.  Compain  de  vous  envoyer  mes  ouvrages  indiffércnment, 
pour  la  somme  de  525  louis.  Céphale  et  Proeris,  tragédie,  que 
je  donne  à  Topera,  à  la  rentrée  de  Pàque,  éloit  dans  mes 
arrangements.  Cependant  si  (jueiqu'un  me  demandoil  Céphale 
seul,  eerlaincnient  j'exigerois  30  louis.  Ainsi,  Monsieur,  mon 
dernier  mot  sur  cet  article  est  de  nous  en  tenir  à  notre  arran- 
gement, si  vous  y  trouvez  vos  intérêts.  Quant  à  ce  qui  regarde 
le  tems  où  je  [)uis  faire  graver,  je  ne  puis  là-dessus  prendre 
aucune  entrave.  Vous  savez  qu  il  vous  est  impossible  de  jouer 
mes  j)iè(es  en  même  temps  qu'à  Paris,  qu'il  faut  au  moins  six 
mois  avant  que  la  gravure  vous  parvienne.  Je  ne  puis  là-dessus 
vous  en  dire  davantage, Monsieur.  Il  arrivera  quelques  fois  que 
vous  serez  fâché  d'avoir  payé  25  louis  pour  trois  ou  quatre  mois; 
d'autres  fois  vous  serez  enchanté  d'avoir  donné  25  louis  pour 
un  opéra  immense  et  d'en  avoir  profité  huit  ou  dix  mois  avant 
le  })ublic.  En  tout  cas,  monsieur,  je  vous  supplie  de  ne  voir 
en  celte  convention  que  vos  intérêts.  S'ils  ne  sont  pas  bien  à 
couvert,  croyez  que  je  ne  désire  rien.  C  est  M.  Compain  qui 
m'a  proposé  cet  arrangement,  auquel  je  n'aurais  point  pensé. 
Je  me  charge  de  la  copie  d'une  partition.  Voilà  de  quoi  nous 
étions  convenus.  Je  suis.  Monsieur,  avec  la  plus  parfaite  consi- 
dération et  un  extrême  désir  d'entendre  un  jour  mes  foibles 
productions  exécutés  sous  vos  ordres, 

Votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur. 

Grétry. 

Paris ,  ce  29  janvier  1775. 


(  429  ) 

A  M.  Grctry. 


Du  11  février  1775. 


Monsieur. 


J'ai  rrçii  la  lettre  que  vous  m'avez  fait  l'honneur  de  niécrire 
le  29  janvier  dernier,  par  où  vous  me  mandez  être  convenu 
avec  M.  Compain  sur  le  pied  de  "25  louis  pour  chaque  ouvrage 
indi>liuclement,  compris  la  copie  de  la  partition.  Je  m'en  liens 
à  cet  arrangement,  pourvu  que  vous  veuillez  me  prévenir  à 
tcms  de  chaque  ouvrage  que  vous  aurez  envie  de  me  céder.  Et 
puisque  la  clause  de  ne  faire  graver  qu'après  une  année  vos 
ouvrages  vous  paraît  trop  onéreuse,  je  n'insisterai  point 
là-dessus;  mais  en  ce  cas  josc  me  promettre,  Monsieui-,  que 
vous  aurez  soin  de  me  les  faire  parvenir  aussitôt  après  qu'ils 
serontachevés.  J'attends  avec  impatience  la  Fausse  Migic,  que 
je  vous  prie  de  faire  remettre  chez  M.  lahbé  Niccoli,  chargé  des 
affaires  de  la  cour  de  Toscane,  au  Petit  Luxembourg,  fau- 
bourg Saint-Germain.  La  même  personne  vous  satisfera  de 
vos  honoraires  à  mesure  que  je  recevrai  les  envois  que  vous 
aurez  la  bonté  de  me  faire.  Si  j'ai  quelque  jour  l'agrément  de 
vous  voir  ici,  je  ferai  mon  possible  pour  vous  y  prouver  la 
satisfaction  que  vous  désirez. 

J  ai  l'honneur  d'être,  etc. 

VlTZTHUJMB. 


A  M.  Vitzlhumb. 

J'ai  envoyé,  Monsieur  ,  la  partition  de  la  Fausse  Magie  et  la 
pièce  imprimée  à  M-  labbé  de  Niccoli.  Il  m'a  promis  delà  faire 
partir  le  même  jour.  Vous  devez  bien  sentir,  Monsieur,  que 
j'ai  refusé  les  25  louis  que  M.  l'abbé  veut  me  prêter.  Si  j'avais 
besoin  d'argent,  c'est  à  mes  amis  à  qui  j'en  demandrois.  Ils 


(  430  ) 

mériteroient  la  préférence.  Je  suis  fâché,  Monsieur,  que  vous 
m'ayez  exposé  à  cette  démarche.  Faites-vous  connoître,  je 
vous  en  prie,  pour  une  autre  fois.  Je  vous  envoyé  la  lettre  de 
M.  Niccoli ,  afin  que  vous  ne  doutiez  pas  de  ce  que  j'avance. 

J'attendrai  que  M.  Niccoli  m'envoye  dire  d'aller  tirer  cet 
argent.  La  pièce  que  vous  allez  recevoir  est  susceptible  de 
beaucoup  de  soin.  Paris  néglige  tous  les  accessoires,  et  ils  ont 
grand  tort.  Une  personne  nous  avoit  proposé  d'exécuter  une 
pantomime  d'ombres  derrière  un  transparent.  La  place  étoit 
après  le  chœur  :  0  grand  Albert.  Nous  n'avons  pas  osé  risquer 
cette  plaisanterie,  qui  peut-être  auroit  réussi.  Le  sujet  de  la 
pantomime  auroit  été  en  cérémonies  de  magie  exécutées  sur  un 
second  Dalin  pareil  à  celui  qui  est  sur  la  scène.  Enfin  ce  projet 
n'a  pas  été  bien  digéré.  La  nuit  qu'il  aurait  fallu  faire  après  le 
chœur,  le  jour  qu'il  auroit  fallu  faire  revenir  au  dénouement, 
c'est-à-dire  au  morceau  :  IVe  troublons  pas  le  mistère,  tout 
cela  a  paru  embarassant.  Au  lieu  de  faire  apporter  la  glace  par 
M.  Dalin ,  c^est  les  Bohémiens  eux-mêmes  qui  apportent  un 
miroir  magique  en  cérémonie  sur  la  marche;  et  au  lieu  de 
dire  •.Ayez-moi  seulement  une  glace,  la  bohémienne  dit: 
Avec  ce  miroir  ayez-moi  seulement  un  ruban ,  etc.  Vous  me 
ferez  un  sensible  plaisir,  Monsieur,  de  me  faire  part  du  succès 
de  cet  ouvrage.  Je  ne  vous  cache  pas  que  les  paroles  ont  été 
fort  critiquées.  On  juge  l'académicien  dans  un  opéra  bouffon, 
et  l'on  est  bien  injuste  sur  le  compte  de  M.  Marmontel.  Je  suis. 
Monsieur,  avec  la  plus  parfaite  considération,  votre  très- 
humble  serviteur. 

Grétry. 

Mardi  2i  février  1775. 


(  431  ) 

A  M.  Grétry. 

Du  25  février  1775. 
Monsieur, 

J'ai  reçu  la  lettre  que  vous  m'avez  fait  l'honneur  de  m'écrire 
le  2i  du  courant.  M.  l'abbé  Niccoli  ne  pouvoit  vous  payer  les 
000  livres  en  question,  n'ayant  pu  l'en  prévenir  qu'après  la 
réception  de  l'opéra,  dont  il  s'agit. 

Je  suis  fâché  de  ce  malentendu;  mais  pour  obvier  à  l'avenir 
à  tout  inconvénient,  j'aurai  soin,  dès  que  je  serai  informé  de 
la  part  de  M.  l'abbé  Niccoli ,  que  vous  lui  avez  remis  quelque 
ouvrage  pour  moi,  de  vous  envoyer  aussitôt  l'assignation  du 
paiement  de  vos  honoraires. 

En  conséquence,  Monsieur,  vous  trouverez  ci  incluse  celle 
des  25  louis  qui  vous  sont  dus  pour  la  Fausse  Magie,  dont  j'ai 
reçu  la  partition  et  le  poëme,  et  dont  M.  l'abbé  Niccoli  vous 
paiera  le  montant. 

Quant  à  cet  opéra,  j'en  ferai  exécuter  la  pantomime  indiquée 
par  votre  lettre,  de  manière  à  en  espérer  de  la  réussite;  et 
j'aurai  soin.  Monsieur,  de  vous  mander  quel  succès  en  aura 
eu  la  première  représentation  ,  que  je  compte  donner  dans  la 
quinzaine  de  l'ouverture  de  notre  spectacle;  la  clôture  de 
cette  année  devant  s'en  faire  la  veille  du  1^"^  dimanche  de 
carême. 

Du  reste  soyez  assuré.  Monsieur,  que  j'y  emploierai  tous 
mes  soins,  et  que  vous  ne  sauriez  me  faire  un  plus  sensible 
plaisir  que  de  venir  entendre  l'exécution  de  toutes  les  pièces 
de  votre  composition,  goûtées  et  suivies  universellement. 

J'ai  l'honeur  d'être  avec  la  considération  la  plus  distinguée. 
Monsieur,  votre  dévoué,  etc. 

ViTZTHUMB. 


(  432  ) 

A  M.  Vilzthumb. 

Je  suis  impatient,  Monsieur,  d'apprendre  le  sort  de  la 
Fausse  Magie  à  Bruxelles.  Je  donnerai  le  "2  may  la  I""^  repré- 
sentation de  Céphale  et  Procris,  tragédie  en  trois  actes.  Je 
vous  prie  de  me  dire  s'il  faut  vous  l'envoyer.  Après  deux 
représenlalions,  nous  serons  très-bien  convenus  de  tout  mes 
changemens.  Je  vous  en  ferai  tirer  une  copie,  et  vous  pourez 
recevoir  cet  ouvrage  vers  la  fin  de  may.  Recevez,  Monsieur, 
les  assurances  de  la  parfaite  considération,  avec  laquelle  je 
suis  votre  très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Grétry. 

Paris,  ce  21  avril  1773. 


A  M.  Grétry. 

Du  30  avril. 
Monsieur, 

Des  circonstances  particulières  m'ayant  empêché  jusqu'à 
présent  de  donner  la  Fausse  Magie,  j'en  ai  fixé  la  1"^^  repré- 
sentation à  mercredi  10  mai  prochain,  étant  dépourvu  d'ac- 
cessoires et  n'osant  pas  risquer. 

Quant  à  Céphale  et  Procris  que  vous  me  proposez  de  pré- 
senter au  public,  c'est  un  spectacle  de  ce  genre  pour  lequel  il 
ne  paroît  avoir  nul  goût.  Je  suis  obligé,  bien  malgré  moi,  de 
renoncer  à  en  faire  i'acquisilion. 

J'ai  l'honneur  d'être  avec  la  considération  la  plus  distinguée , 
Monsieur,  votre  serviteur, 

ViTZTHUMB. 

J'aurai  soin  devons  informer,  Monsieur,  du  succès  qu'aura 
eu  la  Fausse  Magie;  et  quand  vous  aurez  quelque  chose  de 


(  433  ) 

nouveau  dans  le  genre  comique,  je  vous  prie,  Monsieur,  de 
vouloir  bien  vous  souvenir  de  moi. 
J'ai  l'honneur  d'être,  etc. 

A  M.  Vitzlhuml). 

PîH'is.  ce  mercn^dy  5  juillet  1770. 

Les  Mariages  Samnites,  Monsieur,  ont  eu  tout  le  succès 
que  j'osois  en  espérer.  Et  d'après  Icntretien  que  j'ai  eu  avec 
M.  Franck,  qui  est  venu  me  voir  de  votre  part,  Monsieur,  j'ai  fait 
copier  la  partition  que  j'enverai  cette  semaine  à  M,  l'abbé  Niccoli. 
Si  M.  Franck  vous  a  rendu  un  compte  exact  de  notre  conver- 
sation, il  vous  aura  dit  que  je  préméditois  un  voiage  dans  ma 
patrie.  Quelques  circonstances  m'empêchent  encore  de  me 
décider.  Je  désire  cependant  faire  ce  voiage,  et  c'est  beaucoup 
pour  un  homme  libre.  Si  mon  voyage  a  lieu ,  comme  l'espère , 
j'aurai  bien  du  plaisir,  ^Monsieur,  à  vous  entendre  et  vous 
admirer  dans  mes  ouvrages  mêmes,  que  vous  savez  faire 
exécuter,  à  ce  que  dit  l'Europe  entière,  dans  la  plus  grande 
perfection.  J'aurai  1  honneur,  Monsieur,  de  vous  informer 
dans  la  huitaine  si  mon  voiage  de  Bruxelles  à  Liège  aura  lieu. 
Je  serai  surtout  enchanté  de  voir  la  Fausse  Magie,  que  vous 
donnez,  dit- on,  mieux  qu'à  Paris. 

Je  suis,  Monsieur,  avec  la  plus  grande  considération,  votre 
très-humble  et  très-obéissant  serviteur, 

Grétry. 


A  M.  Vitzthumb. 

Il  y  a  déjà  plusieurs  jours,  Monsieur,  que  j'ai  envoyé  à 
Monsieur  l'abbé  Niccoli  un  paquet  qui  renferme  la  partition 
des  Mariages  Samnites,  la  pièce  imprimée  et  les  changements 
de  la  Fausse  Magie.  Quant  à  ce  dernier  article  vous  en  traiterez 
avec  M.  Haubaut,  copiste  de  la  comédie  Italienne.  Je  lui  ai 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  28 


(  434  ) 

déjà  permis  de  les  envoyer  dans  plusieurs  provinces  de  France, 
et  il  en  retire  un  petit  bénéfice. 

Je  vous  envoie  un  changement  que  nous  avons  jugé  néces- 
saire pour  précipiter  l'action.  A  la  place  de  l'air  :  Da?ïs  les 
airs,  acte  5*,  p.  47,  nous  avons  rais  le  dialogue  que  je  vous 
envoyé.  Si  vous  avez  une  bonne  bassetaille,  et  si  vous  ne 
craignez  pas  les  longueurs  comme  nous,  je  vous  enverai  l'air 
qu'on  a  trouvé  très-nécessaire  de  retrancher.  Je  pars  le 
15  août  de  Paris,  elle  M  je  serai  bien  près  de  Bruxelles.  Si 
vous  êtes  en  train  de  répéter  les  Samnites,  et  que  je  puisse 
vous  être  utile,  j'en  serai  bien  enchanté.  Je  ne  ferai  plus  long 
séjour  en  arrivant  à  Bruxelles.  Je  ramène  ma  sœur  qui  est 
chanoinesse  dans  mon  pays,  et  je  compte  revenir  ensuite  à 
Bruxelles  pour  voir  les  Samnites  et  la  Fausse  Magie,  telle  que 
vous  l'avez  donnée  jusqu'à  présent. 

Recevez,  Monsieur,  les  assurances  delà  parfaite  considéra- 
tion et  des  sentiments  distingués  avec  lesquels  j'ai  l'honneur 
d'être , 

Votre  très-humble  et  très-obéissant 
serviteur , 

Grétry. 
Paris,  ce  15  juillet  1776. 

Le  chef. 

C'est  moi,  oui  oui  qui  les  défendrai  (les  droits  de  son  fils). 
Assez  j'ai  fait  parler  la  loi,  il  est  tems  que  la  nature  triomphe. 
Oui,  citoyens,  Agathis  oublia  l'Etat  pour  son  père;  mais  son 

père  alloit  périr Il  tomba  au  milieu  de  la  mêlée.  Son  fils 

s'ouvre  un  passage,  l'enlève  dans  ses  bras  et  bientost  oubliant 
son  père  pour  la  patrie,  il  retourne  au  combat,  et  notre 
vengeance  est  assurée.  Citoyens,  voudriez-vous  condamnera 
la  douleur  le  vieillard  qui  lui-même  combattit  si  souvent  pour 
vous?  Voudriez-vous  couvrir  d'opprobre  sa  vieillesse?  Et  qu'il 
dise  en  descendant  au  tombeau  :  mon  fils  seroit  heureux  s'il 
mavoit  moins  aimé?  Interrogez  vos  cœurs,  et  voyez  qui  de 


(  435  ) 

VOUS,  dans  un  pareil  moment,  refuseroit  d'être  ou  père  aussi 


heureux  ou  fils  aussi  sensible. 

Le  choeur. 

Agathis,  Agalhis. 
De  ses  vertus  qu'il  ait  le  prix. 


A  M.  Vitzthumb. 

Bruxelles,  ce  21  aoust  1776. 

Oserai-je  vous  prier,  Monsieur,  en  cas  que  l'on  vous  adresse 
encore  quelques  lettres  pour  moi,  de  me  les  envoyer  à  1  Hôtel 
de  l'Agneau,  sur  3Ieuse,  à  Liège.  M.  De  Viltaneuse  et  moi, 
Monsieur,  nous  vous  prions  d'agréer  nos  remerciements  de 
toutes  les  honnêtetés  dont  nous  avons  été  comblés  par  vous 
pendant  notre  séjour  à  Bruxelles.  Que  ne  puis-je  vous  en  dire 
autant  de  la  part  de  ma  musique  ,  Monsieur.  Mais  elle  est  bien 
loin  d'être  aussi  satisfaite  de  vos  prétendues  corrections  que 
nous  le  sommes,  M.  de  Viltaneuse  et  moi,  de  toutes  vos  honnê- 
tetés. Ne  comptez  plus  sur  mon  retour  à  Bruxelles,  Monsieur. 
Je  viendrois  vous  gêner  dans  vos  opérations.  Vous  m'avez 
banni  à  jamais  du  théâtre  de  Bruxelles.  Mais  l'honnête  Mon- 
sieur Vitzthumb  conservera  toujours  sur  mon  cœur  les  droits 
que  l'homme  de  probité  obtient  si  naturellement  des  âmes 
reconnoissantes.  Je  suis.  Monsieur,  avec  la  plus  grande  et  la 
plus  parfaite  estime,  votre  très-humble  et  obéissant  servi- 
teur (1), 

Grétry. 


(1)  Malgré  l'absence  de  l'adresse  et  la  distinction  que  l'auteur  semble 
établir  entre  Monsieur,  et  M.  Vilzlhumb,  nous  croyons  qu'elle  lui  est 
écrite.  L'oncle  de  Grétry  et  d'autres  personnes  encore  avaient  adresse 
leurs  lettres  à  Vilzlhumb  pourles  faire  remettre  à  Grétry  pendant  son  séjour 
à  Bruxelles. 


(  436  ) 


OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 


Commission  pour  la  publication  d'une  collection  des  grands 
écrivains  du  pays.  —  OEuvres  de  Froissart,  publiées  avec  les 
variantes  des  divers  manuscrits  par  M.  le  B""  Kervyn  de  Let- 
tenhove.  Chroniques,  t.  XXIK  Table  analytique  des  noms  his- 
toriques, J.-Q.  Bruxelles,  1875;  vol.  in-8°. 

Du  Mortier  (Darlliélemy,  C.)  —  Opuscules  de  botanique 
(186:2-1875).  —  Hepaticae  Europae.  Bruxelles,  1873,  1874; 
2  vol.  in-8°. 

Van  Beneden.  (P.-J.)  —  Notice  sur  la  grande  Balénoptère 
du  Nord  (Balaenoptera  Sibbaldii).  Bruxelles;  br.  in-8°. 

Juste  {Th.)  —  Précis  de  l'histoire  contemporaine  (1815- 
1871).  Bruxelles,  1875;  vol.  in-12. 

Catalan  [E.)  —  Note  sur  les  nombres  de  Bernouilli.  —  Sur 
la  constante  dEuler  et  la  fonction  de  Binet.  —  Sur  les  Asymp- 
totes des  courbes  algébriques.  Paris;  2  br.  i\\-¥  et  br.  in-8". 

Cornet  (F.-L.)  —  Considérations  sur  la  production  et  l'em- 
ploi de  Tair  comprimé  dans  les  travaux  d'exploitation  des 
mines.  Mons,  1875;  br.  in-8°. 

Hennequin  {Le  capitaine  d'état-major).  —  Carte  géologi(iue 
de  l'Europe  à  l'échelle  du  8,000,000'=  avec  notice  explicative. 
Bruxelles,  1875;  feuille  in-pl.  et  br.  in-8°. 

ffeuschling  {Xavier).  —  Épidémie  typhoïde  de  Bruxelles, 
en  1869.  Compte  rendu  analytique  des  travaux  de  la  commis- 
sion d'enquête.  (Extrait  du  Moniteur  belge.  Septembre  1875.) 
Bruxelles;  br.  in-8". 

Royaume  de  Belgique.  —  Recueil  des  rapports  des  secré- 
taires de  légation  de  Belgique,  tome  2,11"  liv.,  août  1  875. 
Bruxelles  :  in-8°. 


(  ^37  ) 

Académie  royale  de  médecine  de  Belgique  ^  à  Bruxelles.  — 
Bulletin,  5''  série,  année  1875,  t.  IX,  n°*  o  et  7.  —  Mémoires 
couronnés,  in-8%  t.  III,  o'^  fascieule.  Bruxelles,  1875;  2  fase. 
in-8°. 

Cominission  royale  pour  la  publication  des  anciennes  lois 
et  ordonnances  de  la  Belgique.  —  Recueil  des  anciennes  lois 
et  coutumes  de  la  Belgique  :  Pays  et  comté  de  Flandre.  Quar- 
tier de  Bruges,  tome  second  {L.  Gilliodls-van  Sevei-en).  — 
Pays  et  comté  de  Brabant.  Quartier  d'Anvers,  tome  5"  {G.  De 
Longé).  Bruxelles,  l87o;  2  vol.  in-4°. 

Commissions  royales  d\ut  et  d'archéologie,  à  Bruxelles.  — 
Bulletin,  XIV«  année,  1873,  n°^  5  et  6.  Bruxelles.  1875;  in-8°. 

Association  belge  de  photographie.  —  Bulletin ,  2^  année, 
1875,  n"M  ,  2  et  3.  Bruxelles;  5  cah.  in-8°. 

Musée  de  l'industrie  de  Belgique.  —  Bulletin,  34^  année, 
4873,  t.  G8,  n"'*  1,  2  et  5,  juillet,  août,  septembre,  Bruxelles; 
5  cah.  gr.  in-S". 

Moniteur  industriel  belge,  vol.  II,  1875,  n"^  49  à  55. 
Bruxelles  ;  7  feuilles  in-4°. 

Société  royale  des  sciences  médicales  et  naturelles  de 
Bruxelles.  —  Journal,  55^  année;  GO"  vol.,  juin  1875;  61^  vol., 
juillet,  août  et  septembre  1875.  Bruxelles;  4  fase.  in-8°. 

Société  royale  de  pharmacie  de  Bruxelles.  —  Bulletin, 
19*^  année,  1875,  n°«  7,  8,  9  et  10.  Bruxelles;  4  fase.  in-8". 

Société  malacologique  de  Belgique.  —  Procès-verbal  : 
séances  de  juillet,  août  et  septembre  1875.  Bruxelles;  feuilles 
in-8°. 

Société  entomologique  de  Belgique,  à  Bruxelles.  —  Compte 
rendu,  série  II,  n"'  15-17,  juin-septembre  1875.  Bruxelles; 
feuilles  in-8°. 

Société  royale  de  botanique  de  Belgique.  —  Bulletin, 
tome  XI  V%  n°  1 .  Bruxelles,  1 875  ;  in-8°. 

La  Presse  médicale  belge,  27"  année  1875,  n"''  31-43. 
Bruxelles:  13  feuilles  in-4°. 


(  438  ) 

Annales  de  médecine  vétérinaire,  ^li"  année,  juillet  à  octo- 
bre 1875.  Bruxelles;  4  cah.  in-8°. 

A  nnales  d'oadistique,  1  ■"%  2%  5''  et  ¥  liv.Juillet-octobre  1 875. 
Bruxelles;  2  fasc.  in-8'. 

Le  Bibliophile  belge,  tome  X,  liv.  !,  2,  5,  4.  Bruxelles; 
feuilles  in-8°. 

L'Abeille,  XXP  année,  juillet-septembre  1873,  5^  à  1^  liv. 
Bruxelles;  in-8°. 

Biblingraphie  de  Belgique,  n"'  5  à  9,  1"  année,  mai  à  sep- 
tembre 1873.  Bruxelles;  feuilles  in-8°. 

Société  de  pharmacie  d'Anvers.  —  Journal,  51^  année,  mai , 
juin  et  juillet  1873.  Bruxelles;  5  cah.  in-8". 

Société  de  médecine  d'Anvers.  —  Annales,  XXXV'  année, 
juillet,  août  et  septembre  1873.  Anvers;  2  cah.  in-8". 

L'Illustration  horticole,  5'  série,  6^  vol.,  7"  liv.,  juillet  1873. 
Gand;  in-S". 

Journal  des  Beaux-Arts,  17^  année  1873,  n"'  15  à  18. 
Louvain;  6  feuilles  in-4°. 

Société  des  sciences,  des  arts  et  des  lettres  du  Hainaut ,  à 
Mons.  —  Mémoires,  5*'  série,  tome  X^  iMons,  1873;  vol.  in-8". 

Société  archéologique  de  Namur.  —  Annales,  tome  Xin% 
2'  liv.  Namur,  1875;  in-8». 

Société  médico-chirurgicale  de  Liège.  —  Annales,  XIV*" 
année,  juin  et  juillet  1873.  Liège;  cah.  in-8^ 

L'Echo  vétérinaire f  3*  année,  1873,  n°'  3,6  et  7.  Liège; 
5  fasc.  in-8''. 

Le  Scalpel,  28''  année,  juillet-septembre  1875,  n"*  1-15. 
Liège;  15  feuilles  in-4''. 

Société  hollandaise  des  sciences  à  Harlem.  —  Archives  néer- 
landaises des  sciences  exactes  et  naturelles,  tome  X,  1"^%  2*  et 
3*  liv.  La  Haye,  1873;  5  liv.  in-8^ 

Cosijn  (A)'  P.-J.)  en  Verivijs  (D'  E.)  —  Woordenboek  der 
Nederlandsche  taal.  Derde  Reeks,  Aflevering  4.  (Gebrek- 
Geducht).  La  Haye,  1873;  in-8°. 


(  i59  ) 

A'.  InslUuiU  voor  de  Taal-  Land-  en  Volketikunde  van 
Mederlandsch  Indië.  —  Bijdragen,  3"  Volgrecks,  Dec!  X, 
I'  Siiik.  -  Rcislochtcn  naar  de  Gecivinkbaai  op  Nicuw-Giiinea 
in  de  jaren  1869  en  1870,  door  C.  IL  H.  von  Roscnherc/.  La 
Haye,  1875;  fasc.  in-8"  et  vol.  in-4". 

Université  de  Leijde.  —  Annales  Aeademici,  1870-1871. 
Leyde,  1875;  vol.  in-4«. 

Maatschappij  der  Nederlandsche  Lelierkunde,  te  Leiden.  — 
Nieiiwe  werken  :  I  Dl.,  v  Si.,  1825;  II  Dl.,  1  en  2  St.,  1850; 
III  Dl.,  î2  St.,  1854;  IV  Dl.;  V  Dl.,  I  en  t>  St.  —  Nieuwe  Reeks 
van  Werken  :  I  Dl.,  1846;  III  Dl.,  1847;  VII  Dl.,  i  en  2  St.. 
1852.  —  Verhandelinojen,  1)1.  III,  1"  St.,  1819.  —  Ilandelingen, 
1827,  1829,  1865,  1872,  1875.  Leyde;  vol.  et  fasc.  in-8". 

Zeeuivsch  Genootschap  der  Welenschappen,  te  Middelbury. 

—  WeL  —  INaanilijst  van  Directeurcn  en  Leden.  Middelbourg, 
1874;  2  br.  in-S". 

Nederlandsche  Dierkundicje  Vereeniging  ,  te  Rotterdam.  — 
Tijdschrift,  jaargang  1874,  1«  Deel,  1%  2%  5^  en  4«  Aflevering. 
Rotterdam;  5  fasc.  in-8°. 

Historisch  Genootschap,  te  Utrecht.  —  Kroniek,  6"  Ser., 
IV«  Deel,  29'' jaargang,  1875.  —  Werken,  Nieuwe  Reeks,  n»  20 
(Brieven  en  onuifgegeven  slukken  van  Johannes  Utenbogaert. 
Derde  Deel.  Derde  Afdeeling,  1650).  — Histoire  des  Provinces- 
Unies  des  Païs-Bas,  depuis  le  parfait  establissement  de  cet 
Estât  par  la  paix  de  Munster.  Tome  IV  [Abraham  de  Wicque- 
fort).  Utrecht;  5  vol.  in-8°. 

Société  provinciale   des    arts   et    des   sciences    d'Utrechl. 

—  Aanteekeningen  gehouden  in  het  jaar  1874.  —  Verslag 
gehouden  den  30  Juni  i874.  —  Het  Kloo-stcr  te  Windesheim 
en  zijn  invloed,  door  D"-  J.  G.  R.  Àcquoy.  —  Peintures  murales 
de  l'église  St-Jacques,  à  Utrecht.  Utrecht  et  Leyde;  2  fasc.  et 
\ol.  in-8%  vol.  in-fol. 

Société  linnéenne  du  .Yord  de  la  France  y   à  Amiens.  — 


(  440  ) 

Bulletin  :  5'  année,  n°  39  ;  4'  année,  n°  40.  Amiens,  2  feuilles 
in-8». 

Société  des  antiquaires  de  Picardie,  à  Amiens.  —  Bulletin, 
année  1875,  W^  1  et  2.  Amiens;  2  fasc.  in-8°. 

Société  d'Émulation  de  Cambrai.  —  Mémoires,  t.  XXXI11% 
V"  partie,  1874.  Cambrai,  1875;  in'8°. 

Société  savoisienne  dliistoire  et  d'archéologie,  à  Chambéry. 
—  Mémoires  et  documents,  tome  XV%  l*^^  partie.  Chambéry, 
1875;in-8°. 

Académie  de  Stanislas,  à  Nancy. — Mémoires,  CXXV^  année, 
•1874,  4^  série,  t.  VII.  Nancy,  1875;  vol.  in-8°. 

Garcin  De  Tassy.  —  La  langue  et  la  littérature  liindous- 


tanies  :  de  1850  à  18C9  (seconde  édition);  en    1871,  1872, 
1873  et  1874.  Paris;  5  vol.  in-8°. 

Lorin.  —  Faits  relatifs  à  l'étude  des  alcools  polyatomiques 
proprement  dits.  —  Application  à  un  nouveau  mode  d'obten- 
tion de  l'acide  formique  cristallisable,  Paris,  1875;  br.  in-4°. 

Neyreneuf  (F.)  —  Sur  le  rôle,  dans  les  phénomènes  élec- 
triques, des  substances  isolantes  en  contact  avec  des  corps 
conducteurs.  Paris,  1875;  br.  in-4*'. 

Académie  des  sciences  de  Paris.  —  Comptes  rendus, 
tome  LXXXI,  n"'  1-15,  juillet-septembre  1875.  Paris;  15  cah. 
in-4". 

Revue  politique  et  littéraire,  "i"  série,  5^  année,  1875-76, 
n"'  1  à  15.  Paris;  13  cah.  in-4°. 

Revue  scientipque,  2*^  série,  5^  année,  1875-7G,  n*'*  1  à  15. 
Paris;  15  cah.  in-4''. 

Revue  britannique,  juillet,  août  et  septembre  1875.  Paris; 
5  demi-vol.  in-8". 

V Institut,  ï\ow\q\\^  série,  3*  année,  juillet  à  septembre  1875, 
„os  |;29  à  141.  Paris;  13  feuilles  in-4''. 

Archives  de  médecine  navale,  tome  24%  n*"  1,  2,  5,  juillet- 
septembre  1875.  Paris;  3  cah.  in-S". 


(  Ui   ) 

Le  Progrès  médical,  5'"*=  année  1875,  n°'  27-39.  Paris; 
l  5  feu  il  les  in-4". 

Journal  de  ragriculture,  tome  III,  juillet-septembre  1875. 
Paris;  15  cali.  in-8". 

Revue  hebdomadaire  de  chimie,  (j*  année  1875,  n°'  i  à  38, 
juillet-septembre.  Paris;  1875;  58  feuilles  in-8°. 

Société  de  géographie  de  Paris.  —  Bulletin,  juillet,  août  et 
septembre  1875.  Paris;  3  fasc.  in-8°. 

Société  d'anthropologie  de  Paris.  Bulletins,  S''  série  :  t.  IX^ 
5"  fîisc,  juillet  à  novembre  1874;  t.  X%  3«  fasc.  mai  et  juin 
1875.  Paris;  2  fasc.  in-8°. 

Société  géologique  de  France.  —  Bulletin,  3*  série  :  t.  H, 
1874,  n"  7;  t.  IIl,  1875,  n°^  6  et  7.  Paris;  3  liv.  in-8°. 

Société  météorologique  de  France.  —  Annuaire,  tome  XXIP 
1874,  feuilles  5  à  15  incl.  —Nouvelles  météorologiques? 
8^  année,  juillet-octobre  1875.  Paris;  6  fasc.  in-8*'. 

Société  centrale  d'agriculture  de  France,  à  Paris.  —  Bul- 
letin des  séances,  n"'  4,  5,6  et  7, 1875.—  Séance  publique  an- 
nuelle tenue  le  27  juin  1875.  —  Mémoires,  année  1875.  Paris; 
5  fasc.  et  vol.  in-S". 

Société  mathématique  de  France.  -  Bulletin  .  tome  III,  n*»'  5 
et  6,  septembre-octobre  1875.  Paris;  2  liv.  in-8''. 

Société  des  amis  des  sciences  naturelles  de  Rouen.  —  Bul- 
letin, 2*  série,  11^  année  1875,  1  semestre.  Rouen,  1875: 
in-8°. 

Société  d'agriculture ,  sciences  et  arts  de  V arrondissement 
de  Valenciennes.  —  Revue  agricole ,  27^  année  1 875  ,  t.  XXVIIÏ, 
n"'  4  à  7.  Valenciennes  ;  2  liv.  in-8°. 

Hirn{G.-A.)  —  Tbéorie  analytique  élémentaire  du  plani- 
mètre  Amsler.  Paris,  1875;  br.  in-8°. 

K.  P.  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Berlin.  —  Monats- 
bericht,  Mai-Juin  1875.  Berlin  ,  1875  ;  2  fasc.  in-8°. 

K.  P.  Geodcitische  Institut.  —  Astronomisch-seodâtische  Ar- 


(  442  ) 

beiten  in  den  Jahren  1875  und  1874.  Berlin,  1875;  vol.  in -4°. 
Bureau  central  de  l'Association  géodésique  internationale. 

—  Comptes  rendus  des  séances  de  la  quatrième  conférence 
i^éodésique  internationale  pour  la  mesure  des  degrés  en  Europe, 
réunie  à  Dresde  du  23  au  28  septembre  1874.  Berlin,  1875; 
in-4". 

Deutsche  cheniische  Gesellschaft  zu  Berlin.  —  Berichte, 
VIII.  Jahrg,  1875,  N' 12,  15,  14  und  15.  Berlin ,  1875;4fasc. 
in-8». 

Gesellschaft  fur  Natur-  und  Heilkunde  in  Dresden.  — 
Jahresbericht,  October  1874  bis  Mai  1875.  Dresde;  in-8^ 

JVeue  Zoologische  Gesellschaft  in  Frankfurt  A.  M.  —  Zeit- 
schrift,  XVI  Jahrg.  Januar-Juin  1875.  Francfort  S/M;  6  cah. 
in-8». 

Justus  Perthes"  Geographische  Anstalt  zu  Gotha.  —  Mit- 
iheilungen,  21.  Band,  1875,  IX.  und  X.  —  Erganzungsheft , 
N'.  45  Gotha;  5  cah.  in-4''. 

Historischer  Verein  fi'ir  Steiermark  zu  Graz.  -  Mitthei- 
lungen,  XXIII^  Heft ,  1875.  —  Beitrage  zur  Kunde  Steierra. 
Geschichtsquellen,  12.  Jahrgang.  Graz,  1875;  in-8°. 

Natur wissenschafilicher  Verein,  Hamburg.  —  Abhandlun- 
gen  :  V.  Band,  4  Abth.;  VI.  Band,  1.  Abth.  Hambourg,  1875; 
2  fasc.  in-4°, 

Medicinisch-naturwissenschaftliche  Gesellschaft  zu  Jena. 

—  Jenaisehe  Zeitschrift,  IX.  Bd.,  N.  F.,  II.  Bd.,  5.  Heft.  Jena. 
1875;in-8°. 

Universitàt  zu  Kiel.  — Schriften  aus  dem  Jahre  1874, 
Band  XXI.  Kiel,  1875;  vol.  in-4«. 

Archiv  der  Mathematik  und  Phijsik,  LVIII.  Teil.,  1.  Heft. 
Leipzig,  1875;  in-8'=. 

K.  B.  Akademie  der  Wissenshaften  zu  Miinchen.  —  Zit- 
zungsberichte  der  philoso.-philolo.  und  histor.  Classe,  1875; 
Bd.  I.,  Heft  III.  Munich,  1875;  in-8°. 


(  445  ) 

K.  K.  Stermvarte  zu  Prag.  —  Astronomischc,  Magnolische 
und  Meteorologischc  Bcobaclitungen,  55.  Jahrgang,  1874. 
Prague,  1873;  in-4°. 

Casopis  Léimnir  Ceskych,  Rocnik  XIV,  1875,  Cislo  26-31, 
53-45.  Prague;  17  feuilles  in-4^ 

Verein  fur  Vaterlandische  Naturkunde  in  Wurltemherg. — 
Wurltenibergischc  naturwissenscliaftliche  Jahresliefte,  Jahr- 
gang XXI.,  1875.S(uUgard,  1875;  in-8°. 

Verein  fur  Kunst  und  Allerthiim  in  Ulm  und  Oberschwa- 
6ew.— Verbandlungeii,  Neue  Rcihe,  VII.  Heft.  Ulm,  1875; 
in-4". 

K.  K.  Geologische  Beichansfall  in  Wien.  —  Jahrbucli,  Bd. 
XXV,  N«  2,  April ,  Mai ,  Juni  1 875.  —  Verbandlungeii ,  N°  6-1 0 , 
April-Juni  1875.  Vienne;  fasc.  et  5  feuilles  petit  in-4". 

Antropologisclie  Gesellscliaft  in  Wien.  —  Mittbeilungen,  V. 
Band,  Nr.  4  u.  5,  6  u.  7,  8  u.  9.  Vienne;  feuilles  in-8''  avec 
planches. 

Dorpater  Naturforscher  Gesellschaft.  — Archiv  fiir  die  Na- 
turkunde,  1.  ser.  :  V,  Bd.,  1.-4.  Liefer.;  VII.  Bd.,  2.-4.  Liefer. 
—  Sitzungsberichtc,  III.  Bd.,  V.  und  VI.  Heft,  1873,  1874. 
Dorpat,  6  fasc.  gr.  in-8''  et  2  fasc.  pet.  in-8^ 

Kurldnd.  Gesellschaft  fur  Lileratur  und  Kunst,  Mitau.  — 
Sitzungs-Berichte  aus  denj  Jahre  1874.  Riga,  1875;  in-8°. 

K.  Upsala  Universitets.  —  Arsskrift ,  1874.  (vol.  in-8°).  — 
Fôrelâsningar  ocb  Ofningar  (2  br.  in-8°).  —  Nagra  Bidrag  till 
Upsala  theologiska  fakultets  historia,  I.,  II.,  III.  (C.  A.  Corné- 
lius).—  Slatistisk  undersôkning  rôrande  Valdsamma  dôdsfall 
i  Sverige,  1.  [Klas  G.  Odén)  in-4°.  —  Thèses  académiques,  65 
br.  in-8°  et  br.  in-4''. 

Académie  Royale  Danoise  des  Sciences  et  des  Lettres,  à  Co- 
penhague. —  Bulletin, n°2,  mars-septembre  J  874.  —  Mémoires , 
classe  des  lettres,  5*  série,  vol.  IV,  n°  11.  Copenhague;  fasc. 
in-8°  et  fasc.  in-4*'. 

Société  Royale  des  Antiquaires  du  Nord,  à  Cope?ihague.  — 


(  444  ) 

Aarbôger  for  Nord.  OEdk.  og  Historié,  1874.  —  Tillœg,  aar- 
gang  1873.  —  Mémoires,  nouvelle  série,  1875-1874,  feuilles  7 
à  lô.  —  Islendinga  Sôgur,  III.  vol.  1875.  —  Njala,  1873.  — 
Kongehôiene  i  Jellinge  og  deres  ivndersôgelse  efter  kong  Fre- 
derik  VU''  befaling  i  1801.  {J.  Kornerup).  Copenhague;  5  vol. 
et  feuilles  10-8";  vol.  in-4°. 

Société  Vaudoise  des  sciences  naturelles,  à  Lausanne.  —  Bul- 
letin, 2^ série,  vol.  XllI,  n°  74.  Lausanne,  mai  1873;  in-8". 

Société  de  géographie  de  Genève.  —  Mémoires  et  Bulletin, 
tome  XIV,  liv.  1  à  5, 1873.  Genève,  Baie,  Lyon;in-8°. 

Mensini  [lacopo).  —  La  Spia  ortosismica.  Nuovo  apparecchio 
avvisatore  dei  terremoti  sussultori.  Florence,  1873:  br.  in-8°. 

Orsoni  (Francesco).  —  I  microfiti  ed  i  microzoi  délia  cbi- 
mica  organica.  Noto,  1873;  br.  in-4". 

Pessina{Enrico).  —  Appunli  interno  al  nuovo  schéma  di 
codiec  pénale  per  il  regno  d'Italia  e  lezioni  sulla  pena  di  morte. 
Naples,  1875:  vol.  pet.  in-8°. 

/?.  Comitato  geologico  d'Italia.  —  BoUettino,  anno  1875, 
n".  5  e  4,  5  e  6.  Rome,  1873;  2  fasc.  in-8". 

Socielù  Toscana  di  Scienze  Naturali,  Pisa.  — Atli,  vol.  1 , 
fasc.  1  e  2.  Pise,  1873;  "1  fasc.  in-8«. 

Nature,  vol.  XI,  1873,  N-  282-^287,  vol.  XII,  N«*  288-309, 
april-september  1875.  Londres,  1875;  28  cah.  in-i". 

Iron,  New  Séries,  vol.  VI,  1875,  N°'  129-143.  Londres:  13 
feuilles  gr.  in-4''. 

Royal  geographical  Society  of  London.  —  Proceeding-', 
vol.  XIX,  N"'  Vil  and  VIII.  Londres  ,  1875;  2  fasc.  in-8". 

Meteorological  Society  of  London.  —  Quarterly  Journal, 
july  1875.  Londres:  in-8'\ 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALE  DES  SCIENCES, 

DES 

LETTRES  ET  DES  BEAUX- ARTS  DE  BELGIQUE. 
1875. —NMl. 


CLASSE  DES   SCIENCES. 


Séance  du  6  novembre  4875, 

M.  A.  Brialmont  ,  directeur  et  président  de  l'Académie. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétueL 

Sont  présents  :  MM.  J.-S.  Stas,  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van 
Beneden,  Edm.  de  Selys  Longchamps ,  H.  Nyst, 
H.  Gluge,  Melsens,  F.  Duprez,  G.  Dewalque,  Ern.  Que- 
telet,  H.  Maus,  M.  Gioesener,  E.  Candèze,  F.  Donny, 
Ch.  Montigny,  Steichen ,  Éd.  Dupont ,  Éd.  Morren , 
Éd.  Van  Beneden,  G.  Malaise,  Alb.  Briart  et  F.  Plateau, 
membres  ;  T.  Schwann ,  E.  Catalan  et  Aug.  Bellynck , 
associés;  Éd.  Mailly,  F.  Crépin,  et  Ch.  Van  Bambeke, 
correspondants. 

2"°"  SÉRIE,  TOME  XL.  29 


(  446  ) 


CORRESPONDANCE. 


La  classe  a  perdu,  le  20  octobre  1875,  sir  Charles 
Wheatstone ,  I'uq  de  ses  associés  de  la  section  des  sciences 
mathématiques  et  physiques,  décédé  à  Paris  à  l'âge  de 
74  ans. 

—  La  Société  impériale  des  naturalistes  de  Moscou 
remercie  pour  les  félicitations  académiques  qui  lui  ont  été 
adressées  au  sujet  du  50^  anniversaire  du  doctorat  de  son 
président,  M.  le  conseiller  privé  Alex.  Fischer  de  Wald- 
heim.  Elle  annonce  en  même  temps  qu'elle  fera  part  de 
ce  témoignage  lors  du  jour  de  la  fête  jubilaire. 

—  L'Institut  royal  des  sciences,  des  lettres  et  des  arts, 
à  Venise,  adresse  le  programme  de  ses  concours  pour  les 
années  1875, 1876  et  1877. 

—  M.  le  professeur  Bernardin  envoie  ses  observations 
sur  le  règne  végétal  faites  à  Melle  le  21  octobre  dernier. 

M.  J.  Cavalier  adresse  son  résumé  météorologique 
pour  Ostende ,  pendant  les  mois  de  septembre  et  octo- 
bre 1875. 

—  L'Académie  nationale  des  sciences  exactes  de  l'Uni- 
versité de  Cordova,  l'Académie  physio-médico-statistique 
de  Milan  et  la  Société  photographique  de  Toulouse  en- 
voient leurs  récentes  publications  et  demandent  l'échange. 

—  Les  Sociétés  zoologiques  de  Londres  et  de  Francfort- 


(  417  ) 

sur-Mein  et  la  Société  asiatique  du  Bengale,  à  Calcutta, 
envoient  également  leurs  derniers  travaux. 

—  M.  Edouard  Morren,  membre  de  la  classe,  offre  les 
deux  ouvrages  suivants  :  i°  Bulletin  de  la  Fédération  des 
sociétés  d'horticulture  de  Belgique^  1874;  2°  Correspon- 
dance botanique.  Liste  des  jardins^  des  chaires  et  des  mu- 
sées botaniques  du  monde,  5^  édition. 

La  classe  vote  des  remercîments  pour  ces  dons. 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  sont  envoyés  à 
l'examen  de  commissaires  : 

1°  Les  dépôts  littoraux  de  l'assise  paniselienne  dans 
les  enviroîis  de  Bruxelles,  mémoire  manuscrit  avec  billet 
cacheté  renfermant  les  noms  des  auteurs.  —  Commis- 
saires :  MM.  Dupont,  Nyst  et  Briart; 

2°  Les  roches  réputées  plutoniennes  des  Ardennes  fran- 
çaises, seconde  partie  et  fin  du  mémoire  couronné  de 
MM.  de  La  Vallée-Poussin  et  Renard.  —  Commissaires  : 
MM.Dewalque,  De  Koninck  et  Malaise; 

5**  Théorèmes  sur  les  polygones  réguliers  et  sommation 
de  quelques  séries  trigonométriques,  par  M.  le  capitaine 
d'artillerie  Beinemund.  —  Commissaires  :  MM.  De  Tilly 
et  Catalan  ; 

4"  Sur  le  problème  de  deux  liquides  superposés  dans  un 
tube  capillaire,  par  M.  G.  Van  der  Mensbrugghe.  —  Com- 
missaires :  MM.  J.  Plateau  et  F.  Duprez; 

5"  Descriptions  de  quelques  oiseaux  nouveaux,  par 
M.  Alphonse  Dubois.  —  Commissaire  :  M.  de  Selys  Long- 
champs. 


(  us  ) 


RAPPORTS. 


Conformément  à  Tordre  du  jour  de  la  séance ,  la  classe 
est  appelée  à  prendre  une  résolution  sur  les  conclusions  des  * 
rapports  de  MM.  Dewalque ,  Dupont  et  Briart  concernant 
le  projet  de  publication  d'une  nouvelle  carte  géologique  de 
la  Belgique. 

Après  une  longue  discussion ,  à  laquelle  beaucoup  de 
membres  ont  pris  part,  la  classe  a  décidé  de  prier  M.  le 
Ministre  de  l'intérieur  de  faire  faire  un  nouveau  tirage  de 
la  carte  de  Dumont,  en  attendant  que  le  gouvernement 
donne  suite  au  vœu,  que  lui  exprime  l'Académie,  de  voir 
exécuter  une  nouvelle  carte  géologique  à  grande  échelle. 
L'exécution  de  cette  carte  serait  confiée  à  un  comité  pour 
la  composition  duquel  l'Académie  réclame  le  concours  des 
départements  de  l'Intérieur,  de  la  Guerre  et  des  Travaux 
publics. 


Note  sur  les  tremblements  de  terre  en  ^872,  avec  supplé- 
ments pour  les  années  antérieures  de  i843  à  ^812,  par 
M.  Alexis  Perrey. 

Rapport  de  M.  C.  MÊataise. 

a  Le  travail  de  M.  A.  Perrey  comporte  124  pages.  C'est 
une  espèce  de  statistique  des  phénomènes  séismiques,  pro- 
venant de  la  réunion  de  notes  publiées  dans  les  journaux 


(  U9  ) 
périodiques,  etc.,  et  de  communications  reçues  de  diverses 
personnes.  Ce  résumé  est-il  complet  pour  chaque  année? 
Il  est  permis  d'en  douter  vu  les  nombreuses  annotations 
ajoutées  sous  forme  de  supplément. 

Dans  un  moment  où  l'on  marchande  les  subsides  accor- 
dés à  l'Académie,  pour  l'impression  de  ses  travaux,  je  suis 
à  me  demander  si  ce  n'est  pas  grever  inutilement  notre 
budget  que  de  voter  l'impression  du  travail  de  M.  A.  Per- 
rey  dans  nos  Mémoires.  N'y  a-t-il  pas  en  France  de 
recueil  où  ce  genre  de  travail  pourrait  tout  aussi  bien 
figurer  qu'ici.  Et  d'ailleurs  ne  publie-t-on  pas  en  Alle- 
magne et  en  Italie  des  résumés  de  tout  ce  qui  se  rapporte 
aux  tremblements  déterre  et  aux  phénomènes  volcaniques. 
J'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe  le  dépôt  dans  les 
archives  du  mémoire  de  M.  A.  Perrey.  d 

JRappot*t  de  MM.   Ch.  .Wontigny. 

a  En  accueillant,  depuis  1843,  dans  ses  publications 
les  catalogues  des  tremblements  de  terre  réunis  par 
M.  Alexis  Perrey,  l'Académie  a  eu  l'intention  de  mettre  en 
lumière  des  documents  qui  sont  indispensables  à  l'étude 
de  la  cause  de  ce  grand  phénomène  naturel.  L'importance 
de  semblables  documents  s'était  fait  sentir  depuis  long- 
temps; aussi  plusieurs  savants  s'étaient-ils  occupés  de  leur 
réunion.  Arago,  entre  autres,  dès  1817,  avait  commencé 
ce  recensement.  Forcé  d'interrompre  cette  tâche  en  1830, 
ce  savant  se  félicita  de  la  voir  reprise  plus  lard  par 
M.  A.  Perrey  et  poursuivie  par  lui  avec  un  zèle  infatigable, 
comme  Arago  le  dit  lui-même.  Un  an  avant  sa  mort,  il  se 
plaisait  à  reconnaître  que  les  catalogues  de  son  continua- 


(  .450  ) 
leur  étaient  plus  complets  que  les  siens,  et  qu'ils  présen- 
taient l'avantage  de  s'étendre  à  un  plus  grand  nombre 
de  contrées.  Il  admettait,  en  outre,  les  conclusions  que 
M.  A.  Perrey  avait  déduites  de  ses  premiers  recensements, 
et  suivant  lesquelles  les  secousses  de  tremblements  de 
terre  sont  influencées  par  la  marche  de  la  lune  (1). 

En  effet,  les  principales  conclusions  que  M.  A.  Perrey 
a  tirées  de  ses  recherches,  qui  ont  successivement  em- 
brassé des  périodes  de  temps  de  plus  en  plus  étendues, 
sont  les  suivantes  (2)  : 

l**  La  fréquence  des  tremblements  de  terre  augmente 
vers  les  syzygies; 

2"*  Elle  est  aussi  plus  marquée  lorsque  la  lune  est  au 
voisinage  de  son  périgée. 

Ces  conclusions  sont  citées  par  plusieurs  savants ,  entre 
autres  par  sir  Charles  Lyell  (5).  Ce  célèbre  géologue  rap- 
pelle, au  sujet  de  ces  conclusions,  la  remarque  de  sir  John 
Herschel  que  voici  :  «  Bien  que  l'action  du  soleil  et  de  la 
»  lune,  dit  Herschel ,  soit  impuissante  à  produire  un  mou- 
j)  vement  de  marée  dans  la  croûte  solide  de  la  terre,  elle 
»  tend  pourtant  à  le  faire,  et  produirait  ce  résultat,  si  cette 
»  croûte  était  fluide;  et  qu'en  réalité  elle  fait  donc  passer 
»  alternativement  les  portions  solides  de  la  surface  ter- 


(1)  OEuvres  d'Arago,  l.  XII,  pp.  209  et  -264.  Voir  aussi  le  t.  XYIl, 

p.  CCXLIl. 

(2)  Propositions  sur  les  tremblements  de  terre  et  les  volcans  formu- 
lées par  M.  Alexis  Perrey,  professeur  à  la  Faculté  des  sciences  de  Dijon, 
1863. 

(3)  Principes  de  géologie,  etc.,  par  sir  Charles  Lyell,  ouvrage  traduit 
par  M.  J.Ginestou  en  1875,  l.  II,  p.  293. 


(  451  ) 

D  restre  de  Tétat  d'extension  à  celui  de  compression,  d 
(Herschel,  Familiar  lectures  on  Scientific  Subjets,  1866). 

Si  j'appelle  ici  l'attention  de  la  classe  sur  les  faits  qui 
précèdent,  c'est  sans  autre  intention  que  de  donner  plus  de 
relief  encore  aux  travaux  de  M.  A.  Perrey,  en  citant  des 
savants  qui  ont  pris  en  considération  les  conclusions  qu'il 
en  a  déduites.  La  science  est  donc  en  voie  de  recueillir  des 
fruits  de  la  publication  des  nombreux  documents  que  notre 
Académie  a  insérés  dans  ses  Recueils,  et  qu'il  n'apparte- 
nait peut-être  qu'à  un  corps  savant  de  mettre  au  jour,  vu 
leur  étendue  et  la  spécialité  de  leur  objet. 

Je  ferai  remarquer,  en  outre,  que  la  coordination  si  labo- 
rieuse d'une  statistique  des  tremblements  de  terre  ne  peut 
se  compléter  en  peu  de  temps,  les  documents  pour  les  an- 
nées écoulées  n'arrivant  que  tard  et  successivement  à  l'au- 
teur. Aussi  n'y  a-t-il  pas  lieu  d'être  surpris  si,  dans  le  tra- 
vail que  la  classe  a  bien  voulu  soumettre  à  mon  examen , 
M.  A.  Perrey  a  publié  un  supplément  où  sont  indiquées  les 
secousses  relatives  aux  années  184^3  à  1872  qu'il  n'avait 
pu  signaler  primitivement.  Dans  l'exposé  plus  étendu  des 
mouvements  qui  ont  agité  la  surface  terrestre  pendant 
l'année  1872,  M.  A.  Perrey  me  paraît  avoir  tenu  compte 
d'une  remarque  critique  de  notre  honorable  confrère 
M.  Mailly,  au  sujet  des  développements  trop  étendus  que 
l'auteur  avait  donnés  à  plusieurs  citations  inscrites  dans  les 
catalogues  précédents. 

En  présence  des  considérations  qui  précèdent,  j'ai  l'hon- 
neur de  proposer  à  l'Académie  l'insertion  du  nouveau  tra- 
vail de  M.  A.  Perrey  dans  le  recueil  des  Mémoires  in-8% 
et  que  des  remercîments  soient  également  adressés  à  l'au- 
teur. » 


(  452  ) 


BappofI  de  JUt.  Oup»*€z. 

«  Mon  opinion  au  sujet  de  l'utilité  des  recherches  sur 
les  tremblements  de  terre  dont  M.  A.  Perrey  continue  à 
s'occuper  d'une  manière  spéciale,  est  en  tous  points  con- 
forme à  celle  qui  se  trouve  exprimée  dans  le  rapport  de 
M.  Montigny,  et  je  me  joins  à  notre  confrère  pour  appuyer 
l'impression  de  la  nouvelle  Note  présentée  par  l'auteur. 
Quant  à  la  question  financière  soulevée  dans  le  rapport  de 
l'honorable  M.  Malaise,  je  me  crois  incompétent  à  la  traiter, 
et  j'en  laisse  la  solution  à  l'appréciation  de  l'Académie.  » 

En  présence  de  la  divergence  d'opinions  des  commis- 
saires et  des  ressources  restreintes  dont  l'Académie  dis- 
pose pour  ses  publications,  la  classe  a  dû  se  borner  à  voter 
des  remercîments  à  l'auteur;  elle  a,  en  même  temps,  décidé 
le  dépôt  de  son  travail  dans  les  archives. 


MM.  Folie,  Catalan  et  Liagre,  chargés  d'examiner  le 
Fragment  III,  du  travail  de  M.  J.-C.  Houzeau,  sur  le  calcul 
numérique,  donnent  lecture  de  leurs  rapports. 

Conformément  aux  conclusions  de  ces  trois  commis- 
saires, la  classe  décide  l'impression  au  Bulletin  du  frag- 
ment précité  ;  elle  a  voté,  en  même  temps,  des  remercî- 
ments à  M.  Houzeau. 


(  455  ) 


1"  Éludes  sur  la  planète  Mars  (S''  notice);  2°  Sur  l'aspect 
de  l'ombre  du  2!'  satellite  de  Jupiter  le  25  mars  1874; 
notices  par  M.  F.  Terby. 

Rapport  de  M.  JEfn.  Quetetei. 

«  La  notice  que  M.  Terby  présente  à  l'Académie  se  com- 
pose de  trois  parties  distinctes.  La  première  contient  les 
observations  de  la  planète  Mars,  faites  à  Louvain  pendant 
l'opposition  de  1875.  Les  conditions  de  distance  étaient 
favorables,  mais  malheureusement  la  déclinaison  de  la 
planète  était  très-australe.  L'auteur  a  pu  cependant  réunir 
un  certain  nombre  de  dessins  qu'il  a  comparés  avec  soin 
aux  ligures  de  Mars  obtenues  depuis  1864.  Il  trouve  que  la 
situation  des  taches  sur  le  disque  présente  beaucoup  d'ana- 
logie cette  année  avec  celles  des  années  1864  et  1858.  Or, 
dans  ces  trois  circonstances,  les  observations  ont  été  faites 
à  des  époques  voisines  des  équinoxes  martiels  :  en  1858 
et  1875  l'équinoxe  du  printemps  méridional,  en  1864, 
l'équinoxe  du  printemps  boréal.  L'auteur  présente  une  des- 
cription détaillée  des  diverses  taches  et  fait  ressortir  l'in- 
fluence considérable  qu'exercent  les  saisons  sur  l'apparence 
et  quelquefois  même  sur  la  visibilité  de  certaines  d'entre 
elles. 

La  2^  partie  est  un  appendice  au  mémoire  intitulé  Aréo- 
graphie  que  l'Académie  a  publié  parmi  ses  Mémoires  in4". 
L'auteur  a  reçu  communication  de  quelques  ouvrages  qu'il 
ne  connaissait  pas  à  l'époque  où  a  paru  son  premier  travail, 
notamment  deux  mémoires  de  l'astronome  italien  Salvator 
Serra  et  un  autre  de  Dominique  Cassini.  Cette  bibliogra- 


(  lU  ) 

phie  mentionne  aussi  quelques  travaux  modernes  qui  sont 
comparés  avec  ceux  que  M.  Terby  a  déjà  fait  connaître. 

Dans  le  Bulletin  du  mois  de  novembre  1874,  M.  Terby 
avait  attiré  l'attention  des  astronomes  sur  la  différence 
de  teinte  qu'avaient  présentée,  dans  la  soirée  du  25  mars 
précédent,  les  ombres  des  2'  et  3'  satellites  de  Jupiter  pro- 
jetées sur  le  corps  de  la  planète;  l'ombre  du  o*^  lui  avait  paru 
décidément  noire  et  celle  du  second,  grise.  M.  Flammarion 
était  parvenu  à  un  résultat  analogue.  M.  Terby,  dans  la 
3^  partie  de  sa  note,  rectifie  ce  qu'il  avait  dit  relativement 
à  l'observation  faite  par  M.  Knobel.  Cet  astronome  a  vu 
l'ombre  du  2^  satellite  noire  et  non  pas  grise.  M.  Webb  l'a 
trouvée  également  noire.  D'après  M.  Birmingham,  l'ombre 
était  brune  et  faible  et  selon  M.  Buffham  elle  fut  grise  pen- 
dant */6  du  temps  du  passage.  Cette  diversité  d'appréciation 
est  d'autant  plus  remarquable  que  l'on  avait  à  côté  comme 
point  de  comparaison  l'ombre  du  5*^  satellite  que  tous  les 
observateurs  semblent  s'être  accordés  à  regarder  comme 
noire.  L'auteur  se  borne  à  constater  le  fait  sans  en  cher- 
cher l'explication. 

Ces  notes  constituent  une  suite  intéressante  aux  re- 
cherches déjà  publiées  par  M.  Terby  sur  l'aspect  des 
grosses  planètes  de  notre  système  et  j'ai  l'honneur  d'en 
proposer  l'impression.  » 

Conformément  à  cet  avis  partagé  par  M.  Liagre,  second 
commissaire,  la  classe  décide  l'impression  au  Bulletin  des 
notes  de  M.  Terby. 


(  4SS  ) 


COMMUNICATlOiNS  ET  LECTURES. 


Fragments  sicr  le  calcul  numérique,  par  M.  J.-C.  Houzeau , 
membre  de  TAcadémie. 

FRAGMENT  III. 

RÉSOLUTION   DES   ÉQUATIONS   NUMÉRIQUES. 

60.  Je  ne  m'occuperai  ici  des  équations  qu'au  point  de 
vue  des  méthodes  les  plus  avantageuses  pour  le  calcul 
numérique.  Je  laisserai  de  côté  la  recherche  des  racines 
imaginaires,  sauf  dans  quelques  cas  particuliers,  tels  que 
les  équations  du  second  et  du  troisième  degré.  Dans  les 
applications  des  sciences  physiques  on  n'a  guère  besoin, 
en  effet,  que  des  racines  réelles;  mais  il  est  important 
d'arriver  rapidement  et  sûrement  à  ces  racines. 

J'ordonnerai  partout  les  équations  numériques  suivant 
les  puissances  croissantes  des  inconnues.  Pour  les  équa- 
tions à  une  inconnue,  j'écrirai  par  exemple  : 

0  =  A  -t-  Bx  -h  Cx'  -  -t-  Jx*"-'  -+-  Kx"-'  -t-  x"*.     .  (85) 

De  cette  manière,  quel  que  soit  le  degré  de  l'équation, 
A  représentera  toujours  le  terme  connu,  R  le  coefficient 
du  terme  du  premier  degré,  C  celui  du  terme  du  second 
degré,  et  ainsi  des  autres.  Pour  toute  équation  de  degré  n, 


(  456  ) 

n  étant  <  m,  il  suffira  d'égaler  à  l'unité  le  coefficient  de 
x",  et  de  rendre  nuls  tous  les  coefficients  qui  suivent. 

En  outre,  lorsqu'une  équation  de  la  forme  (85)  a  subi 
une  préparation  quelconque,  lorsqu'elle  a  été  par  exemple 
privée  à  dessein  d'un  de  ses  termes,  ou  qu'un  de  ses  coeffi- 
cients a  reçu  une  valeur  voulue,  je  remplacerai  x  par  y 
(nouvelle  inconnue),  et  les  capitales  A,  B,  C...  par  les 
lettres  basses  a,  b,  c...  J'écrirai  alors 

0  =  a  -\-  by  -^  cy^ ...  -^jy'^"^  -f-  %•""*  -<-  2/"*  .     .  (86) 
§  M.  —  Solution  trigonométrîque  du  second  degré. 

61.  La  résolution  de  l'équation  du  second  degré  à  une 
inconnue,  par  le  secours  des  lignes  goniométriques,  est 
tellement  simple,  et  si  bien  adaptée  au  calcul  des  loga- 
rithmes, que  l'on  doit  s'étonner  de  la  trouver  complè- 
tement négligée.  Cette  équation  est,  d'après  la  notation  du 
numéro  précédent, 

0  =  A  4-  Bx  -+-  x' (87) 

Pour  la  résoudre  par  la  trigonométrie  on  considère 
séparément  deux  cas,  suivant  que  les  racines  sont  de 
même  signe  (et  par  conséquent  A  positif),  ou  que  ces 
racines  sont  de  signe  différent  (et  par  suite  A  négatif), 

/*•■  cas,  A  positif.  —  Si  les  racines  sont  toutes  les  deux 
de  même  signe,  il  est  permis  de  les  représenter  par  deux 
facteurs  tels  que 

k  tang^  f,     et     A  cot  |  y , 
dans  lesquels  k  peut  toujours  être    pris  positivement, 


(4S7) 

pourvu  que  le  signe  de  9  reste  à  déterminer.  Multiplions 
X  —  k  tang  \  9  par  x — k  001^9,  et  égalons  ce  produit  à 
zéro,  nous  formerons  Téquation  du  second  degré 

0  =  P  —  k  (tang  ^  î?  H-  cot  ^  î?)  ar  H-  x% 
ou  bien 

0=ifc'_A:— x -+- x« (88) 

sin  ^ 

Comparant  (88)  à  la  proposée  (87),  on  voit  que  les 
coefficients  de  celle-ci  ont  respectivement  pour  valeur 

A  =  A;^B 


sm  9 


d'où  Ton  tire  d'abord  A:=l^A,  et  ensuite 

21/Â  UangiyV/Â,)        ,^^^ 

sm«)  = —-,      et    x  =  \      ^  '[  .      89 

^  B  (cot    if\/I.}       ^    ^ 

2'"'  cas,  A  négatif.  —  Les  racines  étant  de  signe  différent, 
on  peut  représenter  Tune  par  k  tangl  9,  et  l'autre  par 
— A; cot  1-9,  A;  étant  essentiellement  positif  et  9  d'un  signe 
à  déterminer.  Multiplions  x — k  tang  y  9  par  oc  -h  A;  cot  4  9, 
et  égalons  à  zéro,  nous  obtiendrons 

0  =  ~  k^—  k  (tang  if  —  cot  i  î»)  X  -4-  xS 
ou  bien 

0  =  —  A:*  H-  2A  cot  ^  .  a:  H-  x^     .     .     .    (90) 

qui  montre  que  les  coefficients  de  la  proposée  ont  dans 
ce  cas  pour  valeur  * 

A=— A%         B  =  2A:cotî); 


(  458  ) 
on  en  tire  d'abord /:  =  V/-— A,  et  ensuite 

B  (tangiî>\/^^) 

cotf= =:=,     et    a;=  .y .     (91) 

21/— A  (_cotiy\/— A.) 

62.  Ces  solutions  trigonométriques  du  second  degré 
fournissent  les  racines  réelles  avec  une  promptitude 
remarquable.  Les  équations  de  cet  ordre  se  rencontrent 
si  souvent  dans  le  calcul,  que  ces  procédés  tirent  de  la 
fréquence  des  applications  un  plus  haut  degré  d'utilité 
pratique^ 

Lorsqu'il  s'agira  d'en  faire  usage,  on  distinguera  donc 
deux  cas,  dans  la  proposée  (87),  selon  que  A,  qui  est 
formé  du  produit  des  racines,  se  trouve  affecté  du  signe  -+- 
ou  du  signe — . 

1°  Si  A  est  positif,  on  prend  l'arc  auxiliaire 

siny  =  -?^, (92) 

et  les  racines  sont 

(tangi.l^,) 
(cot   ifl/Â;S 

c'est-à-dire,  par  le  calcul  logarithmique, 

La;=^LAzpL  tang  if     ...     .     (94) 

Le  radical  peut  toujours  être  pris  positivement ,  et  (p,  qui 
est  de  signe  contraire  à  B,  s'étend  de — 90°  à  h- 90°. 

Le  signe  de  9  est  d'ailleurs  essentiel  pour  déterminer 
celui  de  x. 

Si  £^  est  >  1 ,  cette  valeur  ne  peut  plus  convenir  pour 


(  459  ) 
un  sinus  :  les  racines  sont  imaginaires.  Nous  traiterons  de 
ce  cas  tout  à  l'heure. 
2°  Quand  A  est  négatif,  on  prend  l'arc  auxiliaire 


tangp= — - —  ,      .     .     .    .     (95) 


et  les  racines  sont 


(  — cotiç>l/— A;]  ^ 

c'est-à-dire,  parle  calcul  logarithmique, 

Lx(=f)  =  i  L  [-  a]  zp  L  tang  ^f...     (97) 

Le  radical  peut  toujours  être  pris  positivement,  pourvu 
que  cp  s'étende  de  —  OO''  à  h-  90%  et  que  cet  arc  soit  du 
signe  de  B.  

L'expression  ~^  peut,  quelle  que  soit  sa  valeur,  repré- 
senter une  tangente,  et  les  racines  sont  toujours  réelles. 

63.  Soit  par  exemple  l'équation 

0  =  —  1 2,01 9  887  —  6,753  825  x  +  x*    .     .     (98) 
A  étant  négatif  j'applique  les  formules  (95)  et  (96)  : 

L2  .  .  .  0,301  030  0 
LV/^^..  0,539  948  7 
coLB....  1,170  450  2  — 


Somme.   .   .  0,0 11  428 9  —  =  L tang  f  ...  ~ 45M5'13;'72  =  f . 

lp=  — 22.52.36,86 

Ll^^TÂT. .  0,539  948  7 
Llanglp.  T,625  252  5- 

Somme  .    .    .  0,165  2010—  .    .   .    .  — 1,462  854  =  j^i 
(-)  Différence  0,914  696  4 -♦-  ....  -+-8,216  681  =  a?,. 


(  460  ) 
64.  Il  est  rare  que  les  racines  imaginaires  soient  de- 
mandées dans  le  calcul  numérique.  Voici  cependant  com- 
ment on  peut  les  tirer  d'une  équation  du  second  degré, 
par  voie  goniométrique.  Une  semblable  équation,  dont  les 
racines  sont  imaginaires,  peut  être  mise  sous  la  forme 

0  =  J^-^2kx-^x'     ....    (99) 
sin^f 

On  en  tire,  en  la  résolvant  à  la  manière  ordinaire,  et  en 
faisant  attention  que  \  —  sin^ô  =cos2£, 

x==  —  kz^—\/-cos'e  =  —  k{\z^coU\/^^)  (100) 
sine 

En  comparant  (99)  à  la  proposée  0=  A  +  Bac  h-  x2,  on 
voit  que 

k  =  -iB,    et    A  =  --:-^,     dou     sine  =  ---=.; 

donc,  par  la  substitution  dans  (100), 

a;=  —  |B(1  qicotel/^^)  .     .     .    (101) 

Il  résulte  de  là  que,  dans  l'équation  (92),  lorsque^ 
est  >  1 ,  il  suffit  de  renverser  les  termes  de  la  fraction , 
dont  on  peut  d'ailleurs  négliger  le  signe,  et  de  poser 

sin£  = -, (102) 

21/A 

5  compris  entre  0°  et  90^  Alors  les  racines  sont 

a;^_xB(liFcot£l/^)  =  — lB=FlBcot£l/— 1      (105) 
Dans  le  calcul  numérique,  sans  s'arrêter  à  chercher 
l'arc  £,  on  tire  directement  des  tables  son  Lcot  d'après 
son  L  sin. 


(  461  ) 

§  N.  —  Nouvelle  solution  trigonomé trique  du 
troisième  degré. 

65.  Les  procédés  ordinaires,  employés  pour  résoudre 
l'équation  du  troisième  degré,  sont  différents  suivant  la 
nature  des  racines  f).  Ils  exigent  donc  qu'on  reconnaisse 
d'abord  cette  nature.  Dans  l'équation 

0  =a-4-  6t/  -+-2/% (104) 

déjà  privée  du  terme  du  second  ordre,  il  faut  par  exemple 
calculer  le  binôme  Ab^  h-  27 a^  ce  qui  peut  être  assez  long. 
Une  solution  qui  s'applique  à  tous  les  cas,  sans  autre  con- 
sidération que  les  signes  des  termes,  est  évidemment  pré- 
férable, pourvu  qu'elle  joigne  le  mérite  de  la  simplicité.. 
Or,  toute  équation  du  degré  m  pouvant  être  considérée 
comme  le  produit  membre  à  membre  d'équations  de 
degrés  moindres,  décomposons  l'équation  du  troisième 
degré  en  une  génératrice  du  second  degré  et  une  autre  du 
premier.  Dans  la  génératrice  du  second  degré  compre- 
nons, ce  qui  peut  toujours  se  faire,  deux  racines  de  même 
signe.  Nous  appellerons  celles-ci  racines  conjuguées ,  et 
c'estévidemment  parmi  elles  qu'il  peut  se  trouver  un  couple 
d'imaginaires.  Toutes  ces  génératrices  sont  comprises  dans 
les  deux  formes 

0=k^  —  ksiiif.y-^y'^,    ou  bien    0^=k^sïn^f  —  ky-^y^] 


(*)  La  solution  générale  de  Tarlaglia,  qui  passe  plus  communément 
sous  le  nom  de  Cardan,  et  que  Bombelli  a  développée  et  Albert  Girard 
simplifiée,  est  sans  doute  trop  négligée  aujourd'hui.  Quel  qu'en  soit  le 
mérite  analytique,  elle  a  toutefois  l'inconvénient  d'être  fort  incommode 
pour  les  calculs  logarithmiques. 

2""^  SÉRIE  ,  TOME  XL.  50 


(  462  ) 

Â:  et  9  ayant  des  valeurs  dont  on  peut  disposer.  Multiplions 
membre  à  membre  par  une  équation  du  premier  degré , 
dont  nous  nommerons  la  racine  racine  singulière^  et  telle 
que  le  coefficient  du  terme  eu  ?/2  s'annule  dans  le  produit. 
On  prendra  pour  cette  génératrice 

soit  0  =  A:  sin  y  H-  î/,        soit  0  =  fc  -f-  y. 
Il  vient  alors  par  la  multiplication , 

0  =  F  sin  f  -4-  k^  cos^  ?•  2/  -*-  2/'   ?     •     •     (i05) 
0  =  P  sin\  — /c' cos\.  1/ -*- 3/'   .     .     .     (106) 

Ces  deux  types  représentent  manifestement  toutes  les 
équations  du  troisième  degré  privées  du  terme  du  second 
ordre.  En  les  rapportant  à  la  forme  générale 

0  =  a-+-  6î/-f-2/% (107) 

on  voit  que  le  premier  type  répond  à  6  positif,  et  le  second 
à  b  négatif.  Considérons  ces  cas  tour  à  tour. 

Premier  cas,  b  positif.  —  On  tire  d'abord,  en  compa- 
rant (105)  à  (107), 


^  sin  ç) 


V/6"' 


,5  «^o3 


et 


cos"^)  ▼     sin  y 


T      Sin  o 


d'où  la  racine  singulière 


t/i  =  —  ksm  ^=  —Va.  sin*  f . 

On  pourrait  ensuite  résoudre  la  génératrice  du  second 
degré  à  la  manière  ordinaire,  et  introduire  dans  l'expres- 
sion de  y  qui  en  résulte  la  valeur  de  A:,  ce  qui  donnerait 
pour  les  racines  conjuguées 


(  465  ) 
et  comme  jr^  est  toujours  >  1 ,  on  conclut  immédiatement 
que  ces  racines  sont  imaginaires.  Appliquons  à  cette  géné- 
ratrice les  formules  (102)  et  (105)  du  n"  64.  Nous  devrons 
poser,  dans  ces  relations, 

A  =  /:*,         B  =  —  k  sin  ,?; 

et  par  conséquent 

k  sin  f 

sin  f  = ; —  =  —  i  sm  '^ , 

''2k 

OU  aussi  bien, 

sin  e=  ^  sin  f, 

parce  que  la  colangente  de  s  est  employée  ci-après  avec  le 
double  signe.  Enfin  les  racines  imaginaires  seront 

t/  =  |Asin'^(izpcott  1/ — i)  =  iva.sm^f(i  zp  colfl/ —  J). 

Deuxième  cas,  h  négatif.  —  On  a  d'abord 

et  la  racine  singulière 

La  génératrice  du  second  degré ,  traitée  par  les  procédés 
ordinaires,  fournit  pour  les  racines  conjuguées, 

y  =  ik{[qzV  i  -  I,sm\)  =  i\/  ~  {i  qzV^i-  4sin';}^ 

▼     sin  f 

Il  est  facile  de  voir  que  sin  (p  =  4  donne  des  racines  égales, 
sin  9>4  des  racines  imaginaires,  et  sin  9  <4  des  racines 


(  464  ) 

réelles  inégales.  Celte  génératrice  du  second  degré  devient, 
en  substituant  pour  k  sa  valeur, 


0  =  — 6tang\  — 2/-»-v'-     •     •     (^08) 

COS   f 

Nous  traiterons  l'équation  (108)  par  les  procédés  du 
n°  61 ,  en  faisant 

A  =  —  6  tang^ »,      B  = . 

COSÇ) 

Si  les  racines  sont  réelles,  l'introduction  de  ces  valeurs 
dans  la  formule  (92)  nous  donne,  en  appelant  2 v// l'arc 
auxiliaire  (f  de  cette  expression, 

si„2*  =  Bl^E5l^5îîSl  =  2sin,     .     .     (109) 


COS  f 

Maintenant,  en  vertu  de  sin2  v/>  =  2 sin ;// cos ^ ,  on  trouve 
sin  v/y  COS  i//  =  sincp ,  et  par  conséquent 

sin  <//       sin    o  cos  é       sin   ^ 

tang^  = =■ — ^,       cot<p=-: =-^-^, 

COS  ^       cos^  ^  sin  ^       sin''  ^ 

et  en  vertu  de  tang  ^=^, 

sin*  «//  cos'  ^ 

tang^= ,       cot  «/<=-: . 

sin  f  sin   ^ 

Ensuite  par  la  formule  (95),  en  observant  que  Tare  |-9  de 
cette  formule  est  celui  que  nous  venons  d'appeler  4^ , 

sin'.//  ^ 


1  y r  sin  3  V —  b       (sin'i//, 

•^  °^         cos'.//  coso         /cos>. 


sin  f 


(  465  ) 
Enfin  en  remplaçant  ^  ou  k  par  sa  valeur  égale  V^,  on 
peut  embrasser  les  trois  racines  réelles  dans  la  formule 


V    sin^^ 


U 


X  l  sin'  h 

{  cos'  <p. 


Si  les  racines  conjuguées  sont  imaginaires,  on  renver- 
sera les  termes  de  la  fraction  dans  l'expression^, (109),  et 
l'on  écrira,  en  vertu  de  la  formule  (102)  du  n°  64, 


sin  e  =  — 


2  sm  f 
ou  aussi  bien, 

1 


smf  =^ 


2siii  f 


puisque  cot  z  doit  être  employé  avec  le  double  signe.  Ceci 
fait,  il  viendra  par  la  formule  (103),  en  prenant  B=—/: 

y  =  ^  V/-^  (1  =F  cot  E  v/^). 

^  V      SlïTf 

66.  Représentons  toujours  par 

0  ==  a  -\-  by  -i-  y^ 

l'équation  du  troisième  degré  préparée ,  c'est-à-dire  privée 
de  son  terme  avant-dernier  (vulgairement  le  second).  Sans 
avoir  à  considérer  la  nature  des  racines,  il  suffit  de  distin- 
guer deux  cas,  suivant  le  signe  de  6. 
Si  b  est  positif,  on  pose 

!ilLl=^ (110) 


(  466  ) 
Celte  équatioa   fournit   rapidement  Tare  auxiliaire  <?, 
comme  nous  le  verrons  tout  à  l'heure.  Cet  arc  étant  déter- 
miné, on  obtient  immédiatement  la  racine  réelle 


t/i  =  —  l/a  sin^  y (Hl) 

Les  deux  autres  racines  sont,  dans  ce  cas,  toujours  imagi- 
naires. Posons 

sine=^sin,3, (112) 

ces  racines  ont  pour  expression 

y=l^a  siiî"  f  (1  =F  cot  f  \/^^).     .     .     (113) 

Si,  au  contraire,  6  est  négatif,  on  pose 
sin^  ç>  a 


— = (H4) 

cos"  f       l/—  6^ 

Cette  équation  fournit  l'arc  auxiliaire  9,  comme  nous  le 
montrerons  dans  un  instant.  Si  <p<50''  toutes  les  racines 
sont  réelles;  pour  9  =50°  deux  de  ces  racines  deviennent 
égales  entre  elles;  enfin  pour  9  >  50°  il  y  a  deux  racines 
imaginaires. 

Lorsque  toutes  les  racines  sont  réelles  on  pose 

sin2  ^  =  2sinî), (115) 

et  ces  racines  sont  réunies  dans  l'expression  commune 

y=V-rT-X     sin^^,       .     .     .     (116) 
^        \  cos*  ^ . 

Quand  cp  est  >  50°,  on  a  d'abord  une  racine  réelle 


.v.  =  -V-T-;    ....  (117) 


(467) 
puis  on  pose 

sine  ==—7—, (H8) 

et  les  racines  imaginaires  ont  pour  expression 

y  =  ^V-^0=FCOt.V/^:T)   .     .     (119) 

67.  Le  seul  point  qui  exige  maintenant  quelque  éclair- 
cissement, est  celui  de  la  détermination  de  Tare  auxi- 
liaire (p,  d'après  les  formules  (110)  ou  (114).  Comme  il  est 
permis,  dans  ces  équations,  de  disposer  du  signe  du  radi- 
cal, on  prendra  toujours  le  premier  membre  positif,  et  9 
sera  compris  entre  0"  et  90^  On  pourrait  d'abord  remar- 
quer que 

sin  9?  1    rf^  L  cos  f 

cos'  <P  2M      d  f^ 

M  étant  le  module  des  tables  logarithmiques.  La  colonne 
des  différences  troisièmes ,  dans  une  table  de  L  cos,  fourni- 
rait donc  immédiatement  Tarccp  de  la  formule  (110).  Malheu- 
reusement les  tables  trigonométriques  dont  les  calculateurs 
se  servent  ne  sont  pas  poussées  assez  loin  pour  donner 
des  différences  troisièmes  suffisamment  étendues.  Mais  il 
est  bien  facile  de  préparer  directement  une  table  de  la 
fonction ^^,  ou  plutôt  de  L  sincp  —  5Lcos  9.  Semblable- 
raent  pour  la  fonction  ^^,  on  calculera  2L  sin  9  —  5L 
COS9.  On  voit  même  que  les  tables  trigonométriques  ordi- 
naires se  prêtent  à  ces  calculs,  en  passant  par  quelques 
essais.  Dans  le  but  d'abréger  ces  essais,  nous  donnons 
ci-dessous  une  table  des  deux  fonctions  citées.  On  y  trouve 
^(c^î,)^^^(c^)'<^^  ^egï*^  à  degré,  pour  le  quart  de 
cercle,  avec  cinq  décimales,  et  les  variations.  Celles-ci  ne 


(  468  ) 

sont  pas  les  différences  entre  deux  positions  tabulaires 
consécutives,  mais  le  coefficient  de  variation  se  rapportant 
aux  positions  tabulaires  vis-à-vis  desquelles  il  figure.  On 
s'en  sert  comme  des  différences,  mais  en  interpolant  la 
valeur  qui  convient  au  milieu  de  l'intervalle  auquel  doit 
s'étendre  l'appoint.  Ainsi  149  (du  dernier  ordre)  est  la 
variation  de  Lf^jJf^-),pour  chaque  minute  d'accroissement 
de  y,  lorsque  9  =  10°.  A  11°  cette  variation  est  devenue 
157;  et  si  l'on  voulait  trouver  L(^^^)  pour  lO^SO',  il  fau- 
drait prendre  le  coefficient  de  variation  146  qui  répond 
à  10°io',  milieu  entre  10°0'  et  10°50',  c'est-à-dire  milieu 
de  l'intervalle  pour  lequel  on  demande  d'interpoler.  On 
trouverait  alors  que  146  X  30=4  580;  et  si  l'on  ajoute 
cet  appoint  à  la  valeur  2,  499  29,  qui  est  celle  de  notre 
logarithme  pour  10°0',on  obtient  pour  ce  même  logarithme 
correspondant  à(p=10°50' 2,  545  09. 

Fonctions  du  troisième  degré. 


?• 

\cos3ç>; 

VARIATION 

\C0S3,J>/ 

VARIATION 

pour  1'. 

pour  1'. 

Oo 

l2 

» 

ôô 

» 

i 

2,242  05 

724 

4,483  91 

1  448 

2 

543  61 

363 

3,086  43 

727 

3 

720  59 

243 

439  39 

484 

4 

846  76 

183 

690  35 

364 

S 

945  25 

148 

885  55 

292 

6 

î,026  39 

124 

2,045  63 

244 

7 

095  64 

107 

181  54 

210 

8 

156  30 

95 

299  85 

185 

9 

210  47 

86 

404  81 

166 

1   10 

259  62 

78 

499  29 

149 

11 

r,304  76 

72 

2,585  35 

137 

12 

346  67 

67 

664  55 

127 

13 

385  92 

63 

738  00 

118 

14 

422  96 

60 

806  64 

110 

15 

458  16 

58 

871  16 

105 

(  469  ) 

Fondions  du  troisième  degré  (suite). 


1 

/si„y| 

VARIATION 

-^ 

VARIATION 

F- 

pour  V. 

pour  1'. 

16o 

1,491  81 

55 

2,932  15 

98 

17 

524  15 

53 

990  08 

94 

18 

555  36 

51 

î,045  35 

90 

19 

585  63 

50 

098  27 

86 

20 

615  09 

49 

149  15 

83 

21 

f,643  87 

47 

1,198  20 

80 

22 

672  08 

47 

245  65 

78 

23 

699  80 

46 

291  68 

76 

24 

727  12 

45 

336  44 

73 

2o 

763  06 

45 

394  39 

71 

26 

1,780  86 

44 

1,422  70 

70 

27 

807  40 

44 

464  45 

68 

28 

833  80 

44 

505  41 

68 

29 

860  11 

44 

545  68 

67 

30 

886  38 

44 

585  35 

66 

31 

1,911  04 

44 

r,622  88 

65 

32 

938  95 

44 

663  16 

65 

33 

965  33 

44 

701  44 

63 

34 

991  84 

44 

739  40 

63 

35 

0,018  50 

44 

777  09 

62 

36 

0.045  35 

45 

Ï.814  56 

62 

37 

072  02 

46 

851  48 

62 

38 

099  75 

46 

889  09 

62 

39 

127  36 

46 

926  24 

62 

40 

155  31 

47 

963  37 

62 

41 

0,183  60 

47 

0,000  55 

62 

42 

212  29 

48 

037  80 

62 

43 

241  40 

49 

075  18 

62 

44 

270  97 

49 

112  74 

62 

45 

301  03 

50 

150  52 

63 

46 

0,331  62 

50 

0,188  55 

63 

47 

362  78 

52 

226  91 

64 

48 

394  54 

53 

265  61 

65 

49 

426  95 

55 

304  73 

65 

50 

460  05 

56 

344  31 

67 

51 

0,493  89 

57 

0,384  39 

67 

52 

528  51 

58 

425  04 

68 

53 

563  96 

60 

466  31 

70 

54 

600  30 

61 

508  26 

70 

55 

637  59 

63 

550  96 

72 

(  4.70  ) 


Fonctions  du  troisième  degré  (suite). 


/  sin  ?)  A 

VARIATION 

^  (cOS3y) 

VARIATION 

?■ 

\^C0S5  f  j 

pour  1'. 

pour  1'. 

560 

\ 

0,675  89 

65 

0,594  46 

73 

S7 

715  27 

67 

638  86 

75 

58 

755  79 

68 

684  21 

76 

59 

797  55 

70 

730  61 

78 

60 

840  62 

73 

778  15 

80 

61 

0.885  11 

75 

0,826  93 

82 

62 

931  11 

78 

877  04 

85 

63 

978  74 

81 

928  62 

87 

64 

1,028  13 

84 

981  79 

90 

65 

079  43 

87 

1,036  71 

93 

66 

1,132  79 

91 

1.093  52 

96 

67 

188  59 

95 

152  62 

100 

68 

246  44 

99 

213  61 

104 

69 

307  16 

104 

277  32 

109 

70 

370  83 

109 

343  82 

113 

71 

1,437  74 

114 

1,413  41 

119 

72 

508  26 

121 

486  47 

125 

73 

582  79 

128 

563  39 

132 

74 

661  83 

136 

644  67 

140 

75 

745  96 

145 

730  90 

148 

76 

1,835  88 

.155 

1,822  78 

158 

77 

932  46 

167 

2,021  18 

170 

78 

2.036  77 

181 

027  17 

184 

79 

150  15 

197 

142  10 

200 

80 

274  34 

217 

267  69 

219 

81 

2,411  62 

241 

2,406  24 

243 

82 

565  09 

271 

560  84 

273 

83 

739  07 

310 

735  82 

312 

84 

939  91 

362 

937  52 

363 

85 

3,177  46 

434 

3,175  80 

436 

86 

3,468  19 

543 

3,467  13 

544 

87 

843  00 

724 

842  41 

725 

S8 

4,371  28 

1  087 

4,371  01 

1  087 

89 

5,274  37 

2  174 

5,274  30 

2  175 

90 

00 

» 

00 

• 

Cette  courte  table  ne  peut  être  évidemment  qu'appro- 
chée. Mais  elle  donne  (p,  en  très-peu  d'instants,  à  quel- 


(  471  ) 
ques  minutes  près,  et  dans  la  plupart  des  cas  à  1'.  Elle 
fait  donc  connaître  à  quelle  page  il  s'agit  d'ouvrir  les  tables 
trigonométriques.  Ainsi  guidé,  on  aura  bientôt  une  valeur 
plus  exacte  de  9,  en  formant  Lsincp  —  3  L  cos  cp,  ou 
2Lsin9 — 3  L  cosç  (suivant  les  cas),  dans  les  tables  de 
SchrÔn,  de  Shortrede  ou  de  Vega. 

Toute  valeur  simplement  approchée  de  9  conduira, 
pour  ce  logarithme  X'  de  la  fonction  ^,ou  de  celle  ^, 
à  une  grandeur  un  peu  différente  de  celle  demandée  X.  Il 
existera  dans  ce  logarithme  une  erreur  e,  savoir 

e=  \'  —  X. 

Mais  soient  s  la  différence  des  L  sin,  dans  les  tables  trigo- 
nométriques, pour  l"et  pour  la  valeur  admise  de  9,  c  la 
différence  relative  aux  L  cos,  ces  deux  différences  prises 
sans  considération  de  signe.  Nommons  enfin  /*la  correction 
ou  appoint  à  appliquer  à  9  (en  secondes),  il  est  facile  de 
voir  que 

f== — V f^^^) 

s  -f-  3c 
rendra  l'équation  (110)  satisfaite ,  et 

/•=_ — - —        ....    (121) 

fera  évanouir  Terreur  dans  l'équation  (114). 

On  peut  d'ailleurs,  dans  ces  formules  (110)  et  (114), 
attribuer  au  radical  le  signe  nécessaire  pour  rendre  le 
premier  membre  positif,  et  cp  sera  toujours  compris,  comme 
on  l'a  dit,  entre  0°  et  -h90^ 

68.  Un  exemple  facilitera  l'application  du  procédé  que 
l'on  vient  d'exposer,  et  montrera  avec  quelle  rapidité  et 
quelle  sûreté  cette  marche  fournit  les  racines  d'une  équa- 


(  472  ) 

tion  du  troisième  degré.  Il  ne  faut  pas  oublier  que,  dans 
les  méthodes  ordinaires,  outre  la  nécessité  de  reconnaître 
au  préalable  la  nature  des  racines,  on  n'obtient  cer- 
taines racines  réelles  qu'après  de  longues  combinaisons  de 
termes,  et  en  rencontrant  aux  dénominateurs  des  diffé- 
rences qui  peuvent  devenir  très-petites.  Le  procédé  qui 
vient  d'être  exposé  est  adapté,  au  contraire,  au  calcul 
logarithmique. 

Soit  proposée  l'équation 

0  =  5  — 7.vH-i/% 

qui  est  du  type  0  =  a-hby-hy^.  Le  coefficient  6  étant 
négatif,  j'applique  la  formule  (114). 


La. 


sans  considération  de  signe. 


Diflférence.    .    .    .  1,209  474  3  =  a. 
Notre  table  pour  f  =  21".  î,  198  20 


Différence.    ...        11  27 
Variation  pour  i' .    .    .  80 

D'où  appoint  de  9  en  minutes  =  -^-^=14,  et  9  approché 
=21°14'. 

Avec  cette  valeur,  je  forme,  à  l'aide  des  tables  trigono- 
métriques  à  sept  décimales,  l'expression  lT^^)  ,  savoir  : 


SLsinjp  .    .    . 
SLcosp  .    .   . 

1,1178176           s  =  54,2     2s  =  108,4;  sans  considération 
Ï/J08  406I           c         8,2     3c         24,6)      désigne. 

Différence. 

î,209  4115  =  /'      Somme.  .   .   133,0 
î,209  474  3 

Différence. 

—  62  8  =  e      Le(-).    .    .  2,798 -f- 
L  (2s  H- 3c).   2,124 

Diff.    .    .  0,674  H h4';72=A 

Donc  9  =  21"  14'  4",72;  et  de  cette  valeur  de  9  <  30°,  je 


(473) 

conclus  que  la  proposée  renferme  trois  racines  réelles 
inégales. 
Pour  déterminer  ces  racines  je  pose 

L2  .    .    .  0,301  030  0  \ 

Lsinp.    .   1,558  934  4  I  sans  considération 

I      de  signe. 

Somme.  T,859  964  4  =L  sin 2^  .  . .  46'>25'i;'24  =  24*/ 
^  =  23.12.30,02 

Et  ensuite 

La  .    .    .   0,477  121  3  -t- 
Lsin'p   .  T,H7  868  8-+- 


Diff.     .    .   1,359  252  5  -f-...  Lsin«^  î,191  165  0  +...  Lcos»  ^  î,926  703  6 
l  Diff.(-  )  .   0,453  084  2  —  =  Ly^  ;   0,453  084  2  -4-  0,4o3  084  2 


Sommes 1,644  249  2 -t-  =L7/2;  0,379  787  8  h- =  Ly,. 

Ainsi,  passant  aux  nombres,  les  trois  racines  de  la  pro- 
posée sont 

y,  =  ~  2,858  469,    i/^  = -t- 0,440  808,   1/3= -t- 2,597  661  ; 

dont  la  somme  algébrique  est  nulle,  comme  elle  doit  l'être 
dans  toute  équation  privée  du  terme  avant-dernier  (vul- 
gairement le  second). 

69.  Au  lieu  de  calculer  cp,  comme  nous  venons  de  le 
faire,  par  les  fausses  positions,  on  pourrait  également 
l'obtenir  par  des  séries  convergentes.  On  trouvera  cepen- 
dant que  le  recours  aux  tables  trigonométriques  est  géné- 
ralement préférable.  Aussi  ne  présenterons-nous  rapide- 
ment ces  séries  que  dans  le  but  de  compléter  le  sujet. 

Occupons-nous  d'abord  de  la  fonction  ^ ,  que  nous 
supposerons  toujours  positive,  ^  étant  compris,  comme 
on  l'a  vu,  entre  0°  et  90°.  Nous  appellerons  h  la  valeur 
donnée  à  laquelle  cette  fonction  doit  satisfaire.  On  peut 
écrire  le  numérateur  sous  la  forme  sin  ^9  h-  sin  9  (i — sin2(p), 


(  474  ) 

ou  sin^ç-hsinycos^ç;^  par  suite  la  fonction  h  devient 

sin' © -+- sin  o  cos' «p      sin%      sinsî  ,  ,.^^^ 

h= i -^ ^-= — -^  -+- '-  =  t&n^f-i-  tangf  (122) 

COS    f  COS^f        COS^) 

L'inconnue  est  maintenant  tang  ç),  quantité  susceptible  de 
passer  ici  par  toutes  les  valeurs  absolues ,  depuis  0  jus- 
qu'à -h  00  . 
Mettons  l'équation  (122)  sous  la  forme 

iangf  =  h — tang' 5?,     .     .     .     .     (125) 

et  supposons  d'abord  tang  9  fort  petit;  le  terme  du  troi- 
sième ordre  peut  être  négligé  dans  une  première  approxi- 
mation, ce  qui  conduit  à  poser 

tang  f  =  h,     d'où     tang'  f  =  h^. 

Substituant  dans  (123)  cette  valeur  de  tang^cp,  il  vient 
pour  seconde  approximation 

tang  (f  =  h  —  /i%     d'où     tang'  f  =  P  —  S/i**  h 


Opérons  une  nouvelle  substitution ,  qui  nous  fournira  une 
nouvelle  valeur  de  tang  ^9?,  et  ainsi  successivement,  nous 
trouvons  pour  la  série  cherchée 

tang  y  =  A  —  /i'  -+-  U'  —  12/^'  -*-  55/i'  —  275A*^  ) 

-f- 1  428/i^'  -  7  752/i'«  -f-  45  223A*'  )'     '     ^       ^ 

Toutefois  la  fonction  trigonométrique  qu'il  s'agit  d'in- 
troduire dans  les  formules  (111)  et  (115)  n'est  pas  tangcp, 
mais  sin2(p.  De  l'égalité  ^  =  A  nous  tirons  cos2(p=*^; 
puis  sin2(j)=^— ^^^?.  Enfin  en  mettant  pour  lang^sa 
valeur  (124), 

sin*  f  =  h^—  5/i*  -+-  12/i'  —  55/1»  -4-  ... , 
ou  bien ,  en  représentant  les  coefficients  par  leurs  loga- 


(475  ) 
rithmes, 

sinV=/i'— [0,477121  254  7]/t*-4-;[i,07918I24G0]/i«  \ 

—  [1,740  562  70]  h'  -+-  [2,456  162  6]  /t*°  —  [5,454  728  2]  h'^  i  (125) 
H-  [5,889414]  /t**—  [4,655  7]  h''  +  [5,589] /t*«  — [6,14]  h''  .••  ) 

Celte  série  peut  servir  jusqu'à  h=\  ou  cp  =  15**  environ  ; 
mais  il  est  permis  d'en  étendre  l'usage  en  sommant  empi- 
riquement le  reste  de  la  suite.  En  effet  la  raison  des  der- 
niers termes  diffère  peu  de  — 7r"5/i^  en  sorte  qu'on  pourra 
prendre  pour  expression  du  dernier  terme  et  du  reste 

[6,d4]  h-^o 

reunis 


•l  +  [0,75]/i'** 

Si  au  contraire  h  et  tang  cp  sont  très-grands,  on  écrira 

tang'  f  =  h  —  tang  y, 
OU  tangf  =  (/i  — tangy)^  , 

et  en  développant  le  second  membre, 

1  1       -2  1-5  5        -^ 

tang?  =  /i'— -/i  nangy— -/i  Uang^  f—--h  'tang'^  .     (126) 

ù  y  oi 

Prenons  pour  première  approximation  tang9=/i^,  puis  à 
chaque  approximation  successive  un  terme  de  plus,  nous 
trouverons,  en  suivant  la  marche  auparavant  développée, 
et  en  représentant  immédiatement  les  coefficients  numé- 
riques par  leurs  logarithmes , 

sin'  y  =  1  —  r^  -+-  [r,522  878  745  5]  h~-^ 

—  [2,091514  981  1]/i-^ 

—  [5,614  595  726  4]  IC  '-^-t-  [4^785  090  O]  h~ 
-^  [4,404  878  7] /i"^ 

—  [5;685  9l]  /r^—  [F,337  54]  /r'^ 
-^  [MGs]  h~^  -f-  [6,527]  h-^  •" 


(127) 


(  476  ) 

Cette  série  répondrait  aux  besoins  ordinaires  pour  toute 
valeur  de  h  plus  grande  que  ^ou  que^,  et  elle  devient  très- 
convergente  pour  h  >10. 

Mais  si  h  diffère  peu  de  \ ,  au-dessous  ou  au-dessus,  il 
est  nécessaire  de  développer  la  série  en  fonction  des  puis- 
sances croissantes  de  h  —  1.  Avec  un  peu  d'attention,  et 
en  recourant  à  quelques  transformations  sur  lesquelles  il 
n*est  pas  nécessaire  de  nous  étendre ,  nous  avons  trouvé  : 

sin'  f  =0,517  672  11)6  2  +  [17425  595  045  5]  (/t—  1) 

—  [T;065  972  617  4]  (/i  -  df 
-t-  [2,610  032  726  3]  (/i  — if 

—  [4;5264962](/i— i)*-.[2;2952657]{/i— 1)''  \   (128) 
-4-  [2,453 1506] (/i— if  l 

—  [27451  626  0]  (/i  —  1)'  -+-  [2;556 52]  [h  —  \f\ 

—  [2;218  20]  {h  —  1)^  -I-  [2,001]  [h  —  !)•»...      \ 

Cette  série  servira  dans  l'intervalle  des  deux  autres. 

70.  Quant  à  la  seconde  des  fonctions  considérées  du 
troisième  degré,  savoir  ''^J--,  nous  la  nommerons  k,  quan- 
tité susceptible  de  prendre  ici  toutes  les  valeurs  depuis  0 
jusqu'à  4-  00  .  On  peut  la  mettre  sous  la  forme 

1  —  cos'  y         1            1  ,  . 

k  = , — -  ==  — =  sec'  f  —  sec  îP ,  (129) 

COS"  y  COS^  (f  COS  f 

relation  dans  laquelle,  A;  étant  donné,  l'inconnue  est  deve- 
nue séc  cp.  La  fonction  dont  nous  aurons  besoin  ensuite, 
pour  l'introduire  dans  les  équations  (116)  ou  (1 18)  et  (119), 
est  -^;  et  on  reconnaît  aisément  que  -^=  1  H--^, 
Après  avoir  calculé  séc  9,  c'est  l'expression  -J^  que 
nous  formerons. 
D'abord  si  k  est  petit,  séc  9  diffère  peu  de  1 ,  et  l'on 


(  477  ) 
peut  prendre  riinité  pour  première  approximation  de  l'in- 
connue. Passant  de  là  aux  approximations  successives,  on 
trouve 


séc  <.-=  i  ^  -k--k''-^-k''--—t  -^-  là 
2  8  2  428  2 

5  005,, 
\  024 

et,  par  conséquent, 

1           1       5       5,       \  .,       105  3_ 

k  -\-'-k^ 1  -\-  -k 


(450) 


sin 


? 


A'       2       8         2  428 

5  005,, 
4  024 

OU  en  remplaçant  les  coefficients  numériques  par  leurs 
logarithmes, 

4  4       5 

^-v-  =  !-+-;:—  R^.S74  054  267  71  A 

-4-  [r,C98  970  004  5]  k^ 

—  [T,94  5  979  55]  P  -h  [0,4  76  094  26]  /c*  [   (^  ^^ 

—  [0,467  255  4]  A«  -+-  [0,778  4  54]  /c« 

—  [4,403  55]  k"'  -t-  [4,439  33]  k^  —  [4,785  8]  A;' 
-f-  [2,4  55] /v^"... 

En  second  lieu,  si  A;  est  grand,  on  prendra  d'abord 
séc9  =  A;3;  puis  en  corrigeant  celte  première  valeur  on 
trouve  la  série 

14   4         4       4  4     4  4        4 


séc  o  =  k 

5  4  77 


3^1       84    ^1       245^1       6  564    ^¥ 


4  9  683    ^^       4,594  525    ,^¥ 
400  4 

"^  4  782  969    ^"*'  i 

2'"*=  SÉRIE,  TOME  XL.  51 


/   (132) 


(478) 
et  par  suite,  en  substituant  aux  coefficients  numériques 
leurs  logarithmes , 

_JL  =  1  -+-  A"^  -+-  rr,o22  878  745  51  H  \ 


—  [2,091  Dl498H]A;~~'-t-[5;61459D7264]^~^  f 

—  p,785  090  O]  Ir"^  -+-  [4^404  878  7]  k~~^         l   '^^^' 

—  [5;G85  9l]r^°H-  [5,357  54]r^  | 

—  [6,665j  k~~^  -^  [C',527]  k''^' ... ,  | 

expression  qui  diffère  seulement  de  la  formule  (127)  par 
les  signes  de  certains  coefficients. 

Enfin  si  A:  était  voisin  de  + 1  on  obtiendrait,  en  déve- 
loppant séc  9  selon  les  puissances  de  A:  —  1 , 

-7-—=  2,524  71 7  937  2  - [0,057  518  602  9]  (k  —  i) 

sin  'f 

-+-[0,016  612  550  7]  (A-  if 

—  [0,008  459  458  7]  (A  —  1  f 

-4-  [0,004 61 9  15]  (A -1)*— [0,002  650 95]  (A-1)^)   (^^^^ 
H-  [0,001  572  mk  —  if  —  [0,000  522]  {k—if 
-+■  [0,000  1 6]  (A  —  1  )«  —  ['r,999  9]{k—\f 
-+-[î;999  8](A;— If... 

Or  il  est  à  remarquer  que  le  rapport  des  derniers  termes 
de  cette  suite  est  très-sensiblement  — (A;  —  1),  en  sorte 
qu'on  peut  sommer  empiriquement  le  reste,  en  rempla- 
çant le  dernier  terme  conservé  t  (k  —  1)"  par  iSÏ:zl>l,  Cette 
observation  permet  d'étendre  notablement  l'usage  de  la 
formule  (154). 

§  0.  Équation  complète  du  quatrième  degré. 

71.  On  se  borne,  dans  les  traités  généraux,  à  décom- 
poser en  ses  génératrices  du  second  degré,  l'équation  du 
quatrième  degré  privée  de  son  terme  en  x^.  Mais  comme 


(  ^^79  ) 
la  préparation  de  celle  équation ,  exigée  par  cette  méthode, 
n'est  pas  sans  être  laboriense,  nous  allons  montrer  com- 
ment on  peut  traiter  immédiatement  l'équation  complète. 
Soit  celle-ci 

0  =  A  -+-  Bx  -4-  Cx'  -4-  Dx^  -+-  X*.     .     .     (135) 

Il  faut  distinguer  deux  cas,  suivant  le  signe  qui  affecte  A. 
Premier  cas  ^  A  positif.  —  Prenons  les  deux  équations 
du  second  degré 

0  =  l/A_.  tang  iv^  +  (I  D  -h  /c)  X  -f-  x^  I  ^  ^  ^         . 
0  =  1/a  .cot  i  ^  -f-  (i  D  —  A;)  X  -f-  x'.  i  *  '  *  ^       ^ 

OÙ  9  et  A;  ont  des  valeurs  dont  on  peut  disposer.  Multi- 
plions ces  équations  membre  à  membre,  en  observant  que 
tang^cp  +  cot^cp=;j|^,  et  tang  3  — coti(p=  — 2  cot  9. 
Il  vient 

f'D  y^x     , .  /-      , 

0  =  A  -f-  1 -H  2^l/A.cot9)x 

sin  j 

2  l/Â 


-+-  i  D"^  —  F)x'  -t-  Dx'  -4-  X*. 

sin  'j  / 


En  comparant  cette  expression  à  la  proposée  (I3o),  on 
établit  la  valeur  des  coefficients  B  et  C.  Je  remplace  cot  cp 

par  — *~'y""^ ,  et  j'obtiens  pour  B 

D  l/Â      ''2k\/ \  y  \—~s\n^  «p 

B  =  -^--4- : ^r, 

sm  y  sin  » 

,,   ,      ,         B  .sine.  — DV/Â 

doù     ^'= — .    ....     (157) 

2  l/A  .  \/ I  —  sin^  ^ 
J'élève  cette  valeur  de  k  au  carré,  et  je  l'introduis  pour  k- 


(  480  ) 
dans  l'expression  de  C,  qui  devient  ainsi 

21/T  B'sin^^^  — SBDl/Â.sinç^H- AD^ 

C  • — ; h    3;  1)      • 

sm  ^  4A —  4A  sia-<p 

et  enfin  après  réduction,  en  ordonnant  suivant  les  puis- 
sances croissantes  de  siucp, 

0  ==  —  8  \/Â^  -4-  4AC  sin  ç  +  (8  l^A'  —  2BD\/Â)  sin^  ^ 

-t- (B^H- AD^  -  4AC)sin'?.. (138) 

Cette  équation  ne  renferme  plus  pour  inconnue  que 
sin  cp,  et  est  abaissée  au  troisième  degré.  On  sait  donc  la 
résoudre.  Puis,  9  étant  déterminé,  on  en  tire  k  par  (157), 
et  tout  est  alors  connu  dans  les  génératrices  (156),  qui 
donnent  chacune  deux  racines  de  la  proposée.  Tous  les 
radicaux  peuvent  être  pris  positivement,  pourvu  que  l'on 
tienne  compte  du  signe  de  9,  c'est-à-dire  que  9  s'étende 
de— 90"  à  4-90". 

Deuxième  cas,  A  négatif.  —  Prenons  dans  ce  cas  pour 
génératrices 


0    =    1/ —  A  tang  ^  ç;  -t-  (I  D  -»-  /t)  X  -+-  x% 
Multipliant  membre  à  membre,  nous  obtenons 


2/^1/— A 

0  =:  A  —    DV—  A  cot  9  -+-  1  X 


(139) 


—  (21/—  A  cot  y  —  1  D^  -+-  A^)  x^  -+-  Dx^  -I-  a 
puis,  par  une  marche  analogue  à  celle  qui  précède. 


2V/_  A  cot  ^  H-  i  D^ 


B^  -+-  2BD  y/—  A  cot  y  —  AD^  cot^ 
4A  -+-  4A  cot^  cp 


(  481  ) 
qui  devient  après  réduclion, 

0  =3=  (B'''  -+-  AD-  —  4AC)  -4-  (8  V  —  A'  -+-  2BD  V^— ^)  cot  ? 
—  4  AC  .  col'  y  -4-  8l/—  A\  cot'^  f (1 40) 

Telle  est,  dans  ce  cas,  l'équation  du  troisième  degré 
qui  fournit  l'arc  auxiliaire  cp,  et  par  9  on  obtient  ensuite/: 
par  la  relation 

k  = — sin  y -cos  y.       .     .     (141) 

21/- A  ^ 

Les  deux  équations  génératrices  (139)  seront  ainsi  connues. 

Les  équations  (158)  et  (UO)  étant  du  troisième  degré, 
ont  chacune  en  général  trois  racines.  C'est  qu'en  effet 
toute  équation  du  quatrième  degré  peut  être  décomposée 
de  trois  manières  différentes  en  deux  génératrices  du 
second  ordre.  Chacune  de  ces  génératrices  peut  renfermer 
une  des  combinaisons  deux  à  deux  des  quatre  racines.  On 
pourrait  donc  former,  dans  le  cas  général,  trois  couples 
d'équations  du  second  degré,  contenant  toujours  les 
quatre  même  racines.  Ces  combinaisons  différentes  peu- 
vent servir  aux  vérifications. 

Mais  si  la  proposée  renferme  soit  deux  soit  quatre 
racines  imaginaires,  les  racines  conjuguées  doivent  rester 
ensemble  dans  les  génératrices  respectives  du  second 
degré.  Il  n'y  a  donc  plus  qu'une  combinaison  possible ,  et 
l'équation  en  cp  ne  pourra  donner  qu'une  racine  réelle. 

Enfin  si  deux  des  racines  de  la  proposée  sont  égales , 
l'une  des  trois  combinaisons  du  cas  général  se  répétera,  et 
par  conséquent  on  aura  aussi  pour  9  deux  racines  égales. 


(  482  ) 

§  P.  —  Équations  de  degré  quelconque. 

72.  Quelle  que  soit  la  méthode  qu'on  se  propose  d'ap- 
pliquer à  la  résolution  d'une  équation  numérique  d'un 
degré  supérieur  au  o'"'  ou  au  4"%  il  est  toujours  d'un 
Irès-grand  avantage  de  tracer  préalablement  la  courbe  par 
points.  C'est  par  là  que  toute  recherche  devrait  commencer. 
Soit  la  proposée 

0  =  A  -+-  Bx  -1-  Cx^  ••■  -\-  Jx"-'  -+-  Kx'"-^  -t-  X"*.     (142) 

Cette  équation  est  un  cas  particulier  de  la  relation  plus 
générale  entre  deux  variables 

2/==A-+-Bx  -f-  Cx^.  .-+-Jx"»-^-+-Kx'"-^-+-x'".  (145) 

Or,  cette  dernière  représente  une  courbe  à  deux  branches 
infinies;  et  les  racines  de  (142)  correspondent  aux  valeurs 
particulières  de  x  qui  fournissent  y  =  o,  c'est-à-dire  aux 
points  de  passage  de  la  courbe  par  l'axe  des  x.  Donc 
autant  il  y  a  de  ces  points  de  passage,  autant  il  y  a  aussi 
de  racines  réelles. 

Prenons  comme  exemple  l'équation 

0  =  4,014  127  -+-8,144  291  a;  —  7,745  523  x^ 
-+- 1,410  086  x' -4- X*, (144) 

et  substituons  pour  x  les  valeurs  entières  contenues  entre 

5  et  H-  5.  Pour  faciliter  ces  essais,  nous  donnons  à  la  fin 

de  ce  §  les  logarithmes  tout  préparés  des  dix  premières 
puissances  des  cent  premiers  nombres  naturels.  Il  suffît 
d'ajouter  respectivement  aux  logarithmes  de  celte  table 
ceux  des  coefficients  des  diverses  puissances  de  x  écrits 
sur  un  papier  mobile.  Les  logarithmes  de  notre  table  sont 


(483  ) 
préparés  avec  cinq  décimales  seulemenl;  mais  ce  degré 
de  précision  est  plus  que  suffisant  pour  cet  usage,  parce 
qu'il  s'agit  d'une  simple  approximation  par  le  graphique, 
et  que  la  rapidité  fait  le  mérite  de  ces  essais. 

Nous  avons,  en  égalant  le  second  membre  de  (i44)  à 
une  autre  variable  y, 


-5  .     .     . 

.     .     .V=  -4-   218,41 

4 

-f-     15,28 

3 

—     47,19 

2 

—     38,54 

i 

—     i2,28 

0 

+       4,01 

4 

-+-       6,82 

2 

-+-     16,59 

5 

H-     77,80 

4 

H-  258,90 

5 

-+-  652,55 

La  principale  portion  de  cette  courbe  est  tracée  ci-contre. 
L'échelle  des  y  est  ^  de  l'échelle  des  x. 


l 

\. 

.  IJO 

.  100 

ISO 

.  100 

h 

sy 

1 

-'k 

-^ 

4\3 

2 

-i^ 

•M 

2. 

i   ; 

-s 

+  » 

-J 


(  484  ) 
On  sait  qu'une  équation  de  la  forme  (445)  a  toujours 
deux  branches  infinies,  lesquelles  sont  d'un  même  côté  de 
l'axe  des  x  dans  les  équations  de  degré  pair,  et  de  côtés 
différents  dans  les  équations  de  degré  impair.  Les  points 
de  passage  par  l'axe  des  x,  tels  que  M,  N,  marquent  les 
racines  réelles.  De  plus  ces  courbes  ont  des  sommets 
(maxima  et  minima),  tels  que  a,  6,  c,  en  nombre  égal  à 
^n  —  \,  Tout  sommet  sépare  deux  racines  réelles  lorsque, 
pour  le  former,  la  courbe  franchit  l'axe  des  x.  Mais  dans 
le  cas  contraire,  comme  pour  c,  le  sommet  indique  un 
couple  de  racines  imaginaires.  La  valeur  de  x  qui  corres- 
pond à  ce  sommet  est  la  partie  de  ces  racines  qui  n'est  pas 
affectée  du  symbole  l^  —  1.  Celle  de  y  est,  au  contraire, 
le  coefficient  de  V^  —  1.  On  voit  donc  que  le  tracé  de  la 
courbe  fournit  des  valeurs  approchées,  non-seulement  des 
racines  réelles,  mais  aussi  des  racines  imaginaires.  Si  deux 
racines  étaient  égales  le  sommet  viendrait  toucher  l'axe 
des  X  sans  le  traverser. 

Ainsi  l'on  peut  prendre  très-rapidement  une  idée  nette 
de  la  nature  et  de  la  grandeur  des  racines,  et  trouver 
presque  immédiatement  leurs  valeurs  numériques  appro- 
chées, sans  recourir  à  l'application  laborieuse  du  théorème 
de  Sturm  et  des  tliéorèmes  analogues. 

75.  Les  premiers  calculs  que  nous  venons  d'exécuter 
suffisent  pour  servir  de  point  de  départ  à  la  correction  des 
racines.  On  peut  souvent  admettre  que,  dans  une  petite 
étendue,  les  variations  de  x  et  celles  de  y  sont  propor- 
tionnelles entre  elles.  Ainsi  en  extrayant  du  tableau  pré- 
cédent 

a?,  =  —  4,        y,  =-^  15,28, 
^,,  =  —  5,        ^,,=  —  47,19, 


(  m  ) 

on  on  conclurait  pour  la  valeur  x»  qui   lournirait  ?/o  =  0, 
x„=x  — ,  ou  bicMi  0-0  =  j'„ ;   (140) 

y -y.  y^-y>r 

d'où  l'on  lire  ici 

a\,=  — 5,780. 

Mais  cette  valeur,  bien  qu'approchée,  n'est  pas  exacte 
jusqu'à  sa  dernière  décimale,  car  l'hypothèse  des  varia- 
tions proportionnelles  substitue  un  élément  rectiligne  à 
celui  de  la  courbe  donnée,  ou  en  d'autres  termes,  fait 
abstraction  des  différences  du  second  ordre  et  des  ordres 
supérieurs. 

On  serait  toutefois  guidé  dans  de  nouvelles  supposi- 
tions. Nous  ferons  les  suivantes 


X  = 

-5,9 
-5,8 
—  5,7 

qui 

donne 

y  = 

-»- 

2,137, 

7,651 , 

16,150. 

La  formule  (145)  fournit  ensuite 

x„=  — 5,879  6, 

valeur  beaucoup  meilleure  que  la  précédente.  Continuant 
de  cette  manière  on  amènerait  l'approximation  au  point 
désiré. 

Mais  au  lieu  de  passer  par  des  essais  successifs,  qui 
supposent  deux  points  connus  de  la  courbe,  et  un  élément 
rectiligne  qui  les  relie,  rien  n'empêche  d'introduire  immé- 
diatement les  «-  termes  de  courbure,  d  et  par  conséquent 
de  passer  d'emblée  de  la  valeur  approchée  à  la  valeur 
exacte. 

Déjà  Newton,  au  lieu  d'interpoler  entre  deux  points 
donnés,  s'était  proposé  de  passer  d'un  seul  point  connu 


(  486  ) 
à  la  racine,  c'est-à-dire  d'un  point  donné  près  de  l'inter- 
section de  la  courbe  et  de  l'axe  des  x,  à  cette  intersection 
même.  Toutefois  il  se  bornait  au  terme  du  premier  ordre. 
Or,  Joseph  Fourier  a  fait  remarquer  que  dans  certaines 
parties  de  la  courbe,  surtout  au  voisinage  des  sommets, 
le  premier  terme  est  absolument  insuffisant,  attendu  que 
les  différences  du  second  ordre  sont  alors  comparables  et 
parfois  supérieures  aux  différences  du  premier.  C'est  pour 
parer  à  cet  inconvénient  que  Cauchy  a  introduit  la  consi- 
dération d'un  second  terme.  Mais  il  est  possible  d'em- 
brasser tout  d'une  fois  dans  le  calcul  les  différences  des 
divers  ordres  successifs. 

74.  Soit  F  (a;)  =  0  l'équation  proposée.  Pour  un  point 
de  la  courbe  qui  n'est  pas  exactement  dans  l'axe  des  x, 
c'est-à-dire  pour  une  valeur  de  x  telle  que  X,  un  peu 
différente  d'une  racine,  la  substitution  de  X  dans  F(x)  ne 
donne  pas  0,  mais  une  valeur  finie  -j.  Désignons 

ê      par     F'    (x), 
fl  F"  (X) 


F'"(x), 


La  valeur  X  de  x  substituée  tour  à  tour  dans  F'(x), 
F"(x) ...,  donnera  des  résultats  v\  v\  ...  qui  ne  seront 
autres  que  les  coefficients  différentiels^,  -^î,  ...  relatifs 
au  point  de  la  courbe  qui  a  pour  coordonnées  X  et  v.  Or 
il  s'agit  d'annuler  l'ordonnée,  et  par  conséquent  de  faire 
varier  y  de  —  y. 

A  cet  effet  nommons  f  l'appoint  cherché  de  X,  et  appli- 


(  487  ) 
quons  la  série  de  Taylor,  il  vient 

dy  I     dhj   ,  1       dhj  ^, 

dx  \  .îldx''  \  .'l.ù  dx'' 

\  1 

=  v'  ^  -^- u"  t-  -t- v"  f ...  . 

1.2  1.2.3 


(147) 


n  s'agit  maintenant  de  trouver  1  à  l'aide  de  u;  il  faut  donc 
passer  à  la  série  inverse,  ce  qui  donne,  toute  réduction 
faite, 


-v' .{^v^  —  uu 

u'         2  y''  fiu'^^  ^ 

-^(I5i>"'  —  10u'o"u"'  -4-  ly":^'' 
24:;"^ 


[\mu"'—\^^u'v"'v"'-^-\Ov'^v""-        ^    (U8) 


120:.- 

H-    lOL»'^  u"  j'^   u'^  v") 


-(945:."'- 1260  i;'u"^'" 


720  u"'  j 

Cette  série  fournit  la  correction  t  de  X  dans  toute 
limite  d'approximation  désirée.  Si  l'on  se  borne  au  pre- 
mier terme 

§=-4, (i49) 

V 

on  a  la  correction  de  Newton ,  qui  ne  fait  que  donner  une 
approximation  nouvelle. 

Supposons  qu'après  avoir  obtenu  au  n**  73  la  première 
valeur  x  =  —  5,780,  on  ait  voulu  passer  immédiatement 
à  la  valeur  finale,  par  notre  formule  (148).  La  distance 
entre  cette  valeur  de  x  et  la  véritable  racine  était  encore 
trop  grande  pour  appliquer  cette  formule  avec  rapidité. 
Mais  c'est  à  dessein  que  je  prends  cet  exemple  dans  des 
conditions  défavorables. 


(  488  ) 
Je  forme  d'abord  le  tableau  des  expressions  (146),  qui 
n'exigent  que  des  multiplications  très-simples  : 

F     (x)  =  4,014  127  +  8,141  291  x  —  7,74o  523  x^- 

H-  1,410086x^-4-  X*, 
F'    (x)  =  8,141  291 —  15,490  6dOx 

~+-  4,250  258  x'  -+-  4x%  /   ('  30) 

F"  (x)  =  — 15,490  650  x-t- 8,460  516  X-+- 12  x%       l 

F"'  (x)  =  8,460  516 -+- 24  X,  | 

F''    (x)  =  24.  ' 

Les  dérivées  suivantes  sont  nulles. 

Substituons  maintenant  dans  ces  polynômes  la  valeur 

x  =  — 5,78         Lx  =  0,577  491  80  —  . 

Je  prends  Lx  avec  huit  décimales,  afin  d'être  sûr  de  la 
septième  dans  2Lx,  5Lx,  ALx.  La  substitution  dans  F(x) 
doit  être  pratiquée  avec  toute  l'exactitude  possible.  Dans 
les  dérivées  qui  suivent  on  peut  négliger  chaque  fois  une 
décimale  de  plus.  On  trouve  sans  beaucoup  de  travail, 
pour  les  résultats  de  ces  substitutions, 

V     :=—      9,428  85  , 

v'    =—    88,9010, 

u"  =-f-  125,989, 

u"'  =  —    82,26, 

v'"  =-{-    24, 

v"     et  tous  les  v  suivants.  .  .  nuls. 

J'introduis  maintenant  ces  valeurs  dans  la  formule (148). 
Les  premiers  termes  sont  logarithmiques  et  faciles  à  cal- 
culer. Le  premier  seul  a  besoin  d'être  exprimé  avec  toute 
la  rigueur  que  les  données  comportent. 

Ce  premier  terme,  ou  terme  newlonien,  donne 


=  —  0,106  060, 


([489  ) 
correction  qui ,  ajoutée  à  la  valeur  admise  de  x,  fournirait 

pour  la  racine 

x=  — 5,880  000. 

Or,  cette  valeur  serait  encore  éloignée  de  la  vérité, 
beaucoup  plus  éloignée  même  que  n'était  notre  seconde 
approximation  du  n°  73,  savoir  : 

a;  =  _  5,879  6. 

Mais  si  nous  calculons  les  termes  suivants  de  la  série 
(148),  nous  trouvons  successivement  : 

Valeur  admise  de  a; 3,780  OÔU.Ô 

Série  (148)  l«r  terme 10(3  o60.J 

S^^e      »       7  844.2 

3™e       »       976.3 

4"*e       «       _  147.9 

5™c       »        24.8 

6""^       »       4.5 

Somme.    .    .   •    .   —  3,879  064.6, 

OU  en  retranchant  le  chiffre  surnuméraire  et  forçant  le 
dernier  ordre  conservé , 

0;=  —  5,879  005, 

exact  jusqu'à  la  dernière  décimale  exprimée. 

Les  derniers  termes  ne  sont  pas  aussi  longs  à  former 
que  l'étendue  des  parenthèses  dans  l'expression  (148) 
pourrait  le  faire  penser.  En  effet,  il  suffit  à  ces  derniers 
termes  d'un  très-petit  nombre  de  chiffres  significatifs,  et 
d'autre  part  toutes  les  dérivées  d'un  ordre  su[)érieur  au 
degré  de  l'équation  considérée  sont  nulles. 

7o.  Au  lieu  de  corriger  directement  la  valeur  approchée 
X,  il  peut  être  préférable  de  corriger  LX,  puisque  l'on 
fait  usage  des  multiples  de  ce  logarithme  pour  calculer  les 
termes  qui  contiennent  les  puissances  croissantes  de  x. 
Appelons  z  la  correction  à  apporter  à  F^X,  et  M  le  module. 


(  490 
On  sait  que 

X  -X       z         z^  z' 

4- 


X  M       2M^       2.5M'       2. 3. 4M* 

et  par  conséquent 


X"»  M         2M'        2 . 5  M'  "*' 

Les  termes  successifs  de  l'équation  proposée  nous  donnent 
A  _A=0, 

„2 


/(m-lk     (m-ifz^     (m-ifz^ 
Kx-"-*-KX"-*  =  KX*'-M-  -^  - 


M  2  M^  2  . 5  M' 

2  „2  ,,^3  „3 


/mz        m  z  m  z"       \ 

••» X"*  =  X"* « -+-  ■ ...  I 

\  M  2M2        2.3M^     j 


Sommons  ces  égalités ,  après  avoir  effectué  les  produits 
indiqués,  nous  arriverons  à  une  expression  de  la  forme 

où  Ton  a  posé 

p     =A-+-BX-+-     CX^H-       DX^..=  F(X), 

p'    =  BX  +  2  CX^  -H  3  DX' ...  =  X  F'  (X),  j 

p"  =  BX-^-2^'CX^-^-3'DX^..,  (152) 

»"'=  BX-f-2^CX^-+-3^DX^..,  \ 


(  491  ) 

On  voit  que  p  n'est  autre  que  F  (X),  c'est-à-dire  la  pro- 
posée dans  laquelle  on  a  introduit  la  valeur  X  pour  ac,  et 
p'  la  première  dérivée  multipliée  par  X.  Ainsi  les  deux 
premiers  coefficients  p  et  p\  qui  sont  les  plus  importants, 
dépendent  des  mêmes  calculs  que  v  et  v  du  n°  précédent. 

Pour  tirer  z  de  l'équation  (151)  nous  remarquerons  que 
cette  quantité  est  toujours  petite  par  hypothèse.  Nous  con- 
vertirons donc  la  série  ordonnée  suivant  les  puissances 
ascendantes  de  z,  dans  la  série  inverse,  ordonnée  selon 
les  puissances  croissantes  de  —  p,  et  nous  obtiendrons 

^  ==  _  M  R  -^  -4,  V"  +  -^  (5/)-  -  V'  p'") 
|_p        ^p  ojo 


Y2J-79  (losp"*  -  mp'p"'p"'  -+-  10p>' 


15/3'^p" />'"  —  p'^  p") 

-^-^^y(943p '^- 1260p'p">"'-t-280/?'»"" 


\  (IS^) 


Cette  série  fournira  la  valeur  de  j3,  et  par  conséquent 
celle  de  Lx,  dans  toute  limite  d'approximation  désirée. 
Les  premiers  termes  seuls  ont  besoin  d'être  calculés  avec 
le  nombre  total  des  figures  que  les  données  comportent. 
Mais  il  est  bon  de  partir  d'une  approximation  de  Lx  qui 
n'est  pas  trop  éloignée. 


(  492  ) 
L'exemple  du n*' précédent  donnerait,  avec  X  =— 3,78  = 

[0,577  491  80  — ] , 

p  =v  =  —  9,428  83 , 

j9'  =Xv'  =  -^  [2,5-26  398], 

p"  =  -+-2,107  65, 

p"'=-H  10,094, 

p''  =  -+-  44,294, 

p-  == -t- 187,000, 

p^'  =  -+-  774,000. 

Les  deux  dernières  quantités  ne  sont  calculées  qu'avec 
trois  chiffres  exacts ,  ce  qui  est  suffisant. 

Les  valeurs  p",  p"  et  suivantes  se  forment  plus  rapide- 
ment que  v'\  J"...,  parce  qu'il  suffit  de  multiplier  les  C 
par  2,  les  D  par  3,  etc.,  dans  chaque  polynôme  succes- 
sif (152). 

On  a  maintenant,  en  mettant  en  nombres  la  formule (155), 

1er  terme 0,012  1^85  G, 

2me       „         î  072  2, 

Soie  n  140    7, 

4«ie     0      21  y, 

5""^       »        5  7, 

6'°'=       "        /, 

Somme.    .    .    .   -t-  0,011  2Ô5  2  =  -. 

Ajoutant  enfin  cette  valeur  de  j3  à  LX,  il  vient 

LX  -i-  z  =  0,588  727  0  =  Lac. 
D'où  la  racine  (qu'on  sait  être  négative) 

x  =  —  5,879  065  , 
identique  à  la  valeur  trouvée  précédemment. 


(  493  ) 

76.  Cette  correction  du  logarithme  peut  servir  de 
moyen  de  vérification.  Mais  si  l'on  a  déjà  une  valeur  fort 
approchée  de  x,  la  méthode  précédente  se  simplifie  beau- 
coup en  substituant  au  calcul  de  l'expression  (lo2)  les  dif- 
férences tabulaires  des  logarithmes ,  telles  qu'on  les  prend 
à  vue.  Ce  procédé  empirique  repose  sur  le  raisonnement 
suivant. 

Dans  le  calcul  logarithmique  d'un  terme  quelconque  de 
la  proposée,  le  logarithme  de  ce  terme  varie  seulement  en 
vertu  du  changement  de  x,  puisque  les  coefficients  numé- 
riques A,  B,  C , ...  sont  constants.  Les  sommes  successives 
LB  +  Lx,  LC  +  2Lac,LD  +  SLx, ...  sont  donc  affectées 
respectivement  d'erreurs  z,  2^:,  5^,  ...js: étant  l'erreur  de  hx. 
Les  nombres  correspondants  Ba;,  Coc^,  Dac^,  ...  varieront 
respectivement  de  y'z,  ^v"z,  o/"z...,  où  /,  v",  v'"...  indi- 
quent les  différences  tabulaires  relatives  à  ces  nombres  et 
rapportées  à  un  même  ordre  décimal,  exprimées  par 
exemple  en  unités  du  dernier  ordre.  Affectant  chacune  des 
quantités  v\  2^',  3v"'...  du  signe  du  terme  auquel  elle  se 
rapporte,  et  nommant  T  la  somme  algébrique  des  valeurs 
ainsi  obtenues,  il  est  clair  que 


^  =  -|     • (1S4) 


rendra  nul  le  second  membre  de  la  proposée. 

Ce  procédé  suppose  constantes  les  différences  premières 
v',  v\  v" ...  des  tables,  et  par  conséquent  il  ne  fournit  un 
résultat  satisfaisant  qu'autant  que  z  est  assez  petit  pour 
négliger  les  différences  secondes  et  celles  des  ordres  sui- 
vants. Ces  différences  -J ,  v",  y'"...  sont  celles  des  tables 
antilogarithmiques,  où  le  logarithme  est  l'argument  et  le 

2°"^  SÉRIE,  TOME  XL.  32 


(  494  ) 
nombre  la  variable  correspondante.  Des  tables  de  ce  genre 
ont  d'abord  été  préparées  par  Dodson  [Anti-logarithmic 
canon) ,  et  sont  reproduites  dans  quelques  recueils,  notam- 
ment dans  celui  de  Shortrede.  Mais  si  Ton  ne  dispose  pas 
de  tables  où  le  logarithme  est  l'argument ,  on  pourra  par- 
venir aisément  aux  différences  inverses ,  en  recourant  aux 
remarques  suivantes. 

On  sait  qu'un  logarithme  vulgaire  étant  donnée  LN,  on 
trouve  la  différence  v  au  moyen  de  la  relation 

Lv  =  LN  —  LM  ==  LN  -t-  0,362  22 

d'où  l'on  conclut 

L9v=  LN-f- 0,362  22... -t-L^f,   .     .     .    (155) 

q  représentant  un  facteur  numérique. 

A  mesure  que  l'on  forme  les  sommes  logarithmiques 
L(Bx),  L(Cx2),  L(Dx5) ...,  on  calculera  donc,  avec  trois  ou 
quatre  décimales  seulement. 


U  =L(Bx  )-+-0,d62  2, 
L(2j/")  =L(Cx')-^0,66d3, 
L(3v'")  =L(Dx^)  -t-  0,839  3, 
L(4v")  =L(Ea;*)-t-0,964  3, 
L(5/)    =L(Fa;«)-+-i,06l2, 


L(6v")   =  L(Ga;T  - 
L(7v-')  =  L(Hx')  - 
L(8/"')  =  L(Ix«)  - 
L(9v«)    =L(Ja:^) 
L(10/)  ^L[Y^x'') 


i,140  4, 
1,207  3, 
1,265  3,  Wl56) 
1,316  5,  V 
1,362  2, 


Ce  petit  tableau  permet  d'obtenir  en  peu  d'instants  les 
termes  qui  entrent  dans  la  composition  de  la  quantité  T. 
On  forme  alors  la  valeur  (154)  de  z,  et  l'on  arrive  très-rapi- 
dement à  corriger  Lx. 

Ainsi  ayant  trouvé  au  n''  73  une  approximation  suffi- 


(  i95  ) 
samment  voisine  de  la  valeur  véritable,  savoir 

X  =  —  5,879  6  =  [0,588  787  0  — ], 

je  vais  corriger  celte  racine  par  le  procédé  qui  précède.  On 
trouve  d'abord  dans  cette  hypothèse, 

u=  -4-  0,054  55  =  p. 

Maintenant,  en  calculant  les  expressions  (156)  avec  quatre 
décimales, 

W       =^,861  7,  L(5/")  =  2,754  9, 

L(2y")  =  2,729  9 ,  L(4v")  =  5,51 9  5. 

Passant  aux  nombres  et  affectant  du  signe  convenable 
chacun  des  termes  qui  entrent  dans  la  composition  de  T, 

T  =  —  73  —  537  —  569  -+-  2  087  =  -+-  908. 

Et  par  la  formule  (154) 


0,054  35 
908 

= 

—  0,000  059  9; 

d'où 

enfin 

Ix 

==0,588  7271, 

et 

x  =  —  5,879  065. 

Cette  méthode  de  correction,  très-simple  en  elle-même, 
est  aussi  plus  rapide  que  toute  autre ,  et  nous  la  recom- 
mandons aux  calculateurs.  Elle  exige  seulement  de  partir 
d'une  fausse  position  peu  distante  de  la  vérité. 

77.  Nous  terminons  ce  paragraphe  par  la  table  que  nous 
avons  annoncée.  Elle  abrège  et  facilite  le  travail  des  sub- 
stitutions, aussi  longtemps  qu'il  s'agit  seulement  de  valeurs 
approchées. 


f  496  ) 


Logarilhiucs   des  pvi.s.sances   croissaiitei 


X. 

L  X. 

LxK 

Lx-. 

I 
hx\ 

L.t3. 

■ 

0,000  00 

0,000  00 

0,000  00 

0.000  00 

0.000  00 

2 

301  03 

602  06 

903  09 

1,204  12 

1.505  15 

3 

477  12 

954  24 

1.431  36 

908  49 

2,383  61 

4 

602  06 

1.204  12 

806  18 

2,408  24 

3,010  30 

5 

698  97 

397  94 

2,096  91 

795  88 

494  83 

6 

0.778  15 

1.556  30 

2.334  45 

3,112  61 

3,890  76 

7 

845  10 

690  20 

535  29 

380  39 

4.223  49 

8 

903  09 

806  18 

709  27 

612  36 

315  43 

9 

954  24 

908  49 

862  73 

816  97 

771  21 

10 

1,000  00 

2,000  00 

3,000  00 

4,000  00 

5,000  00 

41 

1.041  39 

2.082  79 

3.124  18 

4.165  57 

5,206  96 

12 

079  18 

158  36 

'237  54 

316  72 

393  91 

13 

113  94 

227  89 

341  83 

453  77 

369  72 

14 

146  13 

292  26 

438  38 

584  51 

730  64 

15 

176  09 

352  18 

528  27 

704  37 

880  46 

16 
17 

1,204  12 
230  45 

2,408  24 
460  90 

3,612  36 
691  35 

4.816  48 
921  80 

6.020  60 
-152  24 

18 

255  27 

510  55 

765  82 

5,021  09 

276  36 

19 

278  75 

557  51 

836  26 

115  01 

393  77 

20 

301  03 

602  06 

•  903  09 

204  12 

505  15 

21 

1,322  22 

2,644  44 

3,966  66 

5.288  88 

6,611  10 

22 

342  42 

684  85 

4.027  27 

369  69 

712  11 

23 

361  73 

723  46 

085  18 

446  91 

808  64 

24 

380  21 

760  42 

140  63 

520  84 

901  06 

25 

397  94 

793  88 

193  82 

591  76 

989  70 

26 

1  414  97 

2.829  93 

4.244  82 

5.659  89 

7.074  87 

27 

431  36 

862  73 

294  09 

725  46 

156  82 

28 

447  16 

894  32 

341  47 

788  63 

235  79 

29 

462  40 

924  80 

387  19 

849  59 

311  99 

30 

477  12 

934  24 

431  36 

908  49 

385  61 

31 

1  491  36 

2,982  72 

4,474  09 

5,965  45 

7,456  81 

32 

505  15 

3,010  30 

515  45 

6,020  60 

525  75 

33 

518  51 

037  03 

555  54 

074  06 

592  57 

34 

581  48 

062  96 

594  44 

125  92 

657  39 

33 

544  07 

088  14 

632  20 

176  27 

720  34 

36 

1,536  30 

3.112  61 

4.668  91 

6,225  21 

7,781  51 

37 

568  20 

136  40 

704  61 

272  81 

841  01 

î^ 

579  78 

159  57 

739  35 

1    319  13 

898  92 

39 

591  06 

182  13 

773  19 

364  26 

933  32 

40 

602  06 

204  12 

806  18 

408  24 

1 

1 

8,010  30 

(  497  ) 

les  cent  premiers  tiombres  naturels. 


L  .rs. 


L  t1«. 


0,000  00 
2,107  21 
3,339  85 
4.214  42 
892  79 

5,447  06 
915  69 

6,321  63 
679  70 

7,000  00 

7,289  75 
554  27 
797  60 

8,022  90 
232  64 

8,428  84 
613  -14 
786  91 
951  28 

9,107  21 

9,255  53 
396  m 
532  09 
661  48 
785  58 

9,904  81 

10,019  55 

-130  11 

236  79 

339  85 

10.439  53 
536  05 
629  60 
720  35 

808  48 

10.894  12 
977  41 

11.058  49 
437  45 
214  42 


0,000  00 
2,408  24 
3,816  97 
4,816  48 
5,591  76 

6,225  21 
760  78 

7,224  72 
633  94 

8,000  00 

8,331  14 
633  45 
911  55 

9.169  02 
408  73 

9,632  96 

843  59 

10,042  18 

230  04 

408  24 

10,577  75 
739  38 
893  82 

11,041  69 
-183  52 

-14,319  79 
450  91 
577  26 
699  48 
816  97 

41,930  90 

42,044  20 

448  44 

254  83 

352  54 

42.450  42 
545  64 
638  27 
728  52 
816  48 


0,0(10  00 
2.709  27 
4,294  09 
5,418  54 
6,290  73 

7,003  36 
605  88 

8.127  81 
588  48 

9,000  00 

9,372  54 

712  63 

40,025  49 

315  45 

584  82 

40,837  08 

41,074  04 

297  45 

508  78 

709  27 

44,899  97 

42,081  80 

255  55 

421  90 

581  46 

12,734  76 
882  27 

13.024  42 
161  58 
294  09 

13,422  26 
546  35 
666  63 
783  31 
896  61 

44,006  72 
443  82 
248  05 
319  58 
448  54 


0,000  00 
3,040  30 
4:771  21 
6,020  60 
989  70 

4 

2 
•3 
4 

7.781  51 

8.450  98 

9,030  90 

542  43 

40,000  00 

6 
7 
8 
9 
40 

40,443  93 
791  84 

44,439  43 
461  28 
760  94 

12,041  20 
304  49 
552  73 
787  54 

43,040  30 

43,222  49 
424  23 
647  28 
802  44 
979  40 

44,449  73 

343  64 
474  58 
623  98 
774  24 

44.943  62 

45,054  50 

485  44 

344  79 
440  68 

45,563  03 

682  02 

797  84 

910  65 

16.020  60 


11 
42 
43 
44 
45 

46 
47 
48 
49 

20 

24 

22 
23 
24 
25 

26 
27 


30 

34 
32 
33 
34 
35 

36 
37 
38 
39 
40 


(  4.98  ) 

Logarithmes  des  puissatices  croissantes 


Ix^. 


L  j:3. 


41 

42 
43 
44 
45 

46 
47 
48 
49 
50 

51 
52 
58 
54 
55 

56 
57 
58 
59 
60 

61 
62 
63 
64 
65 

66 
67 
68 
69 
70 

74 

72 
73 
74 
75 

76 
77 
78 
79 
80 


i,612  78 
623  25 
633  47 
643  45 
653  21 

4,662  76 
672  40 
684  24 
690  20 
698  97 

4.707  57 
746  00 
724  28 
732  39 
740  36 

4,748  49 
755  87 
763  43 
770  85 
778  45 

1.785  33 
792  39 
799  34 
806  48 
842  94 

4,849  54 
826  07 
832  51 
838  85 
845  10 

1.851  26 
857  33 
863  32 
869  23 
875  06 

1,880  81 
886  49 
892  09 
897  63 
903  09 


3,225  57 
246  50 
266  94 
286  91 
306  43 

3.325  52 
344  20 
362  48 
380  39 
397  94 

3,445  14 
432  01 
448  55 
464  79 
480  73 

3,496  38 
511  75 
526  86 
541  70 
556  30 

3.570  66 
584  78 
598  68 
612  36 
625  83 

3.639  09 
652  15 
665  02 
677  70 


3.702  51 
714  66 
726  65 
738  46 
750  12 

3.761  63 

772  98 
784  19 
795  25 
806  48 


L  .r*. 


4,838  35 
869  75 
900  44 
930  36 
959  64 

4.988  27 

5,046  29 

043  72 

070  59 

096  94 

5,422  74 
448  04 
472  83 
197  48 
224  09 

5,244  56 
267  62 
290  28 
312  56 
334  45 

5,355  99 
377  18 
398  02 
418  54 
438  74 

5,458  63 
478  22 
497  53 
516  55 
535  29 

5,553  78 
572  00 
589  97 
607  70 
625  18 

5.642  44 
659  47 
676  28 
692  88 
709  27 


6,451  14 
493  00 
533  87 
573  81 
612  85 

6,651  03 
688  39 
724  96 
760  78 
795  88 


864  01 
897  10 
929  58 
961  45 

6,992  75 

7,023  50 

053  71 

083  41 

112  61 

7,141  32 
169  57 
197  36 
224  72 
254  65 

7,278  48 
304  30 
330  04 
355  40 
380  39 

7,405  03 
429  33 
453  29 
476  93 
500  25 

7.523  25 
545  96 
568  38 
590  54 
642  36 


(  499  ) 

îes  cent  premiers  nombres  naturels  (suite). 


Lx6 

Lx-i. 

hx^. 

L  x^. 

L  xio. 

X. 

9,676  70 
739  50 

41.289  49 
362  74 

12,902  27 
985  99 

14,515  06 

609  24 

16,127  84 
232  49 

41 

42 

800  81 

434  28 

13,067  75 

701  22 

334  68 

43 

860  72 

504  17 

147  62 

791  07 

434  53 

44 

949  28 

572  49 

225  70 

878  91 

532  13 

46 

9,976  55 

11,639  30 

13,302  06 

14,964  82 

16,627  58 

46 

47 

40,032  59 

704  69 

376  78 

15,048  88 

720  98 

087  45 

768  69 

449  93 

131  17 

812  41 

48 

444  48 

831  37 

521  57 

211  76 

901  96 

49 

493  82 

892  79 

591  76 

290  73 

989  70 

60 

10,245  42 

11,952  99 

13,660  56 

15.368  13 

17,075  70 

61 
52 

296  02 

12,012  02 

728  03 

444  03 

160  03 

345  66 

069  93 

794  21 

518  48 

242  76 

63 

394  36 

126  86 

859  15 

591  54 

323  94 

54 

442  18 

182  54 

922  90 

663  26 

403  63 

55 

10,489  43 

19,237  32 

13,985  50 

15,733  69 

17,481  88 

56 

535  25 

291  12 

14,047  00 

802  87 

658  76 

57 

580  57 

344  00 

407  42 

870  85 

634  28 

68 

625  41 

395  96 

166  82 

937  67 

708  62 

59 

668  91 

447  06 

225  21 

16,003  36 

781  54 

60 

10,714  98 

42,497  31 

14,282  64 

16,067  97 

47,853  30 

64 

754  35 

546  74 

339  43 

131  53 

923  92 

62 

796  04 

595  38 

394  72 

194  06 

993  41 

63 

837  08 

643  26 

449  44 

255  62 

18,061  80 

64 

877  48 

690  39 

503  31 

316  22 

129  13 

65 

40,917  26 

12,736  81 

14,656  35 

16,375  90 

18,196  44 

66 

956  45 

782  52 

608  60 

434  67 

260  75 

67 

995  05 

827  56 

660  07 

492  58 

325  09 

68 

44,033  09 
'070  59 

871  94 

710  79 

549  64 

388  49 

69 

915  69 

760  78 

605  88 

450  98 

70 

14,i07  55 

12,958  81 

44,840,07 

16,661  33 

18,612  58 

74 

443  99 

13,001  33 

858  66 

715  99 

573  32 

72 

479  94 

043  26 

906  58 

769  91 

633  23 

73 

215  39 

084  62 

953  85 

823  09 

692  32 

74 

250  37 

425  43 

45,000  49 

875  55 

1     750  61 

76 

44,284  88 
348  94 

43,165  70 

205  44 

45,046  51 
091  93 

16,927  32 
978  42 

18,808  14 
864  91 

76 

77 

352  57 

244  66 

136  76 

17,028  85 

920  95 

78 

385  76 

283  39 

181  02 

078  64 

976  27 

79 

448  54 

324  63 

224  72 

427  81 

49,030  90 

80 

(  SOO  ) 

Logarithmes   des  ptiissances   croissantes 


1 

X. 

L  X. 

Lx'^. 

Lx\ 

LxA. 

L^5. 

81 

1,908  49 

3,816  97 

5,725  46 

7,633  94 

9,542  43 

8i2 

913  81 

827  63 

741  44 

655  26 

569  07 

83 

919  08 

838  16 

757  23 

676  31 

595  39 

84 

924  28 

848  56 

772  84 

697  12 

624  40 

85 

929  42 

858  84 

788  26 

717  68 

647  09 

86 

1,934  50 

3,869  00 

5,803  50 

7.737  99 

9,672  49 

87 

939  52 

879  04 

818  56 

758  08 

607  60 

88 

944  48 

888  97 

833  45 

777  93 

722  41 

89 

949  39 

898  78 

848  17 

797  56 

746  95 

90 

954  24 

908  49 

862  73 

816  97 

771  21 

91 

1,959  04 

3,918  08 

5.877  12 

7,836  17 

9.795  21 

92 

963  79 

927  58 

891  36 

855  15 

818  94 

93 

968  48 

936  97 

905  45 

873  93 

842  21 

94 

973  13 

946  25 

919  38 

892  51 

865  64 

9o 

977  72 

955  45 

933  17 

910_89 

888  62 

96 

1.982  27 

3,964  54 

5,946  81 

7,929  08 

9,911  36 

97 

986  77 

973  54 

960  32 

947  09 

933  86 

98 

991  23 

982  45 

973  68 

964  90 

956  13 

99 

995  64 

991  27 

986  91 

982  54 

978  18 

400 

2.000  00 

4,000  00 

6,000  00 

8,000  00 

10,000  00 

§  Q.  Recherche  des  racines  d'après  leur  grandeur. 

78.  Lorsqu'on  s'exerce  à  la  résolution  d'équations  numé- 
riques, on  n'est  pas  longtemps  à  apercevoir  que  les  racines 
substituées  dans  la  proposée  F(x),  ont,  suivant  leur  gran- 
deur absolue,  une  influence  très-inégale  sur  les  termes  des 
ordres  successifs.  Si  elles  sont  grandes,  les  termes  des 
degrés  supérieurs  prédominent,  tandis  que  si  elles  sont 
petites  ces  termes  n'affectent  pas  le  résultat  d'une  manière 
notable.  Les  approximations  devraient  donc,  dans  les  deux 
cas,  être  conduites  de  manières  différentes.  A  cet  effet  nous 


(  SOI  ) 


es    cenl  premiers    nombres   naliirels   (suite). 


Lj-6. 

Lx\ 

La^s. 

Lj-9. 

L  l'O. 

r. 

4I,4oO  91 

13,359  40 

15,267  88 

17,176  37 

19.084  85 

81 

■m  88 

396  70 

310  61 

224  32 

138  14 

82 

514  47 

433  55 

352  62 

271  70 

190  78 

83 

545  68 

469  96 

394  23 

318  61 

242  79 

84 

576  51 

505  93 

435  35 

364  77 

294  19 

85 

11,606  99 

13,541  49 

15,475  99 

17,410  49 

19,344  98 

86 

637  l;2 

576  63 

516  15 

455  67 

395  19 

87 

^M  90 

611  38 

555  86 

600  34 

444  83 

88 

696  34 

645  73 

595  -12 

644  51 

493  90 

89 

7^25  46 

679  70 

633  94 

588  18 

542  43 

90 

11,754  "25 

13,713  29 

15.672  33 

17,631  37 

19,590  41 

91 

782  73 

746  52 

710  30 

674  09 

637  88 

92 

810  90 

779  38 

747  86 

716  35 

684  83 

93 

838  77 

811  89 

785  02 

758  15 

731  28 

94 

866  34 

844  07 

821  79 

799  61 

777  24 

95 

11,893  63 

13,875  90 

15,858  17 

17,840  44 

19,822  71 

96 

920  63 

907  40 

894  17 

881  15 

867  72 

97 

947  36 

938  58 

929  81 

921  03 

912  26 

98 

973  81 

969  45 

965  08 

960  72 

956  35 

99 

12,000  00 

14,000  00 

16,000  00 

18,000  00 

20,000  00 

100 

classerons  les  racines  d'après  leur  valeur  absolue.  Nous 

appellerons 

grandes  racines  celles  qui  sont  sensiblement  >  i , 
racines  moyennes  celles  qui  sont  voisines  de  l'unité, 
petites  ?'acnzes  celles  qui  sont  sensiblement  <  i. 

Nous  faisons  ici  abstraction  du  signe  de  ces  racines. 

Les  trois  classes  vont  être  envisagées  séparément. 

79.  Soit  d'abord  x  <  1.  Les  puissances  croissantes  de 
cette  quantité  vont  en  diminuant  de  valeur  absolue.  On 
peut  écrire  la  proposée  sous  la  forme 

—  A  =  Bx  H-  Cx^  -4-  Djc'  •••  -+-  Jx"'-'  H-  Kx"-*  ^  x-,       (157) 


(  502  ) 
et  considérer  le  second  membre  comme  une  série  ordonnée 
suivant  les  puissances  croissantes  de  la  variable  x  <  i.  La 
série  convertie  fournit  x  dans  une  suite  développée  suivant 
les  puissances  croissantes  de  A.  C'est  ce  qu'on  appelle 
quelquefois  résoudre  une  équation  par  le  développement 
en  série.  Voici  la  formule  explicite  jusqu'au  terme  du 
sixième  ordre  inclusivement  : 


A       A'          A' 
x  = :C (2e  -  BD) 

A* 

-^(SC  — 5BCD-*-B^E) 

_:^(i4C*-2lBC'D-4-3B^D'-^6B'CE  — B'F) 
B 

giA 
—  7B=^DE— 7B^CF-+-B*G) 


(158) 


Lorsqu'il  existe  une  petite  racine,  cette  série  est  dans 
la  plupart  des  cas  très-convergente.  En  la  poursuivant 
suffisamment,  elle  fournirait  cette  racine  dans  toute  limite 
d'approximation  désirée. 

Il  est  vrai  qu'à  partir  du  4°^^  ou  du  5""^  terme  les  poly- 
nômes s'étendent;  mais  les  calculs  peuvent  alors  s'exé- 
cuter avec  trois  ou  quatre  chiffres  significatifs  seulement. 
Enfin  l'on  peut  se  contenter  d'employer  les  premiers 
termes  de  la  formule  (158)  à  la  recherche  d'une  valeur 
approchée  de  la  plus  petite  racine,  et  corriger  ensuite 
cette  valeur  par  les  procédés  du  §  précédent. 


(  1)05  ) 

80.  Nous  réunirons  ici  les  expressions  particulières  de 
la  formule  (158),  pour  le  second  et  le  troisième  degré. 
Soit  réquation 

0  =  A -4- Bx-f- a:'; (159) 

il  suffit  de  poser  dans  (158)  C  =  i ,  D  =  0  ainsi  que  tous 
les  coefficients  suivants.  On  a  dans  ce  cas , 


A       A*  A'  A*  A'^  A« 

x  = 2-  —  5 14 42  — 

B       B'         B»  B'  B'  B»^ 


A'  A^  A'  A*" 

429 1450-^  —  4  862  — 

g.3       *  ^  B'»  B"  B*' 


A"  A" 

-16796--58  786^ 


Dans  réquation  du  second  degré  résolue  au  n°  65 ,  on 
trouverait  par  le  premier  terme  seul  de  (160), 

x  =  — 1,78. 

Ce  serait  une  première  approximation  de  la  plus  petite 
racine,  qui  est  en  réalité  x  =  — 1,46.  Mais  on  voit  qu'on 
aurait  déjà  une  idée  assez  exacte  de  cette  racine,  bien 
qu'elle  soit  ici  >  1. 

Dans  l'équation  complète  du  troisième  degré 

0  =  A-^  Ba:-+-  Cx'h-x',       .     .     .     (161) 

la  formule  (158),  convenablement  étendue,  fournit  pour 


(  504  ) 
l'expression  de  la  plus  petite  racine, 

-44— C(5e--6BC^-+-!2B^) 
_6^(22C«-55BC*+50B^C^_2B^)  ^   ^^^^^ 

—  55  ^„  C(i5 C  —  59BC*  -\-  50 B^  O—  5  B^) 

—  55—  (26C«  — 9lBe-+-91B2C*— 26B'C--+-B*) 

B" 

A'" 
—  145—  C(54C^-i56BC'^-Hi68B2C*-70B^C^-4-7B*) 


Et  dans  cette  équation  privée  de  son  lerme  du  second  degré 

0  =  a  H-  6?/  -t-  î/% 


^13  ^15  ^17 

_  1428- +7  732^-45  225-... 


(163) 


Ainsi  dans  l'équation 

0  = 
on  trouverait 

5- 

-7i/ 

+  2/% 

i'"'"  lerme  .    .    . 
2«»e     «      ... 
3-e    «       .    .    . 

4me      .,         .     .     . 
3me      „         .     .     . 

Q^^     t>       .    .    . 

.    .   H-  0,428  571 

11  245 

885 

93 

.    .                      11 

1 

^omme. 

.   -\-  0,440  806  =  ij 

(  505  ) 
On  a  ainsi,  par  des  calculs  bien  faciles,  Tune  des  racines 
de  la  proposée  du  troisième  degré. 

Il  peut  arriver  cependant  que  les  séries  qui  précèdent 
ne  soient  pas  convergentes.  Dans  ce  cas  ,  on  ne  peut  pas 
conclure  généralement  à  l'absence  d'une  petite  racine, 
bien  qu'il  en  soit  presque  toujours  ainsi.  On  passe  alors  à 
la  recherche  de  racines  d'une  autre  classe. 

81.  Si  le  procédé  pour  la  recherche  de  la  plus  petite 
racine  est  parfois  employé  (bien  qu'il  soit  fort  négligé  des 
calculateurs),  on  manque  de  guide  pour  la  recherche  des 
grandes  racines  et  des  racines  moyennes. 

Voici  comment  on  peut  arriver  à  des  valeurs  approxi- 
matives de  ces  dernières. 

Afin  de  fixer  les  idées,  je  supposerai  en  premier  lieu 
qu'il  s'agisse  d'une  racine  positive,  voisine  de  h-  1.  Lors- 
qu'une telle  racine  existe,  la  somme  algébrique  S  des 
coefficients,  savoir 

S=A-+-B-t-  C  ••  + J-4-  K  +  i, 

est  peu  différente  de  zéro.  Elle  peut  cependant  s'en 
écarter  dans  des  limites  d'autant  plus  étendues  que  les 
coeffîc'îents  A,  B,  C  ...  sont  plus  grands.  11  faudra  donc 
comparer  S  à  ces  coefficients,  ou  plus  simplement  au 
coefficient  moyen,  abstraction  faite  des  signes.  Soit  M  la 
somme  absolue  des  coefficients  d'une  proposée  de  degré 
m,  le  coefficient  moyen  a  pour  valeur  ^^^.  Nous  regar- 
dons les  procédés  qui  suivent  comme  particulièrement 
applicables,  toutes  les  fois  que  S  est  <  ~-^. 

Appelons  S',  S",  S'"  ...  les  résultats  de  la  substitution 
de  H-  1  dans  les  dérivées  différentielles  des  ordres  succès- 


(  506  ) 

sifs.  On  a 

S'  =B-+-2C-+-  3D-*.m.., 
S"  =  d  .  2  C  -+-  2.3D  4-  3.4E..., 
S'"  =  i.2.5D-t-2.5.4E...,'  *     '     '     ^^^ 


Ces  quantités  se  forment  très-rapidement,  les  multiplica- 
tions étant  des  plus  simples,  et  n'exigeant  pas  les  loga- 
rithmes. 

Si  la  première  approximation  de  x  était  ■+-  1,  la 
seconde  sera  1  — |f,  par  Tapplication  du  terme  newto- 
nien.  Introduisons  cette  nouvelle  valeur  dans  la  proposée 
et  dans  sa  dérivée  du  premier  ordre,  nous  obtiendrons 
deux  résultats  a  et  o-',  savoir  : 

.'  =  B.2c(i-|)^ôd(i-|)\.., 

Développant,  et  comparant  aux  expressions  (164)  ci- 
dessus  ,  on  trouve  aisément  que 

_  ___  _  C" C'"  _| c«» Cv  

2       S'^       6        S''       24        S'*       120      S'«  "*' 

Si        S^      1       s^       i      s* 

et  a'  =  S'  — S"— -4--S'"— S"—,  -4-  —S'—... 

S'       2        S'^       6       S'=       24      S'* 

Enfin,  en  appliquant  un  nouveau  terme  newtonien,  la 
troisième  approximation  a  pour  valeur 

_  S  (T 

qui  fournit,  en  introduisant  pour  a  et  o-'  leurs  valeurs  pré- 


(  507  ) 
cédentes,  et  après  réduction, 

''""         S''i[(S'*-  SS")S'-+-^S*S"']S'-iS'S-jS'...  ^^^^^ 

s  étant  petit  les  puissances  ascendantes  de  cette  quantité 
vont  en  diminuant  rapidement. 

La  manière  la  plus  commode  de  mettre  en  nombres 
l'expression  (165),  est  de  former  tour  à  tour  un  terme  du 
numérateur  et  le  terme  correspondant  du  dénominateur. 
On  effectue  la  division.  Puis  on  ajoute  de  part  et  d'autre 
un  nouveau  terme,  qui  ne  change  pas  considérablement  le 
quotient.  Lorsqu'on  arrive  de  cette  manière  à  des  quotients 
qui  ne  varient  plus  de  quantités  notables,  on  peut  s'arrêter. 
On  a,  dans  ce  cas,  une  approximation  de  x  équivalente  à 
la  troisième  approximation  dans  la  méthode  de  Newton. 

Au  second  degré,  où  S"  =  2,  et  où  toutes  les  dérivées 
suivantes  sont  nulles,  il  viendrait 

§    g'« § 

Ainsi  l'équation 

0  =  — 12  -f-  4xH-  x', 
donnerait 

et  par  suite 

.      7   45 

qui  ne  diffère  de  la  valeur  exacte  -h  2  que  par  le  chiffre 
des  millièmes,  bien  que  cette  racine  soit  déjà  assez  éloi- 
gnée de  H-  i. 


(  508  ) 
Au  troisième  degré ,  où  S'"  =  2x3  =  6, 

S    S'=  — iSS'S"-+- 2S' 

S'il  s'agit  d'une  racine  voisine  de  —  i,  la  même  marche 
est  applicable ,  en  changeant  seulement  les  signes  de  tous 
les  termes  qui  contiennent  des  puissances  impaires  de  x. 
C'est-à-dire  qu'on  posera 

S  =A  — Bh-C—  D..., 
S'  =  — B  — 2C  — 5D..., 
S"  =  —  i  .2C  -t-  2.5D..., 


et  l'on  aura  ensuite 


j|-(S'2  _     s  S")  S'  -+-  i  S'''  S'"]  S'  —  1  S^  S'^  j  S' ...  ' 

82.  Le  logarithme  d'une  quantité  voisine  de  l'unité 
varie  d'une  manière  rapide,  et  seulement  en  fonction  du 
module.  11  y  a  donc  avantage  à  déterminer  par  son  loga- 
rithme une  racine  moyenne  d'une  équation.  Ayant  calculé 
comme  ci-dessus  les  quantités  5,  s\  s"  ...  qui  résultent  de 
la  substitution  de  +  i  dans  la  proposée  et  dans  ses  déri- 
vées des  divers  ordres,  nous  introduisons  ces  valeurs  en 
place  des  y,  dans  la  série  (148),  ce  qui  donne 

S         S^  S' 

Appelons  z  la  somme  de  tous  les  termes  qui  contiennent 
des  S,  c'est-à-dire  posons 

X  =  i    -i-  z. 


(168) 


(  509  ) 
on  sait  que 

[  2  5 

OÙ  M  est  le  module.  Formons  les  puissances  croissantes 
de  z  en  fonction  de  S,  S',  S"...,  et  réduisons,  nous  trou- 
vons 

F=-|  -S'(^'  -  S")  -i|[2S■»^S'(3S"-S"0-3S'■^ 

i   s* 

^CS''^-  S'^(12S"  — 4S'"-4-  S") 

-f-  S'  (1 5  S"^  --  i 0 S"  S'")  -+-  i  D  S"^] 

\       S-'' 
.  — [24S'*-+-S'^(C0S"  -20S'"  -f-  5 S"  — S') 

-4-  S''  (90  S"^  —  60  S"  S'"  -+-  1 0  S'""'  ■+-  i  5  S"  S'') 

h-S'(IOdS"^— 105S"2S'")-t-'I0SS"*]  \   (169) 

—  —  .  — ^[120  S'=^  -+-  S'*  (560 S"  —  I20S'" 

-+-  50S'^  — 6S^-+-  S^') 

-\-  S"  (G50  S"^  —  420  S"  S'"  -+-  70  S'"' 

-+-  1 05  S"  S"  —  35  S'"  S'^  —  2 1  S"  S^) 

-+-  S'^(840S"^  — 840S"'S'"  h-  280S"S"''  -+-  2I0S"^S") 

-H  S'  (945S"*—  i  260S"'S'")  -+-  945  S"^] 


Telle  est  l'expression  de  Lx,  dont  on  peut  pousser 
l'approximation  aussi  loin  qu'on  le  désire.  Mais  les  termes 
supérieurs  au  troisième  sont  laborieux  à  calculer.  Toute- 
fois si  S  est  très-petit  par  rapport  aux  dérivées  suivantes 
S',  S",  S"'  ...  la  formule  (169)  se  simplifie,  sans  perdre, 
dans  cette  hypothèse,  de  son  exactitude  pratique. 

Ordonnons  le  second  membre  de  (169)  par  rapport  aux 
puissances   croissantes  de  ^7,   puis    négligeons  dans  les 

2"'  SÉRIE,  TOME    XL.  35 


(  310  ) 
parenthèses  et  crochets  les  termes  qui  dépendent  de  S,  la 
valeur  cherchée  se  réduit  à 

"   2S'^  ~"  24  S"^  8  S"      ' 

Mais  il  est  important  de  se  rappeler  que  cette  dernière 
formule  n'est  qu'approchée,  et  que  pour  l'appliquer  il  faut 
que  S  soit  très -petit  relativement  aux  dérivées  des  ordres 
suivants. 

S'il  s'agissait  d'une  racine  voisine  de  — 1,  les  séries 
(159)  et  (160)  seraient  encore  applicables,  pourvu  qu'on 
prenne  pour  s,  s',  s"...  le  résultat  des  substitutions  de 
—  1,  et  que  l'on  écrive  pour  premier  nombre ^■ 

83.  Les  grandes  racines  influent  particulièrement  sur 
les  termes  supérieurs.  On  sait,  par  exemple,  qu'on  a  atteint 
la  limite  des  racines  réelles,  lorsque  la  substitution  d'une 
certaine  valeur  X  dans  la  proposée  rend  le  terme  en  m 
plus  grand  que  la  somme  de  tous  les  termes  de  signe  con- 
traire. Au  lieu  de  considérer  cette  somme  entière,  on  peut 
se  borner,  dans  un  premier  essai ,  à  son  terme  le  plus 
influent  Gx",  de  signe  différent  de  x"'.  On  a  dans  ce  cas 
pour  approximation  de  la  plus  grande  racine 

On  pourrait  aussi  isoler  les  trois  termes  supérieurs, 

Jx"*  'h-  Ka'"-'  -f-  x"\ 

et  les  égalant  à  zéro  résoudre  l'équation  du  second  degré 

0  =  J  -+-  Kj  M-  x\ 


oli    ) 
Si  celle  équation  l'ournit  deux   racines  réelles,  la  plus 
Jurande  (absolunienl)  sera  une  première  approximation  de 
la  plus  grande  racine  contenue  dans  la   proposée.  Ainsi 
dans  l'équation  (144)  résolue  au  n"  72  on  aurait  écrit 

0-=  — 7,74o  3-2:3  -v    1,410  080  jc  +  .x% 

qui  donne 

_  I  —  5,570  , 

'^~')  -^  2,100. 

La  première  de  ces  valeurs  est  une  approximation  de  la 
plus  grande  racine  de  la  proposée,  qui  est,  comme  on  Fa 
vu  au  n°  cité,  x  =  —  3.879  065.  La  détermination  de 
cette  première  valeur  approchée,  exacte  à  j:^  près  de  sa 
valeur  absolue,  n'a  coûté  que  quelques  minutes  de  travail. 

Toutefois  ce  moyen  très-simple  laisse  souvent  à  désirer. 
La  marche  suivante  conduit  alors  à  des  approximations 
plus  resserrées.  Si  les  racines  de  Féquation  0  =  J  +  Kj 
+  .t2  sont  réelles,  nous  avons  vu  que  la  plus  petite  a  pour 
valeur  approchée  —  ^.  L'autre  racine  (la  grande  racine 
par  hypothèse)  sera  donc  x  =  —  K  -+-  ^  "=  — k~- 

Introduisons  cette  valeur  dans  la  proposée  et  dans  sa 
première  dérivée  différentielle,  et  nommons  n  et  n'  les 
résultats  de  ces  substitutions.  On  trouve 


(m  -  2)  J 


K 


Développons  les  puissances  de  J  —  K^^  réunissons  les 
termes  semblables,  puis  effectuons  la  division  (hi  —n 


(  512  ) 

par  n'.  Joignons  enfin  le  quolient  à  la  première  valeur 
approchée,  et  nous  aurons  pour  seconde  approximation, 
contenant  l'application  du  terme  newtonien; 


x  =  -K-+--:-- 


J         I         H  -f-  J^      G  -+-  5 IJ 


F -4-  ^2J'-+-  4HJ  —  (m  — 5)P 


K 


(171) 


Au  second  degré  I  et  tous  les  coefficients  précédents 
sont  nuls;  on  a  donc 

a:  =  — K-t-_-4-  —  -4-2  — -f-  4  —  ..., 
K        K  iv^  K' 

OU  bien  d'après  la  notation  employée  plus  haut,  où  A  est 
le  terme  connu  et  B  le  coefficient  de  a-, 

A       A*  A'  A* 

nc=  _  B -4-  --+-— -4-  i> H  4— (17^2) 

B        B^  B«  B'  ^       ' 

Au  troisième  degré  on  trouve  semblablement  pour  plus 
grande  racine  (approchée)  de  0  =  A  +  Bx  -h  Cx^  -h  x^, 

B        A        B'       5AB       2B^  ^,^^^ 

c     c^     c^       c*        e  ^     ' 

84.  Les  formules  qui  précèdent  sont  d'une  application 
commode  lorsque  le  coefficient  du  terme  avant-dernier  ou 
en  rfii  —  1  est  grand.  Mais  il  n'en  est  plus  ainsi  quand  ce 
coefficient  est  sensiblement  <  i,  ou  même  quand  il  est 
petit  par  rapport  aux  autres  coefficients.  Ces  formules 
seraient  d'ailleurs  tout  à  fait  inapplicables  quand  l'équa- 
tion est  privée  de  son  terme  avant-dernier  (vulgairement 
le  second). 

Dans  ces  différentes  circonstances,  on  résoudra  d'abord 
l'équation  0  =  J  h-  Ko;  +  x^,  qui  fournit  pour  racine 
x  =  — i  K  =:f^T+TP^;  et  comme  K  et  surtout  K'^ 


{  3i-"i  ) 
sont  par  hypolhèse  pou  inniieiUs  à  côté  de  J,  on  pourrait 
prendre  pour  première  approximation  .x  =  =f  \^  —  J,  ou 
plutôt  en  négligeant  seulement  le  ternie  du  second  ordre 
par  rapport  à  K  , 

a;  =  =Fl/-J-iK (174) 

On  voit  déjà  que  lorsque  K  est  petit,  il  n'y  a  de  grande 
racine  qu'à  la  condition  de  J  négatif. 

Prenant  la  valeur  (174)  de  x  pour  première  approxima- 
tion, et  calculant  la  correction  newtonienne,  il  vient  après 
réduction, 

I  1     K^  \    I 


i  H  -^  -  IK—  —  [m'  —  2^i  m  -  6)  K* 

± ___ 


Mais  à  mesure  que  les  puissances  de  qz  k  —  J  s'élèvent 
aux  dénominateurs,  les  termes  qui  dépendent  du  carré  et 
des  puissances  supérieures  de  K  cessent  bientôt  d'être 
influents.  Supprimons,  dans  les  numérateurs,  les  termes 
en  R2,  K^,  K^...,  nous  obtiendrons 

I  II       2H+IK       G-t-HK 

La  formule  (17o)  fournit  deux  valeurs  de  x,  à  cause 
des  doubles  signes  qu'elle  renferme.  D'ordinaire  ces  deux 
valeurs  correspondent  l'une  et  l'autre  à  de  grandes  racines. 
Toutefois  la  plus  grande  des  deux,  qui  sera  la  seule  à 
laquelle  il  convienne  de  s'arrêter,  sera  presque  toujours 
celle  que  l'on  obtient  en  affectant  le  radical  d'un  signe 
contraire  à  celui  de  K. 


(  ^1^  ) 

Si  l'équation  que  l'on  considère  est  privée  de  son  ternie 
avant-dernier,  il  suffît  de  faire  K=0  dans  l'expres- 
sion (175). 

85.  Les  méthodes  qui  précèdent  seront  d'un  usage  com- 
mode et  souvent  fort  rapide,  pour  déterminer  dès  l'abord 
les  valeurs  approchées  des  racines.  11  est  vrai  que  ces  pro- 
cédés peuvent  faire  connaître  au  plus  quatre  racines 
réelles  :  une  petite  racine,  deux  racines  moyennes  (l'une 
voisine  de  +  1,  l'autre  de  —  1),  et  une  grande  racine. 
Mais  cela  suffit  en  pratique;  car  si  l'on  détermine  une 
seule  racine  réelle,  on  peut  alors  abaisser  l'équation  par  la 
division,  et  chercher  les  racines  de  l'abaissée.  Ici  encore 
une  racine  suffirait  à  la  rigueur,  et  de  proche  en  proche, 
en  continuant  à  abaisser  l'équation,  on  obtiendrait  toutes 
les  racines  réelles. 

Il  arrive  que  les  formules  relatives  à  la  plus  petite 
racine  et  aux  racines  moyennes  ne  conduisent  qu'à  un 
seul  et  même  résultat.  C'est  lorsqu'il  n'existe  pas  de  petite 
racine  proprement  dite.  Car  en  l'absence  d'une  racine 
d'une  certaine  classe,  les  formules  applicables  à  cette 
classe  fournissent  une  approximation,  peu  sûre  il  est  vrai, 
d'une  racine  d'une  classe  voisine.  C'est  ainsi  qu'en  cher- 
chant une  grande  racine,  on  peut  obtenir  pour  réponse 
une  racine  qui  serait  mieux  dénommée  racine  moyenne, 
et  dont  l'approximation  serait  meilleure  par  les  procédés 
applicables  aux  racines  voisines  de  1. 

Il  arrive  aussi  que  certains  essais  ne  sont  pas  fructueux, 
c'est-à-dire  que  les  séries  ne  sont  pas  convergentes.  Dans 
ce  cas  l'on  devra  chercher  un  couple  imaginaire,  au  lieu 
d'une  racine  réelle. 

Quant  à  l'abaissement  de  Téquation  par  la  division,  il 
est  bon  de  faire  à  ce  sujet  une  remarque  qui  est  loin  d'être 
sans  importance  dans  les  calculs  pratiques.  Il  n'est  pas 


aussi  aisé  qu'on  pourrait  le  penser,  d'abaisser  une  équation 
par  la  division,  sans  altérer  les  rapports  de  ses  coelTicienls 
et  par  conséquent  les  racines  de  l'équation  restante.  La 
moindre  inexactitude  dans  la  valeur  numérique  employée 
pour  X  entraîne  bientôt,  à  la  suite  des  soustractions 
répétées,  des  erreurs  notables  dans  les  coefficients  de 
l'abaissée.  Il  faut  donc,  au  préalable,  s'assurer  de  la  par- 
faite exactitude  de  la  racine  obtenue,  avec  un  chifl're  sur- 
numéraire au  moins.  On  tiendra  compte  ensuite' des 
remarques  suivantes. 

Si  la  racine  déterminée  r  est  <  l ,  on  eff'ectuera  la 
division 

or"*  -+-  Kx"'~^  -4-  Jx'"-----  -4-  Cx-  -h  Bx  -4-  A 

X  —  ?' 

et  les  nouveaux  coefficients,  dans  l'abaissée 

x"'    *  -h  jx"'~^  ...  -4-  cx'  -+-  hx  -+-  «  =  0, 
seront 

j  =  K  -t-  r,    i  =  i  -\-  jr, ...  6=  C  -+-  cr,    «  ==  B  -t-  br,    0=  A  h-  ar.   (i 76) 

Le  dernier  est  une  vérification. 

Mais  si  r  >  1,  il  sera  préférable  d'ordonner  suivant  les 
puissances  croissantes  de  x  et  d'exécuter  la  division 

A  -4-  Bx  -+-  Cx-  •••  H-  Jx'"-'^  -+-  Kx'"-'  -+-  X'" 


Les  coefficients  de  rat)aissée  sont  dans  ce  cas, 

A    ,  B  — «  C— 6  J  — ^•  K  — / 

a= .  h  = ,r= ,  ...j  = ,  1  =  - -^.(177) 

r  r  r  r  r 

La  racine  r  ligure  ici  aux  dénominateurs.  La  dernière 
égalité  est  encore  une  vérification. 

On  peut  tirer  un  autre  enseignement  de  ce  qui  précède. 
Quand  r  est  grand  il  est  très-difficile  d'obtenir  v  (du  n"  74) 


(  516  ) 
avec  un  nombre  de  chiffres  exacts  suffisant  pour  la  cor- 
rection définitive  de  la  racine.  En  effet  les  puissances  supé- 
rieures de  r  et  leurs  multiples,  à  substituer  dans  la  pro- 
posée, ne  sont  données  par  les  tables  logarithmiques 
ordinaires  qu'avec  sept  ou  huit  figures.  Les  derniers  rangs 
des  unités  sont  donc  incertains,  et  comme  y(o\iu)  est 
petit  et  tombe  entièrement  dans  les  rangs  inférieurs,  on 
voit  que  cette  quantité  sera  très-mal  déterminée.  Mais 
remplaçons  la  substitution  par  la  division,  et  formons  les 
nouveaux  coefficients  j\  i  ...c,b,  a,  par  les  formules  (176), 
la  quantité  a  à  laquelle  ce  procédé  conduit  n'est  autre 
que  y  (ou  v).  De  cette  manière  on  aura  u  avec  autant  de 
décimales  exactes  qu'il  y  en  a  dans  a. 

Ainsi  en  cherchant  u  au  n°  74,  par  la  substitution  de 
—  3,780  000  0  dans  F  (a?) ,  nous  n'avons  pu  exprimer 
cette  quantité  qu'avec  cinq  décimales,  bien  que  A  en  eût 
six.  C'est  que  nous  avons  eu  à  prendre  des  différences  dans 
lesquelles  entraient  des  valeurs,  telles  que  Coc^,  qui  s'éle- 
vaient aux  centaines,  et  les  sept  chiffres  certains  du  loga- 
rithme de  C  ne  nous  donnaient  alors  que  les  cent-millièmes, 
auxquels  nous  avons  été  forcé  de  nous  arrêter.  Le  chiffre 
des  millionièmes  eût  été  illusoire.  Mais  si  nous  prenons 
la  marche  qui  vient  d'être  indiquée,  nous  aurons  successi- 
vement 

rf=D-4-    X  =  — 2,369  914, 

c  =  C  -4-  dX.  =  -+-  1,212  948, 

/>  =  B  -4-  cX  =  -4-  D,5oG  5i7, 

a  =  A  -+-  b\  =  —  9,428  864  --=  u. 

Dans  cette  valeur  le  dernier  chiffre  est  à  peine  incer- 
tain de  quelques  unités.  On  est  certain  de  la  5™'  décimale, 
qui,  pour  les  raisons  mentionnées,  est  préférable  ici  à 
celle  du  n"  74. 


(517  ) 

5^  R.  —  Équations  transcendantes  et  équations 
à  plusieurs  inconnues. 

86.  La  marche  suivie  au  n*'  74  s'applique  aux  équations 
iraiiscendantes,  et  permet  de  pousser  l'approximation  tout 
d'un  coup  jusqu'à  la  dernière  décimale  demandée.  Soit 
0  =  F(x)  une  telle  équation.  Égalons  F(x)  à  une  variable  y, 
et  formons  ^  que  nous  nommerons  F'(x),  ^  qui  sera 
F"(x),  etc.  Si  maintenant  la  substitution  d'une  valeur 
approchée  X  dans  F(x)  donne  e,  dans  F'(x) ...  e',  dans 
F"(x)  ...  e'\  et  ainsi  des  autres  dérivées,  on  a 

e        1   e^  i  e^ 

X  =  X  — e" (3  e'"—  e' e'") ..., 

e'       2  e"  6e"^  ' 

tout  à  fait  analogue  à  la  série  (148). 

On  commencera  donc  par  former  les  expressions  parti- 
culières des  coefficients  différentiels,  dans  l'équation  que 
l'on  considère.  Soit  par  exemple  la  proposée 

X  —  sin^x  -4--  =  0; (179) 

les  dérivées  successives  sont 

F'    (x)  =  1  —  2  sin  X  cos  x  =  1  —  sin  !2x , 

F"  (x)=  —  2cos2x, 
F"'  (x)  =  4  sin  2  x , 
F'^-  (x)  =  8cos2x, 

par   conséquent,   en    remplaçant   v  par   e  dans  la  for- 
mule (147), 

2  2^ 

—  e=(l  — sin2x)f cos2x.ê^-+- sin2x.t^ 

1 .2  I  .2.5 

25 

H cos2x.§* (180) 


(  ^^8  ) 

Eniin,  en  convertissant  la  série, 


§  = 1 ros  2x 

d  — sin2a:       (I— siri2a;)^ 


e" 


5  (1  —  sin  2  X 


-J6cos'i>jc  — 2sin2a:(l  —  sin^x)]...  (181) 


Cette  série  donne  rapidement  la  correction  de  x,  quand 
on  a  une  première  valeur  approchée.  Or,  dans  notre 
exemple,  il  est  clair  que  x  ne  peut  avoir  de  valeur  posi- 
tive, puisque  a:;  =  0  donne  y  =  -h  0,5,  et  que  pour  toute 
valeur  croissante  de  x  la  différence  x  —  sin  -x  va  en  aug- 
mentant. Mais  un  x  négatif  peut  satisfaire  à  la  question. 
On  reconnaît  bientôt,  par  quelques  essais,  que  l'arc 
cherché  est  très-voisin  de  —  21°  10',  qui  répond  à 
3c  =  —  0,369  428  05.  Cette  valeur  fournit  en  peu 
d'instants 

e  =  —  0,369  428  05  —  0,1 50  580  29  -+-  0.500  000  00  =  -^  0,000  191  68. 

En  même  temps 

1  —  sin  2x  =  1  —  sin  (42"  20')  =  1 ,073  4  =  e' , 
—  2  cos  2x  =  —  2cos  (~  42"  20')  =  —  1 ,470  6  =  e" , 

De  là  nous  tirons  : 

Ic"^  terme -  0,000  114  55 

2«nc      ), -f-  1 


Somme  .    .     —  0,000  114  54  =  H. 

Appliquant  cette  correction  il  vient 

x  =  — 0,569  542  37,     ou  en  arc     x  =  —  2IM0'25",65. 

87.  Lorsque  les  équations  renferment  plusieurs  incon- 
nues, mais  sont  du  premier  degré,  on  peut  employer  le 
calcul  des  déterminants.  Il  est  bon  toutefois  d'avertir  que 


r  519  ) 

ce  calcul  exige  le  plus  grand  ordre  et  les  précautions  les 
plus  minutieuses,  surtout  quand  le  nombre  des  inconnues 
s'élève.  Pour  la  laeilité  et  la  sûreté  des  opérations  numé- 
riques, la  méthode  des  coefficients  égaux  nous  paraît  mé- 
riter la  préférence.  On  sait  en  quoi  elle  consiste.  On  divise 
chaque  équation  par  le  coefficient  d'une  même  inconnue, 
calculant  par  exemple 


b' 

c' 

p' 

X 

-t- 

ci 
h' 

y 

-+- 

a' 
c" 

•  -+- 

ci 

v" 

0, 

X 

H- 

a 

;.V 

-+- 

a" 

r 

••  -+- 

a" 

:0, 

Puis  prenant  les  différences  il  vient  n  —  \  équations  de  la 

forme 

h\  y  -\-  c'i  z  '•■  -f-  p\  =  0, 
b'i  y  H-  c','  iT  •••  -t-  /)'/  =  0, 


qu'on  translorme  en 


^1  pi 


6,  b. 


On  prend  de  nouveau  les  différences,  et  ainsi  de  suite  jus- 
qu'à la  dernière  inconnue.  Puis  on  remonte  par  degrés 
pour  déterminer  les  autres,  chaque  équation  surnuméraire 
donnant  une  vérification. 

88.  Si  les  équations  qui  contiennent  plusieurs  incon- 
nues, renferment  des  puissances  diverses  et  des  produits 
de  ces  inconnues,  on  ne  peut  trop  recommander  le  recours 
au  tracé  graphique.  Un  exemple  fera  comprendre  l'avan- 


(  520  ) 

tage  de  ce  moyen  auxiliaire,  mieux  que  de  longues  expli- 
cations. 

Soient  proposées  les  équations 


a5-4-2î/^  =  1, 


(182) 


o;y'-+-a:'  — 2x?/  =  4.    .     .     .     (183) 

Je  commence  par  tracer  les  courbes  par  points.  Dans 
l'équation  (182)  je  prends  x  pour  donnée,  et  je  trouve 
successivement 

pour  a:  =  0       ...?/  =  rp  0,71 , 

X  =  -4-  i  ...    y  =  zpO;00, 

et  pour  toutes  les  valeurs  de  x  ^  -+-  \  y  serait  imaginaire; 

pour    X  ==  1    ...   î/  r=r  zp   1 , 

a:=-2...7/=zF2,l!2, 
X  =  —  5  ...  y  =  qz  ô,74, 


-10...2/=-f2-2,4. 


La  courbe  qu'on  voit  en  A  GBC,  dans  la  figure  ci-jointe, 


(  521  ) 
est  symétrique  par  rapport  à  l'axe  des  x,  et  forme  bientôt 
deux   branches   presque   droites ,    qui   se   prolongent  à 
l'infini. 

Dans  l'équation  (185)  je  me  donne  ij,  et  j'obtiens  suc- 
cessivement 

2,00, 


pour  y  =  0     ...  X  = 

'^  '       2,00, 

V  =  0,5...x==)-''^^' 
^2,40, 

y  =  -H  I  ...a:=     -t-  1  , 

et  pour  toute  valeur  de  2/  >  -+-  1  on  voit  aisément  que  x 
est  imaginaire  ; 

pour  y  =  —      ...  X  =  { 

■^  U    2,16, 


y  =  —  2  ...X  = 
y  ^=  —  Z  ...  X  = 


—  8,95, 
-t-    4,93, 

—  15,00, 
+    9,00. 


Cette  courbe  D  G  E  F  a  deux  branches  non  symétriques, 
qui  sont  aussi  bientôt  presque  droites,  et  s'étendent  à 
l'infini. 

Ces  premiers  calculs,  qui  se  font  très-rapidement  à  trois 
décimales,  suffisent  pour  tracer  l'esquisse  des  deux  courbes; 
et  l'on  reconnaît  que  celles-ci  ont  un  seul  point  d'intersec- 
tion G.  Il  n'y  aura  donc  qu'une  seule  valeur  réelle  de  x  et 
de  y,  qui  satisfera  à  la  fois  les  deux  équations  (182) 
et  (185). 

Pour  déterminer  approximativement  ces  valeurs,  je  me- 


(  522  ) 

sure  sur  la  figure  l'ordonnée  du  point  G,  et  je  la  trouve 
manifestement  comprise  entre  -+-  0,7  et  -h  0,9.  J'intro- 
duis successivement  les  trois  valeurs  y  ^  -h  0,1 ,  y  =  -+- 
0,8,  y=  -\-  0,9  dans  les  équations  (182)  et  (185),  et  je 
lire  X  dans  chacune  de  ces  hypothèses. 


xpar  (182). 

xpar  (183). 

Différence. 

—  - 

. .yx< 

— ^i^-.. 

-^--w--^— - 

0,7 

—  0,27 

—  0,95 

H-  0,68 

0,8 

—  0,65 

-  0,64 

—  0,01 

0,9 

—  0,85 

-  0,18 

-  0,67 

L'équation  (185)  fournit  pour  x  deux  racines,  mais  je  ne 
considère  ici  que  celle  qui  appartient  à  la  branche  GD. 

Si  les  X  variaient  dans  les  deux  courbes  proportionnel- 
lement à  y,  on  en  déduirait  y  voisin  de  0,798.  J'essaie  les 
trois  valeurs  0,797,  0,798  et  0,799,  celte  fois  en  em- 
ployant des  logarithmes  à  cinq  décimales,  et  je  trouve  : 

y  X  par  (182).  x  par  (183).  Différence, 

-+-  0,797  —  0,646  7  —  0,6oô  4  -f-  0,006  7 
-t-  0,798  —  0,649  2  —  0,649  8  -+-  0,000  6 
-+-  0,799         —  0,651   7         —  0,6^6  0         —  0,005  7 

On  voit  par  ce   tableau  que  les  valeurs  véritables  sont 
voisines  de 

x=  —  0,649  4     et    y  =  -^-  0,798  1 . 

Je  prendrai  ces  valeurs  pour  xeiy  provisoires,  et  j'aurai 
par  les  procédés  de  la  différentiation,  en  me  bornant  aux 
termes  du  premier  ordre, 

^x-r)  X  -^  4]/  J/y  =  -  a  .     .     .     .     (184) 
i^y^^y  -+-  ^2xrîx—  =li/ âx  —  ^x  rjij  =  —  b,     (185) 


(  5^23  ) 

où  ^x  et  ôy  représentent  les  variations  des  inconnues,  et 
a  et  6  les  seconds  membres  des  équations  (182)  et  (185), 
dans  la  fausse  position  adoptée,  diminués  respectivement 
des  seconds  membres  donnés  -h  i  et  h-  4. 

On  trouve  d'abord,  en  faisant  usage  de  huit  décimales, 

x^H- 5?/^  =1,000  062  1,     ....     (186) 
of  -f-  X-  —  2 xij  =  4,000  095  î)  ;  .     .     (1 87) 

d'où 

a  =  —621,      et      6  =  —  959 

du  dernier  ordre,  qui  est  ici  le  septième  ordre  décimal. 

Je  forme  maintenant  1rs  équations  (184)  et  (185)   en 
employant  quatre  décimales  seulement,  et  j'obtiens 

'    1, 265  (?x -4- 3,1 92  c? 7/  =  — 621  , 

9,554  c?»/—  1,299  rîx  —  1,596  Jx-+-  1,299  c?f/ =  — 959, 


ou  après  réduction , 

:^ .  .  .  (188) 


1,265  âx  -+-  5,192  (??/  =  —  621  ,f 
10,855  rhj  —  2,895  c?x  =  —  959 


De  ces  équations  on  lire 

âx  =  —  160,         '-^jj  =  —  131. 

Corrigeons  de   ces   quantités   les  valeurs  admises,  il 
vient 

X  =  —  0,649  416  0,         y  =  -+-  0,798  086  9  ; 

c'est  la  seconde  approximation. 

Si  l'on  en  veut  une  troisième,  il  faut  mettre  en  nombres 
les  équations  (182)  et  (185)  en  employant  ces  nouvelles 


(  nu  ) 

valeurs,  et  en  se  servant  de  logarithmes  à  dix  ou  à  onze 
décimales.  On  trouve  alors 

a;^-i-2î/'=0,999  999  935  7, 

5  2^3  H-  x'  —  2  xy  =  4,000  000  069  7  ; 

d'où  l'on  conclut 

a  =  -+-  4(35 ,         6  =  —  C97 

du  dixième  ordre  fractionnaire. 

Les  premiers  membres  des  équations  (188)  peuvent 
servir  tels  qu'ils  ont  été  calculés  plus  haut;  il  n'y  a  donc  à 
changer  que  les  seconds  membres,  et  l'on  a 

1,265 --^x-t-  ô,\nây=  -\-  463, 
10,855  >^y  —  2,895  rJx  =  —  097. 

On  en  tire  par  les  logarithmes  à  quatre  figures, 

oX  =  -+-  510  .  f)y  =  -\-  20. 

Appliquant  ces  corrections  aux  dernières  approximations, 
il  vient  enfin,  à  une  unité  près  de  la  dixième  décimale, 

x  =  —  0,649  415  9684,     y  = -\- OJdS  086  902  0. 

On  voit  que  même  dans  ces  limites  de  précision,  la  réso- 
lution des  équations  proposées  n'a  pas  entraîné  des  calculs 
extrêmement  développés  ni  très-laborieux. 


(  525  ) 


Note  sur  le  Drosera  binaïa  LabilL,  sa  siructure  et  ses 
procédés  insecticides  ;  par  M.  Edouard  Morren,  membre 
de  l'Académie. 


OROSKRA  BiXATA  LabiU.,  Nov,  //o//.  (1804),  p.  78,  tab.  405.  -  D.  C,  Prodr. 
,18^24),  I,  p.  317.  —  Bot.  Mag.,  LVIII,  tab.  3082.  -  J.  E.  Planchon,  Sia-  la 
famille  des  Droséracées,  Ami.  des  Se.  nai.,  1849,  IX,  p.  2C6.—  M.  G  Smith, 
The  Seusitivc  Glands  of  Drosera  in  Gard.  Cliron.,  -1873,4).  1403,  ic.  284.  — 
Cil.  Darwin,  Inscctivorous  Plants,  1875,  p.  281. —  Drosera  diehoio)na  Manks 
et  Sol.  )nss.  ex  Smith  in  Rees  cijclop.  —  Drosera  pedata  Pcrs.,  Ench.  I, 
p.  357.  D.  C,  Prodr.  I,  317.  —  Drosera  intennedia  Ricli.  Cunningh.  in  Anu. 
o/Nat.  hist,  yol  IV,  p.  409  (non  Hayne)  ;  Dr.  Cunninqhami  Walp.,  Report., 
1,  229. 


Les  questions  relatives  aux  plantes  insecticides  excitent 
plus  que  jamais  l'intérêt  des  naturalistes  depuis  la  récente 
publication  des  Insectivorous  Plants  par  M.  Charles  Dar- 
>vin.  Dans  ce  volume,  l'illustre  naturaliste  a  particulière- 
ment étudié  le  Drosera  rotundifolia  et  plus  sommairement 
d'autres  espèces  du  même  genre,  le  Dionaea  muscipula, 
VAldrovanda  vesiculosa,  le  Drosophyllum ,  les  Pinguicula 
et  les  Uiriciilaria.  On  peut  remarquer  qu'il  laisse  complè- 
tement à  l'écart  les  Nepenthes^  les  Sarracenia  et  autres 
plantes  à  urnes. 

Ses  études  sur  le  Drosera  sont  un  chef-d'œuvre  d'ana- 
lyse :  appelant  tour  à  tour  à  son  aide  la  sagacité  du  na- 
turaliste, l'observation  microscopique  et  l'analyse  chimique, 
il  scrute  la  structure  des  tentacules,  selon  son  heureuse 
expression,  leurs  mouvements,  les  circonstances  et  les  con- 
ditions de  leur  irritabilité,  l'action  des  matières  azotées  et 
surtout  du  carbonate  d'ammoniaque,  l'agrégation  du  pro- 

2™*"  SÉRIE,  TOME  XL.  54 


(  S26  ) 
toplasme  sous  l'influence  de  ces  matières,  la  dissolulion  de 
l'albumine  coagulée,  etc.,  etc.  Il  établit  l'acidité  du  fluide 
sécrété  par  les  glandes  terminales  des  tentacules  et  il  a 
quelques  motifs  pour  croire  que  cet  acide  est  du  groupe 
des  acides  propionique,  butyrique  et  valérianique.  Il  a 
constaté,  par  exemple,  que  le  contact  d'un  bout  de  cheveu 
pesant  0"'^000822  suffit  pour  provoquer  le  mouvement  du 
tentacule;  que  0'"^00048  de  carbonate  d'ammoniaque 
amènent  l'agrégation  du  protoplasme  dans  les  cellules 
supérieures  du  tentacule.  Les  phénomènes  de  relation  con- 
cernant la  transmission  des  impressions  sont  étudiés  avec 
un  soin  inimitable.  Mais  à  partir  de  ce  point,  les  démon- 
strations deviennent  moins  péremptoires.  M.  Darwin  admet, 
sur  de  faibles  indices,  la  présence  dans  ce  même  suc  acide 
d'une  matière  analogue  à  la  pepsine  et  qui  interviendrait 
seulement  à  la  suite  de  l'excitation  de  certaines  substances 
peptogènes.  Quant  à  l'absorption  de  l'albumine  dissoute, 
elle  aurait  lieu  par  les  glandes  des  tentacules,  c'est-à-dire 
par  les  organes  mêmes  qui  sécrètent  le  suc  gastrique. 

Nous  ne  nous  trouvons  pas  dans  les  conditions  qui  nous 
permettraient  de  pousser,  aussi  loin  que  nous  le  voudrions 
l'essayer,  les  observations  sur  cet  intéressant  problème  de 
physiologie  végétale.  Cependant  nous  ne  voulons  négliger 
aucune  occasion  pour  chercher  la  vérité.  11  faut  bien  le 
reconnaître,  si  la  théorie  nouvelle  a  excité  un  vif  intérêt, 
elle  a  aussi  rencontré  une  certaine  incrédulité.  Nousavons 
exposé  déjà  maintes  considérations  théoriques  qui  militent 
en  sa  faveur,  mais  nos  premières  observations,  en  consta- 
tant l'intervention  des  facteurs  ordinaires  de  la  putréfac- 
tion, autorisaient  le  doute  en  ce  qui  concerne  la  digestion 
des  animaux  capturés.  Nous  avons  été  heureux  de  pouvoir 
faire  de  nouvelles  observations  qui  ont  donné  les  résultats 


(  5*27  ) 

les  plus  élonnanls  et  en  quelques  points  favorables  à  la 
théorie  de  la  digestion. 

Elles  ont  porté  sur  le  Drosera  binala  (fig.  1),  jolie  plante 
des  environs  de  Sidney,  qu'on  rencontre  sur  divers  autres 
points  des  Nouvelles-Galles  du  Sud,  dans  la  Nouvelle-Hol- 
lande. On  le  signale  aussi  dans  l'île  Van  Diemen  et  à  la 
Nouvelle-Zélande.  Il  a  été  rapporté  pour  la  preniière  fois 
par  de  la  Billardière,  dans  ses  herbiers,  au  retour  de  son 
grand  voyage  dans  les  terres  australes  et  publié  dans  les 
Novae-Hollandiae  plantariim  spécimen.  Maintenant  on  le 
cultive  en  Europe  où  il  est  encore  assez  rare,  bien  qu'il 
propsère  dans  un  sol  humide  et  tourbeux  sous  le  simple 
abri  d'une  serre  tempérée.  Il  est  acaule,  mais  ses  pétioles 
étroits,  lisses,  un  peu  cannelés,  peuvent  s'élever  jusqu'à 
vingt  centimètres  :  le  limbe  des  feuilles,  qui  se  bifurque 
une  ou  deux  ou  trois  fois,  selon  la  vigueur  des  plantes, 
atteint  quinze  centimètres.  Certaines  formes  ont  été  prises 
naguère  pour  des  espèces  distinctes;  la  plus  simple,  à 
feuilles  une  fois  divisées,  a  été  décrite  sous  le  nom  de 
Drosera  pédala  par  Persoon  ;  la  plus  compliquée,  dont  les 
feuilles  se  bifurquent  deux  ou  trois  fois,  sous  le  nom  de 
Drosera  dichotonia  par  Banks  et  Solandre.  Ces  deux 
formes,  unies  d'ailleurs  par  le  Drosera  hitermedia  de  Rich. 
Cunningham,  ont  été  fondues  par  M.  Planchon,  dans  sa 
belle  monographie  des  Drosera,  en  une  seule  espèce  et 
ramenées  au  Drosera  binata  (1). 

Les  divisions  foliaires  sont  longues,  étroites  comme  un 


(1)  Sur  la  culture  du  Drosera  binata ,  on  peut  consulter  :  Ed.  Otlo,  in 
Hamb.  Gart.-u.  Blumenz.,  1861,  p.  U;  A.  Steizner,  id.,  1865,  p.  49; 
E.  Mayer,  in  Gartcnflora,  1868,  p.  195;  Mac  Nab,  in  The  Garden,  1873, 
page  4. 


(  528  ) 
cordonnet;  légèrement  concaves  le  long  de  ia  iigne  médiane, 
elles  s'épaississent  sur  les  deux  bords  :  la  face  inférieure, 
un  peu  convexe  dans  le  milieu,  est  lisse,  tandis  que  les 
bourrelets  latéraux  et  la  page  supérieure  sont  tout  hérissés 
de  tentacules  (fig.  2).  Les  tentacules  marginaux  sont 
les  plus  longs,  jusque  0"S00o,  c'est-à-dire  près  de  deux 
fois  la  largeur  des  feuilles;  les  autres  vont  successivement 
en  diminuant  jusqu'au  centre  de  la  feuille  oii  ils  ne  dépas- 
sent pas  un  demi-njiliimètre.  On  en  remarque  même,  de 
dimensions  moyennes,  sur  le  bord  inférieur  de  la  feuille. 

Les  grands  tentacules  (fig.  4)  du  Drosera  binala  sont 
droits,  vert  pâle,  insensiblement  atténués  de  la  base  au 
sommet  :  leur  épidémie  est  çà  et  là  perforé  jjar  de  vastes 
stomates  dont  l'osliole  est  largement  béante.  Jls  se  termi- 
nent en  une  glande  sphérique  dont  la  base  est  verte  et  la 
plus  grande  partie  d'un  rose  vif;  le  centre  paraît  même  un 
peu  pourpré  :  elle  sécrète  un  liquide  très-visqueux  et  lim- 
pide qui  s'accumule  surtout  à  la  partie  supérieure  de  la 
glande  en  une  gouttelette  hyaline.  Le  tentacule  est  traversé 
d'un  bout  à  l'autre  (tig.  5  et  15)  par  un  ou  plusieurs  vais- 
seaux, ordinairement  des  trachées,  quelquefois  des  vais- 
seaux annulaires,  qui  aboutissent  dans  un  amas  de  cellules 
d'inenchyme  occupant  le  centre  de  la  glande.  Les  tenta- 
cules plus  courts  ont  la  même  structure,  plus  ou  moins 
réduite  proportionnellement  à  leur  taille  (fig.  6  et  7)  :  tous 
ont  le  vaisseau  central  et  les  cellules  à  spiricule  dans  la 
glande. 

On  sait  que  les  feuilles  de  Drosera  ont  la  vernation  cir- 
cinale,  ce  qui  suppose,  pensons-nous,  un  accroissement 
acrogène.  Ces  feuilles  se  déroulent  lentement  et  l'on  peut 
remarquer  que  les  glandes  commencent  à  sécréter  quel- 
ques jours  seulement  après  leur  apparition.  Au  sommet 


(  5^29  ) 
aminci  des  feuilles  sont  quelques  tentacules  plus  longs  et 
plus  déliés  que  les  autres. 

La  feuille  est  formée  de  parenchyme  riche  en  cliloro- 
phylle,  sauf  dans  l'axe  des  bourrelets  marginaux  où  se  trou- 
vent les  principaux  faisceaux  entourés  de  cellules  inco- 
lores (lig.  5).  L'abondance  des  trachées  est  remarquable 
jusque  contre  l'épiderme.  Celui-ci  est  sur  la  face  supé- 
rieure abondamment  pourvu  de  stomates  à  grandes  ouver- 
tures (fig.  8,  9;;  il  |)orte,  de  plus,  beaucoup  de  petites 
glandes  sessiles,  formées  de  2,  4,  8  on  16  cellules  (lig.  JO) 
et  remplies  de  granules  bruns;  on  en  trouve  aussi  sur 
l'épiderme  inférieur  et  même  sur  les  tentacules  (fig.  4.). 
Cette  structure  est  dans  tous  les  points  essentiels  la  même 
que  celle  de  notre  Drosera  rofnndifoiia  :  elle  avait  été  très- 
sommairement  examinée  déjà  par  M.  W.  G.  Smith. 

Nos  observations  ont  été  faites  à  la  fin  du  mois  d'octobre 
sur  des  spécimens  cultivés  en  serre  et  en  pleine  végéta- 
tion. Nous  les  avons  rapportés  de  Hambourg  et  nous  les 
devons  à  l'obligeance  de  M.  Kramer. 

Le  liquide  des  glandes,  très-gluant,  est  franchement 
acide:  il  fait  rougir  instantanément  le  papier  de  tournesol. 
Nous  l'avons  essayé  à  plusieurs  heures  du  jour  et  de  la 
nuit,  chaque  fois  avec  les  mêmes  résultats. 

A  l'état  de  repos,  les  tentacules  sont  droits  et  diver- 
gents (comme  il  est  représenté  Hg.  2  et  3)  :  la  glande  est 
d'un  rouge  brillant  et  la  gouttelette  visqueuse  étincelle 
à  la  lumière.  Les  feuilles  hautes  d'un  pied  sont  disposées 
comme  les  mailles  d'un  fdet.  Dans  cet  état,  il  semble  vrai- 
ment que  la  plante,  comme  une  araignée  dans  sa  toile, 
guette  et  attende  sa  proie. 

Au  sommet  des  feuilles  se  dressent  quelques  tentacules 
encore  plus  longs  que  les  autres  et  qui  sont  là  comme  en 
vedette. 


(  530  ) 

Dans  la  nature  la  chasse  est  abondante,  puisque  les 
feuilles  deviennent  sales  et  paraissent  défigurées  sous  les 
dépouilles  animales  (1).  Dans  une  serre,  il  n'en  est  pas  de 
même;  au  mois  d'octobre  surtout,  les  moucherons  sont 
rares  et  la  plante  est  d'une  fraîcheur  exquise  avec  ses  mille 
perles  irisées  et  son  feuillage  à  reflets  rouges. 

Nous  lui  avons  d'abord  présenté  quelques  pucerons 
[Aphis),  qm,  mis  en  contact  avec  les  glandes  des  tentacules 
marginaux,  ont  été  fortement  englués.  Immédiatement,  ces 
tentacules  se  sont  mis  en  mouvement,  et,  en  se  courbant 
sur  leur  face  interne  ou  supérieure,  ils  ont  porté  leur 
charge  sur  le  limbe  même  de  la  feuille.  Ce  mouvement 
de  translation  s'opère  en  deux  ou  trois  minutes,  presque 
toujours  deux  minutes  et  demie.  Les  tentacules  demeurent 
courbés  sur  leur  proie  ;  la  glande  surexcitée,  exsude  une 
surabondance  de  suc  (fig.  11  et  12).  Cependant  la  vie  est 
lente  à  s'éteindre  dans  ces  chétives  victimes  :  nous  en 
avons  vu  qui  ont  vécu  24  heures  dans  cette  glu  avant  leur 
immolation  définitive.  En  général  les  tentacules  se  relè- 
vent après  2  ou  5  jours  :  parfois  ils  demeurent  plus  long- 
temps dans  cette  situation. 

Nous  avons  répété  l'expérience  avec  des  fragments 
d'albumine  coagulée  :  ils  adhèrent  fortement,  et,  presque  à 
vue  d'œil,  les  tentacules  se  courbent;  ceux  du  voisinage 
s'infléchissent,  et  tous  ensemble  portent  l'albumine  et  la 
poussent  dans  le  milieu  de  la  feuille  :  ils  restent  ainsi 
ployés,  arc-boutés  sur  le  fragment  qu'ils  couvrent  de 
leur  sécrétion  acide  et  gluante  :  quelques  heures  plus  tard, 
l'albumine  estdevenue  transparente ,  ses  angles  s'émoussent 
et  après  un  jour  ou  deux,  il  en  reste  peu  de  trace. 

(1)  Darwin,  /.  c.,p.  282.  —  Mac  Nab,  /,  c. 


(  S3i  ) 

La  courbure  des  tentacules  et  la  translation  (Je  l'albu- 
miii€  se  font  en  deux  ou  trois  minutes,  ordinairement  en 
deux  minutes  et  demie.  Il  n'y  a  nulle  différence,  sous  ce 
rapport,  entre  le  jour  et  la  nuit. 

Des  fragments  de  feuilles  coupées  au  ciseau  ont  donné, 
nous  a-t-il  paru,  des  mouvements  plus  lents,  parfois  nuls. 
Dans  ces  conditions  et  à  l'obscurité,  il  arrive  que  l'albu- 
mine est  rendue  transparente  sans  avoir  été  transportée 
par  les  tentacules  marginaux  sur  le  limbe  même  de  la 
feuille. 

La  courbure  et  le  mouvement  de  translation  n'intéres- 
sent ordinairement  que  les  tentacules  d'un  seul  côté  de  la 
feuille  qui  se  trouve  en  contact  avec  l'albumine  ou  dans 
son  propre  voisinage  :  le  côté  opposé  demeure  indifférent 
(fig.  H). 

Les  résultats  sont  les  mêmes  avec  des  moucherons,  des 
fragments  de  tipules,  de  cloportes,  de  petits  limaçons,  des 
vermisseaux,  en  un  mot,  avec  des  matières  azotées.  Tou- 
jours, en  cent  cinquante  secondes  environ,  nous  avons  vu 
ces  matériaux  alimentaires  portés  sur  la  feuille,  et  bientôt 
couverts  par  le  suc  que  sécrètent  les  glandes  terminales. 
Nous  avons,  à  l'exemple  de  M.  Darwin,  expérimenté  l'in- 
fluence d'une  solution  très-faible  de  carbonate  d'ammo- 
niaque, et  nous  l'avons  vu  provoquer  une  prompte  flexion 
des  tentacules. 

D'un  autre  côté,  nous  avons  tenté  l'expérience  avec 
le  papier,  la  moelle  de  sureau,  la  cire  de  bougie,  etc., 
toutes  matières  dépourvues  d'azote  :  elles  adhèrent  bien 
aux  glandes,  mais,  chose  vraiment  étrange,  les  tentacules 
demeurent  indifférents,  la  glande  semble  même  se  dessé- 
cher de  manière  à  ne  point  retenir  ces  substances  inu- 


(  532  ) 

tiles;  bien  plus,  les  tentacules  se  réfléchissent  quelquefois 
vers  le  dehors  et  cherchent  manifestement  à  se  libérer  du 
fardeau  qui  les  embarrasse.  Il  est  très-exceptionnel  de  voir 
une  légère  flexion  causée  par  ces  corps  inertes  :  des  frag- 
ments sont  parfois  portés  jusqu'à  un  certain  point,  mais 
bientôt  le  mouvement  s'arrête  :  tous  les  tentacules,  ou  la 
plupart,  se  relèvent;  en  tous  cas,  la  sécrétion  tarit  et  le 
vent  ou  un  léger  choc  contre  les  feuilles  amènent  la  chute 
des  matériaux  que  la  plante  ne  veut  pas  retenir. 

Ainsi  donc,  le  Drosera  binata,  admirablement  organisé 
pour  la  chasse,  littéralement  couvert  d'appâts,  attire  à 
lui,  fixe  contre  ses  feuilles  légèrement  creusées  en  gout- 
tière, la  matière  animale  qu'il  peut  atteindre.  Cette  même 
plante  écarte  et  rejette  les  substances  inutiles,  dont  elle 
n'a  que  faire. 

La  courbure  des  tentacules  s'opère  ici  avec  beaucoup 
plus  de  rapidité  que  dans  le  Drosera  rotundifolia  :  elle 
n'intéresse  pas  seulement  une  partie  de  l'organe,  mais 
toute  son  étendue,  puisqu'il  prend  la  forme  d'un  grand  arc 
de  cercle.  Dans  celte  situation,  le  microscope  ne  révèle  pas 
de  modifications  dans  l'état  organique.  Nous  mentionne- 
rons toutefois,  non  sans  une  certaine  hésitation,  quelques 
plis  transversaux  qui  semblent  se  manifester  à  la  paroi 
profonde  des  cellules  intérieures  les  plus  proches  du  vais- 
seau central  (fig.  15). 

Nous  avons,  à  plusieurs  reprises,  soumis  à  l'examen 
microscopique  les  fragments  d'albumine  devenus  transpa- 
rents, et  nous  n'y  avons  constaté  ni  bactéries,  ni  monades, 
ni  aucun  des  facteurs  de  la  putréfaction.  Sous  ce  rapport, 
les  résultats  de  ces  nouvelles  observations  ditfèrent,  jusqu'à 
présent,  de  ceux  que  nous  avions  constatés  naguère.  Cette 


(  555  ) 
l'ois  nous  n'avons,  au  cours  do  nos  investigations,  rencon- 
tré qu'un  seul  filament  mvcologique,  fixé  sur  la  glande 
d'un  tentacule  :  son  apparence,  assez  singulière,  rappelle 
un  peu  une  conjugaison  de  Mucorinée  (fig.  14).  Ce  vestige 
est  d'ailleurs  sans  importance  ici.  Mais  nous  avons,  d'autre 
part,  été  frappé  de  cette  circonstance  que  des  pucerons 
englués  par  les  tentacules  sont  demeurés  intacts  pendant 
24,  36  et  même  48  heures,  sans  manifester  les  phéno- 
mènes ni  de  la  putréfaction,  ni  de  la  digestion. 

Dans  nos  premières  observations  sur  le  Pinguicula  et  le 
Drosera  rotundifolia,  nous  avions  rencontré  les  êtres  sapro- 
gènes  dans  les  substances  animales  fixées  sur  leur  feuillage. 
Cette  circonstance  a  fait  naître  en  nous  quelques  doutes 
sur  la  faculté  de  dissoudre  et  de  digérer  les  matières  albu- 
minoïdes  attribuée  au  liquide  sécrété  par  l'extrémité  des 
tentacules.Cetle  fois,  nous  n'avons  point  constaté  de  putré- 
faction :  l'albumine  est  réellement  rendue  transparente , 
comme  M.Darwin  l'a  découvert  sur  le  Drosera  rotundifolia. 
11  est  possible  qu'elle  soit  liquéfiée  et  transformée  en  prin- 
cipes absorbables.  Pendant  la  digestion  animale  l'albumine 
est  modifiée  en  matières  crislalloïdes  qu'on  appelle  pep- 
tones  :  elle  éprouve  cette  modification  sous  l'influence  de 
l'acide  chlorhydrique  et  de  la  pepsine.  Ici,  on  sait  mainte- 
nant que  le  suc  excrété  est  acide,  vraisemblablement  par 
la  présence  d'un  acide  gras.  Quant  à  la  pepsine,  son  inter- 
vention est  encore  problématique.  Mais,  on  ne  saurait 
négliger  l'extrême  viscosité  du  suc  glandulaire;  c'est  là  son 
principal  caractère  :  il  s'étire  au  coniact  du  doigt- en  fila- 
ments longs  d'un  centimètre  au  moins.  Ce  ne  sont  ni  les 
acides  gras,  ni  la  pepsine  qui  peuvent  rendre  compte  de 
cette  nature  gluante.  Au  contact  de  l'alcool,  sur  le  porte- 


(  534  ) 

objet  du  microscope,  il  prend  l'apparence  d'un  réticule 
alvéolaire. 

Nous  voudrions  pousser  plus  loin  les  investigations 
et  déterminer  les  organes  de  l'absorption.  Quanta  la  der- 
nière question,  M.  Darwin  ne  doute  pas  que  ce  ne  soient 
les  glandes  elles-mêmes,  et  il  en  voit  la  preuve  dans  l'état 
d'agrégation  du  protoplasme  qui  est  déterminé  par  les 
substances  ammoniacales.  Il  y  aurait  cependant  quelque 
chose  d'insolite  à  ce  qu'une  glande  fût  en  même  temps  un 
organe  d'absorption,  d'autant  plus  que  son  activité  sécré- 
toire  est  ici  périodique.  11  conviendrait  d'ailleurs  de  recher- 
cher le  rôle  qui  peut  être  dévolu  aux  énormes  stomates 
dont  toutes  les  plantes  insecticides  sont  munies,  et  la  signi- 
fication des  petites  glandes  sessiles  qu'elles  portent  sur  leur 
épiderme.  Dans  le  Drosera  binata,  l'ostiole  des  stomates 
mesure  en  longueur  jusque  deux  centièmes  de  millimètre. 

La  nécessité  et  même  l'utilité  des  matériaux  que  les 
végétaux  insecticides  savent  se  procurer  par  le  singulier 
pouvoir  dont  ils  sont  doués,  ne  sont  pas  établis.  En  effet, 
il  semble  démontré  jusqu'ici  que  ces  végétaux  vivent, 
grandissent,  fleurissent  et  fructifient  en  dehors  de  toute 
intervention  de  matière  animale.  Nous  voulons,  l'année 
prochaine,  nous  former  à  ce  sujet  une  conviction  fondée 
sur  des  observations  directes. 

Nous  former  une  conviction  basée  sur  l'observation  de 
la  nature  est  d'ailleurs  notre  seul  but  en  intervenant  bien 
modestement,  dans  cette  belle  et  difficile  question,  traitée 
avec  tant  de  mérite  et  d'autorité  par  M.  Ch.  Darwin.  Les 
quelques  notes  que  nous  avons  recueillies  et  publiées  jus- 
qu'à présent  sur  ce  sujet  sont  de  peu  d'importance  et  ne 
concernent  que  les  côtés  superficiels  du  phénomène.  Il 


Irri^'  C  Sever-cyns,  ^ricxelles. 


Drosera  binatoL  LabUl. 


iill.cle  l'Acad 


'Ul 


L  ith .  par   G.  uzvgreyns  ,Braxe  lies . 


jDrosera  binaia  LabiLl. 


PL.  m. 


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ZitA  par    G.  Severez/Ji^ , Bruxelles . 


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lJro.';cra  buiata  Labill. 


lill.de  l'Acad, 


PLIV 


V 


l^âi^c 


mmi::^il 


Ix  ,^i      Cl'r^: 


^'^     V>  ^é^; 


\ 


^ 


ZitÀ  par   Gr.  uevereiim , Bruxelles . 


(  555  ) 
faudrait  une  atteulion  soutenue  et  un  travail  minutieux 
et  obstiné  pour  y  pénétrer  plus  avant,  pour  suivre  la  voie 
ouverte,  et  surtout  pour  y  ajouter  quelque  chose  de  ce  qui 
lui  manque  encore  pour  atteindre  le  but. 


EXPLICATION    DES  FIGURES. 


Fig.    1.  Drosera  binata  Lahill. 

—  ±  Un  fragment  de  feuille  avec  les  tentacules  à  l'état  inactif. 

—  5.  Coupe  transversale  d'une  feuille. 

—  4.  Un  tentacule  marginal. 

—  5.  Coupe  longiluilinale  à  travers  un  tentacule. 

a.  Cellules   épidermiques   renfermant  quelques  grains   verts 

contre  la  paroi  postérieure. 

b.  Cellules  parenchymateuses  avec  des  grains  verts  pariétaux 
c    Vaisseaux. 

d.  Inenchyme  central  dans  lequel  aboutissent  les  vaisseaux. 

e.  Cellules  riches  en  grains  de  chlorophylle. 

f.  Cellules  contenant  un  pigment  rouge  liquide  et  granuleux. 

—  6  et  7.  Tentacules  minimes  vers  le  milieu  du  limbe. 

—  8.  Coupe  dans  lepiderme  et  le  parenchyme  supérieur  à  travers  un 

stomate. 

—  9.  Stomates  avec  quelques  cellules  du  derme. 

—  10.  Glandes  épidermiques  :  «et  6,  structure  normale;  cet  d,  struc- 

tures plus  rares. 

—  11.  Fragment  de  feuille  dont  la  moitié  des  tentacules  sont  courbés 

sur  un  morceau  d'albumine. 

—  12.  Un  autre  fragment  dont  les  tentacules  sont  courbés. 

—  13.  Coupe  dans  l'axe  d'un  tentacule  courbé  ;  en  a  ou  voit  des  plis 

transversaux  dans  la  membrane  cellulaire. 

—  14.  Filament  mvcélien. 


536  ) 


Les  ossements  fossiles  du  genre  Aidocète  au  Musée  de  Linz  ; 
par  M.  P.-J.  Van  Beneden,  membre  de  l'Académie. 

Dans  la  mollasse  des  environs  de  Linz,  qne  les  géolo- 
gues placent  généralement  dans  le  miocène,  on  découvrit, 
il  y  a  une  trentaine  d'années,  des  vertèbres  d'un  assez 
grand  Cétacé,  et  deux  ans  après  on  mit  au  jour,  dans  la 
même  localité,  un  crâne  assez  complet  muni  de  ses  con- 
dyles,  quelques  fragments  d'os  de  la  face ,  des  côtes  et 
des  débris  de  sternum. 

Ces  os  étaient  accompagnés  de  restes  de  Sqnalodon  et 
de  Halitherium.  Avec  eux  se  trouvait  une  caisse  tympa- 
nique  assez  bien  conservée  et  une  dent  droite,  à  une  seule 
racine.  M.  Ehrlich  a  figuré  ces  pièces  dans  ses  Geognos- 
tische  Wanderungen,  publiées  à  Linz,  en  1854  (1). 

Cette  dent  et  cette  caisse  tympanique  ont  induit  plu- 
sieurs naturalistes  dans  l'erreur  et,  nous  l'avouons  sans  dé- 
tour, nous  avons  été  de  ce  nombre.  La  caisse  tympanique 
et  la  dent  ont  été  attribuées  à  tort  au  même  animal  que  le 
crâne. 

M.  Herm.  von  Meyer  à  été  le  premier  a  étudier  ces  os  (2) 
et,  le  genre  Balénodon  n'étant  que  vaguement  déterminé 
par  celui  qui  l'a  proposé,  il  crut  pouvoir  désigner  l'animal 
nouveau,  dont  ces  restes  provenaient,  sous  le  nom  de 
Balœnodon  lenzianum.  Il  avait  rapporté,  comme  nous,  la 


(1)  Planches  II ,  IH  el  IV. 

(2)  Balœnodon  lenzianum,  Herm.  von  Meyer,  Leonard's  uiid  Bronn's 
Jahrbuch,  1849, p.  o-i9  et  1850,  2^  Heft,  p  201. 


(  ^^  ) 

caisse  tynipanique,  la  dent  et  le  crâne  à  un  même  aninial. 

Après  un  examen  rapide  sur  les  lieux,  où  nous  nous 
étions  rendu  pour  étudier  le  Squalodon,  nous  avions  cru 
devoir  placer  cet  animal,  d'après  la  dent  et  la  caisse  qui 
accompagnaient  la  tète,  dans  cette  famille  de  Cétacés  car- 
nassiers qui  comprenait  les  Zeuglodons  et  les  Squalodons; 
mais,  ne  pouvant  adopter  le  nom  de  Balénodon,  nous 
avions  proposé  de  lui  substituer  celui  di'Aulocèle  (i),  que 
nous  aurions  dû  conserver  au  lieu  de  le  changer  en  Sté- 
nodon  (2), 

C'est  dans  une  lecture  faite  à  la  séance  publique  de 
l'Académie,  le  16  décembre  1861,  que  nous  avons  em- 
ployé la  première  fois  ce  nom  d'Aulocète,  pour  désigner 
le  sillon  profond  que  forme  l'occipital  de  ce  Célacé.  «  L'ani- 
mal appelé  de  ce  nom  de  Balénodon,  disions-nous,  est  un 
type  nouveau,  qui  n'a  rien  de  commun  avec  les  Cétacés 
trouvés  jusqu'à  présent  dans  le  bassin  d'Anvers.  »  INous 
n'avions  pas  cru  devoir  rapporter  la  caisse  de  l'oreille  et 
la  dent  à  un  autre  animal  et  nous  étions  encore  sous 
l'influence  de  ce  rapprochement,  quand  nous  avons  pro- 
posé le  nom  de  Sténodon. 

Le  docteur  Brandi  visita  le  musée  de  Linz  en  1871  ;  il 
rapporta  la  caisse  et  la  dent  à  un  autre  animal  que  celui 
dont  provenait  le  crâne,  rapprocha  celui-ci  des  Cetothe- 
rium,  et  éleva  le  genre  nouveau  auquel  il  donna  le  nom 
de  Cetotheriopsis,  au  rang  d'une  division  nouvelle  :  les 
Celothcriopsinœ.  La  caisse  ainsi  que  la  dent  sont  rapportées 
au  genre  Squalodon.  C'est  une  forme  particulière  entre  les 


(1)  Bulletin  de  VAcad.  royale  de  Belgique,  2^  sér.  t.  XII  1861,  p.  481. 
{±)  Van  Benedeo,  Recherches  sur  les  Squalodons,  Mém.   de  l'Acad. 

ROYALE    DE  BELGIQUE,  l.  XXXV,  186-J. 


(  558  ) 

Balénoptères  et  les  Cetotherium ,  dit  le  savant  naturaliste 
de  Saint-Pétersbourg,  raais  plus  près,  ajoute-t-il ,  des  pre- 
miers que  des  derniers  (1). 

M.  Brandt  à  raison  de  rapporter  le  crâne  à  un  Mysti- 
cète,  c'est-à-dire  à  un  Cétacé  à  fanons;  mais,  contraire- 
ment à  ce  qu'il  suppose  en  dernier  lieu,  les  vertèbres  qu'il 
attribue  à  différents  Squalodons  aussi  bien  que  la  cervi- 
cale qu'il  rapporte  à  une  Halianassa,  proviennent,  à  notre 
avis,  d'un  seul  et  même  animal. 

Nous  ferons  remarquer  en  passant  que  les  vertèbres 
attribuées  d'abord  par  M.  Brandt  à  l'Aulocète  (pag.  44) 
sont  ensuite  considérées  comme  vertèbres  de  Squalodon 
(pag.  555)  et  plus  loin  définitivement  rapportées  au  Squa- 
lodon E/ir/îc/?u  dans  l'explication  des  planches  (pag.  554). 
Ces  vertèbres  ont  certes  une  forme  bien  particulière,  mais 
n'appartiennent  pas  moins,  à  notre  avis,  à  VAulocète. 

Pendant  un  nouveau  séjour  à  Linz,  en  1874,  nous  avons 
passé  en  revue  toute  la  collection  d'ossements  fossiles  du 
musée  de  cette  ville,  et,  grâce  au  concours  obligeant  que 
nous  a  prêté  son  savant  directeur,  M.  Cari  Ehrlich ,  nous 
avons  pu  nous  convaincre  que  la  colonne  vertébrale  attri- 
buée en  partie  à  des  Squalodons  et  en  partie  à  une  Halia- 
nassa  est  au  contraire  d'un  seul  et  même  animal;  cette 
colonne,  qui  est  presque  complète,  se  rattache  parfaite- 
ment à  la  tête. 

Nous  avons  eu  la  chance.,  en  arrivant  à  Linz,  de  nous  y 
trouver  au  moment  même  où  M.  Ehrlich  venait  de  rece- 
voir, de  Saint-Pétersbourg,  les  ossements  qu'il  avait  com- 
muniqués au  professeur  Brandt,  et  nous  avons  pu  déballer 


(1)  Cetotheriopsis^  Bull.  AcAd.  imp.  de  Saint-Pétersbourg,  novem- 
bre 1874.  p.  563. 


(  S59  ) 
iions-mcme  les  vertèbres  et  les  autres  os  qui  portaient 
encore  les  notes  écrites  de  la  main  du  professeur  de  Saint- 
Pétersbourg. 

Nous  allons  passer  ces  divers  os  en  revue,  mais  résu- 
mons d'abord  la  synonymie  avec  l'indication  des  publica- 
tions qui  ont  eu  cet  animal  pour  objet. 

Balaenoptera  mollassica,  Juger,  foss.  sàugclh.  Wurtcmb.  1857. 

Zeuglodon,  Jo/i.  MuUer,  Die  Zeuglodonten ,  pag.  29. 

Balaenodon  lentianus,  h.  von  Meyer  Jahrhuch,  1850,  2"  H.,  p.  201. 

—  —  Ehrlich.     Ucho.r    die    Nordôstlichen    yJlpen, 

Linz,  1850. 

—  —  Ehrlich,  Geognosiische  Wanderungen  in  Ge- 
hiele  der  Nordôstlichen  Àlpen,  in-8o  Linz,  1856,  p.  81. 
pi.  II,  III  ellV. 

AuLOCETUS,  Van  Beneden.  La  côte  d'Ostende  et  les  fouilles  d'Anvers, 
Bulletins  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  2csér.,  t.XII, 
p.  480,  1861. 

Stenodon  lentianus.  Van  Beneden,  Recherches  sur  les  SqualodonSy 
MÉMOIRES  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  t.  XXXV, 
1865. 

Cetotheriopsis  linziana,  Brandt,  Bulletin  de  l'Académie  impériale 
de  Saint-Pétersbourg,  t.  XVI,  p.  565,  et  t.  XVII,  p.  121 , 
Mel.  Biol.  (t.  VIII,  p.  196  et  527),  Untersitchungen  ûber 
die  Fossilcn  iind  Sitbfossilen  Cctaceen  Europa's,  1875,  p.  40. 

Les  premières  figures  ont  été  données  par  M.  Ehrlich, 
dans  ses  Geognosiische  Wanderungen.  Les  planches  II,  III 
et  IV  le  représentent. 

Dans  notre  mémoire  sur  les  Sr/im/ocZows,  nous  avons 
représenté  le  crâne  planche  IV,  d'après  un  dessin  que 
M.  Ehrlich  avait  envoyé  à  Joh.  Muller  pour  son  travail  sur 
les  Zeuglodons. 


(  o40  ) 
M.  Brandi  reproduit  ensuite  la  tête,  p!.  XiX,  des  ver- 
tèbres, pi.  XVIll,  fig.  5-11,  de  ses   Untcrsuchungcnj  et 
pi.  I,  lig.  7-14  et  pi.  V,  lig.  0-12,  de  ses  Ergànzungen. 

Le  crâne  de  l'Aulocèle  a  tous  les  caractères  des  Balé- 
noptérides  du  midi  de  l'Europe  et  la  dent  ainsi  que  la 
caisse  tympanique  que  nous  avions  cru  devoir  lui  rappor- 
ter, proviennent,  la  première  d'un  Sirénien,  l'autre  d'un 
Squalodon. 

Toute  la  boîte  crânienne  est  conservée  avec  la  plus 
grande  partie  du  temporal  ;  en  regardant  la  tête  par  des- 
sus, on  voit  que  tout  l'occipital,  au  lieu  d'être  aplati  ou 
même  bombé,  est  au  contraire  déprimé,  de  manière  que 
les  bords  se  relèvent  et  forment  une  crête  soutenue  laté- 
ralement par  les  pariétaux  et  les  temporaux. 

Si  l'on  place  le  crâne  devant  soi  à  la  hauteur  des  yeux, 
et  si  on  le  regarde  soit  du  côté  de  l'occiput,  soit  du  côté  de 
la  face,  on  reconnaît  qu'il  présente  au  milieu  un  profond 
sillon  dans  toute  la  longueur  de  l'occipital. 

Le  docteur  Brandt  se  demande,  la  tête  du  Pachy acanthe 
n'ayant  pas  encore  été  trouvée,  si,  par  hasard,  cette 
tête  d'Aulocète  ne  serait  pas  celle  de  ce  ïhalassothérien. 

Dans  la  dernière  note  que  nous  avons  lue  à  l'Académie, 
nous  n'avons  pas  hésité  à  soutenir  l'opinion  que  le  Pa- 
chy acantJnis  est  un  Sirénien;  il  ne  faut  donc  pas  chercher 
la  tête  de  cet  animal  dans  un  Cétacé  souffleur.  11  ne  peut 
rien  y  avoir  de  commun  entre  l'Aulocète  et  le  Pachyacan- 
thus;\\  y  a  entre  ces  deux  genres  toute  la  différence  qui 
sépare  le  Sirénien  herbivore  du  Cétacé  souffleur. 

Indépendamment  de  la  boîte  crânienne,  on  a  déterré 
deux  fragments  de  maxillaire  supérieur  assez  aplatis  et 
larges  et  qui,  par  leur  peu  de  courbure,  indiquent  une 


V    Ui    ) 

Ijaloine  à  courts  lauons.  Ils  sont  mal  conservés  cl  l'orl  déli- 
cats. L'un  a  presque  le  double  de  la  longueur  de  l'aulre. 
En  1871,  M.  Brandt  reconnut  que  ces  os  sont  des  frag- 
ments de  maxillaire  supérieur,  d'après  ce  que  nous  avons 
vu  écrit  sur  l'éliquette,  encore  attachée  à  la  pièce  à  Linz. 

Le  maxillaire  inférieur  est  incomplet;  les  deux  bouts 
manquent.  On  reconnaît  la  nature  de  cet  os  plutôt  parle 
tissu  et  la  direction  des  mailles  que  par  la  forme  de  l'os. 

La  caisse  tympanique  que  nous  avons  figurée  dans  notre 
mémoire  sur  les  Squalodons  se  distingue,  comme  nous 
l'avons  dit  plus  haut,  de  celle  de  tous  les  Mysticèles,  par 
son  grand  développement  du  côté  de  l'axe  et  sa  forme 
rétrécis  en  arrière,  qui  lui  donne  un  aspect  propre,  tout 
différent  de  celui  des  Cétacés  véritables. 

M.  Brandt  a  eu  recours  aux  lumières  de  ses  savants 
confrères  MM.  Steenstrup  et  Malm  pour  reconnaître  les 
affinités  de  la  caisse  tympanique,  que  je  croyais  appar- 
tenir à  l'Aulocèle;  avec  beaucoup  de  raison,  ces  savants 
ont  exprimé  l'opinion  que  cette  caisse  n'appartient  ni  à 
un  Hyperoodon  ,  ni  à  un  Ziphius. 

Cette  tète  a  été  moulée,  mais  il  n'en  existe  malheureu- 
sement que  trois  exemplaires  :  un  à  Vienne,  un  autre  à 
Berlin  et  un  troisième  à  Gratz.  A  Vienne  il  porte  encore 
le  nom  de  Balaenodon  lentianus. 

IXous  avons  comparé  le  crâne  de  l'Aulocète  avec  ceux 
des  Balénoptérides  fossiles  de  la  Bussie  méridionale, 
d'Autriche ,  de  France ,  de  Portugal  et  de  Belgique  et,  pour 
autant  que  nous  pouvons  en  juger  par  la  comparaison  des 
pièces  qui  sont  conservées,  il  n'existe  au  fond  que  peu 
de  différences  entre  elles. 

Tous  ces  os  proviennent,  à  l'exception  de  la  Balaena 
etriisca  de  Capellini,  de  Balénoptères  plutôt  que  de  Ba- 

2™^  SERIE,  TOME   XL.  35 


(  W2  ) 

leines  véritables,  comme  le  montre  la  largeur  et  la  direc- 
tion du  frontal  aussi  bien  que  la  courbure  régulière  de  la 
face.  L'os  frontal  se  dirige  de  dedans  en  dehors  et  d'arrière 
en  avant  dans  les  espèces  fossiles,  tandis  que  nous  le 
voyons  se  diriger  d'avant  en  arrière  dans  les  vivants. 

Les  os  nasaux  sont  toujours  fort  allongés,  les  maxil- 
laires supérieurs  fort  larges,  les  intermaxillaires  très- 
effilés  en  haut,  chez  tous  les  Balénoptères  fossiles. 

Dans  les  vivants,  le  pariétal  et  le  frontal  ne  forment  plus 
qu'une  étroite  bande  entre  le  nasal  et  l'occipital  :  dans  les 
fossiles  cet  espace  est  toujours  fort  allongé. 

L'occipital  recouvre  ainsi  de  plus  en  plus,  depuis 
l'époque  miocène  l'os  pariétal  et  il  se  termine  toujours  en 
formant  un  angle  aigu  en  avant. 

L'épaisseur  des  parois  crâniennes  est  toujours  fort 
grande  dans  les  diverses  espèces  fossiles. 

Dans  la  mollasse  de  Baltringen  on  a  trouvé,  il  y  a  une 
quarantaine  d'années,  un  fragment  de  maxillaire  inférieur, 
provenant  d'un  Cétacé  à  fanons,  et  qui  se  rapporte  peut- 
être  à  l'animal  qui  nous  occupe.  En  tout  cas,  ce  n'est  pas, 
comme  Brandt  le  suppose,  un  animal  voisin  des  Pachya- 
canthes.  Ce  fragment  a  été  signalé  par  Jaeger,  dans  ses 
mammifères  fossiles  de  Wurtemberg  (1857). 

Nous  connaissons  heureusement  presque  toute  la  co- 
lonne vertébrale  de  l'Aulocète  de  Linz.  Comme  nous 
l'avons  dit  plus  haut,  plusieurs  vertèbres  ont  été  attri- 
buées par  M.  Brandt  à  d'autres  animaux. 

La  première  est  un  atlas  qui  correspond  parfaitement, 
par  ses  surfaces  articulaires,  aux  condyles  de  l'occipital 
(lu  crâne  attribué  au  Balénodon.  Nous  sommes  persuadé 
que  cette  vertèbre  est  non-seulement  de  cette  même 
espèce,   mais  du  môme  individu.    Elle   est   complète  à 


(  :.-i5  ) 

l'exceplion  de  la  partie  moyenne  de  Tare  neural.  Par  ce 
qui  en  reste,  on  peut  dire  qu'il  est  faible. 

Cette  vertèbre  mesure  en  largeur,  d'un  bout  de  l'apo- 
pbyse  transverse  à  l'autre,  19  centimètres.  L'arc  inférieur 
qui  correspond  au  corps  de  la  vertèbre  a  5  centimètres 
d'épaisseur. 

Cet  atlas  à  tous  les  caractères  de  la  première  cervicale 
des  Cétacés  à  courts  fanons  et  non  des  Zeuglodontes, 
comme  on  l'a  supposé  à  diverses  reprises. 

ï.a  surface  articulaire  antérieure  est  séparée  sur  la  ligne 
médiane  et  elle  est  fort  large  en  avant.  L'apophyse  trans- 
verse est  courte  et  faible.  Le  canal  rachidien  est  fort  large. 

F^a  seconde  vertèbre,  qui  a  été  déterrée  en  même 
temps,  est  une  troisième,  ou  quatrième  cervicale;  le  corps 
est  fort  bien  conservé,  et  les  apophyses  transverses  supé- 
rieures et  inférieures  sont  représentées  par  leur  base.  Elle 
est  fort  régulière,  un  peu  plus  large  que  haute,  légèrement 
courbée  en  dessous,  creusée  en  dessous  et  mesure  en  lar- 
geur 85  millimètres,  en  hauteur  65  millimètres  et  en 
épaisseur  50  millimètres. 

Cette  vertèbre  a  été  regardée  par  Brandt,  comme  ayant 
appartenu  à  une  Halianassa.  Elle  n'a  pas  été  envoyée 
comme  plusieurs  autres  à  S^-Péfersbourg. 

Les  vertèbres  se  ressentent  presque  toutes  d'une  com- 
pression extérieure  qui  leur  a  fait  perdre  leur  forme  symé- 
trique. 

Une  des  premières  dorsales  se  distingue  par  la  parfaite 
régularité  du  contour  du  corps;  le  pédicule  du  cerceau  est 
large  à  la  base  et  se  porte  faiblement  de  bas  en  haut  et  de 
dedans  en  dehors.  Nous  avons  trouvé  un  Iragment  séparé 
de  la  partie  supérieure  de  Parc  neural  et,  sans  qu'il 
s'adapte  à  l'apophyse   brisée,   nous   pouvons  cependant 


(  Mi  ) 

reproduire  en  partie  le  diamètre  du  canal  qui  loge  la 
moelle.  Le  corps  de  cette  vertèbre  ne  porte  pas  de  trace  de 
facette  articulaire  pour  les  côtes.  Son  épaisseur  est  de 
5  centimètres. 

Deux  autres  dorsales  du  milieu  de  cette  région  ont  le 
pédicule  de  leur  cerceau  beaucoup  plus  étroit  et  s'élevant 
plus  directement.  Le  corps  mesure  jusqu'à  6  centimètres 
d'épaisseur= 

Au  Musée  de  l'iiof- Mineralien  -  Cabinet  à  Vienne, 
nous  avons  trouvé  une  vertèbre,  découverte  à  Pad  en 
Croatie,  et  qui  porte  sur  l'étiquette  qui  l'accompagne, 
indépendamment  de  l'indication  des  lieux,  18o4,  VIF,  7. 
Nous  la  regardons  comme  une  dorsale  de  l'animal  qui  nous 
occupe.  Elle  est  de  la  même  taille  et  ne  diffère  des  autres 
que  par  la  lace  inférieure  du  corps  qui  est  légèrement 
carénée.  Ce  caractère  indique  qu'elle  appartient  à  une  des 
dernières  dorsales. 

Le  même  Musée  renferme  encore  une  vertèbre  du 
Leitnakalk  des  environs  de  Vienne,  qu'il  faudrait  compa- 
rer avec  soin. 

Nous  avons  également  trouvé  une  vertèbre  au  Musée 
de  Stuttgart,  venant  de  la  mollasse  marine  supérieure  de 
Oberschwalben  (le  même  terrain  qui  contenait  l'Arionus 
de  Herm.  von  Meyer,  qui  est  un  vrai  Squalodon),  et  nous 
croyons  également  pouvoir  la  rapporter  à  l'Aulocète  qui 
nous  occupe.  Cependant  cette  vertèbre,  une  des  dernières 
dorsales,  a  le  corps  plus  comprimé  latéralement, de  manière 
que,  vue  de  face,  elle  prend  |)lus  ou  moins  la  forme  d'un 
cœur.  Elle  indique  un  animal  plus  grand  de  taille  que 
celui  de  Linz.  Le  corps  mesure  près  de  15  centimètres 
d'épaisseur  et  10  Va  ^'^  hauteur. 

Une  des  premières  lombaires  a  la  surface  du  corps  large 


(Je  9  cenlimèli'cs  et  d'avanl  en  arrière  10  cenlinièlres  et 
demi.  Elle  n'a  pas  de  carène  à  sa  face  inférienre.  Muth- 
masslkh  eiitcrder  hinteren  Lendwirbel  von  Cetholcriopais, 
porte  l'étiquelle,  et  ce  dernier  mot  est  écrit  de  la  main 
même  de  Brandi.  Celle  verlèbre  a  été  envoyée  à  S*-Pélers- 
bourg. 

J.  Muller  avait  jugé,  d'après  les  dessins  que  M.  Ehrlich 
lui  avait  envoyés,  que  les  vertèbres  caudales  provenaient 
d'un  Zeuglodon. 

Une  autre  vertèbre  lombaire,  mais  plus  incomplète 
encore,  présente  les  mêmes  dimensions  dans  le  corps. 

Les  vertèbres  dorsales  ont  le  corps  plus  large  que  haut. 
Les  vertèbres  caudales  ont  le  corps  aussi  haut  que  large, 
mais  les  suivantes  changent  notablement  sous  ce  rapport. 

Les  trois  vertèbres  caudales,  qui  sont  figurées  dans 
Brandt  [Foss.  Cétac,  pi.  XXIII,  fig.  91-1),  sont  fort  remar- 
quables, par  le  grand  développement  de  leurs  apophyses. 
Les  vertèbres  dans  cette  région  de  la  queue  n'ont  plus 
guère  que  des  rudiments  d'apophyses  dans  les  autres  Cé- 
tacés. Ainsi  le  corps  de  la  caudale  la  plus  complète  est 
haut  de  11  centimètres,  long  de  10  '/^^  ^t  la  zygapophyse 
seule  à  8  centimètres  de  largeur  au-dessus  du  canal  neu- 
ral.  Une  autre  caudale  dont  le  corps  a  la  même  hauteur,  a 
une  apophyse  transverse,  inclinée  en  dessous,  de  8  cenli- 
nièlres el  demi. 

La  caudale  atlribnée  à  un  Squalodon  (Brandi,  pi.  V, 
(ig.  12)  (1)  est  fort  remarquable  par  sa  forme  comprimée; 
le  corps  a  une  hauteur  de  98  millimètres  sur  75""'  de 
largeur  et  95""™  de  longueur. 


(1)  Ergànzungen  zu  den  fossilen  Cetaceen  Europa's. 


(  546  ) 
Ce  sont  ces  deriiiers  os  qui  caractéiisenl  le  mieux  les 
Aulocètes. 

Nous  rapportons  toutes  ces  vertèbres,  non-seulement  au 
même  genre  et  à  la  même  espèce,  mais  nous  ajouterons 
au  même  individu,  tandis  que  le  professeur  Brandt,  comme 
nous  l'avons  dit  plus  haut,  les  rapporte  à  des  animaux  fort 
divers.  Ainsi  les  vertèbres  qu'il  figure  dans  ses  Ergdn- 
zungen  zii  den  fossilen  Celaceen  Europa's  (1874),  pi.  V, 
fig.  9-12  sont  rapportées  au  Squalodon  hypsispomhjlus; 
les  fig.  5-8  de  la  même  planche  au  Squalodon  incerlus,  et 
les  fig.  15-15  de  la  pi.  IV  au  Squalodon  E/irlichii.  Les  pre- 
mières dont  Brandt  fait  son  Squalodon  hypsispondijlus 
sont  des  vertèbres  caudales;  les  fig.  5  à  8  dont  il  fait  le 
Squalodon  iïicerlus ,  sont  des  vertèbres  lombaires  elles 
fig.  13-15  de  la  pi.  IV  sont  également  des  caudales. 

Les  fig.  7  à  15  de  la  pi.  l  de  ses  Ergdnzungen  sont  des 
vertèbres  d'Anlocète.  Brandt  pourrait  supprimer  le  signe 
de  doute  qui  figure  sur  la  planche. 

Cette  même  planche  reproduit  un  os,  fig.  4  à  6,  qui  n'est 
évidemment  pas  un  maxillaire  de  Célacé  et  qui  provient, 
selon  toute  probabilité,  d'un  animal  terrestre. 

On  trouve  encore  deux  fragments  d'un  os  plat  que  nous 
croyons  devoir  attribuer  au  sternum.  Mais  ces  fragments 
sont  trop  incomplets  pour  que  l'on  puisse  se  représenter  la 
forme  qu'affectait  cet  os. 

On  n'a  trouvé  ou  du  moins  on  n'a  conservé  au  Musée  de 
Linz  que  deux  fragments  de  côte;  l'un  est  long  de  15  cen- 
timètres, large  de  5,  presque  droit  et  tout  a  fait  distinct  par 
sa  forme  carrée  des  côtes  des  Cétacés  vivants.  Elle  n'est  en 
effet  ni  arrondie  comme  dans  les  Baleines,  ni  aplatie  comme 
dans  les  Balénoptères  et  nous  avons  retrouvé  dans  le  sable 
noir  à  S^-Nicolas  des  côtes  semblables  au  milieu  de  restes 
de  Balénides. 


(  sn  ) 

L'autre  fragnicnl  esl  im  peu  plus  court  et  plus  mince  et 
il  (lifl'ère  du  précédent  par  un  côté  complètement  aplati, 
de  manière  que  la  coupe  représente  une  ligne  dioile  d'un 
coté,  une  ligne  courbe  du  côté  opposé.  L'un  et  l'autre 
morceau  indiquent  une  côte  fort  solide.  Cette  côte  n'est 
pas  du  tout  los  que  Brandt  a  ligure  sous  ce  nom,  pi.  I, 
fig.  16  (1). 

Nous  ne  donnons  aucune  figure  de  cet  animal,  par  la 
raison  que  les  divers  os,  comme  nous  l'avons  dit  plus  haut, 
ont  été  sulïisamment  reproduits.  La  première  figure  en  a 
été  donnée  par  M.  Ehrlich  en  1854;  ensuite  j'ai  repro- 
duit ces  mêmes  pièces  dans  mon  mémoire  sur  les  Squa- 
loclous  et  dans  ses  dernières  recherches  Brandt  a  encore 
reproduit  la  tète  et  les  principales  vertèbres. 

La  colonne  vertébrale  de  l'Aulocète  est  donc  représentée 
par  un  atlas  assez  complet  dont  Tare  inférieur  mesure 
5  centimètres  dans  le  sens  antéro-postérieur  et  une  autre 
cervicale  qui  n'a  que  la  moitié. 

Une  première  dorsale,  peut-être  la  première,  a  5  centi- 
mètres d'épaisseur  et  une  autre  dorsale  a  5  centimètres  et 
demi. 

Il  y  a  ensuite  cinq  vertèbres  qui  se  suivent  et  qui  appar- 
tiennent, à  la  région  lombaire;  elles  mesurent  environ 
9  centimètres  chacune. 

La  région  caudale  a  sept  vertèbres  qui  mesurent  à  peu 
près  10  centimètres;  la  dernière,  avec  un  canal  neural 
complet,  mais  des  apophyses  rudimentaires,  n'est  guère 
moins  longue  que  les  autres. 

On  pourrait  fort  bien,  par  ces  vertèbres,  supputer  celles 


(I)  nrganzuntjcn  zu  dcn  fossili'n  Celaceen  Europa's. 


(  us  ) 

qui  manquent  et  apprécier  la  longueur  totale  de  l'animal. 

VAulocetus  qui  nous  occupe  devait  avoir  environ  6  mè- 
tres de  longueur,  c'est-à-dire  la  taille  de  notre  Balenoptera 
rostrala. 

Brandt  ne  lui  accorde  que  douze  pieds. 

Gomme  les  Balénoptères  des  environs  d'Anvers,  TAulo- 
cète  avait  le  corps  des  vertèbres  cervicales  beaucoup  plus 
épais  que  dans  les  espèces  suivantes  et  les  métapophyses 
des  vertèbres  caudales  extraordinairement  développées. 

Ces  ossements  proviennent,  ainsi  que  nous  l'avons  dit, 
de  la  mollasse  des  environs  de  Linz  et  ont  été  trouvés 
mêlés  avec  des  ossements  de  Squalodon  et  de  Haiithe- 
rium.  Nous  avons  trouvé  au  Musée  de  Linz,  à  côté  d'eux, 
des  vertèbres  de  Lamna  ciispidala  et  des  dents  de  Car- 
charodon  anrjuslidens  ^  provenant  du  même  terrain. 

Pour  donner  une  idée  de  la  répartition  des  Thalassothé- 
riens  dans  le  bassin  de  Vienne  à  l'époqne  miocène,  nous 
devons  faire  remarquer,  que  Ton  trouve  ici,  comme  en 
Italie,  en  France  et  ailleurs,  des  ossements  de  Sirénides 
et  de  Squalodons,  mêlés  avec  des  ossements  de  Balénop- 
térides,  c'est-à-dire,  des  animaux  de  rivage  et  d'embou- 
chure avec  des  animaux  de  haute  mer,  ce  qui  semble  indi- 
quer, que  les  cadavres  flottants  ont  été  poussés  par  les 
vents  dominants  dans  certains  estuaires,  où  les  os  se  sont 
entassés  et  ont  été  jetés  pêle-mêle,  pendant  un  long  laps 
de  temps. 

En  résumé  lo  Balénide  déterré  dans  les  environs  de 
Linz,  et  qui  est  conservé  au  musée  de  cette  ville,  est  repré- 
senté par  le  crâne,  des  fragments  de  maxillaire  supérieur 
et  inférieur,  des  vertèbres  de  toutes  les  régions,  des  frag- 
ments de  côte  et  de  sternum. 


(  549  ) 

Cet  animal  est  désigné  sous  le  nom  de  Balcnodon  len- 
tianus  (ISoO),  par  Herman  von  Meyer,  Avlocclus  et  Slcno- 
don  Icntianus,  par  nous  (I8G0),  Celotherwpsis  leiitianiis , 
parBrandt(I87J). 

Il  a  été  découvert  dans  la  mollasse  des  environs  de  Linz 
(haute  Autriche)  à  côté  des  Squalodons  et  des  Halianassa, 
et  de  deuxiSquales,  bien  connus,  le  Lamna  cornubica  et  le 
Carcharodon  anguslidens. 

Jusqu'à  présent  on  l'a  trouvé  seulement  à  Linz;  mais 
certains  ossements  trouvés  dans  le  Wurtemberg  et  en 
Croatie  peuvent  lui  être  rapportés. 


Ëfudes  sur  la  planète  Mars  (S'  notice);  par  M.  F.  Terby, 
docteur  en  sciences,  à  Louvain. 

I.  —  Observations  faites  a  louvain  pendant  l'opposition 

DE  1873,  ET  REMARQUES  SUR  DIVERSES  APPARENCES  QUE 
PEUVENT  OFFRIR  LES  TACHES  DE  CET  ASTRE. 

La  déclinaison  australe  si  prononcée  de  la  planète  Mars 
pendant  son  opposition  de  cette  année  enlevait  presque  tout 
espoir  d'obtenir,  dans  nos  contrées,  des  résultats  utiles. 
Cependant  l'on  ne  pouvait  se  dispenser  de  tenter  quelques 
efforts  et  de  profiter  de  la  grande  proximité  de  cet  astre, 
arrivé  en  même  temps  en  opposition  et  dans  un  lieu  voi- 
sin de  son  périhélie,  tandis  que  la  terre  atteignait  ses  plus 
grandes  distances  du  soleil.  Aussi  ai-je  tâché  de  poursui- 
vre mes  observations  malgré  toutes  les  circonstances  défa- 
vorables qui  se  présentaient  en  foule,  et  je  suis  heureux 


(  ooO  ) 
de  contribuer  à  empêcher  que  l'année  187o  ne  laisse  une 
lacune  dans  les  recherches  sur  raspecl  physique  de  celte 
planète.  C'est  dans  ce  but  que  j'ai  mullipHé  les  observa- 
tions et  recueilli  le  plus  grand  nombre  possible  de  des- 
sins :  ils  se  confirment  mutuellement  et  montrent  le  degré 
de  confiance  qu'on  peut  attribuer  aux  détails  qu'ils  ren- 
ferment; j'ose  donc  espérer  qu'ils  seront  utiles  à  consul- 
ter. Selon  toute  apparence,  en  effet,  les  observaiions  au- 
ront été  très-peu  nombreuses  en  1875  comme  en  1860, 
et  il  faut  attendre  les  résultats  les  plus  détaillés  et  les  plus 
importants  des  observatoires  méridionaux. 

Les  dessins  que  j'ai  l'honneur  de  présenter  aujourd'hui 
à  l'Académie  continuent  l'ensemble  des  observaiions  que 
j'ai  commencées  il  y  a  onze  ans,  et  offrent  plusieurs  dé- 
tails intéressants  concernant  l'aspect  que  peuvent  prendre 
les  taches  de  Mars  dans  les  conditions  diverses  de  netteté. 
Il  peut  paraître  singulier,  au  premier  abord,  que  les  cir- 
conslances  généralement  défavorables  de  cette  année  aient 
précisément  conduit  à  plusieurs  conclusions  qui  ne  sont 
pas  dépourvues  d'intérêt,  et  qui  sont  capables  d'aider 
puissamment  à  l'explication  des  dessins,  soit  anciens,  soit 
modernes,  tout  en  confirmant  la  permanence  des  taches, 
et  en  préparant  les  recherches  ultérieures  sur  la  durée  de 
rotation. 

Malgré  le  trouble  presque  constant  de  l'image,  il  a  été 
aisé  de  reconnaître  les  taches  observées  pendant  les  oppo- 
sitions antérieures  :  ce  sont  celles  que  j'avais  désignées 
par  les  lettres  d  (Mer  de  Kaiser  et  Océan  de  Dawes) , 
/"(ensemble  des  Mers  de  Hook  et  de  Maraldi),  b  (Océan 
De  La  Rue),  c  (Détroit  d'Herschel  11).  La  tache  a  (Mer  de 
Tycho)  était  moins  marquée  qu'en  1871  à  cause  de  la  posi- 


(S31  ) 

lion  moins  inclinée  de  Taxe  rclalivemenl  an  rayon  visuel. 
Toutes  les  lâches,  en  etret,  étaient  notablement  abaissées 
sur  le  (lis(|ue  apparent  comparativement  aux  positions 
qu'elles  occupaient  en  187J  ;  la  mer  de  Tycho  n'atteignait 
plus  le  centre. 

L'opposition  de  1864  présente  beaucoup  d'analogie  avec 
celle  de  1875  quant  à  la  situation  des  taches  sur  le  disque 
apparent  :  j'ai  l'ait  remarquer  ailleurs  que  l'année  1858 
est  assez  comparable  à  1864  sous  le  même  rapport  (J).  Les 
observations  de  1858,  de  1875  et  de  1864  correspondeni, 
en  effet,  à  des  époques  voisines  des  équinoxes  martiels  ; 
mais  1875  et  1858  se  rapportent  à  l'équinoxe  du  prin- 
temps méridional,  tandis  que  1864  coïncide  avec  l'équi- 
noxe du  printemps  boréal.  Je  rappelle  ces  circonstances 
parce  qu'il  est  intéressant  de  noter  qu'en  1875  la  mer  de 
Tycho  a  été  assez  marquée,  comme  en  1858,  tandis 
qu'elle  a  été  à  peine  observée  en  1864.  En  1875  et  en 
1858  l'été  boréal  avait  dissipé  tous  les  voiles  susceptibles 
de  cacher  cette  mer;  le  contraire  avait  lieu  en  1864  par 
l'effet  de  l'hiver. 

Pour  permettre  la  comparaison  des  dessins  que  j'ai  fails 
depuis  1864,  j'ai  mis  en  regard  les  taches  identiques  dans 
le  tableau  suivant  : 


(I)  \oh'  Aréographie,  ou  étude  comparative  des  observations  faites 
sur  l'aspect  physique  de  la  planète  3Iars  depuis  Fontana  {IGoQ)  jusqu'à 
nus  jours  (1873);  tome  XXXIX  des  Mémoires  couronnés  et  Mémoires  des 
savants  étramjers,  pul)Iiés  pnr  F  Académie  royale  de  Belgique ,  1875,  in-i"; 
p.  45  et  p.  90,  en  note. 


(  m  ) 


Taches  b  et  c  (Océan  De 
La  Rue  et  Détroit  d'Her- 
schcl  II). 

Tache  a  [Mer  de  Tychu). 


Tache  d  [Mer  de  Kaiser  et 
Océan  de  Daives). 


Tache  f  [Mer  de  Maraldi] 


OPPOSITION 
de  1S64. 


OPPOSITION 
de  1867. 


OPPOSITION 
de  iSTl. 


OPPOSITION 
de  1875. 


OPPOSITION 
de  1875. 


Y  VA.  1,13. 
lf.I2.18. 


Fig.  4,  o, 
6.8; 
fig.  14,  15, 
16. 


Fig.  18à  23.  Fig.  4  à  13  et 
I  fig.  28,  30. 


Fis;   14. 
fig.  lu  à  19: 
;  fie.  21, 22, 
!     ^  29. 
:  fig.3ià3:;. 


Fig.  20,  21     Fig. -1,2; 
22  et  23.     fig.  10  à  43 
fig.  45. 


Fig.  45,  16,     Fig.  3,  4, 
24  et  25.  6,7; 

ï\".  44  à  48. 


i  Fig.  4,  20; 
'  fig.  23  à  26. 
!     fig.  36.  ' 


Fi 


17 
49; 

fig.  26. 


18. 


Fig.  3,  4,  6 

7,8,9; 
fig.  46  à  22 


(•)  Bulletins  de  l' Académie  roxjalede  Belgique,  2*  série,  lome  XXXI  ,p.  i7(i. 
(2)  Id.  id.  id. 

3)  Id.  id.  tome  XXXI I,  p.  57. 

(*)  Id.  id.  tome  XXXVI ,  p.  556. 

L'observation  des  lâches  polaires  était  souvent  très- 
(iifticile  en  1875:  c'est  à  peine  si  j'ai  remarqué  la  tache 
neigeuse  boréale  avant  le  20  juillet;  depuis  cette  date 
l'observation  en  est  devenue  certaine.  Quant  à  la  calotte 
polaire  blanche  australe,  elle  apparaissait  souvent  avec 
beaucoup  de  nelteté  et  spécialement  au-dessus  de  FOcéan 
De  La  Rue  et  de  la  partie  la  plus  occidentale  de  la  Merde 
Maraldi  jusqu'au  10  juillet.  Le  20  juillet,  elle  apparaissait 
aussi  au-dessus  de  l'Océan  de  Dawes.  On  peut  en  conclure 
qu'elle  était  plus  marquée  ou  s'étendait  beaucoup  plus 
d'un  côté  du  pôle,  dans  les  régions  qui,  sur  la  carte  de 
M.  Proctor,  sont  comprises  entre  les  longitudes  de  170** 
et  de  SeO**  environ. 


(  555  } 

La  difliculté  crobserver  la  lâche  polaire  boréale  en  1875 
s'explique  parfaitement;  en  effet,  l'équinoxe,  ou  le  com- 
mencement du  printemps  pour  l'hémisphère  sud,  avait 
lieu  le  7  juin  (i).  Le  pôle  nord  avait  déjà  subi  l'action  de 
l'été:  sa  tache  blanche  était  considérablement  réduite; 
elle  était  déjà  tort  petite,  quoique  bien  visible  encore,  en 
1871  et  en  1875.  Quant  au  pôle  sud,  il  avait,  lors  des 
observations  de  1875,  subi  les  effels  de  l'hiver  :  ainsi 
s'explique  le  développement  de  sa  calotte  neigeuse. 

L'examen  des  taches  polaires  dans  la  série  des  observa- 
lions  faites  de  1871  à  1875  conduit  à  des  résultats  très- 
nets  et  parfaitement  en  rapport  avec  les  saisons  de  Mars. 
C'est  un  fait  bien  connu  et  bien  évident  qu'en  observant 
des  oppositions  successives  de  cette  planète,  on  la  retrouve 
chaque  fois  dans  des  positions  plus  avancées  de  son  orbite, 
ou  correspondant  à  des  longitudes  héliocentriques  plus 
considérables;  l'on  assiste  donc  ainsi  à  la  succession  des 
aspects  dus  à  l'ordre  des  saisons,  de  la  même  manière  que 
l'on  constaterait  cette  succession  si  l'on  pouvait  observer 
la  planète  d'une  façon  continue  pendant  la  durée  d'une 
révolution  entière.  C'est  ainsi  qu'en  étudiant  Mars  en  1871, 
en  1875  et  en  1875,  nous  voyons  cette  planète  progres- 
ser depuis  son  été  boréal  jusqu'à  son  équinoxe  d'automne 
boréal  ou  jusqu'à  son  printemps  austral  :  aussi,  en  1871, 
la  tache  neigeuse  boréale  apparaît-elle  constamment  :  elle 
est  visible  à  cause  de  l'inclinaison  de  l'extrémité  nord  de 
l'axe  vers  la  terre,  mais  très-petite  à  cause  de  l'action  de 
Tété.  La  tache  neigeuse  australe  n'apparaît  qu'accidentel- 
lement, surtout  au-dessus  de  l'Océan  de  Dawes,  accusant 


(1)  Monlhly  notices  ;  tome  XXXV,  p.  506.  Ephemeris  for  phijsical  ob- 
servations of  Mars,  by  A.  Marth,  esq. 


(  mi  ) 

ainsi  son  immense  développement  dans  une  direction  prin- 
cipale et  l'influence  de  l'hiver.  En  1875,  la  tache  horéale 
n'est  plus  visihie  aussi  constamment  et  je  remarque  plus 
fréquemment  la  tache  australe.  En  1875  entin,  cette  der- 
nière lâche  est  longtemps  seule  visible. 

Ces  phénomènes  se  produisent  évidemment  aussi  lonâ^ 
que  la  planète  occupe  ces  positions  successives  dans  les 
limites  d'une  seule  révolution  ;  l'été  boréal  réduit  de  plus 
en  plus  la  tache  polaire  boréale  située  du  côté  du  soleil, 
tandis  que  la  tache  australe  se  développe.  L'extrémité  sud 
de  l'axe,  en  s'inclinant  ensuite  peu  à  peu  vers  nous,  favo- 
rise de  son  côté  et  de  plus  en  plus  la  visibilité  de  cette 
dernière  calotte  neigeuse  très-étendue  d'ailleurs.  On  peut 
s'attendre  à  voir  cette  même  tache  australe  en  1877,  mais 
déjà  notablement  réduite  par  l'elfet  des  rayons  solaires. 

Détail  des  observations  (1). 

Fig.  /.  Le  31  mai  1875,  de  12  h.  25  m.  à  12  h.  55  m. 
Mars  est  très-ondulant;  on  voit  l'Océan  De  La  Rue  [b]  et  la 
Mer  de  Tycho  («).  Celle-ci  est  bien  réduite  comparative- 


(1)  Ces  études  onl  élé  faites  ,  comme  celles  de  18G4,  de  1867,  de  1871 
et  de  1873,  à  l'aide  d'une  lunelle  astronomique  de  Secretan,  ayant  9  cen- 
timètres d'ouverture  utile;  les  grossissements  employés  ont  élé  de  120, 
de  180  et  de  :240  fois  La  planche  qui  accompagne  cette  notice  représente 
l'aspect  de  Mars  tel  qu'il  apparaissait  dans  le  champ  de  la  lunette,  c'est-à- 
dire  que  les  images  sont  renversées  et  que,  conliairement  à  ce  que  j'a 
fait  en  1871  et  en  1875,  je  n'ai  point  placé  verticalement  l'axe  de  rotation 
la  position  rigoureuse  de  ce  dernier  étant  souvent  sujette  à  quelque  doute 
à  cause  de  l'invisibilité  des  taches  polaires.  Le  diamètre  vertical  apparent 
au  moment  de  l'observation  est  donc  placé  veiticalenunt  dans  toutes  les 
ligures.  Il  sera  aisé  d'incliner  un  peu  les  dessins  et  de  retrouver  approxi- 
mativement la  position  de  l'axe  de  rotation  i  our  comparer  ces  observa- 
lions  avec  celles  de  1871  et  de  1875. 


(  Wô  ) 
mciit  aux  oppositions  de  1871  el  de  1875(1).  L'Océan  De 
La  Riio,  au  contraire,  présente  beaucouj)  plus  de  déve- 
loppement, effets  naturels  de  la  position  de  l'axe.  Les 
deux  taches  polaires  sont  certaines;  la  tache  neigeuse  mé- 
ridionale est  étendue  et  très-marciuée;  la  tache  boréale 
apj)araît  par  moments  connue  une  faible  blancheur.  Au 
commencement  des  observations  les  deux  taches  polaires 
ne  se  trouvaient  pas  sur  un  même  diamètre,  mais  à  12  h. 
55  m.  elles  sont  plus  exactement  opposées. 

Fi(j  2.  Le  2  juin,  à  12  h.  25  m.  iMars  est  si  ondulant 
que  l'on  peut  seulement  constater  la  présence  de  l'Océan 
De  La  Hue  (6)  et  sa  forme  générale;  je  ne  vois  pas  les  ta- 
ches polaires. 

J'omettrais  de  citer  cette  observation  si  elle  ne  me  per- 
mettait d'apporter  une  confirmation  à  l'explication  que 
j'ai  donnée  ailleurs  d'une  singulière  anomalie  que  l'on 
rencontre  dans  les  dessins  de  Schroeter.  J'ai  insisté  déjà, 
à  plusieurs  reprises,  sur  la  présence,  dans  les  Areogra- 
phische  fragmente^  d'un  grand  nombre  de  taches  se  termi- 
nant en  pointe  du  côté  du  nord,  et  ne  pouvant  pas  toutes 
s'identifier  avec  la  Mer  de  Kaiser,  qu'elles  imitent  pourtant 
ta  s'y  méprendre  (5).  Ce  fait  semble  étrange  quand  on 


(1)  Bulletins  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  t.  XXXII,  p.  57;  voirid. 
l.  XXXVI,  p  550. 

(-2)  Areograpkisc/ie  fragmente^  manuscrit  et  dessins  originaux  el  iné- 
dits de  raslronome  J.  H.  Schroeier,  de  Lilienihal,  dans  les  Mémoires  cou- 
ronnés et  Mémoires  des  savants  étrangers,  de  TAcadémie  royale  de  Bel- 
gique, t.  XXXVI,  pp.  15  à  18.  —  J'ai  la  salisfaction  d'apprendre  à  l'Aca- 
démie, par  la  même  occasion,  que  M.  Van  d(>  Sande  Bakhuyzen  a  acquis, 
pour  la  bibliothèque  de  l'Observatoire  de  Leyde,  le  précieux  manuscrit  qui 
lait  l'objet  de  ce  mémoire. 

Configuration  des  tâches  de  Mars  à  la  fin  du  XVIII^  siècle,  d'après 


(  o56  ) 
examine  la  carte  de  M.  Procter  et  porterait  même  à  ad- 
mettre des  changements  dans  la  conliguration  des  taches 
de  Mars.  J'ai  émis  l'opinion  que  ces  apparences  offertes 
par  les  dessins  de  Schroeter,  de  W.  Herschel  et  d'autres 
observateurs  devaient  s'expliquer  par  la  présence  des 
Baies  de  Dawes,  de  Béer  et  du  Détroit  de  Dawes,  souvent 
confondus  ensemble,  ou  par  celle  de  l'Océan  De  La  Bue; 
j'ai  même  invoqué,  à  ce  sujet,  le  Détroit  de  Huggins  pour 
une  autre  région.  Or,  le  2  juin,  en  observant  l'Océan  De 
La  Bue,  dont  l'image  était  fort  troublée,  j'ai  cru,  par  mo- 
ments, avoir  sous  les  yeux  la  Mer  de  Kaiser.  La  iig.  2  de 
cette  notice  confirme  d'ailleurs  cette  ressemblance.  Mais, 
dans  les  moments  de  plus  grand  trouble,  la  tache  que  j'ai 
dessinée  paraissait  s'allonger  beaucoup  plus  vers  le  bas  du 
disque  et  une  méprise  était  réellement  possible. 

Le  mauvais  temps  et  la  présence  presque  constante  des 
nuages  à  la  faible  hauteur  de  Mars  empêchent  d'observer 
avant  le  14,  et  font  perdre  l'occasion  d'étudier  le  Détroit 
d'Herschel  II. 

Fig.  5.  Le  iâ  juin,  à  H  h.  15  m.  L'image  est  fort 
troublée;  néanmoins  le  dessin  réussit  bien.  Je  vois  la  Mer 
de  Kaiser  (d)  et  la  Mer  de  Maraldi  (/").  La  nuance  sombre 
de  la  tache  n'est  pas  uniforme,  mais  les  ondulations  de 
l'image  empêchent  de  préciser  ces  détails.  L'aspect  rap- 
pelle tout  à  fait  la  bande  coudée  d'Arago  (I)  et,  par 
moments,  on  attribue  à  la  tache  une  forme  de  croissant. 


Schroeter;  Bullelins  de  r Académie,  2'  série,  t.  XXXYl,  pp.  175,  176,  179 
et  suivanles. 

Aréographie.   Mémoire  cité;  pp.  41,  6-2,  65,  71,  70,  87,  88,  95,  90. 

(1)  Mémoires  scientifiques  de  F.  Arago,  t  2;  Mémoire  sur  Mars, 
p.  293,ag.  12,  15. 


(  •>^7  ) 

Fig.  4.  Le  I i  juin,  de  li  h.  2o  m.  à  II  h.  35  m.  Mars 
est  un  pou  plus  net;  j'aperçois  par  moments  la  dentelure 
m  qui  doit  s'expliquer  par  la  saillie  de  la  Merde  Ilook(l); 
ce  détail  reste  faible.  Avec  le  grossissement  de  180  fois, 
je  suis  frappé  de  trouver  un  aspect  exactement  conforme 
à  celui  que  Schroeter  dessina  le  9  septembre  1798,  à  9  h. 
55  m.  du  soir;  j'ai  reproduit  ce  dessin  de  Lilientbal  dans 
la  fig.  5  de  cette  notice,  car  il  va  nous  conduire  à  une 
conclusion  intéressante;  pour  le  moment,  il  suffit  de  con- 
stater que  la  tache  visible  le  14  juin,  à  11  h.  î25  m.  (en- 
semble des  Mers  de  Hook,  de  Maraldi  et  de  Kaiser)  m'ap- 
paraissait  comme  une  vaste  étendue  grisâtre  assez  pâle,  et 
munie  d'une  pointe  très-noire  qui,  seule,  attirait  immédia- 
tement l'attention;  cette  pointe  occupait  la  région  de  la 
Mer  de  Kaiser  comme  dans  le  dessin  de  Schroeter  (2).  De 
plus,  le  peu  de  développement  apparent  de  la  Mer  de  Kai- 
ser vers  le  nord  rend  compte  de  l'aspect  attribué  par  Ma- 
raldi à  la  tache  qui  lui  servit  à  déterminer  la  durée  de  rota- 
tion en  1704,  et  qui  devait  aussi  être  cette  mer  (3). 

Fig.  5.  Mars  observé  par  Schroeter  le  9  septembre  1198, 
à  9  h.  55  m.  du  soir. 

Fig.  6.  Le  H  juin,  de  /^  h.  à  4^  h.  5  m.  La  Mer  de 
Kaiser,  plus  rapprochée  du  diamètre  vertical  par  le  pro- 
grès de  la  rotation,  apparaît  plus  nettement  que  dans  les 
observations  précédentes,  et  l'ensemble  de  la  tache  visible 
est  encore  gris,  sauf  une  région  très-noire  que  l'on  recon- 


(1)  Aréographie,  mémoire  cité;  p.  9o,  remarques  sur  les  baies  des  Mers 
(le  Hook  et  de  Maraldi. 

(2)  Areographische  fragmente,  mémoire  cité.  p.  12. 

(3)  Mémoires  de  V Académie  des  sciences  de  Paris^  année  1706,  p.  74. 
Observalioiis  de  Mars  faiiesen  1704,  par  Maraldi. 

2'"''  SÉRIE,  TOME  XL.  5G 


(  5o8  ) 

naît  immédiatement  pour  celle  dont  il  a  été  longuement 
question  dans  mon  Aréographie  (1).  La  comparaison  de 
cette  figure  avec  la  figure  4  explique  la  pointe  noire  que 
contient  celle-ci  :  il  devient  évident,  en  effet,  que  cette 
partie  très-sombre,  la  plus  marquée  de  la  tache,  était  seule 
visible  à  11  h.  2o  m.  à  la  faveur  de  la  nuance  plus  pâle 
des  régions  avoisinantes  et  de  leur  plus  grande  proximité 
du  bord.  Lorsque  la  Mer  de  Kaiser  arriva  plus  près  du  cen- 
tre, la  véritable  configuration  de  cette  tache  noire  apparut 
et  son  identité  avec  la  région  sombre  sur  laquelle  M.  Kno- 
bel  a  insisté  en  1875  (2),  et  que  j'ai  étudiée  dans  mon 
mémoire  (3),  devint  indubitable.  La  pointe  noire  observée 
par  Schroeter,  et  qui,  d'abord,  donnait  un  aspect  étrange 
à  la  xMer  de  Kaiser,  était  due  à  la  même  cause,  et  l'astro- 
nome de  Li  lien  thaï  a  observé  le  premier  cette  région  plus 
sombre  dans  une  mer  de  Mars. 

Le  trouble  de  l'image,  en  modifiant  légèrement  l'aspect 
des  taches,  fournit  donc  l'explication  de  beaucoup  de  dé- 
tails singuliers  consignés  dans  les  dessins  notamment  an- 
ciens. J'ajouterai  aussi  que  la  Mer  de  Kaiser,  vue  dans  les 
moments  de  grande  ondulation  de  l'image,  prenait  une 
forme  simplement  triangulaire  bien  caractérisée,  tout  à 
fait  identique  avec  celle  qui  a  été  si  souvent  décrite. 

Pendant  ces  trois  observations  du  14  juin,  je  n'ai  pas  vu 
les  taches  polaires,  bien  que  j'y  portasse  une  extrême  atten- 
tion. 

Fig.  7.  Le  15  juin,  de  il  h.  io  m.  à  H  h.  25  m.  Image 


(1)  Aréographie,  Mémoire  cilé,  p.  54.   Absence  d'uniformité  dans  la 
teinle  sombre  de  la  Mer  de  Kaiser  et  de  l'Océan  de  Davves. 
(-2)  Monlhhj  notices;  t.  XXXIII.  juin  1873. 
(5)  Aréographie,  p  b-i. 


(  559  ) 

très-ondulante.  Je  vois  la  Mer  de  Maraldi  et  la  Mer  de  Kai- 
ser. La  tache  présente  par  moments  la  forme  d'un  crois- 
sant bien  caractérisé;  elle  rappelle  certaines  descriptions 
données  par  Maraldi  (1),  la  bande  crochue  et  le  croissant 
d'Arago  (2). 

Fig.  8.  Le  19  juin ,  de  10  h.  55  m.  à  ii  h.  ^15  m.,  et  à 
H  II  41  m.  L'image  est  extraordinairement  ondulante.  La 
Mer  de  Maraldi  est  très-marquée,  mais  il  est  impossible 
d'en  voiries  détails.  La  bande  se  termine  brusquement  un 
peu  au  delà  du  diamètre  vertical.  Ce  détail  trouvera  plus 
loin  son  explication.  Je  ne  vois  pas  de  taches  polaires. 

Firj.  9.  Le  26  juin,  de  10  h.  55  m.  à  H  h.  10  m.  Tout 
l'horizon  est  vaporeux.  L'image  de  Mars,  vue  à  traversées 
légères  vapeurs,  est  très-nette  et  absolument  exempte 
d'ondulations.  Jamais  la  couleur  rouge  du  disque  ne  m'est 
apparue  aussi  distinctement  (o);  cette  teinte  contraste 
avec  la  blancheur  parfaite  de  la  tache  polaire  australe.  On 
ne  peut  donc,  aujourd'hui,  attribuer  cette  coloration  si 
marquée  à  la  proximité  de  l'horizon.  La  bande  sombre 
(Merde  Maraldi)  est  également  très-nette.  Je  ne  vois  pas 
de  tache  neigeuse  boréale. 


(1)  Mémoires  de  l'Académie  des  sciences  de  Paris;  année  1720  ;  p.  1-14. 

(2)  Mémoires  scientifiques  de  F.  Arago;  l.  2;  pp.  293  à  299. 

(5)  Je  saisis  celte  occasion  pour  répondre  à  une  question  que  M.  le 
général  Liagre  m'a  posée  dans  son  rapport  sur  mes  observations  de  1875. 
Le  savant  secrétaire  perpétuel  de  TAcadémie,  après  avoir  rappelé  que 
M.  Flammarion  avait  trouvé  la  coloration  rouge  de  Mars  moins  intense  que 
d'habitude  en  1875,  disait  qu'il  serait  intéressant  de  savoir  si  j'avais  fait 
une  remarque  analogue.  Je  déclarerai  donc  ici  que  je  n'ai  pas  été  frappé 
par  une  diminution  de  la  coloration  rouge  de  Mars  en  1875,  mais  que,  mon 
attention  n'ayant  pas  été  fixée  expressément  et  avec  intention  sur  ce  point, 
je  ne  puis  ni  confirmer,  ni  infirmer  à  ce  sujet  les  remarques  de  l'astronome 
français. 


(  o60  ) 

Le  ^7  juin,  de  10  h.  25  m.  à  10  h.  55  m.  Mars  esl  un 
peu  ondulant;  néanmoins  bonne  observation.  L'aspect  est 
si  seml)lable  à  celui  du  26  juin  qu'il  est  tout  à  fait  inutile 
d'en  reproduire  le  dessin;  la  bande  sombre /"est  pourtant 
moins  large  et  plus  rapprochée  du  bord  du  disque  (1).  Elle 
limile  encore  la  tache  polaire  australe  qui  est  d'un  blanc 
prononcé.  Le  restant  du  disque  est  d'un  rouge  moins  mar- 
qué que  le  26. 

Fifj.  10.  Le  2  juillet,  de  9  h.  40  m.  à  9  h.  50  m.  Mars 
est  très-ondulant  et  ne  peut  être  observé  qu'à  travers  de 
petites  éclaircies.  On  voit  l'Océan  De  La  Rue  (b)  et  la  Mer 
de  Tycho  (a);  celle-ci  est  très-pàle.  La  tache  polaire  sud 
est  franchement  blanche;  la  tache  neigeuse  inférieure-est 
faible  et  douteuse. 

Ces  détails  sont  certains  malgré  les  circonstances  défa- 
vorables de  l'observation. 

Fig.  il.  Le  3  juillet j  de  10  h.  15  m.  à  10  h.  25  m.  Mars 
est  très-ondulant,  La  division  entre  les  taches  /"  et  6  est 
restée  douteuse.  La  tache  «est  très-faible.  La  tache  polaire 
supérieure  est  blanche  et  certaine,  l'inférieure  douteuse. 

Fig.  12.  Le7  juillet,  de  9  h.  55  m.  à  10 h.  iO  m.  L'image 
est  très-ondulante.  La  tache  polaire  supérieure  est  très- 
blanche.  On  voit  nettement  le  Détroit  d'Herschel  II  (c)  et 
la  Mer  de  Tycho  (a).  La  bande  supérieure  (cb)  a  générale- 
ment une  forme  rectangulaire,  mais,  par  moments,  etgrâce 


(1)  Ce  fait  s'explique  parfaitement  :  l'on  sait,  en  effet,  que  la  Mer  de 
Maraldi  se  rapproche  du  pôle  en  s'étendaiit  vers  l'ouest;  le  :27  juin,  en 
observant  i)lus  lût  que  le  26,  j'avais  sous  les  yeux  une  région  un  peu  plus 
occidentale  de  la  bande  sombre;  celle-ci  devait  donc  paraître  située  un 
[)eu  plus  haut  sur  le  disque  apparent.  On  se  rappelle  que  ce  phénomène  a 
conduit  Schroeter  à  admettre  que  cette  bande  se  déplaçait  réellement  vers 
le  sud.  Voir  Areoyraphische  fragmente  ;  mémoire  cité,  p.  ii. 


(  SCI  ) 
à  un  redoublement  d'altenlion,  on  voit  les  deux  inégalités 
que  j'ai  figurées  à  son   bord   inférieur;  celle  de  droite  (6) 
correspond  à  fOcéan  De  La  Rue,  celle  de  gauche  (c)  aux 
baies  du  Détroit  d'Herschel. 

Fig.  15.  Le  10  juillet,  de  9  h.  W  m.  à  9  h.  30  m.  Un 
vent  violent  s'ajoute  aux  ondulations  de  l'image  pour  ren- 
dre les  conditions  de  l'observation  très-mauvaises.  Néan- 
moins la  présence  et  la  forme  générale  de  la  tache  sont 
certaines;  cette  tache  est  très-faible  et  ressemble  à  la  Mer 
de  Kaiser;  il  serait  aisé  d'être  induit  en  erreur  à  ce  sujet. 
Elle  ne  peut  être  que  le  Détroit  d'Herschel  dont  les  baies 
confondues  (c)  s'avancent  vers  le  nord,  un  peu  à  droite  du 
centre.  Je  ne  vois  pas  de  taches  polaires.  Évidemment 
Schroeter  a  pu  donner  à  cette  région  une  forme  tout  à  fait 
analogue  à  celle  qu'il  attribuait  à  la  Mer  de  Kaiser,  comme 
je  l'ai  déjà  fait  remarquer  (1). 

Fig.  14.  Le  77  juillet,  de  9  h.  5  m.  à  9  h.  15  m.,  éclair- 
cies;  Mars  est  très-ondulant;  néanmoins  très-bonne  obser- 
vation. Les  taches  polaires  sont  incertaines,  la  limite  supé- 
rieure de  l'Océan  de  Davves  est  indécise  ;  toute  la  tache 
est  grise,  à  l'exception  de  la  région  très-noire  signalée  par 
M.  Knobel  en  1873.  La  dentelure  m  est  certaine  et  l'on 
soupçonne  une  strie  brillante  suivante???. 

Fig.  15.  Le  77  juillet,  de  10  h.  75  m.  à  10  h.  âO  m.  Les 
deux  taches  polaires  sont  presque  certaines  à  la  fin  de 
Tobservalion.  Le  grossissement  de  240  fois  confirme 
l'existence  de  la  bifurcation  en  i.  Il  y  a  donc  trace  de  la 
Mer  de  Lambert. 

J'arrive   aux  observations  du  20  juillet,  qui  ont  été 


(1)  Aréographie ,  1.  cil. 


(  o62  ) 

faites  dans  des  conditions  exceptionnellement  favorables 
pour  cette  année  : 

Fig.  16.  Le  20  juillet^  de  8  h.  35  m.  à  8  h,  45  m.  Je 
soupçonne  toujours  un  trait  brillant  suivant  mn;  la  Mer  de 
Kaiser,  sous  forme  d'un  triangle  très-noir  (d),  rappelle 
tout  à  fait  les  dessins  de  M.  Gledhill  pour  1871  (1);  la  ta- 
che polaire  inférieure  est  certaine,  blanche,  brillante.  Je  ne 
vois  pas  de  tache  neigeuse  méridionale. 

Fig.  n.  Le  W  juillet,  de  9  h.  2  m,  à  9  h.  W  m.  La 
netteté  est  parfaite  et  les  détails  se  voient  admirablement 
bien.  Le  trait  brillant  mn  paraît  certain.  La  tache  sombre 
visible  est  munie  de  trois  pointes  se  dirigeant  vers  le  nord; 
ce  sont,  en  allant  de  droite  à  gauche  :  1°  la  Mer  de  Kaiser 
(d),  2°  l'origine  septentrionale  de  la  Mer  de  Hook  [m),  3° 
l'origine  septentrionale  de  la  Mer  de  Maraldi  (/"). 

De  9  h.  lo  m.  à  9  h.  20  m.,  je  commence  à  voir  la  tache 
polaire  méridionale;  elle  apparaît  comme  une  blancheur 
prononcée,  mais  peu  limitée;  elle  reste  visible  ensuite.  La 
tache  polaire  nord  est  toujours  très-marquée  et  déborde 
même  le  disque  par  irradiation. 

Fig.  18.  Le  W  juillet ,  de  10  h.   15  m.  à  W  h.  50  m. 

L'image  devient  ondulante  à  la  fin  de  l'observation.  La 
région  d  est  la  plus  noire;  on  soupçonne  toujours  une  divi- 
sion suivant  m  n;  la  pointe  m  et  la  petite  bande  h  (Détroit 
de  Nasmyth)  sont  certaines.  Je  vois  encore  la  tache  polaire 
sud,  et,  chose  très-curieuse,  on  remarque  deux  amas  blan- 
châtres au  bord  septentrional,  au  lieu  de  la  tache  polaire 
si  visible  pendant  les  deux  observations  précédentes.  Il 
faut  noter  encore  que  la  grande  tache  était  mal  limitée 


(I)  Aréographie,  mémoire  cité;  voir  surtout  fig.  41. 


(  o63  ) 

supérieurement  et  que  toute  la  Mer  de  Kaiser  senil)lail 
très-noire;  la  tache  sombre  partielle  si  remarquable  dans 
la  figure  6  semblait  donc  s'être  étendue  sur  toute  cette 
mer. 

Le  2i  juillet,  j'ai  fait  deux  dessins,  le  premier  de  8  li. 
30  m.  à  8  h.  35  m.,  le  second  de  9  h.  45  m.  à  10  h.  Je  ne 
les  ai  pas  donnés  dans  cette  note,  parce  que  les  images 
étaient  moins  nettes  que  le  20,  et  que  le  vent  troublait 
Tobservalion.  Cependant  ces  deux  dessins  sont  assez  bien 
réussis  et  confirment  tous  les  détails  renfermés  dans  ceux 
du  20  juillet;  le  premier  reproduit  le  dessin  16,  et  le 
second  le  dessin  17,  à  part,  nécessairement,  une  légère 
différence  de  position. 

La  tache  polaire  nord  a  été  visible  au  commencement 
de  la  première  observation  (8  h.  50  m.)  et  est  devenue 
très-douteuse  à  la  fin;  elle  était,  en  tous  cas,  moins  pro- 
noncée que  le  20.  A  9  h.  45  m.,  je  n'ai  plus  réussi  à  la 
voir.  Le  20,  cette  tache  polaire  s'était  comportée  d'une 
façon  tout  à  fait  analogue  :  visible  parfaitement  de  8  h. 
55  m.  à  9  h.  20  m.  et  remplacée  par  deux  taches  blanches 
indistinctes  de  10  h.  15  m.  à  10  h.  50  m. 

Quant  à  la  tache  neigeuse  méridionale,  je  ne  l'ai  pas 
aperçue  le  21  juillet. 

Le  23  juillet,  à  9  h.,  j'ai  fait  un  dessin  très-incomplet 
et  très-imparfait  à  cause  des  nuages  très- fréquents.  Je 
voyais  la  mer  de  Maraldi  et  la  tache  polaire  inférieure. 

Fig.  19.  Le  2â  juillet,  de  8  h.  45  m.  à  9  h.  Mars  ondule 
beaucoup,  surtout  au  commencement  de  l'observation; 
néanmoins  le  dessin  est  très-bon.  Je  ne  vois  pas  de  taches 
polaires;  la  tache  sombre  inférieure  est  très-faible. 

L'aspect  représenté  est  dû  à  la  présence  du  détroit  de 
Huggins  de  M.  Proctor,  et  la  pointe  /"correspond  à  l'ori- 


(  564  ) 

gine  boréale  de  la  mer  de  Maraldi.  Ce  dessin  offre  la  même 
région  que  notre  figure  8\  il  explique  pourquoi  la  bande 
sombre  de  cette  ligure,  comme  celle  de  la  figure  20,  est 
interrompue  avant  d'atteindre  le  bord  oriental  :  cette 
apparence  correspond,  en  effet,  à  Téchancrure  profonde 
découpée  dans  la  bande  sombre  à  l'orient  de  la  mer  de 
Maraldi;  la  bande  est  rétrécie  dans  cette  région  et  il  en 
résulte  que  sa  continuation  est  invisible  près  du  bord 
apparent. 

Fifj.  20.  Le  26  juillet,  de  8  h.  25  m.  à  8  h.  45  m.  Très- 
bonne  image;  les  deux  taches  polaires  sont  d'une  blan- 
cheur prononcée  et  très-étendues.  La  tache  sombre  infé- 
rieure est  très-faible.  La  bande  f  ne  touche  pas  le  bord 
oriental. 

Fiç).  21.  Le  26  juillet,  de  9  h.  30  m.  à  9  h.  40  m. 
L'image  devient  ondulante  à  la  fin  de  l'observation.  Les 
taches  polaires  sont  moins  nettes  qu'à  8  h.  25  m. 

Le  28  juillet,  j'ai  fait  deux  dessins,  l'un  de  8  h.  5  m.  à 
8  h.  15  m.,  l'autre  de  9  h.  5  m.  à  9  h.  lo  m.  On  voyait  la 
mer  de  Maraldi.  A  8  h.  5  m.  les  deux  taches  polaires 
étaient  très-blanches  et  très-prononcées,  aussi  inexacte- 
ment opposées  que  dans  la  fig.  22.  A  9  h.  5  m.  l'image 
était  excessivement  faible  et  les  taches  polaires  n'appa- 
raissaient plus  que  comme  de  faibles  lueurs,  douteuses  par 
moments. 

Fig.  22.  Le  29  juillet,  de  8  h.  10  m.  à  8  h.  15  w., 
très-bonne  observation.  Les  deux  taches  polaires  sont 
très- blanches. 

En  étudiant  les  observations  qui  précèdent,  on  constate 
qu'elles  renferment  des  exemples  remarquables  de  la 
variabilité  d'éclat  et  d'étendue  des  taches  neigeuses.  Cette 
variabilité  est  souvent  apparente  seulement,  et  correspond 


(  565  ) 
à  diverses  positions  do  la  planète  par  l'effet  de  la  rotation; 
en  effet,  les  variations  (l'éclat  on  d'étendue  se  reproduisent 
souvent  périodiquement  et  dans  le  même  ordre.  C'est 
ainsi  que,  dans  les  dernières  observations  dont  il  a  été 
question,  on  voit  les  deux  taches  polaires,  très-nettes  au 
commencement  de  la  soirée,  devenir  presque  invisibles 
plus  tard.  Il  y  a  là  évidemment  un  effet  de  la  rotation. 

Les  changements  de  position  de  l'une  des  deux  taches 
polaires  par  rapport  à  un  diamètre  passant  par  le  milieu 
de  l'autre  ont  également  démontré  que  les  centres  de  ces 
amas  ne  coïncidaient  pas  avec  les  pôles  de  rotation,  et  que 
l'extension  des  neiges  à  partir  de  ces  pôles  était  très- 
variable  suivant  les  diverses  directions. 

Je  terminerai  en  émettant  le  vœu  que  les  observatoires 
méridionaux  nous  fournissent  cette  année  de  nombreux 
dessins,  afin  d'aider  à  combler  la  lacune  qui  résultera 
nécessairement  de  la  position  défavorable  de  la  planète 
pour  les  observateurs  de  nos  contrées. 

II.  —  Premier  appendice  au  catalogue  général 

DES    observations    PHYSIQUES    DE    MaRS  (1). 

Depuis  la  publication  de  V Aréog rapine ,  j'ai  pu  prendre 
connaissance  d'un  certain  nombre  de  dessins  de  Mars  qui 
m'étaient  inconnus  lorsque  j'achevai  ce  travail.  Je  crois 
nécessaire  de  les  mentionner  dans  cet  appendice,  tant 
pour  appeler  sur  eux  l'attention  dès  aujourd'hui  que  pour 
témoigner  ma  reconnaissance  aux  astronomes  qui  veulent 
bien  m'aider  dans  ces  recherches.  Les  lignes  qui  suivent 


(1)  Voir  Aréographie  ^  mém.  cité,  p.  6. 


(  m  ) 

sont  donc  un  complément  du  catalogue  que  j'ai  donné  en 
léte  de  V Aréographie ^  et  renferment  des  détails  sur  les 
circonstances  les  plus  importantes  que  présentent  ces 
dessins. 

Grâce  à  l'obligeance  de  M.  Fraissinet,  secrétaire  de 
l'Observatoire  de  Paris,  j'ai  pu  examiner,  dans  cet  établis- 
sement, trois  ouvrages  relatifs  à  la  planète  Mars,  et  qu'il 
m'avait  été  impossible  de  découvrir  jusqu'ici  : 

Salvator  Serra;  1666;  Martis  revolubilis  observationes 
romanae  ab  affictis  erroribiis  vindicalae. 

Salvator  Serra;  1666;  second  ouvrage  portant  le 
même  titre;  celui-ci  est  accompagné  du  dessin  qui  a  été 
reproduit  dans  les  Transactions  philosophiques  avec  ceux 
de  Cassini  et  de  Campani  :  cette  figure  est  désignée,  dans 
les  Transactions,  par  la  lettre  0,  et  donnée  comme  ayant 
été  obtenue  par  des  astronomes  romains  se  servant  de 
verres  de  Divini.  L'un  de  ces  astronomes  romains  n'était 
autre  que  Salvator  Serra  (i). 

Cassini  ;  Martis  circa  axem  proprium  revolubilis  obser- 
vationes  Bononiae  a  D.  Cassino  habitae.  —  Cet  ouvrage 
contient  deux  plancbes  dans  lesquelles  j'ai  trouvé,  outre 
les  dessins  K ,  L ,  M  ,  N  ,  0  et  P  des  Transactions  philoso- 
phiques (2),  vingt-deux  dessins  de  Cassini  qui  m'étaient 
complètement  inconnus. 

W.  Norle;  1858, 1860, 1862, 1864, 1866,  1869, 1871. 
—  Le  capitaine  Noble  a  eu  la  complaisance  de  m'envoyer 
une  série  de  beaux  dessins  dressés  à  son  observatoire  de 
Forest-Lodge  avec  une  lunette  de  4,2  pouces  d'ouverture 
et  de  61  pouces  de  longueur  focale.  11  y  a  quatre  dessins 


(1)  Phil.  Iransact.  for  1666  and  1666,  p.  242. 

(2)  Phil.  trans.,  I.  cit. 


(  S67  ) 
pour  1858,  un  pour  18G0,  trois  pour  186:2 ,  deux  exécutés 
en  1864,  deux  en  1866,  un  en  1869  et  deux  en  1871. 
Les  dessins  de  1858  et  de  1860  sont  d'autant  plus  impor- 
tants que,  jusqu'ici,  Ton  ne  peut  mentionner  que  très-peu 
d'observations  pour  ces  deux  époques.  Je  me  contenterai, 
pour  le  moment,  de  dire  que  le  capitaine  Noble  a  dessiné 
les  principales  taches  de  Mars.  J'aurai  l'occasion,  plus  tard, 
de  mieux  faire  ressortir  les  détails  intéressants  que  con- 
tiennent ces  observations. 

Trouvelot;  1875.  —  M.  A.  Searle,  chargé  de  la  direc- 
tion de  l'Observatoire  de  Harvard-Collège  (Cambridge, 
E.  U.),  depuis  le  regrettable  décès  de  M.  Winlock,  m'a 
l'ait  parvenir  quatre  superbes  dessins  exécutés  en  1875, 
dans  cet  établissement,  par  M.  Trouvelot.  Cet  astronome  a 
employé  le  grand  réfracteur  de  15  pouces  d'ouverture  du 
collège  Harvard  et  a  obtenu  de  magnifiques  résultats.  Les 
dessins,  de  75  millimètres  de  diamètre,  et  teintés  légère- 
ment de  rouge,  se  rapportent  aux  25,  24,  26  et  29  mai, 
pendant  la  soirée.  Ils  sont  extraits  d'une  série  de  planches 
astronomiques  publiées  par  l'Observatoire  Harvard.  Je 
crois  utile  de  signaler  ici  les  importants  détails  qu'ils  ren- 
ferment, en  répartissant  ces  données  suivant  les  diverses 
régions  de  la  planète  que  j'ai  considérées  dans  VÀréogra- 
phie,  et  en  me  bornant  aux  faits  qui  peuvent  aider  à  la 
solution  des  questions  posées  dans  cet  ouvrage. 

I.  —  Mer  de  Kaiser  et  Océan  de  Dawes. 

(Dessins  du  26  et  du  29  mai.) 

Le  bord  oriental  de  la  grande  tache  de  Mars  est  garni 
d'une  zone  blanche  dans  ces  deux  dessins  de  M.  Trouvelot; 
dans  celui  du  26  mai,  ce  bord  est  dentelé  et  l'on  peut, 


(  568  ) 
sous  ce  rapport,  établir  une  analogie  entre  robservatioii 
de  Harvard-Collège  et  celles  de  M.  Lassell  (I).  -Les  deux 
dessins  de  Cambridge  contiennent  le  Détroit  de  Nasmyth, 
mais  il  est  muni  des  expansions  dirigées  vers  le  sud  que 
j*ai  signalées  dans  d'autres  figures  dues  notamment  à 
MM.  De  La  Rue,  Secchi,  Joynson  et  Green  (2).  Ces  expan- 
sions, qui  ne  figurent  pas  dans  la  carte  de  M.  Proctor, 
méritent  d'être  recherchées  et  étudiées  avec  précision. 
Dans  les  deux  dessins,  le  Détroit  de  Nasmyth  est  bordé  de 
blanc  du  côté  septentrional. 

II.  —   Détroit  d'Herschel  II. 

Cette  région  figure  dans  les  quatre  dessins  de  M.  Trou- 
velot.  Le  bord  septentrional  du  Détroit  d'Herschel  II  est 
garni,  notamment  dans  les  figures  du  25  et  du  24  mai,  de 
deux  dentelures  excessivement  marquées.  Leur  situation 
relativement  à  la  Merde  Tyclio  ne  permet  d'en  identifier 
aucune  avec  la  partie  la  plus  méridionale  du  Détroit  de 
Dawes,  et  l'on  doit  donc  y  voir  la  Baie  de  Béer  et  la  Baie 
de  Dawes  non  dédoublée;  ces  deux  dentelures  sont  bordées 
de  blanc  du  côté  occidental  le  24,  détail  qui  n'est  pas 
figuré  le  25  mai.  On  trouve  des  taches  blanches  analogues 
le  26  mai;  et  le  29  il  règne  une  zone  blanche  le  long  du 
Détroit  d'Herschel,  du  côté  septentrional;  mais  ce  détroit 
présente  de  plus,  dans  ces  derniers  dessins  (26  et  29  mai), 
une  dentelure  située  si  près  de  la  Mer  de  Kaiser  qu'on 
peut  difTicilement  l'identifier  avec  la  Baie  de  Dawes.  Cette 
circonstance  vient  donc  étayer  l'existence  d'une  baie  peu 


(1)  Aréographie,  mém.  cit.,  p.  56. 

(2)  Idem,  pp.  48  et  49. 


(  569  ) 
connue  que  j'ai   appelée    Ikiie   de   J.   Sdwndl,    et   qui 
figure   notamment  dans   certains  dessins  du  P.   Secchi 
pour  1858  (i). 

J'ai  rattaché  à  cette  région  le  Continent  de  Dawes.  Dans 
Je  dessin  du  29  mai  de  M.  Trouvelot,  on  voit,  dans  ce  con- 
tinent, une  tache  sombre  isolée;  elle  ne  figure  pas  sur  la 
carte  de  M.  Proclor;  elle  apparaît  aussi,  quoique  dans  une 
situation  légèrement  dilTérenie,  par  suite  de  la  difficulté 
de  l'observation  sans  doute,  dans  un  dessin  de  M.  J.Schmidt 
qui  a  servi  de  modèle  à  la  ligure  17  de  V Aréograpliie 
(i6  mai  i873),  et  qui  présente  la  ressemblance  la  plus 
frappante  avec  celui  de  M.  Trouvelot,  comme  M.  Searle 
me  l'a  fait  remarquer  dans  une  de  ses  lettres. 

L'étude  de  cette  tache  isolée,  comparable  à  celles  que 
l'on  trouve  vers  les  mêmes  parages  dans  les  dessins  de 
M.  von  Franzenau,  de  Mâdler,  du  capitaine  Jacob  et  que 
j'ai  signalées  dans  V Aréographic  (2),  est  donc  recomman- 
dable  à  tous  les  astronomes  qui  disposent  d'instruments 
puissants,  et  désirent  contribuer  à  compléter  la  carte  de 
Mars  :  sans  aucun  doute,  une  mer  nouvelle  est  à  découvrir 
dans  celte  région. 

M.  Trouvelot  n'a  pas  représenté  l'Océan  De  La  Rue  ni 
la  Mer  de  Maraldi.  Je  passe  donc  à  la  cinquième  région. 

V.  —  Mers  de  Tycho  et  de  Delambre. 

Les  dessins  de  M.  Trouvelot  deviennent  ici  d'une 
extrême  importance  :  ils  prouvent  encore  une  fois  que  si 
l'on  peut  apporter  à  la  carte  de  Mars  des  perfectionne- 


(1)  Aréographie,  p.  74. 
(H)  Idem,  pp.  75  et  76. 


(  570  ) 
ments  notables,  c'est  assurément  dans  la  représentation 
de  ces  mers. 

Dans  le  dessin  du  25  mai ,  la  Mer  de  Tycho  affecte  la 
forme  que  j'avais  déduite  aussi  de  mes  propres  observa- 
tions (1):  c'est  un  anneau  sombre  incomplet  entourant  un 
continent  qui,  pour  M.  Trouvelot,  est  d'une  blancheur 
évidente  (2).  La  Mer  de  ïycho  semble  se  recourber  ensuite 
vers  le  sud  et  rejoindre  le  Détroit  d'Herschel,  mais  en  lon- 
geant de  trop  près  le  bord  oriental;  c'est  une  forme  ser- 
pentante ou  ondulée  bien  caractérisée.  On  ne  remarque 
aucune  espèce  de  division  dans  cette  vaste  tache.  Ajoutons 
qu'un  espace  blanc  très-marqué,  ressortant  sur  le  fond 
rougeâtre,  figure  aussi  au  sud  de  la  tache  Tycho,  sur  les 
confins  des  Continents  de  Dawes  et  de  Màdler.  Dans  le 
dessin  du  24  mai,  la  Mer  de  Tycho  est  plus  près  du  bord; 
sa  limite  orientale  est  très-irrégulière;  on  voit  parfaitement 
les  deux  bandes  sombres  qui  s'en  détachent  à  l'occident  et 
se  dirigent  vers  la  Mer  de  Kaiser;  j'ai  longuement  parlé  de 
celles-ci  dans  VAréographie  à  propos  des  dessins  de 
MM.  Jacob,  Knobel ,  etc.  (5). 


(1)  Bull,  de  l'Acad.  roij.  de  Belgique,  2^  série,  t.  XXXVI.  p.  536; 
fig.  20,  21,  2*et  25.  Je  me  permeltrai  d'appeler  spécialement  ratlention 
sur  l'observation  faite  à  Louvain,  le  12  mai  1873,  de  8  h.  20  m.  à  8h 
30  m.,  et  sur  l'accord  irréprochable  qu'elle  présente  avec  le  dessin  du 
23  mai  de  M.  Trouvelol.  Gel  accord  se  manifeste  spécialement  pour  la  mer 
de  Tycho  et  pour  les  deux  baies  que  j'ai  figurées  en  c,  et  qui  ont  élé  vues 
ideniiquement  par  l'observateur  de  Cambridge.  On  ne  s'attendrait  pas  à 
trouver  une  identité  si  grande  entre  des  dessins  exécutés  à  l'aide  de 
deux  instruments  dont  les  dimensions  offrent  des  différences  aussi 
colossales. 

(2)  MM.  Knobel  et  Green  ont  observé  aussi  ct  tle  blancheur  vers   la 
même  épocjue. 

(3)  Aréugraphic,  pp.  100  et  suiv. 


(  S71   ) 

VI.  —  Mer  de  Béer. 

Dans  les  dessins  du  26  et  du  29  mai,  la  Mer  de  Béer  est 
séparée  du  Détroit  de  Nasmyth  par  une  strie  blanche, 
comme  je  l'ai  fait  remarquer  plus  haut. 

Dans  les  dessins  du  Collège  Harvard,  le  bord  de  la  pla- 
nète est  blanc  et,  le  24  mai,  la  tache  polaire  boréale  a  une 
forme  très-irrégulière. 

Ces  beaux  résultats  obtenus  par  M.ïrouvelot,  à  l'aide 
du  grand  équatorial  de  Cambridge ,  montrent  quel  parti 
l'on  pourrait  tirer  des  instruments  gigantesques  dont  dis- 
posent certains  observatoires,  si  l'on  voulait  les  employer 
d'une  manière  suivie  à  dessiner  les  apparences  de  cette 
belle  planète. 

Backhouse;  1867,  1869,  1871,  1875.  —  Je  venais  de 
terminer  cette  notice  lorsque  je  reçus,  de  M.  T.-W.  Back- 
house, six  dessins  de  Mars,  exécutés  à  Sunderland,  à  l'aide 
d'une  lunette  de  4  1/4  pouces  d'ouverture  et  de  5  pieds 
de  distance  focale.  Deux  observations  ont  été  faites  en 
1867,  deux  en  1869,  une  en  187J  et  une  en  1873.  Je  suis 
heureux  de  constater  que  ces  dessins  présentent  la  res- 
semblance la  plus  frappante  avec  ceux  que  j'ai  obtenus  à 
Louvain.  Ces  figures  dues  à  M.  Backhouse  contiennent 
toutes  la  Mer  de  Tycho,  et  confirment  ce  que  j'ai  dit  anté- 
rieurement de  cette  partie  de  la  surface.  Dans  le  dessin  du 
22  mars  1871,  à  9  h.  55  m.  (t.  m.  de  Greenwich) ,  cette 
mer  se  recourbe  vers  l'Orient  et  l'on  retrouve  une  forme 
très-analogue  à  celle  qu'ont  fournie  spécialement  les 
observations  de  1875.  La  même  tendance  se  manifeste 
déjà,  pour  M.  Backhouse,  en  1867  et  en  1869. 


(d72) 


Sur  l'aspect  de  l'ombre  du  2'  satellile  de  Jupiter  le  25  mars 
1874;  par  M.  F.  Terby,  docteur  en  sciences,  à  Lou- 
vain. 

Une  circonstance  singulière  qui  s'est  produite  le  23  mars 
1874,  pendant  le  passage  des  satellites  II  et  ÎII  de  Jupiter 
sur  le  disque  de  cette  planète,  me  force  à  ajouter  un  com- 
plément à  l'une  des  notes  que  j'ai  eu  l'honneur  de  présenter 
à  l'Académie  et  qui  ont  été  insérées  dans  ses  Bulletins  (1). 

Après  avoir  exposé  brièvement,  dans  ce  travail,  les  ré- 
sultats de  mes  observations  de  Jupiter  faites  en  1874,  j'ai 
donné  quelques  détails  sur  ce  passage  des  deux  satellites: 
l'un  des  faits  principaux  sur  lesquels  je  voulais  insister 
était  la  différence  notable,  frappante,  de  nuance  offerte  par 
les  ombres  de  ces  petits  corps  célestes,  celle  du  2"  m'ayant 
paru  grise,  et  celle  du  o^  complètement  noire.  Ces  deux 
ombres  se  projetaient  sur  le  disque  à  une  très-petite  dis- 
tance apparente  l'une  de  l'autre,  circonstance  qui  rendait 
leur  comparaison  plus  facile  et  plus  instructive.  La  même 
différence  a  été  constatée,  comme  je  le  disais,  par  M.  Flam- 
marion, qui  observait  le  même  soir  à  Paris  (2). 

La  lecture  de  ma  notice  pourrait  faire  supposer  que 
M.  Knobel,  qui  a  observé  aussi  le  phénomène  à  Burton-on- 
Trent,  avait  remarqué  la  différence  de  nuance  des  deux 
ombres.  Je  le  croyais  d'ailleurs  à  cette  époque,  et  c'est  le 
préjugé  que  je  veux  détruire  par  la  présente  note,  en  in- 
sistant sur  la  singularité  de  ce  fait. 


(1)  Bull,  de  VAcad.  roy.  de  Belgique,  2'  sér.,  t.  XXXVIII,  n"  1 1. 

(2)  Comptes  rendus  de  rinstitut,  1874. 


(  375  ) 

Le  Rév.  M.  Webb  voulut  bien  m'écrire  le  premier  qu'il 
avait  étudié  les  mêmes  passages  à  Hardwick ,  par  un  ciel 
des  plus  favorables,  et  qu'il  n'avait  pas  remarqué  la  teinte 
grise  de  l'ombre  du  2'  satellite.  Les  deux  ombres  lui  ont 
semblé  parfaitement  noires  :  «  both  were  perfectiy  black 
j>  and  round,  »  écrit-il  dans  son  journal. 

Étonné  de  ce  fait,  je  relus  la  note  de  M.  Knobel,  et,  n'y 
trouvant  en  réalité  aucun  renseignement  explicite  sur  la 
nuance  des  deux  ombres,  j'écrivis  à  cet  astronome  pour  lui 
demander  quelles  avaient  été  ses  impressions  à  ce  sujet. 
M.  Knobel  me  répondit  que  l'ombre  du  2'  satellite  lui  avait 
paru  noire  et  non  pas  grise.  Cet  observateur  appelle  mon 
attention  sur  les  remarques  que  MM.  Birmingham  etBuff- 
ham  ont  faites  pendant  le  même  phénomène.  D'après 
M.  Birmingham,  l'ombre  du  2^  satellite  était  brune  et 
faible,  et  celle  du  5'  très-noire.  D'après  M.  Buffham, 
l'ombre  du  2'  satellite  fut  légèrement  grise  pendant  le 
sixième  de  son  passage  (1). 

Le  désaccord  entre  ces  renseignements  est  d'autant  plus 
remarquable  et  d'autant  plus  évident  qu'il  s'agissait  ici  de 
comparer  deux  ombres  voisines  sur  le  disque  de  Jupiter, 
et  non  d'apprécier  la  nuance  d'une  ombre  isolée.  Dans  ce 
dernier  cas,  on  ne  pourrait  attacher  la  même  importance 
à  ces  remarques,  chaque  observateur  ayant  pu  baser  son 
appréciation  relative  sur  des  données  différentes;  dans  le 
cas  présent,  au  contraire,  tous  ont  dû  se  baser  sur  l'aspect 
que  leur  a  invariablement  présenté  l'ombre  du  3^  satellite. 

Il  serait  difficile,  croyons-nous,  d'assigner  à  cette  ano- 


(1)  V.  Astronomical  regisler^  may  1874,  et  English  mechanic,  apiil 
1874. 

2"""'  SÉRIE,  TOME  XL.  57 


(  374  ) 
malie  sa  cause  véritable.  Pour  tenir  compte  de  la  part  qui 
revient  à  la  puissance  des  instruments  employés,  j'indi- 
querai ici  que  M.  Flammarion  s'est  servi  d'un  télescope  à 
miroir  argenté,  ayant  7  pouces  anglais,  87  d'ouverture  et 
armé  d'un  grossissement  de  500  l'ois.  M.  Webh  employait 
un  télescope  de  9  pouces  et  des  grossissements  de  212, 
de  27o  et  de  5o7  fois.  Quant  à  M.  Knobel ,  il  se  sert  d'un 
miioir  argenté  de  8  7-2  pouces,  dont  les  grossissements 
varient  entre  144  et  306  fois.  M.  Buffham  possède  un  ex- 
cellent télescope  à  miroir  argenté  de  9  pouces,  qui  lui  a 
permis  de  voir  des  tacbes  blanches  sur  la  planète  Uranus 
et  de  tenter  la  détermination  de  sa  durée  de  rotation.  Je 
ne  possède  pas  de  renseignements  sur  l'instrument  qu'a 
employé  M.  Birmingham.  On  sait  que  la  lunette  astrono- 
mique dont  je  me  suis  servi  ne  présente  que  5  '/^  pouces 
d'ouverture  et  était  armée  d'un  grossissement  de  180  fois. 

Donc  l'ombre  du  2*^  satellite  a  paru  grise  aux  observa- 
teurs qui  se  sont  servis  des  instruments  les  moins  puissants 
(M.  Flammarion  et  moi);  notons  pourtant  que  iM.  Buffham 
lui  attribue  la  même  teinte,  mais  pour  une  partie  minime 
seulement  de  son  passage. 

Il  faut  considérer  qu'à  Louvain  l'état  du  ciel  n'était  pas 
des  plus  favorables,  puisque  des  nuages  sont  venus  inter- 
rompre les  observations;  M.  Flammarion  nous  apprend 
qu'il  a  joui  d'une  bonne  atmosphère;  quant  à  MM.  Webb 
et  Knobel,  ils  ont  observé  dans  des  conditions  très-favo- 
rables. 

Mais,  en  supposant  que  ces  deux  circonstances,  force 
des  instruments  et  état  de  l'atmosphère,  aient  ici  leur  in- 
fluence, n'est-on  pas  en  droit  de  se  demander  pourquoi 
celle-ci  s'est  exercée  seulement,  ou  à  un  plus  haut  degré, 
sur  l'ombre  du  2''  satellite ,  et  non  sur  celle  du  5%  qui  lui 


(  m^  ) 

était  contiguë?  Il  y  aurait  aussi  à  tenir  compte  de  la  nuance 
affectant  la  partie  du  disque  planétaire  sur  laquelle  se  pro- 
jetait l'ombre;  mais,  sous  ce  rapport,  tous  les  observateurs 
se  trouvaient  en  réalité  dans  les  mêmes  conditions. 

On  se  demande  encore  si  la  petite  tache  ne  peut  va- 
rier réellement  d'intensité  pendant  la  durée  d'un  passage. 
Quoique  digne  d'attention,  cette  dernière  hypothèse  serait 
déplacée  en  présence  des  faits  relatés  dans  cette  note ,  puis- 
que, parmi  les  observations  citées  comme  contradictoires, 
il  en  est  plusieurs  qui  ont  eu  lieu  simultanément  (1). 

Il  est  utile  de  mentionner  ici  dt^ux  remarques  que  j'ai 
faites  à  Louvain,  en  1875,  et  que  j'extrais  de  mes  notes 
sur  Jupiter  pendant  l'opposition  de  la  présente  année  : 

Le  27  avril  1875,  à  9^0""  [t.  m.  de  Louvain),  j'ai  aperçu 
Tombre  du  2*^  satellite  qui  effectuait  son  passage;  elle  était 
petite  et  faible,  généralement  assez  pâle  et  grisâtre,  mais, 
dans  les  moments  de  grande  visibilité,  elle  paraissait  noire. 
Dans  un  remarquable  travail  sur  les  ombres  des  satellites 
de  Jupiter,  M.  Burton  relate  une  observation  analogue  : 
«  Le  5  octobre  1870,  l'ombre  du  2"  satellite  acquérait 
»  son  maximum  d'obscurité  quand  l'image  était  très- 
»  nette  (2).  » 

Le  29  mai  1875,  de  9'^15'"  à  9^25°^,  j'ai  observé  l'ombre 


(1)  Voici,  en  temps  moyen  de  Greenwich,  les  heures  données  par  les 
divers  observateurs  : 

Webb.     .     .  .  g^oO-a  à  \Q^^2^. 

Knobel    .    .  .  8h50'»i  el  10^. 

Flammarion.  .  8^56™  à  10''23". 

Terby.     .     .  .  8^57"!  à     9^12™  et  9''o7™  à  lOfalT"". 

(-2)  Monlhly  notices,  vol.  XXXV,  décembre  1874,  p.  66.  «  The  shadow 
»  of  II  on  the  pianet  was  blackest  when  the  défi nil ion  ^vas  mosl 
»  sieady.  » 


(  S76  ) 
(lu  2*^  satellite  sur  la  planète  :  grisâtre  d'abord,  elle  devint 
plus  noire  à  la  fin  de  l'observation. 

Pendant  ces  deux  passages  de  1875,  l'ombre  du  2^  sa- 
tellite suivait  une  bande  sombre  qui  servait  de  bordure  à 
la  calotte  polaire  septentrionale. 

Je  me  contenterai  de  soumettre  ces  faits  à  l'attention 
des  observateurs;  ils  m'ont  paru  dignes  de  remarque; 
mais  je  ne  chercherai  pas,  pour  le  moment,  à  les  expli- 
quer d'une  manière  plus  précise. 

Pour  compléter  l'histoire  des  passages  du  25  mars  1875, 
j'ajouterai,  en  terminant,  que  le  diamètre  de  l'ombre  du 
2''  satellite  a  paru  à  M.  Webb  plus  petit  que  la  moitié  de 
celui  de  l'ombre  voisine ,  et  que  cet  astronome  a  reconnu 
facilement  le  3"^  satellite  dans  le  point  noir  f  de  mon 
dessin  (1). 


—  La  classe  se  constitue  ensuite  en  comité  secret  pour 
s'occuper  de  la  discussion  des  titres  des  candidats  présentés 
aux  places  vacantes,  et  pour  la  présentation  de  candida- 
tures supplémentaires,  s'il  y  a  lieu. 

—  Elle  s'est  également  occupée  des  préparatifs  de  la 
séance  publique  annuelle  qui  aura  lieu,  comme  les  années 
antérieures,  le  16  décembre  prochain. 


(1)  Depuis  la  présentation  de  cette  note,  M.  N.-E.  Green  a  bien  voulu 
me  transmettre  Tobservalion  qu'il  a  faite  le  25  mars  1874,  à  10*^  SO"», 
t.  m.  de  Greenwich,  à  Paide  d'un  réflecteur  de  9  pouces  et  d'un  grossisse- 
ment de  ISO  fois.  L'ombre  du  '2"  satellite  y  est  moins  sombre  que  celle 
du  3«,  et  le  3*^  satellite  lui-même  a  paru  presque  aussi  noir  que  l'ombre 
du  :2<^.  Mon  point  /'était  bien  le  S*" satellite,  d'après  M.  Green. 


(  577  ) 


CLASSE   DES   LETTRES 


Séance  du  8  novembre  1875. 

M.  le  baron  Guillaume,  directeur. 
iM.  Ll\gre,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.  Grandgagnage ,  J.  Roulez,  Paul 
Devaux,  P.  De  Decker,  J.-J.  Haus,  M.-N.-J.  Leclercq, 
Ch.  Faider,  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove,  R  Chalon, 
Thonissen,Th.  Juste,  Alph.  Wauters,  E.  de  Laveleye, 
G.  Nypels,  Alph.  Leroy,  Ém.  de  Borchgrave,  A.  Wagener, 
membres;  J.  Noletde  Brauwere  Van  Steeland,  Aug.  Sche- 
1er,  Alph.  Rivier,  associés;  Edm.  Poullet,  J.  Heremans, 
Stan.  Bormans,  Gh.  Piot,  correspotidanls. 

M.  Stas,  membre,  et  M.  Éd.  Mailly,  correspondant  de  la 
classe  des  sciences,  assistent  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  demande  l'avis  de  l'Acadé- 
mie sur  le  vœu  qui  lui  a  été  exprimé  par  le  dernier  jury  du 
concours  triennal  de  littérature  dramatique  en  langue  fran- 
çaise que  le  gouvernement  examine  la  question  de  savoir 
s'il  y  a  lieu  de  «  subordonner  encore  la  victoire  à  la  corn- 


(378  ) 
position  d'un  sujet  national,  condition  qui  pour  le  genre 
de  la  comédie  contemporaine ,  par  exemple,  est  difficile  à 
observer.  Seulement  à  mérite  égal  la  palme  serait  naturel- 
lement décernée  à  la  pièce  dont  le  motif  appartiendrait  en 
propre  au  pays.  » 

La  classe  décide  l'inscription  de  cette  question  à  Tordre 
du  jour  de  la  prochaine  séance. 

—  M.  le  Ministre  de  l'intérieur  fait  connaître  que  la  cin- 
quième période  du  concours  triennal  de  littérature  en  lan- 
gue dramatique  française  sera  close  le  51  décembre  pro- 
chain. II  demande  que  la  classe  veuillebien  lui  faire  parvenir, 
en  temps  utile,  la  liste  double  de  présentation  pour  la  com- 
position du  jury  chargé  de  juger  cette  période. 

La  classe  s'occupera  de  la  formation  de  cette  liste  en 
même  temps  que  de  celle  des  jurys  quinquennaux  d'histoire 
nationale  et  des  sciences  morales  et  politiques  inscrites  à 
l'ordre  du  jour  de  la  séance. 

—  Le  même  haut  fonctionnaire  précité  fait  parvenir, 
pour  la  bibliothèque  de  l'Académie,  un  exemplaire  du  Car- 
tulaire  de  la  commune  de  Couvin  ,  recueilli  et  annoté  par 
M.Stanislas  Bormans,  1  vol.  in-S". 

M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove  présente  à  titre 
d'hommage  de  la  part  de  M.  Gachard,  le  tome  I"  de  l'ou- 
vrage publié  parce  dernier  dans  la  collection  des  chroni- 
ques de  la  Commission  royale  d'histoire,  sous  le  titre  de  : 
La  Bibliothèque  nationale  à  Paris  :  Notices  et  extraits  des 
manuscrits  qui  concernent  l'histoire  de  Belgique ,  tome  I", 
vol.  in-4% 

M.  G.  Nypels  offre  la  7'  livraison  de  l'ouvrage  qu'il  pu- 
blie sous  le  titre  de  :  Le  Code  pénal  belge  interprété.  In-8". 


(  579  ) 

M.  Rivier  fait  hommage  d'un  exemplaire  de  son  discours 
[H'ononcé  le  il  oclobre  J875  à  l'université  de  Bruxelles 
sous  le  litre  de  :  Une  nouvelle  histoire  du  droit;  br.  in-8". 

M.  J.  Heremans  présente  une  nouvelle  livraison  de  l'ou- 
vrage qu'il  publie  sous  le  titre  de  :  Werkcn  Van  Zuster 
Hadewijcfi,  ï,  gedichten  2*'"  stuk.  ln-8°. 

M.  Slan.  Bormans  adresse  la  i""^  livraison  de  son  livre 
intitulé  :  Les  fiefs  du  comté  de  Namur  (XII P  et  XIV'^  siè- 
cles). In-8°. 

M.  Garcin  de  Tassy,  de  la  Bibliothèque  nationale ,  à 
Paris,  envoie  un  exemplaire  de  sa  revue  :  La  langue  et  la 
littérature  hindoustanies.  In-8". 

M.  Eug.  Bernimolin,  avocat  à  Liège,  envoie  un  exem- 
plaire de  son  travail  intitulé  :  L'école  populaire  et  le  ratio- 
nalisme contemporain.  In-8°. 

La  classe  vote  des  remercîraents  aux  auteurs  de  ces 
dons. 


RAPPORTS. 

Antiquités  de  l'époque  romaine  découvertes  à  Assche  ; 
par  M.  L.  Galesloot. 

Rapport  de  n.  Alph.    IWautcwa, 

a  Le  travail  ci-joint  de  M.  Galesloot  complète  les  com- 
munications intéressantes  qu'il  nous  a  adressées  à  plu- 
sieurs reprises  sur  des  découvertes  d'antiquités  romaines 
effectuées  aux  environs  de  Bruxelles.  Sa  note  contient  en 
particulier  de  curieux  détails  sur  le  résultat  des  explora- 


(  380  ) 
lions  poursuivies,  avec  une  constance  très-louable,  par 
M.  Cricx,  à  Assche.  Elle  mentionne,  notammant,  de  petites 
figurines  en  terre,  représentant  des  chevaux;  de  nombreux 
débris  de  vases,  où  M.  Cricx  a  lu  des  noms  de  potiers  encore 
inconnus;  un  petit  Mercure  en  bronze,  et  enfin,  une 
statuette  en  argent,  que  M.  Galesloot  dit  être  d'un  travail 
exquis.  Ces  découvertes,  ainsi  que  la  mise  à  jour  de  ves- 
tiges de  chemins  empierrés,  établissent  à  Tévidence  que 
le  bourg  d'Assche  était  important  pendant  la  domination 
romaine. 

M.  Galesloot,  en  terminant,  tait  connaître  une  inscrip- 
tion romaine,  restée  jusqu'ici  inédite  et  que  possédait  le 
président  Roose.  Le  hasard  a  lait  tomber  entre  mes  mains 
une  partie  des  papiers  de  famille  de  ce  célèbre  homme 
d'État, qui  élail  aussi  bibliophile  et  antiquaire.  Dans  le  tré- 
sor en  argent  monnayé  qu'il  laissa  à  sa  mort  et  qui  était 
compris  dans  le  lidéicommis  institué  par  lui,  figurent  à  plu- 
sieurs reprises  des  monnaies  anciennes  : 

«  Twee  antique  goude  stucken  die  moeten  worden 
»  gewegen  om  die  weerde  te  kennen  ende  alhier  gesup- 
»  pleert  worden.  » 

«  Item  40  antique  stucken  van  munten  van  den  ouden 
»   tyt.  » 

«  Item  128  antique  medaillien  van  zilver  van  de  Romey- 
r>  nen{\).  » 

Roose,  comme  le  dit  M.  Galesloot,  avait  reçu  une  partie 
de  ses  richesses  en  antiquités  d'un  autre  magistrat,  le  con- 
seiller de  Rrabant  Georges  Uwens,  seigneur  de  Berchem- 


(1)  Éiat  des  médailles  et  pièces  d'or  faisant  partie  du  majorai,  remis 
au  nommé  Catz  par  le  conseiller  et  général  de  la  iMonnaie,  en  date  du 
12  août  1708.  Archives  de  la  ville  de  Bruxelles. 


(381  ) 
Saint-Laurent,  qui  avait  aussi  le  goût  des  livres  et  des 
médailles  (1).  Dans  un  manuscrit  de  la  Bibliothèque  royale, 
le  11"  19755-19756,  on  peut  lire  le  testament  par  lequel 
Uwens,  se  trouvant  sans  enfants,  disposa,  le  51  mars  1645, 
de  ses  biens  meubles  et  immeubles.  Nous  en  extrayons 
les  passages  suivants  où  nous  voyons  que  l'urne  dont  il  est 
parlé  dans  la  note  ci-jointe  provenait  du  bourgmestre 
Rockox,  l'ami  de  Rubens,  regardé,  au  commencement  du 
XVJi^  siècle,  «  comme  le  premier  antiquaire  des  Pays- 
Bas.  »  Il  y  est  constaté  de  plus  que  le  conseiller  Uwens 
possédait,  par  don  ou  par  achat,  non-seulement  des  mé- 
dailles romaines,  en  or,  en  argent,  en  bronze,  tant  consu- 
laires que  des  empereurs,  mais  des  médailles  grecques, 
et  d'autres  antiquités,  notamment  deux  têtes  de  marbre, 
dont  l'une  représentait  Jules  César.  Les  dispositions  qui 
suivent,  copiées  dans  le  testament  de  Georges  Uwens, 
nous  apprennent  en  quelles  mains  passa  ensuite  cette 
collection  inestimable. 

fi  Le  livre  qui  contient  les  armoiries  de  tous  les  cheva- 
»  liers  de  l'ordre  de  la  Toison  d'Or,  avecq  quelques 
»  pourtraits  de  ducqs  et  chefs  dudict  ordre,  je  laisse  et 
»  donne  pour  mémoire  à  monsieur  le  chef-président 
»  (lequel  j'ay  tousjours  honoré  et  aymé  doiz  ma  jeunesse), 
»  comme  aussy  un  livre  intitulé  la  Finance  métallique  et 
»  un  aultre  livre  intitulé  le  Vrais  pourtraits  des  Roys  de 
»  France.  Item  laisse  audict  sieur  président  les  médailles 
»  qui  ont  appartenues  au  feu  Archiducq  Albert,  un  coffre 
»  particulier,  item  les  médailles  de  douzes  premiers  empe- 
»  reurs  très-curieusement  faittes  par  le  Padrian;  item  un 
»  urne  de  marbre  avecq  son  inscription,  pièce  très-rare, 

(1)  Voyez  V Histoire  des  environs  de  Bruxelles,  1. 1,  p.  100. 


(  o82  ) 
»  qui  m'a  esté  donnée  par  feu  monsieur  Rockox,  premier 

»  antiquaire  de  nostre  temps  en  ses  pays. 

»  A  monsieur  Laufin,  chevalier,  conseillier  des  conseils 

»  d'eslat  et  privé  de  Sa  Majesté,  mon  beau-frère,  je  laisse 

»  la  tasse  d'argent  dorée,  embellie  de  belles  médailles  an- 

»  ticques,  à  sçavoir  des  24  premiers  empereurs  de  Rome , 

»  priant  de  la  vouloir  laisser  à  mon  nepveu,  le  lieutenant 

D  civil,  son  lîls  aisné... 

»  iMa  bibliothèque  (exceptez  les  livres  dont  j'ay  desjà 

»  disposé  ou  pouraye   encor  disposer)  sera  partagée  par 

j>  portions  esgales  entre  mon  frère  le  conseillier  à  Luxem- 

»  bourg  et  le  collège  des  pères  jésuistesd'icy...  les  dicts  pères 

»  prendront  mémoire  et  liste  pertinente  de  tous  les  livres 

»  qui  seront  venus  de  moy,  comme  aussy  des  médailles 

»  antiques  que  je  leur  donne  et  laisse,  j'entens  toutes  les 

7)  grecques,  tant  d'argent  que  cuivre,  venues  du  cabinet, 

»  de  feu  monsieur  Rockoy  (1  )  et  par  moy  achaptées  après 

5)  son  trespas,  item  des  autres  60  d'argent,  romaines,  et 

î>  semblables  100  de  cuivre,  qui  leur  seront  aussi  données, 

»  et  donne  par  cette  même  disposition,  à  charge  de  rien 

»  de  tout  ce  que  dict  est,  pouvoir  donner,  obliger,  ny 

»  vendre  à  jamais,  soubz  quelque  prélext  que  ce  soit,  et 

»  à  peine  de  perdre  ce  légat  et  estre  incontinent  appre- 

»  hendé  par  mon  dict  frère,  ses  enfants  masles  ou  à  leur 

»  défaut  par  mon  nepveu,  le  S""  Henry  Florent  Laurin, 

»  lieutenant  civil  de  Gand,  obligeant  ses  dits  pères,  en  cas 

»  d'acceptation  dudict  légat  de  livres  et  médailles,  dont 

»  mon  dict  frère  prendra  acte  et  récépissé,  de  mettre  à 

»  tousjours  mon  pourlraict  en  leur  bibliotecque,   avecq 

»  mes  armoiries  et  devise  comme  benefacteur  d'icelle,  et 


(1)  Rockox 


(  d85  ) 
»  ce  à  peine  que  dessus,  lequel  pourtrait  fait  et  tiré  d'un 
»  bon  maistre  leur  sera  donné  endéans  trois  mois  après 
»  ma  mort  en  chargeant  de  ce  mon  dit  frère. 

B  Mes  autres  médailles  que  j'ai  fait  achapter  en  la  mai- 
»  son  mortuaire  du  dict  feu  S'  Rockocx,  vivant  chevalier 
»  et  premier  bourgmestre  de  la  ville  d'Anvers,  et  très-en- 
D  tendu  en  matière  d'anticquilé  et  médailles,  à  scavoir 
»  toutes  celles  de  cuivres  et  toultes  celles  d'argent,  tant 
p  empereurs  que  consulaires,  exceptées  les  grecques  dont 
j>  j'ay  disposez  cy  dessus,  je  laisse  et  donne  à  mon  dit 
»  nepveu,  le  S'  Henry  Florent  Laurin,  escuïer,  priant  de 
»  les  vouloir  avoir  en  estimes  pour  estre  un  trésor  fort 
»  curieux  en  matière  d'anticquité  et  autant  rare  qu'il  y  at 
p  en  ce  Pays-Bas. 

D  Pareillement  je  laisse  aussy  à  mon  dit  nepveu  quel- 
»  ques  petites  urnes  avec  les  lampes  et  les  deux  testes  de 
»  marbre  dont  l'une  est  asseurement  de  Jule  César  et  une 
D  statue  de  bronse  aussi  la  teste  Cléopâtre,  luy  défendant 
»  bien  expressément  de  vendre,  donner  ou  obliger  les  dites 
D  médailles  ou  aucunes  des  dites  anticquités,  soubs  quel 
B  prétexte  que  pourroit  estre,  mais  ordonne  et  veux  qu'il 
»  les  laisse  toutes  à  son  fils  aisné  qui  ne  serat  d'église  et 
»  au  défaut.des  enfants  masles  à  son  frère  Charles  Renon, 
»  luy  défendant  pareillement  de  les  vendre,  donner  ou 
»  obliger  comme  dit  est,  faisant  la  mesme  défense  aux 
D  enfants  masles  du  dict  Henry  Florent  et  aux  enfants  du 
D  dict  Renon,  s'ils  viennent  onques  audict  Renon. 

»  Mes  médailles  d'or  anticques,  au  nombre  de  vingt  et 
i>  quattre,je  laisse  et  donne  à  dame  Marie  de  Pecque. 
ï>  douarière  de  Reusve,  dame  de  Tildoncq,  comme  aussy 
»  touttes  mes  porcelaines  (exceptés  les  deux  éléphans)  et 
p  pareillement  mon  pourtraict,  si  ne  luy  ai  donné  devant 


(  584  ) 

»  ma  mort,  la  priant  de  laisser  après  sa  mort  lesdictes 
»  médailles  à  mademoiselle  de  Lesclatière,  sa  fille,  à  qui 
»  je  donne  un  grand  grenadier  et  un  myrlus,  suppliant 
»  l'une  et  l'autre  de  prier  pour  le  repos  de  mon  âme. 

»  Mes  autres  restantes  médailles,  tant  de  cuivre  que 
D  d'argent,  partie  empereurs,  partie  consulaires  (dont  je 
»  n'ay  disposé  sy  devant),  que  j'ay  ramassé  l'espace  de 
»  plusieurs  années,  venants  aucunes  du  cabinet  du  feu 
»  prince  de  Chimay,  autres  du  cabinet  du  l'eu  marquis 
»  d'Aytona,  aussy  fort  belles  et  curieuses,  je  laisse  à  mon- 
»  sieur  De  Bie,  greffier  des  finances,  mon  cousin  par 
»  alliance ,  et  au  second  fils  de  monsieur  le  conseillier 
»   iMalineus,  moitié  par  moitié...  n 

Il  y  aurait  un  beau  livre  à  écrire  sur  les  collections  litté- 
raires et  artistiques  qui  ont  existé  dans  nos  Pays-Bas. 
Cette  terre  féconde  ne  s'est  pas  contenté  de  fournir  aux 
lettres  et  aux  arts  de  nombreux  adeptes;  il  s'y  est  rencontré 
aussi,  à  toutes  les  époques,  de  patients  et  intelligents  col- 
lectionneurs. En  vain  les  guerres  extérieures  et  les  guerres 
civiles  y  ont  détruit  ou  en  ont  fait  fuir  les  belles  toiles  et 
les  manuscrits  précieux,  en  vain  l'or  de  l'étranger  y  est 
venu  profiler  de  nos  moments  de  détresse  et  de  nos  heures 
d'indifférence,  le  culte  des  belles  choses  n'y  a,  jamais  été 
abandonné,  et  dans  ces  temps  difficiles  où  la  Belgique  avait 
à  lutter  à  la  fois  contre  ses  voisins  du  Nord  et  ses  voisins 
du  Midi,  c'était  avec  un  soin  pieux,  avec  une  sollicitude 
pour  ainsi  dire  paternelle,  que  Rockox,  Uwens,  Roose, 
entre  autres,  se  transmettaient  les  plus  belles  de  ces  épa- 
ves de  l'antiquité,  remises  en  honneur  par  la  renaissance 
des  lettres.  Sachons  gré  à  M.  Galesloot  d'avoir  appelé  notre 
attention  sur  cette  particularité  intéressante. 

Je  propose  à  la  classe  d'insérer  sa  note  au  Bulletin.  • 


(  o85  ) 


Mtappofi  do  m.   et*,   fiot. 

«  Le  travail  de  M.  Galesloot,  relatif  à  des  antiquités  dé- 
couvertes près  d'Assche,  m'a  été  remis  seulement  samedi 
dernier.  Je  n'ai  par  conséquent  pas  eu  le  temps  d'en  faire 
un  examen  approfondi. 

Ce  motif  m'engage  à  présenter  ici  quelques  observations 
concernant  le  point  principal  de  la  notice  :  la  découverte 
des  nombreuses  figurines  en  terre  de  pipe  représentant 
des  cbevaux.  C'est,  à  ma  connaissance  ,  le  dépôt  le  plus 
considérable  de  ce  genre  qui  ait  été  trouvé  en  Belgique. 
Jusqu'ici  on  en  avait  recueilli  seulement  des  spécimens 
isolés  dans  des  substructions  romaines,  par  exemple  à 
Elewyt,  ou  dans  des  tombeaux. 

Les  Jahr bûcher  des  Vereins  von  Aller thumsfreunden 
mentionnent  des  figurines  de  chevaux  appartenant  à  des 
collections  d'antiquités  dans  les  Pays-Bas  (1).  k  Rome  on 
en  a  également  recueilli  de  terre  cuite.  Klemm,  dans  son 
Handbuch  der  germanischen  Aller thiimskunde  (p.  365), 
constate  la  découverte  de  figurines  semblables  à  Prague  et 
dans  un  tombeau  renfermant  des  os  calcinés  appartenant 
à  un  enfant.  Lui-même  en  possédait  des  exemplaires  d'ar- 
gent. 

Dans  les  tombeaux  païens  les  figurines  de  chevaux 
étaient  des  symboles  funéraires,  comme  l'ont  démontré 
MM.  Schultzet  l'abbé  Cavedoni  (2).  Des  tombeaux  païens 
ces  emblèmes  passèrent  au  même  titre  dans  les  sépul- 


(1)  Livraison  VII,  p.  61. 

(2)  Bullel.  archéol  y  1840,  p.  65;  Osservat.  sopra  un  sepult.  etrusc, 
pp.  45,  55;  BuUelino  delV  inslitul.  di  correspond.  archeoL,  1848,  p.  174; 
Annales  de  rinstil.  archéol.  1847,  pp.  218,  259. 


(  586  ) 
tures  chrétiennes,  peut-être  avec  une  signification  diffé- 
rente (1). 

Toutes  les  figurines  de  chevaux  n'avaient  sans  doute 
pas  la  même  signification ,  ni  la  même  destination.  Tantôt 
elles  servaient  de  symboles  de  nationalités,  par  exemple  sur 
les  monnaies,  tantôt  d'emblèmes  funéraires  sur  les  lampes 
sépulcrales  et  les  vases,  tantôt  d'ex-voto.  Les  chevaux, 
vainqueurs  dans  les  jeux  des  cirques,  étaient  honorés  au 
point  que  leurs  images  figuraient  sur  les  vases  et  dans  les 
bas-reliefs.  Leurs  noms  étaient  également  rappelés  dans  les 
inscriptions,  dont  Gruter  reproduit  un  grand  nombre  (2). 
Rome  renfermait  aussi  plusieurs  figures  de  chevaux  (5). 
Anciennement  ils  y  servaient  d'emblèmes,  comme  chez 
les  Gaulois  et  les  Germains.  Ceux-ci  les  employaient  pour 
les  augures,  ainsi  que  le  démontre  M.  J'àhns  dans  son 
travail  si  remarquable  intitulé  :  Ross  uncl  Reiter  in  Leben. 
uncl  Spruche,  Glaube  iind  Geschichte  der  Deutschen. 

Le  grand  nombre  de  ces  figurines  trouvées  à  Assche 
proviennent  sans  doute,  dit  M.  Galesloot,  d'un  artisan  de 
la  localité,  qui  y  débitait  sa  marchandise.  Mais,  ajoule-t-il, 
reste  à  savoir  à  quoi  elles  servirent. 

A  mon  avis  c'étaient  ou  des  symboles  ou  des  ex-voto. 
Cette  dernière  hypothèse  me  semble  avoir  plus  de  vraisem- 
blance. Caylus  constate  en  etïet  l'emploi  des  figurines  de 
chevaux  à  titre  d'ex-voto  par  les  campagnards  romains  (4). 

A  la  suite  de  sa  notice,  M.  Galesloot  mentionne  une  in- 


(1)  Desbassyns  de  Richemoiil,  Nouvelles  études  sur  les  catacombes 
rom.y  p.  452;  Krar.s,  Die  romischen  katakombi  n,  p.  228. 

(2)  Voir  la  liste  de  ers  chevaux  dans   Oniuphii  Pavinii,  de  ludis  cir- 
censibus,  lib.  II. 

(3)  Gv'jev'ius,  Thésaurus  antiquitatum,  l.  VII,  p.  17S4. 

(4)  Uecueil  d'antiquités  égyptiennes,  étrusques ,  romaines  et  gauloises , 
l.  Il,  p.  321;  t.  VI,  p.  287. 


(  .''87  ) 
scriplion  romaine  et  une  urne  provenant  de  la  collection 
numismatique  de  Pierre  Roosc,  président  duconseil  privé, 
mort  le  27  février  1675.  Cette  collection,  épave  de  celles 
formées  en  Belgique  dès  le  commencement  du  XVh  siècle, 
jouissait  d'une  grande  réputation  (1).  Goltzius  comptait 
dans  les  limites  actuelles  de  la  Belgique  110  collections 
semblables,  dont  22  à  Anvers  et  25  à  Bruxelles  ;  sur  cha- 
cune d'elles  il  fournit  des  renseignements.  A  Bruxelles  il 
cite  les  cabinets  de  Charles-Quint,  de  Philippe  n,d'Éléo- 
nore  d'Autriche,  de  Marie  d'Autriche,  de  Christine,  fille 
du  roi  de  Danemark,  d'Antoine  Perrenot,  de  Lamoral 
d'Egmont  et  d'un  grand  nombre  d'autres  personnages 
importants,  dont  il  indique  les  noms.  Le  cabinet  d'Abra- 
ham Van  Goerle,  à  Anvers,  était,  d'après  le  témoignage  du 
professeur  Vorstius,  un  des  plus  riches  du  XVP  siècle. 

A  cette  époque  le  goût  de  la  renaissance  avait  donné 
lieu  à  la  formation  de  plusieurs  collections  artistiques 
d'une  grande  valeur.  Chaque  famille  importante  avait  la 
sienne. 

De  même  que  M.  Wauters ,  j'ai  l'honneur  de  proposer  à 
la  classe  d'imprimer  la  notice  de  M.  Galesloot.  d 

Conformément  aux  conclusions  favorables  de  ses  deux 
commissaires,  la  classe  décide  l'impression  de  la  notice  de 
M.  Galesloot  au  Bulletin. 


(1)  Voir  Hemelaers,  Imperatorum  romanorum  numismata  aurea  ex- 
cellentissimi  Caroli  ducis  Croyi  et  Arschotani,  dont  la  troisième  édition, 
qui  a  paru  en  1654,  mentionne  180  monnaies  nouvelles  recueillies  par  les 
soins  de  Nicolas  Rococx.  Albert  Rubeus  y  ajouta  un  long  commentaire 
explicalif  à  la  demande  de  Gevartius. 


(  o88  ) 

^otes  biographiques  sur  Corneille  Duplicius  Scepperus; 
par  M.  P.  Génard ,  archiviste  de  la  ville  d'Anvers. 

Rapport  de  M.  fiachard. 

Corneille  Scepperus,  qui ,  dans  le  cours  d'une  longue 
carrière  politique  et  diplomatique,  ne  cessa  de  mériter  la 
confiance  de  Charles-Quint  et  de  sa  sœur  la  reine  Marie, 
est  appelé,  par  Sanderus,  par  Paquot  et  par  d'autres  écri- 
vains, Cornélius  Duplicius  Scepperus. 

Dans  une  notice  présentée  à  la  Compagnie  il  y  a  quelque 
trente  ans  (1),  notre  vénéré  confrère  M.  le  chanoine  de 
Smet  se  demanda  ce  que  signifiait  le  mot  de  Duplicius. 
Fallait-il  y  voir  un  prénom?  C'était  en  vain  que  dans  les 
Martyrologes  les  plus  complets  on  cherchait  un  saint  qui 
s'appelât  ainsi.  N'était-ce  pas  plutôt  que  les  parents  de 
Scepperus,  ayant  perdu  un  premier  fils  en  bas  âge,  lui 
auraient  donné  le  môme  prénom  de  Corneille,  en  y  ajou- 
tant l'épithète  de  second?  M.  de  Smet  n'attachait  du  reste 
que  peu  d'importance  à  cette  conjecture. 

Un  peu  plus  tard  un  autre  de  nos  confrères,  que  nous 
avons  malheureusement  perdu,  M.  le  baron  de  Saint-Gé- 
nois, fit  insérer,  au  Messager  des  sciences  et  des  arts  de  la 
Belgique  (2),  des  Recherches  sur  le  véritable  nom,  le  lieu 
de  naissance,  la  famille,  etc.,  de  Scepperus. 

Après  y  avoir  établi  que  Scepperus  avait  lui-même  pris 
le  nom  de  Duplicius  dans  des  lettres  revêtues  de  sa  signa- 
ture, et  que  nombre  d'actes  émanés  de  Ferdinand  I"'"  et  de 


(1)  Bulletins.  I.  X,  S*^  partie,  p.  67. 

(2)  Tome  XXIV. 


(  •)89  ) 

Charles-Qninl  le  lui  donnaient  aussi,  M.  de  Saint-Gonois 
prenait  à  lâche  de  rechercher  le  nom  patronymique  du 
ministre  de  Charles-Quint. 

11  admettait  d'abord,  avec  Sanderus,  que  Scepperus, 
en  flamand  de  Scipper,  le  marin, ou  de  Scepper^  le  corsaire, 
n'était  qu'un  surnom  ou  un  sobriquet  qui  avait  été  ap- 
pliqué à  IVieul  de  Corneille,  Jean,  lequel  s'était  rendu  fa- 
meux dans  les  guerres  navales  du  règne  de  Philippe  le  Bon 
et  était  devenu  vice-amiral  de  Flandre.  Le  fils  de  Jean 
avait  fait  usage  de  ce  surnom ,  et  Corneille  avait  suivi  son 
exemple.  «  C'était  assez  la  mode  alors  —  disait  M.  de  Saint- 
»  Génois,  —  d'ajouter  au  nom  propre  un  sobriquet,  qui 
»  passait  ainsi  dans  la  suite  aux  héritiers  de  celui  qui 
p  l'avait  porté  le  premier.  Les  noms  flamands  provenant 
j>  de  sobriquets  militaires  existent  encore  en  grand  nombre 
»  chez  nous » 

Quant  au  nom  patronymique  de  la  famille,  M.  de  Saint- 
Génois  concluait  en  disant  que  le  vice-amiral  s'appelait 
«  peut-être  »  DeDobbele,  nom  très-commun  en  Flandre  et 
dont  on  aurait  fait  Diiplicius  en  le  latinisant. 

M.  Génard ,  conservateur  des  archives  de  la  ville  d'An- 
vers, qui  a  exhumé  et  mis  en  lumière  tant  de  documents 
historiques  intéressants  restés  enfouis  dans  cet  important 
dépôt,  y  a  récemment  découvert  des  pièces  qui,  à  son  avis, 
changent  en  certitude  la  supposition  de  M.  de  Saint-Gé- 
nois. C'est  la  communication  de  ces  pièces  qui  fait  l'objet 
de  la  Notice  envoyée  par  lui  à  la  Compagnie. 

La  première  est  une  lettre,  en  français,  écrite  d'Anvers 
le  21  avril  1526,  par  Scepperus,  au  pensionnaire  de  cette 
ville  Adrien  Herbouts,  pour  lui  annoncer  qu'il  va  bientôt 
aller  trouver  l'Empereur  en  Espagne.  Celte  lettre  est  signée 
CoRMLLE  Double,  alias  Sceppere. 

2""^  SÉFUE,  TOME  XL.  38 


(  590  ) 

La  deuxième  est  une  lettre  en  latin,  datée  du  28  mai 
lo26,  à  Paris,  où  Scepperus  annonce  à  son  ami  Herbouls 
son  arrivée  dans  celle  capitale  et  lui  donne  quelques  nou- 
velles politiques.  Celle-ci  esl  signée  Cornélius  Duplicius et 
au-dessous  Scepperus. 

La  troisième  est  une  lettre,  aussi  en  latin,  que  Scep- 
perus écrit  à  Herbouls,  de  Gènes,  le  5  juillet  1527  :  il  l'y 
instruit  du  danger  que  le  grand  chancelier  de  l'Empereur 
(Gattinara)  et  lui  ont  couru  en  venant  d'Espagne  en  Italie, 
les  navires  qui  les  portaient  ayant  été  attaqués  par  des 
vaisseaux  français  de  beaucoup  supérieurs  en  nombre. 
Cette  troisième  lettre  est  signée  Cornélius  Dupl.  et  au- 
dessous  Scepperus,  eques  ,  etc.  Comme  les  deux  précé- 
dentes, elle  repose  en  original  aux  archives  d'Anvers. 

M.  Génard  fait  connaître,  de  plus,  dans  leur  texte  inté- 
gral, deux  documents  dont  le  même  dépôt  possède  une 
copie. 

L'un  est  une  patente  en  latin  de  Charles-Quint  donnée 
à  Manloue,  le  17  avril  1550,  par  laquelle  il  commet  Corné- 
lius DuPLicius  Scepperus  pour  rechercher,  dans  l'Alle- 
magne et  les  Pays-Bas,  les  faux  chrétiens  [menlitos  ac 
simulatos  christianos)  qui  se  disposaient  à  s'enfuir  en 
Orient  avec  leurs  biens,  et  les  marchands  qui  fournissaient 
en  secret  des  armes  aux  Turcs,  saisir  leurs  personnes  et 
leurs  biens,  et  les  livrer  aux  officiers  et  juges  ordinaires 
des  lieux  où  ils  seraient  pris,  afin  que  ceux-ci  instruisissent 
leurs  procès  :  autorisant  Scepperus  à  substituer  des  com- 
missaires, avec  un  pouvoir  égal  à  celui  qui  hti  était  conféré, 
dans  les  provinces  des  Pays-Bas  et  de  la  Germanie  où  i! 
ne  pourrait  se  rendre  de  sa  personne. 

L'autre  document  esl  un  acte  passé  à  Augsbourg,  le 
19  juillet  1550,  devant  le  notaire  Reyiengger,  où  Scep- 


(  591  ) 

perus,  qui  s'y  nomme  et  qualifie  Cornélius  Duplicius 
ScEPPERUs,  EQUEs  AURATus,  clélèguc  pouF  Ics  Pays-Bas 
Jean  Vuystinck,  d'Ulrecht. 

De  ces  faits  et  de  ces  documents  il  résulte,  on  ne  sau- 
rait le  contester,  que  Phomme  d'État  belge  dont  les  succès 
diplomatiques  nous  ont  été  racontés  dans  un  ample  mé- 
moire de  MM.  de  Saint-Génois  et  Yssel  de  Schepper  (1), 
porta  jusqu'en  1530  le  nom  de  Double  ou  de  Duplicius, 
c'est-à-dire  celui  de  sa  famille,  en  le  faisant  suivre  du 
surnom  de  Scepperus. 

Quand  abandonna-t-il  ce  nom,  qui  vraisemblablement 
lui  parut  trop  plébéien,  trop  trivial,  dans  la  position  oii  il 
se  voyait  élevé?  Ce  dut  être  fort  peu  de  temps  après  :  car 
nous  avons,  aux  Arcbives  du  royaume,  plusieurs  lettres 
originales  de  lui  à  Charles-Quint,  du  mois  de  juin  1551, 
où  il  signe  simplement  Cornille  Scepperus.  Et,  après 
cette  époque,  il  ne  prend  ni  on  ne  lui  donne  plus  d'autre 
nom. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe  l'insertion  au  Bul- 
letin de  la  Notice  de  M.  Génard.  Cette  notice  résout  la 
question  qui  s'est  élevée  relativement  au  nom  de  famille 
de  Scepperus;  elle  contient,  en  outre,  des  détails  qui  étaient 
ignorés  sur  les  faits  et  gestes  de  ce  personnage. 

Je  conseillerais  toutefois  à  M.  Génard  de  revoir  le  pas- 
sage de  son  travail  où  il  commente  la  patente  du  17  août 
1530,  car  il  me  semble  qu'il  a  donné  à  cet  acte  de  Charles- 
Quint  une  signification  à  quelques  égards  erronée.  Selon 
lui  les  commissaires  délégués  par  Scepperus  auraient  in- 
tenté des  poursuites  contre  les  principaux  négociants  des 


(1)  Mémoires  de  l' Académie,  l.  XXX,  année  IbS") 


(  o92  ) 
Pays-Bas,  et  le  magistrat  d'Anvers  aurait  fait  opposition  à 
ces  juges  extraordinaires  :  or  la  patente  statue,  en  termes 
exprès,  ainsi  qu'on  l'aura  remarqué,  que  les  prévenus  se- 
ront livrés  aux  officiers  et  juges  ordinaires  des  lieux  où  ils 
auront  été  Sirrèlés^  et  offîcialibus  et  judicibus  ordinariis  lo- 
corum  in  quibus  capti  fuerunt  tradant.  M.  Génard,  je  crois, 
aura  confondu  la  patente  de  1350  avec  des  ordonnances 
de  Charles-Quint  et  de  la  reine  Marie  concernant  les  juifs 
portugais  qui,  après  avoir  été  contraints  de  recevoir  le 
baptême,  vinrent  s'établir  à  Anvers.  Cette  patente  n'était 
pas  un  acte  destiné  à  prendre  place  dans  la  législation  des 
Pays-Bas;  on  a  vu  qu'elle  regardait  l'Allemagne  aussi  bien 
que  nos  provinces  :  c'était  une  mesure  temporaire,  qui 
avait  spécialement  pour  but  d'empêcher  que  les  Ottomans, 
contre  lesquels  la  chrétienté  avait  en  ce  moment  à  soutenir 
une  guerre  terrible,  ne  reçussent  des  secours  des  ennemis 
de  la  foi  répandus  dans  les  États  héréditaires  de  l'Empe- 
reur et  dans  l'Empire  romain.  Nous  ne  trouvons  nulle 
part  de  renseignements  sur  l'exécution  qui  lui  fui  donnée 
et  les  effets  qu'elle  eut  :  il  est  assez  probable  que  ceux-ci 
furent  de  peu  de  conséquence. 

Rappot't  de  .ff.   le  bat*ott   Refvyn  de   l^etlenhore. 

«  Deux  de  nos  honorables  confrères,  l'un  dont  nous 
avons  vivement  regretté  la  perte  prématurée,  l'autre  que 
nous  espérons  conserver  encore  longtemps  malgré  l'âge 
qui  n'a  point  ralenti  ses  travaux,  MM.  de  Saint-Génois  et 
De  Smet,  ont  consacré  à  Scepperus  des  notices  où  ils  ont 
fait  ressortir  avec  intérêt  ses  nombreux  services  et  les 
divers  inciflentsde  sa  longue  carrière  diplomatique. 

Quelques  doutes  subsistaient  sur  le  nom  porté  par  Scep- 


(  593  ) 
perus.  M.  Génard,  archiviste  de  la  ville  d'Anvers,  dont  les 
érudiles  recherches  ont  à  plusieurs  reprises  fixé  l'attention 
delà  classe,  à  réussi  à  les  lever  par  des  documents  authenti- 
ques qui  de  plus  ajoutent  quelques  détails  importants  à  ce 
que  nous  savions  déjà  de  la  biographie  de  Scepperus.  Je  ne 
saurais  mieux  faire  que  de  me  rallier  aux  observations  pré- 
sentées par  mon  savant  confrère  M.  Gachard  et  de  pro- 
poser également  l'insertion  au  Bulletin  de  la  notice  de 
M.  Génard.  » 

Mtappoi't  tic  .n.   Alph.    Wattlet's. 

<L  Je  me  rallie  complètement  aux  conclusions  de  mes 
honorables  collègues,  sauf  que  j'approuve  sans  réserve  le 
travail  de  M.  Génard.  Outre  les  détails  nouveaux  qu'il  con- 
tient sur  le  véritable  nom  de  Sc/iepperus,  il  nous  révèle 
cette  particularité  inconnue  que  celui-ci  accepta  la  mission 
de  rechercher,  de  dénoncer,  de  poursuivre  les  faux  chré- 
tiens et  autres  marchands  soupçonnés  d'envoyer  des  armes 
aux  Ottomans.  L'expérience  de  tous  les  temps  a  surabon- 
damment démontré  l'inutilité  et  les  conséquences  funestes 
de  ces  commissions  extraordinaires,  qui,  sans  rien  empê- 
cher, n'aboutissent,  comme  le  fait  remarquer  M.  Génard, 
qu'à  extorquer  des  rançons  à  des  accusés.  L'archiviste  de 
la  ville  d'Anvers  nous  promet  la  prochaine  publication 
d'autres  documents  sur  Schepperus.  Je  ne  puis  que  l'enga- 
ger à  donner  suite  à  son  projet;  il  contribuera  de  la  sorte 
à  jeter  du  jour  sur  les  causes  du  mécontentement  qui  se 
manifesta  à  Anvers,  à  plus  d'une  reprise  et  d'une  manière 
énergique,  pendant  le  règne  de  Charles-Quint.   » 

Conformément  à  l'opinion  de  ses  trois  commmissaires, 
la  classe  a  décidé  l'impression  au  Bulletin  de  la  note  de 
M.  Génard. 


(  594  ) 

ÉLECTIONS. 

La  classe  procède,  par  scrutin  secret,  à  la  formation  de 
la  liste  double  :  1"  des  jurys  pour  le  prix  quinquennal 
d'histoire  national  (6^  période)  et  pour  le  prix  quinquennal 
des  sciences  morales  et  politiques  (5^  période);  2°  du  jury 
pour  le  prix  triennal  de  littérature  dramatique  en  langue 
française  (6'  période). 

Ces  listes  seront  communiquées  à  M.  le  Ministre  de  Tin- 
térieur. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Antiquités  de  l" époque  romaine  découvertes  à  Assche;  no- 
tice par  M.  L.  Galesloot,  chef  de  section  aux  Archives 
du  royaume. 

Au  mois  de  février  dernier,  j'ai  eu  l'honneur  de  rendre 
sommairement  compte  à  l'Académie,  du  résultat  des 
fouilles  entreprises,  depuis  1871,  sur  le  territoire  de  la 
commune  d'Assche  par  M.  Prosper  Crick  (1).  Je  disais 
dans  cet  aperçu  que  M.  Crick  se  proposait  de  reprendre  sa 
lâche,  cette  année,  après  la  récolte.  C'est  ce  qu'il  a  fait  et 
non  sans  succès,  ainsi  qu'on  va  le  voir. 

Je  signalerai  d'abord  un  dépôt  fort  intéressant  dont  les 
explorations  archéologiques  effectuées  dans  le  pays,  n'ont 
pas  encore  fourni  d'exemple,  que  je  sache.  L'année  passée, 
M.  Crick  avait  trouvé  les  fragments  de  différentes  figurines 


(1)  BuUctins,  2e  séné.  t.  XXXIX,  p.  -2r 


(  39,^  ) 
tMi  terre,  dite  vulgairement  terre  de  pipe.  Son  attention 
s'était  portée  sur  le  champ  doù  ils  provenaient,  mais  ii 
n'eut  pas  le  temps  d'y  terminer  ses  recherches.  Les  ayant 
recommencées,  il  y  a  quelques  semaines,  avec  un  soin 
minutieux,  il  fut  assez  heureux  pour  tomber  sur  un  groupe 
de  ces  objets,  et  exhuma,  coup  sur  coup,  dans  un  étroit 
espace,  au  delà  de  vingt  statuettes ,  non  pas  équestres, 
mais  de  chevaux  en  miniature.  Quoique  toutes  soient  mu- 
tilées, la  trouvaille  n'en  est  pas  moins  remarquable,  car 
outre  leur  nombre,  ces  figurines  offrent  certaines  particu- 
larités qui  méritent  d'être  mentionnées.  Elles  varient  à  la 
lois  d'aspect  et  de  grandeur  (J);  mais  généralement  on  re- 
connaît sous  des  formes  qui  laissent  certainement  à  dési- 
rer comme  fidélité  et  comme  exécution,  le  type  du  cheval 
tel  qu'il  est  représenté  sur  les  monuments  grecs  et  romains. 
Plusieurs  de  ces  petits  chevaux,  qui  semblent  tous  avoir 
été  fixés  sur  des  tablettes  en  guise  de  socles,  sont  bridés. 
L'un  d'eux  porte  une  housse  ornementée,  avec  ses  acces- 
soires. Ici  encore  on  constate  une  parfaite  concordance  avec 
les  monuments  de  l'antiquité.  Enfin,  il  yen  avait  qui  étaient 
accouplés  au  moyen  d'un  joug  passé  sur  l'encolure  (2). 


(1)  La  plus  haute  mesure  14  centimètres  des  pieds  au  dos. 

(2)  Voici  ce  que  M.  P.  Crick  vient  de  m'écrire  à  propos  de  ces  objets. 
«  Je  vous  transmets,  pour  ce  qu'elles  peuvent  valoir,  les  particularités 

(jue  vous  n'auriez  pas  encore  pu  observer  au  sujet  des  petits  chevaux. 

»  Un  seul  a  la  bride  complète,  avec  têtière,  mors,  rênes,  etc.  Il  a  un  col- 
lier, mais  ni  housse  ni  autre  partie  de  harnais. 

V  Presque  tous  les  chevaux  ont  une  espèce  de  collier  vers  le  milieu  du 
cou.  Vous  connaissez  le  cheval  à  la  housse.  A  celui-ci  on  ne  distingue  pas 
(le  bride  ;  mais  les  attaches  de  la  hou'^se  à  l'épaule  et  à  la  croupe  sont  mar- 
quées. 

n  D'après  tous  les  fragments  que  j'ai  trouvés  jusqu'ici,  je  ne  remarque 
que  deux  exemplaires  qui  peuvent  avoir  été  de  même  forme  C'étaient 


(  d96  ) 

Les  figurines  de  celle  espèce  n'étaient  pas  les  seules  que 
le  terrain  recelât;  il  y  en  avait  aussi  de  génisses,  plus  un 
buste  d'homme  ou  de  jeune  homme  qui  m'a  paru  n'être 
qu'une  ébauche,  et  un  bouclier  oval  duquel  se  détache  un 
umbo  très-prononcé.  Il  appartenait  évidemment  à  une  sta- 
tuette de  soldat. 

Considérée  dans  son  ensemble,  la  singulière  découverte 
de  M.  Crick,  vague  réminiscence,  si  j'ose  le  dire,  des  bou- 
tiques de  Pompéi ,  nous  autorise  à  croire  qu'il  a  mis  la  main 
sur  les  épaves  d'un  artisan  (ficlor)  de  la  localité,  qui  y  dé- 
bitait sa  marchandise.  Mais  il  reste  à  savoir  à  quoi  elle 
servait,  et  ce  que  signifie  celle  quantité  de  quadrupèdes. 
Devons-nous  y  voir  autre  chose  que  des  objets  de  fantai- 
sie, tels  que  les  mouleurs  italiens  en  colportent  encore 
dans  nos  campagnes;  avons-nous  ici,  par  exemple,  des 
fictilia  ayant  quelque  rapport  avec  le  culte,  ou  des  sigil- 
/flrmdonl  on  se  gratifiait  aux  saturnales  (1)  ?  Ces  ques- 
tions se  présentent  naturellement  à  l'esprit.  La  difficulté 
consiste  à  les  résoudre  d'une  manière  satisfaisante.  Pour 
moi,  s'il  m'était  permis  de  donner  mon  avis,  je  me  pro- 
noncerais pour  la  première  supposition. 

Un  autre  objet  d'art  recueilli  par  l'explorateur  est  un 


deux  chevaux  accouplés;  ils  étaient  joints  ensemble  à  mi-corps,  au-dessus 
des  jambes  de  devant  et  de  derrière.  Je  vous  ai  montré  deux  autres  che- 
vaux qui  ont  dû  être  rattachés  vers  le  milieu  du  cou  par  une  espèce  de 
joug.  Ces  exemplaires,  quoique  des  plus  achevés,  n'ont  ni  brides,  ni  aucune 
partie  du  harnais. 

»  Le  tiers  environ  des  chevaux  était  accouplé.  Tous  sont  percés  sous  le 
corps  d'un  trou  de  quelques  millimètres,  sans  doute  pour  les  besoins  de 
la  cuisson.» 

(1)  V'o//.  pour  ces  mots  et  celui  de  ^c/or  le  Dict.  des  antiq.  grecq.  «'l 
rom.  de  Piliscus. 


(  -^J»?  ) 

petit  nicrciirc  cmi  bronze,  d'une  exécution  fort  médiocre. 
Le  dieu  porte  deux  ailes  à  la  tète.  Ses  autres  attributs  et 
les  pieds  lui  manquent. 

De  même  que  les  années  précédentes,  les  fouilles  ont 
produit  une  quantité  incroyable  de  tessons  de  la  nature  la 
plus  variée  et  surtout  de  vases  de  terre  samienne,  d'imita- 
tion indigène.  Dans  le  nombre,  il  y  en  a  d'une  grande 
ricbesse  de  dessins  et  d'une  fraîcheur  qui  étonne.  M.  Crick 
a  constaté  sur  ces  débris  les  nouveaux  noms  de  potiers 
que  voici  :  Abiloumii[?)  (1),  Anali  f.,  Aviti  m.  a.,  Off.  Cab., 
Cracis  m.,  Curmi...,  Duphius  f.  (2),  Jolûmm(?),Jiipini  m., 
Marcellij  Suommi  m.  (5). 

Deux  de  ces  tessons  se  recommandent  à  notre  attention 
par  des  graphites.  Ainsi,  quelqu'un  a  dislinctement  tracé 
sur  l'un  d'eux,  à  la  pointe  d'un  instrument,  le  mot  ou  le 
nom  de  Cimio.  On  lit  sur  l'autre  fragment  Mid,  en  lettres 
bien  formées  et  d'une  écriture  différente. 

Aux  antiquités  dont  on  vient  de  donner  une  idée,  il  faut 
ajouter,  comme  produits  des  opérations  de  cette  année, 
cinq  lampes  en  terre  cuite,  dépourvues  de  dessins;  l'une 
d'elles  est  singulièrement  petite;  des  styles,  des  fibules, 
et  des  bracelets  en  bronze,  des  aiguilles  en  os  ayant  servi 
à  des  ouvrages  de  main,  etc.,  ainsi  que  différentes  mon- 
naies dont  une  de  Posthume,  le  restaurateur  des  Gaules. 

Mais,  ce  qui  surpasse  tout  ce  qu'on  a  trouvé,  en  fait 


(1)  Avec  un  point  au  milieu  de  l'o. 

(2)  Ph.  est  remplacé  par  un  'f  grec. 

(3)  Dans  la  liste,  si  consicléral)le  pourtant,  dressée  par  M.  le  conseiller 
Schuermans,  on  ne  trouve  que  deux  de  ces  noms.  (Sigles  figulins,  époque 
romaine,  dans  les  Annales  de  l'Académie  d'arch.  de  Belgique  ,  2^  série, 
t  III, pp.  Set  suivantes.) 


(  598  ) 

d'objets  d'art,  sur  remplacement  du  bourg  romain,  à 
Assche,  est  une  statuette  en  argent  d'un  travail  exquis, 
malgré  ses  proportions  exiguës  (\).  Elle  paraît  avoir 
servi  d'ornement  à  un  meuble  quelconque,  car  elle  est 
estampée  et  n'offre  que  le  devant  du  corps,  de  manière  à 
devoir  être  fixée  ou  incrustée.  Elle  représente  une  femme 
vêtue  d'une  tunique  dont  les  plis  nombreux  et  délicats 
tombent  sur  les  pieds,  qu'on  aperçoit  à  peine  sous 
cette  riche  draperie.  Au-dessus  de  cette  robe  elle  a  un 
autre  vêtement  {amictus) ,  non  moins  remarquable  par  la 
manière  dont  il  est  traité.  Les  seins  sont  nus;  les  bras,  levés 
et  nus ,  sont  linement  modelés;  mais  il  n'en  reste  qu'une 
partie,  et,  ce  qui  est  plus  regrettable,  la  tête  manque 
également.  L'attitude  de  cette  figure  indique  clairement 
qu'elle  portail  quelque  chose  sur  la  tête,  probablement 
une  corbeille  (crtn/s/r«w).  D'où  l'on  peut  inférer  que  nous 
avons  ici  l'image  de  Cérès,  reconnaissable,  du  reste,  à 
ses  seins  exubérants,  emblème  de  la  fécondité  et  attri- 
but ordinaire  de  la  déesse.  Sans  lui,  on  serait  porté  à 
croire  que  ce  bijou  représente  une  canéphore.  En  effet, 
Anthony  Rich,dans  son  excellent  Dictionnaire  des  anti- 
quités grecques  et  romaines,  donne  une  figure  à  peu 
près  semblable  (2),  d'après  un  modèle  du  musée  de  Dresde. 
Celle  dont  il  s'agit  était  la  propriété  de  M.  l'abbé  Mertens, 
curé  à  Oetinghen  et  ci-devant  vicaire  à  Assche ,  où  un 
cultivateur,  qui  l'avait  trouvée,  la  lui  remit.  Il  vient  d'en 
faire  don  à  M.  Crick,  qui  l'a  placée  dans  son  intéressante 
collection. 


(1)  Sept  ou  huit  cenlimèlres,  lorsqu'elle  était  entière. 

(2)  Au  mol  Canephora. 


(  599  ) 

Jl  me  reste  à  ajouter  que  ce  dernier  a  déblayé,  sur  cer- 
tains points  du  terrain  qu'il  a  exploré,  des  vestiges  de 
chemins  ou  plutôt  de  rues  empierrées.  Le  pavage  se  com- 
posait d'une  couche  de  gros  moellons,  disposés  fort  inéga- 
lement, mais  sur  lesquels  il  parait  qu'il  y  avait  une  couche 
régulière  de  pierres  plus  petites.  Les  travaux  incessants 
de  l'agriculture  ont  fait  disparaître  cette  deuxième  couche, 
de  même  que  les  fondations  des  maisons,  dont  les  débris 
encombrent  toutefois  le  sol,  pour  peu  qu'on  le  creuse  à 
une  certaine  profondeur. 

En  résumé,  et  c'est  là  un  point  essentiel,  les  fouilles 
que  M.  Prosper  Crick  poursuit  avec  une  persévérance 
digne  d'éloges,  tendent  à  établir  de  plus  en  plus  l'impor- 
tance de  l'agglomération  d'habitations  qui  a  existé  dans  sa 
commune  natale  sous  l'empire  romain. 

Une  urne  antique  du  président  Roose.  —  A  propos 
d'antiquités,  je  ne  crois  pas  inutile  de  signaler  un  fait  que 
j'ai  découvert  par  hasard,  en  lisant,  aux  Archives  du 
royaume,  le  testament  du  chef  et  président  du  conseil 
privé  Pierre  Roose,  qui  prit  une  part  si  active  aux  événe- 
ments de  son  temps  (1).  Par  ce  testament,  qui  est  daté  du 
4  des  kalendes  d'octobre  1662,  le  président  Roose,  pos- 
sesseur d'une  fortune  très-considérable,  avait  établi  un 
fidéicommis,  dont  il  régla  soigneusement  les  conditions. 
11  y  comprit,  entre  autres,  sa  collection  de  monnaies  et 
une  urne,  à  l'égard  de  laquelle  il  s'exprime  en  ces  termes  : 

€  Numismata  quoque  mea,   aurea,  argentea,  aerea, 


(1)  Voy.  sa  biographie  dans  VHistoire  des  lettres,  elc,  en  Belgique, 
par  feu  le  bibliothécaire  Goelhals,  l.  I 11,  p.  115. 


(  600  ) 
»  prisca  el  nova,  fideiconimisso  Imic  includo,  simul  et 
i>  urûani  marmoream  cui  inscriptio  (1)  : 

D.  M. 

C    PONTIUS    SODALIS 

JULIA    CAMPANA 

OLL.IE.    II. 

«  Quam  urnam,  cum  parte  numismatum,  teslaraento 
»  mihi  legavit  Georgius  Uwens,  regius  in  consilio  Bra- 
»  banliae  senator  (2),  mihi  à  praetexla  Lovanii  percarus, 
»   ob  virtutem.  » 

Comme  il  arrivait  ordinairement,  le  fidéicommis  in- 
stitué par  le  président  Roose  donna  lieu  à  un  grand  procès 
entres  ses  descendants  (5).  J'ignore  si  ceux  qui  existent 
encore  sont  restés  possesseurs  de  cette  urne  antique. 

Le  tumulus  de  Saventhem.  —  Un  autre  renseignement 
puisé  aux  Archives  du  royaume  concerne  la  tombe  ro- 
maine de  Saventhem  dont  l'ouverture ,  tout  au  commen- 
cement du  seizième  siècle ,  excita  si  vivement  la  curiosité 
publique.  Cet  intéressant  monum.ent  a  donné  lieu  à  plus 
d'une  publication.  M.  le  conseiller  Schuermans,  qui  s'en 


(1)  Celte  inscription  n'est  pas  dans  le  Recueil  de  Gruterius.  Je  ne  sais 
si  elle  l'est  dans  celui  de  Graevius  ou  dans  d'autres  de  l'espèce. 

(2)  Il  fui  nommé  conseiller  au  conseil  de  Brabanl,  en  1621 ,  et  mourut 
à  Bruxelles  ,  le  29  septembre  1645,  a  Tàge  de  58  ans.  Son  épitaphe  se 
irouvail  dans  le  chœur  de  l'église  abbatiale  de  Coudenberg.  {Voy.  le 
Théâtre  sacré  de  Brabanl,  t.  I",  p.  2'22. ) 

(3)  En  1750  Ce  procès  fut  plaidé  devant  le  conseil  de  Brabaut.  Il  néces- 
sita l'impression  du  testament  de  Pierre  Roose  (38  pages  in-folio).  Ce 
document  est  précédé  d'une  généalogie.  A  la  fin  on  trouve  les  noms  des 
parties  en  cause.  (Archives  du  conseil  de  Brabant.) 


(  601  ) 
est  occupé  le  dernier  (I),  à  propos  d'un  article  qui  a  paru 
en  Allemagne,  a  fait  suivre  ses  remarques  critiques  d'une 
note  bibliographique,  ou  comme  il  le  dit,  de  l'indication  de 
la  litléralure  du  tumulus.  Le  sujet  paraissait  donc  épuisé, 
quand  il  m'est  venu  à  l'idée  de  consulter  les  registres 
aux  contrats  passés  devant  les  échevins  de  Savenlhem.  J'y 
ai  trouvé  un  renseignement  qui  peut  avoir  de  l'utilité 
pour  éclaircir  le  débat  soulevé  relativement  à  la  date  de 
l'ouverture,  ou  plutôt  du  nivellement  du  vaste  tertre.  Il 
résulte  de  ces  registres  que  ce  fut  le  6  septembre  1504 
que  Renier  Cleerhage,  l'explorateur,  acquit  la  terre  sur 
laquelle  il  s'élevait.  Elle  est  indiquée  dans  l'acte  de  vente 
sous  le  nom  Aen  die  tomme.  Le  vendeur  était  Henri  Estor, 
seigneur  de  Grand-Bigard ,  issu  d'une  vieille  souche  bra- 
bançonne. Le  champ  de  la  tombe  [tomvelt)  est  encore 
désigné  ainsi  à  Saventhem.  Il  est  situé  non  loin  de  l'église, 
près  d'une  vallée  et  contre  un  chemin  large  et  profond  qui 
conduit  à  la  chaussée  de  Louvain.  Nul  doute  que  le  per- 
sonnage dont  la  cendre  reposait  sous  ce  mausolée  agreste, 
de  plus  de  cinquante  pieds  de  haut,  n'habitât  une  villa 
dans  l'endroit  qui,  sous  la  période  franque  apparemment, 
reçut  le  nom  énigma tique  de  Saventhem  (2).  Les  tuiles 
romaines  abondent  dans  le  voisinage  et  la  contrée  était 
certainement  très-habitée,  comme  le  prouve  d'abord  l'im- 
portant établissement  d'Elewyt.  A  Melsbroeck ,  qui  est 
plus  près,  il  y  avait  une  belle  villa,  à  en  juger  par  ses 
vestiges.  Des  Francs  s'y  étaient  établis. 


(1)  Bull,  des  Comm.  d'art  et  d'arch.,  t.  XIII,  pp.  25-41.  (Juin  1873), 

(2)  Ce  nom  a  peu  varié.  {Voy.  l'Histoire  des  environs  de  Bruxelles, 
par  Alpli .  Waulers ,  t.  III ,  p.  154.  ) 


(  602  ) 


Notes  biographiques  concernant  Corneille  Duplicius 
Scepperus;  par  M.  P.  Génai d ,  archiviste  de  la  ville 
d'Anvers. 

Deux  membres  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  M.  le 
chanoine  J.-J.  De  Smet  et  l'eu  M.  le  baron  Jules  de  Saint- 
Génois,  qni  se  sont  occupés  de  la  biographie  de  l'ancien 
diplomate  belge  Corneille  Duplicius  Scepperus,  oni  fait  des 
recherches  inutiles  pour  découvrir  le  véritable  nom  de  ce 
personnage  célèbre. 

Une  dissertation  publiée  par  M.  le  chanoine  De  Smet, 
dans  le  tome  X,  2*^^  partie,  des  Bulletins  de  l'Académie 

ROYALE  DES    SCIENCES  ET    BELLES-LETTRES  DE   BELGIQUE,  Ct 

intitulée  :  Note  sur  quelques  particularités  relatives  à  Cor- 
neille Scepperus,  vice-chancelier  du  Roi  de  Danemarck, 
Christian  H,  contient  à  ce  sujet  ce  qui  suit  : 

«  Dans  les  livres  que  nous  avons  de  l'illustre  vice-chan- 
j>  celier  de  Christierne  II  et  dans  l'épitaphe  qui  orne  sa 
»  tombe,  nous  ne  lui  trouvons  que  le  prénom  unique  de 
»  Corneille;  comment  lui  serait  venu  celui  de  Duplicius 
î>  (si  c'est  toutefois  un  prénom)  que  lui  donnent  à  la  fois 
»  Sanderus,  Paquot  et  bien  d'autres  encore?  Ou  aurait 
»  beau  feuilleter  les  martyrologes  les  plus  complets,  celui 
»  d'Usnard,  par  exemple,  avec  les  auctaria  si  anjples  du 
»  P.  Du  Sollier,  pour  rencontrer  un  saint  du  nom  du  Dupli- 
jt  dus.  Il  conviendrait  toutefois  admirablement  à  un  diplo- 
»  mate,  puisque  ce  titre  même  a  sa  racine  dans  rjnrxôsij 
D  duplex  ou  versipcllis  et  ({u'un  croit  assez  com:nunémenl 
r>  que  les  agents  politiques  des  puissances  emploient  bien 


(  603  ) 

»  peu  le  mot  propre.  Mais  dans  cette  supposition  on  n'au- 
9  rail  pu  donner  qu'après  coup  un  nom  pareil  à  notre 
9  diplomate  et  Tun  ou  l'autre  de  ses  savants  amis,  tel  que 
»  le  caustique  Erasme,  nous  en  eût  dit  apparenmient 
»  quelque  chose.  11  est  encore  aujourd'hui  des  parents  qui, 
»  ayant  perdu  un  (ils  en  bas  âge,  donnent  son  prénom  à 
»  un  enfant  qui  vient  à  leur  naître  plus  tard,  en  y  ajou- 
»  tant  l'épithète  de  second;  ne  serait-ce  pas  un  motif  sem- 
»  blable  qui  a  valu  à  Corneille  de  Sceppere  le  singulier 
»  surnom  de  Duplicius?  Cette  conjecture  est  à  la  vérité 
»  bien  légère,  mais  la  question  elle-même  heureusement 
»  a  fort  peu  de  gravité.  » 

M.  le  baron  de  Saint-Génois  combat  l'opinion  de  M.  le 
chanoine  De  Smet  dans  ses  Recherches  sur  le  véritable  nom, 
le  lieu  de  naissance^  la  famille  et  les  armoiries,  la  sépul- 
ture et  les  écrits  de  Corneille  de  Schepper,  dit  Scepperus, 
insérées  dans  le  tome  XXIV  du  Messager  des  sciences  et 
des  arts  de  la  Belgique  : 

«  Comme  pour  beaucoup  de  grands  hommes  des  temps 
»  anciens,  dit  M.  de  Saint-Génois,  on  ne  sait  pas  même 
»  au  juste  quel  était  le  véritable  nom  de  famille  de  l'habile 
j>  et  infatigable  négociateur  que  nous  trouvons,  pendant 
i>  plus  de  trente  ans,  voyageant  nuit  et  jour,  traitant  des 
»  affaires  sans  nombre,  minutant  la  plus  volumineuse  des 
»  correspondances,  arpentant  toutes  les  grandes  routes  de 
D  l'Europe  comme  un  véritable  courrier  de  cabinet,  allant 
D  tantôt  en  Autriche,  tantôt  en  Turquie,  tantôt  en  Suisse 
»  ou  en  Italie,  tantôt  encore  en  France,  en  Espagne,  en 
»  Pologne,  en  Angleterre  et  surtout  en  Allemagne  pour 
j  compte  de  quatre  tètes  couronnées,  célèbres  à  plus  d'un 
»  titre.  La  question  de  son  véritable  nom  nous  offre  assez 
»   d'intérêt  pour  que  nous  nous  y  arrêtions  un  instant. 


(  604  ) 

»  M.  le  chanoine  De  Smet  traite  cette  question  briève- 
B  ment  dans  la  notice  qu'il  a  consacrée  à  Scepperus,  dans 
D   les  Bulletins  de  l'Académie  royale  de  Belgique. 

D  II  y  examine  la  signification  de  ce  singulier  prénom 
»  de  Duplicius,  que  nous  voyons  accolé  au  nom  de  ce 
D  diplomate.  Dans  son  opinion,  ce  prénom  équivaudrait 
D  au  mot  secundus,  et  ne  lui  aurait  été  donné  que  parce 
D  qu'il  était  le  fils  puîné  de  son  père. 

»  Jl  va  plus  loin  et  croit  que  son  frère  aîné  s'appelait 
i>  aussi  Cornille  et  qu'après  sa  mort,  notre  Cornille 
j>  aurait  pris  le  surnom  de  Duplicius^  comme  si  on  avait 
D  x'oulu  désigner  par  là  qu'il  était  le  2^  Cornille  de  la 
3>  famille.  M.  De  Smet  ajoute  que  ce  nom  ne  lui  a  été  donné 
»  que  par  Sanderus  et  quelques  autres  biographes,  mais 
»  que  Scepperus  ne  le  prit  point  lui-même. 

»  Contrairement  à  l'assertion  de  notre  savant  confrère, 
»  nous  avons  de  nombreuses  preuves  que  le  mot  Dupli- 
î>  dus  faisait  partie  de  son  nom  propre,  que  lui-même 
»  l'employait  dans  sa  signature,  et  que  Ferdinand  I  et 
j>  Charles-Quint  l'ajoutaient  la  plupart  du  temps  à  son  nom 
»  dans  les  actes  et  les  lettres  où  il  est  question  de  lui; 
j)  nous  citerons  entre  autres  la  correspondance  de  Charles- 
»  Quint,  publiée  par  Lanz,  et  le  recueil  édité  par  Von 
D  Gevai  sous  le  titre  de  Urkunden  und  Aclenstucke ,  con- 
»  cernant  les  ambassades  du  roi  des  Romains  à  Constan- 
»  tinople,  où  le  mot  Duplicius  est  souvent  joint  au  nom  de 
»  notre  ambassadeur.  Nous  avouons  cependant  que  Cor- 
»  nille  est  le  seul  de  celte  famille  que  nous  ayons  trouvé 
»  affublé  du  prénom  de  Duplicius.  Quoi  qu'il  en  soit,  nous 
»  dirons  avec  M.  De  Smet,  que  ce  point  onomastique  n'a 
D   pas  heureusement  d'importance  absolue. 

»  Sanderus  le  prétend  issu  de  l'ancienne  et  noble  famille 


(  m  ) 

9  des  Duplicii,  qu'on  a  voulu  faire  dcsceinlre,  dil-il,  des 
»  coinles  de  Flandre;  de  façon  que  Scepperus  ne  serait 
i>  qu'un  surnom,  «  quasi  agnomentum  a  gente  naulica, 
»  avo  ejus  Joanni  Duplicis  datum.  » 

»  Admettant  avec  Sanderus  que  Scepperus  ou  De  Scep- 
j>  per  ne  serait  qu'un  sobriquet,  nous  avons  dit  ailleurs 
»  que  le  vrai  nom  de  notre  Cornille  pourrait  bien  avoir 
»  été  De  Dobbele,  nom  qui  était  très-commun  en  Flandre. 

»  Le  grand-père  de  Cornille  Scepperus,cité  sous  le  nom 
»  de  Jean  Duplicius,  par  Sanderus,  s'était  rendu  célèbre  de 
»  son  temps  par  la  part  qu'il  avait  prise  aux  guerres  navales 
D  sous  Philippe-Ie-Bon  contre  les  Anglais  et  le  duc  de 
»  Glocester.  Il  avait  aussi  combattu  sur  terre  contre  les 
»  Français.  En  récompense  de  ses  services,  if  obtint  la 
»  dignité  de  vice-amiral  de  Flandre. 

»  Sa  profession  de  marin  lui  aura  attiré,  d'après  San- 
»  derus,  le  sobriquet  de  De Schipper  (le  marin),  ou  peut- 
»  être  même  celui  de  De  Schepper  (le  corsaire).  Car, 
D  comme  beaucoup  de  nos  marins  de  celte  époque,  Jean 
D  Duplicius  se  sera  distingué  comme  corsaire  en  faisant 
»  la  cbasse  aux  Anglais,  et  en  écumant  la  mer  au  profit  du 
»  duc  de  Bourgogne. 

»  C'était  assez  la  mode  alors  d'ajouter  au  nom  propre 
>  un  sobriquet  qui  passait  ainsi  dans  la  suite  aux  héritiers 
i>  de  celui  qui  l'avait  porté  le  premier.  Les  noms  flamands, 
D  provenant  de  sobriquets  militaires,  existent  encore  en 
»  grand  nombre  chez  nous  ;  nous  citerons  ceux  de  Brise- 
D  maille^  Brisetête,  Klincspoor ,  Lanczweert ^  Langer ock^ 
D  Onge7iae,  Pylyzer,  Spanoghe,  Stauthamer,  Tayspere  et 
»  Yzerbyter.  Le  fils  du  vice-amiral  de  Flandre  aura 
»  ajouté  à  son  nom  de  Duplicius  ou  de  Dobbele ,  le  sobri- 
ï  quet  donné  à  son    père,  et  rien  d'étonnant  que  son 

2"'*'  SÉHIE,  Ï0>1E  XL.  59 


(  606  ) 

>  pelit-fils  Cornille  ait  continué  à  le  porter  dans  la  suite. 
»  Nous  donnons  du  reste,  dans  l'absence  de  toute  preuve 

»  positive,  cette  conjecture  pour  ce  qu'elle  vaut,  et  nous 

»  concluons  en  disant  que  le  vice-amiral  s'appelait  peut- 

»  être  De  Dobbele,  que  sa   profession  le  fit  surnommer 

>  De  Schipper  (le  marin)  ou  De  Schepper  (le  corsaire)  et 
»  que  le  nom  propre  réel  de  notre  ambassadeur  était 
»  Duplicius^  forme  latinisée  du  nom  flamand  De  Dob- 
»  bêle.  » 

La  dernière  supposition  faite  par  le  Baron  de  Saint- 
Génois  semble  se  vérifier.  En  etTet,  il  résulte  d'une  lettre 
conservée  aux  archives  d'Anvers  et  datée  de  cette  ville  du 
2!  avril  1526,  que  notre  diplomate  signait  du  nom  de  : 
Cornille  Double  alias  Sceppere. 

Yoici  cette  pièce  intéressante, relative  au  procès  inlenlé 
par  le  magistrat  à  Diego  de  Vaille,  frère  de  l'amman 
d'Anvers  (1),  et  qui  est  comme  un  jalon  dans  la  biographie 
du  secrétaire  de  Charles-Quint  : 

A  Monsieur  maistre  Adrien  (Herbouts),  pensionnaire 

de  la  ville  d'Anvers. 

Monsieur  le  Pensionnaire, 

Je  me  recommande  de  bon  cueur  à  vous,  faisant  sçavoir  que 
j'ai  inicntion  de  me  mestre  en  chemin  vers  l'empereur,  mou 
maistre,  de  brief.  Par  quoy  je  vous  prie  vouloir  dépesccr 
l'instruction  et  les  lettres  de  crédence  au  plus  tost,  aflin  que  je 
m'en  puisse  aller.  En  ce  faisant,  me  ferez  chose  agréable, 


(1)  Toutes  les  pièces  concernanl  cet  imporlanl  procès  ont  été  insérées 
(l«ns  le  Bulletin  des  Archives  d'Anvers,  t.  VII ,  pp  i46  el  suiv. 


(607) 

laquelle  vers  vous  selon  mon  povoir  déservirai.  Et  à  tant  je 
prie  à  Nostre  Seigneur  vous  donner  bonne  vie  et  longue.  Et 
dictes  s'il  vous  plaist  à  mon  serviteur  combien  il  me  fauldra 
encores  ici  demourer,  car  depuis  que  j'ai  entreprins  la  bcsoigne 
je  ne  la  veulx  point  de  ma  part  délaisser. 

Escript  en  Anvers  ce  XXI"'*  d'avril,  l'an  XV"=  XXVI. 

Le  vostre  bon  ami, 
CoRXiLLe  Double  alias  Sceppere. 

Une  lettre  flamande  également  conservée  aux  archives 
d'Anvers  et  datée  de  Grenade  du  28  septembre  1526, 
porte  la  même  signature.  Il  nous  semble  donc  que  la  ques- 
tion soulevée  au  sujet  du  véritable  nom  du  diplomate  belge 
doit  être  considérée  comme  résolue. 

Nous  venons  de  voir  que  le  21  avril  1526,  Scepperus 
se  trouvait  à  Anvers.  Une  série  de  lettres  conservées  aux 
archives  de  cette  ville  permet  en  quelque  sorte  d'indiquer 
les  étapes  du  voyage  qu'à  cette  époque  il  fit  en  Espagne. 

Le  5  mai,  il  fut  à  Malines;  le  28  du  même  mois  on  le 
retrouve  à  Paris,  d'où  il  adressa  au  pensionnaire  d'Anvers, 
Adrien  Herbouts,  une  lettre  que  nous  croyons  devoir 
reproduire,  puisqu'elle  contient  quelques  renseignements 
concernant  les  affaires  politiques  qui,  à  cette  époque,  agi- 
taient l'Europe. 

Clarissimo  Domino  Hadriano  Herboo,  Penslonario  oppidi 
Antverpiensis ,  nieo  tanquam  fratri  charissimo. 

S.  Honorabiliset  magnifiée  Domine.  Postexhibitionem  obse- 
quiorum  meorum  XXVII"  die  mensis  Maii,  Lutetiam  adveni 
salvus  et  incolumis;  inde  recta  iturus  in  llyspanias  et  cnraUi- 
rus  négocia  vestra.  Quod  ad  res  novas  pcrlinet,  Rex  Francns 


(  608  ) 

adlîuc  agit  in  Vasconibiis  Congiaci.  Ad  hune  venit  Hugo  a 
Moncada  cum  prorege  neapolitano.  Hic  aiunt  bellum  futurum, 
quod  omen  ulinam  falsura  sit.  Sane  negant  ducatum  Bur- 
gundiae  restiiutum  iri;  scd  oninia  adhuc  dubia  sunt.  Mirum 
quod  animavcrint  hos  homines  Angli  quos  profecto  arbilrantur 
parlibus  suis  nentiquam  defuluros.  Scribam  ad  D.  tuam  fré- 
quenter ex  itinere;  interea  eadeni  me  Magistratui  eonimen- 
dabit  audactcrque  pollicebilur  me  nihil  operae  praetermissu- 
rum  esseinobeundis  earum  rerum  negociisquasmihicommisit. 
Lutetiae  Parisiorum  XXVIII"  die  mensis  Maii,annoM.D.  XXVI*. 

Tuus  ex  animo. 

Cornélius  Duplicius  Scepperus. 

Le  28  septembre  Scepperus  était  à  Grenade;  il  y  était 
encore  le  7  décembre.  Le  5  des  calendes  de  juillet  (o  juil- 
let) de  l'année  suivante,  il  était  à  Gênes,  ville  d'où  il 
adressa  à  Herbouts  la  lettre  que  voici  : 

Ornatissimo  viro  D.  Hadriano  Hylherio ,  oppidi  Antverpien- 
sis  PensionariOj  amico  tanquam  fratri  syncere  dilecto, 

S.   ORNATISSIME  VIR  , 

Jam  toties  scripsi  ad  te,  ut  pudeat  iterum  reiterare;  si  qui- 
dem  nihil  unquam  a  te  litlerarum  accepi  — id  quod  non  reor 
culpa  tua  usu  venisse,  sed  ipsorum  vel  nebulonum  quibus  nego- 
ciura  id  commissum  fuit —  ego  lum  ex  parte  mea  nihil  praeter- 
misi  quod  ad  splendorem  vestrum  attinet;  cujus  rei,cura 
meliorem  adducere  nequeam,  lestem  habeo  Dominum  supre- 
mum  Cancellarium. 

Forsitan  neque  omnino  ignoramus  quid  vos  ab  ollicio  aver- 
icrit.  Quod  qualecumque  est,  isque  qualiscumque  est,  sane 
vos  viros,  ut  reor,  non  bonos  modo,  sed  et  jirudentes  decipere 


(  609  ) 

aut  avcrtcrc  non  clcbuit.  Quicqiiid  id  est,  ego  sanc  non  desi- 
nam,  quacumqiie  in  parte  de  vobis  bene  mereri.  Supremus 
Dominus  Cancellarius  atquc  ego  hcri  Genuam  applicuimus, 
conflictu  habito  in  mari  cuni  sedccira  triremibus  francicis, 
pugnaviniusque  boris  septem,  cum  solum  très  nobis  trirèmes 
adessent,  cum  myoparone  uno  quem  .Bergantinum  vocant; 
sed  hune,  cum  triginta  viris,  Galli  ex  nobis  cepere.  Nos  vero 
sani  evasimus,  paucis  ex  nobis  vuhieratis,  pervenirausque  in 
portum  sinum  qui  ditionisest  Genuensium,  ab  coque  postritlie 
profeeti,  niissis  ad  nos  sex  aliis  triremibus  a  duce  Genuensium, 
Illustri  Antonio  Jo.  Adurno,  Genuam  pervenimus  incolumes. 
Id  quod  ideo  tibi  significare  volui,  ut  si  quid  sit  quod  in  rem 
vestram  efïicere  queam,  vobis  persuadere  possilis  nibilo  me 
permotum  esse  diulurno  vestro  silentio;  id  quod  nuilius  alte- 
rius  rei  gralia  scribo  quam  ut  testimonium  euloginmque  hoc 
apud  te  reliaquam  studii  mei  atquc  benevolentiaeerga  vos.  Cni 
tamelsi  ne  litteris  quidem  respondere  dignali  estis,  nolui  tum 
ego  ofïicio  meo  déesse.  Bene  vnic.  Ex  Genua,  V  Kalendas  Julias 
anno  Domini  M.D.  XXVII». 

Tuus  ut  solet, 

Cornélius  Dupl.  Scepperus,  eques,  etc. 

Dans  leur  Mémoire  sur  les  missions  diplomatiques  de 
Corneille  Duplicius  de  Schepper,  inséré  dans  le  tome  XXX 
des  Mémoires  de  l'Acadé-uie  royale  des  sciences,  des  let- 
tres ET  des  beaux-arts  DE  BELGIQUE,  MM.  le  baroH 
J.  de  Sainl-Genois  et  (i.  A  Yssel  de  Schepper  attribuent 
au  confident  de  Charles-Quint  un  rôle  de  conciliateur  dans 
les  affaires  religieuses  de  celte  époque.  Ils  assurent 
qu'avant  de  rédiger  la  fameuse  confession  d'Augsbourg, 
Melanchton  avait  eu  une  conférence  préalable  avec  lui  et 
Valdez,  un  autre  secrétaire  de  Tempereur,  qui,  tous  de\^x 
attachaient  une  grande  importance  à  son  opinion. 


(  6i0  ) 

Les  savants  auteurs  que  nous  venons  de  citer,  semblent 
ignorer  que  vers  cette  époque,  le  17  avril  1530,  l'empe- 
reur Charles-Quint,  par  lettres  datées  de  Mantoue,  confia 
à  Scepperus  les  fonctions  de  commissaire  suprême  pour 
la  poursuite  des  soi-disant  nouveaux  chrétiens  ou  Juifs 
baptisés  de  Portugal  ,*  accusés  d'apostasie ,  d'intelligence 
avec  les  Turcs  ennemis  de  l'empereur,  et,  par  suite,  du 
crime  de  lèse-majesté.  Le  diplôme  était  contre-signe  par 
le  même  Valdez  auquel  MM.  de  Saint-Génois  et  Yssel  de 
Schepper  ont  fait  allusion. 

De  par  l'empereur,  Scepperus  avait  le  privilège  de 
nommer  un  nombre  indéfini  de  sous-commissaires.  Le 
19  juillet  1530,  par  acte  notarié  passé  à  Augsbourg,  il 
institua  Jean  Vuystinck  d'Utrecht,  comme  sous-délégué 
pour  les  Pays-Bas.  Nos  dépôts  publics  contiennent  de 
nombreux  dossiers  relatifs  aux  poursuites  souvent  arbi- 
traires dirigées  par  ces  délégués  contre  les  principaux 
négociants  établis  en  nos  contrées,  poursuites  qui  se 
terminaient  ordinairement  par  la  mise  à  la  rançon  des 
accusés.  Nous  ferons  connaître  dans  le  Bulletin  des  Ar- 
chives d'Anvers  y  l'opposition  du  magistrat  de  cette  ville  à 
ces  juges  extraordinaires,  qui  prétendaient  que  les  privi- 
lèges de  la  commune  ne  devaient  pas  être  respectés,  puis- 
que le  crime  de  «  judaïser  »  n'était  pas  prévu  dans  la 
Joyeuse  entrée  des  ducs  de  Bradant  j  et  devait  consé- 
quemment  être  jugé,  non  point  par  nos  échevins,  mais 
par  des  commissaires  spéciaux  envoyés  par  l'empereur  (1). 

Pour  le  moment  nous  transcrivons  en  entier  les  actes 
concernant  les  nominations  de  Scepperus  et  de  Vuystinck  , 
ces  pièces  présentant  un  intérêt  exceptionnel,  tant  pour  la 


(1)  Extrail  d'une  requèle  du  magistrat  d'Anvers  à  l'empereur. 


(  611  ) 

biographie  du  secrétaire  de  Charles  V  que  pour  l'histoire 
de  notre  pays  (1)  : 

De  commissie  van  Scepperus  aengaende  de  nieuive  kerstenm 
comende  van  Portugal  ende  van  die  die  lien  souden  willen 
transporteven  in  Turckyen. 

\s  ivoMiiVE  DoMiNi  Amex.  Novcriiit  unîversi  hoc  praesens  pn- 
bliciim  instrumentum  visuri,  lecluri  seu  audiluri,  quod  anno 
n  Nalivitate  Ejusdem  millesimo  quingentesimo  Iricesirao,  in- 
dictione  lercia,  die  niensis  JuHi  décima  nona,hora  circiter  uii- 
decimam  anle  meridiem,  pontificatus  Sanclissimi  in  Christo 
Patris  et  Domini  Domini  Nostri  Cleinenlis,  Divina  Providentia 
Papae  septimi  anno  septimo,  in  mci  Notarii  publici  testium- 
que  infrascriptonim,  ad  hoc  speciaUter  vocatoruni  et  rogalo- 
riini,  praesencia,  personahler  constitutus  magnificiis  et  spec- 
labilis  Dominus  Cornélius  Duplicius  Scepperus,  Eques  auratus, 
Sacralissimique  et  Potentissimi  Principis  et  Domini  Domini 
Caroli,  ejus  nominis  quinti,  Divina  favente  clemencia  Romano- 
l'um  Imperatoris  semper  Aiigusti,  Germaniae,  Hispaniarum, 
ulriusque  Sicilliae,  Jherusalem,  etc.  Régis,  Archiducis  Aus- 
Iriae,  Ducis  Bourgundiae  et  Galliae  Belgicae  Domini,  etc ,  Cle- 
mentissimi  Domini  Nostri  Consiliarius  et  Secretarius,  habuit 
et  lenuit  in  suis  manibus  unum  qnoddam  mandatum  in  per- 
gameno  conscriptum,manu  praefati  Sacratissimi  Caesaris  signa- 
tnm,  et  ejusdem  Sacratissimae  Majeslalis  sigillo  Imperii  ex  cera 
rubra,  in  capsulam  cerae  flavae  impresso,  dependente,  sigilla- 
tum,  cujus  quidem  mandati  ténor  sequitur  et  est  talis  : 

«  Carolus  quintus,  Augustus,  Divina  favente  clemencia, 
Romanorum  Imperalor,  ac  Germaniae,  Hispaniarum,  utriusque 


(1)  Fail  remarquable,  à  l'époque  où  l'empereur  Charles  V  signa  cet 
éclil  contre  les  nouveaux  chrétiens,  le  pape  Clémenl  VII,  par  l'intermé- 
diaire (le  son  légal,  le  cardinal  Benoit  de  Accollis, admit  dans  ses  Élats  les 
Juifs,  les  Turcs  et  tous  les  peuples  orientaux. 


(  612  ) 

Sicilliae,  Hierusalem,  iiisularum  Baiearium  Fortunatarumque 
et  noyi  orbis  Indiarum,  etc.  Rex,  Arcliidux  Aus(riac,Diix  Biir- 
gundiae  et  Galliae  Belgicac  Dominus,  etc.  Cum  audiaiiius  quani 
plures   Cristiariam    religionera  simulantes  Cristianosque   sub 
Cristiana  specie  atque  habitu  decipientes,  parliiii,   collectis 
rébus  suis  omnibus  atque  etiam  alienis,fugam  in  Orientem  et 
ad  Turcarum  aliorumque  boslium  Cristianae  fidei  dominia  et 
terras  parare,  partim,  occasionem  commodiorem  lemporis  ex- 
pectantes,  in  dominiis  terrisque  lam  Imperii  (juani  Galliae  Bel- 
gicac Germaniaeque  heredilariis  Noslris  dcgere,alios  etiam  ad 
frequenlanda  comraercia  et  coëmenda  quae  eis  ex  usu  viden- 
tur,  quaeque  poslca   transmiltant  vcl  secum  ferant,  ad  eadeni 
dominia  jNostra  fréquenter  commigrare,  subditos  Xostros  deci- 
pientes, facultatibus  spoliare  bisque  bostes  fidei  Nostrae  et  Nos- 
iros  clandestine  et  apcrte  eliam  juvare,  quo   sic  melius  ipsi 
tandem  ad  dictas  terras  boslium  Cristianae  fidei   et  Noslros 
commigrare  cl  se  cum  suis  omnibus  conferre  possint,  prout 
multi  eorum  jam  fccerunt  niercatore   ,  etiam  qujosdam  arma 
offensiva  ad  cosdem  Turcas  secreto  mittere,  nostraque  intersit 
in  hujusmodi   mentitos   Christianos  mercatore^que,  qui  arma 
offensiva  transmittunt,  animadvertere  cosque  meritis  poenis 
aflicere  et  punire,  probibereque  ne  Nostram  ditionem  ac  sub- 
ditos facultatibus  spolient  bisque  bostes   Nostros  juvent,  de 
fide,  industria  atque  dexleritale  spectabilis,  fidclis,  'Sohïs  di- 
lecti  CoRNELii  DuPLicii  ScEPPERi.  Consiliarii  et  Secretarii  Noslri 
plurimum  confisi,  eumdem  Commissarium  Nostrum  ad   eam 
rem  elegimus ,  crcavimus  ac  deputavimus,  ac  tenore  praesen- 
tium  eligimus,  crcamus  ac  dcputamus,  cum  facullale  ac  poles- 
tate  uninn  vel  plures  Commissarium  vel  Commissarios  ido- 
neos,tamen  iihi   ipse  personaliter  his  exeqtiendis  {nteressc 
nequiveril,  loco  sui  suhstiluendi,  suhrogandi  ac  snbdelegandi, 
qui  similem  aut  alias  limilatam  habeant  poUstaiem  ut,  vi  ar 
nomine  Xoslro,  et  lanquam  Xoster  in  hac  parte  Commissa- 
rius  aut    Commissurii  in  quuscumque  \oslrae  ac  Romani 
Imperii  ditionis  ac  dominiorum  Nostrorum  Galliae  Belgicae 


(  615  ) 

et  Gcrwaniae  partes  se  conférant ,  al(iiie  hujusinodi  inciilitos 
ac  siimiliitos  Chrislianos,  alios  cliaiii  inoi'calorcs  arma  offcnsiva 
ad  ïurcas  mittcntcs  eorumque  incrccs  ac  hona  mobilia  et  im- 
mobilia, si qunc  illos  liahere  coniii;(Mit  et  qiiacuinque  ca  fucrint, 
iibivis  i:çentiijiii  repcrlos  et  reperta,  capiaiit  seii  capi  ne  earceri- 
bus  detineri  faciaiit,  et  oftîcialibus  ae  judicibus  ordinariis  loco- 
riim  in  quibus  capti  luerint,  Iradanl,  ut,  in  cos  sumniaric  pro- 
cedendo,  processus  forment,  instruant,  décidant  et  expeditam 
justiciam ,  et,  si  casus  id  exigere  videattir,  causa  cognita  et 
juslicia  praevia  etiam  usque  ad  ultimum  supplicium  ethujus- 
modi  bonoruni  con/iscalioneni  procédant  et  procedi  faciant, 
atque  alia  omiiia  et  siiigula  exequanlnr  qiiae  in  pracniissis  et 
circa  ()racmissa  necessaria  visa  fuerint;  mandantes  et  serio 
praeeipienles  quibuseiinique  locum  lenenlibus.Giibernatoribus 
et  Olïîeiariis  Noslris,  tani  mediatis  quam  immediatis,seu  eorimi 
Jocum  tenentibiis,  in  Romano  Imperio  et  aliis  dominiis  ae  pro- 
vinciis  Nostris  lieredilariis,  tam  in  Italia  scilieet  quam  in  Gal- 
lia  Belgiea  et  Germania,  inslitutis  vel  inslituendis,  quoeum- 
que  nomine  nuneupatis  et  quavis  fungantur  dignilate,  oflîcio 
vel  auctorilate,  atque  universiset  singulis  Principibus  tam,  ec- 
elesiaslicis  quam  seeularibus,  Ducibus,i\Iarcionibus,  Comitibus, 
Baronibus,  Militibus,  Capitaneis,  Tribunalibus  quoque  genera- 
libus  et  parlicuiaribus,  Consiliariis,  Regentibus,  Potestatibus, 
Burgimagistris,  Consulibus  ceterisque  Magislralibus  quarura- 
cumque  provinciarum,  civitaturn,  opj)idorum,  Jocorum  et  ter- 
rarum  alque  aliis  quibutcumque  Nostris  et  Romani  Imperii 
subditis,  (juocumque  nomine  nuneupatis  et  cujuseuraque  status, 
dignitatis  aut  condilionis  fuerint,  ut  quotiescumque  ab  ipso 
CoRNELio,  Conrmissario  Nostro,  aut  a  Commissariis  ab  eo  siib- 
delegandis  aut  deputandis,  admoniti,  et  his  litteris  Nostris  aut 
earum  auclenlico  exemplari  requisili  fuerint,  hujusmodi  reos 
eapiant,  deliiieanl  et  arreslent  scu  capi,  detineri  et  arreslari  fa- 
eiant  ;  videlicet  tam  personas  eteorpora  praefatorum  ementito- 
rum  Cbrislianorum  et  ad  Turcas  iter  parantium,ae  eorum  qui 
melioremoccasionem  eo  conferendi  se  ex[;ectantes,inter  Chris- 


(  614) 

tianos  et  subditos  Nostros,  sub  habitu  et  spocie  christiana,  in 
doiiiiniis  Iraperii  et  Galliae  Belgicae  Gerraaniaeque,  heredita- 
riis  Nostris,  degunt  vel  degere  comperti  fuerint,  aut  ad  ea  do- 
niinia,  specie  ut  supra,  coëmpturi  res  necessarias,  occulte  se 
conferunt  merca tores,  etiam  eos  qui  arma  offensiva  ad  diclos 
ïurcas  transmittere  comperti  fuerint,  quam  bona,  tam  mobiiia 
quam  imraobilia,  si  quae  illos  habere  contigeritet  quaccumque 
ea  fuerint,  et  merces  taliter  deiinquentium  subditosque  Nos- 
tros fraudanlium  ;  quas  quidem  merces  et  bona  Nobis  expositum 
est  illos  sub  falsis  insigniis  extrahere  solitos,  sarcinas  etiam 
niercatorum  quorumcumque  signissignatas,  de  quibus  légitima 
informatio  erit,  quod  in  eis  praefalorum  emenlitorum  Cbristia- 
norumbona  contineantur,  quae  tam  diu  teneantur,  donec  con- 
sliterit  certo  ad  quos  pertineant  et  quorum  sint,  utque  etiam 
illi  mercatores,qui  talia  bona  aliquando  sub  suis  marcis  et  signis 
foras  misère  aut  mittere  comperti  sunt,  desuper  via  juris  re- 
quirantur  coganturque  deponere  et  teslificari  veritatem,  quid  et 
quantum  sciant,  et  bona.  apud  se  deposita  vel  commissa,  pan- 
dere  et  in  raanus  judicum  assignare,  ubieumque  inveniantur 
et  capi  poterunt,  et  nullo  pacto  relaxent,  donec  de  hujusmodi 
dtlictis  alque  excessibus  constito  débite  ministretur  justicia, 
declareturque  quid  de  hujusmodi  personis  et  bonis  sic  de- 
lentis  jure  praevio  sit  statuendum  et  alias  ab  bis  qui,  ut  prae- 
mittitur,capientur,  omnibus  mediis  legitimisetajure  permissis 
Veritas  erualur  et  passim  ab  eis  intelligatur,  etiam  per  ques- 
lionem,  si  justiciae  et  indiciorum  qualitales  id  exigere  videan- 
lur,  quid  inter  se  dosignavcrint,  quosque  hujusmodi  conspi- 
rationis  socios  habuerint,  qui  ejus  rei  fuerint  conseil  et,  bis 
habitis,  in  alios  quoque  meritis  poenis  animadverli  possit,  bona 
autem  ita  adjudicata  serventur  et  custodiantur  fideliler  et  in- 
tègre, eodem  in  loco  ubi  sentencia  contra  illos  prolata  erit, 
neque  ad  cujusque  arbilrium  aut  voluntatem  dimoveantur  aut 
distrahanlur,  donec  et  quousque,  alio  Nostro  mandato,  quid  de 
illis  fieri  mandaverimus  apparuerit.  Et  cum  hoc,  per  universum 
Romanuin  Im})crium  ac  dominia  Nostra  hcredifarin  Galliae  Bel- 


(615  ) 

gicae  cl  Germanicic  vl  Ilaliac,  ut  pracmilliliir,  excqui  debeanl, 
volumus,  decernimus  et  jnboimis  ul  liis  litteris,  vel  carum  auc- 
tentico  excmplari.ab  omnibus  et  ubiquc  parcatur  et  obediatur, 
non  obslantibus  salvis-eonduclibus,  indultis  ,  litteris  passagii 
et  quibuscumque  aliis  permissionibus,  per  ipsos  falsos  et  enien- 
titos  Cristianos,  sub  Cbristianitatis  colore,  aut  alios  praedictos 
(raudulenter,  subrepticie  et  obreptive  impelratis  et  quovis 
praelextu  ab  eisdein  allegato  concessis,  ac  omnibus  aliis  in 
contrarium  facientibus,  cessanlibus  quibuscumque,  quibus 
omnibus  et  singulis,  pro  bac  vice  tantum,  derogamus  et  de- 
rogatum  esse  volumus,  harum  testimonio  lilterarum,  manu 
Nostra  subscriplarum  et  sigilli  Noslri  Caesarei  appensione  mu- 
nitarura.  Datum  Mantuae,  die  XVIP  mensis  Aprilis,  anno  Do- 
mini  millesimo  quingentesimo  tricesimo,  ImperiiNostri  decimo, 
aliorumque  Regnorum  decimo  quinto. 

(Signât  mn) 

Carolus. 
El  super  plicam  : 

Ad  mandatum  Caesareae  et  Catholicae  Màjestatis  proprium. 

Alph.  Valdesius. 

Et  a  tergo  :  Recepta.  Obernburger. 

Cujus  quidem  mandati  sive  commissionis  vigore,  praefatus 
niagnificus  Dominus  Cornélius,  ut  Commissarius  in  bac  parte 
generalis,  cum  in  omnibus  se  praesentem  adesse,  aut  omnia  ea 
se  praesentem  obire  quae  in  ipso  raandalo  continenlur,  non 
posse  diceret,  sibisubstituitacsubdelegavit,  ac  tenore  praesen- 
tium  substituit  ac  subdelegat,  cum  poteslate  per  ipsum  subdele- 
gatumel  subcommissarium  etiam  subdelegandi  et  subslituendi 
unum  vel  plures,  cum  eadem  poteslate,  subcommissarium  vel 
subcommissarios,  aut  subdelegalum  vel  subdelegatos,  si  casus 
id  exigere  videatur,  in  mei  Notarii  pnblici  testiumque  infra- 
scriptorum  praesentia,  honestum  virum  Johannem  Vuvstinck, 


.        ^  610  ) 

(le  Trajecto,  tanqiiam  suum  in  hae  parle  veruni-,  legitiimim  et 
indubitatiim  subcoinniissarium  et  subdelegatum ,  per  totiini 
Romanum  Imperium  et  ubiqiie  locoriiiii,  prout  in  mandato 
conlinetur;  ita  tamen  quod  sibi  liberiiin  relinqui  petit  alios 
cadem  potestate  substitnere,  iinmn  vel  plures,  quorum  subsli- 
lutio  cl  subdelcgatio  praesenti  subslitutioni  non  derogelur, 
reservans  etiam  sibi  liberam  revocalioneni  quandocumque  sibi 
visum  fueril  vel  cxpedire  judicavcrit,  in  quos  quidem  subcom- 
inissarios  et  subdelegatos  suo  ;  cl  eorum  queinlil)et  ])Otestatem 
plenariam  ea  omnia  et  singula  faciendi  et  exequendi,  irans- 
tulit  et  traiisfudit  et,  leiiore  praesentium,  transfert  et  trans- 
l'undit,  quani  ipse  vi  praefati  mandati  sive  commissionis  a  Sa- 
eralissima  Caesarea  et  Catboliea  Majeslate  accepit  ;  hoe  tamen 
caulo  et  expresso,  quod,  ubi  primum  ab  iisdem  snbcommissa- 
riis  et  subdelegalis,  aut  eorum  quolibet,  aliquid  realiter  et 
cum  effeclu  contra  reos,  nomine  ut  in  mandato,  altcntatum 
vel  exequulum  fuerit,  teneanlnr  et  obligenturadeum,  tanquam 
ad  Commissarium  in  hae  parte  generalcm,  actionuni  suarum 
rationes  referre,  eum(iue  de  omnibus  et  singulis  suis  actiscertio- 
rcm  reddere,  voluntatemque  et  decretnm  ipsius  expectare,qua 
tamen  expectalionc  non  obstante,  interea  libère  possint  contra 
caplos  aut  detentos,  aut  bona  et  merces,  nomine  ut  supra 
arreslatas,  juridice  proeedere  seu  procedi  facere,  etiam  usquc 
ad  dilTinitivam  sentenliam  ;  quibus  omnibus  ut  supra  eautis, 
praefalum  Joannem  VuvsTinNCK  prosuo  vero,  Icgiltimo  et  indu- 
bilato  subcommissario  et  subdelegato,  cum  potestate  plenaria 
omnia  et  singula  exequendi,  ut  supra  baberi  petit,  omnemque 
ci  fidem  adbiberi,  assistenliam  favoiemque  impendi  quae  sibi, 
ut  in  hae  parte  Commissario  generali,  ex  Sacralissimae  Caesa- 
reae  Majestafis  jussu  et  mandalo  adhiberctur  et  impenderetur; 
in  eujus  quidem  subcommissionis,  siibdelegationis  et  transfu- 
sionis  per  eum  in  j;raefatam  per.-onam  factae  fidcm,  robur  el 
testimonium,  praefatus  magnificus  Dominus  Cornélius,  Com- 
missarius  generalis,  a  me  Xolario  publico  infrascriplo,  tanquam 
persona  auctentica'et  fide  digna,  rogavit,  petiit  et  rcquisivit 


(617) 

uniim  aut  pliira,  lot  quoi  forent  nrccssarin,  publicum  scu  pu- 
blica  cdi  alqucconUci  in-.lrunicnlum  aut  inslriinicnta. 

Acla  siint  liacc  Augustac  Vindelicorum,  in  acdibus  Jacobi 
Rcylcnggcr,  cjiis  oppidi  civis,  anno,  indiclione,  mcnsc,  die, 
hora  et  |)ontiru'atu  qiiil)iis  siipra,  pracsenlibus  ibidem  Matthia 
SiMMERMAN,  clerico  Treverensis  et  Cu.vno  (?)  Algoet,  clerico 
Tornacensis  diocesis,  leslibus  ad  praemissa  rogatis  atque 
requisilis. 

Sic  signatum  : 

Alexander  Cii.  W. 

Sic  subseriptum  : 

El  quia  ego  Alexander  ....  (sic)  ab  Herborn,  Treverensis 
diocesis,  supradictae  Sacratissimae  Caesarae  et  Catbolicae  Ma- 
jestatis  Seeretarius  ordinarius,  pubh'cus  Apostolica  aucloritate 
Notarius,  praediclae  substitulioni,  subdelegalioni,  poteslatis 
dationi  et  reservationi,  omnibusque  aliis  et  singuiis,  dum  sic 
fièrent  et  agerentur,  una  cum  praenominatis  testibus  praesens 
interfui  eaque  omnia  et  singula  sic  fieri  vidi  et  audivi,  ideo  hoc 
praesens  publicum  instrumentum,  manu  alterius  fideliter 
scriptum,  evinde  confeci  et  pubiicavi,  signoque,  noraine  et 
cognomine  meis  solitis  et  consuetis  signavi  et  subscripsi,  in 
fidem  et  lestimoniuni  omnium  et  singulorum  praemissorura, 
rogalus  et  requisitus. 

Recogniliim  cum  originali  instrumento  per  me 

J.  DE  Keyser  (1). 

Corneille  Diiplicius  Scepperiis  qui,  comme  nous  l'avons 
vu,  était  constamment  en  relation  avec  le  magistrat  d'An- 


(I)  Jean  de  Keyser  remplissait,  à  cotte  époque,  les  fonctions  de  secré- 
taire d'ADver.ç. 


(  618  ) 

vers,  revint  dans  cette  ville,  vers  1556.  D'après  le  témoi- 
gnage de  plusieurs  auteurs,  il  y  mourut  le  28  mars  de  cette 
année,  âgé  d'un  peu  plus  de  52  ans. 


M.  Alphonse  Le  Roy  donne  lecture  d'une  notice  biogra- 
phique sur  Adolphe  Borgnet,  membre  de  la  classe,  décédé 
à  Liège  le  15  février  dernier. 

La  classe  vole  des  remercîments  à  M.  Le  Roy  pour  cette 
lecture;  elle  décide,  en  même  temps,  l'impression  de  celle- 
ci  dans  le  prochain  Annuaire  de  la  compagnie.  Cette  notice 
sera  accompagnée  du  portrait  du  défunt. 

Vu  l'heure  avancée,  la  continuation  de  la  lecture  de 
M.  Piot  Sur  la  diplomatie  concernant  les  affaires  maritimes 
des  Pays-Bas  vers  le  milieu  du  XVP  siècle  jusqu'à  la  trêve 
de  Vaiicelle,  est  remise  à  la  séance  du  mois  de  décembre 
qui  aura  lieu  le  lundi  6. 

M.  Alph.  Rivier  est  également  iuvscrit  à  l'ordre  du  jour 
de  cette  séance  pour  une  lecture  portant  pour  titre  :  Les 
méthodes  au  XVP  siècle.  Jean  de  Drosay, 


(  619  ) 


CLASSE   DES  BEArX-ARTS. 


Séance  du  4  novembre  1875. 

M.  Alph.  Balat,  directeur. 

M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Al  vin,  L.  Gallait,  J.  Geefs, 
C.-A.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Edm.  De  Busscher,  Aug.  Payen, 
le  chevalier  Léon  de  Burbure,  J.  Franck,  Gust.  De  Man, 
Ad.  Siret,  Julien  Leclercq,  Ernest  Slingeneyer,  Alex. 
Robert,  F.-A.  Gevaert,Ad.Samuel,wïem6res;Éd.de  Biefve, 
correspondant. 

M.  Chalon,  membre.,  et  M.  Ch.  Piot,  correspondant  de  la 
classe  des  lettres,  assistent  à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  J.-P.  Colfs,  de  Bruxelles,  exprime  par  écrit  le  désir 
de  pouvoir  disposer  du  grand  vestibule  des  académies  pour 
y  exposer  une  découverte  archéologique  relative  à  l'art 
architectural. 

La  classe  confirme  la  réponse  faite  déjà  à  ce  sujet  par 
M.  le  secrétaire  perpétuel  à  M.  Colfs  :  «  que  l'Académie 
ne  se  prononcera  naturellement  qu'après  avoir  pris  cou- 


(  620  ) 
naissance  de  la  découverte  de  Tauleur,  si  celui-ci  la  lui 
communique.  » 

M.  le  secrétaire  perpétuel  annonce  que  la  commission 
nommée  pour  examiner  s'il  y  a  lieu  d'appliquer  l'article  17 
du  nouveau  règlement  des  grands  concours  au  profit  du 
projet-copie  de  restauration  du  temple  de  Vesta  à  Rome, 
par  M.  Dieltiens,  s'est  réunie  le  vendredi  29  octobre  der- 
nier, à  5  heures,  au  local  de  l'Académie. 

La  commission,  après  examen  des  quatre  plans  du  pro- 
jet-copie, a  reconnu  que  cette  œuvre  rentre  dans  la  caté- 
gorie des  travaux  prescrits  aux  lauréats  des  grands  concours 
pendant  leur  séjour  à  l'étranger. 

Elle  a  décidé,  en  même  temps,  qu'il  y  a  lieu  d'accorder 
une  rémunération  à  l'artiste;  elle  prend  cette  décision  en 
faisant  ses  réserves  au  sujet  des  idées  de  M.  Dieltiens  au 
point  de  vue  de  la  restauration  du  monument,  et  en  consi- 
dération du  mérite  et  de  la  bonne  exécution  de  son  projet. 


PROGRAMME  DE  CONCOURS  POUR  1876. 


La  classe  a  arrêté  de  la  manière  suivante  son  pro- 
gramme de  concours  pour  l'année  1876  : 

IS1IJET§>     E,ITTÉ:nAIRES. 

PREMIÈRE    QUESTION. 

Rechercher  les  origines  de  l'école  musicale  belge.  Démon- 
trer jusqu'à  quel  point  les  plus  anciens  maîtres  de  cette 


(  C2I  ) 

école  se  rattachent  aux  décliantcurs  français  et  anglais  du 
Xlt,  du  XIII  et  du  XV  siècle. 

DEUXIÈME    QUESTION. 

Faire  r/iistoire  de  la  céramique  au  point  de  vue  de  l'art 
dans  nos  provinces,  depuis  Vépociue  romaine  jusqu'au 
XVIV  siècle, 

TROISIÈME    QUESTION. 

Faire  l'histoire  de  l'école  de  gravure  sous  Rubens. 

Donner  un  aperçu  historique  sur  les  édileurs  des  pro- 
duits de  cette  école  et  sur  l'exploitation  commerciale  con- 
temporaine qui  fut  faite  de  ces  gravures  dans  tous  les  pays. 

QUATRIÈME    QUESTION. 

Déterminer  les  caractères  de  l'architecture  flamande  du 
XVP  et  du  XV ir  siècle.  Indiquer  les  édifices  des  Pays- 
Bas  dans  lesquels  ces  caractères  se  rencontrent.  Donner 
l'analyse  de  ces  édifices. 

La  valeur  des  médailles  d'or,  présentées  comme  prix 
pour  chacune  de  ces  questions,  est  de  mille  /ra^îcs  pour  la 
première  et  pour  la  quatrième,  et  de  huit  cents  francs  pour 
la  deuxième  et  pour  la  troisième. 

Les  mémoires  envoyés  en  réponse  à  ces  questions 
doivent  être  lisiblement  écrits  et  peuvent  être  rédigés  en 
français,  en  flamand  ou  en  latin.  Ils  devront  être  adressés, 
francs  de  port,  avant  le  \''  juin  1876,  à  M.  J.  Liagre, 
secrétaire  perpétuel  de  l'Académie,  place  du  Musée,  1. 

Les  auieurs  ne  mettront  pas  leur  nom  à  leur  ouvrage; 
ils  n'y  inscriront  qu'une  devise,  qu'ils  reproduiront  dans 
un  billet  cacheté  renfermant  leur  nom  et  leur  adresse. 

2""^  SÉRIE,  TOME  XL.  40 


[  6n  ) 

Faute  par  eux  de  satisfaire  à  cette  formalité,  le  prix  ne 
pourra  leur  être  accordé. 

Les  ouvrages  remis  après  le  terme  prescrit,  ou  ceux  dont 
les  auteurs  se  feront  connaître  de  quelque  manière  que  ce 
soit,  seront  exclus  du  concours, 

L'Académie  demande  la  plus  grande  exactitude  dans  les 
citations;  elle  exige,  à  cet  effet,  que  les  concurrents  in- 
diquent les  éditions  et  les  pages  des  ouvrages  qui  seront 
mentionnés  dans  les  travaux  présentés  à  son  jugement. 

Les  planches  manuscrites  seront  seules  admises. 

L'Académie  se  réserve  le  droit  de  publier  les  travaux 
couronnés. 

Les  auteurs  des  mémoires  insérés  dans  les  recueils 
ont  droit  à  recevoir  cent  exemplaires  particuliers  de  leur 
travail.  Ils  ont,  en  outre,  la  faculté  de  faire  tirer  des  exem- 
plaires supplémentaires  en  payant  à  l'imprimeur  une  indem- 
nité de  quatre  centimes  par  feuille. 

L'Académie  croit  devoir  rappeler  aux  concurrents  que 
les  manuscrits  des  mémoires  soumis  à  son  jugement 
restent  déposés  dans  ses  archives  comme  étant  devenus  sa 
propriété.  Toutefois  les  auteurs  peuvent  en  faire  prendre 
des  copies  à  leurs  frais ,  en  s'ad ressaut,  à  cet  effet,  au  secré- 
taire perpétuel. 

.«iirjETS     D'AUT     APPLIQUÉ. 

MUSIQUE. 

On  demande  la  composition  d'une  messe  solennelle^  à 
quatre  voix  mixtes,  pour  le  jour  de  Pâques,  avec  la  prose 
ViCTFMiE  Paschali  et  l'offertoire  du  jour. 

Le  compositeur  tâchera  de  ne  pas  dépasser  la  durée 
normale  du  service  religieux. 
La  messe  devra  être  entièrement  inédite. 


(i^i.l  ) 

ARCFIITECTIJRE. 

L'Académie  demande  un  projet  de  pont  monumental,  en 
pierre,  à  placer  sur  un  fleuve  de  iOO  mètres  de  largeur. 

Les  concurrents  pourront  faire  emploi  de  statues,  de 
niches,  de  galeries  et  d'arcs  de  triomphe. 

Le  projet  comprendra  les  abords  du  pont,  avec  rampes 
décorées  conduisant  au  (leuve. 

Les  artistes  produiront  le  plan,  la  coupe  et  l'élévation  à 
l'échelle  de  1  centimètre  pour  i  mètre. 

Les  partitions  et  les  plans  devront  être  remis  au  secré- 
tariat de  l'Académie  avant  le  1"  septembre  1876. 

Un  prix  de  mille  francs,  attribué  à  chacun  des  sujets 
précités,  sera  décerné  à  l'auteur  de  l'œuvre  couronnée. 

L'Académie  n'acceptera  que  des  travaux  complètement 
achevés,  tant  sous  le  rapport  de  l'exécution  que  du  tracé 
graphique. 

Le  manuscrit  de  la  partition  musicale  et  une  reproduc- 
tion du  projet  d'architecture  deviendront  la  propriété  de 
l'Académie. 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leur  nom  à  leur  ouvrage; 
ils  n'y  inscriront  qu'une  devise,  qu'ils  reproduiront  dans 
un  billet  cacheté  renfermant  leur  nom  et  leur  adresse. 
Faute  par  eux  de  satisfaire  à  cette  formalité,  le  prix  ne 
pourra  leur  être  accordé. 

Les  ouvrages  remis  après  le  terme  prescrit,  ou  ceux 
dont  les  auteurs  se  feront  connaître  de  quelque  manière 
que  ce  soit,  seront  exclus  du  concours. 


(  624  ) 
COAJMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


Particularités  inédites  concernant  les  œuvres  musicales 
de  Gossec  et  de  Philidor;  par  M.  Cli.  Piot,  correspon- 
dant de  la  classe  des  lettres. 

Malgré  les  critiques  amères,  dirigées  contre  l'opéra  par 
le  sire  de  Saint-Evremont  et  par  Voltaire,  ce  genre  de 
spectacle,  que  défendait  si  vivement  Dufresny,  était  com- 
plètement à  la  mode  dès  le  XYIP  siècle.  11  en  fallait  par- 
tout, peu  importe  le  style,  fût-il  italien,  français  ou 
allemand.  L'Allemagne  elle-même  ne  put  résister  au  cou- 
rant. Berlin,  Manheim,  Dresde,  Dusseldorf  et  d'autres 
grandes  villes  de  l'empire  germanique  avaient  des  théâ- 
tres d'opéras  français. 

Né  en  Italie  pendant  le  XVP  siècle,  l'opéra  passa  en 
France,  de  là  aux  Pays-Bas,  où  il  fut  pendant  la  seconde 
moitié  du  XVHP,  le  principal  amusement  du  public. 
Bruxelles,  comme  la  province ,  avait  son  opéra  flamand 
et  son  opéra  français  (1). 


(1)  Burney  ,  The  stat.  of  miisic,  t.  I,  p.  152. 

Les  coridilioiis  imposées  aux  sujelsaltachés  à  l'opéra  flamand  étaient  plus 
dures  queceJles  de  la  troupe  française.  Voici  les  obligations  que  Vitzthumh 
voulut  imposer  à  M'i"^  J.  Borremans,  chanleuse  à  l'opéra  flamand  :  1»  11 
n'y  a  ni  aura  jamais  dans  l'opéra  flamand  aucun  emploi  déterminé;  eu 
conséquence  chaque  artiste  devra  renjplir  les  rôles  qu'il  lui  assignera; 
2o  Personne  ne  pourra  se  dispenser  de  chanter  dans  les  chœurs,  ni  de 
paraître  sur  la  scène  française,  toutes  les  fois  qu'il  en  sera  requis;  ô»  On 
observera  rigoureusement  le  costume  prescrit  par  le  directeur  pour  les 
spectacles  flamands  et  français  (Lettre  du  29  février  1776;. 


(  C2:;  ) 

Le  lliéàlre  français  de  Bruxelles,  fréquenté  par  le  gou- 
verneur général  elsa cour,  Pélite  de  l'aiislocratie  du  pays  el 
les  hauts  fonctionnaires  de  l'Etat,  s'était  acquis  une  grande 
réputation  à  l'étranger.  On  le  considérait  généralement 
comme  une  des  principales  scènes  de  l'Europe,  après  celle 
de  Paris.  Burney  constate  que  la  salle  était  une  des  plus 
élégantes  au  nord  des  Alpes  (l).  Par  suite  d'une  bonne 
entente,  Compain  ,  excellent  chanteur,  et  Vilzthumb, 
musicien  célèbre,  étaient  parvenus  à  imprimer  une  direc- 
tion convenable  au  goût  des  Bruxellois.  Afin  d'y  parvenir 
mieux  encore,  et  dans  le  but  de  faire  augmenter  les  re- 
cettes, ils  voulaient  produire  du  nouveau. 

Compain  reçut,  à  cet  effet,  la  mission  d'aller  à  Paris 
engager  de  bons  chanteurs,  d'y  acheter  les  partitions  des 
opéras  d'élite  et  les  meilleures  comédies  à  la  mode.  Pen- 
dant son  séjour  en  cette  ville,  il  eut  une  correspondance 
très-suivie  avec  Franck ,  secrétaire  attaché  à  la  personne 
du  prince  de  Starhemberg,  ministre  plénipotentiaire  de 
l'impératrice-reine  aux  Pays-Bas  autrichiens,  et  spéciale- 
ment chargé  de  surveiller  le  théâtre. 

Nous  avons  puisé  dans  celte  correspondance  et  dans 
celle  qu'il  eut  avec  Vitzthumb  un  grand  nombre  de  ren- 
seignements concernant  les  compositeurs  d'opéras  établis 
dans  la  capitale  de  la  France  et  des  pièces  représentées 
aux  théâtres  de  cette  ville.  Dans  cette  notice  nous  parle- 
rons seulement  de  Gossec  el  de  Philidor. 

Au  mois  de  février  1774  Compain  était  à  Paris  fure- 
tant partout,  liant  connaissance  avec  les  artistes  les  plus 
distingués  et  les  compositeurs  les  plus  en  vogue.  Précisé- 


(1)  Burney,  /.  c,  p.  22 


(  m  ) 

ment  à  son  arrivée  on  donnait  à  l'opéra  la  première  repré- 
sentation (22  février  1774),  d'nne  œuvre  nouvelle  de 
Gossec,  compositeur  célèbre  établi  à  Paris  et  né  à  Ver- 
gnies,  commune  appartenant  actuellement  à  la  Belgique- 
C'était  son  grand  opéra  intitulé  Sabiniis.  Compain  assista 
à  cette  représentation  et  admira  le  style  vigoureux  et  puis- 
sant du  créateur  de  la  symphonie  en  France.  Par  l'intro- 
duction d'instruments  non  encore  employés  dans  l'orches- 
tration ,  Gossec  parvint  plus  tard  à  modilier  complètement 
la  musique  de  l'opéra.  De  l'avis  de  Compain,  la  partition 
de  Sabinus  était  délicieuse;  mais  le  libretto  était  détes- 
table, sans  liaison  aucune.  «  Il  n'a  pas,  conlinue-t-il,  le 
»  sens  commun.  De  sorte  que  cet  opéra  ne  fera  pas  à 
»  M.  Gossec  tout  l'honneur  qu'il  mérite.  »  Le  corres- 
pondant de  Franck  admirait  les  ballets  et  les  costumes  de 
la  pièce  et  particulièrement  la  mise  en  scène  du  troisième 
acte.  Quant  aux  acteurs,  ils  laissaient,  selon  lui,  beau- 
coup à  désirer.  Nous  le  comprenons.  Au  lieu  de  chanter, 
les  artistes  criaient  à  tue-tète ,  pensant  par  ce  moyen  pro- 
duire un  grand  elfet  et  dominer  complètement  l'orchestre. 
A  cette  époque  c'était  une  manie  générale  ,  dont  nous 
rendrons  compte  dans  la  suite. 

Le  peu  de  mots  écrits  par  Compain  au  sujet  de  Sabinus 
suffisaient  pour  exciter  l'enthousiasme  de  Vitzthumb.  Il 
voulait  absolument  faire  la  connaissance  de  la  partition 
de  cet  opéra ,  se  souciant  très-peu  de  la  médiocrité  du 
poème.  De  la  Place,  poète  et  écrivain  français,  qualifié  par 
Quérard  de  fécond  et  des  plus  médiocres  du  XVIU'  siècle, 
était  à  cette  époque  le  factotum  littéraire  de  la  scène  de 
Bruxelles.  Il  s'était  engagé  à  introduire  dans  le  libretto 
de  Sabinus  les  changements  jugés  nécessaires  par  Vitz- 
thumb,  grand  amateur  de  modifications  dans  les  poèmes 
et  la  musique  des  opéras  qu'il  dirigeait. 


(  627  ) 

Loin  (le  partager  cet  enlhousiasme ,  Compain  jugea  la 
pièce  peu  convenable  pour  la  scène  de  Bruxelles,  malgré 
le  mérite  incontestable  de  la  partition.  «  Quelque  belle 
»  que  soit  la  musique  de  cet  opéra,  dit-il,  il  ne  nous 
»  produira  rien.  iMais  j'attends  que  M.  Gossec,  ainsi  qu'il 
j>  me  l'a  promis,  m'indique  un  jour  pour  aller  chez  lui  le 
I  prier  de  nous  vendre  les  opéras  non  joués  ou  non 
p  gravés  qu'il  peut  avoir  en  son  portefeuille  (1).  »  Vitz- 
thumb  insistait.  Mais  l'opéra  n'était  pas  gravé,  et  Gossec 
avait  annoncé  à  Compain  qu'à  l'avenir  le  burin  ne  repro- 
duirait plus  ses  œuvres,  si  ce  n'est  par  souscription.  On 
avait  aussi  supprimé  à  Paris  un  des  actes.  Au  lieu  de  cinq 
il  n'y  en  avait  plus  que  quatre.  C'est  en  effet,  selon  les 
biographes  de  Gossec,  un  opéra  en  trois  ou  quatre  actes. 
Le  cinquième  leur  semble  inconnu.  «  Je  vous  préviens, 
»  ajoutait  Compain  en  faisant  part  de  cette  suppression, 
»  qu'il  n'y  a  ni  queue,  ni  tète  à  présent.  Je  vous  envoie 
»  le  poëme  dont  M.  Gossec  m'a  fait  cadeau  et  tel  qu'il  a 
»  été  joué  chez  le  roi.  »  Toutes  ces  objections  tombaient 
devant  la  volonté  de  Yitzthumb.  Il  voulait  posséder  la 
partition  primitive  de  Sabinus. 

Cependant  la  pièce  n'a  jamais  paru  sur  la  scène  de 
Bruxelles,  si  nous  devons  nous  en  rapporter  exclusive- 
ment au  Calalofjue  des  pièces  qu'il  est  permis  de  repré- 
senter sur  les  théâtres  des  Pays-Bas  autrichiens  jusqu'à 
ce  jour  12  avril  1788. 

Pendant  qu'il  s'opposait  de  tout  son  pouvoir  à  l'acqui- 
sition de  Sabinus,  Compain  proposait  celle  de  Périgourdin, 
opéra  burlesque  en  un  acte ,  composé  par  Gossec  pour  le 


(1)  Lellre  adressée  à  Franck  le  5  mars  1774. 


(  628  ) 

prince  de  Conti ,  qui  l'avait  nommé  son  directeur  de  mu- 
sique, et  joué  seulement  chez  lui.  Cette  pièce,  dont 
Hédouin  (1),  un  des  biographes  les  plus  consciencieux  de 
Gossec,  ne  fait  pas  mention,  était  sur  le  point  d'être 
représentée  aux  Italiens,  lorsqu'au  moment  de  la  répé- 
tition une  difficulté  obligea  le  compositeur  à  la  retirer. 
«  Il  veut,  dit  Compain,  nous  en  rendre  propriétaire 
»  moyennant  40  louis  d'or.  Je  l'ai  prié  d'attendre  que 
»  j'eusse  consulté  M.  Vitzthumb.  Ayez  la  bonté  de  m'en- 
»  voyer  des  instructions  à  cet  égard.  Il  voulait  50  louis. 
»  Je  l'ai  prié  de  nous  traiter  en  gens  à  talents.  Et  il  m'a 
»  dit  que  sa  prétention  seroit  de  40  louis.  Ainsi  c'est  à 
»  prendre  ou  à  laisser  (2).  »  Ce  prix  paraissait  encore 
trop  élevé,  et  le  projet  -de  monter  le  Périgourdin  fut  aban- 
donné comme  celui  de  représenter  Sabiniis.  La  fille  de 
Compain,  qui  avait  assisté  à  la  représentation  de  la  pre- 
mière de  ces  pièces,  l'avait  déclarée  mauvaise  (3). 

Il  fallait  cependant  du  neuf. 

A  cet  effet  les  directeurs  du  spectacle  de  Bruxelles 
s'entendirent  avec  un  poète  français ,  nommé  Plein- 
chesne,  ancien  capitaine  d'infanterie,  dont  le  véritable 
nom  était  Roger-Timolhée  Regnard  de  Pleinchesne.  Ce 
personnage,  sur  lequel  Quérard  fournit  des  renseigne- 
ments très-incomplets,  était  auteur  de  quelques  pièces 
dramatiques  (4).  A  Paris  il  suivait  les  théâtres,  où  il  jii- 


(1)  Hédouin,  Mosaïque,  peintres^  musiciens^  littérateurs ,  artistes 
dramatiques. 

(2)  Lettre  du  9  mars  1774. 

(5)  Lettre  de  Compain  à  Franck  du  14  mars  1774. 

(4)  France  littéraire,  t.  VII,  p.  200,  où  se  trouve  une  liste  de  ses 
œuvres,  qui  peut  être  complétée  au  moyen  de  la  correspondance  que  nous 
avons  sous  les  yeux.  Celle-ci  mentionne  :  1»  Le  malentendu ,  comédie 


(  629  ) 

geait  les  partitions  et  les  poëmes  avec  une  certaine  pré- 
tention. Comment  était-il  entré  en  relation  avec  les  direc- 
teurs de  la  scène  de  Bruxelles?  Nous  l'ignorons.  Ce  fut 
sans  doute  par  suite  de  la  rencontre  qu'il  avait  faite  de 
Compain,  dans  l'un  des  salons  de  Paris.  Il  fit  pour  notre 
théâtre  une  pièce  intitulée  Bcrthe,  comédie  héroï-pasto- 
rale en  trois  actes  et  en  vers,  mêlée  d'ariettes.  Le  librctto, 
imprimé  à  Bruxelles  en  1774,  indique  Philidor  et  Gossec 
à  litre  d'auteurs  de  la  musique.  Ce  qui  n'est  pas  tout  à  fait 
exact;  nous  le  ferons  voir  plus  loin. 

Cet  opéra,  dont  nous  n'avons  pas  pu  trouver  la  parti- 
tion, n'est  indiqué  nulle  part  par  les  biographes  de  ces 
deux  artistes.  Le  sujet  en  a  été  emprunté  au  roman  de 
Berte  ans  grans  pies,  composé  par  un  Belge,  Adenès  Li 
Rois,  après  l'année  1275  (1).  Aussi  peu  historien  que 
poète,  Pleinchesne  fait  remonter,  dans  son  Avant-Propos, 
ce  poème  au  XI*"  siècle.  Il  fut  composé,  ajoute-t-il,  par 
un  nommé  Leroy  d'Adenaise  et  dédié  à  Jean  Tristan, 
troisième  fils  du  roi  Saint-Louis,  mort  à  Tunis  en  1270. 
Ces  contradictions  de  dates  ne  lui  semblaient  nullement 
choquantes.  Elles  ne  le  gênaient  en  aucune  façon  dans  la 
préface. 


française  clans  le  genre  italien  en  5  actes,  jouée  à  la  comédie  italienne; 
2°  La  vérité,  comédie  en  deux  actes,  écrite  à  la  louange  du  roi  et  de 

la  reine;  S»  Le  prince  Tiri,  id.,  4°  Le  fanfaron,  id.  ;  5"  Le  B tiré, 

opéra  comique,  sujet  emprunté  au  comte  Menom  par  Voltaire;  6°  L'épreuve 
de  Maricoux,  opéra  comique;  7°  L'heureux  engagement,  opéra  co- 
mique en  un  acte;  8°  Le  bon  médecin,  opéra  comique  en  5  actes  (Lettre 
du  23  avril  1773,  adressée  par  Pleinchesne  à  Vitzthumb). 

(1)  Voir  à  ce  sujet  notre  Notice  intitulée  :  Fragment  d'un  poème  fla- 
mand inédit,  imité  de  Li  romans  de  Berte  aus  grands  pies  (Bulletin 
DE  l'Académie  royale  de  Belgique  ,  2^  série  ). 


(  650  ) 

Le  libretlo,  au  débit  froid  et  glacial ,  sans  combinaisons 
dramatiques,  sans  intrigue  aucune,  fut  remis  par  l'auteur 
à  Gossec  pour  en  faire  la  musique.  Une  comaiande  sem- 
blable ne  devait  guère  flatter  l'artiste.  Il  avait  à  faire  à 
un  poëte,  sur  lequel  Phiiidor  avait  prononcé  condamna- 
lion  en  le  qualifiant  d'homme  sans  ordre.  Il  devait  s'inspi- 
rer d'un  poëme,  sans  poésie,  parsemé  de  vers  très-singu- 
liers, comme  par  exemple  les  suivants  : 

Raimond,  peut-on  donner  ce  qui  n'est  pas  à  soi? 

Pour  vous  parler  votre  langage , 
Des  maux,  dont  je  vous  deuil,  je  sens  le  désarroi. 
Tous  deux  même  torture  en  ce  tems  nous  partage. 

Pleinchesne  se  plaignit,  il  est  vrai,  dans  une  lettre 
adressée  à  Vitzlhumb  (25  avril  1775)  des  changements 
portés  à  son  libretto.  «  Par  le  plus  grand  hasard  du 
»  monde,  dit-il,  il  m'est  tombé  entre  les  mains,  en  route, 
»  un  imprimé  de  Berthe,  daté  de  Bruxelles,  que  je  n'ai 
»  pas  reconnu  pour  être  votre  ouvrage,  ni  le  mien.  On  y  a 
»  tellement  massacré,  défiguré,  anéanti  à  plaisir  mon 
»  dialogue,  dont  on  a  si  bien  ôté  toute  chaleur  et  tout 
»  inlérest,  qu'il  m'a  soulevé  moi-même  à  sa  lecture,  et 
))  que  je  ne  peux  pas  croire  que  cette  pièce,  dans  cet  état, 
»  pût  obtenir  une  seule  représentation  sur  un  théâtre, 
D  comme  le  vôtre.  »  Selon  Yitzthnmb,  la  faute  devait  en 
être  rejetée  sur  la  censure,  dont  les  ciseaux  l'avaient  forcé 
à  faire  des  changements  (i).  Ce  n'étaient  pas  les  seuls. 
L'auteur  en  introduisit  à  son  tour,  lorsque  son  travail 
avait  déjà  été  remis  à  Gossec.  Toutes  ces  modifications 


(1)  Voir  plus  loin,  dans  les  correspondances  la  lettre  de  Vitzthumb  à 
Pleinchesne  du  11  mai  1775. 


(  651  ) 
paraissent  avoir  singulièrement  contrarié  l'artiste.  (îossec 
traînait;  il  ne  finissait  pas  l'ouvrage.  Lorsque  Pleinchesne 
lui  écrivit  pour  le  [)rier  d'achever  la  partition,  Gossec  vint 
le  trouver.  «  Vous  connoissez,  dit  Pleinchesne,  sa  simpli- 
»  cité,  son  honnesleté  et  sa  modestie,  Il  m'a  l'ait  observer 
D  qu'il  était  chargé  de  travaux;  que  ce  qu'il  avoit  lait  jadis 
»  dans  Berlhe  ne  pouvoil  pas  servir;  que  la  musique 
»  depuis  ce  temps  avoit  fait  beaucoup  et  de  très-grands 
»  progrès  en  France;  que  le  genre  étoit  changé;  que 
»  moi-mérne  j'avois  l'ait  beaucoup  de  changements  dans 
»  mes  paroles;  que  le  tems  étoit  trop  court;  et  qu'il  a  eu 
»  beaucoup  de  peine  à  se  rendre  et  à  s'en  charger.  En  tin 
»  à  l'orce  de  le  solliciter,  je  Fai  déterminé,  et  vous  trou- 
»  verez  ci-joint  sa  soumission  et  les  conditions  qu'il  y  a 
»  mises  (1).  » 

Quelques  jours  plus  tard  (22  août  1774)  il  écrivit  de 
nouveau  à  Compain.  Selon  lui  Gossec,  occupé  à  composer  la 
partition  deBerthe,  avait  envie  de  se  rendre  à  Bruxelles, 
où  il  se  proposait  de  l'aire  exécuter  dans  l'église  Sainte- 
Gudule,  au  2  novembre,  jour  des  Trépassés,  sa  célèbre 


(1)  Lettre  du  18  août  1774.  Voici  ces  conditions  écrites  pour  Plein- 
chesne et  signées  de  la  main  de  Gossec  : 

Je  soussigné,  m'engage  et  promets  à  MM.  les  directeurs  du  spectacle  de 
Bruxelles,  de  mettre  en  musique  le  poëme  de  Topera  de  Berthe ,  paroles 
de  M.  Pleinchesne,  moyennant  la  somme  de  douze  cent  livres,  dont 
600  livres  me  seront  paies  sur-le-champ  à  la  réception  du  présent  enga- 
gement, sans  compter  mes  frais  de  voyage,  si  je  suis  nécessaire  pour 
l'exécution  de  la  pièce;  me  réservant  la  propriété  totale  de  ma  musique 
tant  pour  la  gravure, que  pour  le  parti  que  je  pourrai  en  tirer  vis-à-vis  de 
tout  autre  spectacle  que  celui  de  Bruxelles.  Je  m'engage  de  plus  à  fournir 
la  partition  entière,  et  les  parties  simples  et  les  rôles  à  part,  le  tout  d'ici 
au  premier  octobre.  Fait  et  convenu  avec  M.  Pleinchesne,  chargé  de  ce 
traité  par  MM.  les  directeurs  de  Bruxelles.  —  A  Paris  17  aoust  1774. 

Gossec. 


(  632  ) 

messe  de  Requiem.  «  Je  suis  même  occupé ,  ajoute-t-il ,  à 
j>  déterminer  mon  ami  Richer,  que  vous  connaissez  cer- 
»  tainement  et  qui  sans  contredit  est  l'homme  du  royaume 
»  qui  chante  le  mieux,  à  être  des  nôtres  à  faire  ce  voyage 
»  pour  chanter  son  rôle  (sic)  dans  la  messe  de  Gossec, 
»  pour  venir  à  nos  répétitions,  pour  donner  quelques 
»  leçons  à  vos  chanteurs  dans  leur  rôle  de  Rerthe,  enfin 
»  pour  donner,  lui-même  avec  Gossec,  quelque  concert 
D  de  bénéfice,  qui  le  dédommage  de  son  déplacement.  » 
Aucun  de  ces  heaux  projets  ne  devait  se  réaliser.  Plein- 
chesne  écrivit  le  28  août  1774  :  Gossec  m'est  venu  dire 
«  que  l'ouvrage  était  plus  considérable  qu'il  ne  l'avait 
j)  cru,  et  qu'il  étoit  tellement  surchargé  d'autre  besoigne 
»  àne  pouvoir  terminer  son  travail  au  jour  convenu.  »  Le 
poëte  engogea  finalement  Gossec  à  continuer  la  partition, 
en  lui  proposant  d'en  charger  un  second  compositeur,  de 
diminuer  le  nombre  des  morceaux  et  de  les  abréger.  A  cet 
effet  il  frappa  à  toutes  les  portes.  «  J'ai  fait,  dit-il ,  des  pas, 
ï>  des  démarches,  des  suppliques  vis-à-vis  des  trois  ou 
»  quatre  de  nos  amphions  (sic)  qui  tous  ont  fait  les  diffi- 
»  ciles  et  les  renchéris,  me  demandant  des  sommes.  Enfin 
î>  par  un  chef-d'œuvre  de  mon  génie  et  de  mon  bon  génie, 
»  je  suis  parvenu  à  faire  exécuter  cette  entreprise  par 
»  Gossec  et  notre  ami  Philidor,  que  j'ai  accroché,  ser- 
»  moné ,  persuadé,  piqué  d'honneur,  et  enfin  mis  à  la 
»  besoigne,  Dieu  merci!  le  tout  conformément  à  la  sou- 
j)  mission  que  je  vous  ai  envoyée  de  Gossec,  qui  dans  la 
»  vérité  n'est  pas  chère.  Ils  sont  convenus  de  partager 
»  les  25  louis,  que  Gossec  vous  a  demandés  d'avance  , 
»  qu'il  attend  et  qui ,  probablement  sont  en  chemin. 
»  En  un  mot  ils  mettent  en  communauté  tous  les  béné- 
»  fices  et  toutes  les  charges.  J'ai  réduit  les  morceaux  de 
»  musique  à  18.  Chacun  en  a  pris  9,  le  morceau  d'en- 


(  655  ) 
i>  semble  et  cinq  ariettes.  Gossec  ne  me  paroît  pas  aussi 
»  anlhousiasmé  de  cette  association  que  Pliilidor  et  moi.  » 
A  la  réception  de  cetle  nouvelle  combinaison ,  les  direc- 
teurs du  théâtre  de  Bruxelles  demeurèrent  aussi  froids 
que  Gossec.  Jls  comprenaient,  sans  doute,  ce  qu'il  y  avait 
de  singulier  dans  la  position  de  deux  compositeurs  ayant 
chacun  leur  style  et  travaillant  ensemble  à  un  même 
opéra.  A  peine  répondirent-ils  aux  lettres  si  pressantes  et 
si  nombreuses  de  Pleinchesne.  Ils  ne  s'adressèrent  pas 
même,  par  écrit,  aux  deux  compositeurs,  pour  ratifier  la 
convention,  les  remercier  ou  les  engager  au  travail.  La 
f)ièce  était  destinée  à  embellir  la  fête  du  12  décembre, 
anniversaire  de  la  naissance  du  prince  Charles  de  Lorraine, 
et  jour  de  Gala  à  la  cour.  Cette  fête  devait  être  célébrée 
en  1774  avec  plus  d'éclat  que  d'habitude,  à  cause  du 
séjour  de  l'archiduc  Maximilien  à  Bruxelles.  D'après  le 
programme  les  deux  princes  assisteraient  à  la  messe  ;  en- 
suite ils  recevraient  les  compliments  des  ministres  et  de 
l'aristocratie.  Puis  ils  iraient  dîner  chez  le  ministre  pléni- 
potentiaire, se  rendraient  au  spectacle  du  grand  théâtre, 
à  l'issue  duquel  ils  iraient  souper  chez  le  comte  de  Mas- 
laing,  grand  écuyer  de  la  cour.  Tout  le  monde  comptait 
sur  Berlhe  pour  la  solennité.  Le  jour  tant  désiré  appro- 
chait et  rien  n'était  prêt  pour  l'opéra.  Philidor,  atteint 
d'un  accès  de  goutte,  n'avait  pas  pu  travailler.  Dès  le 
mois  de  juillet  il  avait  proposé  de  remettre  le  libretto 
à  Blanchi,  compositeur  de  mérite,  qui  se  serait  fait  un 
plaisir  d'y  travailler  (i).  De  son  côté,  Gossec,  peu  disposé 
à  se  sacrifier,  ne  fit  pas  grand'chose,  et  songea  à  se  faire 
aider  par  un  tiers  dans  la  composition. 


(1)  Lettre  du  50  juillet  1774. 


(  (oU  ) 

«  Ils  ont  pris,  dit  Pieinchesne,  un  musicien  pour  aide, 
B  qui  est  un  jeune  homme  plein  de  zèle,  de  talents  et  de 
»  docilité.  Il  joint  à  ces  qualités  essentielles  celle  d'être 
»  aimable,  d'avoir  une  jolie  figure  et  dans  le  fait  une 
»  basse-taille  fort  agréable.  »  Ce  jeune  compositeur  était 
Bolson ,  artiste  sur  lequel  nous  n'avons  pu  recueillir 
aucun  détail  dans  les  biographies  des  musiciens.  De  l'aveu 
de  Gossec  il  avait  fait  le  tiers  de  la  partition  (1). 

Celle-ci  parvint  successivement  par  fragments  aux  direc- 
teurs du  théâtre  de  Bruxelles.  A  la  fin  de  décembre  elle 
n'était  pas  encore  complète.  Rien  n'avançait.  Impatients  de 
ces  retards,  les  directeurs  de  la  scène  de  Bruxelles  firent 
prendre  des  informations.  Le  Fuel  de  Méricourt,  auteur 
dramatique  et  rédacteur  du  Nouveau  spectateur,  leur  fit 
connaître  les  causes  jusqu'ici  impénétrables  de  cette  len- 
teur. Pieinchesne  ayant  touché,  chez  l'abbé  Niccoli,les 
sommes  dues  aux  compositeurs,  en  avait  complètement 
perdu  mémoire,  malheur  assez  fréquent  chez  les  poètes 
parisiens  de  cette  époque.  Selon  de  Méricourt ,  Gossec  se 
plaignait  de  n'avoir  rien  reçu,  pas  même  de  lettre,  et 
faisait  prier  Vitzlhumb  de  distinguer  sa  musique  de  celle 
de  Botson  (27  décembre  1774). 

La  lettre  de  Méricourt  fut  une  révélation  pour  Yitz- 
thumb.  Sans  retard  il  en  écrivit  à  Gossec  et  à  Philidor 
pour  leur  faire  ses  excuses  et  leur  dénoncer  la  mauvaise 
foi  de  Pieinchesne  (5  janvier  1775).  A  Gossec  il  recom- 
manda de  vouloir  engager  Philidor  à  terminer  l'ouverture 
de  Berthe,  au  sujet  de  laquelle  il  lui  écrirait  après  la 
première  représentation  «  pour  vous  complimenter  ainsi 
»  que  M.  Philidor  sur  la  musique,  que  j'ai  trouvée  char- 


(1)  Lettre  du  19  janvier  1775. 


(  655 


T>  mante.  »  Dans  sa  réponse  Philidor  enlrelinl  son  cor- 
respondant d'une  pièce  nouvelle,  dont  il  avait  fait  la 
musique,  et  intitulée  les  Wiémois  ou  les  feintes  in/ldé' 
lifés.  «  Si,  dit-il,  la  première  représenta-tion  se  passe, 
»  selon  mes  désirs,  je  vous  en  enverrai  une  partition  sur- 
»  le-champ  aux  conditions  convenues  entre  M.  Compain 
»  et  moi.  J'espère  beaucoup  de  cette  pièce,  le  poème  étant 
»  à  faire  rire  aux  larmes  et  du  bon  faiseur,  c'est-à-dire  de 
»  Sodaine.  Point  d'embarras,  tant  pour  les  décorations 
»  que  pour  les  comparses.  Car  il  n  y  a  que  6  acteurs  en 
»  tout,  et  tous  les  rôles  presque  aussi  bons  les  uns  que 
»  les  autres.  Je  vous  réitère  tous  mes  remercîments  pour 
D  les  soins  et  toutes  les  peines  que  vous  voulez  bien 
j>  prendre  pour  mes  ouvrages  et  pour  ma  réputation 
D  (13  janvier  1775)  (1).  » 


(I)  Voici  ce-que  nous  lisons  dans  une  lettre  de  Le  Fuel  de  Méricourt 
adressée  à  Vitzthurnb  du  21  au  30  mars  i775  :  on  vient  enfin  de  donner 
aux  Italiens  les  Rhémois  sous  le  nom  des  Femmes  vengées.  J'ai  eu  l'hon- 
neur de  vous  en  parler,  Monsieur;  mais  elle  a  eu  encore  un  plus  grand 
succès  que  je  me  l'étais  imaginé,  et  ce  succès  ne  peut  être  momentané. 
Sur  le  ihéâlre  il  n'est  point  de  pièce  plus  gaie  et  d'un  meilleur  comique. 
Tous  les  gens  ,  même  qui  n'aiment  pas  M.  Philidor,  trouvent  que  c'est 
un  chef-d'œuvre,  et  qu'il  n'existe  point  de  musique  plus  chantante. 
J'aurois  désiré  qu'il  vous  l'eùl  envoyée.  Mais  il  a  été  piqué  de  n'avoir 
point  reçu  les  15  louis  qui  lui  sont  dus.  11  part  demain  pour  l'Angleterre, 
où  il  restera  5  à  6  mois,  et  à  son  retour  il  la  fera  graver.  Je  lui  ai  dit  que 
je  vous  écrirai  et  il  m'a  laissé  le  maître  de  vous  la  faire  copier  à  ces 
conditions  : 

Pour  copie  2  louis 48  liv. 

Pour  le  prix  dont  on  est  convenu   ......  240  — 

El  15  louis  qui  lui  sont  dus 221  — 

509  liv. 

La  pièce  dure  i  heure  et  VV  Si  elle  vous  plaît ,  écrivez-moi  un  mot,  et 
je  donnerai  ce  qu'il  faut  à  W  Philidor. 


(  656  ) 

La  réponse  de  Gossec  fut  plus  intéressante.  Il  annonça 
à  Yitzthumb  qu'il  avait,  il  est  vrai,  renoncé  à  tous  les 
honoraires  et  comptait  en  faire  cadeau  à  Pleinchesne,  qui 
s'en  défendit  beaucoup;  mais  certaines  circonstances  le 
forçaient  dans  ce  moment  d'accepter  la  somme  dont  on 
lui  était  redevable.  Il  finissait  sa  lettre  en  faisant  connaître 
à  Yitzthumb  les  morceaux  de  Berthe,  dont  il  avait  com- 
posé la  musique.  Ces  morceaux  sont  les  suivants  : 

i"  L'ariette  du  1"  acte,  scène  1  : 

Dans  la  prière 
Chaque  malin. 


2"  L'ariette  du  même  acte,  scène  VI 

Onc  des  yeux  on  n'a  vu 


3°  L'air  du  2'  acte ,  scène  III  : 

Brillante  aurore  d'un  beau  jour , 
'  Fleur  de  lys,  perle  d'Amour. 


Primitivement  le  poème  portait ,  comme  l'assure  Gossec 
luisante  aurore. 
4°  L'ariette  du  même  acte ,  scène  V  : 

Que  j'admire 
Le  délire, 


3°  L'ariette  du  même  acte,  scène  I  : 

Fils  de  Vénus  ,  j'éprouve  la  puissance 
Tous  les  morlels  sonl  faits 
Pour  élre  les  sujets 


(  657  ) 
6°  Le  chœur  du  5''  acte,  scène  I  : 

Nous  n'avons  qu'une  âme, 
Qu'une  même  flamme. 

Les  autres  morceaux,  dit-il  dans  sa  lettre  du  9  janvier 
1775,  ne  lui  appartiennent  pas.  Ceux-ci  avaient  été  com- 
posés soit  par  Philidor,  soit  par  Botson.  «  J'ai  reconnu , 
p  répondit  Vitzlhumb  à  Gossec,  les  vôtres  et  ceux  de 
»  M.  Philidor,  comme  un  connoisseur  connoît  deux  ta- 
»  bleaux,  qui  quoiqu'également  bons,  sont  de  maîtres 
»  différents.  Et  j'ai  l'honneur  de  vous  faire  à  tous  deux 
9  mes  plus  sincères  remercîments  (i).  d 

Ces  lettres  sont  précieuses.  Elles  font  connaître  un 
grand  nombre  de  détails  inédits  concernant  les  œuvres  et 
la  vie  de  Gossec  et  de  Philidor.  Elles  font  regretter  l'im- 
possibilité dans  laquelle  nous  sommes  de  pouvoir  étu- 
dier la  partition  de  Berlhe,  qui  permettrait  peut-être  de 
distinguer  le  style  de  Philidor  de  celui  de  Botson,  et  d'in- 
diquer les  morceaux  dus  aux  inspirations  de  l'un  et  de 
l'autre  de  ces  deux  compositeurs. 

Malgré  l'absence  de  l'ouverture ,  la  pièce  fut  représentée 
la  première  fois  au  théâtre  de  Bruxelles,  le  18  janvier 
1775  (2),  lendemain  des  fêtes  qui  eurent  lieu  à  l'occasion 
de  l'inauguration  de  la  statue  élevée  en  l'honneur  du 
prince  Charles  en  cette  ville.  «  Toute  la  musique,  disait 
»  Vitzthumb  à  Gossec,  en  a  été  trouvée  charmante ,  et  la 
»  pièce  eût  eu  un  succès  achevé  si  le  poème,  que  l'on  a 
D  trouvé  un  peu  froid,  avoit  été  goûté  de  même.  Je  n'en 


(1)  Lettre  du  2-4  janvier  1773. 

(2)  Lettre  du  21  janvier  1773  de  M.  Vilzfhnmb  à  Gossec. 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  41 


(  658  ) 

p  augure  cependant  point  mal  pour  cela,  d'autant  plus 
»  que  les  opéras  qui  plaisent  le  plus  aujourd'hui,  sont 
»  précisément  ceux  que  l'on  a  le  moins  accueillis  d'abord. 
D  D'ailleurs  une  première  représentation  n'est  guères 
»  qu'une  répétition  générale...  Je  suis  on  ne  peut  plus 
»  content  des  morceaux  de  musique,  dont  vous  êtes 
»  l'auteur,  et  ils  ont  été  parfaitement  accueillis  du  pu- 
»  blic,  ainsi  que  ceux  de  Philidor.  Il  n'y  en  a  pas  un  dans 
j>  toute  la  pièce  qui  n'ait  pas  été  applaudi  (1).  » 

Deux  artistes  remarquables,  aimés  du  public  et  do 
l'aristocratie,  avaient  singulièrement  contribué  au  succès 
(le  la  pièce.  C'étaient  :  Compain,  chargé  du  rôle  de  Rain- 
Iroi,  et  M"'  Angélique,  chargée  de  celui  de  Berthe.  Cette 
chanteuse,  qualifiée  de  belle  Angélique  dans  une  lettre 
de  Compain,  était  très  en  vogue,  et  avait  été  engagée  vers 
ce  temps,  par  l'administration  du  théâtre  de  Bruxelles. 
Compain  la  vitaux  italiens,  à  Paris,  où  elle  était  accom- 
pagnée du  prince  de  Ligne,  le  grand  seigneur  le  plus 
galant  de  cette  époque,  et  de  M.  de  Marbais.  Il  commença 
d'abord  par  faire  la  cour  au  prince.  Puis  il  se  présenta 
chez  elle.  «  J'y  ai  trouvé,  dit-il ,  M.  le  chevalier  Gluck, qui 
»  m'a  promis  de  nous  donner  son  Orphée.  Je  dois  dîner 
»  avec  lui  ce  jour-ci ,  et  je  ne  manquerai  pas  de  lui  rappe- 
»  1er  sa  promesse  (2).  » 


^1)  Lollrc  (lu  2i  janvier  1775  de  W.  ViUlliumb  à  Gossec. 

(2)  Lettre  de  Compain  à  Franck  du  o  mars  1774. 

Ang('rKiue  était  lille  de  Jean-Nicolas  Servandoni  d'Ilannetaire  né  à 
Grenoble,  mort  à  liruxelles  en  1780  et  auteur  des:    Observations  sur 

Cari  du  comédien.  Ses  trois  filles,  nommées  Eugénie,  Angélique  et 

étaient  connues  à  IJruxelles  sous  le  nom  des  Trois  Grâces.  C'est  à  Eugénie 
que  le  prince  de  Eigne  adressa  ses  Lettres  sur  les  spectacles  imprimées 
en  1774,  cl  dont  il  disait  :  «  Ce  ne  sont  point  des  lettres  d'amour,  ma 


(  C59  ) 

Après  les  premières  représentations  de  la  pièce  il 
s'agissait  de  liquider  les  sommes  dues  aux  compositeurs 
et  dont  Pleinchesnc  était  resté  en  possession.  Finalement 
le  poète  s'exécuta.  Gossec  reconnut  le  payement  de  la 
dette,  et  M"*'  Philidor,  chanteuse  au  concert  spirituel,  en 
lit  autant  pendant  l'absence  de  son  mari  en  Angleterre. 

Ce  payement  mit  lin  à  la  correspondance  des  directeurs 
du  théâtre  de  Bruxelles  avec  Gossec  et  Philidor.  Vitz- 
Ihumb  se  décida  à  ne  plus  faire  paraître  sur  la  scène  que 
des  pièces  reçues  à  Paris.  Gossec  lui  écrivait  encore  une 
lettre  pour  recommander  des  artistes  français. 

Nous  reproduisons  ici,  à  titre  de  pièces  justificatives, 
les  lettres  de  Gossec,  de  Philidor  et  de  Vitzlhumb. 

Philidor  à  Compain. 

Je  vous  envoyé,  Monsieur,  les  deux  opéras  comiques  du 
Bon  Fils  et  de  iHuitre  et  les  Plaideurs.  Ce  sont  mes  propres 
originaux  que  je  vous  remets.  Ils  sont  corrects,  quoiqu'un 
peu  sales.  Mais  jaime  mieux  garder  les  manuscrits  de  mon 
copiste ,  que  j'aurai  tout  le  tems  de  corriger.  J'ai  joint  à  la 


chère  Eugénie.  L'Amour  n'a  point  d'imprimeur.  Il  s'imprime  lui-même 
où  il  peut.  »  Voici  ce  qu'il  dit  d'Angélique  :  «  Votre  charmante  sœur 
fait  l'ornement  du  speclacle.  Les  sons  enchanteurs,  sa  méthode  à  pré- 
sent et  son  goût  lui  attirent  la  plus  brillante  répulalion.  Sa  négligence 
même  a  des  grâces;  et  avec  son  air  honnête  et  distingué,  elle  fait  un 
grand  tort  à  toutes  ces  actrices,  qui  jouent,  chantent  el  mâchent  toul  . 
qui  s'avancent  avec  la  cadence  du  grand  opéra,  qui  font  des  bras  partout, 
el  qui  ont  l'air  de  ne  chanter  que  pour  le  parterre....  La  douleur  d'Angé- 
lique l'embellit  encore  s'il  est  possible  ;  et  je  l'aime  autant  désolée  dans 
Louise  que  très-gaie  et  malicieuse  sans  indécence  dans  Colombine,elc. 
(Lettres  à  Eugénie,  pp.  U9  et  suiv.)  (Voir  aussi  dans  VAnnuaire  drama- 
tique de  ISiO  l'arlicje  intitulé  :  Établissement  du  spectacle  français  a 
Bruxelles,  p.  37.) 


(  640  ) 

musique  les  deux  pièces  imprimées  avec  des  notes  nécessaires 
pour  l'exécution. 

Quant  au  plaisir  que  j'aurois  de  vous  donner  à  dîner, 
prenez  votre  jour  lorsque  vous  serai  libre.  Faite-le  moi  savoir 
la  veille ,  et  le  jour  qui  pourra  vous  convenir  sera  toujours  le 
mien. 

J'ai  l'honneur,  etc. 

Ad.  Philidor. 

Le  mercredy  9  mars  1774. 

Philidor  à  Compain. 
Monsieur. 

J'aurai  l'honneur  de  vous  attendre  mercredi  prochain  pour 
dinner  avec  moi,  étant  le  jour  qui  vous  convient.  Nous  cau- 
serons sur  le  prix  que  vous  m'offrez  pour  les  changements 
d'Ernelinde.  Je  ne  puis  accepter  cinq  louis;  car  il  m'en  coû- 
tera une  vintaine  d'écus  pour  le  copiste  seulement,  et  il  faudra 
que  je  passe  une  journée  pour  marquer  exactement  les  ren- 
voys  sur  l'ancienne  partition.  J'en  passerai  par  où  vous  vou- 
drez; mais  je  compte  sur  votre  équité. 

J'ai  l'honneur  ,  etc. 

Ad.  PHiLmoR. 
Ce  13  mars  1774. 


Monsieur  , 


Compain  à  Franck. 

Paris,  ce  22  mars  1774. 


J'ai  remis  hier  à  M.  l'abbé  Nicolly  Ernelinde  et  Acajou  avec 
une  seconde  brochure  d'Ernelinde,  sur  laquelle  il  faudra  que 
M.  Vitzthumb  fasse  recopier  toutes  les  notes  qui  sont  écrites 
sur  celle  que  M.  Philidor  m'a  remise....  J'ai  donné  à  M.  Phi- 
lidor 10  louis  d'or.  J'ai  cru   ne  devoir  pas  marchander  avec 


(  64i  ) 

lui,  pour  un  louis  de  plus  ou  de  moins.  Je  n'ai  pas  reçu  de 
réponse  de  M.  Gosscc,  sur  la  lettre  que  je  lui  ai  écrite  pour  le 
prier  de  nous  proeurer  la  partition  manuscrite  de  Sabinus  et 
celle  du  Périgourdin.  J'y  passerai  demain,  ou  lui  écrirai  si  jo 
ne  le  trouve  pas.  Je  n'ai  pas  trouvé  M.  Grétry  chez  lui  hier. 
J'y  repasserai  ce  malin,  et  lui  écrirai  si  je  ne  le  rencontre 
pas;  car  je  voudrais  bien  emporter  la  Rosière  avec  moi.... 

J'ai  diné  hier  chez  M.  Philidor  avec  M.  Blanchi,  italien, 
compositeur  de  musique  célèbre.  Il  m'a  promis  de  nous  donner 
gratuitement  la  musique  des  Sabots,  qu'il  a  faite;  mais  il 
désireroit  être  témoin  de  l'exécution  de  cette  pièce  et  que  ce 
fut  quinze  jours  ou  3  semaines  après  Pâques.  Je  lui  ai  dit  que 
dès  qu'il  aurait  envoyé  à  31.  Vitzthumb  sa  pièce,  on  la  met- 
troit  à  l'étude,  et  que  quand  elle  seroit  à  peu  près  sçue,  je 
l'en  informerois.  Il  n'exige  d'autres  dédommagements  que 
ceux  des  frais  de  son  voyage.  Cela  n'est  pas  un  objet  bien 
considérable.  Quant  à  moi,  je  le  logerai  et  le  trailerai  pendant 
son  séjour.  M.  Philidor  viendra  entendre  la  i"  représentation 
de  son  Ernelinde,  et  m'a  prié  de  l'en  prévenir  quand  on  la 
donnera.  Il  vient  demain  malin  ,  avec  M.  Pleinchesne,  me  lire 
la  pièce  dont  je  vous  ai  parlé,  Monsieur,  et  qu'il  se  propose 
de  mettre  en  musique  pour  le  Gala  du  prince.  Je  ne  me  flatte 
pas  d'avoir  fait  un  voyage  bien  fructueux 

Votre,  etc. 

COMPAIN    DeSPIERRIÈRES. 

A  Paris,  ce  27  juin  1774. 
Philidor  à  Vitzthumb. 
Monsieur  , 

Je  suis  on  ne  peut  pas  plus  sensible  et  plus  reconnaissant 
des  témoignages  d'estime  et  d'amitié,  dont  vous  voulez  bien 


(  642  ) 

m'honorer.  Je  vais  me  mettre  après  la  pièce  de  Berthe,  puis- 
qu'il me  paroît  que  le  poëme  est  jugé  digne  d'être  représenté 
sur  votre  théâtre. 

Je  ferai  de  mon  mieux  pour  que  vous  puissiez  être  un  peu 
content  de  ma  besoigne.  Vous  me  ferai  le  plus  grand  plaisir, 
Monsieur,  de  vouloir  bien  vous  charger  des  danses,  connais- 
sant mieux  que  moi  les  sujets  qui  sont  sous  vos  ordres,  et 
peut-être  mieux  que  moi  ce  genre  de  musique.  Je  vous  prie 
d'assurer  Monsieur  Compain  de  toute  mon  amitié  et  de  me 
croire  avec  l'estime  la  plus  distinguée, 

Monsieur, 

Votre  très-humble  et  très-obéissant 
serviteur , 

Ad.  Philidor. 


Philidor  à  Pleinchesne. 

Malgré  tous  les  avantages,  Monsieur,  que  j'avois  à  faire 
votre  ouvrage  pour  Bruxelles ,  je  pense  qu'il  seroit  très-pru- 
dent de  ne  pas  faire  commencer  à  travailler  aux  décorations, 
que  je  ne  sois  parfaitement  certain  d'être  prêt.  Je  ne  puis  dé- 
cider cette  question  que  vers  la  fin  du  mois  prochain.  Cepen- 
dant si  vous  avez  des  engagements  à  Bruxelles,  qui  vous 
mettent  dans  l'impossibilité  de  reculer,  je  suis  très-assuré  que 
Blanchi,  qui  est  un  musicien  de  mérite,  se  fcroit  un  plaisir 
de  faire  un  ouvrage  qui  pourroit  lui  être  lucratif,  et  je  me 
ferois  moi-même  un  véritable  plaisir  de  vous  faire  causer  en- 
semble. 

J'ai  l'honneur,  etc. 

Ad.  Philidor, 

Ce  30  juillet  1774. 


(  m  ) 

Vitzthuml)  à  Gosscc. 

Du  5  janvier  1775. 

Monsieur, 

Je  viens  d'apprendre  de  M.  Méricourt  que  vous  n'avez  pas 
encore  rien  reçu  des  000  liv.  qui  vous  restoient  dues  confusé- 
ment avec  M.  Philidor  pour  vos  honoraires  au  sujet  de  la 
musique  de  Berthe.  J'en  suis  d'autant  plus  étonné,  que  cette 
somme  a  été  comptée  par  M.  l'abbé  de  Nieolià  M.  PIcinchesne 
aussitôt  après  que  j'eus  revu  le  3*"  acte  de  cette  pièce,  et  ce 
dernier  auroit  diî  vous  la  payer  il  y  a  au  moins  6  semaines. 
M.  Méricourt  me  mande  que  M.  Pleinchesne  a  payé  288  liv. 
à  M.  Philidor,  qui  probablement  attend  qu'il  ait  reçu  le  sur- 
plus pour  vous  en  donner  avis  et  vous  compter  en  même  tems 
ce  qui  vous  en  revient  pour  votre  part.  Je  suis  désespéré  de  ce 
malentendu  et  vais  à  l'instant  en  écrire  à  M.  Pleinchesne, 
D'une  manière  ou  de  l'autre  vous  ne  tarderez  pas  à  élre  satis- 
lait  de  vos  honoraires,  ainsi  que  M.  Philidor,  à  qui  je  viens 
d'écrire  à  ce  sujet.  J'attends  de  jour  en  jour  l'ouverture  de 
Berthe.  Je  vous  prie,  Monsieur,  d'engager  M.  Philidor  à  y 
travailler  et  à  me  l'envoyer  incessamment,  afin  que  je  ne  sois 
point  dans  le  cas  de  donner  la  pièce  sans  son  ouverture.  Je 
compte  là-dessus. 

Pardon,  Monsieur,  si  je  ne  vous  ai  point  écrit  à  vous-même 
depuis  quelque  tems.  Mes  grandes  occupations  en  sont  la 
cause.  Mais  si  M.  Pleinchesne  veut  vous  l'avouer,  il  n'est  pas 
de  lettre  qu'il  n'ait  reçue  depuis  trois  mois,  où  je  ne  me  suis 
souvenu  de  vous  et  de  M.  Philidor,  et  où  je  ne  vous  assure 
l'un  et  l'autre  de  mille  amitiés.  J'altendois,  pour  vous  écrire,  la 
{"représentation  de  votre  opéra  pour  vous  complimenter, 
ainsi  que  M.  Philidor  sur  la  musique,  que  j'ai  trouvée  char- 
mante, et  du  succès  de  laquelle  j'ose  répondre.  J'en  suis  on  ne 


(  644  } 

peut  plus  satisfait,  et  vous  remercie,  Monsieur  des  soins  que 
vous  avez  bien  voulu  y  donner. 

Agréez,  je  vous  prie.  Monsieur,  mes  souhaits  d'une  heu- 
reuse année. 

J'ai  l'honneur,  etc. 

ViTZTHUMB. 

Vitzthumb  à  Philidor. 

Du  5  janvier  1775. 
Monsieur, 

Je  viens  de  recevoir  une  lettre  de  M.  Méricourt,  que  j'avois 
prié  de  passer  chez  vous  afin  de  vous ,  engager  à  accélérer 
l'ouverture  de  Bertlie;  et  je  suis  d'autant  plus  surpris  que 
vous  n'ayez  pas  touché  en  entier  les  600  livres  que  je  m'étois 
engagé  à  vous  faire  tenir  pour  parfait  paiement  de  notre  con- 
vention, que  celte  somme  a  été  comptée  à  Paris  à  M.  Plein- 
chesne  immédiatement  après  que  j'eus  reçu  le  5'  acte  de 
Berthe.  Je  vous  prie,  Monsieur,  de  faire  demander  à  M.  Plein- 
chesne  pourquoi  il  ne  vous  a  pas  payé  conformément  à  mes 
instructions.  Je  lui  écrirai  moi-même  incessamment,  et  d'une 
manière  ou  de  l'autre  vous  ne  tarderez  point  à  être  satisfait. 
J'espère  que  cet  événement  ne  retardera  point  l'expédition  de 
l'ouverture  de  Berthe,  que  je  vous  prie  de  m'envoyer  assez 
tôt  pour  que  je  ne  sois  point  dans  le  cas  de  donner  la  pièce 
sans  ouverture.  Je  compte  sur  vous,  Monsieur,  et  j'espère 
hien  n'être  pas  trompé  dans  mon  attente. 

Pardonnez-moi  si  je  ne  vous  ai  pas  écrit  depuis  quelque 
tems. 

Jai  écrit  plusieurs  lettres  à  M.  Plcinchesne  et  l'ai  chargé 
chaque  fois  de  vous  dire  de  ma  part  mille  choses  obligeantes. 
Je  ne  doute  pas  qu'il  ne  l'ait  fait. 

Agréez ,  etc. 

Ce  n'est  point  par  négligence,  mais  ouiie  que  mes  occupa- 


(  64d  ) 

tions  m'en  ont  laissé  peu  de  loisir,  c'est  que  j'attcndois  pour 
le  faire  une  première  représentation  de  votre  opéra  ,  afin  de 
vous  complimenter  en  même  tems  sur  le  succès  que  j'ose  m'en 
promettre; car  toute  la  musique  en  est  charmante  et  tous  les 
morceaux  d'ensemble  travaillés  avec  un  art  et  un  goût  admi- 
rable. Je  vous  suis  on  ne  peut  plus  reconnaissant  de  vos  soins 
ainsi  qu'à  M.  Gossec,  à  qui  j'écris  par  le  même  courrier. 

De  Paris  ce  13  juin. 
Monsieur. 


Philidor  à  Vitzthumb. 

De  Paris,  13  janvier  1775. 
Monsieur  , 

Votre  lettre  m'a  fait  un  sensible  plaisir;  car  je  vous  avoue- 
rai franchement  que  je  croirois  que  e'éloit  un  oubli  de  votre 
part  de  ne  m  avoir  pas  fait  toucher  les  600  liv.  dont  nous 
étions  convenus.  C'est  avec  douleur  que  j'apprends  avec  cer- 
titude l'abus  de  confiance  de  M.  Pleinchesne,  tant  envers  vous, 
qu'envers  moi.  Il  n'a  cessé  de  me  persécuter  pour  l'ouverture 
de  Berthe,  en  me  promettant  toujours  de  me  satisfaire.  Je  le 
crois  dans  rimpossibilité  de  pouvoir  effectuer  ses  promesses, 
n'ayant  point  assez  d'ordre  dans  ses  affaires.  Ainsy ,  Monsieur, 
je  m'en  remets  à  votre  honnêteté  pour  que  je  ne  perde  pas  le 
fruit  de  mon  travail.  Je  remettrai  sous  2  ou  3  jours  mon 
ouverture  chez  M.  l'abbé  Nicoli,  pour  quïl  vous  la  fasse  tenir 
au  plus  vite.  La  Fausse  Magie  est  toujours  retardée  par  la  foible 
santé  de  Clairval.  Ce  sera  mon  tour  après  pour  les  Rhémois  ou 
les  Feintes  Infidélités.  Et  si  la  1'*  représentation  se  passe 
selon  mes  désirs,  je  vous  enverrai  une  partition  sur-le-champ 
aux  conditions  convenues  entre  M.  Compain  et  moi.  J'espère 
beaucoup  de    cette  pièce,  le  poëme  étant  à  faire  rire  aux 


(  646  ) 

larmes,  et  du  bon  faiseur,  c'est-à-dire  de  Sedaine.  Point 
d'embarras  tant  pour  les  décorations  que  pour  les  comparses. 
Car  il  n'y  a  que  6  acteurs  en  tout,  et  tous  les  rôles  presque 
aussi  bons  les  uns  que  les  autres.  Je  vous  réitère  tous  mes 
remercîments  pour  les  soins  et  toutes  les  peines  qne  vous 
voulez  bien  prendre  pour  mes  ouvrages  et  pour  ma  réputa- 
tion. C'est  avec  toute  la  reconnoissance  que  j'ai  l'honneur 
d'être  avec  estime  et  considération. 

Monsieur, 

Votre  très-humble  serviteur, 

Ad.  Philidor. 

P.  S.  Dans  ma  lettre  j'oublie  de  vous  marquer  que  j'ai 
reçu  de  M.  de  Pleinchesne  12  louis  qui  font  288  liv.  Reste  à 
payer  512. 


Philidor  à  Vitzthumb. 
Monsieur  , 

Je  viens  de  remettre  à  M.  l'abbé  Nicoli  l'ouverture  de 
Bcrthe.  Le  courier  qui  doit  partir  demain  1 9  doit  en  être  chargé. 
Je  désire  sincèrement  que  vous  puissiez  en  être  content. 

J'ai  vu  M.  Gossec  ces  jours  passés,  qui  me  paroît  aussi 
inquiet  que  moi  sur  le  payement  de  ce  qui  devoit  nous  reve- 
nir. Toutes  les  apparences  sont  que  M.  de  Pleinchesne  a  gardé 
probablement  l'argent  qui  nous  éloit  destiné.  Ainsy ,  Mon- 
sieur, nous  nous  en  remettons  à  votre  honnêteté  pour  nous 
faire  tenir  ce  qu'il  doit  nous  revenir  selon  nos  conventions. 

J'ai  l'honneur  d'être,  etc. 

Ad.  Philidor. 

Ce  mercredy  18  janvier  1773. 


(  U7  ) 

Viizthumb  à  Pliilidor. 

Du  2 1  janvier  1775. 
Monsieur, 

J'ai  reçu,  conformément  à  l'avis  que  vous  m'en  donnez  par 
voire  lettre  datée  du  18  du  courant,  l'ouverture  de  Berthe, 
que  j'ai  trouvée  très-bien  travaillée,  de  même  que  la  pièce, 
dont  j'ai  donné  la  V"  représentation  mercredi  dernier.  Elle  a 
eu  quanta  la  musique  tout  le  succès  qu'elle  mériloit ,  c'est-à- 
dire  infiniment ,  et  celui  que  j'avois  lieu  d'en  attendre,  d'après 
les  soins  que  vous  et  M.  Gossec  vous  êtes  donnés.  Le  poëme  a 
paru  un  peu  froid;  mais  on  ne  peut  décider  du  sort  d'une 
pièce  à  la  1'^"'  représentation,  qui  n'est  proprement  qu'une 
répétition  générale.  J'en  augure  néanmoins  d'autant  mieux 
pour  la  suite,  que  les  pièces  auxquelles  on  fait  d'abord  un 
foible  accueil ,  sont  souvent  celles  qui  dans  la  suite  sont  le 
mieux  goûtées. 

Quant  à  vos  honoraires  ,  je  vous  prie,  Monsieur,  de  n'avoir 
aucune  inquiétude.  Je  n'attends,  pour  prendre  un  parti  à  cet 
égard,  qu'une  réponse  de  M.  de  Pleinchesne,  à  qui  il  ne  m'a 
pas  été  possible  d'écrire  jusqu'à  présent.  Je  le  fais  raijourdhui, 
et  j'espère  que  sous  peu  de  jours  vous  serez  entièrement 
satisfait. 

J'ai  rhonneur  d'être, 

Monsieur  votre,  etc. 

ViTZTHUMB. 


Gossec  à  Vitzthumb. 

Paris,  ce  19  janvier  1775. 


Monsieur 


Sitôt  votre  lettre  reçue,  j'ai  vu  Monsieur  Philidor  pour 
l'engager  de  bâter  l'ouverture  de  Berthe,  que  j'ai  trouvée 
avancée.  En  conséquence  vous  la  rccevrés  sous  peu  de  jours. 


{  648  ) 

Il  est  bien  vrai,  Monsieur,  que  je  n'ai  rien  touché  des 
600  livres,  qui  restoient  à  payer  et  pas  même  des  GOO  liv.  du 
premier  payement  qui  fut  fait  d'avance,  laquelle  somme  fut 
distribuée  à  M.  Philidor  et  à  l'auteur  d'un  autre  tiers  de 
Berthe.  Et  tout  ce  que  j'avois  à  prétendre  sur  les  arrange- 
raens  faits  pour  cette  pièce  m'est  encore  dû.  Il  est  bien  vrai 
aussi  que  j'avois  renoncé  à  tout ,  ne  pouvant  faire  la  pièce 
entièrement,  et  que  je  complois  faire  présent  de  mon  tiers  à 
M.  Pleinchéne,  qui  s'en  deffendit  beaucoup ,  en  m'assurant 
qu'il  vouloit  s'acquiter  envers  moi,  soit  par  un  cadeau  ou  par 
argent.  Des  circonstances  m'obligent  à  présent  d'accepter  la 
somme  due.  Et  puisque  vous  voulés  bien  m'en  procurer  la 
satisfaction,  vous  m'obligerés  beaucoup.  Monsieur,  de  me 
la  faire  payer. 

Je  suis  charmé  que  la  musique  de  cette  pièce  vous  plaise. 
Comme  M.  Pleinchéne  a  fait  faire  une  partition  au  net  de  mes 
airs,  je  ne  sais  s'il  les  a  intitulés  de  mon  nom.  Comme  je 
serois  bien  aise  que  vous  sachiez,  3fonsieur,  ce  qui  m'appar- 
tient dans  cette  pièce,  afin  de  recevoir  votre  approbation  sur 
les  morceaux  qui  vous  plairont  et  vos  observations  sur  ceux 
qui  mériteront  votre  censure,  voici  ceux  que  j'ai  faits  : 

1  Dans  la  prairie  chaque  matin.     .     .     .     Berthe. 

2  One  des  yeux  on  a  vu Balmon. 

3  Luisante  aurore Balmont. 

4  Que  j'admire  le  délire Rinfroi. 

5  Fils  de  Vénus Pépin. 

6  Nous  n'avons  qu'une  âme Chœur. 

Je  vous  prie.  Monsieur,  de  me  conserver  une  part  dans 
votre  estime,  et  me  croire  avec  la  plus  parfaite  considération, 

Monsieur , 

Votre  très-humble  et  très- 
obéissant  serviteur, 

GOSSEG. 


(  649  ) 

Vitzthumb  à  Gossec. 

Du  24  janvier  1778. 
Monsieur, 

J'ai  l'honneur  de  vous  remercier  du  soin  que  vous  avez 
bien  voulu  prendre  d'engnger  M.  Philidor  à  accélérer  l'ouver- 
ture de  Berlhe.  Je  l'ai  reçue  conformément  à  l'avis  que  vous 
m'en  donnez,  mais  pas  assez  tôt  pour  pouvoir  l'exécuter  à  la 
première  représentation  de  la  pièce,  qui  s'est  faite  le  d 8  de  ce 
mois.  Toute  la  musique  en  a  été  trouvée  charmante,  et  la 
pièce  eût  eu  un  succès  achevé,  si  le  poëme,  que  l'on  a  trouvé 
un  peu  froid,  avait  été  goûté  de  même.  Je  n'en  augure  cepen- 
dant point  mal  pour  cela,  d'autant  plus  que  les  opéras  qui 
plaisent  le  plus  aujourd'hui  sont  précisément  ceux  que  l'on  a 
le  moins  accueillis  d'abord.  D'ailleurs  une  première  repré- 
sentation n'est  guère  qu'une  répétition  générale.  Et  je  n'épar- 
gnerai ni  soins,  ni  peines  pour  lui  donner  le  succès  qu'il 
mérite  de  votre  part  et  de  celle  de  M.  Philidor.  Je  suis  on  ne 
peut  plus  content  des  morceaux  de  musique  dont  vous  êtes 
l'auteur;  et  ils  ont  été  parfaitement  accueillis  du  public,  ainsi 
que  ceux  de  M.  Philidor.  Il  n'y  en  a  pas  un  dans  toute  la  pièce 
qui  n'ait  été  très-applaudi.  J'ai  reconnu  les  vôtres  et  ceux 
de  M.  Philidor,  comme  un  connoisseur  connoît  deux  tableaux  , 
qui  quoiqu'également  bons,  sont  de  maîtres  difîférents.  Et  j'ai 
l'honneur  de  vous  faire  à  tous  deux  mes  plus  sincères  remer- 
cîmens. 

Quant  au  prix  de  notre  convention,  je  n'attends  qu'une 
réponse  de  M.  Pleinchesne  pour  prendre  à  cet  égard  les  arran- 
gemens  convenables.  Mes  grandes  occupations  ne  m'ayant 
point  permis  jusqu'à  présent  de  lui  écrire,  je  viens  de  le  faire 
pour  le  menacer  d'user  envers  lui  de  rigueur  s'il  différoit 
davantage  à  se  libérer  de  ce  qui  lui  reste  de  1200  livres  qu'il 


(  6S0  ) 

a  touchées  pour  vous  satisfaire,  ainsi  que  M.  Philidor  de  vos 
honoraires  à  cause  de  la  musique  de  Berthe,  conformément  à 
la  convention  que  vous  ne  tarderez  pas  à  l'être  incessamment. 
J'ai  l'honneur,  etc. 

ViTZTHUMB. 


Gossec  à  Vitzthumb. 

Paris,  ce  11  février  1775. 
Monsieur, 

Ce  n'est  point  au  sujet  de  Berthe  que  j'ay  l'honneur  de  vous 
écrire,  quoique  nous  n'ayons  point  vu  ny  entendu  parler  de 
M.  Pleinchesne. 

C'est  pour  vous  entretenir  d'un  sujet  qui  pouroit  peut-être 
vous  convenir  dans  les  rôles  de  caractères ,  c'est-à-dire  ce  que 
nous  appelions  à  Paris  l'emploi  de  Cailleau.  Il  a  une  fort  belle 
voix  basse- taille,  une  mémoire  très-heureuse  et  beaucoup 
d'adresse  dans  son  jeu,  très-bien  de  figure,  gros  papa  de 
bonne  mine.  Il  a  eu  beaucoup  de  succès  dans  la  province,  où  il 
a  été  un  an,  et  on  l'a  vu  à  Paris  dans  les  théâtres  de  société 
avec  un  très-grand  plaisir.  Et  je  ne  doute  point  que  s'il  étoit 
sous  votre  direction.  Monsieur,  seulement  un  an,  vous  en 
fériés  le  plus  grand  sujet.  C'est  à  un  théâtre  comme  le 
vôtre,  Monsieur,  qu'un  acteur  peut  puiser  des  talents.  Je 
crois  vraiment  que  celui-ci  vous  feroit  honneur  dans  peu , 
attendu  qu'il  a  la  plus  grande  ardeur  du  travail.  II  est  homme 
de  bien,  on  ne  peut  pas  plus  rangé,  ayant  une  petite  fortune, 
dont  il  avait  placé  une  partie  dans  le  commerce.  Souvent  les 
entreprises  ne  réussissent  point.  Pour  sauver  le  reste  de  celte 
petite  fortune  ,  il  quitte  le  commerce  pour  reprendre  le  parti 
de  la  comédie. 

Il  est  marié  et  son  épouse,  qui  est  bien  née,  est  fort  inté- 
ressante. Elle  remplit  avec  beaucoup  de  finesse  les  rôles  de 


(  6S1  ) 

soubrette  dans  la  comédie;  mais  elle  ne  chante  pas,  n'ayani 
point  de  voix.  Si  l'homme  peut  vous  convenir,  c'est  ce  que 
nous  désirons.  11  voudroit  s'engager  pour  Pasques.  Voies, 
Monsieur,  si  vous  pouvez  vous  en  charger  et  quel  traitement 
vous  pouriés  lui  faire  si  vous  l'acceptes. 

J'oubliois  de  vous  dire  qu'il  remplit  très-bien  aussi  les  rôles 
à  tablier,  c'est-à-dire  le  bas  comique.  J'attends  votre  réponse 
à  ce  sujet,  Monsieur,  que  je  vous  prie  de  noter ,  afin  que  notre 
homme  ait  le  temps  de  se  retourner.  Je  vous  prie,  Monsieur, 
de  me  conserver  votre  estime  et  de  me  croire,  etc. 

GOSSEC. 

Rue  des  Moulins,  Butte  S'-Roch. 


Vitzthumb  à  Gossec. 

Du  20  février  t775. 
Monsieur  , 

Les  circonstances  ne  me  permettant  point  d'engager  des 
sujets  que  vous  avez  la  bonté  de  me  proposer,  j'ai  l'honneur 
de  vous  remercier  bien  sincèrement  de  lïntérét  que  vous 
voulez  bien  prendre  à  ce  qui  me  regarde.  J'ai  pour  doubler 
l'année  prochaine  l'emploi  de  Cailleau  un  sujet  de  plus  que 
cette  année  (M.  Compain  l'ayant  tenu  seul  jusqu'à  présent), 
et  outre  cela  deux  bons  accessoires.  Quant  à  l'emploi  des  sou- 
brettes, l'actrice  qui  tient  celui  des  Duègnes,  tient  aussi  en 
chef  remploi  des  soubrettes,  et  comme  cette  femme,  d'ail- 
leurs remplie  de  bonne  volonté,  nous  suffît,  je  serois  fâché  de 
la  contraindre  à  un  partage  qu'elle  paroît  vouloir  éviter. 

J'espère,  Monsieur,  que  cet  inconvénient  ne  me  privera 
point  dans  une  autre  occasion  de  la  préférence  dont  vous 
voulez  bien  m'honorer  en  celle-ci,  et  quand  vous  aurez  à  placer 
quelque  bon  sujet,  vous  voudrez  bien  songer  à  moi.  J'accep- 


(  652  ) 

lerai  avec  empressement  tout  ce  qui  me  viendra  de  votre 
part,  à  moins  que  des  circonstances  contraires  ne  me  rendent 
la  chose  impossible. 

J'ai  écrit  à  M.  Pleinchesne ,  et  n'en  ait  point  eu  de  réponse» 
Il  est  plus  qu'apparent  qu'il  ne  m'en  fera  point,  et  que  je  seraj 
dupe  de  cet  homme  de  toute  façon.  Le  tems  du  carnaval  ne  me 
laissant  point  le  loisir  de  régler  cet  objet  à  votre  égard.  Mon- 
sieur, et  à  celui  de  M.  Philidor,  je  remets  jusqu'au  carême  à 
prendre  les  mesures  convenables  pour  vous  satisfaire. 

J'ai  l'honneur,  etc. 

VlTZTHUMB. 


M*  Philidor  à  Vitzthumb. 

Ce  9  mars  1775. 
Monsieur, 

Mon  mari  est  appesens  pour  deux  mois,  et  ille  ma  charger 
de  ces  affaire  en  son  apessence.  Je  me  praisse  de  vous  faire 
scavoir  que  la  faire  de  M.  Piainchene  est  enfin  ter  miner.  IJle 
ma  fais  le  nir  treiz  louis  qui  restai,  et  je  lui  ei  faite  un  reçus 
de  600  liv.  Pour  la  partition  des  Femmes  Vengers ,  je  la  fais 
copier,  et  je  laremetré  sur  le  chara  pour  la  sommes  dont  vous 
aitte  convenue  avec  mon  mari.  Je  vous  prie  de  croire,  Mon- 
sieur, que  cette  pettite  la  quinne,  dont  vous  netiés  pas  garans, 
na  point  diminuer  la  confience  que  mon  mari  a  toujours  eu 
en  vous.  Mais  M.  dePlainchainenous  avoisleurés  tous  les  deux, 
et  ille  ne  ma  paier  que  le  9  de  ce  moi.  Je  proflîtte  de  cette 
occasion  pour  vous  dire  que  je  suis  avec  la  considération  la 
plus  parfaitte, 

Votre  tres-humble  et  tres-obéissante 
servante  Richer, 

F.  Philidor. 


(  655  ) 

Vitzthumb  à  M-^  Philidor. 

Du  23  avril  1775. 
Madame, 

Je  suis  bien  charmé  d'apprendre,  par  la  lettre  que  vous 
m'avez  fait  l'honneur  de  m'écrire  le  9  de  ce  mois,  qucM.Plein- 
chcsne  se  soit  exécute  vis-à-vis  de  M.  Philidor.  Les  précautions 
que  je  prendrai  à  l'avenir  en  pareil  cas  me  mettront  à  l'abri 
des  desagrémcns  que  j'ai  essuyés  par  sa  faute  en  cette  cir- 
constance. 

Je  viens  de  recevoir  la  partition  des  Femmes  Vengées.  J'ai 
Ihonneur  de  vous  remercier.  Madame,  du  soin  que  vous  avez 
bien  voulu  prendre  d'en  diligenter  l'expédition.  J'aurai  soin , 
Madame,  de  vous  informer  ou  M.  Philidor  du  succès  qu'elle 
aura  eue  ici  après  la  i'"  représentation. 

J'ai  l'honneur  d'être  avec  la  considération  la  plus  distinguée, 

Madame, 

Votre,  etc. 

Vitzthumb. 


Vitzthumb  à  Pleinchesne, 

Du  n  mai  1775. 
Monsieur, 

Sans  les  plaintes  portées  contre  vous  par  MM.  Philidor  et 
Gossec  sur  le  manque  de  payement,  dont  vous  avez  touché  le 
montant,  j'aurois  ignoré  votre  existence.  M*  Philidor  m'a  fait 
savoir  que  son  mari  étoit  satisfait  de  la  prétention  qu'il  avoit 
à  votre  charge.  Mais  je  ne  sais  pas  s'il  en  est  de  même  à 
l'égard  de  M.  Gossec,  qui  ne  m'a  pas  écrit  depuis  quelque 
2"*^  SÉRIE,  TOME  XL.  42 


(  6S4  ) 

teins.  Je  ne  me  serois  sûrement  pas  attendu  à  un  procédé 
pareil  de  votre  part,  et  pour  ne  pas  m'y  exposer  une  seconde 
fois,  vous  permettrez,  Monsieur,  que  je  rompe  tout  com- 
merce avec  vous.  J'ai  d'ailleurs  été  si  peu  content,  des  ou- 
vrages que  vous  m'avez  fait  passer  en  vertu  de  notre  conven- 
tion, que  je  n'en  ai  pu  tirer  aucun  parti.  Vous  les  trouverez 
tous  dans  le. paquet  ci-joint,  ainsi  que  la  musique  de  Rosalie 
et  les  dessins  du  costume  de  Bertlie.  La  personne  qui  vous 
remettra  ce  paquet  vous  payera  également  vos  déboursés , 
montant  à  404  liv.  Et  moyennant  quoi,  tout  est  terminé  entre 
vous  et  moi ,  plus  à  votre  avantage  qu'au  mien. 

Quant  à  Berthe ,  comme  il  m'est  défendu  de  représenter  un 
spectacle  quelconque  sans  en  avoir  soumis  le  poëme  à  la  cen- 
sure du  gouvernement,  votre  pièce  n'a  pas  pu  passer  telle 
qu'elle  étoit  en  manuscrit.  Et  ayant  fait  la  dépense  de  la  mu- 
sique, décoration  et  vestiaire,  j'ai  été  forcé  d'y  faire  faire  les 
changements  dont  vous  vous  plaignez,  et  au  moyen  desquels 
seuls  la  pièce  a  pu  supporter  une  représentation.  J'ignore  si 
cette  année-ci  je  pourrai  en  donner  une  2^ ,  sans  y  faire  encore 
d'autres  changements.  Vous  verrez  par  là  que  les  succès  de 
votre  pièce  ne  sont  ni  hrillans,  ni  assurés,  et  qu'elle  eut  été 
sans  effet  si  on  l'avoit  laissée  telle  que  vous  me  l'avez  envoyée. 
C'est  tout  ce  que  j'ai  à  répondre  à  la  lettre  que  vous  m'avez 
fait  l'honneur  de  m'écrire  le  25  du  mois  dernier.  Et  j'ai  celui 
d'être  très-parfaitement  Monsieur  votre ,  etc. 

VlTZTHUMB. 


La  classe  s'est  formée  ensuite  en  comité  secret  pour 
arrêter  la  liste  des  présentations  aux  places  vacantes  sou- 
mises par  les  sections. 


(  6S5  ) 
OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 


Académie  royale  de  Belgique.  —  Commission  royale  d'his- 
toire. —  Collection  de  Chroniques  belges  inédites  :  La  Biblio- 
thèque nationale  à  Paris,  t.  I,  publié  par  M.  Gachard.  Codex 
Dunensis,  etc.,  publié  par  M.  le  baron  Kervyn  de  Lettenhove. 
—  Le  Livre  des  fiefs  du  comté  de  Looz  sous  Jean  d'Arckel 
(C.  de  Borman).  —  Compte  rendu  des  séances,  4""  série, 
tome  II,  VII'  Bulletin.  Table  générale  de  la  3"«  série.  Bruxelles, 
1875;  2  vol.  in-4%  vol.  et  2  br.  in-8^ 

Gachard  {L.-P.).  —  La  Bibliothèque  nationale  à  Paris. 
Notices  et  extraits  des  manuscrits  qui  concernent  l'histoire 
de  la  Belgique,  t.  I,  4875.  Bruxelles  ;  vol.  in-4''. 

Vaîi  Beneden  P.-J.).  —  Les  Pacbyacanthus  du  musée  de 
Vienne.  Bruxelles,  1875;  br.  in-8''. 

Chalon  (Renier).  —  Discours  douverture  prononcé  à  l'As- 
semblée générale  annuelle  du  4  juillet  1875  de  la  Société 
royale  de  numismatique  de  Bruxelles.  Bruxelles;  br.  in-8°. 

Morren  {Ed.).  —  Correspondance  botanique.  Liste  des 
jardins,  des  chaires  et  des  musées  botaniques  du  monde, 
3™^  édit.  Liège,  octobre  1875;  br.  in-8°. 

Cornet  {F.-L.)  et  Briart  (A.).  —  Sur  le  synchronisme  du 
système  hervien  de  la  province  de  Liège  et  de  la  craie  blanche 
moyenne  du  Hainaut.  —  Note  sur  l'existence  dans  le  terrain 
houiller  du  Hainaut  de  bancs  de  calcaire  à  crinoïdes.  Liège; 
2  br.  in-8°. 

Nypels[J.'S.-G.).  —Le  code  pénal  belge  interprété,  7™'  liv. 
Bruxelles,  1875;  in-8''. 

Bivier  [Alphonse).  —  Une  nouvelle  histoire  du  droit.  (Dis- 
cours prononcé  le  11  octobre  1875  à  l'Université  de  Bruxelles.) 


(  6S6  ) 

Bruxelles ,  1875;  br.  in-S".  —  Berichte  Burgundischer  Agenlen 
in  der  Schweiz  von  1619  bis  1629.  Zurich,  1873;  br.  in-8°. 

Heremans  {J.-F.-J.)  en  Ledeganck  (C,-J.-K.).  —  Werken 
van  Zusler  Hadewijch.  l.  Gedichten,  S'^*  stuk.  Gand,  4875; 
in-8^ 

Crépin  [François).  —  Matériaux  pour  servir  à  l'histoire  des 
roses,  S"""  fasc.  —  Observations  sur  quelques  plantes  fossiles 
des  dépôts  dévoniens  rapportés  par  Dumont  à  Tétagequartzo- 
schisteux  inférieur  de  son  système  eifelien.  Gand,  1874-75; 
2  broch.  in-8°. 

Bormans  (Stanislas).  —  Les  fiefs  du  comté  de  Namur. 
i'^  liv.,  XIII""^  et  XI V""^  siècles.  —  Cartulaire  de  la  commune 
de  Couvin.  Namur,  1875;  2  vol.  in-8°. 

Bernimolin  [Eug.).  L'école  populaire  et  le  rationalisme 
contemporain,  tome  L  Liège,  1875;  vol.  in-8°. 

Bergmann  [Atiton).  —  Philips  van  Marnix  van  S'-Alde- 
gonde.  2*^"  Druk.  —  Geschiedenis  der  slad  Lier.  —  Verspreide 
schetsen  en  novellen.  —  Ernest  Staas,  schetsen  en  beelden. 
Liège,  Anvers,  Gand;  br.  et  3  vol.  in-8°. 

Davreux.  —  Sur  la  contagion  du  choléra  par  les  cadavres 
des  cholériques.  Liège,  1875;  broch.  in-8'' 

De  Polter  (Frans),  Ronse  [Edmond]  et  Bore  {Pieter).  — 
Geschiedenis  der  stad  en  kastelnij  van  Veurne.  Gand,  1875; 
vol.  in-8". 

Génard  [P.).  —  Notice  sur  la  Société  royale  d'harmonie 
d'Anvers.  —  L'hôtel  des  monnaies  d'Anvers  (Mémoire  couronné 
le  25  février  1872  par  l'Académie  d'archéologie  de  Belgique). 
—  Levensschets  vanCornelis  van  Kiel  (Kilianus).  —  Notice  sur 
les  architectes  Herman  (le  vieux)  et  Dominique  de  Waghe- 
makere.  Anvers;  4  br  in-8''. 

Hermans  [V.). —  La  vérité  sur  Op  Signorken.  Malines, 
1875;  br.  pet.  in-8°. 

Preudhomme  de  Borre  [A.).  —  La  possibilité  de  la  natura- 


(  6§7  ) 

lisation  de  la  Leptinotahsa  Decemfjneata  examinée  au  point  de 
vue  de  la  concurrence  vitale.  Bruxelles,  1875;  2  feuillets 
in-8°. 

Vander  Straeten  [Edmond.  —  La  musique  aux  Pays-Bas 
avant  le  XIX^  siècle,  t.  III.  Bruxelles,  1875;  vol.  in-8". 

Van  Rysselherghe.  —  Courbes  métcorographiques ,  gravées 
à  Ostende  en  juin  1875,  par  Tenregistreteur  universel.  Feuille 
volante. 

Stad  Turnhout.  —  Verslag  over  het  Bestuur  en  den  Toe- 
stand  der  Zaken.  Turnhout,  1875;  in-8°. 

Académie  royale  de  médecine  de  Belgique.  —  Bulletin, 
ô*""  série,  tome  IX,  n"*  8  et  9.  Bruxelles,  1875  ;  2  fasc.  in-S". 

Annales  des  Travaux  publics  de  Belgique,  tome  XXXÏII, 
l"cah.  Bruxelles,  1875;  in-8^ 

Aiialectes  pour  servir  à  Vhisioire  ecclésiastique  de  la  Bel- 
gique, tome  XII,  1875,  2"^  livr.  Bruxelles;  in-8°. 

Bulletin  des  archives  d'Anvers,  tome  VII,  2Miv.  Anvers, 
1875;  in-8». 

Willems-Fonds  te  Gent.  —  Uitgave,  n'*  81 ,  feuilles  11-22. 
Gand,  1875;  in-8''.  —  Volks-Almanak ,  1876.  Gand,  br.  pet. 
in-8^ 

L'Illustration  horticole,  3^  sér.,  6  vol.,  8^  et  9''  liv.,  août  et 
septembre  1875.  Gand;  2  liv.  in-8°. 

Fédération  des  sociétés  d'horticulture  de  Belgique.  —  Bul- 
letin, 1874.  Liège,  1875;  vol.  in-8«. 

Gleichman  [J.-G.].  —  Het  leven  van  M*"  A.  Bogaerts  (1795- 
1870).  Amsterdam  ;  vol.  pet.  in-4^ 

Physiologisch  Laboratorium  der  Utrechtsche  HoogeschooL 
—  Onderzoekingen,  Derde  reeks.  III.  Aflev.  II.  Utrccht, 
1875;in-8°. 

De  Dietsche  Warande,  nieuwe  reeks,  l^'^'deel,  S'^*'  Afleve- 
ring.  Amsterdam,  1875;  in-8''. 

Institut  R.  Grand-Ducal  de  Luxembourg,  —  Publications 


(  6d8  ) 

de  la  section  des  sciences  naturelles,  tome  XV,  1875.  Luxem- 
bourg; vol.  in-S". 

Lasaulx  {D'"  A .  Von).  —  Études  pétrographiques  sur  les 
roches  volcaniques  de  l'Auverge,  etc.  (traduites  par  F.  Gon- 
nard).  Clermont-Ferraud,  1875;  vol.  in-8°. 

Société  d'agriculture ,  de  sciences  et  d'arts  séant  à  Douai. 
—  Mémoires,  2^  sér.,  t.  XII,  4872-1874.  Douai,  1875;  vol. 
in-8". 

Coussemaker  [E.  de.).  —  Fondation  de  chapelles  et  de  cha- 
pellenies.  Lille ,  4875;  br.  in-8". 

Maire  {Le  Docteur).  —  Discours  prononcé  en  la  Séance 
publique  du  29  septembre  1873  de  la  Société  nationale  Ha- 
vraise  d'études  diverses.  Le  Havre  1875;  br.  in-8°. 

Barghon  Fort-Rion  [F.  de).  —  Étude  historique  sur  S.  E. 
Jean-André  Van  der  Mersch.  Paris,  4875  ;  br.  in-8''. 

Delaborde  (Le  vicomte  Henri).  —  Éloge  d'Auber.  Paris, 
4875;  br.  in -4°. 

Perrey  (A.).  —  Sur  la  fréquence  des  tremblements  de 
terre  relativement  à  l'âge  de  la  Lune.  Paris,  4875  ;  br,  in-4°. 

Catalogue  de  livres  d'histoire  naturelle  et  particulièrement 
de  géologie  et  de  conchyliologie  composant  la  Bibliothèque  de 
M.  G.'P.  Deshayes,  avec  notice  biographique.  Paris,  4875; 
in-8". 

Revue  des  questions  historiques j  40'"''  année,  30  liv.,  4" 
octobre  4875.  Paris;  in-S". 

Société  d'histoire  naturelle  de  Toulouse.  —  Bulletin, 
IX'"*' année,  4874-4875,  3""=  fasc.  Paris,  octobre  4875;  in-8\ 

Société  archéologique  du  midi  de  la  France  j  à  Toulouse.  — 
Bulletin:  feuilles  5,  6  et  7,  4873  ;  feuilles  6  et  7, 4875.  Tou- 
louse; in-4*'. 

Krônig.  —  Das  Dasein  Gottes  und  das  Gluck  der  Menschen. 
Berlin,  4874;  vol.  pet.  in-8°. 

Kihiig.  Preuss.  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Berlin. 


(  639  ) 

—  Monatsbericht,  Jiily  und  Augiist  1875.  —  Abhandlungen. 
Berlin,  187o;  vol.  10-4"  cl  faso.  in-8°. 

Rerliner  Gesetlscha/Ï  fur  Anthropologie ,  Ethnologie  und 
Urgeschichte.  —  Vcrhanillungcii ,  Jalirgang  1875  :  Silzung 
vom  i6  Januar  bis  19  Jiini.  Berlin,  1875;  0  rah.  gr.  in-S". 

Naturhistorisch-Medicinischer  Verein  zu  Ileidelherg.  — 
Vcrhandlungen,  Ncuc  Folge,  1.  Bd.,  2.  fleft.  Hcidelberg,  d875; 
in-8°. 

Ferdinandeum  fur  Tirol  und  Vorarlberg.  —  Zeitscbrift, 
III.  Folge,  19.  Heft.  Innsbruck,  1875;  in-8^ 

Kommission  zur  Untersnchung  deutschen  Meere ,  in  Kiel. 

—  Jabresbericht,  fiip  die  Jahrc  1872,  1875,  II.  und  III.  Jabrg. 
Berlin,  1875;  gr.  in-i". 

K.  Universitat  zu  Freiburg  i.jB.  —  Programme  pour  1875 
et  1876.  —  Liste  du  personnel  enseignant  pour  la  même  année 
scolaire.  —  Dissertations  inaugurales.  Fribourg  en  Brisgau; 
6br.  in-4"ct  18  br.  in-8''. 

Putzeys  {Félix).  —  Ueber  die  Abiogenesis  Huizinga's.  Br. 
in-8''  s.  1.  n.  d. 

Schlagintv)eit-Sakûnliinski  [Hermann  V.).  —  Einsendung 
eines  Gescbenkes  von  Herrn  D""  Armin  Wittstein.  —  Angaben 
zur  Characteristik  der  Kru-Neger.  Br.  in-8''  s.  1.  n.  d. 

Archiv  der  Mathematik  und  Physik ,  LVIII.  Teil.  2.  Heft- 
Leipzig,  1875;  in -8°. 

K.  B.  Akademie  der  Wissenschaften  zu  Milnchen.  —  Sit- 
zungsbericbte  der  math.-pliysik.-Classe,  1875,  Heft  II.  Munich; 
in-8". 

Zoologisch-mineralogischer  Verein  in  Regensburg.  —  Cor- 
respondenz  Blatt,  6""*  année  à  20'"'  année,  1852-1 806.  — 
Abbandlungen,  X.  Heft.  Ratisbonne  et  Munich;  16  vol.  pet. 
in-S". 

Handelmann  (Heinrich).  —  Die  prahistorischc  Archaologie 
in  Schleswig-Holstein.  Kiel,  1875;  br.  in-8^ 


(  660  ) 

K.  Statisticli-Topograpliische  Bureau,  Stuttgart.  —  Wurl- 
tembergische  Jahrbùcher  fur  Statistik  und  Landeskunde, 
Jahigang  1874, 1.  und  11.  Theil.  —  Beschreibung  des  Oberamts 
Rotlweil.  Stuttgart,  1875;  2  vol.  gr.  in-S*»  et  vol.  pet.  in-8\ 
Kaiserl.  Universitàt,  Wien. —  Verwalstungs-und  Zustands- 
bericht  fiir  die  Studien  Jahre  1875/4  und  1874/3.  Vienne, 
1875;  in-8». 

Geographische  Gesellschafl  in  Wien.  —  Mittheilungen , 
XVII.  Bd.,  1874.  Vienne,  4874;  vol.  in-8°. 

Koehne  (Bernardo  Barone  di).  —  Le  monete  ossidionali  di 
Brescia.  Br.  in-8%  1874. 

Société  de  chimie  de  St-Pétersbourg.  —  Journal,  tome  VII, 
n*»"  7  et  8.  S'-Pétersbourg;  in-8°. 

Jardin  Impérial  de  Botanique  de  St-Pétersbourg.  —  Tra- 
vaux, tome  m,  n°  2.  S'-Pétersbourg,  1875;  vol.  in-8°. 

Société  Impériale  des  naturalistes  de  Moscou.  —  Bulletin , 
année  1875,  nM.  Moscou  ,  1875;  in-8''. 

Société  des  naturalistes  de  la  Nouvelle-Russie  à  Odessa. — 
Mémoires,  tome  III,  cah.  I.  Odessa,  1875;  in-8^ 

Société  royale  des  sciences  à  Upsal.  —  Nova  acta,  sér.  III, 
vol.  IX,  fasc.  II.  —  Bulletin  météorologique,  vol.  VI,  1874. 
Upsal,  1875;  fasc.  et  br.  in-4". 

Nordisld  medicinskt  Arhiv ,  Bd.  VII,Tredje  Haftel.  Stock- 
holm ,  1875;  in  8". 

Cordeiro  [Luciano).  —  De  la  découverte  de  l'Amérique, 
Lisbonne,  Paris,  1874;  br.  in-8^ 

Fuyais  de  la  Bastida  {don  Vicente).  —  Historia  de  la  nu- 
mération con  no  vedades  de  grande  importancia  universal. 
Madrid,  1875;  br.  ln-12. 

Trajford  {F.-W.-C).  —  Amphiora  ou  la  vue  du  monde, 
2'"'=  notice.  Zurich  ,  1875;  br.  in-8^ 

Schw.  Gesellschaft  fur  die  gesammten  Naturwissenschaf- 
ten,   Bern.  —  Verhandlungen  :    47.   Versammlung,  1865; 


(  661  ) 

37.  Jahrcsversammluug,  1873-1874.  Coiie;  "1  vol.  pet.  in-8". 

Naturforschende  GeseUscliaft  in  Bern.  —  Mitthcilungen 
nus  dcni  Jahre  1874,  N-"  828-875.  Berne,  1875;  in-8". 

Société  de  physique  et  dltisloire  naturelle  de  Genève.  — 
Mémoires,  tome  XXIV,  1^"  partie.  Genève,  1873-1874;  vol. 
in- 4". 

Société  des  sciences  naturelles  de  Neiichatel.  —  Bulletin, 
tome  X,  second  cahier.  Neuehatel,  1875;  in-8". 

Gatta  (Luigi).  —  La  sismologia  ed  il  magnetismo  terrestre 
secondo  le  piu  recenti  osservazioni  fatte  in  Italia.  Rome, 
1875;  br.  gr.  in-8°. 

Genocchi  (Angelo).  —  Interno  ad  alcune  série.  Turin  ,  187o; 
br.  in-8». 

Volpicelli  (Paolo).  —  Sopra  un  principio  eletlrostatico , 
riconosciuto  dal  sig.  D"  Palagi  (1852).  —  Lettera  del  sig. 
abate  Regnani,  diretta  al  padre  Secchi,  contro  la  teorica  dell' 
illustre  fisico  italiano  Melloni,  e  risposta  del  prof.  P.  Vol- 
picelli (1855).  —  Riflessioni  del  prof.  F.  Ratti  sullc  due 
comunicazioni  del  prof.  P.  V^olpicelli,  relative  alla  pola- 
rità  elettrostatica,  e  risposta  dello  stesso  Volpicelli  (1855).  — 
Comunicazione  del  prof.  F.  Ratti  sulla  seconda  lettera  del 
prof.  P.  Volpicelli  al  sig.  V.  Regnault  e  risposta  dello  stesso 
Volpicelli  (1855).  —  Sull'  epoca  délia  compléta  cecità  di  Ga- 
lileo  (18C8).  —  Di  un  barometro  fotografico  e  formule  per 
compensare  automaticamente  gli  effetti  délia  temjjcratura  in 
un  barometro  qualunque  (1869).  —  Opinioni  e  sperienze 
entiche  e  moderne  circa  il  calore  del  raggiamento  lunare  ed 
anche  stellare  (1870).  —  Formula  générale  per  la  variazione 
del  tono,  prodotto  dal  moto  del  corpo  sonoro,  e  dell'  ascolta- 
tore  :  corollari  di  questa  formula,  e  considerazioni  sul  modo, 
col  quale  credesi  potei'si  spiegare  la  sposlamento  délie  righe 
di  Fraunhofer  nello  spettro  del  sole,  a  motivo  del  suo  moto 
rotatorio  (1870).  —  Esposizione  del  modo  col  quale  per  la 


(  662  ) 

prima  volta  fu  applicato  il  calcolo  alla  elettrostatica  e  ne  fu 
concluso  che  la  elettricita'  indotta  non  tende  (1870).  —  SuUe 
variazioni  di  teinperatiira  prodotle,  sia  dall'  urto  di  una  cor- 
rente  d'aria,  sia  dall'  assorbimento  di  questa  per  le  polveri;  e 
formule  atte  ad  assegnare  tanto  la  dispendenza  fra  la  quautita' 
di  assorbimento,  ed  il  calorico  sviluppato  in  esso,  quanto  a 
tradurre  le  indicazioni  di  qualunque  terraometro  ad  aria,  in 
quelle  del  terraometro  a  mercurio  (1871).  —  Sullo  scopo  del 
piano  di  prova,  e  sulle  cause  da  cui  dipendono  gli  effetti  elet- 
trostatici  di  questo  istromento  (1871).  —  Sulle  correnti  elet- 
triche,  già  dette  di  flessione  (P  nota,  1871).  —  Su  talune 
trasformazioni  di  forza  viva  in  calorico  e  sulla  quistione  a 
cio'  relativa  tanto  fra  il  gesuita  Grassi  e  Galileo  quanto  per 
l'attrito  deir  aria  (1871).  —  Soluzione  compléta  e  générale 
mediante  la  geometria  di  situazione  del  problema  relative  aile 
corso  del  cavallo  sopra  qualunque  scacchiere  (1872).  —  Necro 
logico  cenno  relativo  al  duca  Mario  Massimo  (1875).  —  Effetti 
délia  persistenza  dei  colori  sulla  retina  (1875).  —  Sur  l'in- 
fluence électrique  (1874).  —  Dimostrazione  di  un  teorema  di 
meccanica  enunciato  e  non  dimostrato  da  Poisson  (1875).  — 
Necrologia  dell'  astronomo  G.-B.  Donati  (1875).  —  Nécrologie© 
cenno  relativo  ad  Augusto  de  la  Rive  (1875).  Rome;  18  br.  et 
vol.  in-i";  vol.  in-8°. 

Società  entomologîca  italiana  di  Firenze.  —  Builettino , 
anno  7%  trim.  III,  1875.  Florence;  in-8''. 

Accademia  ftsio-medico-statistica  di  Milano.  —  Atti, 
anno  XXXI,  1875.  Milan,  1875;  in -8°. 

R.  Accademia  délie  scienze  di  Torino.  —  Atti,  vol.  X, 
Disp.  l'-8%  novembre  1874-giugnio  1875.  Turin;  8  fasc. 
in-8\ 

Osservatorio  delta  Regia  Università  di  Torino,  —  Builet- 
tino raeteorologico  ed  astronomico,  anno  VIII  (1875).  Turin. 
1875;  in-4". 


(  6(J3  ) 

Academia  oUmpica  di  Vicenza.  —  Alli,  vol.  VU,  1°  e  2°  se- 
mesl.  1874.  Viccnzc,  1874;  2  fasc.  in-8°. 

Blanford  [Hmry  F.).  —  The  Winds  of  Northern  India ,  in 
relation  to  the  Température  and  Vapour-consli(ucnt  of  llie 
Atmosphère.  Londres,  1874;  in-4''. 

Anthropological  Jnstitute  of  Great  Brîtain  and  Ireland. 
—  Journal,  vol.  V,  n°  I,  July  1875.  —  List  of  the  members, 
1875.  Londres;  2  br.  in-8". 

Royal  asiatic  Society  of  Great  Brîtain  and  Ireland.  — 
Journal,  New  Séries,  vol.  II,  pt.  IL  —  Fifty-second  annual 
Report,  1875.  Londres  et  Hertford  ,  1875;  vol.  et  br.  in-8". 

Institution  of  civil  engineers  of  London.  —  iMinutes  of 
proceedings,  vol.  XLII,  session  1874-1875,  i)t.  IV.  Londres 
1875;  vol.  in-8^ 

Zoological  Society  of  London.  —  Transactions  ,  vol.  IX, 
pt.  4,1875.  —  Proceedings,  1875,  pt.  II  and  pt.  III.  —  Revised 
listof  the  vertebrated  animais  now  or  lately  living  in  ihe  gar- 
dens  of  the  Zoological  Society  of  London.  (Supplément).  Lon- 
dres; hv.  in-4°,  2  liv.  et  br.  in-8°. 

Numismatic  Society  of  London.  —  The  numismatic  chro- 
nicle,  1875,  pt.  IL  Londres;  in-8°. 

Chemical  Society  of  London.  —  Journal,  ser.  2,  vol.  XIII, 
may,  june  and  july,  1875.  Londres;  3  eah.  in-8°. 

Lotîdofi  mathemaiical  Society. —  Proceedings,  vol.  VI, 
Nos.  81,  82,  85  and  84.  Londres,  1875;  in-8». 

Asiatic  Society  of  Bengal ,  Calcutta,  —  Bibliotheca  Indica, 
New  Séries,  Nos.  517,  318,319  and  520 (in-4'');  Nos.  310,  511, 
316,  321 ,  322,  325,  324,  325,  326  (in-8°).  —  Proceedings, 
Nos.  VI-VIII,  June-August  1875.  —  Journal  :  pt.  1,  No.  II, 
1875;  pt.  II,  No.  1  and  extra  number  1875.  Calcutta;  2  br. 
in-4°  et  14  br.  in-8^ 

American  Jour 7ial  of  science  and  arts,  vol.  X,  july-no- 
vemher  1875.  New  Haven,  1875;  5  fasc.  in-8°. 


(  664  ) 

The  Penn  Monthhjj  vol.  VI .  Nos.  67-72,  july-decem- 
ber  1875.  Philadelphie  ;  6  fasc.  in-S". 

Willson  {W'-G.).  —  Meteorological  abstract  for  the  year 
1874.  —  Report  of  Ihe  Midnapore  and  Bardwan  cyclone  of 
Ihe  1 0  th  and  1 6  th  of  october  1874.  Calcutta,  1 875 ;  2  vol.  in-4«*. 

California  Academy  of  sciences.  —  Proceedings,  vol.  IV, 
1870,  pts.  II  and  III.  San  Francisco  ,  1870;  2  fasc.  in-8^ 

Geological  Survey  of  Canada.  —  Rapport  des  opérations 
pour  1875-1874.  Montréal,  1875;  vol.  in-8°. 

Sociedad  de  Geografia  y  Estadislica  de  la  Repuhlica  Mexi- 
cana.  —  Boletin ,  5''  epoca ,  tomo  II,  n*"  5,  6,  y  7.  Mexico ,  1 875  ; 
in-8". 

Sociedad  Mexicana  de  Hisloria  Natural.  —  La  Naturaleza, 
tomo  III,  entregas  6-14.  Mexico,  1875;  9  cah.  in-4°. 

Inslituto  Historico  Geographico  e  Etimographico  do  Bra- 
siL  —  Revisla  trimensal,  tomo  XXXVII,  parte  2^  IV  trim.; 
t.  XXXVIII,  parte  V,  I  e  II  trim.  Rio  de  Janeiro ,  1874,  1875; 
5  fasc.  in -8°. 

Académie  nationale  des  sciences  exactes  de  l'Université  de 
Cordova.  —  Bulletin,  part.  IV.  Buenos- Aires,  1875;  in-8''. 


BULLETIN 


DE 


L'ACADÉMIE  ROYALK  DES  SCIENCES, 

DES 

LETTRES  ET  DES  BEAUX-ARTS  DE  BELGIQUE. 

1875.  —  N«  12. 


CLASSE  «ES   SCIENCES. 


Séance  du  4  décembre  1875. 

M.  A.  Brialmoînt,  directeur  et  président  de  TAcadémie. 
M.  LiAGBE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.-S.  Stas,  P.-J.  Van  Beneden,  Edra. 
de  Selys  Longchamps,  H.  Nysl,  Th.  Gluge,  L.  Melsens, 
F.  Duprez,  Ernest  Quetelet,  H.  Maus,  E.  Candèze, 
F.  Donny,  Ch.  Montigny,  Éd.  Morren ,  Éd.  Van  Beneden, 
C.  Malaise,  F.  Folie  et  F.  Plateau,  membres;  Eug.  Catalan 
et  Aug.  Bellynck,  associés;  Éd.  Mailly,  J.  De  Tilly, 
F.Crépin,  F.-L.  Cornet  et  Ch.  Van  Bambeke,  correspon- 
dants. 

*2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  45 


(  666 


CORRESPONDANCE 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  fait  parvenir  à  la  demande 
de  M.  le  Ministre  des  Pays-Bas,  pour  la  bibliothèque  de 
l'Académie,  un  exemplaire  de  la  2*  édition  de  la  Pinaco- 
fjrophia  de  M.Snellen  van  Vollenhoven;  in-i".  —  Remer- 
cîments. 

—  MM.  les  questeurs  du  Sénat  et  de  la  Chambre  des 
représentants  adressent  des  cartes  de  tribune  réservée 
pour  la  session  législative  de  1875-1876.  —  Remercî- 
mentSc 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  annonce  que  la  classe  des 
beaux-arts,  conformément  à  une  décision  récente  de  la 
commission  administrative,  a  confié  à  une  commission 
composée  de  MM.  Balat ,  Payen,  G.  Geefs,  Fraikin  et 
Monligny,  le  soin  de  s'occuper  d'un  plan  et  d'un  devis  pour 
le  monument  à  élever  à  feu  M.  Adolphe  Quetelet. 

—  Il  donne  ensuite  communication  de  la  motion  faite 
par  M.  Alvin,  dans  la  séance  de  la  classe  précitée,  au  sujet 
d'un  commencement  d'incendie  qui  s'est  déclaré  dans  le 
laboratoire  de  chimie  de  rËcole  industrielle  placée  sous 
l'Académie  et  la  Bibliothèque  royale. 

La  classe  décide  qu'elle  s'associe  à  la  demande,  faite  à 
ce  sujet,  par  les  établissements  intéressés,  «  que  des  me- 
sures soient  prises  pour  le  déplacement  immédiat  de 
l'F^lcole  industrielle.  » 

MM.  Slas,  Melsens  et  Donny  déclarent  faire  leurs  ré- 


(  ^^>7  ) 
serves  au  sujet  de  cet  accident  dont  «on   a,  disent-ils, 
exagéré  l'importance.  » 

—  jM.  F.  Crépin  fait  hommage  de  deux  brochures  de  sa 
coniposilion  :  i°  Matériaux  pour  servir  à  Vhistoire  des 
roses,  ù'  fascicule,  in-8°.  —  2"  Observations  sur  quelques 
plantes  fossiles  des  dépôts  déroniens,  etc.,  in-S". 

M.  de  Selys  Longchamps  présente  une  brochure  im- 
primée portant  pour  titre  :  D'Omalius  d'Hntloy.  Biogra- 
phie. (Extrait  du  Journal  Franklin).  In-12. 

M.  Melsens  présente  de  la  part  de  M.  le  D""  P.  Calli- 
burcès  un  exemplaire  de  son  mémoire  intitulé  :  Recher- 
ches expérimentales  sur  l'influence  exercée  par  la  chaleur 
sur  les  manifestations  de  la  contraclilité  des  organes. 
ln-8». 

M.  Dove,  associé  de  la  classe,  offre  Tannée  1874  du  tra- 
vail qu'il  publie  dans  le  recueil  des  publications  du  Bureau 
royal  de  statistique  de  Berlin  sous  le  litre  de  Druck,  Tem- 
peralur,  Feuchtigkeit  und  Niederschlàge  und  fiinftàgige 
Wdrmemitlel.  In-S". 

M.  M.  Mourion  adresse,  de  la  part  de  M.  A.  von  Lasaulx, 
professeur  à  l'Université  de  Bonn,  un  exemplaire  de  la 
traduction,  faite  par  M.  F.  Gonnard,  de  son  travail  intitulé  : 
Études  pélrograpfiiques  sur  les  roches  volcaniques  de 
l'Auvergne.  ln-8°. 

M.  F.ouis  Gatta,  de  Rome,  fait  parvenir  un  exemplaire 
de  son  ouvrage  intitulé  :  La  Sismologia  ed  il  magnetismo 
terrestre.  Gr.  in-8*'. 

M.  Herman  von  Schiaginlweit,  de  Munich,  adresse  une 
brochure  imprimée  de  sa  composition  :  Zur  Characteristik 
der  Kru-Neger.  In-8". 

Le  classe  vote  des  remercîmenis  pour  ces  dons. 


(  (UicS  ) 

—  Les  élablissemeDls  scientifiques  ,  dont  l'énmnératioii 
suit,  font  parvenir  leurs  derniers  travaux. 

L'Institut  anthropologique  de  la  Grande-Bretagne  à 
Londres,  la  Société  de  pliysique  et  d'histoire  naturelle  de 
Genève,  la  Société  helvétique  des  sciences  naturelles  de 
Berne  et  la  Société  des  naturalistes  de  la  même  ville,  TAca- 
demie  impériale  des  sciences  de  Vienne,  la  Société  minéra- 
logique  de  Ratisbonne,  le  Jardin  impérial  de  botanique  de 
Saint-Pétersbourg  et  la  Société  des  naturalistes  d'Odessa. 

La  Smithsonian  institution  de  Washington  remercie  la 
classe  pour  le  dernier  envoi  de  publications  académiques. 

—  Les  travaux  manuscrits  suivants  seront  l'objet  d'un 
examen  : 

i"  Note  sur  le  second  principe  delà  théorie  mécanique 
de  la  chaleur,  par  M.  J.  De  Tilly,  correspondant  de  l'Aca- 
démie.—  Commissaires  iMiVL  F.  Folie  et  Eug.  Catalan; 

2"  Tables  de  logarithmes  à  douze  décimales,  jusqu'à 
454  milliards,  par  M.  A.  Namur,  avec  une  introduction 
rédigée  par  M.  P.  Mausion,  professeur  à  l'Université  de 
Gand.  —  Commissaires  MiM.  E.  Catalan,  F.  Folie  et  Liagre; 

5°  Sur  les  dépôts  déKoniens  rapportés  par  Diimonl  à 
iélage  quartzoschisteux  inférieur  de  son  système  eifélietij 
par  i\L  iMichel  Mourlon.  —  Commissaires  .>L\L  Alb.  Briart, 
F.-L.  Cornet  et  C.  Malaise; 

4"  Sur  la  relation  qui  existerait  entre  la  température  de 
fusion  et  le  coefficient  de  dilatation  des  métaux  ,  par 
M.  P.  De  Ileen,  ingénieur  à  Louvain.  —  Commissaires 
MM.  M.  Gloesener,  Ch.  Montigny  et  F.  Folie. 


(  m)  ) 


RAPPORTS. 


Sur  le  problème  des  liquides  superposés  dans  un  tube 
capillaire;  par  M.  G.  Van  der  Mensbrugghe. 

itnppot't  de  -fff.   J.   Pintamt. 

«  La  question  des  liquides  superposés  dans  un  même 
tube  capillaire  a  été  traitée  par  Laplace  et  par  Poisson. 
Os  géomètres  sont  arrivés,  par  des  méthodes  rigoureuses, 
à  la  conclusion  que  le  poids  total  soulevé  est  le  même  que 
si  le  liquide  inférieur  était  seul ,  et  M.  J.  Bertrand  a  déduit 
de  la  théorie  de  Gauss  le  même  résultat.  Or  Young  avait 
déjà  signalé  un  fait  qui  ne  s'accorde  nullement  avec  la  loi 
ci-dessus,  et  si  l'on  consulte  les  expériences  de  M.  Bède, 
et  surtout  celles  de  M.  Quincke,  on  y  trouve  de  nombreux- 
exemples  d'un  semblable  désaccord.  Faut-il  en  conclure 
que  les  illustres  géomètres  français  se  sont  trompés,  mal- 
gré une  apparente  rigueur  de  leurs  théories?  C'est  ce  point 
délicat  que  M.  Van  der  Mensbrugghe  aborde  dans  le  Mé- 
moire actuel;  il  admet  la  complète  exactitude  des  calculs 
rappelés  plus  haut,  mais  il  montre  que  ces  calculs  suppo- 
sent une  condition  physique  qu'il  est  impossible  de  réali- 
ser expérimentalement,  bien  qu'on  puisse  la  concevoir  par 
la  pensée.  Cette  condition  consiste  en  ce  que  la  ligne 
suivant  laquelle  la  surface  commune  à  deux  liquides  abou- 
tit à  la  paroi  du  tube,  soit  parfaitement  régulière  et  parfai- 
tement nette,  et  que,  dans  les  mouvements  que  peut 
prendre  la  colonne  totale,  celte  ligne  se  déplace  tout  d'une 


(  ^70  ) 
pièce  en  conservant  sa  régularité  et  sa  netteté.  Or  si  l'on 
fait  l'expérience  de  manière  que  le  liquide  inféiieur  monte 
d'abord  dans  le  tube  et  qu'on  ajoute  un  autre  liquide  par- 
dessus, ce  qui  fera  descendre  le  premier  d'une  certaine 
quantité,  celui-ci  laissera   nécessairement  en  arrière  une 
mince  couche  adhérente  à  la  paroi,  couche  qui    formera 
une  gaine  dans  laquelle  s'engagera  le  liquide  supérieur;  la 
surface  commune  du  ménisque  n'aboutira  donc  plus  à  la 
paroi,  mais  bien  à  cette  gaine.  Si,  au  contraire,  comme 
dans  le  procédé  de  iM.  Quincke,  le  liquide  destiné  à  être  le 
supérieur  monte  d'abord  dans  le  tube,  et  qu'on  permette 
ensuite  à  l'autre  liquide  d'y  pénétrer,  c'est  alors  le  liquide 
supérieur  qui  abandonne   sur  la   paroi   une  gaîne  dans 
laquelle  s'engage  le  liquide  inférieur.  Dès  lors  les  résultats 
de  l'expérience  ne  peuvent  plus  correspondre  à  la  loi  trou- 
vée par  Laplace  et  Poisson.  On  obtient,  au  contraire,  un 
accord  très-satisfaisant  entre  la  théorie  et  l'expérience, 
quand  on  cherche  la  valeur  du  poids  total  soulevé  en  fonc- 
tion des  tensions  de  la  surface  libre  supérieure  et  des  sur- 
faces communes  aux  liquides  en  contact.  La  formule  qui 
donne  le  poids  exprimé  de  cette  manière,  avait  déjcà  été 
trouvée  par  Poisson  ;  seulement  ce  géomètre  ne  rattachait 
pas  les  constantes  qui  y  entrent  à  l'idée  des  tensions; 
M.  Van  der  Mensbrugghe  la  fait  aisément  découler  aussi 
de  la  théorie  des  pressions  de  Laplace  et  de  la  théorie  de 
Gauss.  Cette  même  formule  est  indépendante  de  la  condi- 
tion théorique  irréalisable  dont  j'ai  parlé,  et  voilà  pour- 
quoi elle  fournit  des  résultats  que  l'observation  vérifie. 

Enfin  aux  expériences  citées  dans  ce  qui  précède.  Tau- 
leur  en  ajoute  qui  lui  sont  propres,  et  qui  constituent  de 
nouvelles  confirmations  de  la  formule  fondée  sur  les  ten- 
sions. On  le  voit,  le  travail  de  M.  Van  der  Mensbrugghe 


(  «71  ) 
tend  à  faire  disparaître  dans  la  théorie  des  phénomènes 
capillaires,  une  difficulté  qui  semblait  inextricable;  il  a 
donc  un  haut  degré  d'intérêt,  et  je  ne  doute  pas  que  la 
classe  n'en  décide  l'impression  dans  le  recueil  des  Mémoires 
in-4^  D 

La  classe  a  adopté  ces  conclusions  auxquelles  a  adhéré 
M.  F.  Duprez,  second  commissaire. 


Théorèmes  sur  les  polygones  réguliers  et  sommation  de 
quelques  séries  trig  onomé  trique  s  ;  par  M.  le  capitaine 
d'artillerie  Reinemund. 

Rapport  de   JU.  Jf.  Oc   Tilly, 

<i  Dans  le  Journal  de  Mathématiques  de  M.  Liouville 
(1"  série,  t.  Xlll),  M.  Breton  (de  Champ)  a  donné  l'ana- 
lyse d'un  Ouvrage  publié  en  1746  par  le  célèbre  géomètre 
anglais  Slewart,  sous  ce  titre  :  «  Quelques  théorèmes  gé- 
néraux d'un  grand  usage  dans  les  hautes  mathématiques  ». 
M.  Breton  établit  que  plusieurs  des  propositions  contenues 
dans  cet  Ouvrage  sont  inexactes,  c'est-à-dire  qu'elles  se 
vérifient  seulement  dans  des  cas  particuliers. 

Parmi  celles  qui  sont  exactes,  l'une  des  plus  remarqua- 
bles a  pour  objet  d'exprimer,  en  fonction  de  R,  de  r/i  et 
de  Hj  la  somme  des  puissances  2m  des  distances  d'un 
point  0,  pris  sur  une  circonférence  de  rayon  R,  à  tous  les 
sommets  d'un  polygone  régulier  inscrit  de  n  côtés  (*). 


(*)  m  oi  n  ont  ici  la  même  signilication  que  dans  le  Mémoire  de  M.  Rei- 
nemund Elles  onl  la  signifiealion  inverse  dans  l'Ouvrage  de  Stewart  et 
dans  le  Mémoire  de  M.  Breton. 


(  «7^i  ) 
Cette  somme  s'exprime  par 

(I) -.    ^"'(-2>»-l)...(m-.-i)^.. 

1  .  '2  ...  m  ' 

mais  la  démonstration  n'est  faite  que  pour  le  cas  où  m  est 
inférieur  à  n  et  la  formule  elle-même  comporte  cette 
restriction. 

Il  ne  paraît  pas  que  Ton  ait  trouvé  jusqu'ici  une  solution 
plus  complète,  c'est-à-dire  une  formule  analogue  à  (I), 
présentant  à  peu  près  les  mêmes  facilités  pour  le  calcul 
numérique,  se  réduisant  à  (1)  lorsque  m  est  inférieur  à  n, 
mais  indéj)endante,  dans  sa  forme  générale,  de  toute  hypo- 
thèse sur  les  valeurs  de  ces  deux  quantités. 

M.  le  capitaine  Reinemund  fait  connaître  cette  formule 
générale  dans  la  Note  soumise  à  notre  appréciation.  ïl  en 
déduit  quelques  sommes  de  séries  trigonomélriques,  natu- 
rellement plus  générales  aussi  que  celles  que  l'on  peut 
déduire,  par  une  méthode  analogue,  des  formules  de  Ste- 
wart. 

L'analyse  de  Tau  leur  est  exacte.  Sa  méthode  d'investi- 
gation me  paraît  constituer  une  application  ingénieuse  et 
remarquable  des  imaginaires  à  la  Géométrie.  Ses  résultats 
sont  d'une  importance  comparable  (*)  à  celle  de  l'Ouvrage 
même  de  Stewart.  Enfin  ,  un  exemple  bien  choisi  vient 
montrer  que  le  calcul  numérique  est  tacile,  au  moins  dans 
une  infinité  de  cas  particuliers,  qui  échappent  complète- 
ment à  la  formule  du  géomètre  anglais. 


(*)  Je  dis  comparable  cl  non  supérieure,  car  si  la  formule  de  M.  Rei- 
nemund est  plus  générale  sous  le  rapport  de  la  valeur  de  m,  celle  de 
Slewarl  l'est  davantage  sous  le  rapport  de  la  position  du  point  0.  D'ail- 
leurs, l'Ouvrage  de  Stewart  traite  d'autres  questions  encore. 


Pour  ces  motifs,  j'ai  l'honneur  de  proposer  à  la  Classe 
(le  voler  l'insertion  du  travail  de  M.  Reincmund  dans  le 
Bulletin  de  la  séance  et  d'adresser  des  rcmercîments  à 
l'auteur.  » 

La  Classe  a  adopté  ces  conclusions,  auxquelles  s'est 
rallié  M.  K.  Catalan,  second  commissaire. 


Sur  r étage  devonicn  des  psammites  du  Condroz  dans  le 
bassin  de  Theu.r,  dans  le  bassin  septentrional  (entre 
Aix-la-Chapelle  et  Ath)  et  dans  le  Boulonnais;  par 
M.  Mourlon. 

Minppofl  tic  M.   f-i.   Ucicalqne. 

<i  L'auteur  rappelle  que,  dans  un  iravail  antérieur,  il  a 
reconnu  que  l'étage  des  psaînmiles  du  Condroz  peut  se 
diviser  en  quatre  assises,  d'Esneux,  de  Souverain-Pré,  de 
Montfort  et  d'Évieux,  d'une  puissance  approximative  de 
150,  iOO,  loOet  200  mètres  respectivement.  Le  travail 
actuel  est  consacré  à  l'extension  de  ces  recherches,  d'abord 
dans  le  bassin  de  ïheux. 

Bassin  de  Theux.  —  L'auteur  y  a  reconnu  les  mêmes 
assises  que  sur  les  bords  de  TOurthe.  Il  décrit  en  détail 
la  coupe  comprise  entre  Theux  et  Franchimont. 

Bassin  septentrional.  —  Passant  ensuite  au  grand  bas- 
sin septentrional  de  notre  terrain  anthraxiCère,  l'auteur 
décrit  d'abord  la  coupe  des  tranchées  près  de  la  station  de 
Montzen-Moresnet,  puis  les  carrières  de  Montzen^  dans  les- 
quelles il  n'a  pu  observer  les  deux  assises  inférieures. 
Dans  la  coupe  de  la  tranchée  de  la  station  de  Dolhain,  on 


(  «374  ) 
peut  admettre  que  Passise  de  Monlfort  fait  défaut,  [)roba- 
blement  par  suite  d'une  faille.  Entre  (a  station  de  Trooz- 
Aval  et  Basse-Fraipont^  et  au  Fonl-des-Crfjs ,  à  Cfiaud- 
fontaine ^  l'assise  de  Souverain  -  Pré  semble  manquer 
complètement.  La  coupe  de  l'Ourthe  à  Angleur  n'est  visi- 
ble qu'en  partie.  Dans  la  coupe  sur  le  ruisseau  au  S.  E. 
d'Engis,  l'assise  d'É vieux,  à  son  tour,  paraît  faire  défaut. 
Dans  la  coupe  de  Huj/ ,  sur  la  rive  droite  de  la  Meuse,  les 
assises  d'Évieux  et  de  Souverain-Pré  manquent  à  la  fois. 
Dans  la  coupe  de  la  station  de  Naninne,  où,  selon  moi,  les 
roches  sont  fortement  altérées  par  des  émanations  geysé- 
riennes,  l'auteur  ne  reconnaît  pas  les  assises  dEsneux  et 
de  Souverain-Pré  (1).  .4  Wàpion,  sur  la  rive  gauche  de  la 
Meuse,  et  à  Malonne,  les  coupes  sont  incomplètes.  Celle 
en  face  de  Vabbaye  de  Marche-les- Dames  ne  montre  que 
l'assise  de  Montfort,  mais  une  grande  partie  est  masquée 
par  des  ébouiis;  à  Warlet,  à  NamêcheM^  coupes  sont  aussi 
incomplètes;  celle  des  carrières  d'Houssoy  le  sont  égale- 
ment. Mais  l'auteur  a  obtenu  de  iM.  Gonthier  une  coupe 
détaillée,  provenant  de  la  galerie  de  la  mine  de  Ville- 
en-Waret,  avec  les  échantillons  à  l'appui,  dont  l'examen 
lui  permet  d'affirmer  que  l'on  ne  rencontre  dans  ce  district 
que  la  partie  supérieure  de  l'assise  de  Montfort.  A  Gel- 
bressée,  à  Rhisnes ,  à  Isne,  à  Mielmonl,  les  coupes  sont 
également  incomplètes,  mais  on  n'observe  partout  que  la 
même  assise. 

Au  bois  de  la  Roq  (Arquennes),  je  serais  porté  a  admettre 
la  présence  de  l'assise  d'Évieux  avec  colle  de  Montfort,  de 
même  qu'aux  Écaussines.  Dans  les  carrières  de  Méver- 


(1)  J'y  ai  trouvé  une  Cucullœa  que  jt^  rapporte,  ainsi  que  d'autres 
échantillons  du  bord  nord  du  bassin,  à  C.  unilaleralis. 


(  «75  ) 
gnies  et  d'Attre,  puis  d'Alh,  on  n'observe,  suivant  l'auteur, 
que  rassise  de  Monlfort. 

Boulonnais.  L'auteur  a  complété  son  étude  en  poursui- 
vant ces  couches  en  France,  où  elles  reparaissent  dans  le 
Boulonnais,  complètement  analogues  à  celles  qu'on  vient 
de  voir  en  dernier  lieu. 

Résumé  et  conclusions.  Il  résulte  de  ce  qui  précède  que 
les  assises  établies  sur  fOurthe  par  l'auteur  conservent 
leurs  caractères  depuis  la  frontière  prussienne  jusqu'à  la 
Manche,  mais  qu'une  ou  plusieurs  d'entre  elles  peuvent 
faire  défaut.  Ainsi  le  bord  seplentiional  montre  deux  la- 
cunes constantes,  la  première,  constituée  par  l'absence  de 
l'assise  d'Évieux,  la  seconde,  par  le  manque  des  assises 
d'Esneux,  de  Souverain-Pré  et  de  la  partie  inférieure  de 
l'assise  de  Montfort.  En  même  temps  la  puissance  de  l'étage 
est  fortement  réduite,  des  ^//*  ou  des  *-^/io. 

Cet  intéressant  travail  est  accompagné  d'une  planche 
de  coupes,  et  je  propose  volontiers  à  l'Académie  de  l'im- 
primer dans  notre  Bulletin.  Toutefois,  en  présence  de 
l'état  de  nos  finances,  j'estime  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'impri- 
mer les  planches  en  couleur  :  un  choix  convenable  de 
pointillés  leur  conservera  toute  leur  clarté.  » 

Rap/tofl  do  fi.    K,.   Oo   Mionincle. 

«  Je  n'hésite  pas  à  me  joindre  à  mon  honorable  con- 
frère M.  Dewalque  pour  demander  l'impression  dans  nos 
Bulletins  de  l'intéressant  Mémoire  de  M.  Mourlon  dont-il 
a  suffisamment  fait  l'analyse  pour  que  je  puisse  me  dis- 
penser d'y  revenir. 

Mais  je  ne  partage  pas  son  avis  relativement  à  l'exécu- 


(  676  ) 

lion  de  la  planche  qui  accompagne  le  travail  de  M.  Mour- 
lon. 

En  effet,  ce  travail  faisant  suite  à  un  autre  qui  a  déjà 
paru  dans  nos  recueils,  il  est  indispensable  que  les  plan- 
ches de  l'une  et  de  l'autre  représentant  des  coupes  analo- 
gues soient  exécjilées  de  la  même  façon  Je  crois,  au  reste, 
que  l'économie  qui  en  résulterait  pour  l'Académie  serait 
fort  minime,  par  suite  des  soins  beaucoup  plus  minutieux 
qu'exigerait  la  gravure  de  la  planche  exécutée  d'après  les 
indications  de  M.  Dewalque.  » 

Kapfioi't  lie   71.    Otëpuiêt. 

«  Au  mois  d'avril  dernier,  M.  Mourlon  a  présenté  à 
l'Académie  la  description  do  l'étage  des  psammites  du 
Condroz  dans  leur  région  typique.  Il  montrait  que  les  cou- 
ches atteignent  une  épaisseur  d'environ  600  mètres  dans 
la  vallée  de  l'Ourthe  et,  relevant  dans  cet  endroit  l'échelle 
stratigraphique  de  ce  puissant  étage  qu'il  divisait  en  quatre 
assises,  il  en  suivait  la  répartition  dans  les  principales 
coupes  du  Condroz.  La  série  des  couches  y  restait  la  même, 
mais  certains  groupes  tendaient  à  diminuer  d'épaisseur 
dans  d'assez  grandes  proportions. 

D'après,  ce  qui  avait  été  observé  dans  la  constitution  du 
calcaire  carbonifèrt',  cette  diminution  d'épaisseur  annon- 
çait, comme  je  l'ai  fait  remarquer,  que  les  groupes  réduits 
devaient  disparaître  dans  les  affleurements  plus  septentrio- 
naux. 

La  nouvelle  note  que  M.  Mourlon  nous  soumet  fait  con- 
naître ses  observations  sur  la  constitution  de  cet  étage 
devonien  dans  le  bassin  de  Theux,  dans  le  bassin  septen- 
trional entre  Aix-la-Chapelle  et  Ath,  ainsi  que  dans  le 


i  (377  ) 

Boulonnais.  Il  décril'cn  dclail  les  couches  qui  y  représen- 
tent l'étage.  La  série  se  retrouve  tout  entière  à  Theux. 
Il  l'observe  moins  complète  entre  Moresnet  et  CliautHon- 
taine,  sans  pouvoir  néanmoins  affirmer  que  des  lacunes 
réelles  s'y  présentent.  A  Angleur,  l'assise  d'Ëvieux  (D)  et 
la  partie  supérieure  de  l'assise  de  Montibrt  (C)  sont  seules 
rep)ésentées.A  IIuy,il  reconnaît  l'assise  d'Esneux  (A)et  les 
grès  de  l'assise  de  Montfoit  (C),  séparés  de  la  précédente 
par  des  psammiles  rapportables  à  la  partie  inférieure  de 
cette  assise  C,  mais  les  assises  de  Souverain-Pré  (B)  et 
d'Ëvieux  (D)  y  l'ont  complètement  défaut. 

A  partir  de  celle  coupe  jusqu'à  Atli  et  même  dans  le 
Boulonnais,  deux  lacunes  considérables  se  manifestent 
constamment  sur  les  deux  bords  du  bassin  septentrional. 
L'étage  y  est  réduit  aux  seuls  grès  de  Montfort,  de  sorte 
que  les  psammites  d'Ëvieux  qui  devaient  les  surmonter  n'y 
existent  pas,  non  plus  que  les  psammiles  d'Esneux,  les 
macignos  de  Souverain-Pré  et  les  psammites  de  Mont- 
fort  sur  lesquels  ils  reposent  dans  la  série  normale.  Les 
groupes  slraligrapbiques  manquants  ont  sur  l'Ourlbe  envi- 
ron 500  mètres  d'épaisseur!  Ces  lacunes  sont  donc  très- 
importantes  et  on  ne  peut  douter  de  leur  réalité,  puisque 
l'auteur  les  a  reconnues  dans  treize  coupes  entre  Huy  et 
Ath  et  dans  deux  coupes  aux  environs  de  Boulogne-sur- 
Mer.  Le  calcaire  carbonifère  n'en  a  pas  présenté  de  plus 
caractéristiques. 

Ce  beau  résultat  est  dû  à  la  méthode  suivie  par  l'auteur. 
En  prenant  pour  terme  de  comparaison  l'affleurement 
où  les  couches  otTrenl  le  plus  d'épaisseur  et  en  y  relevant 
la  série  détaillée  des  couches,  il  a  cherché  à  y  raccorder 
successivement  les  autres  affleurements,  subdivisions  par 
subdivisions.  Il  esl  arrivé  par  ce  procédé  comparatif  à 


(  678  ) 
découvrir  (Je  son  côté  la  coiislilutioii  laxuiiaire  de  cet  étage, 
phénomène  qui  est  l'un  des  traits  dominants  de  nos  ter- 
rains devoniens  et  carbonifères. 

L'Entre-Sambre-et-Meuse  reste  maintenant  à  décrire. 
L'étage  y  est  très-développé  et  y  présente  de  belles  coupes, 
surtout  sur  la  Meuse.  L'auteur  nous  fera  sans  doute  con- 
naître bientôt  les  observations  qu'il  y  a  faites.  Les  résultats 
obtenus  jusqu'à  présent  doivent  nous  faire  espérer  que 
cette  troisième  série  de  recherches  ne  sera  pas  moins  fé- 
conde en  faits  intéressants. 

Je  me  joins  avec  empressement  à  mes  deux  honorables 
confrères  pour  demander  l'insertion  aux  Bulletins  de  la 
note  de  M.  Monrlon.  Je  suis  de  l'avis  de  M.  de  Koninck 
qu'il  serait  fâcheux  de  ne  pas  colorier  les  coupes  annexées 
à  cette  note.  La  publication  y  perdrait  beaucoup  et  l'éco- 
nomie résultant  de  la  suppression  des  couleurs  me  semble 
trop  minime  pour  que  l'Académie  se  départisse  de  ses 
usages  en  pareil  cas.  » 

La  classe  a  adopté  les  conclusions  favorables  de  ses  trois 
commissaires. 


Les  dépôts  littoraux  de  l'assise  panisélienne  dans  les  envi- 
rons de  Bruxelles. 

Êtappor-t  tic  .W.   MMupoitt. 

«  Le  mémoire  qui  nous  est  soumis  a  pour  objet  l'étude 
des  couches  qui  se  trouvent  le  long  de  la  rive  droite  de  la 
Senne  dans  les  environs  de  Bruxelles  à  la  base  des  sables 
jaunes  bruxelliens.  Son  auteur  anonyme  décrit  les  coupes 


G79  ^ 

qu'il  a  observées  à  Scliaerbeek,  à  Saint-Gilles  et  à  Uccle, 
figure  deux  d'entre  elles  et  en  elle  les  fossiles. 

Parmi  ces  fossiles,  plusieurs  espèces  caractérisent  par 
leur  aliondance  le  terrain  panisélien  d'Anderlecht.  Cette 
observation  et  la  présence  de  la  glauconie  portent  Fauteur 
à  considérer  ces  couches  comme  paniséliennes. 

D'un  autre  côté,  les  cailloux  qui  se  trouvent  à  la  base 
du  dépôt,  leur  disparition  à  l'est  des  trois  localités  indi- 
quées ci-dessus,  le  nombre  et  la  variété  remarquable  des 
fossiles  portent  Tàuleur  à  considérer  ces  couches  comme 
un  dépôt  de  plage.  Ce  serait,  à  son  avis,  des  points  litto- 
raux de  la  mer  panisélienne.  M.  Vincent  a  soutenu  récem- 
ment la  môme  thèse  à  la  Société  malacologique. 

Dumont  indique  dans  la  légende  de  sa  carte  que  le  sys- 
tème bruxellien  commence  par  un  dépôt  de  gravier.  Il  y  a 
dès  lors  lieu  de  croire  que  ce  dépôt  doit  être  assez  con- 
stant et  se  trouver  sur  un  plus  grand  nombre  de  points. 

Je  ne  connais  jusqu'à  présent  que  les  graviers  que 
M.  Mourlon  a  signalés  dans  les  environs  de  Bruxelles  et  à 
Nil-Saint-Vincent,  localité  située  à  trente  kilomètres  au 
sud-est  de  cette  ville.  Ce  géologue  les  considère,  à  l'exem- 
ple de  Dumont,  comme  bruxelliens,  à  cause  des  affinités 
lilhologiques  des  couches  avec  le  dépôt  qui  les  recouvre; 

Plus  récemment,  i\l.  Vincent,  en  faisant  connaître  les 
résultats  de  ses  recherches  sur  le  terrain  panisélien  de  la 
rive  gauche  de  la  Senne,  a  été  amené  à  y  rattacher  les 
couches  caillouteuses  de  la  rive  droite  et  à  les  considérer 
comme  l'affleurement  extrême  de  ce  système  au  delà  de  la 
Senne.  Ce  point  de  vue  s'écarte  de  celui  de  Dumont  en 
raccordant  à  un  terrain  inférieur  un  dépôt  considéré  jus- 
qu'ici comme  bruxellien  et  en  plaçant  sur  la  rive  droite 
de  la  Senne  un  affleurement  du  terrain  panisélien  que 
Dumont  arrête  complètement  à  la  rive  gauche. 


(  ()80  ) 

La  question  paléontoiogique,  soulevée  par  ces  recher- 
ches, sera  examinée  avec  une  haute  compétence  par  notre 
honorable  confrère  M.  Nyst,  qui  a  déterminé,  l'an  dernier, 
les  nombreux  fossiles  paniséliens  recueillis  dans  le  Hai- 
naut.  Je  me  bornerai  à  faire  la  remarque  qu'il  eût  été  dé- 
sirable de  connaître  les  rapports  précis  qui  existent  entre 
les  dépôts  caillouteux  de  Nil-Saint-Vincent  et  des  envi- 
rons de  Bruxelles  avant  de  formuler  l'hypothèse  —  très- 
ingénieuse  du  reste  —  du  dépôt  littoral  de  la  rive  droite 
de  la  Senne.  11  semble  évident  que  si  ces  deux  dépôts  sont 
les  mômes,  on  pourrait  difficilement  admettre  la  manière 
de  voir  de  l'auteur. 

Quoi  qu'il  en  soil,  le  mémoire  envoyé  à  notre  examen 
me  paraît  le  résultat  de  recherches  sérieuses  et  soutenues. 
Outre  ses  détails  de  stratigraphie  positive,  il  est  accom- 
pagné d'une  liste  de  fossiles  intéressante,  mentionnant  de 
nombreuses  formes  de  poissons,  de  crustacés,  de  mollus- 
ques, etc.,  recueillies  dans  ces  gisements.  Aussi,  quoi- 
qu'une partie  de  ces  faits  et  la  coupe  théorique  à  travers  la 
vallée  de  la  Senne  se  trouvent  déjà  dans  le  mémoire  de 
M.  Vincent,  je  ne  pense  pas  qu'il  y  ait  double  emploi. 

J'ai  l'honneur  de  proposer  d'insérer  ce  travail  dans  les 
Bulletins  de  l'Académie.  » 

Knppoft   «le   fi.    1%'yst. 

<L  Comme  mon  honorable  confrère  M.  Dupont,  je  trouve 
très-intéressante  la  notice  anonyme  intitulée  :  Les  dépôts 
littoraux  de  l'assise  panisélienne  dans  les  environs  de 
Bruxelles.Les  listes  de  fossiles  qu'elle  renferme  se  montent 
à  158  formes  dont  l'association  est  toutefois  assez  hété- 
rogène. On  y  rencontre  des  espèces  yprésiennes  qui  sont 
probablement  roulées  ou  remaniées,  puis  des  espèces  que 


(  681  ) 
nous  pouvons  considérer  comme  paniséliennes.  Enfin  d'au- 
tres, et  ce  sont  les  plus  nombreuses,  se  trouvent  à  la  fois 
dans  les  systèmes  paniséliens  et  bruxelliens.  Je  crois  que 
cette  faune  a  plus  de  rapport  avec  celle  du  mont  Panisel 
et  d'Anderleclit  et  l'opinion  de  l'auteur  me  semble  soute- 
nable;  cependant  le  caractère  vraiment  littoral  de  cette 
faune  de  la  rive  droite  de  la  Senne  ne  me  paraît  pas  bien 
tranché.  On  y  remarque  l'absence  des  genres  lithophages 
qui  caractérisent  surtout  celles  des  plages,  sauf  le  genre 
Teredo  que  l'auteur  y  indique  du  reste  comme  y  étant 
très-rare. 

J'ai  l'honneur,  Messieurs,  de  vous  proposer  l'insertion 
de  cette  notice  dans  nos  Bulletins.  » 

Rapport  de  Mt.  Alb.    MSt'iafl 

«  Depuis  quelques  années  d'activés  recherches,  faites 
aux  environs  de  Bruxelles,  ont  amené  la  découverte  de  gîtes 
fossilifères  dans  les  assises  inférieures  au  système  bruxel- 
lien  ;  un  peu  de  lumière  commence  à  se  répandre  sur  cette 
partie  encore  assez  peu  connue  de  la  géologie  de  notre  pays. 

Le  travail  qui  nous  est  soumis  s'occupe  de  la  descrip- 
tion de  ces  assises  tertiaires,  dans  trois  localités  de  la 
vallée  de  la  Senne,  qui  sont  :  Schaerbeek,  Saint-Gilles  et 
Uccle.  ]1  s'occupe  principalement  de  dépôts  parfois  assez 
volumineux,  mais  généralement  assez  peu  puissants  et 
quelquefois  interrompus,  qui,  sur  la  rive  droite  de  cette 
rivière,  se  trouvent  intercalés  entre  l'argile  yprésienne  et 
les  couches  les  plus  inférieures  des  sables  bruxelliens. 

Cette  étude  paraît  assez  complète  tant  au  point  de  vue 
stratigraphique  qu'au  point  de  vue  paléontologique  et  les 
listes  des  fossiles,  surtout,  sont  fort  intéressantes. 

2°"^  SÉRIE,  TOME   XL.  44 


(  68-2  ) 

Les  auteurs  concluent  de  leurs  observations  que,  con- 
trairement à  l'opinion  de  Dumont,  des  dépôts  que  l'on 
doit  rattacher  à  l'époque  panisélienne  existent  sur  le  ver- 
sant oriental  de  la  vallée  de  la  Senne,  mais  en  petite  quan- 
tité, et  qu'ils  ne  s'étendent  pas  plus  loin  à  l'est;  que  ces 
dépôts,  généralement  graveleux,  renfermant  des  dents  de 
poissons  appartenant  à  d'assez  nombreuses  espèces  et  des 
débris  de  crustacés  ainsi  que  des  mollusques  également 
fort  abondants  en  espèces,  doivent  se  rapporter  à  des 
dépôts  ou  cordons  littoraux  de  la  mer  panisélienne;  et 
enfin,  discutant  la  faune  de  ces  dépôts  côtiers  et  celle  de 
dépôts  de  la  rive  opposée  qui  semblent  leur  être  contem- 
porains, mais  de  formation  tout  à  fait  marine,  ils  sont 
amenés  à  les  ranger  les  uns  et  les  autres  dans  l'éocène 
inférieur  et  à  terminer  l'éocène  moyen  à  la  partie  infé- 
rieure de  l'assise  bruxellienne. 

Sans  rappeler  ici  les  opinions  diverses  des  auteurs  qui 
ont  traité  cette  dernière  question  et  sont  arrivés  à  la  même 
conclusion,  je  dois  faire  observer  que  leur  discussion  s'ap- 
puyait principalement,  comme  celle  du  mémoire  anonyme , 
sur  la  liste  des  fossiles  paniséliens  publiée,  en  1868,  par 
G.  Dewalque  dans  son  Prodrome  d'une  description  géolo- 
gique  de  la  Belgique.  Or  cette  liste  renferme  les  espèces 
de  deux  faunes  distinctes,  celles  du  panisélien  type  du 
mont  Panisel ,  de  Renaix  et  autres  localités  du  Hainaut,  et 
celles  d'assises  inférieures  auxquelles  nous  avons  donné  le 
nom  d'argilites  de  Morlanwelz  et  que  nous  avons  ratta- 
chées à  l'assise  yprésienne  dont  elles  formeraient  le  terme 
supérieur.  (Réunion  extraordinaire  de  la  Société  géolo- 
gique de  France  à  Mons,  en  1874.  — Lecture  d'ouverture 
faite  par  MM.  F.-L  Cornet  et  A.  Briart.)  On  ne  peut  que 
s'égarer  en  raisonnant  sur  cette  liste  mélangée,  et  nous 


(  G85  ) 
persistons  dans  notre  opinion,  c'est-à-dire  à  ranger  les 
couches  de  Morlanwelz  dans  Téocène  inférieur,  en  faisant 
du  panisélien  type  le  terme  inférieur  de  Téocène  moyen. 

Quoi  qu'il  en  soit,  je  reconnais  avec  mes  deux  honora- 
bles collègues  que  le  travail  des  auteurs  anonymes  a  été 
fait  avec  beaucoup  de  soin  et  a  nécessité  des  recherches 
étendues;  mais  je  dois  faire  observer  qu'il  nous  fait  con- 
naître très-peu  de  choses  nouvelles  et  qui  ne  fassent  déjà 
partie  du  domaine  de  la  science.  En  effet,  M.  Vincent, 
préparateur  au  Musée  royal  d'histoire  naturelle  de  Bruxel- 
les, a  publié,  dès  1874,  dans  les  Ammles  de  la  Société 
malacologiqiie  de  Belgique,  une  Note  sur  les  dépôts  pani- 
séliens  d'Anderlecht  près  de  Bruxelles  y  dans  laquelle  il 
décrit  les  mêmes  terrains,  émet  les  mêmes  idées,  et  arrive 
aux  mêmes  conclusions  :  ces  conclusions  sont  celles  que 
j'ai  énumérées  plus  haut  et  elles  sont  résumées  dans  une 
coupe  théorique  transversale  de  la  vallée  de  la  Senne  qui 
accompagne  son  travail.  Or  les  auteurs  anonymes  publient 
également  une  coupe  de  la  même  vallée,  prise  au  même 
point  et  à  peu  près  identique  à  celle  de  M.  Vincent.  On  n'y 
remarque  qu'une  légère  différence ,  c'est  que  la  couche  à 
Nummulites  planulata  se  trouve,  dans  la  coupe  de  M.  Vin- 
cent, à  la  partie  supérieure  de  l'assise  yprésienne,  tandis 
que  dans  celle  de  nos  auteurs  elle  se  trouve  reportée  un 
peu  plus  bas.  Les  tableaux  des  fossiles  donnés  par  ces  der- 
niers sont,  cependant,  beaucoup  plus  complets  que  les 
listes  de  leur  devancier  :  M.  Vincent  n'énnmère,  en  effet, 
que  quarante  espèces,  tandis  que  ces  messieurs  en  don- 
nent cent  quarante  et  une. 

Ces  tableaux  de  fossiles  sont  très-intéressants,  je  le  ré- 
pète; ils  constituent  la  partie  la  plus  remarquable  du  tra- 
vail ,  la  seule  qui  soit  une  nouveauté  dans  la  science.  Pour 


(  684  ) 

le  reste,  il  ne  présente  rien  d'absolument  nouveau,  et  ne 
me  paraît  être  que  l'amplification  du  travail  que  je  viens  de 
citer. 

M.  Vincent  disait,  du  reste  ,  dans  sa  première  Note,  en 
parlant  des  dépôts  découverts  par  lui  :  «  Nous  nous  propo- 
sons de  faire  connaître  ces  dépôts  paniséliens  par  une  Note 
spéciale  (p.  7).  C'est  donc  qu'il  avait  l'intention  d'en  con- 
tinuer l'étude.  C'est,  en  effet,  ce  qui  a  été  fait,  si  je  suis 
bien  renseigné,  et  c'est  ce  que  ne  pouvaient  pas  ignorer  les 
auteurs  anonymes. 

Je  pense  qu'il  est  permis  de  trouver  le  procédé  peu  déli- 
cat et  de  regretter  qu'ils  aient  cru  devoir  garder  l'anonyme 
en  présentant  leur  travail  à  l'Académie. 

Dans  ces  conditions  je  me  suis  demandé  si  je  devais  me 
joindre  à  mes  deux  honorables  collègues  pour  réclamer 
l'impression  du  travail,  et  j'ai  dû,  à  mon  grand  regret, 
me  séparer  d'eux.  Je  propose  donc  à  la  classe  le  dépôt  du 
travail  anonyme  aux  Archives.  » 

La  classe,  en  présence  de  la  divergence  d'opinions  des 
commissaires,  a  voté  le  dépôt  du  travail  précité  dans  les 
archives  de  l'Académie. 


Description  de  quelques  oiseaux  nouveaux  ;  par  M.  Alphonse 
Dubois. 

Mtappo»*t  de  3M.  Edtn.  de  Selys  L.ongcha»nps. 

<L  M.  Dubois  continue  la  détermination  et  l'étude  de  la 
collection  ornithologique  du  Musée  royal  d'histoire  natu- 
relle de  Bruxelles. 

Chemin  faisant,  il  se  propose  de  signaler  les  oiseaux  qui 
lui  paraissent  inédits. 


(  68,^  ) 

Précédemment,  il  a  présenté  à  TAcadémie  des  notices 
sur  plusieurs  espèces  ou  races  nouvelles  d'oiseaux  de 
l'Amérique  tropicale,  et  nous  l'avons  engagé  à  persévérer 
dans  ses  recherches. 

Aujourd'hui,  il  s'agit  encore  d'oiseaux  du  Mexique;  une 
Pie  bleue  [Cyanocilta]  et  un  Troupiale  (Icterns)  présumés- 
nouveaux,  enfin  de  deux  variétés  de  VIcterus  xanthorniis 
non  décrites. 

Comme  M.  Dubois  le  fait  observer,  sa  Cyanocilta  yaca- 
tanica  et  son  Icterus  virescens  ne  diiïèrent  guère  de  la 
Cyanodtla  Beecheyi  et  de  ['Icterus  melanocephalus  que 
par  une  taille  beaucoup  plus  petite  (et  un  bec  légèrement 
modifié  chez  VIcterus), 

J'ai  examiné  avec  M.  Dubois  les  sujets  du  Musée.  La 
différence  de  dimensions  est  vraiment  fort  notable;  mais 
l'ensemble  est  si  analogue  entre  chacune  des  espèces  et 
son  diminutif,  que  je  suis  porté  à  voir  ici  des  races  locales^ 
plutôt  que  des  espèces  tranchées. 

Quelle  que  soit  l'opinion  définitive  qui  puisse  prévaloir  à 
cet  égard,  il  n'en  est  pas  moins  utile  de  signaler  ces  formes 
voisines.  Ce  sont  des  documents  qui  peuvent  présenter  un 
grand  intérêt  pour  la  question  de  l'espèce  en  général, et  en 
particulier  pour  l'application  de  la  théorie  (quelle  qu'elle 
soit)  aux  nombreuses  races  voisines  ou  espèces  représen- 
tatives localisées  que  l'on  observe  dans  les  contrées  inter- 
tropicales de  l'Amérique. 

J'engage  donc  l'Académie  à  décider  l'impression  de  la 
note  de  M.  Dubois.  » 

Cette  impression  est  ordonnée 


(  (hS()  ) 


COMMUNICATIOiNS  ET  LECTURES. 


La  maturation  de  l'œuf,  la  fécondation,  et  les  premières 
phases  du  développement  embryonnaire  des  mammi- 
fères diaprés  des  recherches  faites  chez  le  Lapin;  par 
M.  Edouard  Van  Beneden,  membre  de  l'Académie. 

COMMUNICATION  PRÉLIMINAIRE. 


Il  y  a  dix-huit  mois,  j'ai  communiqué  à  l'Académie  les 
résultats  de  mes  recherches  sur  la  formation  des  organes 
sexuels  chez  les  Hydractinies.  J'ai  établi  que  chez  ces  po- 
lypes les  spermatozoïdes  dérivent  de  Tecloderme;  que  les 
œufs  sont  des  cellules  modifiées  de  l'endoderme,  et  qu'ainsi 
les  deux  lames  cellulaires  adjacentes,  qui  constituent  les 
parois  du  corps  des  Cœlentérés,  présentent  des  caractères 
opposés  au  point  de  vue  sexuel. 

Le  nom  de  feuillet  mâle  convient  à  l'ectoderme  tout 
aussi  bien  que  celui  de  feuillet  animal;  l'endoderme  pro- 
duit les  œufs  en  même  temps  qu'il  préside,  chez  ces  orga- 
nismes, à  l'accomplissement  des  fondions  végétatives  ;  il 
mérite  de  ce  chef  le  nom  de  feuillet  femelle  tout  aussi 
bien  que  celui  de  feuillet  végétatif.  La  fécondation  consiste 
dans  l'union  d'une  cellule  endodermique  avec  des  élé- 
ments ectodermiques;  elle  trouve  sa  raison  d'être  dans  la 


(687) 
constitution  même  de  l'organisme  :  dans  la  séparation  de 
ses  éléments  en  deux  organes  primordiaux,  l'ectoderme 
et  l'endoderme.  Me  fondant  sur  l'homologie,  tout  d'abord 
reconnue  par  Huxley,  entre  les  deux  feuillets  de  l'orga- 
nisme des  Zoophytes  et  les  deux  feuillets  embryonnaires 
aux  dépens  desquels  se  développent  non  -  seulement 
les  Vertébrés,  mais  tous  les  Métazoaires,  j'ai  généralisé 
les  conclusions  de  mes  premières  recherches.  J'ai  émis 
l'hypothèse  que  chez  tous  les  Métazoaires  le  testicule 
dérive  de  l'ectoderme,  que  l'ovaire  prend  naissance  dans 
l'endoderme.  M.  Semper  m'attribue  fort  gratuitement 
l'intention  d'élever  mon  hypothèse  à  la  hauteur  d'un 
dogme  scientifique;  M.  Semper  se  trompe  à  cet  égard  : 
plutôt  que  de  faire  du  dogmatisme  je  renoncerais  à  mon 
hypothèse,  non  sans  regret,  mais  sans  hésitation  dès 
qu'il  me  serait  démontré  qu'elle  se  trouve  en  contradiction 
avec  les  faits.  Mais  jusqu'à  présent  cette  démonstration 
n'est  pas  faite.  Mes  observations  sur  les  Hydractinies  ont 
été  confirmées  en  tous  points  par  M.  Koch  et  tout  récem- 
ment M.  Fol  a  constaté  la  formation  des  produits  sexuels 
mâles  aux  dépens  de  l'ectoderme  et  des  produits  femelles 
aux  dépens  de  l'endoderme,  chez  trois  genres  de  Céphalo- 
phores,réparlis  dans  deux  ordres  différents  de  l'embranche- 
ment des  Mollusques  [Creseis,  Slyliola  subulata  et  Atlanta 
Peronii).  a  Cette  confirmation  des  vues  de  M.  Éd.  Van  Be- 
neden,  écrit  M.  Fol,  est  d'autant  plus  frappante  que 
j'étais  plus  sceptique  lorsque  j'entamai  l'examen  de  la 
question,  d'autant  plus  frappante  que  les  Céphalophores, 
avec  leurs  produits  sexuels  intimement  mêlés  dans  leur 
glande  hermaphroditique,  sont  précisément  ceux  des  ani- 
maux chez  lesquels  l'on  se  serait  le  moins  attendu,  à  priori, 


(  688  ) 
à  voir  ces  vues  se  confirmer  (I),  »  Mon  hypothèse  n'eùl- 
elle  d'autre  mérite  que  celui  d'avoir  provoqué  les  belles 
recherches  de  M.  Fol ,  que  je  me  réjouirais  de  l'avoir  émise. 
J'ai  entrepris  des  recherches  sur  des  animaux  apparte- 
nant à  différents  embranchements  dans  le  but  de  faire  con- 
naître, en  me  fondant  sur  l'observation,  le  mode  de  "for- 
mation des  organes  sexuels.  Dans  l'embranchement  des 
Vertébrés,  j'ai  choisi  comme  sujet  de  recherches  le  Lapin 
domestique.  Mais  l'étude  du  développement  des  organes 
sexuels,  dans  leurs  rapports  avec  les  feuillets  primordiaux 
de  l'embryon,  est  subordonnée  à  la  connaissance  exacte 
de  ces  derniers  et  de  leur  développement.  Or  la  question 
des  feuillets  embryonnaires  des  Mammifères  est  loin  d'être 
résolue;  j'ai  dû  commencer  par  ra'éclairer  sur  ce  point.  Et 
comme  à  la  formation  des  feuillets  se  rattachent  tous  les 
premiers  phénomènes  du  développement,  j'ai  dû  prendre 
le  problème  ab  ovo  et  c'est  le  résultat  de  ces  études  préa- 
lables que  je  vais  avoir  l'honneur  d'exposer  sommairement. 

Depuis  l'époque  où  Bischoff  publia  ses  travaux  clas- 
siques sur  l'embryogénie  des  Mammifères  (Lapin,  Chien, 
Cochon  d'Inde,  Chevreuil)  aucun  naturaliste  ne  s'est  plus 
occupe  de  recherches  suivies  sur  les  premières  phases  du 
développement  de  ces  animaux.  La  raison  de  cet  abandon, 
dont  les  Mammifères  ont  été  l'objet,  se  trouve  avant  tout, 
je  crois,  dans  la  perfection  même  des  travaux  de  l'éminent 
embryogéniste  de  Munich.  Plus  je  les  ai  étudiés,  plus  j'ai 


(1)  Hermann  Fol.  Note  sur  Torigine  première  des  produits  sexuels 
(archives  des  sciences  de  la  Bibliothèque  universelle.  Juin  IS75  ;  aussi 
dans  Annals  and  Magazine  ofXaturalhistory.  1875). 


(  ()89  ) 
admire  comment,  avec  les  moyens  matériels  dont  on  dis- 
posait alors,  à  une  époque  où  l'histologie  était  à  peine 
fondée,  où  toute  l'histoire  des  premiers  phénomènes  du 
développement  embryonnaire  des  Mammifères  était  à  faire, 
Bischoif  a  pu  pousser  aussi  loin  ses  recherches  et  arriver 
à  des  résultats  aussi  vrais  et  aussi  complets. 

Mais  les  questions  aujourd'hui  posées  sont  différentes 
de  celles  qui  préoccupaient  les  embryogénistes  à  cette 
époque;  la  science  a  marché  et  les  méthodes  d'investiga- 
tion se  sont  perfectionnées.  Aussi  de  nouvelles  recherches 
sur  les  premiers  phénomènes  embryonnaires  des  Mammi- 
fères étaient-elles  devenues  un  des  besoins  les  plus  urgents 
de  la  science  actuelle. 

Je  pourrai  faire  paraître  prochainement  un  mémoire 
étendu  accompagné  de  nombreuses  planches,  sur  les  pre- 
miers phénomènes  embryonnaires  du  Lapin.  Diverses  rai- 
sons m'engagent  à  donner  dès  à  présent  un  résumé  de 
mes  recherches. 

Ce  mémoire  est  divisé  en  six  chapitres. 

I.  Phénomènes  de  la  maturation  de  l'ovule.  Disparition 
de  la  vésicule  germinative  et  formation  des  corps  direc- 
teurs. Retrait  du  vitelluset  formation  du  liquide  périvitellin. 

JI.  Phénomènes  relatifs  à  la  fécondation  de  l'ovule. 

III.  Formation  du  premier  noyau  embryonnaire. 

IV.  Fractionnement  du  vitellus  et  formation  d'une  Me- 
tagaslrula. 

V.  Formation  et  développement  de  la  vésicule  blasto- 
dermique  jusqu'au  moment  de  l'apparition  de  la  ligne  pri- 
mitive. 

VI.  Multiplication  des  cellules  et  des  noyaux  dans 
les  feuillets  de  l'embryon. 


(  690  ) 


CHAPITRE  PREMIER. 

PHÉNOMÈNES    DE    LA   MATURATION    DE    l'oVULE. 
DISPARITION    DE    LA    VÉSICULE    GERMINATIVE    ET    FORMATION 

DES   CORPS   DIRECTEURS. 
RETRAIT  DU  VITELLUS  ET  FORMATION  DU  LIQUIDE  PÉRIVITELLIN. 

1.  La  vésicule  germinative  de  l'œuf  du  Lapin  renferme, 
indépendamment  du  nucléole  et  d'un  liquide  clair,  deux 
ou  trois  petits  corps  arrondis  que  j'ai  appelés  pseudo-nu- 
cléoles  [Nebemiudeolen,  Nebenkernkôrperchen  de  Flem- 
ming)  et  une  substance  granuleuse  que  je  désigne  sous  le 
nom  de  nucleoplasma.  Celle-ci  affecte  fréquemment,  dans 
la  vésicule  germinative  de  l'œuf  en  voie  de  développement, 
la  forme  d'un  réticulum.  Le  seul  observateur  qui,  à  ma 
connaissance,  ait  signalé  ces  cordons  ramifiés  de  substance 
granuleuse,  est  Flemming(l).  Il  a  vu  chez  l'Anodonte  et  les 
Unio  un  réseau  analogue  à  celui  qui  existe  chez  le  Lapin  et 
dont  j'ai  moi-même  constaté  l'existence  chez  les  étoiles  de 
mer  [Asteracanthion  rubens), 

2.  Quand  l'œuf  approche  du  moment  de  sa  maturité  la 
vésicule  germinative,  de  centrale  qu'elle  était,  devient  su- 
perficielle. Elle  prend  une  forme  ellipsoïdale,  puis  s'aplatit 
contre  la  zone  pellucide  avec  laquelle  elle  se  met  en  contact 
par  une  surface  de  plus  en  plus  étendue. 

5.  A  ce  moment  Ion  peut  distinguer  dans  le  vitellus 
une  couche  corticale  et  une  masse  médullaire.  La  couche 
corticale  s'éclaircit  au  contact  de  la  vésicule  germinative. 
Une  matière  tout  à  fait  homogène  qui  paraît  être  du  pro- 

(1)  Studien  in  der  Entwicklungsgeschichte  der  Nayaden,  page  20. 


(  <^>91 
toplasme  cortical  dépourvu  de  granulations  vilellines  s'ac- 
cumule autour  de  la  vésicule  et  forme  avec  elle  une  lentille 
biconvexe,  que  j'ai  appelée  la  lentille  cicalriculaire.  La 
lentille  cicalriculaire  déprime  la  masse  médullaire. 

4.  Dès  que  la  vésicule  germinative  arrive  au  contact  de 
la  zone  pellucide,  le  nucléole  s'accole  à  la  membrane  de  la 
vésicule  du  côté  de  la  surface  de  l'œuf,  là  où  la  vésicule  est 
appliquée  contre  la  membrane.  11  s'aplatit  contre  la  mem- 
brane et  se  soude  avec  elle;  sa  substance  plastique  s'étale 
en  une  plaque  qui  présente  d'abord  un  épaississement 
médian.  Cette  lame  je  l'ai  appelée  plaque  nucléolaire. 

o.  En  même  temps  la  membrane  de  la  vésicule  germi- 
native s'amincit  partout  où  elle  se  trouve  au  contact  du 
protoplasme  cicatriculaire.  Il  est  probable  que  la  substance 
qui  constituait  cette  membrane  est  attirée  vers  la  plaque 
nucléolaire  et  qu'elle  finit  par  s'y  confondre  avec  la  sub- 
stance de  l'ancien  nucléole. 

6.  Le  nucleoplasma  avec  les  pseudo-nucléoles  donne 
naissance,  dans  l'intérieur  de  la  vésicule  germinative,  à  un 
amas  de  substance  granuleuse,  plus  ou  moins  bien  cir- 
conscrit que  j'ai  appelé  corps  nucléoplasmique. 

7.  Le  contenu  liquide  et  limpide  de  la  vésicule  germina- 
tive se  confond  avec  le  protoplasme  cicatriculaire,  proba- 
blement à  la  suite  de  la  déchirure  de  la  membrane  de  la 
vésicule  germinative. 

8.  En  même  temps  la  plaque  nucléolaire,  grâce  proba- 
blement à  la  contractilité  inhérente  à  sa  substance ,  con- 
tractilité  reconnue  par  Auerbach  pour  les  nucléoles  des 
cellules  embryonnaires  des  Muscides  et  par  de  la  Valette 
pour  la  tache  deAVagner,  se  ramasse  en  un  corps  de  forme 
variable,  souvent  ellipsoïdal,  quelquefois  lenticulaire  ou 
en  forme  de  calotte,  que  j'ai  appelé  le  corps  nucléolaire. 


(  ()9^2  ) 

9.  F.c  moment  de  la  disparition  de  la  vésicule  se  con- 
fond avec  celui  del'élimination  des  corps  directeurs  {Bich- 
ttingshlàschcn  de  Fritz  Millier;  globules  polaires  de  Robin). 

10.  Les  corps  directeurs  ne  sont  pas  des  parties  équiva- 
lentes d'un  même  tout  :  ils  n'ont  ni  la  même  composition, 
ni  la  même  significalion  :  l'un  est  le  corps  nucléolaire, 
l'autre  le  corps  nucléoplasmique  de  la  vésicule  germinative 
modifiée.  Le  premier  se  colore  en  rouge  par  le  picrocarmi- 
nate  d'ammoniaque;  l'autre  ne  prend  pas  la  matière  colo- 
rante. 

11.  La  lentille  cicatriculaire,  après  le  mélange  de  son 
protoplasme  avec  le  liquide  de  la  vésicule,  devient  granu- 
leuse et  se  confond  avec  la  couche  corticale  de  l'œuf. 

12.  Au  moment  de  la  disparition  de  la  vésicule  germi- 
native commence  le  retrait  du  vitellus,  qui  s'accompagne 
de  mouvements  amœboïdes  et  consiste  dans  l'expulsion 
d'un  li(|nide  transparent, qui  s'accumule  entre  le  vitellus  et 
la  zone  pellucide.  Ce  liquide  je  l'ai  appelé  liquide  pêrivi- 
lellin.  Dans  ce  liquide  se  trouvent  les  corps  directeurs. 

15.  Après  le  retrait,  le  vitellus  reprend  sa  forme 
splK'rique;  on  n'y  reconnaît  plus  la  division  en  couche  cor- 
ticale et  substance  médullaire;  le  vitellus  [)rend  un  aspect 
particulier;  l'œuf  redevient  un  cytode  et  mérite  le  nom  de 
Monerula  qui  a  été  donné  par  Haeckel  à  l'œuf  dépourvu  de 
sa  vésicule  germinative. 

14.  La  disparition  de  la  vésicule  germinative,  la  pro- 
duction des  corps  directeurs,  le  retrait  du  vitellus  et  la 
cessation  de  toute  séparation  en  substance  corticale  et  mé- 
dullaire sont  des  phénomènes  indépendants  de  la  féconda- 
lion.  Ils  se  rattachent  à  la  maturation  de  l'ovule.  Chez  le 
Lapin  ils  s'accomplissent  dans  l'ovaire.  Je  ne  veux  pas 
affirmer  cependant  que  dans  certains  cas  ils  ne  puissent  se 


(  695  ) 
passer  dans  l'oviductc.  Cependanl  je  n'ai  jamais  trouvé 
dans  roviducte  d'œuC  pourvu  de  sa  vésicule  genninalive. 

15.  Le  dépùl  autour  de  l'œuf  d'une  couche  alhuininoïdc 
sciait  aussi  bien  autour  de  l'œuf  non  fécondé  qu'autour 
de  l'œuf  qui  a  subi  l'action  des  spermatozoïdes.  La  ques- 
tion de  savoir  si  l'oeuf  p(Hit  encore  être  fécondé  après  que 
ce  dépôt  s'est  elTectué  reste  indécise. 

CIIAPITHL  IL 

LA     TKCON  DATION. 

1.  Jamais  je  n'ai  trouvé  d'ovule  fécondé  dans  une  vési- 
cule de  De  GraaL  Jamais  je  n'ai  aperçu  de  spermatozoïde 
ni  dans  un  œuf  ovarien,  ni  dans  un  follicule.  Je  ne  pense 
pas  que  la  fécondation  s'acconq)lisse  jamais  t/a/i.s  f  inférieur 
de  l'ovaire. 

±  Les  spermatozoïdes  |)énètrent  à  l'intérieur  de  l'ovule 
en  traversant  la  zoih;  pellucide.  On  en  trouve  un  grand 
nombre,  dans  tout  ovule  fécondé,  en  suspension  dans  le 
liquide  [)érivitellin,  non-seulement  au  début  du  dévelop- 
pement, mais  durant  tout  le  cours  du  fractioinuMuent  et 
môme  encore  quand  la  vésicules  blaslodermique  a  atteint 
plusieurs  millimètres  de  diamètre.  Ils  s(^  trouvent  invaria- 
blement, dans  ce  cas,  sous  la  zone  pellucide  entre  celle-ci 
et  la  vésicule  l)lasl()(lermi<iue.  J'ai  trouvé  juscpi'à  vingt 
spermatozoïdes  dans  la  coupe  opti(|ue  d'un  œuf. 

Barry  est  le  premier  qui  ait  vu  positivement  des  sper- 
matozoïdes à  l'intéiieur  de  l'œuf  des  Mammifères.  Ses 
observations  ont  été  ultérieurement  conlirmées  par  Meiss- 
ner,  par  IJiscbolfcît  par  moi-même. 

3.  On  trouve  toujours  aussi  des  spermatozoïdes  entre  la 
zone  pellucide  et  la  couche  albuminoïde  et  dans  l'épaisseur 


(  694  ) 
de  cette  dernière.   Il  est  rare  d'en  voir  engagés  dans  la 
zone  pellucide.  Cependant  j'en  ai  trouvé  quelquefois  et  dans 
ce  cas  la  tête  était  toujours  dirigée  radiairement. 

4.  Les  œufs  les  plus  jeunes  dans  l'intérieur  desquels  j'ai 
pu  constater  la  présence  des  spermatozoïdes  ont  été  trouvés 
11  heures  après  la  copulation. 

5.  Je  n'ai  jamais  rien  observé  de  comparable  à  un 
micropyle  et  je  suis  convaincu  que  les  orifices  de  la  zone 
pellucide  décrits  sous  ce  nom  par  Barry,  par  Meissner,  par 
Pflijger  et  par  moi-même  sont  des  produits  artificiels,  des 
déchirures  accidentelles  ou  le  résultat  de  perforations  pro- 
duites par  les  aiguilles. 

6.  J'ai  observé  durant  20  minutes  un  spermatozoïde 
vivant  dans  un  œuf  retiré  de  l'oviducte  environ  20  heures 
après  la  copulation.  Il  se  mouvait  avec  une  extrême  agilité 
et  avec  assez  de  force  pour  déplacer  à  lui  seul  le  globe 
vitellin.  Il  ne  manifestait  aucune  tendance  à  s'engager 
dans  le  globe  vitellin.  Une  foule  d'autres  spermatozoïdes 
morts  se  trouvaient  à  côté  de  celui  qui  parcourait  en  tous 
sens  le  liquide  périvitellin.  Dans  tous  les  autres  œufs  que 
j'ai  examinés  les  spermatozoïdes  étaient  immobiles. 

7.  Jamais  je  n'ai  observé  de  spermatozoïde  à  l'intérieur 
du  vitellus.  J'ai  eu  sous  les  yeux  des  centaines  d'ovules, 
et  toutes  les  recherches  que  j'ai  faites  en  employant  les 
procédés  les  plus  divers  pour  trouver  des  spermatozoïdes 
à  l'intérieur  de  la  masse  vitelline  ont  été  infructueuses. 
Mais  j'ai  fréquemment  trouvé  des  spermatozoïdes  étroite- 
ment appliqués  par  leur  tête  contre  la  surface  du  globe 
vitellin. On  en  trouve  constamment^  occupant  cette  position, 
dans  les  ovules  non  encore  fractionnés.  Leur  adhésion  est 
si  intime  qu'ils  restent  accolés  au  vitellus,  quelles  que 
soient  les  manipulations  que  l'on  fait  subir  à  l'œuf.  On 


(  695  ) 

peut  facilement  isoler  le  globe  vilellin  après  l'avoir  fait 
durcir  dans  Tacide  osmique  et  le  liquide  de  Millier.  Le 
globe  ainsi  isolé  montre  toujours  des  spermatozoïdes  acco- 
lés par  leur  tête  à  la  surface  du  vitellus.  Je  crois  donc  que 
la  fécondation  consiste  essentiellement  dans  la  fusion  de 
la  substance  spermatiqne  avec  la  couche  superficielle  du 
globe  vitellin. 

CHAPITRE  III. 

FORMATION  DU  PREMIER  NOYAU  EMBRYONNAIRE. 

C'est  Bagge  qui  le  premier  a  constaté  qu'un  noyau  de  nou- 
velle formation  apparaît  dans  l'œuf  après  la  disparition  de 
la  vésicule  germinative  et  consécutivement  à  la  féconda- 
tion. Mais  dans  ces  derniers  temps  seulement  des  obser- 
vations précises  ont  été  publiées  relativement  à  la  forma- 
tion de  ce  premier  noyau.  Ces  observations  émanent  de 
trois  naturalistes  qui  se  sont  occupés  simultanément  de  la 
même  question  et  d'une  manière  tout  à  fait  indépendante  : 
Biitschli,  Auerbach  et  Strasburger.Tous  trois  sont  d'accord 
pour  affirmer  que  le  nouveau  noyau  se  forme  près  de  la  sur- 
face du  vitellus  et  qu'il  ne  vient  que  secondairement  occuper 
dans  l'œuf  une  position  centrale.  Biitschli  a  vu  chez  plu- 
sieurs Nématodes  et  ultérieurement  chez  des  mollusques 
(Lymneus  auricularis  et  Succinea  Pfeifferi)  deux  ou  plu- 
sieurs (quelquefois  jusqu'à  huit)  noyaux  clairs  se  former 
dans  la  couche  superlicielle  du  vitellus,  gagner  progressive- 
ment le  centre  de  l'œuf  et  s'y  fusionner  pour  donner  nais- 
sance au  noyau  du  premier  globe  vitellin. 

Auerbach  a  fait  également  ses  observations  chez  les  vers 
Nématodes.  (Strongijlns  auricularis  et  Ascaris  nigro- 
venosa). 


(  696  ) 

Il  apparaît  à  chacun  des  pôles  de  Tœuf ,  près  de  la  sur- 
face, une  vacuole  claire,  qui  s'agrandit  progressivement. 
Les  deux  vacuoles  s'écartent  de  la  périphérie,  s'appro- 
chent l'une  de  l'autre,  s'accolent  sans  se  fusionner,  exé- 
cutent un  mouvement  de  rotation  pendant  lequel  le  plan 
suivant  lequel  ils  s'accolent  décrit  un  angle  de  90  de- 
grés; puis  ils  changent  de  forme  et  constituent,  par  leur 
réunion,  le  premier  noyau. 

Strashurger  a  vu  chez  la  Phallitsia  mamillata  un  frag- 
ment irrégulier  de  la  couche  corticale  de  l'œuf  se  détacher 
et  se  porter  vers  le  centre  du  vitellus  pour  y  former  le  noyau. 

Voici  les  résultats  des  recherches  que  j'ai  faites  chez  le 
Lapin  pour  élucider  cette  question  si  importante  de  la 
formation  du  premier  noyau  de  l'embryon  : 

l*'  Peu  de  temps  après  la  fécondation,  la  substance  du 
vitellus  se  divise  en  trois  couches  que  je  désignerai,  pour 
ne  rien  préjuger  relativement  à  leur  signification,  sous  les 
noms  respectifs  de  couche  superficielle,  couche  intermé- 
diaire et  masse  centrale.  La  couche  intermédiaire  est  gros- 
sièrement et  irrégulièrement  granuleuse;  elle  est  plus 
opaque  que  les  deux  autres;  c'est  dans  cette  couche  que 
l'on  observe,  dans  beaucoup  d'œufs,  des  grumeaux  irrégu- 
liers formés  par  des  granules  vitellins  agglutinés.  La  sub- 
stance centrale  est  beaucoup  plus  claire,  mais  uniformé- 
ment granuleuse.  La  couche  superficielle  est  presque 
homogène;  elle  ne  présente  que  de  fines  granulations 
punctiformes  dans  une  masse  fondamentale  très-réfrin- 
gente. J'ai  sacrifié  trois  Lapines  qui  m'ont  montré  le 
globe  vitellin  ainsi  constitué  et  dépourvu  de  tout  noyau. 
Ces  Lapines  sacrifiées,  10  72, 9  et  8  Va  heures  après  le  coït, 
m'ont  donné  la  première  sept,  la  deuxième  cinq  et  la 
troisième  onze  ovules. 


{  6!)7  ) 

2"  Le  phénomène  qui  prélude  à  la  formation  des  élé- 
ments qui  doivent  donner  naissance  au  noyau  consiste 
dans  répaississemcnt  en  un  point  de  la  couche  superfi- 
cielle du  vilellus.  En  ce  point  apparaît  un  petit  corps 
arrondi,  homogène,  dépourvu  de  toute  granulation,  qui  a 
vraiment  l'apparence  d'une  vacuole.  Mais  en  traitant  par 
l'acide  osmique,  la  substance  claire  de  la  soi-disant  vacuole 
se  fonce  et  se  teinte  en  gris,  tandis  que  toute  la  substance 
du  vitellus  se  colore  en  brun.  Ce  corps  que  j'appellerai  le 
profiucleus  périphérique  ^  ]q  l'ai  trouvé  dans  cinq  ovules 
rencontrés  dans  une  même  Lapine  que  j'avais  sacrifiée 
\o  heures  environ  après  le  coït. 

3°  Le  pronucleus  périphérique  formé  dans  la  couche 
superficielle  du  vitellus  s'enfonce;  en  même  temps  il 
s'agrandit  un  peu  et  l'on  voit  apparaître  à  son  intérieur 
plusieurs  corpuscules  très-réfringents  que  l'on  prendrait 
pour  autant  de  nucléoles,  si  on  les  observait  dans  un  noyau 
ordinaire.  Dans  la  masse  centrale  de  l'œuf  apparaissent 
simultanément  deux  ou  trois  petites  masses  claires,  irrégu- 
lières, mais  qui  se  réunissent  aussitôt  en  un  corps  bosselé  à 
sa  surface.  Celui-ci  occupe  dès  l'abord  le  centre  de  l'œuf  et 
son  volume  l'emporte  de  beaucoup  sur  celui  du  pronu- 
cleus périphérique.  A  voir  sa  forme  et  ses  caractères  phy- 
siques, on  le  prendrait  pour  un  noyau  bourgeonnant;  ses 
contours  sont  beaucoup  moins  distincts  que  ceux  du 
pronucleus  périphérique.  Je  l'appellerai  le  pronucleus 
central.  Tous  les  œufs  (quatre)  d'une  Lapine  sacrifiée 
le  27  novembre,  12  7^  heures  après  le  coït,  mon- 
traient en  même  temps  à  quelque  distance  l'un  de 
l'autre  les  deux  pronuclei.  Cependant,  il  y  avait  entre 
eux  quelques  différences  qui,  indépendamment  de  l'appa- 
rence du  vilellus,  portaient  :  1°  sur  la  distance  qui  sépa- 

2"*'  SÉRIE,  TOME  XL.  45 


(  698  ) 

rait  les  deux  éléments  nucléaires;  2°  sur  les  dimensions  de 
ces  derniers;  5°  sur  la  constitution  du  pronucleus  central. 
Dans  trois  œufs  le  pronucleus  central  était  constitué  de 
trois  ou  quatre  parties  juxtaposées  et  de  dimensions  iné- 
gales. Dans  l'un  d'entre  eux  même,  la  matière  vitelline 
séparait  positivement  l'un  de  ces  éléments  des  deux  au- 
tres. Dans  le  quatrième  œuf  les  diverses  portions  parais- 
saient confondues  en  un  tout  unique  irrégulier,  bosselé 
à  sa  surface.  Dans  une  Lapine  sacrifiée  le  17  novembre, 
14  1/2  heures  après  la  fécondation ,  j'ai  trouvé  également 
quatre  œufs  vers  le  milieu  de  l'oviducte;  tous  les  quatre 
montraient  également  les  deux  pronuclei  situés  à  quelque 
dislance  l'un  de  l'autre. 

4"*  Les  deux  pronoclei  se  rapprochent  l'un  de  l'autre 
au  point  de  se  toucher  au  milieu  de  la  masse  centrale  du 
vitellus.  Ils  sont  tout  différents  l'un  de  l'autre.  Le  pronu- 
cleus périphérique  est  sphérique,  ses  contours  sont  régn^ 
liers,  il  est  notablement  plus  petit  que  l'autre.  Le  pronu- 
cleus central  a  la  forme  d'une  calotte  ou  d'un  croissant 
aplati  et  à  cornes  émoussées.  Par  sa  concavité,  il  se 
moule  plus  ou  moins  sur  le  pronucleus  périphérique, 
dont  il  est  séparé  au  début  par  du  protoplasme  cen- 
tral renfermant  quelquefois  une  ou  plusieurs  granu- 
lations volumineuses  et  assez  réfringentes.  Mais  dans 
la  plupart  des  œufs,  les  deux  pronuclei  se  touchent 
on  ne  sont  séparés  l'un  de  l'autre  que  par  une  couche 
imperceptible  de  protoplasme  vilellin.  La  face  convexe  du 
pronucleus  central  est  tantôt  régulière,  tantôt  bosselée,  et 
dans  ce  cas  ses  bords  présentent  des  échancrures,  ce  qui 
donne  à  l'ensemble  de  la  masse  nucléaire  une  apparence 
lobulée.  Dans  quelques  œufs,  j'ai  encore  trouvé  ce  dernier 
divisé  en  deux  parties  de  telle  manière  qu'il  y  avait  en  réa- 


(  699  ) 

lilé  trois  corps  clairs  réunis.  La  substance  qui  constitue  le 
pronocleus  central  présente  exactement  les  mêmes  carac- 
tères optiques  que  celle  du  nucleus  périphérique.  Dans  l'un 
comme  dans  l'autre,  il  existe  des  corpuscules  arrondis,  ré- 
fringents, de  dimensions  variables  que  l'on  prendrait  pour 
des  nucléoles.  J'ai  trouvé  dans  sept  Lapines,  sacrifiées  de  17 
à  21  heures  après  le  coït,  des  œufs  présentant  les  caractères 
que  je  viens  de  décrire  brièvement.  Elles  m'ont  donné  en- 
semble trente-neuf  ovules  que  j'ai  conservés,  en  partie,  en 
préparations  permanentes.  Le  procédé  employé  pour  la 
conservation  de  ces  œufs  est  le  suivant  :  les  ovules  trai- 
tés par  Tacide  osmique  à  1  p.  %  sont  placés  pendant  deux 
à  trois  jours  dans  le  liquide  de  Mûller  et  puis  portés  dans 
la  glycérine.  De  cette  façon,  les  pronuclei  deviennent 
plus  distincts  même  qu'ils  ne  l'étaient  dans  l'œuf  frais. 
Si  on  les  porte  dans  de  !a  glycérine  faiblement  picrocar- 
minatée,  les  pronuclei  se  colorent  en  rose  l'un  et  l'autre. 

5°  Le  pronucleus  périphérique  grandit  rapidement  tout 
en  conservant  sa  forme  sphérique.  Le  pronucleus  central, 
qui  reste  toujours  distinct  de  l'autre  et  se  trouve  toujours 
appliqué  sur  lui  par  sa  concavité,  diminue  de  volume. 
Les  nucléoles  sont  devenus  beaucoup  moins  apparents. 

6°  11  n'existe  plus  au  centre  de  l'œuf  qu'un  seul  noyau, 
formé  aux  dépens  des  deux  premiers.  Je  ne  pourrais  dire 
s'il  se  forme  par  la  fusion  des  deux  pronuclei,  ou  si  l'un 
se  développe  aux  dépens  de  la  substance  de  l'autre.  Ce 
noyau  a  des  contours  très-peu  marqués;  sa  forme  est 
irrégulière;  il  est  formé  d'une  substance  homogène  dans 
laquelle  on  ne  distingue  plus  aucune  trace  des  corpuscules 
réfringents  semblables  à  des  nucléoles. 

Ces  dernières  phases  ont  été  constatées  dans  des  œufs 
non  fractionnés  trouvés  vers  le  milieu  ou  dans  la  moitié  in- 


(700) 
férieure  de  l'oviducte  avec  des  œufs  segmentés  en  deux 
globes. 

Dans  tous  les  œufs  décrits  en  dernier  lieu  (au  4",  au  5" 
et  au  6°),  le  vilellus  présentait  une  apparence  radiée. 

Il  résulte  de  ce  qui  précède  que  le  premier  noyau  de 
l'embryon  se  développe  aux  dépens  de  deux  pronuclei, 
l'un  périphérique  qui  dérive  de  la  couche  superficielle  de 
l'œuf,  l'autre  formé  au  milieu  de  la  masse  centrale  du 
vitellus.  Comme  j'ai  établi  que  les  spermatozoïdes  s'ac- 
colent à  la  surface  du  vitellus  pour  se  confondre  avec  la 
couche  superficielle  du  globe,  il  me  paraît  probable  que  le 
pronucleus  superficiel  se  forme  au  moins  partiellement  aux 
dépens  de  la  substance  spermatique.  Si,  comme  je  le  pense, 
le  pronucleus  central  se  constitue  exclusivement  d'élé- 
ments fournis  par  l'œuf,  le  premier  noyau  de  l'embryon 
serait  le  résultat  de  l'union  d'éléments  mâles  et  femelles. 
J'énonce  cette  dernière  idée  comme  une  simple  hypothèse, 
comme  une  interprétation  que  l'on  peut  ou  non  accepter. 

Le  7  mars  1871 ,  j'eus  l'occasion  d'observer  un  grand 
nombre  de  Chauves-Souris  recueillies  dans  la  grotte 
Saint-Pierre,  près  de  Maestricht  (V.  Mnrinus ,\ . Mystaci- 
nus ,  V.  Dasycnemus  et  V.  Daiibentonii).  Toutes  les  fe- 
melles avaient  la  matrice  et  les  oviductes  distendus  par 
des  spermatozoïdes,  qui  se  mouvaient  avec  une  grande 
agilité.  Je  trouvai  un  ovule  fécondé  dans  les  oviductes 
de  huit  femelles  appartenant  à  différentes  espèces.  Tous 
ces  ovules  se  trouvaient  au  même  état  de  développement. 
Ils  renfermaient  un  globe  vitellin  unique  ayant  subi  Je 
phénomène  du  retrait;  en  dehors  du  vitellus,  dans  le 
liquide  périvitellin  ilottaient  deux  globules  polaires  diffé- 
rents l'un  de  l'autre.  Dans  le  vilellus  on  distinguait  nette- 


(  701  ) 
ment  une  couche  périphérique,  une  couche  intermédiaire 
granul(Mise  et  une  masse  centrale  claire.  Dans  celle-ci  se 
trouvaient  deux  noyaux  pourvus  chacun  d*un  nucléole 
unique  très-rélVingent  et  assez  volumineux.  D'après  mes 
croquis  faits  il  y  a  environ  quatre  ans,  je  crois  pouvoir 
identifier  l'un  de  ces  noyaux  avec  le  pronucleus  périphé- 
rique, l'autre  avec  le  pronucleus  central. 

Le  25  mars  de  la  même  année,  je  reçus  un  nouvel  en- 
voi de  Chauves-Souris.  Je  trouvai  dans  les  oviductes  neuf 
ovules  tous  au  même  état  de  développement  que  les  pré- 
cédents. 

Dans  mon  mémoire  sur  la  composition  de  l'œuf,  j'ai 
figuré  un  œuf  au  même  état  de  développement  que  j'avais 
trouvé  dans  l'oviducte  d'un  Vesperlilio  murinus  en  mars 
i 868  (planche  Xn,fig.  i). 

Le  3  novembre  de  cette  année,  j'ai  fait  prendre  encore 
une  centaine  de  Chauves-Souris  dans  la  même  localité. 
J'ai  trouvé  les  organes  génitaux  femelles  gonflés  par  les 
spermatozoïdes.  Mais  je  n'ai  pu  découvrir  aucun  ovule,  ni 
dans  les  oviductes,  ni  dans  la  matrice. 

Ces  faits  me  portent  à  croire  que  les  Chauves-Souris 
s'accouplent  avant  de  tomber  dans  le  sommeil  hivernal; 
que  les  spermatozoïdes  restent  vivants  dans  le  corps  de  la 
femelle  pendant  une  partie  de  l'hiver;  que  l'ovule  arrive  à 
maturité  au  début  de  la  saison  froide;  qu'il  est  aussitôt 
fécondé;  mais  qu'il  ne  continue  à  se  développer,  que 
lorsque  les  premières  chaleurs  du  printemps  commen- 
cent à  ranimer  les  organes  engourdis  durant  les  froids  de 
l'hiver. 

On  sait  que  Bischoff  a  constaté  un  fait  analogue  chez 
le  chevreuil.  L'accouplement  a  lieu  à  la  fin  de  juillet  ou 
au  commencement  d'août.  Immédiatement  après  s'accom- 


(  702  ) 

plissent  les  premiers  phénomènes  du  développement  em- 
bryonnaire (fractionnement).  Mais  bientôt  le  développe- 
ment s'arrête  pour  ne  se  continuer  qu'en  décembre. 

CHAPITRE  [V. 

FRACTIONNEMENT  ET  FORMATION  d'uNE  MÉTAGASTRULA. 

Les  changements  que  l'œuf  de  la  Lapine  subit  durant  la 
première  période  de  l'évolution  de  l'embryon ,  s'accomplis- 
sent dans  l'oviducte.  L'œuf,  au  moment  d'entrer  dans  l'uté- 
rus, renferme  déjà  un  embryon  constitué  de  deux  feuillets 
cellulaires;  cet  embryon  est  une  gantriila  modifiée  pour  la 
désignation  de  laquelle  je  propose  le  nom  de  mélagaslrula. 
L'œuf  quitte  l'oviducte  entre  le  second  et  le  troisième  jour. 
Le  nombre  d'heures  qui  s'écoulent  entre  le  moment  de  la 
copulation  et  le  moment  de  l'entrée  de  l'œuf  dans  l'utérus 
n'est  pas  constant.  11  est  en  moyenne  de  70  heures.  Si  l'on 
sacrifie  une  Lapine  70  heures  après  la  copulation,  on  trouve 
les  œufs  dans  le  voisinage  du  point  de  terminaison  de  l'ovi- 
ducte, mais  tantôt  dans  l'oviducte,  tantôt  dans  l'utérus. 
D'un  autre  côté,  les  œufs  que  l'on  rencontre  70  heures 
après  le  coït  ne  sont  pas  toujours  exactement  au  même 
degré  de  développement.  Ces  différences  dépendent  proba- 
blement :  1°  de  ce  que  le  point  où  s'opère  la  fécondation 
n'est  pas  toujours  le  môme;  â*"  de  ce  que  le  temps  qui 
s'écoule  entre  le  moment  de  la  copulation  et  le  moment 
de  la  fécondation  est  variable.  Ces  variations  quant  au 
lieu  et  au  moment  de  la  fécondation  dépendent  elles- 
mêmes  de  l'état  des  follicules  de  De  Graaf  au  moment  de 
la  copulation.  Les  femelles  se  laissent  couvrir  tantôt  avani , 
tantôt  après  la  rupture  des  follicules,  et,  dans  le  premier 


(  703  ) 
cas,  la  maturation  des  ovules  peut  être  plus  ou  moins 
avancée.  11  n'est  donc  pas  exact  de  dire,  comme  l'a  pré- 
tendu M.  Reicherl,  que  la  rupture  des  vésicules  a  toujours 
lieu  un  nombre  déterminé  d'heures  après  raccouplomcnt. 
C'est  à  Bischoff  que  l'on  doit  la  découverte  du  fraction- 
nement de  l'oeuldes  Mammifères.  Avant  lui  von  Baër  et 
Barry  avaient  vu  des  œufs  de  xMammifères  en  voie  de  seg- 
mentation; mais  von  Baër  a  employé  des  grossissements 
trop  faibles  pour  qu'il  ait  pu  saisir  les  véritables  carac- 
tères de  l'œuf  segmenté  de  Chien  qu'il  a  eu  sous  les  yeux 
et  son  observation  est  restée  isolée.  Quant  à  Barry,  qui  a 
vu  des  œufs  à  toutes  les  phases  du  fractionnement,  il  a  si 
mal  interprété  les  faits  qu'il  est  impossible  de  lui  attribuer 
le  mérite  de  la  découverte  d'un  phénomène  dont  il  n'a  coni- 
pris  ni  le  mode  ni  la  signification.  Il  n'a  pas  eu  l'idée  de 
ce  qui  constitue  l'essence  de  la  segmentation.  Bischoff, 
au  contraire,  non-seulement  a  décrit  fort  exactement  le 
phénomène  du  fractionnement  tel  qu'il  se  passe  chez  les 
Mammifères,  mais  il  a  fait  connaître  certains  caractères 
essentiels  des  globes  vitellins.  Il  a  reconnu  que  ces  globes 
sont  dépourvus  de  membrane,  qu'ils  possèdent  un  noyau 
clair,  et  s'il  n'a  pas  compris  la  portée  de  la  segmentation 
au  point  de  vue  histogénique,  c'est  à  cause  des  idées 
erronées  qui  régnaient  à  cette  époque  sur  la  constitution 
de  laceliuie.  Bischoff  a  vu  que  les  globes  de  segmentation 
se  transforment  en  cellules  pour  donner  naissance  à  la 
vésicule  blastodermique;  il  a  reconnu  que  leur  vésicule 
claire  devient  le  noyau  des  cellules  blastodermiques;  je 
ne  puis  assez  admirer  l'exactitude  de  ses  observations.  Il 
est  regrettable  que  les  recherches  qu'il  a  faites  ultérieure- 
ment sur  le  développement  du  Cochon  d'Inde  et  du  Che- 
vreuil l'aient  conduit  plus  tard  à  élever  lui-même  un  doute 


(  704  ) 

sur  ses  observations  antérieures  faites  chez  le  Lapin  et  le 
Chien  et  à  leur  donner  une  portée  qu'elles  n'ont  pas.  Dans 
ses  Neiie  Beobachtungen  zur  Entwickelungsgeschichte  des 
Meerschiceinchem ,  il  exprime  l'opinion  que  chez  tous  les 
Mammifères  il  s'opère  à  la  fin  du  fractionnement  une 
fusion  des  globes  vitellins  en  une  masse  granuleuse  com- 
mune d'où  sortiraient  les  cellules  du  blastoderme. 

Si  les  observations  de  l'illustre  embryogénisle  de  Mu- 
nich, relativement  tant  au  fractionnement  qu'à  la  forma- 
tion de  la  vésicule  blastodermique,  sont  marquées  au 
coin  de  la  plus  remarquable  exactitude,  je  dois  ajouter 
qu'elles  sont  cependant  incomplètes  à  certains  égards. 
Des  faits  importants  lui  ont  échappé;  l'attention  de  Bischoff 
n'a  été  portée  ni  sur  tous  les  caractères  des  globes  vitel- 
lins, ni  sur  leur  disposition  relative,  ni  sur  la  loi  suivant 
laquelle  s'opère  le  fractionnement,  ni  sur  la  composi- 
tion de  la  masse  cellulaire  qui  se  produit  à  la  suite  du 
fractionnement.  C'est  ce  qui  fait  qu'une  phase  importante 
de  l'évolution  de  l'embryon  lui  a  échappé;  et  cette  phase 
est  d'autant  plus  importante  qu'elle  est  le  point  de  départ 
de  la  formation  de  la  vésicule  blastodermique  et  la  clef  du 
problème  de  la  formation  des  feuillets  de  l'embryon. 

1.  Le  fractionnement  débute  par  le  changement  de 
forme  du  noyau  embryonnaire  qui,  de  sphérique  qu'il  était 
d'abord,  devient  fusiforme,  et  la  production,  dans  le  globe 
vitellin  primitif,  d'une  figure  karyoîytique  semblable  à  celle 
qui  a  été  observée  et  décrite  chez  les  Néinatodes  par  Auer- 
bach.  Je  ne  puis  encore  faire  connaître  mes  observations 
sur  le  mode  suivant  lequel  s'opère  la  division  du  pre- 
mier globe  de  fractionnement,  pas  plus  que  sur  la  for- 
mation des  noyaux  des  deux  globes  produits  à  la  suite  de 
la  première  segmentation.  Les  recherches  que  j'ai  faites 


(  705  ) 
pour  élucider  cette  importante  question  sont  encore  in- 
suffisantes. Cependant  je  puis  affirmer  que  les  prétendues 
vacuoles  que  Auerhach  fait  apparaître  dans  la  figure 
karyolytique  et  qui  se  voient  également  chez  les  Mammi- 
fères ne  sont  pas  des  éléments  de  nouvelle  formation ,  mais 
des  fragments  du  premier  noyau  embryonnaire.  Ce  sont 
des  corps  formés  de  substance  nucléaire;  ils  se  colorent 
en  rose  par  le  picrocarminate. 

2.  Au  moment  où  le  fractionnement  en  deux  vient  de 
se  terminer,  chaque  globe  présente  une  forme  spbérique 
régulière.  Il  présente  alors  une  tache  claire  qui,  examinée 
à  de  forts  grossissements,  se  montre  formée  de  deux 
parties  distinctes  :  l'une  arrondie  plus  petite  qui  est  un 
dérivé  du  premier  noyau  embryonnaire  et  que  j'appelle 
le  promicleiis  dérivé;  l'autre  plus  volumineuse,  bosselée  à 
sa  surface,  enveloppant  incomplètement  la  première,  que 
j'appelle  le  promicleus  engendré.  Il  n'est  que  le  reste  de  la 
matière  claire,  homogène  et  transparente,  accumulée  dans 
le  premier  globe  aux  deux  pôles  du  premier  noyau,  après 
que  celui-ci  a  pris  la  forme  d'un  fuseau.  Cette  matière  est 
une  partie  diff'érenciée  du  protoplasme  de  la  cellule  en  voie 
de  formation  et  ne  présente  aucun  lien  génétique  avec  le 
noyau  du  premier  globe.  Le  pronucleus  dérivé  s'accroît 
progressivement  aux  dépens  du  pronucleus  engendré;  il 
finit  par  absorber  complètement  ce  dernier.  Le  pronu- 
cleus dérivé  est  devenu  alors  le  noyau  du  globe  vitellin. 
Ce  noyau  clair  est  pourvu  de  plusieurs  nucléoles  réfrin- 
gents. 

Quelque  temps  après  la  première  segmentation,  les 
globes  perdent  leur  forme  spbérique.  Ils  s'affaissent  un 
peu  l'un  sur  l'autre  et  s'accolent  par  une  surface  plus 
ou  moins  étendue.  C'est  à  ce  moment  que  les  pronuclei 


(  700  ) 
ont  disparu  pour  donner  naissance  au  noyau  unique  du 
globe. 

Généralement  les  deux  globes  sont  d'inégales  dimen- 
sions. Sur  vingt-neuf  œufs  que  j'ai  observés  à  cet  état  de 
développement,  vingt  et  un  au  moins  montraient  des 
globes  de  volumes  différents.  Je  dis  au  moins  parce  que  je 
ne  compte  dans  le  nombre  vingt  et  un  que  les  œufs  chez 
lesquels  cette  différence  était  très-manifeste.  Le  petit  globe 
présente  aussi  un  peu  moins  de  transparence-,  par  l'acide 
osmique  il  prend  une  teinle  plus  foncée;  par  le  picrocar- 
minate  il  prend  une  couleur  de  laque  carminée  plus  accen- 
tuée; il  se  colore  plus  vite  et  plus  fortement,  Ces  dernières 
différences  se  reconnaissent  même  dans  le  cas  oîi  les  deux 
globes  ne  présentent  pas  de  différences  au  point  de  vue  de 
leurs  dimensions. 

Je  conclus  de  ces  faits  que  les  deux  premiers  globes  ne 
sont  pas  équivalents;  qu'ils  n'ont  ni  la  même  composition 
ni  la  même  valeur.  La  suite  du  développement  démontre 
que  les  cellules  du  feuillet  externe  de  l'embryon  dérivent 
toutes  du  plus  grand  des  deux  premiers  globes  de  seg- 
mentation; que  toutes  les  cellules  de  l'endoderme  dérivent 
du  plus  petit.  Pour  ce  motif  je  donne  dès  à  présent  au 
grand  globe  le  nom  de  globe  ecloder inique;  au  plus  petit 
le  nom  de  globe  endoder inique. 

5.  Segmeiilalion  en  quatre  globes.  Au  moment  où  la 
segmentation  vient  de  s'achever,  les  quatre  globes  affec- 
tent une  forme  sphérique.  Le  noyau  de  ces  globes  se 
forme  aux  dépens  de  deux  pronuclei  de  la  même  manière 
que  dans  les  deux  premiers  globes.  Dans  certains  œufs  les 
quatre  globes  sont  disposés  de  telle  manière  que  leurs  cen- 
tres se  trouvent  dans  un  même  j)lan.  Ils  sont  de  dimen- 
sions inégales  :  il  y  en  a  deux  qui  sont  plus  grands  et  un 


(  707  ) 

peu  plus  clairs  et  qui  se  colorent  plus  lentement  et  plus 
faiblement  par  le  picrocarminale;  deux  autres  sont  plus 
petits,  un  peu  plus  foncés  et  se  colorent  plus  rapidement 
et  plus  fortement.  Les  deux  grands  globes  dérivent  bien 
certainement  du  premier  globe  ectodermique;  les  deux  pe- 
tits du  premier  globe  endodermique.  Dans  la  plupart  des 
œufs  segmentés  en  quatre,  la  disposition  des  globes  est 
différente  :  les  lignes  qui  joignent  les  centres  des  globes 
de  même  valeur  sont  perpendiculaires  entre  elles. 

Après  quelque  temps  les  globes  perdent  leur  forme 
spbérique;  ils  s'affaissent  les  uns  sur  les  autres;  mais  les 
globes  ectodcrmiques  s'atïaissent  plus  tôt  et  plus  forte- 
ment que  les  globes  endodermiques.  C'est  ce  qui  fait  que 
Ton  voit  souvent  les  deux  grands  globes  plus  ou  moins 
moulés  par  une  légère  concavité  sur  les  deux  petits  qui 
ont  conservé  encore  à  ce  moment  leur  forme  sphérique. 

4.  Division  en  huit.  Xu  moment  où  ils  viennent  de  se 
séparer,  les  buit  globes  affectent  une  forme  parfaitement 
sphéroïdale.  Dans  chacun  d'eux  on  distingue  deux  pro- 
nuclei  accolés  l'un  à  l'autre;  l'un  irrégulier  et  bosselé  à  sa 
surface  est  d'abord  plus  grand  que  l'autre  et  l'enveloppe 
plus  ou  moins  complètement.  Ces  globes  se  trouvent  dis- 
posés sur  deux  plans  :  quatre  globes  plus  grands  et  plus 
clairs  (globes  ectodermiques),  de  mêmes  dimensions,  se 
trouvent  dans  un  même  plan;  quatre  autres  plus  petits  et 
plus  foncés  (globes  endodermiques)  se  trouvent  dans  un 
autre  pian  parallèle  au  premier.  Les  lignes  qui  unissent 
les  centres  des  globes  opj)osés  d'un  même  plan  sont  per- 
pendiculaires entre  elles.  Mais  les  croix  formées  par  les 
lignes  réunissant  les  centres  des  globes  opposés  d'un  même 
plan  forment  ensemble  une  étoile  à  buit  rayons  conver- 
geant sous  des  angles  de  45  degrés. 


(  708  ; 

Bientôt  la  position  relative  des  globes  change  :  l'un  des 
globes  endodermiques  devient  central;  les  trois  autres 
aussi  bien  que  les  quatre  globes  ectodermiques  restent  su- 
perficiels. L'ensemble  des  huit  globes  prend  alors  une 
forme  sphéroïdale.  La  surface  de  la  sphère  est  constituée 
par  sept  globes  enveloppant  un  globe  central  unique.  Les 
quatre  globes  endodermiques  forment  alors  une  pyramide 
de  quatre  boulets.  Le  boulet  qui  constitue  le  sommet  de 
la  pyramide  est  enveloppé  par  une  calotte  concave,  for- 
mée par  les  quatre  globes  ectodermiques.  Ces  changements 
dans  la  position  relative  des  globes  sont  accompagnés  de 
certaines  modifications  que  subit  leur  forme.  Ils  cessent 
d'affecter  la  forme  sphéroïdale,  qu'ils  réalisaient  d'abord, 
pour  s'affaisser  les  uns  sur  les  autres.  J'ai  vu  des  œufs 
dans  lesquels  cet  affaissement  était  si  prononcé,  que  l'en- 
semble des  globes  paraissait  constituer  une  sphère  indi- 
vise et  seulement  sillonnée  à  sa  surface. 

Ces  changements  dans  la  position  relative  des  globes 
vitellins  constitue  un  commencement  d'invagination;  l'ec- 
loderme  formé  par  quatre  globes  tend  à  envelopper  par 
épibolie  la  masse  cellulaire  endodermique.  Cette  tendance 
s'accentuera  davantage  dans  les  phases  ultérieures  et  aura 
pour  conséquence  le  cheminement  progressif  de  l'eclo- 
derme  autour  de  l'endoderme  d'où  résultera  la  formation 
de  la  métagastrula. 

4.  Segmenlalion  en  douze  globes.  La  phase  suivante  est 
des  plus  instructives  :  elle  démontre  que  les  globes  ecto- 
dermiques se  multiplient  plus  rapidement  que  les  globes 
endodermiques. 

Cette  phase  est  caractérisée  par  l'existence  de  douze 
globes.  Elle  a  été  observée  par  Bischoff  chez  le  Chien  et 
chez  le  Chevreuil;  chez  le  Cochon  d'Inde  elle  a  été  signalée 


(  709  ) 
par  Bischoff  et  par  Reichert.  Je  l'ai  observée  cinq  fois  chez 
le  Lapin.  Dans  deux  Lapines  j'ai  trouvé  simullanément  des 
œufs  divisés  en  seize  et  d'autres  en  douze  globes;  dans  une 
autre  Lapine  j'ai  vu  simultanément  des  œufs  divisés  en 
douze  globes,  d'autres  divisés  en  huit. 

Dans  les  cinq  œufs  j'ai  trouvé  huit  globes  notablement 
plus  petits  que  les  quatre  autres;  tous  les  huit  avaient  les 
mêmes  dimensions  et  le  même  aspect;  tous  affectaient  une 
forme  sphérique.  Ils  provenaient  de  la  segmentation  si- 
multanée des  quatre  globes  ectodermiques  de  la  phase  pré- 
cédente. Les  quatre  autres  globes,  notablement  plus  grands 
que  les  précédents,  ne  sont  que  les  globes  endodermiques 
de  la  phase  précédente  qui  se  segmentent  un  peu  plus  tard 
que  les  premiers.  Dans  deux  de  ces  cinq  œufs  l'un  des 
grands  globes  était  tout  à  fait  central,  les  trois  autres  pé- 
riphériques. Dans  les  trois  autres  œufs  la  position  relative 
des  globes  ne  pouvait  pas  se  ramener  au  type  géométrique 
décrit  au  5°. 

5.  Division  en  seize.  Au  début  tous  les  globes  sont 
sphériques.  La  disposition  relative  des  globes  ne  paraît  pas 
être  toujours  la  même.  En  effet,  j'ai  trouvé  quelquefois  un 
seul,  plus  souvent  deux  ou  trois  globes  au  centre  de  l'œuf. 
Plus  lard,  quand  les  globes  se  sont  affaissés  l'un  sur 
l'autre,  on  trouve  jusqu'à  quatre  globes  au  centre.  Des 
douze  périphériques,  huit  sont  alors  ectodermiques;  ils 
sont  adjacents  et  forment  par  leur  réunion  une  calotte 
moulée  sur  les  globes  centraux.  Cette  calotte  ectodermique 
forme  plus  de  la  moitié  de  la  surface  de  l'embryon.  Ces 
cellules  se  distinguent  surtout  des  cellules  endodermiques 
encore  superficielles  en  ce  qu'elles  sont  plus  aplaties  et 
beaucoup  moins  convexes  du  côté  externe  que  les  globes 
endodermiques;  en  outre,  elles  sont  légèrement  concaves 


(  710  } 
à  leur  face  interne.  Les  globes  endodermiques  superficiels 
sont,  au  contraire,  hémisphériques  du  côté  de  la  surface; 
ils  se  touchent  mutuellement  par  des  surfaces  planes. 
Au  point  de  vue  des  dimensions,  il  existe  maintenant 
moins  de  différences  qu'au  début  de  la  segmentation  entre 
les  cellules  eclodermiques  et  les  globes  endodermiques. 

J'ai  eu  sous  les  yeux  entre  cinquante-cinq  et  soixante 
œufs  présentant  la  division  en  seize  globes. 

6.  Division  en  vingt-quatre.  Cette  phase  du  fractionne- 
ment a  déjà  été  constatée  par  Bischoff  qui  fait  observer  que 
dans  les  œufs  qui  renferment  vingt-quatre  globes, ceux-ci 
sont  d'inégales  dimensions.  Ce  qui  est  essentiel  à  noter 
et  ce  qui  paraît  avoir  échappé  à  l'éminent  embryogé- 
niste,  c'est  que  dans  cette  phase,  comme  dans  celle  décrite 
au  n"  5,  les  globes  plus  volumineux  ne  sont  pas  mêlés  aux 
petits,  mais  qu'ils  sont,  au  contraire,  adjacents  l'un  à 
l'autre  et  les  uns  situés  au  centre,  les  autres  à  la  surface 
de  l'embryon. 

Les  globes  ectodermiques  sont  au  nombre  de  seize; 
ils  ont  une  forme  sphérique  et  ils  constituent  ensemble 
une  calotte  appliquée  sur  les  globes  centraux.  Le  nombre 
de  ces  derniers  est  variable;  j'en  ai  trouvé  trois,  quatre 
ou  cinq.  Quelquefois  on  en  trouve  un  ou  plusieurs  dans 
une  position  intermédiaire. 

J'ai  trouvé  quelquefois  des  œufs  dans  lesquels  il  n'exis- 
tait que  vingt-trois  et  même  vingt-deux  globes.  Dans  ces 
œufs,  la  détermination  de  la  partie  ectodermiqne  et  de  la 
partie  cndodermique  était  difficile,  de  grands  globes  se 
trouvant  placés  au  milieu  des  petits.  Je  pense  que  ces 
cas  exceptionnels  doivent  être  attibués  à  cette  circonstance 
que  tous  les  globes  eclodermiques,  à  partir  de  ce  moment, 
ne  se  divisent  plus  simultanément.  Les  uns  se  segmentent 


(  7H  ) 
un  peu  plus  tôt   que  les  autres  et  ces  différences  vont 
s'accuser  de  plus  en  plus  dans  la  suite,  ce  qui  rend  très- 
difficile  dans  certains  œufs  la  détermination  de  la  forme 
embryonnaire  et  de  la  signification  de  certains  globes. 

7.  Dans  les  phases  ultérieures  du  développement,  la 
détermination  exacte  du  nombre  des  globes  devient  elle- 
même  fort  difficile.  Ce  n'est  qu'en  rompant  les  enveloppes 
de  l'œuf  que  l'on  parvient,  dans  certains  cas,  à  résoudre 
la  question  de  nombre.  Dans  les  phases  subséquentes  à 
celles  que  nous  avons  considérées,  le  nombre  des  globes 
augmente  peu  à  peu  et  la  calotte  ectodermique  s'étend 
progressivement  de  façon  à  envelopper  de  plus  en  plus 
complètement  l'amas  des  cellules  endodermiques.  Ces  mo- 
difications successives  amènent  la  formation  de  la  méta- 
gastrula,  qui  se  reconnaît  déjà  fort  distinctement  quand  il 
existe  environ  trente-deux  globes,  mais  qui  s'accuse  da- 
vantage encore  quand  le  nombre  des  globes  est  approxi- 
mativement de  quarante-huit,  de  soixante-quatre  ou  de 
quatre-vingt-seize.  Cette  dernière  phase  est  atteinte,  en 
moyenne,  70  heures  après  l'accouplement.  L'embryon 
présente  alors  les  caractères  suivants  : 

La  partie  périphérique  du  corps  est  constituée  par  une 
couche  de  cellules  claires,  dont  j'évalue  approximativement 
le  nombre  à  soixante-quatre.  A  la  coupe  optique  on  en 
compte  de  treize  à  quinze.  La  masse  centrale  de  l'embryon 
est  formée  par  un  certain  nombre  de  cellules  plus  grandes, 
plus  foncées  et  polygonales.  Si  l'on  fait  rouler  l'œuf  sur  le 
porte-objet,  on  parvient  toujours  à  amener  l'embryon  dans 
une  position  telle,  qu'on  distingue  nettement,  en  un  point 
de  sa  surface,  une  dépression  que  je  désignerai  sous  le 
nom  de  «  lieu  d'invagination  ».  Si  ce  lieu  est  amené  dans 
la  coupe  optique  de  l'œuf,  alors  on  reconnaîl  que  la  couche 


(  ■Ji'i  ) 

superficielle  de  rembryon  se  trouve  interrompue  en  ce 
point  par  une,  deux  ou  trois  cellules  dilïérenles  des  autres 
i]ui  sont  superlicieiles.  Ces  cellules  sont  en  tous  points 
semblal)les  à  celles  qui  constituent  le  noyau  central  de 
l'embryon,  c'est-à-dire  la  masse  endodermique.  Je  consi- 
dère la  solution  de  continuité  qui  existe  dans  la  couche 
ectodermique  au  lieu  d'invagination  comme  homologue  à 
l'anus  de  Rusconi,  réceuiment  désigné  par  mon  ami  Ray 
Lankester,  sous  le  nom  de  blastopore.  Les  quelques  cel- 
lules endodormiques,  engagées  dans  ce  trou,  constituent  le 
bouchon  de  Ecker  ou  bouchon  endodermique. 

Les  cellules  de  la  couche  superficielle  ou  ectodermique 
présentent  les  caractères  suivants  :  elles  ont  une  l'orme 
irrégulièrement  cuboïde;  elles  sont  convexes  en  dehors  et 
en  dedans,  planes  sur  leurs  faces  latérales.  Les  cellules  qui 
circonscrivent  le  bouchon  endodermique  ont  une  l'orme  un 
peu  dilVérente  :  elles  sont  plus  plates  et  s'appliquent  sur 
les  celllules  endodermiques  du  bouchon  par  une  surface 
régulièrement  convexe.  Par  là  elles  se  distinguent  de 
toutes  les  autres  cellules  de  l'ectoderme  qui  se  louchent 
mutuellement  par  des  faces  planes.  Les  dimensions  de  ces 
cellules  varient  un  peu  de  l'une  à  l'autre.  H  n'y  en  a  pas 
deux  qui  aient  exactement  la  même  forme  ni  les  mêmes 
dimensions.  Si  l'on  traite  ces  œufs  par  l'acide  osmique  et 
puis  pas  le  liquide  de  Millier,  on  obtient  de  magnifiques 
préparations  :  les  cellules  ectodermiques  restent  très- 
claires  et  se  colorent  très-faiblement  en  brun;  elles  pos- 
sèdent chacune  un  beau  noyau  sphérique  pourvu  de  plu- 
sieurs nucléoles;  elles  sont  finement  granuleuses;  mais 
après  le  traitement  par  l'acide  osmique  on  trouve  toutes 
les  granulations  accumulées  dans  la  région  circomnu- 
cléaire  du  protoplasme  et  comme  le  noyau  occupe  une 


(  713  ) 

position  excentrique,  qu'il  se  trouve  plus  près  de  la  sur- 
face de  l'embryon,  la  partie  externe  des  cellules  ecto- 
dermiques  se  distingue  par  son  aspect  granuleux.  Au  con- 
traire la  partie  profonde  est  tout  à  fait  claire,  transparente, 
dépourvue  de  granulations.  Cette  circonstance  permet  de 
distinguer  avec  une  extrême  netteté  la  limite  de  l'ecto- 
derme:  si  Ton  observe  l'embryon  avec  un  faible  grossisse- 
ment, on  voit  une  zone  claire  et  limpide  entre  l'endo- 
derme et  l'ectoderme.  L'ectoderme  considéré  dans  son 
ensemble  est  granuleux  dans  sa  partie  externe;  il  est 
clair,  hyalin  et  dépourvu  de  toute  granulation  partout 
où  il  se  trouve  en  contact  avec  l'endoderme. 

Les  cellules  endodermiques  dont  le  nombre  est  difficile  à 
délerminer,sont  de  forme  polyédrique;  elles  se  moulent  les 
unes  sur  les  autres  aussi  bien  que  sur  les  cellules  de  l'ec- 
toderme, de  façon  à  remplir  exactement  tous  les  angles 
rentrants  qui  existent  entre  ces  dernières.  Ces  cellules  sont 
plus  grandes  que  les  cellules  eclodermiques  ;  elles  se  colo- 
rent assez  fortement  en  brun  par  l'acide  osmique  et  ne 
sont  guère  transparentes. Elles  adhèrent  fortement  les  unes 
aux  autres;  si  on  laisse  macérer  dans  le  liquide  de  Millier 
pendant  sept  à  huit  jours,  et  si  alors  on  rompt  les  enve- 
loppes de  l'œuf,  on  parvient  à  isoler  ense  servant  d'aiguilles 
très-fines  la  masse  endodermique  toute  entière.  Les  cel- 
lules qui  la  constituent  tiennent  toutes  ensemble,  tandis 
que  l'ectoderme  se  détache  facilement  de  l'endoderme  et 
les  cellules  qui  le  composent  n'adhèrent  que  très-faible- 
ment les  unes  aux  autres.  La  masse  endodermique  isolée 
affecte  la  forme  d'une  petite  carafe.  Les  cellules  du  bouchon 
de  Ecker  en  constituent  le  goulot.  Le  nombre  des  cellules 
qui  se  trouvent  au  sommet  du  goulot  est  souvent  de  trois; 
quelquefois  même  il  n'en  existe  qu'une  seule;  dans  ce  cas, 

2™^  SÉRIE,  TOME  XL.  46 


(  7U  ) 
celte  cellule  se  Irouvail  en  retrait  sur  les  cellules  ectoder- 
miques  voisines;  le  blaslopore  était  sur  le  point  de  se 
fermer. 

La  forme  embryonnaire  ainsi  caractérisée,  constituée 
par  une  masse  cellulaire  solide,  dépourvue  de  cavité  cen- 
trale, mais  formée  d'une  couche  ectodermique  et  d'une 
masse  endodermique,  pourvue  d'un  blastopore  et  d'un 
bouchon  endodermique,  formée  progressivement  pendant 
le  cours  du  fractionnement  par  épibolie,  je  l'appelle  Me- 
tagastrida  ou  gastrula  modifiée.  Il  est  facile  de  la  ratta- 
cher à  la  gastrula  typique  formée  par  invagination,  telle 
qu'elle  se  trouve  conservée  chez  l'Amphioxus.  Le  mode  de 
formation  de  la  métagastrula  des  mammifères  résulte  de  la 
marche  du  fractionnement;  il  se  rattache  immédiatement  à 
ce  qui  a  été  constaté  chez  les  Batraciens,  les  Ganoïdes  (Es- 
turgeon) et  les  Cyclostomes.  Je  ne  crois  pas  que  l'on  puisse 
distinguer  dans  le  cours  de  cette  évolution  de  la  métagas- 
trula, comme  l'a  faitHaeckel,  une  phase  de  Morula. 

CHAPITRE  V. 

FORMATION  DE  LA  VÉSICULE  BLASTODERMIQUE. 

Dès  que  l'œuf  a  pénétré  dans  l'utérus,  la  masse  cellulaire 
de  la  métagastrula  commence  sa  transformation  en  une 
vésicule  claire  et  transparente  qui  s'accroît  rapidement  et 
atteint,  au  bout  de  quatre  à  cinq  jours,  un  diamètre  de  8  à 
9  millimètres.  Une  vésicule  toute  semblable  se  forme  dans 
la  matrice  du  Chien;  elle  a  été  découverte  par  R.  De  Graaf, 
observée  ensuite  par  Cruikshank  et  décrite  par  von  Baér. 
Elle  a  été  étudiée  depuis  par  Coste,  Barry,  Bischoff,  Meiss- 
ner,  Remak  et  Reichert.  Elle  est  formée  d'une  membrane 


(  7IS  ) 
externe  sans  structure  qui  n'est  que  la  zone  pellucide  unie, 
chez  le  Lapin,  à  une  couche  plus  ou  moins  épaisse  de  ma- 
tière albuminoïde,  et  d'une  memhrane  interne  ,  le  germe 
(Keun)  de  von  Baër,  la  vésicule  blastodennique  de  Coste, 
là  Keimhaut  ou  Keimblase  de  BischofT  et  de  Remak,  la 
membrane  enveloppante  [Umhûllungshaut)  de  Reichert. 
Von  Baër  avait  déjà  reconnu  qu'à  la  face  interne  de  cette 
membrane  demeure  accolé  un  reste  du  vitellus  [ein  Rest 
nicht  anfgelôseler  Botter siibsfanz).  Pour  Bischoff  etRemak, 
ce  reste  du  vitellus  est  un  amas  de  globes  vitellins  non 
encore  transformés  en  cellules  {Dotterresf,  Dotterkugel), 
mais  destinés  à  subir  progressivement  cette  transforma- 
tion au  fur  et  à  mesure  que  ces  globes  viendront  s'inter- 
caler entre  les  cellules  de  la  vésicule  blastodermique.  Ce 
reste  vitellin  n'auraitaucun  rapport  avec  la  tache  embryon- 
naire (Fruchthof,  Keimsc/ieibe)  qui  apparaîtrait  plus  tard, 
après  la  disparition  du  reste  vitellin.  Remak  dit  qu'à  un 
moment  de  son  évolution,  la  vésicule  blastodermique  est 
formée,  sur  tous  les  points  de  sa  surface,  par  une  seule 
rangée  de  cellules.  Pour  Coste,  au  contraire,  la  tache  em- 
bryonnaire procède  de  ce  reste  vitellin,  et  BischofT  émet, 
dans  son  mémoire  sur  le  développement  du  Chien,  une 
opinion  toute  semblable.  Mais  comment  les  cellules  poly- 
gonales de  la  vésicule  blastodermique  se  comportent-elles 
vis-à-vis  des  globes  vitellins?  La  membrane  formée  pas  ces 
cellules  se  continue-t-elle  avec  les  bords  de  la  tache  em- 
bryonnaire ou  bien  recouvre-t-elle  ces  globes?  La  ques- 
tion est  résolue  dans  un  sens  diamétralement  opposé  par 
Bischoff  et  par  Reichert.  Un  grand  nombre  de  questions 
relatives  à  la  formation  et  à  la  constitution  de  la  vésicule 
blastodermique,  de  la  tache  embryonnaire  et  des  feuillets 
restent  encore  à  trancher.  Je  veux  les  résumer  ici;  les 


(  71«  ) 
observations  que  j'ai  faites  et  qui  se  trouvent  résumées 
plus  loin  ont  eu  pour  but  de  les  résoudre. 

1.  Comment  la  vésicule  blastodermique  se  forme-t-elle 
aux  dépens  de  la  masse  cellulaire  qui  à  la  fin  du  fractionne- 
ment remplit  la  cavité  de  l'œuf  et  que  j'ai  démontré  être 
une  métagaslrula? 

2.  Le  reste  vitellin  [Botlerrest  ou  Haufen  der  Dotter- 
kiigeln  de  Biscbotf)  disparaît-il  et  la  tache  embryonnaire 
se  forme-t-elle  aux  dépens  du  feuillet  cellulaire  primitive- 
ment unique  de  la  vésicule  blastodermique  (von  Baer, 
Biscboff  (Mém.  sur  le  Lapin)  et  Remakjou  bien  contribue- 
t-il  à  la  formation  de  la  tache  embryonnaire? 

o.  Cet  amas  de  globes  vitellins  est-il,  oui  (Reichert)  ou 
non  (Biscboff),  recouvert  par  une  couche  de  cellules  po- 
lygonales semblables  à  celles  qui  constituent  la  plus  grande 
partie  de  la  vésicule  blastodermique? 

4.  A  quel  moment  apparaît  la  tache  embryonnaire  pro- 
prement dite?  N'a-t-on  pas  donné  ce  nom  à  des  choses  dif- 
férentes? Le  Friichtfiof  que  Biscboff  fait  apparaître  très- 
tard  chez  le  Lapin  est-il  homologue  à  la  tache  embryon- 
naire du  Chien  (Embryonalfleck,  Fruchthof)  qui  se  montre 
aussitôt  que  commence  la  formation  de  la  vésicule  blasto- 
dermique? 

5.  La  tache  embryonnaire  est-elle  formée  par  un  seul 
feuillet  épaissi?  résulte-t-elle  de  l'accolement  des  parties 
épaissies  de  deux  feuillets?  ou  bien  les  feuillets  ne  présen- 
tent-ils pas  d'épaississement  au  niveau  de  la  tache  et  celle- 
ci  est-elle  formée  par  plus  de  deux  feuillets? 

6.  La  vésicule  blastodermique  est-elle  le  feuillet  externe 
de  l'embryon,  ou  bien  n'est-elle  qu'une  membrane  enve- 
loppante sans  importance  pour  la  formation  des  organes 
principaux  de  l'embryon  (Reichert)? 


(  717  ) 

7.  Quelle  est  l'origine  du  feuillet  inleine? 

8.  Quand  et  comment  se  forme  le  feuillet  moyen? 
Vers  la  fin   du  troisième  jour  commence  la  formation 

de  la  vésicule  blastodermique.  Dans  des  embryons  de 
78  heures  environ,  on  ne  trouve  plus  que  fort  rarement 
des  traces  du  blastopore;  l'ectodermeest  devenu  une  vési- 
cule close  qui  se  moule  exactement  sur  la  masse  cellulaire 
endodermique.  Cette  vésicule  est  formée  par  des  cellules 
semblables  à  celles  qui  constituent  l'ectoderme  de  la  méta- 
gastrula.  ^lais  ces  cellules  sont  plus  nombreuses,  leur 
nombre  est  difficile  à  déterminer;  on  en  compte  dix-huit  à 
vingt  à  la  coupe  optique.  Leur  forme  et  leurs  dimensions 
varient  beaucoup  de  l'une  à  l'autre.  Au  point  de  vue  de  la 
forme,  elles  se  distinguent  surtout  des  cellules  ectoder- 
miques  de  la  métagastrula  en  ce  qu'elles  sont  devenues 
conoïdes;  la  base  des  cônes  est  dirigée  en  dehors;  cette 
base  est  très-faiblement  convexe.  La  vésicule  ectoder- 
mique  est  constituée  par  un  véritable  epithelium  conoïde. 

La  masse  endodermique  est  formée  par  des  cellules 
polyédriques  de  forme  variable.  Ces  cellules  sont  beaucoup 
plus  foncées  etplusgrandes  quelescellulesectodermiques; 
leur  noyau  est  proportionnellement  plus  volumineux. 

A  côté  de  ces  embryons,  on  en  trouve  d'autres  qui  diff"è- 
rent  de  ceux  que  je  viens  de  décrire,  en  ce  que  la  vésicule 
ectodermique  ne  se  moule  pins  sur  la  masse  endodermique: 
elle  en  est  séparée  par  une  fente  dans  laquelle  s'accumule 
un  liquide  albuminoïde  homogène,  clair  et  hyalin. 

La  forme  des  cellules  tant  ectodermiques  qu'endoder- 
miques  s'est  légèrement  modifiée  à  la  suite  de  la  production 
de  cette  fente.  Les  cellules  ectodermiques  sont  maintenant 
tout  à  fait  planes  à  leur  surface  externe;  le  contour  de 
l'embryon  est  marqué  par  une  circonférence   régulière. 


(  718) 
Du  côté  de  la  lente  ces  cellules  sont  très-convexes;  elles 
ont  encore  une  forme  conoïde;  mais  le  cône  a  son  sommet 
très-émoussé  et  son  axe  est  très-court.  Ces  cellules  devien- 
nent aussi  beaucoup  plus  claires.  Si  on  traite  un  semblable 
embryon  par  le  nitrate  d'argent,  on  remarque  que  les 
contours  des  cellules  ectodermiques  se  marquent  admira- 
blement; si,  après  avoir  fait  agir  le  réactif,  on  examine  la 
vésicule  blastodermique  à  sa  surface,  on  reconnaît  les  con- 
tours polygonaux  délimitant  les  bases  des  cellules  conoïdes. 
Ces  bases  sont  des  polygones  de  toutes  formes  et  de 
dimensions  fort  différentes.  Le  nitrate  d'argent  noircit 
aussi  la  substance  qui  unit  entre  elles  les  faces  latérales 
des  cellules  ectodermiques  :  si  on  examine  la  coupe  op- 
tique de  l'embryon ,  on  voit  entre  les  cellules  de  petites 
lignes  noires  dirigées  suivant  les  rayons  de  la  vésicule 
sphérique  qui  forme  maintenant  la  paroi  de  l'embryon. 

La  masse  endodermique  est  constituée  par  des  cellules 
plus  grandes  et  plus  opaques  que  les  cellules  ectodermi- 
ques. Ces  cellules  sont  polyédriques;  mais  celles  qui  dé- 
limitent la  fente  blastodermique  sont  arrondies  et  con- 
vexes du  côté  de  cette  dernière,  d'où  il  résulte  que  la 
masse  endodermique  est  délimitée  par  un  contour  assez  peu 
régulier  et  presque  sinueux.  Le  nitrate  d'argent  n'imprègne 
pas  du  tout  la  substance  unissante  de  ces  cellules, 

La  fente  se  produit  simultanément  sur  tout  le  pourtour 
de  l'œuf,  sauf  en  un  point,  où  la  masse  endodermique  se 
trouve  encore  adhérente  à  la  vésicule  cctodermique  par 
trois  ou  quatre  cellules.  Ce  point  correspond  au  blasto- 
pore.  Dans  certains  œufs  on  voit  en  ce  point  une  cellule 
endodermique  encore  engagée  entre  les  cellules  ectoder- 
miques. C'est  probablement  à  raison  de  cette  union  plus 
intime  qui  existe  en  ce  point  entre  les  deux  feuillets,  que 


(719) 
la  fente  blastodermique  se  produit  sur  toute  la  surface  de 
Fembryon,  sauf  au  lieu  d'invagination. 

La  vésicule  blastodermique  se  distend  rapidement;  son 
diamètre  s'accroît  et  la  fente  blastodermique  devient  bien- 
tôt une  large  cavité.  C'est  déjà  le  cas  dans  des  œufs  de  90 
beures.  Le  diamètre  de  la  vésicule  blastodermique  a  déjà 
atteint  0,12  à  0,1  o  de  millimètre.  Celte  distension  rapide 
de  la  vésicule  ectodermique  est  le  résultat  de  l'aplatis- 
sement progressif  des  cellules  de  l'ectoderme  et  de  leur 
multiplication.  De  conoïdes,  qu'elles  sont  d'abord,  elles 
deviennent  lenticulaires  et  plus  tard  elles  se  réduisent  à 
des  lamelles  minces  légèrement  renflées  seulement  à  leur 
milieu,  au  point  où  se  trouve  le  noyau  entouré  d'une  zone 
circulaire  de  protoplasme  granuleux.  Ces  granules  formés 
par  une  matière  grasse  (ils  se  dissolvent  dans  l'alcool  et 
l'éther  et  noircissent  par  l'acide  osmique)  forment  autour 
de  chaque  noyau  un  anneau  très-apparent  qui  avait  déjà 
frappé  von  Baër  et  que  Bischoff  a  décrit  et  parfaitement 
interprété. 

Ces  cellules  se  multiplient  par  division  non  pas  toutes 
ensemble,  mais  successivement.  Dans  une  vésicule  blas- 
todermique de  0,14  à  0,15  millimètres  de  diamètre,  on 
trouve  généralement  huit  à  neuf  cellules  en  voie  de  multi- 
plication. Je  décrirai  plus  loin  comment  s'accomplit  ce  phé- 
nomène. 

La  masse  cellulaire  endodermique  n'a  guère  augmenté 
de  volume;  elle  reste  adhérente  au  même  point  de  la  vé- 
sicule ectodermique  durant  tout  le  cours  de  la  distension 
progressive  de  cette  dernière.  Les  modifications  qu'elle 
subit  intéressent  surtout  sa  forme  et  le  nombre  de  ses  cel- 
lules. Sa  forme  est  d'abord  irrégulièrement  arrondie;  la 


(  720  ) 

masse  endodermiquc  forme  une  sphère  pleine,  à  surface 
bosselée,  emboîtée  dans  une  sphère  régulière  et  creuse 
qui  est  la  vésicule  eclodermique.  Elle  ne  remplit  pas  celte 
dernière;  entre  les  deux  existe  la  fente  blastodermique. 
Pendant  que  la  vésicule  ectodermique  se  distend,  la  masse 
endodermique  s'aplatit;  elle  devient  lenticulaire,  et  s'ac- 
cole par  une  surface  de  plus  en  plus  étendue  à  la  face  in- 
terne de  Fectoderme.  En  même  temps  ses  cellules  se 
multiplient;  elles  diminuent  de  volume  et  prennent  une 
forme  arrondie. 

Dans  des  œufs  de  92  heures  j'ai  trouvé  la  vésicule  blas- 
todermique qui  a  atteint  0,17  de  millimètre,  formée  de 
deux  parties  : 

d°  Sur  la  plus  grande  partie  de  son  pourtour  la  vésicule 
blastodermique  est  constituée,  comme  l'a  montré  BischofF 
(voir  pi.  Vïi,  fig.  37  de  son  Mémoire  sur  le  Lapin),  par  une 
seule  rangée  de  cellules  ectodermiques.  C'est  la  portion  que 
j'appellerai  monodermique  de  la  vésicule  blastodermique. 

2°  En  un  point,  la  masse  endodermique,  ayant  l'appa- 
rence d'une  lentille  biconvexe,  est  accolée  à  la  face  interne 
de  la  vésicule  ectodermique.  Elle  constitue  le  a  Haufen 
der  Dotterkugein  »  ou  le  «  Dotierrest  »  de  Bischoff.  En  ce 
point  la  vésicule  blastodermique  est  formée  de  deux  feuil- 
lets cellulaires  accolés  :  un  feuillet  ectodermique  et  un 
feuillet  endodermique.  Cette  région  discoïde  caractérisée 
par  l'accolement  des  deux  feuillets  cellulaires  qui  consti- 
tuaient la  métagastrula,  je  l'appellerai  le  gastrodisque. 

Quant  à  la  cavité  circonscrite  par  la  vésicule  blastoder- 
mique, elle  n'est  homologue  ni  à  la  cavité  de  segmentation, 
ni  à  la  cavité  digestive  primordiale  des  batraciens  On  peut 
la  désigner  sous  le  nom  de  cavité  blastodermique.  C'est 
une  cavité  qui  n'a  pas  d'homologue  chez  les  autres  ver- 
tébrés. 


(  7^21  ) 

OEufs  de  cent  cinq  à  cent  quinze  heures. 

La  vésicule  blaslodormique  a  allcint  un  diamètre  de 
0,9  de  raillimèlre  à  2  millimètres  de  diamètre.  Indépen- 
damment de  ses  dimensions  pins  considérables,  la  vésicule 
blaslodermique  a  subi  des  modifications  assez  notables 
dans  la  constitution  du  gastrodisque.   La    masse  cellu- 
laire endodermique  s'est  aplatie;  elle  a  perdu  sa  forme 
lenticulaire  pour  se  transformer  en  une  lame  cellulaire 
accolée  à  la  face  interne  de  la  vésicule    ectodermique 
et  constituer  avec   elle  un   gastrodisque  beaucoup  plus 
étendu  que  celui  que  nous  avons  décrit  dans  la  phase  pré- 
cédente.  L'ectoderme  est  constitué  dans  les  limites  du 
gastrodisque,  aussi  bien  que  sur  tout  le  pourtour  de  la 
vésicule,  par  une  rangée  unique  de  cellules  plates  ressem- 
blant aux  cellules  endothéliales  des  séreuses.  En  traitant 
par  le  nitrate  d'argent  et  ensuite  par  le  picrocarminate  ou 
l'hématoxyline,  on  obtient  des  préparations  magnifiques. 
Pour  étudier  la  constitution  de  la  vésicule,  il  est  r.éces- 
saire  de  l'ouvrir  et  de  l'étaler  en  une  lame,  en  pratiquant, 
après  une  incision  circulaire  suivant  un  grand  cercle  ou 
équateur  de  la  sphère  blastodermique,  des  incisions  conver- 
gentes vers  les  pôles  des  calottes  hémisphériques  séparées 
l'une  de  l'autre  par  la  première  incision. 

On  distingue  l'un  de  l'autre  et  avec  la  plus  grande  faci- 
lité, après  le  traitement  par  le  nitrate  d'argent,  la  région 
monodermique  et  le  gastrodisque  de  la  vésicule  blastoder- 
mique. L'ecloderme  se  colore  en  brun  partout  où  il  n'est 
pas  doublé  par  la  lame  endodermique.  Les  cellules  ecto- 
dermiques,  dans  toute  la  région  monodermique,  réduisent 
le  nitrate  d'argent  et  se  colorent  en  brun;  elles  n'exercent 


(  7^2  ) 
pas  la  même  action  sur  le  réactif,  elles  restent  claires  et 
transparentes,  dans  les  limites  du  gastrodisque.  En  outre, 
le  nitrate  d'argent  délimite  avec  une  extrême  netteté,  en 
colorant  en  noir  leurs  contours,  les  cellules  de  toute  la  vési- 
cule blastodermique.  On  reconnaît  alors  que  ces  cellules  son  t 
des  formes  polygonales  très-variées;  que  quelques-unes 
sont  tout  à  fait  irrégulières  et  qu'elles  ont  des  dimensions 
fort  différentes.  Je  décrirai  plus  loin  leurs  caractères  et 
leur  constitution  en  parlant  de  la  multiplication  des  cellules 
dans  les  feuillets  embryonnaires.  Je  dois  ajouter,  cepen- 
dant, que  chaque  cellule  a  la  forme  d'une  petite  plaque  à 
faces  parallèles  et  épaissie  à  son  milieu.  L'épaississement 
médian  est  constitué  par  le  noyau  entouré  d'un  peu  de  pro- 
toplasme granuleux.  Il  fait  saillie  à  l'intérieur  de  la  cavité 
blastodermique.  La  face  externe  de  ce^s  cellules  est  tout 
à  fait  unie.  Comme  toutes  les  cellules  ectodermiques  ont 
cette  forme,  les  cellules  en  se  touchant  par  leurs  bords 
circonscrivent  entre  leur  saillie  médiane  de  petites  gout- 
tières ouvertes  du  côté  interne. 

Comme  toute  la  région  monodermiqiie  delà  vésicule  se 
colore  en  brun  par  le  nitrate  d'argent,  que  les  cellules  ecto- 
dermiques dans  la  région  du  gastrodisque  ne  réduisent  pas 
le  nitrate,  pas  plus  que  les  cellules  de  la  plaque  endoder- 
mique,  le  gastrodisque  apparaît  comme  une  tache  claire  au 
milieu  du  reste  de  la  vésicule  coloré  en  brun.  Celte  tache  est 
irrégulière  et  lobulée.  Au  point  de  vue  de  sa  constitution, 
nous  devons  distinguer  la  partie  centrale  du  gastrodisque 
et  sa  périphérie.  Dans  la  partie  centrale  du  gastrodisque, 
l'endoderme  est  formé  par  deux  couches  superposées  de 
cellules  arrondies,  très-petites  comparativement  aux  cel- 
lules de  l'ectoderme,  et  plus  ou  moins  serrées  les  unes 
contre  les  autres.  Ces  petites  cellules  protoplasmiques  ne 


(  7^25  ) 
se  délimitent  pas  par  le  nitrate  d'argent;  elles  possèdent 
de  très-gros  noyaux  sphériques  et  leur  corps  se  colore 
vivement  en  rouge  par  le  picrocarminate.  Dans  la  partie 
périphérique  du  gastrodisque,  l'endoderme  est  formé  par 
les  mêmes  cellules;  mais  celles-ci,  au  lieu  de  former  une 
couche  continue,  se  trouvent  disséminées  une  à  une  à  la 
face  interne  de  la  vésicule  ectodermique.  Ces  cellules 
amœboïdes  se  trouvent  toujours  et  exclusivement  dans 
les  gouttières  formées  par  les  cellules  ectodermiques. 
Dans  les  préparations  au  nitrate  d'argent  on  les  trouve 
invariablement  coupées  par  les  lignes  noires  qui  marquent 
les  limites  des  cellules  ectodermiques. 

Il  résulte  de  l'étude  des  embryons  arrivés  à  cet  état  de 
développement  comparés  à  ceux  de  la  phase  précédente, 
que  la  masse  endodermique,  après  avoir  affecté  la  forme 
lenticulaire,  s'étale  en  une  plaque  composée,  dans  sa  partie 
centrale  d'une  double  rangée  de  cellules,  tandis  que  de  ses 
bords  partent  en  divergeant,  et  indépendamment  les  unes 
des  autres ,  des  cellules  isolées,  qui  cheminent  à  la  manière 
d'amibes  à  la  face  interne  de  l'ectoderme.  Ces  cellules  se 
multiplient  et  c'est  par  elles  que  se  fait  l'extension  pro- 
gressive du  gastrodisque. 

OEufs  de  cinq  jours. 

La  vésicule  blastodermique  a  continué  à  se  distendre; 
elle  a  atteint  un  diamètre  de  2  à  4  millimètres  dans  les 
œufs  de  120  à  130  heures. 

Le  gastrodisque  s'est  considérablement  étendu.  L'ecto- 
derme est  toujours  constitué  de  la  même  manière,  tant 
dans  la  région  monodermique  que  dans  les  limites  du 
gastrodisque.  Les  cellules  qui  constituent  ce  feuillet  ont 


(  724  ) 
les  mêmes  caractères  et  les  mêmes  propriétés  que  dans  les 
phases  précédentes.  Quant  à  la  lame  endodermique,  elle 
a  subi  des  modifications  importantes.  Les  cellules  isolées 
de  la  région  périphérique,  aussi  bien  que  les  cellules  pro- 
fondes de  la  région  centrale  du  gastrodisque,  se  sont  étalées 
et  transformées  en  cellules  plates  de  mêmes  dimensions  à 
peu  presque  les  cellules  ectodermiques, de  façon  à  consti- 
tuer maintenant  une  couche  continue  formée  par  une  seule 
rangée  de  cellules.  Celles-ci,  dont  les  contours  irréguliers 
se  marquent  faiblement  par  le  nitrate  d'argent,  forment  un 
epithelium  pavimenteux  simple  ressemblant  beaucoup  par 
l'irrégularité  de  ses  cellules  à  l'endothelium  des  lympha- 
tiques. Dans  la  région  périphérique  du  gastrodisque  cet 
epithelium,  constituant  le  feuillet  interne  ou  muqueux, 
est  immédiatement  accolé  à  la  couche  ectodermique.  Si 
l'on  examine  cette  partie  de  la  vésicule  après  avoir  traité 
par  le  nitrate  d'argent,  on  reconnaît  clairement  l'existence 
de  deux  systèmes  de  lignes  noires  entre-croisées,  indi- 
quant la  présence  de  deux  epitheliums  adjacents,  ils  rap- 
pellent ce  que  l'on  observe  si  l'on  examine  un  épiploon  ou 
une  portion  de  mésenihère  après  le  traitement  par  le  ni- 
trate. Cependant,  tandis  que  les  cellules  qui  recouvrent 
les  deux  faces  d'une  lame  épiploïque  sont  semblables 
entre  elles,  les  caractères  des  cellules  des  deux  feuillets 
adjacents  de  notre  embryon  sont  forts  différents.  Sur  les 
bords  du  gastrodisque  on  trouve  encore  des  cellules  isolées, 
les  unes  arrondies,  les  autres  à  formes  bizarres,  rappelant 
les  formes  successives  qu'affectent  des  amibes  ou  des  glo- 
bules blancs  du  sang.  Au  centre  du  gastrodisque  le  feuillet 
interne,  développé  aux  dépens  de  la  rangée  profonde  des 
cellules  endodermiques,  est  séparé  de  l'ectoderme  par  une 
couche  de  petites  cellules  arrondies,  qui  ont  conservé  tous 


(  725  ) 

Jes  caractères  des  cellules  endodermiques  de  la  phase  pré- 
cédente. C'est  cette  couche  qui  est  le  point  de  départ  de  la 
formation  du  feuillet  moyen. 

Dans  leslimitesdugaslrodisque,  l'endoderme  donne  donc 
naissance  au  feuillet  interne  on  muqueux  et  au  feuillet 
moyen.  Le  feuillet  interne,  constitué  par  une  rangée 
unique  de  cellules  plates,  est  le  résultat  des  modifications 
de  forme  que  subissent  ces  cellules  endodermiques  qui 
circonscrivent  immédiatement  la  cavité  blastodermique. 
Le  feuillet  moyen  est  un  reste  de  cellules  non  modifiées 
de  l'endoderme.  Ce  feuillet  moyen  n'apparaît  que  dans  la 
partie  centrale  du  gastrodisque.  Là,  la  vésicule  blastoder- 
mique est  formée  de  trois  feuillets  cellulaires.  L'externe  et 
l'interne  sont  constitués  l'un  et  l'autre  d'une  rangée 
unique  de  cellules  plates;  Texterne  est  l'ectoderme,  l'in- 
terne est  le  feuillet  interne  ou  muqueux.  Entre  les  deux 
se  trouve  une  couche  formée  de  petites  cellules  arrondies; 
c'est  le  feuillet  moyen.  Cette  région  du  gastrodisque,  où  il 
existe  trois  feuillets  cellulaires  adjacents,  est  l'aire  em- 
bryonnaire ou  région  tridermique  du  blastoderme.  Toute  la 
périphérie  du  gastrodisque,  qui  est  la  partie  de  beaucoup 
la  plus  considérable,  est  formée  par  les  feuillets  externe 
et  interne  immédiatement  accolés.  Elle  constitue  la  région 
didermique  du  blastoderme.  Tout  le  reste  de  la  vésicule 
blastodermique  est  formé  par  une  seule  rangée  de  cellules  : 
c'est  la  région  monodermique  du  blastoderme.  Tous  les 
embryologistes  ont  confondu  le  gastrodisque  à  son  début 
avec  ce  que  j'appelle  l'aire  embryonnaire  ou  région  tri- 
dermique  du  blastoderme.  Les  mots  :  tache  embryonnaire, 
Fruchtlwf,  Etnbryonalfleck,  Keimscheibe  ont  été  employés 
pour  désigner  tantôt  le  gastrodisque,  tantôt  la  région  tri- 
dermique. 


(  7^26  ) 

Œufs  de  six  jours. 

La  vésicule  blastodermique  a  considérablement  grandi. 
Cependant  le  volume  des  œufs,  que  l'on  trouve  l'un  à  côté 
de  l'autre  dans  l'utérus,  est  très-variable.  11  varie  entre 
o  et  5  Ya  millimètres.  Le  gastrodisque  s'est  considérable- 
ment étendu.  Il  a  envahi  environ  la  moitié  de  la  vésicule 
blastodermique.  Ses  bords  sont  très-irréguliers.  L'aire  em- 
bryonnaire s'est  un  peu  accrue;  elle  a  l'apparence  d'une 
tache  à  peu  près  circulaire  occupant  l'un  des  pôles  de  la 
vésicule.  Les  principales  modifications  qu'elle  a  subies 
consistent  dans  l'épaississement  du  feuillet  moyen,  qui 
constitue,  dès  à  présent,  la  plus  grande  partie  de  l'épais- 
seur de  la  région  tridermique  du  gastrodisque.  Le  feuillet 
externe  et  le  feuillet  interne  sont  toujours  constitués  d'une 
rangée  unique  de  cellules  plates  ayant  les  mêmes  carac- 
tères et  les  mêmes  dimensions  que  dans  la  région  dider- 
mique.  11  n'est  donc  pas  vrai  que  le  Fruchthof  on  la  Keim- 
scheibe  soient  formés  par  deux  feuillets  cellulaires  épaissis. 

La  zone  didermique  est  formée  par  l'accolement  de 
Tectoderme  et  du  feuillet  interne  constitués  l'un  et  l'autre 
d'une  seule  rangée  de  cellules  plates. 

La  moitié  inférieure  de  la  vésicule  blastodermique  (ré- 
gion monodermique)  est  constituée  par  une  seule  rangée 
de  cellules  ectodermiques. 

Œufs  de  sept  à  huit  jours. 

La  vésicule  blastodermique  s'est  encore  beaucoup  dis- 
tendue. Son  axe  moyen  atteint ,  dans  certains  œufs,  jusqu'à 
7  et  8  millimètres.  Elle  a  pris  la  forme  d'un  ellipsoïde  de 


(  727  ) 

révolution  à  axes  peu  différents.  Elle  est  constituée  exac- 
tement comme  précédemment.  Seulement  le  gaslrodisque 
a  envahi  dans  quelques  œufs  les  ^J,,  et  même  les  Ys  de  la 
vésicule  blastodermique.  La  région  monodermique  qui 
occupé  le  pôle  inférieur  de  l'œuf  se  réduit  donc  de  plus  en 
plus.  La  région  tridermique,  ou  aire  embryonnaire,  s'est 
un  peu  étendue  en  surface,  mais  elle  s'est  surtout  nota- 
blement épaissie.  Cet  épaississement  dépend  exclusivement 
de  la  multiplication  des  cellules  du  feuillet  moyen.  Celui-ci 
constitue  un  véritable  disque  lenticulaire  qui  soulève  l'ec- 
toderme  et  fait  saillie  à  la  surface  de  la  vésicule.  L'ecto- 
derme  est  toujours  constitué  par  une  seule  rangée  de 
cellules  polygonales  plates.  Mais  ces  cellules  se  sont  mul- 
tipliées avec  une  grande  activité  et  sont  beaucoup  plus 
petites  dans  la  zone  tridermique  que  dans  la  région  dider- 
mique  :  dans  cette  dernière,  en  effet,  Tectoderme,  aussi 
bien  que  l'endoderme,  ont  conservé  leurs  caractères  anté- 
rieurs. Il  en  est  de  même  des  cellules  endodermiques  dans 
la  zone  tridermique.  L'aire  embryonnaire  est  devenue  par- 
faitement circulaire  et  ne  montre  encore  aucune  trace  de 
la  ligne  primitive.  11  n'existe  encore  dans  les  œufs  de  7  à 
8  jours  rien  qui  ressemble  aux  villosités  que  Bischoff  a 
représentées,  pi.  VIII,  fig.  41.  M.  Gôtte  a  décrit  [Central- 
blatt  fur  med.  Wiss,  1869)  une  invagination  du  feuillet 
végétatif  sur  tout  le  pourtour  de  la  zone  sur  laquelle  se 
développe  ce  feuillet.  Le  feuillet  réfléchi  s'accolerait  à  lui- 
même  pour  constituer  une  couche  cellulaire  interne.  Il 
n'existe  absolument  aucune  trace  de  ce  phénomène  qui  n'a 
de  réalité  que  dans  l'imagination  de  M.  Gôtte.  Les  conclu- 
sions qu'il  tire  de  ses  prétendues  observations  ne  méritent 
pas  la  discussion. 


(  728  ) 
CHAPITRE  VI. 

MULTIPLICATION    DES    CELLULES. 

Si  l'on  traite  par  le  nitrate  d'argent  la  vésicule  blasto- 
dermique  d'un  œuf  de  quatre  jours  ou  davantage  et  que 
l'on  étale  ensuite  sur  un  porte-objet  la  région  monoder- 
mique, en  suivant  le  procédé  décrit  plus  haut,  on  recon- 
naît immédiatement  que  cette  membrane  est  formée  d'une 
seule  rangée  de  cellules  plates.  Les  contours  de  ces  cel- 
lules sont  marqués  par  des  lignes  noires  souvent  sinueuses 
ou  anguleuses,  toujours  d'une  remarquable  netteté.  Ces 
lignes  circonscrivent  des  polygones  irréguliers,  de  formes 
et  de  dimensions  très-différentes.  Dans  chacun  des  champs 
polygonaux  l'on  trouve  un  beau  noyau  de  forme  généra- 
ment  ovalaire  dont  la  dimension  variable  d'une  cellule  à 
l'autre  est  en  raison  des  dimensions  de  la  cellule. 

Si  l'on  traite  ultérieurement  cette  membrane  par  le 
picrocarminate  d'ammoniaque  et  qu'on  la  place  ensuite 
dans  la  glycérine  picrocarminatée,  tous  les  noyaux  se 
colorent  en  rose  et  la  teinte  s'accentue  de  plus  en  plus  au 
fur  et  à  mesure  que  les  cellules  séjournent  depuis  plus 
longtemps  dans  la  glycérine  picrocarminatée.  Les  noyaux 
sont  toujours  délimités  par  un  contour  fort  nettement 
marqué  et  assez  régulier;  ils  renferment  un  nombre  con- 
sidérable de  nucléoles  ;  on  en  compte  en  moyenne  six  à 
dix,  quelquefois  jusqu'à  18  et  20  dans  un  même  noyau. 
Ces  nucléoles  de  forme  irrégulière,  foncés  et  formés  d'une 
substance  très-réfringente,  se  chargent  fortement  de  ma- 
tière colorante.  Ils  paraissent  distribués  sans  aucun  ordre 
dans  la  substance  du  noyau.  Le  corps  de  la  cellule  ne 
prend  pas  du  tout  le  carmin. 


(  '^^y  ) 

Si,  au  lieu  de  traiter  par  le  picrocarminate,  on  colore  par 
l'hémaloxyline,  les  noyaux  prennent  une  belle  teinte  bleue 
violacée  pâle;  les  nucléoles  se  teintent  en  bleu  foncé. 

On  obtient  aussi  de  fort  belles  préparations,  en  traitant 
la  membrane  blastodermique  par  l'acide  osmique  et  puis 
par  le  picrocarminate  ou  Thématoxyline.  Les  contours  des 
cellules  sont  alors  beaucoup  moins  apparents;  l'on  parvient 
cependant  avec  quelque  attention  à  les  apercevoir  sous 
la  forme  de  lignes  nettes,  mais  très-fines.  Dans  ces  prépara- 
lions  les  noyaux  se  colorent  en  rouge  vif  par  le  carmin, 
en  violet  par  l'bématoxyline,  et  les  nucléoles  sont  tout 
aussi  distincts  que  dans  les  préparations  au  nitrated'aigent. 
Les  corps  des  cellules  pVésentent  à  leur  périphérie  une 
couche  corticale  claire  dépourvue  de  granulations  et  une 
niasse  médullaire  finement  granuleuse,  dans  laquelle  on 
distingue,  indépendamment  d'un  pointillé  très-fin,  qui  se 
remarque  dans  toute  l'étendue  du  corps  cellulaire,  des  gra- 
nules de  dimensions  assez  considérables,  très-réfringents, 
se  colorant  en  noir  par  l'acide  osmique.  ils  forment  ensem- 
ble un  anneau  irrégulier  mais  fort  apparent  autour  du 
noyau,  fis  se  trouvent  toujours  à  quelque  distance  du  noyau  : 
la  partie  du  corps  cellulaire  qui  avoisine  immédiatement 
le  noyau  est  claire  et  dépourvue  de  granulations. 

Cette  composition  des  celhdes  ectodermiques  on  la  re- 
connaît même  dans  des  préparations  fraîches,  surtout  si  on 
les  examine  dans  l'humeur  aqueuse  légèrement  acidulée 
d'acide  acétique.  Par  l'alcool  absolu  on  dissout  les  cor- 
puscules réfringents;  ce  fait,  joint  à  la  faculté  qu'ils  pos- 
sèdent de  se  colorer  en  noir  par  l'acide  osmique,  démontre 
leur  nature  graisseuse.  Sauf  l'altération  résultant  de  cette 
disparition  des  granules  réfringents^  les  caractèies  des  cel- 
lules et  des  noyaux  se  conservent  fort  bien  dans  les  pré- 

2™*'  SÉRIE,  TOME  XL.  47 


(  750  ) 
paralions  à  l'alcool.  Si  Ton  veut  employer  ce  procédé  il 
faut  ouvrir  la  vésicule  blastodermique  dans  l'humenr 
aqueuse,  avant  de  traiter  par  l'alcool.  Si  on  laisse  séjourner 
la  membrane  dans  le  liquide  de  Mûller  après  avoir  traité 
au  préalable  par  l'acide  osmique,  on  obtientaussi  au  moyen 
du  picrocarminate  et  de  l'bémaloxyline  de  fort  belles  pré- 
parations; mais  tous  les  nucléoles  disparaissent  par  un 
séjour  quelque  peu  prolongé  dans  le  liquide  de  Millier  el 
sous  l'influence  du  picrocarminate  les  noyaux  prennent 
alors  une  belle  teinte  rose  uniforme. 

Dans  les  préparations  au  nitrate  d'argent  colorées  soil 
par  le  picrocarminate,  soil  par  rbémaloxyline,  on  remarque 
çà  et  là,  au  milieu  des  aulies,  ceitaines  cellules  notable- 
ment plus  petites,  plus  ou  moins  arrondies,  dont  le  corps 
granuleux  se  colore  légèrement  par  les  malières  coloiantes, 
mais  qui  se  distinguent  surtout  en  ce  qu'elles  possèdent 
un  petit  noyau  ovalaire,  très-opaque  et  fortement  coloré 
en  bleu.  La  teinte  de  ce  bleu  est  toute  diiférente  de  celle 
que  présentent  les  noyaux  de  la  grande  majorité  des  cel- 
lules. Ces  cellules  ectodermiques  à  caractères  particuliers 
et  qui  se  distinguent  surtout  par  leur  petit  noyau  vive- 
ment coloré,  se  trouvent  toujours  accolées  deux  à  deux. 
Ensemble  elles  forment  une  figure  qui  lappelle  certains 
nœuds  de  cravate. .En  cbercliant  bien  on  trouve  aussi  çà  et 
là  des  cellules  allongées  dans  un  sens  qui,  au  lieu  d'un  grand 
noyaiî  ovalaire,  rose  ou  bleu  violacé,  renferment  deux  petits 
noyaux  en  forme  de  bâtonnets,  situés  à  quelque  distance 
l'un  de  l'autre  et  vivement  colorés  en  rouge  ou  en  bleu. 
Ces  cellules  sont  des  cellules  ectodermiques  en  voie  de 
division  et  les  cellules  colorées  à  |)etils  noyaux  ovalaires 
distribuées  deux  à  deux  au  milieu  des  autres  sont  de 
jeunes  cellules  qui  viennent  d'être  produites  par  division 
d'une  cellule  unique. 


(  731  ) 

La  question  de  la  division  des  cellules  et  des  noyaux  esi. 
entrée  dans  une  toute  nouvelle  phase  à  la  suite  des  récents 
travaux  de  Aueibach,  de  Biilschli  et  surtout  par  les  re- 
cherches étendues  que  Slrashurger  vient  de  faire,  pour 
résoudre  cette  question,  sur  une  foule  de  végétaux  appar- 
tenant aux  types  les  plus  divers.  Depuis  les  recherches  de 
Hofmeister  les  botanistes  admettaient  généralement  que 
le  noyau  d'une  cellule  mère  ne  donne  pas  naissance  aux 
noyaux  des  cellules  qu'elle  engendre  en  se  divisant;  ils 
pensaient,  au  contraire,  que  les  noyaux  des  cellules  en- 
gendrées sont  des  éléments  de  formation  nouvelle.  Au 
contraire  les  zoologistes  admettaient  que  le  noyau  se  divise 
en  s'étranglant  circulairement  et  que  la  division  des  noyaux 
précède  toujours  la  division  delà  cellule  elle-même. 

Bûtschli  vient  de  démontrer  que  dans  l'œuf  aussi  bien 
que  dans  les  globes  de  segmentation  du  Cucullamis  et 
dans  les  cellules  mères  des  spermatozoïdes  de  la  Blatta 
orientaiis  la  division  des  noyaux  se  fait  tout  autrement 
qu'on  ne  l'avait  supposé. 

En  même  temps  Slrashurger  démontrait  que  chez  les 
végétaux  les  noyaux  des  cellules  se  multiplient  d'après  un 
procédé  fort  semblable  à  celui  que  Bûtschli  décrivait 
d'après  des  observations  faites  dans  le  règne  animal. 

Slrashurger  lui-même  a  fait  des  recherches  sur  la  mul- 
tiplication des  noyaux  durant  le  fractionnement  progressif 
de  l'œuf  de  la  Phallusia  mammUlata  et  il  a  conclu  de  ses 
observations  à  l'identité  des  phénomènes  qui  amènent  la 
division  du  noyau  des  cellules  dans  les  deux  règnes. 
D'après  les  recherches  de  ces  deux  observateurs  le  noyau 
commence  par  s'allonger  et  prendre  une  forme  de  fuseau 
(Bûtscbli)  ou  de  tonneau  (Slrashurger). Ce  noyau  présente 
alors  une  striation  longitudinale  et,  suivant  la  zoneéquato- 


(  732  ) 
riale  de  ce  noyau  modifié,  on  remarque  l'existence  d'une 
couche  granuleuse  [aequatoriale  K'ôrnerzone  Bûtschli  ; 
Kernplatte  Strasbûrger  ).  Cette  striation  est  déterminée 
par  l'existence  de  fibrilles  qui  traversent  le  noyau  d'un 
pôle  à  l'autre.  Les  granules  de  la  zone  équatoriale  ne  sont 
que  des  épaississements  des  fibrilles  nucléaires  (Bûtschli). 
La  zone  équatoriale  se  divise  alors  en  deux  plaques  qui 
s'éloignent  aussitôt  l'une  de  l'autre  et  finissent  par  attein- 
dre les  pôles  de  l'ancien  noyau.  Ces  plaques  sont  formées 
de  granules  ou  de  bâtonnets  et  des  fibrilles  (Kernfàden 
de  Strasbûrger)  les  relient  l'une  à  l'autre.  D'après  Bûtschli 
il  se  formerait  autour  de  chaque  plaque  devenue  terminale 
un  espace  clair  qui  deviendrait  le  noyau  de  la  cellule  fille, 
tandis  que  la  plaque  elle-même  deviendrait  le  nucléole; 
d'après  Strasbûrger,  au  contraire ,  la  plaque  elle-même  de- 
viendrait le  noyau  dérivé.  Quant  à  la  substance  qui  unit  les 
deux  plaques  et  qui  provient  de  l'ancien  noyau,  elle  prend 
l'apparence  d'un  ruban,  réunissant  les  deux  plaques  ter- 
minales, et,  d'après  Strasbûrger,  il  se  forme  au  milieu  de 
ce  ruban  qui ,  dans  quelques  cas,  s'élargit  considérable- 
ment, un  nouvel  amas  de  granulations  qu'il  appelle  Zell- 
platte.  Celle-ci  donnerait  naissance  à  la  cloison  de  sépara- 
tion des  deux  cellules  filles  et  une  partie  de  la  substance 
nucléaire,  interposées  entre  les  plaques  terminales,  se  con- 
fondrait avec  la  couche  corticale  (Hautschicht)  du  proto- 
plasme des  nouvelles  cellules. 

Voici  en  résumé  les  résultats  de  mes  recherches  sur  la 
multiplication  des  cellules  de  l'ecloderme  du  Lapin. 

Les  premiers  phénomènes  qui  annoncent  la  division  pro- 
chaine d'un  noyau  ont  leur  siège  en  partie  dans  le  noyau 
lui-même,  en  partie  dans  le  corps  de  la  cellule.  Le  con- 
tour du  noyau  devient  très-peu  distinct;   la   forme   du 


(  753  ) 
noyau  devient  irrégulière;  peut-être  cela  est-il  du  à  des 
mouvements  amœboïdes  exécutés  par  le  noyau.  Les  nu- 
cléoles disparaissent.  Bientôt  la  substance  du  noyau  se 
divise  en  deux  parties  :  l'une  claire  et  transparente  qui  ne 
se  colore  ni  par  la  carmin,  ni  par  l'hémaloxyline,  c'est  le 
suc  nucléaire;  l'autre,  également  homogène  mais  s'imprc- 
gnant  vivement  parles  matières  colorantes  forme,  au  milieu 
du  noyau,  un  grumeau  irrégulier:  c'est  Vessence  nucléaire. 
Le  noyau  prend  une  forme  ovalaire  et  son  grand  axe 
s'allonge  rapidement.  Le  suc  nucléaire  s'amasse  aux  deux 
pôles  de  l'ancien  noyau;  l'essence  nucléaire  s'accumule 
au  milieu  pour  y  former  une  plaque  équatoriale  [aequc- 
toriale  Kornerschichl  de  Biitschli;  Kernplatte  de  Stras- 
burger).  Celle-ci  a  des  faces  bosselées  et  par  conséquent 
irrégulières.  Elle  paraît  formée  par  des  globules  fort  ré- 
fringents tantôt  ovoïdes,  tantôt  allongés  en  forme  de 
bâtonnets.  Cette  plaque  se  colore  fortement  en  rouge  par 
le  picrocarminate;  en  bleu  très-foncé  par  Thématoxyline 
aussi  bien  après  le  traitement  préalable  par  le  nitrate  d'ar- 
gent qu'après  l'action  de  l'acide  osmique.  Elle  se  voit  aussi 
très-distinctement  dans  des  préparations  faites  au  moyen 
de  l'alcool  absolu  (méthode  de  Strasburger)  ou  de  l'acide 
acétique  (méthode  de  Biitschli).  Mais  je  n'ai  jamais  vu, 
quelle  que  soit  la  méthode  employée,  qu'à  ce  moment 
le  noyau  fût  strié  longitudinalement  ou  traversé  [)ar 
des  fdaments.  En  même  temps  que  ces  moditications 
se  produisent  dans  le  corps  nucléaire,  des  changements 
concomitants  ont  leur  siège  dans  le  protoplasma  cellu- 
laire. D'abord  la  cellule  s'allonge  dans  le  sens  de  l'axe  du 
noyau  modifié.  En  même  temps  elle  s'épaissit  et  fait  saillie 
dans  la  cavité  blastodermique;  elle  devient  plus  granu- 
leuse et  se  colore  légèrement  par  les  matières  colorantes. 


(  73i  ) 
tandis  que  le  corps  des  cellules  voisines  ne  se  colore  pas  du 
tout.  C'est  même  cet  aspect  granuleux  et  cette  coloration 
qui  attirent  immédiatement  l'attention  sur  les  cellules  en 
voie  de  division. 

Le  noyau  devient  fusiforme,  puis  rubané.  A  ses  deux: 
pôles  s'accumule,  dans  le  corps  de  la  cellule,  un  peu  de 
substance  claire,  très-tinement  granuleuse.  Est-ce  cette 
substance  que  j'ai  appelée  |)lus  haut  le  pronucleus  engen- 
dré? Cet  amas  polaire  devient  le  centre  d'une  figure  étoi- 
lée  qui  se  développe  dans  le  protoplasme  cellulaire  et 
indique  de  la  façon  la  plus  manifeste  l'attraction  exercée 
par  les  pôles  de  Tancien  noyau  sur  la  substance  protoplas- 
mique  de  la  cellule.  Ces  figures  étoilées  ont  été  observées 
dans  des  globes  vitellins  en  voie  de  division,  par  Kovva- 
levvsky,  par  Fol,  Flemming,  Auerbach,  Bûtschli,  Schrôn, 
QEIIacher  et  Strasburger.  Jusqu'à  présent  elles  n'ont  pas 
encore  été  signalées,  que  je  sache,  dans  des  cellules  ordi- 
naires. 

La  plaque  granuleuse  équatoriale  se  divise  maintenant  en 
deux  moitiés,  en  deux  disques  nucléaires  parallèles,  qui 
s'éloignent  l'un  de  l'autre,  comme  s'ils  se  repoussaient. 
Tant  qu'ils  sont  peu  distants  on  voit  que  les  deux  plaques 
sont  reliées  entre  elles  par  quelques  filaments  (A''er«/'«(/en 
de  Strasburger)  qui  paraissent  être  projetés  par  quelques- 
uns  des  granules  qui  constituent  les  disques  nucléaires. 
Ces  granules  sont  souvent  ovoïdes,  parfois  en  forme  de 
bâtonnets.  Quelques-uns  sont  étirés  en  un  filament  à  l'un 
de  leurs  pôles.  Mais  dès  que  les  deux  disques  s'éloignent 
l'un  de  l'autre,  ces  filaments  sont  retirés  et  se  fondent  dans 
la  substance  des  disques.  Ces  disques  ont  leurs  faces  bosse- 
lées, ce  qui  dépend  de  ce  qu'ils  sont  formés  de  granules 
agglutinés.  Ils  ne  sont  pas  non  plus  fort  réguliers. 


(  ^•">'>  ) 

Pendant  que  ces  phénomènes  s'accomplissent  le  noyau 
prend  la  forme  d'une  bandelette  à  bords  parallèles.  Entre 
les  deux  disques  s'accumule  le  suc  nucléaire  (très-faible- 
ment   teinté  en   rose   par   le  picrocarminate),  qui  avait 
d'abord  été  refoulé  aux  pôles  du  noyau,  f.es  disques  finis- 
sent par  gagner  les  extrémités  de  la  bandelette  nucléaire 
et  se  mettre  en  contact  immédiat  avec  le  petit  amas  clair 
qui  s'est  formé  aux  pôles  de  l'ancien  noyau,  au  centre  des 
figures  étoilées  (pronocleus  engendré?).  Le  corps  de  la 
cellule    montre    un   commencement  d'étranglement  cir- 
culaire. Cet  étranglement  n'intéresse  (pie   le  corps  de  la 
cellule;  il  n'envahit  jamais  la  bandelette  claire  qui  est 
le  reste  de  l'ancien  noyau  et  qui  se  constitue  maintenant 
des  deux  disques  polaires,  colorés  en  rouge  ou  en  bleu,  et 
d'une  pièce  intermédiaire  peu  ou  point  colorée.  Il  se  pro- 
duit au  milieu  de  cette  pièce  intermédiaire,  au  niveau  de 
l'étranglement  cellulaire  une  différenciation  de  substance. 
Le  nitrate  d'argent  y  fait  apparaître  des  points  noirs  de 
plus  en  plus  nombreux.  Ces  points  finissent  par  s'aligner  et 
par  former  la  cloison  de  séparation  des  deux  cellules  en- 
gendrées. Les  parties  de  la  pièce  intermédiaire  adjacentes 
à  la  cloison  se  confondent  de  plus  en  plus  avec  les  zones 
corticales  des  cellules  engendrées;  la   partie  adjacente  au 
disque  polaire  devient,  au  contraire,  granuleuse  et  se  fond 
peu  à  peu  dans  la  masse  médullaire  de  la  cellule.  Le  disque 
polaire  devient  le  noyau  de  la  cellule  engendrée;  il  paraît 
s'agrandir  aux  dépens  de  la  petite  masse  claire  à  laquelle 
il  s'est  accolé,  dès  que  les  corpuscules  qui  le  formaient 
se  sont  fusionnés  en  une  masse  homogène;  celle-ci  prend 
une  forme  ovalaire  de  plus  en  plus  régulière  ;  la  substance 
qui  constitue  les  jeunes  noyaux   se  colore  de  moins  en 
moins  par  le  carmin   et  par  l'hématoxyline  au  fur  et  à 


(  736  ; 

mesure  que  la  cellule  grandit;  le  corps  cellulaire  ne  se 
colore  bientôt  plus  du  tout.  ï.a  cellule  s'étale  et  s'aplatit. 

Les  cellules  de  l'endoderme  se  multiplient  également 
par  division  et  le  phénomène  suit  exactement  la  marche 
que  je  viens  d'exposer  en  décrivant  la  multiplication  des 
cellules  de  l'ectoderme.  Je  m'abstiens  de  faire  ici  aucune 
réfl  'xion  sur  les  faits  que  je  viens  de  décrire.  Je  veux  me 
bornera  exposer  dans  ce  résumé  les  résultats  de  mes  ob- 
servations. ^ 


Le  squelette  de  la  Baleine  fossile  du  Musée  de  Milan  ;  par 
M.  P.-J.  Van  Beneden,  membre  de  l'Académie. 

Dans  les  deux  séances  précédentes  l'Académie  a  bien 
voulu  recevoir  quelques  observations  critiijues  sur  deux 
genres  de  Cétacés  fossiles  des  Musées  de  Vienne  et  de  Linz, 
c'est-à-dire  le  genre  Pachijacanthus  et  le  genre  Aulocetus. 
Nous  avons  l'honneur  de  communiquer  aujourd'hui  une 
nouvelle  notice  sur  une  Baleine  fossile  du  Musée  de  Milan 
dont  les  vrais  caractères,  à  notre  avis,  avaient  été  mieux 
appréciés  par  Cortesi  et  par  Cuvier,  qui  en  ont  fait  men- 
tion au  commencement  de  ce  siècle,  que  par  les  natura- 
listes qui  s'en  sont  occupés  dans  ces  derniers  temps. 

Au  mois  de  novembre  1806  on  mit  au  jour,  sur  le  ver- 
sant oriental  du  monte  Puignasco,  à  une  hauteur  de  1800 
pieds  au-dessus  de  la  plaine,  un  squelette  presque  complet 
d'unCétacé  à  fanons,  qui  fut  décrit  et  (iguré  avec  soin  par 
Cortesi. 

Kn  1816  un  autre  squelette  plus  petit  fut  découvert  dans 
un  vallon  moins  élevé  et  décrit  par  le  même  naturaliste. 


(  >'">^  ) 

Le  squeletle  de  1806,  le  plus  beau  cl  le  plus  complet, 
est  un  tk'S  plus  précieux  ornements  du  beau  Musée  de 
Milan;  le  second  est  conservé  au  Musée  de  Parme.  On  est 
resté  quelque  temps  sans  savoir  ce  qu'il  était  devenu. 

Cortcsi  a  parlaitement  apprécié  les  affinités  de  ces  Ba- 
leines, en  les  comparant  aux  Balénoptères  d'aujourd'hui 
et  particulièrement  à  lu  petite  Balénoptère  de  la  mer  du 
Nord. 

Desmoulins  a  donné  le  nom  spécifique  de  B.  Cuvierii  à 

l'espèce  dont  le  squelette  est  à  Milan  et  qui  vient,  comme 

nous  venons  de  le  dire,  de  Monte  Puignasco,  et  de  Bal. 

^^jorfesii  à  l'espèce  dont  le  squelette,  aujourd'hui  au  Musée 

de  Parme,  a  été  trouvé  à  Montezago,  dans  le  Plaisantin. 

Desmoulins  croit  que  le  second  squelette  appartient  à 
une  espèce  distificte  parce  qu'il  est  plus  petit  de  taille 
(12  V2  pieds  au  lieu  de  21)  et  que  cependant  la  consoli- 
dation des  cartilages  intervertébraux  est  complète.  Nous 
ne  croyons  pas,  à  en  juger  par  les  ossements  fossiles 
d'Anvers,  que  ce  caractère  ait  assez  de  valeur  pour  justifier 
l'établissement  de  deux  espèces  distinctes. 

Dans  ses  Recherches  sur  les  ossements  fossiles  Cuvier 
consacre  tout  un  article  à  la  description  de  ces  Baleines  de 
Cortesi,  et  les  rapporte  comme  Cortesi  au  sous-genre  des 
Rorquals.  C'étaient  les  seuls  Balénides  fossiles  connus 
alors. 

Depuis  on  a  mis  au  jour  dans  diverses  localités  en  Ita- 
lie, même  à  Malte,  de  nombreux  restes  de  cétacés  à  fanons 
fossiles,  qui  sont  conservés  aujourd'hui  dans  les  Musées 
de  Turin ,  de  Bologne,  de  Florence  et  de  iXaples. 

Presque  partout  ces  ossements  de  Balénides  sont  mêlés 
avec  des  débris  de  Cétodontes,  de  Sirénides,  de  Phoques  et 
de  Squalodons. 


(  758  ) 

En  1865  le  professeur  Capellini  a  publié  un  intéressant 
mémoire  sur  un  squelette  découvert  en  1862  à  S.  Lo- 
renzo  in  Collina,  à  247  mètres  au-dessus  du  niveau  de 
l'Adriatique,  et  qu'il  a  rapporté  à  l'espèce  de  Cortesi. 

Dans  l'Ostéographie  des  Cétacés  vivants  et  fossiles  que 
je  publie  à  Paris,  avec  la  collaboration  de  M.  Paul  Gervais, 
j'ai  fait  mention  de  ces  fossiles  et  j'ai  cru  devoir  les  rap- 
porter au  genre  Plésiocète,  que  j'avais  établi,  pour  des 
Cétacés  fossiles  d'Anvers. 

Dans  ces  derniers  temps,  le  Docteur  J. -F.  Brandt  a  cru 
devoir  ériger  un  genre  nouveau  pour  cette  Baleine  de  Mi- 
lan, et  il  a  proposé  le  nom  de  Cetoteriophanes.  Nous  ver- 
rons plus  loin  que  c'est  une  omoplate  mutilée  qui  a  induit 
en  erreur  le  savant  naturaliste  de  Saint-Pétersbourg. 

Le  dernier  travail  sur  les  Balénides  fossiles  d'Italie  est 
du  professeur  Capellini.  Le  savant  naturaliste  de  Bologne  a 
fait  du  Rorqualus  Corlesii  l'objet  d'un  mémoire  nouveau 
cl  il  adopte  le  nom  de  Cetoteriophanes  Capetlinii  proposé 
par  M.  Brandt. 

Nous  allons  démontrer  dans  les  pages  qui  suivent,  que 
les  deux  squelettes  de  Baleine  de  Cortesi ,  ainsi  que  le 
squelette  de  Bologne,  décrit  par  Capellini,  ne  présentent 
point  des  différences  qui  justifient  l'établissement  de  plus 
d'une  espèce;  que  le  genre  Cetoteriophanes  ne  repose 
(jue  sur  une  erreur  d'observation,  et  que  nous  ne  voyons 
pas  de  raison  de  séparer  génériquement  ces  Balénides  du 
genre  Plésiocète. 

Le  magnifique  squelette  du  musée  de  Milan,  que  Cor- 
tesi et  après  lui  Cuvier  ont  décrit  el  figuré,  est  à  peu  près 
complet.  Dans  ces  derniers  temps,  M.  Cornalia,  le  savant 
directeur  de  ce  riche  musée,  l'a  fait  nelloyer  avec  une  rare 


(  759  ) 
habileté  el  les  divorscs  pièces,  y  compris  même  la  tête, 
sont  aussi  propres  à  rétudo  que  si  elles  provenaient  d*un 
animal  vivant. 

On  peut  en  juger  par  la  conservation  de  la  tète  dont 
nous  reproduisons  ici  la  belle  photographie,  que  M.  Cor- 
nalia  a  bien  voulu  faire  exécuter  à  notre  demande. 

Ce  squelette  a  21  pieds  de  long,  c'est-à-dire,  6"\  81  (1). 

La  tète  ressemble  beaucoup  à  celle  des  Balénoptères 
vivantes  comme  l'ont  ditCortesi  et  après  lui  Cuvier;  toutes 
les  proportions  sont  les  mêmes,  aussi  bien  celles  du 
crâne  que  celles  de  la  face;  le  maxillaire  inférieur  même 
ne  diffère  guère  et  l'on  peut  dire  avec  assurance  que  les 
fanons  devaient  être  conformés  comme  ceux  des  Rorquals 
d'aujourd'hui. 

Il  y  a  toutefois  une  différence  dans  le  volume  relatif  de 
la  boîte  crânienne;  le  crâne  est  plus  petit  que  dans  les 
espèces  vivantes.  Comme  pour  les  mammifères  terrestres, 
le  cerveau  semble  également  avoir  augmenté  de  volume 
chez  ces  Thalassothériens,  depuis  l'époque  quaternaire. 

L'occipital  s'étend  en  avant  jusqu'aux  apophyses  mon- 
tantes des  maxillaires;  il  forme  à  lui  seul  toute  la  voûte 
du  crâne.  Les  deux  crêtes  temporales  vont  se  joindre  au- 
dessus  du  frontal,  et  l'espace  qui  reste  entre  elles  s'élargit 
brusquement  en  arrière;  l'occipital  est  déprimé  sur  la 
ligne  médiane  jusqu'au  trou  occipital,  et  de  chaque  côté 
il  est  légèrement  bombé.  On  voit  tout  le  trou  occipital 
quand  la  tête  est  placée  debout.  La  ligure  1  la  représente 
dans  cette  situation. 

Lescondyles  articulaires  de  l'occipital  sont  très-saillants 


(1)  L'autre  squelette  de  Cortesi  n'a  que  4™ ,05  (12  pieds,  5  pouces)  et 
celui  dePodesta,coDservé  égalemenl  à  Parme,  7'°,50. 


(  740  ) 
et,  à  côlé  d'eux,  la  surface  de  roccipital  est  fort  échancrée. 
I/occiput  se  termine  en  pointe  en  avant. 

Les  condyles  de  l'occipal  indiquent  que  la  tête  s'articule 
aux  premières  cervicales  comme  dans  les  vraies  Baleines 
en  formant  un  angle  avec  la  colonne  vertébrale.  Sous  ce 
rapport  les  Rorquals  fossiles  semblent  ditïérer  plus  ou 
moins  des  vivants  et  se  rapprocher  davantage  des  Baleines 
à  longs  fanons. 

Les  os  frontaux  sont  très-dé veloppés,  fort  larges  en  de- 
dans et,  comme  le  fait  remarquer  Cuvier,  d'après  la  figure 
de  Cortesi,  le  bord  postérieur  est  en  courbe  concave  tan- 
dis que  le  bord  antérieur  est  en  courbe  convexe;  on  peut 
dire  que  dans  les  espèces  vivantes  ces  bords  sont  presque 
droits,  de  manière  que  la  partie  du  frontal,  qui  forme  la 
voûte  de  l'orbite,  est  tronquée.  En  arrière  et  en  dehors  le 
frontal  se  termine  en  une  pointe  arrondie,  qui  va  à  ren- 
contre du  temporal. 

Le  diamètre  antéro-postérieur  de  la  fosse  temporale 
est  plus  grand  dans  ce  Rorqual  fossile  que  dans  les  espèces 
vivantes. 

Le  bord  antérieur  du  frontal  forme  une  courbe  convexe, 
au  lieu  d'être  droit  ou  concave;  aussi  le  frontal  comme  l'oc- 
cipital suffiraient-ils  pour  distinguer  ces  Balénoptères. 

Mais  de  tous  les  caractères  fournis  par  le  crâne,  le 
principal,  c'est  la  largeur  de  la  bande  du  frontal  qui  sépare 
l'occipital  des  os  nasaux,  et  la  longueur  de  ces  derniers.  Ces 
os,  au  lieu  de  former  un  coin,  s'allongent  d'une  manière 
excessive,  se  perdent  en  haut  entre  les  maxilliaires  et  les 
frontaux,  et  s'étendent  en  avant  sur  la  même  ligne  que  le 
bord  antérieur  des  frontaux.  C'est  dans  cette  disposition 
étroite  et  allongée  des  os  du  nez,  que  nous  trouvons  un 
des  motifs  qui  justifient  leur  établissement  en  un  genre 


(741  ) 

particulier.  Dans  la  Balaenoplera  rnusculiis  le  bord  anté- 
rieur des  frontaux  s'étend  beaucoup  au-devant  des  nasaux. 

On  peut  conclure  de  la  fusion  des  os  dans  cette  région 
et  surtout  des  os  du  nez,  que  ces  animaux  sont  parfaite- 
ment adultes  malgré  leur  petite  taille. 

La  face  inférieure  du  frontal  présente  aussi  des  carac- 
tères propres.  Dans  les  espèces  vivantes  le  canal  du  nerf 
optique  est  placé  vers  le  milieu  de  l'os,  tandis  qu'ici  il  est 
situé  le  long  du  bord  postérieur,  ce  qui  indique  que  le 
point  oii  le  nerf  optique  prend  son  origine,  est  plus  en 
arrière  que  le  bord  postérieur  du  frontal  ;  il  doit  se  diriger 
d'arrière  en  avant  au  lieu  de  se  diriger  directement  en 
dehors. 

Le  frontal  de  cette  Balénoptère  se  distingue  donc  de 
celui  des  espèces  vivantes  par  les  courbures  des  bords  anté- 
rieur et  postérieur,  par  le  prolongement  en  arrière,  ainsi 
que  par  la  situation  reculée  de  la  gouttière  du  nerf  optique. 

Les  os  nasaux  sont  fort  longs  et  peu  larges;  ils  se  ter- 
minent en  arrière  par  des  lamelles  en  dedans  de  la  branche 
montante  du  maxillaire.  En  avant  ces  os  sont  tronqués. 

M.  Brandt  répètece  qu'avait  dit  Cuvier,que  les  os  nasaux 
manquent  dans  le  squelette  de  i^Jilan.  On  peut  voir,  au 
contraire,  que  ces  os  sont  en  place,  dans  le  dessin  que  nous 
reproduisons  ici  d'après  une  photographie. 

La  tète  n'était  pas  suffisamment  nettoyée  quand  Cortesi 
en  a  donné  la  description  et  nous  ne  sommes  pas  étonné 
que  Cuvier  ait  pu  dire,  en  s'appuyant  sur  les  observations 
dunaturaîiste  italien,  que  les  os  propres  du  nez  avaient  dis- 
paru. Il  les  a  cru  absents,  parce  qu'ils  ne  sont  pas  disposés 
tout  à  fait  comme  dans  les  espèces  vivantes.  Les  jugaux 
manquent  et  cela  se  conçoit  aisément,  si  l'on  songe  que 
le  squelette  a  été  couvert  assez  longtemps  par  la  mer  pour 


(  lit  ) 

que  des  huîtres  aient  pu  s'y  établir  et  s'y  développer  cora- 
plétenient.  Ce  squelette  étant  resté  entier  avec  les  mem- 
bres et  les  côtes,  il  faut  en  conclure  qu'il  était  échoué  dans 
une  crique,  à  l'abri  des  courants  et  de  la  dent  des  grands 
carnassiers.  Nous  avons  vu  des  huîtres  encore  en  place 
sur  les  os. 

Les  inlermaxillaires  qui  sont  fort  distincts  se  terminent 
à  la  hauteur  des  os  nasaux. 

Le  maxillaire  s'élargit  en  arrière  et,  à  la  hauteur  des 
nasaux,  il  forme  au-devant  du  frontal  une  apophyse  qui 
rappelle  la  disposition  de  cet  os  dans  les  vrais  Balé- 
nides.  Le  maxillaire  s'étend  sous  le  frontal,  comme  dans 
tous  les  Cétacés  à  fanons,  tandis  que  dans  les  Cétacés  à 
dents  il  passe  au-dessus  et  se  trouve  en  grande  partie 
caché. 

En  avant,  le  maxillaire  se  termine  en  pointe  sur  Tinter - 
maxillaire  qui  forme  seul  le  bout  du  rostre.  L'intcrmaxil- 
laire  nous  paraît  tronqué  au  bout. 

LesditTérencesprincipales,queronremarqueàlabasedu 
crâne,  résultent  de  ce  que  les  maxillaires  se  terminent  en 
arrière,  au-devant  du  frontal,  plus  brusquement  que  dans 
les  Rorquals  vivants;  de  ce  que  les  frontaux  ont,  comme 
nous  l'avons  dit  plus  baut,  leur  bord  externe  et  posté- 
rieur en  courbe  concave;  de  ce  que  la  fosse  temporale  est 
plus  grande  et  enfin  de  ce  que  l'arcade  zygomatique  se 
recourbe  fortement  en  dehors. 

A  la  face  inférieure  on  voit  aussi  fort  distinctement  que 
les  maxillaires  sont  un  peu  plus  larges  vers  le  milieu  de 
leur  longueur  (jue  dans  les  espèces  de  la  nature  actuelle. 

Un  os  important  pour  la  distinction  des  genres  et  des 
espèces,  c'est  la  caisse  tympanique.  Il  est  encore  en  place 
dans  le  squelette  de  iMilan.  Nous  lui  trouvons  à  peu  près 


(  743  ) 
les  dimensions  de  la  caisse  de  la  Balaenoptera  rosfrala. 
Elle  est  de  forme  ovale,  à  surface  exlerne  régulièromenl 
arrondie  et  affeclant  l'aspect  d'un  caillou  roulé.  Ce  n'est 
pas  une  caisse  de  Baleine,  puisqu'elle  n'est  pas  compri- 
mée; ce  n'est  pas  non  plus  une  caisse  de  Balénoptère, 
puisqu'elle  n'a  pas  son  bord  comprimé;  elle  se  rapproche 
le  plus  de  celles  des  Plésiocèles.  M.  Capellini  a  donné  une 
bonne  figure  de  cet  os  dans  son  dernier  mémoire,  pi.  If 
tig  8. 

L'apophyse  que  nous  désignons  sous  le  nom  de  masloïde, 
dont  le  sillon  qui  la  loge  est  toujours  si  bien  marquée  dans 
le  temporal,  est  droite,  fort  épaisse,  un  peu  élargie  à  un 
des  bonis  et  longue  de  7  centimètres  à  peu  près.  Nous  en 
trouvons  de  semblables  parmi  les  ossements  d'Anvers. 
M.  Capellini  a  donné  une  tigure  de  cette  apophyse  dans  son 
premier  mémoire,  pi.  H,  fig.  5  et 4. 

Un  des  os  les  plus  importants  pour  la  distinction  des 
genres  et  des  espèces,  est  le  maxillaire  inférieur.  Cet  os 
se  termine  en  avant  sans  se  tordre  sur  lui-même,  et  con- 
serve une  largeur  assez  grande;  celte  partie  antérieure  de 
l'os  reste  dans  une  position  verticale  quand  il  esl  en  place. 

Nous  avons  compté  sept  orifices  provenant  du  canal 
dentaire  le  long  du  bord  et  deux  autres  en  dehors. 

Le  maxillaire  se  termine  en  avant  en  présentant  l'échan- 
crure  ordinaire  du  maxillaire  des  Myslicètes.  Le  bord  in- 
féi'ieur  ne  présente  pas  le  sillon  des  Baleines  véritables. 
En  arrière  cet  os  se  termine  par  un  condyle,  dont  la  surface 
articulaire  est  séparée  par  une  échancrure  profonde  pour 
le  passage  du  nerf  maxillaire  inférieur,  qui  pénètre  par 
l'orifice  postérieur  du  canal  dentaire. 

La  surface  articulaire  occupe  la  partie  postérieure  du 
condyle  comme  dans  Its  Balénoptères,  plutôt  que  la  partie 


(  744  ) 
supérieure  comme  dans  les  Baleines.  La  capsule  articu- 
laire, destinée  à  recevoir  ce  condyle,  doit  être  placée  plus 
en  arrière  et  moins  verticalement  que  dans  les  vrais  Mys- 
ticètes.  L'apophyse  coronoïde  est  développée  également 
comme  dans  les  Rorquals  vivants;  elle  en  a  la  courbure 
aussi  bien  que  la  hauteur.  Nous  ferons  remarquer  que  la 
liguredu  maxillaire  inférieur,  publiée  par  M.  Brandt,donne 
l'idée  la  plus  fausse  des  caractères  essentiels  du  condyle. 
On  pourra  s'en  assurer  en  comparant  le  maxillaire  que 
nous  figurons  d'après  une  photographie,  avec  le  dessin 
publié  par  ce  savant. 

En  résumé,  le  maxillaire  inférieur  est  fort  peu  courbé; 
il  ne  se  rétrécit  guère  au  bout,  ni  ne  se  tord  sur  lui-même 
comme  dans  les  Baleines  proprement  dites;  son  apophyse 
coronoïde  est  développée  comme  dans  les  Balénoptères 
et  Ton  peut  en  dire  autant  du  condyle  articulaire. 

Cortesi  figure  un  maxillaire  inférieur  fortement  courbé 
et  on  peut  se  demander  si  cet  os  provient  du  même  animal 
qui  a  les  maxillaires  presque  droits.  On  sait  que  sous  ce 
rapport  il  y  a  des  différences  notables  dans  les  genres 
vivants.  Aussi  s'il  fallait  s'en  rapporter  exclusivement  à 
cette  mandibule,  figurée  par  Cortesi,  pi.  !V,  fig.  1 ,  fau- 
drait-il la  rapporter  plutôt  à  une  Megaptera  qu'à  un  Plé- 
siocète. 

La  colonne  vertébrale  est  presque  complète.  !1  y  a  41  ver- 
tèbres. 

Les  sept  cervicales  sont  toutes  fort  bien  conservées. 
Elles  diffèrent  peu  entre  elles  par  leur  diamètre  antéro- 
postérieur.  L'axis  est  un  peu  plus  fort  toutefois  que  l'atlas, 
ainsi  que  la  septième  de  cette  région. 

L'atlas  mesure  en  hauteur  18  centimètres,  en  largeur 
i29  centimètres.  Ces  dimensions  sont  à  peu  près  celles  de 


(  743) 
l'atlas  de  la  Balaenoptera  rostrata.  Les  apophyses  trans- 
verses sont  étroites  et  s'insèrent  vers  le  milieu  de  la  hau- 
teur de  Tarcneural.  Le  canal  spinal  est  fort  large  surtout 
à  sa  partie  inférieure. 

L'atlas  du  squelette  de  Parme,  dont  M.  Slrohel  a  bien 
voulu  m'envoyer  un  dessin ,  a  les  apophyses  Iransverses 
plus  massives;  elles  prennent  naissance  un  peu  plus  haut. 
L'atlas  du  squelette  de  Milan  ressemble  plus  à  celui  de  la 
Balaenoptera  rostrata;  dans  le  squelette  de  Parme  l'atlas 
est  plus  semblable  à  celui  de  la  Balaenoptera  borealis. 
L'atlas  conservé  à  Turin,  et  que  M.  Brandt  a  figuré  plan- 
che XXI,  figures  7-10  ressemble  plus  au  dernier  qu'au 
premier.  L'atlas  du  squelette  de  Bologne  est  en  trop 
mauvais  état  pour  que  l'on  puisse  en  apprécier  les  vrais 
caractères. 

L'axis  a  près  de  40  centimètres  d'un  bout  de  l'apophyse 
transverse  à  l'autre;  en  hauteur  il  mesure  20  centimètres. 
Son  diamètre  antéro-postérieur  est  de  5  V2  centimètres; 
les  ailes  formées  par  les  apophyses  transverses  supérieures 
et  inférieures  sont  fort  larges  et  le  trou  qui  les  sépare 
est  relativement  petit.  La  surface  articulaire  postérieure 
mesure  en  travers  14  centimètres.  Cette  vertèbre  est  éga- 
lement conservée  au  squelette  du  Musée  de  Bologne;  mais 
quoiqu'elle  soit  un  peu  mieux  conservée  que  l'atlas,  on  ne 
pourrait  en  reconnaître  les  caractères  principaux.  Si  nous 
avions  à  comparer  cette  vertèbre  avec  l'axis  des  espèces 
vivantes,  c'est  avec  celui  de  la  Balaenoptera  rostrata  que 
nous  trouverions  le  plus  de  ressemblance. 

La  troisième  cervicale  a  une  épaisseur  de  0,034.  Le  canal 
spinal  mesure  en  travers  10  centimètres. 

Les  apophyses  transverses  supérieures  et  inférieures 
sont  très-délicates. 

^""^  SÉRIE,  TOME  XL.  48 


(  746  ) 

Nous  avons  pu  dessiner  tous  ces  os  de  grandeur  natu* 
relie,  mais  sans  leurs  apophyses. 

Nous  comptons  de  douze  à  treize  vertèbres  dans  la 
région  dorsale.  Les  apophyses  transverses  de  la  première 
dorsale  sont  le  plus  développées  et,  depuis  la  seconde  dor- 
sale, elles  diminuent  régulièrement  en  longueur  jusqu'à 
la  sixième.  A  la  septième  dorsale  les  apophyses  transverses 
s'allongent  de  nouveau  et  à  la  douzième  elles  ont  une 
longueur  double  de  celles  de  la  sixième. 

La  première  dorsale  a  ses  apophyses  transverses  à  peu 
près  horizontales;  mais  dans  les  suivantes  elles  s'élèvent 
successivement  comme  dans  les  baleines.  Le  canal  spinal 
est  beaucoup  plus  large  que  haut  dans  les  vertèbres  de 
cette  région;  mais  nous  n'oserions  assurer  que  les  arcs 
n'ont  pas  subi  une  pression  extérieure  après  leur  enfouis- 
sement; ce  qui  semble  démontrer  que  cette  déformation 
s'est  produite,  c'est  que  le  canal  n'est  plus  symétrique 
dans  quelques  vertèbres.  Les  facettes  articulaires  des  côtes 
sont  distinctes  en  avant  comme  en  arrière  du  corps  de  ces 
vertèbres.  On  les  voit  de  même  à  la  dorsale  suivante  dont 
le  diamètre  antéro-poslérieur  est  de  5  centimètres. 

A  la  huitième  dorsale  le  corps  de  la  vertèbre  change  de 
forme;  au  lieu  d'être  plus  large  que  haut  comme  dans 
les  premières  dorsales,  il  devient  plus  haut  que  large  et  se 
rétrécit  notablement  en  dessous. 

Le  corps  qui  n'a  que  5  centimètres  d'épaisseur  à  la  pre- 
mière dorsale,  ail  centimètres  à  la  huitième  dorsale. 

Les  vertèbres  de  la  région  lombaire  deviennent  carénées 
en  dessous;  elles  se  creusent  au  milieu  de  leur  longueur; 
le  diamètre  antéro- postérieur  augmente,  les  apophyses 
épineuses  sont  larges  et  hautes  et  les  zygapophyses  sont 
très-développées.  M.  Brandt  figure  quelques-unes  de  ces 


(  717  ) 
vertèbres  (pi.  XXI,  fig.  6-i  1),  d'après  des  dessins  que  Ini  a 
envoyés  M.  Cornalia.  Nous  ferons  remarquer,  en  passant, 
que  dans  les  mêmes  vertèbres  de  l'Aulocèle  du  Musée  de 
Linz,  les  zygapophyses  ont  également  un  fort  développe- 
ment. 

On  n'a  trouvé  qu'un  seul  os  du  sternum, de  forme  trian- 
gulaire, dit  Cuvier  en  parlant  du  squelette  de  Milan.  On 
sait  aujourd'hui  qu'il  n'y  a  jamais  plus  d'un  os  au  sternum 
chez  les  cétacés  à  fanons. 

Le  slernum  ressemble  par  la  forme  à  celui  de  la  Balaenop- 
teramusctdus  vivante  et  de  la  Balaenoptera  robusta  fossile. 
11  a  trois  lobes,  deux  de  côté  assez  larges  et  un  en  arrière 
terminé  en  pointe.  Les  latéraux  sont  un  peu  plus  longs  que 
les  autres.  Par  là  le  sternum  diffère  complètement  de  celui  de 
la  Balaenoptera  roslrata,  qui  a  la  forme  d'une  croix  latine. 

M.  Strobel  a  bien  voulu  nous  envoyer  un  dessin  du 
sternum  complet  du  Musée  de  Parme. 

Les  côtes  sont  toutes  en  place,  comme  on  peut  le  voir 
par  la  ligure  de  Cortesi.  On  en  compte  douze.  Elles  ont 
toutes  leur  col  depuis  la  seconde  jusqu'à  la  septième.  C'est 
la  quatrième  qui  a  le  col  le  plus  long.  La  première  est 
longue  de  0,36  en  suivant  la  courbe  et  large  à  son  extré- 
mité inférieure  de  0,0o5. 

Si  nous  comparons  la  côte  antérieure  à  la  première  de 
Balenoptera  rostrata ,  nous  trouvons  une  différence  no- 
table dans  la  courbure  à  la  partie  supérieure.  Cette  cour- 
bure est  telle  que  la  cavité  thoracique  doit  avoir  une  capa- 
cité notablement  plus  grande  que  chez  la  Balaenoptera 
rostrata.  C'est  un  caractère  qui  rapproche  l'espèce  fossile 
plutôt  des  Baleines  que  des  Balénoptères. 

Il  nous  a  paru  que  la  première  côte  de  gauche  du  sque- 
lette de  Milan,  n'est  pas  la  première;  elle  n'est  pas  assez 


(  7«  ) 
large  et  elle  porte  un  prolongement  en  haut.  La  pre- 
mière côte  de  gauche  serait  donc  perdue.  Il  y  aurait  douze 
ou  treize  côtes.  Par  le  nombre  des  côtes  la  Baleine  fossile 
de  Lombardie  se  rapprocherait  le  plus  des  deux  petites 
espèces  vivantes,  la  Balaenoptera  rostrata  et  la  borealis. 

L'omoplate  a  la  forme  d'un  éventail,  dit  Cortesi,  et  nous 
ajouterons  qu'elle  a  tous  les  caractères  de  Tomoplate  des 
Balénoptères.  Ainsi  elle  est,  comme  dans  ces  dernières, 
beaucoup  plus  étendue  d'avant  en  arrière  que  de  haut  en 
bas;  ceci  s'observe  chez  les  vraies  Baleines.  Cette  omoplate 
paraît  avoir  été  mutilée,  dit  Cuvier,  et  il  n'est  pas  possible, 
ajoute-t-il,  d'en  faire  une  comparaison  exacte  avec  nos 
espèces  vivantes. 

Cette  omoplate  du  squelette  de  Milan  est  en  effet  mu- 
tilée et  c'est  pour  n'avoir  pas  remarqué  cette  mutilation, 
que  M.  Brandt  a  commis  l'erreur  de  faire  de  cet  animal  le 
type  d'un  genre  nouveau.  Il  n'existe  ni  acromion  ni  apo- 
physe coracoïde  à  l'omoplate  de  Milan,  cela  est  vrai;  mais 
ces  apophyses  manquent-elles  naturellement?  Nous  ne  le 
pensons  pas  :  en  examinant  attentivement  le  bord  anté- 
rieur de  l'os,  on  voit  que  la  moitié  de  son  épaisseur  man- 
que et,  à  l'aide  d'une  restauration  habile,  on  a  dissimulé 
la  disparition  des  deux  apophyses  (1). 

Les  os  des  membres  diffèrent  beaucoup  de  ceux  des 
Balénoptères  vivantes  surtout  par  leurs  proportions;  l'hu- 
mérus n'a  pas  une  fois  et  demie  la  longueur  des  os  de 


(1,  Une  omoplate  du  Musée  de  Parme  est  complète.  Elle  a  ses  deux 
apophyses  parfaitement  développées,  semblables  à  celles  des  Balénoptères 
vivantes.  Comme  ces  squelettes  de  Parme  et  de  Milan  sont  si  semblables 
pour  tout  le  reste,  et  que  la  mutilation  de  l'omoplate  de  Milan  est  évi- 
dente, il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  qae  la  restauration  du  bord  antérieur  a 
été  faite  aveè  plus  d'habileté  que  d'exactitude. 


(  7i9) 
Tavant-bras.  Cet  os  est  remarquable  par  sa  forme  allongée, 
le  peu  (le  développement  des  tubérosités;  il  le  cède  sous 
ce  rapport  aux  humérus  de  tous  les  genres  vivants;  il  a 
37  centimètres  de  long  sur  iS  de  large.  Ce  sont  des  me- 
sures que  le  professeur  Strobel  a  bien  voulu  m'envoyer 
d'après  l'exemplaire  du  Musée  de  Parme  (1).  On  peut  voir 
dans  la  figure  de  Cortesi  les  proportions  des  os  du  bras 
comparativement  à  ceux  de  l'avant-bras. 

L'humérus  de  tous  nos  Plésiocètes  d'Anvers  présente 
également  une  longueur  très-grande  relativement  à  son 
diamètre  et  à  la  longueur  de  l'avant-bras.  Cet  os  dans  plu- 
sieurs Mysticètes  vivants  est  presque  aussi  large  que  long. 

Le  radius  est  droit,  fort,  massif;  il  a  presque  le  double 
de  la  largeur  du  cubitus.  Ce  dernier  présente  une  apophyse 
olécrânienne  très-développée  comme  dans  les  Balénoptères 
vivantes. 

Les  Métacarpiens  et  les  Phalanges  ne  nous  ont  rien 
offert  de  particulier.  La  main  semble  avoir  atteint  la  lon- 
gueur de  l'avant-bras. 

Comme  nous  l'avons  dit  plus  haut,  le  second  squelette 
décrit  et  figuré  par  Cortesi  et  dont  Desmoulins  a  voulu 
faire  le  type  d'une  autre  espèce,  est  déposé  au  Musée  de 
Parme. 

M.  Strobel  à  bien  voulu  me  donner  des  renseignements 
sur  cette  pièce  intéressante  après  l'avoir  fait  nettoyer  avec 
soin  et  après  l'avoir  débarrassée  de  la  roche  qui  l'encroûtait 
encore.  Il  a  eu  l'obligeance  de  m'envoyer  des  dessins  des 


(1)  Un  humérus  de  Balénoïde  du  sable  jaune  de  Plaisance,  provenant 
d'un  animal  de  25  mètres  de  long  d'après  M.  Strobel,  faisait  partie  de  la 
seconde  collection  de  Cortesi. 


(  750  ) 

principales  pièces  dont  quelques-unes  sont  parfaitement 
conservées. 

La  tête  est  assez  complète.  Les  maxillaires  supérieurs 
et  inférieurs  sont  en  place  ainsi  que  l'intermaxillaire;  les 
frontaux  sont  mutilés  près  du  bord  des  orbites.  Toute  la 
partie  postérieure  de  la  tête  est  conservée  avec  le  prolon- 
gement du  temporal,  et,  en  la  comparant  avec  celle  de 
Milan ,  il  nous  serait  difficile  de  dire  en  quoi  elle  diffère. 
Les  maxillaires  inférieurs  sont  aussi  droits  dans  le  der- 
nier que  dans  l'autre. 

Cortesi  assure  du  reste,  et  avec  raison,  que  la  forme  de 
la  tête  du  squelette  découvert  en  1816  (fig.  1  pi.  V)  est 
parfaitement  semblable  à  celle  de  son  premier  squelette. 

Le  professeur  Strobel  a  eu  Tobligeance  de  nous  envoyer 
également  un  croquis  de  la  tête  du  Musée  de  Parme,  appar- 
tenant au  squelette  recueilli  par  J.  Podesta  ,  et  il  ne  nous 
est  pas  possible  de  trouver  des  raisons  qui  justifient  l'éta- 
blissement d'une  espèce  distincte.  Nous  savons  que  le  sque- 
lette de  Podesta  a  7  mètres  50  centimètres. 

Nous  ferons  remarquer,  comme  nous  l'avons  dit  plus 
haut,  que  le  maxillaire  inférieur,  figuré  par  Cortesi, 
(Saggi...,  pi.  IV,  fig.  1)  qui  est  au  Musée  de  Parme,  est 
fortement  courbé  et  non  pas  droit  comme  plusieurs  autres 
et  particulièrement  celui  de  Milan.  Il  en  est  de  même  du 
maxillaire  inférieur  de  Turin  (1)  que  M.  Brandt  a  figuré 
pi.  XXI,  fig.  29.  Cette  courbure  paraît  aussi  prononcée 
que  dans  celui  de  Parme. 

A  Turin,  on  conserve  des  ossements  de  cette  même  Ba- 
leine; ils  ont  été  déterrés  à  Cortanzone  et  à  San  Lorenzo; 

(1)  Dessins  envoyés  par  M.  Gastaldi  à  M.  Brandi. 


(  m  ) 

les  verlèbres  ont  été  mises  au  jour  en  novembre  i862,  à 
la  Calunga,  près  de  la  station  de  San  Domiano.  Ces  osse- 
ments consistent  en  une  tête  assez  complète,  des  vertèbres, 
comme  nous  venons  de  voir,  des  côtes  et  des  os  du 
membre.  M.  Gastaldi  a  envoyé  des  dessins  de  ces  pièces  à 
M.  Brandt  qui  les  figure  pi.  XXI  en  les  rapportant  avec 
quelques  auteurs  à  une  espèce  distincte  de  celle  de  Milan. 
—  C'est  la  taille  qui  semble  avoir  décidé  ces  auteurs  et 
nous  ne  pouvons  partager  cet  avis.  Après  avoir  comparé 
os  par  os,  nous  ne  trouvons  absolument  aucun  caractère 
qui  justifie  cette  séparation.  La  pi.  XXI,  fig.  29,  des  Re- 
cherches  de  M.  Brandt  représente  deux  os  maxillaires  infé- 
rieurs et  non  des  côtes  (das  vordere  Bippenpaar)  comme 
il  est  dit  dans  l'explication  des  planches. 

Le  Musée  de  minéralogie  de  Turin  possède  une  tête 
assez  complète  avec  les  maxillaires  supérieurs  et  inférieurs, 
une  quinzaine  de  vertèbres  qui  se  rapprochent  de  la 
Balaenoptera  rostrata,  deux  lombaires  qui  sont  voisines 
du  Plesiocetus  Garopii,  des  vertèbres  d'une  petite  espèce 
du  même  genre,  puis  des  vertèbres  malades  ûeBalaenula 
qui  sont  soudées  entre  elles.  Ces  dernières  viennent  des 
environs  d'Asti. 

Nous  rapportons  au  même  animal  le  Borqual  de  Bo- 
logne que  notre  savant  confrère  Capellini  a  décrit  der- 
nièrement, sous  le  nom  de  Cetotheriophanes  Capellinii. 

Quand  nous  sommes  arrivé  à  Bologne  en  1874,  le  pro- 
fesseur Capellini  a  mis  le  plus  grand  empressement  a 
mettre  sous  nos  yeux  les  restes  de  l'animal,  qu'il  avait 
décrit  quelque  temps  auparavant. 

Après  avoir  étudié  le  squelette  de  Milan  nous  étions  fort 
curieux  de  pouvoir  lui  comparer  celui  de  Bologne. 


(  752  ) 

Le  crâne  est  tronqué  vers  le  tiers  antérieur  de  Toccipi- 
lal  et  le  professeur  Capellini  a  complété  la  première  figure 
qu'il  a  donnée  de  cette  tète  d'après  les  dessins  de  Balé- 
noptères de  Cuvier.  Je  remarquai  de  suite  une  pièce  qui 
était  mêlée  avec  d'autres  débris  et  je  la  mis  en  place  pour 
compléter  la  boîte  crânienne.  C'est  la  pièce  que  Capellini 
a  représentée  sur  sa  nouvelle  planche  et  qui  complète  le 
crâne.  Je  comprends  que  le  savant  professeur  de  Bologne 
n'ait  pas  songé  à  mettre  cette  pièce  allongée  à  sa  place, 
persuadé  qu'il  était,  que  la  boîte  crânienne  devait  finir 
en  avant  comme  il  l'avait  figurée  sur  la  planche  qui  accom- 
pagne le  premier  Mémoire. 

Cette  portion  de  crâne  étant  en  place,  nous  nous  sommes 
mis  ensemble  à  nettoyer  la  surface  des  os  pour  distinguer 
exactement  leur  forme  et  leur  suture  et  c'est  ce  net- 
toyage que  M.  Capellini  a  continué  après  mon  départ.  Il  a 
fait  apparaître  les  parties  du  maxillaire,  du  pariétal  et  de 
l'occipital,  qu'il  a  si  bien  figurées  sur  la  planche  qui  accom- 
pagne son  dernier  Mémoire. 

Si  par  la  pensée  on  restaure  des  deux  côtés  cette  tête 
en  mettant  les  frontaux  en  place,  ainsi  que  les  maxillaires 
et  les  temporaux,  on  reproduit  exactement  la  tête  de  celui 
conservé  à  Milan.  Nous  ne  ferons  qu'une  observation  au 
sujet  de  cette  belle  planche  de  M.  Capellini  qui  représente 
la  tête  du  Plésiocète  de  Bologne,  c'est  que  les  maxillaires 
inférieurs  sont  mis  un  peu  trop  en  avant;  il  n'y  a  pas  en 
arrière  une  lacune  aussi  grande  pour  atteindre  la  surface 
articulaire  du  temporal. 

Les  sept  cervicales  sont  également  conservées  dans  le 
squelette  de  Bologne,  mais  les  apophyses  transverses 
inférieures  ont  toutes  disparu.  Les  supérieures  sont  encore 
en  place  dans  les  vertèbres  trois,  quatre,  cinq  et  sept. 


(  7S3  ) 
\x  corps  de   ces  vertèbres  ressemble   beaucoup,  pour 
la  dimension  surtout,  aux  cervicales  de  la  Balaenoptera 
borealis. 

Si  maintenant  nous  comparons  les  vertèbres  de  Turin, 
reproduites  par  M.  Brandt{pl.  XXII) d'après  des  dessins  de 
Gastaldi  ou  celles  de  Bologne  figurées  par  Capellini,  dans 
son  Mémoire  de  1865  avec  celles  de  Milan,  il  est  évident 
que  nous  avons  affaire  à  des  espèces  qui  ont  les  plus 
grandes  affinités  entre  elles  si  même  elles  ne  sont  pas 
identiques. 

Sous  quel  nom  faut-il  désigner  cette  Baleine  fossile  dont 
Cortesi  a  le  premier  fait  mention  et  que  Cuvier  décrit  et 
figure  en  la  plaçant  dans  le  sous-genre  des  Rorquals? 

Cortesi,  en  faisant  connaître  le  squelette  du  Monte  Pul- 
gnasco,  trouve  avec  raison  que  cet  animal  était  voisin  de 
la  Balénoptère  à  museau  pointu  de  Lacépède,  c'est-à-dire, 
de  la  Balaenoptera  rostrata  des  cétologues  modernes.  On 
sait  que  cette  espèce  ne  dépasse  pas  trente  pieds  de  lon- 
gueur. 

Cuvier,  sans  se  prononcer  sur  ce  rapprochement,  établit 
parfaitement  les  affinités  génériques  de  l'animal;  il  agissait 
avec  sa  prudence  et  son  tact  habituels  en  ne  se  prononçant 
pas  sur  la  question  de  l'espèce.  On  connaissait  si  peu,  à  cette 
époque,  les  Balénides  de  nos  mers  d'Europe,  que  Cuvier 
croyait  devoir  nommer  la  Balénoptère  ordinaire  du  Nord , 
Rorqual  de  la  Méditerranée.  Toutefois  si  le  grand  natura- 
liste avait  proposé  un  nom  il  lui  serait  resté. 

Nous  avons  vu  plus  haut  que  le  docteur  Brandt  a  créé 
un  nom  générique  nouveau  pour  la  Balénoptère  de  Milan 
et  qu'il  rapporte  à  des  espèces  distinctes  les  squelettes 
de  Milan,  de  Parme  et  de  Bologne,  sous  les  noms  de 


(  lU  ) 
Cetotheriophanes  Cuvierii,  Cortesii  et  Capellinii^  d'après 
des  renseignements  descriptifs  et  iconographiques  qu'il  a 
obtenus  par  correspondance.  M.  Brandt  n'admet  pas  seu- 
lement ces  trois  espèces,  mais  peut-être  même  une  qua- 
trième, ce  qui,  dit-il,  ne  doit  pas  étonner,  puisque  le 
bassin  tertiaire  de  la  Russie  méridionale  fournit  quatre 
espèces  et  le  bassin  de  Vienne  à  peu  près  autant.  Il  fait 
mention  de  six  espèces  à  Anvers. 

M.  Brandt  caractérise  ainsi  son  genre  :  les  cerceaux  des 
vertèbres  non  épaissis;  le  canal  vertébral  des  lombaires 
plus  haut  que  large;  l'omoplate  sans  açromion  et  sans 
coracoïde. 

Les  caractères  tirés  de  l'épaisseur  plus  ou  moins  grande 
des  cerceaux  et  de  l'élévation  du  canal  vertébral  plus  ou 
moins  élevé  relativement  à  la  largeur,  ne  peuvent,  à  notre 
avis,  jamais  servir  à  former  un  nouveau  genre.  Quant  à 
l'absence  des  apophyses  de  l'omoplate,  il  n'en  serait  pas 
de  même.  Mais  nous  l'avons  déjà  dit,  ces  apophyses  ne 
manquent  pas  plus  que  dans  les   autres  Balénoptères. 

Après  un  examen  rigoureux  des  deux  squelettes  deCor- 
tesi,  nous  nous  rangeons  à  l'avis  de  ce  savant  naturaliste 
italien;  nous  croyons  qu'ils  appartiennent  à  une  même 
espèce,  et  nous  croyons  de  plus  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'en 
séparer  les  squelettes  de  Bologne,  de  Turin  et  de  Parme. 

J'ai  déjà  dit  dans  l'Ostéographie  des  cétacés  (p.  242)  que 
tous  ces  ossements  de  Bianconi,  Gortesi  et  Capellini  appar- 
tiennent à  une  seule  et  même  espèce,  et  aujourd'hui  que 
nous  avons  pu  voir  et  examiner  la  plupart  de  ces  os,  notre 
conviction  à  cet  égard  est  encore  plus  complète. 

Je  ne  suis,  du  reste,  pas  le  seul  de  cet  avis  et  si  Cuvier 
avait  dû  se  prononcer  à  ce  sujet  aussi  bien  que  Blainville, 
ils  n'eussent  pas  hésité  à  trancher  la  question  dans  ce  sens. 


(755) 

On  ne  trouve  vraiment  entre  ces  squelettes  que  des  diffé- 
rences individuelles. 

Nous  réunissons  ces  Balénoptères  d'Italie  dans  un  mênoe 
genre  avec  les  Plésiocètes  d'Anvers,  à  cause  de  leur  man- 
dibule inférieure,  de  leurs  os  propres  du  nez,  de  la  largeur  et 
de  la  conformation  du  frontal  au-devant  de  l'occipital,  de 
la  forme  du  tympanal  et  de  l'apophyse  mastoïde,  de  la  lon- 
gueur de  l'humérus,  etc.;  et  quant  au  nom  spécifique,  nous 
croyons  devoir  conserver  celui  de  Cortesi.  Nous  désigne- 
rons cet  animal  sous  le  nom  de 

Plesiocetus  Cortesii. 

Nous  pouvons  donner  la  synonymie  suivante  avec  l'indi- 
cation du  nom  des  auteurs  qui  s'en  sont  occupés  et  des 
ouvrages  qui  en  font  mention. 

Cortesi,  Sugli  scheletri  d'un  Rhinoceronte  afri- 

cano  etd'una  Balena...  Milano  1809. 

Cortesi ,  saggi  geologici,  Piazenza  1819. 

Cuvier,  Ossements  fossiles,  t.  V,  1'"*'  part.  p.  390. 1832. 

Baleine  de  Cuvier  et  de  Cortesi.  Desmoulins,  Dictionn. 
classique  d'hist.  nat.,  art.  Baleine,  vol.  11,  p.  165. 1822. 

Rorqualus  Cortesii,  Capellini,  Balenottere  fossili,  Bo- 
logna,  1765. 

Plesiocetus  Cortesii...  Van  Beneden  et  Gervais,  Ostéo- 
graphie  des  cétacés,  Paris,  pp.  242  et  288. 

Cetotherium  [Cetotheriophanes)  Cuvieri,  Cortesii,  Capel- 
linii,  Brandt,  Untersuchungen  ùber  die  Fossilen  und  Sub- 
fossilen  Cetaceen  Europa's.  S*-Petersburg,  1875. 

J.  F.  Brandt,  Ergânzungen  zu  den  fossilen  Cetaceen  Eu- 
ropa's, S*-Peterburg,  1874. 

Cetotheriophanes  Capellinii ,  Capellini,  sui  cetoterii 
Bolognesi...  Bologna,  1875. 


(  7d6) 

Ces  ossements  ont  été  trouvés  dans  les  couches  de 
marne  bleue,  ou  de  sable  jaune  que  l'on  place  générale- 
ment dans  le  Pliocène. 

Les  principales  localités  où  ces  découvertes  ont  été  faites 
sont  :  Monte  Pulgnasco  (1806);  Montezago,  Castelarquato 
(Podesta)  près  de  Chiavenna  Rochesta  (1816);  Prada- 
libno  (1865);  Montelalcone,  S.  Lorenzo  (1862);  Briatico, 
golfe  de  Saint-Theophême,  à  Sienne  (vertèbres  au  Musée 
de  Pise);  Pietra  leccese,  in  terra  d'Otranto  et  enfin  dans  le 
Val  d'Arno  (Gervais.) 

On  a  signalé  également  des  ossements  de  cétacés  à  Malte, 
avec  des  restes  de  Dugongs  et  de  Phocodon. 

On  conserve  au  Musée  de  Milan  le  grand  squelette  de 
Cortesi. 

A  Turin,  au  Valentino,  Musée  de  l'École  d'application 
des  ingénieurs  sous  la  direction  du  professeur  de  géolo- 
gie, M.  B.  Gastaldi,  se  trouvent  les  ossements  décrits 
et  figurés  par  M.  Brandt  et  au  Musée  de  minéralogie, 
sous  la  direction  de  M.  Aug.  Sismonda,  sénateur  du 
royaume,  on  voit  une  tête  et  de  n?)mbreuses  vertèbres  de 
divers  cétacés  à  fanons. 

A  Bologne  se  trouve  le  beau  squelette  décrit  et  figuré 
par  le  professeur  Capellini ,  dans  le  Musée  dirigé  par  ce 
savant. 

A  Parme,  d'après  les  renseignements  que  le  directeur 
Pellegrino  Strobel  a  bien  voulu  me  fournir,  le  Musée 
possède  :  IMe  squelette  de  Montezago,  décrit  et  figuré 
par  Cortesi,  pi.  V,  fig.  1-5;  2Me  squelette  de  la  marne 
bleue  de  Jean  Podesta;  5°  un  squelette  du  sable  jaune 
de  Montefalcone;  4**  des  vertèbres  cervicales  des  Apen- 
nins de  Plaisance;  5**  des  parties  d'un  squelette  d'un 


(  -!^  ) 
grand  animal  du  sable  jaune  de  Montezago;  6°  des  restes 
d*un  squelette  d'un  petit  individu,  c'est-à-dire  la  tête  avec 
les  maxillaires  et  les  intermaxillaires,  des  sables  jaunes 
des  Apennins  du  Plaisantin,  recueillis  par  Cortesi;  7°  le 
corps  d'un  humérus  très-grand  du  sable  jaune  des  Apen- 
nins Plaisantains,  trouvé  également  par  Cortesi. 

Il  paraît  qu'à  Pise  il  existe  également  un  squelette  de 
Balénide  fossile,  mais  qui  n'est  pas  nettoyé. 

Le  Musée  de  Florence  renferme  une  quantité  d'osse- 
ments fossiles  de  cétacés,  que  le  professeur  Capellini  est  en 
train  de  débrouiller.  11  y  a  là  une  région  cervicale,  qui  in- 
dique la  présence,  dans  le  bassin  de  la  Méditerranée,  d'un 
vrai  Mysticète,  très-voisin  d'un  genre  qui  n'est  connu 
encore  que  dans  le  sable  d'Anvers. 

Le  Musée  de  Pise  renferme  également  un  fragment  de 
maxillaire  inférieur  de  Balaena. 

Les  principaux  ossements  fossiles  de  Myslicètes  décou- 
verts jusqu'à  présent  en  Italie  se  rapportent  aux  espèces 
suivantes  : 

Balaena  etriisca,  région  cervicale  au  Musée  de  Bologne. 

Balaena  balsami  (1),  vertèbres  au  Musée  de  Milan. 

Balaenula,  vertèbres  à  Turin  et  à  Florence. 

Plesiocetus  Cortesii,  aux  Musées  de  Milan ,  Turin ,  Bo- 
logne, Parme,  Pise. 


(1)  M.  Cornalia  a  donné  ce  nom  à  une  Baleine  fossile,  dont  on  a  trouvé 
treize  vertèbres  dorsales  et  lombaires  et  quatre  côtes,  à  Montezago,  Pia- 
centino,  en  1806.  C'est  une  vraie  Baleine.  Nous  ne  savons  si  ces  os 
viennent  de  l'argile  bleue,  Pliocène.  Ils  n'ont  pas  le  même  aspect  que 
ceux  de  Plésiocète. 


(  7S8  } 

EXPLICATION  DES  FIGURES. 


Fig.  4.  Tête  de  Plesiocetus  Cortesii,  vue  par  la  face  supérieure,  d'après 
une  photographie  exécutée  sous  les  ordres  de  M.  Cornai  ia. 

Fig.  2.  La  même  têle  vue  du  côté  opposé.  Il  n'y  a  que  les  os  jugaux 
qui  manquent. 
A  côté  on  voit  le  maxillaire  inférieur,  d'un  côté  vu  par  sa  face 
inférieure,  de  l'autre  côté  en  profil. 


Sur  la  période  de  froid  du  mois  de  décembre  1875; 
par  M.  E.  Quelelet,  membre  de  rAcadémie. 

La  période  de  gelée  que  nous  traversons  en  ce  moment 
mérite  de  fixer  un  instant  l'attention.  Depuis  le  25  no- 
vembre il  a  gelé  chaque  nuit,  et  le  2  décembre  au  matin 
la  température  est  tombée  à  —  7°5;  ce  froid  n'est  pas 
excessif  pour  la  saison,  puisqu'on  sait  qu'à  !a  date  du 
25  novembre  la  température  a  déjà  atteint  à  Bruxelles 
10%4  sous  zéro;  mais  il  s'est  présenté  précisément  à  une 
époque  de  réchauffement  de  l'air  et  le  degré  —  7°5  n'a  pas 
été  observé  jusqu'ici  du  24  novembre  au  A  décembre. 

Quand  une  anomalie  remarquable  se  présente,  il  est 
utile  d'étudier  les  faits  analogues  qui  ont  été  observés 
précédemment  :  j'ai  donc  recherché  les  périodes  froides  de 
quelque  importance  qui  se  sont  présentées  vers  la  môme 
époque.  Sur  les  42  années  d'observation  il  y  en  a  15  qui 
présentent  sous  ce  rapport  quelque  analogie  avec  l'année 
1875.  Je  les  ai  réunies  dans  le  tableau  suivant,  en  me 
bornant  toutefois  à  présenter  pour  chacune  d'elles  le 
minimum  absolu  par  pentade,  c'est-à-dire  par  période  de 
cinq  jours: 


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(  759  ) 


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(  760  ) . 

En  examinant  ce  tableau,  on  reconnaît  bientôt  que  les 
températures  d'aucune  de  ces  années  ne  sont  comparables 
avec  celles  que  nous  observons  actuellement,  mais  que  les 
moyennes  ne  s'écartent  pas  trop  des  nombres  obtenus 
cette  année  entre  le  2  novembre  et  le  4  décembre.  Si  l'on 
resserre  les  limites  et  que  l'on  rejette  les  années  où  la 
somme  des  écarts  avec  1875  est  la  plus  grande,  il  reste 
1844,  1849,  1855,  1869,  1870  et  1874  dont  les  minima 
moyens  sont  consignés  dans  l'avant-dernière  ligne.  La 
dernière  ligne  enfin  renferme  les  minima  moyens  des 
trois  années  1844,  1846  et  1855  qui  sont  les  seules  qui 
demeurent,  quand  on  a  éliminé  les  années  dont  les  écarts 
avec  1875  sont  les  plus  grands  dans  chaque  pentade. 
Quoique  ces  trois  séries  de  nombres  aient  été  obtenues  par 
des  combinaisons  différentes  des  minima  annuels,  elles 
concordent  assez  bien  entre  elles. 

Ce  qui  est  encore  particulièrement  remarquable  dans  les 
froids  de  ces  derniers  jours,  c'est  que  malgré  un  vent  d'Est- 
Nord-Est  persistant,  le  baromètre  est  resté  peu  élevé  et 
l'air  humide  et  continuellement  nuageux. 


(  761  ) 


Sur  l'élage  dévonien  des  psammiles  du  Condroz  dans  le 
bassin  de  Theux,  dans  le  bassin  septentrional  [entre  Aix- 
la-Chapelle  et  Atli)  et  dans  le  Boulonnais,  par  M.  Michel 
Mourlon,  conservateur  de  la  section  de  minéralogie  et 
de  géologie  au  Musée  royal  d'histoire  naturelle  de 
Bruxelles. 

Dans  une  première  communication  sur  l'étage  dévonien 
des  psammites  du  Condroz  (1)  je  me  suis  attaché  à  faire 
connaître  la  constitution  détaillée  de  cet  étage  dans  la 
région  qui  lui  a  valu  son  nom. 

Les  psammites  de  l'Ourthe,  entre  Esneux  et  Comblain- 
Fairon,  m'ont  fourni  l'échelle  stratigraphique  de  l'étage 
en  me  faisant  connaître  la  succession  normale  des  couches 
dont  il  se  compose  dans  la  partie  du  Condroz  où  il  paraît 
atteindre  sa  plus  grande  épaisseur. 

J'ai  évalué  approximativement  cette  épaisseur  à  600 
mètres. 

J'ai  montré  aussi  que  ces  600  mètres  de  couches  psara- 
mitiques,  séparant  les  schistes  de  Famenne  proprement  dits 
du  calcaire  carbonifère  (assise  1),  peuvent  se  grouper  en 
quatre  assises  ayant  chacune  leurs  caractères  minéralogi- 
ques,  paléontologiques  et  stratigraphiques  qui  permettent 
de  les  reconnaître  aisément  dans  tout  le  Condroz,  chaque 
fois  qu'elles  sont  ramenées  au  jour  par  des  plis,  comme 
sur  l'Ourthe  et  sur  les  plateaux,  entre  Chapois  (Leignon) 


(1)  Bulletins  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  t.  XXXIX,  Snie  série, 
p.  602. 

2°"^  SÉRIE,  TOME  XL.  49 


(762) 
et  Courrière,  au  delà  d'Assesse,  ou  par  des  failles,  comme 
sur  le  Hoyoux. 

Ces  assises  sont,  en  commençant  par  la  plus  ancienne  : 

A.  Assise  d'Esneux.  (Puissance  approximative.  .  4oO  mètres. 

B.  Assise  de  Souverain-Pré .  —  —  .  .  400  — 
G.  Assise  de  Moiifort.  —  —  .  .  iSO  — 
D.  Assise  d'Évieux.                        —                 —         .  .  200    — 

Total.    .    600  mètres. 

J'ai  l'honneur  de  présenter  aujourd'hui  à  l'Académie  la 
continuation  de  mes  recherches  sur  la  constitution  détail- 
lée des  psammites  du  Condroz  : 

4°  Dans  le  bassin  de  Theux. 
2»  Dans  le  bassin  septentrional 

(entre  Aix-la-Chapelle  et  Ath). 
>  Dans  le  Boulonnais. 

I.  —  Constitution  des  psammites  du  condroz 

DANS  LE  BASSIN  DE  THEUX. 

La  vallée  où  coule  le  ruisseau  de  Spa  présente,  entre 
Theux  et  Franchimont,  d'importants  affleurements  qu'une 
étude  attentive  m'a  permis  de  raccorder  avec  certitude 
aux  psammites  de  TOiirthe. 

Ces  affleurements  s'observent  principalement  :  dans  la 
tranchée  du  chemin  de  fer  où  j'ai  eu  la  bonne  fortune  de 
retrouver  le  gîte  à  végétaux  d'Évieux;  au  sommet  du  flanc 
occidental  de  la  vallée,  dans  une  carrière  abandonnée,  où 
l'on  a  exploité  les  psammites  à  pavés  de  Monfort,  et  sur 
la  montagne  de  Franchimont  dont  les  ruines  célèbres 
reposent  sur  le  macigno  de  Souverain-Pré  lequel,  à  son 
tour,  est  supporté  par  les  psammites  d'Esneux. 


(  /«'^  ) 

La  coupe  suivante  fera  connaître  la  composition  détaillée 
de  ces  alïleurements  : 

Coupe  entre  Theux  et  Franchimonl. 
Fig.   \. 

En  suivant  la  voie  ferrée,  on  rencontre,à  quelques  cen- 
taines de  mètres  de  la  station  de  Theux  : 

i.  Psammite  très-micacé,  parfois  terreux  et,  passant  à  un  schiste 
verdâtre. 

2.  Psammite  schisto-grésiforme  pailleté  passant  à  un  schiste  qui 
prend  à  la  surface  une  teinte  blanchâtre  assez  fréquente  à  ce  niveau. 

Ce  psammite,  en  bancs  presque  verticaux,  renferme,  notamment  en 
2',  d'abondants  débris  de  végétaux  tout  à  fait  semblables  à  ceux  du 
gîte  dTvieux.  J'y  ai  recueilli  aussi  des  débris  de  poissons  ? 

Il  alterne  avec  des  bancs  à  texture  terreuse. 

3.  Psammite  grésiforme  très-pailleté  avec  débris  de  végétaux 
semblables  à  ceux  que  j'ai  rencontrés  souvent  à  la  partie  supérieure 
de  l'assise  de  Monfort. 

i.  Psammite  grésiforme  altéré  en  bancs  contournés,  inclinés  d'en- 
viron 4S°  S.  et  à  stratification  confuse  vers  le  bas. 

Sur  la  rive  gauche  du  ruisseau  et  à  la  partie  supérieure 
du  flanc  occidental  de  la  vallée  on  observe  une  carrière 
abandonnée  dans  laquelle  on  a  exploité  un  banc  de  psam- 
mite grésiforme  gris-bleuâtre,  finement  pailleté,  qui  paraît 
être  incliné  de  20°  N.  et  atteindre  une  épaisseur  de  5  à  6 
mètres.  C'est  le  gros  banc  et  le  blanc  banc  de  Monfort  dont 
j'ai  trouvé,  parmi  les  éboulis  de  la  carrière,  les  parties  ter- 
reuses pétries  d'abondants  Calamités?  (traces  d'axes  assez 
volumineux). 

5.  Macigno  noduleux  passant  à  un  calcaire  à  crinoîdes  spathiqucs. 


(  704  ) 

Ce  macigno  s'observe  sur  la  montagne  de  Franchimont 
ainsi  que  dans  son  prolongement  sur  la  chaussée  de  Theux 
à  Spa  où  il  se  montre,  à  une  centaine  de  mètres  du  pont, 
sous  la  forme  de  grands  blocs  isolés  au  milieu  de  la  végé- 
tation. 

Dumont  fait  mention  de  ce  macigno  dans  son  célèbre 
Mémoire  sur  la  constitution  géologique  de  la  province  de 
Liège  (1)  et  l'indique  comme  un  petit  ruban  de  calcaire 
subordonné  dans  le  psammite. 

6.  Psammite  d'Esneux  avec  des  parties  schistoïdes  verdâtres  et 
un  banc  de  psammite  grésiforme  intercalé  à  la  partie  supérieure. 

Ce  psammite  est  bien  visible  au  contact  du  macigno 
précédent,  dans  la  propriété  de  M.  Granjean,  au  pied  de  la 
montagne  de  Franchimont.  Il  s'observe  le  long  de  la  chaus- 
sée de  Spa,  sur  la  rive  gauche  du  ruisseau,  où  on  peut  le 
suivre  sur  une  très-grande  longueur,  les  couches  étant 
très-peu  inclinées  et  la  chaussée  prenant  une  direction  S-0. 

IL  —  Constitution  des  psammites  du  condroz 

DANS    LE   BASSIN   SEPTENTRIONAL 

(entre  Aix-la-Chapelle  et  Ath). 

Pour  faire  connaître  la  composition  détaillée  des  psam- 
mites du  Condroz  dans  notre  bassin  septentrional,  entre 
Aix-la-Chapelle  et  Ath,  je  passerai  sucessivement  en  revue 
les  affleurements  qu'il  m'a  été  possible  d'observer  :  aux 
confins  de  la  Belgique  et  de  la  Prusse,  entre  Moresnet  et 
Montzen;  sur  la  Vesdre  et  sur  les  bords  (méridional  et 
septentrional)  du  bassin,  entre  Liège  et  Ath. 

(1)  Mémoires  couronnés  de  l'Académie,  t.  VÏII,  p.  181;  1832. 


(  7(>o  ) 


Coupe  des  tranchées  près  la  station  de  Montzen-Moresnet. 
Fig.  2. 

i.  Dolomie  gcodiqnc  recouverte  d'éboulis  terreux  (assise  V, 
Duponl). 

2.  Psammite  schistoïde  vcrdâlre  avec  traces  de  débris  de  végé- 
taux. 

Ce  psammile  est  tout  à  fait  semblable  à  celui  que  j'ai 
rapporté  à  l'assise  d'Évieux  dans  la  tranchée  du  chemin 
de  fer  au  N-0  de  Ciney. 

Il  est  en  majeure  partie  recouvert  d'éboulis  psammiti- 
ques  sur  lesquels  se  trouvent  également  des  traces  de  débris 
de  végétaux,  mais  toutes  différentes  des  précédentes  et  se 
rapportant  plutôt  à  celles  du  psammite  n°  3,  ce  qui  permet 
de  supposer  que  ces  éboulis  proviennent  d'un  niveau  infé- 
rieur à  celui  qu'ils  occupent  dans  la  tranchée. 

5.  Psammites  grésiforme  et  schistoïde  très-micacés  gris  blanchâtres, 
devenant  rougeâtres  vers  le  haut,  en  bancs  puissants  peu  inclinés 
(12"  N.)  renfernant  d'abondants  débris  do  végétaux. 

4.  Psammite  passant  à  un  schiste  rougeâtre  et  verdâtre. 

Ce  schiste  rappelle  ceux  que  j'ai  rapportés  à  l'assise  de 
Monfort  dans  la  tranchée  au  sud  de  la  station  de  Natoye , 
en  me  basant  exclusivement  sur  leur  position  slratigra- 
phique,  car  je  n'avais  pas  encore  rencontré  cet  aspect  rai- 
néralogique  dans  l'étage  des  psammites. 

5.  Psammites  semblables  aux  psammites  n»  3. 

6.  Psammite  blanchâtre  en  bancs  presque  horizontaux  devenant 
parfois  charbonneux  par  Tabondance  des  débris  de  végétaux  qu'il  ren- 
ferme. 


(  7(16  ) 

En  suivant,  du  nord  au  sud,  les  différentes  tranchées  du 
chemin  de  fer  de  la  Société  de  la  Vieille-iMontagne,  on 
retrouve,  avec  un  beaucoup  plus  grand  développement  et 
une  inclinaison  sud ,  toute  la  série  psammitique  de  la  coupe 
précédente. 

Cette  série  de  couches  correspond  à  la  partie  supérieure 
de  l'assise  de  iMonfort.  C'est  celle  qui  s'observe  sur  tout 
le  bord  nord  du  bassin  septentrional,  jusque  dans  le  Bou- 
lonnais, comme  on  le  verra  par  la  suite. 

Carrières  de  Mont  zen. 

Les  carrières  ouvertes  sur  la  commune  de  Monlzen,  au 
S.-E.  de  la  coupe  fig.  2  et  au  S.-O.  de  la  station,  exploi- 
tent un  banc  de  5,80  mètres  d'épaisseur  constitué  par  un 
psammite  grésiforme  gris-bleuâtre  finement  pailleté  qui 
n'est  autre  que  le  gros  banc  de  Monfort. 

C'est  donc  un  psammite  inférieur  à  ceux  qu'on  vient  de 
voir  dans  les  tranchées  du  chemin  de  fer,  de  chaque  côté 
de  la  station  de  Montzen-Moresnet. 

En  outre,  comme  la  coupe  d'une  partie  de  ces  tranchées 
signale  la  présence,  entre  les  couches  supérieures  de  Monfort 
et  la  dolomie  carbonifère ,  d'un  psammite  à  végétaux  que  je 
crois  pouvoir  rapporter  à  l'assise  d'Évieux,  il  s'ensuit  que 
les  différents  groupes  psammiliques  mis  à  découvert  par 
les  tranchées  du  chemin  de  fer,  comme  par  les  carrières,  se 
trouvent  conserver  la  même  position  relative  que  dans  le 
Condroz  et  dans  le  bassin  de  Theux. 

Quant  aux  groupes  inférieurs  de  l'étage ,  il  ne  m'a  pas  été 
donné  de  les  observer  dans  cette  partie  du  bassin  septen- 
trional, soit  que  la  faible  inclinaison  des  couches  ne  leur 
ait  pas  permis  d'affleurer,  soit  qu'elles  y  fassent  complète- 
ment défaut. 


(  767  ) 


Coupe  dans  la  tranchée  de  la  station  de  Dolliain. 
Fig.  3. 

i.  Schiste  grossier,  légèrement  pailleté,  à  surface  luisante  et  légè- 
rement cannelée. 

2.  Psammitc  verdàtre  en  bancs  fortement  contournés;  ce  psammite 
est  en  partie  caché  par  la  végétation,  surtout  vers  le  bas  où  cependant 
un  banc  est  bien  visible  un  peu  avant  d'arriver  au  macigno  n°  3. 

3.  Macigno  schisteux  passant  à  un  calcaire  à  crinoïdes.  Ce  macigno 
ne  perce  la  végétation  qu'en  un  seul  point  et  encore  n'ai-je  pu  m'assu- 
rer  complètement  s'il  est  bien  en  place.  Aussi  n'est-ce  qu'avec  doute 
que  je  le  rapporte  à  l'assise  de  Souverain-Pré. 

4.  Psammite  schisto-grésiforme  verdàtre  avec  traces  de  débris  de 
végétaux. 

Ce  psammite  est,  comme  celui  de  Montzen,  tout  à  fait  semblable  à 
celui  qui  m'a  fourni  les  mêmes  traces  végétales  dans  la  tranchée  au 
N.-O.  de  Ciney.  C'est  le  psammite  d'  de  mon  échelle  stratigraphique. 

5.  Psammite  passant  au  schiste,  au  calschiste  et  alternant  avec  des 
bancs  à  texture  terreuse. 

La  présence  du  calschiste  dominant  parmi  ces  couches  m'oblige  à 
ne  les  rapporter  qu'avec  doute  à  l'assise  d'Évieux. 

6.  Calcaire  avec  rares  crinoïdes  spathiques. 

7.  Calcaire  argileux  en  bancs  minces  avec  crinoïdes  peu  abon- 
dantes, parfois  géodique,  pétri  de  fossiles  {Strophomenes  (Leptœna) 
analogna,  Phill.,  Spirifer  pinguis^  Sow.,  etc.)  et  entouré  de  calschiste 
renfermant  les  mêmes  fossiles. 

8.  Dolomic  entrecoupée  de  petites  failles,  à  stratification  confuse» 
mais  renfermant  en  8'  une  bande  de  phlanite  noir  devenant  blan- 
châtre par  altération,  foss'ûUère  (Cyathophyllum)  et  inclinée  6i»N. 

L'inclinaison,  au  nord,  de  cette  bande  de  phtanite,  parait  bien 
indiquer  la  présence  d'une  faille,  au  contact  des  assises  carboni- 
fères I  et  V. 

Les  différentes  couches  de  la  coupe  de  Dolhain  présen- 
tent cette  particularité,  assez  fréquente  dans  nos  terrains 


(  768  ) 
primaires,  de  se  trouver  dans  une  position  inverse  de  celle 
qu'elles  occuperaient   normalement.   C'est  ce  qui  s'ex- 
prime en  disant  qu'elles  ont  été  renversées,  ou  bien  encore 
qu'elles  ont  dépassé  la  verticale. 

C'est  en  vertu  de  ce  phénomène  que  l'assise  des  psam- 
mites  d'Esneux,  qui  est  la  plus  ancienne  de  l'étage, 
occupe,  au  contraire,  la  partie  supérieure,  tandis  que 
l'assise  d'Évieux,  la  moins  ancienne,  est  à  la  base.  On  voit 
donc  que,  quelles  que  soient  les  actions  mécaniques  qui 
ont  affecté  l'étage  des  psammites,  les  différentes  assises 
dont  il  se  compose,  n'en  conservent  pas  moins  les  mêmes 
relations  stratigraphiques. 

La  coupe  de  Dolhain  présente,  toutefois,  une  différence 
notable  avec  les  précédentes,  en  ce  que  l'on  y  constate  l'ab- 
sence d'un  groupe  de  couches  tout  entier.  On  ne  trouve , 
en  effet,  dans  la  coupe  de  Dolhain,  aucun  vestige  de  l'assise 
de  Monfort  et  l'espace  qui  sépare  les  assises  B  et  D  et  que 
recouvre  la  végétation  est  si  minime  qu'il  est  permis 
d'avancer  qu'elle  fait  complètement  défaut  en  ce  point. 
C'est  là  un  fait  qui  n'est  pas  sans  importance  si  Ton  réflé- 
chit que  j'ai  assigné  à  l'assise  de  Monfort  une  puissance  de 
150  mètres  sur  l'Ourthe.  Toutefois  l'absence  de  cette  assise 
à  Dolhain  et  le  contact  anormal  des  assises  B  et  D  qui  en 
est  résulté  me  paraissent  être  dus  à  un  accident  local  pro- 
duit sans  doute  par  une  faille.  Et  ce  qui  me  paraît  devoir 
appuyer  cette  manière  de  voir,  c'est  que  l'assise  de  Monfort 
a  donné  lieu  à  de  grandes  exploitations  sur  la  Vesdre  et 
que,  même  à  peu  de  distance  à  l'ouest  de  Dolhain,  on  a 
exploité  des  pavés  dans  un  psammite  grésiforme  en  bancs 
épais  à  la  base,  souvent  contournés  et  inclinés  au  nord, 
qui  s'observent  un  peu  au  delà  des  schistes  de  Famenne  de 
la  Pisseroule,  en  suivant  la  chaussée  de  Verviers  à  Dison. 


(  7«0  ) 
J'ajouterai  que  Tassise  B  paraît  réduite  à  une  assez  faible 
épaisseur  dans  la  tranchée  de  Dolhain,  alors,  au  contraire, 
que  l'assise  A  y  présente  une  grande  extension. 

Coupe  entre  la  station  de  Trooz-Aval  et  Dasse-Fraipont. 
Fig.  4. 

i.  Schiste  verdâtre  à  surface  luisante  et  légèrement  cannelée, 
comme  celui  de  la  station  de  Dolhain. 

2.  Psammite  verdâtre. 

Ce  psammite  prend  un  îrès-grand  développement  sur  la 
rive  droite  de  la  Vesdre  qui  le  traverse  sur  une  assez  grande 
longueur,  à  peu  près  de  l'est  à  l'ouest,  dans  le  sens  de  la 
direction  des  couches.  Les  couches  supérieures  de  ce  psam- 
mite se  montrent,  comme  l'indique  la  coupe,  au  commen- 
cement de  la  tranchée  du  tunnel. 

3.  Macigno  noduleux  et  caverneux  avec  Rhynchonella  pleurodon 
en  bancs  puissants  atteignant  jusqu'à  4  et  5  mètres  d'épaisseur  et 
inclinés  20°  S. 

Le  contact  de  ce  macigno  avec  les  psammites  d'Esncux  est  bien 
visible  dans  la  tranchée,  à  l'entrée  du  tunnel,  où  de  grands  blocs 
détachés  se  trouvent  à  côté  de  la  voie. 

i.  Psammites  à  pavés. 

Ces  psammites  sont  exploités  dans  plusieurs  carrières 
sur  les  deux  rives  et  surtout  sur  la  rive  droite. 

On  retrouve  dans  ces  carrières  toute  la  série  des  psam- 
mites deMonfort,  en  bancs  peu  inclinés.  J'y  ai  retrouvé, 
notamment,  le  niveau  à  végétaux  delà  partie  supérieure  de 
l'assise  C. 

5.  Psammite  grésiforme,  en  bancs  faiblement  inclinés  au  nord, 
dans  une  carrière  abandonnée ,  sur  la  rive  gauche. 

6.  Psammite  verdâtre  rappelant  un  peu  les  psammites  d'Esneux- 


(  770  ) 
Ce  psammite  est  en  majeure  partie  caché  par  la  végéta- 
tion, mais  j'ai  pu  l'observer,  sur  la  rive  droite,  en  deux 
points  séparés  l'un  de  l'autre  de  150  mètres. 

7.  Psammites  à  pavés  exploites,  suivant  la  direction  des  couches  à 
cause  du  contourncment  de  la  vallée,  dans  une  grande  carrière  sur 
la  rive  droite. 

8.  Macigno  presque  entièrement  caché  par  la  végétation  et  les 
éboulis  de  carrières. 

En  poursuivant,  sur  la  rive  gauche,  vers  Basse-Frai- 
pont,  on  suit  le  macigno,  dans  le  sens  de  la  direction  des 
bancs,  sur  une  assez  grande  longueur.  De  grands  blocs 
de  macigno  noduleux  et  caverneux  éboulés  se  montrent 
aussi,  assez  abondamment,  au  bord  de  la  rivière.  On  voit 
donc,  en  résumé,  que  l'étage  des  psammites  présente,  dans 
cette  partie  de  la  Vesdre,  la  même  disposition  que  sur 
l'Ourlhe  et  dans  le  bassin  de  Thcux. 

Coupe  du  Fond  de  Cry  à  Chaudfontaine. 
Fig.  5. 

1.  Psammite  verdâtre  formant  un  pli  synclinal  à  Pentrée  du  Fond 
de  Cry. 

2.  Schistes  de  Famcnne  à  stratification  confuse. 

3.  Calcaire  et  schiste  argileux  très-fossilifères  (rercôra/u/a  concen- 
trica;  Spirifcr  disjunclus;  Gomphoccras  ;  Orthoccras). 

4.  Calcaire  bleu  exploité  comme  pierre  h  chaux. 

Ce  calcaire  s'observe,  au  contact  des  couches  n"  3,  dans  la  pre- 
mière carrière  ouverte  sur  le  flâne  oriental  du  Fond  de  Cry. 

5.  Calschiste  en  partie  recouvert  de  végétation  et  séparant  deux 
carrières,  le  long  de  la  route. 

6.  Calcaire  avec  schiste  argileux. 

7.  Calcaire  bleu  veiné  de  calcite  ,  exploité  comme  chaux  hydrau- 
lique dans  de  grandes  carrières. 


(771   ) 

Il  forme  un  beau  pli  anticlinal  bien  apparent  sur  le  flanc  occi- 
dental du  Fond  de  Cry. 

8.  Schiste  de  Famcnnc  cache,  en  grande  partie,  par  la  végéta- 
tion. 

9.  Psammite  schistoïdc  passant  au  schiste. 

10.  Psammite  verdâtre  recouvert  d'éboulis  de  carrières,  vers  le 
bas. 

H.  Psammite  grésiforme  en  bancs  assez  épais  au  contact  du  psam- 
mite précédent. 

Vers  le  sommet  du  flanc  oriental  du  Fond  de  Cry  on  ex- 
ploite dans  une  première  carrière  à  pavés  appartenant  à 
M.  Courtois  Noirfalize,  un  banc  de  psammite  grésiforme 
gris-bleuâtre,  finement  pailleté  qui  atteint ,  comme  \egros 
banc  de  Monfort  auquel  il  correspond ,  la  puissance  de 
5  mètres.  Il  est  incliné  de  62°  S. 

A  un  niveau  supérieur  à  ce  gros  banc  on  exploite 
d'autres  bancs  qui  paraissent  correspondre,  en  tout  ou  en 
partie,  à  ceux  qu'on  a  tenté  d'exploiter  vis-à-vis,  sur  le 
flanc  occidental  du  Fond  de  Cry,  dans  une  petite  carrière 
abandonnée. 

12.  Psammite  schistoïde  foncé  avec  nombreuses  traces  de  débris 
de  végétaux. 

Ce  psammite  s'observe,  à  rétat  d'éboulis,  dans  la  petite  carrière 
abandonnée  dont  il  vient  d'être  fait  mention. 

C'est  le  seul  indice  qu'il  m'ait  été  possible  de  recueillir  de  la  pré- 
sence de  l'assise  d'Évieux ,  en  ce  point. 

15.   Psammite  à  pavés  inclinés  au  nord. 

Dans  une  première  carrière  appartenant  à  Bastin  Honez 
de  Ninane  on  voit  le  pli  synclinal  prendre  naissance  avec 
les  couches  supérieures  et  l'on  retrouve,  avec  une  incli- 
naison nord,  le  gros  banc  de  5  mètres  de  la  carrière  Cour- 


(  772  ) 

lois,  lequel  est  surmonté  ici  d'autres  bancs  également  très- 
puissants. 

L'un  de  ces  derniers  présente  tous  les  caractères  du 
blanc  banc  de  Monfort;  c'est  un  psammite  grésiforme, 
finement  pailleté,  devenant  terreux,  géodique  et  fossilifère 
par  places  et  renfermant  aussi  les  mêmes  traces  d'axes 
assez  volumineux  de  Calamités?  que  sur  l'Ourthe. 

a.  Psammite  verdàtre  avec  Avkula  Damnoniensis  ? 

Ce  psammite  s'observe,  au  tournant  de  la  route,  en 
bancs  inclinés  au  nord,  sous  le  psammite  n°  15. 

En  poursuivant  la  route  vers  Ninane,  on  suit  ce  psam- 
mite dans  le  sens  de  la  direction  des  couches,  puis  on 
arrive  aux  carrières  à  pavés  Etienne  et  Léonard  dans  les- 
quelles on  exploite  le  prolongement  des  bancs  de  la  car- 
rière Honez. 

En  résumé  les  psammites  du  Fond  de  Cry  conservent 
toujours  les  mêmes  relations  straligraphiquesque  dans  les 
coupes  précédentes.  Seulement  l'assise  du  macigno  de  Sou- 
verain-Pré semble  y  faire  complètement  défaut, et  ce  n'est 
qu'avec  beaucoup  de  réserves  qu'on  peut  y  admettre  l'exis- 
tence de  l'assise  d'Évieux. 

Les  psammites  de  l'assise  de  Monfort  s'observent  encore 
au  S.-E.  de  Chaudfontaine,  au  sortir  du  tunnel  où  ils 
ont  été  exploités  pour  donner  du  ballast  à  la  ligne  de 
l'État. 

Coupe  à  Angleur  sur  l'Ourthe. 

En  suivant  la  chaussée  de  Liège,  sur  la  rive  gauche  de 
l'Ourthe,  on  rencontre,  au  delà  des  schistes  houillers,  la 


(  773  ) 
coupe  suivante  dont  toutes  les  couches  sont  renversées  et 
inclinées  au  sud. 

1.  Dolomie  carbonifère  (assise  V,  Dupont),  bien  visible  dans  la 
propriété  de  M.  le  notaire  à  Angleur. 

2.  Schistes  gris- noirâtres  et  rougeâtres  passant  parfois  au  nia- 
cigno. 

3.  Psammite  schisto-grésiforme  fortement  micacé  gris  et  rouge 
en  bancsparfois  très-puissants,  d'autres  fois  très-feuilletés  avec  aspect 
argentin. 

Il  passe  au  macigno  dans  quelques  bancs. 

4.  Psammite  grcsiforme  gris-bleuâtre  pailleté,  devenant  schis- 
toïde  et  fossilifère  avec  débris  de  végétaux  et  passant  à  une  espèce 
de  schiste  renfermant  les  mêmes  débris. 

Ces  roches  s'ohservent  dans  une  première  carrière  aban- 
donnée située  un  peu  au-dessus  de  la  chaussée. 

5.  Psammite  grésiforme  gris-blanchâtre  pailleté ,  exploité  comme 
pavé  dans  une  seconde  carrière  située  à  côté  de  la  précédente. 

Au  delà  du  psammite  n°  5  la  végétation  ne  permet  pas 
d'observer  la  nature  des  couches  qui  séparent  ce  psammite 
des  schistes  de  Famenne. 

Jl  est  aisé  de  reconnaître  dans  les  couches  1  à  4  les  dé- 
pôts de  l'assise  d'Évieux  avec  ses  débris  de  plantes  si  ca- 
ractéristiques. Quant  au  psammite  n°  5,  il  me  semble  devoir 
se  rapporter  à  la  partie  supérieure  de  l'assise  de  Monfort. 

Coupe  sur  le  ruisseau  au  S.-E.  d'Engis 
(commune  d'Ehein). 

En  remontant  le  ruisseau  qui  va  se  jeter  dans  la  Meuse 
en  face  d'Engis,  une  circonstance  favorable  m'a  permis 
d'observer  l'étage  des  psammites,  au   delà  des  grandes 


(  774  ) 

carrières  ouvertes  dans  le  calcaire  carbonifère  de  Visé  et 
des  Écaussines. 

Une  petite  tranchée  qu'on  vient  de  pratiquer,  pour  la 
construction  d'une  nouvelle  route,  entre  le  pont  d'Engis 
et  le  village  de  Neuville-en-Condroz,  a  mis  à  nu  les  psam- 
mites  qui  s'y  présentent,  en  général,  à  l'état  d'éboulis. 
Cependant,  au  commencement  de  la  tranchée,  au  delà  des 
éboulis  de  calcaire  à  crinoïdes,  on  remarque  quelques 
bancs  de  psammite  rouge  presque  verticaux  avec  pendage 
au  nord ,  comme  ceux  de  la  carrière  de  petit  granité  qui 
précède  immédiatement  la  petite  tranchée. 

Le  psammite  grésiforme  rouge  qui  paraît  constituer  la 
majeure  partie  de  l'étage,  en  cet  endroit,  est  tout  à  fait 
semblable  à  celui  qu'on  va  voir  si  puissamment  développé 
à  Huy.  Seulement  la  végétation  ne  m'a  pas  permis  d'obser- 
ver la  nature  des  roches  qui  séparent  ce  psammite  rouge 
du  calcaire  de  Givet  qui  se  montre,  à  peu  de  distance  de 
là,  dans  le  lit  du  ruisseau. 

Tout  ce  que  je  puis  dire,  c'est  que  je  n'ai  trouvé  aucune 
trace  des  schistes  de  Famenne  qui ,  d'après  la  carte  de 
Dumont,  doivent  se  trouver  entre  les  psammites  et  le  cal- 
caire dévonien. 

Si  le  psammite  rouge  de  la  tranchée  est  bien  l'analogue 
de  celui  de  Huy  et  correspond,  comme  ce  dernier,  à  l'as- 
sise de  Monfort,  on  peut  en  conclure  que  l'assise  d'Évieux 
fait  défaut  à  Ehein,  les  éboulis  de  petit  granité  y  succé- 
dant à  peu  près  immédiatement  à  ceux  du  psammite  rouge. 

Coupe  à  Iluy  sur  la  rive  droite  de  la  Meuse. 
Fig.  6. 

A  une  centaine  de  mètres  à  l'ouest  du  pont  du  chemin 
de  fer  du  Hoyoux,  on  peut  suivre  sur  la  chaussée,  à  peu 


(  773  ) 

près  dans  le  sens  de  leur  direction ,  les  couches  de  psam- 
mite  dont  le  pendage  est  au  sud. 

1.  Psanimite  verdâtrc  avec  traces  vcrmiculaires,  passant  à  un 
schiste  parfois  très-fossilifère,  notamment  en  1'  (Modiola  {Pullaslra) 
complanata?  Phill.,  Wiynchonellapugnus  \ar.  subdentata?  Sow.,  Spt- 
rifer  disjunctus,  etc.) 

2.  Psammite  semblable  au  précédent,  mais  alternant  avec  des 
bancs  peu  épais  de  psammite  grcsiforme  grisâtre,  ayant  une  appa- 
rence rosâtre. 

Ce  psammite  devient  plus  quartzeux  et  plus  foncé  à  la  partie  supé- 
rieure. 

3.  Psammites  grésiformes  rouge  et  bigarré  en  bancs  très-puissants 
atteignant  jusqu'à  S  et  6  mètres  d'épaisseur.  J'y  ai  recueilli  :  Ortho- 
ceras  ?,  Jihynchonella  pugnus,  etc. 

4.  Calcaire  à  crinoïdes  (assise  I)  en  bancs  épais  inclinés  au  sud, 
bien  visibles  dans  une  carrière  abandonnée  sur  le  flanc  de  la  mon- 
tagne. 

Les  traits  les  plus  saillants  de  cette  coupe  sont,  d'une 
part,  la  grande  extension  des  psammites  rouges  et,  d'autre 
part,  l'absence  des  assises  de  Souverain-Pré  et  d'Évieux. 

Coupe  dans  la  tranchée  au  S.-E.  de  Naninnes. 
Fig.  7. 

La  tranchée  du  chemin  de  fer  de  la  station  de  Naninnes 
a  mis  à  découvert,  près  de  celle-ci,  des  roches  blanches, 
rouges  et  bigarrées  ayant  un  aspect  tout  particulier  et  que 
je  n'ai  su,  pendant  longtemps,  à  quel  terrain  rapporter. 

Notre  illustre  Maître,  feu  M.  d'Omalius,  avec  qui  j'eus 
l'honneur  de  les  étudier  sur  place,  pensa  y  voir  le  rhénan 
de  Dumont.  Comme  je  n'avais  jamais  observé,  jusque-là, 
ce  faciès  minéralogique  dans  aucun  autre  terrain,  je  me 


(  776  ) 
rangeai  à  l'avis  du  Maître  et  je  le  ferais  encore  aujour- 
d'hui, si  je  n'avais  retrouvé,  depuis,  des  roches  analo- 
gues dans  les  psammites  du  Condroz  de  la  tranchée  à  l'est 
de  Courrière  (1)  et,  plus  récemment,  dans  les  psammites 
du  hameau  de  Wartet  dépendant  de  la  commune  de 
Marche-les-Dames. 

Voici  la  composition  détaillée  de  l'étage  des  psammites  et 
des  dépôts  qui  le  surmonte  dans  la  tranchée  de  Naninnes. 

1.  Psammite  blanc  légèrement  pailleté  en  voie  de  décomposition. 

2.  Psammite  rouge  le  plus  souvent  bigarré  de  vert,  légèrement 
pailleté  ayant  une  tendance  à  se  diviser  en  feuillets  minces  et  se  pré- 
sentant parfois  en  bancs  assez  puissants,  devenant  schistoïdes  et  pas- 
sant à  une  argile  collante. 

3.  Psammite  schistoïde  jaunâtre  et  verdâtre. 

A.  Schiste  grisâtre  et  rougeâtre  se  divisant  en  petits  parallélipi- 
pèdcs  et  devenant  parfois  géodique  et  fossilifère  (Spirifer  disjmic- 
tus,  etc.) 

5.  Dolomie  géodique  fissurée  à  stratification  confuse  et  presque 
entièrement  cachée  par  les  éboulis.  Cette  dolomie  renferme  des 
traces  de  galène. 

Je  rapporte  les  couches  n°'  1 ,  2  et  5  de  celte  coupe  à  la 
partie  supérieure  de  l'assise  de  Monfort  à  cause  des  ana- 
logies précitées.  Quant  aux  couches  n°  4,  je  les  regarde 
comme  représentant  les  schistes  de  Famenne  et  les  cou- 
ches n°  5  le  calcaire  de  Givet.  Cette  manière  de  voir  est 
du  reste  conforme  aux  indications  de  la  carte  de  Dumont. 

Les  couches  de  la  coupe  de  Naninnes  se  trouvent  dans 
l'ordre  inverse  de  celui  qu'elles  occupent  normalement. 
On  peut  en  conclure  que  les  couches  de  nos  assises  A  et  B 
et  d'une  partie  de  C  font  défaut  en  ce  point. 


(1)  Bull,  p.  642,pl.  Il.tig.  8. 


(  777  ) 

Quant  à  l'assise  D,  on  ne  saurait  se  prononcer  avec  cer- 
titude à  son  endroit  par  la  raison  qu'il  n'existe  plus  d'af- 
fleurements entre  la  station  de  Naninnes  et  la  tranchée  de 
calcaire  carbonifère  au  INE.  de  Naninnes. 

Coupe  à   Wépioii  sur  la  rive  gauche  de  la  Meuse. 

Les  travaux  exécutés,  il  y  a  peu  de  temps,  pour  la  con- 
struction d'une  nouvelje  roule  entre  Wépion  et  Saint-Gé- 
rard, ont  mis  au  jour  une  coupe  qui  montre  le  contact  des 
psammites  et  du  calcaire  carbonifère.  C'est  d'abord  un 
psammile  rosâtre  très-micacé,  puis  un  psammite  schis- 
toïde  altéré  fossilifère  {Spirifer^  N.  Sp.?)  qui  finit  par 
alterner  avec  les  bancs  de  calcaire  à  crinoïdes  (assise  I) 
prenant  la  texture  terreuse  par  altération. 

La  nature  rainéralogique  des  psammites  de  Wépion  me 
porte  à  croire  qu'on  a  plutôt  à  faire  ici  à  quelque  couche 
supérieure  de  l'assise  C  qu'à  l'assise  D. 

Coupe  à  Malonne. 

Ce  qui  vient  d'être  dit  pour  les  psammites  de  Wépion 
s'applique  également  aux  psammites  de  Malonne  qui  sont 
constitués  par  un  psammite  rouge  en  bancs  alternant 
avec  un  psammite  schistoïde  très-feuilleté  et  très-micacé 
auxquels  succèdent  immédiatement  le  calcaire  carboni- 
fère des  Écaussines,  sous  la  forme  de  blocs  roulants  de 
calcaire  à  crinoïdes  ,  comme  l'a  montré  récemment 
M.  Dupont  (1). 

Les  couches  de  la  coupe  de  Malonne  sont  inclinées  au 


(1)  Bulletins  de  V Académie  royale  de  Belgique ,  2^  sér. ,  t.  XXXIX 
p.  297,  pi.  II,  tig.  5. 

2"*  SÉKIE,  TOME  XL.  50 


(  778  ) 
sud  et  par  conséquent  renversées  comme  celles  de  Wépion 
et  de  Naninnes. 

Coupe  en  face  de  l'abbaye  de  Marche-les-Dames. 
Fig.  8. 

4.  Psammite  verdâtre  avec  traces  de  débris  de  végétaux  en  bancs 
peu  épais,  peu  inclinés  et  alternant  avec  un  schiste  verdâtre  qui 
semble  résulter  de  sa  décomposition. 

2.  Psammite  semblable  au  précédent,  mais  plus  micacé  et  reposant 
sur  un  calcaire  siliceux  de  teinte  pâle,  légèrement  pailleté  et  fai- 
sant peu  effervescence  avec  les  acides. 

Ce  calcaire  a  élé  mis  à  nu  en  creusant  dans  l'ancien 
chemin  qui  conduit  au  hameau  de  Warlet,  un  peu  avant 
d'arriver  aux  éboulis  de  l'exploitation  d'oligiste. 

3.  Psammite  grésiforme  gris-verdâtre  en  bancs  épais  inclinés, 
20"  S.,  s'observe  dans  une  petite  carrière  abandonnée  où  il  est  sur- 
monté d'un  calcaire  siliceux  bleuâtre  bigarré  de  jaunâtre.  Ce  dernier 
se  désagrège  facilement,  devient  sableux  et  prend  alors  une  teinte 
jaunâtre,  quelquefois  d'un  blanc  éclatant  et  passe  à  une  véritable 
brèche  à  la  partie  supérieure. 

i.  Psammite  grésiforme  gris-verdâtre  finement  pailleté  dont  un 
banc  atteint  0,80  mètres  à  la  base  et  passe  à  un  psammite  schistoïde 
renfermant  d'abondantes  traces  de  débris  de  végétaux  semblables  à 
celles  des  psammiles  n»  1  et  d'autres  fossiles  tels  que  Rhynchonella 
pugnus,  etc. 

5.  Minerai  d'oligiste  oolitique,  fossilifère  [Spirifer  disjunctuSj  var. 
Arckiaci,  Alhyris  concentrka,  Von  Buch),  dans  un  schiste  bleu-violet 
caché  par  les  éboulis  d'exploitation. 

6.  Schiste  verdâtre  ayant  une  tendance  noduleuse. 

7.  Dolomie  en  bancs  massifs  fossilifères.  {Wi.  pleurodon?) 

8.  Dolomie  géodique  altérée  en  partie  recouverte  d'éboulis  dolo- 
mitiques  et  devenant  schistoïde  vers  le  bas.  Inclinaison  i?»  S. 

9.  Dolomie  schistoïde  à  l'état  d'éboulis  ayant  l'apparence    d'un 


(  779  ) 

psaiiiniite,  à  prt'inlèrc  vue,  mais  se  préseiilaiil ,  vei's  le  bas,  en  bancs 
bien  stratifiés,  inclines  4-0°  S. 

10.  Calcaire  bleu  peu  foncé  alternant  avec  des  bancs  dolomitiques 
et  renfermant  d'abondants  polypiers  dont  un  banc  est  presque  exclu- 
sivement forme  à  la  partie  supérieure  :  Jcervularia  Davidsoni , 
M.  Edw.  et  II. 

1 1.  Roche  altérée  rappelant  la  dolomie  n"  9. 

12.  Éboulis  dolomitiques. 

Toutes  les  couches  de  psamraites  de  la  coupe  de  Marche- 
les-Danies  sont  donc  comprises  entre  le  calcaire  carboni- 
fère (assise  1)  et  les  schistes  bleu-violet,  avec  couches  de 
minerai  oligisle  qui  constituent  un  horizon  bien  défini  et 
très-constant  des  schistes  de  Famenne  dans  cette  partie 
du  bassin. 

Les  schistes  verdâtres  (schistes  de  Famenne  propre- 
ment dits)  viennent  ensuite  et  sont  séparés  du  calcaire  car- 
bonifère (assise  1)  par  un  ensemble  de  calcaires  et  de  dolo- 
raies  dans  lesquels  M.  Gonthier  a  parfaitement  reconnu 
la  continuation  des  couches  analogues  deRhisnes  [\).  Seu- 
lement, d'après  ce  géologue,  les  couches  de  Rhisnes  for- 
meraient, en  ce  point,  un  pli  anticlinal,  et  toute  la  série 
précédente  se  reproduirait  en  sens  inverse,  au  delà  de 
la  dolomie.  Une  observation  attentive  m'a  démontré,  au 
contraire,  que  toutes  les  couches  de  la  coupe  de  Marche- 
les-Dames  sont  inclinées  au  sud  et  ramenées  au  jour  par 
une  faille,  comme  l'indique  la  coupe  fig.  8. 

Le  fait  le  plus  saillant  de  cette  coupe  de  Marche-les- 
Dames,  c'est  l'absence  des  assises  A  B  et  D,  mais  comme 
une  grande  partie  de  cette  coupe  est  cachée  par  les  ébou- 


(1)  Bulletins  de  l'Académie  royale  de  Belgique,  ^'^  série,  l.  XXIII, 
n«4, 1867. 


(  780  ) 
lis  et  la  végélation  je  n'ai  pas  cru  pouvoir  borner  mes  in- 
vestigations au  vallon  de  Marche-les-Dames  et  je  me  suis 
rendu,  à  cet  effet,  sur  les  différents  points  où  viennent 
affleurer,  dans  cette  partie  du  bassin,  les  coucbes  corres- 
pondantes à  celles  de  la  coupe.  Je  vais  passer  successive- 
ment en  revue  chacun  de  ces  points  : 

Carrière  et  afjieuremenls  de  Warlet. 

En  remontant  l'ancien  chemin  de  Wartel  j'ai  retrouvé, 
au  delà  du  grand  tas  d'éboulis  provenant  de  l'exploitation 
du  minerai  oligiste,  le  calaire  siliceux  déjà  observé  en  deçà 
de  cet  éboulis  et  figuré  dans  la  coupe.  J'y  ai  recueilli  de 
beaux  cristaux  de  calcite  et  de  petits  rhomboèdres  de 
dolomite,  dans  les  parties  plus  foncées. 

Un  peu  au  S.-O.  de  l'église  de  Wartet  on  a  exploité, 
comme  moellons  pour  bâtisses  dans  une  petite  carrière,  des 
bancs  épais  de  psammile  inclinés  20"  S.  C'est  un  psammite 
se  divisant  en  feuillets  minces  très-micacés  avec  parties 
terreuses. 

A  côté  de  cette  carrière  on  observe,  dans  le  chemin  qui 
conduit  à  l'église,  un  psammite  blanc  également  incliné  au 
sud  et  rappelant  tout  à  fait  celui  de  la  station  de  Naninnes 
dont  il  est  parlé  plus  haut. 

Carrières  de  Namèche. 

En  face  du  moulin  de  Wartet,  sur  la  rive  gauche  du 
ruisseau  qui  fait  la  limite  des  deux  communes  de  Marche- 
les-Dames  et  de  Namèche  et  qui  se  jette  dans  la  Meuse 
près  des  hauts  fourneaux  d'IIaigneaux,  on  exploite,  comme 
pavés,  dans  plusieurs  carrières,  un  psammite  grésiforme 
gris  devenant  rosàtre  et  parfois  très-micacé,  incliné  16°  S. 


(  781   ) 

Le  psammile  de  Namcclie,  de  môme  que  celui  de  la 
carrière  de  Wartel,  correspond  à  celui  qui  dans  la  coupe 
de  Marche-les-Dames  est  en  majeure  partie  cachée  par  la 
végétation  et  les  éboulis. 

11  n'est  pas  jusqu'au  calcaire  siliceux  du  chemin  deWar- 
tet  qui  ne  se  retrouve  un  peu  au  sud  des  carrières  de 
Naméche  où  il  a  été  exploité. 

Carrières  d'Hoiissoy  (Vezin). 

Il  existe  deux  carrières  au  hameau  d'Houssoy.  L'une 
d'elles,  située  à  l'est  de  l'église  de  Ville-en-Waret,  a  fourni, 
m'a-t-on  dit,  les  matériaux  de  construction  de  l'église  nou- 
vellement bâtie.  Cette  carrière  est  aujourd'hui  abandonnée 
et  en  partie  comblée,  mais  on  peut  encore  constater, 
néanmoins,  le  pendage  au  sud  des  bancs.  La  pierre  qu'on 
y  a  exploitée  et  dont  on  voit  encore  des  tas  aux  abords  de 
la  carrière  est  formée  d'un  psammite  grésiforme  très- 
micacé  blanchâtre,  devenant  rosaire  et  pétri  de  fossiles. 
On  y  trouve,  en  abondance,  les  Cucullœa  si  constantes  à 
ce  niveau.  J'y  ai  recueilli  les  espèces  suivantes  : 

Cucullœa  Hardingii,  Sow.  (irès-coinmune). 

—  trapezium,  Phill. 

—  amygdalina,  Phill.  (non  Sow). 
Ctjpricardia  depressa,  Phill.  (non  Sow). 
Avicula  Damnoniensis ,  Sow. 
Solenopsis  sp.? 

Orthoceras  ?  (commun). 
Rhynchonella  pleurodon ,  Phill. 

Exploitations  minières  de  Ville-en-Waret  [Vezin). 

Dans  son  travail  de  1867,  mentionné  plus  haut,  M.  Gon- 
thier  donne  une  coupe  générale  de  l'étage  des  psammites 


i  782  ) 
à  Vezin.  Cette  coupe  est  celle  des  couches  recoupées  par 
les  galeries  de  la  mine  oligiste  de  Ville-en-Waret. 

M.  Gonthier  a  bien  voulu  m'en  communiquer  le  relevé 
détaillé  avec  les  échantillons  de  roches  correspondants  et 
je  crois  utile  de  le  reproduire  ici  intégralement  parce  qu'il 
vient  confirmer,  et  pour  ainsi  dire  démontrer,  ce  que  la 
coupe  de  Marche-les-Dames  et  les  affleurements  de  Warlet, 
de  Naméche  et  d'Houssoy  montraient  déjà  bien  nettement, 
à  savoir  que  les  psammites  de  cette  partie  du  bassin  ne  se 
rapportent  qu'à  la  partie  supérieure  de  l'assise  deMonfort, 
et  que  l'on  peut  ainsi  avancer,  en  toute  sûreté,  que,  non- 
seulement  les  assises  A,  B  et  D  y  font  défaut,  mais  aussi  la 
plus  grande  partie  de  l'assise  C. 

L'examen  des  échantillons  de  roches  correspondant  au 
relevé  de  M.  Gonthier  a  achevé  de  me  fortifier  dans  cette 
opinion.  En  effet,  si  l'on  observe  attentivement,  par 
exemple,  le  psammite  grésiforme  n°  AS  de  ce  relevé  on  est 
frappé  de  voir  son  identité  parfaite  avec  celui  qu'on 
exploite  à  Mevergnies  près  d'Ath,  et  que  l'on  aurait  pu 
cependant  prendre  à  première  vue  pour  l'un  des  bancs 
inférieurs  de  Mon  fort. 

Ils  présentent  la  même  teinte  grise,  la  même  texture  et 
jusqu'aux  mêmes  petits  cristaux  de  pyrite  jaune  dont  ils 
sont  parfois  entièrement  recouverts  l'un  et  l'autre. 

Voici  maintenant  le  relevé,  tel  que  me  l'a  communiqué 
M.  Gonthier,  des  différents  bancs  recoupés  par  les  galeries 
de  la  mine  de  la  Ville-en-Waret  (Vezin). 


4.  Dolomie  du  calcaire  carbonifère  de  Namur  .     . 
2.  Couche  mince  de  minerais  d'iiydroxyde  de  fer. 

5.  Argile  jaune  sablonneuse 

A.  Couche  mince  de  minerais  d'hydroxyde  de  fer. 


0,78 


(  783  ) 

5.  Psammites  gris-foncc,  à  grains  serrés,  très-durs,  con- 
tenant des  paillettes  de  pyrites  et  de  mica.  Petits  bancs  de 

2  à  3  centimètres  d'épaisseur 0,20 

6.  Petits  bancs  de  psammites  de  O'ï'jOlS  à  0,03.  Les 
grains  de  quartz  n'y  sont  pas  aussi  uniformément  dissémi- 
nés oue  dans  les  précédents.  Aspect  foliacé  parallèlement 
aux  strates  avec  alternances  de  couleurs  du  gris-pâle  au 
gris-foncé.  Il  contient  également  des  paillettes  de  pyrites  et 

est  très-micacé  aux  points  de  stratification 4,60 

7.  Grès  gris-foncé  à  grains  serrés.  Deux  bancs,  ensemble  1,40 

8.  Schiste  gris-bleu,  fortement  micacé,  assez  résistant,  se 
divisant  en  feuillets  assez  réguliers  de  2  à  4  millimètres 
d'épaisseur.  Assez  alumineux 0,30 

9.  Psammites  gris  très-dur,  fortement  micacé  aux  joints 
des  strates.  En  petits  bancs  de  0,01  à  0,03  dont  les  uns 
sont  massifs,  les  autres  schistoïdes.  Se  divisent  en  feuillets 

de  1  à  3  millimètres 0,10 

10.  Même  schiste  que  n«  8 0,10 

H.     id.     psammite  que  n"  9 0,15 

12.  id.     schiste  que  n"  8 0,15 

13.  Grès  gris  très-dur,  à  cassure  conchoïde.  Un  banc  de 

0,60,  puis  les  autres  plus  minces  et  de  diverses  épaisseurs.  5,60 

14.  Schiste  gris-pâle,  tendre,  fortement  mélangé  de  py- 
rites, se  divisant  en  feuillets  irréguliers.  Puis  un  banc  de 
psammite  de  même  nuance,  fortement  micacé  de  5  à  8 
centimètres  d'épaisseur 0,70 

15.  Psammite  de  même  nuance  que  le  n°  14,  mais  à 
grains  plus  fins  et  plus  serrés,  fortement  micacé.  Bancs  de 

0,05  à  0,06 0,30 

16.  Psammite  gris-pâle,  à  grains  serrés,  cassure  écail- 
leuse  coloré  par  taches  zonaires  en  gris  pâle  et  en  brun 
pâle;  fortement  coloré  en  jaune  dans  les  joints.  Plusieurs 

bancs  d'épaisseurs  différentes 7^50 

17.  Calcaire  siliceux  à  fond  gris  pâle,  nuancé  de  rose  et 

de  vert,  très-dur 4  25 


0,67 


(  784  ) 

18.  Argile  plastique,  sablonneuse  gris-pâle 

19.  Calcaire  siliceux  gris-pâle,  nuancé  de  rose  et  de 
vert;  grains  serrés,  dureté  moyenne 

20.  Argile  comme  n»  18 

21.  Calcaire  siliceux  comme  n°  19 

22.  Argile  comme  n»  18 /' 

23.  Grès  gris-pâle,  dur,  plusieurs  petits  bancs  de  2  à  3 
centimètres 4,25 

24.  Psammite  gris-jaune  assez  dur,  bancs  de  0,04  centi- 
mètres           0,10 

25.  Psammite  très-dur,  à  fond  gris-pâle,  tacheté  de  rose 

et  de  brun 0,25 

26.  Psammite  gris-sale,  fortement  micacé,  à  grains  très- 
serrés.  L'intérieur  des  bancs  est  criblé  de  cavités  milliaires 
dont  les  bords  sont  tapissés  par  Thydroxydc  de  fer.  Bancs 

de  0,05 0,50 

27.  Psammite  semblable  au  précédent,  sauf  qu'il  est  un 
peu  plus  foncé  et  que  les  cavités  tapissées  d'hydroxyde  de 
fer  affectent  la  forme  de  dcndrites  traversant  toute  l'épais- 
seur du  banc  qui  est  de  0,05.  f^es  joints  de  stratification  des 

bancs  26  et  27  sont  tapissés  d'argiles  ocreuses     ....  1,25 

28.  Psammites  gris-pâle,  tendre,  criblé  comme  n"  26  de 
cavités  tapissées  en  jaune  par  l'hydroxide  de  fer.  Bancs  de 

1  à  3  centimètres 1,00 

29.  Psammites  gris-pâle ,  durs,  ayant  comme  les  précé- 
dents des  cavités  tapissées  en  jaune,  mais  en  plus  petite 
quantité  et  d'un  jaune  beaucoup  plus  pâle 3,70 

50.  Psammites  gris-violet,  fortement  micacé,  surtout  aux 
joints  de  stratification.  Bancs  de  2  à  4  centimètres  .     .     .  3,70 

31.  Psammites  gris-violet,  fortement  micacés,  dans  d'au- 
tres endroits,  surtout  vers  la  surface;  ces  bancs  ont  la  cou- 
leur jaune-brun.  (Principaux  bancs  à  cucuUées)  .     .     .     .  1,50 

32.  Grès  gris,  un  peu  coloré  par  l'hydroxyde  de  fer, 
cassure  écailleuse,  les  joints  des  strates  micacés.  Bancs  de 

0,06  à  0,07 0,85 


(  785  ) 


33.  Psammites    gris-jaunâlrc,    petits    bancs    d'environ 

0,04  centimètres 0,15 

3i.  Psammite  brun-violet,  structure  grossière,  passant  au 

schiste  =t  dur  micacé.  Bancs  de  0,02  à  0,04  ccnlimctres  .  I,i0 

5î).  Psammites  en  petits  bancs  gris-jaune  cl  gris-violet, 

micacé,  très-dur i,00 

56.  Psammites  jaunes  micacés  ,  =t  durs,  aspect  rubané, 

bancs  de  0,03  à  0,06 2,00 

37.  Grès   gris-jaune   en  gros  bancs  sans  stratification 
régulière.  Dur ^-^O 

38.  Schistes  zonaircs  bleu  et  brun  micacé 8,15 

39.  Psammite  gris-brun  micacé  ±  désagrégé,  ±  tacheté 
d'hydroxydc  de  fer 0,05 

40.  Schiste  comme  n"  38 /      ^  .^ 

41.  Psammite  bleuâtre j 

42.  Psammite  gris-jaunâtre  ±  désagrégé,  micacé.     .     .  1,40 

43.  Psammites  gris,  fortement  micacés,  bancs  de  0,04 
centimètres 2,50 

44.  Grès  gris-bleuâtre 4,50 

45.  Grès  gris.  Bancs  de  0,05  centimètres    .     .     .     »     .  3,00 

46.  Psammite  bleu,  très-dur^  micacé,  bancs  de  0,03  cen- 
timètres      ,      ....  0,03 

47.  Schiste  bleu 4,50 

48.  Grès  gris  à  grains  très-fins.  Cassure  conchoïde.   Un 
banc  de  0,90  centimètres.  Vers  la  surface  ce  banc  se  divise 

en  deux  de  0,40  chaque 0,90 

49.  Psammite  bleu 0,05 

50.  Schiste  bleu 2,00 

51.  Psammite  bleu 0,05 

52.  Schiste  bleu 1,20 

53.  Psammites  bleus  très-durs  et  serrés,  banc  aquifère.  0,07 

54.  Schiste  bleu 2,50 

55.  Psammite  gris-bleu 0,05 

56.  Schislebleu 1,65 

57.  Psammite  bleu  très-micacé     ........  0,05 


(  786  ) 

Mètres. 

58.  Psammite  bleu,  ±  durs,  alternant  comme  ci-dessus 

avec  des  schistes 8,50 

59.  Veinettedc  mine,  oligistc  oolilique 0,05 

60.  Schiste  bleu,  plus  alumincux  à  la  jonction  de  la  raine.  0,50 

Cl.  Psammite  bleu  très-dur 0,08 

62.  Schiste  bleu,  très-alumineux 0,20 

65.  Veinetle  de  mine  oligiste  oolitique 0,i2 

U.  Schiste  bleu 1,30 

65.  Psammite  bleu-foncé,  très-dur 0,05 

66.  Schiste  bleu 2,50 

67.  Psammite  bleu-foncé,  très-dur,  se  clivant  en  prismes 
de  répaisseur  du  banc.  Fortement  micacé  aux  strates,  un 

banc 0,50 

68.  Schiste  bleu i,S5 

69.  Psammite  micacé  bleu-foncé,  très-dur 0,10 

70.  Deux  couches  de  mine  oligiste  oolitique  de  0,20  à 
0,50  d'épaisseur  chacune  séparées  par  un  banc  de  schiste 
dzdur 1,00 

71.  Schiste  bleu  divisé  comme  ci  dessus  par  des  couches 

de  5  à  10  centimètres  de  psammite  bleu 19,00 

72.  Schiste  bleu  rempli  de  noyaux  ovoïdes  d'argiles  py- 
riteuses 0,90 

73.  Dolomie  dure  à  Spirifer  Verneuili.  Calcaire  de 
Rhisnes 


Total.     .     .     .        98,61 


Affleurements  de  Gelbressée. 

Je  n'ai  pu  observer  le  psammile  de  Gelbressée  que  dans 
un  chemin  du  parc  dépendant  du  château  de  Franc-Waret, 
mais  c'est  toujours  le  psammile  schistoïde,  très-pailleté, 
blanchâtre  et  jaunâtre  correspondant  à  celui  de  Marche- 
les-Dames. 


(  787) 

J'ajouterai  que  j'ai  retrouvé,  non  loin  du  psammite, 
à  peu  près  à  la  limite  des  deux  communes  de  Gelhressée 
et  de  Franc-Waret ,  au  point  où  l'indique  M.  Gonthier 
sur  sa  carte,  un  schiste  verdàtre  fossilifère  (schiste  de 
Famenne  proprement  dit)  qui  a  été  mis  à  nu  dans  une 
petite  tranchée  pratiquée  à  l'ouest  du  château  et  d'une 
maison  qui  en  dépend  (i). 

Afflem^enient  de  Rhisnes. 

Je  n'ai  pu  ohserver  le  psammite  à  Rhisnes  que  sur  le 
hord  du  ruisseau,  au  nord  du  mamelon  dolomitique  où  se 
trouve  l'église.  Il  ne  présente  rien  de  particulier. 

Carrières  d'Isnes. 

Le  psammite  d'fsnes  repose,  comme  on  l'a  vu  jus- 
qu'ici dans  cette  partie  du  bassin  septentrional,  sur  les 
schistes  bleu-violet  avec  couches  de  minerai  oligiste. 

M.  Dewalque  assigne  une  direction  =  85°  et  une  incli- 
naison S  =  il°  aux  psammites  exploités  pour  dalles  et 
pavés,  dans  deux  carrières  situées  un  peu  à  l'est  d'Jsnes- 
Sauvage  (2). 

Le  psammite  des  Isnes  renferme,  comme  celui  d'Hous- 
soy,  une  grande  quantité  de  CucuUaea  Hardingii,  Sow. 
J'ai  distingué  aussi  parmi  les  exemplaires  de  la  collec- 
tion du  Musée  :  Ciicullaea  trapezium,  Phill.  En  outre  j'ai 


(1)  M.  ringénieur  Gonthier  a  entrepris  de  dresser,  à  Téchelledu  720,000, 
la  carie  géologique  détaillée  en  quatre  feuilles  des  environs  de  Namur 
dont  une  partie  est  déjà  terminée.  M.  Gonthier  y  distingue,  par  une  teinte 
spéciale,  les  schistes  bleu- violet  avec  oligiste  des  schistes  de  Famenne 
proprement  dits. 

(-2)  Bull,  de  la  Soc.  géol.  de  France,  t.  XX  (1862-1863). 


(  788  ) 
mentionné  les  espèces  suivantes   des   Isnes   dans   mes 
tableaux  (1)  : 

Orthoceras  planiseptaium ,  Sandb. 
Spirifer  disjunctus,  Sow. 
Productus  praelonrjus,  Sow. 

Affleurement  de  Mielmont. 

Les  psammites  s'observent  encore  dans  la  coupe  du 
Mazy,  entre  le  calcaire  de  la  ferme  Fanué  et  la  dolomie 
carbonifère,  près  le  château  de  Mielmont,  mais  ils  ne  s'y 
trouvent  qu'à  l'état  d'éboulis.  C'est  toujours,  néanmoins, 
un  psammite  grésiforme  semblable  aux  précédents. 

Carrière  de  La  Roq  (Feluy). 

Au  bois  de  la  Roq  sur  la  commune  d'Arquennes,  près  de 
Feluy,  on  observe  les  psammites  derrière  l'écluse  n"  31, 
sur  la  rive  droite  du  canal  de  Charleroi,dans  une  carrière 
abandonnée  dont  les  bancs  sont  très-peu  inclinés.  Ils  se 
montrent  sur  une  épaisseur  d'une  dizaine  de  mètres  à  l'ex- 
trémité septentrionale  de  la  carrière  et  on  peut  les  suivre, 
dans  cette  même  carrière,  sur  une  longueur  d'environ 
150  mètres  du  nord  au  sud.  Ils  sont  formés  d'un  psammite 
grésiforme  grisâtre  devenant  jaunâtre  et  rougeâtre  par  al- 
tération, en  bancs  puissants  fortement  fissurés,  surtout  à 
la  partie  supérieure,  et  renferme  d'abondants  débris  de 
végétaux  (traces  d'axes  assez  volumineux). 

Ce  psammite  alterne  avec  des  bancs  à  texture  terreuse, 
d'un  jaune  pâle  devenant  parfois  très-argileux  et  renfer- 
mant les  mêmes  débris  de  végétaux.  Un  lit  charbonneux 

(1  )  Bull,  de  l'Acad.  roy.  de  Belgique,  t.  XXX IX  ,  "1^  série  ,  pp.  C50  à  6o0. 


(  789  ) 
s'observe  à  l'exlrémilé  septentrionale  de  la  carrière  et  vers 
le  bas  de  celle-ci. 

M.  Malaise  a  recueilli  dans  le  psammite  de  la  Roq  des 
débris  de  poissons  rapportés  à  Vlloloptychus  nobilissi- 
mus,  Ag. 

Carrières  des  Ecaussines. 

En  allant  aux  Ecaussines  par  la  chaussée  de  Nivelles  à 
Soignies  on  rencontre  une  première  carrière  abandonnée 
et  envahie  par  les  eaux  (au  moment  où  je  la  visitai,  la  der- 
nière fois,  en  octobre  i875).  Une  2'  carrière  exploite,  pour 
en  faire  des  meules,  des  bâches,  des  crèches,  etc.,  des  bancs 
épais  à  peu  près  horizontaux  et  très-fissurés  de  psammite 
grésiforme  parfois  très-pailleté.  La  pierre  n'est  pas  assez 
consistante  pour  qu'on  en  puisse  faire  des  pavés. 

A  la  partie  supérieure  de  la  carrière  apparaît  un  banc 
à  texture  terreuse  tout  à  fait  semblable  à  ceux  de  La  Roq. 
Parmi  les  éboulis  de  la  carrière  se  montrent  des  traces  de 
débris  de  végétaux  sur  un  psammite  très-micacé.  La  roche 
se  montre  sur  une  dizaine  de  mètres  dans  cette  carrière. 

Dans  une  5^  carrière  la  pierre  est  un  peu  plus  dure ,  on 
en  fait  des  meules  et  des  pavés.  —  A  la  partie  supérieure 
s'observe  encore  un  banc  à  texture  terreuse  d'un  jaune 
pâle  avec  parties  argileuses  verdâtres,  comme  dans  la  car- 
rière de  La  Roq.  —  Il  y  a  aussi  des  traces  de  débris  de  vé- 
gétaux dans  les  éboulis. 

Je  crois  que  c'est  dans  cette  carrière  que  j'ai  observé, 
antérieurement  à  1875,  que  le  banc  le  plus  inférieur  était 
un  psammite  grésiforme  zonaire. 

Enfin,  dans  une  4"^  carrière  située  au  N.-O.  des  précé- 
dentes la  roche  est  plus  dure  et  plus  grisâtre  et  l'on  en 
fait  des  pavés.  Au-dessus  des  bancs  de  psammite  grési- 


(  790  ) 

forme  exploités  s'observe  un  banc  à  texture  terreuse  avec 
lit  charbonneux  et  parties  argileuses  verdâtres.  On  trouve 
aussi  dans  cette  carrière  des  traces  de  débris  de  végétaux 
sur  les  éboulis. 

Si  le  lit  charbonneux  de  cette  carrière  correspondait 
exactement  à  celui  qu'on  vient  de  voir  dans  la  carrière  de 
La  Roq,  cela  expliquerait  pourquoi  les  travaux  ont  cessé 
dans  cette  dernière  carrière  la  pierre  exploitable  s'y  trou- 
vant à  un  niveau  inférieur  au  lit  charbonneux  lequel  est 
déjà  situé  au  bas  de  la  carrière. 

Le  contact  de  l'étage  des  psammites  avec  le  calcaire  car- 
bonifère s'observe  aux  Écaussines  dans  la  carrière  à  pavés, 
aujourd'hui  abandonnée,  appartenant  à  M.  le  comte  de 
Spangen.  M.  l'ingénieur  Cornet  qui  a  visité,  à  plusieurs 
reprises,  cette  carrière,  a  bien  voulu  me  communiquer  l'ex- 
trait suivant  de  ses  notes  au  sujet  de  cette  carrière,  dont 
les  couches  se  présentent  comme  suit  de  haut  en  bas  : 

«  i.  Bancs  très-réguliers  de  calcaire  siliceux,  bleu-grisâtre,  à  tex- 
«  ture  compacte,  très-dur  à  la  taille,  se  brisant  en  éclats  aigus  (comme 
»   du  verre,  disent  les  ouvriers). 

r>  Ils  ont  de  0,004  à  0,60  de  puissance  et  alternent  avec  quelques 
r>   bancs  de  calschiste  gris. 

r>  2.  Bancs  de  calschiste  et  d'une  roche  grise  assez  tendre  calca- 
»  reuse,  remplie  de  géodes  cristallines.  C'est  plutôt  un  calcaire  très- 
«    argileux  qu'un  schiste  ou  un  grès  calcareux. 

»  5.  Grès  non  calcareux,  blanc,  à  grains  assez  fins,  formant  un 
»   banc  de  0,60  m.  de  puissance.  Il  est  tout  à  fait  à  fleur  d'eau. 

»  Sous  l'eau  on  voit  un  banc  de  psammite  bien  feuilleté  tout  à  fait 
»   semblable  au  psammite  exploité  dans  les  autres  carrières.  » 

Le  psammite  des  Écaussines,  de 'même  que  celui  de 
La  Roq  et  que  ceux  de  Mevergnies  et  d'Atlre  qui  vont  être 
passés  en  revue,  correspond  à  la  partie  supérieure   de 


(791  ) 

l'assise  de  Monforl  et  son  contact  avec  le  calcaire  carboni- 
fère, contact  qu'on  va  voir  se  reproduire  à  Mevergnies, 
indique  bien  l'absence  de  l'assise  D  sur  chacun  de  ces 
points. 

Carrières  de  Mevergnies  et  d'Attre  près  d'Ath. 

Fig.9. 

La  principale  de  ces  carrières  est  située  sur  la  commune 
de  Mevergnies  et  appartient  à  M.  Declercq.  On  y  voit  le 
contact  de  l'étage  des  psammites  avec  le  calcaire  carboni- 
fère et  les  couches  peu  inclinées  de  ces  deux  terrains  sont 
recouvertes  transgressivemenl  par  un  dépôt  tertiaire  non 
encore  mentionné.  Voici  la  coupe  détaillée  de  la  carrière 
de  Mevergnies  : 

\.  Limon  quaternaire  devenant  sableux,  plus  pâle  et  stalifîé  vers 
le  bas,  où  Ton  observe  un  niveau  de  cailloux  anguleux  peu  abondants 
avec  les  débris  d'une  roche  brunâtre. 

2.  Sables  blanchâtres  et  jaunâtres ,  mouchetés  de  noir,  mais  géné- 
ralement plus  jaunes  à  la  partie  supérieure. 

Ces  sables  rappellent  tout  à  fait  ceux  des  environs  de  Bruxelles 
que  Dumont  rapporte  à  son  système  tongrien.  Ils  sont  généralement 
séparés  des  roches  sous-jacentes,  dans  la  carrière,  par  un  dépôt  cail- 
louteux formé  de  débris  de  phtanite  et  d'autres  roches  passant  parfois 
à  une  espèce  de  poudingue. 

5.  Schistes  noirs  avec  quelques  bancs  de  calcaire  à  crinoïdes  géo- 
diques,  très-fossilifères. 

4.  Psammite  grésiforme,  parfois  zonaire  et  rappelant  alors  le  banc 
inférieur  de  la  5«  carrière  des  Ecaussines.  On  en  fait  des  pavés.  Ce 
psammite  devient  celluleux  et  fossilifère  à  la  partie  supérieure  (Or" 
thoceres  planiseptatwn ,  Sandb.,  etc.) 

Il  est  aussi  quelquefois  entièrement  pailleté  de  petits  cristaux  de 
pyrite. 

Les  carrières  Duchâleau  et  Cambron  situées  non  loin 


(  792  ) 
de  la  précédente,  mais  sur  la  commune  d'Attre,  présentent 
la  même  répétition  de  couches  qu'à  Mevergnies.  Dans  la 
seconde  de  ces  carrières  qui  est  la  plus  éloignée,  on  ob- 
serve, sous  les  sables  blanc  et  jaune,  un  dépôt  caillouteux 
variant  de  quelques  centimètres  à  plus  de  0,50  mètres 
d'épaisseur  et  séparé  des  psammites  à  pavés  par  1,50 
à  2  mètres  de  roches  altérées,  argileuses  et  terreuses, pro- 
bablement carbonifères. 

Les  bancs  supérieurs  des  psammites  sont  fréquemment 
à  texture  terreuse  et  parfois  très-caverneux  dans  les  car- 
rières d'Attre. 

\ll  —  Constitution  des  psammites  du  Condroz  dans  le 
Boulonnais. 

Je  n'ai  que  peu  de  choses  à  ajouter  à  ce  qui  a  été  publié 
jusqu'ici  sur  les  psammites  du  Boulonnais  et  si  je  leur  con- 
sacre ici  quelques  lignes,  ce  n'est  que  pour  faire  ressortir 
leur  complète  analogie  avec  ceux  du  bord  septentrional  de 
notre  bassin  septentrional  et  montrer  ainsi  la  persistance 
de  notre  grande  lacune  jusque  près  de  la  Manche. 

M'étant  rendu  en  août  1874  dans  le  Boulonnais,  j'ai  pu 
observer  les  psammites  d'abord  à  l'ouest  de  Tiennes,  sur 
la  rive  droite  du  ruisseau  de  la  Basse-iNormandie  où  ils 
sont  exploités  dans  plusieurs  carrières.  C'est  un  psammite 
blanchâtre  devenant  rosâtre  en  bancs  peu  inclinés,  le  plus 
souvent  schistoïdes  et  très-micacés,  quelquefois  grési- 
formes  et,  dans  ce  cas,  utilisés  comme  pavés  et  comme 
dalles. 

J'ai  observé  encore  les  psammites  dans  la  carrière  de 
S^^-Godelaine  où  ils  sont  également  exploités  comme  pavés. 
Ces  psammites  sont  tout  à  fait  semblables  à  ceux  qui  font. 


(795) 
dans  notre  bassin  septentrional,  l'objet  d'une  importante 
industrie.  Cette  analogie  n'a  pas  échappé  à  M.  Gosselet 
qui,  dès  1860,  rapportait  les  psammites  du  Boulonnais  à 
ceux  des  Écaussines  (1). 

Les  psammites  du  Boulonnais  renferment,  d'après 
M.  Godwin-Auslen  qui  a  fait  une  étude  spéciale  de  cette 
contrée  (2),  les  trois  espèces  de  CimiUaea  mentionnées 
plus  haut  dans  la  carrière  d'Houssoy. 

C'est  la  présence  de  ces  lamellibranches  dans  les  psam- 
mites du  Boulonnais  qui  les  a  fait  appeler  Grès  à  Unio 
par  Bozet  et  Grès  à  Cyprîcardes  par  M.  Du  Souich. 

D'après  ^1.  Gosselet ,  on  peut  suivre  les  psammites  dans 
le  Boulonnais  depuis  le  chemin  de  Landrethun  à  Tiennes 
jusqu'à  la  ferme  d'Eslinghen  où  ils  ont  été  rencontrés  en 
creusant  un  puits.  Au  delà  de  ce  point  ils  disparaîtraient 
par  l'effet  d'une  faille  qui  mettrait  en  contact  le  terrain 
carbonifère  et  le  calcaire  dévonien  à  Spirifer  Verneuili. 


RESUME  ET  CONCLUSION. 


Il  résulte  de  ce  qui  précède  que  l'étage  dévonien  des 
psammites  du  Condroz  présente,  dans  le  bassin  de  Theux, 
dans  le  bassin  septentrional  (entre  Aix-la-Chapelle  et  Ath) 
et  dans  le  Boulonnais,  les  mêmes  relations  stratigra- 
phiques  que  dans  le  Condroz. 

Non-seulement,  en  effet,  chacune  des  quatre  assises  de 


(1)  Mémoire  sur  les  terrains  primaires,  p.  127;  1860. 

(2)  Quart.  Journ.  of.  geol.  Soc,  Lond.  t.  IX,  p.  351. 

2""*  SÉRIE,  TOME  XL.  51 


(  794  ) 
l'étage  conserve  ses  caractères  dislinclifs,  mais  chacune  des 
subdivisions  de  l'assise  et,  Ton  pourrait  presque  dire,  cha- 
cune des  couches  importantes  de  ces  subdivisions,  offre 
une  constance  des  plus  remarquables  dans  ses  caractères 
pétrographiques  et  paléontologiques. 

L'échelle  stratigraphique,  établie  sur  les  psammites  de 
rOurthe  et  vérifiée  dans  tout  le  Condroz,  reste  donc  exac- 
tement la  même  sur  toute  l'étendue  du  territoire  qui  fait 
l'objet  de  cette  communication.  L'une  des  principales  con- 
séquences de  mes  observations  Sur  les  psammites  du  Con- 
droz en  Condroz,  comme  l'a  fait  remarquer  M.  Dupont 
dans  son  rapport  à  l'Académie  (1),  c'est  que  certaines  as- 
sises tendent  parfois  à  s'y  amincir  dans  des  proportions 
Irès-sensibles.  C'est  aiubi  que  j'ai  montré,  par  des  coupes 
prises  en  différents  points  de  la  vallée  du  Hoyoux,  que  l'as- 
sise de  Souverain-Pré  (assise  B)  n'olfre  plus  guère,  dans 
cette  partie  du  Condroz,  que  quelques  mètres  d'épaisseur 
alors  que  les  trois  autres  assises  d'Esneux,  de  Monfort  et 
d'Évieux  (A,  C  et  D)  présentent,  au  contraire,  une  série  de 
couches  au  moins  aussi  complète  que  sur  l'Ourthe  et  que 
l'une  d'elles  (l'assise  de  Monfort)  donne  lieu  à  des  exploi- 
tations non  moins  considérables. 

Le  même  phénomène  s'observe  dans  notre  bassin  sep- 
tentrional oii  non-seulement  certaines  assises  diminuent 
d'épaisseur,  mais,  ce  qui  est  beaucoup  plus  important,  dis- 
paraissent même  complètement  et  constituent  ainsi  de 
véritables  lacunes. 

Le  tableau  suivant  est  destiné  à  faire  apprécier  l'impor- 
tance de  ces  lacunes. 


(I)  Bull.,  p.  iSi. 


(793  ) 


DÉSIGNATION 

des 

affleurements  de  VcUx^e  des  psammiles  du  Condroz 
dans  le  bassin  de  Tlieux ,  dans  le  bassin  septen- 
trional (entre  Aix-la-Chapelle  et  Ath)ctdans 
le  Boulonnais. 

S 

a 
û 

1 

< 

îi 

ASSISB 

de  Monfort. 

ù          £ 

1    i 

a           3 

1 

■M 

S 

A. 

B. 

c. 

D. 

1.  Coupe  entre  Theux  et  Franchimont.    .    .     . 

2.  Coupe  des  tranchées  près  la  station  de  Mont- 

-+- 

-\- 

-+- 

-+- 

-h 
-+- 
-+- 
-+- 
-t- 
-f- 

-\- 

+ 

+ 

-4- 
-h 
-f- 
-+- 
+ 

-4- 
-+- 

-+- 

? 
-H 

4.  Coupe  de  Dolliain,  près  de  Verviers    .     .    . 
o.  Coupe    entre    la    station  de  Trooz-Aval   et 

-4- 
-4- 

6.  Coupe  du  Fond  de  Cry  à  Chaudfontaine    .    . 

7.  Coupe  à  An"leur  sur  l'Ourthe 

8.  Coupe  sur  la  commune  d'Ehein,  près  d'Engis. 

9.  Coupe  à  Huy,  sur  la  rive  droite  de  la  Meuse  . 
10.  Coupe  à  la  station  de  Naninnes 

H- 

? 

M.  Coupe  à  Wépion 

12.  Coupe  à  Malonne 

13.  Coupe  en  face  de  l'abbaye  de  Marche-les- 
Dames 

44.  Carrière   et   affleurements    du   hameau    de 
Wartet 

lo.  Carrières  de  Namêche 

•16.  Carrières  de  Houssoy  (Vezin) 

17.  Exploitations    minières   de  Ville  -  en -Waret 
(Vezin) 

18.  Affleurement  de  Rhisnes 

■18.  Carrières  des  Isnes 

19.  Affleurement  de  Mielmont 

20.  Carrière  de  La  Roq  fFeluy) 

21.  Carrières  des  Écaussines 

22.  Carrières  de  Fiennes  (Boulonnais)  .... 

23.  Carrière  de  S'«-Godelaine  (Boulonnais)    .    . 

Ce  qui  ressort  principalement  de  l'examen  de  ce  tableau 
c'est  qu'une  lacune  considérable  affecte,  au  moins,  la  plus 
grande  partie  du  bassin  septentrional.  Non-seulement,  en 


(  796  ) 
effet,  les  assises  A ,  B  et  D  y  font  complètement  défaut, 
mais  l'assise  C  elle-même  ne  s'y  trouve  représentée  que 
partiellement. 

Les  psammiles  de  Marche-les-Dames  et  de  Vezin  placés 
entre  les  schistes  de  Famenne  et  le  calcaire  carbonifère 
peuvent  servir  à  démontrer  l'existence  de  cette  grande 
lacune  sur  le  bord  septentrional  du  bassin.  En  effet,  ni  la 
coupe  en  face  de  l'abbaye,  ni  le  relevé  détaillé  des  galeries 
de  la  mine  de  Ville-en-Waret  ne  montrent  le  moindre  ves- 
tige dé  la  présence  de  l'assise  d'Esneux,  ni  de  l'assise  de 
Souverain-Pré,  ni  de  l'assise  d'Évieux,  non  plus  que  de  la 
partie  inférieure  de  l'assise  de  Monfort  constituée  par  le 
gros  banc,  le  blanc  banc ^  etc.,  de  Monfort  exploités  dans 
tout  le  Condroz,  dans  le  bassin  de  Theux,  à  Montzen  ,  à 
OIne,  à  Chaudfontaine  et  sur  la  Meuse. 

Or,  comme  M.  Gonthier  évalue  à  5i,o0  mètres  l'épais- 
seur totale  de  l'étage  des  psaramites  à  Ville-en-Waret  et 
que  j'ai  estimé  approximativement  à  600  mètres  la  puis- 
sance totale  de  cet  étage  sur  l'Ourthe,  il  s'ensuit  qu'on 
peut  évaluer  approximativement  notre  grande  lacune  à 
550  mètres. 

Je  me  bornerai  pour  le  moment  à  constater  l'existence 
de  cette  lacune  dans  l'étage  des  psammites  parce  que  c'est 
la  seule  qu'il  m'ait  été  donné  de  pouvoir  suivre  sur  une 
assez  grande  étendue. 

Ce  n'est  pas  à  dire  pour  cela  qu'il  n'en  existe  pas  d'au- 
tres, mais,  outre  les  dilïicultés  qu'opposent  souvent  la  vé- 
gétation, d'une  part,  l'altération  par  les  agents  atmosphé- 
riques, d'autre  part,  il  ne  suffît  pas  qu'un  certain  groupe 
de  couches  fasse  défaut  dans  un  affleurement  pour  con- 
clure à  une  lacune.  Cette  absence  de  couches  peut  être 
due,  notamment,  à  l'existence  d'une  faille. 


Fio-  l.Counr  mire  Thciilx  et  Krandumon 


Mil 


■Kea&SfSiMt 


Fio-  3.  Onipe  de  i;i  Imiirhrc  <U'  Dolhrtui. 


FlCT-  4..  Coupe  entre  la  .Slalion  ilc  Trooz-A\-al   et  Bassc-Fraipù/it 


Ool/uiin  ,Sl<t/     rimnrl 


Fi"- ."Coupe  du  Fond  de  C ry  a  Cliaiiclfcnlaine. 


-^e^^r^ 


_y 


Fij'tx  Coupe  à  Huv   sur  la  rive  droite  de  la  Meuse 


Fio-.7.CoDpe  dajis  la  trandifleau  SE  de  Najiinncs 


Panlsiirleriiissemi 


Fig-  8   Coupe  en  face  de labbave  de  Marche -Ics-Dames 

Entrvc  (le        CtLh'rte  délit. 


Fiœ.9.CoiipcJeIa  . 


LEGE-VOE. 

/'sommités  <fu   tbnffrv'~ 

[3     lZ]     LZ]    S    ■! 

y,.fturf    /;/»..•/!«.•     ,;:f,.,.w .t»™»» /K- ./.J/iyX  JEumi^ i'MiMi/»r  «»~j/.» 


^   :3    lu 


(  797  ) 


Descriptions  de  quelques  oiseaux  nouveaux;  par  M.  Alpli. 
Dubois,  conservateur  au  Musée  royal  d'histoire  natu- 
relle de  Belgique. 

1.   CYAW(»CITTA   YUCATAilICA    (s|).   nOV.). 

Ad.:  Nigei-riina;  dorso,  alis  caudaque  cœruleis;  infrà  rectricibus 
nigris;  tectricibus  subcaudalibus  nigro-cœruîeis;  roslro  nigro;  pcdi- 
bus  rufescenlibus, 

Jun.:  Alba;  dorso,  alis  caudaque  g lauco-cœruleis;  infrà  rectricibus 
nigris,  apicibus  lateralibus  albis;  femoribus  nigris;  rostro  albicanle; 
pedibus  rufescenlibus. 

L'adulte  est  d'un  noir  uniforme,  avec  le  dos,  les  ailes 
et  le  dessus  de  la  queue  d'un  beau  bleu;  dessous  des  rec- 
trices  noir;  tectrices  sous-caudales  d'un  bleu  noirâtre;  bec 
noir;  pattes  roussâtres. 

Le  jeune  diffère  beaucoup.de  l'adulte  :  toutes  les  parties 
qui  sont  noires  chez  ce  dernier,  sont  blanches  dans  le 
jeune  âge;  dos,  ailes  et  dessus  de  la  queue  d'un  bleu 
légèrement  verdàtre;  dessous  des  rectrices  noir,  mais  les 
rectrices  latérales  terminées  de  blanc;  plumes  des  jambes 
noires;  pattes  roussâtres;  bec  blanchâtre. 

Cet  oiseau  est  très-voisin  du  C.  Beecheii,  Vig.,  avec 
lequel  il  a  sans  doute  été  confondu  jusqu'ici;  mais  il  s'en 
distingue  facilement  par  sa  taille  beaucoup  plus  petite.  La 
différence  dans  les  dimensions  de  toutes  les  parties  est 
tellement  considérable,  qu'il  me  semble  impossible  d'ad- 
mettre le  C.  Yucatanica  comme  une  simple  variété  ou 
race  locale.  Le  bleu  des  régions  supérieures  est  aussi 
moins  foncé  que  chez  le  C.  Beecheii.  Voici,  du  reste,  les 


(  798  ) 

dimensions  des  deux  espèces,  prises  sur  des  individus 
adultes  du  Musée  de  Bruxelles. 

C.    Yucatanica.  C.    Beecheit. 

Longueur  totale  à  partir  du  front.  310  millim.  370  millim. 

—  des  ailes UO      »  480      ^ 

—  de  la  queue ioO      »  i90      » 

—  du  bec  (en  dessus)    .    .          30      »  30      » 
Habitat Yucatan  Californie. 

Le  Musée  royal  d'histoire  naturelle  de  Belgique  possède 
cinq  individus  de  cette  nouvelle  espèce ,  dont  deux  jeunes. 
Chez  l'un  de  ces  derniers,  les  parties  inférieures  sont  déjà 
entremêlées  de  plumes  noires. 

Trois  de  ces  oiseaux  ont  été  rapportés  du  Yucatan  par 
feu  M.  Ghiesbreght;  les  deux  autres  ont  été  acquis  comme 
provenant  l'un  du  Yucatan,  l'autre  du  Mexique  sans 
indication  précise  de  localité. 

2.  ICTEKnS  YIRESCEXS   (sp.  nov.). 

Ad.:  Flavo-virescens ,  dorso  obscurior;  capite ,  jugulo,  alis  eau- 
daque  nigris;  teclricibus  alarum  ininoribus  et  inferioribus  luleo- 
virescentibus  ;  roslro  subarcuato. 

D'un  jaune  verdâtre,  plus  foncé  sur  le  dos;  tête,  gorge , 
haut  de  la  poitrine,  ailes  et  queue  noirs;  petites  couver- 
tures des  ailes  et  sous-alaires  d'un  jaune  verdâtre.  Bec 
assez  grêle,  légèrement  arqué. 

Cet  oiseau  ressemble  entièrement ,  par  son  plumage,  à 
VIcterus  melanocephalus ,  dont  il  est  cependant  facile  à 
distinguer. 

L'/.  virescens  est  à  peu  près  un  quart  plus  petit  que 
ce  dernier,  et  son  bec  est  assez  grêle  et.  légèrement  arqué ^ 


(  7Î)9  ) 

tandis  qu'il  est  droit  et  conique  chez  17.  melanocepfialus. 

Voici  les  dimensions  comparatives  des  deux  espèces  : 

i.    virescens.        I.   melanocephalus. 

Longueur  totale  à  partir  du  front.  US  millim.  220  millim. 

—  des  ailes 82      »  93      » 

—  de  la  queue 8o      »  400      ■ 

—  du  bec n      »  20      » 

Patrie Mexique.  Mexique  et  Texas. 

N'ayant  pu  rapporter  ce  Iroupiale  à  aucune  des  espèces 
décrites,  j'ai  lieu  de  supposer  qu'il  est  encore  inédit. 

Le  type  se  trouve  au  Musée  de  Bruxelles  et  provient  du 
Mexique. 


En  étudiant  les  Ictéridés  de  notre  Musée,  j'ai  également 
trouvé  deux  variétés  ou  races  de  VIcterus  xanthorniis,  qui 
me  paraissent  trop  intéressantes  pour  ne  pas  les  faire  con- 
naître. 

ICTERKS  XANTHORNIJJS  (Llll). 

Hab.:  Guyanes,  Venezuela,  Nouvelle-Grenade,  île  de  la  Trinidad. 

Var.  a.  Dcbcsii  (var.  nov.?}. 

Flavus;  loris,  gula,  jugiilo,  alis  caudaque  nigris;  dorso  nigro- 
guUulato;  teclricihus  alarum  minoribus  nigris ,  flavo  marginatis ;  tec- 
tricihus  majoribus  et  remigibus  secundariis  exteriùs  albo  terminatis. 

Troupiale  jaune;  lorums,  gorge,  haut  de  la  poitrine, 
ailes  et  queue  noirs;  dos  offrant  des  taches  en  gouttelettes 
noires;   petites    couvertures   alaires   noires    bordées  de 


(  800  ) 
jaune;  grandes  couvertures  et  rémiges  secondaires  très- 
légèrement  bordées  de  blanc  à  leur  extrémité  et  exté- 
rieurement. 

Hab.  :  Isthme  de  Panama. 

Longueur  totale  à  partir  du  front 485  millim. 

—  des  ailes 93      » 

—  de  la  queue 78      » 

—  du  bec 21      » 

J'ai  d'abord  cru  devoir  rapporter  cette  variété  au  type 
de  linné,  mais  il  en  diffère  par  une  taille  un  peu  plus 
forte,  par  le  liséré  blanc  des  plumes  des  ailes  à  peine  per- 
ceptible, et  surtout  par  la  présence  des  taches  noires  en 
gouttelettes  sur  le  dos,  ce  qui  le  rapproche  un  peu  de 
VI.  puslulaius. 

L'un  des  deux  .exemplaires  que  possède  le  Musée  est 
une  femelle  :  les  taches  du  dos  sont  peu  nombreuses,  les 
petites  couvertures  des  ailes  sont  d'un  jaune  uniforme  et 
la  teinte  générale  est  moins  orangée  que  chez  le  mâle.  Ces 
oiseaux  ont  été  fournis  par  M.  J.  Verreaux  sous  le  nom  de 
Xanthornus  Dubusii,  J.  Verr.  Mais  il  est  probable  que  ce 
naturaliste  n'en  a  jamais  publié  la  description,  car  je  n'ai 
trouvé  cette  dénomination  mentionnée  dans  aucun  ou- 
vrage. 

Var.  (3.  Margiwai.is  (var.  nov.). 

Flaviis;  loris,  gula,  jugulo,  alis  caudaque  nigris;  tectricibus  alarum 
minoribus  fîavissimis ;  tectricibus  majoribus  albo  terminatis ;  remigibus 
secundariis  large  albo  marginatis;  speculo  alari  albo 

Hab.  :  Isthme  de  Panama. 

Cet  oiseau  se  distingue  de  l'espèce  type  par  une  taille 
un  peu  plus  forte,  par  la  présence  d'un  miroir  blanc  bien 


(  801  ) 
distinct  et  par  les   rémiges  secondaires  très-largement 
bordées  de  blanc. 


Longueur  totale  à  partir  du  front i'iO  niillim. 

—  des  ailes 100      » 

—  de  la  queue 92      » 

—  du  bec 20      » 


Le  Musée  possède  trois  exemplaires  de  cette  variété , 
dont  deux  femelles  ou  jeunes.  Ceux-ci  diffèrent  du  mâle 
adulte  par  le  dessus  du  corps  d'un  jaune  olivâtre,  les 
petites  couvertures  des  ailes  noires  bordées  d'olivâtre,  et 
la  queue  brune;  les  rectrices  sont  bordées  d'olivâtre  et  le 
blanc  des  ailes  est  moins  pur  que  chez  le  mâle  adulte. 

Deux  de  ces  oiseaux  viennent  de  l'isthme  de  Panama; 
Torigine  du  troisième  est  inconnue. 


Théorèmes  sur  les  polygones  réguliers  et  sommation  de 
quelques  séries  trigonométriques ;  par  M.  le  capitaine 
d'artillerie  F.  Reinemund. 

Introduction. 

Les  calculs  qui  vont  suivre  sont  basés  sur  les  deux  for- 
mules d'Euler  : 

cos  z  = : ; 


sin  z  = 


(  802  ) 
Pour  simplifier,  je  poserai  e^^  =«=  «;  dès  lors  : 


cos 


sinz 


21/— 1 
1  sin  z. 


d'où: 

a'  =  cos  £  H-  l/- 
On  en  déduit  : 

Q±2n..T ^  (3Qg  2??i TT  d=  V/I^sin  2m  tt  =  i- 
Ce  résultat  nous  sera  utile  plus  tard. 
J'appellerai  distances  d'un  polygone  régulier,  les  lon- 
gueurs des  droites  joignant  un  point  quelconque  A  de  la 
circonférence  circonscrite,  à  tous  les  sommets  A, ,  Ag,  A3, 
...  A„_i,  A„  de  ce  polygone,  et  je  les  désignerai  par  :  (5, , 

Si  le  point  A  coïncide  avec  un  de  ces  sommets,  les  dis- 
tances s'appelleront  cordes. 


Théorème  général  sur  les  distances. 

La  somme  S^„  des  puissances  (2m)"  des  n  distances 
d'un  polygone  régulier  de  n  côtés  s'obtient  par  la  formule  : 

2?>i(2m-i)...(m-4-w-f-l) 
=h — ^  cos  n  p 


S,„  =  /iR^ 


2wî(2m  — 4)...(m-t-l 
4.2.3...  m 


H-(-i 


r  9 


i  .  2  .  5  ...  (m  —  ?i 
2m(2w— 1  )  ...(m-h2«-4-l  ) 
1.2.5  ...  (m-2/i) 


cos2/ip 


2w(2«i— i)  ...(m-+-0;i-+-l  ) 

=b : — z — = : : COS  Slip 


\  .2.5...  (m  — e/i) 

Dans  cette  formule,  p  désigne  l'arc  AAi  (<  Ç),  A  étant 
situé  entre  A,  et  A„;  R,  le  rayon  de  la  circonférence;  0,  le 


(  803  ) 

nombre  entier  compris  enlre^  ^^  ^  —  ^  i^^^^  ^  si  m  <  n). 
De  plus,  les  termes  entre  parenthèses,  au  second  membre, 
seront  pris  positivement  ou  négativement,  selon  que  le 
dernier  facteur  de  leur  dénominateur  sera  pair  ou  impair. 

Démonstration. 


Soit  X  l'angle  au  centre  du  polygone.  On  aura  : 

p  H-  (?l  \)X 


c?,  =  2R  sin^;  â,  =  2R  sin ^^^—-;â,  =  '2Rsin^—- —  ; 
2  2  2 


2Rsin 


(pi-x  p+x\im 


/     p+(n-l)=t  p  +  (n-i)x\îm 

(,  )..  =  ^°      »-«-.) 

ou  bien,  en  développant  les  puissances  et  en  désignant 
par  T  le  terme  indépendant  de  a  : 

R'"*    r  ^        2??i  (2m — i)   ,    „, 

'■      (-irL  1.2 

±  T 2wia-("-*'^  H-  a- '"M; 


2R'"*   r  2m(2m — 1) 

= cosmp— 2mcos(m— 1)»H cos(m— 2)/) 

(_1)-L  ^  ^  1.2  '^ 


1  .2.  5. ..(m 


+  2  T-] 


(  804  ) 

[â^f""  =  /— ;^;„  1  cos  m  (/)-+-  j")  —  2»i  cos  {m  —  1)  (p  -+-  a:)  -+- 


02R2m 


1  .2.5...  (m  — 1)  ^'        ^       2j' 


2RÎ-  r  T-| 

(^j)'"»  = —    cos  7n{p  -1-  2x)  ~  2m  cos  (m  —  1)  (/>  -h  2x)  -+-  •••  ±  -   ; 


2  R'*"  r  T-| 

(^^)»"'= —    CO.S  7)1  [p  -\-  {n—\  )x]  —'2in  cos  (?n—  1  )  [p-f-(n-  i  )x]  -+-  •  •  •  ±-r- 


2R''" 
") 

Faisant  la  somme  de  ces  n  équations,  membre  à  mem- 
bre, nous  aurons  S^^  au  premier  membre,  et  au  second  : 

R«' 


10) 


±       .nT. 

(-ir 


2°  m  séries  trigonométriques  dont  l'expression  générale 
est  : 

2  R'"'  .   2m  (2m  —  1)  ...  (2;/i  —  (3  -t- 1)  r 

.(-i/- ^ ~ -\  cos  m  — Ê)« 

(-\r    ^        ^  1.2.  5. ..[3  L       ^  ^^ 

-i-cos(m— /3)(p-+-x)-i »-cos(j«  — (3)[p-t-(n  — 1)j;] 

OÙ  (3  doit  varier  entre  0  et  m  —  1 . 

En  appliquant  les  formules  d'Euler,  la  série  entre  paren- 
thèses devient  : 


=i[- 


•i3)P 


•«'(— /3)-   1 


Mais 


m-/3)  ^_  ^2^(m-^)__  ^  . 
r(»n     /3)  ^^  ^-2;r(m-i5)  ^^  ^   . 


(  SOS  ) 

de  sorte  que  les  deux  fractions  et  l'expression  générale  se 
réduisent  à  0  et  qu'il  ne  reste  en  apparence  au  second 
membre  que  : 

± .  wT. 

(-if 

Ici  se  rencontre  toutefois  une  exception  remarquable  ; 
car  si 

(m  —  p)  =  multiple  de  7i  =  Mn, 
on  aura  : 

et  chacune  des  deux  fractions  de  la  somme  générale  pren- 
dra la  forme  ^ 

Mais  il  est  visible  aussi  que,  sous  cette  hypothèse, 
chacun  des  termes  du  développement  (y)  qui  précède,  se 
réduira  à  a^'"~'^^''ou  a~^"'~^^'^  et  par  suite  l'expression  géné- 
rale deviendra  : 

2R2"»  .        2m(-2m— I)...  (2m  -  p-t- 1)  ra('»-/5)P-4- a-("'- 


[—I)-       '        '  1.2. 5. ..(3  L  !2 

2R^'"  2m(2m  — 1)  ...  (2m  — S-H  4) 

.  n  . ^ ^^ ■  cos  (m  —  p)p. 


(_i)«-^  4.  2.  3...  (3 

Si,  comme  nous  l'avons  supposé,  0  est  le  nombre  entier 
compris  entre  ^  et  ^ —  1 ,  réciproquement  m  est  compris 
entre  Bn  et(0  -+-  l)w,  et  par  conséquent  il  y  aura  G  valeurs 
de  (3,  entre  0  et  m  —  1  ,  qui  rendront  m  —  P  multiple 
de  n  :  savoir  : 

m  —  n ,  m  —  2/i ,  m  —  3w , ...  m  —  0;i. 

Ce  résultat  est  illusoire  quand  m  <  n;  mais  alors  aussi 
6  =  0,  et  aucune  valeur  de  (3  ne  satisfait  à  la  condition 
indiquée. 


(  806  ) 

En  remarquant  encore  que  T  et  ( —  1)""  sont  simulta- 
nément positifs  ou  négatifs,  selon  que  2m  est  ou  n'est  pas 
doublement  pair,  on  trouvera  aisément  la  formule  générale 
qu'il  s'agissait  de  démontrer. 

Cette  formule  nous  montre  que  la  somme  83^  est  coii- 
stante,  quel  que  soit  le  point  A ,  tant  que  m  <^n,  car  alors 
0  =  0,  et  les  termes  entre  crochets  disparaissent,  comme 
cela  a  été  remarqué  précédemment.  Ce  dernier  résultat  est 
connu. 

Applications. 

Le  point  Acoïncidantavec  l'un  des  sommets  du  polygone, 
82;^  est  la  somme  des  puissances  (2m)"  de  toutes  les  cordes. 

Comme,  dans  ce  cas,  tous  les  cosinus,  au  second  mem- 
bre, deviennent  égaux  à  l'unité,  nous  aurons  : 

2m  C^m  —  i)  ...{m~{-  n-i-  \ )' 


S,™  =  wR' 


2m(2/>?.  — l)...(m-+-I) 
1.2.3...  m 


■(-If. 2 


_^2m(2m-l). 

...  {m  -  ?i) 
.(m -i- 2/1 -4-1) 

i . 2.3. 

.(m-2;i) 

2m(2m  — 1). 

..  (??i-+-5?i-+-1) 

i  .  2  .  3  ...  (m  —  Qn) 

Exemple  :  834,  pour  le  polygone  régulier  de  14  côtés. 

m  =17,     n  =  \A;     j?i  —  w  =  3  ...  impair. 

,,(34.33.32...  19.18 
834  =  14  R" 


1  .2.3...16.17 
=  14  R'*  (2  .  333  606  220  -+-  2  .  5984) 
=  32  670  654  632  R^*. 


r      34  .  33  .  32"! 


(  807  ) 

2°)  Servons-nous  de  la  formule  précédente  pour  obtenir 
la  somme  P2,„  des  puissances  (2m)''  des  cordes  de  rang 
pair,  quand  n  est  pair.  Ces  cordes  aboutissant  aux  som- 
mets d*un  polygone  régulier  de  I  côtés,  on  aura  évidem- 
ment: 


H         2m(2m-i)...  m-t-i       ,     , 

__n2m  ; î^ i î --4-(—  i 

'     9^    -^        1  .2.  3. ..m  ^ 


'.2 


2m(2m-i).. 

(-:--)" 

1.2.5. 

2m(2»i-i). 

\         2/ 
..  (m  -t-  w  -4-  1\ 

^         1.2.5. 

..  [m  -  n) 

2m(2m-l).. 

.   m-{ hl 

\          2        / 

>• 


1  .2.5 


•■■(-?) 


Exemple  :  P34,  pour  le  polygone  régulier  de  14  côtés. 


54.35.52...19.18 


r      54.55...25       54.33.52-] 
L      1.2.5...10  1.2.5    J 


1.2.5...16.17 
=  7R'*  (2  .  555  606  220  —  2  .  131  122  156) 
=  14  499  555  536  R^ 

S**)  Pour  obtenir,  dans  le  cas  de  n  pair,  la  somme  l2„ 
des  puissances  {2m)"  des  cordes  de  rang  impair,  nous 
remarquerons  que  cela  revient  à  chercher  la  somme  des 
puissances  (2m)"  des  distances  d'un  polygone  régulier  de  ';^ 
côtés,  en  faisant  dans  la  formule  générale  p  =^,  après 
avoir  remplacé  n  par|.  Comme  cos  Bnp  devient  alors 
cos  Qt:,  il  sera  égal  à  -h  l  ou  à  —  1 ,  selon  que  0  sera 
pair  ou  impair;  de  sorte  que  les  signes  des  termes  entre 
parenlhèses,  au  second  membre  de  la  formule  ci-dessous, 


(  808  ) 

résulteront  de  la  combinaison  entre  eux  des  deux  signes 

suivants  : 

n                            en  ,         ,       , 

=t  selon  que:  m ,  m  ~  w,  ...  ,m sont  pairs  ou  impairs. 

±  selon  que  9  est  pair  ou  impair. 

On  trouve  ainsi  : 

2m  (2m—  \)..\m-\---^\\ 

d.2.5...(m~|) 
db 

/  672 

2m(2m  — 1)...  Imn ^\) 

± ^^ ? 

/         ^n\ 
1.2.5...(,u-_) 

Exemple  :  I34,  pour  le  polygone  régulier  de  14  côtés. 

On  a  ; 

n 
m =  17  —  7  =  10  ...  pair  (9  =  1  ...  impair) 

n 
m  —  2. -  =  17  —  14  =  5  ...  impair  (6  =  2... pair). 


j    _n   ,j2m(2m-l)...(m4-l)^  ^ 

'"     2        1        1  .2. 5.. .m  ^      ^  " 


Par  suite  : 


34.53  ...19. 18 


r      54.33..26.25       54.35.32-|| 
^L       1.2.3...9.10  1.2. 3    J) 


2  (1.2.3...16.17 

=  7R'*  (2  333  606  220  -4-  2  . 1 31  1 34  1 24) 
=  18  171  121  276  R'*. 

Il  est  clair  que,  pour  un  polygone  régulier  donné,  on 
doit  toujours  avoir  : 


i  809  ) 
En  appliquant  celte  équation  aux  exemples  que  je  viens 
de  traiter,  je  trouve: 

32  670  654  652  R'*=  1 4  499  553  550  R'*  -+-  1 8  1 711 21  276  R'*- 

c'est-à-dire  une  identité.  Les  résultats  obtenus  sont  donc 
exacts. 

Il  est  évident,  d'autre  part,  que  dans  le  cas  de  n  impair, 
on  aura  toujours,  quel  que  soit  m  : 

p    _i    _-^. 

'^im  *2m  „     > 

car,  à  chaque  corde  de  rang  pair,  correspond  une  corde 
égale,  de  rang  impair. 

II  résulte  de  l'inspection  des  formules  trouvées  pour  l^^ 
et  P2^,que: 

2  i  .  2  .  0  ...  m 

quand  n  est  pair,  tant  que  m  est  <  ^  ou  2m  <  n. 
Tant  que  wî  <  w,  on  aura  encore  : 

2m(27>i  — 1)...  (m -4-  i) 


S,„  =  7iR^ 


1.2.5...  m 


formule  trouvée  par  M.  Breton  de  Champ  [Journal  de 
Mathématiques  de  Liouville,  tome  XIII,  1"  série,  année 
1848,  page  291). 

Observations. 

On  déduit  facilement,  de  l'expression  générale  de  83^,  la 
formule  suivante: 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  52 


(  810  ) 


'     2m  (2m  -  l)...(m  -+-n-*- 1) 

-f-       ^ 1 1- cos  n  p 


n    ]2m(2m  — l)...(m-i-l) 
i  .2.5...  m 


-h(-ir.2 


1 .  2  .  5  ...  (m  -  w) 
2m(2m-1)...(m-^2n+i)^^^^^^ 


1.2.3  ...(m  — 2/i) 
2i>i  (2m  -  1  ) ...  {m -+-  e?iH-1 


OU 


w     2m  (2m  — i)...  (m  -\-  \) 
92"»  *  1  .  2  .  3  ...  m 


1  .2.  5. ..(m 


,  tant  que  m  <  n. 


cosôwp 


Si,  dans  la  formule  précitée,  on  fait  varier  p,  x  et  par 
suite  n,  on  arrivera  à  d'autres  séries  irigonométriques , 
dont  la  somme  peut  être  obtenue  exactement. 

Ainsi  faisons  p  =  0;  remplaçons  |  par  y  et  n  par|; 
y  sera  l'angle  au  centre  du  polygone  régulier  de  n'  côtés. 
Nous  aurons  : 
(sini/r  -^  (sin2i/r  -4-(sin  oy)'-  -*-•••-+-  Un  \^- '^]y 

27}î(27/t— 1)...  Im-+-  — -t-  1 


_    n'  J2m(2m-4M 
~  22"»4-M         1.2^ 5  ... 


(?ïi  -t-  ! 


m 


V(-ir.2 


1  .2.3  ...    m 


zh 


"2 

2m  (2»i  —  i)...(m-^n'H-iI. 
1.2.3...  (m  -  w) 

/        en' 
2m(2m  — 1)...  (m-^-— 


1  .2  .3...  (m-— - 


ou 


92m  + 


(8H  ) 

2w(2m—  d)...  (m-t-  i) 
1.2.5...  m 


tant  que  m  < — 
2 


Cette  formule  ne  peut  servir  que  si  le  nombre  n'  de 
côtés  est  pair;  pour  le  cas  de  n'  impair,  on  aura  recours 
à  la  formule  P^^  ==  ^  démontrée  précédemment,  et  Ton 
trouvera  sans  aucune  difficulté  : 


(sin  2/f "•  +  (sin  21/ f"  -+-  (sin  5y) 


,2m 


_-n('-4i)J 


2»w(2m  — j)...(m-4-'l) 


Q2m+! 


1.2.3...  m 


r  2m(2m— i)...(m  -t-  yt'  ^  jf 

I  1  .2.D...(m— w') 

!  2??i(2m— 1)...(m-f-2yt^-f-i) 
4.(_1)- 2  ^  .2.5...(m  — 2w/; 


L" 


^m{^m—\)...{m-^dn'-\-i 
1.2.5  ...(m  —  671') 


Ces  quelques  exemples  suffiront  pour  montrer  tout  le 
parti  qu'on  peut  tirer  de  la  formule  générale  établie  au 
commencement  de  cette  Note. 


La  classe  s'est  ensuite  occupée,  en  comité  secret,  des 
préparatifs  de  sa  séance  publique  annuelle,  qui  aura  lieu 
le  jeudi  16  décembre,  à  1  heure,  dans  la  grand'salle  des 
Académies  au  Musée. 

Le  programme  se  composera  du  discours  de  M.  le  gé- 
néral Brialmont,  directeur  de  la  classe,  sur  l'accroisse- 


(  812  ) 
ment  progressif  des  armées  permanentes  et  d'une  lecture 
de  M.  Edouard  Morren  intitulée  :  Théorie  des  plantes  car- 


nivores. 


La  prochaine  séance  aura  lieu  le  mercredi  15  décembre, 

à  1  heure. 

La  classe  s'occupera,  dans  cette  séance,  du  jugement 
du  concours  annuel,  des  élections  et  des  préparatifs  de  la 
solennité  du  lendemain. 


(  813  ) 


CLASSE    DES    I.ETTUKS, 


Séance  du  6  décembre  1875. 

M.  le  baron  Guillaume,  directeur. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  .  MM.  J.  Grandgagnage,  J.  Roulez, 
P.  De  Decker,  J.-J.  Haus,  M.-N.-J.  Leclercq,  Ch.  Faider, 
le  baron  Kervyn  de  Lettenhove,  R.  Chalon,  Th.  Juste, 
Alph.  Wauters,  A.  Wagener,  membres;  J.  Nolet  de  Rrau- 
were  van  Steeland,  Aug.  Scheler,  Alph.  Rivier,  associés; 
J.  Heremans,  Rolin-Jaequemyns  et  Ch.  Piot,  correspon- 
dants. 

M.  Ch.  Montigny ,  membre  de  la  classe  des  sciences,  et 
M.  Éd.  M2i\\]y ^  correspondant  de  la  même  classe,  assistent 
à  la  séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'intérieur  avait  émis  le  vœu  que  la 
classe  examinât  la  question  de  savoir  si  les  arrêtés  royaux 
relatifs  aux  concours  triennaux  de  littérature  dramatique 
dans  les  deux  langues  doivent  conserver  comme  conditions 
d'admission  aux  concours,  que  le  sujet  des  œuvres  sera 
emprunté  soit  à  l'histoire,  soit  aux  mœurs  nationales. 


(  su  ) 

La  classe  s'est  ralliée  à  l'avis  émis  sur  ce  point  par  le 
jury  du  dernier  concours. 

Cet  avis  avait  été  formulé  de  la  manière  suivante  : 
G  Peut-être  y  aurait-il  lieu  de  ne  plus  subordonner  la 
victoire  à  la  composition  d'un  sujet  national,  condition 
qui,  pour  le  genre  de  la  comédie  contemporaine,  par 
exemple,  est,  selon  nous,  difficile  à  observer.  Seulement, 
à  mérite  égal,  la  palme  serait  naturellement  décernée  à  la 
pièce  dont  le  motif  appartiendrait  en  propre  an  pays.  » 

—  MM.  les  questeurs  du  Sénat  et  de  la  Chambre  des 
représentants  adressent  des  cartes  de  tribune  réservée 
pour  la  session  législative  1875-1876.  —  Remercîments. 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  annonce  que  la  commis- 
sion administrative  de  l'Académie,  dans  sa  séance  du 
6  novembre  dernier,  a  décidé  que  la  classe  des  beaux-arts 
serait  chargée  de  confier  à  une  commission  composée  de 
son  directeur  actuel,  d'un  architecte,  de  deux  sculpteurs 
et  de  M.  Montigny,  le  soin  de  s'occuper  du  projet  de  mo- 
nument à  élever  à  feu  M.  Adolphe  Quetelet. 

La  classe  des  beaux-arts  a  désigné  MM.  Payen,  G.  Geefs 
et  Fraikin  pour  être  adjoints  à  MM.  Balat  et  Montigny, 
comme  membres  de  cette  commission. 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  donne  ensuite  connais- 
sance de  la  motion  dont  M.  Alvin  a  saisi  la  classe  des 
beaux-arts,  lors  de  la  dernière  séance,  motion  à  laquelle 
s'est  ralliée  la  classe  des  sciences,  et  qui  a  pour  but  de 
s'associer  à  la  démarche  que  la  Bibliothèque  royale  et  les 
Musées  ont  faite  auprès  de  M.  le  Ministre,  au  sujet  d'un 
commencement  d'incendie  qui  a  eu  lieu  le  25  novembre 
dernier,  dans  le  laboratoire  de  chimie  de  l'école  indus- 
trielle. 


(  815  ) 
La  classe  approuve  la  lettre  que  M.  le  secrétaire  perpé- 
tuel propose  d'adresser  à  ce  sujet  à  M.  le  Ministre  de 
l'intérieur. 

—  I/Université  de  Fribourg  en  Brisgau  adresse  des 
exemplaires  de  son  programme  d'études  pour  1 876  et  1 877, 
ainsi  que  plusieurs  dissertations  inaugurales. 

La  Société  littéraire  et  artistique  de  Mitau  accuse  récep- 
tion du  dernier  envoi  annuel  de  publications;  elle  trans- 
met en  même  temps  le  dernier  numéro  de  ses  comptes 
rendus. 

—  M.  Alphonse  Rivier,  associé  de  la  classe,  fait  hom- 
mage d'un  ouvrage  de  sa  composition,  portant  pour  titre  : 
Beric/ite  Burgundischer  Agenten  in  der  Schweiz,  von 
1619  bis  I6W.  Tn-8^ 

M.  G.-W.  Vreede,  associé,  fait  parvenir,  à  titre  d'hom- 
mage, un  exemplaire  de  sa  notice  intitulée  :  Onze  diplo- 
matie^ na  de  erkenning  der  onafhankelijkheid  van  België. 
In-8^ 

M"'*'  veuve  Bergmann  fait  hommage  à  la  classe  :  l°d'un 
exemplaire  de  l'ouvrage  de  feu  son  époux,  couronné  par 
le  jury  du  dernier  concours  quinquennal  de  littérature 
dramatique  flamande  et  intitulé  :  Ernest  Staas,  advocaat, 
Schetsen  en  Beelden  door  Tony.  In-8°;  2°  d'un  exemplaire 
des  ouvrages  suivants  du  même  auteur  :  Verspreide  Schet- 
sen  en  Novellen.  ln-8°  ;  Philips  van  Marnix  van  Sint-Alde- 
gonde.  2^  druk,  in-8°;  Geschiedenis  der  stad  Lier.  InS"". 

M.  le  baron  F.  de  Barghon  Fort-Rion,  de  Versailles, 
envoie,  à  litre  d'hommage,  un  exemplaire  de  sa  dernière 
brochure  intitulée  :  Étude  historique  sur  S.  E.  Jean-André 
Van  der  Mersch.,  général  brabançon,  ln-8''. 

La  classe  vote  des  remercîments  pour  ces  dons. 


(  816  j 

PRIX  DE  SAINT-GENOIS. 


Conformément  à  la  volonté  du  fondateur  et  à  ses  géné- 
reuses dispositions,  la  classe  offre,  pour  la  première  période 
décennale  de  ce  concours,  un  prix  de  quatre  cent  cinquante 
francs  au  meilleur  travail  en  réponse  à  la  question  litté- 
raire suivante  : 

De  belrekkingen  aanduiden,  die  in  verschillende  tijd^ 
perken  hebben  bestaan  tusschen  de  vlaamsche  poëzie  en  de 
ontwikkeling  van  het  vaderlandsch  en  nationaal  gevoel, 
en  den  invloed  bepalen  dien  zij  onder  dit  opzicht  heefl 
gehad. 

Indiquer  les  rapports  qui,  à  diverses  époques,  ont  existé 
entre  la  poésie  flamande  et  le  développement  du  sentiment 
patriotique  et  national,  et  déterminer  l'influence  qu'elle  a 
exercée  dans  cet  ordre  d'idées. 

D'après  les  dispositions  testamentaires  de  feu  M.  de 
Saint-Génois,  ce  travail  doit  être  rédigé  en  flamand.  Il  sera 
lisiblement  écrit  et  adressé,  franc  de  port,  à  M.  J.  Liagre, 
secrétaire  perpétuel  de  l'Académie,  au  Musée,  avant  le 
\''  février  1877. 

L'Académie  exige  la  plus  grande  exactitude  dans  les 
citations;  les  auteurs  auront  soin,  par  conséquent,  d'indi- 
quer les  éditions  et  les  pages  des  ouvrages  cités. 

Les  auteurs  ne  mettront  point  leur  nom  à  leur  ouvrage; 
ils  y  inscriront  seulement  une  devise,  qu'ils  reproduiront 
dans   un    billet  cacheté  renfermant    leur    nom   et    leur 


(  »i7  ) 
adresse.  Faille  par  eux  do  satisfaire  à  celle  Ibrmalilé,  le 
prix  ne  pourra  leiir  èlre  accordé.  Les  mémoires  remis  après 
le  lemps  prescrit,  ou  ceux  dont  les  auteurs  se  leront  con- 
naître, de  quelque  manière  que  ce  soit,  seront  exclus  du 
concours. 

L'Académie  croit  devoir  rappeler  aux  concurrents  que, 
dès  que  les  mémoires  ont  été  soumis  à  son  jugement,  ils 
sont  et  restent  déposés  dans  ses  archives.  Toutefois,  les 
auteurs  peuvent  en  faire  prendre  des  copies  à  leurs  frais, 
en  s'adressant,  à  cet  effet,  au  secrétaire  perpétuel. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


La  diplomatie  concernant  les  affaires  maritimes  des  Pays- 
Bas^  vers  le  milieu  du  XVI"  siècle ,  jusquà  la  trêve  de 
Vaucelles,  par  M.  Ch.  Piot,  correspondant  de  l'Aca- 
démie. 

L  —  INTRODUCTION. 

A  la  suite  des  découvertes  territoriales,  faites  par  les 
Espagnols  et  les  Portugais  en  Asie,  en  Afrique  et  dans  le 
Nouveau-Monde,  le  commerce  maritime  avait  pris,  dans 
les  Pays-Bas,  un  développement  extraordinaire.  Sous  le 
règne  de  Charles-Quint  il  était  parvenu  au  plus  haut  degré  de 
prospérité  qu'il  semblait  pouvoir  atteindre.  Le  mouvement 
du  port  d'Anvers,  la  rivale  de  Venise ,  avait  de  l'aveu  même 
de  l'ambassadeur  de  cette  république  hni  par  surpasser 


(  818  ) 
celui  de  la  métropole  du  commerce  européen.  Vers  le  mi- 
lieu du  XVP  siècle  des  centaines  de  vaisseaux ,  chargés 
des  produits  fournis  par  tous  les  pays,  abordaient  journel- 
lement à  Anvers  et  y  déchargeaient  leurs  riches  cargai- 
sons. 

Les  habitants  des  côtes  maritimes  de  Hollande,  de  Zé- 
lande  et  de  Flandre  n'avaient  pas  moins  de  succès  dans  la 
navigation  et  par  la  pêche  de  mer.  Dunkerque,  Nieuport, 
Ostende,  Flessingue,  Arnemuide  étaient  devenus  des  ha- 
vres importants  pour  la  pêche  du  hareng.  Terveere  et  Hel- 
voetsluis  avaient  pris  les  proportions  de  ports  de  mer  con- 
sidérables. 

Cette  grande  prospérité  porta  bientôt  ombrage  à  nos 
voisins.  Détruire  cet  état  si  florissant  était  un  moyen  pro- 
pre à  ruiner  les  Pays-Bas,  un  expédient  utile  pour  empê- 
cher Charles-Quint  de  devenir  un  jour  maître  de  l'Océan. 
A  cette  époque  l'empire  des  mers  devait  appartenir  à  l'État 
dont  la  marine  marchande  serait  la  plus  considérable,  à 
celui  enlin  qui  pouvait,  en  cas  de  guerre,  armer  le  plus 
grand  nombre  de  navires  de  toute  espèce  (1).  L'immense 
étendue  des  côtes  de  mer  appartenant  à  l'Espagne,  aux 
Pays-Bas,  au  nord  de  l'Allemagne  et  aux  possessions  de 
l'Amérique  semblait  pouvoir  légitimer  des  aspirations  sem- 
blables. 

Tous  les  moyens,  toutes  les  intrigues  furent  employés 
dans  le  but  d'entraver  le  développement  de  notre  com- 
merce maritime  et  de  la  pêche,  industrie  spéciale  aux  Hol- 
landais, aux  Zélandais  et  aux  Flamands. Ceux-ci  ne  furent 
pas  ménagés,  particulièrement  par  les  habitants  des  îles 


(1)  Guichardin,  Description  des  Pays-Bas,  p.  49;  De  Jonghe,  Geschiedenift 
v;(n  het  yederlandsch  zeeivezen,  t.  I.  pp.  8'J  et  VA^2.  note. 


(  m  ) 

l)rilannique&,  malgré  \os  règlements  intervenus  en  1528 
et  1540  entre  les  parties  (1). 

Cette  jalousie,  primitivement  très-occulte,  finissait  par 
se  faire  jour  partout,  chez  nos  amis,  comme  chez  nos 
ennemis.  Ici,  c'était  le  droit  de  tonlieu  qui  servait  de  pré- 
texte à  des  extorsions  (2),  là  c'était  Texercice  du  culte,  qui 
arrêtait  nos  malelots;  ailleurs  c'était  autre  chose.  Cette 
passion  si  basse  était  encore  attisée  par  l'inimitié  qu'a- 
vaient vouée  les  rois  de  France  à  Charles-Quint,  par  leur 
volonté  bien  arrêtée  de  lui  disputer  la  prépondérance  en 
Europe.  Tous  ces  motifs  réunis  donnèrent  lieu  à  des  actes 
de  piraterie,  exercés  contre  notre  marine,  puis  à  des  diffi- 
cultés sans  nombre  avec  les  gouvernements  d'Ecosse, 
d'Angleterre  et  de  France,  et  à  des  réclamations  très-vives 
faites  de  part  et  d'autre.  C'est  à  ces  réclamations  et  aux 
correspondances  diplomatiques,  la  plupart  inédites,  que 
nous  avons  puisé  les  éléments  de  ce  travail. 

II.   —  PIRATERIES   DES   ÉCOSSAIS    ET    DES    ANGLAIS. 

Pendant  la  guerre  entre  la  France  et  l'empereur, 
notre  commerce  maritime  fut  l'objet  d'entraves  et  de  vio- 
lences inouïes.  Elles  continuèrent,  malgré  la  terreur  qu'a- 
vait inspirée  à  la  marine  française  la  conduite  courageuse 
de  notre  flotte  commandée  par  Gérard  Van  Meckeren  ou 
par  Maximilien  de  Bourgogne,  amiral  de  nos  forces  na- 
vales. Celui-ci  était  particulièrement  redouté  depuis  qu'il 


l\)  Proceeding  and  ordinatices  ofthe  privy  council  of  England,  t.  VIII,  p  95. 
2)  Lettres  des  20  septembre  et  2o  novembre  looO  (Archives  de  l'Audience, 
liasse  47). 


(  820  ; 

avait  détruit,  en  1545,  une  flottille  de  navires  marchands 
dans  les  eaux  de  Bordeaux  (1).  Dès  ce  moment  les  atta- 
ques directes  ne  suffisaient  plus  à  la  France.  Il  lui  fallait 
l'aide  des  Écossais,  toujours  prêts  à  liarceler  nos  pêcheurs, 
jamais  rassasiés  de  pirateries. 

En  dépit  des  traités  les  plus  solennels,  les  Écossais 
exercèrent  des  déprédations  inqualifiables.  Gui  de  Dam- 
pierre,  Louis  de  Mâle,  Philippe  le  Hardi,  Philippe  le  Bon 
avaient  voulu  en  vain  intéresser  les  marchands  écossais  au 
développement  du  coinmerce,  en  leur  accordant  difl*érents 
privilèges  (2).  Pendant  Tannée  1530  (15  avril  n.  st.)  un 
traité  lut  conclu  à  Malines  entre  Marie  de  Hongrie,  à  titre 
de  gouvernante  des  Pays-Bas,  et  l'envoyé  d'Ecosse,  traité 
qui  fut  confirmé  par  Charles-Quint  (i24  juillet  1551).  Dix 
ans  plus  tard  (19  février  1541  n.  st.)  un  nouveau  pacte 
fut  arrêté  à  Binche  (5). 

Ces  actes  avaient  un  but,  celui  de  favoriser  la  navigation 
et  le  commerce  et  d'empêcher  entre  les  deux  nations  la 
piraterie,  dont  Jacques  V  constate  les  déplorables  résultats 
dans  une  lettre  adressée  à  Charles-Quint  (4  mai  1531). 
Vains  efl'orts.  Les  vols,  les  destructions,  les  pillages  ne 
continuèrent  pas  moins  de  part  et  d'autre.  Ils  devinrent 
entre  les  deux  nations  des  motifs  de  vengeance,  par  suite 
du  défaut  d'énergie  du  gouvernement  néerlandais.  Lors- 


(4)  Wagenaar,  Vaderlandsche  historié,  t.  V,  p.  128;  Annales  de  la  Société 
d'Émulation  de  Bruges,  2«  série,  t.  VI,  p.  321  et  suiv. 

(2)  Actes  de  1293,  1317,  1339,  1387,  4420,  14;8,  cités  par  Gachard,  Rapport 
sur  les  archives  de  Lille,  pp.  ilo  146,118,  H9,  140,  et  dans  Du  Mont.  Corps 
diplomatique,  t.  IV,  part.  2.  p.  83. 

(3)  Du  Mont,  ibid.,  pp.  83  et  208.  V.  aussi  aux  archives  du  Royaume  la  liasse 
LXIV  de  l'Audience,  intitulée  :  Diverses  pièces  concernant  la  négociation  avec 
l'Ecosse. 


(  82i  ) 

qu'en  1540,  par  exemple,  les  États  de  Hollande  voulurent 
faire  saisir  tous  les  biens  des  Écossais  pour  les  punir  de 
leurs  pirateries,  la  gouvernante  s'y  opposa.  Elle  préten- 
dait que  tous  ces  vols  pouvaient  être  arrêtés  par  les  négo- 
ciations diplomatiques  (1).  En  effet  elle  parvint  à  faire 
signer  le  premier  traité  de  Binche  ;  elle  parvint  même  à 
obtenir  des  sauf-conduits  en  faveur  de  nos  vaisseaux.  Mais 
le  lendemain  de  la  signature  de  ces  actes,  ils  étaient  violés 
ouvertement,  sous  un  prétexte  quelconque.  Pour  résister 
à  ces  pillages  l'Empereur  fut  obligé,  en  1549,  de  prescrire 
aux  vaisseaux  marchands  un  armement,  afin  de  se  ga- 
rantir contre  les  agressions  des  flibustiers  (2).  De  leur 
côté  les  Anglais  tirent,  sans  les  observer,  les  plus  belles 
promesses  de  nous  débarrasser  de  ces  pirates.  Henri  VIII 
s'engagea  à  abandonner  les  Écossais  pour  les  ramener  à 
la  raison  (5).  Toutes  ces  promesses  tombèrent  à  néant  par 
suite  de  l'abandon  dans  lequel  notre  flotte  laissa  l'Angle- 
terre lorsque  l'armée  navale  de  ce  pays  comptait  attaquer 
celle  de  la  France  en  1544.  Les  capitaines  des  navires  de 
guerre  impériaux  se  retirèrent  en  voyant  arriver  la  flotte 
française  et  l'impossibilité  de  celle  des  Anglais  de  pouvoir 
lui  résister.  Cette  retraite  produisit  sur  la  cour  de  Londres 
le  plus  fâcheux  effet.  Selon  une  dépêche  des  ambassadeurs 
de  Charles-Quint,  le  duc  de  Norfolk  aurait  dit  «  que  ja- 
»  mais  le  roy  son  maistre,  de  son  temps,  n'a  voit  veu 
i>  ceste  honte  que  le  roy  de  France  luy  fut  en  mer  supé- 
D  rieur.  ?>  En  conséquence  il  demandait  aux  Pays-Bas  de 


(4)  Wagenaar,  /.  c,  p.  209. 

(2)  Plac.  de  Flaud.,  t.  I,  p.  337. 

(3)  Lettre  du  i9  oct.  4544,  adressée  par  les  ambassadeurs  belges  à  l'empereur. 
(Corresp.  de  l'empereur  et  de  Marie  de  Hongrie  avec  les  ambassadeurs  en  Angle- 
terre, p.  4S.) 


(  822  ) 

lui  prêter  des  bateaux  espagnols  et  hollandais  qu'il  s'obli- 
geait de  payer  (1).  Nulle  part  nous  ne  trouvons  de  trace  du 
consentement  que  notre  gouvernement  aurait  donné  à  un 
prêt  semblable. 

Enfin  Gérard  Van  Meckeren  reçut,  en  1549,  la  mission 
de  commander  les  navires  de  guerre  destinés  à  combattre 
les  Écossais  et  à  protéger  la  navigation  contre  leurs  pira- 
teries. En  donnant  l'année  suivante  la  chasse  aux  navires 
écossais,  il  outrepassa  ses  instructions.  Il  prit  des  navires 
dans  les  eaux  de  la  France  et  en  arrêta  aussi  plusieurs 
autres  de  ce  pays  qui  se  rendaient  en  Ecosse  ou  venaient 
de  là  (2).  Le  conseiller  Scepperus,  chargé  spéciale- 
ment par  le  gouvernement  de  diriger  les  affaires  mari- 
times, fut  obligé  de  lui  écrire  pour  faire  cesser  ces  actes 
arbitraires,  dont  la  France  se  plaignait  à  juste  titre. 

On  a  soutenu  que  l'alliance  de  Charles-Quint  et  de  l'An- 
gleterre, l'ennemie  héréditaire  de  la  dynastie  écossaise , 
était  la  véritable  cause  de  nos  désastres  maritimes.  Rien 
n'est  moins  vrai. 

En  émettant  cet  avis,  les  écrivains  perdent  de  vue  les 
pirateries  commises  vers  cette  époque  au  préjudice  de  nos 
marchands  par  la  France,  par  l'Ecosse  et  surtout  celles  de 
la  Grande-Bretagne.  Lorsque  l'empereur  eut  rompu  avec 
Henri  YIII,  roi  d'Angleterre;  lorsqu'il  refusa  à  ce  prince 
de  l'aider  pendant  la  guerre  avec  l'Ecosse;  lorsque  la  paix 
fut  signée  entre  les  deux  pays  (1"  juillet  1545),  le  pillage 
de  nos  vaisseaux  par  les  Écossais  fut-il  arrêté?  Nullement. 


(1)  Lettre  des  ambassadeurs  du  46  octobre  1544,  ibid.,  p.  1. 

(2)  Annales  de  la  Société  d'Émulation  de  Bruges ,  2^  série,  t.  VI,  pp.  347, 
3ol  ;  liasse  des  négociations  avec  l'Angleterre  à  propos  du  tonlieu.  (Dans  les 
archives  de  l'Audience.) 


(  8^25  ) 
Quand  leurs  câpres  entrèrent,  en  1544,  au  port  de  Terveere 
avec  le  butin  pris  sur  les  Anglais,  n'avaient-ils  pas  arrêté 
aussi  un  grand  nombre  de  vaisseaux  Anversois  (i)?  Le 
gouvernement  néerlandais  poussa  la  générosité  jusqu'à 
faire  restituer  aux  marebands  de  la  Grande-Bretagne  ce 
qu'ils  leur  avaient  enlevé.  Et  malgré  cette  conduite  si 
loyale,  les  Anglais  favorisèrent-ils  moins  les  pirates  écos- 
sais? Ils  les  autorisèrent  à  capturer  nos  vaisseaux  dans  les 
eaux  britanniques.  Bientôt  ils  poussèrent  plus  loin  encore 
leurs  propensions  à  la  piraterie  (2). Durant  tout  le  cours  de 


(1)  Wagenaar,  Le,  pp.  267,268. 

(2)  Calauder  of  State papers,  tlie  Scottish  séries  1867  ài589  ;  Instructions  don- 
nées à  Scepperus  et  François  Vander  Dilft,  ambassadeurs  en  Angleterre,  le 
27  sept.  1540.  {Dans  les  négociations  d'Angleterre,  t.  I,  p.  176,  aux  Archives 
du  royaume);  Information  du  bailli  de  Flessingue  du  41  août  1548,  sur  le  pil- 
lage fait,  le  9  de  ce  mois,  par  deux  vaisseaux  de  guerre  anglais  d'un  navire  armé 
des  Pays-Bas ,  (/Z>/c/.,  t.  II ,  p.  189) ;  Instructions  de  Henri  II,  roi  de  France, 
dont  voici  un  extrait  : 

Instuction  au  S^  Danoy,  que  le  roy  envoie  présentement  en  Angleterre, 
de  ce  qu'il  y  aura  à  faire  pour  le  service  dudit  seigneur. 

Premièrement  ira  treuver  le  Si"  de  Selve,  ambassadeur  du  roy  par  de  là,  et  luy 
dira  que  aiant  icelluy  S''  receu  la  lettre  qu'il  a  escripte  du  19"  jour  de  ce  présent 
moys,  par  laquelle  il  lui  fayct  entendre  la  prinse  de  l'admirai  et  plusieurs  aultres 
grands  S"  de  delà,  et  l'occasion  d'icelle,  semblablement  le  soupçon  en  quoy  le 
protecteur  d'Angleterre  et  aultres  estans  près  la  personne  du  roy  d'Angleterre 
sont  entrez  de  ceste  conspiration.  Et  pour  austant  qu'il  semble  au  roy  que  telles 
choses  viennent  grandement  à  propos  pour  accomoder  et  facilliter  ses  affaires  en 
Escosse,  et  qu'il  désireroit  bien  trouver  moyen  d'y  faire  brouiller  plus  fort  les  car- 
tes qu'elles  ne  sont,  aflBn  de  mettre  dedans  ledit  royaulme  d'Angleterre  s'il  estoit 
possible  une  guerre  civile,  et  les  amuser  à  se  venger  les  ung  des  aultres 
pour  d'austant  rendre  ses  affaires  plus  faciles,  tant  du  costel  d'Escosse,  que  de 
celui  de  deçà,  estimant  que  une  telle  entreprinse.  si  elle  est  véritable,  n'a  pu 
avoir  esté  conjurée  sans  l'intelligence  de  beaucoup  des  plus  grands,  lesquels  ne 
peuvent  avoir  esté  tous  descouvertz,  et  est  impossible  qu'il  n'y  en  ait  encoires 
quelques  ungs  de  cachez,  par  le  moyen  desquelx  se  peult  tenir  ce  feu  allumé, 
quant  ilz  se  sentiront  supportez  et  auront  espérance  de  treuver  quelque  reffuge  et 
appuy  si  grand,  que  celluy  que  l'on  leur  peult  faire  de  deçà 

Et   pour  austant  que  le  roy   a  présentement  nouvellse  que  les  Anglois  ont 


(  824  ) 
Tannée  io45,  ils  s'emparèrent,  quand  ils  le  pouvaienl,  des 
vaisseaux  marchands  néerlandais  et  espagnols  (1).  Les  dé- 
prédations allèrent  tellement  loin,  que  l'empereur  fut 
obligé,  pour  les  faire  cesser,  de  confisquer  les  navires  et 
marchandises  des  Anglais.  Une  bonne  partie  de  la  corres- 
pondance de  Charles-Quint  et  de  la  reine  Marie  avec  les 
ambassadeurs  des  Pays-Bas  en  Angleterre  roule  sur  les 
prises  de  mer  faites  de  part  et  d'autre (2).  Les  négociations 
de  Vander  Dilft  et  de  Vander  Burch  à  Londres  pendant  les 
années  1544  à  1545,  celles  Bourbourg  en  1545,  n'eurent 
pas  d'autre  but. 

On  le  voit  facilement,  les  Anglais,  comme  les  Écossais, 
sacrifiaient  à  la  jalousie.  L'abaissement  de  notre  marine 
était  le  triomphe  de  la  leur. 

En  1550  la  guerre  faite  à  notre  marine  marchande  par 
les  flibustiers  écossais  eut  des  proportions  plus  grandes  en- 
core, et  força  le  gouvernement  des  Pays-Bas  à  prendre  des 
mesures  de  rigueur  contre  un  pays  livré  depuis  longtemps 
à  la  merci  de  la  France  (3).  Les  connivences  entre  les 


naguères  prins  jusques  à  soixante-dix  navires  flamants  et  subjectz  de  l'empereur 
chargez  de  harens  qui  venaient  à  Rouen  à  la  foire  de  la  Chandeleur,  dont  l'em- 
pereur a  fait  grand  démonstration  d'estre  fort  malcontent  et  fait,  pour  ceste  cause, 
saisir  et  arrestertous  les  vivres  et  personnes  de  tous  les  Anglois  estant  dans  les 
Païs-Bas,  chose  qui  est  grandement  contraire  à  ce  quelesdits  Anglois  font  publier 

l)artout  de  la  grande  et  seure  intelligence  qui  est  entre  eulx  et  ledit  empereur 

Faict  à  Saint-Germain  en  Laiz,  le  XXVIl  jour  de  janvier  mil  cinq  cens  quarante- 
huict. 

(Signé):  Henri. 

(1)  Wagenaar.  /.  c,  p.  279. 

(2)  Dans  une  de  ses  lettres,  datée  du  27  juin  -1545,  l'empereur  disait  à  son  am- 
bassadeur qu'il  avait  fait  entendre  à  celui  d'Angleterre  à  Bruxelles  :  «  que  le  roy 
«  avait  malusé  quant  aux  violences,  prinses  et  arrestz  de  navires  et  marchandises 
»  de  nos  subjetz.  » 

;3)  Tytler,  History  of  Scotland,  t  V,  pp.  350,  422;  Calender  of  State  papers 
précité  p.  69;  Buchanus,  De  rébus  Scutis ,  p.  611;  Robertson.  Ilist.  d'Ecosse, 


(  82ri  ) 

Écossais  et  les  Anglais  étaient  en  outre  devenues  trop  évi- 
dentes. De  l'avis  de  la  gouvernante  il  n'y  avait  possibilité 
de  les  arrêter  que  par  des  négociations  avec  le  gouverne- 
ment d'Edouard  Yl.  Scliyfve  et  Vander  Dilft  arrivèrent  à 
Londres  (19  mai  1550)  à  ti(re  d'envoyés  de  l'empereur.  Ils 
furent  immédiatement  reçus  par  le  roi  et  son  conseil 
(23  mai).  Le  but  de  leur  mission  était  de  faire  des  repré- 
sentations au  conseil  concernant  les  fortifications  élevées 


t.  II,  pp.  i(i6,  176.  179.  Nous  reproduisons  ici  l'instruction  donnée  par  l'empereur 
à  son  envoyé  en  Ecosse,  dans  le  but  de  prémunir  le  gouvernement  de  ce  pays 
contre  l'influence  française  : 

Vous  déclarerez  que  vous  êtes  de  S.  M.  envoyé  tout  expressément  audit  Escossc 
pour  luy déclarer laflection  que  sadicte Majesté  a  tousiours  eu  de  garder  et  entre- 
tenir bonne  paix  avec  ung  chascun  etmesme  ses  anciens  alliez,  comme  sont  ceulx 
d'Escosse.  . . .  n'ayans  jamais  eu  querelles  entre  eulx,  tant  que  les  François,  en- 
vieulx  de  cestc  bonne  amytié  et  alliance,  ont  entre  eulx  semé  leur  zizanie  Lesquels, 
après  avoir  mis  le  pied  en  Escosse,  ne  cesseront,  tant  qu'ilz  auront  tout  le  royaulme 
en  leur  pouvoir  pour  l'incorporer  avec  France;  detenans  à  ceste  fin  l'héritière 
dudit  royaume  en  leur  pouvoir,  sans  que  icelle  puist  veoir  icelluy,  ny  ceulx  dudit 
royaulme  leur  royne  et  héritière,  le  tout  pour  en  faire  leur  prouffit  et  s'en  servir 
en  leurs  dessaings  et  troubles  qu'ils  sussitent  partout,  pour  parvenir  à  la  fin  de 
leur  ambition,  qu'est  de  dominer. 

Quilz  peuvent  aussi  veoir  comment  de  jour  à  aullre  lesditz  François  se  irapa- 
tronnient,  envoyant  la  force  d'Ecosse  hors  le  pays,  et  en  leur  lieu  des  François. 
Et  tout  cecy,  afin  qu'ilz  puissent  tant  plus  facilement  parvenir  à  leurs  desseings. 

Qu'ilz  emploient  les  vaissaulx  et  subjecîz  d'Escosse,  qu'ils  ont  tyré  en  France, 
contre  les  pays  et  subjectz  de  S.  M.,  avec  lesquelztoutesfois  ilz  debvroient,  selon  le 
dernier  traicté,  demeurer  en  bonne  amytié 

(Sans  date,  liasse  XIV  des  papiers  revenus  de  Vienne  en  1862,  Archives  du 
royaume.) 

Le  gouvernement  écossais  ne  cachait  nullement  cette  influence.  David  Pavegne, 
secrétaire  du  royaume,  arriva  en  'lo4o  à  Bruxelles,  muni  de  lettres  de  créance, 
pour  déclarer  que  si  l'ancienne  amitié  entre  les  deux  pays  avait  été  enfreinte, 
«  c'esloit  par  l'importune  poursuite  de  leurs  anciens  ennemis.  »  (Lettre  de  Mario 
«  de  Hongrie  à  l'ambassadeur  d'Angleterre,  du  8  mars  doio.)  V.  aussi  Teulel. 
lielalioiis  diplomatiques  de  la  France  cl  de  l'Espagne  avec  l'Ecosse,  t.  I. 
pp.  119,  1*24,  doO  et  suiv.,  176,  179  et  Memoirs  of  his  arn  life  by  sir  James 
Me'vill,  lo'fO  à  lo75. 

2"*^  SÉRIE,  TOME  XL.  55 


(  82G  ) 

près  de  Gravelines,  la  prise  de  quelques  navires  dans  les 
environs  de  ce  port  et  certaines  contestations  territoriales. 
Scbyfve  seul  s'occupa  activement  des  réclamations  élevées 
par  le  gouvernement  des  Pays-Bas  contre  les  machinations 
ourdies  entre  les  Écossais  et  les  Anglais  en  vue  de  ruiner 
notre  commerce. 

Il  écrivit  à  la  reine  (6  juin  1530)  que ,  selon  la  rumeur 
publique  répandue  à  Londres,  les  Anglais  faisaient  bonne 
paix  avec  les  Écossais,  à  la  suite  du  pacte  intervenu  entre 
l'Angleterre  et  la  France.  Celait  vrai.  Les  Anglais  et  les 
Écossais  négociaient  môme  un  traité  de  commerce  mari- 
time (1).  Cette  circonstance  expliquait  parfaitement  dans 
ce  moment  la  bienveillance  des  Anglais  à  l'égard  des  pi- 
rates Écossais.  «  Je  me  suis  enquis,  ajoute-t-il,  de  savoir 
»  si  le  sieur  d'Arsquin,  ambassadeur  d'Escosse,  qui  fut 
»  dernièrement  icy,  seroil  retourné,  ou  quelque  autre  en 
»  son  lieu ,  puisque  les  quarante  jours  sont  jà  expirez,  en 
»  dedans  quel  temps  la  royne  d'Escosse,  contenue  au  traicté 
)>  entre  les  François  et  Anglois,  doit  prononcer.  On  dit 
»  môme  qu'un  personnage  d'Escosse  est  arrivé  à  Lon- 
»  dres  »  (2).  Dans  cette  lettre  l'ambassadeur  belge  rend 
compte  de  ses  démarches  auprès  du  conseil  du  roi  pour 
lui  représenter  comment  les  Écossais  s'emparaient  des 
vaisseaux  néerlandais  à  l'embouchure  de  la  Tamise,  les 
amenaient  par  ce  fleuve  à  Londres,  où  ils  étaient  vendus 
publiquement  à  des  marchands  anglais,  très  au  courant  de 
la  capture  illégale  de  ces  navires.  «  Ceux  du  conseil,  dit-il, 
»  déclaroient  qu'ils  estoient  en  guerre  avec  les  Écossois; 
»  et  cependant  quatre  navires  de  guerre  anglois  avoient 


(1)  Teulet,  Relations  politiques ,  l.  c,  1. 1.  p.  244. 
f!2)  Lettre  (lu  6  juin  iooO,  Conseil  privé. 


(  «'^7  ) 
D  passé  devant  les  Kscossois  en  coiuluisaul  leurs  commis- 
i>  saires  en  France,  d  En  apparence  ces  laits  devaient 
sembler  contradictoires  à  notre  ambassadeur.  La  cour  de 
Londres  voulait  faire  croire  qu'elle  ne  s'entendait  nulle- 
ment avec  ses  voisins,  tandis  qu'elle  était  en  pleine  négo- 
ciation avec  eux.  Ces  contradictions  apparentes  s'expli- 
quent facilement  lorsqu'on  saisit  bien  la  politique  anglaise 
à  l'égard  des  Pays-Bas  et  de  l'Ecosse.  Depuis  le  mo- 
ment où  la  paix  fut  signée  avec  la  France,  l'Angleterre 
n'avait  plus  besoin  de  l'amitié  de  l'empereur.  Elle  pouvait 
ruiner  à  son  profit  le  commerce  maritime  de  nos  provinces, 
désir  auquel  la  politique  et  les  querelles  religieuses  n'é- 
taient pas  étrangères.  D'un  autre  côté  elle  devait  ménager 
l'Ecosse,  avec  laquelle  les  nécessités  du  moment  l'obli- 
geaient à  faire  la  paix  et  où  elle  comptait  beaucoup  d'amis 
et  de  coreligionnaires.  Le  nombre  de  ceux-ci  avait  singu- 
lièrement augmenté  depuis  le  moment  où  les  excès  com- 
mis par  les  troupes  françaises  chez  les  Écossais,  leurs 
amis  et  alliés,  avaient  fait  surgir  entre  ces  deux  peuples 
une  haine  implacable  (I). 

Ce  n'était  pas  le  seul  fait  à  reprocher  à  l'Angleterre. 
Tantôt  des  vaisseaux  de  guerre  de  ce  pays  attaquaient  les 
nôtres  (2);  tantôt  les  agents  anglais  forçaient  nos  matelots 
à  suivre  les  prêches  dans  leurs  ports;  tantôt  ils  poursui- 
vaient nos  navires  sous  prétexte  de  faire  payer  un  droit 


(1;  Teulet,  /.  c,  t.  I,  pp.  197,  208,  2^22, 230,  274. 

(2)  Dans  le  but  d'éviter  les  méprises,  des  propositions  furent  faites  pour  lixer 
les  formes  des  pavillons  «  les  navires  ne  porteront  aultres  enseignes  ni  bannières 
que  l'aigle ,  avec  celles  de  l'amiral,  à  savoir  le  chevalier  de  mer  tenant  ses  armes, 
et  celles  du  roy  d'Angleterre  la  croix  rouge  ou  la  bannière  avecq  les  armes  du 
roy.  »  On  tirera  un  nombre  déterminé  de  coups  de  canon  pour  se  reconnaître. 
M  s.  13.337  de  la  Bibl.  royale  de  Bruxelles.) 


(  828  ) 

(Je  tonlien,  dont  ils  élaient  affranchis  en  vertu  de  privi- 
lèges; tantôt  ces  agents  laissaient  échapper  les  pirates 
écossais  dont  ils  s'étaient  emparés  pour  la  forme  (1). 

Une  nouvelle  expédition  maritime,  à  laquelle  Sccpperus 
assista,  devenait  nécessaire.  Elle  lut  dirigée  contre  les  pil- 
lards en  juillet  1550.  Les  résultats  ne  répondirent  pas  à 
l'attenle.  Une  brume  épaisse  assaillit  nos  navires,  dont  les 
grandes  dimensions  ne  permirent  pas  de  franchir  les  pas- 
sages entre  les  bancs  de  sable  formés  près  des  cotes  de 
l'Angleterre.  C'était  précisément  dans  ces  parages  que  se 
trouvaient  les  pirates.  Après  la  levée  du  brouillard,  quel- 
ques-uns des  navires  les  plus  petits  furent  détachés  de  la 
flotte.  Ils  visitèrent  successivement  les  rades  et  les  cours 
d'eau,  dans  lesquels  s'étaient  léfugiés  les  pillards  effrayés 
à  l'approche  de  nos  bâtiments  de  guerre.  Dès  que  nos  na- 
vires entraient  dans  un  fleuve,  les  ennemis  le  remontaient 
dans  leurs  barques  légères,  et  échappaient  ainsi  à  toute 
recherche,  devenue  impossible  à  cause  des  dimensions  de 
nos  bâtiments  (2).  D'autres  navires  de  flibustiers  s'enfuirent 


(1)  Lettres  de  Schyfve  des  17  juin  et  2ô  juillet  1450.  (Conseil  privé./ 
(2'  Nous  transcrivons  ici  la  relation  de  Sceppcrus  sur  cette  expédition. 

Madame, 

l'our  advertir  V.  M.  du  succès  et  progrès  de  vostre  armée  de  mer,  jjlaise  à 
icelle  sçavoir  que  avec  vent  fort  contraire  nous  arrivâmes  au  primes  dimence 
passé  sur  la  coste  d'Engletcrre,  tcnans  ensemble  grandes  et  petites  navires  pour 
itî  respect  que  avions  aux  François  et  Angiois,  si  par  avanture  ilz  eussent  eu  qucl- 
([ue  nombre  de  navires  ensemble,  dont  ne  sommes  appcrcheuz.  Et  nous  eslongeant 
(le l'embouchure  de  la  Tamize  et  des  sablons  y  gisans,  fismes  nostre  cours  vers  le 
noord  et  courlames  nostre  marée  pour  celle  nuycl  que  nous  surprint  une  bruyne 
si  cspesse,  que  ne  sçavions  veoir  la  proua  delà  pouppe  de  nostre  navire.  Toutes- 
fois,  Dieu  grâces,  il  nous  print  si  bien,  que  estant  le  lendemain  ladicte  bruyne 
avllée.  nous  trouvâmes  l'ung  près  de  l'aultre,  que  lors  prismes  conclusion  entre 
nous  que  le  capitaine  Mceckcre,  avec  les  quatre  grandes  navirs,  liendroit  la  mer 
audchors  des  saidons  et  plates,  dont  toute  ceste  coste  est  pleine,  et  que  moy,  avec 


(  8^i9  ) 

vers  le  nord,  afin  d'éviter  les  poursuites  de  la  marine  helge. 
Voyant  notre  impuissance  à  les  alleindrc,  les  corsaires 


quatre  les  plus  petites  navires,  courreroye  la  dicte  coste  par  dedens  les  sablons 
entre  iceulx  et  la  terre  ferme  si  avant  que  porroye,  pour  veoir  si  ne  trouverions 
quelques Escossois  ou  pirates  que  oousluniièrement  se  tiennent  icyet  sont  souste- 
nuzdes  Anglois,voires  sont  Anglois  mesmcs,  ayant  en  leur  compagnie  un,  deuxou 
trois  Escossois  seulement.  Et  par  ainsi  séparez  les  ungs  des  aultres.je  me  trou- 
vis  avec  les  quatre  navires  susdictes  devant  la  ville  de  llervvitz  au  pays  de  Zuud- 
folck,  par  où  il  y  a  grande  entrée  pour  les  pirates  et  une  des  principales  de  ce 
quartier.  Et  délaissant  illec  trois  navires,  je  m'en  alliz  avec  la  quatriesme  courir 
la  coste  du  pays  d'Essex  jusques  au  noord  costé  de  l'issue  de  la  Tamize  et  cer- 
taine entrée  des  navires  entre  les  sablons  nommés  de  Speidtz  que  pareillement 
est  maintenant  grand  passaige  desdits  Escossois  à  l'environ  de  St-Orsis  et 
Malden,où  suis  esté  mardi,  mercredi  et  jeudi.  Et  cependant  sont  de  nuict  arrivez 
au  loing  de  la  terre  en  ce  lieu  de  Hcrwitz  deux  pinasses  escossoises  armées  en 
guerre  avec  ung  boit  de  Flandres  prins  sur  les  Flamangs  qu'ilz  ont  armé,  sans 
avoir  esté  veues  des  susdites  trois  navires ,  dont  à  mon  retour  icy  fus  adverty  et 
mesmes  que  lesdits  navires,  da  peur  qu'ilz  avoientde  nous,  s'estoyent  bouttez  bien 
avant  dedens  pays  en  une  petite  rivière  contre  mont,  entre  ceste  ville  et  la  ville  de 
Ypswitz.  De  sorte  que  à  noz  navires  n'est  possible  de  les  sçavoir  approcher,  pour 
la  petite  parfondeur,  joinct  que  ce  sont  gens  de  ce  quartier.  Et  est  le  capitaine 
principal  demourant  audit  Ypwitz  nommé  Jems  Greyn  de  Doude,  et  est  celluy  qui 
puis  naguères  en  ce  mesine  lieu  a  admené  et  vendu  deux  navires  de  Dunckerkes. 
duquel  aussi  les  lettres  de  monsieur  l'ambassadeur  Scheyf  font  mention.  Et  Ont 
tous  les  paysans  et  manans  à  leur  commandement ,  comme  ceste  nuict  il  s'est 
trouvé  par  noz  gens  que  avec  trois  sclmtcs  j'avois  envoyé  contre  mont  ladite, 
rivière,  pour  les  descouvrir  et  veoir  leur  convenant,  et  les  ont  trouvé  teliement 
appercheuz  et  préadverti  i  par  les  Anglois,  qu'ilz  ne  les  ont  sceu  entamer.  Et  en 
sommes  présentement  plus  en  particulier  informez  par  certain  garsson  que  doub- 
lons estre  envoyé  pour  espie.  Et  est  venu  à  bort  avec  certaine  schute  angloise, 
disant  qu'il  nous  donneroit  nouvelles  à  l'endroit  desdits  Escossois.  Nous  regar- 
derons ce  que  en  porrons  faire,  et  sy,  sans  trop  esmouvoir  le  pays ,  en  perrons 
venir  audessus.  Du  moins  ce  nous  servira  pour  tesmoingnage  oculaire  que  contre 
le  traicté  entre  l'empereur  et  le  roy  d'Engleterre  et  mesmes  contre  celluy  d'entre 
Engleterre  et  France,  les  Anglois  soustiennent  les  Escossois  en  guerre  contre  les 
subjectz  de  l'empereur,  ou  pour  mieulx  dire  ce  sont  eulx  mesmes  qui  font  la  guerre 
à  l'empereur. 

Madame,  quant  orés  ce  des  Escossois  que  dessus  ne  seroit  advenu,  si  ne  po- 
vons  bouger  d'ici  si  longuement  que  ceste  tourmente,  que  commença  hier.  dure. 
Et  sommes  en  assez  bon  lieu,  sans  que  puissions  estre  offensez,  ne  de  ceste  ville, 
ny  des  deux  chasteaux  situez  sur  ung  sablon  à  l'entrée  du  port,  places  depetile 


(  850  ) 

reprirent  courage,  et  abordèrent   sans  gène   avec  leurs 
proies  en  Angleterre  et  en  Irlande.  Au  nom  de  la  gouver- 
nante des  Pays-Bas,  Schyfve  requit  Edouard  VI  d'agir  effi- 
cacement contre  les  pirates,  qu'elle  ne  voulait  plus  tolérer 
ni  voir  favoriser  par  des  Anglais  «  ou  autrement,  disait-il, 
»  pour  l'indempnité  des  sujets  de  S.  M.  conviendioit  d'user 
»  de  revanche  envers  lesdits  pirates,  quelque  part  que  l'on 
»   pouiroit  les  ratteindre.  »  Le  conseil  protestait  de  son 
ignorance  la  plus  complète  de  ce  qui  se  passait,  protesta- 
tions auxquelles  l'ambassadeur  belge  refusa  d'ajouter  foi, 
«  attendu,  disait-il,  que  les  officiers  du  roy  en  tous  ports 
»  et  havres  le  savent.  »  Convaincu  par  ce  raisonnement  si 
simple,  le  conseil  promit  de  lancer  un  placard  contre  les 
lïibustiers,  et  de  les  faire  poursuivre.  Jusque -Là  le  duc 
de  Somerset,  protecteur  du  royaume  pendant  la  minorité 
d'Edouard  VI,  avait  conservé  son  calme.  A  la  lin  de  la  con- 
versation il  releva  vivement  le  mot  de  revanche  prononcé 
j)ar  Schyfve,  et  lui  demanda  des  explications  à  ce  sujet. 
L'ambassadeur  belge  répondit  en   véritable  diplomate  : 
«  que  S.  M.  pour  l'indempnité  de  ses  sujets  y  pourvoiroit 
»  de  remède,  de  droit  et  licite,  assavoir  de  poursuyr  et 
D  rateindre  ledits  pyrates  et  escnmours  de  mer,  où  qu'ilz 
»  seroient  trouvés  (1).  » 

La  menace,  nous  venons  de  le  voir,  n'eut  pas  d'effet. 


imporlancc;  mais  la  villo  assez  raisonnable  à  veoir  de  loing.  Qu'est  ce  dont  je 
sçauroyc  advenir  Vostre  Majesté  pour  le  présent. 

A  tant,  Madame,  je  supplie  le   Créateur  de  donner  à  Vostre  Majesté  ce  qu'elle 
désire  le  plus  en  bonne  vie  et  longue. 
Du  port  devant  Horwitz.  ce  vendrcdy  iiu'"  de  jullct  XVC  cinquante. 
De  Vostre  Majesté, 

Très-humble  et  très-obéissant  serviteur. 

CORNILLE   SCEPPLRUS. 

;i)  Lettre  de  Schyfve  du  3  juillet  lo50. 


(  H"'«  ) 

Les  pirates,  parn)i  lesquels  se  trouvaient  un  grand  nombre 
d'Anglais  et  même   des  Oslendais,  reparurent   partout. 
En  présence  de  ces  actes  de  nouvelles  représentations 
furent   adressées  de   la   part  de    notre  ambassadeui'  an 
conseil.   Celle    fois-ci    il    le   requit   catégoriquement  de 
s'occuper  des  demandes    si    nombreuses  faites   par  les 
marcbands  néerlandais,  de  juger  lui-même  les  contesta- 
tions au  sujet  des  prises  faites  en  mer,  au  lieu  de  les  ren- 
voyer devant  l'amirauté.  Là,  disait  Schyfve,  les  procé- 
dures trahient  eu  longueur;  les  affairesn'y  finissent  jamais. 
Le  conseil,  on  le  comprend  facilement,  devait  répudier 
une  semblable  mission,  qui  dans  tous  les  pays  appartenait 
à  l'amirauté  (1).   Sinon  le  gouvernement  aurait  été  mis 
directement  en  cause.  «  Le  conseil,  dit  Schyfve,  refusa. 
»  Nonobstant,  toutesfois  ce  que  dessus,  ils  persistarent  et 
»   me  dirent  qu'il  estoit  bien  raisonnable  qu'iiz  en  fussent 
p   du  tout  préalablement  informés.  A  quoy  adjousta  mil- 
»   lord  Werwyck  (prenant  la  parolle  devant  Sommerset, 
»  dont  il  estoit  à  le  veoir  peu  satisfait),  que  le  roy  avoit 
»  paix  et  traicté  avec  les  Escossois,  et  qne  partant  le  roy 
»   ne  les  pouvoit  traicter  aultrement  que  ne  convenoit.  Sur 
»  quoy  je  leur  dis  que  me  sembloit  bien  que  le  roy  avoit 
1)  paix  avecq  lesdis  Escossois.  Et  me  coupant  la  paroîle, 
»  Paget  dict  qu'iiz  n'avoient  paix  avec  eulx;  mais  que  le 
»  roy  n'estoit  tenu  devers  S.  M.  d'invader  les  Escossois  ou 
»  d'exercer  quelque  hostilité  sur  iceulx.  A  quoy  leur  res- 
>  pondis  qu'il  n'y  avoit  icy  question  de  quelque  invasion 
»   ou  hostilité,  ains  tant  seulement  s'il  estoit  permis  et 
»  licite  au  roy  d'entretenir,  nourir  et  favoriser  les  Escos- 
s>  sois,ennemys  de  S.  M.,  fussent  pyratesou  aultres,mesme 


;1)  Y.  De  Jont^he,  /.  c,  1. 1.  pp.  61  et  suivantes. 


(  832  ) 

»  (Je  laisser  tellement  user  ses  propres  subjectz  sur  ceulx 
»  de  l'empereur,  et  que  nullement  ledit  faict  esloit  pas- 
D  sable  ou  escusable;  et  que  c'estoit  bien  plus  que  d'im- 
»  pédier  l'entrecours  et  mutuel  commerce,  lequel  ilz  dési- 
»  rent  si  grandement,  comme  l'ambassadeur  Cbanibellain 
»  avoit  l'autre  jour  déclaré  à  S.  M.  Sur  quoy  pariant  ledit 
»  Sommerset  et  le  répétant  Paget  disrent  que  l'empereur 
»  par  cy-devant  à  l'endroit  des  Escossois  auroit  bien  laict 
»  le  semblable,  sans  déclairer  en  particulier  quant  et  com- 
»  ment.  Et  lors  dirent  que  S.  M.  n'avoit  oncques  failly  au 
»  moindre  point  de  ces  troitez...  (26  juillet  iooO).  » 

Les  termes,  si  aigres  de  cette  conversation,  démontrent, 
à  la  dernière  évidence,  le  désir  du  gouvernement  anglais 
de  ne  pas  vouloir  agir  avec  rigueur  envers  les  Écossais. 

En  dépitdes  placards  publiés  par  Edouard  VI  contre  les 
flibustiers,  les  déprédations  continuèrent  et  devinrent 
plus  nombreuses  que  jamais.  Impossible  de  narrer  ici  tous 
les  dommages  portés  à  nos  navigateurs,  impossible  de  dé- 
crire toutes  les  scènes  de  pilleries.  Ces  détails,  transcrits 
dans  les  correspondances  et  lés  actes  officiels,  appartien- 
nent plutôt  à  la  chronique  qu'à  l'histoire  (1).  Nous  dirons 


(1)  V.  à  ce  sujet  la  correspondance  de  la  reine  Marie  avec  Schyfve,  et  la  nomen- 
clature des  griefs  articulés  contre  l'Ecosse  dans  les  archives  de  l'Audience,  liasse 
LXIV.  Ces  pièces  sont  intitulées  :  Narralio  eonon  que  fjesta  su)H  et  acciderutit 
Flandris  qiiibusdain  ex  oppido  Bnujensi  uavi'jaiitibui  ex  porta  Sti'sensi  in 
Scotiatri  ïitense  Augusto  aniii  XV  XLl^;  Wemontvancù  que  fait  le  commis  et 
député  de  l'empereur  envoyé  de  par  S.  M.  devers  Monsr  le  conte  d'Arrane;  tuteur 
et  gouverneur  de  la  royne  Marie  en  son  royaulme  d'Escosse,  des  prinses  et  pil- 
leries, extorsions,  tors  et  exactions  faites  aux  subjectz  de  ladite  M.  par  ceulx 
dudit  Ecosse  mesmement  depuis  le  dernier  traicté  et  accort  fait  en  Anvers  le 
xxviij*^^  jour  d'avril  l'an  XV'^  quarante-cinq,  V.  aussi  dans  les  Comptes  rendus  de 
la  Commission  d'histoire  3^"  série,  t.  VHI,  pp.  168,  188,  188,  iii-9;  les  Annales 
de  la  Société  d'Éuudaiion  de  Bruges,  2'"  série,  t.  VI.  p.  369  et  suiv.  et  Wagnaar 
Vaderlandsche  historié,  t.  V. 


(  835  ) 

seulement  que  rempcrour  ordonna  (29  mai  1544)  la  saisie 
(les  biens  et  marchandises  appartenant  à  îles  Ecossais,  et 
qu'à  Terveere  plusieurs  individus  d(;  cette  nation  furent 
arrêtés.  Poussés  à  bout,  nos  matelots  ne  manquèrent  pas 
à  leur  tour  de  prendre  des  vaisseaux  écossais.  C'est  ainsi 
que  les  gens  d'un  navire  hollandais ,  capturé  par  des  pi- 
rates écossais,  s'emparèrent  du  bâtiment  de  leurs  enne- 
mis et  le  ramenèrent  à  Helvoeîsluis.  Une  autre  l'ois  les 
nôtres  débarquèrent  dans  une  île  écossaise,  et  y  exercèrent 
les  cruautés  les  plus  grandes.  Enfin  ils  finirent  par  ha- 
rasser tellement  les  ennemis  qu'un  de  leurs  plus  fameux 
flibustiers,  nommé  James  Gryn,  fut  tout  à  fait  ruiné. 
C'étaient  toujours  les  îîoi landais  qui  se  distinguaient  par 
leur  courage  et  la  hardiesse  des  coups  de  main.  S'ils  étaient 
souvent  enclins  à  se  mutiner,  ils  étaient  pleins  d'ardeur 
au  moment  du  danger.  Ce  qui  faisait  dire  par  Scepperus 
dans  un  rapport  adressé  à  la  gouvernante  :  «  les  matelots 
y  hollandois  ne  sont  rangeables  à  la  raison,  ne  plusieurs 
»  des  maistres  des  navires  aussy,  et  signament  d'Amster- 
»  dam  et  Wateriand,  ores  que  ceulx  d'Enchusen  ne  sont 
»  en  tout  excusables,  fis  sentent  mutinerie  et  sédition,  et 
»  pour  telzsont  ténuz  etreputés  en  Hollande  et  par-de-çà; 
5)  ores  qu'aultrement  ce  soient  bons  et  hardis  maronniers, 
»  ayans  bonnes  navires  et  mieulx  équipées,  que  ceulx  de 
»  leur  sorte  en  ont  (1).  a  Ces  prédispositions  à  la  muti- 
nerie s'expliquent  par  leur  aversion  des  Espagnols,  tou- 
jours fanfarons,  bien  souventaussi  pillards  et  dévastateurs 
lorsqu'ils  étaient  logés  dans  les  villages.  Les  Hollandais  , 
comme  les  Flamands,  vouaient  aux  Espagnols  une  haine 


(1)  Lettre  (lu  tîO  sept.  lobA. 


(  854  ) 
implacable,  source  d'un  grand  nombre  d'émeutes,  et  l'une 
des  causes  qui  ne  contribua  pas  peu  au  soulèvement   de 
nos  provinces  pendant  le  XVi''  siècle  (1). 

Cependant  l'Angleterre  laissa  les  pirates  écossais  en 
repos  sous  prétexte  qu'elle  ignorait  complètement  leurs 
agissements.  Elle  ferma  les  yeux  sur  toutes  leurs  dépré- 
dations, sachant  très-bien  que,  par  suite  de  sa  position, 
l'empereur  ne  pouvait  rompre  ouvertement  avec  Edouard  Vï 
et  son  conseil.  Elle  n'ignorait  pas  que  ,  selon  la  manière 
de  voir  de  Charles-Quint,  elle  était  un  épouvantail,  dont 
il  faisait  usage  en  temps  et  lieu  contre  les  Français: 
a  L'Angleterre,  jointe  aux  Pays-Bas,  disait  l'empereur 
»  dans  une  lettre  adressée  à  Renard,  est  redoutée  par  la 
»  France  (2).  »  Les  Anglais  se  crurent  donc  autorisés  à 
faire,  sans  la  déclarer,  une  guerre  clandestine  à  nos  marins. 
En  une  année,  ils  prirent  plus  de  soixante  et  dix  de  nos 
vaisseaux.  Un  autre  motif  non  moins  important  engageait 
Charles  à  ménager  cette  puissance.  La  constitution  physique 
d'Edouard  VI  et  le  testament  de  Henri  Vlil  pouvaient 
amener  un  changement  complet  dans  le  gouvernement. 
Qu'en  savait-on?  Peul-èire  un  jour  iMarie  Tudor,  princesse 
sur  laquelle  l'empereur  exerçait  une 'grande  influence, 


(i)  Lorsqu'en  1333  l'empereur  ordonna  de  faire  passer  des  Espagnols  sur  la 
flotte,  ceux-ci  furent  envoyés  dans  lîle  de  Walchcren.  A  leur  arrivée,  un  soulève- 
menf  général  eut  lieu;  les  campagnards,  rangés  en  ordre  de  bataille,  se  présen- 
tèrent devant  Middelbourg,  dans  le  but  d'attaquer  les  Espagnols.  Il  fallut  toute  la 
présence  d'esprit  de  Scepperus  pour  les  apaiser.  (Leitrc  du  16  octobre  loo3, 
Arch.  de  TAud.)  Dans  une  lettre  du  ti  décembre  1353,  Renard,  ambassadeur 
belge  à  Londres,  se  plaint  à  l'empereur  de  l'inconduite  des  Espagnols,  qui,  selon 
lui,  devraient  être  plus  modestes.  (Correspondance  manuscrite  de  l'empereur 
avec  Granvelle,  p.  4o5.) 

(2)  Lettre  du  25  nov.  1553.  {Corresp.  manuscrite  de  Charles  V  avec  Gran- 
velle, ip  AU.) 


;  85;)  ) 
saisira-l-clle  le  scoplre  de  la  Grande-Bretagne  (i).  Et  si 
cet  événement  se  réalisait,  tonte  la  poliliqnc  anglaise  ne 
j)onvail-ell(^  pas  changer  de  face  du  jonr  an  lendemain? 
Au  lien  d'étie  un  motif  de  division  entre  les  deux  gouver- 
nements, la  question  religieuse  deviendrait  peut-être  la 
hase  d'une  union  étroite,  et  fusionnerait  des  intérêts  com- 
muns. 

L'empereur  était  ohligé,  par  suite  de  ces  considérations 
et  pour  contre-halancer  l'influence  française,  d'entretenir 
des  relations  avec  le  gouvernement  protestant  de  la 
Grande-Bretagne.  Les  agissements  de  l'Angleterre  contre 
notre  marine  ne  lui  tenaient  pas  tant  à  cœur  pour  se 
hrouiller  avec  elle.  A  son  point  de  vue,  l'intérêt  privé 
devait  céder  devant  l'intérêt  politique.  «  Le  nouveau  roi, 
»  disait  Charles-Quint  en  parlant  d'Edouard  VI,  et  son 
»  royaume  sont  sous  ma  protection,  et  j'ai  avec  eux  une 
»  ligue  perpétuelle  et  héréditaire.   » 

Malgré  ces  protestations,  les  deux  gouvernements  se 
méfiaient  l'un  de  l'autre.  Charles  n'avait  pas  oublié  les 
négociations  clandestines  entamées  avec  la  France  par 
Henri  Vil  t.  Le  conseil  d'Edouard  VI  se  souvenait  du  traité 
de  Crépy,  du  refus  fait  par  l'empereur  de  sauver  Boulogne 
et  d'aider  l'Angleterre  dans  sa  guerre  avec  l'Ecosse. 
Grande  fut  aussi  la  méiiance  du  conseil  au  sujet  de  l'in- 
fluence exercée  par  Charles  sur  Marie  Tudor.  A  Londres, 
on  s'entretenait  publiquement  de  l'expédition  maritime  de 
Scepperus,  dont  le  but  fut  singulièrement  travesti  par  les 
nouvellistes.  Selon  les  Anglais  protestants,  il  voulait  se 
rendre  auprès  de  la  princesse  Marie  «  avec  le  secrétaire 


(1)  De  Larrey,  Histoire  d'Angleterre,  t.  III,  p.  893;  Lingard,  Histoire  d'Angle- 
terre, t.  VII,  pp.  81,  lo2.  Altnieycr,  Revue  trim.,  t.  XL. 


(  856  ) 

»  Dubois,  desguysés  en  maronniers,  pour  la  tirer  et  amener 
»  hors  du  royaulme  d'Engleterre,  dont  ceulx  du  conseil 
»  scroient  fort  scandalisez  et  peu  satisfaits,  et  la  com- 
»  mune  en  est  bien  travaillée,  et  que  à  ceste  occasion 
»  ladite  dame  seroit  mandée  en  court,  où  que  l'entier 
»  conseil  et  plein  collège  de  brief  se  doit  assembler.  »  A 
la  réception  de  cette  fausse  nouvelle,  des  soldats  furent 
envoyés  dans  tous  les  havres  et  ports  anglais,  afin  d'em- 
pêcher l'évasion  de  la  princesse.  Selon  John  Lingard,  une 
flotte  fut  équipée  pour  intercepter  toute  communication 
entre  la  côte  de  Norfolk  et  le  rivage  opposé  (1).  On  allait 
même  jusqu'à  prétendre  que  la  princesse  était  déjà  aux 
Pays-Bas.  Quelle  que  fut  l'absurdité  de  ces  bruits,  ils  trou- 
vaient partoutcréance.  L'ambassadeur  français,  à  Bruxelles, 
en  parla  au  président  du  conseil  d'Ktat.  Pour  toute  réponse, 
celui-ci  demanda  au  ministre  quel  avantage  rempereur 
pouvait  tirer  de  la  présence  de  la  princesse  dans  ses  pays. 
«  A  quoy  il  respondit  que  les  Anglois  estoient  d'opinion 
»  que  si  elle  csloit  auprès  de  S.  M.,  qu'elle  traicteroit  le 
»  mariage  d'entre  mon  seigneur  nostre  prince  et  elle,  et 
»  que  après  Sadite  Majesté  vouldroit  prétendre  qu'elle 
D  fuse  vraye  royne  d'Angleterre,  pourceque  le  roy  présent 
î>  estoit  sismatique  et  procédant  d'un  père  de  mesme 
»  farine,  et  descendu  de  femme  non  ayant  esté  espousée 
»  selon  l'ordonnance  de  l'Église  romaine,  tellement  que 
»  Sadite  Majesté  feroit  avec  ceste  couleur  la  guerre.  11 
»  adjousta  d'avantage  avoir  entendu  de  l'ambassadeur 
»  d'Angleterre  résident  en  cesle  cour,  que  l'on  tiendroit 
»  à  l'advenir  plus  de  soing  à  bien  garder  ladile  princesse 


(1)  Histoire  d'Angleterre,  l.  c,  t.  Vil,  p.  82. 


(  857  ) 
»  (|ne  l'on  n'avoit  l'aict  par  cy-ilevanl,  el  (ni'il  falloil  que 
»  à  la  longue  elle  s'accordast  à  la  nouvelle  religion  intro- 
»  (luicle  par  le  roy  (I).  »  Ces  confidences,  Caites  dans  le  but 
d'exciter  plus  que  jamais  les  mélianccs  entre  les  deux 
cours  de  Londres  et  de  Bruxelles,  nVurent  pas  l'eiret 
désiré  par  l'ambassadeur  français. 

Le  démenti  le  j)lus  formel  fut  opposé  à  ces  bruits 
absurdes,  qui  ont  été  admis  comme  vérités  par  des  écri- 
vains modernes,  malgré  l'absence  complète  de  preuves  el 
l'invraisemblance  du  fait  (2).  Nous  n'avons  trouvé  dans  les 
correspondances,  même  les  plus  intimes  concernant  la 
princesse  Marie,  rien  qui  justifie  de  semblables  assertions. 
Cbarles  n'avait  aucun  intérêt  à  appeler  près  de  lui  une 
princesse,  dont  la  place  était  marquée  en  Angleterre.  La 
prudence  lui  commandait  d'attendre  les  événements  et  non 
de  les  précipiter  au  basard. 

A  toutes  ces  rumeurs,  à  toutes  ces  alarmes  vinrent  se 
joindre  des  bruits  étranges.  L'empereur,  disait-on,  voulait 
faire  publier  les  placards  contre  les  hérétiques  à  Anvers, 
lieu  de  résidence  d'un  grand  nombre  d'Anglais,  convertis 
à  la  religion  nouvelle,  et  obligés  par  conséquent  de  quitter 
leur  négoce  :  «  de  quoy,  ajoute  Scbyfve,  on  dit  que  depuis 
»  trois  ou  quatre  jours  en  ça  seroient  icy  retournez  dudit 
»  Anvers  dix  huytou  vingt  navires,  chargés  de  plusieurs 
»  denrées  et  marchandises  de  ce  royaume  et  plusieurs 
»  marchands  anglais  y  retirez.  Et  joinctz  les  points  cy 
»  dessus ,  on  croit  que  la  guerre  se  doit  suyvre,  dont  cha- 
B  cun  icy  est  fort  perplexe.  » 

Ces  bruits  avaient  pris  une  consistance  telle  que  Tam- 


Archives  de  l'Audience,  liasse  4". 

V.  Rapin  de  Thoyras,  Uisioirc  d'Annleiem:,  t. 


(  838  ) 

bassadeur  anglais,  près  de  noire  cour,  crut  devoir  en 
demander  des  explications.  La  gouvernante  nia  formelle- 
ment tous  les  faits  relatifs  à  la  princesse  Marie  et  à  Vhé- 
résie,  et  pour  montrer  combien  elle  était  sincère,  la  flotte 
néerlandaise  fut  rappelée,  au  grand  contentement  des 
Anglais  (i)  et  des  corsaires  surtout.  Par  cet  acte  de  cour- 
toisie, ceux-ci  obtenaient  champ  libre,  jamais  le  gouver- 
nement britannique  ne  leur  avait  rendu  meilleur  ser- 
vice. 

Ensuite  l'ambassadeur  anglais  se  plaignit  des  reproches 
continuels,  adressés  à  son  gouvernement  par  Schyfve,  au 
sujet  des  pirateries.  Constamment  il  nia  les  faits  articulés 
par  Schyfve  avec  une  précision  pour  ainsi  dire  mathé- 
matique ;  toujours  il  répudia  la  responsabilité  de  son 
gouvernement.  Ces  dénégations  continuelles,  répétées  à 
chaque  conférence,  finirent  par  fatiguer  la  reine.  Un  jour 
elle  répondit  au  ministre  anglais  qu'elle  reconnaissait  au 
conseil  du  roi  assez  de  pouvoir  pour  arrêter  ces  pirateries 
s'il  le  voulait,  «  mais  qu'elle  s'apperçut  assez  que  l'on  avoit 
»  tenu  peu  de  soing  à  exécuter  le  placard  contre  les 
D  pirates,  et  que  encoires  depuis  peu  de  jours  avoit  esté 
»  prins  par  iceulx  et  menés  aux  ports  d'Angleterre  un 
»  navir  de  par  deçà  (2).  » 

Bientôt  les  Irlandais  se  mirent  de  la  partie.  Après  avoir 
pris  les  îles  de  Farahil  et  de  Hetland,  appartenant  à 
l'Ecosse,  ils  s'y  installèrent  et  exercèrent  de  là  des  actes 
de  piraterie  contre  nos  pécheurs  (5).  L'Angleterre  s'excusa, 


(4)  Lettre  de  St-Mauricedu  24  juillet  looO.  ^Arch.  de  l'Audience,  n*»  47.) 

(12)  Lettre  de  la  reine  à  Schyfve  du  3  août  iooO. 

(3)  Lettre  de  Scepperus  du  80  juillet  iooO.  (Archives  de  l'Aud'cnce,  liasse  47.) 
Farahil  aujourd'hui  Fair  isle,  et  Hetland,  aujourd'hui  ZetIand(V.  Camdcn,  finran- 
nia  or  a  geograpliical  description  ofEncjland.  t.  III.  p.  733). 


(  S39  ) 

en  disant  que  les  Iilamlais  étaient  des  sauvages,  dont  elle 
ne  pouvait  se  l'aire  obéir. 

On  le  voit ,  les  relations,  en  apparence  si  bonnes  entre 
les  deux  cours,  étaient  fort  tendues.  Les  affaires  des  pira- 
teries prenaient  parfois  tontes  les  allures  d'une  querelle 
religieuse,  et  celle-ci  ne  contribua  pas  peu  à  envenimer  les 
relations  politiques  entre  les  deux  pays. 

Edouard  VI  et  son  conseil  voulaient  le  triompbe  du 
protestantisme.  Charles-Quint  voulait  précisément  le  con- 
iraire,  en  mettant  néanmoins  une  certaine  prudence  dans 
la  mise  à  exécution  de  ses  idées. 

A  Londres,  le  gouvernement  blâma  les  édils  de  proscrip- 
tion lancés  par  l'empereur  contre  les  hérétiques,  tandis 
qu'il  défendait  à  la  princesse  Marie,  restée  fidèle  au  catholi- 
cisme, de  l'aire  dire  la  messe  dans  son  bôtel  par  ses  chape- 
lains (1).  Cet  ordre,  consé(]uence  immédiate  des  innova- 
lions  religieuses,  fut  mal  vu  par  l'empereur.  Il  donna  lieu 
à  différentes  réclamations  de  sa  part  (2).  A  Calais,  les 
agents  anglais  forcèrent  les  matelots  belges  et  particuliè- 
rement les  habitants  de  la  AVest-Flandre  à  suivre  les 
prêches  des  sectaires  (5).  A  Bruxelles,  le  gouvernement  des 
Pays-Bas  s'irritait  des  outrages  commis  contre  le  culte 
dans  l'église  de  Sainte-Gudule  et  dans  celle  de  Binche  par 
des  gens  au  service  de  l'ambassadeur  anglais,  et  obligés  de 
suivre  à  la  messe  la  femme  de  ce  ministre,  restée  catho- 
lique (4).  C'étaient,  de  part  et  d'autre,  des  réclamations  et 


(1)  Lettre  de  Schyfve  du  3  août  1550.  Elle  donne  la  narration  de  cet  ordre  et 
des  détails  intimes  sur  la  conduite  de  la  princesse  à  ce  propos.  Ils  coraplètent 
ceux  donnés  i)ar  Lingard. 

(!2)  John  Lingard,  /.  c,  t.  VII,  p.  80  et  suiv. 

(3)  Lettre  de  Schyfve  du  2G  juillet  -looO. 

(4)  Note  du  président  de  S'-Maurice  du  lo  août  (?) -looO.  Selon  cette  note, 
l'ambassadeur  affirmait  que,  malgré  ses  idées  de  protestantisme,  il  laissait  à  sa 
femme  pleine  liberté  de  conscience. 


(  840  ) 
(les  récriminations  continueiles,  ol  tout  cela  à  propos  de 
la  piraterie. 

Toujours  préoccupé  des  relations  de  famille  établies 
entre  Charles-Quint  et  la  princesse  Marie,  le  gouverne- 
ment anglais  tenait  en  suspicion  nos  ministres  envoyés  à 
Londres.  Ceux-ci  n'obtenaient  rien  en  ce  qui  concerne 
leurs  réclamations  contre  les  pirates. 

L'empereur  s'intéressait,  en  effet,  depuis  1557,  au  sort 
de  sa  cousine  (1).  CY^tait  son  droit;  c'était  un  devoir;  mais 
cet  intérêt  n'avait  rien  de  compromettant  pour  le  gouver- 
nement d'Edouard  YL  Connaissant  très-bien  la  nature 
méridionale  de  la  princesse,  sa  fierté  et  sa  fermeté  de 
caractère,  il  lui  conseillait  constamment  la  prudence.  Par 
l'intermédiaire  de  la  gouvernante  des  Pays-Bas,  il  pres- 
crivit à  Schyfve  la  règle  de  conduite  que  la  princesse  devait 
suivre  à  l'égard  de  son  frère  Edouard  Yl  et  du  conseil, 
tous  imbus  des  idées  de  la  nouvelle  religion.  Selon  cette 
lettre,  elle  devait  obéir  au  roi  son  frère,  se  passer  de 
messe,  s'il  le  fallait,  mais  ne  rien  faire  de  contraire  aux 
préceptes  de  l'ancienne  Église  ;  plutôt  mourir  que  d'y 
forfaire(2).  Dans  ces  conseils  il  n'v  avait  rien  de  contraire 


(d)  Larrey,  "lîist.  d'Angleterre,  d'Ecosse  et  d'Irlande,  t.  III,  pp.  893,  780  et 
781. 

(2)  Voici  le  texte  de  cette  lettre  si  importante  au  point  de  vue  de  l'iiistoire  de 
l'Angleterre  : 

Marie,  etc. 

Très-chier  et  bien  amé.  Geste  sera  pour  vous  advenir  que,  avant  nostre  parle- 
ment d'Augs]mrg,  l'empereur  mon  seigneur  nous  a  ordonné  vous  escripreet  man- 
der que ,  à  la  première  commodité,  vous  veuillez  trouver  devers  madame  la 
princesse  d'Angleterre,  nostre  cousine,  si  avant  que  bonnement  et  sans  donner 
irop  mauvaise  impression  à  cculx  de  delà  faire  le  povcz;  sinon  que  le  faites 
faire  par  quelcun  léal  et  secret  et  auquel  vous  confyez,  pour  déclairer  et  faire 
entendre  à  nostreditc  cousine  comment  S.  M,  I ,  ayant  entendu  la  crainte  qu'elle 
a  d'estre  à  ce  prouchain  parlement  pressée  d'accepter  la  nouvelle  religion,  et  que 


(  841  ) 
aux   intérêts  d'Edouard  VI,  ni  de  la  nouvelle  religion, 
comme  le  gouvernement  le  soupçonnait. Toutes  les  phrases 


à  ceste  fin  l'on  la  mandera  en  court  devers  le  roy  d'Angleterre  pour  la  forcer  de 
déclairer  ce  qu'elle  en  sent,  et  luy  ordonner  de  obéyrà  la  déclaration  dudit  parle- 
ment; après  que  S.  M.  I.,  avecq  nostre  participation,  a  meuremcnt  pézé  ce  que 
nostredite  cousine  nous  en  a  fait  déclairer,  vous  a  commandé  et  expressément 
enchargé  de  vous  trouverdevers  elle,  et  luy  dire  que,  en  cas  qu3  le  S""  roy  d'Angle- 
terre, non  obstant  toutes  graiieuses  excuses  qu'elle  lui  a  désia  fait  faire,  la  voul- 
sist  encoires  presser  venir  devers  lui,  de  sorte  qu'il  luy  semblast  que,  en  plus 
reffusant  ou  délayant,  il  ou  ceulx  de  son  conseil  tacheroyeut,  subz  umbre  de  ce, 
lui  imputer  quelque  façon  de  désobéissance  ou  peu  de  respect  vers  iceluy  S""  roy, 
il  ait  semb  é  à  sadite  M.  I.  qu'elle  ne  se  doibt  ny  peult  excuser  de  soy  y  trouver, 
et  que  mieulx  vault  qu'elle  y  voyse  voluntairement,  que  contrainte,  comme  il  fait 
à  doubter  qu'ilz  feroycnt,  si  elle  perséveroit  à  en  faire  refTuz. 

Et  si  lors  ledit  S»"  roy  ou  ses  ministres  venoyent  à  luy  vouloir  ester  la  messe , 
qu'il  luy  sera  force  de  le  comporter,  puisqu'elle  n'y  sçauroit  faire  résistence, 
estant  chose  forcée  et  que  ne  luy  pourra  cstre  envers  Dieu  imputée,  non  luy  fai- 
sant perdre,  comme  S.  M.  ne  peult  croyre,  que  jamais  elle  ne  fera  la  dévocion  à 
icelle  messe,  ny  auront  lesdites  violences  force  ny  puissance  pour  la  faire  en  riens 
desmouvoir  de  la  foy.  Mais  s'ilz  la  vouloyent  contraindre  ou  à  consentir  à  chose 
erronnée  ou  à  communier  soubz  les  deux  espèces  ou  à  aultre  chose,  par  où  elle 
contrevint  de  son  fait  propre  à  chose  contraire  ou  répugnante  à  l'ancienne  reli- 
gion, que  plutost  elle  debvroit  mourir  que  de  le  consentir,  et  qu'elle  treuve  moyen, 
pour  évitant  'tant  que  faire  se  pourra)  les  soupçons,  nous  faire  sçavoir  ce  que  pas- 
sera, soit  par  vostre  moyen  ou  aultrement,  regardant  en  qui  elle  se  fyera  et  la 
personne  asseurée  que  S.  M.  I.  luy  fera  correspondre;  et  fera  tout  ce  qui  sera  pos- 
sible pour  luy  donner  assistence  vers  ledit  S""  roy  et  ceulx  de  son  conseil  fuitant 
tousiours  de  faire  office,  qui  ou  lieu  de  luy  proufliter,  luy  peult  porter  dommaige, 
et  qu'elle  continue  de  parler  et  respondre  au  roy  et  ceulx  de  son  conseil  modes- 
tement, usant  de  termes  qui  les  pourront  mouvoir,  à  luy  tenir  respect  comme  à 
seigneur  et  roy,  et  les  requérant  qu'ilz  la  laissent  es  mêmes  termes,  comme  elles 
estoit  au  trespas  de  feu  roy  son  père,  du  moins  jusques  venant  ledit  S'  roy  en 
plus  grand  eaige;  que  lors  elle  espère  il  la  respectera  comnje  humble  et  obeys- 
sante  servante,  et  ne  la  forcera  en  chose  qui  la  peult  mettre  hors  de  repoz  de  sa 
conscience.  Etfinablement  direz  à  nostredite  cousine  que  la  response,  qu'elle  a 
faite  sur  ce  qu'on  l'a  interroguyé  quelle  intelligence  elle  povoit  tenir  avec  vous, 
est  impertinente,  et  si  l'on  tumbast  aux  mesmes  termes  qu'elle  vole  continuer. 

Au  surplus,  si  vous  voyez  que  l'on  la  voulsist  forcer  ou  contraindre  de  faire 

chose  quelconque  contre  la  foy,  en  ce  cas  vous  requérons  et,  par  charge  expresse 

de  S.  M.  I.,  ordonnons  que,  en  qualité  et  comme  son  ambassadeur,  vous  regardez 

de  y  entrevenir  et  faire  les  mesmes  remonstrances  que  vostre  prédécesseur  Vander 

Î2™^  SKIilK,  TOMi:  \L.  54 


[  812  ) 

do  celle  dépêche  recommandent  l'obéissance  au  roi  et  la 
résignation. 

Ces  ditTicullés,  ces  soupçons  et  ces  reproches  n'étaient 
pas  propics  à  calmer  l'irritation  des  deux  gouvernements, 
ni  à  arréler  le  mauvais  vouloir  des  Anglais  contre  notre 
marine. 

Cependant  au  milieu  de  ces  débals,  différentes  tenla- 
lives  avaient  été  faites  dans  le  but  de  couper  court  aux 
piraleries,  et  spécialement  en  154-9  (J). 

Enfin  pressé  par  ses  propres  sujets,  Henri  H,  roi  de 
France,  fut  obligé  de  faire  cesser  les  mesures  iniques 
qu'il  avait  prises  contre  le  commerce.  A  cet  effet  il  envoya, 
en  I5o0,  aux  Pays-Bas  des  commissaires  chargés  de  ter- 
miner tous  les  différends  à  ce  sujet  (2).  Dès  ce  moment  la 
Franco  n'avait  plus  d'intérêt  à  exciter  les  Écossais  au  pil- 
lage de  nos  vaisseaux.  Dès  ce  moment  aussi  la  possibilité 
d'une  en  lente  avec  l'Ecosse  devenait  probable.  Ce  royaume 
s'était  épuisé  inutilement,  et  le  gouvernement  des  Pays- 
Bas  voyait  à  regret  les  États  refuser  les  subsides  pour 


Oilfi,  par  charge  de  S.  M.,  a  autresfois  faites  en  cest  endroit,  et  dont  des  lettres, 
qui  en  sontcsté  escriptes,  supposons  que  vous  avez  le  double.  Et  userez  en  ceci  de 
toute  dou'ccur  et  modestie,  avec  tous  bons  et  convenables  nioiens  et  persuasions 
que  trouverez  servir  pour  favoriser  et  assister  nostredite  cousine  et  la  préserver 
de  force  ou  violence,  si  avant  que  faire  le  pourrez.  Le  tout  au  nom  et  par  charge 
de  sadite  ]M.  I.,  y  faisant  le  bon  office,  selon  l'entière  et  parfaite  confyancc  que  y 
a\onsen  vous;  si  de  ce  que  en  succcdra  et  pourrez  sçavoir  et  entendre  delà 
conduite  de  ceulx  de  delà  à  l'endroit  de  nostredite  cousine,  nous  veuller  par 
lettres  particulières  advenir  de  temps  à  aultre  avecq  la  mesme  dilligence  et  le 
plus  souvent  que  possible  vous  sera.  A  tant, etc. 

De  Bruxelles,  le  xiiiJ«  d'octobre  looO. 
A  Tambassadeur  Schyfve. 

(1)  Henné,  Histoire  du  règne  de  Charles-Quint  en  Belgique,  t.  VIII,  p.  348. 

(2)  Du  Mont.  /.  c.  t.  IV,  Z'  part.  p.  î. 


i  81.-)  ) 

continuer  la  guerre.  Chaque  province  el  pour  ainsi  dire 
chaque  ville  mariliinc  innporlanle  s'armait  pour  son  pro- 
pre compte,  sans  aucune  unilé  d'action.  Finalement  le  roi 
de  France  écrivit  (15  juillet  15150)  à  Marie  de  Hongrie 
qu'il  avait  appris,  par  son  amhassadeur  de  Bassefonlaine, 
le  désir  exprimé  par  elle  de  terminer  les  différends  entre 
l'empereur  et  l'Ecosse.  D'après  celte  lettre,  le  roi  de 
France  voulait  d'abord  commencer  par  faire  cesser  les 
hostilités  en  autoiisant  son  ambassadeur  à  traiter  cette 
alfaire  au  nom  du  gouvernement  écossais,  lequel  promet- 
tait de  ratifier  tout  ce  que  le  roi  déciderait.  Cette  propo- 
sition ne  fut  pas  acceptée.  Il  semble,  disait  le  conseil 
d'État  à  la  gouvernante,  que  mieux  vaudrait  suspendre 
la  trêve  jusqu'à  l'anivée  très-prochaine  des  ambassadeurs 
écossais;  on  pourrait  alors  s'entendre  avec  eux,  après  avoir 
examiné  leurs  pouvoirs.  Néanmoins  si  le  roi  persistait,  la 
gouvernante  devait  demander  avant  tout  à  connaître  la 
base  sur  laquelle  il  voudrait  traiter  de  la  trêve,  et  à  quelles 
conditions.  Le  conseil  d'État  trouva  encore  bon  nombre 
d'autres  objections  à  opposer  à  la  signature  de  la  trêve. 
De  sorte  que  les  bonnes  dispositions,  exprimées  de  part  et 
d'autre,  ne  produisirent  aucun  effet.  Toute  négociation 
aurait  été  Irès-probablenienl  abandonnée,  lorsqu'un  évé- 
nement de  peu  d'importance  vint  à  l'improviste  aplanir  les 
difficultés. 

La  reine  douairière  d'Ecosse  s'était  proposé  d'aller 
voir  sa  fille  en  Fiance.  A  cet  effet  Henri  H  voulait  lui  en- 
voyer une  flotte  destinée  à  Tescorler.  Redoutant  la  har- 
diesse de  nos  marins,  le  roi  désirait,  à  tout  prix,  éviter 
une  attaque  dirigée  contre  la  reine  d'Ecosse  pendant  la 
traversée.  11  demanda  en  conséquence  un  sauf-conduit  en 
sa  faveur.  La  gouvernante  ne  pouvait  refuser  ce  que  l'An- 


(  814  ) 

gleterre  accordait  elle-même  (1).  Sans  hésiter  elle  permit  à 
la  reine  douairière  (51  juillet  1550)  de  descendre  aux 
Pays-Bas,  en  se  faisant  accompagner  d'un  nombre  raison- 
nable de  navires,  si  la  nécessité  s'en  faisait  sentir  en  cas 
de  tempête  ou  par  suite  de  force  majeure.  Plus  tard  cette 
sauvegarde  fut  prolongée  à  la  demande  de  l'ambassadeur 
français  (2). 

Ces  procédés  si  généreux  aplanirent  entièrement  la  voie 
aux  négociations.  Un  ambassadeur,  envoyé  par  la  reine 
d'Ecosse,  arriva  (en  octobre)  aux  Pays-Bas  (5).  Les  confé- 
rences ouvertes  à  Binche  présentaient  des  difficultés  telles 
qu'elles  furent  brusquement  interrompues  (4).  Plus  tard 


[i)  Teulet,  /.  c,  p.  239. 

(2)  Lettre  de  la  gouvernante  du  9  sept.  i5o0.  (Archives  de  l'Audience.) 

(3)  L'empereur  avait  nommé  à  litre  de  négociateurs,  le  23  août  1550  :  Adrien 
de  Croy,  comte  du  Rœulx,  Louis  de  Flandre,  seigneur  de  Praet,  Charles  de 
Lalaing,  Charles,  seigneur  de  Berlaymont,  Jean  de  S'-Maurice  et  Viglius  de 
Zuichem.  [Négociations  d'Angleterre,  t.  II,  p.  ISi.) 

(4)  Lettre  de  la  reine  au  sire  de  Bevere,  dont  le  texte  suit: 

Mon  cousin,  pour  ce  que  en  la  dernière  communication  tenue  cejourd'huy  avec 
l'ambassadeur  d'Escosse  sur  les  moyens  de  la  paix  se  sont  trouvées  telles  difficul- 
tez,  tant  à  l'endroit  du  point  des  déprédations  faites  contre  les  subjcctz  de  par- 
deça  que  aultrement,  que  ladite  paix  est  trouvée  en  rompture,  sans  que  de  nostre 
coustel  l'ayons  peu  accepter,  voyant  mesmes  le  peu  de  volonté  que  ceulx  d'Escosse 
démonstrcnt  de  faire  la  justice  auxdits  subjectz  depardeçade  si  grands  domma- 
ges et  i.illcryes  qu'ils  ont  faites  sur  iceulx  avecq  si  grande  tirannye  et  contre 
leurs  propres  saulfconduitz,  comme  est  notoire  à  chacun.  De  sorte  que  tenons  la 
justice  et  juste  querelle  de  nostre  coustel.  Je  yous  ay  de  ce  et  dessus  bien 
voulu  advenir,  atfin  que  incontinent  le  signalez  à  ceulx  des  villes  maritimes  de 
Flandre,  Hollande,  Zellande  et  aullres  hantant  la  mer,  à  ce  que  chacun  soit  sur 
sa  garde  et  pourvoye  à  rencontre  des  incursions  desdits  Escossois,  selon  que 
convient.  A  tant ,  etc. 

Au  S'  de  Bevere. 

Le  8  décembre  1550  de  Binch. 

(Arch.  de  l'Audience.  48.) 


[  8-15  } 

elles  furent  reprises;  enfin  le  traité  fut  signé  (15  décem- 
bre 1550)  (I). 

Cet  acte  termina  toutes  les  difficultés  avec  l'Ecosse  et 
mit  momentanément  (in  à  une  guerre  maritime  désas- 
treuse, qui  avait  duré,  selon  la  reine  de  Hongrie,  pendant 
quatorze  ans  et  même  plus  longtemps  d'après  la  lettre  de 
Jacques  V,  citée  plus  haut.  Le  dernier  attentat  commis  par 
les  Écossais  contre  notre  marine  marchande  date  du  20  dé- 
cembre. 

Par  suite  d'une  mauvaise  interprétation  des  lois  mari- 
times les  croiseurs  arrêtaient  tout  vaisseau  appartenant  à 
un  pays  ami  et  se  rendant  dans  celui  de  l'ennemi,  ou  ve- 
nant de  là.  C'était  le  point  d'achoppement  que  les  gouver- 
nements rencontraient  dans  la  mise  à  exécution  des  règles 
prescrites  aux  corsaires.  C'est  ainsi  qu'en  sortant  de  Nieu- 
porl,  vers  le  22  septembre  i5o3,  le  navire  de  Jean  de 
Sotringam,  accompagné  de  soixante  barques  écossaises, 
fut  attaqué  par  les  Flamands  et  essuya  une  vive  canonnade. 
Tout  son  équipage  fut  blessé  et  la  cargaison  pillée  ou  jetée 
à  la  mer.  Pareille  violence,  disait  la  reine  d'Ecosse  en  ré- 
clamant auprès  de  la  gouvernante,  était  sans  doute  faite  à 
son  insu.  C'est  probable.  En  tous  cas  le  gouvernement  se 
prêta  à  des  transactions  lorsqu'il  s'agissait  de  faits  sem- 
blables (2). 

ni.  —  Pirateries  de  la  France. 

A  peine  la  sécurité  du  commerce  maritime  fut-elle  réta- 
blie en  vertu  du  traité  de  Binche,  que  Henri  H,  roi  de 


(1)  Du  Mont./,  c,  p.  11. 

(2)  Aimnlea  delà  Société  d' Émulation,  l.  c,  p.  87.S. 


Krance,  recommença  plus  Tort  que  jamais  la  piraterie  pour 
son  propre  compte.  Sans  motifs  connus,  sans  déclaration 
préalable,  il  fil  arrêter  nos  vaisseaux  marchands,  les  pilla, 
se  les  appropria  sans  façon  aucune  et  en  fil  vendre  publi- 
quement les  cargaisons  dans  les  ports  français. C'étaient  les 
préambules  des  hostilités  qu'il  méditait  sans  motifs  avoués. 
C'étaient  les  précurseurs  d'une  déclaration  de  guerre,  et 
les  résultats  de  l'alliance  du  roi  très-chrétien  avec  les 
Turcs  et  les  protestants  d'Allemagne. 

Cette  manière  d'agir  révolta  les  habitants  des  Pays-Bas 
au  suprême  degré.  Nos  matelots  se  voyaient  assaillis  en 
pleine  paix  d'une  manière  à  la  fois  traîtresse  et  déloyale. 
Craignant  le  courage  fongueux  de  nos  marins,  les  Fran- 
çais employèrent  la  ruse  et  la  perfidie  pour  les  attaquer. 
Lorsque  leur  Hotte  avait  en  vue  un  convoi  de  navires  mar- 
chands des  Pays-Bas,  elle  tachait  de  s'en  approcher  le  plus 
près  possible.  Puis  elle  leur  intimait  l'ordre  de  baisser  les 
voiles,  sous  prétexte  de  saluer  la  présence,  sur  un  des  bâ- 
timents français,  ou  de  la  reine  d'Ecosse,  ou  du  roi  de 
France  ou  de  son  amiral.  Parfois  ils  les  engageaient  à  tirer 
le  canon  en  signe  de  salut,  auquel  ils  répondaient  par  des 
boulets. 

Sans  se  douter  d'uiîc  trahison  semblable,  les  matelots 
néerlandais  exécutaient  les  formalités  requises.  Dès  ce 
moment,  ils  étaient  perdus.  La  Hotte  française  entourait 
nos  navires,  impuissants  par  suite  de  la  baisse  des  voiles  de 
pouvoir  manœuvrer,  se  défendre  ou  se  sauver;  elle  leur 
commandait  de  se  rendre,  sinon  ils  étaient  incendiés  ou 
coulés  bas,  sans  merci,  comme  sans  pitié. 

Pendant  les  mois  d'août  et  de  septembre  1551,  ces 
moyens  furent  employés  avec  grand  succès  sur  les  côtes 
d'Espagne,  de  France  et  d'Angleterre.   Une   chronique 


r  8i7  ) 

/laniîindc   et  k's   corirspoFidaiiccs   oihciclles   mcnlionnenl 
plusieurs  rencontres  de  ce  genre  (1). 

I!  est  inutile,  croyons-nous,  de  rapporter  iei  ces  scènes 
horribles  qui  se  ressemblent  toutes.  Un  de  ces  épisodes 
reproduit  en  note  et  raconté  par  un  témoin  oculaire,  donne 
une  idée  de  ces  pillages,  pendant  lesquels  la  faiblesse  du 
sexe  n'était  pas  même  respectée  (2). 


(1)  Voici  conmicnt  la  gouvernanle  des  Pays-Bas  relate  une  de  ces  rencnntres 
dans  une  lettre  datée  du  9  septembi-e  lool  :  Le  Polin.  capitaine  des  navires  de 
guerre  de  France,  ayant  puis  naguères  prins  en  mer  les  navires  et  marchandises 
des  subjeciz  de  l'ompercur  navigansvers  l'Espaigne,  a  par  finesse  mandé  par  une 
jachte  à  l'une  des  principales  navires  de  deçà,  que  la  royne  d'Escosse  passoit  en 
l'une  de  celles  armées  de  France,  et  que  l'on  feroit  bien  de,  en  passant,  la  saluer 
et  descharger  toute  l'artillerie  sans  boulklz,  ceque  procédant  de  bonne  foy,  i!/ 
feirent.  Et  au  contraire  leditPoulin  fit  descharger  toute  la  sienne  avecq les  bouHrf/ 
et  surprint  par  cette  finesse  lesdites  navires.  (Arch.  de  l'Aud.,  liasse  54.) 

(2)  Seigneur, 

Je  pensoys  bien,  après  mon  département  d'Anvers,  de  ne  escripre  aultre  chose 
à  vous  que  mon  arrivement  en  bonne  heure  à  Lisbonne.  Ceque,  selon  me  semble, 
n'a  i)leu  à  Dieu.  La  présente  ne  sera  sinon  pour  vous  advertir  de  ma  détenue  icy. 
Je  sçay  pour  vray  que,  quant  la  présente  recevrez,  en  aurez  là  des  nouvelles, 
assavoir  que  le  xx"  jour  du  mois  passé,  à  une  lieue  de  Falamule,  avons  esté  prins 
de  unze  galeons  du  roy  de  France,  esquippez  à  la  guerre.  Et  à  l'heure  que  fusmes 
prins,  esticmes  quatre  hulcques  ensemble,  sgavoir:  la  hulcque  de  Frans  Janssonc, 
quialloit  au  port  de  Litsbonne,  et  une  hurgnette  qui  alloit  à  Canarie.  et  aultre  qui 
venoit  chargée  de  mastes  de  Noorweghe,  et  nostre  hulcque  de  Aem  Diericqx, 
ayans  devant  prins  aultres  quinze  hulcques  de  la  flote  qui  estoit  parti  avecq  nous 
de  Raume,  en  laquelle  flote  turent  deux  vers  Laredo ,  deux  vers  Valence  et  deux 
ou  trois  qui  alloient  vers  Calis  et  la  reste  à  Broaige  pour  sel.  Et  icelles  navires  et 
les  nostres  ont  ils  prins  avec  trois  et  trois  et  quatre  et  quatre  ensemble  avecques 
une  cannelé,  disant  que  en  icelle  armée  de  France  venoit  la  royne  d'Escosse  et 
l'admirai  de  France  qui  la  conduisoit.  nous  requirans  vouloir  amainer  les  voilles 
quant  i!z  debvoient  passer.  Elles  maistres  de  navires  ne  pensant  en  aucnne  trahi- 
son ont  amainé.  Et  pendant  nous  ont  environné,  et  nous  disoient  que  nous  nous 
rendismes  ou  nous  tireroyent  au  fond.  Et  à  ceste  force  de  le  faire  pourceque  nous 
n'esliemes  que  quatre  hulcques  ensemble  et  point  bien  pourveues  pour  combati-e. 
Et  aprèsquenousfusmesrenduz,ont  ammené  le  maislreetle  pilot  devant  l'amiral, 
qui  est  un  grand  seigneur  en  France,  et  aussi  aux  maronniers.  Et  sont  entrés  ma- 


(  848  ) 
Bien  souvent  nos  navires   se    rendirent,  bien   souvent 
nussi  ils  essayèrent  une  résistance  désespérée,  mais  inutile 
contre  des  ennemis  dix  fois  plus  forts  qu'eux.  Pendant  une 


ronniers  de  France  au  lieu  de  maistres.  Et  semblablement  avoient  faict  avecq  les 
autres  navires  qui  va  estoient  prias.  Et  les  ont  treslous  mis  en  prison  et  aussi  à 
Jacques  et  à  Anlhonio  Pères,  et  à  Garcia  et  à  moy,  et  nous  avoient  détenu  aupara- 
vant deux  jours  en  une  navir  de  guerre.  Et  Tilman  demeuroit  en  la  liulcque  avecq 
les  femmes,  lesquelles  estoient  malades  de  la  mer.  Et  si  bien  à  nous  comme  au 
Tilleman  et  aux  femmes  nous  ontdesrobé  tout  ce  que  nous  avions.  Et  nous  ontchar- 
ché  les  habillements  jusques  à  la  chemise,  pour  voir  si  nous  n'avesmes  argent.  Et 
nous  ont  prins  ce  que  aviesmes.  Après  venans  ensemble  vers  la  havere,  neuf  onl  prins 
une  autre  hulcque  qui  venoit  de  Broaige,  chargée  de  sel.  De  sorte  que  toutes  les  hulc- 
ques  qui  sont  prins  sont  en  tout  vingt,  savoir:  ceux  de  Lisbonne  Frans  Janssone  et 
Acm  Dicricqz;  et  autres  deux  qui  alloient  bien  à  la  voille  ont  échappé,  et  la  nostre, 
qui  avoit  famé  de  faire  bonne  voille.  11  me  semble  qu'il  a  pleut  à  Dieu  qu'elle 
tardoit  plus  que  tous  les  autres.  A  ceste  cause  celles  de  la  compagnie  nous  ont 
délaissé.  Et  se  sont  arrivez  devant  nous  plus  de  vingt  lieues  là  où  ilz  ont  rencontré 
à  ceste  armée  de  France.  Et  pourccqu'ilz  estoient  en  grant  nombre,  les  ont  délaissé 
sans  riens  faire,  et  ont  prins  les  derniers.  Et  nous  ont  amené  icy  le  jour  de 
S'-Barihelemy.  Et  sommes  menez  en  terre.  Et  en  yssant  la  navire  ont  prins  nos 
cappes  et  tout  ceque  nous  aviesmes,  si  non  tant  seulement  nous  ont  lai.ssé  les  abil- 
Icmcns  que  aviesmes  vestus-  Et  nous  ont  amené  prisonniers  devant  l'admirai, 
qui  nous  a  prins,  qui  nous  commandoit  donner  une  hostellcrie,  là  où  nous  tous 
ensemble  avons  esté  six  jours,  là  où  Anthonio  Percz  et  les  femmes  sont  devenuz 
malades  des  fiebvres  et  ont  .esté  fort  malades.  Je  les  ay  assisté  en  tout  ceque  m'a 
esté  possib'e.  Et  à  tous  les  maistres,  escripvains  et  maronniers  et  passagers  fla- 
mens  ont  pris  et  mis  en  une  tour  et  ne  sçavons  pourquoy.  Après,  sçavoir  sept  jours 
que  Icsdits  unze  galeons  de  France  retournoient  à  la  mer,  sont  retournez  hier, 
en  ammenant  autres  douze  hulcques  prisonniers,  entre  lesquelz  sont  Jan  Jaques 
ei  Cornélis  Fions,  qui  viennent  de  Lisbonne,  avecque  spacrie  et  beaucoup 
aljouffne  et  autres  deux  on  trois  hulcques  de  S'-Lucas  et  Cales  et  autres  de 
sel,  et  quatre  ou  cincq  cstrelins.  auxquelz  Estreîins  ont  délaissé  après  avoir  des- 
chargez les  bien  qu'ilz  avoient  appertenans  à  aultres  gens.  Lesdites  deux  hulcques 
de  Lysbonne  et  autre  de  Cadiz  ont  combattu  avecq  eulx,  et  ont  tué  quinze  ou 
vingt  personnes  et  ont  blessé  plusieurs  autres  personnes,  et  des  Flamens  ont  esté 
tuez  aussi  beaucoups  et  toute  la  reste  blessez.  Et  jamais  ne  se  eurent  rendus  s'ilz 
n'avoient  point  mis  le  feu  es  navires  pour  les  faire  brusier,  et  de  telle  sorte  se 
sont  rcnduz  Des  hulcques  de  Lisbonne  ont  [)rins  tout  l'argent  qu'ilz  emmenoient . 
si  bien  aux  maistres  comme  aussi  à  trois  ou  quatre  viaenezcs  [a]  qui  emmenoient 

(a)  Citadins  de  Portugal,  habitués  à  acheter  aux  Pays-Bas  des  marchandises  au 
comptant. 


(  849  ) 
i\c  ces  allaqiics  brulalt\s  cl  sournoises,  deux  navires  hollan- 
dais   se  défendirent  durant  une  journée  cnlièrc  avec  un 
héroïsme  indomptable,  tuant  et  détruisant  tout  ce  qui  les 


grant  quaniité  d'argent.  Et  après  l'avoir  priiis  ont  tue  deux  d'icculx  Et  c'est  uno 
pitié  grande  à  vooir  si  bien  auxFlamens,  comme  les  passagiers  vcnuz  es  hulcqucs. 
nudz  et  blessc^z  que  on  Turquie,  ne  en  pays  infidèlz  ne  dcbvroit  passer  chose  sem- 
blable. 11  fault  avoir  paccicnce  et  aclendre  l'ordre  du  roy.  11  plaise  à  Dieu  qu'il 
v'iengne  en  brief  et  bonment,  comme  le  désirons  trcstous.  A  tous  les  maronniers 
des  hulcqucs  derniers  ont  donné  licence  pour  enaller.  Et  se  sont  trestous  enallés. 
Les  maistrcs  et  escripvains  sont  prisonniers  en  une  tour.  Touclianl  les  niarchan- 
dises  de  tous  Icsdites  huicques  on  pense  qu'on  ne  rendra  nulle  chose,  pourcequc 
plus  que  la  moitié  y  a  esté  desrobbé  ;  et  ce  qu'on  trouve  s'est  mis  par  commande- 
ment du  roy  en  pachus  [b).  On  veult  dire  que  l'empereur  a  esté  cause  de  toutcecy. 
pourcequ'oii  dit  que  ses  gens  en  Pietmont  ont  prins  jiluiseurs  argent  et  tué  grand 
nombre  de  gens,  lesquelz  le  roy  de  France  envoyoit  à  Parma.  Et  cecy  dist-on  estre 
la  cause.  Il  me  semble  que  sans  double  aurons  la  guerre.  Et  ceulx  de  ce  pays  le  dé- 
sirent (n  grande  manière  pour  la  grande  assistence  qu'ilz  ont,  assavoir  avecq  le 
Turcq,  àcui  font  grand  honneur  et  leaymentfort.Tellementque  lesTurcqz  en  leurs 
navirs  ont  leurs  bannières  avecq  celles  de  France,  et  aussi  pareillement  les  Fran- 
çois en  leurs  églises  celles  des  Turques.  Aussi  dit-on  qu'il  a  alliance  avecq  le  roy 
d'Angleterre  et  d'Escosse  et  avecq  ceulx  de  Dennemarcques  et  d'Oislande  et  avec- 
ques  aucuns  seigneurs  d'Allemaigne  et  avecq  les  principaulx  seigneurs  d'Italie. 
Et  c'est  une  chose  terrible  et  de  merveille  le  mal  qu'ilz  vueillcnt  à  l'empereur 
età  tous  les  siens.  Dieu  aydera  l'empereur  comme  a  faict  jusques  astheure.  Je 
me  suis  passé  jusques  astheure  en  disant  que  je  suis  portugalois.  II  me  semble 
que  ce  a  esté  le  meilleur,  combien  que  toutes  fuis  est  grant  le  mal  qu'ilz  veullenl 
et  monstrent  aux  Portugalois.  Dieu  nous  envoyera  le  rem:de  que  nous  désirons. 
De  la  hulcque  de  Cornélis  Floris  est  apporté  à  l'amiral  grande  quantité  d'ar- 
gent, si  bien  en  or,  comme  en  argent.  Et  tous  les  jours  on  y  trouve  plus  dedens  le 
seel  et  entre  les  sacqz.  De  tout  ceque  dist  est  me  semble  que  vous  autres  deb- 
vrez  cesser  de  faire  ammener  nulles  marchandises  d'Espaigne,  pourceque  ces 
navires  d'armées  et  aultres  qui  nouvellement  sont  faites  et  de  nouveau  se  appa- 
reillent disent  qu'ilz  actcnderont  en  le  canal  tous  les  navires  qui  viendront 
vers  ce  pays;  et  veu  aussi  qu'ilz  ont  assistence  des  Englois  ne  les  enchault  s'il 
soit  hiner  ou  leste,  pour  ce  que  tousiours  arresteront  là.  Et  ceci  povez  dire  à 
tous  les  frères  là,  et  ceulx  qui  actendent  fruict  et  autres  marchandises  de  la 
vendenche  et  autres  marchandises  l'cscripvant  par  terre  à  Espaigne.  Et  quant 
aux  marchandises  que  envoyerezde  là,  ferez  ce  que  bon  vous  semblera,  ponrcequt? 

(6)  Entrepôt. 


V  850  ) 

entourait.    Ils  ne  se  rendirent  que   lorsque   les   Français 
furent  parvenus  à  les  incendier. 

Averti  de  ces  pillages  et  surexcité  par  les  relations  de 
ces  attaques  perfldes,  le  gouvernement  des  Pays-Bas  fit 
des  réclamations  auprès  de  l'ambassadeur  français  rési- 
dant à  Bruxelles.  Il  lui  demandait  compte  de  la  conduite 
déloyale  de  ses  compaîriotes.  Après  plusieurs  conmiunica- 
tions  verbales,  pendant  lesquelles  de  Bassefonlaine  protestait 
des  bonnes  intentions  du  roi,  son  maître,  il  finit  par  décla- 
rer (2  sep.  iSol),  que  depuis  17  jours  il  n'avait  plus  reçu 
de  lellres,  malgré  des  réclamations  réitérées  (1).  Enfin, 
Henri  II  donna  signe  de  vie.  Il  trouvait,  disait-il,  la  nou- 
velle de  ces  atîaques  fort  étrange.  Si  elle  éiait  vraie,  tout 
s'était  passé  à  son  insu  ;  des  explications  seront  demandées 
à  l'amiral,  qui  est  obligé  de  mettre  en  liberté  les  navires 
arrêtés.  C'était,  un  leurre  auquel  le  gouvernement  des 
Pays-Bas  eut  la  faiblesse  de  croire  un  instant,  malgré  de 
nombreux  avertissements  et  en  dépit  des  nouvelles  mari- 
times communiquées  par  Scepperus.  D'après  ces  renseigne- 
ments, les  officiers  de  la  marine  française  déclaraient  bau- 
tement  que  le  roi  leur  avait  donné  des  lettres  de  marque; 
qu'ils  se  rendraient,  comme  ils  le  firent  en  effet,  dans  les 


cestuy  roy  est  fort  puissant  sur  la  mer,  pourccque  en  ceste  havre  ayt,  avecq  icelles 
qui  sont  sorliz  passé  deux  jours,  vingt  et  cinq  ou  trente  galéons  d'arnities,  qui 
tirent  six  pièces  d'artillerie  de  bronse  par  chacun  costé  et  tous  prez  de  leane,  et 
chacun  a  trois  cens  et  quatre  cens  hommes  de  guerre  arcabusiers.  Et  en  Diepée. 
dit-on,  qu'il  y  a  les  plus  beaux  galeons  en  monde.  De  tout  cequc  dibt  est  pourez 
faire  ce  que  vous  plaira  et  de  tout  aviser  à  vous  les  amis  et  seigneurs  de  pardelà, 
ausquelz  me  recommande. 

Translaté  de  certaine  lettre  missive  escripte  en  Havre  de  Grâce  du  xtu"  {sic) 
de  septembre  (lool).  Dirigée  à  Loys  de  Seville,  marchant  espaignart ,  escript  par 
son  serviteur  illecq  tenu. 

'1)  Archives  de  l'Audieuce,  liasse  54. 


(  831   ) 
poris  de  la  Graïulo-IîiTtngnc,  el  de  là,  aidés  par  les  An- 
glais, ils  iraient  coniir  sus  à  lous  nos  vaisseaux  (1). 

Au  lieu  d'armer  immédiatement  la  (lotie,  la  reine  écrivit 
à  Londres  nour  eniiager  le  gouvernement  britannique  à 
surveiller  les  flibustiers  oci'upés  à  dévaliser  nos  vaisseaux 
sur  les  eùles  d' Angleterre.  Puis  elle  se  demandait  s'il  y 
avait  ou  non  guerre  avec  la  France,  et  comiïient  il  fallait 
s  y  prendre.  Cependant,  jamais'occasion  plus  favorable  ne 
s'était  présentée  pour  porter  un  coup  fatal  à  la  marine 
française.  Slrozzi,  le  vaillant  Florentin,  commandant  de  la 
flotte  française,  était  loin  des  vaisseaux  qui  croisaient  dans 
la  mer  du  Nord.  Menacé  par  les  sbires  du  connétable  de 
Montmorency,  il  dut  abandonner  le  parti  de  la  France  pour 
sauver  sa  vie.  Sa  retraite,  dit  très-bien  Sismonde  de  Sis- 
mondi,  avait  mis  lin  aux  exploits  de  la  flotte  française  (2). 

La  gouvernante  des  Pays-Bas,  femme  adroite  mais 
d'une  prudence  excessive,  se  contentait  de  faire  dans  ses 
lettres  des  récriminations  conire  la  mauvaise  foi  des  Fran- 
çais.Dans  une  de  ses  missives,  écrites  au  comte  de  Rœulx, 
à  propos  dune  sauvegarde  accordée  par  les  Français  aux 
villes  maritimes  de  Flandre,  elle  disait  :  «  les  François,  quel- 
»  que  traiclé,  asseurance  ou  promesse  qu'on  ayt  avec  eulx, 
»  n'observent  riens;  ains  trompent  quant  ilz  asseurent , 
»  comme  leurs  actes  ont  puis  nagaires  bien  tesmoigné;  et 
»  fait  à  craindre  qu'ilz  mectent  en  avant  cesîe  seurelé  pour 
»  tant  mieulx  surprendre  ceulx  de  Flandre,  quant  ilz  ver- 
»    ront  leurapoinl  et  penseroient  estre  bienasseurez  (5).  » 

La  reine  se  laissait  aller  volontiers  à  des  déclamations 


(1)  Lettre  du  11  sept.  looi.  (ArcJiives  de  l'Audience,  ibid.) 

(2)  Hist.  des  Français,  t.  Xll,  p.20o. 

(3)  Lettre  du  29  octobre  -Inol.  (Archives  de  l'Audience,  liasse  oS.) 


(  85i  ) 

somblnbles  clans  ses  correspondances  parliculières.  Quand 
ii  fallait  agir  au  grand  jour,  elle  y  mettait  plus  de  circon- 
spection. Dans  le  but  de  ménager  la  France,  elle  poussait 
la  prudence  au  point  d'engager  clandestinement  les  parti- 
culiers à  s'armer  en  corsaires,  et  à  attaquer  les  vaisseaux 
marebands  de  l'ennemi  (1).  De  cette  manière  elle  espérait 
pouvoir  mettre  à  couvert  sa  responsabilité  en  cas  de  récla- 
mations et  dérouter  les  Français.  Le  contraire  eut  lieu. 
Encouragés  par  l'inertie  apparente  du  gouvernement  néer- 
landais et  par  ses  actes  de  prudence,  qui  ressemblaient 
singulièrement  à  de  l'impuissance,  les  Français  armèrent 
publiquement  leurs  floltes.  Jamais  ils  ne  cessèrent  de  har- 
celer noire  marine  marcbande.  De  son  côté,  l'amiral  belge 
ne  parvint  pas  même  à  équiper  notre  flotte,  faute  d'hom- 
mes. Rien  n'était  prêt  au  moment  de  Faction.  II  fallait 
attendre  lorsque  l'ennemi  agissait  avec  vigueur.  Le  défaut 
de  fonds  ne  contribua  pas  peu  à  augmenter  la  perplexité  de 
la  gouvernante.  Et  lorsque  l'Espagne  lui  olTril  les  sommes 
nécessaires  pour  armer  40  à  50  vaisseaux  de  guerre  desti- 
nés à  purger  la  mer  des  forbans  qui  l'infestaient,  elle  eut 
la  faiblesse  de  les  refuser,  conformément  aux  conseils  don- 
nés par  Scepperus,  toujours  peu  disposé  à  l'aclion  et  grand 
partisan  du  vieux  système  de  se  tenir  sur  la  défensive  (2). 
Enfin,  lorsque  la  flotte  était  prête,  elle  reçut  l'ordre 
de  convoyer  nos  vaisseaux  marchands  et  pécheurs,  selon 
la  vieille  routine  (5),  comme  si   l'ennemi  se  présentait  au 


(1)  De  S* -Gcno'is,  Missions  diplomatiques  de  Scepperus ,  p.  96.  fDans  les 
Mlémoires  de  l'Académie^  t.  39.) 

(2)  Archives  de  l'Audience ,  n»  So. 

(3)  V,  les  propositions,  faites  en  septembre  dool.  à  la  ville  d'Anvers  par  la  gou- 
vernante. Ces  propositions  tendaient  à  faire  payer  par  l'Ëtat  le  tiers  des  frais 
d'armement  des  navires  de  guerre  destinés  à  convoyer  les  vaisseaux  sortis  de  ce 
port  (Ms.  17,260  de  la  Bibliothèque  royale  de  Bruxelles.) 


(  855  ) 
nionieut  de  la  réunion  de  nos  forces  navales  pour  les  atta- 
quer et  voler  nos  vaisseaux  marchands,  comme  si  fexpé- 
rience  n'avait  pas  dcmoniré  à  l'évidence  que  les  Français 
agissaient  seulement  par  surprise,  frappaient  en  temps  op- 
portun, sans  accompagner  leurs  navigateurs  et  sans  se 
préoccuper  de  leur  défense. 

Nos  bâtiments  de  guerre  pouvaient,  par  suite  de  cette 
négligence,  s'emparer  sur  les  côtes  de  la  France  d'un  assez 
bon  nombre  de  vaisseaux  marchands  appartenant  à  ce 
pays  (I).  Un  de  nos  marins  alla  plus  loin  encore.  Adrien 
Crol,  d'Er)khuizen  s'empara,  en  1555,  près  des  côtes  de 
la  Normandie,  de  l'ile  de  Sark,  ou  Serk,  ou  Gers,  soumise 
à  la  domination  française  (2). 


{i)  Ribier,  Lettres  et  uiémuires  d'État,  t.  II,  p,  372;  Van  Bruyssel,  Hist.  du  com- 
merce, t.  m.  pp.  84,  08;  Annales  de  la  Société  d'Émulation,  l.  c,  p.  374. 

[%  Nous  donnons  ici  les  extraits  de  deux  lettres  très-intéressantes  pour  l'his- 
toire de  cette  île,  et  contenant  des  renseignements  que  nous  avons  cherchés  en 
vain  dans  les  ouvrages  anglais.  V.  pour  l'histoire  de  cette  île,  qui  passa  sous  la 
domination  des  Anglais  pendant  le  règne  d'Elisabeth,  Lewis.  Dictionary  of  En- 
gland,  t.  II,  p.  278  et  Camden,  Britannia,  t.  III,  p.  7SI. 

Madame, 

J'ay  le  xxiiu''  de  ce  mois  receu  les  lettres  de  Vostre  Majesté  du  xviiil-,  par  les- 
quelles icelle  m'advertist  de  la  prinse  de  l'isle  de  Sercq,  faite  par  Adrien  Crol 
d'Enchusen,  en  la  sorte  et  manière  que  j'ay  veu  par  l'extrait  des  lettres  de  mess»"» 
les  ambassadeurs  de  l'empereur  en  Angleterre,  contenant  bien  particulièrement  l'as- 
siette, qualité  et  importance  de  ladite  ysle  et  mesmes  les  forts.  Sur  quoy  plaise  à 
V. M.  bénignement  entendre, que,  du  temps  de  ma  jeunesse  et  que  j'ay  hanté  le 
pays  de  Normandie  et  quelquesfois  la  mer  là  entour,  ladite  ysle  de  Sercq,  comme 
deshabitée  et  dépeuplée  de  gens,  n'estoit  d'aucun  renom,  famé  ne  estime,  non 
plus  que  aprésent  est  l'isle  de  Orme  (aujourd'hui  Herme )  appartenant  aux 
Anglois,  assise  entre  Garnisey  (aujourd'hui  Guernesey)  et  ledit  Sercq,  sur 
le  nord  dudit  Garnisey  et  zuyd  dudit  Sercq.  Et  parainsy  n'en  ay  point  oij 
parler,  si  non  depuis  l'an  XV^XLV  que  lors  les  Anglois  (comme  réfusans 
accepter  la  paix  faite  à  Crepy  en  Valois  entre  l'empereur  et  le  feu  roy  de 
France),  demourans  en  guerre  contre  les  François,  furent  d'iceulx  anvahi/. 
en  l'isle  de   Garnisey  par  le  S''  d'Hennebault    avec    une    grosse  armée  de 


(  su 


Celle  conquête  fut  immédiatement  abandonnée;  Adrien 
Croî  dut  se  contenter  de  démolir  les  foriificalions  élevées 


mer,  consistant  en  plusieurs  navires  de  guerre,  et  aussy  en  galères,  tlesqueles 
avoient  charge  Pierre  et  Lyon  Strozzi,  Paulin,  baron  de  la  Garde,  cuydans 
lesdits  Fran(.'ois  légièrement  emporter  ladite  ysle  et  colles  de  Jczé  (Jerssc)  et 
Orney.  En  quoi  ilz  furent  frustrez.  Et  comme  en  assaillant  ledit  Garnisey  estant 
une  des  galères  principales  tellement  atournée  des  coups  d'aitil'erye  desdits 
Anglois.  qu'elle  ne  se  sçauroit  soustenir  sur  l'eaue  et  deux  des  autres  galères 
l'eussent  attachée  et  pourvcue  aucunement  pour  la  mener  en  France,  lesdits 
François  ne  la  sachant  conduire  plus  avani  que  jusques  ladite  ysle  de  Scrcq.  lors 
déserte,  veullans  aucunement  courir  le  deshonneur  qu'ils  avoient  roceu  en  assail- 
lant ledit  Garnisey,  trouvant  ledit  Sercq  de  bonne  et  forte  assiete  et  propice  pour 
porter  dommaige  aux  Anglois,  y  firent  quelque  blochuys  eî  y  laissarent  aucuns 
compaignons  avec  l'artillerrye  de  ladite  galère.  Et  depuis  firent  raport  audit  feu  roy 
de  l'opportudité  de  ladite  ysle,  telement  qu'il  y  envoya  gens  et  y  fist  faire  les 
forts  présentement  y  estans.  Au  moien  de  quoy  vient  à  primes  en  cognoissance 
des  gens.  Et  en  ont  eu  les  Anglois  desdifes  yles  de  Garnisey,  Gezé  et  Orney  à 
souffrir;  mais  ne  l'ont  sceureconquerre,  à  cause  de  quoy,  et  que  je  n'avoye  dicelie 
nulle  certaine  cognoissance.  Oblemperans  aux  lettres  de  V.  M.,  j'ay  fait  venir 
devers  moy  divers  maistres  des  navires  et  capitaines  de  ceste  ville,  comme  ceulx 
qui  plus  fréquentent  ladite  coste  et  ysles  que  nulz  autres.  Et  ne  trenve  que  ung 
vieillard  nommé  Pieter  Jacobssoon  Biock,  eaigé  de  LXVJ  ans,  et  un  Anglois. 
nommé  Piobert  Wiileby.  lesquelz  ont  esté  en  hault  de  ladite  ysle,  avant  toutefois 
qu'elle  fut  occupée  des  François.  Et  parlent  d'icellc  assez  conformément  à  ce 
qu'cscrivent  mesdits  seigneurs  les  ambassadeurs,  sauf  qu'dz  ne  sçaivcnt  à  parler 
du  molin  d'eaue  ne  aussy  des  forts,  comme  non  y  aians  esté  en  leur  temps.  Autres 
capitaines  aventuriers,  comme  Robert  Schotman,  Schoonen  Dieric,  Hans  Kuychel 
et  Cornelis  Cuypper  et  autres  disent  souvent  avoir  esté  sur  les  rades  de  ladite 
ysle,  et  qu'elle  est  terriblement  haulte  et  d'horrible  regard,  sans  y  estre  montez  en 
hault.  Mais  que  à  leur  advis  le  lieu  est  fort  propice  pour  porter  dommaige  aux  Fran- 
çois, empescher  et  enîerrompre  la  navigation  de  Brouaigc,  la  Piochclle  et  Cordeaux 
vers  la  Basse- lîretaigne  et  Normandie.  Ce  que  tous  afferment  unanimement.  Et 
est  chose  toute  notoire  que  les  navirs  veuilans  faire  ladite  routle,  s'ilz  ne  veul- 
lent  touppieret  se  mettre  à  la  haulte  mer  jusques  au  canal  entre  L'xentSarlinges, 
sont  contraintes  passer  par  certain  canal  nommé  La  Ferrière,  prenans  leur  cours 
entre  ledit  Scrcq  et  Jerzé,  ou  ledit  Sercq  et  Garnisey  près  de  Orme,  afin  d'éviter 
les  roches  nommez  en  nostre  vulgaire  Le  Kiscas  et  en  espaignol  Casquete. 

Disent  aussy  que  dudit  Sercq  l'on  peult  veoir  passer  toutes  lesditcs  navires  et 
leur  endominaiger,  selon  la  force  que  le  capitaine  commis  audit  Sercq  ou  autres 
peuvent  avoir. 

Estre  véritable  qu'il  n'y  a  nul  port,  mais  bien  une  creque  ou  raisseau  descen- 


(  sm  ) 

pjir  les  Français  dans  celle  île,  et  de  jeter  en  mer  loul  ce 
qu'il  ne  pouvait  emporter  (1).  La   limidiJé  du  gouverne- 


danl  entre  les  roches;  laquelle  croque  ou  ruisseau  l'on  pourroit  approprier  ol 
élargir  avec  le  temps  ,  en  y  faisant  une  mole  de  pierres,  dont  illec  y  a  grande 
abondance,  et  ce  pour  tenir  une  paire  de  jaclites  ou  navires  de  rymes,  allans  peu 
profond,  comme  sont  celles  dont  s'est  servy  ledit  Adrien  Crol,  et  que  pour  autres 
navires  y  a  bonne  rade  contre  tous  vents  à  l'enlour  de  ladile  ysle,  comme  dessus. 
Et  au  pis  aller  se  pourroient  Icsdites  navires  saulver  à  f.arnisey.  distant,  d'illec 
lieue  et  demye  de  Flandres,  ou  à  Gerzé,  distant  quatre  lieues  vers  l'oost-noord- 
oost.  et  plus  près  de  la  cosle  de  France,  ou  à  Orney,  gisant  du  costé  dudil  Jerzé 
vers  le  nord  environ  deux  lieues,  en  cas  qu'ils  ne  sceussent  gaigner  les  rades  dudit 
Garnisey. 

Disent  pareillement  que  la  marée  est  iîlec  bien  haulte.  De  sorte  que  une  navire 
surgeant  sur  neuf  braches  se  treuve  à  la  basse  eaue  sur  le  secq;  mais  que  le 
fons  desdites  rades  est  sablonneux  et  pourtant  moins  dangereux. 

Déposent  aussy  lesdits  capitaines  Robert  Schotsman  et  Schoonen  Dieric,  que 
depuis  ceste  guerre  entre  l'empereur  et  le  roy  de  France,  les  Angiois  de  Garnisey 
leur  ont  respectivement  volu  persuader  qu'ilz  deussent  essayer  d'occuper  ladite 
ysle  de  Sercq;  mais  comme  lesdits  Schoonen  Dieric,  par  faulte  d'ung  pilote  an- 
glais, perdist  son  navir  soubz  l'isle  d'Orney,  ledit  Robert  ne  se  Irouvoit  conseillé 
de  l'emprendre  seul. 

Quant  à  la  grandeur  de  ladite  ysle,  ilz  ne  la  S(;avent  bonnement  dire,  comme 
non  y  ayant  pris  tel  regard;  mais  de  la  fertilité  disent  qu'il  y  a  force  conins ,  et 
que  du  temps  dudit  Pieter  Jacobssoon  Block  y  avait  force  bestial  saulvaige,  et  ce, 
conforment  tous ,  que  le  lieu  est  de  grant  respect  comme  dessus. 

Mais  pour  respondre  à  ce  que  V.  M.  m'ordonne  l'advertir  du  proufBt  que  l'em 
pereur  faisant  garder  ladite  ysle  en  pourroit  tyrer,  je  ne  voy  point  que  pour  le 
commencement  il  y  sgauroit  faire  aucun  pronffii,  jusques  à  tant  que  l'ysle  seroit 
peuplée  de  gens  et  les  champs  cultivez  et  semez.  Ains  au  contraire  fauldra  que 
S.  M.  porte  la  despcnce  et  y  souslicgne  quelque  nombre  de  gens  et  pour  le  moins 
de  iiiJ^»  à  cent  hommes  pour  faire  le  guet  et  défendre  les  forts. 

Ladite  isle  ne  peult  aussy  servir  pour  les  navires  marchandes  de  ce  pays, 
parceque  iceiles  ne  chercent  ce  chemin  comme  trop  dangereux,  si  ce  n'est  qu'ilz 
soient  desvoyez  par  faulte  et  négligence  des  pilotes,  comme  est  advenu  au  capi- 
taine Meckere  l'année  passée  en  la  fin  d'octobre,  estant  desroutté  de  la  flofe  d'Es- 
paigne  avec  une  grande  navire,  que  se  povoit  reputer  pour  miracle  qu'il  vint  à 
saulvement;  mais  seulement  peult  servir  de  rcmpare  ou  refuge  aux  navires  de 
guerre  de  S.  M.  I.  ou  de  ses  subjectz  pour  porter  dommaige  à  tous  passans  par 
ladite  Perrière  et  Rasblanchart,  et  tenir  en  crainte  les  costesde  Seribourg,  de  la 
"Haghe  (que  es  cartes  navigatoires  s'apelle  cabo  dellago],  de  Aurances  et  aussy  du 

1)  Lettre  de  Scepperusdu  2  nov  ioo3. 


(  856  ) 
ment  belge,  nous  dirons  même  sa  pusillanimité,  l'empêcha 
de  faire  ce  que  fit  plus  tard  le  gouvernement  britannique. 


Bretaigne,  en  tant  que  les  François  n'ont  de  ce  costé  moien  ne  ports  pour  tenir 
aucunes  navires  ordinaires,  et  ne  pevent  empescher  le  passaige  des  nostres.  Et 
parceque  dessus  peult  apparoir  le  respect ,  prouffit  et  apparence  de  service  que 
S.*M.  en  sçauroit  tyrer. 

Et  quant  à  ce  que  Yostre  Majesté  m'ordonne  dire  mon  advis  sur  la  disposition 
de  cestuy  affaire,  il  me  semble.  Madame,  qu'il  ne  se  fault  point  arresler  au  raport 
que  ledit  Crol  a  fais  à  mesdits  S"  les  ambassadeurs,  ne  aussy  à  ceque  les  An- 
glois  disent  de  ladite  ysle  de  Sercq;  mais  avant  se  resouidre  de  la  tenir  ou  aban- 
donner, que  l'empereur  la  pourra  envoyer  visiter  par  homme  confident 

Mais  si  S.  M.  treuve  qu'elle  n'y  sçauroit  recevoir  grand  service  ne  equipollent  aux 
despens  que  fauldra  mettre,  en  ce  cas  S.  M.  la  pourroit  donner  ou  faire  vendre 
aux  Anglois,  sans  la  laisser  retomber  es  mains  des  François,  à  condition  que 
lesdits  Anglois  seroient  tenuz  de  faire  bonne  compaignye  aux  navires  des  subjeclz 
de  V.  M 

J'entens  que  le  capitaine  Girard  de  Meckere  cognoit  aussy  ladite  isle,  et  par 
ainsy  si  tost  qu'il  sera  à  terre,  je  le  requéreray  me  déclairer  ce  qu'il  en  scet. 

A  tant,  etc. 

De  Vlessinghes,  ce  xxvu*  de  septembre  iooS. 

De  Votre  Majesté  très-humble  et  obéissant  serviteur, 

CORNILLE   SCEPPERUS. 

Madame, 

En  suyvant  mes  dernières  lettres  touchant  l'isle  de  Sercq,  j'ay  parlé  au  capi- 
taine Meckere,  luy  demandant  ce  qu'il  en  sçavoit.Sur  quoy  il  m'a  respondu  ladite 
ysle  estre  de  grosse  importance;  mais  de  sa  part  n'y  avoit  esté  dessus,  mais  bien 
embas  sur  les  rades.  Par  lettres  de  quelque  homme  cogneu,  lequel  a  hanté  ladite 
ysle,  j'ay  entendu  qu'elle  est  longue  environ  une  lieue  d'Allemaigne  et  gaires  moins 
large  ;  qu'il  y  soloit  avoir  trois  villaiges  et  ung  monastère,  qui  sont  tousdestruitz, 
et  que  ladite  ysle  est  meilleure  qu'on  ne  pense,  comme  sur  laquelle  l'on  pourroit 
gaigner  bledz,  qui  serviroient  pour  mille  hommes;  qu'il  y  a  pareillement  bonne 
eaue  sortant  des  roches, au  moyen  delaquelle  les  habitans  soloientmouldre  leurs 
bledz,  ayant  le  moulin  depuis  esté  deffait  et  après  derechief  mis  sus  parles 
François,  comme  celluy  qui  m'escrit  dit  avoir  entendu,  mais  avoir  vu  les  vestiges 
du  premier  moulin 

En  quatre  ou  cincq  jours  partyront  de  Vlissinghes  trois  navires  aventuriers 
bien  armées,  faisant  leur  compte  daller  droit  vers  ledit  Sercq,  et  illec  espyer  les 
François 

A  tant,  madame,  etc. 

De  la  Vere,  le  second  jour  d'octobre  i5o3. 

De  V.  M.  très-humble  serviteur. 

CORNILLE  SCEPPERUS. 


(  857  ) 
En  s'cmparant  de  celle  île,  les  Anglais  en  firent  un 
boulevard  redoutable,  une  menace  coniinuelle  contre  les 
forces  mariiimes  de  la  France.  Le  gouvernement  des  Pays- 
Bas  ne  put  comprendre,  malgré  les  avis  des  Anglais,  tout 
le  parti  qu'il  pouvait  tirer  de  cette  conquête.  11  l'abandonna. 

De  son  côté,  Henri  II  ne  négligea  pas  de  se  faire  des 
adliérenis  dans  les  eaux  de  l'Ems  pour  harceler  de  là  nos 
vaisseaux  marchands.  Des  câpres  de  TOostc-Frise  arrêtè- 
rent dans  ces  parages  tons  les  navires  en  destination  des 
Pays-Bas  (1).  Encore  une  fois,  la  gouvernante  se  contenta 
de  réclamer  auprès  de  la  comtesse  d'Ooste-Frise,  et  ne  flt 
rien  contre  les  flibustiers. 

Les  premiers  mois  de  Tannée  1554  furent  signalés  par 
Tarmement  d'une  flotte  dans  les  ports  néerlandais.  Il  ne 
s'agissait  pas  précisément  de  protéger  nos  vaisseaux  mar- 
chands. Ce  but  était  un  accessoire.  Il  fallait  une  démon- 
stration politique  pour  secourir  Marie  Tudor,  menacée  par 
la  France,  qui  soutenait  en  Angleterre  une  guerre  intes- 
tine, excilée  par  les  factieux  et  par  les  promesses  de 
Henri  II  (2).  Quatorze  vaisseaux   de  guerre,  armés  aux 


(1)  Lettre  du  magistrat  d'Amsterdam  ,  des  16  novembre  et  1"  décembre  1353. 

(2)  Voici  ce  que  Renard  écrivit  à  ce  sujet  à  l'empereur  : 

0  Quant  aux  advis  que  le  S»"  Deylre  a  reçus  de  l'apprest  de  mer  du  couslel  de 
»  France,  il  est  certain  que  les  François  avoient  armé  et  permis  aux  particuliers 
B  d'armer  quantité  de  navires  pour  seccomlerla  rébellion  de  feu  Houyet(Wyat?), 
«  qu'eust  hier  la  teste  tranchée ,  et  pour  promovoir  les  praticqiies  qu'ilz  tenoient 
B  en  Angleterre,  mais  avoient  veu  que  l'entreprise  estoit  faillie  par  la  victoire  de 
»  Moulues  et  iMacquereaux;  et  ont  retenu  les  grands  bateaulx  de  la  Normandie  et 
»  Bretaigne;  et  n'y  a  que  trois  jours  que  dix  d'iceulx  .par  l'impétuosité  du  vent, 
B  furent  jectez  aux  donnes  près  de  Douvres,  et  le  plus  grand  nombre  est  à  Brest 
»  en  Bretagne,  que  l'on  tient  ne  fera  grand  effect,  puisqu'ilz  sçavent  que  ladmiral 
*  d'Angleterre  se  joinct  avec  les  bateaulx  de  V.  M.,  qui  se  parte  lundi  de  ce  lieu 
»  (Londres)  et  que  S.  A.  sera  accompagnée  de  430  voiles.  Mais  il  est  certain  que 
»  jusqucs  à  ce  ilz  ont  entendu  la  deflfaicte  de  Houyet,  ilz  avoient  armez  etretenuz 
»  les  bastcaulx  pour  l'effect  susdit.  »  (Lettre  du  42  avril  loSi.  Corr.  de  l'empereur 
avec  Granvelle.  p.  639.)  V.  aussi  ibid.  les  lettres  aux  pp.  502,  6U2. 

2™^  SÉKIE,  TOME  XL.  o5 


(  858  ) 
Pays-Bas,  se  réunirent  (16  avril  i5S4)à  la  flotte  anglaise. 
Selon  rempcreur,  elle  devait  ôler  aux  Français  tout  espoir 
de  sortir  de  leurs  ports.  Il  mettait  en  même  temps  en  mer 
six  bateaux  corsaires  bien  équipes,  destinés  à  porter  des 
ravages  sur  les  côtes  de  la  France,  et  à  attaquer  tous 
les  bâtiments  naviguant  dans  ces  parages  (1).  Celait  une 
réponse  faite  aux  armements  nouveaux  entrepris  par  le 
roi  de  France,  une  représaille  des  captures  exécutées  en 
mer  et  dans  la  Tamise  d'un  nombre  considérable  de  navi- 
res marcliands  appartenant  aux  Pays-Bas  (2).  Notre  flotte, 
commandée  par  le  sire  de  Wacken,  amiral  généra!,  devait 
se  rendre  à  Douvres  avec  une  ceriaine  oslen talion  a(in  de 
démontrer  aux  Anglais  que  la  maison  d'Autriche  voulait 
faire  des  sacrifices  pour  soutenir  la  cause  de  la  Grande- 
liretagnc  (5) . 

Ces  démonstrations  d'amitié  n'eurent  pas  les  efl'ets 
auxquels  le  gouvernement  des  Pays-Bas  s'attendait.  Les 
gentilshommes  et  soldats  de  l'amiral  anglais  se  mutinèrent; 
les  marins  de  la  flotte  néerlandaise  ne  voulaient  plus  servir 
ii  cause  de  la  cherté  des  vivres.  Enfin  l'amiral  de  la  Grande- 
Bretagne  trouva  notre  flotte  mesquine  (4);  les  Anglais 
désignaient  nos  vaisseaux  sous  le  nom  ridicule  de  coquilles 


(1)  Papiers  d'État  de  Granvelle,  t.  IV,  pp.  199.  d98,  20i.  218,  231.  V.  au  sujet 
de  l'équipement  de  ces  vaisseaux,  Van  lirujssel,  Histoire  du  convnerce,  t.  III, 
p.  40.  Annales  de  la  Société  d'Émulation,  l.  c.,  p.  374.  a 

(2)  V.  dans  la  Correspondance  de  diarles-Quint  avec  Granvelle,  les  pp.  469, 
i9B  V,  502,  525,  où  se  trouvent  les  détails  de  ces  armements  et  de  ces  prises. 

;3)  Lettre  de  l'ambassadeur  Renard  à  l'empereur,  du  23  janv.  1554.  (Cojveî- 
pondance  de  Charles  V  avec  Granvelle.  p.  509.) 

(4)  Lettre  de  Renard  à  l'empereur  du  28  avril  dooi.  «  Selon  qne  j'ai  veupar  les 
lettres  qu'il  (l'admirai)  a  escript,  il  n'est  content  de  l'armée  que  V.  M.  a  envolée, 
disant  qu'il  n'y  a  que  trois  ou  quatre  navires  qui  passent  cens  tonnaulx.  Ibid., 
p.  65U. 


.  8oi!  ) 
de  moules.  Lorsque  leurs  uinrins  reueonlraicnt  les  nôtres  sur 
terre,  ils  se  queiellaieut,  se  battaient,  bref,  ils  ne  se  souf- 
fraient pas.  Et  cependant  ils  continuèrent  à  croiser  dans  la 
nier  du  Nord  jusqu'en  janvier  de  rannée  suivante  (i). 

En  1555,  le  cai-dinal  Pôle,  légat  du  Saint-Siège  en 
Angleterre,  entama  des  négociations  de  paix  entre  Henri  II 
et  Cbarles-Quinl.  Tous  les  eiïorts  du  légat,  toutes  ses  ten- 
tatives écliouèrent  devant  les  prétentions  des  deux  parties, 
excitées  par  les  intrigues  de  Catherine  de  Médicis.  Les 
hostilités  recommencèrent,  sans  délai,  par  terre  et  sur 
mer.  De  nouveau  les  frontières  des  deux  pays  furent  sac- 
cagées par  les  belligérants,  comme  pendant  Tannée  précé- 
dente. Sur  mer,  lien  n'était  changé  à  Télat  ancien.  Des 
navires  fiu'ent  pris  tantôt  par  les  Français,  tantôt  par  les 
Néerlandais,  sans  qu'aucune  action  décisive  pût  les  faire 
songer  à  la  paix.  Pareille  situation  s'explique  facilement. 
Depuis  la  retraite  de  Strozzi,  la  marine  française  n'avait 
plus  pris  aucune  initiative  autre  que  celle  de  la  piraterie. 
Aux  Pays-Bas  le  gouvernement,  les  provinces  et  les  villes 
se  tenant  sur  la  défensive,  se  contentèrent  de  proléger,  par 
des  forces  navales  éparpillées,  les  vaisseaux  marchands  et 
pécheurs,  rôle  facile  depuis  le  mariage  de  Phihppe,  prince 
d'Espagne,  avec  Mario,  reine  d'Angleterre  (25  juillet  1554). 
A  partir  de  cette  époque,  notre  marine  n'avait  plus  rien  à 
redouter  de  la  part  de  la  Grande-Bretagne,  et  si  par  hasard 
des  sujets  anglais  commettaient  ou  laissaient  commettre 
quelque  irrégularité,  les  représentations  du  gouvernement 
des  Pays-Bas  étaient  écoutées  et  les  torts  immédiatement 
l'éparés. 

Ainsi  se  réalisèrent,  en  grande  partie,  les  prévisions  de 


;i)  Ibid.,  pp.  270,  274. 


(  860  ) 

Charles-Quint  :  sous  plusieurs  rapports,  les  intérêts  des 
deux  gouvernements  s'étaient  identifiés.  Pendant  le  règne 
de  Marie  Tudor,  nous  étions  loin  de  la  situation  créée  à 
notre  marine  par  le  mauvais  vouloir  du  gouvernement 
d'Edouard  VI.  Le  droit  et  la  justice,  en  ce  qui  concerne 
notre  pays,  avaient  fait  place  à  la  ruse  et  à  l'arbitraire. 

Rien  de  mémorable,  si  ce  n'est  la  piraterie  habituelle, 
n'avait  plus  été  signalé  sur  la  mer. 

Tout  à  coup,  nous  voyons  apparaître  dans  l'histoire  un 
fait  qui,  interprété  comme  il  le  fut  par  des  écrivains  fran- 
çais, aurait  été  une  véritable  calamité  pour  notre  pays  et 
spécialement  pour  la  province  de  Hollande  «  Sub  id  tempus, 
»  dit  de  Thou ,  noslri  in  Oceano  cum  Belgicis  navibus 
»  ingenti  ac  furiali  praelio  pugnavere  (1).  »  Puis  il  continue 
la  relation  du  combat,  en  rendant  justice  à  la  bravoure  des 
deux  parties.  Sans  lire  le  passage  entier  de  de  Thou,  des 
écrivains  français  concluent  à  la  destruction  complète  de  la 
flotte  hollandaise  et  soutienne^,  en  dépit  du  texte  de  cet 
historien,  que  la  France  remporta  une  victoire  incontes- 
table (2). 

Les  termes  dont  de  Thou  se  sert  nous  ont  inspiré  des 
doutes  sérieux  sur  cette  grande  victoire  et  sur  l'anéantisse- 


(1)  Thuanus,  Historiaruin  siii  teniporis,  libri.  CXXXVIII,  t.  I,  p.  556. 

(2)  Sismonde  de  Sismondi,  Histoire  des  Français,  t.  XII,  p.  281.  —  On  peut 
encore  consulter  au  sujet  de  ce  combat  naval:  Histoire  de  la  bataille  navale 
faite  par  les  Dieppois,  Paris,  V6ol,  et  sur  les  différentes  éditions  de  cette  relation, 
les  Antiquités  et  chronique  de  Dieppe,  X.\\,^.^lo%o\x  toute  cette  bataille  est 
longuement  racontée;  Bouvet,  Annales  de  la  Marine  française,  t.  II.  p,  26;  Van 
Veer,  Hollandscite  cfironycke,  p.  128;  Pontus  Heulerus,  Rerum  austr,  //Z>,XIII, 
p.  66o:Velius,  C/o?i/;^-  van  Huorn,  p. 62;  Haraeus,  Annales  ducatus  Brabantiae, 
1. 1,  p.  680;  Daniel,  Histoire  de  France,  t.  IX,  p.  761  ;  Wageuaar,  Vaderlandsche 
historié,  t.  V.p.  400;  l'abbé  Cochet,  Les  Églises  de  l'arrondissement  de  Dieppe, 
p.  278;  baron  Kervvn  de  Leltenhove,  Hisl.  de  Flandre,  t.  VI,  p.l46;  Van  Bruyssel, 
Hist.  du  commerce,  t.  III,  p.  42. 


(  8fii  ) 
ment  complet  de  notre  marine.  Rien ,  à  notre  avis,  ne  sem- 
ble justifier  un  succès  si  complet,  si  inattendu  de  la  pari 
de  la  marine  française.  Nous  avons  voulu  vérifier  les  faits 
avancés  par  les  écrivains  de  la  France  au  moyen  de  docu- 
ments émanés  du  gouvernement  des  Pays-Bas  :  Audialur  et 
altéra  pars.  Une  information,  prise  par  le  bailli  de  iMiddel- 
bourg,  concernant  ces  événements,  les  présente  sous  leur 
véritable  jour.  D'après  cet  acte,  dont  nous  reproduisons  le 
texte  en  note,  Tévénement  a  du  se  passer  vers  le  milieu 
d'août  15oo  et  non  vers  la  fin  de  ce  mois,  comme  le  dit  de 
Thou(1).  D'autres  écrivains  le  placent  au  11  août,  et  l'abbé 


(1/  Tesmoings  examinez  par  le  bailly  de  Middelbourg  en  Zeellande,  en 

présence  de  Cornille  Alters,  notaire  publique,  le  17^  jour  d'août 
d555. 

Cornille  Janssone,  maet  de  la  hulck,  nommée  le  Sampson,  en  laquelle  estoit 
maronnier  Nicolas  Janssone  de  Broock  (liroek  in  Waterland:  et  Vriull  Aelbrechts- 
zone,  batellier  sur  ladite  hulck,  eagez  de  XVIIJ  ans  ou  environ,  disent  tous  deux 
estre  vray  que  venans  les  deposans  cestuy  dernier  voiage  avec  la  hulcke  susdite 
en  la  flotte  de  Calis  de  Andelosia  jusques  environ  ung  lieu  nommé  Beiverley  et 
Douveren,  ont  veu  de  loing  venir  xxviij  navires,  desquelles  l'une  deschargea  ung 
coup  d'artillerie.  Sur  quoy  leur  maronnier  dit  que  c'estoient  amis.  Toutesfois 
que  ce  nonobstant  ilz  meissent  en  ordre  les  crochetz  et  qu'ilz  délaissassent  encoi- 
res  la  grande  artillerie  dessoubz  le  overlooper.  Mais  approuchans  ledites  xviu 
navieres  plus  près  et  congnoissans  que  c'estoient  François,  leur  maistre  de  gou- 
vernail dit  :  mectez  en  ordre  l'artillerie  ;  ce  sont  François.  Faisans  les  basteliers 
toute  extrême  dilligence,  pour  la  mectre  en  ordre  ;  mais  ils  n'ont  sceu  estre  prestz 
quant  les  François  sont  abordés.  Disent  aussy  que  s'ils  eussent  peu  estre  plustost 
prestz,  qu'il  leur  sembloit  qu'ilz  eussent  peu  oultraiger  les  François,  et  comme 
lèvent  estoit  grant,les  eussent  peu  mectre  au  fond  ainsi  que  deux  desdites  navires 
françoises  sont  esté  enfendrées  par  l'impétueuse  entrée  des  nostres,  se  noyant  l'une 
desdites  navieres  assez  près  de  celle  des  deposans.  Disent  davantaige  qu'il  en  y  a 
demeuré  bruslées  six  de  noz  hulcques,  assavoir  celle  de  Claes  Janssone,  où 
estoient  lesdits  deposans,  celle  de  Potfer  de  Broock  (Broek  in  Waterland),de  Jean 
Lange  de  Zymerdorp  (Zuiddorp  en  Zelande;,  Cornellis  Claeyssone  de  Watergang, 
maet,  Geertssone  de  Hulpendam  et  de  Floris  Cheyssone  de  Doryckerdam,  et  que 
cinq  autres  sont  esté  prinses;  mesmes  Melis  Claessone  visadmiral  a  esté  abordé 
le  premier,  et  aiant  d'ung  coup  d'artillerie  eu  emporté  la  teste,  Paul  Symons  de 
Purmerende,  Aem  Diericxssone  de  Lausmar  estant  chargé  d'allun  pour  mènera 


(  8()^  ) 

Cothel  au  2  du  même  mois,  points  de  chronologie  de  peu 
d'importance,  mais  qui  démontrent  combien  les  auteurs 
français  sont  peu  d'accord  sur  ce  sujet,  comme  sur  le 
nombre  des  vaisseaux  engagés  dans  le  combat. 

Selon  cette  information,  la  flotte  française,  sortie  du  port 
de  Dieppe,  était  montée  par  des  aventuriers  extrêmement 
hardis,  venus  d'Ecosse,  d'Angleterre,  d'Irlande,  de  Guel- 
dre,  de  Hollande  et  d'autres  provinces  des  Pays-Bas.  Elle 
n'aurait  pas  eu  tout  le  succès  qu'on  lui  attribue  en  France. 
Quant  à  la  flotte  hollandaise,  ne  l'oublions  point,  ce  n'était 
pas,  à  proprement  pai'ler,  une  flotte  de  guerre.  Elle  était 
composée,  de  Thou  en  convient,  de  navires  marchands 
armés  simplement  pour  se  défendre  contre  des  flibustiers 
isolés  et  non  contre  une  flotte  de  guerre.  Ils  étaient  chargés 


Londres.  Jacques  Thiemans  alias  Schuylmaker.  Pieter  Reygcrtssone  de  Dorickeu- 
dam.  Disent- davantaigc  que  Herinan  Hens  de  Euckhuj-sen,  admirai  desdiles 
hulcques,  esloil  une  fois  prinsedes  François;  mais  veans  les  François  le  feug  par 
trop  impétueulx  en  la  basanne,  l'ont  incontinent  habandonné.  Quoy  voiens  ceulx 
qu'estoient  en  la  hulcque  dudit  Claes  Jans  one  se  sont  courruz  en  celle  de  Her- 
man  Hens,  habandonnans  la  leur,  que  desia  estoit  en  feu  et  flamme.  Interroguez 
s'ilz  ne  cognossoient  point  ladmiral  des  François,  déclairenl  que  Schoon  Dierick 
estoit  leur  admirai,  ainsi  qu'ilz  avoient  ouy  compter  d-;  Ghecrt  Dievicxssone  de 
Serwau,  qui  dit  avoir  parlé  à  luy  mesmes,  que  ledit  Schon  Dierickx  lui  crya  : 
Rendé-vous;  car  vous  estes  de  tout  quiet  de  vostre  navir,  et  sommes  plus  puis- 
sans  que  vous  austres.  Disent  en  oultre  qu'il  en  y  a  demeurez  s'^pt  naviers  fran- 
çoises,  deux  enfondrés  et  cinq  bruslécs.  La  reste  s'est  partie  bien  désarmée  et 
mal  en  ordre.  Déclarent  aussi  que  ledit  Schoon  Dierick  a  esté  veu  mort  d'ung 
coup  d'artillerie,  avant  que  ladmiralle  se  noya.  Aussi  dit  Cornelis  Albrechtssone 
qu'il  avoit  ouy  d'une  natif  d'Amsterdam,  banny  du  pays  comme  i!  disoit.  qu'il  y 
avoit  en  l'admiralle  v<:  hommes,  et  es  autres  navieres  de  nu,  lU  etijc  hommes. 
Disent  que  lesdits  gens  de  guerre  des  navieres  françoises  esloient  vaillens  et  de 
toute nation.si  comme  Escossois.Anglois,  Yrlandois.  Geldrois,Ho!landois  et  autres 
de  ce  Pays-Bas,  tous  bien  en  ordre.  Déclairent  d'avainlage  que  lesdits  François 
avoient,  en  leurs  navieres,  piques  de  la  longueur  de  xvuu  piedz,  que  celles  de 
nostre  coustel  n'estoient  que  de  xiiu,  xv  ou  xvj  pieds,  par  où  les  nostres  ne  se 
pouvoientbicn  mectre  en  dcfîensc,  si  non  avec  force  et  grande  perle  de  nos  gens. 
(Archives  de  l'Audience,  liasse  73.) 


(  800  ) 

do  grandes  richosscs,  inférieurs  en  nombre  à  ceux  de  leurs 
ennemis  el  défendus  par  un  ehiflVe  de  matelots  bien  minime 
eomparalivemenl  à  celui  de  la  flolle  dieppoise.  Le  comman- 
dant français  en  convint  lui-même.  Si  nos  liulques  sui- 
virent droit  leur  cbcmin,  sans  faire  semblant  de  voir  la 
flotte  ennemie,  ce  ne  fut  pas  par  fanfaronnade,  comme  le 
disent  les  relations  publiées  en  France,  mais  parce  qu'elles 
ignoraient  qu'elles  avaient  aiïaire  à  des  ennemis,  à  des 
pirates,  à  des  voleurs  enfin.  Notre  convoi  mareband,  com- 
posé de  vingt-deux  bâtiments,  selon  les  relations  françaises 
ou  de  dix-buit  bulques  seulement,  selon  l'abbé  Cocbct,  ne 
fut  pas  entièrement  détruit,  comme  Sismonde  de  Sismondi 
l'assure.  Six  de  nos  bulques  furent  brûlées,  cinq  furent 
prises.  II  en  restait  donc  encore  onze.  Nous  voyons,  en 
effet,  différentes  bulques,  venant  du  Midi,  arriver  successi- 
vement dans  les  ports  de  la  Zélande(l),  et  Daniel  constate 
dans  son  bistoire  de  France  que  «  la  flotte  flamande,  toute 
»  délabrée,  gagna  la  Hollande  (2).  » 

En  ce  qui  concerne  la  flotte  française,  composée  de  dix- 
buit  ou  de  dix-neuf  navires  de  guerre,  portant  cbacun  200, 
500  ou  400  bommes,  elle  n'eut  pas  lieu  d'être  très-satis- 
faite de  son  expédition.  Le  commandant  Louis  d'Espinelle 
d'Harfleur,  désigné  sous  le  nom  de  Seboon  Dierk  par  les 
matelots  interrogés  à  Middelbourg,  fut  tué  :  son  vaisseau, 
monté  par  500  bommes,  fut  englouti.  Plusieurs  capitaines 
subirent  le  sort  de  leur  commandant. Deux  navires  français 
furent  coulés  bas  ;  cinq  devinrent  la  proie  des  flammes.  De 
sorte  que  des  dix-buit  ou  dix-neuf  bâtiments  de  guerre 
ennemis,  il  en   restait  encore  onze  ou  douze,  qui,  très- 


fl)  Lettre  du  24  août  lo5o.  Archives  de  l'Audience,  liasse  73. 
Cl)  T.  IX,  p.  763. 


(  864  ) 
maltraités,  se  retirèrent  en  désordre  vers  Dieppe.  Ils  ne 
purent  pas  même  songer  à  donner  la  chasse  aux  autres 
vaisseaux  de  la  flotte  hollandaise. 

Cette  victoire  nest  donc  pas  auâsi  importante  que  les 
écrivains  français  le  prétendent.  De  Thou  en  convient  pour 
ainsi  dire  implicitement  lorsqu'il  raconte  la  dextérité  de  nos 
matelots  à  lancer  le  feu  dans  les  bâtiments  ennemis,  mon- 
tés par  des  matelots  en  nombre  supérieur  aux  nôtres.  Aussi 
finit-il  sa  narration  en  faisant  remarquer  combien  les  im- 
périaux diminuaient  l'importance  de  la  victoire. 

Quoi  qu'il  en  soit,  lerésullat  du  combat  fut  glorieux  pour 
les  Hollandais,  qui,  de  l'aveu  des  Dieppois,  s'étaient  dé- 
fendus comme  des  lions.  Malgré  l'infériorité  du  nombre, 
ils  ont  pu  infliger  aux  Français  une  rude  leçon,  laquelle 
aurait  été  plus  dure  encore  s'ils  avaient  eu  le  temps  de 
s'apprêter,  et  s'ils  n'avaient  pas  eu  une  aveugle  confiance 
dans  les  rassurances,  données  par  un  des  leurs. 

La  flotte  de  Dieppe  ne  se  montra  plus,  tant  elle  avait  été 
maltraitée.  Notre  marine  marchande  continua  tranquille- 
ment ses  expéditions  lointaines.  Bientôt  elle  put  les  entre- 
prendre avec  plus  de  sûreté  par  suite  de  la  trêve  de 
Vaucelles. 

III.  —  Conclusions. 

La  marine  belge ,  si  florissante  vers  le  milieu  du 
XVP  siècle,  subit  à  cette  époque,  nous  venons  de  le  voir, 
de  graves  désastres.  Soit  jalousie,  soit  politique,  soit  guerre 
ou  querelles  religieuses,  au  nord  comme  au  midi,  tout 
conspirait  contre  elle.  Les  événements  s'accumulaient  pour 
l'anéantir. 

Ces  résultats  sont  dus,  en  partie,  au  gouvernement  par- 


(  mi  ) 

sonnel  de  rcmpcrenr.  Dans  noire  pnys  la  chute  des  coni- 
nriunes,  dont  Charles  écrasa  la  [)lus  forte  et  la  dernière 
encore  debout,  lui  permit  de  suivre  le  courant  des  idées 
nouvelles  qui  avaient  surgi  dès  le  XV"  siècle  au  sujet 
de  la  monarchie. 

Partout  s'étaient  montrées  des  tendances  à  faire  prévaloir 
un  gouvernement  fort,  centralisateur,  l'unité  monarchique 
appuyée  sur  les  principes  du  césarisme,  les  faveurs  et  les 
armées  permanentes.  Seuls  les  états  de  nos  provinces  ré- 
sistaient à  ces  tendances.  Seuls  ils  empêchaient  Charles- 
Quint  de  se  rendre  complètement  maître  de  la  situation. 
C'était  un  pointd'achoppement,  une  difficulté  qui  le  mettait 
dans  une  position  inférieure  à  celle  des  rois  de  France  et 
d'Angleterre,  à  peu  près  maîtres  absolus  chez  eux.  Lors- 
que le  gouvernement  des  Pays-Bas  devait  agir,  rien  n'était 
prêt  :  il  fallait  des  fonds  ;  et  les  États,  dispensateurs  des 
aides  et  subsides,  n'étaient  pas  toujours  d'humeur  à  les 
accorder.  Delà  des  discussions  et  des  pourparlers  qui  en- 
traînaient une  perte  de  temps  considérable.  Lorsque  les 
États  avaient  enfin  accédé  aux  demandes  de  l'empereur, 
dans  le  but  de  faire  sérieusement  la  guerre,  nos  forces 
maritimes  furent  éparpillées  pour  convoyer  les  vaisseaux 
marchands  et  pécheurs.  De  son  côté  l'ennemi  agissait  d'une 
manière  diamétralement  opposée,  il  réunissait  toutes  les 
forces,  et  frappait  en  temps  opportun. 

Doué  d'un  grand  génie,  Charles-Quint  dirigeait  tout  par 
lui-même.  Sachant  se  plier  selon  les  circonstances  et  les 
nationalités,  il  marchait  toujours  droit  au  but  avec  beau- 
coup plus  de  dignité  et  de  sincérité  que  les  monarques  de 
son  voisinage.  Chez  eux  les  mensonges  et  la  duplicité 
étaient  en  matière  politique  leur  arme  de  prédilection.  A 
leurs  yeux  la  fausseté  était  synonyme  d'habileté.  Le  gouver- 


(  866  ) 
ncmcnt  belge  eut  le  grand  lort  d'y  ajouter  foi,  malgré  des 
avertissemems  réilérés  et  une  expérience  journalière. 

Selon  la  manière  de  voir  de  l'empereur,  ses  ministres 
étaient  des  instruments,  jamais  des  favoris,  mais  toule  ini- 
tialiveleuréiail  interdite.  Telle  était  aussi  la  position  qu'il 
avait  donnée  à  la  gouvci-nanle  des  Pa)S-Bas. 

Quant  aux  misères  du  peuple,  l'empereur  s'en  occupait 
rarement.  Des  idées  plus  vastes  absorbaient  toute  son 
attention.  Le  bien-être  matériel  et  parlant  la  question  du 
commerce  maritime  n'étaient  pas  toujours  l'objet  de  ses 
soins  dans  les  pays  soumis  à  son  sceptre;  ils  devaient  céder 
le  pas  aux  exigences  politiques.  Dans  les  Pays-Cas  ces 
questions  d'intérêt  matériel  étaient  confiées  à  la  gouver- 
nante, sans  lui  accorder  cependant  les  pourvoirs  nécessaires 
pour  prendre  des  mesures  d'initiative. 

Cette  princesse,  aux  qualités  brillantes,  active  et  douée 
d'une  intelligence  remarquable,  n'était  pas  à  la  bauteur  de 
sa  mission  quand  il  fallait  agir.  La  diplomatie  était  son  élé- 
ment, la  prudence  un  moyen  dont  elle  faisait  preuve  dans 
toutes  ses  relations.  Au  moment  de  l'action  ces  bonnes 
qualités  devenaient  des  obstacles,  des  causes  d'indécision 
continuelle.  Celle-ci  était  entretenue  par  Scepperus,  le  prin- 
cipal et  pour  ainsi  dire  l'unique  conseiller  de  la  gouver- 
nante concernant  les  affaires  maritimes.  Diplomate  etpoëte 
avant  tout,  Scepperus  n'aimait  pas  mieux  l'action  que  la 
reine  Marie. 

Au  lieu  d'agir  avec  vigueur,  au  lieu  de  prévenir  les 
attaques  de  la  flotte  française,  la  gouvernante  tergiversait; 
elle  continuait  le  vieux  système  de  défense  et  de  protec- 
tion accordée  à  la  marine  marcbande.  Cette  protection  se 
bornait  le  plus  souvent  à  la  publication  de  placards  sur  la 
matière,    à    des    réclamations    diplomatiques    et  à    faire 


(  8«7  ) 

accompagner  nos  vaisseaux  marchands  ou  pécheurs  par 
des  vaisseaux  de  guerre,  souvent  en  nomhre  insuffisant. 

Les  mesures  législatives  prescrivant  Tarmcment  des  vais- 
seaux et  i'ohligalion  de  voyager  |)ar  convois  étaient  ilhi- 
soires  lorsque  l'ennemi  se  présentait  en  masse.  Les  négo- 
ciations diplomatiques,  nous  Tavons  vu,  étaient  des 
leurres.  Elles  produisaient  des  promesses  mensongères , 
qui  déroutaient  complètement  notre  gouvernement  lors- 
qu'il s'y  fiait.  Quand  l'Angleterre  refusait  à  nos  agents 
toute  justice  contre  les  flibustiers  écossais,  quand  elle 
rendait  la  liberté  à  ces  pillards  après  les  avoir  arrêtés  pour 
la  foi-me,  elle  fit  pendre,  à  la  demande  de  la  France,  les 
corsaires  coupables  d'avoir  atlaipié  les  vaisseaux  fran- 
çais (I).  L'escorte  fournie  par  rÉlat  à  nos  vaisseaux  mar- 
chands n'étant  pas  toujours  sufîisante,  les  Etats  et  les 
villes  maritimes  en  firent  armer  pour  leur  propre-compte, 
au  moyen  de  deniers  provenant  de  certaines  taxes  (2),  ou 
bien  ils  demandaient  à  la  France  des  sauf-conduits,  dont 
les  prix  exorbitants  étaient  payés  par  les  marchands  (5). 
Ceux-ci  étaient  ordinairement  victimes  de  leur  bonne  foi. 
Les  sauf-conduits,  de  l'aveu  de  la  gouvernante,  n'étaient 
pas  mieux  observés  que  les  traités  et  les  promesses  de  la 
diplomatie. 

Ce  fut  le  défaut  d'initiative  et  d'action  qui  perdit  notre 
marine; ce  fut  l'initiative  et  l'action  qui  créèrent  la  puissance 


(-!)  Teulet,/.  c,  p.  2io. 

(2)  V.  Proposie  ghedaen  bij  den  heere  van  Eecke,  aen  de  gedeputeerde  van 
Vlaenderen,  tlolland  en  Zeelandt,  24  mey  1553,  dans  la  Kronijk  van  het 
historiacli  Genootschap  van  IJtrecht,  46<=  année,  -ISSO,  p.  53. 

(3)  Voir  le  compte  de  l'armement  fait  en  15oI,  par  la  ville  de  Bruges  de  diffé- 
rents bâtiments  de  guerre,  destinés  à  convoyer  la  marine  marchande.  (Ms.  46,838 
de  la  Bibliothèque  royale  de  Bruxelles.) 


(  868  ) 

maritime  des  Provinces-Unies,  héritières  de  la  nôtre.  La 
république  batave  mit  à  profit  le  génie,  le  courage,  la  per- 
sévérance et  l'esprit  entreprenant  de  ses  enfants  pour  pren- 
dre sur  mer  une  posiiion  enviée  par  toutes  les  puissances. 
A  son  prestige  elle  ajouta  une  grandeur  nouvelle,  en  exé- 
cutant ce  que  le  gouvernement  belge  aurait  dû  Aiire  dès  le 
commencement  du  XVh  siècle.  Elle  se  faisait  respecter  par 
la  force,  et  se   méfiait  de  la  diplomatie. 


Jean  de  Drosay,  l'un  des  réformateurs  de  la  science  du 
droit  au  XV t  siècle;  par  M.  Alphonse  Rivier,  associé 
de  FAcadémie. 

La  réforme  de  la  science  du  droit,  au  XVI^  siècle,  a  fait 
naître  une  multitude  de  traités,  de  discours,  d'épîlres, 
d'espèces  diverses  et  de  toutes  dimensions,  sur  la  méthode 
juridique,  sur  l'art  du  droit,  sur  le  moyen  de  devenir  un 
parfait  jurisconsulte. 

On  entrait  dans  une  ère  nouvelle;  il  fallait  s'orienter,  el 
remplacer  la  tradition  dont  on  prétendait  s'affranchir. 

L 

Beaucoup  de  ces  ouvrages  avaient  simplement  pour  but 
de  servir  de  guides  aux  jeunes  gens  des  écoles.  On  en 
composait  de  ce  genre  dès  le  moyen  âge;  tels  étaient  déjà 
la  Methodus  utriusque  juris  anonyme,  de  la  première 
moitié  du  XV'^  siècle  (1),  et  les  ouvrages  ou  opuscules 


(1)  Stintzing,  Geschichte  derpopulàren  Litteratur  des  rômischen  und  kano 
nischen  Rechts,  pp.  29,  33. 


(  8(il»  ) 

portant  le  litre  De  modo  atndendi  de  Martin  de  Fano,  de 
Caiiis,  de  Caccialupus.  Ces  docteurs  exhortaient  la  jeunesse 
à  étudier  sans  cesse,  à  ne  négliger  aucun  instant  ni  aucune 
occasion ,  conformément  au  vieux  quatrain  déjà  cité  par 
Jean  Faber,  et  répété  par  Henri  de  Piro  : 

Si  quis  forte  vclit  juriscoiisultus  habcri. 
Continuel  sludium,  velit  a  quociimque  doceri, 
Invigilel ,  nec  vincal  eum  tortura  laboris , 
Fortior  insurgat  cunctisque  reccntior  /wris{l). 

«  Toutefois,  dit  Martin,  ne  travaillez  pas  au  point  de 
tomber  en  mélancolie  ou  de  gagner  le  mal  de  poitrine , 
mais  prenez  du  repos  de  temps  à  autre  et  égayez  votre 
esprit.  »  Sur  quoi  Caccialupus  remarque  :  «  Pareil  avis 
est  superflu  de  nos  jours,  car  les  livres  des  écoliers  sont 
habituellement  pleins  de  poussière,  tandis  qu'eux  circulent 
sur  les  places,  bien  vêtus  et  même  avec  luxe,  pour  voir  et 
se  faire  voir  (2).  » 


(1)  Jean  dit  Faber,  de  Roucines,  en  la  terre  de  Montbéron,  non  loin  d'Angou- 
lême,  est  mort  vers  1340.  M.  Eschbach  attribuait  ces  vers  au  président  Antoine 
Favre,  mort  en  1624.  J'ai  suivi  moi-même  cette  indication  erronée  dans  mon 
Introduction  historique  au  droit  romain.  HENRI  VON  DEM  BiRNBAUM,  de  Piro, 
est  mort  en  1473, 

(2)  Martin  Cassaro,  de  Fano,  vivait  encore  en  1272.  Jean  Jacques  Canis  ou 
A  Canibus,  professeur  à  Padoue,  est  mort  en  1490  ou  1494  Jean-Baptiste  de 
Caccialupis  était  professeur  à  Sienne,  lorsqu'il  écrivit  son  Hlodus  studendi  in 
utroque  jure,  en  14117,  où  il  cite  fréquemment  Martin. 

—  Subdit  Martinus  de  Fano  in  dicta  cpistola  :  «  nec  tantum  studeatis  quod  tris- 
tilia  ant  pectoris  dolor  vos  affligat  anxietatibus  ♦.  recipite  requiem,  et  animum  ad 
gaudia  revocate.  »  Hoc  fuerit  supperfluum  monere  temporibus  noslris.  Nam  libri 
scholarium  regulariter  sunt  pleni  pulvere,  quotidie  circumeunt  plateas,  ut  cum 
sint  bene,  imo  luxuriose  induti,  videant  et  videantur.  (Caccialupus,  Modus  stu- 
dendi, document  IV.)  —  Martin  donnait  aussi  des  conseils  utiles  au  professeur  ; 
il  exige  qu'il  ait  «  vim  impressivam,  ut  exemplis  intelligibiiibus  instruat  quod 
ostendit  :  nec  sit  in  sua  lectione  pomposus,  sed  potius  utilis  et  lidelis  :  et  plus 
veritati  quam  truffis  et  ornamento  verborum  inhaerens.  «  (Caccialupus,  docu- 
ment H.) 


(  870  ) 

lin  moment  vint  où  les  recommandations  des  vieux 
maîtres  purent  paraître  un  peu  triviales. 

Aux  esprits  avides  de  nouveaulé  que  vivifiait  le  souffle 
fécond  de  ranliquité  classique,  il  fallait  une  nourriture  à  la 
fois  plus  forte  et  plus  raffinée.  Nous  avons  quelque  peine 
à  nous  rendre  un  compte  exact  du  zèle  avec  lequel  on 
s  enquérait,  au  temps  de  h  Renaissance,  des  méthodes  les 
plus  avantageuses  pour  apprendre  et  pour  enseigner.  Les 
jeunes  gens,  souvent  aussi  des  hommes  faits,  allaient  de 
ville  en  ville  et  d'école  en  école  à  la  recherche  ou  à  la  suite 
des  maîires  en  renom.  Les  adeptes  de  la  science  réformée 
en  étaient  les  apôtres;  considérés  non  comme  de  simples 
enseigneurs,  mais  comme  des  initiateurs,  ils  étaient  con- 
sultés de  près  et  de  loin  par  les  néophytes  qui  voulaient  être 
mis  sur  la  honne  voie,  guidés,  éclairés.  Les  exemples  abon- 
dent. J'en  prends  un  dans  un  document  publié  naguère,  où 
figurent  deux  personnages  connus  (1).  Pierre  Lorioz  (2), 
étant  professeur  à  Bourges,  se  vit  consulté  par  un  étu- 
diant d'Orléans,  qui  fut  plus  tard  le  conseiller  Maclou 
Popon,  du  Parlement  de  Bourgogne  (5).  Lorioz  répondit- 
avec  bienveillance  :  «  Je  suis  surpris  qu'en  cette  matière 
vous  me  demandiez  conseil  à  moi  plutôt  qu'à  vos  profes- 


{i)  Zeitschr'tfi  fur  liechlsgeschichte,  XI,  319-321.  L'original  de  la  lettre  de 
Lorioz  est  à  Paris,  dans  le  inanuscrit  latin  838o.  lequel  provient  du  conseiller 
Philibert  m:  laMareJo  savant  historien  bourguignon.  J'en  dois  la  connaissance 
à  M.  Aimé  Herminjaru.  l'infaligàble  éditeur  de  la  correspondance  des  réforma- 
teurs. 

(2)  Pierre  Lorio/,  Lnriotus,  voir  mon  Introduction  historique  au  Droit 
romain,  p.  496,  et  l'étude  de  M.  Villequez  sur  les  Écoles  de  Droit  de  In  Bour- 
gogne. 

(3)  Maclou  Popon,  Maclovius  Pomponius,  mort  en  1577  dans  sa  soixante- 
quatrième  année,  fut  l'ami  de  Jacques  de  Vintimille,  qui  a  raconté  sa  vie.  Une 
lettre  autographe  de  Popon  fait  partie  de  la  collection  de  M.  Charles  Rahf.en- 
beek. 


(871  ) 

scurs  que  vous  rencontrez  tous  les  jours.  Ce|)en(lant .  je  ne 
veux  pns  que  vous  puissiez  dire  que  j'tue  manqué  à  vous 
venir  en  aide.  Je  vais  donc,  non  pas  vous  développer  mon 
opinion,  ee  que  je  ferai  peul-èlre  quelque  jour,  mais  vous 
l'indi(pier  seulemenl  d'une  façon  sommaire,  vu  l'exiguïtc 
du  lemps  dont  je  |)uis  disj)oser.  »  Popon  avait  demandé  le 
moyen  de  se  metire  prom})tement  sur  la  vraie  voie  de  la 
jurisprudence;  —  alors  déjà  la  jeunesse  élait  pressée  d'ar- 
river et  désireuse  d'abréger  l'indispensable  apprentissage, 
—  cliose  plus  pardonnable  jadis  qu'aujourd'hui,  vu  la  lon- 
gueur démesurée  des  éludes  (!). 

Lorioz  offre  à  son  jeune  ami  deux  méthodes  au  choix.  Si 
Popon  veut  suivre  la  plus  prompte,  il  commencera  par 
mettre  de  côté  les  commentaires,  pour  lire  uinquement  les 
textes, en  faisant  sur  les  loisdç  chaque  titre  des  -jcpar/r/a(2), 
qu'il  ordonnera  par  genres  et  par  espèces,  selon  son  propre 
jugement,  sans  s'aider  ni  de  Placcntin,  ni  d'Azon,  ni  de 
Zasius.  Ce  travail  achevé,  et  pour  le  compléter,  il  pourra 
recourir  aux  commentaires  des  docteurs,  et  de  préférence 
à  ceux  qui  ont  paru  récemment  à  Lyon  en  trois  volumes  (5). 


(1)  Rogas,  ut  coinpcndiariam  libi  describam  rationeni,  qua  cito  ad  veram  juris- 
prudentiae  pcrvenire  viam  possis.  —  Lor.iuz,  lettre  citée,  Zeiischrift,  p.  320. 

{%  Voyez  sur  la  notion  du  xj-py-Tirlc-^,  Ménage,  Amoenitates  juris  civilis , 
chapitre  XV:  Quid  sitit  ttjcP^zitj.cc.  Dans  lacceplion  primitive,  ce  sont  de  sim- 
ples annotations  de  concordance  :  adiwlare  quœ  alils  in  titulis  ac  locis  illiim  ad 
titulum  pertiueutia  reperiatUur. 

Plus  tard,  l'on  désigna  ainsi  des  sommaires  ou  brefs  commentaires  de  chaque 
titre.  C'est  dans  ce  dernier  sens  que  Lorioz  entend  le  mot  de  xv.pxTLTlov.De 
même  Drosay. 

:8)  «  Primum  (modum  adsequi  posscm)  biennio,  dum  solas  leges  rejectis 
omnibus  iutcrpretationibus  praeiegerem  et  inter  legendum  singularum  legum 
paralitla  mihi  conficerem,  illis  post  modum  in  gênera  et  species  redaclis.  ïloc  in 
modo  nulla  Piaccntini,  Azonis,  vel  Zasii  indiges  opéra,  nimirum  hi  nihil  aliud  in 
suis  summis  quam  somniarunt.  Verum  cum  unius  tituli  singularum  legum  para- 


(  872; 
L'étude  du  droit,  selon  celle  mélhode,  durera  deux  ans. 
L'autre  méihode  en  prendra  trois  :  l'élève  lira,  sans  en 
omettre  aucun,  lous  les  similia  d'Accurse;  il  en  dressera 
des  lisles;  de  plusieurs  similia,  il  déduira  les  règles  géné- 
rales et  les  exceptions  générales,  et  les  classera  dans  Tordre 
qu'il  jugera  bon.  Il  y  pourra  joindre  alors  les  interpréta- 
tions de  Bariole,  de  Jason,  de  Dccius  eld'Alcial  (1).  On  le 
voit.  Tune  et  l'aulre  de  ces  mélhodes  supposent  et  exigent 
de  la  part  de  l'élève  un  travail  original  et  personnel.  Je  ne 
sais  si  cette  lettre  marque  le  dernier  degré  du  développe- 
ment de  Lorioz;  peut-être  ses  écrits,  comme  la  tradition,  le 
montrent-ils  plus  avancé.  Mais  ce  qui,  dans  la  leltre, 
annonce  bien  Tliomme  de  la  science  réformée,  c'est  celle 
indépendance  qu'il  veut  inculquer  à  l'élève,  et  ce  Irait  fut 
bien  pour  quelque  chose,  sans  doute,  dans  le  méconlenle- 
ment  que  lui  témoignaient,  quelques  années  plus  lard,  les 
professeurs  routiniers  de  Leipzig(2).  Le  temps  qu'il  assigne 


litJa  habueris,  eo  quo  dixi  ordine  redacta,  poteris  his  habita  seriei  tuae  ratione 
doctorum  commentarios  annectere,  sed  potissimum  (si  rem  absolutam  velis)  in 
primis  eos  adjunges,  qui  tractatus  conscripsere,  quos  omnes  bibiiopola  quidam 
Lugduni  tribus  voiuminibus  recens  compegit.  »  L.  c,  p.  321.  Je  ne  sais  trop  de 
quel  recueil  Lorioz  veut  parler.  L'Oceanus  juris,  qui  a  paru  à  Lyon  en  io3o,  a 
neuf  volumes. 

(!)  «  Si  illius  (Accursii)  similia  (quae  ipse  vocat)  ne  uno  quidem  praetermisso 
diligentcr  excusseris,  facile  hune  tibi  parare  modum  poteris,  modo  illa  omnia 
similia  glossatim  nullo  ne  minimo  quidem,  ut  praedixi,  contempto  percurrcris. 
Et  ex  his  omnibus  in  charta  conscriptis  nedum  allegatis  générales  régulas  tibi 
conficias  ex  pluribus  simijibus.  Itemque  générales  exceptiones.  Quibus  interpre- 
lationes,  quas  praedicti  doctores  super  his  simiiibusfcccrunt  juxta  tuum  ordinem 
adjungas  vel  quoque  illas  praeleges,  si  fortasse  te  in  tuo  conficiendo  ordine  adju- 
vare  possint.  Hoc  pacto  tribus  annis  hune  secundum  docendi  modum  absolute 
adsequi  possem.  »  —  il  y  a  quelque  obscurité  dans  l'énumération  des  auteurs 
que  Lorioz  recommande;  il  n'est  pas  certain  s'il  les  recommande  à  propos  de  la 
première  ou  de  la  seconde  méthode. 

'2)  Comparez  Muther,  Zeitschrift  fur  Rechtsgeschichte ,  IV,  pp.  407,  408. 


(  873  ) 
aux  éludes  n'est  pas  moins  digne  de  remarque.  On  y  recon- 
naît aussi  le  novateur  qui  refusait  de  faire  son  cours  magis- 
tralement et  à  la  manière  italienne  (1).  On  sait  le  scandale 
qui  en  résulta.  Le  sage  Melchior  d'Osse  jugea  nécessaire 
de  s'élever  contre  ces  innovations  dans  le  testament  poli- 
tique qu'il  adressa  à  l'électeur  de  Saxe  :  «  Les  méthodes 
nouvelles,  dit-il,  égarent  les  élèves.  Elles  ne  leur  servent 
d'ailleurs  de  rien,  car  ils  n'y  apprennent  ni  les  gloses,  ni  les 
distinctions;  ils  n'y  aiguisent  pas  leur  jugement;  ils  étu- 
dient bien  les  lieux  communs,  mais  ils  ne  savent  pas  se 
défendre  lorsqu'un  vrai  maître  les  serre  un  peu  (2).  Ils 
restent  ainsi  de  pauvres  bouche-trous,  et  bien  peu  d'entre 
eux  peuvent  devenir  vraiment  doctes...  Qu'on  établisse 
donc  pour  la  jeunesse  des  docteurs  qui  professent  comme 
ont  professé  les  anciens  et  excellents  hommes  Reynier, 
Bartole,  Balde,  Cynus,  Dynus,  Alexandre,  Jason,  Décius  et 
autres  (5).  » 

IL 

A  côté  de  cette  littérature  qu'on  peut  Bp\ie]er  pratique , 
on  en  trouve  une  autre,  plus  ambitieuse,  dont  les  auteurs 
ne  se  bornaient  pas  à  mettre  l'étude  des  sources  à  la  place 
des  énormes  commentaires,  mais  prétendaient  remanier 


(t)  Voyez  mon  étude  sur  Nicolas  de  Bruxelles,  Bulletin  de  l'Académie, 
tom.  XXXVIII,  p.  628. 

(2)  C'est-à-dire  :  ils  peuvent  acquérir  la  connaissance  des  arguments,  mais  ils 
ne  savent  pas  s'en  servir  parce  que  la  dialectique  leur  fait  défaut.  C'est  ainsi  qu'il 
faut  entendre  ces  paroles  de  Melchior  :  «  Werden  wohl  locales,  kônnen  aber 
das,  so  sic  lernen,  .  .  .  nicht  vertheidigen.  » 

(3)  Civilistisches  Magazin  de  HUGO,  II,  232-237.  MUTHER,  à  l'endroit  cité 
Doctor  Johann  Apell,  64,  65. 

2™"  SÉRIE,  TOME  XL.  56 


(  874  ) 
les  sources  elles-mêmes,  afin  de  leur  donner  une  forme 
meilleure. 

Un  passage  du  traité  De  oratore  (1)  devait  jouer  un 
grand  rôle  dans  ces  tentatives.  Cicéron  place  dans  la  bouche 
de  Crassus  les  paroles  suivantes  : 

«  Si  enim  aut  mihi  facere  licuerit  quod  jam  diucogito, 
mit  alius  quispiam  aut  me  impedito  occuparit  aut  mortuo 
e/feceritj  ut  primiim  omne  jus  civile  in  gênera  digérât, 
quae  perpauca  sunt,  deinde  eorum  generiim  quasi  quaedam 
memhra  dispertiat,  tum  j)ropriam  cujusque  vim  definitione 
declaretj  perfectam  artem  juris  civilis  habebitis,  magis 
magnam  atque  uberem,  quam  diffîcilem  atque  obscu- 
ram.  » 

«  On  crut  savoir  alors,  dit  M.  Bluhme  (2),  comment  le 
droit  devait  être  exposé.  On  se  demanda  si  les  livres  de 
Justinien  répondaient  à  ce  que  Ton  croyait  être  autorisé  à 
exiger,  et  Ion  trouva  que  non.  »  Guillaume  Budé  se  pro- 
nonça dans  ce  sens  dès  Tan  lo08.  On  se  mit  à  critiquer, 
soit  l'ordonnance  des  livres  et  des  parties,  soit  celle  des  lois 
dans  chaque  titre.  On  essaya  de  systèmes  nouveaux.  Mais 
cette  tendance  rencontra  une  opposition  énergique,  dans  le 
sein  même  de  l'école  élégante.  Plusieurs  des  membres  de 
cette  école,  et  des  meilleurs,  craignaient  que  ces  innova- 
tions ne  fissent  disparaître  les  traces  du  passé,  au  préjudice 
de  l'interprétation  historique  des  jurisconsultes;  d'autres 
prévoyaient  que  les  difficultés  provenant  des  changements 
apportés  à  l'ordre  traditionnel   et  connu  feraient  tort  à 


(1)  De  Oratore  I,  XLII,  190.  —  L'ouvrage  perdu  de  Cicéron  De  jure  civili  in 
artem  redigendo  a  fait  l'objet  d'un  travail  excellent  de  Dirksen  (Académie  de 
Berlin,  '1842.  Hinterlassene  Schriften  I,  1871). 

(2)  Zeitschriftfur  geschichtliche  Rechtswisseuschaft,  IV,  p.  379. 


(  875  ) 
l'élude  immédiate  des  sources.  Selon  d'autres  enfin,  Jusii- 
nien  a  exécuté  de  point  en  point  le  programme  de  Cicéron; 
sa  compilation  bien  comprise  satisfait  à  toutes  les  exigences 
possibles  d'ordre  et  de  méthode;  mais  il  la  faut  bien  com- 
prendre (1).  Le  plus  connu,  parmi  les  auteurs  qui  ont  (avec 
maintes  divergences)  soutenu  cette  thèse,  est  Joachim 
Hoppers  (2).  L'un  des  premiers,  le  premier  peut-être,  et 
probablement  le  plus  enthousiaste,  fut  un  docteur  régent 
de  l'Université  de  Caen,  en  Normandie,  aussi  connu  comme 
linguiste  (5),  Jean  de  Drosay,  seigneur  de  Sainte-Marie, 
dont  la  théorie,  développée  dans  ses  leçons,  n'a  été  com- 
muniquée au  grand  public  qu'après  sa  mort. 


IIL 


Je  n'ai  de  renseignements  ni  sur  la  naissance  de  Jean  de 
Drosay.  ni  sur  son  décès,  lequel  ne  peut  être  postérieur  à 
iS4o  et  n'est  pas  antérieur  à  lo43  (4).  Je  crois  sa  famille 


(-1)  Bluhme,  à  l'endroit  cité,  p.  381  et  suivantes. 

(2)  Dans  l'excellent  traité  intitulé  Seduardus ,  sive  de  vera  jurisprudentia, 
au  livre  IV.  Voyez  notamment  le  titre  14...  «  Recta  ratio  videtur,  ut  prout  quisque 
liber  juris  et  quo  ordine  scriptus  est,  ita  sit  exponendus.  » 

f8)  On  cite  souvent  ses  Grammaticœ  quadrilinguis  partitiones  in  gratiam 

puerorum Paris ,  Wecliel,  4544.  Il  semble  qu'il  avait  aussi  composé  une 

grammaire  française  .  V.  p.  'lo4  de  la  grammaire  quadrilingue. 

(4)  HuET  l'appelle  Drosay,  et  c'est  ainsi  que  s'orthographie  aujourd'hui  le  vil- 
lage du  même  nom.  D'autres,  ainsi  La  Chesnaye  des  Bois,  appellent  cette  famille 
Drosey,  d'autres  encore  Drossey  ou  Drozay.  Huet  ne  consacre  à  notre  juriste  que 
quelques  lignes  ;  la  biographie  Hoefer,  dix  ;  M.  Cauvet,  M.  Frère  moins  encore. 
SERViN,LECERF,la  biographie  Michaud  ne  paraissent  pas  le  connaître.  M.  Lalanne 
le  mentionne  comme  grammairien  d'après  La  Monnoye.  Le  privilège  royal  de  la 
Méthode  de  Drosay,  livre  posthume,  est  du  4  juin  1544.  Le  titre  porte  1545.  — 
Drosay  a  daté  des  Ides  de  septembre  4542  l'avant-propos  de  sa  grammaire  qua- 
drilingue. Cette  grammaire  a  paru  en  1544;  rien  n'indique  qu'il  fut  déjà  mort 
lorsqu'elle  a  été  imprimée. 


(  876  )        • 
anoblie  par  office;  elle  paraît  avoir  tenu  un  rang  hono- 
rable dans  sa  province  (1). 

J'ignore  où  Drosay  fit  ses  études  et  où  il  prit  ses  degrés. 
Sa  haute  culture  littéraire  est  attestée  par  chaque  page  de 
sa  méthode.  Sa  grammaire  aussi  en  fait  foi;  il  s'y  montre 
versé  dans  l'hébreu  et  le  grec,  non  moins  que  dans  le  latin 
et  le  français  ;  quelques  passages  écrits  en  sa  langue  mater- 
nelle ne  sont  dépourvus  ni  de  style  ni  de  vigueur.  J'en 
citerai,  comme  spécimen,  la  définition  de  la  nature  et  du 
but  de  la  grammaire. 

«  La  grammaire,  dit-il,  enseigne  quatre  choses  :  la  façon 
»  d'escrire,  la  manière  de  Hre,  la  raison  de  dire  et  Tordre 
»  de  parler. 

»  La  première  partie  besongne  aux  letres  ;  la  seconde  aux 
»  syllebes  ;  la  troisiesme  aux  dictions  et  la  quatriesme  aux 
»  oraisons. 

»  Les  fins  de  chascune  partie  sont  bien  escrire,  plaisam- 
»   ment  lire,  sçavoir  la  propriété  des  dictions  ;  et  cognoistre 


(i)  Un  Jean  Drosey,  qui  vivait  encore  avec  sa  femme  en  l'an  1428,  était  notaire 
et  secrétaire  royal.  C'est  probablement  à  lui  que  notre  auteur  fait  allusion  en  ces 
termes  :  «  Mihi  jucunda  est  recordatio  avi  et  proavi  mei,  quorum  hic  Carolo 
régi  VI  Magister  scrinioae  fuit,  ille  autem  Carolo  VU,  a  libellis  et  sub  North- 
manniae  Seneschatlo  praeses  Rothomagensis ,  quorum  mihi  adhiic  sunt  domi 
libri  membranis  descripti,  singulis  i7iitiis  aureis  litteris  illustratis.  »  Methodus, 
pp.  59, 60.  Le  chartrier  de  Saint-Pierre-sur-Dives  mentionne  un  Jeau  de  Drozay, 
Ecuyer,  Seigneur  de  Sainte-Marie-aux-Anglais,  qui  peut  avoir  été  le  père  du  pro- 
fesseur ;  il  siégeait,  en  1483,  avec  le  Sénéchal  de  l'abbaye  et  d'autres  écuyers  pour 
juger  divers  criminels.  Mémoires  de  la  Société  des  antiquaires  de  Normandie, 
VII,  I,  p.  261.  Un  autre  Jean  Drozay,  seigneur  de  Sancey  et  de  Beaucoudray, 
épousa,  vers  1S30,  Marguerite  de  Murdrac.  Ce  n'était  probablement  pas  le  nôtre, 
qui  s'intitule  Samarianus.  Vertot  mentionne  un  Jacques  Drosey  de  Sainte-Marie, 
reçu  chevalier  de  Malte,  le  30  juillet  1631.  La  Chesnaye  des  Bois  donne  les 
armes  de  la  famille  Drosey  :  d'azur  au  chevron  d'argent  chargé  de  six  coquilles 
de  sable  et  accompagné  de  trois  croissants  d'or. 


(877) 

»  l'ordre  convenant  des  oraisons.  Le  but  et  ce  àquoy  tend 
»  toute  la  grammaire,  est  sçavoir  bien  parler  et  composer, 
»   juger  de  tous  autbeurs  et  les  exposer. 

»  Grammaire  doncques,  est  une  certaine  raison  et  ma- 
»  nière  de  parler  et  composer,  c'est  a  scavoir  que  les 
»  autbeurs  ont  gardée.  Et  est  ainsi  appellée  de  lignes  ou 
»  letres  premiers  comencemens  de  cest  art,  pourceque 
»  aux  Grecz  ce  mot  rp^.'^i^'?  signifie  ligne,  et  ce  mot 
»   xpa^pa  leire. 

»  Or  ceste  manière  Dieu  aidant,  sera  quasi  pourtraicte 
»   en  ce  petit  livret » 

Peut-être  Drosay  a-t-il  assisté  aux  leçons  de  médecine 
du  célèbre  Jacques  Dubois,  avec  lequel  il  avait  plus  d'un 
point  de  contact  en  sa  double  qualité  de  philologue  et  de 
méthodiste  (1). 

Il  semble  que  Drosay  ait  commencé  d'enseigner  à  Caen 
en  1529  (2).  En  effet,  dans  sa  préface  De  ratione  docendi 
immiitataf  que  je  crois  être  de  1558  ou  de  1  oo9,  postérieure 
par  conséquent  de  cinq  années  au  moins  au  discours  de  ve- 
tere  ac  noviliajurisprudentia  de  Bérauld,  il  dit  professer  le 


(I)  «  Quemadmodum  enim  admirabilis   ille   medicus  Jacobus   Sylvius,  cum 

novissime  Parisiis  Galeni  libros  exordiutur  de  sanitate  tuenda »  (p.  460.) 

—  «  Ut  ab  Sylvio  ipso  alias  audivi.  cum  Galeni  libros  de  sanitate  tuenda  Parisiis 
praelegere  inciperet.  »  (p.  69.)  —  C'était  avant  le  voyage  de  Dubois  à  Montpel- 
lier, qui  eut  lieu  en  lo30.  La  célébrité  de  Dubois  attirait  beaucoup  de  monde. 
L'auteur  de  la  Grammaire  quadrilingue  devait  sympathiser  avec  l'auteur  de 
VIsagoge  in  linguam  gallicam  et  du  traité  De  medicinae  ordine  et  ordinis 
ratione.  Drosay  cite  également,  dans  sa  grammaire,  la  grammaire  de  Sylvius. 

[2j  II  enseignait  le  droit  civil,  c'est-à-dire  le  droit  romain.  Les  cours  de  droit 
romain  avaient  été  abolis  à  Caen  en  1433,  parce  que  «  ledit  estude  ne  serait  utile 
pour  le  pays  de  Normandie,  qui  est  tout  réglé  par  coustumes,  »  Cf.  Bulaeus,  Hist. 
univ.  Paris.  V,  426.  —  Ils  avaient  donc  été  rétablis.  En  l'an  do38  ou  1539, 
Drosay  faisait  un  cours  de  droit  public  (romain).  P.  io8  :  «  Hoc  autem  (anno)  quo 
publicum  jus  praelegimus.  » 


(  878  ) 

droit  civil  dans  cette  académie  depuis  environ  dix  ans  (1). 

Ce  fut  à  ce  moment  qu'il  résolut  de  changer  de  méthode, 
d'adopter  l'enseignement  nouveau  «  qu'a  prescrit,  il  y  a 
»)  mille  ans,  Justinien  lui-même,  et  que  développent 
y>  aujourd'hui  dans  leurs  élégants  écrits  Budé,  Alciat, 
»  Zasius,  Cantiuncula ,  Nicolas  de  Lescut,  Ferrarius, 
»   Hegendorphinus,  Oldendorp  et  Baron  (2).  » 

Dans  la  préface  générale,  placée  en  tête  du  livre,  laquelle 
me  paraît  être  de  1543,  notre  auteur  dit  qu'il  est  voué 
depuis  quatorze  ans  à  «  cette  très-salutaire  profession  (o).  » 
Les  matériaux  de  son  enseignement,  ses  cahiers  de  diver- 
ses dates,  forment,  avec  quelques  pièces  qui  y  sont  inter- 
calées, le  volume  assez  indigeste  dont  je  veux  essayer  de 
donner  une  idée,  d'après  la  première  édition,  que  j'ai 
seule  sous  les  yeux.  Drosay  mourant  en  avait  confié  à  un 
ami  le  dépôt  et  la  publication  (4). 

(1)  «  Cuin  autem  jus  ipsum  civile  annisjamplus  miuus  deceni  iu  hac  nostra 
florente  academia  vulgari  scholarum  more  professus  fuerim,  .  .  »  (p.  159)  — 
Cette  préface  est  un  discours  aux  étudiants ,  à  l'ouverture  du  cours  sur  le  Code  de 
Justinien.  Or,  il  ressort  d'un  avant-propos  adressé  au  lecteur,  que  \ Économie  des 
Pandectes  de  Baron  avait  paru  au  moins  trois  ans  auparavant,  et  l'Économie  est 
de  1535. 

D'autre  part.  Drosay  dit  dans  ravant-4)ropos  de  sa  Grammaire  quadrilingue . 
adressé  «  Puerorum  praeceptoribus  »,  que  l'idée  lui  en  est  venue  eu  instruisant 
dans  les  langues  ses  petits-fils  ou  ses  neveux  :  «  Cum  rationem  quandam  expedi- 
tissimam  exquirere,  qua  nepotes  cliarissimos  in  linguis  instituerem.  »  —  Si  l'on 
ne  traduit  pas  nepotes  par  neveux,  il  faut  admettre  que  Drosay  a  commencé  tard 
l'enseignement  du  droit. 

(12)  «  Novus  autem  docendi  modus  is  erit.  qnem  nobis  ante  mille  anuos  orationi- 
bus  suis  plane  divinisipse  juris  author  praescripsit,  et  hodiejam  clarissimi  multi 
viri  scriptis  suis  elegantissimis  effinxerunt  veluti  Budaeus,  Alciatus.  Zazius,  Can- 
tiuncula, Nicolaus  a  Scuto,  Ferrarius,  Hegendorphinus,  Oldendorpius  et  Aeguina- 
rius.  »  ip.  lo9.) 

(3i  P.  9  : «  Et  ego  huic  saluberrimae  profession!  a  quatuordecim  jam 

annis  consecratus  sim.  » 

(4j  Épitredédicatoirc  d'ANDRÉ  GiNOUX,  Andréas  Ginosius  Sauctambrosiensis. 
Vovez  les  notes  suivanles. 


(  879  ) 

IV. 

Le  titre  de  ce  livre  posthume  annonce  clairement  la 
thèse  qui  y  est  posée  et  soutenue.  Le  voici,  tout  au  long, 
d'après  la  première  édition  : 

Juris  Miicersi  Jusiinianea  Methodus,  olmi  a  Cicérone 
optimo  juris  artifice  praescripta,  imnc  Dei  munere  veluti 
postliminio  revocata,  per  D.  Johmmem  Drosaeiim  Sama- 
rianum,  juris  utriusque  antecessorem ,  apud  Cadomum 
celeberrimam  Northmanorum  Academiam  (1). 

André  Ginoux  de  Saint-Ambroise  donne  quelques  ren- 
seignements sur  l'origine  de  l'ouvrage  dans  son  épître 
dédicatoire  adressée  à  l'illustre  et  infortuné  Spifame(2), 
et  Drosay  en  refait  le  récit  dans  sa  préface.  Il  voyait  Justi- 
nien  se  vanter  d'avoir  rédigé  le  droit  comme  Cicérofi 
l'avait  voulu  faire  (o).  Or,  il  ne  pouvait  croire  que  Justi- 
nien  se  fût  vanté  sans  juste  motif.  Il  s'appliqua  dès  lors, 
de  toutes  les  forces  de  son  esprit,  à  la  recherche  de  cet 
«  art  »  de  Justinien  et  de  Cicéron ,  et  n'eut  trêve  ni  repos 
qu'il  ne  l'eût  retrouvé.  Cet  art  constitue  la  vraie  méthode, 
pista  juris  docendi  ratio,  préférable  à  toutes  celles  que  les 
modernes  ont  forgées.  Grande  a  dû  être  la  colère  divine, 


(1;  Parisiis,  apud  Maturinum  Dupuys,  sub  signo  hominis  sylvestris,  et  insigni 
Frobeiiiano,in  via  ad  divum  Jacobum,  MDXLV.  Cum  privilegio  regio  ad  quinquen- 
nium.  —  Bluhme  ne  connaissait  pas  cette  édition  lorsqu'il  a  publié  son  excellent 
travail  sur  l'ordre  des  fragments  dans  le  Digeste,  Zeitschrifl  fïir  geschichtliche 
Rechtswissenschaft,  IV,  pp.  207-472.  Autres  éditions  :  Cologne,  1564;  Paris,  4565  . 

(2)  Ginoux  était  alors  précepteur  des  jeunes  Hurault,  qu'il  appelle  «  Hiiraul- 
tios  summae  spei  adolescentes  meae  curae  commissos.  »  Un  de  ses  élèves  est 
devenu,  si  je  ne  me  trompe,  le  célèbre  chancelier  Cheverny  (1528-1599),  qui  ne 
parle  pas  de  Ginoux  dans  ses  Mémoires.  On  connaît  la  lugubre  histoire  de 
Jacques  Spifame,  qui  fut  décapité  à  Genève ,  en  1566,  pour  adultère  et  pour  faux. 

(3,  Épître  dédicatoire  de  Ginoux,  p.  6  :  ...  «  Cum  Justinianum  saepe  glorian- 
tem  legisset,  jus  se  universum  in  artem  quandam  redegisse,  atque  adeo  tandem 
praestitisse,  quod  Cicero  se  facturum  reccperat » 


(  880  ) 
qui  l'a  cachée  si  longtemps  ;  grande  est  la  miséricorde 
divine,  qui  l'a  enfin  révélée  pour  le  plus  grand  bien  de 
l'Etat,  lequel  sera  restauré  bientôt,  et  des  particuliers, 
dont  les  procès  seront  décidés  dorénavant  avec  moins  de 
peine  et  moins  de  frais  (1)!  Drosay  déclare  avoir  été  mis 
sur  la  voie  de  sa  découverte  par  le  passage  où  Justinien 
parle  de  la  nature  et  de  la  vertu  des  nombres  (2) ,  et  par 
un  petit  traité.  De  aperiendis  studiis,  qu'un  ami  lui  avait 
donné,  traité  contenant  une  méthode  très-commode  par 
laquelle  les  jeunes  gens  peuvent,  avant  d'avoir  accompli 
leur  vingt  et  unième  année,  acquérir  aisément  toutes  les 
sciences  (5).  Il  entreprit  là-dessus  la  lecture  du  Code;  il  en 
saisit  Tordonnance,  avec  laquelle  il  compara  celle  des  Insti- 
tutes,  des  Pandectes  et  des  Novelles.  Lorsqu'il  écrivait  sa 
préface    générale,   quatre    ans   s'étaient   écoulés    depuis 


(1)  i>/e///oc?z<5,  pp.  9  à  10 «  Magna  profecto  fuit  adversus  mortales  ira 

divina,  quod  talis  hactenus  latuerit  methodus,  a  viris  in  toto  orbe  dignitate,  literis, 
et  rerum  cognitione  excellentibus,  imperiali  auctoritate,  sic  elaborata  :  unde 
ubique  litium  tantum  incendium  accensum  est  :  Respublica  pêne  interiit,  singulis 
quae  sua  sunt  tantum  curantibus.  Contra  autem  summa  Dei  misericordia  est,  pro 
qua  gralias  ei  maximas  agere  debemus,  quod  eam  quoque,  ut  alias  omnes  bonas 
artes,  nostris  temporibus  revelare  dignatus  sit,  inde  spe  bona  concepta.  quod 
brevi  Respublica  instaurabitur,  et  minoribus  posthac  inipensis  ac  laboribus 
lites  decidentur.  » 

(2)  Constit.  Tanta,  §  1.  Methodus,  p.  il  :  «  Praeterea  JusLiniani  locus  ille  de 
natura  et  arte  numerorum,  .  .  .  tam  alte  auimo  meo  insedit,  ut  ante  non  quie 
verim,  donec  ex  praelecta  Jordanis  et  Orontii  quoque  arithmetica,  ejus  scnsum 

aliquem  assecutus  fuerim »  —  Oronge  Fine,  de  Briançon,  à  la  fois 

homme  politique  et  mathématicien.  Sa  Protomathesis  a  été  imprimée  à  Paris  en 
1382.  Les  dix  livres  d'arithmétique  de  Jordanus,  annotés  par  Lefévre  u'Etaples. 
ont  paru  en  ii96  ;  d'autres  ouvrages  de  lui  en  lo83-lo36. 

(3)  Ibid.  :  «  Intcrea  cujusdam  libellus,  qui  de  apeiiendis  studiis  inscribitur 
ad  me  amici  dono  pcrvenit,  qui  rationem  commodissimam  aperit,  qua  possent 
adolescentes  ante  vicesimum  primum  annum  omne  genus  sibi  disciplinarum 
facile  comparare,  si  primum  earum  professorcs  horis  dislinctis  gênera  omnia  et 
species  continuo  summatim  omnibus  cxponcrent,  dcinde  minutiora  propriis  unus- 
quisque  discipulis  praelegcre..  »  Je  ne  sais  quel  était  ce  merveilleux  opuscule.  Ce 
ne  peut  guère  être  le  Liber  de  lUterarum  ludis  rccte  aperiendis  de  Stlrm  ;1o39). 


(881  ) 

lors,  ce  qui  s'accorde  avec  ce  que  j'ai  dit  plus  liaut  (I). 

On  me  dispensera,  j'espère,  denumérer  les  étapes  par 
lesquelles  Drosay  dit  être  passé  pour  arriver  à  la  convic- 
tion que  Justinien  a  réalisé,  avec  un  art  admirable,  le  projet 
de  Cicéron,  et  que  les  titres  de  sa  compilation  constituent 
un  traité  suivi,  composé  méthodiquement  et  didactique- 
ment  :  «  titulorum  traclatiis  perpétuas  esse  orationes,  génère 
(UdascaUco  compositas  (2).  »  Ces  confessions  ingénues 
peuvent  paraître  un  peu  puériles.  Cependant,  on  y  voit 
poindre  le  germe  de  la  découverte  brillante  qui  a  fondé , 
quatre  siècles  plus  tard ,  la  réputation  de  Bluhme  (3).  On  ne 
peut  s'empêcher  de  respecter  le  besoin  d'ordre,  de  clarté,  de 
méthode,  de  logique  qui  se  trahit  partout  dans  ce  livre  si 
médiocrement  agencé;  et  l'on  sait  gré  à  l'auteur  de  la  peine 
qu'il  se  donne,  pour  peu  qu'on  réfléchises  combien  il  a  fallu 
de  tâtonnements  stériles  en  apparence  pour  réaliser  des 
progrès  qui  nous  paraissent  aujourd'hui  faciles  et  naturels. 

Je  ne  suivrai  pas  non  plus  Drosay  dans  les  paratitles, 
arguments,  commentaires  qu'il  donne,  toujours  avec  l'in- 
tention déclarée  de  démontrer  la  réalité  de  sa  découverte, 


(4)  Pp.  41  à  12. 

(2)  Pp.  10  à  13.  «  Haec  itaque  ars  est  nietliodusque  Justinianea,  ad  Ciceronis 
omuino  praescriptum  elaborata  :  quam  qui  probe  aperuerit,  veluti  Cneius  aller 
Flavius  cornicum  oculos  confixerit,  jure  sic  omnibus  pervio  reddito  (p.  -12).  «  — 
P.  227  :  ...  a  Hac  imperatoria  et  Ciceroniana  methodo  nune  Dei  gratia  veluti 
postliminio  revocata,  quicquid  inter  duos  asseres  uno  volumine  continetur,  unico 

prendum  intuitu  exhibemus Quod  si  seniel  videres,  in  te  sui  amoreni  plane 

mirabilem  haec  juris  Idea  pulcherrima  statim  excitaret.  Hac  via  sane  regia,  et 
omnium  meo  judicio  faciilima,  juris  universum  ordinem  clarissime  dispicias.  In 
Pandectis  originem,  in  Codice  processum,  in  Novellis  consummationem  et  in 
Institionibus  omnium  summam  quandam  brevissimam.  » 

(3)  Voir  la  dissertation  de  Bluhme  dans  la  Zeitschrift  fur  geschichiliche 
Rechtswissenschaft ,  citée  plus  haut.  Bluhmk  juge  bien  Drosay  :  «  D.  zerarbeitet 
sich    grossentheils    mit    vieleni    Fleisse    an    der    Ausfuhrung    ungeniessbarer 

Ideen An  einzeluen  grundlichen  Bemerkungen  fehlt  es  iibrigens  nicht.  w 

A  l'endroit  cité,  p.  385.  —  Voyez  HuGO,  Geschiclite  des  romischen  Redits  seit 
Justinian,  p.  277  de  la  3«  édition. 


(  8S2  ) 

sur  les  Institutes  (1),  sur  les  sept  parties  ou  Wnes  du 
Digeste,  à  grands  traits  et  comme  à  vol  d'oiseau,  pour 
manifester  ce  qu'il  appelle  «  generum  digestio  et  membro- 
rum  parlilio  (2),  »  sur  les  trois  préfaces  de  Justinien  (5) , 
sur  l'épître  d'Haloandre  (4)  et  même  sur  l'épigraphe  grec 
de  la  Florentine  (5);  puis,  en  entrant  dans  le  détail,  sur 
quelques  litres  des  Pandectes  (6)  ;  puis  encore  sur  le  Code 
en  général  (7)  et  sur  le  prologue  du  Code  en  particulier, 
avec  analyse  des  diverses  périodes  oratoires  des  trois  con- 

(1)  Pp.  46  à  21.  Il  termine  par  ces  mots  :  «  Haec  est  Institutionum  civilium 
œconomia  pulcherrima,  quam  si  animo  conceptam  tenueris  Pandectas  facillime 
intelliges.  » —  Il  recommande,  pour  les  Institutes,  un  ouvrage  absolument  ignoré 
aujourd'hui:  «  tabulam  D.  Ranchicurii  subjecimus,  ante  quinquagiuta  annos, 
licet  huius  tabularii  recentiores  non  meminerint,  typis  excussam,  quod  ad  eam 
lectorem  in  hac  methodo  saepe  remitlimus.  »  J'ai  cherché  vainement  ce  tableau, 
qui  doit  avoir  été  imprimé  vers  1490.  L'auteur  n'est  plus  connu.  On  peut  conjec- 
turer qu'il  s'appelait  Ranchicourt.  Or,  un  Pierre  de  Ranchicourt,  fils  de 
Jean,  qui  était  économe  du  comte  Jean  II  de  Nevers,  a  été  protonotaire  aposto- 
lique, chancelier  d'Amiens,  chanoine  de  Cambrai,  archidiacre  de  Valenciennes , 
enfin  évèque  d'Arras,  oii  il  est  mort  en  1499.  Peut-être  est-il  l'auteur  de  ce  tableau, 
duquel  Drosay  dit  que  les  auteurs  récents  ne  le  mentionnent  plus. 

{%  Pp.21àoO. 

(3)  Pp.  oO  à  61  :  «  Quarumeîiam  œconomiam  etvarios  usus  indicavi ,  quod  meo 
judicio  studiosis  et  excitandis  et  praeparandis  maxime  conducant  et  clarissime 
Pandectarum  methodum  aperiant.  » 

(4)  Pp.  61  à  62.  ...  «  Quo  doctissimi  viri  votum  sanctissimum  et  pios  labores 
studiosi  intelligentes,  libentius  hanc  juris  resiitutionem  am  plectantur.  » 

(5)  Pp.  62  à  64:  «  Ut  nihil  excitandis  studiosis  desit  !  » 

(6;  De  Justicia  et  jure,  pp.  63  à  76;  De  Origine  juris,  pp.  76  à  78;  De  legibus, 
pp.  78  à  88;  De  Constitutionibus  principum,  pp.  89  à  90;  De  statu  homiiium, 
pp.  90  à  95;  De  iis  qui  sui  vel  alicui  juris  sunt,  pp.  95  à  403  ;  De  adoptionibus 
pp.  403  à  425;  puis  viennent  deux  pages  et  demi  d'  «  accommodation  »  communes 
aux  trois  titres  précédents;  puis  De  divisione  re?-MHj,pp.  426  à  428;  puis  deux 
paratitlcs  sur  tous  les  titres  relatifs  aux  magistrats,  pp.  428  à  432;  puis  Dejuri- 
dictioue,  pp.  432  à  VAH;Dejure  Jisci,^]).  438  à  443;  De  captivis,  pp.  443  à  451; 
De  castrensi  peculio,  pp.  454  à  457. 

(7)  Juslinianei  codicis  générale  argumentum  ejusque  ad  Pandectas  pcr  sin- 
gulas  partes  co//a^/o,  pp.  461  à  465;  se  terminant  par  ces  mots  adressés  aux 
étudiants  :  «  Hoc  générale  est  argumentum,  quod  tanquam  novae  meas  rationis 
primum  spécimen,  ideo  nunc  praemitfere  cupicbam.  quo  librum  pulcherrimum, 
ac  simul  utilissimum  a  me  sicutcumque  excitati  et  praeparati,  postea  legeretis 
alacrius,  inlellegeretis  facilius,  et  memoria  teneretis  fidelius.  » 


(  885  ) 

stitulions  Haec  quae  neccssai'io,  Summa  reipublicae  et 
Cordi  (1),  sur  les  deux  premiers  livres  du  Code  (2),  sur  le 
droit  publie  confeiui  au  premier  et  aux  trois  derniers  (5) , 
enfin  sur  les  livres  des  fiefs,  en  dix  lignes  (4),  et  sur  les 
Novelles  en  deux  pages  (5). 

Je  crois  mieux  faire  en  me  bornant  à  signaler  certains 
traits  de  notre  auteur,  qui  me  paraissent  caractéristiques  : 
ils  ont  plus  de  prix  à  mes  yeux  que  les  explications  érudites 
de  mots  et  de  choses  où  il  se  complaît  et  qui  sont  parfois 
d'un  grammairien  plus  que  d'un  jurisconsulte  (6).  L'un  de 
ces  traits ,  c'est  sa  connaissance  parfaite  des  derniers   pro- 


(1)  Pp.  16fi  à  184. 

(%  Pp.  484  à  228  :  «  Argumenta  tam  specialia  quam  singularia.  » 

(8)  Pp.  228  à  237. 

(4)  P.  237.  Il  y  recommande  aux  élèves  Oldendorp  d'aborcl  puis,  quand  ils 
seront  plus  avancés,  Zasius,  enfin  Frédéric  Schenck  de  Tautenberg,  dont  le 
commentaire  récemment  publié  (lo37)  avait  eu  d'emblée  un  grand  succès  :  «  Lege 
prinmm  Oldendorpium.  deinde  Zazium,  postea  dictum  Friderichum  qui  vulgatam 
editionem  sequutus  est.  vir  alioqui  eloquentissimum.  » 

(3)  Pp.  237  à  238.  En  voici  la  pensée  finale  :  «  Haec  de  Jusliniani  Novellis  ad 
praesens  sufficiant.  quibus  suprema  quasi  manus  juri  civili  imposita  est,  ut  in  illis 

extet  postrema  constitutionum  civilium  emeudatio »  —  Suit  un  très-bon 

répertoire  alphabétique. 

(6)  On  lui  en  faisait  le  reproche.  Il  en  parle  et  y  répond  dans  sa  préface  au 

Code  de  Justinien  (p.  lo8) «  In  tyronum  autem  gratiam  uonnuUa  conscrip- 

simus,  quae  reserare  quidam  monebant,  quod  eorum  judicio  infra  juris  doctoris 
dignitatem  viderentur.  At  multorum  consilio  ea  nunc  relinquere  maluimus,  ut 
Justinianeae  compositionis  exemplum  in  posterum  diligentius  observandum  juve- 
nes  accipiant,  et  utilitatem  quam  inde  consequi  possunt,  perspiciant,  si  hoc  modo 
periodos,  cola,  et  commata  numerantes,  et  vocabula  praecipua  discutientes,  ora- 
tiones  universae  filum  et  ordinem  dispiciant.  Legum  materias,  ut  loquuntur.  seu 
theoricas  ant  doctrinas,  quas  post  Accursium  copiose  tradunt  Doctores,  a  nobis 
omissas  alii  caussantur.  At  ego  juris  artem  commodissimam,  a  nemine  quem 
legerim  hactenus  tractatem  ex  ipsis  manifesto  :  quae  primum  ex  ipso  textu  intégra 
scientia  ordine  suo  brevi  percipi  et  Accursium  postea  at  Doctores  omnes  cum 
libuerit,  facilius  intelligi  et  memoriae  mandari  possint.  Juris  praeterea  termines  a 
me  negligi  alii  falso  putant,  qui  me  cum  recentioribus  caeteris  doctissimis  viris 
légales  tantum  grammaticos  appellant.  At  nihil  ego  magis  conor,  quam  ut  generum 
et  membrorum  omnium  vocabula  prius  probe  explicata  juris  studiosi  habeant, 
ut  singulorum  postea  titulorum  definitiones  facilius  percipiant.  »  Cf.  p.  20o. 


(  884  ) 

grès  réalisés,  surtout  par  les  Allemands,  clans  Texposition 
philosophique  et  dans  la  méthode,  en  quoi  il  se  rattache 
aussi  au  groupe  nombreux  dont  j'ai  parlé  au  commence- 
ment de  cette  notice.  Un  autre  trait,  moins  original  peut- 
être,  mais  non  moins  intéressant,  c'est  l'esprit  national,  le 
patriotisme  scientifique  et  juridique  de  ce  connaisseur  de 
l'étranger  et  de  l'antiquité. 


V. 


Drosay  est  un  moderne,  tout  autant  que  l'était  Lorioz 
qui  écrivait,  à  peu  près  à  la  même  époque,  sa  lettre  à 
l'étudiant  d'Orléans.  11  a  reconnu  que  son  enseignement 
selon  la  mode  ancienne  était  peu  fructueux,  et  il  l'a  changé, 
ainsi  qu'on  l'a  vu  tout  à  l'heure  (1),  dans  le  sens  de  la 
brièveté,  de  l'élude  des  textes  et  d'une  forme  élégante  et 
rationnelle  (2).  Il  témoigne  du  respect  aux  Glossatenrs  et 


(1)  «  Cum  autem  jus  ipsum  civile  annis  jam  plus  minus  decem  in  hac  nostra 
florente  academia  vulgari  scholarum  more  professus  fuerim,  labores  vero  tantos 
paucis  adeo  intelligam  profuisse  eloquentissimorum  nostri  foelicis  seculi  inter- 
pretum  exemplo  provocatus,  consuetum  docendi  modum  nonnihil  immutare 
decrevi.  Si  enim  recentiores  ceterarum  artium  praestansissimi  professeras,  lin- 
guarum  et  bonarum  ariium  adjuti  cognitione,  qua  nostri  majores  temporis 
infœlicitate  viri  alioqui  acutissimi  erant  deslituti,  jam  suam  pêne  omnes  tradi- 
tionem  emendarunt,  cur  nobis  quoque  jurisconsultis  id  non  licebit,  ut  saltem 
postremi  omnium  resipiscamus,  qui  aliorum  duces  (si  authores  nosti'os  imitare- 
mur)  esse  debueramus  ?  »  p.  439. 

(2)  P.  228  :  «  Hanc  omnino  viam  restituere  academiis  affecto,  quam  dudum 
praescripserunt  ordiuatores  earum  sapientissimi,  ut  juris  quidem  tyronibus  lectu- 
ram  alii  textualem  facerent  :  iis  autem  qui  jam  provecti  esscnt,  unus  aut  alter 
cum  apparatu.  Quod  cum  ignoratione  docendi  praestare  non  possent,  confusanei 
quidam  rccitatores  verius  quam  doctores,  bonis  tamen  viris,  qui  nunc  bonarum 
litterarum  auxilio  totis  viribus  eam  conantur  adserere,  invidia  teterrima  detra- 
here  non  erubescunt,  »  —  Drosay  recommande  aussi  l'Histoire  de  Du  Rivail  et 
les  Vies  des  Jurisconsultes  de  RuTiLius.  Il  insiste  sur  la  nécessité  de  connaître 
l'histoire,  non-seulement  de  Rome,  mais  du  pays  où  l'on  doit  appliquer  les  lois 
romaines,  et  sur  l'utilité  de  la  géographie. 


(  885  ) 
aux  Docteurs  (1),  mais  sa  philosophie  est  celle  de  Mclanch- 
thon  et  de  Lefèvre  d'Étaples,  et  les  auteurs  de  droit  qu'il 
invoque  sans  cesse,  tout  en  les  combattant  quelquefois  sur 
des  points  spéciaux,  sont  non-seulement  les  Français,  tels 
que  Budé,  Baron  (2),  Longueval  (3),  Nicolas  de  Lescut  (4), 
Claude  Cotereau  (5),  mais  encore  et  surtout  les  Allemands 
qui  formaient  prceiscment alors  une  élite  de  grande  valeur: 
Apell,  dont  VIsagoge  posthume  venait  d'être  publiée  (6), 
Spiegel  (7),  Derrer  (8),  Hegendœrffer  (9),  Adam  Wer- 


(1)  Pp.  d3  à  -14  :  «  Quid  igitur  inutilia  erunt  excellentum  virorum  commentaria? 
superfluus  item  Accursius?  Nequaquam  pi'ofecto  sic  nobis  visum  fuit.  .  .  Boni 
certe  sunt.  ut  de  lege  ait  Apostolus,  si  qnis  bene  utatur.  ,  .  —  Nec  doctores  igitur 
nec  Accursium  destituimus,  sicuti  nos  quidam  falso  calummiantur  :  imo  magis 
stabilimus,  viam  aperientes,  quo  ipsis  commodissime  utaris,  sicut  nec  legem 
destruebat  Apostolus,  cum  fidem,  qua  lex  demum  impletur,  praedicaret.  » 

(2)  Baron,  duquel  Drosay  dit  qu'il  a  découvert  Vars  juris,  a  répondu  aux 
objections  de  Drosay  dans  un  tout  petit  opuscule  intitulé  :  Cavillorum  quœ 
lo-Drosœus  moriens  in  adversariis  niiper  reliquit  adversus  aliquot  hujus  œco- 
nomiae  locos,  dissolutio,  qui  est  imprimé  à  la  suite  de  VOEconomia,  dans  l'édition 
des  œuvres  de  Baron,  Paris,  4598,  tome  III,  p.  318.  Baron  s'adresse  aux  mânes 
de  Drosay  :  0  pie  Drosaei  spiritus  !  0  pii  mânes ,  etc. 

(3)  Le  commentaire  de  Longueval  sur  la  loi  hnperium  est  de  4539. 

(4)  Les  Actions  de  Lescut  sont  de  4537. 

(5)  Le  traité  De  Re  militari  de  Cotereau  est  de  4539. 

(6)  En  4540,  à  Breslau.  La  Methodica  dialectices  ratio  ad  jiirisprudentiam 
accommodata  a  paru  en  4535.  Jean  Apell  est  mort  en  4536.  Voyez  sur  Apell, 
la  savante  notice  de  M.  Muther,  Doc/or  Johannes  Apell,  Kœnigsberg,  4864. 

(7)  Jacques  Spiegel  n'est  pas  mort  avant  4546;  son  Lexique  a  été  imprimé  pour 
la  première  fois  à  Strasbourg  en  4538-4539.  Voir  ma  notice  sur  la  Nomenclatura 
jurisperitorum  àâïis  les  Bijdragen  voor  Regtsgeleerdheid  en  wetgeving^  iSIZ, 
p.  249,  et  suivantes;  et  le  remarquable  discours  rectoral  de  M.  de  Stintzing  (4875) 
sur  le  dicton  Juristen  bôse  Christen,  n.  6. 

(8)  Mort  en  1544  ;  le  premier  volume  de  la  Jurisprudentia  de  Derrer,  professeur 
à  Fribourg,  a  paru  à  Lyon,  en  4540.  Voyez  sur  Derrer  :  Schreiber,  Geschichte 
der  Albert  Ludwigs  IJniversitàt  zu  Freiburg,  II,  pp.  330  à  332. 

(9)  Christophe  Hegendoerffer,  mort  en  4540,  professeur  à  Francfort-sur- 
rOder  de  4535  à  4537.  Les  ouvrages  juridiques  de  cet  homme  distingué  ont  paru 
en  4535, 4537, 4539. 


(  880  ) 

ner  (1),  Oldendorp  (2),  Kling  (5),  Lagus  (4),  Ferrarius  (5), 
enfin,  naturellement,  Zasius  et  Cantiuncula.  Drosay  est  au 
fait  des  productions  les  plus  récentes  de  tous  ces  hommes 
qui  unissaient,  dans  des  mesures  diverses,  l'esprit  philoso- 
phique à  la  science  du  droit,  et  qu'on  peut  qualifier,  par 
excellence,  de  jurisconsultes  réformateurs.  Les  Italiens, 
juristes,  philologues,  antiquaires,  ne  lui  sont  pas  moins 
familiers  ;  il  allègue  aussi  des  Anglais,  tels  que  le  gram- 
mairien Thomas  Linacre  (6),  et  des  Flamands,  tels  que 
Josse  de  Clichthove. 

Je  sais  bien  que  l'unité  de  langue  rendait  plus  faciles 
alors  qu'elles  ne  le  sont  à  présent,  les  relations  entre  les 
hommes  d'étude  de  nations  différentes.  Mais  il  n'y  en  a 
pas  moins  quelque  intérêt  à  constater  combien  vaste  était, 
il  y  a  trois  siècles,  l'horizon  intellectuel  d'un  modeste  pro- 
fesseur de  Normandie. 

VI. 

Et  Drosay  était  bien  de  son  pays,  aimant  ses  bonnes 
villes  de  Rouen,  de  Caen,  de  Bayeux;  sa  très- florissante, 
très-sacrée   et   très -chère   académie  ;    sa    riche    province. 


(1)  Adam  Werner,  professeur  à  Heidelberg  de  149d  à  io37.  V.  Stintzing, 
Ceschichte  der  populàren  Litteratur,  p.  176. 

(2)  Jean  Oldendorp,  mort  en  lo67,  professeur  à  Cologne  et  Marbourg.  Son 
traité  De  formula  a  paru  en  lo38,  ïlsagoge  en  1539,  les  Actions,  les  Variae,  la 
Practica  en  1340, 

(3)  Melchior  Kling,  professeur  à  Wittenberg,niorten  1S71.  Ses  Enarrationes 
sont  de  154±  Voyez  sur  Kling,  iMuther  ,  dans  la  Zeitsclirift  fiir  Rcchtsyeschichte . 
IV,  pp.  438,  439."^ 

(4j  Conrad  Haas,  professeur  à  Wittenberg,  mort  en  1346.  La  pemière  édition 
de  sa  Methodica  juris  iractatio  est  de  1543. 

(5)  Jean  Eisermann,  mort  en  15o8,  professeur  à  Marbourg.  Ses  Commentaires 
aux  Institutes  et  au  titre  de  Regulis  juris  sont  de  1336,  le  traité  des  Appels,  etc., 
est  de  1342. 

(6)  Thomas  Lynacer,  né  en  4460,  mort  en  1324,  auteur  du  célèbre  traité  De 
emendata  structura  latini  sermouis. 


(  887  ) 

Il  évoque  avec  plaisir  les  souvenirs  de  sa  famille;  les 
allusions  locales  ne  manquent  pas  non  plus  dans  son  livre. 
La  classis  Scleucena  lui  rappelle  les  flottes  de  Dieppe  et  de 
Honfleur;  il  compare  les  deux  métropoles  de  la  Phénicic, 
Béryte  et  Tyr,  aux  deux  sièges  épiscopaux  de  son  diocèse, 
Caen  et  Bayeux  ;  et  à  propos  des  primats  d'Alexandrie,  il 
remarque  qu  on  pourrait  donner  le  titre  de  primats  de  Nor- 
mandie aux  citoyens  de  Rouen  (1).  Il  mentionne,  à  propos 
des  Maiumae,  la  coutume  de  porter  au  premier  jour  de 
mai  un  arbre  par  la  ville  (2). 

Ces  rapprochements,  qu'il  serait  aisé  démultiplier,  ne 
proviennent  point  d'un  caprice,  mais,  au  contraire,  d'un 
principe,  d'un  système  :  c'est  que  le  droit  romain  ne  doit 
point  être  étudié  comme  un  droit  mort  ou  étranger,  et  qu'il 
faut  Vaccommoder  à  l'état  et  à  l'usage  de  la  République  (3). 

De  là  des  accommodations,  qui  suivent  l'exposé  du  con- 
tenu des  titres  et  dans  lesquelles  Drosay  compare  le  droit 
de  Rome  à  celui  qu'il  a  sous  les  yeux.  Il  accommode  ainsi  à 
la  France  de  François  1%  les  règles  du  Digeste  qui  ont 
trait  à  l'état  des  personnes  et  il  trouve  que  cette  matière  a 
bien  changé  :  au  point  de  vue  de  l'état  respectif,  qu'il  oppose 
à  l'absolu,  il  constate  que  tout  le  monde  est  suijuris,  sauf 
les  moines,  qui  sont  serfs  des  abbés,  et  les  enfants  légitimes 
jusqu'à  leur  mariage,  qui  sont  soumis  à  leurs  parents;  il 


(1)  Lit.  C,  X,28:  De  Alexandriae primatibus.  Drosay, p.  '234. 

(2)  P.  235:  .  .  «  Error  est  ergonosti'orum  qui  existimantillud  esse  festum,  cum 
in  praescntem  cliem  quercum  Calendis  Maji  ludentes  in  urbem  juvenes  portant.  » 

(3)  123  :  ...  «  Quoniam  ex  Ciceronis  sententia,  juris  intcrpretatio  ad  Rci 
publicae  formam  usumque  forensem  accommodanda  est,  et  cognitio  (ut  quidam 
aitî  ad  actionem  transferenda » 

P.  166  :«  Accomodatio  vcro,  qua  leges  sic  prius  expiicatae,  ad  Rempublicam 
postea  nostram ,  usumque  forensem  accomodantur,  et  utilis  earum  usus  osten- 
ditur.  » 


(  888  ) 
constate  encore  qu'il  n'y  a  pas  en  France  d'adoption,  si  ce 
n'est  en  une  certaine  mesure  dans  le  monachisme  (1). 

Ailleurs  il  compare  les  patrices  aux  pairs  de  France,  le 
questeur  au  chancelier,  les  duumvirs  aux  maires  et  aux  pré- 
vôts. Il  applique  aux  relations  du  Roi  très-chrétien  avec 
l'Église  et  les  hérétiques  les  constitutions  du  premier  livre 
du  Code  (2).  Il  donne  aux  élèves  quelques  conseils  pratiques 
pour  acquérir  d'une  manière  indépendante  et  sûre  la  con- 
naissance simultanée  du  droit  romain  usuel  et  du  droit 
français  (5).  J'ai  parlé  de  son  patriotisme;  on  comprend  que 


(i)  P.  426:  «  Quod  ad  respectivum  altinet  omnes  quidem  sui  jnris  esse  viden- 
tur,  praeter  monachos,  qui  serviunt  abbatibus  :  ad  quos  servorum  materiam  trahi 
posse  docet  Inxocentius,  qui  ad  eam   rem   comprobandam  plerumque  adhi- 

betur ;  praeter  etiam  eos   qui  ex  justis  nuptiis  procrcantur.   quousque 

ducant  uxores  quos  sub  potestate  parentum  esse  hoc  evidenter  arguit,  quod  ipsos 
parentes  et  in  judicio  emancipare  soleant,  licei  talem  potestatem  in  suos  liberos 

non  habeant,  qualem  olim  Romani Et  banc  sententiam  tenebatD.RENATUS 

GuAiNERius,  doctor  Pictavensis  clarissimus.  Caeterum  adoptiones  in  hoc  regno 
non  permittuntur,  praeterquam  in  mouachismo,  ubi  reperire  est  imaginem  quan- 
dam  utriusque  adoptiouis  :  unde  ab  adoptione  ad  religionis  ingressum  argumcn- 
tum  trahi  poterit,  ut  plerumque  faciunt  doctores.  H  une  itaque  statum  in  hoc  libère 
Francorum  regno  solos  arbitror  monachos  usurpasse,  apud  quos  alios  videas  tan- 
quam  serves,  et  alios  tanquam  liberos  iniques,  et  dominicam  et  patriam  potesta- 
tem abbates  habere  constat.  Quod  jus  est  singulare  religionis.  »  Voyez  aussi  les 
autres  accommodations,  pp.  482  à  484,  203  à  205. 

(2)  V.  note  précédente. 

^3)  P.  483  :  «  Sic  autem  charceum  volumen  aliquod  satis  magnum  prœparan- 
dum  consulo,  ut  primum  illud  in  certos  libros  secundum  rerum  civilium,  quae 
sunt  in  usu,  summa  quaedam  gênera,  instar  Justinianis  Codicis  dividat,  deinde 
gênera  illa  in  média  seu  in  membra,  per  titulos  quosdam  suppartiat.  Tum  singu- 
lis  titulis  singula  capitula,  quse  in  usu  esse  cognoverit,  tam  ex  jure  Romano, 
quam  ex  patrio  decerpta  supponat.  Ita  tandem  perfectum  jus  civile  proprium 
habcbit,  sibi  magno  usui  postea  futurum.Ita  novi  licentiatum  quendam  eruditis- 
simum  tentasse,  qui  sub  certis  titulis  undique  brèves  quasdam  sententias  sive 
conclusiones,  tam  ex  consuetudine  et  stilo,  quam  regiis  sanctionibus,  et  patriae 
usu  non  scripto,  coUegerat  :  sed  nihil  juris  scripli  redegerat,  neque  etiam  talem 
rerum  civilium  ordinem  tenebat,  quem  nobis  Justinianus  ostendit.  Sic  in  medicina 
periti  omnes  medici  faciunt,  qui  sub  certis  rerum  medicarum  titulis  ex  universa 
medicina  decerpunt,  quae  suae  regionis  hominibus  commoda  noverinl  :  quibus  in 
omni  vita  utuntur,  senectutis  subsidia  vocantes.  » 


(  889  ) 
je  rcmends  dans  le  seul  sens  possible  au  seizième  siècle. 
Je  vois  chez  Drosay  un  grand  adaclienient  pour  son  roi  et 
pour  la  France,  qu'il  appelle  «  noire  libre  royaume  des 
Francs.  »  Il  voudrait  la  voir  amendée  et  pacifiée  et  il  croit 
(pie  sa  mélliode  y  pourra  contribuer  (I). 

H  émet  Tidée  d'un  Code  général  pour  tout  le  royaume  (2). 
Il  méditait  aussi,  dit-il,  de  faire  un  système  complet,  à  la 
manière  de  Cicéron  et  de  Juslinien,  du  droit  français,  ou 
tout  au  moins  du  droit  normand  (5). 

Voilà  plusieurs  bonnes  idées,  saines,  modernes,  et  qui 
me  paraissent  prouver  que,  tout  illusionné  qu'il  pouvait 
élre,  celui  qui  les  a  exprimées  en  un  slyle  pur  et  même 
élégant,  n'était  point  un  rêveur  vulgaire. 


VIL 


Jean  de  Drosay  est  presque  oublié  aujourd'hui.  C'est 
tout  au  plus  si  le  patriotisme  provincial  songe  à  lui  pour 
grossir  le  catalogue  des  Normands  illustres;  peu  s'en  faut 
qu'on  ne  le  cherche  en  vain  dans  les  compilations  volumi- 


(I)  Pp.  -169,  161  :  «  Ita  probe  rempublicani  utramque  cognoscentes.atque  rerum 
omnium  civilium  species  et  gênera  earumque  descriplas  ordine  naturas  tenentes, 
promptius  multo  et  salubrius,  quœcumque  causa  consultaliove  occurrerit,  rcme- 
dium  dabitis  quam  si  immensa  illa  et  iimumerosa  commentariorum  juris  volu- 
mina  consueto  more  legissetis  :  materiam(ulBuDAEUS  ait)  accendendarum  lilium, 
quibus  nunc  Gallia  passim  flagrat,  incendio  quidem  vix  unquam  deflagraluro, 
nisi  prius  meo  judicio  juvenibus  leges  in  scholis  eo  quem  dixi  mjdo  tradantur.  » 

(2  Incidemment,  il  est  vrai,  et  à  titre  d'hypothèse,  p.  71  :  «  Unde  Justinianum 
existimo  omnes  etiam  contudisuenes  colligi  jussisse,  ut  operis  ministri  animad- 
vertcrcnt  quid  ex  usu  obtineret,  aut  jam  immutatum  esset  :  quemadmodum  hodie 
faceret  Rex  noster  Christianissimus  Franciscus,  si  jus  générale  in  regno  suo  con- 
dere  vellet.  » 

(.S)  P.  12o  :  «  Donec  Deo  volcnte,  jus  universum  nostrie  Gailiae,  aut  saltem 
Northmaniae,  Justiniani  exemplo  in  artem  redigere  valeani.  » 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  57 


;  890  ) 
neuses  où  de  longs  articles  sont  consacrés  aux  comédiens 
qui  ont  eu  leur  jour  de  vogue,  aux  filles  célèbres  et  aux 
hommes  de  lettres  les  plus  obscurs.  Il  n'y  a  rien  là  qui 
doive  surprendre.  C'est  dans  Tordre  des  choses  ;  de  plus 
méritants  ont  eu  le  même  sort. 

Pourtant,  l'histoire  juridique  ne  rayera  pas  de  ses  regis- 
tres le  naïf  docteur  de  Caen.  11  est  vrai  que  sa  méthode  ne 
vaut  guère  et  que  sa  découverte  est  une  illusion.  Mais  il 
faut  voir  en  lui  le  savant  loyal,  chercheur,  laborieux  en 
des  domaines  variés,  à  la  fois  philologue  et  jurisconsulte, 
possédant  sur  le  droit  si  morcelé  de  la  France  des  vues  de 
synthèse  qui  n'étaient  pas  encore  banales  alors,  et  au  cou- 
rant de  la  science  étrangère  plus  qu'on  ne  l'est  maintenant. 
Il  faut,  encore  et  surtout,  reconnaître  et  estimer  en  lui 
l'ouvrier  de  la  réforme  juridique  et  l'un  des  plus  indépen- 
dants et  des  premiers.  Car  il  a  dû  se  former  à  la  vieille 
école,  et  lorsqu'il  est  mort,  à  peu  près  en  même  temps 
que  Budé,  plusieurs  années  avant  Bérauld,  Connan  et 
Baron,  les  plus  grands  jurisconsultes  du  grand  siècle,  les 
Cujas,  les  Brisson,  les  Hotman,  les  Doneau,  étaient  des 
adolescents  ou  des  enfants;  Mudée,  Viglius,  Bauduin  dé- 
butaient; Denys  Godefroi  et  Antoine  Favre  n'étaient  pas 
encore  nés.  Malgré  ses  erreurs ,  Drosay  est  un  de  ceux 
qui  leur  ont  ouvert  et  montré  le  chemin,  et  au-dessous 
de  leurs  noms  glorieux,  nous  pouvons  assigner  au  sien 
une  place  modeste,  mais  honorable,  dans  le  Panthéon  de 
la  Renaissance. 


(  894  ) 


CLA8S£  DES  BEAUX-ARTS. 


Séance  du  2  décembre  i875. 

M.  Alph.  Balat,  directeur. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  L.  Alvin,  L.  Gallait,  J.  Geefs, 
C.-A.  Fraikin,  Éd.  Félis,  Ed.  De  Bussclier,  Aug.  Payen,  le 
chevalier  Léon  de  Burbure,  J.  Franck,  Ad.  Siret,  Julien 
Leclercq,  Ernest  Slingeneyer,  Alex.  Robert,  F.-A.  Gevaert, 
Ad.  Ss^mue]^  membres. 

M.  Ch.  Montigny,  membre  de  la  classe  des  sciences  et 
M.  Chalon  membre  de  la  classe  des  lettres,  assistent  à  la 
séance. 


CORRESPONDANCE. 


M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  exprime  le  désir  de  con- 
naître quelles  sont  les  raisons  qui  ont  déterminé  le  jury  du 
dernier  concours  des  cantates  pour  le  grand  prix  de  com- 
position musicale,  à  remplacer  le  programme  des  condi- 
tions exigées  des  concurrents  pour  les  poèmes,  par  la 
disposition  suivante  qui  formerait  Tun  des  articles  du  pro- 
gramme des  prochains  concours  : 

Les  cantates  auront  pour  sujet  ou  un  fait  historique  ou 


(  892  ) 
une  création  idéale  susceptible  de  mouvement  ou  d'expres- 
sion dramatique.  Elles  ne  doivent  pas  dépasser  200  vers. 

M.  le  Ministre  a  demandé,  en  même  temps,  si  TAcadé- 
mie  ne  jugerait  pas  utile  de  préparer  iin  nouveau  pro- 
gramme pour  les  littérateurs  qui  prendront  part  au  con- 
cours pour  le  libretlo. 

Cette  lettre  a  été  envoyée  à  M.  Gevacrl,  président  du 
jury  permanent  et  l'un  des  membres  du  dernier  jury  des 
cantates. 

—  M.  le  Ministre  de  Tlnlérieur  adresse,  pour  être  déposé 
dans  la  collection  de  l'Académie  ,  un  exemplaire  en  bronze, 
des  médailles  dont  la  désignation  suit  : 

Médaille  commémorative  de  l'inauguration  de  la  statue 
équestre  érigée  par  la  ville  et  le  commerce  d'Anvers,  en 
riionneur  de  feu  S.  M.  Léopold  P%  par  Charles  Wiener; 

Médaille  commémorative  de  la  visite  de  la  Famille  royale 
à  Anvers ,  à  l'occasion  de  la  démolition  de  la  citadelle  du 
Sud,  par  F.  Baeles; 

Médaille  commémorative  du  mariage  de  S.  A.  R.  M"""  la 
Princesse  Louise  avec  S.  A.  Mgr.  le  duc  Philippe  de  Saxe, 
par  Edouard  Geerts. 

M.  le  Ministre  a  été  remercié  pour  ce  don. 

—  MM.  les  questeurs  du  Sénat  et  de  la  Chambre  des 
représentants  adressent  des  cartes  de  tribune  réservée 
pour  la  session  législative  1875-1876.  —  Remercîments. 

—  M.  le  chevalier  Soenens  fait  parvenir  des  cartes  d'en- 
trée personnelle,  avec  catalogue,  pour  l'exposition  de  sa 
galerie  de  tableaux,  rue  de  la  Charité,  n*'  25,  à  Saint-Josse- 
ten-Noode.  —  Remercîments. 


(  893  ) 

—  M.  le  chevalier  Léon  de  Burbure  envoie  la  notice 
biographique  de  M.  Ch.  Bossclet,  membre  de  l'Académie, 
qui  lui  a  clé  demandée  par  la  classe  des  beaux-arts  pour 
le  prochain  Annuaire. 

La  classe  remercie  i\L  de  Burbure  pour  celte  notice, 
laquelle  figurera,  avec  le  portait  du  défunt,  dans  l'Annuaire 
sous  presse. 

—  M.  le  vicomte  Henri  Delaborde,  associé  de  la  classe  et 
secrétaire  perpétuel  de  l'Académie  des  beaux-arts  de  l'In- 
stitut de  France,  adresse,  à  titre  d'hommage,  un  exemplaire 
de  VÉloge  cCAuber,  qu'il  a  lu  dans  la  séance  publique 
annuelle  de  l'Académie  précitée,  du  50  octobre  i87o; 
1  broch.  in-4°. 

M.  J.  Franck,  membre  de  la  classe,  fait  hommage,  de 
la  part  de  M.  Raab,  professeur  à  l'Académie  des  beaux- 
arts  de  Munich,  de  sept  gravures  exécutées  par  cet  artiste. 
Elles  comprennent  la  Vierge  de  Raphaël  et  les  portraits  de 
MM.  Zumbusch,  C.  von  Piloty,  Franz  Defrcggen,  KnabI  et 
Leubach,  professeurs  à  l'établissement  précité. 

M.  P.  Génard,  archiviste  de  la  ville  d'Anvers,  adresse, 
pour  la  bibliothèque  de  l'Académie,  quelques  brochures 
dont  il  est  l'auteur. 

Il  annonce  en  même  temps  que,  dans  peu,  il  aura  l'hon- 
neur de  soumettre  à  la  classe  des  beaux-arts  un  mémoire 
sur  Rubens. 

Des  remercîments  sont  volés  aux  auteurs  de  ces  diffé- 
rents dons. 

—  M.  J.-P.  Golfs,  architecte  à  Ixelles,  soumet  le  pros- 
pectus de  son  travail  sous  presse  intitulé  :  Le  Génie  de 
V architecture^  et  destiné,  selon  lui,  à  faire  connaître,  entre 


(  89i  ) 

autres,  les  motifs  de  l'époque  précise  de  la  naissance  du 
style  gothique  dans  nos  contrées.  Il  joint  à  celte  pièce 
une  façade  de  cathédrale  gothique,  selon  Técole  française. 

La  dennande  de  M.  Golfs  a  uniquement  pour  but  d'avoir 
à  sa  disposition  la  rotonde  du  Musée,  afin  d'y  exposer  le 
résultat  de  ses  découvertes  archéologiques. 

La  classe  décide  qu'elle  ne  peut  se  départir  des  règles 
suivies  en  pareil  cas.  Elle  regrette  donc  de  ne  pouvoir 
admettre  la  demande  de  M.  Golfs,  laquelle  entraînerait 
implicitement  le  patronage  de  son  œuvre  par  l'Académie. 

—  M.  le  secrétaire  perpétuel  annonce  que  la  commission 
administrative  s'est  occupée  dans  sa  dernière  séance,  qui 
a  eu  lieu  le  6  novembre  précédent,  du  monument  à  élever 
à  la  mémoire  d'Ad.  Quetelet. 

Il  a  communiqué,  dans  cette  réunion,  la  lettre  qu'il 
avait  écrite  à  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  au  sujet  de  ce 
monument. 

M.  le  Ministre,  tout  en  assurant  l'Académie  qu'elle  peut 
compter  sur  le  concours  pécuniaire  de  son  déparlement, 
ajoute  qu'il  attendra  qu'on  lui  fasse  parvenir  quelques 
renseignements  sur  le  caractère  et  l'importance  du  monu- 
ment à  élever,  pour  fixer  le  chiffre  de  l'intervention  du 
Ministre  dans  la  dépense. 

D'après  le  résultat  des  souscriptions  reçues  jusqu'au 
i"  novembre  courant,  leur  montant  s'élève  à  environ 
7,000  francs. 

La  commission  administrative,  conformément  à  la  délé- 
gation qu'elle  a  reçue  de  l'asseniblée  générale  des  trois 
classes  du  5  mai  1874,  avait  décidé  que  la  classe  des 
beaux-arts  serait  chargée,  dans  sa  prochaine  séance,  de 
nommer  une  commission  composée  d'un  architecte  et  de 


(  895  ) 
deux  sculpteurs,  à  laquelle  seraient  adjoints  le  directeur 
de  la  classe  des  beaux-arts  et  l'auteur  de  la  proposition, 
M.  Montigny,  pour  étudier  le  projet  du  monument  en 
question.  Le  devis  sera  d'environ  12,000  francs. 

Le  monument  sera  destiné  au  Palais-Ducal,  que  le  gou- 
vernement s'occupe  d'approprier  pour  l'Académie. 

La  classe  désigne,  outre  MM.  Balat  et  Montigny, 
MM.  Payen,  G""^  Geefs  et  Fraikin  ,  comme  membres  de  la 
commission. 

—  La  classe  a  donné  ensuite  son  approbation  définitive 
au  programme  de  concours  pour  1876,  rédigé  lors  de  la 
dernière  séance. 

Elle  s'occupera  bientôt  du  programme  de  1877,  au  sujet 
duquel  un  appel  est  fait  aux  membres  pour  les  questions 
qui  y  figureront. 


COMMUNICATIONS  ET  LECTURES. 


M.  Alvin  rend  compte  d'une  démarche  qui  a  été  faite 
auprès  de  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur,  au  nom  du  conseil 
d'administration  de  la  Bibliothèque  royale,  de  la  commis- 
sion directrice  du  Musée  de  peinture  et  de  sculpture,  ainsi 
que  de  la  direction  du  Musée  d'histoire  naturelle,  à  l'occasion 
d'un  accident  survenu  dans  le  laboratoire  de  chimie  de 
l'école  industrielle,  établi  immédiatement  au-dessous  de  la 
Bibliothèque  de  Bourgogne  et  au  milieu  des  bâtiments 
occupés  par  les  collections  les  plus  précieuses  de  l'Étal. 
Il  demande  que  la  classe  des  beaux-arts  s'associe  à  cette 


(  890  } 

démarche  et  appuie  de  son  autorité  la  demande  qui  a  été 
adressée  au  Ministre,  et  qui  a  pour  objet  la  clôture  immé- 
diate du  laboratoire  et  la  suspension  de  ce  cours  jusqu'à 
ce  que  la  ville  de  Bruxelles,  de  qui  dé|)end  l'école  indus- 
trielle, ait  procuré  un  local  [)Our  y  installer  le  laboratoire. 
La  classe  décide,  à  l'unanimité,  qu'elle  s'associe  à  la 
démarche  dont  elle  vient  d'être  saisie.  Elle  a  lésolu  en 
même  temps  que  les  classes  des  sciences  et  des  lettres,  qui 
doivent  se  réunir  dans  quelques  jours  et  qui  ont  autant 
d'intérêt  qu'elle  à  la  conservation  du  premier  dépôt  litté- 
raire du  pays  et  des  collections  des  Musées,  seront  priées 
de  s'associer  à  la  motion  précitée. 


—  La  classe  s'est  constituée  en  comité  secret,  pour 
s'occuper  de  la  discussion  des  titres  des  candidats  présentés 
aux  places  vacantes,  lors  de  la  dernière  séance,  et  pour 
l'inscription  de  candidatures  nouvelles  s'il  y  a  lieu. 

Elle  a  arrêté,  d'une  manière  définitive,  la  liste  des 
élections. 


(  897  ) 


CL\SSE  DKS  vSCIEUCES 


Séance  du   15  décembre   1875. 

M.  A.  Brialmont,  diiecteur,  président  de  l'Académie. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  B.-C.  Du  Mortier,  J.-S.  Stas,  L.  de 
Koninck,  P.-J.Van  Beneden,  Edm.  de  Selys  Longchamps, 
H.  Nyst,  Gluge,  Melsens ,  F.  Dewalque,  Ern.  Quetelet, 
H.  Maus,  E.  Candèze,  F.  Donny,  Ch.  Montigny,  Éd.  Du- 
prez,  Éd.  Morren,  Éd.  Van  Beneden,  C.  Malaise,  F.  Folie, 
Alb.  Brinrt,  F.  Plateau,  membres;  E.  Catalan,  associé;  J.  De 
Tilly,  F.-L.  Cornet,  correspondants. 


CORRESPONDANCE. 


Par  une  lettre  du  Palais ,  Sa  Majesté  fait  connaître  qu'elle 
regrette  de  ne  pouvoir  assister  à  la  séance  publique  de  la 
classe. 

S.  A.  R.  M"'  le  Comte  de  Flandre  fait  exprimer  des 
regrets  semblables. 

MM.  les  Ministres  de  l'Intérieur  et  des  Affaires  Étran- 
gères remercient  de  l'invitation  qui  leur  a  été  adressée 
pour  cette  solennité,  et  s'excusent  de  ne  pouvoir  y 
assister. 


(  898  ) 
M.  le  iMinistredes  Travaux  Publics  et  M.  le  président  du 
Sénat  expriment  leurs  remercimenls  au  sujet  de  la  même 
invitation. 

—  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  communique  une  lettre 
du  département  de  la  Guerre  faisant  connaître  que  les 
pierres  qui  ont  servi  à  la  carte  géologique  du  pays  par  feu 
Dumont  nécessiteraient  une  dépense  très-considérable  pour 
être  mises  en  état  de  fournir  un  nouveau  tirage.  Le  dépôt 
de  la  guerre  propose  de  faire  usage  de  la  carte  en  4  feuilles, 
à  l'échelle  du  7i60,ooo,  qu'il  vient  de  publier  et  sur  laquelle 
on  pourrait  ajouter  les  données  géologiques  actuelles. 

La  classe  renvoie  ces  pièces  à  l'examen  de  MM.  De- 
walque,Briart  et  Cornet. 

—  MM.  F.  Putzeys  et  A.Swaan,  de  Liège,  adressent  un 
pli  cacheté  contenant  l'exposé  sommaire  de  recherches 
toxieologiques  qu'ils  poursuivent  encore,  écrivent-ils,  et 
pour  lesquelles  ils  désirent  prendre  date. 

Ce  dépôt  est  accepté. 

—  M.  Cavalier  envoie  son  résumé  météorologique  pour 
Ostende  pendant  le  mois  de  novembre  1875. 

—  M.  P.-J.  Van  Beneden  fait  hommage  d'un  exemplaire 
de  sa  notice  Sur  les  Pac/iyacantlius  du  Musée  de  Vienne. 
ln-8". 

MM.  F.-L.  Cornet  et  A.  Briart  font  hommage  des  deux 
ouvrages  suivants  :  l"*  Sur  le  synchronisme  du  système  her- 
vien  de  la  province  de  Liérje  et  de  la  craie  blanche  moyenne 
du  Hainaut;  S**  Note  sur  V existence,  dans  le  terrain  houil- 
1er,  de  bancs  de  calcaire  à  crinoïdes.  In-8°. 


(  899  ) 

—  La  Société  littéraire  cl  philosophique  de  Liverpool  an- 
nonce qu'elle  a  expédié  le  volume  XXIX  de  ses  Proccedings. 

L'Observatoire  physique  central  de  Saint-Pélersbourg 
annonce  l'envoi  de  la  2^  partie  du  tome  IV  de  son  Reper- 
torium  flir  Météorologie. 

—  La  classe  renvoie  à  l'examen  de  MM.  Folie  et  Cata- 
lan le  Supplémefit  (ou  suile)  à  la  note  sur  le  second  prin- 
cipe de  la  théorie  mécanique  de  la  chaleur,  par  M.  J.  De 
Tilly ,  correspondant  de  l'Académie. 


ELECTIONS. 


Conformément  à  l'article  2  du  règlement  général,  la 
classe  procède  aux  élections  pour  les  places  vacantes  en 
remplacement  d'un  membre  titulaire  et  de  quatre  associés. 
Elle  s'occupe  aussi  de  l'élection  de  deux  correspondants. 
Les  noms  des  élus  seront  mentionnés  au  compte  rendu  de 
la  séance  publique. 


JUGEMENT  DU  CONCOURS  ANNUEL 


Deux  mémoires  avaient  été  envoyés  en  réponse  à  la  cin- 
quième quesùon  du  programme  de  concours  pour  1875. 
Cette  question  avait  pour  sujet  :  On  demande  la  description 
du  système  houiller  du  bassin  de  Liège. 

Le  premier  mémoire  porte  pour  devise  :  Omnia  vincit 
labor. 


(  900  ) 
Le  second ,  les  mots  :  La  science  n'est  pas  œuvre  d'ima- 
gination, etc. 

Rapport  de    n.   G.   Octcnlquc. 

a  Un  premier  concours  ouvert  sur  cette  question  nous 
avait  valu,  il  y  a  deux  ans,  une  réponse  qui  avait  reçu  Tap- 
probation  des  commissaires,  mais  le  concours  fui  prorogé 
pour  permettre  à  Tauteur  de  notables  corrections  et  addi- 
tions,  notamment  pour  la  partie  historique,  qui  était 
presque  nulle.  Cette  mesure  a  réussi,  à  certains  égards, 
au  delà  de  nos  espérances,  car  un  nouveau  concurrent  est 
entré  en  lice  avec  celui  que  nous  avons  été  sur  le  point  de 
récompenser  naguère.  L'Académie  doit  s'en  applaudir; 
mais  l'examen  de  ces  volumineux  manuscrits  et  l'étude 
comparée  des  nombreuses  cartes  et  coupes  qui  y  sont  jointes 
de  part  et  d'autre,  ont  imposé  aux  commissaires  un  labeur 
opiniâtre  jusqu'à  la  dernière  heure.  Certes,  en  comparant 
les  opinions  des  deux  concurrents,  nous  n'avons  jamais 
pensé  à  apporter  ici  un  rapport  qui  précisât  de  quel  côté 
est  la  vérité;  mais  les  divergences  de  vues  des  auteurs  sont 
telles,  pour  les  districts  peu  connus,  qu'il  nous  a  paru  indis- 
pensable de  comparer,  au  moins  pour  quelques  localités, 
les  documents  fournis  par  eux  avec  ceux  que  nous  avons 
pu  nous  procurer.  Appliquant  celte  appréciation  à  l'en- 
semble, nous  croyons  pouvoir  dire  que  les  éludes  des  deux 
concurrents  ont  été  faites  avec  soin,  et  qu'elles  ne  peuvent 
venir  que  d'ingénieurs  qui  ont  étudié  à  fond  notre  bassin 
houiller. 

M.  l'ingénieur  en  chef-directeur  des  mines,  inspecteur 
du  service  de  la  carte  minière,  a  bien  voulu  mettre  à  notre 
disposition  les  nombreux  documents  accumulés  dans  son 


(  901  > 

administration,  tant  pour  faciliter  nos  études  et  nos  appré- 
ciations que  pour  nous  permettre  de  reconnaître  éventuel- 
lement les  emprunts  qui  auraient  pu  lui  être  faits.  Nous 
lui  en  exprimons  volontiers  toute  notre  gratitude;  et  nous 
devons  ajouter  que  nous  avons  trouvé  dans  ses  bureaux 
des  documents  semblables  à  quelques-uns  de  ceux  (juc  le 
premier  concurrent  nous  a  envoyés  il  y  a  deux  ans.  Ainsi 
la  grande  carte  jointe  à  son  mémoire  se  retrouve  dans  les 
bureaux  de  la  carte  minière,  mais  dépourvue  du  quadrillé 
à  l'aide  duquel  notre  carte  semble  avoir  été  construite,  de 
sorte  que  Texemplaire  de  l'administration  parait  être  un 
calque  du  nôtre. 

Il  kul  remarquer  ici  que  les  résultats  obtenus  par  le 
service  de  la  carte  minière  ont  été,  par  parties,  libérale- 
ment communiqués  aux  exploitants  intéressés  qui  en  ont 
fait  la  demande.  Ce  qu'on  sait  aujourd'hui  de  la  constitu- 
tion de  notre  système  houiller  est,  en  partie,  l'œuvre  de 
l'administration,  en  partie,  celle  des  nombreux  ingénieurs 
qui,  dans  nos  charbonnages,  se  préoccupent  de  la  question 
depuis  nombre  d'années;  de  telle  sorte  qu'il  nous  semble  à 
peu  près  impossible  de  reconnaître  à  qui  appartient  la 
découverte  de  tel  ou  tel  fait  déterminé.  Souvent,  sans  doute, 
les  auteurs  ne  chercheront  à  revendiquer  que  la  première 
publication  de  faits  déjà  connus. 

M.  l'ingénieur  en  chef-directeur  a  bien  voulu  ajouter 
son  appréciation  personnelle  sur  certaines  opinions  expri- 
mées parle  travail  que  nous  venons  de  citer:  nous  en  avons 
pris  note,  mais  nous  ne  croyons  pasdevoiren  parlerdavan- 
tage,  vu  que  nous  n'avons  pas  à  nous  prononcer  sur  les  pro- 
babilités plus  ou  moins  grandes  des  conjectures  qu'il  est 
permis  de  faire  sur  la  partie  non  explorée  de  notre  bassin. 
Nous  reviendrons  sur  ce  point.  Au  préalable,  nous  allons 


(  902  ) 
essayer  d'analyser  impartialement  les  œuvres  des  deux 
concurrents. 


I. 


Le  mémoire  qui  porte  pour  épigraphe  Omnia  vincit 
labor  improbîis,  nous  est  envoyé  par  l'auteur  qui  s'était 
présenté  au  concours,  il  y  a  deux  ans.  Le  travail  soumis 
aujourd'hui  à  notre  examen  comprend,  non-seulement  le 
volumineux  manuscrit,  accompagné  de  quatre  feuilles  de 
cartes  et  de  coupes,  qui  nous  a  été  présenté  à  la  séance  du 
7  août  dernier,  mais  encore  presque  tout  le  texte  du  mé- 
moire présenté  au  concours  de  1873,  ainsi  que  les  deux 
cartes  et  les  coupes  y  annexées.  Le  temps  a  manqué  sans 
doute  à  l'auteur  pour  faire  une  nouvelle  rédaction  de  tout 
son  travail,  ce  qui  lui  aurait  donné  l'occasion  de  faire  çà  et 
là  d'utiles  modifications  :  je  le  regrette  beaucoup,  surtout 
en  présence  d'un  concurrent. 

Ce  mémoire  est  précédé  d'un  Avertissement  destiné  aux 
commissaires.  L'auteur  y  expose  ce  qu'il  a  fait  pour  se  con- 
former aux  indications  des  rapports  de  1873,  et  il  fait 
remarquer  à  celte  occasion  que  les  nouvelles  recherches 
qu'il  a  poursuivies  pendant  dix-huit  mois,  ont  partout  con- 
firmé l'exactitude  de  la  synonymie  des  couches  qu'il  a 
établie  le  premier,  en  se  fondant  sur  des  horizons  minéra- 
logiques  dont  il  a,  le  premier  aussi,  signalé  l'importance. 
II  ajoute  à  ce  propos  que,  ses  découvertes  ayant  été  exposées 
dans  les  rapports  précédents,  il  croit  pouvoir,  le  cas 
échéant,  en  réclamer  la  propriété.  Nous  lui  en  donnons 
acte.  Cela  dit,  voici,  d'après  cet  Avertissement,  l'ordre  suivi 
par  l'auteur  et  l'indication  des  parties  conservées  du  pre- 
mier mémoire  : 


(  903  ) 

Chap.  1.  Introduction  (pages  1  à  3du  mémoire  de  1873). 

Chap.  il  Description  géologique.  (Texte  nouveau,  revu 
et  complété). 

Chap.  III.  Relations  de  notre  système  houiller  avec  les 
bassins  allemands  de  notre  frontière  Est  et  Nord-Est. 
(Texte  nouveau). 

Chap.  IV.  Description  minéralogique  et  paléontolo- 
gique.  (Chapitre  maintenu,  pp.  19  à  150,  mais  précédé 
d'une  introduction  historique). 

Chap.  V.  Recherches  sur  la  synonymie  des  quatre 
groupes  du  système  houiller  de  la  province  de  Liège. 
(Chapitre  maintenu,  pp.  151  à  261). 

Chap.  VI.  Discussion,  au  point  de  vue  synonymique, 
de  la  nomenclature  des  couches  adoptée  par  Dumoni. 
(Chapitre  nouveau). 

Chap.  VIL  Conclusions.  (Texte  conservé,  pp.  262  à 
264). 

Les  cartes  et  coupes  annexées  à  ce  mémoire  compren- 
nent, outre  les  deux  cartes  et  les  coupes  de  1873  :  1°  une 
carte  au  '/so.ooo,  indiquant,  pour  tout  le  bassin  en  question, 
la  coupe  horizontale  des  six  horizons  de  grès  caractéristi- 
ques par  un  plan  passant  par  le  zéro  de  la  Meuse  au  pont 
des  Arches,  à  Liège;  2°  comme  appendice  à  la  précédente, 
une  carte  des  bassins  de  Modave,  de  Bois,  d'Ocquier  et 
d'Aywaille,  tout  à  fait  insignifiante;  3°  une  carte  indiquant, 
à  partir  de  Visé,  le  raccordement  de  notre  bassin  houiller 
avec  ceux  du  Limbourg  et  de  la  Prusse,  aussi  au  Vso.ooo  et 
au  niveau  de  la  Meuse  ;  cette  carte  pourrait  s'ajouter  à  la 
première,  si  l'on  ne  redoutait  l'inconvénient  d'une  longueur 
trop  grande;  4°  une  planche  découpes,  se  rapportant  à 
cette  dernière  carte,  dont  elle  complète  les  indications. 

Nous  allons  aborder  maintenant  l'examen  du  mémoire. 


(  904  ) 

Chap.  I.  —  Introduction. 

Je  crois  inutile  de  répéter  Tanalyse  que  j  en  ai  donnée 
il  y  a  deux  ans. 

Cette  partie  est  suivie  d'une  liste  bibliographique  des 
ouvrages  cités.  Celle  liste  est  peu  méthodique  et  les  indi- 
cations qu'elle  renferme,  sont  incomplètes  :  à  mon  avis, 
elle  peut  être  supprimée  d'autant  plus  aisément  que  la 
plupart  des  ouvrages  ne  sont  cités  qu'une  fois  dans  le  cours 
du  travail.  Pour  les  autres,  notanmient  pour  le  mémoire 
couronné  de  Dumont,  il  suffira  de  donner,  à  la  première 
citation,  le  titre  exact  et  complet,  avec  toutes  les  indications 
usitées,  et  expressément  recommandées  par  l'Académie  aux 
concurrents. 

Chap.  II.  —  Description  géologique. 

J'ai  peu  de  chose  à  modifier  au  résumé  que  j'en  ai 
donné,  il  y  a  deux  ans. 

L'auteur  maintient  son  opinion  que  les  plis  se  sont  pro- 
duits lorsque  les  couches  étaient  encore  molles,  et  les  cas- 
sures, après  leur  consolidation.  Il  continue  à  diviser  les 
failles  en  deux  classes,  «  les  vérilablcs  failles,  qui  consti- 
tuent une  rupture  de  terrain  avec  interposition  de  matières 
remplissantes  et  rchoppement,  et  les  cassures  avec  glis- 
sement de  l'une  des  pailies,  généralement  moins  impor- 
tantes eu  égard  au  rejet  occasionné  et  qui  ne  présentent 
pas  aux  joints  de  rupture  des  matières  remplissantes.  » 
Je  suis  loin  de  prétendre  qu'il  n'y  a  pas  de  distinction  à 
faire  entre  une  grande  et  une  petite  faille;  mais  je  persiste, 
de  mon  côté,  à  maintenir  que  l'auleur,  sans  motifs  connus, 


(  90o  ) 
s'ccarle  de  la  déflnitioii  admise  par  fous  les  géologues. 
J'ajouterai  que  le  mol  de  rejet,  qui  intervient  dans  sa  défi- 
nition, me  semble  pris  dans  un  sens  qui  n'est  pas  celui 
qu'on  lui  donne  généralement  lorsqu'il  est  question  du  dé- 
placement observé  dans  une  faille;  et  enfin,  que  sa  seconde 
classe  n'a  pas  de  nom  particulier.  On  remarquera  aussi 
que  l'auteur,  malgré  l'importance  qu'il  semble  attacher 
aux  matières  de  remplissage,  n'en  dit  pas  un  mot  dans  le 
cours  de  son  travail,  si  ce  n'est  parfois  pour  en  mentionner 
l'épaisseur. 

Le  mot  de  rehoppement,  que  l'auteur  emploie  à  celle 
occasion ,  m'amène  à  protester  énergiquement  contre  l'in- 
troduction, dans  la  langue  scientifique,  de  termes  de  ce 
genre,  empruntés  à  la  langue  des  mineurs,  ininlelligibles 
pour  qui  n'est  pas  bouilleur,  et  parfaitement  superflus,  vu 
qu'ils  ont  leurs  équivalents  bien  connus  en  français.  Je  puis 
ajouter  qu'il  n'est  pas  rare  de  voir  des  termes  de  ce  genre 
n'être  usités  que  dans  un  district  du  pays.  Je  profiterai  de 
l'occasion  pour  appeler  toute  l'attention  de  l'auteur  sur 
l'emploi  de  certaines  expressions  qui  n'ont  pas  ,  en  français, 
la  signification  qu'il  leur  attribue,  par  exemple ,  enclave 
pour  surface,  territoire,  ou  qui  ne  sont  que  d'affreux  néolo- 
gismes,  comme  versage  pour  versant  et  postéranéité  pour 
postériorité. 

Revenons  aux  failles.  La  carte  de  l'auteur  en  indique 
quatre  principales,  qu'il  décrit  longuement.  Trois  d'entre 
elles  sont  d'une  importance  majeure,  puisqu'elles  servent 
de  base  à  la  division  du  bassin.  J'ai  résumé,  il  y  a  deux 
ans,  les  indications  de  l'auteur  à  leur  sujet  :  aujourd'hui, 
il  les  prolonge  considérablement  vers  le  N.E.  Il  en  est  de 
même  pour  la  quatrième  faille,  celle  de  Hozémont,  sur  la- 
quelle le  rapport  de  mon  honorable  confrère,  ]VL  Briart, 

2""'  SÉRIE,  TOME  XL.  58 


(  906  ) 

avait  appelé  son  attention,  il  y  a  deux  ans.  Pour  moi,  je 
considère  ces  prolongements  comme  extraordinairement 
problématiques.  Je  ne  vois,  par  exemple,  aucun  motif  pour 
faire  aboutir  au  calcaire  de  Montzen  la  faille  eifelienne, 
celle  de  Seraing  et  celle  de  Saint-Gilles.  Quoi  qu'il  en  soit, 
je  dirai,  sans  plus  tarder,  que,  en  cas  de  publication,  le  tracé 
de  ces  accidents  doit  être  tel  qu'on  puisse  distinguer  aisé- 
ment la  partie  hypothétique  de  celle  qui  est  bien  connue. 

J'ajouterai  quelques  réserves  pour  la  faille  eifelienne. 
J'admets  avec  l'auteur  qu'elle  se  prolonge  au  nord -est  de 
Kinkempois  (Angleur),  mais  les  documents  que  j'ai  eu 
l'occasion  d'étudier  pour  les  environs  de  Jupille  et  de 
Bellaire,  me  porteraient  à  modifier  son  trajet.  En  1873, 
l'auteur  la  faisait  passer  vers  la  limite  N.N.O.  de  la  conces- 
sion des  Quatre-Jean;  aujourd'hui,  elle  traverserait  cette 
concession,  dans  laquelle  elle  entre  en  passante  environ 
200  mètres  au  nord  de  son  extrémité  occidentale.  Selon 
moi,  au  lieu  de  la  déplacer  vers  le  Sud,  il  eût  été  plus  exact 
de  la  faire  remonter  vers  le  Nord,  au  delà  de  la  couche 
Marnette  de  Herman-Pixherotte. 

Nous  avons  dit  que  les  trois  failles  principales  divisent 
notre  bassin  en  quatre  parties  que  l'auteur  appelle  groupes 
du  Nord,  du  Centre,  du  Sud  et  des  plateaux  de  Hervé. 
Jl  y  ajoute  cette  fois  la  description  des  petits  bassins  du 
Condroz,  qu'il  appelle,  «  une  traînée  d'épanchement  »  ex- 
pression qui  va  certainement  bien  au  delà  de  sa  pensée. 

L'auteur  revient  ici  sur  la  production  des  plis  pendant 
la  période  de  plasticité,  puis  des  cassures  et  des  failles 
après  la  consolidation.  «  Dans  quel  ordre,  dit-il,  ces  grands 
»  accidents  se  sont-ils  produits,  et  par  quels  effets  succes- 
»  sifs  ?  Beaucoup  de  théories  pourraient  intervenir  pour 
»   fournir  la  solution  de  ce  problème.  Je  signalerai  les  faits 


(  907  ) 
«  itidisculables  pour  en  déduire  les  conclusions  les  plus 
»  vraisemblables.  »  Il  admet  que  les  plis  se  sont  formés 
d'abord,  sous  Taclion  convergente  de  forces  de  compres- 
sion dirigées  du  Sud  et  du  Sud-Est  vers  le  centre,  le  nord 
de  la  formation  restant  immobile  et  peu  affecté.  Quant  aux 
cassures  et  aux  failles,  il  rejette  toute  idée  de  soulèvement 
pour  admettre  des  abaissements.  Après  l'action  de  la  com- 
pression et  la  formation  des  plis  du  système  houiller,  ainsi 
que  des  selles  calcaires  de  Flémalle  et  de  Ramet,  l'en- 
semble du  bassin  houiller,  abandonné  sans  appui,  s'est 
brisé  suivant  les  lignes  les  plus  accusées  de  ces  plis,  les- 
quelles constituaient  les  lignes  de  moindre  résistance. 
«  Tel  serait  le  prolongement  de  la  lisière  eifelienne  au  sud 
»  de  laquelle  le  groupe  des  plateaux  de  Hervé  serait  resté 
»  en  place.  »  En  même  temps,  d'autres  fentes  se  produi- 
sent au  Nord,  et  l'abaissement  de  chaque  lambeau  inter- 
posé dépend  du  frottement,  variable  suivant  l'inclinaison 
de  la  cassure. 

Sans  vouloir  rechercher  ce  qu'il  peut  y  avoir  de  fondé 
dans  les  idées  de  l'auteur,  je  me  bornerai  à  faire  remar- 
quer qu'il  arrive  ici  à  cette  conclusion,  que  la  formation 
des  cassures  a  suivi  immédiatement  celle  des  plis,  ce  qui 
ne  me  paraît  guère  d'accord  avec  l'opinion  que  les  pre- 
mières se  sont  produites  après  la  consolidation  des  roches, 
les  secondes,  pendant  qu'elles  étaient  encore  plastiques. 

La  compression  a  donc  varié  d'intensité  de  l'Ouest  à 
l'Est;  elle  a  été  la  plus  énergique  là  où  le  bassin  est  le  plus 
rétréci,  notamment  entre  Horion  et  les  Awirs;  elle  a  été 
moindre  entre  Visé  et  Forêt.  Suivant  le  conseil  qui  lui  avait 
été  donné,  l'auteur  a  cherché  à  déterminer  l'étendue  d'une 
couche  replacée  horizontalement;  il  a  fait  ce  calcul  pour 
trois  coupes,  les  deux  premières  Nord-Sud,  la  troisième 
N.  56°  0.11a  trouvé  que  les  développements  de  la  couche  in- 


(  908  ) 
férieure  exploitée  seraient  respectivement  de  6.800,  de  8.800 
vi  22.400  mètres,  la  largeur  du  bassin  étant  950,  1.200  et 
3.700  mètres.  On  peut  conclure  de  là  que  la  largeur  du 
bassin  houiller  a  été  réduite  à  14,  14  et  17  p.  %  seulement 
de  ce  qu'elle  était  en  ces  trois  points.  Ces  rétrécissements 
surpassent  notablement  tous  ceux  qui,  à  ma  connaissance, 
ont  été  indiqués  jusqu'aujourd'hui.  Entraîné  par  ses  préoc- 
cupations de  compression,  l'auteur  se  borne  à  faire  remar- 
quer que  cette  compression  a  varié  suivant  les  rapports 
7,15,  7,53  et  6,05. 

L'auteur  aborde  ensuite  la  description  des  petits  bassin  s 
du  Condroz,  aujourd'hui  inexploités;  mais  il  se  borne  à 
rappeler  les  documents  antérieurs.  Je  me  bornerai  à  ajouter 
trois  obervations. 

D'abord  l'auteur,  en  traitant  du  bassin  de  Theux,  ne 
parlepas  de  la  disposition  si  remarquable  du  calcaire  carbo- 
nifère, qui  vient  recouvrir  le  système  houiller  au  Nord  et 
au  Sud,  disposition  figurée  par  Dumont  sur  sa  carte  de 
Pépinster  à  Spa  et  reconnue  par  la  Société  géologique  de 
France,  lors  de  sa  session  extraordinaire  à  Liège,  en  1863. 
En  second  lieu,  la  nouvelle  couche  de  houille  dont  il  cite 
la  découverte  d'après  notre  savant  confrère,  M.  De  Koninck, 
n'appartient  pas  au  système  houiller;  elle  est  intercalée 
dans  le  calcaire  carbonifère.  Enfin,  l'auteur  considère  ces 
petits  bassins  comme  formés  isolément  dans  des  dépres- 
sions du  calcaire,  lesquelles,  à  raison  de  leur  peu  de  pro- 
fondeur, n'auraient  pu  recevoir  que  les  premières  assises. 
Il  y  aurait  beaucoup  à  dire  en  faveur  du  maintien  des  idées 
reçues;  je  mebornerai  à  faire  remarquer  que  la  concordance 
admise  jusqu'ici  entre  ces  dépôts  houillers  et  le  calcaire 
carbonifère  suffit  pour  faire  rejeter  cette  manière  de  voir. 

En  cas  d'impression,  ce  chapitre  devrait  être  supprimé. 

Groupe  du  Nord.  —  La  limite   septentrionale  de  cette 


(  909  ) 

partie  est  ineoniplétemciit  connue  et  la  carrière  est  large- 
ment ouverte  aux  hypothèses.  L'auteur  décrit,  trop  suc- 
cinctement peut-être,  la  disposition  du  calcaire  de  Visé, 
puis  il  expose  les  rapports  de  lallurc  de  ce  calcaire  avec 
celle  des  couches  reconnues  à  l'Ouest,  dans  les  houillères 
voisines  (Biquet-Gorée),  et  il  en  conclut  que,  probable- 
ment, les  plaleurcs  exploitées  entre  les  plateaux  d'Ans  et 
d'Oupeye,  doivent  former  de  nouveaux  retours  par  selles 
et  fonds  de  bateau,  en  concordance  avec  le  soulèvement  de 
Visé  et  celui  de  Horion-Ilozémont.  De  même,  les  plisse- 
ment du  système  houiller  à  Lhonneux  et  à  La  Gleixhe  lui 
paraissent  indiquer  que  le  calcaire  doit  se  représenter  au 
nord  de  la  faille  de  Hozémont  et  entourer  l'hypersthéniie 
(gabbro)  qu'on  a  exploitée  dans  cette  localité.  Dans  toute 
celte  argumentation,  il  se  base  sur  une  certaine  symétrie 
qui  règne  dans  toute  la  formation  carbonifère,  et  en  vertu 
de  laquelle  on  doit  rencontrer  au  nord  de  la  faille  des  mouve- 
ments de  terrain  analogues  à  ceux  qu'on  observe  au  midi. 
Je  n^ai  pas  à  me  prononcer  sur  les  probabilités  de  l'exis- 
tence du  système  houiller  au  nord  de  la  grande  faille  dont 
il  s'agit,  mais  je  ne  puis  m'abstenir  de  faire  remarquer  que 
les  raisons  que  fait  valoir  l'auteur,  me  semblent  bien  peu 
concluantes.  Il  me  parait,  d'un  côté,  qu'il  simplifie  trop 
l'allure  du  massif  calcaire  de  Visé,  qui  est  extrêmement 
disloqué  et  se  prête  mal  à  l'observation.  Cette  allure  est  loin 
d'être  ce  qu'on  pourrait  croire  à  l'inspection  de  la  carte , 
laquelle  ne  reproduit  qu'imparfaitement  celle  de  M.  Horion, 
dont  l'interprétation  exige  qu'on  fasse  intervenir  des  déran- 
gements considérables  (1).  D'autre  part,  une  faille  assez 


(1)  A  ce  propos,  je  demanderais  à  l'auteur  de  reproduire  sur  sa  carte,  non  pas 
seulement  le  contour  du  massif  de  Visé,  mais  les  détails  indiqués  à  la  même 
échelle  par  i\l.  Horion. 


(  910  ) 
puissante  pour  mettre  le  système  houiller  en  contact  avec 
le  silurien,  me  parait  rendre  extrêmement  hasardée  toute 
supposition  sur  la  similitude  d'allure  des  couches  situées 
des  deux  côtés  de  cette  faille.  Je  suis  confirmé  dans  celte 
manière  de  penser  lorsque  je  vois  Fauteur  amené  à  consi- 
dérer le  gabbro  de  Hozémont  comme  injecté  dans  le  cal- 
caire carbonifère,  et  postérieur  à  la  formation  houillère  : 
bien  qu'on  n'ait  pu  constater  jusqu'à  présent  dans  quel 
terrain  il  a  fait  éruption,  je  pense  qu'on  trouvera  peu  de 
géologues  disposés  a  abandonner  l'idée  qu'il  se  trouve  dans 
les  schistes  siluriens,  qui  affleurent  à  proximité,  et  qu'il  est 
de  beaucoup  antérieur  à  l'époque  houillère  (1).  Pour  ache- 
ver de  rendre  ma  pensée,  je  dirai  que  des  considérations 
analogues  à  celles  que  fait  valoir  l'auteur,  pourraient,  à 
mon  avis,  être  présentées  relativement  à  ce  qui  doit  se 
passer  au  sud  de  la  faille  eifelienne,  et  aux  mouvements 
qui  doivent  y  correspondre  à  ceux  des  couches  du  groupe 
du  Midi,  si  l'on  n'y  connaissait  suffisamment  la  présence 
du  terrain  devonien ,  avec  une  allure  propre. 

Avant  de  quitter  ces  localités,  je  dois  faire  remarquer  à 
l'auteur  que,  s'il  refuse  de  considérer  comme  siluriennes 
les  couches  qu'il  appelle  rhénanes,  il  y  aurait  lieu  d'en 
donner  le  motif;  sinon,  il  serait  préférable  d'accepter  la 
dénomination  généralement  usitée  aujourd'hui.  Ensuite, 


(\)  L'auteur  cite  à  ce  sujet  un  extrait  entre  guillemets  du  cours  de  Dumont, 
d'après  lequel  ce  géologue  aurait  mentionné  la  présence  de  cailloux  de  roches 
porphyriques  dans  le  terrain  houiller.  Si  cette  citation  est  exacte,  elle  prouve  seu- 
lement que  le  cahier  est  mauvais.  Ce  n'est  pas  dans  le  poudingue  houiller  que 
Dumont  a  signalé  la  présence  de  roches  porphyriques,  mais  dans  le  poudingue 
eifelien  ;  et  il  ne  s'est  pas  borné  à  en  parler  à  son  cours,  il  a  fait  connaître  ce  fait 
remarquable  dans  son  Mémoire  sur  le  terrain  rhénan. 


(  i»H  } 
l'auteur  donne,  à  Hozcmont,  une  coupe  dans  laquelle  je 
vois,  sous  le  terrain  crétacé  et  de  haut  en  bas  : 

'<  Lignures  »  charbonneuses. 
Plîlhanite. 
Pierre  d'avoine. 
Grès  houiller. 

Je  ne  connais  guère  le  plithanite  que  superposé  directe- 
ment au  calcaire  carbonifère.  Cette  coupe  nous  montre  une 
disposition  bien  différente  :  sans  la  contester,  je  crois  devoir 
appeler  toute  ratlenlion  de  l'auteur  sur  ce  point,  qui  mé- 
rite quelques  développements. 

Enfin,  à  l'appui  de  ce  qu'il  vient  de  dire  sur  l'existence 
probable  d'un  nouveau  bassin  houiller  au  nord  de  celui 
que  l'on  connaît  actuellement,  l'auteur  s'appuie  sur  des 
documents  indiquant  la  découverte  de  petits  fragments  de 
houille  prés  de  Landen.  Je  crois  qu'on  a  fait  erreur  et 
qu'on  a  pris  pour  houille  du  lignite  landenien  (1). 

Groupe  du  Centre.  —  L'auteur  a  ajouté  à  sa  rédaction 
première  des  renseignements  sur  les  alunières  du  bord  mé- 
ridional du  bassin.  Je  l'engagerai  à  réparer  un  oubli,  en 
indiquant  l'inclinaison  de  la  faille  des  Awirs;  et  je  signale- 
rai ici  que  les  dressants,  bien  développés  dans  ce  groupe,  ont 
été  exploités  pour  coke  presque  jusqu'aux  couches  les 
plus  inférieures. 

Groupe  du  Sud,  —  Je  n'ai  rien  de  nouveau  à  dire.  Je 
ferai  seulement  remarquer  à  l'auteur  que  son  texte  indique 
que  ce  groupe  ne  dépasse  «  guère  »  la  Chartreuse  à 
l'Est,  ce  qui  ne  me  paraît  pas  tout  à  fait  d'accord  avec  sa 
carte. 


(1)  Cette  opinion  me  paraît  hors  de  doute  pour  le  cas  des  fra  mentsde  charbon 
de  terre  amenés  par  une  source. 


l  912  ) 

Groupe  des  plateaux  de  Hervé.  —  La  description  de  ce 
groupe  me  paraît  peu  modifiée.  Je  présenterai  seulement 
deux  observations. 

Vers  Chèvremonl  et  la  montagne  des  Krikions  (Chènée), 
l'auteur  attribue  au  système  houiller  Tallure  du  système 
Tamennien  ou  de  l'eifelien  qui  s'observe  au  contact  :  la  pré- 
sence d'une  faille  puissante  dans  cette  région  me  paraît 
rendre  ce  procédé  peu  sur  (1). 

En  second  lieu,  c'est  à  tort  qu'il  indique ,  au  nord  d'An- 
drimont  et  de  Bilstain ,  le  contact  du  calcaire  carbonifère 
et  des  schistes  houillers.  Il  y  a  en  ce  point  une  faille  puis- 
sant qui  lui  a  échappé  et  qui  met  ces  schistes  en  contact  avec 
les  psammites  et  les  schistes  famenniens  depuis  l'est  de  la 
Haute-Saurée  jusqu'au  delà  de  Villers.  Une  autre  faille, 
parallèle  à  la  précédente  et  située  à  environ  600  mètres  au 
N.N.O.,  ramène  au  jour,  par  places,  le  calcaire  carbonifère 
àBois-le-Dame,  aux  Quatre  Chemins  et  au  coude  du  chemin 
de  Villers  à  IJauvent. 

Suivant  le  conseil  donné,  il  y  a  deux  ans,  l'auteur  a 
poursuivi  l'étude  de  notre  formation  houillère  jusqu'à  la 
frontière,  autant  qu'on  peut  le  faire  en  l'absence  d'exploi- 
tations et  dans  une  région  où  l'observation  est  difficile  ou 
impossible.  Il  poursuit  cette  étude  dans  le  chapitre  sui- 
vant. 


(1)  J'ai  une  autre  critique  à  adresser  à  la  carte  au  •/■■20.000  de  cette  partie  Faute 
d'indications  suffisantes  de  la  surface,  je  n'avais  pas  remarqué,  il  y  a  deux  ans, 
qu'elle  arrive  à  la  montagne  des  Krikions,  où  l'auteur  figure  le  passage  des  cou- 
ches de  houille.  Il  y  a  là  une  erreur  que  je  ne  m'explique  pas  :  la  carte  de  Dumont 
montre  en  cet  endroit,  c'est-à-dire  entre  l'Ourthe  et  la  Vesdre,  la  partie  inférieure 
de  son  étage  quartzo-schisteux  du  système  eifelien ,  et  la  vérification  du  fait  est 
tellement  simple  que  l'auteur  ne  pouvait  l'ignorer.  De  même  dans  la  vallée  de  la 
Meuse .  vers  Kinkempois,  l'auteur  fait  empiéter  le  houiller  sur  l'eifelien.  Est-ce  à 
raison  de  l'inclinaison  de  la  faille,  combinée  avec  le  niveau  de  la  coupe? 


(  !>ir>  ) 

CiiAP.  III.  —  Relations  géologiques  entre  te  système  fiouil- 
1er  de  la  province  de  Liège  et  les  systèmes  allemands 
de  notre  frontière  Est  et  Nord-Est. 

Dans  le  prolongement  du  bassin  méridional  que  forment 
les  couches  du  groupe  des  plateaux  de  Hervé,  se  trouve 
sur  le  territoire  prussien  la  concession  de  Sybilla,  dans  la- 
quelle on  a  reconnu  récemment  trois  couches  de  houille 
terreuse  et  inexploitable.  Le  tracé  de  ces  couches  montre 
l'origine  du  bassin  d'EschAveiler.  L'espace  compris  entre 
cette  concession  et  celle  de  Houlteau  est  occupé  par  une 
selle  stérile  qui  est  la  base  de  la  formation  houillère,  et 
des  deux  côtés  de  laquelle  Tennoyage  a  lieu  vers  TEst,  en 
Prusse,  et  vers  l'Ouest,  dans  notre  pays. 

II  est  digne  de  remarque  —  et  l'auteur  insiste  avec  rai- 
son sur  ce  fait  —  que  le  nombre  des  couches  de  houille  du 
bassin  d'Escliweiler  est  le  même  que  dans  le  bassin  de 
Liège.  On  se  rappelle  que  l'auteur  en  admet  47  :  Clère , 
dès  1*814,  en  avait  reconnu  46  chez  nos  voisins. 

L'auteur  cherche  ensuite  à  montrer  que  le  bassin  de  la 
Ruhr  (je  ne  sais  si  ce  nom  est  exact)  est  également  en 
rapport  avec  le  nôtre;  voici  comment.  «  Si,  dit-il,  comme 
»  je  crois  l'avoir  prouvé,  du  moins  avec  de  grandes  pré- 
»  somptions,  un  bassin  inconnu  existe  entre  Visé  et  Horion- 
»  Hozémont,  il  est  plus  que  probable  que  le  versant  Est 
»  du  soulèvement  calcaire  de  Visé  est  à  son  tour  le  point 
»  originaire  d'assises  houillères  plongeant  en  bassin  vers 
»  l'Est,  de  même  que,  dans  les  concessions  de  Biquet- 
»  Gorée,  elles  existent  et  plongent  symétriquement  vers 
»    l'Ouest.  » 

«  Il  en  résulterait  que  le  Limbourg  belge  renfermerait 


r  9ii  ) 

»  dans  sa  partie  orientale  la  pointe  soulevée  cl\ni  bassin 
»  dont  la  richesse  se  développerait  vers  le  Limbourg  hol- 
»  landais  et  TAllemagne.  Ces  prévisions  seraient  confir- 
»  mées  si,  comme  on  l'a  rapporté,  des  sondages  ont  fourni 
)>  dans  cette  zone  la  découverte  de  couches  de  houille.  » 
Malheureusement  on  n'a  pu  obtenir  de  renseignements 
positifs.  Partant  de  ce  qu'on  sait,  l'auteur  explique  le  tracé 
qu'il  a  représenté  sur  sa  nouvelle  carte  n"*  2,  à  laquelle  se 
rapportent  les  coupes  de  la  planche  n°  3,  et  d'où  résulte, 
dit-il,  pour  le  Limbourg  hollandais,  l'espérance  de 
richesses  en  houille  qu'il  avait  pressenties  dans  son  pre- 
mier mémoire.  Il  m'a  paru  que  la  manière  ingénieuse  dont 
il  explique  les  résultats  des  différents  sondages  connus, 
résultats  tantôt  heureux,  tantôt  défavorables,  mérite  toute 
considération ,  et  parle  en  faveur  des  idées  de  l'auteur  sur 
cette  région. 

A  ce  chapitre  sont  en  outre  annexées  une  planche  repré- 
sentant les  travaux  de  Sybilla,  avec  raccordement  et  coupe; 
puis  une  coupe  horizontale  et  une  coupe  verticale  du  bassin 
houillerd'Eschweiler,  coupes  extraites  du  grand  ouvrage  de 
Geinitz,  auquel,  le  cas  échéant,  il  sufïirait  de  renvoyer. 

Chap.  fV.  —  Desci'iption  minéralogique 
et  paléontolofjiqiie. 

L'auteur  ajoute  ici  à  son  ancien  chap.  lU  une  introduc- 
tion historique  à  l'occasion  de  laquelle  il  décrit  les  diverses 
roches  qui  se  rencontrent  dans  notre  système  honiller. 
Cette  dernière  partie,  extraite  presque  entièrement  du 
mémoire  couronné  de  Dumont,  ne  présente  pas  un  grand 
intérêt  de  nouveauté.  On  pourrait  remplacer  l'expression 
de  quartz  grenu  par  celle  de  quartzile  et  indiquer  comme 


(  915  ) 

cornets  calcaires  emboîtés  les  corps  mentionnés  par 
Dumont  comme  polypiers  (?)  clans  l'ampclite. 

Celle  inlroduclion,  —  dont  j'approuve  l'addition,  — 
appelle  cependant  quelques  observations. 

L'auteur  rapporte  assez  en  détail  ce  qu'on  sait  au  sujet 
des  fossiles  animaux  qui  ont  été  rencontrés  dans  notre  for- 
mation houillère.  Je  crois  que  cette  partie  pourrait  être 
abrégée;  mais  j'aurais  désiré  la  voir  résumée  en  un  tableau 
indiquant  pour  chaque  espèce  les  lieux  et  les  niveaux  où 
elle  a  été  citée,  el  les  auteurs  qui  en  ont  parlé.  11  en  est  à 
peu  près  de  même  pour  les  plantes.  La  liste  de  l'auteur 
est  singulièrement  incomplète  :  il  aurait  trouvé  beaucoup 
plus  dans  VAbrégé  de  géologie  de  d'Omalius  ou  dans  mon 
Prodrome  d'une  descriplion  géologique  de  la  Belgique.  Je 
lui  conseillerais  de  reproduire  la  liste  donnée  par  M.  Crépin 
dans  Patria  belgica;  et  comme  il  annonce  qu'il  donnera, 
à  l'occasion,  des  renseignements  sur  le  gisement  exact  de 
plusieurs  espèces,  il  ferait  chose  utile  en  réunissant  ces 
indications  en  un  tableau. 

L'auteur  s'occupe  longuement  des  rognons  de  sidérose, 
sans  en  séparer  convenablement  ces  grosses  concrétions 
que  nos  mineurs  désignent  sous  le  nom  de  cloches  et  qui 
conservent  la  trace  de  la  stratification  des  couches  qui  les 
renfermenl,  tandis  que  les  rognons  sont  formés  d'éléments 
concentriques.  Ceux-ci  se  rencontrent  ordinairement  au 
mur  des  couches  de  houille ,  plus  rarement  dans  les 
couches  stériles  ou  au  toit,  très-rarement  sous  la  couche 
de  houille  elle-même  (Macy  Veine  et  laie  du  mur  de 
Lairesse).  Un  tableau  réunit  tous  les  cas  connus  (1). 


(1)  Pourquoi  les  numéros  de  ce  tableau  ne  se  suivent-ils  pas  dans  leur 
ordre  naturel  ? 


(  916  ) 

Il  semble  à  l'auteur  qu'une  loi  générale  a  présidé  à  la 
dissémination  de  ces  rognons.  Il  attribue  leur  formation  à 
des  courants  thermo-électriques,  circulant  dans  la  croûte 
solide  du  globe.  Le  plus  grand  nombre  se  trouve  au  mur 
à  cause  de  circonstances  tenant  à  des  déluges  diluviens 
que  je  ne  comprends  pas  bien  :  «  Pendant  chaque  période 
»  diluvienne  correspondant  à  la  formation  d'une  couche 
»  de  houille,  les  dépôts  inférieurs  prenaient  une  consis- 
»  lance  pâteuse  dans  un  espace  de  temps  relativement 
»  court,  grâce  à  la  pression  des  dépôts  successifs.  Ceux, 
»  au  contraire,  qui  se  constituaient  à  Tépoque  terminale 
»  d'un  déluge,  conservaient  leur  semi-fluidité  pendant  un 
»  temps  plus  long.  Il  en  résulte  que  les  phénomènes  de 
»  transport  moléculaire  précités  ne  pouvaient  se  produire 
»  spécialement  que  pendant  cette  dernière  période,  à 
»  laquelle  correspond  le  dépôt  constituant  spécialement 
»  le  mur  et  accessoirement  le  toit  d'une  couche.  Nous 
»  pourrions  en  conclure  que  les  slampes,  autres  que  le  toit 
»  et  le  mur,  dans  lesquelles  on  trouve  également  des 
»  rognons  de  fer  carbonate,  signalent,  dans  la  période  du 
»  déluge  houiller  correspondant,  une  intermittence.  » 

Voici  pourquoi  le  fer  est  à  l'état  de  carbonate  :  «  Les 
»  dépôts  formant  limite  d'un  déluge  sont  demeurés  plus 
»  longtemps  que  tous  autres  exposés  aux  influences  d'une 
»  atmosphère  renfermant  en  grandes  proportions  de 
»  l'acide  carbonique...  Les  parties  du  dépôt  soustraites  à 
»  cette  influence  ont,  au  contraire,  conservé  le  métal 
D  disséminé  dans  la  masse  à  l'état  d'oxyde. 

»  La  rencontre  de  ces  rognons  vient  corroborer  la 
»  théorie  généralement  admise  sur  le  mode  originaire  de 
»  la  houille  par  déluges  périodiques,  engloutissant  succès- 
»  sivement  des  débris  de  végétaux  ,  recouverts  ensuite  de 
»  la  vase  plus  ou  moins  argileuse  ou  sableuse.  j> 


(  -^'7  ) 

Il  y  a  chez  Fauteur  —  on  le  voit  en  beaucoup  d'endroits 
de  son  travail  —  une  grande  propension  à  chercher  la 
cause  de  tout.  Je  suis  loin  de  l'en  blâmer;  mais,  appelé  à 
donner  un  avis  sur  ces  théories,  je  pense  qu'il  n'a  pas  été 
heureux  dans  ses  essais  d'innovation. 

Le  dernier  paragraphe  que  je  viens  de  transcrire  m'en- 
gage à  rappeler  l'endroit  du  mémoire  précédent  où  il  est 
question  du  mode  de  formation  de  la  houille.  A  propos 
des  variations  dans  l'épaisseur  des  couches  de  charbon  de 
terre,  l'auteur  dit  que  ,  «  théoriquement,  il  résulterait  du 
»  mode  de  génération  adopté  que,  sur  un  grand  dévelop- 
»  pement,  tout  au  moins,  une  même  couche  de  houille 
D  doit  conserver  une  puissance  et  une  composition  uni- 
»  forme.  » 

Cela  peut  dépendre  de  la  théorie  que  l'on  adopte;  pour 
moi,  cette  conséquence  n'est  point  nécessaire.  On  croirait 
à  la  lecture  de  ce  qui  suit,  que  l'auteur  n'a  pas  d'idée  fort 
nette  de  la  théorie  adoptée,  tant  certains  passages  parais- 
sent s'appliquer  à  l'une,  tandis  que  d'autres  semblent 
s'appliquer  à  l'autre.  Aussi  je  pense  que  l'auteur  devrait 
exposer  succinctement,  mais  nettement,  la  théorie  qu'il 
adopte  et  sur  laquelle  il  s'appuie. 

«  On  a  généralement  considéré  les  horizons  géologiques 
»  (?)  sur  lesquels  se  déposaient  (?)  les  couches  végétales 
»  qui  devaient  donner  naissance  à  la  houille,  comme  for- 
»  mant  d'immenses  bassins  réguliers.  On  pourrait  cepen- 
»  dant  admettre  que  ces  bassins  étaient  légèrement 
»  ondulés  en  une  foule  de  points.  Ces  ondulations  étaient 
»  le  résultat  des  mouvements  en  quelque  sorte  continuels 
T>  auxquels  l'écorce  du  globe  était  soumise,  à  l'origine 
»  surtout. 

»  Si  donc  on  suppose  que  les  couches  végétales  se 


(  918) 
»  soient  déposées  dans  un  bassin  en  quelque  sorte  mobile, 
j>  se  plissant  légèrement  en  certains  points,  on  en  conclut 
»  que  l'épaisseur  d'un  dépôt  isolé,  en  voie  de  formation, 
»  a  été  plus  notable  dans  une  partie  déprimée  que  dans 
»  une  partie  surélevée.  i>  Ceci  n'est  pas  sûr.  En  tout  cas, 
ce  passage  me  paraît  se  rapporter  à  la  théorie  du  char- 
riage. 

»  D'autre  part,  la  végétation  des  âges  houillers  s'ar- 
»  rétait  dès  que  l'immersion  sous  le  niveau  des  eaux  s'opé- 
»  rait.  »  Voilà  bien  la  théorie  des  tourbières. 

»  Si  les  déluges  successifs  qui  ont  amené  des  dépôts 
»  arénacés  recouvrant  successivement  les  couches  formées, 
»  se  sont  opérés  sur  des  horizons  plus  ou  moins  ondulés, 
»  les  phénomènes  ci-dessus  décrits  ont  pu  se  mani- 
»  fester.  » 

Je  doute  que  l'auteur  trouve  beaucoup  de  partisans  de 
ces  déluges  successifs. 

Dans  son  dernier  chapitre,  Conclusions,  il  ajoute,  à  l'oc- 
casion des  grès  que  Ton  rencontre  partout,  situés  toujours 
à  une  hauteur  à  peu  près  égale,  d'où  l'on  peut  conclure 
que  ceux  de  chaque  niveau  sont  contemporains  :  «  cette 
D  conclusion  vient  à  l'appui  de  la  théorie  ordinaire  de  la 
»  formation  de  la  houille.  On  a  pu  lui  objecter  le  grand 
»  nombre  de  déluges  survenus  pendant  la  formation  suc- 
»  cessive  de  plus  de  quatre-vingts  couches  de  houille,  mais 
D  ce  nombre  se  réduisant  de  plus  de  moitié,  l'objection 
ï>  perd  ainsi  une  partie  de  sa  valeur.  » 

Pour  en  revenir  à  l'introduction  de  notre  chap.  IV,  la 
description  minéralogique  de  nos  diverses  variétés  de 
houille  vient  ensuite,  mais  tout  à  fait  écourtée;  puis 
l'auteur  rappelle  ce  qu'on  sait  des  eaux  salées  qui  ont  été 
rencontrées  dans  notre  formation  houillère. 


^  (  919  ) 

Vient  ensuite,  pour  compléter  ce  chapitre  IV,  le  cha- 
pitre 111  de  l'ancien  mémoire.  Aux  observations  que  j'ai 
présentées,  il  y  a  deux  ans,  j'ajoute  que  l'auteur  ferait 
chose  utile  en  donnant,  dans  ses  listes  de  concessions  des 
quatre  groupes,  l'indication  des  communes  sur  lesquelles 
elles  se  trouvent.  En  second  lieu ,  l'auteur  a  joint  à  son 
texte,  à  l'occasion  de  la  couche  Cinq-Pieds,  une  coupe  en 
traits  bleus,  rouges  et  noirs,  laquelle  a  grand  besoin  d'ex- 
plications, car  je  dois  avouer  ({u'elle  m'a  laissé  beaucoup 
d'obscurités. 

Nous  arrivons  au  chapitre  V,  l'ancien  chapitre  IV,  Re- 
cherches  synonymiqiies  sur  les  quatre  groupes,  \iom  lequel 
je  n'ai  rien  à  modifier  dans  mon  précédent  rapport.  Vient 
ensuite  un  chapitre  nouveau. 

Chap.  VI.  Discussion,  au  point  de  vue  synonymique,  de 
la  nomenclature  des  couches  adoptée  par  Dumont. 

L'auteur  fait  d'abord  observer  qu'à  l'époque  à  laquelle 
Dumont  publia  son  remarquable  travail  sur  notre  bassin 
houiller,  on  ne  connaissait  rien  des  deux  branches  de  la 
faille  de  Seraiug,  de  la  faille  eifelienne  et  du  prolongement 
de  la  faille  de  Saint-Gilles  entre  Wandre  et  Cheratte.  On 
devait  donc  considérer  comme  distinctes  les  mêmes  cou- 
ches situées  de  chaque  côté  de  ces  dérangements  ignorés; 
aussi  les  mineurs  leur  donnaient  des  noms  particuliers. 
Telle  est  la  principale  cause  du  nombre  élevé  de  couches 
admis  par  Dumont.  L'auteur  donne  ensuite  le  tableau  des 
groupes  établis  par  cet  illustre  géologue  et  des  couches 
qu'il  reconnaissait  dans  chacun  ,  et  qu'il  réunissait  en  trois 
étages. 

a  Si  l'on  dresse,  dit  l'auteur,  d'après  l'opinion  qu'il  for- 
»  mule,  le  tableau  de  superposition  de  chacun  de  ses 
»  groupes  en  rangeant  ces  derniers  dans  l'étage  corres- 


(  920  ) 
»  pondant  qu'il  leur  attribue,  sans  nomenclature  ni  con- 
D  cordance  synonymique  précise,  on  arrive  aux  résultats 
D  suivants.  » 

«  Étage  supérieur En  tout  51  couches  au  maximum, 

D  dont  23  au  maximum  sont  exploitables, c'est-à-dire,  ont 
»  au  moins  0™,40.  » 

c<  Étage  moyen En  tout  21  couches  au  maximum, 

»  dont  18  au  maximum  sont  exploitables.  » 

«  Étage  inférieur En  tout  31  couches  dont  25  sont 

j>  exploitables.  » 

Donc  un  total  de  83  couches  dont  66  sont  exploitables. 
C'est  ce  dernier  nombre,  notons-le  bien,  que  l'auteur  a 
réduit  à  47,  et  il  doit  chercher  la  cause  de  cette  différence. 
Il  rappelle  textuellement  comment  Dumont  a  établi  ses 
calculs.  Des  faits  sur  lesquels  ce  savant  s'appuyait,  les  uns 
restent  acquis,  d'autres  sont  controuvés,  d'autres  enfin  res- 
tent hypothétiques.  L'étage  supérieur  de  Dumont  est  cor- 
rect pour  le  groupe  du  Nord,  mais  il  doit  être  modifié  dans 
le  groupe  du  Centre.  En  effet,  Dumont  admettait  que  la 
couche  Hareng  est  la  même  que  la  Petite  Veine  de  Mons  : 
or,  l'auteur  ayant  établi  que  le  grès  sous  Chaineux  (Centre) 
est  le  même  que  le  grès  sous  Grande  Veine  des  Dames 
(Nord),  la  synonymie  acceptée  par  Dumontest  évidemment 
erronée,  d'où  il  suit  qu'il  y  a  erreur  manifeste  dans  le 
nombre  de  63  couches  admises  au-dessus  du  grès  de  Flé- 
malle. 

De  même,  la  couche  Grande  Dacque  est  reconnue  être 
rOlyphon,  comme  Dumont  l'admettait;  mais  Diamant,  de 
la  Chartreuse,  n'est  pas  l'Olyphon,  du  Val-Benoît,  qui  cor- 
respond à  Poignée  d'Or,  de  la  Chartreuse.  Le  grès  sous 
Diamant,  que  Dumont  raccordait  au  grès  de  Flémalle,  est 
donc  de  beaucoup  inférieur  à  ce  dernier. 


(  '^'^1  ) 

Quant  au  groupe  des  plateaux  de  Hervé,  il  était  si  peu 
connu  en  1850  que  les  erreurs  ne  doivent  point  sur- 
prendre. 

L'auteur  cherche  ensuite  à  prouver  que  la  nomenclature 
de  Dumont  présente  de  doubles  emplois  et  que  l'ordre  de 
superposition  des  couches,  tel  qu'il  résulte  des  tableaux  de 
ce  savant,  renferme  des  inexactitudes.  Il  m'est  impossible 
de  résumer  cette  discussion.  Je  l'ai  étudiée  avec  soin,  et  je 
dois  dire  que  l'auteur  me  paraît  avoir  réussi  à  établir  l'exac- 
titude de  ses  vues,  au  moins  dans  la  plupart  des  cas. 

Il  arrive  ainsi  à  établir  les  tableaux  rectifiés  des  trois 
étages  de  Dumont.  Il  obtient  de  la  sorte  : 

Étage  supérieur  :  22  couches  exploitables  au  lieu  de  28  fDumont). 
Étage  moyen  :    14        »  »  »  18        » 

Étage  inférieur  :  11        »  »  »         23       » 

Total  :       47  66 

L'auteur  donne  ensuite  les  tableaux  rectifiés  de  la  suc- 
cession des  couches  dans  les  16  groupes  de  Dumont,  tout 
en  reconnaissant  que  cette  division  en  16  groupes  n'a  plus 
d'importance  aujourd'hui,  la  division  en  quatre  groupes, 
limités  par  les  grandes  dislocations  étant  suffisante.  Il 
maintient  donc  le  tableau  synonymique  qu'il  a  donné  dans 
son  premier  mémoire  et  qui  est  tout  à  fait  neuf. 

Chap.  VIL  —  Conclusions. 

Ce  chapitre  est  emprunté  à  l'ancien  mémoire,  et  je  n'ai 
rien  à  ajouter  à  ce  que  j'en  ai  dit,  il  y  a  deux  ans. 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  o9 


922  ) 


II 


Le  second  mémoire  a  pour  épigraphe  :  «  la  science  n'est 
»  pas  œuvre  d'imagination ,  mais  d'observation ,  de  calcul 
»  et  de  réflexion.  »  Dans  son  introduction,  l'auteur  nous 
apprend  qu'il  conserve  la  classification  de  Dumont  et  donne 
à  l'expression  g  système  houiller  »  le  même  sens  que  lui 
donnait  ce  savant  maître  et  que  nous  avions  dans  l'esprit 
lorsque  nous  avons  proposé  la  question.  Nous  n'avons  pas 
à  discuter  les  motifs  qu'il  fait  valoir;  nous  allons  le  suivre 
dans  les  diverses  parties  de  son  travail. 

Le  premier  chapitre  est  consacré  aux  Généralités  sur  la 
formation  de  la  houille  et  des  bassins  houillers.  Admettant 
l'origine  végétale  de  la  houille,  l'auteur  insiste  sur  les  rap- 
ports intimes  qui  relient  tous  les  combustibles  fossiles,  de- 
puis la  tourbe  jusqu'à  l'anthracite,  et  il  reproduit  à  l'appui 
quelques  analyses,  auxquelles  il  ajoute  certaines  considé- 
rations plus  ou  moins  fondées  sur  les  relations  qui  existent 
entre  cette  série  de  produits  naturels  et  celle  des  produits 
de  la  carbonisation  du  bois  en  vases  clos.  Il  n'y  a  là  rien  de 
neuf  ou  de  complet. 

Examinant  de  plus  près  le  caractère  de  la  végétation 
houillère,  l'auteur  lui  trouve  de  grandes  analogies  avec 
celle  de  nos  tourbières,  puis  il  énumèreune  série  de  plantes 
de  notre  flore  actuelle  comme  ayant  servi  à  former  la 
houille.  Cette  ignorance  des  lois  les  plus  connues  de  la  pa- 
léontologie ne  nous  a  pas  médiocrement  étonné.  Après  cela, 
on  n'est  plus  surpris  de  voir  l'auteur  admettre  que  cette  an- 
cienne végétation  s'est  développée  sous  un  climat  analogue 


(  !>^^">  ) 
à  celui  de  nos  grandes  tourbières  modernes,  soit  par  une 
température  moyenne  de  6  à  8  degrés. 

L'auteur  ajoute  quelques  mots  pour  repousser  la  théorie 
du  charriage,  puis  pour  expliquer  la  transformation  des  ma- 
tières végétales  en  houille.  11  s'occupe  ensuite  de  la  forma- 
tion des  couches  de  houille  successives  et  des  couches  sté- 
riles qui  les  séparent  :  les  oscillations  du  sol  jouent  ici  un 
grand  rôle.  U  en  résulte  que  les  couches  étaient  originaire- 
ment horizontales  et  que  leurs  plissements  sont  postérieurs 
à  leur  formation.  D'autre  part,  les  conditions  qui  ont  pré- 
sidé à  la  végétation  houillère,  expliquent  pourquoi  ces 
anciennes  tourbières  ne  se  trouveraient  que  dans  la  zone 
tempérée.  Ici  l'auteur  est  fort  incomplètement  renseigné 
sur  l'extension  géographique  des  bassins  houillers. 

Le  deuxième  chapitre  est  intitulé  Situation  géogra- 
phique du  bassin  de  Liège.  L'auteur  ne  voit  aucun  motif 
pour  supposer  à  ce  bassin  une  nouvelle  extension  au  nord 
de  Haccourt;  il  conserve  donc  la  délimitation  indiquée  par 
Dumont,  sauf  qu'il  y  introduit,  pour  les  environs  de  Visé, 
les  indications  fournies  par  la  petite  carte  de  M.  Horion.  Les 
trois  ou  quatre  pages  consacrées  à  l'indication  de  ces  limites 
ne  sont  intelligibles  qu'à  l'aide  d'une  carte  géographique, 
et  l'inspection  de  la  carte  géologique  de  Dumont  en  apprend 
davantage,  de  sorte  que  ces  pages  pourraient  être  suppri- 
mées sans  inconvénient  sérieux. 

Suivent  quelques  données  sur  l'altitude  des  affleure- 
ments du  système  houiller  et  de  la  Meuse,  données  incom- 
plètes, parfois  même  peu  exactes;  par  exemple,  la  cote  du 
zéro  du  pont  des  Arches,  à  Liège,  n'est  pas  60  mètres, 
mais  5o.  La  profondeur  du  bassin  houiller  serait  de  HOO 
mètres  en  ce  point;  son  épaisseur  maximum  étant,  d'après 


(  924  ) 

les  coupes  de  l'auteur,  de  1400  raèlres  jusqu'à  la  dernière 
couche  exploitable. 

Le  troisième  chapitre  a  pour  titre  Généralilés  minera- 
logiques  et  géologiques.  L'auteur  considère  la  séparation  de 
l'étage  inférieur  comme  peu  nette  et  peu  fondée,  ce  qui  est 
affaire  d'appréciation,  et  il  signale  avec  raison  son  absence 
en  bien  des  points.  Il  expose  en  détail  la  disposition  géo- 
graphique de  cet  étage;  il  rapporte  une  division  en  trois 
assises,  par  M.  Horion;  puis  il  donne  quelques  renseigne- 
ments sur  les  gîtes  métallifères  qui  sont  venus  s'intercaler 
au  contact  du  calcaire  carbonifère,  renseignements  dépa- 
rés, çà  et  là,  par  quelques  inexactitudes;  enfin,  il  passe  à 
la  description  des  roches,  ampélite,  phlhanite,  grès  ou 
quartzile,  et  des  minéraux  accidentels,  alun  de  plume, 
gypse,  chaux  carbonalée  fétide,  etc.  A  cette  occasion, 
quelques  mots  sont  consacrés  à  l'assimilation  de  cet  étage 
au  milhlone  gril  des  géologuesanglais.  L'auteur  donne  une 
analyse  d'ampélite  alunifère  et  une  autre  d'ampélite  graphi- 
que, variété  tout  à  fait  accidentelle,  lesquelles  auraient  été 
exécutées  au  laboratoire  de  l'École  des  mines  de  Paris,  il 
ne  dit  pas  à  quelle  occasion;  il  rapporte  au  phthanite  des 
cristaux  de  quartz  enfumé;  il  admet  que  le  phthanite  ne 
se  décolore  pas  au  feu  ;  enfin  il  traite  de  tous  les  miné- 
raux des  ampélites.  Il  décrit  à  tort  le  quartz  grenu  comme 
distinct  du  quartzite  et  il  fait  connaître,  sous  le  nom  de 
concrétions  schisteuses  ou  calcarifères,les  cornets  calcaires 
emboîtés  qui  furent  jadis  considérés  comme  polypiers. 

Vient  ensuiie  la  description  des  roches  de  l'étage  houil- 
1er  proprement  dit;  en  premier  lieu,  le  psammite,  qui  passe 
au  grès  et  est  plus  fréquemment  désigné  sous  ce  dernier 
nom.  Suivant  l'auteur,  il  passerait  vers  le  bas  à  un  conglo- 


(  Î)2S  ) 
mérat  à  gros  éléments,  dérivés  de  roches  antérieures, 
gneiss  ou  granité  :  il  est  probable  que  l'auteur  a  introduit 
ici  un  passage  emprunté  à  quelque  ancien  traité  de  pétro- 
graphie, mais  nullement  applicable  au  cas  présent.  11  a  ana- 
lysé 26  échantillons  de  ces  grès  :  il  est  regrettable  de  voir 
figurer  dans  ces  analyses  la  rubrique  «  autres  matières,  » 
sans  aucun  éclaircissement. 

Vient  ensuite  le  poudingue.  Ici  encore,  à  propos  de  la 
position  des  cailloux,  l'auteur  introduit  une  observation 
que  l'on  trouve  dans  les  ouvrages  de  géologie,  mais  qui  ne 
peut  s'appliquer  au  conglomérat  à  petits  éléments  qu'il  a  à 
faire  connaître.  I.a  description  du  schiste  n'est  pas  plus 
satisfaisante.  Tout  cela  vient  de  ce  que  l'auteur  entre- 
mêle les  caractères  généraux  de  ces  roches,  —  ce  qu'il 
pouvait  omettre,  —  avec  les  caractères  particuliers  des 
variétés  qu'il  avait  à  décrire. 

La  distinction  entre  les  schistes  du  toit  et  ceux  du  mur 
n'est  qu'ébauchée;  il  est  probable  d'ailleurs  qu'il  y  a  ici 
une  lacune  dans  la  copie. 

La  description  est  suivie  des  analyses  de  66  échantillons 
de  schiste  houiller  :  l'auteur  ferait  chose  utile  en  les  discu- 
tant. Ainsi,  nous  trouvons  que,  dans  ces  66  analyses,  la 
proportion  de  silice  varie  de  65,8  à  95,8  p.  "/o;  dans  48 
cas,  elle  est  comprise  entre  69  et  72  p.  °/o.  De  même,  la 
proportion  d'alumine  varie  de  11,5  à  50,9  p.  7o5  ^^^^ 
51  cas,  elle  est  comprise  entre  28  et  50  p.  7o.  Ces  résul- 
tats semblent  indiquer  une  composition  normale  corres- 
pondant à  la  formule  A|2  0^,  4  Si  O^;  résultat  intéressant, 
surtout  lorsqu'on  le  rapproche  de  la  composition  des  ar- 
giles plastiques  d'Andenne ,  que  j'ai  considérées  comme 
provenant  de  la  décomposition  des  schistes  houillers,  et 
dont  la  composition  serait  représentée,  dans  le  plus  grand 


(  926  ) 

nombre  des  cas ,  par  la  formule  Al^  0^,  5  Si  0-,  d'après  les 
nombreuses  analyses  rationnelles  exécutées  par  mon  ha- 
bile collègue,  M.  le  professeur  Chandelon,  qui  a  bien  voulu 
me  communiquer  ces  résultais. 

Nous  arrivons  au  paragraphe  le  plus  important,  consa- 
cré aux  propriétés  physiques  et  chimiques  de  nos  houilles. 
La  description  laisse  à  désirer,  surtout  au  point  de  vue 
de  Tordre;  mais  elle  est  accompagnée  d'une  centaine 
d'analyses (J),  avec  dosages  du  coke  et  des  cendres,  plus 
une  quarantaine  de  dosages  de  coke  et  de  cendres,  que 
Fauteur  discute  avec  soin.  11  en  résulte  que  nos  houilles 
renferment  : 

82,87  à  93,90  de  carbone, 
d,02  à    4,12  d'hydrogène, 
i,2o  à    7.10  d'oxygène  avec  azote, 
1,22  à  16,00  de  cendres. 

Le  rapport  des  matières  volatiles  aux  matières  fixes  est 
de  1  :  2,ol  pour  la  variété  la  plus  grasse  et  de  1  :  24,07 
pour  la  plus  maigre. 

D'après  ces  analyses,  l'auteur  croit  pouvoir  confirmer  la 
classification  proposée  récemment  par  M.  Hilt,  qui  divise 
les  houilles  de  la  Worms  comme  suit,  d'après  le  rapport 
entre  les  parties  volatiles  et  les  parties  fixes. 

1.  Houilles  maigres  anthraciteuses.    .    .    de  l  :  20         à  4  :  9. 

2.  »  demi-grasses  anciennes    .     .  »  1  :  9  »  1  :  o.o. 

3.  »  grasses  à  coke »  i  :  o,5  "1:2. 

4.  »  »      nouvelles »  1  :  2  »  1  :  1,5. 

o.  )'  demi-grasses  nouvelles     .    .  »  1  :  1,5  »  1  :  4,23. 

6.  »  maigres  nouvelles »  1  :  4.25  »  1  :  1,11. 

Mais  l'ingénieur  allemand  serait  allé  trop  loin  en  ajou- 


'i)  C'est  sans  doute  par  inadvertance  que.  dans  les  analyses,  l'auteur  inscrit  le 
carbone  cokéjié  :  il  me  paraît  qu'il  faut  lire  simplement  carbone. 


(  947  ) 

tant  que  la  loi  qu'il  croit  avoir  reconnue  est  suffisamment 
constante  pour  que  l'on  puisse,  dans  une  même  mine,  dé- 
terminer l'ordre  de  superposition  des  couches  d'après 
l'examen  des  rapports  ci-dessus.  A  ce  propos,  l'auteur  fait 
remarquer  que  les  couches  inférieures,  qui  sont  maigres 
au  nord  de  la  faille  de  Saint-Gilles,  fournissent  du  char- 
bon gras  au  midi  de  ce  grand  dérangement. 

Le  paragraphe  suivant  est  consacré  aux  minéraux  acci- 
dentels, fers  sulfurés,  limonite,  sidérite,  quartz,  pholé- 
rite,  chaux  carbonatée  simple,  ferrifère  ou  manganésifère  , 
anthracite.  C'est  sans  doute  par  erreur  de  rédaction  que  le 
fer  sulfuré  est  indiqué  comme  s'enflammantspontanément  : 
c'est  la  houille  pyriteuse  qui  est  dans  ce  cas  (1).  L'auteur 
donne  diverses  analyses ,  mais  sans  renseignements  sur 
l'origine  des  échantillons  analysés.  Il  y  aurait  encore  d'au- 
tres détails  à  relever  snr  ce  point.  Je  considère  aussi 
comme  méritant  confirmation  la  présence  du  quartz  hyalin 
en  lamelles  minces  entre  les  lits  charbonneux;  je  n'ai  ja- 
mais vu  que  de  la  calcite. 

La  plus  grande  partie  des  renseignement  contenus  dans 
ce  paragraphe  paraissent  empruntés  aux  mémoires  cou- 
ronnés de  Davreux  et  de  Dumont,  surtout  pour  ce  qui 
concerne  les  formes  cristallines  des  minéraux. 

Le  chapitre  suivant  est  intitulé  Géogénie^  soulèvements, 
stratifications  sous-jacentes.  L'auteur  n'hésite  pas  à  consi- 
dérer la  formation  houillère  comme  étendue  primitivement 
sur  toute  la  surface  occupée  aujourd'hui  par  le  terrain  an- 


(1)  Ce  qui  ne  m'empêche  pas  de  croire  que,  dans  beaucoup  de  cas,  l'inflam- 
ination  spontanée  est  déterminée  par  la  combustion  lente  de  l'hydrogène  carboné 
qui  se  dégage  dans  un  tas  de  houille. 


(  928  ) 

ihraxifère,  et  ayant  laissé  pour  témoins  de  son  existence 
les  petits  bassins  houillers  du  Condroz. 

Après  la  formation  du  système  houiller survint  le  soulè- 
vement en  masse  de  l'Ardenne  et  du  Condroz,  soulèvement 
dont  la  direction  est  indiquée  par  celle  des  grandes  failles 
qui  affectent  ce  système  ou  le  limitenl  au  Sud,  comme  par 
celle  des  ennoyagesdes  plis  nombreux  que  font  les  couches. 
Dans  notre  province,  celte  direction  est  sensiblement. 
N.E.-S.O.  L'auteur  insiste  sur  la  différence  d'intensité  du 
soulèvement  depuis  l'Ardenne  jusqu'à  la  Meuse,  et  il 
accompagne  ses  explications  de  diagrammes  qui  n'ont  pas 
réussi  à  m'en  donner  une  idée  parfaitement  nette;  en 
même  temps,  il  me  paraît  négliger  un  peu  le  refoulement 
de  l'Ardenne  vers  le  Nord. 

Ce  soulèvement  s'accompagna  de  dislocations  considé- 
rables, parmi  lesquelles  il  faut  citer  en  première  ligne 
celle  qui,  entre  Yvoz  et  Angleur,  a  mis  en  contact  les 
schistes  houillers  et  ceux  de  l'étage  du  poudingue  de  Bur- 
not.  Deux  failles  nouvelles  (auxquelles  l'auteur  rattache 
plus  loin  celles  qui  ont  été  observées  entre  Huy  et  Mo- 
dave),partent  deBeau-Fraiponl,  près  Chênée,et  de  Chaud- 
fontaine  pour  se  diriger  au  Nord-Est  et  elles  partagent  le 
bassin  de  Hervé  en  trois  parties.  Vient  ensuite  la  faille  de 
la  Vesdre,  que  l'auteur  indique  comme  reconnue  dans  les 
concessions  d'Angleur  et  du  Val-Benoît  :  sa  direction  se 
rapproche  de  celle  de  plusieurs  vallées  de  l'Ardenne,  et 
Ton  serait  ainsi  amené  à  la  considérer  comme  posté- 
rieure aux  failles  N.  E.  dont  il  vient  d'être  question  et  à 
la  rapporter  à  la  limite  entre  le  terrain  triasique  et  le  ju- 
rassique. 

D'autres  rides  se  sont  produites  transversalement  :  la 
première  sépare,  à  Samson,  notre  bassin  houiller  de  celui 


(  1)29  ) 
du  Hainant;  la  seconde  est  celle  de  la  région  comprise 
entre  la  Meuse  et  la  Vesdre,  et  la  troisième  se  montre  à 
notre  frontière  orientale,  entre  notre  bassin  houiller  et 
celui  d'Esclnveiler. 

L'auteur  considère  l'aflleurement  de  la  bande  silurienne 
duCondroz  comme  un  autre  résultat  du  grand  mouvement 
qui  plissa  nos  terrains  anciens  à  la  lin  de  la  période  carbo- 
nifère, et  il  fait  valoir  à  l'appui  de  cette  opinion  les  résul- 
tats auxquels  notre  honorable  confrère,  M.  Houzeau,  est 
arrivé,  il  y  a  une  vingtaine  d'années. 

Une  autre  faille  existe  dans  la  vallée  de  la  Meuse  en  aval 
de  Liège  et  elle  a  été  reconnue  en  divers  endroits.  C'est 
peut-être  le  prolongement  de  la  fracture  dans  laquelle 
rOurte  coule  en  aval  de  Durbuy,  et  sa  direction  est  sen- 
siblement celle  du  système  sardo-corse,  dont  M.  Houzeau 
a  également  signalé  Tinfluence  dans  cette  partie  de  notre 
pays. 

A  Hozémont,  le  système  houiller  repose  sur  un  calcaire 
que  M.  Gosselet  a  rapporté  au  calcaire  à  stringocéphales. 
On  n'y  observe  guère  l'étage  inférieur;  les  phthanites  et 
quartzites  par  lesquels  commence  la  formation,  doivent 
être  considérés  comme  des  accidents  dus  à  un  métamor- 
phisme local. 

Enfin  le  bord  méridional  de  la  formation  est  souvent 
renversé. 

L'auteur  rappelle  ensuite  que  d'Omalius  plaçait  ce 
grand  soulèvement  de  nos  terrains  anciens  à  la  limite 
entre  le  zechstein  et  le  grès  des  Vosges,  et  qu'il  insistait 
sur  le  changement  de  direction  de  ce  soulèvement,  de  part 
et  d'autre  d'une  ligne  allant  de  Namur  à  Rochefort,  vers 
rOuest.  jusque  dans  le  pays  de  Galles,  vers  le  Nord-Est, jus- 
qu'au Harz. 


(  950  ) 

Vient  ensuite  un  chapitre  intitulé  :  Accidents  et  déran- 
gements affectant  les  dépôts  houille rs.  L'auteur  y  établit 
deux  sections. 

A.  —  Accidents  contemporains  de  la  formation.  En  pre- 
mier lieu  viennent  les  variations  des  inlercalations  schis- 
teuses qui  divisent  souvent  les  couches  de  charbon  de 
terre  en  plusieurs  laies  :  leur  étude  est  importante  au  point 
de  vue  de  la  recherche  de  la  synonymie  des  couches.  Ces 
accidents  consistent  en  variation  de  puissance  des  inter- 
calations,  disparition  d'un  lit  schisteux  ou  production  de 
nouveaux  lits,  pouvant  aller  jusqu'à  séparer  par  plusieurs 
mètres  de  couches  stériles  une  laie  de  charbon  qui  devient 
ainsi  une  veinette  distincte;  remplacement  d'une  couche 
de  houille  par  une  série  de  veinettes;  diminution  de  puis- 
sance ou  disparition  d'une  couche.  Les  étreintes  sont  de 
même  nature  que  ces  derniers  accidents,  mais  elles  sont 
tout  à  fait  locales.  L'auteur  se  borne  à  indiquer  un  ou  deux 
exemples  de  chaque  cas,  renvoyant  pour  le  reste  aux  des- 
criptions des  diverses  couches. 

B.  —  Accidents  postérieurs  à  la  formation.  Ici  viennent 
se  placer  les  failles,  les  brouillages,  etc.,  au  voisinage  des- 
quels la  houille  est  souvent  fort  altérée.  Le  soulèvement 
qui  les  a  produits  s'est  opéré  à  une  époque  où  les  roches 
étaient  déjà  suffisamment  consolidées  pour  se  briser  fré- 
quemment dans  les  plis. 

Ce  mouvement  fut  une  combinaison  de  compression 
latérale,  donnant  lieu  aux  plissements,  et  de  soulèvement, 
produisant  les  failles. 

Ces  fractures  sont  générales  ou  locales.  Les  premières 
ont  produit  la  faille  eifelienne,  celle  de  Saint- Gilles,  etc.; 
les  secondes  n'ont  occasionné  que  des  dérangements  acces- 
soires, qui,  fréquemment,  ne  se  manifestent  qu'au  voisi- 


f  951  ) 
nage  du  plan  de  rupture.  On  rencontre  ces  dernières  dans 
presque  tous  les  cnnoyages,  et  leur  inclinaison,  qui  est 
généralement  celle  de  la  bissectrice  de  Tangle  du  bassin 
ou  de  la  selle,  est  rarement  inférieure  à  45".  E^nfin,  des 
fractures  dérivées  ont  été  provoquées  par  Tune  ou  l'autre 
des  cassures  précédentes,  sur  lesquelles  elles  viennent 
s'embrancher.  Tel  est  le  cas  pour  la  faille  de  Saint-Gilles, 
dont  la  lèvre  méridionale,  qui  forme  le  mur,  a  provoqué,  en 
se  relevant,  une  série  de  cassures  presque  horizontales  dans 
les  couches  du  toit.  A  la  Minerie,  au  contraire,  une  série 
de  trois  à  six  cassures  dérivées  verticales  vient  se  grefïèr 
sur  trois  failles  secondaires. 

Les  fractures  de  toute  catégorie  sont  parallèles  à  la  di- 
rection du  soulèvement  qui  les  a  produites.  Les  accidents 
contemporains  sont  donc  parallèles  entre  eux;  cependant 
cette  règle  est  moins  générale  pour  les  cassures  déri- 
vées. 

Partant  de  là,  l'auteur  reconnaît  trois  séries  de  frac- 
tures distinctes  dans  le  bassin  de  Liège  : 

l*'  Accidents  produits  par  le  grand  soulèvement  qui  a 
suivi  la  formation  houillère  et  qui  est  dirigé  E.20à  25'' N. 
Telles  sont  les  failles  eifelienne,  de  Saint-Gilles,  de  Se- 
raing,  des  Onhons,  de  Hervé,  de  Saint-Hadelin,  etc.,  avec 
les  cassures  dérivées  qui  s'y  rattachent  au  nord  de  la  faille 
de  Saint-Gilles,  à  l'Espérance  à  Herstal,  etc.,  etc.  Leurs 
directions  s'écartent  au  plus  de  5°  de  celle  du  soulève- 
ment; 

2°  Accidents  dirigés  N.-S.  Ce  sont  les  failles  de  Gaillard- 
Cheval,  de  Brouck,  de  Gilles  et  Pirotte,  de  Rhées,  de  la 
Meuse,  de  Cheratte-Wandre,  de  la  Minerie.  fndépendam- 
ment  de  leur  direction  ,  l'auteur  les  rattache  au  système 
sardo-corse  par  cette  raison  qu'on  les  rencontre  seulement 


(  932  ) 

dans  la  zone  parcourue  par  la  ride  que  M.  Houzeau  a 
reconnue  en  la  rapportant  à  ce  système  ; 

5**  Accidents  dirigés  vers  le  S.E.  et  rattachés  au  sys- 
tème du  Thiiringerwald.  Ce  sont  les  failles  du  Val-Benoît 
et  d'Angleur,  dont  la  direction,  reconnue  seulement  sur 
une  très-faible  longueur,  varie  de  11o°à  ISo*'. 

L'auteur  rapporte  ici  la  distinction  que  l'on  fait  souvent 
«  entre  les  failles, nom  sous  lequel  on  désigne  les  cassures 
avec  écartement  des  parois  et  terrain  de  remplissage,  et 
les  crains,  fractures  simples,  sans  écartement.  »  Je  con- 
state à  ce  sujet  que  la  dénivellation  des  parois,  caractère 
essentiel  de  toute  faille,  existe  dans  tous  les  accidents 
dont  il  est  question  ici;  et  j'aime  à  croire  que  c'est  par 
inadvertance  que  l'auteur  ne  l'a  pas  rappelée  dans  la  défi- 
nition ci-dessus,  qui  paraît  n'avoir  en  vue  que  la  distinc- 
tion à  introduire;  il  y  a  là  une  lacune  à  combler.  Quant  à 
cette  distinction  entre  faille  et  crain,  l'auteur,  avec  raison, 
n'y  attache  aucune  importance;  ce  qu'on  appelle  terrain 
de  remplissage  n'est  formé  le  plus  souvent  que  des  débris 
broyés  des  couches  recoupées  par  la  faille.  C'est  seulement 
vers  la  surface  que  ces  matériaux  incohérents  ont  pu  être 
enlevés  dans  certains  cas  par  des  phénomènes  diluviens 
qui  ont  introduit  des  cailloux  roulés,  des  graviers  et  d'au- 
tres matières  de  remplissage  proprement  dit.  On  remar- 
quera que  cette  introduction  de  matériaux  de  transport 
peut  se  présenter  jusqu'à  une  profondeur  de  100  mètres 
et  même  davantage. 

Viennent  ensuite  quelques  détails  intéressants  sur  Tes 
transformations  opérées  dans  ces  matériaux  de  remplis- 
sage par  des  infiltrations  d'eaux  chargées  de  calcaire,  etc. 

L'auteur  décrit  ensuite  avec  soin  les  modifications  qui 
résultent  de  la  multiplicité  des  cassures,  de  leur  obliquité 


(  953  ) 
variable  par  rapport  aux  couches  traversées,  etc.  Ainsi, 
telle  faille  présente  une  zone  bouleversée  d'une  centaine  de 
mètres  de  large  lorsqu'elle  traverse  les  couches  très-obli- 
quement, et  se  réduit  à  une  cassure  nette  lorsqu'elle  les 
recoupe  sous  un  angle  fort  ouvert.  Tantôt  le  toit,  tantôt  le 
mur  est  relevé  :  ce  dernier  cas  est  le  plus  général.  Le  pas- 
sage qui  suit,  et  qui  est  relatif  à  l'inflexion  des  couches  au 
voisinage  de  la  faille,  renferme  une  faute  de  copie  :  la  dis- 
position indiquée  ne  peut  s'appliquer  indifl'éremment  à 
l'abaissement  et  au  relèvement  du  toit  de  la  faille. 

A  propos  de  ces  accidents,  l'auteur  cite  de  nombreux 
exemples  des  variations  de  nature  du  charbon  qui  les 
accompagnent. 

Un  fait  important  à  noter,  c'est  quele  relief  du  sol  (dans 
les  parties  non  recouvertes  de  morts-terrains)  est  en  rap- 
port avec  les  failles.  La  plupart  des  vallées  qui  sillonnent 
notre  système  houiller,  sont  dues,  d'après  l'auteur,  à  des 
accidents  de  ce  genre.  Ainsi  le  vallon  de  Toute-Voie  est 
en  rapport  avec  la  faille  de  Saint-Gilles,  et  diverses  ondu- 
lations du  sol  des  concessions  de  la  Batterie  et  de  la 
Grande-Bacnure  sont  en  relation  avec  les  accidents  souter- 
rains qui  y  ont  été  constatés.  L'auteur  insiste  avec  raison 
sur  l'importance  de  ces  relations. 

Aux  failles  se  rattachent  les  brouillages,  «  amas  peu 
stratifiés  de  fragments  de  roc  ou  de  charbon  disposés  sans 
ordre,  et  provenant  sans  nul  doute  de  la  succession  d'une 
série  de  cassures  dérivées  aux  approches  d'une  fracture 
principale.  On  les  rencontre  également  entre  deux  frac- 
tures principales  ou  secondaires  assez  rapprochées.  »  L'au- 
teur en  cite  des  exemples.  Viennent  ensuite  les  rétrécisse- 
ments et  les  renflements,  accidents  corrélatifs,  dont  la  répé- 
tition donne  lieu  à  l'allure  en  chapelet,  et  qu'il  ne  faut  pas 


(  954  ) 

confondre  avec  les  étreintes,  dont  l'origine  est  contempo- 
raine de  la  formation,  tandis  qu'ils  sont  le  résultat  d'une 
action  dynamique  postérieure.  Viennent  ensuite  les  queu- 
vées  ou  doublages  de  veine  et  les  recoutelages^  accidents 
qui  ne  sont  guère  déflnis,  et  dont  les  exemples  mérite- 
raient quelques  figures  à  intercaler  dans  le  texte. 

Enfin  un  paragraphe  est  consacré  aux  altérations  qui  se 
présentent  dans  les  couches  de  houille  lorsqu'elles  arrivent 
à  la  surface  du  sol  ou  au  contact  des  morts-terrains. 

Le  chapitre  suivant  est  intitulé  Métamorphisme.  Les 
phéno^nènes  métamorphiques  sont  peu  prononcés  dans 
notre  bassin,  où  l'on  ne  rencontre  pas  de  roche  éruptive. 
La  chaleur  centrale  et  la  pression  des  couches  superposées 
sont  les  principaux  agents  à  considérer  ici.  On  peut  leur 
attribuer  la  nature  de  plus  en  plus  maigre  du  charbon  à 
mesure  que  l'on  descend  la  série  des  couches,  mais  cette 
loi  générale  présente  beaucoup  d'exceptions  locales  dont 
la  cause  nous  échappe.  La  relation  entre  ces  modifications 
de  la  houille  et  les  dérangements  a  été  signalée  plus  haut, 
mais  à  titre  de  coïncidence.  L'auteur  en  cite  des  exemples 
remarquables,  puis  il  recherche  si  l'observation  ne  fait 
pas  constater  des  zones  de  métamorphisme.  A  cet  égard 
il  fait  remarquer  que  la  houille  devient  de  plus  en  plus 
maigre  à  mesure  qu'on  s'avance  vers  l'est  du  bassin  (non 
compris  les  plateaux  de  Hervé);  ainsi,  la  grande  veine  de 
Cortils,  très-grasse  à  la  Haye,  est  devenue  entièrement 
maigre  à  la  Petite-Bacnure.  Stenaye  présente  une  modifi- 
cation analogue.  Ce  n'est  pas  le  résultat  d'une  différence 
de  gisement,  les  couches  étant  partout  en  plateures  au  nord 
de  la  faille  de  Sainl-Gilles.  L'auteur  arrive  donc  à  conclure 
que  le  métamorphisme  qui  a  donné  lieu  aux  charbons  mai- 


(93o) 
gres,  est  à  son  minimum  au  centre  du  bassin,  vers  Seraing, 
et  qu'il  augmente  graduellement,  à  partir  de  là,  dans  les 
deux  directions,  N.E.  et  S.O. 

Il  faut  remarquer  cependant  que  le  métamorphisme  dos 
couches  inférieures  est  moins  prononcé  aux  extrémités  du 
bassin  que  sur  son  bord  septentrional.  11  semblerait  donc 
être  en  rapport  avec  la  compression  qui  a  accompagné  le 
soulèvement  du  terrain  :  il  serait  à  son  minimum  aux 
points  les  moins  soulevés  et  augmenterait  progressivement 
vers  les  extrémités  du  bassin,  où  le  soulèvement  a  été  le 
plus  considérable.  Cette  influence  de  la  compression  par 
soulèvement  viendrait  s'ajouter  aux  deux  autres,  l'ancien- 
neté de  la  couche  et  la  masse  des  dépôts  qui  la  recouvrent. 
L'influence  de  l'allure  des  couches  tient  probablement  à 
ce  que  celte  action  des  masses  superposées  se  fait  sentir 
davantage  sur  une  couche  en  plateure  que  sur  une  couche 
en  dressant. 

En  commençant  le  chapitre  suivant,  Description  des 
couches,  l'auteur  nous  apprend  qu'il  existe  dans  notre  bas- 
sin de  Liège  55  couches  exploitables,  et  qu'il  les  numé- 
rotera en  partant  de  la  plus  ancienne.  C'est  donc  six  cou- 
ches de  plus  que  celles  qu'admet  son  concurrent;  mais  on 
doit  remarquer  qu'il  entend  par  couches  exploitables 
toutes  celles  qui  ont  donné  lieu  à  une  exploitation  conti- 
nue, tandis  que  l'ancien  concurrent  entend  par  là  celles 
qui  ont  au  moins  0,"'40  de  puissance.  Il  nous  semble  que 
les  deux  auteurs  sont  à  peu  près  d'accord  pour  Fensemble, 
quoiqu'il  y  ait  entre  eux  bien  des  divergences  sur  le  détail 
des  synonymies. 

Dans  cette  analyse,  nous  ne  pouvons  suivre  l'auteur  dans 
la  description  des  o5  couches  successives  dont  il  traite. 


(  936  ) 

Nous  ferons  remarquer,  d'une  manière  générale,  que  l'au- 
teur suit,  dans  un  grand  nombre  de  concessions,  la  couche 
qu'il  considère  comme  partout  la  même  et  qu'il  fait  con- 
naître'pour  chacune  sa  puissance,  sa  disposition,  etc.,  et 
la  nature  du  charbon  qu'elle  fournit.  Ces  descriptions  sont 
accompagnées  de  croquis;  toutefois  nous  les  trouvons  un 
peu  concises.  Ainsi  il  faudrait  à  l'occasion  indiquer  les 
houilles  dont  l'analyse  a  été  donnée  plus  haut. 

Le  chapitre  suivant  est  consacré  à  la  Description  des 
stampes  entre  les  diverses  couches  :  il  ne  se  prête  pas  mieux 
à  un  résumé. 

L'auteur  rapporte  qu'il  a  vu  souvent  le  nombre,  la  puis- 
sance et  la  nature  des  couches  stériles  comprises  entre 
deux  mêmes  couches  de  houille,  varier  dans  les  plus  larges 
limites,  même  pour  les  bancs  les  plus  caractéristiques  et 
pour  une  même  concession.  On  peut  juger  par  là  de  ce  qui 
doit  arriver  si  l'on  compare  deux  concessions  un  peu  dis- 
tantes. 

Je  présenterai  ici  quelques  observations  en  passant.  Je 
remarque  qu'un  grès  entre  les  couches  7  et  8  serait  rayé 
par  l'ongle.  A  propos  de  la  stampe  entre  les  couches  15 
et  14,  caractérisée  par  le  grès  de  Stenaye,  l'auteur  définit 
le  clavaij  silice  imprégnée  de  carbonate  de  fer;  ailleurs  le 
même  nom  local  de  clavai  est  donné  à  la  sphérosidérite. 
Qu'est-ce  aussi  qu'un  numéro,  et  en  quoi  diffère-t-il  d'une 
veinette?  Jusqu'à  quel  point  est-il  exact  de  dire  que  cer- 
tains schistes  sont  très-onctueux  au  toucher?  L'auteur 
renvoie  souvent  aux  analyses  de  schistes  qu'il  a  données; 
mais  ces  renvois  devraient  être  accompagnés  du  numéro 
d'ordre  de  l'analyse.  La  stampe  entre  les  couches  17  et  18 
est  très -caractéristique,  tant  par  sa  puissance  que  par 


(  957  ) 
le  grès  de  Flérnalle,  bien  que  l'auteur  ne  trouve  à  ce  grès 
aucun  caractère  pétrographique  spécial.  Je  ne  crois  pas 
exact  de  dire  que  ces  10  à  12  mètres  de  grès  ne  forment 
qu'un  banc.  Dans  la  description  de  la  stampe  entre  les 
couches  29  et  50,  une  confusion  analogue  se  remarque 
entre  les  termes  banc  et  assise. 

Le  sujet  du  chapitre  suivant  est  la  Description  des 
failles.  L'auteur  s'attache  particulièrement  à  exposer  les 
faits  connus  et  se  montre  beaucoup  plus  réservé  que  son 
concurrent  sur  les  conjectures  que  l'on  peut  faire  à  l'égard 
de  ce  qui  se  passe  dans  les  parties  encore  inexplorées  de 
notre  bassin.  Ce  chapitre  me  paraît  fort  bien  traité  et  mé- 
riter l'impression,  comme  celui  que  nous  avons  analysé 
plus  haut  sur  l'origine  et  la  classilication  de  ces  dérange- 
ments. L'analyse  de  ces  quatre-vingts  pages  in-folio  m'en- 
traînerait trop  loin  et  ne  présenterait  d'ailleurs  qu'une 
utilité  fort  restreinte.  Je  demanderai  seulement  à  faire 
remarquer  que,  pour  ce  qui  concerne  la  puissance  verti- 
cale de  la  faille,  l'auteur  se  borne  parfois  à  donner  le  dé- 
placement normal  aux  couches,  indication  qui  est  insuffi- 
sante à  elle  seule,  et  qui  ne  dispense  pas  de  calculer  le 
déplacement  vertical,  quand  on  connaît  l'inclinaison  des 
couches. 

Passant  ensuite  à  l'élude  de  Yallure  des  couches,  l'auteur 
aborde  la  description  des  coupes  verticales  qu'il  a  con- 
struites, au  nombre  de  vingt-cinq,  réparties  sur  toute  la 
longueur  du  bassin.  Leur  analyse  m'entraînerait  trop  loin  ; 
et  je  supprime,  pour  abréger,  quelques  observations  sans 
portée. 

L'auteur  nous  fait  ensuite  connaître  la  manière  sui- 
vant laquelle  il  a  cru  devoir  exécuter  le  Grand  pkui  d'as- 
semblage, an  720.000,  qu'il  a  joint  à  son  texte.  Cherchant 

2""''  SKitlE,  TOME  XL.  00 


(  958  ) 
avant  tout  à  rester  dans  la  limite  des  observations,  il  lui  a 
été  impossible  d'accepter  partout  un  niveau  uniforme. 
Ce  plan,  qui  représente  la  coupe  du  bassin  houiller  par  un 
plan  horizontal,  est  divisé  en  trois  zones.  Dans  la  première, 
ce  plan  horizontal  passe  au  niveau  de  la  Meuse  :  elle  com- 
prend le  bassin  de  Hervé  et  l'extrémité  S.O.du  bassin,  vers 
Huy;  le  seconde,  pour  laquelle  le  plan  de  coupe  passe  à 
SO  m.  sous  la  Meuse  à  Liège,  comprend  la  région  située  au 
nord  de  la  faille  de  Saint-Gilles,  jusqu'aux  failles  de  Rhées 
et  de  la  Grande-Bacnure  à  l'Est,  et  à  la  ligne  de  coupe  n"9 
à  rOuest(vers  la  concession  de  l'Arbre-Saint-Michel);  enfin 
la  troisième  zone,  pour  laquelle  le  plan  de  coupe  passe  à 
200  mètres  sous  la  Meuse,  comprend  particulièrement  le 
bassin  de  Seraing. 

A  cette  grande  carte,  qui  n'a  pas  moins  de  3  '/a  mètres 
de  long,  l'auteur  a  ajouté  trois  coupes  horizontales  à 
l'échelle  du  */ioo.ooo,  indiquant  les  limites  du  système  houil- 
ler et  le  trajet  des  principales  failles.  F^a  première  coupe 
passe  au  niveau  de  la  Meuse;  la  deuxième,  à  500  mètres, 
et  la  troisième,  à  1000  mètres  sous  ce  niveau.  Elles  pré- 
sentent beaucoup  d'intérêt,  mais  leur  reproduction  exigerait 
trois  grandes  planches. 

Enfin,  réunissant  les  données  géométriques,  fournies  par 
ces  diverses  coupes  verticales  ou  horizontales,  à  celles  que 
Ton  peut  tirer  de  l'étude  pélrographique  des  couches  de 
houille  et  des  stampes  intercalées,  l'auteur  a  dressé  une 
Grande  coupe  de  raccorde nienls  dans  laquelle  sont  graphi- 
quement représentés  les  principaux  faits  décrits  dans  les 
chapitres  consacrés  à  l'étude  des  couches  et  des  roches 
stériles  interposées  entre  elles.  Ce  tableau  résume  donc  la 
plus  grande  partie  de  ce  travail,  moins  ce  qui  concerne 
les  failles. 

D'après  les  recherches  de  l'auteur,  la  puissance  du  sys- 


(  939  ) 

lème  houiller  chez  nous  dépasserait  1150  mèlres  (nous 
croyons  avoir  lu  plus  haut  1400),  dont  la  moitié  supé- 
rieure renferme  les  couches  de  beaucoup  les  plus  nom- 
breuses, puisque  Cbèneux  ou  Slenaye,  qui  est  la  quator- 
zième, se  trouve  déjà  à  500  mètres  au-dessus  du  calcaire 
carbonifère. 

Le  chapitre  suivant  est  consacré  à  la  Comparaison  de 
ces  résultats  avec  ceux  auxquels  Dumont  était  parvenu 
en  1850.  L'auteur  passe  successivement  en  revue  les 
seize  groupes  que  Dumont  avait  proposés  et  il  explique 
pour  chacun  les  divergences  entre  ses  opinions  et  celles 
de  notre  maître.  Deux  causes  ont  surtout  contribué  à  les 
produire  :  la  première,  c'est  que  Dumont  a  compris  dans 
son  énumération  des  couches  non  exploitées  dont  notre 
auteur  n'a  pas  tenu  compte;  la  seconde,  c'est  que  Dumont, 
par  suite  de  renseignements  incomplets,  a  superposé,  sur 
une  notable  partie  de  leur  hauteur,  les  deux  séries  situées 
au  nord  et  au  sud  de  la  faille  de  Saint-Gilles.  En  somme, 
c'est  la  même  explication  que  celle  qui  a  été  proposée  par 
l'autre  concurrent. 

Vient  ensuite  VExamen  des  raccordements  et  des  séries 
de  couches  du  mémoire  présenté  an  concours  de  "1873. 
Comme  c'est  surtout  par  notre  rapport  que  Pauteur  a  eu 
connaissance  de  ces  résultats,  nous  croyons  devoir,  à  tout 
hasard,  analyser  ici  ce  cbapitre  avec  quelques  détails,  et 
signaler  les  divergences  principales  que  présentent  les 
recherches  des  deux  auteurs. 

Dans  le  groupe  du  Nord,  le  concurrent  de  1875  admet 
vingt-neuf  couches  seulement  sous  Maret;  notre  auteur  en 
trouve  dix  de  plus  jusqu'à  Boulotte,  qui  est  la  première 
pour  lui,  tandis  qu'elle  serait  seulement  la  troisième  pour 
son  concurrent.  Dans  le  groupe  du  Centre,  le  mémoire 


(  940  ) 
de  1875  admettait  quarante  et  une  couches  :  notre  auteur 
en  compte  quarante-cinq  dans  la  série  de  l'Espérance 
(Seraing),  d'Yvoz  et  des  environs  de  Huy,  et  quarante-huit, 
en  y  comprenant  la  série  de  Wandre,  Cheratte,  Abhoz  et 
Biquet-Gorée. 

Pour  le  groupe  du  Sud,  les  résultats  exposés  dans  le 
mémoire  de  1873  ont  été  trop  incomplètement  présentés 
dans  mon  rapport  pour  que  notre  auteur  pût  les  discuter. 
Il  signale,  entre  autres,  qu'il  y  a  sept  couches  sous  la 
veine  du  Tunnel  (Chartreuse),  tandis  que  son  concurrent 
n'en  comptait  que  cinq. 

C'est  dans  le  groupe  des  plateaux  de  Hervé  que  les 
divergences  sont  nombreuses  et  importantes.  Indépendam- 
ment de  l'allure  générale  des  couches  et  des  failles,  à  pro- 
pos desquelles  l'auteur  a  déjà  constaté  de  nombreux  dés- 
accords, il  en  trouve  un  grand  nombre  d'autres  dans  les 
synonymies  proposées,  il  y  a  deux  ans,  et  maintenues 
aujourd'hui.  Ainsi,  les  concessions  de  Hervé  et  du  Hasard 
présentent  des  couches  supérieures  à  celles  de  Crahay- 
Maireux.  Sotte  Veine  et  Veine  au  Charbon  ne  sont  qu'une 
seule  couche;  Seconde  Veine  des  Champs,  à  Wergifosse, 
n'est  autre  que  Sotte  Veine.  Au  Hasard,  plusieurs  couches 
sont  représentées  par  des  veinettes  dont  il  n'a  pas  été  tenu 
compte;  Jeanne  et  Camille  sont  la  même  couche;  Hasard 
n'est  pas  Louise,  des  Prés  de  Fléron.  Dans  cette  dernière 
concession.  Maréchal  et  Malgarnie  ne  forment  qu'une 
même  couche,  etc.;  Angélie  n'est  pas  Bien  Venue,  des 
Onhons,  mais  bien  Grande  Onhon.  Celle-ci,  à  son  tour, 
est  Grande  Veine,  et  Xhilette  est  Quatre  Poignées,  de 
Cowette-Rufin.  Dans  ce  dernier  charbonnage,  l'auteur  con- 
sidère comme  identiques,  respectivement, Quatre  Poignées 
et  Toussaint,  Gilles  et  Dure  Veine  ,  Grande  Grailette  et 
Grande  Veine.  Tandis  que  le  concurrent  de  1875  considère 


(  941  ) 
(irande  Grailette  comme  représentant  Dure  Veine,  du 
Fond  dos  Fawcs ,  notre  auteur  donne  à  la  première  de  ces 
couches  le  n*'  14  et  à  la  seconde  le  n"  21.  Celle-ci  ne  serait 
pas  Petite  Foxhalle,  ni  Petite  Delsemme,  pas  plus  que 
Grande  Veine  ne  serait  Grande  Delsemme  ni  Grande  Veine, 
des  Steppes:  ce  serait  Beaujardin.  La  Veine  des  Puits,  de 
Trou  Souris,  serait  Mald'accord,  de  Herman-Pixherotte, 
comme  Marnelte  est  la  même  que  Homvent,  Petite  Cal- 
haute  qu'Oiseau  de  Proie,  et  Pixherotle  que  Judée.  D'autre 
part.  Grande  Veine,  de  Nooz,  représente  Beaujardin,  de 
Trou  Souris.  La  concession  de  la  Basse -Ransy  se  rac- 
corde aux  précédentes  par  une  veinette  que  le  canal 
d'écoulement  de  Foxhalle  a  montrée  faisant  bassin  et 
qui  est  supérieure.  Petite  Foxhalle  est  la  même  couche 
que  Petite  Delsemme.  Pour  la  concession  des  Steppes, 
Grande  Veine  y  représenterait,  sauf  vérification  par  des 
travaux  tout  à  fait  récents.  Grande  Onhon,  desOnhons, 
Angélie,  des  Prés  de  Fléron  et  Grande  Veine,  de  Cowette- 
Ruhn.  D'un  autre  côté,  Bastin- Piquette  ou  Madame 
et  Dure  Veine,  de  Macy- Fond -Piquette,  ne  sont  au- 
tres que  Dure  Veine  et  Grande  Veine,  du  Fond  des  Fawes. 
Enfin,  les  couches  de  Melin  seraient  supérieures  à  celles 
de  la  Minerie  ;  la  Veine  au  Sable  ne  serait  pas  le  n**  8 
(Veine  du  Tunnel),  mais  len°  10;  et  Quatre  Jean  serait  le 
n°  14,  tandis  que  Douce  Veine,  de  la  Chartreuse,  serait 
len«  12. 

Notre  auteur  n'admet  pas,  comme  son  concurrent,  l'exis- 
tence de  six  horizons  de  grès  caractéristiques  dans  notre 
système  houiller  :  selon  lui,  il  y  a  une  vingtaine  d'horizons 
de  grès,  dont  ceux  de  Domina,  de  Maret,  de  Flémalle  et 
de  Stenaye  peuvent  seuls,  jusqu'à  un  certain  point,  être 
considérés  comme  caractéristiques. 

Lesdeux  concurrents  s'accordent  pour  assimiler  Grande 


(  94^2  ) 

Veine  des  Dames  à  Chêneux  et  à  Stenaye;  mais,  tandis 
que  celui  de  1873  raccorde  à  ces  dernières  Marnette,  du 
bassin  de  Hervé,  l'autre  les  rapporte  à  Beau  jardin.  De 
même,  ce  dernier  ne  regarde  pas  Cor  et  Houlleux  comme 
synonymes  de  iMagneumoxhon  et  de  Grande  Veine,  des 
Kessales;  il  rejette  de  même  la  plupart  des  raccordements 
que  j'ai  indiqués  à  la  fin  du  S*"  alinéa  de  la  page  21  de 
mon  rapport  précédent. 

Le  chapitre  suivant  renferme  la  Paléontologie  de  notre 
système  houiller.  Après  ce  que  nous  avons  dit  au  commen- 
cement de  ce  rapport,  on  ne  s'étonnera  pas  de  le  trouver 
tout  à  fait  insuffisant.  L'auteur  donne  d'abord  une  liste  pas- 
sable des  espèces  animales,  puis  il  se  borne  à  indiquer  les 
genres  de  plantes  dont  on  trouve  des  espèces  dans  le  sys- 
tème qui  nous  occupe.  Ce  qui  est  plus  intéressant,  c'est 
l'étude  de  la  répartition  des  fossiles  animaux  :  sur  ce  point, 
les  résultats  de  l'auteur  s'écartent  quelque  peu  de  ceux 
auxquels  M.  l'ingénieur  Malherbe  est  arrivé.  Ajoutons  d'ail- 
ieursque  les  gisements  connus  de  ces  fossiles  sont  trop  peu 
nombreux  pour  qu'on  puisse,  suivant  l'auteur,  qualifier  les 
niveaux  observés  d'horizons  paléontologiques.  Sous  le  béné- 
fice de  cette  observation,  il  établit  neuf  niveaux,  conformé- 
ment au  tableau  suivant  : 

Base  de  l'étage.  Hêtres. 

iN«  1,  au  loil  de  la  couche    6  distance  moyenne  200 

»  3,  » 

»  4,  » 

»  5,  » 

»  6,  )) 

»  7,  « 


jusqu'au  sommet  de  1  élage  200 


15 

)) 

200 

17 

» 

150 

28 

n 

190 

50 

25 

56 

80 

58 

25 

42 

85 

44 

55 

(  9«  ) 

[.e  premier  horizon  est  le  loil  de  la  couche  de  Hervé,  à  la 
iMinerie.  On  y  trouve  des  rognons  analogues  à  ceux  de 
Melin. 

Les  Goniatites  Lister i  du  toit  de  la  Veine  Madame  à  la 
Rochette,  sont  au  même  niveau,  ainsi  que,  probablement, 
ceux  du  charbonnage  de  Trou-Souris,  où  ils  provenaient 
sans  doute  du  toit  de  la  couche  Cinq  Poignées.  Orthoceras 
strigiUatum  de  Trou-Souris  appartient  probablement  au 
même  horizon,  ainsi  que  Cardinia  lellinaria^  de  Juj)iile. 
Les  rognons  fossilifères  du  Houileux  peuvent  se  rapporter 
à  celui-ci  ou  au  suivant. 

Le  deuxième  horizon  renferme  les  rognons  à  Goniatites 
Listeri  trouvés  au  toit  de  Macy  Veine  à  Melin,  et  probable- 
ment Aricula  papyracea  des  schistes  de  la  même  localité. 
Cardinia  acuta,  des  Grands  Makets,  appartient  à  cet 
horizon  ou  au  suivant. 

Le  troisième  horizon  comprend  huit  espèces  de  cardinies 
trouvées  au  toit  de  la  couche  Belle-au-Jour  dans  les  con- 
cessions du  Val-Benoît  et  du  Grand  Bac;  ainsi  que  celles  des 
schistes  compris  entre  Grand' Fontaine  et  Grande  Pouplou- 
rou,  à  Trembleur. 

Le  quatrième  horizon  ,  toit  de  Veine  de  Joie,  à  laHaye, 
est  marqué  par  la  présence  de  Mytilus  Wesmaelanns. 

Le  cinquième  horizon,  toit  de  Grande  Veine  des 
Champs,  à  Wergifosse,  montre  diverses  espèces  de  cardi- 
nles. 

Le  sixième  horizon,  toit  de  Plate  Veine,  à  Patience- 
Beaujonc  a  fourni  récemment  quelques  fossiles  à  M.  Firkel. 

Le  septième,  toit  de  Cinq  Pieds,  au  Gosson,  est  caracté- 
risé par  Cardinia  antiqua.  Les  espèces  du  même  genre 
signalées  dans  la  concession  de  la  Batterie,  appartiennent 
à  ce  niveau  ou  à  l'un  des  deux  suivants. 


(  944  ) 

Le  huitième  est  le  toit  de  la  veinette  Neppe  ou  Sar- 
lette,  que  l'on  doit  rattacher  a  la  formation  de  Grande- 
Veine,  de  Bonne-Fin  et  du  Horloz;  il  est  caractérisé  par 
Cardinia  omlis,  signalée  par  M.  R.  Malherbe. 

Enfin  le  neuvième  horizon  est  le  toit  de  la  couche  Rosier, 
des  concessions  de  la  Haye,  de  Bonne-Fin,  de  la  Batterie 
et  de  Gérard-Cloes. 

Le  dernier  chapitre  est  consacré  aux  petits  bassins  du 
Condroz;  il  ne  renferme  aucun  renseignement  nouveau,  ce 
qui  n'est  pas  surprenant,  puisque,  depuis  longtemps,  il  ne 
s'y  trouve  plus  aucune  exploitation. 

IIL 

L'impression  générale  que  laisse  l'étude  attentive  de  ces 
deux  grands  mémoires  est,  comme  nous  l'avons  dit  en 
commençant,  qu'ils  sont  l'œuvre  de  deux  ingénieurs  qui 
connaissent  bien  notre  bassin  houiller.  Si  les  auteurs 
s'étaient  strictement  renfermés  dans  la  question  telle 
qu'elle  était  posée,  ils  auraient  certainement  évité  la  plu- 
part des  critiques  que  nous  avons  dû  faire  lorsque  ils  se 
sont  aventurés  dans  le  champ  des  spéculations  relatives  à 
la  géogénie.  D'autre  part,  nous  ne  pouvons  nous  abstenir 
d'exprimer  le  regret  de  n'avoir  trouvé,  ni  chez  l'un  ni  chez 
l'autre,  de  nouvelles  données  de  nature  à  nous  aider  à 
établir  chez  nous  une  bonne  division  de  cette  formation 
et  à  la  raccorder  sûrement  aux  formations  analogues  de 
l'étranger. 

Il  résulte  de  là  que,  si  nous  croyons  qu'il  y  a  lieu  de 
récompenser  les  auteurs,  nous  pensons  aussi  qu'il  n'y  a 
pas  lieu  de  décerner  la  médaille  d'or.  Mais,  comme  une 


(  913  ) 
bonne  partie  de  la  récompense,  c'est  rhonneiirdc  la  pnbli- 
cation,  nous  avons  à  présentera  ce  sujet  deux  observations 
préalables. 

Ainsi  que  nous  l'avons  vu,  les  deux  concurrents  sont 
souvent  en  désaccord,  au  moins  pour  ce  qui  concerne  les 
portions  non  encore  explorées  du  bassin;  et  nous  avons 
déjà  dit  qu'il  nous  est  impossible  de  nous  prononcer 
entre  eux.  Nous  devons  ajouter  qu'une  des  raisons  qui 
nous  en  empêche,  c'est  que  les  coupes  du  second  concur- 
rent sont  tracées  en  traits  continus,  c'est-à-dire,  sans  dis- 
tinction entre  les  faits  positifs,  reconnus  par  l'exploitation, 
et  les  conjectures  plus  ou  moins  probables  que  l'on  peut 
faire  pour  les  régions  inexplorées.  A  notre  avis,  toute 
publication  de  carte  ou  de  coupe  doit  distinguer  avec  net- 
teté ces  deux  ordres  de  faits. 

Nous  tenons  d'autant  plus  à  dégager  notre  responsabi- 
lité —  et  en  même  temps  celle  de  l'Académie  —  qu'il 
s'agit  ici  d'une  question  intimeinent  liée  à  la  fortune 
publique.  Il  doit  être  bien  entendu  que  l'approbation  glo- 
bale donnée  à  ces  travaux  n'engage  les  rapporteurs  et 
l'Académie  sur  aucun  point  déterminé,  et  qu'on  ne  peut 
s'en  faire  un  titre  pour  lancer  dans  le  public  une  entreprise 
toujours  hasardeuse,  c'est-à-dire  pour  laquelle  les  action- 
naires ne  sauraient  être  trop  circonspects. 

Sous  le  bénéfice  de  celte  réserve,  et  après  en  avoir 
conféré  avec  nos  deux  savants  confrères,  nous  croyons 
devoir  proposer  la  publication  partielle  de  ces  deux  mé- 
moires et  des  cartes  et  plans  qui  les  accompagnent.  Leur 
publication  intégrale  exigerait  des  dizaines  de  milliers  de 
francs  :  il  faut  donc  supprimer  tout  ce  qui  n'est  pas  abso- 
lument indispensable;  mais,  quoi  qu'on  fasse,  les  frais  de 


(  946  ) 
publication  seront  assez  élevés  pour  qu'il  soit  impossible  à 
l'Académie  d'y  subvenir  avec  son  budget  ordinaire. 

Il  faudra  donc  demander  au  gouvernement  un  crédit 
spécial  que  légitime  suffisamment  l'importance  industrielle 
de  cette  question.  Les  Chambres  n'ont  jamais  refusé  leur 
appui  à  une  œuvre  exclusivement  scientifique  :  il  n'y  a  pas 
de  doute  qu'elles  accorderont  l'argent  nécessaire  pour  une 
publication  attendue  impatiemment  par  l'industrie  de 
notre  bassin  houiller. 

Cela  posé,  voici,  à  notre  avis,  ce  qui  devrait  être 
publié. 

Les  auteurs  n'ajoutant  rien  à  ce  que  l'on  sait  des  petits 
bassins  houillers  du  Condroz,  il  faudrait  supprimer  tout  ce 
qui  concerne  ces  bassins. 

Pour  le  mémoire  de  l'ancien  concurrent,  supprimer  la 
description  des  roches  et  toutes  les  considérations  géogé- 
niques  :  les  rapporteurs  les  ont  suffisamment  indiquées 
pour  que  la  paternité  de  l'auteur  ne  puisse  lui  être  con- 
testée. La  publication  comprendrait  donc  la  plus  grande 
partie  du  chapitre  W^descriptiongéologiqxie,  le  chapitre  III, 
relations  de  notre  bassin  houiller  avec  les  bassins  aile- 
mands,  une  grande  partie  du  chapitre  IV,  description  mi- 
néralogiqiie  et  paléontologique ,  le  chapitre  VI,  discussion 
de  la  nomenclature  des  couches  admises  par  Dumont,  et 
le  chapitre  Vil,  conclusions.  Quant  au  chapitre  V,  recher- 
ches sur  la  synonymie  des  quatre  groupes  du  système,  il 
y  aurait  avantage  à  le  remplacer  par  un  tableau  synop- 
tique dans  le  genre  de  la  coupe  de  raccordements  dressée 
par  l'autre  concurrent;  ce  tableau  serait  fait  à  la  même 
échelle,  7'300. 

A  ce  texte  on  ajouterait  la  petite  carte  au  '/so.ooo  repré- 


(  i)47  ) 
sentant  l'allure  des  six  horizons  de  grès  admis  par  l'au- 
teur, qui  serait  invité  à  y  joindre  quelques  coupes  transver- 
sales à  la  même  échelle.  Quelques  figures  à  intercaler  dans 
le  texte,  ou  même  quelques  petites  planches  seraient,  en 
outre,  indispensahles,  par  exemple,  pour  les  travaux  de 
Sybilla  et  l'origine  du  bassin  allemand. 

Du  travail  du  second  concurrent,  on  imprimerait  les 
parties  suivantes  :  du  chapitre  lil,  un  résumé  de  la  des- 
cription des  roches,  donnant  in  extenso  les  analyses  et  leur 
discussion;  puis  les  deux  sections  suivantes.  Géogénie, 
soulèvements,  et  accidents  et  dérangements;  puis  le  cha- 
pitre VI,  descriptions  des  failles.  Le  chapitre  VJl,  consacré 
à  Vallure  des  couches  devrait  être  remanié  et  abrégé,  parce 
que  nous  sommes  obligés  de  réduire  à  cinq  les  vingt-cinq 
coupes  que  décrit  l'auteur.  Le  texte  serait  terminé  par  le 
chapitre  Vllï,  Synonymie. 

Comme  planches,  nous  conservons  cinq  coupes  verti- 
cales sur  les  vingt-cinq,  en  ajoutant  que  l'auteur  devra  les 
réduire  au  Y^oooo^  tl^  manière  que  la  plus  longue  ne 
dépasse  pas  les  dimensions  d'une  planche  ordinaire,  repliée 
sur  elle-même.  Cette  réduction  d'échelle  nécessitera  la 
suppression  du  tracé  d'un  grand  nombre  de  couches,  mais 
elle  ne  diminuera  pas  l'importance  de  ces  coupes  comme 
exposition  de  l'allure  du  terrain.  D'ailleurs  la  question 
d'argent  ne  nous  laisse  guère  de  choix  :  nous  ne  pouvons 
que  les  réduire  ou  les  supprimer.  Pour  la  même  raison 
économique,  nous  renonçons  à  proposer  la  publication  des 
coupes  horizontales  et  du  plan  d'assemblage  au  '/20.000;  et 
nous  sommes  forcé  de  demander  de  réduire  de  moitié 
(soit  au  7'3oo)  l'échelle  des  deux  feuilles  de  la  coupe  de 
raccordements,  tout  en  supprimant  les  couleurs  et  en  les 


(  948  ) 

remplaçant  par  des  hachures  convenablement  choisies. 
Malgré  ces  coupures,  on  aurait  ainsi  tout  le  fond  du  travail 
de  l'auteur,  sinon  comme  arguments,  du  moins  comme 
résuUats.  Rien  n'empêcherait  d'ailleurs  l'insertion,  à  l'en- 
droit le  plus  convenable,  des  passages  nécessaires  pour 
caractériser  convenablement  les  vues  que  l'auteur  a  voulu 
représenter  sur  son  grand  plan  d'assemblage  :  je  citerai 
pour  exemple  la  partie  du  groupe  des  plateaux  de  Hervé 
au  sud  de  la  faille  de  S^-Hadelin,  vers  la  localité  de  ce  nom 
et  Xhendelesse. 

En  laissant  aux  auteurs  la  liberté  de  remanier  leur  tra- 
vail, l'un  et  l'autre  trouveront  avantage  à  profiter  de  cette 
latitude,  et  chacun  en  profitant,  ils  n'auront  rien  à  se  repro- 
cher mutuellement. 

Il  est  nécessaire  de  rappeler  aux  auteurs  qu'il  est  indis- 
pensable de  donner  des  citations  complètes.  Le  nouveau 
concurrent  a  été  on  ne  peut  plus  laconique  sous  ce  rap- 
port; et  je  présume  en  outre  qu'un  certain  nombre  des 
analyses  qu'il  rapporte  ont  déjà  été  publiées  ailleurs.  Cette 
lacune  devra  être  remplie  avec  soin  pour  la  publication 
académique. 

Si  l'académie  adoptait  ces  propositions,  les  trois  com- 
missaires n'hésiteraient  pas  à  se  réunir  pour  indiquer  sur 
chaque  manuscrit  ce  qui  doit  être  supprimé,  modidé  ou 
conservé. 

Enfin,  quant  aux  récompenses  à  accorder  aux  concur- 
rents, nous  proposons  une  médaille  d'argent  à  chacun 
d'eux,  puis  (le  prix  étant  de  mille  francs),  une  somme  de 
six  cents  francs  à  l'auteur  du  mémohe  Labor  omniavincil 
iuiprobus,  et  une  somme  de  quatre  cents  francs  à  son 
concurrent,  d 


(  1)49  ) 

Mta/ipot'l  tif    .ta.   Ut'iat'l. 

«  La  sixième  quoslion  du  concours  do  1875  était 
conçue  en  ces  termes  : 

On  demande  la  description  du  système  houiller  dn  bassin 
de  la  prorince  de  Liège. 

Un  mémoire  avait  été  envoyé  à  TAcadémie  en  réponse  à 
cette  question. 

Bien  qu'ayant  reconnu  assez  de  mérite  à  ce  travail,  vos 
commissaires  l'avaient  trouvé  trop  imparfait  en  certaines 
parties  et  trop  incomplet  pour  mériter  d'être  couronné. 
La  classe  admettant  ces  conclusions  avait  également,  sur 
la  proposition  des  mêmes  commissaires,  décidé  de  main- 
tenir la  question  au  concours  pour  1875  dans  l'espoir  de 
voir  l'auteur  y  prendre  part  de  nouveau. 

Cet  espoir  n'a  pas  été  déçu,  on  peut  même  dire  qu'il  a 
été  dépassé. 

En  effet,  non-seulement  le  premier  mémoire  nous  est 
revenu  complété  et  amendé,  mais  un  second  concurrent  est 
entré  en  lice.  Comme  le  travail  de  ce  dernier  est  parvenu 
avant  l'autre  à  l'Académie,  je  m'en  occuperai  tout  d'abord. 

PREMIER    MÉMOIRE. 

Le  premier  mémoire  a  pour  devise  : 

La  science  nest  pas  œuvre  d'imagination,  mais  d'obser- 
vation, de  calcul  et  de  réflexion. 

Dans  mon  rapport  de  1875,  je  disais  :  «  La  question 
B   posée  par  l'Académie  n'est  pas  une  question  purement 


(  9oO  ) 
»  théorique.  L'intérêt  industriel  qui  s'y  rattache  prime  de 
»  beaucoup  l'intérêt  scientifique.  On  pouvait  donc  la  con- 
»  sidérer  sous  deux  faces  et  l'on  devait  s'attendre  à  la  voir 
»  traiter  d'une  manière  toute  différente,  selon  qu'un  géo- 
»  logue  ou  un  ingénieur  entreprendrait  d'en  donner  la 
»   solution.  » 

Je  puis  dire  du  travail  que  j'examine  en  ce  moment,  ce 
que  je  disais  du  mémoire  de  1873,  que  c'est  évidemment 
l'œuvre  d'un  ingénieur;  si  le  géologue  s'y  montre  parfois, 
ce  n'est  pas  toujours  avec  bonheur.  Je  puis  même  ajouter 
qu'il  y  est  parfois  très-malheureux,  comme  je  tâcherai  de  le 
montrer  par  la  suite. 

Le  travail  se  compose  de  deux  gros  volumes  de  texte 
et  d'un  grand  nombre  de  planches.  Le  texte  peut  se  divi- 
ser en  deux  parties  :  la  première,  purement  théorique, 
s'étend  longuement  sur  les  phénomènes  géogémques  qui 
ont  accompagné  et  suivi  la  formation  de  nos  bassins 
houillers;  la  seconde,  purement  technique,  beaucoup  plus 
étendue,  s'occupe  de  la  description  des  couches  et  des 
stampes  stériles  qui  les  séparent  et  de  la  recherche  de 
leur  synonymie. 

Dans  une  préface  de  quelques  pages  l'auteur  expose  le 
plan  de  son  travail  :  «  Il  compte  décrire  avec  l'exactitude  la 
»  plus  rigoureuse  ce  qu'il  aura  pu  voir  par  lui-même  et 
»  condenser,  autant  que  possible,  tout  ce  que  ses  prédé- 
»   cesseursontditjusqu'àce  jour  sur  le  sujet  à  examiner.  » 

Reprenant  ensuite  la  devise  qu'il  a  mise  à  son  travail, 
il  dit  qu'il  n'oubliera  pas  que  «  la  science  nesl  pas  œuvre 
»  d'imagination,  mais  d'obsermtion,  de  calcul  et  de  ré- 
»  flexion  ;  et  que  l'on  fait  plus  pour  elle  en  exposant  des 
»  faits  qu'en  inventant  des  systèmes  plus  ou  moins  logi- 
»   ques ,  des  théories  plus  ou  moins  nébuleuses.  » 


(  y^>i  ) 

II  ajoute  que  la  géologie  surtout  est  ennemie  de  ces 
théories  cl  de  ces  systèmes. 

Je  crains  bien  qu'en  ce  dernier  point,  lauteur  ne  se 
fasse  illusion  d'une  étrange  manière.  La  géologie  n'a  que 
trop  sa  part  dans  les  tiiéories  et  les  systèmes  qui  encom- 
brent l'histoire  naturelle.  Si  de  ce  côté  on  peut  lui  repro- 
cher une  chose,  c'est  de  s'être  fait  la  part  du  lion.  On  verra, 
du  reste,  par  la  suite,  que  l'auteur  lui-même  ne  se  fait  pas 
faute  de  produire  des  hypothèses;  mais  peut-être  a-t-il 
voulu,  par  défiance  de  ses  propres  forces,  ou  par  un  dé- 
dain qui  demanderait  à  être  autrement  motivé,  exposer  le 
peu  de  cas  qu'il  fait  de  ces  théories ,  le  peu  d'importance 
qu'il  y  attache,  et,  comme  conséquence,  excuser  le  peu  de 
soin  qu'il  a  misa  les  étudier  et  la  manière  souvent  erronée 
avec  laquelle  il  les  expose. 

Continuant  sa  préface,  l'auteur  prétend  que  l'insuccès  du 
mémoire  présenté  en  1875  l'avait  presque  découragé  et  lui 
avait  fait  craindre  le  même  sort  pour  son  ouvrage  à  lui  ; 
H  En  effet,  dit-il,  j'avais  des  raisons  de  reconnaître  dans 
»  l'auteur  du  travail  un  ingénieur  du  corps  des  mines, 
»  attaché  au  service  de  la  carte  générale,  où  il  a  pu  puiser 
»  à  pleines  mains  les  éléments  de  son  travail  et  profiter  de 
»  la  collaboration  des  autres  fonctionnaires  de  l'État  (ingé- 
»  nieurs,  géomètres  ou  dessinateurs)  qui  depuis  vingt  ans 
»    ont  entrepris  ce  grand  travail.  » 

«  La  lutte  n'était  évidemment  pas  égale  entre  nous... 

»  N'étais-je  pas  bien  audacieux  d'espérer  de  mes  seules 
»   forces  un  travail  plus  digne  de  vos  suffrages?  » 

D'un  autre  côté,  M.  Jules  Vanscherpenzeel-Thim  écrivit, 
dans  le  courant  de  cette  année,  la  lettre  suivante  à  M.  le 
secrétaire  perpétuel  de  l'Académie. 


(  952  ) 
«  Monsieur, 

»  Le  compte-rendu  de  la  séance  de  l'Académie  royale  de 
»  Belgique  du  5  de  ce  mois  (section  des  sciences)  signale 
j»  la  présentation  d'un  mémoire  en  réponse  à  la  question 
»  concernant  la  description  du  bassin  houiller  de  la  pro- 
»  vince  de  Lièr/e,  et  le  renvoi  de  ce  travail  à  trois  de  ses 
»   membres,  MM.  Dewalque,  Cornet  et  Briart. 

»  L'année  dernière,  l'Académie  a  eu  à  s'occuper  d'un 
»  mémoire  sur  la  même  question;  mais  elle  n'a  pas  cru 
»   pouvoir  décerner  la  récompense  promise. 

»  La  lecture  des  rapports  présentés  à  cette  occasion  par 
»  ses  commissaires,  m'a  donné  la  conviction  que  certains 
»  éléments  de  ce  mémoire,  notamment  les  caries  y  an- 
»  nexées  qui,  d'après  les  rapporteurs,  offraient  seules  de 
»  l'intérêt,  avaient  été  puisées  dans  les  archives  du  service 
»  spécial  de  la  carte  générale  des  mines  dont  la  haute 
»    direction  m'est  confiée. 

»  En  conséquence,  je  viens  vous  prier  de  vouloir  bien 
»  informer  MM.  Dewalque,  Cornet  et  Briart  que  le  Gou- 
»  vernement  fait  exécuter  une  carte  générale  des  mines  et 
»  que  je  mets  à  leur  disposition  tous  les  plans  et  docu- 
»   ments  relatifs  à  ce  travail  et  réunis  depuis  1861. 

»  Ils  pourront  ainsi  apprécier  les  mérites  du  mémoire 
»  dont  ils  ont  été  saisis  et  reconnaître  les  emprunts  qui, 
»  éventuellement,  pourraient  avoir  été  faits  aux  archives 
»   de  l'administration. 

»  Veuillez  agréer,  Monsieur  le  secrétaire  perpétuel,  l'as- 
»   surance  de  ma  haute  considération, 

»   L'ingénieur  en  chef,  directeur  des  mines. 
»  (StV/wé);  Jules  Vanscherpenzeel-Taim.  » 


(  !)55  ) 

Dès  le  concours  de  1875,  je  me  suis  rendu  dans  les  bu- 
reaux de  la  carte  générale  des  Mines  pour  la  province  de 
Liège,  el  j'ai  eu  l'occasion  de  me  convaincre  que  les  prévi- 
sions de  M.  l'ingénieur  en  chef  des  Mines  sont  exactes  en 
ce  qui  concerne  le  concurrent  de  celte  époque,  lequel, 
comme  je  l'ai  dit,  se  représente  cette  année.  Je  me  suis 
convaincu  que  la  plupart  des  matériaux  qui  ont  servi  à  son 
travail,  notamment  les  cartes  et  les  coupes,  se  retrouvent 
dans  les  bureaux  de  ce  service  spécial. 

Quant  au  nouveau  concurrent,  il  n'en  peut  être  ainsi,  el 
pour  qui  sait  lire  entre  les  lignes,  il  résulte  des  passages 
que  j'ai  cités  plus  haut,  qu'il  existe  entre  lui  el  l'auteur  du 
premier  mémoire  un  esprit  de  rivalité,  je  dirai  même  d'an- 
tagonisme, qui  exclut  une  telle  supposition.  Cet  esprit  d'an- 
tagonisme ne  fait  du  reste  que  s'accentuer  de  plus  en  plus 
dans  la  suite  du  travail,  et  il  y  a  même  un  chapitre  consa- 
cré exclusivement  à  la  réfutation  de  certaines  hypothèses 
émises  par  le  concurrent  de  1873  relativement  à  la  syno- 
nymie des  couches. 

Il  pourra  probablement  surgir,  par  la  suite,  des  ques- 
tions de  priorité  sur  certaines  assimilations,  certaines  dé- 
couvertes que  les  deux  auteurs  ne  sont  que  trop  enclins  à 
s'attribuer.  Il  me  semble  qu'en  général  ils  font  trop  bon 
marché  des  travaux  de  leurs  devanciers  et  des  ingénieurs 
de  charbonnages  qui  explorent  le  bassin  de  Liège  depuis 
lai.t  d'années.  A  ce  propos,  je  citerai  l'opinion  de  M.  Burat 
relativement  à  une  question  semblable  soulevée  au  sujet 
du  raccordement  des  couches  du  bassin  de  Saint-Etienne. 

«  Cette  classification,  dit-il,  appartient  exclusivement 
»  aux  ingénieurs  directeurs  de  Mines,  qui,  depuis  plus  de 
»  trente  ans,  ont  étudié  le  bassin  de  la  Loire.  Ce  sont,  en 
j»   effet,  les  travaux   souterrains   qui   ont   successivement 

2'"*^  SÉRIE,  TOME  XL.  61 


(  954  ) 

»  résolu  toutes  les  questions  géologiques  relatives  à  la 
»  structure  et  à  la  composition  du  bassin,  et  vouloir  sat- 
»  tribuer  la  propriété  de  ces  résultats,  c'est  commettre  une 
»  usurpation  contre  les  droits  de  tous  les  exploitants.  » 
(La  houille,  1851,  p.  368.) 

Je  ne  puis  être  aussi  exclusif,  aussi  tranchant  que  Til- 
Justre  professeur  de  l'Ecole  centrale  de  Paris,  au  moins  en 
ce  qui  concerne  le  bassin  de  Liège.  Le  mérite  des  décou- 
vertes partielles  doit  être  rendu  à  ceux  qui  les  ont  faites, 
mais  un  mérite  non  moins  grand  consiste  à  les  coordonner 
de  manière  à  en  former  un  ensemble  aussi  rationnel  que 
possible. 

Ce  n'est,  du  resle,  pas  le  moment  d'examiner  ces  ques- 
tions épineuses;  je  reprends  l'analyse  du  premier  travail 
en  clôturant  ici  une  digression  peut-être  déjà  trop  longue. 

L'auteur  continue  sa  préface  par  des  considérations  gé- 
nérales sur  la  manière  d'étudier  les  bassins  bouillers.  Sans 
négliger  aucun  des  points  de  la  question  il  compte  s'occu- 
per surtout  «  des  gisements  des  couches  de  houille,  de 
»  leurs  allures,  de  leur  synonymie  ainsi  que  des  déran- 
»  gements  qui  les  affectent,  »  remettant  à  un  travail  pos- 
térieur, l'étude  si  intéressante  des  rapports  entre  notre 
bassin  houiller  et  les  bassins  voisins  du  Hainaul  et  de 
l'Allemagne. 

Le  corps  de  l'ouvrage  est  divisé  en  dix  chapitres.  Les 
chapitres  qui  traitent  de  théorie  pure,  de  géogénie,  sont  fort 
peu  recommandables.  Les  théories  admises  depuis  long- 
temps sont  fort  mal  exposées;  quant  aux  idées  nouvelles 
émises  par  l'auteur,  les  unes  sont  absolument  fausses,  les 
autres  demanderaient  à  être  présentées  plus  clairement  et 
quelquefois  même  plus  correctement  au  point  de  vue  du 
langage.  L'auteur  a  peine  à  trouver  le  mot  propre  et  l'on 


(  Wd  ) 

voit  bien  qu'il  est  peu  familiarisé  avec  des  théories  qu'il 
ne  donne,  pour  ainsi  dire,  qu'à  contre-cœur. 

Après  avoir  rappelé  certaines  théories  surrannées  sur 
l'origine  de  la  houille,  il  admet  pour  celle-ci  une  origine 
végétale.  11  conclut  par  analogie  et  d^ une  façon  presque  cer- 
taine du  mode  de  formation  actuel  des  tourbières  à  celui 
de  nos  bassins  houillers  ;  mais  il  émet,  dès  le  premier  cha- 
pitre, beaucoup  d'idées  bizarres  dont  je  me  contenterai  de 
citer  quelques-unes. 

L'auteur  se  demande  ce  qu'a  dû  être  la  nature  des  plantes 
houillères  et  il  ajoute  :  «  l'examen  des  empreintes  des  nom- 
»  breuses  espèces  qui  ont  été  rencontrées  dans  le  terrain 
»  houiller  permet  de  se  rendre  un  compte  assez  exact  de 
»  la  flore  houillère...  la  flore  houillère  ofl'rait  de  grandes 
»  analogies  avec  notre  flore  contemporaine  des  tour- 
»  bières  et  comprenait,  comme  elle,  des  fougères,  crypto- 
»  games  vasculaires,  des  gazons,  des  liliacées,  des  pal- 
»  miers,  des  conifères,  des  cycadées,  des  stonolifères  à  tiges 
»  traçantes,  prèles,  joncs,  roseaux,  des  arbustes  tels  que 
»  les  airelles,  les  érics,  des  andromèdes,  des  pins  sylvestres, 
»   des  bouleaux  blancs  et  des  sapins  rouges.  » 

Cela  prouve  bien  que  l'auteur  ne  connaît  pas  le  premier 
mot  de  la  question.  On  croirait  lire  la  description  des  ma- 
rais tourbeux  du  Danemark,  et  il  n'est  pas  impossible 
qu'il  n'y  ait  puisé  des  inspirations. 

Il  ajoute  plus  loin  :  «  Les  végétaux  (de  l'époque  houil- 
»  1ère)  sont  identiques  dans  toutes  les  formations  sous  di- 
»  verses  latitudes  du  globe,  dont  on  peut  conclure  que  la 
»  température  était  uniforme.  Je  crois  que  cette  tempéra- 
»  turc  devait  être  en  général  peu  élevée.  Si  j'en  juge 
»  d'après  les  conditions  actuelles  de  formations  des  tour- 
»   bières,  elle  ne  devait  pas  dépasser  6°  à  8".  » 


(  9o6  ) 
Voulant  expliquer  Tabsence  de  fossiles  dans  le  terrain 
houiller  il  dit  que  «  les  îles  basses  de  la  période  houillère, 
»  souvent  inondées  se  prêtaient  mal  à  la  vie.  »  et  il  ajoute  : 
«  une  autre  raison  qui  empêche  de  retrouver  les  traces  de 
»  la  vie  animale  gît  dans  la  grande  quantité  de  SO^  qui 
»  devait  exister  dans  les  eaux  de  cette  époque  et  dissoudre 
»   les  coquillages  à  enveloppes  calcareuses.  » 

Il  revient  plusieurs  fois  sur  la  présence  de  l'acide  sulfu- 
rique  dans  les  eaux  de  la  période  houillère  et  paraît  même 
avoir  fait  certaines  expériences  sur  la  réaction  de  cet  acide 
sur  les  bois  et  avoir  obtenu  «  un  produit  bitumineux  offrant 
»  certaines  analogies  avec  le  charbon;  mais  la  pression 
»    manquant,  l'expérience  n'a  pu  être  plus  concluante.  » 

Je  crois  pouvoir  me  borner  à  ces  citations  pour  donner 
une  idée  de  la  valeur  du  premier  chapitre. 

Le  chapitre  II  a  pour  titre  :  Situation  géographique  du 
bassin  de  Liège. 

Les  limites  adoptées  par  Fauteur  sont  celles  qui  ont  été 
fixées  par  Dumont.  Il  ne  croit  pas  qu'il  existe  des  raisons 
suffisantes  pour  les  modifier  et  il  combat  une  opinion  de 
son  concurrent  de  1875  qui  caressait  volontiers  l'idée  d'un 
retour  du  bassin  houiller  au  N.-E.  de  l'îlot  calcaire  de  Visé. 
11  en  a,  dit-il,  vainement  cherché  les  traces,  soit  «  dans  la 
»  vallée  du  Geer,  soit  dans  aucune  des  petites  vallées  abou- 
»  tissant  à  la  vallée  de  la  iMeuse.  »  Cela  n'a  rien  d'étonnant 
puisque  ces  vallées  sont  creusées  dans  les  terrains  crétacés 
ou  tertiaires  et  ce  n'est  pas  là  que  l'on  peut  reconnaître 
l'allure  du  terrain  houiller  sous-jacent. 

Le  chapitre  III  intitulé  :  Généralités  géologiques  et  miné- 
ralogiques,  est  meilleur  quoique  renfermant  encore  quel- 
ques singularités.  Il  constate  la  division  du  terrain  houiller 
en  deux  étages,  division  proposée  par  Dumont,  qu'il  combat 


(  9S7  ) 

mais  qu'il  finit  par  adopter  comme  plus  simple  et  plus 
commode. 

Il  décrit  ensuite  les  espèces  minéralogiques  et  les  roches 
des  deux  étages.  Je  pourrais  signaler  beaucoup  d'imper- 
fections dans  ces  descriptions,  mais  cela  m'entraînerait  trop 
loin.  Ce  qu'il  y  a  de  plus  remarquable  dans  ce  chapitre 
ce  sont  les  analyses  des  différentes  roches.  Les  unes  sont 
puériles  et  sans  grande  utilité,  comme  celles  des  psam- 
mites  au  nombre  de  26,  des  schistes  au  nombre  de  66. 
Il  s'y  trouve  même  une  analyse  de  poudingue.  Mais  il 
n'en  est  pas  de  même  des  analyses  des  houilles,  au  nombre 
de  154,  qu'il  traite  au  point  de  vue  de  la  densité,  du  pou- 
voir calorifique,  de  la  composition  chimique,  du  carbone 
cokefié,  des  cendres  et  de  la  proportion  des  matières  fixes. 
Ces  analyses  peuvent  avoir  une  utilité  réelle.  Malheureu- 
sement, elles  sont  accompagnées  d'idées  dans  le  genre  de 
celle-ci  :  «  La  houille  peut  absorber  jusqu'à  60  p.  "/„  de 
j>  son  poids  d'eau  par  la  capillarité,  en  se  dilatant  et  aug- 
»  mentant  de  volume.  —  Le  pouvoir  calorifique  des  houilles 
»  est  supérieur  au  pouvoir  calorifique  du  carbone  pur  »  et 
d'un  autre  côté  «  la  houille  qui  donne  le  pouvoir  calori- 
»  fique  le  plus  considérable  est  celle  dans  laquelle  la  pro- 
»  portion  de  carbone  est  la  plus  forte.  » 

Plus  haut  il  fait  cristalliser  le  phtanite  et  compose  les 
psammites  d'un  schiste  argileux  réunissant  des  grains  de 
quartz  et  de  feldspath  en  quantités  à  peu  près  égales. 

Beaucoup  d'auteurs  sont  cités  dans  ce  chapitre  comme 
dans  les  autres  parties  du  mémoire.  Faisons  remarquer 
une  fois  pour  toutes  que  ces  citations  sont  faites  sans  autre 
indication ,  ni  le  titre  de  l'ouvrage,  ni  l'année  de  la  publi- 
cation ,  ni  la  page  ne  sont  indiqués. 

Dans  une  sous-section  de  ce  chapitre,  intitulée  :  Forma- 


(  938  ) 

lion  du  bassin  de  Liège,  çjéogénie ,  soulèvements ,  straiifwa- 
tions  souS'jacenteSy  Fauteur  délaye  quelques  bonnes  idées 
dans  un  fatras  de  théories  au  milieu  duquel  il  est  fort  dif- 
ficile de  s'orienter.  11  y  a  fort  peu  d'ordre  dans  rouvrage,et 
Ion  est  parfois  étonné  de  voir  l'auteur  revenir  sur  des  théo- 
ries ou  considérations  déjà  émises  et  dont  on  croyait  avoir 
fini  depuis  longtemps. 

Je  ferai  remarquer  que  jusqu'à  présent  l'auteur  ne 
parle  pas  du  grisou  et  qu'il  n'en  parle,  par  la  suite,  qu'inci- 
demment, dans  la  description  des  couches,  en  signalant 
celles  qui  sont  plus  ou  moins  grisouteuses. 

Nous  passerons  immédiatement  à  la  partie  principale  du 
travail,  à  In  description  des  couches  ,  des  stampes  et  à  la 
recherche  de  la  synonymie. 

Le  concurrent  de  1873  avait  admis  47  couches;  c'est 
encore  le  chiffre  qu'il  admet  cette  année.  L'auteur  du  pre- 
mier mémoire  reporte  ce  chiffre  à  53.  Cette  différence,  lé- 
gère en  somme,  n'a  pas  lieu  d'étonner  ceux  qui  sont  fami- 
liarisés quelque  peu  avec  les  changements  de  puissance  et 
décomposition  que  subissent  les  couches,  quelquefois  sur 
des  distances  relativement  faibles.  Ce  qui  ressort  principa- 
lement de  ces  deux  chiffres,  c'est  que  celui  de  Dumoni, 
donné  en  1833,  était  singulièrement  exagéré. 

Les  couches  sont  décrites  par  numéro  d'ordre,  la  couche 
n^  1  étant  la  plus  profonde.  11  attribue  ensuite  à  chacune 
d'elles,  les  noms  divers  qui  lui  sont  donnés  dans  les  diffé- 
rentes parties  du  bassin.  11  a  recueilli  à  ce  sujet,  comme  il 
le  dit  lui-même,  le  plus  grand  nombre  possible  de  rensei- 
gnements aux  divers  points  de  vue  de  la  composition,  de 
la  nature  du  charbon,  des  caractères  minéralogiques  et  chi- 
miques et  des  conditions  de  gisement.  Il  accompagne  ses 
descriptions  de  coupes  représentant  à  peu  près  toutes  les 


(  959  ) 
couches   à   réchelle  de  1  cent,  par  mètre  et  telles  qu'elles 
se  présentent  dans  les  différentes  concessions,  avec  lesinter- 
calations  schisteuses  et  les  veineltes  qui  leur  sont  voisines 
et  qui  doivent  leur  être  rapportées. 

Il  admet,  ce  qui  est  rationnel  en  de  certaines  limites, 
que  chaque  couche  doit  avoir  été  formée  à  peu  près  hori- 
zontalement; qu'après  chaque  formation,  l'immersion  de  la 
tourhière,par  suite  d'un  affaissement  plus  ou  moins  général, 
a  amené  le  dépôt  de  sédiments  qui  ont  formé  les  stampes 
stériles  et  que  si  les  épaisseurs  des  stampes  varient  et  ne 
sont  pas  égales  partout,  c'est  que  l'affaissement  de  la  lour- 
hière,  pour  employer  son  expression,  n'a  pas  été  partout  le 
même.  Il  reconnaît  que  les  couches  principales,  servant 
d'horizons  géologiques ,  sont  espacées  d'une  manière  plus 
régulière,  même  à  de  grandes  distances,  et  qu'elles  réta- 
hlissent  l'épaisseur  normale  des  stampes  que  les  veines  in- 
termédiaires tendent  à  irrégulariser. 

Il  explique  le  nombre  restreint  des  couches,  relativement 
à  celui  donné  par  Dumont,  1*"  par  des  synonymies  géné- 
rales ignorées  de  cet  auteur  ou  non  admises  par  lui  ;  2°  par 
la  réunion  en  une  seule  couche  ou  formation,  pour  me 
servir  d'une  de  ses  expressions,  de  plusieurs  lits  de  charbon 
ayant  reçu  des  noms  différents. 

L'auteur  entreprend  ensuite  la  description  des  stampes 
ou  assises  stériles  séparant  les  couches  de  houille. 

Il  eût,  peut-être,  été  préférable  de  faire  les  deux  descrip- 
tions en  même  temps.  Toutes  ces  descriptions  paraissent, 
du  reste,  faites  avec  le  plus  grand  soin  et  il  est  certes  éton- 
nant que  l'auteur  soit  parvenu,  avec  ses  propres  forces, 
comme  il  le  dit,  à  réunir  tant  de  documents.  Les  descrip- 
tions des  slampes  et  des  couches  de  houilles  sont  complé- 
tées par  une  grande  planche  les  représentante  l'échelle  de 


(  960  ) 

I  p.7oo;  celle  grande  planche,  qu'il  appelle  sa  grande  coupe 
de  raccordement  y  donne  les  stanipes  normales  et  tient  lieu 
de  ce  que  l'auteur  de  1873  nommait  son  album  mméralo- 
gique. 

La  classe  comprendra  facilement  qu'il  est  impossible  de 
se  rendre  garant  de  l'exactitude  de  tant  de  descriptions. 

Je  dois  à  ce  propos  répéter  ce  que  je  disais  dans  mon 
rapport  de  1875  :  «  qu'étranger  au  pays  de  Liège,  que  je 
»  n'ai  visité  que  de  loin  en  loin,  il  m'est  impossible  d'entrer 
»    dans  l'examen  de  tant  de  détails  et  de  renseignements.  » 

Remarquons,  pour  en  finir  avec  ce  chapitre,  que  l'au- 
teur, admettant  que  la  végétation  qui  a  donné  naissance  à 
une  couche  de  houille  a  été  arrêtée  par  l'immersion  plus 
ou  moins  complète  de  la  tourbière,  est  amené  à  terminer 
définitivement  la  période  houillère  de  la  même  manière, 
c'est-à-dire  par  une  immersion  générale  de  la  contrée. 
C'est  le  contraire  qui  est  généralement  admis  et  son  idée 
fera  peu  de  prosélytes. 

L'auteur  passe  ensuite  à  la  description  des  failles  qu'il 
divise  en  failles  principales,  en  failles  secondaires  et  en 
failles  dérivées.  Il  en  fait  une  très-longue  énumération  et  il 
les  décrit,  les  principales  surtout,  avec  beaucoup  de  détails. 

II  n'esl  pas  toujours  d'accord  avec  l'auteur  du  mémoire  de 
1873,  comme,  par  exemple,  à  propos  du  prolongement  de 
la  faille  S'-Gilles  à  Test  et  de  la  faille  S*-Adelin  à  laquelle 
ce  dernier  ne  semble  guère  attacher  d'importance.  Ce  sont, 
du  reste,  de  pures  hypothèses,  plus  ou  moins  étayées  de 
preuves  assez  vagues  et  qu'il  est  de  toute  impossibilité  de 
vérifier  dans  l'état  actuel  des  choses. 

J'ajouterai  que  l'auteur,  en  ceci  comme  en  beaucoup 
d'autres  choses,  se  laisse  aller  trop  facilement  à  émettre 
des  théories  souvent  fort  discutables,  sur  l'origine  ou  la  for- 


(  961  ) 
mation  de  ces  failles,  et  inoutre  une  lendance  exagérée  à 
faire  provenir  certains  accidents  de   la  surface  lie  cassures 
quelquefois  fort  peu  importantes  du  terrairi  houiller. 

Tous  ces  documents  sont  résumés  graphiquement  en  un 
grand  plan  (V assemblage^  ainsi  que  l'appelle  Fauteur.  C'est 
une  coupe  horizontale  faite  à  trois  rn'veaux  différents  pour 
trois  zones  superficielles  assez  arhitrairement  limitées.  Les 
inconvénients  d'une  pareille  disposition  sautent  aux  yeux, 
et  ils  seraient  encore  bien  plus  visibles  si  lauteur  n'avait 
pas  eu  la  précaution  de  choisir,  le  plus  possible,  des  failles 
pour  limites  de  ses  zones.  Quand  il  doit  recourir  à  des 
limites  de  concessions,  le  cas  est  plus  embarrassant,  les 
traces  des  couches  devant  nécessairement  y  être  brus- 
quement interrompues,  sans  que  l'on  en  devine,  au  pre- 
mier abord,  le  motif.  C'est  ce  qui  devrait  avoir  lieu, 
par  exemple  ,  à  la  limite  entre  les  concessions  de  Sart 
d'Avette  et  de  Bon-Espoir,  que  l'auteur  a  choisie  comme 
limite  entre  deux  de  ses  zones,  laquelle  limite  est  ce- 
pendant traversée  par  les  couches  sans  solution  de 
continuité.  Est-ce  pour  éviter  l'inconvénient  que  je  si- 
gnale ou  pour  tout  autre  motif?  Dans  tous  les  cas,  c'est 
une  faute  en  ce  sens  que  le  tracé  n'est  pas  exact.  J'ajou- 
terai que  les  indications  de  la  surface  sont  tout  à  fait  insuf- 
fisantes. De  plus ,  l'auteur  a  fait  figurer  les  couches  en 
trait  plein  dans  toute  leur  étendue,  que  le  tracé  soit  cer- 
tain ou  qu'il  soit  purement  hypothétique.  11  en  est  de 
même  des  failles  dont  on  ne  peut  distinguer  les  parties 
bien  connues  de  celles  qui  ne  le  sont  pas.  L'auteur  donne 
en  outre  trois  autres  coupes  également  horizontales  mais 
à  plus  faible  échelle  et  donnant  très-peu  d'indications.  La 
première  est  au  niveau  de  la  Meuse,  la  seconde  est  à 
500  mètres  et  la  troisième  à  iOOO  mètres  sous  ce  niveau. 


(  962  ) 

Il  donne  de  pins  23  coupes  transversales  du  bassin,  la 
première  à  rextrémité  ouest  vers  Andenne,  la  dernière 
vers  l'est,  allant  de  Moetroux  vers  Dizon.  En  faisant  toutes 
réserves  quanta  l'exactitude  du  tracé,  je  dois  dire  que  ces 
coupes  sont  fort  intéressantes  et  donnent,  par  leur  succes- 
sion, une  idée  fort  nette  du  bassin  de  Liège.  Elles  ont  du 
demander  à  l'auteur  un  travail  considérable.  Je  regrette 
toutefois,  que,  ainsi  que  pour  les  coupes  horizontales  d'as- 
semblage, l'auteur  n'ait  pas  jugé  convenable  de  distinguer 
le  tracé  certain  du  trac.^  hypothétique. 

Les  descriptions  de  ces  coupes  font  l'objet  d'un  chapitre 
spécial. 

Malheureusement,  toutes  ces  coupes  et  cartes  ne  mesu- 
rent pas  moins  de  22  mètres  carrés  de  superficie,  de  quoi 
effrayer  le  budget  le  plus  robuste. 

Dans  un  des  derniers  chapitres,  l'auteur  critique  Tim 
portance  attribuée  par  son  concurrent  de  1875  aux  six 
horizons  de  grès  qui  lui  ont  principalement  servi  à  établir 
ses  raccordements.  Il  ne  peut  en  reconnaître  que  quatre, 
et  encore  ne  présentent-ils  pas  la  continuité  et  la  régularité 
que  l'on  serait  en  droit  de  demander  à  des  horizons  bien 
déterminés.  Quant  à  lui,  il  s'est  principalement  servi  de 
couches  ou,  comme  il  le  dit,  de  formations  remarquables 
par  la  constance  de  leurs  caractères. 

Je  pense  que  ces  horizons  ne  sont  pas  plus  certains  que 
les  autres  et  offrent  des  variations  proportionnelles  aussi 
considérables.  Les  deux  auteurs  sont  en  désaccord  sur  cer- 
tains raccordements,  ce  qui  n'a  rien  d'étonnant  pour  qui 
connaît  les  difficultés  et  les  incertitudes  d'un  semblable 
travail. 

L'avant  dernier  chapitre  est  consacré  à  la  paléontologie. 
L'auteur  se  contente  d'énumérer  les  espèces  tant  animales 


(  965  ) 
(]iie  végélalcs.  Ce  n'est  pos  son  fort,  du  reste,  que  la  pa- 
lcoiitolog:ie  :  sa  clnssificatioii,  fort  incomplète,  est  souvent 
fautive  et  les  noms  des  genres  sont  quelquefois  mal  ortho- 
graphiés. 

Il  a  constaté  neuf  niveaux  fossilifères  qu'il  a  reconnus  en 
divers  points  plus  ou  moins  éloignés.  Il  les  discute  et  entre 
dans  d'assez  longs  détails,  fort  inléressanis  du  reste,  quoi- 
que généralement  déjà  connus. 

Enfin  il  termine  j)ar  la  description  succincte  des  bassins 
accessoires  du  rjraud  bassin  anthraxifère ,  qu'il  n'a  pas 
visités  et  au  sujet  desquels  il  ne  peut  répéter  que  ce  qu'en 
ont  dit  ses  devanciers.  Il  est  donc  inutile  de  nous  y  arrêter. 

SECOND    MÉMOIRE. 

L'auteur  du  mémoire  présenté  au  concours  de  1873,  le- 
quel avait  pour  devise:  «Les  observations  directes  accumu- 
»  lées  à  suffisance  permettent  seules  d'appliquer  la  méthode 
•  de  généralisation  que  Von  doit  avoir  comme  objectif  en 
»  matière  de  qéorjénie,  »  soumet  à  l'Académie  un  mémoire 
complémentaire  portant  pour  devise  :  «  Omnia  vincit  labor 
»   improbus.  » 

Une  préface,  jointe  à  ce  nouveau  travail,  fait  connaître 
que,  par  des  études  nouvelles  et  continues,  il  a  cherché  à 
combler  les  lacunes  signalées  dans  son  premier  travail,  et 
qu'il  a  modifié  les  parties  qui  avaient  soulevé  des  objec- 
tions. 

Il  constate  que  «  les  bases  de  son  premier  travail,  c'est- 
»  à-dire  la  synonymie  des  couches  qu'il  avait  avant  tout 
»  pour  objectif  et  qu'il  est  parvenu  à  établir  en  s'étayant 
»  sur  les  horizons  minéralogiques  qui  constituent  une  décou- 
la  verte  tout  aussi  exclusivement  personnelle  que  la  syno- 


(  9U  ) 

»  nymie  générale,  sont  restées  les  mêmes  à  la  suite  des 
»  études  complémentaires  consignées  dans  le  présent  tra- 
»  vail.  »  Tout  cela  prouve  assez  d'amour-propre  de  la  part 
de  l'auteur  et  la  même  tendance  que  j'ai  signalée  chez 
l'auteur  du  premier  mémoire^  à  s'attribuer  beaucoup  de 
découvertes  que  l'on  doit  à  ses  devanciers.  Il  ne  peut 
cependant  espérer  faire  croire  à  personne  qu'il  a  le  premier 
indiqué  comme  horizons  géologiques,  tout  au  moins  pour 
le  bassin  de  Liège,  les  grès  de  Domina ,  de  Flémalle  et  de 
Stenaye,  et  il  se  trompe  évidemment  quand  il  dit  que  la 
synonymie  de  la  couche  Chaineux  et  de  la  couche  Stenaye 
n'avait  «  jamais  été  entrevue  avant  lui,  »  puisque  son  con- 
current se  sert  de  la  même  synonymie  en  ajoutant  «  qu'elle 
est  peu  contestée.  » 

L'auteur  ajoute  que  «  le  Gouvernement  fera  sans  doute 
»  publier  une  carte  des  mines...  Cette  œuvre...  devra  for- 
»  cément  avoir  un  degré  d'exactitude  rigoureux  que  l'Aca- 
»  demie  ne  peut  espérer  rencontrer  dans  une  œuvre  per- 
»  sonnelle...  L'administration  n'a  pas  encore  entrevu  la 
»  possibilité  d'un  raccord  de  l'important  dépôt  des  plateaux 
»   de  Hervé  avec  le  bassin  de  Liège  proprement  dit...  » 

La  publication  des  cartes  que  présente  l'auteur...  «  four- 
»  nira  pendant  longtemps  les  indications  les  plus  précises 
»  qui  aideront  même  puissamment  à  l'exécution  du  travail 
»   officiel.  » 

L'auteur  n'a,  jusqu'à  présent,  entendu  formuler  aucune 
objection  sérieuse  contre  ses  bases  de  raccordement.  Il  n'en 
pouvait  guère  être  autrement,  puisque  le  public  ne  les  con- 
naît que  par  ce  qu'en  ont  dit  les  commissaires  de  1875.  Du 
reste,  le  premier  mémoire  est  venu  combler  cette  lacune. 

Quant  à  la  crainte  émise  par  lui  de  voir  ses  concurrents 
s'emparer  ou  profiter  de  ses  conclusions,  «  constituant,  au 


(  96^  ) 

»  point  de  vue  synonymiqiie,  dos  déeoiivcrlcs  nouvelles 
»  qui  lui  sont  enlièrcmont  personnelles  et  dont  il  reven- 
»  dique  la  propriélé,  »  la  lecture  du  mémoire  précité  est 
venue  nous  montrer  qu'elle  est  loin  d'être  fondée. 

L'insistance  qu'il  met  à  affirmer  ses  découvertes,  dans 
les  passages  de  la  préface  que  je  viens  de  citer,  et,  par 
la  suite,  à  plusieurs  reprises,  semble  dénoter  une  vague 
inquiétude  de  les  lui  voir  contester. 

Le  rapport  de  l'honorable  xM.Dewalque  donne  un  résumé 
irès-complet  du  travail  ou  plutôt  des  chapitres  complé- 
mentaires que  l'auteur  a  cru  devoir  y  joindre. 

Il  y  a  fort  peu  de  chose  à  ajouter  aux  points  qui  ont  été 
discutés  dans  ce  rapport.  Je  dois  dire  que  je  m'y  rallie 
entièrement.  Cependant,  je  crois  devoir  ajouter  les  obser- 
vations suivantes  : 

Les  hypothèses  sur  les  accidents  qui  ont  affecté  le  ter- 
rain houiller  ont  certains  côtés  attrayants,  quoique  ne  pré- 
sentant rien  d'absolument  nouveau;  ils  mériteraient  d'être 
développés  avec  plus  de  précision  dans  les  détails.  On 
admet  avec  assez  de  facilité  que  les  plissements  du  terrain 
houiller  aient  eu  lieu  pendant  une  période  de  plasticité  et 
que  les  failles  ou  cassures  se  soient  produites  quand  cet 
état  de  plasticité  avait  fait  place  à  un  état  de  durcissement 
plus  ou  moins  prononcé.  Ce  que  Ton  conçoit  moins,  et  ce 
qui,  du  reste,  n'explique  rien,  c'est  son  idée  de  faire  pro- 
duire les  plissements  par  des  phénomènes  de  soulèvement, 
et  les  failles  par  des  phénomènes  d'abaissement.  Je  relè- 
verai ici  quelques  phrases  qui  manquent  de  clarté  ou  qui 
expriment  des  idées  fausses. 

Il  dit  avoir  rencontré  la  faille  de  Saint-Gilles  à  la  surface, 
«  à  4-95  mètres  en  N.  du  parallèle  passant  à  oO  mètres  à 
»   TE.  du  bure  de  Wandre.  » 

C'est  une  phrase  à  rectifier. 


(  966  ) 

Quand  il  fait  du  bassin  méridional  de  Dumont  une 
traînée  d'épanchement  des  couches  très-inférieures,  il  em- 
ploie une  expression  tout  à  fait  impropre. 

Plus  loin,  il  dit  :  «  Les  forces  de  compression  ont  agi 
»  spécialement  du  S.  vers  le  N.,  accessoirement  du  S.O. 
j)  vers  le  centre  ,  et  par  suite  l'effet  produit  a  comme  zone 
»  une  direction  résultante  des  deux  forces  concurrentes,  » 
ce  qui  n'est  pas  du  tout  facile  à  comprendre. 

Plus  loin  encore,  il  parle  «  d'une  force  comprossive, 
»  radiée  en  divers  sens  vers  un  centre  à  peu  près  com- 
»  mun...  »  et  trouvant  inutile  de  recourir  à  la  théorie  des 
soulèvements,  il  dit  que  «  l'on  peut  expliquer  par  l'effet 
»  exclusif  d'une  compression  en  divers  sens  les  déforma- 
»  tions  multiples  du  bassin  de  Liège.  »  L'auteur  semble 
ignorer  que  la  théorie  des  soulèvements  est  principalement 
basée  sur  la  compression  produite  par  le  retrait  de  Técorce 
solide  du  globe,  que  les  soulèvements  sont  le  résultat  de 
cette  compression  et  que  l'on  ne  peut  pas  plus  les  séparer 
qu'une  cause  quelconque  de  son  effet  immédiat.  Quant  à 
son  idée  de  faire  agir  ces  forces  compressives  en  divers 
sens,  elle  est  peu  fondée  et  dans  tous  les  cas  parfaitement 
inutile. 

Pour  la  selle  de  Flémallc,  comme  pour  la  selle  de  Kim- 
kempois,  l'auteur  semble  admettre  des  compressions  dans 
le  sens  de  la  direction  de  ces  accidents.  Peut-être  son 
expression  trahit-elle  sa  pensée,  mais  c'est  le  contraire  qui 
est  vrai,  les  forces  compressives  doivent  avoir  exercé  leur 
action  dans  le  sens  perpendiculaire  au  plissement. 

L'auteur  persiste  dans  ce  qu'il  avait  avancé  en  1873, 
relativement  à  l'hyperslénite  d'Hozémont,  qu'il  fait  surgir 
au  milieu  du  calcaire,  et  il  fait  de  ce  calcaire  une  selle  ana- 
logue à  l'Ilot  calcaire  de  Visé.  Si  cet  îlot  calcaire,  par  sa 


(  !>67  ) 
forme,  se  prèle  assez  bien  à  l'hypothèse  des  retours  du 
bassin  houillor  au  N. ,  il  n'en   peut  è(re   de   même  des 
affleurements  de  IIorion-Hozémont. 

Quant  au  bassin  houiller  de  Landen,  il  n'y  faut  absolu- 
ment pas  eompler.  «  S'il  est  établi,  »  eomme  dit  l'auteur, 
que  du  charbon  a  été  retiré  de  deux  puits  aux  environs  de 
celle  ville,  au  siècle  dernier,  c'est  que  ce  charbon  y  avait 
été  descendu.  On  pourrait  citer  plusieurs  exemples  de  la 
même  fraude  dans  notre  pays.  Et  pour  la  fontaine  qui, 
dans  la  même  localité,  charriait  de  petits  fragments  de 
houille,  il  faut  aussi  la  reléguer  au  rang  des  fables. 

Je  trouve  encore  plus  loin  une  phrase  qui  a  besoin 
d'explication,  à  moins  que  l'auteur  ne  préfère  la  supprimer 
complètement,  ce  qui  serait  mieux.  Il  parle  des  plissements 
plus  prononcés  de  la  zone  d'Vvoz,  qui  sont  dus,  dit-il,  «  à 
»  la  résultante  des  forces  actives  et  passives  intervenues  et 
»  provenant  les  premières  de  la  compression  de  la  parliecal- 
»    caire  de  Flémalle  et  les  secondes,  de  la  pression  du  midi.» 

Il  entre  dans  beaucoup  de  détails  sur  certains  bancs  de 
grès  qu'il  a  pu  observer  et  suivre  à  la  surface  du  bassin  des 
plateaux  de  Hervé  et  qui  l'aident  beaucoup  à  reconnaître 
l'allure  générale  du  terrain.  Par  ridenlificaiion  de  ces  bancs 
de  grès  avec  les  grès  bien  connus  du  bassin  de  Liège,  il 
parvient  à  déduire  le  synonymie  des  couches.  Cette  partie 
paraît  être  judicieusement  étudiée.  Je  me  rallie  cependant 
aux  observations  présentées  par  M.  Dewalque  relativement 
aux  limites  mêmes  du  bassin. 

L'auteur  consacre  un  chapitre  nouveau  à  l'étude  des 
relations  du  bassin  de  Liège  avec  les  bassins  allemands. 

Constatons  ici  Pinsufïisance  des  détails  de  sa  carte 
au  niveau  de  la  iMeuse  où  ces  relations  sont  en  partie 
indiquées. 


(  968  ) 

Les  grands  cours  d'eau,  la  Meuse  et  FOurlhe  sont  à 
peine  représentés  et  ne  se  prolongent  pas  au  delà  du  tracé 
des  couches.  On  n  y  voit  qu'un  fragment  de  la  frontière 
prussienne;  quant  à  la  frontière  hollandaise,  elle  n'y  est 
pas  figurée  du  tout. 

Il  puise  ses  renseignements  sur  le  bassin  d'Eschweiler 
dans  lin  ouvrage  déjà  bien  vieux,  celui  de  M.  J.-F.  Clerre, 
ingénieur  au  corps  de  Mines,  imprimé  en  1814  et  il  éiablit 
ses  relations  avec  nos  bassins  par  l'intermédiaire  des  quel- 
ques couches  terreuses  et  inexploitables  reconnues  dans 
ces  derniers  temps  par  les  travaux  de  la  concession  Sibylla, 
couches  qu'il  identifie  aux  couches  inférieures  de  la  pro- 
vince de  Liège. 

«  Si  je  suis  parvenu,  continue  l'auteur,  à  trouver  la 
»  relation  du  bassin  d'Eschweiler  avec  notre  formation 
»  houillère,  j'ai  lieu  de  croire  également  que  le  bassin  de 
»  la  Ruhr  ne  présente  pas  moins  un  trait  d'union  avec  une 
»  partie  du  dépôt  de  la  province  de  Liège,  jusqu'à  présent 
»   ignoré.  » 

Et  ce  trait  d'union  ignoré  jusqu'ici,  il  le  trouve  dans  les 
lambeaux  du  terrain  houiller  reconnus  récemment  par  des 
sondages  et  même  par  des  puits,  dans  le  Limbourg  hollan- 
dais. Ces  découvertes  ont,  dit-il,  confirmé  ses  prévisions. 

C'est  toujours  la  même  tendance,  comme  on  le  voit. 
On  peut  se  demander  si  les  sondages  n'ont  pas  fait  naître 
les  prévisions  de  l'auteur  au  lieu  de  les  confirmer.  Dans 
tous  les  cas ,  il  faut  reconnaître  que  ces  prévisions  ont 
au  moins  été  partagées,  puisqu'elles  ont  provoqué,  de  la 
part  d'autres  personnes,  des  dépenses  assez  considérables 
en  travaux  de  recherche. 

Il  a  été,  du  reste,  impossible  à  l'auteur  d'obtenir  des  ren- 
seignements sur  ces  sondages.  On  entoure  ces  découvertes 


(  969  ) 
de  mystère.  .  .  .  Cela  prouve  qu'au  point  de  vue  industriel 
il  ne  faut  pas  trop  se  faire  illusion  sur  l'importance  du  ter- 
rain houiller  reconnu.  On  n'est  aussi  mystérieux  que  quand 
on  n'a  que  peu  de  chose  à  cacher,  et  si  les  résultats  étaient 
bien  avantageux,  on  serait  un  peu  plus  communicatif. 

Quant  à  reconnaître  dans  ces  lambeaux  l'origine  du  bas- 
sin houiller  de  la  Ruhr,  rien  n'est  moins  certain.  Ils  font, 
évidemment,  partie  du  terrain  houiller  qui  a  donné  lieu  a 
certaines  exploitations  au  N.-E.  d'Aix-la-Chapelle;  mais  il 
est  probable  que  si  le  prolongement  occidental  du  bassin 
de  la  Ruhr  pénétre  dans  le  territoire  hollandais,  c'est  beau- 
coup plus  au  N.  que  l'auteur  ne  l'indique. 

Le  chapitre  intitulé  :  Description  minéralogique  el 
paléonlologiqiic,  a  été  analysé  par  M.  Dewalque  dont  j'ad- 
mets les  appréciations. 

Je  tiens  tout  particulièrement  à  laisser  à  l'auteur  la  res- 
ponsabilité de  certaines  théories  plus  ou  moins  bizarres, 
entre  autres  de  celle  de  la  formation  des  rognons  de  fer 
carbonate  par  l'action  de  phénomènes  thermo-électriques. 

Le  chapitre  VI  dans  lequel  il  discute  la  nomenclature 
des  couches  adoptées  par  Dumont  est  également  un  chapi- 
tre nouveau.  Il  établit  d'abord  que  des  83  couches  admises 
par  Dumont,  66  seulement  sont  exploitables;  c'est  de  ce 
dernier  chiffre  qu'il  faut  tenir  compte,  ce  qui  réduit  l'écart 
de  près  de  moitié. 

A  l'époque  de  Dumont,  la  plupart  des  failles  ou  leurs 
prolongements  n'étaient  pas  connus  :  «  On  devait  croire 
»  dès  lors,  dit  l'auteur,  que  les  couches  rencontrées  en 
»  allures  similaires  en  deçà  et  au  delà  de  ces  dérangements 
»  ignorés  étaient  parfaitement  distinctes,  sans  renfermer 
»  de  séries  répétées  »  Dumont  aurait  donc  compté  deux 
fois  certaines  couches.  Il  prouve  la  chose  par  des  exemples, 
et  il  y  trouve  «  la  cause  fondamentale  de  la  supputation 
2""^  Srhie,  tome  XL.  62 


(  970  , 
»   d'un  nombre  de  couches   beaucoup  plus  considérable 
»   qu'en  réalité.  » 

Celle  discussion  de  la  nomenclature  de  Dumonl  me 
paraît  être  faite  avec  soin,  et  est,  dans  tout  les  cas,  beaucoup 
plus  complète  que  celle  de  son  concurrent  sur  le  même 
sujet.  Il  donne,  en  terminant,  des  tableaux  qui  rétablissent 
les  couches  par  groupes  et  par  étages. 

Tout  ce  qui  précède  a  trait  aux  additions  faites  par 
lauteur  à  son  travail  de  1873  et  dont  la  plupart  avaient 
été  réclamées  par  vos  commissaires.  Quant  aux  parties 
conservées,  mon  appréciation  reste  la  même  qu  a  cette 
époque. 

Je  dirai  maintenant  quelques  mots  des  cartes  et  coupes 
qui  accompagnent  ce  travail. 

D'abord,  comme  pour  son  concurrent,  je  me  suis  donné 
la  peine  d'en  faire  le  métré,  et  je  suis  arrivé  au  chiffre 
de  13m2,50,  plus  modeste  j  en  conviens,  mais  qui  ne  laisse 
pas,  cependant,  que  de  donner  à  réfléchir. 

J'avais  conseillée  l'auteur  certaines  modifications.  J'avais, 
entre  autres  fait  ressortir  les  inconvénients  des  deux  niveaux 
adoptés  par  lui  pour  la  construction  des  coupes  horizontales 
formant  les  cartes.  Pour  obvier  à  ces  inconvénients,  il 
donne  une  nouvelle  carte  générale  du  bassin  au  niveau  de 
la  Meuse  à  Liège,  à  une  échelle  réduite,et  où  ne  sont  figurés 
que  les  6  horizons  de  grès  principaux.  Cela  atteint  plus  ou 
moins  le  but,  mais  sans  obvier  aucunement  au  manque 
(les  détails  de  la  surface,  signalé  à  la  grande  carte.  J'avais 
aussi  conseillé  à  l'auteur  de  numéroter  ses  couches  au  lieu 
de  leur  donner  un  liséré  de  couleur,  ce  qu'il  n'a  pas  cru 
devoir  faire,  et  ce  qu'a  fait  son  concurrent.  Je  regrette  éga- 
lement qu'il  ne  se  soit  pas  rendu  à  mes  observations  quant 
à  ses  coupes  verticales,  qui  sont  incomplètes  et  qui  eussent 
dû  être  failes  à  la  même  échelle  que  ses  caries. 


(  î^71  ) 

CONCLUSIONS. 

Malgré  les  nortibreuses  imperfections  signalées  et  à  pro- 
pos desquelles  j'ai  cru  devoir  enirer  dans  beaucoup  de 
détails,  il  me  paraît  qu'il  y  aurait  une  grande  utilité  à  pu- 
blier les  deux  mémoires,  en  élaguant,  bien  entendu,  les  par- 
ties défectueuses,  en  réduisant  considérablement  le  nombre 
des  planches,  et  en  f{iisant  subir  à  celles  qui  pourraient  être 
conservées  une  notable  réduction  d'échelle. 

Je  demanderai  de  plus  que  cette  publication,  qui  doit 
entraîner  à  des  frais  d'impression  assez  considérables,  soit 
faite  au  moyen  d'un  subside  spécial  qui  serait  demandé  à 
M.  le  Ministre  de  l'Intérieur,  afin  de  ne  pas  ébrécher  le 
budget  ordinaire  de  l'Académie. 

Quant  aux  récompenses  à  accorder  aux  auteurs,  je  me 
rallie  à  la  proposition  de  votre  premier  commissaire.  » 

9af/po»*t  cl*»  MM.  Cofnet. 

«  Les  deux  mémoires  sur  la  description  du  terrain  houil- 
ler  de  la  province  de  Liège  que  la  classe  a  soumis  à  notre 
examen  ,  ont  été  si  complètement  analysés  et  si  parfaite- 
ment étudiés  dans  les  deux  rapports  dont  il  vient  d'être 
donné  lecture ,  que  je  déclarerais  me  rallier  entièrement 
à  l'opinion  de  mes  deux  honorables  collègues,  s'il  ne  s'agis- 
sait pas  de  la  description  d'un  terrain  dont  la  connaissance 
a  une  énorme  importance  au  point  de  vue  économique, 
tandis  qu'elle  n'en  a  pas  plus,  sous  le  rapport  purement 
géologique,  que  tout  autre  système  de  nos  terrains  pri- 
maires. 

Si  la  classe  des  sciences  avait ,  pour  la  question  de  con- 
cours, demandé  la  description  du  terrain  dévonien,  du 
calcaire  carbonifère,  du  terrain  crétacé  ou  du  terrain  ter- 


(  972) 
tiaire,  c'est-à-dire  la  descriplion  d'une  formation  qui  ne 
renferme  guère,  dans  notre  pays,  comme  substances  utiles 
à  l'homme,  que  des  matériaux  divers  pour  les  construc- 
tions, je  serais  d'avis  d'ouvrir  les  Mémoires  de  l'Académie 
royale  à  toutes  les  hypothèses  un  peu  vraisemblables, 
que  les  auteurs  feraient  sur  l'allure  en  profondeur  et  on 
étendue  des  diverses  assises  et  des  bancs  entrant  dans  la 
composition  du  terrain  décrit.  Si  des  découvertes  venaient 
ultérieurement  démontrer  l'inexactitude  de  ces  hypothèses, 
la  publicité  donnée  à  celles-ci  dans  nos  Mémoires  n'aurait 
causé  que  peu  ou  point  de  préjudice  économique. 

Mais,  dans  le  cas  qui  nous  occupe  aujourd'hui,  il  s'agit 
du  terrain  houiller  de  la  province  de  Liège  qui  renferme 
de  nombreuses  et  belles  couches  de  houille  dont  l'exploi- 
tation est  une  source  de  richesse  pour  le  pays  tout  entier, 
en  même  temps  qu'elle  procure  de  grands  profits  à  plu- 
sieurs concessionnaires.  Aussi  la  recherche  de  nouvelles 
couches  de  houille  ou  du  prolongement  de  celles  qui  sont 
déjà  connues  sur  certains  points  ,  se  poursuit  avec  ardeur. 
Mais  les  travaux  de  reconnaissance  qu'il  est  presque  tou- 
jours nécessaire  d'effectuer,  exigent  très-souvent  des  dé- 
penses énormes  qui  sont  entièrement  perdues  si,  comme 
l'on  en  a  malheureusement  trop  d'exemples,  le  terrain 
houiller  est  peu  riche,  sinon  stérile. 

Dans  la  plupart  des  cas,  même  quand  le  terrain  houil- 
ler affleure  à  la  surface,  on  n'a  pour  se  guider  lors  de 
l'exécution  des  travaux  qui  ont  pour  but  la  découverte  de 
gisements  de  combustible,  dans  une  partie  non  encore 
explorée  d'un  bassin  houiller  quelconque,  que  des  indi- 
cations très-incertaines.  Nous  pourrions  citer  beaucoup 
d'exemples  d'entreprises  qui  se  sont  effectuées  sans  autre 
connaissance  préalable  que  celle  de  l'existence  du  terrain 
houiller  et  qui,  néanmoins,  ont  été  couronnées  des  plus 


973  ) 
brillants  succès;  mais,  par  contre,  nous  pourrions  en  citer 
d'autres,  très-nombreuses  aussi,  qui  semblaient  avoir  pour 
elles  toutes  les  chances  de  réussite  et  qui   n'ont  eu  pour 
résultat  définitif  que  l'engloutissement  de  capitaux  énormes* 

La  production  de  la  houille  a  acquis  une  très-grande 
importance  dans  la  province  de  Liège  ;  cependant  une 
partie  considérable  du  terrain  houiller  tel  qu'il  est  limité 
par  Dumont  ou  par  les  auteurs  des  mémoires  qui  nous  sont 
soumis,  y  est  encore  tout  à  fait  inexplorée  et  l'on  ne  peut 
faire  aujourd'hui,  sur  le  nombre  et  l'allure  des  couches  de 
combustible  qui  s'y  trouvent,  que  des  hypothèses  plus  ou 
moins  vraisemblables.  C'est  ce  qu'ont  fait  nos  deux  auteurs. 
Mais  ce  qui  prouve  combien  est  large  le  champ  des  hypo- 
thèses dans  le  cas  qui  nous  occupe,  c'est  que  les  caries 
jointes  aux  mémoires,  quoique  fournies  par  des  hommes 
qui  possèdent  évidemment  une  connaissance  approfondie 
du  bassin  liégeois,  sont  pourtant  loin  de  s'accorder  entre 
elles.  Nous  ne  citerons  qu'un  seul  exemple  de  ce  désac- 
cord, mais  il  est  frappant.  L'auteur  du  premier  mémoire 
attribue  une  très-grande  richesse  en  couches  à  cette  partie 
importante  du  terrain  houiller  qui  se  trouve  comprise 
entre  le  calcaire  carbonifère  et  les  exploitations  des  char- 
bonnages du  Hasard  et  de  Crahay-Maireux,  tandis  que 
l'auteur  du  second  mémoire  la  considère  comme  presque 
complètement  stérile.  L'un  des  deux  tracés  est  évidemment 
erroné.  Il  est  probable  qu'ils  le  sont  tous  deux,  mais  l'ave- 
nir seul  peut  nous  l'apprendre. 

L'Académie  royale  ne  fait  pas  siennes  les  opinions  des 
auteurs  des  articles  qu'elle  insère  dans  ses  publications. 
Mais  il  est  des  cas  où  elle  doit  s'inquiéter  de  l'effet  que  ces 
opinions  peuvent  avoir,  sous  le  rapport  économique,  sur 
certaine  partie  du  public.  Malgré  toutes  les  réserves  que 
nous  pourrions  faire  à  propos  du  tracé  des  couches  sur  les 


(  974  ) 
cartes  et  les  coupes  jointes  aux  deux  mémoires  que  nous 
avons  examinés,  il  est  certain  que  la  publication,  dans  les 
Mémoires  académiques,  de  ces  documents  tels  que  nous 
les  avons  reçus  influencerait  considérablement  les  travaux 
de  recherches  dans  le  bassin  de  Liège.  Il  serait  même  à 
craindre  que  la  spéculation  ne  s'en  emparât  pour  monter 
quelques-unes  de  ces  affaires  véreuses  dans  lesquelles  le 
pubhc  se  laisse  si  facilement  engager. 

Je  ne  puis  donc  me  rallier  à  l'avis  des  deux  premiers 
commissaires  qu'à  la  condition  expresse  que  sur  les  cartes 
dont  ils  proposent  l'insertion,  les  parties  des  couches  ou  des 
bancs  de  grès  connues  par  les  travaux  miniers  ou  par  des 
affleurements  bien  évidents  soient  seules  figurées  ou  que, 
du  moins  les  tracés  hypothétiques  ne  soient  indiqués  que 
par  un  pointillé  très-fin.  Je  demande  en  outre  qu'à  la 
légende  de  chaque  carte  ou  de  chaque  tableau  synony- 
mique,  il  soit  ajouté  en  caractères  saillants  une  note  décla- 
rant que  l'Académie  entend  laisser  aux  auteurs  toute  la 
responsabilité  de  leur  travail.  ■ 

Après  délibération,  la  classe,  adoptant  les  conclusions 
des  rapports  de  ses  commissaires,  accorde  au  premier  mé- 
moire une  médaille  d'argent  et  une  somme  de  600  francs, 
et  au  second  mémoire  une  médaille  semblable  avec  une 
somme  de  400  francs. 

L'ouverture  des  billets  cachetés  a  fait  connaître  comme 
auteur  du  premier  mémoire  M.  J.  Renier  Malherbe  et 
comme  auteur  du  second  M.  Julien  de  Macvr,  tous  deux 
habitant  Liège. 

La  proclamation  des  résultats  du  concours  aura  lieu 
dans  la  séance  publique  du  16  décembre. 


(  975  ) 


GlJlSSË  DES  SCIENCES. 


Séance  publique  du  i6  décembre  i875, 

M.  A.  Brialmont,  directeur,  président  de  rAcadémie. 
M.  LiAGRE,  secrétaire  perpétuel. 

Sont  présents  :  MM.  J.-S.  Stas,  L.  de  Koninck,  P.-J.  Van 
Beneden,  Edm.  de  Selys  Longchamps,  H.  Nyst,  Gluge, 
Mclsens,  F.  Duprez,  G.  Dewalque,  H.  Maus,  E.  Candèze, 
F.  Donny,  Ch.  Montigny,  Éd.  Morren,  Éd.  Van  Beneden, 
C.  Malaise,  F.  Folie,  membres;  Th.  Schwann,  E.  Catalan, 
associés jEd,  Mailly,  J.  De  Tilly,  F.  Crépin,  G.  Van  der 
Mensbrugge ,  correspo7idants. 

Assistaient  à  la  séance  : 

Classe  des  lettres  :  M.  le  baron  Guillaume,  directeur; 
M.  Ch.  Faider,  vice-directeur  ;  MM.  J.  Roulez,  P.  Devaux, 
P.  De  Decker,  J.-J.  Haus,  M.-N.-J.  Leclercq,  le  baron 
Kervyn  de  Lcttenhove,  R.  Chalon,  Thonissen,  Th.  Juste, 
Alph.  Wauters,  G.  Nypels ,  membres;  J.Nolet  de  Brauwere 
van  Steeland,  Aug.  Scheler,  Alph.  Rivier,  associés. 

Classe  des  beaux-arts  :  M.  Balat,  directeur;  MM.  L.  Ahin, 
J.  Geefs,  Ch.  Fraikin,  Éd.  Fétis,  Edm.  De  Busscher, 
Aug.   Payen,  le  chevalier   Léon  de   Burbure,  J.  Franck , 


(  976  ) 
Gusl.  De  Man,  Ad.  Siret,  J.  Leclercq,  Ern.  Slingeneyer, 
Alex.  Robert,  membres. 

A  une  heure,  le  bureau  de  la  classe,  composé  de 
MiM.  Brialmont,  directeur,  et  Liagre,  secrétaire  perpétuel, 
ainsi  que  MM.  le  baron  Guillaume ,  directeur  et  Ch.  Faider, 
vice-directeur  de  la  classe  des  lettres,  et  M.  Balat,  direc- 
teur de  la  classe  des  beaux-arts,  viennent  prendre  place 
sur  l'estrade. 

Un  auditoire  nombreux,  parmi  lequel  on  remarque  un 
certain  nombre  de  dames,  S.  Ex.  sir  Savile  Lumley,  Ministre 
d'Angleterre,  S.  Ex.  M.  le  Ministre  de  Turquie,  et  divers 
hauts  fonctionnaires ,  assiste  à  la  réunion. 

M.  Brialmont  a  pris  d'abord  la  parole  pour  faire  la 
lecture  suivante  d'usage  comme  directeur. 

Causes  et  effets  de  l'accroissement  successif  des 
armées  permanentes. 

Messieurs, 

En  ioD2,  Charles-Quint  résolut  de  faire  un  suprême 
effort  pour  reprendre  Metz,  qui  était  tombée,  la  même 
année,  au  pouvoir  des  Français  par  surprise  et  trahison. 
Bien  que  son  empire  fût  aussi  vaste  que  celui  de  Charle- 
niagne,  il  ne  put  réunir  devant  la  place  que  60,000  hommes. 

Le  typhus  et  le  froid  firent  de  tels  ravages  dans  cette 
armée  que  l'empereur  dut  lever  le  siège  et  licencier  une 
partie  des  troupes. 

Trois  siècles  après  cet  événement,  en  1870,  l'Alle- 
magne, dont  la  superficie  est  égale  au  tiers  seulement  de 
celle  des  États  de  Charles-Quint,  investit  celte  même  place 


(  977  ) 
de  Melz  avec  200,000  liommes  et  porla,  au  delà  du  Rhin, 
m\  effectif  lolal  de  900,000  combaitaFiis  (1). 

Une  disproportion  aussi  grande  existe  entre  la  force  de 
rarméc  française  sous  Henri  II,  et  celle  de  Tamnée  fran- 
çaise d'aujourd'hui. 

Le  successeur  de  François  I"  ayant  déclaré  la  guerre  à 
TEspagne,  en  1557,  Philippe  II  fit  envahir  ses  Etats  par 
55,000  faniassinset  12,000  cavaliers,  auxquels  vinrent  se 
joindre  8,000  auxiliaires  anglais.  Cette  armée,  placée  sous 
le  commandement  du  duc  Philibert  de  Savoie,  mit  le  siège 
devant  Saint-Quentin,  forteresse  «  doù  dépendait  alors  le 
salut  de  la  France  (2).  » 

Le  connétable  Anne  de  Montmorency,  à  la  léte  de 
25,000  hommes  de  bonnes  troupes,  essaya  en  vain  de  ravi- 
tailler la  place  et  d'y  introduire  des  secours;  obligé  de 
battre  en  retraite  après  un  demi-succès,  il  rencontra,  à  la 
sortie  d'un  défdé,  8,000  hommes  d'armes  et  reiters  sous 
les  ordres  du  comte  d'Egmonl.  Celui-ci  l'attaqua  vigoureu- 
sement et  le  mit  dans  une  déroute  complète.  Montmorency 
perdit  la  moitié  de  son  effectif  et  ses  meilleurs  officiers  (3), 
l'autre  moitié  fut  prise  ou  dispersée  (4).  Par  suite  de  cet 
échec,  la  France  se  trouva  dans  une  situation  si  critique, 
que,  de  l'aveu  de  ses  historiens,  elle  eût  été  réduite  à  signer 


(1)  D'après  le  docteur  Engel,  directeur  du  bureau  statistique  de  Berlin,  l'effectif 
des  troupes  qui  ont  passé  la  frontière  allemande  en  1870-1871,  s'élève  à  913,957 
hommes,  savoir:  69o,9o7  Prussiens,  42,502  Saxons.  45.896  Hessois,  405,4-18 
Bavarois,  28,781  Wurtembergeois  et  25,918  Badois. 

(2)  MOTLKY,  la  Révolution  des  Pays-Bas,  t.  I".  p.  246 

(3)  Le  connétable  fut  blessé  et  pris,  le  duc  d'Enghien  tué;  Montpensier,  le  ma- 
réchal de  Saint-André  ,  le  duc  de  l.ongueville,  le  prince  de  Mantoue,  le  comte  de 
la  Bochefoucault,  d'Aubigny  et  Bochefort  furent  faits  prisonniers. 

(4)  De  Thou  prétend  que  les  Français  eurent  2.500  tués  dans  cette  bataille  et 
les  Espagnols  50  seulement. 


(  978  ) 
une  paix  désastreuse  si  Philippe  II  avait  permis  aux  vain- 
queurs de  Saint-Quentin  de  marcher  sur  Paris.  «  L'unique 
«  armée  (1)  sur  laquelle  reposait  la  défense  de  la  France, 
»  dit  M.  Henri  Martin,  en  citant  de  Thou,  semblait  alors 
»  anéantie....  L'ennemi  était  assez  fort  pour  entreprendre 
»  à  la  fois  d'accabler  dans  La  Fère  les  débris  de  l'armée 
j»  française  et  de  marcher  droit  à  Paris  qui  était  sans  dé- 
»   fense  (2)  » . 

Charles-Quint  le  savait;  aussi  quand  on  lui  annonça  la 
victoire  de  Saint-Quentin,  il  s'écria:  »  Mon  fils  est-il  à 
Pam(3)?)» 

Eh  bien,  Messieurs,  la  France  qui,  en  1557,  après  la 
perte  d'une  armée  de 25,000  hommes,  se  trouvait  à  la  merci 
du  roi  d'Espagne,  mit  sur  pied,  en  1871,  une  armée  de 
plus  d'un  million  de  soldats  (4),  et  continua  la  lutte  non- 
obstant les  désastres  de  Sedan  et  de  Metz  qui  lui  avaient 
coûté  350,000  hommes  (tués,  blessés  et  prisonniers). 

Aujourd'hui  cette  même  nation,  malgré  la  perte  de  deux 
provinces,  pourrait  mobiliser  2,400,000  soldats,  représen- 
tant le  pied  de  guerre  de  son  armée  active  et  de  son  armée 
territoriale. 

Quant  aux  forces  miUtaires  actuelles  des  États  dont  se 


(4)  Indépendamment  de  l'armée  qui  succomba  à  Saint-Quentin,  la  France  avait 
alors  en  Italie  une  armée  de  12,000  hommes  de  pied,  de  400  gendarmes  et  de 
800  chevau-légers,  sous  les  ordres  du  duc  de  Guise,  qui  combattait,  avec  peu  de 
succès  ,  les  troupes  aguerries  du  duc  d'Albe. 

(2;  Histoire  de  France,  t.  VIII,  p.  4oo. 

(3)  Lettre  du  majordome  de  Charles-Quint,  citée  par  M.  Mignet. 

(4)  Le  général  Pourcet  donne  dans  son  livre  (p. 209)  le  résultat  de  la  revue  d'ef- 
fectif qui  fut  passée  le  5  février  1871. 

Il  y  avait  en  ce  moment,  en  ligne.  534,000  hommes ,  dans  les  dépôts  et  en  Algérie, 
354,000  ;  total ,  888,000  hommes,  non  compris  273.000  hommes  de  l'armée  du  Rhin , 
prisonniers  en  Allemagne. 


(  979  ) 
composait  l'empire  de  Charles-Quint,  on  peut  les  évaluera 
plus  de  4  millions  d'hommes,  ou  à  22  fois  ce  qu'elles  étaient 
enlooO,  eu  égard   à   la  population,  et  en  supposant  que 
celle-ci  ait  triplé  depuis  lors  (1). 

Cet  énorme  accroissement  des  armées  permanentes  est 
un  des  faits  les  plus  curieux  et  les  plus  importants  de  This- 
loire.  Il  sera  donc  utile  d'en  indiquer  les  causes  et  d'en 
apprécier  les  effets. 

Si  je  me  suis  décidé  à  traiter  ce  sujet  dans  une  assem- 
blée de  savants,  c'est  qu'il  n'est  pas  exclusivement  du  do- 
maine de  l'histoire  et  de  l'art  delà  guerre.  Les  sciences,  en 
effet,  ont  largement  contribué  à  l'accroissement  des  armées 
permanentes,  et  suivant  que  cet  accroissement  sera  jugé 
un  bien  ou  un  mal ,  elles  auront  à  réclamer  une  part 
d'éloges  ou  à  se  charger  d'une  part  de  responsabilité. 


H. 


Les  armées  permanentes  ne  sont  pas  d'institution  mo- 
derne. Leur  origine  remonte  à  l'époque  où  les  Grecs  éprou- 
vèrent la  nécessité  de  perfectionner  leur  milice  et  de  faire 
progresser  l'art  de  la  guerre,  pour  repousser  les  innom- 
brables armées  des  barbares  ou  pour  aller  combattre  ces 
armées  chez  elles  et  s'emparer  de  leur  territoire. 

Les  premières  armées  dont  fassent  mention  les  livres 
saints  et  les  histoires  profanes,  étaient  levées  pour  la  durée 
d'une  campagne  et  composées  de  tous  les  citoyens  en  état 


(1)  La  période  moderne  du  doublement  de  la  population  est  évaluée,  d'après  les 
derniers  recensements,  à  cent  neuf  ans  en  moyenne.  Elle  était  beaucoup  plu» 
longue  antérieurement,  pour  plusieurs  raisons  qu'il  est  inutile  d'exposer  ici. 


(  980  ) 
de  porter  les  armes.  Telles  furent  les  armées  de  Moïse  (1), 
de  Cyrus,  de  Crésus,  de  Darius,  et  de  Xerxès;  la  moins 
forte  de  ces  armées  comptait  plus  de  300,000  hommes. 

A  la  bataille  de  Timbrée,  le  premier  fait  de  guerre  dont 
les  détails  soient  arrivés  jusqu'à  nous,  et  qui  remonte  à 
Tan  o48  avant  Jésus-Christ,  Cyrus  avait  présents  sous  les 
armes  196,000  Perses,  et  Crésus  420,000  Assyriens  (2). 

L'an  490  avant  Jésus-Christ,  500,000  Perses,  levés  par 
Darius,  envahirent  la  Grèce  et  furent  repoussés  à  Marathon 
par  10,000  Athéniens,  sous  Milliade.  Il  fallait  que  l'art 
de  la  guerre  eût  bien  décliné  chez  les  Perses,  pour  que  la 
Grèce  obluit  un  pareil  succès  septante-huit  ans  après  les 
triomphes  de  Cyrus. 

Voulant  réparer  l'échec  de  son  père  et  châtier  les  Grecs, 
Xerxès  leva,  en  481,  une  armée  beaucoup  plus  forte,  qu'il 
commanda  en  personne.  Hérodote,  qui  avait  quatre  ans  au 
moment  où  les  Perses  franchirent  l'Hellespont,  tenait  de 
témoins  oculaires  que  cette  armée,  fournie  par  quarante- 
six  nations  alliées  (Perses,  Mèdes,  Assyriens,  Égyptiens, 
Parthes,  Arabes,  etc.),  comptait  à  Doriskos,  où  elle  fut  pas- 
sée en  revue,  1,700,000  fantassins  et  80,000  chevaux, 
chiffres  dont  l'exactitude  semble  confirmée  par  ce  fait 
qu'elle  mit  sept  jours  et  sept  nuits  à  franchir  le  double 
passage  de  l'Hellespont,  bien  que  les  officiers,  pour  accé- 
lérer la  marche  des  troupes,  eussent  distribué  aux  soldats 
force  coups  de  bâton  et  de  fouet  (5). 


(\)  Elle  comptait  600,000  hommes,  le  quart  environ  de  la  population.  C'est  la 
plus  ancienne  armée  dont  l'histoire  fasse  mention. 

(2)  D'après  Xénophon. 

(3)  D'après  Hérodote,  elle  comptait,  en  outre,  !20,000  Arabes  et  Lydiens  mon- 
tant les  chevaux  et  conduisant  les  chars. 


(  981  ) 

A  eetcffeclif,  le  plus  élevé  dont  Thisloire  fasse  mention, 
il  faut  ajouter,  d'après  Hérodote,  un  nombre  au  moins  égal 
de  serviteurs  esclaves,  vivandiers,  conducteurs  de  bétail, 
concubines,  eunuques,  cuisiniers,  etc.  (1). 

Les  provisions  pour  cette  colossale  armée  avaient  été 
réunies  pendant  trois  ans  sur  divers  points  de  la  ligne 
d'opérations. 

Il  est  hors  de  doute  que  l'armée  de  Xerxès,  de  même 
que  celle  de  Darius,  avait  été  formée  par  la  levée  en  masse 
de  tous  les  hommes  valides.  N'ayant  fait  aucune  exception 
en  faveur  de  ses  propres  enfants,  Xerxès  se  crut  en  droit 
de  punir  le  riche  Pythios,  dont  il  fut  Thôte  à  Sardes ,  parce 
que  celui-ci  avait  demandé  la  permission  de  garder  près  de 
lui  son  cinquième  fils. 


Après  la  revue,  elle  fui  rejointe  par  300,000  soldats,  formant  le  contingent  des 
peuples  d  Europe. 

Xerxès  avait  1,200  vaisseaux,  montés  chacun  par  237  hommes,  et  3,000  vais- 
seaux, montés  chacun  par  80  hommes. 

(1)  Les  armées  actuelles  de  l'Orient  présentent  encore  le  même  phénomène.  Le 
comte  de  Warren,  qui  était  dans  l'Inde  en  1843,  rapporte  qu'à  cette  époque  l'ar- 
mée desCipayes  comptait  250,000  hommes.  Devant  pourvoir  à  ses  besoins,  cette 
armée  était  accompagnée  de  son  bazar.  «  C'est,  dit  il,  un  village  de  marchands  , 
un  peuple  d'ouvriers  qui  vendent  aux  Cipayes  tout  ce  dont  ils  ont  besoin  et  qui  les 
suivent  à  la  guerre  avec  leurs  bestiaux  et  leurs  magasins.  Boulangers,  bouchers, 
cabaretiers,  tout  ce  qui  est  nécessaire  à  la  vie  se  trouve  au  camp;  chaque  officier 
traîne  avec  lui  un  énoi-me  bagage  ,  dix,  quinze  ou  vingt  domestiques ,  une  tente, 
un  mobilier,  etc.  Bref,  le  système  n'a  pas  changé  depuis  Xerxès  et  Darius.  Cette 
adjonction  de  tant  d'individus  qui,  le  jour  de  la  bataille  ,  ne  servent  absolument 
à  rien,  mais  qu'il  faut  protéger  avant  tout,  parce  que  sans  eux  on  mourrait  de 
faim,  déroute  complètement  les  prévisions  accoutumées  d'un  officier  général  euro- 
péen, puisque  \&  tiers  de  son  monde,  tout  au  plus,  est  capable  de  faire  le  coup 
de  fusil...  Le  moindre  mouvement  rétrograde  livre  toutes  ses  ressources  à  l'en- 
nemi. Il  faut  donc  agir  lentement,  à  coup  sur,  ne  rien  risquer.  Aussi  lord  Clive 
a-t-il  fait  la  conquête  du  Bengale  avec  une  poignée  de  soldats,  comme  Alexandre 
avait  fait  celle  de  l'Inde,  deux  mille  ans  auparavant.  » 

{^Inde  anglaise,  t.  V^.) 


(  982  ) 

La  bataille  navale  de  Snlamine  obligea  Xerxès  à  battre 
en  retraite;  il  laissa  en  Grèce  500,000  hommes  sous  les 
ordres  de  Mardonius. 

Cette  armée  fut  battue,  en  Tan  479,  à  Platée,  par  Pausa- 
nias,  et  le  même  jour  la  flotte  perse  subit  un  échec  décisif 
à  Mycale. 

Environ  cent  cinquante  ans  après  (en  Tan  553),  l'un 
des  successeurs  de  Xerxès,  Darius  Codoman,  leva  400,000 
fantassins  et  100,000  chevaux,  pour  arrêter  la  marche 
d'Alexandre  le  Grand.  Cette  armée,  de  même  que  les 
précédentes,  formait  une  masse  confuse  sans  instruction 
et  qui  n'élait  pas  même  subdivisée  en  unités  tactiques. 
Il  fut  impossible  de  la  diriger  et  de  l'engager  contre  les 
Grecs,  qui  avaient  des  troupes  exercées,  disciplinées  et  bien 
commandées.  L'historien  Grote  dit  avec  raison  que  les  sol- 
dats de  ces  énormes  armées  étaient,  un  jour  de  bataille, 
«  plutôt  spectateurs  que  combattants,  » 

C'est  également  une  sorte  de  levée  en  masse  qui  permit 
à  Attila,  roi  des  Huns,  de  réunir  la  formidable  armée  avec 
laquelle  il  eût  ravagé  l'Europe  occidentale,  si  les  Gallo- 
Romains  ne  l'avaient  arrêté  à  Chàlons,  l'an  Ao\  de  l'ère 
chrétienne.  La  même  origine  doit  être  attribuée  à  l'armée 
des  Arabes  Musulmans,  qui  fut  écrasée  à  Poitiers,  Tan  732, 
par  Charles  iMartel.  Dans  cette  mémorable  bataille,  où  se 
trouvèrent  aux  prises  l'Asie  et  l'Europe,  le  Coran  et  la 
Bible,  il  y  eut  d'énormes  forces  engagées.  Jamais  l'Occi- 
dent n'avait  vu  s'entre-choquer  de  pareilles  masses.  Il 
périt  des  deux  côtés,  d'après  l'historien  goth  Jornandès, 
J  65,000  hommes. 

C'est  encore  par  le  service  général  et  obligatoire  que  fut 
recrutée  l'armée  de  700.000  Mongols  et  Tarlares  avec 
laquelle  Genghis  Khan  s'empara  en  1209  de  Pékin  et  de 


(  98.1  ) 
tout  le  pays  situé  entre  cette  ville  et  la  mer  Caspienne. 

A  partir  de  ce  moment,  on  ne  vit  plus  qu'une  seule 
grande  armée,  formée  par  la  levée  en  masse,  ce  fut  celle 
qui  permit  à  Tamerlau,  l'un  des  successeurs  Mongols  de 
Genghis  Khan,  de  refaire  les  conquêtes  d'Alexandre  dans 
l'Inde  et  de  battre,  en  1401,  les  Turcs,  sous  Bajazet,  à  An- 
cyre.  Dans  cette  bataille,  la  première  où  les  Musulmans 
lurent  vaincus  par  les  Tarlares,il  périt  400,000 hommes  (1). 

Ces  armées  présentaient  le  spectacle  de  masses  confuses, 
sans  organisation,  ni  instruction,  ni  discipline,  et  l'histoire 
nous  apprend  qu'elles  furent  battues  honteusement  chaque 
fois  qu'elles  eurent  à  faire  à  des  troupes  exercées,  pourvues 
d'un  bon  armement  et  commandées  par  des  généraux 
habiles. 

Ainsi  10,000  Grecs  sous  Miltiade  (2)  repoussèrent  à 
Marathon  100,000  fantassins  et  10,000  cavaliers  Perses, 
commandés  par  Datis  (5). 

Ainsi  la  petite  armée  de  4,000  Spartiates  avec  laquelle 
Léonidas  défendit  les  Thermopyles  (4)  arrêta  pendant  deux 
jours  l'armée  de  Xerxès  et  lui  fit  perdre,  au  témoignage 
d'Hérodote,  20,000  hommes. 

Ainsi  encore  7o,000  Grecs  (5)  sous  Pausanias  vainqui- 


(1)  Histoire  universelle,  par  Cantu,  t.  XII.  p.  76. 

[%  D'après  Justin;  9.000  d'après  Cornélius  Nepos.  M.  Paul  Devaux.  dans  son 
Mémoire  sur  tes  guerres  médiques ,  soutient  qu'à  cet  effectif  de  10,000  hoplites 
on  doit  ajouter  10,000  à  12,000  hommes  de  troupes  irrégulières  (esclaves,  etc.). 

(3)  C'est  l'effectif  donné  par  Cornélius  Népos  ;  Pausanias  le  porte  à  300,000 , 
chiffre  exagéré;  M.  Devaux  à  6o,000. 

(4)  Les  forces  totales  de  Sparte  et  d'Athènes  ne  s'élevèrent  qu'à  11,200  hommes, 
d'après  Pausauias;  ces  forces,  après  le  passage  des  Thermopyles,  s'embarquèrent 
sur  la  flotte  qui,  sous  Eurybiade  et  Thémistocle,  remporta  la  victoire  décisive  de 
Salamine. 

(o)  Pausanias  avait  40.000  hommes  de  troupes  pesamment  armées,  3o,000  ilotes 
(troupes  légères]  et  un  nombre  proportionné  d'esclaves,  conduits  par  chaque  divi- 
sion de  l'armée  :  total ,  1 10,000  hommes, 


(  984  ) 
rent,  à  Platée,  500,000  Perses  (l'élite  des  troupes  de  Xer- 
xès)  commandés  par  Mardonius. 

Cette  supériorité  de  la  science  sur  le  nombre  éclate  sur- 
tout pendant  les  merveilleuses  expéditions  d'Alexandre. 
Dans  sa  deuxième  campagne  d'Asie,  l'armée  macédonienne, 
forte  de  40,000  fantassins  et  de  7,000  chevaux  (1),  se 
trouva,  à  Issus,  en  présence  de  500,000  Perses.  Alexandre 
les  attaqua  résolument,  les  mit  dans  une  déroute  com- 
plète et  fit  un  grand  massacre  parmi  les  fuyards  accumulés. 
Les  Perses  perdirent  100,000  fantassins  et  10,000  cava- 
liers. Du  côté  des  Macédoniens  il  n'y  eut  que  500  fantas- 
sins et  150  cavaliers  tués. 

A  la  bataille  d'Arbèles,  livrée  deux  ans  après  (551  avant 
J.-C.)  la  supériorité  des  Grecs  ne  fut  pas  moins  écra- 
sante (2).  Darius  donna  l'exemple  de  la  fuite,  et  toute  l'ar- 
mée se  débanda  lorsque  seulement  le  dixième  de  ses 
forces  avait  été  engagé.  Ses  pertes  furent  immenses,  celles 
des  Grecs  minimes  (5). 

Bien  que  ces  grands  et  décisifs  succès  doivent  être  attri- 
bués en  partie  à  l'ignorance,  à  l'indiscipline  et  à  la  mollesse 
des  Perses  et  de  leurs  alliés,  on  ne  peut  nier  qu'ils  ne 
témoignent  éloquemment  en  faveur  de  la  supériorité  des 
troupes  permanentes  de  la  Grèce. 

L'armée  de  Philippe  de  Macédoine,  père  d'Alexandre, 


(i)  C'était  la  force  de  l'armée  d'Alexandre  à  Arbèles.  D'après  Grote,  Alexandre 
n'avait  que  30,000  fantassins  et  4,500  cavaliers  lorsqu'il  envahit  l'Asie,  l'an  334 
avant  Jésus-Christ. 

(2)  Arrien porte  à  300,000  le  nombre  de  Perses  tués,  surtout  dans  la  poursuite. 
Diodore  le  réduit  à  90,000  et  Quinte-Curce  à  40,000. 

Les  Lacédémoniens  eurent  100  hommes  tués  d'après  Arrien,  et  300  d'après 
Ouinte-Curce. 

(3)  Alexandre  avait  47,500  hommes,  dont  7,000  de  cavalerie,  et  Darius 
600,000  hommes. 


(  \m  : 

élail  tactiqiiemenl  la  meilleure  du  temps.  Il  l'avait  rendue 
permanente  et,  pour  la  compléter,  y  avait  introduit  des 
mercenaires. 

Avant  lui,  les  armées  grecques  étaient  composées  de 
citoyens  riches  (1),  que  l'on  appelait  par  la  voie  du  sort  et 
qui  rentraient  dans  leurs  foyers  après  une  campagne  d'été 
de  quatre  ou  cinq  mois. 

A  l'époque  où  le  créateur  de  l'organisation  militaire  de 
la  Macédoine  parut  sur  la  scène,  ce  parfait  modèle  de 
recrutement  avait  déjà  subi  la  désastreuse  influence  de  la 
corruption  des  mœurs  et  de  l'abaissement  des  caractères. 

«  A  Athènes,  dit  Grote,  et  dans  la  plupart  des  autres 
parties  de  la  Grèce,  les  citoyens  étaient  devenus  opposés  à 
un  service  de  guerre,  dur  et  actif.  L'usage  des  armes  avait 
passé  principalement  à  des  soldats  de  profession...  qui  ser- 
vaient partout  où  une  bonne  solde  leur  était  offerte  (2).  » 

Les  armées  de  la  république  romaine  furent,  comme 
celles  des  premiers  temps  de  la  Grèce,  formées  et  alimen- 
tées parla  conscription  sans  privilège,  c'est-à-dire  fondée 
sur  le  principe  du  service  personnel.  Avant  Marins,  on  n'as- 
treignait au  service  militaire  que  les  hommes  libres  payant 
un  cens  supérieur  à  4,000  as  (400  francs).  L'armée  romaine 
se  composait  alors  des  citoyens  les  plus  riches,  les  plus 
instruits,  les  plus  dévoués. 

Dans  l'opinion  du  législateur  romain,  «  la  fortune  et  la 
propriété  étaient  des  otages  et  des  garanties  pour  la  répu- 


(Ij  Ils  devaient  être  assez  riches  pour  s'équiper  et  pourvoir  aux  frais  de  la 
guerre.  En  échange  de  ce  sacrifice,  on  leur  accordait  tous  les  emplois  adminis- 
tratifs et  judiciaires  et  toutes  les  hautes  positions  sociales. 

■2)  L'armée  d'Alexandre   comptait  5,000  mercenaires.  Il  y  en  avait  !20,'lOO  à 
80,000,  d'après  Grote,  dans  l'armée  perse  .  à  Issus.  C'étaient  tous  des  Grecs. 
^■"^  SÉRIE,  TOME  XL.  65 


(  986  ) 
blique   et  le  fondement  le  plus  sûr  de  Tamoiir  de  la  pa- 
trie (1).  D 

A  cause  de  ce  recrutement  limité,  les  armées  de  Rome 
ne  furent  pas,  eu  égard  à  la  population,  plus  nombreuses 
que  ne  l'avaient  été  celles  de  la  Grèce,  mais  la  qualilé  des 
hommes,  la  supériorité  de  l'instruction,  de  Tarmement  et 
du  commandement  leur  donnèrent  assez  de  puissance  pour 
vaincre  les  masses  confuses,  ignorantes  et  indisciplinées 
des  barbares.  En  l'an  346  avant  Jésus-Christ,  lorsque 
Rome  commença  la  conquête  du  monde,  elle  ne  pouvait 
lever  que  4o,000  hommes. 

a  Cette  nation,  dit  Montesquieu,  a  tiré  son  éclat  et  l'ar- 
mée son  mérite  de  ce  que  les  soldats  qui  la  composaient 
n'étaient  pas  d'une  classe  obligée  de  sacrifier  sa  liberté 
pour  assurer  sa  subsistance.  » 

Marius  corrompit  l'esprit  aristocratique  des  légions,  en 
y  introduisant  des  pauvres  et  des  hommes  de  race  aflVan- 
chie  (2),  qui  communiquèrent  à  l'armée  leurs  habitudes  de 
désordre  et  d'anarchie.  Jusque-là  le  service  militaire  avait 
été  considéré  non  comme  un  devoir,  mais  comme  un  droit 
du  citoyen  libre.  Cette  altération  de  la  milice  romaine  eut 
pour  résultat  de  transformer  l'armée  en  un   instrument 


(1)  ViTi',  Histoire  civile  de  l'armée  française. 

["2]  Le  général  Bardin  prétend  qu'après  la  bataillo  de  Cannes,  l'enrôlement  des 
esclaves  fut  une  nécessité;  jusque-là,  il  n'avait  été  qu'une  exception;  Marius  en 
fit  un  principe. 

D'après  Mommsen, Marius  fut  obligé  d'admettre  les  prolétaires  dans  l'armée 
«  parce  que  les  classes  les  meilleures  de  la  société  s'éloignèrent  de  plus  en  plus 
du  service  militaire  et  que  la  classe  moyenne  et  celle  des  Italiotes  diminuaient  de 
plus  en  plus.  »  Le  même  historien  fait  observer  judicieusement  que  «  Marius,  en 
formant  une  classe  de  soldats,  en  remplacement  des  citoyens  soldats  de  la  répu- 
blique, fut  cause  que  le  service  militaire  devint  graduellement  une  profession,  et 
que  l'armée  temporaire  fit  place  à  l'armée  permanente  »  (réforme  qui  s'accomplit 
régulièrement  sous  Auguste). 


(  987  ) 
dangereux.  Les  factions  s'en  emparèrent,  et  Ton  vil  alors 
Tarmée  combattre  successivement  pour  César  et  pour 
Pompée,  pour  Antoine  et  pour  Brutus.  Quand  Auguste 
monta  sur  le  trône,  il  trouva  l'instrument  usé,  et  jugea  né- 
cessaire de  le  refondre  en  décrétant  la  permanence  de 
l'armée  (  I  ).  «  Au  lieu  de  20  campagnes ,  séparées  quelque- 
fois par  de  longs  intervalles  de  repos  dans  ses  foyers,  le 
légionnaire  devait  accomplir  vingt  années  de  service  effec- 
tif, c'est-à-dire  vivre  vingt  années  sous  la  tente  et  dans  les 
camps  retranchés  qui  étaient  les  casernes  des  Romains.  » 
Malheureusement,  dans  la  crainte  que  le  peuple  ne  s'in- 
surgeât contre  son  despotisme ,  Auguste  éloigna  des  légions 
les  citoyens  romains  et  n'y  admit  plus  que  les  levées  des 
provinces  et  les  mendiants  de  la  cité  :  mesure  fâcheuse, 
dont  Mécène  prit  la  responsabilité.  Dion  Cassius  pré- 
tend ,en  effet,  que  ce  célèbre  favori,  pour  éviter  les  sédi- 
tions et  les  guerres  civiles,  avait  conseillé  à  son  maître 
de  désarmer  les  citoyens  et  d'enrôler  exclusivement  dans 
ses  armées  «  la  portion  la  plus  vigoureuse  et  la  plus  forte 
de  la  nation,  celle  que  la  misère  contraignait  à  vivre  de 
brigandage.  » 

L'armée  permanente  cessa  donc  d'être  nationale  et  elle 
déclina  d'autant  plus  vite,  qu'après  Auguste  on  étendit  à 
toute  l'Italie  l'exemption  qui  avait  été  accordée  à  la  cité, 
et  qu'on  n'enrôla  plus  dès  lors  que  des  volontaires  et  des 
provinciaux  non  romains.  Or,  Tacite  nous  apprend  que 
l'empereur  Tibère  se  plaignait  de  ce  qu'on  ne  trouvait  plus 


(1)  Auguste  assujettit  les  prétoriens  à  un  service  de  12  ans  et  les  légionnaires  à 
un  service  de  46  ans  d'abord,  puis  de  20  ans.  Dans  la  cavalerie,  on  ne  servait  que 
10  ans. 


(  988  ) 
de  son  temps  de  soldats  volontaires  autres  que  «  des  misé- 
rables et  des  vagabonds.  » 

La  perte  de  l'esprit  militaire  eut  pour  résultat  immé- 
diat de  faire  rétrograder  la  tactique.  Sous  les  empereurs, 
il  ne  restait  plus  rien  des  brillantes  conceptions  ni  des 
utiles  réformes  de  Scipion,  de  Marins,  de  Syllaet  de  César. 

Dès  le  IV^  siècle,  on  avait  altéré  complètement  la  mi- 
lice romaine,  en  substituant  au  principe  du  service  per- 
sonnel, le  principe  du  recrutement  considéré  comme  une 
charge  de  la  propriété  foncière.  De  là  à  la  transformation 
du  service  militaire  en  impôt  direct,  il  n'y  avait  qu'un  pas, 
et  ce  pas  fut  vite  franchi.  Le  propriétaire,  non-seulement 
ne  fut  plus  tenu  de  servir  en  personne,  mais  on  le  dispensa 
même  de  fournir  un  nombre  de  recrues  proportionné  à 
l'étendue  de  ses  domaines,  en  lui  permettant  de  payer  une 
certaine  somme  pour  être  quitte  et  libre  envers  l'État.  Au 
moyen  de  cette  somme,  qui  était  de  50  à  56  sols  d'or  (I), 
l'État  achetait  des  remplaçants.  «  Nous  ne  connaissons 
pas,  dit  M.  Vitu,  de  témoignage  plus  éclatant  de  la  déca- 
dence d'une  grande  société  ni  de  présage  plus  certain  de 
sa  dissolution,  qui  devait  s'accomplir  dans  le  siècle  sui- 
vant. » 

A  partir  de  ce  moment,  il  y  eut  des  pillages  et  des  mal- 
versations dans  les  prestations  pécuniaires,  décadence  mo- 
rale et  physique  chez  les  hommes  recrutés.  Les  soldats 
étaient  en  général  ignorants,  pillards  et  lâches;  les  plus 
mauvais  étaient  les  hommes  de  rebut  que  fournissaient  les 
propriétaires,  en  achetant  à  prix  d'argent  la  connivence  des 
officiers  recruteurs;  les  moins  mauvais  étaient  les  vglon- 


(1)  'Si*  sols  d'or  on  laii  ;^7;).  el  ;{0  sols  d'or  en  l'iin  'M. 


(  989  ) 
laiies  qu'eiirôlait  rÉlal  avec  l'argent  provenantdes  radiais. 

Un  grand  nombre  de  citoyens,  pour  exempter  leurs 
enfants  du  service,  les  rendaient  incapables  de  darder  le 
pilum  en  leur  coupant  le  pouce  de  la  main  droite;  et  l'État, 
pour  réprimer  la  désertion,  fut  obligé  de  marquer  les  sol- 
dats au  front  ou  sur  les  mains,  avec  un  fer  rouge,  afin  de 
pouvoir  découvrir  plus  facilement  les  coupables. 

A  partir  de  Constantin  (506)  on  enrôla  dans  les  armées 
romaines  des  Goths,  des  Vandales,  des  Sarmates  et  d'au- 
tres barbares.  Ce  fut  le  dernier  degré  de  la  décadence. 

Lorsque,  en  406,  250,000  Sarmates,  Ostrogolhs  et  Ger- 
mains du  Nord,  commandés  par  Radagbis,  se  ruèrent  sur 
l'Italie,  l'empire  romain  expirant  ne  put  leur  opposer  que 
30,000  ou  40,000  soldats,  plus  30,000  auxiliaires  Goths, 
Huns  et  Alains,  sous  les  ordres  de  Stilicon  (1).  Malgré  sa 
grande  infériorité  numérique,  cette  armée,  grâce  aux 
troupes  permanentes  qui  en  formaient  le  noyau,  vainquit 
les  barbares,  en  extermina  un  grand  nombre  et  réduisit  le 
reste  en  esclavage.  Ce  fut  un  des  derniers  succès  des  aigles 
romaines.  Bientôt  les  barbares,  victorieux  dans  la  Gaule, 
inondèrent  l'empire  et  le  saccagèrent. 

La  supériorité  des  troupes  permanentes  de  Rome  sur 
les  armées  temporaires  des  barbares,  est  démontrée  par  des 
faits  nombreux  et  concluants.  On  sait  que  le  conquérant 
des  Gaules,  au  moment  de  pénétrer  en  Belgique  (l'an  57), 
se  trouva  en  présence  d'une  coalition  des  peuplades  du 
Nord,  dont  les  forces,  commandées  par  Galba,  s'élevaient 


{i)  L'enrôlement  à  l'intérieur,  pratiqué  par  Marias  (100  ans  avant  J.-C.;. 
sauva  l'État  oc  au  point  de  vue  militaire,  dit  Mommsen,  de  même  que  plusieurs 
siècles  après,  Arbogast  et  Stilicon  prolongèrent  son  existence  pour  un  certain 
temps,  par  l'introduction  de  l'enrôlement  étranger.  » 


(  990  ) 
à  300,000  hommes.  Il  n'avail  à  leur  opposer  que  24,000 
légionnaires,  réunis  sur  rAisne,et  cette  force  suffît  non- 
seulement  pour  abattre  tous  les  ennemis  de  Rome  en  deçà 
du  Rhin,  mais  encore  pour  tenir  en  respect  ceux  qui  se 
trouvaient  au  delà. 

Peu  fiant  la  septième  campagne  des  Gaules,  en  Pan  52, 
Vercingetorix  ,  chef  de  l'armée  des  Celtes,  s'était  réfugié 
dans  Alésia  avec  80,000  hommes  d'infanterie  et  13,000 
cavaliers.  César  l'investit  avec  la  totalité  de  ses  forces 
(10  légions  ou  40,000  hommes  environ).  Vercingetorix 
appela  toute  la  nation  sous  les  armes.  Après  un  mois  d'at- 
tente, 250,000  fantassins  et  8,000  cavaliers  (1)  vinrent 
assaillir  la  circonvallation  du  général  romain,  en  même 
temps  que  les  assiégés  attaquèrent  la  contrevallation.  Le 
premier  assaut  ayant  été  repoussé,  l'armée  celte  quitta  le 
champ  de  bataille,  complètement  découragée,  et  bientôt 
après,  Alésia,  abandonnée  à  elle-même,  tomba  au  pouvoir 
de  César. 

Les  plus  grandes  armées  de  la  république  romaine  ne 
dépassèrent  point  85,000  hommes;  celle  des  consuls  Paul 
Emile  et  Varron  à  la  bataille  de  Cannes  était  composée  de 
7o,000  hommes  d'infanterie  et  de  7,200  chevaux. 

Sous  Auguste,  les  forces  militaires  de  l'empire  s'éle- 
vèrent à  150,000  hommes,  au  milieu  du  règne,  et  à 
197,000  hommes  vers  la  fin  (2). 


(i;  D'après  quelques  auteurs,  Cumniius  ne  porta  au  secours  d'Alesia  que 
180,000  hommes. 

>2)  D'après  Montveran.  Auguste  avait  24  légions  formant  16i,000  hommes: 
12,000  hommes  appartenaient  aux  cohortes  prétoriennes,  8,000  aux  cohortes 
urhaines  et  133,000  aux  cohortes  de  sujets  et  d'alliés.  Ces  dernières  étaient,  sans 
doute,  les  troupes  mercenaires,  recrutées  chez  les  barbares.  qu'Auguste  avait  pris 
à  sa  solde  pour  garder  les  frontières  de  l'empire. 


(  9»!  ) 

Sous  Adrien  (en  l'an  120),  Tarmée,  au  dire  d'Appian, 
avait  200,000  hommes  de  pied,  40,000  cavaliers,  200  chars 
et  500  éléphants. 

L'eiïeclir  des  forces  militaires  dépassa  450,000  hommes 
sous  Constantin  (vers  320). 

Ainsi,  à  mesure  que  la  qualité  des  troupes  déclinait,  leur 
nomhre  augmentait  et  leurs  succès  devenaient  plus  rares 
rt  plus  contestés. 

Depuis  Auguste  jusqu'à  Constantin,  la  défense  de  la 
frontière  du  Rhin  n'exigea  que  8  légions  ou  48,000  hom- 
mes; ces  légions  étaient  campées  entre  Cologne  et 
Mayence. 

Dans  la  Gaule,  1,200  hommes  suffirent,  dit  Sismondi, 
pour  hrider  le  pays;  et  le  maximum  de  forces  agissantes 
dont  le  Sénat  eut  hesoin  pour  réduire  à  l'obéissance  le 
monde  alors  connu,  ne  dépassa  point  100,000  hommes 
effectifs. 

L'histoire  de  la  Grèce,  celle  de  Rome  et  de  tous  les  États 
qui  ont  joué  un  grand  rôle  dans  le  monde,  prouvent  que 
la  décadence  des  mœurs  et  l'abaissement  des  caractères 
ont  toujours  conduit  à  la  décadence  des  armées,  en  y  intro- 
duisant des  éléments  impurs  (remplaçants  ou  mercenaires 
étrangers),  des  idées  de  lucre,  des  habitudes  de  désordre 
et  une  licence  contraires  aux  devoirs  et  à  l'honneur  mili- 
taires. A  son  tour,  la  décadence  des  armées  a  toujours  réagi 
sur  le  système  politique,  en  ouvrant  l'ère  des  troubles  et 
des  guerres  civiles,  laquelle  aboutit  nécessairement  au  des- 
potisme, aux  mouvements  séditieux  dans  les  camps,  aux 
coups  d'État  militaires,  en  un  mot  au  règne  des  Pré- 
toriens. 


99^2 


111. 


Après  la  destruction  de  Tempire  romain,  le  service 
général  et  obligatoire,  qui  avait  produit  les  grandes  armées 
temporaires  des  Orientaux  et  des  barbares,  et  la  conscrip- 
tion, qui  avait  produit  les  petites  armées  d'abord  tempo- 
raires, puis  permanentes,  des  Grecs  et  des  Romains,  cédè- 
rent le  pas  à  un  mode  de  recrutement  fondé  sur  la 
subordination  du  client  au  patron,  du  bénéficiaire  au 
bienfaiteur  ou  du  vassal  au  seigneur  (1),  subordination 
qui  donna  naissance  au  vasselage  militaire  ou  à  l'obli- 
gation d'homme  à  homme,  base  du  service  militaire 
féodal. 

A  cette  époque,  de  même  que  chez  les  anciens,  le  ser- 
vice militaire  était  considéré  comme  une  charge  naturelle 
de  la  propriété  terrienne. 

La  féodalité  produisit  de  petites  armées  temporaires  de 
nobles,  possesseurs  de  fiefs  (vassaux)  ou  d'arrière-tîefs 
(arrière-vassaux),  dont  la  convocation  portait  le  nom  de 
ban  et  d' arrière-ban. 

Ces  armées  coûtaient  peu  au  souverain  parce  que  les 
hommes  d'armes  devaient  se  monter,  s'équiper  et  pourvoir 
à  tous  leurs  besoins,  et  que  c'était  seulement  après  un 
délai  convenu  (5  ou  4  mois  sous  les  deux  premières 
dynasties  des  rois  de   France  et  40  jours  à   partir  du 


(1)  C'est  sous  les  Carloviiigiens  que  le  mot  vassal  rempla(.-a  dans  la  langue  du 
droit  le  mot  leude,  fidèle  ou  client.  La  subordination  du  vassal  du  seigneur  en- 
traînait la  subordination  d'une  propriété  à  une  autre,  qui  est  la  base  du  système 
féodal. 


(  î)93  ) 

XI*  siècle),  que  leur  entretien  tombait  à  charge  de  la  cou- 
ronne (l). 

Ce  défaut  de  permanence  des  armées  eut  pour  résultat 
de  favoriser  les  invasions  et  le  brigandage;  témoin  la  ter- 
reur qu'inspiraient  au  IX*' siècle  les  bandes  de  Normands, 
dont  la  force  dépassait  rarement  500  hommes.  Les  plus 
grandes  villes  se  laissèrent  dépouiller  par  ces  bandes,  et 
l'histoire  rapporte  notamment  qu'en  852  Tune  d'elles  mit 
en  fuite  toute  la  population  de  Paris. 

Peu  à  peu  cependant  l'effectif  des  armées  s'accrut  par 
l'enrôlement  d'un  grand  nombre  de  manants  et  de  serfs 
(à  l'époque  des  premières  croisades),  et  par  l'adjonction  des 
milices  communales  (au  commencement  du  XII' siècle). 

L'armée  qui,  sous  Godcfroid  de  Bouillon  entreprit  la 
première  croisade,  en  1096,  comptait  900,000  hommes, 
mais  si  grands  étaient  le  désordre,  la  confusion  et  l'indis- 
cipline qui  y  régnaient,  qu'arrivée  en  Bithynie,  elle  était 
réduite  à  700,000  hommes  et  qu'elle  ne  put  amener  devant 
Jérusalem  que  50,000  combattants. 

L'armée  de  la  deuxième  croisade,  partie  en  H47,  ne  se 
composait  que  de  200,000  hommes;  elle  subit  un  grave 
échec  devant  Damas,  et  rentra  honteusement  en  Europe. 
Comme  celle  de  la  première  croisade,  elle  comptait  un 
grand  nombre  de  manants  et  de  serfs,  engagés  par  les  sei- 
gneurs en  violation  du  système  féodal. 

Les  enrôlements  salariés  furent  une  conséquence  de  ces 
expéditions  lointaines.  En  effet,  le  droit  féodal  n'imposant 


(i)  Les  Institutions  de  saint  Louis  portent  qu'après  quarante  jours  le  baron  et 
l'homme  du  roi  (propriétaire  noble  dont  le  fief  est  situé  dans  le  domaine  royal)  ne 
sont  plus  tenus  de  servir  à  leurs  dépens  et  peuvent  s'en  retourner,  à  moins  que  le 
roi  ne  les  prenne  à  sa  charge  pour  défendre  le  royaume.  (Ils  pouvaient  refuser  de 
suivre  le  souverain  hors  du  rovaume. 


(  994  ) 

pas  le  service  au  dehors  du  royaume,  les  seigneurs  de- 
vaient défrayer  leurs  vassaux  en  leur  allouant  une  solde, 
et  comme  celle-ci  n'était  pas  toujours  régulièrement  payée, 
rindiscipline  et  la  mutinerie  commencèrent  dès  lors  à 
s'introduire  dans  les  armées. 

Plus  tard  l'appoint  de  la  féodalité  fut  emprunté  aux 
milices  communales,  qui  introduisirent  dans  l'armée  l'élé- 
ment bourgeois  et  plébéien. 

On  transforma  aussi,  de  plus  en  plus,  le  service  mili- 
taire en  subsides,  de  sorte  que  l'enrôlement  à  prix  d'ar- 
gent, peu  connu  sous  les  deux  premières  races  des  rois 
de  France,  prit  sous  la  troisième  un  développement  consi- 
dérable. 

I.a  plus  grande  armée  composée  de  troupes  féodales  et 
de  milices  communales  qui  ait  paru  sur  les  champs  de 
bataille,  est  celle  que  le  comte  de  F'iandre,  ligué  avec 
remj)ereur  Othon,  les  Anglais,  le  comte  de  Boulogne  et  le 
duc  de  Brabanl,  opposa  à  Philippe-Auguste  dans  les 
plaines  de  Bouvines,  en  1214.  Elle  comptait  150,000  hom- 
mes, dont  10,000  seulement  étaient  de  la  cavalerie  féodale. 
Philippe-Auguste  l'écrasa  avec  une  armée  moitié  moins 
nombreuse,  mais  dans  laquelle  il  y  avait  beaucoup  de 
troupes  à  cheval. 

L'armée  qui  sous  Philippe  de  Valois  envahit  la  Flandre  en 
1547,  et  qui  se  porta  ensuite  au  secours  de  Calais ,  assiégé 
par  Edouard  111  d'Angleterre,  comptait  55,000  chevaux 
et  100,000  hommes  de  pied  (1): 

A  la  bataille  d'Azincourt,  livrée  en  1415,  il  n'y  avait,  du 
côté  des  Français,  que  des  troupes  féodales,  les  commu- 


(1)  Kervyn  de  Lettenhove,  Histoire  de  Flandre,  t.  lll,  p.  323. 


(  i)95  ^ 
niers  s'élnnt  trop  mal  conduits  dans  les  comhats  anté- 
rieurs, notamment  à  Crécy  et  à  Poitiers  (I).  Ce  grand 
eflbrl  de  la  noblesse  française  contre  le  roi  d'Angleterre  ne 
produisit  qu'une  armée  de  100,000  hommes.  C'était  plus 
qu'elle  n'avait  pu  opposer  aux  communes  flamandes  à 
Courtrai,  en  1502  (2),  et  plus  que  n'avait  donné  la  convo- 
cation du  ban  et  de  l'arrière-ban  sous  Philippe  le  Bel  (3). 

Une  des  dernières  armées  féodales,  fut  celle  qui  com- 
batlil,  sous  Charles  le  Téméraire,  à  Granson;  elle  ne  comp- 
tait que  10,000  hommes,  dont  18,000  cavaliers  des  com- 
pagnies d'ordonnance. 

Les  gentilshommes  pauvres  étaient  exempts  du  service, 
en  vertu  du  principe  ancien  que  celui  qui  ne  possède  rien 
n'a  rien  à  défendre  et  ne  doit  être  tenu  à  rien.  Plus  lard, 
on  recruta  parmi  eux  les  mercenaires.  Cette^  classe,  qui 
comprenait  également  des  non  nobles,  —  gens  des  villes 
et  des  campagnes,  —  s'accrut  peu  à  peu,  à  mesure  que 
la  classe  des  liefTés  s'affaiblit  par  les  guerres  intes- 
tines (4). 


(i)  Le  lendemain  de  cette  dernière  bataille,  80,000  hommes  des  communes 
françaises  furent  écrasés  par  600  lances  et  2,000  archers  anglais. 

(2)  La  chevalerie  française  avait  à  Courtrai  une  armée  de  o8,000  hommes. 

(3)  Cette  convocation  ne  donna  au  roi  de  France  que  80,000  hommes. 

'  (4)  Les  premiers  salariés  furent  des  nobles.  Déjà  en  1271,  dit  M.  Vitu,  il  y  avait 
un  grand  nombre  de  fiefs  qui  ne  devaient  le  service  militaire  qu'à  condition  de 
recevoir  une  solde. 

Sous  Philippe  le  Rel,  au  commencement  du  XIV*"  siècle,  le  service  des  fiefs  se 
transforma  d'une  manière  presque  générale  en  service  salarié. 

Les  mercenaires,  c'est  à-dire  ceux  qu'on  enrôlait  à  prix  d'argent  dans  le  pays 
d'abord,  puis  à  l'étranger  (et  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  les  .vw/ar/cf,  qui 
étaient  obligés  de  servir),  sont  d'une  origine  plus  ancienne.  Il  y  avait  déjà  des 
mercenaires  étrangers  dans  l'armée  de  Robert  le  Frison  en  l'an  1070  :  c'étaient 
des  archers  anglais.  En  1280,  Guy  de  Dampierre  avait  à  sa  solde  des  piquiers  alle- 
mands pour  châtier  les  villes  de  Flandre.  Depuis  lors,  il  y  en  eut  dans  toutes  le.s 
armées,  jusqu'à  la  fin  du  XVIII'*  siècle. 


(  996  ) 

Pour  mettre  nn  terme  à  ces  guerres,  qui  affaiblissaient 
leur  autorité,  les  rois  s'appuyèrent  sur  les  communes,  qu'ils 
se  rendirent  favorables  en  leur  octroyant  des  chartes  d'af- 
franchissement, en  vertu  desquelles  elles  pouvaient  lever 
des  milices  et  construire  des  remparts.  Ces  milices  avaient 
fait  leur  apparition  vers  le  milieu  du  XI'  siècle  (I);  elles 
gardaient  les  villes,  les  protégeaient  contre  les  violences 
des  châtelains  et  des  nobles,  et  étaient  trnues  de  suivre 
leur  seigneur  en  guerre,  mais  à  condition  de  pouvoir  ren- 
trer le  soir.  Quelques  communes  accordaient  au  seigneur 
le  droit  de  retenir  plus  longtemps  les  milices,  en  leur 
payant  une  solde,  après  1  ou  2  jours  de  service;  celles 
qui  n'avaient  d'autre  seigneur  que  le  roi,  devaient  à  celui-ci 
le  service  féodal  complet  de  40  jours. 

Les  milices  communales  disparurent,  après  trois  siècles, 
avec  l'armée  féodale  dont  elles  avaient  été  le  complé- 
ment (2).  En  France,  où  elles  avaient  montré  généralement 
peu  de  consistance,  de  bravoure  et  de  dévouement,  elles 
furent  supprimées  sous  Charles  VII. 

Avant  cetteépoque  l'ordre  était  fréquemment  troublé  par 
des  bandes  d'aventuriers  nationaux  et  étrangers  [colereaux 
et  routiers)  que  l'on  voit  figurer  dans  les  armées  françaises 
dès  le  commencement  du  XII'  siècle  (5).  Ces  bandes  se 


(1)  La  commune  de  Bruges  (une  des  plus  anciennes;  fut  établie  par  Bau- 
douin IV. 

(2)  L'importance  des  milices  communales  diminua  graduellement,  à  partir  de 
Tavénement  de  la  maison  de  Bourgogne.  L'indiscipline  neutralisa  l'effet  de  leur 
nombre  et  de  leur  courage.  Elles  manquaient  aussi  d'instruction,  et  leur  service 
limité  était  cause  que  le  prince  qui  les  employait  voyait  souvent  échouer  ses  entre- 
prises au  moment  même  où  il  touchait  au  succès. 

(3)  Ces  mercenaires  furent  surtout  recherchés  par  les  souverains  à  l'époque  où, 
luttant  contre  l'hostilité  des  grands  vassaux,  jaloux  de  l'autorité  royale,  ils  ne  pou- 
vaient plus  compter  sur  l'appui  des  milices  communales,  trop  faibles  ou  mal  dis- 


(  997  ) 

comportèrent  vaillamment  dans  plusieurs  circonstances, 
notamment  à  la  bataille  de  Bouvines;  mais  comme  elles  se 
recrutaient  de  gens  sans  aveu,  on  ne  pouvait  compter  ni 
sur  leur  fidélité  ni  sur  leur  obéissance.  En  I3G0,  les  com- 
pagnies de  routiers  servirent  tour  à  tour  le  roi  d'Angle- 
terre, le  roi  de  France  et  le  comte  de  Montfort.  Des  lors 
on  vit  des  troupes  entières  déserter  les  drapeaux  et  passer 
à  l'ennemi  avec  armes  et  bagages. 

Pour  faire  cesser  ce  Iléau,  Cbarles  V  institua  les  compa- 
gnies d'ordonnance,  ou  Tannée  régulière.  Il  assura  môme 
la  permanence  de  quelques-unes  de  ces  compagnies.  Son 
petit-fils,  Cbarles  Vlï,  rendit  permanente  toute  l'armée 
régulière  en  1438  (I);  cependant  l'ordonnance  qui  fixa  le 
nombre  des  compagnies  à  15  (2),  et  organisa  le  système 
des  tailles  royales,  ne  parut  qu'en  i44-5.  Dès  ce  moment 
(L  l'agriculture  se  releva  et  le  travail  reprit  ses  droits.  Ce 
que  l'autorité  royale  et  les  foudres  de  l'église  (5)  n'avaient 
pu  faire,  l'armée  permanente  le  réalisa  (4).  b 


posées  pour  eux.   D'après   quelques  historiens,  ce  furent  les    Brabançons  qui 
fournirent  les  premiers  routiers,  en  1159. 

(1)  Par  la  célèbre  ordonnance  de  Dlois,  adressée  à  tous  les  baillis  du  royaume; 
L'année  suivante  (1439),  les  états  généraux  approuvèrent  en  principe  la  création 
d'une  armée  permanente  et  votèrent  une  taille  de  4,200,000  livres  par  an  pour 
l'entretien  de  celte  armée. 

Charles  le  Téméraire  créa  8  cotnparjnies  d'ordonnance  en  4471.  Deux  ans 
après,  les  États  de  tous  les  pays  sous  sa  domination  accordèrent  une  aide  de 
.S00,000  écus,  payable  par  tous,  sans  exception,  pour  l'entretien  de  ces  troupes 
permanentes.  La  inème  année.  Charles  porta  à  22  le  nombre  des  compagnies: 
chaque  compagnie  se  composait  de  100  lances,  et  chaque  lance,  de  1  homme 
d'armes,  o  archers,  3  hommes  à  pied,  1  coutillier  et  i  page. 

On  doit  à  Charles  le  Téméraire  la  première  ordonnance  sur  l'exercice  des 
troupes. 

(2)  Chaque  compagnie  se  composait  de  100  lances  et  chaque  lance  de 
6  hommes. 

(3)  En  l'an  1179,  le  concile  de  Latran  avait  lancé  l'anathème  contre  ces  troupes 
sans  foi  ni  loi. 

(4)  M.  Vitu. 


(  998  ) 

Rien  de  plus  navrant,  dit  un  historien,  que  le  tableau 
de  la  France  avant  celte  lutte  de  la  force  organisée  contre 
le  brigandage.  Les  meilleurs  capitaines  étaient  à  la  tête 
des  bandes,  qui  avaient  pris  le  nom  à'écorcheurs  :  témoin 
de  Chabannes,  La  Hire,  Lislrac,  Xaintrailles,  le  bâtard 
d'Armagnac  et  presque  tous  les  compagnons  de  la  Pu- 
celle. 

Les  rouliers  pillaient  les  campagnes,  prenaient  même 
les  villes  d'assaut,  pour  y  lever  des  impôts,  s'emparaient 
des  notables  et  des  riches,  et  ne  les  relâchaient  qu'à  prix 
d'argent. 

«  La  cause  principale,  pour  ne  pas  dire  unique,  de  ces 
épouvantables  désordres,  au  sein  desquels  la  France  faillit 
redevenir  sauvage,  c'est  que  l'organisation  militaire  repo- 
sait sur  des  enrôlements  soldés  et  que  la  solde  n'était  plus 
payée  (I).  » 

Une  ordonnance  des  états  généraux,  de  1459,  permet 
d'apprécier  exactement  la  situation  de  l'armée  à  cette 
époque.  Elle  défendait  aux  capitaines  de  gendarmes  de 
piller  et  de  voler  (art.  6),  de  prendre  et  de  rançonner  les 
laboureurs,  voituriers,  etc.  (art.  7),  d'enlever  le  bétail 
(art.  8),  de  détruire  les  denrées  et  d'enfoncer  les  barriques 
de  vin  (art.  9),  de  couper  les  vignes  et  les  arbres  (art.  H), 
d'allumer  des  incendies  (art.  13),  d'abattre  les  couver- 
tures des  maisons  (art.  14),  etc.,  etc.. 

Mais  les  routiers  résistèrent  à  toutes  ces  ordonnances. 
11  fallut  les  détruire  et  les  expulser  par  la  force.  Ce  résultai 
fut  assuré  par  la  création  des  compagnies  d'ordonnance, 
qui  inaugurèrent  l'établissement  définitif  de  l'armée  fixe  et 


DM.  Vitu. 


(  999  ) 

permanente,  des  garnisons  permanentes  et  de  l'impôt  per- 
manent (1). 

Les  compagnies  d'ordonnance  étaient  une  milice  aris- 
tocratique, à  laquelle  se  joignaient,  en  temps  de  guerre, 
des  nobles  non  engagés,  qui  recevaient  alors  la  paye  des 
gendarmes  d'ordonnance.  Indépendamment  de  cette  armée 
féodale,  Charles  VU,  pour  remplacer  les  milices  commu- 
nales supprimées,  forma  une  infanterie  roturière  connue 
sous  le  nom  de  francs-archers.  Cette  infanterie,  composée 
d'hommes  fournis  par  les  paroisses,  était  à  la  solde  du  Roi, 
mais  en  temps  de  guerre  seulement  (2).  A  raison  d'un 
homme  par  50  feux,  la  France,  qui  avait  à  cette  époque 
15  millions  d'habitants,  aurait  pu  fournir  60,000  francs- 
archers. 

Les  résultats  que  produisirent  ces  utiles  réformes  de 
Charles  Vil  furent  très-remarquables.  Voici  en  quels 
termes  les  signale  l'auteur  de  l'excellente  Histoire  civile 
de  l'armée  française.  «  Les  frontières  et  les  routes  devin- 
rent, en  deux  mois,  plus  sûres  qu'elles  ne  l'avaient  été  à 
aucune  autre  époque  de  notre  histoire.  L'agriculture  et  le 
commerce  sortirent  du  néant,  les  déserts  se  peuplèrent. 
Une  vie  nouvelle  reparut  sur  le  sol  français,  jonché  de  tant 
de  ruines,  arrosé  de  tant  de  sang  généreux.  C'est  comme 
une  renaissance,  un  printemps,  une  aurore.  » 

Tous  les  annalistes  du  XV^  siècle  s'expriment  dans  le 


(1)  M.  Vitu  fait  remarquer  judicieusement  que  la  réorganisation  militaire 
opérée  par  Charles  VII  eut  pour  conséquence  la  réorganisation  financière  de  la 
France. 

(2)  Par  l'ordonnance  de  1448,  chaque  paroisse  devait  fournir  un  homme,  choisi 
parmi  les  plus  capables.  Cet  homme  devait  s'équiper  et,  s'il  ne  le  pouvait  pas, 
la  paroisse  intervenait.  Il  était  astreint  à  des  exercices  et  à  des  revues  men 
suelles. 


(  1000  ) 
même   sens,   notamment  Thomas   Bazin  et  Mathieu  de 
Coucy. 

Sous  Louis  XI  l'armée  française  avait  9,000  cavaliers 
(les  compagnies  d'ordonnance,  10,000  hommes  d'infan- 
terie nationale  (tenant  lieu  des  francs-archers  que  le  roi 
avait  supprimés)  et  6,000  hommes  d'infanterie  suisse,  en 
tout  :  25,000  hommes  (1). 

L'effectif  des  armées  s'accrut,  mais  faiblement,  sous 
François  I""  et  Henri  11  en  France  ,  sous  Charles-Quint  en 
Allemagne,  en  Italie  et  en  Espagne. 

En  lo25,  François  V^  dut  faire  un  grand  effort  pour 
opposer,  en  Italie,  50,000  hommes  à  l'armée  impériale, 
commandée  par  Pescara.  Celle-ci  remporta  une  victoire 
décisive  à  Pavie,  bien  que  forte  seulement  de  20,000 fan- 
tassins, 700  hommes  d'armes  et  500  chevau-légers. 

En  1552,  Charles-Quint,  menacé  par  200,000 Turcs, 
sous  les  ordres  de  Soliman,  ne  put  réunir  que  70,000 
hommes,  y  compris  les  Espagnols  de  l'armée  d'Italie  et 
les  Italiens  que  l'empereur  et  le  pape  avaient  à  leur  solde. 
Ce  fut  sa  plus  grande  armée.  En  1555,  dans  l'expédition 
contre  Tunis,  il  n'avait  que  50,000  hommes  (2),  embarqués 
sur  500  navires.  Dix  ans  après,  quand  les  Confédérés  se 
jetèrent  en  Allemagne  avec  85,000  hommes,  il  ne  put  leur 
opposer  que  50,000  fantassins  et  9,000  cavaliers.  Enfin, 
dans  sa  grande  expédition  contre  Metz,  les  forces  totales 
de  son  armée  ne  dépassèrent  pas  60,000  combattants. 


(1)  C"est  l'effectif  que  Louis  XI  opposa  à  la  lUjue  du  bien  public  et  à  Charles 
le  Téméraire. 

Mazas  prétend  que  l'effectif  maximum  de  l'armée  française ,  sous  Louis  XI , 
atteignit  le  chiffre  de  6o,000  hommes,  dont  18,000  de  cavalerie,  mais  ce  chiffre 
semble  exagéré. 

(2)  20,000  hommes,  d'après  quelques  historiens. 


(  1001  ) 

Le  général  Bardin  évalue  à  41,000  hommes,  levés  en 
grande  partie  à  l'étranger,  reffeclif  total  de  l'armée  fran- 
çaise à  cette  époque  (15S8). 

De  1600  à  1609,  Henri  IV  n'eut  sur  pied  que  4,100 
hommes  d'infanterie  et  2,657  hommes  de  cavalerie,  plus 
3,000  hommes  formant  le  noyau  de  quelques  régiments 
d'infanterie,  réformés  après  la  guerre  de  Savoie  et  servant 
à  garder  les  châteaux  ou  citadelles  (1). 

Lorsque,  en  1610,  il  se  hrouilla  avec  la  maison  d'Au- 
triche, à  l'occasion  de  la  succession  de  Clèves  et  de  Juliers, 
le  duc  de  Sully  prit  des  mesures  pour  porter  l'armée  fran- 
çaise à  rcffectif  de  49,600  hommes ,  savoir  : 
1,000  gentilshommes  volontaires, 
4,600  hommes  de  cavalerie, 

25,000  hommes  d'infanterie, 
1,000  hommes  de  réserve  de  cavalerie, 

20  canons,  6  coulevrines  et  4  bâtardes. 

L'armée  du  maréchal  l>esdiguières,  destinée  à  seconder 
les  princes  d'Italie,  comptait  : 
2,000  hommes  de  cavalerie, 

12,000  hommes  d'infanterie, 

10  canons. 

Les  garnisons  étaient  fixées  à  4,000  hommes. 

Total,  49,600  hommes  (2). 

A  cette  époque,  les  autres  États  avaient  relativement 


(Ij  Recherches  sur  ta  force  de  l'armée  française  (depuis  Henri  IV  jus- 
qu'en 1803),  ouvrage  composé  d'après  des  documents  oflBciels  et  publié  à  Paris 
en  1806. 

(2)  Sous  Henri  IV,  on  pratiquait  une  espèce  de  presse  pour  avoir  des  soldats. 
Sully  nous  montre  les  Français  de  ce  temps  ne  marchant  aux  armées  que  courbés 
sous  le  bâton  et  menacés  du  gibet.  Longtemps  après ,  ce  même  mode  de  recrute- 
ment était  encore  en  vigueur,  conmie  nous  le  verrons  plus  loin. 

2'"''  SKP.IE,  TOME   \L.  64 


(  1002  ) 

encore  moins  de  troupes  sous  les  armes.  On  en  aurait  eu 
la  preuve  si  la  mort  n'était  venue  arrêter  Henri  IV  dans 
l'exécution  de  son  projet  d'abaisser  à  la  fois  la  branche 
allemande  et  la  branche  espagnole  de  la  maison  d'Autriche. 
En  vue  de  ce  grand  dessein  que  Richelieu,  Mnzarin  et 
Louis  XIV  réalisèrent  partiellement  dans  la  suite,  Henri  IV 
s'était  allié  avec  Venise,  le  pape,  la  Toscane,  la  Savoie  et 
tous  les  Étals  protestants  du  reste  de  l'Europe.  Les  mé- 
moires de  Sully  nous  apprennent  que  ces  Élats  s'étaient 
engagés  à  lui  fournir,  en  tout,  128,000  hommes,  17,000 
chevaux  et  108  canons. 

A  partir  de  1620,  Louis  XHÏ  augmenta  graduellement 
les  forces  militaires  de  la  France.  En  1655,  elles  se  com- 
posaient de  cinq  armées  d'un  effectif  tolal  de  100,000  hom- 
mes, dont  18,000  de  cavalerie.  Cet  effectif  fut  maintenu 
jusqu'au  traité  de  Munster,  en  1648. 

Pour  le  tenir  au  complet  on  avait  été  obligé  de  recourir 
à  des  moyens  extrêmes;  témoin  l'ordonnance  de  1636 
qui  supprima  temporairement  les  travaux  de  bâtisse  afin 
(le  déterminer  les  maçons  à  se  faire  soldats,  et  l'ordon- 
nance de  1643  (reproduction  d'une  ordonnance  de  Fran- 
çois 1")  qui  recommanda  «  d'enrôler  par  préférence  et 
(le  force  les  vagabonds,  gens  sans  aveu  et  fainéants.  » 

Le  désir  d'abaisser  les  maisons  d'Autriche  et  d'Espagne, 
qui  avait  engagé  Henri  IV  à  porter  son  armée  à  près  de 
50,000  hommes,  et  LonisXllI  à  doubler  ce  nombre,  déter- 
mina Louis  XIV  à  atteindre  lechiflVe  de  131,000  hommes 
en  1668,  après  la  paix  d'Aix-la-Chapelle,  et  celui  de 
176,000  en  1672,  au  début  de  la  guerre  contre  la  Hol- 
lande (1). 

(1)  Recherches,  etc. 


(  i()()5  ) 

Nous  touchons  ici  à  la  grande  et  principale  cause  de 
l'accroissement  successif  et,  selon  nous,  exagéré  des  armées 
permanentes.  Il  convient  de  nous  y  arrêter  un  instant,  pour 
Tapprécier  exactement  et  en  indiquer  les  premiers  effets. 

Louis  XIV  avait  une  ambition  immodérée,  qui  se  trahit 
par  ces  mots,qu'iI  adressa  au  maréchal  de  Villars  :S'«f;raii- 
dir  est  la  plus  digne  et  la  plus  agréable  occupation  d'un 
souverain,  a  La  pensée  première  de  son  règne,  dit  Henri 
Marlin,  fut  de  prendre  le  traité  des  Pyrénées  comme  un 
point  de  départ  vers  des  agrandissements  ultérieurs  aux 
dépens  de  la  monarchie  espagnole.  Celle  pensée  est  la  con- 
tinuation de  la  politique  nationale,  puisque  la  France  n'a 
point  atteint,  par  le  traité  des  Pyrénées,  les  bornes  de  son 
développement  naturel  et  que  l'Espagne  détient  encore 
plusieurs  provinces  sur  le  sol  gaulois  (i).  » 

Ainsi  «  refaire  France  ce  qui  avait  été  Gaule,  »  telle  fut 
la  principale  préoccupation  du  Roi.  Ce  projet  qui  avait 
séduit  Henri  lY  au  moment  où  il  tomba  sous  le  fer  d'un 
assassin,  et  que  Fiichelieu  comptait  réaliser  lorsqu'il  entama, 
en  1655,  sa  grande  lutte  contre  la  maison  d'Autriche,  ce 
projet, accepté  etencouragé  par  la  nation  française,  laquelle 
voulait  être  non-seulement  grande,  mais  prépondérante, 
inspira  et  dirigea  toutes  les  actions  du  plus  orgueilleux  des 
souverains,  du  plus  ambitieux  et  du  plus  implacable  des 
ministres  (2). 


(1)  T.  XIII,  p   275. 

(!2)  Ce  projet  eût  été  avouable  et  utile  à  l'Europe  si  les  États  de  Charles-Quint 
étaient  restés  soumis  au  même  sceptre  et  à  la  même  direction.  Le  puissant  em- 
pereur avait  détruit,  en  effet,  à  son  profit,  l'équilibre  politique  et  créé  une  situa- 
tion peu  tolérable  pour  les  autres  États  et  surtout  pour  la  France.  Mais  sous  ses 
faibles  successeurs,  les  deux  grandes  fractions  de  l'empire  ne  pouvaient  causer 
les  mêmes  alarmes  ni  faire  naître  les  mêmes  inquiétudes.  La  France,  par  consé- 


(  um  ) 

Pour  atteindre  leur  but,  Louis  XIV  et  Louvois  ne  recu- 
lèrent devant  aucun  sacrifice  ni  devant  aucun  excès  de 
pouvoir;  ils  ne  s'arrêtèrent  pas  même  lorsqu'ils  virent  la 
France  épuisée,  ruinée,  mutilée! 

«  Après  la  paix  de  Nimègue  (1679),  dit  M.  Martin  (1), 
Louis  ne  veut  plus  seulement  le  complément  naturel  de  la 
France;  il  n'assigne  dans  sa  pensée  aucune  borne  à  l'exten- 
sion de  sa  puissance.  Il  est  obsédé  par  le  rêve  funeste  de 
l'empire.  En  1680  le  corps  de  Paris  achève  de  l'enivrer 
en  lui  décernant  solennellement  le  titre  de  Louis  le 
Grand.  » 

En  faisant  peser  sur  les  autres  nations  l'ascendant  le 
plus  impérieux  et  le  plus  accablant  qui  eût  jamais  été 
exercé  en  Europe,  la  France  amassa  contre  elle  de  terribles 
ressentiments,  et  provoqua  une  réaction  qui  bientôt  éclata 
de  toutes  parts  avec  une  intensité  sans  égale.  L'odieuse 
conduite  du  roi  envers  la  flollande  (2)  révolta  le  sentiment 
public  dans  le  monde  entier.  L'incendie  du  Palatinat 
chassa  de  leurs  foyers  100,000  habitants  qui  vinrent  de- 
mander vengeance  à  l'Allemagne.  Les  dragonnades  et  la 
révocation  de  l'édit  de  Nantes  peuplèrent  l'empire,  la  Hol- 
lande et  l'Angleterre  d'autres  malheureux,  qui  manifes- 
taieiil  les  mêmes  ressentiments. 


quent,  n'avait  plus  le  droit  de  se  dire  menacée  par  la  suprématie  de  la  maison 
d'Autriche,  ni  surtout  le  droit  de  chercher  à  substituer  sa  suprématie  à  celle  de 
l'empire  de  Char!es-Quint,  dont  les  deux  fractions  pouvaient  sans  doute  s'unir 
encore,  mais  que  des  intéiêts  opposés  ou  divergents  pouvaient  aussi  déterminer 
à  se  combattre. 

(1)  T.  XIII,  p.  368. 

(2)  C'est  Louvois  qui  rédigea  et  fit  accepter  par  Louis  XIV  la  déclaration  du 
14  juin  1672,  par  laquelle  il  menaçait  les  villes  hollandaises  de  ne  leur  donner 
aucun  quartier  «  si  elles  tâchent  de  résister  aux  forces  de  Sa  Majesté  par 
l'inondation  de  leurs  digues  ou  autrement.  »  Il  ordonna  les  dévastations  du  Pala- 
tinat et  contribua  à  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes. 


(  \{m  ) 

Ainsi  menacée,  par  ses  propres  fautes,  d'une  coalition 
européenne,  la  France  dut  augmenler  l'eflectir  de  ses 
armées  à  mesure  que  croissait  le  nombre  de  ses  ennemis. 
Pour  faire  face  à  la  ligue  d'Augsbourg,  formée  en  1G87, 
Louis  mit  sur  pied  une  armée  double  de  celle  qu'il  avait 
dirigée,  en  1672,  contre  la  Hollande.  Pendant  cette  guerre, 
qui  se  termina  en  1697  par  la  paix  de  P»ys\vick,  son  armée 
atteignit  l'effectif  de  596,000  hommes  (I). 

Le  même  effectif,  à  peu  près,  fut  maintenu  durant  les 
guerres  de  la  succession,  de  i70l  à  1715  (2). 

Ces  guerres  épuisèrent  tous  les  Étals  et  les  obligèrent  à 
contracter  des  dettes  énormes;  mais  elles  furent  particu- 
lièrement désastreuses  pour  la  France,  dont  la  misère 
n'était  pas  moins  hideuse  parce  qu'on  l'avait  parée  de  lau- 
riers. Elle  s'était  véritablement  épuisée  à  vaincre,  et, 
comme  le  remarque  l'auteur  du  Siècle  de  Louis  XIV  :  a  on 
périssait  de  misère  au  bruit  des  Te  Deiim.   )> 

La  population  qui,  en  1685,  s'élevait  de  22  à  25  millions 
était  tombée  à  19  1/2  millions,  en  1700  (5). 

Le  29  mai  1675,  le  gouverneur  du  Dauphiné  écrivait  à 
Colbert  «  que  le  commerce  cessait  absolument  dans  sa 
province  et  que  la  plus  grande  partie  des  habitants  n'avaient 
reçu,  pendant  l'hiver,  que  du  pain  fait  avec  des  glands  et 
des  racines;  que  présentement  on  les  voyait  manger 
l'herbe  des  prés  et  l'écorce  des  arbres  (4).  » 

Peu  de  temps  après,  Locke,  voyageant  dans  le  Langue- 


ci)  Recherches,  etc. 

(2)  L'auteur  des  Recherches ,  etc.,  porte  Peffectif ,  pendant  ces  douze  années,  à 
392,000  liornnies. 

(3)  Cela  est  constaté  par  les  Mémoires  des  intendants. 

(4)  Ces  résultats  étaient  dus  en  partie  à  un  hiver  exceptionuellement  rigoureux  . 
qui  avait  détruit  le  bétail  et  causé  un  énorme  préjudice  à  l'agriculture. 


(  i()0()  ) 
doc,  constata  que  les  fermages  des  terres  avaient  diminué 
de  moitié  depuis  le  commencement  de  la  guerre.  En  1710, 
le  trésor  ne  vivait  plus  que  d'expédients.  «  Pour  avoir  de 
l'argent,  les  intendants  enlevaient  jusqu'aux  dépôts  publics. 
On  ne  pouvait  plus  faire  le  service  qu'en  escroquant  de 
tous  côtés...  C'était  la  banqueroute  universelle  de  la 
nation  (1).  » 

Les  ponts,  les  chaussées  et  les  chemins  étaient  dans  un 
état  de  dégradation  presque  générale  (2).  La  pèche  était 
ruinée  et  les  populations  frontières  succombaient  sous  le 
poids  des  contributions,  des  logements  militaires  et  des 
réquisitions.  Les  propriétaires  fonciers  ne  touchaient  plus 
en  Flandre  qu'un  tiers  de  leur  revenu,  etc.  (3). 

Tout  concourait  à  donner  à  la  misère  des  proportions 
effrayantes,  le  manque  de  bras  que  la  guerre  enlevait  aux 
travaux  des  champs,  les  mauvaises  mesures  économiques, 
les  folles  dépenses  de  la  cour  et  les  désordres  administra- 
tifs de  toute  espèce. 

Vauban  disait,  dans  sa  Dîme  rotjale ,  rédigée  après  la 
paix  de  Ryswick  :  «  Près  de  la  dixième  partie  du  peuple 
est  réduite  à  mendier,  des  neuf  autres  parties,  cinq  ne  peu- 
vent faire  raumôneàcelle-là,dont  elles  ne  diffèrent  guère; 
trois  sont  fort  mal  aisées,  la  deuxième  ne  compte  pas  plus 
de  100,000  familles,  dont  il  n'y  a  pas  10,000  fort  à  leur 
aise.  » 

En  1715  la  situation  du  crédit  public  était  telle,  que  le 
ministre,  pour  avoir  8  millions,  fut  obligé  de  donner  32 
millions  de  billets  aux  traitants.  «  L'usure,  dit  un  historien 


(\)  Henri  Martin,  t.  XIV,  p.  528. 

(2)  HenriMartin,  t.  XIV,p.  331. 

(3)  Voir  les  Mémoires  des  intendants. 


(  iO()7  ) 
français  (1),  règne  snr  les  ruines  de  la  société.  De;s  émeutes 
éclatent  pour  les  vivres  dans  le  peuple  et  même  dans  l'ar- 
mée. Les  manufactures  sont  languissantes  ou  fermées;  la 
mendicité  forcée  dévore  les  villes.  Les  campagnes  sont  dé- 
sertes, les  terres  en  friche  faute  d'outils,  faute  d'engrais, 
faute  de  bestiaux;  les  maisons  tombent  en  ruine.  La  France 
monarchique  semble  près  de  finir  avec  son  vieux  roi.  » 

Ce  vieux  roi,  qui  avait  dédaigné  les  sages  conseils  de 
Colbert  et  de  Vauban,  reconnut  ses  fautes  à  l'heure  su- 
prême, en  disant  au  Dauphin  (son  arrière-petit-fils)  : 

«  J'ai  trop  aimé  la  guerre,  ne  m'imitez  pas  en  cela, 
non  plus  que  dans  les  trop  grandes  dépenses  que  j'ai 
faites.  » 

Louis  XIV  a-t-il  au  moins  fait  progresser  l'art  de  la 
guerre  par  tant  de  folles  et  coupables  entreprises? 

Je  ne  le  pense  pas!  En  poussant  à  l'exagération  des 
armées  permanentes  et  en  ruinant  les  finances,  il  créa  une 
situation  qui  rendit  la  tâche  de  ses  généraux  de  plus  en 
plus  difllcile  et  quelquefois  même  impossible. 

La  principale  difficulté  résidait  dans  le  recrutement, 
qui  se  faisait  à  prix  d'argent  et  par  l'emploi  de  moyens 
indignes  d'une  nation  civilisée. 

Les  mémoires  du  maréchal  de  Villars  prouvent  cepen- 
dant que  vers  la  fin  du  règne  les  régiments  avaient  à  peu 
près  leur  effectif  au  complet,  parce  que  la  misère  en  dé- 
peuplant les  campagnes  peuplait  l'armée;  mais  si  les 
hommes  étaient  abondants  tout  le  reste  manquait.  Point 
d'habits,  point  de  provisions,  point  d'armes.  On  voyait  des 
soldats  vendre  jusqu'à  leurs  fusils,  pour  ne  pas  mourir  de 


(1)  Henri  Martin,  t.  XIV,  p.  597. 


(  1008  ) 
faim.  Le  maréchal  affirme  qu'il  n'eut  jamais  de  pain  pour 
plus  de  vingt-quatre  heures  d'avance. 

Malgré  l'appoint  que  la  misère  publique  fournissait  à 
l'armée,  il  est  constaté  que  durant  tout  le  règne  de 
Louis  XiV,  il  fallut  enrôler  des  soldats  par  la  force,  la  ruse 
ou  la  corruption,  contrairement  à  l'ordonnance  de  1692 
qui  avait  prohibé  tout  enrôlement  de  cette  espèce. 

Lemontey  dit,  dans  son  remarquable  Essa?  sur  rétablis- 
sement monarchique  de  Louis  XIV  :  «  On  vit  la  cour  déli- 
vrer des  commissions  à  plusieurs  capitaines,  après  les 
désastres  de  RamilIies,pour  se  former  des  compagnies  par 
tous  les  moyens  de  la  force  et  de  la  ruse,  et  ces  aventu- 
riers, poursuivant  leur  proie  dans  les  forets  et  les  vallées 
les  plus  profondes,  enrégimenter  sans  autre  forme  les  la- 
boureurs capturés  et  livrés  comme  de  misérables  Africains 
à  des  chasseurs  d'hommes.  » 

Le  racolage  se  faisait  à  Paris  dans  des  maisons  appe- 
lées fours,  où  l'on  enfermait  les  victimes.  Il  y  avait  en- 
core beaucoup  de  ces  maisons  au  siècle  dernier. 

Nonobstant  l'emploi  de  ces  moyens  odieux, il  fut  impos- 
sible, sous  Louis  XV  et  jusqu'à  l'époque  de  la  révolution 
française,  d'atteindre  l'effectif  prescrit  par  \es  ordonnances 
de  composition  de  Varniée,  et  de  répaicr  les  pertes  causées 
par  la  guerre.  Pour  combler  le  dédcit,  il  fallut  recourir  aux 
mercenaires  étrangers,  dont  le  nombre  s'élevait  encore  à 
26,000  à  la  fin  du  règne  de  Louis  XVI  (1). 

La  qualité  des  troupes  ayant  diminué  et  les  difficultés 
du  commandement  s'étant  accrues  à  mesure  que  l'effectif 


(I)  La  loi  fondamentale  des  28  février-21  mars  1790  stipula  que  l'effectif  des 
troupes  étrangères,  dans  l'armée  française,  ne  pourrait  pas  dépasser  26.000 
hommes.  La  Convention  nationalisa  les  corps  étrangers. en  1792. 


(   lOOi)  ) 

(les  îiimécs  angnicnlail,  los  opérations,  vers  la  (in  dn  règne 
de  Louis  XIV,  étaient  devenues  moins  rapides,  les  plans 
de  canip-ague  moins  audacieux,  les  mouvements  siir  les 
champs  de  bataille  moins  prompts  et  moins  décisifs  qu'ils 
ne  l'avaient  été  du  temps  de  Condé  et  de  Turenne.  Les 
meilleurs  généraux  de  l'époque,  les  Créqui,  les  Vendôme 
et  les  Villars  se  montrèrent  inlia!)iles  à  manier  les  lourdes 
masses  qu'on  leur  avait  confiées  (I).  Seul,  le  maréchal  de 
Luxembourg  en  sut  tirer  un  parti  convenable. 

«  Il  semble ,  dit  Henri  Martin ,  que  les  résultats  s'amoin- 
drissaient à  mesure  que  les  armées  augmentaient.  On  était 
déjà  loin  du  temps  où  Turenne  obtenait  de  si  prodigieux 
succès  avec  20,000  ou  50,000  hommes  (2).  » 

L'art  de  la  guerre  ne  doit  donc  rien  à  la  création  des 
grandes  armées.  Les  progrès  qu'a  faits  cet  art,  depuis 
l'institution  des  troupes  permanentes  jusqu'à  la  mort  de 
Louis  XIV,  sont  dus  uniquement  au  génie  militaire  des 
Nassau,  de  Condé,  de  Turenne  et  de  Gustave-Adolphe. 

Après  la  guerrede  la  succession,  aucune  puissance  n'osa 
prendre  la  responsabilité  d'un  désarmement  de  quelque 
importance. 

Sous  Louis  XV,  il  y  eutméme  une  année  où  l'effectif  de 
l'armée  française  dépassa  de  5,000  hommes  l'effectif  le  plus 
élevé  qui  eût  été  atteint  sous  Louis  XIV.  C'était  en  1741  , 
au  moment  où  la  France  se  déclara  contre  Frédéric  IL 
Elle  avait  alors  401,000  hommes  sous  les  armes. 

Pendant  la  guerre  de  Sept  ans,  l'effectif  descendit  à 


(1)  La  plus  grande  et  la  plus  sanglante  bataille  du  siècle  de  Louis  XIV  fut  celle 
de  Malplaquet ,  où  430,000  alliés,  sous  Maiiborough  et  le  prince  Eugène,  rem- 
portèrent une  victoire  signalée  sur  118,000  Français,  commandés  par  Villars. 

(2j  Histoire  de  France,  t  XIV,  p.  178. 


(  iOlO  ) 

330,000  hommes,  non  compris  7,000  hommes  de  milices 
bourgeoises  levées  pour  servir  à  l'intérieur  du  royaume.  La 
Russie,  la  Prusse,  l'Autriche  n'avaient  à  celte  époque  que 
700,000  hommes  en  tout.  Les  forces  de  la  Hollande  s'éle- 
vaient à  40,000  hommes  et  celles  de  l'Angleterre  à 
45,800  hommes,  plus  35,000  hommes  de  milice,  levés 
en  1756. 

En  4787,  un  an  après  la  mort  de  Frédéric  H,  la  Prusse 
avait  182,600  hommes  sous  les  armes,  dont  55,000  de  ca- 
valerie (1).  A  la  moindre  apparence  de  guerre,  cet  effectif 
pouvaitêtre  porté  à  250,000  hommes  (2),  bien  que  la  po- 
pulation du  royaume  ne  fût  que  de  5,000,000  d'habitants. 

A  celte  époque,  la  force  de  l'armée  française  était  des- 
cendue à  162,000  hommes. 

Le  14  juillet  1789,  son  effectif  organique  comportait,  sur 
le  pied  de  paix,  228,000  hommes,  dont  55,000  de  troupes 
permanentes  (3),  et,  sur  le  pied  de  guerre,  287,000  hom- 
mes, dont  76,000  de  troupes  permanentes  (4). 

En  1792,  la  France  menacée  par  300,000  Prussiens, 
Anglais,  Autrichiens,  Saxons,  Hanovriens,  Hollandais, 
Espagnols  et  Piémontais  (5),  ne  put  opposer  à  ces  forces 


(1)  D'après  quelques  auteurs,  la  Prusse,  à  l'époque  de  sa  plus  grande  puissance 
(au  commencement  de  la  guerre  de  Sept  ans),  n'avait  que  150,000  hommes  sous 
les  armes.  Von  Ludinghausen  dit  que  Frédéric  II  laissa  à  son  successeur  une 
armée  de  203,000  hommes  pour  une  population  de  o  millions  d'âmes. 

(2)  [iecfierclie  sur  la  force  de  l'armée  française,  etc. 

(8)  Les  régiments  de  milice  provinciale ,  qui  formaient  la  partie  restante  de 
l'armée,  avaient  été  créés  en  1()88  et  avaient  pris,  en  1771,  le  nom  de  troupes  pro- 
vinciales. Us  étaient  devenus  permanents  en  1726. 

(4)  Archives  du  dépôt  de  la  fiuerre. 

(o)  D'après  Jomini,  l'Autriche  avait,  en  1792,  2i0,000  soldats;  la  Prusse, 
160,000;  les  cercles  de  l'Empire,  50.000  à  80.000;  la  Hollande,  45,000.  L'Angle- 


(  lOli  ) 

que  225,000  hommes  (1);  mais  le  20 juillet  de  celte  année, 
V Assemblée  léçjislative  décréta  que  l'armée  serait  portée  à 
relîeclil'de  440  à  450  mille  hommes  par  des  enrôlements 
volontaires;  et  le  IG  août  de  l'année  suivant  la  Convention 
vola  une  levée  en  masse  de  300,000  hommes. 

Léo  décembre  1793,  les  hommes  réellement  présents 
à  leur  corps  étaient  au  nombre  de  528,300.  En  août  et 
septembre  1794,  cet  effectif  monta  à  732,400  hommes  (2). 
Il  tomba  à  484,300  hommes  en  1795  et  à  422,000 
en  1796. 

Deux  ans  après,  le  corps  législatif  décréta  le  principe  du 
service  obligatoire,  pour  les  hommes  valides  de  20  à 
25  ans. 

Sous  Bonaparte,  premier  consul,  en  1801,  la  France 
avait  sous  les  armes  414,700  hommes,  effectif  qui  resta  à 
peu  près  constant  jusqu'en  1805, 

A  partir  de  celte  année,  Napoléon  devenu  tout-puissant 
ne  se  contint  plus.  Sa  vaste  ambition  lui  suggéra  le  projet 
chimérique  de  poser  sur  sa  tète  la  couronne  de  Charle- 


terre  pouvait  fournir  à  la  coalition  ÎW,000  hommes;  le  Piémont,  30,000;  l'Es- 
pagne, .1  iO,000  :  total ,  595,000  à  6!2o,000  hommes. 

La  France, toutefois,  neut  à  combattre  immédiatement  dans  les  Pays-Bas  que 
-100,000  Autrichiens,  59,000  Prussiens ,  l!2,000  Hessois  et  10,000  émigrés  :  total , 
172,000  hommes. 

{■!)  D'après  Servan,  la  France,  au  moment  où  la  coalition  lui  déclara  la  guerre, 
n'avait  que  133,000  hommes,  non  compris  l'artillerie,  à  laquelle  il  manquait 
4,000  hommes  sur  9,000. 

[%  Dubois  de  Crancé  disait,  dans  son  rapport  du  6  février  1795,  que  la  France 
avait  eu  sous  les  armes,  pendant  la  campagne  précédente,  près  de  1,100,000  hom- 
mes; mais  ce  chiffre  était  exagéré,  parce  qu'il  ne  tenait  pas  compte  de  la  déser- 
tion qui  avait  considérablement  diminué  les  effectifs.  D'après  Servan,  la  force 
maximum  (  atteinte  à  la  fin  de  1794)  n'était  que  de  749,545  hommes. 


(  i012  ) 

magne  et  de  faire  du  monde  une  monarchie  universelle  (i). 
La  résislance  générale  que  celte  ambition  provoqua  mit 
l'empereur  dans  la  nécessité  d'augmenter  considérable- 
ment les  forces  militaires  de  la  France  et  de  se  préparer 
à  une  guerre  de  longue  durée.  Il  trouva  du  reste  la  nation 
prête  à  le  suivre  dans  cette  voie,  parce  que  la  coalition 
avait  blessé  son  orgueil  en  attaquant  la  révolution  sur  son 
terrain,  et  que  la  République  avait  Hatté  ses  instincts  bel- 
liqueux en  soutenant  que  ,  pour  assurer  l'indépendance 
de  la  France,  il  était  nécessaire  de  donner  à  ce  pays  son 
développement  naturel,  h  limite  du  Rhin,  et  de  l'entourer 
de  républiques  vassales. 

A  ses  débuts,  la  France  révolutionnaire  n'eut  aucun 
projet  <Je  conquête,  et  l'Assemblée  constituante  se  montra 
môme  franchement  pacifique.  Elle  ne  voulait  avoir  sous  les 
armes  que  245,000  hommes  en  temps  de  paix  et  510,000 
en  temps  de  guerre.  Ces  chiffres  étaient  justifiés  par  le 
litre  Vî  de  la  constitution  de  Tan  1791,  ainsi  conçu  ; 

«  La  nation  française  renonce  à  entreprendre  aucune 
guerre  dans  la  vue  de  faire  des  conquêtes  et  n'emploiera 
jamais  ses  forces  contre  la  liberté  d'aucun  peuple.  » 

Lorsque  la  Constituante  céda  la  place  à  la  Législative 
(le  50  septembre  1791)  la  force  de  l'armée  ne  s'élevait 
en  réalité,  d'après  Servan,  qu'à  146,000  homuies  (2). 


(1)  Lorsque  le  corps  de  Lannes,  après  la  capitulation  de  Prenslow,  se  trouva  en 
face  de  la  mer  du  Nord,  les  soldats  firent,  pour  la  première  fois,  retentir  le  cri  de 
Vive  V empereur  d'Occideni!  »  Leur  enthousiasme,  dit  M.  Thiers,  avait  deviné 
l'ambition  de  Napoléon.  » 

(2)  On  lit  dans  le  rapport  présenté  le  21  novembre  1792  par  Uabaud-Saint- 
Élienne,  au  nom  du  comité  de  constitution  et  du  comité  militaire  :  «  L'armée  per 
manente  n'a  pas  besoin  d'avoir  plus  de  130,000  hommes;  mais  en  prévision  d'une 


(  i015  ) 

Bientôt  après,  la  Convention,  attaquée  par  l'Europe  coa- 
lisée, porta  cet  effeclil'à  732,000  hommes.  On  n'avait  pas 
encore  atteint  un  cliiiïre  aussi  élevé  en  Europe»,  depuis 
rinstituliou  désarmées  permanentes. 

Il  élail  réservé  à  Napoléon  de  dépasser  cette  limite.  Eni- 
vré par  ses  premiers  succès  et  n'ayant  plus  de  comptes  à 
rendre  ni  de  contrôle  à  subir,  le  vainqueur  d'Austerlitz, 
d'Iéna  et  de  Wagram,  (it,  au  commencement  de  1812,  des 
préparatifs  immenses  pour  envahir  la  Russie. 

Celte  année,  dit  M.  Thiers,  la  France  mit  sur  pied  a  la 
plus  grande  de  toutes  les  armées  régulières  qui  aient  jamais 
existé,  la  plus  grande  qu'on  eût  vue  depuis  les  conquérants 
barbares.  » 

Napoléon  passa  le  Niémen  avec  423,000  hommes  (non 
compris  30,000  Autrichiens  employés  loin  du  théâtre  des 
opérations).  Sur  les  derrières  de  cette  armée,  se  trouvait 
une  armée  de  réî^erve  de  130,000  hommes,  non  compris 
40,000  malades  et  12,000  hommes  répandus  dans  divers 
postes.  Il  restait  en  France  dans  les  dépôts  150,000  hom- 
mes, en  Italie,  50,000,  en  Espagne,  300,000  :  total 
1,135,000  dont  875,000  français  (1). 

Sur  les  648,000  hommes  dont  l'empereur  pouvait  dis- 
poser pour  les  opérations  actives  contre  la  Russie,  535,000 
envahirent  le  territoire  ennemi;  au  passage  de  la  Béré- 


attaque  des  puissants  voisins,  elle  doit  avoir  derrière  elle  une  armée  auxiliaire 
de  100,000  hommes,  tirée  des  3,600,000  gardes  nationaux  qui  existent  dans  le 
pays;  ces  100,000  hommes  doivent  être  des  volontaires.  Ils  ne  servent  pas  en 
temps  de  paix.  » 

(1)  Il  y  avait  dans  cette  armée,  d'après  les  calculs  de  M.  Thiers,  io0,000  Prus- 
siens, Bavarois,  Saxons.  Wurtembergeois,  Westphaliens .  Hollandais,  Croates, 
Espagnols  et  Portugais,  tous  mal  disposés,  et  30,000  Autrichiens,  50,000  Polo- 
nais, 20,000  Italiens  et  10,000  Suisses,  dévoués  à  la  France. 


(  iOli  ) 

zina,  ils  n'élaienl  |>liis  que  52,000,  dont  12,000  seule- 
ment avaient  conservé  leurs  armes.  500,000  hommes 
avaient  péri;  les  autres  s'étaient  débandés  ou  avaient  été 
faits  prisonniers  (1). 

L'édifice  de  la  monarchie  universelle  fondé  par  «  une 
politique  aveugle  et  désordonnée  (2)  »  s'écroula  sur  la  tête 
de  son  téméraire  auteur,  et  l'histoire  eut  à  constater  une 
fois  de  plus  la  vérité  de  ce  mot  de  Benjamin  Constant  : 
«  Le  pouvoir  absolu  rend  fou.  » 

M.  Thiers  a  pu  dire,  sans  manquer  de  justice  ni  de 
mesure  à  l'égard  de  Napoléon  :  «  Il  a  immolé  plus  d'hommes 
que  jamais  n'en  ont  immolé  les  conquérants  asiatiques, 
et  sur  les  terres  restreintes  de  l'Europe,  couvertes  de  popu- 
lations résistantes,  il  a  parcouru  plus  d'espace  que  les 
Tamerlan  et  les  Gengis  Khan  n'en  ont  parcouru  dans  les 
vides  de  l'Asie.  » 

L'accroissement  rapide  des  armées  après  180o  permit  à 
Napoléon  et  à  ses  ennemis  de  présenter  sur  les  champs  de 
bataille  des  elfeclifs  supérieurs  à  ceux  que  les  Français  et 
les  alliés  avaient  eus,  à  Malplaquet,  la  plus  grande  bataille 
du  siècle  de  Louis  XIV. 

A  Wagram,  l'armée  française  comptait  150,000  hommes 
et  l'armée  autrichienne  140,000;  à  Borodino,  il  y  avait 
127 ,000  Français  et  140,000  Russes;  à  Baulzen,  150,000 
Français  et  150,000  alliés;  à  Dresde  120,000  Français  et 
180,000  alliés;  à  Leipzig,  150,000  Français  et  500,000 
alliés. 

Sous  Napoléon,  comme  sous  Louis  XIV,  l'accroissement 
des  armées  ne  conduisit  à  aucun  progrès  dans  l'art  de  la 


(1)  Le  nombre  des  soldais  faits  prisonniers  fut  d'environ  100,000. 

(2)  Thiers,  Histoire  du  Consulat  et  de  l'Empire. 


(  i(H5  ) 
guerre.  L'hislorien  le  plus  enlhoiisiaste  et  le  plus  indulgeni 
du  grand  capitaine  est  lui-même  obligé  d'en  convenir. 
«  Rien  que  Napoléon,  dit-il,  possédât  ce  que  la  plus  grande 
expérience  pouvait  ajouter  au  plus  grand  génie,  cepen- 
dant Kart  de  la  guerre  lui-même  avait  perdu  quelque  chose 
sous  l'influence  de  l'immensité  et  de  la  précipitation  des 
entreprises. 

»  La  campagne  de  1812  présenta  l'image  d'une  expé- 
dition à  la  manière  de  Xerxès.  Huit  jours  s'étaient  à  peine 
écoulés  depuis  le  passage  du  Niémen ,  que  200,000  hom- 
mes avaient  déjà  quitté  les  drapeaux  et  donnaient  le  spec- 
tacle déplorable  et  contagieux  d'une  dissolution  d'armée.  j> 

Les  grandes  batailles  livrées  de  1809  à  1814  font  moins 
d'honneur  au  génie  militaire  de  Napoléon  que  ses  victoires 
d'Italie,  d'Egypte,  d'Autriche,  de  Prusse  et  de  France 
obtenues  avec  des  armées  égales  et  même  inférieures  à 
celles  d'Alexandre,  de  César,  d'An  ni  bal,  de  Turenne  et  de 
Frédéric  II  (1).  C'est  en  efl'et  avec  50,000  hommes  qu'il 


(1)  Alexandre  fit  la  conquête  de  l'Inde  avec  une  armée  qui  ne  dépassa  point 
47,000  hommes  (effectif  présent  à  Arbèles). 

César  obtint  ses  plus  beaux  succès  (Pharsale.  Alésia,  etc.)  avec  des  armées  de 
24,000  à  40,000  hommes. 

Annibal  franchit  les  Pyrénées  avec  oO.COO  fantassins,  9,000  chevaux  et  37  élé- 
phants; il  n'avait  plus  que  '20,000  fantassins  et  6,000  cavaliers  lorsqu'il  déboucha 
en  Italie,  et  remporta  sur  les  Romains  la  victoire  de  la  Trébia.  (Les  Gaulois  lui 
ayant  fourni  des  renforts  après  cette  journée,  il  put  opposer  57,000  hommes, 
dont  -10.200  de  cavalerie,  aux  82,000  Romains  que  commandait  Varron  à  la 
bataille  de  Cannes).  A  Zama,  Annibal  n'avait  que  36,000  hommes  et  Sci- 
pion  37,200. 

Gustave- Adolphe  n'avait  que  18,000  hommes  à  Lutzen  ,  où  il  remporta  une  vic- 
toire signalée  sur  40,000  Impériaux. 

Turenne  et  Montecuculli  n'eurent  jamais  plus  de  2o,000  à  30,000  hommes  sous 
leurs  ordres,  et  ils  accomplirent,  avec  ces  petites  armées,  des  exploits  qui  sont 
encore  admirés  aujourd'hui. 

La  victoire  de  Leuthen,le  chef-d'œuvre  tactique  de  Frédéric  le  Grand  fut  rem- 


(  iOIG  ) 
envahit  l'Italie  en  1796,  avec  32,000  hommes  qu'il  s'em- 
barqua pour  l'Egypte  en  1798;  avec  40,000  hommes  qu'il 
franchit  les  Alpes  en  1800,  avec  180,000  hommes  qu'il 
entama  en  180o  sa  mémorable  campagne  contre  l'Autriche, 
la  Russie,  la  Suède  et  l'Angleterre,  avec  une  force  équiva- 
lente qu'il  écrasa  la  Prusse  et  la  Russie  en  1806  et  1807 
à  Inéa,  à  Eylau  et  à  Freidland,  et  avec  70,000  soldats,  les 
uns  épuisés,  les  autres  trop  jeunes,  qu'il  tint  tête  aux 
armées  de  l'Autriche,  de  la  Prusse  et  de  la  Russie 
(environ  300,000  hommes),  dans  la  mémorable  campagne 
de  1814. 

A  Lodi,  Aréole  et  Rivoli  il  vainquit  avec  18,000  hom- 
mes; à  Marengo,  avec  28,000;  à  Auslerlitz,  avec  6o,000; 
à  Inéa,  avec  56,000;  à  Eylau,  avec  63,000;  à  Monlmirail 
et  à  Montereau,  avec  39  et  30  mille.  Or,  c'est  dans  ces  jour- 
nées célèbres  que  son  génie  se  manifesta  avec  le  plus 
d'éclat.  Chaque  fois  qu'il  eut  à  engager,  le  même  jour,  plus 
de  100,000  hommes,  il  se  montra  inférieur  à  lui-même. 
Cela  lient  à  ce  que  la  nature  a  mis  des  limites  aux  facultés 
qui  doivent  entrer  en  jeu  dans  la  conduite  et  l'emploi 
des  troupes. 

Montecuculli  ne  voulait  que  des  armées  de  30,000 hom- 
mes. Turenne  regardait  une  armée  de  plus  de  50,000 
hommes  «  comme  incommode  pour  qui  la  commande  et 
pour  qui  la  compose.  »  Le  maréchal  de  Saxe  et  le  général 
xMoreau  étaient  d'avis  qu'une  armée  ne  doit  pas  dépasser 
40,000  hommes.  Guibert  porte  l'effectif  maximum  à  60  ou 
70  mille  combattants,  et  le  maréchal  Gouvion  Saint-Cyr 


l)ortée  par  32,000  hommes  sur  87,000  Autrichiens.  Le  même  général  défit,  à  Ros- 
bach,  avec  !22,000  hommes,  63,000  Français  sous  les  ordres  du  maréchal  de 
Sou  bise. 


(  1017  ) 

prétendait  que  le  commandement  d'une  armée  de  100,000 
hommes  «  exige  de  telles  forces  morales  et  physiques 
qu'on  ne  peut  espérer  les  trouver  réunies  dans  un  seul 
homme.  » 

Les  dernières  guerres  ont  donné  un  démenti  à  ces 
opinions,  puisqu'à  Solferino,  Sadowa,  Gravelolte  et  Sedan 
on  a  vu  des  généraux,  qui  n'avaient  pas  l'expérience  ni  le 
génie  militaire  de  Bonaparte,  mettre  en  action  des  armées 
de  150  à  250  mille  hommes  (1)  et  obtenir  des  succès  com- 
parables aux  plus  beaux  faits  d'armes  de  la  République  et 
de  l'Empire.  Cela  provient  de  ce  que  les  progrès  des 
sciences  et  des  arts  ont  mis  aux  mains  des  généraux  mo- 
dernes des  moyens  et  des  ressources  que  n'avaient  pas  les 
anciens,  pour  transporter  et  diriger  de  grandes  armées, 
pourvoir  à  leurs  besoins  et  en  régler  avec  précision  tous  les 
mouvements.  C'est  ici  que  se  manifeste  l'intervention  de 
la  science  dans  l'accroissement  des  armées  permanentes. 
Grâce'aux  Salomon  de  Caus,  aux  Papin,  aux  Fulton,  aux 
Stephcnson,  aux  Galvani,  aux  OErstedt,  aux  Wheatstone, 
ces  illustres  promoteurs  et  inventeurs  des  bateaux  à 
vapeur,  des  chemins  de  fer  et  du  télégraphe  électrique, 
les  généraux  ont  pu  combiner  des  mouvements  plus  éten- 
dus, exécuter  de  grandes  concentrations  de  troupes  avec 
plus  de  rapidité,  de  sûreté  et  de  précision,  établir  enfin  des 
relations  plus  faciles  entre  les  armées  en  campagne  et  les 
bases  d'opérations,  comme  entre  les  corps  éloignés  agis- 
sant de  concert  sur  un  même  champ  de  bataille.  D'autres 
découvertes  ont  permis  de  nourrir  plus  facilement   les 


(1)  A  Solferino,  il  y  avait  460,000  Autrichiens  et  440,000  Français  et  Piémon- 
tais;  à  Sadowa,  200,000  Autrichiens  et  220,000  Prussiens,  dont  seulement  480,000 
à  483,000  furent  engagés;  à  Gravelotte,  220,000  Allemands  et  430,000  Français; 
à  Sedan,  220,000  Allemands  et  410.000  Français. 

2""^  SÉRIE,  TOME  XL.  65 


(  lOiS  ) 
iroupes  en  marche,  d'assurer  mieux  le  service  des  ambu- 
lances et  des  hôpitaux  et  de  réduire  notablement  les  trains 
de  bagages  et  de  vivres.  Sans  ces  avantages  précieux,  les 
Allemands  auraient-ils  pu,  comme  ils  l'ont  fait  dans  la  der- 
nière guerre,  jeter  en  quelques  jours  18  corps  de  35,000 
hommes  sur  la  frontière  française,  mettre  ces  corps  en 
marche  dans  un  ordre  parfait,  les  pourvoir  de  tout  en  abon- 
dance, établir  de  promptes  et  faciles  relations  avec  leurs 
dépôts,  dont  quelques-uns  élaient  éloignés  de  plusieurs 
centaines  de  lieues,  et  faire  combattre  ces  masses  énormes 
sans  confusion  ni  désordre  sur  des  champs  de  bataille  si 
étendus  qu'aucun  regard  humain  ne  pourrait  les  embras- 
ser? Sans  doute  le  génie  du  comte  de  Moltke,  la  science 
des  états-majors  et  l'instruction  si  solide  du  soldat  alle- 
mand ont  grandement  contribué  à  ce  résultat;  mais  il  n'en 
est  pas  moins  certain  que  des  armées  doubles  de  celles 
qui  déjà  parurent  peu  maniables  à  Luxembourg,  à  Villars 
et  à  Napoléon,  n'auraient  pu  être  mises  si  facilement  en 
action  (i)  ni  obtenir  de  pareils  succès  sans  le  secours  effi- 
cace que  les  sciences  et  les  arts  industriels  ont  prêté  à  la 
stratégie  et  à  la  tactique.  Or,  en  rendant  les  grandes  armées 
maniables,  les  savants  et  les  industriels  ont  singulièrement 
facilité  la  lâche  des  souverains  et  des  peuples  qui  ont  créé 
ces  armées  dans  des  vues  ambitieuses;  ils  ont  poussé  aussi 
à  l'accroissement  des  dépenses  militaires,  en  perfection- 
nant les  armes  et  en  inventant  de  nouveaux  moyens  de 


I)  La  grande  difficulté  tactique  des  batailles  sera  toujours  d'assurer  la  mise  en 
action  simultanée  de  toutes  les  Iroupes  qui  doivent  concourir  à  l'attaque  décisive 
sur  laquelle  on  compte  i)our  vaincre.  Cette  difficulté  augmente  énormément,  et  les 
chances  de  succès  diminuent  dans  le  même  rapport,  quand  les  masses  engagées 
dépassent  un  certain  effcclif. 


(  iOiî)  ) 
défense  el  de  destruction.  En  effet,  après  chaque  invention 
qui  accroît  la  puissance  des  troupes,  des  fortifications  ou 
des  flottes,  toutes  les  nations,  quelque  coûteuse  que  puisse 
être  cette  invention,  sont  obligées  de  se  l'approprier.  C'est 
ainsi  que  nous  avons  vu  les  grands  États,  dans  l'espace 
de  vingt-cinq  ans,  transformer  complètement  leur  ma- 
rine el  leurs  batteries  de  cote,  et  modifier  deux  ou  trois 
fois  les  fusils,  les  canons  et  les  affûts  de  leur  armée  de 
terre. 

Il  nous  reste  à  indiquer  les  causes  qui  ont  provoqué 
l'accroissement  des  forces  militaires  depuis  les  guerres  du 
premier  empire. 

On  croyait  fermement,  après  la  chute  de  Napoléon,  que 
l'ère  des  conquêtes  était  fermée  pour  longtemps,  et,  dans 
leur  joie  naïve,  les  nations  se  flattaient  de  pouvoir  réduire 
notablement  les  dépenses  militaires.  Cette  illusion,  hélasl 
ne  fut  pas  de  longue  durée. 

La  loi  de  18J8  fixa  le  complet  du  pied  de  paix,  en 
France,  à  240,000  hommes,  mais  il  n'y  eut  en  réalité  sous 
les  armes,  celte  année,  que  118,000  hommes.  Or,  déjà 
en  1825,  l'effectif  présent,  du  pied  de  paix,  s'éleva  à 
282,000  hommes,  et  celui  du  pied  de  guerre  à  590,000. 
Trois  ans  après,  le  premier  chiffre  était  représenté  par 
561 ,000  hommes  et  le  second  par  464,000. 

Sous  Louis-Philippe  le  maximum  du  pied  de  paix  fut 
atteint  en  1852;  il  s'éleva  à  452,000  hommes. 

Le  second  empire  qui  espérait,  en  faisant  la  guerre,  con- 
solider sa  puissance  et  trouver  une  occasion  favorable  de 
donner  à  la  France  son  complément  naturel,  augmenta  en- 
core cet  effectif,  et  lut  en  mesure  de  mobiliser,  en  1870, 


(  1020  ) 

909,000  hommes ,  donl  417,000  de  garde  nationale  mo- 
bile (1). 

Si  l'on  tient  compte  de  la  population  qui  était  alors  de 
58,000,000  d'àmes,  on  voit  que  l'effectit'  n'avait  dépassé 
que  de  peu  relTeclif  maximum  de  Louis  XIV,  qui  était  de 
596,000  hommes  pour  une  population  de  19  1/2  millions, 
et  l'effectif  moyen  de  Napoléon,  avant  1806,  qui  était  de 
414,000  hommes  pour  une  population  de  28  1/2  mil- 
lions (2). 

Le  dernier  grand  accroissement  des  armées  permanentes 
est  dû  à  l'introduction  du  service  général  obligatoire,  le- 
quel a  permis  à  l'Allemagne  de  porter  au  maximum  le  rap- 
port entre  reffectif  des  citoyens  armés  et  le  chilfre  de  la 
population.  C'est  encore  Napoléon  qui  a  provoqué  cet 
accroissement  en  voulant  réduire  la  Prusse  à  l'impuissance, 
après  léna,  et  en  lui  imposant  à  cet  effet  (par  un  des  arti- 
cles secrets  d'une  convention  signée  à  Paris,  le  8  septem- 
bre 1807,  postérieurement  au  traité  de  Tilsit)  l'obligation 
de  ne  maintenir  sous  les  armes,  pendant  dix  ans,  qu'une 
armée  de  42,000  hommes.  Pour  éluder  cette  clause  et  pré- 
parer à  la  guerre  de  l'indépendance  un  grand  nombre  de 
citoyens,  sans  éveiller  les  soupçons  du  maître,  la  Prusse 


(1)  La  déposition  du  maréchal  Le  Bœuf,  dans  l'enquête  ordonnée  par  r As- 
semblée nationale,  prouve  que  l'effectif,  au  I"  juillet  1870,  était  de  567,000 
hommes  instruits  et  de  417,3H6  hommes  de  la  garde  nationale  mobile.  La 
classe  de  1870,  dont  l'appel  avait  été  avancé,  comptait  liO,000  hommes  pour 
l'armée  et  80,000  pour  la  garde  mobile.  Le  nombre  des  volontaires  pour  la  guerre 
s'éleva  à  28,099  ;  total  général,  1.282,099  hommes.  D'après  la  loi  organique  du 
^cr  février  1808,  Vannée  active  et  la  réserve  comprenaient  un  effectif  de  800,000 
hommes,  et  la  garde  nationale  mobilisée,  un  effectif  de  530,000  honmies;  total  gé- 
néral, 1,350,000  hommes. 

(2)  Le  recensement  de  1801  donne  27,489,000  âmes  et  celui  de  1800, 29,107.000. 


(  m\  ) 

adopta  le  service  obligatoire  et  le  système  de  Kumper,  qui 
consistait  à  congédier  les  recrues  lorsque  leur  instruction 
militaire  était  terminée  et  à  les  remplacer  par  d'autres  re- 
crues, que  l'on  renvoyait  à  leur  tour  dès  qu'elles  étaient 
formées.  Grâce  à  cette  ingénieuse  combinaison,  la  Prusse 
put,  au  commencement  de  1815,  compléter  reffeclif  des 
régiments  et  organiser  ol  bataillons  nouveaux  (I).  Jugeant 
ces  forces  insulfisantes  pour  résister  aux  grandes  armées 
de  Napoléon,  elle  décréta,  le  5  février  i815,  l'organisation 
de  chasseurs-francs,  et  promulgua,  le  17  mars,  une  loi  qui 
mettait  à  la  disposilion  du  gouvernement  tous  les  jeunes 
gens  en  étal  de  porter  les  armes.  On  forma  ainsi  209  ba- 
taillons et  174  escadrons  de  landvvehr.  Ces  mesures,  inspi- 
rées par  un  ardent  patriotisme,  permirent  à  la  Prusse, 
dont  la  population  avait  été  réduite  ,  par  le  traité  de  Tilsil, 
de  8  1/2  à  5  millions  d'habitants,  de  présenter  en  ligne, 
pour  la  guerre  de  l'indépendance,  516,000  combattants, 
(non  compris  les  officiers),  et  55,000  chevaux  (2). Elles  ser- 
virent de  base  à  la  loi  de  1814  et  aux  décrets  de  1815,  qui 
imposaient  à  tous  les  citoyens  en  état  de  porter  les  armes, 
l'obligation  de  servir  de  20  à  25  ans  dans  l'armée  active, 
de 25 à  25  dans  la  réserve, de  25 à  52 dans  le  premier  ban 
de  la  Landwehr  et  de  52  à  59  dans  le  second  ban.  La 
Lanchturm  était  composée  de  tous  les  citoyens  valides, âgés 
de  17  à  49  ans,  qui  n'appartenaient  ni  à  l'armée  ni  à  la 
landwehr  (5). 


(i)  Les  Armées  allemandes,  par  Von  Ludinghausen. 

(2)  Von  Ludinghausen. 

(3)  La  loi  du  8  septembre  1814  et  les  décrets  sur  la  landwehr  du  21  novem- 
bre iSio  furent  modifiés  en  18o7  et  en  1860.  Le  contingent  fut  porté  de  40,000  à 


(  iO:22  ) 

En  d859,  la  Prusse  commence  à  se  préparer  au  rôle 
qu'elle  a  joué  depuis  avec  un  si  rare  succès.  Dès  l'année  sui- 
vante, elle  porte  le  contingent  annuel  de  l'armée  de  40,000 
à  63,000  hommes,el  la  durée  du  service  dans  la  réserve,  de 
deux  à  quatre  ans.  Par  celte  mesure,  son  pied  de  guerre, 
qui  avait  été  jusque-là  de  530.000  hommes  (1),  dont  un 
quart  sous  les  armes  en  temps  de  paix,  monta  à  781,000 
hommes  (2),  dont  deux  septièmes  sous  les  armes  en  temps 
de  paix. 

Un  nouvel  accroissement   fut  décrété  après  la  guerre 
de  1866,  qui  donna  à  la  Prusse  un  supplément  de  popula- 
tion de  4,500,000  habitants  (3).  Le  contingent  s'éleva  dès. 
lors  à  100,000  hommes,  et  le  pied  de  guerre  atteignit  le 
chiffre  de  977,262  combattants  (4). 

Le  contingent  pour  toute  l'armée  allemande  est  actuel- 
lement de  143,000  hommes,  et  l'on  estime  que  l'empire 
pourra  mettre  sur  pied  2,800,000  combattants,  lorsque 
la  landsturm  sera  complètement  organisée.  Cet  effectif,  qui 


63,000  hommes,  la  durée  du  service  dans  la  réserve  fut  fixée  à  quatre  ans,  et  le 
!<''■  ban  de  la  landvvehr  (citoyens  de  26  à  36  ans)  ne  fut  plus  obligé  de  faire  partie 
de  l'armée  en  campagne. 

(1)  A  savoir  :  220,000  hommes  (armée active),  'loO,000  hommes  (l^r  ban  de  la 
landvvehr)  (  de  ces  370,000  hommes,  30,000  étaient  destinés  aux  places  fortes  ); 
50,000  recrues  (comme  réserve  active)  et  140,000  hommes  (2«  ban  de  la  land- 
wehr). 

(2)  342,000  hommes  de  l'armée  active,  430,000  hommes  de  la  réserve,  493,000 
hommes  de  troupes  de  garnison,  appartenant  en  grande  partie  au  l"  ban  de  la 
landvvehr,  218,000  hommes  du  2^  ban  de  la  landvvehr  et  6,000  hommes  apparte- 
nant aux  corps  spéciaux. 

(3)  En  4844,  la  Prusse  avait  40  millions  d'habitants;  en  4859,  48  millions; 
en  4866,  avant  la  guerre,  49,300,000,  et  après  la  guerre ,  23,800,000. 

(4)  Armée  de  campagne,  514,826  hommes;  troupes  de  dépôt,  480,672;  troupes 
de  garnison,  265,082;  total,  957,580,  soit  977,262  avec  les  officiers. 


(  1023  ) 
correspond  à  un  soldat  par  groupe  de  quatorze  habitants, 
représente  le  maximum  absolu  de  puissance  militaire.  La 
proportion  généralement  admise  jusqu'ici  —  et  que  les 
petits  États  n'ont  pas  encore  dépassée  —  était  d'un  soldat 
sur  cinquante  habitants,  et  l'on  considérait  comme  exces- 
sive la  proportion  d'un  sur  trente,  préconisée  par  quel- 
ques écrivains  militaires. 

La  France  qui ,  pour  ne  pas  déchoir,  a  dû  adopter 
le  système  militaire  de  l'Allemagne,  pourra,  lorsque  ce 
système  aura  produit  tous  ses  effets,  mobiliser  2,425,000 
hommes  (armée  active,  réserve  de  l'armée  active,  armée 
territoriale  et  réserve  de  l'armée  territoriale),  soit  un  soldat 
par  groupe  de  quinze  habitants. 

L'Autriche,  l'Italie,  la  Russie,  tous  les  Étals  de  l'Europe 
ont  augmenté  ou  augmenteront  leurs  forces  militaires  dans 
la  même  proportion. 

Pour  faire  apprécier  l'importance  de  cet  accroissement, 
je  citerai  quelques  chiffres  significatifs. 

Pendant  la  guerre  de  Sept  ans,  la  Russie,  la  Prusse, 
l'Autriche,  la  France  et  les  États  qui  constituent  l'Italie 
actuelle,  avaient  sous  les  armes  un  effectif  total  de 
1,150,000  hommes  (i). 

En  1827,  ces  mêmes  États,  dont  les  limites  avaient  sans 
doute  changé,  mais  qui  formaient  à  peu  près  la  même 
masse    territoriale,   avaient    un    effectif  de  guerre  de 


{i)  Recherches  sur  ta  force  de  l'armée  française,  etc.  Dans  l'effectif  de 
1,150,000  hommesjj'ai  fait  figurer  les  États  qui  constituent  l'Italie  actuelle  pour 
113,000  hommes.  Je  ne  puis  pas  garantir  l'exactitude  de  ce  dernier  chiffre,  qui 
doit  cependant  s'écarter  peu  de  la  vérité. 


2,629,000  hommes  (i; 
celui  de  1760. 


(  1024  ) 

,  c'est-à-dire  plus  que  double  de 


(i)  Ces  chiffres  sont  extraits  d'un  tableau  dressé  par  le  général  Pelet  et  publié 
dans  le  Spectateur  militaire,  t.  IV.  Voici  ce  tableau  : 

Le  pied  de  guerre  de  la  France  était,  en  1827,  de.    .  314,623  hommes. 

Celui  de  la  Russie  de 4,039,017        — 

—  de  l'Autriche  de 7o9,o04        — 

—  de  la  Prusse  de o2M28        -  (a) 

—  de  la  Bavière  de 71,600        — 

—  du  Wurtemberg  de 27,900       — 

—  de  la  Saxe  de .    . 24,000       — 

—  de  la  Sardaigne  de 6'J,000        — 

—  du  royaume  de  Naples  et  de  la  Sicile  de    .    .  63,000        — 

—  des  États  romains  de 12,000        — 

Total 2,8G3,077  hommes  {b). 

Ces  mêmes  États  peuvent  aujourd'hui  mobiliser  les  forces  suivantes  : 

France 2,423.000  hommes. 

Russie. l.S20,000        -    (0 

Autriche 1,094,000        - 

Allemagne 1,310,000       — 

Italie 823,000       - 

Total.    ....  7,170.000  hommes. 


(a)  Non  compris  la  landsturm. 

(b)  La  populalion  de  ces  divers  pays 

France.     .     . 
Russie.     .     . 
Auliiclie  . 
Prusse  . 
Bavière.     . 
Wurtemberg 
Saxe     .     . 
Sardaigne 
Naples  et  la  Sicile 
Étals  Romains    . 


était  la  suivante  : 

31,383,000  âmes. 

59,53-2,900  — 

30,000,700  — 

ll,3G'J,G89  — 

3,744,000  — 

1,400,000  — 

1,38'2,000  — 

4,lGG,9-20  — 

7,121,740  — 

2,425,400  — 


Total.     .     .     .     152,592,549  âmes. 
(C)  Lorsque  a  nouvelle  loi  russe  aura  fonctionné  pendant  quinze  ans,  l'arméo 


(  nm  ) 

Depuis  1827,  rnccroissemcnl  a  été  plus  rapide  encore, 
puisque  aujourd'hui  les  cinq  Étals  ci-dessus  désignés  (I) 
peuvent  mettre  sur  pied  7,170,000  hommes,  clnlfrc  qui 
s'élèvera  à  plus  de  11  millions  lorsque  les  nouvelles  lois 
militaires  auront  produit  tous  leurs  effets,  et  qu'on  tiendra 
compte  de  la  landsturm  russe,  qui  n'est  pas  encore  orga- 
nisée, et  de  la  landsturm  prussienne,  qui  n'a  jusqu'ici  que 
240  bataillons  régulièrement  constitués. 

Ainsi,  dans  l'espace  de  cinquante  ans,  la  puissance  mili- 
taire des  cinq  grands  États  du  continent  européen  a  presque 
triplé. 

Notre  siècle  est  donc  arrivé,  après  tant  de  progrès  ac- 
complis dans  l'ordre  matériel  et  dans  l'ordre  moral,  après 
de  si  grands  efforts  et  des  vœux  si  unanimes  en  faveur  du 
maintien  de  la  paix,  après  les  objurgations  virulentes  de  la 
presse  et  des  congrès  contre  la  guerre  et  les  armées,  après 
les  ardentes  et  généreuses  aspirations  des  penseurs  et  des 
philanthropes  vers  un  avenir  de  concorde  et  de  prospérité, 
noire  siècle,  dis-je,est  arrivé  à  la  réalisation  de  l'armement 
maximum,  celui  qui  ne  saurait  être  dépassé,  à  moins  d'in- 
corporer les  adolescents  et  les  vieillards! 


active  comptera  2  millions  de  soldats  instruits,   non  compris  les  garnisons  et  la 
landsturm,  dont  reiïeclif  atteindra  I  million.  Si  l'on  ajoute  à  ce  chiffre  celui  des 
hommes  valides  restants,  qui  seront,  en  cas  de  guerre,  enrôlés  et  armés  par  petits 
corps,  on  arrive  à  un  total  de  5  millions  de  combattants. 
(1)  La  population  de  ces  divers  pays  est  la  suivante  : 

Pour  la  France 30,102,000  âmes. 

—  Russie 09.884,000 

—  Autriche 35,904,000 

—  Allemagne 40,582,000 

Italie 25,801,000 

Total.     .     .     .     209,273,000  âmes. 


(  1026  ) 

Anciennement,  l'armement  général  existait  chez  les  bar- 
bares et  l'armement  restreint  chez  les  peuples  civilisés. 
Cela  tenait  à  ce  que  les  armées  de  ceux-ci,  à  cause  de  leur 
immense  supériorité  lactique, pouvaient  renoncer  à  l'avan- 
tage du  nombre. 

Aujourd'hui,  l'armement  général  n'existe  que  chez  les 
peuples  civilisés,  et  l'armement  restreint,  que  chez  les  peu- 
ples barbares  ou  demi-civilisés  (!).  Cela  s'explique  encore 
facilement. 

L'entretien  des  armées  est  devenu  si  onéreux  et  l'aride 
la  guerre  si  compliqué,  si  difficile,  que  le  maximum  de 
puissance  militaire  ne  peut  être  atteint  que  par  les  nations 
qui  ont  le  plus  d'instruction,  de  richesse  et  de  prospérité. 

Le  temps  n'est  plus  oii  l'on  pouvait  «  nourrir  la  guerre 
par  la  guerre.  » 

Napoléon,  qui,  le  dernier,  a  fait  une  large  application 
de  ce  principe,  a  dû  reconnaître  qu'il  est  précaire  pour  les 
vainqueurs,  et  qu'il  pousse  les  vaincus  à  la  révolte,  par  le 
spectacle  des  rapines  et  des  cruautés  qu'il  autorise  ou 
provoque. 

Les  progrès  du  droit  des  gens  et  l'adoucissement  des 
mœurs  ont  imposé  aux  conquérants  l'obligation  de  solder 
—  pendant  ou  après  la  guerre  —  tout  ce  qu'ils  requièrent 
ou  consomment  en  pays  ennemi. 

C'est  donc  le  développement  de  la  richesse  publique  qui 
a  rendu  possible  l'accroissement  successif  des  armées  et 
des  dépenses  militaires,  depuis   l'époque   où   Henri   IV 


(1)  Parmi  les  peuples  civilisés,  l'Angleterre,  seule,  a  conservé  son  armement 
restreint,  mais  malgré  sa  situation  insulaire  et  l'énorme  puissance  de  sa  marine, 
il  est  à  prévoir  que  bientôt  elle  sera  obligée  de  modifier  son  système  de  recrute- 
ment, qui  s'oppose  à  tout  accroissement  notable  de  l'armée  de  terre. 


(  i027  ) 

lorma  le  projet  d'abaisser  la  puissante  maison  d'Autriche. 
Quant  à  la  cause  qui  a  provoque  cet  accroissement , 
elle  réside  uniquement  dans  l'ambition  démesurée  de 
(Iharles-Quint,  de  Louis  XFV  et  de  Napoléon  l""",  qui  ne 
surent  point  se  borner  à  la  grandeur  modérée,  la  seule 
qui  soit  durable,  parce  qu'elle  n'est  pas  insupportable  à 
autrui. 

Voyons  maintenant  quels  seront  les  effets  du  dernier  et 
très-important  accroissement  de  puissance  militaire  qui 
vient  de  se  produire  après  la  guerre  franco-allemande. 

L'un  de  ces  effets  a  été  prévu  el  indiqué  dans  les  termes 
suivants,  par  J.-B.  Say  : 

«  Les  nations  civilisées  sont  les  seules  qui  puissent  avoir 
assez  de  produits  pour  entretenir  des  forces  militaires 
imposantes,  ce  qui  éloigne  pour  l'avenir  la  probabililé  de 
ces  grands  bouleversements  dont  l'histoire  est  pleine^  et  où 
les  peuples  civilisés  sont  devenus  victimes  des  barbares.  » 

Un  autre  effet  de  l'énorme  accroissement  des  armées, 
sera  l'impossibilité  de  soutenir  de  longues  guerres,  sans 
ruiner  les  tinances  des  États  el  sans  provoquer  une  sus- 
pension générale  des  affaires  et  des  transactions  de  toute 
nature. 

Un  autre  effet  encore,  sera  la  nécessité  de  créer  dans  la 
plupart  des  États  de  nouveaux  impôts,  pour  subvenir  aux 
dépenses  militaires,  qui  ont  presque  triplé  depuis  cin- 
quante ans. 

Enfin,  le  développement  exagéré  des  forces  militaires 
aura  pour  dernier  effet  de  produire  la  décadence  des  ar- 
mées et  de  faire  rétrograder  l'art  de  la  guerre. 

La  propriété  des  grandes  armées  de  mettre  les  peuples 
civilisés  à  l'abri  de  nouvelles  invasions  de  barbares,  est  peu 


(  1028  ) 

importante  aujourd'hui,  car  la  civilisation  actuelle,  loin 
d'avoir  à  craindre  les  barbares,  prend  l'offensive  contre 
eux  en  Asie,  en  Afrique  et  en  Australie.  Ce  n'est  que  si 
elle  manquait  à  ses  devoirs,  en  désarmant  ou  en  négligeant 
les  armées,  comme  le  firent  les  Romains  après  Auguste, 
que  de  nouveaux  Tartares  et  de  nouveaux  Musulmans 
pourraient  s'abattre  sur  les  populations  amollies  de  l'Oc- 
cident. 

Un  avantage  plus  sérieux  des  grandes  armées  est  d'abré- 
ger notablement  la  durée  des  guerres,  car,  bien  qu'il  soit 
prouvé  qu'une  courte  lutte  entre  des  forces  considérables 
coûte  autant  de  sang  (1)  et  d'argent  qu'une  longue  lutte 
entre  de  petites  armées,  cependant  au  point  de  vue  éco- 
nomique et  social,  il  est  extrêment  utile  d'abréger  les  crises 
qui  entraînent  la  suspension  des  affaires  et  jettent  un 
trouble  profond  dans  les  esprits.  La  guerre,  en  effet,  n'est 
pas  seulement  onéreuse  par  l'argent  qu'elle  coûte,  elle 
Test  encore  par  l'argent  qu'elle  empêche  de  gagner. 

Si,  nonobstant  la  courte  durée  des  guerres  modernes,  je 
signale  l'appauvrissement  des  États  comme  un  des  effets  de 


(1)  Il  y  a  lieu  de  faire  remarquer  cependant  que,  proportionnellement  au  nom- 
bre des  troupes  engagées,  les  batailles  modernes  sont  moins  meurtrières  que  les 
anciennes.  Sous  Frédéric  II  et  Napoléon,  les  pertes  étaient  plus  fortes  qu'elles  ne 
le  sont  aujourd'hui,  parce  qu'on  s'abordait  de  plus  près  et  surtout  parce  que 
toutes  les  troupes  étaient  engagées,  tandis  que  dans  les  grandes  batailles  de  nos 
jours,  il  y  a  des  corps  qui  ne  sont  pas  engagés  ou  qui  ne  sont  engagés  que  pendant 
peu  de  temps. 

A  Solferino,  les  vainqueurs  curent  14,415  hommes  tués  et  blessés  sur  140,000 
à  Custozza,  3,133  hommes  sur  73,000;  à  Sadowa,  9,153  hommes  sur  ;220,000;  à 
Gravelotte,  20.139  hommes  sur  220,000;  à  Sedan,  8,960  hommes  sur  220,000, 
chiffres  bien  inférieurs  à  ceux  des  batailles  de  Frédéric  II  et  de  Napoléon.  A 
Leuihen ,  l'armée  prussienne,  forte  de  30,000  hommes,  eut  environ  3,000  hommes 
tués  et  blessés,  A  M arengo,  28,000  Français  perdirent  7,0!)0  hommes. 


(  10-29  ) 
l'énorme  accroissement  des  armées  permanentes,  c'est  que 
pour  lever  en  temps  de  guerre  des  forces  considérables, 
il  faut  de  toute  nécessité  garder  sous  les  drapeaux,  en 
temps  de  paix,  un  eiroclirqui  ne  peut  être  inlerieur  à  trois 
contingents  annuels  (le  tiers  environ  de  l'armée  totale)  (1). 

L'expérience  et  le  témoignage  des  hommes  de  guerre 
prouvent,  en  elïét,  qu'il  est  impossible  de  lormer  un  bon 
soldat  en  moins  de  trois  ans,  môme  dans  les  pays  qui, 
grâce  à  l'instruction  et  au  service  obligatoires,  produisent 
les  soldats  les  plus  intelligents  et  les  plus  moraux.  Les 
exigences  de  la  guerre  moderne  ne  permettent  donc  pas 
de  considérer  comme  sufTisantes  les  armées  de  milices, 
dont  les  hommes  ne  sont  réunis  annuellement  que  pen- 
dant huit  ou  quinze  jours.  Ces  armées,  de  même  que  les 
armées  de  mercenaires,  ont  lait  leur  temps  (2j.  Celles  de 
l'un  et  de  l'autre  type  qui  existent  encore  n'offrent  plus 
assez  de  garanties,  et  il  n'est  pas  douteux  qu'elles  ne  dispa- 
raissent bientôt. 

La  Suisse,  éclairée  par  ses  militaires  les  plus  instruits, 
commence  à  douter  de  Tefficacitéde  son  système  de  dé- 
fense, et  l'on  a  pu  soutenir  récemment  en  Angleterre,  sans 


(1)  Nous  disons  le  tiers,  parce  qu'il  est  reconnu  que  pour  avoir  une  forte  armée 
active  et  une  réserve ,  on  doit  nécessairement  astreindre  les  citoyens  au  service 
pendant  douze  ans,  c'est-à-dire  avoir  douze  contingents  sous  les  armes  au  mo- 
ment de  la  guerre;  or,  l'effectif  des  neuf  plus  anciennes  classes  est  réduit  par  la 
mortalité  et  les  pertes  de  toute  espèce,  au  double  à  peu  près  de  l'effectif  des  trois 
classes  sous  les  armes.  C'est  ainsi  que  se  trouve  justifiée  la  nécessité  de  maintenir 
sous  les  drapeaux ,  en  temps  de  paix,  le  liers  environ  de  l'effectif  de  guerre. 

(2j  f*our  savoir  ce  que  valent  les  armées  de  milice  et  celles  que  produisent  les 
levées  en  masse,  même  aux  époques  où  l'enthousiasme  est  le  plus  vif,  il  suffit  de 
lire  les  relations  des  guerres  de  la  Péninsule,  celle  de  la  guerre  de  la  Sécession 
d'Amérique  et  l'excellent  ouvrage  publié,  en  mars  1870,  par  Camille  Roussel,  sur 
les  volontaires  de  1791-1794. 


(  1030  ) 

soulever  aucune  protestation  sérieuse,  qu'un  jour  viendra 
où  la  Grande-Bretagne,  pour  assurer -sa  sécurité  et  con- 
server son  intluence  sur  le  continent,  sera  obligée  de  re- 
courir à  la  conscription. 

Quant  au  dernier  effet  de  l'accroissement  excessif  des 
forces  militaires,  la  décadence  des  armées  et  de  l'art  de 
la  guerre,  je  suis  certain  qu'en  le  signalant,  j'ai  causé  une 
grande  surprise  à  la  plupart  de  mes  auditeurs,  convaincus, 
sans  doute,  que  cet  art  a  fait,  de  nos  jours,  d'énormes 
progrès.  Eh  bien.  Messieurs,  quoique  très  répandue,  celte 
opinion  est  fondée  sur  des  apparences  trompeuses,  et  il  me 
sera  facile  de  vous  prouver  qu'elle  ne  résiste  pas  à  un 
examen  approfondi. 

ÎV. 

La  force  des  armées  modernes  réside  principalement 
dans  l'instruction  et  dans  l'éducation  militaire  des  soldats. 
Les  progrès  accomplis  dans  l'armement  et  dans  les  mé- 
thodes de  combat  ont  rendu  cette  préparation  plus  longue 
et  plus  difficile  qu'elle  ne  l'était  autrefois.  Elle  exige  des 
cadres  nombreux  et  bien  composés.  Or,  plus  un  peuple 
est  civilisé  et  riche,  pUis  il  éprouve  d'éloignement  pour  la 
carrière  des  armes,  laquelle  ne  conduit  ni  à  la  fortune  ni 
aux  tranquilles  jouissances  de  la  vie.  La  difficulté  de  trou- 
ver un  nombre  suffisant  de  sujets  honorables  et  instruits, 
pour  encadrer  une  grande  armée,  augmentera  donc  tous 
les  jours.  Cette  difficulté  sera  grande  surtout  pour  le  re- 
crutement des  sous-offîciers,  car  dans  les  pays  riches  et 
prospères  les  carrières  civiles  off'rent  aux  jeunes  gens  plus 
de  liberté  et  de  bien-être  que  ne  peut  leur  en  donner  l'ar- 
mée, sans  exiger  d'eux   ni  aulant  de  travail,  ni  autant  de 


(  105i   ) 

sacrifices.  Il  faudra  donc  descendre  à  un  niveau  intellecluel 
et  moral  de  plus  en  plus  bas  pour  recruter  les  cadres  infé- 
rieurs, et  il  faudra  aussi  se  montrer  de  moins  en  moins  rigou- 
reux pour  le  recrutement  des  officiers.  Dans  de  pareilles 
conditions  il  est  à  prévoir  que  l'instruction  et  la  discipline 
péricliteront,  et  qu'insensiblement  les  armées  permanentes 
perdront  les  précieuses  qualités  qui  leur  donnent  une  si 
grande  supériorité  sur  les  armées  de  milices.  Alors  Tari  de 
la  guerre  non-seulement  né  fera  plus  de  progrès,  niais  dé- 
clinera rapidement.  Ces  appréhensions  n'ont  rien  d'exa- 
géré. Déjà  dans  le  pays  le  mieux  préparé  pour  la  guerre, 
celui  où  l'armée  a  jeté  les  plus  fortes  racines,  où  la  popu- 
lation a  les  plus  vives  sympathies  pour  le  soldat  et  où 
régnent  les  idées  les  plus  favorables  au  développement  de 
la  profession  des  armes,  déjà  en  Prusse  la  difficulté  du  re- 
crutement des  cadres  inspire  des  craintes  sérieuses  aux 
hommes  d'État  et  aux  généraux  les  plus  distingués.  En 
février  1874,  un  journal  militaire  de  Berlin  signalait  ce 
fait,  que  dans  une  seule  division  allemande  «  il  y  avait  120 
places  de  sous-officiers  vacantes  et  lo  emplois  occupés  par 
des  soldats  n'ayant  par  terminé  leur  service  obligatoire  de 
trois  ans,  bien  que  la  garnison  où  se  trouve  cette  division 
soit  très-agréable  et  que  le  soldat  y  jouisse  d'une  grande 
considération  (1).  » 

En  France,  en  Autriche  et  en  Italie,  la  même  pénurie 
se  remarque.  Il  a  été  constaté  récemment,  chez  nos  voisins 
du  Midi,  qu'un  grand  nombre  de  sous-officiers  refusent 
lepaulette  de  sous-lieutenant,  pour  accepter  des  emplois 
civils,  mieux  rétribués  et  plus  faciles  à  remplir. 


(1)  Nette  mduarische  Blàuer. 


(  103^2  ) 

On  aura  beau  augmenter  la  solde  des  sous-ofliciers, 
améliorer  leurs  logements,  leur  donner  plus  de  liberléet 
d'autorité,  le  mal  ne  disparaîtra  pas;  il  prendra  même  un 
caractère  déplus  en  plus  alarmant,  surtout  dans  les  armées 
qui,  se  recrutant  en  partie  de  mercenaires  tirés  des  derniè- 
res couches  de  la  société,  sont  privées  des  bons  miliciens 
dont  ces  mercenaires  tiennent  lieu,  et  des  jeunes  gens  de 
la  classe  aisée  qui  ont  une  vocation  i)rononcée  pour  la 
carrière  des  armes,  mais  qu'arrête  au  seuil  de  la  caserne 
la  crainte  de  s'y  trouver  en  contact  avec  le  rebut  de  la  na- 
tion. 

C'est  donc  un  fait  avéré  que  les  classes  intelligentes, 
morales  et  conservatrices  dans  lesquelles  il  importe  que 
les  cadres  se  recrutent,  ne  pourront  plus  désormais  pour- 
voir aux  besoins  des  grandes  armées.  Si  l'on  maintient  les 
effectifs  actuels,  la  décadence  arrivera  promptement,  et 
aura  des  conséquences  d'autant  plus  graves,  que  le  manie- 
ment des  grandes  armées  exige  plus  de  science  et  d'habileté 
chez  les  officiers,  plus  d'instruction  et  de  discipline  chez 
les  soldats. 

J'ajouterai  que  les  guerres  devenant  de  plus  en  plus 
courtes,  il  sera  désormais  impossible  de  compléter  Tinstruc- 
tion  des  cadres  pendant  la  durée  d'une  campagne,  comme 
cela  se  faisait  autrefois.  On  devrait,  par  conséquent,  avoir 
des  officiers  et  des  sous-officiers  mieux  préparés  et  plus 
instruits  que  ne  l'étaient  ceux  des  armées  de  Frédéric  II 
et  de  Napoléon;  or,  dans  la  plupart  des  armées,  les  sous- 
officiers  ont,  au  contraire,  décliné  et  bientôt  il  en  sera  de 
même  des  officiers. 

On  devrait  avoir  aussi  des  soldats  mieux  exercés  à  la 
marche  et  au  combat,  parce  que  du  jour  au  lendemain  ils 
peuvent  se  trouver  en  présence  de  l'ennemi,  grâce  aux 


(  i053  ) 

chemins  de  fer,  qui  ont,  en  quelque  sorte,  supprimé  les 
distances.  Autrefois  on  faisait  de  longues  étapes  pour  arri- 
ver aux  lieux  de  concentration  et  sur  le  champ  de  bataille, 
ce  qui  permettait  de  compléter  l'instruction  et  l'éducation 
des  soldats  avant  de  les  mener  au  feu.  Aujourd'hui  il  n'y 
a  plus  de  période  d'apprentissage,  et  c'est  presque  sans 
transition  que  le  milicien  passe  de  la  vie  paisible  du  foyer 
aux  terribles  émotions  de  la  guerre. 

Non-seulemcHt  les  grandes  armées  déclineront  sous  le 
rapport  de  la  composition  et  de  la  préparation  des  cadres, 
elles  opposeront  encore  des  entraves  de  plus  en  plus  fortes 
au  génie  des  commandants  en  chef.  L'obligation  de  nour- 
rir les  troupes,  en  pays  ennemi,  sans  recourir  à  la  maraude 
et  sans  affamer  les  habitants,  et  l'obligation  non  moins 
gênante  de  traiter  les  prisonniers  et  les  blessés  d'après  les 
règles  adoucies  du  nouveau  droit  des  gens,  rendront,  en 
effet,  bien  précaires,  même  impossibles  certaines  opéra- 
tions hardies,  aventureuses  qui  ont  illustré  les  conqué- 
rants d'autrefois,  et  dont  les  difficultés  augmenteront,  évi- 
demment, à  mesure  que  les  armées  s'accroîtront. 

A  un  autre  point  de  vue  encore,  les  grands  effectifs  se- 
ront nuisibles  au  développement  de  l'art  de  la  guerre. 

Avant  que  Turenne,  Condé,  Gustave-Adolphe,  Frédé- 
ric Il  et  Napoléon  eussent  créé  ce  qu'on  appelle  l'art  de  la 
grande  guerre,  les  armées  se  disputaient  méthodiquement 
et  lentement  la  possession  des  forteresses  et  des  lignes 
retranchées.  La  guerre  se  faisait  alors  autour  des  places, 
et  finissait  d'ordinaire  par  un  siège.  Sous  les  grands  capi- 
taines que  je  viens  de  citer,  et  notamment  sous  le  plus 
illustre  de  tous.  Napoléon  ,  le  sort  des  empires  se  décidait 
en  rase  campagne,  et  la  paix  était  le  prix  d'une  victoire 
décisive. 

2"^  SÉRIE,  TOME  XL.  66 


(   1034  ) 

Depuis  peu  l'on  a  fait  un  retour  vers  l'ancienne  manière 
de  guerroyer.  La  campagne  de  Crimée  a  fini  par  la  reddi- 
tion de  Sébastopol,  et  celle  de  France,  par  la  capitulation 
de  Paris.  Si  l'Autriche  avait  eu  une  grande  position  forti- 
fiée sur  le  Pô,  en  1859,  la  bataille  de  Solferino  n'eût  pas 
abouti  à  la  conclusion  de  la  paix,  et  si  Vienne  avait  été 
fortifiée  en  1866,  les  vainqueurs  de  Sadowa  auraient  dû, 
comme  ceux  de  l'Aima,  se  résignera  un  long  siège. 

Voici  l'explication  de  ce  fait  :  * 

Le  développement  excessif  des  armées  ayant  rendu  les 
guerres  moins  longues,  les  stratégistes  ont  compris  que  le 
meilleur  moyen  de  combattre  une  invasion,  était  de  créer 
de  grandes  positions  défensives  où  une  armée  battue  ou 
trop  faible  pour  tenter  le  sort  des  armes,  en  rase  campagne, 
pût  tenir  assez  longtemps  pour  obliger  l'ennemi  à  battre 
en  retraite.  Ces  positions  sont  les  camps  retranchés  per- 
manents, dont  l'idée  appartient  à  Vauban,  mais  qui  n'ont 
reçu  leur  véritable  destination  et  une  organisation  ration- 
nelle que  depuis  la  chute  du  premier  empire.  L'une  des 
plus  remarquables  applications  qui  en  ait  été  faite  est  le 
camp  retranché  de  Paris,  qui  date  de  1840.  Si  ce  camp, 
dont  les  dimensions  furent  réglées  sur  la  portée  des  ca- 
nons lisses,avait  reçu  en  temps  opportun,  les  modifications 
et  les  accroissements  nécessités  par  l'introduction  des  ca- 
nons rayés  dans  les  parcs  de  siège  et  dans  l'armement  des 
places,  les  armées  allemandes  n'auraient  pu  le  bloquer,  et 
la  guerre  eût  pris,  sans  doute,  une  direction  plus  favorable 
aux  Français.  L'avenir  assignera  donc  un  rôle  impor- 
tant à  tous  les  camps  retranchés  qui  auront  assez  d'am- 
pleur et  de  ressources,  pour  abriter,  nourrir  et  approvi- 
sionner de  grandes  armées  pendant  10  ou  12  mois.  Grâce 


(  1035  ) 
à  ces  établissements,  certaines  invasions  échoueront  et 
d'autres  ne  produiront  que  des  résultats  incomplets.  Ils  se- 
ront par  conséquent  très-précieux  pour  les  petits  Ëtats,  et 
même  pour  les  Étals  de  premier  ordre,  lorsque  ceux-ci 
éprouveront  un  grand  désastre  au  début  des  opérations; 
mais  l'art  de  la  guerre  n'en  tirera  aucun  profit,  parce  que 
les  camps  retranchés,  attirant  les  armées  par  les  grands 
avantages  qu'ils  leur  offrent,  limiteront  les  combinaisons 
des  stratégistes  et  subordonneront  le  succès  d'une  cam- 
pagne à  la  reddition  d'une  place,  comme  au  temps  de 
Charles-Quint ,  des  princes  de  Nassau  et  de  Louis  XIV  (i). 

Il  est  donc  prouvé  que  l'accroissement  énorme  des  ar- 
mées permanentes,  si  funeste  au  point  de  vue  des  intérêts 
matériels,  n'est  pas  moins  fâcheux  au  point  de  vue  de  la 
bonne  constitution  des  armées  et  des  progrès  de  l'art  de  la 
guerre. 

Pour  atténuer  le  mal,  il  n'y  a  qu'un  moyen  actuellement 
ou  prochainement  réalisable,  c'est  la  réduction  proportion- 
nelle des  grandes  armées  et  l'introduction  générale  du  ser- 
vice personnel,  seul  mode  de  recrutement  qui  puisse  pro- 
duire des  armées  intelligentes  et  morales. 

Il  y  aurait  une  autre  solution,  plus  radicale  et  plus  heu- 
reuse, ce  serait  d'arriver  à  la  suppression  même  de  la  guerre 


(l)  En  théorie,  les  camps  retranchés  devraient  donner  plus  d'indépendance  aux 
généraux,  en  les  dispensant  notamment  de  l'obligation  de  couvrir  la  capitale  ou  le 
centre  de  la  puissance  militaire  du  pays  (comme  l'est  Anvers  pour  la  Belgique); 
mais,  en  réalité,  il  arrivera  rarement  qu'un  général  battu  ou  menacé  de  l'être, 
ne  se  replie  pas  sur  un  camp  retranché,  plutôt  que  de  manœuvrer  en  arrière  ou 
latéralement.  C'est  ce  qui  m'autorise  à  d\re\ue ,  dans  la  plupart  des  ca.s,  les 
guerres  modernes  se  termineront  par  un  grand  siège,  ou  échoueront,  parce  que 
l'assaillant  ne  pourra  mener  ce  siège  à  bonne  fin. 


(  i056  ) 
et  à  l'aplanissement  des  conflits  internationaux  par  voie 
d'arbitrage. 

Mais  loin  de  considérer  ce  moyen  comme  admissible, 
nous  ne  pouvons  pas  même  nous  bercer  de  Tespoir  que  les 
sanglants  démêlés  de  peuple  à  peuple  seront  désormais 
moins  fréquents. 

Sans  doute  l'obligation  d'entretenir  les  grandes  armées 
aux  frais  du  trésor,  même  en  pays  ennemi,  rendra  les 
guerres  de  plus  en  plus  difficiles  ;  sans  doute  aussi  radou- 
cissement des  mœurs  et  les  progrès  accomplis  dans  l'ordre 
moral,  provoqueront  une  réaction  de  plus  en  plus  vive 
contre  l'emploi  de  la  force  dans  les  conflits  internationaux, 
mais  ce  double  eïïet  ne  sera  jamais  assez  puissant  pour 
prévenir  les  luttes  armées.  Aussi  longtemps  qu'il  y  aura 
des  peuples  qui  voudront  être  prépondérants,  et  des  chefs 
d'États  ou  d'armées  qui  rêveront  pour  eux  ou  pour  leur 
pays  de  brillantes  destinées,  il  faudra  s'attendre  à  ce  que 
les  abus  anciens  se  reproduisent  avec  leur  cortège  habi- 
tuel de  violences  et  de  calamités. 

Tout  ce  que  je  puis  concéder,  je  ne  dirai  pas  aux  amis 
de  la  paix,  car  nous  sommes  tous  de  ses  amis,  mais  aux 
disciples  de  Kant  et  de  l'abbé  de  Saint-Pierre, c'est  que  les 
guerres  à  venir  dureront  moins  longtemps  et  produiront 
moins  de  ruines. 

Quant  à  voir  toutes  les  causes  de  conflits  écartées  ou 
atténuées  par  les  progrès  des  idées  et  des  mœurs,  je  ne 
pense  pas  qu'il  nous  soit  donné  de  jouir  jamais  de  ce  spec- 
tacle consolant.  Je  partage  plutôt  l'opinion  de  l'économiste 
distingué  (1),  qui  soutenait,  en  1873,  que  les  progrès  de 


(4)  M.  Moi.iNARi.  Voir  la   lieviie  dex   Deux   Mondes,   livraison  du   dS  jan- 
vier 1878.  • 


(  1037  ) 
rinduslrie  et  le  développement  prodigieux  des  voies  xle 
communication,  mettant  en  relation  tous  les  peuples  civi- 
lisés ou  demi-civilisés  du  globe,  ont  par  là  même  multiplié 
entre  eux  les  occasions  de  querelles  et  de  conflits.  Ces  dif- 
férents, la  sagesse  commande  sans  doute  aux  États  plus 
encore  qu'aux  particuliers  de  les  éviter  ou  de  les  aplanir, 
mais  cela  est  généralement  impossible ,  soit  parce  qu'il 
n'existe  pas  de  tribunaux  d'États  appuyés  sur  une  force 
internationale  capable  de  faire  respecter  leurs  décisions, 
soit  parce  que  les  peuples,  comme  les  individus,  ont  des 
passions  et  des  préjugés  qui  les  rendent,  à  certains  mo- 
ments, inaccessibles  à  la  raison,  à  la  modération,  à  la  jus- 
tice. Or,  comme  le  prix  de  la  guerre  monte  de  plus  en  plus 
et  que  celui  de  la  paix  croît  dans  le  même  rapport,  il  faut 
que  les  gouvernements  se  tiennent  continuellement  en 
éveil  pour  prévenir  les  conflits  que  tant  de  points  de  con- 
tact entre  eux  peuvent  faire  surgir  inopinément,  et  qu'ils 
soient  toujours  prêts,  politiquement  et  militairement,  à 
faire  face  à  des  agressions  qu'il  n'est  pas  toujours  en  leur 
pouvoir  d'éviter  (\). 

Mais,  dira-t-on,  n'y  a-(-il  donc  rien  à  tenter  pour 
diminuer  les  maux  de  la  guerre  et  le  poids  des  armements 
excessifs  que  se  sont  imposés  la  plupart  des  États? 


(1)  Voici  en  quels  termes  M.  Molinari  énonce  cette  vérité  : 

«  A  quels  besoins  des  nations  les  gouvernements  doivent-ils  pourvoir?  Ces 
besoins  varient  selon  les  époques,  mais  le  premier  a  été  de  tout  temps  le  besoin 
de  sécurité  extérieure,  et  il  ne  semble  pas  ,  malheureusement,  que  les  progrès  de 
la  civilisation  aient  rendu  en  ce  point  la  tâche  des  gouvernements  plus  facile ,  au 
contraire!  Entre  des  nations  de  plus  en  plus  rapprochées  et  dont  les  rapports  de 
toute  sorte  deviennent  de  jour  en  jour  plus  fréquents,  les  occasions  de  conflitis 
sont  aussi  plus  nombreuses.  Ces  conflits ,  il  faut  savoir  les  éviter  ou  les  résoudre 
à  l'amiable,  et,  si  une  solution  pacifique  n'est  pas  possible,  il  faut  être  en  mesure 
de  tes  vider  par  la  force  !  Voilà  ce  que  demande  la  sécurité  extérieure.  » 


(1038  ) 

Messieurs,  la  réduction  proportionnelle  des  grandes 
armées  (1)  rendue  possible  par  les  décisions  d'un  congrès 
européen  obéissant  à  des  idées  philanthropiques  et  libé- 
rales, tel  doit  être,  je  pense,  le  desideratum  des  amis  du' 
progrès.  Au  delà  il  n'y  a  rien  de  pratique,  rien  de  prochai- 
nement réalisable.  Espérer  que  les  armées  permanentes 
disparaîtront  comme  le  mammouth  a  disparu  «  parce  que 
la  terre  ne  pouvait  plus  le  nourrir  (2),  »  c'est  prendre  un 
beau  rêve  pour  une  consolante  réalité.  La  guerre  est  tou- 
jours et  sera  longtemps  encore,  sinon  éternellement,  le 
triste  lot  de  l'humanité.  Nous  sommes  si  éloignés  de  la  voir 
disparaître  que  notre  génération  a  pu  assister  au  spectacle 
incompréhensible  de  la  résurrection  d'un  Alexandre,  d'un 
César,  d'un  Charlemagne,et  que,  depuis  un  quart  de  siècle, 
il  a  été  versé  plus  de  sang  sur  les  champs  de  bataille  qu'à 
aucune  autre  époque  de  l'histoire  moderne,  excepté  pen- 
dant les  dernières  années  du  règne  de  Napoléon  I". 

Aujourd'hui  comme  au  temps  de  Voltaire,  on  peut  dire 
«  qu'un  prince  qui  licencierait  ses  troupes...  qui  laisserait 
tomber  ses  fortifications  en  ruine  et  qui  passerait  son 
temps  à  lire  Grotius,  dans  un  an  ou  deux  aurait  perdu  son 
royaume.  »  C'est  que  la  force,  qui  a  été  nécessaire  pour 
instituer  le  droit,  est  encore  plus  nécessaire  pour  le  faire 
régner. 

Aristote  appelle  l'homme  un  animal  politique.  L'homme 
est,  en  réalité,  un  animal  belliqueux.  Alors  même  que  les 
progrès  des  idées  et  des  mœurs  modifieraient  sa  nature  au 

(1)  Les  armées  des  petits  États  sont,  proportionnellement  à  la  population,  bien 
plus  faibles  que  celles  des  États  de  premier  ordre.  C'est  pourquoi  la  réduction 
devra  porter  sur  les  dernières  et  non  sur  les  autres,  qui  n'ont  pas  dépassé  les 
limites  admissibles,  et  qui  devraient  même  être  augmentées  considérablement  si 
les  grands  États  ne  diminuaient  pas  l'effectif  qu'ils  ont  actuellement  sur  pied.  » 

(2)  Mauvais  argument,  qui  a  été  produit  avec  succès  dans  plusieurs  Congrès 
de  la  paix. 


(  1039  ) 
point  que  toujours  la  raison  et  la  justice  prévaudraient  sur 
ses  passions  et  ses  préjugés,  s'ensuivrait-il  que  la  guerre 
pût  être  supprimée? 

La  guerre  n'esl-elle  pas  plus  forte  que  nous?  n'est-elle 
pas  une  des  conditions  de  Texistence  et  du  développement 
des  peuples,  un  des  agents  les  plus  actifs  du  progrès  so- 
cial? Qui  oserait  le  nier?  La  science  et  l'histoire  ne  nous 
apprennent-elles  pas  que  la  destruction  est  le  principe  de 
la  vie  et  que  l'humanité  ne  s'avance  dans  la  voie  de  la  per- 
fection qu'en  foulant  des  ruines? 

Si  l'existence  terrestre,  comme  la  religion  et  la  philoso- 
phie l'enseignent,  est  une  épreuve  imposée  à  l'homme, 
pourquoi  cette  épreuve  serait-elle  exempte  des  maux 
qu'entraînent  la  guerre,  les  révolutions,  la  peste,  les  trem- 
blements de  terre,  et  d'autres  phénomènes  naturels  qui 
sont  le  désordre  apparent  nécessaire  à  l'universelle  har- 
monie, et  dont  l'action  se  fera  sentir  aussi  longtemps  que 
roulera  dans  l'espace  la  petite  planète  que  nous  habitons? 

La  justice  et  la  liberté  n'ont  été  données  à  l'homme 
qu'au  prix  des  combats,  et  la  félicité  ne  lui  a  été  promise 
qu'en  récompense  de  l'abnégation,  du  dévouement  et  du 
sacrifice. 

Il  faut  donc  accepter  la  guerre  et  les  armées,  comme  étant 
d'inévitables  agents  de  conservation  et  de  progrès,  et  bor- 
ner notre  ambition  à  rendre  la  guerre  moins  fréquente, 
moins  cruelle,  et  les  armées  moins  nombreuses,  plus  in- 
telligentes, plus  morales,  afin  que  l'humanité  ait  moins  de 
sacrifices  à  faire,  moins  de  douleurs  à  subir,  moins  de 
sang  et  de  larmes  à  verser.  Sur  ce  terrain  pratique, 
l'homme  d'État,  le  philosophe  et  le  militaire  peuvent  se 
donner  la  main  avec  l'espoir  d'aboutir  à  un  résultat  utile 
et  durable. 


(  1040  ) 
La  parole  a  ensuite  été  donnée  à  M.  Edouard  Morren 
pour  faire  une  lecture  intitulée  : 

La  théorie  des  plantes  carnivores  et  irritables. 


PREMIERE  PARTIE. 
LA   DIGESTION. 

Unité  nutritive.  —L'azote.  —  Groupe  téléologique.  —  Systématique.  —  Géogra- 
phie; stations;  faciès.  -  Le  piège;  gibier;  attraction;  anatomie.  —  La  diges- 
tion; historique;  expériences;  l'acide;  le  ferment;  surexcitation  gastrique; 
indigestions;  durée  ;  nombre.  —  Absorption;  organes.  —  Décomposition;  com- 
mensaux. —  Utilité;  culture. 

Unilé  nutritive.  —  Il  y  a  trois  ans,  à  pareille  date  (1), 
nous  avons  déjà  établi  devant  TAcadéinie  que,  contraire- 
ment à  des  préjugés  encore  répandus,  la  nutrition  est  en 
réalité  la  même  chez  les  animaux  et  chez  les  plantes;  qu'il 
convient  de  distinguer,  en  physiologie  végétale,  la  produc- 
tion des  substances  plasmiques  à  l'aide  des  matériaux 
inorganiques  et  la  véritable  nutrition  qui  consiste,  comme 
chez  les  animaux,  dans  la  circulation,  l'assimilation  et  la 
consommation  de  ces  mêmes  substances  plasmiques.  Nous 
avons  soutenu  le  principe  de  l'unité  de  structure  et  d'acti- 
vité dans  tous  les  êtres  organisés:  nous  voulons,  aujour- 
d'hui que  l'Académie  nous  admet  encore  à  l'honneur  de 
l'entretenir,  reprendre  les  choses  au  point  où  nous  les 
avons  laissées  et  montrer  que  les  végétaux  manifestent  des 


(1)  Introduction  à  l'étude  de  la  nutrition  des  plantes,  BuLL.  DE  l'Acad.  ROY. 
DE  Belg.,  décembre  1872. 


(  lOil  ) 
phénomènes  biologiques  d'un  ordre  élevé  que  Ton  croyait 
être  l'apanage  exclusif  de  l'activité  animale.  Grâce  aux 
récentes  investigations  scientifiques,  les  plantes  mieux 
connues,  plus  appréciées,  s'élèvent  presque  au  niveau  zoo- 
logique tout  comme  les  progrès  de  la  biologie  animale  sem- 
blent rapprocher  les  animaux  de  l'homme  et  donner  de 
l'esprit  aux  bêtes. 

L'azote.  —  De  tous  les  éléments  que  les  êtres  organisés 
doivent  se  procurer  pour  assurer  leur  existence,  le  plus 
précieux  est  l'azote,  avec  ses  alliés  habituels,  le  soufre  et 
le  phosphore.  L'azote  organisable  est  parcimonieusement 
réparti  dans  la  nature,  où  il  se  trouve  sous  la  forme  d'am- 
moniaque et  d'acide  nitrique.  Ces  deux  substances,  qui 
sont  en  quelque  sorte  aux  confins  du  monde  minéral  et  du 
règne  organique,  sont  produites  sous  certaines  influences 
dans  le  sol  et  dans  l'atmosphère.  C'est  là  que  la  plupart  des 
végétaux  vont  les  puiser,  soit  à  l'aide  de  leurs  racines, 
soit  au  moyen  de  leurs  feuilles.  Le  carbonate  d'ammo- 
niaque existe  dans  l'atmosphère,  sinon  à  l'état  de  sel,  au 
moins,  à  cause  de  l'inégale  diffusibilité  de  ses  deux  consti- 
tuants, à  l'état  de  dissociation;  il  peut  être  porté  directe- 
ment sur  le  feuillage  par  la  pluie  ou  par  la  rosée  (1). 


(1)  Nous  avons  constaté  expérimentalement  qu'un  léger  surcroît  de  carbonate 
d'ammoniaque  dans  l'air  d'une  serre  où  Ton  cultive  particulièrement  des  épiphytes 
exotiques,  telles  que  des  Orchidées  et  des  Broméliacées,  exerce  la  plus  heureuse 
influence  sur  la  santé  de  ces  plantes  aériennes  auxquelles  l'atmosphère  doit  ap- 
porter tous  les  principes  nécessaires  pour  se  constituer  ;  l'absorption  a  bien  réel- 
lement lieu  par  les  feuilles,  puisque  certaines  Tillandsiées  du  genre  très-bien 
nommé  Phyiarhiza  par  M.  Visiani,  n'émettent  point  de  racines.  Nous  en  avons 
vu  naître,  grandir,  fleurir  et  fructifier  sans  avoir  jamais  émis  de  racines  au  sein 
de  l'atmosphère  chaude  et  humide  où  elles  sont  maintenues  (  Tillandsia  bulbosa 
Hook). 


(  i042  ) 

Ses  sources.  —  Le  carbonate  d'ammoniaque  est  préci- 
sément le  produit  ultime  de  la  décomposition  naturelle 
des  matières  azotées.  La  plupart  des  plantes  absorbent 
Fazote  sous  cette  forme  pour  le  faire  entrer  dans  le  conflit 
vital;  mais  il  n'en  est  pas  ainsi  pendant  toutes  les  phases 
de  leur  existence,  par  exemple  la  germination,  et  il  y  a  des 
plantes  qui  ne  se  conforment  pas  à  la  loi  le  plus  générale- 
ment suivie.  Il  suÛQrail  de  citer  les  Champignons,  mais  on 
peut  négliger  ces  êtres  saprogènes,  les  plus  puissants  des- 
tructeurs qui  soient  au  monde,  qui  n'ont  du  végétal  que 
l'apparence  et  qui  font  exception  à  presque  tous  les  prin- 
cipes de  la  physiologie  des  plantes.  Nous  voulons  nous  ap- 
puyer sur  des  végétaux  d'ordre  supérieur  et  nous  pouvons 
invoquer  les  saprophytes,  les  parasites  et  les  carnivores  qui 
savent  se  procurer  les  matières  azotées  avant  que  celles-ci 
soient  tombées  dans  le  monde  minéral:  les  premières, 
comme  le  Neottia  Nidiis-avis ,  vivent  dans  l'humus;  les 
secondes,  comme  l'Orobanche,  se  grefl'ent  à  quelque  plante 
nourricière,  tandis  que  les  dernières  s'en  prennent  aux  ma- 
tières animales:  l'avantage  est  en  leur  faveur,  mais  le  prin- 
cipe est  le  même. 

Les  vraies  parasites  puisent  dans  leur  nourrice  les  ali- 
ments à  rélat  de  circulation  naturelle,  les  saprophytes  les 
absorbent  pendant  la  fermentation  putride,  alors  que  les 
carnivores  leur  font  éprouver  au  contraire  les  efi*ets  d'une 
fermentation  indirecte  :  ce  pouvoir  de  digestion  est  leur 
caractère  essentiel  ;  seul,  il  sufiirait  presque  pour  les  élever 
à  la  dignité  animale. 

L'activité  des  plantes  carnivores  est,  en  dernière  ana- 
lyse, une  question  d'azote  :  pour  se  procurer  ce  précieux 
mobile  de  leur  organisme,  elles  se  mettent  en  rébellion 
contre  le  règne  animal ,  auquel   un  trop  grand  nombre 


(  i04o  ) 

d'autres  plantes  est  fatalement  voué,  et  dans  cette  lutte 
héroïque,  elles  s'élèvent  à  un  niveau  d'organisation  dont 
on  ne  soupçonnait  pas  la  grandeur  avant  qu'elle  fût  me- 
surée par  un  génie  de  la  puissance  de  Darwin.  Les  princi- 
paux problèmes  qui  concernent  ces  végétaux  étranges  qui 
chassent  aux  insectes,  leur  tendent  des  pièges, les  attirent 
par  de  fallacieuses  séductions,  s'en  emparent,  les  tuent  et 
les  mangent  et,  pour  les  absorber,  empruntent  aux  animaux 
mêmes  leurs  procédés  de  digestion,  ont  été  pour  la  plupart 
élucidés  avec  une  rare  sagacité  par  M.  Darwin  (1),  en  ce 
qui  concerne  les  Droséracées  et  les  Utriculariées,  et  par 
son  illustre  confrère,  le  D""  Hooker  (2)  pour  les  Sarracénia- 
cées  et  les  Népenthacées. 

Groupe  téléologique.  —  Les  plantes  carnivores  ou  insec- 
tivores, selon  la  nouvelle  expression,  constituent  un  groupe 
physiologique  et  non  pas  un  groupe  taxinomique.  Comme 
les  parasites,  les  plantes  grasses,  les  lianes,  elles  appar- 
tiennent à  diverses  familles  et  à  plusieurs  régions;  elles 
paraissent  s'être  adaptées  par  la  sélection  naturelle  aux 
circonstances  entre  lesquelles  elles  ont  pu  se  mouvoir  et 
se  propager  :  leur  structure  est,  comme  on  dit,  téléolo- 
gique. 

La  systématique.  —  Les  mieux  caractérisées  forment 
la  famille  des  Droséracées  qui  se  compose  de  six  genres  : 
Byblis  Salisb.,  Roridula  Linn.,  Drosophyllum  Link ,  Dro- 
sera  Linn.,  AIdrovanda  Linn.  et  Dionaea  Ellis  :  nous  les 


(1)  Darwin,  Insectivorous  Plants,  4875. 

(2)  Hooker,  Address  to  the  Department  of  Botany  and  Zoology ,  in  Report 
of  the  44e  meeting  of  the  Brit.  Assoc.  (Belfast),  1874,  p.  i02.-  Belgique  horticole, 
4874,pp.262et362. 


(  1044  ) 

avons  émimérés  dans  Tordre  de  leur  perfectionnement 
successif.  On  place  les  Droséracées  parmi  les  Dicotylédones 
polypétales  calyciflores,  dans  le  voisinage  des  Saxifragées. 
Le  Dionaea,  dont  on  a  discuté  les  affinités  (1), établit  le  pas- 
sage vers  le  Cephaîotus  Labill.  rattaché  aujourd'hui  aux 
Ribésiacées  (2).  Les  Sarracéniacées,  où  se  trouvent  les 
genres  Sarracenia  L.,  Dariingtonia  Torr.  et  Heliamphora 
Benth.,  encore  polypétales,  sont  classées  parmi  les  Thala- 
miflores.  Elles  ont,  par  leur  placentation  pariétale  et  d'au- 
tres caractères,  des  affinités  évidentes  avec  la  série  précé- 
dente. Quant  aux  Népenthacées,  réunies  toutes  dans  le  seul 
genre  Nepenthes  Linn.,  elles  sont,  par  la  classification  ac- 
tuelle, rangées  dans  une  tout  autre  section,  près  des  Aris- 
toloches, parmi  les  Monochlamydées.  Enfin  les  genres  Utri- 
cularia  Linn.  et  Pingiiiciila  Tourn.  que  l'on  comprend,  à 
tort  ou  à  raison,  dans  la  même  catégorie  des  plantes  insec- 
tivores, appartiennent  à  la  famille  des  Utriculariées,  rangée 
parmi  les  Gamopétales  personnées.  On  connaît  donc  des 
plantes  carnivores  dans  chacune  des  trois  classes  des  Di- 
cotylédones, tandis  qu'on  n'en  cite  aucune  parmi  les  Mono- 
cotylédones. 

Géographie.  —  Les  genres  précités  ont  une  valeur  et 
une  dispersion  fort  inégales. 

Dans  la  famille  des  Droséracées,  les  Byblis  comptent 
trois  ou  quatre  espèces  confinées  dans  l'Australie  septen- 
trionale; les  Roridula,  peu  importants,  appartiennent  à 
l'Afrique  australe. 


(1)  M.  B.-C.  Dumortier  a  proposé  de  constituer  la  famille  des  Dionaeacées  :  Bull, 
de  l'Acad.  roy.  de  Belg.,  1837 ,  tome  IV  ,  p.  443. 

(2)  Bentham  et  Hooker  ,  Gênera  Plantarum. 


(  i0i5  ) 
Le  Drosophyllum  lusitanicum  Link,  seul  de  son  genre, 
est  concentré  en  Portugal  et  au  Maroc,  mais  les  Drosera 
forment  un  genre  puissant  :  on  en  connaît  une  centaine  de 
formes  spécifiques, parmi  lesquelles  il  en  est  qui  sont  grim- 
pantes :  elles  sont  répandues  presque  partout  sur  le  globe. 
Le  genre  est  représenté  dans  la  flore  belge  par  les  Drosera 
rolundifolia  L.,  D.  intermcdia  Hayne  et  D.  anglica  Huds. 
Les  deux  autres  genres  de  la  famille  sont  monotypes  :  ce 
sont  VAldrovanda  vesiciilosa  L.  que  l'on  connaît  en  Aus- 
tralie, au  Bengale  et  en  Europe,  et  le  Dionaea  muscipula 
Ellis,  déjà  célèbre  et  bien  connu  sous  le  nom  û'Àtlrape- 
mouches  (Venus  Fly  Trap;  Fliegenfânger,  Fliegenfalle). 
Tout  est  étrange  dans  cette  plante,jusqn'à  son  aire  de  dis- 
persion qui  est  resserrée  dans  la  Caroline  du  Nord,  aux 
États-Unis,  entre  les  limites  les  plus  étroites.  Elle  n'est 
pas  confinée  exclusivement  aux  environs  de  Wilmington  , 
sur  un  espace  de  2  à  3  lieues  carrées,  mais  elle  est  rare 
sur  les  autres  points  du  territoire  de  la  Caroline  septen- 
trionale et  dans  les  districts  voisins  de  la  Caroline  du  Sud. 
Elle  a  été  signalée  pour  la  première  fois,  en  1759,  par  Ar- 
thur Dobbs,  gouverneur  de  l'État,  dans  une  note  insérée 
dans  VHorius  Collinsonianus  (1).  En  1768,  Ellis  en  fit 
l'étude  et  la  description, et,  après  l'avoir  placée  sous  l'invo- 
cation de  la  nymphe  Aicoy<,  mère  de  Vénus,  il  écrivit  à  Linné 
une  lettre  demeurée  classique.  Dès  la  même  année,  1768, 
la  Dionée  fut  apportée  vivante  en  Europe  par  William 
Young.  Quelques  erreurs  et  certains  préjugés  des  premiers 
observateurs,  qui  furent,  il  faut  l'avouer,  accrédités  par 
Linné,  lui  donnèrent  une  certaine  notoriété;  mais  elle  fut 
le  sujet  d'études  sérieuses  publiées  en  1854  par  le  doc- 


(11  Gard.  Cfiron.,  1875,  I,  306. 


(  iOi6  ) 
leur  Curtis  et  en  i868,  par  Canby,  plus  récemment  par 
MM.  Hooker,Balfoui\  Burton  Sanderson  et  Darwin.  Elleest 
la  plus  extraordinaire  entre  toutes  les  plantes  carnivores. 

Le  Cephalolus  follicularis  Labill.,  unique  de  son  genre, 
se  trouve  exclusivement  sur  un  territoire  restreint  de  l'Aus- 
tralie occidentale,  près  d'Albany. 

Quant  aux  Sarracéniacées,  deux  genres  sont  monotypes 
à  aire  restreinte  :  le  Darlingtonia  californica  Torr.  de  la 
Sierra  Nevada  de  Californie  et  un  Heliamphora  qu'on  a 
rencontré  au  Venezuela ,  sur  le  mont  Roraima;  mais  le 
genre  Sarracenia  est  mieux  doté  :  on  en  connaît  six  es- 
pèces répandues  sur  l'Amérique  du  Nord. 

Les  JSepenthes  sont  plus  nombreux,  mais  d'une  tout 
autre  région  :  on  les  trouve  aux  Indes  orientales,  dans  les 
îles  de  la  Sonde  et  à  Madagascar. 

Les  Ulriculia  et  les  Pinguicula,  qui  ont  une  autre  allure, 
se  trouvent  dans  presque  toutes  les  régions  fraîches  des 
deux  hémisphères,  même  à  la  Nouvelle-Hollande. 

Stations.  —  En  résumé,  les  plantes  carnivores  sont  ré- 
parties presque  partout  sur  le  globe.  Mais  si  elles  appar- 
tiennent à  des  familles  diverses  et  si  elles  prospèrent  sous 
des  climats  différents,  on  peut  remarquer  que  les  condi- 
tions locales  dans  lesquelles  elles  vivent  sont  uniformé- 
ment les  mêmes  pour  toutes,  c'est-à-dire  que  leur  station 
est  presqtje  identique.  Les  botanistes  belges  savent  dans 
quelles  localités  de  la  Campine  et  de  l'Ardenne  on  trouve 
les  Drosera  :  c'est,  en  général,  sur  les  terrains  siliceux, 
légers,  humides  et  tourbeux;  il  arrive  parfois  même  que 
leurs  chétives  racines,  fibreuses,  noires,  ne  touchent  pas 
au  sol  et  croissent  simplement  parmi  lesSphagnum.  C'est 
dans  les  mêmes  conditions  au  bord  des  tourbières,  que 


(   1047  ) 

croissent  les  Dionées  de  la  Caroline,  les  Sarracenia  du 
Canada,  le  Darlwgtoniaâc  la  Californie,  les  Népenthesde 
Bornéo  et  de  Madagascar.  Toutes  évitent  la  présence  du 
calcaire.  Il  en  est  de  même  des  Pinguicula  et  de  certains 
Utricidaria  [il.  montana).  Un  petit  nombre  seulement, 
comme  l'^l /f/roîo^f/a, devient  franchement  aquatique, perd 
tout  à  fait  les  racines  et  vogue  librement  sur  la  surface  de 
Peau  ou  bien  se  baigne  plus  profondément,  comme  nos 
Utricidaria  (1). 

Faciès.  —  Les  plan  tes  carnivores  ont  entre  elles  certaines 
ressemblances  de  faciès  ou  d'allure.  Beaucoup  ont  une  tige 
courte,  avec  leurs  feuilles  en  rosace,  comme  nos  Drosera, 
laDionée,  le  Darlingtonia,  les  Sarracenia;  chez  quelques- 
unes,  la  tige  s'étend  :  on  connaît,  au  moins  dans  les  her- 
biers sinon  dans  les  cultures,  des  Drosera  qui  s'élèvent  à 
une  certaine  hauteur.  Quant  aux  Népenlhes,  ce  sont  des 
plantes  frutescentes,  parfois  sarmenteuses  et  qui  atteignent 
des  dimensions  assez  considérables  pour  occuper  toute  une 
serre. 

Le  piège.  —  Leur  feuillage  est  de  formes  bizarres,  mais, 
dans  son  ensemble,  il  est  d'un  beau  vert,  souvent  rehaussé 
de  teintes  rouges  ou  brunes.  Les  fleurs  s'épanouissent  ou 
fructifient  de  la  manière  la  plus  habituelle.  En  y  regar- 


(1)  Nous  venons  de  constater  que  la  plupart  des  plantes  carnivores  vivent  dans 
les  mêmes  conditions  que  les  Sphagnum  :  nous  pouvons  faire  remarquer  à  ce 
propos  que  ces  singulières  Mousses  ont  certaines  cellules  percées  d'ouvertures 
naturelles  par  lesquelles  on  a  constaté  l'entrée  de  petits  animalcules  (  iîof//er  vid- 
garis].Cjes  trous  et  cette  entrée  ne  sont  probablement  pas  fortuits  et  il  y  a  peut-être 
là  une  certaine  analogie  avec  les  ampoules  et  les  amphores  des  plantes  supérieures 
"Voir  Ch.  Morren,  De  l'existence  des  Infusoires  dans  les  plantes,  Bull,  de 
l'Acad.,  t.  VI,  et  Etudes  d'anat.  vég.  —  Ce.  MOBhE^,  Recherches  sw  l'inen- 
chijrne  des  Sphagnum,  BuLL.  DE  L'AcAD.,  VIII,  1844, 1,  -164  et  Dodonaea. 


(  4048  ) 

dant  de  plus  près ,  en  considérant  les  choses  à  travers  le 
prisme  de  la  science,  le  regard  saisit  tout  ce  qu'une  obser- 
vation superficielle  avait  méconnu.  Laissant  de  côté  les 
Pinguicula  et  les  Utricularia,  au  sujet  desquels  nous  ne 
sommes  pas  suffisamment  édifié  et  qui  constituent  une 
catégorie  spéciale,  on  constate  chez  toutes  les  plantes  car- 
nivores l'existence  d'organes  appropriés  à  la  chasse  des 
insectes;  ces  organes  acquièrent  plus  de  perfection  et  plus 
de  développement  d'une  de  ces  plantes  à  l'autre,  si  on  les 
dispose  dans  un  certain  ordre  qui  n'est  pas  l'ordre  de  la 
classification  taxinomique.  Pour  l'apprécier,  il  faut  partir 
des  Droséracées  les  plus  simples  qui  ne  sont  guère  mieux 
douées  que  certaines  Saxifrages,  le  Saxifraga  tridacty- 
lites  L.,  par  exemple,  qui  est  pourvu  de  poils  glanduleux 
auxquels  de  faibles  insectes  peuvent  se  laisser  engluer  et 
en  se  décomposant  fournir  du  carbonate  d'ammoniaque 
qui  est  absorbé. 

«  Comme  il  n'est  pas  douteux,  dit  M.  Darwin,  que  ce 
procédé  soit  d'un  grand  secours  aux  plantes  qui  croissent 
dans  un  sol  pauvre  ,  il  doit  tendre  à  être  perfectionné  par 
la  sélection  naturelle.  Ainsi,  toute  plante  ordinaire,  pour- 
vue de  glandes  visqueuses,  qui  accidentellement  attrape 
des  insectes,  peut,  sous  des  circonstances  favorables,  être 
changée  en  une  espèce  capable  de  vraie  digestion.  » 

Nous  sommes  disposé  à  le  croire,  mais,  laissant  décote 
la  théorie,  quelque  séduisante  qu'elle  paraisse,  nous  nous 
bornerons  à  considérer  chez  les  plantes  insectivores  suc- 
cessivement la  chasse,  la  digestion  et  le  mouvement. 

Perfectionnement  du  piège.  —  Le  piège  se  perfectionne 
des  plus  simples  aux  plus  élevées. 

Chez  le  Drosophylhim,  ce  sont  des  tentacules  qui  se  ter- 


(  1049  ) 

inioent  par  une  glande  et  déjà  parcourus  par  un  faisceau 
de  trachées.  Chez  les  Drosera,  les  tentacules  sont  irritahles 
etmotiles  (1)  :  ils  se  courbent  sur  l'insecte  qu'ils  maintien- 
nent contre  la  feuille  dont  les  deux  bords  peuvent  se  rele- 
ver un  peu.  Les  Aldrovanda  ont  au  sommet  des  feuilles, 
avec  quelques  tentacules,  une  petite  trappe  hérissée,  à 
deux  lobes  susceptibles  de  se  rapprocher  par  un  mou- 
vement localisé  à  la  base  et  ainsi  de  se  fermer  momenta- 
nément. 

La  Dionée  dispose  de  l'appareil  le  plus  perfectionné  :  on 
ne  saurait  mieux  le  comparer  qu'à  cette  sorte  de  piège  à 
prendre  les  petits  animaux  et  que  nous  appelons  un  cep  (2) 
en  Belgique.  Il  consiste  en  deux  lobes  ou  valves  qui  se  joi- 
gnent à  peu  près  suivant  un  angle  droit  et  qui  ont  la  forme 
d'un  hémicycle  surbaissé;  la  nervure  médiane  est  proémi- 
nente à  la  face  inférieure,  les  lobes  sont  bordés  de  longs  cils, 
raides  et  aigus  :  tout  l'appareil  peut  atteindre  environ  trois 
centimètres  de  largeur  et  quand  la  santé  est  florissante,  il 
est  d'une  belle  teinte  rouge  à  la  face  supérieure  (5).  On  peut 
remarquer  que  cette  trappe  est  séparée  de  la  feuille  pro- 
prement dite  par  un  support  épais,  long  de  quelques  milli- 
mètres. Il  peut  se  fermer  vivement  et  se  transformer  en 
une  sorte  de  vésicule  bordée  de  deux  rangées  de  cils 
entre-croisés. 

Dans  le  Cephalolhus  et  dans  les  Népenthes,  les  Sarrace- 
nia  et  le  Darlingtonia,  le  piège  auquel  les  insectes  se  font 
prendre  en  foule  agit  comme  un  trébuchel;  il  a  la  forme 


(1)  ÉD.  MORREN,  Note  sur  les  procédés  insecticides  du  Di osera  rotundifoUa , 
1875. 

(2)  Le  mot  n'est  pas  dans  le  Dictionnaire  de  l'Académie  française. 

(3)  Ch.  Morren  a  donné,  en  4834,  quelques  éclaircissements  sur  sa  structure  et 
sa  morphologie.—  Hort.  belge ,  1834,  p.  71. 

^""^  SÉHIF,,  TOMK  XL.  67 


(  1050  ) 

d'une  urne  ou  amphore  plus  ou  moins  ouverte  au  sommet, 
dressée  ou  suspendue  à  Textrémité  de  chaque  feuille,  par- 
fois développée  en  lieu  et  place  des  feuilles  elles-mêmes. 
Dans  les  plus  beaux  Népenthes,  cette  amphore  peut  attein- 
dre un  pied  et  demi  de  longueur  et  engloutir  un  oiseau  ou 
un  petit  mammifère. 

Homologie.  —  Le  perfectionnement  des  organes  de  pré- 
hension et  de  digestion,  d'ailleurs  confondus,  est  frappant  : 
la  question  de  l'homologie  est  peut-être  discutable.  Dans 
les  Drosera,  la  feuille  ouverte  avec  ses  dépendances  en 
forme  de  tentacules  reployés  et  ses  bords  un  peu  relevés, 
fonctionne  momentanément  comme  un  estomac.  Dans  la 
Dionée,  au  lieu  de  nombreux  tentacules,  on  voit  un  seul 
et  vaste  lobe  qui  s'ouvre  pour  saisir  le  gibier  et  se  ferme 
pour  le  digérer.  Dans  les  Népenthes,  enfin,  l'organe  a 
vraiment  la  forme  d'un  sac  stomacal  muni  d'un  seul  ori- 
lice  (i). 

Gibier.  —  Le  gibier  de  nos  plantes  consiste  en  petits 
animaux  :  les  Drosera  s'emparent  de  Diptères  et  d'autres 
petits  volatiles;  ils  chassent  la  plume,  tandis  que  la  Dio- 
née saisit  plus  facilement  de  petites  bêtes  qui  marchent, 
on  pourrait  dire  le  fauve.  On  a  trouvé  dans  ses  feuilles 
fermées  à  l'état  d'estomac,  des  Élalères,  des  Chrysomèles, 
des  Charençons,  des  Araignées,  des  Scolopendres  et  des 


;i)  Les  feuilles  de  Drosera  peuvent  émettre  des  bourgeons  (Éd.  Morren,  /.  c); 
il  en  est  de  même  des  feuilles  de  Dionée.  M.  Mildebrandt,  de  Cologne,  a  constaté 
(jue  ces  feuilles  étant  bouturées  s'enracinent  et  donnent  des  bourgeons  adventifs  : 
il  a  omis,  malheureusement,  de  signaler  la  place  même  à  laquelle  se  forment  ces 
bourgeons.  Wochenschr.,  48B1,  p.  192,  trad.  dans  le  Journ.  de  la  Soc.  d'hort.  de 
Paris.  1862,  VIll,  378. 


(  \om  ) 

Fourmis.  Dans  nos  serres,  on  lui  a  vu  prendre  des 
Limaces.  Si  l'on  ouvre  les  larges  urnes  des  Darlinglonia, 
on  y  trouve  de  gros  Papillons  de  nuit.  Selon  le  D'  Hooker, 
les  jeunes  urnes  de  Népenthes  atteignent  le  gibier  aérien 
et  s'en  emparent,  tandis  que  les  urnes  plus  anciennes 
dressent  leurs  embûches  au  gibier  terrestre.  Dans  les 
nasses  des  Utriculaires  aquatiques,  on  trouve  de  petits 
Crustacés. 

Attraction.  —  Ces  pauvres  victimes  de  la  rapacité  végé- 
tale sont  attirées  dans  le  piège  où  elles  doivent  périr  au 
moyen  d'artifices  ingénieux  et  presque  irrésistibles.  Nous 
avons  constaté  que  le  Pinguicula  répand  une  odeur  qui 
doit  être  analogue  à  celle  des  Champignons  et  qu'il  attire 
ainsi  sur  ses  feuilles  humides  et  gluantes  de  petites  mou- 
ches {Exediia  fungorum  de  Geer)  qui  habitent  ordinaire- 
ment les  Agarics  (1).  Nos  Drosera  indigènes  ont  leur  rosace 
foliaire  étalée  sur  le  sol,  d'un  beau  rouge,  rehaussée  de 
mille  petites  perles  qui  étincellent  au  soleil  et  qui  sont 
dressées  dans  toutes  les  directions,  comme  les  tentacules 
de  Bryozoaires. 

Le  Drosera  binata  Labill.,  qui  est  introduit  d'Australie 
dans  les  serres  d'Europe,  a  ses  grandes  feuilles  linéaires, 
dichotomes,  étalées  au  sommet  de  longs  pétioles  dressés, 
qui  se  disposent  en  grand  nombre  comme  un  vaste  filet 
dans  lequel  les  mouches  doivent  se  faire  prendre  comme 
dans  une  toile  d'araignée  (2).  La  Dionée  ne  sécrète  pas  du 
miel  comme  Ellis  l'avait  cru  et  comme  Linné  l'a  rapporté 


(1)  Éd.  MorREN,  Observations  sur  les  procédés  insecticides  des  Pinguicula 

(2)  ÉD.  MORREN,  Note  sur  les  procédés  insecticides  du  Drosera  binntn. 


(  dOoâ  ) 

d'après  lui  :  ses  trappes  sont  sèches  quand  elles  ne  sont 
pas  occupées  à  digérer;  elles  répandent  sans  doute  une 
odeur  qui  attire  les  insectes,  mais  en  tous  cas,  elles  sont 
parsemées  sur  toute  leur  surface  rosée  de  petites  glandes 
à  huit  divisions  qui  sont  au  nombre  des  plus  belles  choses 
de  la  nature  par  leur  gracieuse  symétrie,  la  régularité  de 
leur  structure  et  leur  charmante  coloration.  Si  la  beauté 
des  formes  et  l'éclat  des  couleurs,  dit  M.  le  D'  Balfour,  peu- 
vent être  appréciés  par  les  mouches,  la  Dionée  a  bien  assez 
d'attraits  sans  recourir  au  miel. 

Quant  aux  Sarracéniacées  et  aux  iNépenthacées,  elles 
emploient  ce  moyen ,  le  même  que  les  tleurs  qui  veulent 
être  câlinées  par  les  abeilles;  elles  enduisent  de  miel  le 
bord  de  la  coupe  fatale.  Nous  ne  sommes  donc  pas  seuls 
en  ce  monde  à  savoir  qu'on  attrape  les  mouches  avec  du 
miel! 

La  prise  du  gibier.  —  L'insecte  qui  se  laisse  attirer  par 
ces  séduisants  appâts  ou  par  ses  appétits  sensuels,  est 
voué  à  une  mort  terrible.  Dans  presque  tous  les  cas,  son 
existence  va  se  terminer  dans  une  lente  et  horrible  agonie. 
Lorsqu'un  Drosera  a  saisi  sa  proie,  on  voit  la  sécrétion 
gluante  augmenter,  les  tentacules  voisins  venir  à  la  res- 
cousse et  tous  ensemble  se  ployer  vers  la  victime  qui 
s'épuise  en  vains  efforts  à  vouloir  se  dépêtrer;  poussée 
contre  la  feuille  sur  d'autres  glandes  pédicellées,  la  pauvre 
bête  périt  sous  ces  débordements  de  bave  corrosive. 

La  Dionée  agit  avec  plus  de  cruauté  et  plus  d'intelli- 
gence. Aussitôt  qu'un  insecte  excite  une  de  ses  trappes,  les 
deux  valves  déjà  peu  écartées  (angle  de  90'')  se  rappro- 
chent vivement  en  même  tenjps  que  les  cils  s'abaissent  et 
s'entre-croisent  d'une  bordure  à  l'autre;  voilà  donc  la  bes- 


(   1053  ) 

liole  prise  comme  dans  un  étaii,  à  moins  que  la  proie  ne 
soil  ou  trop  fiiible  ou  trop  forte,  et  c'est  ici  que  se  mani- 
feste rintelligence  qui  a  présidé  à  la  structure  de  la  plante. 
Si  la  proie  estchétive, elle  passera  entre  les  barreaux  du  gril- 
lage de  sa  prison.  Si  elle  est  forte,  elle  écarte  ses  entraves. 
Mais  si  le  gibier  est  de  bonne  prise,  si  c'est  une  mouche 
rondelette,  elle  sera  impitoyablement  sacrifiée  :  l'étau  qui  la 
presse,  concave  d'abord ,  se  redresse  et  s'applique  étroite- 
ment contre  elle;  il  n'est  pas  exact,  comme  on  l'a  cru,  que 
ses  mouvements  surexcitent  l'irritation  de  la  feuille;  mais 
bientôt  toutes  les  glandes  de  la  surface  entrent  en  activité 
et  commencent  à  sécréter  un  suc  qui  se  déverse  sur  l'in- 
secte, l'imprègne  de  son  humeur  aigre,  si  bien,  horresco 
referens!  que  la  plante  absorbe  peut-être  sa  victime  encore 
vivante,  sans  plus  de  ménagements  que  nous  n'en  prenons 
nous-mêmes  à  l'égard  d'un  radis. 

Les  pièges  des  Sarracenia  et  des  Nepenthes  agissent 
comme  des  trébuchets  :  le  bord  de  l'urne,  près  duquel  se 
trouve  le  sucre,  est  lisse;  les  insectes  glissent  sans  pou- 
voir ni  se  retenir,  ni  s'échapper,  et  ils  tombent ,  en  général , 
dans  un  liquide  corrosif  qui  occupe  tout  le  fond  de  l'ap- 
pareil. 

Analomie.  —  Ces  singuliers  et  puissants  organes  des 
Drosera^  des  Dionaea  et  des  Nepenthes,  déjà  si  remarqua- 
bles par  leur  morphologie  et  leur  mode  d'activité,  dont 
nous  avons  seulement  esquissé  les  traits  généraux,  ne  sont 
pas  moins  intéressants  au  point  de  vue  de  leur  structure 
anatomique.  Sans  entrer  dans  aucun  détail,  nous  devons 
signaler  les  glandes  et  les  papilles  qui  couvrent  leur  sur- 
face, les  vastes  stomates  de  leur  épiderme  et  les  nom- 
breuses   trachées   qui    parcourent    le   parenchyme.  Les 


,  i05i  ) 
glandes  jouent  incontestablement  le  rôle  principal  dans  la 
sécrétion  des  divers  principes  qui  servent  à  attirer,  à  sai- 
sir et  à  digérer  les  insectes.  La  question  est  de  savoir  si 
ces  principes  sont  excrétés  en  même  temps,  ou  si,  comme 
il  semble  probable,  la  glu,  l'acide  et  le  ferment  ne  pro- 
viennent pas  plutôt  de  glandes  différentes.  La  question  est 
aussi  de  savoir  par  quels  organes  se  fait  l'absorption  des 
produits  de  la  digestion,  si  elle  se  fait  par  les  glandes 
mêmes  qui  ont  sécrété,  ou  si  elle  n'a  pas  lieu  plutôt  par  les 
stomates  ou  par  des  papilles  singulières,  peut-être  ouvertes 
au  sommet,  qui  sont  entremêlées  avec  eux  (1).  Le  rôle  des 
trachées  n'est  pas  moins  douteux  :  l'opinion  la  plus  plau- 
sible est  qu'elles  servent  à  porter  aux  glandes  l'eau  néces- 
saire à  leur  activité. 

Théorie  générale  de  la  digestion.  —  On  sait  que  la  diges- 
tion consiste  essentiellement  dans  la  transformation,  dé- 
terminée par  un  ferment  soluble  agissant  en  présence  d'un 
acide,  des  matières  albuminoïdes  insolubles  et  colloïdes, 
en  principes  solubles  et  diffusibles.  La  digestion  animale 
est  d'ailleurs  imparfaitement  connue;  on  peut  supposer 
qu'elle  consiste  en  hydratation  et  dédoublement  des  sub- 
stances digérées  :  le  résultat  consiste  en  matières  dont  la 
constitution  se  rapproche  des  cristalloïdes  et  par  consé- 
quent susceptibles  d'être  absorbées  :  ils  constituent  les 
peptones. 

La  théorie  de  la  digestion  chez  les  plantes  carnivores 
n'est  pas  aussi  récente  qu'on  pourrait  le  croire.  Déjà, 
en  1829,  Burnett  soutint  que  l'urne  des  Sarracenia  exerce. 


(1)  ÉD.  MORREN,  Drosera,  p.  5. 


(  \mn  ) 

sur  les  insectes  qu'elle  a  capturés  une  action  digestive  ana- 
logue à  celle  (le  Teslomac  des  animaux  (1).  Le  docteur 
Curtis  publia,  en  1854,  le  résultat  de  ses  persévérantes 
recherches  sur  la  Dionée.  Son  Mémoire  est  encore  le  meil- 
leur qui  ait  été  fait  sur  cette  plante.  Il  constata  que  l'in- 
secte n'est  ni  écrasé,  ni  asphyxié,  et  il  reconnut  que  la  sé- 
crétion qui  suit  la  capture  est  analogue  à  la  salive  ou  au 
suc  gastrique;  il  en  conclut  que  l'insecte  saisi  par  la  plante 
devait  servira  l'alimenter.  Un  autre  botaniste  américain, 
M.  Canby  (2)  mit  délinitivement  hors  de  doute,  en  1868, 
la  théorie  de  la  digestion  :  il  prouva  que  le  suc  digestif  est 
toujours  sécrété  en  temps  convenable,  quand  la  feuille  est 
saine  et  quand  la  proie  convient  à  la  plante  :  que  la  feuille 
peut  digérer  la  viande  crue  qu'on  lui  offre;  enfin  que  cha- 
que feuille  peut  opérer  deux  ou  trois  digestions  pendant 
sa  vie,  avec  un  intervalle  de  satiété  et  qu'elle  meurt  ordi- 
nairement pendant  ou  après  sa  troisième  digestion. 

Plus  récemment  enfin,  en  1874,  le  docteur  Hooker,  de 
Kew,  a  publié  ses  observations  sur  les  plantes  à  urnes  (3). 
Le  docteur  Balfour,  d'Edimbourg,  a  fait  connaître,  cette 
année  même,  ses  expériences  sur  la  Dionée  (4)  et  Darwin 
a  enrichi  la  science  de  son  mémorable  ouvrage,  Inseclivo- 
vous  Plants,  qui  est  un  chef-d'œuvre  d'analyse  et  de  saga- 
cité. Il  y  a  peu  de  jours,  le  29  octobre  1875,  le  Botanische 
Zeitung  publiait  le  résultat  des  expériences  de  Max 
Reess  et  de  H.  Will ,  favorables  à  la  théorie  de  la  digestion 
végétale. 


(1)  Hooker  (Belg.  horu,  -1874,  p.  363). 

(2)  Gardener's  Monthly  Journal.  Philadelphie,  1868,  X. 

(3)  Voy.  la  Belgiq.  hort.,  1874,  pp.  262  et  362. 

(4)  Gardener's  Chronicle,  -1873,  II,  8,  67. 


(  i0o6  ) 

La  digestion  végétale  est  réellement  semblable  à  celle 
que  déterminent  le  suc  gastrique  et  le  suc  pancréatique  : 
elle  intéresse  les  matières albuminoïdes,  l'albumine  fraîche 
ou  coagulée,  la  fibrine ,  la  chair  crue  ou  la  viande  rôtie  et 
les  cartilages;  elle  consiste  dans  une  liquéfaction  de  ces 
aliments.  De  petits  cubes  d'albumine  coagulée,  larges  de 
2  millimètres, ou  de  petites  tranches  de  cette  matière,  lon- 
gues de  4  ou  5  millimètres  sur  1  millimètre  d'épaisseur, 
déposées  sur  les  feuilles  de  Drosera,  deviennent  transpa- 
rentes, leurs  angles  s'émoussent  et  ils  finissent  par  être 
liquéfiés. 

Nous  avons  constaté  sur  le  Drosera  6ma^a  que,  dans  ces 
conditions,  la  fermentation  putride  n'intervient  pas.  Max 
Reess  et  H.  Will  ont  constaté  la  liquéfaction  et  l'absorption 
de  la  fibrine.  Pendant  ses  nombreuses  expériences  sur  le 
Dîonaea  muscipida,  M.  Balfour  a  toujours  vu  que  ladiges- 
tion,  lente  d'ailleurs,  de  la  chair  crue  se  fait  sans  qu'il  y 
ait  trace  de  décomposition  ou  de  mauvaise  odeur:  la  viande 
perd  bientôt  sa  couleur  rouge  et  elle  passe  petit  à  petit  à 
l'état  de  pulpe  inodore. 

Tandis  que  la  chair  déposée  sur  le  Sphagnum  pourris- 
sait en  deux  jours,  elle  demeurait  indemne  dans  la  feuille 
de  Dionée  occupée  à  digérer.  M.  Lindsay,  ayant  gorgé 
des  feuilles,  au  risque  de  leur  donner  une  indigestion,  a 
constaté  que  la  viande  renfermée  entre  les  valves  delà 
feuille  conserve  sa  fraîcheur,  tout  en  macérant,  tandis  que 
les  lambeaux  de  chair  qui  dépassaient  la  capacité  de  ce 
petit  estomac  ne  tardaient  pas  à  se  putréfier. 

Enfin  la  chair  putréfiée  mise  en  contact  avec  le  suc  de 
ces  feuilles  perd  sa  mauvaise  odeur.  M.  Hookera  constaté 
que  le  suc  des  Nepenthes  agit  comme  antiseptique  sur  les 
substances  animales  qui  s'y  trouvent  plongées. 


(  i057  ) 

On  doit  considérer  le  fluide  sécrété  par  les  glandes  des 
Droscra  et  des  Dionaea  comme  un  véritable  suc  digestif, 
non-seulement  parce  qu'il  en  produit  les  effets,  mais  en- 
core parce  qu'il  semble  en  avoir  la  composition.  On  sait, 
en  effet,  que  le  suc  de  l'estomac  opère  la  digestion  des  ma- 
tières albuminoïdes  par  l'action  d'un  ferment  soluble,  la 
pepsine,  agissant  en  présence  d'un  acide,  l'acide  cblorhy- 
drique;  cette  pepsine  est  elle-même  une  matière  azotée; 
elle  est  sécrétée  par  l'estomac.  Ce  qu'on  appelle  la  diges- 
tion stomacale  est  en  réalité  une  sorte  de  fermentation  qui 
convertit  l'albumine  en  substances  liquides  et  diffusibles. 

Or,  on  a,  sinon  la  preuve,  au  moins  des  indices  de  la 
présence  de  ce  corps  ou  de  son  équivalent  dans  le  liquide 
que  les  plantes  carnivores  excrètent  pendant  la  période 
d'activité  :  c'est  en  cela  que  réside  la  valeur  des  récentes 
découvertes  qui  ont  autorisé  l'assimilation  scientifique  des 
digestions  animale  et  végétale. 

U acide.  —  Le  suc  des  Drosera  et  celui  des  Dionaea  sont 
acides  :  ils  rougissent  le  papier  de  tournesol,  au  moins 
quand  la  sécrétion  est  abondante  et  l'organe  en  activité. 
Le  D*"  Frankland,  consulté  par  M.  Darwin,  pense  que  cette 
acidité  provient  de  l'acide  propionique,  peut-être  de  l'acide 
valérianique,  au  moins  d'un  acide  gras  de  la  série  acé- 
tique. Cette  opinion  a  été  corroborée  par  les  analyses  de 
M.  H.  Will ,  exécutée  dans  le  laboratoire  de  M.  von  Gorup; 
elles  ont  porté  sur  le  suc  obtenu  par  la  macération  dans 
l'eau  de  plusieurs  milliers  de  Drosera  préalablement  ex- 
cités au  moyen  de  la  poussière  de  verre.  L'extrait  aqueux 
renfermait  de  l'acide  formique,  dont  M.  Frankland  avait 
au  contraire  signalé  l'absence,  et,  à  en  juger  par  l'odeur, 
des  acides  propionique  et  butyrique.  L'acide  formique  exis- 


(  10^8  ) 
lait  en  proportion  notable  dans  ce  liquide,  mais  M.  Will 
émet  l'avis  qu'il  pourrait  bien  venir  du  parenchyme  de  la 
feuille  et  non  du  fluide  sécrété  par  les  glandes,  lequel  au- 
rait seul  fourni  les  acides  déjà  signalés  par  Frankland. 
Cette  opinion  est  vraisemblable;  on  sait  combien  l'acide 
formique  est  répandu  dans  les  tissus  végétaux  et  on  le 
rencontre  même  parmi  les  matières  qui  peuvent  se  trouver 
dans  notre  estomac.  Le  même  acide  formique  a  été  signalé 
en  proportion  notable  dans  le  suc  digestif  de  la  Dionée,  par 
le  professeur  Dewar  (1),  en  même  temps  que  des  chlo- 
rures. Dans  cette  plante,  la  sécrétion,  parfois  si  abondante 
qu'elle  découle  le  long  du  pétiole,  est  de  nature  gluante  et 
se  conserve  longtemps  sans  se  décomposer.  On  a  donc  des 
indices  concordants  à  l'égard  d'un  acide  gras  volatil,  mais 
jusqu'ici  l'acide  formique  a  seul  été  positivement  constaté 
dans  le  suc  du  Drosera  et  de  la  Dionée.  Il  constitue  à 
l'état  concentré  le  venin  ordinaire  des  fourmis,  des  poils 
des  Orties  et  de  ceux  de  la  Chenille  processionnaire.  On 
sait,  en  outre,  que  le  fluide  corrosif  des  Carabes  consiste 
en  acide  butyrique. 

Ferment.  —  On  n'a  encore  que  des  preuves  indirectes 
de  la  présence  de  la  pepsine.  D'après  le  professeur  Frank- 
land, le  suc  des  glandes  de  Drosera,  acidulé  par  l'acide 
sulfurique,  répand  l'odeur  caractéristique  de  la  pepsine 
(Darwin,  /.  c,  p.  88).  Ce  ferment  existe  sans  doute  en 
quantité  extrêmement  faible. 

C'est  un  des  caractères  des  ferments  solubles  de  mani- 
fester leur  puissante  influence  sous  les  proportions  les 
plus  minimes.  Darwin  étend  aux  Drosera  la  théorie  de 

(4)  Balfour,  /.  c. 


(  1059  ) 
Schiff(l)  sur  la  digestion  d'après  laquelle  les  glandes  de 
restomac  sécrètent  un  acide  quand  elles  sont  excitées  par 
une  irritation  mécanique,  tandis  qu'elles  donnent  la  pep- 
sine seulement  après  avoir  absorbé  certaines  substances 
solubles,  azotées,  qu'il  désigne  sous  le  nom  de  peptogènes 
(Darwin,  129.)  La  transformation  des  matières  azotées  en 
substances  solubles  et  diffusibles  est  un  phénomène  fré- 
quent dans  l'économie  végétale,  comme  la  transformation 
de  la  fécule  sous  l'influence  de  la  diastase  en  dextrine  et 
en  glucose.  Mais  le  ferment  n'était  pas  connu. 

MM.  Gorup-Besanez  et  H.Will  (2)  ont  extrait  récemment 
(1874)  des  graines  de  Vicia,  au  moyen  de  la  glycérine,  un 
principe  capable  de  dissoudre  les  substances  albuminoïdes, 
telles  que  la  fibrine,  et  de  les  convertir  en  véritables  pep- 
tones.  Ce  ferment  intervient  sans  doute  pendant  la  germi- 
nation et  dans  la  mise  en  œuvre  de  tous  les  dépôts  nutri- 
tifs. Plus  récemment  encore,  MM.  Max  Reess  et  H.  \Vill(3), 
appliquant  au  Drosera  le  môme  procédé  d'extraction  au 
moyen  de  la  glycérine  (4),  ont  obtenu  un  extrait  glycérine 
qui,  étendu  de  quelques  gouttes  d'acide  chlorydrique  dilué, 
opère  la  digestion  artificielle  de  la  fibrine.  Cette  expérience, 
répétée  une  douzaine  de  fois  avec  des  résultats  toujours 
affirmatifs,  est  très-favorable  à  la  nouvelle  théorie.  Cepen- 
dant pour  ne  pas  devancer  étourdiment  la  marche  lente  et 
grave  de  la  science,  il  importe  de  reconnaître  que  cette 
théorie  manque  encore  de  deux  bases  nécessaires,  la  déter- 


(4)  Physiol.  delà  digestion,  4867,  11,  p.  188,  245  (d'après  Darwin). 
■2)  Berichte  der  Deutschen  Chem.  Gesellschaft.  Berlin,  1874,  p.  1478. 

(3)  Bot.  Zeitung,  29  octobre  1875. 

(4)  Par  le  procédé  de  Huflfner,  Journal  fur  prakt.  Chemie ,  Neue  Folge-, 
V,  377. 


(  i06o  : 

rainalion  positive  de  l'acide  et  du  ferment  qui  intervien- 
nent dans  la  digestion  végétale  (4). 

On  savait  que  la  pepsine  n'existe  pas  seulement  dans  le 
suc  gastrique.  Brùcke  a  reconnu  sa  présence  dans  le  sang 
et  dans  les  muscles.  Bretonneau  avait  déjà  annoncé  que  la 
viande  introduite  dans  une  plaie  sous-cutanée  pouvait  s'y 
digérer  comme  dans  l'estomac  (2).  iMais  on  ne  soupçon- 
nait pas  sa  présence  chez  les  végétaux  où  elle  paraît  répan- 
due dans  l'organisme,  comme  la  diastase,  et  on  s'attendait 
encore  moins  à  rencontrer  ce  ferment  dans  une  matière 
sécrétée  par  les  végétaux  en  quelque  sorte  à  la  sollicita- 
tion des  matières  animales. 

Surexcitation  gastrique.  —  En  effet,  la  sécrétion  d'un 
acide  pas  les  plantes  insectivores  est  plus  ou  moins  consé- 
cutive du  contact  d'un'insecle,  et  la  sécrétion  de  la  pepsine 
semble  provoquée  par  le  contact  d'une  matière  azotée.  Les 
pièges  de  la  Dionée  sont  parfaitement  secs  quand  ils  sont 
ouverts  et  disposés  pour  la  chasse;  si  la  fermeture  est  pro- 
voquée par  un  simple  attouchement  momentané  ou  par 
une  substance  inerte,  une  paille,  un  morceau  de  calcaire, 
ce  piège  ne  sera  pas  changé  et  ils  se  rouvrira  le  plus  vite 
possible;  une  matière  azotée  sèche  ne  produira  pas  plus 
d'effet;  mais  vienne  un  morceau  de  chair  fraîche  ou 
vivante  et  alors  l'occlusion  se  maintiendra,  deviendra  plus 
étroite  et  bientôt,  c'est-à-dire  en  quelques  heures,  la  face 
en  contact  avec  cet  excitant  émettra  une  sécrétion  de  plus 


(-1)  M.  Lawson  Tait  {^atwe.  -29  juill.  i875.  pp.  !254-2o2)  annonce  avoir  séparé 
de  la  sécrétion  du  Drnsera  binata  et  des  Népenthes  une  substance  qui  ressemble 
beaucoup  à  la  pepsine  et  qu'il  propose  de  nommer  Drosérine. 

{%  P.  SCHiJTZENBERGER,  Les  fermentations,  1875,  p.  253. 


K  i06l  ) 
en  plus  abondante,  qui  commence  par  les  glandes  directe- 
ment excitées,  mais  qui  ne  tarde  pas  à  se  propager  à  toutes 
celles  qui  se  trouvent  successivement  atteintes.  La  surex- 
citation est  évidente  et  parfois  si  prononcée,  que  la  salive 
coule  le  long  de  la  feuille  ou  s'épanche  entre  les  bords  de 
Tappareil. 

Le  Drosera  rotundifoUa  a  les  tentacules,  pendant  l'atti- 
tude du  combat,  terminés  par  une  gouttelette  imprégnée 
de  glu.  Cette  substance  n'a  pas  encore  occupé  les  chi- 
mistes :  elle  semble  indépendante  de  l'acide  et  du  ferment. 
La  gouttelette  est  presque  toujours  assez  acide  pour  rougir 
le  papier  de  tournesol  :  cependant  quand  les  glandes  sont 
surexcitées  par  des  attouchements  répétés  ou  par  les 
agitations  d'un  insecte  englué,  l'acidité  devient  plus  pro- 
noncée. 

Le  même  phénomène  se  manifeste  chez  les  Népenthes. 
M.  Hooker  a  constaté  que  la  présence  d'une  matière  inor- 
ganique dans  l'urne  de  ces  plantes  ne  produit  pas  d'effet 
appréciable,  tandis  qu'il  a  remarqué  un  afflux  considérable 
de  liquide  dans  les  urnes  où  il  avait  introduit  quelque  ma- 
tière animale.  Il  a  constaté  de  plus  que  le  suc  des  Népen- 
thes isolé  de  l'urne  ne  produit  les  phénomènes  de  la  diges- 
tion artificielle  que  d'une  manière  lente  et  incomplète, 
tandis  qu'à  l'intérieur  de  l'urne  la  digestion  se  fait  plus 
rapidement  et  plus  complètement  sans  doute  par  l'influence 
peptogène  des  substances  en  présence. 

Nous  avons  constaté  sur  le  Drosera  binata  que  les  ma- 
tières azotées  provoquent  l'inflexion  des  tentacules  et  aug- 
mentent la  sécrétion,  tandis  que  de  petits  fragments  inertes 
de  papier  ou  de  cire  tarissent  la  sécrétion  des  glandes 
et  font  courber  les  tentacules  en  arrière  :  les  matières 
nutritives  sont  donc  portées  sur  le  tissu  des  feuilles  et 


(  i062  ) 

les  substances  inutiles  sont  réellement  rejetées  en  dehors. 
M.  Balfour,  après  ses  belles  et  nombreuses  expériences 
sur  la  Dionée,  ne  doute  pas  que  Tabondance  de  la  sécrétion 
ne  soit  en  rapport  avec  la  qualité  du  festin;  une  vieille 
mouche  sèche  et  vide  laisse  la  plante  impassible,  tandis  que 
pour  une  grosse  araignée,  pour  un  papillon  dodu  ou  pour 
un  bon  morceau  de  chair  fraîche,  la  sécrétion  déborde 
comme  la  salive  chez  un  gourmet  qui  tient  un  succulent 
morceau  entre  les  dents  :  on  peut  dire  de  l'un  comme  de 
l'autre  que  l'eau  leur  vient  à  la  bouche. 

Indigestion.  —  Le  même  savant  rapporte  que  certaines 
matières  sont  de  digestien  fort  difficile,  le  fromage,  par 
exemple.  M.  Canby  avait  perdu  une  de  ses  Dionées,  en  la 
soumettant  au  régime  forcé  du  fromage.  Le  docteur  Bal- 
four  voulut  vérifier  l'expérience;  le  8  juillet  1874,  il  admi- 
nistra une  certaine  dose  de  chester  à  l'une  de  ses  plantes; 
le  9,  il  a  cru  voir  des  nausées  et  des  envies  de  vomir; 
pourtant  tout  semblait  bien  marcher,  quand  le  21,  des  trou- 
bles d'apparence  bilieuse  se  produisirent;  la  feuille  devint 
jaune,  puis  noire  et  mourut  d'une  véritable  indigestion. 

Il  arrive  aussi  que  les  Dionées  se  repaissent  avec  glou- 
tonnerie et,  comme  nous,  elles  pâtissent  de  se  surcharger 
l'estomac.  Le  5  juillet,  on  donna  à  quelques  feuilles  autant 
de  viande  qu'elles  en  voulurent  prendre,  le  lendemain, 
elles  en  étaient  gorgées  :  quelques-unes  furent  soumises 
à  un  traitement  énergique;  on  leur  enleva  avec  les  doigts 
tout  ce  qu'elles  n'avaient  pu  enfermer;  elles  furent  sau- 
vées. D'autres,  abandonnées  à  leur  triste  sort,  manifestè- 
rent, dès  le  15  juillet,  des  signes  évidents  de  maladie. 

Les  substances  indigestes  sont  en  général  l'huile,  la 
graisse,  l'urée,  etc.  Nous  cultivions  cow  amo)^e  une  belle 


(  1065  ) 

louffe  de  Drosera  binala,  fraîche  et  de  bon  appétit  jusqu'à 
ce  que,  dans  une  malencontreuse  expérience,  nous  lui 
offrîmes  la  moitié  d'une  pilule  de  pepsine  pharmaceutique: 
nous  ne  savons  ce  que  renfermait  cette  pilule  (1),  mais 
deux  ou  trois  jours  après,  pour  cette  raison  ou  pour  une 
autre,  notre  plante  fut  visiblement  indisposée;  depuis  lors 
toutes  ses  glandes  se  sont  taries  et  toutes  les  feuilles  se 
sont  successivement  flétries. 

Durée  de  la  digestion.  —  La  durée  des  digestions  varie 
avec  les  plantes,  la  nature  des  aliments  et  diverses  circon- 
stances. 

Le  Drosera  binata  hydrate  et  rend  transparent  en  huit 
ou  dix  heures  le  blanc  d'œuf  qu'on  lui  a  servi.  Le  Drosera 
rolundifolia  nous  a  paru  moins  actif  :  d'après  MM.  Rees  et 
Will,  il  dissout  en  quelques  heures  les  flocons  de  fibrine. 
Selon  Hooker,  il  faut  le  même  temps  aux  Népenlhes  pour 
commencer  à  entamer  les  bords  des  fragments  cubiques 
d'albumine  immergés  dans  leurs  urnes  ou  pour  produire 
un  commencement  de  gélatinisation  dans  les  cartilages. 

La  Dionéea  la  digestion  paresseuse;  comme  les  serpents, 
chacun  de  ses  repas  se  prolonge  de  8  à  20  ou  50  jours. 
M.  Balfour  a  compté  24  jours  pour  l'ingestion  d'une  grosse 
mouche  bleue  :  pendant  ce  temps  et  quelques  jours  après, 
la  feuille  est  dans  un  état  de  torpeur  qui  ressemble  à  une 
sieste. 

Nombre  des  digestions.  —  Le  nombre  des  digestions 
qu'une  feuille  est  capable  d'exercer  est  en  raison  inverse 


(1)  Nous  nous  sommes  rappelé  depuis  que  ces  pilules  de  pepsine  renfermaient 
chacune  cinq  milligrammes  d'extrait  de  noix  vomique. 


(  i064  ) 

(lu  temps  qu'elle  emploie.  Les  tentacules  courbés  de  Dro- 
sera  se  redressent  après  quelques  jours  et  semblent  prêts 
à  recommencer.  M.Canby  a  constaté  au  contraire  dès  1868, 
que  chaque  feuille  de  Dionsea  ne  peut  accomplir  qu'une  ou 
deux  digestions  et  qu'elle  meurt  fatalement  si  elle  risque 
une  troisième  opération.  On  peut  remarquer  incidemment 
que  tous  ces  phénomènes  se  passent  à  la  température  or- 
dinaire de  l'été. 

Absorplion.  —  On  ne  connaît  rien  encore  des  procédés 
chimiques  de  la  digestion  végétale  :  on  connaît  seulement 
le  fait  de  la  liquéfaction  des  matières  azotées  ;  on  suppose, 
avec  toute  apparence  de  raison,  que  les  produits  de  la  di- 
gestion, c'est-à-dire  les  peptones,  sont  absorbés  par  l'orga- 
nisme. M.  Darwin  a  constaté  que  l'absorption  des  matières 
azotées  est  accompagnée  d'une  agglomération  particulière 
du  protoplasme  à  l'intérieur  des  cellules  :  le  même  phéno- 
mène est  provoqué  par  le  carbonate  d'ammoniaque. 
M.  Hooker  a  constaté  l'absorption  chez  les  Népenthes  et 
M.  Balfour  chez  la  Dionée  ;  ainsi,  par  exemple,  ayant 
donné  à  l'une  de  ses  pensionnaires,  le  1"  juillet,  un  petit 
morceau  de  viande,  le  18  il  était  faiblement  entamé,  mais 
le  25,  il  était  réduit  en  bouillie;  le  24,  presque  tout  était 
absorbé  et  le  25,  il  ne  restait  plus  que  de  minces  petites 
plaques  non  suffisamment  transformées.  Cette  observation 
montre  que  la  liquéfaction  des  matières  animales  marche 
rapidement  pendant  la  dernière  période  de  la  digestion. 
Plus  récemment  MM.  Max  Rees  et  H.  Will  se  sont  assurés 
que  le  Drosera  absorbe  la  fibrine  dissoute  par  la  digestion. 
M.  Clarck(i)a  institué  une  expérience  sinon  concluante, 


; I)  Journal  of  Dotany,  septembre  1875. 


(  1065  ) 

au  moins  ingénieuse  :  il  a  offert  à  ses  Drosera  des  mouches 
sautées  au  citrate  de  lithium  et  quelques  jours  plus  tard, 
l'analyse  spectrale  a  fait  voir  ce  métal  dans  tous  les  organes 
de  la  plante,  jusque  dans  les  organes  floraux. 

Organes  de  V absorption.  —  Quant  aux  organes  histolo- 
giques  au  moyen  desquels  se  fait  l'absorption ,  on  n'est  pas 
généralement  d'accord,  si  ce  n'est,  sans  doute,  pour  dénier 
cette  aptitude  aux  surfaces  couvertes  d'une  cuticule  plus 
ou  moins  épaisse. 

M.  Darwin  est  d'avis  que  cette  fonction  est  remplie  par 
les  organes  mêmes  de  la  sécrétion,  tandis  qu'il  nous  sem- 
ble que  ce  rôle  est  dévolu  aux  vastes  stomates  ou  de  pré- 
férence aux  singulières  papilles  stomatiques  que  nous  avons 
constatées  chez  le  Drosera  et  qui  nous  ont  paru  être  perfo- 
rées au  sommet. 

Décomposition.  —  Si  la  liquéfaction  de  l'albumine  est 
incontestable,  comme  nous  l'avons  reconnu  sur  le  Drosera 
bitana  Labill.,  il  n'est  pas  moins  vrai  que  des  phénomènes 
de  décomposition  naturelle,  par  les  bactéries,  les  monades, 
les  ferments  et  les  mucédinées  peuvent  se  produire  dans 
les  insectes  capturés.  Nous  avons  rencontré  ces  facteurs  de 
la  fermentation  putride  sur  les  Pingiiicula  longifolia  et 
alpina  (1).  Nous  avons  rencontré  une  autre  fois  des  moisis- 
sures autour  d'une  mouche  qui  avait  été  déposée  sur  une 
feuille  de  Drosera,  mais  elle  était  de  forte  taille  et  réelle- 
ment hors  de  proportion  avec  les  capacités  digestives  de  la 
feuille.  Nous  avons  vu  encore  au  fond  des  urnes  des  Sar- 
racenia  un  véritable  charnier  d'insectes  en  putréfaction; 


(1)  Éd.  Morren,  Observations  sur  les  procédés  insecticides  des  Pinguicula. 
"2"^  SÉRFE,  TOME  XL  68 


(  1066  ) 

mais  tous  ces  phénomènes,  parfaitement  naturels,  n'ôtent 
point  leur  valeur  aux  observations  positives  qui  établissent 
avec  non  moins  de  certitude  une  véritable  fermentation 
indirecte  au  moyen  d'un  ferment  soluble. 

Commensaux.  —  Il  reste  toujours  quelques  débris  du 
festin,  tout  n'est  pas  liquétié.  Les  plantes  carnivores  par- 
tagent avec  des  commensaux.  Le  D""  Hooker  rapporte, 
d'après  les  observateurs  américains,  qu'il  y  a  des  insectes 
«  trop  adroits  pour  s'aventurer  dans  le  piège  des  Sarra- 
cenia,  qui  laissent  tomber  leurs  œufs  dans  l'ouverture  de 
l'urne,  afin  que  leur  progéniture  profite  de  la  nourriture 
qui  s'y  trouve  accumulée.  » 

II  explique  aussi  la  présence  dans  ces  urnes  de  larves 
et  de  nymphes.  Plus  récemment  M.  Riley  (J)a  signalé  à 
l'Association  américaine  pour  l'avancement  des  sciences 
un  lépidoptère,  le  Xanthoptera  semicrocea  G.,  qui  vient 
impunément  déposer  ses  œufs  sur  les  pièges  du  Sarrace- 
nia  variolaris  que  sa  chenille  dévore.  La  larve  d'un  dip- 
tère, le  Sarcopliaga  sarraceniae  Ril,  vit  à  l'intérieur  même 
de  l'urne,  dans  le  liquide  meurtrier  pour  tant  d'autres 
insectes;  elle  y  acquiert  tout  son  développement  et  elle  ne 
l'abandonne  que  pour  aller  se  transformer  sous  terre  en 
insecte  parfait.  Barton  rapporte  enûn  que  divers  oiseaux 
insectivores  fendent  les  urnes  au  moyen  de  leur  bec  pour 
en  dévorer  le  contenu. 

Utilité.  —  11  reste  d'ailleurs  à  établir  expérimentale- 
ment  que   la   liquéfaction  des  matières  azotées  et  leur 


(1)  Transactions  of  the  Academy  of  sciences  of  Saint  Louis,  vol.  III,  n»  "2, 
Saint-Louis.  4875.  -  Bull,  de  la  Soc.  entamai,  de  France,  1875,  43  janvier, 
p.  XIII. 


(   1067  ) 

absorption  contribuent  réellement  à  l'alimentation  de  ces 
végétaux.  Jusqu'ici  on  manque  d'un  fait  péremptoire  à 
opposera  ceux  qui  pensent  que  les  animaux  capturés  ser- 
vent à  nourrir  la  plante  indirectement  par  les  produits  de 
leur  décomposition  absorbés  par  les  feuilles  ou  par  les 
racines  (i)  et  à  ceux  qui  prétendent  que  tant  d'artifice  a 
seulement  pour  but  de  débarrasser  la  plante  des  insectes 
qui  la  gênent. 

Culture.  —  On  sait  depuis  longtemps  que  la  culture 
des  plantes  carnivores  est  extrêmement  difficile  :  la  cause 
en  est  peut-être  à  leur  antipathie  pour  le  calcaire,  mais  les 
jardiniers  habiles  parviennent  cependant  à  les  élever  et  à 
les  propager,  sans  qu'aucun  d'eux,  quoi  qu'on  en  ait  dit, 
ait  jamais  conseillé  de  leur  donner  de  la  viande  ou  du 
blanc  d'œuf;  les  insectes,  au  contraire,  sont  éloignés  de 
ces  plantes,  dans  les  serres  où  nous  les  tenons  enfer- 
mées. 

M.  Tait  (2)  a  fait  quelques  essais  de  culture  de  Drosera 
en  les  alimentant  avec  diverses  substances  azotées  organi- 
ques ou  minérales,  par  l'intermédiaire  des  feuilles  ou  des 
racines  et  elles  ne  paraissent  pas  avoir  donné  des  résultats 
concluants  en  faveur  de  la  théorie.  Jusqu'ici,  à  notre  con- 
naissance, nul  n'a  établi  l'utilité  et  encore  moins  la  nécessité 
d'une  alimentation  animale  pour  les  végétaux  insecticides. 
Les  faits  que  nous  avons  constatés  chez  les  Pinguicula  nous 
ont  convaincu  que  pour  ces  plantes,  du  moins,  les  insectes 
capturés  sont  d'un  très-faible  secours  économique  (5).  On 


(1)  C'est  la  théorie  de  Ch.  Morren,  développée,  en  185:2,  dans  la  Belgique  hor- 
ticole ,  4852 ,  tome  II ,  p.  227. 

(2)  Nature,  29  juillet  4875,  p.  254. 
l3)  ÉD.  Morren,  Le. 


(  1068  ) 

s'est  prévalu  de  raffaiblissement  du  système  radical  dans  les 
Drocéracées,  mais  il  n*est  pas  si  insignifiant  qu'on  l'a  pré- 
tendu :  la  racine  est  très-notable  dans  le  Drosera  binata  et 
elle  est  normale  dans  le  Drosera  r o lundi folia.  Nous  avons 
cité  des  plantes  nullement  carnivores  qui  n'ont  point  de 
racines  du  tout.  D'ailleurs,  comme  nous  l'avons  établi  au 
commencement,  il  ne  s'agit  pas  d'une  nutrition  générale 
destinée  à  fournir  tous  les  matériaux  nécessaires  à  l'orga- 
nisme, mais  seulement  d'une  source  jusqu'ici  inconnue  et 
assez  insolite  de  l'azote  organique.  En  admettant  même 
comme  définitivement  élabli  et  démontré  que  nos  plantes 
se  procurent  l'azole  de  leur  albumine  par  une  véritable 
digestion,  il  reste  non  moins  élabli  qu'elles  puisent  dans  le 
sol  les  matières  minérales  et  qu'elles  absorbent  dans 
l'atmosphère  l'acide  carbonique  qui  doit  être  soumis  à  l'éla- 
boration chlorophyllienne  et  fournir  le  carbone  des  com- 
posés ternaires. 

Dans  Pétat  actuel  de  la  théorie,  on  peut  seulement 
admettre  que  le  pouvoir  insecticide  fournit  aux  végétaux 
qui  en  sont  pourvus  un  surcroît  de  matières  azotées  :  on 
peut  même  s'étonner  des  faibles  dimensions  de  nos  Drosera 
et  de  la  Dionée  relativement  à  la  masse  nutritive  que  leurs 
victimes  devraient  leur  apporter  (i). 

(1)  Note  ajoutée  pendant  l'impression.  —  Notre  honorable  collègue 
M.  Catalan  a  bien  voulu  nous  communiquer  la  note  suivante  qui  pré- 
sente un  véritable  intérêt  historique  et  bibliographique.  Il  a  extrait 
des  Œuvres  de  Diderot  (1873,  t.  IX,  p.  237)  le  passage  suivant: 
«  Plante  de  la  Caroline  appelée  Muscipula  Dionaea ,  a  ses  feuilles  éten- 
dues à  terre,  par  paires  et  à  charnières;  ces  feuilles  sont  couvertes  de 
papilles.  Si  une  feuille  se  pose  sur  la  feuille,  celte  feuille  est  sa  compagne, 
se  ferme  comme  Ihuitre,  sent  et  garde  sa  proie,  la  suce  et  ne  la  rejette 
que  quand  elle  est  épuisée  de  sucs.  Voilà  une  plante  presque  Carnivore.  » 

a  Je  ne  ne  doute  point,  continue  Diderot,  que  la  Muscipula  ne  donnât 


(  i069  ) 


DEUXIÈME  PARTIE. 

LA    MOTILITÉ. 

Classificalion;  mouvements  physiques,  organiques,  excités,  provoqués,  instinc- 
tifs. —  Mécanisme.  —  Irritation  :  localisation,  spécialisation.  -  Siège  du  mou- 
vement, rapidité;  indépendance.  -  Théorie  des  mouvements  provoqués  :  agré- 
gation du  protoplasme;  contraction  des  cellules:  Déshydratation.  -  Propagation, 
transmission ,  communication.  —  Organes  de  la  transmission.  —  Vitesse  de 
transmission.  ~  Énervation.  -  Anesthésie.  -  Chlorhydrate  de  morphine.  — 
Curare.  —  Action  de  l'électricité;  thermo-électricité;  courant  électrique.— 
Conséquences.  —  Mouvements  instinctifs  :  Zoospores;  Lianes.  —  Conclusion. 

Jusqu'ici  nous  avons  considéré  dans  les  plantes  insecti- 
cides les  phénomènes  de  la  nutrition  :  ils  ne  sont  pas  les 
seuls  qui  les  rapprochent  des  animaux.  Quelques-unes 
d'entre  elles  manifestent  des  actes  de  mouvement,  d'irri- 
tabilité et  de  sensibilité  qui  sont  d'un  ordre  plus  élevé  dans 
la  série  des  phénomènes  biologiques.  Ce  sont  les  Droséra- 
cées  et  jusqu'à  un  certain  point  les  INépenthes.  A  ce  point 
de  vue  nouveau  l'horizon  s'élargit  :  le  règne  végétal  offre 
un  grand  nombre  de  manifestations  évidentes  d'une  acti- 
vité que  l'on  croyait  propre  aux  animaux. 

Classification.  —  Pendant  trop  longtemps  on  a  con- 
fondu dans  un  déplorable  désordre  tous  les  phénomènes 


à  l'anal^'se  de  l'alcali  volatil,  produit  caractéristique  du  règne  animal.  « 
Le  manuscrit  de  Diderot  date,  paraît-il,  de  1762.  L'éditeur,  M.  As- 

sézai,  ajoute  en  noie  :  «  La  Dionée  attrape-mouches  est  encore  de  temps 

à  autre  l'objet  d'expériences  de  la  part  de  nos  savants.  A-ton  fait  celle 

qu'indique  Diderot?  » 

Celte  expérience  n'aurait  pas  la  portée  que  lui  attribuait  Diderot,  mais 

elle  était  fort  judicieuse  pour  l'époque  où  elle  a  été  proposée. 


(  1070  ) 

de  motilité,  toutes  les  manifestations  dynamiques  que  pro- 
duisent les  plantes.  11  y  a  lieu  cependant  de  les  classer 
d'après  leur  siège,  ou  suivant  leur  but  et  surtout  de  dis- 
tinguer les  divers  facteurs  de  ces  mouvements. 

Mouvements  physiques.  —  H  y  a  des  mouvements  pure- 
ment physiques  qui  dépendent  de  quelque  disposition 
mécanique  propre  aux  organes  ou  aux  tissus;  tels  sont  les 
étamines  des  Kalmia  ou  les  capsules  du  sablier  des  An- 
tilles, certains  déplacements  qui  dépendent  de  l'hygrosco- 
picité  dans  le  Finiaria  hygromelrica,  la  Rose  de  Jéricho, 
les  Helychrysum,  etc.,  et  maints  phénomènes  de  dissémi- 
nation du  pollen  ou  des  graines. 

Mouvements  organiques.  —  Il  y  a  ensuite  des  mouve- 
ments organiques  inhérents  aux  êtres  vivants  dont  l'acti- 
vité consiste  essentiellement,  comme  nous  l'avons  fait 
voir  (J),  à  transformer  la  chaleur  des  combustibles  organi- 
ques en  phénomènes  de  mouvement.  Ici  se  présentent 
l'accroissement,  la  rotation  du  protoplasme,  la  circulation 
de  la  sève,  la  migration  des  principes  alimentaires,  tous 
les  transports  matériels  qui  se  rattachent  à  la  tension  des 
tissus,  à  la  turgescence  des  cellules  considérée  en  elle- 
même,  dans  ses  variations,  dans  ses  relations  et  dans  ses 
effets.  Sans  nous  y  arrêter,  nous  rapporterons  seulement 
une  expérience  de  Clark  sur  la  force  expansive  de  la 
Courge,  qui,  en  se  développant  sous  un  manomètre,  sou- 
leva successivement  des  poids  de  60,  500,  1,400  et  jusque 
5,000  livres  (2).  On  y  rattache  l'émanation  aqueuse,  l'an- 
thèse  des  fleurs ,  etc. 


(4)  ÉD.  MORREN,  Énergie  de  la  végétation. 

(2)  Gardener's  Chronicle,  1875.  42  juin,  p.  747. 


(  107i  ) 

Mouvements  excités.  —  Vient  ensuite  une  troiv«;ième 
catégorie  de  mouvements  qui  touchent  de  près  aux  précé- 
dents, mais  qui,  sans  être  aussi  inhérents  à  l'organisme 
sont  toutefois  inévitables  :  ce  sont  les  mouvements  excités 
par  un  agent  cosmique,  parmi  lesquels  viennent  se  ranger 
les  phénomènes  d'héliotropisme  et  de  géotropisme  des 
tiges,  des  racines  et  des  feuilles;  certains  mouvements  pé- 
riodiques qui  semblent  commandés  par  les  variations  de  la 
lumière  ou  de  la  chaleur,  comme  le  sommeil  des  plantes- 

On  connaît  d'ailleurs  chez  les  végétaux  supérieurs  de 
véritables  mouvements  involontaires,  spontanés  et  pério- 
diques qui  dépendent  d'une  cause  interne,  comme  les 
pleurs  ou  les  pulsations  de  certaines  Aroïdées,  l'agitation 
de  VHedysarum  gyrans  et  du  Megaclinium  falcalum. 

Mouvements  provoqués.  —  La  catégorie  des  mouve- 
ments provoqués  ressemble  le  plus  aux  mouvements  qu'on 
appelle  volontaires  chez  les  animaux  :ce  sont  des  mouve- 
ments consécutifs  d'une  irritation,  provoquée  ordinaire- 
ment par  un  contact;  on  les  voit  dans  les  feuilles  sensi- 
lives,  les  élamines  de  Berberis,  de Mahonia, des Spamannia, 
des  Synanthérées,  les  stigmates  des  Scrophulariacées. 
La  manifestation  la  plus  simple  est  la  contraction  d'une 
cellule  de  JSitella  sous  la  piqûre  d'une  épingle  ou  bien  celle 
d'une  feuille  de  Schinus  Mulli  au  contact  de  l'eau.  Ces 
mouvements  sont  liés  à  une  véritable  irritabilité  végétale, 
bien  supérieure  à  la  simple  excitabilité  générale  des  tissus 
vivants.  Ils  peuvent,  par  exemple,  chez  le  Mimosa  pu- 
dica,  etc.,  se  manifester  chez  des  plantes  où  se  produisent, 
en  outre,  des  mouvements  spontanés  de  veille  et  de  som- 
meil et  qui  ont  ainsi  une  motililé  complexe  qu'il  importe 
d'analyser. 


(  1072  ) 

Mouvements  instinctifs.  —  Chez  quelques  plantes  enfin, 
on  voit  se  produire  certains  mouvements  extraordinaires 
qui  intéressent  de  très-près  leur  existence  et  qu'on  appel- 
lerait volontiers  des  moxwements  instinctifs,  si  on  les 
voyait  exécutés  par  les  animaux  :  ce  sont  des  mouvements 
qui  semblent  acquis  pendant  la  grande  lutte  pour  l'exis- 
tence, développés  par  la  sélection  et  invétérés  par  ata- 
visme :  les  uns  intéressent  la  nutrition,  les  autres  la  pro- 
pagation; ils  en  est  de  partiels,  d'autres  sont  généraux. 
Nous  rangeons  ici  le  volubilisme  des  tiges  ou  des  vrilles, 
la  nutation  de  ces  organes,  certains  mouvements  sexuels 
(Ruta,  Nigella),  l'agitation  des  zoospores,  des  phytozoaires 
et  de  maints  hydrophytes.  Comme  procédé,  ils  participent 
de  tous  les  mouvements  précités,  mais  comme  valeur  phy- 
siologique, ils  élèvent  presque  les  plantes  à  la  hauteur  des 
fonctions  de  relation  par  la  manifestation  d'instincts  et  de 
discernement. 

Les  mouvements  des  Droséracées  supérieures  sont  de  la 
catégorie  des  mouvements  provoqués  ;  en  les  étudiant,  on 
reconnaît  certaines  ressemblances  avec  les  mouvements 
des  animaux. 

Mécanisme.  —  Le  mouvement  du  Drosera  consiste  dans 
une  incurvation  des  tentacules,  accompagnée  pendant  la 
digestion  d'un  léger  exhaussement  des  bords  de  la  feuille. 
Celui  de  la  Dionée  est  beaucoup  plus  perfectionné;  on  peut 
distinguer  le  rapprochement  soudain  des  valves,  l'entre- 
croisement des  cils,  et,  s'il  y  a  digestion,  la  compression 
graduée  des  deux  valves. 

Irritation.  —  Les  mouvements  provoqués  n'ont  lieu 
qu'à  la  suite  d'une  irritation  qui  résulte,  en  général,  d'un 


(  1075  ) 

choc,  d'un  contact,  un  ébranlement,  une  piqûre,  une  brû- 
lure. On  provoque  les  mouvements  de  la  Sensitive,  en  diri- 
geant sur  un  point  du  leuillage  le  foyer  d'une  lentille 
biconvexe.  Si  l'on  pique  une  cellule  de  Nitella  avec  la 
pointe  d'une  aiguille,  elle  se  contracte  et  s'affaisse.  Une 
trappe  de  Dionée ,  rapporte  M.  Balfour,  se  ferme  aussi 
vivement  au  contact  d'une  goutte  de  chloroforme  que  le 
ferait  notre  paupière. 

Localisation.  —  La  sensibilité  est  d'ailleurs  localisée  : 
souvent  le  tissu  cellulaire  irritable  est  celui-là  même  qui 
exécute  le  mouvement,  comme  les  vrilles,  les  filets  slami- 
naux  des  Cynarées,  etc.  On  peut  remarquer  que  la  sensi- 
bilité réside,  en  général,  dans  le  tissu  qui  pendant  le  mou- 
vement devient  concave,  par  exemple  la  partie  inférieure 
du  principal  pulvinule  des  Sensitives,  la  face  interne  des 
étamines  de  Berberis.  Mais  il  arrive  aussi  que  le  tissu  ca- 
pable de  recevoir  et  de  transmettre  l'irritation  est  d'instinct 
du  tissu  motile  et  ne  manifeste  lui-même  aucun  mouve- 
ment propre  :  c'est  le  cas  chez  les  Droséracées  supérieures. 
Déjà,  dans  nos  Drosera  on  voit,  quand  les  papilles  mé- 
dianes reçoivent  une  irritation  appropriée,  les  tentacules 
marginaux  s'infléchir,  principalement  à  leur  base.  Mais 
dans  la  Dionée,  cette  différenciation  atteint  le  plus  haut 
degré  de  perfection  :  il  existe,  comme  Ellis  l'a  constaté  le 
premier,  sur  chaque  lobe  du  piège,  trois  papilles  tactiles, 
disposées  en  triangle,  longues  d'un  ou  deux  millimètres, 
ordinairement  dressées,  articulées  à  leur  base  et  par  suite 
couchées  sur  les  valves  pendant  l'occlusion,  d'ailleurs 
molles  et  délicates,  exclusivement  formées  de  cellules  dans 
lesquelles  on  ne  voit  rien  de  particulier.  Ces  palpes  sont  du 
sommet  à  la  base  d'une  exquise  sensibilité;  au  moindre 


f   ^074  ) 

attouchement,  le  piège  se  ferme  vivement,  comme  une 
trappe  dont  on  aurait  lâché  le  ressort.  Le  reste  de  l'appareil 
est  impassible  au  toucher,  mais  ces  six  papilles  sont  dispo- 
sées de  telle  sorte  qu'un  insecte  en  passant  ne  peut  guère 
éviter  de  les  frôler,  ce  qui  détermine  sa  capture. 

Spécialisation.  —  Le  genre  de  contact  nécessaire  pour 
produire  une  irritation  suivie  de  mouvement  est  loin  d'être 
indifférent.  La  Dionée,  dont  les  cordes  sensibles  vibrent 
au  moindre  attouchement  d'un  corps  solide,  demeure  indif- 
férente quand  le  vent  l'agite  ou  qu'elle  est  fouettée  par  la 
pluie.  Il  en  est  de  même  pour  certaines  vrilles,  tandis  que 
les  étamines  de  Berberis  se  relèvent  sous  le  souffle  de 
l'air,  mais  sont  insensibles  aux  attouchements  des  petits 
insectes  qui  fréquentent  ces  fleurs.  On  sait  que  les  vrilles, 
au  moyen  desquelles  beaucoup  de  lianes  s'élèvent  et  se 
soutiennent  droites,  tant  qu'elles  ne  rencontrent  pas  le 
support  qu'elles  cherchent,  s'entortillent  rapidement  dès 
qu'elles  l'ont  rencontré;  elles  aussi  sont  irritables  par  la 
face  qui  devient  concave.  M.  Darwin  a  montré,  dans  un 
ouvrage  dont  il  vient  de  donner  il  y  a  quelques  jours  une 
nouvelle  édition  (1),  que  parmi  ces  vrilles  il  en  est  qui 
sont  irritées  par  de  minces  filaments,  d'autres  au  contact 
de  poils  raides,  quelques-unes  enfin  ne  sont  aff"ectéesque 
par  une  surface  lisse  ou  bien  rugueuse.  Aux  Drosera  il 
faut  un  contact  prolongé  pour  provoquer  la  flexion  des 
tentacules:  de  simples  attouchements  ne  leur  suffisent  pas, 
à  moins,  et  ici,  le  merveilleux  reparaît,  que  leur  sensibi- 
lité ne  soit  surexcitée  par  les  matières  azotées  :  la  moindre 


[\)  The  Movements  and  Habits  of  CUmb'mg  Plants. 


(  i075  ) 
parcelle  de  ces  matières  les  met  en  alerte;  il  suffît  même 
de  doses  ultra-homœopalhiqnes.  Darwin  assure  qu'il  suffit 
de  0"'^000095  (95  millionièmes  de  milligramme)  de  nitrate 
d'ammoniaque  pour  que  la  tïexion  ait  lieu,  tandis  que  des 
corps  inertes,  le  sable  ou  le  papier  laissent  la  plante  en 
général  fort  indifférente.  Un  phénomène  analogue  se  pro- 
duit chez  la  Dionée  :  elle  se  ferme  sous  un  attouchement 
fortuit  ou  au  contact  d'une  substance  indigeste ,  mais  cette 
irritation  factice  est  de  courte  durée;  l'occlusion  cesse 
après  vingt-quatre  heures,  tandis  qu'au  contact  d'une 
matière  albuminée  et  fraîche,  l'irritation  va  en  augmen- 
tant et  l'appareil  ne  s'ouvre  qu'après  la  digestion. 

Siérje  du  mouvement.  —  Le  siège  du  mouvement, 
l'organe  de  la  motilité  dans  les  plantes  irritables  consiste 
toujours  en  simples  cellules,  auxquelles  on  n'a  reconnu 
jusqu'à  ce  jour  aucun  caractère  particulier  :  les  méats 
inter-cellulaires  ne  paraissent  ni  plus  ni  moins  nombreux 
que  dans  les  autres  tissus.  Celui-ci  est  toujours  parenchy- 
mateux,  peu  fibreux,  mais  en  général  très-vasculaire.  Il 
forme  la  substance  même  de  tout  l'organe,  comme  les 
filaments  des  Cynarées,  les  stigmates  des  Mimules,  ou  les 
tentacules  des  Drosera,  ou  bien  il  est  mieux  différencie, 
par  exemple,  à  la  face  interne  des  étamines  de  Berberis,à 
la  face  inférieure  du  bourrelet  primaire  de  la  Sensitive  et 
autour  de  la  côte  médiane  des  trappes  de  Dionée  :  chacun 
de  ces  groupes  de  cellules  joue  le  rôle  d'un  muscle.  Il 
semble,  à  considérer  le  règne  végétal  dans  son  ensemble, 
que  tout  tissu  cellulaire  puisse  devenir  motile  sous  l'in- 
fluence de  quelque  excitation:  ainsi  dans  la  Dionée,  le 
bord  des  lobes,  qui  porte  les  cils,  s'infléchit  pour  fermer  le 
grillage  et  toute  la  face  supérieure  des  lobes  peut  entrer 
en  activité  pendant  qu'ils  agissent  comme  estomac. 


(  1076  ) 
Rapidité.  —  Les  mouvements  provoqués  sont,  souvent, 
brusques  et  assez  rapides,  comme  ceux  de  la  Sensitive,  du 
Berberis,  des  Cynarées  et  de  la  Dionée;  d'autres  sont  un 
peu  plus  lents,  comme  ceux  des  Drosera  et  de  la  plupart 
des  vrilles.  Quand  ces  mouvements  sont  momentanés,  on 
remarque  que  le  retour  à  la  position  de  repos  est,  en  gé- 
néral, beaucoup  plus  lent  que  le  mouvement  adducteur. 
L'anatomie  montre  d'ailleurs  que  le  tissu  cellulaire  qui 
agit  dans  ce  sens  est  aussi  le  plus  prépondérant. 

Indépendance.  —  On  peut  remarquer  que  ces  mouve- 
ments sont  indépendants  des  phénomènes  de  croissance  : 
ils  sont  accomplis  par  des  organes  complets,  arrivés  au 
terme  de  leur  développement.  La  tension  générale,  à 
laquelle  tous  les  tissus  sont  soumis  pendant  leur  période 
d'activité,  est  tout  à  fait  hors  de  cause  ici,  de  même  que 
ses  variations  périodiques  constatées  par  MM.  Hoffmeister, 
Sachs,  Kraus,  etc. 

Les  mouvements  provoqués  ont  lieu  à  toute  heure  du 
jour  et  même  de  la  nuit,  au  moins  quand  ils  ne  sont  pas 
compliqués  par  des  mouvements  périodiques  d'une  tout 
aulre  nature.  Ils  ne  sont  pas  moins  indépendants  de  la 
lumière  et  de  la  chaleur,  bien  entendu ,  dans  les  limites  de 
la  phototonie  et  de  la  thermotonie  générales.  Ce  sont  bien 
des  mouvements  propres  et  fonctionnels. 

Théorie  des  mouvements  provoqués.  —  Nous  avons  dit 
que  nul  caractère  istologique  ne  différencie  ni  le  tissu  irri- 
table, ni  le  tissu  motile;  ses  cellules  contiennent  le  plasma 
ordinaire  des  cellules  parenchymateuses,  des  grains  verts, 
de  l'amidon  ou  d'autres  granulations  qui  varient  suivant 
les  plantes. 

Néanmoins  des  progrès  ont  été  réalisés  dans  la  voie  qui 


(  1077  ) 
conduit  à  la  connaissance  de  la  mécanique  des  mouve- 
menls  provoqués,  les  seuls  dont  nous  nous  occupions  ici. 

Agrégation  du  protoplasme.  —  La  première  découverte 
est  un  changement  d'état  du  protoplasme  qui  semble  aban- 
donner les  parois  des  cellules  pour  se  rassembler  autour 
de  Taxe  principal.  C'est  ce  que  Darwin  a  nommé  l'agréga- 
tion du  protoplasme  :  dans  les  conditions  normales,  elle 
précède  et  accompagne  toujours  la  flexion  des  tentacules 
de  Drosera  et,  réciproquement,  dès  que  le  protoplasme 
reprend  sa  fluidité  habituelle,  le  tentacule  se  redresse. 
L'état  d'agrégation  s'observe  aussi  dans  les  tentacules  qui 
se  meuvent  sous  l'influence  d'une  irritation  transmise.  Il 
arrive  toutefois  que  certaines  substances  provoquent 
l'agrégation  sans  qu'il  y  ait  flexion.  M.  Heckel,  de  Mont- 
pellier, a  décrit  le  même  fait  (1)  dans  les  étamines  du  Ber- 
heris  :  a  Avant  l'excitation,  le  contenu  de  leurs  cellules, 
coloré  en  jaune,  est  disséminé  dans  toute  la  cavité  utri- 
culaire  et  surtout  appliqué  sur  les  parois...,  tandis  qu'après 
l'irritation  ce  même  contenu...  ramené  des  différents 
points  de  la  circonférence  est  condensé  au  centre  de 
Tutricule.  »  Nous  avons  le  devoir  d'ajouter  que  jusqu'à 
l'heure  actuelle  les  observations  relatives  à  la  connexité 
de  cet  étal  d'agrégation  du  protoplasme  avec  le  mouvement 
de  la  cellule  sont  peu  nombreuses. 

Contraction.  —  Un  second  fait ,  sur  lequel  les  données 
scientifiques  sont  déjà  plus  concordantes,  est  celui  d'une 
contraction  dans  les  cellules  motiles  qui  se  raccourcissent 
dans  le  sens  du  mouvement  en  même  temps  qu'elles  s'élar- 

(1)  EDOUARD  HjiCKEL,  Du  mouvement  végétal,  1873. 


(  i078  ) 

gissent  ou  s'épaississent  dans  le  sens  transversal.  Les  cel- 
lules en  état  de  tension  pendant  le  repos  se  contractent 
plus  ou  moins  vile  sous  Tinfluence  de  l'irritation  reçue. 
M.  Cohn,  de  Breslau,  est,  pensons-nous,  le  premier  qui 
ait  introduit  cette  donnée  dans  la  science  (1)  par  ses  obser- 
vations sur  les  filets  irritables  des  Cynarées.  Ces  organes 
se  raccourcissent  en  moyenne,  d'après  Cohn,  de  12p.  c. 
et,  suivant  Unger ,  même  de  26  p.  c.  :  ils  offrent  à  l'étude 
un  intérêt  particulier  parce  que  toutes  leurs  cellules  se 
contractent.  M  Pfeffer  et  d'autres  ont  constaté  aussi  une 
diminution  d'étendue  suivant  le  sens  longitudinal  sur  la 
partie  active  des  pulvinules  de  Sensitive  et  d'Oxalis  (2). 
Les  observations  de  M.  Heckel  sur  le  Berberis  sont  con- 
cordantes (3)  :  il  constate  dans  les  cellules  une  contraction 
d'un  sixième  de  la  longueur  et  même  des  plis  transver- 
saux sur  la  membrane,  a  Pendant  qu'il  se  raccourcit,  dit 
M.  Heckel,  le  filet  des  étamines  de  Berberis  augmente 
d'épaisseur  :  c'est  le  diamètre  antéro-postérieur  qui  aug- 
mente d'un  demi-millimètre  environ.  »  M.  Darwin  {/.  c, 
316)  a  mesuré  la  contraction  dans  le  sens  transversal  sur 
le  tissu  contractile  de  la  Dionée  ;  il  a  constaté  que  deux 
points  marqués  à  une  dislance  de  17/1000  de  pouce 
s'étaient  rapprochés,  après  l'irritation,  de  2/1000  de  pouce 
(0""'0o08);  il  a  mesuré  aussi  la  contraction  qui  se  produit 
sur  les  valves  mêmes  pendant  qu'elles  pressent  sur  le  bol 
alimentaire.  D'un  autre  côté,  M.  Balibur  s'est  assuré  que 
si  l'on  coupe  une  tranche,  qui  peut  être  assez  épaisse,  sur 
la  portion  inférieure  de  la  charnière,  le  mouvement  n'est 
point  enrayé. 


(1;  Cohn,  Contractile  Gewebe  in  Pftanzenreich,  1861. 

(2)  J.  Sachs  (Van  Tieghem! ,  pp.  1043  et  1044. 

(3)  ÉD  Heckel,  Du  mouvement  végétal,  1873. 


(  1079  ) 

En  général,  la  contraction  est  momentanée;  les  tissus 
reviennent  lentement  à  leur  état  normal  de  tension  quand 
Torgane  reprend  sa  position  de  repos.  Dans  la  plupart  des 
cas,  la  Scnsilive,  le  Berberis,  etc.,  l'action  du  tissu  mo- 
teur est  contre-balancée  et  secondée  par  un  autre  amas 
cellulaire  ordinairement  antagoniste  et  qui  agit  en  sens 
inverse  du  premier,  mais  avec  plus  de  lenteur  et  moins  de 
force;  parfois  ce  tissu  opposé  demeure  passif,  et  il  arrive 
aussi,  dans  les  vrilles  notamment,  que  l'état  contracté 
devienne  permanent  par  la  consolidation  de  l'organe  (1). 

Cobn  avait  comparé  les  cellules  contractiles  aux  fibres 
lisses  des  animaux.  Sans  atteindre  ce  degré  d'organisation, 
ces  cellules  manifestent  incontestablement  des  phéno- 
mènes plus  élevés  que  ceux  du  protoplasme  général.  Le 
docteur  Burdon  Sanderson  (2)  n'hésite  pas  à  reconnaître 
que  la  ressemblance  entre  la  contraction  d'un  muscle  et 
celle  de  la  Dionéeest  complète,  étonnante  et  d'autant  plus 
absolue  qu'on  la  poursuit  plus  loin.  On  sait  que,  pendant 
la  contraction  ,  le  volume  du  muscle  n'est  pas  modifié; 
ainsi  dans  les  insectes,  dont  on  peut  observer  les  contrac- 
tions sous  le  microscope  ,  on  voit  que  les  plus  petites  fibres 
participent  au  changement  de  forme. 

Déshydratalion.  —  Un  troisième  principe  qui  ressort 
des  observations  les  plus  récentes,  c'est  que  la  contrac- 
tion des  cellules  est  accompagnée  d'une  expulsion  d'eau. 
M.  Briicke  a  remarqué  la  (laccidité  de  Torgane  moteur  de 
la  Sensitive  pendant  la  contraction.  M.  Lindsay  a  constaté 
l'obscurcissement  de  ce  même  organe.  M.  Pfeffer  surtout 


(i  ;  De  Vries-  —  J.  Sachs  (Van  Tieghem^ ,  p.  1021. 

{%  Proc.  Rey.  Soc,  vol.  XXI,  p.  49o.  -  Nature,  4874,  pp.  105  et  127. 


(  1080  ) 

a  démonlré  l'expulsion  de  l'eau  à  chaque  contraction.  On 
en  a  conclu  à  une  déshydratation  de  la  cellule  active  : 
l'eau  passerait  dans  les  méats,  serait  transnoise  par  les 
vaisseaux  ou  recueillie  momentanément  par  les  tissus  voi- 
sins, de  préférence  par  ceux-là  mômes  qui  agissent  comme 
des  ressorts  antagonistes.  On  explique  le  retour  à  l'état  de 
tension  normale  par  la  récupération  lente  de  l'eau  brus- 
quement expulsée  au  moment  de  l'irritation. 

La  théorie  de  l'hydratation,  inaugurée,  pensons-nous, 
par  M.  Hofmeister,  soutenue  par  M.  Pfeffer,  est  fondée 
sur  des  faits  indubitables  et  bien  observés,  mais  il  n'est 
pas  moins  incontestable  que,  seule,  elle  est  insuffisante 
pour  expliquer  l'ensemble  des  faits  connus  :  elle  rattache 
les  mouvements  provoqués  aux  mouvements  généraux  qui 
sont  en  rapport  aeec  la  tension  des  tissus,  mais  elle  néglige 
précisément  les  caractères  propres  des  mouvements  pro- 
voqués. 

Tissu  passif,  —  Un  quatrième  principe  sur  lequel  il  ne 
saurait  plus  y  avoir  de  désaccord,  c'est  que,  dans  les  or- 
ganes motiles,  il  faut  distinguer  des  tissus  actifs  et  des 
tissus  passifs  :  sans  entrer  dans  des  détails,  il  semble  vrai 
de  dire,  en  thèse  générale,  que  l'organe  actif  est  le  tissu 
cellulaire,  tandis  que  les  faisceaux  et  l'épiderme  sont  à 
l'état  passif.  Ce  principe  s'étend  aux  végétaux  inférieurs 
chez  lesquels  la  différenciation  n'a  pas  eu  lieu  et  il  s'ac- 
corde avec  l'observation  que  les  dépendances  de  l'épi- 
derme, c'est  à-dire  les  vrais  poils,  sont  inactives. 

Propagation.  —  Quand  la  sensibilité  et  le  mouvement 
sont  confondus  dans  le  même  tissu,  l'irritation  reçue  par 
un  point  de  l'organe  se  propage  dans  tout  l'organe  con- 


(  1081  ) 

tractile.  Cette  propagation  rayonne  dans  tons  les  sens  ; 
ainsi,  si  l'on  irrite  un  point  sensible  du  pulvinule  de  la 
Sensilive,  on  voit  les  effets  de  la  contraction,  l'obscurcis- 
semeiil  causé  par  le  fUix  d'eau  dans  les  méats,  se  propager 
autour  du  point  touché  (1).  Le  muscle  interne  du  Berberis, 
les  filets  des  Centaurées,  le  stigmate  des  Mimules,  font 
voir  la  même  propagation  radiale. 

Transmission.  —  Quand  l'organe  sensitif  est  séparé  de 
l'organe  molile,  l'irritation  est  transmise  de  l'un  à  l'autre. 
Dans  la  Sensiiive,  où  la  sensibilité  existe  même  en  dehors 
du  tissu  contractile,  il  suffit  de  toucher  une  foliole  à  l'ex- 
trémité pour  qu'elle  se  relève  par  une  contraction  de  la 
base.  Chez  le  Drosera  une  irritation  sur  la  feuille  est  suivie 
d'une  (lexion  des  tentacules  marginaux.  Quant  à  la  Dionée , 
les  deux  facultés  sont  le  mieux  séparées.  Dans  tous  les 
cas,  la  transmission  se  fait  dans  le  sens  des  rayons  et 
selon  toutes  les  directions. 

En  effet,  il  suffît  de  toucher  un  des  six  filaments  tac- 
tiles pour  provoquer  la  fermeture  des  deux  lobes  et  l'abais- 
sement du  grillage  périphérique.  M.  Darwin  a  étudié  les 
principales  circonstances  de  la  transmission  par  des  expé- 
riences délicates  où  il  incisait  les  tissus  de  la  Dionée  entre 
le  palpe  et  la  charnière.  Il  ressort  de  ces  expériences, 
comme  des  faits  précités,  que  l'impulsion  motrice  circule 
dans  toutes  les  directions  et  qu'elle  peut  atteindre  l'organe 
moteur  par  une  voie  indirecte  ou  détournée. 

Communication.  —  Il  y  a  plus  encore  :  l'irritation  peut 
se  communiquer  d'un  organe  moteur  à  un  autre  organe 


(1)  Pfeffer.  -  Sachs  (V.  T.),  p.  1044. 

2""'    SÉRIE,    TOME    XL.  69 


(  108^2  ) 

moteur  :  ainsi,  dans  la  Sensitive,  une  irritation  suffisante 
se  transmet,  à  des  intervalles  déterminés,  d'une  foliole 
aux  autres  folioles,  à  toute  la  feuille  et  même  à  toutes  les 
feuilles  de  la  plante.  Les  circonstances  de  cette  communi- 
cation sont  des  plus  intéressantes.  Chez  les  Cynarées  le 
mouvement  d'une  étamine  peut  déterminer  le  mouvement 
des  autres  :  dans  les  stigmates  motiles  et  dans  la  Dionée, 
le  mouvement  d'une  valve  se  communique  ordinairement 
à  l'autre  valve.  Il  peut  en  être  autrement  :  ainsi ,  pendant 
les  expériences  de  vivisection  sur  la  transmission  du  sti- 
mulus moteur,  il  arrivait  que  le  lobe  opéré,  dont  on  exci- 
tait ensuite  le  palpe,  semblait  paralysé,  tandis  que  l'autre 
lobe  se  mettait  en  mouvement.  Quelquefois  c'est  le  con- 
traire qui  avait  lieu  (Darwin,  /.  c).  Il  en  résulte  que  le 
mouvement  est  indépendant  dans  chaque  lobe  de  la  Dionée 
et  qu'une  mutilation,  suffisante  pour  abolir  le  mouvement 
dans  un  lobe,  n'empêche  pas  la  transmission  du  stimulus, 
qui  va  exciter  le  mouvement  dans  le  lobe  opposé.  On  sait 
aussi  que  le  mouvement  peut  être  restreint  à  l'une  ou 
l'autre  extrémité  de  chaque  lobe. 

Organe  de  la  transmission. —  L'organe  de  la  transmis- 
sion paraît  être  encore  le  tissu  cellulaire,  quel  qu'il  soit, 
superficiel  ou  profond  et  qui  ne  se  distingue  par  aucun 
signe  anatomique  connu.  Notre  opinion  se  fonde  sur  des 
faits  probants.  Ainsi  les  papilles  sensitives  de  la  Dionée 
sont  exclusivement  cellulaires  (!)  :  il  suffit  d'effleurer  les 
poils  des  étamines  de  Cynarées  pour  mettre  celles-ci  en 
mouvement  (2);  de  même  dans  la  Mimeuse  pudique,  l'épi- 
derme  et  les  poils  des  bourrelets  reçoivent  et  conduisent 
l'irritation. 


(1)  Balfour  ,  Dajkwin. 
Ci)  Heckel.  p.  IU8. 


(  1083  ) 

Sans  doute  la  fréquence  des  trachées  dans  les  organes  des 
raouvemenls  provoqués,  leur  grand  nombre,  leur  réparti- 
tion, leur  structure  en  ressort,  le  rapport  entre  le  nombre 
des  trachées  et  l'énergie  du  mouvement  sont  des  considé- 
rations qui  peuvent  faire  naître  la  pensée  de  leur  attribuer 
un  rôle  dans  la  transmission  du  stimulus.  C'est  l'opinion  de 
M.  Heckel  (1)  et  de  M.  Ziegler  (2),  mais  elle  manque  de 
base  positive.  Elle  est  contredite  par  les  faits  précités  et, 
de  plus,  M.  Darwin  s'est  assuré,  par  ses  vivisections,  que, 
chez  la  Dionée,  la  transmission  est  tout  à  fait  indépen- 
dante des  trachées. 

Vitesse  de  transmission.  —  La  vitesse  de  transmission 
ou  le  temps  qui  s'écoule  entre  l'irritation  et  le  mouve- 
ment varie  suivant  les  espèces  et  jusqu'à  un  certain  point 
suivant  les  circonstances  et  l'état  de  la  plante.  II  est  très- 
court  dans  la  Dionée,  l'Épine-vinette,  les  Cynarées,  mais 
parfaitement  appréciable  :  il  varie  entre  une  et  plusieurs 
secondes  dans  la  Sensilive  et  dans  les  stigmates  de  la  série 
des  Scrophulariacées;  quant  aux  vrilles,  il  en  est  qui  se 
meuvent  après  trente  secondes  ou  quelques  minutes,  d'au- 
tres après  une  demi-heure  ou  plusieurs  heures.  Le  Drosera 
rotundifolia  est  assez  paresseux,  mais  le  Drosera  binata 
est  plus  vif  et  il  a  terminé  l'inflexion  des  tentacules  ordi- 
nairement en  deux  minutes  et  demie  après  l'irritation.  Il 
résulte  des  observations  connues  sur  le  Drosera  et  le 
Dionaea  que  la  transmission  est  plus  rapide  et  mieux  as- 
surée dans  le  sens  de  l'axe  principal  des  cellules.  Darwin 


(i)  Heckel,  p.  93. 

(2)  Ziegler,  Comptes  rendus,  48  mai  1874.  p.  1417. 


(  1084  ) 

voit  dans  ce  fait  un  indice  prémonitoire  d'une  fibre  ner- 
veuse (1). 

Énervation,  —  Jusqu'ici  l'observation  n'a  rien  révélé 
dans  les  tissus  irritables  qui  ressemble  au  tissu  nerveux  et 
rien  n'autorise  à  admettre  l'existence  d'une  substance  ner- 
veuse vaguement  répartie.  Cependant  il  se  passe  quelque 
chose  d'analogue  aux  fonctions  des  nerfs.  Outre  l'irritation, 
la  différenciation  des  impressions,  leur  transmission  et  le 
temps  qu'elle  réclame,  nous  pouvons  invoquer  une  vérita- 
ble énervation,  un  état  de  fatigue  qui  abolit  le  mouve- 
ment. Cet  état  bien  connu,  mais  mal  apprécié,  les  uns  (2) 
l'appellent  accoutumance,  les  autres  état  de  rigidité  tran- 
sitoire (3).  Il  consiste  dans  l'abolition  des  mouvements  à 
la  suite  d'excitations  réitérées.  L'observation  de  Desfon- 
taines sur  les  Sensitives  qu'il  a  fait  rouler  en  voilure  sur  le 
pavé  de  Paris,  est  devenue  classique  (4).  De  même  les  éta- 
mines  de  Berberis  semblent  épuisées  après  onze  ou  douze 
contractions  réitérées,  parfois  même  après  quatre  ou  cinq 
contractions,  si  l'on  n'attend  pas  la  fin  de  l'expansion 
(Heckel).  Après  une  digestion  laborieuse,  la  Dionée  de- 
meure pendant  quelques  jours  impassible  aux  excitations 
même  les  plus  appétissantes;  elle  semble  plongée  dans  un 
véritable  état  de  torpeur.  Appliquant  à  cet  ordre  de  faits 
un  des  raisonnements  à  l'aide  duquel  Tyndall  et  d'autres 
ont  popularisé  la  théorie  mécanique  de  la  chaleur,  nous 


:1)  La  durée  du  mouvement ,  sa   vitesse,  son  amplitude   et  la  durée  de  l'élaJ 
contracté,  pourraient  aussi  être  prises  en  considération. 
(2j  Heckel,  etc. 

(3)  Sachs  ,  etc. 

(4)  Voy.  Ch.  Morren,  Bull,  de  l'Acad.,  \iii\  ,  VIII .  2.  p.  232  et  Dodonœa, 
I,  14o. 


(  1085  ) 

croyons  pouvoir  conclure  que  quelque  chose  s'épuise  dans 
un  organe  irrilo-contractilc.  En  effet,  le  D*"  Burdon  San- 
derson  définit  Virrilabilité  la  propriété  d'un  organisme, 
c'est-à-dire  du  protoplasme  vivant,  d'être  excité  à  agir, 
c'est-à-dire  à  mettre  en  œuvre  la  force  accumulée  en  lui, 
par  quelque  mouvement  ou  quelque  changement  extérieur. 
Il  constate  que  la  contractilité  est  la  forme,  l'état  de  cette 
décharge,  ou  l'action  qui  se  manifeste  par  un  changement 
de  forme  et  qui  ordinairement  se  traduit  par  un  travail 
mécanique.  Il  compare  cette  irritabilité,  commune  à  tous 
les  êtres  vivants,  dans  ses  manifestations  les  plus  simples, 
à  la  propriété  des  composés  explosibles  et  à  certaines  dis- 
positions mécaniques,  telles  que  les  trappes  ou  les  pièges. 
On  peut  remarquer  que  dans  les  vrilles  la  sensibilité 
est  momentanée;  elle  disparaît  quand  ces  organes  sont 
fixés  et  quand  ils  vieillissent.  Elle  dépend  aussi  de  la  santé 
générale  de  la  plante;  de  sa  tonalité  à  l'égard  de  la  chaleur 
et  de  la  lumière.  C'est  ainsi  que  les  circonstances  fâcheuses 
qui  affectent,  suspendent  ou  abolissent  la  nutrition  géné- 
rale, comme  l'obscurité,  le  froid,  la  sécheresse,  intéres- 
sent en  même  temps  la  sensibilité.  On  possède  un  grand 
nombre  de  données  sur  l'influence  de  diverses  substances 
chimiques  (1).  Il  en  est  qui  semblent  la  surexciter,  comme 
le  camphre  à  l'égard  des  tentacules  du  Drosera  :  un  éclai- 
rage prolongé  agit  souvent  dans  le  même  sens»  Il  n'est  pas 
inopportun  d'ajouter  encore  que  ces  mouvements  résis- 
tent au  traumatisme;  les  étamines  des  Cynarées  et  des 
Berberis,  les  stigmates  de  Mimulus,  les  feuilles  de  Dionée, 
les  pulvinules  des  Mimosa  ne  cessent  pas  d'être  irritables 
après  avoir  été  détachés  et  même  lacères,  pourvu  qu'on  les 

(1)  Sachs,  p.  1037.  —  Heckel. 


(  1086  ) 

maintienne  à  l'état  d'humidité  nécessaire.  Au  contraire, 
dans  les  gaz  asphyxiants,  l'hydrogène  ou  l'azote,  dans  le 
vide,  la  motilité  est  abolie  ou  au  moins  suspendue. 

Anesthésie.  —  L'action  des  anesthésiques  est  la  plus 
intéressante  :  les  vapeurs  de  chloroforme  paralysent  la 
Sensitive  dans  la  position  même  où  ils  la  trouvent,  c'est-à- 
dire  avec  les  folioles  étalées  ou  relevées.  M.  P.  Bert  (1)  a 
fait  cette  importante  observation  que  le  chloroforme  ou 
réther  abolit  l'irritabilité  de  la  Sensitive,  sans  affecter  en 
elle  les  mouvements  spontanés.  Le  résultat  est  le  même 
quand  la  plante  est  soumise  à  une  obscurité  absolue  et 
suffisamment  prolongée,  tandis  qu'un  éclairage  continu 
augmente  l'irritabilité  et  abolit  les  mouvements  spontanés. 
D'après  Pfeffer  (2)  on  peut,  par  un  anesthésique,  paralyser 
les  folioles  médianes  d'une  feuille  de  Sensitive,  sans  em- 
pêcher l'irritation  de  passer  des  folioles  terminales  jusqu'à 
la  base  de  la  feuille  et  de  là  aux  feuilles  voisines. 

M.  Heckel  a  observé  l'action  des  anesthésiques  sur  les 
étaniines  de  Berberis  :  il  a  vu  agir  dans  ce  sens  le  chloro- 
forme, l'éther  sulfurique  et  le  sulfure  de  carbone  :  il  dit 
avoir  obtenu  un  sommeil  manifeste  sur  des  rameaux  plon- 
gés dans  40  grammes  d'eau  additionnés  de  5  grammes  de 
chloroforme  (3),  tandis  que  le  chloral  hydraté  agirait  seu- 
lement s'il  est  transformé  en  chloroforme  par  l'action  de 
la  soude.  Mais  chez  cette  plante  l'aneslhésie  des  étamines 
ne  se  manifeste  que  dans  la  position  de  repos.  Si  les  va- 


(1)  p.  Bert,  Recherches  sur  les  mouvements  de  la  Sensitive,  Journ.  d'Anat. 
de  Ch.  Robin ,  1867 ,  p.  549. 

(2)  \V.  Pfeffer,  Dieperiod.  Beweg.  der  Blattorgane,  1875. 

(3)  Comptes  rendus.  23  mars  1874. 


(  1087  ) 

peurs  de  chloroforme  les  trouvent  dressées  contre  le  pistil, 
elles  s'abaissent  lentement  et  quand  elles  se  couchent  sur 
leur  pétale  opposé,  on  les  trouve  endormies  :  les  irrita- 
tions sont  sans  effet  jusqu'à  ce  que  ce  sommeil  léthargique 
soit  dissipé.  On  peut  de  même  endormir  l'androcée  des 
Cynarées  et  le  stigmite  des  Mimulus.  Les  expériences  de 
M.  Darwin  sur  le  Drosera  et  sur  la  Dionée  n'ont  pas  donné 
de  résultats  concluants  (1)  :  l'action  de  l'éther  a  paru  plus 
efficace  que  celle  du  chloroforme.  On  sait  que  ces  sub- 
stances abolissent  les  mouvements  du  protoplasme  et  des 
cils  vibraliles.  M.  Mussat  (2)  a  décrit  la  contraction  du 
plasmode  cellulaire  au  contact  du  chloral  hydraté. 

Chlorhydrate  de  morphine.  —  M.  Heckel  (3)  a  eu  l'ingé- 
nieuse idée  d'expérimenter  l'effet  du  chlorhydrate  de  mor- 
phine sur  une  fleur  de  Berberis  endormie  par  le  chloro- 
forme :  il  laissait  tomber  dans  cette  fleur  une  goutte  de 
solution  aqueuse  concentrée ,  soit  un  demi-milligramme  de 
narcotique  et,  quand  l'absorption  avait  pu  se  faire  à  la 
suite  de  quelques  entailles  dans  l'épiderme,  l'assoupisse- 
ment se  prolongea,  paraît-il,  pendant  quinze  minutes  et 
même  durant  tout  un  jour. 

Curare.  —  Nous  connaissons  une  seule  expérience  pour 
apprécier  l'action  du  curare  sur  les  mouvements  provo- 
qués (4)  :  cet  agent  serait  sans  effet.  M.  Schnetzler,  qui  en 


(1)  Darwin,  /.  c.,217,  304. 

'%  bail,  de  la  Soc.  Linnéenne  de  Paris;  mars  1874. 

(8)  E.  Heckel,  Comptes  rendus,  6  avril  d874,  p.  987  et  du  Mouvement  végé- 
/«/,  187o,p.  70. 

(4)  SCHNETZLER,  Bull.de  la  Soc.  Vaud.  des  sciences  nat.,  X.  d'après  le  Bull- 
Soc  bot.  France,  1869,  XVI.  R.  B.  214. 


(  i088  ) 

est  l'auteur,  fait  justement  remarquer  que  le  curare  ne  dé- 
truit pas  non  plus  la  contraclilité  ni  le  mouvement  du  sar- 
code  animal. 

Action  de  Véleclricilé.  —  L'action  de  l'électricité  sur  les 
mouvements  des  plantes  a  pu  être  appréciée  depuis  les 
perfectionnements  apportés  dans  la  fabrication  des  appa- 
reils à  induction  (1).  En  se  servant  des  courants  induits 
donnés  par  la  pile  de  Ruhmkorff ,  au  bisulfate  de  mercure, 
M.  Heckel  a  constaté  qu'un  courant  faible  (26  à  29"  de 
l'électromètre)  provoque  la  contraction  des  étamines  de 
Berberis  et  que  a  pendant  tout  le  temps  que  passe  le  cou- 
rant, le  filet  ne  tend  pas  à  retourner  à  sa  position  de  re- 
pos; il  reste  en  contraction,  et  cet  état  peut  durer  long- 
temps ,  tant  que  la  tension  du  courant  n'augmente 
pas  (2)  ».  Par  un  courant  plus  fort  (65°)  le  mouvement  ne 
se  produit  plus,  mais,  dit  M. Heckel, comme  Kabsch  l'avait 
vu,  l'excès  de  tension  du  courant  détermine  un  état  par- 
ticulier qui  maintient  les  étamines  courbées  après  la  perte 
de  leur  irritabilité  et  les  frappe  de  mort  dans  cet  état. 

Le  résultat  fut  le  même  sur  les  étamines  de  Centau- 
rées (5)  :  le  mouvement  se  produit  par  un  courant  et  la 
contraction  se  maintient  tant  que  le  courant  passe  «  sans 
avoir  la  moindre  tendance  à  revenir  à  leur  situation  pre- 
mière, tant  que  la  tension  de  l'électricité  ne  dépasse  pas 
une  certaine  limite.  Il  faut  absolument  que  le  courant  soit 
interrompu  pour  que  l'étamine  puisse  reprendre  sa  force 
contractile,  et  cette  propriété  se  reconquiert  après  six  à 


[\)  Heckel,  Mouvemeut ,  pp.  56,  57. 

(2)  Id.,  ib.,  p.  59. 

(3)  id.,  ib.,  p.  147. 


(  i089  ) 

huit  minutes  de  repos.  Ce  laps  de  temps  écoulé,  un  nou- 
veau courant  détermine  une  nouvelle  contraction  et  Ton 
peut  reproduire  ce  phénomène  très-longtemps  si  l'intensité 
du  courant  n'augmente  pas  inopinément,  et  ne  dépasse  pas 
la  limite  de  tension  supportée  par  ces  organes.  Nous  avons 
continué  sur  un  grand  nombre  d'étamines  l'expérience 
pendant  un  jour  tout  entier,  sans  jamais  avoir  observé  de 
diminution  dans  l'amplitude  des  mouvements.  En  augmen- 
tant la  puissance  du  courant  jusqu'à  80°  du  galvanomètre, 
nous  avons  obtenu  le  disparition  de  l'irritabilité  après  une 
seule  contraction,  même  sur  les  plus  gros  filets.  Dans  ce 
cas,  ces  filets  meurent  dans  la  période  de  contraction.  » 

En  ce  qui  concerne  la  Sensitive,  un  faible  courant  d'in- 
duction, traversant  le  pétiole  commun,  rapproche  les 
folioles.  Les  chocs  électriques  agissent  comme  les  ébran- 
lements mécaniques  et  des  chocs  puissants  anéantissent  la 
sensibilité  (1). 

Thermo-électricité.  —  Des  manifestations  thermo-élec- 
triques ont  été  constatées  dans  les  organes  moteurs.  Si 
l'on  applique  une  soudure  de  l'appareil  thermo-électrique 
de  Ruhmkorff  sur  le  pulvinule  d'une  Sensitive  et  l'autre 
soudure  sur  un  point  voisin  de  la  tige,  on  voit  l'aiguille  du 
galvanomètre  à  gros  fil,  avec  lequel  les  éléments  commu- 
niquent, dévier  progressivement  et  assez  rapidement  pour 
prendre,  après  quelques  minutes,  une  position  d'équilibre. 
Le  pulvinule  est  donc  plus  froid  que  la  tige,  il  s'y  opère 
une  consommation  de  chaleur. 

Si  l'on  excite  alors  la  feuille  et  qu'elle  s'abaisse,  on  voit, 


(i)  p.  Bert,  /.  c. 


(  i090  ) 

après  quelques  secondes,  l'aiguille  du  galvanomètre  se 
mouvoir  et  indiquer  une  légère  augmentation  dans  la  tem- 
pérature du  pulvinule  :  cette  déviation  persiste  quelque 
temps,  puis  l'aiguille  revient  à  son  point  de  départ  (1). 

Courant  électrique.  —  Nous  arrivons  enfin  à  la  décou- 
verte d'un  courant  électrique  normal  dans  la  feuille  de 
Dionée  par  le  D""  Sanderson  (2)  et  de  sa  perturbation  au 
moment  d'une  irritation  ou  d'une  contraction,  découverte 
qui  semble  autoriser  l'assimilation  physiologique  de  Tappa- 
reil  molile  des  plantes  avec  un  muscle  animal. 

On  sait  qu'un  muscle  est  le  siège  de  décompositions  chi- 
miques qui  mettent  en  liberté  la  force  accumulée  dans  ses 
composés,  à  Tétat  de  chaleur  ou  de  quelque  autre  forme 
de  mouvement  :  pendant  la  contraction,  il  se  produit  plus 
de  chaleur  et  même  un  travail  mécanique.  En  même 
temps  le  muscle  est  le  siège  d'un  courant  électrique  dont 
l'importance  est  proportionnelle  à  sa  vigueur  :  ce  change- 
ment électrique  manifesté  par  le  courant  exprime  non  pas 
le  travail  actuellement  fournie  un  moment  donné,  mais  la 
capacité  pour  ce  travail.  Pendant  la  contraction ,  la  mani- 
festation delà  force électroraotrice  diminue  proportionnel- 
lement au  degré  de  la  contraction  sans  qu'on  en  puisse 
conclure  qu'il  y  ait  transformation  d'un  effet  dans  un 
autre,  ni  que  la  source  de  force  exercée  par  l'organe  qui 


(1)  p.  Bert,  Note  sur  la  température  comparée  de  ta  tige  et  du  renflemeni 
moteur  de  la  Sensitive.  Comptes  rendus,  4869,  LXIX,  p.  895. 

(2)  Dr  BuRDON  Sandkrson.  Brit.  Assoc.  Report,  1878.  Traus.  Sect.,  p.  133.  Ou 
the  electric  Phenomena  accoiupagniug  tlie  contraction  of  the  Cup  oJ'Dionaea  ; 
Proceedings  of  the  Roy.  Soc,  vol.  XXI,  p.  495.  Lecture  at  the  Roy.  Institution, 
5  juin  1874.  .\ature,  -1874.  pp.  105  et  127.  The  Journal  of  Boiany ,  ïiO\.  \S1S, 
p.  346.  Bot.  Zeii.  1874,  p.  6.  Bull.  Soc.  bot.  de  France,  1874,  R.  B..  p.  146.  etc. 


(  iOî)l  ) 

se  contracte  soit  électrique.  On  sait  que  le  courant  élec- 
trique d'un  muscle  peut  être  apprécié  à  Taide  d'un  galva- 
nomètre approprié  qui  en  révèle  la  direction,  l'intensité  et 
les  variations.  En  se  servant  du  galvanomètre  de  Thomson 
(système  de  Du  Bois  Raymond),  M.  le  D''Sanderson  a,  dans 
une  séance  publique  de  la  Roj/al  Institution,  fait  voir  à  son 
auditoire  émerveillé  absolument  les  mômes  phénomènes 
dans  le  muscle  gaslrocnémicn  de  la  grenouille  et  dans  une 
iéuille  de  Dionée.  Après  avoir  déterminé  le  sens  et  l'inten- 
sité du  courant  galvanique  dans  le  muscle,  il  le  remplaça 
sur  les  deux  électrodes  par  une  feuille  complète,  et  la 
direction  du  courant  demeura  la  même.  Lorsque  son  in- 
tensité parut  régulière  (comme  on  s'en  apercevait  par  la 
tranquillité  de  l'aiguille),  on  toucha  légèrement  un  des 
tentacules  sensitifs  avec  la  pointe  d'un  pinceau  et,  à  l'in- 
stant, il  y  eut  une  interruption  du  courant,  bientôt  suivie 
d'un  retour  à  la  circulation  normale.  L'expérience  plu- 
sieurs fois  renouvelée  donna  toujours  le  même  résultat. 

La  partie  de  la  feuille  qu'on  appelle  le  pétiole  fut  alors 
coupée,  le  piège  demeurant  seul  sur  les  électrodes.  Dès  lors 
la  déclinaison  de  l'aiguille  fut  augmentée,  plus  que  dou- 
blée. En  effet,  d'autres  expériences  ont  montré  qu'il  existe 
dans  le  pétiole  un  courant  dirigé  en  sens  inverse  de  celui 
du  piège  :  les  conditions  électriques  sont  donc  en  antago- 
nisme dans  les  deux  parties  de  la  feuille,  de  part  et  d'autre 
de  l'articulation  :  elîes  contrarient  mutuellement  la  mani- 
festation de  la  force  électromotrice  l'une  chez  l'autre.  Le 
docteur  Sanderson  rapproche  cette  observation  de  celle 
connue  chez  les  nerfs  comme  «  variation  électrotonique 
du  courant  nerveux.  »  D'autres  expériences  l'ont  conduit  à 
reconnaître  aussi  ce  qu'on  appelle  pour  les  muscles  «  la 
période  d'excitation  latente.  i> 


(  109:2  ) 

Conséquences.  —  Le  doule  est-il  encore  permis?  Est-il 
encore  possible  de  croire  que  les  végétaux  sont  des  êtres 
passifs,  bornés,  comme  on  disait,  dans  les  limites  de  la  vie 
végétative  :  sont-ils  les  jouets  des  forces  cosmiques! 

Il  faut  reconnaître  d'ailleurs  que  la  Dionée  est  peut-être 
la  plante  la  plus  merveilleuse  qui  soit  au  monde  :  son  or- 
ganisation téléologique  est  admirable  et  la  différenciation 
des  fonctions  atteint  le  plus  baut  degré  de  perfection.  Elle 
est  si  bien  perfectionnée  dans  cette  voie  qu'elle  est  plus 
que  toute  autre  peut-être  élevée  en  organisation  dans  le 
sens  zoologique.  Mais  elle  n'est  pas  seule  ni  exception- 
nelle; ce  qui  s'est  révélé  cbez  elle  se  manifeste  aussi,  sous 
l'une  ou  l'autre  forme,  dans  d'autres  plantes.  Les  aptitudes 
dont  elles  sont  douées  ne  sont  pas  toutes  développées,soit 
parce  que  celles  qu'elles  ont  suffisent  pour  assurer  leur 
existence  et  leur  progéniture,  soit  parce  que  les  circon- 
stances extérieures  les  en  aient  empêchées  :  la  motilité  des 
feuilles,  par  exemple,  et  la  nutation  des  tiges  existent  à 
tous  les  degrés  dans  les  plantes,  même  à  un  degré  si  faible 
qu'il  demeure  seulement  à  l'état  de  puissance. 

Mouvements  instinctifs.  —  Nous  avons  été  conduit  au 
point  où  nous  sommes  arrivé  en  étudiant  les  mouvements 
provoqués.  Il  en  est  d'autres  qui  leur  sont  supérieurs, qu'on 
a  tort  de  confondre  avec  les  mouvements  automatiques; 
ce  sont  des  mouvements  tellement  invétérés  qu'ils  sont 
devenus  involontaires  et  spontanés  :  pour  ces  mouvements- 
là  l'irritation  semble  réellement  provenir  de  l'organisme 
lui-même  :  ils  sont  si  étroitement  liés  à  la  sécurité,  aux 
habitudes  et  aux  exigences  de  ceux  qui  les  manifestent 
qu'ils  sont  devenus  instinctifs.  On  en  trouve  à  tous  les 
degrés  de  l'échelle  taxinomique. 


(  1095  ) 

Zoospores.  —  Cciiaincs  Algues  se  propagent  au  moyen 
de  cellules  qui  s'en  séparent,  s'en  éloignent  avec  toutes  les 
apparences  de  petits  animaux  :  on  les  nomme  des  zoo- 
spores. On  sait  depuis  peu  que  les  zoospores  ou  les  micro- 
zoospores  emportent  parfois  avec  elles  toutes  les  espé- 
rances de  la  plante  et  qu'elles  vont,  loin  des  lieux  où  elles 
sont  nées,  assurer  l'existence  de  leur  progéniture.  Dans 
cette  occurrence,  elles  manilestent  une  étrange  anima- 
tion (1).  La  botanique  est  intarissable  en  faits  de  ce  genre 
dont  la  forme  varie  à  l'infini  et  dont  le  fond  est  toujours 
le  même  :  la  lutte  pour  l'existence. 

Ces  sortes  de  mouvements  tiennent  peut-être  de  trop 
près  à  l'essence  même  de  l'organisation  :  on  pourrait  croire 
qu'ils  sont  obligatoires.  Mais  nous  pouvons  soutenir  la 
thèse  des  mouvements  instinctifs  chez  les  plantes  à  l'aide 
d'arguments  irréfutables. 

Lianes.  —  Les  Lianes,  par  exemple,  même  celles  de  nos 
pays,  trop  faibles  pour  soutenir  leurs  tiges,  savent,  en  s'en- 
laçant  autour  d'un  support,  en  se  soutenant  à  l'aide  de 
vrilles  ou  en  s'appliquant  contre  une  paroi  verticale, 
s'élever  à  une  grande  hauteur  pour  procurer  à  leur  feuil- 
lage l'air  et  la  lumière  dont  il  est  avide.  Lorsqu'elles  ont 
atteint  leur  but,  elles  perdent  quelquefois  la  qualité  qui 
les  y  avait  conduits  :  le  Lierre,  par  exemple,  dont  on  a  fait 
l'emblème  de  l'attachement,  quand  il  est  arrivé  assez  haut 
et  qu'il  se  sent  fort, change  d'allure  et  s'éloigne  du  soutien 


(1)  Areschoug,  Observationes  Phytologicae,  in  Act.  Soc.  Se.  Ups.  -1804, d'après 
W.-T.  Thiselton  Dyer,  On  the  classification  and  sexual  reproduction  of  Thal- 
lophytes, iSm. 


(  1094  ) 

de  sa  jeunesse.  Un  vieux  lierre  est  le  symbole  de  l'ingrati- 
tude, mais  sa  vie  n'est  pas  sans  ressembler  à  d'autres! 

Lorsque  la  tige  d'un  Houblon,  d'un  Chèvrefeuille,  ou 
d'une  autre  liane  volubile,  sort  de  terre,  au  printemps,  on 
peut  la  voir,  l'extrémité  courbée  en  crochet,  tourner  lente- 
ment vers  les  points  de  l'horizon,  comme  un  aveugle  cher- 
chant à  tâtons  le  mur  qui  doit  le  guider.  Cette  nutation, 
indépendante  de  la  lumière,  s'accomplit  jour  et  nuit,  et  ne 
cesse  qu'au  contact  d'un  corps  solide:  dès  qu'elle  a  trouvé 
son  soutien,  sur  la  nature  duquel  elle  se  montre  plus  ou 
moins  exigeante,  la  liane  se  tord  en  spirale  tout  en  s'ac- 
croissant  avec  une  extrême  rapidité. 

Les  mouvements  spontanés  des  vrilles  sont  encore  plus 
étonnants  que  ceux  des  tiges  :  elles  aussi  cherchent  en  tâ- 
tonnant le  support  auquel  elles  peuvent  se  fixer,  mais  avec 
celte  seule  et  singulière  exception  qu'une  vrille  s'enroule 
rarement  autour  d'une  autre  vrille  de  la  même  plante  : 
leur  sensibilité  estexquise,  leurs  mouvements  très-rapides; 
elles  se  déplacent  quand  le  support  ne  leur  convient  pas, 
pour  en  chercher  un  autre  plus  propice;  enfin,  quand  elles 
l'ont  rencontré,  les  unes,  comme  celles  de  la  Bryone, s'en- 
roulent prestement  par  leur  extrémité,  les  autres,  comme 
celles  de  la  Vigne  vierge,  se  fixent  au  moyen  de  disques 
ressemblant  beaucoup  aux  ventouses  des  pieds  de  la 
mouche  domestique  qui  lui  permettent  de  s'attacher  aux 
vitres  et  de  marcher  contre  le  plafond  :  toutes  deux,  dès 
qu'elles  sont  ainsi  fixées,  de  raides  qu'elles  étaient,  se  tor- 
dent en  hélice,  par  une  sorte  de  mouvement  secondaire, 
de  manière  à  se  tendre  et  à  rapprocher  la  tige  à  laquelle 
elles  prêtent  leur  secours.  Il  en  est  qui  semblent  confor- 
mées comme  le  pied  d'un  oiseau  :  il  faut  lire  dans  fadmi- 


(  J095  ) 

rable  ouvrage  de  M.  Darwin  les  phénomènes  merveilleux 
que  les  plantes  sarmenleuses  ont  révélés  à  cet  habile  et 
perspicace  observateur  (1). 

D'un  autre  côté,  M.  Paul  Lévy  rapporte  (2)  que  dans  les 
forets  de  la  Guyane,  les  Lianes  ont  de  l'affinité  pour  cer- 
tains arbres  qu'elles  recherchent  avec  affectation  en  évi- 
tant d'autres  arbres  plus  proches.  On  les  voit  s'écarter  soi- 
gneusement lorsqu'elles  rencontrent  sur  leur  route  de  ces 
arbres  ennemis,  a  II  y  a,  dit  M.  Paul  Lévy, un  Ficus  nommé 
Malapalo  (Tue-Bois)  qui  enveloppe  de  ses  bras  les  arbres 
les  plus  robustes  et  finit  par  les  faire  périr.  Lorsque  l'arbre 
avant  l'arrivée  du  Matapalo  avait  des  lianes  qui  l'enser- 
raient, rien  n'est  curieux  comme  de  constater  les  efforts 
que  la  liane  fait  pour  se  dégager  et  fuir  l'ennemi  mortel 
avant  qu'il  grandisse  assez  pour  le  faire  périr.  C'est  dans 
ce  cas  qu'on  rencontre  les  formes  de  lianes  les  plus  tour- 
mentées. D 

Conclusion.  —  C'est  pour  se  faire  une  place  au  soleil 
que  les  lianes  agissent  ainsi,  pour  s'abriter,  pour  se  nour- 
rir, pour  se  propager,  pour  se  défendre  ,  pour  se  déplacer, 
que  d'autres  végétaux  déploient  autant  d'activité.  Le  mou- 
vement est  général  et  universel.  A  travers  les  courbes  de 
l'univers  et  les  méandres  de  la  nature, on  voit  bien  la  ligne 
droite  qui  mène  de  la  matière  à  l'intelligence.  Le  but  est 
évident;  la  cause  est  dans  la  grande  lutte  pour  l'existence, 
le  moyen  est  dans  les  aptitudes  latentes  et  lentement  dé- 
veloppées. 


(1)  Darwin,  The  Movemcnts  and  Habits  of  Climbing  Plants,  1875. 
[%  Bull,  de  la  Soc.  bot.  de  France,  1869,  p.  279. 


(  1096  ) 

Les  faits  que  nous  venons  de  rapporter  sont  assez  im- 
portants pour  que  chacun  puisse  en  apprécier  les  déduc- 
tions et  en  discuter  la  valeur.  Quant  à  nous,  nous  termi- 
nerons simplement  par  un  hommage  à  la  science  anglaise 
dont  le  génie  pratique  et  lucide  a  su ,  dans  ces  derniers 
temps,  jeter  une  vive  clarté  sur  les  problèmes  les  plus 
obscurs  des  sciences  naturelles. 

M.  le  secrétaire  perpétuel  a  proclamé,  de  la  manière 
suivante,  les  résultats  du  concours  annuel  de  la  classe  et 
des  élections  : 

RÉSULTAT    DU    CONCOURS    DE    LA    CLASSE    POUR    1875. 

La  classe  avait  reçu  deux  mémoires  en  réponse  à  la 
question  :  On  demande  la  description  du  système  houiller 
du  bassin  de  Liège. 

Le  premier  porte  pour  devise  :  Omnia  vincit  labor  im- 
probus;  le  second  les  mots  :  La  science  n'est  pas  œuvre 
d'imagination,  mais  d'observation,  de  calcul  etde  réflexion. 

Conformément  aux  conclusions  de  ses  commissaires,  la 
classe,  dans  sa  séance  du  Jo  décembre,  a  voté  une  mé- 
daille d'argent  à  chacun  des  deux  auteurs;  elle  a  décidé, 
en  outre,  que  la  somme  de  i,000  francs,  affectée  comme 
récompense  à  la  solution  de  la  question  proposée,  serait 
répartie  entre  les  deux  concurrents  dans  la  proportion  de 
600  francs  i)Our  l'auteur  du  mémoire  n"  1  et  de 400  francs 
pour  Fauteur  du  mémoire  n°  2. 

L'ouverture  des  billets  cachetés  a  fait  connaître  comme 


(  1097  ) 

auteur  du  n°  i ,  M.  J.  Rénier  Malherbe,  ingénieur  des  mines 
à  Liège,  et  comme  auteur  du  n°  2,  M.  Julien  de  Macar, 
ingénieur  des  mines,  directeur-gérant  des  charbonnages 
de  Cheratte,  près  de  Liège. 

MM.  Malherbe  et  de  Macar,  présents  à  la  séance,  sont 
venus  recevoir  la  récompense  qu'ils  venaient  de  remporter. 

L'assemblée  a  accueilli  cette  décision  par  ses  applaudis- 
sements. 


ÉLECTIONS. 

La  classe  a  eu  le  regret  de  perdre,  le  15  janvier  dernier, 
son  doyen  d'âge,  l'un  de  ses  membres  les  plus  éminents, 
M.  J.-B.-J.  d'Omalius  d'Halloy,  appartenante  la  section 
(tes  sciences  naturelles. 

M.  F.  Crépin,  correspondant,  a  été  appelé,  par  les  suf- 
frages de  ses  confrères,  à  remplacer  M.  d'Omalius.  Cette 
élection  sera  soumise  à  l'approbation  de  Sa  Majesté. 

La  classe  a  élu  associé  dans  la  même  section  M.  Henri 
Von  Dechen,  conseiller  intime,  à  Bonn,  en  remplacement 
de  Sir  Charles  Lyell,  décédé  pendant  le  courant  de  l'année. 

Elle  a  également  élu  associés  dans  la  section  des  sciences 
mathématiques  MM.  Rodolphe  Clausius,  professeur  à 
l'Université  de  Bonn,  E.  Chevreul,  de  l'Académie  des 
sciences  de  Paris,  et  Buys-Ballot,  directeur  de  l'Institut 
météorologique  d'Utrecht,  en  remplacement  de  MM.  Ar- 
gelander,  Lamarle  et  Van  Rees,  décèdes  pendant  l'année 
actuelle. 

Enfin ,  M.  G.  Van  der  Mensbrugghe,  professeur  à  l'Uni- 

2™'    SÉRIE,   tome    XL.  70 


(  i098  ) 

versité  de  Gand ,  a  été  appelé  au  nombre  des  correspon- 
dants de  la  section  des  sciences  mathématiques  et  physiques 
et  M.  Alfred  Gilkinet,  docteur  en  sciences  naturelles,  au 
nombre  de  ceux  de  la  section  des  sciences  naturelles. 


OUVRAGES  PRÉSENTÉS. 


Académie  royale  de  Belgique.  Commission  royale  d'his- 
toire. —  Compte  rendu  des  séances,  4"  série,  t.  III,  i"  Bulle- 
tin. Bruxelles,  1876;  in-8°. 

Va?i  Beneden  {Éd.).  —  La  maturation  de  l'œuf,  la  féconda- 
lion  et  les  premières  phases  du  développement  embryonnaire 
des  mammifères ,  d'après  des  recherches  faites  chez  le  lapin. 
Bruxelles,  1875;  br.  in-8°. 

Ministère  de  l'Intérieur.  —  Médaille  commémorative  :  i"de 
l'inauguration  de  la  statue  équestre  érigée  par  la  ville  et  le 
commerce  d'Anvers  en  l'honneur  de  feu  S.  M.  Léopold  l" 
(Cil.  Wiener)  ;  i2°  de  la  visite  de  la  Famille  royale  à  Anvers,  à  l'oc- 
casion de  la  démolition  de  la  citadelle  du  Sud  (F.  Baetes)  ;  5*'  du 
mariage  de  S.  A.  R.  M'"'=  la  princesse  Louise  avec  S.  A.  M^""  le 
(lue  Philippe  de  Saxe  [Ed.  Geerts).  —  5  médailles  de  bronze. 

Canneel  (J.-Th.).  —  Explication  des  sujets  représentés 
dans  les  peintures  murales  exécutées  dans  l'église  paroissiale 
de  Sainte-Anne.  —  Explication  des  peintures  murales  de 
l'église  de  Burst.  Gand  ,  1874,  1875;  2  br.  in-8". 


(  1099  ) 

Dubois  [Alph.].  —  Les  Ié[)idoptcrcs  de  l'Europe,  leurs  che- 
nilles et  leurs  chrysalides  décrits  et  figurés  d'après  nature  : 
\"  série,  espèces  observées  en  Belgique,  liv.  67  à  78.  Bruxelles, 
1874-1875;  12  liv.  in-8». 

Godcfroy  MénUgtaise  [Le  marquis  de).  —Traduction  fran- 
çaise avec  annotations,  variantes,  glossaire  et  index  delà 
Chronique  de  Ilainaut  rédigée  par  Gilbert,  Chancelier  du 
comte  de  Ilainaut  Bauduin  V  (1040-4195).  Tomes  14  et  15 
des  mémoires  de  la  Société  historique  et  littéraire  de  Tournai. 
—  Tournai,  1874;  2  vol.  in-8°. 

Harlez  (C.  de).  —  Avesta.  Livre  sacré  des  sectateurs  de 
Zoroastre  traduit  du  texte,  tome  L  Introduction.  —  Ven- 
dîdàd.  Liège,  1875;  vol.  in-8°. 

Heuschling  (Xaviei-).  —  Recherches  statistiques  sur  les 
périodes  de  doublement  de  la  population.  Liège,  1873;  br. 
in-8°. 

Journal  Franklin.  —  Biographie  d'Omalius  d'Halloy. 
Liège;  extrait  in-12. 

Potvin  {Ch.).  —  De  la  littérature  française  en  Belgique 
(Article  de  la  Revue  de  France,  5'"'=  année,  1875,  t.  XIV, 
n°'  42,  45,  44.  Paris;  5  liv.  in-8").  —  Les  Publications  belges 
(Bibliographie.  Article  de  la  Revue  Britannique,  n"'  de  dé- 
cembre 1874  et  de  juin  1875.  Bruxelles;  liv.  et  feuilles  déta- 
chées m-S".) 

Van  Baamdonck  {D''  J .).  —  Les  sphères  terrestre  et  céleste 
de  Gérard  Mcrcaior  (1541  et  1551).  S'-Nicolas,  1875;  br.  pet. 
in-4°. 

Reproduction  de  ces  sphères  à  l'aide  du  fac-simile  de  leurs 
fuseaux  originaux,  gravés  par  iMercator  et  conservés  à  la 
Bibliothèque  royale  de  Bruxelles.  Bruxelles,  1875;  atlas  in-fol. 

Verstraete  [Ch.  G.- P.).  —  De  l'éducation  des  sourds-muets 
en  Belgique.  Gand  ,  1875;  br.  in-8°. 

Académie  royale   de  médecine   de  Belgique.  —  Bulletin, 


(  liOO  ) 

D"*"  série,  année  1875,  tome  IX,  n"»  10  et  H.  Bruxelles,  i875; 
in-8». 

Société  royale  des  sciences  médicales  et  naturelles  de 
Bruxelles.  —  Journal,  CI™*  vol.,  55™*  année,  octobre,  no- 
vembre et  décembre  1875.  Bruxelles;  5  liv.  in-8°. 

Société  royale  de  pharmacie  de  Bruxelles.  —  Bulletin , 
19™*  année,  novembre  et  décembre  1875,  n°'  11  et  12. 
Bruxelles;  in-8°. 

A7inales  de  médecine  vétérinaire,  11™*  et  12™*  cahiers, 
24™*  année,  novembre  et  décembre  1875.  Bruxelles;  in-8°. 

La  Presse  médicale  belge ,  27™*  année,  1875,  n*"*  44  à  52; 
28™*  année,  1876,  n"  1  à  4.  Bruxelles;  15  feuilles  in-4". 

Annales  d'oculistigvc ,  11™*  série,  tome  IV,  5™*  et  G™*  liv., 
novembre  et  décembre  1875.  Bruxelles;  liv.  in-8°. 

Société  royale  de  numismatique  de  Belgique,  à  Bruxelles. 
—  Revue  belge  de  numismatique,  52™*  année  1876  ,  1"  liv; 
Bruxelles;  in-S". 

Commissions  royales  dart  et  d'archéologie.  —  Bulletin, 
XIV™*  année,  1875,  n°^  7  et  8.  Bruxelles  ,  1875;  \n-H\ 

Société  enlomologique  de  Belgique  à  Bruxelles.  —  Compte- 
rendu,  série  II,  n"'  18,  19  et  20,  novembre  et  décembre  1875. 
Bruxelles;  feuilles  in-8°. 

Société  malacologique  de  Belgique  à  Bruxelles.  —  Procès- 
verbal,  séances  d'octobre,  de  novembre  et  de  décembre  1875. 
Bruxelles;  feuilles  in-8". 

Musée  de  l'industrie  de  Belgique  à  Bruxelles.  —  Bulletin , 
54™*  année,  tome  68,  octobre,  novembre  et  décembre  1875. 
Bruxelles;  3  liv.  in-8°. 

Moniteur  industriel  belge,  vol.  Il,  1875,  n"'  56à6i. 
Bruxelles;  9  feuilles  in-4". 

Annales  des  travaux  publics  de  Belgique,  lome  XXXIII, 
2™*  cah.  Bruxelles,  1875;  in-8°. 

Recueil  des   rapports  des  secrétaires  de  légation  de  Bel- 


(  1101  ) 

tjique ,  tome  II,   12""  liv.,  décembre   1875.    Briixclles  ;  in-8°. 

Le  Bibliophile,  belge  y  18""'  année,  1875,  liv.  5  à  10. 
Bruxelles;  feuilles  in-8°. 

Bibliographie  de  la  Belgique,  r*  année,  n"' 10  et  il, 
octobre  et  novembre  1875.  Bruxelles;  feuilles  in-8°. 

Analectes  pour  setvir  à  l'histoire  ecclésiastique  de  la  Bel- 
gique, tome  XII,  1875,  5""  liv.  Bruxelles;  in-8°. 

V Abeille,  21"^^  année,  octobre,  novembre  et  décembre  1875, 
S""^  à  10"'^  liv.  Bruxelles  ;  5  liv.  in-8". 

Société  de  pharmacie  d'Anvers.  —  Journal,  51"'^  année, 
août,  septembre  et  octobre  1875.  Bruxelles;  2  liv.  in-8°. 

Société  de  médecine  d'Anvers.  —  Annales,  35"°"  année, 
octobre  et  novembre  1875.  Anvers;  liv.  in-8''. 

Willems-Fonds  te  Gent.  —  Jaarboek  voor  1876.  Gand , 
1870;  vol.  in-8°. 

Bévue  de  l'instruction  publique  de  Belgique,  XXIII"'*  année, 
1875,  N.  S.,  tome  XVIII,  4""%  5'"*  et  0"^'=  liv.  Gand;  3  liv. 
in-S". 

Société  libre  d'émulation  de  Liège.  —  Mémoires,  N.  S., 
tome  V.  Liège,  1875;  in-8''. 

Société  médico-chirurgicale  de  Liège.—  Annales,  14"*^  année, 
août  et  septembre  1875.  Liège;  liv.  in-8°. 

Le  Scalpel,  28"*  année,  octobre  à  décembre  1875,  n°*  14 
à  26.  Liège;  13  feuilles  in-4*'. 

L'Echo  vétérinaire,  V""®  année,  octobre,  novembre  et  dé- 
cembre 1875,  n°*  8,  9  et  10.  Liège;  in-8°. 

Société  littéraire  de  l'Université  catholique  de  Louvain.  — 
Rapport  sur  les  travaux  pendant  l'année  1874-1875  (^4//)/*. 
Wins).  Louvain,  1875;  br.  in-12. 

Journal  des  Beaux- Art  s ,  17"*  année,  1875,  n"»  19  à  24  et 
supplément  Louvain;  7  feuilles  in-4°. 

Cercle  archéologique  du  pays  de  Waes ,  à  St-Nicolas.  — 
Annales,  tome  V,  4"**  liv.,  décembre  1875.  S'-Nicolas;  in-4*'. 


(  M02  ) 

Vreede  (G-W.).  —  Onze  diplomatie,  na  de  erkenning  der 
onafhankelijkheid  van  België.  Utrecht,  1875;  br.  in-8°. 

Snellen  van  Vollenhoven  [S.-C).  —  Pinacograpliia,  part  2. 
Aflev.  2.  La  Haye,  1875;liv.  in-4«. 

K.  instituîit  voor  de  laal-land-en  volkeiikiinde  van  Xeder- 
landscli  ludië.  —  Bijdragen,  5*^*  volgreeks,  X**«  deel,  2'**'  en 
o'^^stuk.  La  Haye,  1875;in-8°. 

Société  des  antiquaires  de  Picardie  à  Amiens.  —  Bulletin  , 
année  1 875  ,  n°  5.  Amiens  ;  in-8°. 

Société  linnéenne  du  nord  de  la  France,  à  Amiens.  — 
Bulletin  mensuel,  4"""  année,  novembre  et  décembre  1875. 
Amiens;  2  feuilles  in-8''. 

Callibiircès  {Le  docteur  P.).  —  Recbcrebes  expérimentales 
sur  l'influence  exercée  par  la  chaleur  sur  les  manifestations 
de  la  contractilité  des  organes.  Paris,  1870;  br.  in-8^ 

Delaire  {Alexis).  —  Le  fond  des  mers.  Etudes  lithologi- 
ques. Lithologie  du  fond  des  mers  par  M.  Delesse,  ingénieur 
en  chef  des  mines.  Paris;  br.  in-8°. 

Garcin  de  Tussy.  —  La  langue  et  la  littérature  hindous- 
tanies  en  1875.  Paris  ;in-8°. 

Mortillet  {Gabriel  de).  —  Découvertes  de  sépultures  dans 
Seine-et-Marne,  l'Aisne  et  le  Loir-et-Cher.  -  Origine  du 
bronze.  Paris,  1875,  187G;  2  br.  in-8°. 

Société  géologique  de  France.  —  Bulletin  ,  5°'*'  série,  tome  II, 
1874,  n«8;tomein,  1875,  n°  8.  Paris;  2  liv.  in-8». 

Société  de  géographie,  à  Paris. —  Bulletin,  octobre  et 
novembre  1875.  Paris;  2  liv.  in-8*'. 

Société  météorologique  de  France.  —  Annuaire,  tome  XIX, 
1871.  Tableaux  météorologiques,  feuilles  C-1 4.  —  Nouvelles 
météorologiques.  S"""  année,  novembre  1875.  Paris;  2  liv. 
in-8°. 

Société  des  éttides  historiques,  à  Paris. —  L'Investigateur, 
41™*  année,  juillet-octobre  1875.  Paris;  2  liv.  in-8". 


(  1 103  ) 

Revue  des  questions  historiques,  X"'  année,  1"  janvier 
I87(),  57'»"'  liv.  Paris,  1876;  in-8°. 

Vlnstilut,  N.  S.,  ù""'  année  1875,  n°'  142  à  154.  Paris; 
13  feuilles  in-4". 

Revue  britannique ,  oelobre ,  novembre  et  décembre  1875. 
Paris;  5  demi-vol.  in-8°. 

Académie  des  sciences  de  Paris.  —  Comptes -rendus, 
tome  LXXXI,  n"'  14  à  26,  octobre  à  décembre  1875.  Paris; 
15  cah.  in-4*',  et  table  du  tome  LXXX. 

Revue  scientifique,  2""^  série,  5"'*^  année,  n°M4  à  26,  octobre 
à  décembre  1875.  Paris;  15  cah.  in-4°. 

Revue  politique  et  littéraire,  2"*^  série,  5"*  année  ,  n°'  14  à 
26,  octobre  à  décembre  1875.  Paris;  15  cah.  in-4°. 

Journal  de  l'agriculture  ,  tome  IV,  1875.  Paris;  15  cah. 
în-8^ 

Archives  de  médecine  navale ,  tome  XXIV,  n*"  4,5  et  6, 
octobre  ,  novembre  et  décembre  1875.  Paris;  5  cah.  in-8°. 

Le  progrès  médical,  5°"^  année,  octobre  à  décembre  1875, 
n"*  40  à  52.  Paris  ;  15  feuilles  in-4°. 

Raab.  —  Gravures  :  Portraits  de  MM.  les  professeurs  Zum- 
buscli,  C.  Von  Piloty ,  Franz  Defreggen,  Knabl  et  Leubach, 
et  reproduction  de  la  Vierge  de  Raphaël.  Munich;  6  gr.  in-fol. 

Deutsche  chemische  Gesellschaft  zu  Berlin.  —  Berichte, 
Jahrg.  VIII,  n^  16,  17,  18  und  19.  Berlin;  4  Hv.  in-8». 

Zeitschrift  fur  die  Gesammten  Naturwissenschaften  {Dr. 
C.  G.  Giebel),  N.  F.,  1875,  Bd.  XI.  Berlin,  1875  ;  vol.  in-8^ 

K.  Statistische  Bureau  in  Berlin.  —  Monatliche  Mittel  des 
Jahrganges  1874  fiir  Druck,  Temperatur,  Feuchtigkeit  und 
Niederschlâge  und  funglâgige  Warmemittel  {  H.-W.  Dove). 
Berlin,  1875;  in-4°. 

Justus  Perthes'  Geographische  Anstalt  zu  Gotha.  —  Mit- 
theilungen,  21.  Band,  1875,  XI.  Gotha;  cah.  in-4''. 

Handelsstatistische   Bureau ,   Hamburg.  —  Tabellarische 


(  H04  ) 

Uebersichlen  des   Hamburgischen   Handcls   im   Jalire    1874. 
Hambourg,  1875;  vol.  gr.  in-4°. 

Mediciniscli-naturwissenschaftliche  Gesellschaft  zu  lena. 

—  Jenaische  Zeitschrift  fur  Naturwissenschaft,  IX.  Bd.  N.  F., 
II.  Bd.  4.  Heft.  léna,  1875;  in-8°. 

Casopis  Lekarûr  Ceskych,  Rocnik  XIV,  1875,  Cislo  44-52. 
Prague;  9  feuilles  in-4**. 

K.  Akademie  der  Wissenschafïen  in  Wien.  —  Anzeiger, 
Jahrg.  1875,  Nr.  XVIII-XXIII,  XXV- XVII.  Vienne;  feuilles 
in-8». 

Société  impériale  russe  de  géographie.  —  Bulletin  :  t.  VIIÏ, 
IX  et  X.  —  Mémoires  :  section  de  géograpbie,  tome  III  (1873); 
section  d'ethnographie,  tomes  U\  et  V  (1873);  section  de  sta- 
tistique, tomes  III  et  IV  (1873-1874).  —  Travaux  de  l'expédi- 
tion ethnographique  dans  la  Russie  occidentale,  tome  V  (1874). 

—  Travaux  de  Tenquête  sur  le  commerce  des  grains  en  Russie  : 
dans  la  région  centrale,  tome  III  (1873);  dans  la  région 
Voiga-Newa ,  tome  IV  (1874);  dans  la  région  occidentale, 
tome  IV  (1874).  —  Travaux  de  l'expédition  scientifique  en 
Sibérie:  partie  botanique ,  tome  II  (1874);  partie  géologique, 
tome  III  (1873).  —  Description  géographique  de  l'Asie  par 
C.  Ritter  :  Le  Turkestan  chinois  et  le  Turkestan  oriental, 
tome  V  avec  supplément  (1869  et  4873);  l'Iran,  tome  VI 
(1874).  -—  Exploration  du  Turkestan  par  N.  SeverzofT.  S^-Pé- 
tersbourg;  15  vol.  in-8"  et  2  vol.  in-4°(en  russe). 

Société  de  chimie, d  St-Pétershoiirg.  —  Journal,  tome  VII, 
n"  9.  S'-Pétersbourg;  in-8". 

histituto  y  Observatorio  de  Marina  de  San  Fernando.  — 
Anales,  seccion  2*  :  Observaciones  meteorologicas,  ano  1874. 
San  Fernando,  1875  ;  gr.  in-4°. 

Krafft  {Dr.  Friedrich).  —  Ueber  die  Entwickelung  der 
Theorctischcn  Chemie.  Baal ,  1875;  br.  in-8". 

St-Gallisch  natarwissenschafUiche  Gesellschaft.  —  Bericht 


(  im  ) 

iiber  (lie  Thatigkcit,    1873-1874.  S'-Gnll,   1873;   vol.  in-8". 

De  Rossi  {M. -S.).  —  I  icrrcnioti  di  Romaj^na  dal  Scltcmbre 
1874  al  Maij;gio  1875.  —  Sulle  norme  e  siigli  stnimcnli  econo- 
mici  per  le  osservazioni  mierosismiche  proposti  dal  P.-T.  Bcr- 
lelli  e  M. -S.  De  Rossi.  —  Sopra  la  stipe  votiva  di  Bourboniie- 
les-Bains  cemenlata  da  cristallizazioni  mctalliche  contempo- 
ranee  ed  illustrala  dal  Cli.  Prof.  E  Dauhrée.  Rome,  1875; 
3  broch.  in-4". 

Cadet  {Soci'ate).  —  Nouvelles  études  sur  le  choléra  asia- 
tique. —  Esempj  comprovanti  l'uso  interne  del  sottosolfato  di 
mercurio  ed  esempj  concorrenti  a  comprovare  l'efficacia  anti- 
limica  del  solfuro  negro  di  esso.  —  Proposta  interne  la  cura 
délia  lissa  detta  comunemenle  rabbia  eanina  o  idrofobia.  — 
Interne  relTicacia  particolarmente  anlicolerica  del  solfuro  nero 
(li  mercurio.  — Ragionamenlo  inteso  a  comprovare  la  mirabile 
eflicacia  terapeulica  del  solfuro  nero  di  mercurio.  Rome,  1873 
et  1875;  4  br.  in-8°  et  br.  in-4°. 

Corrispondenzia  scienlifica  in  Roma.  —  BuIIettino  univer- 
sale,  vol.  8%  N.  !26  et  27.  Rome;  feuilles  [n-A°. 

Bidlellino  del  vidcanismo  italiano ,  Anno  II ,  1873,  fasc.  VI, 
Vil,  VIII.  Rome,  1875;  in-8". 

R.  ComiUdo  geologico  d'Ilalia.  —  Bollettino,  N°  7  e  8, 
Luglio  e  Agosto  1875.  Rome,  187o;in-8°. 

Lane  Fox  [A.).  —  Excavations  in  Cissbury  Camp,  Sussex. 
Londres  ,  1875;  br.  in-8°. 

Xalure,  vol.  XII,  Nos.  510-513;  vol.  XIV,  Nos.  314-3:22, 
octobcr-december,  1875.  Londres;  13  cali.  in-8°. 

Numisinalic  Society  of  London.  —  Journal,  new  séries, 
No.  LIX,  1875,  pt.  III.  Londres;  in-8". 

Geoloyical  Survey  of  the  United  Kingdom.  —  Catalogue  of 
ihe  publications.  —  Report  of  the  commissieners  appointed 
to  inquire  inte  ihe  several  matters  relating  te  coal  in  the 
United  Kingdom.  —  Maps  and  sections   to  accempany  the 


(  il06  ) 

report  of  Ihe  royal  coal  commission.  Londres,  1875;  br.  in-8**, 
3  vol.  pet.  in-4"  et  atlas  in-fol. 

American  Journal  of  Science  and  Ai^ts  :  vol.  X,  No.  60,  and 
Swpplementary ,  december,  4875;  vol.  XI,  No.  61  ,  january 
4876.  New  Haven;  5  liv.  in-8°. 

U.  S.  geological  Survey  of  the  Territories  at  Washi?igton. 
—  Map.  of  the  Lower  Geyser  Basin  on  the  Upper  Madison 
River.  —  Map  of  the  sources  of  Snake  River  v^^ith  its  tribu- 
taries.  —  Map  of  the  Upper  Geyser  Basin  on  the  Upper 
Madison  River,  Montana  terr.  — Montana  and  Wyoming  terri- 
tories  embracing  raosl  of  the  country  drained  by  the  Ma- 
dison, Gallatin  and  Upper  Yellov^^stone  Rivers.  —  Preliminary 
map  of  central  Colorado  Showing  the  Région  Surveyved  in 
1873  und  1874.  Washington;  6  cartes  in-fol. 


Fin  ou  Tome  XL  de  la  '2'^'  série. 


BULLETINS  DE  l'aCAUKMIK  KOYALE  DE  BELGIQUE. 

TARLKS  ALPIIAHÉTIQLÎES 

DU   TOME    QUARANTIÈME    DE    LA    DEUXIÈME   SÉRIE. 

1875. 
tablp:  des  auteurs. 

A. 

Académie  tles  sciences  de  Cracovie.  -  Demande  d'échange  de  publica- 
tions, 50. 

Jcadémie  nationale  des  sciences  de  r Université  de  Cordova  -  Demande 
d'échange  de  publications,  446. 

Académie  physico-médico-statistique  de  Milan.  —  Demande  d'échange» 
de  publications,  446 

Administration  des  hospices  de  la  ville  de  Bruxelles.  —  Demande  rela- 
tive au  système  de  paratonnerres  à  établir  sur  l'hôpital  St-Pierre,  50. 

Allard  {Ern.).  —  Second  prix  du  grand  concours  d'architecture  de  1875 
214,266. 

Aïvin  (L).  —  Rapport  sur  les  arrêtés  royaux  réorganisant  les  grands  con- 
cours (prix  de  Rome),  214,  229;  adjoint  à  la  section  de  gravure  pour  le 
jugement  du  concours  annuel  delà  classe  des  beaux-aris,  216;  membre 
de  la  Commission  pour  les  objets  d'art  à  reproduire  par  les  lauréats  (prix 
de  Rome),  228;  souvenir  du  1V«  centenaire  de  Michel  Ange,  244 ,  250; 
motion  relative  aux  dangers  qu'offre  le  laboratoire  de  chimie  de  l'école 
industrielle,  666,  814,  895. 

Anomjmes.  —  Présentent  un  travail  concernant  les  dépôts  littoraux  de 
l'assise  panisélienne  dans  les  environs  de  Bruxelles,  447;  rapports  de 
MM.  Dupont,  Nyst  et  Briart,  678,  680,  681. 


1108  TABLE    DES    AUTEURS. 

Art  Union  of  London.  —  M.  Donaldson  fait  hommage  de  deux  gravures 

publiées  par  cette  institution,  227. 
Association  française  pour  Vavancement  des  sciences.  —  Ouverture  de 

sa  4*  session ,  2. 


B. 


Balat{Alph.).  —  Membre  de  la  Commission  pour  les  objets  d'art  à  repro- 
duire par  les  lauréats  (prix  de  Rome),  228;  regrette  de  ne  pouvoir  pré- 
sider la  séance  publique  de  la  classe  des  beaux-arts,  242;  discours 
concernant  le  palais  des  beaux-arls  de  Bruxelles,  246;  membre  de  la 
Commission  chargée  d'examiner  le  projet  copie  du  lauréal  Dieliiens, 
406;  avis  de  celte  Commission,  620;  membre  de  la  Commission  pour 
l'élude  du  projet  du  monument  Quelelet,  666,  814,  895. 

Bambeke  (Ch.  Van).  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M.  Fœttinger  con- 
cernant répiderme  des  cyclostomes,  271. 

Baner.  —  Demande  des  renseignements  sur  le  mémoire  concernant  la 
tapisserie  de  haute-lice  aux  Pays-Bas,  244;  rapport  verbal  de  M.  Fétis 
sur  cette  demande,  408. 

Barglion  Fort-Rion  {Le  baron  F.  de).  —  Hommage  d'ouvrage,  813. 

Bartje  (Antoine-Louis).  —  Annonce  de  sa  mort,  59. 

Basevi  (Abraham).  -  Accuse  réception  des  publications  académiques,  40. 

BeUynck  (Aug.).  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M.  Gilkinel  sur  des 
plantes  fossiles  de  l'étage  du  poudingue  de  Burnof,4;  rapport,  75;  com- 
missaire pour  une  seconde  rédaction  du  travail  de  M.  Cogniaux  concer- 
nant des  cucurbitacées  nouvelles,  etc.,  32;  rapport,  275. 

Bi'neden  (Éd.  Van).  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M.  F.  Plateau 
concernant  l'appareil  digestif  chez  les  Myriapodes  de  la  Belgique,  271; 
de  la  maturation  de  l'œuf,  de  la  fécondation  et  des  premiers  phéno- 
mènes embryonnaires  chez  les  mammifèies  d'après  les  observations 
faites  chez  le  lapin,  6>'6. 

Beneden  [P.-J.  Van).  —  Nommé  membre  du  comité  d'exécution  pour  le 
monument  d'Omalius,  2;  hommage  d'ouvrages,  3, 270,  808  ;  rend  compte 
des  fêtes  du  200^  anniversaire  de  la  découverte  des  infusoires  par 
Leeuwenhoek ,  271  ;  les  pachyacanthus  du  Musée  de  Vienne,  323;  les 
ossements  fossiles  du  genre  Aulocèle  au  Musée  de  Linz,  536;  le  sque- 
lette de  la  Baleine  fossile  du  Musée  de  Milan,  736. 

Bergmann  (Feu  Ant.).  —  Lauréat  du  concours  quinquennal  de  lilléralure 
flamande  (o*"  période) ,  33. 

Bergmann  (M^^  veuve).  —  Hommage  d'ouvrages.  813. 


TABLK    DKS    AUTFL'RS.  1109. 

Bernardin.  —  Transmet  ses  observations  bolaiiiques  faites  à  Mclle,  eu 
octobre  1875,  446. 

Bernimolin  (Eug  ).  —  Hommage  d'ouvrage,  579. 

Bormans  (Slan.).  —  Maximilien-Emmanuel  de  Bavière,  comte  de  Namur, 
166;  hommage  d'ouvrage,  579. 

Brialmont  (Alexis)  —  Sur  les  causes  el  les  effets  de  l'accroissement 
successif  des  armées  permanentes,  976. 

Briart  [Alp.).  —  Commissaire  pour  les  mémoires  de  concouis  sur  le  bas- 
sin houiller  de  la  province  de  Liège  ,  55;  rapport,  9i9;  rapport  sur  la 
publication  d'une  nouvelle  édition  de  la  carte  géologique  de  la  Belgique, 
59,  308;  décision  prise  sur  les  conclusions  de  ce  rapport,  448;  lettre  du 
Département  de  la  guerre  relative  à  cette  décision,  898;  commissaire 
pour  l'examen  de  cette  lettre,  ibid. ;  commissaire  pour  un  travail  ano- 
nyme concernant  les  dépôts  littoraux  de  l'assise  panisélienne  dans  les 
environs  de  Bruxelles,  447;  rapport ,  681  ;  commissaire  pour  un  travail 
de  M  Mourlon  sur  les  dépôts  dévoniens ,  etc  ,  668;  hommage  d'ou- 
vrage ,  898. 

Burbure  {Le  chev.  (/e).— Exprime  son  opinion  sur  les  modifications  à  faire 
au  programme  du  concours  des  cantates,  40;  lettre  de  M.  le  Ministre  de 
l'Intérieur  relative  à  ces  modifications,  891  ;  adres.se  le  manuscrit  de  sa 
notice  biographique  de  feu  M.  Bosselel ,  893. 

Buys- Ballot.  Élu  associé,  1097. 


C, 


Calliburcès  (Le  D""  P.).  —  Hommage  d'ouvrage,  667. 

Catalan  (E).  —  Commissaire  pour  les  fragments  II  et  III  du  travail  de 
M.  Houzeau  sur  le  calcul  numérique,  4,  271;  rapports,  67,  452;  com- 
missaire pour  deux  notes  de  M.  Saltel  concernant  les  surfaces  à  points 
multiples,  4;  rapport  verbal,  5;  lecture  de  son  rapport  sur  le  travail  de 
M.  Havrez  concernant  des  transcendantes ,  ibid.;  hommage  d'ouvrages, 
-270;  commissaire  pour  un  travail  de  M.  Reinemund  sur  les  polygones 
réguliers  et  des  séries  trigonométriques ,  447;  rapport,  673;  commis- 
saire pour  un  travail  de  M.  De  Tilly  concernant  la  théorie  mécanique  de 
la  chaleur,  668,899;  commissaire  pour  un  travail  de  MM.  Namur  et 
Mansion  concernant  des  tables  de  logarithmes  à  douze  décimales,  668. 

Cavalier  (J.).  —  Transmet  ses  observations  météorologiques  faites  à 
Ostende  en  1875 ,  2,  51 ,  270,  446 ,  898. 

Chalon  (R.).  —  Adjoint  à  la  section  de  gravure  pour  le  jugement  du  con- 


liiO  TABLE    DES    AUTliURS. 

cours  annuel  de  la  classe  des  beaux-aits,  216;  hommage  d'ouvrage, 
106. 

Chasles  (M.).  —  Hommage  d'ouvrage,  3. 

C/ievreul  {M.-E  ).  —  Élu  associé,  1097. 

Clausius  (/?.)  —  Élu  associé,  1097.  , 

Codron  (L.-H.-S.).  —  Présente  une  note  sur  un  aérostat  à  voiles,  52. 
rapport  verbal  de  M.  Montigny,  274. 

Cogniaux  (A.).  —  Présente  une  seconde  rédaction  de  son  travail  con- 
cernant des  cucurbilacées  nouvelles,  etc.,  52;  seconds  rapports  de 
MM.  Morren,  Bellynck  et  Crépin,  273,  274. 

Colfs  {J.-P.).  —  Demande  à  pouvoir  exposer  une  découverte  archéolo- 
gique concernant  l'art  architectural  ,619,  893. 

Collège  des  bourgmestre  et  échevins  de  la  ville  d'Anvers.  —  Invile  l'Aca- 
démie à  l'inauguration  du  buste  du  baron  G.  Wappers,  226. 

Congrès  international  des  amèricanistes.  —  Ouverture  de  sa  première 
session ,  2. 

Congrès  scientifique  de  France.  —  Annonce  que  sa  XLI"  session  aura  lieu 
à  Périgueux,  269. 

Cornet  {F.-L.).  —  Commissaire  pour  les  mémoires  de  concours  sur  le 
bassin  houiiler  de  la  province  de  Liège,  53;  rapport,  971  ;  hommage 
d'ouvrages,  270  ,  898  ;  commissaire  pour  un  travail  de  M.  Mourlon  sur 
les  dépôts  dévoniens,  etc.,  668;  commissaire  pour  la  lettre  du  Dépar- 
tement de  la  guerre  relative  à  la  publication  de  la  carte  géologique  de 
la  Belgique,  898. 

Crépin  [Fr.)  —  Commissaire  pour  une  seconde  rédaction  du  travail  de 
M.  Cogniaux  concernant  des  cucurbilacées  nouvelles,  etc.,  52;  rapport, 
274;  rapports  de  MM.  Dewalque,  de  Koninck  et  Dupont  sur  son  travail 
concernant  la  flore  des  psammites  du  Condroz,  53,  55,  56;  hommage 
d'ouvrages  ,  667;  élu  membre  titulaire,  1097. 


Dechen{H.  von).  —  Élu  associé, 4097. 

De  Coster  {J.-B.).  —  Lauréat  du  grand  concours  d'architecture  de  1875, 
215,266. 

De  Heen  {M  -P.).  —  Présente  un  travail  concernant  la  fusion  et  la  dilata- 
tion des  métaux ,  668. 

D"Eichthal{G.).  —  Hommage  d'ouvrage,  147. 

De  Keyser  {N.}. —  Membre  de  la  Commission  pour  les  objets  d'art  à 
reproduire  par  les  lauréats  (prix  de  Rome),  228. 


TABLi:    Di:S    AUTEURS.  1111 

De  Koehne  {Le  baron  Rernard).  —  Hommage  d'ouvrage,  40G. 

De  Koninck  {L).  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M.  Gilkinet  sur  des 
piailles  fossiles  de  l'étage  du  poudingue  de  lUirnot,  4;  rapport,  70;  rap- 
port sur  le  travail  de  M.  Crépin  coucernaiU  la  flore  des  psammites  du 
Condroz,  55;  commissaiic  pour  le  travail  de  M.  Mourlon  concernant 
l'étage dévonien  des  psammiles  du  Condroz  dans  le  bassin  deTheux,etc., 
271  ;  rapport,  675;  commissaire  pour  la  seconde  partie  du  mémoire  cou- 
ronné sur  les  roches  plutoniennes  des  Ardennes  françaises,  447. 

Delaborde  [Le  vicomte  H.).  —  Hommage  d'ouvrage,  893. 

De  la  Vallée- Poussin  {C/i.}.  —  Présente  la  seconde  partie  de  son  mé- 
moire couronné  concernant  les  roches  plutoniennes  des  Ardeimes  fran- 
çaises ,  447. 

Delisle{L.).  — Accuse  réception  de  son  diplôme  d'associé,  147;  hommage 
d'ouvrage,  ibid. 

De  Man  (G).  —  Membre  de  la  Commission  pour  les  objets  d'art  à  repro- 
duire par  les  lauréats,  228  ;  rapport  sur  le  mémoire  de  concours  concer- 
nant la  sculpture  aux  Pays-Bas  aux  XYII^  et  XVllIe  siècles,  258;  mem- 
bre de  la  Commission  chargée  d'examiner  le  projet  copie  du  lauréat 
Dielliens,  406;  avis  de  cette  Commission  ,  620. 

Dépôt  de  la  guerre  {M.  le  Directeur  du).  —  Présente  un  travail  concer- 
nant la  triangulation  de  la  Belgique,  268. 

Dewalque  (G.).  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M.  Gilkinet  sur  des 
fossiles  de  l'étage  du  poudingue  de  Burnot,4;  rapport,  71;  relation  de 
coups  de  foudre,  13;  homm:ige  d'ouvrage  avec  mention  bibliogra- 
phique, 51  ;  commissaire  pour  les  mémoires  de  concours  concernant  le 
bassin  houiller  de  la  province  de  Liège,  o5:  rapport,  900;  rapport  sur 
le  travail  de  M.  Crépin  concernant  la  flore  des  psammites  du  Condroz, 
53;  rapport  sur  la  publication  d'une  nouvelle  carte  géologique  de  la 
Belgique,  59,  274;  décision  prise  relativement  aux  conclusions  de  ce 
rapport,  448;  lettre  du  Département  de  la  Guerre  relative  à  cette  déci- 
sion, 898;  commissaire  pour  Texamen  de  cette  lettre,  ibid.;  commis- 
saire pour  un  travail  de  M.  Mourlon  concernant  l'étage  dévonien  des 
psammites  du  Condroz  dans  le  bassin  de  Theux,etc.,  271  ;  rapport,  673; 
commissaire  pour  la  seconde  [lariie  du  mémoire  couronné  concernant 
les  roches  plutoniennes  des  Ardennes  françaises,  447. 

Dielliens  {Ern).  —  Soumet  son  projet  copie  réglementaire,  214,  243; 
Commission  chargée  d'examiner  ce  projet,  406;  avis  de  celle-ci,  620; 
fait  parvenir  son  XII«-  rapport  semestriel,  226. 

Dillens  (Julien).  —  Lauréat  du  concours  de  sculpture  de  la  classe  des 
beaux-arts,  241,  243,  266. 


4i^2  TAHLE  DES  AUTEURS. 

Donaldson  [T-L).  —  Lettre  accompagnant  l'hommage  de  deux  gra- 
vures, 227. 

Donny  (F.).  —  Fait  ses  réserves  au  sujet  de  la  motion  de  M.  Alvin  rela- 
tive aux  dangers  qu'offre  le  laboratoire  de  chimie  de  l'école  iudus- 
trielle,  666. 

Dove  [H.-W.).  —  Hommage  d'ouvrage ,  667. 

Dubois  (Alp.).  —  Présente  une  note  concernant  quelques  oiseaux  nou- 
veaux, 447;  rapport  de  M.  de  Selys  Longchamps,  684;  impression,  797. 

Du  Mortier  (C.-B.).  —  Hommage  d'ouvrages,  270. 

Dupont  [Éd.).  —  Rapport  sur  le  travail  de  M.  Crépin  concernant  la  flore 
des  psammites  du  Condroz,  56;  rapport  sur  la  publication  d'une  nou- 
velle édition  de  la  carte  géologique  de  la  Belgique,  59,  291  ;  décision 
prise  sur  les  conclusions  de  ce  rapport,  448;  lettre  du  Département  de 
la  Guerre  relative  à  cette  décision,  668;  commissaire  pour  le  travail  de 
M.  Mourlon  concernant  l'étage  dévonien  des  psammites  du  Condroz 
dans  le  bassin  de  Theux,  etc.,  271  ;  rapport ,  676;  commissaire  pour  le 
travail  anonyme  concernant  les  dépôts  littoraux  de  l'assise  panisélienne 
dans  les  environs  de  Bruxelles,  447  ;  rapport,  678. 

Duprez  (F.).  —  Présente  le  résumé  de  ses  observations  météorologiques 
faites  à  Gand,  en  1874,  51  ;  commissaire  pour  une  note  de  M.  Perrey 
sur  les  tremblements  de  terre  en  1872,  etc  ,  52;  rapport,  452;  commis- 
saire pour  deux  travaux  de  M.  Vander  Mensbrugghe  concernant  :  1»  la 
surface  de  contact  d'un  solide  et  d'un  liquide,  52;  rapport,  272;  2»  le 
problème  de  deux  liquides  superposés  dans  un  tube  capillaire,  4i7; 
rapport,  671  ;  commissaire  pour  un  travail  de  M.  Leclercq  concernant 
des  orages  qui  onl  éclaté  à  Liège,  en  1874  et  1875,  271. 


Eleivyck  {Le  chevalier  Xavier  Van)   —  Hommage  d'ouvrage,  227. 


Faider(Ch.).  —  Hommage  d'ouvrage,  35. 

Fétis  (Éd.).  —  Adjoint  à  la  section  de  gravure  pour  le  jugement  du  con- 
cours annuel  de  la  classe  des  beaux-arts,  216  ;  membre  de  la  Commis- 
sion pour  les  objets  d'art  à  reproduire  par  les  lauréats  (prix  de  Rome», 
228;  commissaire  pour  une  demande  concernant  le  mémoire  sur  la 
tapisserie  de  haute-lice  aux  Pays-Bas,  244;  rapport  verbal,  408. 


TABLE    DUS    AriEURS.  1115 

Fischer  de  Waldheim  {Le  conseiller  privé  Alexandre).  -  Célébration  de 
son  50*  anniversaire  de  doclorat,  2,  446. 

Flandre  {S.  A.  B.  Mgr.  le  Comte  de).  —  Fait  exprimer  ses  regrets  de  ne 
pouvoir  assister  à  la  séance  publique  de  la  classe  des  beaux-arts,  243; 
mêmes  regrets  pour  la  séance  publique  de  la  classe  des  sciences,  897. 

Fœttinger  (.4 /ex.).  — Présente  un  travail  concernant  la  structure  de  l'épi- 
derme  des  cyclostomes,  271. 

Folie  (F).  —  Commissaire  pour  les  fragments  II  et  III  du  travail  de 
M.  Houzeau  sur  le  calcul  numérique,  4,  271  ;  rapports,  62,  452;  com- 
missaire pour  deux  notes  de  M.  Saliel  concernant  les  surfaces  à 
points  multiples,  4;  rapport  verbal,  5;  lecture  de  son  rapport  sur  le 
travail  de  M.  Havrez  concernant  des  transcendantes ,  ibid;  rapport  sur 
un  instrument  astronomique  de  M.  Journeaux-Duhamel,  61  ;  commis- 
saire pour  un  travail  de  M.  le  Directeur  du  dépôt  de  la  guerre  concer- 
nant la  triangulation  de  la  Belgique,  268;  commissaire  pour  un  travail 
de  M.  De  Tilly  concernant  la  théorie  mécanique  de  la  chaleur,  668,  899; 
commissaire  pour  un  travail  de  iMiM.  Namur  et  Mansion  concernant  des 
tables  de  logarithmes  à  douze  décimales,  668;  commissaire  pour  un 
travail  de  M.  P.  De  Heen  concernant  la  fusion  et  la  dilatation  des  mé- 
taux, 668. 

Fraikin  (Ch.).  —  Délégué  pour  assister  à  la  célébration  du  4«  centenaire 
de  Michel  Ange,  228;  rend  compte  de  sa  mission,  244  ;  membre  de  la 
Commission  pour  les  objets  d'artjà  reproduire  par  les  lauréats  (prix  de 
Rome),  228;  membre  de  la  Commission  pour  l'étude  du  projet  du 
monument  Quetelet,  6G6,  814,  895. 

Frank  (J.).  —  Membre  de  la  Commission  pour  les  objets  d'art  à  reproduire 
par  les  lauréats  (prix  de  Rome),  228. 


Gachard  {L.-P.).  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M.  Génard  concernant 
Corneille  Duplicius  Scepperus,  350;  rapport,  588;  hommage  d'ouvrage 
578. 

Galesloot  (L.).  —  Présente  un  travail  concernant  des  antiquités  de 
l'époque  romaine,  découvertes  à  Assche,  550;  rapports  de  MM.  Wauters 
et  Piot,  579,  585;  impression,  594. 

Gallait  (L).  —  Membre  de  la  Commission  pour  les  objets  d'art  à  repro- 
duire par  les  lauréats  (prix  de  Rome),  228. 

Garcin  de  Tassy.  —  Hommage  d'ouvrages,  579. 

2""*'    SÉRIE,    TOME    XL.  71 


^-lii  TABLE    DEii    AUTEURS. 

Galta [Louis).  -  Hommage  d'ouvrage,  667. 

Geefs  (G.).  —  Membre  de  la  Commission  pour  l'étude  du  projet  du  monu- 
ment Quetelet,  666,  814 ,  895. 

Geefs  (7.)  —  Membre  de  la  Commission  pour  les  objets  d'art  à  reproduire 
par  les  lauréats  (prix  de  Rome),  228  ;  rapport  sur  le  mémoire  de  concours 
concernant  la  sculpture  en  Belgique  aux  XVII«  et  XVII1<=  siècles,  258. 

Génard  (L).  —  Présente  un  travail  concernant  Corneille  Duplicius  Scep- 
perus,  350:  rapports  de  MM.  Gachard,  le  baron  Kervyn  de  Leltenhove 
et  Wauters,  o88,  592,  393;  impression,  602  ;  hommage  d'ouvrages, 
895. 

Gevaert  (A.).  —  Exprime  son  opinion  sur  les  changements  à  faire  au  pro- 
gramme du  concours  des  cantates,  40;  lettre  de  M.  le  Ministre  de  l'Inté- 
rieur relative  à  ces  changements,  891;  fait  connaître  que  le  jugement  du 
grand  concours  de  composition  musicale  de  1875  a  dû  être  ajourné, 
213;  donne  lecture  du  discours  de  M.  Balat  concernant  le  palais  des 
Beaux-Arls  de  Bruxelles ,  246. 

Gilkinet  i^lf.)-  —  Présente  un  travail  sur  quelques  plantes  fossiles  de 
l'étage  du  poudingue  de  Burnot,  4;  rapports  de  MM.  de  Koninck,  De- 
walqueel  Bellynck,  70,71,  75;  impression,  159;  élu  correspondant,  1098. 

Giovanni  {Vincenzo  di).  —  Hommage  de  plusieurs  ouvrages  de  philoso- 
phie, 36;  note  bibliographique  sur  ceux-ci,  par  M.  Le  Roy,  148. 

Gloesener  {M.).  —  Observations  relatives  au  méléorographe  universel  de 
M.  Van  Rysselberghe,  21  ;  présentera  une  noie  sur  certains  effets  pro- 
duits par  la  foudre  à  Liège,  22;  commissaire  pour  un  travail  de  M.  De 
Heen  sur  la  fusion  et  la  dilatation  des  métaux,  668. 

Guillaume  (Le  baron).  —  Hommage  d'ouvrage,  35. 


H. 


Havrcz  {Paul}.  —  Lecture  des  rapports  de  M.M.  Catalan  et  Folie  sur  son 

travail  concernant  des  transcendantes ,  5. 
Hennequin  (Le  capitaine  d'état-major).  -  Hommage  d'ouvrage,  270. 
Heremans  (J.).  —  Hommage  d'ouvrage,  579. 
Hinrichs{Le  D'  Gustave).  —  Hommage  d'un  météorite,  32. 
Hirn  [G.-A.).  —  Hommage  d'ouvrages,  51,  270. 
Houzeau  {J.-C).  —  Présente  les  fragments  II  et  111  de  son  travail  sur  le 

calcul  numérique,  4,  271;  rapports  de  MM    Folie,  Catalan  et  Liagre , 

62,  67.  70,  452;  impression,  74,  455. 


TABLE    DES    AUTEURS.  H 15 


Institut  royal  des  sciences ,  des  lettres  et  des  arts  de  Venise.  —  Adresse 
son  programme  de  concours  pour  i875,  1876  et  1877.  446. 


Journemix- Duhamel.  —  Rapports  de  MM.  Quetelet,  Liagre  et  Folie  sur 

son  nouvel  instrument  astronomique,  60,  61. 
Juste  (Th.).  —  Hommage  d'ouvrage,  350. 


Kervyn  de  Lettenhove  {Le  baroîi).  —  Hommage  d'ouvrages,  35, 350;  com- 
missaire pour  un  travail  de  M.  Génard  concernant  Corneille  Duplicius 
Scepperus,  530;  rapport,  592. 

L. 

Lasaulx  {D"  von).  —  Hommage  d'ouvrages,  32,  667. 

Leclercq  (0).  —  Présente  une  note  sur  des  orages  qui  ont  éclaté  à  Liège 
en  1874  et  1873,271. 

Leclercq  (/.).  Membre  de  la  Commission  pour  les  objets  d'art  à  reproduire 
par  les  lauréats  (prix  de  Rome),  228. 

Lepsius  {R.).  —  Accuse  réception  de  son  diplôme  d'associé,  33. 

Le  Roy  {Alp.).  —  Note  bibliographique  sur  les  ouvrages  philosophiques 
de  M.  di  Giovanni,  148;  lecture  de  sa  notice  biographique  sur  Adolphe 
Rorgnet,  618. 

Leva  {J.  de).  —  Hommage  d'ouvrage,  36. 

Liagre  (J.).  —  Commissaire  pour  les  fragments  II  et  III  du  travail  de 
M.  Houzeau  sur  le  calcul  numérique,  4,  271  ;  rapports,  70,  432;  dé- 
légué au  Congrès  des  sciences  géographiques  de  Paris,  30,  146,  213; 
rapport  sur  un  instrument  astronomique  de  M.  Journeaux-Duhamel, 
60;  proclame  le  résultat  des  concours  et  des  élections  de  la  classe  des 
beaux-arts  et  de  la  classe  des  sciences,  264, 1096;  commissaire  pour 
un  travail  de  M.  le  Directeur  du  Dépôt  de  la  guerre  concernant  la  trian- 
gulation de  la  Relgique,  268  ;  commissaire  pour  deux  notices  de  M.  Terby 
concernant  la  planète  Mars  et  l'ombre  du  deuxième  satellite  de  Jupiter, 


il  16  TABLE    DES    AUTEURS. 

271  ;  rapport,  454;  observations  relatives  au  méléorographe  universel 
de  M.  Van  Rysselberghe ,  317;  commissaire  pour  un  travail  de  MM.  Na- 
mur  et  Mansion  concernant  des  tables  de  logarithmes  à  douze  déci- 
males, 668. 
Liais  (Emm.).  —  Note  sur  la  parallaxe  du  soleil,  5. 


Macar  {Julien  de).  —  Lauréat  du  concours  de  la  classe  des  sciences,  1097, 

Malaise  {€.).  —  Commissaire  pour  une  note  de  M.  Perrey  sur  les  tremble- 
ments de  terre,  en  1872,  etc.,  52;  rapport,  448;  commissaire  pour  la 
seconde  partie  du  mémoire  couronné  concernant  les  roches  pluto- 
niennes  des  Ardennes  françaises,  447;  commissaire  pour  un  travail  de 
M.  Mourlon  sur  les  dépôts  dévouions,  etc.,  668. 

Malherbe  {J.  Renier).  —  Lauréat  du  concours  de  la  classe  des 
sciences,  1097, 

Mansion  (P.).  —  Présente  un  travail  concernant  des  tables  de  logarithmes 
à  douze  décimales,  668. 

Marchai  (Edm.).  —  Lauréat  du  concours  littéraire  de  la  classe  des  beaux- 
arts,  239,  264  ;  remercîments,  243. 

Melsens  (L).  —  Fait  ses  réserves  au  sujet  de  la  motion  de  M.  Alvin  rela- 
tive aux  dangers  qu'offre  le  laboratoire  de  chimie  de  Pécole  indus- 
tielle,  666. 

Ministre  de  la  Guerre  {M.  le).  —  Lettre  relative  à  la  publication  d'une 
nouvelle  édition  de  la  carte  géologique  de  la  Belgique,  898. 

Ministre  de  la  Justice  {M.  le).  —  Hommage  d'ouvrages,  35,  349. 

Ministre  de  flnlérieur  {M.  le).  —  Hommage  et  envoi  d'ouvrages,  2,  50, 
146,  268,  349,  578;  hommage  de  médailles,  892;  transmet  le  procès- 
verbal  des  opérations  du  jury  du  grand  concours  d'architecture  de  1875, 
213;  soumet  le  projet  copie  du  lauréat  Dielliens  (prix  de  Rome),  214; 
avis  de  la  Commission  chargée  d'apprécier  ce  projet ,  620  ;  transmet  les 
rapports  trimestriels  des  lauréats  Diel tiens  et  Cuypers  (prix  de  Rome), 
226;  demande  la  liste  double  de  candidats  pour  la  formation  des  jurys 
des  concours  quinquennaux  et  triennaux,  348,  578,  594;  soumet  un 
projet  d'arrêté  concernant  les  copies  exigées  des  lauréats  des  grands 
concours  (prix  de  Rome),  405;  demande  l'avis  de  l'Académie  sur  les 
changements  à  apporter  :  1»  au  programme  des  concours  triennaux,  577, 
réponse  à  cette  demande,  813;  2»  au  programme  du  concours  des  can- 
tates, 891  ;  transmet  une  lettre  du  Département  de  la  Guerre  relative  à 


TABLE    DES    AUTEURS.  1117 

la  publication  d'une  nouvelle  édition  de  la  carie  géologique  de  la  Bel- 
gique, 898;  témoigne  ses  regrets  de  ne  pouvoir  assister  à  la  séance 
publique  de  la  classe  des  sciences,  897. 

Voir  Arrêtés  royaux  :  Table  des  matières. 

Ministre  des  Pai/s-Bas  {S.  E.  M.  le).  —  Hommage  d'ouvrage,  666. 

Montigny  {Ch.).  —  Commissaire  pour  une  noie  de  M.  Perrey  sur  les  trem- 
blemenls  de  terre  en  1872,  etc,  52  ;  rapport,  449  ;  commissaire  pour  une 
noie  de  M,  Codron  sur  un  aréostal  à  voiles  et  pour  une  note  de  M.  Wal- 
tier  concernant  l'étude  de  la  nature,  52,  53;  rapports  verbaux  274; 
commissaire  pour  un  travail  de  M.  D.  Leclercq  sur  des  orages  qui  ont 
éclalé  à  Liège  en  1874  et  1875,  271  ;  membre  de  la  Commission  pour 
l'étude  du  projet  du  monument  Quelelet,  666,  814,  895,  commissaire 
pour  un  iravail  de  M.  De  Heen  concernant  la  fusion  et  la  dilalalion  des 
mélaux,  668. 

Morel  {Le  Z)»"  Jules).  —  Demande  que  l'Académie  se  fasse  représenter  au 
200«  anniversaire  de  la  découverte  des  infusoires  par  Leuwenhoek,  268; 
compte  rendu  de  cet  anniversaire  par  M.  P.-J.  Van  Beneden,  271. 

Morren  {Éd.).  —  La  structure  et  les  procédés  insecticides  du  Drosera 
ROTUiNDiFOLiA  L.,  6;  du  Drosera  binât  a  Labill,  525;  la  théorie  des 
plantes  carnivores,  1040;  hommage  d'ouvrages,  51,  447;  commissaire 
pour  une  seconde  rédaction  du  mémoire  de  M.  Cogniaux  sur  des  cucur- 
bitacées  nouvelles  etc.,  52;  rapport,  273. 

Mourlon  {Michel).  —  Présente  un  travail  concernant  l'étage  dévonien  des 
psammites  du  Condroz  dans  le  bassin  de  Theux,  etc, .  271  ;  rapports  de 
MM.  Dewalque,  de  Koninck  et  Dupont,  673,  675,676;  impression,  761. 
présente  un  travail  sur  les  dépôts  dévoniens  rapporlés  par  Dumonl  à 
l'étage  quartzo-schisteux  inférieur  de  son  système  eifelien,  668. 


N. 


Namur  {A.).  —  Présente  un  travail  concernant  des  tables  de  logarithmes 

à  douze  décimales ,  668. 
Nolet  de  Brauvjere  van  Steeland  {J.).  —  Hommage  d'ouvrages,  36;  note 

bibliographique  sur  un  ouvrage  du  D»"  Wap  concernant  Bilderdijk,  37. 
Nypels  {G.).  —  Hommage  d'ouvrage,  578. 
Nyst  {H.).  —  Commissaire  pour  le  Iravail  anonyme  concernant  les  dépôts 

littoraux  de  l'assise  panisélienne  dans  les  environs  de  Bruxelles,  447; 

rapport,  680. 


iH8  TABLE    DES    AUTEURS. 


Parlatore  (P.).  —  Accuse  réception  des  publications  académiques  ,  4. 

Pauli  {Ad.).  —  Membre  de  la  Commission  chargée  d'examiner  le  projet 
copie  du  lauréat  Dieltiens,  406;  avis  de  cette  Commission,  620. 

Payen  {Aug  ).  —  Membre  de  la  Commission  chargée  d'examiner  le  projet 
copie  du  lauréat  Dieltiens ,  406  ;  avis  de  celte  Commission,  620  ;  membre 
de  la  Commission  pour  l'élude  du  projet  du  monument  Quelelet,  666, 
814,893. 

Perrey  (A.).  —  Présente  une  note  concernant  les  tremblements  de  terre, 
en  1872,  etc.,  o2;  rapports  de  MM.  Malaise,  Montigny  et  Duprez,  448 , 
449,452. 

Pety  de  Tliozée  (Ch.)  —  Hommage  d'ouvrage,  147. 

P inchar t  {Alex.).  —  Demande  de  renseignements  concernant  son  mé- 
moire couronné  sur  la  tapisserie  de  haute-lice  aux  Pays-Bas,  244; 
rapport  verbal  de  M.  Félissur  celte  demande,  408. 

Piol  {Ch.).  —  Fragment  d'un  poëme  flamand  inédit  imité  de  Lr  roumars 
DE  Berte  aus  grans  piés,  loo  ;  commissaire  pour  un  travail  de  M.  Gales- 
foot  sur  des  antiquités  romaines  découvertes  à  Assche,  350  ;  rapport, 
585;  la  diplomatie  concernant  les  affaires  maritimes  des  Pays-Bas  au 
XVI^  siècle,  404,  618,  817  ;  correspondance  de  Grétry  avec  Vitzthumb, 
408  ;  particularités  inédites  concernant  les  œuvres  musicales  de  Gossec 
et  de  Philidor,  624. 

Plateau  {F.):  —  Présente  un  travail  concernant  l'appareil  digestif  chez 
les  Myriapodes  de  la  Belgique,  271;  assiste  aux  fêtes  du  200^  anniver- 
saire de  la  découverte  des  infusoires  par  Leeuwenhoek,  271. 

Plateau  (7).  —  Commissaire  pour  deux  travaux  de  M.  Van  der  Mens- 
brugghe  concernant:  i»  la  surface  de  contactd'un  solide  et  d'un  liquide, 
52;  rapport,  272;  2»  le  problème  des  liquides  superposés  dans  un  tube 
capillaire,  447;  rapport,  669. 

Putzeys  (F.).  —  Dépôt  d'un  pli  cacheté ,  898. 

Q 

Quetelet  {Ern.)  —  La  direction  de  l'aiguille  aimantée  à  Bruxelles,  en 
1875,  20;  commissaire  pour  une  note  de  M.  Waltier  concernant  l'étude 
de  la  nature,  53;  rapport  verbal,  274  ;  rapport  sur  un  inslrument'astro- 
nomique  de  M.  Journeaux-Duhamel,  60;  commissaire  pour  un  travail  de 


TABLE    DES    AUTEURS.  1  H  î> 

M.  le  Directeur  du  Dépôt  de  la  guerre  concernant  la  triangulation  de  la 
Belgique,  268;  commissaire  pour  deux  notes  de  M.  Terby  concernant  la 
planète  Mars  et  l'ombre  du  2"  satellite  de  Jupiter,  271;  rapport,  453; 
commissaire  pour  un  travail  de  M.  D.  Leclercq  sur  des  orages  qui  ont 
éclaté  à  Liège  en  1874  et  1875,  271  ;  étoiles  filantes.  Les  Perséides  en 
1875,  319;  l'éclipsé  de  soleil  du  29  septembre  1875,  322;  la  période  de 
froid  du  mois  de  décembre  1875,  758. 


Haab.  —  Hommage  de  gravures,  893. 

Bées  {Richard  Van).  —  Annonce  de  sa  mort,  267. 

Heinemuîid.  —  Présente  un  travail  concernant  les  polygones  réguliers  et 
des  séries  trigonométriques,  447  ;  rapport  de  MM.  De  Tilly  et  Catalan, 
671,  673;  impression,  801. 

Henard.  —  Présente  la  seconde  partie  de  son  mémoire  couronné  sur  les 
roches  plutoniennes  des  Ardennes  françaises,  447. 

Hivier  (Aip.).  —  Hommage  d'ouvrages,  579  ,  815;  Jean  de  Drosay ,  l'un 
des  réformateurs  de  la  science  du  droit  au  XVI^  siècle,  618,  868. 

Rodenbach  (C).  —  Demande  à  pouvoir  rentrer  en  possession  du  manus- 
crit de  son  mémoire  concernant  les  mesures  de  longueur  de  l'antiquité, 
270. 

Roi  {S.  M.  le)  —  Fait  témoigner  ses  regrets  de  ne  pouvoir  assister  à  la 
séance  publique  de  la  classe  des  beaux-arts,  245;  même  regrets  pour 
la  séance  publique  de  la  classe  des  sciences,  897. 

Rysselberghe  (F.  Van).  —  Hommage  de  diagrammes  méléorographiques , 
270. 

Rysselberghe  {Octave  Van).  —  Second  prix  du  grand  concours  d'archi- 
tecture de  1875,  214,  266. 

S. 

Saltel  {L).  —  Présente  deux  notes  concernant  les  surfaces  à  points  mul- 
tiples, 4;  rapports  verbaux  de  MM.  Folie  et  Catalon,  5;  impression  de 
ces  notes,  22,  27;  hommage  d'ouvrage,  52. 

Samuel  {Ad.).  —  Exprime  son  opinion  sur  les  changements  à  faire  au 
programme  du  concours  des  cantates,  40;  lettre  de  M.  le  Ministre  de 
l'Intérieur  relative  à  ces  changements,  891. 

Scheler  (Aug.).  —  Hommage  d'ouvrage,  147. 

Schlagintioeit  {H.  von).  —  Hommage  d'ouvrage,  667. 

Schwann  (Th.).  —  Hommage  d'ouvrage,  3;  commissaire  pour  un  travail 


1120  TABLE    DES    AUTEURS. 

de  M.  F.  Plateau  concernant  l'appareil  digestif  chez  les  Myriapodes  de 
la  Belgique,  271  ;  commissaire  pour  un  travail  de  M.  Fœltinger  concer- 
nant répiderme  des  cycloslomes,  271. 

Selijs  Longchamps  (Edm.de).  —Commissaire  pour  une  note  de  M.  Dubois 
concernant  quelques  oiseaux  nouveaux,  447;  rapport,  684;  hommage 
d'ouvrage,  667. 

Siret  (Ad.).  —  Rapport  sur  le  mémoire  de  concours  concernant  la  sculp- 
ture en  Belgique  aux  XYII*  et  XVIlIe  siècles,  252,  238,  264. 

Slingeneyer  {Ern.).  —  Délégué  pour  assister  à  la  célébration  du  4^  cen- 
tenaire de  Michel  Ange,  228  ;  rend  compte  de  sa  mission,  244. 

Société  des  sciences  naturelles  de  Pise.  —  Demande  d'échange  de  publica- 
tions, 269. 

Société  de  zoologie  de  Rotterdam.  —  Demande  d'échange  de  publications, 
269. 

Société  géologique  de  Belgique.  —  Ouvre  une  souscription  pour  élever 
un  monument  à  feu  d'Omalius  d'Halloy,  2;  M.  P.-J.  Van  Beneden  élu 
membre  du  comité  d'exécution  de  ce  monument,  ibid. 

Société  géologique  de  France.  —  Annonce  la  date  de  sa  prochaine  réu- 
nion extraordinaire,  50. 

Société  hollandaise  des  sciences  à  Harlem. — Adresse  son  programme  de 
concours  pour  1875,  268. 

Société  impériale  des  naturalistes  de  Moscou.  —  Annonce  qu'elle  va  cé- 
lébrer le  50«  anniversaire  de  doctorat  de  son  président,  2;  remercie 
pour  la  lettre  de  félicitations  qui  lui  a  été  adressée  à  ce  sujet,  446. 

Société  libre  d'émulation  de  Liège.  —  Adresse  son  programme  de  concours 
pour  1878,350. 

Société  littéraire  «  Le  Parnasse,  »  à  Athènes.  —  Demande  d'échange  de 
publications,  550. 

Société  photographique  de  Toulouse  —  Demande  d'échange  de  publica- 
tions, 446. 

Soenens  {Le  chev.)  —  Fait  parvenir  des  cartes  et  des  catalogues  pour  son 
exposition  de  tableaux ,  892. 

Stas  {J.-S.).  —  Fait  ses  réserves  au  sujet  de  la  motion  de  M.  Alvin,  relative 
aux  dangers  qu'offre  le  laboratoire  de  chimie  de  l'école  industrielle,  666. 

Sivaan{A.).  —  Dépôt  d'un  pli  cacheté,  898. 


Tennyson  {A.).  —  Accuse  réception  de  son  diplôme  d'associé,  35. 

Terby  (F.).  —  Présente  deux  notices  concernant  :  l»,  la  planète  Mars;  2*, 


TABLE    DES    AUTEURS.  1121 

l'ombre  du  2»  satellite  de  Jupiler,  271  ;  rapport  de  MM.  Quelelel  et 
Liagre,  435,  454;  impression  349,  572. 
Tilly  {J.-M.  De)  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M.  Reinemund  sur  les 
polyjjones  réguliers  et  des  séries  trigonométriques,  447;  rapport,  671  ; 
présente  un  travail  concernant  la  théorie  mécanique  de  la  chaleur, 
668, 899. 

V. 

Vaîi  der  Mensbrugglie  (G.).  —  Présente  un  travail  concernant  les  proprié- 
lés  de  la  surface  de  contact  d'un  solide  et  d'un  liquide,  52;  rapport  de 
MM.  J.  Plateau  et  Duprez,  272  ;  impression,  341  ;  présente  un  travail 
sur  le  problème  des  liquides  superposés  dans  un  tube  capillaire,  447; 
rapport  de  MM.  J.  Plateau  et  Duprez,  669, 671;  élu  correspondant,  1097, 

Vreede  {G.-W.).  —  Hommage  d'ouvrage,  815. 


W. 


Wagener  {Aug.).  —  Approbation  royale  de  son  élection  de  membre  titu- 
laire, 34. 

Wap  (Le  D'').  —  Hommage  de  son  livre  intitulé  Bilderdijk,  etc.  36;  note 
bibliographique  sur  cet  ouvrage,  37. 

Wattier.  —  Présente  une  note  concernant  une  théorie  nouvelle  pour 
l'étude  de  la  nature,  53;  rapports  verbaux  de  MM.  Montigny  et  Quetelet, 
274. 

WaïUers  [Alp.).  —  Commissaire  pour  un  travail  de  M.  Galesloot  sur  des 
antiquités  romaines  découvertes  à  Assche,  350;  rapport,  579;  commis- 
saire pour  un  travail  de  M.  Génard  sur  Corneille  Duplicius  Scepperus, 
350;  rapport,  593;  Henri  III,  duc  de  Brabant  (suite),  351. 

TFheaslone  [Ch.).  —  Annonce  de  sa  mort,  446. 

Wiener  (Ch.).  —  Lauréat  du  concours  de  gravure  de  la  classe  des  beaux- 
arts,  240,  265;  remercîments,  243. 

Willems- Fonds,  à  Gand.  —  Adresse  le  programme  de  concours  pour  une 
histoire  de  la  PaciHcatioD  de  Gand,  350. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Académie.  —  Airêlé  royal  modifiant  le  règlemenl  d'ordre  intérieur  de  la 
classe  des  beaux-arts,  39;  motion  de  M.  Alviu  relative  aux  dangers 
qu'offre  le  laboratoire  de  chimie  de  l'école  industrielle,  666,  814,  893  ; 
décision  de  la  Commission  administrative  relative  au  projet  du  monu- 
ment Quetelet,  666,  814,  894. 

Archéologie.  —  M.  Galesloot  présente  un  travail  concernant  des  antiquités 
de  l'époque  romaine  découvertes  à  Assche,5o0;  rapports,  379,  385; 
impression,  394. 

Architecture.  —  M.  Colt's  demande  à  pouvoir  exposer  une  découverte 
archéologique  relative  à  l'art  archilectoral,  619,895;  rapport  sur  le 
projet  copie  du  lauréat  Dielliens  (restauration  du  temple  do  Vesta,à 
Tivoli),  620. 

Arrêtés  royaux.  —  Approbation  de  l'élection  de  M.  Wagener  comme 
membre  titulaire,  34;  prix  quinquennal  de  lillérature  flamande  décerné 
à  feu  M.  Bergmann  (3"'«  période) ,  33;  modilication  au  règlement  d'ordre 
intérieur  delà  classe  des  beaux-arts,  39;  rapport  sur  les  arrêtés  royaux 
réorganisant  les  grands  concours  de  peinture,  de  sculpture  .  de  gravure 
et  d'architecture,  214,  229;  projet  d'arrêté  concernant  les  copies  exi- 
gées des  lauréats  (prix  de  Rome)  ;  405. 

Astronomie.  —  Sur  la  parallaxe  du  soleil,  par  M.  Liais,  3  ;  rapports  sur 
un  nouvel  instrument  astronomique  de  M.  Journeaux-Ouhamel,  60,  61  ; 
M.  Terby  présente  deux  notices  concernant  la  planète  Mars  et  l'ombre 
du  2me  satellite  de  Jupiter,  271  ;  rapports,  435.  454;  impression,  549, 
572;  l'éclipsé  de  soleil  du  29  septembre  1873,  par  M.  Ern.  Quetelet, 
322. 

B. 

Beaux-arts.  —  Discours  de  M.  Balat  concernant  le  palais  des  beaux-aris 

de  Bruxelles .  246. 
Bibliographie.  —  Note  par  M.  Noiet  de  Brauwere  van  Steeland ,  sur  un 

ouvrage  de  M.  le  D""  Wap  concernant  Bilderdijk,  37  :  par  M,  Dewalque 


TABLE    DKS    MATIÈRES.  1123 

au  sujet  de  sa  traduction  d'un  ouvrage  de  géologie,  51  ;  par  M.  Le  Roy 

sur  les  ouvrages  philosophiques  de  M.  cli  Giovanni,  1-48. 
Billets  cachetés.  —  Dépôl  d'un  pli  cacheté  par  MM.  Putzeys  etSwaan, 

898. 
Biographie.  —  M.  Génard  présente  un  travail  concernant  Corneille  Du- 

plicius  Scepperus,  350;  rapports,  588,  59:2,  595;  impression,  602.  — 
Voir  Jurisprudence. 
Botanique.  —  La  structure  et  les  procédés  insecticides  du  Drosera  rotun- 

DiFOLiA  L.  et  du  Drosera  binata  Labill..  par  M.  Edouard  Morren,  6, 

525;  la  théorie  des  plantes  carnivores  et  irritables,  par  le  même,  1040; 

M.  Cogniaux  présente  une  seconde  rédaction  de  son  travail  concernant 

des  cucurbitacées  nouvelles  ,  52;  seconds  rapports  sur  ce  travail,  273, 

274. 
Voir  Géologie  et  paléontologie. 
Bustes  des  académiciens  décèdes.  —  Inauguration  à  Anvers  de  celui  du 

baron  Guslaf  Wappers,  226. 

C. 

Caisse  centrale  des  artistes.  —  Pension  accordée  ,241. 
Commission  :  Des  paratonnerres.  Chargée  de  l'examen  d'une  demande 
relative  à  l'établissement  de  paratonnerres  sur  l'hôpital  Saint-Pierre,  50. 

—  Pour  i,a  liste  des  objets  d'art  a  reproduire  par  les  lauréats  des 
GRANDS  CONCOURS.  Mcmbrcs,  228;  chargée  de  faire  un  rapport  sur  un 
projet  d'arrêté  concernant  les  copies  exigées  des  lauréats,  406.  —  Pour 
LA  publication  d'une  collection  des  grands  écrivains  du  pays.  Pré- 
sentation des  tomes  XXI  et  XXII  des  chroniques  de  Froissart,  35,  350. 

—  Pour  l'étude  du  projet  du  mo.nument  Quetelet.  Membres,  666,  814, 
895.  —  Pour  l'exameiv  du  projet  copie  du  lauréat  Dieltiens.  Membres, 
406;  rapport,  020. —  Royale  d'histoire.  Présentation  du  Livre  des 
fiefs  du  comté  de  Looz,  349;  du  tome  1"  de  la  chronique  concernant  la 
Bibliothèque  nationale  de  Paris,  578. 

Concours  de  la  classe  des  beaux-arts.  —  Terme  fatal ,  216;  rapports  sur 
le  mémoire  concernant  la  sculpture  en  Belgique ,  aux  XVII^  et  XVlJIe 
siècles,  252,  238,  264;  rapports  sur  les  concours  de  gravure  et  de 
sculpture,  240;  proclamation  des  résultats,  264,  265,266  ;  demande  de 
renseignements  concernant  le  mémoire  relatif  à  la  tapisserie  de  la 
haute-lice  dans  les  Pays-Bas,  244;  rapport  verbal  de  M.  Fétis  sur  cette 
demande,  408  ;  programme  pour  1876,  406,  620. 

Concours  de  la  classe  des  lettres.  —  Programme  pour  1877,  56. 


1124  TABLE    DES    MATIÈRES. 

Concours  de  la  classe  des  sciences.  —  Mémoires  reçus  en  réponse  à  la 
question  concernant  le  bassin  houiller  de  la  province  de  Liège,  53; 
rapports,  900,  949,  971  ;  proclamation  des  résultats,  1097. 

Concours  des  cantates.  —  Modifications  proposées  au  programme,  40; 
demande  de  M.  le  Ministre  de  l'Intérieur  relative  à  ces  modifications, 
891. 

Concours  (grands).  Prix  de  Home  :  AncniTECTURE,  gravure,  peimure, 
SCULPTURE.  Rapport  sur  les  arrêtés  royaux  réorganisant  ces  concours , 
214,  229;  Commission  chargée  de  dresser  la  liste  des  objets  d'art  à 
reproduire  par  les  lauréats,  228;  projet  d'arrêté  concernant  les  copies 
exigées  des  lauréats,  405.  —  Architecture.  Lauréats  de  1875,213, 
214,  266;  projet  copie  du  lauréat  Dielliens,  214,  243;  Commission 
pour  l'examen  de  ce  projet, 406;  rapport  de  celte  Commission,  620; 
XII«  rapport  semestriel  du  lauréat  précité,  226.  —  Composition  musicale. 
Ajournement  du  jugement  de  1875,  215.  —  Sculpture.  VI«  rapport  du 
lauréat  J.  Cuypers  ,  226. 

Coîicours  quinquennaux  :  Littérature  flamande.  Lauréat  de  la  cin- 
quième période,  35.  —  Histoire  nationale.  Candidats  pour  le  jury  de 
la  sixième  période,  348,  578,  594.  —  Sciences  morales  et  politiques. 
Candidats  pour  le  jury  de  la  cinquième  période,  348,  578,  594. 

Concours  triennaux  de  lillerature  dramatique  :  Langue  française.  Mo- 
difications au  programme ,  577,  8 1 3  ;  candidats  pour  le  jury  de  la  sixième 
période,  578,  594.  —  Langue  flamande.  Modifications  au  programme, 
577,  813. 


Discours.  —  Discours  de  M.  Balat  concernant  le  palais  des  beaux-arts  de 
Bruxelles,  246;  de  M.  Brialmont  sur  les  causes  et  les  effets  de  l'accrois- 
sement successif  des  armées  permanentes,  976. 

Dons. — Ouvrages  par  MM.  :  le  Ministre  de  l'Intérieur,  2, 50,  147,  268,  349, 
578;  Chasles  el  Sch\vann,3;  P.-J.  Van  Beneden,  3,  270,898:  le  Ministre 
de  la  Justice,  35,  349  ;  baron  Guillaume,  Faider,  35;  baron  Kervyn ,  35 , 
350;  di  Giovanni,  Wap,  Noiet  de  Brauwere  van  Steeland,  de  Leva ,  36; 
Hirn,  51,270;  Morren,51,  447;  Dewalque,  51;  von  Lasaulx,52,  667; 
Saltel,  52;  Scheler,  Delisle,  Pet  y  de  Thozée,  d'Eichthal,  147:  van  Ele- 
wyck,  227;  Du  Mortier,  Catalan,  Heiinequin,  van  Rysselberghe,  270; 
Cornet,  270,  898;  Juste,  350;  Chalon,  baron  dé  Koehne,  406;  Gachard, 
Nypels,  578  ;  Heremans,  S.  Bormans,  Garcin  de  Tassy,  Bernimolin,  579  ; 
Rivier,  579,  815;  Delaborde,  Génard,  893;  le  Ministre  des   Pays-Bas, 


TABLE    DES    MATIÈRES.  H  25 

666;  Crépin,  de  Selys  Longchamps,  Calliburcès,  Dove,  Gatla,  von  Schla- 
gintweil,  667  ;  Vreede,  V«  Bergmann,  baron  de  Barghon  Fort-Rion  ,815; 
Briart,  898;  —  d'un  méléorile  par  M.  Hinrichs,  5:2;  —  de  gravures  par 
MM.  Donaldson,  227;  Raab,  893;  —  de  médailles,  par  M.  le  Ministre 
derintérieur,  892. 

E. 

Élections  et  nominations.  —  Approbation  royale  de  l'éleclionde  M.  Wa- 
gener  comme  membre  lilulaire,34;  membres  délégués  pour  assister  aux 
fêtes  du  4»  cenleDaire  de  Michel  Ange,  228 ;  Commission  chargée  de 
dresser  la  liste  des  objets  d'art  à  reproduire  par  les  lauréats  des  grands 
concours,  ibid.;  candidatures  aux  places  vacantes  :  dans  la  classe  des 
sciences, 547,  576;  dans  la  classe  des  beaux-arts,  654,  896;  Commis- 
sion pour  l'examen  du  projet  copie  du  lauréat  Dieltiens,  du  grand  con- 
cours d'architecture,  406  ;  liste  de  candidats  pour  les  jurys  des  concours 
quinquennaux  et  triennaux,  548,  578,  594;  Commission  pour  Télude 
du  projet  du  monument  Quetelel,  666,  814,  894  ;  M.  Crépin,  élu  membre 
titulaire,  MM.  von  Dechen,  Clausius,  Chevreul  et  Buys-Ballot,  élus 
associés,  MM.  Van  der  Mensbrugghe  et  Gilkinet  élus  correspondants, 
1097,  1098. 

Embryogénie.  —  De  la  maturation  de  l'œuf,  de  la  fécondation  et  des 
premiers  phénomènes  embryonnaires  chez  les  mammifères,  d'après  les 
observations  faites  chez  le  lapin,  par  M.  Ed.  Van  Beneden,  686. 


Fêtes  jubilaires.  —  Célébration  du  50«'  anniversaire  de  doctorat  du  prési- 
dent de  la  Société  des  naturalistes  de  Moscou,  2, 446;  membres  délégués 
pous  assister  au  4^  centenaire  de  Michel  Ange,  228;  compte-rendu  des 
fêtes  de  ce  centenaire,  244,  250  ;  200^  anniversaire  de  la  découverte 
des  infusoires  par  Leeuwenhoek,  268,  271. 


Géodésie.  —  M.  le  Directeur  du  Dépôt  de  la  guerre  présente  un  travail 
concernant  la  triangulation  de  la  Belgique,  268. 

Géologie  et  paléontologie.  —  M.  Gilkinet  présente  un  travail  concernant 
la  flore  fossile  de  l'étage  du  poudingue  de  Burnot,  4;  rapports,  70,  71, 
75;  impression,  159;  M.  Dewalque  lit  une  note  relative  aux  noms 
Cambrien  et  Silurien,  51  ;  rapports  sur  le  travail  de  M.  Crépin  concer- 


H  26  TABLE    DES    MATIÈRES. 

nant  la  flore  des  psammiles  du  Condroz,  53,  35,  56  ;  rapports  sur  une 
nouvelle  édition  de  la  carte  géologique  de  la  Belgique,  59,  274,  291, 
308;  décision  prise  sur  les  conclusions  de  ces  rapports,  448;  lettre  du 
Déparlement  de  la  guerre  relative  à  ces  conclusions,  898;  M.  Mourlon 
présente  un  travail  sur  l'étage  dévonien  des  psammiles  du  Condroz 
dans  le  bassin  de  Theux,  etc.,  271  ;  rapports,  673,  675, 676  ;  impression, 
761  ;  des  anonymes  présentent  un  travail  concernant  les  dépôts  litto- 
raux de  l'assise  panisélienne  dans  les  environs  de  Bruxelles,  447;  rap- 
ports, 678, 680,  681  ;  MM.  de  la  Vallée-Poussin  et  Renard  présentent  la 
seconde  partie  de  leur  mémoire  couronné  concernant  les  roches  pluto- 
niennes,  447  ;  M.  Mourlon  présente  un  travail  concernant  les  dépôts 
dévoniens,  etc  ,  668;  rapports  sur  les  mémoires  de  concours  concernant 
le  bassin  houiller  de  la  province  de  Liège,  900,  949,  971. 
Gravure.  —  Lettre  de  M.  Donaldson  accompagnant  l'hommage  de  deux 
gravures,  227;  rapport  sur  le  concours  de  gravure  en  médailles  de  la 
classe  des  beaux-arts,  239. 

U. 

Histoire.  —  Maximilien-Emmanuel  de  Bavière,  comte  de  Namur,  par 
M.  St.  Bormans,  166;  Henri  III,  duc  de  Brabant  (suite),  par  M.  Wau- 
ters,  351  ;  la  diplomatie  concernant  les  alTaires  maritimes  des  Pays-Bas 
au  XVI«  siècle,  par  M.  Piot,  404,  618,  817. 

Voir  Biographie. 

Histoire  liUéraire.  —  Fragment  d'un  poëme  flamand  inédit  imilé  de  Li 
ROUMANS  DE  Bebte  al's  gra>s  piÉs,  par  M.  Piol,  155. 


Jurisprudence.  —  Jean  de  Drosay,  l'un  des  réformateurs  de  la  science 
du  droit  au  XVl*  siècle, 61 8.  868. 


M. 


Mathématiques  pures  et  appliquées.  —  M.  Houzeau  présente  les  frag- 
ments II  et  Illjde  son  travail  sur  le  calcul  numérique,  4,  271  ;  rapports, 
62, 67,  70,  452;  impression,  74,  455;  M.  Saltel  présente  deux  notes  con- 
tenant les  surfaces  à  points  multiples,  4;  lecture  des  rapports,  5;  im- 
pression des  notes,  22,  27;  lecture  des  rapports  sur  le  travail  de 
M.  Havrez  concernant  des  transcendantes,  Q;  M.  Reinemund  présente 


TABLE    DES    MATIÈHES.  1127 

un  travail  concernanl  les  polygones  réguliers  el  des  séries  higonomé- 
iriqups,  447;  rapport,  071 ,073;  impression,  801  ;  MM.  Namur  ei  Man- 
sion  présenlenl  un  travail  concernant  des  tables  de  logarithmes  à  douze 
décimales,  008. 

Météorologie  et  pkysique  du  globe.  -  Helalion  de  coups  de  foudre,  par 
M.Devvalque,  13;  sur  la  direction  de  l'aiguille  aimantée  à  Bruxelles,  en 
1875,  par  M,  Quetelet,  20;  M.  Perrey  présente  une  note  sur  les  tremble- 
ments de  terre  en  1872,  52;  rapports,  448,  449,  452;  M.  Wallier  pré- 
sente une  note  concernant  une  nouvelle  théorie  pour  l'élude  de  la  na- 
ture, 53;  rapports  verbaux,  274;  M.  Leclercq  présente  une  note  sur  des 
orages  qui  ont  éclaté  en  Belgique,  271  ;  étoiles  fdantes.  Les  Perséides 
en  1875,  par  M.  Quetelet,  3î9;  sur  la  période  de  froid  du  mois  de 
décembre  1875,  par  le  même,  758. 

Métrologie.  —  M.  Rodenbach  sollicite  la  restitution  du  manuscrit  de  son 
mémoire  concernant  les  mesures  de  longueur  de  l'antiquité,  270. 

Monument  J.B.  J-d'Omalius  d'Halloy.  —  Souscription  ouverte  par  la 
Société  géologique  de  Belgique,  2;  nomination  de  M.  P.-J.  Van  Beneden 
comme  membre  du  comité  d'exécution,  ibid. 

Monument  Quetelet.  —  Montant  approximatif  des  souscriptions  et  nomi- 
nation de  la  Commission  pour  l'étude  du  projet  de  ce  monument,  606, 
814,  894. 

Musique.  —  Correspondance  de  Grétry  avec  Vitzthumb;  notice  par 
M.  Ch.  Piot,  408;  particularités  inédites  concernant  les  œuvres  musi- 
cales de  Gossec  et  de  Philidor,  par  le  même,  024. 


W. 


Nécrologie.   —  Annonce  de  la  mort  de  M.  Barye,  39;  de  M.  Van  Rees, 

207  :  de  M.  Whealstone,  440. 
Notices  biographiques  pour  l'Annuaire.  —  M.  Le  Roy  donne  lecture  de 

sa  notice  sur  Ad.  Borgnet,  618;  M.  le  chevalier  de  Burbure  adresse  son 

manuscrit  de  celle  de  M.  Bosselet ,  893. 


Ouvrages  présentés.   -  Juillet,  40;  août,  216;  septembre-octobre,  456 ; 
novembre  055;  décembre,  1098. 


^^28  TABLE    DES    MATIÈKES. 


Peinture.  —  Demande  de  M.  Baner  relative  au  mémoire  concernanl  la  ta- 
pisserie de  haute-lice  aux  Pays-Bas,  244;  rapport  verbal  sur  cette 
demande,  408. 

Phénomènes  périodiques  —  Documents  présentés  par  MM.  Cavalier,  2, 
5i,  270,  446,  898;  Duprez,  51  ;  Bernardin,  446. 

Physique.  —  Observations  présentées  par  M.  Gloesener  et  relatives  au 
méléorographe  universel  de  M.  Van  Rysselberghe,  21  ;  mêmes  observa- 
tions présentées  par  M.  Liagre,317;  demande  relative  à  l'établissement 
de  paratonnerres  sur  Thôpital  S^-Pierre,  30;  M  Van  der  Mensbrugghe 
présente  un  travail  sur  les  propriétés  de  la  surface  de  contact  d'un  so- 
lide et  d'un  liquide,  52;  rapport,  272;  impression,  341  ;  M.  Codron  pré- 
sente une  note  sur  un  aérostat  à  voiles,  52;  rapport  verbal,  274; 
M.  Vander  Mensbrugghe  présente  un  travail  sur  le  problème  des  liquides 
superposés  dans  un  tube  capillaire,  447  ;  rapport,  669,  671  ;  M.  De 
Heen  présente  un  travail  concernant  la  fusion  et  la  dilatation  des  mé- 
taux, 668;  M.  De  Tilly  présente  un  travail  concernant  la  théorie  méca- 
nique de  la  chaleur,  668,  899. 

Voir  Météorologie. 

Prix  du  baron  de  Saint-Génois.  —  Question  pour  la  ]^'  période  décen- 
nale, 816. 

Publications  académiques.  —  Demande  d'échange,  50,  269,  350,  446. 

R. 

Hapports.  —  Lecture  des  rapports  :  1"  sur  un  travail  de  M.  Havrez  con- 
cernanl des  TRANSCENDANTES  ;  2»  sur  dcux  notices  de  M.  Sallel  concer- 
nant les  surfaces  à  points  multiples,  5;  rapports  :  sur  le  travail  de 
M.  Crépin  concernant  la  flore  des  psammites  du  Condroz,  55,  55,  56; 
sur  une  nouvelle  édition  de  la  carte  géologique  de  la  Belgique,  59,  274, 
291,308  ;  décision  prise  sur  les  conclusions  de  ces  derniers  rapports, 
448;  lettre  du  Département  de  la  guerre  relative  à  ces  conclusions,  898; 
rapports  :  sur  un  nouvel  instrument  astronomique  de  M.  Journeaux- 
Duhamel,  60,  61  ;  sur  les  fragments  II  et  III  du  travail  de  M.  Houzeau 
concernant  le  calcul  numérique,  62,  67,  70,  452  ;  sur  un  travail  de 
M.  Gilkinet  concernanl  la  flore  fossile  de  l'étage  du  poudingue  de 
Burnot,  70,  71,  73;  sur  les  arrêtés  royaux  réorganisant  les  grands  con- 
cours de  peinture,  de  sculpture,  de  gravure  et  d'architecture,  214,  229; 
sur  le  mémoire  de  concours  de  la   classe  des  beaux-arts  concernanl 


TADLE    DES    MATIÈRES.  1129 

rhistoire  de  la  sculpture  aux  Pays-Bas  pendant  les  XYII»  et  XVIII" 
siècles  et  sur  les  concours  de  gravure  et  de  sculpture  de  la  même 
classe,  25:2,  :238,  259,  240;  rapport  sur  un  travail  de  M.  G.  Van  der 
Mensbrugghe  concernant  les  propriétés  de  la  surface  de  contact  d'un 
soiid»'  et  d'un  liquide,  272;  seconds  rapports  sur  un  travail  de  M.  Co- 
ynianx  concernant  des  cucurbilacées  nouvelles,  273,  274;  rapports 
vtMbaux  :  1"  sur  une  nouvelle  théorie  pour  l'étude  de  la  nature  de 
M.  Watlier,274;2o  sur  un  système  aérostatique  de  M,  Codron,ibid.;  rap- 
ports sur  une  note  de  M.  Perrey  concernant  les  tremblements  de  terre 
en  1872,  4-48,  449,  452;  sur  deux  notices  de  M.  Terby  concernant  la 
planète  Mars  et  l'ombre  du  2*  sattellite  de  Jupiter,  453,  454;  sur  le 
travail  de  M  Galesloot  concernant  des  antiquités  de  l'époque  romaine 
découvertes  à  Assclie,  579,  585;  sur  le  travail  de  M.  Génard  concernant 
Corneille  Duplicius  Scepperus,  588,  592,  593;  rapport  de  la  Commission 
chargée  d'examiner  le  projet  copie  du  lauréat  Dielliens,  du  grand 
concours  d'architecture,  620;  rapports  sur  un  travail  de  M.  Mou  ri  on 
concernant  l'étage  dévonien  des  psammites  du  Condroz  dans  le  bassin 
de  Theux,  elc  ,  G73,  675,  676;  sur  le  travail  anonyme  concernant  les 
dépôts  littoraux  de  l'assise  panisélienne  dans  les  environs  de  Bruxelles, 
678, 680,  681  ;  sur  la  note  de  M.  G.  Van  der  Mensbrugghe  concernant  le 
problème  de  deux  liquides  superposés  dans  un  tube  capillaire,  669, 
671  ;  sur  le  travail  de  M.  Beinemund  concernant  les  polygones  réguliers 
et  des  séries  trigonométriques,  671,  673;  sur  la  note  de  M.  Dubois 
concernant  des  oiseaux  nouveaux,  684;  sur  les  mémoires  de  concours 
de  la  classe  des  sciences  concernant  le  bassin  houiiler  de  la  province  de 
Liège,  900,  949,971. 

S. 

Sciences  morales  et  politiques.--  Des  causeset  des  effets  de  l'accroissement 
successif  des  armées  permanentes,  par  M.  le  général  Brialmont,  976. 

Sculpture.  —  Bapports  sur  le  mémoire  de  concours  concernant  l'histoire 
de  la  sculpture  aux  Pays-Bas  pendaut  le  XVIl"  etXVIlI*  siècles,  232, 
238,  264;  rapports  sur  les  bas-reliefs  du  concours  de  la  classe  des 
beaux-arts  représentant  V Horticulture.  240;  souvenir  du  iv^  centenaire 
de  Michel  Ange,  244,  2o0. 

Z. 

Zoologie.  —  M.  F.  Plateau  présente  un  travail  concernant  les  phénomènes 
delà  digestion,  etc.,  chez  les  Myriapodes  de  la  Belgique,  271  ;  M.  Fœt- 
linger  présente  un   travail  sur  l'épiderme  des  cyclostomes,  ibid.  ;  les 
2"*^  SÉRIE,  TOME  XL.  72 


1450  TABLE    DES   5IATIÊRES. 

Pacbyacanthus  du  musée  de  Vienne,  par  M.  P.-J.  Van  Beneden,  525; 
les  ossements  fossiles  du  genre  Aulocète  au  musée  de  Linz,  par  le 
même,  356;  le  squelette  de  la  Baleine  fossile  du  Musée  de  Milan,  par  le 
même,  756  ;  M.  Dubois  présente  un  travail  concernant  quelques  oiseaux 
nouveaux,  447;  rapport  de  M.  deSelys  Longchamps,  684;  impression, 
797. 
Voir  Embryogénie. 


TABLE  DES  PLANCHES. 


Page    12.  Drosera  rotundifolia.  L. 

—  144.  Plantes  fossiles  de  l'étage  du  poudingue  de  Burnot. 

—  554.  Drosera  binata.  Labill. 

—  565.  Planète  Mars  (opposition  de  1875). 

—    758.  Squelette  de  la  Baleine  fossile  du  Musée  de  Milan. 

—  796.  Sur  l'étage  dévonien  des  psammites  du  Condroz  dans  le  bassin 

de  Theux ,  dans  le  bassin  septentrional  (entre  Aix-la-Chapelle 
et  Ath)  et  dans  le  Boulonnais. 


ERRATA. 


Page   22,  au  lieu  de  :  M.  Gloesener 18  dernier,  lisez  :  18  juin  dernier 

—  52,  4«  §,  au  lieu  de  :  la  météorite,  lisez  :  du  météorite  qu'il  a  offert. 

—  147,  au  lieu  de  :  M.  Aug.  Scheler  présente  à  titre  dommage,  lisez  :  d'kom- 

mage. 
Page  214,  §  2,  au  lieu  de  :  Dieltjens ,  lisez  :  Dieltiens. 

—  243,  §  ^,idem. 

—  244,  §  1 ,  au  lieu  de  ••  Banner,  lisez  :  Baner. 

—  578,  §  2,  au  lieu  de:  cinquième  période  du  concours  triennal  de  littéra- 

ture dramatique  française,  lisez  :  sixième. 


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